7? 260 CZ 2& hx. ISBN 2-85653-135-0 MÉMOIRES DU MUSÉUM NATIONAL D’HISTOIRE NATURELLE NOUVELLE SÉRIE Série B, Botanique, TOME 31 Odile PONCY LE GENRE INCA (LÉGUMINEUSES, MIMOSOIDEAE) EN GUYANE FRANÇAISE SYSTÉMATIQUE, MORPHOLOGIE DES FORMES JUVÉNILES, ÉCOLOGIE « STUDIES ON THE FLORA OF THE GUIANAS », N° 13 PARIS ÉDITIONS DU MUSÉUM 38, rue Geoffroy-Saint-Hilaire (V«) 1985 Source : MNHN, Paris ÉDITIONS DU MUSÉUM NATIONAL D’HISTOIRE NATURELLE En vente à la Bibliothèque centrale du Muséum, 38, rue Geoffroy-Saint-Hilaire, 75005 Paris C.C.P. : Paris 9062-62 Y Annuaire du Muséum national d'Histoire naturelle (depuis 1939). Archives du Muséum national d'Histoire naturelle (depuis 1802. In-4°, sans périodicité). Bulletin du Muséum national d’Histoire naturelle (depuis 1895. Depuis 1979, divisé en 3 sections : A (Zoologie, Biologie et Écologie animales), B (Botanique, Biologie et Écologie végétales, Phyto¬ chimie), C (Sciences de la Terre, Paléontologie, Géologie, Minéralogie). 4 livraisons par an. Les grands Naturalistes français (depuis 1952. Sans périodicité). Mémoires du Muséum national d'Histoire naturelle (depuis 1935. Depuis 1950, nouvelle série en 3 (puis 4) parties : A (Zoologie) ; B (Botanique) ; C (Sciences de la Terre) ; D (Sciences physico-chimiques). Notes et Mémoires sur le Moyen-Orient (depuis 1933. In-4°, sans périodicité). Publications du Muséum national d’Histoire naturelle (depuis 1933. Sans périodicité). © Éditions du Muséum national d'Histoire naturelle, 1985 Sri MÉMOIRES DU MUSÉUM NATIONAL D'HISTOIRE NATURELLE Série B. Botanique, Tome 31 LE GENRE INGA (LÉGUMINEUSES, MIMOSOIDEAE) EN GUYANE FRANÇAISE SYSTÉMATIQUE, MORPHOLOGIE DES FORMES JUVÉNILES, ÉCOLOGIE « STUDIES ON THE FLORA OF THE GUIANAS », n° 13 par Odile PONCY * SOMMAIRE AVANT-PROPOS. 5 ABSTRACT. 6 INTRODUCTION. 7 1. Place du genre Inga dans la sous-famille des Mimosoideae . 7 a) Historique. 7 b) La tribu des Ingeae . 8 2. Sytématique du genre Inga . 8 Chapitre I. — MORPHOLOGIE. REMARQUES BIOGÉOGRAPHIQUES ET PHYLOGÉNIQUES. 11 I. Morphologie. 11 1. Appareil végétatif. 11 a. Architecture et croissance. 11 b. Tronc et rhytidome. 12 c. Feuilles. 12 2. Inflorescences et fleurs. 13 a. Inflorescences. 13 b. Fleurs. 15 3. Fruits et graines. 15 a. Fruits. 15 b. Graines. 17 4. Plantules et jeunes plants. 17 a. Plantule. 17 b. Jeune plant. 17 1) Tige. 17 2) Feuilles. 18 3) Jeunes pousses. 19 4) Système racinaire. 21 II. Remarques sur la phylogénie. 21 1. Introduction. 21 2. Relations phylétiques des Inga avec les autres genres de la tribu des Ingeae . 21 3. Relations phylétiques entre les espèces du genre Inga . 22 • Laboratoire de Phanérogamie, Muséum national d’Histoire naturelle, 16, rue Buffon, 75005 Paris S— 1 Source : MNHN, Paris 2 ODILE PONCY III. Remarques sur la biogéographie. . 23 A. Distribution géographique des espèces guyanaises de Inga . 23 1. Les espèces endémiques de Guyane et des régions limitrophes. 23 2. Les espèces guyano-amazoniennes. 23 3. Les espèces à très large répartition. 24 B. Affinités floristiques des Inga guyanais... 25 C. Hypothèse sur le centre d’origine et de diversification du genre. 26 Chapitre IL TRAITEMENT SYSTÉMATIQUE DES ESPÈCES GUYANAISES DU GENRE INGA . 29 Remarques préliminaires. 29 Sect. Bourgonia Benth. 30 Inga alata R. Ben. 30 I. alba (Sw.) Willd. 30 I. auristellae Harms. 33 I. bourgoni (Aubl.) DC. 33 I. marginata Willd. 34 I. pezizifera Benth. 35 Sect. Leptinga Macbr. 36 /. cinnamomea Benth. 36 I. fanchoniana Poney. 37 I. heterophylla Willd. 37 I. huberi Ducke. 38 I. lateriflora Miq. 40 I. paraensis Ducke. 40 I. sertulifera DC. 41 I. umbellifera (Vahl) Steud ex DC. 42 /. virgultosa (Vahl) Desv. 43 Sect. Pseudinga Benth. 43 Ser. Glabriflorae Benth. 43 I. capitata Desv. 43 I. stipularis DC. 44 ''Ser. Gymnopodae Benth. 45 I. acreana Harms. 46 I. acrocephala St. 46 I. leioca'ycina Benth. 47 I. melinonis Sag. 48 I. nobilis Willd. 48 I. ricardorum Bern. & Spichiger. 51 I. thibaudiana DC. 51 Ser. Pilosulae Leon. 53 I. pilosula (Rich.) Macbr. 53 I. splendens Willd. 54 Ser. Dysanthae Benth. 56 I. cayennensis Sag. ex Benth. 56 Ser. Longiflorae Benth. 57 I. tubaeformis R. Ben. 57 I. speciosa Spr. ex Benth. var. lomatophylla Benth. 57 Ser. Leptanthae Benth. 59 I. disticha Benth. 59 Sect. Euinga Benth. 60 Ser. Tetragonae Pitt. 60 I. bracteosa Benth. 60 I. nuda Benth. 61 I. rubiginosa (Rich.) DC. 62 Source : MNHN, Paris INGA DE GUYANE FRANÇAISE 3 Ser. Sulcatae Pitt. 64 I. edulis (Vell.) Mart. 64 I. ingoides (Rich.) Willd. 65 I. meissneriana Miq. 67 Clé des espèces d’après les caractères des fruits. 67 Clé pour les formes juvéniles de 22 espèces. 69 Chapitre III. — LA CROISSANCE DU JEUNE PLANT. 71 Introduction. 71 I. L’axe primaire orthotrope. Modalités d’acquisition de la plagiotropie. 71 A. Description. 72 1. I. edulis et les espèces à croissance continue. 72 2. I. fagifolia et les espèces à croissance rythmique. 74 3. Autres espèces. 76 B. Discussion. 76 a. Acquisition de la phyllotaxie distique et de l’inclinaison plagiotrope. 76 b. Déterminisme de la différenciation plagiotrope.,. 77 II. Ramification de l’axe primaire : étude des plantes en serre. 79 A. Le jeune plant : axes latéraux précoces et ramification plagiotrope séquentielle. 79 1. Description. 79 2. Discussion. 79 B. Description comparée de la séquence de développement chez deux espèces. 80 1. I. edulis . 80 2. I. fagifolia . 84 3. Discussion. 86 a) Degré de différenciation et réversibilité. 86 b) Mise en place du relais du tronc. 86 c) Croissance rythmique. 86 III. La ramification : quelques exemples d ’Inga juvéniles étudiés sur le terrain. 88 1. Présentation de quelques exemples. 88 — en sous-bois de forêt dense. 88 — en milieu ouvert. 89 2. Discussion. 89 Conclusions. 93 Chapitre IV. — BIOLOGIE ET ÉCOLOGIE DU GENRE INGA EN GUYANE FRANÇAISE. 97 Introduction. 97 I. Amplitude écologique des espèces guyanaises de Inga ; importance du genre dans l’écosystème guyanais. 97 A. Les Inga forestiers. 99 1. La forêt primaire de l’Arataye. 99 2. La forêt secondaire de Cabassou. 100 3. La forêt de la piste de St-Elie. 100 4. Autres localités forestières. 101 B. Les Inga non forestiers. 101 1. Les Inga de la végétation secondaire rudérale. 101 2. Les Inga ripicoles. 103 3. Présence du genre Inga dans quelques biotopes naturels en région côtière. 103 C. Discussion, conclusions. 104 II. La régénération naturelle des Inga et leur rôle dans le recrû forestier. 105 A. Remarques sur la phénologie et la biologie florale. 105 B. Biologie de la dissémination des graines et de la germination. 106 1. La dissémination zoochore. 106 Source : MNHN, Paris ODILE PONCY 2. La germination. 107 a) Délai et taux de germination. 107 b) Viabilité des graines. 108 c) Causes de la perte du pouvoir germinatif. 108 d) Autres remarques. 108 C. Le développement du jeune plant. 110 1. Structure du peuplement d ’Inga en forêt.. 110 2. Les Inga pionniers dans les zones défrichées. 110 D. Discussion : implantation des Inga en forêt et importance des Inga pionniers. 110 1. Adaptation aux conditions sciaphiles. 111 2. Le comportement pionnier. 111 III. Devenir des Inga en forêt : leur place dans la sylvigenèse. 112 Conclusions. 115 RÉSUMÉ ET CONCLUSIONS GÉNÉRALES. 117 BIBLIOGRAPHIE. 121 Source : MNHN, Paris Avant-propos Le présent travail s’intégre dans l’étude floristique et écologique de la forêt guyanaise, telle qu’elle est effectuée depuis de nombreuses années par les botanistes du Muséum et ceux de l’ORSTOM ; ces derniers, et notamment J. P. Lescure, m’ont montré l’intérêt de l’étude du genre Inga, lors de mon premier séjour en Guyane française, dans le cadre du stage annuel des étudiants de l’Université de Montpellier, dirigé par F. Hallé. Ce travail, pour sa plus grande part, a fait l’objet d’une thèse de 3 e cycle, Soutenue à l’université P. et M. Curie (Paris) en mai 1981. Je remercie F. Hallé d’avoir orienté mes recherches et de m’avoir encouragée tout au long de la réalisation de cette thèse. Au Laboratoire de Phanérogamie, grâce à l’accueil de M. Leroy, j’ai pu bénéficier de l’aide matérielle nécessaire à la réalisation de ce travail. Mlle A. Lourteig n’a pas ménagé sont temps pour m’initier à l’étude des spécimens d’herbier. Par la suite, l’étude des plantes vivantes a été effectuée dans les serres du Muséum ou J. Sem¬ blât m’a accueillie et conseillée, et dans celle du Laboratoire de Phanérogamie à Brunoy, que M. Leroy et Mme Maury m’ont encouragée à utiliser. Je tiens à remercier tous ceux qui m’ont aidée à me procurer des fruits et des graines, ainsi que G. Cremers qui a suivi pour moi le développement des plants cultivés à Cayenne. Grâce aux membres de l’équipe pluridisciplinaire « Arataye » du Muséum, qui m’ont accueillie parmi eux, j’ai pu, au cours de 3 missions en forêt guyanaise, réunir les données de terrain présentées dans ce travail. Lors de ces séjours, j’ai aussi bénéficié des conseils et des encouragements des bota¬ nistes de l’ORSTOM, et de P. Charles-Dominique et son équipe. C’est à Mme S. Jovet-Ast que je dois la publication de ce travail sous sa forme actuelle ; ses conseils m’ont été précieux. Enfin j’adresse mes remerciements chaleureux à ceux qui ont collaboré à la mise au point de ce travail : J. Rameau pour la dactylographie, F. Pilard et G. Chypre pour la réalisation d’une partie des dessins, D. Serrette pour les tirages des photographies et des planches. Source : MNHN, Paris ABSTRACT The présent study of the genus Inga from French Guyana deals with the following points : 1. The strong morphological cohésion of the genus, already mentioned by some authors, is emphazised by the following new features : — the indéhiscent pod ; — the pulpous seedcoat (sarcotesta) which is the edible part of the fruit, confers to the seed a constant structure, not found in other mimosoid généra ; — the embryo and seedling morphology, and specially the semi-hypogeal germination and the undifferentiated initial growth stage which provides interesting generic features (opposite unijugate leaves ; similar stipules and glands, ...) ; — the végétative architecture : in ail analysed species, the growth conforms to Troll’s Model. The morphological analysis of the Guianese species thus shows new characters, but none of them can be useful to discuss Bentham’s classification, based principally on floral characters. 2. Inga shows primitive features, but others — seed structure and once pinnate leaves ; plagio- tropic différentiation of Troll’s model with true distichy ; high level of complexity of the foliar nec- taries, ... — suggest that it represents in the tribe Ingeae a specialized lineage, successfully adaptated to the tropical rain forest, as attested by the important number of species. 3. The biogeographical data until now gathered are still too partial, but suggest that Inga diver¬ sification is recent, at least posterior to the isolation of South America in the Early Cenozoic, and that it'occurred probably when the sédiments of the Amazonian lowlands were laid during the Late Ceno¬ zoic. 4. The initial undifferentiated phase corresponds to orthotropic growth with spirally arranged leaves. Plagiotropic différentiation, analysed at the first stages, appears to be correlated with change of the apical activity of the primary axis and, for some species, with the occuring of rhythmic growth. Both features of plagiotropy (distichy and axis bending) ocur independently ; the first seems to be an endogenous determined pattern, but the second could be largely submitted to ecological condi¬ tions. 5. The ecological analysis of the Guianese Inga shows that only one half of ail species are ri- parian, and mainly that species diversity in high primary forest is very important : about 20 species (out of 37) inhabit it. Other field observations deal with different stages of Inga natural recruitment cycle, the general features of which are described : the edible sarcotesta plays both functions of a seedcoat protecting the embryo against dessication, and of an aril attracting tree-dwelling animais which are the spreading agents ; the embryo has a very short life-span and germinates immediately ; the initial growth stage, occurring in underwood shade, is slow and sometimes stops during variable lapses of time ; it seems therefore to possess the dormancy ability of which the seed is devoid. At later stages, the growth of different species dépends on their own adaptability to light conditions. Some appear to put up with underwood shade as well as full light in a large chablis, beeing able to adapt their growing habit to the available energy. Saplings of some species, when strong light intensity suddenly occurs, become effi¬ cient pioneers in the recruitment of a perturbated parcel. Such a strategy demonstrates the high adap¬ tative ability of Troll’s architectural model. Source : MNHN, Paris INTRODUCTION : GÉNÉRALITÉS ET HISTORIQUE Le genre Inga ( Leguminosae-Mimosoideae, tribu des Ingeae ), absent de l’Ancien Monde, vit en Amérique tropicale et subtropicale entre 25° N (Mexique) et 34° S (Uruguay, Argentine)). Il est repré¬ senté dans tous les pays d’Amérique latine, excepté au Chili, et compte 150 à 200 espèces (il s’agit d’une estimation personnelle : Bentham, suivi par d’autres auteurs, en comptait environ 140 ; Elias (1974), suivi par Nielsen (1981), évalue le nombre d’espèces à 350-400). Contrairement aux genres voisins, plus diversifiés, les Inga semblent confinés, d’une extrémité à l’autre de leur aire, aux habitats méso- ou hygrophiles, et ils sont probablement absents des zones où le climat présente une importante saison sèche. La plupart des espèces habitent la forêt dense humide. Quelques espèces atteignent des altitudes de 1000 à 2000 m, aux Antilles (/. martinicensis ), au pied des Andes (/. feuillei, I. oerstediana), en Amérique Centrale (/. hintoni, I. densiflora, I. mortoniana...). La flore de Guyane française compte au moins 37 espèces à.'Inga, parmi lesquelles beaucoup sont forestières et ont, souvent, un comportement pionnier qui leur confère un rôle important dans les premiers stades de succession sylvigénétique. Les autres sont abondantes dans la végétation ripicole, et dans la végétation rudérale, surtout sur sol hydromorphe. De nombreuses espèces sont protégées ou cultivées dans les limites de leur aire naturelle, comme ombrage dans les plantations de café ou de cacao, ou pour la cueillette des fruits dont les graines sont comestibles. Un petit nombre d’espèces ont été acclimatées hors des limites de répartition du genre : I. feuillei (Californie, Polynésie, Sicile), I. edulis (Polynésie, Afrique). 1. Place du genre Inga dans la sous-famille des Mimosoideae. a) Historique La première description de ces arbres par Marcgravius remonte à 1638 et emprunte aux Indiens Tupi le nom de « Inga » (d’après Leôn, 1966) ; Plumier a repris ce nom en 1703. Linné avait, dès 1735, séparé Mimosa (étamines libres et peu nombreuses) de « Feuilleea » (étamines monadel- phes en nombre indéfini). Cependant, en 1737 et 1753, il inclut les Inga dans le genre Mimosa. Miller le premier, en 1754, leur conféra un rang générique et fut suivi en 1777 par Scopoli, tandis que Aublet (1775) attribuait au genre Mimosa la « cassie bourgoni » (= Inga bourgonî) de Guyane. Willdenow (1806) eut une conception très large du genre Inga, dans lequel il incluait des espè¬ ces actuellement rattachées à des genres voisins ( Pithecellobium, Calliandra et même Acacia). Par la suite, Kunth (1923) et de Candolle (1825) ont amélioré la connaissance de ce groupe en décrivant de nouveaux taxons. Mais c’est à Bentham que l’on doit la première conception moderne du groupe des « Mimoseae », encore actuellement en vigueur dans ses grandes lignes. C’est lui qui proposa (1845) la première diagnose précise du genre en limitant celui-ci à des espèces à feuilles uni-pennées ; il le plaça d’abord dans la tribu des Acaciae avant de décrire (en 1875) la tribu des Ingeae. Source : MNHN, Paris ODILE PONCY b) La tribu des Ingeae (Bentham, 1875) L’auteur la distingue des 5 autres tribus des Mimosoideae par des caractères floraux (« fleurs à étamines très nombreuses ») et séminaux (« graines dépourvues d’albumen ») ; elle comprend 9 genres exclusivement tropicaux : Albizia, Affonsea, Archidendron, Calliandra, Enterolobium, Inga, Lysiloma, Pithecellobium, Samanea, Serianthes. Le genre Inga est remarquable par ses feuilles uni-pennées, carac¬ tère qu’il partage seulement, parmi les Mimosoideae, avec le petit genre brésilien Affonsea et avec quel¬ ques espèces du genre Cojoba Britton & Rose. L’originalité et l’homogénéité du genre Inga, ainsi défini grâce à ses caractères foliaires, n’ont pas été remises en question depuis Bentham. Les caractères des fruits et surtout des graines, dont l’importance sera détaillée dans ce travail, ne peuvent que confirmer cette conception. Il n’en n’est pas de même pour les autres genres. Les Ingeae de l’Ancien Monde, étudiées notamment par Kostermans (1954), Mohlenbrock (1963), font encore l’objet de remaniements importants grâce aux travaux récents (1979, 1980, 1983-84) de Nielsen, qui prennent largement en compte les caractères séminaux. Les Ingeae néotropicales n’ont pas subi de révision critique globale. Les différents traitements des Ingeae dans les flores locales (Ducke, 1925, 1933 ; Kleinhoonte, 1940 ; Macbride, 1943 ; Woodson & Schery, 1950...) reprennent souvent les grandes lignes de la classifica¬ tion de Bentham. Les travaux de Britton & Rose (1928) conduisent à un important morcellement des genres : mais, exception faite peut-être du genre Cojoba (= Pithecellobium, sect. Samanea p. p.), ce remaniement paraît spéculatif et ne contribue pas à la meilleure compréhension du groupe. Nielsen ( 1981), qui a résumé les conceptions des différents auteurs sous forme d’un tableau (l.c. : 174-176), estime que les seuls genres « universally accepted » sont : Albizia, Calliandra, Cedrelinga, Enterolo¬ bium, Inga, Lysiloma, Serianthes, Wallaceodendron » ; et il ajoute : « opposed to this, Pithecellobium is the most used name for the residue »... 2. Systématique Du Genre Inga. La première classification des espèces, proposée par Bentham (1875), est encore aujourd’hui la seule qui considère le genre dans son ensemble. Bentham a divisé Inga en 5 sections, essentiellement d’après les caractères des fleurs et des inflorescences (tabl. I). L’une de ces sections, Pseudinga, se répartit elle-même en plusieurs séries fondées sur les caractères du rachis foliaire (ailé ou non) et des fleurs (dimensions, pilosité). Les auteurs qui ont traité du genre depuis Bentham l’ont fait de façon fragmentaire, souvent à l’occasion de la préparation de flores locales ; ils ont conservé le système de Bentham tel quel, ou légèrement modifié (Pittier, 1916, 1929). Le système de regroupements infragénériques proposé par Britton & Killip (1936) est fondé sur un nombre excessif d’espèces, dont la validité paraît souvent douteuse. Le travail de Leôn (1966), bien qu’il concerne seulement les espèces d’Amérique Centrale et des Antilles, constitue la première révision critique sérieuse de la systématique du genre. Le tableau I résume les modifications proposées, notamment par Pittier (1916) qui, d’après la forme du fruit, sépare Euinga en deux séries, et surtout par Leôn (1966) : celui-ei rassemble Pseudinga et Euinga dans une grande section Inga, divisée en 13 séries dont certaines correspondent à celles de Bentham. Cependant, comme les auteurs précédents, Leôn utilise surtout les caractères floraux, la morphologie du fruit n’étant prise en compte que pour les séries Tetrogonae et Inga. Source : MNHN, Paris INCA DE GUYANE FRANÇAISE 9 i s 1 ! J! 16 i l sî Mi g g il H i I V iiiiü fil! ! 1 il n r .if i MM ■=1 £ sis 11 ! I !|l î{ ; îi M fl If II l.lï! i = i iiil> ii4i iiiii I i! i! iï ifl Source : MNHN, Paris CHAPITRE I MORPHOLOGIE, REMARQUES BIOGÉOGRAPHIQUES ET PHYLOGÉNIQUES I. MORPHOLOGIE La description du genre proposée ici a été établie à partir de l’étude des espèces guyanaises. Aux caractères morphologiques de-la plante adulte, dégagés par l’analyse des spécimens d’herbier provenant de Guyane française et par des observations de terrain, on ajoutera la description des caractères juvé¬ niles, observés in vivo (en serre et sur le terrain) chez une vingtaine d’espèces à partir de la germina¬ tion. 1. Appareil végétatif. Le genre comprend uniquement des arbustes ou des arbres, généralement de moyenne grandeur ; néanmoins quelques espèces sont de grands arbres forestiers. Plusieurs espèces qui deviennent de grands arbres commencent à être fertiles dès le stade arbustif, lorsqu’ils atteignent 4-5 m de hauteur. a) Architecture et croissance. L’observation sur le terrain des Inga de plus de 20 espèces montre qu’ils présentent tous la même architecture végétative qui correspond, selon la terminologie adoptée par Hallé & Oldeman (1970), au « modèle de Troll », dont la définition est la suivante (Hallé, Oldeman & Tomlinson, 1978) : « axes tous plagiotropes, l’architecture étant construite par leur superposition continue. Les axes princi¬ paux contribuent pour partie au tronc, et pour partie aux branches ; la partie proximale se dresse le plus souvent secondairement, après la chute des feuilles. La partie distale est alors une branche, avec ou sans croissance déterminée, portant des axes latéraux qui souvent ne forment pas de portion basale dressée ». Selon les espèces et surtout selon les conditions écologiques, cela se traduit soit par un port « en touffe », l’arbre étant formé de troncs multiples dès sa base, soit par la présence d’un tronc uni¬ que, portant une couronne large, et étalée. Les nombreuses espèces ripicoles réalisent particulièrement bien ce port, avec leurs nombreuses branches plagiotropes retombantes (pl. III, 3, 4). La croissance végétative est continue chez la plupart des espèces étudiées ; mais quelques-unes (/. fagifolia, I. sertulifera, I. cinnamomea,...) présentent une croissance rythmique : phases de croissance et phases de repos alternent, mais aucun « marqueur » morphologique (écailles, différences de longueur des entrenœuds...) ne permet, sur les rameaux anciens, de repérer les unités de croissance. Les modali¬ tés de la croissance rythmique sont exposées au chapitre III. Source : MNHN, Paris 12 ODILE PONCY b) Tronc et rhytidome. Tronc irrégulier, subcylindrique ou à méplats. Les plus gros arbres (0 > 40 cm) ont parfois des contreforts massifs, arrondis, jusqu’à 60-80 cm de hauteur. Rhytidome mince, couvert de lenticelles plus ou moins serrées, petites, saillantes, donnant souvent au tronc un aspect rugueux et finement strié transversalement. La couleur varie de blanc à brunâtre selon les espèces, ou rouge chez plusieurs espè¬ ces de la sect. Bourgonia. Les rameaux (parfois même les rachis foliaires) sont également pourvus de lenticelles ; ils sont glabres ou finement tomenteux, ou encore chez quelques espèces (/. cayennensis, I. tubaeformis) couverts de poils denses hirsutes. c) Feuilles (PI. I, II ; fig. 7 à 13). Toujours unipennées et paripennées. — Stipules : jamais spinescentes, le plus souvent réduites, linéaires, parfois falciformes, rare¬ ment larges et foliacées (/. stipularis), parfois persistantes. — Folioles : selon les espèces leur nombre varie de 2-5 (6-8) paires ; elles sont généralement ellip¬ tiques et acuminées, à bord droit ; le limbe, tomenteux ou glabre, plus rarement pubescent, a des ner¬ vures tertiaires fia nervure I est le rachis, voir ci-dessous) à base souvent décurrente le long de la nervure secondaire et à extrémité longuement prolongée le long du bord du limbe (nervation « camptodrome », von Ettingshausen 1861, in Mouton 1970) ; la base des folioles est plus ou moins asymétrique. — Pétiole et rachis : Remarques sur la terminologie employée : — « rachis » est la nervure principale à partir du point d’insertion de la première paire de folioles ; dans les descriptions qui vont suivre, il est donc dissocié du pétiole. Il se compose, dans les feuilles possédant plus de 2 pai¬ res de folioles, de plusieurs « segments interfoliolaires » ; — on utilisera les termes suivants pour décrire le pétiole et le rachis : « ailé », lorsque ces organes portent une expansion latérale foliacée ± large mais nette et pourvue d’une nervation visible ; « marginé », lorsqu’ils sont aplatis ou légèrement élargis latéralement ; « nu », lorsqu’ils sont dépourvus de toute expansion latérale, conservant une section cylindrique. Pétiole le plus souvent nu à marginé, même lorsque le rachis qui lui fait suite est ailé (ceci pour les feuilles de l’adulte : pour les stades jeunes, v. p. 18). Rachis ailé ou non suivant les espèces ; sou¬ vent simplement marginé, au moins dans la portion distale de chaque segment interfoliolaire ; rarement nu (cf. fig. 2, p. 18). — Glandes foliaires : situées sur le rachis au point d’insertion de chaque paire de folioles (excepté chez I. cayennensis, I. fanchoniana où certaines glandes manquent) ; jamais de glande pétio- laire. La forme et la taille des glandes constituent des caractères utiles pour l’identification, surtout si l’on observe les feuilles juvéniles (cf. fig. 2). Elles ont la forme d’une coupe de (0,5) 1-2 (3) mm de dia¬ mètre, plus ou moins profonde, à contour généralement circulaire, ou elliptique, triangulaire, réni- forme ; sessile, parfois stipitée. Sur les feuilles juvéniles, la plage centrale, qui correspond à la zone sécrétrice, est souvent spectaculaire, de couleur blanc brillant, vert ou rouge. L’anatomie des glandes reste très peu connue ; les premiers résultats de leur étude, chez 7. edulis (Leroux, 1980) montrent qu’il s’agit de structures complexes ; leur fort degré de spécialisation est révélé par une zonation nette, et par le développement important de la vascularisation glandulaire (présence de nombreuses trainées phloé- miennes). L’activité sécrétrice des glandes, importante pendant les stades foliaires juvéniles, diminue progressivement et Source : MNHN, Paris INGA DE GUYANE FRANÇAISE 13 disparaît lorsque la feuille est âgée. La sécrétion est fluide, transparente, de saveur sucrée : l’analyse des sucres, effectuée par chromatographie à partir d’échantillons prélevés sur les jeunes plants de plusieurs espèces en serre, révèle la présence constante de 3 sucres : glucose (formes a et b), fructose, saccharose (Laboratoire de Chimie Appliquée du M.N.H.N. : B. Bodo, comm. pers., 1980). Outre les glandes foliaires, on observe souvent des poils secréteurs le long du rachis des jeunes feuilles. L’attrait que présentent ces sécrétions pour de nombreuses espèces de fourmis, observé facile¬ ment sur le terrain, montre l’importance de la myrmécophilie chez les Inga, qui cependant ne possèdent pas de « structures d’accueil » spécialisées. 