HMadin bei adeseiag hs be D É: MÉMOIRES SOCIÉTÉ IMPÉRIALE DES SCIENCES, DE L'AGRICULTURE ET DES ARTS, DE LILLE. ANNÉE 1853. LILLE, CHEZ TOUS LES LIBRAIRES,. PARIS, CnEZ DERACHE , nuE DU BOULOY, N.° 17, AU 1." 185%. « |émasmamenpamanaamne MÉMOIRES SOCIÉTÉ IMPÉRIALE DES SCIENCES DE L'AGRICULTURE ET DES ARTS DE LILLE. MEMOIRES SOCIÉTÉ IMPÉRIALE DES SCIENCES DE L'AGRICULTURE ET DES ARTS DE LILLE. ANNEE 1853. LIDLE CHEZ TOUS LES LIBRAIRES SE TP n$ PAL Hits PARIS c&ez DERACHE, nue pu pouroy, n° 17, Au 1 1854. LILAS aa auut 14m 1 v x 1" = 1? 9.2 MÉMOIRE SUR LA PHYCITE, matière sucrée du Protococcus vulgaris (Phycée), Par M. LAMY, Membre résidant. Dans un mémoire publié en juin 1852 par les Annales de Physique et de Chimie, j'ai fait connaître l’existence de deux substances nouvelles extraites du Protococcus vulgaris, Algue ou Phycée des plus simples , sous le rapport de l’organisation. L'une de ces substances, que j'ai nommée Phycite, a une saveur douce, fraîche, qui la rapproche des sucres ordinaires. Mais la facilité rare avec laquelle elle cristallise en beaux prismes transparents, sa composition élémentaire, sa résistance à l’action des ferments, et certains autres caractères, en la rendant intéressante au point de vue théorique, la différencient complètement des sucres ou matières sucrées jusqu'à présent connues. Pour lever tous les doutes qui pouvaient rester sur la nature de cette substance, j'ai dû faire une étude plus approfondie de ses caractères, en m'attachant surtout à ceux d’entre eux qui étaient les plus importants. J'aiparticulièrement donné mes soins à l'ana- lyse élémentaire, à la détermination de la forme cristallogra- phique et à l’action exercée par la chaleur. Composition élémentaire. — Dans mon premier travail, j'avais indiqué à la Phycite la composition suivante : Carbone... ..,... 39,10 Hydrogène. .... 8,23 Oxygène....... 52,67 100,00 , (2) correspondant à la formule empirique c'’H°0". Mais l'on sait combien sont délicates des déterminations de l'hydrogène dans des substances organiques. Quelques millièmes de cet élément, en plus ou en moins, peuvent correspondre, dans les formules représentatives , à un équivalent de plus ou de moins. J'ai donc fait de nouvelles analyses qui sont toutes venues con- firmer les premières. Afin de donner la mesure de leur exactitude, j'ai analysé comparativement de la Phycite et du sucre candi blanc, dont la composition est parfaitement connue. Voici les nombres fournis par deux expériences où fout était semblable, dimensions des tubes, proportions des matières, durée et mode d’expérimentation. Analyse N.0 1. Poids de la phycite. .. 0,, 499 Eau de combustion. ..... 0,3715 Acide carbonique... ..... 0,7140 Composition en centièmes : Ce 1 39,92 Hi 8,27 Ov ste 169,51 100,00 La composition théorique déduite de la formule c'H1$0"* donne : (UNE Ne LR) RESTE SUR O0 . 52,42 100,00 L'accord relativement à Phydrogène est aussi satisfaisant que possible, (3) Analyse N.0 2. Poids du sucre sandi blanc... 0,500 Eau de combustion. ... 0,,288 Acde carbonique... :... 0, 766 Composition en centièmes : U= 41,80 Hi 1-0-.,16:40 O = ..... 51,80 100,00 La formule théorique C'?H''O"" donnerait : Co sau142,01 HE 0e 6,43 O0 11.:.-001,46 100,00 Dans cette analyse de comparaison , les nombres obtenus pour l'hydrogène sont identiques , à moins de 1/2 millième , avec ceux qu'indique la formule théorique. Ainsi donc, je regarde comme parfaitement établi le rapport des équivalents du carbone, de l'hydrogène et de l’oxigène de la Phycite. Quant à leur nombre absolu , il me paraît difficile pour le mo- ment de le fixer. La Phycite, en effet, ne forme aucune combi- naison nettement définie et stable , soit avec les bases , soit avec les acides ; c’est un corps neutre par excellence. Il n'y a donc pas possibilité de déterminér son équivalent par des combinaisons analogues aux sels. Forme cristalline. Cétté impossibilité m'a naturellement con- duit à faire une étude complète de la forme cristallographique, le deuxième caractère dans l’ordre d'importance d'une substance. J'ai rencontré des difficultés que j'étais loin de soupconner, (4) Dans le mémoire déjà cité, me laissant guider par la symétrie apparente, j'avais rapporté la Phycile au système du prisme droit rectangulaire. Mais ayant examiné avec plus d'attention un grand nombre de cristaux , déterminé la valeur de leurs angles, je fus porté à penser que ces cristaux pourraient bien appartenir au système du prisme oblique. Cependant et finalement, la dis- cussion des inclinaisons trouvées, l'existence réelle, quoique rare , de certaines facettes, l'improbabilité d'hypothèses qu'aurait entraînées l'adoption du prisme oblique, me déterminent aujour- d’hui à rapporter la forme de la Phycite au prisme droit rectan- gulaire. Si j'ai pu hésiter dans cette détermination, c'est qu'elle me semble sortir des conditions ordinaires de la cristallisation. La symétrie la plus constante et la plus apparente, est celle d'un prisme oblique, dont les bases seraient constamment remplacées par des facettes perpendiculaires aux arêtes latérales. C’est, en apparence, je le repète, un prisme droit avec la symétrie du prisme oblique. Les dessins ci-joints donneront une idée des formes les plus constantes que j'ai observées dans une centaine de cristallisations. La forme fig. (4) est très-rarement aussi complète. Angles de P sur M — 90° P'sur M = 902 M sur, à — 136039" M sur b — 103057! M sur d — 109030" Le plus ordinairement les cristaux sont moins développés. Toujours la face qui touche aux parois du vase est creuse et offre des stries parallèles aux facettes principales. Cette face creuse et striée se produit aussi au contact de l'air, à la surface libre des dissolutions; de manière que l'on voit se for- mer des espèces de trémies hexagonales. Sa LS cu (5) L'angle de P sur M est constamment droit fig. (1), (2), (3). Les facettes a, placées sur les angles A de la base supérieure du prisme fondamental, sont très-développées fig. (f) et ont assez souvent leurs correspondantes sur les angles B’ de la base inférieure, de même que lesfacettes b, placées sur les angles B de la base su- périeure ont leurs correspondantes, plus développées, sur Îles angles A’ de la base inférieure. Mais en examinant attentivement un grandnombre de cristaux , on reconnaît le plus souvent sur les angles inférieurs A’ des facettes, très petites d’ailleurs, qui sont autant inclinées sur M que les grandes faceites a placées sur les angles À. De même, j'ai pu reconnaître sur les angles B, des facettes b correspondantes aux facettes b’ placées sur les angles B”. Or, l'existence de ces facettes ne peut se rapporter qu'à un prisme droit. Dans l'adoption du prisme oblique, il faudrait re- garder celte identité d’inclinaison de deux couples d’angles comme purement accidentelle : hypothèse toute gratuite. — L'inclinaison P sur M — 90° ne peut également s'appliquer qu'à un prisme droit, à moins d'admettre un prisme oblique dont les bases se- raient remplacées par des facettes perpendiculaires aux arêtes ; supposition qui aurait le graye inconvénient d'accorder beaucoup d'importance à une modification rare et partielle en cristallo- graphie, constante et complète dans le cas qui ncus occupe. Ainsi, malgré l'absence assez fréquente de certaines facettes qu'exige la symétrie , maigré l’inégal développement des facettes de modifications, je crois pouvoir conclure que la forme cristalline de la Phycite appartient bien au quatrième système cristallin , système du prisme droit rectangulaire. Toutefois, je dois faire observer que mes raisonnements sont basés uniquement sur la valeur des inclinaisons des faces du prisme et des facettes modifiantes. Aussi, ai-je apporté toute ia précision possible dans la mesure de ces inclinaisons. Le goniomètre dont je mesuis servi était un, goniomètre, à réflexion de Wollaston. La mire horizontale de réflexion était (6) 1 placée à 80 " environ, et je crois pouvoir répondre de l’exac- titude de mes mesures à moins de cinq minutes près. Le système cristallin étant déterminé, j'ai appliqué le calcul trigonométrique à l'évaluation des dimensions relatives du prisme. Il est facile de calculer les portions d’arêtes enlevées sur la facette la plus développée , a sur A. ; Ces longueurs sont entre elles comme les nombres SONO Or, d’après une loi fondamentale de cristallographie, les arêtes elles mêmes , ici les dimensions du prisme, sont dans le même rapport, ou plus généralement dans des rapports que l’on obtient en multipliant ces nombres par m,n, p; m, n,9p étant des nombres très simples. Si, dans le cas présent, nous admettons que les intersections des facettes avec les faces primitives sont parallèles aux diagonales de celles-ci , les dimensions de la forme prismatique pourront être représentées par 9, 8, 24. La hauteur serait triple de la largeur. Action de la chaleur. L'action de la chaleur sur une substance fournit souvent de bons caractères pour la différencier des sub- stances du même ordre. — C'est le cas de la Phycite. En chauffant avec précaulion quelques cristaux de cette ma- tière sucrée , placés dans une petite capsule de porcelaine, on la voit fondre d’abord en un liquide incolore vers 112°, et puis répandre une odeur caractéristique qui m'avait frappé tout d'abord, et que j'ai comparée à celle de la farine torréfiée. Mais si l’on continue à élever la température, en évitant l’ébullition , la matière finit par disparaître complètement, et c’est à peine si dans la capsule on apercoit des traces de matières charbonneuses. — La Phycite peut donc être volatilisée, au moins partiellement. Cette propriété est si différente du genre d'altération qu'é- prouvent les matières sucrées connues, que j'ai voulu la constater (T7) mieux en recueillant les produits volatilisés. Or, à la distillation en vase clos, la température s’élevant lentement et graduellement jusqu'à 260° environ , il ne se dégage aucun gaz; mais de la vapeur d'eau en petite quantité se condense dans le col de la cornue avec une matière liquide , à peine colorée en jaune, qui se solidifie par lé refroidissement. L'analyse a prouvé que cette substance n'était autre chose que de la Phycite. Poids de la matière... 0,385 Composition en centième : € — .... 39,4 DS oops CERN 02 "D 100,00 En chauffant au point de faire bouillir pendant quelques mi- nutes la matière, les produits qui distillent sont encore les mêmes, seulement l’altération est plus grande; la matière qui passe, comme celle qui reste dans la cornue, se colore davantage ; elle répand une odeur de caramel ét est imprégnée d’une eau légèrement acidulée. Quant à la substance restée dans la cornue, elle est partie composée de phycite non altérée, partie d’une matière analogue au glucose, pouvant réduire facilement ce qu’on appelle le tar- trate double de cuivre et de potasse. La Phycite, au contraire, ne précipite que trèsdifficilement , et parune ébullition soutenue, de l’oxide rouge de cuivre. De ces expériences il faut conclure que la matière sucrée du Protococeus est volatile partiellement , un peu à la façon de l’acide oxalique. En résumé : 1.° La Phycite a la composition élémentaire : Carbone. .. — 39,33 Hydrogène. — 8,25 Oxigène. .. — 52,42 100,00, (8) que je représente par la formule empirique C'°H! °O!'2 à cause des relations remarquables suivantes : C°H'0": NC HPOP PSE — C'°H'40" = Pl a À Phycite, Glucose à 100° Manuite. 2.0 Elle cristallise avec une facilité extraordinaire en beaux prismes tout-à-fait transparents qui appartiennent au système pris- matique rectangulaire droit, mais avec des anomalies de déve- loppement qui restent encore à expliquer. 3.0 Elle peut être volatilisée en partie, sans boursouflement , en répandant une légère odeur qui rappelle celle de la farine torréfiée. 4.9 Elle ne fermente pas. 5.9 Elle n’a pas d'action sur la lumière polarisée. Je suis heureux de pouvoir ajouter que ce dernier caractère, que j'ai annoncé dans mon premier mémoire , a été vérifié par un de nos savants les plus compétents en ce genre d'études, par M. Pasteur. © NOTE SUR LA DENSITÉ ET LE POIDS SPÉCIFIQUE DES CORPS, Par M. Lamy, Membre résidant. Les novions de densité, de poids spécifique des corps sont géné- ralement mal comprises et surtout mal exposées dans la plupart des traités de physique. On confond la première de ces expressions avec l’autre, et souvent ces deux-ci avec ce que l’on nomme impro- prement pesanteur spécifique. Cette confusion de grandeurs très- différentes vient généralement de ce que l’on ne s’entend pas sur les définitions. Dans cette note, j’ai pour but : 1.° de donner les définitions précises de la densité absolue, du poids spécifique absolu , de la densité relative et du poids spécifique relatif du corps ; 2 © de faire connaître une démonstration très élémentaire du théorème suivant : le nombre qui exprime la densité relative d'un corps représente aussi son poids spécifique relatif ; 3.° enfin, de déduire de ce théorème comme conséquence , le procédé suivi pour la détermination de la densité relative ou du poids spécifique relatif des corps. 1.0 La densité absolue d’un corps , c'est la masse ( quantité de matière) de l’unité de volume. Le poids spécifique absolu , c’est le poids (le poids est une résultante de forces) de la masse ren- fermée dans l’unité de volume. Mais on ne peut rien mesurer d'absolu ; de là la nécessité de définitions nouvelles. On appelle densité relative d’un corps, le nombre qui exprime combien de fois la masse de l’unité de volume de ce corps contient la masse de l'unité de volume d'un autre corps pris pour terme de compa- (10) raison; l’eau, pour les solides et les liquides. On nomme poids spécifique relatif, le nombre qui exprime combien de fois le poids de l'unité de volume d'un corps contientle poids de l'unité de volume du corps qui sert de terme de comparaison, comme l’eau pour les solides et les liquides. 2.0 Ces définitions étant posées. considérons un corps, solide ou liquide, et prenons l’eau pour terme de comparaison. Soient P le poids d'un certain volume Vc-cb: du corps, D sa densité absolue, d son poids spécifique absolu ; soient P’ le poids d’un même volume V €: cb. d’eau, D’ sa densité absolue, d’ son poids spécifique absolu. Puisque , par définition , D est la masse d’un centimètre cube du corps, V x D sera la masse de V €: cb. ou la masse du corps; mois on sait que g est le poids de l’unité de masse ; (*) done, V x D x gsera le poids de V x D unités de masse, ou le poids P du corps. Donc on a PENSE D'un autre coté, d est le poids de { cent. cube du corps, donc V x d sera le poids de V ©:cub- ; danc on aura encore P= V x d. (*) En désignant par p le poids de la masse »n ou la force de pesanteur qui fait tomber cette masse, par p' le poids de la masse »° et par q, g' les vitesses du corps qui tombe après une seconde de chûte en deux lieux différents, on démontre que pp :: mg :mg. Fixons les unités en prenant pour unité de poids p' le poids dont la masse est m° = 1, la vitesse après /” de chûte libre g = 4; il viendra P = my. Enfin, faisons m = f{, et nous obtiendrons p=9g; (9 = 97, 808 à Paris) done le poids de l'ynité de masse peût-être représenté par 9 (#1) Et par suite : B=VX NX Dix gt. Un raisonnement semblable appliqué aux éléments P'. V, D’ et d’ de l’eau donnerait, dans le même lieu (2) P'=NseD! xg = xd! Divisant les membres de J’égalité (1) par les membres corres- pondants de (2), il viendra POINT ENS PO VxD'xg Vxd'’ ou bien en simplifiant Or, par définition, ». c'est la densité relative: c'est le D’ d' poids spécifique relatif; done, ces deux rapports ou nombres sont égaux. 3. On voit que pour obtenir ce nombre, il suffit de diviser le poids P d'un corps par le poids P! du même volume d’eau. On est convenu de prendre le corps à zéro degré et l’eau à la température de 4°. Sans vouloir discuter ici le mérite de cette convention, il aurait mieux valu, sans aucun doute, adopter aussi 0° pour la température de l'eau. RECHERCHES SUR LES COMBINAISONS DÉFINIES DU CHLORE ET DU BROMK AVEC LE PHOSPHORE, {Par M. Benjamin CORENWINDER , Membre résidant. Dans un premier travail publié en 1851, j'ai appelé l'attention des chimistes sur la nécessité de multiplier les dissolvants des sub- slances chimiques, afin d'obtenir des combinaisons cristallisées et d'une composition définie. Quelques chimistes se rappelleront peut-être que j'ai démontré le premier que le sulfure de carbone est un dissolvant précieux , qui peut servir fructueusement à préparer un grand nombre de corps nouveaux ou incomplètement connus jusqu’à ce jour. Par l'emploi de ce liquide, je suis parvenu à découvrir les com- binaisons cristallisées de l’iode et du phosphore. Dans un mémoire qui a paru dans les Annales de Physique et de Chimie et dans les Publications de la Société des Sciences de Lille, j'ai fait connaître leurs diverses propriétés et donné leur composition définie en équi- valents. Aujourd'hui, je me propose de faire connaître les observations que j'ai faites sur les combinaisons définies du chlore et du brome avec le phosphore, combinaisons obtenues par l'intermédiaire du sulfure de carbone. Les propriétés de ces corps étant déjà connues en partie, je me suis borné à enregistrer ce qui m'a paru offrir un certain intérêt. Lorsqu'on veut préparer le perchlorure de phosphore , on met (43) quelques morceaux de phosphore au fond d'une cornue sur un lit de sable pur, et on fait arriver en contact avec ce corps un cou- rant de chlore parfaitement desséché. La combinaison a lieu, et il se forme un produit liquide qui distille ; on le reprend ensuite pour le saturer de chlore , et on obtient enfin le perchlorure de phosphore en masse lanugineuse, jaune-blanchâtre et impure, parce qu’elle est toujours baignée de chlore en excès. Tout chimiste qui a fait cette préparation peut apprécier com- bien elle est désagréable, incommode et peu satisfaisante; aussi je crois être utile aux personnes qui auraient à préparer du per- chlorure de phosphore pur, pour des besoins de laboratoire ou des recherches de chimie organique , en leur faisant connaître le pro- cédé suivant, qui permet de l'obtenir rapidement et dans un état de pureté absolu. Je fais dissoudre du phosphore sec dans du sulfure de carbone en quantité telle que la dissolution ne soit pas fort concentrée, et je fais passer dans ce liquide un courant de chlore lavé et desséché convenablement. Il importe que le tube, qui plonge dans la disso- lution du phosphore, ait un large diamètre, parce que même dès le commencement de l'opération il s'y attache du perchlorure qui finit promptement par l’obstruer. En prenant les précautions que tous les opérateurs connaissent , on peut obvier facilement à cet inconvénient. Si la dissolution est fort chargée de phosphore, il s’y dépose bientôt une poudre cristalline blanche, qui est du perchlorure de phosphore comme le démontre l’analyse suivante ; le liquide-mère concentré et abandonné au refroidissement laisse déposer lente- ment ce même corps , et cette fois en petits cristaux réguliers qui se volatilisent promptement à l'air et qui , conséquemment , sont difficiles à observer. Rien n'est plus facile que de purifier ensuite ces produits. Il suffit, après avoir décanté le liquide-mère, de les placer dans un petit tube que l’on chauffe au bain-marie, et d'y faire passer len- (44) tement un courant d'air sec. Bientôt le perchlorure est parfaite- ment dépouillé des moindres traces de sulfure de carbone et con- séquemment propre à tous les emplois qui exigent des composés purs et définis. Je me suis assuré par l'analyse qu'il en était ainsi. J'ai déter- miné là composition du produit lanugineux, cristallin qui se dépose dans l’éprouvette pendant l'opération, ét j'ai trouvé les ré- sulfats suivants : 1.10 Analyse. Matière employée Og. 630 Chlorure d'argent obtenu 2, 135 Ce qui représente en chlore 0, 528 Le calcul de la formule Ph. CI. 5 exige0, 533 2.e Analyse, Cristaux qui se déposent dans le liquidé-mère par refroidissement lent : Matière employée 12. 021 Chlorure d'argent obtenu 3, 490 Ce qui représente en chlore 0, 863 Le calcul de la formule Ph. CI. 5 exige 0, 865 Ces analyses ont été faites en introduisant la prise d'essai dans un petit tube effilé, séché à la lampe ét dont je connaissais le poids ; par différence , j'ai pu déterminer le poids du produit à analyser. Ce petit tube a été mis dans un flacon à l’emeri fermé, au fond daquel il y avait un peu d’eau. Par l'agitation la pointe eflilée du tube à été cassée ét le chlorure absorbé par l’éau , sans perte d'äcide chlorhydrique. PERBROMURE DU PHOSPHORE. On sait que par le contact direct, la préparation dû perbromure dé phosphore présente assez de danger. En employant pour dis- solvant le sulfure de carbone , on 6btient cé perbromure avec la plus grande facilité. (45) Moici comment j'opère pour éviter tout accident. Je fais dis- soudre le phosphore dans du sulfure de carbone et je place la dissolution dans de la glace. D'un autre côté, je prends une disso- lution de brome dans le même liquide, et versant celui-ci goutte à goutte et avec précaution, il n'y a pas’à craindre de projections ni de pertes mécaniques de matières. En employant cinq équivalents de brome et un équivalent de phosphore, on obtient un liquide d’un beau rouge foncé. Si la dis- solution n’est pas en quantité suffisante, le bromure se prend en masse cristalline rouge-orangé. Si, au contraire, on a employé un excès de sulfure de carbone, il faut en volatiliser une partie par la chaleur du bain-marie ; le liquide abandonne ensuite par refroi- dissement des cristaux jaunes de perbromure de phosphore. Ce produit purifié de toutes traces de sulfure de carbone se su- blime sans altération à la chaleur du bain d'eau. Sa vapeur, qui est d’un très-beau rouge, se condense à la voûte de la cornue en cristaux rouge-orangé , qui jaunissent par refroidissement. Son point de fusion et celui de volatilisation se confondent comme pour le perchlorure de phosphore et se trouvent tous deux entre 80 et 850. Au contact de l’eau il se décompose, mais sans ce bruissement particulier au perchlorure de phosphore. Tout se dissout et on a dans le liquide de l'acide bromhydrique et de l’acide phospho- rique sans autre produit. J'ai essayé de mettre en contact une dissolution contenant un équivalent de phosphore avec des dissolutions contenant deux et trois équivalents de brome. J’ai obtenu des liquides incolores qui ne cristallisent pas, même à l’état concentré et dans un mélange frigorifique à - 20°. Le perbromure de phosphore peut être utilisé avautageuse- ment pour préparer l’acide bromhydrique. On sait que le procédé généralement employé pour préparer cet acide consiste à faire agir peu à peu la vapeur de brome sur (46) des fragments de phosphore humide. Cette expérience qui offre un certain danger , et qui donne de mauvais résultats, peut être facilement exécutée avec le perbromure de phosphore préparé d'avance. Il suffit de placer quelques fragments de ce produit au fond d’un tube que l’on recouvre de verre humecté. Par la chaleur l'acide bromhydrique se dégage et on peut le recueillir par les procédés habituels. NOUVEAU PROCEDE POUR DÉTERMINER LA VALEUR INDUSTRIELLE DU NOIR ANIMAL, Par M. Benjamin CORENWINDER , Membre résidant. L'emploi du charbon animal dans la fabrication du sucre indi- gène est sans contredit une des plus belles applications qu’on ait faite de nos jours des observations chimiques à l'industrie. Sans la découverte de cet agent, cette importante industrie n'aurait certainement pas atteint le haut degré de développement auquel elle est parvenue aujourd'hui. Peut-être même, arrûtée dans sa marche, dès l'origine, se serait-elle éteinte aussitôt, dans l'impuissance de lutter avec avantage contre la concurrence de l'étranger. Par cela même que l’emploi du charbon animal est indispen- sable dans l'industrie sucrière , il est de la plus haute importance pour le fabricant de s'assurer de la bonne qualité de ce produit, lorsqu'il en fait des approvisionnements. Malheureusement il n’existe pas jusqu’à ce jour de méthode qui permette d’assigner au noir animal une valeur fondée sur une de ses plus importantes propriétés. Il était à désirer que l’on par- vint à découvrir un procédé propre à fixer cette valeur par des chiffres , et à lui attribuer ainsi un titre facile à constater par les hommes les moins exercés aux manipulations chimiques, comme on l’a fait pour les soudes, les potasses et les chlorures alcalins. Actuellement , quand on veut apprécier la valeur industrielle du noir animal, on cherche à déterminerle rapport comparatif de son pouvoir décolorant avec un noir connu par ses propriétés, en 2 (18) le plaçant autant que possible dans le même état physique que celui qui sert de terme de comparaison. Le pouvoir décolorant du noir d'os doit sans doute être pris en considération, mais il est une autre propriété de cette matière à laquelle on n'a pas fait attention d'une manière sérieuse, c'est son pouvoir absorbant. Dans l'état actuel de la sucrerie, ce dernier est certainement plus important à considérer que le pouvoir décolorant, puisque, avec les appareils centrifuges on parvient à dépouiller parfaite- ment les cristaux de sucre du sirop plus ou moins coloré qui les baigne. Du reste, le pouvoir absorbant du noir agit dans le même sens que le pouvoir décolorant, qui est dù évidemment à l'absorp- tion des matières plus ou moins foncées qui sont en dissolution dans les jus ou dans les sirops. La valeur comparative du noir animal peut donc être établie d’après la quantité de chaux qu'un poids déterminé de cette ma- tière est susceptible d’absorber. Ayant observé bien des fois que cetteabsorption, quiest considérable pour lenoir neuf, l'est beau- coup moins pour le noir revivifié; j'ai pensé qu'on pouvait fonder sur cette propriété un procédé satisfaisant pour donner à ce pro- duit un titre, un cachet déterminé, et ce, d'autant plus, que cette même propriété est sans contredit la plus importante pour le fabricant, puisqu'elle a pour effet de dépouiller les sirops d'un corps qui nuit à la cuite, et qui empêche Ja cristallisation d’une certaine quantité de matière sucrée. Ceci admis, il me fut facile de trouver une méthode à la portée de tout le monde, pour déterminer la valeur industrielle du noir animal. | Je suppose qu'on ait préparé une dissolution de sucrate de chaux , il est facile de déterminer combien il faut de degrès de la dissolution d'acide sulfurique employée dans les essais alcalimé- triques , pour saturer un voluine connu de ce sucrate , 50 centi- mètres cubes par exemple. ( 19.) à Cela fait, si j'ai plusieurs échantillons de noir à essayer, je commence par les amener, autant que possible ; dans le même état de division, en les passant séparément sur les mêmes tamis , puis mettant un poids déterminé (50 grammes) de chacun des échantillons dans des flacons séparés , jy ajoute un même volume (4 décilitre) de sucrate, et je laisse le contact s'opérer pendant une heure. Ce temps écoulé , je filtre séparément les liquides , j'en prends successivement 50 centimètres cubes , et déterminant séparément ce qu'il faut de degrés d’acide sulfurique normal pour compléter la saturation , je connais par différence les degrés proportionnels de chaux qui ont été absorbés par chaque échantillon de noir animal: Celui qui en a absorbé le plus est sans contredit le plus favorable pour le consommateur, celui auquel il doit donner la préférence. Ce procédé d'appréciation est si simple, si facile à exécuter, que je ne doute pas que toutes les personnes intéressées en feront usage. Toutefois, pour lui donner plus de précision , j'ai, après quelques essais, été conduit à préparer le sucrate de chaux et la dissolution d’acide sulfurique de la manière suivante : Je commence par disposer un liquide acide , composé de vingt grammes d'acide sulfurique monohydraté pur , étendu d’eau jus- qu’au volume exact d’un litre. D'un autre côté, je prépareune dissolution desucrate de chaux (1) (1) Si l’on pouvait faire dissoudre complètement un poids donné de chaux dans une dissolution sucrée , il faudrait prendre 11 gr. 4e de chaux pure pour saturer exactement 20 gr. d'acide sulfurique pur, Mais comme il n’en est pas ainsi, voici comment j'opère : Je fais dissoudre dans l'eau 125 à 130 gr. de sucre blanc, j’y ajoute 15 à s0 gr. de chaux vive , et je porte le liquide à l’ébullition. Je filtre pour séparer ce sui nes'est pas dissout et je complète environ un litre avec le liquide filtré. J'essaie ensuite sur 50 cent. cubes de cette dissolution, combien il faut de degrés d'acide ’ ( 20) telle que le volume d’un litre soit exactement saturé par ce litre de dissolution d'acide sulfurique. De cette manière, un volume quelconque de ce sucrate (50 centimètres cubes) par exemple, sera nécessairement saturé par une burette graduée , contenant aussi 50 centimètres cubes d'acide sulfurique normal. Opérant ensuite avec les échantillons de noir à essayer de la manière indiquée plus haut , je cherche combien il faut de degrés de Ja burette pour compléter la saturation de 50 centimètres cubes du liquide filtré, après son contact avec le noir. S'il en faut 35, 100 — 35 ou 65 représente la proportion de chaux absorbée par le noir ; c’est donc, comme convention établie, le chiffre qui peut représenter son titre ou son degré. On peut opérer avec une burette dont le zéro de la graduation se trouve à la partie inférieure; de cette manière , on lit directe- ment le degré du noir essayé. Pour faire apprécier l'exactitude relative de ma méthode, je prends au hasard, parmi les nombreuses expériences que je trouve dans mes cahiers , les exemples suivants : 4.7 gssat. — Noir neuf de raffinerie en poudre. 50 grammes de ce noir ayant été mis en contact pendant une heure avec un décilitre de sucrate normal , il a fallu 19° d'acide sulfurique pour compléter la saturation de 50 centimètres cubes du liquide filtré. Il ya donc eu 81 parties sur 100 d’absorbées par ce noir. Sa valeur comparative peut en conséquence se représenter par 81 degrés. normal pour en faire la suturation , il en fant je suppose 125 ; je fais cette pro- portion : 125 : 100 2: 100 : æ — So. Done, en prenant 80 centilitres du sucrate préparé , les étendant d’eau jusqu'à 10 cent., j'ai une dissolulion de suerate de chaux titrée, saturant exactement son volume de la dissolutien d'acide snlfurique, et qui peut servir pour les essais. (2) 2.0 gssar. — Noir neuf, en gros grains, contenant encore des grains moyens et des fins. 1.re expérience... ..... ..... 66°1/2 2.e ide: 2-00 b2 A Fa 670 3.° essai. — Noir neuf, bien bluté, en gros grains et moyens. 1:re expérience 2: nur, s29480h1620 2.e idiot siens pt 62°4/2 On voit par ces trois exemples que l'absorption, ainsi qu'on de- vait s’y attendre, est d'autant plus considérable, que le noir est plus divisé. Il faut nécessairement, quand on veut faire des essais comparatifs, lamiser les échantillons de manière à obtenir, autant que possible, des grains de grosseur semblable. On se tromperait si on attribuait d'une manière absolue au noir du 3.° essai une valeur moindre qu'à celui du 2.2 Car si le dernier à , dans les premiers temps où on l'emploie, des effets de décolora- tion et d'absorption plus prononcés, il perdra bientôt une partie de ces avantages, parce que le noir fin qu'il contient sera perdu aux premiers lavages avant la revivification. 4.° Essal. — Noir revivifié de bonne qualité , en gros et moyens grains. Titre 16° D.2 ESSAI. — Autre noir revivific. Titre 14 à 15° 6.2 Essar. — Nouvel échantillon de noir revivifié. Titre 6 à 7° 7.2 Essar. — Noir composé de 10 grammes neuf pareil à celui de l'essai N.° 2. 40 de revivifié d,° d.° N.0 4. 50 grammes. Titre 25 à 26° (2) Si on observe que le pouvoir absorbant du noir neuf employé est 67.0, celui du noir revivifié est 146, on peut faire l'équation suivante : 67 4x16 — +—— = 26, 2. Si Le | Ce chiffre est évidemment aussi satisfaisant que possible pour un produit aussi peu homogène que le noir animal. 8.2 Essar. — Noir composé de 25 grammes noir neuf (essai N.° 2.) 25 de revivifié (essai N°4.) 50 grammes. Titre 41° ; 67 16 L'équation donne ne 4Ao 1/2. 9.e gssar. — Noir neuf en gros grains, terne. Titre 57 à 58° Enfin, pour derniers exemples. je citerai les suivants : 10.0 gssar. — Noir neuf de M. À, tel qu'il le livre au com- merce , en gros grains. 1." expérience.............. 67 à 680 2, NN ME ART CU 67 à 68° 11.0 essai. — Noir neuf de M. B, contenant beaucoup de fin grain. Titre 66 à 67° 12.° gssar. — Noir neuf de M. C, tel qu'il le livre aux fabri- cants , bien bluté, peu de fin. Titre 63° Afin de comparer d'une manière plus sûre les pouvoirs absor- bants de ces noirs, je les ai amenés, autant que possible , au (23 } même état de division, en séparant avec des tamis les très-gros grains et les fins , j'ai obtenu les résultats suivants : Noir de M. A. — 64° Id. de M. B. — 61 à 620 Id. de M. C. — 55 à 56° J'ai déterminé par expérience les pouvoirs décolorants compa- ratifs de ces trois derniers produits. Entre À et B, je n'ai pas : trouvé de différence appréciable. Ainsi on parvient à plus de pré- cision par la détermination des pouvoirs absorbants que par la comparaison des effets décolorants. Quant au pouvoir décolorant de C, il était sensiblement plus faible que pour les noirs A et B. Ces exemples suffisent pour faire apprécier les avantages que l'on retire de la comparaison des pouvoirs absorbants pour la chaux des diverses espèces de charbon animal. Je n’entrerai pas dans plus de détails à ce sujet. On se tromperait si l’on croyait pouvoir se baser sur les chiffres que je viens de citer pour calculer le pouvoir absorbant absolu du noir pour la chaux. J'ai fait des expériences qui prouvent que le noir en absorbe d'autant plus qu'il y en a davantage dans la dissolution. 11 se fait un équilibre entre l’action du noir, la force dissolvante de l’eau et la capacité de saturation du sucre, qui varie suivant la quantité des éléments en présence dans la disso- lution, Ces lois, que je me propose d'étudier, entrent dans le cadre des généralités que l’immortel Berthollet a si bien dévelop- pées dans sa Statique chimique , livre dont on peut dire à plus juste titre que Stahl le disait de la physique souterraine de Becher : opus sine pari. SUR LA TRANSPOSITION, Par M. DELEZENNE , Membre résidant. Je ne trouve presque rien sur la transposition dans les plus volumineux dictionnaires de musique, ni même dans les traités d'harmonie que j’ai pu consulter. Rien non plus dans la plupart des solféges : la briéveté ordinaire de ces sortes d'ouvrages permet à peine d’effleurer un sujet. Enfin, l’inutilité de mes recherches me fait penser qu'il y a là une lacune à combler dans l'enseignement élémentaire. J'ai donc essayé d'établir et de démontrer des règles exactes pour tous les cas et spécialement our le cas compliqué des notes accidentelles dans le ton d’où l'on sort. Il y a même sur ce point de graves erreurs à corriger. es règles exigent la connaissance des clefs , et leur mécanisme lui-même est imparfaitement expliqué dans les auteurs. M. Suremain-Misséry seul, à mon avis, a méthodiquement exposé ce mécanisme, dans l'ouvrage qu'il a publié en 1793. J'ai refait à ma manière cette exposition du système des clefs. J'aurais mieux fait peut-être de copier textuellement mon modèle. Tout ce que je dis sur la transposition résulte de la seule inspection du tableau des gammes tel que je l’ai donné et expliqué dans ma notice sur le RÉ, Ce tableau rend également compte de certains faits musicaux qui n’ont pas encore été étudiés que je sache du point de vue où je me suis placé. L'examen de ces faits vient après l'explication du système des clefs; je finis par la transposition, sujet principal de cet écrit. SYSTÈME D'ÉCRITURE MUSICALE. Le but qu'on se propose en cherchant un système d'écriture musicale est de trouver un moyen très-simple pour indiquer tout à la fois la note à faire entendre, l’octave à laquelle elle appartient en prenant pour première octave celle dont l’ut est de 32, 64, ou 128 oscillations par seconde, et enfin le temps pendant lequel cette note doit être entendue. Bien que les mots ut, ré, mi, fa, sol, la, si soient très courts, ils offrent des signes réellement trop compliqués , et ils seraient avantageusement remplacés par les signes respectifs 1,2, 3, 4, », 6 et7, au-dessus et au-dessous desquels on mettrait des points pour indiquer le numéro de l'octave à laquelle chaque son corres- pondrait. Ces points et les signes * et}, placés comme de coutume compliqueraient peu ces chiffres très simples et bien significatifs ; mais on éprouverait des difficultés pour indiquer par d’autres modifications également simples la durée de ces notes (a). On a atteint le but par un système d'écriture analogue à celui en usage dans l'arithmétique, où le même signe placé à une, deux, trois où quatre places au-delà d’une autre prend une signification particulière. On est donc convenu de n’employer qu'un caractère, unique pour toutes les notes, mais variable dans sa forme pour marquer la durée, et variable dans sa position pour indiquer l'espèce de note et le numéro de l’octave. Néanmoins, pour qu'on puisse au simple coup-d'œil déterminer la place relative qu'occupe un signe , on marque toutes les places par des lignes parallèles et (a) Ces difficultés ont été heureusement levées par nn amateur distingué de notre ville. Les résultats pratiques sont des plus remarquables ; mais iei il ne peut étre question que du système d'écriture généralement nsité et auquel doivent aboutir toutes les méthodes d'enseignement. (26) leurs interlignes. L'ensemble de ces lignes parallèles s'appelle portée; et comme la forme du signe à écrire sur ou entre les lignes de la portée est tout-à-fait arbitraire , on a adopté le signe très simple ©. On peut donc écrire , comme le montre la figure 1, les notes des gammes successives , supposées de même durée, en allant de bas en haut, du grave à l’aigu. La durée d’une note, dans une pièce de musique, n’est jamais qu'une partie aliquotetrès-simple d’une durée plus longue, et cette partie aliquote est toujours 2, 3, 4, 6 ou 8. Ainsi, par exemple, la note © est celle du morceau qui doit avoir la plus longue durée, comme de 8 secondes, par exemple; on l’appelle une ronde, parce qu'en effet elle a la forme ronde. Pour indiquer une durée moitié moindre, on modifie sa forme comme il suit: © ou p' et alors on l'appelle une blanche. Pour une durée égale à la moitié de la blanche ou égale au quart de la ronde, on | écrit # ou po et ce signe est une noire. Pour la note qui doit avoir une durée moitié de la noire, quart de la blanche, huitième de la ronde, on écrit p cer C'est une croche. La double, la triple , la quadruple croche , dont la durée n’est que la moitié, le quart, le huitième de celle de la simple croche, se marque ainsi p.82, 2; etc. Eine ANAL £ Pour indiquer que la durée ordinaire d’une note doit être pro- longée d’une moitié de cette même durée , on écrit un point à la droite , ainsi : és @ÿs Pr etc. (27) On a également adopté des signes très-simples pour indiquer des silences de diverses durées , et d’autres signes aussi très- simples pour indiquer d’autres circonstances énumérées dans les solféges. Le dièse et le bémol sont annoncés par le signe * et b mis à côté de la note qui , sans changer de place sur la portée, change un peu de gravité ou d'acuité et d'un intervalle que j'ai déter- miné ailleurs. Pour ne pas m'engager dans des détails qu m'éloigneraient trop de mon but, je ne parlerai pas de la mesure et des diverses manières de la subdiviser. Revenons donc à la portée et cherchons à déterminer le nombre des lignes qui doivent la composer pour qu’elle recoive toutes les notes que peuvent faire entendre les voix d'hommes et de femmes, depuis la plus grave jusqu'à la plus aiguë. L'étendue générale de ces voix est de trois octaves et demie, ou de vingt-quatre degrés diato- niques, depuis le fa grave de 171 oscillations par seconde jusqu'au si aigu de 1920 oscillations. Ce fa grave est identique avec celui que font entendre les trois quarts de la grosse corde d’un violon- celle, corde qui, entière et à vide, donne un wt de 128 oscillations par seconde. La portée générale doit done avoir douze lignes , ainsi que le montre la figure 2. Les voix les plus graves parmi celles des hommes chantent les notes placées sur ou entre les lignes inférieures de cette sorte d'échelle générale. Les voix les plus aiguës des femmes chantent les notes qui occupent les derniers échelons ; enfin il est des voix d'hommes et des voix de femmes qui chantent les notes placées sur les lignes intermédiaires. Ces voix sont dans le médium. L’ut sur la sixième ligne est l'ut médium. D'après cela , il n’est pas nécessaire d'employer toute cette portée de douze lignes pour écrire les notes que peut chanter soit une voix grave, soit une voix médium, soit une voix aiguë. Or, l'étendue ordinaire et indivi- duelle de la voix ne dépasse guère une octave et demie; par (28) conséquent il suffit d'une portée de cinq lignes pour écrire la musique que peut chanter une voix humaine ; mais au commen- cement de cette portée il faudra écrire un signe qui fasse connaître quelle est la partie de l'échelle générale qui a fourni cette portée de cinq lignes. Cela est nécessaire pour donner aux sons placés sur cette portée particulière le degré d’acuité qu'ils ont dans l'échelle générale ou portée de douze lignes; cela est d'autant plus nécessaire encore que d’autres voix, chantant sur d'autres portées, peuvent avoir à se mêler à celle qui chante sur cette portée particulière. Et comme il y a beaucoup de voix intermé- diaires entre la plus grave et la plus aiguë , et que toutes ont à- peu-près la même étendue, on voit qu'il faut diviser la portée générale de douze lignes en portées particulières de cinq lignes. La figure 2 montre que la portée générale de douze lignes peut se diviser en huit portées différentes de cinq lignes chacune; il reste donc à faire choix d’un signe qui indique spécialement telle ou telle de ces huit portées. La première ligne, la ligne inférieure de chacune des sept pre mières portées, contient une note différente, En écrivant donc le nom de cette note sur la première ligne de sa portée, cela suffirait pour éviter toute confusion et cela suffirait aussi pour déterminer les noms des notes sur ou entre les lignes de la portée; seulement, la première et la huitième portée ayant également un s0/ sur la première ligne , il y aurait ambiguité; mais il est évident que cette ambiguité disparaîtrait si l'on écrivait, par exemple, le mot la sur la cinquième ligne de cette huitième portée. Ce que je viens de dire de la première ligne de chaque portée s'applique aux autres lignes et aux espaces. Il conviendrait, en suivant cette idée, de choisir la troisième ligne , celle du milieu , et d'y écrire les mots : ré fa la ut mi sol si ré. D'autres moyens se présentent comme d'eux-mêmes pour arriver au but; mais je passe de suite à celui qui a été adopte, (29) On à choisi les notes a , ut, sol, qui se suivent de quinte en quinte, pour désigner sans confusion et séparément les huit portées de cinq lignes. La note fa est sur la 4.° ligne de la 1." portée; donc pour toute musique éerite sur une portée de cinq lignes et destinée à être chantée par une voix très-grave , on indiquera celte portée par le mot FA écrit sur la 4.° ligne. — Au lieu du mot FA, on est convenu d'employer le signe ‘> placé sur ia 4.° ligne. Le même signe ‘} placé sur la 3.° ligne indiquera la 2.* portée. Par la même raison , le mot UT placé sur la 4.e, 3.°, 2.9, 17e ligne d’une portée, indiquera respectivement la 3 ®, /.°, 3°, 6.e portée de l'échelle générale. Enfin le mot SOL écrit sur la 2.°, 1." ligne d'une portée indiquera respectivement la 7.2, 8.° portée. Au lieu des mots UT et SOL on emploie les signes ‘2 et “A et ces signes avec celui ‘>: de FA se nomment CLEFS. (fig. 2) Il y a donc deux clefs de FA , quatre clefs d'UT et deux clefs de SOL , en tout 8 clefs parce qu'il y a 8 portées , la même clef ne pouvant servir pour des portées différentes qu'en changeant de place. Pour ne pas s'assujeltir à avoir sans cesse sous les yeux la figure 2 , il importe de se mettre dans la mémoire la relation qui existe entre le numéro de la ligne de chaque clef et le numéro de la portée correspondante. Il faut donc se souvenir que : 4.0 Le numéro de la ligne d’une clef de FA et le numéro de la _ portée correspondarte font ensemble le nombre 5. 20 La somme analogue pour les clefs d'UT est 7. 3.0 La somme analogue pour les clefs de SOL est 9. Les sommes étant 5 7 9 Les ciefs sont FA UT SOL ( 30 ) D'une somme retranchant le numéro de la ligne d’une clef, le reste est le numéro de la portée D'une somme retranchant le numéro d'une portée , le reste est le numéro de la ligne de cette clef. Une clef d’ut est-elle sur la troisième portée ? de 7 j'ôte. 3, le reste 4 me dit que cette clef d’ut est sur la quatrième ligne. Une clef d'ut est sur la deuxieme ligne : de 7 j'ôte 2, le reste 5 me dit que cette clef d'ut est sur la cinquième portée. Une clef de fa est sur la deuxième portée : de 5 j'ôte 2, le reste 3 me dit que cette clef est sur la troisième ligne. — Et ainsi des autres. Ainsi, avoir dans la mémoire les trois nombres 5 7. 9 et les notes correspondantes FA UT SOL dispense d’avoir sous les yeux la figure 2. Au surplus , pour venir en aide à la mémoire du lecteur, je désignerai les diverses clefs par le nom de la note suivi d’un premier chiffre indiquant le numéro de la ligne et d'un second chiffre indiquant le numéro de la portée. Ainsi FA 32 indiquera la clef de fa sur la troisième ligne de la deuxième portée, UT 43 indiquera la clef d'ut sur la quatrième ligne de la troisième portée ; et ainsi des autres. La somme des deux chiffres sera 5 pour les clefs de FA , 7 pour les clefs d'UT et 9 pour les clefs de SOL. Remarquons que les notes de la première portée, celle de la clef de FA sur la quatrième ligne , sont disposées sur les lignes et les interlignes ou espaces , comme le sont celles de la dernière portée indiquée par la clef de SOL sur la première ligne. Pour cette huitème portée, fa est done aussi placé sur la quatrième ligne, et ainsi on pourrait , pour cette huitième portée , se servir encore de la clef de FA , avec la précaution de la faire précéder du chiffre 2 pour annoncer la huitième portée : ou plutôt que les notes sont de deux octaves plus élevées que celles de la première portée sous la même clef de FA , quatrième ligne. (31) Comme il n'y a que sept notes dans la gamme , il ne peut y avoir que sept portées sur lesquelles les notes soient différemment distribuées. La huitième portée n’est donc que la reproduction de la première élevée de deux octaves. Une neuvième portée , une dixième, une onzième... reproduirait la deuxième, la troisième, la quatrième. :.. élevée de deux octaves. De même, une portée au-dessous de là première reproduirait la septième abaissée de deux octaves. Une de plus reproduirait la sixième ; une de plus encore reproduirait la cinquième... et ainsi de suite. Il est évident , à l’inspection de la figure 2, que l'on pourrait se borner aux deux clefs de FA et de SOL, savoir 4 clefs de FA sur les lignes 4 5 2 1 pour les portées 1 2 3 4 et 4 clefs de SOL sur leslignes 4 3 2 PA) pour les portées respectives 5 6 7 Sas! Il est évident encore qu'une seule clef d'UT pourrait suffire ; on la mettrait sur les interlignes 2 et CT) pour les portées respectives 1 etant) sur les lignes PUR PRE) À oi pour les portées 3 4 5 6 | sur les interlignes 3 et o025h } pour les portées Diuhreteots bu Les sons graves se reconnaîtraient par la clef placée sur les espaces au bas de la portée , les sons aigus par la clef posée sur les espaces au haut de la portée. Les sons seraient dans le médium pour la clef posée sur une ligne. Une seule clef de SOL pourrait encore suffire en la mettant sur les interlignes 4 2 1 pour les portées respectives 1 2 3 4 et sur les lignes PANNE DIT 1 | pour les portées pasnËg ire Dadit it) = En un mot , chacune des sept notes de la gamme peut être plus (3) ou moins commodément celle d’une seule clef pour les huu portées. La note so/ serait une des plus commodes. Au surplus, si j'entre dans ces détails, c'est pour montrer que le choix est arbitraire et que celui qu’on a fait des clefs de FA, d'UT et de SOL , n’est ni indispensable ni le meilleur. Une portée générale de 12 lignes, partagée en! 8 portées de 5 lignes, suffit aux besoins musicaux des voix, et même aux besoins de beaucoup d'instruments qui se rapportent à des clefs ou portées différentes ; mais il existe aujourd’hui des instruments dont l'étendue est très-considérable, comme le piano à 6 et même T octaves. et surtout l'orgue dont l'étendue va jusqu'à 8 et même 9 octaves. Cependant on n’a pas jugé nécessaire d'étendre davan- tage l'échelle générale de douze lignes. En effet, pour les parties graves de l'orgue et du piano et que l’on joue de la main gauche, on écrit la musique sur la clef de FA #1 , et pour les notes plus graves que le fa placé sous la portée on met de courtes lignes supplémentaires dont le nombre croît avec la gravité des sons. Quant aux sons plus aigus que le Za sur la cinquième figne de la première portée , on les écrit sur des lignes supplémentaires au- dessus de la portée et en nombre suffisant. ; Pour les parties aiguës de ces instruments et que l’on joue de la main droite, op les écrit sur la clef de SOL 27, et les notes plus graves ou plus aiguës que celles que peut contenir cette portée , sont écrites sur ou entre de semblables lignes supplémentaires. Toutefois , si les sons deviennent plus graves de deux octaves que ceux de la portée sous la clef de FA, on les écrit sur la portée même , en indiquant par un signe qu'il faut les faire plus graves de deux octaves. Il en est de même, et cela arrive souvent, pour les sons de deux octaves plus aigus que ceux de la 7.2 portée : on les écrit sur la portée avec l'attention d'indiquer par un signe qu'il faut faire entendre des sons plus aigus de deux octaves. On voit bien que par ce moyen il n°v aura jamais plus de six (33) hgnes supplémentaires à écrire au-dessus ou en-dessous d'une portée quelconque. Ainsi, pour les instruments les plus étendus , les seules clefs de FA 41 et de SOL 27 suffisent à tous les besoins. Les autres clefs sont appropriées aux voix et aux instruments bornés, les notes ne dépassent pas plus la portée d’un côté que de l'autre. Toutes les clefs sont utilisées dans la transposition. Revenons encore aux huit portées et aux clefs qui les dis- tinguent. Supposons qu'un morceau soit écrit sur la première portée, à Ja clef de FA 41 , que les notes remplissent toute cette portée et même quatre lignes supplémentaires au-dessus. On voit par la figure 2 quil serait alors plus commode, pour éviter les lignes supplémentaires qui se multiplient au-dessus de la portée , de transposer le morceau , de le copier sur la clef d'UT , 4. ligne , pour adopter la 3. portée. Alors on n’aurait plus que deux lignes supplémentaires au-dessus de la portée et autant au-dessous. De même si un morceau est écrit sur la clef de SOL 27 et si les notes ne dépassent pas la portée par le haut , mais la dépassent par le bas de deux lignes supplémentaires, on voit que pour réduire ces deux lignes à une seule en bas et une en haut, il suffit de copier le morceau sur la clef d'UT 16. Si les lignes supplémentaires étaient au-dessous de la première portée ou au-dessus de la huitième , comme on ne pourrait pas alors changer de clef, puisqu'il n'y en a pas au-dessous de celle de FA 41 ni au-dessus de celle de SOL 48, il faudrait conserver ces lignes supplémentaires. Au premier abord, il semble que la lecture de la musique doive être rendue très-difficile par la complication de ces fragments de lignes et qu'on retombe ainsi dans les difficultés qu'on a voulu éviter par l'usage des clefs; il en serait ainsi. en effet , Si ces lignes étaient longues , s’il fallait les compter ou aller de l'une à l'autre pour découvrir le nom de la note. Ce n’est point ainsi qu'on arrive au résultat ; c’est l'image, le dessin que forment avec 3 (#4) la note ces bouts de lignes supplémentaires qui rappellent le aom de la note. Par exemple , il y a cinq lignes supplémentaires au- dessus de la 8.2 portée et une note sur la dernière de ces cinq lignes. Il suffit d’avoir reconnu une fois pour toutes que cette note est un ré pour qu'à l'avenir on reconnaisse ce ré au dessin fait par les lignes et la note. C'est même ainsi que nous lisons dans un livre; ce n’est pas en reconnaissant une à une les lettres du mot Constantinople que nous lisons ce mot, c'est plutôt par la figure, le dessin qui résulte de l’ensemble de ces lettres que nous nous déterminons à prononcer le mot. Quand un morceau est écrit avec une gamme principale dont quelques notes sont diésées ou bémolisées, comme, par exemple, la gamme majeure de mi, dont les quatre notes fa , ut , sol, ré sont diésées, où la gamme de ré bémol dont les cinq notes sé, mi, la, ré, sol sont bémolisées, on n'éert pas les signes *, + indi- catifs du dièse et du bémol en avant de chacune de ces notes dans la portée; on les éer: tune fois pour toutes à la suite de la clef et sur les lignes ou espaces occupés par ces notes, de sorte que sur la portée on ne voit que des notes à l’état naturel. Les signes : ,k, ainsi écrits constituent l’armure de la clef. Lorsque par exception quelqu'une de ces notes diésées ou bémolisées par l’armure doit être exécutée à l’état naturel, on met au-devant d'elle le signe bécarre & qui détruit momentanément l'effet du dièse ou du bémol de la clef. Si au contraire quelque note naturelle du ton principal doit être exceptionnellement, accidentellement diésée ou bémolisée, on met le signe * ou ; devant cette note et ce signe s'applique aux notes pareilles de la même mesure. Armer la clef, c'est donc y écrire les dièses et les bémols du ton principal. Les signes », , et : qu'on rencontre dans le cours du morceau sur les notes de la portée sont des signes accidentels, et les notes qui les portent sont dites elles-mêmes des notes accidentelles. Les notes acciden- telles annoncent souvent un changement de ton passager. Nora. À droite de la figure 2 j'ai écrit les nombres d’oscillations qui correspondent aux diverses notes de l’échelle générale. (35) Si l'on caleule les notes qui se succèdent de quinte en quinte au-dessus et au-dessous de l’ut de départ, on trouve la série sui- vante qu'il faut lire de gauche à droite pour avoir les quintes en montant , et de droite à gauche pour avoir les quintes descen- dantes. Pour distinguer ces dernières et éviter la confusion, on les marque du signe — . 6 si,,—5 fae—5 Utye—4 8013 réc—3 la —2 mi, —2 sù— fa ut ut sol rét 21ac 3 mi 3 sù 4fa* 5 ut°ce 5 sol 6 ré*cc... Les chiffres ou coefficients sont les numéros des gammes mon- tantes ou descendantes où se trouvent les notes. | Voir la notice sur le RÉ.) En faisant rentrer ces notes dans l'intervalle d’une octave et ne tenant pas compte des commas qui élèvent les unes et abaissent les autres, on aura : FER sol, ré, la, mai, si, fa ut sol ré la mi si fa’... Ce sont là les toniques des treize gammes usitées en mode majeur. C'est dans cet ordre que j'ai écrit les gammes majeures du tableau A. Ce tableau peut être indéfiniment prolongé par le haut et par le bas. Il contient dans chaque ligne horizontale les gammes relatives des trois modes. J'y ai fait figurer le mode mixle pour mémoire et parce que l'usage en est fréquent , bien qu'il ne soit jamais principal. ; Les gammes en mode majeur s'exécutent sans modification soit en montant, soit en descendant. li n’en est pas de même des gammes mineures et mixtes, en montant on hausse souvent d'un demi-ton mineur les deux dernieres notes , afin que la dernière, devenant par là note sensible , appelle la tonique à un demi-ton majeur au-dessus d'elle. Cette modification s'opère rarement en descendant ces gammes, Ces changements n'étant qu'accidéntels, les trois gammes relatives ont à la clef les mêmes dièses ou les mêmes bémols, puisqu'elles sont composées des mêmes notes rangées seulement dans un ordre diatonique différent. | 36 Les gammes formant les trois groupes supérieurs et les trois groupes inférieurs du tableau ne sont point usitées, d’abord parce qu'étant fort compliquées d'accidents elles sont d'une exécution difficile , ensuite parce qu'elles sont inutiles ou superflues comme je vais le faire voir. On aperçoit déjà que les gammes majeures usitées de fa dièse et de so/ bémol n’en font pour ainsi dire qu'une seule , car elles ont le même nombre d'accidents à la clef et les toniques ne différent que d’un comma. Il est donc indifférent d'employer l'une ou l'autre de ces deux gammes. Néanmoins, elles peuvent avoir un caractère sensiblement différent dans l'exécution pratique ; cela tient à des causes d’inexactitude qui seront signalées plus loin. Les toniques des gammes majeures de ut dièse et de ré bémol ne diffèrent aussi que d’un comma ; mais l'une a sept dièses et l’autre , celle de ré bémol, n'a que cinq bémols et doit être préférée. De même encore la gamme de ré dièse a neuf dièses à la clef, tandis que celle de mi bémol n’a à la clef que trois bémois. La gamme de ré dièse est donc inutile et inu- sitée puisqu'on y supplée par la gamme de mi bémol d'une exé- cution plus facile. Par les mêmes raisons la gamme compliquée de fa bémol est remplacée par la gamme usitée et plus simple de mi naturel. En général de deux gammes , dans le même mode, dont les toniques ne diffèrent que d’un à deux commas , on préfère celle qui a le moins d'accidents à la clef. Voilà pourqüoi, dans la pratique, on ne fait guère usage que de treize gammes différentes dans chacun des trois modes. On ne met que bien rarement plus de six dièses ou six bémols à la clef. Six de ces treize gammes contiennent des dièses simples, six contiennent des bémols simples, une seule dans chaque mode est en notes naturelles. Dans la pratique instrumentale des treize gammes usitées de chaque mode , l'orchestre ne tient pas compte des commas qui élèvent ou abaissent neuf des vingt-huit notes différentes du tableau A. La musique s'exécute pratiquement avec dix-neuf sons (37 | différents par octave. On fait plus encore; comme entre deux notes qui diffèrent d’un ton peuvent se placer le dièse de l’une et le bémol de l’autre, et comme ce dièse et ce bémol ne diffèrent que d'un où deux commas tout au plus, on ne prend qu'uneseule note intermédiaire un peu trop aiguë pour représenter le dièse et un peu trop grave pour représenter le bémol, ce qui réduit à douze par octave le nombre des sons différents usités dans les orchestres. Néanmoins les virtuoses qui jouent des solos sur les instruments à sons libres ne confondent pas le dièse avec le bémol ; ils tiennent même compte des commas, surtout dans les mélodies à mouvement lent et à sons soutenus. L'inspection du tableau A donne lieu à de nombreuses remar- ques; je vais en développer quelques-unes. La tonique d'une gamme majeure est à une tierce mineure au- dessus de la tonique de la gamme mineure relative, et à une tierce majeure au-dessous de la tonique de la gamme mixte relative. En allant de bas en haut, les notes successives d’une même colonne montent de quinte en quinte. Elles descendent de quinte en quinte en allant au contraire de haut en bas. En allant de haut en bas , les gammes successives ont un dièse de moins jusqu'à la gamme naturelle du milieu qui n’a aucun accident. En continuant de descendre, les gammes successives ont un bémol de plus ; e’est-à-dire qu'en descendant de gamme en gamme il y a chaque fois une note qui s’abaisse d’un demi-ton mineur. Au contraire en allant de bas en haut il y a unenote qui s'élève d'un demi-ton mineur. Ainsi, on produit le même effet sur une note en mettant un dièse ou ôtant un bémol, ou bien en tant un dièse ou en mettant un bémol. Une note bécarre ou à l’état naturel peut être considerée comme étant tout à la fois diésée et bémolisée. Si deux gammes du même mode-ont des toniques qui diffèrent d'un comma ou deux, commesi dièse et ut, mi dièse et fa, (38) la dièse et si bémol, etc., la somme des accidents est douze. Toutefois, si les deux gammes sont en dièses ou en bémols, cest la différence dans le nombre des accidents qui est douze, comme la gamme de fa double-dièse qui aurait treize dièses et la gamme de so/ qui a un dièse. Si deux gammes du même mode ont des toniques qui diffèrent d’un demi-ton mineur, elles ont ensemble sept accidents , dièses et bémols. Telles sont les gammes de fa dièse et fa, de s et de si bémol, de /a et la, , ete. Toutefois, si les deux gammes sont en dièses ou en bémols, c'est la différence des accidents qui est sept, comme les gammes de s? dièse et si, de ré dièse et ré, de fa et fa bémol , etc. Si deux gammes des modes majeur et mixte ont la même tonique, la différence des accidents est toujours quatre, s'ils sont de même nature; mais si l’une des gammes est en dièses et l’autre en bémols, c’est la somme des accidents qui est quatre. Si deux gammes des modes majeur et mineur ont la même tonique , la différence des accidents pareils est trois. Si l'une des gammes est en dièses et l’autre en bémols, c'est la somme des accidents qui est trois. Si deux gammes des modes mineur et mixte ont la même tonique , la différence des accidents est toujours un. Au-dessus du si dans les trois gammes naturelles , sans acci- dents, on trouve la série des dièses dans l'ordre où ils s'écrivent à une clef quelconque. Si done on connaissait seulement le nombre des dièses à une clef, on trouverait facilement l'ordre dans lequel on doit les écrire. Si le dernier dièse est seul connu, on trouvera avec la même facilité et leur nombre et l'ordre dans lequel on doit les écrire à une clef. Au-dessous du fa dans les trois gammes naturelles du tableau, on trouve la série des bémols dans l’ordre où ils s'écrivent à une clef. Si donc on connaît le nombre des bémols à la clef, on trou- vera facilement l'ordre dans lequel on doit les écrire. Si le dernier (39) des bémols est seul connu , il sera facile de trouver leur nombre et l'ordre dans lequel on doit les écrire. J'appellerai sére des dièses ces notes au-dessus du si, alors même qu'elles seraient élevées ou abaissées d'un demi-ton mineur. J'appellerai série des bémols ces notes au-dessous du fa, alors même qu'elles seraient élevées ou abaissées d'un demi-ton mineur. Quand toutes les notes d'une gamme quelconque du tableau A sont naturelles ou diésées ou bémolisées, on peut indifféremment les considérer comme étant les sept premières notes de la série des dièses ou les sept premières notes de la série des bémols. Telles sont les gammes majeures de ut, ul, ut,; mineures de Va, (a, la; mixtes de mi, mi, mu. Pour les autres gammes , les accidents sont mélangés et alors les notes sont , les unes, les premières de la série des dièses ou des bémols, et les autres , les premières de la série des bémols ou des dièses. Exemples : Dans la gamme majeure de {a les notes accidentées fa*, ut”, sol sont les trois premières de la série des dièses et lesnotes natu- relles sont les quatre premières de la série des bémols. Pour la gamme de ré dièse en mode majeur,les notes fa double- dièse et ut double-dièse sont les deux premières de la série des dièses ; les autres sont les cinq premières notes homonymes de la série des bémols. Dans la gamme majeure de mt bémol , les notes accidentées sont les trois premières de la série des bémols ; les autres sont les quatre premières notes homonymes de la série des dièses. Dans la gamme mineure de si bémol , les notes accidentées sont les cinq premières notes de la série des bémols ; les deux autres sont les premières de la série des dièses. (4) Dans la gamme majeure de /« double-hémol, les notes affectées d'un double-bémol sont les quatre premières de la série des bémols; les autres sont les trois premières notes homonymes de la série des dièses. Ces exemples doivent suflire. Ces distinctions purement conventionnelles nous seront plus tard fort utiles, quand nous étudierons la question des notes accidentelles dans la transposition. Il faudra alors les relire ou se les rappeler. Une pièce de musique est toujours composée sur une gamme majeure ou mineure principale qui détermine l’armure de la clef, et comme les gammes relatives ont les mêmes dièses ou les mêmes bémols à la clef, l’armure ne fait pas connaître si la gamme priu- cipale est majeure ou mineure. Dans le courant de la pièce on change de mode, on change de gamme, ce qui amène des dièses ou des bémols nouveaux qu’on écrit devant les premières des notes homonymes qui doivent cn être affectées dans la même mesure. Ce changement de gamme peut amener au contraire le retour à l'état naturel de notes qui, d’après l'armure de la clef, devraient être diésées ou bémolisées. On est averti de ce changement par un bécarre £ mis en avant de la note. La pièce se termine dans le ton principal. Etant données deux des trois choses , savoir : la tonique, l'ar- mure, le mode, trouver la troisième. Les trois cas possibles se résolvent immédiatement par la seule inspection du tableau A. À défaut de ce tableau , on aura recours aux règles suivantes, déduites elles-mêmes de l'inspection du tableau. 1.27 cas. Étant donnés la tonique et le mode, trouver l’armure. Écrivez la série des quintes montantes : so/, ré, la, mi, si, fa’, ttso Us à Si la tonique occupe le rang n dans celte série, il y a » dièses à l'armure du mode majeur et n — 3 dièses à l'armure du mode mineur. (M) Prenez la série des quintes descendantes : fa, sè,, mr, las, ré,, sob.….…. Si la tonique occupe le rang n dans cette série, il y a n bémols à l’armure du mode majeur et n + 3 bémols à l’armure du mode mineur. 2,e cas. Étant données la tonique et l’armure, trouver le mode. Sly a n dièses à l’armure et si la tonique occupe le rang n dans la série des quintes montantes, le mode est majeur. Il est mineur si la tonique occupe le rang n + 3. S'il y a x bémols à l'armure et si la tonique occupe le rang » dans la série des quintes descendantes , le mode est majeur. Il est mineur si la tonique occupe le rang n + 3. 3.e cas. Étant donnés l'armure et le mode , trouver la tonique. S'il y a » dièses à l’armure , la tonique occupe le rang n dans la série des quintes montantes , pour le mode majeur. La tonique occupe le rang » + 3 pour le mode mineur. S'il y a n bémols à l’armure , la tonique occupe le rang n dans la série des quintes descendantes pour le mode majeur. La tonique occupe le rang n — 3 pour le mode mineur. Nora. C'est pour éviter la trop grande multiplicité des exemples que j'ai représenté par # un nombre quelconque pris à volonté. On généraliserait et on abrégerait bien plus encore, ici et ailleurs, si l'on -considérait les bémols comme des dièses négatifs; mais cela pourrait emburrasser quelques lecteurs. Le cas pratique le plus fréquent et le plus utile à considérer est celui où l'on voudrait trouver la tonique quand on connaît seulement le dernier dièse ou le dernier bémol. Le problème est alors indéterminé. Nous avons déjà dit comment on trouve l'ordre et le nombre des accidents quand le dernier est connu. Or, à une armure connue correspondent trois modes différents el par suile trois toniques différentes. La tonique de la gamme principale est (4) toujours la dernière note de la pièce si c'est une mélodie sans accompagnement. Dans le cas contraire, c'est presque toujours la dernière note la plus grave de l'accompagnement. La tonique est toujours la dernière note de l’une au moins des parties: L'armure et la tonique ainsi trouvées déterminent le mode. I y a un indice pour reconnaître le mode quand la tonique est inconnue. [l est fondé sur l'observation déjà faite qu'en montant les gammes mineures on élève d'un demi-ton mineur Ja septième note, afin qu'elle diffère de la huitième d'un demi-ton majeur et remplisse ainsi Ja fonction de note sensible. Or, à l'inspection du tableau À on reconnait que cette note sensible ne se trouve pas dans la gamme majeure relative ; aussi, quand cette note sensible se montre dans les premières ou les dernières mesures, elle indique que le mode est mineur. Si elle ne se montre pas, le mode est probablement majeur. L'armure et le mode ainsi trouvés déterminent la tonique. Il y a encore un autre indice pour reeon- paitre le mode : il est majeur ou mineur selon que la première tierce est majeure ou mineure. L’oreille exercée d'un musicien reconnait le mode majeur ou mineur à l'audition des premières mesures. La clef d'une pièce de musique imprimée ou manuscrite est toujours armée de ses dièses ou bémols. Il y a donc lieu seulement de découvrir la tonique quand on connaît le mode, ou de déter- miner le mode quand on connaît la tonique. Nous l'avons déjà dit, un coup-d'œil sur le tableau A résoud immédiatement le problème. Mais quand on n'a pas ce tableau sous les yeux au moment du besoin, on a recours aux règles suivantes déduites elles-mêmes de l'inspection du tableau et de ce qui précède. Si le mode est majeur, la tonique est toujours à un demi-ton majeur au-dessus du dernier dièse ou à une quinte au-dessus du dernier bémol. Elle se confond avec l’avant-dernier bémol. Si le mode est mineur, la tonique est à un ton majeur au-dessous du dernier dièse ou à une tierce majeure au-dessus du dernier bémol. (48) Réciproquement si la tonique est donnée et si elle est à un demi- ton au-dessus du dernier dièse ou à une quinte au-dessus du dernier bémol, le mode est majeur. De même si la tonique est à une tierce majeure au-dessous du dernier dièse où à une tierce majeure au-dessus du dernier bémol , le mode est mineur. On pourrait facilement établir des règles analogues pour le mode mixte ; mais cela serait sans utilité réelle, car ce mode n’est jamais principal. Si entre les notes de la gamme majeure d'ut, on intercale celles de la gamme majeure d'ut dièse , on aura : ut ré mi fa sol la sè ut rés me fe sol la”, sË, et comme m2, ne diffère de fa que de deux commas , on suppri- mera m1, représenté par’ fa. Au lieu de si* on pourra prendre ut, plus aigu que si* de deux commas seulement , on aura ainsi la gamme chromatique : ub out ré ré mi fu fa, sol soF la la si ut EE PH … _ _ - = Le LEA es to WW % © ko & M & Lo tt J'ai mis au-dessous et entre les notes les valeurs en commas des intervalles. Ces valeurs seraient moins inégales si on élevait d'un comma les notes de la gamme d'ut:. On aurait alors ut ut ré ré mi fa fa sol sol la la si 2ut on + Cas ce or e a = ee ce or + # & cr & LS Ci & 2 2 L2 L2 2 LS eo L 2 co [© L 2 Si entre les notes de la gamme majeure d’ut on intercale les notes de la gamme majeure de ré bémol, on aura, en supprimant l'un des deux fa consécutifs : ub ré, ré mi, mi fa sol, sol la, la si, si 2ut Len e LA Lex ion ot En Hal # A Le. Er L2 œ L23 œ L° Le vs 02 co L 2 2 L2 C'est une gamme chromatique en bémols (44 ) On appelle échelle enharmonique la série des notes qu'on obtient en intercalant entre les notes de la gamme majeure d'wt les notes des gammes d'ut* et de ré,. Je ne m'y arrêterai pas. Je passe à d'autres considérations pour lesquelles il faudra avoir sous les yeux le tableau B ainsi que le tableau A. A la seconde colonne du tableau B je donne les valeurs des notes exprimées en commas. Ces valeurs sont exactes à quelques millièmes de commas près, ce qui est une approximation plus que suffisante pour mon but. Une oreille délicate et exercée, mise dans des conditions parti- eulières d'expérimentation, est sensible à une erreur d’un dixième de comma faite sur le son qu'elle entend comparé au son qu’elle vient d'entendre. Ces conditions d'expérimentation n'étant pas remplies dans l’exécution ordinaire de la musique, les erreurs de deux à trois dixièmes de comma passent inapereues : l'oreille se tient pour satisfaite. Toutefois, si les erreurs d'exécution sont fréquentes et s'élèvent jusqu'à un comma entier tantôt en excès, tantôt en défaut, l'oreille s'inquiète et n'est point satisfaite. Sans qu'on puisse dire précisément en quoi pêche l'exécution , on sent qu'elle laisse quelque chose à désirer. Dans les mélodies lentes et à sons faibles et soutenus, l'oreille a le temps d'apprécier et de comparer les sons successifs; elle est alors beaucoup moins tolérante. Les allérations d'un comma, ou un peu plus ou un peu moins, que subissent les notes dans une exécution imparfaite , donnent au morceau un caractère particulier différent de celui qu'il aurait si l'exécution était rigoureusement exacte; c'est en partie en cela que consiste la différence entre un virtuose et un artiste ordinaire. À mérite égal dans la précision du rhythme , dans la beauté des sons , dans l'art de les soutenir , de les renfler, de les (45) diminuer , le virtuose aux sons exacts l'emportera de beaucoup sur l'artiste aux sons altérés. Supposons qu'une flûte, par exemple, soit percée avec la plus rigoureuse exactitude et d'un nombre de trous suffisant pour qu'elle rende avec une précision mathématique les sons naturels de la gamme ainsi que leurs dièses et leurs bémols. Parmi les treizetons usités, cette flûte ne pourra jouer juste que dans les tons majeurs de ré bémol , d’ut et de s?, et dans les tons relatifs des modes mineur et mixte. Ce sont en eflet les seules gammes dont toutes les notes sont pures et non abaïssées ou élevées d'un comma. Elle jouera plus ou moins faux dans les dix tons majeurs restant et les vingt tons relatifs. Dans le ton de #2 elle fera un fa dièse trop aigu d’un comma. Dans le ton de fa elle fera un so/ trop aigu d'un comma. Il y aura deux sons trop aigus d'un comma dans les tons de a et de si bémol, etc. Dans le ton de ré, l'exé- cution sera tout-à-fait défectueuse, parce que les notes m7, fa dièse,, so/ el si qu'elle fera seront trop aiguës d'un comma. il y aura également quatre sons trop aigus d’un comma dans le ton desni bémol, etc. A la vérité, pour la flûte, ces erreurs pourraient être atténuées par les artifices de l'embouchure , mais ces correc- tions imparfaites ne sont plus possibles dans les instruments à touches. Ainsi, même dans l'hypothèse d’une parfaite construction dans les instruments à sons fixes, l'exécution musicale ne peut être toujours irréprochable. Il en est de même des instruments à sons libres, comme on le verra plus loin. La voix jouit seule du privilége de pouvoir chanter juste dans tous les tons et tous les modes. En prenant la flûte pour exemple el pour fixer les idées , j'ai supposé que les instruments à sons fixes pouvaient être construits de manière à rendre avec précision les notes naturelles ainsi que leurs dièses et leurs bémols; mais cette supposition est inadmis- Sible ; pour la réaliser il faudrait tripler le nombre des trous ou des touches , ce qui est malériellement impossible sur nos (246 \ instruments ; qui ont et doivent avoir des dimensions restreintes dépendantes du nombre et des dimensions de nos doigts. Alors même que cette construction supposée serait possible, le doigté présenterait des diflicultés presque insurmontables. Nous n’aurons donc jamais d'instruments à sons fixes qui puissent exécuter la musique avec une justesse absolue dans tous les tons des divers modes. On est donc forcé d'en combiner la construction de manière qu'entre deux notes qui diffèrent d’un ton, il n'y ait qu'un son moyen un peu frop aigu pour représenter le dièse et un peu trop grave pour représenter le bémol. En un mot, il faut adopter un tempérament quelconque dans l'accord des instru- ments à sons fixes. Les accordeurs d'orgues et de pianos adoptent tel ou tel tempérament propre à favoriser les tons les plus usités au détriment de la justesse dans les autres tons. Le tempérament égal consiste à diviser l'octave en douze demi- tons égaux , ce qui altère l'exactitude de toutes les notes, mais en réparlissant assez uniformément les erreurs pour que l'oreille en soit peu offensée, ainsi qu'on va en juger. La seconde colonne du tableau B renferme les valeurs éxactes des notes correspon- dantes de la première colonne. Dans la troisième colonne, on a mis les valeurs en commas de ces notes altérées par le tempé- rament égal, et enfin dans la quatrième colonne se trouvent les différences entre les valeurs exactes et les valeurs altérées. Étudions les effets de ces différences. Ce que nous dirons des gammes majeures prises pour exemple s'appliquera aux gammes descendantes relatives des deux autres modes. La gamme majeure d'ut sera médiocrement bonne ; le ré sera trop aigu de près d'un comma , le #4 de six dixièmes et le 4 de sept dixièmes de comma. Le /a et le sol seront presque justes et le si sera trop aigu d'un demi-comma. Dans la gamme de ré, le mi, qui doit être baissé d'un corama. sera trop aigu d’un comma et six dixièmes : l'effet en sera mauvais. Le fa dièse sera trop aigu d’un comma et demi , le sol (47 ) d'un comma , le si d’un comma et demi et l'u/ dièse d'un comma et un tiers. Cette gamme sera donc défectueuse. Dansla gamme de mi, toutes les notes seront faites trop aiguës ; le si d'un demi-comma , le fa dièse d’un comma et demi et les autres notes d’une quantité intermédiaire. Il semble donc que cette gamme sera plus mauvaise que la précédente; mais comme, en moyenne ; loutes les notes seront trop élevées d’un comma , leurs relations seront peu troublées et en définitive cette gamme sera moins défectueuse que la précédente. Je laisse au lecteur le soin de continuer cet examen sur les autres gammes pour apprécier sur chacune l'effet plus ou moins nuisible du tempérament égal. Il remarquera que dans ce système de compensation le sé dièse est trop aigu de deux commas, c'est- à-dire de près d’un quart de ton mineur, ce qui est une altération intolérable ; mais le si dièse n'entre pas dans les gammes usitées. En général les notes naturelles seront , en moyenne, trop aiguës de près d'un demi-comma; les notes diésées trop aiguës d'un comma et un cinquième et les notes bémolisées trop graves d'un quart de comma. Les tons où il entre des dièses sont plus défec- tueux que les tons par bémols , sauf le cas des compensations approchées , comme celles que j'ai fait remarquer sur la gamme de mi. Maintenant, faisons une supposition irréalisable , mais utile. Supposons que tous les instruments d’un orchestre puissent faire toutes les notes du tableau À avec une précision absolue et qu'il s'agisse d'exécuter une pièce que pour plus de simplicité je suppo- serai écrite tout entière dans le ton d'ut majeur. L’exécution sera parfaite, la pièce aura le caractère qui lui est propre et con- forme à l'intention du compositeur qui l'a chantée mentalement en Mécrivant. Si cette pièce est ensuite transposée et exécutée sur une autre tonique quelconque plus aiguë ou plus grave, son caractère propre ne changera pas; il sera plus ou moins gai ou triste, brillant ou sombre comme il l'était sur la première tonique, (48 ) car toutes les notes seront exactement élevées ou abaissées de fa même quantité. Que la mème pièce soit de nouveau exécutée par les mêmes instruments supposés celte fois rigoureusement tempérés selon la loi du tempérament égal. Le caractère propre de la pièce sera évidemment modifié puisque toutes les notes seront altérées , et différemment altérées , comme le prouve la quatrième colonne du tableau B. Mais ce nouveau caractère se conservera si la pièce est ensuite exécutée sur une autre tonique quelconque, parce que toutes les noles seront élevées on abaissées de la même quantité. Dans les orchestres on adopte un tempérament inégal qui con- siste à faire exactes les notes naturelles et à prendre un milieu entre deux notes consécutives pour tenir lieu du dièse de l’une et du bémol de l’autre. De plus, on fait fa et ut pour mi dièse et si dièse, et l'on fait si et mi pour ut bémol et fa bémol. La cin- quième colonne du tableau B contient les valeurs en commas des notes diésées et bémolisées dans ce système de tempérament. La sixième colonne donne les différences entre les notes altérées et les notes exactes de la deuxième colonne. On remarquera que quatre des nouvelles notes diésées sont trop aiguës d'un comma , et trois d'un demi comma. Les nouvelles notes bémolisées sont toutes trop graves, quatre d'un comma et trois d’un demi-comma. J'ai dit que les notes naturelles étaient exactes; cela n’est pas toujours vrai pour les instruments à archet accordés par quintes ; lorsque dans le ton d'ut on joue à vide les notes ré, {a, mi, elles sont trop aiguës d’un comma, comme je l’ai prouvé ailleurs. Cela posé, si notre pièce de musique est jouée dans le ton dut où elle est écrite , l'exécution sera bonne et le caractère ne sera pas modifié si les notes ré, {a , mi ne doivent pas être jouées à vide. Si au contraire elles doivent toujours être jouées à vide et surtout si elles reviennent fréquemment , le caractère de la pièce sera très-sensiblement modifié. (49) « Le même trait d’un violoncelle joué sur les cordes ré et a, »''ou exécuté sur les cordes wt et so/, prend tout de suite un » autre caractère. » (Dict. de P. Lichtenthal.) Si le trait est en ut majeur, toutes les notes jouées sur les cordes ut et so! pourront être justes et le trait aura son caractère réel. Joué ensuite sur les cordes ré et La , le trait changera de caractère parce qu'il y aura des notes justes mêlées avecles notes ré et la qui seront trop aiguës d’un comma quand elles seront jouées à vide. « Il est évident que le fa dièse pris pour note sensible du ton » de sol est nécessairement plus haut que le même fa dièse, pris » comme troisième degré du ton de ré majeur. Il suffit d’avoir un » peu d'oreille pour en être convaincu. Cette altération existe dans » toutes les gammes , et bien qu’elle soit légère il est indispen- » sable de s’y soumettre autant que possible , sans quoi certains » sons deviennent équivoques , et l’on passe pour jouer faux. » (Nouvelle méthode de flûte à quatre clefs, par T. Barbignier.) C’est d'oreille, par la pratique et sans calcul, que M. Barbignier trouve le a dièse du ton de so/ plus aigu que celui du ton de ré. Cette observation délicate est confirmée par le tableau A. Par la tournure qu'il donne à sa phrase, M. Barbignier semble dire que le fa dièse exact est celui du ton de ré et que celui du ton de so! doit être plus aigu pour monter vers la tonique. Ce serait tirer une fausse conséquence d’une bonne observation. Pour éviter toute fausse interprétation , il fallait dire ou faire entendre que le troisième degré du ton de ré, le sixième du ton de /a et le second du ton de mi est un fa dièse altéré, un fa dièse plus grave d'un comma que le fu dièse exact du ton de so/ et du ton de sé. Par le tempérament de l'orchestre, toutes les notes diésées sont trop aiguës, et les notes bémolisées trop graves. Ce fait a le très- grand avantage d'imprimer à chaque gamme un caractère parti- culiér; mais on ne devrait pas l’ériger en principe en disant que le'dièse doit monter vers la note supérieure et que le bémol dort 4 (: 50; ) descendre vers la note inférieure. En pratique on confond le dièse avec le bémol voisin; cette confusion a son utilité, mais on ne devrait pas non plus l'ériger en principe. On va même plus loin, des savants soutiennent, ayec insistance que le dièse est plus aigu que le bémol. Ces faux principes conduisent inévitablement à de fausses conséquences qui vont quelquefois jusqu'à l'absurde, Une note diésée ou bémolisée occupe sur la portée la même place que la note naturelle. Dans les autres cas, les notes plus aiguës sont placées plus haut sur la portée. S'il était vrai qu'entre deux notes qui différent d’un ton, le dièse füt plus aigu que le bémol , il ne serait pas placé plus haut que le bémol, il serait placé plus bas. Par exemple, sur la clef de so/, seconde ligne, le ré bémol serait écrit sur la quatrième ligne, tandis que l'ut dièse plus aigu serait. placé plus bas, sur le troisième espace. Afin de simplifier ce qui me reste à dire , oublions pour un moment que les ré, la, mi joués à vide sur le violon sont trop aigus d'un comma et transposons notre pièce du ton d'ut au ton de sol. Il n'y aura alors qu'un son nouveau, le fa dièse, trop aigu d'un demi-comma. A moins qu'il ne soit prodigué, son influence se fera peu sentir et l’on pourra ne pas s’aperceyoir du changement de ton si l'on n’a pas entendu la pièce dans le ton d'ut, surtout si le ré est joué à vide. Il en sera à peu près de même si la pièce est transposée dans le ton de fa. Le si bémol sera joué trop grave d'un demi-comma et le so/ trop aigu d'un comma entier. Il en serait autrement si l'on transposait la pièce dans le ton de mi, par exemple. Quatre notes seraient altérées; le so! dièse et l’'ut dièse seraient faits trop aigus d’un comma ; le fa dièse trop aigu d’un comma et demi , et le ré dièse trop aigu d'un demi- comma. L’altération du caractère de la pièce serait encore un peu plus sensible si l’on transposait dans le ton de /a, car le si, l'ut dièse et le so/ dièse seraient faits trop aigus d’un comma et je fa dièse { 51 d’un comma et demi. Cependant, si les ré, la , mi, qui font partie de la gamme de /a, devaient tous être joués à vide, les violons exécuteraient la pièce avec exactitude, car toutes les notes, alors trop élevées d’un comma, conserveraient les relations exactes qu'elles doivent avoir dans l’exécution rigoureuse, seulement le fa dièse serait trop aigu d’un demi-comma. En poursuivant cet examen sur les autres tons usités on arrivera à cette conclusion confirmée par l'expérience de tous les jours, que l'espèce de tempérament qu’on est obligé d'adopter dans les orchestres modifie le caractère véritable des morceaux joués dans les tons où ils sont écrits et altère plus ou moins profondément le caractère des morceaux transposés dans des tons différents. Chaque ton (ou gamme) dans le même mode a, pour ainsi dire, un cachet particulier dépendant du nombre de ses notes justes et de ses notes altérées. Le degré de justesse dans l’exé- cution dépend lui-même du degré de perfection dans la construc- tion matérielle de l'instrument, s’il est à sons fixes , et du doigté de l'exécutant si l'instrument est à sons libres. La qualité ou le timbre des sons influe aussi sur le caractère d’un morceau ; faites jouer par un autre instrument un air écrit pour le hautbois, vous reconnaîtrez que le caractère en est modifié. Le compositeur veut inspirer le sentiment dont il est lui-même pénétré et il choisit en conséquence le mouvement, le ton, le mode, le rhythme et les instruments les plus propres à produire l'effet voulu. Dans les solos sur les instruments à sons libres, l'artiste de bon goût s'attache de préférence à la justesse et à la beauté des sons ; la difficulté ne vient qu'en seconde ligne. C'est l'opposé dans les solos sur les instruments à sons fixes; comme la justesse parfaite y.est impossible malgré les artifices de l'embouchure, c’est la difficulté dans la vitesse qui vient en première ligne. Le pianiste, par exemple, ne passe pour fort que si ses doigts disloqués lui permettent de faire des milliers de notes en un instant très-court. C'est la principale ressource de cet instrument , car les sons meu- (52) rent presqu'en naissant. C’est le contraire pour l'orgue , c'est la tenue et la beauté des sons qui en font le principal mérite ; la vitesse serait d’ailleurs en opposition avec la destination spéciale de l'instrument. Le tempérament égal est réalisable sur les instruments à tou- ches; il ne l’est pas sur les instruments à archet accordés par quintes, car les cordes ré, la, mi joués à vide donneraient souvent des sons un peu trop aigus. Le tempérament ordinaire de l'orchestre me paraît préférable au tempérament égal; il a sur ce dernier l'avantage dé donner avec exactitude les notes naturelles, sauf, dans certains cas, les notes à vides ré, lu, mi, et de diminuer utilement la trop grande acuité des notes diésées et la trop grande gravité des notes bémo- lisées. Néanmoins, les altérations qui subsistent e£ qui varient d'une gamme à l'autre, suffisent pour imprimer à chacune de ces gammes un caraëtère particulier et distinct. C’est une grande et heureuse ressource pour le compositeur qui peut choisir le ton le plus propre à inspirer un sentiment déterminé. Si l'on suivait rigoureusement le tempérament égal, cette variété dans les effets produits par la diversité des gammes, disparaîtrait sans faire disparaître le mauvais effet de l'altération de toutes les notes. Elle disparaîtrait encore dans l'hypothèse d’une justesse absolue ; mais le plaisir de l'oreille en serait plus vif. Il est fort douteux cependant que ce surcroît de plaisir soit une suffisante com- pensation. « Chaque ton a son caractère particulier ; de à naît une source » de variétés et de beautés dans la modulation ; de là naît une » diversité et une énergie admirable dans l'expression; de là » naît enfin la faculté d’exciter des sentiments différents avec des » accords semblables frappés en différents tons. Faut-il du gai, » du brillant, du martial ? Prenez les tons wt, ré, mi. Faut-il du » grave, du religieux ? le mi bémol et le fa l'exprimeront noble- » ment. Faut-il du touchant, du tendre? Prenez les tons de 4, (53) » mi, si bémol. Fa mineur va jusqu'au lugubre et à la douleur; » la bémol est très-sombreet un célèbre auteur l'appelle le ton » des tombeaux; ré mineur porte la tristesse dans l'âme. Le », même ton peut revêtir plusieurs caractères ; l’uf, par exemple, » exprime. également l'innocence, la simplicité ; le mi bémol » l'amour, etc. En un mot, chaque ton, chaque mode a son » caractère propre qu'il faut connaître, et c'est là un des moyens » qui ajoutent puissamment à la véritable expression musicale. » Ce passage pris dans le dictionnaire de Lichtenthal est presque entièrement copié du dictionnaire de Jean-Jacques-Rousseau. Ily a quelques légères différences dans les appréciations. Les diffé- rences sont plus saillantes et plus nombreuses entre cet article et celui plus détaillé, plus étendu qu'on trouve au tome 3, page 356 et suivantes, des Essais sur la musique, par Grétry, contemporain de Jean-Jacques. On apprécierait sans doute plus différemment en- core aujourd hui le caractère particulier des diversesgammes, par suite de l'introduction dans les orchestres de beaucoup d'’instru- menis à vent nouveaux ou perfectionnés qui influent par leur nombre et leur timbre sur le caractère d’une mélodie ou d'une harmonie. A égalité dans la justesse des notes , un morceau qui vient d'être joué sur le violon pourra paraître plus éclatant s'il est joué sur la trompette à pistons ; il paraîtra plus champêtre, plus mélancolique s’il est joué sur le hautbois. Une simple sour- dine mise sur le chevalet d'un violon nuancera la couleur du morceau. Le plus ou le moins de justesse dans la production des sons à sa grande part d'influence dans le jugement que l’on porte sur {el orchestre qu’on dit excellent etsur tel autre qu'on dit mé- diocre , bien qu'il y ait le même nombre dé musiciens, le même nombre de violons, de trombones, de flûtes , etc. Dans les deux orchestres, le caractère de chaque gamme peut être différemment nuancé et par suite différemment apprécié. En copiant dans Lichtenthal le passage ci-dessus, j'ai souligné quelques mots qui énoncent un fait d'observation pratique dont (54) il est facile de donner l'explication. Je prends à cet effet un accord quelconque, par exemple, l'accord direct /a ut mi sol. Les tierces extrêmes Za ut, mi sol sont mineures; la tierce intermé- diaire ut mi est majeure. Si les quatre notes sont exécutées en arpége dans la justesse absolue , l'accord aura le caractère qui lui est propre, son véritable caractère. L'effet sera modifié si l'accord est exécuté sur un violon qui ferait à vide les notes /a et mi, lesquelles seraient ainsi trop aiguës d’un comma. L'intervalle la ut sera diminué d’un comma ; l'intervalle mi so! sera égale- ment diminué d'un comma , et l'intervalle ut mi sera augmenté d’un comma. Une si profonde altération dans les trois tierces en entraîne une correspondante dans l'effet de l'accord. Je reprends le même accord dans la gamme de ré, savoir : sn ré fa, la. Dans l'exécution le si, sera fait comme un &# naturel: le ré et le {a , s'ils sont joués à vide, seront aussi trop aigus d’un comma. Enfin , le fa*. sera exécuté comme un fa et sera ainsi trop aigu d'un comma et demi. Si toutes les notes étaient faites trop aiguës d’un comma juste, l'accord aurait son véritable caractère, car les mtervalles conserveraient leur jus- tesse, L'effet ne sera donc que très-légèrement nuancé par le demi-comma dont le fa dièse sera trop élevé; en définitive, cet accord sera meilleur dans le ton du ré que dans le ton d’ur. Le même accord ut, mi, sol, sù , pris dans le ton de mi bémol, sera très-profondément altéré. Les deux intervalles de tierce mineure seront diminués d’un comma et demi, et celui de la tierce majeure sera augmenté d’un comma et demi. En continuant cet examen sur d’autres gammes et sur d'autres accords, on reconnaîtra la justesse de l'observation signalée. Abstraction faite de l'influence que peuvent avoir sur l'effet pro- duit, le timbre variable avec l'espèce d'instrument , la grosseur et la nature des cordes, le degré d’acuité , les harmoniques, l'intensité, etc., etc. les accords joués en différents tons ne peuvent avoir un effet constant que si les notes qui les consti- en (55) dE tuent sont exécutées soit dans la justesse absolue, selon les valeurs en commas de la seconde colonne du tableau B, soit en suivant le tempérament égal et selon les valeurs de la troisième colonne. Dans le premier cas, les tierces mineures ; de ces accords se- ront de 14,48 commas et ies tierces majeures ; de 17,96. Dans le Second cas, les tierces mineures seront de 13,95 commas et les majeures de 18,60. (56) TRANSPOSITION À VUE. Un violoniste affectionne l'instrument dont il se sert depuis longtemps ; il y est habitué, il le connaît. Il serait momentané- ment embarrassé, il jouerait moins bien sur un violon qui n'aurait pas précisément la même rorme, la même longueur de manche, le même poids que le sien Il exécuterait plus mal encore sur son propre violon s’il changeai la distance du sillet au chevalet, car le doigté qu'il s’est fait par un long exercice et qui convient à la parfaite justesse dans les rapports des sons , ne conviendrait plus pour un changement sensible dans la longueur des cordes. Aussi tous les violons ont-ils, à très-peu près du moins, la même dis- tance du sillet au chevalet. Cette distance ou diapason est de 12 pouces (325 millimètres). Les altos , les violoncelles, les contre- basses ont aussi un diapason uniforme. Les flûtes, les bassons , les hautbois, ete , etc. sont aussi de mème longueur entre eux pour donner le même son. A cette convention, pour ainsi dire obligatoire , s’en ajoute une autre qui n’est pas non plus tout-à fait arbitraire, c’est de donner aux cordes des instruments à archet une tension telle qu'étant accordées par quintes elles rendent de beaux sons, ni trop graves, ni trop aigus. C’est ainsi que le son rendu par la quatrième corde du violoncelle est d'environ 128 os- cillations par seconde, et l’on est convenu de l'appeler wt. De là résulte le nombre d’oscillations de tous les sons qu'on fait en- tendre dans l’exécution d’une musique quelconque et par suite la longueur qu'il faut donner aux flûtes , aux bassons , ete., ete. L'ut du violoncelle était autrefois d'environ 125 oscillations dans les divers orchestres de l'Europe. Il a toujours monté depuis. Il était de 128 oscillations il y a un demi-siècle, il est aujourd'hui de 129. Il n'est pas précisément le même dans tous les orchestres. Pal PEN ne es Det en fn. ou en dé Sd (37 ) \ Je le supposerai de 128 oscillations. Sa double-octave aiguë est donc de 512 oscillations par seconde ; c’est l’ut de la clef d'UT 34 du tableau général figure 2. Cet ut de 512 oscillations est aussi celui de la cinquième ligne, deuxième portée; de la quatrième ligne, troisième portée ; de la deuxième ligne, cinquième portée ; etenfin de la première ligne , sixième portée. Ce mème wf est dans le médium des sons usités. Il est rendu par les voix d'hommes et de femmes et par presque tous les instruments. C’est la note la plus grave du hautbois ; elle peut varier sur cet instrument par les variations de température et le pincement des lèvres sur l’anche. On à cette note de 512 plus exacte et plus fixe par un instrument en fer ou en acier, ayant la forme d'une fourche et qu'on nomme diapason (4). Le [a au-dessus de cet ut est donc de 912 x 5 ou 853 1/3 oscillations par seconde. Ce {a est rendu par les voix de femmes et par un grand nombre d'instruments. C’est la note du milieu des grands pianos , de l'orgue, de la harpe, du cor anglais, des clarinettes , etc. , etce., et ce qui lui donne beau- coup d'importance c'est qu'elle est à l'octave aiguë de la chante- relle du violoncelle, à l'unisson de la chanterelle de l’alto, et à l'unisson de la seconde corde du violon. On la conserve au moyen d'un diapason en acier qui sert de point de départ pour l'accord de tous les instruments de l'orchestre. (2) La fixité obligée de tous les sons de l'orchestre résulte évidem- ment de la structure des instruments , et celle-ci dépend elle- même de celle du corps humain. Les instruments primitifs avaient peu d’étendue, ils ont été faits dans l'intention manifeste d’imiter Ja voix ou du moins de la suppléer. Aujourd’hui les instruments sont très-nombreux et quelques-uns sont fort étendus. Ils as- (1) Nous avons déjà employé ce mot, mais ans une acception différente, Ilen a encore plusieurs autres, comme les mots fon, corde etc. C'est un vice de la nomenclature musicale. + (a) Le La du théâtre de Lille est de 79,29 oscillations par seconde. 58 ) treignent les voix qu'ils accompagnent à la fixité de leurs sons, ce qui s'oppose souvent à l'exécution d'un air qu'on voudrait chanter, parce que certaines notes fixes sont un peu trop aiguës ou un peu trop graves pour être rendues par la voix. Si cette voix chantait seule , sans le concours d'aucun instrument, elle exécu- terait facilement le morceau sans changer ni la clef ni l’armure, ni la disposition des notes sur la portée, elle n'aurait pour cela qu'à prendre une autre tonique quelque peu plus aiguë ou plus grave que celle qu'avait donné l'instrument. Si le chanteur sait lire sur les huit clefs ayant une armure quelconque, il pourra exécuter toutes les musiques, pourvu que l'intervalle de la note la plus grave à la note la plus aiguë ne passe pas l'étendue de la voix. En essayant diverses toniques , il en trouvera toujours une qui lui permettra d'exécuter le morceau. Si au contraire le chan- teur ne sait lire couramment que sur une seule clef, il sera obligé, pour chanter le morceau , de le copier en déplaçant les notes en les transposant , c'est-à-dire en les écrivant sur la portée à un ou plusieurs degrés plus haut ou plus bas, afin que la note qui porte le nom de la clef choisie soit écrite sur la ligne de cette clef. Dans ce cas , l'armure de la £ ef ne devra pas changer, et l'opération faite on aura transposé ,e morceau en déplaçant les notes sur la portée, en changean, ae clef sans changer d’armure Si les nom- breux dièzes où bémois ae cette armure embarrassaient le chan- teur, il en réduira le nonpre ou les fera disparaître à volonté par un nouveau déplacement des notes. Ce sont ces diverses opéra- tions qui constituent la transposition écrite. La transposition à vue, non écrite, se fait sans rien changer à le disposition des notes sur la portée, mais en changeant soit la clef, soit l’armure, soit les deux à la fois. Elle est particulièrement utile aux instru- mentistes ; c'est par elle que nous commencerons l'étude de la transposition. Dans ce qui précède, j'ai implicitement suppose que le mor ceau à exécuter était ecrit tout entier dans un ton, sans passer (59) par des modnlations qui amèneraient des notes accidentelles. Je _maiptiendrai cette supposition dans ce qui va suivre, en réservant pour une étude spéciale le cas un peu plus compliqué des notes accidentelles. Un violon accompagne un chanteur ; la tonique qu'il lui a donnée est nécessairement l'une des notes fixes naturelles diésées ou bémolisées du tableau A. L'exécution terminée, le chanteur recommence, mais cette fois il prend une tonique pius grave de 3 commas. Îl transpose donc sans rien changer à ce qui est écrit, et sans éprouver la moirdre difficulté. Le violoniste ne peut plus le suivre ; car il ferait trop aiguës de 3 commas toutes les notes à vide, quand même il serait assez habile pour modifier sur-le- champ son doigté de manière à abaisser de 3 commas les autres notes. Il ne peut accompagner qu'après avoir détendu ses quatre cordes pour les abaisser de 3 commas. En général, les instruments ne peuvent transposer à vue que si l’ancienne et la nouvelle tonique se trouvent parmi celles des gammes du tableau A. Transposer à vue, c'est exécuter un morceau en élevant ou abaissant toutes les notes d’un nombre déterminé de degrés dia- toniques. Il y a 7 intervalles ou 7 degrés diatoniques dans une gamme quelconque, depuis la tonique jusqu’à son octave aiguë où grave. Deux de ces 7 degrés sont d'un demi-ton majeur 1#, trois sont d’un ton majeur + et deux d’un ton mineur . Lorsqu’en partant d’une tonique primitive on transpose en montant de 1, 2, 3, 4, 5, 6 degrés diatoniques, ou en descendant de 6, 5, 4, 3, 2, 4 degrés diatoniques on tombe sur la même tonique nouvelle. En effet, les nombres qui se correspondent dans ces deux lignes sont complémentaires lun de l’autre; l’un est pair, l'autre est impair et leur somme est 7, nombre de degrés diatoniques de la gamme. La tonique nou- vellé trouvée en montant sera donc à l'octave aiguë de celle trouvée en descendant. (160 ) Aucune clef n'est posée sur un espace de la portée générale figure 2, toutes sont posées sur une ligne et à distance les unes des autres d'un nombre pair de degrés diatoniques. I suit de là montant escendant nombre pair de degrés. Pour transposer éndirectement d’un : : montant PR Re JENOÉ nombre impair de degrés: sa aicscendant il faut transposer en qu'on ne peut transposer directement en d que d’un descendant néant du sr @ complémentaire de degrés diato- haut niques; mais il faut Re une ou deux octaves plus do parce qu'on sera sur une clef posée trop us de 7 ou de 14 de- grés sur l'échelle générale, figure 2. En transposant comme on vient de le dire on déplace fictive- ment loutes les notes d’un nombre pair de degrés , on change de portée , et chaque note du ton nouveau occupe sur la portée nou- velle la place même que la note correspondante du ton primitif occupait sur la portée que l’on abandonne. De là je déduis la règle générale suivante pour opérer dans tous les cas la transposi- tion à vue : Choisissez arbitrairement une note quelconque que j'appelle P et remarquez l’espace ou la ligne qu'elle occupe sur la portée du morceau à transposer, Montez au-dessus de P ou descendez au- dessous de P du nombre de degrés qu’il y a de la tonique primi- tive à Ja tonique nouvelle, vous tomberez ainsi sur une note que. j'appelle N. Cela fait, cherchez sur la figure 2 la portée sur laquelle la note N occupe la même place que P sur la portée du morceau. La clef nouvelle et cherchée sera celle de la portée ainsi trouvée. , Par l'adoption de la nouvelle clef, la note P quelconque se trouve par le fait montee ou descendue du nombre voulu de de grés; par conséquent la tonique et toutes les notes du morceau br à ar 1" ( 61 ) l sont également déplacées de ce même nombre de degrés diato- niques , c'est-à-dire que là transposition demandée est effectuée. Il est fort commode de prendre pour la note P la tonique du morceau ; la note N est alors la tonique nouvelle qui souvent est donnée d'avance ou qu’on peut facilement trouver. Remarquons que : 4.0 À chaque clef correspond une portée d’un numéro connu ; 2.9 Les portées de la figure 2 montent de deux en deux degrés diatoniques, depuis la première jusqu'à la huitième ; elles des- cendent par conséquent de deux en deux degrés depuis la hui- tième jusqu'à la première ; 3.0 On ne peut transposer qu'en montant ou en descendant d'un nombre pair de degrés. I suit de ces remarques, que si au numéro connu de la portée primitive , on ajoute ou l'on retranche la moitié du nombre pair de degrés dont il faut élever ou abaisser le morceau, on aura le numéro de la portée nouvelle, celle de la clef transposée. C'est encore un procédé de transposition très-commode. J'appliquerai avec tous les détails nécessaires ces procédés de transposition, et je choisirai les exemples de manière à rencontrer les difficultés qui pourraient embarrasser les commencçants. Pour suivre ces détails , que j'abrégerai de plus en plus à mesure que nous ayancerons , il faudra avoir sous les yeux le tableau A et la figure 2 Il faudra aussi ne pas perdre de vue que les places assi- gnées aux notes naturelles sur les huit portées, sont aussi les places des mêmes notes diésées ou bémolisées. Enfin je rappelle que, d’après le tableau À, les dièses se mettent à la clef dans l'ordre suivant : fa ut sol ré la mi ÉD et les bémols dans l’ordre suivant : sù nvi la ré sol ut fase Pour opérer la transposition et pour armer la clef nouvelle, la clef tansposée, il faut connaître le mode et la tonique du morceau à transposer, ainsi que la tonique nouvelle. Il n'y aurait aucune difficulté si l’on donnait, par exemple, le mode et l'intervalle de la nouvelle tonique au-dessus ou au-dessous de celle du morceau , Car le mode donné et l'armure écrite font connaître la tonique primitive, et l'intervalle donné fait trouver la tonique nouvelle. Avant d'en venir à l'exécution, il est bon de prendre une idée du nombre des cas qui peuvent se présenter. La tonique à changer est l’une des 21 notes naturelles , diésées ou bémolisées. La nou- velle tonique est aussi l'une de ces 21 notes. Cela fournit 20 x 21 ou 420 cas pour un mode et pour une clef. On aura donc en tout, pour les huit clefs , 8 fois 420 ou 3360 cas. En nous bornant aux 13 toniques les plus usitées, n'ayant au plus que six dièses ou six bémols à la clef, on aura encore 12 x 13 x 8 ou 1248 cas, pour le mode majeur. 1.cr exemple. — Un morceau est en #4 majeur sur la clef d’ut , troisième ligne , quatrième portée , ou selon nos conventions, sur la clef d'UT 34. 1 y a 4 dièses à la clef sur fa, ut, sol, ré. On veut trausposer à vue en montant sur la tonique si bémol , à 4 degrés diatoniques plus haut. 1€ procédé. — Sur la portée du morceau à transposer, je choisis capricieusement pour la note P, le sol placé sur le pre- mier espace. La note N, plus élevée de 4 degrés . est un ré; je cherche donc sur la figure 2 la portée sur laquelle le ré occupe le premier espace. C’est la sixième portée , celle de la clef d'UT 16. Donc pour transposer en exéeulant , il faut faire abstraction de la clef d'UT 34, ainsi que des quatre dièses dont elle est armée , et supposer la clef d'UT 16, avec deux bémols sur si et mi. Par un autre caprice je choisis pour la note P l’ut de la clef primitive. La note N, plus élevée de 4 degrés, est un so/ ; je cherche done sur la figure 2 la portée sur laquelle le so/ occupe aussi la troisième ligne. C’est la sixième portée , celle de Ja clef d'UT 16. 63) Je choisis enfin la tonique donnée »i pour la note P. Elle est placée sur la quatrième ligne de la portée primitive; je cherche done sur la figure 2 la portée sur laquelle le si bémol, (qui est à 4 degrés au-dessus de mi, et quiest la tonique nouvelle, ) es4 également placé sur la quatrième ligne. C'est encore la sixième portée, celle d'UT 16. Il serait fastidieux de répéter sur d’autres exemples de pareils détails, quant au choix de la note P de départ ; aussi, désormais, je prendrai la tonique primitive : c’est le choix le plus commode. 2 € procédé. — Si l'on connaît le numéro de la portée primi- tive , il suffira de compter de combien de degrés il faut monter ou descendre depuis la tonique que l'on quitte jusqu’à la tonique nouvelle pour savoir, à raison de deux degrés par portée, quel sera le numéro de la portée du ton nouveau, ce qui fera con- naître la clef nouvelle. Dans l'exemple ci-dessus, il faut monter de quatre degrés pour aller de mi à si bémol , il faut donc monter de deux portées, de la quatrième à la sixième, celle d'UT16. 2. exemple. — Un morceauest en mi majeur, clef d'UT 34. On veut le transposer en descendant sur sè bémol. 1.97 procédé. — De la tonique primitive mi à la toniqne nou- velle si bémol, il y a trois degrés à descendre. D'ailleurs la to- nique mi est sur la quatrième ligne de sa portée. Il faut donc chercher au-dessous de la clef d'UT 34 une portée sur laquelle le si bémol occuperait aussi la quatrième ligne. Il n’y en a pas. La transposition demandée est donc impossible. Le si bémol occupe la quatrième ligne sur la sixième portée , celle de la clef d'UT 16. Si l'on adopte cette portée, on aura monté toutes les notes de 4 degrés au lieu de les descendre de 3 desrés ; elles seront donc trop élevées de 7 degrés ou d'une oc- tave. On prendra donc cette clef d'UT 16; mais en exécutant il faudra faire toutes les notes plus graves d’une octave. k 2,e procédé. — I n'y a aucune clef distante d’une autre d'un (64 nombre impair de degrés. La transposition demandée est donc impossible. On peut l'effectuer indirectement en montant du nombre de degrés pair complémentaire du nombre impair, parce qu'on arrive alors à la même tonique nouvelle ; mais trop aiguë d'une octave. Ne pouvant descendre de 3 degrés , on montera de 4, ou de deux portées au-dessus de la quatrième; c'est-à-dire qu'on prendra la sixième portée, celle d'UT 16 ; mais il faudra exécuter le morceau à une octave en-dessous. 3.0 exemple. — Un morceau est en fa mineur avec 4 bémols à la clef d'UT25. On veut le transposer en fa dièse, avec trois dièses à la clef. Faet fa dièse occupent la même place sur une portée quel- conque. Il faut donc conserver la même portée, la même clef et remplacer les 4 bémols par 3 dièses. Onne change pas de clef quand on transpose d’une note à l’une de ses homonymes , comme de fa à fa” ; de fa à fa; de fa, à fa”. L'armure seule change. 4° exemple. — Un morceau esten ré mineur sur la clef de FA32. On veut le transposer en montant sur la tonique sol plus aiguë que ré de trois degrés. 1.97 procédé. — Sur la portéede la clef de FA 32 la tonique pri- mitive ré occupe la seconde ligne. El faut donc chercher , sur la figure 2, une portée sur laquelle la nouvelle tonique so! occupe aussi la seconde ligne. C'est la septième portée. Mais le so de cette portée n'est pas , comme on le demande, élevé de 3 degrés au-dessus de la tonique ré, il est plus élevé de dix degrés, c'est- à-dire qu'ilest trop élevé de 7 degrés ou d'une octave. On fera donc abstraction de laclef de FA32, on supposerala clefde SOL27; mais on exécutera à une octave au-dessous de ce qu ‘indique la septième portée. 2.e procédé. — I n'y a aucune portée à 3 degrés au-dessus de la seconde. [l faut donc transposer indirectement en so/ en des- cendant de 4 degrés, complément de 3. C'est-à-dire qu'il faut (65) descendre de deux portées , aller de la seconde portée à celle qui précède la première, Si cette portée existait, on la prendrait et l'on exécuterait le morceau à une octave au-dessus. Cette portée n'existe pas; mais, d'après ce que nous avons vu page 31, elle est reproduite à 2 octaves plus haut par la septième portée ; c’est donc celle-ci, qu’il faut prendre, mais il faudra exécuter à une octaye en-dessous. Si au lieu de transposer en so/ naturel avec deux bémols à la clef, on voulaittransposer le morceau en so/ dièse ou en so/ bémol, on tomberait sur la même clef, mais il faudrait y supposer cinq dièses dans le premier cas, ou neuf bémols dans le second. En général , si d’une tonique naturelle, diésée ou bémolisée, on transpose sur une note naturelle, diésée ou bémolisée, on ne trouve qu’une seule clef pour les 9 cas, mais l’armure de cette clef change. 5.e exemple. — Un morceau est en mi bémol sur la clef de SOL 18. On veut le transposer à vue en descendant sur la to- nique la. 1er procédé. — Le mi bémol sur la clef donnée occupe le troi- sième espace. Il faut donc trouver une portée sur laquelle la nou- velle tonique /a occupe aussi le troisième espace. C’est la sixième portée, celle de la clef d'UT 16. On ne laissera rien à la clef si le mode est mineur ; on supposera 3 dièses si le mode es majeur. 2.€ procédé -- De mi bémol à la il y a 4 degrés à descendre. Il faut donc descendre de deux portées , aller de la huitième à la sixième. 6. exemple. — Un morceau est en m2 bémol sur la clef de SOL 18. On yeut le transposer en montant sur la tonique /a. 4.e" procédé. — On opère comme dans le cinquième exemple, et l’on arrive encore à la clef d'UT 16 ; mais comme au lieu de monter de 3 degrés on est descendu de 4, il faudra exécuter une octaye plus haut. 2.€ procédé. — En montant de me bémol à Lil y a 3 degrés, 5 66 ) nombre impair qui oblige de transposer en descendant de 4 de- grés, complément de 3. Il faut donc descendre de deux portées , de la huitième à la sixième, et exécuter une octave plus haut. Si, en forçant les choses, on voulait aller de mi bémol à a, en montant par un nombre pair de degrés, on trouverait dix degrés ou 5 portées au-dessus de la huitième. C’est donc Ja treizième portée qu'il faudrait prendre. Elle n'existe pas. Mais d’après ce qui a été dit page 31, elle reproduirait la sixième portée , et c’est celle-ci qu'il faut prendre. 7.eexemple. —Un morceau est en so7 dièse sur la clef d'UT #3. On veut le transposer en descendant de 6 degrés. 4.er procédé. — La note à 6 degrés en-dessous de so/ dièse est un /a. Il faut donc trouver une portée sur laquelle le La occupcrait le second espace comme la tonique so/ dièse sur la portée pri- mitive. C'est done la clef de SOL 27 qu'on prendra ; mais alors, on aura transposé de 8 degrés en montant au lieu de transpo- ser de 6 degrés en descendant. I faudra donc, dans l'exécution, descendre toutes les notes de 14 degrés; c'est-à-dire qu'il fau- dra exécuter à deux octaves au-dessous de ce qu'indique la sep- tième portée. 2.e procédé. — Pour descendre de 6 degrés il faut descendre de trois portées au-dessous de la troisième, c’est-à-dire qu'il faut aller à une portée en-dessous de la première. Elle n'existe pas; mais elle est reproduite par la portée au-dessous de la huitième; c'est donc la septième portée qu'il faut prendre. 8.€ exemple. — Un morceau est sur la clef de SOL 27 ; on veut le transposer en montant de 3 degrés diatoniques. D'après cet énoncé on ignore le mode et les deux toniques , ce qui ne permet pas de déterminer l'armure du ton primitif, ni l'armure du ton nouveau. Néanmoins, on peut facilement découvrir la clef nouvelle. 1.87 procédé. — À défaut de tonique je prends pour la note P de départ, la note so/ de la clef donnée. Elle est placée sur la se- conde ligne. La note à 3 degrés plus haut est un ut. Il faut donc (67) prendre la portée sur laquelle l’ut occupe aussi la seconde ligne, c’est celle de la clef d'UT 25; mais il faudra exécuter à l’octave au-dessus, parce que cette clef d'UT 25 est à 7 degrés au-dessous de ce qui est exigé. 2. procédé. — Il n'y a pas de clef à 3 degrés au-dessus de celle de SOL 27. On transpose donc indirectement en descendant de 4 degrés, nombre pair, complément du nombre impair 3. Des- cendre de 4 degrés, c’est descendre de deux portées , de la sep- tième à la cinquième, celle de la clef d'UT 25. Et comme au lieu de monter de 3 degrés on est descendu de 4 , il faudra exécuter une octave plus haut. 9. exemple. — Un morceau est sur la clef de FA 32 ; on veut le transposer en descendant de 4 degrés. 1.er procédé. — La note à 4 degrés au-dessous de fa étant un si, on prendra la clef de SOL 27, où le si est placé sur la troisième ligne, comme le fa sur la portée de la clef donnée. Mais en trans- posant ainsi, on aura monté de dix degrés au lieu de descendre de 4. Il faudra donc dans l'exécution du morceau ainsi transposé, faire les notes plus graves de 14 degrés, c’est-à-dire de deux oclaves. 2.e procédé. — Pour descendre de 4 degrés, il faut descendre de deux portées , cequi conduit à une portée au-dessous de la première , ou à une portée au-dessous de la huitième qui repré- sente la première à deux octaves plus haut. On prendra donc la clef de SOL 27; mais on fera les notes plus graves de deux octaves. En raisonnant comme on vient de le faire sur ces deux derniers exemples, on trouvera toujours facilement la clef transposée quand on donnera une clef primitive quelconque et le nombre de degrés exigé par la transposition en montant ou en descendant. On trouvera dans les deux tableaux ci-après la solution du pro- blème pour tous les cas qui peuvent se présenter. (68 | Clefs transposées en MONTANT du nombre de degrés diatoniques ci-dessous. CLEFS primitives 1 2 3 4 5 6 SOL 18 | UT 25 | FÀ 32| UT 16| Ur 43 | SOL 27 | ÜT 34 SOL 27 | UT 34 | SOL 18 | UT 25 | FÀ 32 | UT 16 | ÜT 43 UT 16 | UT 43 | SOL 27 | UT 34 | SOL 18 | UT 25 | FA 32 UT 25 | FA 32 | UT 16 | UT 43 | SOL 27 | UT 34 | SOL 18 UT 34 | FA | UT 25 | FA 32 | UT 16 | UT 43 | SOL 97 UT 43 | SOL 27 | UT 3%4 FA4t| UT 25| FA 32 | UT 16 FA 32 | UT 16| UT 43 | SOL 27 ur) Fa art ur 5 FA 41 | UT 25, FA 32 |. UT 461 UT 43 | SOL 27 | UT 34 Clefs transposées en DESCENDANT du nombre de degrés diatoniques ci-dessous. | CLEFS primitives 5 4 3 2 1 SOL 18 | UT 25 | FA 32| UT 16| UT 43 | SOL 27 |" UT % SOL 27 | UT 34 | SOL 18 | UT 25 | FA 32 | UT 16 |. UT 43 UT 16 | UT 43 | SOL 27 | UT 34 | SOL 18 | UT 95 | FA æ UT 25 | FA 32 | UT 16 | UT 43 | SOL 27 | (UT 34/|'SOL 18 UT 34 | FA 41 | UT 25 | FA 32 | UT 16 | UT 43 | SOL 27 UT 43 | SOL 27 | UT 34 | FA 41 | UT 95 | FA 32 | UT 16 FA 32 | UT 16 | UT 43 | SOL 27 | UT 34 | FA M | UT 25 FA M | UT 25 | FA 32 | UT 16 | UT 43 | SOL 27 | UT 3%4 (œ ) Quand on connaîtra le mode et l’une des deux toniques, il sera facile de trouver l’autre tonique, et par suite l'armure de chacune des deux clefs. Pour faciliter l'usage de ces deux tableaux, je donnerai ici quelques exemples. Un morceau est sur la clef primitive d'UT 16. On veut le trans- poser en montant de six degrés. On suit dans le premier tableau la ligne horizontale qui com- mence par UT 46 et l’on prend la clef de FA 32 qui, dans cette ligne, est sous le chiffre 6. Les deux points qu’on voit au-dessus du mot FA signifient qu'il faut exécuter à deux octaves au-dessus de ce qu'indique la position de cette clef sur l’échelle générale, figure 2. En partant de la clef de FA 41 on veut transposer en montant de cinq degrés. On suit, dans le premier tableau, la ligne horizontale qui commence par FA 4 , et en s’arrêlant sous le chiffre 5 on trouve la clef transposée SOL27 avec un point au-dessous du mot SOL pour avertir qu'il faut exécuter une octave plus bas. On se sert du second tableau quand la transposition doit se faire en descendant. Ces deux tableaux serviront encore à résoudre le problème suivant : Un morceau est sur une clef donnée ; il provient d’une trans- montant escendant degrés. On demande la cléf primitive. Il est évident qu'il n y.a qu'à considérer la clef donnée comme descendant montant degrés donné. Cela conduira nécessairement à la clef demandée. position qui a été faite en d'un nombre donné de primitive el transposer le morceau en du nombre de (70 ) Tout morceau en mode majeur ou mineur peut être facilement transposé sur une clef sans armure. Il suffit en effet de transposer en ut si le mode est majeur, ou en {a si le mode est mineur. On peut également transposer tout morceau quelconque sur une clef ayant une armure déterminée d'avance. En effet , le mode et l'armure font trouver la tonique et l'on rentre alors dans la règle générale. Si un morceau en mode majeur est transposé en ut dièse , il y aura 7 dièses à la clef. Si le morceau était transposé en ré bémol, il n'y aurait que 5 bémols à la clef. Or, l'intervalle d'ut dièse à ré bémol n’est que de deux commas; l'effet pour l’intonation sera donc à très-peu près le même , et puisque le ton de ré bémol est moins compliqué et d'une plus facile exécution on devra le préférer au ton de ut dièse. Le ton de ré dièse a 9 dièses à la clef; celui de m? bémol n’a que 3 bémols, il devra donc être préféré , car l'intervalle de ré dièse à mi bémol n'est que d’un comma. On voit de même qu'il est plus avantageux de transposer un morceau en /a bémol avec 4 bémols à la clef, que de le transposer en s0/ dièse avec 8 dièses. En trans- posant en /a dièse on aurait 10 dièses à la clef, tandis qu'en transposant en si bémol on n'aurait que 2 bémols. Généralement, quand on a à transposer, dans le mode majeur, sur une tonique diésée qui a plus de 6 dièses à la clef, il est préférable de trans- poser sur la note voisine bémolisée. À l'aide du tableau A le lecteur fera lui-même des remarques analogues pour la transposition cn mode mineur. Dans tous les exemples qui précedent on donnaît la clef du morceau à transposer sur un autre ton et il fallait trouver la clef nouvelle. Cela suppose que le praticien sait lire couramment la musique sur toutes les clefs. Il n’y a guère que les compositeurs, les chefs d'orchestre , les professeurs et les artistes jouant de plu- sieurs instruments qui s’exercent à la lecture rapide sur les8clefs. Le praticien moins studieux qui ne lit couramment que sur la clef (71) de son instrument, n’est pas pour cela privé du plaisir d'exécuter facilement les musiques écrites sur différentes clefs, pourvu qu'elles ne dépassent pas les limites de son instrument. Il lui suffirait en effet de savoir résoudre le problème inverse du précédent , c'est- à-dire de savoir transposer à vue sur sa clef favorite tout morceau écrit sur une clef quelconque. Voici comment il pourra raisonner pour arriver au but. Puisqu'on veut transposer à Vue Sur une clef choisie, sans rien changer à la disposition des notes, il faudra que la tonique à découvrir soit sur la portée de la clef voulue, à la même place que la tonique du morceau sur sa portée. On cherchera donc sur la portée de la clef choisie quelle est la note qui y occupe la même place que la tonique donnée sur la portée du morceau. Cette note sera la tonique nouvelle. I n'y aura plus qu'à armer la clefen conséquence. Voici quelques exemples pris au hasard. Un morceau est en si majeur sur la clef d'UT 25. On veut le transposer à vue sur la clef de FA 41. La tonique si du morceau à transposer es sur le premier espace ; c’est un la qui occupe le premier espace sur la clef de fa choisie. 1 faudra donc faire abstraction de la clef d'ut amsi que de 5 dièses dont elle est armée, et la remplacer mentalement par la clefde FA 41 , armée de 3 dièses. De la 5.° portée on veut descendre à la 1." ; on descendra donc de 4 portées ou de 8 degrés. Donc la tonique nouvelle est à 8 degrés au-dessous de si ; c'est donc un la. Ce morceau en a da ou la sur la clef de FA41 serait en ut ut” ut, FA 32 mi mi mi UT 43 sol sol sol, UT 34 si si sè, UT 25 ré ré ré, UT 16 fa fo" far SOL 27 la Li la, SOL 18 (72 ) Un morceau en mode mineur est sur la clef d'UT 34 La tonique est indifféremment ré, ré*, ré,, sur le 3.° espace. On veut le transposer sur la clef du violoncelle, c'est-à-dire sur la clef de FA 41.Sur le 3.° espace de cette clef est un mi, ou un mi, ou un mi,. Il faut donc faire abstraction de la clef d’ut ainsi que de son armure, et supposer un dièse à la clef de FA 41, si on veut jouer le morceau en mi; 8 dièses si on veut le jouer en mé, ou enfin 6 bémols si on veut le jouer en mi,. En descendant de la quatrième portée à la premiere , on des- cend de 6 degrés: la nouvelle tonique est donc à 6 degrés au- dessous de ré; c’est donc un mi. Un morceau est en ut majeur sur la clef de SOL 27. Une femme veut le chanter sur la clef d'UT 25. L'ut sur la clef de so/ indiquée est sur le 3.° espace, et il ya un fa sur le 3. espace de la clef d'ut choisie. On fera donc abs- traction de la clef de so/ et l’on supposera la clef d'UT 25 armée d'un bémol. Pour descendre de la septième portée à la cinquième , il faut descendre de 4 degrés ; la tonique nouvelle sera donc à 4 degrés au-dessous d'ut, c'est-à-dire qu'elle est un fa. Un morceau en mode mineur est sur la clef de FA 32. La to- nique est la, ou la“, ou Za,. On veut le jouer sur le violon à la clef de SOL 27. Le {a sur la clef de fa indiquée est sur la qua- trième ligne. C’est un ré, ou un ré, ou un ré,, quiest sur la qua- trième ligne de la clef de so/ choisie. On fera donc abstraction de la clef de fa ainsi que de son armure, et l'on supposera une clef de SOL 27 avec un bémol si on veut jouer en ré mineur; avec 6 dièses si on veut jouer en ré’, ou enfin avec 8 bémols si on veut jouer en ré,. De la deuxième portée à la septième il y a 10 degrés. Or, en montant de 10 degrés au-dessus de La, on arrive à la tonique ré. (78) Je vais maintenant aborder la question des notes accidentelles. Par la transposition à vue, on change de clef et d'armure, et par suite les notes du ton primitif changent de nom sans changer de place sur la portée. Si plusieurs notes du ton primitif sont acci- dentellement modifiées , la modification ne peut avoir pour bat et pour effet que d'élever ou d'abaisser d'un demi-ton mineur Îles notes correspondantes du ton nouveau. Quand la note du ton pri- mitif el sa correspondante dans le ton nouveau sont, l'une et l'autre, naturelles , diésées ou bémolisées , le changement exigé par le signe accidentel s'opère sans difficulté : l'accident se trans- met sans modification de la note du ton primitif à la note du ton nouveau. Mais il n’en est pas toujours ainsi et alors on peut hésiter sur l'interprétation à donner au signe accidentel de la note primi- tive et le changement à faire sur la note correspondante du ton nouveau pour opérer sans erreur l'élévation ou l’abaissement d’un demi-lon mineur. Par exemple, une note du ton primitif doit être accidentellement haussée d’un demi-ton mineur : si, dans le ton nouveau et d'après son armure , la note correspondante est diéséc, naturelle ou bé- molisée, il faudra faire de cette note un double-dièse dans le premier cas; un dièse dans le second cas ; un bécarre dans le troisième cas. Si, par éxemple encore, une nole quelconque du ton primitif doit être accidentellement baissée d'un demi-ton mi- neur , et si la note correspondante du ton nouveau est, d'après la nouvelle armure, une note naturelle, diésée ou bémolisée, il faudra dans le premier cas en faire un bémol, dans le second un bécarre et dans le troisième un double-bémol. Ï y a donc des notes du ton primitif qui transmettent purement et simplement leur accident aux notes correspondantes du ton nouveau , et d’autres qui ne les transmettent qu’en les modifiant. Nous allons chercher les moyens de reconnaître les unes et les autres. Nous appellerons notes critiques celles dont les accidents ont besoin d’être interprétés. (74) Soit un morceau en ré majeur à transposer plus haut , en si. Les notes du morceau ne peuvent être que celles de la gamme de ré et les notes du morceau transposé ne peuvent être que celles de la gamme de si. Ce sont ces dernières notes qu'on lira sur la nouvelle clef, et les signes accidentels dont eiles peuvent être affectées sont déjà écrits sur les notes du ton de ré; mais à la clef on trouve trois dièses de plus dans le ton de si que dans le ton de ré. La question est donc de savoir comment on doit interpréter sur les notes du ton nouveau et de la nouvelle clef, les changements accidentels déjà écrits sur les notes du ton et de la clef que l'on abandonne. À cet effet, parcourons ces notes une à une sur le tableau A. La première note ré du ton primitif devient un si sur la nou- velle clef. Si ce ré est accidentellement diésé ou bémolisé, cet accident se transmettra tout simplement à la note s:; on fera donc ici, sans difficulté dans l'exécution, ce qui est indiqué. Même remarque sur le so/ du ton primitif : s’il est marqué accidentelle- lement d'un dièse ou d'un bémol , le signe s'applique à la note mi du nouveau ton. La note f« censée diésée d'après l'armure, devient un ré censé diésé d’après la nouvelle armure. Si ce fa était acci- dentellement marqué d’un bécarre pour détruire l'effet du dièse à l’armure , le signe bécarre s’appliquerait également à la note re correspondante dans le nouveau ton. Ce que nous venons de dire de la note fa qui devient un ré, s'applique à la note ut qui de- vient un /a. Ainsi donc les changements accidentels sur les notes ré, fa, sol, ut°, du ton primitif, s’exéculent, comme ils sont indiqués , sur les notes correspondantes si, ré’, mi, la’, du ton nouveau. La difficulté n'est donc pas là. Maintenant, passons en revue les trois autres notes du ton primitif. Le mi bécarre (naturel) devient un «t dans le ton nouveau , et cet ut est diésé par la nou- velle armure. Si le mi était accidentellement diésé, il faudrait élever d’un demi-ton mineur la note correspondante , il faudrait faire ut double-dièse. Si le mi était accidentellement bémolisé , il (76 ) faudrait abaisser d’un demi-ton mineur la note ut diès corres- pondante : il faudrait supposer un bécarre sur l'ut pour détruire l'effet du dièse de l'armure. On verra de même que si le la du ton primitif était accidentellement marqué d'un dièse ou d'un bémol, il faudrait élever ou abaisser d’un demi-ton mineur la note correspondante, c'est-à-dire qu'il faudrait supposer le fa marqué d'un double-dièse ou d’un bécarre. Même observation pour le si du ton primitif. Ainsi done, les signes accidentels sur les notes ré, fa, sol et ut: non critiques du ton primilil se transmettent sans change- ments sur les notes transposées. Les signes accidentele sur les notes mi, lu, si, doivent aussi produire leur effet sur les notes correspondantes du ton nouveau ; mais il faut être attentif pour les bien interpréter : à des dièses sur les notes critiques du ton primitif correspondent des doubles-dièses sur les notes critiques transposées , et à des bémols sur les notes du ton primitif corres- pondent des bécarres sur les notes transposées. La difficulté apparente vient de ce que les trois notes mi, la, si, bécarres dans le ton primitif, prennent un dièse en passant dans le ton nouveau, où il y a par conséquent #roës dièses de plus que dans le ton primitif. Trois est donc la différence des signes semblables aux clefs des deux tons. Remarquons que : 1.0 Les notes ré, fa, sol, ut, du ton primitif sont les 7 — 3 ou 4 premières notes de la série des dièses. 2,0 Leurs correspondantes si, ré, mi, la, dans le ton nouveau , sont les 7 — 3 ou 4 premières notes de la série des bémols. 93.0 Les trois notes critiques mi, la, si, du ton primitif sont les trois premières notes de la série des bémols. 