V ï.nr MEMOIRES • (ATT .. ..JL , " c ~-T POUR SERVIR A L’HISTOIRE DES INSECTES. Par M. DE Re AU MU R, de ï Académie Royale des Sciences, de celle de Peters bourg, if de VAcadémie de rinflitut de Bologne, Commandeur if Intendant de l Ordre royal if müitaire de Saint Louis. TOME QUATRIEME. Hijloire des Gallinfedes, des Pngallinfed.es, if des Mouches à deux ailes. A PARIS, DE L’IMPRIMERIE ROYALE, M. D C C X X X V 1 I I. lïiJ JüîfcsiüîtJ+sil: s=»îü>$fcs'î *=JÎüt«'!'î=r$«=5 * «îfcsfw+tsttsf5=ffc=îf«=!?«tiaî«=îît;*s=tî # & # $!#!£■$;$$!$&!&$» $râ + s=9 R$s=î45=:45=î$«=:^Jî=îi«.4.î=î{5=ï4 s=îj P R F F A CE, Où Fou donne une idée générale des Mémoires contenus dans ce Volume, if quelques remarques fur la fuite de l’ouvrage . N OUS avons fini le troifiémc Volume par l’hiftoire de ces excroifiances des plantes & des arbres qu’on a nommées des Galles, & dont la production eft due à des Infeétes de différons genres & de différentes chiffes, qui fe nourriflent & croifient dans leur intérieur : nous commençons ce volume par l’hiftoire des infeéles, qui ont été pris eux-mêmes par d'habiles Naturalifles, pour des galles de plantes & d’arbres, pour des portions d e- corce ou de bois. Nous leur avons donné le nom de Gallinfedes, propre à faire entendre que, quoiqu’ils ref- femblent à des galles, ils font réellement des infeéles. Ce font de petits animaux qui nous doivent paraître bien étranges, en ce que plus leur accroiffemeut avance, plus ils font près de leur état de perfeélion, & plus ils perdent la figure animale, moins ils paroiffent animés. Quand ils ne viennent que de naître, & quelques jours après leur naiffance, tant qu’ils font d’une telle petitefle que les yeux ont peine à les appercevoir, ils ne le cèdent en aélivité «Sc en agilité à aucun autre infeéîe, ils courent fur les tiges, fur les branches, & fur les feuilles des plantes & des arbres; ils ont alors quelqu’air de petites cloportes; mais bientôt ils fe fixent, ils fe tiennent immobiles : il vient même un temps, & ce temps dure plufieurs mois, pendant lequel il n’efi plus en leur pouvoir de changer . a ij iv PREFACE. de place. C’eft néantmoins pendant ce temps qu’ils croif- fait le plus; alors ils ne femblent que des tubercules de i 'écorce de la plante à laquelle ils lont attachés. Les gal- jinfeétes de quelques efpeces lont grolfes comme des pois, ou plus grottes, & celles de quelques autres efpeces font auffi petites que des grains de poivre. 11 y en a qui font arrondies en boules; les unes font des boulesprelquepar¬ faites, d’autres font des boules dont un fegment a été emporté, d’autres font des demi-boules, d’autres ont une figure plus allongée, elles ont en petit celle d’un bateau renverfé. Jamais elles ne paroiffent moins avoir vie, que lorfqu’elles font occupées à frire des milliers d’œufs: elles les pondent fans les mettre au jour, pour ainfi dire, ou au moins fans les y faire paroître. Pendant que le con¬ tour du corps elt appliqué contre l’écorce d’un arbre, Sc qu’il ne celle d’y être appliqué, la gallinlèéte fait lortir des œufs de fon derrière; à inclure qu’ils fortent, elle les fait paflfer fous le ventre, elle continue de les couvrir; elle les couvre de même lorfque la nichée elt complette, elle la cache & relte deffus comme pour la couver. Elle périt pourtant bientôt lorfque fa ponte eft finie; mais après fa mort & après s’être defTéchée, elle eft encore utile à les œufs & aux petits qui en doivent naître; fon cadavre qui ne fe détache point de l’arbre, forme une coque folide à la nichée. Mais le grand myfîére, & qui jufqu’ici en eft refté un pour les Naturaiiftes mêmes qui n’ont point con¬ fondu les gallinlèétes avec les galles, c’eft de fçavoir com¬ ment ces gallinlèétes ont été fécondées. De grands Oblèrvateurs ont cru que les gallinlèétes fe fuffifoient à elles-mêmes, quelles fe multiplioicnt fans accouplement. Au lieu d’admettre une exception fi fingu- liére à la réglé générale, d’autres Sçavans ont penfé qu’il étoit plus probable que les gallinlèétes s’accouploient dès BSi PRE' FACE. v qu’elles étoient nées , ce qui feroit encore une grande fingu- larité. Mes oblèrvations réitérées m’ont appris que parmi les gallinfedles il y a réellement des mâles Sc des fémeiles ; mais que les mâles ne s’accouplent qu’avec des femelles qui ont pris leur accroilfement, qu’avec des femelles dont le temps de la ponte eft prochain. Tout a contribué à rendre les mâles méconnoiffables, leur forme eft ablolu- ment différente de celle des femelles, Sc ils font fi petits par rapport aux femelles, qu’il n’étoit guéres naturel d’ima¬ giner qu’ils fiiffent faits pour être aflortis avec elles. Parmi les gallinfeéles