2. Inflorescences et fleurs (fig. 1 et 7 à 13 ; PI. I, 1) a) Inflorescences. Chez toutes les espèces, l’inflorescence est une grappe simple ; le pédoncule, de longueur variable (1-1.0 cm), est prolongé par le rachis portant les fleurs. Chez quelques espèces (/. cayennensis, I. disti- cha, etc.), les fleurs, espacées, forment un épi lâche ; mais le plus souvent, très serrées, elles composent un épi contracté (notamment dans la sect. Bourgonia où elles forment un manchon cylindrique) ; enfin, le rachis pouvant se réduire à un réceptacle terminal arrondi, l’inflorescence est alors cespiteuse (sect. Leptinga Macbr.). La floraison est acropète : l’inflorescence, portant des fleurs épanouies à la base et des boutons à l’extrémité, présente chez certaines espèces ( Gymnopodae Benth., Tetragonae Pittier, Sul- catae Pitt.) un aspect conique caractéristique. Chaque inflorescence produit 10 à 50 fleurs selon les espèces. C’est dans la sect. Bourgonia que le nombre de fleurs (très petites) est le plus elevé ; par contre I. bracteosa, I. cayennensis, I. rubiginosa produisent rarement plus de 15-20 fleurs par grappe. Les grappes, toujours axillaires, peuvent être isolées ou groupées en fascicule de 2-5 par aisselle. Les modalités variées de groupement des inflorescences, observées dans différentes espèces ou parfois au sein d’une même espèce, montrent un gradient de complexité de l’ensemble inflorescentiel. La fig. 1 réunit quelques exemples, de façon schématique (seuls sont représentés des axes d’ordre n et n-1). Dans le type le plus simple (fig. IA) les axes, équivalents, portent des épis axillaires isolés ou groupés par 2/3 à chaque aisselle. La production d’infiorescences est facultative : l’axe continue sa croissance végétative sans modification. Au contraire, la spécialisation de certains axes en rameaux courts représente une structure plus complexe (fig. 1D) : les épis sont en effet portés par des axes végétatifs à entrenœuds courts, à crois¬ sance limitée, et dont les feuilles, pourtant morphologiquement identiques aux feuilles de l’axe « long », restent très réduites et tombent souvent précocement. Ces axes courts sont homologues d’infiorescences composées, les feuilles réduites ayant valeur de bractées. Ils existent sporadiquement chez plusieurs espèces (/. umbellifera, I. melinonis, I. pezizifera...) mais sont constants et caractéristi¬ ques chez I. alba où ils forment des inflorescences volumineuses, chaque feuille réduite axillant 2-4 épis. (Leôn, 1966, a également remarqué la présence de rameaux courts chez quelques espèces d’Amérique Centrale). Entre ces deux schémas, existent différents intermédiaires : les schémas B et C (fig. 1) en mon¬ trent des exemples. Certains axes, tout en restant capables de croissance indéfinie, présentent un rac¬ courcissement des entrenœuds et une réduction des feuilles axillantes. L’abondance des inflorescences, surtout lorsque leur épanouissement est plus précoce que celui des feuilles, contribue à simuler une flo¬ raison terminale. Parfois, le bourgeon terminal de l’axe portant les inflorescences se nécrose et un méristème végétatif axillaire plus vigoureux le relaye (fig. 1, D-c). Les fruits paraissent alors se trouver en position terminale. Source : MNHN, Paris 14 ODILE PONCY Fig. 1. — Quelques types de rameaux inflorescentiels chez les Inga guyanais. A : croissance des rameaux végétatifs non modi¬ fiés par la floraison ; B, a : axe n-1 non modifié ; feuilles et entrenceuds réduits sur l’axe n ; b : poursuite de la crois¬ sance végétative des deux axes ; C, a : axe n-1 non modifié, axe n = rameau court à croissance limitée ; b : poursuite de la croissance végétative de l’axe n-1 seulement ; D, a : tous axes modifiés : réduction des entrenceuds et des feuilles sur l’axe n-1, axes n = rameaux courts à allongement limité ; b et c : deux possibilités pour la reprise de la croissance, allon¬ gement de l’axe n-1 (b) ou nécrose de l’apex n-1 et relais par un méristème végétatif inférieur (c). Source : MNHN, Paris INGA DE GUYANE FRANÇAISE 15 Ainsi, au niveau des inflorescences, les variations peuvent porter : — sur le degré de réduction des entrenœuds et des feuilles axillantes ; — sur les différentes possibilités de groupement des axes inflorescentiels à une même aisselle : épis simples isolés ; épis fasciculés ; rameaux courts isolés ; rameaux courts fasciculés ; épis simples + rameaux courts ; inflorescence + pousse végétative. Dans certains cas, on observe une transition le long d’un axe qui porte successivement : rameaux courts, rameaux courts + épis simples, épis simples seulement (fig. 1 D) ; — sur le synchronisme entre croissance végétative et développement des inflorescences. De la même façon que les axes végétatifs, à développement immédiat ou retardé (v. p. 79) selon les cas, les inflorescences apparaissent soit à l’aisselle des feuilles naissantes et se développent en même temps que celles-ci, soit à l’aisselle des feuilles adultes. La ramiflorie est plus rare (/. melinonis). La cauliflorie stricte n’a pas été observée en Guyane. Elle existe au moins chez une espèce d’Amazonie occidentale (Inga sp., photo A. Santos, comm. pers., 1980) et chez I. saffordiana (Leôn, 1966 : 268). La spécificité de ces caractères de l’inflorescence reste difficile à établir. Chez certaines espèces, comme I. edulis, I. auristellae, I. sertulifera, les inflorescences semblent toujours disposées selon le type simple A (fig. 1). D’autres présentent les diverses variations décrites plus haut ; en particulier /. umbellifera, I. acrocephala, I. speciosa, /. capitata, I. bourgoni, etc. et probablement la plupart des espèces guyanaises. I. alba est apparemment la seule qui possède des rameaux courts particulièrement bien individualisés. Il est difficile d’évaluer la signification évolutive de ces variations. Les inflorescences les plus simples sont généralement considérées (Elias, 1981) comme les plus évoluées. Dans le cas des Inga, deux modalités opposées peuvent être envisagées : 1. épis simples à l’aisselle de -* rameaux courts feuilles normales (contraction / réduction) 2. rameaux courts -* fascicules d’épis simples (contraction / réduction) Dans le deuxième cas, les fascicules sont alors considérés comme des rameaux courts à entre¬ nœuds nuis. b) Fleurs. Les fleurs, blanches ou jaune très clair (excepté chez I. pilosula à fleurs jaune vif), se situent à l’aisselle de bractées le plus souvent réduites, linéaires ou en forme d’écailles triangulaires ou spatulées, de 1 à 3 mm de longueur, rarement plus grandes (/. bracteosa, I. disticha ). Sessiles ou pédicellées (le pédicelle atteint au maximum 1,5 cm), les fleurs ont une structure constante : calice et corolle campa- nulés ou tubuleux, à 5 lobes réguliers ou irréguliers ; calice parfois bilobé ; ovaire unique, souvent porté par un court pédicelle ; étamines nombreuses (plus de 30), soudées en un tube plus ou moins exsert, filet long et grêle ; anthères portées par un disque (fig. 7 f). Les variations portent sur les dimensions et la pilosité du périanthe : la longueur de la corolle (LC) varie de 1 à 3-4 cm ; celle du calice (Le), de 1 mm à 1 cm ; le rapport Lc/LC, de 1/2 à 1/5. Les étamines sont au moins deux fois plus longues que la corolle ; l’ensemble de la fleur peut ainsi, chez certaines espèces, atteindre 5 cm de longueur ou plus, ce qui donne une idée du volume important de l’inflorescence. 3. Fruits et graines. (PL I, 2-3 ; IV ; fig. 7 à 13). a) Fruits. Les fruits sont des gousses indéhiscentes que les animaux, Mammifères arboricoles ou Oiseaux, ouvrent pour consommer les graines, dont ils assurent ainsi la dissémination (cf. chap. IV). Le fruit est parfois partiellement déhiscent (/. ingoides ). Source : MNHN, Paris 16 ODILE PONCY Note sur les termes employés pour décrire la gousse : le terme de « marges », que nous utiliserons plutôt que celui de « bords », par analogie avec la terminologie anglo-saxonne « margins », désigne les zones de contact entre les valves ; les marges limitent les « faces », qui sont la surface externe, visible, des valves. Longue de (5) 10-20 (30) cm et large de 1-4 cm, selon les espèces, la gousse contient le plus sou¬ vent 10 à 20 graines (plus chez I. thibaudiana, I. edulis ; moins chez I. virgultosa ) ; elle est droite ou un peu incurvée, moins souvent bien arquée (/. pezizifera, I. melinonis...) et enroulée en spirale chez une espèce (/. fanchoniana). Selon que les valves sont planes ou bombées, et les marges élargies ou non, la gousse mûre apparaît, en section, aplatie, cylindrique ou tétragone. Les variations de l’aspect du péricarpe portent sur : — l’épaisseur et la consistance : selon les espèces le péricarpe est mince et membraneux, ou épais et fibreux, souple ou rigide, parfois lignifié ; — la pilosité : la gousse mûre est glabre, ou couverte d’un fin tomentum lui donnant un aspect velouté, plus rarement couverte de poils raides hirsutes (/. cayennensis, I. disticha...) ; — la couleur : les gousses glabres sont vert plus ou moins sombre, ou jaune vif ; les gousses tomenteuses, brun-verdâtre ou jaunâtre , à brunes ; les gousses très pubescentes, brun-ocre « ferrugi¬ neux » ; — l’ornementation des faces : elle est généralement peu marquée et constituée de rides plus ou moins saillantes, transversales ou obliques ; chez quelques espèces, on observe une ornementation réti¬ culée ténue (/. alba, I. auristellae...) ou au contraire très en relief (/. huberi). En combinant les caractères du péricarpe, des marges et l’aspect de la gousse en section, on a tenté de distinguer plusieurs types de fruits : a) Marges non dilatées étroites (1-3 mm de large) ; graines souvent non contiguës et saillantes sous le péricarpe mince : I. stipularis (PL IV-6), I. leiocalycina (PI. IV-3), I. heterophylla... ; (graines contiguës chez I. marginata). b) Marges faiblement dilatées (3-5 mm), non saillantes, et faces plus ou moins bombées. Le péri¬ carpe de tels fruits, épais et souple, à surface généralement lisse ou presque lisse, et glabre, donne à la gousse un aspect cylindrique et charnu : I. sertulifera, I. umbellifera, I. cinnamomea, I. nobilis (PI. IV-1, 2, 5). c) Marges faiblement dilatées, saillantes : les faces, généralement plus larges que dans le cas (b), restent planes, le péricarpe est plus rigide : I. cayennensis, I. disticha (fig. 11), I. huberi (fig. 8), I. alata... d) Marges fortement dilatées (plus de 5 mm), généralement saillantes, et faces planes : la section du fruit est alors quadrangulaire, et presque carrée lorsque les faces restent étroites. A ce type corres¬ pondent les espèces de la série Tetragonae (/. bracteosa, I. rubiginosa, I. nuda, (fig. 12). e) Marges hypertrophiées : les fruits sillonnés, qui caractérisent la sér. Inga Leôn (= « Sulca- tae » Pittier), résultent du développement des marges au détriment des faces : chez /. edulis, les faces sont inexistantes et leur emplacement visible en coupe transversale des gousses juvéniles (cf. Poncy, 1984, fig. 1) ; chez I. ingoides, I. meissneriana, les faces sont encore présentes, très étroites, entre les deux zones sillonnées (fig. 13 ; PL 1-3) Dans les types (a), (b), (c) se répartissent les fruits des espèces appartenant aux autres séries taxonomiques. Quelques espèces s’y intègrent mal, comme I. thibaudiana dont le fruit, très souple et à marges dilatées, non saillantes, est presque tétragone, ou comme I. splendens dont les fruits volumineux ont un péricarpe très épais et rigide à faces très bombées. Aspect de la paroi interne du fruit (PL IV) : l’endocarpe, blanc fibreux, est parfois très mince ; lorsque le fruit vieillit et se dessèche, il adhère souvent à la pulpe des graines et peut être confondu avec celle-ci. Les graines sont le plus souvent disposées dans le sens transversal, contiguës et serrées, ou non contiguës (les deux valves de la gousse se rejoignent alors entre chaque graine). Dans les fruits sil¬ lonnés (type e), les graines sont disposées dans le sens longitudinal ou oblique (Poncy, 1984, fig. 2). Source : MNHN, Paris INGA DE GUYANE FRANÇAISE 17 b) Graines. Les graines mûres ont été étudiées chez 25 espèces (dont 22 de Guyane française). La description détaillée des graines, germinations et plantules ayant été publiée précédemment (Poncy, 1984), nous en rappelons ici seulement les points importants : — Mises à part les variations de dimensions, les graines ont toujours le même aspect : lorsqu’on ouvre le fruit mûr, chacune d’elles apparaît comme une masse ovale entièrement recouverte d’une pulpe filamenteuse blanche, gorgée de suc (les sucres qu’elle contient sont identiques à ceux que sécrètent les glandes foliaires : v. p. 13). — Cette pulpe, portée par une enveloppe interne membraneuse, constitue avec cette dernière un tissu unique, le tégument séminal. — Un tel tégument séminal répond exactement à la définition du sarcotesta (Corner, 1976 : 51) ; les filaments uni- ou pluri-cellulaires qui forment la pulpe semblent correspondre à la couche externe (palissadique) hypertrophiée. — Les graines sont dépourvues d’albumen ; les cotylédons, toujours charnus, ont un épiderme pigmenté (vert à brunâtre ou violacé à noir) qui semble dépourvu de stomates et d’hydatodes ; l’axe embryonnaire est droit, la plumule et l’hypocotyle toujours pubescents. 4. Plantules et jeunes plants. a) Plantules. Les germinations et les plantules ont été observées in vivo, en serre et sur le terrain, sur 25 espè¬ ces. Comme pour les graines, leurs caractères sont décrits en détail dans une publication antérieure (Poncy, 1984). L’aspect des plantules est très comparable chez les différentes espèces : — La germination est dite « semi-hypogée » (au sens de Ng, 1978) : les cotylédons sont libres et « exposés » ; l’hypocotyle ne s’allonge pas, ou peu. — Il n’y a pas de cataphylle. — Les deux premières feuilles sont opposées, sauf chez deux espèces ; elles ont une paire de folioles et un pétiole presque toujours ailé. b) Le jeune plant, (pl. V) 1. Tige : — Elle est constituée par l’axe primaire ou par un axe cotylédonaire de remplacement. Sa pilo¬ sité varie d’une espèce à l’autre conformément au caractère de l’adulte. L’écorce est ponctuée de nom¬ breuses et petites lenticelles claires. — La chute des cotylédons a lieu lorsque la plantule a émis 3 à 6 feuilles selon les espèces. — La protection de l’apex est parfois assurée par les stipules, chez les espèces où elles sont bien développées (/. alata, /. cinnamomea, I. stipularis,...). Mais plus souvent, le rôle protecteur revient au rachis de la dernière feuille émise, notamment chez les espèces dont les jeunes tiges et feuilles sont assez fortement pubescentes : les poils denses de la face inférieure du rachis forment un épais manchon (/. cayennensis, I. thibaudiana....). Chez ces espèces, les stipules sont réduites, laciniées, alors que, lorsque les stipules sont larges et engainantes, la plante est généralement glabre. — Les bourgeons sériés existent chez toutes les espèces, jusqu’à 4 par aisselle (/. edulis ), en série verticale et acropète. Source : MNHN, Paris 18 ODILE PONCY 2. Feuilles (fig. 2) : — Acquisition du nombre de folioles caractéristique de l’espèce : aux premières feuilles uniju- guées opposées succèdent, en nombre variable selon les espèces et les conditions écologiques, d’autres feuilles à 1 paire de folioles ; puis apparaissent progressivement des feuilles à 2, 3... et jusqu’à 6-7 pai¬ res suivant les espèces. Quel que soit le nombre spécifique de folioles, celui-ci est généralement atteint pendant la phase de croissance initiale orthotrope (v. chap. III, p. 71). Chez quelques espèces à feuilles 4-à 6-juguées au stade adulte, les jeunes plants acquièrent, très tôt après la germination, des folioles nombreuses, souvent en nombre supérieur à celui qui caractérise l’adulte (/. thibaudiana, I. cayennensis, I. virgultosa...). Chez les espèces à feuilles bi-juguées (/. pilosula, I. splendens), les feuilles à 1 paire de folioles sont plutôt plus nombreuses au stade jeune ; mais l’augmentation du nombre de feuilles unijuguées peut être liée à la prolongation de la phase orthotrope (v. p. 89 au sujet de I. splen¬ dens). Fig. 2. — Quelques caractères des jeunes feuilles : A, glandes foliaires : a, circulaire ; b, triangulaire ; c, ovale transversalement ou réniforme ; d, ovale allongée ; e, en coupe ; f, aplatie ; g, stipitée ; h, sessile. B, aile du pétiole ou du rachis : a, trian¬ gulaire ; b, droite ; c, rhomboïde ; d, arrondie ou oblongue ; e, pétiole (ou rachis) marginé. C, port des feuilles : a, dres¬ sées ; b, retombantes. — Le pétiole des premières feuilles est généralement deux ou plus de deux fois plus court que les folioles. Chez les espèces guyanaises, le pétiole est presque toujours dépourvu d’aile au stade adulte, même lorsque le rachis est ailé. Au contraire, le pétiole des premières feuilles est le plus souvent ailé (fig. 2 B). Chez I. edulis, cultivé en serre, la réduction et la disparition de l’aile du pétiole ont lieu entre la 30 e et la 40 e feuille (à 3 ou 4 paires de folioles). Les dimensions du pétiole diffèrent parfois beau¬ coup entre la plantule et l’adulte : chez /. edulis (cf. fig. 13, p. 66), I. splendens (cf. fig. 10, p. 55) par exemple, bien développé aux stades jeunes, il devient très court ou subnui chez l’adulte. — Le rachis, comme le pétiole, même nu ou marginé à l’état adulte, est le plus souvent ailé chez le jeune plant. L’aile disparaît très rapidement chez I. nobilis, I. phzizi/era, tardivement chez I. thibau¬ diana. — Les stipules sont semblables chez toutes les espèces, au niveau des premières feuilles : laci- niées, pointues, de dimensions réduites. Mais elles acquièrent rapidement leurs caractères spécifiques, souvent même avant l’acquisition du nombre définitif de folioles. Chez I. cinnamomea cependant, elles sont d’emblée développées et présentent leur aspect caractéristique. Le rôle protecteur des stipules chez plusieurs espèces a été évoqué plus haut. — Les folioles présentent des variations (dimensions, pilosité, asymétrie...) dont on doit tenir compte dans les descriptions spécifiques, et qui seront mentionnées au chap. II, pour chaque espèce. Quelques cas de pigmentation particulière du limbe ont été observés, en sous-bois sur des plantules Source : MNHN, Paris INCA DE GUYANE FRANÇAISE 19 (/. cf. edulis, I. cf. thibaudiana, I. cf. alba) et chez la majorité des plants de I. edulis cultivés en serre (pl. VI, 6). Cet aspect de la feuille, non constant pour une même espèce, pourrait être lié à des condi¬ tions d’éclairement faible. — Les glandes foliaires (fig. 2A ; pl. VI) sont présentes dès les premières feuilles de la jeune plantule, au niveau de l’insertion des folioles, sans exception chez la plupart des espèces (chez /. cayen- nensis, I. fanchoniana, leur absence est un caractère de la plante adulte : v. p. 37, 56). Chez les toutes premières feuilles, elles sont identiques d’une espèce à l’autre, indifférenciées, très réduites et circu¬ laires, excepté chez I. edulis où elles affectent d’emblée une forme ovale ; elles acquièrent progressive¬ ment l’aspect et les dimensions caractéristiques de chaque espèce, et ce plus ou moins précocement : chez I. alba, elles sont bien développées dès les 4-5 e feuilles, alors que chez I. ingoides, elles se diffé¬ rencient beaucoup plus tardivement (pl. VI, 1, 3, 4). En tout cas, les glandes sont fonctionnelles très tôt, avant même d’avoir effectué leur différenciation complète. La couleur des glandes est un caractère important pour la reconnaissance des espèces, principalement sur la feuille juvénile. De l’acquisition progressive des caractères végétatifs résulte donc, pour la plupart des espèces, un important polymorphisme foliaire entre la plantule et l’adulte. Ceci est illustré (fig. 3) par un jeune pied de /. acrocephala qui présente des feuilles de type juvénile sur l’axe primaire basal et, sans transi¬ tion, des feuilles de type adulte sur la portion distale réitérée. L’augmentation du nombre de folioles, la perte de l’aile du pétiole, l’augmentation de la taille des glandes correspondent aux changements les plus visibles. 3. Caractères des jeunes pousses : — Couleur : chez plusieurs espèces, les jeunes pousses (tige, stipules, nervures, limbes foliaires...) sont uniformément rouge sombre. Ceci s’observe particulièrement bien chez les espèces à croissance rythmique, au moment de l’émission de chaque unité de croissance. D’autres espèces ont des feuilles rouge clair ou rosées, notamment celles dont le limbe est peu coriace (/. auristellae, I. disticha). Chez I. splendens, I. alata, I. edulis etc., seuls les limbes foliaires sont rouge sombre, brunâtres ou vio¬ lacés, les tiges, stipules, nervures restant verts. Les autres espèces ont leurs très jeunes pousses vertes d’emblée. — Pilosité : elle est présente ou absente, le plus souvent conformément au caractère de l’adulte. Parfois très abondante dès la germination (/. cayennensis), elle apparaît généralement ou se renforce lorsque la plantule grandit (/. edulis, I. ingoides) ; elle est caractéristique sur les très jeunes feuilles Source : MNHN, Paris 20 ODILE PONCY d’espèces dont les feuilles adultes ont une pubescence très légère (7. thibaudiana) ou nulle (/. splen- dens). Les poils sont blancs à bruns-roux, hirsutes ou apprimés. — Port des feuilles. Selon les espèces on observe : a) des feuilles dressées : pétiole et rachis rectilignes, folioles dressées ; la phase d’expansion s’accompagne d’une inclinaison de haut en bas de l’ensemble de la feuille vers la position horizontale (fig. 2C-a ; pl. VI, 2) ; b) des feuilles retombantes, en raison de l’inflexion précoce du pétiole et du port pendant des folioles : l’expansion foliaire s’accompagne d’un redressement de bas en haut du rachis et des folioles (fig. 2C-b ; pl. VII, 5). Fig. 4 — Système racinaire des plants de 3 espèces cultivées en serre : a, I. fagifolia (plant de 15 mois, pivot de 60 cm de long, axe aérien de 35 cm de haut ; b, I. edulis : système primaire et adventif épicotylaire (pivots de 60 cm env., axe aérien 60 cm ; plant de 11 mois) ; c, I. cinnamomea : portion de pivot montrant un amas de nodules (plant de 15 mois, axe aérien 1,10 cm de haut). Source : MNHN, Paris INGA DE GUYANE FRANÇAISE 21 Les caractères de couleur et de pilosité des jeunes pousses sont liés à l’espèce, et donc utiles pour la reconnaissance des formes jeunes ou stériles, mais aussi, sans doute, assez fortement influencés par les conditions écologiques (éclairement). 4. Système racinaire (fig. 4) : La racine principale forme un pivot qui émet des racines latérales éparses. Les racines adven- tives, fréquentes dans la région cotylédonaire (épicotyle et hypocotyle), apparaissent parfois très tôt après la germination : chez certaines espèces, elles peuvent constituer un important réseau plagiotrope au ras du sol. Le système racinaire correspond alors au « système mixte » décrit par Kahn (1978). Chez I. edulis, l’implantation racinaire est un peu particulière : l’une des racines adventives épicoty- laires prend un développement vertical important et double le pivot principal d’un pivot parallèle. Par la suite, ces deux pivots se renforcent et émettent un réseau de racines secondaires plagiotropes en sur¬ face. Dans les conditions de culture en serre, leur devenir n’a pas pu être suivi. Plus tard, la base des jeunes troncs émet encore fréquemment des racines adventives (/. edulis, I. auristellae, I. stipularis...). Les racines de toutes les espèces étudiées portent des nodules sphériques, blancs, à épaississe¬ ments bruns, généralement épars et de petite taille, assez gros et souvent groupés en amas volumineux (3-4 ( + ) cm 0), chez I. edulis et surtout chez /. cinnamomea. II. Remarques Sur La Phylogénie. 1. Introduction : relations phylétiques des Ingeae avec les tribus voisines. Les données paléontologiques, palynologiques, cytologiques, anatomiques concordent avec celles de la morphologie foliaire et florale pour formuler une hypothèse sur les tendances évolutives des Mimosoideae (Elias, 1981) selon laquelle les Ingeae, apparues à l’Oligocène supérieur, auraient atteint un niveau de spécialisation élevé. Ainsi, « généra of Ingeae ( Inga, Pithecellobium, Affonsea, Archiden- drori), formerly considered primitive, must be recognized as highly advanced taxa marked by many spe- cialized characters » (Elias, l.c. : 151). 2. Relations phylétiques des Inga avec les autres genres de la tribu des Ingeae. Aucune hypothèse n’existe pour expliquer les relations de parenté des différents genres de la tribu, parmi lesquels Calliandra serait le plus spécialisé (Guinet, 1969, 1981 ; Goldblatt, 1981). En ce qui concerne Inga, on fera les remarques suivantes : — Pour Corner (1954), les feuilles des Légumineuses auraient évolué depuis les feuilles bi- pennées jusqu’aux feuilles simples. Il considère donc qu 'Inga représente un état dérivé. — Par ailleurs, et conformément à sa théorie du Durian (Corner, 1949), cet auteur interprète le sarcotesta, apparu indépendamment dans plusieurs lignées et correspondant à un retour à une structure anatomique indifférenciée, comme un caractère dérivé (Corner, 1976 : 52-54). Il critique vivement à ce sujet la conception de Van Der Pijl (1955) pour qui le sarcotesta est une structure primitive dont l’arille serait dérivée, par réduction progressive de la partie charnue. Ayant défini sans ambiguïté (Poncy, 1984) la nature du tégument séminal des Inga guyanais, on peut, en suivant Corner, en tirer argument pour apprécier le degré de spécialisation du genre. Source : MNHN, Paris 22 ODILE PONCY D’autres caractères nous paraissent pouvoir aussi être interprétés comme dérivés : — L’architecture végétative : les auteurs des modèles architecturaux n’ont pas émis d’hypothèse au sujet des tendances évolutives de l’architecture végétative, mais il nous semble que la différenciation plagiotrope qui caractérise le modèle de Troll et la plagiotropie distique vraie sont dérivées de l’ortho- tropie (voir aussi p. 77). Cette différenciation s’observe d’ailleurs sur les jeunes plants dont la crois¬ sance débute par une phase juvénile (v. p. 71 et suiv.). S’il s’avère, comme c’est probable, que l’ensem¬ ble du genre présente les même caractères architecturaux, cela signifierait qu’ils ont été acquis par la souche ancestrale du genre ; ils seraient donc utiles dans l’étude phylogénique des Ingeae. — Les glandes foliaires : la structure complexe (évoquée p. 12) des glandes cupuliformes possé¬ dant une vascularisation développée correspondrait, ainsi que le souligne Elias (1972 ; 1981 : 148), à un fort degré de spécialisation. Mais les Inga possèdent aussi des caractères primitifs, notamment l’absence d’espèces herbacées et le fruit indéhiscent : mais la signification phylétique de ce dernier reste à discuter. Bien qu’il ait conservé certains caractères primitifs, on peut supposer que le genre Inga repré¬ sente l’aboutissement d’une lignée des Ingeae dont les caractères ont évolué à partir de formes ancestra¬ les à feuilles bipennées et à tégument normal. Certaines espèces de Pithecellobium possédant un sarco- testa non pulpeux (P. cauliflorum) ou des feuilles unipennées (§ Cojoba, cf. Nielsen, 1981) pourraient être des jalons de cette lignée. Ces remarques ne sont pas en contradiction avec les affinités très marquées entre Inga et le petit genre brésilien Affonsea. Celui-ci possède aussi les caractères originaux de Inga (feuilles unipennées, graines à tégument pulpeux contenu dans des fruits indéhiscents...). Il s’en distingue par son calice très développé, mais surtout par la présence de plusieurs carpelles dans l’ovaire. Il semble en effet que, con¬ trairement à l’interprétation classique selon laquelle les Légumineuses pluricarpellées seraient les formes ancestrales de la famille, l’ovaire pluricarpellé ne constitue pas un caractère primitif, mais que « the monocarpellate condition has secondarily given rise to the multicarpellate one » (ELIAS, 1981). Ainsi, Nielsen (1979) a-t-il placé côte à côte dans le genre Archidendron des espèces à ovaires uni- et pluri¬ carpellé. Mohlenbrock (1963) avait déjà proposé le rattachement d’ Affonsea à Inga. 3. Relations phylétiques entre les espèces du genre Inga. Aucune hypothèse phylétique n’existe actuellement, qui puisse être confrontée à la classification de Bentham. Quelques éléments de réflexion sont fournis par les travaux palynologiques et anatomi¬ ques : — D’après Guinet (1969, et comm. pers., 1979), le genre semble présenter une grande variabi¬ lité dans les caractères polliniques, compte tenu de l’homogénéité de ces caractères dans l’ensemble de la tribu des Ingeae : l’analyse palynologique pourrait donc être une technique intéressante pour préciser les relations phylogéniques entre les espèces ou groupes d’espèces. Mais le nombre encore insuffisant d’espèces étudiées, et les difficultés d’identification des espèces dans ce genre encore mal connu ne per¬ mettent pas de confronter les données palynologiques abquises avec la classification de Bentham. — L’étude de l’anatomie du bois chez 47 espèces à.’Inga, principalement surinamiennes, a con¬ duit Baretta-Kuipers (1973) à considérer les sections Bourgonia et Euinga Bentham comme des grou¬ pes naturels. Les sections Leptinga et Diadema, réunies en une seule par différents auteurs depuis Ben¬ tham, semblent former, par contre, deux groupes voisins mais distincts. Cependant, pour les caractères anatomiques comme pour beaucoup d’autres, l’homogénéité entre les espèces analysées est importante : un seul caractère différentiel (le mode de combinaison des rayons) est utilisable, les autres étant à peu près constants d’une espèce à l’autre. L’étude morphologique des espèces guyanaises, réparties pourtant dans différentes sections, n’apporte pas non plus d’éléments différentiels décisifs. Par contre, elle confirme que le genre est extrê- Source : MNHN, Paris INGA DE GUYANE FRANÇAISE 23 mement homogène. Les caractères observés sont généralement constants (architecture, structure des fleurs, graines, germinations, plantules...) ou répartis dans les différentes sections (nombre de folioles, aile du rachis, régularité du calice...). Quelques-uns caractérisent chacun une section ou série mais sont variables dans les autres, et aucune corrélation n’apparaît entre eux. Ainsi : — les fruits à marges hypertrophiées et faces réduites ou nulles de la Ser. Inga Leôn dérivent probablement des gousses à marges étroites ou peu élargies ; — la contraction de l’inflorescence, aboutissant au capitule, généralement considérée (cf. Elias, 1981) comme dérivant de l’épi plus ou moins lâche, caractérise la Sect. Leptinga Macbr. ; — les glandes stipitées sont sans doute dérivées des glandes sessiles : elles existent chez les Lep- tanthae et les Longiflorae (et les Vulpinae Leôn, non représentées en Guyane française) ; — les Bourgonia possèdent en commun les fleurs les plus petites du genre, dont les grandes fleurs dériveraient, en corrélation avec l’évolution des agents pollinisateurs (cf. Elias, 1981). Les fleurs les plus grandes sont celles des Tetragonae Pitt. (et hors de Guyane, des Golmanianae Leôn). On ne dispose donc encore d’aucun argument pour discuter de la valeur de ces groupements infragénériques. L’analyse détaillée de la signification phylétique de ces caractères et de leurs corréla¬ tions, chez le plus grand nombre possible d’espèces, est donc nécessaire avant de pouvoir formuler une hypothèse sur les tendances évolutives à l’intérieur du genre Inga. On peut toutefois suggérer, à titre d’hypothèse de départ, que certaines espèces de la Sect. Bour¬ gonia, à fleurs petites portées par des épis lâches et à fruits sans marges élargies, sont les plus proches de la souche ancestrale. III. Remarques Sur La Biogéographie. A. — Distribution géographique des espèces guyanaises de Inga. Une première tentative d’analyse des données concernant l’extension géographique des espèces guyanaises permet de définir, en première approximation, trois groupes d’espèces à répartition diffé¬ rente (fig. 5) : 1. Les espèces endémiques de Guyane et des régions limitrophes sont seulement actuellement au nombre de trois : I. fanchoniana, I. melinonis et I. virgultosa. L’endémisme de I. virgultosa est proba¬ blement réel, et lié à une écologie particulière. Les deux autres espèces, forestières et rares, existent peut-être ailleurs mais ont été récoltées seulement en Guyane. 