R 260 cd MÉMOIRES DU MUSÉUM NATIONAL D’HISTOIRE NATURELLE NOUVELLE SÉRIE Série A, Zoologie TOME XX FASCICULE 2 D. GUINOT-DUMORTIER RÉVISION DES GENRES EUXANTHUS DANA ET HYPOCOLPUS RATHBUN (CRUST. DECAP. BRACH.) PARIS ÉDITIONS DU MUSÉUM 36, rue Geoffroy-Saint-Hilaire (V e ) 1960 Source : MNHN, Paris MÉMOIRES III IIISKIII NATIONAL «HISTOIRE MT [RELIE Série A. Zoologie. Tome XX, fascicule 2. — Pages 153 à 218 RÉVISION DES GENRES EUXANTHUS DANA ET HYPOCOLPUS RATHBUN (CRUST. DECAP. BRACH.) Remarques sur les cavités sous-hépatiques et les coaptations des Hypocolpus par Danièle GUINOT-DUMORTIER SOMMAIRE I. Introduction. 154 II. Remarques sur les cavités sous-hépatiques et les coaptations des Hypocolpus . 157 III. Le genre Euxanthus Dana . 164 Tableau de détermination des Euxanthus . 167 E. sculptilis Dana . 167 E. exsculptus (Herbst) . 169 E. rugosus Miers . 173 E. herdmani Laurie. 175 E. macutatus Haswell . 177 IV. Le genre Hypocolpus Rathbun . 177 Tableau de détermination des Hypocolpus . 179 H. dioerticulatus (Strahl) . 180 Hypocolpus .. 184 H. granulatus (de Haan) . 187 H. per/ectus sp. nov. 190 H. rugosus rugosus (Henderson) . 195 H. rugosus stenocoelus ssp. nov. 198 H. punctatus (Miers) . 203 H. abolti (Rathbun) . 205 V. Distribution géographique . 208 VI. Résumé . 211 Vil. Bibliographie . 213 Mémoires du Muséum. — Zoologie, t. XX. 11 154 DANIÈLE GUINOT-DUMORTIER I. — INTRODUCTION C’est au cours de l’étude d’une petite collection de Décapodes Bra- chyoures, récoltée à la fin du siècle dernier à l’Ile Mayotte, dans l’Archipel des Comores, que nous avons eu à examiner un Xanthidé appartenant au genre Hypocolpus Rathbun. La détermination de ce spécimen nous a donné l'occasion de vérifier celle des autres Hypocolpus de la collection du Muséum et de consulter la littérature relative à ce genre ; ceci nous a rapidement amené à constater qu’une révision systématique s’imposait. Le caractère apparemment artificiel de la distinction entre les genres Hypocolpus Rathbun et Euxanlhus Dana nous a incité à étendre à ce dernier genre l’essai de révision tenté ici. Les Euxanlhus sont plus fréquemment cités dans la littérature carcinologique que les Hypocolpus. En effet, si le genre Euxanlhus Dana, 1851, dont un assez grand nombre d’espèces ont été décrites, maintenant en partie identifiées les unes aux autres, se répartit largement et abon¬ damment dans tout l'Indo-Pacifique, le genre Hypocolpus Rathbun, 1897 (= Hypocoelus Heller, 1861), strictement indo-pacifique lui aussi, possède, semble-t-il, des espèces plus localisées, fort rares pour la plupart, et mal connues. Ces deux genres, caractérisés par la conformation du bord antéro¬ latéral et de la région antennaire, se distinguent seulement l’un de l’autre par la présence, chez les Hypocolpus, d'une cavité située sur la face ven¬ trale, dans la zone sous-hépatique, et limitée antérieurement par la première moitié, en forme de crête, du bord antéro-latéral de la carapace. Le nombre des espèces décrites sous le nom générique A'Euxanlhus s’élève à 13 (1). H. Balss (1938, p. 40), dans sa liste des espèces valides du genre Euxanlhus, en cite 7, dont une douteuse : E. exsculplus (Herbst), E. herdmanni (sic, = herdmani) Laurie, 1906 (? = punclalus A. Milne Edwards), E. maculatus Haswell, 1882, E. minutus Edmondson, 1925, E. punclalus A. Milne Edwards, 1865, E. ruyosus Miers, 1884, et E. sculptilis Dana, 1852. Les six autres espèces sont depuis longtemps tombées en synonymie, ce sont : E. huonii (Jacquinot, 1852) [ =E. sculptilis Dana], et E. melissa (Herbst, 1801), E. mamillatus (H. Milne-Edwards, 1834), E. nilidus (1) On trouve mention, dans la liste des Crustacés de l'Afrique orientale donnée par Hilgendorf (1869, p. 100), de deux espèces : • E. fragarius (Melissa , Strahl, mser. Mus. Bcrol.) • et • Ë. cauipes (Mel., Strahl, mser.) ■ qui ne nous paraissent pas avoir été publiées et qui seraient, selon une hypothèse de Nobili (1900, p. 238), la première Melissa mamiltaln Strahl | = E. exsculplus (Herbst)), la seconde Leptodius cavipes (Dana). Source : MNHN, Paris GENRES EUXANTHUS ET HYPOCOLPUS 155 Dana, 1852 [toutes trois = E. exsculptus (Herbst, 1790)]. E. rugulosus Heller, 1865 (1) est un synonyme de Lydia annulipes (H. Milne Edwards, 1834) et E. luberculosus Miers, 1884 (2), synonyme d ’Actaea calculosa. (H. Milne Edwards, 1834.) Des sept espèces citées par Balss, ne peuvent être retenues aujour¬ d’hui comme indiscutablement valides que les quatre suivantes : E. sculp- tilis Dana, 1852, E. exsculptus (Herbst, 1790), E. rugosus Miers, 1884, décrit à l'origine comme une variété d 'E. exsculptus, et E. herdmani Laurie, 1906. En effet, E. maculatus Haswell est une espèce douteuse : elle n’a, à notre connaissance, jamais été revue depuis sa brève et insuffisante description et ne peut être identifiée avec certitude à aucune autre espèce du genre. L'E. minutus décrit par Edmondson (1925, p. 46) du Pacifique tro¬ pical (Ile Wake) n’est pas un Euxanthus et nous sommes d’accord avec C. H. Edmondson pour l’identifier à Cycloxanthops cavatus Rathbun (3). En ce qui concerne le genre Hypocolpus, il comptait cinq espèces : //. diverticulatus (Strahl, 1861) à très vaste répartition, H. granulatus (de Haan, 1837) connu jusqu’à présent du Japon et du Siam seulement, H. rugosus (Henderson, 1893) signalé deux fois du golfe de Manaar et mis en synonymie par des auteurs récents avec l’un ou l’autre des précé¬ dents, et enfin deux espèces caractérisées