qui couvrent la tige d’un arbre, il y en a des milliers qui relient extrêmement petites, plus petites que des grains de poivre, pendant que d’autres deviennent groffes comme des pois. Les premières femblent n’avoir pû croître. Sc avoir péri, elles paroiffent n etreplus qu’une peau defféchée Sc friable, pendant que les autres font renflées Sc toutes pleines de fuc. C’eft que les premières doivent perdre leur première forme, changer d’état, ceffer detre gallinfeéfes ; elles doivent fe métamorphofer, Sc elles fe métamorphofent en de petites mouches qui n’ont que deux ailes blanches, Sc très-grandes par rapport au volume du corps, Sc bordées chacune d’un rouge auffi beau que celui du carmin. Dès que ces mouches font nées, elles cherchent les gallinleéles qui font en état d etre fécondées. La gallinieéfe eft un animal d’une grandeur fi énorme par rapport à la petite mouche, que celle-ci peut fe promener fur l'on corps comme iur un terrein fpacieux; elle s’y promene aufti, elle y cherche Sc y trouve l’endroit où elle doit fe fixer, l’endroit où eft l’ouverture deftinée à recevoir la partie qui caraélérife le mâle. Peu de temps après que ce petit mâle ailé a fécondé une fémelle, qui non- èulement n’eft pas ailée, mais qui femble une maffe affés informe & fans vie, cette fémelle pond des milliers a iij V) P R F F A C E. d’œufs. Parmi les gallinfedes, il y en a des efpeces dont les œufs font enveloppés dans une el'pece de loye, ou plutôt dans un coton très-blanc. Celles-ci femblent avoir une aclrefie qu’on ne s’attendroit pas à trouver à un infecte incapable de mouvemens fenfibles, elles femblent fçavoir filer; mais j’ai obfervc que la Nature a tout préparé pour que les œufs fuffent ainfi enveloppés, fans que la naere y contribuât par fon art, qu’elle file fans s’en donner la peine, & fans le fçavoir. Le corps exfude, laiffe tranfpirer le coton, qui forme une enveloppe douce & épaiffe aux œufs. Au refie, laclafiedesgallinlectes n’efi pas feulement propre à s’attirer l’attention des curieux des merveilles de la Nature, une des efpeces qui lui appartient, efi un objet de com¬ merce, je veux parler du kermès, appellé au (fi graine de vermillon, dont on fe fert pour teindre en rouge, & dont la Médecine fait le firop & la confection d’Alkermès. Cette efpece de gallinfecte naît fur un chêne fi petit, qu’il n’efi: qu’un arbriffeau qui s’élève peu ; fes feuilles font épineu- fes comme celles du hou. Dans les pays où cette efpece d’arbufte croît naturellement, & où le kermès fe nourrit dedus, les gens de la campagne font des récoltés de grains qu'ils n’ont point eu la peine de femer, & ces grains lont de petits animaux. Mais c’efi dans le fécond Mémoire que nous parlons de la plus utile de toutes les drogues pour la teinture, de la cochenille. Nous y examinons des infectes que nous avons nommés des Progallinfeâes, parce qu’ils ont quelque refîemblance avec les gallinfectes, quoiqu’ils foient plus aifés en tout temps à reconnoître pour des animaux. Nous en caractérifons d’abord une cfpéce, commune dans ce pays fur l’orme & fur d’autres arbres, qui frit des petits vivans, & qu’elle met au jour dans une forte de nid en forme de corbeille, & fait du coton que le ventre & les PREFACE. ^ vij côtés du corps ont laifle tranlpirer. Notre pays n’eft pas de ceux où la cochenille croît; le Mexique la fournit leul au relie du Monde; nous n’avons pas été en état de l’ob- ferver vivante, mais nous avons fait ufage des obfervations fûres que d’autres, & en particulier M. de Ruufcher, nous ont fournies. Malgré la grande confommation de coche¬ nille qu'on a faite chaque année en Europe, depuis la découverte du nouveau Monde, on eft relié long-temps incertain fur la nature de cette précieufe drogue; on l’a regardée long temps comme une graine; mais il eft actuel¬ lement bien démontré quelle eft un animal qui vit fur une efpece de ces plantes qui ont été nommées Opuntia, figuiers d’Inde& Raquettes. Nous connoilfons même ailes la figure de ce petit animal fi utile, pour avoir cru être en droit de le ranger parmi les progallinfedes. La cochenille eft un in- feéte dépourvû d’aîles; & ce que nous trouvons parmi les faits envoyés à M. de Ruufcher, joint à nos obfervations fur les progallinfedes, prouve qu’elle eft fécondée par un très-petit infede ailé, tel à peu-près qu’eft le mâle des gallinfedes. Dans les temps où on n’avoit point de coche¬ nille en Europe, on failoit en Pologne la récolté d’un inlcde appellé graine d’écarlate de Pologne ; cet inlède fe nourrit & croît lur la racine de plufieurs plantes différentes ; je ne l’ai point encore trouvé en France, quoiqu’il y puilfe être. Mais M. Brennius