2. Les espèces guyano-amazoniennes s’étendent sur les territoires du bouclier guyanais couverts de forêt dense (Guyane française, Surinam, Guyana, Venezuela) et dans tout le bassin amazonien (Pérou, Colombie, Bolivie, Brésil). Une quinzaine d’espèces au moins, c’est-à-dire la moitié de celles qui sont présentes en Guyane française, ont ce type de répartition ; elles appartiennent aux différents groupes taxonomiques, excepté à la sér. Inga Leôn. Les limites méridionales de ces aires restent impré¬ cises : les collections étudiées (Paris, Kew, Utrecht) possèdent très peu de matériel provenant des régions situées au sud du bassin amazonien (Bolivie, Mato Grosso, Minas Gérais). A ce type de distri¬ bution se rattachent : a) Les aires, plus réduites, de I. meissneriana (Guyana, Surinam, Guyane française, Roraima et Parâ) et de I. huberi et I. cayennensis (Guyana, Surinam, Guyane française. Para) ; là encore, il peut s’agir soit d’aires n’atteignant réellement pas le reste de l’Amazonie, soit d’une documentation insuffi¬ sante. Source : MNHN, Paris 24 ODILE PONCY Fig. 5. — Distribution géographique des Inga guyanais. b) Les aires qui dépassent la région guyano-amazonienne : — vers le nord : 2 espèces sont présentes à la fois en Guyane française, en Amazonie et en Amérique centrale (Panama, Costa Rica) : I. umbellifera (fig. 6) et I. pezizifera (cette dernière a une aire amazonienne limitée à sa partie orientale : Guyanes, est du Parâ). Mais ce nombre est probable¬ ment plus élevé : en effet, l’analyse de groupes d’espèces comme sapindoides / bracteosa / macrophylla et punctata / leiocalycina (incl. strigillosa) (v. p. 60 et 47) pourrait confirmer que chacun correspond à une seule espèce ; — vers le sud-est : 2 espèces sont communes à la Guyane et à l’Etat brésilien de Bahia (Lewis, 1979). I. nuda est connue au Surinam, en Guyane française, au Parâ et au Bahia (mais il s’agit d’une espèce assez rare pour laquelle des collections plus importantes seraient nécessaires). La répartition de /. capitata est beaucoup plus large puisqu’elle s’étend dans toute la région guyano-amazonienne, et au sud-est jusqu’au Bahia et à la région de Rio (fig. 6). 3. Les espèces à très large répartition sont au nombre de 4 (/. edulis, I. heterophylla, I. margi- nata, I. thibaudiana). Elles occupent, du Mexique à l’extrême sud du Brésil, des aires à peu près aussi vastes que celle du genre entier (fig. 5), mais n’existent pas aux Antilles. Enfin, il faut mentionner la répartition tout à fait particulière de I. ingoides : c’est la seule espèce commune à la Guyane française et aux Antilles ; elle semble liée aux régions côtières. Source : MNHN, Paris INGA DE GUYANE FRANÇAISE 25 Fig. 6. — Distribution géographique de 3 espèces d ’Inga guyanais : • I. ingoides : Petites Antilles et région côtière des Guyanes ▲ I. umbellifera : Guyanes-Amazonie + Venezuela et Panama (cf. aussi I. pezizifera) V I. capitata : Guyanes-Amazonie + Brésil S. E. (cf. aussi I. nuda ) B. — Affinités floristiques des Inga guyanais. L’analyse succincte de la répartition des Inga guyanais et les données bibliographiques dont nous disposons (Ducke, 1925, 1933 ; Leôn, 1966 ; Lewis, 1979 ; Macbride, 1943 ; Pittier, 1916...) sem¬ blent indiquer que les Inga sont répartis dans les trois grandes régions biogéographiques suivantes : — Guyanes-Amazonie, — Amérique centrale, nord de la Colombie et du Venezuela, — Brésil non amazonien (est et sud), auxquelles il faut ajouter les régions périphériques qui groupent : — les espèces andines (de vallées forestières, plus quelques espèces de montagne), dont l’impor¬ tance et les affinités sont mal connues, — les espèces antillaises, en très petit nombre (5), — les espèces de l’extrême sud du Brésil, du Paraguay, de l’Uruguay et de l’Argentine. Les Inga de Guyane française ne constituent pas une entité biogéographique, mais ils s’intégrent dans le vaste ensemble guyano-amazonien. A titre d’exemple, on peut évaluer leurs affinités floristiques en comparant le nombre d’espèces communes à la Guyane française et, respectivement, à l’Amérique centrale, au Parâ (Brésil) et au Bahia (Brésil) : Source : MNHN, Paris 26 ODILE PONCY Remarquons enfin que d’après Leôn ( l.c. : 272), « it is quite possible that a migration of species from South America could hâve reached the Central American mainland in the Upper Cretaceous ». On observera que cette hypothèse est incompatible avec celle que nous énonçons ci-dessus (suggérée par Leôn lui-même), pour des raisons évidentes de chronologie. Ce tableau met en évidence les affinités floristiques importantes entre Guyane et Amazonie orientale. C. — Hypothèse sur le centre d’origine et de diversification du genre. Le nombre élevé d’espèces recensées par Ducke dans l’ensemble du bassin amazonien, a conduit Leôn (1966 : 272) à considérer cette région comme le « centre d’origine » du genre, le nombre d’espèce décroissant de cette région vers la périphérie. Cette hypothèse paraît justifiée si l’on admet : — que le genre Inga a fait tardivement son apparition dans la tribu des Ingeae ; — que la plaine d’Amazonie, formée de sédiments accumulés au Mio-Pliocène, s’est peuplée de forêts à la fin du tertiaire, comme le pensent divers biogéographes dont Prance (1978) a résumé la position. L’espèce ancestrale du genre Inga, apparue non pas dans le bassin amazonien, mais sans doute antérieurement à celui-ci, sur les terres hautes d’un bouclier ancien (au Sud, bouclier brésilien ? ou au Nord, bouclier guyanais ?), aurait migré vers le bassin amazonien : c’est là que, remarquablement adaptée à la forêt tropicale humide, elle aurait donné naissance à des espèces nombreuses, ayant elles- mêmes migré jusqu’aux confins de ces forêts. En outre, le fait qu’aucun des taxons infragénériques actuellement reconnus (sections et séries de Bentham, 1875, Leôn, 1966) ne soit confiné à des aires limitées, mais que tous sont au contraire répartis dans l’ensemble de l’aire du genre, pourrait signifier que ces divisions ne correspondent pas à des groupes naturels. Cela peut indiquer aussi que les migrations vers les régions périphériques ont eu lieu tardivement, à partir d’un groupe déjà largement diversifié. Ainsi, la série Inga, qui constitue cer¬ tainement un groupe naturel, est représentée dans toutes les régions, y compris — et surtout — les régions périphériques : la souche ancestrale de cette série est donc probablement apparue au moment de la diversification initiale du genre. Ce mode de diversification et de dispersion dans un milieu favorable, sans contraintes géographi¬ ques ou écologiques, que Haffer (1979) qualifie de « passif », pourrait expliquer l’apparente contra¬ diction entre l’extraordinaire diversité spécifique et la forte homogénéité morphologique du genre Inga, le seul parmi les Ingeae, de surcroît, à être resté confiné à la forêt tropicale humide. Ainsi que l’a écrit Stebbins (1974 : 159), même si « les régions climatiquement intermédiaires peuvent être considérées comme des laboratoires dans lesquels le plus grand nombre de complexes adaptatifs nouveaux de groupes végétaux sont apparus », cela « ne signifie pas cependant que la spécia¬ tion cesse lorsqu’un groupe devient pleinement adapté à des habitats hautement favorables. Beaucoup de grands genres, comme Ficus, Miconia, Inga, (...) apparaissent exclusivement dans de tels habitats ». Source : MNHN, Paris INGA DE GUYANE FRANÇAISE 27 En ce qui concerne les centres de diversification secondaire, les variations du paléoclimat et la formation d’îlots forestiers « refuges » ont certainement joué le même rôle pour la spéciation des Inga que pour celle de beaucoup d’autres groupes végétaux ou animaux. Mais seule une meilleure connais¬ sance de toutes les espèces du genre, de leur phylogénie et de leur distribution géographique permettra d’écrire leur histoire biogéographique probable. Source : MNHN, Paris Source : MNHN, Paris CHAPITRE II TRAITEMENT SYSTÉMATIQUE DES ESPÈCES GUYANAISES DU GENRE INGA Remarques préliminaires : 1. les espèces sont regroupées dans les taxons infragénériques reconnus par Bentham (1875) ou Leôn (1966) (cf. tabl. 1 p. 9), et présentées par ordre alphabétique à l’intérieur de chaque section ou série. 2. Les descriptions ont été effectuées à partir du seul matériel provenant de Guyane française, sauf indication contraire ; les variations observées sur des spécimens provenant d’autres régions sont indiquées le cas échéant ; les dimensions sont données pour la plante adulte fertile ; 3 paramètres sont utilisés pour la description des fleurs : Le = longueur du calice, LC = longueur de la corolle, Ls = longueur du tube staminal ; la plantule (stade 2 feuilles) et le jeune plant sont décrits lorsqu’ils sont connus (i.e., qu’ils ont été cultivés à partir de graines bien identifiées : cf. Poncy, 1984) 3. Clés : deux clés sont proposées à la fin de ce chapitre, l’une pour les fruits, l’autre pour les formes juvéniles. Inga Miller, Gard. Dict. Abridg. 4, 2 (1754) Scopoli, Introd. Hist. Nat. 298 (1777) Willdenow, in L., Sp. PI. 4 : 1012 (1806) De Candolle, Prodr. 2 : 432 (1825) Bentham, Hook., Lond. J. Bot. 5 : 577 (1845) Bentham, Trans. Linn. Soc. 30 : 601 (1875) Pittier, Contr. U. S. Nat. Herb. 18 : 173 (1916) Leôn, Ann. Miss. Bot. Gard. 53 : 265 (1966) Amosa Neck., Elem. 2 : 459 (1790) Torealia Nor., Verh. Batay. Gen. 5, (4), 4 (1790) Ingaria Rafin., Sylva Tell. 119 (1838) Feuilleea Kuntze, Rev. Gen. PI. 1 : 182 (1891), p. p. Espèce-type : Inga vera (L.) Willd., Sp. PI. 1010 (1806) (Mimosa vera) L., Sp. PI. (1498) Source : MNHN, Paris 30 ODILE PONCY Sect. Bourgonia Benth. Inga a la ta R. Ben. Bull. Mus. Nat. Hist. Nat., 27 : 198 (1921) Type : Mélinon n° 8 (P !) Arbre moyen à grand (jusqu’à 30 m x 60 cm) ; rhytidome clair, gris jaunâtre, lenticelles brun rougeâtre, élargies transversalement, serrées ; rameaux glabres, anguleux, avec de nombreuses lenticelles rondes. Feuilles (3)4(5) juguées ; stipules polymorphes, lancéolées à spatulées ou rhomboïdes, 6-8 x 2-4 mm, glabres ou légèrement pubescentes, striées longitudinalement, caduques ; pétiole 2-4 cm, nu à ± largement ailé (aile triangulaire) ; rachis 8-12 cm (chaque segment 2,5-4 cm) pourvu d’expansions ailées larges de 3-6 mm, obtuses ou rhomboïdes ; glandes orbiculaires ou ovales, à bord épais, très sail¬ lantes, sessiles ou faiblement stipitées, de 0 = 1,5-2 mm ; folioles lancéolées [4-7 x 2,5-3 cm (paires inf.) à 10-18 x 3,5-7 cm (paires sup.)], acuminées, à base atténuée peu asymétrique ; limbe membra¬ neux, ± gaufré, glabre sur les 2 faces ou légèrement pubescent face inf. ; jeunes feuilles à limbe vert ou légèrement rougeâtre, ± pubescentes, à glandes rougeâtres à bords épais, sans plage centrale claire. Inflorescences : épis groupés par 3-5 à l’aisselle des feuilles ou portées par un rameau court à feuilles atrophiées de 4-5 cm de longueur ; pédoncule grêle, long de 1-3,5 cm, glabre ou tomenteux ; rachis 1-1,5 cm portant 30 à 50 fleurs très serrées ; bractées très réduites (< 1 mm), écailleuses, spatu¬ lées, recourbées, persistantes ; fleurs sessiles, glabres ou à tomentum très ténu ; calice tubuleux (Le = 1-2 mm), à lobes réguliers très courts ; corolle infundibuliforme (LC = 5-7 mm) à lobes pointus de 1-2 mm ; Lc/LC = 1/5 ; tube staminal non exsert ou peu exsert. Gousse droite, 15-25 x 2,5-3,5 cm, glabre, plate, mucronée, verte à maturité ; marges peu élar¬ gies (2-3 mm) ; faces ridées transversalement ; graines non contiguës, ± saillantes ; pulpe peu abon¬ dante ; cotylédons verts, 1,5 x 1 cm. Plantule (pl. V-2, VII-6) généralement glabre ; feuilles 1 et 2 opposées, unijuguées ; stipules laci- niées de L = ±5 mm ; glandes orbiculaires de 0 < 1 mm ; pétiole long de env. 2 cm, largement ailé (1 cm ou +), à bords ondulés ; folioles elliptiques (L = ± 2 cm), à bords ondulés, à base fortement asymétrique (bord interne concave) ; extrémité aiguë ou légèrement cuspidée. Jeune plant : au stade des premières feuilles 4-juguées (d’ordre 15-20), les stipules lancéolées atteignent env. 15 x 5 mm ; les glandes présentent l’aspect et la taille caractéristique de l’adulte après la 10 e feuille ; feuilles juvéniles vertes ou rougeâtres (glandes et limbes). Remarque : les jeunes plants de I. alata et de I. pezizifera sont semblables avant la 10* feuille ; jusqu’à ce stade, les deux espèces sont indiscernables. Habitat : bord des cours d’eau ; forêt dense. Distribution géographique : espèce connue seulement en Guyane française. Remarques : (1) I. alata est facilement confondue avec I. pezizifera ; elle s’en distingue essentiel¬ lement par la morphologie des fruits et des glandes ; (2) I. alata est très proche de l’espèce péruvienne I. chartacea, mais les fleurs de cette dernière sont plus grandes. Matériel étudié : Benoist s.n., St-Jean-du-Maroni (st.), 12. 5. 1921 ; Cremers 4586, Riv. Tampoc (fl.), 1.4.1977 : Grenand 716, Trois-Sauts (fr.), 4.2.1975 ; Jacquemin 1864, Trois-Sauts (fl.) 19.3.1976 ; Lescure 508, Trois-Sauts (st.), 9.11.1974 ; Mélinon 8, rég. de St-Laurent (fl.), 1845 (type) ; Oldeman B- 3199, Haut Oyapock (fl.), 13.5.1970 ; Poney 124, Riv. Arataye (fl.), 13.10.1978 ; 220, Riv. Arataye (fr.), 14.11.1978 ; Sastre 4830, Riv. Arataye (fl.), 24.4.1976. Inga alba (Sw.) Willd. in L., Sp. Pl. 4 : 1013 (1806) Mimosa alba Swartz, Fl. Ind. Occid. 2 : 976 (1800) Type : Von Rohr, Cayenne (BM !) Source : MNHN, Paris INCA DE GUYANE FRANÇAISE 31 Vahl (M.), 1807 — Eclog. Am. 3 : 31 Bentham (G.), 1875 — Trans. Linn. Soc. Lond. 30 : 610 Bentham (G.), 1876 — in Mart., Fl. Bras. 15 (2) : 474, PI. 126 Pittier (H.), 1916 — Contr. U.S. Nat. Herb. 18 : 182 Kleinhoonte (A.), 1940 — in Pulle, Fl. Surin. 2 (2) : 304 Macbride (F.), 1943 — in Fl. Peru, Field Mus. Bot. Ser. 13 (3) : 14 Bena (P.), 1960 — Ess. Forest. Guyane : 79-82 Cavalcante (P.), 1972 — Fr. Comest. Amazonia, in Pap. Av. Mus. Goeldi 67, fig. 29 Ingafraxinea Willd. in L. Sp. PI., 4 : 1019 (1806) Mimosa fraxinea Poiret, Dict. Suppl. 1 : 44 (1810) Inga thyrsoidea Desv., J. Bot. 1 : 71 (1814) (type Desvaux s.n., P !) I. spruceana Benth., Hook. J. Bot. 2 : 239 (1840) (type Spruce 246, P !) I. parviflora Sagot ex Benth., Trans. Linn. Soc. 30 : 610 (1875) (type Sagot 977, P !) nom. in syn. Arbre moyen à grand, fleurissant dès 5-7 m de hauteur et pouvant atteindre 30-40 x 70-80 cm ; contreforts massifs arrondis sur les plus grands pieds, jusqu’à 1 m de hauteur ; rhytidome brun orangé ou rougeâtre, couvert de lenticelles saillantes très serrées ; écorce intérieurement rosée à rouge sombre, ou jaunâtre ; rameaux glabres ou légèrement tomenteux. Feuilles 3(4)-juguées ; stipules droites, laciniées (5-7(10) x 1 mm), glabres, caduques ; pétiole nu à marginé, 2-4,5 cm ; rachis 6-8(10) cm, chaque segment 2-3(4) cm, marginé à faiblement ailé (jusqu’à 3 mm de largeur à l’extrémité), tomenteux ; glandes sessiles, en coupe orbiculaire ou subtriangulaire, très saillantes, aussi larges ou plus larges que le rachis (0 = 1-2 mm) ; folioles glabres, elliptiques (pai¬ res inf. : (3)4-6 x (2)2,5-3,5 cm, paires sup. 5-10 x 3-5 cm), extrémité aiguë à faiblement acuminée, base légèrement asymétrique, obtuse à cunéiforme ; limbe papyracé à face inf. vert grisâtre. Inflorescences axillaires groupées par 2-3, ou portées par un rameau court, tomenteux, long de (2)3-6(8) cm ; chaque feuille atrophiée, caduque, axille 2-4 épis ; pédoncule tomenteux (L = 0,5-1 cm) ; rachis ± 1 cm, portant 15-25 fleurs très serrées ; bractées écailleuses très réduites (0,5-1 mm), spatu- lées ; fleurs sessiles ; calice régulier tubuleux (Le < 1 mm) très faiblement denté, à pilosité hirsute éparse ; corolle tomenteuse (LC = 3-4 mm), à lobes irréguliers ; Lc/LC = 1/4 ; tube staminal longue¬ ment exsert (Ls = 10( + ) mm) Gousses (10)15-30 x 1-2 cm ; marges non dilatées (1 = 2-3 mm), péricarpe mince, brunâtre, tomenteux ; graines non contiguës très saillantes, pulpe très peu épaisse, cotylédons (10)13-15 x 7- 8 mm, vert sombre à brun. Plantule : feuilles 1 et 2 opposées ; stipules réduites (L = 3 mm), laciniées ; pétiole (L = 1,5 cm) faiblement ailé ; glande réduite, rouge ; folioles rougeâtres devenant vert grisâtre mat, glabres, 2-3 x 1,5 cm. Jeune plant (pl. V-3 ; V1I-3) à feuilles unijuguées jusqu’à la 8-10* ; premières feuilles 3-juguées d’ordre 10-15 ; feuilles rougeâtres, pubescentes, dressées pendant leur phase d’expansion, devenant vert grisâtre ; glandes devenant très tôt volumineuses (2-3 mm de 0), plus larges que le rachis, aplaties ou en coupe peu profonde, rouge sombre pendant la phase d’expansion. Habitat : forêt dense primaire ou forêt secondaire ancienne. Distribution géographique : forêt dense d’Amazonie (Pérou et Brésil) et du Massif Guyanais, jusqu’au Venezuela. Matériel étudié : Benoist 14, rég. de Cayenne (fl.), 19.6.1914 ; 197, Acarouany (fl.), 29.6.1914 ; 457, rég. de St-Laurent (fr. juv.), 29.12.1913 ; s.n., rég. de St-Laurent (fr.), 8.1920 ; Boom & Mori 1730, Saül (fr. juv.), 17.9.1982 ; Cremers 7541, Hte Mana (fl.), 15.8.1981 ; Desvaux 28, Cayenne (fl.) (type de I. thyrsoidea) ; Grenand 1412, Trois-Sauts (fl.), 25.2.1977 ; Leblond s.n., (fl.), 1792 ; Mélinon 79, St-Laurent (fl.), 1863 ; 250, St-Laurent (fl.), 1876 ; s.n., St-Laurent, 1864 ; Prévost 440, Cabassou (fr.), 19.2.1979 ; Prévost & Grenand 973, Ht Oyapock (fl.), 28.8.1980 ; S.F. 160 M, rég. de Cayenne (fr.), 3.3.1954; 206 M, route St-Laurent-Mana (fl.), 9.9.1954; 6128, Maroni (fr.), 21.3.1952; 7560, Crique Margot (fl.), 9.10.1956 ; 7667, St-Laurent (fr.), 14.2.1957. Source : MNHN, Paris Fig. 7 — Trois espèces de la Sect. Bourgonia Benth. — a-f, Inga pezizifera Benth. : a, rameau portant de jeunes inflorescences ; b, fruit (a et b, x 1/3) ; c, extrémité d’un rameau montrant les feuilles juvéniles et les stipules ; d, inflorescence ; e, fleur ; f, étamines ; g-k, Inga auristellae Hms : g, rameau fleuri ; h, fruit (g, h, x 1/3) ; 1, inflorescence ; J, fleur, k, jeune bourgeon montrant les stipules ; l-o, Inga bourgoni (Aubl.) DC : I, rameau fleuri ; m, fruit (I, m, x 1/3) ; n, extrémité d’un axe montrant les stipules, les feuilles et les inflorescences juvéniles, les fleurs ; o, détail d’une portion d’axe inflorescentiel montrant les bractées. Source : MNHN Paris INGA DE GUYANE FRANÇAISE 33 Inga auristellae Harms (fig. 7g-k) Notizbl. Bot. Gard. Berlin, 6 : 298 (1915) Type : Ule 9426, Pérou (Rio Acre) (iso-, G !, U !) Ducke (A.), 1922 — Arch. J. B. Rio, 3 : 58 Macbride (F.), 1943 — in. Fl. Peru, Field Mus. Bot. Ser. 13 (3) : 17 Kleinhoonte (A.), 1940 — in Pulle, Fl. Surinam 2(2) : 307 Arbuste ou petit arbre de sous-bois ne dépassant pas 10 m de haut, à tronc grêle de 0 < 10 cm, parfois muni de petits contreforts fins (pl. III-l) ; écorce variable, brune à grisâtre ou blan¬ châtre, fine ; rameaux glabres. Feuilles 3-juguées ; stipules linéaires (L » 5 mm), caduques ; pétiole (L = ± 1 cm), marginé à légèrement ailé ; rachis (L = 4-6(8) cm) ailé (l’aile atteint 4 mm de largeur sous l’insertion des folioles) ; folioles elliptiques, acuminées, à base légèrement atténuée, glabres sur les 2 faces ; paire inf. 4-6 x 1,5-2,5 cm ; paires méd. & sup. 6-9 x 2-3,5 cm ; glandes ostiolées, petites (0 < 1 mm) ; feuil¬ les juv. rouge clair, glabres, glande rouge sombre. Inflorescences : 1-4 épis axillaires contractés ; pédoncule grêle, 2-3 cm, rachis 1,5-2 cm, bractées réduites (L = 1,5 mm), en forme de cuiller, persistantes ; fleurs sessiles ou portées par un très court pédicelle ; calice tubuleux (Le = 2-3 mm) portant des poils épars, à lobes réguliers effilés ; corolle (LC = 6-8 mm), glabre ; Lc/LC = 1/3 ; tube staminal non ou très légèrement exsert. Gousse de 12-20 x ± 1,5 cm, péricarpe mince et glabre, marges non dilatées, faces finement ridées ; fruit mûr vert, souple, les graines disposées de façon contiguë font légèrement saillie. Plantule non étudiée. Forme juvénile (observations de terrain) : pas de variation notable par rapport à l’adulte. Habitat : sous-bois de forêt dense ; I. auristellae peut former localement une strate arbustive monospécifique, en forêt inondable aux abords des cours d’eau. Distribution géographique : Guyanes, Amazonie péruvienne et brésilienne. Matériel étudié : Aubréville 308, Bélizon (fl.), 4. 1961 ; Cremers 7562, Hte Mana (fl.), 17.8.1981 ; de Granville 131, Riv. Sinnamary (fl.), 1.5.1969 ; T. 1142, Ht Oyapock (fl.), 17.7.1975 ; 3138, Saül (fl.), 22.7.1979 ; 3264, Saül (fl., fr.), 13.1.1980 ; Grenand 938, Trois Sauts (fl.), 1.6.1975 ; Mori, Pipoly & Tavakilian 15370, Saül (fr.), 25.3.1983 ; Oldeman T. 85, Ht. Approuague (fl.), 10.8.1968 ; T. 577, Ht Oyapock (fr.), 25.4.1970 ; B. 1787, Ht Approuague (fl.), 10.8.1968 ; B. 2214, Approuague (fr.), 25.11.1969; B. 4166, Saül (fr.) 29.10.1971; Poney 136, Riv. Arataye (fl.), 21.10.1978 ; 219, Riv. Arataye (fr.), 14.11.1978. Inga bourgoni (Aubl.) DC (fig. 7, l-o) De Candolle, Prodr. 2 : 434 (1823) Mimosa bourgoni Aubl., Hist. Pl. Guy, Fr. : 941, t. 358 (1775) Type : Aublet, Cayenne (BM !) Ducke (A.), 1922 — Arch. J. Bot. Rio. 3 : 54 Thomson (J. Mc L.), 1931 — Publ. Hartl. Bot. Liverpool, 7 : 48, fig. Kleinhoonte (A.), 1940 — in Pulle, Fl. Surin. 2 (2) : 309 Inga assimilis Miq., Linnaea 19 : 130 (1847) (type Kappler 1690, P !) Arbre moyen ou petit ; écorce blanchâtre à brunâtre à lenticelles nombreuses, irrégulières ; rameaux glabres. Feuilles 3-juguées (excepté Sagot 166, fil. 4-juguées) ; stipules développées (10-15 x 2-3 mm), droites à falciformes, arrondies à l’extrémité, souvent persistantes ; pétiole court (0,5-l(l,5) cm), parfois réduit au pulvinus, très légèrement marginé ; rachis marginé à ailé, 8-12 cm ; la marge s’élargit en une aile triangulaire courte à l’extrémité de chaque segment du rachis ; folioles elliptiques à oblongues, fai¬ blement acuminées, peu asymétriques, glabres sur les deux faces ; paire inférieure 6-8 x 3-6 cm, paires Source : MNHN, Paris 34 ODILE PONCY médiane et supérieure 10-14(18) x 5-8 cm ; glandes circulaires, peu saillantes, 0 = 1 mm ; feuilles juvéniles glabres. ... Inflorescences en épis axillaires isolés ou groupés par 2-3(4), parfois ramiflores ; pédoncule 0 5-1,5 cm ; rachis 2,5-4(5) cm ; fleurs (30-50 par épi) très serrées sur le rachis, bractées très réduites (L =’ 1 mm), élargies distalement en forme de spatules recourbées, cuspidées, persistantes ; fleurs ses- sües ; calice (Le =1-15 mm) à lobes très courts et émoussés ; corolle (LC = ± 5 mm) en tube évasé, lobes'longs de 1 mm ; calice et corolle portent des poils ténus épars ; Lc/LC = 1/4 à 1/5 ; tube stami- nal le plus souvent exsert, parfois pas plus long que la corolle. Gousse de 10-12 x 2 cm, plate, glabre, à marges peu dilatées (4-5 mm), et faces ornementées de fines rides transversales ; gousse inconnue à l’état de fruit mûr frais. Plantule et forme juvénile inconnues. Habitat : forêt dense, bords des cours d’eau ; sporadiquement végétation secondaire. Distribution géographique : Brésil (Para), Guyanes, Venezuela. Materiel étudié : Grenand 1048, Trois-Sauts (fl.), 28.6.1975 ; 1878, Bas Oyapock (fl.), 4.6.1980 ; Mélinon 129, Mana (fl.), 9. 1854 ; Oldeman T-54, Ht Approuague (fl.), 31.7.1968 ; B-1035, Riv. Comté (fl.), 14.7.1967 ; 1089, Riv. Comté (fr.), 9.2.1965 ; Prévost 206, Roura (fl.), 25.2.1978 ; Sagot 166, Acarouany (fl., fr.), 4.1857 ; Sastre & Moretti 4135, Bas Maroni (fl.), 3.5.1975 ; Sastre 5683, Riv. Arataye (fl.), 15.8.1977. Inga marginata Willd., L., Sp. PI. 4 : 1015 (1806), excl. syn. Type : Bredemeyer, Caracas (non vu) Kunth*(G.), 1823 — Nov. Gen. & Sp. PL, 6 : 285 Bentham (B.), 1875 — Trans. Linn. Soc. 30 : 607 (1875) Sagot (P.), 1882 — Ann. Sc. Nat. 6 (13) : 3 Pittier (H.), 1916 — Contr. U.S. Nat. Herb. 18 : 182 Kleinhoonte (A.), 1940 — in Pulle Fl. Surin. 2 (2) : 308 Macbride (F.), 1943 — in Fl. Peru, Field Mus. Bot. Ser. 13 (3) : 30 Standley (P. C.) & Steyermark (J. A.), 1946 — in Fl. Guatemala, Fieldiana Bot. 24 (5) : 39 Schery (R. W.), 1950 — in Fl. Panama, Ann. Miss. Bot. Gard. 37 (2) : 223, fig. 84 Thomson (J. McL.), 1931 — Publ. Hartl. Bot. Lab. Liverpool 7 : 48 Leôn (J.), 1966 — Ann. Miss. Bot. Gard. 53 : 281 /. sapida H. B. K., Nov. Gen. Sp. PL 6 : 286, 1924 (non Benth.) (type Bonpland 1566, P !) I. guayaquilensis G. Don, Gen., Hist. Dichl. PL 2 : 391, 1832 (type Ruiz & Pavon s.n., ; fide Bentham) /. odorata G. Don, l.c. (type Ruiz & Pavon s.n. ; fide Bentham) /. semialata (Vell.) Mart., Flora 20, 2, Beibl. 