4.9 Enfin, les trois notes critiques fa, ut, sol du ton nouveau sont les #rois premières notes de la série des dièses. ‘Je le répète : Le ton primitif ré a deux dièses à la clef; le ton nouveau si en a cinq, la différence est trois. D'oùl suit que pour (76) l'exemple choisi la différence entre les nombres des signes sem- blables des deux clefs est trois ; que dans l'exécution , les notes non critiques du ton primitif transmettent purement et simplement leurs accidents aux notes correspondantes non critiques du ton nouveau et que l'attention doit se porter sur les trois premières notes de la série des bémols prises dans le ton primitif, c'est-à- dire sur les trois premières notes de la série des dièses prises dans le ton nouveau. Ces trois notes critiques de la série des dièses doivent être affectées d'un double-dièse ou d’un bécarre si les trois notes critiques de la série des bémols prises dans le ton pri- mitif sont accidentellement diésées ou bémolisées, Tout cela est long à expliquer et ennuyeux à lire, mais tout cela se voit d’un coup-d’æil jeté surtableau A. Soit à transposer un morceau ex montant du ton primitif de mi, mineur , au ton nouveau de sol. Celles des notes fa, s0!,, ut, du ton primitif qui seraient acciden- tellement modifiées , tfansmettraient sans difficulté leurs modifi- cations aux notes /a, si,, mi, correspondantes du ton de so/. L’at- tention doit se porter seulement sur les quatre notes critiques mi,, la, sà etré, du ton primitif qui deviennent les notes critiques sol, ut, réet fa dans le ton nouveau. Ces quatre notes du ton pri- mitif sont les quatre premières notes de la série des bémols et les notes critiques correspondantes dans le ton nouveau sont les quatre premières notes de la série des dièses. Il y a d’ailleurs quatre unités de différence dans le nombre des bémols aux deux clefs. Si des notes critiques de la série des bémols dans le ton primitif sont accidentellement modifiées, ces modifications de- vront avoir leur effet sur les notes critiques correspondantes de la série des dièses dans le ton nouveau. Si le m?,, par exemple, est accidentellement marqué d'un bécarre ou d’un double-bémol, il faudra élever ou abaisser d’un demi-ton mineur le so corres- pendant , il faudra faire so/* ou s0/,. Même observation pour les (71) autres notes de la série des bémols qui, par leurs accidents, modi- fient les notes critiques correspondantes de la série des dièses. Ce sont les notes de la série des dièses dans le nouveau ton qui sont critiques et doivent attirer l'attention. Si l'on transpose en descendant du ton de ut* mineur au ton de si bécarre, les notes non critiques ré*, mi, sol, la et si du ton primitif transmettent tout simplement leurs signes accidentels aux notes non critiques ut’, ré, fa*, sol et la du ton nouveau. Les deux notes critiques ut, fa, du ton primitif, ou les deux pre- mières de la série des dièses, se transformerent dans les deux prémières notes critiques së, mi de la série des bémols. Le ton pri- mitif a quatre dièses à la clef, le ton nouveau en a deux, la diffé- rence est deux. Sansaller plus loin on voit que si l’on transpose en montant , d'un ton en dièses à un autre ton en dièses, ou d’un ton en bémols à un autre ton en bémols , la différence, moindre que sept, dans le nombre des signes pareils aux deux clefs fait connaître sur combien de notes doit se porter l'attention pour bien transposer dans le cas des notes accidentelles , et que les notes critiques sont les premières de la série des dièses prises dans le ton nouveau. Que si l’on transpose en descendant d’un ton en dièses à un autre ton en dièses , ou d'un ton en bémols à un autre ton en hé- mols , les notes à surveiller , les notes critiques dans le ton nou- veau sont les premières de la série des bémols et leur nombre est égal à la différence des accidents semblables aux deux clefs, cette différence étant moindre que sept. Justifions ces observaticns par quelques nouveaux exemples ; mais abrégeons les explications. On veut transposer en montant de si majeur avec 5 dièses , en sol avec 8 dièses. La différence de 8 à 5 est3 et il y a dans le ton primitif les troës notes critiques si mi la, les 3 premières de la série des bémols , qui deviennent, dans le ton nouveau, les 3 (78) notes critiques s0/, ut, fa, lesquelles sont les trois premières de la série des dièses. Transposons en montant du ton majeur de wf, avec 7 bémols à la clef , au ton de mi, avec 3 bémols à la clef. La différence de 7 à 3est 4 et il ya dans leton primitif les 4 notes critiques ré, mi, la, si, qui sont les premières de la série des bémols et corres- pondent aux 4 notes critiques fa, sol, ut, ré dans le ton nouveau. Ces dernières notes sont les 4 premières de la série des dièses. Transposons en descendant du ton mineur de si,, avec 5 bémols à la clef, au ton de fa, avec {{ bémols à la clef. La différence de 5 à 41 étant 6, il doit y avoir 6 notes critiques, ce sonteneffet, dans le ton primitif , les 6 notes ut, ré, mi, fa, sol, la de la série des dièses, correspondant aux 6 premières notes de la série des bémols dans le ton nouveau. La seule note non critique est le si du ton primitif, ou la première de la série des bémols , corres- pondant, dans le ton nouveau, à la première note fa de la série des dièses. Quand la différence entre les signes semblables aux deux clefs est 7 ou plus grand que 7, toutes les notes sont critiques , il n'y a pas de note dans le ton primitif qui transmette purement et sim- plement son accident à la note correspondante du ton nouveau. Les notes accidentelles peuvent alors faire naître dans le ton nou- veau des doubles et triples dièses , ou des doubles et triples bémols , et ces triples dièses ou ces triples bémols ne sont pas usités. Soit, par exemple, à transposer du ton de re majeur avec 2 dièses au ton de la’, avec 40 dièses. La différence des armures est ici 8, et toutes les notes des deux tons sont critiques. Si la note sè prenait un dièse accidentel il y aurait un fa triple dièse dans le ton nouveau de la*. Remarquons cependant qu'à lexception du si, première note de la série des bémols, prise dans le ton primitif, toutes les notes (7) du ton nouveau n'ont qu'un dièse de plus que leurs correspon- dantes dans le ton primitif, mais que le fa, première note de la série des dièses , a deux dièses de plus que la correspondante sè du ton de ré. À ce titre, la note si est la note critique ou double- ment critique dans le ton primitif et le fa double dièse , la note doublement critique du ton nouveau. Cette circonstance rapproche ce cas de ses analogues précédents et la similitude serait complète s’il n’y avait qu'une unité de différence , au lieu de 8, dans les signes semblables des armures. Or, l’excédant de 40 sur 7 est 5 et la différence de 3 à 2 est 1. Soit encore à transposer du ton de sol majeur, au ton de mi. On verra facilement que les trois premières notes la, si, mi, de la série des bémols sont les trois notes doublement critiques dans le ton primitif de sol, et que les trois notes fa’, sol* elul**, COrrespon- dantes dans le ton nouveau, de mi’, sont les érois premières de la série des dièses et qu’elles sont aussi les trois notes doublement critiques du ton nouveau. Les 11 dièses du ton nouveau se ré- duisent à 4 si on en ôte 7. Or la différence de 4 à { est 3,etily a 3 notes doublement critiques. Les gammes qui ont plus de 7 dièses ou de 7 bémols à la clef ne sont point usitées , ainsi on ne transpose point sur les toniques : soë, rét, la’, mit, si ...... qui ont à la clef 8 9 10 11 12dièses, mais on transpose sur les toniques : las, mis, Sp, Fa, Ut... qui n'ont à la clef que 4 3 2 1 Obémols, etes toniques en bémols ne diffèrent que d’un à deux commas des toniques en dièses qu'elles remplacent. Soit maintenant à transposer en montant du ton de mi, majeur au ton de ré. ‘Il y a trois bémols à la clef dans le ton de mt, , et deux dièses ( 80 ) à la clef dans le ton de ré, Comme ici les signes des armures sont différents , je fais la somme la) de ces signes. Cette somme est cinq , aussi allons nous trouver que pour bien transposer, dans le cas des notes accidentelles , les notes critiques à surveiller dans le {on nouveau sont les céng premières de sa série des dièses , correspondantes aux cing premières de la série des bémols dans le ton primitif. Les notes fa, ut, du ton primitif transmettent purement et simplement leur signe accidentel aux notes mi, si, du ton nou- veau. Les cinq premières notes de la série des bémols, savoir : mi, sol, la, si, ré, prises dans le {on primitif transmettent aussi leurs modifications aux cinq premières notes de la série des dièses, prises dans le ton nouveau; mais il faut convenablement interprêter et exécuter cette transmission. Si, par exemple, le si est marqué d'un bécarre qui détruit l'effet du bémol à Ja clef, il faudra élever d'un demi-ton mineur le /a correspondant, il faudra faire un la dièse. Si le ré du ton primitif est accidentellement diésé ou bémolisé, l’ut dièse du ton nouveau deviendra ut double dièse ou ut bécarre. En raisonnant de la même manière pour transposer en descen- dant du ton de ré majeur au ton de m2,, on verra que les cing notes critiques à surveiller dans le ton nouveau, sont les cin premières de la série des bémols, ces cing notes provenant des cinq premières de la série des dièses prises dans le ton primitif. Les raisonnements et les conséquences restent les mêmes pour tous les cas où l'on transpose d’un ton en bémols à un ton en dièses, ou d’un ton en dièses à un ton en bémols, pourvu que la somme des accidents dissemblables aux clefs des deux tons soit au-dessous de 7. (a) Ce serait encore la différence si l’on considérait, ainsi qu’on le peut , les bémuls comme des dièses négatifs. Cela serait même très avantageux dans plusieurs circonslances importantes dont je n'ai pas à m’oecuper ici. (81) Transposons ex montant du ton mineur de {4 au ton de {a dièse. Il n'y a pas de dièses, il y a zéro dièse, au ton primitif, etil yena 7 au ton nouveau. La différence est 7, aussi les notes critiques du ton nouveau sont-elles au nombre de 7. Les 7 notes du ton primitif sont les 7 premières notes de la série des bémols, et les 7 notes critiques du ton nouveau sont les 7 premières de la série des dièses. Si donc des notes naturelles du ton primitif sont accidentellement marquées d’un dièse ou d’un bémol, les notes critiques correspondantes dans le ton nouveau seront censées mar- quées d'un double dièse ou d'un bécarre. Transposons ex descendant du ton d'ut majeur, au ton de wt,. Il y a zéro bémols au ton d’ut, il y en a 7 au ton de wf,. La dif- férence est 7, et il y a7 notes critiques au ton nouveau. Si donc des notes naturelles du ton primitif sont accidentellement affectées d'un dièse ou d'un bémol, les notes critiques correspondantes dans le ton nouveau seront censées marquées d’un bécarre ou d'un double bémol. Transposons en montant du ton de ré, majeur, avec 5 bémols, au ton de sè avec 5 dièses. Aucune note du ton primitif ne peut transmettre son signe accidentel à la note correspondante dans le ton nouveau de si. Toutes les notes sont critiques; mais évidemment les notes m1, , la, si sont doublement critiques. Elles sont les éroës premières de la série des bémols et elles correspondent aux trois notes ut“, fa , sol, du ton nouveau, notes qui sont doublement critiques et les trois premières de la série des dièses. Si la note ma, était accidentellement affectée d’un bécarre ou d’un double bémol, la note «t* correspondante dans le ton nouveau prendrait un double dièse ou un bémol. Si la note ut naturelle prenait accidentellement un dièse ou un bémol, la note correspondante Za* deviendrait un {a double dièse ou un la bécarre. (82) Si la note a, est accidentellement marquée d’un bécarre ou d’un double bémol, la note correspondante si du ton nouveau doit être diésée ou bémolisée , etc. Il y a 7 notes simplement critiques et 3 doublement critiques , ce qui fait 10, égale à la somme des signes contraires des armures. De 10 ôtant 7 il reste 3, nombre égal à celui des notes double- ment critiques. Je vais résumer les observations faites sur les exemples qui précèdent, ou à faire sur d’autres exemples, mais auparavant il est nécessaire de convenir d’un moyen d’abréger le discours et de le rendre en même temps moins obscur. Je représenterai par l'initiale D la différence entre le nombre des dièses à l’un des deux tons et le nombre des dièses à l’autre ton. Si les deux tons sont par bémols, D sera encore la différence des bémols aux deux clefs. Si les deux tons, le primitif et le nou- veau, sont Jun par dièses et l’autre par bémols, je représenterai par l'initiale S la somme des signes aux deux clefs. D ou S est aussi le nombre des notes critiques. Quand D ou $ passe 7, toutes les notes des deux tons sont critiques, et l'excès de D ou S sur 7 fait connaître le nombre des notes doublement critiques. D n'est pas plutôt un nombre qu’un autre ; il en est de même de S, c’est chaque exemple particulier qui fixe le nombre que D ou que S représente. Quand on transpose en montant d'un {on par dièses à un autre ion par dièses , les notes critiques , dans le ton nouveau , sont les D premières notes de la série des dièses et elles proviennent des D premières notes de la série des bémols prises dans le ton primitif. Si plusieurs de ces dernières notes sont accidentellement marquées d’un dièse, les notes critiques correspondantes dans le ton nou- veau font naître des doubles dièses. Les bémols font naître des bécarres sur les notes critiques du ton nouveau. { 83) Les accidents sur les autres notes du ton primitif se trans- meltent sans modification aux notes non critiques du ton nou- veau. — Je ne répéterai plus cette observation qui s'applique à tous les cas. Quand on transpose en montant d’un ton par bémols à un autre ton par bémols , les notes critiques dans le ton nouveau sont les D premières notes de la série des dièses, provenant des D premières notes de la série des bémols, prises dans le ton primitif. Si plusieurs de ces dernières notes sont accidentellement marquées d’un bécarre ou d’un double bémol, les notes critiques correspon- dantes du ton nouveau devront être diésées ou bémolisées. Quand on transpose ex montant d’un ton par bémols à un ton par dièses, les notes critiques dans le nouveau ton sont les S premières notes de la série des dièses, provenant des S premières notes de la série des bémols, prises dans le ton primitif. Si plu- sieurs de ces dernières notes sont accidentellement marquées d’un dièse, les notes critiques correspondantes dans le nouveau ton prendront un douhle dièse. Si d’autres sont marquées d'un hécarre, les notes critiques correspondantes prendront un dièse ; si d'autres enfin sont marquées d'un bémol, les notes critiques ‘ correspondantes prendront un bécarre. Quand on transpose en descendant d’un ton par dièses à un autre ton par dièses, les notes critiques dans le nouveau ton sont les D premières notes de la série des bémols, et elles proviennent des D premières notes de la série des dièses prises dans le ton pri- mitif Si plusieurs de ces dernières notes sont accidentellement affectées d’un double dièse ou d’un bécarre, les notes critiques correspondantes dans le ton nouveau doivent prendre un dièse on un bémol. Quand on transpose en descendant d’un ton par bémols à un (S4) ton par bémols, les notes critiques sont les D premières notes de Ja série des bémols provenant des D premières notes de la série des dièses du ton primitif. Si plusieurs de ces dernières notes sont accidentellement diésées ou bémolisées, les notes cri- tiques correspondantes dans le ton nouveau prendront un bécarre ou un double bémol. Quand on transpose en descendant d’un ton par dièses à un ton par bémols, les notes critiques dans le ton nouveau sont les S premières notes de la série des bémols et elles proviennent des S premières notes de la série des dièses prises dans le ton primitif. Si plusieurs de ces dernières notes sont accidentellement affectées d’un double dièse , les notes critiques correspondantes prendront un dièse. Si d’autres sont marquées d'un bécarre, les notes cri- tiques correspondantes prendront un bémol. Enfin, si d’autres notes sont marquées d’un bémol, les notes critiques correspon- dantes prendront un double bémol. TRANSPOSITION ÉCRITE. Pour effectuer la transposition écrite , on déplace les notes en copiant le morceau. Ce que nous avons dit des notes accidentelles dans la transpo- sition à vue, s'applique, quand on change de ton, aux notes accidentelles, dans la transposition écrite. Néanmoins, on ne suppose plus, mais on écrit devant les notes critiques du ton nouveau le signe bécarre , dièse ou bémol exigé par la transposi- tion. On ne suppose plus la clef et l’armure nouvelles, on les écrit. En conséquence, et pour ne pas nous répéter sans utilité, nous nous bornerons à parcourir brièvement quelques exemples de transposition écrite sans nous préoccuper des notes accidentelles suffisamment étudiées dans ce qui précède. ( 85 ) Nous distinguerons deux cas. Dans le premier, on conserve la clef: dans le second on change de clef. Un morceau est en mt majeur sur une clef quelconque armée de quatre dièses. On veut l'écrire une tierce mineure plus haut, en sol, sans changer de clef. On montera toutes les notes de deux degrés et l’on mettra à la clef un dièse sur le fa. Les trois autres dièses du ton primitif dis- paraissent. Un morceau est en ré majeur; on veut l'écrire en ré, un demi- ton mineur plus bas. Le ré naturel du ton primitif et le ré bémol du ton nouveau occupent la même place sur la portée ; il y aura donc tout simple- ment à remplacer les deux dièses à la clef du ton de ré par les cinq bémols du ton de ré bémol. Un morceau est en si bémol mineur, avec cinq bémols à la clef; on veut l'écrire en so/, à une tierce majeure plus bas. Il faudra déplacer les notes, les descendre de deux degrés et mettre deux bémols seulement à la clef. Si l’on veut transposer le même morceau à une tierce mineure plus haut, en ré, il faut monter toutes les notes de deux degrés et ne laisser qu’un bémol à la clef. Un morceau est en mi, majeur. On veut le transposer en là , à une quarte plus haut On montera toutes les notes de trois degrés et l’on méttra trois dièses à la clef, Les trois bémiols du ton primitif disparaissent. Un morceau est en fa dièse mineur. On veut l'écrire en ut. On descendra toutes les notes de trois degrés et l’on mettra trois bémols à la clef. ( 86; En général, pour le premier cas, voyez de combien de degrés il faut monter ou descendre sur la portée pour aller de la tonique primitive à la tonique nouvelle. En copiant le morceau sur une portée vide, effectuez ce déplacement sur toutes les notes et mettez à la clef conservée les dièses ou les bémols du nouveau ton. On donne la tonique et la clef d’un morceau qu'il faut trans- poser à une octave plus haut, ou à une octave plus bas. , Pour ce cas, l’armure se conserve parce que le ton ne change pas pour être monté ou descendu d'une octave. Par suite, les notes transposées conservent leurs noms et leurs signes acci- dentels. Il est évident qu'il suffit de déplacer de sept degrés sur la portée toutes les notes du morceau. Un inconvénient assez fâcheux peut résulter de cette opération, c’est que la portée reste vide d'un eôté et que l’autre côté se charge de lignes supplémentaires et de notes. On peut obtenir le résultat en ne déplaçant les notes que d’un seul degré, mais en changeant de clef. Pour arriver dans tous les cas à la connaissance de cette clef, nous répéterons ici une remarque déjà faite sur la figure 2, savoir : que les portées montent et descendent de deux en deux degrés. Il suit de là qu’en augmentant ou en diminuant de trois unités le numéro d'une portée , on a le numéro d'une portée plus élevée ou plus abaissée de six degrés. De là résulte la règle sui- vante pour transposer d’une octave en changeant de clef sans changer d’armure. Si la transposition doit se faire à l’octave aiguë, montez réel- lement toutes les notes d’un degré sur la portée, et sur cette portée, dont vous connaissez le numéro, mettez la clef de la portée dont le numéro est plus élevé de trois unités. Vous aurez fait ainsi deux opérations successives qui reviennent ensemble à élever sur la portée toutes les notes de sept degrés. Si la transposition doit se faire sur l’octave inférieure, on des- Le dns se ee te ee ee de (87 ) cend d’abord et réellement d’un degré toutes les notes sur la portée dont le numéro est connu, ensuite on descend fictive- ment les notes de six degrés en prenant la clef correspondante à la troisième portée au-dessous. Voici quelques exemples : Un morceau est écrit en mode majeur ou mineur sur une toni- que quelconque et sur la clef d'UT 34. On veut le transposer à une octave au-dessus. Il faut aller de la quatrième portée à la septième et y écrire le morceau en montant toutes les notes d’un degré. La nouvelle clef sera donc celle de SOL 27. On pourrait prendre la huitième portée, celle de SOL 18, mais comme cette portée est plus élevée de deux degrés que la septième , il faudrait, par compensation, y descendre toutes les notes d'un degré. On pourrait prendre la sixième portée, celle d'UT 16, mais comme cette portée est de deux degrés au-dessous de la septième, il faudrait , par compensation, y monter toutes les notes de trois degrés. Si le morceau devait, au contraire, être transposé à l'octave inférieure , on irait de la quatrième portée à la première sur la- quelle on écrirait les notes en les descendant d’un degré. On pourrait prendre la deuxième portée, celle de FA 32, maisil faudrait y descendre toutes les notes de trois degrés. Un morceau en mode majeur ou mineur est écrit sur une tonique quelconque et sur la clef de SOL 27. On veut le transposer à l'oc- tave supérieure. Il faut donc aller de la septième portée à la dixième. Si cette dixième portée existait, elle reproduirait la troisième portée, d’après l'observation faite page 10. On prendra donc la troisième portée, celle d'UT 43, et on y élèvera toutes les notes d’un degré, (88 ) et comme alors on aura transposé à l'octave inférieure, il faudra faire toutes les notes plus aiguës de deux octaves. Ce résultat prouve que la transposition écrite demandée est impossible. C'est ce qui arrivera quand, pour transposer d’une octave, on sera conduit à une portée supérieure à la huitième ou inférieure à la première. Tout morceau écrit sur la clef d'UT 34 ou sur la clef d'UT 25 peut être transposé à l’octave supérieure et à l’octave inférieure, et l'on trouvera, pour les deux cas, au moins deux clefs qui résolveront le problème. Un morceau écrit sur une portée moins élevée que la qua- trième peut être transposé à l’octave supérieure et non à l’octave inférieure. Un morceau écrit sur une porté plus élevée que la cinquième peut être transposé à l’octave inférieure et non à l'octave supérieure. Un morceau écrit sur la clef de FA 41 peut être transposé à la double octave supérieure. Il suffit pour cela de substituer la clef de SOL 18 à la clef de FA 41. Réciproquement un morceau écrit sur la clef de SOL 18 peut être transposé à la double octave inférieure en substituant la clef de FA 41 à la clef de SOL 18 Ce sont les seuls cas possibles de transposition à deux octaves. Si l’on veut transposer d'une sixte en montant ou en des- cendant, on montera ou l’on descendra toutes les notes d’un degré sur la portée d'un numéro plus élevé ou plus abaissé de deux unités, si cette portée est l'une des huit de la portée générale figure 2. Si l’on veut transposer d'une quarte en montant ou en descendant, on montera ou l’on descendra les notes d’un degré sur la première portée au-dessus ou en-dessous de celle du morceau. On met à la nouvelle clef l'armure du ton nouveau. (89) En consultant toujours la figure 2, on découvrira facilement la marche à suivre pour transposer sur une clef choisie un mor- ceau écrit sur une clef quelconque. Soit à transposer sur/la clef de FA 41 un morceau écrit sur la clef d'UT 34. Le fa du morceau est placé sur le quatrième espace; en le descendant d’un degré il se trouvera sur la quatrième ligne comme le fa de la clef choisie. Il faut donc tout simplement des- cendre d'un degré toutes les notes , ne rien changer à l’armureni aux signes accidentels et substituer la clef de FA 41 à la clef d'UT 34. Soit à transposer le même morceau sur la clef de FA 32. On voit qu’il suffit de descendre toutes les notes de trois degrés, parce que le fa du quatrième espace se trouvera ainsi sur la troi- sième ligne où se trouve le fa de la clef choisie. Si on voulait transposer le même morceau sur la clef d'UT 43, on remarquerait que l’ut du morceau se trouve sur la troisième ligne et qu'en le montant de deux degrés, ainsi que toutes les notes, il se trouvera sur la quatrième ligne, comme l’ut de la clef voulue. Si la clef choisie était celle d'UT 95, il faudrait descendre loutes les notes de deux degrés. Si la clef choisie était celle d'UT 16, il faudrait descendre toutes les notes de quatre degrés. Si l’on choisit la clef de SOL 27 , on remarquera que le so/ du morceau est sur le premier espace et qu'il suffit de monter toutes les notes d’un degré pour que le s0/ se trouve sur la seconde ligne, comme celui de la clef voulue. Enfin , en descendant toutes les notes d’un degré on aura trans- posé le morceau sur la clef de SOL 18. Voici donc la règle à suivre pour ce cas de transposition écrite : Voyez où est sur la portée du morceau la note qui porte le nom de la clef sur laquelle vous voulez transposer; comptez de ( 90 combien de degrés il faut déplacer cette note en montant ou en descendant pour qu’elle aille se placer sur la ligne de la clef choisie. Copiez le morceau en opérant ce déplacement sur toutes les notes. A la clef du morceau il faut substituer la clef voulue sans rien changer à l’armure ni aux signes accidentels. Il ne reste plus qu'un cas à examiner, c’est celui ou l’on vou- drait transposer le morceau sur une clef choisie et sur un ton nouveau. Ce cas se ramène facilement au précédent. En effet, si pour opérer le changement de clef, il faut, par exemple, mon- ter les notes de trois degrés et s’il faut les descendre de deux de- grés pour opérer le changement de ton il suffira de monter toutes les notes d’un degré, et de substituer la clef choisie et l'armure du nouveau ton, à la clef et à l’armure du morceau. Par le premier cas de la transposition écrite , la portée et la clef restent fixes ; les notes se meuvent, elles sont transportées sur Jeur échelle fixe à un ou plusieurs degrés plus haut ou plus bas. Par Ja transposition à vue, ce sont les notes qui restent fixes et c’est l'échelle qui monte ou descend de plusieurs degrés en gagnant d'un côté les échelons qu’elle perd de l’autre; c'est enfin une nouvelle échelle qui vient se placer sur les notes en repos , et cette échelle apporte sa clef avecelle. Fig 1. 1706, 66 170,66 [TU Oo Fig 2 Eg | 1e [C} ut“, ré’ mi’. far si* mie la ré*e sol: sol“ ul** fa: la* TE 12 dièses. 11 10 6 dièses. 5 4 3 Slype si mi sie mi la ré* so fa® si ut NEUR. ü s 9 8 ut ré fa: sol‘? so Ut mis, LS JAN EE ré" mie sol la ut ré? fa. sol IR ul mi, fa. la sl ré Tu sol, la ut ré fac sol, si, ul mi, fa lake Si ré Mi sohe la ut, re, fa, sol, Sie Ut, 1üiÿ ÿ e Fa, fa mis aie rè, sol, ut, fa, Siiue LU lan rép, sols, ut sol, ut fas® ut ré le re sol « ut, fa, Siype Mie AJEUR. 16 4 15 F ré”. mi. fa’ sol*” Ja” site ul réf mi fas® sol la” sr ut ré? mi. fa sol la si ut ré mi fa® so“ la si uts re mi fa, sol Ja si ut réc mi fa sol la si, ut ré mi, fa sol. 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ET) COS OT COS TTC CSSS OS CE 11 CON CONS LYON CUT) CCSN CUS 10 fat soi" la sit ut réf "mis 9 se ut rà mis, fa sol las 8 mi, fa”, sol Ja si) ul ré 7 SEL ue ré mil fa sol 6 dièses. rés mi fa so La si ma 5 so Ja si UtUTÉS mia 4 ut ré mi fa, so“ la Si 3 fa, sol la Sie ut ré mi, 2 si ut ré mi fa sol dla 1 M a Usa USE ut ré ( la si ut ré mi fa sol. 1 bémol. ré mi, fa sol Ja sh ut 2 sole Jak sh uk ré mi, f& 3 ut ré mis fa sol La, si 4 fa sol, La si ut r@ mi, 5 sh ut, ré mi fa sok la, 6 mi ap sol Ja, sh ut, ré (74 Te Sijse Ut ré. mi, fap solfe s ré mi, M$ sol, la bp ul, El sol Ja, sis ut ré, ip Maj 10 ut, rép mMib fa, soft asp Sispe 11 fa, sol, asp ip ut téh mispe 12 bémols. S EN MODES : | UO[9S SIN9IEA Sa2u949JJIO 1889 juouresa duo) aI UO[9S SIN A SOOUOI9JJICE 91389910, 2P quouvioduey o] RER ON: SODEXA SANTE A UO(9S SINOIEA Sa0019JJI 3°,29 12,77 22,95 27,44 35,93 | 45,41 53,80 0c,00 8,48 17,96 23,16 32,64 11,12 50,60 516,51 5,20 13,68 18,87 28,35 37,83 46,32 (91) EXPÉRIENCES ET OBSERVATIONS SUR LES CORDES DES INSTRUMENTS À ARCHET. Par M, DELEZENNE, Membre résidant. Les grosses cordes conviennent à la production des sons graves, les sons aigus qu'on veut en tirer en les tendant ou en les raccour- cissant , sont trop sourds et trop faibles. Les cordes minces à leur tour conviennent aux sons aigus ; les sons graves qu'on en tire en les relàchant ou en les allongeant, manquent d'intensité. Cela explique les différences qu'on remarque dans la grosseur des cordes d'un instrument. Une longue pratique a conduit peu à peu à fixer pour chaque corde des limites de grosseur hors desquelles le choix serait mauvais et ces limites sont même assez rapprochées. Il en résulte que les diamètres des cordes homogènes d'un in- strument ont des rapports à peu près fixes dont on ne s’écarte pas sans inconvénient. Le coup-d’æil et une longue pratique semblent être les seuls guides dans le choix des cordes à assortir pour un instrument donné. A la vérité, les luthiers se servent d’un calibre par lequel ils peuvent juger qu’une corde est plus grosse qu'une autre; mais ce calibre de bas prix est si mal exécuté qu'il ne mesure rien. Alors même qu'il mesurerait les grosseurs avec pré- cision , il resterait à savoir quel doit être leur rapport. A cet égard, aucun principe n’a été posé que je sache, et tout reste livré aux grossiers à-peu-près de la routine Ï doit y avoir cependant un principe servant de base à la déter- mination de ces rapports. Selon moi, ce principe est légalité de pression de toutes les cordes sur le chevalet, afin que la résul- tante passe par le plan de symétrie de l’instrument. Si la table était sans barre et l'instrument sans âme, le principe serait incontes table : la symétrie l’exigerait. Par leur position, celte barre et (92) cette âme ne me paraissent pas défavorables au principe, du moins je ne vois pas en quoi elles lui seraient contraires. La symétrie exige que les cordes fassent des angles égaux avec le chevalet. Or, cette condition est remplie dans tout instrument soigneusement monté. En effet, la courbure du chevalet est imitée par celle du bord du cordier, car lorsqu'on vise le long de celui-ci; la projection de son sillet trace près de l’arête du chevalet une courbe qui suit exactement cette arête. Quand le chevalet est un peu haut, ce qui augmente sa pression sur la table, c’est que celle- ci exige plus de force pour vibrer convenablement. Une table vibrant facilement peut recevoir un chevalet moins haut, ce qui la fatigue moins ; mais dans tous les cas, il convient que la projection dont j'ai parlé suive l’arête du chevalet. Par l’accomplissement de cette condition, toutes les cordes font , comme je l'ai dit, des angles égaux avec le chevalet. Maintenant, pour que, sous cette condition , les cordes soient également tendues et pressent également sur le chevalet , il faut que les diamètres soient en raison inverse des nombres de vibration. Ainsi, en appelant 1 le diamètre d’un mi de violon, le diamètre du Za, à la quinte au-dessous , doit être ? = 1,5; celui du ré doit être (£) — 2,25. Si le sol était en boyau de même densité, son diamètre serait (3) — 3,375. Mais à cette épaisseur, et en raison de son peu de longueur, un so/ en boyau rend des sons un peu sourds : une corde en boyau de cette grosseur ne peut rendre des sons francs et intenses que si elle est plus longue. C’est pour cela que le s0/ d’un violon est plus mince que le ré; mais on le file pour augmenter la densité et diminuer le nombre des vibrations sous une tension égale. Les rapports d'épaisseur varient dans la pratique ; mais s'ac- cordent-ils, en moyenne, avec ceux que je viens de déterminer d'après le principe que j'ai posé ? Pour avoir une réponse à cette question , j'ai demandé à M. Lapaix, l’habile et consciencieux luthier bien connu de la Société, dix assortiments divers de cordes (93 ) pour le violon. Je l’ai prié de choisir les cordes de chaque assor- timent comme il le ferait pour l'amateur le plus difficile. J'ai mesuré les diamètres. Il a fallu multiplier ces mesures sur chaque corde pour avoir une moyenne, parce que le diamètre varie sensi- blement d’un point à un autre. Pour les dix assortiments, le rapport moyen du {a au mi est 1,4409 qui diffère bien peu de 1,5 qu'exige le principe posé. Celui des dix rapports qui s'éloigne le plus en excès de 1,5 est 1,708: celui qui s’en éloigne le plus en sens contraire est 1,231. Ces deux nombres 1,708 et 1,231 disent assez qu'un luthier n’est pas sûr de fournir deux fois le même assortiment. Le rapport moyen du ré au {a est 1,362. Le plus grand est 1,600 et le plus petit 1,151. Ces nombres confirment l'observation précédente. Six assortiments pour alto m'ont donné 1,352 au lieu de 1,5 pour le rapport du ré au /a. Quatre assortiments pour violoncelle m'ont donné une moyenne de 1,366 pour le rapport du ré au /a. Enfin, quatre assortiments pour contre-basse à trois cordes m'ont donné 1,294, aussi pour le rapport du ré au /a. Toutes ces moyennes sont plus petites que celle exigée par le principe. Les différences peuvent s'expliquer en supposant que la densité des cordes en boyau croît à mesure que le diamètre aug- mente. Les grosses cordes paraissent en effet plus serrées , plus compactes, plus denses que les minces faites-avec les boyaux d’animaux.plus jeunes, mais cette apparence peut être trompeuse ; c’est à l'expérience directe à décider cette question. Ce qui m'a engagé à faire le travail dont je viens d'indiquer les détails, c'est le désir d'ajouter s’il se peut un léger perfection- nement à un violon excellent que M. Lapaix vient de terminer (15 juillet). Ce violon est supérieur à ceux que divers amateurs possèdent ou ont eu l'occasion d’entendre. Quand il est joué, il vibre très-fort par la table, le fond , les éclisses , le manche et.Ja (9%) tête. Il vibre et sonne quand on chante ou seulement quand on parle près de lui. J'ai proposé à M. Lapaix d'y mettre des cordes choisies ayant les épaisseurs croissantes comme les nombres 4,5et(5). J'ai mesuré les épaisseurs , mais n'ayant pas ren- contré juste ce qu'il nous fallait, nous avons dû nous contenter d’un à-peu-près dans les proportions à partir du mi qui a été choisi un peu fin. Voici en millimètres les épaisseurs auxquelles il à fallu s'arrêter : mi —= 0,5192 : la = 0,7692 ; ré — 1,1289, ce qui donne l ë = 584 Et 406 mi la Ces cordes produisent un bon effet ; le violon gagne sensiblement en sonorité et surtout en égalité, parce que M. Lapaix ne colle sa table et son fond qu'après s'être assuré qu'ils font entendre le même son et certains sons voulus, quand on les attaque avec l’archet par des points déterminés et symétriquement placés. Un bon violon italien monté avec des cordes pareilles a aussi paru plus égal. Le violon est une frêle machine principalement composée de deux minces planches collées sur des éclisses. On se demande comment un instrument aussi délicat ne se brise pas en mille pièces sous la pression du chevalet et la violente traction des cordes. Ceux qui ont le goût du merveilleux se plaisent à exagérer la force que le violon supporte sans se briser ; ils parlent de 40 , de 50 et même de 60 kilogrammes. J’ai consulté bien des livres pour savoir à quoi m'en tenir de ces vagues appréciations ; mais ma curiosité n’a pu être satisfaite ; le résultat de mes recherches se réduit aux deux citations suivantes : (95) « La tension des cordes d’un violon est de 80 livres , d’après » M. Charles. » {Savart, mémoire sur les instruments à archet.) «On estimait autrefois que, pour tendre une chanterelle à son » ton, il fallait la tirer par une force équivalente à un poids de » 19 livres; la deuxième par le poids de 17 livres, la troisième » par un poids de 15 livres, la quatrième par un poids de 13; en » tout 64 livres. Mais le diapason s'étant élevé , et la grosseur » des cordes s'étant accrue, on.trouve que ce poids n’est pas » moindre de 40 kilogrammes. Plus anciennement il n’était que » de 23 1/2. » (Dict. de technologie, article violon, par Francœur.) Pour arriver au ton voulu , la tension des cordes varie avec la densité et le diamètre , c'est pour cela sans doute que les deux auteurs cités ont donné en nombres ronds le résultat moyen des expériences. On aimerait cependant à avoir les nombres précis pour des cordes connues par leur épaisseur et par leur usage non seulement sur le violon, mais encore sur l’alto , le violoncelle et la contre-basse. On n’a rien que je sache pour ces trois derniers instruments. On n'a pas non plus calculé la pression que les cordes exercent sur la table par l'intermédiaire du chevalet. Ce sont des lacunes regrettables que j'ai voulu combler. Je vais en conséquence exposer brièvement les moyens employés pour arriver au but. Je ne dirai rien des précautions qu'il faut toujours prendre quand on cherche à bien faire ; je dirai seulement que j'ai opéré ‘comme s’il s'agissait d’une affaire importante el sérieuse. Je prends partout le millimètre et le gramme pour unités ; cet avertissement donné une fois pour toutes abrègera les écritures. J'ai fait la pesée des cordes au milligramme , avec une petite balance sensible et par la méthode de Borda. Les grosses pesées sont faites avec des poids en fonte, formant une pyramide par leur superposition. J’estime qu'ils peuvent être en erreur de 3 à 4 grammes sur 15.000. J'ai pris pour l’unité du son le {a du théâtre de Lille. Ce {a (96 ) est de 879,29 oscillations par seconde. Les instruments à archet employés tour-à-tour ont été sans cesse comparés au diapason qui sonne ce la. Ces instruments m'ont été prêtés par M. Lapaix qui m'a aidé avec patience et dévouement. Je prends le diamètre des cordes en dix points à-peu-près éga- lement distants. Le vernier du bel instrument de Fortin dont je me sers étant légèrement fautif, j'ai dû calculer une table de cor- rection. Cela explique les quatre chiffres décimaux de ces mesures, bien que le chiffre des centièmes puisse être en erreur de quelques unités parce que le diamètre d’une corde variant sensiblement d'un point à un autre, la moyenne ne peut être qu'une approximation. Les densités 9 des cordes ont été calculées par la formule D° : > l'3— p' dans laquelle p' estle poids de la corde dont la longueur est /' et le diamètre D. Pour que à soit exprimé en grammes , selon l'usage, il faut que D et /’ soient mesurés en centimètres; mais comme je prends partout le millimètre pour unité, il faut écrire : 5 7 —l'à EST 1000? d'où l’on tire : log. à = 3,1049101 + log. p' — (log. + 2 log. D). C’est la formule dont j'ai fait usage. Je reviendrai plus loin sur ces densités calculées. Le poids P qui tend la corde au ton voulu s'obtient facilement par lefsonomètre et ses accessoires décrits dans ma notice sur la corde vibrante. Ce sont les mêmes procédés, mais l'instrument est placé verticalement. La corde libre, tendue par un poids, vient à peine toucher l’arête du sillet inférieur. Il est facile d'essayer le (97) son avec un curseur ou chevalet mobile (voir la nôtice}. Le plateau où l’on met les poids est une planche carrée soutenue par des cordonnets portant un crochet qu’on passe dans un œillet fait à l'extrémité inférieure de la corde. Ce plateau, que j'ai changé selon les circonstances, est soigneusement pesé avecses agrès. Sur la corde tendue par le poids total P, on marque deux points près des extrémités. Leur distance / est soigneusement mesurée. C’est à ces points qu'on coupe la corde après l'expérience, pour mesurer le poids p’ et le diamètre D. La corde tendue se détorderait si l'on n'empêchait pas le plateau de tourner. L'obstacle qu’on lui oppose est le moindre possible ; mais il doit nuire un peu à l'exactitude de la pesée; l'erreur doit, être très-minime, car lorsque l’on opère sur une bonne corde , un simple changement de quelques grammes dans l’assortiment des poids fait varier sensiblement le son alors que le plateau est chargé de 8 à 10 kilogrammes. i La portion { de la corde qu'il faut amener par le poids P à faire » oscillations par seconde est le diapason des instruments de M. Lapaix, c’est-à-dire que : 1 — 326 pour le violon; 346 pour l’alto ; 687 pour le violoncelle ; 1113,5 pour la contrebasse à trois cordes. Lorsque / — 1113,5 c’est-à-dire lorsqu'on opère sur une corde de contrebasse , mon sonomètre ne peut plus servir puisque la distance des deux sillets n’est que de 1000. D'ailleurs il se défor- merait sous l'énorme poids nécessaire. J'ai tourné la difficulté en opérant sur la longueur 1%, ce qui n’exige que le quart du poids P ; mais on s'expose ainsi à l’erreur due à la grosseur de la corde ( notice citée). On a done un poids P un peu trop faible en quadruplant le poids observé , c’est ce que l'expérience justifie , 7 (98) comme où le verra plus loin. En opérant de cette manière il faut faire usage de l’archet qui ne donne même qu'un son difficilement appréciable. J'ai aussi pendu la grosse corde à un clou près duquel est un sillet fixe : je la pince entre les doigts à la longueur { — 1113,5 et Je tâche de la faire vibrer avec l'archet. Le son dans l'air libre, sans moyen de renforcement, est encore plus douteux et plus faible. On peut très-facilement se tremper d’une octave. Il est assez difficile d'opérer ainsi sans agir involontairement pour tendre ou détendre quelque peu la corde, ce qui exige des chan- gements dans l'assortiment des poids quand on veut le bien connaître, On réussit néanmoins avec de l'attention et de la patience. Les poids obtenus par ces expériences sont insérés à la colonne P du tableau ci-joint. Je pouvais me dispenser de faire ces expériences , car il suffit de prendre le poids p’ d'une longueur !' de la corde pour calculer le poids P, cherché, au moyen de la formule : { Voir la notice citée.) : nul g polei 21° dans laquelle / est le diapason ou la distance du sillet au chevalet du violon, de l’alto, du violoncelle ou de la contrebasse , p étant le poids pour la longueur /. et comme p —- cr , Ja formule devient : pur : l'g. % Pour le {a du violon où a n — 879,29 avec / — 326. On prend (99) n — 879,29 x = s'il s’agit du ré, ou n — 879,29 x ? x ? s’il s’agit du so/ etc. ù Supposons qu'il s'agisse de la quatrième corde ut du violon- celle, alors n — 879,29 x? x2x?x! et { — 687. Mettant ces valeurs, et celle 9808,8 de g, dans la formule, on trouvera log. P, — 5,9119542 + log. p' — log. /’. C’est par de semblables formules que j'ai calculé les nombres de la colonne P, du tableau. On doits’attendre à des différences notables entre lestensionsP, y calculées et les tensions P observées, car les cordes en boyau ont de nombreux défauts dont le calcul ne peut pas tenir compte. Elles n'ont pas, comme les cordes métalliques, un diamètre, une densité el une homogénéité uniformes. Quand on fait vibrer une corde fausse devant une surface noire, on voit l’image d’une corde et parfois l’image de deux, de trois cordes qui paraissent presque fixes dans l'intérieur de l'image générale. Assez souvent une corde est fausse dans l’une de ses moitiés et bonne dans l’autre. Les cordes d’un diamètre très inégal sont toujours fausses. Quand on opère sur une corde reconnue bonne par l’uniformité approchée de son diamètre et la régularité de l’image pendant qu'elle vibre, il suffit de changer le poids P de quelques grammes pour saisir sur-le-champ un changement sensible sur la hauteur du son, alors même que le plateau est chargé de plus de dix kilo- grammes. Quand on opère au contraire sur une corde fausse . il faut tâtonner longtemps avant de trouver le poids P sur lequel on peut conserver des doutes parce qu'il en reste sur le son qui manque de franchise. Pour apprécier l'importance des différences entre les valeurs de P, et deP, je désignerai par », le son pour lequel on aurait : _pur PE pe ? On a d’ailleurs, En divisant membre à membre il vient : CHERS æ étant en commas l'intervalle entre les sons, correspondant à FObtpe Passant aux logarithmes il vient : mublos Pi tion; 001079 C’est par cette formule que j'ai caleulé les nombres insérés à la colonne æ du tableau. Je vais maintenant passer en revue.les diverses colonnes de ce tableau. La première colonne s'explique d'elle-même, Dans la seconde colonne j'indique par un numéro la grosseur du fil de cuivre rouge argenté qui recouvre plusieurs cordes. En multipliant ce numéro par 0,0256,ona, en millimètres, la grosseur du.fil. (Voir la page 12 de la notice sur la corde vibrante.) Colonne P. On voit qu'en général la chanterelle des instruments à archet est plus tendue que la seconde , celle-ci plus tendue que la troisième, et cette dernière plus que la quatrième. Le violon- celle parait faire exception ; c’est sans doute accidentellement que la quatrième est plus tendue que la troisième et la seconde. Ainsi (101) donc, dans la pratique , on s’écarte du principe que j'ai posé, bien qu'on s’en rapproche et qu'on le dépasse même quelquefois, par exception ou accidentellement , ce qui milite en sa faveur. Si les quatre cordes d’un violon étaient également tendues,, les plus grosses, moins flexibles , opposeraient plus de résistance, les doigts de l'artiste se fatigueraient à les pousser contre la touche et c’est vraisemblablement pour cela qu'on les tend moins que ce qu'exige le principe posé. Cependant , il est facile de concilier le principe avec les exigences de l'artiste. On remarque en effet, dans le tableau , un ré mince tendu par 5209 grammes etunré, épais tendu par 6910. La moyenne de ces deux lensions usitées est de 6059. Que l’on prenne donc 4 cordes tendues chacune par 6 kilogrammes ou 6 4 2, les doigts n’en seront pas fatigués, le principe sera appliqué et le violon aura plus d'égalité. Parmi les cordes variées que j'ai soumises à l'épreuve par les poids, on n’en trouve pas quatre pour violon qui remplissent rigoureusement la condition d'égalité dans la tension. Ici encore j'ai dû me contenter d'un à-peu-près. J'ai pris le mi de 6119, le la de 5944 , le ré de 5729 et le so! de 5729. La différence 390 entre le plus grand et ie plus petit de ces nombres ne correspond, sur les sons, qu'à une différence de 2,65 commas. Ces cordes montées sur le violon de M. Lapaix produisent un très-bon effet. Le violon a plus d'égalité et plus de vigueur qu'avec l'assortiment ordinaire. Le tableau m'a encore offert la combinaison suivante : Le mi de 6119,5; le Za de 6210,6 ; le ré de 6379,5 et le 50/7 de 6329,5. Sauf le so7 qui est un peu gros, mais très-énergique, cette combinaison est fort'boñné. On à chanëé ce $6/ contrée uns0/ ordinaire, celui-ci a paru tomparativément mou et faible. Une très-petite différence dans le diamètre dé deux cordes qu'on veut tendre au même 1ôn én entraîné uñe très-Srande dans les poids. Par exemple ; les deux midé vidlon , 4ù comménéement du tableau , ne different pas d'un dixième de millimètre et cette (102 ) petite différence en entraine une de 2680 grammes dans les poids, ce qui correspond à une différence de 13 commas sur les sons ; c'est à-dire que si le mi le plus fin était tendu par le poids du mi le plus gros, le son monterait d'un ton et demi, il irait au fa double-dièse. Le calibre des luthiers est donc un très-mauvais guide, un guide trompeur dansle choix des cordes à assortir pour monter un instrument. Je l’ai déjà dit, un luthier n'est pas sür de fournir deux fois le même assortiment parce que ni ses yeux ni son calibre ne peuvent apprécier avec assez de süreté les petites différences qui ont une si grande influence sur les résultats , el encore parce que deux cordes peuvent être de mème grosseur sans être de même densité. L'instrument étant monté et accordé on reconnait, en poussant les cordes du bout du doigt, quelle est ceile qui est trop tendue ou qui ne l'est pas assez et on la remplace par une plus mince dans le premier cas, par une plus grosse dans le second cas, sauf à renouveler ce tàtonnement si le changement ne satisfait pas. Si le prinape de l'égalité de tension des cerdes dans les instru- ments à archet était généralement reconnu avantageux , comme il l'est en effet, le calibre n'aurait presque plus d'utilité et les luthiers devraient recourir à la mesure par les poids. L'opération serait plus longue ; mais elle serait facile et les appareils néces- saires seraient bientôt bâclés sans plus de dépense que celle d'une série de poids. Ces poids peuvent même être remplacés par des pierres, des férailles d'un poids connu. La somme des tensions des cordes est de : 23 à 30 kilogrammes pour le violon; 22 à 29 pour l’alto; 43 à 54 pour le violoncelle ; environ 170 pour la contrebasse à 3 cordes. (103) Colonnes P, et æ. Les tensions P, calculées sont en majorité plus petites que les tensions P observées ; mais sur les sons , les intervalles æ sont en majorité au-dessous d'un comma. L'inter- valle est plus grand et en sens contraire pour les cordes de contre- basse. Cela se conçoit : j'opérais sur la moitié de la longueur /, et comme les cordes étaient fort grosses, il fallait, pour les faire monter au ton voulu , un poids P moindre que le quart de celui qui eût été nécessaire si l'on eut opéré sur la longueur totale /. Colonne D. J'ai déjà dit que les nombres de cette colonne n'étaient que des moyennes douteuses de quelques unités sur le chiffre des centièmes. Il y. a une autre cause d'erreur. Mon instru- ment ne me permettait pas de prendre le diamètre pendant que la corde était tendue par le poids P. La tension allonge la corde, surtout si elle est mince , ce qui diminue le diamètre. Quand on ôte le poids , la corde prend du retrait, ce qui augmente un peu le diamètre, et c’est après la tension que j'ai mesuré D. Ces nom- bres D sont donc par celte cause un peu trop grands. L'erreur dans le même sens est beaucoup plus grande pour les cordes filées, car on suppose en mesurant que le boyau est couvert d'un cylin- dre de métal et non d’un fil tourné en hélice. Colonne ». Les diamètres D étant trop grands, par les canses que je viens de signaler, les densités à sont trop petites, et comme les valeurs de D sont incertaines ; celles de 2 doivent être encore plus défectueuses , je n'y ai que peu ou point de confiance, et s’accordassent-elles pour indiquer, comme je l'ai soupçonné , plus de densité pour les grosses cordes , je ne me tiendrais pas pour satisfait. Tout ce qu'on peut conclure de cette colonne c’est que la densité des cordes nues en boyau est d'environ 1,265 par une moyenne entre 26 valeurs incertaines. Le nombre 4,700 évidemment erroné n’a pas été employé. La densité moyennetrop petite des onze cordes filées est 4,075. Il me reste à calculer la pression que la tension des cordes transmet à la table par le chevalet. A cet effet, soient : : ( 104 ) AB (fig. 1) la direction de la corde tendue depuis le chevalet A jusqu'au sillet de la tête ; AE — P la force de tension de cette corde ; AC la direction de la corde tendue depuis le chevalet À jusqu’au sillet du cordier ; AF la force de tension de cette partie de la corde. En achevant le parallélogramme on aura : AD pour la direction du plan moyen du chevalet et pour la poussée du chevalet sur la table. Le triangle EAD donne : Sin. 4 in. b AD pa a+ b) AF —="P - sin. b. sin. b Maintenant, décomposons en D ou en A (fig. 2) la force AD suivant AG et AH, parallèle et perpendiculaire à la table DU. Nommons € l'angle ADU que le plan moyen AD du shevalet fait avec la table DU. On aura alors : sin. c sin. (aæ+b) sin.c H — AD TEE Er Ê A R ki sin. b R L'angle EAF — a + b se mesure facilement avec le goniomètre d'Haïüy. Les angles a et b { fig. 1 ) seraient facilement mesurables avec ce goniomètre si le chevalet n'avait pas une épaisseur décroissante depuis la base jusqu'à l’arête supérieure. Pour les obtenir, soit KAL (fig. 3) le chevalet. On mesure l'angle EAL — m et l'angle FAK = n. Soit 4 l'angle KAL, on aura a—=œm—+g et b=n—;g parce que le plan moyen AD du chevalet divise l'angle KAL.en deux parties égales. On tire de là g = (m+n) —(a+b); mais j'ai préféré, pour plus d'exactitude, calculer À 4 en mesurant (405 } la hauteur totale.du chevalet, l'épaisseur à la base et l'épaisseur au sommet.et au bord de l’arête. L’angle ADU = 6 = ALU — +9. Pour avoir l'angle cil faut donc mesurer l'angle ALU. A cet effet on coupe dans un carton un peu raide un angle qui approche plus ou moins de ALU. On le présente à cet angle ALU, ce qui montre dans quel sens il faut rogner le carton pour,obtenir l'égalité. On y parvient par quel- ques tâtonnements, et avec un rapporteur ou avec le goniomètre on mesure sur le cartonl'angle ALU: Toutes les données étant ainsi fixées, on peut passer aux appli- cations numériques. Je présenterai comme exemple celle que j'ai faite sur l'excellent violon de M. Lapaix. Les deux angles EAL — m, FAK = n (fig. 3) différaient si peu qu'unmouvemeut presqu'insensible imprimé au chevalet les a rendus égaux , c’est-à-dire que le plan moyen AD du chevalet divise l'angle EAF en:deux partieségales. Ainsim = net.a —b. J'ai trouvé l'angle EAF de 1572 30/, d'où a —b — "80 45’. D'après des mesures exactes pnses sur lechevalet retiré du violon, jai.eu + g = 2° 8', et quelques secondes que je néglige. J'aitrouvé l'angle ALU — 87°, donc e— 870 — 203! — 84057". De ce que a—b, les formules trouvées plus haut se réduisent à : sin. 2 a op cos. cos. a sin.c AF —P; AD —P dr à R ” R ù R c formules dans lesquelles on fera a = 78° 45° et c — 84057". Je prendrai P — 23000 pour la somme des tensions des quatre cordes du violon quandla monture est fine. Il en résulte AD — 8974 et AH — 8939. Pour le cas des cordes plus grosses, je prendrai P — 30000. Il en résulte AD — 11705 et AH — 11660. Aïnsi, quand un violon est monté avec des cordes fines, la { 106) tension totale est d'environ 23 kilogrammes , la pression perpen- diculaire sur la table est de près de 9 kilogrammes. Quand le violon est monté avec de grosses cordes, la tension totale est d'en- viron 30 kilogrammes et la pression sur la table d'environ 11 kilo- grammes et demi. Alto. Les quatre angles EAF mesurés sur un alto, différaient peu les uns des autres. La valeur moyenne est de 1529 17! 30”. Je prendrai a — 76° 9', ce = 85° et P — 23000 pour le cas des cordes fines. Avec ces nombres on trouve : AD — 11011, AH=— 10970. Pour le cas des grosses cordes on a : AD — 13894, AH = 13831. Violoncelle de M, Lapaix. D'après les mesures soigneusement prises sur le chevalet, l'angle g = 2° 15’ 55”. Je prendrai 2016". J'ai trouvé ALU = 89° 45’. Donc ADU — 87° 29’. J'ai mesuré les angles EAL pour les quatre cordes ; ils différaient fort peu L'angle moyen est de 790 15’. Donc a = 79015'— 20 16— 76° 59/. La moyenne entre les angles EAF est 153° 47° — a + b. Ces quatre angles diffèrent très peu. Il suit de ces mesures que l'angle b — 153047! — 760 n0" — 76° 48’. On voit qu'ici encore le plan moyen du chevalet divise l'angle des cordes en deux parties presqu'égales. Dans les formules de la page 16, il faudra faire : a+b= 153 47, b— "T6 48 et . c — 870 29". Je prendrai P = 43000 pour les cas des cordes minces. Au moyen de ces nombres on trouve : AD — 19512 et AH = 19493. Pour le cas des cordes épaisses, je ferai P — 54000. On trouve alors : AD — 24503 et AH = 24479. (407 ) Contrebasse à trois cordes. Les dimensions du chevalet condui- sent ,.à +q — 2%,.42. J'ai trouvé ALU —.9%, : donc ADU.æ 919 48° — c. J'ai trouvé EAL — 76° 34, donc a — 13° 56'.La moyenne des trois angles EAF est de 1420 47 — a + db; donc b — 1420 47! — 730 54 — 680 53. Ainsi, a+b— 14247, b—6G853 et c — 910 18. Avecces angles et P — 170000, on trouve AD — 110223 et AH = 110195. Si l'on fait P — 180000, on trouve : AD — 116706 et AH — 116676. ( 108 | P P, æ D mi de violon, mince. 7190,6 7162,5 0,157 0,6103 la ” 6040,6 G035,4 0,034 0,8231 ré 5209,5 5152,0 U,446 4,0180 so! filé au N°5. 4500,6 45708 —0,628 O0;9103 Sommes. 22,944,3 22,920,7 mi de violon, épais. 9870,6 9734,5 0,558 0,7025 la 7190,6 7810,6 —0,102 0,9641 ré 6910,6 7198,9 —1,645 1,049 sol filé au N° 5. 5350,6 5167,3 1,402 0,9923 Sommes. 29.922,4 29.911,3 la d'alto, mince. 8290,6 8118,4 0,845 0,9026 ré 6110,6 5980,5 0,866 1,1410 sol filé au N°5. 4779,5 4631,1 0,342 0,8513 ut filé au N°8. 3884,5 39501 —0,674 1,1128 Sommes. 23.065,2 22.680,1 la d’allo, épais. 9390,6 8838,4 2,439 0,9795 ré 7443,6 7613,0 —1,450 1,3179 sol filé au N°5. 6670,6 6549,7 0,742 1,0795 ul filé au N°8. 5240,6 5238,2 0,018 1,3690 Sommes. 28.645,4 28.239,2 la de violoncelle, mince. 12.590,6 12.591,6 0,000 1,1436 ré 9639,5 9481,9 0,663 1,5050 sol filé au N.%6. 8541,5 8315,4 1,079 1,2616 ul filé au N.° 18. 12.389,5 11.890,3 1,650 2,0000 Sommes. 43.161,1 42.279,2 la de violoncelle, épais. 17.459,5 16.862,6 1,400 1,3487 ré 13.049,5 12.895,4 0,479 1,7564 sol filé au N.° 6. 10.024,5 9.870,2 0,624 1,4308 ul filé au N.° 13. 13.229,5 13.232,5 —0,006 2,1461 Sommes. 53.763,0 52.860,7 la de contrebasse. 85.318,0 89.042,0 —1,719 3,7770 ré 37.018,0 49.389,00 - 3,508 3,9128 sol vieille corde hors de service. 47.118,5 49.630,80 —2,090 4,1282 Sommes. 169.454,5 179.061,0 mi la la la M % S © = = sol sol ( 109 ) P P, æ D de violon. 6119,5 6113,9 0,004 0,6007 de violon. 5943,5 5851,8 0,627 0,8539 5944,5 5859,7 0,578 0,8718 6004,5 6159,2 —1,024 0,8718 6210,6 5973,1 1,567 0,8645 de violon. 5198,5 5232,5 —0,262 1,1624 de violoncelle. 15.799,51 15,213,1 1,520 1,3077 de violoncelle. 11.479,5 10.948,8 1,904 1,6257 de contrebasse. 63.113,0 G60.068,0 1,981 3,1897 60.522,0 59.508,0 0,680 3,1897 vieille corde hors de service. 50.918,0 59.912,0 —6,540 4,6667 de violon. 5729,5 1,1872 6379,5 1,2641 filé au N.° 4, venant d'un mi fin 3564,5 0,7641 filé au N.° 5, venant d’un La. 6329,5 1.1280 id. id. 5969,5 1,0564 filé au N.° 4, venant d’un /a. 5729,5 1,1026 Pour qu'une corde puisse servir à. des expériences. précises d’acoustique il faut que, sous une tension quelconque, les parties égales rendent des sons. identiques, el.de plus que latmoitiérende l'octave aiguë de la corde.entière ; que le quartrende la double- octaye, le huitième la triple-octave, et ainsi de suite. Or, j'ai fait voir, dans ma. notice sur la corde vibrante, que cesconditions ne sont suffisamment bien, remplies que par des,cordes métalliques très-minces, Une corde quelconque est d'autant plus fausse qu'elle s'éloigne davantage de ces conditions. Les cordes en boyau sont toutes.plus ou moins fausses , parce quela matière manque d'homogénéité et que le diamètre n'est. pas d 1,145 1,220 1,172 1,237 1,215 1,324 1,218 1,276 1,231 1,219 1,290 uniforme. La corde filée est fausse,aussi, mais-beaucoup moins. 110) que la corde nue, parce que le fil de métal qui la recouvre unifor- mément lui communique une densité moyenne moins irrégulière. Par une expérience très-simple, chacun peut s'assurer de la fausseté plus où moins grande des cordes nues ou filées d'un instrument à archet. Ayez une lame de liège, épaisse seulement de 4 à 6 millimètres pour qu'elle soit flexible ; posez-la sur deux cordes voisines de l'instrument préalablement accordé avec soin, et faites vibrer les deux cordes également raccourcies ; il arrivera rarement que l'accord de quinte sera exactement conservé. Le liége placé à d’autres distances du sillet vous fera découvrir des points où la discordance sera fort grande ; pour rétablir l'accord de quinte vous serez obligé d'incliner le liége. J ai quelquefois eu ainsi plus d'un centimètre de différence entre les longueurs des deux cordes sur le violoncelle. Pour qu'une corde n’ait pas ces défauts qui tourmentent les instrumentistes, il faut qu’elle ait un diamètre uniforme dans toute sa longueur et une homogénéité parfaite. J'ai fait remarquer dans ma notice sur la corde vibrante, que les minces cordes métalliques elles-mêmes ne remplissent pas toujours ces conditions. Une même bobine peut fournir de bonnes et de mauvaises cordes destinées à des expériences précises : il faut choisir. Cette justesse absolue est impossible pour les cordes des instruments à archet: on doit seulement essayer d'en approcher, ou plus exactement, de diminuer les défauts ordinaires des cordes usitées. J'ai essayé une cordé en soie filée, mentionnée à la page 11 de la notice citée ; son épaisseur est de 1,34, elle vibre longtemps, les sons qu’elle rend sont très-beaux; quand le chevalet mobile est placé au milieu juste de sa longueur, c'est-à-dire à 500 millimètres de chaque sillet, les sons comparés ne sont pas tout-à-fait identiques ; l'iden- tité s'obtient en reculant le chevalet de 0,8, ce qui fait une diffé- rence de 13 centièmes de comma sur les deux sons. Cette corde, fausse pour des expériences précises, serait ralativement excel- lente sur un instrument à archet, (111) Après des tentatives infructueuses, M. Lapaix, en se conformant à mes recommandations , est parvenu à filer, avec le N.° 4 1/2, un faisceau de 22 fils de soie, tendus par un poids de 2 kilo- grammes. Le diamètre total de cette corde est de 0,5128 sur toute sa longueur; aussi cette corde, dont l'homogénéilé est régulière , rend des sons identiques quand on fait vibrer des parties égales. Sous le rapport de la justesse, c’est la perfection pour l'usage sur un instrument à sons libres. Tendue par un poids de 2033 grammes et souvent observée pendant 13 jours, cette corde a constamment et identiquement rendu le son du diapazon donnant le /a du théâtre de Lille, pour une longueur de 5 — 163 millimètres. Ce poids tendant est voisin de celui qui romprait la corde. Chacun des 22 fils de cette soie est composé de 22 brins et le diamètre de ceux-ci est de - de millimètre , de sorte qu'on peut mettre 6400 brins dans un millimètre carré. De 0,5128 retranchant deux fois le diamètre du fil métallique on a 0,5128 — 0,2304 — 0,2824 pour le diamètre du faisceau de soie emprisonné sous le métal. Sous le rapport de la justesse et de la conservation del’accord, les cordes filées sur soie sont donc de beaucoup préférables aux cordes en boyau nues ou filées ; mais pour substituer les unes aux autres il faut chercher par l'expérience quelle proportion il est nécessaire de garder entre le métal et la soie pour que la corde satisfasse l'artiste sous le rapport de la facilité du jeu et de la beauté du timbre, et il faut encore s'écarter peu du principe d'égalité dans la tension des cordes. Tout cela conduit nécessairement à des essais plus ou moins fructueux. M. Lapaix s’y est dévoué. Bonne ou médiocre, chaque corde a été soumise à l'expérience et au caleul comme on l'a fait plus haut sur les cordes en boyau , ce qui servait de guide pour d'autres essais. Dans le tableau suivant je rapporterai, comme exemples , quelques-uns de ces essais. Le tableau commence par les meilleurs résultats, ceux auxquels çn s’arrétera! si des expé- riences ultérieures ne donnent rien dé mieux. *21p10,P Soy)UNN D 1 © O1 à & ND —# 17 18 19 112!) On à aussi filé des cordes en boyau pour en faire des ré de violon , d'alto et de violoncelle. En choisissant bien la corde à boyau , ainsi que le fil métallique , on a obtenu de bonnes cordes quiont également été soumises an calcul et à l'expérience ; mais je n’insérerai pas dans le tableau les résultats obtenus parée que les cordes en soie sont préférables. ré sol ré sol ut ré sol ut ré ré ré sol snl ut ut ul ut ul ut de violon. d’alto. de violoncelle. de violon. de violoncelle de violoncelle ‘410$ 9P SID Sop 91qu0oN 66 88 88 88 99 198 155 198 66 186 155 155 176 155 155 220 176 198 198 “Qt 9p ID np OJJumN P P, 41/2 59625 59477 7 4479,5 45708 41/27 7209,5 7288,3 7 5379,5. 5465,2 13 5729,5 5719.,8 41/2 12929,5 12289,0 10 11979,5 11203.0 19 11909,5 11439,0 41/2 6129,5 6037,9 41/2 12889,5 12722,0 41/2 11649,5 11801,0 12 11589,5 11650,0 12 11729,5 11920,0 20 10449,5 10389,0 21 12629,5 1 12724,0 20 115:9,5 11576,0 14819,5 14529,5 16079,5 15769 . 0,802 0,5641 0,8748 0,7692 0,8974 1,2564 1.1026 1,2564 1,7949 0,1179 1,2051 1,0513 1,2666 1,2724 1,6667 1,8718 1,8205 1,8718 1,9231 5,0328 D 6,392 4,596 3,740 4,636 5,627 3,625 4,963 5,537 4,017 2,698 3,289 5,033 5,103 4,632 5,663 5,447 5,047 (113) Remarques sur ce tableau. Généralement, lescordes en soie filées ont un diamètre uniforme dans toute leur longueur; on observe très rarement des différences qui ne s'élèvent alors que de 1 à 3 centièmes de millimètre. Ces cordes en soie sont justes , et comme pour les filer on leur donne d-peu-près la tension qu'elles auront sur l'instrument, elles s’allon- gent très-peu à l'épreuve par les poids; elles ne tournent pas et enfin elles conservent très-longtemps leur accord si les chevilles bien serrées ne se détournent pas. On remarquera qu'aux N.° d'ordre 6, 7 et 8, les trois cordes du violoncelle ont des tensions égales entre elles et à celles du la mince (page 20). L'assortiment est d’une parfaite convenance ; l'égalité désirée est obtenue et le jeu sur ces cordes est très-facile. Le son qu’elles rendent est sensible pendant 15 secondes , tandis que le son sourd des cordes ordinaires ne dure que 8 secondes. Ces cordes rendent des sons aigus très-élevés que les cordes ordinaires refusent. Les mêmes avantages s’obliennent avec les cordes 3, 4 et 5 pour l'alto, et les cordes 1 et 2 pour le violon. Sur tous les instruments le ré en soie est extrêmement plus avantageux que le gros ré ordinaire en boyau ; il ya plus d'égalité, le jeu est plus facile et l'intensité du son beaucoup plus grande. Le timbre des bonnes cordes en soie filée est agréable, franc, pur, éclatant ; il contraste singulièrement avec le son terne et nazillard des cordes ordinaires. L’ut du N.° 16 est d’un bon effet; mais le son est relativement un peu yvoilé : la soie domine trop. Cette corde ne vaut pas le N.° 44. Le N.° 15 est aussi une assez bonne corde, mais elle est un peu dure à jouer; elle refuse certaines notes très-élevées qu’on obtient avec le N.0 8. Le timbre du N.° 12 est un peu plus clair que celui du N.° 13, où la soie domine. Le N.° 11 est un bon ré, bien qu'un peu faible sous les doigts. Il contient moins de soie que le N.° 6. 8 (114) Le N.° 9 est un très-bon ré. Le N.0 17 est une excellente quatrième de basse. Elle a été filée une première fois avec le N.° 21 ct filée une seconde fois avec le N° 4 1/2. Les spives de ce dernier fil s'engagent exactement entre les spives du gros fil. Le N.° 18 est aussi un bon wt. Les spives du gros fil N.° 15 alternent avec les spives du fil plus gros Ne 20. Le N.0 19 a aussi été filé deux fois, avec les N.05 21 et 8. Cet ut refuse les sons très aigus que donnent les deux ut precédents ; il est néanmoins préférable à l'ut ordinaire en boyau filé qui refuse aussi les notes élevées. Il est probable qu'à l’époque où l'on a substitué une mince corde filée à la grosse quatrième en boyau du violon, les routiniers se sont opposés à l'innovation. Habituée aux sons sourds de ce sol et à sa grosseur, la majorité aura longtemps résisté , malgré les avantages évidents d’un son plus franc et d’un timbre plus agréable. Le temps a fait justice de cette opposition , et aujourd'hui qu'une habitude différente est contractée on repousserait avec une égale vivacité la proposition de reprendre ce gros so/ en boyau. On affirmerait que le doigté en est incommode, que le son est sourd et le timbre de mauvaise qualité. On ne veut pas changer d’habi- tude, même au prix d'une amélioration réelle. On repoussera donc, il faut s’y attendre, la substitution d’un ré filé au gros ré en boyau du violon ; on le trouvera trop mince comme on trouverait trop gros le so! en boyau. En vain ce ré filé sera plus facile à jouer, aura un son plus éclatant, un timbre pur, on le repoussera, car il n'a pasles défauts de celui auquel on est habitué. Mais s'il y a des routiniers slationnaires il y a aussi des artistes et des amateurs intelligents qui ne tiennent pas le mieux pourennemi du bien et peu-à-peu le ré filé sera adopté , non seulement pour le violon , mais encore pour l’alto et le violoncelle. Déjà même des artistes et des amateurs éclairés ont adopté les nouvelles cordes en soie pour les divers instruments à archet. LES E Li ET, OP MRULT SR En CRE Rs FE FR LE DOUÉ ne +58 > der né DA Le en, nés pe , 6 ‘ (115) SUR LA FORMATION DES STOMATES DANS LE TRADESCANTIA VIRGINICA ET LES TRANSFORMATIONS CELLULAIRES QUI L'ACCOMPAGNENT, Par M. GARREAU , Membre résidant. Les plantes phanérogames et les cryptogames vasculaires sont recouvertes dans toutes leurs parties, à l'exception, toutefois, de leurs extrémités radicellaires et stigmatiques, d’une double mem- brane dont la plus extérieure, entièrement privée d'organisation cellulaire et d'une composition plus hydro-carbonée que la eellu- lose, a recu le nom de cuticule; c’est elle qui reçoit le contact immédiat du monde extérieur à la plante. La couche membraneuse qu'elle recouvre et qui manque dans quelques plantes submergées, mais existe constamment dans les végétaux terrestres vasculaires. se compose de cellules aplaties plus ou moins régulières ou si “nueuses sur leurs bords et présente dans les parties aériennes, principalement dans celles qui recouvrent les jeunes tiges et les feuilles, de petites ouvertures elliptiques formées de deux cellules encroissant et destinées à mettre en communication le parenchyme intérieur de la plante avec l'air atmosphérique La formation de ces petils organes a été suivie avec quelque soin par MM. de Mirbel sur le marchantia polymorpha, huyomobhl, sur le jacyn- thus orientalis et par Meyen sur le ficus elustica. Guidé par l'étude des manifestations vitales des matières pro- téiques cellulaires , j'avais eu lieu de soupçonner que la secrétion et la transformation chimique et morphique de la cellulose était 116 | sous la dépendance vitale de ces matières, et que, dès lors, les transformations cellulaires qui se manifestent dans le développe ment des stomates devaient être liées à leur accumulation dans certaines parties. J'avais, du reste, observé que les courants plas- tiques de matière vivante que l'on observe ordinairement, sous formeréticuléc,dans la plupart des cellules en voie d’accroissement, était susceptible de se diviser, dans une même cellule, en plusieurs goyers de circulation fonctionnant d'une manière distincte et indé- pendante, et qu'autour de chacun de ces nouveaux centres circu- latoires il se formait une membrane pellucide, semblable à l'écume du savon, membrane qui, d'une cavité unique, en formait une multiple et dont le nombre des loges correspondait exactement à celui des foyers d'où elles tiraient leur origine : les poils multi- cellulés qui hérissent les jeunes ovaires de la courge et ceux des jeunes mérithalles de la sclarée offriront ces résultats à tout ob- servateur patient. Ce mode de formation cellulaire se confond presque avec celui admis par Schleiden qui le tire du nucléus dont la substance même servirait à l'accroissement de la cellule dans la paroi de laquelle il reste enclavé en s'atrophiant, mais il en diffère, cependant, en ce que la matière vivante du nucléus n'entre pas comme substance dans la couche de cellulose formée , mais seulement dans l’enduit vivant qui la tapisse et que l’on détache avec facilité avec les agents qui coagulent l'albumine ou colorent les matières orga- niques azolées. Ce mode de formation cellulaire n’est pas exclusivement borné aux organes pileux des plantes, l'épiderme, dans les parties sto- maliques, me l'a présenté dans les feuilles de l'Ephémère des jardins, avec des particularités très dignes d'être signalées. Les siomates qui abondent sur l’épiderme de cette plante sont, comme ceux de l'immense majorité des végétaux, formés de deux cellules en forme de croissant qui se joignent par leurs extrémités aiguës et laissent entre elles une petite fente en forme de boutonnière : (117) ces deux cellules sont entourées de quatre autres, dont deux de même hauteur qu'elles sont en connéxion avec leur partie latérale externe, et les deux autres de même hauteur mais d’une largeur double, joignent, chacune de son côté, les bords supérieurs et inférieurs des cellules stomatiques et des leurs deux cellules laté- rales contiguës. On à de cétte manière un carré un peu irrégulier, formé de six cellules dont le centre est occupé par les deux cellules semilunaires du stomale. Ces six cellules sont de création posté- rieure à celles qui, dans le principe, constituaient l’épiderine de la jeune feuille. Voici comment ces cellules se sont formées : Un petit lambeau de la partie axillaire externe de la feuille très-jeune encore présente, sous une amplifiation de 200 diamètres, des cellules quadrilatères dont les cavités sont , en grande partie, occupées par des nucléus lisses et d'un pouvoir réfringent marqué. Mais parmi ces cellules, et à des espaces réguliers, on en découvre d’autres d’un même diamètre transversal, mais moitié moins éten- dues en hauteur; leur contenu en matière azotée vivante est moins lié et plus granuleux; il présente aussi une teinte un peu plus ambrée ; c’est cette cellule qui donne naissance aux deux cellules semilunaires qui composent l'ouverture du stomate : nous la désignerons sous le nom de cellule-mère du stomate. Cette celluie-mère correspond par ses deux extrémités latérales à deux cellules quadrilatères dont les nucléus viennent coïncider exacte- ment avec ces mêmes extrémités contre lesquelles ils semblent s'appliquer directement ; ces nucléus granuleux et opaques émettent des filaments radiaires dans lesquels s'effectuent des courants qui vont, à une certaine distance, mais peu éloignée du centre de la cellule , former un petit conglomérat de la matière qui les constitue et qui, bientôt devient le céntre d'une circulation locale. À peine ce premier changement a-t-il eu lieu que le nucléus contigu à la cellule-mère du stomate, par un travail derésorption, façonne la paroi de la cellule qui le loge et s'entoure d'une mem brane cellulaire qui constituera, après son accroissement complet, (118) la cellule latérale du stomate. Cette jeune cellule se trouve, dès lors, logée dans une échancrure de la cellule qui lui a donné naissance, mais par le fait de son accroissement et de celui de la cellule dont elle émane, cette échancrure s’efface et ne se montre plus que sous la forme d'une légère courbure. La cellule qui a perdu une partie de sa substance ne paraît pas perforée, parce que le nucléus qui s’est formé près de son centre la tapisse d’une couche ceilulosienne sécrétée pendant le travail de résorption opéré par le nucléus qui a formé la cellule latérale du stomate. Les cellules placées en haut et en bas du stomate étaient origi- nairement carrées, mais par le fait de leur accroissement elles doublent d’étendue dans le sens de leur hauteur , et leur centre est occupé par un nucléus volumineux dont les filaments protéiques se portent en abondance vers sa paroi contiguë à la cellule-mère du stomate. Cette matière accumulée dans ce point, s’entoure d'une membrane fine à peine visible et constitue dès ce moment une nou- velle cellule qui s’accroitra principalement en hauteur pour at- teindre la forme d'un quadrilatère qu'elle conserve durant son existence. La cellule-mère du stomate est la dernière à subir sa métamor- phose, et celle-là commence par la séparation en deux nucléus peu distincts l’un de l’autre , de la matière azotée vivante qu'elle contient. À peine ces deux petites masses sont-elles ébauchées , que l’on voit naître entre elles un petit diaphragme qui sépare la cellule qui les contient en deux loges distinctes; bientôt cette cloison semble se dédoubler, et il en résulte deux cellules séparées par une fente qui s'accroît à mesure que les nouvelles cellules se développent et prennent la courbure qui leur est propre. Tel est en deux mots, le mode d’après lequel l’évolution du stomate de l’éphémère et des cellules qui l’avoisinent, s'opère. Je dois, en terminant, faire remarquer que la plupart des phy- siologistes admettent queles cloisonnements cellulaires sont d’abord (149) simples et qu'ils se dédoublent ensuite par une scissure qui en forme deux panneaux ; mais d’après mes propres observations , ce n'est pas de cette manière que la nature opère, car J'ai loujours remarqué que dans les formations intracellulaires, il se forme des membranes closes et non de simples lames, et ce sont les parties libres et plus visibles de ces membranes que d’autres observateurs regardent à tort, selon nous, comme de simples cloisons. (120 ) SUPPLÉMENT AUX ARBRES ET ARBRISSEAUX ET LEURS INSECTES, Par M. MACQUART, Membre résidant. PALMIER CHAMOEROPS. COLÉOPTÈRES. Doritomus chamæropis. Fab. — Ce Curculionite vit sur le Cha- mœærops en Algérie et probablement aussi en Provence. FRAGON. Orchestes'rusci. Herbst. { Salicis. schr.) V. Houx. LIERRE. COLÉOPTÈRES. Tropideres undulatus. Panz. — Ce Curculionite est né chez M. Perris de morceaux de Lierre mort. Otiorhynchus scabrosus. Marsh. — M. Perris a trouvé ce Curculionite en secouant des Lierres. Ebreus albifrons. Fab. — Ibid. Xylophilus aculeatus. Gyll. — Ibid. — nigripennis. Villa. — Ibid. Dendroctonushederæ. Ericks. — Ce Xylophage vitsur le Lierre. Parmena fasciata. Villiers. — Ce Longicorne se trouve sur le Lierre. BERBERIS. DIPTÈRES. Lasioptera berberina. Schr. — Cette Tipulaire vit sur le Berberis. (191 ) Tepbritis meigenii. Loew. — Cette Muscide-se développe dans les fruits du Berberis. On n'y trouve jamais qu’une seule larve. CLÉMATITE. COLÉOPTÈRES. Thea (Muls) 22. guttata Linn. — Sur la C. vitalba. M. GROSEILLER. COLÉOPTÈRES. Hammaticherus cerdo. Fab. — V. Orme. La larve ronge le pied des Groseillers. Muls. Coccinella hieroglyphica. Linn. (Ribis. Scriba.) — V. Pin marilime. HÉMIPTÈRES. Thrips grossulariæ. Hal. — V. Vigne. CISTE. COLÉOPTÈRES. Bruchus biguttatus. OI. — V. Palmier. Sur le C. crispus. Apion tubiferum. Gyll. == V: Tamarisc. Sur les C. crispus et monspeliensis. ' Spermophagus cardui. Stev..(Cisti. Oliv.) — Ce Curculionite vit sur les Cistes. Geonemus flabellipes. OI. — Ce Curculionite vit sur le C. monspeliensis. Albana (Muls) grisea. Foudras. — Ce Longicorne se trouve sur les Cistes. | Hispa testacea. Lin. — Cette Chrysoméline se trouve sur le C. salvifolia. DIPTÈRES. Usia lata. Loew. — Cette Muscide vit sur les Cistes. (12) TAMARISC. COLÉOPTÈRES. Junius bimaculatus. Erichs. — Ce Brachélytre se trouve au pied des Tamarisc. Berginus tamarisci. Dej. — Ibid. Throseus pusillus. Heer. — V. Aüne. Au pied des Tamarisc. Jacquelin Duv. Xylitinus subrotundatus, Heer. —V. Lierre. Sur les Tamarisc. La Reynie. Trotomma pubescens. Kew. — Ibid. Hypera tamarisci. Fab. — Ce Curculionite nt sur le Tamarisc. Coniatus chrysochlorus. Lucas. — V. Tamarise. Ibid. Pachnephorus cylindricus. Kart. — Ce Curculionite vit au pied des Tamarisc. Stylosomus tamarisci. Jenis. — Cette Chrysomeline se trouve sur les Tamarisc. Suffr. Coccinella undecim punctata. Lim. — V. Pin maritime. Harmonia doublieri. Muls. — Ce Securipalpe se trouve sur les Tamarise. HÉMIPTÈRES. Phytocoris erpaphytes. Am. — Cette Cimicide vit sur les Tamarise. Typhlociba stactogala. Am. — Cet Homoptère vit sur les Ta- marisc. Perris. LEPIDOPTÈRES. Adela (Cauchas, zell.) cyanella. Mann. — V. Saule. Elle vole sur les buissons de Tamarisc. TILLEUL. COLÉOPTÈRES. Cryphalus tiliæ. Fab. - Ce Xylophage vit dans le Tilléul. Stenostola tiliæ. Kuster. — V. Saule. Clytus arvicola. Oliv.—V. Erable sycomore. La larve vit dans le Tijleul. Muis. Saperda tremulæ. GÿlIl. — V. Erable plane. Ibid. Aegusoma scabricornis. Scop. —V. Hêtre. La larve vit dans les troncs caverneux des Tilleuls. Muls. Exocentrus balteatus. Fab. — V. Saule. La larve vit dans le Tilleul. Rhamnusium salicis. Fab. — V. Saule. Sa larve vit aussi dans Je Tilleul. : Xanthocroa gracilis. Von Heyd. (Tiliæ. spitz in litt.) — Cet Hété- romère vit sur le Tilleul. LÉPIDOPTÈRES. Euplocamus mediellus. Tr. — La Chenille de cette Tinéïde vit dans le détritus du Tilleul et s’y creuse de profondes galeries qu’elle tapisse de soie et qu'elle ferme avec la même matière avant de passer à l’état de chrysalide. Dup. VIGNE. COLÉOPTÈRES: Callidium unifasciatum Rossi. — V. Aubépine. La larve vit dans les sarments de la Vigne. Muls. ERABLE. COLÉOPTÈRES. Stenus impressus. Tischer. { Aceris. Lacord.) —Ce Brachélytre vit sur l'Erable. LÉPIDOPTÈRES. Adela (Cauchas Zell.) cyanella. Mann. — V. Saule. Elle vole sur les buissons d’Erable. DIPTÈRES. Campylomyza aceris. Meig. -- Cette Tipulaire vit sur l'Erable. (124) SYCOMORE. COLÉOPTÈRES. Aegosoma scahricornis. Scop. —-V. Hêtre. Sa larve vit dans les troncs caverneux des Sycomores. Muls. Saperda scularis. Linn. — V. Erable plane. Sa larve vit dans le Syc. MARRONIER. COLÉOPTÈRES. Ægusoma scabricornis. Scop.— V. Hêtre. Sa larve vit dans les Marroniers. Muls. LÉPIDOPTÈRES. Tinea caprimulgella. Von Heyd. — V. Clématite. La Chenille vit dans les souches du Marronier. ALTHÆA. COLÉOPTÈRES. Grammoptera ruficornis. Fab. — V. Lierre. M. Perris en a trouvé la larve dans les tiges mortes de l'Hybiscus syriacus (Althæa). Elle en ronge l'écorce, en respectant soigneusement l'épiderme ; elle trace ainsi des galeries couvertes, larges, irrégu- lières. Avant de passer à l'état de nymphé, elle creuse dans le bois une cellule profonde, dans laquelle elle s’enferme en bou- chant l'ouverture. FUSAIN. LÉPIDOPTÈRES. Phycis angustella. Zell. — V. Groseiller. La Chenille vit dans la graine du Fusain. NERPRUN. Clytus Rhamni. Germ. — V. Erable Sycomore. Galeruca viburni. Payk. — V. Viorne. (125) PISTACHIER.. COLÉOPTÈRES. Hesperophanes sericeus. Fab. — La larve de ce Longicorne vit dans le Lentisque. Mulsant. Cryplocephalus pistaciæ. Suff. — V. Cornouiller. Sur le Téré- binthe. LENTISQUE. Tituræa ( Macrolænes Dej.) lentisci. Fab. — Cette Chrysoméline vit sur le Lentisque. NOYER. COLÉOPTÈRES. Balaninus elephas. And. — V. Noyer. glandium. Marsch. — V. Ibid. turbatus. Gyll. — V. Ibid. Mesosa curculionides, Linn. — V. Chëne. La larve vit dans le Noyer. Muls. Parmena fasciata. Villers. — Ibid. Muls. ROSIER. COLÉOPTÉRES. Anthobium angustum. Kies. —— V. Saule. Il se trouve dans les fleurs du Rosier des Pyrénées. Kies. Otiorhynchus ovatus. Linn. (Rosæ, Deg.) — V. Nerprun. Orchestes Jota. Fab. (Rosæ, Herbst.) — V. Houx. Aromia rosarum. Dahl. — V. Saule. HÉMIPTÈRES. Physapus cynorrhodi. Hal. — V. Vigne. Il vit dans les fleurs de l'Eglantier. ( 126) RONCE. COLÉOPTÈRES. Agrilus ohvaceus. Oliv. — V. Vigne. Sur la Ronce. Coræbus rubi. Linn. — Ce Sternoxe vit sur la Konce. Polydrusus rubi. Gyll. — V. Pommier. Strangalia cruciata. Dej. — V. Aüûne. Il vit sur les Ronces en fleurs. De Laporte. Cryptocephalus informis. Suff. — V. Cornouiller. Sur les Ronces. DIPTÈRES. Cecidomyia socialis. Loew. — V. Groseiller. La larve vit dans les galles ligneuses sur les tiges des Ronces. Cecidomyia plicatrix. Loew.— Ibid. Dans les feuilles déformées de la Ronce cæsius. Lasioptera rubi. Heeger.— La larve de cette Tipulaire vit dans les galles des Ronces avec la Cec. socialis. AUBÉPINE. COLÉOPTÈRES. Omalium rivulare. Payk. (Oxyacanthæ var. Lacord. — V. Hêtre. ———— oxyacanthæ. Grav. — V. Hêtre. Anaspis nigra. Meg. — V. Vigne. On le trouve en secouant les Aubépines. Perris. Bruchus variegatus. Germ. — V. Palmer. Sur l'Aubépine Ramphus æneus. Dej.—M. De Laporte a trouvé ce Curculionite en secouant une haie d'Aubépine. Anthonomus pomorum. Deg. var. | Cratœgi. Chevr.) — V. Sorbier. Otorhynchus cratægi. Sch. — V. Nerprun Bourgène. Hammaticherus cerdo. Fab. — V. Orme. Sur l'Aubépine. Orsodacna humeralis. Lat. (Oxyacanthæ. Scholtz.—V. Neflier. (127) LÉPIDOPTÈRES. Adela. { Eutyphia. Hubn. ) Zell. — V. Saule. Elle vole sur les fleurs de l’Aubépine , en Provence. Dup. DIPTÈRES. Cecidomyia cratægi. Loew. — V. Groseiller. La larve vit dans les branches des Cratægus oxyacantha et coccinea. W. Cecidomyia circumdata. Loew. — Même observation. Bibio rufitarsis. Meig. —V. Pommier. Il se trouve sur les fleurs de l’Aubépine. M. SORBIER. Anthobium sorbi. Gyll. — V. Saule. POIRIER. COLÉOPTÈRES. Phytæcia nigricornis. Fab. — V. Vigne. La larve vit dans les rameaux du Poirier. Muls. Polvosia prœusta. Linn. — La larve de ce Longicorne vit dans le Poirier. Muls. HYMÉNOPTÈRES. Tenthredo adumbrata. Klug. — V. Grosciller. Vers le déclin de l’été, on voit la fausse chenille, en Lithuanie, sur les branches des Poiriers , des Pruniers et des Cerisiers; elle est gélatineuse. Après avoir dévoré les feuilles , elle y laisse des taches qui pro viennent des mailles des vaisseaux mis à nu. Cette larve est in- sensible à toutes les impressions extérieures; elle ne change jamais de position et ses mouvements sont si lents qu'on ne peut les comparer qu’à ceux du Limaçon , et comme lui , elle cache sa tête el ses pattes pectorales sous la partie antérieure du corps, qui est hombée et élargie. POMMIER. COLÉOPTÈRES, Anthonomus ulmi. Dej. (Pomonæ. Germ.) — V. Noyer. | 128 Phyllobius mali. Gyll. — V. Poirier. Micraspis 42 punctata. Linn. — Ce Sécuripalpe se trouve sur les Pommiers. Muls. DIPTÈRES. Bibio pomonæ. Meig. — Cette Tipulaire vit sur les Pommiers. PRUNIER. COLÉOPTÈRES. Coræbus undatus. Fab. (Pruni. Panz.) — Il vit sur le Prunier. Phytæcia nigrricornis. Fab. — V. Vigne. La larve vit dans les rameaux. Ceutorhynchus pruni. Steph — V. Bruyère. PRUNELIER. DIPTÈRES. Cecidomyia peregrina. Loew. — V. Groseiller. La larve vit dans de petites galles sur les feuilles du P. spinosus. CERISIER. COLÉOPTÈRES. Athous rhombeus. Oliv. — V. Chêne. On le trouve dans le bois décomposé du Cerisier. Curtis. Mecinus pyrastri. Herbst. (Cerasi. Payk.) — V. Poirier. Saperda scalaris. Linn. — V. Erable plane. Il vit sur les Cerisiers. Orsodacna nigriceps. Lat. (Cerasi. Var. Dej.) — V. Néflier. DIPTÈRES. Cecidomyia cerasi. Loew. — V. Groseiller. La larve vit dans le sommet des tiges desséchées. CERISIER A GRAPPES. COLÉOPTÈRES. Elodes Padi. Linn. — V. Pin Silvestre. (129) SPIROEA. COLÉOPTÈRES. Cereus pedicularis. Linn. (Spirea. Steph.) Il vit sur les Spireas AJONC. COLÉOPTÈRES. Olibrus (Erichs) millefolii. Payk. (Ulicis. Gyll.) — I vit sur l'Ajonc. Anthocomus ulicis. Erichs. — Cette Malachide vit sur l’Ajonc. Luperus suturalis. Boit. — V. Bouleau. Il vit sur l'Ajonc. Suülbia philopatis. — M. Dardouin l’a prise sur un Ü. provin- cialis. HÉMIPTÈRES. Tbrips (Sericothrips. hal.) staphilinus. hal. —V. Vigne. Com- mun sur l'Ajonc. ——— Odontothrips. Hal. — Ibid. ——— livida. Hal. — Ibid: SPARTIER. COLÉOPTÈRES. Lœmophlœus ater, Oliv. (Spartü. Curtis.) — V. Clématite. Mylabris spartii. Germ. — V. Genêt. Apion spartii. Kirby. — V. Tamarisc. Sitona spartii. Kirby. — V. Houx. Sitona sulcifrons. Thunb. — V. Houx. Il vit sur le S. à ba- lais. Perris. Hylastes spartii. Nordl. — V. Pin maritime. Deilus fugax. Feb. — La larve de ce Longicorne paraît vivre dans le S. à balais. Muls. Gonioctena spartii. Oliv. — V. Saule. Calomicus circumfusus. Marsh. (Spartit. Ent. Hefl.) = Cette Chrysoméline vit sur le Spartier. ( 480!) Chrysomela litura. Lat. — V. Saule. Sur le S. à balais. HÉMIPTÈRES. Coreus dentator. Fab. — Cette Cimicide vit sur le S. à balais Gorski. LÉPIDOPTÈRES. Hetcrogynis erotica. — V. Genêt ci-après. GENÊT. COLÉOPTÈRES. Cneorhinus tubericollis. Fairm.—V. Coudrier. I vitsur le Genêt fleuri. Cryptocephalus flavoguttatus. OI. — V. Cornouiller. [l vit sur le G. sagittalis. Muls. Chrysomela litura. Lat. — V. Saule. Sur les Genêts. HÉMIPTÈRES. Coreus dentator. Fab. — V. Spartier. Il vit sur les Genêts, Pseudophlæus falleni. Schilling.— Cette Cimicide vit sur le G. tinctoria. Gorski. LÉPIDOPTÈRES. Heterogynis erotica.— La chenille de cette Liparide est courte, onisciforme. Elle vit sur le G. purgans et sagittalis, et se ren- ferme dans une coque à réseau qu'elle attache aux branches. DIPTÈRES. Cecidomyia genistæ. Loew. — V. Groseiller. La larve vit dans des galles sur les tiges du G. germanique. CYTISE. LÉPIDOPTÈRES. Nemotois pantherellus. Guen. — V. Prunelier. Il vole sur les buissons du C. spinosus. Zeller. (131) ROBINIER. Thylacites glabratus. Sch. (Robiniæ. herbst.) — Ce Curculionite vit sur le Robinier. AIRELLE. LÉPIDOPTÈRES. Adela (Eutyphia. Hubn.) degeerella. Zeller. —V. Saule. La chenille vit sur l’A. myrtille. BRUYÈRE. COLÉOPTÈRES. Cleonis ericæ. Sch. — V. Bruyère. Ceutorhynchus ferrugatus. Fab. — V. Bruyère. [1 vit sur la B. scoparia. Nanophyes siculus. Fab. — V. Tamarisc. Il vit sur les B. cine- rea et tetralix. Perr. Ulopa obtecta. Fab. — Ibid. Crepidodera lineata. Fab. — V. Saule. Sur la B. scoparia. Perr. Stylosomusericeti. Suff. —V. Tamarisc. Il vit sur les B. arbo- rea. S. HÉMIPTÈRES. Phytocoris siphonistes. Am. — Poirier. Il vit sur la B. scopa ria. Perr. Psylla pipullia. Am. — V. Buis. Sur la B. scoparia. Perr. Thrips ericæ. Hal. — V. Vigne. Sur les Bruyères. LÉPIDOPTÈRES. Adela (Eutychia. H.) paludicolella. Zell. — V. Saule. Elle vole sur une Bruyère, à Pise. Zell. DIPTÈRES. Cecidomyia ericæ. L. D. — V. Groseiller. La larve vit à l’ex- (182) trémité des tiges de la B. scoparia, qui , en se développant, pré- sentent la forme d’un gros bouton. Winnerz. CALLUNA (Bruyère commune). COLÉOPTÈRES. Pachybrachys fimbriolatus. Mull. — V. Saule. Sur le C. vul- gaire. Suff. LÉPIDOPTÈRES. Lycæna ægon. Bork. — Y. Baguenaudier. Sur la C. vulg. Hering. Emydia eribrum. Linn. — La chenille de cette Lithoside est garnie de tubercules surmontés d'aigreties de poils courts. Elle vit sur la C. vulg. et se renferme dans un tissu lâche, entouré de mousse. Her. Chelonia purpurea. Lion. — V. Cerisier. La chenille vit sur la C. vulg. Her. Psyche atra. Her. — V. Lotus. La chenille vit sur la C: vulg. Her. ——— stettinensis. Her. — Elle se trouve sur la C. vulg. Her. Atychia pruni Her. — V. Groseiller. Elle se trouve sur la C. vulg. Her. Acronycta rumicis. Linn. ++ V. Tilleul. Il se trouve aussi sur la C. vulg. Her. ———— auricoma. Feb. — Ibid. Her. Hadena pisi. Linn. — V. Sparlier. Ibid. Her. Chersotis porphyrea. Hübn. — V. Bruyère. Ibid. Her. Crambus erycellus. Tr. — V. Tamarisc. Ibid. Her. Palpula ericella. Dup. — Cette Tinéide a les deux premiers ar ticles réunis, deux fois aussi longs que la tête, Elle vole sur la C. vulg. La chenille est inconnue. Oecophora ericinella. F. V. R. — V. Olivier. Il vit sur la C. vulg. (133 ) VIORNE. Omalium floralis. Payk. ( Viburni. Grav.) — V. Hêtre. LAURIER ROSE. LÉPIDOPTÈRES. Tortrix hermineana. Dup. — V. Lierre. Sur le L. rose. M. Mar- gueral. SUREAU. COLÉOPTÈRES, Cercus sambuci. Erichs. (Solani. heer.) — Il vit sur le Sureau. Catheretes sambuci. Maeckel. — Ce Clavicorne vit sur le Sureau. Clytus massiliensis. Fab. — V. Erable sycomore. Sur le petit Sureau. De la Porte. Pärmena fasciata. Vill. — Ce Longicorne vit sur le Sureau. Muls. CHEVREFEUILLE. LÉPIDOPTÈRES. Orneodes polydactylus. Tr. — V. Xylosteum. Il vit sur le Chè- vrefeuille. j XYLOSTEUM. Orchestes loniceræ. Fab. (Xylostei. clairv.) — Houx. OLIVIER. Mylabris oleæ. Chevr. Alger. — V. Genêt. Helops oleæ. Chevr. — V. Pommier. FRÊNE. COLÉOPTÈRES. Tychius fraxini. Dahl. — V. Spartier. (134) Toxotus méridianus. Gyll. — Ce Longicorne vit dans le Frêne excelsior. Toxotus sericeus. Lat. — Ibid. DIPTÈRESe Cecidomyia betularia. Loew. — V. Groseiller. La larve vit dans des galles allengées, sur les nervures intermédiaires des feuilles du Frêne excelsior. L Cecidomyia invocata. Loew. Sur les feuilles du Frêne ex- celsior. Cecidomyia acrophila. Loew. — Ibid. — pavida. Loew. — Ibid. SAULE BLANC. COLÉOPTÈRES. Agrypnus atomarius. Fab. — V. Chêne. Il se trouve dans le . bois du Saule. Jacquelin. Duv. Mycetophaga salicis. Chevr. — V. Peuplier. Ampedus crocatus. Geoff. — Ibid. Rhyncolus strangulatus. Chevr.—V. Pin maritime. Dans le bois mort des vieux Saules. Tachylerges salicis. Linn. — Ce Curculionite vit sur le Saule. decoratus. Schupp. — Ibid. ——— saliceti. Fab. — Ibid. Chlorophanus salicicola. Germ. — V. Saule. Bagous cnemerythrus. Marsh. — On trouve ce Curculionite en secouant les Saules. Purpuricenus Kæhleri. Fab. — La larve de ce Longicorne vit dans les Saules. OEgosoma scabricornis. Lat. — V. Hêtre. La larve vit dans le tronc des Saules. Delaporte. Lamia textor. Linn. — V. Mimosa. La larve vit dans le Saule. Muis. (435) Oberea oculata. Linn. — V. Chevrefeuille. Ibid. Rhopalus clavipes. Fab. — La larve de ce Lungicorne vit dans les Saules. Mesosa nobilis. Oliv.. — V. Chêne. Sa.lanve vit dans le Saule. Muls. Lina collaris. Linn. (Salicis. Fab } — V. Saule. Gynandrophthalma cyanea. Fab. (Salicina: Scop.) — Cette Chrysoméline vit sur le Saule. Phœdon salicinum. Heer. — V. Bouleau. Cryptocephalus bistripunctata. Charp. (Salicis. Oliv.) — NV. Cornouiller. Chilocorus renipustulatus. Scriba. — Ce Securipalpe vit dans les Saules. Muls. LÉPIDOPTÈRES. Tinea fuliginosella. Lienig. — V. Clématite. ‘Elle vit sur les Sauies. DIPTÈRES. Ceratopogon leucopeza. Meig. — V. Chèvrefeuille. Il vit sur les chatons des Saules Ceratopogon nivei pennis. Meig. — Ibid. stigma. Meig. — Ibid. pulicaria. Meig. — Ibid. obsoletus. Meig. — Ibid. Cecidomyia libialis. Loew. — V. Groseiller: La larve vit sur le Saule blanc. Cecidomyia talicina. Loew. .— Ibid. Il vit en société avec le précédent. Cecidomyia boucheana. Loew: == Ibid. La larve vit dans le ter- reau de Saule. Cecidomyia rosaria: Loëew. — Ibid. La larve vit dans les ro- settes du Saule blanc. Cecidomyia iteophila. Loew. — Ibid. albipennis: Loew. — Ibid: ( 136 ) SAULE VIMINAL. Orchestes carnifex. Germ. ( Viminalis. Schr.) — V. Houx. SAULE A FEUILLES D'AMANDIER. DIPTÈRES. Cecidomyia limbata, Loev. — V. Groseiller. La larve vit dans les rosettes du Saule à feuilles d’amandier. Cecidomyia heterobia. Loew. — Ibid. Il vit en société avec le précédent. SAULE POURPRE. DIPTÈRES. Lasioptera argyrostacta. Meig. — La larve de cette Tipulaire vit dans des galles ligneuses des rameaux du Saule pourpre. Winn. SAULE MARCEAU. COLÉOPTÈRES. Agrilus viridipennis, Lap. — V. Vigne. Sa larve vit sous l'écorce du Saule marceau. Calvia 10. guttula. Linn. — Ce Sécuripalpe vit sur le Saule marceau. Muls. DIPTÈRES. Cecidomyia capreæ. Loew.— V. Groseiller. La larve vit dans de petites galles dures , qui se forment dans les feuilles du Saule marceau. SAULE A OREILLETTES. DIPTÈRES. Cecidomyia peregrina. Loew. — V. Groseiller. La larve vit dans de petites galles qui se forment sur les. feuilles du Saule aurita. ÿ Cecidomyia salicis. Schr. — Ibid. La larve vit dans des galles ligneuses sur les rameaux du Saule aurita. (437) Cecidomyia capreæ. Loew.— Ibid. La larve vit dans de petites galles dures qui se forment dans les feuilles du Saule aurita. SAULE A TROIS ETAMINES. LÉPIDOPTÈRES. Adela cuprella. S. V. — V. Saule. La chenille vit sur le Saule triandra. SAULE DES SABLES. COLÉOPTÈRES. Lina collaris. Fab. — V. Saule. Il vit sur le Saule arenaria. Fairm. SAULE FRAGILE. DIPTÈRES. Cecidomyia saliceti. Loew. — V. Groseiller. La larve vit dans les bourses des feuilles déformées du Saule fragilé. Cecidomyia terminalis. Loew. — Ibid. SAULE CENDRÉ. DIPTÈRES. Cecidomyia salicis. Schr. -— V. Groseiller. La larvé vit dans des galles ligneuses sur les rameaux du Saule cinerea. SAULE RAMPANT. LÉPIDOPTÈRES. Adela cuprella. S. V.— V. Saule. La chenille vit sur lé Saule repens. Zell. SAULE OSIER. Oberea oculata. Déj. —V. Chevrefeuille. Sur les Oseraies. . PEUPLIER. COLÉOPTÈRES. Phylethus populi. Rédtenb.— Cet Hétéromère vit sous l'écorce. (138) Mordella Gacognii. Muls. — V. Aubépine. Sa larve vit dans le Peuplier. Rhyncolus strangulatus. Perr. — V. Pin maritime. Onle trouve sur les Peupliers morts. Rhyncholus populi. Dej. — Ce Curculionite vit sous l'écorce. Sylvanus populi. Chevr. — V. Poirier. Oegosoma scabricornis. Lat. — V. Hêtre. La larve vit dans le Peuplier. Hesperophanes mixtus. Fab. — La larve de ce Longicorne vit dans le Peuplier. Muls. Hesperophanes nebulosus. Oliv. — Ibid. Muls. Acanthoderus varius. Fab. — V. Chêne. Sa larve vit dans le Peuplier. Muls. Clytus tibialis. Linn. — V. Sycomore. La larve vit dans le Peuplier. Muls. Molorchus abbreviatus. Fab. —— V. Saule. Sa larve vit dans le Peuplier. Molorchus dimidiatus. Fab. — Ibid. Morimus tristis. Fab. — V. Sureau. Il se trouve au pied du Peuplier. Anœærea carcharias. Linn.—Ce Longicorne vit sur les Peupliers. Muls. Mesosa curculionides. Fab. — V. Chêne. La larve vit dans le Peuplier. Muls. Rhamnusium salicis. Fab. — V. Saule. La larve vit sur les Peupliers. HÉMIPTÈRES. Cercopis populi. — V. Saule. Phitocoris populi. Linn, — V. Poirier. DIPTÈRES. Cecidomyia populi, L. Duf. - V. Groseiller. La larve vit sur les feuilles du Peuplier , sans y déterminer de déformation. {439 | Ceratopogon Kaltenbachii, Winn. — V. Saule blanc. Kaltenb. Il a trouvé les larves dans la sève extravasée d'un Peuplier. Xylophaga marginata. Meig. — M. Wesmael a trouvé plusieurs larves entre les lames du liber d’un Peuplier. PEUPLIER TREMBLE. COLÉOPTÈRES. Anœærea carcharias. Fab. — V. Saule. Il vit sur les Trembles. Clytus arvicola. Oliv. — V. Sycomore. La larve vit dans le Tremble. Obrium cantharinum. Linn. — La larve de ce Longicorne vit dans le Tremble. DIPTÈRES. Cecidomyia tremulæ. Loew. — V. Groseiller. La larve vit dans des galles en forme de pois sur les feuilles du Tremble. FIGUIER. COLÉOPTÈRES. Hypoborus ficûs. Erichs. — Ce Xylophage vit sous l'écorce. Morimus funestus. Fab. —- V. Sureau. La larve vit sur le Figuier. . ORME. COLÉOPTÈRES. Astrapœus ulmi. Rossi. — Ce Brachélytre vit sous l'écorce. Nanophyes ulmi. Meg. — V. Tamarisc. .Miccotragus cuprifer. Panz (Ulmi. Dej.) — Ce Curculionite vit sur l’Orme. … Prionus coriarius. Lat. — V. Bouleau. La larve vit dans les Ormes. Delaporte OEgosoma scabricornis. Scop. — V. Hêtre. La larve vit dans les troncs caverneux de l'Orme. Muls. (140 ) Clytus arvicola. Oliv. — V, Sycomore. La larve vit dans l'Orme. Delaporte. Epilachna argus. Fourc. — Ce Sécuripalpe vit sur l’Orme. Muis. Coccinella variabilis. Il. (Ulmi. Scriba.) — V. Pin maritime. HÉMIPTÈRES. Phytocoris uimi Linn. — V. Poirier. Il vit sur l'Orme. Physapus ulmifoliarum. Hal. — Ce Thrips vit solitaire sous les feuilles de l'Orme. BOULEAU. COLÉOPTÈRES. Orchestes rufus. Oliv. (Betuléti. Panz. — V. Houx. Apion betulæ. Chevr. — V. Tamarisc. Syneta betulæ. Fab. — Cette Chrysoméline vit sur le Bouleau. DIPTÈRES, Cecidomyia betulæ. Kaltenb. — V. Groseiller. La larve vit dans les chatons femelles. Psila nigricornis Meig. = V. Rosier. Il vit sur les feuilles des Bouleaux de la Scandinavie. Zett. Psila nigra. Meig. — Ibid. AUNE. COLÉOPTERES. Orchestes scutellaris. Fab. (Alni. Herbst.) -— V. Houx. Omalium nigrum. Grav. (Salicinum. Gyll.) = V. Hêtre. salicis Gyll. — Ibid. Tomicus monographus. Fab. — V. Peuplier. La larve vit sous l'écorce de l’Aûne mort. Tomicus bicolor. Ratz. — Ibid. Cryptocephalus cordiger. Linn. — V. Cornouiller. 11 vit sur l'Aüne. Suff. (441 Cryptocephalus distinguendus. Schnd. — Ibid. Anatis ocellata. Linn. — Ce Sécuripalpe vit.sur l'Aûne. Muls. Sospila tigrina. Linn. — Ibid. Halyzia 16. guttata. Linn. — Ibid. Calvia 10 guttata. Linn. — V. Saule Marceau. Ibid. Vibidia 12 guttata Poda. — Ce Sécuripalpe vit sur l'Aûne. Muls. Chilocorus renipustulatus. Scriba. — V. Saule. Ibid. LÉPIDOPTÈRES. Attacus pyri. Borkh. — V. Citronnier. La chenille vit aussi sur l’Aûne. DIPTÈRES. Psila nigricornis. Meig. — V. Rosier. Il vit sur les feuilles de l’Aûne en Scandinavie. Psila nigra. Meig. — Ibid. COUDRIER. COLÉOPTÈRES, Agrilus auripennis. Sol. (Coryli. Dahl.) —V. Vigne. Oberea linearis. Linn. — V. Aüne. Suivant Roesel , la femelle dépose ses œufs sur les jeunes branches , près des bourgeons. La jeune larve s’insinue dans le bois jusqu'à la moelle dont elle doit se nourrir. Elle chemine , la tête en bas, dans le canal médullaire et le suit dans la longueur d’un demi-pied. Halyzia 46 guttata. Linn. — V. Aûne de ce supplément. Il vit aussi sur le Coudrier. Muls. LÉPIDOPTÈRES. Atacus pyri. Borkh. — V. Citronnier. La chenille vit aussi sur le Coudrier. CHARME. COLÉOPTÈRES, Cicones (Curlis.) variegatus. Hellw. (Carpini. Curt.) — Ce Xy- lophage vit sous l'écorce. (14 ) Anobium carpini. Hellw. — V. Lierre. Polyosia præusta. Linn. — V. Poirier. Clytus arvicola. Olir. — V. Sycomore. La larve vit dans le Charme. Muls. Leiopus nebulosus. Linn. — V. Poirier. La larve vit dans le Charme. Muls. Scymaus fulvicollis. Muls. — V. Pin silvestre. Il vit sur les charmilles. M. HÉMIPTÉRES. Jassus carpini. — Cet Homoptère vit sur le Charme. DIPTÈRES. Ceratopogon regulus. Winn. — V. Chèvrefeuille. La larve vit sous l'écorce des vieux troncs du Charme. Winn. Cecidomyia valvata. Loew. — V. Groseiller. Il vit dans le bois décomposé du Charme betulus. HÊTRE. COLÉOPTÈRES. . Otiorhynchus fagi. Chevr. — V. Nerprun Bourgène. Cerylon fagi. Mulscholski. — V. Hêtre. Cryphalus fagi. Lat. — Ce Xylophage vit sous l'écorce. Eledona fagi. Panz. — Cet Hétéromère vit sous l'écorce. Idalia livida. Deg. — Ce Sécuripalpe vit sur le Hêtre. Muls. Scymaus biverrucatus. Panz. — V. Pin silv. Il vit sur le Hêtre. Muls LEPIDOPTÈRES Tinea fulvimitrella. Sadoffsky. — V. Clématite. La chenille vit dans le bois décomposé du Hêtre rouge. Zell. Tinea caprimulgella. Von Heyd. — Ibid. La chenille vit dans les souches de Hètres. Euplocamus mediellus. Curt. — La chenille de cette Ténéide a un écusson corné sur la nuque. Elle vit dans le bois décomposé ( 143 ) du Hêtre, s'y creuse de profondes galeries qu’elle tapisse de soie , et en ferme l'entrée avec la même matière avant de se transformer. Z. | Euplocamus Fusslinellus. Sulz. — Ibid. La chenille habite les vieux troncs des Hêtres. Euplocamus tessulatellus. Zell. — Ibid. DIPTÈRES. Cecidomyia bipunctata. Winn. — V. Groseiller. La larve vit dans des galles velues sur les feuilles du Hêtre. Cecidomyia albilabris. Loew. — Ibid. La larve vit dans le bois décomposé de Hêtre Cecidomyia cilipes. Loew. — Ibid. ———— decorata. Loew. — Ibid. — — angustipennis. Loew. —- Ibid. nudicornis. Loew. — Ibid. > Fagi. Hurt. — Ibid. La larve vit dans des galles coniques sur les feuilles du Hêtre. Cecidomyia piligera. Loew. — Ibid. La larve vit dans des galles obtuses, velues, brunes , sur les feuilles du Hêtre, avec la Cecid. bipunctata. CHATAIGNIER. COLÉOPTÈRES. Stenoxys. Schm (œdemera} annulata. Germ. — Cet Hétéro- mère se trouve sur le Castanea vesca. CHÈÉNE. COLÉOPTÈRES, Hygronoma quercina. Chevr.—Ce Brachély tre vit sous l’écorce: Oxylæmus cæsus. — Ce Brachélytre vit sous l'écorce du Chêne en supuration. (14) Berginus tamarisci. Dej. — Ce Brachélytre se trouve en secouant les jeunes Chênes. Cetonia aurata. Linn. — V. Rosier. La larve vit dans les vieilles souches. Cetonia marmorata. Fab. (Quercûs. Schr.) — V. Rosier. affinis. Panz. (Quercûs. Bonn.) — Ibid. Adelocera varia. Fab. (Quercüs. Herbst.) — Ce Sternoxe vit sous l'écorce. Ludius quercûs. Gyll. — V. Cytise. Dircæa undata. Perris. — V. Hêtre. Il a ététrouvé en fauchant sous de grands Chênes. P. Sparedrus. Meg. ( Calopus. Andersch.) testaceus. And: — Cet Hétéromère vit sur le Chêne. Cneorhinus carinirostris. Sch. — V. Coudrier. En secouant les jeunes Chênes. Perris Cneorhinus exaratus. Marsh. — Ibid. Polydrusus flavovirens. Sch. — V. Pommier. M. Perris l'a trouvé en secouant les jeunes Chênes. Polydrusus sparsus. Dahl. — Ibid. Centorhynchus rugulosus. Herbst. (Quercicola. Payk.) — V. Bruyère. Centorhynchus quadridens. Panz. (Quercicola. Marsh.)—V.Ibid. Acallus abstersus. Sch. (Roboris. Curtis.) — V. Hêtre. Celiodes ruber. Marsb. (Quereüs. Oliv.) —- Ce Curculionnite vit sur le Chêne. Celiodes Rubicundus. Payk. (Quercüs. Payk.) — V. fbid. Anoplus plantaris. Noesen (Roboris. Suff.) — Ce Curculionite vit sur le Chéne. Scolyus vittatus. Lat. — V. Orme. Il vit dans le Chêne, Prionus coriarius. Linn. — V. Bouleau. Il vit dans le Chêne. Perris. Callidiura alni. Fab. — V. Aubépine. La larve vit dans le Chène. : 145) Platynotus (Clytus) arcuatus. Fab.— La larve de ce Longicorne vit dans les vieilles souches. Delaporte. Molorchus abbreviatus. Fab. — V. Saule. La larve vit dans le Chêne. Muls. Pogonocherus pilosus. Fab. — V. Gui. La larve vit dans le Chène. Muls. Cerambyx heros. Scop. — V. Pommier. La larve vit dans le tronc des vieux Chênes. Muls. miles. Bonelli. — Ibid. La larve vit ordinairement dans les racines des Chênes. Muls. Anœæsthetis testacea. Fab. — V. Saule. On le trouve dans les fagots de Chêne. Delaporte. Polyosia prœusta. Linn. — La larve de ce Longicorne vit dans le Chêne. Muls. Strangalia melanura. Linn. — V. Aune. La larve vit dans le Chêne. Muls. Exocentrus adspersus. Rey. — V. Saule. La larve vit dans le Chêne. Cryptocephalus bistripunctatus. Creutz. — V. Cornouiller. Il vit sur le Chêne. Suffr. Harmonia impustulata. Linn. — Ce Sécuripalpe se trouve pen- dant l'hiver sous l'écorce des vieux Chênes. Muls. Calvia bis septem guttata. Schaller.—Ce Sécuripalpe vit sur le Chêne. Scymaus nigrinus. Kugel. — V. Pin. Silv. Il vit sur le Chène. Muis. Batrisus oculatus. Aubé. — V. Charme. M. Perris l’a trouvé au pied d’un Chêne. HÉMIPTÈRES. Xylocoris latior: Muls. — V. Pin maritime. Il se trouve sous les écorces de Chêne. LÉPIDOPTÈRES. Adela ( Entyphia. Hubn.) Viridella. Scop. — V. Saule. Elle se 10 ( 146 ) trouve sur les buissons de Chêne, et vole en grandes troupes comme les Chironomes. Zell. Tinea quercicolella. Hubn. — V. Clématite. Sur le Chêne. DIPTÈRES. Cectdomyia præcox. Winn. — V. Grosciller. On la trouve dès les premiers jours de mars dans les bois, surtout sur les branches de Chène nouvellement coupées. W. CHÈNE TAUZIN. HÉMIPTÈRES. Phytocoris ulmi. Linn. — Cette Cimicide vit sur le Chêne Tau- zin. populi. Linn. — Ibid. CHÊNE VERT. COLÉOPTÈRES. Coræbus œneicollis. Villers. — Ce Sternox se trouve sur les bourgeons du Chêne vert. Jacquel. Duv. Coleucs Javeti. Jacq. — Ibid. Polydrusus setifrons. — V. Pommier. Sur le Chêne vert, à Montpellier. Cossonus ilicis. Fab. — V. Houx. Brachyderes Ilicis. Dehl. — V. Houx. SLylosomus ilicicola. Suff. — V. Tamanisc. Cryptocephalus lividimanus. Suff. — V Cornouiller. M. Kie- senwetler l’a trouvé sur les Ilex du mont Serrat, Stylosomus ilicicola. — Il vit sur le Chêne vert. LÉPIDOPTÈRES. Polyommatus ilicis. Ramb. — Il vit sur le Chêne vert. suberis. Ramb. — Ibid. occlusa. Ramb. — Ibid. saportæ. Ramb. — Ibid. (147) Harpya fagi. Linn. — V. Hêtre. Il vit sur le Chêne vert. Peridea trepida. Linn. — V. Chêne. Ibid. Catephia alchymista. Linn. — V. Chêne. Ibid. Ophiodes lunaris. Linn. — V. Chêne. [bid. Hadena protea. Linn. — V. Spartier. Ibid. Orthosia stabilis. Linn. — V. Houx. Ibid. instabilis. Linn. — V. Houx. Ibid. ambigua. Lion. — V. Houx. Ibid. Hemerophila petrificaria. Hubn. — V. Prunelier. Ibid. Amphidasis hirtaria. Linn. — V. Pommier. Ibid. CHÊNE LIÉGE. LÉPIDOPTÈRES. Polyommatus suberis. Ramb. — Il vit sur le Liège. R. ilicis. Ramb. — Ibid. ———— occlusa. Ramb. — Ibid. saportæ. Ramb.— Ibid. Harpya fagi. Linn. — V. Hêtre. Ibid. Peridea trepida. Linn. — V. Chêne. Ibifi. Catephia alchymista. Linn. — V. Chêne. Ibid. Ophiodes lunaris. Linn. — V. Chêne. Ibid. Hadena protea. Linn. — V. Spartier. Ibid. Orthosia stabilis. Linn. — V. Houx. Ibid. — insfabilis. Linn. — V. Houx. Ibid. ambigua. Linn. — V. Houx. Ibid. Hemerophila petrificaria. Hubn. — V. Prunelier. Ibid. Amphidasis hirtaria. Linn. — V. Pommier. Ibid. CHÊNE BELLOTA. COLÉOPTÈRES. Pachybrachys azureus. Suff. — V. Saule. Il vit sur le Chêne Bellota. Suff. { 148 | GALÉ. COLÉOPTÈRES. Aphthona lutescens. Gyll. — V. Ronce. Commun sur le Galé. Perris. LÉPIDOPTÈRES. Liparis dispar. Linn. — V. Myrte. Il vit sur le Galé. Graslin. Orgya ericæ. B. — V. Rosier. Ibid. GENÉVRIER. .COLÉOPTÈRES. Lampra festiva. Fab. — V. Peuplier. Il vit sur le Genévrier. HÉMIPTÈRES. Acanthosomus hœmorrhoïdalis, Linn.— Cette Cimicide vit sur le Genévrier, en Lithuanie. Gorski. Gonocerus juniperi. Dahl. — Ibid. Hylastes juniperi. Chevr. — V. Pin maritime. CYPRÈS. COLÉOPTÈRES. Morimus funestus. Fab. — V. Sureau. La larve vit dans le cyprès. Muls. tristis. Fab. — Ibid. Muis. PIN SYLVESTRE. COLÉOPTÈRES. Clerus formicarius. Linn. — V. Pin Sylv. M. Chevandier a trouvé sous l'écorce une larve de Clerus, qui était attaquée par des Dendroctonus piniperda et par des Pissodes notatus. Omophluspinicola. Redtenb.— Cet Hétéromère vit sous l'écorce. Hymenophorus Doublieri. Muls. — La larve de ce Cistéhnien vit dans les bois de Pins. (‘149 ) Brachonyx indigens. Herbst (Pineti Payk.) — Ce Curculionite vit sous l'écorce. Erirhinus pinetum. Fab. — V. Peuplier. Cerylon histeroides. Lab. — V. Hêtre. Il vit sous l'écorce des Pins. Delaporte. Colydium ustulatum. Déj.. — V. Orme. Ibid. Sylvanus pini. Gaybil. —- V. Poirier. Cryphalus pini. Villa. — Ce Xylophage vit sous l'écorce. Pogonocherus ovalis. Gyll. — V. Gui. La larve vit dans le Pin. fascicularis. Fab. — Ibid. Muls. Monohammus gallo-provincialis. Oliv. — V. Chène. La larve vit dans le Pin. Muls. Ergates serrarius. Panz. — V. Pin sylv. La larve vit dans l'intérieur des souches. Muls. Oxypleurus (muls. } Nodieri. — La larve de ce Longicorne vit sous l'écorce. Muls. Asemum striatum. Linn. — La larve de ce Longicorne vit dans le Pin. Muls. Ædilis montana. Serv. — La larve de ce Longicorne vit dans l'écorce du Pin. Muls. Ædilis grisea. Fab. — Ibid. Vesperus strepens. Oliv. —- V. Chêne-vert. La larve vit dans le Pin. Muls. Rhagium bifasciatum. Fab. — V. Aubépine. La larve vit dans le Pin. Muls. Rhagium inquisitor. Linn. — Ibid. - indagator. Fab. — Ibid. Leptura rubro testacea. II. — V. Hétre. La larve vit dans le Pin. Leptura sanguinolenta. Gyll. — Ibid. Calomicrus pinicola, Duftschm. — Cette Chrysoméline vit sur le Pin. Adonia (Muls mutabilis. Scriba, — Ce Sécuripalpe vit sur le Pin. Muls. (150) Idalia (Muls) livida. Degeer. — Ce Sécuripalpe vit sur le Pin. Muis. Coccinella undecem punctata. Linn. — Ibid. quinque punetala. Lion. — Ibid. Harmonia (Muls) margine punetata. Schall. — Ibid. Myrrha (Muls) 18. guttata. Linn. — Ibid. Mysia (Muls) oblonga guttata. Linn. — Ibid. Anatis (Muls) ocellata. Linn. — Ibid. Vibidia (Muls) 12. guttata. Poda. — Ibid. Nomius (Muls) cruentatus. Muls. — Sous l'écorce. - Seymmus nigrinus. Kugel. — Ibid. discoideus. Schneid. — Ibid. Rhysobius litura. Fab. — Ibid. BÉMIPTÈRES. Pentatoma pinicola. Muls. — V. Génévrier. Il vit sur les Pins Anthocoris testaceus. Muls. — Cette Cimicide vit sur les Pins. Muils. DIPTÈRES. Cératopogon niger. Winnerz. — V. Chèvrefeuille. La larve vit sous l'écorce. W. Cecidomyia signata. Loew. — V. Grosciller. La larve vit dans les jeunes branches mortes, en société avec des larves de Coléop- tères. PIN MARITIME. (1) COLÉOPTÈRES. Bembidium nanum. Gyll. — Ce Carabique se trouve sous l'écorce des vieux Pins morts. P. Phlæopora reptans. Grav.— Ce Brachélytre vit sous l'écorce. P. ——- corticalis. Grav. — Ibid. P. (1) Cet article est extrait de l'introduction que M. Perris a publiée de l'histoire du Pin maritime, dans laquelle il a signalé un grand nombre d'observations nouvelles. (151) Homalota celata. Erich. — Ce Brachélytre vit sous l'écorce. P. Oxypoda analis. Gyll. — Ibid. P. Placusa pumilio. Grav. — Ce Brachélytre paraît parasite des Crypturgus pusillus et Ramulorum et des Podura lignorum. P. Omalium vile. Er. — Ibid. P. Pulium apterum. Guer. — Ibid. P. Ips ferruginea. Fab, — V. Hêtre. P. Rhysophagus depressus. Fab. — V. Hêtre. Il fait la guerre aux larves des Hilurgus piniperda et minor. P. Temnochila cœrulea. Oliv. — Ibid. La larve de ce Clavicorne attaque celles de l'OEdilis grisea et du Mélanophila tarda. P. Ditoma crenata. Fab. — Ibid. P. Aulonium bicolor. Herbst. — Ce Clavicorne dépose ses œufs dans les galeries du Tomicus laricis en pénétrant par le trou dont le Tomicus a perforé l'écorce, et ses larves dévorent celles de ce Xylophage. Brontes planatus. Linn. — V. Chêne. La larve est carnivore. P. Hypophlœus linearis. Gyll. — V. Orme. Cet Héléromère est parasite du Tomicus bidens ; il s'introduit dans ses galeries par le trou même que la femelle a creusé, et y dépose des œufs d'où naîtront des larves qui dévoreront celles des Tomicus. P. Sylvanus unidentatus. Fab. — V. Poirier. P. Lœmophlœus Dufourii. Laboulbène, — V. Clématite. P. Paramecosoma abietis. Payk. — Ce Clavicorne dépose ses œufs dans les nids des chenilles du Cnethocampa pithyocampa. Les larves s’y nourrissent des détritus de feuilles et des dépouilles qui y sont accumulées. P. Dermestes mustelinus. Er. — V. Hêtre. Mème observation. P. Platysoma oblonga. Fab. — V. Orme. La larve détruit celles des Æylurgus et des Tomicus. P. Teretrius flavicornis. Payk. — La larve de ce Clavicorne fait la guerre à celle du Crypturqus pusillus. P. Plegaderus cœsus. Fab. — V. Hêtre. Même observaiian P (152) Plegaderus discisus. Er. — V. Hêtre. Même observation. P. = saucius. Fab. — Ibid. P. Dorcus parallelipipedus. Linn. — Ce Lamellicorne dépose ses œufs dans les Pins morts. P. Chrysobothris solieri. Lap. et Gor. — V. Peuplier. Sur les vieux Pins. P. Melanophila tarda. Fab. — Ce Sternoxe vit sous l'écorce. Melanotus brunnipes. Germ. — Ibid. Eurythyrea micans. Fab. — V. Chêne. La larve de ce Sternoxe, que l’on trouve dans les maisons, pourrait bien vivre dans le bois équarri. P. Malachius balteatus. Chevr. — V. Lierre. Il fait sa proie des larves qui vivent sur les jeunes Pins. P. Dasytes ater. Fab. — Même observation. P. Thanasimus formicarius. Fab. — La larve de ce Térédile vit sous l'écorce et attaque celles de l'OEdilis grisea, du Melanophila tarda, du Rhagium indagator, du Monohammus gallo provin- cialis. P. Thanasimus quadrimaculatus. Fab. — La larve attaque une Tinéide. P. Trichodes alvearius. Fab. — La larve de ce Térédile est égale- ment parasite et vit sous l'écorce. P. Opilus mollis. Linn. — V. Chêne. La larve attaque les mêmes insectes que le Thanasimus formicarius. P. Anobium pertinax. Linn. — V. Lierre. La larve se trouve dans le bois équarri. P. Anobium abietis. Fab. — Ibid. longicorne. Kies. — Ibid. Ennearthron cornutum. Gyll. — Il vit sur le Boletus pini. P. Tomicus (Bostrichus) eurygraphus. Er.—Suppt. Ce Xylophage pénètre dans le bois comme une vrille, et va déposer ses œufs dans les couches ligneuses. P Tomicus {Bostrichus) bidens. Fab. — Supp.! Jl trace, de la base au sommet des jeunes Pins, ses galeries étroites. P. (153) Crypturgus pusillus. Gyll. — Ce Xylophage laboure l'écorce et perfore le bois. P. Crypturgus ramulorum. Pers. — Ibid. Hylurgus minor. Hartig. — V. Hêtre. Il se fait remarquer par ses longues galeries transversales. P. Hy!urgus piniperda. Linn. — P. Hylastes attenuatus. Er.—V. Pin mar. Il dépose ses œufs dans les arbres morts. S. ———— palliatus. Gylk — Ibid. —--—— angustatus. Herbst. — Ibid. Rhyncolus porcatus. Germ. — V. Pin mar. Suppl. Dans ses états de larve et d’adulte, il pratique dans le bois mort un réseau de galeries. P. ———— strangulatus. Perr. — V. ibid. P. Magdalinus carbonarius. Fab. — V. Vigne. La larve dévore l'écorce et s’introduit dans le canal médullaire. P. Pissodes notatus. Fab. — V. Pin sylvestre. La larve tracedans leliber ses sentiers sinueux. P. Hylobius abietis. Linn. — V. Saule. P. Ceutorhynchus Bertrandi. Perr. — V. Bruyère. On le trouve en secouant les Pins. P. ———-—— histrix. Perr. — Ibid. Spondylis buprestoïdes. Fab. — V. Pin sylvestre. Il dépose ses œufs sur les souches. P. Ergates faber. Linn. — V. Pin sylv. Même observation. P. Criocephalus rusticus. Linn.— V.Pin sylv. Même observation. P: … Hylotropes bajulus. Linn. —La larve de ce Longicorne vit dans le bois équarri. P. Aedilis montana. Serv. -— Ce Longicorne dépose ses œufs sur les souches. P. ——— grisea. Fab. — Ibid. Monohammus gallo-provincialis. Oliv. — V. Chêne. P. Rhagium indagator. Fab. — V. Aubépine. P. (154) Leptura rubro-testacea. Selig. — V. Hètre. La larve mine le bois mort dans toutes les directions et à toutes les profondeurs. P. Disopus pini. Linn. — V. Sapin blanc. Cette Chrysoméline se jette en foule sur les feuilles dont elle ronge à reculons le paren- chyme. P. Mysia oblongo punctata. Linn, — Ce Securipalpe dévore les Pucerons. P. Prionychus ater. Fab. — Il vit sous l'écorce et il dépose ses œufs dans le bois réduit en poudre. P. Helops caraboides. Panz. — V. Pommier. S. Hallomenus flexuosus. Payk. — Cet Hétéromère vit sur le Bole- tus pini. P. Xanthochroa carniolica. Gistt. — Il dépose ses œufs dans les arbres en décomposition. P. HYMÉNOPTÈRES. Urocera juvencus. Linn. — M. Perris s’est assuré que la larve est lignivore et qu'elle creuse à travers l'aubier sa galerie pa- rabolique. Lophyrus piceæ. Fab. — Cette Tenthrédine vit sur le Pin. P. Tenthredo limbata. Genil. — V. Groseiller. La fausse chenille seule de cette tribu vit dans le détritus. P. Pimpla instigatoria. Gruv. — La larve de cet A . est parasite du Pissodes notatus. P. Ichneumon motatorius. Vill. — La larve est parasite du Crioce- phalus rusticus. P. Vipio nominator. Fab. — La larve est parasite de l'Aedilis gri- sea et du Rhagium indagator. P. Formica pubescens. Fab. — Cette espèce établit ses fourmi- lières dans les souches vermoulues. P. ——— nigre. Linn. — Même observation. P. HÉMIPTÈRES. Aphrophora corticea. Germ. — V. Weigelia. La larve de cet (155) Homoptère s'enveloppe de flocons d'écume comme celle de l'A. spumaria. Apbis pini. Linn. — V. Cornouiller. LÉPIDOPTÈRES. Sphynx pinastri. Linn. — V. Sureau Lasiocampa pini. Linn. — T. Poirier. Cnethocampa pithyocampa. Lœw.— V. Charme. Tinea decuriella. Hubn. — V. Clématite. La chenille pénètre jusqu'au liber et détermine des écoulements de résine au milieu de laquelle elle vit et se métamorphose. P. Tortrix strobilana. Hubn. — V. Lierre. La chenille ronge la moelle des jeunes tiges. P. ——— buoliana. Fab. — Ibid. DIPTÈRES. Mycetobia pallipes. Meig. — V. Orme. Lapbria gilva. Meig.—V. Pistachier. Il dépose ses œufs sur les souches. P. ——— atra. Fab. — Même observation. Xylota pini. Perr. — V. Pin maritime. Sphærophoria tæniata. Perr. — La larve de cette Syrphide dé- xore l'Aphis pini. P. Toxonevra fasciata. Macq. Blephariptera serrata. Meig. — La larve de cette Muscide vit comme celle du Paramecosoma. P. Leucopis griseata. Sall. — La larve de cette Muscide dévore l'Aphis pini. P. Teremyia laticornis. Perr. — V. Erable. La larve vit de détri- tus. P. Homalura flavipes. Perr. — La larve de cette Muscidesenourrit des détritus produits par l'Anobium molle. Phora pusilla. Meiz. — Cette Muscide vit de détritus. P. ( 156 } PIN STROBUS. COLÉOPTÈRES. Pissodes strobi. Redtenb. — V. Pin. Silv. : LÉPIDOPTÈRES, Tortrix strobilana. Hub. —- V. Lierre. DIPTÈRES. Cecidomyia strobi. Kalt. In litt. — La larve vit dans les cônes. Winn. PIN CEMBRO. COLÉOPTÈRES. Tomieus cembræ. Heer. — V. Peuplier. SAPIN EPICEA. Salpingus piceus. Germ. — V. Aubépine. SAPIN COMMUN. COLÉOPTÈRES. Paramecosoma abietis. Payk. —-V. Pin maritime du suppl.Perr. Hylobius abietis. Fab, — V. Saule. Molorchus dimidiatus. Fab. — V. Saule. Muls. Callidium violaceum. Fab. — V. Aubépine. Muls. Hylotropus bajulus. Fab. — V. Pin mar. du suppl. Muls. Strangalia quadrifasciata. Fab. — V. Aune. Muls. Leplura rubrotestacea. Fab. — V. Hètre. Muls. ——— sanguinea. Fab. — Ibid. Idalia livida. Deg. — V. Hêtre. Muls. Mysia oblonga guttata. Linn. — V. Pin sylv. Muls. Anaties ocellata. Linn. — Aune. Muls. LÉPIDOPTÈRES. Euplocamus füsslinellus. Sulz. — La chenille de cette Tinéide vit dans les vieilles souches. Tinea fuliginosella. Lienig. — V. Clématite. (157 } LES PLANTES HERBACÉES D'EUROPE ET LEURS INSECTES. POUR FAIRE SUITE AUX ARBRES ET ARBRISSEAUX D'EUROPE, Par M. MACQUART, Membre résidant. INTRODUCTION. Depuis que j'ai publié l'ouvrage intitulé : Les Arbres et Arbris- seaux d'Europe et leurs Insectes, mes amis m'ont engagé à faire pour les plantes herbacées ce que j'avais fait pour les végétaux ligneux. Il leur a semblé que s’il était utile et intéressant de faire connaître les insectes qui vivent sur les arbres , en indiquant les moyens de détruire ceux qui y font des dégâts, il ne l'était pas moins de considérer les autres plantes sous le même rapport. A la vérité, les arbres, par leur grandeur, leur durée, leurs fruits, leur substance ligneuse , sont d’un ordre supérieur aux végétaux hérbacés, et leurs insectes, beaucoup plus nombreux , surtout à cause des écorces qui leur offrent des aliments et des retraites, nous inspirent de l'intérêt par la diversité et la singularité de leurs instincts; souvent aussi ils exercent des ravages qui ré- clament nos moyens de répression; mais, d'un autre côté, les plantes herbacées se recommandent par leur nombre beaucoup plus considérable, par une plus grande diversité dans leurs fa- milles et leurs espèces , par leurs graines, dont plusieurs, comme (158 ) celles des céréales, ont recu la grande mission de servir de prin- cipale nourriture aux hommes; par leurs feuilles qui en font la pâture des bestiaux ; et, d'après ces différentes considérations , les insectes qui s'y développent n'excitent pas moins notre cu- riosité , notre intérêl, ne nous causent pas moins de dommages, n'appellent pas moins notre vigilance à les combattre. Si les arbres élèvent dans les airs leurs grands dômes, leurs cimes majestueuses , s'ils dressent vers le ciel leurs immenses pyramides , s'ils se réunissent en vastes forêts sur la crête ou sur le flanc des montagnes, les plantes herbacées couvrent comme d'un manteau la nudité de la terre, elles s’agglomèrent en moelleux tapis de graminées pour former l'émail de nos prairies. Si la culture des arbres nous intéresse par les fruits qu’elle nous procure, par les matériaux qu’elle fournit à nos besoins, à notre industrie, à nos arts, par la part qu'elle apporte à la fortune publique et privée ; la culture des plantes herbacées, c'est-à-dire celle qui est le fondement de l’agriculture, nous importe infini- ment davantage en nous donnant notre pain, la pâture de nos bestiaux , en réunissant les hommes par les secours réciproques qu'elle exige, en constituant la base de la civilisation. Avec quel soin ne devons-nous pas observer les insectes de nos plantes cultivées, pour nous opposer à leurs déprédations, quand nous considérons qu'ils les attaquent toutes, qu'ils détruisent quelquefois des récoltes entières, qu'ils sont accusés de causer annuellement "ne perte de 200 millions à la France seulement , et que ces dévastations peuvent être au moins en partie prévenues , réprimées , par les moyens qu'indiquent la science ct l'expé- rience. Tandis que les arbres ne présentent dans le règne végétal qu’un certain nombre de genres disséminés dans les nombreuses classes qui le composent ; qu'ils constituent seulement deux de ces dernières , les Amentacées et les Conifères, les plantes herba- cées y occupent une place incomparablement plus considérable ; ( 159 ) elles forment seules un grand nombre de classes, des em- branchements même presqu'entiers. C'est ainsi que les Crypto- games, qui comprennent le cinquième des végétaux connus , n’offrent d'autres arbres que les Cicas ; que les Monocotylédones, aussi nombreux que les Cryplogames , ne comptent que les Pal- miers. Parmi les Dicotylédones, les Ombellifères , les Labiées, les Composées et beaucoup d'autres classes importantes ne sont com- posées que de plantes herbacées , et dans la plupart des autres, les arbres ne sont qu’en faible minorité. Par ces diverses considérations, nous pouvons dire que les plantes herbacées sont le peuple du royaume des végétaux , dont les arbres sont la noblesse et les Palmiers les princes, ainsi que les nommait Linnée. C'est surtout chez elles que nous devons étudier les phénomènes de la végétation dans toutes leurs par- ties, et dont nous considérerons surtout les harmonies qu'elles présentent entr’elles. RACINES. Les racmes fixent la plante au sol par leur tendance à y des- cendre, et elles y puisent les substances qui, conjointement avec celles que fournissent les feuilies, sont nécessaires à sa nutrition, à son développement et à sa propagation. Elles présentent les harmonies les plus remarquables entre le sol et la plante en se coordonnant à toutes les modifications , à toutes les exigences de l’un et de l’autre. Elles se ramifient en fibres chevelues chezla pauvre Bruyère, pour qu’elle ne perde rien de la faible couche d'humus qui lui suffit pour vivre et pour fleurir. Elles s’en- foncent en longs et robustes pivots dans le sol profond qui sup- porte le Chêne, Celui de qui la tête au ciel était voisine Et dont les pieds touchaient à l'empire des morts. Elles s'étendent horizontalement en longs câbles dans les Peu- ( 460 ) pliers de nos rivages qu'elles raffermissent contre les empiètements des eaux. Dans les Cyprès chauves qui bordent les fleuves de l'Amé- rique septentrionale il sort des racines supérieures, à quelque distance de l'arbre, un cercle d’excroissances coniques, creuses, résistantes, qui font l'office d'estacade contre la violence des eaux et le choc des glaces. Chez les plantes herbacées, les racines se gonflent quelquefois de substances succulentes qui fournissent, comme la graisse à l'animal, une nourriture supplémentaire au végétal, et qui de- vient , par les prodiges de la culture, une ressource précieuse pour l'homme et les bestiaux. Telles sont les racines potagères , le Navet à la chair tendre et douce, la Carotte nourrissante et parfumée , l'industrielle Betterave que l’art transforme en sucre, en alcool. D’autres fois elles s’enflent cà et là en tubercules farineux , comme la Pomme de terre , si précieuse encore , malgré le fléau opiniâtre qui enlève aux pauvres une partie de leur subsistance. L'on pourrait aussi considérer comme des racines subissant d’autres modifications, les bulbes des Liliacées , si les maîtres de la science n'avaient pas jugé que c’étaient des bourgeons conte- nant l’ébauche d'une jeune tige, et dont les écailles sont les feuilles transformées. Elles nourrissent au moins la plante de leur substance , comme les tubercules, et nous fournissent d'utiles substances alimentaires, telles que l'Ognon, qu'adorait l'Egypte, et l’Aïl, dont raffole la Provence. Quoique les racines servent surtout à la nutrition des plantes , elles servent souvent aussi d’auxiliaires à la propagation par les bourgeons qui s'y développent, tels sont les drageons des arbres, les yeux de la Pomme de terre, du Topinambour, du Dahlia, les cayeux des plantes bulbeuses, par lesquels la nature, prodigue de la vie, ajoute encore à toute la fécondité de la multiplication sexuelle. Les racines nous intéressentsouvent encore par leurs propriétés (161) salutaires. Quoique privés plus ou moins de l'influence de l'air, de la lumière, des chauds rayons du soleil , leurs sucs ont des vertus puissantes qu'égalent rarement les autres parties des plantes. Telles sont celles de la Rhubarbe , de l'Ipécacuanha, de la Guimauve, de la Réglisse, du Chiendent, et de bien d’autres qui soulagent l'humanité, sujette à tant de maux. Les insectes qui vivent sur les racines sont nombreux et sou- vent nuisibles. C'est ordinairement dans l'état de larve qu'ils exercent leurs ravages souterrains dont nous ne voyons souvent les effets que par la mort des plantes. Quelques-uns les attaquent toutes, comme la larve du Hanneton , la chenille de la Noctuelle (Agrotis segetum }, le Grillon-taupe. Nous pouvons souvent dé- couvrir leur marche ténébreuse d’une plante à une autre. D’autres sont attachés exclusivement à une seule espèce, tel que le Taupin (Agriotes segetis), qui dévaste nos champs de blé. TIGES. La tige, qui est la partie ascendante du végétal, et qui sert de support aux rameaux, aux feuilles , aux fleurs et aux fruits, est à la fois le chaume du Froment , la hampe du Lis , la tige du Noisetier, le tronc du Chêne. Herbacée , elle ne voit qu'un prin- temps et plie au moindre zéphyr ; ligneuse, elle vit des siècles et résiste aux efforts de la tempête. Herbe tendre ou bois incorrup- tible , remplie d’une moelle succalente, ou formée de zones con centriques, couverte d’un duvet moelleux ou d’une rugueuse écorce de l'épaisseur d’un cheveu ou d’une tour, la tige nous présente toutes les couleurs, les densités, les dimensions, les formes que l'imagination peut enfanter. Nous lui devons le four- rage de nos bestiaux , le chaume de nos toits , le lin et le chanvre de nos tissus, le bois de nos constructions , les écorces qui nous fournissent une multitude de substances utiles : le tan, le liége, la gomme , la résine, les parfums , le papier, la canelle, le quin- quina , et jusqu'aux pirogues des populations boréales. 11 (162 ) L'une des harmonies végétales les plus sensibles consiste dans les nœuds qui fortifient de distance en distance les tiges d’un cer- tain nombre de frêles plantes, qui se forment à l'insertion des feuilles , et qui présentent une disparité dans la contexture de cette partie du végétal. C'est ainsi que les Céréales , qui nour- rissent le genre bumain, résistent aux vents qui les agitent comme les vagues de l'Océan. Les insectes qui vivent à la surface ou à l'intérieur des tiges présentent une grande multitude d'espèces dont les instincts sont pleins de diversité et d'intérêt. Nous avons parlé des Xylophages qui se développent dans l'écorce des végétaux ligneux, dont les galeries, dirigées dans tous les sens, y causent de grandes altéra- tions, et qui ont recu la mission de hâter la dissolution des arbres dépérissants par l’âge ou les maladies ; nous avons mentionné les Longicornes qui vivent dans l’aubier, le Cossus qui pénètre dans le bois, les Cigales, les Pucerons, les Gallinsectes, qui, vivant à la surface, enfoncent leur trompe sous l’épiderme pour en pomper les sucs. Un grand nombre d’autres rongent la tige des plantes herbacées et y commettent de grands désordres. Tels sont les Chlorops, les Agromyzes , les Cephus, les Saperdes, qui infestent nos céréales et en sont les plus grands déprédateurs. D’autres ne se servent des tiges que pour y déposer diversement leurs œufs, de manière que les larves, après leur éclosion, se répandent sur le feuillage. Ainsi les Tenthrèdes placent les leurs dans les in- cisions pratiquées au moyen de la scie qu'ils portent à l’extré- mité du corps ; le Bombyx neustria dispose les siens en anneaux sur les jeunes branches de nos pommiers. Les épines, qui garnissent les tiges d’un assez grand nombre de végétaux . et qui sont considérées comme des rameaux ou des feuilles avortées , ont sans doute un rapport direct avec l’écono- mie végétale ; mais la science physiologique n’a pu le découvrir encore. Elles ont au moins une destination protectrice en faveur des animaux faibles contre les forts : c'est sous l'abri des buissons ( 163 ) épineux du Prunelier, de l’Aubépine, de l'Ajone, que le lièvre, le lapin se blottissent pour échapper à leurs ennemis ; c'est au pied du Chardon que le charmant oiseau qui lui doit son nom place son nid entouré d’épines , comme il le garnit intérieurement de la bourre moelleuse des graines pour garantir et réchauffer les fruits de ses amours. Il a été émis sur les fonctions des épines une opinion bien plus scientifique. M. Astier, de Toulouse, les regarde comme des organes chargés d'entretenir constamment dans la plante la quantité de fluide électrique nécessaire à l’har- monie générale de son existence, et de plus, comme ayant la puissance d’écarter la foudre et d'établir l'équilibre entre la terre et les nuages orageux. Les expériences sur lesquelles l’auteur fonde son opinion sont plus curieuses que concluantes FEUXLLES, Les feuilles, ces appendices latéraux des tiges, élégantes expan- sions du tissu cellulaire, dans lesquelles la nature réunit à un suprème degré l’unité de composition à la diversité de la forme, nous présentent une multitude de phénomènes et d'harmonies pleins d'intérêt. Elles sont un des organes principaux de la végé- tation puisque par la théorie de la métamorphose, devinée par Linnée, reproduite par le poète botanisie Goethe, et adoptée gé- néralement , les fleurs et les fruits ne sont que des feuilles trans- formées. Les feuilles ont pour fonctions principales de mettre le végétal en contact avec l'atmosphère, d’absorber les gaz qui servent à l'éntretien de sa vie, et d'exhaler les gaz inutiles à son existence, c’est le phénomène de la respiration qu’elles opèrent ainsi. Le jour, elles absorbent l’acide carbonique de l'atmosphère, en retiennent le carbone et exhalent l'oxygène; la nuit, elles absorbent de l'oxygène et dégagent de l'acide carbonique. A la respiration les feuilles joignent la transpiration, souvent (164) insensible, mais se manifestant souvent aussi par un fluide qui s'amoncelle à la surface , résineux sur les feuilles de la Fraxinelle, visqueux sur celles du Martynia, sucré sur les Tilleuls, salé sur les Tamarise et autres plantes du bord de la mer, acide sur le Pois chiche, fétide sur le Madia, vésiculeux , brillant, chargé de soude dans la Glaciale. La disposition des feuilles est soumise à une loi remarquable d’après laquelle elles sont rangées en spires régulières autour des rameaux. Le plus souvent, en partant d’une feuille quelconque et en parcourant la spirale, on trouve une sixième feuille au-des- sus de la première. Dans d’autres cette disposition est plus simple ou plus composée. Les feuilles présentent dans leurs formes des modifications qui contribuent à caractériser les grandes divisions des plantes Phané- rogames. Dans les Monocotylédones elles sont toujours simples et sans dentelures; dans les Dicotylédones apétales elles sont également simples, mais souvent dentelées ; dans les Monopétales elles le sont encore, mais fréquemment découpées ; dans les Poly pétales enfin elles sont sénéralement composées. La position des feuilles entr'elles offre aussi quelque coordina- tion avec les autres caractères botaniques; c'est ainsi qu’elle est toujours alterne dans les Monocotylédones , et qu'assez générale- ment elle est uniforme dans les familles naturelles. Les nervures des feuilles présentent deux dispositions princi- pales : elles naissent toutes de la base et sont parallèles entr'elles dans les plantes Monocotylédones ; elles partent obliquement de ja nervure moyenne dans les Dicotylédones , se divisent et se sub- divisent en s’épanouissant sur le limbe et forment un réseau d’une ténuité extrême. La forme des feuilles, le plus souvent elhptique et plus ou moins dentelée ou divisée suivant le nombre et la direction des acrvures , est principalement déterminée par la quantité de paren- chyme qui s'étend entre ces dernières, comme nous le voyons (165 ) par la végétation d’une plante dont les divisions des feuilles sont d'autant plus profondes qu'elle manque de vigueur. Un des phénomènes les plus remarquables que présentent les feuilles consiste dans l’excitabilité qui se manifeste chez plusieurs , phénomène analogue à celui de l'irritabilité que la matière nerveuse produit dans les animaux inférieurs. Ainsi, dans la Dionée, une mouche vient-elle à se poser sur la surface supé- rieure d’une feuille, les deux lobes se rapprochent aussitôt, croisent les cils de leurs bords, et l'insecte est pris sans pouvoir s'échapper. La Sensitive contracte les siennes à la simple approche d’un corps étranger ; le Sainfoin animé, Hedysarum gyrans, est plus sensible encore, et sa découverte devait appartenir à une femme, Lady Monson. C’est en parcourant les bords du Gange qu'elle a observé cette merveille du règne végétal. Des trois folioles qui composent la feuille la terminale s'incline alterna- tivement à droite et à gauche et cette oscillation se produit depuis lelever jusqu'au coucher du soleil. Les folioles latérales ont un double mouvement continuel, qui s'exécute sans l'intervention apparente d'aucun stimulant étranger : elles tournent sur leur char nière, chacune à son tour et par saccades ; l’une s'élève rapidement pendant que l'autre s’abaisse et, en même temps, elles se rapprochent et s'éloignent de la foliole impaire. Ces mouvements ont lieu la nuit comme le jour ; mais pendant la nuit, toute la feuille s’abat et prend une rigidité qui semble contraster avec la mobilité des folioles latérales. Les profondes investigations de la physiologie végétale n’ont pu encore arracher à la nature son secret sur ce phénomène mystérieux. Parmi les particularités que présentent les feuilles, nous men- tionnons une modification qu’elles subissent en harmome avec le besoin des végétaux. Dans un assez grand nombre de plantes et particulièrement chez les Papilionacées, à feuilles composées , les tiges sont si grêles qu'elles ne peuvent se soutenir qu'à l’aide de support; alors la foliole terminale se transforme en vnille qui (166 ) s’enroule aux corps voisins. Quand l'appui est inutile, la foliole conserve sa forme normale. Les feuilles présentent surtout de l'intérêt par leurs harmonies avec tout ce qui les entoure. Elles en ont avec la lumière du jour, qu'elles recherchent en se placant généralement de manière à être en contact avec elle. Quand le soleil descend sous l'horizon les plantes sommeillent, suivant l'expression de Linnée, chacune à sa manière, les feuilles prenant diverses positions pendant la nuit. Dans l’Arroche, elles s'appliquent étroitement l’une à l’autre ; dans l’Ænothère, elles se dressent et enveloppent la tige ; dans la Mauve du Pérou, elles s’enroulent autour des bourgeons ; dans la Luzerne, elles se relèvent, se réunissent par le sommet seulement , et se courbent en-dedans pour abriter les fleurs ; dans le Mélilot, les folioles sont réunies à leur base pendant qu'elles sont ouvertes et écartées à leur sommet ; dans le Lupin, elles se renversent et se couchent ; dans la Casse du Maryland, le pétiole commun se dresse vers la tige tandis que les folioles s'abaissent, en contournant leurs pé- tioles propres de manière à présenter la surface supérieure en- dessous, puis à s'appliquer lune contre l’autre età pendre vers la terre; dans le Févier, les feuilles se rapprochent, elles se couchent sur le pétiole et le cachent entièrement. Au retour du soleil sur l'horizon, tous ces feuillages en ressentent l'influence et re- prennent leur position diurne. Les feuilles se mettent en harmonie avec l'eau en plusieurs ma- nières. Celles qui flottent à la surface, comme dans le Nymphea, au lieu d’avoir les stomates (pores) à la surface inférieure, les ont a la supérieure. Les feuilles qui sont dans un état naturel d'im- mersion sont dépourvues de stomates et même d’épiderme, et elles ne se composent que de parenchyme. Parmi les harmonies aquatiques des feuilles, pourquoi ne rap- pellerions-nous pas celles qui ont été décrites avec tant de charme par Bernardin de Saint-Pierre? Pourquoi ne nous prête- (167) rions-nous pas à voir les végétaux des montagnes, l’Orme, le Bouleau, le Buis, recevoir l'eau des pluies dans leurs feuilles faconnées en cuillers , la laisser écouler par les pétioles creusés en gouttière, jusqu'aux branches et au tronc d'où elle arrive aux racines ? Les harmonies que les feuilles présentent avec les animaux , et surtout avec les insectes, sont plus remarquables encore. Par la délicatesse de leur contexture, elles sont éminemment appropriées à ces petits êtres, soit pour être leur séjour habituel, soit pour leur servir d’aliment, soit pour fournir des matériaux à leurs in- dustries. C’est sur les feuilles qu'ils se livrent le plus souvent à leurs évolutions, à leurs ruses, à leurs guerres et à leurs amours. Dans leur voracité, les innombrables chenilles dépouillent quelque- fois des forêts entières; une multitude de petites larves viventen mi- neuses entre lesdeux membranes des feuilles dont elles rongent le parenchyme ; les Cigales, les Pucerons, les Psylles, les Cochenilles, les Kermès en pompent les sues avec leur trompe; les Cynips, les Cécidomyies déterminent par la succion l’afflux de la sève et la production d’excroissances galliformes qui présentent le singulier phénomène de l’ordre, de la régularité, de la convenance, pro- venant d’une déviation accidentelle des sucs végétaux, d’une perturbation, d’un désordre dans l'organisme. Les insectes trouvent dans les feuilles des matériaux inépui- sables pour exercer leur industrie, surtout dans la construction du berceau de leurs petits ; les chemlles en mêlent souvent des fragments à leur soie pour tisser le cocon dans lequel elles passe- ront à l’état de chrysalide ; les Teignes en font entrer des parcelles dans leurs ingénieux fourreaux; les Charencons les roulent en cylindre, en cornet, les plient industrieusement en valise, pour y cacher leurs œufs. FLEURS. La fleur est à la fois l’ensemble des organes qui concourent à la reproduction et la création la plus gracieuse qui soit sortie des (168 ) mains divines. Tandis qu'aux yeux du botaniste elle est J'assem- blage de feuilles transformées (1), elle est pour le reste du genre humain une délicieuse combinaison de tout ce qu'il y a de plus délicat, de plus moelleux, de plus suave, de plus brillant, de plus élégamment nuancé. Chargée de la fonction la plus impor- tante, elle est le siége des organes reproducteurs. Appelée à s'épanouir à toutes les températures, dans tous les sites, à toutesles latitudes et à remplir sa destination en s'harmonisant avec toutes les modifications de la lumière , à tous les rayons du soleil , elle prend toutes les couleurs, toutes les formes, toutes les combi- naisons sans cesser d'être symétrique , élégante, harmonieuse. Les couleurs des fleurs où se combinent la pureté , l'éclat, les nuances les plus délicates , les dessins les plus suaves , tous les effets les plus propres à charmer les yeux , sont en même temps coordonnées à la fécondation et elles la favorisent par les effets que produisent sur les fleurs les rayons du soleil , suivant leurs couleurs. Si on enferme le réservoir d'un thermomètre très-sen- sible au milieu d’une Rose rouge, et un autre dans une Rose pâle, toutes deux semblables pour la grosseur et l'épaisseur de leurs pétales, toutes deux également exposées au soleil, le premier ther- momètre montera plus haut que le second. M. Marrey, partant des observations faites par M. W. Herschell sur la température propre aux différents rayons du spectre solaire, s'est assuré que, selon la couleur dominante du disque floral, la température de la plante était en rapport exact avec celle que présentent les mêmes couleurs fournies par le prisme , de sorte que la tempéra- ture de l'atmosphère étant de 12.° 22, centigrades, par exemple , celle du Calla Æthiopica qui est du blanc le plus pur, est de 12,0 78.La couleur blanche étant celle qui produit le plus de cha- (x) La fleur est un assemblage de plusieurs verticilles (ordin. 4) constitués par des feuilles diversemeut transformées et disposés les uns au-dessus des autres en étages tellement rapprochés que les intervalles ne sont pas distincts. ( 169 } leur colore plus souvent que les autres les fleurs des climats septentrionaux et celles qui éclosent dans les saisons les plus froides, comme les Perce-Neige , les Narcisses, les Muguets. Les couleurs foncées , qui réfléchissent peu la lumière, appar- tiennent généralement aux fleurs des contrées et des saisons chaudes, et il n'existe pas de fleur entièrement noire , parce que ses pétales sans réflexion lui seraient inutiles. Les formes des fleurs allient sans doute également leur beauté à l'utilité ; mais cette dernière qualité n’a pas encore été con- statée par des expérienses rigoureuses. Nous en sommes encore sous ce rapport au système séduisant de Bernardin de St.