a publié de fort bonnes obferva¬ tions fur cet infede, que j’ai encore rapportées dans ce fécond Mémoire, parce que la graine d’écarlate de Pologne me paroît être une efpece de progallinfedes. Nous avons juftifié affés de fois l’étude de l’hiftoire des infedes, nous avons aftes prouvé que ceux qui ne veulent lui accorder place que parmi les amufemens curieux, & qui la mettroient volontiers au rang des amufemens frivoles, ne connoiffent pas alfés ce qui eft de fon reiïbrt; nous viij PREFACE. avons affes prouvé qu’il eft peu de recherches dont on doive fe promettre autant de ce qu’on appelle des utilités réelles, que des recherches fur les infeétes; mais les im- prefïions qu’on a confervées pendant long-temps fur quelque matière que ce foit, font difficiles à effacer; elles font affoibiies, eiles paroiffent même injufles, dans l’inftant où elles font attaquées par des preuves auxquelles il n'y a rien à répliquer; mais on oublie ces preuves, & les idées trop enracinées quelles avoient combattues, fe repré- fentent encore dans la fuite comme vraies. Des idées peu favorables à l’étude de l’hiftoire des infectes, fubfiftent encore dans bien des elprits; elles n’y fçauroient pourtant tenir, toutes les fois qu’on fe rappellera les utilités qu’on retire de ceux qui font le principal objet des deux premiers Mémoires. On fait beaucoup d’ufàge du kermès, foit dans la Médecine, foit pour les teintures, quoique par rapport aux teintures, on ne i’employe peut-être pas avec autant davantage qu’on le pourroit. Pcrfonne n’ignore que la cochenille cff au rang des drogues les plus précieufes, & dont le débit eff le plus grand & le plus fûr. Le Mexique eff peut-être plus riche par fa cochenille, que par lés mines d’argent ; & les richeflés qu’elle lui procure, n’expofcnt point fes habitans à autant de rifques, que celles qu’il faut aller chercher dans des abymes loûtcrreins. Efl-il à pré¬ fumer qu’il foit impoffible de découvrir d’autres infeéles, négligés jufqu’ici, qui pourraient nous êtreauffi utiles que le font le kermès & la cochenille! Eff-il bien fur que la Cochenille ne puiffé être cultivée que dans fon pays natal ! Les vers à foyc, fi multipliés dans tant de pays differens, & Ci éloignés de ceux où ils ont été trouvés, ne nous permettent pas de le penfer. Et de qui des découvertes tic la nature de celles dont nous parlons, doivent-elles être plus attendues, que de ceux qui connoîtront les genres des P R E' F A CE. ix des infeéles & leur génie ! Quelqu’un qui continuera de croire que la cochenille & le kermès font des graines ou d’autres productions de plantes, n’ira pas chercher parmi les inleèles, d’autres infectes analogues à ceux-ci. N’a-t-on pas une grande avance pour trouver, quand on fçait au moins ce qu’il faut chercher, & où il le faut cher¬ cher! Mais on voudroit d’abord de futile, & on nepcnfe pas affés qu’il faut y être amené par degrés; n’eft-il pas heureux que des obfervations curieufes puiffent nous y conduire ! Quoique nous ayons parlé dans les Volumes précedens, d’un grand nombre de mouches de différens genres, ce n’a été, pour ainfi dire, que par occafion; ce n’efl que dans le troifiéme Mémoire de ce Volume, que nous commençons à donner les principes généraux de l’hiftoire des mouches; que nous établiffons des caractères propres à les ranger en dates, en genres & en elpeces. C’efl un travail qui d’abord n’offre rien d’agréable, mais qui étoit très-important pour l’hiftoire générale des infectes, parce que celle des mouches en efl une des principales branches. Les genres des mouches font reliés dans une confufion dont il étoit auffi difficile que néceffaire de les tirer; leur nombre efl très-confidérable, & il l’cfi à un point capable d’effrayer un Obfervateur, qui, fans les avoir étudiés pen¬ dant long-temps, fe propoferoit de les mettre en ordre. Les méthodes employées pour diffiibuer en claffes & en genres, les différens êtres qui peuvent être à la portée de nos yeux, ont des avantages dont nous avons déjà parlé ailleurs, & qui font très-connus de tous ceux qui ont cultivé quelqu’une des parties de l’hifioire naturelle. Au moyen des arrangemens & des difiributions, on vient à bout depuifer des fujets qui nous paroiffoient inépuifables. Tout ce dont notre imagination ne nous montre pas les . b X P R E’ F A C E. bornes, ce qu’elle nous rcpréfcme conlulénient, devient infini pour elle: le nombre des étoiles qu’un beau ciel offre à la limplc vûe de quelqu’un qui n’a jamais cherché à s’inftruire de leur arrangement , paroît infini. De vouloir compter ces étoiles, lui paroîtroit une entreprife folle; cependant en les rangeant par conrtellations, on ertparvenu à