111 (1837) (type le. Vell., pi. 5, Mimosa semialata) I. exceisa Poeppig, Nov. & Gen. Sp. PL 3 : 78 (1845) (type Poeppig 1335, P !, G !) I. puberula Benth. in Hook., Lond. Journ. Bot. 4 : 589 (1845) (type Pohl s.n. ; fide Bentham) I. pycnostachya Benth., l.c. (type Matthews s.n. ; fide Leôn) I. leptostachya Benth., Trans. Linn. Soc. >30 : 608 (fide Kleinhoonte, 1940) I. microcoma Harms, Notizbl. Bot. Gard. Berlin 6 : 30 (type : Ule 9431, Brésil, G !), syn. nov. Arbre moyen à grand ; écorce brun rougeâtre à fines lenticelles suborbiculaires ; rameaux grêles, glabres ou très faiblement tomenteux. Feuilles glabres, 2-juguées ; stipules rubanées (4 x 1,5 mm), enveloppantes, mucronées, très rapidement caduques ; pétiole (L = (0,5)1(2) cm) marginé ; rachis (L = (2,5)3-4 cm) marginé à ailé : aile triangulaire de 3-4 mm de largeur dans sa partie distale ; glandes sessiles, circulaires (0 = 0,5- 1,5 mm) ; folioles elliptiques à oblongues, de dimensions très inégales : celles de la paire supérieure (10-15 x 4-6 cm) environ 2 fois plus grandes que celles de la paire inférieure (5-8 cm x Source : MNHN, Paris INGA DE GUYANE FRANÇAISE 35 1,5-3 cm) ; acumen allongé (1-2 cm), asymétrique, mucroné ; base cunéiforme asymétrique; limbe mince, papyracé. Feuilles juvéniles rougeâtres, glabres, brillantes, glande saillante rouge sombre. Inflorescences : épis axillaires isolés ou groupés par 2-3, pédoncule très court (0,3-l( + ) cm ; rachis allongé (L = (4)6-8 cm) portant 30-50 fleurs disposées de façon peu dense ; bractées très petites (L < 1 mm) ; calice (Le < 1 mm) campanulé, à lobes irréguliers ; corolle en entonnoir (LC = (3)4 mm) ; Lc/LC = 1/4 ; tube staminal non exsert à longuement exsert (Ls = 4 à 8 mm). Gousse sessile, mucronée, de (6)10(12) x ± 1 cm ; fruit mûr vert, de section subcylindrique ; péricarpe mince, souple, glabre ; marges non dilatées (1,5-2 mm), faces bombées, lisses à très finement ridées, graines légèrement saillantes ; graines à pulpe très peu abondante, cotylédons verts, arrondis, de ±5x7 mm. Plantule : feuilles 1 et 2 opposées ; feuilles 1 à 7 unijuguées, pétiole (L = 1-1,5 cm) légèrement ailé ; feuilles suivantes bijuguées, avec les caractères de l’adulte. Habitat : forêt dense. Distribution géographique : vaste, correspondant à l’aire de répartition du genre. Remarques : (1) les variations foliaires de type 3-jugué observées au Surinam (Kleinhoonte, 1940) n’ont pas été rencontrées en G. F., où les feuilles présentent des caractères stables*; la variation porte sur les fleurs, sessiles ou pédicellées, et sur la longueur du tube staminal. (2) Le type de I. microcoma Hms (Ule 9431, K !), ainsi que les spécimens péruviens attribués à cette espèce que nous avons observés (Croat 19318, 20245, 20362), présentent des caractères qui s’inscrivent dans la variation de I. margi- nata ; c’est pourquoi nous plaçons la première dans la synonymie de la deuxième. (3) I. fagifolia, espèce voisine de /. marginata, très polymorphe et très largement répandue en Amérique tropicale, n’a pas encore été trouvée en Guyane. Matériel étudié : de Granville B-4591, Saül (fl.), 16.10.1972 ; Grenand 1864, Roura (fl.), 12.7.1979 ; Mori & Boom 15029, Saül (fl.), 2.10.1982 ; Oldeman B.4179, Saül (fl.), 29.10.1971 ; Poney 471, Riv. Arataye (fr.), 27.2.1981 ; Prévost 768, Saül (fl.), 14.9.1979 ; Sagot s.n. (fl.), Cayenne ; 6474, Fl. Maroni (fl., fr.), 28.12.1978 ; Vieillescazes 896, Riv. Arataye (fl.), 14.9.1983. Inga pezizifera Benth. (fig. 7a-f, PI. II-2, III-2) Hook., Lond. J. Bot. 4 : 587 (1845) Type : Schomburgk 124, Guyana (iso- P !) Bentham (G.), 1875 — Trans. Linn. Soc. 30 : 609 Kleinhoonte (A.), 1940 — in Pulle, Fl. Surin. 2 (2) : 302 (/. urnifera) Jansen-Jacobs (M.), 1976 — ibid. , Add. & Corr. : 630 Leôn (J.), 1966 — An. Miss. Bot. Gard. 53 : 288 Inga urnifera Kleinhoonte, Rec. Trav. Bot. Neerl., 22 : 414 (1925) (type Herb. Boschu 27687) I. microstachya Brit. & Kil., Ann. N. Y. Acad. Sc. 35 : 115 (1936) (type Mutis 3633, G !) I. subsericantha Ducke, Arch. J. Bot. Rio, 3 : 55 (1922) (type Ducke 16732, MG !) syn. nov. Arbre moyen atteignant en forêt dense 25-30 m x 30-40 cm ; en bordure de cours d’eau ou en végétation secondaire, il présente une forme étalée à troncs multiples ; écorce brun clair à ocre, lenticel- les claires nombreuses ; rameaux glabres. Feuilles 3-4 juguées ; stipules développées, linéaires à rhomboïdes (6-8 x 2 mm), caduques ; pétiole et rachis épais ; pétiole (L = 2-3 cm) nu ; rachis (L = (6)10-15 cm, chaque segment 2,5-4 cm), nu à marginé ; glandes (pl. II-2) volumineuses, en coupe circulaire à réniforme, saillantes, à bord épais, souvent plus larges que le rachis (0 = 3-5 mm) ; folioles elliptiques, 9-12 x 4-6 cm (paires inf.) à 10- 17 x 5-7 cm (paires sup.) ; base arrondie, asymétrique ; extrémité aiguë à faiblement acuminée ; limbe fréquemment gaufré, glabre, brillant. Feuilles juvéniles vert clair, légèrement pubescentes, caractéristiques par l’important développe¬ ment des acumens, des glandes et du mucron terminal. Inflorescences en épis axillaires ou portés par un rameau latéral court à feuilles atrophiées ; Source : MNHN, Paris 36 ODILE PONCY pédoncule court (1,5-2,5 cm), rachis = 1cm; portant 25-40 Heurs très serrées ; bractées écailleuses réduites (L < 1 mm), persistantes ; Heurs sessiles ou portées par un court pédicelle ; calice (Le = 1 mm) et corolle (LC = 5-6 mm) tubuleux, à dents très courtes, faiblement pubescents ; Le/ LC « 1/5 ; tube staminal non ou très légèrement exsert (Ls = 6-7 mm). Gousse de 15-25 x 3-4 cm, plate ; péricarpe vert sombre à maturité, moyennement rigide ; mar¬ ges peu dilatées ; faces finement ridées obliquement à presque lisses, graines légèrement saillantes ; cotylédons verts de 3 x 1 cm environ. Plantule et forme juvénile (pl. II-2) : feuilles 1 et 2 opposées ; les feuilles 1 à 4-6, unijuguées, ont un pétiole ailé (L = 1/3 de la longueur des folioles), à bords ondulés, une glande orbiculaire peu développée, des stipules réduites, laciniées (L = 1-2 mm) ; sur les feuilles suivantes (pl. VII-7) (2- juguées à partir de la 5-7' ; 3-juguées à partir de la 8-10*), l’aile du pétiole disparaît progressivement, les glandes et stipules acquièrent leur aspect caractéristique ; limbe foliolaire glabre, brillant, gaufré. Habitat très varié : forêt primaire ou secondaire ; recrû forestier (sur sol humide) ; végétation secondaire et ripicole. Distribution géographique : Amérique centrale, Venezuela, Guyanes, Amazonie brésilienne et péruvienne. Matériel étudié : Benoist 985, St-Jean du Maroni (fl.), 23.3.1914 ; 1191, ibid. (fl.), 8.5.1914 ; 1263, ibid. (fl.), 28.5.1914 ; Feuillet 902, Piste de St-Elie (fl.), 10.6.1983 ; Hladik 3091, Cabassou (fl.), 10.1979 ; Lemée s.n., Bas-Maroni (fr.), 1901 ; Mélinon 81, Maroni (fl., fr.), 1876 ; Mélinon 125, Bas- Maroni (fl.) ; Mélinon s.n., Bas-Maroni (fl.), 1862 ; Poney 300, St-Laurent (fr.), 4.12.1978 ; Prévost 412, Cabassou (fl.), 1.1979 ; S.F. 6140, Maroni (fr.), 25.3.1952 ; 7314, Mana (fr.), 28.2.1956 ; 7378, Mana (fr.), 16.3.1956 ; Wachenheim 195, Bas-Maroni (fl.), 1920 ; 322, Bas-Maroni (fl.), 1921. Sect. Leptinga Macbr. Inga cinnamomea Spruce ex Benth. Mart., Fl. Bras. 15 (2) : 470, pl. 124 (1876) Type : Spruce 1651 (fl. Solimoes, Brésil, K !, P !) Bentham (G.), 1875 — Trans. Linn. Soc. 30 : 606 Macbride (F.), 1943 — in Fl. Peru, Field Mus. Bot. Ser. 13 (3) : 19 Ducke (A.), 1949 — Bol. Técn. Inst. Agron. Norte, 18 : 24 Jansen-Jacobs (M.), 1976 — in Pulle Fl. Surin., Add. & Corr. 2 (2) : 633 Cavalcante (P.), 1972 — Frutas Comest. Amazonia, Pap. Av. Mus. Goeldi 17 : 69, fig. 30 Arbre moyen (Boom & Mori 2399 : 22 m x 21 cm) ; tronc cylindrique à faibles contreforts ailés ; rhytidome grisâtre à brunâtre. Feuilles 3-juguées, glabres ; stipules développées (jusqu’à 15 x 5 mm), rectangulaires à rhomboï¬ des, acuminées, striées longitudinalement, caduques ; pétiole (L = 2-3 cm) nu à marginé ; rachis 8- 12 cm (chaque segment 4-6 cm), nu ou parfois marginé sous l’insertion des folioles ; glandes ostiolées, moins larges que le rachis; folioles elliptiques, ' acuminées, de 7-10 x 3-4 cm (paire inf.) à 15-20 ( + ) x 5-8 cm (paires sup.) ; base légèrement asymétrique, aiguë à cunéiforme. Inflorescences en capitules axillaires très denses, globuleux, groupés par 2-4 ; pédoncule grêle de 3-5 cm ; bractées linéaires à spatulées (L = 3-4 mm), faiblement tomenteuses ; fleurs sessiles, faible¬ ment tomenteuses ; calice et corolle (Le = 3-4 mm ; LC ,= 5-6 mm) campanulés, à lobes réguliers, courts et pointus ; Lc/LC == 1/2 ; tube staminal exsert (Ls = 7-10 mm) ; étamines courtes (partie libre = 5 mm). Gousses immatures (Mori & Pipoly 15606) 11 x 3,5 cm ; faces ridées transversalement ; gousses mûres (provenant de Belém, voir remarque ci-dessous) 20-22 x 4,5 cm, marges 1-1,5 cm, section subcy¬ lindrique, faiblement arquées ; péricarpe vert brunâtre, souple, faces ridées transversalement et légère- Source : MNHN, Paris INGA DE GUYANE FRANÇAISE 37 ment bombées au niveau des graines. Graines 10-12 par gousse, contiguës et serrées, pulpe abondante (pl. IV-5) ; cotylédons vert vif, 3,5 x 1,7 cm env. ; surface de contact entre les graines irrégulière. Plantule (cf. Poncy, 1984, pl. I) entièrement glabre. Feuilles 1 et 2 alternes, uni-juguées ; pétiole nu de 3-4 cm ; stipules foliacées rectangulaires de 5 x 3 mm, à bord supérieur denté ; glande orbicu- laire réduite (0 < 1 mm) mais saillante ; folioles elliptiques de 10-15 x 5-7 cm à acumen court. Jeune plant (Pl. VIII-4) : premières feuilles 3-juguées d’ordre 15 à 20, avec les caractéristiques de celles de l’adulte, mais des dimensions souvent supérieures ; feuilles juvéniles (pl. VII-5) rouges, bril¬ lantes, à port retombant, glandes demeurant rouge sombre jusqu’à la fin de la croissance de la feuille. Habitat : forêt dense. Distribution géographique : Guyanes, Amazonie brésilienne. Matériel étudié [Remarque : la présence de I. cinnamomea en Guyane française est attestée depuis peu, et elle n’y a encore été récoltée (excepté un spécimen en fruits immatures) qu’à l’état sté¬ rile. Son identification n’est cependant pas douteuse, grâce notamment à la connaissance de la forme juvénile décrite plus haut. Les descriptions des fleurs et des fruits mûrs portent, respectivement, sur des spécimens du Surinam et sur des fruits provenant du marché de Belém : les fruits sauvages ont proba¬ blement des dimensions plus réduites] — Barrier 2758, Riv. Arataye (st.), 14.3.1981 ; Boom & Mori 2399, Saül (st.), 26.10.1982 ; Mori & Pipoly 15606, Saül (fr. immat.), 13.4.1983 ; P.oncy 389, Riv. Ara¬ taye (st.), 4.3.1981 ; 374, ibid. (plantule) ; 420, 445, 551..., ibid., Riv. Arataye (st., juv., 3.1981). Inga fanchoniana Poncy Bull. Mus. nat. Hist. natn. Paris, 4 e sér., 5, sect. B, Adansonia, n° 1 : 103-107, 1983 La description de cette nouvelle espèce, récemment publiée, ne sera pas reprise ici. Rappelons que, par son inflorescence cespiteuse, elle se rapproche de la sect. Leptinga à laquelle nous la ratta¬ chons ; il s’agit d’une espèce originale par ses feuilles 4-juguées dont la glande distale manque, par ses inflorescences ramiflores, et surtout par son fruit volumineux, enroulé en spirale et de couleur orangée à maturité. Matériel étudié : en plus du matériel cité dans la diagnose, citons 2 spécimens florifères récem¬ ment récoltés : Prévost 1631, Piste de St-Elie, Km 17,5 (fl.), 19.9.1984, échantillon provenant du même pied que l’holotype ; Prévost 1648, Piste de St-Elie (fl.), 30.9.1984 ; échantillon provenant de la même localité que le type. Inga heterophylla Willd. L., Sp. PL, 4 : 1020 (1806) Type : Hoffmannsegg s.n., Brésil (non vu) Grisebach (A.), 1864 — Fl. West Indies : 227 Bentham (G.), 1876 — in Mart., Flora Bras., 15 (2) : 465, pl. 122 Britton (N. L.) & Killip (E. P.), 1936 — Ann. N. Y. Acad. Sc. 35 : 113 Kleinhoonte (A.), 1940 — in Pulle, Fl. Surin. 2 (2) : 295 Macbride (F.), 1943 — in Fl. Peru, Field Mus. Nat. Hist. 13 (3) : 24 Schery (R. W.), 1950 — Ann. Miss. Bot. Gard. 37 : 194 Leôn (J.), 1966 — Ibid. 53 : 349 Cavalcante (P.), 1972 — Frutas Comest. Amaz., Pap. Av. Mus. Goeldi 17 : 74-75, fig. 32 Mimosa parae Poir. in Lam., Encycl. Suppl. 1 : 44 (1810) Inga umbellata G. Don, Gen. Syst. : 391 (1832) (fide Bentham) I. protracta St., Flora 26 : 758 (1843) (type Hostmann & Kappler 1194, iso-, P !) I. stenocarpa Spr. ex Benth., Trans. Linn. Soc. 30 : 603 (1875) nom. nud. in syn. I. vouapaefolia Spr. ex Benth., ibid., nom. nud. in syn. I. mapiriensis Pitt., Contr. U. S. Nat. Herb. 18 : 174 (1816) (type Buchtien 1768 ; fide Leôn). Source : MNHN, Paris 38 ODILE PONCY Arbuste ou petit arbre ; rameaux grêles, glabres, à petites lenticelles. Feuilles 2-3-juguées ; stipules linéaires, réduites (L = 1,5-3 mm), généralement persistantes ; pétiole marginé (L = 0,5-1 cm), rachis marginé composé de 1 ou 2 segments de L = (0,5)1(1,5) cm ; glandes orbiculaires généralement stipitées (pédoncule jusqu’à 1 mm de longueur), rarement sessiles ; folioles lancéolées, acuminées, petites : 1,5-3 x 0,5-1,5 cm (paire inf.) à 2,5-5 x 1,5-2 cm (paire(s) sup.) ; limbe glabre, lisse sur les deux faces. Inflorescences : épis très contractés ou capitules axillaires, 1(2) par aisselle ; pédoncule grêle de 1-2(2,5) cm ; rachis 2 à 5-7 mm, portant 30-40 fl. très serrées ; bractées réduites à des écailles recour¬ bées,'L = l'mm ; fleurs portées par un fin pédicelle (L = 5-7 mm) ; fleur glabre, calice (Le = 1 mm) régulier, à dents à peine marquées ; corolle (LC = 5 mm), striée longitudinalement, dents < 1 mm ; Lc/LC = 1/5 ; tube staminal (Ls = 7-8 mm) légèrement exsert. Gousse glabre de 7-12 x 1-1,5 cm, mucronée ; péricarpe mince ; marges non dilatées (< 1 mm), faces ornementées de fines rides réticulées ; graines saillantes, contiguës (fruit mûr frais inconnu). Plantule, forme juvénile inconnues. Habitat : forêt dense ou secondarisée sur sol sablonneux, en région côtière : en Guyane, cette espèce a été rencontrée exclusivement dans la région de Saint-Laurent-du-Maroni. Distribution géographique vaste : de Panama et Trinidad au Brésil central et du NE. Matériel étudié : Benoist 1081, St-Jean (fl.), 20.11.1914 ; Mélinon 394, St-Laurent (fl.), 1862 ; 485, ibid. (fl.), 1862 ; s.n., ibid. (fl.), 1864 ; Richard s.n. (fl.) ; S.F. 7430, Mana (fl.), 31.3.1956 ; 7433, Mana (fl.), 3.4.1956 ; 7894, St-Laurent (fr. immat.), 9.1961 ; s.n., St-Laurent (fr.), 5.8.1948 ; Wachen- heim 52, Maroni (fl.) ; 312, Maroni (fl.). Inga huberi Ducke (fig. 8a-c) Arch. J. Bot. Rio 3 : 49 (1922) Type : Huber 2050, Brésil (MG 1) Ducke (A.), 1930 — Arch. J. Bot. Rio 5 : 120 Sandwith (N. Y.), 1931 — Kew Bull. : 369 Jansen-Jacobs (M.), 1976 — in Pulle, Fl. Surin., Add. & Corr. 2 (2) : 633 Arbre moyen (20-30 m x 30-35 cm) ; tronc irrégulier, rhytidome finement grenu, brun à noir⬠tre ; rameaux brun grisâtre sombre, pourvus de lenticelles claires irrégulières, tomenteux dans les parties jeunes. Feuilles bijuguées ; stipules linéaires (L = 6-8 mm), persistantes ; pétiole (1-1,5 cm) et rachis (3- 4 cm) robustes, lignifiés, pourvus de lenticelles, non ailés mais aplatis en triangle sous l’insertion des folioles ; glandes en coupe très saillante, celle de la paire inf. ovale, large de 2-3 mm, celle de la paire sup. orbiculaire, plus petite ; folioles elliptiques à oblongues (paire inf. 9-12 x 3-5 cm ; paire sup. 15-20 x 5-8 cm) ; base aiguë à cunéiforme ; extrémité aiguë, apiculée ; limbe glabre sur les deux faces, lisse, coriace, vert sombre brillant. Inflorescences : [Le matériel de Guyane française ne comportant pas de fleurs matures, inflores¬ cences et fleurs sont décrites d’après des spécimens du Surinam] : capitules axillaires isolés ou groupés par 2-3 ; pédoncule épais, de longueur variable (3-6 cm), tomenteux ; bractées réduites en forme d’écaille spatulée recourbée (L = 1 mm) ; capitules de 20-30 fleurs portées par un pédicelle de 1-1,5 mm ; calice (Le = 2-2,5 mm) campanulé à 5 lobes réguliers très courts, tomenteux ; corolle (LC = 8-10 mm) infundibuliforme, glabre dans sa partie inférieure, à lobes triangulaires de 1-2 mm, pubescents ; Lc/LC = 1/4 ; tube staminal (Ls = 10-12 mm) légèrement exsert. Gousse large et plate (20-30 x 4-6 cm), irrégulière, généralement droite, à contours irréguliers, asymétrique a l’extrémité ; péricarpe du fruit mûr vert grisâtre, rigide ; marges légèrement dilatées (0,5- 1 cm; ; faces ornementées de rides obliques épaisses et de granulations irrégulières ; graines non conti¬ guës, disposées obliquement, pulpe peu abondante ; cotylédons 1,5-2 x 1 cm, blanchâtres à violacé clair. Piamuk grêle ; feuilles 1 et 2 opposées, unijuguées ; stipules aussi grandes ou plus grandes que Source : MNHN, Paris Fig. 8. — Quatre espèces de la Sect. Leplinga Macbr. — a-c Inga huberi Ducke : a, rameau feuille portant une inflorescence et un jeune fruit ; b, fruit mûr (a, b, x 1/3), c, inflorescence ; d-g, Inga virgultosa (Vahl) Desv. : d, rameau portant inflo¬ rescence et fruit mûr (x 2/3) ; e, axe inflorescentiel montrant les bractées ; f, fleur ; g, détail de la base de la feuille, . montrant une stipule ; h-m, Inga sertulifera DC : h, rameau portant inflorescence et fruit mûr (x 1/3) ; i, extrémité de . l’axe inflorescentiel montrant les bractées ; j, bractée normale ; k, bractée de la base du capitule ; I, détail d’un entre- ' nœud montrant les stipules ; m, fleur ; n-q, Inga paraensis Ducke : n, rameau florifère ; o, fruit (n, o, x 1/3) ; p, inflo- \ rescence ; q, détail de la base de la feuille montrant les stipules. Source : MNHN}Paris 40 ODILE PONCY celles de l’adulte (8-10 x 1-2 mm), linéaires à lancéolées, effilées à l’extrémité ; pétiole aplati mais non ailé ; folioles allongées étroites (3-5 x 1-2 cm), limbe coriace vert sombre brillant. Habitat : forêt dense. Distribution géographique : Surinam, Guyane française, Para. Matériel étudié : Mori & Pipoly 15593, Saül (fr.), 12.4.1983 ; Oldeman 3236, Saül (fl. juv.), 12.9.1971; Poney 234, Riv. Arataye (fr.), 18.11.1978; 586, Riv. Arataye (fr. juv.), 26.8.1983; Wachenheim 6, rég. de St-Laurent (st.), 1921 [les récoltes effectuées en forêt de la Riv. Arataye, où I. huberi est localement abondante, ont permis de proposer la première description précise du fruit de cette espèce]. Inga lateriflora Miq. Linnaea, 19 : 131 (1847) Type : Hostmann 1691, Surinam (iso-, P !) [Bien qu’elle n’ait fait l’objet d’aucune récolte fertile en Guyane française, nous mentionnerons rapidement cette espèce, dont la présence est attestée en Guyana, au Surinam et au Para, et à laquelle semblent appartenir quelques spécimens stériles guyanais]. Espèce très voisine de I. heterophylla. Elle s’en distingue par : des feuilles à folioles plus nom¬ breuses (3-5(6) paires), un peu plus grandes, des glandes plus larges, orbiculaires et sessiles, un rachis plus large (/. 12 cm ; espèce non ripicole. /. ingoides 3. Gousse de longueur < 12 cm ; espèce ripicole. /• meissneriana 2. Pas de surface lisse : gousse entièrement cylindrique, côtelée, longue de 20-35 cm. I. edulis 1. Gousse non ainsi : face aussi larges ou plus larges que les marges 2. Marges dilatées, de largeur > 1 cm, saillantes ; gousse de section carrée ou rectangulaire (sect. Tetragonae) 3. Gousse glabre de couleur verte ; faces ornementées de fines stries transversales Source : MNHN, Paris 68 ODILE PONCY 4. Largeur des faces < 2 cm. !• nuda 4. Largeur des faces > 2 cm. /• bracteosa 3. Gousse tomenteuse d’aspect velouté, brun-roux. I. rubiginosa 2. Marges de largeur < 1 cm, ou marges non saillantes 3. Gousse d’aspect charnu, de section circulaire ou presque circulaire 4. Marges de 0,5 à 1 cm de largeur, non saillantes 5. Gousse pubescente. 7. disticha 5. Gousse glabre 6. Gousse droite 7. Péricarpe lisse, jaune vif à maturité, cotylédons noirs, à surfaces de contact planes. 7. umbellifera 7. Péricarpe ± ridé, vert brunâtre veiné, cotylédons verts à surfaces de contact irrégulières 8. dimensions 8-12 x 1,5-2,5 cm ; espèce ripicole. 7. nobilis 8. dimensions 15-20 x 2,5-3,5 cm ; espèce forestière. I. cinnamomea 6. Gousse fortement arquée à enroulée en spirale, péricarpe orangé, lenticellé. 7. fanchoniana 4. Marges de largeur < 0,5 cm 5. Faces ornementées réticulées. 7. bourgoni 5. Faces lisses ou presque lisses 6. Gousse glabre, jaune ; marges non saillantes 7. Gousse de longueur > 8 cm. I. pilosula 7. Gousse de longueur < 8 cm 8. espèce forestière. . 7. capitata 8. espèce ripicole. 7. sertulifera 6. Gousse finement tomenteuse, brunâtre, marges légèrement saillantes. 7. thibaudiana 3. Gousse non charnue, marges de largeur < 0,5 cm 4. Gousse plate, de largeur > 2 cm 5. Marges non saillantes 6. Gousse pubescente (poils hirsutes), péricarpe brunâtre 7. Gousse droite à bords réguliers, pilosité très dense brun roux ; végétation secondaire. I. cayennensis 1. Gousse droite ou légèrement courbe, poils épars ; forêt. 7. tubaeformis 6. Gousse glabre, un peu arquée péricarpe vert sombre, épais. 7. splendens 5. Marges saillantes, gousse glabre 6. Gousse très courte (< 6 cm) et asymétrique. /. virgultosa 6. Gousse de longueur > 8 cm 7. Gousse droite ou très légèrement courbée 8. Marges de = 0,3 cm ; péricarpe fibreux, assez souple, ornementé de rides transversales 9. Faces ± 2 cm, endocarpe filandreux développé entre la pulpe des graines. 7. ricardorum 9. Face ± 3 cm, endocarpe non développé. /. alata 8. Marges de * 0,5 cm ; péricarpe robuste rigide 9. Gousse dépourvue de lenticelles ; disposition oblique de l’ornementation du péricarpe et des graines ; cotylédons bleu-vert. /. acreana 9. Gousse portant des lenticelles ; disposition transversale de l’ornementation du péricarpe et des graines ; cotylédons vert franc 10. Gousse de largeur 2,5-3,5 cm, marges peu saillantes, graines non saillantes. I. paraensis 10. Gousse de largeur 3,5-4,5 cm, marges très saillantes, graines saillantes. I. acrocephala 7. Gousse irrégulière ou arquée 8. Gousse droite, marges irrégulières, ornementation des faces très saillante et irrégulière, fin tomentum brunâtre. j huberi Source : MNHN, Paris INGA DE GUYANE FRANÇAISE 69 8. Gousse arquée, glabre, faces ornementées de légères rides 9. Graines non contiguës ; gousse verte. /. pezizifera 9. Graines contiguës ; gousse brun jaunâtre. I. melinonis 4. Gousse non plate (à section circulaire, ou à graines très saillantes, de largeur < 2 cm 5. Gousse à bords ± ondulés, à graines très saillantes, non contiguës 6. faces lisses ou finement ridées, gousse vert sombre brillant 7. Largeur des faces < 1,5 cm. I. stipulons 7. Largeur des faces > 1,5 cm. I. leiocalycina 6. Faces à ornementation réticulée 7. Péricarpe brun verdâtre, très légèrement tomenteux ; ornementation en réseau dense et assez saillante . I. alba 7. Péricarpe glabre ; ornementation très fine, à peine saillante . I. heterophylla 5. Gousse à bords droits, à graines peu ou pas saillantes, contiguës 6. Dimensions 8-12 x 1 cm ; arbre moyen à grand. I. marginata 6. Dimensions 10-18 x 1,5 cm ; arbuste ou petit arbre. I. auristellae Remarque : I. lateriflora et I. speciosa, dont les fruits sont mal connus, n’entrent pas dans cette clé. Clé pour les formes juvéniles de 22 espèces Guyanaises de Inga Cette clé est incomplète car les formes jeunes de plusieurs espèces sont encore inconnues. Peu d’espèces sont identifiables au stade plantulaire. La plupart le sont à partir du stade 10-15 feuilles. 1. Feuilles pubescentes, y compris finement duveteuses, au moins au stade juvénile 2. Pétiole et rachis nus ou marginés 3. Pétiole et rachis nus, tomenteux roux ; limbe des folioles adulte tomenteux ; très jeunes feuilles à tomen- tum roux dense. I. rubiginosa 3. Pétiole et rachis marginés ; limbe des folioles adulte glabre ; très jeunes feuilles rouge sombre à léger tomentum blanchâtre. I. alba 2. Pétiole et rachis ailé 3. Pas plus de 2 paires de folioles 4. Limbe adulte vert vif, brillant ; longueur des stipules < 5 mm ; glande plus large que le rachis 5. Base des folioles presque symétrique ; très jeunes feuilles rougeâtres. I. pilosula S. Base des folioles fortement asymétrique, à bord supérieur concave ; très jeunes feuilles roussâtres à mordorées. /. leiocalycina 4. Limbe adulte vert grisâtre, mat ; longueur des stipules ± 10 mm ; glande moins large que le rachis- I. splendens 3. Plus de 2 paires de folioles 4. Limbe des très jeunes feuilles rouge clair ou rosé, à pilosité blanchâtre 5. Folioles elliptiques ; face supérieure du limbe ± nettement marbrée vert/gris bleuté ; glande réni- forme ou « en boutonnière » développée. /• edulis 5. Folioles allongées étroites ; limbe uniforme ; glande ostiolée réduite. I. disticha 4. Limbe des très jeunes feuilles vert ou brun-ocre 5. Pas plus de 4(5) paires de folioles ; longueur des folioles généralement > 8 cm 6. Limbe adulte tomenteux, bourgeons pubescents 7. Bourgeons fortement pubescents (poils apprimés roux) ; glande aplatie aussi large ou plus large que le rachis. I- ingoides 7. Bourgeons à pubescence dense (poils hirsutes blanchâtres) ; glande ostiolée moins large que le rachis. I- nuda Source : MNHN, Paris 70 ODILE PONCY 6. Limbe adulte glabre ; bourgeons très faiblement tomenteux. I. alata 5. Jusqu’à 7 paires de folioles, de longueur < 8 cm 6. Pilosité abondante sur les deux faces des folioles, blanche sur les très jeunes feuilles, puis rousse, hirsute ; glandes stipitées, 0 < 1 mm, parfois manquantes. I. cayennensis 6. Feuilles tomenteuses, nervation saillante face inf. ; glandes en coupe large (0 > 1 mm), blanch⬠tres. /• thibaudiana 1. Feuilles glabres 2. Pétiole et rachis non ailés 3. Stipules développées ; jeunes pousses rouge sombre 4. Stipules foliacées plus larges que longues ; folioles de longueur < 10 cm. I. stipulons 4. Stipules rectangulaires plus longues que larges ; folioles de longueur > 10 cm. I. cinnamomea 3. Stipules lancéolées ou linéaires ; jeunes pousses vertes * 4. Pas plus de deux paires de folioles ; limbe coriace, sombre vernissé 5. Folioles allongées (3 fois ou plus de 3 fois plus longues que larges ; pétiole aplati. I. huberi 5. Folioles elliptiques (environ 2 fois plus longues que larges) ; pétiole cylindrique. I. capitata 4. Jusqu’à 4-5 paires de folioles 5. Glande distale souvent absente ; folioles fortement asymétriques, limbe coriace, mat. I. fanchoniana 5. Glande proximale ovale, aplatie ; folioles presque symétriques, limbe souple, brillant.... I. nobilis 2. Pétiole et rachis ailés ou marginés 3. Aile large à foliacée 4. Longueur des folioles < 8 cm ; glandes réduites 5. Pas plus de 3 paires de folioles de longueur > 2 cm ; jeunes pousses rosées. I. auristellae 5. Jusqu’à 9 paires de folioles de longueur s 2 cm. /. virgultosa 4. Longueur des folioles > 8 cm ; glandes développées 5. Stipules lancéolées de longueur > 1 cm ; glandes aplaties ovales ou réniformes. I. alata 5. Stipules linéaires de longueur < 1 cm ; glande en coupe très large. /. pezizifera 3. Aile réduite, plus ou moins triangulaire 4. Pas plus de 2 paires de folioles 5. Folioles des paires inférieure et supérieure de mêmes dimensions ; limbe coriace, lisse et brillant ; très jeunes feuilles rouge sombre. / sertulifera 5. Folioles de la paire inférieure plus petites que celles de la paire supérieure ; limbe non coriace ; très jeunes feuilles vertes. /. marginata Source : MNHN, Paris CHAPITRE III LA CROISSANCE DU JEUNE PLANT L’AXE PRIMAIRE ORTHOTROPE ET SA DIFFÉRENCIATION PLAGIOTROPE. Mise en place du modèle de troll. Introduction On a vu (p.ll) que, pour l’ensemble des espèces de Inga observées en Guyane française, l’archi¬ tecture végétative est conforme au « modèle de Troll » (Halle & Oldeman, 1970). On pourrait pen¬ ser que le genre entier est homogène pour l’architecture, comme il l’est sans doute pour d’autres carac¬ tères morphologiques. En fait, l’analyse reste à faire pour la presque totalité des espèces. Le modèle de Troll, par sa nature même, offre de nombreuses possibilités de variations, et l’étude détaillée d’espèces qui s’y conforment reste encore nécessaire pour améliorer sa compréhension. L’étude du développement de quelques espèces au cours des stades juvéniles a permis de décrire la mise en place de cette architecture, en particulier les modalités de l’acquisition de la plagiotropie et, pour les stades les plus avancés, la ramification. Les descriptions qui suivent portent : — Sur l’observation, pendant 10 à 30 mois selon les espèces, de 10 à 20 plants par espèce (sauf indication contraire). Ces plants sont issus de semis qui se sont développés en serre conditionnée au Muséum National d’Histoire Naturelle, et ont servi de base aux descriptions des germinations et des plantules (v. p. 17, et chap. il ; et Poncy, 1984). Plusieurs espèces ont été également cultivées au Jar¬ din Botanique du centre ORSTOM de Cayenne (1-3 plants par espèce). Les observations effectuées et aimablement communiquées par G. Cremers sur ces « témoins » n’ont pas montré de différences sur le plan des séquences de développement. Leurs dimensions, à âge égal, sont parfois plus importantes, mais ce n’est pas général. — Sur