respectivement par la présence d’une et de deux crêtes au travers de la cavité sous-hépatique, et très rares puisque récoltées une fois : H. punctalus (Miers, 1884) du Détroit de Torrès, et deux fois : H. abotti (Rathbun, 1894) de file Aldabra. L’examen des collections du Muséum d'Histoire naturelle nous a permis de distinguer une espèce nouvelle : Hypocolpus perfectus sp. nov. confondu par Balss (1934, p. 511) avec H. granulatus de Haan. Nous décrivons une sous-espèce nouvelle, H. rugosus (Henderson) (t) E. rugulosus Heller, 1865, p. 12, pl. 2, 11g. 2 ; Stebbing, 1910, p. 297. Cf. Odhner 1925, p. 85 ; Balss, 1938, p. 40 ; Barnard, 1950, p. 218. (2) H. luberculosus Miers, 1884, p. 205, pl. 19, lig. A. Cf. Odhner, 1925, p. 52 ; Balss, >938, p. 40 ; Sakai, 1939, p. 486. (3) Nous extrayons d'une lettre du Dr. C. H. Edmondson (16 juillet 1957) le passage suivant : • 1 ain als'o glad to make a statement regarding theform whieli 1 callcd Euxanthus Minutus in 1925. 1 dcscribcd it lirsl frora a Wake Island spcciincn, doubtless a juvénile, balss, in 1938, p. 10, without having scen the spécimen, considercd it a valid spceies. La ter (1931 ) I described a erab from Maui (Hawaiian) under the name Megametope sulcalus. l’his proved to be the saine species which I described from Wake Island. Balss (1938, l‘. 43) considered M. sulcalus to be Cycloxanthops cavalus Hathbun (1907). 1 am inclined to »gree with Balss thaï bolh E. minutus and M. sulcalus are C. cavalus Hathbun. » Après examen d'un spécimen de cette espèce, fourni par le Dr. Edmondson, et provenant d’Oahu, ainsi que du spécimen de Cydoxunlhops cavatus (dét. T. Odhner, coll. du Muséum) signalé Par II. Bai.ss (1938, p. 43), nous pensons que la synonymie de Cycloxanthops cavatus Rathbun, 1907 s'établit comme suit : Cycloxanthops cavalus Rathbun, 1907, p. 41, pl. 5, lig. 8 : pl. 6, fig. 3, 3a : Tuamotu. Euxanthus minutus Edmondson, 1925, p. 46, lig. 8, a-d ; pl. 3, B : Ile Wake. Megametope sulcalus Edmondson, 1931, p. 11, pl. 4, A ; lig. 3, e,f : Ile Maui. Cycloxanthops cavata, Ward, 1932, p. 244 : lie North West. Cycloxanthops cavalus, Balss, 1938, pl. 43 : lies Gilbert. H faut toutefois noter que l'appartenance de l’espèce cavatus Rathbun au genre Cy¬ cloxanthops Hathbun, 1897 (p. 164), nous paraît douteuse. Source : MNHN, Paris 156 DANIÈLE GUINOT-DUMORTIER stenocoelus, d’après deux spécimens recueillis à l’Ile Maurice et figurant parmi les indéterminés du British Muséum. Pour toutes les espèces du genre Hypocolpus, nous qualifierons la cavité de la face ventrale de «sous-hépatique» (Sakai, 1939, p. 457, parle de «subhepatic area») et non de « ptérygostomienne » comme l’ont fait la majorité des auteurs : en effet, elle est toujours située entre le bord antéro-latéral et la ligne de suture qui sépare la zone sous-hépa¬ tique de la zone ptérygostomienne, cette ligne s’infléchissant lorsque le bord inférieur de la cavité tend à se rapprocher de la base des chélipèdes (H. diverticulatus : pl. II, fig. 8 ; H. per/edus : pi. II, fig. 7). Notre étude des genres Euxanthus et Hypocolpus est principalement basée sur les exemplaires conservés au Muséum. Compte tenu des recti¬ fications de détermination, la collection comprend des représentant de trois des quatre espèces d’ Euxanthus connues et certainement valides, à savoir : E. sculplilis Dana, E. exsculptus (Herbst), E. rugosus Miers. Le Dr. I. Gordon a examiné pour nous le type d’ E. herdmani Laurie, conservé au British Muséum, et nous en a fourni un dessin. Le genre Hypocolpus est représenté dans les collections par H. granu- latus (de Haan), par II. diverticulatus (Strahl), et maintenant par l'espèce nouvelle, H. per/edus, que nous avons décrite d’après les deux spécimens déterminés par Balss comme II. granulatus en 1934 (p. 511), l’un conservé au Muséum d'Histoire naturelle, l’autre envoyé par le Dr. Engelhardt du Musée de Munich ; un troisième spécimen, indéterminé de la collection Decary, et provenant comme les précédents de Madagascar, nous a per¬ mis de vérifier la description d 'H. per/edus et de constater le total développement de la cavité sous-hépatique chez un exemplaire juvénile de cette espèce. Un spécimen, déterminé par Nobili sous le nom d 'H. diverticulatus et qui est, soit un individu anormal de cette espèce, soit une espèce nouvelle, est décrit ici sous le nom d 'Hypocolpus sp. Grâce à l’obligeance du Dr. I. Gordon, nous avons pu examiner plu¬ sieurs spécimens d’H. rugosus Henderson dont les syntypes, et aussi deux spécimens indéterminés du British Muséum, types d 'H. rugosus stenocoelus nov. ssp. Le Dr. Panning a bien voulu nous confier l’exemplaire d’H. abotti (Rathbun) signalé par Balss en 1934 et conservé au Musée de Hambourg, ainsi que trois spécimens d'H. diverticulatus (Strahl). Nous avons égale¬ ment eu communication de deux spécimens de cette dernière espèce, provenant de Nhatrang (Inst. Océanogr.). La seule espèce du genre que nous n’ayons pas eue entre les mains est II. pundatus (Miers), mais l’holotype et seul spécimen connu est conservé au British Muséum, et le Dr. I. Gordon nous a fourni de cet exemplaire des dessins accompagnés de renseignements qui nous permettent de le redécrire. Source : MNHN, Paris GENRES EUXANTHUS ET HYPOCOLPUS 157 Le présent travail comporte pour chacun des deux genres Euxanthus e t Hypocolpus un tableau de détermination et, pour chaque espèce, la synonymie, la liste du matériel examiné, avec l’indication de l’endroit