fçavoir que non-feulement elles peuvent être comptées, mais que le nombre de celles qui peuvent etre appcrçûes fans lunettes, ne va qu’à environ deux mille. Le nom¬ bre des plantes paroît immenfe, & après avoir ramaffé avec de grands foins & de laborieul'es recherches, celles qu’on a pu découvrir dans les différens climats, on a bien de la peine à s’affurer qu’on en connoifie douze à treize mille efpeces différentes. Les méthodes femblent refferrer les bornes de la Nature; elles réduifent à un nombre d’objets finis , des fuites d’objets que nous croyions voir infinies. Je ne veux pas dire pour cela que l’infini ne fe trouve point dans la Nature, mais il n’eft pas dans le nombre tics objets qui font àla portée de nosfens; autrement l’étendue de notre terre feroit infinie. D ailleurs, les difiributions en clartés, en genres & en efpeces, mettent notre imagination à l’aife, en lui préfentant des tableaux où de très-grandes fuites d’êtres différens font peintes en raccourci & très en petit, mais très-diftin élément. Nous ne nous arrêterons point actuellement à rapporter les caractères des quatre clartés principales fous lefquelles nous avons rangé les mouches, foit à deux, foit à quatre ailes, les caractères des clartés fubordonnées à celles-ci, & les caractères des genres de ces différentes clartés; ç’en eft bien affés d’avoir à faire lire une fois, clans le troifiéme Mémoire, ces détails fecs par eux-mêmes; quoique nous y donnions les cara¬ ctères des mouches, foit à quatre, foit à deux ailes, ce vo¬ lume ne traitera que des mouches à deux ailes. PREFACE . xj Ce que nous avons fait dans le troifiéme Mémoire, par rapport aux mouches, n’étoit ni moins néceffaire,ni moins difficile à faire, par rapport aux vers fous la forme delquels les mouches de différens genres ont pris leur accroiffement. Nous tâchons de mettre ces vers en ordre dans le quatrième Mémoire; nous y donnons les caractères de leurs clafles, de leurs genres & de leurs efpeces. Les formes des têtes nous aident beaucoup à en déterminer les claffcs, & nous offrent d’abord une divifion. Nous trouvons quantité de genres de vers qui ont non-feulement des têtes molles, mais qui ont des têtes qui lé gonflent & qui le contractent, qui s’allongent &. qui fe raccourciffent, en un mot, des têtes dont les ligures font très-variables, & varient conti¬ nuellement; d’autres vers ont, comme tous les autres animaux, des têtes d’une figure confiante. On trouvera dans le quatrième Mémoire, d’autres caractères marqués, que nous avons employés, foit pour établir fept dates générales de vers, foit pour divifer ces claffcs en genres. La flructure des organes par le moyen delquels les mouches prennent leurs alimens, nous ont fourni, dans le troifiéme Mémoire, les caractères dont nous nous fommes lervi pour diflinguer les quatre dates générales des mou¬ ches. Les unes ont une trompe fans dents, d’autres ont une bouche fans dents, d’autres ont une bouche armée de dents, & d’autres ont une trompe & des dents. Entre les trompes, les unes font toujours allongées, & d’autres fè raccourciffent. Les trompes des infectes font des inflrumens ou plutôt des machines bien dignes de notre attention; ce font des machines analogues à nos pompes, elles font deftinées à puifer le fàng dans les vaiffeaux des grands ani¬ maux, ou à puifer des liqueurs mielleufes dans les vaiffeaux des fleurs,ou dans les vaiffeaux des autres parties des plantes: mais ce font des pompes plus compliquées que les nôtres, b ij xi; PREFACE. puifqu elles doivent ouvrir les canaux dans lefquels elles doivent puifer. Leurs pillons , outre leur office de pifton , doivent faire celui d’inftrumens qui percent;toutescestrom- pes l'ont des machines très-compofées,quoiqu’elles loient des machines auffi (impies qu’elles le puiffent être. 11 y a de grandes variétés dans la ftruéhire des trompes accordées aux différais infeétes, même aux mouches de différentes clalfes & de différens genres. La trompe qui, comme celle du taon, doit percer le cuir dur & épais d’un bœuf, dernan- doit non-lêulcment à être plus forte & pluslolide que la trompe qui n’eft deftinée qu a percer notre peau, elle de- mandoit même à être autrement confîruite. Si on vouloit raffcmbler dans un feul ouvrage toutes les variétés de flru- tflure que nous offrent les trompes des infeétes, & en don¬ ner des développemens, on entreprendroit un ouvrage qui demanderoit plus de planches qu’on n’en trouve dans les Ramelli, les Léopolds, &c. & dans tous les Auteurs qui ont traité de l’élévation des eaux. Enfin, les différentes machines hydrauliques, imaginées par nos Méchaniciens, ne fçauroient nous faire voir des