l’observation des formes juvéniles d 'Inga sur le terrain, principalement en forêt dense bordant la rivière Arataye (voir carte, fig. 32 p. 98). I. L’axe primaire orthotrope. Modalités de l’acquisition de la plagiotropie. Parmi les espèces qui réalisent le modèle de Troll, l’épicotyle est plagiotrope soit d’emblée, dès la germination, soit après avoir élaboré une phase orthotrope plus ou moins marquée (HallÉ, Olde¬ man & Tomlinson, 1978). Chez les quelques espèces d 'Inga présentées ici, la phase orthotrope, impor¬ tante, dure jusqu’à l’apparition des feuilles de type adulte (v. p. 18) ; cette phase présente deux périodes morphologiquement distinctes : Source : MNHN, Paris 72 ODILE PONCY 1 — Orthotropie avec phyllotaxie spiralée ; 2 — Orthotropie avec phyllotaxie distique, la disposition spiralée et la symétrie radiale étant éventuellement secondairement acquises. A. — Description 1. I. edulis et les espèces à croissance continue. — I. edulis : De toutes les espèces cultivées en serre, c’est celle qui fait preuve de la plus grande vigueur, par ses dimensions et sa vitesse de croissance. Après les deux premières feuilles opposées, l’axe émet 5 à 7 feuilles alternes à 1 paire de folioles. Bien que la croissance postplantulaire soit rapide chez cette espèce (l’exemplaire de la fig. 14 porte 5 feuilles, mesure 20 cm et a moins d’un mois), les feuilles sont émises une par une et chacune se développe complètement avant qu’un nouvel entrenœud et une nouvelle feuille n’apparaissent. Les feuilles ont d’emblée une disposition spiralée (fig. 14 ; pl. VIII-1). La tige est dressée et rectiligne. La surface foliaire augmente progressivement avec l’apparition des feuilles à 2, puis 3 et 4 paires de folioles. Les entrenœuds sont courts (< 5 cm). La fin de la phase orthotrope est marquée par une croissance lente, ou même des arrêts de croissance. Fig. 14. — Jeune plant de I. edulis (1 mois ; 20 cm, 5 feuilles) orthotrope à phyllotaxie spiralée — vu de profil et de dessus. L’apparition de la phyllotaxie distique a lieu à partir de la 10 e feuille (l’axe atteint 50 à 60 cm de hauteur), ou plus tardivement. A ce moment les feuilles naissantes sont clairement disposées dans un plan. L’observation est facilitée car la plante a alors un mode de croissance tel que les entrenœuds des 2-4 dernières feuilles formées s’allongent alors que les feuilles juvéniles sont en cours d’expansion. De plus, approximativement au même moment, l’axe commence à croître en « zig-zag » : les entrenœuds successifs sont émis à 90° l’un de l’autre et forment une ligne brisée contenue dans un plan qui semble confondu avec le plan cotylédonaire (cf. fig. 16, pour I. thibaudiana). Une fois mis en place, cet aspect de l’extrémité de l’axe est conservé à chaque instant. Il ne s’agit pas, pour cette espèce, de croissance rythmique. En vieillissant, les entrenœuds se redressent, la tige reste légèrement anguleuse. Le début de la phase distique est lié à une augmentation de la vigueur et de la vitesse de croissance des plants. Le changement de direction de croissance de l’axe suffit alors à conférer à celui-ci un port pla- giotrope. Suivant les cas, la courbure se produit : Source : MNHN, Paris ING A DE GUYANE FRANÇAISE 73 (1) au moment de l’apparition de la distichie : elle a lieu de façon progressive, entre la 10* et la 15* feuille environ ; (2) nettement plus tard : dans ce cas, l’axe orthotrope continue sa croissance vigoureuse (feuilles grandes, entrenœuds longs) et peut produire le double de feuilles et tripler sa hauteur ; 4 des 12 jeunes plants cultivés ont ainsi donné un axe orthotrope de 1,50 à 1,80 m. L’arrangement des feuilles est peu rigoureux dans cette portion d’axe orthotrope distique : soit elles se réorientent en disposition spiralée par le jeu du redressement / rotation des entrenœuds, soit elles restent plus ou moins distiques (pl. IX et XI). Lorsque l’inclinaison se produit, c’est d’une façon moins progressive que dans le cas (1) : la courbure peut ne mettre en jeu qu’un seul entrenœud très allongé (jusqu’à 15 cm). Dans les deux cas, la courbure plagiotrope semble avoir lieu : (1) Dans une direction bien définie par rapport à l’axe de symétrie de la plantule ; la tige s’inflé¬ chit en restant toujours dans le plan intercotylédonaire, c’est-à-dire que le plan qui contient les entre¬ nœuds en « zig-zag », à l’origine perpendiculaire au plan intercotylédonaire, s’infléchit en gardant cette orientation (fig. 15). Ceci a pu s’observer chaque fois que les cicatrices cotylédonaires sont encore nettes, c’est-à-dire pour les 2/3 des plants. (2) En association avec l’émission d’axes latéraux : voir p. 80. Fig. 15. — Distichie et courbure plagiotrope chez I. edulis : A, la flexion alternative des entrenœuds s’incrit dans le plan coty- lédonaire ; B, la courbure plagiotrope s’effectue dans le plan intercotylédonaire. Vues de face (a„ b,) = plan cotylédo- naire, de gauche (ai, b 2 ) = plan intercotylédonaire, de dessus (ai, b 3 ). — Autres espèces : Trois autres espèces ont un développement analogue à celui de I. edulis : (1) Chez I. ingoides, la disposition foliaire distique apparaît plus tardivement, au niveau des 15 e - 20 e feuilles. Chez tous les plants, la croissance orthotrope se poursuit au-delà de ce stade : aucun d’eux n’a présenté de courbure plagiotrope pendant le temps de culture, alors que le plus développé atteignait 1,60 m (avec 35 feuilles) et avait déjà émis 4 rameaux latéraux (pl. VII1-3). (2) Chez I. thibaudiana (fig. 16), la phase orthotrope est beaucoup plus réduite en hauteur, mais elle compte également 10 à 15 feuilles. A ce stade, la croissance devient brusquement plus rapide, et ceci de façon beaucoup plus nette que chez I. edulis ; la phyllotaxie distique, associée à la flexion alter- Source : MNHN, Paris 74 ODILE PONCY native des entrenœuds (= croissance en « zig-zag » de l’axe), apparaît à la suite de cette augmentation de vigueur (pl. IX, 4). La courbure plagiotrope est également différée par rapport à l’acquisition de la distichie. Elle apparaît généralement avec la première ramification plagiotrope, aux environs de la 15' feuille, ou plus tard (à ce stade, la hauteur des plants est ^ 50 cm (pl. X, 1). (3) Les jeunes plants de /. cayennensis (pl. X, 2) se développent de façon tout à fait comparable à ceux de /. thibaudiana. Le passage à la distichie a lieu en serre chez des plantules de 20 cm de hau¬ teur environ, et après un an de culture (sur le terrain, la phase orthotrope peut atteindre 50 cm). Fig. 16. — /. thibaudiana : A, phase orthotrope à phyllotaxie spiralée ; B, acquisition de la phyllotaxie distique et réorienta¬ tion des feuilles pendant leur phase d’expansion. Vues de face et de dessus. Schémas valables également pour I. edulis. 2. Inga fagifolia et les espèces à croissance rythmique. — I. fagifolia (fig. 17 ; pl. IX, 3) : (N. B. : rappelons que I. fagifolia Willd., bien qu’ayant une vaste répartition néotropicale, n’a pas encore été récoltée en Guyane française. Sa description ne figure donc pas au chapitre II. — espèce de la sect. Bourgonia, à feuilles bijuguées. — Récolte des graines : J. Jérémie, Parc des Roches Gravées, Guadeloupe, 1978 ; herbier de jeunes plants : O. Poney 332, 348). La phase orthotrope est beaucoup plus réduite que chez les espèces précédentes. La phyllotaxie distique apparaît généralement dès la 4'-5' feuille, en tout cas avant la 8 e , et parfois alors que les feuil¬ les sont encore unijuguées ; elle est également liée à l’aspect en « zig-zag » de la tige. Source : MNHN, Paris INGA DE GUYANE FRANÇAISE 75 Fie. 17. — Phyllotaxie distique chez I. fagifolia : A, axe primaire orthotrope : sur la dernière unité de croissance émise (acco¬ lade), les feuilles sont encore disposées dans un même plan ; en dessous, elles sont spiralées par réorientation secondaire ; B, axe II plagiotrope axillé par la 16 e feuille, vu de dessus. Les premières unités de croissance (de 2 feuilles) apparaissent plus tard, au niveau des feuilles d’ordre 10 à 15 sur l’axe primaire ; les U. C. suivantes produisent progressivement 4, 5 ou même 6 feuilles (pl. IX, 3). Pendant la phase d’expansion des feuilles d’une U. C., la tige en « zig-zag » et la disposition distique sont particulièrement nettes. A ce stade, le jeune plant est encore orthotrope. La conservation de l’orthotropie de l’épicotyle se réalise de la façon suivante : malgré un léger redresse¬ ment, une angulation marquée subsiste d’un entrenœud à l’autre, et les entrenœuds s’écartent successi¬ vement du plan distique de départ, pour former une sorte d’hélice articulée. Les feuilles acquièrent une disposition spiralée souvent régulière autour de l’axe de symétrie de la tige hélicoïdale. Courbure plagiotrope : elle a lieu très tardivement, en tout cas pas avant la 20* feuille. La plante a alors émis plusieurs unités de croissance et plusieurs rameaux latéraux plagiotropes (voir aussi p. 84 et fig. 23). Source : MNHN, Paris 76 ODILE PONCY — autre espèce : I. sertulifera : La croissance de la phase orthotrope est particulièrement lente : les plants de 2 ans atteignent 25 à 35 cm de hauteur, ont une vingtaine de feuilles spiralées et des entrenœuds courts. Une plantule de la même espèce poussant à Cayenne, âgée de 19 mois, mesure 60 cm et reste orthotrope. La modification de l’activité apicale n’en est que plus spectaculaire, entraînant la mise en place de la croissance rythmi¬ que par unités de croissance de 2 à 3 feuilles distiques (pl. IX, 1, 2), un fort allongement des entre¬ nœuds, l’émission d’axes latéraux. Courbure plagiotrope : l’axe primaire ne prolonge pas la phase orthotrope comme chez I. fagifo- lia, par un redressement secondaire des entrenœuds. Au contraire la structure plagiotrope est conservée par l’axe primaire, mais son orientation reste proche de la verticale. 3. Autres espèces. Plusieurs autres espèces ont été cultivées en serre. Mais, pour des raisons différentes selon les espèces, seule la phase orthotrope à phyllotaxie spiralée a été observée. (1) Plants à phase orthotrope très développée : chez I. alata, I. alba, I. nuda, I. nobilis, I. pezi- zifera, les plants hauts de 60 à 150 cm sont encore orthotropes et à phyllotaxie spiralée ; même chez I. cinnamomea, dont les axes orthotropes atteignaient 150 à 300 cm de hauteur, après 30 mois de culture (pl. VIII, 4). (2) Plants cultivés pendant une période trop courte : I. huberi, I. leiocalycina, I. marginata, I. rubiginosa, I. virgultosa. Les plants de ces espèces, cultivés pendant moins de 10 mois, ne dépassaient pas 30 cm au moment des dernières observations. (3) Plants peu vigoureux, à croissance très lente : I. fanchoniana, I. pilosula (pl. VIII, 2), I. splendens. Chez cette dernière, la phyllotaxie spiralée de l’axe orthotrope est particulièrement nette, les pétioles étant généralement engainants et les entrenœuds courts (pl. V, 6 ; VII, 1). Sur le terrain (piste de St-Elie, oct. 1982), on a pu observer de jeunes plants de I. fanchoniana parfaitement orthotropes et à phyllotaxie spiralée, atteignant jusqu’à 1,50 m. D’une façon générale, l’observation des jeunes tiges sur le terrain confirme que la croissance commence par une phase orthotrope développée. Mais souvent, c’est la phase orthotrope à phyllotaxie distique qui se prolonge plus ou moins, en fonction des conditions écologiques (voir aussi au chap. IV). B. — Discussion a. Acquisition de la phyllotaxie distique et de l’inclinaison plagiotrope. Les observations qui viennent d’être décrites montrent : (1) Que la plagiotropie n’est pas réalisée d’emblée dès la germination. La présence d’un tronçon basal orthotrope est considérée comme fréquente (Halle et al., 1978 : 242) chez les espèces qui relè¬ vent du modèle de Troll. D’importance variable, la phase orthotrope représente pour ces auteurs une phase « dédifférenciée » dont le degré « reflects the différenciation sequence imposed on the apical meristem by the sexual process of seed development » (l.c. : 247). (2) Que les deux conditions nécessaires à la réalisation de la plagiotropie (distichie et courbure de la tige) sont acquises de façon indépendante ; la disposition distique précède l’inclinaison de la tige et n’est donc pas induite par celle-ci. Les deux évènements sont particulièrement bien dissociés chez Inga fagifolia dont la phase orthotrope à phyllotaxie distique est très développée. (3) Que la disposition distique correspond non pas à une réorientation des feuilles, mais réelle¬ ment à la différenciation du méristème apical, après la germination, conduisant à la phyllotaxie distique vraie. Dans le modèle de Troll, « variation of the degree of différentiation of the plagiotropie phase is considérable and must be considered 'carefully since this is the critical feature of Troll’s model » (l.c. : 248). Ces degrés variés dans la différenciation touchent essentiellement la phyllotaxie, et la diffé- Source : MNHN, Paris INGA DE GUYANE FRANÇAISE 77 renciation est la plus importante lorsque la distichie vraie est réalisée dans le méristème, alors que, quand la phyllotaxie est spiralée (et les feuilles secondairement réorientées), la structure d’origine de la tige est celle d’un axe orthotrope. L’importance de la modification est probablement fonction de la complexité de la phyllotaxie initiale du tronçon orthotrope, lorsqu’il existe. Dans le cas présent (mais des coupes dans l’apex en phase distique seront nécessaires pour le préciser), il est possible que les primordiums réalisent une phyllotaxie spiralée ; cependant, à l’extrémité d’un axe très jeune, les plus jeunes feuilles visibles pré¬ sentent déjà une disposition distique, ce qui signifierait que, très précocement, avant même leur émis¬ sion, les feuilles naissantes sont affectées par une réorientation. Ceci est douteux (car une réorientation de ce type suppose que les feuilles soient déjà fonctionnelles) et peut paraître spéculatif, mais permet¬ trait peut-être d’expliquer la spectaculaire flexion alternative des entrenœuds de la très jeune tige, qui serait une conséquence mécanique de la disposition distique d’ordre secondaire des ébauches foliaires. Les espèces qui, comme ces quelques Inga, présentent, au cours du passage ortho/plagiotrope de l’axe primaire, une différenciation du méristème vers la distichie vraie, devraient permettre de préciser les modalités de cette transition au niveau du méristème apical, et les intermédiaires que la nature admet. (4) Intérêt pour la phylogénie : s’il s’avère, ce qui reste à prouver, que la phyllotaxie distique est générale dans le genre Inga, il est de nombreuses espèces, dans les genres voisins, qui présentent une phyllotaxie spiralée. Lorsque les axes sont plagiotropes (ce qui n’est pas général), la disposition est dis¬ tique par réorientation secondaire : ainsi chez certains Albizia (Hallé et al., 1978 : 248, et obs. pers.), Serianthes, Enterolobium, Pithecellobium (obs. pers.). Les quelques Calliandra observés sont au con¬ traire distiques d’emblée, comme les Inga. Si on accorde un intérêt phylogénique à la phyllotaxie disti¬ que, la comparaison à ce point de vue des différents genres des Ingeae (associée à celle de leurs modè¬ les architecturaux) pourrait avoir un intérêt dans la compréhension de l’évolution du groupe. b. Déterminisme de la différenciation plagiotrope. La phyllotaxie distique et l’orientation plagiotrope apparaissant de façon indépendante, il faut envisager le déterminisme de la différenciation à ces deux niveaux. On a tenté de mettre en relation cette différenciation avec les étapes de la croissance du jeune plant, et avec le milieu extérieur. 1. Ainsi, la différenciation qui conduit à la phyllotaxie distique pourrait être liée : — Au changement du rythme de l’activité apicale : on a vu que, après le développement du jeune plant orthotrope à feuilles spiralées, la croissance ralentit ou marque un arrêt. L’augmentation, parfois brutale, de la vitesse de croissance précède l’apparition de la phyllotaxie distique de façon très nette chez I. thibaudiana, I. cayennensis ; chez I. edulis, I. ingoides, I. sertulifera, les deux évènements sont plus ou moins concomittants. Pour toutes ces espèces en tout cas, la phyllotaxie distique apparaît lorsque les feuilles sont bien différenciées (nombre de folioles de l’adulte). Mais, chez I. fagifolia, la phyllotaxie distique apparaît très tôt, alors que les feuilles sont encore unijuguées ; c’est après que la croissance devient plus vigoureuse, et que les premières unités de croissance sont émises. — A l’utilisation des réserves cotylédonaires, la chute des cotylédons marquant l’acquisition de la vigueur autonome de la plante. La recherche d’une telle relation peut se faire : (a) Chez des espèces différentes, en comparant la hauteur de l’axe orthotrope avec les dimen¬ sions des cotylédons. Ceci ne donnerait pas dans le cas des Inga de résultats « parlants », la plupart des espèces ayant des cotylédons de taille comparable. 11 est vrai cependant que I. edulis et I. cinnamomea, qui ont de très grosses graines, ont une phase orthotrope très développée. (b) Chez une même espèce, en comparant des plantules issues d’embryons ayant subi ou non l’ablation des cotylédons au moment du semis. Les essais d’ablation des cotylédons effectués chez deux espèces n’ont pas été concluants : chez une seule (/. feuillei), un nombre suffisant de plantules s’est développé correctement ; mais, à la fin de la période de culture, aucune n’a terminé la phase ortho¬ trope à phyllotaxie spiralée. Après 7 mois, les plants à cotylédons mutilés atteignent en moyenne 26 cm de hauteur, contre 47 pour les plants témoins, mais le nombre de feuilles émises est le même (9-10) dans les deux cas : il est possible que la diminution des réserves séminales affecte seulement la longueur Source : MNHN, Paris 78 ODILE PONCY des entrenœuds mais pas la séquence morphogénétique conduisant à la plagiotropie. Rappelons que, d’après Halle et al. (1978 : 16), les germinations de Parinari présentent une phase orthotrope réduite lorsque les cotylédons sont supprimés. En outre, chez toutes les espèces de Inga étudiées, les cotylédons se détachent de la plantule assez tôt, et en tout cas le plus souvent longtemps avant la mise en place de la plagiotropie. Bien qu’une expérimentation précise soit nécessaire pour pouvoir l’affirmer, il est pro¬ bable qu’il n’y a pas, dans le cas des Inga, de relation stricte entre la quantité des réserves séminales et la différenciation plagiotrope. 2. D’autre part, le déterminisme de la courbure plagiotrope pourrait être lié aux facteurs exter¬ nes (sol, éclairement). Cette étude n’a pas été entreprise méthodiquement, mais on peut faire les remar¬ ques suivantes : — Relations avec la nodulation des racines : la nodulation est le signe d’un milieu pauvre, mais aussi de la meilleure utilisation de ce milieu par la plante. S’il y a peu de nodules, la plante a toutes les chances d’être peu vigoureuse, puisque les conditions de « sol » sont toujours peu favorables en pots de petite taille. Chez I. edulis, la nodulation est très variable d’une plantule à l’autre, et il ne semble pas y avoir de relation entre la présence (et l’abondance) des nodules et, d’une part la vigueur, d’autre part la précocité de la coubure plagiotrope. Chez I. cinnamomea, la nodulation est également variable, et se produit avant l’apparition de tout signe de différenciation de l’épicotyle. De même chez I. fagifolia : des plantules d’aspect et de vigueur comparables, en phase orthotrope distique, ont ou non des nodu¬ les. — Effet de l’enrichissement du sol : un des 3 plants de I. pilosula ayant effectué la courbure plagiotrope a été placé dans un pot de volume double et a reçu de l’engrais liquide : dans les deux semaines qui ont suivi ce traitement, l’axe primaire a repris l’orientation orthotrope, et émis deux axes latéraux plagiotropes (pl. X, 3-4). Chez les deux autres plants, l’axe primaire est resté plagiotrope. Cette brusque amélioration de la nutrition racinaire est sans doute la cause d’un tel comportement : il semble donc que des conditions de sol défavorables puissent provoquer une courbure plagiotrope pré¬ coce. Une expérimentation précise est nécessaire, mais cette observation concorde avec celles de Ban- cilhon (1974, cité par Halle et al., 1978 : 249) sur les plantules de Sida carpinifolia. — Orientation de la courbure plagiotrope : on a vu (p. 73) que le plan de courbure de l’axe pri¬ maire des plants de I. edulis est le plan intercotylédonaire. Cette observation, facilitée chez cette espèce grâce à l’aspect très apparent des grandes cicatrices foliaires, a été faite également sur quelques plants de I. thibaudiana et de I. pilosula. Les espèces à croissance lente ou à phase orthotrope très importante ne permettent pas de l’effectuer. En tout cas, chez I. edulis, le sens de l’éclairement le plus fort est indépendant de celui de l’axe plagiotrope : ceci serait un argument en faveur du déterminisme endogène de l’orientation plagiotrope. D’autres causes pourront être recherchées au déterminisme de la différenciation plagiotrope, et en particulier l’intensité de l’éclairement. Bien que des données précises manquent encore, il est tentant de faire l’hypothèse que le déterminisme du passage phyllotaxie spiralée-phyllotaxie distique est essentiellement morphogénétique, et que c’est au niveau de l’inclinaison plagiotrope que l’influence des facteurs externes est sensible. L’acquisition préalable de la distichie, et la possibilité de réarrangement secondaire de sa symétrie donne à la plante toute facilité pour s’élever (conservation de l’orthotropie) ou s’incliner et s’étaler en position plagiotrope. On entrevoit alors quelle peut être l’influence du milieu sur le devenir d’une telle plante, notamment celle de l’énergie lumineuse disponible, et quel avantage il en résulte. Ces notions seront reprises plus loin, lors de l’étude des formes juvéniles sur le terrain. Source : MNHN, Paris INGA DE GUYANE FRANÇAISE 79 II. Ramification de l’axe primaire : étude des plantes en serre. A. Le jeune plant : axes latéraux précoces et ramification plagiotrope séquentielle. 1. Description — Axes précoces : ils ont été observés chez toutes les espèces cultivées en serre. Il s’agit des ramifications de l’axe primaire de la très jeune plantule, qui peuvent être : (a) des axes cotylédonaires : ils sont fréquents chez I. edulis, I. fagifolia, I. sertulifera. Leur développement est soit sylleptique et ils gardent alors une vigueur égale à celle de l’épicotyle pendant quelques entrenœuds, soit proleptique en présence ou non d’un traumatisme de l’axe primaire ; (b) des rameaux axillés par les premières feuilles (1-2 à 5-6), fréquents, sylleptiques ou prolepti- ques. Ces axes, naissant sur la portion orthotrope, indifférenciée, de l’axe primaire, sont également orthotropes, à phyllotaxie spiralée. Le plus souvent, ils s’allongent peu, végètent et disparaissent au profit de l’axe I. Rarement, si la vigueur est suffisante, la plantule reste « double » grâce à la crois¬ sance simultanée de l’épicotyle et d’un de ces axes (ex. I. edulis, pl. VIII-1). — Axes plagiotropes distiques : ils apparaissent sur la portion différenciée de l’axe primaire, c’est-à-dire après l’acquisition de la phyllotaxie distique ; ils sont sylleptiques ou proleptiques. D’emblée, leur phyllotaxie est distique et leur orientation plagiotrope. Chez certaines espèces, leur apparition est étroitement liée à l’inclinaison plagiotrope de l’axe primaire : c’est le cas de I. edulis, I. cayennensis, I. splendens, I. thibaudiana... ; chez d’autres (/. fagifolia, I. ingoides, I. nobilis, I. sertuli¬ fera), la croissance orthotrope de l’axe primaire peut se prolonger après l’émission des premiers axes latéraux plagiotropes. D’autre part, chez les espèces à croissance rythmique, l’apparition des premiers axes latéraux plagiotropes est associée à celle des premières unités de croissance (7. fagifolia, I. nobilis, I. pilosula, I. sertulifera...). 2. Discussion : différenciation plagiotrope des méristèmes axillaires L’observation des premières ramifications montre que la nature des axes latéraux semble liée au degré de différenciation de l’axe primaire qui les produit. Le résultat d’une « expérience » pratiquée sur 15 plants de I. fagifolia apporte des arguments à cette hypothèse (fig. 18) : la destruction traumatique (par une brutale augmentation accidentelle de la température de la serre) a touché les méristèmes pri¬ maires de ces plants au niveau des feuilles 9 à 15, c’est-à-dire à un stade où la phyllotaxie distique et la croissance rythmique s’établissent. Les rameaux axillaires émis immédiatement après ont été le plus sou¬ vent plagiotropes, mais chez quelques plants leur croissance orthotrope leur a permis de se substituer à l’axe primaire détruit. Il apparaît que, chez les plants ayant émis un axe secondaire orthotrope, la crois¬ sance rythmique n’était pas encore installée sur l’axe primaire au moment de la destruction de son méristème. Ces axes orthotropes ont une phyllotaxie distique et, comme l’épicotyle, ils présentent une réorientation secondaire des feuilles. Au contraire, les axes qui, bien qu’affranchis de la dominance de l’axe primaire, restent plagiotropes, proviennent de la partie déjà différenciée de l’axe primaire. Ainsi : — la phase initiale orthotrope à phyllotaxie spiralée émet, avec ou sans traumatisme de l’axe primaire, et de façon facultative, un ou plusieurs axes orthotropes à phyllotaxie spiralée, cotylédonaires 1. Selon la terminologie adoptée par Hallé et al. (1978 : 242). Syllepsie = développement continu d’un axe latéral à par¬ tir de l’axe terminal sans période de repos du méristème latéral ( i.e ., axes terminal et latéral se développent ensemble) ; pro- lepsie : développement discontinu du méristème latéral, qui marque une période de repos (i.e., l’axe terminal se développe avant l’axe latéral). Source : MNHN, Paris 80 ODILE PONCY ou axillaires des premières feuilles ; ces axes représentent le potentiel de réitération traumatique du jeune plant ; — après l’acquisition de la différenciation plagiotrope de l’axe primaire, les axes II qu’il produit ont d’emblée une structure plagiotrope ; ces axes correspondent à la séquence de développement du modèle de Troll. Fig. 18. — Inga fagifolia, ramification après traumatisme de l’axe I survenu : a, a„ pendant la phase orthotrope spiralée ; b, b„ après la mise en place de la phyllotaxie distique. B. Description comparée de la séquence de développement chez deux espèces. Les deux espèces décrites illustrent l’une la croissance continue (/. edulis), l’autre la croissance rythmique (/. fagifolia). 