où se trouvent déposés les types (1), une description (2) et les remarques de taxonomie ou de nomenclature auxquelles elles ont donné lieu. Nous donnons un dessin ou une photo de toutes les espèces que nous avons eues en notre possession, et nous avons reproduit la figure originale des deux espèces que nous n’avons pas pu examiner personnellement, Euxanthus herdmani et Hypocolpus punctatus. Nous avons figuré le premier pléopode des espèces dont nous possédions un exemplaire mâle, ainsi que la cavité sous-hépatique de tous les Hypocolpus. Nous exprimons nos remerciements à M. J. Forest, qui a bien voulu nous guider pendant l’élaboration de ce travail ; au Dr. I. Gordon, du British Muséum, pour l’aide très importante qu’elle nous a fournie. Nos remerciements iront également au Dr. Panning, du Musée de Ham¬ bourg, au Dr. Engelhardt, du Musée de Munich, et au Dr. Serène, de l’Institut Océanographique de Nhatrang, qui nous ont envoyé un précieux matériel, au Dr. C. H. Edmondson, qui nous a permis de régler la question de l’espèce décrite par lui sous le nom d 'Euxanthus minutas et enfin à M. M. Gaillard, auteur des dessins qui illustrent ce travail. II. — REMARQUES SUR LA CAVITÉ SOUS-HÉPATIQUE ET LES COAPTATIONS DES HYPOCOLPUS Les Hypocolpus offrent, à la face ventrale de la carapace, dans la région sous-hépatique, deux cavités symétriques, à fond lisse et imperforé. Cette cavité sous-hépatique, dont H. Milne Edwards (1834, p. 376) remarque qu’elle représente une « disposition dont nous ne connaissons pas d’autre exemple chez les Crustacés », étant donné la constance de sa forme dans chaque espèce représentée par plusieurs spécimens et, en même temps, les différences observées d’une espèce à l’autre, semble constituer un caractère différentiel valable, suffisant même dans la plupart des cas, pour procéder à une identification spécifique. Nous avons cependant maintenu dans l’espèce H. rugosus (Henderson, 1893), les spécimens de Laurie, 1906, provenant de la région topotypique (Golfe de Manaar), malgré une cavité sous-hépatique de taille un peu différente et bordée postérieurement par une dépression assez étroite, plus ou moins granuleuse (pl. II, fig. 14, pl. XII, fig. 69), et qui n’est repré¬ sentée que par un sillon chez le type (pl. II, fig. 13 ; pl. XII, fig. 67). Cette diversité de forme de la cavité sous-hépatique dans le genre (1) AI. P. désigne le Muséum d'Histoire naturelle de Paris, et B. M. le British Muséum. _ (2) La nomenclature utilisée par la désignation des régions de la carapace est celle de °ana (1852A, p. 20). Source : MNHN, Paris 158 DANIÈLE GUINOT-DUMORTIER Hypocolpus (pl. II) et l'existence d’espèces où elle est peu développée, nous ont amené à revoir le genre Euxanthus, par définition dépourvu de cavité. Or, une espèce, E. exsculplus (Herbst, 1790), présente une région sous-hépatique d’aspect variable : il n’y a jamais de cavité à proprement parler mais, chez de nombreux spécimens, une plage lisse, quadrangulaire, de forme et de position fixes, plus ou moins plate et plus ou moins apparente, limitée dans les cas extrêmes, soit par un bord entier, soit par un bord antérolatéral où les dents tuberculiformes typiques font place à de simples lobes (pl. II, fig. 10 ; pl. VIII, fig. 44-47). La présence d’une plage lisse chez E. exsculplus n’est liée ni au sexe, ni à la taille, ni à d’autres caractères morphologiques : elle représente certainement l’homologue de la cavité du genre Hypocolpus. Cette espèce est la seule du genre Euxanthus qui présente une fossette ventrale, facultative : chez les autres espèces, la région sous-hépatique est plus ou moins granuleuse et pubescente, jamais déprimée, et le bord antéro- atéral n'est pas cristiforme dans sa moitié antérieure. La présence fréquente d’une aire homologue de la cavité sous-hépa¬ tique des Hypocolpus chez un Euxanthus, lequel est d’ailleurs le plus large¬ ment répandu et le plus souvent cité, montre le caractère artificiel de la coupure générique. Nous avons cependant maintenu le genre Hypocolpus Rathbun, 1897, étant donné les complications de nomen¬ clature qu’entraînerait son rattachement au genre Euxanthus Dana, 1851. Il existe en particulier un Hypocolpus rugosus (Henderson, 1893) et un Euxanthus rugosus Miers, 1884. Un autre trait remarquable du genre Hypocolpus est l’existence de coaptations. Les pattes ambulatoires sont courtes et comprimées laté¬ ralement, l'articulation mérus-carpe permet une flexion totale du carpe, et le mérus est profondément excavé sur sa face inférieure : lorsque l’appendice se replie, le carpe et le propode s’emboîtent dans la concavité du mérus, et le dactyle s’ajuste exactement le long du bord inférieur de l’ischion, l’ongle atteignant — ou presque — le sternite. Lorsque toutes le- pattes sont repliées, les deux dernières se logent dans la très forte conca¬ vité du bord postéro-latéral ; elles s’accolent les unes aux autres, aux chélipèdes et à la carapace, de façon si parfaite que l'ensemble forme une surface continue. Le dispositif le plus parfait est réalisé chez H. per/ectus (pl. XI, fig. 60-63) dont les articles des pattes, larges, comprimés, s’emboîtent entre eux, avec ceux des appendices adjacents et avec le bord de la cara¬ pace qui, très élargie, recouvre les deux premières paires. Les chélipèdes qui, dans les deux sexes, sont égaux, présentent des coaptations similaires : le mérus est comprimé latéralement ; le bord supéro-interne du carpe, lorsque la