compofitions auffi admi¬ rables & auffi variées que celles que pein ent nous montrer les trompes données aux infeéfes pour conduire différens flics dans leur corps. Dans le cinquième Mémoire, nous nous contentons de Elire connoître la compofition de ces trompes qui font terminées par des levres charnues. Ce font les trompes qu’ont le plus ordinairement les mouches à deux ailes & à corps court. Nous y donnons quelques exem¬ ples des différences qui fe trouvent dans la ftruélure de ces fortes de trompes, en expliquant la ftruélure de la trompe des groffes mouches bleues de la viande, la ftruélure de la trompe des mouches à deux ailes & à forme d’abeilles» & la ftruélure de la trompe des taons. Nous parlerons dans d’autres Mémoires, de mouches qui nous donneront PREFACE. xii; ©ccafion de faire connoître des trompes faites fur des modèles très-différens de ceux des précédentes; telles font, par exemple, les trompes des coufins. On n’a qu’à étendre un peu de firop fur quelqu’endroit des parois tranfparentes du poudrier de verre, & renfermer enfuite une groffe mouche bleue dans ce poudrier, pour être en état de voir comment elle fait agir fa trompe, & l’admirer. Dans le fixiéme Mémoire nous parcourons les parties extérieures des mouches à deux ailes ; nous nous y arrêtons d’abord aux yeux à rezeau, à ces yeux taillés à tant de milliers de facettes, & qui font d’un volume fi confidé- rable, qu’ils couvrent fouvent la plus grande partie de la tête. Nous faifons remarquer que quelques Mouches ont quatre de ces yeux à rezeau, dont deux s’élèvent beaucoup, & font faits comme des turbans. Chaque œil à rezeau eft un affemblage d’un nombre prodigieux de petits yeux, cependant plufieurs genres de mouches, & le plus grand nombre des genres, outre les yeux à rezeau, ont encore des yeux, ordinairement trois, dont les cornées font liffes. Nous faifons connoître les fligmates, ou les bouches de la refpiration des mouches: nous en trouvons quatre au corcelet de chacune, & un plus grand nombre aux an¬ neaux de leurs corps. Les mouches qui n’ont que deux ailes, pour ftippléer à celles qui leur manquent, ont de chaque côté deux pièces, dont l’une rdfemble à une double aîle, & très courte, & l’autre à un balancier. Les anneaux qui couvrent le corps, font écailleux; ils ne feraient pas en état de fe gonfler & defe contracter, de s’arrondir & de s’applatir auffi promptement qu’il efl loti vent nécel- faire, fi chaque anneau étoit fait d’une feule piece. La nature a aulfi fait entrer dans chaque anneau , au moins deux pièces écaillcufes, aiïemblées par des membranes, qui iè pliflTent ou s’étendent fuivant le befoin. Nous b iij x iv PR F FA CF. donnons des idées générales des variétés que la nature a employées dans la ftrudure des anneaux de différentes mouches, pour qu’ils puflbnt avoir un jeu convenable. Enfin dans le même Mémoire, après nous être un peu ar¬ rêté à confidérer les jambes des mouches, & fur-tout leurs pieds, qui font munis d’efpeces de hroffes, ou de pelottes de poils, nous partons à examiner les parties intérieures. Celles que nous pouvons voir afles diftindement, ne fçauroient manquer de nous faire naître des regrets fur beaucoup d’autres de ces mêmes parties, qui nous échap¬ pent par leur petiteffe, & leur peu de confiftance. Mais au moins pouvons-nous fuivre tout le canal des alimens. Nous trouvons dans leur intérieur deux poulinons, ou deux lacs poulmonaires, qui font d’un volume qui les rend aifés à connoître, Si qui par leur blancheur, & l’ar¬ rangement de leurs fibres, ne fçauroient manquer de fixer nos regards. Le corps de quelques mouches eft en certains endroits, d’une tranfparence qui approche de celle du verre, & qui permet de voir ce qui fe parte dans leur intérieur. On a le plaifir d’y voir un véritable cœur fe dilater, & fe contrader alternativement, verfer ou leringuer de la liqueur dans un gros vairteau qui en part. On eft bien étonné enfuite de voir la même liqueur retourner vers le cœur par le même canal par lequel elle s’en étoit éloignée. Mais un fpedacle plus fmgulier, eft celui de couches de nuages, pofées les unes au-defliis. Si à quel¬ que diftancc des autres; ces nuages partent de la jondion du corps avec le corcelet, 6c marchent toujours parallèles à eux-mêmes, jufqu a ce qu’ils foient par de-ià le cœur, où ils difparoiflent; on tâche d’expliquer la caufe de ce phénomène, en finiflant le fixiéme Mémoire. L’hiftoiredes infedes fi remplie de faits fin gu Ii ers, n’a rien de plus furprenant à nous offrir, que ces formes fi PREFACE. xv différentes, fous lefquelles elle nous montre le meme ani¬ mal dans différais temps du cours de fa vie. Toute che¬ nille