1. /. edulis (fig. 19 ; pl. XII) a. Ramifications de l’axe primaire : on a vu que les axes orthotropes précoces sont fréquents ; quant aux axes plagiotropes distiques, les représentations schématiques des étapes de la croissance de quelques-unes des plantules étudiées en serre montrent le synchronisme entre l’apparition des premiers d’entre eux et le changement de direction de croissance de l’axe primaire, qui devient plagiotrope. b. Etablissement du relais pour le tronc : après émission des premiers axes II, l’axe primaire continue sa croissance plagiotrope, mais les derniers entrenœuds formés se redressent, ce qui donne à la plante, pendant quelques temps, l’aspect de la fig. 19-e ; cette situation peut se prolonger, comme dans le cas de la fig. 20, où le tronc, au dernier stade observé, reste monopodial. Mais, généralement, la vigueur de l’axe I est, plus tôt, concurrencée par un ou plusieurs des axes II qu’il a émis, et cela selon deux modalités différentes : (1) Redressement et renforcement de la vigueur de l'un des axes II plagiotropes décrits ci-dessus (fig. 19-f, g). Un ou plusieurs de ces axes sont en effet des concurrents potentiels pour le relais de tronc. Cette « concurrence » se manifeste par le redressement simultané de l’axe I et d’un des axes Source : MNHN, Paris INGA DE GUYANE FRANÇAISE 81 Inga edulis développé en serre : a, phase 82 ODILE PONCY Fie. 20. — Prolongation de la dominance de l’épicotyle et tronc monopodial chez un jeune plant de I. edulis développé en serre (portions d’axes grisées : voir fig. 19). Fig. 21. — /. edulis, jeune plant développé en serre : émission simultanée d’axes proleptiques orthotropes et mise en place, par l’un d’eux, du relais de tronc, les autres devenant plagiotropes (portions d’axe grisées : voir fig. 19). Source : MNHN, Paris Fig. 22. — I. edulis, jeune plant développé en serre : émission successive d’axes proleptiques orthotropes et dominance par le dernier formé, le précédent devenant plagiotrope (portions d’axe grisées : voir fig. 19). Source : MNHN, Paris 84 ODILE PONCY secondaires plagiotropes (pas nécessairement le plus proche de l’apex de l’épicotyle) et par une augmen¬ tation brusque de leur vigueur : ces deux axes présentent alors une phase de croissance orthotrope, à vigueur égale, d’importance variable d’un individu à l’autre. Dès que l’axe II prend le dessus, l’axe I diminue de vigueur et reprend progressivement le port plagiotrope. (2) Emission d’axes proleptiques orthotropes (fig. 21, 22). Chez /. edulis, le développement retardé d’axes émis par l’axe primaire, souvent assez bas sur celui-ci, ou par des axes II, marque la forte aptitude à rejeter chez cette espèce, aptitude déjà remarquée sur le terrain. Il s’agit d’axes d’emblée orthotropes, à entrenœuds longs, vigoureux, dont l’émission est favorisée par la destruction de l’axe primaire, ou par son affaiblissement même léger ou temporaire. La phyllotaxie est toujours distique, avec la flexion alternative des entrenœuds décrite plus haut (p. 73) ; et les feuilles des tron¬ çons orthotropes se réorientent plus ou moins, secondairement, selon les même modalités que celles décrites pour l’axe primaire. Comme dans le cas précédent, la compétition pour le relais de tronc peut avoir lieu et se mani¬ fester par un regain de vigueur de l’axe primaire ; mais, le plus souvent, celui-ci reste plagiotrope (en raison même, sans doute, de sa faiblesse) et la compétition a lieu entre deux ou plusieurs de ces axes ; l’aspect de la plante varie selon le lieu d’émission de ces axes orthotropes (axe primaire ou axes secon¬ daires, dans leur région proximale ou distale) et leur nombre (fig. 21, 22). Par la suite, l’axe qui domine construit un élément équivalent à celui qu’a élaboré l’épicotyle : croissance orthotrope avec réorientation des feuilles (voir ci-dessus), inclinaison plagiotrope, émission d’axes latéraux plagiotropes. En termes d’architecture végétative, la signification de ces deux modalités est sans doute diffé¬ rente, la première correspondant à la mise en place du modèle de Troll, la seconde à sa réitération. 2. /. fagifolia (fig. 23) a. Ramifications de l’axe primaire — Les axes cotylédonaires sylleptiques sont fréquents, mais rares sont, par contre, les rameaux axillés par la base de l’épicotyle. — Axes latéraux plagiotropes : les premiers rameaux latéraux sont émis à des niveaux variés sur l’axe I, mais toujours après l’acquisition de la croissance rythmique (v. p. 75). Les axes secondaires à phyllotaxie distique, et d’emblée plagiotropes, sont portés par un axe primaire à croissance orthotrope, à phyllotaxie distique, mais dont les feuilles sont secondairement réorientées. Contrairement au cas de /. edulis , ils sont émis très nettement de façon rythmique, par séries de 2 à 4, séparées par des portions d’axe sans ramification. Ils sont rarement sylleptiques : le plus souvent, leur développement a lieu sur l’avant-dernière unité de croissance. b. Etablissement du relais pour le tronc : Celui-ci n’a pas encore été effectué, au dernier stade observé pour cette espèce. Contrairement à I. edulis, l’inclinaison plagiotrope de l’axe primaire est tardive : chez l’exemplaire le mieux développé (fig. 23-f, g) elle se produit avec l’émission de la 4* série d’axes latéraux. Ensuite, plusieurs unités de croissance sont émises par les axes tous plagiotropes, éloignant les méristèmes du tronc et constituant une phase d’exploitation latérale, sans croissance en hauteur. Il n’y a donc probablement pas chez cette espèce de compétition entre les axes pour le relais du tronc, en raison du degré de différenciation plagiotrope élevé et à caractère irréversible des axes, y com¬ pris l’épicotyle une fois que sa direction de croissance horizontale est installée. Le relais de tronc sera plutôt un axe proleptique émis par l’axe I au niveau de la courbure. Sa mise en place ne serait pas le résultat d’une compétition entre 2 ou plusieurs axes, mais d’un transfert de la vigueur du méristème de l’épicotyle devenu plagiotrope à celui de l’axe relais. Signalons en outre l’observation effectuée sur les plants ayant produit des axes plagiotropes disti¬ ques, après destruction traumatique de l’axe primaire, dans 1’ « expérience » citée plus haut (p. 79) : aucun d’eux n’a développé d’axe relais, que ce soit à partir de ces axes plagiotropes ou à partir d’axes proleptiques émis à la base de l’axe épicotylé (voir /. edulis). Il est probable que ceci se produirait dans Source : MNHN, Paris 86 ODILE PONCY des conditions plus favorables que celles de la culture en serre. Mais c’est sans doute aussi le signe du degré de différenciation plus poussé des axes plagiotropes, et d’une aptitude plus faible à la réitération traumatique que chez I. edulis. 3. Discussion a — Degré de différenciation et réversibilité. — Phyllotaxie distique : l’allongement des axes selon les modalités décrites plus haut (p. 72 et suiv.) avec disposition distique et entrenœuds formant une ligné brisée, est constante et irréversible chez tous les exemples étudiés dans les différentes espèces, même si le « zig-zag » n’est pas toujours accentué. — Orientation plagiotrope ou orthotrope des axes. Celle-ci présente des variations : (1) Chez I. fagifolia, I. thibaudiana, les rameaux axillaires sont, d’emblée, plagiotropes et disti¬ ques, et le restent : aucun axe n’a montré au cours de sa croissance de tendance à l’orthotropie, pas plus que l’axe primaire, une fois devenu plagiotrope. D’autre part, le fait que, même affranchis de l’influence du méristème apical, de tels rameaux ne puissent retrouver l’orthotropie, est le signe d’une différenciation poussée. (2) Chez I. edulis, la différenciation plagiotrope est réversible, au moins pour certains axes, en particulier l’épicotyle : en effet celui-ci, ainsi que certains des axes secondaires qu’il a émis, peut pré¬ senter, après une phase de croissance plagiotrope, un retour à Porthotropie accompagné d’une vigueur accrue (croissance rapide, entrenœuds très longs) qui correspond souvent à la phase de concurrence entre deux axes pour le relais du tronc. Le développement éventuel d’axes proleptiques d’emblée ortho- tropes sur un axe plagiotrope est également le signe de la réversibilité de la plagiotropie chez cette espèce. b — Mise en place du relais du tronc. — Apparition des premiers rameaux latéraux. Le fait que pour plusieurs espèces, la mise en place des premières ramifications soit liée à l’acquisition de la croissance plagiotrope de l’axe primaire et que ces caractères paraissent (cf. I. pilosula, p. 78) fortement influencés par une variation de l’éner¬ gie disponible, semble indiquer que l’expression phénotypique de la ramification est fortement dépen¬ dante de la vigueur globale de la plante. Ainsi, la courbure plagiotrope de l’axe primaire et l’apparition des premiers rameaux latéraux seraient liées de deux façons différentes, selon la vigueur : (1) L’axe primaire distique orthotrope, vigoureux, émet des axes secondaires sylleptiques qui contribuent, en retour, à l’affaiblissement de l’axe primaire et à l’apparition de la croissance plagio¬ trope qui en résulte (fig. 19). (2) Au contraire l’axe I, peu vigoureux, s’incline, et la modification physiologique consécutive permet le développement de méristèmes axillaires jusque-là inhibés (fig. 21, 22). Le résultat est le même dans les deux cas. Mais, si le niveau de vigueur est plus élevé encore, l’émission d’axes secondaires ne provoque pas nécessairement la courbure plagiotrope de l’axe I, qui peut ainsi être beaucoup plus tardive (fig. 20, 23). — Etablissement du relais pour le tronc. De la même façon, celui-ci semble être, au moins chez I. edulis, le résultat : (1) de la vigueur globale de la plante, qui permet ou non la croissance vigoureuse d’un axe laté¬ ral et sa mise en concurrence avec l’axe primaire, et qui détermine donc la longueur de celui-ci ; (2) de la répartition entre les axes de cette vigueur, qui détermine la dominance définitive par l’un ou l’autre axe. Ainsi, on peut tenter d’expliquer les variations qui viennent d’être décrites en termes de gradient de vigueur, selon la fig. 24. c — Croissance rythmique. On a vu qu’elle existe chez une partie seulement des espèces étudiées : I. fagifolia, I. sertulifera, I. cinnamomea, 1. pilosula,... et qu’elle n’est pas présente dès la germination mais apparaît progressive¬ ment pendant la phase de croissance initiale orthotrope. Source : MNHN, Paris INGA DE GUYANE FRANÇAISE 87 Fig. 24. — Relation entre la croissance plagiotrope de l’axe primaire et sa ramification en fonction de la vigueur globale. A, niveau de vigueur bas : inclinaison précoce de l’axe primaire, suivie de ramification ; B, niveau de vigueur moyen : premières ramifications plagiotropes émises avant l’inclinaison plagiotrope de l’axe I. L’un de ces rameaux latéraux est capable (B,) ou non (B,) de prendre le relais du tronc ; C, niveau de vigueur élevé : inclinaison plagiotrope tardive, l’émis¬ sion des premiers rameaux latéraux n’affectant pas son développement orthotrope. Il est probable que plusieurs espèces se développent selon des modalités intermédiaires, avec des « unités de croissance » de longueur variable et des phases de repos plus ou moins prolongées selon les conditions écologiques : il s’agirait d’un rythme exogène. Mais chez I. fagifolia, I. sertulifera, I. pilo- sula par exemple, c’est réellement d’un rythme endogène qu’il s’agit ; les U. C. comptent, après la phase d’installation des premiers stades, un nombre à peu près constant de feuilles : (2) 3 pour I. sertu¬ lifera et I. pilosula ; 5-6 pour I. fagifolia. Cependant, chez aucune des espèces étudiées, en serre ou sur Source : MNHN, Paris ODILE PONCY le terrain, on n’a pu observer de marqueurs morphologiques externes de la croissance rythmique : il n’y a en effet ni écailles, ni variation de la longueur des entrenœuds ou des dimensions foliaires... ; et, par conséquent, on ne peut prévoir les modalités de la croissance d’un arbre donné au vu des seules parties âgées des axes, à moins que, dans certains cas, il n’existe des marqueurs anatomiques (cernes) des U. C. Toutefois, les espèces à croissance rythmique sont souvent caractérisées par la couleur rouge des jeu¬ nes feuilles, ce qui rend spectaculaires les jeunes unités de croissance pendant leur phase d’expansion. Le synchronisme des phases de croissance et de repos des différents axes est très net chez I. fagi- folia. La mise en place des rameaux secondaires est également rythmique. Les axes 11 d’une même « série », i.e. émis simultanément, sont axillés par des feuilles produites par une même unité de crois¬ sance de l’axe primaire. Le long de celui-ci, les U. C. ayant produit des axes latéraux plagiotropes alternent avec celles qui n’en portent pas : le rythme qui gouverne la ramification est donc différent du rythme de croissance. 111. La ramification : QUELQUES exemples d’Inga juvéniles, sur le terrain. 1. Présentation de quelques exemples Les figures 25 à 31 schématisent l’architecture de quelques individus juvéniles (jusqu’à 2-3 m de hauteur) appartenant à différentes espèces d’Inga poussant dans des conditions écologiques différentes, principalement en sous-bois et en chablis de la forêt primaire bordant la riv. Arataye (v. aussi p. 100). — En sous-bois de forêt dense. (a) I. auristellae (fig. 25) : il s’agit d’une espèce de petite taille, qui effectue son développement complet en sous-bois. Les individus juvéniles, très abondants, adoptent très tôt le port plagiotrope avec orthotrope, phyllotaxie spiralée (le plus souvent par réorientation secondaire). 3HE transition plagiotrope, phyllotaxie distique. n ° ‘."•.""ï-*> ** 1= 30 cm, 39 sont des Inga, soit près de 5 %. Compte tenu de la grande diversité floristique qui caractérise la forêt primaire, il apparaît que le genre Inga occupe une place importante parmi les grands arbres. Vieillescazes (1979) lui attribue le 4 e coefficient d’abondance après les genres (ou groupes de genres) Eschweilera/Lecythis, Protium, Carapa/Guarea, mais cette estimation porte sur 1 ha seulement. Rappelons que les Inga sont des arbres de moyenne grandeur, dont le diamètre maximal du tronc se situe le plus souvent aux alentours de 30 Cm (le plus grand diamètre relevé étant de 60 cm) : la plupart des tiges, de diamètre compris entre 20 et 30 cm (10 dans 1 ha, d’après Vieillescazes), ont probable¬ ment atteint leur développement maximal et n’apparaissent pas dans notre inventaire. Source : MNHN, Paris 100 ODILE PONCY Au Surinam, les inventaires de Schulz (1960), qui portent sur plusieurs types de forêt, suggè¬ rent des proportions comparables à celles trouvées dans nos parcelles ; bien que les données soient exprimées de façon très différente, on peut citer l’analyse floristique d’une surface totale de 5,6 ha en forêt dense (mais par quadrats dispersés de 10 x 10 m, voir ci-dessous) : les Inga de diamètre supérieur à 25 cm y sont au nombre de 36 environ. Les autres exemples étudiés par cet auteur dans quelques types particuliers de forêt (sur sable blanc ; forêt avec espèce dominante comme Vouacapoua ou Dicorynia) ne permettent pas de déceler de variations quantitatives significatives au niveau du genre Inga. b — Les espèces forestières : Parmi les 39 arbres cités ci-dessus, 30 sont identifiables et ont permis de distinguer les 13 espèces suivantes : /. acrocephala (1/30), I. alata (3/30), I. alba (2/30), I. bourgoni (2/30), I. capitata (1/30), I. cinnamomea (1/30), I. huberi (4/30), I. cf lateriflora (1/30), I. leiocalycina (2/30), I. marginata (5/30), I. pezizifera (3/30), I. rubiginosa (3/30), I. paraensis (2/30). Compte tenu du fait que 9 arbres, soit près du 1/4 des Inga de la surface étudiée, n’ont pu être identifiés, il est probable que d’autres espèces pourraient s’ajouter à cette liste et en particulier, peut- être, celles qui ont été observées à proximité de la parcelle considérée, comme I. acreana, I. edulis, I. splendens. En outre, 3 autres espèces, abondantes dans la parcelle mais de dimensions modestes, n’apparaissent pas dans nos relevés des grands arbres : ce sont I. auristellae, I. disticha, I. stipularis. 2. La forêt secondaire de Cabassou L’étude des Mammifères arboricoles a été effectuée (Charles-Dominique et al., 1981) sur un terrain de 8 ha dans cette forêt secondaire ancienne — les auteurs estiment son âge à environ 80 ans. Parmi les tiges de diamètre > 30 cm, 3 espèces û’Inga ont été recensées : I. pezizifera, de loin la plus abondante, I. alba et /. thibaudiana. En outre, l’inventaire détaillé (toutes les tiges à partir de 3 cm de diam.) effectué par M. F. Prévost (in Charles-Dominique et al., l.c.) indique la présence de 4 autres espèces : I. acrocephala, I. capitata, I. leiocalycina, I. cf. paraensis, I. cf. alata. Il s’agit d’arbres jeunes (3 à 15 cm de diamètre) présents à raison de 1 ou 2 pieds par espèce. A l’intérieur des 8 ha, les 3 espèces alba, pezizifera et thibaudiana totalisent à elles seules 84 arbres de diamètre > 30 cm. En ramenant ce chiffre à 6 ha pour pouvoir le comparer à celui de la forêt de l’Arataye, on obtient 63 arbres contre 39 à l’Arataye sur une surface équivalente. En l’absence de données concernant le nombre total, pour toutes les espèces, des arbres de 0 > 30 cm sur cette par¬ celle de 8 ha, l’importance quantitative du genre Inga n’a pu être évaluée. Mais si l’on admet que les arbres sont plus petits en moyenne en forêt secondaire qu’en forêt primaire, on peut supposer que le nombre de tiges d 'Inga (63), qui atteint presque le double de celui de la forêt primaire de l’Arataye, représente une proportion 2 à 3 fois plus élevée des grands arbres en forêt secondarisée. Cette abon¬ dance contraste avec le nombre réduit (3) d’espèces. 3. La forêt de la piste de Saint-Elie Les données relatives à ce site sont moins précises que pour les deux précédents, car les informa¬ tions floristiques proviennent soit de récoltes éparses en forêt, soit d’inventaires vernaculaires trop peu souvent associés à des herbiers de référence. Parmi les espèces forestières déjà rencontrées en forêt de l’Arataye, on retrouve I. alba (appa¬ remment la plus commune), I. capitata, I. lateriflora, I. leiocalycina, I. pezizifera, I. cf. paraensis, I. rubiginosa. Il faut y ajouter I. fanchoniana, I. tubaeformis ; I. stipularis, qui peut atteindre 20 m de hauteur, est fréquent. D’autres espèces sont certainement présentes, dont la reconnaissance aux alen¬ tours permettrait d’identifier les formes jeunes qui participent à la régénération sur abattis (v. p. 110) : malgré le petit nombre d’espèces relevé jusqu’ici, la diversité floristique est probablement au moins Source : MNHN, Paris INGA DE GUYANE FRANÇAISE 101 aussi importante que dans la forêt de PArataye par exemple. Cependant, il apparaît que l’importance quantitative des grands Inga (0 > 30 cm) est beaucoup plus faible dans cette région que dans la forêt de PArataye. Les relevés du C.T.F.T. qui portent sur 13,4 ha, et ceux de H. Puig sur 2 ha (PuiG, comm. pers., 1980), indiquent qu’ils sont au nombre de 2 à 4 par ha : soit environ 20 pour 6 ha, con¬ tre 39 en forêt de PArataye. 4. Autres localités forestières L’étude des collections guyanaises en herbier apporte quelques précisions et nous conduit à for¬ muler les remarques suivantes : — La forêt prospectée aux abords de PArataye contient presque toutes les espèces actuellement connues, en Guyane française, dans la forêt dense humide. Font exception notamment I. fanchoniana, I. melinonis. — 7. alba, I. capitata, I. edulis, I. leiocalycina, I. marginata, I. pezizifera, ainsi que, en sous- bois, 7. stipulons et 7. auristellae sont les espèces les plus communes de la forêt primaire. 7. alata, I. acrocephala, I. bourgoni, I. splendens et surtout 7. cinnamomea, I. huberi, semblent plus rares. — La plupart de ces espèces atteignent les forêts proches de la côte (île de Cayenne, forêts de la région de St-Laurent, du Bas-Oyapock...) mais certaines semblent en être absentes, comme 7. auristel¬ lae, I. cinnamomea, I. edulis, I. huberi, I. lateriflora. — Certaines espèces semblent habiter exclusivement la haute forêt dense (7. alba, I. cinnamo¬ mea, I. huberi, I. marginata, I. melinonis, I. paraensis, I. rubiginosa), mais beaucoup se rencontrent également dans les milieux ouverts (voir § suiv.). — La forêt de la région NW de Guyane (Mana, Saint-Laurent), souvent considérée comme flo- ristiquement différente de celle du reste du territoire, contient les mêmes espèces forestières à’Inga : une seule n’a pas encore été rencontrée ailleurs en Guyane que dans cette région, 7. heterophylla , qui croît sur sol sableux ; cette espèce semble exiger un substrat xéromorphe ; d’après Schulz (1960 : 175), il s’agit, au Surinam, d’une espèce caractéristique de la « savanna forest ». — A un type de forêt très particulier est associé Inga virgultosa : c’est la forêt sur pente, basse, xérophytique, de transition entre la forêt dense humide et les dômes granitiques ou « inselbergs ». Plu¬ sieurs récoltes attestent sa présence dans les sous-bois de telles forêts, souvent en abondance, tant en Guyane qu’au Surinam et en Amapa. On rencontre aussi cette espèce, sporadiquement, en sous-bois des forêts côtières guyanaises. 7. umbellifera a été également rencontré dans ce type de végétation. — Un très petit nombre d’espèces habituellement non forestières existent çà et là en forêt, dans des conditions particulières : 7. sertulifera, en forêt inondable aux abords des cours d’eau (Maroni, Approuague) ; 7. umbellifera au contraire, parfois rencontré en sous-bois de haute forêt, serait lié dans ces quelques stations à un sol localement soumis à un fort ruissellement : sommet de crête escarpé, affleurement de roche. B. — Les Inga non forestiers. 1. Les Inga de la végétation secondaire rudérale. Les Inga sont communs dans tous les sites fortement perturbés portant une végétation basse, héliophile : bords de route, de terrains d’aviation, villages, végétation dégradée de l’île de Cayenne, cultures. Ils appartiennent à 11 espèces au moins : 7. bracteosa, I. cayennensis, I. ingoides, I. nuda, I. pezizifera, I. pilosula, I. thibaudiana, I. sertulifera, I. speciosa, I. stipulons, I. umbellifera. La plus commune est 7. thibaudiana, suivie en abondance par 7. ingoides et 7. cayennensis ; plus rares sont 7. pilosula à fleurs jaune vif, et surtout 7. nuda, I. speciosa. Ces espèces ont, par ailleurs, des tendances écologiques très différentes. Ainsi 7. nuda, I. pilo¬ sula, I. sertulifera et 7. thibaudiana sont par ailleurs ripicoles. 7. ingoides est un composant de la forêt Source : MNHN, Paris 102 ODILE PONCY acA-tana ... acAociphaia. au/Uitztiae alba . cUata . bowigoni. . btoicteoM . capctata cayesintjxiii CAJinamomta diiticha .. ianchorUana heXesiophytta hubvu. • • ■ ■ ingo-idti .. teiocaZycina iraiginata mMine/ùana mztÀnonii . nobltu ... pa iaejua, . pez-tzÀ&eAa pitoiitfa .. 'U.ca/ido'mm 'lubigùio&a iVrfuLiiena specXosa .. splendzns . stipuZaA-is . tlubaucUana tubaefa'unii umbetU-iz/ia v-üiguttoia . Zones défrichées Us TABLEAU 2 - Ecologie des espèc (+) présence sporadique Source : MNHN, Paris INGA DE GUYANE FRANÇAISE 103 basse côtière sur sables (région de Mana notamment) ; I. umbellifera semble préférer les substrats rocheux. I. pezizifera et I. stipulons sont les seules espèces communes avec la flore forestière, l a pre¬ mière, accidentellement ripicole, est surtout un grand arbre forestier ; la deuxième, qui habite aussi le sous-bois de la haute forêt, montre ainsi une grande tolérance vis-à-vis des conditions d’éclairement, mais sa présence en végétation secondaire est peu fréquente. I. cayennensis semblait exclusivement rude raie en Guyane, mais son amplitude écologique reste mal connue : au Surinam et au Parâ, elle existe aussi en « forêt mésophytique » ; la récolte, dans la forêt de la piste de Saint-Elie, de jeunes plants appartenant à cette espèce, indique qu’elle existe, au moins accidentellement, dans certains sites de forêt ; mais elle n’a été observée ni parmi les Inga pionniers ni parmi les arbres adultes. Ces considérations sont valables pour la végétation secondaire de la bande côtière, la plus impor¬ tante. A l’intérieur du pays, I. cayennensis, I. ingoides semblent absentes de la végétation rudérale. Pat contre, /. stipulons est présent dans la région de la piste de Saint-Elie, mais absent de la végéta tion secondaire côtière ; et I. bracteosa, à floraison spectaculaire, pousse aux bords des chemins à Trois-Sauts et à Saül, mais n’atteint pas la côte. Remarquons enfin que /. bracteosa, I. cayennensis, I. ingoides ne sont pas ripicoles (v. § suiv.). 2. Les Inga ripicoles La moitié environ des espèces guyanaises sont ripicoles. Très peu d’entre elles semblent habiter exclusivement les rives des cours d’eau : ce sont I. meissneriana, /. nobilis, I. ricardorum. Les autres espèces se développent tant au bord des fleuves que dans d’autres milieux, et peuvent ainsi être : (a) ripicoles et forestières : ainsi, parmi les espèces forestières citées plus haut, /. alatu, I. acro- cephala, I. auristellae, I. bourgoni, I. capitata, I. disticha, /. edulis, L leiocalycina, /. pezizifera, I. splendens. Pour la plupart d’entre elles, la situation ripicole semble accidentelle et rare (et surprenante pour des espèces dont le développement est considéré comme sciaphile (cf. p. 110) comme I. auristellae, I. capitata) ; mais I. bourgoni, /. leiocalycina, I. splendens sont plus fréquents sur les rives ; (b) ripicoles et de végétation non forestière (secondarisée ou non) : ce sont /. nuda, /. pilosula, I. sertulifera, I. speciosa, I. thibaudiana, I. umbellifera. I. sertulifera est essentiellement ripicole, tandis que I. umbellifera ne l’est qu'exceptionnellement. Les Inga ripicoles les plus abondants sont I. nobilis, I. thibaudiana, I. sertulifera. 3. Présence du genre Inga dans quelques biotopes naturels en région côtière. — Forêt-galerie en savane et lisière forêt-savane : curieusement, on n’a pas trouvé à.'Inga en forêt-galerie, et pratiquement pas non plus le long des lisières forêt-savane (rares exemplaires de I. thi¬ baudiana), bien que ces lisières aient été visitées à plusieurs reprises, entre Cayenne et Iracoubo (1978). Les collections d’herbiers guyanais n’ont fourni qu’un seul exemple, attribué à I. sertulifera (Benoist s.n.). — Ilôts forestiers en savane : dans ces parcelles de forêt développées çà et là en savane autour d’affleurements rocheux, on trouve I. umbellifera et I. pilosula. — Savane : exceptionnellement, /. pilosula a été observé en savane à Byrsonima, où il adopte d’ailleurs le même port que ces derniers et y fructifie, malgré l'action du feu. — Forêt claire sur sable : on y rencontre fréquentent I. ingoides, I. thibaudiana et I. hete- rophylla ; le cas de ce dernier, strictement localisé dans la région de Saint-Laurent/Mana, a été évoqué plus haut. Source : MNHN, Paris 104 ODILE PONCY C. — Discussion, conclusions. 