pince se replie à la face inférieure de la carapace, longe le bord antéro-latéral cristiforme, et l’ensemble propode- dactyle s'applique contre le mérus et l’ischion, en recouvrant à la face ventrale une zone garnie, dans toutes les espèces, d’une toison de poils Source : MNHN, Paris GENRES EUXANTHUS ET HYPOCOLPUS 159 plumeux. Dans cette position, le chélipède est coapté avec la cavité sous- hépatique, et ceci selon deux modes : 1. — La cavité est de grande taille, profonde et son grand axe est très oblique par rapport à l’axe transversal de la carapace. Dans ce cas, la pince traverse la cavité, en en cachant la partie postérieure, mais ne la recouvre jamais totalement ; le bord supéro-interne du carpe et du pro- pode se creuse en une large encoche qui élargit la partie visible de la cavité (H. diverticulalus : pl. XI, fig. 64, 65 et H. perfedus : pl. XI, fig. 62, 63). 2. — La cavité est plus petite, moins profonde et son grand axe est parallèle à l’axe transversal, ou peu oblique par rapport à cet axe : dans ce cas, le bord supéro-interne du carpe et du propode du chélipède s’applique contre la face ventrale de la carapace, suivant exactement le bord postérieur de la cavité. La région supérieure de ces articles présente deux facettes formant entre elles un angle très ouvert, et perpendiculaires au plan d’ouverture de la cavité, laquelle est entièrement laissée à découvert ( H. granulatus : pl. IX, fig. 52, 53 ; H. rugosus : pl. XII, fig. 66-68). Chez H. rugosus slenocoelus, dont la cavité sous-hépatique propre¬ ment dite, lisse, très étroite et allongée, est bordée postérieurement par une dépression granuleuse à peine moins large et moins profonde (pl. II, fig. 15), le bord supérieur de la pince, conformé comme chez H. granulatus, s’applique le long du bord plus ou moins irrégulier de la dépression postérieure (pl. XII, fig. 70, 71). Rathbun (1894, p. 21) indique une disposition analogue chez H. abotli, espèce caractérisée par l’existence de deux crêtes parallèles au travers de la cavité qui, ainsi divisée en trois compartiments (cf. Balss, 1934, p. 512), n’est jamais non plus recouverte par les chélipèdes (pl. II, fig. 11 ; pl. X, fig. 58, 59). U est à noter que, dans le genre Hypocolpus, chez le spécimen décrit d’Obock sous le nom A'Hypocolpus sp. dont la cavité est très peu profonde, la dépression du chélipède est corrélativement à peine marquée (pl. II, fig- 9 ; pl. IV, fig. 25 ; pl. X, fig. 56, 57). Chez les Euxanlhus exsculplus à fossette sous-hépatique et, en par¬ ticulier, dans le spécimen type d’E. punctatus A. Milne Edwards, 1865, celle-ci est toujours laissée à découvert par les chélipèdes, mais on ne peut réellement parler de coaptation, pas plus que chez les autres Euxanlhus. La fonction de la cavité sous-hépatique des Hypocolpus est malheu¬ reusement inconnue. Peu d’auteurs ont essayé de donner une explication du rôle de cette formation énigmatique. Hilgendorf (1879, p. 789), à l’occasion de la description A’Hypocoelus seul plus (= Hypocolpus diuer- ticulatus) de la côte orientale d’Afrique, émet la supposition suivante : « Der grosse runde Ausschnitt oben auf dem Grenzgebiet zwischen Carpus und Hand scheint einen verlockenden Eingang zu der sonderbaren Source : MNHN, Paris 160 DANIÈLE GUINOT-DUMORTIER Seitenhôhle vorstellen zu sollen, die nach dem Einkriechen eines Thieres leicht geschlossen werden kann. » Cette hypothèse, selon laquelle le dispositif que constituent la pince et la cavité représenterait un piège pour la capture de proies, ne peut être retenue. Klunzinger qui semble avoir vu la même espèce vivante, réfute une autre hypothèse et écrit (1913, p. 174) : «Die Grube findet sich bei beiden Geschlechtern in gleicher Entwicklung, kann also kein Brutrauin sein. Ihre Oberflache ist glatt unter der Lupe etwas kôrnig. In der Hinterecke zeigt sich eine vertiefte Stelle, mit weicher Bchaarung. » Etant donné que chez les Euxanthus il y a à la fois absence de cavité sous-hépatique et de coaptation des appendices thoraciques, et que d’autre part, les Hypocolpus présentent par contre des coaptations dont la perfection est d’autant plus grande que les cavités sous-hépatiques sont plus développées ou plus profondes, on peut supposer que les deux caractères — coaptations et présence de la cavité — sont liés. L'existence chez d’autres Décapodes d'adaptations portant sur les régions para-ptérygostomiennes montre dans quelle direction doivent porter les recherches. Le travail de H. Balss en 1944 sur la morphologie des Décapodes nous fournit plusieurs cas de modifications morpholo¬ giques de ces régions, modifications qui seraient en rapport avec la fonction respiratoire. Nous nous bornerons à citer ici quelques exemples, sans tenir compte de la position systématique des espèces, qui, choisies seulement en raison de leurs particularités anatomiques et physiologiques, présentent plus ou moins nettement des dispositifs analogues à ceux observés chez les Hypocolpus. Le cas des Calappa nous montre une coaptation carapace-chélipèdes : en position de repos, ceux-ci, et plus spécialement le propode, très élargi et comprimé latéralement, s’appliquent étroitement contre la face ventrale. L'eau respiratoire pénètre, de part et d’autre, par les crénelures du bord supérieur du propode de la pince, et elle atteint l’orifice branchial, situé en avant des pl, par 1’ « exostegal canal » (Garstang, 1897, p. 215). Ce canal, limité par des poils plumeux, est ménagé entre