-Pierre , développé avec tant de charme et d’après lequel les fleurs se mo- difient en réverbères pour réfléchir la chaleur, ou en parasols pour s’en préserver . Les combinaisons et les agrégations des fleurs contribuent sou- vent à leur beauté plus encore que leurs formes et leurs couleurs. Rien n'égale la diversité de ces agrégations en bouquet, en thyrse, en corymbe, en grappe, en épi, en ombelle, en fasci- cule, en verticille. La grâce de ces dispositions laisse loin derrière elle l’art le plus exercé des bouquetières. Plusieurs de ces combinaisons semblent affectionnées par la nature plus que d'autres, et son! répandues avec profusion. Telles sont les fleurs en ombelle et surtout les fleurs composées. Les fleurs en ombelle, dont le nom comme la forme rappelle l'image d'un parasol, présentent une agrégation d’une multitude de petites fleurs dont les unes occupant le centre ont les pétales également courts , et les autres, situées à la circonférence , ont ceux du côté extérieur allongés , disposition qui leur fait réfléchir les rayons du soleil , et qui favorise la fécondation. Les fleurs composées , qui sont si nombreuses qu’elles com- prennent la dixième partie du règne végétal, c'est-à-dire 9,000 espèces, sont des agrégations de fleurons formant un disque : souvent entouré de pétales en. forme de rayons , comme dans les (170 ) Päquerettes, les Dahlias. Ces fleurons, ne contenant ordinairement, les uns que des étamines, les autres que des pistils , il en ré- sulte que les fonctions reproductrices ne sont remplies que par la fleur dans son ensemble. On l’a comparée à une cité dont les habitants , resserrés sur un étroit espace , ont constitué une véri- table société d'assistance mutuelle , ayant pour but la conserva- tion de l'espèce (1). Les fleurs présentent un grand nombre de phénomènes remar- quables tels que production de bruit, développement de cha- leur, dégagement de lumière et surtout les particularités qui sont relatives à la reproduction ; on peut mentionner aussi l’Hor- loge de Flore qui montre l'inégalité des heures de la floraison, et le Sommeil des plantes que nous avons signalé dans les feuilles et qui se manifeste aussi dans les fleurs. Les unes se penchent demi-closes vers la terre : Geranium ; d'autres se ferment complè- tement : Oxalis versicolor ; d'autres se renversent simplement : Renoncule. L’Horloge de Flore est réglée par les fleurs ainsi qu'il suit : à trois heures du matin s'ouvre le Salsifis; à quatre, la Cupidone; à cinq, le Pavot; à six, l'Épervière; à sept, le Nymphea ; à huit, le Mouron; à neuf , le Souci; à dix, la Glaciale ; à onze, les Mauves ; à midi , toutes les fleurs qui ne s’épanouissent qu'au soleil le plus éclatant ; à quatre et cinq heures du soir, les Belles de nuit; à six heures, les Geraniums du Cap ; à sept , la Ga- lanthine de nuit ; à huit , une Ficoïde; à neuf, le Silène noc- turne ; à dix, le superbe Cactus à grandes fleurs. Plusieurs fleurs s'ouvrent ou se ferment selon les viscissitudes atmosphériques , elles les annoncent quelques heures d'avance , et ajoutent un Baromètre à l'Horloge de Flore. Aïnsi le Laitron de Sibérie , fermé le soir, présage une journée sereine ; si ses (a) Le Maout , règne végétal (14) fleurs sont ouvertes , il pleuvra le lendemain. Le Souci pluvial , fermé le matin, annonce un jour pluvieux ; mais cette plante se trompe quand l'atmosphère est chargée d'électricité , et sa fleur reste ouverte pendant les pluies d'orage. Un exemple de bruit produit par les fleurs est fourni par la Grenadille bleue qui, la nuit, produit un effet semblable au mouvement d’une montre. Parmi les fleurs qui développent de la chaleur je citerai l'Arum d'Italie dont le spadice (1) s’échauffe, au moment de la fécondation, jusqu'à 40 degrés. Les fleurs de la Fraxinelle sont chargées d'une multitude de petites glandes d'où s’exhale pendant les chaudes journées du printemps un fluide volatil qui, le soir, devient si abondant autour de la plante qu'il s’enflamme et répand une iueur purpurine lors- qu'on en approche une lumière. Nous devons la connaissance de ce phénomène à Mile. Élisabeth Linnée dont l'esprit d'observa- tion et la piété filiale la rendirent digne de son illustre père. Elle fit connaître également la propriété qu'ont les fleurs de la Capu- cine de lancer des étincelles phosphoriques pendant le crépus- cule. La même singularité a élé observée depuis sur les fleurs du Souci. Les particularités les plus remarquables qui se produisent dans les fleurs sont les phénomènes relatifs à la reproduction. Ceux qui ont été observés sont en grand nombre; ceux qui ne l'ont pas en- core été sont sans doute bien plus nombreux encore. Ils consistent presque tous dans les mouvements que l’excitabilité détermine dans les étamines et les pistils. Nous nous bornerons à mention- ner les suivants : Les fleurs renversées ont généralement le pistil plus long que les étamines , de sorte que le pollèn tombe sur le stigmate. Pen- (1) Le Spadice est une colonne qui occupe le centre de la fleur. (172 ) dant la floraison des Pins et des Sapins, on apercoit à leur sommet comme un léger nuage de pollèn. Nous voyons dans les fleurs des Graminées des mouvements très-prononcés , surtout dans celles du Seigle, au temps où elles s’épanouissent; le matin, lorsque Je soleil paraît sur l'horizon, les trois anthères s'élèvent, s’agitent au-dessus des stigmates, se renversent l'une après l’autre, s'ouvrent , et le pollèn s'échappe. Les fleurs de plusieurs Liliacées telles que les Amaryllis , les Pancratium , ont les anthères fixées le long de leurs filets et pa- rallèlement au pistil, avant leur épanouissement. Lorsque la flo- raison est complète, ces anthères prennent une situation horizon- tale, pivotent sur l'extrémité qui les porte, et présentent au stigmate le point par où le pollèn doit se répandre. Le Collinsonia du Canada a ses deux étamines divergentes et fort écartées. Le pistil placé entr'elles se fléchit d’abord vers . l’une jusqu'à ce qu'il la touche ; il se retire quelque temps après, et se fléchit du côté opposé pour s'appliquer sur l’autre. (Deleuze.) La Nielle de Damas a les pistils beaucoup plus longs que les étamines qui entourent la base de la fleur. Dès que les anthères sont prêtes à s'ouvrir, ils courbent leurs sommets en forme de cornes de bélier pour se plonger au milieu d'elles, et reprennent ensuite leur première position. Les dix anthères qui terminent le cylindre des étamines dans les fleurs du Genêt à balais sont sur deux rangs égaux , éloignés l'un de l’autre. Le rang inférieur parvient à la maturité avant le supérieur au milieu duquel le stigmate est placé et retenu par les pétales ; mais lorsque le pistil a acquis assez de force pour les écarter , il se roule comme un cor de chasse, et plonge son som- met dansles anthères inférieures ; s’allongeant ensuite, il vient se placer dans les supérieures , mûres à leur tour. Les fleurs de l'Épine-Vinette montrent une excitabilité ex- trême dans leurs étamines qui, au moindre contact, au frôlement même des ailes d’un insecte , se dressent vivement du fond des pétales, et se jetent sur le pistil. (48) Chez les plantes aquatiques la fructification s'opère avec des phénomènes particuliers plus ou moins remarquables et qui ont quelquefois de l’analogie avec ceux de l'instinct animal. La fé- condation a lieu au-dessus de la surface des eaux , sans doute afin que le pollèn pulvérulent des étamines puisse se disséminer dans l'air; mais la maturation des graines s’accomplit au sein des eaux, etil en résulte que les fleurs, avant d'éclore, montent à la surface et s’immergent ensuite par des procédés très variés. Les Nymphœa, ces reines des eaux, qui joignent à leur extrême beauté des propriétés alimentaires, des vertus salutaires et même un caractère sacré qui les faisait adorer des Egyptiens sous le nom de Lotus , les Nymphæa élèvent leurs fleurs au-dessus de leurs larges feuilles dès les premières heures du jour, et les re- tirent vers le soir. Les Utriculaires ont leurs feuilles munies de vésicules à oper- cule mobile. Avant la floraison ces vésicules contiennent un mucus plus pesant que l’eau , qui tient les feuilles submergées, plus tard , un gaz léger remplace le mucus qui sort en soulevant l'opercule, la plante s'élève à la surface, et la floraison s'opère ; ensuite la plante sécréle denouveau du mucus dans les utricules et elle redescend au fond des eaux où ses graines mürissent et se resèment. L'intelligence souveraine qui se décèle dans ce phénomène se manifeste bien autrement dans la floraison de la Valisnérie, plante aquatique et dioïque. Les fleurs à pistils sont portées sur un pédoncule fort long, roulé en spirale au fond de l'eau. Lors- qu'elles sont au moment de s'épanouir, la spirale se déroule jusqu’à ce que la fleur soit parvenue à la surface. Les fleurs à ‘élamines sont très-petites, très-nombreuses et portées sur des épis qui sont submergés ; mais à l’époque où elles éclosent elles se détachent , montent à la surface, y flottent, et leur pollèn parvient aux fleurs à pistils qui bientôt après rentrent au fond de l'eau et mûrissent leur semence (174) Tous ces mouvements exécutés par les étamines et les pistils ont bien de l’analogie avec ceux que l'instinct vital produit dans les animaux inférieurs ; ils sont également coordonnés aux fonc- tions de ces organes. Les fleurs présentent avec les insectes des harmonies moins nombreuses que les feuilles, mais aussi dignes d'attirer notre attention. Comme elles sont investies de fonctions plus impor- tantes, comme une seule d’entr’elles contient souvent les germes nombreux d'une nouvelle génération, elles ne sont pas abandonnées à la voracité de ces petits animaux, exposées à une destruction complète ; au moins n'est-ce que rarement qu'elles en sont dévo- rées; elles n’en offrent pas moins des aliments à de nombreuses tribus ; mais ce sont les sucs de leurs nectaires qui leur sont enlevés , sans en éprouver de dommage. Elles nourrissent la plu- part des insectes munis de trompe, les immenses essaims de Mouches, les Papillons qui viennent butiner au fond de leurs corolles. Elles fournissent aussi leur pollèn aux Abeilles qui le convertissent en cire. FRUITS. Le fruit ou carpelle qui, en théorie, est une feuille trans- formée, repliée sur les bords, est en même temps la réunion de l'ovaire devenu le péricarpe (l'enveloppe), et de l’ovule devenu la graine; le fruit est le but dernier de la végétation, le point de départ d’une autre génération. Son importance est attestée par les soins infinis avec lesquels la Providence le protége dans son accroissement. Du moment qu'il se forme, tous les sucs qui nour- rissaient également toutes les parties de la fleur se dirigent, se concentrent sur l'ovaire, l’alimentent , le développent et le mû- rissent. Ses modifications innombrables nous présentent les formes , les couleurs, les parfums, les saveurs les plus suaves. Aux fruits de nos arbres et arbrisseaux dont nous voyons chaque (175) année se dérouler la guirlande savoureuse viennent se joindre ceux de nos plantes herbacées : la Fraise printanière, délicieuse, salubre, le Melon parfumé qu'enflent les chaleurs de l'été pour ra- fraîchirnotre sang enflammé; l’Ananas, plus beau encore qu'il n’est excellent, et qui, trouvant dans nos serres chaudes Ja température de l’Inde, y mürit comme la Goyave succulente aux Antilles , le Pamplemousse à l'Ile-de-France, comme la Noix du Cocotier qui fournit le lait et le beurre, le Palmier qui donne le vin, l'Arbre à pain et le fameux Lit-Chi, délices des Chinois. Les fruits ont été doués de toutes ces qualités nutritives et sa- lutaires, sans doute parce qu'ils étaient l'unique aliment destiné à l’homme sorti des mains de son Créateur ; ils sollicitaient sa main par la séduction de tous ses sens; ils s’adaptaient à tous ses besoins ; ils étaient en harmonie avec la simplicité, le calme , la mansuétude de ses goûts. Ils ne lui coûtaient aucun effort , ils le laissaient en paix avec les animaux sur lesquels il exerçait un bienveillant empire. Dans les bosquets d'Eden, nos premiers parents , Délices l’un de l’autre, honneur du geure humain Erraient parmi les fleurs en se donnant la main, Grâce aux soins journaliers-de leurs doux exercices , Leur soif a ses plaisirs, leur faim a ses délices ; Simple était leur festin : les arbres complaisants Eux mêmes de leurs fruits leur offraient les présents : Et s'inclinant vers eux les branches tributaires Font hommage à leur roi de ces dons volontaires. (1) (x) So hand in hand they pass’d, the loveliest pair That ever since in love’s embraces met, . Au And after no more toil Of their sweet gard'ning labor than suflic'd To recommend cool zephyr, and made ease. More casy, wholsome thirst and appetite (1%) Les fruits et les graines présentent encore un grand intérêt dans les moyens de dissémination dont ils sont pourvus et qui sont admirablement en harmonie avec la station naturelle des plantes. Ceux qui appartiennent aux plaines sont emportés au loin surtout par les oiseaux qui dispersent les noyaux, les baies, les glands, les faînes, les chataignes. C’est ainsi que le Geai, Picus glandarius, est spécialement chargé de semer le Chêne; le Bec croisé, de transporter le Pin en extrayant les pignons des cônes qui les renferment, au moyen de ce bec en apparence difforme , mais admirablement adapté à cette destination. D’autres graines sont renfermées dans des enveloppes élastiques qui, au moment de la maturité, s'ouvrent avec explosion, et les lancent dans l’espace; telles sont la Balsamine, le Concombre sauvage, le Genêt à balais. D'autres encore sont hérissées de crochets ou couvertes de substances cotonneuses de manière à s'attacher aux animaux qui les touchent et qui les transportent avec eux, comme les graines de la Bardane, de la Clématite, de l’Aïgremoine. Les graines des plantes riveraines sont conformées pour se dis- séminer en voguant. Elles suivent les courants des ruisseaux, des fleuves, des mers mêmes, jusqu'à ce qu'elles abordent sur des côtes quelquefois lointaines ; elles surnagent confor- mées en bateau, en gondole, en radeau. Ainsi naviguent celles de la Capuëine munies de leur quille ; celles du Fenouil creusées en canot; les capsules du Martynia qui se relèvent en pirogues ; les étroites gousses du Mimosa qui s’allongent en esquif; les gros fruits du Cocotier sont entraînés par les courants des mers vers des rives étrangères. More grateful , to their supper fruits they fell, Nectarine fruits, which the compliant boughs Yeided them, side long as they sat recline, On the soft downy banck damask’d with flowers. Paradise lost. (477 ) Les végétaux des montagnes , soumis également à la loi de la dissémination , ont des graines coordonnées à l'air , aux vents chargés de les disperser. Comment pourrait-on méconnaître cette destination dans toutes celles dont les aigrettes légères sont fa- connées en parachute et remplissent toutes les conditions pour les porter longtemps dans les airs. Il en est de même de celles qui sont munies d'ailes membraneuses , comme celles de i Érable, du Tilleul, de l'Orme, de l’Aristoloche , qui volent au loin portées par les vents. Celles de ce dernier arbrisseau ne sont pas les moins remarquables par toutes les péripéties qu'elles éprou- vent avant leur maturité et leur dispersion à l’aide d'une mem- brane papyracée qui fait défaut, comme inutile, aux grames avortées. A toutes ces harmonies joignons celles que les fruits et les graines présentent avec le règne animal. Autant nous avons vu les fleurs interdites pour ainsi dire aux animaux, ou ne leur per- mettant que d'innocents larcins, autant les fruits leur sont abon- damment accordés pour être leur principale nourriture. La nature se montrait avare des fleurs dont une seule produit jusqu’à 500 graines (1) ; elle est prodigue des graines qu'elle a multipliées à l'infini, afin d’en faire à la fois un vaste banquet pour les ani- maux , et d'obéir au précepte divin : « Croissez et multipliez. » Les insectes qui se nourrissent de graines nous causent des dommages qui réclament tous nos soins pour en atténuer la gravité. La Calandre du blé, le plus redoutable de ces dépréda- teurs , infeste nos greniers. La femelle pénètre danslestas de blé, dépose un œuf sous la surface d’un grain qu’elle a piqué, ayant l'instinct de boucher l'ouverture d’une sorte de gluten qui la rend imperceptible. La larve éclot, ronge la substance farineuse , en occupe l’espace à mesure qu’elle croît, de manière à le remplir (x) Le Pavot. 12 (178) complètement quand elle a atteint le terme de son développe- ment. Elle subit ses métamorphoses dans sa demeure réduite à une mince pellicule et elle en sort en y perçant une ouverture de sa trompe. Les générations se succèdent si rapidement que, d’après un calcul de Degeer, un seul couple peut donner naissance en une année à 23,600 individus. D'autres insectes exercent également des ravages sur les graines de nos légumineuses. Après avoir considéré dans les plantes les harmonies qu'elles présentent entr'elles , nous examinerons les relations qu’elles ont avec l’homme , avec ses besoins , son esprit, son imagination, sa mémoire, son cœur. Ce ne sera qu'une légère esquisse, mais celle d’un immense tableau, s'étendant à l'humanité tout entière, et nous retraçant à chaque trait les bienfaits de Ja Providence. Les plantes répondent à la plupart des besoins de l’homme. Elles lui fournissent ses aliments, soit directement, soit indirecte- ment en constituant la nourriture des animaux qui font partie de son alimentation. Les Céréales , c’est-à-dire le Blé en Europe, le Riz en Asie, le Maïs en Afrique et en Amérique en sont la base providentielle ; les plantes potagères et les fruits y apportent leur précieux contingent. C'est aux plantes que l’homme doit les principaux moyens de rétablir sa santé. Elles sont douées des vertus appropriées à toutes les altérations ; les douces Malvacées sont pectorales , les aroma- tiques Labiées sont stimulantes, les amères Gentianées sont to- niques , les äâcres Crucifères anti-scorbutiques. À chaque famille là Providence a attribué une qualité salutaire qui nous est géné- ralement révélée par l’odeur et la saveur et que nous retrouvons plus ou moins dans toutes les espèces répandues sur Ja surface du globe. Chaque plante est, en quelque sorte , un génie bien- faisant qui nous offre son secours contre une des nombreuses in- firmités humaines. Ce sont également les végétaux qui fournissent la plupart des (479 ) matériaux à l'industrie humaine : le bois à ses constructions ; le fourrage à la nourriture de ses bestiaux; le Lin et le Coton à ses tissus, sans compter la laine et la soie qui proviennent d'animaux nourris de substances végétales ; le Sésame, le Colza , le Pavot à son éclairage et à toutes les autres utilités de l’huile , l’Indigo, la Garance, la Cochenille à ses tentures ; les gommes et particuliè- ment le Caout-chouc à une multitude toujours croissante d’usages ; Ja Canne à sucre et sa rivale indigène, aux mille combinaisons qui flattent notre friandise ; toutes les fibres végétales à l’industrie du papier dont on use et abuse si amplement. Les plantes sont en harmonie avec l'esprit de l’homme par tous les éléments qu’elles offrent à son désir insatiable de sa- voir, et il en est résulté la science de la botanique, cette science charmante qui s'exerce sur les fleurs, qui s'étudie en parcourant les riants bosquets , les prés émaillés, le bord des ruisseaux. Depuis Théophraste , l'ami d’Aristote , qui l’a fondée et inaugurée parun chef-d'œuvre et qui a décrit les 200 espèces alors connues, jusqu'à l'époque actuelle où elle en compte90,000, elle s’estaccrue, développée, ramifiée par les travaux d’une multitude d'hommes tels que: Dioscoride , Pline, Gessner, Linnée, Tournefort, les Jussieu, de Candolle, qui ont étudié, nommé, décrit, classé, figuré les plantes, qui ont découvert les fonctions de leurs divers organes, qui les ont cherchées et recueillies dans toutes les parties du globe, qui. en. ont appliqué l'étude à l'agriculture, à l'horticulture, à la zoologie sous le rapport surtout de l’entomologie et surtout à la médecine à laquelle elles prodiguent toutes leurs vertus. La botanique, toujours attrayante, a dû une grande popularité à Linnée dont le système sexuel facilitait l'étude des plantes encore médiocrement nombreuses à cette époque. La méthode naturelle introduite par Bernard de Jussieu eut ensuite le mérite de les ran- ger dans l'ordre que la nature leur a assigné. Actuellement, c’est surtout l'attrait de Ja difficulté vaincue qui entraîne les esprits vers celte vaste science, devenue abstruse et très complexe. En ( 480 } effet , elle se présente escortée des profondeurs quelquefois mys- térieuses de la physiologie végétale , des complications de la clas- sification , de la multiplicité des familles et des genres, du nombre infini des espèces, de la nécessité d’une nomenclature accablante pour la mémoire ; elle exige le dévouement le plus complet de ses adeptes, pour suivre dans leur essor les sommités actuelles de la botanique telles que de Candolle, Lindley, Mirbel, Mobl. ILest même devenu impossible de cultiver la science tout entière , et chaque partie est. devenue l’objet des études spéciales d'hommes supérieurs. C’est ainsi que M. Brogniard a dirigé ses travaux sur les végétaux fossiles, M. Meyer sur la géographie végétale, MM. Richard , Mohl, R. Brown sur la physiologie végétale , M. Cas- sini sur la grande famille des plantes composées, MM. Eckardt , Bisschoffsur les Cryptogames. Cette dernière branche a même été subdivisée et nous avons vu Fries proclamé le prince des Myco- logues. (1) Parmi les plaisirs de l'esprit que donnent les plantes, nous ne pouvons omettre celui des herborisations , ces excursions qui ont tant d’attraits pour le botaniste, qui lui procurent à la fois le charme d’une promenade avec des amis partageant ses goûts ; dans les prés émaillés de fleurs ou les bois qui couvrent le (1) Ce surnom à donné lieu | il y à queïques années , à une méprise asez plai- sante. Fries était arrivé à Paris, fort connu des savants , mais peu des libraires. Un de ces derniers ayant appris d’un botaniste que Fries , prince des Mycologues était à Paris avecl'intention de publier l'un de ses ouvrages, concut l'espoir d'en devenir l'éditeur, s’informa de l’adresse du prince, et, après avoir fait la toilette la plus soignée , se rendit à son hôtel. 11 demande an concierge : Fries, prince des Mycologues; on Jui répond que l’on ignore si M, Fries est prince, qu'il n’en à ni l'air ni le train, mais qu'il est logé au quatrième ; le libraire monte, étonné de la modestie du grand personnage, il sonne et il est introduit par Fries lui-même dans une humble chambre encombrée de livres et d'une multitude de Champignons, sans compter les Mucor qui tapissaient les murs, Le libraire alors s'incline devant la science et il se rappelle que toutes les gran- deurs ne sont pas celles qu'un vain peuple honore. (181) flanc des montagnes, la jouissance que donnent la rencontre d'une plante que l'on trouve pour la première fois , d’une autre que l’on possède à peu près seule, d'une autre encore qui présente quel- qu'observation inédite à faire. Je ne parle pas de la joie de dé- couvrir une espèce nouvelle. C'est un morceau de prince auquel il ne faut plus guères penser en Europe. Quel plaisir pendant les haltes de se montrer réciproquement ses trouvailles, renfermées dans les cylindres métalliques , de s’en raconter les circonsfances, d'échanger les [échantillons doubles, afin d'accroître ses richesses. Après un repas sur l'herbe , assaisonné d’un appétit dévorant , on se remet en course jusqu'au coucher du soleil ; on suit le bord des eaux, on se hasarde dans les marais, on s’enfonce dans les ravins, on gravit les monts escarpés au risque de subir le sort de Bastard d'Angers qui, en escaladant un rocher, tomba à plus de 60 pieds dans un gouffre où , le corps fracassé, il gisait mourant à 24 ans, victime de la science , sans espoir de jouir de ses jeunes travaux, de revoir sa mère, son ami , lorsque le troisième jour son chien fidèle, guidé par l'instinct si sûr de l'affection , découvrit le lieu fatal , le revêla à cet ami, l'y entraîna en le tirant par ses vête- ments et partagea avec lui le bonheur d’arracher Bastard à la mort. Les herborisations , pour être aventureuses , n’en sont que plus attrayantes. Avec quelle ardeur n’ont pas été entreprises celles de tant debotanistes dans toutes les parties du globe, d'Auguste St.- Hilaire au Brésil , d'André Michaux dans l'Amérique septentrio- pale , de Wallich, dans l'Inde , de Blume et Fischer , à Java, de MM. Guillemin , Pérusset et Richard, dans la Sénégambie, de Siebold , au Japon , de Labillardière, à la Nouvelle Hollande. C'est à ces hommes intrépides que nous devons le grand essor que la science a pu prendre et tous les trésors de nos herbiers , de nos serres , de nos jardins, cette multitude de fleurs char mantes qui nous prodiguent tant de jouissances. Nous devons à nos souvenirs classiques la jouissance de retrou- (182) ver dans un grand nombre de plantes des noms qui nous rap- pellent des vers harmonieux denos auteurs favoris, Virgile, Horace, Ovide , qui étaient animés d’un sentiment si vif des beautés de la nature. Ils ont souvent donné du charme même aux herbes les plus humbles. C’est ainsi que Virgile représente Thestylis broyant le Serpoletavec l’Ail pour rafraïchir les moissonneurs accablés par la chaleur : Thestylis et rapido fessis messoribus œstu Allia Serpyllumque herbas contundit olentes. Ailleurs, le poète conseille de placer les ruches près du Daphné, du Serpolet , de la Sarriète et des Violettes dont les abeilles re- cherchent les fleurs : Hæc cireum casiæ virides, et olentia latè Serpylla , et graviter spirantes copia Thymbræ Floreat , irriguumque bibant Violaria fontem, Ailleurs, le mol Acanthe entoure les anses de deux coupes ciselées par Alcimédon : Et nobis idem Alcimedon dua poeula fecit, Et molli circum est ansas amplexus Acantho; Martial demande pourquoi la Laitue qui terminait autrefois les festins, les commence maintenant : Claudere quæ cœnas Lactuca solebat avorum Dié mihi eur nostros inchoat illa dapes ? Un berger de Virgile compare Galathée au Thym du mont Hybla : : Nerine Galathea , Thymo mibi dulcior Hyblæ, Candidior eyenis, hederà formosior albà. Les images gracieuses que nous puisons dans ces réminis- cences juvéniles, répandent sur les plantes un charme ineffaçable, Mais, s'il est possible de donner plus d’attraits aux plantes, c'est d'y joindre celui de l’entomologie ; c’est de considérer les plantes dans leurs nombreuses harmonies avec les insectes qui y (183) puisent leurs aliments, y construisent le berceau de leurs petits, y manifestent le prodige de leur instinct. Unir les végétaux aux insectes , c’est introduire sur une scène admirablement décorée, mais inoccupée, les acteurs qui y répandent le mouvement et l'action ; c’est mêler à l'intérêt que nous inspirent les phénomènes de la vie végétative , celui que nous trouvons dans la vie animée par toute la vivacité du sentiment, Nous avons à citer un exemple remarquable de cette réunion des deux sciences en M. Léon Du- four qui, après avoir cultivé exclusivement la botanique, y a joint l’entomologie , de manière à connaître également les plantes et les insectes qui en dévorent les racines , qui en sillonnent l’é- corce de leurs galeries , qui en attaquent les feuilles, soit en les rongeant , soit en y vivant en mineurs entre les deux membranes, soit en y produisant, par la succion de la sève , des tumeurs sou- vent régulières et élégantes , qui en recherchent les fleurs pour y puiser ie doux suc des nectaires, qui prélèvent leur part au grand banquet des fruits par mille manœuvres que nous devons souvent combattre pour en préserver les produits de nos cultures. Quelle que soit l'insuffisance de mes connaissances botaniques, j'ai goûté moi-même bien des jouissances dans mes recherches des plantes considérées sous le rapport de leursinsectes. Depuis les observations, qu'en 1819, les Mélèzes du jardin de mon père m'ont donné l’occasion de faire sur les mœurs des Psylles de cet arbre (4), j'en ai recueilli dans plusieurs parties de la France, telles que la belle fôret de Fontainebleau , dans la Belgique, la Hollande , l'Allemagne, la Suisse , la Savoie. Il me souvient, par exemple , de l'exploration que j'ai faite sur le St.-Gothard,, en y allant d’Altorf. Après avoir traversé jusqu’à onze fois la Reuss sur des ponts plus ou moins hardis , tels que le pont du Diable où cette rivière, ou plutôt ce vaste torrent , se précipite comme une (1) Voyez le mémoire inséré dans les annales de la Société des Sciences, de l'Agriculture et des Arts de Lille, année 1819. ( 184) £ataracte immense, de rocher en rocher, avec un fracas assour- dissant ; après avoir pénétré dans le ténébreux Urnerloch, creusé dans les profondeurs du Teufelsberg , je me trouvai tout-à-coup dans les prés riants et fleuris d’Andermatt et près des ruines du vieux château d'Hospen. Là, au milieu de la végétation la plus variée , la plus splendide , entouré d’une abondance extrême de fleurs , je trouvai une Faune plus riche encore que la Floreetsu- périeure à tout ce que j'avais vu (1). C'est un bruissement , un murmure , un bourdonnement incessants, un vol continuel de nombreux essaims qui planent immobiles ou se précipitent avec impétuosité, ou voltigent ou se balancent autour de leur berceau. Les feuilles dela Renoncule âcre sont minées par les larves de la Phytomyze jaune , qui y creusent des galeries tor- tueuses ; celles du Myriophyllum sont habitées par les larves du Phytobius notatus , qui sont dépourvues de pieds, mais qui se- crètent une humeur visqueuse qui les y retient et forme plus tard la coque des nymphes ; la tige de la Salicaire à feuilles d'Hysope recoit les œufs de la Nanophyehémisphérique, qui produisent une tumeur galliforme dans laquelle vivent les larves ; les bourgeons terminaux du Thym sont piqués par une Cécidemyie, et l'œuf qui y est déposé produit une galle en forme de petits artichauds ve- lus et feutrés; les capitules bleus de l'Échinops sont envahis par les larves du Larinus maculosus, qui les déforment et s’y creusent de vastes cellules, dans lesquelles elles opèrent leurmétamorphose ; les boutons de la fleur de l’Hélianthème alyssoïde servent de berceau aux œufs de l’Apion rugicolle , les larves rongent les étamines et l'ovaire et se transforment dans la fleur même qui, ne s’ouvrant pas, leur forme une coque ; la partie supérieure de la tige du Cé- raiste est dépositaire d’un œuf de Psylle ; elle se raccourcit et s’enfle par la succion de la larve, les feuilles calicinales prennent (1) M. Brémi, entomologiste distingué de Zurich, m'a affirmé qu'il avait capturé 1500 insectes d’un seul coup de filet dans ces mêmes lieux. (185) la forme d’un chaperon , les pétales deviennent vertes, dépassent la grandeur ordinaire et prennent des formes irrégulières ; enfin la capsule s’enfle et devient gibbeuse. Il semble, à voir le nombre immense des insectes qui vivent aux dépens des plantes , que le règne végétal ne puisse leur suffire , et cependant ils ne portent aucune atteinte à l’ensemble du tableau et ne font qu'y répandre le mouvement et en accroitre l'intérêt. Enfin les plantes et surtout leurs fleurs s’harmonisent avec notre âme par tous les sentiments qu’elles éveillent en elle. Chaque année, nous voyons avec un doux plaisir, dans nos vergers, dans nos bosquets, reparaître les premières fleurs printanières , les Primevères, les Paquerettes, les Violettes, les Narcisses. Avec quel charme n’assistons-nous pas au développement successif de toute la couronne de Flore depuis la Perce-Neige jusqu'à la Rose de Noël! Toutes ont quelque chose d'agréable à nous dire, toutes recherchent nos regards ; celles même qui se cachent veulent nous plaire par leurs parfums. Les fleurs, la plupart bien modestes, que je cultive dans mon jardin de Lestrem (1), réunies dans de nombreux (1) Lestrem me représente quarante ans de bonheur, suivis de larmes et de regrets jusqu’à la mort. Celle qui en faisait le charme était douée d’un jugement si sain, d’un sentiment si délicat, que toute sa vie en fut pour ainsi dire péné- trée, ainsi que d’une douce piété, puisée dans la maison paternelle. Ces qualités donnaient à toutes ses actions la droiture , la chaleur et l'élévation. Elles se reflétaient dans sa physionomie bienveillante et animée, elles la ren- dirent tourà tour la sœur de charité de son vieux père, le judicieux conseil ; la tendre amie de son mari , la sage et zélée directrice de l'éducation de ses filles qui» confiée à la religion, répondit à ses pieuses espérances , et elle eut la satisfo®##on d'accomplir la tâche laborieuse que lui avait imposée sa sollicitude mate?zelle. Une charité éminemment chrétienne se répandait dans ses discours e’ res actes , pré- sidait à ses travaux manuels, et de larges distributions de vêtements la faisaient bénir des nombreux indigents de Lestrem dont elle soulageait en même temps les muüsères morales. Elle excerçait l’hospitalité comme au bon vieux temps dont son gothique castel était un vestige. La fraîcheur des bosquets , la limpidité des eaux, ( 186 ) massifs, me sourient chacune à sa manière (1). Les plantes sont souvent pour nous des symboles dont le lan- gage intéresse notre âme. Le Lierre est celui de l'amitié; la Rose, du plaisir; la Palme, de la gloire; l'Immortelle nous parle de l'éternité; la Germandrée nous dit : Ne m’oublie pas (Vergiss mein nicht); le Lys estl'emblème de la pureté et aussi de ce beau pays de France dont il paraît l’écusson royal que St.-Louis, Henri IV, Louis XIV, ont tant illustré. La Grenadille expose à le charme des fleurs, la bonté des fruits, étaient en harmonie avec l'aimable nature de l'excellente châtelaine. Ce séjour, naguère encore celui du bonheur, est devenu celui d’une profonde tristesse; tout y est sombre et douloureux ; les réunions de famille , qui étaient si Joyeuses, n’y font plus entendre que des gémissements. Les pauvres pleurent leur bienfaitrice ; mais une mort chrétienne, précédée d’une vie pure et vertueuse, adou- cit l’amertume des regrets, et la prière au pied de la croix qui s’élève sur sa tombe monte avec confiance vers le ciel. (x) Dans l’un des groupes , à côté des Coreopsis, des Hortensia, des brillantes Verveines , le Lopézia me montre sa petite figure agacante dans son irrégularité, le Lobelia m’éblouit de sa pourpre éclatante, le Dielythra déroule sa charmante guirlande de fleurs semblables à des cœurs réunis par un lien commun; l'Escholtzia de la Californie me prodigue l'or de sa corolle. Dans un autre massif situé près d’un Marronnier au vaste feuillage, j'ai réuni des arbrisseaux à des plantes vivaces. Le Benthamia, le Neillia, l’Aristotelia, le Photinia au beau feuillage, le Thermopsis arborescent, le Deerhingia , le Calli- carpa étoilé. lIndigofera, le Stranvasia . le Bridgesia , l'élégante Synantherée, le Stuartia, l’Adamia aux baies azurées, mêlent leurs fleurs et leur feuillage lustré aux touffes de Lys, d'Hémérocalles. d'Iris, d’Agapanthe , le Yucca me montre sur sa tête charmante sa large pyramide de cent-cinquante grandes fleurs blanches, gracieusement inclinées. Près de 1à, la terre de bruyère sé pare des fleurs des admirables Magnolia, des Rhododendrum, des Kalmia, des Azalea, des Weigelia, des Rhodora, des Clethra au doux parfum, des Mitraria écar- lates, des Menziezia aux fleurs de Muguet. Plus loin, un pavillon oriental, situé près d’un large canal d’eaux limpides, bordé de hauts peupliers, présente un appui aux arbustes grimpants. La Glycine y fleurit à côté de la belle Clématite de Siebold, de l'Aristoloche dont la fleur a la forme d’une pipe allemande; du Kadsura aux fruits pourprés ; du Boussin- gaulüa, de l’Akebia, du Physianthus aux fleurs blanches, élégantes; du Wis- teria , délices des Japonais; du Tecoma aux fleurs de Cinabre, du Smilax des (187, notre vénération les insignes de la Passion du Sauveur des hommes. Et la Pensée, l'une des belles conquêtes de l’horticulture actuelle, produite par l'heureuse alliance de l’humble fille de nos bois avec celle des hauteurs de l’Altai, embellie en Angle- terre par les soins de l’aimable fille du comte de Tankerwill , perfectionnée par son introduction en France. De ces divers éléments de beauté s’est produite cette fleur charmante, sym- Chinois, aux racines sudorifiques; du Calystegia, ce charmant Liseron double aux drageons envahissants. Non loin du courant sinueux des Anettes, j'ai planté un mussif d’arbres rési- neux, composé de Cèdres du Liban et Deodara, de l’élégant Cryptomeria, du Gingho biloba, du Podocarpus , du Callitris, de l'Araucaria, du Taxodium, du Cephalo- taxus, du Liboredrus, qui servent d’abri contre le vent du nord à divers arbrisseaux dont les jolies fleurs contrastent avec la sombre verdure des Conifères. Tels sont leLeycesteria , le charmant Poinciana , le Pernettia , le Forsithia cultivé dans les jardins du Japon pour l'agrément de ses fleurs et les propriétés salutaires de ses graines; l’élégant Calophacca des bords du Volga; l’Ardesia des montagnes de Inde, le Corynocarpus, le Fabiana qui , par la finesse du feuillage, rivalise avec le Tamarisc; le Cleyera dont le fruit ressemble à la cerise, le Colletia, l’Abu- tilon aux cloches d’or veinées de bronze, l’Escalonia dont le port est si gracieux. Autour du rustique parloir ombragé de beaux Platanes et consacré à l’amitié, se groupent de gracieux Fuchsia , des Abrotomus , des Pentstemum , des Clarkia, des Syainsonia, des Erigerons, ces Paquerettes aux cent rayons; des Viscaria vernissés, des Gaillardiaa à la cocarde espagnole, des Siphocampylos , mêlés aux touffes de Cuphea dont le petit masque noir et blanc est si piquant ; des Bouvar- dia au tube écarlate, de Laperousia dont le nom rappelle un si douloureux souvenir. Parmi les plus beaux végétaux que j'ai cultivés cette anuée , je u’hésiterai pas à nommer le Maïs gigantesque dont la graine tiréedes îles d’Hyères m’a été donnée par M. de Courcelles, agronome distingué. On ne peut se figurer la beauté de cette plante qui, haute de quatre mètres, est surmontée d’une superbe aigrette d'étamines, qui porte plusieurs épis terminés par leur grand panache de stils pourpres et jaunes, el dont le magnifique feuillage, s'étendant en éventail de chaque côté de la tige, égale en beauté celui des végélations tropicales. Ce jardin, ces plantations , passeront bientôt en d’autres mains ; mais les fleurs seront arrosées par la piété filiale , les arbres seront cultivés par la science fores- tière qui a administré avec tant de zèle les belles forêts de Fontainebleau, du Nivernais et de la Bresse, ( 188 ) bole de la pensée, soit par les couleurs mélancoliques de ses pétales violets, soit par l’expression de sa physionomie piquante , soit par l'air méditatif que lui donne son pédoncule incliné, ou sa direction vers le soleil, qui fait allusion à la constance et à l'élevation de la pensée par excellence. Les plantes parlent encore à l’âme par les souvenirs personnels qu'elles y réveillent; ces Mélèzes, ces Rhododendrum , me rap pellent les dernières zones végétales que j'ai vues sur les flancs du Mont-Blanc avant d'arriver à la mer de glace; cette Gentiane au bleu si pur transporte ma pensée au grand St.-Bernard où j'ai admiré les prodiges de la charité chrétienne. Ce Kalmia latifolia m'a été donné par M. Dumont de Courset, le père de l’horticul- ture française ; cette Hémérocalle du Japon , au parfum suave, est un souvenir de M. De Norguet dont les plantes chéries restent cul- tivées par le sentiment le plus tendre. Ce Géranium à feuilles de Lierre est un gage de la constante amitié de mon frère (1) dont la mort m'a coûté tant de larmes. (1) Cette mort a terminé récemment une de ces existences calmes, douces, heureuses , trop rares dans notre siècle turbulent , ennemi du repos, avide d’or et de jouissances matérielles. Ce bonheur, fondé sur les bases les plus solides , la modération dans les désirs , l'absence de l'ambition , la vertu , la religion, a été à peine interrompu par le passage à celui qui ne doit pas finir. M. Louis Macquart de Terline, doué de la délicatesse de l'esprit, de la gran- deur de l’âme, de la sensibilité du cœur, manifesta pendant toute sa vie ces qua- lités par ses goûts et ses affections, Ses gouts, toujours vifs, le portèrent vers la poésie pendant la jeunesse, riche d'imagination , vers la culture des fleurs pendant l’âge mûr et jusqu’à la mort. D'excellentes études au collége de St-Pierre, à Lille, quoiqu’interrompues par la tourmente révolutionnaire , développèrent sa verve poétique , qui, répan- dant son enchantement sur sa jeunesse, charma en même temps ses nombreux amis, Il cultiva surtout la poésie légère, sans déroger cependant à La loi, alors en usage, de se hasarder dans la tragédie. 11 fut admis dans un petit cercle poétique de la capitale dont faisait partie M. de Faucompret, son parent, qui devait être plus tard traducteur de Walter ( 189.) Souvent les plantes nous intéressent par les noms qui leur ont élé donnés. Nous aimons à retrouver dans les fleurs les demi- dieux et les héros de la Grèce, Hercule, Achille, Hyacinthe, Adonis, Artémise, dont les noms sont d’ailleurs si euphoniques. Les anciens avaient aussi appelé quelques plantes d’après les qualités dont elles étaient douées. Ainsi le Tussilage qui chasse la toux, le Dipsacus qui guérit de la soif (4), la Chélidoine dont la Scott. Chaque membre de la société se soumettait à traiter le même sujet , choisi et proposé par un comité qui se constituait ensuite en jury pour juger le mérite des compositions, Au nombre des juges se trouvait Geoffroy, le célèbre aristarque dont les feuilletons influèrent sur la renaissance du goût littéraire en France. Ces concours stimulèrent le talent de M. Macquart qui fut plusieurs fois vaiu- queur dans la lice, et quelques-unes de ses poésies furent imprimées dans les re- cueils du temps. Lorsqu'il sentit s’affaiblir son imagination juvénile , il en vint à négliger ces fleurs de la pensée pour les fleurs de la nature, et il les cultiva à leur tour #vec la même ardeur. l réunit au-delà de 3000 espèces de plantes dans ses jardins d’Hazebrouck et ensuite de Blendecques. Il prit plaisir à grouper par familles les arbres et arbrisseaux , à présenter par ce rapprochement la diversité de la forme jointe à l'unité du fond, et à faire de ses collections un sujet précieux d’études botaniques. Les fleurs l’intéressaient surtout par la grâce, la délicatesse , la beauté dont elles sont à la fois des spécimens et les symboles. Il les scrutait dans les phéno- mènes de leur développement , dans les mystères de leurs amours, dans les ber- ceaux de leur postérité, el cette étude charmante était pour son esprit et son cœur encore de la poésie. La vivacité que M. Macquart portait dans ses goûts était la même dans ses affec- tions ; 1l avait pour sa famille et ses amis une tendresse et un dévouement inalté- rables': il aimait son pays comme le font tous les cœurs bien nés ; mais il se dé- fendit toujours d'accepter des fonctions publiques. Cependant, s’il ne se rendait pas utile officiellement , il s’en dédommageait par tout le bien qu’il faisait autour de lui : il soulageait toutes les misères , il touchait toutes les plaies pour les gué- rir, Dernièrement encore, on lui proposait une acquisition : Non, répondit-il, notresuperflu appartient aux pauvres. Cette ardente charité lui était surtout inspirée par le sentiment religieux dont il fit pénétré toute sa vie et qu'il transmit à ses enfants. (x) LU guérit de la soif an moyen de ses feuilles, opposées et réunies de ma- mière à former une écuelle où se conserventles eaux pluviales. ( 490 ) floraison dure autant que le séjour des hirondelles ; le Géranium dont le pistil s'allongeen bec de grue; l'Anémone qui s'épanouit au souffle du vent; l’Amarante qui ne se flétrit pas; la Sauge (Salvia) qui doit son nom à ses vertus si salutaires, qu'elle donna lieu au distique de l’école de Salerne : Cur moriatur homo cui Salvia creseit in horto ? Contra vim mortis non est medicamen in hortis. Les modernes, et surtout Linnée dont l'imagination était si poétique, ont trouvé également des noms qui plaisent par leur signification. Ainsi il a donné celui de Silène à des fleurs dont le calice est ventru ; le nom d’Agavé qui déchira son fils Penthée, à des plantes dont les feuilles sont épineuses ; celui d’Atropos à une herbe vénéneuse. Commerson a donné le nom de Danaïde à des fleurs dont les organes femelles étouffent les organes mâles. M. Adrien de Jussieu a nommé Janusia un genre dont les fleurs ont un double visage. Nous aimons également à rencontrer chez les plantes les noms d'hommes qui ont honoré la science, au moins lorsque ces noms peuvent se traduire dans la langue botanique, tels que Linnœa, Magnolia, Bignonia, Lobelia, Gessneria, Lindleya; c’est un hommage dicté par la reconnaissance et la vénération ; mais l’adoption de cette nomenclature personnelle a eu un grave incon- vénient. À côté de ces noms que nous prononcons avec plaisir, se sont glissés une foule d’autres, rocailleux, barbares, antipathiques au moins aux oreilles françaises, tels que Knowltonia , Brucken- thalia, Trautvetteria, Kierschlegeria, Zauschneria , Krynitsküa , Pullertickia, Schlechtendalia, Kosteleskia, Benninghausenia, Krascheninikovia , et une multitude d’autres de la même nature. Ces noms, qui déchirent la langue et l'oreille, ont discrédité la botanique, ils lui ont enlevé le charme poétique qui s'attache aux fleurs ; ils y ont substitué le ridicule , ils l'ont dépopularisée , ils ( 491 ) l'ont fait reléguer parmi les sciences inaccessibles au public; ils ont enfin fait désirer une réforme qui la fasse proclamer de nou- veau l'aimable Science. Les plantés enfin excitent en notre âme la reconnaissance envers la Providence pour tous les biens dont elles sont les dispen- satrices ; ornements de la terre dont elles recouvrent la nudité par les riches tapis de ses pelouses et de ses moissons, par les somp- tueuses draperies de ses épaisses forêts, elles nous charment par leurs fleurs, forment la base de notre nourriture et celle de nos bestiaux, sont en harmonie avec tous nos besoins, toutes nos industries, et nous révèlent plus intimement que la terre et les cieux, les trésors de la bonté suprême. Les insectes qui sont les hôtes les plus ordinaires des plantes occupent la scène végétale qui sans eux serait admirablement déco- rée, mais déserte et inanimée. Leurs dimensions sont en harmo- nie avec les feuilles et les fleurs sur lesquelles ils vivent. Ils y naissent le plus souvent, s'y nourrissent, s’y développent, s'y livrent à leurs merveilleuses industries , à leurs ardentes amours, à leurs combats acharnés ; ils y construisent avec toute la sollici- tude du sentiment maternel le berceau de leur famille. Investis à l'égard des plantes de la haute mission de maintenir. l'équilibre entre les espèces, en arrêtant les végétations luxuriantes, ils nuisent à la vérité à nos cultures et nous obligent à leur dis- puter nos récoltes; mais ils nous dédommagent de leurs dépré- dations par de précieuses productions : la soie, la plus belle dés matières textiles ; le miel, la plus douce des substances alimen- taires; la cochenille, la plus riche de nos couleurs, et la cire qui brûle sur nos autels, figure de l’ardente prière qui monte vers Dieu. Je ne puis terminer cette introduction sans y consigner l’expres- sion de ma reconnaissance envers mes amis les entomologistes qui m'ont encouragé par leurs suffrages ou qui m'ont fourni des matériaux. Je me bornerai à citer MM. Amyot, Mulsant, (19 ) L. Dufour, Perris surtout, qui a bien voulu m'adresser une longue série de ses observations inédites sur les insectes des plantes her- bacées. Ses nombreuses découvertes sur les mœurs de ces petits animaux le placent au premier rang des émules de Réaumur, et l'histoire de ceux du Pin maritime dont il a commencé la publica- tion dansles Annales de la Société entomologique, est un travail très-considérable qui contient une multitude d'observations nou- velles sur l’anatomie , la physiologie et les mœurs de ces insectes. Et comment pourrais-je omettre M. Boyer de Fons Colombe, que la mort a enlevé récemment aux sciences naturelles et avec qui je m'honore d’avoir été pendant plus de vingt ans uni par les liens de la sympathie et de l'affection (1). Dans ses nombreux travaux, l’observation des phénomènes de la nature se joignait toujours au sentiment religieux ; comme Linnée, il ne séparait pas la créature du Créateur; sa science alimentait sa piété , et autant sa vie a été pure, autant sa mort à été sereine. (x) I avait approuvé mon ouvrage sur les facultés intérieures des animaux invertébrés et avait proposé à Monseigneur l'archevêque d’Aix dont il était l'ami, de le mettre entre les mains de ses séminaristes. Sa Grandeur m'écrivit à ce sujet une lettre qui m'est précieuse. ( 193 } PREMIER EMBRANCHEMENT . CRYPTOGAMNMES. VÉGÉTAUX À ORGANES REPRODUCTEURS ORDINAIREMENT CACHÉS. Cette vaste classe de plantes précède dans la série ascendante les autres végétaux par la simplicité relative de leur organisation. Ainsi que leur nom l’exprimé, les organes de la fructification, les noces, sont le plus souvent cachés; cependant, elles n'ont pu se dérober aux investigations microscopiques qui y ont fait découvrir denombreuses modifications et une gradation organique analogue à celle que présentent les végétaux phanérogames. De la repro- duction par les spores (graines) les plus simples, elles passent pro- gressivement à des organes sexuels qui ont quelques rapports avec les pistils el les étamines , réunis ou séparés , quelquefois même portés sur des individus différents, comme dans les végétaux les plus fortement organisés. Nous voyons également cette gradation dans l’ensemble de l’or- ganisation. La série commence par les Cryptogames cellulaires, c'est-à-dire ceux qui sont composés uniquement de cellules et les Vasculaires, composés de cellules et de vaisseaux. Les Cellulaires, dès leur base, présentent deux séries parallèles, les Algues et les Champignons, suivies par les Mousses et les Hépatiques quile sont, à leur tour, par les Vasculaires , c’est-à-dire les Characées , les Fougères et les Prèles. La même gradation se manifeste encore dans l’ordre qui préside à l'apparition des Cryptogames, soit dans les eaux , soit sur les 13 (1% ) rochers nus , où les germes des espèces les plus simples se déve- loppent toujours les premiers, de manière que nous voyons les Conferves suivies des Algues, les Lichens suivis des Champignons, pour arriver successivement au faîte de la nature Cryptogame. C'est une faible image de ce qui se passa pendant la longue durée du troisième jour de la création où Dieu dit : « Que la terre pro- duise de l'herbe qui porte de la graine et des arbres. » (1) Quelle que soit cette gradation et les différences qu'elle amène dans les organes, l'unité de composition se retrouve surtout dans ceux de la reproduction. Dans toutes les Cryptogames , les semences ou sporules sont enveloppées d’une capsule diversifiée de formes qui se distinguent entr’elles par les noms de spore , de sporidie, de thèque, d'involucre , de disque, de cornet, de coiffe, de conceptacle, suivant les classes de cette grande série qui com- prend le quart du règne végétal. La destination que la Providence a donnée aux Cryptogames est très-considérable dans l'économie générale de la nature; elle est d’une utilité très-diversifiée dans l'économie domestique: Sous ce dernier rapport, les Champignons nous présentent un aliment agréable, abondant et répanda sur une grande partie du: globe; les Lichens offrent le même avantage, mais restreint aux contrées boréales ; ils fournissent aux habitants de l'Islande une nourriture (1) Cette succession de là création, si clairement énoncée dans la Genèse, s'est trouvée tellement confirmée par la science et particulièrement par la Géologie et la Paléontologie , que cette concordance frappe d’étonnement , et lorsque l’on voit que l'histoire des premiers peuples, l’ethnographie et la linguistique présentent la même concordance entre les récits de Moïse et les découvertes les plus récentes et les plus authentiques de ces sciences , ce n'est plus de l'étonnement que l'on res- sent; mais la conviction la plus profonde que l'historien juif n'a pu écrire son livre que par l'inspiration divine , et c’est ane des preuves les plus concluantes en faveur du christianisme dont ce livre est la base, (195 ) précieuse’ , }, comme ils sont l'unique aliment des rennes pendant les longs hivers de la Laponie. (2) Une Fougère (3} sert d’aliment aux habitants de la terre de Diémen ; la Prèle des fleuves était un aliment des Romains et l’est encore en Toscane. (4) Nous devons aussi des substances comestibles à la famille des Algues, ces plantes marines quelquefois si remarquables par leur grandeur et leur beauté. Tous les peuples du nord de l'Europe font usage des Ulves, plus connues sous le nom de Varecs. L'Ulve laitue se mange en salade en Angleterre ; une espèce, qui se couvre d'une efflorescence sucrée, porte le nom de Canne à sucre de l'Océan et tient heu de cette substance en Islande. (5) C’est une autre espèce qui jouit d'une si grande célébrité dans tout l'Orient, sous le nom de Nid d’hirondelle. Les Cryptogames fournissent également un grand nombre de substances utiles à l’art de guérir. Tous les maux physiques qui affligent l'humanité y trouvent des remèdes. J'en épargnerai l’é- numération à mes lecteurs et à moi, et me bornerai à mentionner la Fougère qui chasse le ver solitaire , la Mousse de Corse des enfants, le sirop de Capillaire et la pâte de Lichen, qui sont moins un médicament qu'une friandise. Les Cryptogames nous sont encore utiles sous beaucoup d’autres rapports ; nous donnons les Fougères comme fourrage et litière à nos bestiaux ; les cendres en sont utilisées dans la fabrication du savon, du verre, de la porcelaine. Les Algues servent d'engrais sur les côtes de Bretagne, et s’'ex- (x) Getraria islandica. (2) Cladonia rangiferina. (3) Roccella tinctoria. Acharius, (4) Pteris esculenta, (5) Ulva saccharina. ( 196) ploitent en coupes réglées. On en extrait des alcalis et de l'iode; on emploie comme combustible les tiges (stipes) de la Laminaire digitée. C'est aux Lichens enfin que nous devons l'Orseille, cette ma- tière colorante, déjà employée du temps de Théophraste, disciple de Platon, et qui surpassait en éclat la pourpre même. Recueillie primitivement sur les rochers de la Grèce , et depuis sur toute la côte occidentale de l'Afrique, aux Canaries, sur les sommités des Pyrénées et du Puy-de-Dôme , elle continue à donner aux tissus la couleur noble et modeste dont se parent nos premiers pasteurs. La destination des Cryptogames , dans l'économie générale de la nature, se présente sous deux rapports. D'abord , comme fils aînés de la création végétale, c'est de leur détritus accumulé que s'est formé l'humus primitif dans lequel ont pu se développer les germes des végétaux plus composés ; c'est à leur nature rudimen- taire que nous devons les fleurs, les fruits et le splendide manteau dont se couvre la terre. Ce grand phénomène des premiers jours du monde se renouvelle toutes les fois qu'un rocher s'élève au- dessus de la surface de l'Océan. Les germes des Lichens s'y fixent les premiers, produisent de larges expansions aux contours décou- pés, se glissent dans les moindres fissures, commencent à en dé- tacher de faibles parcelles de silice, de calcaire, et laissent, à leur mort, par leur décomposition, une légère couche de détritus dont s'emparent les fines et moelleuses Mousses, auxquelles succédent graduellement les Fougères aux frondes élégantes et, avec le temps, les plantes et les arbres phanérogames dont les graines sont apportées par les vents et les oiseaux. La seconde destination générale des Cryptogames et particuliè- rement des Champignons dans la nature, est de hâter la dissolu- tion de tous les végétaux qui ont cessé de vivre. Ils sont pour les plantes ce que les insectes sont pour les animaux : ils pullulent avec une grande puissance destructive ; ils complètent la décom- ( 197 ) position des substances végétales dont les éléments doivent entrer dans d’autres combinaisons. Quelquefois ils semblent empiéter sur cette attribution en atta- quant les végétaux vivants, et ils nous nuisent encore par des multiplications excessives. C’est ainsi que nos froments sont dé- vastés par la Nielle (4), que nos seigles sont ergotés (2), que nos raisins sont envahis depuis peu par l’Oïdium, ce nouveau fléau de nos vignobles. Les Cryptogames sont enfin , parfois , les parasites d'animaux vivants. On en a trouvé sur la membrane qui tapisse les poumons des Mammifères , dans la trachée-artère de petits oiseaux; les vers à soie sont en proie à la Muscardine ‘3). La chrysalide d’une Phalène de la Nouvelle Zélande, retirée dans la terreavant sa métamorphose, à quelquefois pour parasite la Sphæridia robertsii qui se fixe derrière la tête et jamais ailleurs. La Mouche végé- tante des Caraïbes est la nymphe morte et desséchée d'une Cigale qui porte sur son dos une espèce de Clavaire. La Mouche domes- tique est souvent, en automne, retenue aux vitres de nos, fenêtres par sa trompe, engagée au milieu d'une touffe de Champignons semblable à une moisissure. Mais, si les Cryptogames vivent parfois aux dépens des Insectes, les Insectes vivent bien plus souvent aux dépens des Cryptogames. Ces végétaux, et surtout les Champignons, sont leberceau et l’ali- ment d'une multitude d'espèces de Coléoptères et de Diptères, dont les larves se développent et y exercent quelquefois des indus- tries fort singulières ; en un mot, les Cryptogames chargés de la dissolution des dépouilles mortelles des plantes le sont aussi d'ali- menter la vie des animaux. D (x) Uredo carbo. (2) Sclerotium clava. (3) Maladie produite par l'invasion du Botrytis Bassianae { 198) PREMIÈRE DIVISION. CRATIPGAMES CELLULAIRES. Ces végétaux , dont la contexture n’est formée que de tissu cellulaire sans vaisseaux ni trachées, compren- nent {rois familles : les Algues, les Champignons et les Mousses. PREMIÈRE SOUS-CLASSE. ALGUES. Végétaux cellulaires pourvus de gemmes ( Gonidia } prolifiques vivant ordinairement dans l’eau. Ce groupe immense commence, parla simplicité de sa compo- sition, la série des végétaux, mais il est à peu près parallèle à celui des Champignons. Il s'étend, se développe en organisation et se diversifie en nombreuses modifications qui ont donné lieu à l’éta- blissement de tribus, de genres, d'espèces également nombreux. Les principales tribus sont : 1es Chaodinées. On à voulu dire sans doute eelles qui, par la simplicité de leur organisation , ont dù sortirles premières du chaos, à la voix de Dieu. Elles consistent seulement en globules ou en filaments ; les Ocillarées caractéri- sées par leurs mouvements spontanés ; les Confervées qui forment les touffes filamenteuses si communes dans les eaux ; les Céra- miées formées de masses rameuses ; les Uivacées constituées par des expansions larges et minces, creusées de cellules ; les Floridées qui, par leur contexture délicate, élégante et richement colorée, ressemblent à des fleurs ; enfin les Fucus , cartilagineux , oli- vâtres, géants des Algues, couvrant les rochers de nos côtes sous les noms de Varecs et de Goëmons. Plusieurs végétaux de cette classe rudimentaire présentent des (199) particularités qui nous intéressent par leur beauté ou par leur uti- lité, ou par leur singularité. Nous admirons l'éclat de la Padine qui brille comme la plume du paon. Nous trouvons des matières alimentaires, agréables. quelquefois délicieuses, dans les Ulves, telles que l'espèce appelée Nid d’hirondelle. Aussi précieuse que le Girofle et la Muscade, elle sert d'assaisonnement aux viandes les plus délicates. L’hi- rondelle salangane qui la recueille sur les eaux de l'Océan indien, où elle flotte comme une gelée transparente, la pétrit avec son bec, l’attache aux rochers pour servir de nid à ses petits, et lui donne ainsi la préparation qui en fait un mets délicieux au goût des gourmets de la Chine et de tout l'Orient. Le Nostoch , cette gelée organisée et fugace que nous foulons aux pieds dans les allées sablées de nosjardins, après la pluie, au printemps et en automne , jouit d'une ancienne célébrité due aux alchimistes et surtout à Paracelse, qui , par ses apparitions sou- daines et mystérieuses, le considéraient comme une émanation des astres, l'employaient à préparer la panacée universelle et la pierre philosophale, et lui donnaient les noms de Fleurs du ciel, _d’Arche céleste, de Trône de la terre et bien d'autres plus bizarres encore, dont plusieurs sont restés dans la langue vulgaire et at- testent encore les étranges idées-qu'ils avaient répandues parmi les peuples. (1) Mais une singularité réelle que présentent plusieurs Algues con- siste dans leur nature ambigüe, sur la limite des règnes végétal et animal, au point que plusieurs sont rangées dans l'un ou dans l'autre, suivant les opinions également respectables des auteurs. Ainsi, douées d'irritabilité comme les animaux ou d’excitabilité comme certaines plantes telles que la Sensitive , les Ocillaires sont des filaments (2) toujours en mouvement, se courbant de (1 ) Ces noms vulgaires sont entr'autres : purgatoire des étoiles, crachat de lune, beurre magique. | (2) Ces filaments sont si fins que leur épaisseur est quelquefois de 1/90 de millimètre. | ‘200 ) droite à gauche, s'avançant ou se relirant comme des vers. Les Bacillaires sont formées d’une matière organique vivante, renfer- mée dans une enveloppe siliceuse. Tant que la vie dure, elles se meuvent d'avant en arrière comme une navette en se délournant quand elles rencontrent un obstacle. Les Zygnèmes, primitivement formées de filaments articulés, réunis en touffes légères, ont dans leurs articulations unematière molle, disposée en une spirale élégante ou en étoile. À un instant déterminé, lorsque deux fila- laments se sont rapprochés parallèlement , ils envoient du milieu de chaque article des prolongements qui se soudent en un tube de communication. Alors la matière molle passe indifféremment de l’un dans l’autre, et forme une boule destinée à la reproduc- tion de la plante. Enfin . les Conferves ont une matière contenue dans des cellules, laquelle, à une certaine époque, se réunit en pe- tits corps reproducteurs qui, se frayant un chemin au dehors, se meuvent dans le liquide jusqu'à ce qu'ils se soient fixés en un lieu où ils se développeront. Cependant , aucun de ces mouve- ments ne parait subordonné à la volonté comme dans les animaux mème les plus simples : les Infusoires. De sorte, qu'en comparant entr’eux les deux grands embranchements des êtres vivants, nous trouvons l’un et l’autre, à leur source, doués de mouvements ; mais, dans les animaux , ces mouvements , dirigés par la volonté, l'instinct ou l'intelligence, se sont perfectionnés graduellement avec l'organisation, tandis que dans les végétaux, ces mouvements n'étant que spontanés ont cessé dans le progrès organique. Que serait-il arrivé s'ils s'étaient également développés dans les plantes, les arbres ? Leur spontanéité eût été la cause des plus grands désordres. Les Algues étant généralement des plantes aquatiques et la plupart marines, nourrissent péu d'insectes, à notre connaissance. Celles qui habitent les eaux douces , telles que les Conferves , doivent cependant leur donner des moyens de subsistance , mais presque rien n'a été conslaté. Quant aux Algues marines , les (1201 ) Fucus, qui habitent les rochers, alternativement au-dessus et au- dessous des eaux par les marées, servent d’abri ou d'aliment à plusieurs espèces de Coléoptères et dé Lépidoptères. COLÉOPTÈRES. Homalota debilis. — Sous les Algues. Fairmaire. ———— elongatula. — Ibid. Philonthus sericeus. Holm. — Ibid. Perris. Trichopteryx attenuata. Gillm. — Ibid. Ibid. ————— fucicola. Alib. — Ibid. Ibid. Saprinus sabulosus. — Sous les Algues. Fairmaire. —————— quadistriatus. — Ibid. Colotes rubripes. — Sous les Algues. Phaleria cadaverina. — Sous les Algues. LÉPIDOPTÈRE Briophila algæ. — V. Marronier. FAMILLE. ULVACÉES. Urvacex. Frondes plus ou moins larges, crépues , creusées de cellules régulières contenant chacune deux à quatre sporules. Les Ulves dont nous avons parlé dans les généralités ; et qui sont généralement marines, comprennent quelques espèces qui habitent nos ruisseaux. L'une d'elles nourrit la chenille de la Nonagria ulvæ. Hubn. — Les chenilles, munies de plaques écailleuses sur les deux premiers segments, vivent et se méta- morphosent dans les tiges des plantes aquatiques. FAMILLE. BYSSOIDES. Byssomee. Filaments déliés , droits ou couchés , continus ou articules, simples ou rameux, stériles ou fertiles. ( 202 ) Cette famille comprend la moisissure, c'est dire à quel point elle est rudimentaire. L'Oïdium, le Botrytis, si nuisibles au raisin, au ver à soie, en font partie. Elle s'attache à tous les corps en voie de décomposition, et elle a recu la mission d'en hâter la dissolution. Deux insectes ont été signalés comme vivant sur les Byssus. COLÉOPTÈRE. Eucinetus meridionalis. Lap. — Ce Malacoderme a été observé sur des Bvssus par M. Perris. LÉPIDOPTÈRE. Mniophila candilaria. Fab. — La chenille de cette Phalénide se nourrit de Byssus et de Lichen. Elle est courte , tuberculée, et se retire dans des cavités pour y former son cocon qu’elle recouvre de parcelles de ces mêmes Cryptogames. Brez l’a observée sur le Byssus candelaria. FAMILLE. FUCACÉES. Fucaceæ. Linn. Frondes coriaces , filiformes ou planes, ordinairement bifur- quées, parsemées de vésicules creuses ; sporidies noirâtres. Les Fucus ou Varecs sont surtout remarquables par les vési- cules et par le phénomène qu'ils présentent, c’est-à-dire la diffé- rence des gaz qu'ils renferment, suivant qu'ils sont ou non exposés à l'air. Cette différence , observée pour la première fois par M. De Candolle, consiste dans les proportions d'oxygène qui, quelques heures après que la marée ne couvre plus le végétal, sont celles qui existent dans l'air atmosphérique, et qui sont moindres dans le moment où la marée recouvre la plante. Parmi les nombreuses espèces de Fucus, il y en a qui présentent de grandes dimensions. L'une d'elles, le Macrocystis , paraît être par sa longueur le plus grand végétal connu. Suivant M. Harvey, (208 ) sa tige , indéfiniment bifurquée , atteint jusqu'à une longueur de cinq cents mètres. Cesplantes couvrent quelquefois des parages entiers de l'Océan ; leurs touffes sont si épaisses, si serrées, que la proue des vais- seaux peut à peine s'v ouvrir un passage. « Elles sont , dit M. de Chateaubriand, sujettes à changer de climat ; elles semblent par- tager l'esprit d'aventure de ces peuples que leur position géogra- phique a rendus commerçants. Le Fucus giganteus sort des antres du nord avec les tempêtes ; il s'avance sur les mers, en enfermant dans ses bras des espaces immenses ; comme un filet tendu de Jun à l’autre rivage de l'Océan, il entraîne avec lui les Moules, les Phoques, les Raïes, les Tortues et jusqu'aux Souffleurs , qu'i. prend sur sa route. Quelquefois fatigué de nager sur les vagues, il allonge un pied au fond de l’abîme et s’y arrête debout, puis recommencant sa navigation avec un vent favorable, après avoir flotté sous mille latitudes diverses , il vient tapisser les côtes du Canada des guirlandes enlevées aux rochers dela Norwège.»{Génie du Christianisme. Migrations des plantes.) Plusieurs insectes ont été observées sur les Fucus sans distinc- tion spécifique de ces plantes. COLÉOPTÈRES. Philonthus sericeus. — Ce Brachélytre a été trouvé sous des Fucus par M. Laboulbène. ———-— xantholinus. — [bid. ———— nigritus. — Ibid. ———— bipustulatus. — Ibid. ————. intermedius. — [bid. ———— echeninus. — Ibid. ——-— aterrimus. — Ibid. Aleochara obscurella. — Laboulb. Même observation. Saprinus sabulosus. — Sous les Fucus. Cafius fucicola. Leach. — Cet auteur a trouvé ce Brachélytre sur des Fucus. (204 ) Homalota anthraeima. — Fairmaire. Sous les Fucus. ———— albopila. Mulsant. — Cet auteur l’a trouvé rarement sous des Fucus à Aiguesmortes. Sylpha opaca. Fab. — Sous les Fucus. Trachyscelis aphidioides. — Lut. Cet Hétéromère à été trouvé sous des Fucus par M. Laboulbène. Phaleria cadaverina. Fab. — V. Hètre. Même observation. DIPTÈRES. Tachydromia albipennis. Perr. — Cette Empidie se trouve sous les Fucus. Medeterus oceanus. Macq. — V. Pin maritime." J'ai trouvé cette espèce sous les Fucus de l’estacade de la jetée du port de Dun- kerque , en nombre d'autant plus grand que la jetée s’avançait davantage dans la mer. Scatophaga oceana. Macq. — Mème observation. ———— marina. Macq. -— Même observation. ———— tessellata. Macq. — Même observation. ———— fucorum. Fall. — Même observation. Actora æstuum. Meig. — Cette Muscide vit sur les Fucus. FAMILLE. G. LICHENACÉES. Licnenacez. Frondes crustacées portant les organes de la fructification. Ces Cryptogames, que nous voyons couvrant les rochers, tapis sant les vieux murs , appliqués contre l'écorce des arbres ou sus- pendus à leurs branches, ou étalés sur la terre, se montrent sons la forme de croûte, d’expansions foliacées, de filaments. Ils ont une consistance sèche , coriace et membraneuse ; leur adhérence aux corps quiles supportent a lieu sans véritables racines, et c’est dans l'air humide qu'ils trouvent leur nourriture ; leurs couleurs sont extrêmement variées et présentent souvent les nuances les plus vives du rouge pourpre, de l’orangé et du rose le plus tendre. { 205 ) Les Lichens sont utiles à l’homme comme aliment, comme mé- dicament et comme matière tinctoriale ; ils fournissent une sorte de gruau aux Islandais, de fourrage aux rennes des Norwégiens. Par leur qualité éminemment amère, ils exercent un effet tonique très-salutaire sur l'organe digestif et sur la poitrine ; leur macé- ration dans l'eau donne un grand nombre de couleurs propres à la teinture. Une espèce particulière, l’'Usnée barbue, fournit une poussière inflammable. Cette famille , divisée en uve multitude de genres , sert d'ali- ment à un grand nombre d’insectes dont la plupart ont été signalés sans distinction des espèces de Lichens sur lesquelles ils vivent. COLÉOPTÈRE. Homalota livida. Mulsant.— Ce Brachélytre vit dans des détritus de Lichens au Mont-d'Or. HÉMIPTÈRE. Chermes lichenis. Linn. — V. Tamarisc. Brez. LÉPIDOPTÈRES. Lithosia rubricollis. L. —V. Tilleul. La chenille vit de Lichens et particulièrement sur le L. Olivaceus Pini et Fagi. ———— luteola. —- Hubn. ainsi que toutes les autres espèces. Calligenia rosea. Fab. — V. Hètre. Setina irrorea. Hub. -—— V. Saule. Nudaria mundana. Lino. — V. Aulne. Typhonia lugubris. Ochs.— Les chenilles glabres et vermiformes de cette Psychide vivent et se transforment dans des fourreaux * portatifs, revêtus de particules pierreuses. Elles'se nourrissent de Lichens qui croissent sur les pierres. Briophila glandifera. W. W. — V. Algues. Les chenilles de toutes les espèces vivent de Lichens et se transforment dans des crevasses qu'elles recouvrent de ces plantes et qu'elles tapissent intérieurement de soie. Cyrrædia ambusta. Linn. — V. Poirier. (206 ) Hadena thalassina. Linn. — V. Spartier. ——— obseura. Haw. — Ibid. Aventia flexuaria. Hub. -— Y. Pin. Elle vit de Lichens et se transforme dans un tissu lâche entre les feuilles. Cleora lichenaria. W. W.-- La chenille de cette Phalénide est courte , déprimée , à tubercules bifides , ayant les trois premiers segments moins gros que la tête. Elle vit des Lichens qui croissent sur le tronc des arbres et se métamorphose dans des coques re- vêtues extérieurement des débris de ces mêmes Lichens. Boletobia carbonaria. W. W.—- La chenille de cette Phalénide est courte, à tubercules pilifères. Elle vit de Lichens et de Bolets et se métamorphose dans une coque recouverte des débris de ces mêmes végétaux. Mniophila corticalis. Hubn. — V. Chêne. Yponomeuta irrorella. Linn. — V. Fusain. Incurvaria bipunctella. Dup. — V. Groseiller. Enolmis achantella. — God. La chenille de cette Tinéide vit de Lichens. Rambur. ——— lutcella. — Dup. Ibid. Solenobia clathrella.—Tr. La chenille de cette Tinéide se nour- rit du Lichen des vieilles barrières. Au repos, elle tient son four- reau dans une position horizontale. M. Bruand. Solenobia lichenella. — L. Ibid. G. IMBRICAIRE. Iugricania. Linn. Frondelles horizontales, foliacées, disposées en rosette. L'Imbricaire des murs, L. parietina ; est le Lichen le plus com- mun de tous, qui se fait remarquer de loin par sa belle couleur d’un jaune d'or, et qui croît sur les murs, les rochers , les écorces des arbres. Deux Lépidoptères ont été observés sur ce Lichen. Bryophila perla. Dup. — V. Lichen. La chenille vit sur les Im- bricaires. Elle se construit une petite coque ronde avec de la terre et des fragments de ces Lichens. ( 207 ) Bryophila lupula. Hubn. — Mêmes mœurs. G. CLADONIA. Craponra. Linn. Tiges simples ou rameuses , nues ou chargées de folioles, por- tant à leur sommet des tubercules globuleux , sessiles et soli- taires. La Cladonie des Rennes, C. rangiferina , couvre les montagnes de la Laponie et du Groenland ; c’est la nourriture de ces précieux bestiaux qui la cherchent et la broutent sous la neige. Un Lépidoptère a été observé sur la Cladonia, par M. Hering. Lithosia arideola. — V. Tilleul. La chenille vit sur ce Lichen et sur le Syntrechia subulata. d DEUXIÈME SOUS-CLASSE. CHAMPIGNONS. Funer. Végétaux cellulaires à membrane séminifère très-variable dans sa forme et ne couvrant que la face inférieure. Cette immense famille, qui comprend le plus grand nombre de Cryptogames, présente un vif intérêt, quand on considère son his- toire depuis les anciens jusqu'à nos jours, et qu'on suit l'extrême développement où est parvenue cette partie de la science, l'un des monuments les plus admirables du génie d'investigation qui ca- ractérise notre époque. Suivant Pline, qui représente l'antiquité, « les principes géné- » rateurs des Champignons sont le limon et le suc fermentescible » dés terres humides, ou bien des racines des arbres à gland. Ce » n'est d'abord qu’une écume visqueuse , ensuite une espèce de » corps membraneux et enfin un Champignon tout formé. » Dans le XVE siècle, on alla jusqu'à croire que les Champi- gnons pouvaient être des minéraux ou des sortes de Polypiers ; qu'ils produisaient des œufs, que de ces œufs éclosaient des vers, et que ceux-ci devenaient Champignons ; d’autres croyaient qu'ils étaient le résultat de la putréfaction des corps. ( 208 ) La science moderne a fait justice de ces erreurs, mais elle a parfois émis des opinions qui n’ont pu se soutenir, telles que celles de MM. Cassini et Turpin , qui admettaient que ce qu'on appelle communément un Champignon, est un Apothecium ou le fruit d'une plante habituellement souterraine. La famille des Champignons, composée maintenant de plus de 20,000 espèces (c’est le cinquième des plantes connues), réparties en mille genres et au-delà , présente une organisation tellement différente de celle des autres végétaux, qu’elle est l'objet d'une science à part, qui à exigé une nomenclature également particu- lière, science qui honore d'autant plus ceux qui la cultivent qu’ils ne sont soutenus ni par l'attrait de la beauté ou de la gran- deur des objets de leurs études , ni par la popularité que pourront acquérir leurs travaux. Honneur à Michéli, père de la science , à Bulliard, Persoon, Fries, Berkeley, Montagne , Desmazières et tant d’autres qui se sont dévoués, qui ont, en quelque sorte, tiré du chaos celte partie considérable de la création et qui ont répandu la lumière sur l’ordre, la convenance, l'harmonie qui brillent sur elle comme sur tous les autres êtres sortis des mains du Créateur. L'une des particularités les plus remarquables que présentent les Champignons, c’est d’être composés entièrement de tissu cellu- laire, sans mélange ni de trachées ni de vaisseaux ; comme dans les autres plantes, et c’est l'extrême diversité des cellules dans leur forme, leur grandeur, leur consistance, leur combinaison, qui produit l'immense série de ces végétaux , terminée par le Protococeus constitué par une cellule unique. Les Champignons se distinguent encore des autres plantes par l'absence de racines distinctes ; ils ne croissent pas comme elles sous l'influence de la lumière ; ils se développent dans l'obscurité avec une rapidité telle que M. Ward a vu un Phallus fœtidus grandir de 76 millimètres en 35 minutes, et que M. Schleiden s’est assuré que le Bovista gigantea s’accroit en acquérant approxima- tivement 20,000 cellules par minute ; mais aussi, s'ils se hâtent de { 209 | vivre, ils se hâtent de mourir et si, en une nuit , ils peuvent pas- ser de la grosseur d’une tête d’épingle à celle d’une gourde, dès le soir ils ont souvent rempli leur destinée et passé à l’état de dé- liquescence, de dissolution. Les organes reproducteurs des Champignons diffèrent égale- ment de la manière la plus contrastante de ceux des plantes phanérogames. L'appareil sexuel manque chez la plupart d'entre eux et, lorsqu'il existe, il se refuse à toute comparaison. Les graines n’ontpoint d'embryon. Elles sont constituées par des cellules nommées sporules , souvent détachées , et de bonne heure, de la plante mère. Leur germination se réduit à produire d’autres cel- lules semblables aux premières. Ces graines sont souvent si nom- breuses, dans le Lycoperdon par exemple , que lorsqu'elles s’é- : lancent dans les airs, à l’époque de la maturité, elles forment comme un nuage et que, d’après le calcul de Fnies, un échantillon de Reticularia maxima contenait plus de dix millions de sporules dont chacune était douée de la faculté de se développer en un nouvel individu semblable au premier. Nous avons parlé à l’article Cryptogames de la destination des Champignons dans l’économie générale de la nature. Il nous res- terait à mentionner leur utilité particulière à notre égard , si tout le monde ne savait qu’ils sont un mêts agréable mais dange- reux ; que, s’ils flattent notre sensualité par la délicatesse de leur saveur , ils nous empoisonnent par leurs principes délétères. Ils étaient en usage chez les Romains comme ils le sont chez nous ; « mais ils furent fort décriés, dit Pline, depuis l’horrible attentat » d'Agrippine, qui s'en servit pour empoisonner l’empereur » Claude, son mari, attentat qui la conduisit à infecter l'univers » d'un autre poison, qui lui devint funeste à elle-même par l’avé- » nement de Néron, objet de toute sa tendresse. » La famille des Champignons renferme un grand nombre d'es- pèces comestibles, indépendamment de l’Agaric de couche devenu si vulgaire depuis qu'il est cultivé. Chaque sol , chaque tempéra- # 14 (M0) ture , souvent chaque forêt, chaque bruyère , produit les siens. C'est ainsi que les Clavaires, les Helvelles , les Morilles, les Chanterelles sont recherchés aux environs de Paris, les Polypores dans les Vosges , les Bolets, les Mousserons dans le midi de la France, l'Oronge en Italie. Enfin, la Truffe qui est aussi un Champignon flatte notre sen- sualité dans toutes les parties du monde. Les Champignons ne sont pas seulement destinés à nous pré- senter des mets savoureux et sains quand nous savons discerner les espèces, ils nourrissent surtout de nombreux insectes. Des tribus considérables tout entières n’ont pas d’autre berceau, s’y développent, soit isolément, soit en famille. et y manifestent quel- quefois des habitudes fort remarquables. C’est ainsi que les Céro- plates, qui vivent dans les Agarics, ont l'instinct de revêtir d’une couche de soie le plan sur lequel elles se posent; en marchant elles s’assujettissent à tapisser l’espace qu'elles parcourent et, lorsqu'elles se fixent , elles construisent une sorte de pavillon qui les recouvre entièrement. Les insectes qui vivent de la substance des Champignons appar- tiennent aux Coléoptères et aux Diptères. Dans le premier de ces ordres, on compte un grand nombre de Brachélytres, de Xylo- phages, d'Helopiens, de Trimères, les genres Boletobius, Boleto- chara , Mycetoporus, Mycetochara, Mycetophaga , Lycoperdina. Parmi les Diptères, les Champignons possèdent entièrement la tribu considérable des Tipulaires fungicoles, les Platypézines et une partie de celle des Sciomyzides. C’est à cette dernière qu’ap- partiennent les Hélomyzes, qui se développent dans les Truffes et qui, dans l’état ailé, recherchent les terrains qui recouvrent ces tubercules. La plupart des observations qui ont été faites sur les insectes des Champignons ne mentionnent ni les genres ni les espèces de ces végétaux auxquels ils appartiennent. Nous en donnons la liste. (21) GOLÉOPTÈRES. Emus fossor. Fab.— Ce Brachélytre vit dans les Champignons. Microsaurus lateralis. Gravenh. — Même observation. Philonthus æneus. Grav. — Même observation. Oxyporus rufus. Fab. — Il vit en famille. Boletobius atricapillus. Fab. — Ibid. Bolitochara pygmæus. Fairmaire. — Il vit dans plusieurs es- pèces. Bolitochara cincta. Grav. — Ibid. fungi. Germ. — libd. Bolitophagus fungicola. Germ. — Erchs. Aleochara laniginosa. Grav. — Ibid. Oxypoda alternans. Grav. — Ibid. Hygronoma palleola. Kiesenwetter. — Ibid. Proteinus brachypterus. Fab. — Ibid. Megarthrus depressus. Payk.—Ibid. ———— denticollis. Berk. — Ibid. ———— hemipterus. Ill. — Ibid. Antalia impressa. Kies. — Ibid. Scaphidium 4 maculatum. Fab. — V. Orme. agaricinum. — Ibid. Strongylus glabratus. Fab. — Idid. Cryptophagus rufipennis. Dej.— Observé par Gyllenhal dans les Champignons: Opatrum silphoides. Linn. — Brez. Anisotoma cinnamomea. Fab. — V. Hêtre. ——— humerale. Fab. — Ibid. ——— rufomarginatum. Duf. — Ibid. Tetratoma fungorum. Fab. — V. Hêtre. Cis castaneus. Mellié. — V. Bouleau. M. Mellié l’a trouvé dans les gros Champignons qui vivent sur les Noyers, M. Chevrolat sur ceux des Marroniers. Cis laricinus. Reichenbach. — Ibid. M. Aubé en a conservé longtemps des individus vivants dans un Champignon. (212) Cis mandibularis. Gyll. — V. Bouleau. Triplax russica. Linn. — Dans divers Champignons. —— ænea. Fab. — Ibid. Tritoma bipustulata. Fab. — Mème observation. Endomychus coccineus. Fab. — Mème observation. DIPTÈRES. Ceratopogon brunnipes. Perris. — V. Chèvrefeuille. M. Perris a trouvé la larve dans des Champignons décomposés. . Psychoda nervosa. Perris. — Même observation. Cænosia fungorum. — Deg. La larve se développe dans les Champignons G. SPHÆRIE. Sraæria. Linn. Champignons microscopiques , formant des taches de couleurs variées , et s'ouvrant au sommet par un pore arrondi dont le bord est plus ou moins proéminent et se prolonge quelquefois en un long tube. Les Sphæries se développent sous l'épiderme des bois ,des tiges ou des feuilles des plantes, et sont le symptôme d'une destruction prochaine qu’elles ont mission d'accélérer. Un seul insecte a été signalé sur les Sphæries : Diphyllus lunatus. Fab.— La larve de ce Coléoptère xylophage vit sur le Sphæria concentrica, qui se développe dans les couches mortes du Frêne. Perris. G. LYCOPERDON. Lycorernon. Linn. Peridium globuleux ou turbiné , charnu d'abord, puis pulvéru- lent, s'ouvrant à son sommet quand il est mûr , et renfermant des spores entremêlés de filaments. Les Lycoperdons , quoique fétides et vénéneux , nous inté- ressent par le phénomène que présente le mode de dissémination de leurs germes. Lorsqu'ils sont parvenus à leur maturité, ils s'ouvrent à leur sommet et.il se fait une explosion de semences ( 2143 ) sous la forme de poussière ou de fumée qui se répand dans l’at mosphère. Une espèce particulière donne, lorsqu'on la brûle , une fumée âcre analogue à celle de l’amadou , et usitée en Angleterre pour engourdir les abeilles quand on veut enlever leur miel sans les faire périr. Un médecin, M. Richardson, en a conclu qu'elle pour- rait engourdir de plus grands animaux et remplacer l’éther et le chloroforme. Une expérience récente, faite sur un chien, a réussi, et nous devrons peut-être aux Lycoperdons un nouveau moyen d'échapper aux grandes douleurs physiques. Une autre espèce, le Lycoperdon stellatum , dans le premier développement, ressemble à une boule et reste sous la terre. Elle présente deux enveloppes , l’extérieure se fend à son sommet, se divise en lobes qui s’écartent peu à peu, se roulent sur eux- mêmes et, comprimant la terre environnante, l’entrouvrent, sou- lèvént la boule interne et la portent à la surface par un mouvement d’élasticité très-marquée. La boule se trouve ainsi soutenue au- dessus de la terre par les lobes formant autant de pieds, sur lesquels elle est posée. C’est alors que l'explosion se fait et que les germes s'envolent. Les sporules en s’échappant sont si nombreuses qu’elles forment comme un nuage de fumée. Fries a calculé qu'un échantillon de Réticularia maxima en contenait plus de dix millions, toutes douées de la faculté de se développer en un nouvel individu. J’admire ce nombre prodigieux, et j’admire aussi la science qui a compté ces atomes impalpables qui se répandent en fumée dans les airs. Les insectes qui vivent dans ces Cryptogames ne sont pas nom- breux: Ils sont tous Coléoptères; un genre a reçu le nom de Ly- . coperdine parce que toutes ses espèces s’y développent. Strongylus ferrugineus. Fab. — V. Sapin blanc. Cryptophagus lycoperdi. Hub. — La larve de ce Clavicorne vit dans les Lycoperdons. ————— cellaris. Fab. — Ibid. (244) Golgia succincta. Muls. Fab. — Ce Sulcicorne vit, ainsi que sa larve, dans ces Cryptogames. Lycoperdina cruciata. Fab. — Même observation. ———— bovistæ. — Fab. G. FULIGO. Fouico. Haller. Chapeau sessile et gélatineux. Le Fuligo vaporaria, qui croît dans les tannées , nourrit un insecte, Abræus rhombophorus. Rouzet. — V. Hêtre. Ce Clavicorne se tient caché dans la poussière jaune contenue sous les chapeaux gélatineux de ce Champignon G. TRUFFE. Turer. Linn. Tubercule formé de tissu cellulaire dont l’intérieur offre des filaments blancs portant des thèques noires qui renferment quel- ques spores. La Truffe semble avoir été créée pour réaliser le système des compeusations. Ce tubercule informe, obscur, sans lige, sans ra- cines , caché dans la terre et condamné , ce semble, à y rester toujours enseveli, ignoré ou dédaigné, jouit de la destinée la plus brillante, Ja plus glorieuse. Son parfum si fin, si suave, si parti- culier, sa saveur en harmonie avec son parfum, l'ont élevé, au siècle d’Auguste, comme au nôtre, au rang suprême des honneurs culinaires. Les Romains en faisaient leurs délices (1); ils envoyèrent à sa recherche jusque dans la Lybie et c'était à elle que Juvénal faisait allusion dans ce vers : Gustus elementa per omnia queærunt. * Pline, en citant l'Espagne parmi les parties de l'empire où elle était connue, rapporte que Lartius Licinius, gouverneur de ce x) I est singulier que dans le XVIL.: siècle , Jean Picard, dans sa Celtopédie, dérive le nom de la Truffe du grec Truphe , délices. Ménage le dérive de {uber, tubere , trubere, trufere. (245 ) pays, mordant à une Truffe, à Carthagène, rencontra un denier romain avec la dent, qui en fut cassée. La présence de ce denier dans cette Truffe peut s'expliquer , en supposant que le germe du tubercule , se développant près du denier , l'ait entouré de toutes parts. La Truffe, dont l’usage fut détruit par l'invasion des Barbares, ne reparut en Europe qu'à la fin du XVIIE siècle. Introduite à Paris, vers 1780, surtout chez les financiers et chezles filles entrete- nues , à cause de sa réputation aphrodisiaque, elle se répandit ra- pidement au point où nous la voyons aujourd hui. Elle est procla- mée le mets par excellence , le diamant de la cuisine. « Elle peut, dit Brillat-Savarin , rendre les femmes plus tendres et les hommes plus aimables ; » mais elle a contribué à développer le sensualisme, à en faire la plaie honteuse de notre siècle ; elle fait dire : « Pour manger une dinde truffée , il faut être deux : la dinde et soi. » c’est-à-dire deux brutes. Nous voyons la Truffe dans les banquets politiques , employée comme moyen corrupteur et devenue poison de l’âme, comme le Champignon l’est quelquefois du corps; elle a passé des soupers de la courtisane aux repas officiels, aux dîners de cérémonie; elle se vulgarise de plus en plus et excite partout la gourmandise et la luxure. Des essais de culture de la Truffe ont été faits, d’abord par le baron de Bornholz, puis par M. de Noë. Si le succès abaissait la valeur des Truffes , elles perdraient une partie de leur mérite (1). La récolte des Truffes ne se fait pas seulement en employant des porcs. Des insectes se rendent également utiles sous ce rap- port, en voltigeant au-dessus des terrains truffiers. DIPTÈRES. Sciara ingenua. L. Duf. — Cette Tipulaire se développe dans la Truffe. (1) Le sol le plus favorable à cette culture doit être un peu humide , léger, ferrugineux et calcaire, et contenir une grande quantité de feuilles de chène en décomposition. (26 ) Anthomyia blepharopteroides. L. D. — La larve de cette Muscide vit dans la Truffe. Helomyza ustulata. Meig. — Mème observation. — Les habi- tants de Rions appelent ces mouches Mouscades rubassiesses. Helomyza pallida. Meig. — Ibid. ———— lineuta. Meig. — Ibid. ———— tuberivora. L. Duf. — Ibid- ———— penicillata. L. Duf. Reaum. - Ibid. Phora pallipes. Meig. — Ibid. G. AGARIC. AGarIcus Surface inférieure présentant des lames rayonnantes. Les Agarics, les plus nombreux des Champignons, doivent leur nom , suivant Dioscoride , contemporain d'Auguste, à la contrée d’Agaria, en Sarmatie, qui en produisait abondamment. C'est à ce genre -qu'appartiennent la plupart des Champignons comes- tibles dont l’usage est si répandu, surtout en Europe, et dont la production est accrue par la culture. Les couches suppléent aux pacages, aux prairies, aux bruyères, aux forêts, et nous devons à de jeunes religieuses d'un couvent de Naples la découverte d'en obtenir du marc de café amoncelé à l'ombre. Dans la multitude des espèces usuelles , indépendamment de la commune , nous citerons l’Agaric délicieux , l’Amelhyste, l'Anisé, le Mousseron, l’Oreillette des pelouses orléanaises, le Géant dont le chapeau en parasol est porté sur une haute tige, l’Aromatique qui, caché sous l'herbe, trahit sa présence, comme la violette, par son parfum; le Lactaire qui, à peineeffleuré, donneune liqueur douce comme le lait ; l'Oronge, surtout de l'Europe méridionale, ce célèbre Bolet d'Horace, de Sénèque, de Juvenal ; l'Elvellæ, de Cicéron. Apicius, le Nepotum omnium altissimus gurges , ainsi que l'appelle Pline , apprenait à l’assaisonner avec du miel, de l'huile et des jaunes d'œuf. Juyéual, dans sa mordante ( 247 ) satyre, introduit un patron ne faisant servir à ses parasites que des Champignons équivoques et se réservant le Bolet. Vilibus ancipites fungi ponentur amicis Boletus domino. Enfin, c’est l'Oronge préparée avec du poison par ordre d'A- grippine qui donna la mort à Claude, le mit au rang des dieux; et Néron, qui lui dut letrône, lui donna par une plaisanterie atroce le nom de Cibus deorum. Du reste, plusieurs Agarics ne sont que trop vénéneux par eux- mêmes. Un auteur prétend même que l'empoisonnement de Claude a pu se commettre en substituant à l'Oronge l'Agaric muscaire , qui y ressemble à s'y méprendre. La même qualité délétère ap- partient aux Agarics émétique, meurtrier, sanguin et bien d'autres; mais ils ne sont souvent nuisibles que d’une manière relative : les uns le sont dans le Midi et sont innocents dans le Nord ; d’autres sont bons ou mauvais suivant qu’on les cueille dans les pâturages ou à l’ombre des bois. Les meilleurs mêmes se changent en poison quand ils sont trop développés. Cependant, on peut généralement en prévenir les mauvais effets, en les plongeant dans du vinaigre étendu d’eau , avant d'en faire usage. L’Agaric muscaire produit sur les Kamtschadales un effet fort singulier lorsqu'il est employé sec ou infusé avec une espèce de vaccinium : il cause une ivresse particulière, accompagnée de tremblements et de convulsions, inspirant aux uns la gaîté, les chants, la danse, aux autres la tristesse, l'abattement. On les voit quelquefois , les armes à la main, se précipiter les uns sur les autres , ne connaissant plus aucun danger et avec des forces mus- culaires surexcitées , jusqu’à ce que le sommeil les calme et les rende à eux-mêmes. Une autre particularité que présentent quelques Agarics , c’est d’être phosphorescents pendant la nuit et de l'être, non par la dé- composition , comme beaucoup d’autres corps, mais lorsque le développement est dans toute sa plénitude. Ce sont les lames qui répandent la lumière. (218) Les Insectes qui se développent dans les Agarics n'ont pas été signalés en grand nombre. COLÉOPTÈRES. Staphylinus agarici. Linn. — Brez. Bolitochara agaricola. Mannerh.—V. Champignon. Boletophaga agaricola. Latr. — V. Champignon. Scaphidium agaricinum. Fab. — V. Orme. Nitidula colon. Fab. — V. Hêtre. Tritoma bipustulata. Lat. — La larve se développe dans les Agarics. Triplax nigripennis. Fab. —- Même observation. DIPTÈRES. Trichocera annulata. Perris.—La larve de cette Tipulaire vit en société dans les Agarics. Empis minuta. Lat. — Il vit sur les Agarics. G. BOLET. Borerus. Linn. Chapeau central à surface inférieure munie de tubes libres, cy- lindriques, rapprochés. Les Bolets, dont le nom a été détourné de son acception primi tive qui, chez les Romains, se rapportait aux Agarics , diffèrent particulièrement de ces derniers par la surface inférieure du cha- peau qui présente .des tubes au lieu de lames, et parle pédicule, plus ou moins renflé à sa base, en forme de toupie. Beaucoup moins nombreux en espèces , ils le sont plus en individus ; ils entrent dans une part au moins égale dans notre alimentation ; ils offrent également des espèces éminentes en qualités et d'autres qui sont vénéneuses. Aussi répandus, mais plus communs dans l'Europe méridionale, nous les trouvons surtout dans les forêts, sur les coteaux boisés, dans les taillis plantés de Chataigniers et de Chènes, dans les Bruyères, sur la lisière des bois, sous la Fougère au bord des prés montueux et ombragés. (M9) Les Bolets, sous le nom de Ceps, fournissent une nourriture ‘abondante surtout aux habitants du midi de la France, dans les mois de septembre et octobre. La consommation en est très-grande à Bordeaux, à Bayonne ; les bouchers d’Auch abattent un bœuf de moins chaque semaine de la saison. Les meilleures espèces sont le Bolet comestible, qui est en même temps le plus répandu, et le Bolet bronzé, que Grimod de la Reynière préférait à tous les Champignons connus. Ce célèbre gourmand l'appelait le divin Cryptogame à tête de nègre, et il eut volontiers passé la moitié de sa vie dans les bois pour le cueillir, et l’autre à le déguster. Parmi les espèces vénéneuses, il faut craindre surtout le Bole- tus perniciosus, que l’on confond facilement avec l’Edulis. Les Insectes qui se développent dans ces Cryptogames sont assez nombreux , mais ils ont été souvent confondus avec ceux qui vivent dans les Polypores, voisins des Bolets. Nous nommons ici ceux qui ont été observés sur les Bolets , sans distinction. COLÉOPTÈRES. Staphylinus bicolor. Linn. Brez. — V. Hêtre. ———— thoracicus. Linn. Brez. — Ibid. Stenus flavipes. Grav. Brez. — Ce Brachélytre se développe dans les Bolets. L Oxyporus rüfus. Linn. Ce Brachélytre vit en famille dans les Bolets. Bolitobius lunulatus Fab. — Même observation. ——— pygmæus. Linn. — Ibid. Bolitochara troglodytes. Dej. — Même observation. ———— boleti. Grav. — Ibid. Colobicus marginatus. Fab. — Ce Clavicorne se développe dans les Bolets. Ghiliani Engis humeralis. Latr. Duf, — V. Sapin blanc. Cistela ceramboides. Fab. — V. Tilleul. Sur le Bolet fomen- tarius. Bolitophagus agaricicola. Fab. — V. Hêtre. (20 ) Diaperis boleti. Fab. — V. Hêtre. Mycetoma suturale. Panz.— Ce Ténébrionite se développe dans les Bolets. L. Duf. Bostrichus cinereus. Gyll. — V. Clématite. Sur le Bolet ver- sicolor. Cis minutus. Latr. — V. Bouleau. — quadridens. Mellié. — Ibid. — affinis. Gyll. — Ibid. — Boleti. — Ibid. — bostrichoides. L. Duf, — Ibid. Mycetophagus lunaris. Fab. -- V. Peuplier. ————— mauritanica. Lat. — Ibid. Platypus cylindrieus. Lat. — V. Poirier Chrysomela boleti. Linn. — V. Saule. Triplax nigriceps. Dej. — Cette Chrysoméline se développe dans les Bolets. « ——— nigripennis. Fab. — Ibid. ——— hispidus. — Ibid. Tritoma bipustulata. Lion. — Ibid. LÉPIDOPTÈRE. Boletobia carbonaria. W. W.— La chenille de cette Phalénide est courte et tuberculeuse. Elle vit duns les Bolets qui croissent sur le bois décomposé et se métamorphose dans une coque recou- verte des débris de ces mêmes Bolets. DIPTÈRES. Boletophila cinerea. Meig. — La larve de cette Tipulaire se dé- veloppe dans les Bolets. Boletophila fusca. Id. — Ibid. G. POLYPORE. Poryronus. Micheh. Chapeau sessile ou pédiculé, latéral ou central , parfois mul- tiple et rameux. Face inférieure garnie de tubes nombreux, (22) entiers, séparés les uns des autres par des cloisons simples et très-minces. Ce genre, qui a été détaché des Bolets, comprend un grand nombre d'espèces croissant pour la plupart sur les arbres ou à leur pied. Quelques unes portent même le nom de ceux dont ils sont particulièrement les parasites. C’est ainsi que le Mélèze nourrit le Polypore officinal qui entre dans la composition de l’élixir si trom- peur de longue vie ; que c’est au Chêne rouvre que nous devons l’'Amadouvier qui arrête l’effusion de notre sang. Les Polypores se font remarquer tantôt par leur grandeur et leur poids qui atteint quelquefois trente livres , comme dans le P. giganteus , dont le pédicule s’évase d’un côté en un demi cha- peau diversement contourné ; tantôt par leurs formes, comme dans le P. frondosus, formé d’un grand nombre de chapeaux sem- blables à des feuilles ridées , tuberculées de chicorée, ou dans le P. pescapræ , dont le pédicule porte bizarrement plusieurs cha- peaux. Plusieurs espèces se recommandent par leurs qualités alimen- taires et rivalisent d'utilité avec les Bolets et les Agarics. L'une d'elles, le P. tuber, flatte même notre sensualité, commela Truffe, dont elle reproduit la couleur , le parfum et le goût. Une autre, fort estimée à Naples, présente un phénomène fort singulier par sa faculté de croître sur un tuf volcanique, appelé pour cette raison pierre à Champignons. Ce tuf, très-poreux, de nature argileuse et calcaire, mais sans aucun mélange de terre, jouit de la pro- priété de produire le Polyporus tuberaster , dont les germes y trouvent les conditions mystérieuses de leur développement. Cette propriété se conserve, quoique la pierre soit transportée au loin, et jen ai fait l'expérience en Flandre où un fragment, rapporté de Naples par M. Am. Taverne, et déposé dans un lieu chaud.et hu- mide, donna pendant deux mois un assez grand nombre de ces Champignons, de très-bonne qualité. Un assez grand nombre d'insectes se développent dans les Po- lypores suivants : ( 222 ) POLYPORE VERSICOLORE,. P. versIcoLoR. COLÉOPTÈRES. Cis boleti. Fab. — V. Bouleau. Il vit en familles , quelquefois très-nombreuses. Fries. Ennearthron cornutus. Gyll. — Ibid. Fries. LÉPIDOPTÈRE. Boletobia carbonaria. W. W. — V. Bolet. La chenille de cette Phalénide vit dans le P. versicolor comme dans les Bolets. DIPTÈRES. Cecidomyia polypori. Winnertz. — La larve vit dans les Poly- pores sans y causer de déformations. Cecidomyia lugubris. Loew. — Ibid. dans le P. vers. Sciophila unimaculata. Macq. — La larve de cette Tipulaire vit dans ce Polypore. Perris. Tetragoneura hirta. Winnertz. — La larve de cette Tipulaire vit dans les P. versicolor qui se développent dans le bois décom- posé du Hètre.. Winn. Ditomyia trifasciata. Winn. — Même observation. POLYPORE FOMENTAIRE, P. FOMENTARIUS. Î LÉPIDOPTÈRE. Euplocamus parasitellus. Hubn. — La chenille de cette Tinéide est glabre; elle se creuse dans ce Polypore des galeries profondes qu’elle garnit de soie et en ferme l'entrée. DIPTÈRE. Ceroplatus sesioides. Wahlberg. — La larve de cette Tipulaire file un ruban ou des fils dont elle forme un cocon. POLYPORE ODORANT. P. SUAVEOLENS. COLÉOPTÈRES. Cis boleti. Fab. — V. Bouleau et Polyp. versicolor. (223 ) Ennearthron fronticornis. Panz. — La larve de ce Xylophage se développe dans ce Polÿypore. Motschouski. POLYPCRE UNICOLORE. P. unicocor. Bull. COLÉOPTÈRE. Cis rugulosus. Mannerh. — V. Bouleau. Il vit aussi dans ce Po- lypore suivant l’observation de M. Mellié. POLYPORE FERRUGINEUX. P. FERRUGINOSUS. DIPTÈRE . Ditomyia trifasciata. Winnertz. — V. Polypore versicolor. POLYPORE ÉCAILLEUX. P. squamosus. COLÉOPTÈRE. Ennearthron fronticornis. Panz. — V. Polyporus suaveolens. POLYPORE AMADOUVIER. P. 1GNIARIUS. COLÉOPTÈRE. Cis fuscatus. Mellié. — V. Bouleau. Il a été trouvé dans ce Polypore par M. Laboulbène. POLYPORE DU MURIER. P. moi. , LÉPIDOPTÈRE. Euplocamus morillus. Dup. — V. P. fomentarius, POLYPORE DU BOULEAU. P. BETULINUS. LÉPIDOPTÈRES. Lita betulinella. Linn. — V. Bouleau. Brez l’a observé sur ce Polypore. Euplocamus picarellus. Dup. — V. P. fomentarius. Zeller la trouvé dans ce Polypore. POLYPORE DU HÊTRE. P. rAGr. COLÉOPTÈRE. .… Bolitophagus crenatus. Fab. — V. Hètre. Ghiliani l'a trouvé dans ce Polypore. ( 224 } LÉPIDOPTÈRES. Tinea corticella. Cortis. — V. Clématite. Zeller l’a observé dans ce Polypore. Euplocamus polypori. Esper. — V. P. fomentarius. Même observation. POLYPORE DU TILLEUL. P. mrtæ. LÉPIDOPTÈRES. Tinea corticella. Curtis. —V. Clématite et Polypore du Hètre. POLYPORE DU PEUPLIER. P. roruui. LÉPIDOPTÈRE. Tinea cloacella. Haworth. — V. Clématite La chenille vit dans le Polypore du Peuplier argenté. Zeller. POLYPORE DU CERISIER. P. cErasi. COLÉOPTÈRE. Orchesia micans. Fab. — V. Hètre. Ghiliani en a trouvé des centaines dans l’état d’insecte parfait et de larve. POLYPORE DU PIN. P. pri. COLÉOPTÈRES. Cis dentatus. Gacogne. — V. Bouleau. Il vit sur ce Polypore. Gac. Ennearthron cornutus. Gyll. — V. Polyp. versicolor. M. Mellié l'a trouvé dans le Polypore. du Pin. POLYPORE DU SAPIN. P. agretis. COLÉOPTÈRE. Cis lineatus et cribatus. Chevrier. — V. Bouleau. M. Gacogne les a trouvés sur ce Polypore. * G. HYPODRYS. Hyroprys. Dec. Chapeau sessile ou fixé latéralement à un pédicule très-court, ( 225 ) Face inférieure garnie de tubes grêles, inégaux, frangés à leur orifice. Ce genre de Champignons doit son nom à sa station ordinaire au pied des Chênes, et la seule espèce que nous connaissons, l'H. hepaticus, doit le sien à une certaine ressemblance , tant pour la forme que pour la couleur , avec le foie de bœuf qui est son nom vulgaire. C'est le même genre et la même espèce que Bulliard a appelé Fistuline buglossoïde. Elle fournit un mets agréable en France et en Italie. Deux insectes ont été signalés sur ce Cryptogame. Triphyllus punctatus. Fab. — D'après une observation de M. Perris, la larve de ce Coléoptèrexylophage vit dans l'Hypodrys et y creuse des galeries sinueuses. Cis Jacquemartis. Mellié. — V. Bouleau. M. Jacquemart l'a trouvé sur l’Hypodrys. G. HYDNE. Hypxu. Linn. Surface inférieure du chapeau à membrane fructifère , hérissée d'aiguillons plus ou moins longs, coniques ou comprimés , à l’ex- trémité desquels se trouvent les capsules membraneuses renfer- mant les sporules. Ces singuliers Champignons qui se rapprochent des Polypores, mais dont la surface inférieure, au lieu d’être creusée de tubes, se hérisse de pointes, sont surtout remarquables par la diversité des formes qu'ils affectent. Le pédicule central ou latéral, simple ou rameux, est quelquefois nul. Le chapeau présente une forme tantôt régulière, élégante, tantôt bizarre dans son irrégularité. Sa surface supérieure est quelquefois couverte d’écailles ou de zones concentriques et ondulées ; l’inférieure présente ses pointes sous la forme de poils flexibles ou d’aiguillons durs et aigus. Ce chapeau disparaît quelquefois et alors l'Hydne adhère par toute sa surface à l'arbre sur lequel il croît, et il n’est plus qu'une couche recou- verte par la membrane qui représente la surface inférieure et 15 (226 ) prend la forme tantôt de la tête d’un chou-fleur , tantôt d'un hé- risson. Plusieurs espèces sont usuelles et nous fournissent des mets agréables. Un seul insecte a été observé sur les Champignons. DIPTÈRE, Cylindrotoma macroptera. Macq.— La larve de cette Tipulaire a été trouvée dans l’Hydnum erinaceum par M. Perris. SOUS-CLASSE. MOUSSES. Muscr. Linn. Végétaux cellulaires. Tiges et feuilles distinctes. Séminules ren - fermées dans une capsule traversée intérieurement par un axe, s’ouvrant au moyen d’un opereule ordinairement caduc. Jusqu'ici nous avons eu à décrire des végétaux auxquels nous ne pouvions pas refuser ce nom , mais qui ne nous présentaient aucune analogie sous le rapport de la forme avec ceux qui couvrent et parent la terre. Nous ne voyions le plus souvent que d'informes rudiments ou de bizarres productions, arides et tristes parasites évitant l'air et la lumière , au lieu des plantes au gai feuillage, aux gracieuses fleurs qui nous donnent de doux gazons , ou des arbres élancés dont la cime majestueuse nous donne de frais ombrages. Par la transition que forment les Hépatiques avec les Mousses, nous arrivons à des végétations normales, nous reconnaissons des tiges, des feuilles d’un vert d'émeraude, des fleurs portées sur de longs pédoncules, mais toutes ces choses charmantes sont en mi- niature. Des simulacres de Sapins, de Cèdres forment d'épaisses forêts que recouvrent et ombragent les herbes de nos pelouses ; ils revêtent le tronc des arbres d’une brillante verdure qui résiste à l'âpreté des hivers ; ils tapissent la rude surface des rochers de leurs couches moelleuses. ( 227 ) Cependant les Mousses, en nous présentant les formes de végé- tation parfaite, appartiennent encore , par la simplicité de leur composition , à l’ordre élémentaire des Cryptogames cellulaires , réunissant ainsi deux conditions opposées. Il en est de même de l'appareil de la reproduction. Les semences ne sont, comme dans les Algues, les Champignons, que desspores de la plus grande simplicité et, près des capsules qui les con- tiennent, il se montre, comme dans les Hépatiques, une produc- tion masculine qui les féconde et élève les humbles Mousses au rang des végétaux monoïques et quelquefois dioïques. Cette organisation ambigüe semble heurter l’ordre naturel et déconcerter la science, mais elle est conforme à ce que nous voyons dans les plus petits animaux , les Infusoires , qui réunissent de même la simplicité de composition à une complexité de formes qui les élève dans la série; c'est aussi une loi de la nature : Natura maxima miranda in minimis. Les Mousses montrent cette complexité surtout dans Ja forme de l'organe femelle , et dans les nombreuses modifications du type. Le développement de l'organe présente successivement l'enveloppe formée par des feuilles dilatées, des pistils plus ou moins nombreux auxquels succèdent des capsules portées sur de longs pédoncules, et coiffées d'une sorte de bonnet phrygien qu tombe lors de la maturité et laisse à découvert l'ouverture des capsules. Les petites graines qu’elles contiennent. sont renfermées quatre à quatre dans des cellules qui s'oblitèrent, et elles se com- posent d’une membrane extérieure et d’un noyau granuleux. Les modifications du type atteignent toutes les parties de l’or- ganisation : les fleurs sont tantôt monoïques, tantôt dioïques ; les capsules sont latérales ou terminales et de formes très-diverses ; l’ouverture en est pourvue d’une ou de deux rangées de dents au nombre de quatre ou d’un multiple de quatre ; les graines sont lisses ou hérissées. C’est ainsi que par leurs modifications organiques, les Mousses ( 228 | s'élèvent au nombre de près de 2,500 espèces ; elles s’adaptent à tous les sites, à tous les climats; mais elles recherchent l'ombre, l'humidité ; il y en a même d'aquatiques. Le rôle que jouent les Mousses dans la nature et dans l’écono- mie domestique est considérable. Sans parler du charme quenous trouvons à nous reposer sur les tapis moelleux qu’elles nous offrent à l'ombre des forêts, au bord des ruisseaux, au murmure des eaux, elles adoucissent nos maux par leurs vertus pectorales, sudorifiques. Les habitants du nord en font des engrais, des matelas; ils trouvent, dans la Fontinalis anti-pyre- tica, des moyens de prévenir les incendies, par sa propriété in- combustible ; l'impératrice Catherine employa le Polytricum commune à lier les pierres d'un quai de 1,209 toises à Saint- Pétersbourg, et cette construction est encore si solide qu’elle résiste aux coups de bélier. Dans l’économie de la nature, la Mousse sert aux petits oiseaux à préparer de doux nids aux fruits de leurs amours ; l'ours l’a- moncèle dans sa tanière ; elle prête son abri au premier déve- loppement des arbres qui, plus lard, l'abriteront à leur tour ; elle est, avec le Lichen , la végétation primitive qui recouvre la nudité des rochers et de la terre et qui, par sa décomposition, pré- sente une première couche d'humus aux végétaux d’un ordre supé- rieur. « La belle Mousse aquatique, connue sous le nom de Spha- gnum, dit Deleuze, entrelaçant sur les marais ses longs rameaux, y forme d’abord des touffes, ensuite des prairies flottantes qui, chaque année, augmentent d'épaisseur et de surface, et s'étendent même quelquefois à plusieurs lieues. Sur ce tapis d’un vert cendré viennent d'abord s'établir de jolies petites plantes, telles que le brillant Rossolis et l'élégante espèce de Myrtille appelée Oxycoc- cus ; ensuite des arbrisseaux rampants; enfin, des Saules et des Aulnes dont les racines vont chercher le fond et assurent à l'agri- culture la conquête d’un terrain d’abord mondé., » Les insectes qui vivent dans les Mousses sont assez nombreux. Nous mentionnerons ceux dont la présence y a été constatée, avec ou sans distinction des espèces de ces Cryptogames. COLÉOPTÈRES. Stilicus orbiculatus. Fab. — Ce Brachélytre a été trouvé dans la Mousse par Duftschmidt. Stenus rugosus. — Kiesenwetter a découvert ce Brachélytre dans les Mousses humides des Pyrénées. Strophosomus hirtus. Sch. — Ce Brachélytre a été observé par Steven dans la Mousse, en Angleterre. Homalota pavens. Erichs. — V. Lichen. M. Kiesenwetter a trouvé ce Brachélytre dans la Mousse des torrents des Pyrénées. ———— myops. Kies. — Mème observation. Tachyporus brunneus. — V. Peuplier. Sous la Mousse. Fair- maire. ————— ruficollis. — Ibid. Tachinus collaris. — Ce Brachélytre vit sous la Mousse. Quedius auricomus. Zell. — V. Chêne. Zeller l'a trouvé dans la Mousse des petits ruisseaux. Trogophlæus omalinus. Erichs. — Kiesenwetter a observé ce Brachélytre dans la Mousse des ruisseaux. Lesteva pubescens. Mann. —- Même observation. Eugnathus longipalpis. Muls. — Type d'un nouveau genre de Brachélytres découvert par M. Mulsant dans la Mousse, sur le mont Pilate au Mont-d'Or. Nitidula marginata Fab. — V. Hetre. Anthrenus muscorum. Fab. — Ce Clavicorne vit dans la Mousse. Scaphisoma agaricina. — Il vit sous les Mousses. HYMÉNOPTÈRE. Bombus muscorum. Linn. — Cette Apiaire forme son nid de Mousse. (230) LÉPIDOPTÈRES. Cleophana ramosa. Freyer. — La chenille de cette Noctuélite esi atténuée aux deux extrémités. Elle se nourrit de Mousse. Sa chrysalide, munie d'une gaïîne ventrale , longue et linéaire, est contenue dans un cocon papyracé recouvert de débris de Mousse et attachée aux tiges. Eudorea petrophila. Standf. — V. Néflier aubépine. La chenille vit de la Mousse qui croît sur les rochers de la montagne du Géant (Riesengebirge). Crambus pratellus. Tr.—V.Tamarisc. Les chenilles de ce genre vivent dans la Mousse qui croît à terre et sous les pierres et dont il paraît qu'elles ne mangent que les racines. Elless'y creusent des galeries. Leurs chrysalides sont renfermées dans des tissus étroits et serrés. DIPTÈRE. Siphonella ænea. Macq. — V. Noyer. Nous avons trouvé cette Hétéromyside dans la Mousse. Les Mousses du genre Hypnum présentent les insectes sui- vanls : COLÉOPTÈRE. Staphylinus hypnorum. Lat. — V. Hètre. HYMÉNOPTÈRE. Bombus hypnorum. Lat. — V. Mousses. LÉPIDOPTÈRES. Psyche mellierella. Bois D. — La chenille de cette Bombycide est glabre; les trois premiers segments sont cornés. Elle se nourrit de l'Hypnum repens et son fourreau est entièrement composé de ce Cryptogame. Tinea Leopoldella. Costa. — V. Clématite. Costa l'a trouvé sur l’'Hypnum murale. Le genre Leskea nourrit le Lépidoptère suivant : ( 231 ) Psyche albida. Esper. — La chenille de cette Bombycide com- pose son fourreau de Leskea sericea. Sur le genre Bryum vivent les Lépidoptères suivants : Boletobia carbonaria. Linn. — V. Bolet. La chenille se nourrit du Bryum murale. Tinea Leopoldella. Costa. — V. Clématite. Même observation. SOUS-CLASSE, HÉPATIQUES. Heraricæ. Linn. Végétaux cellulaires composés d’une tige foliacée, monoïques ou dioïques. Capsule sans coiffe. Spores . ACCOMpAÈRÉS d'élatères Fibres roulés en spirale. Les Hépatiques présentent le singulier phénomène de produc- tions analogues aux informes Lichens , paraissant aussi reculées qu'eux dans la chaîne végétale, et douées en même temps, et pour la première fois, de la propriété des sexes et même de la modifica- tion sexuelle monoïque et dioïque qui distingue particulièrement les végétaux les plus avancés. Cette grande infériorité entre la forme des Hépatiques et leur organisation doit faire soupconner qu'elle est moins réelle qu’elle ne paraît l'être , et, en effet, les expansions foliacées dont elles affectent la forme et qui tendent à les confondre avecles Lichens, présentent une tige qui manque toujours à ces derniers dont les côtés se dilatent diversement, et qui les rapproche encore des vé- gétations normales. Les Hépatiques sont donc en quelque sorte desplantes d’un ordre supérieur qui se déguisent sous les formes les plus humbles. L'organe sexuel féminin présente un appareil remarquable; ce sont des fibres roulées en spirale, auxquelles adhérent les sémi- nules et qui, en se détendant lors de la maturité, les lancent dans l'air par bouffées et à l'instar, mais par un mécanisme différent, de l’explosion des Lycoperdons. (2%) Outre ce moyen de reproduction, un certain nombre d'Hépa- tiques se propagent encore par des espèces de bourgeons qui se développent sur les feuilles et qui forment de nouveaux indi- vidus. Ces singuliers végétaux vivent sur la terre humide ou sur la surface des eaux, ou en parasites sur les arbres. Parmi ces para- sites, le Jungermannia du Tamarisc se fait remarquer par deux conformations très-différentes du lobe inférieur de la feuille, sui- vant la hauteur qu'il occupe sur la tige del'arbrisseau nourricier : ou ce lobe est simplement convexe en dessus et concave en des- sous, ou bien il devient creux et tubuleux par la soudure de ses bords ; il se ferme en avant, s'ouvre à sa base et représente soit un casque ou une tête d'oiseau. Les Hépatiques présentent une autre particularité ; c'est d'ab- sorber l'humidité avec une extrême promptitude et de l'abandon- ner de même par l’évaporation , de sorte qu’elles semblent perdre la vie et la reprendre presqu’instantanément. Sous le rapport de l'économie domestique, l'Hépatique des fon- taines , Murchantia polymorpha , a été longtemps employée pour combattre les affections du foie, et c'est de cette propriété que dé- rive le nom de cette classe de Cryptogames. Le seul insecte que nous puissions rapporter aux Hépatiques est un Lépidoptère. Lithosia rubricollis. Linn. — V. Tilleul. La chenille vit sur le Jungermannia. SOUS-CLASSE, FOUGÈRES. Fiurces. Linn. Tige (Rhizome) rampante ou verticale ; feuilles portant à la surface inférieure des groupes de capsules renfermant les sémi- nules (spores). Peu de végétaux présentent de l'intérêt sous autant de rapports, quoiqu'appartenant encore à la classe des Cryptogames, aux pre- ( 233 ) miers anneaux de la chaîne végétale. Les Fougères se recom- mandent à notre attention par la grandeur de leurs dimensions, Ja beauté de leurs formes, les phénomènes de leur fructification, le nombre de leurs genres et de leurs espèces, par leur géogra- phie, par leur histoire ancienne et paléontologique , enfin, par leur utilité dans l’économie domestique. Les Fougères, tantôt herbacées et rampantes sur le sol, tantôt arborescentes et prenant une direction verticale , s’étalent en fines pelouses dans les forêts boréales et dans nos jardins d'hiver, ou s'élèvent graduellement jusqu’à la hauteur des plus grands arbres qu'ils embrassent de leurs rhizomes (tiges) gigantesques, et dont ils surmontent les sommets de leurs touffes immenses, dans les fo- rêts équatoriales de l'Amérique. Leur beauté n’emprunte rien à l'éclat des fleurs, mais elle brille dans l’élégance, la grâce, la noblesse des frondes ailées, digitées, dentelées, festonnées, qui s'épanouissent en admirables panaches quelquefois chargés de soie moelleuse et brillante (1) sur les grèves solitaires de l'Océanie, et qui rivalisent de majesté et d’élévation avec les Palmiers dont les cimes altières se balancent dans les airs sur les flancs des Andes. La fructification des Fougères est remarquable par tout l’appa- reil qui accompagne lesspores (séminules), mais surtout par le mys- tère dont la fécondation est enveloppée. Ces plantes étant les plus développées entre tous les Cryptogames, il n’est guères permis de douter qu'elles ne possèdent comme les Mousses, les Hépatiques, des organes fécondateurs ; et cependant les mvestigations les plus approfondies n’ont encore pu les découvrir, et la science la plus profonde est réduite à en soupconner l'existence en des poils de structure spéciale dans chaque genre, ou des vésicules situées près des spores, mais sans que les uns ni les autres donnent la preuve de cette destination. (1) Pinonia splendens. (234 ) Les séminules sont renfermées dans des capsules disposées par groupes sur la surface inférieure des feuilles. Elles se singularisent entre la plupart des graines en n’adhérant d'aucune manière aux parois des capsules, et en offrant une multitude de formes. Chacun des groupes est entouré d'un anneau de cellules élastiques, d'une structure spéciale, formant un ressort qui, par son action, déter- mine la rupture des capsules lors de la maturité et lance les sémi- nules au dehors. L'état avancé de la science sur la fructification de ces végetaux rend plus singulière encore l’assertion récente d'un botaniste alle- mand , d’après laquelle on obtient des Fougères en semant des graines d'Orchis. Une erreur semblable ne semblerait pas appar- tenir à notre époque. Le type des Fougères qui nous paraît si restreint lorsque nous considérons les espèces que nous avons habituellement sous les yeux, se modifie tellement dans les climats chauds que le nombre des espèces connues s'élève à plus de 3,000 , réparties dans une multitude de genres où se déploie avec la plus admirable diversité toute la fécondité de la puissance créatrice. La géographie des Fougères a donné lieu à une observation intéressante : Plus les îles sont petites et éloignées des continents, plus leur chmat prend le caractère maritime par l'humidité habi- tuelle de l’airet l’uniformité de la température, etplusles Fougères deviennent nombreuses proportionnellement aux plantes phanéro- games, au point que plusieurs îles de la mer du Sud n’ont presque pas d’autre végétation. Les Fougères étaient connues des anciens comme de nous. Les Grecs les appelaient Pteris, de la forme ailée de leurs feuilles ; les Romains leur donnaient le nom de Filix (Filix invisa. Virg.), beaucoup moins facile à expliquer, et que d'anciens commenta- teurs ont dérivé de felix, faisant allusion à leur heureuse fécondité. Le nom français, s’il vient de Fiix , ce qui paraît assez bien dé- montré, a bien changé en venant jusqu'à nous ; cependant on (233) retrouve des vestiges de Filicaria (1), dans Feuquière dont se servent encore les habitants des campagnes dans une partie de la France. Les anciens, comme les modernes, ont trouvé dans les Fougères un grand nombre de propriétés utiles à la santé, qui ont été trop fastueusement louées pendant des siècles et trop dédaigneusement méprisées depuis. Dans les différentes parties du globe, ces végé- taux servent à de nombreux usages. On en fait du pain, de la bierre , du fourrage , de la litière, des cendres , de la potasse, du savon, de la porcelaine, du verre, enfin, ainsi que l’attestent nos vieux refrains : Le vin qui rit dans la Fougère, et la chanson : Que ne suis-je la Fougère ! Enfin, les Fougères se présentent en foule parmi les plantes fossiles presqu'à l'exclusion des autres végétaux, et dépassant en- core les dimensions des espèces vivantes les plus gigantesques. Elles forment, en grande partie , les couches houillères , dont les plus anciennes remontent à une époque antérieure à l'existence des animaux, c’est-à-dire au troisième des grands jours de la créa- tion suivant le récit sublime de Moïse, si admirablement d'accord avec la science géologique. Les Fougères , au moins celles de l’Europe, nourrissent très- peu d'insectes, et l’on peut s'en étonner tant leurs belles feuilles semblent à la convenance des chenilles et des larves. Devons-nous croire par analogie que celles des îles de l'Océanie, dont elles forment presque tonte la flore, sont également respectées des in- sectes qui y sont si nombreux ? Quoi qu'il en soit, voici les observations dont nous avons con- paissance. Le POLYSTICUM , Fougère mâle, donne asile à l'Hémiptère Centrotus cornutus , qui se tient de préférence sur les hautes tiges. Amyot. (1) La ville de Fougère s'appelle en latin Filicaria, ( 236 | Le PTERES, aigle impérial (1), Linn.nourrit un Coléoptère : Se- landria citripes. La larve se nourrit des feuilles du Pteris et se transforme dans la terre ; et deux Lépidoptères : Colias palæno. Linn. — V. Cytise. Eriopus pteridis. Fab. — La chenille de cette Noctuélite est rase, de couleur vive, atténuée en avant. La SCOLOPENDRE OFFICINALE, Linn., nourrit un Diptère. Phytomyza scolopendri. Meig. — V. Houx. M. Goureau a ob- servé que la larve de cette espèce mine les feuilles de cette’ Fou- gère. Elle y creuse une galerie filiforme le long de la nervure médiane, quelquefois très-contournée. DEUXIÈME DIVISION. CRYPTOGAMES VASCULAIRES. Ces végétaux dont la contexture comprend des vais- seaux et des trachées, comprennent les Characées, les Marsiliacées et les Equisétacées ; ils présentent des frondes (feuilles) et des organes sexuels. SOUS-CLASSE. EQUISÉTACÉES. Eouiseracex. Linn. G. PRELE. Equisetum. Linn. Tiges cylindriques , sillonnées, articulées, munies aux artieu- lations d’une gaîne membraneuse dentée. Fructification en épis terminaux; spores libres, portant à leur base quatre filets(élatères) élastiques, terminés par des anthères pollenifères. Ce petit groupe est un des plus singuliers du règne végétal. Il (x) Lorsqu'on coupe la racine en travers , elle offre deux lignes qui se croisent et représentent assez bien l'aigle de l'empire d'Autriche, (237) présente d’une part des caractères qui lui sont entièrement propres et, de l’autre, des analogies apparentes qui l'ont fait ranger dans des classes et des familles très étrangères les unes aux autres, telles que les Acotylédones , les Monocotylédones, les Dicotylé- dones , les Casuarinées , les Cicadées et même les Conifères. Au- jourd’hui même, les botanistes hésitent à Le placer avant ou après les Fougères dont il ne se rapproche lui-même qu’en se trouvant comme elles, mais d’une autre manière, à l’extrémité des Cryp- togames. ; L'organisation des Prèles présente des singularités dans toutes ses parties : des tiges souterraines horizontales , noueuses, émet- tant des racines verticillées et des tiges aériennes qui sont creuses, cylindriques, cannelées, rigides, articulées, munies aux articula- tions d’une gaîne membraneuse , divisée en dents qui sont peut- être des feuilles rudimentaires. Ces tiges, dont l'organisation intérieure n’est pas moins parti- culière que l’extérieure , sont terminées par une sorte d'épi ou de chaton formé de nombreuses écailles sous lesquelles sont logées des capsulesrenfermant des séminules (spores) et les laissant échap- per par une fente qui s'ouvre lors de la maturité. A ces séminules sont fixés quatre filaments élastiques qui s’enroulent autour d’elles ou s'étalent , suivant l'humidité ou la sécheresse de l'air, dont ils montrent les moindres variations par une grande agitation. Ces filaments contiennent des corpuscules qui s’échappent à leur tour » et qui, véritable pollen, fécondent les spores. Les Prèles croissent dans les prés, les champs , les bois hu mides et même les eaux. Elles sont répandues sur la plus grande partie du globe, à l'exception peut-être de la Nouvelle Hollande, et malgré cette diffusion, elles présentent si peu de modifications organiques qu'un seul genre réunit à peu près les espèces peu - nombreuses de la famille, même en y comprenant les fossiles, quel- quefois gigantesques, que l'on trouve dans les couches houillères, ce qui atteste encore l’étrangeté du type. ( 238) Les propriétés des Prèles sont très diverses ; elles ont été re- connues utiles ou nuisibles, et jugées quelquefois avec prévention. Elles sont un des fléaux de l’agriculture ; elles nuisent à tous les bestiaux, excepté les chèvres ; ceux qui s'en nourrissent tombent dans un état de maigreur et en meurent quelquefois ; elles font tomber les dents des vaches et avorter les brebis. D'un autre côté , la médecine reconnaît aux Prèles une qualité astringente très prononcée, et elle les emploie sous ce rapport. Les Romains leur attribuaient la propriété de consumer la rate et ils faisaient boire son infusion aux coureurs pendant trois jours. Ils en mangeaient les jeunes pousses comme les asperges et les habitants de la Toscane le font encore. Les chevaux et les moutons les broutent avec plaisir en Suisse. Elles servent de fourrage en Suède; les rennes s’en nourrisseni en Laponie. Lestiges de la Prèle des marais sont si âpres et si rudes, peut-être à cause dela grande quantité de silice dont l'épiderme est encroûlé, qu’elles sont employées à polir le bois et les métaux. C'est à cette âpreté, plus ou moins propre aux Prèles, qu'elles doivent leur nom francais, autrefois Asprèle, Asparella en italien ; leur nom grec Hippuris, et latin Equisetum, dérivent de l'espèce de ressemblance qu'elles présentent avec la queue des chevaux , d’où est venu aussi celui de Chevaline qu'elles portent dans le vieux français de Du Tillet, traduction de Pline, Horse- tail, en anglais et Rossschwanz, en allemand. On peut attribuer à la même âpreté des Prèles le petit nombre d'insectes qui y ont été observés. COLÉOPTÈRES. Cardiophorus equiseti. Hubn. — V. Hètre. Grypidius equiseti. Fab. — Ce Curculionite se développe dans les Prèles. Donacia tomentosa. Ahr. — M. Suffrian a observé que cette Chrysoméline vit sur les Prèles. ( 239 ) Hæmonia equiseti. Fab. — La nymphe de cette Chrysoméline se trouve dans les racines. Suffrian. DIPTÈRE. Notiphila cinerea. Meig. — Cette Muscide vit sur la Prèle des marais. SECOND EMBRANCHEMENT. PHANÉROGAMES. Voyez les Arbres et leurs Insectes. PREMIER ORDRE. MONOCOTYLÉDONES. Voyez les Arbres et leurs Insectes. CLASSE. HYDROCHARIDÉES. Hyprocaarez. Bart]. Fleurs dioïques ; périanthe adhérent ; graines périspermées. Cette classe se réduit pour l'Europe à deux plantes, le Stratiote et la Vallisnérie ; cette dernière célèbre par la manière dont s'opère la fécondation. Les organes sexuels se trouvant chacun dans des fleurs produites par des plantes différentes, ces fleurs , qui sont restées submergées jusqu’à leur épanouissement , viennent l’une et l’autre à la surface par des procédés également différents : les femelles, en déroulant leur tige en spirale, les mâles, en se déta- chant de la leur et venant voguer librement autour des premières. C'estce que Castel a décrit en vers harmonieux dans son poème des plantes : (240 ) Le Rhône impétueux , sous son onde écumante, Durant six mois entiers nous dérobe une plante Dont la tige s’allonge en la saison d'amour, Monte au-dessus des flots, et brille aux yeux du jour. Les mâles dans le fond jusqu'alors immobiles De leurs liens trop courts brisant les nœuds débiles , Voguent vers leur amante, et libres dans leurs feux Lui forment sur le fleuve un cortéye nombreux; On dirait d’une fête où le dieu d’hyménée Promèue sur les flots sa pompe fortunée. Mais les temps de Vénus une fois accomplis, La tige se retire en rapprochant ses plis, Et va mürir sous l’eau sa semence féconde. G. STRATIOTE. Srratiores. Linn. Fleurs dioïques ; mâles à 6 pétales et 12 à 20 étamines ; fe- melles à 6 styles bifides. La Stratiote aloïde est remarquable par son beau feuillage qui Jui a valu le nom d'Ananas aquatique, et dans lequel Dioscoride, Galien, Pline trouvaient un remède contre les blessures. Du centre de la rosace, que forment ses feuilles à demi submergées, s'élève une hampe portant des fleurs blanches renfermées dans des spathes avant leur développement. Un seul insecte a été signalé sur le Stratiote. LÉPIDOPTÈRE. Hydrocampa stratiotalis. W. W. — V. Potamogéton. Les che- nilles se filent des tuyaux en sortant de l'œuf et se nourrissent du parenchyme des feuilles. Dutrochet a expliqué leur respiration sous l'eau par la loi de l’endosmose et de l'exosmose. D'après cette loi, lorsqu'on plonge dans l'eau qui tient de l'air en dissolution un récipient à parois perméables, contenant de l'oxygène , de l'acide carbonique et de l'azote en proportions quelconques, un double courant s'établit entre les gaz du récipient et l'air que con- tient l'eau jusqu à ce qu'il ne reste plus dans ce récipient que de l'oxygène et de l'azote dans les proportions qui constituent l'air atmosphérique. (2) CLASSE. HÉLOBIÉES. Hecouxx. Bart. Périanthe inadbérent ; graines non périspermées. Nous placons cette classe près de la tête des Monocotylédones, par ce qu’elle commence par des plantes qui, par leur affinité avec les Cryptogames, forment une transition entr'elles. Mais si les unes, comme les Zostères, semblent descendre dans la série vers les Fueus., les autres ne tardent pas à s’y élever considérablement, et nous voyons le Butôme rivaliser dé beauté avec les Liliacées. Entre ces deux extrêmes , les Potamogétons , les Alismas , les Sa gittaires nous intéressent à différents titres. Toutes ces plantes sont aquatiques, et c’est peut-être ce carac- tère qui en rend le type si restreint. Sous le rapport entomologique , ces plantes ont donné lieu à peu d'observations FAMILLE. LEMNACÉES. Lemnaceæ. Duby. - Fleurs à périanthe, monoïques ; eapsule uniloculaire , poly- sperme. G. LENTICULE. Lena. Linn. Fleurs monoïques, mâles à deux étamines, femelles à un pistil. Rien de plus simple, en apparence, que les Lenticules , ces pe- tites feuilles rondes qui flottent sur les eaux stagnantes et qui en couvrent quelquefois la surface comme un tapis vert. En réalité, ces feuilles sont des plantes très composées et présentant des par- ticularités remarquables. Sur leur rebord, on observe une fissure par laquelle on voit sortir, soit une autre feuille, de laquelle il doit en sortir bientôt une troisième, soit les fleurs et quelques ra- dicules qui descendent dans l’eau. Ces fleurs, pourvues de sexes séparés , sont renfermées d'abord dans une enveloppe membra- neuse et réticulée, qui se fend ensuite pour laisser sortir une fleur 16 (242) femelle pourvue d'une corolle et d'un pistil, et une ou deux fleurs mâles munies de deux étamines. Le fruit consiste en une où plusieurs graines renfermées dans une capsule arrondie. Ces petites plantes se propagent avec une promptitude éton- nante et elles offrent par leur fécondité des aliments à une multi- tude d'animaux aquatiques. Leur propriété la plus utile peut-être est d'absorber le gaz hydrogène et de maintenir ainsi la pureté des eaux stagnantes. Les Lenticules nourrissent sans doute un grand nombre d’in- sectes. Nous mentionnons ceux qui ont été particulièrement si- gnalés. COLÉOPTÈRES. Tanysphyrus Lemnæ. Fab. — Ce Curculionite s'y développe. Donacia Lemnæ. Fab. — V. Potamogéton. LÉPIDOPTÈRES. Hydrocampa nymphæalis. Linn.V. Typha. ————— lemnalis. W. W. — Ibid. Rhinosia Lemnicella. Dup. — V. Génévrier. Lyonetia Lemnicella. Zell. — V. Tilleul. DIPTÈRE. Tetanocera ferruginea. Meig. — M. Léon Dufour a découvert la larve au milieu des Lemna. Elle est du petit nombre de celles de Diptères qui n'ont qu'une paire de stigmates qui sont pos- térieurs. FAMILLE. NAIADÉES. Nannee. Jussieu. Fleurs apérianthées, unisexuelles ; carpelles monospermes ; sti- pules engaînantes. Cette petite famille a été l'objet de travaux considérables qui sont attestés par les différents noms qui lui ont été donnés. Outre celui que Jussieu a emprunté des Naïades de Linnée , elle a reçu (243 ) celui de Fluviales par Ventenat, de Potamophiles par Richard, de Hydrogetones par Link , de Potamogétones et: d’Alismacées par Reichenbach. Il est vrai qu'elle est composée de plantes qui dif- fèrent fort entr'elles, telles que les Zostères, les Ruppies, les Po- tamogétons dont on a fait des tribus particulières ; elle compte des plantes hermaphrodites, monoïques, diviques ; les fleurs sont axillaires ou terminales , solitaires ou réunies ; en un mot , il s'y trouve peu d'unité , si ce n’est que toute cette famille est aqua- tique et qu'elle possède un caractère inverse de celui que présente généralement les plantes aériennes, je veux dire que les fleurs fe- melies se trouvent situées plus haut que les mâles , de sorte que le pollen de ces dernières doit monter au lieu de descendre pour remplir sa fonction fécondatrice et, par conséquent, posséder une légèreté spécifique plus grande que celle de l'air atmosphérique. Nous n'avons à nous occuper, sous le rapport des insectes de:ces plantes, que des Zostères , des Potamogétons , des Alisma et des Sagittaires. TRIBU. ZOSTÉRÉES. Zosterex. G. ZOSTÈRE. Zosrera. Linn. Style à 2 stigmates allongés ; graine à radicule supérieure ; pollèn confervoïde. - Les Zostères, dont le nom tiré du grec signifie ceinture, forment un groupe particulier de Monocotylédones, mais qui a desrapports plus ou moins éloignés avec les autres végétaux de cette division, ce qui a donné lieu, dans les méthodes naturelles, à un grand nombre d’appréciations différentes. Les anciens qui ne les classaient que d'après leurs apparences, leur facies, les plaçaient parmi les Fu- eus, les Algues et donnaient à l'une des espèces le nom d’Alga vitriariorum, à cause de l'usage qu'ils en faisaient. Les habitants de nos côtes les jugent de même et les appellent Varecs, Goë- mons ; les botanistes modernes, les considérant dans leurs organes (244 ) de fructification, les ont compris dans différents groupes, suivant le plus où moins d'importance qu'ils accordaient à tels ou tels de ces organes. C’est ainsi que les Zostères ont été successivement comprises parmi les Aroïdes, les Naïadées, les Fluviales, les Pota- mées, etc. et jamais d’une manière satisfaisante, jusqu'à ce qu'elles aient été isolées par Kunth. En un mot, elles ont été ballottées pat la science comme elles le sont par l'Océan , dont les vagues les pelotonnent, les déroulent , les entrelacent de toutes les ma- nières. Ces plantesmarines, les seules parmi les Phanérogames, croissent dans les bas-fonds de la mer et sont assez connues par leurs feuilles étroites et longues quelquefois de quatre mètres. Les fleurs sont monoïques : les femelles n'ont qu'un pistil, les mâles qu'une éta- mine dont le pollèn diffère étrangement de celui des autres plantes, peut-être parce que la fécondation s'opère dans l’eau: Il est allongé en tube et quelquefois rameux ; le fruit a la forme de l’olive. Les Zostères, par leur abondance, servent à un grand nombre de grossiers usages. Les anciens les employaient à emballer le verre et nous les imitons. Elles servent en Hollande à fortifier les digues et à amortir la violence des vagues. En Suède, elles tiennent lieu de chaume pour couvrir les toits. Ailleurs, elles sontemployées comme engrais, comme litière, comme matelas et même comme fourrage. Par l'incinération, on en fait de la soude. Enfin, la mé- decine s’est servie comme d’un remède antiscrofuleux des. pelottes de mer ou Egragopiles marins , qui ne sont autre chose que des amas de feuilles de Zostère roulées ensemble par l’action des flots. Les insectes observés sur les Zostères se réduisent à quatre. COLÉOPTÈRE. Hæmonia zosteræ. Fab. — V. Prèle. Observée par M. Suffrian. HÉMIPTÈRES,. : Salda zosteræ. Fab. — Cette Cimicide vit sur les Zostères. ( 245 ) Coccus zosteræ. Linn. — V. Tamarisc. Linnée l'a observé sur les bords de la mer Baltique. DIPTÈRES. Scotophaga oceana. Macq. — V. Fucus. * Actora æstuum. Meig. — V. Fucus. TRIBU. POTAMOGETONÉES. Poramoceron. Kunth. G. POTAME. Poramocgron. Linn. Fleurs hermaphrodites ; stigmates subsessiles ; graines sus- pendues. Ces plantes , connues sous le nom vulgaire d'Épis d’eau, vivent les unes dans les marais fangeux , les autres dans les ruisseaux aux doux murmures. Elles sont généralement submergées , rare- ment flottantes , aux feuilles délicates , ondulées , sans épiderme. Leurs jolis épis se dressent au-dessus des eaux pour célébrer les mystères de la fructification qui ne peuvent s’accomplir sans l’in- tervention de l'air nécessaire à l’action du pollèn. Ces épis sont formés de petites fleurs dont les simples corolles renferment quatre étamines et autant de pistils, auxquelles succèdent de petites noix dont l'embryon se recourbe en fer à cheval. Ces Naïades sont si fécondes qu’elles peuplent les eaux, au point de rendre leur extraction souvent nécessaire à la navigation des canaux. Il en résulle bientôt un engrais puissant qui contribue tous les ans à la fertilité de mon jardin, à la grosseur de mes as- perges, à la saveur de mes petits pois. Cette propriété vaut bien la vertu astringente dont la médecine faisait usage autrefois. Parmi les nombreux insectes qui trouvent asile dans les lacis inextricables que forment ces plantes , quelques uns ont été ob- servés plus particulièrement. COLÉOPTÈRES. Donacia typhæ. Linn. — Cette Chrysoméline, ainsi que ses (246) congénères, habitent les plantes aquatiques. Leurs larves , qui vivent dans les racines, sont nues et leurs nymphes sont attachées par un de leurs côtés à des filaments , suivant l'observation de Linnée. M. Suffrian a observé le D. Typhæ sur le P. natans. Hæmonia zosteræ. Fab. — M. Babington a trouvé cette Chry- soméline’ sur le P. pactinetus. LÉPIDOPTÈRES. Hydrocampa potamogalis.