11 faut insister sur l’importance, quantitative et qualitative, du genre Inga en forêt primaire dense humide : on peut estimer à une vingtaine, soit plus de la moitié des espèces actuellement recensées jusqu’ici en Guyane française, celles qui entrent dans la composition floristique de cette forêt. Evidem¬ ment l’existence, généralement admise aujourd’hui, d’une répartition « en mosaïque » des espèces en forêt tropicale ne permet pas d’extrapoler, à partir de l’analyse d’une surface restreinte, à la composi¬ tion floristique de toute la forêt. Toutefois la méthode d’analyse de Schulz (1960 : 167 ; nombreuses placettes de surface réduite, dispersées sur une grande surface en forêt) atténue largement le risque d’erreur : elle a donné, pour le genre Inga, des résultats d’un ordre de grandeur comparable à ceux obtenus dans la forêt de l’Arataye. De Granville (1976) a également remarqué l’abondance des Inga en forêt guyanaise (près des rives du grand Inini), surtout sur terrain bien drainé (plateau et haut de pente ; « fiat » non inondable) ; dans l’une des parcelles, le 2 e coefficient d’abondance leur est attribué. On a remarqué cependant que la forêt de la piste de St-Elie est beaucoup moins riche, en nombre d’espèces et en nombre de tiges ; des différences d’ordre édaphique interviennent sans doute entre cette région et celle de l’Arataye par exemple : l’une est installée sur un substrat schisteux, tandis que l’autre couvre le socle granitique. Quoi qu’il en soit, le nombre élevé d’espèces comptées sur une surface réduite, et confirmé dans diverses autres localités guyanaises, indique une diversification importante du genre Inga en milieu forestier. Ce nombre ne peut qu’augmenter grâce aux progrès à venir de l’inven¬ taire floristique, encore très insuffisant en Guyane. C’est dire que la « réputation » des Inga, considérés habituellement comme appartenant aux végétations de milieux ouverts, n’est pas fondée. Si cette erreur a pour cause la méconnaissance de la floristique plus importante pour la haute forêt que pour les milieux ouverts, on peut penser que nombreux sont les taxons touchés par une telle inexactitude. La comparaison, quantitative et qualitative, des populations à.’Inga dans deux forêts très diffé¬ rentes (Arataye, 6 ha ; Cabassou, 8 ha) apporte un exemple floristique précis de l’appauvrissement flo¬ ristique de la forêt secondarisée qui, en corollaire, privilégie quantitativement un petit nombre d’espèces (dominance numérique très marquée de I. pezizifera, à Cabassou). La différence floristique entre la forêt et les divers milieux ouverts non ripicoles est nette. I. pezizifera est la seule espèce commune à ces deux types de biotopes. Cette ségrégation est d’autant plus remarquable que la plupart des espèces forestières sont pionnières et se développent donc en condition héliophile (voir aussi p. 111). L’abondance, prévisible, des espèces ripicoles se confirme, mais : (1) rares sont les espèces exclu¬ sivement ripicoles ; (2) la moitié des espèces guyanaises ne sont pas ripicoles ; (3) sont éventuellement ripicoles, les espèces appartenant tant à la flore de haute forêt qu’à celle de la végétation ouverte, secondaire ou non. Le développement des jeunes plants de la majorité des espèces est héliophile, aussi il n’est pas surprenant de les rencontrer au bord des cours d’eau. L’absence de nombreuses espèces dans la végétation ripicole ne peut s’expliquer par le rôle de l’éclairement que pour les quelques espèces sciaphiles, encore que I. auristellae et I. capitata semblent s’accommoder, éventuellement, d’un milieu ouvert. Le facteur limitant est plutôt, pour les'espèces non ripicoles, la forte hydromorphie du sol rive¬ rain. Malheureusement, en forêt, les données pédologiques manquent, mais il est probable que les espè¬ ces à la fois forestières et ripicoles se développent, en forêt, dans des stations à sol mal drainé plus ou moins inondable ; certaines ont sans doute simplement peu d’exigences édaphiques. En végétation côtière, il est plus facile de mettre en relation, par exemple, l’écologie non ripicole de I. ingoides et I. cayennensis avec les sols qui les accueillent, riches en sables et excessivement drainés. Cette analyse succincte, encore imprécise puisque beaucoup d’espèce restent mal connues, montre cependant que, si très peu d’espèces sont exclusives de milieux particuliers (ex. I. virgultosa), la plupart sont adaptées à des milieux variés dans lesquels elles cohabitent. C’est le cas pour 13 espèces au moins, Source : MNHN, Paris INCA DE GUYANE FRANÇAISE 105 qui vivent côte à côte sur notre parcelle de 6 ha en forêt primaire de l’Arataye. Une telle cohabitation d’espèces très affines dans un milieu homogène est difficile à expliquer ; elle pourrait être liée à la phé- nologie, ou à la biologie florale (v. ci-dessous) ; c’est peu probable, en tout cas, pour les espèces de la section Bourgonia (5 espèces de cette section sont présentes en forêt de l’Arataye), dont les fleurs sont presque semblables, par leur forme et leurs dimensions. Toutefois, il apparaît que des espèces morphologiquement très voisines occupent parfois des bio¬ topes séparés. Ainsi les 3 espèces guyanaises de la série Inga Leon (v. p. 64) : — I. edulis vit en haute forêt, et compte parmi les espèces pionnières lors du recrû forestier en forêt primaire (p. 110) ; — I. ingoides est banal en forêt basse côtière sur sol sableux, et fréquent également dans la végé¬ tation secondaire rudérale de la région côtière ; — I. meissneriana est exclusivement ripicole. Un autre cas de vicariance écologique est illustré par deux espèces très proches (leurs fruits en particulier sont semblables, jaune vif à maturité) de la section Leptinga : I. sertulifera, très fréquem¬ ment ripicole, est associée aux sols fortement hydromorphes, tandis que I. umbellifera préfère les con¬ ditions xériques d’un substrat rocheux. II. La RÉGÉNATION NATURELLE DES INCA ET LEUR RÔLE DANS LE RECRÛ FORESTIER A. — Remarques sur la phénologie et la biologie florale. En ce qui concerne la phénologie des Inga en Guyane, les dates de récoltes relevées sur les spéci¬ mens d’herbier indiquent que quelques espèces fleurissent plutôt pendant la saison sèche (septembre à décembre) ; mais la plupart d’entre elles ont une floraison très irrégulière. La production de fruits, fré¬ quente de février à avril, explique l’idée répandue selon laquelle la fructification optimale des Inga a lieu au moment de petit été de mars, mais pour beaucoup d’espèces, la fructification est irrégulière et répartie sur toute l’année. Les données concernant la pollinisation sont rares pour le genre Inga. Cependant, la cohabita¬ tion, dans un milieu aussi homogène que la forêt guyanaise, d’espèces dont les fleurs se ressemblent fortement par la taille et la forme, laisse supposer qu’il y aurait beaucoup à attendre de l’étude des mécanismes de la pollinisation (horaires, spécificité des pollinisateurs). Winkler (1907) signale que I. edulis est visité par des papillons Sphingidés du genre Nephele : Silberbauer-Gottsberger & Gotts- berger (1975) ont décrit la pollinisation de I. thibaudiana par les Sphingidés, pendant les premières heures de la nuit ; et au Panama, les fleurs de /. heterophylla seraient visitées par des papillons diurnes (d’après Gentry, comm. pers., 1979). Au sud du Brésil, les grosses fleurs de I. sessilis sont, d’après Vogel (1968), chéiroptérophiles. Cet auteur suggère qu’il s’agit d’une exception au sein d’un genre par ailleurs essentiellement entomophile. L’ornithophilie existe aussi chez les Inga, au moins chez une espèce : au Venezuela, J. J. Petter a photographié la visite des fleurs de I. sp. (cf. ingoides ou vera) par un colibri (in Ligabue Ed., « Alto Orinoco, Indios e ambiente », 1978) ; en Guyane, les fleurs de I. ingoides seraient visitées successivement par les colibris — en fin d’après-midi — et par de très peti¬ tes chauve-souris — à la tombée de la nuit — (P. Charles-Dominique, comm. pers., 1979). L’étude actuellement la plus précise de la biologie florale des Inga est celle de Koptur (1983), qui porte sur 7 espèces costariciennes et met en évidence d’une part des différences phénologiques au niveau des dates, mais surtout des horaires de floraison ; d’autre part une importante diversification de la pollinisation, essentiellement entomophile (19 familles d’insectes dont 11 de papillons), mais aussi ornithophile (Tro- chilidae) et chéiroptérophile (rare). Source : MNHN, Paris 106 ODILE PONCY B. — Biologie de la dissémination des graines et de la germination. 1. La dissémination zoochore Nos observations personnelles en forêt guyanaise, largement complétées par les résultats de l’équipe de P. Charles-Dominique (Ch.-Dominique et al., 1981) et les explications que celui-ci m’a aimablement communiquées, permettent de préciser un peu les modalités de la dissémination des graines des Inga. Borzi (1903) a observé et décrit, chez I. feuillei, l’ouverture des fruits mûrs, encore en place dans l’arbre, par les Oiseaux qui sont friands de la pulpe. La gousse des Inga est indéhiscente (v. p. 15) ; de plus chez les espèces guyanaises que nous avons observées, elle ne possède généralement pas de mécanisme d’abscission : en effet, on ne trouve pas en forêt de gousse mûre saine au pied des Inga fructifiés, mais seulement des fruits immatures ou parasités, ou des débris (toutefois, fait exception I. fanchoniana, dont les gousses mûres ont été récoltées au pied de l’arbre porteur et montraient des traces de Rongeurs terrestres : Prévost, comm. pers., 1981). En milieu ouvert (ripicole, végétation secondaire), on peut observer fréquemment les gousses vides, séchées, encore en place sur l’arbre. Les Vertébrés arboricoles frugivores (Mammifères, Oiseaux) sont les principaux disséminateurs des graines : attirés par la. pulpe sucrée qu’ils consomment, ils ouvrent les gousses encore en place dans l’arbre. La consommation au sol et la dissémination par les animaux terrestres sont sans doute très limitées. Le rôle des animaux diffère selon qu’ils consomment les fruits immatures ou mûrs, qu’ils ava¬ lent la graine complète ou seulement la pulpe. Ainsi certains Rongeurs ( Coendou, Echimys ) consom¬ ment la graine entière en la détruisant ; quant aux Oiseaux (Perroquets), ils ne consomment pas les embryons, mais en prélevant la pulpe, ils en détruisent la plus grande partie avant de les rejeter. La dissémination des graines aptes à germer est alors possible, mais accidentelle et peu efficace. Les vrais disséminateurs sont les Singes, Marsupiaux, Ecureuils, Kinkajous. L’efficacité de la dispersion dépend de leur comportement alimentaire : certains (dont les Ecureuils) sucent la pulpe et rejettent le « noyau ». Leur action se limite à libérer la graine du fruit et à la semer au pied de l’arbre qui l’a pro¬ duite, ou très près de celui-ci : la dispersion est limitée dans l’espace, et donc peu efficace. D’autres animaux ingèrent la graine complète et la rejettent dans leurs excréments, laissant l’embryon intact. Ils effectuent donc un transport efficace des semences loin de l’arbre porteur. Le Kinkajou en particulier, qui effectue de grands déplacements, est considéré (Charles-Dominique et al., 1981) comme un excel¬ lent disperseur pour les graines de nombreuses espèces arborescentes guyanaises. Selon les cas, l’embryon se trouve libéré soit nu, soit enveloppé de la partie interne, non pul¬ peuse, du tégument. En tout cas, c’est un embryon dépourvu de toute protection qui atteint le sol. Remarque : les fruits de I. ingoides s’ouvrent parfois, partiellement, dans l’arbre. Chez cette espèce comme chez I. edulis, on trouve des plantules en abondance sous l’arbre fructifié. La dispersion par les animaux ne s’effectuerait donc pas, ou mal. Il est probable que ceux-ci consomment les pulpes, mais sans ingérer les embryons qu’ils rejettent sous l’arbre. Cela s’explique mal : il est possible que la richesse particulière des cotylédons en tannins, «par exemple, ne suffise à exclure que la graine soit ingé¬ rée. Ainsi, la production d’une pulpe comestible par le tégument de la graine confère réellement à ce tégument le rôle écologique d’un arille. La pulpe, partie comestible d’un fruit parfaitement adapté à la zoochorie, se développe, à la fin de maturation du fruit et de la graine, alors que l’embryon viable devient apte à germer. Les animaux arboricoles qui consomment les graines agissent soit comme « des¬ tructeurs », soit comme « disperseurs » efficaces des semences. De telles caractéristiques sont, d’après P. Charles-Dominique, communes à différentes espèces forestières arborescentes dont la phénologie, de type irrégulier (dans le temps et en abondance), compense l’absence de protection, morphologique ou chimique, contre l’action des prédateurs destructeurs des fruits immatures. Source : MNHN, Paris INGA DE GUYANE FRANÇAISE 107 2. La germination a. Délai et taux de germination : la germination a été observée sur le terrain et en serre (cf. p. 17 et Poncy, 1984) ; elle a lieu généralement immédiatement après le semis, sans période de latence ; la levée s’effectue dans un délai de 5 jours à 3 semaines, comme le montre la fig. 34 : les espèces qui apparaissent sur la partie gauche du graphique ont le délai de germination le plus court, avec le taux le plus élevé et l’échelonnement des levées le plus faible. Pour plusieurs autres espèces dont les semis ont été effectués directement sur le terrain ( I. alata, I. ingoides, /. nobilis, I. splendens, I. thi- baudiana), les résultats n’apparaissent pas sur le graphique mais leurs germinations ont les mêmes caractéristiques ; leurs graines, provenant de fruits récoltés sur l’arbre, et semées dans un délai de 24 h après la récolte, ont germé immédiatement et en totalité ; après une semaine, s’amorçait l’épanouisse¬ ment des deux premières feuilles. Pour les autres espèces, les levées s’échelonnent entre 2 et 4 semaines avec un taux inférieur à 50 %. I. sertulifera a montré le délai de germination le plus long : 3 à 6 semai¬ nes, avec un taux inférieur à 30 %, et l’échelonnement le plus grand. Dans les conditions optimales, la germination semble donc avoir lieu dans les deux semaines qui suivent le semis. Pour les lots de graines dépassant ce délai (excepté I. alba ), le pouvoir germinatif est supposé déjà altéré. Dans ce cas, les grai¬ nes peuvent encore germer dans un délai de 3 à 6 semaines. Mais, en général, si la germination n’a pas lieu, la mort des embryons est constatée dans le mois qui suit le semis. De telles caractéristiques de la germination paraissent banales dans un milieu aussi constamment favorable que la forêt équatoriale. Les données manquent en région néotropicale. Mais, en effet, De La Mensbruge (1966) indique que « de nombreuses essences » d’Afrique équatoriale ont une germina¬ tion « très rapide » (moins de 2 semaines) ou « rapide » (2 à 6 semaines). En Malaisie, une estimation Source : MNHN, Paris ODILE PONCY de Ng (1978) porte sur 180 espèces d’arbres de la forêt dense : 65 % d’entre elles ont des graines capa¬ bles de germer dans un délai de 12 semaines et sont qualifiées d’espèces à germination rapide. b. Viabilité des graines : l’altération du pouvoir germinatif est fonction du temps écoulé entre la récolte du fruit mûr et le semis, mais aussi des conditions de conservation des fruits. Elle est très pré¬ coce, et s’amorce sans doute dès la maturité complète du fruit (v. § d). Ainsi, parmi les lots de graines que nous avons semées : — celles de I. sertulifera proviennent de fruits mûrs récoltés sur l’arbre (F. Hallé, févr. 1978), parfaitement sains et dont le semis a été effectué 17 jours après la récolté ; taux de germination : 25 % ; — celles de I. fagifolia ont été semées 8 jours après la récolte (au sol) de gousses fraîchement tombées ; taux de germination : 60 % ; — celles de I. pilosula (Pérou) proviennent de fruits également récoltés à terre 18 à 20 jours avant la date du semis ; taux inférieur à 50 %. c. Causes de la perte du pouvoir germinatif : il est probable que la vigueur de l’embryon s’altère, par asphyxie, s’il n’est pas libéré rapidement de la gousse. Mais la dessiccation semble la cause principale de la perte du pouvoir germinatif. Quelques jours après la récolte la pulpe brunit et se dessè¬ che, même dans le fruit encore fermé. Une centaine de graines reçues de Itabuna/Bahia, débarrassées de leur pulpe et séchées, ont pourri rapidement après le semis. Ceci appelle une remarque au sujet de la « résistance » de l’embryon : Borzi (1903) a démontré que l’embryon de I. feuillei, séparé du tégument lorsque la graine est mûre, a acquis, par transfert aux cotylédons du rôle protecteur du tégument manquant, une bonne capacité de résistance notamment vis- à-vis de la dessiccation (cotylédons à cuticule épaisse, à épiderme dépourvu de stomate ; axe embryon¬ naire fortement pubescent). Il nous semble au contraire que l’embryon soit incapable de supporter la déshydratation, et que l’adaptation soit dans le sens de la présence autour de l’embryon d’une enve¬ loppe lui assurant une humidité constante. La pulpe aurait un rôle important dans la protection de l’embryon mûr avant la dissémination, en assurant par sa forte capacité de rétention d’eau une humi¬ dité importante à l’intérieur de la gousse. Si la pulpe se dessèche, l’embryon ne survit pas longtemps. L’aspect de la pulpe, son état d’hydratation, est un bon critère de la fraîcheur du fruit et de la viabi¬ lité des graines. Cette dernière, altérée lorsque le délai augmente entre la chute (ou la cueillette) du fruit mûr et le début de la germination, l’est d’autant plus que le fruit est soumis à la dessiccation. Au Bré¬ sil, Cavalcante (1972, 1976), Maixner & Ferreira (1978) ont également attiré l’attention sur la vul¬ nérabilité à la sécheresse des graines de Inga et sur la nécessité de les semer rapidement. d. Autres remarques : — Désynchronisation entre maturité du fruit et maturité de la graine. Les considérations précé¬ dentes ne prennent pas en compte le stade de maturité de la graine, donc le moment où elle est apte à germer : deux lots de graines de I. nobilis, prélevés l’un dans des fruits très mûrs, l’autre dans des fruits encore verts, ont germé de la même façon. Les graines de I. splendens ont levé avec vigueur dès le semis, alors que les fruits n’étaient pas mûrs pour la consommation de la pulpe, encore très peu développée ; l’observation de nombreux fruits d’autres espèces montre que le développement de la pulpe est tardif et correspond au stade ultime de maturation de la graine, mais que l’embryon est apte à germer avant ce stade. La faible viabilité des graines après la dissémination serait ainsi compensée par leur maturité plus précoce que celle du fruit. Cette désynchronisation, probablement très fréquente chez les arbres de forêt tropicale humide, paraît adaptée à la déhiscence par les animaux arboricoles (et terrestres) qui rend très aléatoire le moment de l’ouverture du fruit. Par exemple, les perroquets con¬ somment des fruits encore immatures, mais dont les graines sont déjà aptes à germer, comme nous avons pu le contaster en semant des graines de /. alata rejetées par ces Oiseaux. — « Viviparité » : Borzi (1903) avait remarqué qu’en l’absence d’ouverture du fruit par les oiseaux, les graines de I. feuillei commencent à germer à l’intérieur de la gousse encore en place sur l’arbre : la pression exercée par la germination provoquerait la déhiscence de la gousse et la chute des plantules qui pourraient ainsi s’enraciner. Leôn (1966) et Ducke (1969) mentionnent également cette particularité chez les Inga d’Amérique Centrale. Nous l’avons aussi observée chez quelques espèces Source : MNHN, Paris INGA DE GUYANE FRANÇAISE 109 guyanaises (/. sertulifera, I. nobilis, I. pilosula, I. edulis, I. fanchoniana) : la radicule atteint 1 à 5 cm, et s’insinue entre la pulpe et le péricarpe ; les cotylédons restent apprimés et la gemmule n’est pas du tout développée. La proportion de graines « vivipares », lorsqu’elles existent dans un lot de fruits, est de l’ordre de 1 à 5 %, donc très inférieure à celle des embryons qui moisissent ou se dessèchent. On peut supposer qu’une telle tendance existe chez la plupart des espèces d ’Inga. Mais, contrairement à ce que semble suggérer Leôn (1966 : 271 ; « once the embryo reaches the ground the already advanced germination accelerates... »), il ne s’agit pas de la stratégie habituelle et optimale de germination. Cette germination « précoce », qu’on ne saurait comparer à la viviparité des Rhizophora, semble plutôt se produire de façon accidentelle lorsque le fruit n’a pas été ouvert par les prédateurs, et permettre aux embryons particulièrement vigoureux de continuer leur développement dans un fruit resté clos. Il est peu probable qu’elle se produise avant l’abscission du fruit ; cela n’a pas été observé sur le terrain, même dans les fruits d’un I. ingoides pourtant très mûrs et partiellement fendus. D’autre part, la survie de la graine n’en serait pas favorisée. — Influence de la prédation sur le taux de germination : si l’on admet que les graines dont le pouvoir germinatif n’est pas altéré germent à près de 100 %, on doit remettre en question l’importance du rôle de la prédation sur le pouvoir germinatif. Hladik & Hladik (1969), ayant analysé l’effet du transit des graines de nombreuses espèces forestières dans le système digestif des Singes, ont conclu que dans de nombreux cas (dont celui des Inga) la levée des graines est nettement favorisée par la préda¬ tion. Cependant nos semis, bien qu’aucun n’ait subi un tel traitement, réalisent un taux de germination maximal. SENESCENT Dissémination Pouvoir germinatif [AbscissionJ Arboricoles [Terrestres] (Barochore) Optimal Décroissant "Pré-germination" Echelle de temps approximative : *-1 = 1 semaine Fig. 35. — Maturation et viabilité des graines. Conclusion : Les graines des Inga guyanais, totalement dépourvues de dormance, perdent rapide¬ ment leur pouvoir germinatif. Les graines disséminées en forêt par des animaux arboricoles qui ne fré¬ quentent pas les zones défrichées, y germent immédiatement, dans les conditions sciaphiles du sous- bois, donnant naissance aux jeunes plants orthotropes décrits au chapitre précédent. Les caractéristiques probables de la stratégie de la germination sont résumées par le diagramme de la fig. 35. (L’unité de temps est approximative : la durée de la phase de pouvoir germinatif optimal ne pourra être précisée qu’après des observations plus nombreuses et plus rigoureuses). Source : MNHN , Paris 110 ODILE PONCY C. — Le développement du jeune plant. Nos observations sur le terrain ont permis de mettre en évidence la présence des formes juvéniles de plusieurs espèces d’Inga, tant en sous-bois de forêt structurée que dans des milieux ouverts (chablis, abattis...). Nous ne présenterons pas ici l’analyse détaillée des relevés effectués, dont le plus important porte sur 4 hectares en forêt de l’Arataye (cf. Maury & Poncy, sous presse), ni la comparaison avec les données recueillies (personnellement ou par d’autres auteurs) sur d’autres sites (tableau II, p. 102). On présentera seulement, brièvement, les données qu’elle fournit pour tenter de décrire les modalités d’implantation des Inga en forêt et leur rôle dans le recrû forestier. 1. Structure du peuplement d’Inga en forêt On trouve en forêt les formes juvéniles de la plupart des espèces signalées dans les inventaires des grands arbres (v. p. 99). Les très jeunes plants (jusqu’à 50 cm de hauteur) notamment ceux de I. pezizifera, I. marginata, I. huberi (en forêt de l’Arataye), I. stipularis, I. capitata, sont abondants (plus de 100 plants de 0 < 1 cm par hectare) ; ceux de I. leiocalycina, I. paraensis, I. acrocephala, I. rubi- ginosa, I. splendens, I. bourgoni... sont moins nombreux (moins de 100 / ha). Globalement les Inga, répartis dans toutes les classes de diamètre, présentent une distribution d’essences d’ombre (Rollet, 1974). C’est aussi le cas de quelques espèces (/. capitala, I. huberi, I. pezizifera : fig. 36), dont on peut dire qu’elles régénèrent bien en forêt ; d’autres, comme I. rubiginosa, sont présentes aux stades juvéniles (0 < 1 cm), et dans les classes de 0 > 10 cm, mais manquent entre les deux ; 4 espèces n’ont été rencontrées qu’à l’état de plantules ou de très jeunes plants (jusqu’à 50 cm) et sont absentes des classes 1 à 15 cm : ce sont I. alba, I. bracteosa, I. edulis, I. thibaudiana. 2. Les Inga pionniers dans les zones défrichées Dans diverses zones de forêt perturbée ou défrichée (chablis naturels ou artificiels, âgés de 1 an ou plus ; abattis, brûlés ou non brûlés ; exploitation forestière), on reconnaît une quinzaine d’espèces, toutes déjà rencontrées en forêt non perturbée, au moins à l’état de jeune plant. Les plus fréquentes sont I. pezizifera, I. alba, I. edulis, I. alata, I. stipularis, I. marginata, I. thibaudiana. N’ont jamais été observés dans ces milieux ouverts I. auristellae, I. capitata, I. huberi. D. — Discussion : implantation des Inga en forêt et importance des Inga pionniers. L’étude morphologique comparée des Inga juvéniles (chap. III) a permis de montrer comment, grâce à la souplesse du modèle de Troll, les jeunes Inga peuvent s’adapter à des conditions écologi¬ ques — et notamment d’intensité lumineuse — variées. On pourrait distinguer plusieurs stratégies, en fonction de seuils croissants pour l’énergie lumi¬ neuse : (1) Développement complet en sous-bois, pour les espèces sciaphiles (/. auristellae, I. capitata, I. huberi) qui régénèrent en sous-bois dans des conditions d’éclairement faible. (2) Développement possible, indifféremment en sous-bois ou en chablis, avec des modalités de croissance variables selon les cas, évoquées au chapitre précédent : ce serait le cas de nombreuses espè¬ ces forestières (/. alata, I. leiocalycina, I. marginata, I. pezizifera, I. splendens, I. stipularis...). Source : MNHN, Paris INGA DE GUYANE FRANÇAISE 111 (3) Croissance bloquée à un stade très jeune en sous-bois : c’est le cas pour I. alba, I. edulis, I. thibaudiana, qui exigent un éclairement fort pour poursuivre leur développement, mais sont capables de survivre en attendant que les conditions deviennent favorables. Ces trois stratégies illustrent des mécanismes adaptatifs qu’il nous paraît intéressant de commen¬ ter : 1. Adaptations aux conditions sciaphiles — L’étude morphologique montre que la phase orthotrope, monocaule ou peu ramifiée, est pro¬ longée en sous-bois : cette aptitude donne aux espèces des groupes (1) et (2) la possibilité de se dévelop¬ per en sous-bois, avec de faibles niveaux d’énergie disponible et à un rythme plus lent qu’en pleine lumière. Elles auraient alors le comportement des « nomades sciaphiles » d’OLDEMAN, profitant des marges du chablis ou de trouées plus claires en forêt (Hallê et al., 1978 : 383), ou celui des espèces qui, selon Oldeman (1974), « s’insinuent graduellement dans une voûte légèrement endommagée » et « réagissent vigoureusement à de très petites améliorations des conditions écologiques ». C’est aussi, en Côte d’ivoire, le cas de Turraeanthus africana dont la stratégie de régénération 1 est décrite par Alexan¬ dre (1977) comme de type « forêt-forêt » (mais cette espèce, contrairement aux Inga, ne supporte pas l’éclairement fort). I. stipulons semble être un exemple de cette stratégie : cet arbre a le plus souvent des dimensions modestes mais peut atteindre 15 à 20 m, et ses formes jeunes sont souvent, en sous- bois, des rejets munis de racines adventives nombreuses émises par le tronc couché (voir aussi la fig. 26-c, p. 90). Ceci pourrait être le signe que les plants de cette espèce supportent mal, au-delà d’une cer¬ taine hauteur, les conditions sciaphiles et s’affaissent facilement. Les rejets qu’ils émettent pourront se développer si une trouée de lumière survient. — Survie du jeune plant en sous-bois : les espèces du groupe (3) ont la possibilité de survivre, probablement longtemps, en milieu favorable à leur germination mais pas à leur croissance : ceci com¬ pense le handicap dû à la totale incapacité de dormance de la graine et à la faible durée de son pouvoir germinatif : la dormance a lieu au stade plantule, et non à celui de la graine. Cette stratégie est aussi celle d’autres arbres de la forêt dense, comme de nombreuses Dipterocarpaceae d’Asie du Sud-Est dont les graines sont viables pendant 3 semaines, alors que les plantules peuvent survivre 3 ans à l’ombre (G. Maury, comm. pers.) ; en côte d’ivoire, Alexandre (1977) estime même à 40 ans l’âge des plants de 2 m de Turraeanthus africana. 