le bord externe de l’exopodite de mxp 3 , le rebord ptérygostomien et, au-dessus, la face inférieure du propode (Balss, 1944, p. 549). De même, chez Solenolambrus Stimpson ( Parlhenopidae d'Amérique), les chélipèdes peuvent s’appliquer à la face ventrale de la carapace et ainsi recouvrir la gouttière, creusée dans la région prétygostomienne, qui conduit à l’orifice afférent («orifice de Milne Edwards». Balss, loc. cit., p. 551). Un dispositif analogue se retrouve chez un genre voisin, Mesorrhoea Stimpson. Dans le genre Deckenia (Potamonidae de la côte orientale d’Afrique et des Seychelles), il y a, de chaque côté du cadre buccal, un sillon large et lisse qui s’étend de l’extrémité antérieure de l'épistome — et au voi¬ sinage de l’ouverture de la gouttière endostomienne qui constitue la moitié dorsale du tube branchial efférent — jusqu'au niveau de la deuxième dent antéro-latérale ; il se prolonge, à la face dorsale de la carapace, en arrière du front et de l’orbite, par une zone également Source : MNHN, Paris GENRES EUXANTHUS ET HYPOCOLPUS 161 déprimée (cf. A. Milne Edwards et Bouvier, 1893, pl. 8 ; Balss, 1944, p. 552). H. Balss (/oc. cil., p. 556, fig. 590) expose le mécanisme respiratoire des Sesarma, crabes qui passent une partie de leur vie hors de l’eau ; dans ce cas, l’analogie avec les Hypocolpus est là encore, comme chez Deckenia, crabe d’eau douce, assez lointaine : seul est à rapprocher de la cavité sous-hépatique des Hypocolpus, le sillon profond et étroit qui prend naissance au débouché du canal efférent, à l’angle antéro- externe de l’endostome, et qui longe le bord sous-orbitaire. La fonction de cette gouttière semble être de recueillir l’eau efférente avant le rejet de celle-ci, soit sur la face dorsale de la carapace, soit sur la zone réticulée de tubercules et de soies géniculées qui s’étend ventralement sur toute la région ptérygostomienne et sur les branchiostégites. Cet essai d’un rapprochement entre l’appareil respiratoire de certains Brachyoures et la cavité sous-hépatique du genre Hypocolpus, se révèle peu satisfaisant ; d’autres exemples classiques d’adaptations respira¬ toires ne donnent pas non plus d'explication concluante. En effet, dans tous ces cas, il n’y a pas une cavité close comme chez Hypocolpus : il s’agit toujours d'un sillon, d’une gouttière — la pince peut concourir à sa fermeture — qui communique, soit avec l’orifice afférent, soit avec le canal efférent. C'est surtout chez un autre Xanlhidae, dans le genre Carpoporus Stimpson, 1871, connu par deux espèces seulement, et chez un Anomoure de la famille des Lilhodidae, appartenant au genre LopholithodesBrandt, 1848 (= Echinocerus White, 1848. cf. Holmes, 1900, p. 127), que l’on trouve des adaptations comparables à celles observées chez les Hypocolpus Le genre Carpoporus Stimpson possède, comme les genres Euxanthus et Hypocolpus, un bord antéro-latéral ne rejoignant pas l’angle orbitaire externe, mais se prolongeant à la face inférieure jusqu’à l’angle antérieur de la cavité buccale (cf. Rathbun, 1930, p. 235) ; la conformation de la région antennaire est également voisine (cf. A. Milne Edwards, 1879, p- 247). Mais Carpoporus se distingue par un front de forme différente, par le grand écartement des orbites, la convexité et la lobulation de la carapace, les pattes ambulatoires, etc... De C. papulosus Stimpson, 1871, de la côte atlantique américaine dont nous avons examiné un spécimen, M. Rathbun (1930, p. 269) écrit dans sa diagnose (p. 270) : « Chelipeds with a large hole above between carpus and manus». M. Rathbun suppose — comme auparavant Stimp¬ son — que cet orifice est un passage pour l’eau jusqu'aux ouvertures branchiales afferentes et que les deux épines, « peglike », situées au milieu de la face interne de la main, forment une sorte de filtre en avant de l’ou¬ verture branchiale. Balss (1944, p. 551) confirme : « Hier wird der Kanal [aber] durch den Hinterrand des Propodus und den Vorderrand des Carpus der Scherenfüsse gebildet und fiihrt zur Milne Edwardsschen Offnung. » C. papulosus, s’il possède une excavation, d’ailleurs remarqua- Source : MNHN, Paris 162 DANIÈLE GUINOT-DUMORTIER blement circulaire entre le carpe et la main, n’a pas de cavité sous-hépa¬ tique (cf. Rathbun, 1930 pl. 110, fig. 3-6 ; pl. 111). C. orientalis Sakai (Sakai, 1935, p. 77 ; 1939, p. 458), connu seulement du Japon, est ainsi décrit : « A deep semicircular dépréssion excavated at the antero-lateral border behind the orbit ; the cheliped has also a dépréssion on the inner dorsal side bctween the carpus and the propodus. When the chelipeds are tightly retracted, these two dépréssions unité to form an ovoid one aside the carapace, which can be observed entirely from obliquely forward ». C. orientalis se rapproche donc davantage du genre Hypocolpus ; toutefois, la cavité de la carapace semble là beaucoup plus éloignée du cadre buccal, et se trouve située très près du bord antéro¬ latéral ou sur le bord antéro latéral lui-même (Sakai écrit « at the antero- lateral border ». En vue dorsale de la caparace, la cavité est nettement visible (cf. Sakai, 1935, pl. 7, fig. 3 ; 1939, pl. 60, fig. 5),ce qui n’est le cas chez aucun Hypocolpus. De plus, et ceci est valable aussi pour C. papulosus, l’excavation de la pince n’est pas réalisée de la même manière que chez H. diverti- culatus ou H. perfeclus. Chez Carpoporus, le bord supéro-interne ne présente pas une zone déprimée entre le carpe et le propode, mais