doit avoir été papillon, toute mouche doit avoir été ver. Nous avons vû dans le premier volume comment l’infedle que nousappellions une chenille, parvient à nous paraître un papillon. Nous voyons dans le feptiéme Mémoire de ce volume-ci, comment l’infecfle que nous appellions un ver, parvient à être pour nous, une mouche à deux ailes, de celles qui ont le corps court. La chenille, pour devenir papillon, paffe par l’état de crifalide; tous les vers à tête de figure variable, & plufieurs de ceux à tête de figure confiante, ont à fubir une métamorphofe de plus; I état de nymphe efl pour ces derniers infeéles, ce que l’état de crifalide efl pour les autres ; mais ils paffent par un état moyen entre celui de ver & celui de nym¬ phe; ce qui n’a point encore été obfervé, que je fçache, par les naturalifies. J’ai nommé cet état celui de boule allongée, parce que c’eft la figure qu’il donne à l’infeéte. Le'pafïage de l’état de boule allongée à celui de nym¬ phe, n’a point été non plus fuivi par les naturalifies, & méritoit bien de l’être ; il fe fait tout autrement que celui de l’état de chenille à celui de crifalide. Dans un inflant une chenille eft transformée en crifalide; l’infeéîe quitte fa peau de chenille, & fur le champ il efl crifalide, fur le champ on peut lui trouver toutes les parties du papillon ; au lieu que ce n’eft que peu à peu que les par¬ ties de la mouche fe développent & fe montrent, ce n’eft que peu à peu que la forme de boule allongée efl changée en celle de nymphe. Nous avons admiré ailleurs l’art avec lequel des chenilles de différentes efpeces fçavent fe conftruire chacune une coque, lorfque le temps de leur métamorphofe approche. Cette coque efl un logement dans lequel i’infecle doit être commodément Ôl en fureté. XV) F R E' F A C E. pendant qu’il fera crilhlicle; la plupart de ces coques font de foye, 6c la foye entre, même pour beaucoup, dans la compofition de celles où d’autres matières font employées. Nos vers ne fçavent point le faire d’aufii jolies coques, mais ils s’en font qui ne font,ni moins folides, ni moins fmguliéres. La peau même du ver qui fe transforme, lui fournit fa coque. Le ver pour devenir boule allongée, quitte fa peau, mais il la quitte fans en fortir, il en détache toutes fes parties, 6c les iaifte fous cette peau , à laquelle il fait prendre la figure d’un œuf. Il femble que la peau clu ver ne foit pour lui, que ce qu’eft pour nous une robe de chambre. Après avoir tiré nos deux bras d’une robe de chambre, nous pourrions nous en couvrir la tête, 6c tout le refie du corps: la peau du ver couvre de même l’infeéle changé en boule allongée. Mais cette peau pour le couvrir mieux, eft devenue plus folide 6c plus épaifie; au lieu qu'auparavant elle étoit molle & flexible, elle efi alors dure 6c roide ; elle forme une boîte bien clofe de toutes parts, qui a la figure d’une coque d’œuf, figure propfe à recevoir un infeéfe,qui n’a que celle d’une boule oblongue. A un des bouts de cette efpece de boule, à un des bouts de l’infeéte, on peut remarquer un enfoncement. C’efi de-là que fortent fuccefiivcment toutes les parties de la mouche qui doivent fe montrer, pour que la boule allongée foit changée en nymphe. Quand l’infecfie eft en boule, il reftemble à un fœtus qui aurait été rendu monf- trueux, parce qu’on aurait fait entrer fa tête, fes bras 6c fon col dans la capacité du ventre. En faifant fortir peu à peu ces mêmes parties du fœtus de cette cavité , on rendrait peu à peu au monftre la figure humaine. C’efi ainfi que lorfque les jambes, les ailes, la tête, qui étoient enfoncés dans la capacité du ventre de l’infeéte, viennent à en fortir peu à peu, à fe montrer en dehors, & à PREFACE . xv ij & à s’étendre fur le corps, que l’inlèéte qui ne fembloit qu’une longue boule charnue, devient une nymphe à laquelle on trouve toutes les parties d’une mouche. Quand les parties de la nymphe fe font affermies, l’in¬ fecte eff arrivé au temps où il doit paraître & vivre fous la forme de mouche, il eff arrivé au temps où il doit fortir de fa coque. Plus cette coque étoit lolide, mieux elle le défendoit lorfqu’il étoit dans l’impuiflance de fe mouvoir, & plus il doit paraître difficile à l’infecfte d’y faire l’ouverture qui lui devient néceffaire lorfqu’il veut en fortir. Nous expliquons dans le huitième Mémoire com¬ ment la mouche parvient à ouvrir la coque dans laquelle elle fe trouve renfermée ; c’eff par un des bouts, par l’anté¬ rieur, quelle en doit fortir: la nature a eu foin auffi de préparer ce bout, de manière qu’il n’oppofît pas aux efforts de la mouche, une réfiftance égale à celle que leur oppoferoient les autres endroits de la