—Tr. Cette Pyralide a les jambes pos- térieures très longues, les ailes supérieures très étroites. M. Du Trochet a observé la chenille sur les feuilles submergées du P. lucens. Comme elle est organisée pour respirer l'air, elle doit être continuellement environnée de ce fluide et tenue à l'abri de l’eau dans laquelle elle se nourrit. Elle se fabrique donc une coque de soie protégée en dehors par des morceaux de feuilles de, Pota- mogéton.Cette coqueestouverteetson intérieur contient de l’airau milieu duquel la chenille vit. Avant de passer à l’état de chrysalide, elle ferme complètement ce fourreau qui continue à renfermer de l'air. Ce n’est que lorsque l'Hydrocampa devient papillon qu'il sort del'eau. Ainsi, dans ses deux premiers états, il vit sous un appareil tout semblable à la cloche du plongeur; quoique constamment submergé , il vit dans l'air, et cet air ne cesse pas d’être propre à la respiration, bien qu'il n'éprouve aucun renouvellement ap- parent. Ce phénomène trouve facilement son explication dans les faits exposés. On voit que les parois perméables de la coque de soie doivent laisser passer de l'extérieur à l’intérieur la portion d'oxygène nécessaire, en même temps qu'elles permettent la sortie du gaz acide carbonique et de l’azote qui se trouveraient en excès Du Trochet. G. ALISMA. Arisma. Linn. Fleurs hermaphrodites, à six étamines opposées deux à deux aux pétales. (247 ) La principale espèce de ce genre, l’Alisma plantago, Plantain d'eau ou Fluteau , ést une grande et belle plante que nous trou- vons avec plaisir au bord des eaux, dont la hampe assez élevée porte un élégant panicule de petites fleurs blanches ou roses, de trois larges pétales et de trois linéaires. Aux propriétés salutaires que les anciens attribuaient à l’Alisma les modernes en ont joint une contre l'hydrophobie, en faveur de laquelle il s'est élevé des témoignages imposants, mais qui n’a pas reçu la sanction de l'expérience en France. Un paysan d'Archangel a découvert ce remède qui consiste dans la racine pulvérisée de l’Alisma dont on saupoudre le pain que mangent les personnes atteintes de cette affreuse maladie; il est employé dit-on avec succès depuis plus de 25 ans dans le gouvernement de Tula, et cependant il paraît illusoire, au moins en France, et la cautérisation est encore le seul préservatif qui mérite con- fiance. Deux insectes ont été observés sur ces plantes. COLÉOPTÈRE. Hydronomus alismatis. Gyll. — Ce Curculionite vit sur ces plantes. DIPTÈRE. Lasioptera auricincta. Winn. — La larve de cette Tipulaire vit dans des galles qui se développent sur les feuilles de l’Alisma plantago. G. SAGITTAIRE. SacrmrarrA. Linn. Fleurs monoïques : mâles à nombreuses étamines ; femelles a nombreux pistils. Les Sagittaires doivent leur nom et celui plus vulgaire de Flé- chière, à leurs feuilles dont la base est large et l'extrémité aiguë, comme le fer d’une flèche ou d’un dard. De ce feuillage élégant qui flotte sur les eaux s'élève une hampe surmontée d'un panicule de jolies fleurs blanches, re- ( 248 ) levées de nombreuses étamines brunes, Ces fleurs, semblables de forme et différentes de sexe, sont disposées de manière que les mâles occupent le sommet du bouquet et les femelles, la base, situation opposée à celle que présentent les fleurs des Naïades. Cette diversité des fleurs ajoute encore à la beauté de la plante, l’un des ornements de nos clairs ruisseaux, de nos limpides rivières. Une espèce de Sagittaires est cultivée à la Chine et au Japon, en faveur de ses racines bulbeuses qui sont alimentaires : elle se trouve aussi dans l'Amérique septentrionale , vers l'embou- chure du fleuve Colombia, où elle est également employée à la nourriture des habitants. Les insectes observés sur les Sagittaires se bornent aux sui- vants : COLÉOPTÈRES. Donacia sagittariæ. Fab. — V. Potamogéton. Lema Cyanella. Fab. — Cette Chrysoméline vit sur les Sagit- taires , quand il ne se trouve pas de Bouleaux dans le voisinage. Galeruca nympheæ, Linn. (G. Sagittariæ, var. Gyll.\ — V. Viorne. LÉPIDOPTÈRE. Cidaria sagittariæ. B. — V. Berberis. Observée en Hongrie. G. TRIGLOCHIN. Triezocan. Linn. Fleurs disposées en épi terminal. Ces plantes, connues en France sous le nom de Truscart , croissent dans les marais et les prés humides ; une espèce de la Suède sert de pâture aux bestiaux et a été l'objet d'un.mé- moire spécial de Linnée. Une autre est, saline et se trouve sur les bords de la mer. C’est sur cette, dernière que vivent deux in- sectes Coléoptères observés par M. Suffrian. Chrysomela concinna. Steph. — Sur le Triglochin maritime. .Phœdon tniglochinis. Schaum, — V. Bouleau. ( 249.) FAMILLE. BUTOMÉES. Buroweæ. Rich. Périanthe hexaphylle; carpelles polyspermés ; placentaires pariétaux rameux. G: BUTOME. Buromus. Linn. 9 étamines, 6 pistils. Graines attachées à la paroi interne des capsules par un réseau vasculaire. Parmiles plantes que nous rencontrons avec le plus de plaisir, au bord de nos ruisseaux, de nos étangs, de nos rivières, au- cune ne nous charme, autant par son élégance et sa grâce, que le Butome, le Jonc fleuri; il n'a pas, il est vrai, ce que nous admirons. dans le Nymphæa : la forme de la Rose unie à la blancheur du Lys; mais sa fleur s'élève gracieuse sur une tige svelte et élancée, elle domine toutes les fleurs d'alentour, elle s'épanouit en ombelle légère, arrondie, nuancée de rose, ceinte d'une élégante collerette et son charmant aspect cap- tive tous les regards. Elle rappelle enfin par son port et la disposition de sa fleur, le superbe Agapanthe qui brille au Cap de Bonne-Espérance à côté des Xeranthemum et des Strelitzia. F Le Butome, quoique son nom, dérivé du grec, fasse allusion à sa tige coupée par les bœufs, n'est jamais dévoré par les bestiaux. Ses feuilles comme ses racines sont âeres, mais on les dit apéritives et sudorifiques. Ces dernières sont alimentaires. en Sibérie. Les fleurs de cette belle plante présentent leurs nectaires à des essaims d'insectes qui tourbillonnent autour d'elles; cependant une seule espèce a été observée comme lui étant propre : c’est un Hémiptère. Aphis Butomi. Schr. — V. Cornouiller. (250 ) CLASSE, AROIDÉES. Arorneæ. Linn. Périanthe nul ou écailleux et inadhérent, ordinairement un seul ovaire; graines périspermées ; fleurs sessiles sur un spadice. Cette classe, dont le nom provient du genre Arum, quien est le plus considérable , est composée de plusieurs familles (1) dont une partie seulement appartient à l’Europe et comprend un petit nombre d'espèces indigènes , telles que les Typha, les Spar- ganium, les Gouets. Ces espèces présentent un intérêt et des modifications du type de la classe, qui vont croissant dans les exotiques au point d'acquérir une grande importance et d’ex- citer notre étonnement ou notre admiration. Ce type se modifie de telle sorte que les Aroïdes, le plus souvent sans tiges , sont quelquefois des plantes sarmenteuses, grimpantes, parasites, comme les Pothos de l'Amérique méridionale , et quelquefois des arbres semblables aux Palmiers, comme plusieurs Pandanus de l’Asie équatoriale. Il en est de même des propriétés : l’âcreté des sucs , la fétidité des odeurs, la qualité nutritive des racines de plusieurs espèces européennes , deviennent plus nuisibles ou plus utiles dans les exotiques ; le Caladium Seguinum est un poison très-violent, le Calla æthiopica a une odeur suave, plu- sieurs Colocasia sont cultivées au nombre des productions les plus nutritives. Les Aroïdes d'Europe ont donné lieu à quelques observations entomologiques. FAMILLE. TYPHACÉES. Tyraaceæ. De Cand. Ovaire solitaire, uniovulé; ovule suspendu; feuilles très entières. (1) Les Typhacees , les Pandanées , les Orontiacées et les Caliacées. ( 251 } G. TYPHA. Typua. (1) Tourn. Fleurs monoïques; chatons cylindriques très denses. Epi mâle terminal ; épi femelle situé sous le mâle. Ces plantes connues. vulgairement sous le nom de Massettes et de Roseaux des étangs, sont remarquables par les masses cylindriques , brunes, serrées que forment les fleurs au sommet de leur longue tige. De ces fleurs monciques les mâles oc- cupent la partie supérieure de l'épi, les femelles l'inférieure, en laissant souvent quelqu’intervalle entr’elles et les mâles. Les Typha, communs et répandus sur la plus grande partie du globe, étaient connus et utilisés à Rome où, suivant Strabon , ils étaient l'objet d'un commerce considérable. Nos pauvres paysans en utilisent toutes les parties : les racines, épaisses , noueuses , confites au vinaigre , leur tiennent lieu de conserves : elles pour- raient les guérir du scorbut comme en Russie. Les tiges et les feuilles servent de fourrage et de litière à la chèvre, nourrice de leur famille ; elles couvrent leurs toits, garnissent leurs siéges, fournissent des matériaux à leur industrie qui en tresse des nattes ; le duvet moelleux et élastique des fleurs est l'édredon de leur oreiller, en un mot la Providence tire de cette herbe vulgaire de nos étangs, de nos marais, de nombreuses et riches ressources en fayeur de l'indigence. Les différents insectes observés sur les Typha, l'ont été sur le T. latifolia. COLÉOPTÈRES. Telmatophitus typhæ. Fall.— Ce Brachélytre vit sur les Typha. Brirhinus festucæ. Herbst. (E. Typhæ. Ahrens.) —V. Peuplier. Cryptophagus Typhæ. Gyll. — La larve de ce Clavicorne se développe sur cette plante. (1) Ce nom grec, qui signifie marais, à élé donné ensuite à ces plantes et à une espèce de riz qui croissent dans ces lieux, ( 252 ) Donacia Typhæ. Brahm. —V.T. —————— Potamogéton.— La larve a été observée par M. Suffrian. —————— hydrocharidis. Fab. — Même observation. ————— tomentosa. Ahr. — Même observation. LÉPIDOPTÈRES. Nonagria nexa. Hubn. — V. Sureau. La larve a été observée par M. Héring. Nonagria cannæ. — Même observation. ———— typhæ. Esp. — La chenille a été observée par M. Esper. Simyra venosa. Borkh. — Saule. G. SPARGANIUM. Srarçanium. Tourn. Fleurs mâlesen chatons globuleux ; femelles à périgone de trois folioles et à ovaire sessile. A côté des Typha dont les propriétés sont si diversifiées en faveur de nos chaumières , se trouvent dans les ruisseaux comme dans la classification naturelle les Sparganium, nommés vul- gairement Rubanniers, à cause de leurs longues feuilles étroites, qui flottent sur les eaux. Ceux-ci sont employés à la plupart des mêmes usages. L'économie domestique en fait aussi de so- lides liens , et ces rubans d’eau étaient autrefois les bandelettes dont les pauvres mères se servaient pour emmailloter leurs en- fants. Enfin ces plantes présentent des propriétés salutaires. Depuis l'antiquité leurs racines sont reconnues sudorifiques et propres à guérir la morsure des serpents. Les insectes qui vivent sur les Sparganium sont assez nom- breux. COLÉOPTERES. Cryptophagus sparganii. Sturm. — V. Typha. Erirhinus sparganii. Sturm. — V. Peuplier. (253 ) Telmatophilus spargani, — Les larves vivent dans les fruits du Sparg. ramosum. H. Perris. ——————— caricis. Même observation. Donacia sagittariæ. Linn. — V. Potamogéton. M. Perris a ob- servé le développement de cette espèce sur le Sparg. ramosum. La larve estovoïde, convexe en-dessus, aplatie au-dessous, atténuée en avant, à tête très petite, mandibules courtes et machoires fortes. Le corps n'offre que onze segments et huit paires de stigmates. Cette larve vit entre les feuilles du Spar- ganium et au collet des racines, elle paraît se nourrir plutôt de la sève que du tissu, car on la trouve toujours au milieu d'une mucosité. M. Perris explique la respiration de cettelarve par la même loi qui l’opère dans l’Hydrocampa stratiotalis. {Voyez ce mot.) Avant de se métamorphoser, la larve s’enfonce dans la vase, s'accroche à une racine du Sparg., et y colle une coque elliptique formée de salive visqueuse , sans mélange de terre, qui semble soyeuse sans être formée de soie. M. Perris présume que la larve faconne sa coque en tuméfiant et en raccourcissant à la fois son corps, elle y répand sa sa- live, qui devient solideen se desséchant, et le corps, en se con- tractant , se trouve à l’aise dans la coque. Donacia lemnæ. Fab. — V. Potamogéton. M. Mulsant a observé la larve qui.se-développe dans une coque sur le Sparg. ramosum. ———- linearis hope. — Il se développe entre les feuilles des Sparg. ramosum et simple ———— typhæ. Bruhm. — Il vit aussisurle, Sparg. ramo- sum. Suffrian. ———— simplex. Feb. — Il vit sur les Sparg. ramosum et simple. ——— hydrocharidis, Feb. — Sur le Sparg. simplex. ———— tomentosa. Abr. — Sur le Sparg. simplex. ———— sparganii. Ahr., — Même observation. ( 254 ) LÉPIDOPTÈRES. Nonagria sparganii. Esp. — V. Sureau. M. Guénée a observé la chenille sur des Sparganium. Colobius sparganiellus. Dup. — La chenille de cette Tinéide, suivant l'observation de M.Guénée, vit et se métamorphose dans les tiges ou les racines du Sparg. nutans. Elle est très effilée, avec la partie postérieure anguleuse ; elle est transparente et parsemée de quelques poils ; elle est munie de deux plaques cornées, l'une sur le premier segment, l’autre sur le dernier; sur le dos de celui- ci on remarque deux stigmates. La chrysalide est longue avec les segments de l'abdomen garnis circulairement de dents comme celles des Cossus. FAMILLE. CALLACÉES. Cazcaceæ. Spach. Périanthe nul ; ovaire solitaire ; feuilles à nervures palmées ou pétalées. G. GOUET. Aru. Linn. Spathe en forme de cornet ; spadice androgyne; fleurs mâles insérées au-dessus des femelles. Les Arum dont le nom vulgaire de Pied de veau exprime la forme de la feuille , présentent des qualités énergiques qui les rendent tour à tour vénéneux, alimentaires et pourvus de pro- priétés singulières. L'äcreté brülante de leurs sucs fait de toutes les parties de ces plantes un poison violent que la médecine em- ploie cependant en émétique. Les racines, composées presqu'uni- quement de fécule, donnent une nourriture saine et agréable lors- qu’elles sont dégagées de ce principe caustique par la dessiccation. Elles ont aussi la propriété du savon. Les fleurs de quelques espèces ont une odeur cadavéreuse qui trompe les mouches de la viande , attirées par l'instinct d'y déposer leurs œufs, tandis que les poils raides et dirigés en dedans qui hérissent la spathe, re- ( 255 ) tiennent ces mouches prisonnières , lorsqu'elles ont cédé à cette séduction. Enfin ces fleurs offrent un phénomène qui n'a été signalé dans aucune autre plante : le spadice, c’est-à-dire leur axe commun, acquiert une chaleur considérable qui dure plusieurs heures pendant la fécondation et qui peut s'élever à 50 degrés, la chaleur atmosphérique étant à moins de 20. Ce dégagement de calorique qui paraît produit par l'excitation momentanée des forces vitales, se produit probablement dans d’autres fleurs ; Mais dans des proportions moindres qui ne le rendent pas accessible à nos sens. Les deux Lépidoptères suivants sont les seuls insectes qui aient été signalés sur les Arum : Cucullia. Dracunculi. Hubn. — Cette Noctuélite a le collier du thorax relevé en capuchon ; la chenille est épaisse, lisse, de couleurs vives ; elle mange les fleurs de préférence et s’en- terre profondément pour se métamorphoser. La chrysalide a une gaïne ventrale détachée de l'abdomen et terminée en spatule: Ja coque est composée de terre et de soie, Tryphœna. Janthina. Linn. — V. Hêtre. CLASSE. GLUMACÉES. GLuwacex. Bartl. Fleurs sans périanthe, disposées en épis où épillets, accompa- gnées de bractées glumacées; étamines ordinairement au nombre de trois ; pistil ordinairement à 2 ou 3 styles ; ovaire inadhérent , uniovulé. Cette classe n'est composée que de deux familles, mais ce sont les Cypéracées et les Graminées : les premières, généralement aquatiques ou riveraines, peu usuelles , à l'exception de l’un des Végétaux les plus célèbres de l'antiquité, le Papyrus, dont l’é- corce nous à transmis tous les antiques monuments de l'esprit humain, ces précieux aliments de l'âme; et les Graminées à qui (256 ) nous devons la subsistance du corps, le pain que Dieu nous donne chaque jour. FAMILLE. CYPÉRACEÉES. Cyreraceæ. Nees. Graines libres; chaumes sans nœuds, le plus souvent anguleux. Cette famille est encore comme les précédentes, composée de plantes pour la plupart aquatiques ou riveraines ; c'est une des différences qui ladistinguent des Graminées qu'elle précède. Quoi- qu'aussi nombreuse en espèces, elle l’est beaucoup moins en genres. Elle est divisée en plusieurs tribus (1) dont trois seulement ont fourni des observations entomologiques: TRIBU. CYPÉRÉES. Cyrersæ. Nees. G. SOUCHET. Cyrerus. Linn. Fleurs hermaphrodites, dénuées de soies. Les Souchets, dont le nom paraît provenir de leur ressemblance avec les Jones, (2) se font reconnaître à leurs racines épaisses et rampantes, à leur chaume élevé, souvent triangulaire , sans nœuds, nu ou garni de feuilles.étroites, à leurs fleurs formant un thyrse terminal et élégant. Répandus sur toute la terre, ils ont des propriétés diversement employées. Leurs racines traçantes les font planter sur les dunes de la Hollande pour en fixer les sables ; celles du Souchet odorant répandent nn parfum aromatique qui décèle un principe stimulant très énergique; celles du Souchet comestible sont chargées de tubercules dont la saveur douce, agréable leur à mérité le nom d'Amandes de terre. Mais. ces qualités n'approchent pas de celles du, Souchet à papier, le fa- (x): Les Cypérées, les Scirpées ; les Hypolytrées. les Rhynchosporées, les Sclériées , les Elynées , les Caricées. (s) Juneus, Juncetus , Jungetum. Les Italiens donnent au Souchet odorant le nom de Gioncho odorato ; les Espagnols , celui de Juncia odorosa. Ménage. (257 ) meux Papyrus des anciens (1) qui dès avant Moïse et jusques au moyen âge. DRE TRN Er ENS 0 a servi l’art ingénieux De peindre la pensée et de parler aux yeux. Chaque hampe fournissait dans son épaisseur 12 à 20 feuillets dont la préparation (2) constituait une industrie très perfectionnée au temps d’Auguste. Indépendamment de cette importante propriété, le Papyrus était pour les Egyptiens d'une utilité merveilleuse. La partie in- férieure de la tige leur offrait une nourriture saine et succulente. Les racines leur servaient de combustible et se façonnaient en vases. Des premières couches de la plante on fabriquait des vête- ments, des voiles pour les vaisseaux; de la tige entrelacée en natte on construisait même des barques qui, enduites de bitume, servaient à la navigation sur le Nil. Enfin le peuple reconnaissant exprimait dansses hiéroglyphes l'ancienneté de son origine par un faisceau dePapyrus, comme sa première nourriture et le thyrse de cette plante lui tenait lieu de fleurs pour orner les autels des Dieux. Un seul insecte a été observé sur les Souchets; c'est le Lépi- doptère. Leucania Cyperi. B. D. — V. Châtaignier. TRIBU. SCIRPÉES. Scrrreæ. Nees. G. SCIRPE. Sous. Linn. Fleurs hermaphrodites, munies de six soies. (1) Le nom grec de Papyrus paraît dériver du nom égyptien Babur ou Berde, (2) La fabrication du papier consistait, après avoir coupé les deux bouts de la plante , et enlevé les couches extérieures , à diviser la partie moyenne avec une aiguille en longues lames ou feuillets circulaires très minces , et à croiser ensuite Sur ces feuillets, réunis dans leur longueur, d’autres feuillets posés transversale- ment , qu'on unissait étroitement les uns aux autres en les imbibant d'une eau collante et en les soumettant ensuite à l’action de la presse. 17 (258) Les Scirpes qui sont au nombre des plantes aquatiques les plus communes et les plus élevées , sont confondus avec les Jones par le peuple el connus sous les noms de Jones des étangs et des chaisiers, qui indiquent leur statien et leur utilité la plus ordi- naire, au moins en Europe. Une espèce bien plus utile encore, Scirpus tuberosus, Roxb. est cultivée à la Chine pour les tuber- cules de ses racines, nommés Pi-fsi, châtaignes d’eau, qui sont recherchés comme un aliment agréable , sain et doué d’un grand nombre de propriétés médicales probablement préconisées comme tant d'autres par le charlatanisme. Le nom de Scirpus que Linnée a assigné à ce genre était chez les Romains synonyme de Juncus, comme ses dérivés , et se retrouve dans tous les auteurs : c'est ainsi que Térence rapporte le proverbe Nodum in Scirpo querere, cette grande infirmité de la nature humaine de chercher la vérité, le bonheur où ils ne sont pas , de poursuivre de vains fantômes qui nous font tomber de déceptions en déceptions, si nous ne tenons le fil d'Ariane. L'homme est de glace aux vérités . Il est de feu pour le mensonge, Les insectes observés sur les Scirpes sont : COLÉOPTÈRES. Erhirnus festucæ. Herbst.—V. Peuplier. La larve se développe sur les Scirpus maritimus et lacustris en vivant dans la tige dont il ronge la moitié de l'épaisseur. Erirhinus Scirpi. Fab. — ibid. Donacia Typhæ. Brahm. — V. Potamogeton. M. Suffrian en a observé le développement dans le Scirpus maritimus. LÉPIDOPTÈRES. Nonagria cannæ. Tr.— V. Sureau. Observé sur les Scirpes par M. Hering. (259 ) à Leucania Scirpi B. D. — V. Châtaignier. Observé sur les Scirpes par M. Guénée. Scirpophaga phantasmella. Tr. — Cette Platyomide a la trompe nulle ou rudimentaire, l'abdomen terminé par une touffe épaisse de poils, et les pieds postérieurs très allongés. La chenille a une plaque cornée sur les deux premiers segments. Elle vit el se mé- tamorphose dans les tiges des Scirpes. Chilo phragmitellus. Tr. —Cette Schænobide a la trompe courte etmembraneuse, et les palpes inférieurs aussi longs que la tête et le thorax réunis; la chenille est nue, effilée. La chenille vit et se métamorphose dans les tiges des Scirpes ; la chrysalide est munie d’une protubérance au devant de la tête et terminée par une pointe dentelée circulairement. Schænobius forficellus. Tr. — Cette Schænobide à la trompe rudimentaire; les palpes inférieurs sont aussi longs que dans les Chilo. La chenille vit et se métamorphose dans les Scirpes.. La. chrysalide est enveloppée d’un tissu solide. TRIBU. CARICÉES. Carrceæ. Reichenb. G. LAICHE. Carex. Linn. Fleurs monoïques ou dioviques ; bractées imbriquées en tous sens. Les Carex dont on connaît le nombre prodigieux de 500 espèces sont des herbes marécageuses, au feuillage rude , scabreux, à la tige triangulaire, tranchante , à laquelle ilsädoivent leur nom dérivé du verbe grec couper, tandis que leur nom français était . primitivement Careiche qui en provient évidemment, et qui pour- rait bien être devenu Laiche par abréviation et altération. Quoi qu'il en soit, ces plantes que leur rudesse rend peu utiles à Ja nourriture des bestiaux , rachètent ce désavantage par les propri- étés médicales de leurs racines qui sont aromatiques, sudorifiques, ("260 ) détersives et apéritives. Ces racines traçcantes et fibreuses sont aussi très propres à raffermir les sables mouvants des dunes. COLÉOPTÈRES. Cryptophagus Caricis. Fab. — V. Typha. Melolontha Fullo. Linn. — La larve de ce Hanneton se nourrit des racines de Carex. Dans l’état de nymphe , sa retraite se décèle par un gros trou pratiqué ordinairement dans le talus des buttes de sable des dunes. Heterogaster Claviculus. Meyer. — Il se trouve en nombre im- mense sur les Carex. Heterogaster glandicolor. id. — ibid. Telmatophilus Caricis. —La larve vit dans ies fruits du Spar- ganium ramosum : Perris. Donacia linearis , Hopp. — V. Potamogéton. M. Suffrian l’a observé sur les Carex riparia , paludosa, glauca et panicea. Donacia discolor. Hopp. ibid. — Il vit sur les fleurs des C. pa- tudosa , glauca, panicea et Stricta. Suff. Donacia miyra. Fab. — Ibid. sur les €. riparia, cespitosa et Seuta. Suff. Donacia Typhæ. Brahm.— Ibid. Sur les C. paludosa et ri- paria. Suff. Donacia simplex. Fab. — Ibid. Sur les C. paludosa et ri- paria. Suff. Donacia Lemnæ. Fab. —Ibid. Sur divers Carex. Ghiliani. HEMIPTÈRE. Chorosoma arundinis. Curtis. — Cette Cimicide vit sur le Carex hirtus. Gorski. LÉPIDOPTÈRES. Satyrus œdipus. Linn. — V. Bruyère. Il se trouve dans de grandes clairières d’un bois de la Sologne, où croît en abondance ( 261 ) une espèce de grand Carex, mais il ne se repose Jamais que sur la Bruyère. Pierret. Arctia lubricipeda. Fab. Ibid. — V. Poirier. M. Héring a oh servé la chenille sur des Carex. Arctia urticæ Esper. — Ibid. ——— menthastri. Fab. — Ibid. Leucania caricis. Tr. — V. Châtaignier. Simyra venosa. Borkh. — V. Saule. La chenille vit sur tous les Carex. Hering. Plusia festucæ. Linn. — V. Lonicère. La chenille vit sur le C, ampullacea. DIPTÈRE. Cecidomyia riparia. Loew. — La larve vit dans les fleurs mâles du Carex riparia. FAMILLE. GRAMINÉES. GRamnez. Juss. Fleurs groupées en épillets accompagnés chacun d'un petit in- volucre de deux glumes similaires concaves, l’une externe, l’autre interne. Etamines hypogynes au nombre ordinaire de 3 ; pistil ordinairement à 2 styles. Graine adhérente au péricarpe. La bonté divine, si prodigue de ses dons en faveur des hommes, ne s’est nulle part manifestée avec autant de sollicitude pour leurs besoins matériels que dans cette famille végétale. Elle s’y est montrée cette fois universelle, en étendant le bienfait à toute la terre habitable. Cette famille a été créée pour pourvoir à la subsis- tance. des hommes et de leurs animaux domestiques: elle suffit à leur nécessaire. Elle leur donne le pain , la chair, le lait , la laine de ses bestiaux, le chaume pour couvrir leur toit. Mais ces plantes providentielles ne leur ont été accordées qu’à condition de les cul- tiver, et il en est résulté un autre bienfait, celui de la civilisation ( 962 ) par l’agriculture , par la propriété , par la vie sédentaire qui en sont dérivées. Pour remplir cette haute destination les Graminées ont été adaptées à tous les climats et la culture en remonte aux premiers àges du monde. Partagées en deux grandes sections dont la pre- mière , sous le nom de Céréales, sert plus particulièrement de nourriture aux hommes et l’autre à celle des bestiaux, chaque espèce a sa zone plus ou moins déterminée. Parmi les Céréales l'Orge et l’Avoine s’avancent dans le nord ou sur les montagnes jusqu'aux dernières limites de la végétation; le Seigle vient en- suite et il est suivi lui-même par le blé qui occupe toutes les ré- gions tempérées. Le Riz lui succède , en avancçant vers le midi, el il est remplacé parle Maïs, entre les tropiques. Enfin comment passerions nous sous silence la Canne à sucre qui ne produit que du superflu , si l’on veut, mais de ce superflu chose fort néces- saire. Cette distribution géographique, qui paraît primitive, ne s'oppose pas à la culture des Céréales dans les différentes zones, et c’est ainsi que nous les cultivons toutes dans nos contrées tem- pérées. Leur importance est telle que non seulement elles sont la base de la nourriture des populations, mais qu'elles sont une source immense de travail, d'industrie, de commerce, de nawi- gation; qu’elles préoccupent les gouvernements , les législateurs , provoquent des crises politiques, ébranlent les Etats. Les autres Graminées , dontles graines sont généralement trop petites pour nourrir les hommes, servent de fourrage aux bes- taux, Elles forment en grande partie le gazon des prairies, soit qu'une seule espèce couvre des contrées entières de ses innom- brables individus, comme dans les steppes de l'Asie, soit qu’une multitude d'espèces diversifient la fraiche verdure qui donne tant de charme à nos paysages. Cette famille, composée d'une multitude de tribus, dé genres et de plus de 3,000 espèces connues, nombre très inférieur sans | 263 } doute au nombre effectif, est cependant l’une des plus naturelles du règne végétal, présentant la plus grande unité de composition jointe aux modifications les plus diversifiées du type. Parmi ces dernières, on s'étonne de voir celle que présentent les Bambous, ces arbres graminées qui , dans l’inde et à la Chine , rivalisent d’élévation et d'élégance , ainsi que d'utilité, avec les Palmiers. Généralement herbacées , les Graminées présentent un chaume creux, dont quelques nœuds font toute la force. Leurs épis, serrés ou épars en larges panicules, portent des fleurs peu dis- tinctes. Au temps de la fécondation , le matin, lorsque le soleil paraît sur l’horizon, les anthères s'élèvent, s’agitent au-dessus des stigmates , se renversent l’une après l’autre, et le pollèn s'é- chappe par petites bouffées. Au surplus, ces végétaux si utiles n’ont aucun éclat. Autantils sontnombreux, autant ils sont simples et modestes , leur nature populaire se prête à des allusions, et Linnée qui avait autant de poésie dans le cœur que de science dans la tête, les a caractérisés d’une manière fort piquante, mais qui était plus juste de son temps que du nôtre. Voici la traduction de sa phrase latine : « Les Gramens, plébéiens, campagnards, pauvres, gens de chau- » me, très simples, très vivaces, constituant la force et la puissance » du royaume végétal, et se multipliant d'autant plus qu'on les » maltraite davantage et qu’on les foule aux pieds (1). » Les insectes qui viventsur les Graminées sont nombreux, quel- ques uns leur sont très nuisibles ; les larves des Hannetons, des grandes Tipules, les chenilles des Noctuelles, dévorent les racines des herbes de nos prairies. Les Calandres, les Teignes, les Alu- cites , les Agrotis , les Chlorops , les Céphus, les Saperdes, les Sauterelles et une multitude d’autres, attaquent particulièrement (1) Gramina plebeïi , rustici, pauperes , culmacei, simplicissimi , vivacissimi = regni vegelabilis vim et robur constituentes qui que magis mulctati et calcati, magis multiplicativi, Linu. ( 264 } les Céréales, et nuisent aux récoltes de manière à produire une perte annuelle de 200 millions. Parmi les insectes qui ont été observés sur les Graminées dont les espèces n'ont pas été signalées, nous mentionnons les suivants : COLÉOPTÈRES. Limonius bipustulatus. Fab.— V. Pin Sylvestre. Cardiophorus ruficollis. Fab. — V. Hêtre. —— ——— asellus. Tr. — Ibid. Ampédus sanguineus. Fab. — V. Pommier. Ludius cruciatus. Fab. — V. Cytise. Melolontha vulgaris. Linn. — V. Erable, Rhinocyllus lareynii.— au pied des Graminées. Chrysomela graminis. Fab. — V. Saule. ———— hœmoptera. Fab. — Ibid. ORTHOPTERE. Locusta viridissima. Linn. — V. Vigne. HÉMIPTÈRES. Tucephora sanguinolenta. Linn. — Cette Cicadelle suce les Graminées. Aphrophora spumaria. Linn. — V. Weigelia. LEPIDOPTÈRES. Arge galathea. Linn. — La chenille de cette Satyride est pu- bescente ; la chrysalide ne se suspend pas et repose à nu sur la terre. Erebia cassiope. Fab. — V. Grenadier. Satyrus mœæra. Linn. — V. Bruyère. —-— ægeria. Linn. — V. Ibid. ——— cire. Fab. — V. Ibid. Nemeobius lucina. Linn. -- Cette Erycinide a les pieds anté- ( 265 ) rieurs des mâles incomplets. La chenille est ovale, hérissée, la . chrysalide est attachée par la queue et par un lien transversal. Chelonia aulica. Linn. — V. Cerisier. Arctia fuliginosa. Linn. — V. Poirier. Lasiocampa quercifolia. Linn. — V. Poirier. Odonestis potatoria. Linn. — V. Brome. Agrotis putris. Linn. — V. Bruyère. Charœas graminis. Linn. — Cette Noctuélide a les ailes supé- rieures courtes. La chenille qui est rase, ronge les racines des Graminées, de manière à dévaster quelquefois les moissons. Elle se transforme dans la terre. Crambus pratellus. Tr. — V. Tamarisc. ———— culmellus. Tr. — V. Ibid. TRIBU. ORYZÉES. Onvzz. Kunth. Epillets uniflores ; glumes souvent nulles ou réduites à la paillette inférieure ; fleurs souvent diclines , à six étamines. Cette tribu comprend plusieurs genres, parmi lesquels domine le Riz dont nous avons à nous occuper. G. RIZ. Onxza. Linn. Epillets biglumes ; glumes petites, membraneuses ; fleurs hexandres. Si le Blé est la base de la nourriture des hommes dans toutes les parties tempérées du globe, le Riz remplit la même destination dans toutes les régions méridionales, et présente ainsi une importance plus grande encore, sa sphère s'étendant sur les deux tiers des habitants de la terre. Le Riz comme le Blé peut être considéré comme l’un des plus grands éléments de la ci- vilisation puisqu'il a fait renoncer les hommes à la vie nomade des chasseurs et que sa culture remonte à l'origine des peuples civili- sés. Son nom arabe Arez, d'où sont venus Oryza et Riz, est ( 266 ) aussi hébreux, il a été employé par Moïse dans l’Exode, chap. 16, suivant le savant Grotius. Numa, dans l'enfance du peuple ro- main, prescrivit des offrandes aux dieux parmi lesquelles le Riz avait la prééminence. De sa patrie, soit africaine, soit asiatique, le Riz, intro- duit dans l'Europe méridionale en concurrence avec le Blé, parvint en Amérique, patrie du Maïs, et s’y naturalisa éga- lement. Partout il dut son succès à l'excellence de son grain et à l'extrême abondance de ses récoltes (1\ qui, dans l'Asie et particulièrement dans l'Indoustan, s'élèvent à trois et même . à quatre chaque année. Cependant, à côté de ces avantages, la culture du Riz pré- sente, sous le rapport de la salubrité du sol, des inconvénients graves qui, du reste, n'existent que pour l'Europe et l’Ame- rique. Comme plante à peu près aquatique, le Riz est cultivé en Egvpte et en Chine, (2) dans des terres arrosées artificiel- lement par des eaux qui s’écoulent sans altérer la pureté de l'air. En Europe et en Amérique, au contraire, cette culture ne se fait que dans des terres marécageuses, d’où s’exhalent des miasmes délétères, meurtriers pour les populations, et elle ne peut se concilier avec les intérêts de l'humanité. Aussi est- elle interdite en France, et n'est-elle tolérée en Italie et en Espagne qu'en faveur des mesures prises par les gouvernements, soit pour écarter les rizières des lieux habités, soit pour en atténuer les ravages par des travaux hydrauliques. Au surplus, lors même que la raison de salubrité n’exis- terait pas, la culture du Riz, comme plante méridionale et aquatique, ne pourrait être encore que d’un intérêt secondaire (1) Le rendement du grain est de 80 et même de 100 pour un, (2) En Chine, oncultive souvent leRiz sur des radeaux ou espèces d’iles flot. tantes , formées «vec des naltes de Bamwbous , ‘et chargées d’une quantité suffi- saste de terre pour favoriser la végétation, st permettre que les racines de la plante demeurent en contact habituel avec l'eau courante. ( 267 ) en Europe, et entrer en concurrence avec le Blé; mais, con- sidéré comme substance alimentaire accessoire, le Riz nous pré- sente une nourriture saine , agréable et substancielle; sous les formes nombreuses qui lui sont données, il est également pré- cieux par ses propriétés médicinales, réparatrices et hygié- niques. Le Riz est donc en Europe aussi utile que le Blé est nc- cessaire, mais ensemble, ils sont les nourriciers de l'humanité entière. Mais deux plantes surtout, par leurs tributs divers, Se disputent l'honneur de nourrir l'univers. Ainsi fut adopté par la moitié du monde, Le Riz, fils de la térre et nourrisson de l'onde, Qu’adore l’Indien , dont le grain savoureux Défie et la tempête et les vents rigoureux , Et qui pour la beauté se tressart en coiffure, Fournit de ses chapeaux l’élégante parure. Tel surtout le Froment que Cérès nous donna , De ses premiers épis couvrit les champs d'Euna ; Salutaire aliment payé de tant de peines, Premier besoin de l’homme et l'honneur de nos plaines. (Delille , les Trois-Rëgnes.) Nous ne pouvons douter que le Riz, dans l’état de végéta- tion, ne soit attaqué par de nombreux insectes, mais aucun, à notre connaissance, n'a encore été signale. Deux Coléoptères sont seulement connus comme dévorant son grain. Calandra oryzæ. Fab. — Ce Charençon dépose un œuf sur un grain de Riz, la larve qui en provient y pénètre et le dé- yore, et par son extrême fécondité y produit de grands ravages. Silvanus sexdentatus. Fab. — V. Poirier. M. Blesson a observé que la larve vit dans les tas de Riz. TRIBU- PHALARIDÉES. Paararmex. Kuntz. Fleurs biglumes. Glumes ordinairement égales. Styles ou stig- mates ordinairement allongés. { 268 ) Parmi les plantes européennes que comprend cette tribu, se trouvent plusieurs herbes de nos prés, nourricières de nos bes- tiaux : les Vulpins, les Phalaris, les Flouves, les Phiéoles qui entrent dans la composition de nos meilleurs fourrages. Parmi les exotiques d’origine, brille le Maïs, cultivé dans toutes les parties du monde et l’un des éléments les plus féconds de la subsistance du genre humain. G. MAIS. Zea Lino. Fleurs monoïques ; les mâles en panicule terminal , les femelles en épis denses , solitaires aux aisselles des feuilles supérieures. Un seul style. Cette belle plante se distingue par sa tige élevée, droite, robuste, garnie de feuilles allongées, par le thyrse élégant de ses fleurs mâles, qui s'élève à son sommet, et par les beaux épis, accompagnés de leur longue chevelure, que présentent les fleurs femelles. On la cultiverait pour sa beauté, sion ne le faisait pour son utilité qui s'étend sur la plus grande partie du globe. Le Maïs est, après le Riz etle Blé, le plus grand bienfait de la Providence pour l'alimentation du genre humain et en même temps pour la civilisation par l’agriculture. Propre comme le premier aux climats méridionaux , il s’est successivement étendu sur les cinq parties du globe, fournissant une part plus ou moins grande de la nourriture des populations en même temps que des bestiaux, sans que l'on soit encore d'accord sur sa patrie primitive. Cette question a eu trois phases très distinctes. Vers la fin du siècle dernier (1), le Maïs passait pour provenir des Indes, d’où il avait été apporté en Turquie, et celte opi- (1) Avant celte époque, on à Cru reconnaitre le Mais dans le Sésame des Grecs, dans le Far des Romains , d'où provient Je mot farine, dans le Blé Sar- razin, dausle Millet, Holcus Sorghum, doni parle le Iante dans sa Diviue Comédie. ( 269 ) nion l'avait fait appeler Blé de Turquie ou de l'Inde. Peu d'années après l'on s’accorda à croire qu'il était originaire d’A- mérique , et cette opinion était fondée sur ce que les Européens en ont trouvé la culture établie dans cette partie du monde, lors de la découverte, et de mamière à ne laisser aucun doute que ce ne fut depuis une époque immémoriale. Mais cette ori- gine américaine est maintenant contestée par plusieurs objections très fortes qui ramènent à la première opinion. En effet, sui- vant l'observation de M. Bonafous, la tradition indienne paraît démontrer la culture du Maïs dans cette partie de l’Asie de- puis une époque antérieure à la découverte de l'Amérique. En second lieu, le traité d'histoire naturelle de Li-Tchi-Tchin, qui a été écrit vers le milieu du 15° siècle, parle de l'existence du Maïs en Chine à une époque tellement rapprochée de celle de la découverte de l'Amérique que l’on ne doit pas rapporter à cet événement l’introduction de cette plante en Asie. Enfin le Maïs trouvé à Thèbes, dans le cercueil d’une momie (par M. Rifaut en 1819) après trente ou quarante siècles, serait une relique précieuse, mais unique , qui prouverait son existence en Afrique dès les temps les plus réculés. (1) Il faut donc croire que le Maïs, originaire de l’ancien monde, a été porté à une époque fort ancienne dans le nouveau, d'où il a été introduit en Europe. C'est dans l'histoire de Venise par Bembe, publiée en 1530, qu'est signalé le Maïs pour la première fois dans cette partie du monde. Le nom du Maïs est américain ; quant à celui de Zea que lui a donné Linnée, il est grec, mais paraît avoir été employé par Homère, Théophraste et Pline pour nommer l'Epeautre. Quoi qu'il en soit, le Maïs est devenu l’objet d’une grande culture dans tous les climats méridionaux, mais surtout en Amérique où il est la base de la nourriture des hommes, comme (1) M. de la Chatre, Encycl. du XIX. siècle. (270 ) le Riz en Asie et en Afrique, etle Blé en Europe, etil doit cette faveur à toutes les qualités qui le recommandent : l'a- bondance de son produit, (1) les propriétés nutritives de son grain, les nombreux usages que lon en fait : la millasse des Gascons, la polenta des Piémontais, du sucre à la nouvelle Or- léans, de l'alcool au Mexique, la nourriture la plus substan- cielle pour les bestiaux dans le midi, et un excellent fourrage vert dans le nord. COLÉOPTÈRES. Agriotes segetis. Fab. (Elater Maydis.) Angellini. — V. Vigne. Melolontha vulgaris. Linn.—V. Erable. La larve, le ver blanc, porte dans le Béarn le nom de laire , et dévore la racine du Maïs. Pedinus glaber. Fab. — La larve de cet Hétéromère dévore aussi la racine. ORTHOPTÈRES. Gryllo talpa vulgaris. Linn. — Même observation. Acrydium migratorium. Linn. — Il détruit le feuillage. — _italium. Hab. — Même observation. HÉMIPTÈRES, Aphis Zeæ. Bonafous. V. Cornouiller. — On le trouve en abondance à l'aisselle des feuilles caulinaires et entre celles de l'épi. Coceus Zeæ. L. Duf. — V. Romarin. LÉPIDOPTÈRES. Heliothis armigera. Dup. — V. Coudrier. Cette espèce se trouve dans tous les pays où l’on cultive le Maïs. Heliothis peltigera. Guen. — Même observation. (1) Il atteint en Amérique le chiffre de 129 hectolitres par hectare. (271) Leucania Zeæ. Dup. — V. Châtaignier. La chenille mange les barbes de l’épi et pénètre entre les balles qui le recouvrent. Leucania Scirpi. B. D. — Même observation. — Loreyi. Dup. — Même observation. Plusia Gamma. Linn. — V. Lonicère. Agrotis præcox. Fab.—V. Bruyère. La chenille attaque la tige. Pyralis ruralis. Villiers. — V. Tamarisc. Botys Silacealis. Hubn. (B. eupulialis, Clerck.)— V. Tama- risc. La chenille pénètre dans la moelle du Maïs , la dévore , fait jaunir la plante et cause sa mort. Passerini. Tinea Zeella. Villiers. — V. Clématite. La chenille vit dans le cœur des panicules et de l’épi. G. VULPIN. ALorecurus. Linn. Fleurs hermaphrodites. Glumes connées à la base. Styles ter- minaux. Stigmates très-longs, plumeux. Epillets agrégés en panicule serrée. « L’Alopecurus, dit Pline, donne un épi doux au toucher, qui » est rembourré de coton, de sorte qu’il ressemble à une queue » de renard dont les Grecs lui ont donné le nom. » C'est aussi l’origine du nom de Vulpin. Cette herbe des prairies qui bordent nos rivières, est une des plus précieuses par l'abondance et la qualité du fourrage qu’elle fournit. Un seul insecte a été signalé sur ces plantes, c'est le Lépi- doptère Leucania alopecuri. B. — V. Châtaignier. La chenille a eté observée sur cette plante par M. Guénée. G. PHLÉOLE. Pareum. Linn. Fleurs hermaphrodites. Glumes obliquement tronquées au sommet. Styles terminaux. Stigmates plumeux. Epillets agrégés en panicule serré. Les Phléoles, voisines des Vulpins par les caractères botaniques, (272) le sont aussi par leurs qualités comme fourrage, et quelques espèces habitent les mêmes lieux. La Phléole des prés, que nous reconnaissons à l’épi chargé d’étamines violettes ou roses, est la même à laquelle les Anglais donnent le nom de Thymothy-Grass, et qui a été importée en France, comme espèce nouvelle, pour en faire des prairies artificielles. Le nom de Phleum, qui a été donné à ces plantes par Haller, et qui signifie abondance, a été francisé en Phléon, Phléole, Fléole et Fléau, et ce dernier a paru provenir de la forme de l’épi qui représente la bate de l'instrument du cultivateur, dont le nom dérivé de flagellum, offre une seconde acception et laisse dans l'esprit une impression bien différente. Insectes que l’on trouve sur les Phléoles. COLÉOPTÈRES. Anomala rugatipennis. Graills. — V. Vigne. On la trouve sou- vent suspendue par les pieds postérieurs aux tiges grêles des Phléoles. Anisoplia agricola. Fab. — V. Rosier. Mème observation. LÉPIDOPTÈRE. Arge galathea. Linn. — La chenille de cette Satyride est peu allongée, pubescente, a tête globuleuse. La chrysalide n’est pas suspendue et repose à nu sur la terre. G. PHALARIS. PraLanis. Fleurs hermaphrodites. Glumes presqu'égales. Stylesterminaux. Stigmates en goupillons. Epillets agrégés en épis ou en panicule. Théophaste et Pline donnaient le nom de Phalaris à une plante dont la tige en roseau donnait une graine semblable au Sésame, qui offrait un remède contre la pierre. Nos anciens botanistes , Bauhin, Dodonœus , Scheuchzer, ont cru la reconnaître dans les graminées dont il est question, et leur en ont donné le nom. ( 278 ) Parmi les nombreuses espèces qui composent ce genre , l’une d'elles, ou plutôt sa variété panachée, est cultivée dans nos jardins en faveur de ses feuilles agréablement rayées de vert, de blanc et dejaune; l’autre, sous les noms d’Alpeste, de Graine d'oiseau, de Millet long, et originaire des Canaries , est l’objet d’une cul- ture utile par sa semence, nourriture favorite des serins qui, dans leur état de servitude, préfèrent à toute autre graine celle de leur patrie. Un seul insecte a été signalé sur les Phalaris : c’est un Hémi- ptère. Coceus phalaridis. Linn. — V. Tamarise. Il vit sur les racines du Phalaris canariensis. Brez. G. HOUQUE. Hozcus. Linn. Fleurs diclines dans le même épillet, éloignées l’une de l’autre, la supérieure mâle, l’inférieure hermaphrodite. SUITE pédicellés, disposés en panicule rameux. Le nom de Holcus, que Pline donnait à l'Orge des murailles, a été transporté par Linnée à un genre considérable de Graminées, qui comprend plusieurs espèces communes dans nos prairies, et d'autres qui sont exotiques et qui remplissent un rôle important dans l’économie domestique. Tel est le Sorgho : originaire de l'Inde, il est la nourriture principale d'un grand nombre de peu- plades de l’Afrique qui en font du pain. Il est aussi, mais moins, cultivé en Asie et même dans le midi de la France, sous le nom de Gros millet, mais seulement pour la nourriture de la volaille. Deux insectes Lépidoptères ont été observes sur les Houques. Satyrus hermione. Linn. — V. Bruyère. Observé par Brez. Bombyx hieracii. Fab. — V. Ronce. G. FLOUVE. Anraoxanraum. Linn. Epillets triflores ; la supérieure hermaphrodite ; les deux infé- rieures neutres ; deux étamines. Epis agrégés en panicule simple. 18 ( 274) Ce genre de plantes présente plusieurs particularités qui le recommandent à notre attention. Elles semblent moins bien trai- tées par la nature que les autres Graminées, sous le rapport de la fructification, chaque épillet offrant deux fleurs stériles .sur trois, et la fertile n'étant pourvue que de deux étamines au lieu de trois, ce qui contrariait fort Linnée, contraint de l'éloigner de sa place naturelle dans le système sexuel. Cependant elles paraissent dédommagées de cette sorte d’infériorité organique par la faculté de porter de petites bulbes qui sont terminées par des feuilles rudimentaires et qui reproduisent la plante comme les graines. Ces plantes, qui doivent leur nom grec à la couleur jaunâtre de leurs panicules, se font encore remarquer par l'odeur agréable, voisine de celle du Mélilot, qu'elles exhalent et qu'elles commu- niquent au fourrage dont elles font partie, en le rendant ainsi plus appétissant et salutaire aux bestiaux. Ces diverses particularités ont valu aux Anthoxanthum l’hon- neur d'être chantés par Darwin, dans ses amours des plantes. Nos esprits ne sont plus assez portés vers la poésie pour goûter des descriptions comme celle-ci, dont nous empruntons la traduc- tion à Deleuze : « Près de toi, Anthoxa, deux bergers (1) et deux sœurs, leurs » épouses (2), se nourrissent d’ambroisie (3); au milieu des vastes » landes où les bruyères étalent leurs fleurs de pourpre et mêlent » leurs rameaux dorés, ils vivent enfermés dans une verte retraite » (4), à l'abri de l'envie. Une fumée bleuâtre (5) s'élève de leur » cabane de gazon : leurs enfants timides se jouant au sein des » parfums (6, , tantôt recoivent les rayons bienfaisants du soleil, » et tantôt se rafraïchissent aux gouttes cristallines de la pluie. » (x) Les étamines. (2) Les pistils. (3) Le suc des nectaires (4) Les glumes. (5) Le pollèn. (6) L'odeur des fleurs. ( 2754) Un seul insecte a été signalé sur ces plantes : c’est un Lépi- doptère. Satyrus circe. Fab. — V. Bruyère. TRIBU. PANICÉES. Panicex. Kunth. Epillets biflores (la fleur inférieure stérile, incomplète. G. PANIC. Panicum. Linn. Fleurs biglumes. Glumes très inégales. Ovaire glabre à deux styles. Styles terminaux. Stigmates pénicelliformes. Ce genre, qui compte plus de 400 espèces, en comprend plu- sieurs alimentaires. Tel est, surtout, le Panic Millet, qui, origi- uaire de l'Inde, s’est répandu depuis un temps immémorial en Afrique et en Europe. Suivant Diodore, Pline, Columelle, les Romains en tiraient une grande utilité comme céréale; ils en faisaient du pain, d'où paraît dériver son nom: ils se bornaient souvent à en faire de la bouillie comme des différentes espèces de Blé, et cette forme qu'ils donnaient à ces aliments était si habituelle que les autres peuples leur avaient donné le nom de mangeurs de bouillie. Dans une partie de l'Italie, ils y mélaient des fèves comme dans tout ce qu'ils apprêtaient.e Panico et Galliæ » quidem præcipue Aquitania utitur ; sed et cireumpadada Italia » addita faba sine quà nibil conficiunt. » Plin. 1. 18. Le Millet fait encore partie de la nourriture de l’homme dans l'Inde et en Afrique où il fait, avec le Sorgho , la base de la sub- sistance des Nègres. En France, il sert à nourrir les oiseaux. Plusieurs espèces sont cultivées comme fourrage ; l'herbe de Guinée est un Panic naturalisé en Amérique et dont on a fait des essais en France. Insectes des Panics : COLÉOPTÈRE. Lema flavipes. Fab.— La larve se nourrit des feuilles du Pani- cum italicum. ( 276 ) LÉPIDOPTÈRES Erebia Medusa. Fab. — V. Grenadier, La chenille de cette espèce a été signalée sur le Millet. Satyrus hyperanthus. Fab. — V. Bruyère. Même observation. TRIBU. ARUNDINACÉES. Aruvpmacezæ. Kunth. Fleurs ordinairement à longs poils, glumes membraneuses aussi longues que les glumelles. G. PHRAGMITE. Puragwres. Tri. Epillets de cinq à ,sept fleurs distiques, hermaphrodites, à l'exception de l'inférieure qui est neutre; rachis de l’épillet garni de longs poils. Panicule très-rameux , diffus. Le Phragmite, c'est le Roseau vulgaire, qui aurait dû conserver ce nom si connu {{), le Roseau qui dans tous les temps, dans tous les lieux , a été employé à une multitude d'usages , et dont Pline a dit : « Belli pacisque experimentis necessariæ , atque » etiam deliciis gratiæ. » Les Grecs et les Romains en faisaient des flèches ; ils s'en servaient pour écrire. Les bergers en tail- laient leurs flûtes. Hos tibi dant calamos, en accipe Musa, Virgile. Egl. 6. Dépossédé de ces emplois élevés, le Roseau qui plie et ne rompt pas, reste utile au pauvre pour couvrir sa chaumière , pour nourrir sa chèvre, pour en former la litière , pour alimenter son industrie en lui donnant des matériaux à faconner des nattes, des païllassons, et jusqu'à d’humbles balais. Le Roseau Phragmite nourrit d'assez nombreux insectes. (1) Ménage dérive Roseau de rauselum, diminutif du latin barbare rauseum, qui setrouve en celle signification dans l’ihbé Jouas, en la vie de Ssint-Vulfran, archevêque de Sens : « Locorum pulustrium , quæ plena erant longissimis rausets rirgultis. » Le latin barbare rauseum a été formé de l’ancien allemand raus. » (AY ) COLÉOPTÈRES. Odacantha melanura. Fab. — La larve se nourrit et se déve- loppe dans les tiges. Phytonomus arundinis. Fab. — Ce Curculionite se développe également dans les tiges. Hypera rumicis. Fab. — Même observation. OEdemera crassicollis. Gyll. (Oe. arundinis. Dahl.) — Cet Hé- téromère vit sur les Roseaux. Donacia nigra. Fab. —- V. Potamogéton, il vit entre les feuilles enroulées. Suff. Donacia nigra. Fab. — Ibid. —————— simplex. Fab. — [bid. —————— fennica. Payck. — Ibid. —————— hydrocharidis. Fab. — Ibid. ——— —— discolor. Hopp. — Ibid. = ————— arundinis. Abr. — Ibid. HYMÉNOPTÈRE. Cynips phragmites. Linn. — V Erable. Il vit dans des ren- flements qu'il détermine à l'extrémité des tiges. HÉMIPTÈRE. Aphis arundinis. Fab. — V. Cornouiller. Il vit sur le Roseau Epigeius. LÉPIDOPTÈRES. Odonestis potatoria. Linn. — La chenille de cette Bombycide est cylindrique, munie de deux aigrettes de poils, l’une sur le deuxième segment, dirigée en avant, l’autre sut le onzième, in- clinée en arrière. Elle vit solitaire et se transforme dans un cocon ovale. Cossus arundinis. Triepke. — V. Saule. Observé sur le Roseau par Hering. ( 278 | Macrogaster arundinis. Hubn..— V. La larve de celle Hépia- lide vit et se transforme dans l'intérieur des tiges. Nonagria paludicola. Hubn. — V. Sureau. La femelle dépose ses œufs en grand nombre sur un Roseau, et ils s'y trouvent ren- fermés par l'effet de la végétation. Les jeunes chenilles y vivent en commun jusqu'à ce que leur taille devenue plus forte et leur appéüt plus grand, ne leur permettent plus de s’y nourrir suffi- samment. Elles percent la demeure commune pour se répandre sur les plantes environnantes, ce qui constitue ainsi un petit groupe de Roseaux attaqués. Parvenue à l’époque où elle doit habiter seule, chacune de ces chenilles va chercher une tige et s’y introduit en perçant un trou dans une de ses articulations supérieures. Elle y vit quelque temps de la moelle du roseau, et, quand elle vient à en manquer, elle perce un second trou par où elle sort. Cette première opération de la chenille empêche le Roseau qu'elle a choisi de végéter par le sommet. Les jeunes feuilles roulées qui composent cette sommité ne tardent pas à se dessé- cher et à jaunir, tandis que le reste de la plante ne cesse d’être sain. La chenille en grandissant a acquis des mandibules assez fortes pour ronger une moelle un peu plus dure. Elle descend donc le long de la même tige et y choisit ordinairement, à un ou deux pieds de la partie submergée, la retraite où s’opèreront ses dernières mues et sa transformation en chrysalide, elle y entre par un trou qu'elle creuse au bas de l'articulation : une fois que son corps y a passé tout entier, elle travaille à boucher ce trou, ce qu’elle fait, non pas en filant (il semble qu'elle n’en a pas la fa- culté) mais en rapprochant les rognures du roseau et en les col- lant ensemble. Elle vit alors tranquille dans sa retraite jusqu'à sa transformation. Quand ce temps approche, elle monte vers le haut de l’articu- lation ; là, elle ronge un espace ovale, destiné à faciliter sa sortie quand elle sera devenue papillon, mais, ne sachant pas filer, 19 79 ) { \ comment fera-t-elle pour fermer ce trou, comme ses analogues, d'un voile de soie qui défende l'accès de sa demeure à ses enne- mis? Elle y supplée en laissant dans son entier l’épiderme du roseau, dans toute la largeur du trou. Pour plus de sûreté, elle compose avec les débris du Roseau qu'elle vient de ronger un plancher en voûte arrondie, immédiatement au-dessus de son trou. Enfin, elle descend de deux à six pouces plus bas, elle y forme pour soutenir sa chrysalide un nouveau plancher très-léger, qui se trouve encore consolidé par la peau qu’elle quitte, et là , elle se change sans faire de coque, en une chrysalide fort allongée. Cette chenille diffère de celle du N. Typhæ : 1.° en ce qu'un seul Roseau suffit à celle-ci pour toute sa vie;'2.° en ce qu’elle ne file pas comme elle, ne faisant usage de sa soie que pour agglomérer les débris du roseau ; 3.° en ce que sa chrysalide est placée la tête en haut dans sa tige; 4.0 en ce qu'elle ne fait pas de coque; 5.° en ce que le trou par où le pa- pillon doit sortir est ovale, au lieu d’être rond ; 6.° en ce qu'elle ne bouche jamais ce trou, rongeant à cet effet dans la partie dure du Roseau une espèce de porte. Nonagria phragmitidis. Hab. — Ibid. Nonagria neurica. Hubn. — Ibid. M. Héring a observé la che- aille sur le Roseau. Leucania obsoleta. Hubn. — V. Châtaignier. La chenille se trouve dans le chaume sec du Roseau Phragm. Her Simyra venosa. Bork. — V. Saule. La chenille vit sur le Phra- gmites: Héring. Phalæna arundinis. Linn. — La chenille vit dans les sommets de l’Arundo epigeius. Pyrausta arundinalis. Êvers. — M. Éversmann a observé cette Pyralide sur les roseaux, à Kasan. Schænobius forficellus. Tr. — La chemlle de cette Crambide est lisse. Elle vit et se transforme dans les tiges des Roseaux. Schænobius mucronellus. Tr. — Ibid. { 280 |) Chilo phragmitellus. Tr. — V. Scirpe. Elachista arundinella. Fab. — V. Houx. DIPTÈRES Cecidomyia scutellata. Meig. — V. Groseiller. La larve vit dans la tige de l'A. Phragm. | Ogcodes gibbosus. Meiz. — M. Leprieur a trouvé plusieurs de ces Diptères sur une tige de Phragmite. TRIBU. AVENACÉES. Avexaczæ. Kunth. Epillets à deux ou plusieurs fleurs ; la terminale ordinairement stérile ; glumes membraneuses. G. AVOINE. Avexa. Linn. Epillets à trois fleurs. Glumes convexes : l'externe plus courte. Glumelles ordinairement poilues ou barbues; l’externe bifide au sommet. La patrie originaire de l’Avoine paraît être la zone boréale de notre hémisphère. Suivant Pline, les Scandinaves , les Germains, les Celtes en faisaient leur principale nourriture sous la forme de gruau, de bouillie, de pain; c’est d'eux que les Romains l'ont reçue, et l’on peut soupconner que le nom teutonique Haver est l'origine d'Avena. Cependant, dès le [V.° siècle avant l'ère chré- tienne, Hippocrate connaissait cette céréale et en prescrivait l'usage en boisson comme un des antiphlogistiques les plus efficaces. Peut-être l'Avoine était-elle parvenue dans la Grèce par la Perse que plusieurs auteurs lui donnent pour berceau , mais qui probablement l'avait empruntée elle-même du nord de l'Asie. Avant de nourrir nos chevaux , l'Avoine servait donc d’aliment aux hommes, et elle le fait encore malgré la supériorité du Blé, dans les régions froides ou arides, dans lesquelles il ne prospère ( 284 ) pas, telles que la Bretagne et l'Écosse. Elle est aussi employée à faire de la bierre et de l'alcool, et elle conserve en médecine la réputation que lui a faite le père de la science, mdépendamment du rapport de Pline, d’après lequel les médecins attribuaient, à l'usage de la bouillie d'Avoine, la rareté des malades dans la Germanie. Au surplus, les Romains ne se servaient de la plante qu'à l’usage de farrago , fourrage, comme nous le faisons de VAvoine fromentale, le Ray-grass français. Insectes qui ont été signalés sur l’Avoine. COLÉOPTÈRES. Agriotes segetis. Gyll. — V. Vigne. —La larve de ce Sternoxe est souterraine et dévore les racines de l’Avoine jusqu'au collet comme celles des autres céréales. On conseille, comme moyen de prévenir ses dégats, de répandre des tourteaux de cameline, reduits en poudre, sur les parcelles des champs où l’on com- rence à s'apercevoir de la présence de ces larves. Lema melanopus. — La larve se nourrit des feuilles de l’Avena sativa. Perris. HÉMIPTÈRE. Aphis avenæ. Scap. — V. Cornouiller. LÉPIDOPTÈRES. Satyrus phaedra. Linn. — V. Bruyère. La chenille vit sur l’Avena elatior. Agrotis tritici. Linn. — V. Bruyère. La chenille vit des pani- cules de l’Avena sativa. DIPTÈRES. Agromyza nigritarsis. Macq. — Cette petite Muscide dépose ses œufs à la base de l'Avoine nouvellement levée; le dévelop- pement en est arrêté et il se forme une tumeur au centre de laquelle se développe la larve. Au mois de juin, en ouvrant les ( 282 ) plantes tuméfées , on voit lépi bien formé mais contre terre, ét la larve s'attache alors à la base de l’épi et y creuse un sillon en hélice, de manière à intercepter la sève et empêcher la maturité du grain. Les cultivateurs de l'intérieur de la France , pour dési- gner cette altération, disent que les Avoines boudent. Les moyens les plus efficaces de prévenir le retour du mal, sont d’alterner les récoltes et d’arracher les plantes attaquées, avant que les larves n'aient passé à l’état parfait. Chlorops cereris. Meig. — V. Blé. Cette petite Muscide vit sur l'Avoine comme sur le Blé. Chlorops messoria, id. — Ibid. ———— guerini, id. — Ibid. = Frit. Linn. — Ibid. G. AIRA. Arra. Linn. Epillets de deux fleurs hermaphrodites. Glumes carénées Ce genre qui porte aussi les noms de Canche et de Foin, est très voisin des Avoines, mais il ne produit que de petites graines, inutiles dans l'économie domestique. Ces Graminées à fleurs nues ou chargées de barbes, à panicules diffus ou res- serrés en épis, croissent suivant leurs espèces, dans des sols très variés; nous en trouvons dans les bois, dans les marais, dans les prés, dans les sables, sur les montagnes comme dans les vallées; l'espèce la plus remarquable est l'A. canescens. Ces Graminées nourrissent les insectes suivants : HÉMIPTÈRE. Chermes graminis. Linn. — V. Tamarisc. Il vit sur l’Aira flexuosa. LEPIDOPTÈRES. Melitæa cinxia. Fab. — V. Peuplier. La chenille vit sur l'Atra canescens. Hering. ( 283 ) Hesperia linea. Fab.—V. Citronnier. La chenille vit sur l'A?ra motana. Brez. d Chelonia hebe. Linn. —V. Cerisier. Sur l'Aira canescens. Her. Hadena cespitiss WW. — V. Spartier. Sur l’Aira cespitosa. Br. Pellonia vibicaria. Linn. — Cette Phalénide à les antennes et les pieds antérieurs très allongés. La chenille est presque fili- forme, elle se transforme dans un léger tissu à la surface du sol. | TRIBU. FESTUCACÉES. Fesrucaceæ. Kunth. Epillets ordinairement multiflores. Glumes ordinairement her- bacées. Glumelles le plus souvent aristées. Arête non tordue. Ces Graminées sont de toutesles tribus végétales celle qui contribue le plus à couvrir la surface de la terre. Par le nombre des genres et des espèces, elles se répartissent à tous les sites, a tous les sols, à tous les climats, et elles revêtent des es- paces immenses de leurs innombrables individus, elles forment particulièrement le fond de nos prairies, de nos vergers , qui nous offrent de doux tapis de verdure. Ces plantes servent très-peu à la nourriture des hommes. Nous ne pouvons guère mentionner sous ce rapport que le Pä- lurin, que les Abyssins cultivent sous le nom de Teff, et la Glycérie que les Polonais recueillent sous celui de Manne, dans la vaste étendue de leurs marais. Mais la Providence nous les a données pour la subsistance de nos bestiaux, dont elles forment la plus abondante pâture. Ce sont les Fétuques, les Pä- turins, les Bromes, lesBrizes, et quelques autres qui composent nos meilleurs fourrages. Nous leur devons tous les avantages que nous rétirons de nos chevaux, de nos bœufs, de nos moutons, c'est-à-dire les substances que ces animaux fournissent à notre alimentation et à nos vêtements, mais surtout les bienfaits de l’agriculture et de la civilisation. ( 284 ) Les insectes qui vivent sur les plantes de cette tribu doivent être fort nombreux, ils comptent sans doute pour beaucoup parmi ceux qui ont été observés sur les Graminées en géné- ral, sans spécifier celles qui les nourrissent. D’autres ont été signalés sur des espèces déterminées de ces plantes et plusieurs d’entr'eux ont donné lieu à des observations qui présentent de l'intérêt. G. CRÊTELLE. Cyvosurs. Linn. Epillets à dix fleurs hermaphrodites, mêlées de stériles, com- posées de glumes seules. Ces jolies Graminées de nos prairies se font remarquer par les bractées découpées qui accompagnent les épis et qui leur donnent l'apparence, tantôt de la queue d'un chien, confor- mément à leur nom grec, tantôt d’une crête d'oiseau suivant leur nom français. Un seul insecte a été signalé sur ces plantes : LÉPIDOPTÈRE. Satyrus pamphilus. Linn. — V. Bruyère. Brez l'a observé sur la Crêtelle des prés. G. PATURIN. Poa. Linn. Epillets distiques, disposés en panicule. Fleurs toutes herma- phrodites. Glumes plus courtes que l’épillet. Le Poa des Grecs, Pabulum des Romains, Päturin des Fran- cais , est l'herbe commune et par excellence qui constitue le fond de nos meilleurs pâturages, des frais gazons, des fines pe- louses qui charment nos regards , attirent nos pas et nous in- vitent au repos , aux douces rêveries. Comme tout ce qui est bon et utile, les Pâturins sont extré- mement répandus sur le globe; l’on en connaît près de trois cents espèces, appropriées à tous les sols, à tous les sites, a toutes les températures. Nous nous bornerons à mentionner ( 285 ) le Teff de l'Abyssinie, cultivé comme Céréale, et qui donne trois récoltes chaque année. Insectes qui ont été observés sur les Pâturins : COLÉOPTÈRES. Dasytes ater. Fab, — Ce Malacoderme vit sur les Pâturins, comme sur toutes les autres Graminées. Dasytes villosus. Hoffm, — Ibid. Anomala rugatipennis. Gr. — V. Vigne. M. Graëlls l’a vue en Espagne, suspendue par les pieds postérieurs aux tiges des Pâturins. Anisoplia agricola. Fab. — V. Rosier. Gymnætron graminis. Gyll. —- La larve de ce Curculionite vit sur les Päturins. Chlorophanus graminicola. Sturm. — V. Saule. Cléonis graminis. Sturm. — V. Bruyère. Donacia linearis. Hopp. — V. Potamogéton. Il vit sur le Pâturin aquatique. Donacia tomentosa. Ahr. — Ibid Hispa atra. Linn. — V. Coudrier. HÉMIPTÈRES. Triecphora (cercopis) vulnerata. Germ. — Cette Cicadaire vit sur les Pâturins. Aphrophora spumaria. Linn. — V. Weigelia. LÉPIDOPTÈRES. Arge galathea. Lion. — La chenille de cette Satyride a le corps peu allongé et la tête globuleuse. Elle ne se suspend pas pour se métamorphoser. et la chrysalide repose à terre. Erebia cassiope. Fab. — V. Grenadier. Satyrus circe. Fab. — V. Bruyère. ——— phaedra. Linn. — Ibid. La chenille se nourrit du P. pratensis. Freyer. ( 286 ) Satyrus maera. Linn. — V. Bruyère. ———— Janira. Ochis. — Ibid. Ægeria. Linn. Ibid. hyperanthus. Linn. — Ibid. Nemeobius lucina. Linn. — La chenille de cette Erycinide est ovale, hérissée de poils. La chrysalide s'attache par la queue et par un lien transversal. Lithosia mesomela. Linn. — V. Tilleul. Chelonia aulica. Linn. — V. Cerisier. Arctia fuliginosa. Linn. — V. Poirier. Psyche graminella. WW. — V. Graminées. Lasiocampa quercifolia. Linn. — V. Poirier. Odonestis potatoria. Linn. — V. Graminées. Caradrina respersa. WW. — V. Ibid. Stilbia stagnicola. Tr. — La chenille de cette Caradranide est très grosse. Elle s'enfonce dans la terre sans former de coque. Cerigo cytherea. Fab.—La chenille de cette Hadenide est rase. La chrysalide est renfermée dans une coque peu solide, dans la terre. x Segetia xanthographa. Fab. — La chenille de cette Noctuélide est rase, la chrysalide est renfermée dans une coque légère dans la terre. Agrotis putris. Linn, —V. Bruyère. Charæas graminis. Linn. — V. Graminées. Spælotis nyctimera. Dup. — La chenille de cette Noctuélide vitsur le P. annuel. Bruand. Elle se métamorphose dans la terre. DIPTÈRES. Cecidomyia graminicolella. Kaltenb. in litt.—V. Groseiller. La larve vit dans de petites galles ovales entre les tiges et les feuilles engaïînées du Poa nemoralis. Cecidomyia Poae. P de B. — V. Ibid. La larve vit dans la (287) graine du P. trivialis qui prend une forme plus épaisse et étendue. Winn. G. GLYCERIA. Grycerra. Rob. Br. Epillets peu ou point comprimés, linéaires , allongés. Fleurs toutes hermaphrodites. Glumes chartacées. Le Poa flottant est devenu de par la science de Robert Brown, Je type d’un genre , au nom mythologique, qui se fait remar- quer par ses longues tiges, dont la base horizontale flotte sur les eaux, et l'extrémité se dresse verticslement pour exposer ses panicules fleuris; il se recommande encore par ses graines substancielles qui lui ont valu les noms d'herbe à la manne, de Manne de Prusse, Manne de Pologne, et qui dans ces pays sont recueillies , converties en gruau et préférées au Riz. Enfin, ces plantes sont si abondantes dans les marais du nord de l'Europe , qu’elles tendent à les transformer en tourbières. Deux insectes ont été signalés sur les Glycéries. LÉPIDOPTÈRES. Nonagria fluxa. Hubn. — V. Sureau. M. Héring à vu la che- nille se nourrissant de la G4. spectabilis. Simyra venosa. Borkh. -- V. Saule. Même observation. G. BRIZE. Brrza. Linn. Epillets arrondis, à longs pédicelles, au moins à cinq fleurs, toutes hermaphrodites. Glumes arrondies, panicule pendant, tremblant. Parmi les Graminées que nous distinguons dans nos prairies par leur agréable simplicité, les Brizes occupent l’un des pre- miers rangs; à l'élégance de leur port elles joignent celle de leurs panicules qui s’inclinent avec grâce et dont les épillets, portés sur de longs et frêles pédicules, se teignent de pourpre et tremblent au souffle du moindre zéphyr. Aussi lespèce prin- (288 ) cipale a-t-elle recu le nom d’Amourette qu'elle partage du reste avec d’autres jolies plantes, telles que le Poa eragrostis, le Saxifrage hypnoïde , la Lychride des prés. Suivant Lamarck, le nom de Brize dérive du verbe grec dor- mir, parce que le sommeil accable les personnes qui mangent le pain fait avec la graine de l'espèce cultivée, B. maxima remarquable par ses épillets panachés de blanc, de jaune et de brun. Trois insectes Lépidoptères ont été signalés sur les Brizes. Lygæna brizæ. Esper. — V. Cytise. Callimorpha hera. Hera. — V. Saule. OEcophora brizella. Tr. — V. Olivier. G. DACTYLE. Dacniis. Linn. Épillets de deux à sept fleurs hermaphrodites. Glumes caré- nées; panicule unilatéral , tres serré. Ce genre est représenté en Europe par le Dactyle glomérulé, commun dans les prés et assez remarquable par la disposition de ses fleurs en épillets nombreux, comprimés, ramassés en peloton, tournés du même côté et disposés en panicules diffus, panachés de vert et de violet. Cette plante , rude au toucher, âpre au goût, partage avec le Chien-dent la propriété d'être un vomitif pour la race canine. Deux insectes Lépidoptères vivent sur cette plante : Ercbia blandina , Fab.—V. Grenadier. M. Guénée a observé la chenille sur le Dactylis glomerula. Leucania dactylidis. Ramb — V. Châtaignier. Même obser- vation. G. FÉTUQUE. Fesruca. Linn. Epillets pédicellés de deux à plusieurs fleurs distiques , herma- phrodites. Glumes acuminées. Ces plantes, qui sont au nombre de celles que recherchent ( 289 | le plus avidement les bestiaux, présentent des espèces nom- breuses, appropriées aux sols, aux températures, aux sites les plus différents; elles affectent des formes et même des cou- leurs très variées ; il y en a derampantes, d’élancées , de dif- fuses, derigides, d'élégamment inclinées, Leurs touffes souvent isolées et étalées sur le sol sont vertes, glauques, azurées, rouges, brunes, dorées; leurs fleurs se groupent en panicules, en bouquets, en grappes, en épis. Egalement utiles dans les prairies naturelles et artificielles, les Fêtuques le sont surtout dans les sols arides, sablonneux, calcaires où plusieurs espèces croissent de préférence. Telle est la Fêtuque coquiole dont les brebis sont si avides sur nos landes les plus stériles, tandis que, par une singularité assez remarquable, une de ses simples variétés, la Fest. tenuifolia, n’en est jamais broutée. Les insectes suivants vivent sur les Fêtuques : COLÉOPTÈRES. Erirhinus festucæ. Herbst. — V. Peuplier. Donacia sericea. Ill. (D. festucæ. Fab) — V. Phellandrie. HÉMIPTÈRES. Cimex dolobratus. Linn. — V. Tilleul. Sur le Fest. natans. Coccus festucæ. S. C. -- V. Tamarisc. Sur les Fest. Cespitosa et phænioides. Coccus radicum graminis. F. S. — Ibid. Sur les Fest. ces- pitosa. Tæniothrips dispar. Halid. — Sur le Festuca fluitans. ————— brevicornis. Hel, — avec le précédent. LÉPIDOPTÈRES. Lælia cœnosa. Hubn.— Cette Liparide, voisine des Dasychires, a la trompe très longue, et les palpes deux fois aussi longs 19 (290 |) que la tête. La chenille vit sur les Fêtuques, est garnie de brosses et se métamorphose dans un cocon de soie entremélée de poils. Spælotis nyctimera. B. D.— Cette Noctuélide a la trompe longue et les palpes très velus, les ailes sont luisantes. La chenille se nourrit de la Fêtuque ovine, elle est glabre, marquée de taches cunéiformes sur le dos. Elle se transforme dans la terre. M. Bruand. Calocampa vetusta. Hubn. — Cette Xilenide a les antennes épaisses, la trompe longue, les palpes courts, l'abdomen aplau, les pieds courts, les ailes à bord terminal denté. La chenille vit sur les Fêtuques. Héring. Elle est rase, allongée, atténuée aux extrémités, ornée de couleurs vives. Elle s’en- terre profondément avant dese transformer ; le cocon est de terre el très fragile. Plusia festucæ. Linn. — V. Lonicère. ——— concha. Fab. — Ibid. G. BROME. Brouus. Linn. Epillets pédicellés, oblongs, de cinq fleurs au plus, distiques, imbriqués. Glumes plus courtes que l’épillet. Panicules rameux. Les Bromes , dont le nom grec était donné par les Romains à une espèce de Blé, a été appliqué par Linnée à un genre nom- breux de Graminées que nous trouvons dans les prés, dans les bois, dans les champs, et qui, mêlées aux précédentes, forment de bons fourrages ; quelques unes sont assez communes pour avoir des noms vulgaires, comme la Droue, le Séglin. Une autre très répandue en Amérique, le B. cathartique présente dans ses racines un puissant purgatif employé au Pérou et au Canada. Les insectes observés sur {es Bromes se réduisent à quatre. COLÉOPTÈRES: Anisoplia Bromicola. Germ. — V. LÉPIDOPTÈRES. Odonestis potatoria. Linn. — V. Phragmite. (291) Emydia rippertii. — La chenille paraît vivre sur les Bromes, d'après une observation de M. Pierret. Cidaria chenopodiaria. Linn. — V. Berberis. Adela (Euthyphia. Hubn.) congruella. F. R. — V. Saule. La chenille vit sur les hampes du Festuca ovina, en Bohème. Mann. G. MÉLIQUE. Méuica. Linn. Epillets d’une à deux fleurs hermaphrodites et d’une à trois rudimentaires. Glumes inégales. Ce petit genre présente une disposition des fleurs très-simple, mais qui ne l’est que par l’un de ces avortements si fréquents dans le règne végétal , semblables à l’effet d’un accident et qui sont cependant entrés dans le plan de la création. Il résulte de l'état rudimentaire dans lequel une partie des fleurs est restée, que les épillets sont fort exigus, mais ils se groupent en panicules remarquables par leur élégance et attirent nos regards, soit dans les bois touffus, soit sur les collines pierreuses, où la nature a placé ces jolies plantes. Un seul insecte Lépidoptère a été signalé sur les Méliques. Satyrus Arcanius. Linn. — V. Bruyère. Observé par Brez. TRIBU. HORDEACÉES. Horprace. Kunth. Bpillets ordinairement triflores, souvent aristés. La fleur ter- minale stérile. Glumes herbacées. Epis simples, solitaires. Cette tribu, qui comprend nos principales Céréales, le Blé, le Seigle, l'Orge, nous amène à des considérations qui intéressent les hommes, sous un grand nombre de rapports d'une haute impor- tance. Les Céréales, en effet, se rattachent à l'agriculture, à la civilisation, à la subsistance des peuples, à l'économie politique, sociale, domestique , à la législation , au bien-être des peuples, ( 292 | Elles ont fixé les hommes sur le sol par l'agriculture, qui est la mère de la civilisation. Comme base de la subsistance des hommes, leur abondance accroit la population (1), améliore la santé (2), contribue à la prospérité publique. Les gouvernements doivent donc encourager l’art qui produit cette abondance, par tous les moyens qui sont en leur pouvoir ; ils doivent honorer les cultivateurs, exciter, récompenser les efforts qu'ils font pour per- fectionner la culture des Céréales et tous les procédés qui s’y rat- tachent et qui apportent quelquefois un progrès immense dans la production. Voyez les effets obtenus par les industries annexées à l'agriculture, telles que les sucreries, les distilleries (3); voyez le drainage qui, déjà , en Angleterre, a accru au moins d’un tiers le rendement du blé, et qui a relevé l’agriculture du coup qui lui avait été porté par une loi dirigée contre la propriété. Voyez (1) Il existe une telle solidarité entre le mouvement de la population et celui des subsistances ; que la première subit des fluctuations correspondantes à l'abon- dance où à la pénurie des récoltes, M. Millot, à qui l'on doit des travaux de sta- Listique uuportants, a prouvé numériquement que le nombre des jeunes gens appelés chaque année sous les drapeaux, varie suivant la fertilité de l'année correspondante à leur naissance. Ainsi en 1819, époque de disette , le nombre des naissances fut moindre , et en 1837, il ne se présenta au tirage que 295,792 conserits , tandis qu'en 1834, année correspondante à 1814, époque d’abondance, es listes de conseription furent de 326,298. Il est vrai qu’en 1814 , il se joignit à la fertilité de l'année, le bonheur qu'éprouva la France de la restauration des Bourbons sur le trône. Mais, par suite encore de la disette de 1817, l'augmenta- tion progressive de Ja population, jusque-là de 168,200 habitants nouveaux par année moyenne , s'arrêta à 64,648. (2) Le docteur Mélier a constaté, d’après des calculs faits sur une période de 160 ans ; que le nombre des malades et celui des décès augmeute ou décroît sui- an! l'abondance ou la disette. (3) Une ferme située aux environs de Valenciennes , exploitée à la sole, pro- duisait annuellement 12 hectolitres de blé par hectare tous les trois ans, Depuis que l’on y a établi une sucrerie, la jachère y a été supprimée. les terres pro- duisent du Blé tous les deux ans etrapportent 30 hectolitres par hectare, (293) encore l’art de la mouture qui , par ses perfectionnements (1), a tiré du froment une quantité de farine très supérieure à celle qui en était obtenue précédemment. Les. gouvernements doivent encore prendre les mesures les plus efficaces pour maintenir les Céréales à un prix qui concilie les intérêts des producteurs avec ceux des consommateurs, pour prévenir les dépréciations, qui, en abaïssant la valeur du Blé en-dessous du prix de revient (2) ; ruinent le cultivateur, ou les chertés qui tuent le pauvre. L'un des sujets les plus importants à traiter, relativement au Céréales, est celui des insectes qui leur sont nuisibles, et des moyens de les en préserver. Les dommages qu'elles en éprouvent sont évalués à 200,000,000 annuellement. Ces insectes sont, particulièrement pour les Céréales dans l’état de végétation : les Chlorops, les Cephus, les Hannetons, les Saperdis ; dans l’état sec, les Calandres, les Alucites, les Teïgnes ; dans l’état de farine, les Ténébrions, les Blattes. En donnant des détails sur chacun d'eux, nous indiquons les procédés les plus efficaces pour prévenir leurs ravages. D’autres insectes vivent sur les Céréales sans leur causer de dommages sensibles. Parmi ces derniers nous en rangerons quel- ques-uns que M. Perris a observés sur les chaumes qui recouvrent les bergeries, dans le département des Landes. COLÉOPTÈRES. Malachius œneus. Fab. — V. Lierre. La larve, découverte par (x) Les procédés dans les méthodes de mouture sont anssi précieux que ceux de culture. Dans les provinces où la mouture est en retard, on tire en farine moitié seulement du poids du blé , tandis qu'on admet généralement qu’elle y entre pour les trois-quarts. Au XV. siècle, Budé dit qu'il fallait 6 hectolitres de fro- ment pour la nourriture d’un homme pendant un an, parce qu'alors on ne tirait que 36 kilogrammes de farine d’un hectolitre. Aujourd’hui, trois hectolitres suf fisent , parce que le froment donne trois quarts de son poids en farine. (2) La loi de 1832 protége l’agriculture en établissant un droit proportionnel plus fort à l'exportation et plusfaible à l'importation , lorsque la valeur du ble est supérieure ou inférieure à 20 fr. l'hectolitre. ( 294 ) M. Perris, est très-carnassière, et fait la guerre aux autres in- sectes. Elle est armée de fortes mandibules munies de deux dents. Derrière les antennes, de quatre articles,se montrent quatreocelles, situés sur une lache noire. Les stigmates sont au nombre de neuf. Elle se transforme en nymphe sans autre préparation que celle de se faire une niche au milieu des détritus des chaumes, Latridius minutus. Linn. — La larve de ce Xylophage (Dej.), observée par M. Perris, se distingue entre les larves connues des Coléoptères ; par les mandibules représentées par deux corps qui se meuvent comme elles, mais qui en diffèrent en ce qu'ils sont charnus et non cornés, à peu près triangulaires et non crochus, et qui paraissent insérés ou plutôt articulés entre les machoires ; elles sont munies extérieurement , près de l'extrémité, de trois poils assez longs, et à l'extrémité , de deux petites dents presque droites et cornées. Cette larve est encore caractérisée par l'absence de palpes labiaux et de lèvre inférieure. La nymphe se fait re- marquer en ce qu'elle est fixée au plan de position par le mame- lon anal de la larve. Corticaria pubescens. Ill.— Ce genre diffère peu des Latridies. La larve ressemble fort à la précédente. P. Cryptophagus dentatus. Herbst. — La larve de ce Clavicorne a la tête large. Les antennes de trois articles. Sous les antennes, on aperçoit un groupe d ocelles qui forment sur chaque joue une tache noirâtre. Orthoperus piceus. Steph. -— La larve de ce très-petit Trimère (Perris) se distingue par l'insertion des antennes au tiers postérieur de la tête. Crambus enshamensis. WW. — La larve de cette Anisotomée (Gaubil) est entièrement couverte de petites aspérités et de longs poils. La nymphe n'est pas enveloppée dans une coque. L'extré- mité de l'abdomen qui est bilobée, se trouve engagée dans la peau de la larve, chiffonnée et ramassée dans un paquet informe. Cette dernière particularité est une preuve de cette admirable (295 ) sollicitude de la nature qui s'exerce aussi bien sur les petites espèces que sur les grandes. Lorsque le moment de la transfor- mation en nymphe est venu, la larve se cramponne au plan de position, au moyen d'un mamelon placé sous le dernier segment du corps ; puis, la peau de la larve se fend le long du thorax et se ramasse à l'extrémité de la nymphe, dont les derniers segments y demeurent engagés comme dans un fourreau, de sorte que la nymphe est solidement retenue au chaume sur lequel la larve s'était fixée, et brave ainsi les vents. Xylophilus dimidiatus. Kuntz. — Sur les toits de chaume. ———— populneus. Fab. — Ibid. Perris. Faronus La Fertei. — Aubé. On trouve cette espèce en se- couant les toits de chaume. Perris. HÉMIPTÈRE. Ploiaria vagabunda. Linn. — Cette Géocorise filiforme vit sur le chaume. DIPTERES. Sapromyza 4 punctata. Fall. — La larve de cette Muscide, découverte par M. Perris , s'accroche sur le chaume ainsi qu'il suit : le onzième segment s'applique à l'aide de ses deux papilles, sur le plan de position; puis, rentrant dans le dixième segment qui s’abaisse, il permet aux papilles et aux lobes dont ce dernier est pourvu, de se cramponner aussi sur le même plan. De plus, la contraction du dernier segment a produit le vide au-dessous de lui, une ventouse s’est formée, et son action est telle que, sur une plaque de verre renversée, la larve demeure solide- ment fixée. Il lui est donc facile de se maintenir entre les chaumes. Hydrellia apicalis. Perr. — Cette Hydromyzide s’est peut-être trouvée accidentellement sur le chaume. Asteia amæna. Meig. — La larve de cette Agromyzide n'est pas connue. ( 296 } G. IVRAIE. Lorium. Linn. Epillets solitaires, distiques, de cinq fleurs ou plus. Glumes oblongues. Epis grèles , flexueux. Cette plante malheureuse (infelix Lolium. Virg.), seule entre toutes les Graminées, contient un principe délétère dont les effets sont connus depuis une haute antiquité. Ses graines, à la fois âcres et narcotiques, produisent des vertiges , des tremblements, l'ivresse , la stupeur, la privation momentanée de la vue (1), et pour produire ces effets, il suffit d’un faible mélange d'ivraie avec d'autres graines alimentaires (2). Cette plante est d'autant plus dangereuse qu’elle croît de préférence dans les champs ense- méncés de Céréales, qu’il y a beaucoup d’analogie entre elles, que leurs graines mürissent en même temps et que la confusion est facile. Il est cependant indispensable d’extirper l'Ivraie, afià d'éviter son mélange avec le bon grain, et c'est sous cette figure que les livres saints nous représentent la vertu exposée à la con- tagion du vice, si elle n’en évite soigneusement le contact. Parmi les espèces d'Ivraies,il y en a d'innocentes. Le Ray-grass, gazon anglais (Lolium perenne), en est une, et nous lui devons ces pelouses dont la finesse, la fraicheur, la verdure, n'ont pas d’égales, au moins en Angleterre. Les insectes observés sur ces plantes sont : LÉPIDOPTÈRES. Satyrus Dejanira. Linn. — V. Bruyère. La chenille vit sur l'Ivraie enivrante, suivant Freyer. Heliophobus popularis. Fab. — V. Peuplier. Eusebia bipunctaria. WW. — Cette Phalénide vit sur l'Ivraie (1) Cette action s'exerce sur l'Homme , sur le Chien,le Mouton, le Cheval, sur les Poissons ; elle paraît être très-faible ou même nulle sur le Bœuf, le Porc , les Oiseaux. (2) Il sufüt d’un dixième. (297 ) vivace ; elle a le front proéminent, les palpes aigus et connivents. La chenille est courte, glabre. Elle se transforme dans un léger cocon à la surface du sol. Phalœna morio. Linn. — Sur l'Ivraie vivace. G. BLÉ. Trnicum. Linn. Epillets sessiles, solitaires, comprimés, triflores; fleurs distiques, imbriquées. Glumes ovées ou lancéolées, carénées Base de la nourriture des hommes dans une grande partie de l'ancien monde, et surtout en Europe, le Blé jouit de cette noble prérogalive depuis une hauie antiquité, depuis l'époque des patriarches. Melchisedeck offrait du pain et du vin au Très-Haut en qualité de grand prêtre. Abraham présenta du pain aux trois messagers divins qui venaient lui prédire la naissance d'Isaac. lacob envoya ses fils en Egypte pour acheter du blé à Joseph, On a trouvé de nos jours du blé dans les hypogées de l’ancienne Thèbes. Son origine, comme celle d'Homère est disputée en faveur de différents lieux: C’est la vallée du Jourdain, suivant Dureau de la Malle, parce que la Vierge des zodiaques égyptiens , copiée ensuite par les Grecs et les Romains, tient un épi de froment; ceux-ci plaçaient cette origine dans les plaines d'Enna en Sicile, où Cérès en avait enseigné la culture. D’après une autre opinion fort accréditée, le berceau du Blé est la Perse, et, il y a peu d'années, le botaniste Michaux en a trouvé croissant spontané- ment sur une montagne de ce pays. D’autres plaçaient l’origine du Blé dans l'Ethiopie, d’autres dans la Tartarie, la Scandi- navie, la Germanie, les Gaules. Le Blé, au siècle d’Auguste, était l’objet d’une culture soignée et.d'une mmportation immense pour nourrir le peuple roi; Virgile et Pline nous ont appris comment on le cultivait, l'espèce de chaulage qui était usité : Semina vidi equiden medicare sereutes Et nitro prius et nigrà perfundere amurcà. ( Virg. Géorg.) ( 298 ) la jachère et la rotation des récoltes : Alternis ide tonsas cessare novales, Et seguem patiere situ durescere campum, (Virg.) l'écobuage : Sæpe etiam steriles incendere prefuit agros, Atque levem stipulam crepitantibus urere flammis. (Virg ) l'usage de faire brouter les fanes pour renforcer les épis : Luxuriem segetum tenera depascit in herba. (Virg.) les ravages du Charençon : Cr relpeiee populatque ingentein farris acervum Curculio. CVirg.) Le mauvais effet produit sur lesrécoites de Ble par l'enlevage des cailloux des terres pierreuses, est également mentionné par Pline. Les provinces d’où Rome tirait le plus de Blé pour sa consom- mation étaient la Sicile, l'Afrique, l'Egypte, la Mysie. Quelle haute opinion de la fertilité de l'Afrique dut avoir Auguste en voyant la plante de Blé que lui envoyait un deses intendants, et qui portait 400 épis produits par un seul grain ! (Pline.) La culture actuelle du blé en France n'offre pas de phénomène de ce genre, mais elle y oppose les 300 variétés de froment qui s'adaptent à tous les sols, les instruments perfectionnés, les semis en ligne, le drainage et surtout les industries annexées à l'agriculture : les sucreries, les distilieries, les brasseries, les amidonneries, les huileries qui enrichissent les Céréales de tout ce que l'abondance des engrais peut produire. Le genre Tritieum comprend non-seulement les espèces alimen- taires, mais encore plusieurs qui ne le sont pas; tel est le T.repens si connu sous le nom de Chien-dent. Les insectes qui vivent sur les Blés sont nombreux, leurs ra- vages ne sont que trop connus. Les moyens de les en préserver ne le sont pas assez. ( 299 ) BLÉ COMMUN. Triricum vuLGARE. Villars. Epillets en épis tétragones. Glumes ventrues, comprimées au- dessous du sommet. COLÉOPTÈRES. Zabrus inflatus. Déj. — La larve de ce Carabique se nourrit des racines et fait quelquefois de grands ravages. L'insecte par- fait se trouve quelquefois sur les épis et en ronge le grain. Zabrus gibbus. Fab. Amara trivialis. Duftsch. — Même observation. ——— familiaris. id. — Ibid. ——— communis. Fab. — Ibid. ——— tricuspidata. Sturm. — Ibid. ——— aulica. Illig. — Ibid. Agriotes segetis. Gyll. — Les larves de ce Taupin (Sternoxe) sont allongées, fort étroites, jaunâtres, d’une consistance fort dure; elles sont souterraines, rongent les racines du Blé jusqu'au collet et font périr les plantes. C’est au mois d'avril qu'elles exercent leurs ravages, d'autant plus considérables que l'hiver a été plus rigoureux. Les champs n’en sont infestés que par parties, sans que l’on en ail encore expliqué la cause. On con- seille, comme moyen de prévenir ces dégats, de répandre des tourteaux de cameline, réduits en poudre, sur les parcelles des champs où l'on commence à s’apercevoir de la présence de ces larves. On assure même que le Blé que l’on fait succéder à la Cameline n’en est jamais attaqué, comme il semble, au contraire, qu'après le Trèfle, le Blé y soit plus exposé. On peut encore faire la guerre à l’insecte, lorsqu'il paraïl en été dans l’état ailé , et avant qu'il dépose ses œufs. Il est probable qu'il le fait en automne au pied des blés nouvellement levés, mais ce fait n'a pas encore été constaté et il importe de le vérifier. Melolontha vulgaris. Linn. — V. l'introduction. Anisoplia fruticosa. Fab. — V. Rosier. Herbst l observé sur les Blés et l'avait nommé A. segetis. { 300 | Meloe melanura. Linn.— On trouve cet Hétéromère sur les épis. Lytla segetum. Fab. — V. Catalpa. Il nuit aux Blés dans la Sicile. Lagria atra. Fab. — Brez a observé cet Hétéromère sur les Froments. Apion frumentarium. Fab. — V. Tamarisc. Sitona frumentaria. Fab. — V. Houx. Calandra granaria. Fab.— Ce Curculionite est le plus grand dévastateur du Blé dans l’état sec. Parmi les moyens de le com- battre, nous ne rappellerons que le suivant : Lorsqu'on s’apercoit qu'un tas du Blé est attaqué , on forme un petit monticule de grains, auquel on ne touche plus, tandis qu'on remue le tas avec une pelle. Les Calandres qui l’habitent étant inquiétées, l'aban- donnent et se réfugient presque toutes dans le monticule qui est placé auprès. On doit continuer cette opération quelque temps et à des intervalles assez rapprochés. Lorsqu'on juge qu’un grand nombre d'individus se sont réunis dans le monticule, on les fait périr en y jetant de l’eau bouillante. On doit employer ce procédé qui détruit les insectes parfaits et non les larves, aux premières chaleurs du printemps, et avant que la ponte n’ait eu lieu. L'opération réussit encore plus complètement, si, à la place du monticule de Blé, on substitue de l'Orge, les Calandres ayant une préférence bien marquée pour cette dernière. Calandra oryzæ. Fab.— Cette espèce nuit aussi au Blé. Trogossita mauritanica. Lat, —V. Peuplier d'Italie. [l attaque quelquefois le Blé. Saperda gracilis, Guer.— V. Erable plane. Ce petit Longi- corne, nommé Aiguillonnier, à Barbézieux, parait dans le courant de juin quand les Blés sont en fleurs. Alors la femelle perce un petit trou dans la tige près de l'épi, et y introduit un œuf. Comme elle en a au moins 200 dans les ovaires, et qu'elle n’en dépose qu'un dans chaque tige, et seulement dans celles qui portent les plus grands épis, il en résulte qu'une femelle peut infester plus de (3M ) 200 tiges de blé. L'œuf, descendu ou tombé jusqu’au premier nœud du chaume , donne naissance à une larve qui remonte dans le tuyau jusque près de l’épi, ronge circulairement ce tuyau, . ne laissant intact que l'épiderme. L'épi, ainsi isolé, ne reçoit plus les sucs nourriciers, reste vide, se dessèche quand les grains approchent de leur maturité, et tombe au premier vent. Cette larve descend ensuite dans le chaume, en perce successivement les nœuds, et va se loger au bas de la tige, afin d'y passer l'hiver. Les tiges dont les épis sont tombés s'appellent aiguillons et ces Blés sont dits aiguillonnés. La perte causée par cette maladie s'élève quelquefois au cinquième ou sixième de la récolte. Lema melanura. Fab. — Cette Chrysoméline a été observée sur le Froment par Brez. Hispa atra. Fab. — V. Coudrier. Même observation. ORTHOPTÈRES. Locusta viridissima. Linn. — V. Vigne. Acrydium migratorium. Linn. — Cet Orthoptère est celui qui produit tant de dégats par ses voyages. HYMÉNOPTÈRES. Cephus pygmæus. Fab. — Cette Tenthredine commet souvent des ravages considérables sur le Froment. La femelle insère au mois de mai un œuf dans une tige à l’aide de la petite scie qu’elle porte à l'extrémité du corps ; la larve se nourrit de la moelle du chaume, perce les cloisons, et parvenue au terme de sa croissance peu de jours avant la moisson, elle descend vers la terre et elle y prend un moyen singulier pour faciliter sa sortie sous la forme ailée, au printemps suivant : C’est de couper circulairement, comme la Saperde, la paille en-dedans, de 14 à 28 millimètres de terre. Ensuite elle s'enfonce un peu au-dessous du sol, et se construit dans l'intérieur du chaume, une enveloppe dé soie dans laquelle elle passe l’hiver. Au mois d'avril suivant, elle passe à l'état ( 302) de nymphe, et peu de jours après à l'état parfait. Les effets que produit cet insecte sur les Blés consistent d'abord dans la couleur et le poids des épis ; huit à quinze jours avant la moisson, ils sont blanchâtres et droits; ils s'élèvent au-dessus des autres qui sont encore verts et qui se courbent sous le poids du grain, tandis que les premiers sont entièrement vides, ou ne contiennent qu'un très-petit nombre de grains raccornis ; ensuite la coupure cir- culaire, opérée par la larve au bas du chaume, fait qu'il se brise au pied et qu'il tombe à terre lorsqu'il fait du vent. Alors le champ présente quelquefois le mème aspect que s'il avait été waversé dans tous les sens par des chasseurs ou par des animaux. (M. Herpin.) Le moyen le plus rationnel de se garantir de ces dégats est de détruire les larves des Céphus, soit en labourant à plusieurs reprises les champs qui ont produit du Fromentet d’enterrer et de détruire ainsi les étocs, soit en les brûlant. HÉMIPTÈRES. Thrips rufa. Linn. — V. Vigne. Il vit dans les épis. —— obseura. Muller. — Ibid. LÉPIDOPTÈRES. Satyrus aegeria. Linn. — V. Bruyère. Ilarus ochroleuca. W-W. -- Cette Hadénide a l'abdomen caréné. La chenille est effilée, à tête assez grosse. Elle vit à découvert sur les Blés dont elle dévore les grains. La chrysalide est renfermée dans une légère coque de terre. Segetia xanthographa. Fab. — Cette Noctuélide a les palpes légèrement inclinés vers la terre. La chenille est rase, elle vit de Céréales et se tient cachée sous leufs touffes. La chrysalide est renfermée dans une coque légère , sous la!terre ou à sa surface. Agrotis segetum. Linn. — V. Bruyère. La chenille vit des racines des Blés et passe l'hiver sous terre. Elle cause souvent des dégats. (303) Agrotis tritici. Linn. — Même observation. ——— aquilina. W-W. — Ibid. ——— fumosa. Fab. — Ibid. Scopula frumentalis. Linn. — V. Prunier. Crambus pedriolellus. Dup.— V. Tamarisc. La chenille vit dans un long fourreau composé de soie et de sable à la base des Blés dont elle dévore les racines. Butalis cerealella. Encyc. — La chenille de cette Tinéide vit et se transforme dans des grains de Froment qu’elle ronge à l'intérieur sans, qu'on s’en aperçoive au-dehors. Sa multipli- cation est prodigieuse; car elle peut produire jusqu’à six généra- tions par année et elle cause quelquefois les plus grands ravages. C'est l'Alucite. des grains. Suivant M. Amyot, un cultivateur a remarqué que les gerbes qu'il laissait en javelles couchées par terre pendant quelque temps . donnaient un Blé qui n'était pas atteint par ces chenilles, tandis que celui provenant des gerbes rentrées immédiatement après la moisson en était fortement attaqué. On a observé aussi que le Blé, battu de suite après la moisson était à l'abri de ses atteintes, tandis que celui que l'on ne battait que plus tard, en octobre ou pendant l'hiver, y était sujet. Enfin, il résulte d’une autre observation, que le Blé dur serait préservé des attaques de l'insecte, tandis que le Blé tendre yseraittrès exposé; l'Alucite n’exerce ses ravages que dans les par- ties intérieures de la France ; le Midi et le Nord n’en souffrent pas. Tinea granella. Linn. — V. Clématite. Elle ne commet pas moins de dégats que l’Alucite lorsqu'on la laisse se multiplier sans obstacle. La chenille réunit plusieurs grains de Blé avec la soie qu'elle file, et elle se nourrit de la substance du grain. Le meilleur moyen de s’en garantir est de fermer les fenétres des greniers avec des châssis à canevas, après qu'on les a purgés des grains attaqués qui se trouvent toujours à la surface des tas. DIPTÈRES. Cecidomyia flava. Meig. — V. Groseiller. ( 304 ) Cecidomyia tritici. Latr. — V. Groseiller. La larve vit dans la tige près du collet ou du premier nœud, et elle fait avorter les épis sans nuire à leur développement extérieur. Cecidomyia cerealis. Bremi. — Elle a causé des dégats consi- dérables dans le grand duché de Bade, dans la Hongrie et la Carinthie, Cecidomyia fromenti. Nob. — J'ai observé dans les environs de Saint-Omer un champ de Blé, barbu ; 15 à 20 de ces petits insectes voltigeaient autour de chaque épi ou se posaient dessus. J'en ai vu plusieurs qui introduisant l'extrémité de l'abdomen entre les glumes pour y déposer leurs œufs. On ne peut douter que, malgré leur petitesse, ils ne commettent , par leur grand nombre sur chaque épi, des dégats, au moins sur la qualité du grain. Chlorops lineata. Meig. — Cette petite Muscide jaune, à lignes noires , paraît en automne, gonflée d’un grand nombre d'œufs; elle les dépose sur de jeunes plantes de Blé ou de Seigle, un seul sur chaque pied nouvellement levé. Peu de jours après, il naît de cet œuf une larve qui ronge la tige jusqu'à sa base et l'empêche de monter; mais la sève, alimentée par les racines, continue la végétation, et, ne pouvant faire monter la plante privée de sa tige, épaissit le collet entouré de feuilles, au centre duquel la larve passe l'hiver, Dans cet état de la plante, les cultivateurs du centre de la France disent qu'elle est en poireau ou qu’elle culotte. Elle reste ainsi jusqu'au mois de mars, où elle jaunit et meurt. Cependant, vers le même temps, les larves se changent en nym- phes qui, au mois de mai, passent à l'état de Mouches. Elles s’ac- couplent peu après , et les femelles de cette seconde génération pondent à leur tour au mois de juin; mais cette fois , elles n'atta quent que le Froment , la végétation du Seigle étant avancée et la tige déjà dure et sèche. Elles ont l'instinct de déposer leurs œufs au bas de l’épi du froment avant qu'il se soit dégagé de la feuille supérieure qui l’enveloppe et lui forme une sorte de coiffe, Si ( 305 ) l'on détache quelques jours après cette feuille de la tige, on voit que la larve qui est sortie de l’œuf au bas de l’épi, se creuse un sillon extérieur le long de la tige, depuis l’épi jusqu’au nœud supérieur. Lorsqu'elle est arrivée à ce point , elle a atteint le terme de sa croissance , elle se change en nymphe et, peu de jours après , en insecte parfait. Cependant, les tiges attaquées présentent des altérations singulières , elles n’atteignent guère que la moitié de la hauteur de celles qui sont saines ; leur ma- turité est considérablement retardée: elles sont encore très-vertes lorsque les autres sont déjà jaunes ; l'épi n’est pas encore sorti d’entre les feuilles qui l’engaînent ; il est court, peu volumineux, peu abondant en grains ; ceux-ci d'ailleurs sont maigres et rac- cornis ; enfin tous les épillets situés du côté du sillon longitudinal creusé par la larve, sont entièrement avortés. Les petits Chlorops de la seconde génération, développés au mois d'août, s’accou- plent au mois de septembre, et déposent leurs œufs comme leurs aïeules, sur les plantes de Froment ou de Seigle nouvellement Jevées.—Les Chlorops ont fait de grands dégats en France en 1812 eten 1839. Le Nord paraît à peu pres exempt de leurs ravages, et on le doit sans doute aux assolements plus perfectionnés, plus variés, au moyen desquels ces Mouches arrivées au moment de pondre, ne trouvent pas à leur portée les plantes de Froment ou de Seigle qui doivent recevoir leurs œufs, et elles meurent sans pouvoir se reproduire; car il est à remarquer qu'elles s'éloignent peu du lieu de leur naissance. Un second moyen de les détruire, c'est d’arracher les tiges qui contiennent leurs larves. Il en est un plus efficace encore, c’est de semer les blés en novembre, les Chlo- ropsn'ayantplusalors la vigueur nécessaire pour opérer leur ponte. Chlorops lata. Meig. — Ibid. M. Waga a fait connaître une immense multiplication de cette espèce aux environs de Varsovie. Chlorops cereris. Meig. — Ibid. — messoria. Id. — Ibid. — guerinii. Herpin. — Ibid. 20 . 306 } Chlorops Frit. Linn. — Ibid. BLÉ RAMPANT (chien-dent) Triricum ngeens. Linn. Epillets le plus souvent à cinq fleurs. Glumes lancéolées , acu- minées, à cinq nervures. Cette espèce qui fait le désespoir du cultivateur autant que la précédente en fait le principal trésor, se réhabilite dans l'opinion publique par l'utilité de sa racine dont tout le monde connaît les propriétés diurétiques, rafraîchissantes et apéritives. Elle nourrit les insectes suivants : LÉPIDOPTÈRE. Chelonia villica. Linn. — V. Cerisier. La chenille vit sur le Chien-dent. Héring. DIPTÈRE. Lonchæu parvicornis. Meig. — M. Perris a fait connaître les développements de cette Lauxanide. La femelle perce avec sa tarière un bourgeon de Chien-dent et y dépose un œuf. La pré- sence de ce corps étranger détermine le bourgeon à s'allonger en formant des courbes et à se dilater en forme de fuseau. C'est une galle extérieurement revêtue d’écailles pubescentes qui sont des feuilles avortées. La larve vitau centre de la substance de la galle en y creusant une galerie. Elle y passe à l'état de nymphe munie d’un mamelon sur le vertex et lorsque la dernière transformation va s'opérer, ce mamelon se dilate, et la coque s fend le long d’une suture latérale. Il ne reste plus à l’insecte qu'à écarter les écailles qu'une admirable combinaison de la nature a laissées libres à l'extrémité de la galle, et ce dernier travail n’exige ni beaucoup de temps, ni de grands efforts. G. SEIGLE. Secase. Linn. Epillets sessiles, solitaires, comprimés, triflores; les deux fleurs inférieures subopposées ; glumes étroites, subulées, carénées. (307 ) Autant le Froment se plaît dans les climats tempérés, dans les pays de plaines, dans les sols gras et fertiles ; autant le Seigle se fait aux régions boréales , aux montagnes, aux terres stériles, sablonneuses ou calcaires; il brave les gelées les plus rigoureuses; sa rapide croissance est en harmonie avec les étés si courts de la Norwége ; son chaume solide et flexible résiste aux efforts de la tempête. Il est la providence des Scandinaves, des montagnards, des pauvres habitants des steppes et des landes. 11 leur donne un pain moins blanc, moins léger, mais beaucoup plus savoureux, plus nourrissant , mieux approprié à leurs estomacs robustes. Les insectes suivants ont été signalés sur le Seigle. COLÉOPTÈRES. Anisoplia agricola. Fab. — V. Rosier. Il se trouve sur les épis. Anisoplia fruticosa. Id. — Ibid. Cistela lepturoides. Fab. — V. Tilleul. Apion frumentarius. Fab. — Y. Tamarisc. Calandra granaria. Linn. — V. Blé. Cryptocephalus rufitarsis. Fab. — V. Cornouiller. 11 vit dans les épis. Crepidodera helxines. Fab. — V. Saule. HYMÉNOPTÈRE. Cephus pygmœus. Fab. —V. Blé. HÉMIPTÈRE. Thrips physaphus. Fab. —NaVigne. LÉPIDOPTÈRES. Agrotis segetum, Linn. — V. Bruyère. Pyralis secalis. Linn. — V. Tamarisc. La chenille se tient dans les feuilles et les ronge. ( 308 } Phalæna secalis. Linn. — La chenille vit dans les épis qu'elle ronge à l'intérieur. Tinea granella. Linn. — V. Clématite. DIPTÈRES. Chlorops lineata. Meig. — V. Blé. — cereris. Ib — Ibid. — messoria. Id. —Ibid. — guerini. Herp. — Ibid. — Frit. Meig. — Fbid. G. ELYME., Ervuus. Linn. Epillets sessiles, fasciculés , ordinairement à deux fleurs im- briquées. Glumes lancéolées ou subulées, coriacées. Ce genre dont le nom a été emprunté de Théophraste qui l'employait pour une espèce de Panic , est représenté en France surtout par l'Élyme des sables, belle plante au feuillage glauque comme les flots de la mer, et qui croît dans les dunes où elle est fort utile pour en fixer les sables par ses longues racines tracantes. Un seul insecte a été signalé sur cette Graminée. LÉPIDOPTÈRES. Laucania elymi. Tr. — V. Châtaignier. M. Guénée a observé la chenille sur l'EI. arenarius. G. ORGE. Horpeum. Linn. Epillets uniflores, ternés; les latéraux généralement neutres ou mâles ; celui du milieu hermaphrodite. Glumes raides, aristées au sommet. Cultivée dans tous les temps et dans tous les lieux de l'Europe, de l'Asie occidentale et de l'Egypte, l'Orge n'a pas d’origine connue ; on la retrouve dansles hypogées des anciens Scandinaves ( 309.) comme dans celles des Égyptiens ; il semble, au moins dans le Nord, que la culture en ait précédé celle des autres Céréales. Comme nourriture de l’homme, l'Orge a été préparée en pâte e en bouillie, longtemps avant de l'être en pain. Les Grecs en faisaient leurs petits gâteaux appels Maza. C’est un esclave celte qui à appris aux Romains l’art de la boulangerie ; mais , comme le pain en est très-inférieur à celui du Froment, l'Orge a cédé peu à peu sous ce rapport, et n’a conservé toute son importance que dans les régions où elle est la seule Céréale cultivée. Cependant elle a été employée à fabriquer de la bierre, depuis une haute antiquité, dansles contrées boréales ; en y joignant du Houblon, comme en Egypte par l’adjonction du Lupin. Elle entre pour beaucoup aussi dans la nourriture des bestiaux, soit en grain, soit en fourrage vert. En médecine, depuis Hippocrate, l'eau d'Orge n'a pas. cessé d’être la tisane par excellence comme adoucissante et analep- tique ; nous devrions mentionner aussi le sucre d'Orgeetl’Orgeat s’il y entrait encore de l'Orge. Les insectes observés sur l’Orge sont : COLÉOPTÈRES. Cerandrina cornuta. Fab. — Ce Taxicorne a été trouvé dans de l’Orge avariée par M. Chevrolat. Sitonu frumentaria. Fab. — V. Houx. Même observation. Philethus cornutus, Fab.— Mème observation. Biophlœus depressus. — Ibid. Monotoma 4. foveolata. — Ibid. Labidostomis hordei. Fab. — V. Coudrier. Cryptocephalus hordeï. Linn.—V. Cornouiller. Il vit sur l'Orge marin. Zeugophora melanopa. Linn. (Chrys hordei. Foucr.) — Cette Chrysomeline vit sur l'Orge. (310 } LÉPIDOPTÈRES. Hadena cespius. W-W.— V. Spartier. Tinea granella. Linn. —V. Clématite. DIPTÈRES. Chlorops lineata. Meig. — V. Blé. — Frit. Linn. — Ces petites Muscides vivent huit à dix dans chaque épi; elles rongent la fleur et font avorter le grain. Du temps de Linnée, elles causaient un dommage annuel de 100,000 ducats pour la Suède seulement. : TRIBU. ANDROPOGONÉES. AxprorocoxEeÆ. Kunth. Epillets biflores. Fleur inférieure neutre. G. CANAMELLE. Saccaarum. Linn. Epillets géminés , l’un sessile , l'autre pédicellé. Glumes mem- braneuses , entourées d’une houppe de soie. La Canne à sucre, cette haute et belle plante au long feuillage glauque, à l’ample panicule argentée, doit à l’exquise douceur deson suc, son utilité, sa célébrité, ses destinées singulières et acci- dentées. Originaire de l'Asie équatoriale, son sucre, quoique brut, a pénétré dès une haute antiquité chez les Grecs et les Romains, où il n’était guère employé qu'à titre de médicament sous le nom de Miel de roseau, mais signalé par Théophraste, Dioscoride, Galien, chanté par les poètes : Quique bibunt tenera dulces ab arundine succos, Lucaiu. Phars. I: a Peu à peu la plante a pénétré des bords du Gange dans l'Arabie, et elle a été cultivée et exploitée avec succès en Morée, en Sicile, en Calabre, en Espagne où il y avait encore des sucreries en 1789. TE Transportée aux Antilles après la découverte de l’Amérique et ensuite sur le continent, la Canne y trouva toutes les conditions de la plus grande prospérité. Cependant, ses progrès furent lents. Sous le règne de Henri IV, le sucre se vendait encore à l'once et fort cher chez les pharmaciens de Paris; mais, parvenue depuis lors à un degré très élevé de culture, elle a fourni à toute l'Eu- rope ses produits devenus l’objet d'une consommation , d’un com- merce et d’une navigation immenses ; elle a supplanté le sucre des abeilles qui depuis les premiers âges du monde entrait dans la plupart des combinaisons de la friandise humaine, qui contribuait aux délices des soupers d’Aspasie et de Lucullus; mais elle n’a pu enlever au miel le privilége que lui donnent ses douces vertus , de nous soulager dans nos maux. Cependant, au plus haut degré de son triomphe, la Canne s’est trouvée en présence d’une émule européenne : la Betterave dont le produit identique qui a recu de la science et de l'industrie la plus heureuseimpulsion, aurait déjà supplanté celui de la Canne, en France, si le Gouvernement n'avait dû protéger celui-ci contre son rival en faveur des Colonies et du commerce maritime. Mais il n’est guère douteux que , dans un avenir plus ou moins rap- proché , l’heureuse suppression de l’esclavage et l'émancipation des Colonies d’une part, et les grauds intérêts de l’agricul- ture française de l’autre, ne donnent gain de cause à la Betterave qui a doté cette dernière de l'industrie la plus fertilisatrice de notre sol. Quoi qu'il en soit, la concurrence a été favorable à la consom- mation du sucre qui ne cesse de s'accroître (1) sous toutes les formes que l’art le plus ingénieux a su lui donner et sous les- quelles la sensualité la plus raffinée les savoure. Nous ne connaissons pas d'insecte qui vive sur la Canne à sucre en Europe; mais le sucre même nourrit une espèce aptère : (1) Cette consommation est de 5 Liv. par année et pour chaque individu en France; elle l’est de ro liv, en Angleterre , et de 14 en Italie. (312) Lepisma saccharina. Fab. — Remarquable par sa couleur ar- gentine. En Amérique , deux insectes ont été signalés sur la Canne : COLÉOPTÈRE. Lucanus interruptus. Fab. — La larve de ce Lamellicorne ronge les racines. LÉPIDOPTÈRE. Bombyx semiramis. Fab. — La chenille dévore les feuilles. CLASSE. JUNCINÉES. Juncneæ. Bartl. Périanthe à folioles tantôt toutes glumacées, tantôt les trois extérieures glumacées et les trois intérieures pétaloïdes. Ovaire inadhérent. Graines ptrsre” mées. Cette classe, composée de plusieurs familles (1), forme une transition singulière entre les Graminées et les Liliacées, c'est-à- dire entre les plantes les plus utiles et les plus belles, sans pré- senter l'utilité des unes ni la beauté des autres. Elle est le trait- d'union qui relie deux groupes distingués entr'eux par des diffé- rences contrastantes, mais rapprochés par quelques caractères intermédiaires. La nature ne procède pas par sauts, natura saltus non facit (Linn.); mais ses transformations sont parfois merveil- leusement subtiles. Nous n’avons à parler que des Joncs et du petit nombre de leurs insectes. G. JONC. Juxcus. Linn. Périanthe à six sépales dont les trois internes sont ou plus longs ou plus courts que les trois externes. Tiges sans feuilles. (1) Les Restiacées, les Joncacées , les Xyridées et les Commélinacées. ( 313.) Les Joncs, dont le nom si vulgaire a été donné par les anciens et les modernes à un grand nombre de végétaux différents, sont aux yeux des botanistes ces plantes à la tige ronde, sans feuilles, tenaces, utiles à l’horticulture en lui fournissant des/liens, nuisibles à l’agriculture, en altérant la qualité du fourrage dans les prés humides où elles abondent. Mais si la science restreint ainsi l’acception du nom, l'usage persiste à l’étendre et à appeler Jonc fleuri , le Butome; Jonc épi- neux, l’Ajonc ; Jonc de la Passion, le Typba ; Jonc du Nil. le Papyrus ; Jonce des Indes , le Palmier Rotang, et le Juncus mollis de Virgile, qui paraît se rapporter au Scirpus lacustris. Viminibus mollique paras detexere Junco. (Ecl. 2.72.) Insectes observés sur les Joncs. COLÉOPTÈRES. Cercus rufilabris. Lat. (C. Junci. Steph.) — Ce Clavicorne vit sur le Jonc. Balaninus tomentosus. Herbst. — V. Noyer. Tapinotus sellatus. Fab, — Ce Curculionite a été pris en fau- chant sur des Joncs. Perris. Tychius junceus. Reich. — V. Spartier. Lixus junci. Sch. — V. Spartier. Chrysomela juncorum. Suff. — V. Saule. Plectroscelis viridissima. Dej. — Voisin des Altises. Bryaxis juncorum. Leach. — On trouve ce Psélaphien en fau- chant sur les Joncs des marais. Perris. HÉMIPTÈRES. Chorosoma juncorum. Curtis. — V. Carex. Livia juncorum Lat. — Cette Psyllide vit, sous toutes ses formes, sur les Joncs et particulièrement sur le J. supinus, dans les fleurs hypertrophiées. ( 314 ) LÉPIDOPTÈRES. Nonagria junci. B. — V. Sureau. Mythimna turca. Linn. — Cette Leucanide a les palpes épais, serrés contre la tête, et les pieds très velus dans les mâles. La chenille est rase; la chrysalide est renfermée dans un cocon peu solide, dans la terre ou à sa surface. Calocampa vetusta. Hubn. — Cette Xylinide a les antennes épaisses et crénelées dans les mâles, et le front muni d'un toupet obtus à deux sillons. La chenille est rase, très allongée. Elle s'enterre profondément pour se transformer, et son cocon est entièrement de terre et très-fragile. Coleophora albicolella. Mann. — V. Tilleul. La chenille vit sur les spires du Juncus conglomeratus. Zeller. Coleophora lacunicolella. Mann. — Ibid. Cette espèce vole en mai au Prater de Vienne, le long d’un bras du Danube, sur les Jones. Zell. Elachista arundinella. F. V. C. — V. Houx. DIPTÈRES. Ortalis syngenesiæ. Fab. — V. Cerisier. Cette espèce se trouve sur les Joncs. Ochthiphila juncorum. Meig. — Cette petite Muscide se trouve en abondance sur les Joncs. G. LUZULE. Luzura. Desv. Périanthe à six sépales, dont les trois internes sont de la même longueur que les externes. Tiges munies de feuilles. Le Juncus campestris (Linn.\, qui est le type de ce genre, se fait remarquer par les ombelles que forment ses fleurs brunes et dont les calices sont hérissés de pointes. Il croît dans les pâturages secs, sur la lisière des bois, sur le flanc des montagnes. Deux insectes ont été signalés sur les Luzules. ( 35°) COLÉOPTÈRES. Chrysomela juncorum. Suff. — V. Saule. Il vit sur la Luzula maxima. LÉPIDOPTÈRES. Emydia grammica. Linn. — Cette Lithoside a les palpes très- courts. La chenille est garnie de tubercules surmontés d’aigrettes. Elle se transforme dans un tissu lâche, entouré de mousse. Elle vit sur la Luzula verna. Freyer. CLASSE. ENSIFÈRES. Ensaræ. Bartl. Fleurs bermaphrodites, terminales. Périanthe adhérent, supère, à six sépales bisériés ; étamines, six à trois, épigynes. Pistil à ovaire triloculaire. Feuilles nerveuses, le plus souvent en forme de lame. Cette classe est composée de plusieurs familles (1) très-remar- quables par la beauté de leurs fleurs et quelquefois par l’excel- lence de leurs fruits. Il suffit de citer les Iris, les Narcisses, les Amaryllis, pour rappeler combien elle charme nos yeux ; il suffit de nommer l’Ananas pour proclamer sa suprématie sur les autres plantes, par la triple perfection de la beauté, du parfum et de la saveur, surtout lorsqu'il nous est donné de le déguster müri par le soleil des Antilles et expédié à Paris par la vapeur. C’est à cette classe qu'appartiennent les Agavé qui fournissent aux Mexicains presque tout ce qui est nécessaire à leurs besoins : vin, miel, vêtements, papier, hamacs, cordes d'arc, lignes à pêche, poutres, solives, tuiles, pieux, haies impénétrables. Nous ne connaissons qu'un petit nombre d'insectes vivant sur les Ensifères. (1) Les Broméliacées , les Amaryllidées, les Zridées, les Hemodoracées, les Hypoxydées et les Burmanniacées. (316) FAMILLE. IRIDÉES. Innex. Juss. Fleurs hermaphrodites, accompagnées de bractées. Périanthe adhérent , supère; sépales bisériées. Trois étamines épigynes. Style terminé par trois stigmates le plus souvent pétaloïdes. Cette famille, par l’un de ses caractères distinctifs , les trois étamines, se rattache encore aux Glumacées, aux Monocotylédones inférieures; par ses autres caractères et par la beauté de ses fleurs, elle se rapproche des classes supérieures, elle s’allie aux Liliacées, délices du règne végétal. Autour du genre aussi élé- gant que nombreux des Iris, dont elle a emprunté le nom, se groupent les Glayeuls dont l'espèce indigène a fait place dans nos jardins aux races brillantes du Cap, les jolies Antholyzes , les superbes Tigridies, les Crocus auxquels nous devons le safran , les Morées qui fournissent un aliment aux Hottentots, le Sisyrhyn- chium des montagnes de la Macédoine, que les Grecs faisaient cueillir par de jeunes vierges pour l’offrir aux dieux et se rendre la terre favorable, enfin, un grand nombre d’autres qui contri- buent à l’ornement de nos serres. Les Iris seuls ont donné lieu à des observations entomologiques. G. IRIS. Iris. Linn. Périanthe régulier. Limbe à 6 divisions : les trois extérieures ordinairement inclinées, les trois intérieures ordinairement dressées ; les trois étamines insérées à la gorge du périanthe, et les trois stigmates en forme de pétales. Le nom du brillant météore de la messagère céleste a éte donné à plusieurs objets dontles couleurs le rappellent: à une pierre précieuse, à un papillon, à la partie colorée de l'œil, au genre de plantes qui nous occupe. Ces dernières le doivent aux anciens. Iris à cælestis arcûs similitudine nomen accepit. Dioscor. En effet , toutes les | teintes les plus vives, les nuances les plus su- (317) aves de l’Iris céleste s’y retrouvent harmonieusement reproduites ; mais, si la coloration seule leur à valu ce nom charmant , elles le méritent plus encore par leurs formes pittoresques, par l’agen- cement gracieux des différentes parties, par la forme insolite et mystérieuse de l’un des organes. Des six divisions du calice sans corolle ou de la corolle sans calice nousen voyons alternativement trois recourbées vers la terre et trois dressées vers le ciel, les unes et les autres amplement dilatées, élégamment chiffonnées. Sur chacune des trois inclinées s'étend une autre partie en forme de pétale qui la recouvre hermétiquement. Si nous la soulevons, nous voyons une étamine entre la division du calice et son oper- cule qui , sous cette forme déguisée, est le stigmate fécondateur, et ce qui contribue encore à la beauté de la plante, c’est le groupe que forment les fleurs sur chaque tige, dans les différentes phases de la floraison, c’est la touffe de feuilles en forme de glaive acéré qui semble en défendre les approches. Les Iris, dont 130 espèces sont connues, se répartissent sur tout le globe , à l'exception des tropiques ; ils embellissent tous les sites depuis le bord des marécages jusqu'aux interstices des rochers et aux toits des chaumières. Leur abondance jointe aux nombreuses propriétés de leurs tubercules leur donnent une im- portance plus ou moins réelle; les médecins s'en servent avec succès, les charlatans en exaltent les vertus imaginaires ; les par- fumeurs en font des essences de Violettes, les marchands de vin en font du St-Péray, les épiciers du café , les Écossais de l’encre , les Hottentots leur nourriture. Les insectes qui ont été observés sur les {ris se réduisent à un petit nombre d’espèces-qui vivent sur l'I. pseudo-acorus. COLÉOPTÈRES. Aphthona cœruba. Gyll.— Sur l’Iris pseudo-acorus. Lixus turbatus. Gyll. L. [ridis. Oliv. — V. Spartier. Curculio Ireos. Linn. — Sibérie. Brez. Mononychus pseudo-acori. Fab.— La larve se nourrit des fruits de l'E. pseudo acor. et s'y transforme. Perris. LÉPIDOPTÈRES. Hydræcia leucostigma. Hubn.— Les chenilles de cette Gorty- nide et de ses congénères sont munies de plaques écailleuses sur le 1." et le 12 segments. Elles vivent au pied des ris et en ron- gent les tubercules. M. Héring les a observées sur l'I. pseudo acorus et le pumila. Simyra venosa. Borkh. — V. Saule. DIPTÈRES. Oscinis nigerrima ? Macq. — M. Goureau a observé la larve de cette Muscide minant les feuilles de l'T. pseudo ac. Agromyza nana. Meig. — Même observation. FAMILLE. AMAR YLLIDÉES. Amarvzuiee. Rob. Br. Périanthe supère, à segments tous pétaloïdes. Six étamines or- dinairemeut épigynes. Pistil à ovaire infère. Cette famille brillante, ainsi que l'exprime Je beau nom d’Ama- ryllis, réunit toutes les qualités qui charment les yeux ; l'élégance des formes , la grâce du port, l'éclat des couleurs ou leurs douces nuances, en élèvent les fleurs à l’un des rangs les plus distingués du règne végétal. Souvent elles joignent à lafbeauté la suavité de leurs parfums: toutes semblent avoir quelque chose d'aimable ou d'intéressant à nous dire. La Nivéole qui perce la neige à peine aussi blanche que ses corolles , nous annonce l'approche du prin- temps. Le Narcisse penché au bord des eaux , nous parie morale, en nous rappelant la triste destinée de l’insensé , idolâtre de lui- même. Le Lys St-Jacques nous représente dans toute sa splendeur le signe vénéré que portent sur leur robe les chevaliers de Cala- trava et dont le pourpre sablé d’or efface l'éclat des autres fleurs. (#9) Parmi les autres sommités de cette famille nous mentionnerons l'Amarvyllis Joséphine , le colosse dont l’ombelle composée de 60 fleurs grandes comme le Lys a près de trois mètres de cir- conférence, le Lys de Guernesey dont la fleur écarlate a tant d'éclat qu'elle trahit son origine exotique et qu’elle accrédite l’opinion suivant laqueile la présence de la plante dans cette île est due au naufrage d’un vaisseau venant du Japon au xvir.® siècle. Nous citerons encore parmi les autres notabilités dont abonde ce beau groupe: les Crinum , les Pancratium, les Alstrémères qui brillent dans nos serres. De cette famille nous n’avons à mentionner que trois genres, sous le rapport entomologique. Tous les autres paraissent être respectés par les insectes, G. NARCISSE. Nararssus. Linn. Périanthe hypocratériforme , à tube droit et gorge couronnée d'un godet. Etamines insérées plus bas que le godet. Ovaire tri- loculaire. Le nom de Narcisse dérive de Nardjis en Arabe et en Persan. Ce genre, composé d’un grand nombre d'espèces, la plupart de l'Europe méridionale, a été divisé par M. Haworth en plusieurs sous genres, caractérisés ordinairement par la forme du godet , et auxquels il a donné des noms le plus souvent grecs, Lels qu'Ajax, Hermione, Hélène, Philogyne, Diomède, Illus, Ganymède, qui sont de fantaisie , mais au moins euphoniques. Parmi les espèces, qui ne connaît la Jonquille qui exhale un parfum si suave, le Narcisse des poètes, celui que Virgile et Ovide ont nommé dans leurs vers. Parsintra septa domorum Narcissi lacrymam Prima favis ponunt fandamina Géorg. 4. 160. Mala ferant quereus, Narcisso floreat alnus. Egl. 8. 53. (320) Peu d'insectes ont été observés sur les Narcisses. HÉMIPTÈRE. Physapus ater. Degeer. — Ce petit Thrips vit dans les fleurs. DIPTÈRES. Merodon Narcissi. Fab.— Cette Syrphide et la plupart de ses congénères se développent dans les oignons de Narcisse. Ré- aumur y à découvert les larves, une ou deux dans chaque bulbe: elles sont ridées, cylindriques, un peu atténuées aux deux extré- mités ; la tête est armée de deux crochets cornés, pointus, cour- bés en dessous. Au dessus de ces crochets se trouve une corne charnue, fendue à l'extrémité. Plusieurs de ces larves se sont méta- morphosées dans les oignons mêmes ; d’autres n’ont passé qu'à l’état de nymphe vers la fin de l'hiver. C’est au mois de mai qu'elles prennent la forme ailée. G. PANCRATIUM. PancraTium. Linn. Périanthe infundibuliforme ; gorge à godet pétaloïde, cam- panulé, à six dents alternes avec les étamines ; tube long, grèle. Etamines insérées entre les dents,Ovaires triloculaires. Stigmate entier. Entre les plus belles Liliacées brillent les Pancratium dont les fleurs déploient toute la pompe que peut atteindre le règne végétal, rebaussée par le charme de la grâce et de l’élégance. Diversifiées en plusieurs espèces dont deux appartiennent à l'Europe méridi- onale, ces fleurs tantôt s’épanouissent sous la forme de brillantes étoiles dont les rayons sont formés par les profonds sinus de leur corolle; tantôt se groupent en magnifique ombelle dont se cou- ronnent des hampes élevées, ou se réunissent en somptueux cra- tère dont le centre est décoré d’un faisceau d'anthères d’or sans cesse vacillantes. Le plus souvent à cette beauté se joint un par- fum où se combinent ceux du Narcisseet de la Vanille. Dans l’une des espèces la floraison se termine par un phénomène singulier : (3% ) la hampe se courbe, devient horizontale, prend une rigidité infle- xible et c'est dans cette attitude que la fructification s'opère et que la graine mûrit. Le nom de Pancratium, tout puissant , a été donné par Diosco- ride , non à ce beau genre de plantes , mais à l’Allium magicum, auquel les Anciens attribuaient des propriétés universelles ; c’est par ricochet qu'il est arrivé aux fleurs qui le portent aujourd'hui, et qui n'ont que la paissance que: donne la beauté. Les insectes observés sur les Pancratium seréduisent à deux. LÉPIDOPTÈRES. Glottula pancratii. Cyril: — Cette Apamide a la trompe rudi- mentaire, réduite à un double filet grêle, la chenille est glabre, elle attaque les bulbes et les feuilles du, Pancratium maritimum. La-chrysalideestrenfermée dans des coques de terre et enterrée. Guénée. Glottula encausta. Hubn. — Ibid. ibid. G. ALSTREMÈRE. Arsrrogwer4. Linn. Périanthe irrégulier. Sépales disjoints , inégaux , onguiculés ; les 3 intérieurs plus étroits; étamines insérées à la base des sépales ; style filiforme ; stigmate à trois lanières recourbées. Les fleurs de ces belles plantes joignent à l'éclat et à Ja disposition élégante des couleurs, la grandeur, la grâce et une pittoresque irrégularité qui en rehausse encore la beauté. Transportées des vallées de la Colombie, du Mexique, des Antilles, dans nos serres, les nombreuses espèces y fleurissent successivement presque toute l'année, et nous voyons le Lys des Incas, affublé de son nom suédois, s'épanouir sur les bords de la Baltique comme dans les vallées du Pérou. Un petit papillon de l'Allemagne, portele nom de ces plantes, sans doute parce que sa chenille en ronge le feuillage. Hæmilis alstræmerella. Hubn. — Cette Tinéïde a les antennes aussi longues que le corps. L'abdomen des mâles est terminé par 21 ( 322 | un bouquet de poils. La chenille porte un écusson corné et des points verruqueux surmontés d'un poil. Elle vit et se méta- morphose entre des feuilles qu'elle réunit avec de la soie. CLASSE, LILIACÉES. Linracex. Barti. Périanthe ordinairement inadhérent, régulier, à six sépales ou six divisions. Etamines six, antépositives, hypogynes ou insérées au périanthe. Anthères ordinairement introrses , à deux thèques. Ovaire triloculaire. Aucune classe végétale n'égale celle-ci en beauté. Elle doit son nom à la fleur qui est le type de ce don suprême, et cette beauté, pour nous charmer davantage encore, se diversifie sous toutes les formes que l'imagination peut concevoir; elle nous présente toutes les modifications de la grâce, de l'élégance, du coloris, Loutes les combinaisons de l'agencement en bou- quet, en ombelle, en panicule, en verticille , en corymbe. Elle nous plaît par toutes les nuances de la séduction. Le Muguet, l’Arthérie, l'Asphodèle, la Jacinthe, la Tubereuse, l'Hémérocalle, la Tulipe, lAgapanthe, le Yucca, l'Impériale, le Lis, ettant d’autres aimables fleurs, forment une gradation qui nous charme. Les Liliacées ne se bornent pas à être belles, elles nous sont précieuses par leurs propriétés, et elles varient également les services qu'elles nous rendent. Nous y trouvons en plantes po- tagères l'Ail, ses utiles congénères et l'Asperge; les habitants des tropiques possèdent dans les tubercules des Ignames leur plus grande ressource alimentaire; en plantes textiles, le Phor- mium de la Nouvelle-Zélande fournit à la marine de l'Europe une partie de ses câbles; en plantes médicinales, la Salsepa- reille présente ses propriétés sudorifiques, l'Aloes, ses vertus toniques; il fait la base de l'élixir de longue vie, qui a trompé tant d'espérances. (33) La plupart des Liliacées n'ayant qu'une végétation de courte durée, ne nourrissent qu'un petit nombre d'insectes. FAMILLE. SMILACÉES, Suiraceæ. Bob. Br. Périanthe inadhérent, à six divisions, étamines hypogynes ou insérées à la base des sépales ; anthères introrses. Styles con- nés ou distincts ; ovaire inadhérent. Cette famille de Liliacées, quoique peu nombreuse, comprend des végétaux dans lesquels l'unité de composition s’unit étran- gement à la diversité de forme, Les caractères les plus irré- cusables forment un seul groupe, non-seulement de l’Asperge potagère, du Muguet parfumé , du Fragon épineux , mais encore du Smilax salsepareille et surtout du monstrueux Dragonnier, dont le tronc atteint 15 mètres de circonférence. Jamais les extrêmes ne se sont autant rapprochés que l’humble plante herbacée dont la végétation a duré à peine un mois, et l’arbre colossal de la vallée d'Orotava, à la base du pic de Ténériffe , dont l'existence remonte aux premiers âges du monde, contem porain du Baobab, qui, non loin de là, au Sénégal, brave de même l'effort des siècles pour le soumettre à la loi commune ! Qui apprendra aux générations futures comment et pourquoi le Muguet et le Dragonnier forment un même anneau dans la chaîne des êtres ? Nous n’avons qu'un petit nombre d'insectes à mentionner dans cette famille. G. MUGUET. ConvazariA. Linn. (1) Périanthe campanulé, à six lobes recourbés ; étamines incluses ; insérées à Ja base du périanthe, ovaire non stipilé, stigmate petit, obtus. (1) Le nom de Muguet dérive de Muscatus. La Noix muscade a été appelée Noix muguette. (Saumaise et Ménage.) Rival de J'aimable Violette, le Muguet nous charme lorsque dans nos courses printanières dans les forêts ombreuses, nous apercevons ses jolies grappes blanches en même temps que nous savourons son odeur si fine. L'une et l’autre fleur nous plaisent. Seulement la Violette se cache et le Muguet se montre; le/par- fum de l’une décèle des propriétés bienfaisantes, celui de l’autre trahit un principe irritant. L'une est le symbole de la modestie, l’autre de la prétention de séduire. Rien ne se ressemble moins que le Muguet et le Lis. Il ne nous faut rien moins que les savantes analyses de la bota- nique et de la chimie, pour nous convaincre des rapports qui les unissent; mais l'instinct des insectes est d'accord avec la botanique et la chimie, et les mêmes espèces vivent sur le Muguet etsur le Lis. COLÉOPTÈRES. Lema merdigera. Linn. — V. Lis. —— brunnea. Fab. — Ibid. G. SCEAU DE SALOMON. PozyconarTem. Tourn, Périanthe tubuleux, à six lobes dressés ; étamines insérées vers le milieu du périanthe. Ovaire non stipité. Stigmate petit, obtus. Ces plantes voisines du Muguet, de taille plus élevée, ha- bitantes comme lui des forêts, sont également ornées de fleurs agréables, mais dénuées d'odeur, c'est-à-dire du principal mé- rite de celles de leur voisin. Un seul insecte a été observé sur ces plantes : HYMÉNOPTÈRE. Tenthredo trichocera. Lep. V. Groseiller. — Suivant M. Per- ris, la fausse chenille vit des feuilles du Polygonatum mul- tiflora , et se transforme dans la terre. G. ASPERGE, AsparaGus. — Linn. Périanthe campanulé, à six parties étalées au sommet ; éta- { 325) mines, incluses , insérées, au fond du périanthe; ovaire non sti- pité. Stigmate trilobé. Les Grecs et les Romains mangeaient les Asperges comme nous. Les premiers leur ont donné leur nom, et ils en dis- tinguaient des variétés sous ceux d'Orminon et de Myacanthon. Les Romains en ont connu les propriétés et la culture. Caton qui en a traité dans ses ouvrages, sous ce dernier rapport, conseillait de les planter parmi les roseaux. Athénée distin- guait celles des prairies et celles des montagnes, et il pré- férait celles qui n'avaient pas été semées. On recueillait , amsi qu'on le fait encore en Italie, les Asperges qui croissaient spontanément dans les prés, dans les bois, comme celles que l'on cultivait dans les jardins. La nature, dit Pline, avait fait les Asperges sauvages, afin que chacun les cueillit en tous lieux, mais les voilà perfectionnées, et Ravenne les vend trois àla livre. (1) Juvénal annonce des Asperges à Persicus, en l'invitant à souper à Tivoli. Asparagi pasilo quos tegit villica montani fuso. (Sat. XI.) Je m'étonne que Brillat Savarin n'ait parlé de l’Asperge que pour raconter le fait suivant : « On vint dire un jour à Mgr. Courtois de Quincy, évêque de Bellay, qu'une Asperge mer- veilleuse pointait dans un des carrés de son potager; la nou- velle ne se trouve ni fausse ni exagérée; la plante avait percé la terre, latête en était arrondie, vernissée, diaprée, et pro- mettait une colonne plus que de pleine main. « Monseigneur s’avança armé du couteau, et allait séparer de sa tige le végétal orgueilleux; mais, Ô surprise! Ô de- sappointement ! 6 douleur! l’Asperge était de bois. » La plaisanterie un peu forte était du chanoine Rosset, qui (1) Sylvesires fecerat natura corradas, ut quisque demeteret passim. Ecce altiles spectautur asparagi ; et Rayenna ternos libris rependit PI. lib. r9. (3% ) tournait à merveille et peignait agréablement. Monseigneur la prit chrétiennement ; il en rit et Loute sa cour en fit de même, Insectes de l’Asperge : COLÉOPTERES. Lytta vesicatoria. Linn. -- V. Catalpa. Il cause quelquefois de grands dégats dans les plants d'Asperge. Goureau. Lema asparagi. Linn. — V. Lys. Il vit sur l'Asperge. —— 12 punctata. Fab. — Ibid. —— campestris. — Ibid. —— 5 punctata. — Ibid. i —— paracenthesis. — Ibid. Sur l’Asperge sauvage. HÉMIPTÈRE. Pentutoma oleracea. Linn. — V. Génévrier. Il vit sur l'As- perge en Lithuanie. Gorski. DIPTERES. Tipula hortuluna. Linn. — V. Graminées. La larve fait quel- quefois les plus grands ravages dans les plants d'Asperges. Ortalis fulminans. Meig. — V. Cerisier. La larve vit dans la tige de l'Asperge où elle creuse une galerie puis s'étend jusqu'aux räcines. Bouché. FAMILLE. COLCHICACÉES. Coccnicaceæ. De Cand. Périanthe coloré, étamines insérées à la base des sépales, anthères ordinairement extrorses, styles dictincts, ovaire inad- hérent. Cette famille doit son nom à la plante trop célèbre de la Colchide, dont Médée composait ses poisons. Aussi commun dans nos prairies aquatiques, le Colchique y apporte les mêmes qualités délétères, etil est d'autant plus dangereux que ses jolies fleurs invitent à les cueillir, et qu'elles ne sont pas moins (327) malfaisantes que les feuilles et les bulbes. Ces fleurs pré- sentent une singularité assez remarquable : elles s'épanouissent en automne sans tiges ni feuilles et disparaissent. Cependant les ovaires fécondés passent l'hiver dans un état d'inertie sous la terre, et au retour du printemps les graines se développent et paraissent portées sur une bampe et accompagnées de feuillage. Parmi les autres plantes de cette famille, les seules sur les- quelles des insectes ont été observés, sont les Vératres. G: VERATRE. Verarrum. Tourn: Périanthe persistant ; sépales oblongs, étalés ; étamines à filets filiformes; anthères unithèques ; ovaire à trois coques multio- vulées. Stigmates petits, terminaux. Comme les Colchiques, peu de plantes possèdent des qua lités aussi énergiques que les Vérâtres. Poison redoutable ou puissant remède, elles donnent la mort ou guérissent de nom- breuses maladies. Avant d’être ‘exclues de la thérapeutique comme trop dangereuses dans l'emploi qui en était fait, l'es- pèce à fleurs blanches qui croît sur nos hautes montagnes, a été reconnue comme identique avec l'Ellebore des anciens qui jouissait d'une haute réputation surtout pour la guérison de la folie. Les philosophes en prenaient une légère infusion pour se rendre plus propres aux travaux intellectuels. Il était pour Sénèque, par exemple, ce que le café était pour Voltaire: ke boisson spirituelle. Le Vérâtre noir est très-remarquable par le nonbne et la di- versité des insectes qui viennent butiner sur ses fleurs; c'est un bourdonnement incessant. Un seul insecte, à notre connaissance, se développe sur les Vé- râtres, c’est le Lépidoptère. Argyrotosa rolandriana. Linn. — V. Poirier. La chenille de cette, Platyamide ronge les feuilles à, mesure qu'elles se déve- Joppent. ( 328 ) FAMILLE. ASPHODELÉES. AsPnoniee. Baril. Périanthe inadhérent; sépales ou lobes bisériés. Etamines à filets libres ; anthères introrses, styles connés ; péricarpe capsu- laire. Cette famille comprend la plupart des Liliacées les plus con- formes aux caractères de la classe et les plus remarquables, par la beauté. Il suffit de nommer le Lys, la Tulipe, la Hyacinthe , l'Hémérocalle, la Tubéreuse, pour nous rappeler combien ils flattent nos sens par l'élégance, la grâce des formes, la pureté ou l'éclat des couleurs, la suavité des parfums. Par leur splendide parure ces herbes des champs , des vallées, ont recu la mission de montrer à l'homme à quel point la Providence divine veille sur lui. Quelques espèces se recommandent par leur utilité. Le groupe des Alliacées surtout occupe un rang distingué parmi nos plantes potagères. L’Aloes nous fournit des sucs utilement em- ployés en médecine. C'est à cette famille qu'appartient aussi le Phormium textile, ce lin de la nouvelle Zélande, qui présente une fibre végétale plus tenace qu'aucune autre, et que l’Europe emprunte pour sa marine à l'Océanie, en attendant que sa naturalisation nous en procure gratuitement les avantages Les insectes des Asphodélées ne sont pas nombreux et ne pré- sentent pas un grand intérêt. G. TULIPE. Tuzrpa (1). Tourn. Périanthe à six sépales disjointes, en forme de cloche, étamines hypogynes , courtes. Ovaire à gros stigmate persistant. Lorsque Bousbecque, ambassadeur à Constantinople et le (1) Ce nom dérive du persan Thoulyban , qui est devenu Tulipan, Tulpan et Turban, dont la fleur a la forme, («329 ) savant botaniste Clusius,. deux hommes que le Nord de la France s’honore d’avoir produits (1) dotèrent leur pays de cette belle, plante, ilsne soupçonnaient pas sans doute l'étrange succès qu'elle y obtiendrait. La fête même des Tulipes , qui est célébrée tous les ans dans le sérail du grand seigneur, ne devait pas les préparer au triomphe merveilleux de cette fleur qui plus que toute autre a été l’objet d'un culte plutôt que d’une culture. C’est qu'au charme de la beauté, à la grâce de la forme, à l'éclat des couleurs, à l'élégance des dessins , il se joignait tout le prestige qu'y attachaient la mode , l'engouement , la vanité. Ces coupes charmantes qui faisaient les délices de Voltaire, du maréchal Biron, qui semblent forgées par le Dieu des arts, ciselées et peintes par celui du goût; ne justifiaient pas l’extravagance des transactions qui se commettait pour satis- faire cette passion désordonnée. Le prix fabuleux donné pour un oignon du Semper Augusta , et la brasserie de Lille échangée pour. un autre et cent folies semblables (2) attestent l'enchante- ment que cette fleur produisait surtout en Hollande et en Flandre. Cependant, comme tout ce qui est excessif, la Tulipeswit sa gloire s’obscurcir; elle fut négligée, délaissée, presque méprisée ; on méprisa sa beauté et elle put dire : Je n'ai mérité, Ni cet excès d'honneur, ni cette indignité. L'on n'a observé sur la Tulipe que trois petits insectes. HÉMIPTÈRES. Apbhistulipæ.