il existe, à l’articulation, un véritable « trou » semi circulaire que Rathbun (1930, p. 576) qualifie de « respiratory orifice». A. Milne Edwards (1879, p. 247), dans la diagnose du genre Carpo¬ porus, fait allusion aux Lithodidae du genre Echinocercus (sic, = Echino- cerus = Lopholilhodes), et en particulier à E. foraminatus Stimpson, 1859, (= Lopholilhodes foraminatus) de Californie. Ce rapprochement d'un Brachyoure et d’un Anomoure repose sur l’existence dans le genre Lopho- lithodes de coaptations des pattes et, dans l’espèce foraminatus, d’un canal ménagé entre les articles du chélipède et de la première patte ambula¬ toire. Il est remarquable que la description donnée par Faxon (1895, p. 45) des coaptations des pattes dans le genre Echinocerus ( = Lopho- lithodes) puisse convenir à celle d’un Hypocolpus, H. perfeclus ou H. abotti, par exemple. Faxon écrit : « not only do ail the legs fold under the body but their segments are so modified that in an attitude of repose ail the opposed surfaces and edges are fitted together with admi¬ rable nicety, and the animal is boxed up as elïectually as a tortoise in its shell. » Les pattes ambulatoires repliées s’imbriquent en effet d'une façon qui rappelle celle des Hypocolpus. De plus (cf. Stimpson, 1859, p. 79 ; A. Milne Edwards, 1879, p. 247 ; Faxon, 1895, p. 45), il y a chez L. foraminatus un profond sinus sur la face externe du carpe, prolongé par une excavation de la face postérieure du mérus du même appendice, excavation fermée en avant par une crête de la face interne de l’ischion ; un sinus correspondant, moins profond, existe sur la face interne du carpe de la première paire de pattes ambulatoires (cf. Schmitt, 1921, p. 157, fig. 102). Quand les pattes sont repliées, ces sinus forment, de chaque côté du corps, un orifice circulaire qui donne accès au canal situé entre les deux premières paires d'appendices, canal qui servirait, d’après les Source : MNHN, Paris GENRES EUXANTHUS ET HYPOCOLPUS 163 auteurs, à amener l'eau vers les ouvertures branchiales : sans ce dispo¬ sitif, celles-ci seraient obturées parles appendices étroitement appliquées à la face inférieure de l'animal. Bouvier écrit à ce sujet (1895, p. 185) : « Les Echidnocères sont adaptés au même genre de vie que les Calappes et protègent leurs appendices céphaliques en les recouvrant par une sorte d’opercule que constituent les pinces et surtout un lobe interne très développé du carpe. Chez E. joraminatus, cette adaptation spéciale est poussée plus loin que dans les autres Echidnocères, aussi voit-on, dans cette espèce, le bord postérieur du carpe des pattes antérieures présenter une échancrure demi-cylindrique qui peut s'appliquer contre une échancrure de même forme des pattes ambulatoires, et former avec elles un canal vraisemblablement destiné au courant d’eau respiratoire». Balss (1944, p. 546) reprend la même explication : « Wenn also die Beine aneinandergelegt werden, so entsteht dadurch ein glattwandiger Kanal, der nach déni Branchiostegiten hinführt und das Atemwasser einlâsst. » En résumé : les Lopholithodes ont des pattes coaptées de telle façon que l'animal contracté forme une masse compacte, sans aspérités ni creux importants. Cette disposition des appendices ne permettrait pas l'accès de l’eau respiratoire à l’orifice branchial afférent si les chélipèdes ne présentaient un canal par lequel pénètre cette eau. Une espèce de Carpoporus présente des coaptations du même ordre des pattes et des chélipèdes et possède en plus une cavité dans la région anléro-latérale de la carapace, cavité dont le rôle n’est pas connu. Les Hypocolpus, enfin, ont des pattes thoraciques coaptées avec la carapace comme chez Lopholithodes, et leurs chélipèdes présentent aussi des adaptations qui sont directement en rapport avec la présence de cavités sous-hépatiques. Il semble que dans ces trois cas, le fait adaptatif principal soit la coaptation des appendices qui permet au crustacé de se ramasser en « boule » comme le font certains animaux terrestres : Tatou, Glomeris, Armadillidium. Pour être parfaite, cette adaptation a dû être accompagnée de l’acquisition de dispositifs tels que les « passages » ménagés dans les appendices de Lopholithodes et Carpoporus. Peut-être les cavités sous-hépa¬ tiques des Hypocolpus jouent-elles un rôle dans la circulation de l’eau respi¬ ratoire ? Nous ne pouvons malheureusement pas pour l'instant déterminer la nature de ce rôle : elles ne présentent aucun orifice interne, leur fond est lisse et non poreux. Toute hypothèse serait pour l’instant hasardeuse et quels que soient leur développement (en particulier dans le cas de leur proximité de la « fente inspiratrice » chez les espèces H. diverticulatus et //. perfectus) et leur forme, qu'elles soient entières ou divisées par des crêtes, on ignore si elles sont fonctionnelles. L’examen du comportement des Hypocolpus permettait sans doute d’éclairer le problème, mais nos connaissances sur leur biologie sont pratiquement inexistantes. On sait simplement, d’après les localités des récoltes, qu’ils appartiennent surtout à la faune des Madrépores (cf. fig. texte 4 et 5). Rathbun signale (1911, p. 215) H. diverticulatus sur les Source : MNHN, Paris 164 DANIÈLE GUINOT-DUMORTIER récifs de Cargados Carajos ; Laurie (1906, p. 401) signale H. rugosus sur les récifs coralligènes du golfe de Manaar, etc. Par contre, Sakai (1939, p. 458), indique comme habitat A' H. haani Rathbun (= H. gra- nulatus) des