coque; il eff telle¬ ment conffruit, qu’il peut être fendu afles facilement en deux parties égales, & qui font ailées à détacher du reffe de la coque. Alors la mouche a une grande porte ouverte : la réfiffance qu’elle a eu à vaincre pour s’ouvrir cette porte, a pourtant encore de quoi paraître confidérable, quand on cherche quelle peut être celle de fes parties, que la mouche a pu employer pour furmonter cette réfiffance. On n’imaginerait pas quel eff l’inflrument au moyen duquel elle en vient à bout, & comment elle le fait agir. La tête des mouches, comme celle de la plupart des ani¬ maux, a une figure confiante; fon crâne eff cartilagineux, & comme écailleux; mais la nature a accordé à la mouche prête à naître, de pouvoir gonfler & contracter alternative¬ ment fa tête, &de plus, d’en faire fortir un mufeau d’une grandeur démefurée, capable de prendre differentes for¬ mes, & fouvent celle d’une veflîe. C’eft en gonflant fa tête xviij P R E F A C F. &lon mufeau, que la mouche agit à diverfesreprifes contre le bout de la coque qui la tient renfermée, qu’elle force ce bout à s’entrouvrir, & qu’elle force à tomber les deux demi-calottes, ou au moins une des deux demi-ca¬ lottes dont il efl compofé. Le corps de la mouche qui vient de naître, efl beaucoup plus petit que celui des autres mouches de fon efpece; les ailes d’ailleurs font fi pli (fées & fi raccourcies, qu’on lesprendroit pour des ailes avortées ; mais bientôt le corps acquiert du volume, & les aîles s’étendent & lé développent, lied probable que ces effets font dûs à l’air que la mouche rcfpire, puifquc nous avons vu quelquefois l’air entrer dans l'aile d’une mou¬ che «aidante, & toute mince qu’eft cette aile, la dédou¬ bler pour ainfi dire, & en faire une veffie. Le neuvième Mémoire donne l’hiftoire abrégée rie pluficurs efpcces de mouches à deux aîles & à corps court; on y voit que quoique la plupart de ces efpeces de mou¬ ches aiment les liqueurs mielleufes ou fucrées, & le lucre même, que les clpeccs de vers fous la forme defqucls elles ont pris leur accroiffcmcnt, différoient entr’elles en goût ; qu’entre ces efpcces devers, les unes n’aimoient que les matières végétales; que les autres ne fe nourrifïbient que de chair; & que les autres ne trouvoient un aliment con¬ venable que dans des matières qui avoient déjà été digé¬ rées par de plus grands animaux. Au refle, entre les vers qui aiment les plantes, les uns aiment des plantes ou des parties tle plantes dont les autres ne voudraient pas goû¬ ter. Entre les vers carnaciers, les uns ne veulent que la chair des animaux vivans,& les autres que celle des ani¬ maux morts, quelques-uns la veulent corrompue jufqu’à un certain point. Différons cxcrémcns d’animaux nour- riffent différentes efpcces de vers. Nous avons déjà Lit admirer bien des fois la prévoyance qui conduit les meres-: PREFACE. xi x mouches à faire naître leurs petits fur des matières qui leur offriront un aliment convenable dès qu’ils feront nés; ce Mémoire nous fournit encore plulieurs nouveaux exemples de cette prévoyance; il nous apprend que les mouches ne font pas feulement attentives au choix de la matière, elles le font à l’état de cette matière; lesgroffes mouches bleues en donnent un exemple bien remarqua¬ ble : leurs vers doivent être nourris d’une chair molle & qui puiffe fe corrompre, fi on offre aux meres-mouches de la chair defféchée, ou, ce qui eft plus fingulier, fi on laiffe à leur difpofition de la chair fraîche, dans des en¬ droits où elle doit fe deffécher vite fans fe corrompre, les mouches ne feront pas leurs œufs deffus. Nous faifons obferver dans le même Mémoire, quelques-unes des va¬ riétés qui fe trouvent entre les œufs de différentes mou¬ ches, plufieurs de ces œufs ont des formes qui nous doi¬ vent paroître bien recherchées, & qui leur ont été don¬ nées pour des fins qu’il nous eft quelquefois permis de connoître. Nous faifons voir comment ces œufs font ar¬ rangés dans le corps de la mere; nous difons quelque choie de la manière dont ils font fécondés par le mâle; 6c nous rapportons des obfervations qui prouvent que dans l’accouplement de certaines mouches, la femelle lèmble faire ce que font les mâles dans l’accouplement de tous les autres animaux, que c’cft la partie poftérieure de la fémeüe qui s’introduit dans le corps du mâle. Toutes les efpeces de quadrupèdes font vivipares, toutes les efpeces d’oifeaux font ovipares, & parmi les infeêles, comme parmi les poiffons, il y a des efpeces ovipares 6c des efpeces vivipares. Le dixiéme Mémoire nous fait connoître quelques efpeces de mouches à deux aîles, qui font vivipares, qui mettent au jour des vers vi- vans. II