— M. de Fons-Colombe a trouvé ce Puceron vivant (x) Bousbecque envoya des graines à Chusiis (Delecluse) en 1575. (2) Un hollandais douua pour une Tulipe 36 septiers de froment, 2 de riz, 4 bœufs gras, 12 brebis grasses, 8 pores engraissés, 3 muids de vin, 4 tonneaux de bière, 2 tonneaux de beurre, 1,000 livres de fromage, « lit, des habits et une grande tasse d'argent. (330) en famille sous la première enveloppe des oignons de Tulipe, arrachés et conservés, au mois de novembre. Leucanium (Coccus ? Tuliparum.) Bouché. — V. Tamarisc. DIPTÈRE. Cecidomyia fuscicollis. Meig. — V. Groseiller. — Lalarve vit dans les bulbes de Tulipe. G. LIS. Liium. Linn. Périanthe à six sépales disjoints, connivents à leur base, étalés dans le haut, munis d'une glande nectarifère. Etamines hypogynes , ovaire prismatique, trigore. Nous venons de voir dans la Tulipe une fleur qui doit à son éclatante beauté une destinée brillante, mais accidentée, une faveur passionnée, mais de vogue et semblable à la popularité. Bien au-dessus d'elle se présente dans toute sa noblesse, sa dignité, sa majesté, l'admirable Lis dont l'empire sur les autres fleurs est toujours le même, universellement reconnu dans tous les temps et dans tous les lieux ; c'est lui dont le Sauveur des hommes a dit qu'il a plus de magnificence que Salomon dans toute sa gloire; et cette beauté à un attrait d'autant plus puissant qu'elle est rehaussée par une noble simplicité et par une pureté parfaite de forme et de couleur. Aussi le Lis est-il le touchant emblème de la candeur et de l'innocence ; les Romains le régardaient aussi comme celui de l'espérance. Il partage avec la Rose le sceptre de la beauté ; réunisils nous montrent la charmante image du plaisir joint a l'innocence , c'est à dire du bonheur le plus pur. L'un des plus beaux titres de gloire du Lis, c’est de figurer dans le blason royal de France, d'être le symbole de ce beau (1) Le nom du Lis , dans toutes les langues modernes de l’Europe , dérive de Lilium en latin, de Lirion en grec et de Laleh en persan. (831 ) payset rester inséparable de son bonheur et de sa véritable gloire. Parmi les insectes du Lis, le plus remarquable est le joli Coléoptère rouge que l’on prendrait pour une goutte de sang sur un vase d'albâtre. COLEOPTÉRES. Lema merdigera. Linn. — La larve de cette Chrysoméline dévore le feuillage et elle a l’instinct de se couvrir de ses déjections. Abdominalis med. — Sur le Lilium bulbiferum. HÉMIPTÈRE. Leucanium liliacearum. Bouché. — V. Tulipe. G. JACINTHE. Hyacwraus. Linn. Périanthe infundibuliforme, à base ventrue; les six divisions liguliformes, étalées. Etamines incluses , insérées au tube du périanthe ; ovaire non stipité ; stigmate pelit, tronqué. La faveur dont jouit la Jacynthe orientale est fondée sur ses fleurs charmantes de forme, et de couleur, groupées en élégants bouquets, douées du parfum le plus suave et devenues par les artifices de la culture d’une richesse extrême en variétés. Cette plante gracieuse , à la fois aquatique et terrestre, fleurit non- seulement dans nos jardins, mais dans le boudoir des dames comme dans le cabinet des savants. Toute l’Europe est tributaire d'Harlem qui sait apprécier la Jacinthe surtout comme branche de commerce. Cette fleur a trop de grâce et de charme pour lui disputer le nom poétique dont elle est en possession. Nous voyons en elle la beauté, l'élégance, la délicatesse de l’amie d’Apollon que ce dieu, inconsolable d’avoir causé sa mort, voulut immortaliser au moins sous cette forme gracieuse ; nous ne discuterons pas les droits (332 ) qu'ont à ce nom la Dauphinelle Ajax, et le Lis Martagon, en faveur des lettres AI, AI qu'ils portent au fond de leur corolle et qui expriment encore les gémissements d'Hyacinthe. Formamique ea, quam Lilia, si nou Purpureus color huie, argenteus esset in illis Ipse suos gemitus foliis inscribit, et AI, AI, Flos habet inscriptum, Ovide On ne pourrait pas plus enlever à cette fleur son nom que sa beauté. Un seul insecte a été observé sur les Jacinthes, c'est le Lépi- doptère , Caradrina plantaginis. Hubn. — Cette Noctuélite a la trompe robuste et les palpes écartés l’un de l’autre. La chenille est courte, ramassée, atténuée aux deux extrémités. Elle se renferme, pour se métamorphoser, dans un cocon composé de terre et de soie, et s'enterre profondément. G. AIL. Arzrum. Linn. Plantes bulbeuses. Fleurs en ombelle, accompagnées d’une spathe membraneuse. Pédicelles inarticulés. Périanthe persistant, à sépales étalés. Etamines insérées à la base des sépales, Ovaire trisulqué. Stigmate tronqué, ou capitellé ou tridente. Ce genre de Liliacées présente peu la beauté de sa classe, mais il rachète grandement cette infériorité par ses qualités utiles. Il leur doit une célébrité qui remonte aux premiers âges du monde. Plusieurs espèces particulièrement ont acquis une grande popula- rité. L'oignon avait été mis au rang des dieux de l'Egypte, sans doute en faveur de son utilité, et les Hébreux dans le désert, avant de recevoir la manne céleste, regrettaient non-seulement les mar- mites pleines de viande, mais encore les oignons de l'Egypte. Les Grecs recherchaient ceux de Corcyre et de Samothrace. Les Romains , chez qui l'on retrouve pour la première fois leur nom (333) français (1), en faisaient comme nous un grand usage condi- mentaire , et y reconnaissaient toutes les propriétés médicales d'une panacée. Les Français du moyen-âge distinguaient les oignons de Corbeil (2). Le miroton et la soupe à l'oignon sont arrivés de génération en génération jusqu’à nous , ainsi que les mille autres combinaisons culinaires dans lesquelles entre ce dieu de la cuisine. L’Ail proprement dit n'est pas moins connu que son congé- nère, mais ses qualités plus prononcées ont de l'attrait ou in- spirent de la répulsion suivant les goûts. Les Athéniens en étaient friands ; les Romains l’abandonnaient aux appétits grossiers, et Horace le comparait aux plus affreux poisons. Chez les modernes, le nord le repousse , le midi en fait ses délices. Dix navires pour- raient à peine enlever toutes les gousses d’Ail qui sont apportées à la foire de Beaucaire. Sous le rapport médical, ses vertus sont si nombreuses, qu'il est la Thériaque des pauvres, c’est-à-dire leur remède universel. Le Poireau , ce mets maintenant si vulgaire, était employé par Néron comme un moyen d'entretenir sa belle voix ; celui du terri- toire de Tarente exhalait un parfum si expansif que Martial recommande l'Osculum clausum dans une épigramme érotique. Enfin, l'humble Échalotte s'étonne de devoir son nom à la ville d’Ascalon et d'être un trophée glorieux de la première croisade Insectes des diverses espèces d’Ail. COLÉOPTÈRES, Anencodes rufventris. Scop. — V. Spirea. Il vitisur les fleurs des oignons. Schmidt: Anencodes azurea. Meg. — Ibid, Brachycerus siculus. Déj. — M. Ghiliani a observé plusieurs de (:) Columelle, qui vivait au 1, siècle! de. l'ère chrétieune , dit : cepam mar- sicam simplicem , quam vocant unionem rustici, eligite. (3) Un vieux fabliau , Ze Forgeron de Creil, en fail mention, (334 ) ces Cureulionites qui venaient de subir leur dernière métamor- phose dans l’intérieur de l’Ail. (Allium sativum. Linn.\ Lema brunnea. Fab. — V. Lis. La larve ronge la feuille de lAllium ursinum. M. Perris. LÉPIDOPTÈRE. Rærslerstammia assectella. Zell, — La chenille de cette Tinéïde est courte, aplatie, plus large en avant qu’en arrière. Elle vit dans les tiges de l'oignon dont elle n’attaque que le pareuchyme; elle se fixe dans des coques à claire voie, fixées le long de la princi- pale côte des feuilles. DIPTÈRES. Eumerus œneus. Meig., — V. Orme. La larve vit dans les oi- gnons dont elle atteint le centre. Anthomyia platura. Meig. —- La larve de cette Muscide vit dans les Échalottes. Les stigmates antérieurs sont épanouis en spatule et bordés de dentelures. Goureau. G. ASPHODÈLE. Asrnonezus. Linn. Périanthe à sépales connés à leur base, étalés. Etamines hypo- gynes ; les trois intérieures un peu plus longues ; filets déclinés vers le bas. Ovaire recouvert par la partie dilatée des filets. Peu de plantes ont eu autant de renommée que l'Asphodèle, chez les anciens. Il était consacré à la religion; il était l'emblème de la puissance et, en même temps, de l'amour. De nombreuses vertus lui étaient attribuées en médecine; enfin, il contribuait à l'alimentation des hommes. Aussi a-t-il été célébré par les phi- losophes, les poètes, les naturalistes, les médecins, depuis Hésiode jusqu’au moyen-âge. Sous le rapport religieux il était considéré comme servant de nourriture aux mänes. On le semait autour des sépultures. Porphyre rapporte qu'un tombeau portait cette inscription : « En ( 335 ) dehors, je suis entouré de Mauves et d’Asphodèles, et au-dedans je ne renferme qu’un cadavre. » Suivant Lucien, les ombres des mortels , après. avoir passé l’Achéron , traversaient une vaste plaine d’Asphodèles. C'était le mets le plus agréable aux mânes des hommes vertueux. A cette attribution glorieuse, cette plante joignait celle expri- mée par son nom (Asphodelus, sceptre}, d’être le symbole de la royauté, et elle devait sans doute cet honneur à sa tige droite et ornée, qui lui vaut encore aujourd'hui le nom de Verge de Jacob. Suivant Théophraste, cette tige gracieuse, parée de fleurs brillantes, était l'emblème des amours. Quant aux propriétés médicales de l’Asphodèle, elles s’éten- daient, d après le rapport de Pline, à la plupart des affections : c'était une autre panacée. Enfin, les-tubercules de l’Asphodèle, pétris avec de l'orgemondé, formaient un pain agréable et savou- reux. De toute cette célébrité passée, de toutes ces vertus longtemps préconisées il ne reste que le souvenir. L'Asphodèle n’est plus utilisée qu’en Sicile où l’on en mange les jeunes tiges comme les Asperges dont elles ont à peu près la saveur. Insectes observés sur les Asphodèles : COLÉOPTÈRES. Thylacites asphodeli. Ramb. — Ce Charencçonite se développe dans l'Asphodèle. | Agapanthia asphodeli. Déj. — Ce Longicorne vit sur les Aspho- dèles. LÉPIDOPTÈRES Polia pumicosa. Hubn. — La chenille de cette Hadénide se nourrit de l’Asphodelus microcarpus; elle est rase, à tête assez grosse ; elle s’enterre assez profondément pour se métamorphoser dans un cocon peu solide de terre. (336 ) \ Solenoptera meticmlosa. Linn. = V. Ciste. La chenille vit sur lAsphodelus microcarpus. Rumb. Triphœna orbona. Fab. — V. Hêtre. Mème observation. Ramb. ———— pronuba. Linn. — Ibid. Agrolis saucia. Hubn. — V. Bruyère. Ibid. Ramb. Egira australis. B. -— V. Chêne. Ibid. Ramb. G. TUBÉREUSE. Pozvanrues. Linn. Périanthe infundibuliforme , à tube allongé, courbé et lobes étalés. Etamines insérées à la gorge du périanthe; ovaire à loges multi-ovulées ; stigmate épaissi. Aucune plante ne révèle son origine indienne autant que la Tubéreuse. Dans la gracieuse souplesse de sa tige, dans l’élé- gance et la beauté de ses fleurs, dans la pureté de leur blancheur, et surtout dans l'exquise suavité de leur parfum, elle a quelque chose de voluptueux comme les Odalisques; mais les délices enivrantes dont elle nous fait jouir offrent des dangers; elles peuvent nous donner la mort. Un seul insecte a été observé sur la Tubéreuse : c'est un Puceron. Aphis polyanthis. Linn. Tuberosæ, Fons col., Kaltenb. — Y. Cornouiller. G. PONTEDERIA. Ponreperia. Lion. Périanthe infundibuliforme , à tube courbé, hexagone, percé de quatre fentes longitudinales; limbe à six divisions. Etamines insérées à hauteurs inégales au tube du périanthe. Ovaire inadhé- rent. Feuilles généralement cordiformes. Ce genre, ou plutôt la petite tribu qu'il représente, a singu- lièrement exercé la science des botanistes pour fixer sa place dans la classification naturelle. Ses caractères présentent une sorle de diffusion qui lui donne des rapports avec des plantes très-diffé- rentes les unes des autres. C’est ainsi qu’il à été rapproché suc- (337) cessivement des Asphodèles, des Narcisses, des Iris, des Comme- lines, des Joncs, des Balisiers et même des Sagittaires; mais il se réfuse obstinément à toute assimilation, et réduit les classifica- teurs à'en faire un groupe voisin, mais distinct, des Asphodélées. Ces plantes, toutes d’origine exotique, sont représentées en Europe par le Pontederia cordata des marais de l'Amérique Septentrionale, que nous cultivons dans nos jardins et qui décore le bord des eaux de ses jolies fleurs bleués disposées en épi. Un seul insecte a été observé sur cette plante. M. de Fons- Colombe à trouvé sur ses tiges le Puceron, Aphis nympheæ. Fab. CLASSE. ORCHIDÉES, Oromez. Juss. Périanthe irrégulier, adhérent, supère; de six sépales dissem- blables ; les trois externes et les trois internes disjoints. Etamines épigynes. Anthères introrses. Pollèn à granules cohérents. Ovaire uniloculaire. Stigmate formant une fossette visqueuse. La célébrité des plantes de cette classe repose sur la conforma- tion singulière-et extrêmement diversifiée des fleurs et sur les pro- priétés des différentes parties de la végétation. Elle remonte àune : haute antiquité, même sans reconnaître parmi elles, avec Virey, le mystérieux Doudaïm, convoité par Rachel , chanté par Salomon. Les fleurs, dont la corolle présente généralement un casque, deux ailes latérales et une lèvre inférieure, se modifient tellement dans toutes leurs parties , que la classe ne contient pas moins de 300 genres, depuis les explorations de Swartz, Blumenbach, Lindley, Petit-Thouars , dans les forêts de l'Amérique tropicale et surtout au Chili. Quoique les Orchidées constituent une des classes les plus naturelles du règne végétal par la structure des fleurs, elles se divisent en deux sections très-distinctes sousle rapport de leur mode de végétation : celles de la première ont jeurs racines dans la terre, et elles croissent dans les prairies, les bois, les montagnes ; celles de la seconde sont parasites , leurs 22 ( 338 ) racines se fixent dans l'écorce des arbres, et leurs tiges, grimpant comme de flexibles lianes le long des troncs, s'étendent de branche en branche, forment d'élégantes guirlandes et répandent sur les forêts tropicales une beauté dont nous donnent une bien faible idée ces mêmes végétaux plantés dans les corbeilles suspendues en lustres au sommet de nos serres chaudes. Les fleurs des Orchidées, dans l'extrême diversité de leurs modifications, sont souvent remarquables par la richesse ou la disposition de leurs couleurs, par la suavité de leurs parfums, par l'élégance ou la singularité de leur structure. La partie inférieure surtout nous confond d’étonnement en affectant les formes animales les plus inattendues , les plus fantastiques : l’insecte, l'oiseau, l’homme lui-même y trouvent leur caricature, bizarrerie qui a été poétiquement exprimée par Catel dans son poème des plantes : Dieux ! avec quel plaisir, dans tes sentiers fleuris, J’apercois, à Meudon, ce ravissant Ophrys, Insecte végétal de qui la fleur aïlée, Semble quitter sa tige et prendre sa volée. Ces simulacres d’animalité paraissent n'avoir pas été étrangers à la foi qu’avaient les anciens dans les propriétés aphrodisiaques des Orchidées. Encore aujourd'hui, dans tout 1 Orient on croit, comme au temps des magiciennes de Thessalie dont parlent Théo phraste et Dioscoride, que les bulbes diversement employés donnent la faculté de produire les sexes à volonté (1); comme si la Providence avait voulu laisser à l’homme la puissance de détruire la loi la plus nécessaire au maintien de son espèce. Les Orchidées, dépouillées par la science moderne de ces vertus imaginaires, nous fournissent cependant des substances utiles et agréables. La fécule nourrissante et analeptique que leurs bulbes contiennent en abondance est la base du Salep, cette gélatine (1) Le bulbe de l’année prochaine mangé par un homme produit des garçons, selui en pleine végétation , mangé par une femme, produit des filles. (339) éminemment alimentaire que nous tirons à grands frais de la Perse et de la Turquie, quand nous en possédons tous les éléments dans nos Orchis indigènes. C’est aussi cette classe qui comprend la Vanille, cette espèce sarmenteuse dont la pulpe des siliques exhale un parfum si balsa- mique, si suave, si bienfaisant. ; Insectes des Orchidées : COLÉOPTERE. Otiorhynchus ovatus. Fab.— Y. Nerprun. Il perfore les graines de l'Ophrys nidus avis. Laboulb. DIPTÈRE. Calliphora erythrocephala. Meig. — M. Zeller. M. Zeller a observé que ces mouches étaient attirées par l’Orchis cariophora , qui a l'odeur de la Punaise et dont elles sucent le miel. Il en à vu une qui portait une production semblable à un champignon. Cette production sortait de la cavité buccale. C'était une tige de pollèn surmontée d’un bouton qui s’y était attaché: plusieurs autres de ces mouches offraient la même particularité , et elles portaient jusqu’à trois et quatre de ces tiges de pollèn. CLASSE. SCITAMINÉES. ScrramNeE. Bart]. Périanthe irrégulier, adhérent, supère, soit simple, soit triple. Etamines, 1, 5 ou 6, insérées au pourtour du sommet de l'ovaire, ou au périanthe interne. Ovaire infère. Stigmate terminal. Cette classe, dont le nom indique des plantes choisies, recom- mandables par leur beauté, leur grâce , leurs qualités, présente en effet à nos yeux et plus encore à nos souvenirs, à notre ima- gination, le végétal par excellence sous le rapport des aliments qu'il offre à l’homme sous les tropiques , le plus remarquable par la grandeur du feuillage, le plus célèbre par les traditions qui s’y rattachent : le Bananier, le Figuier d'Adam, l'Arbre du paradis terrestre, considéré par les uns comme l'arbre fatal de la ( 340 ) science du bien et du mal, par les autres comme celui dont les feuilles ont caché la nudité de nos premiers parents. Il nous rap- pelle encore les déscriptions charmantes du capitaine Cook, les scènes délicieuses de Paul et Virginie qui ont enchanté notre jeu- nesse. Une autre espèce prêtait son ombrage aux sages de l’Inde dans leurs promenades philosophiques. Son fruit éminemment nutritif est si abondant qu'aucun autre végétal ne donne à la terre un produit alimentaire qui puisse lui être comparé (1). La Banane fraiche a le goût de beurre frais légèrement sucré. On en fait aussi de la farine et du vin. Parmi les Scitaminées se range aussi le Gingembre, ce vif stimulant qui aiguillonne l'appétit, ranime les sens, rend aimable, donne de l’esprit, mais dont l'usage excessif devient incendiaire , frappe d’atonie tous les organes et rend imbécilles les malheureux qui y ont cherché des jouissances. A côté du Gingembre se place le Curcuma, cet autre excitant dont les Indiens font tant d'usage comme condiment, l'employant dans le Kari, leur célèbre assaisonnement; et comme cosmétique à l’u- sage des dames, pour embellir la peau et donner del’éclat au teint. Enfin , les Scitaminées comprennent encore les Balisiers dont on ne vante pas les propriétés, mais qui plaisent par la beauté de leurs fleurs. ! Nous rapportons à l'espèce connue sous le nom de Canna indica et cultivée dans nos jardins, un insecte Lépidoptère. Nonagria cannæ. Tr. Guénée. — V. Sureau. FIN DE LA PREMIÈRE PARTIE. (x) D'après l'évaluation faite par M. de Humboldt, un terrain de cent mètres carrés , dans lequel on a planté 4o Bananiers, rapporte , dans un an, 4,000 livres en poids de substañce nourrissante. Ce même espace de terrain , semé en blé, ne donnerait que 30 livresde grain , d'où M. de Humboldt conclut que le produit des Bananes est à celui di Froment (sons le rapport de la substancenutritive et du ter- rain cultivé) comme 195 est à 1 ; à celui des pommes de terre, come 44 est à #, (341) DES PLANTES MENTIONNÉES DANS L'OUVRAGE. — oignon. — ursinum. — échalotte. Aira. ALGUES. Alisma. Alstrémère. Amaryllidées. Andropogonées. Aroïdées. Arundinacées. Asperge. Asphodèle. Avenacées. Avoine. Blé. — rampant. Bolet. Brize. Brome. Butome. Butomées. Byssoïdes. TABLE ALPHABÉTIQUE 218 Callacées. Canamelle. Caricées. CHAMPIGNONS. Cladonie. Colchicacées. Cretelle. CRYPTOGAMES. Cyperacées. Cypérées. Dactyle. — glomerula. Elyme. — arenarius. ENSIFÈRES. EQUISÉTACÉES. Festucacées . Fétuque. — nalans. — cespitosa. — phænioides. — fluitans. Flouve. FOUGÈRES. Fucacées. Fuligo. GLUMACEES. Glycérie. Gouet. Graminées. HÉLOBIÉES. HÉPATIQUES Hordéacées. Houque. Hydne. HYDROCHARIDÉES. Hypodrys. Imbricaire. Iridées Iris. — pseudoacorus. lvraie. — vivace. Jonc. — supinus. — conglomeratus. JUNCINÉES. Laiche. Lemnacées. HLIACÉES. Lenticule. Lichénacées. LILIACÉES. Lis. — bulbiferum. Luzule. — maxima. Lycoperdon. Maïs. Mélique. MONOCOTYLÉDONES. MOUSSES. Muguet. Narcisse ‘31 ) 204 255 287 254 261 241 231 291 225 224 316 317 312 313 314 259 Nayadées. Ophrys. Orpbrys nidusmavis. ORCHIDÉES. Orge. — marin. Orizées. Pancralium. — maritime. Panic. Panicées. Paturin. Phalaridées. Phalaris. PHANEROGAMES. Phléole. Phragmite. Polypore. — versicolore. — fomentaire, = odorant. — unicolore. — ferrugineux. — écailleux. — amadouvier. — du mürier. — du bouleau — du hêtre. — du tilleul. — du peuplier. — du cérisier. — du pin. — du sapin. Polysticum. Pontederia. Potame. — lucens. — natans. — pactinetus. 235 246 Potamogétonées. Préle. Riz. Sagittaire. Sceau de Salomon. Scirpe. — maritime. Scirpées SCITAMINÉES. Scolopendre. Seigle. Smilacées. Sparganium. — nutans. Fri romasum. (343) 254 253 Sparganium simplex Sphœærie. Stratiote. Triglochin. — maritime. Truffe. Tubereuse. Tulipe. Typha. Typhacées. Ulvacées. Veratre. Vulpin. Zostère. Zostérées. 1616 (344) ANTHOINETTE BOURIGNON, Par M. DUPUIS, Membre résidant. 1616. Le XVI siècle vit naître à Lille une femme bien remar- quable. Elle occupa longtemps l'attention de ses concitoyens, et contribua à la fondation de l’un de nos hospicesles plus importants. Plus tard réfugiée en Hollande et en Danemarck elle écrivit un grand nombre d'ouvrages qui furent dès leur apparition traduits en plusieurs langues et devinrent le sujet des polémiques les plus vives. Cependant le nom de cette femme est à peine connu parmi nous , les biographes en parlent d’une facon incomplète, partiale et erronée. Ce me paraît donc une œuvre utile de rappeler à votre attention les titres historiques, philosophiques et littéraires de M.cie Bourignon. C’est en 1616 que naquit cette fille singulière. Elle nous l’ap- prend elle-même dans sa vie extérieure. « Je suis née en la ville de » Lisle en Flandres , le 13 de janvier 4616, baptisée en la paroisse » Saint-Maurice, et là me fut donné le nom d’Anthoinette (sic). » Mon père s'appelait Jean Bourignon. » (Il était, disent les té- moignages, marchand, riche et considéré. Il portait le titre de lieutenant second et sergeant du roy en sa prévôté de Lille.) «et ma mère : Marguerite Becquart; lui était italien d’origine, » elle était des environs de Lille. » Le mysticisme se manifeste en elle de bonne heure. A quinze ans, elle arrive à concevoir une telle horreur de son éducation mondaine, qu’elle passe ses journées dans un travail continu , ses 36 (35) nuits en prières , tout son temps en macérations de peur que la mort ne la surprenneen état de péché. Pendant ses longues veilles , elle eut des visions. Dans l’une d'elles, la plus frappante, elle crut se trouverrevêtue de l’habit de Saint Augusun, et appelée par Dieu à fonder aw désert un ordre nouveau de personnes vivant comme les premiers Chrétiens. Dès lors , elle n’a plus qu’une pensée : se retirer au désert, dût elle le chercher jusqu’au bout du monde, et remplir sa mission. En conséquence elle achette du drap brun, se fait un habit d’hermite, en prend aussi le chapeau, et un dimanche matin, à quatre heures, elle sort de chez elle décidée à n’y plus rentrer. Elle n’em- portait qu’un sou pour acheter un premier morceau de pain dans sa route. Mais une voix lui dit : Où donc est ta foil sur un sou? Elle jette cette monnaie et va entendre la première messe à Saint- Etienne. De là elle sort de la ville par la porte de Fives et arrive à Tournai pour y entendre la grand’messe. Elle poursuit sa route et se dirige vers Mons, mais au village de Bassec où c'était fête 4 des enfants s'aperçoivent que ce prétendu hermite est une femme. On l'entoure. Des soldats qui étaient en cantonnement aux envi- rops accourent , et l'officier voyant une si jeune fille abandonnée, (elle n'avait pas vingt ans) l’enlève, la fait monter de force sur son cheval et l'emmène au village de Blatton. Là il descend chez Je mayeur pour lequel il avait un billet de logement , entraîne la pauvre enfant dans cette maison , veut la faire manger et boire , puis le soir venu ayant fait retirer tous les gens, essaie de se li- vrer à d'indignes caresses. Mais le mayeur vient au secours de la jeune fille. On la fait fuir chez le curé. Les soldats ne respectent pas cet asile, et elle a tout juste le temps d'entrer dans l'église et de se cacher dans les orgues. Le curé de Blatton (Georges de Lisle} était un homme qui après une jeunesse déréglée, frappé de la mort d’un de ses amis tué à ses côtés, s'était jeté dans une austérité inimaginable. Il faut Hire sa vie etcelle de M.le Bourignon, pour voir jusqu’à quel ( 346) point la nature humaine peut s’exalter dans cette voie de macéra- tions. Le curé portait nuit et jour une: chaîne autour du corps; il passait des mois entiers sans boire ni eau, ni vin, ni aucun li- quide; ilallait chaque nuit se prosterner plusieurs heures en pri- ères dans l'église. Quant à M.‘ Bourignon, elle ne mangeait qu'une fois par jour, le soir, etsouventrien que du pain couvert de cendres. Elle ne restait que trois ou quatre heures dans le cercueil qui lui servait de lit. Le reste de la nuit , elle le passait en prières et à genoux. Elle portait un cilice qui lui laissa jusqu’à ses der- uiers jours des traces sanglantes. Aussi sa vie n'est-elle qu’une longue suite de maladies affreuses qui la retiennent des mois en- tiers dans son lit; cependant ellene faiblit pas, elle supporte avec résignation ces souffrances continues : « Je suis aussi contente » d’être malade que de me bien porter, » dit-elle quelque part. Et elle se soutient jusqu'après soixante ans avec la plus grande énergie. Une telle nature devait sympathiser avec le curé de Blatton. Aussi la prend-t-il immédiatement sous sa protection. Le matin même qui suivit cette nuit si agitée, comme elle voulait pour- suivre sa route, ‘il s’y opposa. « On voit assez, lui dit-il, que » vous êtes une fille. Votre honneur sera en péril.»-—« N'importe » répond-t-elle résolument. Dieu me gardera.» Cependant l’ec- clésiastique craint des réprimandes de ses supérieurs; il part pour les consulter après avoir pris soin d'enfermer la pauvre fille et revient bientôt avec ordre de ne la point laisser partir avant que l'archevêque l'ait interrogée. Elle se laisse aller à la douleur, mais Dieu la console et lui renouvelle la promesse qu'il lui a faite, lorsqu'il l’a choisie pour fonder une réunion de personnes animées de l'esprit évangélique. Elle est effrayée d'unepareille mission, elle la croit impossible pour elle qui n'a ni autorité, ni savoir, ni fortune. Alors on lui dit, et cet on, dans sonstyle, est toujours la parole divine : «Regardez ces arbres sur le cimetière , ils semblent » du boïs sec sans feuilles ou fruits, ny aucune apparence; ce- { 347 ) » pendant la saison venue ; ils porteront feuilles, fleurs et fruits en. »abondance, sans que personne les touche. Il en sera de même sde mon œuvre. J'avais une fenêtre sur le cimetière, ajoute »M.elle Bourignon, et je contemplais ces arbres qui y étaient et » compris bien que letemps n'était pas encore venu, mais qu'il » arriverait en la saison ordonnée de Dieu. » Peut-on voir plus charmante image et mieux exprimée. (Parole de Dieu.) L’archevèque de Cambrai, (Mgr. Vanderbuch) arrive enfin. Il interroge M.elle Bourignon et lui permet de vivre à Blatton en recluse: Mais le père de la jeune fille était arrivé le même jour. Il invoque l’autorité paternelle et ramène son enfant, bien peinée qu'on eùt découvert son asile. Après avoir passé quelque temps à Tournai, dans un couvent, pour laisser oublier les propos que sa fuite avait fait tenir, M.e"e Bourignon revint à Lille. Elle se retira du monde et passa toutes ses journées chez elle, dans une chambre où elle avait établi un oratoire qu'elle avait puérilement décoré de figures de cire, re- présentant diverses scènes de ses visions. Celles-ci revinrent alors plus frappantes et plus caractéristi- ques. Citons en une : « Le diable ne manquait pas de me donner ».des destoursbiers dans mes prières, car souvent j’entendois dans »ma chambre des rumeurs. On sembloit ouvrir les fenêtres et »wmouvoir tous les meubles derrière moy. J'avois grande crainte, » Mon cœur se battoit de frayeur, parce que j'avois le naturel » fort timide et craintif. Je m’adressois à Dieu sans regarder en » arrière poursuivant mes prières. Il me dit : Ne crains point, je » suis avec toy. Une nuit, entendant semblable bruit, il me sem- » bloit qu'on marchoit à grands pas dans ma chambre. Je demeu- »ray ferme sans me mouvoir. Mais sitôt que j'eus achevé , me »levant, je vis à mon côté la forme d'un grand homme de la cou: » leur d’une ombre, qui se tint devant moy pour m'empêcher de » passer à mon petit enclos. Je le poussay de mes deux mains : »il tomba tout roïide, comme un bâton sans plier. Je mis mon (348) » pied sur sa tête et enjambant il me sembloit marcher surun œuf. » J'entray dans ma retraite bien pensive ce que je ferois le len- » demain de ce grand corps. Je m’endormis. A mon réveil sitôt » que j'eus ouvert ma porte, je ne vis aucune chose qui füt. D'où » j'appris que e’étoit une illusion diabolique pour m’effrayer. » « (Parole de Dieu, 655 56.) . Dans cette vision ce qu'il y a de plus frappant, c’est cette sorte de communication directe avec la Divinité qui semble prendre cette pauvre âme sous sa protection particulière. En effet depuis l’âge de quinze ans ce n'étaient pas seulement des visions qui remplissaient la vie de M.‘ Bourignon, c’étaient des rapports constants, immédiats avecla Divinité. C’est là qu'est le fait capital de sa vie, ce qui occupe tous ses livres, toutes ses lettres et toutes ses conversations. Voici de quelle nature étaient ces communications : « Dieu est esprit, l'âme est esprit. Ils se » communiquent en esprit. Ce ne sont point paroles verbales, » mais des intelligences spirituelles qui sont pourtant plus intel- » ligibles que les plus disertes éloquences du monde. Dieu se fait » entendre à l'âme par des mouvements intérieurs , lesquels l'âme » entend et comprend à mesure qu’elle est vide des idées terres- » tres; et autant que les facultés de l’âme cessent, d'autant plus » intelligibles lui sont les mouvements de Dieu. L'âme espurée » se transforme en luy et n’a besoin de paroles ni de vue pour l’en- » tendre, non plus que nous n'avons besoin d'œil ni de langue » pour entendre nos propres conceptions. » (Lumière née en té- nèbres. [. 1.) Ce n'étaient même pas seulement des inspirations religieuses qu’elle recevait ainsi, c’étaient souvent des avertissements, des instructions sur les faits les plus vulgaires de la vie. Aussi ex- prime-t-elle tout son désespoir lorsque plus tard, à Gand, elle fut pendant plusieurs mois privée de ces communications. Elle con- vient que l'esprit de Dieu lui a enseigné suivant ses besoins, à écrire, à rédiger des mémoires qui étonnaient les avocats, à diri- (349 ) ger, à administrer, à tenir des comptes, à faire bâtir, etc., etc. Il lui a révélé tous les textes de la Bible qu’elle cite bien qu’elle neles ait jamais lus. Il lui a dévoilé les complots de ses ennemis, lui a prédit le sort de ses amis éloignés , lui a fait voir la destinée éternelle de ceux que la mort lui avait enlevés. Elle entend une personne éloignée de plus de trente lieues qui lui demande ses prières, elle les adresse au ciel, et l’amie éprouve aussitôt le bien qu’elle en attendait. Tous ces faits que nous nommons ma- gnétiques aujourd'hui sont expliqués d’une façon ingénieuse par Melle Bourignon. « Les âmes bienheureuses voyent toute chose »en Dieu ; elles voyent en lui tout ce qui se passe entre ceux qui » sont membres de leur corps, comme je puis voir de mes yeux » tout ce qui se passé es autres membres de mon corps. Et lors- » qu'une âmeest en la présence de Dieu , elle entend tout ce qui »peut luy toucher. L'on peut bien quelquefois avoir cette expé- » rience en la vie mortelle, car il m’est souvent arrivé que jai vu » l'estat des âmes de ceux qui étoient corporellement éloignés de » moy. Les âmes mortes en la grâce de Dieu , ajoute-elle , ne sont » pas si loin de nous qu’on veut se l’imaginer, car estant agiles et » subtiles , elles se transportent en un moment où bon leur sem- »ble, et si nous étions délivrés de notre mortalité, nous verrions »ces âmes voler par l'air, comme nous voyons tant depetites » atomes (si) voler en l’air es rayons du soleil. » (Témoignage de vérité. 47e partie Ç 235.) On reconnaïtra là facilement diverses théories des écoles de Swedenborg , de Charles Fourrier et de Kerner. La recommandation que fait ailleurs M.°!e Bourignon : «Que pour de simples curiosités, onne doit jamais demander ni »isouhaiter ces divines lumières, ains seulement pour ce qui peut »mous rendre agréables à Dieu ou profitables à notre prochain. » setrouve répétée à chaque page des ouvrages de Deleuze. Nous avons cru utile d'exposer ici, et en détail, ces faits qui occupent toute la carrière de M.®le Bourignon , parce qu'ils ont agi dès le principe sur la conduite de sa vie, (850 ) En effet, plus le culte intérieur se développa’ en elle, moins elle fit de cas du culte extérieur. Elle renonca d'abord aux prières quotidiennes : « Mes prières vocales, dit-elle, me vinrent comme à charge. Je ne savais » plus dire mon office, en estant toujours interrompue par des » entretiens intérieurs Je me forcois à le poursuivre et quelque ». fois toute la nuit se passait sans l'avoir achevé. Je priais Dieu » pour scavoir s'il m'avait abandonnée ou si j'estois devenue » paresseuse , que je ne scavois plus achever mes prières. Il me » dit : je suis esprit, parlez-moy en esprit. J'opérerai dorénavant » en esprit et vérité. Cessez, je feray tout. Je me rendis à ces » coups cessant mes prières vocales. Je m'abandonnay tout à luy, » chassant toute imagination mienne et j'entendois plus claire- » ment les inspirations de Dieu. » (Parole de Dieu. 48.) Bientôt ce ne sont plus seulement les prières vocales | mais toutes les pratiques religieuses qu'elle abandonne. Elle en vint à ne plus fréquenter les églises. « Les pieux offices et solennités de » l'église se font souvent où les hommes et les diables en recou- » vrent plus d'honneur que ne fait Dieu mesme. » (Lumière née en ténèbres. [. 2.) Elle passa même des années sans se confesser et sans communier, c'est elle qui nous l’apprend, à la suite d’une vision où elle s'était trouvée citée devant le tribunal de Dieu pour s'être confessée inutilement. Les sacrements en général lui parais- sent superflus, « car les personnes vouées à la piétéles possédent » tous en elles-mêmes. » (Lumière née en ténèbres. IL. 30.) Les œuvres de charité lui devinrent aussi importunes. Elle donnait aux pauvres le peu qu’elle possédait en propre, par devoir, mais non par intérêt pour eux, « qui sont trompeurs et ne rendent » point grâces à Dieu du bien qu'on leur fait, ains s'en servent » souvent à de plus grands péchez. » Elle va même plus loin : « Prier pour autrui, c’est s'occuper des créatures. S'en abstenir, ».ce n'est pas manquer de charité. Car, dès qu'on a en son âme » une affection pour le bien du prochain, Dieu y entrant avec © 639 (351 ) cette affection , il la seconde et lui accorde tous ses souhaits... Ses souhaits sont les désirs de Dieu, sans autre prière que les mouvements qu'il voit en l'âme. Il lui accorde tous ses désirs, les remuant lui-même. Je ne scay, ajoute-t-elle, si vous m'en- tendez, car il est fort intérieur. » (Lumière née en ténèbres. L. 12.) En effet, elle touche ici aux subtilités les plus aiguës de la théologie mystique. Au sein de ces préoccupations nouvelles, elle revenait pourtant sans cesse à son projet de fonder une communauté où elle eût fait refleurir dans toute sa pureté la piété chrétienne. Elle se décida donc après deux années environ de séjour à Lille à retourner vers Mons , pour obtenir de l'archevêque l'exécution de la pro- messe qu'il lui avait faite jadis, de laprendre sous sa protection s elle continuait à être tourmentée dans sa vocation par sa famille. Elle partit cette fois sans le consentement, mais aussi sans oppo- sition de son père. L’archevèque lui permit de fonder à Blatton, sur un terrain offert par une veuve pieuse, une maison religieuse. Elle comptait s'y faire accompagner par plusieurs sœurs non cloîtrées de la maison de Notre-Dame à Mons où elle était logée. Sa piété, son esprit avaient enthousiasmé ces filles, ainsi que l’archevêque et l'un de ses amis, le père Duboys , supérieur de l’oratoire de Ma- lines. Elle prenait ainsi d'ordinaire un immense ascendant sur les âmes tendres et exaltées, généreuses et impressionnables. Mais, hors ce cercle restreint de son action personnelle , elle était fort mal vue par le clergé. Son dédain pour les pratiques de la religion devait blesser une corporation qui y voit avec raison les bases de sa puissance, et c'est là, commele dit Bayle, #n dogme furieusement attractif de persécution. Les Jésuites en particulier reprochaient à M.e!e Bourignon d’avoir détourné les religieuses de les écouter et de ne pas prendre pour elle-même de directeur dans leur compagnie. Il y a ici un trait de caractère trop piquant pour être omis. Notre mystique craignant qu'on ne lui imputât à ES EE © x L-2 (352) orgueil sa répugnance pour un directeur crut devoir consulter l'archevêque. Celui-ci la détourna d'en prendre un, lui en dé- montra même l'inutilité , mais lui recommanda expressément de n'en rien dire aux révérends pères. Un homme si faible devait céder facilement et abandonner bientôt M.cle Bourignon. L'occasion ne tarda pas à s’en présenter. La guerre de trente ans, dans sa dernière période, avait trans- porté en Flandres le théâtre des hostilités, et c'est pour cette raison qu'on trouvait à Mons et l'archevêque de Cambray et les refuges des divers couvents de Maubeuge et de Bavay que nous avons mentionnés. Le père Duboys engagea M.°lle Bourignon à prier Dieu qu'il mit fin à ces maux qui pesaient si lourdement sur l'église. Elle consentit, mais après avoir consulté son divin maître, elle déclara que ces maux n'étaient précisément que le juste chà- timent des vices du clergé. Dès son enfance, frappée du peu de foi de tout ce qui l’entou- rait, elle répétait sans cesse, après avoir lu son catéchisme : Quand donc irons-nous au pays des chrétiens? Mais elle croyait qu'à défaut du vulgaire , le clergé avait au moins conservé la piété évangélique. Deux faits éveillèrent bientôt son attention : Quand après l’une de ses premières visions, elle se fût vouée à la vie religieuse, elle alla trouver le prieur des Carmes déchaussés de Lille et lui demanda dans quel couvent elle devait entrer. Celui-ci l'ayant interrogée et ayant appris qu’elle n'avait pas de dot, lui démontra qu'elle ne serait recue dans aucun ordre et la railla sur sa naïveté. Plus tard, elle se confessait à un jésuite qui voulait la marier à un de ses parents. Il ne craignit pas de l'y exhorter au confessionnal même, et sur sesrefus, de ne pas lui accorder l’absolution. La jeune Anthoinette en fille déterminée et qui sentait la pureté de sa conscience, alla néanmoins communier sous ses yeux. Chaque jour vint ensuite l'éclairer davantage sur le peu de véritable piété que possédait le clergé. Aussi, sur les instances du père Duboys, elle consigna en 1640 1641 (353) quelques pages son opinion sur les maux de la guerre , ainsi que les vices qui les avaient mérités, et elle mit dans la bouche de Dieu ces paroles : « J'oteray aux prêtres et aux religieux la puis- » sance, la dignité, la foy, pour les faire reconnaître abominables » au peuple comme ils le sont devant moy. » Ne semble-t-il pas qu'elle ait eu ici la révélation de ce que le clergé allait être au XVII fsiècle, perdant sa dignité et sa foi, jusqu’à la révolution populaire qui allait le priver de sa puissance et de son autorité. On comprend quelle irritation devait soulever un pareil écrit. L'autorisation de fonder une maison à Blatton fut aussitôt retirée à M.ele Bourignon. Elle pensa qu'elle réussirait plus facilement au pays de Liége où l'autorité spirituelle et l'autorité temporelle se trouvaient con- centrées dans les mêmes mains. Elle y alla à cet effet, et obtint la permission de fonder son couvent; mais quand elle revint chercher les sœurs de Mons qu’elle s'était attachées et sur lesquelles elle comptait, elle les trouva brisées Par une persécution si rude que deux d’entre elles moururent de souffrances et de chagrins. L'une était la sœur Malapert, véritable type de piété et d'innocence. La supérieure même qui avait logée M.ele Bourignon à son relour, fut sérieusement menacée. Celle-ci renonça alors à son projet et se contenta de se retirer à Blatton pour y vivre en récluse sur le terrain qui lui avait été donné. Mais elle ne tarda pas à y être persécutée, on accusa même à son sujet le curé qui la visitait souvent. Elle fut forcée de s'éloigner, £et après quelques voyages!, la mort de sa mère la ramena à Lille. Elle assista quelque temps son père dans son commerce, mais celui-ci s'étant remarié, elle rencontra peu d’égards chez sa belle mère et crut devoir quitter la maison paternelle pour se retirer dans une petite retraite jadis bâtie pour une recluse près l'église Saint-André (faubourg Saint-Pierre). C'est dans cette solitude qu'elle passa plusieurs années, laissant souvent écouler des mois 23 (1354 entiers sans ouvrir sa porte à autre personne qu'a la femme qui venait une fois tous les huit'jours lui porter ses provisions: Là, son esprit se.confirma dans les spéculations mystiques. Le caractère général de ces doctrines est, comme on sait, l'abandon de l'activité humaine. « L'âme, lorsqu'elle se dépouille de toutes »: sortes d’affections terrestres pour s'unir à Dieu seul , se trouve » comme anéantie.et abymée en lui; en sorte que Diewest vivant » tout en elle, à mesure qu’elle meurt à elle-même, Dieu meut » toutes ses puissances et agit’, parle et travaille comme si l’âme » m'avait plus de mouvements naturels et qu'elle fût toute divi- » nisée, » (Lumière née en ténèbres. II. Lett: 19.) « L'activité » humaine est le plus grand obstacle à la conversion. » ( Frag- ments du soldat chrétien cités par Poiret.) « Si l'action que nous » devons faire est pour la gloire de Dieu purement , il faut dire : » Seigneur, je ne peux et ne sais rien; faites donc en moi cette » action et demeurer simple et libre comme un enfant qui attend » la bienveillance de son père. » (Lumièrenée en ténèbres. I. 3.) « Les âmes pieuses n'ont ni forces, ni puissances siennes non » plus que n'en auraitune goutte de vin jettée dans la mer, la- » quelle perd aussitôt sa force et sa substance et perd l'être du » vin en devenant eau par le grand océan: qui l’environne et la » change en sa propre substance.» (Idem. [. 43.) « Je compris » que c'est Dieu qui fait tout, et qu'en un moment il me pouvait » .oster toutes ses grâces et me rendre sotte ou la plus méchante » de toutes les créatures ; que J'estois un pot de terre où il avoit » misses trésors et qu'il les pouvoit oster et briser le pot on le » remplir de fange. » (Parole de Dieu.) Tous ces fragments que nous venons de citer, sont confirmés par un long et brillant exposé inséré dans la seconde partie de la Solide vertuetoù, décrivant les trois ponts qu'il faut passer pour arriver à la Jérusalem céleste, elle fait des: deux premiers l'abandon du monde et de la convoitise et du troisième lesrenoncement à sa propre volonté. De cette passivité pieuse à l'amour pur de Dieu, il n'y a qu'un (355) pas. Sans s'attacher à ce dernier principe avec autant de force que M.e Guyon, M.‘ Bourignon s’en préoccupe souvent. « Bien » des vertus peuvent vous conduire à la perfection, écrit-elle à » un vieillard, mais il y a tant de détours qu'on se perdroit bier en chemin, de plus que votre âge avance et de crainte qu'il ne » vous reste assez de vie pour surmonter tous vos défauts ou » acquérir toutes les vertus, prenez ce chemin raccourci de » l'amour de Dieu. C’est un feu qui consume tout insensiblement. » Tous vos vices s’y brüleront, des cendres desquels les vertus se » formeront doucement. L'amour est le seul bien. Aîmez. Aimez » et tout sera consumé par cet abîme d'amour. » (Lumière née en ténèbres. I. 13.) Dans ces élans spirituels, M.‘ Bourignon goûtait des délices inexprimables, et cette solitude absolue lui rappelle sans cesse les plus heureux jours de la vie. « I] me semblait qu'il n'y avait rien » entre Dieu et mon âme. Elle se sentoit toute absorbée en luy. » Je ne vivois plus, mais luy vivait en moy. Les consolations » intérieures passoient souvent jusqu'au corps qui perdoit tout » sentiment à mesure qu'il oublioit les choses de la terre. Mon » esprit s’évanouissoit. Je me délectois sensiblement dans ces » » Œ douceurs où je passois quelques heures sans rien sentir, ni scavoir si j’estois en ce monde ou en paradis. » (Parole de Dieu. 54.) Voila bien l’extase, et l'on voit que, comme chez beaucoup de mystiques , l’exaltation spirituelle prend ici le langage de la pas- sion charnelle. Ailleurs elle s’écrie encore : « Ce n'éloient que » caresses et délices spirituels. Mon Dieu , je vous appartiens, » faites de moy tout ce que vous voudrez. » (Id.) Ou bien. « Je meurs d'amour, j’abandonne mon âme » Aux doux attraits de Jésus qui l’enflamme, » Et qui me fait tomber en pamoison...» (Fragments.) Mais le monde troublait ces chastes plaisirs. Le neveu du curé 1647 ( 356 ) de Saint-André s'était pris pour elle de passion. Il chercha d'abord du consentement de son oncle à obtenir la main de M.‘le Bourignon etse voyant repoussé, il la poursuivit, la menaca, tira des coups de fusil dans ses fenêtres pour l’effrayer et répandit dans tout Lille lel bruit qu'il l'avait épousée, bruit tellement accredité qu'on fut obligé de le démentir au prone. Mlle Bourignon avait été souvent demandée en mariage; la passion que nous venons de raconter ne fut pas la dernière qu'elle inspira, nous allons en voir un exemple bien plus extraordinaire tout à l'heure. C’est à sa distinction et à la supériorité de son esprit qu'elle devait cette influence puissante, car elle paraît avoir été moins que Jolie. Lorsqu'elle vint au monde, des cheveux noirs fort épais lui cachaient les yeux, et le nez était attaché à la lèvre supérieure. Ses parents pensaient à l'étouffer comme un monstre. Les cheveux tombèrent. Une opération heureusement faite remit les lèvres en leur état naturel, et avec l'âge, l’intelli- gence rendit agréable cette physionomie disgraciée. Suivant Poiret : « Elle était d'une taille moyenne, mince et déliée, le » visage à proportion , le teint fort brun , le front ouvert et sans » aucune ride, les yeux tirant sur le bleu, le regard ingénu.…. Son » aspect, sa parole, son abord étaient naïfs, doux et agréables, » sa démarche grave.» Suivant Bayle, qui ne l'avait point vue, et n'en parle que d'après ses ennemis, elle était fort laide. Il est assez difficile de se faire une opinion sur ce point, car elle ne voulut jamais se laisser peindre. Je ne sais même s’il existe d'elle un portrait authentique, bien que la biographie universelle prétende, sans citer son autorité, que Poiret en avait fait un de sou- venir, plusieurs années après la mort de cette femme célèbre. Peu importe, du reste, que ses traits aient été plus ou moins réguliers, puisqu'elle inspirait tant d'admiration passionnée. Les faubourgs de Lille ayant été envahis par les ennnemis. (C'etaient alors les Français qu'on désignait sous ce nom, car il s'agit des guerres qui eurent lieu sous la minorité de Louis XIV) 1648 1650 ( 357) Male Bourignon dut se retirer en Belgique près d'une dame pieuse deses amies (la comtesse de Villerwal, à Deuse) jusqu’à la mort de-son père. Alors elle revint à Lille pour recueillir sa succession. Mais sa belle-mère ne voulait rien lui rendre. Elle se décida à plaider avec l’aide de son beau-frère, Charles Vantorre, assesseur dela gouvernance deLille, et elle passa plusieurs années en procès. C'est pendant ce temps qu'elle fit la connaissance d'un nommé Jean de Saint-Saulieu, du village de Mons-en-Pévèle, près Douai, qui joua un grand rôle dans sa vie. Un jour qu'elle était dans la rue, il l'aborda, et lui demanda à quoi en étaient ses procès : & Vous n’en finirez point, lui dit-il, Dieu ne le veut pas, car si » vos affaires étaient vidées, vous sortiriez pour faire vos desseins. » Mais vous ne ferez pas ce que vous voulez et vous ferez ce que » vous ne voulez pas. » La dessus, il la quitta. M.°"e Bourignon se demanda si c'était un fou ou un prophète. Il revint le lende- main et lui prouva qu'il n'était ni l’un ni l’autre. C'était un paysan, cordonnier de profession, qui, après avoir été soldat, s'était adonné à la vie spirituelle , avait vécu plusieurs années avec un ermite et était arrivé au détachement le plus complet. Nul ne parlait religion et autre vie comme cet homme. Il dirigeait alors la maison Sant-Pierre qui fondée d'abord par le magistrat {nom qu’on donnait . comme on sait, à la municipalité de Lille) pour recevoir les paysans réfugiés en ville lors de l'invasion, avait reçu ensuite les orphelins de ces mêmes paysans morts à l'hôpital et enfin servait maintenant à l'éducation d'enfants pris dans la classe indigente. Il voulait que M.‘!e Bourignon prit, à son exemple, la direction d'une autre maison toute pareille. C'était celle qu'on nomma d’abord : Hôpital de la Misère, puis des Charitables (nom des douze bourgeois chargés de l'administrer pour le compte de la ville et des fondateurs), puis ensuite Hospice de Notre-Dame des sept douleurs ou simplement des sept douleurs. Il avait été établi primitivement rue du Plat, au côté du coïlége des Hibernois. Ce ne fut que vers le XVI siècle qu'il fut transporté où il est aujour 1653 { 358 | d’hui et où il est plus connu sous le nom de son fondateur, Jean Stappaert. Celui-ci simple marchand à Lille avait destiné d’abord cet hospice à recevoir le trop plein de la maison St-Pierre dont nous venons de parler. Après l'invasion, on y laissa les filles orphelines, comme on avait placé les garcons à Saint-Pierre. Enfin on remplace ces orphelines à mesure qu’elles sortaient par de pau- vres filles de la ville. La municipalité avait tout à fait abandonné l'administration et l’avait laissée en entier à la charge de Stap- paert , qui la soutenait par une fondation de 262 florins de rente annuelle. Et lorsque Me1e Bourignon, après avoir longtempshésité, accepta la gérance de cet établissement, il porta cette rente à 300 florins par contrat, du 6 novembre 1653. L'esprit supérieur de cette femme parut bientôt dans la gérance. Elle rétablit l’ordre, fit des économies, établit une règle, améliora l'instruction et réunit en partie à ses frais plus de cinquante élèves. Elle donna à cette institution le renom qu'elle possède encore aujourd'hui et qui fait que les bourgeois aisés vont comme de son temps y chercher leurs servantes. Mais pendant qu'elle relevait ainsi cette maison, celle que dirigeait Saint-Saulieu s’anéantissait faute de fonds suffisants. Il voulait en fonder une autre, il fallait en trouver le moyen. Il se proposa, dans ce but, de prendre à bail une ferme de la ville. M.‘e Bourignon fut sa caution. Il y gagna six mille francs en quelques années, puis prétendit que cet argent était bien à lui et ne voulut plus entendre parler de la maison des pauvres. Alors, jetant le masque , cet homme se montra sous un jour tout nouveau. Lui qui se disait tellement détaché du monde qu'il ne savait pas distinguer une belle femme d'une laide, rechercha M.cle Bourignon, timidement d’abord , lui offrant « de vivre en » mariage, gardant néanmoins la virginité. » Et sur son refus, il devient insolent, opiniâtre, passionné, furieux; il la menace, force diverses fois sa maison et cherche, comme dit Bayle, à suppléer par la force de ses bras ce qui manquait à l'efficace de 1657 { 359 ) ses discours. Ses menaces et ses actions! allèrent’ si loin que Me Bourignon fut obligée de fuir plusieurs fois, puis de requérir l'appui des magistrats. On lui donna des sergents de garde en sa maison pour la protéger. Saint-Saulieu fut poursuivi par l'autorité: Il fit réparation, paya les frais et se soumit à une amende s’il recommencait ses poursuites. Aussi se borna-t-il à persécuter sourdement la régente, à lui susciter des procès, à la diffamer et à lui aliéner tous ses amis, Stappaert entre autres. Il se maria ensuite avec une ser- vante de l’hospice qui avait été séduite par lui et qui eut beau- coup de peine à s’en faire épouser. Puis il mourut misérablement, quelques années après, en disant qu'il souffrait les peines de l'enfer. Michelet, dans son livre du Prêtreet de la Femme, a raconté cet épisode avec le charme ordinaire à ce qu'il écrit, mais je ne sais ce qui peut le porter à regarder Saint-Saulieu comme un émissaire des Jésuites. Ceux-ci étant les ennemis de la régente, ont dû se réunir à l’homme qui la persécutait, mais luivparaît n'avoir agi que sous sa seule impulsion personnelle. Pendant ce temps et pour se garantir de semblables événements, Melle Bourignon s’était constituée en clôture dans son hôpital avec là permission de l'évêque de Tournay et avait pris la robe grise etle manteau noir dont elle s'était trouvéerrevêtue dans ses pre: mières visions. Cependant, des faits plus smguliers encore devaient se produire dans cet hospice. Un jour, la supérieure: fait mettre en pénitence dansune chambre fermée une petitefille de treize à quatorzeansqui avaitcommis quelque faute. Tout à coup cet enfant rentre;dans la classe-et reprend sa place. On se demande comment elle apu sortir dela chambre où.elle étaitenfermée:On s’y transporte et l'ontrouve la porteexactement close et leverrou tiré. On presse alors l'enfant dequestions, et l'on apprend qu’elle esten communication constante avecle démon et que c'est lui quiesbyenu ladélivrer. Effrayée d'une semblable révélation, notre supérieure poursuit:ses interrogations ( 360 ) et apprend successivement que deux, puis quatre, puis toutes ses pensionnaires , qui étaient alors plus de trente, sont infestées de sorcellerie , ont été au sabbat, ont vu le diable, ont dansé avec lui, ont reçu ses marques et enfin ont été souillées de ses caresses. (Voir la description minutieuse de toutes ces infamies dans la parole de Dieu. 120.) Il y a ici tout à la fois du grotesque et de l’odieux. Il est odieux de voir ces petites filles si douces, si pieuses, dont Mele Bourignon elle-même vante la sagesse apparente, la piété extérieure et qui eussent, dit-elle, donné leur vie pour elle ( Antechrist décou- vert Il), transformées en monstres capables de la corruption la plus précoce et la plus obscène. Il est grotesque de voir énumérer tous ces faits de sorcellerie : la pluie pénétrant dans les chambres bien fermées, le pain qui reste six heures au four sans cuire, la mort de tous les animaux domestiques, les drogues magiques qu'on trouve dans les plats et sous les lits, et bien d’autres faits tout aussi prodigieux. On serait tenté de ne pas trop accuser Mel Bourignon quand on connaît l'esprit de l’époque; quand on lit les attestations au- thentiques rédigées suivant l'usage en latin et signées par trois curés de Lille qui avec les pères Capucins exorcisaient ces petites filles ; quand on voit le savant Poiret déclarer « que ceux « qui contestent ces faits y sont intéressés ou sont déraisonnable- a ment sceptiques , » et surtout, quand on songe que l’on sortait d’une des époques où le plus de sorciers ont été brûlés. Mais M.slie Bourignon enchérit sur son temps. Suivant elle , et c’est le Saint- Esprit qui le lui a appris, les trois quarts des hommes sont liés au diable par pacte précis. Et puis elle prêche la rigueur , elle se plaint de ne voir plus assez de ces justes châtiments. ( Tombeau de la fausse théologie, WT, 10. Antechrist découvert, dans l'avis au lecteur. Avis et instructions salutaires, [.) Voilà ce qui n'est excusable en aucun temps, ce que le cœur seul a toujours suffi pour rendre exécrable. 1662 ( 361) On est heureux de voir que ces sentiments ne furent partagés ni par la municipalité de Lille, ni par le lieutenant criminel. Ils accueillirent les plaintes des parents qui se trouvaient ainsi diffa- més et accusés d’avoir élevé leurs enfants dans le culte du démon, car la supérieure et les pasteurs prétendaient que ces petites filles étaient toutes ensorcelées avant d’entrer dans la maison. On ou- vrit une enquête ; on apprit que des domestiques s’étaient livrés à de mauvais traitements sur les élèves. On parlait d'une petite fille qui serait morte à la suite de coups de verge qu’elle aurait reçus, mais cette affaire perdit toute sa gravité dans l'instruction, et la servante accusée fut mise en liberté après quelques mois de dé- tention. Quant à M.‘le Bourignon elle fut ajournée et sur son refus de comparaître après trois ajournements inutiles le lieute- nant criminel se transporta avec huit sergents armés au couvent, cn enfonça les portes et emmena la supérieure en habit religieux ela pied à l'hôtel-de-ville suivie d’une foule de peuple qui à son tour, l'accusait d’être sorcière. On la remit en liberté, parce qu'elle allégua sa qualité de recluse pour se soustraire à la juridiction civile. L'évêque de Tournay envoya son vicaire général à Lille pour soutenir cette pré- tention. Après plusieurs pourparlers avec cet ecclésiastique , plusieurs comparutions personnelles et bien des hésitations, le magistrat se décida à faire arrêter Me Bourignon. Cette fois elle avait été avertie et s'était enfuie. Mais les couvents et les particu- liers que ces accusations de sorcellerie effrayaient n’osaient guère la recevoir. Après avoir cherché un asile sur la terre franche de St- Pierreet dans diverses cachettes, elle se décida à quitter Lille. Le magistrat fit alors sortir de l'hospice la régente que M°"e Bou- rignon avait mise en sa place. Ily établit une supérieure à sa dé- votion et y fit entrer les Jésuites qui n'avaient pu jusqu'alors s’y faire admettre. Ces religieux organisèrent une procession pour celébrer cet évènement, et promenèrent les enfants sur un char qui représentait le purgatoire (362) Plus tard Me Bourignon étant à l'étranger pendant la guerre, sa belle-mère s’empressa de faire confisquer ses biens, sous pré- texte qu'elle était en terre ennemie. M°le Bourignon était en Holstein, pays neutre, mais pour ne pas s’exposer aux chances et aux tracas d’un procès en restitution, elle fit abandon, à l'hospice Stappaert qui en a joui depuis lors, de tout ce qu'elle tenait de son père, et elle confirma, à différentes époques, cette donation que sa famille essaya vainement d'attaquer. (Avis et instructions salutaires, IL.) On voit par là que M£l!e Bourignon était rentrée en possession de ses biens, contrairement à ce qu'avance la Biographie universelle : « Qu'il ne lui resta de ses procès que la honte d’avoir plaidé contre sa mère. » Ses droits étaient d'ailleurs évidents. N'ayant qu'une sœur, elle pouvait prétendre d'après la coutume , ainsi qu'elle le dit elle-même , à la moitié de tout ce que son père possédait au jour de son remariage. Et sonpère était riche. De Lille elle s’en fut à Gand, puis à Bruxelles , à Louvain et à Malines, revint à Lille pour chercher à se faire réintégrer dans l'hospice Stappaert, retourna en Belgique et passa ainsi plusieurs années en voyages ef en procès. Elle commenca alors, vers la quarante-sixième année de son àge, à se trouver en relation soit par correspondance , soit par conversations avec des esprits distingués. Ceux auxquels elle s’attacha le plus sont une religieuse du nom de Suzanne; Agnès Sueesens , directrice de la maison des pauvres de Saint- Joseph à Malines ; et parmi les hommes, outre Lamberti, curé de saint Maurice à Lille, qui était depuis longtemps son confesseur ; Gillemans, théologien estimé, auteur de plusieurs ouvrages de piété, chanoïne et archiprètre à Gand ; Pierre Noels , licencié en théologie, prêtre et chanoine à Malines ; Coriache, archidiacre et plus tard vicaire général dans la même ville; De Cort, supérieur des frères de l'Oratoire, curé de Saint-Jean et directeur de la maison des pauvres à Malines ; bien d’autres encore. Au contact ‘de ces intelligences éclairées, Mflle Bourignon ( 363 ) semble prendre conscience de ses forces. Elle n'avait guères écrit jusqu'alors que quelques lettres, dont on forma depuis le recueil intitulé : {Appel de Dieu et le refus des hommes... (Lettres de 1636 à 1640 et 1672 à 1680), et un Traité de la Vie solitaire ; que la vie solitaire est la plus parfaite de toutes les vies qu'il y ait au monde... qu'elle dit avoir composé au reclu- sage de Saint-André, l’an 1649. Cet écrit est fort remarquable, plein de mouvements lyriques. Il commence ainsi : « © vie soli- « daire , que tu es heureuse et que tu es plaisante , belle et dé- « sirable à celuy qui cherche Dieu... » Et après la comparaison de cette existence à chacun des états du monde, cette apostrophe revient triomphante: « © solitaire ! que tu es heureux. » Ses nouveaux amis la poussèrent à écrire d’une façon plus suivie. Elle commença par l’histoire mystique et intérieure de sa vie qu'elle intitula : Parole de Dieu (1663). C’est un ouvrage de la plus attrayante lecture. On ne croirait pas qu'une femme ait pu conserver une pareille fraicheur d'expressions, une semblable flexibilité de plume, à quarante ans, si l’on ne voyait des souve- nirs de jeunesse racontés avec la même émotion que s'ils étaient tout récents. On ne voit donc pas trop pourquoi Jean Paul ap- plique à notre mystique l’épithète très-peu méritée de tant soit peuprosaique. Dans ses voyages à Lille, à Gand , à Bruxelles, qui remplirent plusieurs années de sa vie, elle augmenta beaucoup le nombre de ses lettres. Elle en fit plus tard plusieurs recueils intitulés : La Lumière née en ténèbres, qui invile tous les hommes de bonne volonté à ouvrir les yeux de leur entendement pour la connaître. (Les trois premières parties datées Lille et Gand, 1664 et sui- vants; la dernière : Amsterdam, 1671.) Le Tombeau de la fausse Théologie , exterminée par la véritable venant de Diew. | Les pre- mières lettres de Lille et Gand, 1665 à 1668; les dernières Amsterdam et Sleevisch, 1670, 1671.) L'Académie des savants théologiens, où üls peuvent apprendre à discerner la vérité de Dieu | 364) hors des vérités estudiées par les hommes. (1664, 1665 pour la première partie; 4667 pouc les deux autres. } C’est là surtout qu'elle paraît elle-même et qu'on admire combien son style est naturel , animé, brillant. Aussi la plupart de ses ouvrages ne sont, comme ceux que nous venons de citer, que des recueils de lettres ; malheureusement elles sont trop multipliées, insérées sans suite, sans liaison , pleines de redites, de répétitions, de particularités elles fatiguent , et n'ont dù leur publicité qu'au fanatisme de ses amis. « Je dis et redis en diverses manières avec « termes différents ces mêmes choses pour tant mieux lesinculquer « au cœur et à l'esprit de tous ceux qui désirent arriver à la vie « éternelle. » ( Renouvellement de l'esprit évangélique, avant- propos. } « Ces divines lumières sont comme un fleuve qui coule « en abondance, et mon âme ne peut tarir. » ( Lumière née en ténèbres , IV, 9.) Aussi pourrait-on trouver en trois cents pages, et sous une forme éclatante , tout l'esprit de Me Bourignon qu'il faut cher- cher avec peine dans vingt volumes. Il y à aussi dans ses écrits quelques vers. Ils ont du mouve- ment, mais manquent tout-à-fait d'art et qui pis est du senti- ment même de l’art. Elle les a composés, dit-elle, sans compter à la mesure , pour traduire son enthousiasme. Sa prose est aussi fort incorrecte. Elle convient elle-même des défauts de son orthographe: « Je n’ay , dit-elle , qu’un simple patois pour signi- « fier naïvement mes pensées. » (Tombeau de la fausse Théologie, IL, 14.) | Un seul ouvrage de cette période est fait avec soin, correction et ordre: c’est la Lumière du Monde, récit très-véritable d'une pélerine, Anthoinette Bourignon , voyageant vers l'éternité ( trois parties, datées de 1663 à 1667 }, résumé de ses doctrines. Mais celui-là à été évidemment composé par De Cort sur ses conver- sations et seulement revu par elle, C’est là surtout qu'elle commence à sortir de son mysticisme (365 ) idéal et rêveur pour traiter des questions pratiques. La première qui attira son attention fut celle de la grâce. Tout ce monde qui l'entourait en Belgique , Gillemans , De Cort, Noels étaient jan- sénistes. Ce dernier avait même été secrétaire du célèbre évêque d'Ypres , Cornelius Jansenius. On était alors au plus fort de la première période de cette lutte théologique ; Port-Royal était dans tout son éclat , Arnaud avait été condamné , et les Provinciales avaient été écrites quelques années auparavant. Melle Bourignon avait des sympathies pour les mœurs sévères et la piété austère du parti persécuté. Elle avait en horreur la morale relâchée des Casuistes et revenait souvent sur la coupable facilité des confesseurs. Elle approuvait même en quelques points la théo- rie des Jansénistes : « Je suis toujours confirmée, qu’en matière de « la grâce, personne n’a encore connu la droite vérité , quoique « l'opinion des Augustiniens est la plus parfaite, si elle n’a « encore touché le blanc. » {Lumière née en ténèbres , LIL, 47.) Mais Arnauld et les siens, en développant leur doctrine, arri- vaient à incliner vers la prédestination, et c’est ce qu’elle ne pouvait souffrir. C’est ce qui lui avait fait refuser à ses amis, qui l'en pressaient, d'aller à Paris soutenir la cause des persécutés. (Confusion des ouvriers de Babel. 1.) On se demande , en lisant ces lignes, ce que serait devenue cette énergique nature au milieu d'une semblable lutte et au centre même de la mêlée. Elle insiste toujours sur le libre arbitre. « Le franc arbitre est la » seule chose qui représente à l’homme la liberté et l'infinité de » Dieu, c'est par là seulement que nous pouvons nous attacher » à lui qui est infini. Il ne peut être diminué, ce n’est jamais » Jui qui manque à l’homme, mais la lumière. Seulement il y a » inclination à malignité chez lui depuis le péché d'Adam. » (Lumière du monde. IE.) Dieu nous a faits pour l'aimer, et » comme il n’y a point d'amour parfait et accompli ne soit que » l'âme donne son libre consentement à l’aimant, pour cela il » nous a créés libres. (Id. I. 12 conf.) { 366 ) Mais à côté de ce libre arbitresi absolu, M.ele Bourignon pose la grâce d’une facon qui en est absolument indépendante : « La » grâce vient de Dieu, sans aucun mérite ou coopération de notre » part, parce que nous ne pouvons rien mériter ni coopérer avant » d’avoir l'esprit. » Et malgré que nous y répondions par des offenses, il ne cesse pas de nous les prodiguer « par ce qu’elles » ne nous ont pas été données pour nos mérites, elles ne nous » sont pas ostées pour nos démérites. » (Là même.) Ainsi deux choses bien distinctes : chez l’homme une liberté absolue d'accepter ou de répudier les dons célestes ; chez Dieu, une bonté absolue qui lui fait répandre sans cesse ces dons, même sur les ingrats. Réduite à ces termes généraux, on voit que cette question qui nous semble purement théologique dans la querelle du XVIL. siècle, n’est qu'une des formes de cette grande discus- sion philosophique qui a occupé toutes les époques et toutes les écoles même les plus matérialistes sur la conciliation du libre exercice des forces de l'individu avec l’action générale de l'intel- ligence suprême. Aussi Voltaire qui avait peu étudié la philoso- phie mais qui en avait profondément l'instinct, dit-il avec raison : « Que la question de la grâce et de la prédestination rentre, pour » le fond, dans le labyrinthe de la liberté et de la fatalité où toute » l'antiquité s'est égarée. » {Siècle de Louis XIV ch. du Jan- sénisme. } M.ele Bourignon pensait aussi que c'est un labyrinthe et n’ai- mait point à s'y engager. « De vouloir spéculer si Dieu a de toute » éternité vu en particulier tous les biens et maux que les hommes » feraient, c'est une question trop curieuse, surpassant notre » capacité, laquelle apporte peu d'utilité à notre salut. » (Aca- démie des scavants théologiens. [.) « Ils bâtissent de grandes » disputes sur la grâce suffisante ou efficace , termes inventés, » lesquelles étant examinées, on trouverait qu'elles nesont fondées » que sur des paroles. » {Lumière du monde. III.) Elle raconte même dans le Tombeau de la fausse théologie. I « qu'elle a vu ( 367 ) » deux prêtres différant sur la question de la grâce, prêts l’un » et l’autre à mourir pour leurs idées opposées. Et ils lui deman- » daient lequel des deux mériterait le titre de martyr. Tous les » deux, leur répondit-elle, mais. du démon. » Elle ne pouvait souffrir, en effet, qu'on portât le zèle, la passion , l'intolérance sur des questions qui n’intéressaient pas le salut. Elle montra le même esprit dans toutes les discussions théolo- giques. Ainsi, plus tard, sur l'Eucharistie, elle disait à un corres- pondant : « Je soubaiterais que vous travailliez davantage à incor- ». porer l'esprit de Jésus-Christ qu’à disputer en vous-même si son » corps est réellement en ce sacrement transubstantié, comme » disent les Romains, ou joint au pain et à l’eau, comme croyent » les Luthériens, ou bien qu’il n’y est qu’en ressemblance, comme » disent les Calvinistes et autres. » (Lumière née en ténèbres. IL.) Jamais elle ne donna son opinion ou les doctrines qu’elle embras- sait comme articles de foi. L'amour de Dieu et la pureté de la vie sont pour elles les seules conditions essentielles de la piété. Cependant , ces discussions transformèrent peu à peu son mys- ticisme et elle en vint à se croire illuminée sur une foule de points extraordinaires. Nous ne pouvons entrer dans le détail de toutes ces aberrations, nous allons seulement en esquisser l’ensemble. _Le genre humain est arrivé aux derniers temps prédits par les écritures. Il n'y a plus de vrais chrétiens, même dans les religieux, l'abomination est au sanctuaire. L'Antéchrist qui n’est autre que le démon, après avoir régné longtemps dans les esprits, va se ma- nifester matériellement , s’il n'est pas déjà apparu, et elle croyait même le voir dans le fameux imposteur Sebataï Sebi qui faisait alors ses ravages en Palestine, et dont parlaient les gazettes. Le monde, est condamné depuis trente ans, il va périr dans peu de temps. (Antéchrist découvert et presque tous ses ouvrages.) Alors viendra le règne du Christ. Celui-ci est le premier né d'Adam, le premier né d’entre les hommes,comme dit l'Écriture. Adam l’a enfanté dans son état d’innocence, avant le péché et ( 368 ) Dieu l'a adopté, ce fils bien-aimé qui n'a ainsi jamais été séparé de la Divinité. C’est par lui que le Tout-Puissant dès le principe parle et communique avec l’homme. {Il y a ici quelques idées du Demiourgos des Gnostiques.) Plus tard il est rené en Marie pour adopter les misères et la mortalité. Enfin il est rede- veau glorieux après son supplice et il viendra régner éternel- lement parmi les hommes, se communiquant à eux sensible- ment. Ce seront les jours nouveaux prédits par l’Apocalypse. (Aveuglement des hommes, pierre de touche , nouveau ciel, etc.) Alors l'homme redeviendra ce qu'était Adam. Nos corps actuels ne sont qu’une apparence. Dieu n'a pu les créer mortels et misé- rables. Eternel il ne fait rien que de tel. « Les corps glorieux que » Dieu a créés sont tous éternels, ne pouvant mourir, puisque » Dieu n’a pas fait la mort, néanmoins notre corps interne et » glorieux est couvert de misères et de calamités , desquelles les » hommes ne peuvent être délivrés que par lemoyen de la mort qui » met fin à nos travaux et donne commencement à notre repos. » (Nouveau ciel et nouvelle terre. [.) Ainsi le corps de l’homme ne périra point. Seulement les mali- gnités en seront séparées et elles subsisteront aussi pour tour- menter plus vivement les êtres condamnés qui ne pourront plus s’en délivrer par la mort. {(Aveuglement des hommes. Il.) Ce qui se rapproche encore de certaines idées gnostiques. Ce n’est pas seulement l'homme qui n'a pas été créé tel que nous le voyons, mais tout autre être. Nos vices ont amené les fléaux. Le serpent dans le paradis terrestre était créé pour flatter la vue et non pour mordre. Il restera inoffensif sur la terre régé- nérée , et le mal de la morsure subsistera dans les enfers, c’est-à- dire, loin de la présence de Dieu pour tourmenter les damnés. « L'air nous transportera où bon nous semblera, l’eau s’affer- » mira pour nous soutenir. Les animaux nous seront soumis » comme nous le serons à Dieu. » (Nouveau ciel. L.) Il est facile de rapprocher ces idées de celles des visionnaires modernes, Ch. Fourier entre autres. LL. + ( 369 ) C'est là que se trouvent ces passages sur la génération que l’on a si-souvent reprochés à M.‘le Bourignon et que nous ne cherche- rons pas à défendre. Elle prétend que, dans le monde régénéré, les deux sexes ne subsisteront plus et que l'amour de Dieu, joint au désir de produire d'autres créatures pour l'aimer, suffront à créer les êtres. L'idée en elle-même n’a rien de blessant, mais la naïveté crue des peintures en est intolérable. Ceux qui seraient curieux de ces sortes de réveries les trouveront dans l'Etoile du matin. Il serait puéril du reste de ne voir que le coté ridicule de ces doctrines bizarres. La croyance en une nouvelle terre, comme on parlait au temps de M.‘ Bourignon, est une des idées persis- tantes de l'humanité. Le judaïsme en est plein. Bien qu'elle ne paraisse pas dans le paganisme vulgaire que les poètes nous ont fait connaître, les mystères s'en inspirent. Dès les premiers jours du christianisme, Saint-Jean s’en fait le chaleureux interprète. Les plus grandes hérésies : Gnostiques, Millenaires et Manicheens reposent sur cette base. Sous le nom d'Evangile éternel, on la retrouve dans tout le moyen - âge. L'auteur de la théo- logie germanique, ami de Luther, si ce n’est Luther lui-même, ja pose dès le début du protestantisme qui la voit inspirer bien des sectes: les Anabaptistes, entre autres, et tous les voyants depuis Bæhme jusqu'à Swedenborg. Dans notre époque même, qui se dit si positive la croyance au renouvellement du monde se retrouve énergique et vivace; seulement on ne compte plus pour l'opérer sur le concours de la Divinité et des esprits, on l'attend comme conséquence des découvertes humaines. Des esprits forts assurent que l’organisation sériaire des travailleurs ou la gratuité du crédit vont faire disparaître la misère, éclairer les esprits, rendre inutiles les médecins et les juges, et réaliser le bonheur commun. L'antiquité grecque et romaine d’une part, le catholicisme de l'autre ont seuls constamment écarté ces croyances. Aussi l’un s'est-il renfermé dans un détachementyfuneste de tout ce qui tient à 24 (370 ) la terre, tandis que l’autre s’abandonnait à un sensualisme sans issue. La condition de l’homme est en effet si triste en ce monde, son état finiet imparfait l’expose à tant de mécomptes , qu'il a be- soin , pour ne point se décourager, d'y entretenir des espérances ou des illusions. Celui qui les appuie de raisons spécieuses ou de convictions contagieuses, est toujours sûr du succès. Aussi, malgré la singula- rité de ses idées, ou peut-être à cause de cette singularité même , M.ete Bourignon prenait chaque jour plus d’empire sur son en- tourage. Gillemans et Noels la consultaient comme un oracle, De Cort n’en était plus que l'écho fidèle. Il se laissa persuader par elle que les enfants de son écoleétaient ensorcelés comme ceux de Lille. Agnès Sueesens refusa d'ajouter foi aux mêmes insinuations, quant à la maison qu’elle dirigeait et M.!2 Bourignon nous as- sure qu'elle mourut bientôt victime des sortiléges de ses pen- sionnaires. Notre mystique s’enivra de cet enthousiasme qu'elle inspirait. Elle regarda toutes ces âmes qui lui obéissaient comme des fils spirituels et se proclama mère des vrais croyants. Elle ne tarit pas en tendres et généreux sentiments à leur égard : « Si vos en- nemis vous otent tout le temporel , bénissez-en Dieu avec joye, écrit-elle à l’un d'eux, vous n’aurez pour cela nécessité de rien ; car tout ce que j'aye dans le monde est pour vous assister au besoin. » (Lumière née en ténèbres. & 17.) « Je les appelle mes enfants pour scavoir que Dieu les veut engendrer par le moyen des lumières qu’il me donne. » (Idem. III. Avis au lecteur.) Je vous ayme comme la prunelle de mes yeux, parce qu'ayant connu la vérité, vous l'avez suivie. » (Là même. III 27.) Et ail- leurs, en plaisantant : «Vous me direz que vousêtes enfant, mais » vous têtez si goulument que le laict vous suffoque. » (Tombeau de la fausse théologie. { 6.) Puis s’égarant dans cette voie, M.°l!e Bourignon en vint à croire à une sorte de conception spirituelle de ces âmes. Une citation va 2 C4 CADRES V) ( 371 ) nous rendre cette imagination plus sensible : « Un dimanche après » dinée, étant enrecueillement, on me dit: pourquoi ne souhaitez- », vous pas des enfants. Aussitôt voici le pasteur (Est ce De Cort?) » dans mon idée si fortement imprimé comme s’il se fut jeté à corps » perdu dans mes bras, je fus surprise et dis : des hommes, Sei- » gneur, seront-ce des hommes. Je pensay de concevoir cinq » personnages que je tiens gens de bien. » (Parole de Dieu. 158.) Plus tard, ces mêmes phénomènes de douleur «se reproduisirent » chaque fois que par le moyen de ses escrits ou deses paroles, » Dieu opérait en quelqu'àäme. » (Appel de Dieu.) Elle grossit ainsi pendant toute sa vie la liste de ses fils spiritueis et se crul bientôt la femme de l'Apocalypse, (Livre XIL.) plus que celà même. « Je suis l'épouse du Saint-Esprit, je ne le peux plus celer. Croyez » en ce qu'il vousplaît. Si ne désirez être digne d'entrer au ban- » quetnuptial, Dieu est témoin qu'il n’y a pas de ma faute.»(Lu- miére née en ténèbres. IT 30.) Et ses disciples entretenaient par leurs flatteries ces illusions qui ont contribué à égarer l’esprit de M.e'e Bourignon. (Voir la préface de ia Lumière du Monde, par De Cort, et la préface apologétique de Poiret.) Nous épuisons à dessein ce triste sujet pour n'avoir plus à y re- venir. Nous allons maintenant retrouver cette femme étrange dans son énergie et sa supériorité. k Elle n'abandonnait pas son plan de communauté évangélique, et comme De Cort avait des terres en Danemarck, elle résolut de s'y rendre pour mettre ses projets à exécution. Elle partit en con- séquence pour Amsterdam, et trouvant la navigation interrompue par les mauvais temps, elle se résigna à attendre dans le recueil- lement que la saison fût meilleure. Elle se logea en conséquence avec De Cort et quelques amis dans une maison située à l’extré- mité de la ville. Mais il n’en devait pas être ainsi. Amsterdam était alors un centre intellectuel très-brillant. La liberté civile, la liberté de la presse et la liberté religieuse n'étaient point absolues en ce pays (372 ) comme on la dit souvent, car nous voyons les niagistrats inter- venir pour forcer un Quaker à fermer ses magasins le dimanche. Mais pourtant ces libertés étaient si larges eu égard à l’état des autres pays du continent, que la Hollande était devenue le re- fuge de tout ce qui était persécuté en Europe, c'est-à-dire, de tout ce qu'il y avait de plus exalté, de plus ardent, de plus bardi. Dans ce milieu, M.‘"e Bourignon ne pouvait manquer d'être dis- tinguée. La supériorité de son esprit, l'élégance de sa plume, l'élévation mystique de ses convictions attirèrent vers elle tous les esprits, surtout lorsqu'on connut soit ses manuscrits, soit quelques fragments de la Lumière née des ténèbres qu’elle se décida à faire imprimer, car elle s'était aussi proposé ce but en venant en Hol- lande. Elle voulait donner la publicité aux ouvrages qu'elle avait écrits depuis qnelques années, et que nous avons indiqués. En Brabant elle avait à craindre, dit-elle , d'être jetée dans les pri- sons de l’inquisition. C'était un monde bien nouveau que celui dans lequel elle en- trait ainsi triomphante, Pour la première fois, elle se trouvait avec des Protestants. Elle demeurait dans une cour où il y avait six lo- gements occupés par six personnes de religions différentes. Son médecin l'avait fait connaître à ses voisins, et elle avait été tout étonnée de voir que ces gueux (on voit que les Protestants hol- landais conservaient encore le nom que la cour d'Espagne leur avait donné) n'étaient pas comme des sauvages , « ce qu'elle avait pensé en sa jeunesse. » (Tombeau de la fausse théologie. IE 1. Du reste Dieu l'en avait prévenue, et comme elle hésitait de se rendre dans un pays protestant, l'esprit lui avait dit : « Ce ne « sont pas les différences vulgaires de religion qui donnent le « salut, mais c’est l'amour de Dieu et la vertu , lesquels il faut « aymer en toutes personnes qui y aspirent, sans avoir égard à « quelque religion extérieure dont ils fasseni profession. » (Pa- role de Dieu. | Elle trouve donc là des Calvinistes qui croient que Jésus-Christ (373) asatisfait pour eux, ce qui les rend trop sürs d'eux-mêmes et en- clins au péché et aussi aux erreurs de la prédestination. Des Ana baptistes de la réforme de Menno, lesquels croient qu'il faut être baptisé après avoir l'usage du plein jugement... elles les compare aux Jésuites de nos quartiers, car ils sont politiques et réglés selon le monde, mais ils ne sont pas renés en esprit. Des Juifs qui attendent encore le Messie. Des Cartésiens qui ne croient qu’au dieu que leur raison peut comprendre. Des Sociniens , les- quels méprisent tout-à-fait Jésus-Christ, et ne croient pas à un Dieu créé ; elle les a renvoyés sans réponse, car des demandes si im- pertinentes n’en méritent pas. Des Trembleurs qui se croient illuminés, ne saluent et ne rendent hommage à personne , ce qui n'est pas l’esprit de charité et de bonté. Des Luthériens qui se disent évangéliques sans l'être plus que les Romains. Des Armi- niens qui sont les plus universels et les plus accommodables des Protestants (on sait, en effet, combien ils faisaient profession de tolérance }, mais ils lui semblent un peu superbes et croyant d’a- voir la grâce de Dieu en leur pouvoir. Des prophètes et d’autres se disant envoyés de Dieu. { Extrait et résumé de la première lettre, deuxième partie du Tombeau de la fausse Théologie. ) En effet, rien n'était si extraordinaire que ce mouvement. Les Luthériens et les Calvinistes étaient les puissants de ce temps. La querelle des Gomaristes et des Arminiens s'était apaisée. L'attention se concentrait sur deux sectes : les Quakers alors paissants , et qui pourtant troublaient déjà les assemblées en pro- phétisant , tenaient tête à l'autorité et refusaient de répondre à la justice ; puis les Anabaptistes de la réforme du célèbre Menno, homme remuant , capable et énergique , dont Charles-Quint avait mis la tête à prix. Les Cartésiens encore récents, puisque leur maitre venait de mourir , partageaient avec ces deux sectes l’at- tention publique. Ensuite venaient ceux que Melle Bourignon ap- pelle Prophètes et envoyés de Dieu, groupant autour d'eux des disciples peu nombreux, mais fanatiques. (374) C'était Labadie, ce fougueux hérétique, d’abord catholi- que ardent et élève des Jésuites, plus tard protestant et mi- nistre du saint évangile à Middlebourg, orateur passionné, novateur bardi, toujours errant , pratiquant sans cesse le prosé- lytisme et poursuivi sans relâche par la persécution. Puis Jean Rothé qui succéda à Labadie et qui poussant plus lon que lui les extases ct les visions se croyait arraché de son lit par des anges qui le forcaient à écrire. Il fut mis en prison à Amsterdam et abjura pour jamais ses erreurs. L'un de ses amis, Quirin Kublmann , qui était venu le joindre , guidé par des visions , fut moins heureux : après l’existence la plus agitée, après avoir par- couru toute l'Europe et une partie de l'Asie, il fut mis à mort à Moscou , où il était aller prêcher ses doctrines. Il y avait aussi plusieurs femmes visionnaires dont la plus célèbre était une Tanneke Denys, qui se disait le nouvel esprit de Bæhme. On se sent pris de vertige en lisant dans le Renouvellement de l'Esprit évangélique \KI], diverses lettres), le tableau que Me Bourignon a tracé de ce monde étrange. C’est pourquoi nous avons réuni ici tous ces visionnaires, bien qu’elle ne les ail connus que succes- sivement et dans divers lieux. Toute une partie de la population semble être sous le charme d’une puissance magique , ne s’entre- tenir, ne se préoccuper que de théories mystiques, de visions fantastiques , et vivre dans un monde tout différent de celui que nous habitons. Mele Bourignon vit tous ces personnages , chacun la quitta convaincu qu'il en ferait une disciple précieuse. « Les Trembleurs « disaient que j'étais de leur sentiment, vu que je parlais de lu- « mière du Saint-Esprit, les Cartésiens , de la raison , les Luthé- « riens, de l'Evangile, les Calvinistes, des vices de l’église.» Quant aux visionnaires , ils devaient naturellement la croire des leurs. Labadie surtout l’exaltait moyennant, ajoute-t-elle , qu'elle se soumît à sa direction. {Avis et Instructions salutaires, I. } II s’é- tait déjà attaché une femme exaltée et bien autrement célèbre que Melle Bourignon. C'était Me Schurman, celle qu'on appelait la (375 ) Sapho du Nord, qui était tout à la fois théologienne , érudite, orientaliste , philosophe , poète , artiste, et ce qui est bien plus, femme d'esprit ; qui entretenait des correspondances avec la reine Christine, la princesse Marie de Gonzague, la duchesse de Lon- gueville, la princesse Elisabeth, le cardinal de Richelieu, Guillaume Penn, Naudé, Saumaise , Huygens , Gassendi, Vos- sius, Mersenne et tous les personnages célèbres de son temps ; dont les ouvrages comprennent, outre son portrait au burin, par elle-même, de l’hébreu , du grec, du français et des vers latins dont Balzac disait : « Je ne crois pas que cette Sulpitia que Mar- « tial a si hautement louée en fit de si beaux et si latins. » La rencontre de ces deux femmes dut être bien intéressante. Melle Bourignon , plus énergique de caractère et plus faite à la réflexion se trouva supérieure à cette femme célèbre et la traita en écolière : « J'ai un jour, dit-elle, conféré avec la demoiselle « Schurmans (sic), laquelle on disait la plus sage femme de « Hollande pour avoir passé toute sa vie ès estudes de lettres et « sçait presque toutes sortes d'arts et de langages, mais auprès « de moy, elle ne scavait presque ni français ni flamen , à cause « que je raisonnois autre chose que ce qu’elle avait tiré des « livres de controverse qu'elle avait lus. » (Témoignage de vérité, IT, lettre 27.) Elles entretinrent quelque temps, sur des questions théologiques, une correspondance aigre-douce dont on peut juger par deux lettres de Melle Bourignon, insérées dans le Tombeau de la fausse Théologie (III, 3 et 4, 26 mars et 6 avril 1668.) Je n’ai pas trouvé dans les œuvres de M°1e Schur- man, ses réponses. On peut se les figurer par la lecture de ses écrits et il aurait été curieux d'opposer son style fleuri, acadé- mique à la naïveté de M°1e Bourignon. Celle-ci, revenant sur son thème ordinaire , lui dit qu'il vaut mieux prier pour avoir la grâce de Dieu que disputer pour savoir comment on l’a : « Il vaut mieux « s’estudier pour estre soumise. et abandonnée à Dieu , que pour « être sage ès lettres , » ajoute-t-elle méchamment. (376) Cet esprit d’éloignement pour les questions dogmatiques se manifeste, en effet, de plus en plus chez Melle Bourignon, au contact de ces diverses écoles. « Je cherche après la vray église « sans corruption, mais je ne l’ay encore trouvée nulle part, « sinon en la doctrine de Jésus-Christ , laquelle est toute belle et « sans macule aucune... Je n'ay garde de chercher Dieu aïlleurs « craignant qu'il ne m'arrive comme à l'espouse des canliques qui « cherchant son bien-aimé par les rues, fut battne et maltraitée des « gens de garde. Jaime mieux me retirer dans la chambrette de « mon âme. » (Tombeau de la fausse Théologie , I, 4.) Et elle conclut : « Voyant en toutes sortes de religions des abus, « comme en la réforme de Calvin trop de commodité à suivre le « naturel et aux Luthériens trop de partialité et ès Romains, « comme nous sommes trop d'embarras et de difficultez..…. ayant « considéré toutes sortes de religions... je n'ai rien trouvé de « solide non plus en l’une qu'en l’autre, et partant je ne saurais « resoudre à suivre autre chose que les enseignements de Jésus- « Christ. (Là même) Je suis dans un pays où tous ont une ombre « de vérité tirée de l'Écriture, mais aucun ne l'entend parfaite- « ment. Ce qui me semble tout le meilleur , ce sont les personnes qui ont quitté toutes sortes de sectes et de religions , et sont attendans et aspirans après la véritable vérité. » ( Lumière née en Ténébres , INT, 41.) Les sectes protestantes virent donc bien vite qu’elles ne pou- vaient compter sur Melle Bourignon. « Les réformateurs de l’église & romaine ont bien vu avec leur raison naturelle qu’elle était re- « lachée et ténébrense ; mais en voulant la réformer, ils l'ont e difformée davantage et fait comme celuy qui veut moucher une « chandelle-pour en avoir plus de lumière et l'éteint entièrement.» (Lumière née en Ténèbres, LEE.) Elle entra donc bientôt en lutte avec les Quakers , les Menno- nistes , les Calvinistes et les Luthériens, comme nous lé verrons plus loin. 2 2 (377) Quant aux visionnaires, ils ne tardèrent pas non plus à l’aban- donner, quand ils virent qu'ils ne pouvaient la dominer. Labadie J'attaqua furieusement après l'avoir tant recherchée et tant exaltée ; il défendit à ses disciples d'entrer en relation avec elle, même de lire ses livres. De son côté, elle ne le ménagea point ; elle alla jusqu’à l'accuser d’avoir pris avec les femmes de son école des privautés intimes qu'il faisait passer sur le compte de la charité chrétienne. (Renouvellement de l'Esprit évangélique, IL; De toutes ces querelles que souleva Ml Bourignon , la plus vive et la plus curieuse est celle qu’elle eut avec les Cartésiens. A la tête de ceux-ci se trouvaient Heydanus et Burmanus. ( Sans doute Antoine , le père du célèbre Pierre, car on sait combien cette famille des. Burmann a été féconde en savants et en philo- sophes. ) Leur rationalisme inspirait à notre mystique une profonde horreur. « Elle tient ce sentiment , que Dieu peut se comprendre « par la raison, pour athée; car tout ce qui peut se comprendre « par la raison n'est pas Dieu. » (Tombeau de fausse Théo- logie , Il, {. ) Et s’expliquant plus amplement { dans le même ou- yrage , L, 12) : « Je tiens pour erreurs et séductions tout ce qui « sort de l'étude et de la sagesse humaine à cause que ce qui est « naturel est brutal et nullement divin; car les bêtes ont comme « les hommes un jugement naturel à proportion pour régir et « gouverner son semblable. Une poule dirige ses poussins avec « plus d'adresse que ne font souvent ceux qui se disent directeurs « d'âmes.... A cause que vous croyez de voir clair en la raison « vous estes aveugle , d’un aveuglement presqu'incurable, d’au- « tant que ce qu'on voit seulement par la raison ne peut être « qu'une chose corporelle et limitée. Or Dieu estant un esprit © infini et incompréhensible , ne peut jamais être compris par une « raison finie et il ne serait pas Dieu s’il pouvait estre compris « en nostre raison et celuy qui ne cognoit pas d'autre Dieu que « celuv qu'il peut comprendre avec:sa raison, estun parfait (378 ) « athée. La foy au contraire n'est pas une qualité naturelle « comme est nostre raison, ains une qualité divine, qui procède « de Dieu... Dieu, foy, Saint-Esprit et lumière divine n’est « qu'une même chose bien qu'on la nomme de termes divers ; » et nulle créature humaine ne naist dans le monde sans appor- « ter en soy cette lumière de foy. » On conviendra que cette argumentation bien qu’elle ne soit pas présentée sous la forme dogmatique est forte et élevée. Il est vrai que la raison y est entendue dans un sens très-restreint puisqu'on ne lui donne à connaître que les choses corporelles et limitées. Mais bien que les Cartésiens l’entendissent dans un sens plus large et plus élevé, ils n’en faisaient pas moins une faculté naturelle , propre à l'organisme psycologique de l’homme et non une communication divine comme la foi. Pour sortir de cette diffi- eulté et donner à la raison un caractère de certitude absolue on est venu à la considérer comme impersonnelle , puis comme exté- rieure à l’homme , et enfin comme Dieu lui-même. Déjà du temps de Melle Bourignon , un Cartésien écrivit devant elle, sur un mor- ceau de papier , le mot : entendement , et lui dit : Zl n'y a pas d'autre Dieu. (Tombeau de la fausse Théologie et Sainte-Visiere.) Il semble done qu'elle entrevit et combattit surtout dans le Cartésianisme les conséquences que Spinosa et les écoles alle- mandes modernes allaient en tirer, ainsi que la déchéance de la foi. Poiret va plus loin encore dans sa colère contre la doctrine de Descartes, et avoue cependant avoir été atteint lui-même de cette maladie dont la lecture de saint Jean de la Croix a pu seule le guérir (on sait, eneffet, qu'il a écrit des ouvrages car- tésiens). Il raconte la mort d’un professeur d'Amsterdam, qu'il ne nomme pas et qui à ses derniers moments réclamant sans cesse les prières de M.°l* Bourignon, s’écriait : © mon enfen- dement, où m'as-tu conduit ? A ces attaques répondirent et les Cartésiens et les Protestants. (379 ) Ces luttes réitérées aliénèrent tous les partis. Ils se liguèrent pour perdre leur ennemi commun et en eurent bientôt trouvé les moyens. $ Nous avons parlé des terres que de Cort possédait en Dane- marck et que M.‘ Bourignon destinait lorsqu'elle quitta la Belgique à devenir le siége d’une communauté évangélique. Mais bien des obstacles se rencontrèrent quand il s’agit de se mettre en possession. Ces terres étaient une partie de l’île de Noorstrand, située dans le duché de Holstein et longeant le Jutland. Des parents de de Cort avaient concu le projet d'endiguer cette île et en avaient obtenu l'autorisation du gouvernement danois. De Cort lui-même y avait sacrifié toute sa fortune, assez considérable, et avait acquis ainsi la propriété de quelques-unes de ces terrés , la dîme sur d’autres. Mais ayant pris pour ces travaux des arrangements qui surpassaient ses forces , il se trouva poursuivi de toutes parts et fit l'abandon de ses biens à l'Oratoire de Malines, dont il était supérieur, à charge par cette communauté de satisfaire ses créan- ciers. Melle Bourignon, qui avait l'esprit des affaires et qui arriva à Gand quand les choses en étaient là, montra à de Cort quel mar- ché désavantageux il avait fait, sacrifiant ainsi toute sa fortune, d'autant plus que l’Oratoire ne se pressait pas de payer les créan- ciers et le laissait de nouveau exposé aux poursuites. Elle le poussa donc à plaider , rédigea des requêtes, et le conseil de Malines d’une part, la cour de Gottorp de l’autre, relevèrent de. Cort de ce marché {sans doute pour cause de lésion ou d’inéxé- eution), et lui accordèrent un an pour rembourser aux pères de l'Oratoire les sommes qu’il en avait reçues. Il se rendit alors près des participants, ceux qui comme lui avaient contribué à l’endiguement, afin de prendre de nouveaux arrangements. Tel était quant à lui le but personnel de son voyage à Amsterdam. ( 380) Mais l'Oratoire voyait avec regret ces biens lu échapper. On y avait en outre établi du consentement de De Cort les Jansé- nistes expulsés de France, il était à craindre qu'ils ne pussent s'entendre avec M.le Bourignon qui voudrait commander là en maître absolu. Il est vrai que l’exil des Jansénistes était levé, la persécution avait momentanément cessé , ils étaient presque ren- trés en faveur, Arnault venait d’être présenté à la cour , mais tout cela n'avait rien de bien solide, l'avenir le prouva. Quelques pères actifs et capables, ainsi que des laïques qui leur étaient attachés entreprirent donc contre De Cort une lutte qui pût l'empêcher d'arriver à ses fins. A leur tête se mit un per- sonnage assez connu dans l’histoire de ces temps, c’est de Saint- Amour, se faisant appeler Louis Gorin, autrefois recteur de l'Université de Paris, secrétaire du grand Arnauld comme on disait alors. C’est lui qui avait écrit le Journal de ce qui s'est fait à Rome touchant les cinq propositions. Ouvrage que les Elze- viers imprimèrent, qui fit grand bruit en son temps et fut con- damné par arrêt du Conseil à être brülé par la main du bourreau. Il prétendait avoir acheté.d'un père Patin, muni de la procuration de De Cort les terres de Noordstrand, moyennant la promesse d'un revenu déterminé lequel ne pouvait être atteint. Il deman- dait la résolution et la restitution. Il réunit à sa prétention les participants mécontents et obtint du magistrat d'Amsterdam l'arrestation de De Cort et sa détention dans la maison pour dettes. Celui-ci y resta six mois sans que nulles démarches, nulle offre de caution pussent le faire mettre en liberté. M.1e Bouri- gnon rédigea une suite de mémoires éloquents qui composent le livre intitulé : L'Innocence reconnue et la Vérité découverte. (1669 à 1671). Rien n'aboutit. Enfin quelques parties fatiguées * ou apitoyées se désistèrent et le magistrat signa l'ordre d’élar- gissement. De Cort se retira en Danemarck, où il mourut deux mois après environ empoisonné par un inconnu qui s'était présenté pour le (381 ) guérir de la goutte. C'est du moins ainsi que le prétendent Me Bourignon et Poiret. Mais on sait combien leur imagination exaltée doit rendre leurs allégations suspectes, Le testament de De Cort fut ouvert en vertu d'une ordonnance de la cour de Gottorp. Aux termes de cet acte M.ele Bourignon fut reconnue légataire universelle et autorisée à accepter sous bénéfice d'inventaire. L'oratoire fit de nouveau valoir ses pré- tendus droits de cession. M.®le Bourignon leur demanda un compte. Un ordre fut ouvert à Gottorp et leurs prétentions rejetées. (Té- moignage de vérité. IL. 34.) Cependant, ils restaient toujours en possession et M.!e Bourignon menacée à Amsterdam , forcée de se cacher pour éviter les embuches de ses ennemis et de.sortir de la ville blottie dans un panier porté sur une civière, se décida à aller en Danemarck suivre sa cause de plus près. Elle se dirigea d’abord sur Harlem, puis s'embarqua à Enchuy- sen, vint débarquer à Tonningue, s'arrêta à Sleevisch et s'établit à Hussun. Là, sa réputation s'étant répandue, elle se vit entourée d'amis dévoués, de disciples fanatiques. Déjà parmi ses fidèles, plusieurs avaient signé à Harlem un acte curieux par lequel il s'engageaient àla suivre partout avec obéissance, comme un bon capitaine. Elle avait perdu à Amsterdam un ami récent, mais plein de dévoue- ment, c'était Comenius, si célèbre au XVIII siècle par ses travaux originaux sur les langues et l’enseignement. Elle s'était attaché Stiénon, esprit sûr ; Christian Hoburg, écrivain allemand remar- quable qui se fit le traducteur de ses livres; Nicolas Hennings , riche marchand d'Hambourg, la plus forte tête du parti, dit Bayle; ilavait quitté femme et position, famille et fortune pour suivre sa mère spirituelle; le fameux mystique Poiret dont nous aurons encore occasion de parler ; et le grand anatomiste Swam- merdaam qui. inséra les doctrines de M.tlle Bourignon jusque dans ses écrits scientifiques, notamment dans son Ephemeri vita et que l’on voit dans ses lettres bizarrement partagé entre le soin ( 382 ) de son salut et la sollicitude pour ses collections; puis, bien d’autres moins célèbres, des gens de justice et des gens de guerre, des marchands et des mariniers , des paysans et des savants, de grands seigneurs et des hommes du peuple, des vieillards et des enfants, jusqu’à un maître de danse qui veut avec toute sa famille suivre notre mystique.(Pierres de la nouvelle Jérusalem.) Car à notre époque positive, on ne se doute pas combien le soin de l’autre vie préoccupait jadis nos pères dans toutes les classes de la société. M.clie Bourignon s’occupa à revoir et terminer, pour les livrer à l'impression, les différents ouvrages qu'elle avait écrits ou pro- jetés à Amsterdam. Ce sont encore des recueils de lettres, tels que la Confusion des ouvriers de Babel, comment les ouvriers qui se croyent appelés à édifier s'opposent le plus aux vérités, et ta- chent chacun d'édifier sa propre confusion. (Lettres d'Amsterdam, Hambourg et Lutzhourg, 1668 à 1680.) Le Traité admirable de la solide vertu laquelle n'est pas connue des hommes de maintenant. (datées de Sleevisch, Hussum, Hambourg, 1672 à 1677.) Puis des livres de polémique comme l’Antechrist découvert qui montre le temps dangereux auquel nous vivons maintenant. (1668 à 1680. On voit que tous ces ouvrages ne sont terminés que longtemps après qu'ils sont commencés, ils paraissaient par parties. } La dernière miséricorde de Dieu (1668) contre les vices du sacerdoce. Contre les Cartésiens, la Sante visiere pour découvrir comment les hommes ont perdu la vue et la lumiére de la foi dans une mis- sive adressée à tous les hommes qui sont et seront créés de Dieu, puis l’histoire des événements de sa vie qu’elle intitule : Vie exté- rieure (1668). Mais ces loisirs durerént peu. La guerre de la France contre la Hollande, était alors à son moment le plus animé. Ce dernier pays était ravagé par nos armées. Les maux de ce temps rame nèrent beaucoup d’âmes à la religion et l'on vit arriver chez M.1le Bourignon des familles entières de la Frise et de Hambourg , qui venaient lui demander à vivre sous sa direction. Elle loua à cet ( 383) effet une grande maison où elle les établit. Et il paraît que c’é- tait alors la coutume des chefs d'école, car Labadie et d’autres illuminés trainaient ainsi après eux une foule de disciples. Mais comme ceux de ce dernier étaient riches, on y menait une vie somptueuse. (Renouvellement de l'esprit évangélique. IL.) Il n’en était pas de même chez M.tlle Bourignon. Elle voulut en vain plier à l’obéissance, aux abstinences et à la vie chré- tienne, cette foule qui n'avait cherché là évidemment qu'un re- fuge contre les maux de la guerre, et dont la piété s'était éva- nouie avec le danger. Rien de misérable comme les discussions d'intérêts, les reproches , les trahisons dont elle fut assaillie par ces gens de peu de foi dont quelques-uns lui avaient témoigné tant de reconnaissance et auxquels elle s'était attachée. EnGn la position devint intolérable. Elle renvoya les uns chez eux et dirigea les autres, les plus nécessiteux, vers le Noordstrand où ils se livrèrent à la culture des terres. Les mécontents exci- tèrent les ennemis de M.‘le Bourignon , et elle se vitattaquée de toute part. Elle répondit à tout avec une incroyable activité, elle écrivait ses réponses, les faisait traduire en allemand, en fla- mand, en latin, et les faisait imprimer chez elle sous des presses qui lui appartenaient. Cette dernière circonstance attira l’attention de l'autorité. La cour de Gottorp donna ordre au magistrat d’Hus sum de tenir information sur les comportements de M.elle Bouri- gnon et de ses amis. Le duc de Holstein qui jusqu'alors lui avait été favorable l’abandonna et fit fermer son imprimerie. Elle crut devoir se retirer de ses domaines et se refugia à Fleensbourg. Mais là le peuple excité par le clergé protestant commença a s'agiter ayec tant d'animosité que M.elle Bourignon dont la yie était menacée, dût s'enfuir en toute hâte. A peine avait-elle quitté Fleensbourg que le magistrat parvint à connaître le lieu où elle s'était tenue cachée , en fit la visite, saisit les livres et les papiers qu’elle avait laissés et condamna au bannissement la veuve qui lui avait offert asile. La pauvre femme 1674 (384 | faillit être lapidée par le peuple au sortir du tribunal. M.e1e Bou- rignon envoya aussitôt un de ses amis pour protester contre ces violences, mais il fat arrêté et mis en prison. On prétendit que la lettre dont il était porteur était injurieuse et diffamatoire. Il fut condamné à l'amende et jusqu'à payement retenu chez le bour- reau, chargé de fers. puis forcé d'assister à l’autodafé de la lettre et des livres de M.elle Bourignon qui eut lieu sur une place pu- blique et enfin banni de la ville. Les mêmes faits se reproduisaient à Hussum , où la persécutée était de retour. Le fiscal de Sleevisch, Kirchman , se rendit chez elle, brisa ses presses dont on prétendait qu’elle continuait à se servir, enleva ses livres, ses papiers et même ses effets, lui cau- sant, dit-elle, un préjudice de plus de six mille florins. Enfin, le duc de Holstein décréta contre elle une prison perpétuelle , sans qu'elle en süt le pourquoi, et ordonna qu'elle fût conduite dans la forteresse de Tonningue L'ordre d’arrestation avait été envoyé au général major de toute la milice du pays, nommé V anderwyck. C'était justement un ad- mirateur de M.‘ Bourignon. Il se rendit aussitôt près du duc, dissipa les calomnies intéressées du clergé protestant , et non-seu- lement fit révoquer l'ordre, mais assura à la pauvre femme la protection du gouvernement. Il alla lui porter cetie bonne nou- velle, mais l'engagea en même temps à quitter Hussum, où le peuple fanatisé contre elle pouvait lui faire un mauvais parti Elle se retire donc à Sleevisch sur la voitare d’un charretier qui en route est forcé de la faire passer pour sa femme et en con- séquence de se coucher près d'elle, tout habillé, il est vrai. Elle ne trouva d'abord personne dans la ville qui voulüt la loger, ni même lui vendre une botte de paille pour son coucher. Mais peu à peu sa position s’améliora, surtout à mesure que la protection du duc devenait plus évidente. Elle rédigea alors pour calmer les scrupules de ce seigneur, auquel on l'avait représentée comme (385 ) n'ayant aucune religion, la profession de foi qui se trouve repro- duite en tête de tous ses livres : « La confession de foy de M.flle Bourignon qu'elle présenta à » Ja cour de Gottorp, pour l’opposer aux bruits calomnieux que » les ecclésiastiques répandaient pour rendre suspecte la pureté » de sa foy. » 1. Jesuis chrétienne et crois tout cequ'un vrai chrétien doit »: croire. ».2. Je suis baptisée dans l’église catholique au nom du Père, » au nom du Fils et au uom du Saint-Esprit. »13. Je crois les douze articles du Credo, ou le symbole des » apôtres et ne doute en aucun article d'iceluy. = » 4. Je crois quedésus-Christ est vrai Dieu, qu'ilest aussi vrai » homme et qu'il est le sauveur et rédemteur du monde. » 5. Je crois en l’évangile, aux saints prophètes et entoute » l'écriture, tant le vieux que le nouveau testament. »: Et je veux vivre et mourir en tous points de cette croyance ; ce que je proteste devant Dieu et les hommes à tous ceux qu'il » appartiendra. » En foy de quoy j'ai signé cette même véritable confession de »* ma main et cachetée de mon cachet. A Sleesvichk, le 114 mars » 1675. » Le due lui permit de faire réimprimer les livres qui lui avaient été pillés à Hussum , afin de répondre à ses ennemis. C’est alors qu'elle se livra à la polémique la plus vive contre les diverses sectes protestantes. C’est ce qui explique comment elle n’a pas été condamnée par l'église romaine. Comme elle l'indique dans la Pierre de touche : « Les persécutions des Luthériens lui ont fait » thonneur parmi les Catholiques. Ils en eussent fait une martyre, » si-elle eût été brûlée avec ses livres. » On yoit.en effet souvent que ses ouvrages sont examinés , on ne voit pas qu'ils soient frap- . pés de condamnation. Mile Bourignon avait déjà eu affaire avec les Mennonistes. 2 25 ( 386 ) L'un des plusillustres, Serrarius, Pierre Serrurier, prédicateur des réformés à Cologne, avait été l’un de ses plus chauds par- üsans. Il voulait publier ses écrits, et y joindre des préfaces qu'il avait préparées; mais quand il vit qu'il ne pouvait l'en- traîner dans son parti, il se sépara d'elle , chercha vainement à entraîner Comenius, l’un de ses anciens amis, réussit au moins à lui aliéner le traducteur flamand qu’elle employait d'ordinaire, et excita contre elle Duroeus, célèbre pasteur protestant qui par- courait alors le Palatinat, pour son projet de réunion des Luthé- riens et des Calvinistes. L'histoire de ces luttes et la réfutation des théories et des attaques de Serrarius se trouve au Tombeau de la fausse théologie. (XL 14 et autres.) Ces lettres avaient été publiées séparément en flamand : de twaelf lasteringen (les douze accusations.) Ensuite vinrent les Quakers. Un anglais établi à Amsterdam, Benjamin Furly, se fit leur organe et écrivitun pamphlet intitulé : Anthoinette Bourignon découverte et son esprit connu par ses fruits qu'il n'est pas de Dieu clairement montré hors de ses propres écrits. Celle-ci en eut à peine parcouru les premières pages, qu'elle y répondit par un libelle décousu , plein de dé- sordre et de redites, mais étincelant çà et là de verve et de vi- gueur. C’est l'avertissement adressé au peuple contre la secte des Trembleurs, où sont solidement établis les fondements de la puis- sance et de l'authorité de toutes sortes de supérieurs.(1674) Ce ma- nuserit fut pillé à Hussum, elle le refit sur l'édition flamande et le publia avec l'autorisation du duc. Ce qu'il y a de plus curieux dans cet ouvrage , est la théorie des pouvoirs temporels. On sait quel mépris avaient les Quakers pour toutes les puissances de ce monde. Aussi Furly reproche- t-ii à Melle Bourignon les respects qu’elle témoigne au duc. Un grand seigneur, dit-il, n’est pas plus qu'un mendiant. Celle-ci répond que c’est là une hérésie, que tout pouvoir vient de Dieu. C'est une grâce du ciel quand il estbon; c'est un châtiment { 387 } quand il est mauvais. Dieu ayant fait les nobles et les seigneurs pour commander , leur a donné les qualités pour le faire suivant le bien des peuples, à moins. que ceux-ci n’en soient indignes , et c'est encore alors par la volonté de Dieu que l'autorité devient tyrannique. « La vertu a d’abord fait les nobles, et Dieu a donné » à leurs héritiers des grâces particulières, parce qu'ils eu avaient » plus besoin et que la justice de Dieu ne peut manquer de don- » ner ses grâces selon la nécessité d'un chacun. Mais lorsqu'un » d'iceux n'use pas bien de ces grâces , c’est signe que les infé- » rieurs ont mérité la punition par leurs péchés. » Les Luthériens qui étaient en majorité dans le Holstein et qui formaient pour ainsi dire la religion officielle , attaquèrent à leur tour M.ee Bourignon. Deux prêtres se chargèrent de Ja ré- futer. L'un d'eux, Henry Burchard , pasteur luthérien à Slee visch, publia un ouvrage allemand , intitulé : Remarques chré- tiennes et fondées sur les hérésies blasphématoires d'Antoinette Bourignon. Christliche grundliche anmerkungen. Plus tard en s'aidant comme pour le précédent des lettres de Possevin et d’au- tres savanis, il en fit paraître un second : Nouvelles remarques. Widerhohte erzehldung. L'autre, Gérard Ouvw, pasteur luthérien à Fleensbourg, fit im- primer un énorme in-folio : Apocalypsis herœseos. Apocalypse ou révélation des hérésies par lesquelles Antoinette Bourignon a voulu empoisonner dans ses écrits les bons luthériens d Holstein. M.‘ Bourignon leur répondit et plus particulièrement au premier par la Pierre de touche pour connaître l'or de la vraie charité hors du métail du cuivre doré de la charité apparente. (1674). Enfin les Calvinistes eurent leur tour et elle écrivit les trois volumes du Témoignage de vérité opposé aux faussetés.et men- songes publiés pour détourner les hommes des lumières salutaires. {Une première partie de polémique, datée de 1673. Une seconde , ( 388 ) composée de lettres et mémoires écrits antérieurement, 1671 à 1679. Puis un énormerecueil de témoignages publics et particuliers rendus à la personne de D.€1e Bourignon.) C'était pour répondre aux imputations insérées par l'un d'eux dans la gazette d'Ham- bourg, sous ce titre : Vray pourtrait d'Antoinette Bourignon et second pourtrait, tous deux écrits par Berkendal, ministre à Altona. Nous avons parlé ailleurs des réponses que M.‘1e Bourignon adressa aux Labadistes, aux prêtres catholiques et aux Cartésiens. On peut en conclure que la plupart de ses écrits sont des œuvres de polémique. Elle porte dans ces ouvrages cette ardeur et cet éclat de style que nous avons signalés, mais l'absence de précision et de méthode surtout les rendent pénibles à lire.Elle les écrit généralement lorsqu'elle n’a-pris , elle en convient elle-même, qu'une connaissance incomplète et superficielle, du livre qu'elle réfute et n'en avoir souvent parcouru ou ne s'en être fait traduire que quelques pages. Aussi ce ne sont que des apologies perpé- tuelles de sa conduite et des répétitions fatigantes des principes qu'elle a déjà reproduits cent fois. Pas de suite, pas de liaison. Elle prétend que l'esprit qui la guide le veut ainsi et que, pour cela elle n’a jamais permis à ses amis de mettre un ordre scho- lastique à ses écrits. (Dernière miséricorde de Dieu.) Quant au fond même de cette polémique , elle roule sur des accusations d'hérésie, sur des discussions théologiques et enfin sur des reproches personnels au caractère de M.°2 Bourignon. Ses ennemis nous la représentent acariâtre, traitant avec dureté les élèves ou les malades confiés à ses soins, avare, avide, cap- tant les successions, plaidant contre ses parents, portant le dé- sordre dans les ménages, séparant les maris d'avec leur femme, les eufants de leur parents, enfin ils attaquent jusqu’à la moralité dé sa vie intime. Berkendal lui reprochant de n’avoir autour d'elle que des hommes , comme Labadie n'avait que des femmes, l’ap- pelle Jeune débauchée. (Témoignage de vérité, préface de Hase.) I à un côté vrai dans ces critiques. Il est certain que l’ima- ( 389) gination exaltée de notre mystique a dû souvent l'égarer et la rendre injuste à l'égard de ceux qui l’entouraient, lui faire illusion sur les persécutions dont elle se croyait l'objet, ne lui laisser voir autour delle qu'assassins soldés, domestiques achetés par ses ennemis, sorciers déguisés, émeutes organisées , magistrats égarés. Elle à pu par ce travers d'esprit donner lieu aux mesures rigoureuses qui ont été prises contre elle, La sin- gularité de son existence, la fréquentation continuelle, la de- meure commune même avec ceux qu'elle appelait ses fils spiri- tuels, la naïveté parfois cynique de son style ont pu donner lieu aussi à des reproches justes s'ils n’eussent été exagérés. Enfin on s'étonne de sa froideur , de son peu d'émotion dans les circonstances les plus graves de la vie, lors par exemple que sa famille en proie aux plus vives inquiétudes depuisplusieurssemaines vient la reprendre à Blatton, tandis qu'elle n’est préoccupée que de la crainte d’être découverte et ramenée chez elle. On est étonné aussi de l'insistance qu’elle met à combattre la libéralité et même la charité quand malgré les observations de ses enfants elle leur recommande sans cesse de ne rien payer trop cher aux marchands et de ne pas donner beaucoup aux malheureux : « Il vaut mieux » faire une charité spirituelle à leurs âmes en retenant ce qu’on », a, que de leur remettre en mains des biens pour leur servir à » pécher. » (Tombeau de la fausse théologie. IV. 26.) On a pu conclure de ces faits que M.2!e Bourignon manquait des qualités du cœur. Cependant d’autres traits, son zèle pour le service qui lui est confié, l'affection qu'elle inspire à tout ce qui l'approche démentent cette conclusion. On sait combien l'amour de Dieu est. exclusif dans, la secte catholique, combien il exige de renon- cement aux affections de ce monde. Elle en fait profession. « Pour » moi, si j'avais mille royaumes du monde, mille pères, mille mères et autant de frères, et sœurs ou amis, je les abandon- nerois volontiers tous à la fois pour jouir des douceurs du repos ».intérieur, lequel est un convive perpétuel où l’âme se récrée LA 1-2 ( 390 ) » avec son Dieu, en attendant une récréation éternelle. » (Lu- mière née en ténèbres , IV. 25) Ainsi le mysticisme, contraire- ment à ce que l'on croit généralement , développe l'imagination bien plus que le cœur. Et c'est par ces tendances qu'il faut expliquer et juger M elle Bourignon. Pendant qu'autour d'elle se livraient ces luttes , le pays où elle se trouvait devenait le théâtre de guerres sérieuses. La Suède avec l'appui de la France attaquait le Danemarck précisément à cause de ces provinces du Holstein qui ont été sans cesse un sujet de querelles entre ces pays voisins. M.cle Rourignon ne trouvant plus là le repos dont elle avait besoin se retira à Hambourg, et non Strasbourg comme le disent les biographies, puis dans d’autres villes où son existence et sa liberté furent encore menacées. Les prêtres s'étaient ligués contre elle, les magistrats et le peuple lui étaient également défavo- rables. À Hambourg on était décidé à Ja faire sortir de la ville par les mains du bourreau où à l’enfermer dans la maison de discipline des filles repenties, quand elle fut prévenue et s’enfuit. Heureusement un sexgneur de Lutzbourg en Oostfrize qui depuis longtemps s'intéressait à elle, lui offrit un asile dans sa baronnie , une maison et sa protection. Il se chargea même de placer ses amis qu'elle fit alors venir de Sleesvich où ils étaient sans cesse menacés ou maltraités par le peuple et de Noords- trand, où ils ne pouvaient plus habiter puisque M.e1e Bourignon venait d'être déclarée déchue de ses droits faute d'avoir comparu lorsque se jugeait le procès. (Témoignage de vérité. IT. 36.) Le seigneur de Lutzbourg mit bientôt sa protégée à la tête d'un hôpital que ses ancêtres l'avaient chargé de fonder. Elle le dirigea pendant une couple d'années et fut alors visitée et célébrée par tout ce qu'il y avait de personnes distinguées aux environs Elle mit la main à ses derniers ouvrages : Le nouveau ciel et la nouvelle terre contenant des merveilles inouïes jamais vues ni déclarées de personne, composé pour la consolation des bonnes âmes. ( 391 ) (Etait terminé en 1668, car la seconde partie bien qu'annoncée n'a jamais été faite). Un recueil de lettres intitulé : L'aveuglement des hommes de maintenant qui est plus grand à l'égard de leur salu qu'il n'a été de tous siècles (1671 à 1678, la deuxième partie a été publiée après sa mort et est restée inachevée.) D’autres recueils ne furent également publiés qu'après sa mort, ce sont : Le renou- vellement de l'esprit évangélique (1676 à 1680). Les persécutions du juste ou lettres écrites par feue M.elle Bourignon à l'occasion de toutes sortes de persécutions qui l'ont accueillie en tous temps et en tous lieux (quelques-unes datées de 1664 à 1665, plusieurs de 1668 , 1669, presque toutes de 1672 à 1680). L'Etoile du matin , traitté recueilli deslettres de feue M.°12 Bourignon avec un recueil de fragments de ludite demoiselle (A6T1 à 4680). Les Pierres de la nouvelle Jérusalem, traité recueilly des lettres posthumes de M.1e Bourignon. (Trois parties composées de lettres écrites vers 1672-1674. La quatrième de fragments divers. ) Avis el instructions salutaires à toutes sortes de personnes, recueillis ès-lettres de feue M. Bourignon (première partie : lettres de 1666 à 1667, puis 1671-1676. Deuxième partie, 1675 à 1680.) Plusieurs années s'écoulèrent ainsi faisant croire à M.e!e Bou- rignon qu'elle avait enfin trouvé le repos, mais les persécutions recommencèrent. Des familles dont quelques membres avaient été entraînés par ses goûts mystiques, des parents dont les enfants confiés à ses amis en avaient recu de mauvais traitements , des domestiques qu'elle avait accusés de sorcellerie, d'anciens dis- ciples qu'elle s'était aliénés, ameutèrent le peuple contre elle et la dénoncèrent à Hambourg. En même temps, elle avait perdu l'appui du baron. L’épouse de celui-ci, qui sans doute voyait avec peine linfluence d'une autre femme , voulut la ‘forcer à abandonner ses biens à l'hospice. M.‘1° Bourignon prétendit qu’elle devait se les réserver comme elle avail fait jusqu'alors, pour en aider les personnes persé- ( 392 ) cutées au sujet de la vérité religieuse. (Renouvellement de l'esprit évangélique , et avis et instructions salutaires. IL.) La querelle s’envenima. La baronne en vint à persuader à son mari de livrer M.clle Bourignon à la justice. Celle-ci n'eut que le temps de s'enfuir dans la Frise occidentale où elle se retrouvait sous la juridiction de la Hollande. Agée de plus desoixante-quatre ans,atteinte depuis dix-huitmois de fièvre quarte et de dyssenterie, cachée sur de mauvais'cha- riots, sans domestique, sans amis, M.ele Bourignon ne put sup- porter ce voyage entrepris dans la saison rigoureuse. Elle fut forcée de s'arrêter dans un lieu qu'on croit être Franeker ou quelque bourg voisin et y mourut le lendemain 30:octobre 1680. Le mouvement qu'elle avait excité dans les esprits, dura quel- que temps encore. Dans différentes villes on avait commencé à tenir des assemblées pour répandre ses doctrines. Des Labadistes avaient porté ses livres à Genève. Swammerdaam en avait envoyé en [ialie (1675). Des théologiens et des médecins anglais en avaient fait traduire en leur langue (lettres de 1670 et 1679). Presque tous existaient en flamand et en latin, plusieurs en allemand. Bayle nous apprend que l'Ecole Bourignoniste avait pris en Ecosse une importance assez grande pour exiger des réfu- tations sérieuses : The snake in the grass (4e serpent dans l'herbe), de Charles Lesley et Bourignanism detected (le Bourignanisme dévoilé), de Cockburn. En 1686, Poiret publia toutes {es œuvres de M.elle Bourignon contenues dans 19 volumes. (Amsterdam, Henry Wetsein, in-12). Ce n’était point là une nouvelle édition, ce n'était que la réunion des ouvrages publiés isolément par Arents et Riewertz à Amsterdam. Aussi trouve-t-on dans chaque volume plusieurs caractères et plusieurs paginations. On avait déjà fait d'autres recueils semblables en 45 ou 35 volumes (bibliothèque de l'arsenal) ou 22 volumes (bibliothèque de Lille). Seulement celui dont nous parlons maintenant a de particulier qu'on a fait im- { 393 ) primer des titres nouveaux et qu'on a cherché à classer les ou- vrages suivant leur date afin qu'on puisse les lire avec ordre et fruit. Cette prétention n’est pas trop bien justifiée, mais il est presqu'impossible d'y réussir. Si l’on s'attache à l'époque de la composition , on se trouve en face de recueils , de lettres , qui embrassent toute une période de dix à vingt ans. Si l’on s'attache à la date de la publication, comment reconnaitre l'édition prin- ceps dans ces écrits publiés presque simultanément en plusieurs langues. Malgré ce défaut, le recueil en 19 volumes est très-utile complet et commode. Poiret y a joint des notes , une préface apologétique et une Vie continuée fort détaillée, qui forme un volume entier et fait suite à la Parole de Dieu et à la Vie exté- rieure , ouvrages dans lesquels M.e!e Bourignon , comme nous l'avons dit, avait raconté les premières années de son existence. Enfin on trouve dans la même édition un livret d'Engelbert, inti- tulé : Nouvelles visions et dont les idées ont beaucoup d’analogie avec celles de notre auteur. Lorsque parut ce recueil , le célèbre diplomate Seckendorf en inséra dans les Acta eruditorum de Leipsie un compte-rendu (relatio) très court et très-peu favorable. Un anonyme qu'on croit être encore Poiret y répondit par un avis nécessaire (monitum necessarium). Seckendorf se défendit à son tour dans un gros volume : Apologie du compte-rendu. (apologia relationis) où se trouvent reproduites et résumées toutes les accusations de la polémique contemporaine. Ce fut à ces deux sources : Seckendorf et Poiret , que puisa Bayle. Or rien n’est si mauvais pour écrire une histoire impar- tiale, que de consulter un ennemi acharné et un disciple aveugle. Aussi l’article du Dictionnaire historique , l'un des plus spirituels qui soient tombés de cette plume charmante manque-t-il de vérité. C'est cependant là qu'ont puisé tous les biographes postérieurs , et rien d'étonnant qu'il y ait dans leurs notes tant de partialité. Aussi sans prétendre excuser des défauts évidents , sommes- nous remonté aux sources mêmes pour chercher à restituer dans (394 ) toute sa vérité ce type étrange et fort. Car on ne peut refuser, on le voit, à M.®le Bourignon un caractère ferme et solidement trempé, sans faiblesses et sans fluctuations, austère et sévère, mé- prisant également et le plaisir et la douleur, se tenant sans cesse dans la région des idées et des devoirs. C'est en outre un écrivain remarquable et si elle eüt traité des sujets plus en rapport avec le goût de notre temps, on lirait encore ses livres avec délices. Qu'on appelle ses visions comme on voudra, phénomènes nerveux, monomanie, extase, magnétisme, illumination et révélation inté- rieure, on y trouvera toujours la marque et les traces d’un brillant génie. On à vu , sauf quelques déplorables égarements, combien était grande sa tolérance et sa haine de la contrainte , combien sa morale était élevée, combien surtout était inaltérable son espé- rance danslerègne futur de la charité et de la justice sur la terre. Enfin la fécondité des idées, l'habitude des réflexions sérieuses, l'élévation de ses théories morales lui assignent évidemment un rôle marquant dans les idées de son temps. On tend de nos jours à restreindre beaucoup trop la portée du mot : Philosophe. I semble qu'on n'ait droit à ce titre qu'autant qu'on ait produit quelqu'œuvre dogmatique, régulière et rentrant dans le programme du baccalauréat. C’est pitié que cela. Est philosophe quiconque a produit une réflexion originale sur le problème de la destinée humaine. Il y a plus de philosophie dans tel verset de la Bible, ou dans tel vers d’Horace que dans tous les in-folio de certain scholastique, ou dans les in-quarto de certain cartésien pour ne pas médire des modernes. Et ce que nous disons ici frappe plus vivement encore quand il s'agit du mysticisme. Demander aux partisans de cette doc- trine des œuvres suivies , régulières , complètes et méthodiques , c'est ne pas les comprendre. D’après la nature même de leurs travaux il ne faut attendre d'eux que des élans lumineux, des aperçus rapides, d'éblouissants éclairs de la pensée. Mais le rationalisme a tellement triomphé de nos jours que tout ce qui n'accepte pas ses procédés n'est pas compté par lui. ( 395 ) Cependant la connaissance n'est évidemment pas réservée exclu- sivement à ces recherches actives et progressives , à ces classi- fications symétriques , à ces observations expérimentales et minu- tieuses qui forment aujourd'hui tout le bagage de notre science. L'inspiration lumineuse de l'esprit, les instincts passifs, les har- monies de notre nature avec la nature extérieure sont beaucoup dans la connaissance humaine. Pour s’en convaincre il suffit de voir ce que le rationalisme exclusif a produit depuis quarante ans. Dans les sciences la classification absorbant toutes les études. Dans les arts le talent se substituant partout au génie. Dans les professions libérales et les arts mécaniques l’enseignement des écoles dominant la vocation personnelle. Dans les mœurs, les li- bertés les plus intimes, celle même de la pensée, sacrifiées à un bien être de convention, à un repos factice. N’est-il pas temps que le mysticisme nous rende les élans de l'âme, l'indépendance du caractère, l'inspiration du goût , l'originalité du style et la spon- tanéité du jugement. Mais cela ne pourra se faire tant qu'ilrestera abandonné au fanatisme des magnétiseurs ou à l'ignorance de certains ordres religieux. Il semble vraiment que l'humanité ne puisse faire quelques pas qu'entre les oscillations extrêmes d’une époque égarée dans un mysticisme exclusif etinsensé ; puis d’une autre époque absorbée dans un rationalisme pédantesque et non moins exclusif. Quant aux tentatives misérables de l'ecclectisme, quelque bruit qu'elles fassent en leur temps , l'histoire se donne à peine le souci de les enregistrer. Une seule doctrine peut se mettre au point de vue de chaque système isolé pour en effacer le caractère exclusif et en recueillir les études particulières; seule elle peut admettre et réunir en faisceau ces théories diverses, parce qu’elle les regarde toutes comme des apparences spéciales et relatives d’une vérité qu'il n'est pas donné à l’homme de connaître et de juger. Mais le scepticisme a pour devise : Sincérité, tolérance. Il n’est point appelé à devenir le symbole des majorités. 396 ) EEE ——a—a—a——— RAPPORT DE M. JEANRON, SUR LE MUSÉE WICAR ET LE MUSÉE DE PEINTURE DE LA VILLE DE LILLE. Monsieur le Ministre , Je viens vous rendre compte de la mission que vous m'avez fait l'honneur de me confier pour la ville de Lille , par votre dé- cision du 14 septembre courant. L'ordre écrit que j'ai reçu me chargeait spécialement d’examiner la collection des dessins origi- naux des peintres les plus célèbres des écoles anciennes , ainsi que les tableaux d’Arnould de Vuez que renferment les monu- ments publics de cette ville. Mais dans les instructions verbales que vous youlütes bien me donner avant mon départ, vous m’en- gageâtes à y examiner aussi tout ce qui intéresse les arts du des- sin. C’est donc sur ces différents points et dans cet ordre que je vais vous entretenir, en recommandant, Monsieur le Mi- nistre, à toute votre indulgence une rédaction rapide que je suis obligé de laisser telle , pour ne pas ajourner les affaires cou- rantes. Les musées de Lille, Monsieur le Ministre, sont placés dans 2 élagede l'Hôtel-de-Ville, dont ils occupent toute la partie achevée du Fe deuxième étage. La partie en voie d'exécution ou en projet , est destinée à leur accroissement, de manière qu'à ce deuxième étage rien n'interrompra bientôt le parcours au milieu des mo- numents de l’art. Les musées considérés en eux-mêmes ct indé- pendamment de l'édifice, sont également en bonne voie de Fais sement , d'appropriation et d'achèvement. Escalier On y est introduit par un escalier d'honneur d'un caractère PRE monumental, d'un style à la fois élégant et grave. La décoraz tion en à été obtenue par la plus intelligente appropriation d'é- preuves moulées sur les plus beaux monuments de l’art antique. ( 397 ) Au pourtour de la cage, dans une frise ménagée à cet effet, se coordonnent avec bonheur les bas-reliefs du Parthénon et ceux du temple de la Victoire aptère. Au sommet sont placées comme soutiens, près du plafond, les caryatides du temple de Pandros; sur deux des faces ces caryatides sont accouplées; sur deux autres, mais disposées isolément, se trouvent celles de la villa Albani. Dans les niches qui occupent les intervalles entre toutes ces caryatides on a disposé des fragments d'architecture et de sculpture antiques, tels que chapiteaux , autels, socles, bustes, vases, etc. Beaucoup de goût et de soin a présidé à cet arrangement, qui dénote chez les personnes qui en ont été char- gées une véritable intelligence de la valeur artistique de ces ob- jets. Il m'a été dit qu'une grande frise tombant sur l’un des paliers, était destinée à recevoir les bas reliefs choragiques de l'école d'Egineet d'Olympie, et que dans deux grandes niches de l’ordre inférieur encore vides, on comptait placer des figures entières. É Si la ville de Lille, Monsieur le Ministre, espère obtenir de votre bienveillante intervention ces quelques moulages, je ne saurais trop vous recommander sa demande peu coûteuse. Cette libéralité de l'Etat terminerait un bel ensemble décoratif , et une raison plus grave encore pour moi, appelle ici votre sollicitude. Cet! escalier menant du premier au deuxième étage, conduit à un véritable centre d’art où de fortes études peuvent se suivre pour la jeunesse, et comme aucun service amenant foule ou distraction ne prendra place dans cette région de l’hôtel-de- ville, jeregarde cet escalier. comme consacré à l'étude par des- tination; le parti austère qui a présidé à sa décoration et le choïx savant des monuments qui la constituent , fourniront cer- tainement aux étudiants un objet d'éducation qui ne sera pas né- gligé. Il pourra correspondre dans une proportion modeste mais suffisante au musée des plâtres dont plusieurs établissements d’art importants ont tenu à se doter. Musée des dessins, Biographie Wicar. ("398 | Les musées de Lille où cet escalier conduit consistent en une collection de dessins , une de peintures et une collection d’his- toire naturelle. Bien que cette dernière me paraisse et curieuse et considérable , je m'abstiendrai, Monsieur le Ministre , de vous en entretenir, étant tout à fait incompétent pour en apprécier le mérite. La collection des dessins provient du legs fait à la société des sciences, de l'agriculture et des arts de sa ville natale, par le peintre Wicar. Cette collection est administrée par une com- mission composée de MM. Benvignat et Verly , architectes , Les- tiboudois , docteur en médecine, Legrand , avocat, et Delezenne, professeur de physique. Je ne crois pas ,: Monsieur le Ministre; qu'il convienne dans l'étude dont vous m'avez chargé , de laisser passer sans quelques indications biographiques le nom de Wicar, d'un homme dont la vie pleine de mâles travaux et de savantes recherches a été si dignement couronnée par les dispositions généreuses, auxquelles une de nos plus importantes cités doit ses plus précieux embel- lissements, et des ressources avec lesquelles elle pourra continuer à ses enfants de fécondes libéralités. Wicar , peintre d'histoire, naquit à Lille en 1762, d'un pauvre ouvrier menuisier. Sa vocation précoce fut remarquée , en 1772, par le comte d'Hespel, membre du Magistrat dela ville de Lille: il trouva chez cet homme bienfaisant les premiers secours qui lui. ouvrirent la carrière; il fut placé par lui et soutenu à l’école de dessin de Lille, qui devait son assez: récente institution à M. de Sechelles, intendant de la province de Flandre; Wicar s’y distingua dans ses premières études, conduit par deux hommes habiles qui se suscédèrent à la tête de cette école, les profes- seurs Guéret et Watteau. Il vint à Paris vers 4780 où al fut tiré de la plus grande pauvreté par une pension de 300 livres tour- nois que lui fit sa ville. Mais cette pension ne lui fut pas con- tinuée ; il se soutint dans sa détresse par le produit de quelques ( 399 | leçons de dessin et par l'assistance et les conseils de MM. d'Hespel, Van der Cruyssen, de Labarre, Langlart , Masquellier frères, Roland, Jacquery, ses compatriotes, dont quelques- uns, les derniers , étaient d’habiles artistes. Il étudia la gravure sous la direction du célèbre Lebas ; Roland le présenta à David qui l’accueillit avec la plus grande bonté et l’encouragea. Il se lia d'amitié avec Girodet, Gros, Gérard, Guérin et Drouais. En état déjà de pouvoir par ses propres ressources venir en aide à sa famille, il résolut de partir pour l'Italie sans prévenir personne. Mais David averti de ce projet le retint jusqu'au moment où il devait l'y conduire lui-même en compagnie de Drouais, lo:squ'il irait exécuter à Rome , en 1784 , le tableau du serment des Horaces que venait de lui commander le roi Louis XVI. David le recommanda à Vien, et ce double patro- nage assura ses études et ses progrès. Après avoir beaucoup dessiné à Rome, il passa à Florence, où son enthousiasme lui fit concevoir la plus vaste et la plus héroïque résolution qu'un ar- tiste isolé püt se proposer. Il entreprit de dessiner pour la gra- vure , la galerie entière de Florence, tâche immense à laquelle ne firent pas défaut , pendant 23 années, la plus consciencieuse application et la plus rare aptitude. David , nommé membre de Ja Convention , proposa le 27 nivose an 2 de la République, (16 janvier 1794), au nom du comité de l'instruction publique, ja suppression de la commission du muséum et la création d’un conservatoire. Il désigna Wicar pour en faire partie, (section des, antiquités). Le 18 pluviôse, en qualité de membre de ce conservatoire, Wicar résidant au Louvre fit partie de la commis- sion chargée de rassembler et d’inventorier dans les musées na- tionaux , les monuments propres à l'étude de l’art. Il s’y appliqua avec Ja plus rarc énergie et dans cet emploi qui demandait autre chose que l'habileté et l'expérience d'un praticien , dénué de toute instruction première, mais secondé par une mémoire prodigieuse, il acquit vite une érudition considérable, une littérature suffisante { 400 ) ét la parfaite connaissance de plusieurs langues. Il fut ensuite chargé par le Directoire de s’adjoindre à la commission des arts désignée pour explorer l'Italie. Le musée de Lille montre un té- moignage de l'estime qu'avait conçue pour son caractère et son talent Napoléon, alors général en chef de l’armée d'Italie. Wicar fut spécialement chargé par lui de choisir dans le musée de Flo- rence, pour être envoyés à Paris, 60 tableaux. Il fut envoyé aussi à Bologne , à Milan , à Gênes et à Naples. A cette époque, il résolut de se livrer plus entier à l'exercice de la peinture et de se fixer à toujours en ltalie. I fit alors d'im- portan(s tableaux et des portraits parmi lesquels deux de Pie VIF, l'un pour le Vatican , l’autre pour le vice-roi prince de Beauhar- nais, puis celui de Joseph Napoléon, roi de Naples, du prince Murat et de sa famille, ceux des maréchaux Masséna, Lannes, de Christophe Salicetti, du commissaire Garat, de l’ambassadéur de France baron Haltier, de l'intendant comte Rey, du duc de Bracciano et de sa femme et de don Giovanni Torlonia. En 1805, Wicar fut nommé professeur à l'académie de S.t-Luc et membre de l'académie des Arcades. En 1807, le roi Joseph le nomma directeur-général de l'académie des Beaux-Arts à Naples. En 1815 , Wicar qui avait contribué par son intelligence et son zèle à enrichir nos musées, se montra plein de sollicitude pour les défendre. Ami intime de Canova qui avait reçu la mis- sion de venir rechercher les monuments provenant de nos con- quêtes , il fit tout pour amoindrir nos restitutions el c’est à ses vives démarches et à sa puissante intercession que nous devons la conservation de beaucoup de belles choses, notamment les pré- cieuses statues du Tibre colossal , de la Pallas de Velleti et de la Melpomène. En 4816, Wicar termina son tableau de la résurrec- tion du fils de la veuve de Naïm qu’il porta en Amérique d'où il revint en ltalie en 1817. En 1818, il exécuta pour M. de Som- mariva son tableau de Virgile lisant l’Enéide devant Auguste. En 1819, sa Résurrection du Christ pour la métropole de Ra- us Wicar. Galerie dessins, (401 ) vennes, son Mariage de la Vierge pour la cathédrale de Pérouse ; en 1825 son tableau des apôtres saint Pierre et saint Paul pour le monastère de Cassinensi : ‘en 1827, son tableau de Coriolan aux portes de Rome, destiné au roi de Bavière, mais finalement acheté par don Marino Torlonia , duc de Bracciano , et enfin ,'en 1828, son lableau d'Oreste et Electre, entrepris pour M. le duc de Laval Montmorency, ambassadeur de France. Il mourut le der- nier de sa famille, en 1834, à l'âge de 72 ans. Dans une vie si pleine de travaux importants , d'emplois con- sidérables, de missions actives, de relations brillantes, d’entre- prises couronnées de succès, Wicar acquit une fortune que l’on a sans doute exagérée , mais qui lui permit de faire beaucoup de bien pendant sa vie et après sa mort. Les nombreuses, les hono- rables , les solides amitiés qui l'entourèrent jusqu'à son, dernier jour, répondent puissamment à la calomnie dont , ainsi que tant d'hommes éminents, il subit les atteintes sans que ‘sa légitime renommée en ait été obscurcie ni amoindrie. Wicar par son testament donne à sa ville une précieuse et con- sidérable collection de dessins et un assez grand nombre de monuments de toute nature, dont plusieurs d’un mérite impor- tant, tant de l'antiquité que de la renaissance , tels que statuettes et médailles en bronze, émaux, travaux en bois, terres cuites, marbres, stucs cirés, etc. De plus il lègue, sous des conditions de moralité et d'aptitude soigneusement et intelligemment prescrites, des sommes et des biens destinés à entretenir à Rome dans leurs études des jeunes gens de sa ville natale. La collection de dessins, Monsieur le Ministre, est de la plus grande importance par le nombre et la supériorité des morceaux qu'elle contient. Le catalogue n’en existe point encore imprimé , probablement parce que les hommes de goût et de science qui ont présidé à son installation ont voulu se livrer avec conscience «et recherche à la solution de quelques problèmes qui ne peuvent pas ne pas se rencontrer dans les attributions et la description si 26 (402) délicate quelquefois des monuments de cet ordre. J'en ai pu, cependant, grâce à l'obligeance de MM. Benvignat et Verly et leur aimable empressement, constater avec eux et le nombre et les attributions jusqu'ici adoptées. Le nombre s'élève à 1,035. En l'absence de catalogue, je vous fournis ei-après un état alpha- bétique et nominal de tous les maîtres de la main desquels ces dessins émanent, avec indication de quantité pour chacun d'eux. Abati. 