fonds vaseux ou sableux à 30-50 mètres de profondeur. A propos d'un Euxanthus, E. melissa (= E. exsculptus), Ward (1932, p. 243) observe : «The species occurs under living coral on the New- Caledonian zone : occasional specimens are obtained in the lagoon zone under the live corals. » III. GENRE EUXANTHUS DANA Euxanthus Dana, 1851, p. 125 ; 1852a, p. 75 (1) ; 18526, p. 173. Melissa Strahl, 1861, pp. 101-103. Euxanthus A. Milne Edwards, 1865, pp. 211, 289 ; 1873, p. 195. Alcock, 1898, p. 109. Euxanlhopsis Rathbun, 1897, p. 166. Euxanthus Klunzinger, 1913, p. 171 [75]. Balss, 1938, p. 40. Espèce-type : E. sculptilis Dana, 1852. Diagnose La carapace est large et convexe. Les régions sont délimitées en lobules plus ou moins proéminents. Le front est proéminent et étroit (environ 1/4 de la plus grande largeur de la carapace). Le bord antéro¬ latéral, long et divisé en dents tuberculiformes — certaines sont parfois remplacées par des lobes peu saillants, — ne se termine pas à l’orbite mais se prolonge à la face inférieure, sous l’angle exorbitaire, jusqu’à la partie antérieure du cadre buccal. 11 n'y a pas de dent orbitaire externe, sauf chez une espèce (E. sculptilis). Les antennules sont repliées presque transversalement. L’article basal de l’antenne est long et se loge entre le bourrelet formé par le bord supra-orbitraire et la dent infra-orbitraire, d’ailleurs parfois peu saillante. Son angle supéro-externe forme un prolongement qui pénètre à l’intérieur du hiatus orbitaire et le remplit ; à son angle supéro- interne est ménagée une petite dépression au fond de laquelle s’insère le flagelle de l'antenne qui est petit et se trouve inclus dans le hiatus orbitaire (pl. I, fig. 4). L’orbite n’est pas close, mais le segment basal antennaire est, du côté interne, en contact avec le front qui vient en (I) En 1852 a, Dana considère Euxanthus comme un sous-genre du genre Xantho Leach. Nous transcrivons ici sa diagnose : • Articulas antennarum externarum linus orbital fissurant internant ad summum imptens, caoitate in ejus apicis latere antico articulum pro- ximum gerente. A largo anlero-laleralis sub orbitd anlice productus • (1852a, p. 75). Source : MNHN, Paris GENRES EUXANTHUS ET HYPOCOLPUS 165 recouvrir le bord et, du côté externe, il se soude avec la paroi orbitaire inférieure. Le bord supra-orbitaire possède une seule ligne de suture, fermée et peu distincte. Les orbites sont petites. L’endostome est lisse et sans crêtes (Hyperolissa). Les chélipèdes sont égaux dans les deux sexes. Les doigts sont très légèrement excavés à leur extrémité. L’abdomen mâle a cinq segments (les segments 3-4-5- sont fusionnés). L’abdomen femelle est de sept articles. Les pléopodes sont de type xanthidien banal (voir pl. VI); le pl2<$ est court, à pièce apicale falciforme. Remarques En 1861, Strahl avait proposé, en remplacement d 'Euxanihus, le nom générique de Melissa, choisi en raison de l’existence d’un Cancer métissa décrit par Herbst en 1801. En 1897 (p. 166), M. Rathbun avait proposé Euxanthopsis pour Euxanihus Dana, 1851 et Métissa Strahl, 1861, étant donné l’existence d'Euxanlhe Hübner, 1816 (Lepidoptera) et de Melissa Smith, 1854 (Hymenoptera) : aucun auteur n’a adopté ce nouveau nom. Le genre Euxanthus est un genre indo-pacifique (fig. texte 4) ; il groupe actuellement cinq espèces dont une fort douteuse (E. maculatus Haswell, 1882, voir p. 177). Il se distingue parla conformation du bord antéro-Iatéral et de la région antennaire. Les remarques qui vont suivre sont aussi en grande partie valables pour les Hypocolpus qui ne diffèrent des Euxanthus que par la présence de cavités sous-hépatiques. Le bord antéro-Iatéral n’aboutit pas à l’orbite mais se prolonge à la face ventrale jusqu’aux angles de la cavité buccale : c’est aussi le cas des genres Medaeus Dana, 1851, Carpoporus Stimpson, 1871, Lipaes- thesius Rathbun, 1898, Halimede de Haan, 1835. Ortmann (1893, p. 429) base sa classification des Xanthini, en parti¬ culier sur la disposition de la région antennaire : il place le genre Euxan¬ thus parmi les Xanlhidae, dans la sous-famille des Carpilinae qu’il carac¬ térise ainsi ; « Innere Orbitaspalte offen, Basalglied der âussern Antennen in die Orbitasplate eindringend, frei Glieder nicht von der Orbita ge- trennt. » C’est le cas des Euxanthus (pl. I, fig. 4) et des Hypocolpus (pi. I, fig. 5 et 6) ; cependant les Carpilius sont bien différents : en effet, l’article basal antennaire n’atteint pas l'angle supéro-interne de l’avancée sous-orbitaire, et ce sont seulement les articles suivants et le flagelle, très court, qui se prolongent à l’intérieur du hiatus orbitaire ; il n’y a pas de cavité ménagée à l’angle supéro-interne du segment basal de l'antenne pour l’insertion de la tigelle mobile (pl. I, fig. 1). Mais chez d’autres Carpilinae, comme Phymodius, on peut retrouver une disposition analogue à celle d'Euxanthus, avec un article basal s’avançant jusqu’au niveau de la dent infra-orbitaire et une petite cavité pour l’insertion du flagelle. Alcock (1898, p. 77) isole, parmi les Xanlhidae et la sous-famille des Source : MNHN, Paris 166 DANIÈLE GUINOT-DUMORTIER Xanlhinae, les deux genres Euxanthus et Hypocoelus ( = Hypocolpus) dans l'alliance Euxanthoidea. Klunzinger (1913, p. 170) rapproche le genre Euxanthus des Eti- sinae, comme l’avait d’ailleurs déjà fait A. Milne Edwards (1865, p. 289). En effet, si les espèces du genre Etisus tel que l’a défini Ortmann (1893, p. 