2. Le comportement pionnier Toutes les espèces des groupes (2) et (3) voient leur développement grandement favorisé par la brusque augmentation de l’éclairement et de la température. Leur qualité de pionniers viendrait de ce que, dans ces conditions héliophiles, leur vigueur nouvelle s’exprime par l’émission d’axes plagiotropes multiples, correspondant à la réalisation du modèle de Troll. On précisera quel peut être leur rôle dans le recrû forestier et dans quelles conditions ils sont efficaces : (a) Différentes études de la colonisation des milieux forestiers perturbés portent sur des espèces dont la germination est favorisée par l’éclairement fort et dont les graines, capables de dormance, sont présentes dans le sol forestier avant la friche (Keay, 1960 ; Guevara & Gomez-Pompa, 1972 ; Cheke et al., 1979), à moins qu’elles ne possèdent un mode de dissémination favorisant leur accès rapide dans les zones perturbées (Whitmore, 1975). Les Inga, dont la germination est sciaphile et qui sont présents dans le sous-bois à l’état de plantules ou de jeunes plants, constituent un exemple des espèces « classi¬ quement considérées comme appartenant à la grande forêt, (...) germant sous forêt bien structurée, mais exigeant un apport d’énergie assez fort, sur chablis, pour réaliser l’expansion qui leur permet d’édifier une voûte » (Oldeman, 1974). Schulz (1960) avait décrit le comportement de l’Angélique ( Dicorynia guianensis), dont le nombre de plantules en sous-bois est élevé, en montrant, pour cette espèce, « the strongly stimulating influence which illumination exercises on the incrément ». (b) L’efficacité des Inga en tant que pionniers est fonction de plusieurs critères : Source : MNHN, Paris 112 ODILE PONCY — vigueur individuelle de chaque espèce : I. edulis, I. alata, I. pezizifera, I. rubiginosa, I. acro- cephala sont particulièrement vigoureuses. Les pieds de ces espèces peuvent atteindre 4 à 5 m de hau¬ teur en 1 an (chablis de l’Arataye), 7 à 13 m en 4 ans (abattis à Trois-Sauts, Lescure, 1978). Ils se ramifient abondamment et produisent de grandes feuilles, assurant un bon recouvrement horizontal. I. alba, I. marginata, I. stipulons... ont un développement moins spectaculaire ; — composition floristique du terrain, avant et après la coupe : en effet il semble que si les Inga participant aux recrûs appartiennent aux espèces les moins compétitives, ils seront concurrencés et éli¬ minés par d’autres pionniers. D’autre part, dans les recrûs riches en Inga, ceux-ci rivalisent avec certai¬ nes autres espèces pionnières (Solanaceae, Cordia, Laetia...) mais les Cecropia sont rares, ou absents. Par contre, quand les Cecropia dominent (cf. exploitation forestière « ARBOCEL », piste de St-Elie ; Maury, 1979 ; de Foresta, 1981), ils surciment rapidement les Inga qui sont éliminés du recrû ; — degré de destruction de la zone perturbée : la croissance des Inga est très lente au cours de la première phase orthotrope et ceci est incompatible avec la colonisation rapide du milieu telle que l’effectuent les pionniers véritables. Il faut donc supposer que seuls seront compétitifs dans l’occupation d’un milieu défriché les plants ayant déjà effectué, en sous-bois, les premiers stades lents du développe¬ ment et pour lesquels l’apport soudain d’énergie lumineuse est l’occasion d’acquérir un comportement pionnier, et non d’être détruits, comme c’est le cas des espèces sciaphiles dans de telles conditions. On comprend alors que les Inga seront plus efficaces dans les chablis où la destruction n’est pas trop forte, ou dans les abattis imparfaitement défrichés, comme celui qu’a décrit Haxaire (1976) à Trois-Sauts. Par contre, dans les coupes « à blanc » comme celle d’« ARBOCEL » (voir ci-dessus) et dans les abat¬ tis fortement brûlés (cf. Prévost, 1982), les Inga sont très tôt concurrencés, par les Cecropia par exemple. Signalons enfin que les espèces qui entrent dans le groupe (2) sont la majorité des espèces fores¬ tières : elles adoptent soit le comportement des « nomades sciaphiles », soit celui des vrais pionniers, que Van Steenis (1956) qualifiait de « nomades héliophiles ». III. Devenir des Inga en forêt : leur place dans la sylvigenèse. Dans la forêt secondaire de Cabassou (Charles-Dominique et al., 1981), la distribution des arbres par classes de diamètres, sur 8 ha, permet de déceler un comportement différent pour 3 espèces de Inga (fig. 36). La 4 e espèce présente dans cette forêt, I. capitata, a fait l’objet de relevé sur 1 ha seulement et représente un 4' type de comportement. Cet exemple illustre notre hypothèse sur le com¬ portement sylvigénétique des Inga forestiers, ébauchée à partir des observations et des comparaisons effectuées dans les différents sites étudiés. La fig. 37 représente 4 groupes d’espèces, intégrés dans un schéma du cycle sylvigénétique inspiré de celui de Halle et al. (1978 : 377) (notons que la part d’hypo¬ thèse est importante en ce qui concerne la longévité des arbres). a. — Dans le groupe a, se placent I. thibaudiana, I. bracteosa, pionniers stricts (= « nomades héliophiles »), participant à l’installation de la I e strate arborescente, mais rapidement dominés par d’autres espèces, et qui meurent après avoir survécu plus ou moins longtemps en sous-bois. Oldeman ( 1974) classait dans ce groupe tous les Inga sans discrimination. b. — Le groupe b compte le plus d’espèces : toutes celles qui sont pionnières et deviennent cependant, à l’âge adulte, des arbres de moyenne grandeur mais atteignant la voûte de la jeune forêt structurée. Ce sont notamment les espèces rencontrées en forêt de l’Arataye : I. acrocephala, I. alata, I. bourgoni, I. edulis, I. marginata, I. pezizifera. Pour elles sans doute (et aussi celles du groupe c, voir ci-dessous), de Granville (1977) a écrit, citant une autre opinion d’OLDEMAN : « Dicorynia guianensis et I. bourgoni sont, d’après Oldeman (comm. pers.), des espèces de stades avancés de la régénération de la forêt ; leur abondance n’a rien de surprenant lorsqu’on sait que la vieille forêt bien stratifiée (...) Source : MNHN, Paris INCA DE GUYANE FRANÇAISE 13 10 20 30 Fig. 36. — Distribution par classe de diamètre des Inga de trois espèces. (Cabassou, 8 ha, relevé équipe P. Charles-Dominique, 1978). n’occupe que 5 à 10 % de la surface sur terrain horizontal (Oldeman, 1974) ». (En fait le « bou- gouni » (nom local créole) recouvre plusieurs espèces, parmi celles qui sont citées ci-dessus). c. — Il est tentant de placer dans un groupe séparé (groupe c) les,espèces qui, comme I. alba, I. cinnamomea, I. paraensis, I. rubiginosa, deviennent de grands arbres de la fofêt bien structurée. Leur diamètre atteint 50-60 cm et leur hauteur 30-35 m. Ils appartiennent probablement à la catégorie des arbres qui, bien que pionniers, ont une durée de vie très longue et sont donc, à tous les stades de la sylvigenèse, des arbres dominants (ex. du Goupia glabra). d. — Le groupe d rassemble les espèces non pionnières : la très commune I. auristellae, qui fructifie en sous-bois ; I. capitata, I. huberi et peut-être I. disticha. I. stipulons possède un comporte¬ ment particulier : bien que sciaphile, il vit aussi parfois dans la végétation héliophile. Les espèces du groupe d seraient donc en forêt les composants, tardivement installés, des ensembles structuraux infé¬ rieurs, et pourraient indiquer un stade sylvigénétique évolué. Source : MNHN, Paris 7. — Hypothèse sur le rôle des Inga dans la sylvigenèse. Représentation schématique inspirée de H/ Id, Ih, Ild, etc., phases successives de la sylvigenèse (d : dynamique, h : homéostatique) d’après ces stades sylvigénétiques : arbres du présent (tireté) et d’avenir (pointillé). Trait plein = Inga des 4 groi INGA DE GUYANE FRANÇAISE 115 Conclusions L’implantation des Inga forestiers s’effectue de façon variable selon les espèces, mais tous com¬ mencent leur développement de la même façon : dissémination zoochore et germination sciaphile. En forêt, certaines espèces sont capables de régénérer à l’ombre de la voûte forestière, mais la plupart sont fortement favorisées par l’ouverture d’une trouée. Le développement est bloqué à un stade très jeune chez trois espèces, mais des données précises manquent pour établir si d’autres, dont on trouve en sous-bois les formes jeunes à des stades variés, atteignent, au cours de leur croissance en con¬ ditions sciaphiles, un stade qu’elles ne peuvent dépasser que si un chablis survient. Parmi les quelque 35 espèces guyanaises, près du 1/3 peuvent être considérées comme participant aux premiers stades de la régénération de la forêt. Leur importance dans le recrû a été remarquée égale¬ ment au Panama (Kenoyer, 1929, signale la présence de 8 à 10 espèces) et au Surinam (Katelaars & Budelman, 1976 ; Boerboom, 1974). La présence, quantitative et qualitatjve, des Inga dans une zone défrichée, aléatoire, dépend des plantules ou arbustes présents dans le sous-bois avant la friche. Leur efficacité, variable suivant les espèces, est plus importante dans les zones défrichées où la destruction n’est pas trop forte. La réitération du modèle de Troll étant peu visible, il est difficile de préciser si ces arbres sont, conformément à l’idée d’OLDEMAN, des nomades caractérisés entre autres par une réitération nulle ou faible. Mais on peut supposer que la souplesse de leur modèle architectural leur permet de s’adapter aux conditions microclimatiques verticales, en alternant phases orthotropes et plagiotropes pour se fau¬ filer dans la voûte. Les espèces des groupes b et c (fig. 37) correspondent aussi, dans la description de la reconstitu¬ tion forestière de Ashton et al. (1978), à un groupe intermédiaire entre les pionniers stricts et le stade évolué, qui tout en partageant la plupart des caractères biologiques des espèces pionnières, ont une durée de vie beaucoup plus longue. L’idée selon laquelle ces arbres, « avec leurs racines absorbantes profondes et peut-être une très active fixation d’azote, semblent jouer un rôle important dans le réta¬ blissement de la fertilité du sol et du cycle des éléments minéraux », est intéressante s’il s’avère à l’ave¬ nir qu’une proportion importante des espèces de cette série sont des fixateurs d’azote, soit au niveau des feuilles, soit (Légumineuses) au niveau des racines. Enfin, on pourrait s’attendre à ce que les espèces pionnières en forêt et les espèces de la végéta¬ tion secondaire de la région côtière, également héliophiles, soient les mêmes. En fait, à quelques excep¬ tions près, comme I. pezizifera et I. thibaudiana, la différence de composition floristique entre ces deux biotopes est nette. L’absence en forêt des espèces de la région côtière et de certaines ripicoles peut être due : — à leur incapacité de germer dans les conditions du sous-bois, ce qui les empêche, au moment du défrichement, d’être présentes à l’état de plantules ; — à des conditions édaphiques ou climatiques qui limitent leur répartition géographique à la région côtière ; — à leur stricte exigence pour l’hydromorphie du sol, pour les espèces ripicoles ; — à leur croissance trop lente, même au-delà des tout premiers stades pendant lesquels le déve¬ loppement semble marquer un temps d’arrêt chez la plupart des espèces. C’est sans doute le cas de I. sertulifera dont la croissance en serre s’est avérée particulièrement lente. Une variété de comportements plus importante peut être attendue de la meilleure connaissance, à l’avenir, de toutes les espèces forestières qui restent mal décrites, notamment dans leurs formes juvéni¬ les. De plus, beaucoup d’observations restent à faire avant que certaines espèces d 'Inga puissent être utilisées comme « indicatrices » de l’état d’avancement d’une succession forestière. Source : MNHN, Paris Source : MNHN, Paris RÉSUMÉ ET CONCLUSIONS GÉNÉRALES La présente étude du genre Inga en Guyane a suivi plusieurs orientations. Nous résumerons point par point les conclusions auxquelles elles nous ont conduite : l. Homogénéité et originalité du genre. En ce qui concerne la taxonomie, on ne peut qu’apporter de nouveaux éléments pour confirmer la remarquable homogénéité morphologique du genre Inga : différents auteurs l’ont déjà évoquée à tra¬ vers les caractères foliaires et floraux ; on peut maintenant y ajouter, au moins pour les espèces guya- naises : — les caractères des fruits, toujours indéhiscents, et ceux des graines, auxquelles l’aspect compa¬ rable des embryons, mais surtout la présence d’une pulpe d’origine tégumentaire, confèrent une struture constante ; ceci concorde avec les descriptions données par d’autres auteurs qui ont évoqué la « pulpe » ou P « arille », ce qui suggère que cette particularité est commune à tout le genre ; c’est aussi son caractère le plus original, puisqu’on ne le retrouve ni chez les genres voisins ni dans la famille. — la morphologie des embryons et des plantules, et notamment : (1) la germination semi-hypogée, constante chez toutes les espèces où elle est connue ; (2) la phase initiale de croissance qui, en raison même de son caractère indifférencié, représente un stade intéressant pour l’étude des caractères génériques. A de rares exceptions près, les jeunes plan¬ tules ont des feuilles opposées à une seule paire de folioles, à stipules, glandes, etc., comparables, sinon identiques, d’une espèce à l’autre. Cette phase initiale correspond à un développement orthotrope et la phyllotaxie est spiralée. Par la suite, les différents caractères végétatifs acquièrent progressivement leur aspect spécifique (nombre de paires de folioles, aspect du rachis, des stipules, des glandes), en même temps que s’effectue la transition vers la structure plagiotrope qui caractérise le modèle de Troll ; (3) L’architecture végétative, autre élément de cette homogénéité : toutes les espèces observées sont des arbres du modèle de Troll. L’étude morphologique des espèces guyanaises n’apporte donc aucun élément nouveau pour appuyer la classification de Bentham (1875), essentiellement fondée sur les caractères floraux, ou pour la rejeter. 2. Interprétation phylogénique Degré de spécialisation des Inga Bien que les Inga aient conservé des caractères primitifs, quelques arguments permettent de sug¬ gérer qu’ils représentent une lignée spécialisée de la tribu des Ingeae. Ces arguments sont fournis par : (1) la structure des graines et la morphologie des feuilles unipennées, que l’on peut interpréter, en accord avec Corner (1954, 1976), comme des caractèrés dérivés ; Source : MNHN, Paris 118 ODILE PONCY (2) l’architecture végétative : la différenciation plagiotrope (modèle de Troll), accompagnée de la phyllotaxie distique vraie est probablement dérivée de la structure orthotrope à phyllotaxie spiralée. S’il se confirme ultérieurement que l’ensemble dii genre se développe de la même façon que les quel¬ ques espèces guyanaises étudiées, cela pourrait signifier que ces caractères spécialisés ont été acquis par la souche ancestrale du genre ; (3) l’anatomie : les glandes foliaires présentent une complexité et une organisation qui révèlent un fort degré de spécialisation. La comparaison de ces organes chez différentes espèces du genre serait certainement d’un grand intérêt pour la taxonomie. Malheureusement, les genres voisins ne sont pas connus sous cet aspect. Plutôt que des représentants du groupe ancestral des Mimosoideae, les Inga seraient donc, au contraire, un groupe spécialisé et bien adapté au milieu qui est le sien, la forêt humide. Sa très grande diversité spécifique est le signe de la réusite de cette adaptation. D’autres genres sont, bien sûr, aussi riches ou plus riches en espèces, mais peu le sont tout en conservant une telle homogénéité morphologi¬ que, géographique et écologique. Inga est resté un genre confiné aux milieux hygrophiles, tandis que la plupart des genres voisins (Pithecellobium, Albizia, Calliandra, Lysiloma...) ont des représentants adap¬ tés à d’autres milieux. Ainsi que l’a écrit Stebbins (1974 : 159), même si « les régions climatiquement intermédiaires peuvent être considérées comme des laboratoires dans lesquels le plus grand nombre de complexes adaptatifs nouveaux de groupes végétaux sont apparus », cela « ne signifie pas cependant que la spécia¬ tion cesse lorsqu’un groupe devient pleinement adapté à des habitats hautement favorables. Beaucoup de grands genres, comme -Ficus, Miconia, Inga , (...) apparaissent exclusivement dans de tels habitats ». 3. Données biogéographiques Elles sont encore trop incertaines pour pouvoir constituer des arguments solides. Cependant, l’extension actuelle du genre au seul continent américain, sa diversité spécifique considérable malgré une grande homogénéité morphologique, l’absence d’espèces possédant une aire de distribution disjointe pourraient indiquer qu’il s’agit d’un genre dont la diversification est récente, et au moins postérieure à l’isolement de l’Amérique du Sud au début du Tertiaire. 4. Analyse de la dynamique de la croissance Aux premiers stades, elle permet de préciser les modalités de la différenciation plagiotrope, qui s’accompagne d’une modification de l’activité apicale de l’axe primaire, et chez certaines espèces de l’apparition de la croissance rythmique. Les deux caractéristiques de la plagiotropie, acquises indépen¬ damment, sont : — la phyllotaxie distique, qui n’existe pas lors de la germination et répond probablement à un déterminisme endogène ; * — la courbure plagiotrope dont l’orientation s’effectuerait dans un plan déterminé morphologi¬ quement ; et dont la localisation sur l’axe primaire semble dépendre directement des conditions écologi¬ ques, qui déterminent la vigueur globale de la plante. En outre, la plagiotropie est parfois réversible, jamais la phyllotaxie distique. Limitée, sur le plan morphologique, à l’exemple des Inga, une telle analyse de la construction du modèle de Troll a seulement un intérêt descriptif. Ultérieurement, elle pourra s’intégrer dans une étude globale de ces mécanismes dans des taxons variés parmi les Légumineuses, et contribuer ainsi à la meilleure connaissance de ce modèle très complexe et hétérogène, et des différents degrés de spécialisa¬ tion qu’il comporte. Source : MNHN, Paris INGA DE GUYANE FRANÇAISE 119 Par contre, au point de vue écologique, elle est utile à l’interprétation du rôle du comportement des jeunes plants dans le cycle de la régénération de ces arbres, en forêt ou en milieu ouvert. 5. ÉCOLOGIE L’analyse écologique des Inga guyanais montre que le nombre d’espèces ripicoles ne représente que la moitié du nombre total d’espèces, et surtout que la diversité spécifique en forêt est importante puisqu’une vingtaine d’espèces y habitent, soit plus de la moitié du nombre total pour la Guyane. D’autre part, les observations effectuées concernent différentes étapes du cycle de la régénération naturelle et permettent d’en décrire les grandes lignes. Les fruits indéhiscents produisent des graines couvertes d’une pulpe sucrée d’origine tégumen- taire, qui remplit le double rôle : — de tégument, en assurant la protection de l’embryon contre la dessiccation, pendant la fin de la maturation et jusqu’à ce que le fruit mûr soit ouvert, — d’arille, puisque les Vertébrés arboricoles frugivores qui la consomment sont les agents de la dissémination des graines. L’embryon qui atteint le sol, nu ou couvert de la partie interne (non pulpeuse) du tégument, est totalement dépourvu de dormance et la germination est immédiate. La germination à l’intérieur du fruit est accidentelle et correspond à un mécanisme de survie de l’embryon, lorsque l’ouverture du fruit n’a pas été effectuée. La phase initiale du développement, morphologiquement indifférenciée, tant par les caractères végétatifs que par la structure orthotrope, s’effectue dans l’obscurité du sous-bois ; la croissance est lente, ou nulle pendant des laps de temps plus ou moins longs. Pendant cette phase, la plante semble pouvoir marquer le temps de latence dont la graine est dépourvue ( = « dormance au stade plantule »). Par la suite, le comportement des différentes espèces semble être essentiellement fonction de leur tolérance respective vis-à-vis des conditions d’éclairement. Certaines s’accommodent apparemment de l’ombre du sous-bois autant que de la pleine lumière d’un grand chablis : mais elles adaptent alors leur mode de croissance à la quantité d’énergie dont elles disposent, ce qui se traduit, sur le plan architectu¬ ral, par la réalisation des nombreuses variantes que permet la souplesse du modèle de Troll : en sous- bois la phase orthotrope est prolongée, tandis qu’en chablis, la brusque augmentation de l’énergie dis¬ ponible provoque l’émission précoce de réitérations multiples masquant le modèle initial. Une straté¬ gie de ce type représente une des possibilités d’adaptations liées à l’architecture. Pour les espèces de sous-bois, le modèle de Troll peut au contraire être interprété comme adapté à un milieu où l’énergie lumineuse, très faible, est captée efficacement par les feuilles distiques d’axes plagiotropes. Chez certai¬ nes espèces, les jeunes plants qui, brusquement mis en présence d’une forte intensité lumineuse, sont capables de réaliser une croissance vigoureuse, jouent alors le rôle de pionniers en participant, avec les autres espèces pionnières, au recouvrement rapide de la surface perturbée. Les données expérimentales manquent encore pour savoir si la phase initiale orthotrope à crois¬ sance lente exige vraiment l’obscurité du sous-bois : quelques espèces au moins, de végétation rudérale, sont sans doute capables de pousser d’emblée en pleine lumière. En revanche il semble que, chez les espèces forestières, le comportement pionnier ne puisse s’exprimer que lorsque les plantules ont dépassé la phase de croissance initiale lente : avant ce stade, elles pourraient être incapables, physiologique¬ ment, de profiter de l’augmentation de l’énergie lumineuse, et donc d’entrer en compétition avec les pionniers véritables. Source : MNHN, Paris Source : MNHN, Paris BIBLIOGRAPHIE Alexandre (D. Y.), 1977. — Régénération naturelle d’un arbre caractéristique de la forêt équatoriale de Côte d’ivoire : Turraeanthus africana Pellegr. Oecologia plantarum 12 (3) : 241-262. Ashton (P.) et al., 1979. — La forêt naturelle : biologie, régénération, croissance. In : Ecosystèmes forestiers tro¬ picaux. Rapport UNESCO/P.N.U.E./FAO, chap. 8. Aublet (F.), 1775. — Histoire des plantes de la Guiane françoise, 4 tomes, Paris. 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Source : MNHN, Paris Source : MNHN, Paris Planche III. — 1, Inga auristellae, base du tronc ramifiée et anastomoses racinaires (un seul individu) ; sous-bois près de la rivière Arataye, oct. 1978 ; 2, Inga pezizifera, exemplaire jeune, orthotrope et à phyllotaxie spira¬ lée, de 1 m de hauteur, dans un abattis de 1 an ; Sinnamary, Piste de St-Elie, abattis expérimental ORS¬ TOM, déc. 1978 ; 3, 4, Inga meissneriana, arbre ripicole de 10 m de haut environ, Fl. Approuague, déc. 1978 (cliché C. Sastre). Source : MNHN, Paris Source : MNHN, Paris Planche IV. — Fruits. 1, 2, Inga sertulifera, vues externe (1) et interne (2), x 1/2, Riv. Arataye, oct. 1978 ; 3, I. leiocalycina, gousses trouvées au sol, x 1/2, forêt de l’Arataye, oct. 1978 ; 4, I. nobilis, détail du fruit montrant le tégument pulpeux, le funicule et les graines immatures (échelle = 1 cm), Riv. Arataye, oct. 1978 ; 5, Inga cinnamomea, vues externe et interne ; les cotylédons (c) sont visibles sous le tégument pulpeux déchiré ; fruits commercialisés (A. Lourteig, marché de Belém/Para, Brésil, 1978), échelle = 1 cm ; 6, /. sti¬ pulais, vues de face et de profil ; Sinnamary, piste de St-Elie, récolte H. Puig, juin 1979 (échelle = 1 cm). Source : MNHN, Paris Source : MNHN, Paris Planche V. — Jeunes plants cultivés en serre. 1, Inga cf. disticha (4 mois, sept. 80) ; 2, I. alata (10 mois, sept. 1979) ; 3, I. alba (9 mois, juin 1980) ; 4, I. fanchoniana (2 mois, août 1980) ; 5, I. cayennensis (4 mois, oct. 1979) ; 6, I. splendens (10 mois, sept. 1979) ; 7, I. sertulifera (10 mois, déc. 1978). [Références de récoltes et d’herbiers : voir Poney 1984, tabl. Ij. Source : MNHN, Paris Source : MNHN, Paris Planche VI. — Jeunes plants : feuilles juvéniles et glandes foliaires (échelle = 1 cm). 1 à 4, Inga ingoides : 1, feuille 3 de l’axe primaire (1-juguée) ; 2, feuilles juvéniles à l’extrémité de l’axe I, au niveau de la 20 e feuille ; 3, 4, aspect des glandes sur une feuille 4-juguée d’ordre 20-25 sur l’axe I (3, feuille juvé¬ nile ; 4, feuille adulte) ; 5 et 6, Inga edulis : 5, extrémité de l’axe montrant les jeunes feuilles et les glandes « en boutonnière » ; 6, feuille bicolore (nervures vertes ; limbe intersticiel gris bleuté argenté). Source : MNHN, Paris VI Source : MNHN, Paris Planche VII. — Jeunes plants : feuilles juvéniles et glandes foliaires (échelle tule de 1 an : 1, axe I avec 7 e feuille juvénile ; la flèche indique la 1' feuille 6 de l’axe I ; 3, /. alba, 5 e feuille de l’axe I ; 4, /. cayennensis, dessus, 16 e feuille juvénile (6-juguée) ; 5, I. cinnamomea, 10 e feuille d< l’axe I ; 7, /. pezizifera, axe I de la plantule de 1 an, vu de dessus, 8 e = 1 cm). 1, 2, Inga splendens, plan- ! feuille de l’axe II ; 2, détail de la axe I d’un plant de 18 mois, vu de ; l’axe I ; 6, /. a la la, 10 e feuille de feuille juvénile. Source : MNHN, Paris VII Source : MNHN, Paris Planche VIII. — L‘axe primaire orthotrope (échelle = 10 cm). 1, Inga edulis, axe I + axe II orthotrope « pré¬ coce », axillé par la 3 e feuille de l’axe I ; 2, /. pilosula, plant de 70 cm, la plus jeune feuille est la 15' ; 3, I. ingoides, plant de 120 cm, la plus jeune feuille est la 21' ; 4, I. cinnamomea, jeune plant de 110 cm, la plus jeune feuille est la 18'. Source : MNHN, Paris Source : MNHN, Paris Planche IX. — Phyllotaxie distique et flexion alternative des entrenœuds (échelle = 1 cm). 1, 2, Inga sertulifera, espèce à croissance rythmique, extrémité de l’axe primaire (plant de 2 ans, hauteur 80 cm) ; 3, I. fagifolia, espèce à croissance rythmique, extrémité de l’axe primaire (plant de 2 ans, hauteur 180 cm), jeunes feuilles formant une U. C. ; 4, I. thibaudiara , espèce à croissance continue, extrémité de l’axe primaire (stade 12- 15' feuilles). Source : MNHN, Paris IX Planche X. — Distichie, plagiotropie et ramification. 1, Inga thibaudiana, disposition foliaire distique du plant monocaule ; 2, I. cayennensis, développement sylleptique de l’axe praimaire et de deux axes latéraux ; 3, 4, /. pilosula : 3, courbure brutale de l’axe I au niveau de l’entrenœud (x) ; 4, un mois plus tard, avec apport nutritif important, redressement de l’axe I et émission d’axes II. Source : MNHN, Paris Source : MNHN, Paris Planche XI. — Plagiotropie et ramification chez Inga edulis. 1, plant de 1 m, axe I plagiotrope dans sa partie distale, axes II plagiotropes à développement légèrement retardé ; 2, plant de 2,80 m ; conservation de l’orthotropie de l’axe I et redressement de l’axe II supérieur (A II). Source : MNHN, Paris X Dépôt légal : Novembre 1985. IMPRIMERIE NATIONALE 5 564 011 T 62 Source : MNHN, Paris MÉMOIRES DU MUSÉUM NATIONAL D’HISTOIRE NATURELLE Série B, Botanique Derniers volumes parus : T. 29 — Le pollen et les stomates des Gardéniées (Rubiacées) du Gabon. Morphologie et lutives, par Monique Kedda.m-Malpla.nche. 1985. T. 30 — Monographie des Apocynacées — Tabernaemontanoïdées américaines, par Lucile Source : MNHN, Paris 17 DEC, 1985 PUBLICATIONS DES LABORATOIRES DU MUSÉUM En vente à l’adresse de chaque laboratoire Adansonia. Laboratoire de Phanérogamie, 16, rue de BufTon, 75005 Paris. Alexanor. Laboratoire d’Entomologie générale et appliquée, 45, rue de Bufîon, 75005 Paris. Alytes. Laboratoire de Zoologie (Reptiles et Amphibiens), 25, rue Cuvier, 75005 Paris. Annales de Paléontologie (Vertébrés et Invertébrés). Laboratoire de Paléontologie, 8, rue de BufTon, 75005 Paris. Annales de la Société Entomologique de France. Laboratoire d’Entomologie générale et appliquée. Annuaire des Arachnologistes mondiaux. Laboratoire de Zoologie (Arthropodes), 61, rue de BufTon, 75005 Paris. Annuaire des Myriapodologistes mondiaux. Laboratoire de Zoologie (Arthropodes). Bulletin d’Écologie. Laboratoire d’Écologie générale, 4, avenue du Petit Château, 91800 Brunoy. • Bulletin de Liaison des Musées d’Histoire naturelle. Inspection générale des Musées d’Histoire naturelle de Province, Service national de Muséologie, 57, rue Cuvier, 75231 Paris Cedex 05. Bulletin de la Société Entomologique de France. Laboratoire d’Entomologie générale et appliquée. Bulletin de la Société d'Ethnozoologie et d’Ethnobotanique. Laboratoire d’Ethnobotanique et d’Ethnozoologie, 43, rue Cuvier, 75231 Paris Cedex 05. Cahiers des Naturalistes. Laboratoire de Zoologie (Vers), 61, rue de BufTon, 75005 Paris. Cahiers de Paléontologie. Laboratoire de Paléontologie. Cryptogamie (Mycologie, Algologie, Bryologie et Lichénologie). Laboratoire de Cryptogamie, 12, rue de BufTon, 75005 Paris. Cybium. Laboratoire d’ichtyologie générale et appliquée, 43, rue Cuvier, 75231 Paris Cedex 05. Entomologiste (L’J. Laboratoire d’Entomologie générale et appliquée. Faune de l’Europe et du Bassin méditerranéen. Laboratoire d’Entomologie générale et appliquée. Faune de Madagascar. Laboratoire d’Entomologie générale et appliquée. Flore du Cambodge, du Laos et du Viêt-Nam. Laboratoire de Phanérogamie. Flore du Cameroun. Laboratoire de Phanérogamie. Flore au Gabon. Laboratoire de Phanérogamie. Flore de Madagascar et des Comores. Laboratoire de Phanérogamie. Flore de la Nouvelle Calédonie et Dépendances. Laboratoire de Phanérogamie. Index Seminum. Service des Cultures, 43, rue de BufTon, 75005 Paris. Journal d’Agriculture traditionnelle et de Botanique appliquée. Laboratoire d’Ethnobotanique et d’Ethnozoologie. Mammalia. Laboratoire de Zoologie (Mammifères et Oiseaux), 55, rue de BufTon, 75005 Paris. Objets et Mondes. Laboratoire d’Ethnologie. Musée de l’Homme, Palais de Chaillot, place du Trocadéro, 75116 Paris. Revue d'Écologie et Biologie du Sol. Laboratoire d’Écologie générale. Revue française d’Entomologie. Laboratoire d’Entomologie générale et appliquée. Revue internationale Acarologia. Laboratoire de Zoologie (Arthropodes). Revue de Nématologie. Laboratoire de Zoologie (Vers). Source : MNHN, Paris