1 Albertinelli. 1 Aldovrandini (Mauro). 1 Aldovrandini (Pompeo)2 Allori (Alexandro). Allori (Christophano). André delSarte. Bandinelli. Baroccio (de Vignole). Bassan (Jacopo). Bassan (Francesco). Bottari. Beccafumi. Bellin. Berettino. Berreloni. Bubiena ou Bubiana, Bognet. Bonechi. Bonedi. Bottani. Botticelli. Bronzino. Bucchner. Cades Giuseppi. Callot. Cambiajo. Carrache (Annibal). Carrache (Ludovico). Castello. = NN @ 9 © 49 = 1 NO ee Om O1 = à D Dh mi NO NO be ND O1 © © à 19 Christophano Roncelli. 1 Campelli. Cigoli. Cipriani. Circignani. Couen Corrège. Cranach. Dandini. David. Dolci (Carlo). Empeli Chmetti. Eyck (Van). Ferreiti. Ferri (Ciro). 1 Ferri. 1 Ficherelli 1 Finiguera. 4 9 1 1 2 © à ND DD & © N DD + 19 Fra Bartolomeo. Franchessini. Francia (Biji). Francia (Francesco). 14 Frandi. 2 Furini. 4 Galbiani. 28 Gherardini(Alexandro)5 Gherardini (Thomasso)3 Ghezzi. 2 Ghirlandajo. 5 Giordano. 1 Giotto. Guerchin. Gravures. Gregorio Guido. Guirlando. Hauffmann. Holbein. Jean Ange. Joseppin d’Arpino. Jules Romain. Lapi, Léonard de Vinci. Ligozzi. Lippi Lorenzo. Luguiero. Lucas de Leyde. Manetti. Manni. Manozzi. Mantegna, Marat{a. Mazaccio. Marchetti. Menabuoni. Menici. Michel Ange. Montelutici. Morandini. Moro (Lorenzo). 7 6 13 O1 me NO © = me à ON C9 me CO ©J = Q à = © … + + © (403 ) Naldini 5 Riccio. 2 Tintoret. 2 Nasini. 1 Ronculli. 2 Titien. 8 Pagani 1 Roselli. 3 Trevisani. 1 Palma, 1 Rosso. 2 Ulnelli. 1 Pannini. 1 Sabatelli. 5 Vanni (Francesco). 3 Parmesan. 5 Sacchi. 1 Vanni (Cavallo Franc.) Panignano. { Salviati. 50 Vannini: 22 Paul Véronèse. 1 Sansovino., 1 Van Ostade. 1 Pegni Lefuttore. 2 Scalandrucei. 2 Vasari. 2 Perino del Vaga. 4 Schidone. 1 VerKruys. 4 Perugin. 1 Simone de Petaro. 1 Vintura. 1 Prattoli. 4 Signorelli. 3 Wicar. 7 Polidore de Caravage. 4 Sirani. 1 Zuccaro (Frederico). 2 Pollagnolo. 2 Soderini. 2 Zuccari (Taddeo). 2 Porcictti 1 Sodoma. 2 Zœdri. 22 Pordenone. 4 Sogliani. 1 Zuccherelli. 9 Poussin. 6 Stradano. 3 Inconnus. 193 Procassini. 2 Tempesta. 1 Raphaël. 68 Testa Pietro. 2 ovas. 200 Rembrandt. 1 Tiarini. 1 Vous aurez été frappé , Monsieur le Ministre, du beau choix auquel l'intelligent artiste avait su élever la collection qu'il des- tinait à sa ville, en voyant qu'elle offre 7 dessins de Giotto , 13 de Mazaccio, 14 de Francia, 5 de Ghirlandajo, 3 de Signorelli, 3 de Léonard de Vinci, 68 de Raphaël, 194 de Michel-Ange, 6 d'André del Sarte, 9 de Bartolomeo, 2 de Corrège, 8 d’Annibal Carrache, 6 de Guerchin , 6 du Guide, 8 d'Holbein, 5 de Parmesan, 4 de Polydore de Caravage, 2 du Tintoret, 8 du Titien, etc. Pour vous exprimer mon impression, Monsieur le Ministre, devant la plupart de ces sommités, j'épuiserais toutes les formules laudatives sans arriver à dépeindre des choses dont le mérite frappe les yeux si puissamment. Il y a dans les grandes collec- tions des capitales de l'Europe , des pensées premières des maîtres de l’art aussi belles et aussi précieuses ; mais les beaux morceaux qui se trouvent à Lille ne leur cèdent en rien. J'ai pensé , Mon- Conseil de faire re- produire quelques dessins. Arrangement matériel deja collection. ( 404 ) sieur le Ministre , en les considérant, qu'il pourrait être digne de votre sollicitude d'en désigner un certain nombre au burin des graveurs que votre administration encourage. Des fac simile de cette élite conscieusement exécutés fourniraient à d'habiles artistes un utile aliment et procureraient aux amis de l’art dans toute l'Europe , une vive satisfaction. Les frais auxquels s’'élèveraient ces reproductions assez rapides et auxquelles les moyens divers de la gravure et de la lithographie peuvent s'appliquer ne seraient point au dessus de vos ressources ordinaires et tout recommande la propagation de monuments qui bien qu'appelés à être ardem- ment visités à Lille ne Je seront point cependant autant que s'ils se trouvaient ici, Comme vous le verrez, Monsieur le Ministre, par le plan, les salles dans lesquelles sont exposés les dessins, font face à l'escalier dont je vous ai entretenu plus haut; elles sont spacieuses et bien éclairées; les dessins s’y coordonnent contre les murs et sur des tables-chevalets, de manière qu'ils sont tous à la portée de l'œil du curieux ou de l'étudiant, considération grave et qui n’a pu être atteinte aussi complètement dans beaucoup decollections célèbres. Le système d'encadrement, la confection des tables-chevalets, méritent beaucoup d'éloges ; et bien, Monsieur le Ministre, que pour en rendre compte, il faille entrer dans de minutieux détails, j'ai pensé qu'il pouvait être utile de le faire. En différentes villes et dans plusieurs établissements, il pourra y avoir besoin avant peu d'organiser des exhibitions analogues. Sous votre adminis- tration, même au Louvre, au Luxembourg , à Versailles , il sera nécessaire peut-être d'y procéder. Je vous prie donc, Monsieur le Ministre, de me permettre de vous Indiquer le système suivi à Lille et de mettre sous vos yeux , non-seulement les figures , (1) mais encore les mesures et le prix de revient de chacun des objets dece mobilier. Car sa parfaite appropriation, sa simplicité, le caractère, la commodité et l’économie qu'on a su y concilier , le recommandent tout-à-fait comme un utile modèle. (1) Voir les planches à la fin de ce rapport. ( 405 ) Les cadres contenant les dessins sont placés contre les murs et sur quatorze tables-chevalets contenant dix cadres simples et cinq cadres à deux glaces pivotant par le milieu. Chaque cadre simple est en bois de chêne orné de deux filets en bois de palissandre incrusté; ce cadre a deux buttées , l’une pour recevoir la glace qui y est retenue par du mastic au minium à l'huile, placé de manière à ne pas arriver à l’arête inférieure de la buttée, l'autre buttée est destinée à recevoir une feuille de zinc passée au vernis copal, recouverte d’une feuille de papier blanc très-fort sur laquelle les dessins sont attachés avec des épingles; la feuille de papier est repliée et collée sur la face exté- rieure du zinc afin qu'aucune colle ne soit à l’intérieur du cadre, et cela pour éviter la naissance d'animaux rongeurs. La feuille de zinc est retenue dans la buttée par de petites tringles en bois clouées avec de petites pointes. Ces cadres ont 0" 81° de longueur sur 0" 59° de hauteur. Le bois d’un cadre simple, la glace en verre demi-blane, la feuille de zinc verni , la feuille de papier et deux anneaux ont été payés 9 francs. ï Le cadre double face est composé de deux encadrements, deux glaces , une feuille de zinc vernie couverte de papier blanc des deux côtés ; il vaut 14 francs. Chaque table-chevalet à 4" 95° de longueur sur 0" 54° de largeur ; -à la hauteur de 0" 80°, la partie inférieure n’est pas à jour; le pourtour est garni de planches de bois blanc ou Sapin ; toutes les autres pièces du bâtis sont en bois d'orme. La table A reçoit 5 cadres simples de chaque côté appuyés sur les pentes BB; ils sont fixés à la hauteur de la traverse C par des crochets à vis passant dans les anneaux ; le vide D reçoit cinq cadres doubles ayant au centre de la partie inférieure un pivot entrant dans la traverse C; ils sont en outre retenus par le haut avec une vis placée dans la traverse E. Valeur d’une table-chevalet : 40 franes. Objets divers proveuant du legs Wicar. Proposition de moulage. Buste de femme en cire colorée. 106 Je ne vous donnerai pas, Monsieur le Ministre , une description détaillée ni complète de différents objets qui accompagnent le legs principal de Wicar. Seulement, je vous dirai, qu’en général, ces objets d'une assez grande variété ne sont pas assez nombreux , chacun dans leur genre, pour constituer une collection, mais que plusieurs d'entre eux ont une importante valeur de curiosité et d'art. I] serait très-utile d'obtenir de la ville de Lille qu’elle vou- lut bien permettre d'en mouler plusieurs tels que différents bas- reliefs en marbre de la Renaissance et cinq en bronze de l’école florentine représentant des bacchanales et un autre Hercule ter- rassant le lion de Némée, et un buste antique en bronze. Mais, Monsieur le Ministre, si je ne m'arrête pas davantage sur ces objets, je dois signaler par une mention particulière un buste de femme en cire colorée. Les papiers de Wicar , à propos de ce buste de femme qui méritait les investigations et les discussions les plus diligentes et les plus sérieuses, se bornent à dire que ce buste est du temps dé Raphaël. Ce n’est point assez, pour une chose aussi rare, aussi inimitable, aussi belle, que cette vague et élastique énonciation. Ce morceau est un chef-d'œuvre du premier ordre. L'impression qu’on en recoit est des plus fortes, et la ville de Lille doit tout faire pour retrouver le titre de noblesse d’une telle merveille. Quant à moi, je n'hésite pas et j'engage tout ce que je puis avoir de prétentions à la compétence en affirmant qu’un seul homme, depuis la renaissance de l’art jusqu'à ce jour, a pu voir sortir de ses mains une telle création, et cet homme, c’est Raphaël lui-même. J’affirme cela, bien que Wicar n'ait pas osé le faire, bien qu'il ne soit pas recu dans la tradition vulgaire- ment admise de l’art que Raphaël ait fait œuvre de sculpteur. Mais je m'engage à fournir les preuves qu'il a été dit autrefois que Raphaël avait modelé plusieurs têtes de femme ; et celle-ci- est tellement pleine du caractère, de la grâce, de la beauté, de la sublimité qui sont l'essence propre et incommunicable de ses œuvres, qu’elle ne peut émaner d'aucun de ses élèves, d'aucun Collection de peinture. (407 ) de ses émules. Ajoutez, Monsieur le Ministre, que ce morceau de la plus grande rareté eût suffi à illustrer son auteur qui n'eût pas pu atteindre à un tel degré de perfection sans s’y essayer par de nombreux préludes, et qu'il n’y füt pas arrivé sans continuer à produire les plus importants résultats. La science universelle de Raphaël dans les arts du dessin explique un tel ouvrage et un tel succès, de même que ses nombreuses entreprises en peinture et sa carrière si vite achevée expliquent pourquoi la sculpture et l'architecture ne lui doivent que quelques chefs-d'œuvre tout à fait isolés. Cette tête de jeune femme en cire colorée a été légère- ment brisée au cou, éraillée et décolorée en plusieurs endroits, mois on a eu le bon esprit, à Lille, de rapprocher tant bien que mal les morceaux sans se permettre aucune sophistication impie, ce dont on ne saurait trop louer la commission. Cette tête est montée sur un socle à pivot et recouverte d'un cylindre en verre. Elle est placée dans un des angles de la petite salle qui termine le musée Wicar. Je n’approuve point cette place ni le pivot. Je crains qu'il n'arrive quelque jour un accident en tournant avec secousse ce morceau fragile et je voudrais plus d'appareil dans la manière dont on l'expose aux regards; le milieu d’une salle conviendrait mieux ; on devrait l'entourer d'une rampe. Le musée de peinture occupe actuellement quatre salles à gauche de l'escalier. Ces salles sont très-bien appropriées et le jour s’y distribue d’une manière tout -à-fait heureuse. Tout ya été calculé dans l'intérêt des tableaux; l'ouverture verticale qui les éclaire est d’une proportion bien entendue qui donne un jour suffisant, sans lequel la peinture s’obscurcit et perd toute trans- parence dans ses parties vigoureuses. Le jour non plus n'y est point prodigué d’une manière imdiscrète, et la peinture n’en est point en quelque sorte dévorée et conserve toute sa magie. La position intelligente des châssis laisse parvenir également sur toutes les surfaces la lumière convenable. Il ny a en aucun Historique du musée de Lille. ( 408 ) endroit ni reflet, ni obscurcissement, ni éclat dissonnant , ni mi- roitage. Ces conditions, radicalement nécessaires pour mettre les travaux de notre art en valeur , se rencontrent rarement dans un édifice. Il n’est pas une seule salle du Louvre qui les puisse fournir. Il faut dire, Monsieur le Ministre, que les bâtiments où se trouve le musée Wicar et le musée de peinture ont été entière- ment reconstruits pour leur destination. Il était donc naturel d'espérer cet heureux résultat, maisil a été complètement obtenu. Les tableaux sont classés par grandes divisions d'écoles ; la pre- mière salle contient les Italiens, la deuxième les Flamands, la troi- sième les Français anciens, et enfin la quatrième , les Français modernes. Ces quatre catégories divisent un nombre total de 189 tableaux. Les tableaux des peintres actuellement vivants ou morts depuis peu d'années s'élèvent, sauf erreur, au nombre de 22. Ils pro- viennent, soit de la libéralité de leurs auteurs, soit de celle du gouvernement ou des acquisitions de la ville de Lille. Ce nombre se décompose ainsi : Données par le Gouvernement Dons des auteurs. Achetés par la ville. 1826 Ansiaux. 4822 Abel de Pujol. 1830 Bonnier fils. 183% Jeanron. 1837 Berlin 2 tabl. 1836 Sleuben. — Ducornet. A834 Cam. Roqueplan. 4835 À. Boulanger, 1848 Lehmann — Serrur 2 tableaux. 1835 Amélie CoignetA848 Troyon. — Wicar 4 tableaux, 1838 E, Delacroix. Je crois devoir, Monsieur le Ministre, entrer dans quelques considérations sur la provenance de la partie ancienne qui com- pose le fonds de cette collection et, en même temps, je vous don- nérai à connaître par un résumé succinct l'historique du musée de Lille et des graves vicissitudes qu'il a éprouvées. Le musée de Lille fut l'un de ceux que l’on fonda sous le nom de musées départementaux ; il se forma donc d’abord de toutes les œuvres de l’art recueillies dans les couvents et monastères devenus propriétés nationales, ainsi que chez les émigrés soumis à la confiscauon. Le peintre Louis Watteau, par ordre de la muni- (409 ) cipalité, en dressa un bon inventaire en 1795. Le nombre des tableaux décrits par lui s'élevait à 595. Un arrêté des consuls, en date du 44 fructidor an XI, distribua aux principales villes de France et du nouveau territoire français une partie des tableaux rassemblés au Louvre et une partie de ceux qui arrivaient à la suite des conquêtes d'Italie et de la Bel- gique. Lille en reçut pour sa part 46. Je vous en donne ici l'état, Monsieur le Ministre, et vous en indique en partie les provenances. Ils provenaient, soit de notre ancienne collection , soit des églises de Paris, soit du palais des Tuileries, soit de l’ancienne académie de peinture, soit de l'hôtel de Toulouse, soit de Belgique, soit de Bavière (Munich) , Soit d'Allemagne (Augsbourg). Mais le musée de Lille ne trouva pas alors une administration assez attentive ni assez savante ; et malgré tout ce qu’il y avait de favorable dans les circonstances , la ville ne sut pas créer une collection digne d'elle. L'exiguité du local ne justifie pas suffisamment les conseils désastreux qui furent suivis. Toujours est-il que de ces ri- chesses on fit deux parts : une que l’on exhiba et l'autre qui, sous le nom de dépôt, échappa à tout contrôle sérieux et à tout régime conservateur. De 1803 à 1814, ce fonds précieux fut dis- séminé. 97 tableaux inscrits sur l'inventaire de Louis Watteau furent distribués aux églises de Lille et à celles des villages envi- ronnants, tantôt sous forme de dons, tantôt sous forme de vente pour un prix qui ne varia guère par toile de 6 à 42 et 18 francs. » En mai 1813, M. le baron Duplanty, alors préfet du Nord, nomma une commission chargée de dresser un inventaire. Si cet inven- taire à existé, il a disparu. Ce travail était ordonné en vue d’ar- river à vendre à des particuliers les tableaux qui ne seraient pas jugés avoir une valeur assez importante ou qui auraient exigé des frais trop considérables pour leur restauration. Aucune trace n'est restée de ce travail, si ce n’est un relevé informe, manifeste- ment fait par quelque subalterne illettré. Toujours est-il que dans ces circonstances, 354 tableaux furent vendus pour une somme de 1,365 fr. 50 c. (3 fr. 85 la pièce.) (0) Il ne convient point, Monsieur le Ministre, que j'insiste sur cette phase de l’histoire du musée de Lille ni que j'apprécie la gestion de la commission qui en était chargée alors. Mais il me suffit de vous faire remarquer que bon nombre des ouvrages de maîtres célèbres ou au moins estimés, inscrits par Louis Watteau sur son inventaire de 1795 ne se retrouvent plus dans le musée actuel et ont dû de toute nécessité être vendus à cette époque. C'est donc, d’après le témoignage de Louis Watteau , homme très scrupuleux et très compétent, un réel désastre pour le musée de Lille, qui eut lieu à cette époque, car, suivant lui, on peut conclure à la perte d'un tableau du Poussin, de trois tableaux de Jordaens, d'un tableau du Guerchin, d'un de Wouwermans, de quatre de Berghem, d'un de Gérard Dow, de quatre de Teniers ou d’Absovin , son habile élève ; de onze de Breughel, de six de Franck, de quatre de Palamède , de deux de Gérard de Lairesse, de deux de Michel Cocci, d’un de Huysmans de Malines, de deux de Bourguignon. Le musée de Lille possédait en outre 21 tableaux d’un très habile Van der Burgh , artiste de la contrée et dont le talent adhère complètement à la vieille école flamande. ]1 ne lui en reste maintenant que trois. Van Artois, duquel on peut dire la même chose, y était représenté par neuf tableaux dont il ne reste plus que deux; et enfin Van Oost, excellent peintre de l’école de Rubens et dont les cathédrales de Belgique montrent avec orgueil les belles compositions , était alors représenté par 41 tableaux dont cinq seulement sont restés. En 1816, M. de Pradel, directeur général de la maison du roi, s'appuyant probablement sur la manière dont ce dépôt d'objets d'art avait été administré , réclama pour le musée de Paris buit d’entre les principaux tableaux qui avaient été donnés en 1803 à la ville de Lille, comme je l'ai dit précédemment, au nombre de 46. Mais M. de Vaublanc, ministre de l'intérieur , donna contre- ordre au moment où ces tableaux allaient être restitués. [ci heureusement s'arrête la série des faits regrettables qui ont entravé le développement du musée de peinture de Lille. (41) J'ai trouvé ce musée sous la direction de M. Regnard à qui l'on ne saurait faire trop d’éloges pour le soin, l'intelligence et l'amour qu'il y apporte. Il est parfaitement secondé par l’archi- tecte de talent, M. Benvignat, qui a disposé les localités,et appuyé par le zèle et l'autorité de M. le Maire et de MM. les membres du conseil municipal dont l’incessante sollicitude s'exerce à accroître et à embellir.cet établissement. Beaucoup de beaux ouvrages s'y rencontrent. Il y a de très- beaux tableaux de Paul Véronèse, de Bassan, de Rubens, de Van Dyck, de Van Oost, de Jordaens, de Crayer, de Teniers et de Van den Velde, de Lebrun, de Sébastien Bourdon, de Delafosse, de Mignard, de Valentin, de Philippe de Champaigne, etc. JL y a de fort intéressants morceaux des peintres de genre, de paysage, d'animaux et de fleurs de la vieille école flamande. Il ya plusieurs belles copies anciennes et quelques-unes tout-à- fait admirables que la ville a acquises du directeur de son école de peinture, artiste d’un talent éminent sur lequel, Monsieur le Ministre , j'appellerai tout particulièrement votre attention quand je vous entretiendrai de cet établissement. Ces belles reproductions que M. Souchon fit au musée de Paris au temps de ses fortes études sous la direction de David, sont celles du Couronnement d’épines du Titien, l’un des plus beaux tableaux de notre galerie, travail très difficile et de la réussite la plus entière; celles du por- trait de François L.®" du même maître, et enfin celle du célèbre tableau de Murillo, la Notre-Dame-des-Neiges que nous avons perdu en 1815 et dont cette copie est le seul souvenir qui nous reste en France, ce tableau n'étant pas gravé. Ily a encore douze tableaux et quatre esquisses d’un certain Arnould de Vuez qui méritent une mention particulière ; ces ouvrages, sans avoir le caractère magistral et l'originalité frap- pante qui distinguent les œuvres des grands maîtres de l'art, n'en possèdent pas moins toutes les qualités recommandables constituant le mérite des talents intermédiaires qui concilient Arnould de Vuez Proposition d'échange (M2) les tendances contradictoires de plusieurs écoles et arrivent à ces résultats moyens et savants que la tradition enregistre encore avec honneur. Arnould de Vuez est donc un homme assez éminent dans notre art et assez important dans la tradition de notre école nationale pour prendre rang dans toute collection considérable et qui prétend à se compléter. Cependant le Louvre ne possède aucun tableau de ce maître peu connu et qu'apprécient si haute- ment tous les amateurs qui ont eu occasion &e rencontrer ses rares productions. Arnould de Vuez cependant fut un homme fécond, mais ce n’est guère qu’à Lille, sa ville natale, qu'il réalisa ses entreprises personnelles et indépendantes. Appelé à Paris par Leman qui demanda aux Flandres ses collaborateurs de prédi- lection, il vit le fruit de sa laborieuse carrière presqu'entièrement absorbé dans la vaste production de l’illustre metteur en œuvre de l'école française au siècle de Louis XIV. Cependant Arnould de Vuez, par lui-même, était capable des plus considérables réalisations et, en dehors de toute direction, il pouvait montrer une ampleur magistrale dans ses créations et trouver dans sa propre expérience les dispositions les plus intelligentes. Il l'a prouvé dans son imposante et considérable décoration de la salle dite du Conclave, à Lille, laquelle donne la plus haute estime pour son talent et est certainement une des choses que la ville de Lille peut montrer avec le plus d'orgueil. Ce serait, Monsieur le Ministre, une opération à tenter dans l'intérêt du musée du Louvre que la proposition à la ville de Lille d’un échange qui ferait entrer dans notre collection de peinture un ouvrage important de ce vieil artiste lillois. Par là, un premier pas serait fait dans la voie désirable de la réhabilitation de nos anciennes écoles provinciales qui méritent beaucoup plus de con- sidération qu'on n’a su jusqu'ici leur en accorder, au grand détriment de l'éclat général de l’école française ; car, combien de bons maîtres dont les ouvrages ne figurent pas au musée et qui ne sont connus que dans les contrées où s'écoula dans la plus -M3) grande modestie leur méritante carrière! On devrait regarder comme tun véritable bienfait pour notre collection d'y pouvoir un jour introduire quelques morceaux des maîtres de Toulouse, de Perpignan, de Marseille, de Dijon, de Reims, de Tours, de Valen- ciennes, de Lille, etc. C'est là un grave objet dont je ne négligerai pas de vous entretenir et pour lequel j'ai déjà fait plusieurs tenta- tatives. Beaucoup de très beaux talents se sont révélés dans les écoles provinciales ; nos plus illustres maîtres, ceux qui se sont exercés à Paris avec le plus d'éclat n’ont pas, pourla plupart, d'autre filiation. Parmi ces hommes, Arnould de Vuez est cer- tainèément l’un des plus distingués. Le nombre de ses tableaux à Lille est assez grand pour que les amis de l’art qui s'y trouvent soient les premiers à permettre de notre part un bon choix , sans crainte d’appauvrir leur musée ou de montrer peu de vénération pour-eur habile compatriote. Jai considéré avec soin les douze tableaux d’Arnould de Vuez. Celui qui me paraîtrait le plus convenir au musée du Louvre par son caractère, sa gravité, la simplicité de sa composition et l’éner- gie de son exécution, représente une Scène de l’Apocalypse et figure sous le N.° 11 dans l’état que je fournis ici. Cet état rem- placera le catalogue de la collection de peinture qui n’existe pas encore imprimé. | ÉÉ DÉSIGNATION DES TABLEAUX. NOMS DES PEINTRES. 1} St-Jean reprochant à Hérode sa conduite.| Ansiaux. 2| St-François recevant les stigmates..... |Arnould de Vuez. 3| St-Bonaventure écrivant dev. un crucifix. Idem. 4} Un St-Récollet guérissant la jambe d'un Idem. DEDTE ROME M Lars Arme 5| St-Bonaventure devant un concile....... Idem. 6| St-Bonaventure disant la messe. ........ Idem. 7| St-François préchant. .:../.........:. Idem. © 8! St-Augustin guérissant des malades... Idem. 9| St-Augustin distribuant des aumônes..… Idem. 10| Ste-Cécile ......... Se Ma EN ne itel « Idem. 11| Scène de l’apocalypse.... ....... ... Idem. 12| Portrait d’une femme à mi-corps....... Idem. 13| Deux tétes/d'étudels "ON TE Idem. 14| Le jugement dernier (esquisse)......... Idem. 15| Le jugement de Salomon (id.),......... Idem. 16| La femme adultère (id.)............... Idem. 17| La mort d’Ananie (id.).. ......,.... Idem 18| L'innocence de Suzanne reconnue (id.).. Idem. 19] Paysages NN RNERNTUIQE AT Bertin. 20! Id: RP MAS ED DEEE Mr Idem. 21| Rétlour de l'enfant prodigue ........4.. Belle le fils. 92| Vue prise de l'entrée de l’ancien musée.|Bonnier fils. MS IBSQNISSRe-6 7 RES... ee: Boucher. 24| Procession du Corgrus domini à Rome ...|C. Boulanger. 2:| Le Christ soulevé par des anges ...... Séb.2 Bourdon. 26| Repos d'un jeune modèle..... .. ... .|Amélie Cogniet. 27|NPORITA IE PR PRET RME cation Douvé. 28| Adieux d'Hector et d'Andromaque...... Ducornet 29| St-Louis rendant la justice............. Idem. 30| Attributs des beaux arts............... Dupont-Watteau. 31| Jésus-Christ donnant à St-Pierre les clefs De la Fosse. AUPArAAIS Te Fr eme emmenee ce Hilaire Ledru. 32| Le vieux porteur d'eau défaillant. ...... 33| Portrait de Fénélon................... Inconnu. g4| Bataille Ro ee CEE ent J. Parrocel père. (4) Désigné par M. Jeanron. — (2) Ges cinq esquisses ont servi aux tableaux de la salle du Conelave, PROVENANCES. Donné par le Gouv. 182 Couvent des Récollets. Idem. Idem. Idem. Idem. Idem. Couvent des Augustine. Idem. Eglise St-Pierre. Origine inconnue. (1) Idem. Idem. Chapellede l'Hôtel-de-V. Idem. Idem. Idem. Idem. (2) Donné par le Gouv. 183 Idem. Idem. an XI Donné par l'auteur,183 Idem p. M. Jouffroy 183 Donné par le Gouv. 183 Idem an XI Acheté en 1835. Origine inconnue, Donné par l’auteur. Idem. Origine inconnue. Eglise St-Pierre. Donné par le Gouv. 182 Donné par M. Dieudonn Relevé sur l'invent.179 NOMS DES PEINTRES. É DÉSIGNATION DES TABLEAUX. PROVENANCES. t MANU DEN PEL Ut, OR J. Parrocel père. 11 (ET PARENTS ERP RER ET AE Delacroix Eug. La sainte famille...... .............. Inconnu. Le jugement dernier.......,.......... Idem. LE THON: 10 2 RÉPONSECE EEE Ecole française. LE ANTON e PASELANNTE LPAPROPEN RENE À Gd. de Lairesse. Paysage. Vue du Limousin.......,.... Jeanron. Hercule assommant Cacus... .....:... Lebrun. MONET Mignard. Fulvieet Cicéron. .....:........:.. 4. Monsiau. Moïse sauvé des eaux.............. .. D'après Poussin. Joseph expliquant les songes........... Abel de Pujol. Les pèlerins d'Emmaüs.........,...... Restont. Mort de l’espion Morris................ C. Roqueplan. Aa OO... 1. ie Serrur. Mort d’Agamemnon................... Idem. Jeanne la folle. ...:.........,.,....,. Steuben. Unsacrifice ui... ..,.. 0000 .....[Troyen. Dessoldatsjouant auxdés la robe du Christ | Valentin. ae ouogl |... |. Vernet. Adoration des rois................ ...[Vignon. La procession de Lille...... ........ .|L. Watteau. Une escarmouche de cavalerie. ....... Idem. ET ÉAE ORNE TRRRTEr EEE PRET Idem Confédération des départements du Nord, de la Somme et de l'Aisne. .......... Idem. Jugement de Salomon........ ....... L. Wicar. Résurrection du fils de la veuve de Naïm.| Idem. Virgile lisant l'Enéide devant Auguste. .| Idem. 3| Joseph expliquant les songes... UE Idem. &| Paysage....... 6 Le PSPOMRP EE PR EE 2 Brenghel. La sainte famille.........,............ Brenghel et Van Baelen. L'annonciation. ..:................. . (Ph. de Champaigne. La Vierge et Saint-Joseph en adoration devant Jésus-Christ. ................ Idem Le bon Pasteur, ......... RE IN +ue Idem (1) Ex-préfet du Nord. Relevé sur l’invent.1795 Donné par le Gouv. 1838 Idem an XI. Idem. Idem. Relevésur l'invent. 1795 Acheté en 1834. Donné p. le Gouv. an XI Idem. Idem. en 1826. Relevésur l'invent. 1795 Donné par le Gouv. 1822 Idem. an XI. Acheté en 1834: Donné par l’auteur. Idem. Donné par le Gouv.1836 Releyé sur l’invent.1795 Donnép.M.Dieudonné(1) Donné p. le Gouv. an XI Idem. Acheté en 1828. Légué p. M. d’Aigremont Achelé en 1803, Origine inconnue. Donné par l’auteur. Idem. Idem. Idem. Relevé sur l'invent.1795 Idem. Donné p. le Gouv. an XI Idem. Idem. ( 416 } DÉSIGNATION DES TABLEAUX. 103 Scène de la vie de Saint-Nicolas. - Martyrs enterrés vivants. . . .'. . La pêche miraculeuse. . . . . Paysage. . . . Kdem' mme." .L. NAT | Jésus-Christ allant au Calvaire. . + . FREE 10 SIN. ’ Légumes et fruits FIeUTS EME Portraits: A/man . … Trois apôtres Idem. Idem. JnteaHbatt Mein. à à à) 4700 La tentation de Saint-Antoine. . . - . Portrait d’un vieillard. . . . . . : . . Portrait d'homme. . . . . Portrait d’un architecte. . . . . . . . BR AIEEBEMNAMAEN. 0 2 EN Une vierge entourée de fleurs.. . . . Saint-Jérome. . . . . . Sr Paysage avec animaux. . . . . - - : : Idem avec chèvres et moutons. . - Des fumeurs. . Paysagesun, . Huîtres et fruits. . . Un incendie. Une vierge en grisaille entourée de fleurs. Scène de carnaval. Un chasseur. Nature morte. Idem. .|Cossiers, Crayeer. Idem. Van Artois. Idem. Frank. -|Gillemann. Grief. Van Thielen. De Heem. Jacobs. J. Jordaens. Idem. Idem. Idem. Idem. Lebouteux. Téniers père. Idem. Inconnu. (Idem. Idem. Idem. .|Brenghel et Franck. .[Inconnu. Ecole de Berghem. Idem. .|D'après Téniers. . .[Roos de Tivoli. .[Inconnu. Idem. Idem. Mollenaert. NOMS DES PEINTRES. PROVENANCES. Eglise St-Maurice. Relevésur l’invent. 179 Idem. Donné p. le Gouv. anX Origine inconnue. Relevé sur l'invent. 179 Idem. Idem. Origine inconnue. Eglise St-Maurice. Idem. Idem. Idem. Acheté en 1837. Donnép. le Gouv.an2 Relevé surl'invent 17 idem. Donné par M. Jouffro Origine inconnue. Relevé sur l'invent. 17 Origine inconnue. Relevé surl'invent. 17 Origine inconnue. Relevésur l’invent. 17 Idem. Idem. Idem. Abbaye de Cysoing. Origine iuconnue. Légué p:M. d'Aigrem Relevé sur l'inven£. f Origine inconnue. Idem. Idem. (A7 ) param mer amener aan PEER = RE Æ. DÉSIGNATION DES TABLEAUX. NOMS DES PEINTRES. PROVENANCES. Bas-relief on grisaille......... ... ... Guerart. Acheté en 1833. en : AAA AI. À Et Idem. Idem, L'adoration des Mages................ Idem Idem. en 1836 (1). LENS AA OE SORTE TE Molyn. Origine inconnue. Vue des Alpes............ DRM Mompré. Relevésurl'invent. 1795 Une dame à son clavecin........ ..... D'après Metza. Acheté en 1835. Une scène de ménage.......... .... .[Rickart. Relevésur l’invent. 1795 Pierre chez Caiphe................. .[Romboots. Idem. Descenfeudeicroix. ........... 2... Rubens. Eglise des Capucins. La Mädeleine mourante...... . were! sltiidem: Donné parle Gouv.an XI La Vierge et St.-François.. ...,..... .| Idem. Eglise des Capucins. S{-Françoiss 4.4............. 200 Idem: Idem. St.-Bonaventure ..................... Idem. Idem. Borlraibid'enfant:. ss: :.222 Jen. D'après Rubens. Donné parleGouv.an XI Reel is Re fobnels A. RinsCh. Idem. DOBDMRAMR em an ee cette ve ve :e 2 A8 Idem. Idem. Basr-eliefs en grisaille..... DA RRAE . .|Sauvage. Origine inconnue. Une @squissento4l....,:.......049008 C. Schutt. DonnéparleGouv.an XI Romeo os... aus ......../Sibrechts. Origine inconnue. Lavrésurrectiont"}.. ....4/:cstns au Simon de Vos. Don du Gouvern. an XI. Chasse A0 LOMAA .. .........40208 Sneyders, Origine inconnue. Ghnese fauicerd ...........:.. {4m Idem. Légué par M. Duhem. Scène de famille.............,....... Tilborg. * Origine inconnue. 8 Marine hollandaise. ........... ...... Van den Velde. Proy. dun échange faiten 1814 Intérieur d'un palais......... ....... Van Delen et Téniers. |Relevésur l’invent. 1795 Paysage ..... _ 128 OPA COPA Van der Burg. Idem. OR EAN... plant Idem. Idem. RUN AU. .:.....:.....)008 Idem Idem. Idemishk.....-, Lecce UT OUR Idem. Idem. Paysage avec figures et animaux ...... V. D. Benk. Origine inconnue. dem} ” eur RE Idem. Idem. Intérieur dans le genre de Téniers..... |Van der Pool. Idem. MR aysagebh. in. Mail. .:....c esse +... Van Douven. Idem. MAINT-C'Eurila eroikie: ..... ,.....24e Van Dyck. Eglise des Récollets. LSt.-Antoine de Padoue....... : TA Idem. Idem. 140| L'assomption de la Vierge............. Idem Idem. {} Ancien tableau à volets, 27 (M8) DÉSIGNATION DES TABLEAUX. NOMS DES PEINTRES. PROVENANCES. Portrait de Marie de Médicis Portrait de femme La Vierge au donataire................ Un Carme pansant la jambe d'un reli- Fr LL) ONE MIN CESR EERECE, QE La Vierge et St.-Joseph présentant l'en- fant Jésus Une Vierge St.-Augustin et la Vierge....... Combals de coqs.-..................: Ste.-Thérèse carmélite Scène d'intérieur Judith tenant la tête d'Holopherne...... Le Christ et la Madeleine- La Vierge, l'enfant Jésus et des anges.. Les vendeurs chassés du Temple Séène"d'intérieur..;...1.....4...4%401% Une vue de Venise.................,. Le Christ au tombeau Un Christ St.-Jean dans sa grotte Le réveil des bergers Une sybille L'enlèvement de Déjanire Hercule terrassant l'hydre Hercule et Antée Apothéose de Ste.-Pétronille Fuite en Egypte Portrait Gr conne MROÉHP ONE Le Christ au tombeau Un évêque à genoux devant une croix... Le jugement de Midas.,............... St.-Grégoire Dédicace du Temple de la Paix Le pouilleux (Souchon) Van Dyck. Attribué à Van Dyck. D'après Van Dyck. Van Oost (J.) Idem. Idem. Idem. Van Utrecht. Van Ukens. Verseegh. Lambert Zustris. Idem. Andre del Sarte. Barsan. Idem. Canaletto. Ecole des Carrache. D'après Carrache. Caravage Colonia. D'après Guido. Idem. Idem. Idem. D'après Guerchin. Inconnu. Ecole de Vénise. Idem Inconnu. Idem. Idem. Lanfranc. C. Maratte. D'après Murillo, fi Donné par leGouv.an XI Origine inconnue. Don du Gouvern.an XI. f Couvent des Carmes déchauss.… Idenr. Origine inconnue. Relevésur l'invent.1795 Donné p. le Gouv. an XI Origine inconnue. Don du Gouvern. an XI. Idem. Idem. Idem. Idem. Idem. Acheté en 1837. Don du Gouvern. an XI- Origine inconnue. Acheté en 1835. Relevé sur l'invent. 4795 Don du Gouvern. an XI. Idem. en 1848. Idem. Idem. Idem. Idem. Acheté en 1840. Don du Gouvern. an XI: Idem. Idem. Idem. Idem. Idem. Acheté en 1837. Don du Gouvern. an XI Acheté en 1843. M9) DÉSIGNATION DES TABLEAUX. NOMS DES PEINTRES. PROVENANCES. Assomption de la Vierge....... sie Lie Piazetta. Don du Gouvern. an XI. PSE TOUR. du ce nnhe «ae ur D'après Raphaël. Idem. L'école d'Athènes. ............... ... Id. par Arnould de Vuez/Relevé sur l'invent. 1795 L'enlèvement de Psyché............... D’après Raphaël Don du Gouvern. 1819. Minerve couronnée par la Victoire (pla- LOU) es REQUIEM REIEENEN. LU Romanelli. Idem. an XI. HAYSA Mens DUR RARES. dard. Salvator Rosa. Acheté par la ville. FuitetenEpyplers. ut. ut eee Sassenit. Donnép. le Gouv. an XI. 2| Esther devant Assuérus............... Ecole de Tintoret. Acheté en 1837. 3| Portrait de FrancoisI.®....(Souchon)..|D'après Titien. Acheté en 1843. Le couronnement d'épines..... idem... Idem. Idem. Notre-Dame des neiges........ idem... [D'après Murillo. Idem. Martyre de St.-Georges............... P. Véronèse. Don du Gouvern. an XI Jésus-Christ descendu de la croix... ... Idem. Acheté en 1837. La bénédiction des marais pontins..... Lehmann. Don du Gouv. en 1848. FEMTITOE CMP ERREEIe Troyen. Idem à a La ville de Lille se distingue par l'importance qu’elle attache e peinture. à l’éducation artistique de sa jeunesse et par les sacrifices géné- reux qu'elle s'impose pour ce noble objet. J'ai entendu apprécier avec Ja plus grande faveur son école de musique qui obtient, m'a-t-on dit, les plus beaux résultats. Cependant, je vous de- manderai la permission de ne point vous fournir de renseigne- ments ni d'appréciations autres que ceux qui sont du domaine des arts que j'ai étudiés. La peinture, la sculpture, et l'architecture avec les sciences accessoires sur lesquelles elles s'appuient sont ' libéralement et savamment enseignées à Lille. J'ai été tellement frappé de la hauteur dans les doctrines, de l’assiduité dans les travaux et des ressources dans les éléments qui se trouvent dans cette école que son examen a;été la plus attachante partie de ma mission ; car on ne saurait se défendre d'accorder un sentiment bien vif de curiosité et d'intérêt aux moyens qui sont pris pour y ( 420 ) assurer, au milieu des vestiges du passé, la continuité et le progrès. Les arts du dessin sont étudiés à Lille dans un vaste établis- sement où tout a été coordonné et aménagé avec sollicitude et ampleur. Tout y a été fait pour l’usage, rien pour l’ostentation ; un faux luxe, une inutile richesse ne viennent point déguiser l'indigence ou l'oubli des conditions sérieuses de l'appropriation, nécessaire au travail. Aussi, dans les meilleures conditions 200 à 250 élèves s’exercent dans les différentes classes de dessin , soit d’après les gravures, soit d'après la bosse, soit d’après pature; 15 ou 20 élèves peignent ou modèlent dans la classe de peinture; 35 à 40 étudient l'architecture; 45 apprennent le dessin des machines et 320 suivent les cours de dessin linéaire. L'anatomie et la perspective sont tenues en honneur. J'ai vu, Monsieur le Ministre, les études peintes des jeunes artistes de Lille. Beaucoup de bonnes choses pleines d'avenir s’y font remar- quer. Il y a, du jeune peintre Colas qui, grâce au legs de Wicar, a pu faire le voyage d'Italie et a remporté cette année une mé- daille à l’exposition de Paris, une fort belle étude de dos. Il y en a de très-remarquables de MM. Lobbedez et Gautiez, jeunes gens qui déjà ont contribué avec distinction à la décoration de l'Hôtel- de-Ville dans une salle destinée au conseil de discipline. De l’un ou de l’autre, j'ai remarqué dans cette salle une figure de garde national très-bien ajustée et d’une solide et bonne peinture. Dans la classe de dessin , j'ai vu de fort bons ouvrages et j'ai relevé sur le tableau d'honneur de ses médaillistes, quelques indications de noms et de dates qui ont un intérêt réel pour l'histoire de l’art : 1766. Dubras de Carravaccio. 1767. Liénart de Dussort. 1775. F. Watteau de Valenciennes (neveu). 1777. Roland. 1778. Wicar. (424) 1782. Watteau. 1791. Cochin. 1796. Descamps. 1800 à 1810. Interruption de l'école. 1822. Ducornet (né sans bras). 1893. De Bayser (architecte de la ville de Boulogne). 1833. Wacquez. 1838. Colas. 1842. Loridan (a été entretenu par la ville de Lille à Paris). Les salles destinées à l'étude des plâtres , à celle de l'anatomie, sont richement pourvues ; et le système de vitrines qui tend à con- server leur beau matériel, est parfaitement entendu. emande Quant à la salle où les élèves travaillent d’après les modèles =. gravés , le fonds d’exemples qu'ils y trouvent n’atteint pas au 4 nombre suffisant, et je ne crains pas, Monsieur le Ministre, de pne. Vous conseiller de l’accroître par l'envoi des principales pièces de . la chalcographie du Louvre. : Je ne puis pas, Monsieur le Ministre, clore cette revue de l'école EE: sans vous signaler le grand mérite du praticien consommé qui la écolæe Conduit. M. Souchon, peintre d'histoire, élève de David , a dans - notre art une réelle supériorité. Aux études sévères de l'atelier } de son maître il a su joindre un énergique exercice d'après les D vieux maîtres des écoles flamandes et italiennes. Dessinateur et À coloriste à la fois , peu d'hommes étaient aussi capables que lui | de guider selon leurs aptitudes diverses les jeunes gens dans les À voies si sévères de l’art. M. Souchon, né dans le midi, dirige cette | î | école depuis une quinzaine d'années. Il a plus de 60 ans et il serait arrivé sans sa rare modestie et ses mœurs retirées , à une réputa- tion brillante. | La wille de Lille réalise en ce moment une construction très- BôledeVile importante, celle de son Hôtel-de-Ville à peu près achevé. Ce ' beau monument dont vous trouverez ici, Monsieur le Ministre, le Eglises. (42) plan nécessaire pour l'installation des musées, à été reconstruit sous la direction de M. Benvignat, architecte , ancien élève de l'école des Beaux-Arts, à Paris. Le bâtiment de l'aile droite qui a été conservé date du siècle dernier, et une annexe beaucoup plus ancienne , qui a été autrefois une chapelle et qui contient la salle dite du Conclave, dans laquelle résidaient la justice de paix et le conseil de discipline, a été religicusement conservée et res- taurée. Un escalier de la même époque, celle de Philippe-le-Bon, et d’un caractère artistique tout à fait remarquable y sera reporté. Ce respect des choses anciennes est d’un bon exemple , eton ne saurait trop applaudir aux soins qui ont été pris dans les travaux d'entretien et de réparation pour n'altérer en rien la physionomie primitive de ces vestiges d’un art plein d'originalité et de charme. Dans la salle du conclave où se trouve la belle et vaste décoration d'Arnould de Vuez, il n’est pas jusqu'aux boiseries qui, dans leur restauration et leur entretien, n’attestent la consciencieuse vo- lonté d'éviter toute sophistication moderne. I y a quelques bons tableaux dans les églises de Lille et plu- sieurs sculptures intéressantes , entre autres une figure de Christ de M. Bra, artiste lillois très-connu à Paris, où il résida long- temps, et qui, avec M. Benvignat a été chargé du monument du général Négrier dont l'inauguration va bientôt avoir lieu. Dans l'église de S.t-Catherine où se trouve cette statue, il existe un tableau de Rubens du plus grand prix. Il représente le martyre de cette sainte et peut dignement se tenir à côté des plus belles productions de ce grand maître. Ce takleau a même des qualités qui m'ont semblé dans l'ensemble de son œuvre mériter une men- tion particulière. Il est de son exécution la plus exquise, de Ja plus grande richesse de tons et de son dessin le plus élégant et le plus correct. Cette page magnifique et charmante a sa légende locale. Elle a été faite à Lille même et pour la place qu'elle oc- cupe, par Rubens lorsqu'il séjourna dans cette ville et elle lui fut payée 6,000 florins. Je ne dois peut-être pas, Monsieur le Mi- ections (428) nistre, en vous signalant cette œuvre importante, retirer l'expres- sion de mon regret de ne la point voir placée au musée dont elle serait sans contredit le plus bel ornement. Ce n'est point seule- ment par la considération de ce que les études y pourraient ga- gner ; car je m'empresse de reconnaître que la dignité du lieu où je l'ai vue domine cette considération , mais je crains bien que le temps ne soit venu où ce tableau entre dans sa phase de dépéris- sement et qu'il ne résiste pas longtemps au régime auquel il est soumis dans une exposition naturellement humide. Quand des chefs-d'œuvre de cet ordre ont concouru pendant un temps con- sidérable à orner les édifices, on devrait peut-être avant tout penser à leur conservation , et si l'église, sans renoncer à'sa pro- priété et en la mentionnant sur letableau même, consentait à le déposer au musée de la ville où son état serait plus facilement surveillé, on pourrait reconnaître sa sollicitude en lui donnant en dédommagement soit une copie faite par les plus habiles gens soit un original commandé à un maître. J'en dirai autant d'une adoration des bergers, par Van Dyck, qui se trouve à l'hôpital gé- néral où les résultats de l’humidité sont encore plus imminents. J'ai su que l'inspecteur général des hospices, M. de Watteville, avait émis à l'égard de la translation de ce tableau au musée le même vœu que moi. Chez plusieurs particuliers , à Lille , on trouve aussi des collec- eulières [ions importantes et curieuses. J'ai vu de beaux tableaux chez M. Tencé qui, depuis de longues années, en fait le commerce avec beaucoup de compétence. Ce véritable amateur est le père de M. Ulysse Tencé, membre de la commission de surveillance de la restauration du musée du Louvre. J'ai vu aussi chez M. Langlart, également très-versé dans la connaissance de la peinture an- cienne, les plus intéressants morceaux des maîtres: enfin, M. Gentil-Descamps montre une considérable collection de curio- sités , de meubles, etc. Je terminerai , Monsieur le Ministre, ce compte-rendu rapide (424) de ma mission à Lille, sur lequel j'appelle encore une fois votre indulgence, en vous disant quelques mots du théâtre de cette ville. Le théâtre de Lille a été aussi reconstruit par M. Benvignat qui, à l'exemple des maîtres de la renaissance. joint au talent de l'architecte celui du peintre et qui, par conséquent , en a exécuté lui-même la décoration. Une pensée unique dans laquelle les con- venances des deux arts ont pu être ainsi complètement satisfaites se manifeste avec éclat dans cette réalisation. La forme circulaire du plafond, entièrement supporté par des caryatides, offrait une surface convenable pour traiter d'une manière monumentale les compositions allégoriques exprimant l’époque de l'origine de l'art théâtral. Dans cette région sont figurés , à côté de chacune des quatre Muses qui président aux différentes divisions de l’art dramatique, les groupes des hommes célèbres qui s’y sont illustrés: Aristophane , Ménandre , Aristodème, Sophocle, Euripide, Polus, Orphée, Myrtis, Pindare ; les grands talents de la Renaissance : Dante, Machiavel, Aretin, Rinuccini, Shakspeare , Lope de Vega, Rotrou, sont représentés au-dessous, à la hauteur des troisiémes loges, de même que les représentants du siècle de Louis XIV et de Louis XV occupent , classés jusqu'à un certain point, la déco- ration des premières et deuxièmes loges. L'avant-scène repré- sente la ville de Lille décernant des couronnes aux Beaux arts. Veuillez agréer, Monsieur le Ministre, l'assurance de mon res- pectueux dévouement. Le Directeur des Musées nationaux , Signé, JEANRON. ya { ne] amacoroda " { g Ë D <—— COL LLL LL III Z np des a PTE RÉ PILES, 2 nr) bn Pszsausepes- £SzSL24282 UE à UE E LS SNS SE 3 À RS PESPERRILTE PERTE 2 MR LRE ES FE EEE E« LS GS 2 ES S © ee 5 ? AVS 84 SG Es sos ,95 Et 9 SAR à 4 € n élève de l’école des Beaux-Arts. No: projet. l'Hôtel A. Voir la note explicative de la décoration de ce grand escalier qui conduit aux musées et où se trouvent des bas-reliefs, carvatides et fragments d'archi- tecture et de sculpture antiques. La reconstruction de l'Hôtel-de-Ville de Lille a ete Lommencée en 1845, sous la direction de M. Benvigoat, architecte, an0ien élève de l'école des Beaux-Arts Le bâtiment de l'aile droite qui à elé conservé date du siècle dernier ] / Les bitiments où se trouvent le musée Wicar et le musée de peinture ont élé entièrement reconstruils. / 3 | Dans les parties projelées. la portion & en continu ation de l'aile droite existe jusqu'à hauteur du | renier élage et date de la même tpaque que cette aile droit = + - B. L'escalier en pierre du nps de Philippe-le Bon se lave Celte ancienne chapelle, qui dat dé méiue 7 | e, a été restaurée complétement 7 tre ans el se trouve en hor tat | - = - | | a QE * | ervatiou. La cour de l'H SR | 1 Le | | In | AW Il | m l'| r | ; À Cm ae TH vat être re 1 | s bâtiments que Re) — == : | LU | struitmaïatenant pour B. | Sn j jeu | ic ! (==) S 2) te 30m ur 12 | < | X | ndrait un mu ( s COUR | ‘l | S S | 5 | S a) à | | 4 Q su) Les constructions projelees 3 } s J | Ï Su marquées C/sont destin | jusqu'à la hauteur du musée Nora. Les parties ainsi indiquées ne sou encone U'A lat de projet, Celle continuation projetée du musée de peinture permettealt de faire le tour de l'Hôtel-de-Ville on passant successivement par tous les musées A. Voir la note explicative de la décoration de ce grand escalier qui conduit aux musées et où se trouvent des bas-reliels, carvatides et fragments d'archi- Lecture et de sculpture antiques MÉMOIRE SUR L'ÉTAT HYGIÉNIQUE DE LA VILLE DE LILLE Au point de vue de l'assainissement des rues, canaux, égouts et de l’approvisionnement des eaux publiques et privées PAR MM. BOLLAERT ET GOSSELET MEMBRES RÉSIDANTS. —28— L'un des caractères les plus remarquables de notre époque, c'est l'importance que l'on attache à toutes les questions qui ont rapport à l'amélioration physique et morale des populations. Parmi ces questions, l'hygiène publique, si méconnue, si dédaignée, si souvent sacrifiée à de misérables sophismes ou à des habitudes vicieuses, prend enfin la place qui lui convient dans l'adminis- tration, et l'on peut dire que les principes si simples qui la déterminent sont arrivés désormais parmi nous au rang des bases fondamentales de la civilisation et du progrès, de telle sorte que leur application, plus ou moins large, marque les degrés de l'élévation des peuples dans l'ordre physique, intellectuel et moral. Le congrès ouvert à Bruxelles en automne dernier, où se trouvaient représentées nôn-seulement l'Europe entière, mais encore les nations les plus avancées de l'Afrique et de l'Amérique, est une preuve bien éclatante de ce que nous avançons. On vit un roi entouré de ses enfants et de ses ministres ne point dédaigner d'assister aux séances si pleines d'intérêt et d'actualité de ces véritables assises de l'hygiène ?, Aucun état ne veut rester en arrière, et toutes les puissances de l'Europe, depuis la Russie jusqu'à l'Espagne, se précipitent à À Cette assemblée remarquable entreprit de résoudre, autant que le permet l'état actuel de la science, toutes les questions d'hygiène publique, et nous ayons puisé dans ses travaux des renseignements dont nous ferons usage au besoin, 28 6 — grands pas dans cette voie féconde qui mène en définitive au bonheur matériel des peuples et à la prospérité des nations. En France, grâce à l'intervention puissante et bien décidée du chef de l'État, ces idées sont déjà entrées dans le domaine des faits accomplis, et de grands changements se préparent encore sur tous les points. Parmi les grandes cités appelées à profiter de ce mouvement, Lille se trouve en première ligne. Centre d'une population considérable qu'attirent et conservent les avantages réunis d'une agriculture prospère et d'une industrie aussi variée qu'étendue, elle a pour premier devoir d'assurer à ses habitants nombreux et resserrés sur un faible espace, la jouissance aussi complète que possible des bienfaits de l'hygiène. De même qu'elle n'a cru devoir reculer devant aucun sacrifice pour marcher à la tête des villes scientifiques en élevant dans son sein un Lycée de premier ordre et des amphithéâtres destinés à l'instruction supérieure, de même elle doit tout mettre en œuvre pour obtenir l'assainissement parfait de son enceinte, sous peine de voir multiplier le rachitisme et l'incapacité au travail, à où la vigueur du corps non moins que la force de l'intelligence peuvent lui permettre de lutter avantageusement avee les villes rivales de sa puissance et de sa gloire antique. Lille jouissait naguère encore de la triste célébrité de renfermer dans ses murs ces habitations malsaines, ces caves infectes où venait s'étioler cette partie de la population qui, par son abais- sement matériel et intellectuel, par son ardeur au travail et par sa résignation, mérite à tous égards de fixer l'attention de nos magistrats. Depuis les trois dernières années, on a sensiblement modifié cet état de choses; le zèle de nos édiles, les dispositions bienfai- santes de la loi sur les logements insalubres, ont fermé beaucoup de caves inhabitables, ont assaini nombre de courettes; mais combien d'améliorations restent à réaliser! Que de causes d'insa- lubrité avons-nous encore sous les yeux, soit en dedans, soit en dehors des habitations! Pour le premier point, nous devons compter sur les progrès de la loi précitée; c'est du second, c’est de l'assainissement général que nous allons nous occuper, en commençant par. ce qui est relatif à la voie publique. Maintes fois le Conseil central de Salubrité ? a démontré quelle était l'influence de l'assainissement des abords des maisons sur la situation physique et morale des riverains. Cette ‘influence a été constatée partout et spécialement à Londres *, par des enquêtes } « Le pavage régulier des cours n'aurait pas seulement un but hygiénique; « pour uous, qui avons comparé, il reste la conviction qu'il serait encore un « puissant stimulant de propreté et d'ordre intérieurs, Nous avons reconnu, « et tout le monde peut s’en convaincre après nous, que si par exceplion une « cour ou une ruelle se trouve bien pavée, bien jointoyée, si le fil d’eau est « facile et en bon état, la propreté de la cour se reflète dans les habitations. » (1848, Rapport sur l'Assainissement, par M. Bailly.) ? On lit dans une déposition de James Chadwich, consignée dans lé rapport de M. Darey, ingénieur en chef des ponts et chaussées sur le macadé- misage des chaussées de Londres et de Paris : « Quelques cours de la cité « avaient, il y a quelques années, un aspect repoussant; l'autorité s’en est « occupée; les cours, même les cours privées furent dallées on payées; le « bien-être des habitations fut accru au delà de toute expression. « Il n’est pas jusqu'aux cours du voisinage de Pelticourt-Lane, quartier « le plus sale de la cité, qui ne soient aujourd'hui aussi propres que « cette salle... » « .….. Donnez les moyens de nettoyer et on en fera bon usage. LR E Il y avait une partie d'Honoïds-Ditch qui, il y a deux ans, aurait pu « être citée comme un des plus sales cloaques, Des étrangers venaient y voir « un exemple de la malpropreté qui pouvait se trouver à Londres en présence « d’une civilisation aussi avancée et de la bonne tenue des grandes rues « situées dans le voisinage : depuis leur pavage, les lieux ont fait des progrès « frappants en ce qui concerne la propreté et le bien-être... » Le président de l’Institut des Ingénieurs de Londres disait : « Le sujet en «“ discussion est d’autant pius important qu’il touche non-sealement aux a intérêts commerciaux de tout un pays, mais que de plus l’état des routes « exerce une influence matérielle sur lé bien-être de la société. « .….. La boue en décomposition dans les rues est une des causes qui « vicie le plus l’air respiré par les habitants des grandes villes; c’est aussi « Pun des plus grands obstacles aux habitudes d'ordre et de propreté domes- « tiques; et du seul fait d'une grande propreté dans les rues découlent des « conséquences d’un ordre bien plus élevé, qu'un observateur superficiel! ne « déconvrirait pas d’abord, » « — 428 — oficielles dont les procès-verbaux ont été rendus publies, et offrent aujourd'hui un frès-grand intérêt pratique. La puissance de cette réaction est par nous tellément sentie que nous avons résolu de ramener l'attention sur ce terrain. Membres l'un et l'autre du Conseil central de Salubrité, chargés de services qui touchent par plus d'un côté au bien-être des populations, nous avons pensé que notre intervention serait en ce moment de quelqu'utilité à nos concitoyens si nous pouvions faire connaître et adopter des vues tout à la fois efficaces et pratiques d'améliorer la voie publique. Les moyens d'action que nous proposons se sont rencontrés d'une manière si parfaite avec les indications formulées par M. À. Chevallier, du Conseil de Salubrité de Paris, dans sa notice historique sur le nettoiement de la capitale, que nous y avons trouvé un puissant encouragement. De son côté, l'administration municipale, aussi éclairée qu'avide de progrès, a déjà prouvé tout l'intérêt qu'elle attache à ce sujet en mettant gracieusement à notre disposition tous les documents administratifs dont elle peut disposer, et qui ont contribué à nous faire apprécier et juger tous les rouages de la voirie urbaine dans la ville de Lille : rouages incomplets, insufisants, dont les résultats soulèvent des récriminations unanimes. Ce n'est pas d'aujourd'hui que datent les plaintes dont nos rues sont l'objet. Leur réputation de saleté est devenue en quelque sorte proverbiale, et, parfois, l'étranger qui visite nos murs est tenté d'appliquer à la généralité des habitants ce qui heureusement n'appartient, dans beaucoup de quartiers, qu'à la situation négligée du service de la voie publique. Le mal est donc ancien ; il est passé en quelque sorte à l'état d'habitude; et bien que l'on se plaigne dans les journaux, dans les conversations, on accepte une situalion mauvaise, détestable, parce qu'il ne s'est présenté jusqu'ici aucun moyen de la changer. Si l'on a quelquefois étudié soigneusement quelques points de la question, on n'est arrivé à rien de général et de méthodique, et l'on n'a jamais — 429 — profité de l'influence de la presse pour indiquer aux habitants comment ils pourraient remédier, aux inconvénients dont ils se plaignent et qui dépendent d'eux en grande partie. Ce qui frappe les yeux les moins clairvoyants, c'est l'élat constamment boueux de la chaussée ; c'est surtout la négligence qui semble présider au balayage et à l'enlèvement de ces matières malsaines, immondes; et l'on est tenté de s'en prendre à une administration qui n'augmente pas le nombre des bras, des chevaux, des voitures, sans se préoccuper de l'efficacité de cet accroissement, et de l'appréciation du système, ni des complications dont se trouve hérissé un service aussi étendu. Mais la question ainsi posée serait trop simple, et depuis longtemps, sans doute, la ville serait assainie s'il s'agissait uniquement d'augmenter les moyens d'actions dont on dispose en ce moment; en raisonnant ainsi on oublierait un élément important qui semble dominer toute la question, celui de la dépense. Il s’agit done, non-seulement de connaître la somme des améliorations qu'il conviendrait d'introduire dans ce service, mais encore de savoir si avec les ressources qui y sont affectées actuellement, et celles que, sans trop gréver son budget, elle pourrait y joindre en supplément, il est possible d'arriver à des résultats plus satisfaisants, plus complets : tel est le but de cette première partie de notre travail. Et d'abord, nous devions nous demander d'où provient la boue qui couvre habituellement une chaussée dans notre cité? Il 'est facile de reconnaître qu'elle est produite par des causes diverses; qu'elle provient des détritus de toute nature qui y sont projetés chaque jour, ou qui y sont amenés accidentellement : 1° Par les voitures arrivant dutdehors; car la boue qui s'attache aux roues dans la campagne, en tombe plus tard sur la voie publique par l'effet de la dessiccation et du mouvement ; 20 Par les matières provenant du trop plein des voitures. et surtout par les chargements de fumiers et autres objets de peu de valeur aceumulés souvent au-delà de la capacité des voitures ; — 450 — 5° Par les déchets des emballages et déballages, chargements et déchargements opérés sur la voie publique ; 4° Par le dépôt quotidien des ordures de ménage, que cliaque riverain effectue librement sur la chaussée durant toute la journée ; 5° Enfin, la bone dans notre humide climat, est produite en partie par la chaussée elle-même, par le sable plus ou moins argileux qui sert de balast aux grès formant la partie supérieure de la voie. Ceci connu, il paraît logique de rechercher les moyens qui contribueraient à diminuer les causes productrices de la boue : c'est ce que nous ferons dans le même ordre : 1° A mesure que l'excédent de la population se répand en dehors de la ville et concourt à élever ces constructions nombreuses qui forment autant de villes de nos faubourgs, on améliore de toutes parts les chaussées en faisant disparaître les accotements en terre eten les remplaçant par des trottoirs ou des zônes d'empierrement. Ce système, appliqué depuis 15 années environ, à modifié singu- lièrement l'état dans lequel se présentaient autrefois à nos portes les voitures venues du dehors. Après avoir parcouru les chemins de terre et les accotements des routes, elles introduisaient en ville une grande quantité de boue. Toutefois il reste encore beaucoup à faire; et l'on voit le long de quelques-unes de nos grandes routes, à la sortie même des fortilications, des accotements en terre ou des trottoirs d'un côté seulement de la chaussée. Depuis longtemps l'administration des ponts et chaussées fait de larges sacrifices pour faire disparaître peu à peu ces lacunes. Mais il serait à désirer qu'elle s'occupât avant tout de les combler aux abords de la ville, sauf à reporter ensuite plus loin ces utiles changements. D'un autre côté, il y a lieu de remarquer qu'au fur et à mesure que les routes se bordent d'habitations, que la population s'entasse dans les faubourgs, il surgit, par ce fait même, des causes d'insalu- brité d'autant plus énergiques, que les administrations locales n'ont — 431 — pas toujours dans leur volonté ni dans les allocations des fonds communaux, les ressources nécessaires pour les fairesdisparaître ; de sorte que, si l'on se plaint des rues de Lille, les plaintes ne sont pas moins fondées quand on jette un regard sur ce qui nous environne. Il en résulte que malgré les améliorations précitées, les voitures et les piétons pénètrent encore en ville, chargés d'une certaine quantité de fange. Cet effet serait amoindri dans une grande proportion si l'admi- nistration des ponts et chaussées contraignait les agents, dont le canton touche aux portes de la ville, d'exécuter les balayages que l'on prescrit sur les routes, dans l'intérêt même de leur conser- vation?. Poussées par un esprit d'émulation bien entendue, les autorités locales seraient portées à exécuter un travail aussi utile sur les autres parties du pavé de la commune, de même qu'elles ont suivi l'exemple donné par les ingénieurs de l'Etat, en établis- sant partout des trottoirs 2 Il est peut-être plus difficile de faire cesser les abus du charge- ment défectueux des voitures. Ce n'est que par des règlements de police bien faits et exécutés rigoureusement, que l'on parviendra à faire disparaître cette cause de malpropreté des rues. Quand le public aura été suffisamment informé que des peines pécuniaires peuvent atteindre tout voiturier qui aura laissé tomber, à l'intérieur de la ville, une partie des matières qu'il transporte, par suite d'un excès de chargement, on soignera davantage l'arrangement des voitures qui traversent la cité, et sans nuire à ses propres intérêts, on respectera la voie publique. Il faut d'ailleurs remarquer que l'exemple est souvent donné par le service de l'ébouage, dont il n’est pas rare de rencontrer les tombereaux oules chariots, et surtout ceux-ci, pleins outre mesure, } Dans l'arrondissement d’Avesnes, les réclamations d’une petite ville et de ses faubourgs ont été entendues, et le balayage s’effectue sur le pavé des routes de Landrecies à une distance de quatre kilomètres. ro — et laissant échapper par-dessus les bords ou à travers les interstices une matière fluide, ou les fumiers qu'ils viennent de relever, mar- quant ainsi derrière eux la trace de leur passage *. Nous saisissons celte occasion de faire remarquer aussi combien les arrêtés relatifs à la circulation diurne des fumiers à travers la ville sont le plus souvent interprétés d'une manière dérisoire, et on ne peut plus désagréable pour les habitants. Les toiles qui doivent recouvrir les fumiers ne sont d'ordinaire que des chiffons étroits ou déchirés, jetés comme une corde sur la voiture, uniquement pour éluder la prescription. Les débris d'animaux, tels que les cuirs de tannerie, ou les os destinés au noir, les productions cornées et autres, échappent aux dispositions des arrêtés, et n'en produisent pas moins de désagréments pour la circulation. Il suffirait sans doute de réviser l’arrêlé en prescrivant de recou- vrr d'une toile qui les enferme entièrement le fumier, les débris d'animaux et toutes matières odorantes gui circulent dans la ville après les heures fivées. 3° Quant à la troisième cause de malpropreté signalée, il n'est pas douteux (et dans les villes industrielles surtout, de grandes facilités sont nécessaires aux commerçants), que la voie publique peut être occupée momentanément par les riverains afin de charger ou décharger les voitures, d'emballer ou de déballer les marchan- dises. C'est un usage qui a pris force de loi, bien qu'il y ait à Paris de grandes restrictions à cet égard; mais il ne saurait être douteux, non plus, que cette tolérance ne doit pas être portée au point d'incommoder le voisinage et de salir la rue par les malpro- pretés qui se produisent dans ces manœuvres. Les pailles, les déchets de toutes sortes que la circulation disperse , que le vent ? Les arrêtés du Préfet de police relatifs à la circulation dans Paris des voitures de plâtre et autres objets pulvirulents, odorants, ainsi qu'à leur déchargement, sont parfaitement applicables à notre ville. Mage porte au loin doivent être, dans une ville bien tenue, immé- diatement relevés par les usagers, sans qu'ils puissent prétexter un autre travail à effectuer prochainement au même lieu. 4 L'habitude qui existe à Lille de déposer sur la rue chaque jour, à toute heure, où il plaît à chacun, les ordures de ménage, les débris végétaux et animaux, et surtout les cendres de houille, est un obstacle insurmontable à la propreté. Ces dépôts, comme ceux qui résultent du balayage, séjournent, dans beaucoup de quartiers, un temps considérable sur la voie, et sont bientôt dispersés par les chevaux, par les voitures, par les piétons qu'ils éclaboussent ; en un mot par le #rafie, comme disent les Anglais. Il est bien vrai que le mode du dépôt de l'ordure des maisons est toléré dans la plupart de nos villes, mais avec des restrictions sévèrement maintenues. Ainsi, à Paris? un temps-très-limité est accordé chaque jour aux riverains, et le balayage, suivi de l'ébouage, s'y opère d'une manière bien plus active et plus régulière qu'à Lille. Des dispositions toutes contraires sont usitées en Angleterre. À Londres, par exemple, chaque maison a dans la cour un lieu de dépôt pour les fumiers et ordures; et chaque jour les agents du nettoiement vident les espèces de citernes sans rien déposer sur la voie. À quelques lieues de Lille, deux de nos villes principales, Dunkerque et Boulogne, offrent un mode d'assainissement encore plus rapide. Chaque jour, à heure déterminée pour chaque rue, et pour ainsi dire pour chaque maison, le tombereau, muni d'une eloche,.se présente et reçoit les ordures de la journée, que la ménagère a déposées dans un panier sur le seuil de la porte. Aussi ne voit-on jamais dans ces villes le moindre dépôt sur la 1 Une heure seulement, de six à sept ou de sept à huit heures du matin, suivant la saison, est accordée pour opérer le balayage. (Ordonnance du 3 novembre 1846.) — 454 — rue; el, bien qu'il y ait plusieurs ménages dans chaque maison 1, les chaussées s'y maintiennent d'une netteté remarquable. Le mode pratiqué à Lille a donné jusqu'ici et donnera toujours de mauvais résultats ; il est aussi contraire aux lois de l'hygiène qu'aux facilités de la circulation. Durant l'hiver, et principalement après les temps de neiges, alors que chaque dépôt se dérobe momen- tanément à la vue, et que les voitures d'ébouage, pour ne pas ramasser de neiges, s'abstiennent de tout enlèvement, et laissent s'accumuler les fumiers de plusieurs jours, de plusieurs semaines, comme nous venons de le voir en 1853 ; c'est alors, disons-nous, qu'au moment du dégel on ne peut s'avancer qu'à travers une fange épaisse et fétide, et au milieu de montagnes de boues solidifiées, qui rendent en beaucoup de points la voie très-périlleuse?. Il est certain que si l'on parvenait à modifier les habitudes des riverains, à faire disparaître les dépôts de cendres et d'ordures sur la rue, on aurait, par le fait seul, amélioré dans une proportion incaleulable le service de la chaussée. Nous reviendrons plus loin sur ce détail quand il sera question du balayage et de l'enlèvement des boues. 5° La nature du sol influe sur la propreté de la chaussée, en ce sens que, dans les terrains sablonneux, les eaux pluviales et autres !_ Le système dés paniers ou baquets particuliers a été prescrit etessayé à Paris à plusieurs reprises, (Voir l’édit de Francois Ieï en date du 28 janvier 1539, et Parrêt du Parlement daté du 30 avril 1663.) Il n’a pu réussir comme à Londres à cause de l’encombrement relativement beancoup plus considérable de la population parisienne; car on sait que si la capitale de l'Angleterre renferme un plus grand nombre d'habitants, son étendue est infiniment plus considérable, puisque chaque habitant correspond à Londres à une surface de 100 mètres, tandis qu’un habitant de Paris n’a que 34 mètres, et que les 260,000 maisons de Londres sont occupées par 7 A habitants seulement, au lieu qu'à Paris on en compte 34 par maison, ce qui répond à un grand nombre de ménages qui ne trouvent pas comme dans les cours de Londres un dépôt provisoire des immondices. Mais on n’y a pas renoncé entièrement, et on étudie de nouveau le sujet en ce moment, ? Les rues étroites, telles que celles du Dragon, Saint-Étienne, des länueurs, ete., sont alors extrêmement dangereuses. — 455 — répandues à la surface des routes s'infiltren £ à travers les joints qui séparent les pavés et disparaissent rapidement dans le sous- sol, tandis qu'il n'en est plus de même quand celui-ci est glaiseux et argileux. Les eaux, alors, sont arrêtées à la base de la couche arénacée qui forme le balast, et qui, ainsi détrempée, devient fluante, jaillit avec plus ou moins de force sous le poids des voitures, entre les grès, et se répand sur la voie. C'est ce qui arrive à Lille et dans la plupart des villes de l'arrondissement. Ainsi ramené. à la surface, le sable de carrière mélangé de terre glaiseuse conserve l'eau avec une grande tenacité. La terre, les cendres répandues sur la rue, les parcelles de fer provenant des roues de voitures et des pieds des chevaux (suivant les expériences récentes de M. Chevreuil:, de l'Institut), contribuent aussi à en altérer la pureté; souvent le grès lui-même, qui forme le pavé, est plus ou moins tendre; et une fois imbibé, il s'assèche plus ou moins difficilement au détriment de la propreté. Une longue expérience de travaux de chaussée a fait reconnaître qu'avec le sous-sol que l'on rencontre à Lille le mode de pavage à employer doit être favorable à l'asséchement des rues; nous parlerons ailleurs de celui qui consiste à obtenir un balast imper- méable supportant des grès d’une nature porphyrique. On ne saurait indiquer exactement dans quelle proportion chacune des causes que l'on vient d'analyser agit pour produire la boue de nos rues, mais on est forcé de reconnaître que l'appli- cation des mesures que nous n'avons fait qu'énoncer diminuerait dans un rapport considérable le cube et surtout le poids des boues à enlever journellement. Il est inutile de faire remarquer que ces améliorations ne peuvent ? M. Chevreuil a trouvé du fer en très-grande abondance entre les payés des ruisseaux de Ja rue Mouffetard ; et il estime que ce fer, absorbant l’oxigène des wiatières envirounantes, pour passer à l’état d'oxide, s'oppose à la transformation en acide carbonique des malières végétales maintenues ainsi dans uu élat de fermentation putride. VÉG = étre toutes réalisées immédiatement ; celles qui tiennent à l'état du sol, au degré de propreté des faubourgs, ne peuvent l'être qu'à la longue par suite de travaux successifs qu'on peut toutefois exécuter avec plus ou moins de suite et d'activité. Il en est d’autres que l'on peut introduire sans délai, et ce sont les plus importantes, les plus radicales En première ligne vient la suppression complète des dépôts d'immondices sur la rue, avec la conséquence qui en découle : transport direct à la voiture des baquets de chaque ménage ‘. En second lieu se trouvent les modifications à apporter au balayage qui est l'une des opérations les plus difficiles du service de salubrité. C'est à Lille la pius mal exécutée. Des études nombreuses et répétées sur ce sujet ont été faites non-seulement chez nous, mais à Paris, à Londres, en Italie, partout enfin, car toute agglomération d'hommes entraîne partout les mêmes incon- vénients. Dans le plus grand nombre des villes du Nord, le balayage est mis à la charge des riverains; à Paris même cette disposition administrative a prévalu (voir l'ordonnance du 5 novembre 1846). Le balayage à Londres est à la charge des paroisses (terme corres- pondant à nos arrondissements urbains). Elles emploient à ce travail les pauvres dont elles sont chargées. Mais il y a partout de grands abus, partout de grandes lacunes, et l'on s'est ingénié à trouver des moyens mécaniques capables de suppléer à l'insuffisance des divers systèmes. La machine anglaise de With-Worth paraît offrir des avantages considérables, entre autres ceux de relever la boue en la balayant et de réaliser d'après l'enquête de notre ingénieur 1 On se demandera sans doute si la conservation, dans l’intérieur des maisons, des immondices de la journée ne sera pas une cause d’insalubrité plus grave que celle que l’on voudrait éviter; mais on sera bientôt rassuré si l’on réfléchit que ces matières pourront, au besoin, être exportées matin et soir, qu’elles auront moins de tendance à fermenter en petite quantité et à sec que réunies au milieu des tas de boues, qu'enfin les vases contenants pourront être fermés et soumis à de fréqueuts lavages, — 431 — Darey une économie de 50 à 66 pour °/, sur le balayage et l'ébouage effectués à la main; malgré de tels résultats, cet appa- reil d'un prix élevé n'est encore en usage que dans quelques villes anglaises. A Lille, chacun sait comme les choses se passent : l'entrepreneur atout à sa charge et doit effectuer chaque jour le balayage de toutes les parties de la voie publique. Mais à l'exception d'un très- petit nombre de rues principales, les boues ne sont balayées, ni enlevées à heures régulières, ni même chaque jour. Beaucoup sont à peine balayées une fois la semaine, nulle part et en aucun temps elles ne le sont complétement. Une décomposition fétide, que favorise l'humidité habituelle, est la conséquence de cette stagnation trop prolongée de matières déjà en fermentation ; ét les émanations sui generrs qui s'en dégagent deviennent très- sensibles dans certains endroits. Après le balayage tel quel, la boue semi-liquide est abandonnée ça et là et encombre les rues. Ges amas accrus bientôt et multipliés par les apports continus de l'intérieur des maisons ne ardent pas (si, comme il arrive le plus souvent, le tombereau ne suit pas de près l'atelier des balayeurs) à reprendre la place qu'ils occupaient avant le balayage *. Aussi, pendant une grande partie de l'année le pavé, qu'un 1 Une machine agit comme quinze ouvriers valides ou comme trente indigents. On avait expérimenté à Manchester qu'un ouvrier libre balayant 1,000 mètres carrés, les pauvres de paroisse 500 à 600. A Londres, un homine nettoie par jour une surface beaucoup plus grande; mais il paraît que l'ouvrage est fait avec moins de soin. Serait-ce dans les mêmes conditions qu’on obtient à Paris 2,000 mètres? 2 En vue de ramasser la boue liquide et de sécher le pavé, l’éboueur est obligé, d’après le cahier des charges, de répandre du fumier sur la rue et de le relever ensuite quand la circulation l’a broyé dans la fange. Cette opération, nommée rétramage, très-utile dans le système actuel, qui procrée pour ainsi dire la boue, deviendrait sans application on à peu près si la propreté était habituelle, RTE — balayage et des ivrigations convenables n'ont pas approprié, reste-t-il très-humide contrairement aux intérêts de la ville qui consacre tous les ans de fortes sommes à l'entretien de la chaussée ?. Quant au personnel affecté au balayage, il est fourni par l'entrepreneur des boues de la ville; il doit être plus ou moins considérable suivant la quantité de boues existantes. Mais il est notoire que, généralement, il est insuffisant comme nombre? et comme aptitude. En effet, le personnel, qui ne s'élève que rarement au delà de 70 individus, est composé de ee qu'il y a de plus affaibli parmi les habitants les plus dénués de la ville. On ne saurait voir sans pitié et sans dégoût à la fois ces bandes de balayeurs, mal accoutrés, souvent grossiers envers les con- ducteurs de voitures, insultant l'un, insultés par l'autre; ils effectuent une besogne qu'ils ont d'autant moins intérêt à bien faire qu'elle est exécutée en commun. Ces ouvriers * reçoivent, il est vrai, un très-faible salaire, mais en réalité le travail qu'ils fournissent est encore trop rétribué, comme le prouvent les expériences déjà citées, dans lesquelles il a été constaté, par des essais comparatifs, que le même travail exécuté par des hommes valides est mieux terminé et produit une économie de 50 à 60 pour °/s. D'un autre côté il y a peut-être quelqu'inhumanité à employer à des travaux difliciles, très-fatigants, qui exposent à toutes les intempéries des hommes et surtout des femmes aussi débiles, et d'autant moins en état de les supporter qu'une alimentation insuffisante et des habitudes funestes les portent à rechercher 1 Les dépenses s’élèvent, année moyenne, à 10,000 fr., service non compris. 2? Le service ordinaire du balayage compte vingt hommes et cinquante femmes. # Les balayeurs recoivent 10 cent. par heure et rarement plus de 60 cent. par jour (les balais à leur charge). — 459 — l'excitation des spiritueux, qui entretiennent chez eux des causes permanentes de maladie et de dégradation morale . Il ne saurait y avoir de profit même pour l'entrepreneur à continuer ce mode de travail, fut-il en rapport avec les besoins de la ville, car non- seulement il doit payer cher relativement, mais encore il doit surveiller avec beaucoup de difficulté. Ce qui vient d'être dit conduit naturellement à remplacer les brigades actuelles par des hommes vigoureux, intelligents et intéressés à perfectionner leur travail sous l'œil de chefs actifs. Des agents, des cantonniers chargés de maintenir en bon état une certaine longueur de rue ou de place publique, pourraient être rendus responsables de leur service, et mériter par leurs soins ou par leur négligence des encouragements pé cuniers, ou des retenues proportionnées, le tout réglé par des instructions bien nettes, bien précises, d'où ils ne pourraient se départir. Disons sommairement ici que les fonctions principales du cantonnier de salubrité, muni d'un outillage convenable, consis- teraient à balayer ? chaque jour, à la première heure, dans toute l'étendue de son canton, ef en commençant par les points où la circulation est plus active et plus matinale, tout ce qu'il y trouverait à“balayer. Durant la journée il aurait à ramasser sur une brouette tout ce qui pourrait tomber sur la voie ; les ruisseaux, les urinoirs, les bouches d’égouts seraient à sa surveillance et à sa charge, ainsi que les trottoirs des édifices publics, dés ponts et ceux des maisons 2 Des considérations humanitaires plus spécieuses que réfléchies pourraient engager à continuer ce genre de travail, payé même à chers deniers aux balayeurs actuels, mais il ne serait pas très-difficile d'occuper chez eux ces malheureux à des travaux moins pénibles et non moins rétribués. Il serait d’ailleurs impossible de craindre pour leur avenir si l’on réfléchit aux prodiges de l’antique charité lilloise. ? On se trouve très-bien en Angleterre, et, depuis peu, à Boulogne, d'employer pour le service de la voie des balais en baleine ou en fibres d’aloès qui chassent plus fort et s'usent moins rapidement, =D non habitées. Il se procurerait, soit aux fontaines publiques, soit chez les riverains, l'eau nécessaire à l'assainissement de ces locaux’; il veillerait à ce que l'ébouage confié à l'entreprise soit exécuté conformément aux prescriptions du service de salubrité; que les tombereaux par exemple arrivent à heure fixe dans les différentes parties de son canton, afin que les riverains puissent préparer d'avance le baquet aux ordures et le mettre au seuil de la porte, à la disposition de l'éboueur. Il tiendrait la main à ce que chaque riverain exécute avant l'heure fixée le balayage ou le lavage de son trottoir, et l'arrosement pendant les chaleurs de l'été, et aux époques de la journée déterminées par les arrêtés, de la moitié du pavé de la rue. Il agirait de même en temps de neige, veillant au libre cours des ruisseaux, préparant aux points convenables, aux carrefours et autres, les déblais nécessaires à la circulation des voitures et des piétons. Dans les moments opportuns, après ses visites, et le balayage principal dont il a été parlé, il aurait à nettoyer à fond * une 1 Les arrosements prescrits pendant les grandes chaleurs, dans Îles rues, ceux que l'administration fait exécuter en cette saison sur les places et les promenades publiques, seraient, à certaines époques de l'hiver, extrèmement utiles, indispensables même au nettoiement complet de certaines rues difficiles à sécher et où la boue épaissie résiste au balai (la rue de la Monnaie par exemple), La dépense de deux tonneaux irrigateurs ayant été faite, il suffit de les utiliser convenablement pour opérer de grandes améliorations sur certains points. ? La question de savoir s'il convient de nettoyer à fond les chaussées, en enlevant toute la boue qui s’applique sur les pavés, est diversement appréciée. On se fonde pour la conserver sur la croyance que cette. boue supporte une partie de la charge des voitures, ou bien encore qu’elle maintient l’écartement et empèche le déchaussement du payé. Mais nous ferons remarquer qu'il est incontestable que les voies pavées se détériorent incomparablement plus durant la saison pluvieuse que pendant les temps secs; qu'il y a donc pour indication de faciliter autant que possible l’assèchement des pavés, et que, saut les cas où la chaussée vient d'être réparée, un travail exécuté avec un instrument trop large pour pénétrer entre les grès et les déchausser, mais assez étroit cependant pour enlever tout ce qui ne relie pas les pavés, est de nature à conserver le pavage, et alors même qu’il en résulterait quelqu'aggravation de dépense, elle se trouverait largement compensée par le bienfait qui résulte de l'assainissement de la rue. seclion de son parcours à l'aide du balai, de la rugine, ou de l'irrigation, de telle sorte que cette appropriation s'effectue successivement dans toute l'étendue du canton une fois par semaine. Il aurait aussi à exécuter les travaux de menues réparations de la chaussée, telles que relevés d’ornières, remplacements de grès, réparations de flaches, ou, suivant les ordres qu'il recevrait de ses chefs, il devrait se réunir aux cantonniers voisins pour exécuter en commun des travaux de relevés à bout, de grosses réparations de chaussée, ou même servir de chef d'atelier aux ouvriers paveurs libres auxquels ces travaux pourraient être confiés. Au besoin il veillerait à la sécurité de la voie, il ferait disparaître les obstacles à la circulation’; en cas d'incendie, il donnerait l'alarme au poste voisin; il signalerait à son chef immédiat tout fait repréhensible qui se commettrait sur son canton et produirait ainsi un grand allégement et une grande régularité dans le service de la police, en ce qui concerne la voirie. Il est inutile de dire que les outils du cantonnier pourraient lui être fournis à son entrée au service et qu'ils seraient alors entretenus et renouvelés en temps utiles, à l'aide de faibles retenues, etc., etc.; ceci rentre dans le modèle de livret annexé au travail sous le N° 1. De bons et loyaux services dans des travaux aussi fatigants et 1 Si lon réfléchit qu’il ne devra plus être fait aucun dépôt sur la voie, que Ja bonne tenue de la rue préviendra la production de boue, on comprendra facilement que toutes les parties de chaque section ne nécessiteront pas même un balayage complet par huitaine. Dans la situation actuelle, les soixante-dix balayeurs, pour satisfaire au cahier des charges en renouvelant chaque jour le balayage, devraient l’effectuer chacun sur une étendue de 3,733 mètres carrés; or, il résulte d’observations répétées à Paris avec grand soin qu'un homme valide peut balayer au maximum 2,000 mètres carrés par jour, En tenant compte du peu de temps pendant lequel les balayeurs fonctionnent habituellement, puisqu'ils ne parviennent guère à gagner que 60 cent., on arrive à ce fait que si certaines rues privilégiées sont balayées plusieurs fois par semaine, ce ne peut être qu'aux dépens des raes moins fayorisées. 29 RE aussi importants mériteraient assurément aux cantonniers, après un certain nombre d'années, une retraite ou du moins un poste équivalent dans quelque fonction moins pénible dépendant de la ville. Mais on ne devrait recruter ces agents que parmi les meilleurs sujets, capables à tous égards de remplir leurs fonctions. Des appréciations sérieusement combinées permetteut d'espé- rer que l'emploi de trente cantonniers en temps ordinaire serait suffisant pour l'exécution complète de tous les détails ci-dessus indiqués. En cas de neige * (note importante), de gelée prolongée et de débâcle, il y aura quelquefois lieu de leur adjoindre un nombre convenable d’auxiliaires, et alors les femmes des cantonniers mariés pourraient avoir la préférence *. 1 Les soixante-dix balayeurs actuels ne travaillant que la demi-journée, le travail d’un jour entier exigera moitié d'ouvriers pour un mème espace. De plus, la surface balayée par un cantonnier étant environ 2,000 mètres par jour, les 261,265 mètres qui représentent nos rues nécessiteraient un personnel de cent trente-un cantouniers, mais la prohibition de rien déposer sur la rue entraînera l'avantage de ne balayer chaque partie de la voie publique qu'une fois la semaine, c’est-à-dire le sixième de la besogne ou vingt-deux ouvriers. En ajoutant le service général de parcours, la surveillance nécessaire, on est conduit à admettre trente cantonniers en moyenne. ? Dans le système proposé, la neige, n’étant plus mélangée de boues et de déchets de ménage, pourrait être, sans inconvénients, projetée dans les canaux de la ville qui ne seraient pas entièrement gelés, de sorte qu’il deviendrait possible d'en débarrasser promptement la cité, comme on le fait à Paris; à cet effet, les riverains pourraient être tenus de balayer la chaussée aussitôt après la neige et de réunir celle-ci en tas séparés (sans pouvoir jamais les augmenter par l'apport des neiges de l’intérieur) le long d’un des ruisseaux de la rue ; et pour éviter les discussions, on désignerait par exemple le côté des numéros pairs pour toutes les rues (voir le projet d’arrêté municipal No 2), ce qui rendrait immédiatement la circulation facile en prévenant les accidents qui arrivent si souvent aux piétons comme aux attelages. L’enlèvement s’effectuerait ensuite en commençant par les rues les plus étroites, où il serait plus rapide et plus urgent qu'ailleurs. Les déchargements seraient opérés aux cours d’eau voisins avec toutes les précautions nécessaires pour ne gêner ni la circulation ni les riverains de ces canaux. En cas de gelée, qui rend tout travail difficile, les rues étroites seraient seules débarrassées et la neige portée soit aux grands canaux, soit à un autre point désigné. Sur la place, les neiges seraient rejetées de manière à laisser un large passage en face des habitations, et des sentiers seraient ouverts par les cantonniers dans les directions utiles. 3% On remarque que les femmes ont une très-grande aptitude au balayage; il — 443 — Si l'expérience venait, après une application radicalement faite de l'ensemble de ces mesures, démontrer l'insuffisance du nombre proposé, ce ne serait point un motif pour écarter le système lui même, il y aurait tout simplement à employer quarante et même cinquante cantonniers, sans s'effrayer du surcroît de dépense qui pourrait se produire ‘, car les avantages de tous les instants qui résulteraient pour les habitants de la ville d’une propreté parfaite de la voie sont tellement palpables, tellement sentis aujourd'hui, qu'il ne saurait s'élever aucune réclamation à cet égard, puisqu'en définitive ils peuvent se traduire en économie individuelle sur les vêtements que la boue souille sans cesse, en accroissement commercial que les facilités de circulation ont toujours pour effet d'amener rapide- ment. Toutefois notre appréciation doit être maintenue Jusqu'à preuve contraire. Immédiatement au-dessus des cantonniers seraient placés un certain nombre de conducteurs de salubrité dont le service consisterait d'une part à assurer, d'après les ordres supérieurs, l'exécution des mesures conservatrices et de salubrité générale de la voie qui sont du ressort des cantonniers ; à dresser les procès- verbaux de contravention aux arrêtés de police municipale; à diriger les travaux prescrits sur la voie, etc. Et d'autre part ils auraient à surveiller les mesures d'alignement, ou celles de salubrité particulières à certaines usines et prescrites par l'autorité administrative. Un conducteur par dix cantonniers suffirait largement au besoin du service. serait donc avantageux, et moral à la fois, de voir le cantonnier aidé dans ses fonctions par sa propre femme, dont le gain, si minime qu’il soit, accroitrait les rétributions de ces agents. En cas de maladie de ceux-ci, la suppléance provisoire pourrait également se faire par les femmes. ! La récapitulation des frais d'assainissement à Paris porte un total de 2,663,000 fr., ce qui fait par habitant 2 fr, 66 cent. On trouve à Lille une dépense complète de 41 cenl. par habitant en calculant sur un total de 31 000 fr, l'ensemble des sommes qui contribient à ce service. — ht — Enfin à leur tête serait placé-un ingénieur de salubrité chargé tout à la fois de l'assainissement des rues, de leur bon entretien, de la direction des travaux et du service des alignements. À ces fonetions viendrait se rattacher une surveillance spéciale entière ment négligée aujourd'hui et dont il vient d'être parlé, celles des établissements dangereux, incommodes ou insalubres, autorisés moyennant certaines réserves, certaines prescriptions, qui la plupart du temps sont inexécutées, ou lombent en désuétude, jusqu'à ce que l'excès des inconvénients qui résulte de la tolérance force les parties intéressées, après avoir longtemps souffert, à s'armer pour leur défense des moyens toujours désagréables, souvent inefficaces, que la loi laisse à leur disposition. L'ingénieur de la salubrité serait également chargé d'éclairer l'administration sur l'établissement clandestin des industries insa- lubres, et de proposer, au moment des enquêtes, les conditions que lui paraîtraient exiger ces sortes d'usines. Cet agent ‘principal, tout à la fois homme d'expérience et de talent, architecte et ingénieur, serait choisi avec le plus graud soin, car de lui, de son activité, de son intelligence, dépendrait en grande partie le succès du nouveau système, le bon ou le mauvais emploi des forces mises à sa disposition. k Nous venons de réunir l'ensemble de l'organisation par laquelle la ville assurerait le service du balayage à l'aide d'agents spéciaux etsoumis à sa dépendance, organisation qui, réunissant dans une même main l'ensemble des matières qui s'y rattachent, imprimerait une activité nouvelle à cette partie importante des fonctions municipales aujourd'hui déférées aux cinq commissaires de police que des oceupations nombreuses de divers ordres, que le défaut de connais- sances spéciales et de vues d'ensemble rendent inhabiles à bien faire, quelque soit leur bon vouloir. I yalieu d'examiner maintenant une autre partie non moins importanie du service de salubrité, qui doit être laissée à l'industrie privée, mais qui n'en doit pas moins être l'objet d'une surveillance active et d'une réglementation inflexible. — 445 — Si le balayage est mal exécuté et incomplétement fait, que doit-on dire de l'ébouage? De ces ignobles tombereaux mal joints qui laissent pour ainsi dire tomber ça et là autant de boue qu'ils en emportent, qui entravent négligemment la cireulation et s'inquiètent peu de suivre de près ou de loin l'atelier des balayeurs? Il a été dit quelles sont les conséquences de ce retard. L'une des plus graves est la prolongation durant toute la journée des pérégrinations de ces voitures. Evidemment le matériel de l'entrepreneur des boues est vicieux, il est aussi insuffisant pour surmonter les difficultés actuelles du service dont il convient de signaler la principale : il s'agit du dépôt général des fumiers formé près de l'Île Sainte-Agnès. La ville fournit, en dehors des fortifications, sur le territoire de Fives, un terrain où l'entrepreneur est tenu d'aller déposer la totalité des produits de l'ébouage. Cet emplace- ment ne paraît pas heureusement choisi, au point de vue de l'hygiène et des convenances. S'il est au nord de la ville, il en est tellement près que les vents en portent quelquefois les émanations sur les quartiers voisins, séparés au plus de 200 mètres en ligne droite, alors qu'à Paris on exige une distance d'au moins 2,000 mètres. En outre, les deux portes que suivent les voitures pour s'y rendre sont. très-fréquentées, et les convois funèbres de tout un quartier populeux doivent longer le terrain, après avoir été entravés dans leur marche pieuse et recueillie par les tombereaux malen- contreux. Il ne faut parler que pour mémoire des nombreux jardins auxquels ces portes donnent accès, et qui, occupés par nos citadins, sont constamment infectés par les miasmes qui se dégagent de ce dépôt. Sans nous préoccuper non plus des voyageurs du chemin de fer saisis tout d'un coup au passage par les-odeurs fétides de ces foyers d'infection, il convient d'aborder le sujet sous un point de vue plus matériel, celui de la distance à parcourir pour les tombe- reaux ; etalors, au lieu de paraître trop rapproché, ce local semblera trop éloigné; et en effet, le dépotoir de l'Ile Sainte-Agnès étant situé à 450 mètres de la porte de Tournai, qui, elle-même, est à = 140 — 1,270 mètres du centre de la ville (rue du Cirque), il en résulte que chaque voiture doit, pour l'aller et le retour, parcourir 3,440 mètres. Si l'on remarque la nécessité pour l'entrepreneur d'avoir terminé l'ébouage à des heures déterminées, c'est-à-dire avant dix heures, midi ou deux heures du soir, suivant la saison, ce qui équivaut en moyenne à terminer avant midi un travail qu'il ne peut commencer avant sept ou huit heures du matin, on verra qu'en admettant le maximum théorique de rapidité des voitures chargées(28,000 mètres), il ne pourrait effectuer, durant les cinq heures de marche, plus de trois voyages et un tiers, ce qui, vu les temps d'arrêt multipliés, doit se réduire à deux voyages en moyenne par demi-jour et pour chaque voiture. De là naît la nécessité où l'on est d'accroître le nombre des voitures, che vaux et charretiers pour enlever les fumiers dontle total journalier ne s'élève en moyenne qu'à 19 mètres cubes environ, soit 6,850 mètres cubes pour l'année, d'après les données que nous devons croire exactes ”. Il y a donc lieu à un grand déploiement d'appareil pour des résul- tats financiers fort restreints, puisque la vente de ces fumiers, qui se fait au prix de 7 fr. par voiture à deux chevaux, enlevant environ 3 mètres cubes, forme une somme de 15 à 16,000 fr. seulement. L'éloignement du dépôt général doit entrer pour beaucoup dans les obstacles que rencontre la concurrence aux adjudications de l'ébouage, malgré les fractionnements que l'on a cherché à introduire 1 L'évaluation des fumiers, eu égard au nombre d'habitants, donnerait lieu, suivant les villes qu’on observe, à des différences bien bizarres qui prennent leur source dans les éléments les plus divers, et quelquefois difficiles, à apprécier de la production des immondices et de la manière de les évaluer. Nous citerons par exemple : Population, Fumiér par jour. Pour un habitant, Lille, sur 75,000 hab.| 19 mètres cubes.| jésoon de mètre cube, Paris, 1,000,000 FOURS 106000 — RE 200 000 A|27S MINI S — 441 — dans le service ; car il est difficile de trouver des cultivateurs ou des industriels possédant un outillage convenable, et nous ajouterons qu'à cet égard encore la position est des plus défavorables aux culti- vateurs qui ont jusqu'ici recherché cet engrais. On voit, en effet, dans un rapport de M. Loiset au Conseil municipal de Lille, en 1845, que sur cent voitures de fumier de la ville qui se disséminent dans les campagnes, soixante-quinze sont enlevées par les cultiva- teurs arrivant par la porte de Dunkerque, dix par ceux qui entrent par la porte de Béthune, sept voitures passent par la porte de Paris, huit par les autres portes. Ainsi que le faisait remarquer l'honorable rapporteur, il y aurait à tenrr compte de cette distribution dans le choix des lieux de dépôt. À tous égards, la ville se placerait dans des conditions bien préfé- rables, si, au lieu d'un seul dépotoir extra-muros, elle pouvait mettre à la disposition de ses entrepreneurs plusieurs points de décharge provisoire, tellement combinés, qu'il n’y ait aucune perte de temps, et que les transports vers les lieux de dépôt définitif soient effectués sans qu'ils puissent en aucun cas rien séjourner dans la ville et porter atteinte aux règles de l'hygiène. Il suffirait pour cela de mettre à contribution toutes les voies de communication que nous possédons, et de profiter, comme on l'a fait ailleurs ‘, des canaux et des voies ferrées qui sillonnent la ville, pour exporter chaque jour les immon- dices, en affectant à chaque quartier des points rapprochés pour l'embarquement. (Voir l'annexe N° 3.) Il existe, par exemple, le long des quais de la Haute-Detle et de ceux de la Basse-Deûle, des points plus ou moins écartés, où l'on pourrait, sans danger pour la circulation, établir ces quais d'embar- 1 A Bruxelles, les dépôts sont établis sur V'Esplanade, et les fumiers sont emportés ou par voitures ou par bateaux sur le canal. Il en est de même à Orléans et à Bordeaux, M. À Chevallier pense que ce mode de transport serait très-avantageux à Paris, — 448 — quement à l'aide de quelques appropriations très-simples : ainsi, un arrêt fixe pour les roues de voitures en couronnement des murs de quais, un plan incliné disposé en entonnoir, permettraient aux immondices, que les tombereaux déverseraient par le mouvement de bascule qui leur est propre, d'arriver sans intermédiaire d ans des bateaux qui seraient stationnés et amarrés sous la planche d'abordage, aux heures déterminées, et qui emporteraient ensuite les fumiers soit à un dépôt éloigné, soit directement vers les localités parcourues par le canal, où viendraient les prendre les cultivateurs intéressés. (Annexe N° 4.) Ainsi, tout l'espace compris sur la rive gauche de la Deûle, entre le pont de la Barre et celui du Ramponeau, ainsi encore le rivage qui termine la rue Saint-Sébastien, derrière le magasin aux Fourrages, pourraient servir de quais d'embarquement. Un sem- blable déversoir serait surtout utile aux abords du moulin du Château. Si des motifs graves, que nous ne prévoyons pas, n'y faisaient obstacle, on pourrait également utiliser le canal des Molfonds pour ce transport : la quantité de barques nécessaires au service de la journée serait introduite sous la surveillance d'un employé de l'octroi par la grille placée derrière l'hôpital militaire, et après être chargées elles sortiraient toutes ensemble par la même issue pour gagner la Deûle. Une opération analogue pourrait s'effectuer à l'aide des chemins de fer du Nord et sans désagrément pour la station. En effet, à l'extrémité de la gare des marchandises se trouve un point très-favorable pour le transbordement des matières que recevraient des wagons spéciaux. À défaut de la possibilité d'obtenir un arran- gement avec la compagnie du chemin de fer, on pourrait disposer le canal des Sœurs-Noires, correspondant à la rue des Jardins, de la manière indiquée pour le canal des Molfonds. Il serait indispen- sable dans ce cas de faciliter le passage de ce canal dans la Deûle?. ? Une autre combinaison pourrait encore amener la totalité des produits boueux de la ville à la placé du Château, surtout si l'adjudication était — 459 — Un des principaux résultats de l'application de ce système mixte serait de réduire à moins d'un kilomètre, aller et retour, le trajet moyen qu'aurait à faire chaque voiture, capable dès lors d'en remplacer quatre. On arriverait donc à effectuer l'ébouage en employant le quart des tombereaux, le quart des chevaux, le quart des conducteurs avec leurs aides *. Mais il faudrait, pensons-nous, appliquer cette accélération dans la marche à un prompt enlèvement des immondices, en autorisant une réduction de moitié seulement du matériel destiné à parcourir la ville. Toutefois, la réduction ne serait pas absolue, car elle ne porte que sur les voitures et chevaux; il y aurait lieu de suppléer au transport * par un service de bateaux ou de wagons. Or, dans l'état où se trouve aujourd'hui la batellerie, il serait facile à un entrepreneur de s'entendre avec quelques batéliers que l'éventualité des chargements oblige souvent à stationner inactifs sur les canaux *. Et, de son côté, la compagnie des chemins de fer trouverait dahs la régularité d’un chargement de celte nature une compensation aux appropriations qu'elle aurait faites. Sur ces bases, l'entreprise, divisée par lot, serait accessible à un grand nombre d'amateurs qui feraient naître une rivalité utile prise par un seul entrepreneur; cet arrangement, qui offre moins de rapidité dans le service que le fractionnement précité, aurait encore de grands avantages sur le mode actuel. 1 C’est-à-dire en moyenne que l’ébouage pourrait s'effectuer en lui accordant le temps qu’il emploie aujourd’hui avec cinq voitures, cinq chevaux et dix charretiers ou aides, s’il n’y avait à Lenir compte du temps nécessaire au chargement, ? L’outillage de chaque entrepreneur, en rapport avec le système de transport qu’il adopterait, devrait toujours être agréé par l'ingénieur de salubrité, Il serait surtout avantageux de choisir des voitures basses et de petites dimensions, les bateaux seraient disposés de manière à ne rien perdre dans les canaux. % Les époques de chômage et de gelée des canaux nécessiteraient l'adoption de dépôts provisoires comme ceux établis actuellement pour les moments de dégel, — 450 — aux intérêts de la ville. Les cultivateurs n'auraient plus à redouter les pertes de temps considérables occasionnées par le mode actuel d'ébouage ; ils n'auraient plus à se préoccuper du balayage dont toutes les difficultés et les complications devaient les écarter forcé- ment du concours. On pourra espérer les mêmes résultats qu'à Paris, où ce sont presqu'exelusivement les cultivateurs qui viennent recueillir les produits du balayage, et où la concurrence est telle, que dans un avenir peu éloigné on attend de grands rabais sur les remises accordées aux entrepreneurs. Il n'est pas sans importance de remarquer aussi qu'un transport peu onéreux et à de grandes distances des fumiers de la ville? devra amener une plus-value de ces précieux engrais, dont l'usage est jusqu'ici restreint à quelques exploitations limitrophes. Il y aurait donc là, par la suite, des rentrées probables à la caisse de la ville dont nous allons avoir à discuter les intérêts. Nous connaissons trop cependant toutes les difficultés que l'on rencontre quand il s'agit de modifier d'anciennes habitudes que la routine respecte aveuglément pour ne pas prévoir le cas où les adjudicataires préfèreraient jouir des lieux de dépôts accordés par la ville au risque de faire plus de chemin. Aussi ne devra-t-on pas s'étonner de retrouver au projetde budget ci-après la prévision d'une dépense conforme à celle qui a existé jusqu'ici, mais qui disparaîtra par la suite, à mesure que l'expérience et une application 1 Sur 356 voitures enlevées chaque jour à Paris, 353 sont portées direc- tement chez les cultivateurs, ? Dans les détritus que rejettent les ménages, il est des objets de peu de valeur qui sont journellement recueillis et qui rentrent dans le commerce, Les os, les chiffons, les morceaux de verre, les débris de porcelaine, etc. Il s'établit ainsi une foule de petites récoltes accumalées dans les chambres des malheureux qui créent autour d’eux des foyers d’une infection déplorable que nous avons souvent constatée. Il serait à désirer que la ville en fut totalement débarrassée, et, dans le système, il se trouverait bientôt des petits industriels, domiciliés à la campagne, qui se livreraient à ce trafic loin de la ville. Les cendres, que l’agriculture recherche quelquefois, au lieu d’être relevées dans la rue, seront recueillies a domicile par les personnes qui s’en occupent, comme cela se pratique fréquemment aujourd'hui, — 451 — intelligente * viendront confirmer les avantages des modifications proposées, qui peuvent se résumer comme suit : Pour l'extérieur et les abords de la ville, se mettre en rapport avec l'administration des ponts et chaussées, avec les autorités adminis- tratives des communes contiguës, à l'effet d'obtenir satisfaction sur la bonne tenue des voies de communication. A l'intérieur, créer un service spécial de la salubrité comprenant la voirie dans tous ses détails et la surveillance des établissements dangereux, incommodes ou insalubres. (Les grands projets d'édifices et de réparations des constructions municipales étant laissés aux architectes libres.) L'agent en chef de ce service aurait le titre d'ingénieur de la salubrité avec les fonctions ci-dessus désignées ; trois conducteurs des travaux, assermentés et placés sous ses ordres, surveil- leraient les cantonniers en parcourant au moins une fois chaque jour toute l'étendue de leur section. Des cantonniers urbains, en nombre suffisant (trente par exemple), seraient chargés du service actif dans une étendue de rue mise sous leur responsabilité pour le balayage, les menues réparations, la surveillance policière, etc. Défense serait faite de jeter, déposer ou laisser couler sur la voie publique aucune ordure, aucune matière que ce soit. Les fumiers de ménage de chaque jour et autres seraient con- servés par les particuliers, et les paniers, baquets ou autres conte- nants, étanches et faciles à transporter, seraient mis à la disposition de l'éboueur, sur le seuil de la porte, à heure déterminée. Le service de l'ébouage, laissé à l’entreprise, aurait à relever les produits du balayage de la rue et à porter directement les paniers de chaque maison sur les voitures. Celles-ci, tenues aussi proprement que possible, arriveraient à heures fixes, précédées de la sonnerie habituelle, et pourraient ensuite ou emporter directement leur chargement, ou le transborder © Il serait peu rationnel de faire les premiers essais dans l'hiver, au milieu de l’inexpérience et des plus grandes difficultés du service qu’on surmonterait sans peine, au contraire, si chacun était d'avance faconné à sa besogne. — 452 — soit sur les bâteaux, soit sur les wagons, aux points déterminés par l'administration, pour les emporter immédiatement. En cas d'obstacle à la circulation par suite de gelée, dégels ou chômage, des dépôts provisoires seraient, comme aujourd'hui, autorisés aux lieux déterminés par l'administration pour être évacués confor- mément au cahier des charges. (Annexe n° 5.) Il nous reste maintenant à apprécier le système ci-dessus au point de vue financier, en évaluant les dépenses auxquelles il devra donner lieu. C'est en quelque sorte le critérium de tout projet. Comme point de comparaison, nous indiquerons d'abord le chiffre des dépenses inscrites au budget communal pour tout ce qui a rapport de près ou de loin au service de la propreté et de la sécurité de la voie publique, L'année 1847, comparée à celles qui précèdent et aux années qui se sont écoulées depuis, semble présenter des chiffres normaux que l'on peut considérer comme exprimant la moyenne d'une période comprenant les dix dernières années. Nous extrayons donc du budget de la ville les détails ci-après : Chapitre 17. — Service du balayage et de l’ébouage. Subvention à l'entrepreneur des boues. 45,000 fr. Loyer de terrain à Fives. . . . . 700 l 45,768 fr. — — à l'Esplanade. . . 68 Chapitre 2. — Service de la voirie. Traitement de l'architecte. . . . . 3,000 — de deux inspecteurs-voyers. 3,600 97.150 Entretien ordinaire du pavage. . . 10,850 ; ReLEVÉS RAS DOUES =. un: 040 000 | Ghapitre 3. — Service de canaux et égouts. Curage des égouts. . . . . . . 2,610 ‘ 2 A UC SA CANAUX ue. 1 120 00 DUU 11,810 Nettoiement des urinoirs. . . . . 1,200 55,028 fr. Les besoins du nouveau système auraient nécessairement pour effet de transformer quelques-unes des dépenses précitées pour les appliquer aux exigences du service. Ainsi, dans le premier chapitre, la subvention à l'entrepreneur — 455 — des boues doit non-seulement disparaître, mais se voir dans un temps en rapport avec la concurrence plus ou moins active qui pourra surgir, convertie en un recouvrement au profit de la ville. Quand aux sommes affectées aux loyers des divers terrains de dépôt de fumiers, elles ne sauraient être supprimées immédiatement pour les motifs que nous avons exposés ci-dessus. Dans le chapitre du service de la voirie, le traitement de l'ingénieur de salubrité doit s'élever en proportion des connaissances spéciales, des services et de l'activité qu'on est en droit d'en attendre. Il ne saurait être inférieur à 4,000 fr., et déjà cette somme figure en partie au budget : les fonctions de l'architecte devenant plus étendues et plus limitées à la fois, plus spéciales en un mot. Les inspecteurs-voyers ou les conducteurs de salubrité conser- veraient le même traitement de 1,800 fr., l'expérience justifierait peut-être le maintien de deux employés seulement. Nous pensons cependant que l'accroissement de la besogne qui leur incombe autorise la prévision de l'augmentation de leur nombre qui serait porté à trois. Les agents subalternes ou les cantonniers urbains, divisés en titulaires au nombre de vingt-quatre et en adjoint au nombre de six, devront recevoir, en moyenne, un traitement de 600 fr., taux maximum du salaire des cantonniers de l'État. Le séjour de la ville entraîne nécessairement à des dépenses que ceux-ci évitent à la campagne. Il serait même à désirer que des logements à prix réduits leurs fussent accordés dans quelques bâtiments appartenant à la ville. Nous avons prévu l'emploi d'auxiliaires, les gratifications à accorder aux cantonniers les plus méritants, la nécessité de leur avancer les outils nécessaires. On fera donc figurer à ces différents titres une somme éventuelle de 2,500 fr. L'entretien ordinaire des pavés doit subir une réduction notable sur la main-d'œuvre, qui incombe désormais en partie à nos ouvriers, et que des réparations immédiates, ainsi qu'une propreté satisfai- sante auront pour effet d'amoindrir beaucoup. On peut évaluer à 5,500 fr. environ l'économie à espérer. — 454 — Nous respecterons le total affecté aux relevés à bout tout en pesant nos réserves sur la probabilité d'économies qu'amènera la bonne tenue des chaussées. Le curage des égouts et des canaux se payant au mètre cube, le système d'ébouage proposé entraînera une diminution immédiate et considérable de l’envasement et des frais qui en résultent’; en outre, la suppression du crédit de 1,200 fr. affecté au nettoiement des urinoirs réalise sur ce chapitre une économie d'environ 4,000 fr. Quant au budget des agents de la police, quant à leur nombre, nous n'aurons garde d'y porter la main, c'est à l'administration, éclairée par l'expérience, d'apprécier soit les modifications qu'il y aurait à introduire, soit les accroissements qui pourront être évités, par suite des services que nos cantonniers sont appelés à rendre en ce qui concerne la surveillance matérielle de la voirie. Ces considérations posées, nous établirons le budget de la salubrité de cette manière : Chapitre 1°7. — Service de l'ébouage. Loyer de terrain à. Fives ou autres. 700 Ph 7G8 fr. — — à l'Esplanade. . . 68 Chapitre 2.— Service de la voirie. Traitement de l'ingénieur de salubrité. 4,000 — de trois conducteurs. . . 5,400 — de trente cantonniers. . . 468,000 Frais accessoires, gratifications, auxi- 46,950 liairesswuetciale attente dirait. scutél 2622550 Entretien ordinaire du pavage. . . 7,000 = extraordinaire. . . . . 40,000 Chapitre 3. — Service de canaux et égouts. Guragetdestécots mel A AL EN 7 — des canaux. . . à + 55,018 fr. 1 Nous dirons ailleurs que les riverains, qui ont sur les canaux des servitudes continues et apparentes, doivent être appelés à concourir au curage de ces cours d’eau. — 455 — Toutes choses prévues et laissant en dehors les bonifications éventuelles, nous arrivons à constituer approximativement notre budget à l'aide des ressources qui s'y trouvent aujourd'hui consacrées. Il ne saurait donc se présenter d'obstacles à soumettre à l'expé- rience des dispositions qui promettent à la ville une sécurité parfaite, une propreté inusitée, et qui préludent aux autres mesures de salubrité que nous aurons à proposer ultérieurement, et parmi lesquelles se présentera d'abord la question, neuve encore, des urinoirs publics, inaugurés à Lille de la manière la plus inintel- ligente, la plus contraire à l'hygiène et aux convenances de la morale. CHAPITRE II. En établissant dans nos rues des urinoirs publics, l'Adminis- tration a répondu, en principe, à l'une des améliorations que l'on signalait depuis longtemps parmi les plus urgentes. En effet, la ville de Lille, de plus en plus importante par l’affluence des étrangers qui la visitent incessamment, soit pour leurs affaires, soit dans l'intérêt de leurs plaisirs, voyait jusqu'ici les promeneurs s'arrêter au premier coin, souiller chaque maison, transfor- mer chaque anfractuosité, chaque embrasure de nos portes, en urinoirs infects, d'où la matière liquide se répandait partout, sur les trottoirs et devant les façades de nos magasins. À certains moments, durant les jours de fêtes, plusieurs quartiers de la cité exhalaient des odeurs que l'on ne doit pas même rencontrer dans les lieux réservés à cet usage. Par les nouvelles prescriptions, les dépôts d'urine ont été localisés, il est vrai; mais il faut bien le dire, les inconvénients de la liberté illimitée n'ont été supprimés dans certains points que pour être accumulés sur d'autres, aggravés même, et ils sont aujourd'hui intolérables. — 456 — Les urinoirs construits dans la ville de Lille, sur des modèles variés, ne nous semblent répondre d'aucune manière aux fins que l'on devait se proposer, en laissant même en dehors des indications que nous aurons à développer; l'hygiène, la morale, et un accès facile, tel est le triple but qu'il était impor- tant de ne pas perdre de vue dans l'exécution; on eut mis alors les plus grands soins à atténuer les inconvénients inséparables de ces appareils; on eut réfléchi qu'il est moins utile de dissimuler la construction que de la rendre accessible à ceux qui la recherchent, par des dispositions tolérables, sinon monumentales; que les personnes qui en ‘font usage ne désirent ni voir ni être vues; qu'enfin, il est indispensable de restreindre, autant que possible, l'espace consacré aux matières, et que celles-ci doivent, dans l'intérêt de l'hygiène, disparaître sous le sol à l'instant même. Le problème ainsi posé, examinons ce que l'on a fait à Lille, non pas afin de renouveler une critique trop facile et répétée chaque jour par les personnes qui ont à souffrir de l'état actuel, mais pour prévenir une foule d’objections qui pourraient s'élever contre nos propositions, et comme justification en quelque sorte. Nous ne parlerons guère des urinoirs mobiles qui, avec la forme qu'on leur a donnée à la mairie, s'ils étaient attachés pour éviter les eulbutes, si l'on y était plus masqué, vaudraient beaucoup mieux, malgré leurs émanations, que la plupart de ceux établis sur les autres points. En commençant par les plus anciens de date, nous passons de suite aux nombreux urinoirs placés autour du théâtre. Ils sont d'un usage assez commode, il faut le reconnaître, l'écoulement des liquides s’y fait rapidement et utilement; mais quelle immense surface ne présentent-ils pas à l'évaporation! les murs de face, les murs latéraux, les radiers, le développement de la grille, peuvent ensemble mesurer trois mètres carrés pour chacun des 18 grands urinoirs, ou une somme totale de plus de 50 mètres carrés à découvert et soumis par moitié à l'insolution du matin, moitié à celle de la seconde partie du jour. — 457 — Les édifices plus récents sont munis de cuvettes en fonte d'un aspect assez satisfaisant; quelquefois la gouttière vient s'y rendre pour assurer les irrigations au moins pendant la pluie; ce système cependant n'est point parfail. Les cuvettes ne sont point accessibles aux enfants, et le pied en est constamment humecté par les urines. De plus, l'avancée de ces appareils force à s'écarter plus ou moins de l'embrasure pour éviter le contact sur les vêtements des bords du récipient ; et, à défaut d’une forte saillie des constructions, il en résulte une mise en scène fort désagréable. Ajoutons que les tuyaux qu'on voit quelquefois engorgés ne conduisent pas toujours les urines sous le sol, mais tout simplement dans le ruisseau. Plus tard on a établi, sur les ponts, les urinoirs rentrants, tous à hauteur d'appui’. Plusieurs de ces petits appareils sont évidés sous le garde-fou et obligent à un renversement très-peu commode, très-peu gracieux, les personnes qui se respectent ; car les passants, en suivant le trottoir, leur marchent à peu près sur les talons, et les fenêtres des maisons voisines sont des observatoires où personne n'ose plus se hasarder. Tous ces urinoirs ont aussi des surfaces d'évaporation très-étendues, on ne s'en aperçoit que trop au passage. Leurs dimensions sonttelles qu'on y voit quelquefois grou- pées deux et mêmes trois personnes. Bien que la plupart perdent les liquides directement dans la rivière, il en est plusieurs qui, par une incroyable négligence, jettent les urines sur un terre-plein malen- contreux, où elles imbibent le sol et lancent dans l'atmosphère des odeurs épouvantables ; nous citerons seulement celui qui tient au jardin botanique, celui de la rue de Gand, etc. Nous arrivons aux urinoirs simples ou doubles bâtis le long des murs ou dans les angles des édifices ; et pour éviter les répétitions, 1 Celui de la rue Saint-Étienne est une exception, et la guérite suffirait au but si la paroi du fond ne revenait brusquement contre la face des visiteurs, et si l'accès en était facile. 30 DE nous ne parlerons que des premiers, laissant aux autres leur part des inconvénients que nous signalerons. Les urinoirs doubles sont séparés par une pierre de 4 mètre de hauteur sur 30 centimètres de saillie pour les plus favorisés, de sorte quele haut du corps est parfaitement en évidence; et que si deux personnes s'y rencontrent, elles peuvent mutuellement plonger l'œil l'une sur l'autre, échanger des paroles de circonstance et confondre leurs haleines si fétides ou si avinées qu'elles puis- sent être. Dans quelques endroits, etdes plus fréquentés, on voit desséparations de 75 à 80 centimètres de hauteur sur 15 et même 10 centimètres de saillie. I y a de ces pierres posées sur un trottoir constitué uni- quement par une bordure sur laquelle on ne se peut guinder que par un tour d'équilibre. Force est bien de se tenir en dehors ; mais au pied du trottoir coule naturellement le ruisseau ; il faut donc s'éloigner encore, et cela dans des passages qui ont environ deux mètres de largeur. Ce n'est point aux extrémités de la ville qu'on voit ces choses-là : c'est au centre, c'est sur la place (la rue de la Nef, les débris Saint-Etienne). On croirait à peine que, dans des conditions comme celles que nous venons d'indiquer de saillie , de trottoir, de ruis- seau, de largeur de voie, on avait placé un urinoir double, de chaque côté de l'entrée de la cour des Brigittines! Nous n'entre- prendrons pas la description de ce qu'était alors le passage; le choe d'une voiture en a fait justice. Nous venons de passer en revue les urinoirs étudiés spécialement sous le rapport des bienséances ; mais nous n'avons pas été plus heureux en les considérant au point de vue de l'hygiène, et nous n'avons pas terminé ce chapitre. On a cherché à les confiner en dehors des grandes artères, dans les ruelles souvent étroites, où là ventilation est insuffisante, et où il faut les connaître pour les retrouver au besoin. Les lavages et irrigations qui doivent être effectués chaque jour sont d'autant moins efficaces, que la présence des grilles s'oppose à l'action des instruments de propreté, et que souvent les pierres elles-mêmes sont préparées à la petite pointe de ES — 45. manière à receler les sédiments et les incrustations urineuses dans les ondulations qu'elles présentent. Puis à la suite des récipients que nous avons décrits, on voit un simple fil d'eau rejetant les urines dans le ruisseau de la rue où elles parcourent des distances dé plus de cent mètres en quelques points, imbibant la fange, infectant l'air sur leur passage, avant de trouver la bouche d'égout qui doitles recueillir; d'autres fois encore, les urines n'ont pas d'écoulement du tout, par suite des contre- pentes des ruisseaux ; et quand il n'y a pas des pluies abondantes, elles doivent tout attendre de l'évaporation. Il est bien quelques exceptions où les urines s'écoulent directement dans l'égout, mais elles sont rares ; aussi les plaintes n'ont-elles pas manqué à cesujet. Les personnes dont les habitations ouvrent leurs portes, leurs fenêtres le long de ces ruisseaux fétides, regrettent avec raison l'ancien laisser-aller et la dissémination qui en était la consé- quence. Nous partagerions entièrement leur avis s'il n'y avait pas d'amé- liorations possibles dans cette partie importante des charges de nos édiles. Mais ceux-ci ont déjà trop bien compris qu'il serait fâcheux de persévérer dans cette voie, pour ne pas saisir avec empressement des dispositions plus avantageuses à tous égards. Celles que nous allons proposer résolvent la question, et peuvent satisfaire d'autres intérêts : celui des finances de la ville d'une part; et d'autre part celui bien plus grave de l'agriculture. Que de richesses, en effet, ne sont pas jetées en pure perte dans ces aqueducs ? Et comment croire que dans un centre d'agriculture si renommé par le parti qu'il sait tirer de ces engrais liquides on n'ait pas songé à recueillir les matières les plus riches en principes fertilisants *. ———————.—.…….—..…….…….…….….….….….…—….….…"_…"_….…"…"….…" ——"……_—…_….…_…" —…—…—…_—_… 1 Quelques personnes onl pu émettre l'avis de supprimer lolalement les urinoïirs en maintenant l'interdiction d’uriner dans la rue. — On se base sur — 460 — Nous n'avons point à insister sur les expériences chimiques ni sur les résultats pratiques obtenus et qui démontrent toute l'in- fluence sur la culture de cette sécrétion si abondante en matières azotées. Après MM. Payen et autres, un des économistes les plus distin- gués dont s'honore la ville de Lille, M. Loiset, estime que cet engrais, S'il élait apprécié à sa valeur, serait beaucoup plus recherché que ceux de la plupart de nos vidanges !. Il y aurait donc une incurie complète à persévérer dans les erre- ments actuels, alors que, par certaines dispositions avantageuses , on peut concilier toutes les indications que nous allons résumer succinctement en renvoyant à un dessin graphique les détails des diverses pièces de l'appareil *. les habitudes contractées par les personnes de l'autre sexe et par la proseription pai Û par la proserip qui existe dans quelques villes. Londres en offre un exemple remarquable, Sans doute l'autorité a le droit de prendre une décision de cette nature, Elle . " E « . . pourrait encore recourir, comme amendement, à frire établir des urinoirs dans l'intérieur de quelques habitations, comme nous le demanderons pour les latrines; mais il y aurait là des inconvénients de plus d’un genre qu'on ne peut développer ici; et quant à la suppression radicale, elle commande, au préalable, des réformes complètes dans les habitudes non-seulement des citadins, mais encore de tout le pays, 1 Dans un petit mémoire écrit avec beaucoup d’élégance et de talent, sur les vidanges de Paris, M. Mille, ingénieur des ponts et-chanssées, rappelant les avantages des engrais liquides sur ceux connus sous le nom de Poudrette, signale les déperditions nombreuses qui se font aux dépens de l’agriculture des environs de Paris. Ce travail, dont la forme fait oublier le fond, est d'un haut intérêt pour les personnes qui s'occupent d'hygiène publique, (Annales des ponts el chaussées, 1854, mars et avril ) ? En Belgique, le ministre de l’intérieur , après les recherches qu’il a fait entre- prendre dans tout le royaume, et notamment d'après le mémoire de M. Schmit, conelutà prendre les mesures suivantes pour prévenir ladéperdition des engrais. 10 Défense formelle de laisser écouler dans les égouts, Jes rivières ou les puits perdus, les matières fertilisantes, de quelques natures qu’elles soient, qui se produisent dans les habitations, les établissements publics, les usines, les fabriques, etc. 2° Obligation à toute personne qui élève, soit nne maison, soit tout autre bâtiment où il se produit des matières fertilisantes, d'établir des fosses fixes ou mobiles, dont la capacité soit en rapport avec la quantité des matières produites ; — 46l — 1° Accuser franchement la construction; 20 En rendre l'abord facile et surtout décent; 3° Assurer l'intégrité du sol aux alentours ; 4 Faire disparaître les urines immédiatement sous le sol ; De Les amener dans des réceptacles faciles à vider au profit de la ville et dans l'intérêt de l'agriculture; Ge En faciliter l'entretien (balayage, lavage), par la nature des matériaux et par leur bonne disposition ; T° Enfin, les multiplier autant que le réclame le mouvement de la population. On comprend dès lors qu'il est indispensable de n'en établir que là où existera un enfoncement ou une pierre ayant au moins un relief de 45 centimètres, à partir de la plaque verticale apposée au mur riverain. En outre, il convient que cette pierre en relief, ou bien le coin de mur qui le remplace, soit terminé vers la rue par une partie renflée qui complète l'abri que l’on recherche. L’élargissement peut n'être que de 8 à 10 centimètres sur les faces latérales du petit mur en relief. D'autre part, ilest indispensable, pour produire un isolement complet, que toutes les paroïs verticales de l'appareil stélèvent au-dessus des plus hautes tailles, et qu'un petit toit en 30 Obligation de construire ces fosses d’après les conditions déterminées par l'autorité compétente, et propres, en tous cas, à garantir à Ja fois la salubrité publique et la conservation des matières fertilisantes; 49 Etablissement sur fosses de latrines et d’urinoirs publics dont le nombre soit en rapport avec la population; 59 Obligation d'en faire les vidanges et d'en opérer le transport par des procédés el avec un outillage qui sauvegarde complétement fa salubrité publique. 60 Etablissement de fosses de dépôt au dehors des villes et à portée des consommateurs, si la vente et l'enlèvement réguliers, an moment del’eéxtraction, ne sont pas assurés; 70 Obligation de faire le balayage des rues et le curage des égouts, ruisseaux, rivières, canaux, à des époques (détérminées, et transport immédiat des résidus dans les lieux de dépôt au dehors des villes et à, portée des consommateurs. — 462 — zinc avec une nochère abrite, en cas de pluie, les personnes forcées de s’y arrêter. C'est d'après ces principes qu'est conçu le projet d'urinoir qu'in- dique le dessin joint au présent rapport, et qui se compose d’un plan, une élévation et de deux coupes verticales. Les détails qui y figurent suffisent pour faire connaîtreles parties prin cipales de l'appareil ; mais pour l'intelligence de chacun, il con- vient de l'accompagner d’une courte description. L'urinoir, supposé double, est établi le long d'une rue contre une façade riveraine. Il se compose de trois parties principales : Au-dessous du sol, d'un réservoir destiné à recueillir les matières liquides ; Au niveau du trottoir, d'une euvette percée d'une ouverture destinée à recevoir ces matières ; Au-dessus du sol, d'une pierre de taille verticale, perpendi- culaire au mur riverain, formant séparation des deux urinoirs contigus, de plaques verticales en pierre très-lisse au-dessus de la cuvette de l'urinoir et d'un toit demi-cireulaire surmontant le tout. Le réservoir est muni d’un couverele au niveau du trottoir, qui permet d'y introduire un récepteur mobile d'un maniement très- facile et qui, introduit convenablement, vient prendre, par son propre poids, la place qu'il doit occuper dans le réservoir. Le récepteur n'offre à l'évaporation qu'une étroite ouverture. Dans le cas où quelques matières tomberaient à côté du récepteur, elles pourront, par une perte d'eau rejoindre l'égout voisin. Un conduit, creusé dans une pierre de taille sur laquelle repose la cuvette, amène dans le réservoir les eaux tombées dans celle-ci. L'inclinaison en est très-forte ; il sera facile de le tenir en état de propreté. La cuvette, formée d'une seule pierre, offre des surfaces inclinées qui aboutissent à une ouverture verticale dirigeant les matières és. Stak DEF du Plan. Lerte ct en vers l'égout, Un plan, S parties il con- e contre les illie le verlune rpendi- urinoïrs sus de Wiontant ir, qui nt très- par son oir. Le Dans le r, elles re post celle-ci état de nclinées uatières ELEVATION PLAN £ — 465 — dans le conduit dont il vient d'être parlée. Ces surfaces en pierre? calcaire noire, polie, sont inclinées de telle sorte que l'action projetante des matières lancées ne puisse pas incommoder la personne placée sur le seuil de la cuvette. Ce seuil fait saillie de 1 à 8 centimètres sur le pavage du trottoir. La pierre de stalle qui sépare les deux appareils contigus fait saillie de 45 centimètres sur le nu du mur riverain; elle s'élève à 1 mètre 80 environ au-dessus du niveau du trottoir. Vers la rue, elleest terminée par deux saillies, de telle sorte qu'à cette extrémité elle a une épaisseur de 30 centimètres, tandis qu'à l'intérieur cette épaisseur n'est que d'environ 15 centimètres *. L'intérieur des parois verticales de l'appareil est tapissé de plaques lisses, en lave de Volvie ou de poterie vernissée (silicatée). Ces plaques ont un développement en largeur de 70 centimètres, et 1 mètre de hauteur. Ces dimensions données, nous croyons utile de mettre en regard un autre système, heureusement appliqué à Cambrai, où la ville s'est imposé des sacrifices intelligents en améliorations hygiéniques. Des cloches en fonte reçoivent les liquides et se vident au moyen d'un opercule qui permet l'introduction d'une pompe qu'on y adapte chaque jour. A nos yeux cette disposition onéreuse doit avoir l'inconvénient de faciliter les dépôts urineux capables de détériorer rapidement la fonte. Toutefois, ce n'est que par la comparaison dans la pratique qu'il 1 L'enduit de silicate de chaux liquide (dont le dépôt est à Saint-Quentin) semble de nature à résister aux incrustations si difficiles à prévenir. 2 Peut être eussions-nous dû demander un barrage ou garde-corps comme ceux que l’on voit aux guérites des boulevards de Paris ou autre pour empêcher de leur donner une autre destination ou même de s’y cacher la nuit. Ce sont des mesures de police dont l'usage fera peut-être reconnaître la nécessité; mais ces défenses avancées ont toujours l'inconvénient de tenir les personnes à distance, parce qu'un se défie de leur contact, et elles peuvent nuire à l’exévcution du balayage. : = 1ig4"= est possible de résoudre les mcertitudes où l'on est encore, el la ville de Lille ne doit pas reculer devant des essais bien dirigés. Nous reproduirons donc aussi le plan? de ces urinoirs, et nous passerons à une autre question. Quelle que soit la bonne tenue et la multiplicité des urinoirs dont il vient d'être parlé, ils ne peuvent suffire à toutes les indications posées par la nature et par nos habitudes civilisées. Cette circula- tion, ce mouvement dont nous avons parlé, motivent suffisamment , dans une ville aussi étendue, la création de latrines publiques qu'il serait inutile, sans doute, de multiplier autant que les urinoirs ; cela se comprend; quatre ou cinq locaux répartis convenablement, à proximité des rues les plus fréquentées, pourraient suflire à toutes les exigences. Ce que l'on a pu voir quelquefois des latrines publiques est assurément capable de faire repousser tout d'abord une proposition de cette nature. Aussi convient-il d'indiquer de suite qu'il s’agit ici de latrines bien tenues et d'une propreté surveillée minutieu— sement, ce qui n’est pas aussi difficile qu'on pourrait le croire. Deux moyens se présentent pour arriver à ce but: l'entreprise particulière ou la construction par la ville. Dans le premier cas, des primes annuelles pourraient être accordées à quelques particuliers qui s'engageraient à donner accès aux latrines de léurs habitations, lesquelles devraient réunir certaines conditions spécifiées par un cahier des charges, et dont les princi- palés seraient un abord facile par un corridor; plusieurs cabinets, deux au moins, bien séparés ; des dispositions de tuyaux d'appel on autres moyens qui les rendent inodores , possibilité d'avoir sous la main l'eau nécessaire aux nettoiements. Les avantages qui revien- draient à l'entrepreneur, outre la prime et l'augmentation du produit des fosses, se composeraient des petites rétributions facul— tatives des personnes qui en feraient usage. EEE CT fe JL ? Nous devons, à l’obligeance de M. Debeaumont, membre du Conseil général, les détails qui précèdent. Mur de Facade. ©] La$ta En RS RNRUBREREULE Mesh ; RES D T PEUT ORRRN ER ERRrT PE CENE NERR EN i \| 1 F] ! Wveaudele rue ov du Trottoir. Je — 65 — Il est bon de remarquer que les conditions ci-dessus sont celles du plus grand nombre des habitations, et que d'un autre côté une foule de professions sédentaires, exercées dans l'intérieur des maisons, au rez-de-chaussée, des quartiers du fonds, pourraient se prêter sans fatigue à une surveillance complète de ces locaux : nous citerons les tailleurs en chambre, les couturières, les cordon- niers, les plieuses de fil, les éplucheuses de coton, ete, etc. Il s'établira donc, sans bourse déliée, pour ainsi dire, une petite industrie spéciale. Une indication sur la porte, comme on voit à Paris pour les établissements semblables , suflrait au public, à qui les cantonniers urbains pourraient toujours donner les renseigne- ments désirables; car le service de salubrité aurait à vérifier la bonne tenue de ces locaux. Dans la seconde hypothèse, où la ville interviendrait plus-direc- tement en construisant elle-même les cabinets, soit qu'ils fussent ouverts près de la voie publique, soit qu'ils fussent aussi relégués dans le fond des habitations, comme par exemple dans les maisons appartenant aux bureaux de bienfaisance, et qu'on transforme en maisons modèles pour les ouvriers, ou mieux encore dans les bureaux de charité, qui ont toujours un concierge, et qui se trouvent en général près des paroisses , ete. ete. Il y aurait à prendre les dispositions les plus efficaces pour les rendre inodores. Il faudrait les surveiller également par des préposés attentifs. On vient de voir que dans les bureaux de charité les concierges seraient naturellement en position de remplir cette mission; ailleurs il pourrait être disposé de petits logements destinés aux cantonniers iariés, dont les femmes se chargeraient de l'entretien convenable des cabinets et du service, ce qui ne manquerait pas de leur tourner à profit”. 