470), ont des orbites closes par accotement des bords infra et supra orbitaires et, par suite, possèdent un article basal antennaire ne se prolongeant pas à l’intérieur du hiatus orbitaire — c’est toute l’antenne qui est alors exclue du hiatus (pl. 1, fig. 2) —, les espèces du genre Etisodes possèdent, selon la diagnose d’ORTMANN, des orbites closes par la soudure de l'article basal antennaire, d’une part avec le rebord sous-frontal, d’autre part avec la paroi orbitaire, et montrent un prolongement du segment basal à l’intérieur du hiatus orbitaire, ainsi qu’une dépression pour l’insertion du flagelle (pl. I, fig. 3). Mais, à l’inverse du genre Euxan¬ thus (et plus généralement des Carpilinae), le genre Etisodes (et les Etisinae) présente une tigelle mobile, longue, exclue de l’orbite. G. Bohn, dans un travail sur la respiration des Décapodes, traitant des conséquences morphologiques et phylogéniques (1901, p. 210) qu’en¬ traînent les adaptations respiratoires chez les Xanthidae, rapproche E. mamillatus A. Milne Edwards (= E. exsculptus) ainsi qu’ Hypocoelus granulalus (= Hypocolpus granulalus) de Hann, de plusieurs espèces d ’Actaea qu’il a examinées : selon cet auteur, ces diverses espèces sont affines et se caractérisent par un front rabattu en avant de manière à recouvrir plus ou moins l’angle supéro-interne de l’article basilaire de l'antenne et à s’y souder (toc. cil., p. 289, fig. 176 H et E). Bohn reconnaît en outre un caractère primitif à E. mamillatus (E. exsculptus) en raison de la présence chez cette espèce des traits distinctifs cités ci-dessus et du développement d’un « pseudo-lobe portunien » au sommet des lacini des maxillipèdes antérieurs (toc. cil., p. 290). En réalité, aucun genre de Xanthidae ne semble être très proche des Euxanthus et des Hypocolpus ; la constance, à l’intérieur des deux genres, de plusieurs caractères importants leur confère une grande homogénéité: ce sont la lobulation particulière de la carapace, la conformation de la région antennaire, du bord antéro-latéral, du maxillipède externe, du premier pléopode mâle dont l’organisation est la môme chez toutes les espèces (au nombre de soies distales près) et enfin l’égalité, dans les deux sexes, des chélipèdes, ce qui est un cas relativement peu fréquent chez les Brachyoures, et plus précisément chez les Xanthidae. Les deux genres Euxanthus et Hypocolpus dont la séparation est, en fait, artificielle puisqu’elle repose uniquement sur la présence, chez le second, de deux cavités ventrales sous-hépatiques, paraissent occuper une place à part et doivent former une section des Xanthidae qui correspondrait à l’alliance des Euxanthoidea d’ALCOCK. Source : MNHN, Paris GENRES EUXANTHUS ET HYPOCOLPUS 167 TABLEAU DE DETERMINATION DU GENRE EUXANTHUS 1. Une dent orbitaire. Six dents antéro-latérales E. sculptilis, p. 167 — Pas de dent orbitaire externe. Moins de six dents antéro-latérales. 2 2. Quatre dents antéro-latérales.E. herdmani, p. 175 — Cinq dents antéro-latérales, les trois premières parfois peu dis¬ tinctes . 3 3. Toujours cinq dents antéro-latérales tuberculiformes. Face dor¬ sale rugueuse. E. rugosus, p. 173. -— Les trois premières dents antéro-latérales plus ou moins déprimées, parfois fusionnées en un lobe unique (forme punctatus). Face dorsale lisse. E.exsculptus (1), p. 169. Euxanthus sculptilis Dana (PI. VI, fig. 39 ; pl. IX, fig. 49) Euxanthus sculptilis Dana, 1852a, p. 75 ; 18526, p. 173, pl.8, fig. 8 a-d : Iles Fidji et Tongatabu. — Type : Smithsonian Inst., Washington. Cancer huonii, Jacquinot, 1852, pl. 4, fig. 1; Jacquinot et Lucas, 1853, p. 16 : Détroit de Torrès. Métissa sculptilis, Strahl, 1861, p. 101. Euxanthus sculptilis, A. Milne Edwards, 1865, p. 291 : Iles Fidji et Tongatabu. Euxanthus huonii, A. Milne Edwards, 1865, p. 290, pl. 15, fig. 1-lc : Détroit de Torrès. Euxanthus sculptilis, Hilgendorf, 1869, p. 106 : Mer Rouge. Euxanthus huonii, Haswell, 18826, p. 47 : Queensland (Cap Grenville) ; Miers, 1884, pp. 182, 204 : Côte N. et N.-E. de l'Australie. Euxanthus sculptilis, Miers, 1884, p. 182 : N.-E. de l’Australie, Iles Fidji, Iles Philippines. Euxanthus huonii, de Man, 1888, p. 263 : Ile Amboine. Euxanthus sculptilis, Ortmann, 1893, p. 466 : Samoa ; Alcock, 1898, p. 111 : Golfe Persique, Iles Andaman, Samoa. Euxanthus huonii, Lanchester, 1900, p. 735 : Singapour. Euxanthus sculptilis, Klunzinger, 1913, p. 171 [75] : Mer Rouge ; Laune, 1915, p. 413 : Mer Rouge, Indes; Boone, 1934, p. 107, pl. 57 : Tahiti ; Gordon, 1934, p. 28 : Moluques (Banda Neira) ; Stephensen, 1945, p. 148 : Golfe Persique (d’après Alcock). Matériel examiné. Détroit de Torrès, Hombron et Jacquinot coll., Type de Cancer huonii Jacquinot : 1 17,5x12,3 mm, Tuticorin : vue dorsale. Fio. 67. — Id. : vue ventrale, chélipèdcs en extension. Fig. 68. — Id. : vue frontale, chélipèdcs en position de repli découvrant tota¬ lement les cavités. Fig. 69. — H. rugosus (Henderson), spécimen déterminé par Laurie (1906), 9 ovigère 18x13 mm, Golfe de Manaar : face ventrale, cavité sous-hépa¬ tique gauche. Fig. 70. — H. rugosus slenocoelus ssp. nov., Syntype, $ 23x15 mm, Ile Maurice : vue dorsale. Fig. 71. — Id. : vue frontale, chélipède laissant totalement à découvert la cavité sous-hépatique, lisse, ainsi que la dépression granuleuse qui la borde postérieurement. Source : MNHN, Paris MÉMOIRES DU MUSÉUM. Série A. Tome XX. PI. XII 70 71 GENRES EUXANTHUS ET HYPOCOLPUS Source : MNHN, Paris Source : MNHN, Paris