2 Quel que soit d’ailleurs le mode adopté, il ne sera pas sans: importance de rappeler ici sommairement les dispositions reconnues efficaces pour assainir les fosses d'aisance établies comme elles le sont dans le Nord. La plus simple, Ir moins dispendieuse, est de faire communiquer, par un tuyaux assez Jarge, la — 466 — Ces détails minutieux, dans lesquels nous sommes obligés de descendre pour démontrer la possibilité pratique de ces moyens, aous seront sans doute pardonnés en faveur de l'importance du sujet. Tout repoussant qu'il soit, nous avons cependant encore , avant de terminer, à parler d'une autre phase de la question : de la vidange des fosses d'aisance. C'est un usage immémorial que celui pratiqué dans nos murs. S'il est un des plus simples, il est aussi des plus répugnants. Com- ment n'a-t-il pas été modifié ? La réponse à cette question se relie à tant d'intérêts divers, qu'il est indispensable de les rappeler au moins sommairement. L'engrais/lamand, on lesait, n’est autre chose que le produit de nos fosses d'aisance auquelles cultivateurs ajoutent, quand ilsle peuvent, des tourteaux de colza ou d'œillette: le tout est mélangé de temps à autre dans des citernes spéciales et transporté sur les terres en temps utile. A l'eflet de recueillir l'engrais, chaque cultivateur possède un outillage en rapport avec l'importance de l'exploitation : une voiture, des tonneaux et un sceau de cuivre attaché à une corde de quelques mètres de longueur. : Les marchands de légumes arrivent le matin portant à l'avant de l'équipage les produits de leur culture, et à l'arrière les tonneaux destinés à la vidange, empilés les uns sur les autres; aussitôt les marchandises déballées , ils remplissent leurs tonneaux et profitent ainsi du retour de leur voiture pour approvisionner la citerne. Les autres cultivateurs font des voyages spéciaux avec une ou partie Ja plus élevée de Ja voûte de la citerne avec une cheminée en activité ; si Von est privé de cet expédient, il faudra prolonger le tuyau dont il vient d’être parlé à une grande hauteur, Il est prudent, surtout dans ce dernier cas, d'établir un second tube sous le siége et près de l’ouverture pour rejoindre le premier ou le rendre dans une cheminée, Si le tube devait traverser un escalier, comme on le voit souvent dans les constructions restreintes de Paris, et que l’on ait à éclairer cet escalier, on obtient un tirage parfaiten plaçant la lumière, ou un bec de gaz dans l’intérieur de la cheminée d'appel à l'aide d'une ouverture latérale que l'on ferme par un verre — 461 — : plusieurs voitures, et viennent acheter à nos domestiques les matières qu'elles ont trop d'intérêt à falsifier pour n'y point mélanger souvent les eaux de ménage, et souvent même l'eau limpide de la pompe. Cependant l'abondance des liquides amène quelquefois de la dépréciation qui abaisse le prix convenu. Les fraudes de cette nature ont lieu surtout alors que les marchés sont passés avec des courtiers spéciaux à qui le cultivateur s'adresse quelquefois quand les habitués ne lui suffisent pas; quoiqu'il en soit, ce prix varie entre 15, 20 et 25 centimes le tonneau. Il y a donc là un revenu important pour la domesticité lilloise, quand ce ne sont pas les chefs de maison eux-mêmes qui en prof- tent, soit qu'ils le fassent figurer dans les gages de leurs servantes, soit qu'ils n'en tiennent aucun compte à celles-ci, comme celà se voit dans les grands établissements ‘. Si, par une disposition réglementaire quelconque, ce revenu éventuel venait à manquer aux domestiques, il n'est pas douteux que, par le fait seul, le prix des salaires s'élèverait immédiatement; il est donc facile de comprendre la réserve apportée par l'Adminis- tration dans les prescriptions qui s'y rapportent. Ces usages ont donné lieu à des constructions intérieures qui ne permettent guère de les changer; si, d'une part, les cultivateurs viennent, suivant leur convenance, chercher peu à peu chaque jour les précieux engrais; de l'autre, les vendeurs ne sont pas fâichés de toucher souvent une partie de leurs rentes ; de sorte que les latrines de nos habitations, parfaitement citernées pour éviter toute déperdition, sont d'une exiguité qui exige de fréquentes vidanges, et qui s'opposerait par conséquent à l'exploitation par un ou plusieurs adjudicataires des vidanges de la ville; car il faudrait un matériel considérable s'il n'était pas autorisé à travailler toute la journée. © Les budjets de nos hôpitaux font entrer en recette le’ produit des fosses d’aisance, L’adjudicalion élève le prix à 2 fr, par individu el par an. — 468 — Faisons remarquer de suite que ces opéralions répétées ont du moins l'avantage de ne point favoriser la décomposition qui donne au gaz des fosses d'aisance celte fétidité dangereuse, cette irrespi- rabilité si funeste, quand on se hasarde sans précaution dans les latrines très-longtemps fermées. Ce n'est pas à dire pour cela quela chose soit sans inconvénient, comme le prétendent les intéressés. Il n'est pas un étranger quinesoit révolté des émanations produites chaque matin, jusqu’à huit heures, par la circulation des voitures de nos fameux tonneaux, et il ne faut pas même être étranger pour en ressentir grandement les incommodités, lorsque les occupations forcent à descendre de bonne heure dans la rue ou lorsqu'on veutdonner de l'air à ses appartements. Les instruments de cuivre ou d'argent, les peintures à la céruse se ternissent dans ce dernier cas {rès-facilement, et il reste pendant une partie du jour dans les habitations, une atmosphère dont on ne se débarrasse qu'avec peine. Or, comme ces inconvénients se répètent tous les jours, il semble indispensable d'y chercher un remède. Il est facile de s'assurer que les émanations qui se dégagent pen- dant le trajet proviennent d'abord de la négligence avec laquelle la vidange a été faite, et en second lieu du défaut d'obturateur hermé- tique des tonneaux. En effet, on se borne, pour emplir les vases, à plonger dans la fosse, à l’aide de la corde, le seau de cuivre, et on le vide en le ren- versant d'une main dans le tonneau par l'orifice de forme carrée d'un décimètre de côté. Ces manœuvres répétées jusqu à réplétion ne peuvent s'exécuter sans qu'il s'en répande sur le hord de la bonde, et souvent la surface externe du tonneau en est inondée ; on l'essuie à peine avec un fampon de paille qui est consacré à servir d'obturateur de l'orifice : la tonne en cet état est replacée sur la voi- ture, et quand le chargement est achevé de cette manière, la marche commence. Les cahos alors font jaillir la matière contre la paroi supérieure, et l'ouverture quadrilatère, mal bouchée par le tampon plus ou moins rond, plus ou moins perméable, donne issue à une certaine quantité du produit de la vidange. — 469 — Il y a À des pratiques grossières et indignes de notre civilisation. Si, pour dernier trait au tableau, nous disions que plusieurs orifices des fosses d'aisance sont placées en dehors des habitations, dans la rue, que les ouvriers, après leur opération, vont souvent laver leurs mains, leurs vases de cuivre dans le ruisseau ou à la pompe voisine, on sera édifié sur le dégoût que cela doit inspirer, et sur les atteintes qui en doivent résulter pour la salubrité. Cette énumératio des faits qui se produisent chaque jour dans notre ville resterait sans but si nous n'avions entrevu la possi- bilité d’atténuer beaucoup, si pas d'anéantir entièrement, les désa- gréments de ce mode de vidange, en évitant de souiller extérieu- rement les tonneaux et en les fermant ensuite d'une manière exacte. On obtiendrait ce résultat en interdisant tout autre mode de vidange que par la pompe, et en obligeant à clore les ouvertures des ton- neaux par des bondes en bois recouvertes de terre glaise *, très- facile à se procurer ici; en proscrivant sur la voie publique le lavage des instruments qui se ferait dans l'intérieur des maisons de manière à ne donner lieu à aucune odeur dans le trajet. Disons sommairement que les pompes ad hoc, prescrites comme nous l'avons dit, pourront être ou la propriété du cultivateur qui économiserait du temps et de la main-d'œuvre, soit dans la vidange, soit dans le déchargement des citernes, ou bien leur être louées par les courtiers dont nous avons déjà parlé, soit à prix fixé par la ville, soit à l'amiable. Ce ne serait là gêner en rien les habitants de la cité, ni les antiques habitudes des campagnards, et ce serait débarrasser la ville de l'une des incommodités les plus marquées, sans grever en rien Je budget et sans rien soustraire à l'agriculture. ? Si la glaise paraissait insuffisante pou maintenir les bords, on pourrait exiger qu’une charnière en fer l'assujétisse entièrement comme cela se fait à Paris, — AT — CHAPITRE HI. Dans la première partie de ce mémoire, au nombre des causes produetrices de la boue de nos rues, nous avons signalé le mode de pavage employé à Lille, et nous faisions ‘pressentir quelques détails sur l'application de méthodes perfectionnées. En les abordant, il est bon de faire remarquer que sous ce titre nous comprendrons non-seulement la chaussée proprement dite, mais les ruisseaux, les trottoirs et même les constructions riveraines. Les dangers qu'ils peuvent offrir à la circulation, les incommo- dités qui entravent le commerce, l'insalubrité surtout, doivent être étudiés ici sans perdre de vue qu'il s'agit de charges permanentes pour la cité. On a déjà dit comment il se faisait que le balast qui entre dans la composition des chaussées pouvait à Lille contribuer, en temps de grande humidité, à la formation d'une boue insalubre. Nous ajouterons de suite que cet effet, dù à la finesse et à l'impureté du sable généralement en usage dans la localité, est encore aggravé par l'usure, l'irrégularité, et jusqu'à la nature du grès employé dans la plupart de nos rues. La pâte qui constitue en général ces pavés un peu tendres est une combinaison de substance calcaire et d'une certaine proportion de silice, que l'on trouve aux environs d'Arras et de Béthune. Si on plonge dans l'eau, même les plus durs, ils en absorbent une quantité notable qu'ils semblent retenir avec énergie lorsqu'ils sont ensuite exposés à l'air sec. Les uns à surface large, lisse et bombée, fatiguent beaucoup les piétons et les chevaux ; les autres, de faible dimension, irréguliers, sont séparés par des joints considérables. C'est surtout à l'époque des réparations que l'on peut apprécier, dans la forme, l'étendue entre les lignes de grès de ce balast devenu noir, infecte et facilement détrempé par les eaux. Tous les efforts du service doivent donc tendre à changer peu à — 4 — peu, mais d'une manière absolue, cette siluation, en améliorant, d'une part, la nature et la forme des grès, et de l'autre, la pureté ainsi que l'imperméabilité du balast. Si, comme il arrive à Dunkerque et dans quelques villes de notre littoral, le sous-sol sur lequel s'appuie la chaussée était complétement perméable, le balast n'aurait d'autre condition à remplir que de donner une solidité et une élasticité plus grande à la chaussée; et, dans ce cas, un sable bien pur et bien homogène atteindrait entièrement le but *; mais, à Lille, les conditions dont il a déjà été parlé sont toutes différentes; et au lieu de ne voir dans le sous-sol qu'un immense crible qui laisse passer les eaux, il faut, au contraire, le considérer comme un écran qui arrête, en les absorbant partiellement, les matières liquides descendues à son niveau. On pourrait être conduit dès lors à espérer des avantages suffi- sants en substituant au sable fin argileux un sable graveleux, offrant, d'une part, plus de résistance au contact de la terre amollie qui le reçoit, et, d'autre part, passant avec plus de peine par les joints des pavés. Dans ce cas, la dificulté de trouver à Lille un sable de cette nature, que ne donne aucune des carrières situées dans les contrées environnantes, ne serait pas insurmontable, car on pourrait s'adresser aux carrières de gravier, et en réserver pour le pavage toute cette partie tenue que l'on sépare avec soin en le passant à la clef du gravier en usage sur les routes”? et qui vient généralement des carrières d'Arques près Saint-Omer. Toutefois, en admettant que l'on puisse trouver une semblable matière à un prix raisonnable, son emploi aurait toujours pour © Il faudrait encore, dans le cas où le sol scrait perméable, se préoccuper de l'influence des infiltrations sur l’eau des puits. P ? Un mélange de sable et de cendre de houille ou autres résidus de fabrique pourrait aussi remplir les conditions ci-dessus. — 4fe) — résultat de laisser filtrer jusqu'à la surface du sous-sol une partie des liquides plus où moins impurs qui bientôt détremperaient encore comme aujourd'hui cette première couche terreuse, en la rendant meuble et malsaine à ce point, que pendant les chaleurs, l'odorat le moins exercé peut en apprécier les émanations délétères. Aussi, dans notre opinion, est-il indispensable d'assurer l'imper- méabilité complète du balast, de telle sorte que toutes les eaux qui viendraient à son contact, ne trouvant aucune issue, soient immédiatement forcées de gagner le ruisseau et l'égout. Il est reconnu que le mélange intime de chaux hydraulique de Tournai avec le premier sable venu, dans la proportion de un huitième de chaux sur un de sable, remplit convenablement le but, et il y a lieu de penser qu'on pourrait arriver au dosage de un de chaux à dix de sable. Il y a une quinzaine d'années, des expériences oné été faites par M. Davaine, alors ingénieur de l'arrondissement, sur la route impériale n° 17, aux abords de Pont-à-Mareq, sur la route départementale ne 14 de Lille à Roubaix, et à Lille, dans la rue de Tournai. Tous les emplacements de ces ouvrages sont pendant fort longtemps restés très-unis, sans exiger aucun travail d'entretien. Ce fait doit d'autant moins étonner qu'il est bien reconnu aujourd'hui que la solidité, la durée d'un pavage dépend en grande partie de son substratum ”. L'épreuve a donc été coneluante, et l'on ne peut attribuer qu'à des changements survenus dans le service l'abandon d'une méthode perfectionnée et applicable surtout aux chaussées des villes, où, par suite du trafic, les remaniements nécessaires à l'entretien sont souvent difiiciles et toujours onéreux *. 1 L'antique méthode des Romains était généralement de donner trois pieds d'épaisseur à leur pavé, qui se composait de deux couches de pierres plates au fond, d’une couche de matériaux plus grossiers par dessus, et ainsi de suite en couches régulières dont la dernière n'était autre qu'un béton dans lequel on fixait les pierres de la surface. # Les tranchées faites dans les rues pour pose et raccordement de tuyaux de gaz où autres sont souvent un grand obstacle à la circulation en même temps — 4713 — La mise en œuvre de ces:malières exige quelques préparations préalables qui ont leur importance pratique. Ainsi la chaux hydrau- lique doit être éteinte et réduite en poudre; il faut qu'elle soit ensuite mélangée intimement avec lesable, Ces manipulations, pour être surveillées et satisfaisantes, nécessiteraient l'emploi d'un local ad hoc où elles seraient exécutées avec lout le soin qu'elles comportent, de manière à ne conduire aux ateliers de paveurs que le mélange prêt à être mis en œuvre. La petite dépense qui en résulterait, et qui peut s'élever de 50 cent à 1 fr. du mètre cube, doit entrer en ligne de compte dans la comparaison par laquelle nous devons compléter nos remarques sur le système, entre le prix de revient de ce balast et le prix du sable usité aujourd’hui. En admettant que le dosage de la chaux hydraulique soït d'un huitième par rapport au sable, le sous-détail du prix au mètre cube de mélange pourrait être ainsi établi, savoir : 0 m. 875 de sable ordinaire à 6 fr. . . . . . Bfr.9%5c. 0 m. 125 de chaux hydraulique non éteinte, à 46 fr. 2 » 100025 En supposant au dixième le dosage de la chaux, le prix du mélange serait de 7 francs, Si l'on voulait faire usage à Lille de sable graveleux préférable au sable ordinaire, le prix de cette matière ne s'élèverait pas à moins de 7 fr. 50, et l'on estime que le meilleur sable en usage, celui de Saint-Omer ou d'Ostricourt, coûte, rendu à pied-d'œuvre, 7 francs. En résumé, l'emploi du balast hydraulique n'élèverait au plus que d'un huitième le prix du sable, et en l'affectant uniquement à qu’à la solidité de la voie. Les tassemen{s inégaux ainsi établis produisent à la surface de la chaussée des ruptures fâcheuses. On pourrait éviter tous ces inconvénients en plaçant ces tuyaux de conduite sous les trottoirs dans les cas où il serait impossible de les poser dans lesiégouts. ji Vars — l'exécution des travaux de pavage neuf ou de relevés à bout, on n'augmenterait que d'une manière peu notable la somme aetuelle- ment affectée à ce travail; mais cet excédent, par la suite, se tradui rait en une très-grande économie d'entretien !, et comme on l'a indiqué ci-dessus avec avantage pour la circulation, non moins que pour la salubrité en vue de laquelle nous aurons encore des modi- fications à réclamer plus loin. En ce qui touche le choix et la nature des pavés, on peut recon- naître que depuis cinq ou six années le service municipal est entré dans une voie de progrès. Les travaux neufs ou de grosse réparation exécutés en différents endroits (rue du Molinel , des Sept-Sauts) indiquent une tendance vers les bonnes méthodes usitées par les ponts et chaussées: Les grès neufs dont on à fait usage sont d'une qualité bien préférable aux anciens ; c'est une espèce de pierre porphyrique provenant de la Belgique. Les carrières de Quenast, près Mons, ont une réputation déjà ancienne et méritée, qui doit leur assurer la préférence. Mais, quant à la forme , il y aurait surtout un excellent modèle à suivre, celui du service municipal de la ville de Paris. ? Les derniers perfectionnements apportés au pavage de la capitale, inspirée des améliorations introduites en Angleterre *, consistent à choisir ces matériaux parmi les plus durs, les plus imperméables et 1 Le système usité par M. Haywood, suiveyor actuel de la cité de Londres, paraît devoir donner une construction inébranlable et parfaitement imperméable, mais il est beaucoup plus coûteux comme premier établissement. Il fait creuser la chaussée jusqu'a une profondeur de dix-huit pouces et remplir cette forme de granit concassé sur la surface duquel il étend une couche de sable fin; sur ce dernier lit repose le pavé que l’on assujettit à la hie, et dans les joints duquel on coule un mélange de chaux liquide et de sable (un sixième ou un septième de chaux pour un de sable). La surface du pavé est ensuite recouverte d’un gros sable qu’on laisse séjourner pendant trois semaines, La soudure qui s'établit ainsi est telle que, si l'on doit le démolir, il faut, pour enlever le premier pavé, qu'un paveur et son aïde travaillent trois où quatre heures, (Rapport de M. Darcy.) ? Des essais nombreux, tant sur la nature que sur la forme des pavés, ont été faits en Angleterre depuis 1826. — 475 — à leur donner, au lieu de la forme cubique généralement usitée ; celle d'un parallelipipède ‘allongé, à base rectangulaire, ayant à la surface une longueur de 0,22: ou 25 centimètres sur une largeur de 10 à 14 centimètres. Les grands avantages de ces dimensions sont de diminuer le nombre et la largeur des joints dans le sens de la marche ?, toutien maintenant assez d'aspérités pour la sûreté du pied des chevaux ; de donner plus d’assise et de solidité au pavage par un entre-croi- sementiplus marqué des boutisses sans cependant rien: enlever) à l'élasticité de la chaussée, qu'il est important +de conserver. non- seulement dans l'intérêt du pavage, mais ‘encore. dans: celui des constructions riveraines. C'est surtout dans les rues où larcirculation atune grande impor- tance que ce système a été appliqué: Il est bien vrai que le commerce livre les grès dont il s'agit à un prix un peu plus élevé que celui desigrès équarris : Mais dlic peu de temps, les habitudes élant: faites aux carrières, l'on peut prévoir que les prix de livraison des deux:modèles seront sensi-: blement les mêmes. Le seul obstacle à l'introduction de.ce mode dans notre-localité serait dans la difficulté d'amener les ouvriers de carrières, à l'adopter. Mais si l'on est, parvenu à le lever pour les carrières qui approvisionnent Londres, Paris et d'autres grandes villes, il n'est pas doufeux qu'on y arrive également pour.celles qui fournissent le département du Nord. Ce résultat dépend évidemment.de disitalire que voudraient prendre:les administrations intéressées, et: dussent-elle$ augmenter momentanément les prix qu'elles accordent, l'amélioration du service doit les porter à adopter cette méthode déjà expérimentée à ? La parfaite union des lignes de payés procure une usure uniforme, tandis qu’ils s’arrondissent avec de grands joints, cumme on le voit à Lille. Cet effet est encore produit quand on les dispose: en lignes diagonales, ce qui favorise le bris des angles. D — 416 — Lille, où l'on peut voir un exemple très-satisfaisant de l'effet produit par un pavage de ce genre, dans la rue des Sept-Sauts; la ville ayant eu à sa disposition des grès de démolitions provenant d'un soubassement de murs d'édifice, les utilisa, tout irréguliers qu'ils étaient, comme grès de pavage. Le travail a été fait il y a au moins quatre ans ; et malgré toute la circulation qui s'opère en ce point, on ne remarque pas de déformation sensible de la chaussée. Ce n'est donc pas à la théorie seule que nous renvoyons les personnes compétentes, mais bien à la pratique. Nous demandons simplement à la ville de ne point perdre le fruit des expériences heureuses qui ont été faites dans son enceinte, et pour ainsi dire sous la direction de ses magistrats, tant pour le balast que pour la forme et la nature des grès. Nous devons néanmoins faire remarquer que des pavés d'un modèle plus petit, que des grès même anciens, quand ils ne sont pas trop détériorés par l'humidité, peuvent être parfaitement utilisés dans les rues moins fréquentées, si on veut les asseoir sur un balast convenable; mais une condition importante dans l'emploi des grès, que l'on considère trop facilement comme hors de service’, c'est de les choisir minutieusement, de réunir les modèles semblables, et de n'employer qu'une seule forme, une même grandeur dans chaque rue, en évitant ainsi les irrégularités qui nuisent à la solidité de la construction et augmentent beaucoup les joints ainsi que la main-d'œuvre. Le système de pavage à grès de boutisses (ainsi qu'on peut le désigner), outre la solidité, a encore l'avantage de bien s'adapter 1 On a dernièrement vendu à vil prix une quantité considérable de grès dont on auraït certainement tiré un excellent parti d’après les indications que nous venons de signaler. On aurait pu paver ainsi à peu de frais la façade de l'Esplanade qui, dans toute une grande étendue, est encore à faire, Des ingénieurs anglais donnent encore aujourd’hui la préférence aux pavés de petit équarrissage fondés sur des lits de gros gravier, de cassons de briques, de granit ou autres, et assis sur une couche de sable mélangé de chaux. — 477 — à l'établissement et à la consolidation des fils d'eau le long des bordures de trottoirs. « Ces deux accessoires de la chaussée, ruisseaux et trottoirs, laissent encore à Lille (comme d'ailleurs en beaucoup de nos grandes cités) un vaste chat p aux améliorations ; il convient done, en ce qui les concerne, de s'appesantir sur les détails. Les premiers ne sont point partout favorables à l'écoulement des eaux, par suite du peu de soin apporté à leur construction et à leur entretien. Ils offrent fréquemment des causes d'arrêt, de stagnation et de fétidité. Formés souvent par des grès trop petits d'échantillon, privés de fondation, mal assurés, sous la triple influence des eaux qui détrempent, du balai qui déchausse, des voitures qui ébranlent, ce pavage grossier et superficiel s'enfonce irrégulièrement de manière à ne présenter bientôt qu'une suite de paillers et de contre-pentes où se forment de petites mares infectes. En vue d'obvier à une partie de ces inconvénients depuis. la création des trottoirs, beaucoup de riverains ont établi des fils d'eau en pierres de taille posées bout à bout. En diminuant le nombre des joints, ce système en effet pouvait donner, dans de bonnes conditions d'établissement, d'excellents résultats. C'était bien ici le cas de faire emploi de solides fondations en formant un balast de cassons de briques ou de gravier, de manière à remédier par un lit incompressible au défaut d'épaisseur de ces plaques. Mais, au mépris de ces sages précautions, la pierre de taille mince est assise sur une faible couche de sable reposant lui- même sur un fond plus ou moins meuble et détrempé. Aussi se sont-elles bientôt enfoncées irrégulièrement ; leurs axes se sont croisés et aux points de jonction le fil d'eau s'est également trouvé converti en lagunes fétides, que le balayage , quelque soin qu'on y mette, ne parvient pas toujours à faire disparaître même momenta- nément. C'est encore la ville de Paris qui va nous fournir, à l'égard de éelte partie importante de la voie, le meilleur modèle à suivre quant à la forme. On y supprime le pavé de revers, celui qui est placé en — A4TB — contre-pente au piel de la bordure du trottoir, et le versant de la chaussée s'avance dès lors à la rencontre du parement même de celte bordure, de telle sorte que l'eau glisse dans l'angle formé par ces deux surfaces, Il est facile de se rendre compte des avantages offerts par ces dis- positions. L'un des premiers est de ne former qu'un tout des trot- toirs et de la chaussée, en leur assurant un point d'appui réciproque, tandis que dans la ligne brisée de l'autre méthode, le versant de la chaussée est pour ainsi dire abandonné. Le pavé de revers étant lui-même très-mal assujetti contre la bordure dont il peut d'autant moins prévenir le renversement qu'il ne repose que sur la ange. Hätons-nous de dire qu'il est plusieurs conditions indispensables pour donner à cette combinaison les avantages qu'elle comporte. Nous ne reviendrons pas sur l'utilité d’un balast incompressible exécuté conne il est dit plus haut; limperméabilité de cettematière est surtout importante ici”. Nous supposons les grès de grand échantillon et convenablement disposés; c'est-à-dire, avec une pente suffisante pour amener les eaux contre la bordure *. Celle-ci’, de son côté, doit avoir des dimensions telles qu'elles offrent une:cer- taine résistance au choc, à la pression des roues de voitures, et une section rectangulaire gardant à là queue autant de largeur qu'à la tête, avec assez de hauteur pour que la base corresponde à l'extré- mité inférieure des pavés attenants, et que le même balast puisse servir de fondation à l'uneet à l'autre pierre. 1 Si l'essai de la rue de Gand n'a pas entièrement réussi, cela tient à quelques imperfections dans l'exécution; celui de la rue du Molinel paraît plus heureux, ? Pourquoi faut-il que l'ébranlement des voitures ne permette pas de cimenter les ruisseaux à la cendrée dans une certaine largeur? * A est dangereux loutefois d'exagérer la pente près des ruisseaux en la faisaut brusque el rapide comme ou peut le remarquer rue Saint-André, à l'angle des bâtiments des Archives, près les Halles, rue de la Quennette, rue de Roubaix, ete., etc, Il y a une foule de rues où les touinants des embran- chements ont des rüisseaux trés: dangereux, — 479 — En arrivant ainsi à lasconstruclion des trottoirs, nous nous trou vons en présence d'un arrêté municipal parfaitement motivé, mais qui prouverait au besoin, par les résultats obtenus, combien en matière administrative il faut de précision et de fermeté exempte de toute tolérance ; nous aurons donc à profiter de l'expérience acquise. Les bordures actuelles, considérées comme faisant partie du trot toir, ne sont à vrai dire que des bordures de pavé, laillées sur deux faces ; leur épaisseur de 10 à 15 centimètres à la tête, renflée un peu vers le ruisseau, diminue vers la queue pour se terminer en pointe. Posées ainsi sur un sol compressible ; privées d'appui vers la chaussée, elles cèdent facilement à un choc, à une forte gelée, au tassemen£ des dalles du trottoir ; elles se déjettent et se renversent comme on le voit sur un grand nombre de points oùles vides, laissés ainsi entre les pavés , des saillies fermées par l'angle interne devenu supérieur, arrêtent le pied des passants et produisent des chutes d'autant plus graves, que le pavé formant le revers, loin de soutenir la personne qui a perdu l'équilibre, présente une surface glissante qui l'entraîne au fond du ruisseau: Cette défectuosité s'ag- grave en quelques endroits par l'élévation incroyable des trottoirs qui atleignent jusqu'à 25 et 27 centimètres ‘. On avait, à l'époque de la création, pensé qu'une hauteur de 18 centimètres était méces- saire, et l'on à toléré des exagérations graves comme l'expérience l'a démontré, car c'est une des causes les plus réelles des nombreux accidents auxquels ont donné lieu les trottoirs de Lille. A cette époque aussi, on avaitencouragérun mode de les confec- tionner fort agréable à l'œil, trèsfavorable au maintien de la pro- preté, mais bien funeste, en définitive, à la circulation. F Cent vingt côtes ont été relevées avec Soin (nous pouriious citer les numéros des maisons) dans les rues dé Paris, de Touruai, Mahieu, des Sahuteaux, Saint-Sauveur, des Tours, de Gand, place Saint-Martin, rue d'Angleterre, Négrier, Marais, Voltaire, du Gros-Gérard, des. Bouchers, des Canonniers, du Maire, des Jardins, de Roubaix, Saint-Jacques, Basse, de la Barre, de l’Hôpital-Militaire, Saint-Étienne. Toutes les hauteurs mesurées vaiient de 20 à 27 centimètres, les plus répétées sont 22 et 25 centimètres, : OL — 480 — Le dallage en pierres de taille ‘, de Tournaiou de Marquise, que l'on remarque devant quelques maisons de nos principales rues,ea causé bien des accidents plus ou moins graves. Les temps de neige, de verglas, les pluies même, ainsi qu'une forte sécheresse, rendent ces surfaces polies par le frottement , extrêmement dangereuses. La précipitation (dont il faut reconnaître l’utilité à certains égards), mise à réaliser ces trottoirs, entraîna plus d'un inconvénient. Nous venons de parler de la faveur avec laquelle était accueilli le dallage, mais l'article 3 de l'arrêté du 9 avril 1835 laissait à chaque riverain la liberté d'opter entre quatre espèces de matériaux * ; de sorte.que la tolérance aidant à l'égard des dimensions, de la taille et de la pose, l'aspect, la forme et la viabilité de cette partie importante dela voie publique change pour ainsi dire de maison à maison. Si quel- ques personnes ont fait usage de grès équarris plus ou moins fine- ment taillés, la généralité a mis en œuvre ceux qui couvraient jadis les accotements (flégards), où qui provenaient des déchets de la chaussée. Les uns, propriété du riverain, comme les autres achetés à vil prix, étaient fort irréguliers. Il en est résulté une surface rugueuse et flachée qui retient longtemps les eaux pluviales ou ménagères. Nous avons aussi lieu de regretter que l'article 5 de l'arrêté pré- cité n'ait point été plus rigoureux relativement à la manière dont devaient se faire les écoulements d'eaux provenant des habitations riveraines. Quelques propriétaires les ont amenés sous le trottoir par un aqueduc qui débouche au ruisseau en le recouvrant ici d'un dallage ordinaire, là d'un grillage en fer forgé plus ou moins mial T La nature des dalles employées à Paris et à Londres, pour les trottoirs qu'on exécute sans bordures, est une pierre meulière non susceptible de poli, de sorte que le pied y est toujours ferme, ? La surface des trottoirs pourra être pavée : « 19 En grès équarris et pierres plates de grès; “ 29 En dalles de Landrethun; “ 39 À la cendrée en grès de 14 à 17 ceulimètres (on a toléré {1 à 15): = 4® Au sable en grès des dimensions ci-dessus énoncées. » — 481 — assuré, et dont les barettes sont souvent écartées à ce: point que les cannes,, les parapluies sur lesquels. on s'appuie, l'extrémité. même des pieds s'y trouvent facilement engagés. Les autres constructeurs ont laissé l'écoulement se faire à ciel ouvert dans une dépression du trottoir, par les tuyaux de descente des eaux pluviales ou par les goulottes des maisons qui débouchent à différentes hauteurs et lancent à l'improviste leurs jets sur le chemin, que doit suivre le piéton. Dans la mauvaise saison , ces eaux s'arrêtent longtemps là où la surface du trottoir n'est pas bien entretenue (et les exemples en sont nombreux), de sorte qu'au moment des gelées elles forment des banes de glace accrus chaque jour etqui occasionnent des chutes souvent fatales. C'est, il faut le dire, en contravention aux prescriptions munici- pales , que les propriétaires modifient suivant leurs convenances là pente, la direction et la hauteur du trottoir, pour faciliter l'accès de leurs habitations. Les grandes portes sont partout annoncées par une différence dans le niveau et la pente du trottoir, et il faut une extrême attention pour n'êlre.pas victime de cesinégalités , souvent compliquées, de tous les défauts signalés précédemment, de dallage glissant, de goulottes ou ruisseaux doubles, triples, jetés à travers le trottoir ; de flaches d'eau produites par les élévations, les renver- sements des pavés, ete., etc. On semble ne pas comprendre qu'il faut avant: tout niveler la voie publique *, et que les différences facultatives des hauteurs du sol des habitations ne doivent se raccorder que dans l'intérieur par des dispositions convenables. Il est bien vrai que pour les voitures, l'élévation même des trottoirs ajoute une difficulté à l'appropriation; alors, sentant que le peu 1 D’après les mesures données lors de la création, les eontre-pentes devant les portes cochères devaient s'étendre à 1 mètre 80 de chaque côté. 2 Rien n'est simple el facile comme les dispositions prises à Paris : le trotloir étant moins élevé, 12 centimètres, s’abaisse encore graduellement et obliquement devant les grandes portes, mais il y resle toujours une élévation formant ruisseau, de sorte que la transition est insensible, — 482 — détendue de l'accotément semble nécessiter une obliquité contre laquelle nous élevons nos réclamations. Les marches qui conduisent aux habitations sont aussi, dans quelques rues, des entraves exces- sivetnent regrettables à la circulation. Nous savons quel est le respect dû aux droits acquis, mais nous savons aussi combien sont plus respectables encore les droits de tous; et, alors que sur les grandes routes si larges et si commodés, l'administration des ponts et chaussées est tellement scrupuleuse, qu'elle exige des riverains une régularité souvent gênante et onéreuse pour eux, des sacrifices de terrain, de constructions, de plantations anciennes, ete., nous ne saurions comprendre que, dans les villes, les facilités de la circulation soient entravées par des considérations qu'on seraiten droit de dire mesquines, au prix des grands intérêts qui sont en présence. Les constructions modernes, d'ailleurs, ne sont pas plus surveil- lées que les autres, il faut bien le dire, et, de cette façon, l'abus tend à se perpétuer. « L'article 3, titre 2, de la loi du 24 août 1790, confie tout ce « qui intéresse la sûreté et la commodité du passage dans les rues, “ quais, places et voies publiques, à la vigilance et à l'autorité des « municipalités. » Les magistrats de Lille n'ont jamais oublié qu'il y avait pour eux plus qu'une question de compétence, qu'ilsne pou- vaient se soustraire à une certaine responsabilité morale ; et il n'a sans doute manqué à leurs tentatives, à leur bon vouloir, que la fermeté dans l'exécution, la persévérance dans les répressions. Car les considérants de l'arrêté du 9 avril 1835 pourraient encore se prêter admirablement à la situation présente et motiver de nouvelles mesures, comme alors on peut dire : « Que les flégards ou espaces « compris entre les façades des maisons et les fils d'eau bordant les « chaussées des rues (traduisez trottoirs) n'offrent pas en général un « passage sûr, commode et facile ; que plusieurs sont pavés en petits « grès mul assis et mal joints ; que les pentes prescrites par les règle “ ments n'yontpas été observées ; qu'ils sont souvent »al raccordes à la limite des propriétes et y forment des ressauls dangereux ; a — 483 — «que l'administration municipale a le devoir de faire cesser cet état « de choses et de prescrire des dispositions propres à faire jouir le « publie d'un passage commode sur les (trottoirs); qu'elle doit « veiller à ce que ceux qui sont en mauvais état soient réparés ou « reconstruits, en observant des pentes et contre-pentes conve- « nablement fixées, et en employant des matériaux qui ne compro- « meftent pas la sûreté des passants, etc., ele, » Parmi les causes qui viennent compromettre cette sûreté de la circulation, nous avons encoreà noter celles qui résultent, dans nos rues les plus étroites, des dimensions exiguës qui rendent les trot- toirs plus dangereux qu'utiles. On a cherché à donner à la voie au moins 6 mètres, sans s'occuper de ce que devenaint les piétons sur les trottoirs, et, en suivant aveuglément cette indication, on est arrivé à un grave défaut. Dans les rues qui ne livrent passage qu'à une seule voiture, on a souvent laissé un espace beaucoup trop large à cet effet, en restreignant le trottoir à une simple bordure contre les maisons. Lorsque les piétons sont rencontrés par une voiture dans ces défilés, leur position devient très-critique, car le trottoir est inaccessible; au pied se trouve le ruisseau, et bien souvent le véhicule, dont l'essieu fait saillie de 10 à 15 centimètres, est entraîné irrégulièrement de droite ou de gauche, soit par l'effet du bombement de. chaussée, soit en hiver par l'effet des glaces. Evidemment sur. plusieurs points ilest indispensable de réduire la voie et d'élargir les trottoirs de manière que les piétons puissent y trouver un refuge; mais ce n’est pas seulement dans les rues étroites que l'élargissement des trottoirs serait désirable ; dans beaucoup de rues, ils sont si étroits, si difficiles, si encombrés, que les piétons sont forcés, à leurs risques et périls, de circuler au milieu des voitures. (Les rues de Paris, de la Quennette, de la Monnaie, etc.). On exécute dans la capitale des remaniements très-importants.en ce sens qu'on ne laisse que rigoureusement la voie nécessaire à l'entre- croisement des voitures pour restituer aux piétons les facilités auxquelles ils ont droit. Nous ne saurions passer non plus sous silence les embarras et — 484 — les dangers permanents ouverts sur les trottoirs par les caves habitées ou à usage de magasin. Au mépris des arrêtés qui fixent" là saïllie que peuvent avoir ces orifices, de ceux qui limitent aussi l'espace que peuvent occuper les marchandises exposées en dehors des magasins, on voit jusque dans les rues les plus étroites, là où les trottoirs sont les plusnécessaires, des ouvertures béantes jusqu'à la bordure du ruisseau; on voit des portes ouvertes en saillie à angle droit, des paniers, des fruits, de la ferraille, des vieilleries envahir tout le trottoir sans le moindre souci des passants. Un pareil laisser-aller ne saurait se justifier sous le prétexte spécieux de faciliter, de favoriser le petit commerce. Personne ne soutiendra assurément que les petites industries aient été annulées à Paris, à Londres, depuis que rien, absolument rien, ne peut faire saillie sur le parement extérieur des murs de façade, et où, certes, on ne tolèreraient pas sur le passage public ces ouvertures, qui ont déjà occasionné des accidents de plus d'un genre. I est grand temps que l'administration municipale prescrive la réparation immédiate des trottoirs les plus dégradés, qu'elle ordonne pour cause de sûreté publique le raccordement des bordures déjetées, des enfoncements et rentrées®, qu'elle fasse, dans l'intérêt de la salubrité, réparer ausis les ruisseaux défec- tueux; qu'elle statue pour l'avenir de manière à arriver progres- sivement à une uniformité plus satisfaisante sous tous les 1 On avait accordé 40 centimètres de saillie à l'ouverture des caves qui devaient être recouvertes par une dalle en bois de 5 centimètres d'épaisseur, Mais, par suile de réclamation, on a toléré une dalle mobile de 35 centimètres, ce qui amène des ouvertures de 75 centimètres en saillie sur les trottoirs ; et, comme les caves habitées, les caves magasins sont presque loujours ouvertes, le public doit descendre sur la voie, ? Au moment où nous terminons ce travail, uous voyons exéculer sur plusieurs points ces raccordements, el nous croyons n'être pas tout à fait étrangers à ces réparations; mais comme on ne modifie en rien le système ancien, on persiste à asseoir les grès sur la boue desséchée, nous pensons ne devoir rien changer aux conseils que nous avons furmulés, — 485 — rapports de, cette partie de la voie, dans le sens des observations précédentes. $ Les dispositions dont il vient d'être question auront, par elles- mêmes une influence très-marquée:sur la salubrité; mais, il ne suffit. pas que les rues, faciles d’ailleurs.pour le trafic, soient faci- lement aussi balayées, lavées, entretenues sans qu'il se produise une immense infiltration sous le sol. 11 fautencore que l'air, que la lumière y cireulent largement ; il faut qu'aucun obstacle ne s'oppose à l'assé; chement des pavés; il faut que l'oxigène de l'air arrive en proportion suffisante pour la combustion des matières organiques, qui, malgré toutes les précautions, se déposent sur le sol, où (suivant les belles recherches de M. Chevreul} elles tendent à se transformer en sulfures à la faveur des eaux chargées de sulfates, et donnent ainsi naissance aux, gaz les plus méphitiques, les plus vénéneux; il faut que les habitations qui bordent la rue subissent l'influence des plus précieux agents de la santé, l'air et la lumière. Comment dès lors admettre qu'il soit loisible à tout propriétaire d’exhausser son habitation au détriment de ses voisins de la rue entière, c'est-à-dire quand celle-ci n'a pas des dimensions telles que l’aération, l'insolation , puissent s'y opérer indépendamment de la hauteur des maisons. On voit à Lille des courettes, des rues étroites où l'ouvrier.a dû, par économie, chercher un logement, tout à coup masquées et comme enterrées par l'élévation d’une fabrique ou autre-bâtiment qui inter cepte ainsi ce qui était destiné à tous les voisins (rues Doudin, des Célestines, des Tanneurs, etc.). Gependantles rues grandes et larges nemanquent pas à Lille, et offrent des emplacements propres à créer les plus grands établissements. Maisà l'exclusion des fabriques, quand une ville est limitée par des murailles, quand elle ne peut suffire par des dilatations latérales à l'accroissement de ses habitants, on voit ceux-ci chercher dans la hauteur des constructions à combler le déficit. Mais alors il est du devoir de l'autorité administrative d'im— poser des limites au droit de la propriété individuelle, puisque l'exercice de ce droit porte atteinte à la propriété de chacun , elle — 486 — doit arrêter que les constructions ne pourront s'élever que suivant une échelle déterminée par les dimensions de la rue. Que des prévisions aussi simples et en même temps aussi sages aient échappé aux siècles précédents, cela se comprend jusqu'à un certain point, car il était bien rare de rencontrer de hautes habi- tations; mais il n’est plus permis de rester étranger aujourd'hui aux grandes vérités hygiéniques qui se font jour au sein des popu- lations ". On est heureux de voir en pareille matière le chef de l'État poser des jalons et des réserves dans le décret du 20 mars 1852, que nous regrettons vivement ne pas voir encore appliqué à la ville de Lille. — Décret que, pour le dire en passant, on est disposé à inter- préter dans des limites beaucoup trop étroites en supposant qu'il suffit de reculer une construction de quelques centimètres pour échapper aux exigences salutaires qu'il renferme. L'article 5 de cet arrêté renvoie à un décret ultérieur rendu dans la forme des règlements d'administration publique, « ce qui « concerne la hauteur des maisons, les combles et les lucarnes. » Privés de guides de ce côté, nous n'en devons pas moins essayer d'apporter quelque lumière dans la question; et nous ferons remar- quer d'abord que la direction des rues relativement aux vents régnants et à l'insolation, que leurs jonctions, leurs embranche- ments, sont des considérations d’une telle importance hygiénique, qu'il doit en résulter des modifications dans les règles à suivre en ce qui concerne la hauteur des maisons. Ainsi, il est facile de comprendre qu'une direction du nord au sud favorisera l'assèchement du pavé de la rue et que la chaleur solaire y activera la décomposition des matières organiques ; que 1 La publication périodique, si éminemment civilisatrice de M. Ed, Charton, ccinmence dans le numéro de janvier dernier un premier article parfai- tement dicté à ce sujet, et qui en fait espérer une série d’autres non moins intéressants, — Ai: — les-rues ouvertes aux vents du, sud-ouest, habituels dans nos climats seront balayées sans cesse par des courants utiles; que les directions est-ouest seront moins heureuses, soumises aux vents humides de l’ouest, aux pluies abondantes qu'ils amènent, ces rues sècherout difficilement si elles n’ont pas une grande largeur. Les vues obliques à celles sus-indiquées subiront relativement les conséquences de ces directions; les rues sinueuses, tortueuses, offrent les plus grands obstacles au renouvellement de l'air, Elles impliquent la nécessité de moins élever les constructions et d'élargir la voie. L'ouverture de places publiques, de carrefours nombreux, ajoute beaucoup à l'assainissement des villes en multipliant les tourbillons, en entraînant par des différences variées de pression les masses d'air disposées à stationner dans les embranchements des grandes artères. Aussi faudra-t-il s'attacher dans le percement ou l'élar- gissement des rues à faire coïncider les affluents, autant en vue de l'hygiène que des facilités de communication. Il est évident, d'après ces prémisses, que chaque rue, suivant ses dispositions particulières, devrait donner lieu à une réglemen- tation toute spéciale; et il serait désirable qu'il'en fut ainsi. Mais il en résulterait, on le conçoit, une trop large part à l'arbitraire pour que l'on puisse tout abandonner à l'appréciation qu'il est sage de réserver pour les cas exceptionnels, en traçant des règles géné- rales pour l'application. En principe, les dimensions devraient être calculées de manière à ne jamais donner plus de hauteur aux, constructions riveraines que la rue n'a de largeur, de telle sorte qu'à 6 mètres de largeur deroie, les habitations qui la bordent n'aient pas plus de 6 mètres de haut à la naissance du, toit, dont la pente serait aussi déter- minée, qu'à 12 mètres de large la ruene soit bordée que de construc- tions élevées au plus de 12 mètres, et ainsi de suite. Cependant les faits accomplis, les bâtisses solidement élevées depuis longtemps, consacrent des droits imprescriptibles en quelque sorte ; la nécessité de loger, dans les centres, industriels et notam- — 488 — mént dans les villes de guerre comme Lille, une population serrée et indispensable à leur activité, impose des bornes à l'amour du bien et doit faire fléchir une règle dont la sévère application serait par trop subversive de l'état de choses. Aussi, après s'être rendu compte de l'influence précitée de la hauteur des maisons sur l'assainissement de la voie publique, après avoir pesé également les considérations qui précèdent, est-on amené à penser que l'échelle pourrait être fixé comme suit : 1° Au-dessus de 3 mètres de largeur, ne pas admettre d'habi- tation front à rue et limiter les murs de clôture à À mètres au-dessus du sol; 2% De 4 à 6 mètres, les façades n'auraient pas plus de 8 mètres de haut, et le toit finirait avec une pente de 50 degrés au maximum ; 3° De 6 à 8 mètres de largeur, 10 mètres de façade avec toit en pente de 60 degrés au maximum ; 4° De 8 à 10 mètres, les façades pourraient s'élever à 15 mètres avec pente de toit facultative ; 5 De 40 à 12 mètres au maximum, 20 mètres de façade ; 6° Au-dessus de 12 mètres, hauteur illimitée. Sur ces bases, la ville ne prendrait désormais à sa charge aucun passage qui ne soit établi conformément aux indications qui précèdent; et elle’exigerait la fermeture, comme propriété particu- lière, de toutes les courettes où passages non acceptés. Rien n'empêcherait d'ailleurs les constructeurs de prendre l'élévation convenable à leurs dessins, mais en retrait des façades de manière à rentrer dans les limites ‘posées. On aurait ainsi un résultat précisément inverse à celui des anciennes rues quelquefois recouvertes dans le haut par les'empiétements des maisons latérales qui arrivaient àu point de se toucher parlées pignons. Les plates-formes qui résultéraïent de ces retraits ne seraient — 489 — pas sans agrément :pour l'œil-en rompant lamouotonie des lignes droites. Elles ne seraient pas sans charmes pour les habitants, carelles seraient souvent transformées en jardins suspendus. Les plantes, même de petite dimension, exercent sur l'air environnant une influence, des plus favorables, et: toutes les facilités accordées à leur introduction dans les villes auront des résultats heureux. Elles assainissent, elles moralisent à leur manière; en égayant l'habitation, en demandant quelques soins de culture ; elles ramènent au logis, elles contribuent au bonheur domestique, c'est encore de là santé. Les plantations d'arbres de toute nature sont à juste titre recherchées dans les villes. Les arbres absorbent, par leurs racines, * les matières en décomposition (voir encore le travail de M. Chevreul et ceux plus anciens de Franklin) ; ils purifient l'air par la respi- ration qui s'effectue dans les: feuilles ; ils procurent un abri durant les chaleurs; mais à côté des avantages peuvent se rencontrer aussi “des inconvénients, si l'ombre qu'ils projettent s'oppose à l'assè- chement du sol ou des habitations. 11 faut donc des lieux parfai- tement convenables et des essences appropriées aux locaux, La ville de Lille offre bien peu de terrain où il soit possible d'en espérer quelque bienfait. Il est vrai que l'espace réservé aux fortifi- cations, que les plantations dont celles-ci sont couronnées, contribuent puissamment à la salubrité ; néanmoins l'esplanade du Réduit (Saint-Sauveur), la rue de Fives, celle de Saint-Sauveur dans sa partie la plus large, pourraient avantageusement, pour le quartier, recevoir des arbres de moyenne taille convenablement espacés. Rien de ce qui peut contribuer à la santé ne saurait être négligé par une administration sage : et ce doit être pour elle une bonne fortune de pouvoir joindre l'agréable à l'utile. En résumé, nous avons eu pour but dans ce chapitre de réclamer comme amélioration progressive : 1° De n'employer désormais aux grands travaux de pavage qu'un balast imperméable ; — 190 — 2% De ne faire usage dans les rues de grand trafic que de grès porphyriques taillés en parallèlipipèdes de 22 centimètres sur 14; 3° De ne point rejeter trop facilement les grès dits hors de service, mais de les faire trier avec soin suivant leurs dimensions pour les asseoir sur un balast imperméable dans les rues de moindre importance ; 4 De faire redresser les ruisseaux en les rejetant contre les bordures dés trottoirs et y faisant usage du balast à la chaux hydraulique ; d° De faire redresser les bordures déjetées des trottoirs ; 6° De diminuer l'élévation de ceux-ci, ce quetend à produire la modification ci-dessus indiquée pour les ruisseaux ; 1° De faire supprimer partout les dallages en pierre de taille, hsse et glissante; d'exiger dans les reconstructions des grès taillés à la grosse pointe de 15 centimètres sur 18 à la tête, balastés et cimentés ; 8’ D'exiger que les écoulements d'eau pluviale et ménagère, provenant des maisons, ‘se fassent sous le trottoir à l'aide de goulottes en fonte ; 9° De régulariser les pentes et contre-pentes établies devant les portes charretières ; 10° D'élargir certains trottoirs dangereux par leur exiguité; 11° D'apporter la plus grande sévérité (sinon de les supprimer entièrement) sur les ouvertures de caves avancées dans la rue?; ! Il serait mieux encore d’exiger que les eaux soient immédiatement dirigées dans lés égouts publics lorsqu'il en existe dans les rues. (Les propriétaires voisins pourraient s'entendre pour profiter du: même aqueduc.) ? En pareille matière, comme pour les étalages, il faut sayoir trancher dans le vif, les demi-mesures sont souvent nuisibles, Le service des cantonniers urbains serait ici de la plus grande utilité. — 491 — 12° De proscrire entièrement les étalages extérieurs qui enva- hissent les trottoirs et y causent desembarras de toute nature; 13° De limiter la hauteur des constructions relativement à la largeur des rues et comme moyen d'accepter le décret impérial dn 20 mars 1852; 149 Enfin, de favoriser les'plantations en ville-et d'en exécuter sur les points cités. MÉMOIRE SUR LES ARCHIVES DE L'ABBAYE DE CYSOING, Par M. LE GLAY, Membre résidant. Auliquo celebrata situ, celebrata colono Sgnctorum facts splenaida, dives avis (Car. VENDUILIAUS . ) Les étymologistes , qu'on ne prend jamais au dépourvu , n'ont pas manqué de trouver une origine et même deux à ce mot de Cisoing. Selon les plus hardis, il y avait parmi les chefs de l’armée romaine qui occupa la Gaule-Belgique, du temps de l’empereur Claude , un patricien nommé Cæsonius. Cet officier supérieur habitait Tournai et venait se livrer au plaisir de la chasse dans la forêt baignée par la Marque. Il y construisit même un château qui ne tarda pas à être environné d'autres habitations et à devenir le centre d'une ville appelée C'æsona, du nom de son fondateur. Bien que ce mot Cæsona soit employé par Guillaume le Breton dans sa Philippide où il est dit, à propos de Bouvines : Sanquineum a zephyro , Cæsonam tangit ab Eure , l'étymologie romaine n'en sourit pas à Buzelin qui aimerait mieux y voir Cis Onium. c'est-à-dire situé en decà de /'Onium , petite rivière de ces parages (1. Il n'y à à cela qu'une difficulté ; c'est que personne n'a jamais vu la petite rivière dont il s'agit. (1) « Placeret potius quod aliqui dieunt , inde nuncupari Cisonium . quod cis Ouium , amnem aquæ snodicum , sedent. » Gallo.-Flandr. 108. (493 ) Quoi qu'il en soit, Cisoing , sur la rivière de la Marque, dans le Pagus Tornacensis; estun des lieux tes plus:anciennement célèbres de nos environs. St.-Amand et Seclin seuls remontent plus haut C'était, dèsle neuvième siècle, un fisc royal (1)oudomaine propre du souverain, comme l’attestent les diplômes souscrits par Gisla, petite fille de Charlemagne. Du reste , l'illustre abbaye de Ciscing était dignement entourée. Bouvines et Mons-en-Pevèle ui offraient un voisinage historique assez recommandable. Ajoutons que , dans notre pays de plaines uniformes, Cisoing se distingue par un site plein de mouvement et de variété. (2) C'est là qu'au 1x° siècle , un gendre de Louis-le-Débonnaire songea à établir une maison religieuse. Le testament de ce grand seigneur, nommé le comte Everard, porte dans Vander Haeret dans Miræus la date de 837 (3). Il énumère les lieux et les do- maines appliqués, tant au nouveau monastère qu'à l'usage des héritiers du testateur. Ce document, dont l'authenticité ne paraît pas douteuse , est un des titres les plus notables qu'on puisse consulter pour la topographie de la Pevèle et du Mélantois. :Mi- ræus , qui le reproduit d'après Vander Haer (4), d’une manière infidèle selon son habitude , l’a enrichi de quelques notes intéres- santes. Le même acte présente en outre une nomenclature de livres qui a bien aussi sa valeur. Sans doute le testament de St Everard aura été déposé en ori- (x) Apud monasterium fisei Cysonü. — Ad onasterium in fisco Cysonio situm, — Actum fisco Cysonio: (2) Le plateau dit de Cisoing est borné d’un côté par la rivière de la Marque, de l'autre par les villages de Bourghelles et &e Wannéhaiu. Il a au nord la plaine où fut livrée Ja bataille de Bouyines, gu sud un grand bois qui s'étend jusqu’à Cobrieux. (3) Diplomata Belgica ,1, 19. Voyez sur cetie date une dissertation de M. Marchal qui prétend , avec assez de vraisemblance , qu'au lieu de 837, ilfaut lire 873. Bulletius de l’Académie royale de Bruxelles, 1840, 11.° partie, W1*etsuivantes. (4) Les Chastellins de Lille}, page 35. 33 ( 494 ) ginal à Cisoing; mais on sait que les titres de cette époque ne se retrouvent guères, si ce n’est en copie. Estimons-nous heureux que celui-là soit ainsi parvenu jusqu'à nous. Il y avait jadis à la Chambre des comptes, à Lille, un coffre renfermant les chartes de l’abbaye, qui l'y avait fait déposer pour plus de sûreté durant les guerres, au commencement du xv.° siècle (1). Ce coffre fut ouvert en 1678 par Denis Godefroy qui dressa un inventaire des titres et en délivra quelques copies. On le ferma ensuite de trois serrures doni les clefs furent gardées en même temps par l'abbé de Cisoing et par Denis Godefroy. En 1783, les clefs ayant disparu , et l'abbaye voulant avoir commu- nication des pièces contenues dans ce meuble, il dut intervenrr un arrêt du Conseil pour en autoriser l’ouverture. Il est certain d’ailleurs que toutes les archives de Cisoing n'étaient pas làren- fermées, puisque, le 25 décembre 1790, les commissaires du Directoire du District de Lille apposèrent les scellés sur une chambre du monastère où ils trouvèrent un grand nombre de cartons contenant, dit le procès-verbal , les divers titres de Ci- soing, M. Gosse , dernier abbé, signa l’acte avecles commissaires. Ce que nous possédons aujourd’hui concernant cette abbaye se compose de 178 diplômes , chartes, bulles et autres originaux, répartis ainsi qu'il suit : pour le xr1.e siècle, 27 titres; pour le xur.®, 106; pour le x1v.®, 23; et pour le xv.®, 22. La pièce première est une lettre scellée d’un scel oblong en cire rouge, datée de Reims, 1129. L'archevêque Raimond mande à Anselme, abbé de Cisoing, que Hériman qui avait obtenu indûment les deux charges de prévot et de trésorier, y a renoncé. En conséquence l'archevêque les remet à la disposition de l'abbé pour les conférer, sous certaines conditions (2). En outre, il confirme (1) C'était sv prendre un peu tard. Il eût fallu faire cela quelques jours avant la bataille de Bouvines , ou même avant l'invasion des Normands. (3) Voyez sur ce fait Buzeliu, Annales Gallo-Flandriæ 228-399, (495 ) l'établissement de chanoines réguliers de St-Augustin dans ce monastère, au lieu des séculiers qui s'y trouvaient naguères. Ce titre est mentionné dans le Cameracum Christianum, 261. Il est inséré dans Aubert le Mire (im, 328) qui l’a extrait du Spicilége de d’Achéry. Il est visible que le texte a été copié sur notre original, puisqu'on y laisse en blanc le mot même qui manque audit ori- ginal. Le sceau appendu au bas de l'acte présente l'archevêque debout. En fait de cartulaires, je n’en ai qu'un seul à mentionner. C’est un petitin-folio, papier, demi-reliure nouvelle, folioté à la marge inférieure jusqu'au feuillet ccvr; viennent ensuite 13 feuillets non chiffrés, dont deux en blanc. Le commencement du volume est fort délabré. Sur la première page on lit le distique suivant : Dive tuis, Everarde, fave cultoribus; hacce Vestra pelle domo cuncta inimica Deo. L'écriture de ce cartulaire mforme est fort diverse. Les titres concernent surtout Beaurepaire. L'inventaire dont je viens de parler m'a été communiqué obli- geamment par M. le marquis de Godefroy de Menilglaise , avec autorisation d'en prendre copie pour notre dépôt. C'est à l'aide de ce répertoire que j'ai pu vérifier les pertes éprouvées par les archives de Cisoing depuis 50 ou 60 ans. Les archives de la Chambre des comptes de Lille nous offrent pour les temps antérieurs au x1v.° siècle les données suivantes , d'autant plus dignes d’être recueillies que les actes ÿ mentionnés ne se retrouvent pas dans le fonds propre de Cisong. 1. 4477. Philippe, comte de Flandre et de Vermandois, donne à l’abbaye une rente annuelle de 20 sous, payable le jour des Rameaux par son receveur de Lille. Le comte destine cette rente à solder le pain et le vin nécessaires pour Je sacrifice de la messe. Original en parchemin scellé du sceau dudit comte. 2,0 1219, avril. Pierre de Douai déclare que Baudouin, comte ( 496 ) de Flandre et de Hainaut, lui ayant donné ten fief l’avouerie de Sommaing (4) qui appartenait à l’abbaye de Cisoing, et cette abbaye lui ayant cédé son franc-alleu dans les bois et les marais de cette ville, la maison de Beaurepaire, ses appendances avec les bois de Biarche et de Longhe - Selve restant dans l'avouerie, il règle les droits et les devoirs de la dite avouerie. Copie du temps en français. Nota. Cette version romane figurera en regard du texte dans les pièces justificatives du présent mémoire. 3.0 1283. J. doyen et le chapitre de Saint-Pierre de Lille dé- clarent que Jean de Lille, chanoine de Cisoing , a reçu de Marie et de Bèle, ses sœurs, 64 livres parisis qu'elles lui avaient prè- tées pour les nécessités de l’abbaye, lorsqu'il en avait l’administra- tion par ordre de son prélat, et promet de leur rendre 61 livres 9 sols parisis , ainsi que s'y était obligé l’abbé de Cisoing ; mais que l’abbé ayant employé cet argent à d’autres dépenses , il ne pouvait le leur donner. Original en parchemin , le sceau manque. 4.° 1286. Robert , abbé, et tout le couvent envoient à Gui, comte de Flandre, Jean de Lille et Jean d'Orchies, pour traiter quelques affaires. Original en parchemin scellé des sceaux desdits abbé et religieux. Deuxième cartulaire de Flandre, pièce 402. Huitième cart. de Flandre , pièce 274. 5.° 1286. L'abbé et le couvent déclarent qu'ils trouvent leurs biens tellement absorbés par les usuriers qu'ils ne peuvent plus pourvoir à leur subsistance. En conséquence , ils en remettent la totalité entre les mains du comte de Flandre qui l’accepte, moyen- nant certaines conditions. Original en parchemin scellé. Nota. A ces lettres en sont jointes d’autres par lesquelles l'ab- (x) Ce lieu de Sommaing, donné à Gisla par Charles-le-Chauve, son frère, était un fise royal aussi bien que Cisoing: Fiscum nomine regium in pago Hostre- want situm quem mihi jam fatus rex püssimuset, si dicere audeam, germanus meus , Caxolus.. , dono tribuere dignatus est. ( 497) baye s'engage à les faire ratifier par Jean , cardinal , légat du St. Siége , et par l'archevêque de Reims. 6.2 1286. Le comte Gui ordonne à Jean Makiel, son clerc, de demander aux abbé et religieux de Cisoing l’état de leurs revenus etide leurs dettes et combien ils peuvent prendre d'argent à vie. Il le nomme receveur de l’abbaye avec un ou deux chanoines et. déclare qu'il a mandé à Simon Malet de Douai et à Joffroy de Renzières, ses sergents, d'emprunter en son nom 1600 livres dont il fera sa dette propre. Minute enparchemin. Huitième cart. de Flandre , pièce 275. 7.° 1286. Jean de Lille et Jean d' Orchies , Chanoïines de Ci- soing , mettent tous les biens de l’abbaye sous la garde et protec- tion du comte Gui, et lui donnent l'hommage du château de Rieu- lay. (1) Original en parchemin avec les sceaux desdits Jean de Lille et Jean d'Orchies. 8.° 1286. État général des revenus et des dettes de l’abbaye. Original scellé. 9.0 1286. L'abbé de: Cisoing mande au légat du pape que le comte Gui leur a prêté, pour les aider à acquitter leurs dettes, la somme de 2417 livres 44 sols parisis, aupaiement de quoi ils obligent leurs biens jusqu'à concurrence annuelle de 400 livres parisis. Ils désignent Henri , prieur, et Jean d'Orchies, chanoine, pour leurs cautions solidaires. 10.° 1286. Lettres à peu près pareilles adressées à P. (Pierre Barbet), archevêque de Reims. 11.0 1286. Jean de Has, Pierre de Has, son frère , Pierre... et Roger de le Rouere, reconnaissent avoir pris à cense de Gui, comte de Flandre , toutes les terres à labour appartenant à l'ab- (1) Rieulay. Rullagium , sux la xive droite de la Scarpe , était connu dès le 1x: siècle, puisqu'un diplôme de Charles-le-Chauve, daté de 877, assigne à l’abbaye de Marchiennes et in prædicto pago, scilicet Ostrebanno, de villa Rullagio, anguillascecc, (498 ) baye et dont ils ne doivent répondre qu'au comte ou audit Jean Makiel. Chirographe en parchemin. 12.0 1286. L'abbaye s'engage pardevant l'official de Tournai à payer au comte de Flandre les sommes que celui-ci lui a pré- tées , sous peine d’excommunication si elle n’exécute pas sa pro- messe. Original scellé. 13.0 1286. Henri, procureur de l’abbaye, jure d'observer ce qui est contenu dans les lettres ci-dessus et prie l'official , si elles ne s'exécutent pas, de l’y contraindre par sentence. Original scellé du scel de l'official. 14.9 1289. Le comte Gui ordonne au bailli de Lille et à Henri Makiel d'empêcher que l’abbaye de Cisoing , dont les affaires vont toujours en empirant, ne vende son bien et ne coupe sept bon- niers de bois qu'elle avait cédés à J. de Le Barre ; il leur enjoint aussi d’avoir soin de la cense de Louvy et des autres biens de la maison. Original en parchemin. Chartes du dépôt de Rupelmonde. On trouve dans l’ancien dépôt de Rupelmonde , si bien inven- torié par M. le baron Jules de Saint-Genois , les actes ci-après : 40 4279. L'abbé de Cisoing vend à Gillion Wetin , bourgeois de Tournai et à Catherine , sa femme , une rente viagère de 20 livres , et, en cas de décès de l’un des deux , reversible sur la tête du survivant , par moitié. Ils s’obligent à payer pour chaque jour de retard, 5 solstournois et engagent leurs hiens à l’acquitte- ment de cette rente. Minute ou copie du temps. 2.0 1286. Mêmes lettres que celles qui sont signalées ci-dessus p. 5 et qui se trouvent à la Chambre des comptes à Lille. 3.° 1286. Liste de ce que doivent à Jean Makiel , receveur de Flandre, dame Mascote li Ricard, bourgeoise de Douai et le cou- vent de Cisoing, pour draps, pots, hanaps et bassins d'argent , etc. Rôle presqu'illisible. (499) 4.° 1286. Robert, abbé , et Henri, prieur de Cisoing, font connaître l'emploi de la somme de 1600 livres parisis que le comte de Flandre leur avait abandonnée, afin de payer les créanciers de l’abbaye. (Suivent les noms des personnes entre lesquelles cette somme est répartie.) Original scellé. 5.0 4287. Compte des dépenses faites par le prieur pour le monastère. Rôle. 60. Henri, abbé, nomme Delebare , bourgeois de Lille , rece- veur de tous les biens qui appartiennent au monastère (suit l’énu- mération des biens). Il déclare avoir prié le comte de Flandre de confirmer cette nomination ; ce qui a été fait. Copie, écriture du temps. 7.° 1288. Énumération des dettes de l’abbaye. Rôle. 8.0 1288. Gui , comte de Flandre, ratifie la cession par l’ab- baye à Delebare , d'une rente de 950 livres parisis, à la condition pour celui-ci de payer certaines dettes de l’abbaye. Copie ou minute. 9.0 Vers 1290. Sommes payées pour l’abhé de Cisoing à Lille, à Tournai et à Douai. Rôle en français , écrit des deux côtés. 10.0 Vers 1290. Prisée des biens de l’abbaye. Rôle en fran- gais , fragment. 11.0 Vers 1290. Autre prisée de biens non compris dans la précédente. Rôle en francais , fragment. 12.0 Vers 1290. Compte des déboursés faits par Jean Makiaus pour l’abbaye. Rôle en français, fragment écrit des deux côtés. Autres documents qui se trouvent en Belgique. Les titres qui viennent d’être indiqués ne sont pas les seuls que possède la Belgique touchant l’abbaye de Cisoing. On trouve en- core à la bibliothèque royale de Bruxelles , fonds Van Hulthem, n.° 544, Origo sive Historia monasterii Cisoniensis, canonic. requl. ord. s. Augustin ab ango 867 ad 1460. Il est très-pro- { 500 ) bable quete manuscrit est une copie de l’Æistoriamonasterii Ci- soniensis (1) insérée dans le Sprcilége de Luc d’Achéry , t. 1 de la nouvelle édition ; t. x de l’ancienne. Disons , en outre , que le cartulaire officiel de l’abbaye de Ci- soing est à Tournai entre les mains de l'honorable M. Dumortier, membre de l'Académie de Belgique et de la Chambre des, repré- sentants. V. Bull. de l'Acad. roy de Bruxelles, 1840 ,, wret suiv. Titres reposant à la bibliothèque de Lille. Enfin, pour achever de mentionner ce qui a été distrait des ar- chives de Cisoing à effet d'enrichir d’autres dépôts, ajoutons que la bibliothèque de Lille possède 23 ou 24 manuscrits prove- nant de cette abbaye. J'ai donné, je crois, une description suffi- sante de chacun d'eux dans mon catalogue des manuscrits de cette bibliothèque, in 8.° Lille, 1848. Mais entre ces volumes, il en est plusieurs qui, par leur contenu , ont autant d'affinité avec nos archives qu'avec la bibliothèque où ils tiennent , du reste , fort convenablement leur place. Ainsi le n.° 123, Registrum cano- num , in [.0, offre une série d'actes que l’on ne s'attend guères à trouver là et que par conséquent il est bon de signaler dans ce mé- moire. On y voit donc : (x) Cette prétendue histoire n’est autre qu'un petit recueil de chartes dont la plus ancienne est le testament même de St, Everard auquel le savant bénédiction assigne la date de 867, et la plus moderne, un titre de 1460 où l'abbé Denis de Launays confirme, sous certaines conditions , la fondation d’une chapelle dans le château de Lannays. Voici comment d’Achéry s'exprime à la fin de son préambule: « Ediderunt Everardi testamentum, anno 1611, Floris Vander Haer, canonicus » S. Petri Jusulensis, in ist. caslellanorum insulensium et Aub, Miræus in » Codice donationum , anno 1624. Plura ego in hac editione menda correxi, » corruptas Voces emendavi ope antiqui apographi membranacei, atque ut me » gratum exhibeam V, CI. Dionysio Godefroy, computorum in. urbe Insulis a » rege præfecto ac rectori, suas, lectores, ipsum chartas et omnia quæ Cisonium »“ spectant benevolo animo ac plena manu, ut ajunt, contulisse. » Les documents qui composent cette espèce de cartulaire #ont au nombre de quatorze. { 501 ) 4.° 968. Charte d'Amauri qui se qualifie prévôt de Cisoing, (Voy. Mirœus , 11, p. 129). 2.0 1429. Deux titres délivrés par Rainauld, archevêque de Reims. Les originaux sont ici. M. Godefroy les a mentionnés dans son inventaire précité. ? 3.0 Vers 1160. Accord conclu entre l'abbé de Cisoing et Roger de Landas , avoué du lieu. 4.° 1164 à Tournai. L'évêque Giraud prend l’église de Cisoing sous sa protection et confirme ses biens. L'original qui se trouve ici est aussi inventorié. 5.0 1170. Bref du pape Alexandre IT, qui autorise l'abbé de Cisoing à revendiquer les biens de l’abbaye mal à propos aliénés par les chanoines séculiers qui occupaient la maison antérieure- ment. L'original est ici, non inventorié. 6,0 1190. Willaume, archevêque de Reims , déclare que l'ab- baye de Cisoing est sous sa juridiction spéciale. L'original que nous avons ici est inventorié. 7.9 1208, juin. Raoul , évêque d'Arras, défend de recevoir des sœurs converses à Beaurepaire jusqu’à ce que ie nombre en soit réduit à douze. L'original existe inventorié. 8.0 1219 , mars. Jean , seigneur de Cisoing , donne à ce lieu la loi de La Bassée. (En français.) Original inventorié. (1) 9.0 1255, septembre. Jacques, évêque d'Arras , remplace les sœurs converses de Beaurepaire par des chanoines. Orig. inven- torié. Imprimé dans le Spicilége de d’Achéry , 1, 885. 10.0 1266, mai. Accord entre l'abbé et les religieux de Cisoing au sujet de quelques difficultés. Original inventorié NV. Spicilége, 11, 886. (1) Cet origiual , parfaitement authentique, est en latin. C’est le texte pri- mitif, avec date certaine, de la lei de Cisoing. Quand on m’aura montré un pareil exemplaire de Ja version romane publiée par M. Dumortier, (Compte rendu de la Commission royale d'histoire vi, 234). je croirai que ladite version est bien de launée 1219. Jusques là, je la tiendr+ pour contempnraine, c’est-à-dire du xt .° siècle. ( 502 ) 11.9 1367,12 décembre. Le chapitre métropolitain de Reuns au torise les chanoines de Cisoing à élire un abbé en place de celui qui est mort. Orig. inventorié et mentionné dans le Cameracum Christianum. 286. 12.0 1460. Denis de Lannays confirme la fondation d'une cha- pelle dans le château de Lannays, pour laquelle il avait donré une autorisation provisoire en 1458. V. Orig. inventorié. Spicilége 1, 887 et Cameracum Christianum , 287. Au surplus , le t. 73 des 182 Colbert, à la bibliothèque impé- riale de Paris , renferme à peu près en totalité les titres de l’ab- baye de Cisoing. Documents déjà publiés. Il existe des traces notables de ces archives en divers recueils imprimés. Ainsi , on voit que lé P. Buzelin y a puisé amplement, tant pour ses Annales que pour son Gallo-Flandria. Miræus a publié plus ou moins fidèlement les neuf diplômes dont voici l'index : 1.0 Testamentum S. Everardi comitis, hujus abbatiæ fundatoris, 1R40; 2.9 837. Walgarius sacerdos, Everardi comitis capellanus, fundationem ejus ampliat (1). 1, 644. Notit. eccl. Belgii, 50. 3.° 870. Gisla, Ludovici pii imp. filia, Everardi antedicti con- jux, fundationem ejus confirmat ac perficit. m , 289. 4.° 968. Amulrieus, vir nobilis, omnem suam ei donat heredi- tatem , 11, 1129. 5.0 1199. Rainaldus, archiep. Remensis , confirmat institutio- nem canonicorum sub regula. (1) Miræus a omis entr'autres la nomenclature des livres légués par Walgarius V, Buzelin , Gallo-Fiaudr. 359 et Catalogue des mss. de Lille, 415. té cé. ie dé Rs. (508 ) 6.° 1159. Rogerius de Landast, Cisoniensis abbatiæ advocatus, jura ejus recognoscit (4). I, 702. 7.0 4186. Joannes de Landast et Petronilla de Avesnis eam do- tant, probante Everardo , episcopo Tornac. Petronillæ fratre. 1, 551. V. aussi Notitia eccl. Belgi. 464. 8.° 1208. Innocentius IT papa prohibet ultra recipi moniales in prioratu de Beaurepaire, ab hac abbatia dépendente, 11, 374. 9,0 1255. Jacobus, episcopus Atrebatensis, sororibus amanda- tis ex ecclesia de Beaurepaire, canonicos Cysonienses substituit (2). n, 1236. 10.013041. Philippus Pulcher , rex Galliæ, eam suscipit in pro- tectionem (3). 11, 150. Enfin, Dom Wartel, dans ses Observations sur l'Histoire de Lille, a publié seize titres inédits de l'an 4101 à 1286, savoir : 1.° Donation des autels de Lomme, Lambersart, Verlinghem et Pérenchies , par Baudri, évêque de Tournai, 1101. — 2.0 Do- nation des autels d'Halluin , Roncq et Bousbecque, par le même, sans date, — 3.° Donation des autels de Lesquin et Annappes, par le même , 1110. — 4.° Lettre de Jean de Neuve-Eglise tou- chant la dime de Dranowtre , 1251. — 5.° Autre lettre du même et de Falgale sa femme, sur le même sujet, 1259, 23 août. — 6° Troisième lettre des mêmes sur le même sujet, 1260 , dé- cembre. — 7.° Lettre d'Elisabeth, mère de J. de Neuve-Eglise, même sujet, même date. — 8.° Lettre de Gui de Clermont, prévôt de Saint-Pierre de Lille. Dime de Dranowtre vendue au (x) Dans ce diplôme , Miræus signale comme abbé de Maroilles , Muricolensi, un Bauduin abbé de Marœul, Mareolensi. Cette simple erreur de mot a suffi pour fourvoyer les frères Ste.-Marthe, qui ont trouvé là occasion de créer un abbé imaginaire de Maroilles , sous le titre de BauduinIl , Gall. Christ. MI, col. 129. (2) V. Spicilége de d'Achéry Il, 885. La seule différence que j'ai rémarquée entre le texte de Miræus et notre original, c’est que l'éditeur à mis providere volentes au lieu de providemus, (3) Je n’apercois ni dans le fonds propre de Cisoing, ni dans celui dela Chambre des comptes de Lille , ni dans le recueil des Ordonnances du Louvre , aucun ves- tige de ce privilége dont Miræus n’indique pas la provenance. (504 } chapitre, 1260, avril. — 9.0 Vente des dimes de Marcq-en-Ba- reul et de Wasquehal au chapitre de Saint-Pierre, par Robert de Béthune, 1377, 4 juin. — 10.° Lettre de la comtesse Margue- rite pour la procession de Lille, 1270, mai. — 11.0 Lettre du car- dinal de Sainte-Cécile touchant l'enlèvement et la mort d'Adam Blauwet, 1276 , décembre. — 12.° Compromis de Jean d’Espaing au sujet d'Adam Blauwet, 1276, novembre. — 13.° Accord entre le chapitre de Saint-Pierre et le sire de Cisoing pour la proces- sion de Lille , 1286, juillet. — 14.° Sentence des arbitres sur le même sujet, 1286, août. — 15.° Lettre d’Arnoul , sire de Ci- soing, touchant l'acquisition de 24 livrées de terre par le cha- pitre. — 16.0 Lettre de Gui, comte de Flandre, sur la même matière , 1286, novembre. Écrivains et hommes lettrés de Cisoing. Entre les archives d’un monastère et les hommes lettrés qu'il a produits, il y a trop d’affinité pour que l’on puisse traiter des unes sans parler un peu des autres. Presque toujours en effet, c'est dans les archives, non moins que dans Ja bibliothèque de leur maison, que ces solitaires amis de l'étude ont trouvé l'unique moyen d'exercer leur intelligence et de lui donner l'essor. A Cisoing, aussi bien qu'ailleurs, ils’est rencontré souvent des esprits d'élite qui ont su concilier avec l'observance de la règle et des devoirs monastiques, certains délassements littéraires, certains travaux de philosophie religieuse ou d'histoire locale. Ce n’est pas à dire pourtant que nous ayons à nommer ici des hommes de génie ou même de profond savoir, comme nous avons eu occasion de le faire en parlant des archives religieuses du Cambrésis ou de celles de Liessies et de Maroilles. Cisoing ne va nous offrir que des personnages médiocrement connus, si même connus ils sont. Simon DE Proissy (1), bachelier en théologie, qui administra l’abbaye de l'an 1461 à 1483, n’a laissé d'autre souvenir de ses (x). Sur cette famille de Proissy ; voyez Carpentier, Histoire de Cambray, 3.e partie, page 894. (305) services littéraires qu'une belle copie en trois volumes in-folio, vélin, des sermons de St. Bernard et du B. Guerric, abbé d'Igny, dont il fit don à la bibliothèque de Cisoing. (V. Cat. des mss, de Lille, page 40.) Henri Descamps, religieux de Cisoing et curé de Bouvines vers la fin du xv.® siècle, fut plutôt compilateur qu'écrivain. Il existe àla bibliothèque de Lille divers manuscrits signés de lui. Il paraît que le bon curé affectionnait les livres apocryphes. Ce qui nous reste de lui se compose de l'Evangile de Nicodème , de l’In- fantia Christi, De ortu Pilati et morte sua, De ortu Jude prodi- toris, Presbiter Johannes , toutes œuvres dénuées d'authenticité, comme on sait, et désayouées de l'Église (V. Cat. des mss, de Lille, page 35, n.° 68). Du reste, le même volume contient d'autres petits traités qui paraissent être d'Henri Descamps, ainsi que le quatrain suivant : Sunt tria que vere faeiuut me sepe dolere : Est primum durum quod nescio me moriturum ; Ulterius timeo quod tempus nescio quando ; Inde magis flebo quod nescio quo remanebo. ANTOINE LE Caron ou KaroN , autre compilateur à qui l’on doit un recueil de curieux mélanges historiques touchant la première moitié du xvr.® siècle, le tout accompagné de facéties , vers sati- riques , etc. où la France n’est pas épargnée. Ce volume repose à la bibliothèque de Lille, n.° 323 des mss. Marais DE Maizzy , né à Douai, chargé d’une mission à Rome, adressa en 1535 et 1536 à son abbé, Mathias de Barda, plusieurs lettres historiques jugées dignes d’être conservées. (V. le n.° 233 des mss. de Lille). On a fait le même honneur aux Prénes d’un curé de Cisoing qui vivait aussi et préchait à l’époque de l'abbé Mathias. N.° 100 des mss. de Lille. CanLes VENDUILLE ou VENDEVILLE, né à Douai , sous-prieur de l'abbaye, parent et peut-être neveu de Jean de Vendeville, éxêque de Tournai, fut , sous la prélature de Nic, Bonmarchiet et (506 ) de Jean de Reumaux, le poète latin en titre de l'abbaye. Les vers que Buzelin cite de lui, Gall, F1, 112, ont de la correction et une certaine élégance. Awsrolse Le Came, qui prenait pour devise : À campis ambrosia, comme allusion à son nom, se signala aussi par ses poésies latines dont le recueil existe ms. à la bibliothèque de Lille, n.° 364, sous le titre: Piacarminaet miscellaneacum emblematibus, 1639, m-4.0, orné de dessins coloriés. Il a publié en outre un volume intitulé : Pia anagrammata in litanias ex breviario romano desumptas, quibus accesserunt plura alia ex legendis sanctorum approbatis, collecta cum epigrammate atque poemate subsequente. Insulis, ex officina Petri de Rache , sub bibliis aureis. Anno 1637, in-4.0 Jacques Cocqueau , d'abord sous-prieur et maître des novices à Cisoing, puis tour à tour curé de Louvil et de Camphin, a, comme son confrère Antoine le Caron , laissé une compilation his- torique. Celle-ci commence par Adam et finit par Abbas, roi des Perses ; ce qui n'exclut pas des personnages modernes, tels que Catherine de Médicis, Erasme, Henri de Bourbon, Ronsard, etc. Jacques a eu la gloire d’être célébré en un acrostiche quintuple que rapporte le Cat. des mss. de Lille, page 317. Dox Deos, professeur de théologie à Cisoing , est auteur d’une longue lettre écrite de la Sorbonne, le 24 mars 1719, au sujet de la fameuse instruction pastorale que le cardinal de Noailles avait publiée le 14 janvier précédent et qui fut condamnée à Rome, le 3 août de la même année. Le religieux de Cisoing s'attache à dé- fendre la constitution Unigenitus qu’on ne saurait repousser, dit- il, sans s’unir aux hérétiques. P. A. pe SALLENGRE, chanoine et receveur de Cisoing, après s’être livre pendant plusieurs années à l'étude de la jurisprudence coutumière, écrivit, de 1733 à 1736, deux volumes sur les coutumes de Lille. Voyez le catalogue des mss. page 84, n.° 145 et 136. Le religieux de Cisoing qui s’est fait le plus connaître par ses écrits est Dom Louis Warez, de Lille, prévot d'Hertsberghe. L'abbé Leclerc de Moutlinot, chanoine de-St.-Pierre, publia ( 507 ) en 1764, une histoire de Lille (4) qui fit du bruit, pour ne pas dire du scandale. Entre les critiques dont ce livre fut l’objet, on re- marqua un volume anonyme ayant pour litre : Observations sur l'Histoire de Lille, in-12 de 222 pages, Avignon, 1765. L'œuvre de l'abbé Montlinot y est appréciée avec une certaine amertume, mais en connaissance de cause. L'auteur relève sans pitié les er- reurs commises par la plume passionnée et peu chrétienne du cha- noine de St-Pierre. On ne tarda pas à savoir que les Observations sur l'Histoire de Lille, étaient dues à Dom Wartel, déjà connu par quelques poésies composées et publiées lors de l'érection de la py- ramide de Cisoing, monument commémoratif de la victoire de Fontenoy (2). La brochure critique de Wartel produisit un tel effet que Montlinot renonça à imprimer le second volume de son ouvrage et prit même le parti de résigner son bénéfice pour aller vivre ailleurs. Louis Wartel , né en 1721, n’a point d'article dans les biographies; mais M. ÉËm. Dibos le signale dans le Nouveau Guide des étrangers à Lille, p.202. V. aussi Archives du Nord , 3.° série, 111. 527. Enfin Aucusrn Gosse qui, de prieur de Beaurepaire, devint abbé de Cisoing , est auteur d’une Lettre sur la princesse Gisèle, fille de Louis le Débonnaire et sur la date du testament de St.- Everard, Lille, 1779. Conjectures sur le séjour d’Ingchurge à Cisoing Avant de clore cette partie du mémoire, rappelons ici une cir- constance historique qui, si elle était bien avérée, devrait tenir sa place dans les annales monastiques de Cisoing. (x) Histoire de la ville de Lille depuis sa fondation jusqu’en 1434. in-13, Paris, 1764. (2) Description de la pyramide élevée à la gloire du roi dans l’abbaye des chanoines réguliers de Cysoing, in-4-° de 26 pages avec une vue de la pyramide, Lille, P. Brovellio, r75r. L'épitre au roi, le poème et la cantate sont de Dom Wartel. Les inscriptions et les devises ont été composées, par le P. Ch. Wastelain, jésuite, auteur de la Description de la Gaule Belgique, in-4.0. Cette description de la pyramide a été reproduite dans les Archives du Nord, 3.° série, V. 2, page go. Wartel eut deux frères : Jean Baptiste, avocat , et Georges, bibliothécaire de ’abbaye du Mont St. Eloi, qui se sont fait connaître aussi par quelques bons écrits. ( 508 ) Suivant une lettre de l’évêque Etienne de Tournai, Paluzü Mis- cell, 1. 420 , la reine Ingeburge, sœur de Kanut VI, roi de Danemarck et épouse répudiée de Philippe-Auguste , aurait été détenue captive à l'abbaye de Cisoing. Nos histoires de France ne mentionnent pas ce fait. M.Capefigue , dans son Æistoire de Phi- lippe-Auguste, chap. 11, rapporte cette lettre, et au chap. xxvunr, il dit bien que cettemalheureuse princesse , ainsi délaissée, se livra à une dévotion ustère et visita plusieurs couvents d’hommes et de femmes. Mais parmi ces couvents, il ne nomme que l'abbaye de Pontivi. M. Catteau-Calleville, auteur de l’article Ingeburge dans la Biographie universelle, affirme qu'elle choisit pour re- traite un couvent de Soissons. Qu'Ingeburge ait été accueillie à Pontivi, il faut bien l’admettre , puisqu'il existe un décret du chapitre général de Citeaux, qui inflige une peine au supérieur de cette maison pour avoir recu et hébergé la reine avec ses sui- ventes. Dom Martène a donné le texte de ce décret dans son The- saurus anecdotorum , m1, col. 1245. Quant au couvent de Soissons, que M. Catteau-Calleville ne prend pas la peine de désigner nominativement, j'avoue que je n'y crois guères. Je ne sais pas d’après quelle autorité ce bio- graphe a parlé de Soissons ; et jusqu'à ce qu'il en. ait pro- duit une, je resterai dans le doute. Il n’est pas vraisemblable qu'Ingeburge ait choisi pour lieu de son exil une résidence si voisine de la cour , qui se tenait à Poissy. Ce voisinage ne pou- vait convenir ni à sa dignité offensée, ni à l’aversion que Philippe- Auguste éprouvait pour elle. Pontivi se conçoit ; car Pontivi était hors de France , dans le duché de Bretagne ; mais Soissons ! J'estime que M. Catteau-Calleville a été abusé par quelque simili- tude de nom , qui lui aura fait prendre Soissons pour Cisoing (1). (x) On sait que cette abbaye fut longtemps sous la juridiction immédiate de l’archevèque de Reims. Or, il existe dons la collection épistolaire d'Étienne de :- Tournai, publiée , en 1689, par le P. Claude Du Moulinet, deux lettres qui pourraient bien faire allusion à ce refuge de la reine dans Gisoing. Par l'une , Etienne implore la charité de l'archevêque pour cette princesse, par V'autre , Ingeburge remercie elle-même le prélat de ses bons offices. therghe. epaire. 209 ) Archives des prieurés. On sait que la plupart des abbayes possédaient , dans des can- tons plus ou moins rapprochés d'elles, des bénéfices qui portaient le nom de prévotés ou de prieurés, Ce n’était d’abord ue des fer- mes où domaines dans lesquels l'abbé plaçait quelques religieux pour en diriger l'exploitation. Au xu1.® siècle, on commença à régulariser ces petites colonies monastiques , en leur donnant un chef et une administration spé- ciale, de sorte qu'elles constituèrent alors de véritables bénéfices , sous le titre de pricurés simples. L'abbaye de Cisoing avait deux prieurés : Herstherghe et Beaurepaire. Herstberghe, situé dans la Flandre occidentale , forme aujour- d’hui un gros hameau dépendant d'Ootscamps , à une lieue de Bruges. La première mention que je trouve de ce lieu consiste en un titre de 1149, où le comte de Flandre, Philippe d'Alsace, assigne à la chapelle d'Herstherghe 40 borniers de terre. Le mot de prieuré n'est pas prononcé dans cet acte: mais le comte Philippe y reconnaît que c’est une dépendance de Cisoïing, et déclare que déjà son père Thierri avait octroyé des biens à Ja même chapelle. { Voir les pièces justificatives n.° 1.) Des lettres de Giraud, évêque de Tournai, 1164, confirment Hersthberghe à l'abbaye de Cisoing : Capellam de Hertesberge cum his que ad ipsum pertinent. (Pièces justif. n.°2.) Là se bornent à peu près les documents qui nous restent tou- chant Herstberghe. jà I n'en est point de même pour Beaurepaire, Bello reparium , Bellus reditus, qu'il faut éviter de confondre avec l'abbaye de Beaurepaire ou Cornelis-Munster, au pays de Liége. Le nôtre était situé sur la paroisse de Sommaing en Ostrevant el portait le vocable de N.-D. au bois. Bien que cette maison de Beaurepaire paraisse.remonter, comme Cisoing, à l’époque carlovingienne, je ne la vois désignée nomina- 34 (510) tivement dans aucun acte-authentique antérieur à 1169. Le titre qui en fait mention sous cette date est un diplôme donné à Valen- cieunes par le comte de Hainaut, Bauduin [V et son fils aîné, qui règlent avec l’abbaye leurs appartenances respectives dans les bois de l'Ostrevant. Thierri (Theodoricus) prieur de Beaurepaire, figure au bas de l'acte parmi ceux qui y apposent leur seing ({). J'ai consacré dansle Cumer.-Christ., page 344, un court article à ce prieuré qui jusqu'en 1219 fut habité par des religieuses con- verses. : L'examen que j'ai fait des chartes de Beaurepaire m'a fourni l'occasion de relever les noms d’une partie des prieurs qui l'ont administré. Je les consigne ici en attendant une nomenclature plus complète : Thierri , 1469 ; — Henri de Tournai, 1280 ; — Jean du Burcq ; 1428; —Rasso de Willies, 1439-1444; — Olivier Goubault, 1457- 1462 ; — Delannoy, 1469 ; — Nicolas Leurion , 1483; — Louis Robbe , 1493-1495; — Jacques de Deule , 1518 ; — Roland Le Prouvost, 1527-1536 ; — Adrien de Gorre , 1564 ; — Jean Le Bonte , 1566; — Jean Goleas , 1568, — Anselme de Buisine, 1620-1622 ; — Louis Saillart, 1625-1638 ; — Grégoire de Heulst, 1669-1674; — Reys, 1733; — Augustin Meurisse, 1743-1746; — Philibert Godart, 1769; — Auguste Gosse, 1775-1780 ; — Emmanuel Charlet, 1790. Un titre de l’an 1286, reposant aux archives de la Chambre des comptes de Lille, évalue les revenus du prieuré de Beaure- paire à la somme de 2,530 livres 2 sous 6 deniers parisis, somme assez considérable pour ce temps là. Le même titre ne donne qu’un revenu de 40 livres au prieuré d'Herstherghe. Les chartes , registres et liasses concernant Beaurepaire, for- ment un petit fonds spécial qui a bien son intérêt, surtout au (x) Les chefs de ces fermesclaustrales se nommaient déjà prieurs à cette époque, puisque dans l'acte dont il s'agit ici, Theodoricus, qui figure parmi les témoins, se qualifie prior, quoique Beaurepaire ne fût pas encore un prieuré proprement dit. (511) point de vue des notions topographiques sur la contrée. Nous donnons dans les pièces justificatives divers actes qui le prou- veront. L'inventaire dressé par l’autorité locale, en 1791, à l’époque de la suppression du prieuré, indique un titre du 28 juin 1212, comme le plus ancien qui fût alors dans ces archives. C'est, sans nul doute, celui par lequel Agnès de Bailleul, dame de Fenaing , accorde en aumône aux huit religieux de Beaurepaire, un demi-marc d'argent à recevoir tous les ans à Fenaing, ou sur la tourbière dudit lieu. Les archives propres de Cisoing renferment des actes antérieurs qui peuvent être considérés comme apparte- nant aux archives de Beaurepaire. Les registres et liasses du fonds de Beaurepaire sont au nombre de 25. Le plus ancien registre intitulé : Appointement pour le prieuré de Beaurepaire, est de l'an 1526. Vient ensuite un compte de 1541. Le reste consiste en terriers, chassereaux, etc. du xvir.€ et du xvur.° siècle. Un procès-verbal en date du 1. mai 1790, rédigé par le maire et les officiers municipaux de Sommaing , donne la nomen- clature des religieux existant alors à Beaurepaire, ainsi qu'il suit : Emmanuel Charlet, prieur, 45 ans, — Xavier Mazingue , sous- prieur , 70 ans, — Calixte Duquesne, maître des bois , 59 ans, — Dominique Trigault, chantre, 39 ans, — Alipe Schlim vicaire, de Sommaing , 37 ans. — Anne Laval, bibliothécaire, 38 ans, — Auguste... procureur, 35 ans. — Lorent Coqu, 27 ans. Chacun de ces religieux déclare, après interpellation, vouloir vivre et mourir selon la règle qu'il a embrassée. Le même procès- verbal relate l’état de la bibhothèque du prieuré : Théologie, 730 volumes ; Jurisprudence , 419; Sciences et arts, 75; Histoire, 673 ; Belles-lettres , 159. Total 1776. (1) (r) Les archives de Cisoing ont fourni à M. de Godefroy de Méniglaise le sujet d’un autre mémoire qui sera inséré daus le 1.4 du Bulletin de.la Commis- sion historique du Nord. PIÈCES JUSTIFICATIVES. 1e Lettre de Philippe d'Alsace, comte de Flandre, touchant la donation de cer- taines terres au prieuré d’Hertsberghe. 1149. In nomine Patris et Filii et Spirilus Sancti. Amen. Ego Philippus, Dei gratia Flandrensium comes, omnibus christianis in perpetuum. Omnibus fidelibus presentibus atque futuris notum facere curavi xxxx bonaria in campo de Wernevelt cum pastura que est in Beverna ( 1 } et in campo de Bullescamp (2) et in pascuis circumjacentibus, ecclesie S. Gertrudis apud Hertesbergam , a patre meo Theoderico comile in elemosinam datas ad usus fratrum inibi Deo sub abbate Cisoniensi devote famulantium , rogatu simul et assensu Cononis castellani, ob remedium anime mee matrisque mee , liberas ab omni servili exactione in perpeluum constituisse me, et utinconvulsum atque firmum amplius permaneat, sigilli mei ime pressionne communisse. Testes qui affuerunt: Philippus comes, Disderius prepositus, Hakettus decanus, Cono castellanus, Rogerus de Curtrai el filii ejus, Willelmus de Hus , Boidinus de Prad (3), Lambertus notarius , iderus de Orskamp. Actum Brugis anno Domini MexL nono, 11 nonas decembris. Original scellé. L IE. Girauld , évêque de Tournai, prend l’abbaye de Cysoing sous sa protection et.en confirme les biens. 116%. In nomine Patris et Filii et Spiritus Sancti. Amen. Ego Giraldus, divina dispositione Tornacensium episcopus , cunetis fidelibus in perpetuum. Dignum arbitramur pro amoré ejus qui nos prior dilexit, proprium fundens sanguinem in argumentum dilectionis, justis petitionibus quorumquereligiosorum pie aurem accomodare. Notum igitur sit quam presentibus tam futuris quod ecclesiam cisoniensem B. Calixti martiris, precibus Anselmi ejusdem ecclesie reverendi abbatis, atque fratrum regularium ibidem divino obsequio mancipatorum, sub B. Dei genitricis Marie et ecclesie Tornacensis nostraque protectione clementer (x) Il existe en Belgique plusieurs lieux du nom de Beveren ; maïs il s’agit sans doute ici de Beveren sux la Lys , Flandre occidentale , près d'Harlebeke. (2) Bulscamps , Flandre occidentale, à une lieue de Furnes. (3) Ce Boïdinus de Prad pourrait bien être le même que Balduinus de Prat qui figure comme témoin dans une charte de 1169, donnée par Philippe d'Alsace en faveur de l’abbaye de Ninove. Hirœus, 1, 544. . (5143) suscipimus , et presentis scripti privilegio communimus. Statuentes ut quaseunque possessiones, quecunque bona eadem ecclesia inpresentiarum juste. et canonice, sub nostri Cura regiminis possidet aut in futurum concessione pontficum, largitione principum , oblatione fidelium, seu aliis justis modis , Deo propitio, polerit adispisci, firmaet illibata prefate ecclesie permaneant. In quibus hec propriis duximus exprimenda voca- bulis: preposituram videlicet et decaniam ipsius ecclesie et prebendas canonicorum decedentium cum omni decima ejusdem ville Cisonïü, sicut a Rainaldo bone memorie Remensi archiepiscopo, religionis intuitu , eidem ecclesie concesse sunt et scriplo firmate; nemus adyocati in his videlicet que subscripta sunt et que admodum subseripta sunt: in cisoniensi nemore quod ab antiquo inter prepositum et advocatum commune fuisse dinoscitur , prepositus quicquid ei necesse erat, tam ad edificia quam ad comburendum , remota omni contradictione, accipiat, In transmutalione vero ordinis, timens D. Ingelbertus advocatusne plus vastaretur ab abbate quam a preposito, utrique (sic)videlicetabbas et advocatus, consilio religio- sorum virorum et liberorum advocati homioum compositionem ejusdem nemoris subierunt. Statutumest igitur quod in supradicto nemore ad omnes ipsius abbatie construendas domos, infra terminos Cisonii et Lou- vilii , ad ignem sufficienter in coquina sua et in cameræet ad opus cambe , septies vel octies in anno , de vivo nemore, remota omni contradictione , habeat abbas. De mortuo autem in aliis ecclesie necessitatibus, infra supra- dictos terminos . quantum suffieit accipiat. Hospites ecclesie domos suas de vivo et mortuo in nemore éodem accipiant. Hec vero et alia multa que de communibus inter ecclesiam et advocatum possessionibus ab antiquis temporibus observantur, Rogerus de Landast, predicte ecclesie advocatus, coram bone memorie Sansone, vénerabili Remorum archi- episcopo et apostolice sedis tune legato , recognovit, presentibus quoque venerabilibus episcopis, Balduino Noviomensi , Godescaldo Atrebatensi , abbatibus etiam Gossuino Aquicineti (1), Martino S. Vedasti (2); Fulcone Hasnoniensi, Fulberto Arowasiensi, Balduino Maroliensi, Henfrido Falo- pinensi, clericis quoque et militibus quamplurimis, quin et fidem manu eee SE (x) Sur le b. Gossuin ; septième abbé d'Anchin, voyez M, Escallier, Histoire d'Anchin, chap. vir. (3) Martin , abbé de St.—Vaast d'Arras, Foulques, abbé d'Hasnon, Henfrid, abbé de Phalempin, et Bauduin, abbé de Mareuil, avaient déjà figuré comme témoins en 1199, dans une transaction entre l'abbé et l’avoué de Cisoing. Voyez Spicil, xu. 507, d10, (514) propria dedit ea que coram memoratis episcopis recognovit se sine fraude doloque cuncta observaturum : Louvilium (1) tam in terra et pratis quam in nemore, in qua advocatus nichil omnino habet preter advoca- tionem, scilicet forisfacti terciam partem : altare de Bovines (2) cum omni decima , altare de Baseu (3) cum omni decima , allare de Canfinio (4) cum ompi decima, altare de Louvilio cum omni decima, altare de Genez (5) cum omni decima , altare de Asch (6) eum terra de doario altaris, altare de Lis (7) cum uno modio fromenti de bodio, altare de Ceren (8), altare de Toflers (9), apud Hechut (erram Arnulf et uxoris ejus qui se et sua sepefate ecclesie reddiderunt. De Arboreta V solidos quos comes Flandren- sis singulis annis solvit, capellam de Hertesberge cum his que ad ipsam pertinent, terram videlicet in circuitu capelle cum bruaria , terram Ber- tildis apud Gotehen, decem et octo bonaria, terram apud Jabece tam emp- tam quam susceptam in elemosinam, molendinum de Lebece cum terra adjacenti. Hec omnia, sicut in presenti pagina scripta habentur, salva nostra nostrorumque successorum justicia , ecclesie S. Calixli cisoniensis perpetuo libere possidenda concedimus. Quod ne a posteris aliquatenusin- fringatur , sigilli nostri impressione confirmamus et idoneorum testium annotatione corroboramus : SS. Waltheri decani , S. Letberti prepositi , S. Letberti cantoris, S. Symonis et Amulrici presbiterorum , S. Rameri, Wiberti, Lamberti, Thome , Henrici, Gossuini, Waltheri, Wenemari, ca- ponicorum. Letbertus cancellarius legit et subscripsit. Actum Tornachi anno Verbi incarnati mczxiv feliciter. Amen. Original où restent les altaches du sceau (1) Louvil, sur un ruisseau nommé le Riez del Becq, à 3 kil. de Cisoing. (2) Bouvines, sur la Marque, 3 kil. de Cisoing. Lieu assez connu par le grand fait d'armes du 25 juillet 1914. (3) Baisieux , sur la route de Lille à Tournai. (4) Camphin-en-Pévele, à 5 kil. de Cisoing, nommé dansle testament de St. Everard qui, dit-on, y fut inhumé ayec sa fémme et son fils Adelard. (5) Genech, 5 kil. de Cisoing et autant d’Orchies. Rien ne prouve que ce lieu ait été un gynécée romain, comme on l’a voulu déduire de son nom. (6) Aseq. surla Marque , près la route de Lille à Tournai. (7) Lys-lez-Lannoy, sur le Riez del Becq. (8) Chéreng , sur la Marque, près la chaussée de Lille à Tournai, (9) Toufflers , surle Riez del Becq, 1 kil, de Lannoy. ( 515 ) VIE. Loi de Sommaing. TEXTE LATIN. Quoniam tempora periculosa sunt et dies mali; et in eo malicie puncto mundum videmus positum quod fide- litati servande student pauci et mul- tiplicande fraudi plures inhiant , ne- cessarium est providere ut ea que bona fide, pura mente et sano consilio fiunt, perpetuam firmitatem. obli- neant, nec unquam dolo cujusquam vel astucia , in sui detrimentum valeant immulari. Eapropter ego Petrus de Duaco (2) notum facio tam presentibus quam fuluris quod cum Balduinus , Flandrie et Hainoie comes, mihi in feodum concessisset advocatiam quam babebat in villa de Summeing, que villa tota cum toto dominio et alla justicia est ecclesie Calixti Cysoniensis de jure antiquo, abbas et capitulum prefate ecclesie me volentes in suis fideliorem et prumptiorem negoliis habere, com- muni consilio et assensu, mihi et heredi. meo advocatiam sui liberi alodii quod habent à villa predicta usque in Scardum, tam in nemore quam. in marisco concesserunf. Domusautem de Belrepair, cum terris et sartis et aquis ei adjacentibus et 1219, avril. TEXTE ROMAN. (1) Pour chou ke li tans sunt perilleus et li jour mavais, et ke nous veommes le monde mis en tel point de malisse ke peu de gent estudient à garder foiauté; etlipluseur s'abéent à boisdie multeplier, besoins est de porvir ke les choses ki sunt faites par bonne foi, de nete pensée et de sain conseil aient fermeté permenaule, ne ne puissent iestre muées en leur empi- rement par boisdie, ne par malisse. Pour ces choses, jou Pieres de Douai fac conneute chose à fous chiaus ki or sunt et ki avenir sunt ke cum Bau- duins, cuens de Flandreset de Hanau, eust atriet à moi en fief l'avouerie k'il : avoit en le vile de Soumaing , li quelle vile toute avoec tout le segnourage et avoec le haute justiche est de le glise s. Kalist de Cysoing de droite anchi- serie , li abbés et li capitlesde leglise devant dite , ki mevourent avoir plus foial et plus aparelliet en leurs be- soins, par leur commun consel et par lor assens, otroiïerent à moietà men hoir l’avouerie de leur frane alues qu'il ont en bos et en marais de le vile de Soumaing devant dite juskes en Escard. Mais li maison de Beaure- (x) Il existe en outre une traduction faite au xv.€ siècle, et insérée dans le Liber ecclesiæ Cysontensis , folio 191. ‘(2) Ce Pierre de Douai figure dans des titres de la chambre des comptes de Lille pour 1189, 1200 et 1209. En tête de ce dernier il se qualilie bailli dela reine Mahaut, douairière du comte Philippe d'Alsace. Il est question aussi de Jean son fils, de son frèxe Bauduin de Marquette, et de son neveu Wautier, chätelain de Douai. (516) mansione Fulcardi et nemoribus de Biarche et de Longa Sylva, in advocatia prefati comitis et heredis ipsius remanserun{. Ne autem super conventionibus inter ecclesiam et me inde factis aliqua possit dubietas aut contentio in posterum suboriri, eas scripto presenti volui declarari hoc modo. Ego et heres meus debémus custodire nemus expensis nostris, et pro custodia habere medietatem precii , quando ecelesia illud vendet. Venditio etenim ad ecclesiam spectat; nec possum ego, nec heres meus , in ipsa yenditione aliquid clamare, vel eam impedire. Post octo annos debet ecclesia illud vendere; ante, non potest. Si autem pro aliqua causa accelerare vel prolongare vendi- tionem voluerit, contra meam volun- {atem vel heredis mei, id facere non poterit. Si emptores nemoris aliquem locum in nemore ad suos fascicnlos reponendos locaverint, a me et ab ecclesia locare debent et precium locationis inter nos existet commune. si vero ego et heres meus in ipsa venditione poluerimusinvenirealiquos mercatores qui cariori precio ipsum nemus emant, ecclesia nostrum consilium, dum tamen sine fraude sit, intendere debebit. Si ego et heres meuspro defensionenemoris fossatum circa ipsum nemus facere voluerimus, per assensum ecclesie fet, et ecclesia medietatem sumptus exsolvet. Quod si forte, per meam aut heredis mei negligentiam vel malivolentiam con- tra eamdem ecclesiam- conceptam, nemus male custoditum fuerit, eccle- sia expensis nostris illud faciet cus- todiri ; et tamdiu habebit custodiam , donec de prefalis expensis eidem paire aveuc ses tieres et aveuc ses sars et ses eves et le manage Foucart, et aveuc les bos de Bierche et de Longhe-Selve, remenent en l’avouerie le conte devant dit et de sen hoir. Et pour chou k'aucune doutanche u au- cuns contens ne puist naistre des con- venanches ki de chou sunt faites entre le glise et mi, je veul ches convenanches par cest escrit iestre esclairiés en tel manière. Jou et mes hoirs devoumes garder le bos à no propre despens ; et por le garde nous devoumes avoir le moitié del pris, quant li glise le vendera; car à le glise afiertlivendages. Ne jou nèmes hoirs ne poons riens el vendage ré- clamer, ne le vendage empeechier. Apriès van ans li glise doit vendre le bos:; devant elle ne puet. Se por aucune cause li glise veut haster u prolongier le vendage dou bos, che ne pora elle faire contre le volenté de mi et de men hoir. Se li acateur dou bos voeleut louer aucun liu el bos à metre lor faissious, il le doivent louer de miet de le glise ; etli louiers sera communs entre nous. Se jou et mes hoirs poons trouver markans al tans dou vendage ki à plus chier pris acacheut le bos devant dit, preus ke ché soit sans boisdie , li glise devera entendre nostre consel. Se jou et mes hoirs volons faire fosset entour cel bos pour le deffense dou bos, on le fera par l’assens del eglise ; et li glise paiera le moitié. del despens. Se par aventure, li bos estoit mal gardés par le négligense de miu de men oir, u par mal volenté ke nous ariens conchieute contre le glise, li glise le fera garder à no propre dépens; et si longhement ara li glise le garde (517) ecclesie fuerit satisfactum. In prefato nemore nec ecclesia, nec ego, nec heres meus, aliquid incidere vel sartare vel hospites de novo in co instituere, nisi de communi assensu, unquam poterimus. Minuta foris- facta que in nemore contingent, sicut super incisione arboris furtim facta, vel super captione animalis nemoris arbuseulasdampnose depascentis mea sunt et heredis mei. Majora autem forisfacta que ad altam justiciam pertinent, si in codem nemore eve- rerint, communia sunt inter eccle- siam et me et heredem meum. Si animalia ecclesie vel mea, vel heredis mei incurrent in nemus, neuter ab altero forisfactum exiget , dum tamen non fiat per malitiam. Concessit preterea mibi et heredi meo eadem ecclesia xxf 1rrror raserias terre extra nemus, in quarum numero est mansio mea et hospites ibi manentes, in quibus ipsa ecclesia habet rectam decimam. Parochiale jus mansionis mee et hospitum est ipsius ecclesie et tam vivi quam mortui spectant ad parochiam de Summeng. Quod si forte ego et heres meus in terra predieta hospites instituerimus , cum his qui jam sunt instituti, nullum omnino usagium , nullum jus ipsi vel animalia eorum in herba, in viri- dibus, in siccis ramis ejusdem nemoris habebunt. Si aliquid in terra illa s. Calixti que est in advocatione ista, ego et heres meus adquirere poterimus ad commodum ecclesie et nostrum, dum tamen non sit de possessione ecclesie ; et ecclesia medietatem sumptus facere voluerit, infra annum in {ota illa adquisitione medietatem habebit. Ea que predicta juskes a tans con li ara asés fait des despens devant dis. El bos devant noumé ne li glise, ne jou, ne mes hoirs ne porons aucune chose taillier, ne sarter, ne estaulir hostes de nouviel,se chen'est par commun assens.Limenus fourfait ki avenront ou bos, si comme de coper 1 arbre larencheneusement u com de prendre une bieste dama- geusement depaissant les arbrisiaus dou bos sunt mien et men hoir. Li plus grant fourfait ki partienent à haute justiche, s’il avenoient ou bos, il sunt commun entre le glise et mi et men hoir. Se les biestes de le glise u les miennes u les biestes men hoir, kéurent ou bos, pour tant ke che ne soit fait par malisse, li uns del autre ne pora demander nul fourfait. Li glise devant dite a otroiiet à mi et à men hoir xx rasieres de tieres dehors le bos; el el conte de ces xxIHII rasières est mes mana- ges et li hoste ki là maineut. Et si ia li glise le droite disme; li droit profit de men manage est de le glise ; et vif et mort aferent à le profe de Soumaing. Se par aventure jou et mes hoirs estaulissiéèmes en le terre devant dite hostes avec chiaus ki ja i sunt estauli, il n'aront nul usage ne nul droit, ilne lor biestes, en hierbe, en vers, ne én secs rains de celmeis- mes bos. Se jou et mes hoirs poiemes aucune chose aquerre en celle terre S.-Kalixt ki est de ceste avouerie au prufit de le glise et de nous, pour tans ke che ne soit de la possession dele glise et li glise i veolle faire le moitié del despens dedans l'an, li glise aura le moitié en tous cel aquiert. Li glise a otroïet en fief ces choses ki sunt devant dites à moi et (518) sunt concessit ecclesia mihi et heredi meo in feodum; et inde sum ejusdem ecclesie homo ligius et erit similiter beres meus. Feodum istud nullo modo , nulla causa dividi potest, sed semper integrum permanebit:necego, nec heres meus ulli sive ecclesie sive persone illud invadiare, dare in ele- mosinam, legare, vendere, vel aliquo modo possumus obligare, nisi ecclesie s. Calixti, dum tamen ipsa ecclesia ad hoc volueritintendere. In omnibus piscariis et fossatis et furbariis a domo mea de Rulaiusque in Scardum, ecclesia et ego et heres meus com- munem piscationem habemus et usa- gium, preterquam in fossatis que sunt in circuitu domus mée, quorum piscatio mea est et heredis mei. In hospitibus quos secus capellam in nemoreinstitueram medielatem habet ecclesia et decimam. Interranemoris versus plateas de Hatemont (1), sep- tem scilicet raseriis, paulo plus vel minus, similiter medietatem suam habet et decimam. In liberis hospi- tibus quos habet ecclesia apud Sum- meing, nichil juris ego nec heres meus habemus, nisi extra posses- à men hoir; et de chou suis je hom liges de le glise el aussi le sera mes hoirs. C1s fief ne puet iestre devisés ne départis par nulle manière ne par nulle cause; mais tous tans entiers demorra. Ne jou ne mes hoirs ne le porons à nullui ne à le glise, ne à auire personne enwagier, ne don- ner, ne aumosner, ne vendre, ne en nulle autre maniere obligier , forsque à li glise SL. Calixte, partans que le glise veulle à chou entendre. Li glise etjou et mes hoirs avons commune peskerie et commun usage en toutes les peskeries, en tous les fossés et en toutes les tourbières ki sunt de me maison de Rieulai juskes en Escard, fors que ès fossés ki sunt entour me maison, des queus fossés li peskerie est toute miene et men hoir. Li glise a le moitié et le disme ès hostes ke j'avoie eslaulis selonc le capielle ou bos. Li glise a le moitié et le disme en le tiere dou bos viers la place de Hatemont.Se loist à savoir vis rasières pau plus, pau mains. Jou ne mes hoirs n'ayoas riens de droit &s frans hostes ke liglise a à Soumaing, s'il ne font aucun fourfait hors des frankes pos- (1) Hatemont, dans diverses chartes d'Anchin , notamment sous la date de 1235, ancien hameau ou ferme sur le territoire de Bruile, est mentivnné 13995, 1556. Au xv® siècle, un héritier de Pierre de Douai reconnaît le droil exprimé dans ce passage de la charte. « Je Anthoine de Lannoy, chevalier, seigneur de Mingoval et du Locon , » conseiller et chambellan de monseigneur le duc de Bourgogne, fais scavoir à tous que » j'ay veu et tenu urre chartre de l’avoerie de Sommaing, en date de 1919 au mois » d'avril, dont j’ay la copie, contenant plusieurs points appartenant à l’église St - » Calixte de Cysoing et à moy, entre les quels elle parole de vit raz. de bos vers la » place de Hattemont. Si connais qu'ils sont de commun en proufit à la ditte eglise » et à moy. Tesmoing mon scel mis et pendu à ces présentes, le 4x juing l'an mil » JUS XLI, » (519) siones liberas fecerint forisfactum. Si quis de aliis hospitibus, propter aliquod forisfactum , in domos libe- rorum hospitum confugerit, nec ego, nee heres meus, nec major, nec scabini ineumdem manus apponent, dum tamen ecclesia de ipso justiciam parata sit exibere. In aliis hospitibus ville habeo redditum meum quem donavit mihi et heredi meo predictus comes, talem qualem ipse habebat, quando tenebat advocatiam secun- dum recordationem scabinorum. Que- relis et placitationibus, quacumque occasione emerserint, salvo jure ecclesie, ego et heres meus interesse debemus, quia in emendationibus et forisfaclis que in eadem villa pro- veniunt, tertiam partem pro advo- catia ego et heres meus habemus et ecclesia duas ; et ut nos tertiam par- tem habeamus, et ecclesia duas, invi- cem fideliter tenemur adjuvare. Quod si ecclesia vellet alicui duas partes forisfacti remittere, tria nichilo- minus mihi et heredi meo salva esset. Homines et hospites ecclesie nec ego nec heres meus possumus citare, nec ipsi ad citationem nos- tram aliquando debent venire , vel de villa cum armis exire, nisi ad feodum ecclesie defendendum. Nullam pre- terea in eadem villa vel in totius ville territorio ego et heres meus facere possumus mansionem vel requirere procurationem. Banni qui fient in predicta villa ex parte ecclesie et advocati fient. Quemcumque scabini ad scabinatum elegerint major eccle- sie per consilium ipsorum instituere debet; nec ego, nec heres meus in hoc ipsos possumus impedire; et qui non voluerit recipere scabinatum per sessions. Se aucuns des autres hostes s’afuioit pour aucun fourfait ès mai- sons des frans hostes, ne jou, ne mes hoirs ne li maires, ne li eskevin ne meteront mains à lui, portant ke li glise soit apparellié de faire justiche de lui. Jou ai me rente et autres hostes de le vile ke li cuens devant dis donna à mi et à men hoir telek'il avoit quant il tenoit l’avouerie, selonc le recordanche des eskevins. Jou et mes hoirs devoumes iestre as plaintes et as plais par quelle ocoison ke il sourgent, saf le droit de le glise; car jou et mes hoirs avoumes pour l’avouerie le tierche part ès amendes et ès fourfait ki avienent en celle vile et li glise les deus pars. Ensi soumes tenus d’aidier li uns l'autre foiaument à chou ke nous aiemes le tierce part et li glise les deus. Et se li glise voloit à aucun par- donner les deux pars dou fourfait, nekedent li tierche partie demanroit sauve à mi et à men hoir. Jou ne mes hoirs ne poomes semonreles hommes ne les hostes de le glise, ne il ne doivent venir nule fie à no semonce , ne de le vile issir à armes, se che n’est por défendre le fief de le glise. Jou ne mes hoirs ne poons faire en le vile manage, ne en tout le lieroit de toute le vile, ne demander procu- ration. Li ban k’on fera en le vile seront fait de par le glise et de par l’avouet. Chelui ke li eskevin aront esliut à l’eskevinage, li maires de le glise par leur consel le doit estau- lir. Ne jou ne mes hoirs ne les porons de chou empeschier. Et se aucuns ne voloit rechevoir l’eskevi- nage, il doit iestre à chou contrains par le glise, par mi et par men hoir. ( 520 ) ecclesiam per me et per heredem meum ad hoc debet constringi. Si quis scabinorum, propter defectum suum aut excessum, à Scabinatu fuerit amovendus, ecclesia eum-per meum el heredis mei consilium amovebit ; nec eam in hoc poterimus impedire. Quandocumque abbas qui pro tempore fuerit de feodo isto heredem vel successorem in homi- nem debuerit recipere et ei fcodum reddere, antequam hocfaciat, presens scriptum legi faciet et exponi coram ipso et comparibus suis; et ipse postea, fide ipsius prestita, jurabit super sancta sese quicquid in hoc scriplo continetur, fideliter observa- lurum, nec unquam se contra illud facturum ; postea recipietur in homi- nem, Salvo jure et relevamine que debentur ecclesie. Ut autem hec om- nia firmius et fidelius observentur, presentem paginam sigillo meo robo- ratam domino Ilberto, abbati Cyso- niensi et ejusdem Jloci capitulo contradidi. Actum anno gratie M° cc° xIx°, mense aprili. Original en parchemin auquel il me reste que les allaches du sceau. IV. Coufinmation de la charte précédente. Se aucuns des eskevins doit iéstre osté del eskievinage por se défaut u por sen fourfait, li glise l'ostera par le consel de mi et de men hoir, ne en chou nous ne poons le glise enpeechier. Quant li abbé de Cysoing, ki ke il soit, devera rechevoir à homme l'oir u le successeur de cest fief, et rendre àf lui cest fief, au- chois ke il chou fache, il fera cest présent escrit lire et despondre de- vant lui et devant ses pers. Et apriès chou il fianchera et jurra sour sains ke il gardera foiaument tout chou ki est contenut en cestescrit, ne ke ja- mais ne fera riens ki soit contre l’és- crit. El puis on le réchevera à homme, sauf le droit et le relief ke on doit à le glise. Pour chou ke toutes ces choses soient gardées plus fermement et plus foiaument , si ai jou donnée cette présente pagéne efforchié de men saul à men signeur Ybiert l'abbé et au capitle de Cysoing. Fait fu l’an de grasse mil deus cens et disenuef, el mois d'avril. Minule ou copie du temps sur parchemin. 1219, mai. R., divina permissione Atrebatensis episcopus, omnibus presentes litteras inspecturis salutem in Domino sempiternam. Sciat universitas vestra quod nos compositionem et pacem que inter dilectum nostrum Ibertum abbatem et conventum Cysoniensem ex una parte et P. militem de Duaco ex allera, facta est super advocatia de Sommaing, cuslodia nemoris et marisci usque ad Scardum, piscatione, turbariis, forefactis et liberis hospitibus de Sommaing, gratam habemus et ratam , sicut in predictorum abbatis et conventus Cysoniensis et P, militis de Duaco autenticis plenius continetur, et ad majorem firmitatem sigilli nostri munimine confirmamus, Subseriptis (521) eorum nominibus qui huic nostre confirmationi interfuere presentes : S. Arnulphi abbatis b. Petri in Gandavo, S. Pontii archidiaconi Atrebatensis. S. Simonis archidiaconi Ostrevandensis.S. Sigeri de Tornaco. S. Joannis de Camphaing, canonicorum'Cysoniensium.Actum apud Ha$nun anno dominice incarnationis M cc nono decimo, mense mayo. Y. Gérard de Hertaing fait don de diverses pièces de terre pour l'institution d’une paroisse à Hornaing , avec réserve des droits et prérogatives de l’abbaye. 1250 mai. Reverendo patri in Domino J. (1) Dei gratia Attrebatensi episcopo, B. (2) Cisoniensis ecclesie minister humilis ejusdemque Joci conventus, salutem et cum debila reverentia paratam ad obsequia voluntatem. Noverit reverenda palernitas vestra quod bone memorie Gerardus de Hertaing (3) fidelis noster, pro remedio anime sue, contulit ecclesie s. Calixti de Hor- naing , ad Opus parochie ibidem instituende de consensu heredum suorum , iv octonalia (4) terre jacentia in via de Ere , v octonalia jacentia ad Mo- lainmont, versus territorium de Escaudaing , 11 octonalia adherentia Rolandi campo , 1x octonalia jacentia al Markisot, 1 raseriam a le Motte- lette, vu raserias et dimidiam jacentes in campo qui vulgariter vocatur Li bus s. Calixt. Quas terras dictus Gerardus de nobis tenebat in feodum. Nos vero, dictam elemosinam approbintes, predictas terras absolvimus ab omni servitio feodali, hoc salvo quou nos retinemus in terris predictis decimam, terragium et totalem justiciam et sex nummos valencenensis monete, pro relevio quotiescumque contigerit novum presbiterum institui in parochia memorata. Maldegarius vero et D. Meliciana, mater ejus, uxor Gerardi predicti, pro remedio animarum suarum, contulerunt in (2) Jacques de Dinant fut évêque d'Arras de 1247 à 1360. (2) Barthélemi , élu abbé de Gisoing en 1239, mort en 1261. (3) Carpentier, Hist.de Cambray, 684, 4.€ partie, mentionne un Gérard de Her- taing,qui épousa en 1 196, Helvidede Caulery.Or, cela ne s'accorde pasavec le présent acte, où l'on donne pour femme änotre Gérard, Mélicienne ou Mélissende, à moins qu’il n'ait été marié deux fois. Le village d'Hertaing appartient aujourd'hui à la Belgique, province de Tournai. (&) Octonale, huitelée, mesure agraire usitée dans certaines localités du Hainaut. Son étendue, évaluée selon le système métrique , variait de 53 ares 76 centiares à 33 ares 43 centiares, (52 ) elemosinam predicte ecclesie unam modiatam (1)terre ad mensuram ostreva- nensem jacentem in territorio de Hellemmes , de consensu domini sui Gui- donis de Montegni, militis, sicut plenius continetur in litteris ejusdem super hoc confectis.Et nos, de communi assensu, contulimus eidem ecclesie omnes oblationes que de cetero provenient ad manum sacerdotis et minutas decimas parochianorum dicte ecclesie et decimas in ortis arabilibus infe- rius subscriptis, videlicet in orto Johannis de Preudhome , in duobus ortis Theobaldi Le Meur, in orto Lietardis relicte Manassei, in orto Walberti Grenier, in orto Johannis de Ghelin , in orto domine de Hornaing , qui fuit Lietardis , in orto Elizabeth de Atrio, in orto Margarete de Hellemmes , in orlo Almarici Lonbraige , in orto Liutbrandi, in orto Goberti Lonbraige, in orto Nicholai Le Bloc, in orlo Gilleberti Le Couvreur, in orto del Escange. in orto de le Mottelette. Indiximus autem et ordinavimus et a vobis ordinari et confirmari supplicamus quod, si convenit a vobis vel suc- cessoribus vestris curtem propriam edificari intra limitem parochie pre- dicte, presbiter parochialis nullam decimam porcorum , pomorum , pullo- rum, lanarum seu aliorum proventuum, intra clausuram curtis sue habere vel acquirere poterit; sed curtis nostra ab omni jure vel consuetu- dine decimationis libera in perpetuum permanebit. Ut autem predicta rata et inconvulsa permaneant, presentem paginam sigillorum nostrorum ap- pensione roboravimus, reverendam paternitatem vestram exorantes quatenus elemosinam et conditiones predictas, ad honorem Dei el promo- tionem ecclesie parochialis s Calixti de Hornaing (2), approbare et aucto- ritate pontificali dignemini confirmare. Datum anno MCCL, mense mayo. Vidimus scellé du scel de l'évêque d'Arras, sous la date du 28 mai 1230. Copie du xvr.° siècle. VI. Lettres de Philippe le Bon , duc de Bourgogne , par lesquelles il commet ceux des comptes à Lille , pour avoir le soin et le gouvernement des biens de l’abbaye de Cisoing, 1429, 12 octobre, à Paris. Phelippe, duc de Bourgoingne, conte de Flandre, d'Artois, de Bour- (1) Muiée, mesure agraire , quantité de terre qui s'ensemence avec un muid de froment. La muiée de Cambrésis et sans doute d'Ostrevant équivalait à seize mencaudées. (2) Horoaing formait avant 1790 deux paroisses du diocèse d'Arras, l’une sous le nom d'Hornaing-St.-Jean , l'autre sous le patronage de St, Calixte. Cette der- nière appartenait à l’abbaye de Cisoing, qui s’en fit confirmer la possession par bulle d'Alexandre IL , ro janvier 1199. (523) goigne , etc. à noz amez et féaulx , les gens de nos comptes à Lille, salut et dilection. 11 est venu à nostre congnoissance que jà feust-il que dèsle vivant de nostre très chier seigneur et père, cui Dieu pardoint, pour re- trenchier et extirper le doloreux, infame, très dommagable, povre et pifeux gouvernement que de pieça aueuns abbé et religieux de l’église de Chisoing (1) en nostre chastellenie de Lille , moult notablement et ancien- nement fondée, douée et admortie par noz prédécesseurs de noble mé- moire, contes et contesses de Flandres, avoient accoustumé mener et tenir en icelle abbaye en vendant , aliénant et dissipant et mettant hors de leurs mains les biens , possessions, terres, rentes et héritages d'icelle église à vil pris et pour moins beaucop que les choses ne valoient, et tellement en avoient usé que plusieurs desdits biens, rentes et possessions avoient grant espace de temps esté , estoient encores apparant d'estre ès mains de plusieurs particuliers viagiers. Et par ce et autrement la dicte abbaye avoit esté tellement foulée , gouvernée et apovrie, que , pour l’entretenement du service divin, des ouvrages nécessaires, sustenfacion et gouvernement des- dits abbé et religieux et autres leurs affaires requis et nécessaires qu’elle avoit pou ou néant de revenus , dont iceulx abbé et couvent se peussent aidier, icellui feu nostre dif seigneur et père euist ordonné certains com- missaires pour enquérir la vérité des choses dessus dites, entendre et réduire ledit malvais gouvernement en bon usage et par grant espace de temps fait détenir en prison fermée lesdits abbé et religieulx, en leur ostant tout le gouvernement quelzconques ayant regard à la dicte église. Et pour relever et resourdre icelle église dudit malvais gouvernement ancien, nostre dit feu seigneur et père, entre autreschoses, euist commis icellui gouvernement meismement du temporel de la dicte église et fait mectre en la Chambre desdits comptes devers vous et en vostre garde les lettres, chartres, priviléges et plusieurs autres escriptures de ladite église , en- semble les scels desdits abbé et couvent. Et combien aussi que certain temps après le trespas de feu nostre dit seigneur et père, vous, pour au- cunes considéracions euissiez de par nous ef soubz nostre main baillié . l'administration et gouvernement du temporel d'icelle église à l'abbé qui y est de présent(2), moyennant que chascun an il nous en rendroit vray compte et rensaignement souffisant pardevant vous, ce non obstant icellui (1) L'acte par lequel le duc Jean essaye de faire entrer la réforme à Cisoing est daté de Lille , le 7 juillet 1419. (2) Les deux abbés auxquels ces accusations paraissent s'appliquer spécialement sont Gilles Randoul et Nicolas Roberti. Le premier a même subi un emprison- nement, (52% ) abbé s’est depuis en plusieurs et diverses manières gouyerné, porté et maintenu (1), et encore se gouverne , porte et maintient en icelle abbaye et dehors publiquement, très dissolument et déshonnestement par tenir femmes mariées et autres, fréquentant les favernes, jeux de dez, faire battre, navrer etinjurier gens, travailler et vexer ses religieux par manière de vindicacions ou autrement de ses volonté et courage desraisonnable ; et à ceste cause se soient meus plusieurs questions, doléances et discors entre lesdits abbé et religieux , en dénigrant et villpendant estas de prélature et ordene de religion. El pour à ce pourvoir et mettre en paix, concorde et union , lesdits abbé et religieux et icellui malyais gouvernement extirper etréduire en bon régime et usage convenable, contendans toujours amour et douceur préférer à rudesse et rigueur, vous vous feussiez nagaires transporté en ladite abbaye devers lesdits abbé et religieux et à chascun d’eulx remontré les faultes et mesus dessus touchiés, et de par nous, à meure délibération de gens ayant congnoissance en fait de religion et autres sages et notables, baillié par escript et bonne déclaration, certaine instruction contenant plusieurs poins et articles fondez en raison et jus- tice, et ausdits abbé et religieux ordonné et enjoint la entretenir pour le bien et relévement de la dicte église et l’entretennement dudit divin service ; ce que eulx et chascun d’eulx euissent promiz de bonne foy faire et entretenir. Néantmoins en persévérant de mal en pis et au contempt et hayne que nous nous sommes entremiz dudit gouvernement, comme il peut sembler, icellui abbé, en contempnant nos haulteur et seignourie , n’en a tenu ne tient compte... Pourquoy nous qui ne voulons ces choses souffrir ne passer soubz dissimulacion, ains, pour l'acquit de nostre conscience, y pourveoir et ledit malvais et desraisonnable gouvernement réduire en bon usage, vous mandons et commandons estroittement, en commettant par ces présentes que vous vous informez sur ce que dit est. Et se par l'informacion tenue il vous en appert , soustrayez (x) Cet état ruineux de l’abbaye n’était pas nouveau; il datait du xur.© siècle. 11 existe aux archives de Rupelmonde un acte d'avril 1279, par lequel l'abbé et le couvent déclarent que pour amoindrir des dettes ausures considérables, ils vendent une rente viagère à un bourgeois de Tournai. Par d’autres lettres du 16 décembre 1286 , ils reconnaissent que tous leurs biens sont grevés de l'ortés dettes usuraires, et que, ne trouvant plus aucun prèteur pour leur fournir de l'argent, ils ont, pour être préservés d’une ruine totale, abandonné tout cequ'ils possèdent au comte de Flandre, leur protecteur naturel , qui veut bien contracter de grands emprunts en leur faveur. Voyez Inventaire des chartes de Rupelmonde , par le baron J. de Saint-Genoïs, page 158. Chambre des comptes de Lille. Original. 2° et 8." carlul. de Flandre. (525) et oslez de par nous audit abbé le gouvernement général el entier des biens, profit, rente, possessions et revenues temporelz d'icelle église et de par nous y commetlez une personne ou plusieurs, telle ou tels que proffitable et expédient vous semblera , qui en sera ou en seront tenu rendre compte et reliqua pardevant vous, touteset quan- teffois que requis en sera ou seront, en contraignant au surplus lesdiz abbé et religieux et chascun d’eulx par détention et emprisonnement de leurs corps, se besoings est et par toutes autres manières de constrainte raisonnables, à entretenir de point en point la dicte instruction. Et avec ce ramenez et remettez réalement et de fait oudit prioré ledit sire Jeban du Bure ouautre plus profitable pour le gouvernement d'icellui, se vous le trouvez en délibéracion , en mettant toutes voies ou faisant mettre icellui du Bure(f) hors desdites prisons, se fait n’est, et déboutant de fait, par toutes voyes pertinentes et servans, icellui sire Mahieu d'icellui prioré, comme illicite occuppeur et détenteur d'icellui , lequel par ces présentes, se mes- tiers est, en déboutons. Mandons en oultre à tous nos officiers, justiciers et subgés,, requérons les autres que à vous et à voz commiz obéissent et entendent diligemment. Car ainsi, pour considération des choses dessns- dites, le voulons estre fait, nonobstant oppositions, appellacions ne quelz- conques lettres subreptices, impétrées ou à impétrer à ce contraires: Donné à Paris le x.° jour d'octobre l'an de grace M. cccc vingt neuf. (2) Original en parchemin dont le sceLest enlevé. Transcril au registre 10 des Mémoires . fol. 30. (2) C'est le même Jean du Burçq qui fut nommé abbé à, la place de N, Roberti. Camerac. Christ, 286. (2 Cette ordonnance de Philippe-le-Bon ne mit pas fin pour toujours aux abus dans le monastère. En 1603, l'archevêque de Cambrai, Guillaume de Ber- ghes , après une visite à Cisoing, rendit le 15 novembre une ordonnance où il déclare que , pour le redress des excez el abus y trouvez, signamment en l'administration du temporel, À commet, par forme d'essai, à l'office de pro: cureur frère Augustin Naxon, alors procureur de Beaurepaire, à Vl'oflice de déperisier Er. Evrard Ghislain , et enfin à celui de sous-prieur Fr. Jean Bosquet. JE ajoute que l'abbé, N. de Bonmarcbiet, devra s'abstenir de rien appliquer désormais à son profit personnel jusqu'à cé que les dettes de l'abbaye, qui sont considérables , soient enfin acquittées,vous requérant, dital, quant au surplus ; de vous gouverner comme à un bon père et prélat appertient ; et Sy que de vostre charye puissiés rendre comple à Dieu, et qu'à faulte de ce n'aions occasion de procéder par aultres voies au redressement des affaires de vostre maison , réduicte à l'extrémilé qu'elle est. 4 35 { 5926 \ VIE Requête à l'empereur Charles. Quint par Claude Doublet, prévot de Hertsberghe. Sans date (1530). Remonstre très-humblement vostre très-humble orateur sieur Glaude Doublet, prestre, religieulx profès de l’abbaye de Saint-Calixte de Cisoing del ordre de Saint-Augustin, au diocèse de Tournay, en vostre chastellenie de Lille, comment il a pleut depuis trois ans enchà à révérend père en Dieu, monsieur l'abbé de Cisoing, son prélat, luy donner et commettre la provosté de Herdsberghe, membre annex à ladicle abbaye, scitué sur les fins des Burlescamps(1) en pays silvestre ; laquelle provosté et les biens d’iceux sont de dotation et fondation de voz très-nobles prédécesseurs et de la meisme anchienneté de ladicte abbaye. Laquelle provosté, de tous temps, entre aultres prééminences, libertez, possessions et biens, avoit sur lesdites anchiènes fondations touste justice. Or treuve ledit supoliant tant par anchiens escrips ettesmoingnaiges, audit lieu soloient demourer pluis- sieurs religiculx pour faire le service divin, selon l’intencion des fondateurs; treuve aussi que par les guerres et divisions qui out régné parchidevant en vostre pays de Flandres, l'église, édiffices et masnoirs de ladicte église et de leurs subjectz sont esté mis en ruyne, et les gens et habitans des- paysiet, tellement que, en l'an mil Ille XL ou environ, tous les biens, revenues entièrement ne revenoyent pour le plus que de sept livres de gros par an. Laquelle dicte provosté, par le très-sobre et innutille gouvernement que pardevant ledit temps il y a eu audit lieu de Cisoing, a esté vendue et aliennée ès mains de séculiers bien l’espace de cent ans ou environ, tellement que pendant ladicte ruyne et aussi vente, le divin service cessa audit lieu, et, que pis est, les occupeurs ont laissiet anichiler les drols, libertez de ladicte église, leur justice, biens, revenues, rentes et possessions. Lequel povre et sobre gouvernement, voz très-nobles pré- décesseurs , comme de bonne mémoire, le duc Philippe, Jehan et Charles, ont parcidevant mis remède et par leurs commissaires et députez mis ordre à ladicte abbeye et provosté, en prenant touttes les lettres, tiltres, cartu- laires et tous les biens temporels, ensamble le sceau du couvent en leurs mains , commettant le tout , soubz vostre garde, ès mains de Messieursles gens de vozcomptes à Lille où ils sont encoires pour le présent en curatelle. Depuis lequel temps , feu de bonne mémoire Jehan (2), abbé dudit Cisoing, (1) Bulscamps, Flandre occid., à x lieue de Furnes, près le canal de Berghes, (2) Jean Salembien , élu en 1482 , mort en 1526. (597 ) dernier deffunct, pour acquiter sa conscience et l’intencion des fondateurs de ladicte provosté, fist grosse diligence à réduire, remettre et relever ledit lieu de la provosté, en y faisant rapointier l'église, édifiant maison et demeure, recouvrer che qu'il pooit bonnement des rentes, terres et reve- nues anchiennes, par vosire accord acquesta quelque peu de biens tendant afin que le service divin se peuisse dire et célébrer; pareillement leurs bruyères et aultres biens faire cultiver et aucunes quantitez donner en emphitéothèses ou rente pour faire le plus grand proffit de ladicte provosté, soubz seau d'abbé et couvent, comme aussi ont fait les sieurs circumvoisins de ladicte provosté, tellement que le pays autour d'icelle qui soloit estre comme déserte se peuple et mulliplie. A cause de laquelle multiplication , tant de gens que de bestes, icellui suppliant est grandement foullez tant des circumvoisins que meismes de leurs propres subjects et arrentez cn leurs bois, prés, eauwes, terres que aultrement et che spécialement pour che que leur dicte justice et seigneurie est ainsi tumbée interupte et ne serroit ou vouldroit icelle remettre en nature quelques bons tiltres , ensei- gnemens et priviléges qui en sont reposant soubz mesdits sieurs de vostre chambre des comptes que aultrement, sans préalablement avoir sur ce vostre congié et grâce, combien ledit suppliant et ses prédicesseurs ont toujours obvyé que nulz autres sieurs circumvoisins sur ladite anchienne admortie fondation de ladite provosté ayent prins cognoissance ou judieature, du moings qu'il soit venu à leurs connoissances , s’il n’a esté vostre bailli Van der Oudtschen pour matière de haulte justice. Or treuve ledit suppliant les cireumvoisins de ladicte provosté culx et leurs bestes si desriglé en faisant dommaige en ses bois, prés, eauwes et aultrement qu'il n’a riens à luy, et che par faulte qu'il n’a audit lieu baïlly, officier ne juges. Requer- rant très-humblement Vostre Majesté consulre qu'il est autant de mérite vers Dieu, les anchiennes églises tumhées en décadences relever etremettre eu leurs anchiens drois que de fonder nouvelles, accorder audit suppliant, ou nom qu'ilprocède en cas qu'il appert des prémisses, de pooir commettre ung bailli sergans et par emprunt, à cause qu'il n’a encoires subjects assez souffisans à estre en loy, prendre les sept eschevins de la seigneurie de Ghendbrugghe plus prochaine dudit Herdsberghe et provosté, en ordonnant à iceulx que conjurement et semonce dudit baïlly de ladicte provosté et relation du sergans devant eulx, sermentez selon leurs drois, coustumes deues observées, ils faissent ou jugent droit, amendes telles que a ledit sgr. de Ghendbrugghe, qui est seigneurie visconlière, en recepvant deshé- ritance ou adhéritance de tous lesdits vieulx biens admortiz à ladicte église et provosté. Er en cas lesdits de la loy de Ghendbrugghe ne voulloient accepter ladicte charge, ledit suppliant, ou nom qu'il procède, polra prendre et eslire aullres sept hommes de bien des cireumvoisins, lesquelz estant esleu polront estre par Vostre Majesté constraint, leur octroyant la cognois- sance de tous cas civil et amendes de six livres, avecq le congié de dressier ( 528 | ung baneq pour icelluy bailluy.et sept eschevins tenir leur plaix, touttes ei quantefois qü'il sera besoing et requis en seront, comme les sgrs: circum- voisins ont accoustumé faire en che seullement sur les anchicnnes fon- dations et domaines admorties de si très-1nchien temps, à ladite prévosté. Se ferez œuvre méritoire (1). Copie du temps en papier. (x) Cette supplique, envoyée à l'avis de la Chambre des comptes, donna lieu à une information où je recueille les données suivantes concernant Hérstherghe: 19, D'un acte de vente de ladite prevôté en date de 1389, il appert que l’abbaye de Cisoing avait dès lors à Hertsberghe toute justice séculière; 2.0 d’un certain matreloge (martyrologium , nécrologe), il couste que la prévôté d'Hertsberghe lez Bruges, appartenant à Cisoing, est vendue viagèrement à M.° Jehan Marissal, avec justice haute, moyenne et basse, sergents et officiers ; 3.° les registres an- ciens prouvent que ce genre de vente est usité depuis Van 1345 ; 4.9 On dit au même matreloge qu'en 1419, ledit Jehan Marissal: donna à MM. de Cisoing 7 gros , monnaie de Flandre; 5.9 en 1445, la prévôté étant rentrée aux mains de l'abbé par procès ou autrement , elle fut affermée, successivement jusques vers 1475, à Loys Sterrin, Loys Flouck, Christian Scappre et enfin à M.C Jehan d'Anneus, chanoine de St, Donas à Bruges, 6.0 divers comptes de l'abbaye de Cisoing, pour le XV.€ et XVI.C siècle témoignent que cette abbaye avait à Hertsberghe un bailli auquel elle payait des gages. bailli ou erichoudere dont le rétablissement est demandé, avec pouvoir d’ériger pour luiun bancq ou siége plaidoyable nn à. NOTE SUR LE DÉPLACEMENT D'UN REIN SUR UN HOMME DE 36 ANS; Par M. J. CHRESTIEN, Membre résidant. Le déplacement des parties organiques est aujourd’hui un fait bien connu des anatomistes, et grâce aux travaux nombreux el si remarquables de M. Geoffroy St.-Hillaire, on connaît même en quelque sorte les lois suivant lesquelles ces déplacements ont lieu. Ce n’est donc pas un fait nouveau que je viens vous exposer, c’est une simple observation confirmative des observations déjà connues ; mais , convaincu que les sciences pratiques en général ne progres- sent que par l'étude des faits , j'ai pensé devoir vous communiquer celui-ci, persuadé que, si je me méprenais sur sa valeur, votre bienveillance lui ferait également accueil. Chargé par ma position de faire les nécropsies des corps livrés à l'étude à l’école de médecine, à la vue du corps du nommé D., je fus frappé de l’infiltration existant uniquement au membre infé- rieur droit, et fus naturellement amené par ce fait à explorer le trajet des ‘canaux veineux de ce côté. J'arrivai ainsi bientôt sur! une tumeur placée tout-à-fait au devant de la veine iliaque primitive droite etun peu sur l'extrémité de la veine cave inférieure et vou- lant en constater la nature, je fus assez surpris de voir qu’elle n’était autre que le rein ( N.° 13, dessin ci-joint }. En disséquant ce rein pouren bien voir les rapports (ensemble du dessin), je trouvai le reintun peu plus petit que dans l’état normal, le bord inierne et le hile du rein devenu sa face antérieure; le rein reposant sur son bordexterne et ses faces antérieure et postérieure s'étant converties * | 530 ) en bords, de plus cet organe ne recevait point les vaisseaux vers la moitié de son étendue de haut en bas mais les recevait en haut n.9 9, 10, 11. L’uretère n.° 14 partait bien à peu près du centre, l'artère rhénale était double n.°° 9 et 10 partant de l’aorte au point où elle se bifurque en deux vaisseaux; l'inférieur est d'un calibre un peu plus fort que le supérieur sans cependant égaler le calibre normal, la veine rhénale présente son calibre ordinaire mais va en remontant sur l'extrémité supérieure du rein et passant au devant des artères se verser dans la veine iliaque primitive gauche à peu de distance de son point de jonction avec la veine inférieure (N.05 11 et 12.) Les capsules surrénales sont normalement placées, même, celle du côté droit ; elles ne sont point figurées dans le dessin que je vous présente ; elles ont été maladroitement enlevées par la per- sonne à qui j avais confié un moment le scalpel. J'ai appelé cette observation confirmative de celles publiées ; en effet, il ne me paraît pas possible de ne pas admettre qu'ici en- core, le rein droit ne se soit développé tout à fait indépendam- ment de son congénère et au lieu où je l'ai trouvé et ne se soit greffé, que l'on me permette cette expression, au tronc le plus voisin, c’est-à-dire, tout à fait l'extrémité de l'aorte, nouvelle preuve , s'il en fallait , que le système circulatoire se développe de la peripherie au centre. Quant au déplacement relatif des faces de l'organe, ce fait que je n'ai pas trouvé mentionné dans le petit nombre d'ouvrages que jai pu compulser , nos bibliothèques en étant assez pauvres , ne doit pas être très-rare ; il me paraît, en effet, pouvoir s’expliquer par un arrêt de développement et nous offrir un cas de persistance de l’état primordial de l'organe. En effet, la sissure existe d'abord sur la face antérieure de l'organe. On sait que l’uretère paraît dans le règne animal, aller du bord externe au bord interne. (Externe, poissons, reptiles\, (face antérieure, oiseaux), bord interne mam- mifères. ee ET, CORNE LA, ml ES ; 24 Lg agp PC 27777 CL 7 D . = More A CA 22,77 eh 2 ne 2 ETC) ie DAT LU LEO Cri Le RS Ve PL fe M Loges nr ddut/À PE > Ê ÿ FT Pop HAT DEL PTS dos PAZ = nd mp) DT DA | pi LA , 7 BOT EC QT PET D'AAT ES AA Lg © pe 2 — 7 21 A TES 27 (531 ) Parmi les hommes qui ont le plus contribué aux progrès de l'optique moderne, et que la Société s’honore d'avoir compté au nombre de ses membres résidants , se place en première ligne J'immortel auteur de la découverte de la polarisation, Malus. La Société possède dans ses archives plusieurs travaux manuscrits de cet illustre physicien. La lettre suivante est la reproduction autographe de celle qu'il adressa à la Société en quittant la ville de Lille. 4 Discours prononcé par M. LE GLAY, président de la Société des Sciences. La Société des Sciences a aussi son tribut de regrets à déposer sur cette tombe. L'homme dont on vient de parler en termes si dignes et si convenables au nom de l'Ecole de médecine et du corps médical tout entier, cet homme nous appartient d’ancienne date; il nous appartient par son nom tout scientifique, par ses titres personnels ; il était nôtre encore par ce bon esprit de con- fraternité académique qui, plus que le savoir lui-même, fait vivre , durer et prospérer les compagnies savantes. Ce n’est pas seulement par des écrits et par des découvertes que l’on sert la science et qu'on tient un rang distingué dans une académie. Celui-là aussi, celui-là surtout sert et honore la science qui en fait d’utiles applications au bien de l'humanité. Or, Messieurs, est-il autour de nous une seule classe de citoyens qui n'ait aujourd'hui ses motifs pour partager notre deuil, pour s'associer à nos hommages? Est-il dans le pays un canton, une commune: dans cette grande ville, un quarüer, une rue, j'ai presque dit une maison , un réduit obscur, où Lestiboudois n'ait porté les secours de son art et les bienfaits de son zèle éclairé, ‘désintéressé? Oh! quelle touchante oraison funèbre se ferait entendre ici à l'heure qu'il est, si l’on y apportait soudain toutes les paroles de bonne affection, de haute estime et de légitime reconnaissance qui se sont dites depuis deux jours , à propos de sa mort, au foyer des familles lilloises ? Mission belle et sublime en effet, Messieurs, que celle du médecin quand elle est ainsi exercée ; autre sacerdoce dont le ministère, en apparence tout matériel, esl néanmoins sans cesse appliqué avec bonheur aux peines de l'âme, si souvent compagnes des souffrances corporelles. C’est vous que j'en atteste, Messieurs les membres de ce corps médical si haut placé dans l'opinion pu- (533) blique. Nul, vous le savez, ne remplissait ce saint ministère avec plus de candeur, plus de simplicité, et ajoutons avec plus de succès que ce confrère bien aimé. Nul aussi ne l’a vu mieux remplir autour de son lit de douleur. Certes, puisque nous le pleurons aujourd'hui , il faut bien recon- naître que les soins les mieux entendus, les plus sagement com- binés du savoir, de l'expérience et du dévouement amical, ne sont pas toujours efficaces. Mais que peuvent nos vaines paroles , Ô famille éplorée ! pour calmer votre douleur qui est aussi la nôtre! Et pourtant il ya quelque chose qui peut aussi et doit, ce me semble, après la pensée en Dieu, vous réconforter et vous consoler un peu. Ce sont ces témoignages d’universelle sympathie, cette condo- léance de tous les cœurs, cette popularité de la tristesse enfin qui, s’identifiant à votre deuil privé , en ont fait un deuil public et la tristesse d’une ville entière. Le discours de M. le Président de la Société des Sciences n° donnant pas les faits biographiques qui se trouvent dans le dis- cours prononcé par M. Cazeneuve, à la distribution des prix de l'Ecole de médecine, nous empruntons à ce dernier , en les résu- mant, quelques faits et quelques dates qui formeront une sorte de biographie abrégée. J.-B. Lestiboudois est né à Lille, le 3 septembre 1796, d’une famille dans laquelle on comptait déjà plusieurs générations de médecins; c’est en 1813 qu'il commenca ses études médicales à l'Hôpital-Militaire où il servit en qualité de sous-aide, et de là, après avoir échappé au typhus contracté dans l'exercice de ses fonctions, il se rendit à Paris. Pendant sou séjour dans cette capitale, il perdit son père, et ayant été recu docteur en 1818, il revint dans sa ville natale, Trois ans après son arrivée, il fut chargé de la constatation des décès, mission qu’il conserva jusqu’en 1850. En 1823, il fut nommé chirurgien à l'hôpital général et membre de la Société des Sciences, de l'Agriculture et des Arts de Lille. - Sa nombreuse clientèle lui laissait’ le temps de faire le service gratuit d'un (534) bureau de charité; les pauvres furent, si l’on peut ainsi parler, sa clientèle de prédilection. Un grand nombre d'orphelins de l'hôpital général ont trouvé en lui un père, un protecteur, et lui doivent une position honorable dans le corps médical. Lorsque fut fondé à Lille l'école secondaire de médecine (1852), J.-B Lesti- boudoiïs fut nommé par Le Ministre à la chaire d’accouchements; mais il ne devait pas longtemps exercer la fonction de professeur qu’il remplissait avec une véritable distinction ; après une douloureuse maladie supportée avec le calme d'une âme chrétienne, il mourut le 28 janvier 1853. AT Yes f 4 EEN = 0 me ie Er mi vpé 27 LEE vers DISTRIBUTION SOLENNELLE DES PRIX. — GRISES — Le 12 Septembre 1852, la SOCIÉTÉ NATIONALE DES SCIENCES, DE L'AGRICULTURE ET DES ARTS DE LILLE, tient sa séance publique et annuelle. M. le PRéFer a ouvert la séance en ces termes : « Messiburs , » C’est une solennité bien chère à l'arrondissement de Lille que celle qui, chaque année, nous rassemble à l'Hôtel-de-Ville et nous met en rapport direct avec tous ces représentants de l’agriculture : L'agronome qui, par ses théories, par ses recherches, prépare des voies nouvelles ; le cultivateur qui expérimente et qui apporte les résultats de sa pratique laborieuse; l’ouvrier des champs, que de longs et honnêtes services, chez le même maître, rendent si recom- mandable, en s’associant à la propriété du sol, à l’ordre et à la richesse du pays. » Par une heureuse disposition de vos statuts, à cette cohorte d'agriculteurs, nous voyons se réunir, dans l’éclat de cette fête, les hommes de méditation et d'étude qui, au nom du patriotisme comme de la science, honorent notre département par leurs infati- gables investigations sur les origines et les points principaux de l'histoire nationale du Nord. » Dans cette grande et florissante contrée, où l'homme se livre avec tant d'activité aux travaux de l'industrie et du commerce, à la 36 — 536 — perfection matérielle du sol, on est frappé d'étonnement à la vue de ces groupes de travailleurs d'élite, de ces sociétés laborieuses et recueillies, à qui le temps semblerait devoir manquer pour cultiver l'art et la science pure. C’est que votre caractère se distingue, Messieurs, par une rare puissance de volonté et par le bon sens qui préside à la fécondation de vos loisirs ! » Les encouragements que vous décernez aujourd'hui couron- nent dignement vos efforts, et vous devez être fiers des résultats que vous obtenez. » Qu'ils s'approchent donc de nous avec confiance, ces lauréats de l’ordre et du travail ! Qu’à leur tour ils soient fiers des récom- penses qu'ils vont recevoir de la Société des sciences, de l’agrieul- ture et des arts de Lille ! Et que, rentrés dans leurs foyers, ils con- tinuent de compter sur l'appui du gouvernement et de leurs hono- rables concitoyens. » Par l’ascendant du bon exemple, par l'appui eflicace que vous accordez, les hommes que vos récompenses distinguent, provoque- ront, autour d'eux. une salutaire émulation. C’est de la propagande dans le bien. » Vous secondez ainsi les grands desseins du prince Louis- Napoléon. Il sait que les populations rurales lui sont amies : il s’est dévoué à leur bien-être, et c'est à ce bien-être que, vous aussi, vous travaillez. » Recevez, Messieurs, mes remereiments et mes félicitations pour la mission que vous accomplissez : elle est digne des temps où nous vivons. Aux agitations publiques a succédé une ère de paix , et nous la devons auprince qui, en un jour, en a doté la France, dans ses centres populeux comme dans ses plus humbles chaumières . » La paix a aussi ses honneurs. Et c’est dans la paix que les récompenses vont atteindre, avec discernement, les mérites les plus élevés et les services les plus modestes. » Le A5 août, la France a célébré la fête nationale du chef de l'Etat. L'administration municipale de Lille, secondant avec un 4 —.h37 — généreux empressement les vues bienfaisantes du prince Louis- Napoléon pour la moralisation des classes ouvrières, a voulu que des livrets de la caisse de retraite de la vieillesse fussent décernés: Elle a voulu aussi que les enfants des écoles primaires reçussent égale- ment des livrets de la caisse d'épargne. Nous allons remettre ces brevets de bonne conduite et d'honnêleté à ceux qui les ont mérités. Ce ne sera point un des épisodes les moins intéressants de cette solennité. » Associer à celle fête de l'agriculture, les souvenirs de la fête du 45 août, c'est une excellente pensée dont j'aime à reporter tout le mérite à l'administration municipale. » Le 15 août a repris sa place dans les fastes historiques de la France.” » La religion, l'héroïsme militaire, un nom immortel, celui de l'Empereur ; la reconnaissance pour son illustre successseur, tels sont , désormais , la signification et le caractère imposant, que le peuple célébrera dans le 45 août. » Le savant et le laboureur. l'industriel et l'artiste, la nation loute entière se groupe autour da prince: car le nom de Napoléon réunit toutes les conditions de la plus légitime popularité ! » M. Baizzy, Président de la Société, à prononcé le discours suivant : « Messieurs , » En acceptant la présidence de votre Société, j'ai obéi à la majorité, bien que je sentisse l'insuflisancé de mes moyens ; mais je croyais que, avec du zèle, celte tâche que vous m'imposiez serait possible, facile même. Que’ j'étais dans l'erreur ! Je n’aper- cevais pas l’écucil du discours académique, «et sans songer que j'avais tacitement rencontré une dette d'autant plus au-dessus de mes forces que mes prédécesseurs l'avaient payée très-honorable- ment, je me bercais de: l'espoir d'arriver sans encombre jusqu'au jour de l'expiration dé mon mandat, Au moment décisif, cette dette = FR: — e me parait plus pesante encore, et ce n’est pas sans hésitation que je vais essayer de l’acquitter dans cette solennité, devant les pre- mières autorités de notre pays, devant une réunion trop riche elle- même de ses propres connaissances, pour qu'elle ait besoin du faible tribut des miennes. » Pour faciliter mon travail, je n’entrerai pas dans le vague, je ne chercherai pas à faire de belles phrases, à arrondir les périodes de mon discours; je me bornerai à esquisser rapidement l'histoire de votre Société ; j'ai pensé que cela me serait plus aisé , car je n'aurai qu'à parcourir les nombreux volumes dans lesquels sont consignés vos travaux pour trouver les matériaux dont j'ai besoin. Ce n’est pas une analyse de vos travaux que j'entreprends, je m'en garderai bien, c’est seulement une petite excursion faite dans votre titre de Société des Sciences , de l'Agriculture et des Arts, ex- eursion qui aura pour objet de prouver par des faits tirés de vos œuvres, que lorsque vous l’avez adopté, vous vouliez le justifier. » Avant d'entrer en matière, permettez-moi de jeter un coup- d'œil en arrière, de me laisser guider, pour un instant, par M. Bottin, le premier qui fut votre président, et de rappeler à votre souvenir quelle a été l’origine dela Société actuelle. » Le 10 août 1806, la Société d’Amateurs des Sciences et Arts de la ville de Lille tenait sa première séance publique , et son. pré- sident prit pour sujet de discours l’histoire des Sociétés littéraires et scientifiques qui ont existé autrefois à Lille. Le souvenir le plus éloigné que l’on ait conservé d’une de ces Sociétés remonte à la fin du quinzième siècle, époque de la fondation de la chapelle de l'Im- maculée-Conception. J1 y avait alors une Société, nommée le petit puits du mois, cemposée de quelques gens de lettres faisant des vers et des discours ; ils nommaient entre eux un prince de l’année et choisissaient pour en remplir les fonctions celui qui l’année pré- cédente, avait donné la plus belle production, soit en vers, soit en prose. À celte époque, vous le voyez, Messieurs, le goût des lettres s'était déjà introduit dans notre cité ; mais les Sociétés qui les eul- livaient, ne se soutenant qu'autant que les moyens qui les avaient — 539 — produites pouvaient suffire à leur existence, et ces moyens élant trop restreints, cette existence n'était que passagère ; aussi les vit-ons’éteindre et se reproduire plusieurs fois dans l’espace d’un sièele. Le souvenir de ces Sociétés, le nom qu'elles portaient, voilà tout ce que la tradition nous a laissé; quant à leurs travaux, à moins que quelques-uns d’entreeux ne soient enfouis dans les ar- chives publiques ou particulières, rien ne nous en est parvenu. En 47àä9, on retrouve des traces d'une Société de poètes lillois qui avait pris pour devise : Peu, mais de son mieux ; agréable, mais utile. Elle avait produit quelques mémoires dignes de la presse, et dont il est à regretter qu’on ne:possède pas les eopiesi; mais elle n’avait rien fait encore pour le: dehors, pas même un almanach, parce que, comptant à peine six mois d'existence, elle fut attaquée par les armes de l'ironie aussi puissantes, peut-être, alors qu'aujourd'hui, et, faible qu’elle était, elle suecomba pour ne plus se relever. » Ce n’est que vingt-six ans plus tard qu'une: autre: association se forma dans l'intention de joindre les délassements littéraires aux travaux maçonniques alors à la mode. Elle prit le. nom de Collége des Philalètes et pour épigraphe utile dulei. Des questions furent proposées, des prix assignés à ceux qui se-distingueraient le: plus. Les orages qui grondaient, à l'horizon politique: n’intimidèrent point des hommes fortement prononcés pour le progrès dessciences et desarts, et, en dépit de-tous les obstacles, les-Philalètes augmen- tèrent le nombre de eurs associés résidants, et correspondants , :et offrirent enfin, aux habitants de Lille, dans une séance publique annuelle, une espèce de commémoration.de la:fête des Muses. Les Philalètes . dit encore M. Bottin, s’occupaient plus particu- lièrement des sciences et, des. artsutiles, et imprimaient tous les six-mois un: bulletin. indiquant, une-série. de: dix-huit questions. à iraiter dans le semestre qui-allait s'ouvrir. Vous:possédez dans: vos arehives!plusieurs mémoires! qui fontregretter aussi,de n’avoin pas la-colleetion complète. Parmi-eux se: trouve, un, projet: d'Histoire universelle des sciences, par Delory; l'éloge: du-maréchal prince de —.5#0 — Soubise, associé honoraire du Collége des Philatètes, par le che- valter Legonidec de Trésan; un éloge funèbre de M. Poisson des Londes, maréchal-de-camp, ingénieur en chef à Lille, ancien pré- sident du collége, par le même, et une dissertation sur l'enchaine- ment des êtres, par le chevalier Aubert de Bernois. Ici se terminent brusquement les travaux de Ja Société des Phi- latètes. La Révolution qui éclata alors secoua trop rudement les sciences et les arts, auxquels elle devait, plus tard, donner une immense impulsion, pour que le Collége des Philalètes ne s'écroulât pas; mais l’esprit qui animait les hommes de sciences ne fit que s’engourdir pour se réveiller plus tard sous la même forme , bien que sous un autre nom. Vers 4802, les avantages qui résultent de la réunion d'hommes se vouant d’un commun aecord au eulte des sciences et des aris furent appréciés par quelques amateurs qui, jusque-là, travaillaient isolément. Ils fondèrent une nouvelle société qui prit le nom de Société d'amateurs des sciences et des arts de la ville de Lille, et se réunirent régulièrement une fois par semaine. C’est cette Société qui subsiste encore, c’est volre Société, Messieurs, qui plus tard intercala le mot agriculture dans son titre et s'occupa d’une manière éclatante de cette science, la plus véritablement utile de toutes. Elle prit et conserva jusqu’aujourd'hui la devise adoptée par les Philalètes et leurs devanciers; c’est donc, en quelque sorte, toujours le même esprit qui a dirigé vos prédécesseurs et qui vous dirige encore dans la voie qui, en même temps qu’elle est agréable, conduit à l’utile. Je ‘croirais faire une omission blamäble si je ne rappelais ici que Messieurs Porret, Féron, Cavalier, Judas, François Lestiboudois , Dehau, Hécart, Faubert, Boulet, Vanbavière, Peuvion, Macquart, Duhamel et Trachez furent ces amateurs. Il ne reste plus de vivants que ces trois derniers, et parmi eux nous avons encore le bonheur de possédér au nombre des membres de la Société, M. Macquart, dont les nombreux et remarquables travaux en histoire naturelle occupent une si large page dans le recueil de vos mémoires. — 541 — » Mais je reviens au titre de votre Société et je vais essayer de démontrer que vous ne l'avez jamais ‘oublié, et que les sciences, l'agriculture et les arts sont les trois champs que vous avez cultivés avec une ardeur incessante depuis un demi-siècle. » Comme Société des Sciences. si j'ouvre votre recueil, je suis frappé de l’étonnante quantité de mémoires remarquables que vous y avez consignés. J'aurais un volume à écrire si je devais indiquer leititre de toutes les questions par vous traitées. Je n'ai pas non plus l'intention de nommer leurs auteurs, je craindrais de blesser leur modestie, car ce qu'ils ont fait, ils l'ont fait par amour pour la seience et non pour la vaine gloire d'entendre leur éloge de la bouche d’un de leurs collègues. Je me bornerai donc à vous rappe- ler: les différentes branches des sciences physiques, mathématiques etnaturelles qui ont tour à tour fait l’objet de vos études, et que des mémoires d’une grande importance sur l'astronomie, l’aréométrie, la chronométrie, la chimie, la géologie, la botanique, la micoder- mie, l’antropologie, l’entomologie, l’ornitologie, la conchyliologie, la médecine humaine et vétérinaire, l’obstétrique, l'hygiène, la phi- losophie, la philologie, la linguistique, la littérature, la législation, la numismatique ont été produits par vous el vos correspondants et ont placé votre Société au rang de celles qui ont le plus fait pro- gresser les sciences, » Vous ne vous êtes pas bornés à cultiver ces sciences, vous avez proposé des prix considérables en faveur des auteurs qui élucide- raient quelques questions importantes ; ainsi, vous avez offert des médailles d’or pour les meilleurs travaux sur l’histoire des sciences physiques et mathématiques de la*contrée qui forme aujourd’hui le département du Nord; sur l’histoire littéraire de la même con- trée ; sur la topographie médicale de Lille et de ses cantons; sur les institutions civiles ; scientifiques et religieuses qui. ont favorisé les beaux-arts chez les anciens et les modernes; sur la possibilité de remplacer avec avantage, par un moyen mécanique muet, le mé- canisme bruyant actuellement envusage pour le battage du fil à coudre, et bien d’autres questions dont la solution était attendue — 542 — depuis si longtemps. Jusqu'ici quelques-unes d’entre elles n’ont pas été traitées, vous n'avez pas eu la satisfaction de: décerner les prix que vous aviez proposés; mais bien que ces dernières aient été retirées de votre programme, je ne doule pas: que: si des travaux de quelque mérite sur leur sujet vous élaient présentés, vous ne soyez heureux de récompenser d’une manière digne de vous les auteurs qui, tardivement, auraient répondu à votre.appel. » L'agriculture, qui figure au second rang dans le titre que vous avez donné à votre Société, el qui, par son importance, devrait en occuper le premier, a été pour vous le sujet de: fructueux travaux consignés dans un bulletin agricole publié chaque mois et adressé à vos associés agriculteurs. et aux maires des communes rurales de notre arrondissement. Tout ce qui a pour objet ses progrès dans notre contrée a été étudié avec soin ; la commission chargée de cette partie de vos travaux s’est acquiitée: de ses devoirs avec une scru- puleuse et concienseieuse ardeur, et les résullats que vous avez obtenus sont immenses. Une phase nouvelle s'est ouverte pour la partie agricole de la Société, elle résulte dela création d'un eomice, qui embrasse l'arrondissement tout entier, et qui s’est récruté tout à la fois parmi les cultivateurs pratiques. et les propriétaires, dont la collaboration augmentera l'importance des travaux que vous avez produits, et dont ce qui va suivre vous donnera unefaible idée. ». Il était désirable-que. la France s’affranchit du:tribut qu'elle paie: chaque, année pour l'importation du, houblon, plante:si émi- xemment utile, dans le Nord, suntout{ qui ne produit nieidre ni vin. Notre elimat tempéré, notre sol généralementfertile,. limoneux et profond donnait la certitude, d’une réussite) complète: de, sa culture. Vous avez. proposé des primes, pour! la plantation: de-eette vigne flamande, et quelques! années ont suffi pour qu'elle: prit rang parmi les cultures, qui. donnent, le plus de: produit aux cultivateurs. » L'agriculture: du pays: vous, doit. l'introduction: de- plusieurs céréales nouvelles, de plantes: fourragères, des semis’en ligne, des semoirs, hache-paille, sareleurs. à bras,et autres instruments ara- toires propres à faciliter les travaux agricoles en même temps qu’ils diminuent la fatigue de l’agriculteur. » Les efforts que vous avez faits pour introduire la garance dans la culture du pays ont été inutiles, mais n'en doivent pas moins être appréciés. Les essais que vous avez provoqués n'ont manqué que de la patience et de la persévérance nécessaires pour être couronnés de succès. Ce n’est qu'après plusieurs années qu’une plantation de ce genre devient productive, et malheureusement les grands propriétaires n’ayant pas consacré une portion de leur terrain à Ja culture de cette plante tinctoriale, les petits, qui avaient la bonne volonté de s’y livrer, n'avaient pas le temps d’attendre que la récolte des racines les dédommageit de leurs dépenses et de leurs soins. Cependant, les quelques tentatives qui ont été faites démontrent pérempioirement que la culture de la garance, opérée avec succès par nos aïeux, peut encore l’être aujourd'hui dans le nord de la France. » La maladie de la pomme de terre a attiré très-sérieusement votre attention. Quelques membres de votre compagnie ont produit des travaux remarquables sur ce sujet, malheureusement encore au- jourd’hui dignes de vos méditations; des expériences ont été faites pour essayer de prévenir le mal qu'on ne pouvait guérir : leur succès n’a pas répondu à votre attente; les semis sur place et les différents autres moyens que vous avez proposés ou expérimentés vous-mêmes, n’ont amené aucun résultat concluant; mais il ne faut désespérer de rien, des expériences nouvelles, multipliées que, je l'espère, vous tenterez encore, viendront prouver 1me fois: de plus que la persévérance maîtrise la nature même et vérifieront nos prévisions. Puissent ces résultats être prochains et rendre à notre agriculture cette plante si précieuse, cette succédanée du blé, qui avait résolu ce grand problème : Plus de famine ! » Depuis de longues années, la Société avait institué un concours, devenu départemental depuis, pour l'éducation et l'amélioration des animaux domestiques. Cette branche de l’économie rurale qui était encore, relativement, peu avancée chez nous, tandis que chez brr 1! — 5 en nos voisins elle avait fait des progrès immenses, est arrivée en peu d’année à un degré de perfection inespéré, et les primes que vous n'aviez, faute de ressources suffisantes, offertes d’abord que pour le perfectionnement des races bovines, l’ont été successivement pour les autres races domestiques. Plus tard enfin, sur vos pres- sanles instances, le gouvernement à doté notre contrée d'un con- cours régional d'animaux de boucherie, dont les premiers résultats ont été en partie cause d’une diminution sensible dans le prix de la viande. » Vous avez, les premiers en France, institué une exposition départementale des produits et machines agricoles, qui a réagi puissamment sur les progrès de l’agriculture de notre pays, et le conseil général, ayant apprécié toute l'importance de cette utile institution, a voté les fonds nécessaires à l'établissement d’un concours central qui a lieu aujourd’hui à Valenciennes, el aura successivement lieu tous les deux ans dans les quatre principaux arrondissements du département du Nord: » Vous avez pensé que vous n'aviez pas assez fait pour l’agri- culture en stimulant, par tous les moyens en votre pouvoir, le zèle des agriculteurs et que vous deviez aussi récompenser la fidélité, la moralité, le courage, le talent et les longs services des agents agricoles, cette classe si intéressante, si humble et si utile, et sur la proposition d'un homme que nous regrettons encore, du docteur Hautrive, notre collègue, dont le nom est resté gravé aussi dans l'esprit de quelques vieux laboureurs, de quelques vieux bergers, vous avez institué des primes dont la distribution nous émeut chaque année et fait couler de douces larmes des yeux de ceux qui les donnent et de ceux qui les reçoivent. » Si de l’agriculture je passe au dernier terme du programme qui constitue le titre de votre Société, je trouve encore que vous n'avez rien négligé pour qu'il ne soit pas un vain mot placé là comme une enseigne menteuse. Il n’est pas donné à tout le monde de posséder le fou sacré qui constitue le véritable artiste, mais il est permis au grand nombre de distinguer celui qui a reçu l'in- — D45 — fluence secrète ; aussi de tout temps vous êtes-vous altachés à faire asseoir à côté de vous les artistes qui vous ont paru avoir un mérite incontestable, et poèles, seulpteurs, peintres, musiciens sont venus concourir à l’œuvre que vous aviez entreprise. » Autour de vous se trouvaient d’autres artistes que leur modestie tenait dans l'ombre, bien qu'ils fussent dignes de briller au grand jour, vous êtes allés les chercher, vous les avez amenés jusque dans celle enceinte, et, au milieu d’une réunion nombreuse et choisie, vous leur avez donné la preuve que, vous saviez distinguer et en- courager le mérite. C’est ainsi que MM. Colas, Pierre Baumann, Blanquart-Evrard, Lavainne et autres ont reçu de votre main un témoignage d'admiralion pour leur talent. » Votre amour pour:les beaux-arts vous fait aller plus loin encore et vous a suggéré l’idée de rechercher dans le passé les noms des artistes qui avaient jeté ou étaient dignes de jeter un lustre nouveau sur leur pays natal. Ainsi, Wicar, enfant de Lille, élève de nos écoles académiques, éloigné de son pays depuis sa jeunesse, était pour ainsi dire oublié de ses concitoyens, lorsque le bruit de sa gloire revint comme un écho lointain jusqu'à vous. Vous le con- viâles d'entrer dans votre famille, à devenir votre correspondant, et cette marque de fraternité, toute désintéressée, fut une semence qui germa et dont le fruit devint pour notre cité la source d'une richesse artistique digne d’ère enviée par le monde entier, » Roland, statuaire, élait aussi un enfant presque oublié de notre département. Cependant c'était un artiste éminent, le maitre de David d'Angers, l'une des gloires de notre France si féconde en artistes, et l’auteur de la notice sur la vie et les travaux de celui qui fut son maître, notice couronnée par votre Société qui avait mis ce sujet au Concours. » Un autre artiste, né aussi dans notre département, et qui avait quitté son pays à une époque où tant d'illustrations furent obligées de s’expatrier, Ruyssen, dont mon prédécesseur vous avait, l'an dernier, révélé le nom, est aujourd’hui connu de tout le monde artistique par suite de la notice dont M. Rouzière reçut le prix — 546 — que vous aviez offert, et qui vous fit connaître sa vie el ses œuvres. » Oserai-je, à mon tour, vous signaler un nom presque entière- ment oublié, bien qu’il appartienne à un artiste né dans nos murs el dont les travaux paraissent n'être pas sans mérite, ainsi que vous en pourrez juger par les quelques mots que je vais vous dire. » En parcourant la liste de vos membres correspondants de l'année 1808, je trouvai le nom de Corbet, artiste statuaire à Paris. Ce nom ne m'étant pas tout-à-fait inconau, je cherchai à savoir s’il n’appartenait pas à un concitoyen. Je trouvai chez M. Vanackere, libraire, un admirable buste du premier consul, qu’on me dit être de Corbet, de Lille. M. Louis Lenglart, artiste lui-même et possédant un riche cabinet, me montra, précieusement conservée, une jolie statuette en terre, représentant une Vénus, dont la vue, ilest vrai, ne peut être permise à tout le monde, mais dont les proportions et les formes sont d’une pureté irréprochable à mon avis. Cette œuvre est aussi de Corbet. M. Lenglart se sou- vint que le professeur de l'académie de dessin de Cambrai, vieillard de 82 ans, avait eu jadis des rapports avec mon héros et le pria de lui écrire ce que ses souvenirs lui rappelleraient. M. Grohin témoigna sa surprise de ce que le nom d’un lillois aussi distingué fût aussi peu connu de ses concitoyens. Il se souvient d’un Mé- léagre, figure en terre cuite et d’une grande expression, qui est de Corbet, et a été exposée à notre ancien salon des Arts. Qu'’est-elle devenue? T1 dit que lorsque lui, Grohin, faisait ses études à Paris, Corbet habitait l'hôtel du général Burnonville; qu'il venait d’y terminer la statue du Dragon, l'une des quatre qui ornent la frise de l’arc-de-triomphe du Carrousel, et enfin que l'empereur Napo- léon lui avait commandé son buste en marbre. » Voilà tout ce que j'ai appris sur Corbet... Ah! si, je sais encore qu'il faisait partie de la municipalité de Lille en l'an IE de la République, à l'époque où M. Dujardin était maire, et que, homme de lettres en même temps qu'artiste et administrateur, il & = 54 e” [l prononça dans les cérémonies publiques, des discours qui ont eu du retentissement. » Vous verrez, Messieurs, si le nom de Corbet est digne d’être relevé, et, persévérant dans là marche que vous avez suivie , vous jugerez s’il n’est pas utile que vous proposiez un prix pour l’auteur de la meilleure biographie de Corbet, artiste lillois. » Je termine ici, messieurs, en concluant que l'esprit d'associa- tion que vous avez su conserver, a été la cause des résultats obtenus, et que le bien que vous avez fait au pays l’a été parsuite de la mul- tiplicité des facultés que. vous avez admises. Le titre qué vous avez donné à votre Société vous a obligés à le justifier, aussi, en les cultivant, vous avez honoré, protégé les sciences et les savants, l'agriculture et les hommes qui s’y livrent, les arts et les artistes. » Après ce discours, M. Dezerur, Secrétaire-Général de la Société, a proclamé dans l’ordre suivant les différents prix étrangers à l'agriculture : $ 1. LITTÉRATURE, SCIENCES & ARTS. * Fidèle à la noble mission qu’elle s’est donnée et qu’elle accomplit depuis près d’un demi-siècle, en étendant toujours le cercle de son action, la Société des Sciences, de l'Agriculture et des Arts de Lille, éprouve un vif sentiment de satisfaction de pouvoir constaler une fois de plus, que le sol de notre beau département n’est pas seule- ment riche en moissons, mäis“que plusieurs branches du grand arbre scientifique y portent aussi des fruits abondants. Sur les rapports motivés de commissions spéciales, et sans pré- z * NOTA. — Aucun mémoire n’a été présenté sur les sujets! littéraires et scientifiques mis cette année au Gonçours par la Société, 37 — 548 — tendre que les travaux, que les ouvrages dont il lui a été donné de distinguer, d'apprécier le mérite, soient les seuls remarquables qu'ait vu naître le département, La Société offre le témoignage public de sa haute estime et de sa reconnaissance à M. »’Azgerr pe Luynes, cet ami, ce bienfaiteur éclairé des Arts, ce Mécène moderne, pour avoir prêté son puissant appui à la gravure au moment où de trop faciles reproduetions menaçaient son avenir et pour avoir choisi notre musée Wicar, comme premier champ de ses travaux, travaux qu'il a confiés à deux artistes lillois, MM. Wacquez et Leroy. Elle ajoute à ce témoignage, la remise de peux Méparzces qu'elle prie M. »’Azsert DE Luynes de transmettre à ces Artistes qui se trouveront doublement heureux et flattés de les recevoir de la main d’un homme d'un mérite si éminent, d’un appréciateur si habile. La Société offre aussi un témoignage public de sa haute estime : À MM. Vincenr et DE CoussemackeR, tous deux ses membres correspondants, auteurs d'ouvrages d’un grand intérêt scientifique, l'un sur la musique des Grecs, l’autre sur l'histoire de l'har- momie. La Société décerne : À M. le docteur Duzarpin, médecin à Lille, une Méparcse por, pour ses importants travaux en télégraphie électrique. A M. MazwGus, maitre de chœur de la paroisse de Saint- Etienne, à Lille, une MéDaiLLE D'ARGENT, grand module, pour les progrès qu'il a fait faire à la musique sacrée et pour les nom- breuses compositions dont il a enrichi cette partie si importante, et si majestueuse du culte catholique. A M. Larux, luthier à Lille, une paretLze MÉDAILLE pour les perfectionnements qu'il a introduits dans la construction des instruments à archet. (509) — $ 11. RÉCOMPENSES Aux Quvriers des fabriques et aux FKléèves des écoles primaires, C'est aux temps présents à assurer, par de bonnes et Sages mesures, la tranquillité des temps à venir, l'administration muni- cipale de la ville de Lille marche résolument dans cêtte voie salu taire; c’est ainsi qu’elle à attribué des livrets, tant! de la Caisse d'épargne que de la Caisse des retraites, à un certain nombre d'ouvriers qui s'étaient plus particulièrement, distingués par la moralité, l'esprit d'ordre et l’assiduité au travail; et aux jeunes élèves les plus recommandables parmi ceux des écoles primaires. Ces livrets, elle a choisi notre séance solennelle pour en faire la remise et doubler le prix de la récompense en appelant surelle la publicité qui propage et les applaudissements qui font naître les imitateurs. La Société est flattée de cette distinction : elle est heureuse d'unir ainsi dans son programme, aux palmes académiques, les . récompenses décernées aux vertus modestes, à la jeunesse stu- dieuse. L'administration municipale décerne des Livrets de la Caisse d'épargne à MM. Cuasor, Michel, ouvrier raffineur, depuis 50 ans chez MM. Bernard frères. | Lozz, Joseph-Auouste, ouvrier filien, depuis 48 ans chez M. Laden. M "° Desronraine, Rosalie Gennart, ouvrière en coton, depuis 45 ans chez M. H. Barrois. Cover, Dominique, ouvrier filer, depuis 45 ans: chez M. Lucien Leihierry. — 550 — Dewerr, Augustin, ouv. filtier, depuis 45 ans chez M. Senélar. Coquerez, Louis, ouvrier liltier, depuis #4 ans chez M. Des- camps, Auguste. Parent, Gabriel, ouvrier filtier, depuis 44 ans chez M. Des- camps, Auguste. Simon, Constant, ouvrier filer, depuis 44 ans chez MM. Ovi- gneur, frères. WarrmreLos, Antoine, ouvrier teinturier, depuis 42 ans chez M. Descat-Leleux. Liserr, Henri, ouvrier en cardes, depuis 41 ans chez M. De- carnin. Héquerre, Auguste, ouvrier filtier, depuis 40 ans chez M. Saint-Léger. | Duriez, Augustin, ouvrier filer, depuis 40 ans chez M. Pouillier-Longhaye. Popevi, Emile, ouvrier en chicorée, depuis 39 ans chez M. Humbert-Lervilles . Sanwsouuteu, Henri, ouvrier en fil, depuis 39 ans chez M. Descamps, Auguste. Gugzuanr, Etienne, ouvrier en cardes, depuis 38 ans chez MM. Scrive frères. Dourrevaux, Jean-Baptiste, ouvrier filier, depuis 37 ans chez M.me veuve Crespel et fils. Wicparr, Louis-Joseph, ouvrier filter, depuis 37 ans chez M. veuve Crespel et fils. DourreLonG, Jean-Baptiste, ouvrier filtier, depuis 37 ans chez M." veuve Crespel et fils. Dorre, Charles-Hubert-Joseph, ouvrier en fil, depuis 36 ans chez M." veuve Crespel et fils. Descuève, Félix, ouvrier filtier, depuis 36 ans chez M. Fau- chille-Delannoy. Cawsray, Hubert-Joseph, papetier, depuis 36 ans chez M. Danel, imprimeur. = 591 — Bonn, César, ouvrier filtier, depuis 36 ans chez M."° Des- camps (née Danel) et Bigo. Osrenpe, Jean-Baptiste, ouvrier en: fil, depuis 36 ans chez M." veuve Crespel et fils. WaresqueLLe, Michel, ouvrier en cardes, depuis 35-ans chez MM. Scrive frères. Taéry, Louis, ouvrier fileur, depuis 34 ans chez MM. Lam- bert et Courbont frères. Lecrerco, Philippe, ouvrier filtier, depuis 34 ans chez M. Fauchille-Delannoy. Masczé, Pierre-Joseph, ouvrier en fil, depuis 34 ans chez M."e veuve Crespel. Hauwez, Jean-Baptiste, fileur, depuis 34 ans chez M. Wal- laert-Desmons. Cauprow, Emile, ouvrier fileur, depuis 34 ans chez M. Wal- laert-Desmons. Gosert, Jean-Baptiste, ouvrier en fil, depuis 33 ans chez M." veuve Crespel et fils . Baiseur, Jean-Baptiste, ouvrier en fil, depuis 33 ans chez M." veuve Crespel et fils. Mention honorable à MM, Prouvosr, Donat, maïtre-ouvrier de filterie, depuis 45 ans, chez M. Descamps-Beaucourt. RonarT, Dominique, papetier, depuis 38 ans chez M. Danel, Imprimeur. Demapre , Joseph, ouvrier en cardes, depuis 32 ans, chez MM. Scrive, frères. Cocuereux, Henri, ouvrier tissérand, depuis 32 ans chez M. Debuchvy. Denis, Martin, ouvrier en fil, ‘depuis 32 ans chez Mme Ve Crespel et Fils. — 1552 — Baupry , Désiré, pressier, depuis 32 ans chez M. Danel, Imp. Lesrux, Emélie-Françoise, régleuse de papier, depuis 32 ans chez M. Danel, Imprimeur. Navez, Alexandre, ouvrier filtier, depuis 32 ans chez M. Descamps, Auguste. Dourzen, César, maître-ouvrier de filterie, depuis 32 ans chez M. Descamps-Beaucourt. Laisxé, Louis-Désiré-Joseph, ouvrier fileur, depuis 34 ans chez M. Desmedt-Wallaert. Dscorrienigs, Anne-Marie Joseph, dévideuse, depuis 31 ans chez M. Vernier-Vanhoenaker. Pauwezs, Alfred, compositeur, depuis 31 ans chez M. Danel, Imprimeur. Brssrau, Xavier, fileur, depuis 34 ans chez M. Mille, Auguste. DELEBECQUE, François, ouvrier en cardes, depuis 30 ans chez MM. Scrive, frères. SPELLEMACK, Benoît, ouvrier filier, depuis 30 ans chez M. Benoit-Hallez. Durossé, César, ouvrier fileur, depuis 30 ans chez M. Vantroyen et Mallez. Frère, Joseph, ouvrier filtier, depuis 30 ans chez M. Crespel- Descamps et Delespaul. PriGuer, Rosalie, dévideuse, depuis 30 ans chez M. Wallaert- Desmons. HerriN, Philippe, ouvrier filtier, depuis 30 ans chez M. Fauchille-Delannoy. Reusr, Louis, relieur, depuis 30 ans chez M. Danel imprimeur. Prevosr, Ilenri, papetier, depuis 30 ans chez M. Danel imprimeur, — 553 — Elèves des Ecoles primaires auxquels des Livrets de la caisse des retraites de la vieillesse sont accordés en récom- pense de leur bonne conduite et de leurs succès. ÉCOLE PRIMAIRE SUPÉRIEURE. Trour, Henri. Dusuisson, Alphonse. DeLrnesse, Louis. ÉCOLES PRIMAIRES COMMUNALES. Guizserr, Baptiste. Carre, Henri. Lerouce, Gustave. : Denisow, Louis. Croisier, César. Duronr, Adolphe. Desquienxs, Auguste. OGrez. ÉCOLES DES FRÈRES DE LA DOCTRINE CHRÉTIENNE. DuvoceLLe, Oscar. Rexiers, Louis-Francois. Frixow, Joachim. Cazier, César. S IN. PRIMES Pour la bonne tenue des Logements d'ouvriers, Appréciant l’œuvre si méritoire de l'assainissement des logements de la classe ouvrière, et voulant, dans la limite de ses moyens, en continuer les bienfaits. là Société avait promis des Primes ou des Médailles aux chefs de famille qui auraïententretenu, pendant toute l’année, leur logement dans le plus grand état de propreté possible, Ho elle avait pris l'initiative dans cette œuvre de bien où l’a suivi depuis le Bureau de Bienfaisance de la ville. Ayant reconnu aujourd'hui que cette institution charitable était mieux placée qu’elle pour atteindre le but désiré, la Société a accepté la demande que lui a faite le Bureau de Bienfaisance de décerner, dans sa Séance solennelle, les Prix obtenus et d’y donner par là plus d'éclat et de retentissement. Le Bureau de Bienfaisance décerne des récompenses à : MM. Sauvace, Carlos, rue Saint-Sauveur. — Lapaiise, Joseph, cour l’Apôtre. — Cozce, Prosper, allée des Jardins. — ManGez, Carlos, rue de la Vignette. — Wacox, Louis, rue de Fives. — Luserr, César, cour Jeannette. — Muzuer, Charles, rue des Robleds. — Dérerosse, Florent, rue du Bourdeau. — Connie, Charles, rue des Casernes. — Drzzy, Alexandre, rue du Prez. — Fourmaux, cour Lebrun, rue Saint-Sébastien. — Vaxporue Dupin, Quai de la Haute-Deüle. — Garaxn, Henri, rue de la Nef. — Dorre, Désiré, rue de la Baignerie. — Dusous, Charles, rue Saint-André. M. Daarzuin (veuve), rue Joyeuse. —GrAnpsarr, Pauline, veuve Vanselinck, rue des Morts. — CLémenr, Isabelle, veuve Vandergyenden, rue Mahieu. — Sécer (veuve), rue du Gard. — DupLancnon (veuve), rue Doudin. Mentions honorables. M. Marézieux, Victor, façade du Réduit. M. Dunen, Désiré, rue de l’Hôpital-Militaire. M. Guirserr, Sophie, veuve Lenir, rue de Ban-de-Wedde. D — S IV, AGRICULTURE. £a parole est accordée à M. J. LereBvre, Secrélaire- Général du Comice agricole, qui s'exprime ainsi : La Société vient de signaler à l'opinion publique les nobles efforts accomplis dans les Sciences, les Lettres et les Arts en vue de leurs progrès et de leurs perfectionnements; les vifs et justes applaudissements partis de cette nombreuse assemblée et qui ont couvert les noms déjà proclamés, seront suivis, nous en sommes certains, de quelques témoignages de sympathie en faveur deshommes modestes qui se livrent aux travaux agricoles, moins brillants, mais plus immédiatement utiles à l'humanité entière que les premiers. Nous ne retarderons pas la légitime impatience des lauréats en esquis- sant ici la marche générale des améliorations qui se produisent en ce moment dans les diverses branches de l’agriculture locale; il nous suffira de constater que l’ancienne châtellenie de Lille, jadis le berceau et le modèle des pratiques agronomiques rationnelles, continue de se tenir à la tête du mouvement de progrès qui entraîne l’ensemble de l’agriculture nationale. Machines et instruments agricoles. Teilleuse mécanique. — La culture du lin, autrefois l’une des sources de la prospérité du pays, éprouve depuis un cértain nombre d’années une fâcheuse décadence : M. Giraudon à cherché à la relever par l'effet d’une préparation plus parfaite et plus économique de la fibre textile par excellence. Pour y parvenir, il a construit une Teilleuse mécanique destinée a être mue à bras d'homme et à être placée dans nos plus modestes exploitations. La Société décerne, à titre d'encouragement : Une MéDaiize D'ARGENT à M. Félix Giraupow, constructeur à Lille. Charrue. —D'heureuses modifications apportées à la confection de là charrue du pays ont fait accorder : UNE MépaiLLe D'ARGENT à M. A. LaGnigz, maréchal à Roubaix. — 556 — Emploi des Vaches pour les travaux agricoles, Les services que la petite culture peut recueillir des vaches, comme force motrice appliquée aux opérations aratoires, ont déter- miné la Société à provoquer cette innovation partout où elle serait susceplible d'y devenir utile; grâce aux encouragements qui ont été décernés, cette idée simple se généralise depuis quelques années dans la pratique. Quatre Primes pe 50 FR. sont accordées aux cultivateurs dont les noms suivent, et qui ont accompli les conditions du Programme : 1. Hunez, Victor, cultivateur à Radinghem ; 2.9 Waucquier, Pierre, id. à Cobrieux ; 3.9 Buisserre, Benoît, id. à Annœullin; 4.9 DereGnaucourT, Jean-Baptiste, id. à Capelle. Arboriculture forestière. Mépaizze D'ARGENT à M. Desmiens, François, pour les soins intelligents qu’il a donnés depuis 35 ans à la culture forestière des bois Communaux de Gondecourt. Exploitation modéle, La Mépazre p'or de la valeur de 200 fr. que la Société décerne annuellement pour la gestion habile et progressive des exploitations rurales’ devait, celte année, être appliquée à l’un des deux Cantons de Lannoy ou d'Armentières, dont les conditions agricoles sont pourtant fort dissemblables et très-inégales : deux candidats se sont partagés le suffrage du Comice agricole, et quoique offrant des bases agronomiques essentiellement différentes, leurs exploitations ont été jugées d’un mérite égal pour la somme des progrès accomplis dans leurs localités respectives. En consé- quence, la Société décerne : Une Mépaize D'or à M. veuve Leroy, fermière à Houplines ; Et semsranze Mépaizse à M. Boucuery, cultivateur à Chéreng. HN Culture en famille, Deux PRIMES de 50 fr. ont été offertes aux cultivateurs, chefs de famille, qui travaillant seuls, avec le concours de leurs enfants, demeurant avec eux, sans: domestique ni ouvriers auxil- liaires, mettraient en valeur la culture la plus étendue et la plus productive, eu égard au nombre de bras valides, qu'ils. peuvent employer. Ces primes sont accordées : 4.9 A M. CasreLan, (Aimable), d'Hallennes-les-Haubourdin, qui, avec l'assistance de sa femme et de ses onze enfants, cultive 19 hectares. 2.9 À M. Dugrain (Pierre-Francois), de Fournes, exploitant, par les seuls soins de sa famille, composée du père, de la mère et de six enfants, huit hectares de terre, sans compter les pâturages. UNE MÉDAILLE D'ARGENT, à M. LazLoy, (Alexandre), de Gonde- court, comme se rapprochant, des. précédents par le travail de sa famille, composée de sa femme, de son frère et de six enfants eultivant en propre 3 hectares 42.ares et donnant en outre, pour autrui, ses soins à 4 hectares 50 ares de transplantation, de récoltes de colza et semblable étendue de récolte en blé. Dans l'intention de propager l'usage des cribles métalliques con- fectionnés par M. Gaillard, de Paris, M. Marescaille de Courcelles a mis à la disposition de la Société, pour être distribué comme récompense, plusieurs deses instruments perfectionnés; la généreuse inspiration de notre honorable collègue, ne saurait recevoir une meilleure application, que celle de l’accorder en gratification à l'honnête et digne famille d'Alexandre Larroy. Création et amélioration de chemin public. Mépaizre D'ARGENT, grand module, à M. C. Laczemanr, maire d’Erquinghem-le-Sec, pour la direction intelligente, les sacrifices personnels. le zèle et le dévouement dont il a fait preuve dans la création et l’entretien depuis quatre’ ans de la viabilité communale. — 558 — CONCOURS DÉPARTEMENTAL DE BESTIAUX. Amélioration des races. TAUREAUX. 1.%prix, 250 fr., à M. Rucrepusca, de Saint Sylvestre-Cappel, 2.e id., 200 fr., à M. Lecar, de Bondues. 3.° id., 450 fr., à M, Desucuy, de Noyelles. 4.8 id., 400 fr., à M. Louis Mamieu, à Cappelle-Brouck. Mention honorable à M. PLANQUE, à Ennetières. VACHES DE CINQ ANS AU PLUS. 1. prime, 120 fr., à M. Vannove, de Merville. 2. id, 100 fr., à M. Cousin, de Lambersart. 3.° id., 80 fr., à M. LecowG, de Verlinghem. GÉNISSES DE DEUX A TROIS ANS. 4. prime, 80 fr., à M. Louis Mamreu, à Cappelle-Brouek. 2.e àd., 70 fr., à M. Fidèle Bouxtor, de Bailleul. 3. ïd., 60fr, à M. Durivaux, de Sainghin-en-Mélantois. 4.e et 5° primes, ex œquo, 30 fr., à M. Lerers, de Loos, et à M. Picaver, de Quesnoy-sur-Deüle. Mention hanorable, à M. Corner, de Sainghin-en-Mélantois. BÉLIERS. A. prix, 60 fr., à M. Louis Vaxonpenpick, de Coudekerque. 2.e id., 40fr., à M. Craunorez, de Morbecque. 3.° id., 20 fr., à M. César MaerteN, de Boeschèpe. Engraissement des Bestiaux. VEAUX. 4. prix, 80 fr., à M. Rowarr, de Bourghelles. 2.e id., 60fr.. à M. Augustin Cocez, &e Mérignies. 3.e id., 40fr.. à M. Joseph Monrez, de Rersée. ae et 5,0 id, 40 fr, ex œquo, à M. Rocer-Lerssyne, de Mérignies et à M. Dupus, aussi de Mérignies. — 509 — AGENTS AGRICOLES. La distribution des récompenses aux labeursincessants, poursuivis pendant une longue série d'années par les serviteurs de l’Agriculture, n'est pas une partie des moins intéressantes de la solennité qui nous rassemble. Jusqu’iei cependant les services agricoles les plus élevés et les plus méritoires ont rarement offert des candidats à nos modestes couronnes: cette année, nous sommes heureux d’avoir à vous signaler deux exemples de capacité de dévouement et d’abné- gation qui honorent le travail agricole ; nous vous demanderons la permission de vous faire connaître les faits dans les termes mêmes des témoignages parvenus à la Société. Maîtres de labour. «La ferme de M." V.e Leroy, d'Houplines, qui vient de recevoir » la MépaïLce D'or de bonne exploitalion, avait, du vivant du mari » de celte dame, recueilli un pelit cousin ; élevé par ses soins, bien » jeune encore, iltravaillait aux champs, puisil conduisait la charrue. » Ce jeune homme a grandi dans la maison. Après le décès de son » mari, M. Leroy, qui avait reconnu en lui toutes les qualités qui ÿ pouvaient faire un excellent cultivateur, lui confia la gestion de son » exploitation. Il s'appelle Auguste Fenart; c'est lui qui suivant les » lecons de son parent défunt, les a mises en pratique de la manière » la plus remarquable, au profit de M." Leroy; c’est lui le véri- » table auteur de la supériorité dela culture de cette dame. Il est » aujourd’hui âgé de 50 ans. Toujours honoré de l’intime confiance » de sa parente et la méritant au suprême degré, il peut certaine- » ment être considéré comme lewmeilleur cultivateur du pays, » quoique ne cultivant pas pour son compte. Certes, si les statuts » de la Société ne s'y opposaient pas et si elle pouvait décorer cet » homme de mérite de la grande médaille d’or de 200 fr., ce serait » une récompense justement donnéé'et à laquelle M." Leroy et le » Canton d’Armentières applaudiraient.s — 660 — Cet exposé si simple el si touchant-de vertus trop rares el trop ignorées , nous a été confirmé, non-seulement par la famille de M.me V.e Leroy, qui vénère Auguste Fenarr comme son véritable chef et père, mais encore par de notables cultivateurs de la localité. En conséquence, la Société décerne à M. Auguste FENART, UNE MÉDAILLE D'ARGENT, grand module, pour l’habile gestion donnée à l’exploitation de M. V.° Leroy, d'Houplines. La Société a rencontré dans M. Jean-Baptiste Taierrry, employé chez M. Benjamin Demouveaux , fermier à Bouvines, un digne émule de M. Auguste Fenarr ;» cet agent agricole a successivement été employé comme garcon de cour, valet de ferme, etenfin depuis » dix ans comme maître de labour, remplaçant son maitre, infirme, » rentrant toujours avec une exactitude exemplaire pour donner ses » soins aux animaux de la ferme; soignant avec un zèle et une » capacité dignes d’éloges, les intérêts d’une nombreuse et hono- rable famille, qui, sans ses soins tout paternels, aurait incliné » à sa ruine : né se réservant que les petits profits pour ses menus » plaisirs, il fait, avec ses gages, subsister sa vieille mère, veuve » depuis vingt-quatre ans, et dont il est l’unique soutien. » Y Ces faits, textuellement cités, sont relatés dans un certificat signé des eultivateurs notables de la commune de Bouvines, pleinement confirmés par plusieurs membres du Comice agricole, ont été vérifiés par une Commission spéciale, qui en a assuré la rigoureuse exactitude. La Société décerne à Jean-Baptiste Tarerrry, Uxe Mépar£ce D'ARGENT el UNE Pre de 30 francs. Maniement des Instruments perfectionnés, La Société accorde : Une MÉDAILLE D'ARGENT à M. A. Buriez, ouvrier à gage, chez M. Lallemant fermier à Erquinghem-le-Sec , pour son aptitude à bien conduire les semoirs et autres instruments perfectionnés. — 561 — Berger. La Houcerrk D'arGeNT eLuNE Prime de 30 francs, sont décernées à M. Jean-Pierre Tuéry, pour ses bons et loyaux services pendänt 35 ans, en qualité de berger, chez M. Honoré Cochet, eulivateur à Gondecourt. LR Domestiques de ferme. La Société décerne : Les Epis d'argent et une Prime de 30 francs à Jean-François Brice, depuis 44 ans chez M. Louis Lambelin, à Ennevelin: La Fourche d'honneur et une Prime de 25 francs à Antoine CorniLze, depuis 43 ans chez M. Constant Facon, à Halluin. Une Médaille d'argentet une Prime de20 fr. à Pierre Craves, depuis 42 ans chez M. Lemaire-Gadenne, à Flers. Une Médaille d'argent et une Prime de 20 fr. à Géry Accarr, depuis 41 ans chez M. Gallet, successeur deM. Dubrulle, à Mar- quillies. Une Médaille d'argent et une Prime de 20 fr. à Bauduin Haver, depuis 40 ans chez M. veuve Leuridan-Segon, à la Chapelle-d'Armentières. Une Médaille d'argent et une Prime de 20 fr. à Pierre Derousaix, depuis 40 ans chez M. Louis Ducatillon, à Hem. Une Médaille d'argent et une Prime de 20 fr. à Alexandre Bouin, depuis 38 ans chez M" veuve Alexandre Ramery, à Armentières. Ouvriers à gages. La Société décerne : . Le Piquet d'honneur et une Prime de 30 fr. à Joseph Vanoaue, depuis 52 ans chez M. Auguste Dewette, à Nenville- en-Ferrain. La Bèche d'honneur et une Prime de 95 fr. à Auguste Fruzeux, depuis 52 ans chez M. Béghin, à Fromelles, — 562 — Une Médaille d'argent el une Prime de 20 fr. à Jean-Baptiste Tairrez, depuis 48 ans chez M. Lefebvre, à Mons-en-Pevèle. Une Médaille d'argent et une Prime de 20 fr. à Pierre- François Lepcar, depuis 42 ans chez M. Haquette, à Roncq. Une médaille d'argent et une prime de 20 fr. à Augustin Buisine, depuis 42 ans chez M. Louis Waymel, maire à Wavrin. Une Médaille d'argent et une Prime de 20 fr. à Jean-Baptiste Duazr, depuis 39 ans chez M. Louis Heddebault, à Houplin. Une Médaille d'argent et une Prime de 20 fr. à Romain Decannoy, depuis 39 ans chez M. Delehaye, à Ennevelin. Une Médaille d'argent et une Prime de 20 fr. à Pierre Leccerco, depuis 36 ans chez M. Charles Quint, à Chéreng. Servantes de ferme. La Société décerne : Une Médaille d'argent et une Prime de 30 fr. à Amandine Bazcer, depuis 40 ans chez M. François Dubus, à Cappelle. Une Médaille d'argent et une Prime de 25 fr. à Appoline BerLoue, depuis 30 ans chez M. J.-J. Lambelin, à Bondues. Une Médaille d'argent etune Prime de 20 fr. à Julie Lacacne, depuis 27 ans chez M. Louis Hochin, à Martinsart, (hameau de Seclin). Une Médaille d'argent et une Prime de 20 fr. à Rosalie Duwez, depuis 25 ans chez M. Descloquemant, à Seclin. Le Secrétaire général, Le Président, Vicror DELERUE. BAILLY. Le Secrétaire du Comice Agricole, J. LEFEBVRE. Lille, — Imp. de Leleux. Len w1EmantS DR NC Fe nches ont êlé omises à la fin de l'Essai dé Le Sur la Flandre française, par M. Meugy ; une de 1852, ER. ia 1 (Pagetôt du Melaue Del ARS) Fige (Page 160 due Vue de 1804) LL CNE D, Œucienne Cuviéic & Cru) - Caruêre de 2). APP ? N Lys s SOLEX NE F3 (Tage 186 du Volune de 4851) 7, a 72 AT mme — LL mé \ CES 4 THAT É d ; Fe \ ES Coupe de fa cote Guipeupoul au DS (RCE RU Mme ü de 2 D rene D Dana - Ne Ta Tree Lt Eu Do de À He Te à q (2 4 15.) Varanchée de Chen de Fee, à Tin. Fa 5 (ge 17) : À N Dali de Torre Gay T (Lnge 46) EC 1 bise Ex out Ga. G(Panu 45) ; Roc Cure le vote Je Cl Cherques à Cet GEAR ENT Map, 2 Cuoel. Boy. 9 (Page 49) q ( \ à t C | À CLUDTD TI DD = L À : ne. Sr Z 22 | | Ut } \ | ver votre LE. " 4 DA ES | nine D. Hot : = 4 12.) “ = Ora Je LU 11. ( Page 71.) Où Dapud tiques fx Da:ahsurre N $ — (Oum = Le : re & — ET ERE + Sig 15 (fee 88) M rent. ns Guporaussale ai Chain defer eulte Dolleut we Oudbeisteene M ur de MCRAIR Tes a ame de Mhukerque Man x 86) 19 F G: 4.4 Te : = x ” Ystan qu " HP ES ds | È {5 5 TL LEE co din Viiirosvetie LA ae comble À her LL si 14 AE _— lues Ve Lmmhirane Disparition gene Sue mont de unique ET FO 3 1 | nr y rutlans a | {C L PRTUTA TS Lune ATAN A / (( 1 LCL LH ( 563) LISTE DES MEMBRES DE LA SOCIÉTÉ. Membres honoraires. MM. LE PRÉFET du département du Nord. LE MAIRE de la ville de Lille. DESMAZIÈRES, H., propriétaire, admis membre titulaire le 22 août 1817. COMPOSITION DU BUREAU POUR L'ANNÉE 1853. 19 janvier 1835. 27 messid.an XI. 17 novemb. 1858. 21 juin 1844. 9 avril 1847. 19 avril 1844. 17 mars 1848. 12 sept. 1806 12 sept. 1811. 3 décemb. 1819. 17 août 1821. 18 avril 1823. 20 mars 1824. 2 octobre 1825. 2 décemd. 1825. 21 novemb. 1828. 5 décemb. 1828. 27 avril 1831. 3 février 1832. 1. juillet 1836. 31 janvier 1840. 20 novemb. 1840. 5 mars 1841. 21 janvier 1842. 19 novemb. 1845. 7 janvier 1848. LE GLAY, £, président, conservat. des arch. du Nord. MACQUART, %, vice-président, propriétaire. DELERUE, secrélaire général , juge-de-paix. CHON, secrétaire de corresp., prof. au Lycée impérial CHRESTIEN , bibliothécaire , docteur en médecine. BACHY, trésorier, agronome. CORENWINDER, agronome, secrélaire de la com- mission d'agriculture. Membres titulaires. DELEZENNE, #, professeur de physique. DEGLAND , #, docteur en médecine. LOISET, médecin vétérinaire , ancien représentant. LESTIBOUDOIS (Th.), +, correspondant de l’Institut. VERLY, architecte, KUHLMANN, *£, prof. de chimie, corresp. de l'Institut. BAILLY, docteur en médecine. HEEGMANN , propriétaire. DE COURCELLES , propriétaire. DANEL, propriétaire. MOULAS, littérateur. LEGRAND (Pierre), #, avocat, député au Corps Législ. BENVIGNAT, architecte, professeur. LEFEBVRE (J.), #, agronome. TESTELIN , docteur en médecine, anc. représentant. CAZENEUVE, #, docteur en médecine. BOLLAERT, x, ingénieur des ponts-et-chaussées. CALOINE, architecte. LAVAINNE , professeur de musique, chevalier de l'ordre de la Couronne-de-Chêne , des Pays-Bas. 38 20 octobre 1848. 6 avril 1849. 6 avril 1849 6 avril 1849. 30 janvier 1852. 20 mai 1852. 10 décemb. 1852. id. id. id. id. id. id. id. id. id. ( 564 Membres titulaires (suite). DUPUIS , avocat. PARISE , docteur en médecine. DELIGNE, professeur de littérature. LAMY. professeur de physique au Lycée impérial. BLANQUART-ÉVRARD, +, propriétaire à Lille. COLAS, peintre. CHARIÉ, #, ingénieur en chef des ponts-el-chaussées. VIOLETTE , #<, commissaire des poudres et salpôtres. GARREAU, pharmacien en chef à l'hôpital militaire, TISSANDIER , docteur ès-lettres. BRUNEEL , *£, littérateur. GOSSELET, docteur en médecine. MEUREIN , maître en pharmacie. DE LA FRÉMOIRE , #, ingénieur des ponts-et-chaus. DUREAU, conseiller de préfecture. BROWERS, pharmacien aïde-major, à l'hôpital milit. OUVRAGES OFFERTS À LA SOCIÉTÉ. LA SOCIÉTÉ A RECU EN DONS PENDANT L'ANNÉE 1853, Des différents Ministères : Histoire des peintres. Bulletin des comités historiques. Année 4852. Tome 1v. Bulletin du comité de la langue, de l’histoire et des arts de la France. Année 1853. N.° 1, N.o 2. Rapport fait à l’usage des inscriptions et belles-lettres, au nom de la commission des Antiquités de la France, par M. Lenor- mant. Année 1852. Catalogue des brevets d'invention pris du 1.‘ janvier au 31 dé- cembre 1852. Description des machines et procédés consignés dans les brevets d'invention, de perfectionnement et d'importation pris sous l'empire de la loi de 1791. 78-79.° vol. Année 1852. Description des machines et procédés pour lesquels des brevets d'invention ont été pris sous l'empire de la loi du 5 juillet 1844. Tomes x et x. 1852. De ses Membres résidants : Rapport sur quelques procédés emplovés pour clarifier les bieres ; extrait des travaux du conseil central de salubrité du dépar- tement du Nord. Rapporteur, M. Gosselet, M. R. (1) Messe à trois voix pour soprano, ténor, basse et solos, par M. Ferdinand Lavainne, M. R. Mémoire sur les archives des abbayes de Liessies et de Maroilles, par M. Le Glay, membre correspondant de l'Institut, M. R. Lille, 1853. Brochure in-8. Dictionnaire du patois de Lille et de ses environs, par M. Pierre Legrand, M. R. Grand in-8. Lille, 1853. De l'affection typhoïde de l'espèce chevaline et de ses rapports avec la fièvre typhoïde de l’homme, par M. Loiset, M. R. Brochure. Lille, 1853. Rapport sur les inoculations de pleuropneumonie épizootique (+) Les lettres M. R. signifient Membre résidant. Les lettres M. C, signifient Membre correspondant, 566 } dans le nord de la France, d'après le système du docteur Willems, par une commission mixte de la société centrale de médecine et du comité agricole de Lille. M. Loiset, M. R., rapporteur. Les Saisons, par Jacques Thomson, traduction en vers français, par M. P. Moulas, M. R. Lille, 1853. De l'opération de la cataracte pratiquée à l’aide d’une fine aiguille à coudre introduite à travers la cornée, par A. Jacob, traduit de l’anglais par A. Testelin, M. R. Bruxelles, 1853. Description du monument à élever à Lille, à la gloire de l'empe- reur Napoléon [r, suivant le projet del’architecte C.Verly. 1853. Mémoire sur l'enzootie foudroyante (Myélite dorso lombaire), atteignant toutes les espèces herbivores dans le nord de la France, par M. Loiset, M. R. Brochure in-8. Lille, 1853. Médailles, jetons, monnaies du règne de Sa Majesté l’empereur Napoléon IE, précédées des pièces de la représentation et de la srésidence, par C. Verly, M. R. 1, 2, 3 et 4.eliv. Des Sociciés correspondantes : ABBEVILLE:.ul Lot sit Mémoires de la société d'émulation. Années 1849, 50, 51 et le 1.er semestre de 1852. AMIENS:....:.#enamx Le cultivateur de la Somme ou bul- letin des comices agricoles d’A- miens, de Montdidier et de Doul- lens. Année 1852, N.0 4. Année 1853, N.05 1, 9, 3, 4. Mémoires de la société des anti- quaires de Picardie. Documents inédits. Tome n. 1853. Bulletin de la société des antiquaires de Picardie. Année 1853. N.o5 1, 2 et 3. ANGERS ARRET RE Mémoires de la société d'agriculture, sciences et arts d'Angers, 2. série : 2.0 vol. , 2.6 liv., 1851; 3. vol., 1.8 et 2.0 liv. 1852. Bulletin de la société industrielle du département de Mame-et Loire, 33° année, 3.€ de la 2e série. 1852, ol ds à ti ANGERS (suite). ....... BPAUNVAIS" 2 CPR BEOIS.r «. .G£R + de 72 BORDEAUX. . su BOULOGNE-SUR-MER... BOURGES 2210 I, 16 BRUXELLES 91000, (567 | Travaux du comice horticole de Maine-et-Loire. 4 vol. N.°5 35 et 36. 1852. Bulletin de l’Athénée du Beauvoisis, 2.e semestre de 1852. Mémoires de la société des sciences et des lettres de la ville de Blois. Compte-rendu de la commission ad- ministrative de la société des amis des arts. Actes de la société Linnéenne. 2:° série : tome vin, 3.° et 4.€ Liv. ; tome 1x, 1.re liv. Programme de l’académie des scien- ces, belles-lettres et arts. Séance du 20 juin 1853. Recueil des actes de la même aca- démie. 2.2, 3.2 et 4!° trimestre de 1852. Société d'agriculture, des sciences et des arts. Séances du 30 octobre 1852 et 19 mars 1853. Extrait du bulletin agricole dé la société. Mai et juin 1853. Bulletin de la société d'agriculture du département du Cher. N.95 53 et 54. Tome vu. Société royale de Flore, 62.2 et 63.° exposition. Académie royale des sciences. An- nuaire. 18.2 et 19.e année. Mémoires couronnés, tome v, 1."e partie. Bulletin des sciences , tome 18, 2.° partie, tome xx, 4.7e et 2.° partie; tome xx, 1.7° et 2.° partie. Mémoires de la société d'agriculture et de commerce, tome v, 1." et 2.e partie. Mémoires de l'académie des sciences, arts et belles-lettres. Caen, 1852. + ( 568 ) Des Sociétés savantes : CHALONS-SUR-MARNE. Séance publique de la société d'agri- culture, commerce, sciences et arts du département de la Marne. Années 1851 et 1852. Bulletin des travaux du comice agri- cole du département de la Marne, N.°5 16 et 17. CHARTRES MARS Ephémérides de la société agricole du département de l'Indre. Année 51 el 52. CHERBOURG. ......... Mémoires de la société nationale académique de Cherbourg. Mémoires de la société des sciences naturelles , 1 vol. CLERMONT en Auvergne. Annales scientifiques , littéraires et industrielles de l'Auvergne. CLERMONT-OISE ...... Bulletin agricole de la sociéte d'agri- culture de Clermont-Oise, du N.° 12 au N.0 17 inclus. COMPIÈGNE .. :.:..:. L'Agronome praticien, journal de la société d'agriculture de l’arron- dissement de Compiègne. N.° 13 à 18 inclus. DOUAL.. 4 #nv#te Publications agricoles de la société impériale et centrale. BRINATS RES CA Annales de la société d’émulation du département des Vosges. Tome vu, À cahier. RARAISE . sbonmaos Mémoires et publications de la so- ciété d'agriculture, d'industrie , des sciences et des arts de Falaise. 1853. GAND sie LE. Annales de la société royale des beaux-arts et de la littérature de Gand. 3.2 et 4.° liv. GENEVE... + Bulletin de la société vaudoise des sciences naturelles. N.° 25 à 30 inclus. | 569 ) RACINE PONER 2.7 Bulletin de la société académique de Laon, tome 17. 1853. PE HAVRE" 7.2. Recueil des publications de la société hâvraise d’études diverses. 18.° et 19.€ année. EIMOGES:. 5.1. Mr Bulletin de la société archéologique et historique du Limousin. Tome iv, 11.6 liv. Limoges, 1853. MBBE..icx ce Lure Chambre de commerce de Lille. — Observations contre l’affermage des canaux et la tarification uni- forme du péage des voies navi- gables. 6 juin 1853, 1 vol. in-4.° Bulletm médical du nord de la France. Broché. Rapport sur les travaux du conseil central de salubrité et des conseils d'arrondissement du département du Nord, pendant l'année 1852. N.c 41.1 vol. in-8.e. LYON. ......... . ... Mémoires de l'académie nationale des sciences, belles-lettres et arts de Lyon. Classe des sciences, tome 1; Lyon, 1851. Classe des- lettres, tome 1. Annales de la société linnéenne de Lyon. Années 1850 1852. Annales des sciences physiques et naturelles, d'agriculture et d'in- dustrie de la société nationale d'agriculture de Lyon. 2.° série, tome 111, 2.e partie. Année 1351. MACON RIM TEL Journal de la société d’horticulture, 8.° année, Ne 4 et 5. MENDE: 27 M PNR: Bulletin de la société d’agriculture , industrie et arts du département de la Lozère, N.° 33 à 39. Mende, 1853. METZ. DA AE AN RS Exposé des travaux de la société des sciences médicales de la Mo- selle. 1852. MULHOUSE... 2. NANTES pe etre PARIS. 0 ARE EN ROUEN SEC: ae SAINT-ETLENNE .. SAINT-OMER. bi spl TRONES tree - . (570 ) Bulletin de la société industrielle , N.05 119, 120, 121. Journal de la section de médecine de la société académique du dépar- tement de la Loire-Inférieure. 18° année, 29. vol. N.95 147, 148, 149. Société nantaise d’horticulture. — Résumé des travaux du 16 dé- cembre 1849 au 7 novembre 1852. 2.€ série, N.° 3. Nantes, 1853. Journal de la société d'agriculture et des comices agricoles du dépar- tement des Deux-Sèvres. 16.° année. Niort, 1853. N.°5 6, 7, 8, et 9. Société philomatique. Extraits des procès-verbaux des séances pen- dant l’année 1851 et 1852. Bulletin des séances de la société impériale et centrale d'agriculture de Paris. Annales dela société impériale d'hor- ticulture de Paris. Précis analytique des travaux de l’Académie des sciences, belles- lettres et arts de Rouen, pendant 1851 et 1852. Bulletin des travaux de la société libre des pharmaciens. Année 1852 Bulletin de la société libre d'émula- tion de Rouen. 1853. Bulletin de la société industrielle et agricole de l'arrondissement. Bulletin historique de la société des antiquairesdela Morinie.2.° année, 1.re et 2.° liv. Mémoires de la société d'agriculture, des sciences et arts du départe- ment de l'Aube. N.° 19 à 96 in- clus. Années 1851 et 1853. »71 | TOULOUSE .......... Recueil de l'académie des jeux flo- raux. 1853. Mémoires de l'académie impériale des sciences, inscriptions et belles- lettres de Toulouse. 4. série, tome 111. Année 1853. VAPENCE..:...... 200 Bulletin des travaux de la société dé- partementale d'agriculture de la Drôme. N.° 21. Avril 1853. VALENCIENNES ....... Mémoires de la société d'agriculture, sciences et arts de l’arrondisse- ment, tome 1x. Revue agricole, industrielle et litté- raire. N.° 2, 3 et 4. VERSAILLES... Mémoires de la société des sciences morales, des lettres et des arts de Seine-et-Oise, tomes 1, 11, I. Années 1847, 1849 et 1853. De ses Membres correspondants : Revista mensual de agricultura. Periodico de intereseses mate- riales, dirigito, par don Augusto de Burgos, M. C. 4 vol. in-8. Madrid, 1850. Le livre de la corporation des peintres et sculpteurs gantois (1338 à 1539. — 1574 à 1712). Notice de M. Edmond de Busscher . M. C. Broch. in-8.°. Ruines de l’abbaye de Saint-Bavon, à Gand, par le même. Id. Nouveau manuel des aspirants au baccalauréat ès - sciences, d'après le programme officiel de 1852, par MM. Langlebert et E. Catalan, M. C. 2:° partie. Notice de la bibliothèque communale de Bourbourg, par E. de Coussemaker, M. C. Lille, 1853. De l'insuffisance à domicile du secours médical et de la nécessité d’hôpitaux cantonaux, par le docteur Bruno Dauvin, M. C. Arras. Rapport du secrétaire de la commission de l'exposition de Dun- kerque. Novembre 1853. Introduction à l'histoire générale de la province de Picardie, par D. Grenier, M. C, 2 liv., 1853, 572 } Nouvel essai d'explication du monument d'Igel, par Marie-Anne- Libert. M. C. Bonn. 1852. Nouvelle architecture navale, par M. Maïzière, M. C. Sur les tables tournantes, par le même. In-8.° Essai de géologie pratique sur la Flandre française (arrondisse- ments de Dunkerque, Hazebrouck, Lille et Douai), par M. Meugy, M. C. Dawis ou un lâche, comédie en trois actes et en vers, par M. Eug. Ponsart, M. C. Lille, 1853. Des sourds-muets et des aveugles. — Mémoire sur l’état actuel des institutions à leur usage et sur les réformes à y apporter, par M. E. Hubert Walleroux, M. C. Paris, 1852. TABLE DES MATIÈRES CONTENUES DANS CE VOLUME, Pages. Deuxième mémoire sur la Phycite. matière sucrée du Protococcus vulgaris (Pliycée) par M. Lamy, M. R.(1)...................... Note sur la densité et le poids spécifique des corps, par M. Lamy, Recherches sur les combinaisons définies du chlore et du brome avec le phosphore, par M. B. Corenwinder, M. R................... Nouveau procédé pour déterminer la valeur industrielle de noir ani- mal, par M. B:Corenwmder, MR TT ne da scene Sur la transposition , par M. Delezenne , M. R..................... Expériences et observations sur les cordes des instruments à archet , Mar Me Delezenne MERE Re eee lemme ed Sur la formation des stomates dans le Tradescantia virginica et les transformations cellulaires qui l’'accompagnent, par M. Garreau, NOURRI EN RENE ee ee titine Supplément aux arbres et arbrisseaux et leurs insectes, par M. Mac- ATEN RAA NE A A TR AE AR tee Les plantes herbacées d'Europe et leurs insectes pour faire suite aux arbres et arbrisseaux d'Europe (1.'© partie) par M. Macquart, Table alphabétique des is mentionnées dans l'ouvrage pré- (20 (11 FOR OA PE 2 0e OR M EU Anthoinette Bourignon , par M. Dupuis, MAR 64. 0 : Rapport de M. Jeanron sur le musée Wicar et le musée de peinture de la villede Lille #1"... Et D am aies ne Mémoire sur l’état hygiénique de la ville de Lillé, au point de vue de l’assainissement des rues, canaux, égouts et de l’approvision- nement des eaux publiques et privées, par MM. Bollaert et Gosse- (1) Les lettres M, R. signifient Membre résidant, $ tu (574 A! Mémoire sur les archives de l'abbaye de Cysoing, par M. Le Glay, MORE UT 0 Étresme be aptes ebieleeirieelalate se vie cale DSC ” 492 Note sur le déplacement:d’un rein sur un homme de 36 ans, par M. J. Cbrestien , M-:R:r14.65.:: 1.0 PR Cr UT LEE AS SUR de AE .…. 529 Lettre antographede Malus::57. :...,.,...-..,%.0 00-02: 11 + 581 Discours prononcé sur la tombe de M. J.-B. Lestiboudois, par M. À LEE) T'as d'ou cart Lo rte M A nt PS EL 532 Distribution solennelle des prix........,.............,......... 535 Lise des membres de la Société.. ................. As : js 53% Ouvrages offerts 4 la SOcIéé;. 2020220. deperua te UN RE EEE RUN (Lilie-hnp.L Danel: MÉMOIRES DE LA |$) SOCIÉTÉ IMPÉRIALE DES “SCIENCES; » DE L'AGRICULTURE Fr DES ARTS, i $ «À de GE: - à ed ë . SUPPLÉMENT A L'ANNÉE 1853 ET TABLE GÉNÉRALE DE LA -1.* SÉRIE, 4» : eo + Es É . LILLE, CHEZ TOUS LES LIBRAIRES. PARIS, cnez DERAÂCHE , RUE DU BOULOY, N.+ 7, AU 1.4" pese 1856 : eee ! MÉMOIRES SOCIÉTÉ IMPÉRIALE DES SCIENCES, DE L'AGRICULTURE ET DES ARTS DE LILLE. LJ | | | | fIONMUU : } 1 MENRE Gen AI ET à RSS LILLE , IMP. DE L. DANEL. MEMOIRES SOCIÉTÉ IMPÉRIALE DES SCIENCES, DE L'AGRICULTURE ET DES ARTS de Lille. SUPPLÉMENT A L'ANNÉE 1853 ET TABLE GÉNÉRALE DE LA Îf.* SÉRIE. LILLE, CHEZ TOUS LES LIBRAIRES. PARIS, cuez DERACHE, RUE DU BouLoy, N.° 7, au 1.6r 1856 Page 31. 38. 39. 45. 46. 55. 60. . Lecat. II. Vol. 9. Lisez vol. 10. ERRATA TRÊS-IMPORTANT. Bachy. IV. Supprimez 74. Barré , Louis. II. 464. Lisez 404. Begin. Mettez 647 à la place de 497 et réciproquement. Delerue. VI. Vol. 7. Lisez vol. 27. VIII. Page 161. Lisez page 461. Delezenne. VI. Page 7. Lisez page 5. X. Lisez ainsi cet article : Sur la construc- tion d’un baromètre et d’un thermomètre (avec Peuvion). Analyse aux Mém., vol. 1, cah. 4, page 101 et cah. 5, page 11. XVIIL. Après idem. Ajoutez page 8. . À la fin de l’article ajoutez : Voyez pour deux rapports Barré 2.e 1I et Trachez VII. Dupuis. Page 209. Lisez 709. Kulhmann. XXIX. Page 190. Lisez 290. II. Lisez ainsi cet article : Sur l’action fertili- sante des cendres de tabac. Not. agric., vol. 10, page 121. 2. J. Lefebvre. XIV. 27. Lisez 262. Le Glay. IX. 804. Lisez 834. . Th. Lestiboudois:XXX VI. 205. Lisez 216. . Loiset. XVII. 225. Lisez 221. . Moulas. II. Au lieu de Matos mettez Soarez. . Silvy. HE. Cah. 3. Lisez Cah. 2. . Trachez. VIT. Ajoutez à la fin : Voir à la suite l'ana- lyse d'un rapport de M. Delezenne. . Vincent. [. Ajoutez à la fin: I bis, théorie algébrique du cercle osculateur dans les lignes du 2.f ordre, icem page 35. NOTICES NÉCROLOGIQUES. Théodore Barnoïs et Romain Peuviox furent deux membres trop utiles de la Société impériale des Sciences , de l'Agriculture et des Arts de Lille, pour que leur perte ne soit pas mentionnée dans les mémoires de la Société. Les discours prononcés par le président sur leur tombe ayant été omis dans les volumes de l'année deleurmort où ils devaient naturellement tfouver place, se trouvent reportés ici pour combler cette lacune. Discours prononcé le 13 avril 1851 . sur la tombe de Théodore Bannois, membre résidant de la Société des Sciences, de l'Agri- culture et des Arts de Lille , (admis le 16 décembre 1825), par M. Legrand, son président. « Messieurs, » C'est un triste spectacle qu'une tombe entr'ouverte, plus navrant encore, quand celui que quelques pelletées de terre vont séparer pour jamais du reste du monde, avait su, comme Barrois, par d'utiles travaux, marquer sa place parmi les hommes dont s'honore la science. L » Au désespoir d'une famille qui pleure l'un de sesmembres les plus chers, à la douleur de nombreux ouvriers qui perdent un patron humain et éclairé, à ces larmes éloquentes, interprètes des sentiments de tous, la Société des Stiences ,. de l'Agriculture et des Arts, dont je suis ici l'organe, doit joindre le tribut des regrets que lui cause la mort d'un collègue dontla rare modestie relevait encore le mérite réel. » Vingt-cing années d’une confraternité scientifique, la plus douce, la plus durable de toutes les associations, avaient. établi entre Barrois et nous des rapports que la mort à brusquement rompus , mais dont le souvenir ne s’effacera jamais. 2 » Barrois était du petit nombre de ces hommes d'élite qui ap- précient l'importance de la science, et qui attendent de son appli- cation à l'industrie et aux arts les plus heureux résultats. » Sa vie s'est ainsi passée | j'oserai même dire usée) à chercher à appliquer utilement à mille sujets divers les règles du calcul et de la mécanique, ses sciences favorites. » Industriel distingué lui même, il était mieux que personne en position de tenter ces expérimentations qui n'obtiennent une réussite complète qu'à la condition d'une alliance, trop rare de nos jours , entre la théorie et la pratique. » On comprend en effet bien facilement de quelle utilité pou- vait être, non seulement pour l’industrie, mais encore pour la science , le fabricant zélé, qui , connaissant à fond les ressorts de ces machines, mystère encore nouveau pour la plupart des in- dustriels qui les emploient, pouvait de lui-même observer les imperfections de leur marche , et trouver un remède convenable. » A l'époque où les machines à vapeur n'avaient pas atteint le degré de précision qu’elles ont aujourd'hui, Théodore Barrois fitconstruire chezlui, pour ses machines, avec ses dessins, d’après ses calculs, la machine qui fonctionne encore et qui est une des meilleures du département. » Son occupation la plus constante, son plaisir le plus vif étaient de chercher à en améliorer les détails. » Lorsque le génie de l’homme eut conquis la vapeur, il n'avait pas le dernier mot de cette puissance énergique qu'un poète a appelée l'âme du monde matériel ; il fallait trouver le moyen de la mesurer avec exactitude , pour en calculer la portée. » C'est alors que l'illustre de Prouy dota l'industrie du frein qui porte son nom. Mais ce frein tel qu'il était sorti des études du savant, offrait quelques dangers pour celui qui l'aurait expé- rimenté sans prendre des précautions assez multipliées et génantes dans l'usage. » Barrois appliqua au perfectionnement del’æuvre de deProuy tout ce que la science lui avait fourni de calculs, tout ce que l’ex- érience lui avait procuré d'observations, tout ce que la nature ui avait départi d’opiniâtrelé. Il est parvenu à améliorer et à simplifier l'instrument dont l'utile emploi est devenu plus sùrel plus fréquent. » C’est ainsi qu'il inventa une nouvelle soupape de sûreté, pour prévenir l'explosion des machines à vapeur. » Faut-il s’étonner maintenant de cette préoccupation de tous les instants qui absorbait Barrois, préoccupation dont l'on trouve plus d’un exemple chez les hommes spécialement adonnés aux 3 études mathématiques, préoccupation qui, en l'isolant dans les abstractions, paraissait lui eréer une vie en dehors de la vie ordinaire. » Faut-il s'étonner que cette tension perpétuelle de l'esprit , que ces efforts de travail, qui dépassaient la mesure de ses forces, aient amené, par le coup de trois appolexies successives, la fin d’un homme à qui sa puissante organisation promettait une plus longue carrière. » Indépendamment des travaux que je viens de signaler, Barroïs a encore produit plusieurs mémoires recommandables. » On a de lui une théorie des bateaux aquamoteurs, propres à remonter les fleuves et à les descendre plus facilement par la seule action de leur courant : une théorie analytique de la ma- chine pneumatique; une théorie pour déterminer la quantité d'eau qu'un puits peut fournir, et le mouvement de son niveau pendant qu'on l’épuise. » Les sciences mathématiques lui doivent enfin un travail fort étendu sur l'application du calcul des probabilités aux assurances contre les chances d'incendie. » Ces travaux ont été imprimés dans la collection de la Société des Sciences, et sont souvent consultés avec fruit. » Barrois, pendant qu’il habitait Lille , a appartenu au Conseil général du département , à la Chambre et au Tribunal de com- merce; bien qu'il se fût fixé à Fives, il était resté membre du Conseil de salubrité et de la Société des Sciences ; c'était un de nos collègues les plus assidus et les plus laborieux. L » Tel est l'homme, Messieurs, dont j'ai essayé d’esquisser rapi- dement la vie scientifique. À Û » Ce n'est pas à vous, ses parents, ses amis » SS Ouvriers, que j'ai besoin de dire ce qu'il fut dans sa vie privé, ce qu'il y avait en lui de bon , d’aimable , d’inoffensif: je ne veux chercher ni à augmenter, ni à sécher vos larmes. 1 » En présence d’un malheur comme celui qui nous frappe tous, il faut nous résigner, nous bumilier devant le décret de Dieu qui rappelle à Jui les hommes dont il juge que la mission est finie dans ce monde. | Ô » Disons seulement qu'on ne meurt pas tout entier uand on a pu, comme Barrois , laisser sur la terre le souvenir du jen qu'on a fait, el des travaux qui ne seront pas perdus pour la science et pour l'humanité. . j » Adieu, Barrois, adieu pour la dernière fois. » 4 Discours prononcé le 14 août 1852, sur la tombe de Romain PEUVION, membre honoraire de la Société nationale des Sciences, de l'Agriculture et des Arts de Lille, (admis le 17 nivôse an XI) par M. Bailly, son président. « Messieurs , » Ce qui nous rassemble ici, c’est la mort d’un homme de bien, d'un ami dévoué, d’un savant modeste, qui fut notre confrère , d’un industriel enfin, dont la probité dans toute l’acception du mot, fut le partage ; mais homme, il a dû subir le sort réservé à l'homme , il a dû obéir à la loi commune, il est rentré dans le sein de celui qui Jui accorda l'existence. Cette existence fut longue, Messieurs , mais elle fut bien remplie. Dès son jeune âge , Romain Peuvion, enfant de Lille, puisa dans sa famille, le goût des arts, des choses curieuses et du travail manuel. Il devint un ouvrier très habile en toutes choses et manœuvrait avec une égale perfec- tion, le tour , la lime, le rabot. Ces travaux qui, pour lui, n'é- laient qu'un délassement , ne l'empêchaient pas dese livrer à une industrie plus lucrative , et des premiers , ilintroduisit la filature du coton à la Mull-Jenny, genre de travail qui fut si profitable à notre pays, où il prit bientôt une grande extension. Vers la même époque, l'Angleterre inondait la France d’une espèce de pelotte de coton qu'on recherchait avidement, non-seulement à cause de la bonté du fil, mais encore pour l'élégance avec la- quelle il etait disposé. Peuvion inventa une machine qui lui don- nait les mêmes résultats que celle dont se servaient nos voisins , bien qu'il ne la connût pas, et pendant plusieurs années , il garda le secret d'une découverte qui lui fut fort lucrative. » L'un des premiers aussi, il fit du tulle à la mécanique, mais par suite d'une concurrence effrénée, il abandonna l’une et l’autre de ces industries pour se livrer à la fabrication et au raffinage du sucre. . » La physique, la chimie, la mécanique lui furent d'un puis- sant secours. Par ses essais et ses études, il fut conduit à une méthode de raflinage par les gaz qui fit, dans letemps, une pro- fonde sensation dans l'industrie sucrière. » Peuvion ne perdit pas un seul jour de sa vie; le temps que ne réclamaient pas sa famille, ou ses affaires, il le consacrait au travail des mains ; il avait toujours un instrument ou une ma- chine à faire. Toutes les pièces de son beau cabinet de physique 5 sont sorties de sa tête ou de ses mains, il dédaignait les choses communes et faciles, à moins qu'elles ne fussent très utiles; il s’attachait principalement aux instruments dont la construction exigeait beaucoup de patience. Le besoin , l'habitude du travail étaient si puissants chez lui, qu'il limait, tournait ou écrivait pour peu que ses souffrances nes’y opposassent pas complètement, et peu de jours encore avant sa mort, il travaillait à un instrument destiné à porter l’action de l'électricité sur sa vessie paralysée. » D'après ses goûts, son amour pour la science, on peut croire aisément que l’un des premiers, à Lille, il s’estlivré à l'étude de la photographie. Tous les appareils dont il s’est servi ont été confectionnés par lui; parmi euxon remarque un appareil pan- oramique, qui permet de prendre des vues d’une immense éten- due. La Société nationale des Sciences, de l'Agriculture et des Arts de Lille, à laquelleil appartenait depuis le 47 nivôse an X1, inséra daus le recueil de ses mémoires toutes les instructions né- cessaires sur l’origine, la construction et les usages de cet in- strument. Permettez-moi, Messieurs, de fixer un peu plus long- temps votre attention sur une petite machine qu'on peut considérer comn.e un chef-d'œuvre de patience et de délicatesse de travail et qui paraîtrait impossible à exécuter, si elle n’était là pour prouver jusqu'à quel degré la persévérance humaine peut aller. Peuvion construisit une machine propre à tracer sur verre les micromètres indispensables aux microscopes et à l'étude de la diffraction. Avant lui on avait fait des micromètres circulaires moins parfaits que les siens, mais on avait déclaré impossible Le tracé de micromitres circulaires contenant plusieurs centaines de cercles dans unespace de un millimétre de diamètre. Au prix de beaucoup d'efforts et d'essais nombreux continués pendant vingt ans, Peuvion a vaincu cette difliculté et a produit un véritable chef-d'œuvre qu'il a eu la satisfaction de voir fonctionner avant de mourir. » Notre vénérable confrère était étranger au monde et à ses vains plaisirs ; sa nombreuse famille, ses affaires, ses goûts ont amplement rempli sa longue etlaborieuse existence. Il était d'une piété profonde et sincère qui excluait tout esprit de parti, sans ex- clure la tolérance. Il est mort commeil a vécu, calme et résigné, n'ayant rien à regretter du passé et Lout à espérer de l'avenir. » JUBILÉ ACADÉMIQUE DE M. MACQUART, Le cinquantième anniversaire de l'entrée dans la Société impé- riale des Sciences, de l'Agriculture et des Arts de Lille , d’un de ses membres, est un fait trop heureux pour elle et trop rare (1), pour que son souvenir ne soit pas conservé dans ses annales. En conséquence, la Société décide que l'adresse rédigée par M. Delerue et présentée le 17 juillet 1853, à M. J. Macquart, sera comprise dans ses mémoires. « Monsieur et vénéré confrère , » Nous venons, au nom de la Société des Sciences , de l'Agri- culture et des Arts de Lille, vous apporter l'hommage solennel - des sentiments qu'elle éprouve à l'occasion du jubilé académique qe vous accomplissez aujourd'hui même comme membre rési- ant de cette Compagnie. » En effet , c'est le 17 juillet 1803 que vous avez été admis dans son sein : un demi-siècle s’est écoulé depuis lors ! » Mais le temps a passé si vite pour vous au milieu d'études et de découvertes utiles, que vous ne vous êtes pas aperçu de sa marche rapide et des années qu'il laissait derrière lui L Et pour- tant , il aurait suffi d’un regard jelé sur vos nombreux travaux our vous la révéler ! Mais non , vous n’avez jamais compté avec a science , et vous avez toujours ajouté aux travaux de Ja veille les travaux du lendemain. Le seul repos que vous ayez connu, c'est celui qui résulte d’un changement de travail. » La Science vous a récompensé d'un si beau dévouement. Vous Jui avez donné votre amour de fils, elle vous a traité en mère re- connaissante ; vous l'avez honorée, elle vous a ennobli; vous (x) Ce fait ne s’est produit que cinq fois dans l’Académie francaise, depuis-sa création, 7 avez cultivé, agrandi son domaine ; la Science, de son côté, vous a doté de ses dons les plus rares et les plus précieux. » Jouissez longtemps encore de tous ces avantages ; long- temps encore restez parmi nous, vous notre honneur et notre exemple, et que l'hommage que nous vous apportons aujourd’hui d'une voix si émue , d’un élan si spontané , si unanime, vienne mettre le sceau de la véritable amitié aux titres de la vraie science, oui de la vraie science, nous le répétons, quoiqu'il puisse en coûter à votre modestie ; mais l'amitié à cru pouvoir entrer chez vous en prenant la vérité pour sa compagne. » Lille , le 17 juillet 1853. » Signé : le Président , Le Gray. Dans la séance du 19 août, M. Le Glay, président, rend compte de la présentation de l'adresse de la Société à M. Mac- quart , et lui transmet les remerciments chaleureux de son hono- rable doyen. CRÉATION D'UN MUSÉE AGRICOLE ET INDUSTRIEL. Dans la séance du 46 septembre M. Gosselet fait la proposition suivante : « Messieurs, » Notre but, en prenant la parole, est de vous demander un grand acte aujourd'hui; de vous inviter à faire jaillir de. votre sein une création nouvelle, impérissable comme votre activité, parce qu’elle trouvera toujours de nouveaux aliments ; une œuvre ui jette ses racines dans le passé, ses ramilications infinies dans l'avenir ; un musée qu'envieront toutes les nations qui ne possèdent rien d’analogue, qu'elles imiteront bientôt, tant il renfermera d'éléments instructifs, soit comme histoire des industries passées, soit comme acheminement à des progrès ultérieurs. » Un Conservatoire des arts et métiers, agricole et industriel en même lemps, non pas un salon muet et dispendieux comme celui de Paris, qui semblable aux catacombes, n’exhibe que des squelettes, el qu'on trouve toujours désert, parce qu'il ne laisse rien à l'esprit, si ce n'est un respect religieux pour tant d'efforts d'imagination qu'on ne comprend pas, à moins d'études spéciales etexclusives. » C'est l'activité humaine au contraire prise sur le fait; c'est la vie de l’industrie dans le sens le plus large, le plus étendu, que nous voulons doter de l’immortalhté. » Saisir au passage ses prodiges sans nombre, les fixer dans une collection méthodique, en dévoiler à tous les yeux la succession hiérarchique; prendre à son origine la matiere brute, la suivre pas à pas dans toutes ses transformations mécaniques , chimiques et usuelles ; rappeler à l’agriculture ses pratiques séculaires , ses méthodes nouvelles, les acquisitions, les importations progressives; suivre, par exemple, la graine de Ja betterave jusqu'à la calci- pation de la potasse indigène ; la semence du lin, jusqu'à la con- fection admirable de ces tissus soyeux, +uxquels la ville de Fénélon a donné son nom... 9 ». Immense, effrayante encyclopédie ! » Nous l'avons envisagée froidement, cependant, et sous toutes ses faces; nous l'avons méditée depuis plusieurs années, et peut- être serait-elle en voie d'exécution si nous n'avions pensé qu'elle était digne de vous, Messieurs, et que vous deviez en accepter la paternité. » Sans aucun doute, vous serez en droit de nous demander compte des voies et moyens, avant de prendre une détermination quelconque, et d'attendre que nous allions au devant de toutes les objections que la timidité, l'inertie, l'ignorance, le mauvais vouloir même, vont soulever au-dehors de cette enceinte. » Mais sous le toit qui nous abrite, n'avons-nous pas un exemple imposant de ce qu'a pu le dévouement à la science ethno- logique et la volonté d'un seul homme récoltant, par des sacrifices incessan{s , les grossières ébauches de l’art des peuplades isolées, leurs instruments barbares et ingénieux à la fois de défense on d'agression, les écarts d'imagination des nations rêveuses de l'Orient. » Ne le voyons-nous pas créant, en quelques années, l’une des plus belles collections de ce genre , collection qu'il sera peut-être impossible de réaliser dans un siècie d'ici, quand le frottement des races, des instincts, des connaissances , des besoins, des échanges, favorisé par la vapeur, aura passé son inexorable niveau sur toutes les nations productrices de ces richesses du musée Moillet. » Si telle est l'œuvre d’un seul homme, que n’avons-nous pas à attendre d’une ruche comme la nôtre, dont tous les travailleurs, chacun dans leur sphère, en suivant leurs relations individuelles, reviendront chaque jour chargés d'un butin riche et précieux que nous trouvons à notre porte? Que ne devons-nous pas attendre d'un appel fait a notre fertile, à notre industrieux arrondissement; à notre département, où toutes les industries, toutes les cultures se.sont donné rendez-vous; à notre France si heureusement partagée par la nature et par son génie créateur ; au monde enlier, qui paie à nos produits un si large tribut en échange des matières que nous altirons des points les plus reculés ? » Votre volonté seule, Messieurs, et à côté même de Ja salle où vos habiles commissaires ont parqué les misères’et. les oripeaux des nations sauvages, vous élalerez les pompeuses conquêtes de la civilisation surla matière. » Enseignement grand, sublime, que saura comprendre. la municipalité lilloise, qu’elle favorisera de son concours.en lui ouvrant des galeries devenues bientôt inutiles par la translation 10 des collections d'histoire naturelle que votre commission, toute savante, embellit chaque jour par ses acquisitions et par ses clas- sifications. » A votre premier signal, Lille, Roubaix, Tourcoing, rempli- ront d'abord vos casiers, et lorsque plus tard l'espace vous man- quera , ne soyez pas inquiets, votre exposition permanente aura conquis sa place parmi les merveilles du Nord. » Et ne voyons-nous pas assez tout l'intérêt qui s'attache à ces exhibitions éphémères auxquelles on élève des palais tels que les féeries orientales n'auraient pas osé l'imaginer. Il n’est plus au- jourd’hui une ville secondaire qui, selon ses moyens, ne veuille avoir son exposition. Hier c'était Arras, aujourd hui Dunkerque, demain notre cité aura son tour ; les fonds sont alloués pour l'ex- position agricole, et sans être indiscrets, nous pouvons dire qu'il y a lieu de penser que l'industrie départementale ne voudra pas rester en arrière. » C'est qu'en effet, ces expositions répondent, tant bien que mal, à un besoin réel de la situation. Destinées à assouvir la curiosité publique, à entretenir l'émulation entre les producteurs, elles viennent contenter la curiosité, exciter la rivalité ; mais, il faut bien le reconnaître , l'esprit n’est point entièrement satisfait. » Ces pompeux étalages d’étoffes brillantes, de tapis inimitables, de produits d’un fini et d’une perfection que rien ne semble devoir surpasser, s'ils représentent assez fidèlement, à un jour donné, le degré où a pu s'élever le génie de la fabrication, ils ne disent rien des efforts qui les ont précédés ; ils ne montrent point tout ce qu'il faut de labeur pour atteindre le but ; ils ne préviennent point les tâtonnements nouveaux des hommes inexpérimentés ; ils ne disent tien du passé, ils n'instruisent pas, ils ne parlent pas à l'avenir. Comme des jalons posés à de grandes distances, et que le vent renverse à mesure, ils ne laissent pas même la trace de leur exis- tence. Et cependant les cultures , les industries se transforment sans cesse ; tantôt elles reviennent à leur point de départ sous le couvert de la nouveauté, sans qu'on puisse apprécier ce qu'il y a de positif ou de mensonger Gone la découverte du moment; tantût elles s’effacent ou même s’anéantissent complètement. Bien peu de personnes actuellement se rappellent avoir vu dans nos murs une fabrication de porcelaine qui n était pas sans mérite. » Lvs tissus de lin dont nous avons parlé, connus et recherchés dans le monde entier, sous le nom de batiste ou de Cambrai, sont menacés dans la production par les lins étrangers, dans la fabri- cation par les toiles de coton si habilement travaillées qu'une main expérimentée éprouve quelque difficulté à les différencier. 11 Nous pourrions sans peine multiplier les exemples , si cetle ques- tion ne devait être encore envisagée sous un autre jour, le plus favorable à nos yeux : c’est qu'au sem même du travail, une ignorance grossière, incroyable, paralyse souvent la marche et le progrès des arts et de l’industrie. » Combien de personnes, en effet, ignorent d'où nous vient et comment nous vient la matière cotonneuse de nos filatures, de nos étoffes roubaisiennes ! » Combien auraient intérêt à savoir quelle est la graine qui fait concurrence à la production oléagineuse de nos contrées! » Combien de cultivateurs, s'ils connuissaient des semailles mieux appropriées au sol et au mode de culture, pourraient tirer un parti plus avantageux .de leur exploitation ! » Mais déjà, Messieurs, vous avez si bien compris cette lacune dans les notions générales ou spéciales, que là-bas, dans les angles de cette salle, vous avez réuni près de 100 espèces différentes de céréales, non point pour vous, qui les connaissez, non point pour en décorer le lieu de vos séances, mais dans un but plus large, plus pratique, plus populaire, pour les exposer aux yeux de tous. » Vous aviez donc en vous, Messieurs , le germe de la pensée féconde dont nous venons vous demander la réalisation immédiate en vous invitant à désigner des commissaires zélés que vous char- gerez : » 4.° De s'entendre avec l'administration municipale ; » 2.0 D'appeler les matières à collectionner, soit en s'adressant directement aux producteurs, soit en stimulant l’activité de chacun de nous ; » 3.0 D'arrêter les bases de la classification à adopter; » 4.° D'enregistrer , au fur el à mesure, les dépôts qui leur seraient faits, de manière à éviter toute confusion ultérieure; » 5.° De déposer et ronserver provisoirement les collections dans les locaux, si exigus qu’ils soient, dont dispose la société ; » G.e D'assurer enfin, par tous les moyens en son pouvoir, la création et l'organisation d'une exposition permanente de l'agri- culture et de l'industrie , sous la direction de la Société Impériale de l'Agriculture, des Sciences et des Arts de Lille, » La Société, adoptant à l'unanimité la proposition précédente, a chargé une commission composée de MM. Kuhlmann , Loiset, Bachy, Gosselet-et Violette, d'examiner cette importante propo- sition. é hs 12 Cette commission, par l'organe de M. Violette, a fait le rapport suivant : « Messieurs, » MM. Gosselet et Bachy vous ont soumis, dans une de vos dernières séances, le projet d'établissement d’un musée devant réunir la série des matières premières employées dans l'industrie et des divers produits fabriqués qu'on en peut retirer. Vous avez nommé une commission que vous avez chargée d'examiner les moyens de réaliser cette idée, et nous venons vous rendre compte de cet examen. » Nous avons commencé par nous pénétrer de l'utilité de ce projet et nous avons reconnu qu'il était nouveau et pouvait offrir un précieux sujet d'étude. Nous avons cherché en vain un éta- blissement semblable ou analogue. Le Conservatoire des arts et métiers indique, par son nom, qu'il est destiné à présenter l'en- semble des outils, des ustensiles, des métiers propres à faconner les matières, mais non point la réunion des matièresen cours de fabrication et fabriquées. Viennent ensuite quelques collections spéciales ; le musée des Gobelins destiné à la tapisserie et à la teinture ; le musée de Sèvres montrant les produits de art céra- mique; le musée de Cluny comptant quelques rares produits industriels au milieu des richesses artistiques du moyen-âge. Les expositions périodiques des produits de l'industrie ne présentent, avec le nouveau projet, qu'une analogie trompeuse, car elles ras- semblent les produits fabriqués seulement, et non point les ma- tièrespremières; elles ont pour but d'enregistrer, pour ainsi dire, la situation industrielle à chaque époque, sous les rapports de la qualité, du goût et du prix, et nullement d'enseigner les diffé- rentes phases que subit la matière première pour se transformer en produits manufacturés. C’est ce dernier enseignement que don- nera le nouveau musée par une exposition méthodique, que nous allons développer. » Le musée technologique , ce nom semble indiquer son but, doit comprendre la série des transformations que subit la matière première entre ses deux termes extrêmes , la récolte et l'objet fabriqué propre à l'usage immédiat du consommateur. Quelques exemples feront mieux comprendre cette pensée : » À côté des matières propres au tissage, lin, coton, laine, chanvre, soie, phormium tenax, elc., se rangeront les matières peignées, cardées, enrubannées, lavées , dévidées, puis étirées en fils de diverses grosseurs, puis lissées en pièces, puis teintes avec 13 dessins variés et enfin apprêtées ; suivra la collection des matières tincloriales , chacune d'elles accompagnée des échantillons des teintes diverses qu’elles produisent. On comprend la belle série des nombreux tissus, aussi riches par leurs dessins que par leurs couleurs que produisent Tourcoing, Roubaix, Elbeuf, Sedan, Carcassonne, Lyon et Mulhouse. » Les arts métallurgiques seront représentés par le minerai brut, trié, lavé, bocardé, grillé, coulé, raffiné, aciéré, puis fondu ou préparé sous les formes propres à l'usage : la collection des alliages avec les métaux élémentaires employés dans la confection de tous les objets métalliques, soit d'utilité, soit d'ornement » Les arts chimiques paieront un large tribut. Il suffit de nom- mer la potasse, la soude, le charbon, le noir animal, les savons , le verre, le cristal, la poterie, les acides, pour indiquer la longue série des transformations que subit la matière afin de se prêter à l'usage du consommateur. Ainsi on verra le mélange du sel, du charbon et de la chaux produisant la soude brute, qui sera épurée par cristallisation; on verra le mélange de sable et de soude ou de potasse donnant le verre ou le cristal brut, qui se transformera en verres d'optique , lentilles, gobletterie simple ou coloriée ; on verra le bois produisant le charbon, le goudron, le vinaigre ; l'os fournissant le noir animal ou se prêtant aux formes élégantes que lui donnera la tabletterie; on verra l'argile blanche ou colorée , lavée, pétrie, moulée, émaillée, coloriée, cuite, produisant les objets de poterie simple ou les formes élégantes de la porcelaine. Enfin, l’agriculture présentera l'ensemble des produits de ses nombreuses industries, tels que le sucre, les huiles, les alcools , les nombreuses espèces de blé, les diverses sortes de farine, les fécules, pâtes alimentaires, conserves, cuirs, marocains , suifs, bougies stéariques, oléine, etc., etc. Ainsi on verra les graines de colza, de lin, de sésame, d’arachnide, leurs huiles et leurs tourteaux ; on verra la pomme detterre, sa fécule et sa pulpe; la betterave, sa pulpe pressée, le jus naturel, puis déféqué, puis concentré, puis déposant par cristallisation le sucre brut, qui sera rafhné, puis la mélasse ainsi que l'alcool et les sels de potasse qu'on en retire. » En résumé, ce Musée sera un enseignement encyclopédique de l’industrie, qui parlant à la fois aux yeux et à l'esprit, pré- sentera un intérêt réel. — C'est ainsi que vous l'avez compris, Messieurs, en adoptant le projet. » Quant aux moyens de réalisation, nous avons pensé qu'avant de faire un appel officiel à l'assistance municipale, il convenait d'essayer, dans le sein même de la Société, un commencement 14 d'exécution. A: cet effet, nous proposons à nos collègues d'unir leurs efforts à nos efforts personnels auprès des divers fabricants, pour obtenir de leur généreuse intervention la série des objets en matière première, en cours de fabrication et fabriqués. » Pour faciliter cette œuvre de recherches, nous proposons à la Société de faire connaître publiquement le projet d'établisse- ment du Musée agricole et industriel, son but, ses avantages , de faire appel à la munificence des fabricants, et de renouveler cet appel, au besoin, en désignant, suivant les convenances de chacun, les noms des donateurs. » Ces divers moyens nous ont paru les plus efficaces pour faciliter la collection de notre Musée. Quant aux objets recueillis, ils se- raient provisoirement reçus et classés dans une ou plusieurs salles faisant partie de l'emplacement réservé à la Société dans les bâti- ments de la Mairie. » Lorsque cette collection prendra de l'importance, lorsque l'espace lui manquera, c’est alors que la Société s'adressera à l'autorité municipale, et en lui montrant ses richesses acquises , lui demandera un local, non seulement pour conserver ce précieux dépôt, mais encore pour lui permettre de l'agrandir. C'est ainsi qu'ont fait deux hommes dont la ville conserve le religieux sou- venir, MM. Wicar et Moillet. La Société des Sciences ne fera que suivre ces généreuses traditions en dotant la ville de Lille d'un établissement unique, d’un Musée de l’industrie et de l’agriculture.» COMPTE RENDU DES TRAVAUX DE LA SOCIÉTÉ IMPÉRIALE DES SCIENCES, DE L'AGRICULTURE ET DESARTS DE LILLE, PENDANT LES ANNÉES 1851, 1852 er 1853. Par M. Vicror DELERUE,, Secrélaire:Général. Séance du 30 décembre 1853. MESSIEURS , Si, sur notre belle terre de France, noblesse oblige, il semble en être de même à vos yeux du travail; en effet , vos productions se succèdent importantes et nombreuses , et amené chaque année par mes fonctions à vous en présenter le compte-rendu , chaque année aussi la tâche qui m'est imposée deviendrait de plus en plus lourde si la douce confraternité littéraire qu nous lie n’en venait diminuer le poids; si donc j'ai attendu la réunion de vos travaux de trois années pour acquitter ma dette, ce n'était point que la matière ne pût fournir à un compte annuel ; ce n'était point non plus que les liens qui nous unissent se fussent relâchés, c'était, avouons-le, l'attente où je me trouvais chaque année d’a- voir enfin un successeur et le désir de lui laisser entière cette belle et riche portion de mon héritage. 16 Vous en avez disposé autrement en me perpétuant , pour ainsi dire , dans mes fonctions. Le vaste domaine des sciences physiques et naturelles a encore été exploré par nous, pendant ces trois dernières années, en plu- sieurs points nouveaux; des découvertes, des conquêtes précieuses y ont été faites, et cependant , que de choses restent à voir, à sonder ; que de mystères restent à pénétrer dans cette autre carrière de l’immensité, de l'infini!! Mais devons-nous nous en plaindre et ne voyons-nous pas que la main de Dieu a semé là aussi d’inépuisables trésors que l’on n'obtient qu'à force de travail, afin d'empêcher l’homme de se livrer à l’orgueil de croire, dès ses premiers succès, qu'il ne lui reste plus rien à faire et qu'il peut se reposer. | Il y a trois mots, Messieurs, qui renferment un sens sublime et qui indiquent à l’homme qu'il a toujours à avancer : LA For, L'HUMANITÉ , LE TRAVAIL. Malgré ce grand mouvement vers les sciences, l’agriculture n’a pas pour cela été négligée. De nombreuses communications ent été faites, d'intéressants travaux ont été présentés , soit qu'ils aient été demandés par l'autorité supérieure, soit qu'ils aient été provoqués par l'amour si louable du bien public et de la science agricole. Les lettres et les arts n’ont été ni moins cultivés ni moins pro- ductifs. Vous le verrez, Messieurs, par le compte-rendu que je vous pré- sente : partout l'élan a été le même, partout le tribut s'est payé bienau-delà de la taxe ; non seulement, chez vous, les œuvres se commencent ; mais elles s’achèvent, se publient et vont porter au loin leurs germes producteurs. 17 SCIENCES. Après de longs et laborieux travaux que vos mémoires ont re- cueillis en partie, M. Meugy est arrivé aux dernières pages de son Essai de géologie pratique sur le sol de la Flandre française. Cet important travail est un service réel rendu à l’agriculture de nos contrées qui y trouve la description, la composition et la classification des terrains qu'elle est appelée à fertiliser, Il est dignement terminé par un tableau statistique présentant par commune la constitution du sol, la population, l'étendue super- ficielle, la nature des substances utiles exploitées et non ex- ploitées. M. Kuhlmann vous a plusieurs fois entretenus de diverses re- cherches auxquelles il s’est livré seul ou en commun avec M. Pe- louze , dans le but de rendre plus économique la fabrication de l'acide sulfurique. Il vous à fait part que son savant collaborateur et lui ont con- staté la possibilité de décomposer le sel marin et, en général, tous les chlorures et les nitrates par leur contact avec le sulfate d’alumine ou le sulfate de fer en facilitant la réaction par la cha- leur et un courant de vapeur d’eau. C'est ainsi qu'ils sont arrivés à produire l'acide muriatique à très bas prix par la décomposition du chlorure de manganèse, ré- sidu de la fabrication du chlore , au moyen de magnas d'alun, ou directement au moyen des terres pyriteuses des aluneries. M. Kuhlmann vous a rendu compte aussi des procédés qu'il met en usage pour convertir en acide sulfurique, l'acide sulfhy- drique qui se dégage de diverses réactions chimiques ( séance du 17 janvier 1851). Le même confrère vous a aussi entretenus des expériences faites par lui pour fixer l'opinion de la science sur un point important de la théorie de la teinture | séance du 20 mai 1853). 18 M. Corenwinder vous à lu un mémoire sur quelques expé- riences de chimie démontrant qu'on peut produire directement par l'intermédiaire des corps poreux, tels que la mousse de pla- tine ou la pierre-ponce, les acides iodhydrique, brombydrique, sulfhydrique et sélenhydrique, dont les éléments ne se combinent pas par l’action seule de la chaleur (séance du 7 février 4851). Vous devez aussi aux travaux du même collègue : Un mémoire sur les phénomènes de la germination considérée dans des faits nouveaux | séance du 12 octobre 1854). Enfin il vous a donné connaissance : De son mémoire sur les combinaisons définies du chlore et du brome avec le phosphore ( séance du 20 mai 1853); Des faits intéressants qu'il a recueillis sur le drainage et sur les bons effets qu'il a produits dans plusieurs communes de nos en- virons , et il à de plus déposé dans nos archives son mémoire sur des procédés nouveaux pour déterminer la valeur industrielle du noir animal { séance du 49 août 1853) Après plusieurs communications sur un nouveau composé or- ganique qu’il a découvert dans & Protococeus vulgaris ; plante de la famille des Phycées et qu'il à nommé acide phycique, M. Lamy vous a lu un mémoire duquel il résulte : Qu'en pour- suivant ses recherches sur le composé organique acide, il en a isolé un deuxième qui doit se placer à la suite des sucres, près de la mannite. Ce composé, qu’il a nommé phycite, a une saveur sucrée très franche et est remarquable par la beauté de sa forme cristalline {séances des 4 avril et 18 juillet 1851). Dans un deuxième mémoire sur cette substance sucrée, il en a fait connaître la composition exacte, la forme cristalline, et les autres caractères chimiques essentiels. Vous lui devez encore un travail de physique moléculaire sur la sursaturation des dissolutions salines. Et un autre sur fa densité et le poids spécifique des corps (séance du 6 mai 1853.) 19 MM. Corenwinder et Dufau se sont livrés en commun à des analyses comparatives sur les betteraves de la campagne dernière, en vue de déterminer leur richesse absolue en sucre cristallisable (séance du 3 mars 1852.) Vous avez recueilli dans vos mémoires le fruit des derniers la- beurs de M. Peuvion: ce sont les importants perfectionnements qu'il a apportés à la photographie sur plaque et sur papier au moyen d'un daguerréotype panoramique rectiligne qui permet d’obtenir des images de 60 centimètres de longueur. M. Parise vous a fait connaître un procédé nouveau de suture qu'il a mis en pratique avec un succès complet à la suite de l’ex- tirpation d’une tumeur volumineuse ; il vous a rapporté ses ob- servations sur quatre malades atteints de la pierre, enfin il a mis sous vos yeux une pièce pathologique à l’appui de la thèse qu'il a développée dans'un mémoire spécial, savoir: Que les tumeurs blanches sont le résultat du développement de tubercules sous les cartillages qui revétent les surfaces articulaires. M. Chrestien a payé son tribut à la science anatomique par le dépôt d’une note sur un cas de tératologie curieux , sur un fœtus présentant une hémitérie relative à la disposition des organes ; Et d'une autre note sur le déplacement d'un rein chez un homme de 36 ans. M. Violette vous a lu un Mémoire surles charbons de bois et un autre sur lx propriété du charbon de bois pour favoriser la ger- mination. Le système musical des Grecs et les belles recherches faites par M. Vincent, l’an de vos membres correspondants, dans le but de déterminer ja nature et les différentes mesures usitées dans la musique de ces peuples, ont fournià M. Heegmann l'heureuse . occasion de nous présenter un exposé rapide de ce travail et d'y ajouter ses propres recherches et ses observations: 20 Je trouve encore dans ce vaste champ des sciences : Trois mémoires de M. Delczenne, sous ces titres : Sur le Ré de la gamme naturelle et sur sa valeur numérique. Expériences et observations sur les cordes des instruments à archet. Sur la transposition. Et les travaux suivants de M. Macquart : La suite du quatrième supplément sur les Diptères exotiques nouveaux ou peu connus, ses mémoires sur les insectes diptères de la tribu des Tachinaires et son ouvrage sur les arbres et ar- brisseaux d'Europe et leurs insectes. Dans ce dernier ouvrage l'auteur considère les arbres sous les divers rapports qu'ils ont avec les insectes, soit par les dommages qu'ils en souffrent, soit par les avantages que nous présentent les insectes de plusieurs arbres , soit encore par l'intérêt que jette sur les arbres le spectacle des mille manœuvres auxquelles les in- sectes se livrent au gré de leurs instincts. Indépendamment de cet intérêt répandu sur les arbres et sur les insectes qu'il décrit, l'auteur sait nous en inspirer un non moins grand par les particularités que les uns et les autres pré- sentent et par les harmonies qui naissent de leurs rapports entre- eux. Cet ouvrage, malgré son importance et son étendue, fut bientôt suivi d'un supplément et enfin, Croyant qu'il n’a rien fait dès qu'il lui reste à faire, et cédant à d'instantes sollicitations, M. Macquart vient de terminer pour les plantes herbacées un travail de la nature du précédent. Il était bien naturel que la plume qui avait décrit les arbres, ces princes du royaume des végétaux , s’occupät ensuite des plantes herhacées qui en est ie peuple. C'est ià, Messieurs, une bonne fortune pour nous et pour les sciences naturelles. 21 = Comme son aîné , cet ouvrage inspire un vif intérêt ; une con- stante sympathie, comme lui il est précédé d'une introduction où la science abonde , où l'amour de la nature s’unit au sentiment religieux le plus pur. Ce nouveau travail porte ce titre : Les plantes herbacées d'Eu- rope et leurs insectes. C'est à dessein, Messieurs, que j'ai réuni dans les mêmes pages ces deux noms, Delezenne et Macquart , et que je leur applique cette devise : Travail oblige. En effet, depuis près d’un demi-siècle qu'ils font partie de la Société, ils n’ont cessé de lui donner l'exemple d'une vie employée tout entière aux progrès de la science, ils n'ont connu de repos que celui qui existe d'un changement de travail ; compagnons au départ, compagnons pendant la longue route qu’ils ont parcourue, ils le sont encore aux jours des’ ré- compenses, et la croix d'honneur qu'a recue dernièrement M. Macquart et à laquelle vous avez si fraternellement applaudi, est venue donner à leur carrière scientifique une nouvelle et même conformité. Bientôt cette douce confraternité de vie, de travail et d'honneur aura un rapport de plus ! Le jubilé académique que vient d’ac- complir M. Macquart et que vous avez célébré avec un si juste orgueil, M. Delezenne en verra luire le jour pour lui-même, et tous deux auront vaillamment concouru, ici bas, pendant un demi- siècle, à élever l'édifice de nos travaux. AGRICULTURE, ECONOMIE PRATIQUE. La loi du 20 mars 1851 sur l'établissement des comices, vous a procuré une fois de plus l'occasion de faire éclaier hautement vos vives et constantes sympathies pour l’agriculture. mue des suites désastreuses que pouvait avoir ce projét de‘loi pour les sociélés qui n'étaient point purement agricoles, quoique s’occupant utile- ment d'agriculture, la Suciété s'est empressée d'adresser ses 22 réclamations à la commission chargée de le préparer, etelle peut revendiquer une bonne part du succès que cette réclamation , élevée d’ailleurs d’un bout de Ja France à l’autre, a obtenu, et qui a eu pour résultat de conserver à l’agriculture le patronage des sociétés savantes et de continuer à l'abriter sous un drapeau à qui elle doit ses plus belles conquêtes. Forte de ce succès, la Société a formulé ie règlement du comice, l'a soumis à l'approbation préfectorale , l’a rendu public et a vu bientôt se presser dans les rangs du comice de l'arrondissement de Lille, les hommes les plus honorables et les plus dévoués aux intérêts de l’agriculture. Cette union ne fut pas heureuse : quelque temps après vint la loi du 25 mars 1852 et les incertitudes de son application. Ici, Messieurs, ma pensée et la vôtre se rappellent de pénibles débats et une séparation bien regrettable, sans doute, mais qui a dù s’accomplir aux hauts prix des sacrifices qu'il eût fallu subir pour l'éviter. Les honorables membres qui faisaient partie de la Société, sous le titre d’associés agriculteurs où de membres du comice agricole, se sont éloignés d'elle pour former un corps distinet et séparé. Ils ont oublié tout-à-coup, ce qu'ils avaient proclamé eux-mêmes: que l'agriculture avait (oujours eu dans nos contrées une marche d'autant plus sûre qu’elle s'éclairait du flambeau des sciences. Je ne mettrai pas sous. vos yeux le tableau de ces longs et malheureux débats : une commission spéciale est chargée de ce soin. Mais rassurez-vous, Messieurs. Malgré cette séparationf, la So- ciélé n’en continuera pas moins la marche rapide qu'elie opère depuis près d'un demi-siècle dans le champ des améliorations agri- coles ; elle est semblable à ces corps d'élite qui se recrutent au pre- mier appel et qui n'auraient besoin, d’ailleurs , pour réparer leurs pertes , que de se serrer contre le drapeau, que de redoubler de zèle, d'amour et de courage. 23 Mais j'ai hâte de le dire, laissons ces tristes détails et reprenons la marche de notre compte rendu. Le premier grand ouvrage qui s'offre à mes yeux dans la série de vos travaux concernant l'économie agricole c'est la Séatis- tique de la consommation de lavéande à Lille, par M. Loiset. En vous disant que l'ouvrage de notre laboneux collègue em- brasse une série de 39 ans { 1812 à 1851), c'est dérouler devant vous les pièces considérables de ce vaste inventaire de la sub- stance animale de l’une des plus grandes cités de la France, in- ventaire dont le résumé général, quoique fait avec la forme brève et l'expression rigoureuse du langage de la statistique, présente des détails d'un grand intérêt et que l’on parcourt avec fruit et plaisir ; je citerai particulièrement les chapitres consacrés à la comparaison de la puissance nutritive des diverses denrées animales et aux effets de l’action du régime animal sur les nais- sances , les décès et la santé des populations. Nous devons au même auteur deux autres mémoires. L'un in- titulé: De l'affection typhoïde de l'espèce chevaline et de ses rapports avec'la fièvre typhoïde de l'homme.L'autre: Mémoire sur l'Enxzootie foudroyante, (myélite dorso-lombaire) attaquant toutes les espèces herbivores dans le nord de la France. Puissent les études faites par notre collègue aider puissamment à combattre un fléau qui a déjà fait de si nombreuses victimes ! Les autres travaux de la Société dans la voie agricole peuvent soutenir honorablement la comparaison avec ceux des années précédentes. J'y trouve, indépendamment d'un grand nombre de travaux coufants et administratifs, de propositions et de com- munications : Plusieurs rapports de M. Lefebvre, sur l'organisatien et les travaux des comices, sur la question des lins et sur la question des sucres. 24 Un rapport de M. Molroguier sur la production et le commerce du sel. Celui de M. Cazeneuve sur des questions spéciales d'agriculture el sur nos derniers concours de bestiaux. Celui de M. Loiset sur Le lait de vaches privées morbidement de la propriété de donner du beurre. Plusieurs autres rapports du même collègue sur la question des lins , soulevée par le comité des filateurs de lins à Lille, sur les concours de bestiaux qui ont eu lieu en cette ville, ces deux dernières années, et sur l'épizootie régnante depuis longtemps en France et en particulier dans notre département. J'y trouve aussi le travail de M.Macquart sur l'empoissonnement des rivières d'après les procédés de MM. Gelin et Remy, ses rapports sur les rapports de la commission d'histoire naturelle, son compte- rendu sur le congrès central d'agriculture , auquel il à assisté comme délégué de la Société. Je ne quitterai pas cette partie de vos travaux sans y mentionner un ouvrage qui s’y raîtache par plus d'un lien, c’est le travail dans lequel M. Legrand traite une question de compétence à propos de la législation des portions »1énagères ou parts de marais, et qui tend à faire rentrer dans la juridiction des conseils de pré- fecture une attribution que le conseil d'État veut leur enlever. Ce travail.sse range de lui-même à la suite de Za législation des portions menagères , du même auteur. Votre Société peut non seulement revendiquer l'idée première d'une mesure grande et féconde, d'une mesure aux résultats précieux et pleins d'avenir, mais, une fois de plus, elle peut aussi réclamer l'honneur de l'initiative de son développement et de son application, de sa vie matérielle et pratique. Cette réflexion me vient au moment de vous parler de la pro- position faite par MM. Gosselet et Bachy, de /a création à Lille d'un musée agricole et industriel. 35 Cette proposition, si bien développée par ses auteurs en ses riches et féconds résultats, et dont le rapport de M. Violette a fait ressortir davantage encore le puissant intérêt et l'extrême utilité, en même temps qu'il indiquait les moyens pratiques de son exécution , fournira une preuve nouvelle, s'il en était besoin, de votre vive et constante sympathie pour la science agricole que vous avez couverte de votre haut patronage depuis plus d'un demi- siècle, et pour l’industrie que vous avez toujours Lenue en si grande considération. L'économie publique proprement dite est redevable à MM. Bol- laert et Gosselet d’un Mémoire sur l'état hygiénique de la ville de Lille au point de vue de l'assainissement des rues, égouts, canaux, et de l'approvisionnement des eaux publiques ot privées. Ce titre indique suffisamment l'importance du travail auquel il est attaché, travail plein d’utiles recherches et d'exemples à suivre. BEAUX-ARTS ET LITTÉRATURE. Déjà, Messieurs, dans mon compte-rendu des travaux de 1850, j'ai appelé votre attention sur l'ouvrage dont s'occupait M. Thémistocle Lestiboudois, par suite de la mission scientifique qu'ila remplie en Algérie, par ordre du gouvernement. Aujourd'hui notre collègue a terminé son œuvre , et la Société s'est empressée d'en enrichir ses mémoires ; il porte ce Litre si at- tachant pour tous ceux qui s'occupent de nos possessions d’outre- mer : Voyage en Algérie, ou Etudes sur la colonisation de l'Afrique française. L'auteur a recherché les causes qui ont amené la France à concevoir la pensée de coloniser cetie conquête. — 11 a énuméré les nombreuses difficultés que notre civilisation doit rencontrer sur cette terre sans ports assurés , sans [leuves , sans rivières na- 26 vigables , herissée de montagnes inaccessibles, desséchée pendant l'été, insalubre pendant les, défrichements, et habitée par une race guerrière, animée. d’une haine séculaire contre les chrétiens. Il s’est occupé à faire une étude approfondie de l'Atjantide, interposée comme une île entre l’Europe et l'Afrique australe, entourée par la Méditerranée , l'Océan et Je désert. I] la consi- dère au point de vue géologique, hydrographique, météorolo- gique, botanique, et surtout au point de vue de la production des végétaux utiles et commerciaux. Si les armes donnent la conquête , la civilisation seule assure la possession, el viennent les {emps où nos mœurs, nos sciences , nos arts , notre langue, se répandant de loutes parts en Algérie, en feront une seconde fois la conquête, soldat distingué de l'intelligence , notre collègue pourra revendiquer sa part de gloire dans la grande œuvyre du retour de la terre d'Afrique à la civili- sation ; alors se réalisera une fois de plus cette vérité écrite par Voltaire : « Que notre langue et nos sciences ont fait plus de conquêtes que l'épée de Charlemagne. » M. Le Glay vous a apporté aussi un large tribut. Vous lui devez cinq ouvrages : Un Mémoire dans lequel il établit /a véritable situation et les limites du pays d'Ostrevant (pagus Ostrebannus \ ; Un Mémoire sur les archives des églises ct maisons religicuses du Cambrésis; Un Recueil de nouveaux analectes ou de documents inédits pour servir à l'histoire des faits , des mœurs et de la littérature ; Un Mémoire sur le droit du Gave ; Et un autre sur les archives de l'abbaye de Cysoing. Dans ces nouveaux ouvrages, M. Le Glay a su rassembler, avec son discernement ordinaire, les documents les plus propres à éclairer l'histoire de nos contrées à laquelle il a déjà fourni de si précieux matériaux ; ilia su, comme toujours, donner à l'éru- 27 dition historique quelque chose qui déguise agréablement la sé- cheresse et la raideur que tant d’autres lui laissent. M. Dupuis s'est livré à des recherches historiques extrêmement intéressantes dans un mémoire qu'il a intitulé : Études critiques sur la philosophie d'Hégésias Pissithanathe de l'école Cyrénaique. Le même collègue a pris aussi pour sujet d'autres recherches historiques, la vie et les ouvrages d'Antoinette Bourignon, née à Lille en 1616, et qui y a laissé une renommée si diversement appréciée. © Vous vous rappelez tous la charmante création du Bourgeois de Lille autour de laquelle M. Legrand, son auteur, a su réunir tant d'intérêt, de sympathies, eh bien ! à côté de ce riant ta- bleau, M. Legrand vient d'en appendre un autre, ni moins frais, ni moins gracieux, dans sa Bourgeoise de Lille, à qui vous avez fait un si bon accueil dans la soirée où il vous l’a présentée. La même plume s'est aussi amusée à dépeindre des recherches sur les enseignes sculplées ou peintes des rues de la ville de Lille’, et à composer un dictionnaire du patois de Lille et de ses en- virons. Enfin, comme si tout ce qui a rapport à sa ville natale lui re- venait de droit, notre collègue nous a lu une notice sur les œuvres dramatiques de notre concitoyen M. Alexandre Bernos. Dans cette série d'ouvrages où la délicatesse de la forme s’unit à la fraicheur de la pensée, je dois mentionner encore : Le mémoire de M. Caloine sur le livre si remarquable que M. Topffer a intitulé : Réflexions et menus propos d'un peintre genevois, et les deux morceaux de littérature où M. Deligne nous a initiés à ses premiers pas dans la carrière où il marche aujour- d'hui si hardiment. La poésie, elle aussi, s'est rappelée à vos souvenirs ; M. Moulas a lerminé sa traduction de Thomson , et votre secrétaire-général a publié un second recueil de fables. 28 Les beaux-arts, proprement dits, ont suivi le brillant essor im- primé aux sciences , à l’agriculture et aux lettres. M. Colas qui, avant de devenir votre collègue , a vu deux fois ses travaux honorés de vos distinctions publiques, vient d'achever les peintures qui décorentle fonds supérieur de l’abside principale de l'église Notre-Dame, à Roubaix, et dont le sujet est e cou- ronnement de la Vierge. Le peintre s’est inspiré de la litanie de la Vierge, dont ila personnifié quelques-uns des principaux versets de la manière la plus heureuse et la plus saisissante ; ainsi dans ce verset: Reïnedes Anges, l'archange Michel, agenouillé sur son dragon, s'incline devant la Vierge en abaissant sa lance pour lui rendre hommage. Dans celui : Reine des Prophètes, c’est Isaïe, vêtu, vicillard aux formes vigoureuses, montrant au peuple l’accomplissement de sa prophétie. Dans cet autre : Reine des Patriarches , c'est Abraham exaltant le glorieux fruit de sa postérité, etc. Ajoutez à cela un dessin pur et correct, un coloris plein de lumière et d'harmonie, un ensemble plein de grandeur et de majesté célestes, et vous n'aurez encore qu'une bien faible idée de cette œuvre capitale qui présente, en outre, une des grandes difficultés de la peinture, vaincue avec un rare bonheur, celle d'une décoration au moyen de figures exécutées sur la surface courbe de l’abside, et celle non moins grande, peut-être, de l'absence de lumière directe remplacée par les reflets mous et uniformes des murs tout blancs de l'édifice. MM. Lavaine et Blanquart-Evrard ont continué leurs importants travaux, l’un, dans de grandes compositions musicales qui lui ont valu la décoration du roi des Pays-Bas et les éloges du monde savant ; l'autre dans des perfectionnements ct des produits qu'il semblait impossible à l'art photographique d'atteindre jamais. Persévérant dans son œuvre et passant de la pratique à la 29 théorie, M. Danel a publié sous ce titre : Méthode simplifiée pour l'enseignement populaire de la musique , le cours que, depuis plu- sieurs années, il a ouvert chez lui pour les ouvriers, et qui lesinitie aussi facilement qu'agréablement aux charmes de la musique. M. Verly, qui a fait de l'art numismatique l'objet principal de ses études, vous a fait hommage des premières livraisons de l'ou- vrage qu'il publie sous ce titre : Description des médailles, jetons, monnaies du règne de S. M. l'empereur Napoléon II , précédée des pièces de la Représentation et de la Présidence. M. Verly a produit aussi un projet pour le monument que la ville de Lille élève à la gloire de S. M. I. Napoléon L.®" Ce projet, quoique réunissant plus d'une qualité précieuse, a rencontré pour rival celui du statuaire Lemaire dont les travaux artistiques ne rencontrent plus, depuis de longues années, de concurrents qui puissent lui disputer les palmes à cueillir. Une défaite, dans ces circonstances, n’a rien que d'honorable. Enfin la traduction, qui est aussi un art, doit à M. Moulas la mise en prose du charmant roman anglais de Samuel Johnson, intitulé : Æistoire de Rasselas , prince d'Abyssinie. Notre collègue a-t-il heureusement choisi en mettant la main sur un ouvrage dont il existe déjà trois traductions ? C’est là une question que la publicité, je l'espère, jugera à son avantage. S'il en était autrement , il lui resterait toujours le mérite de la lutte et celui plus grand encore d’avoir coupéré aux moyens propres à répandre en France un ouvrage devenu popu- laire chez nos voisins, et dont la saine philosophie et la douce morale dirigent son lecteur vers le bien. Ces livres-là ne sont pas déjà si communs dans notre littérature pour ne point savoir gré à celui qui vient en augmenter le nombre. J'avais bien raison de vous dire tout à l’heure que , non-seule- ment, dans notre Compagnie, les œuvres se commencent, mais 30 qu'elles s’achèvent et sé publient ; en effet , el je ne puis mieux terminer ma revue de nos travaux dans le cercle des beaux-arts, qu'en payant ie pour la Société entière , à la commission du musée Wicar, le juste tribut d’éloges auquel elle a droit pourle calalogue de ce riche Musée qu’elle vient enfin d'achever, après de longues années de constants et laborieux travaux. Ce catalogue, Messieurs, si impatiemment attendu , répondra, sous tous les rapports, à l'attente du public, et, disons-le hardi- ment, à l'attente du monde savant. Rien n’a été négligé, ni études consciencieuses, ni recherches poussées au loin, ni renseignements authentiques, pour le rendre le digne interprète du Musée dont il met au grand jour les immenses richesses , et vient en doubler le prix en indiquant les filons qui les ont produits. C'était remplir le vœu de son illustre fondateur. A côté de ce savant inventaire des richesses que renferme le musée Wicar, les travaux de la Commission d'histoire naturelle viennent prendre une place qu'eux seuls pouvaient dignement occuper et par leur importance et par leur utilité. Cette Com- mission qui acheva en 1850 l'immense catalogue (plus de 8,000 espèces) des animaux invertébrés du cabinet confié à ses soins, à sa surveillance, vient d'achever une tâche non moins grande en meltant au jour celui des animaux vertébrés de cette précieuse collection ; elle a dans ce dernier travail , dans ce classement gé- néral par classes et par espèces, été puissamment aidée par M. Cussac, jeune entomologiste qu'elle avaitattaché à ses travaux. Maintenant il me reste à vous parler de travaux qui, pour être moins importants, ne doivent pas pour cela être oubliés. Les questions d'économie publique renvoyées par l'autorité su- périeure à l'appréciation de la Société, les ouvrages qui lui ont été offerts en hommage par leurs auteurs, les candidatures aux titres de membres résidants ou correspondants, ont donné lieu à de nombreux et intéressants rapports où se retrouvent les noms 31 de MM. Macquart , Le Glay, Cazencuve, Loiset , Moulas, Parise, Dupuis, Lefebvre, Lamy, Charié, Bruneel | Garreau, Gosselet , Bachy, etc. Vous avez admis au nombre de vos membres résidants, pendant le cours de ces trois dernières années : MM. Blanquart-Evrard, propriétaire Colas , peintre d’histoire. Violette, commissaire des poudres et salpêtres à Lille. Charié , ingénieur en chef des ponts-et-chaussées , id. Charet-de-la-Frémoire , ingénieur ordinaire , id. Dureau , conseiller de préfecture , id. Browers, pharmacien de 1."e classe , id. Garreau , docteur en médecine , id. Tissandier, professeur au Lycée , id. Bruneel, propriétaire , id. Gosselet, docteur en médecine , id. Meurein , maître en pharmacie , id. Et au nombre de ses correspondants : MM. Catalan, docteur ès-sciences , ancien répétiteur à l’École polytechnique, à Paris. Le duc d'Albert de Luynes, membre de l'Institut. Ivan-Willarceau , astronome à l'Observatoire de Paris. Achmet d'Héricourt , propriétaire à Arras. Debaecker, propriétaire à Teutincourt. Auguste de Burgos, agronome, à Madrid. Ponchard , inspecteur de la librairie , à Valenciennes. Serret, répéliteur à l'École polytechnique. Davaine , docteur en médecine, à Paris. Bruno Dauvin, docteur en médecine , à Sairt-Pol. 32 A côté de ces alliances qui viennent, de jour en jour augmenter notre grande famille scientifique , d'anciennes liaisons ont été brisées par le temps. Nous avons eu la douleur de perdre MM. Barrois, Peuvion et Jean-Baptiste Lestiboudois , tous trois membres résidants; la mort est venu rompre les liens qui les at- tachaient à notre Société, mais la part qu’ils ont prise dans nos travaux, mais les excellents rapports qu'ils ont Loujours eus avec nous , mais le juste tribut d'éloges et les paroles d'amitié et de regrets qu'ont prononcées sur leurs tombes MM. Legrand, Bailly et Le Glay, resteront dans notre mémoire comme ces bonset doux souvenirs qui portent au bien , à l'amour du travail, et avec les- quels on aime à se retrouver. FF à... D eee me uen rural | | Dash tbe had br Rage be gags | k ns 07 | | À Tv 1 À | y =! 1 € L à ] | AE à po