doit paroître fingulier qu’entre des mouches affés c l 'i XX . PREFACE. femblables, qu’entre des mouches de même genre 6c d’ef- pcce peu différente, les unes biffent des œufs, pendant que les petits fortent vivans du corps des autres. La prodi- gieufe fécondité que la nature a accordée à quelques-unes des efpcces de mouches vivipares, a bien plus de quoi furprendre; il y a telle de ces dernières mouches, dont le corps renferme à la fois plus de vingt mille vers. On verra élans ce Mémoire comment tant de vers font arrangés élans le corps de leur mere, ét comment ils parviennent à en fortir. Ceux même qui ont donné le moins d’attention aux infecles, connoilfent les abeilles, les guêpes, les frelons & les bourdons. Des mouches de ces elifférens genres le préfentent h fouvent à nos yeux, qu’il feroit difficile de trouver quelqu’un qui n’eût pas une idée, au moins grol- fiére, de leur figure, Sc qui n’eut pas eu occafion d’ap¬ prendre le nom qui a été donné à chacune de ces fortes de mouches. Elles ont quatre ailes; leur hifloire eft refervée pour le Volume fuivant, celui-ci ayant été accordé aux mouches à deux ailes. Parmi ces dernières, il y en a qui reffemblent fi fort aux abeilles, d’autres qui reffcmblent fr fort aux guêpes, d’autres qui reffcmblent fi fort aux frelons, & d’autres qui reffemblent fi fort aux bourdons, que lorf- que l’on s’en rapporte au premier coup d’œil, on les prend pour quelqu’une de ces mouches. Le onzième Mémoire donne l’hiftoire des mouches à deux ailes qui ont l’air d’abeilles, & de celles qui ont l’air, foit de guêpes, foit de frelons; 6c le douzième Mémoire ne traite que des mou¬ ches à deux ailes qui ont l’air de bourdons. Les infedes qui, après leur dernière transformation, font des mouches à forme d’abeilles, ont été d’abord des vers de la fécondé claffc, des vers à tête de figure variable, mais qui font pourvûs de jambes. La plûpart de ces vers font caradérifés PREFACE. xxj par une queue longue & rafe, ce qui nous a déterminé à leur donner le nom de vers h queue de rat. Les naturalises qui ont le plus parlé de ces vers, ont ignoré l’ufage & les lingularités de cette queue. Quoiqu’on trouve de ces vers fur terre en certains temps, ce font des vers aquatiques; dès l’infiant de leur naifiance, ils font dans l’eau, ou dans des matières excefiivemcnt abbreuvées d’eau, & c’efl dans l’eau qu’ils prennent leur accroiffcment : mais quoiqu’ils doivent vivre dans l’eau, ils ont befoin de relpirer l’air, & leur queue efi l’organe avec lequel ils vont le chercher au delîus de la furface de l’eau. La queue y peut atteindre, quoique le corps en foit fort éloignépelle peut s’allonger confidérablement, devenir longue de plus de quatre à cinq pouces. On a le plaifir de voir même à l’œil, les gros vaiffeaux à air dans l’intérieur de l’inièéte, la tranfparence de fon corps le permet ; on y voit comment ces vaifleaux le plient & replient, & comment ils s’allongent & fe déplient, félon que la queue s’accourcit ou s’allonge. Ces infeétes, après avoir paflè dans l’eau la première partie de leur vie, après y avoir pris tout leur accroiffement, ont à palier la fécondé partie de leur vie fous terre, & enfin à en palier la dernière partie dans l’air. Quand ils n’ont plus à croître, ils quittent l’eau, ils marchent fur Ja terre jufqu a ce qu’ils en ayent trouvé qui les invite à s’y enfoncer. Us ne refient pas long-temps fous terre fans y perdre leur première forme; ils fe font une coque de leur propre peau, comme nous avons vû les vers de la viande s’en faire une de la leur; mais la coque de nos vers à queue n’efi pas aulfi fimple que celle de ces autres vers; bientôt on voit fur fa partie antérieure & fupérieure, quatre cornes roides, dont les deux plus grandes pouffent & s’élèvent, après que la coque eft formée. Les coques de plufieurs autres vers, comme les coques de nos vers à queue de rat, ont des cornes, & c iij xxij P R E F A CE. ccllcs-ci nous donnent occafionde faire connoître de quel ufage font ces cornes à l'infecte renfermé dans la coque. Nous prouvons qu’elles font quatre tuyaux, au moyen clef- quels il refpire l’air. Mais comment ces cornes parviennent- elles à s’élever au deflùs d’une coque roide6c dure! comment la percent-elles î où étoient-elles contenues dans l’infecte, lorfqu’il avoit la forme de ver! Ce font de petits myftéres qui dévoient paroître difficiles à développer, 6c fuppofer bien de laméchanique; auffi n’euffiai-je paselperé que tout ce qui les regarde, eût pu être expolc à mes yeux auffi diftinctement qu’il l’a été. Une autre très-grande fmgularité dans la dernière transformation de ces infectes, dans celle qui les fait paroître mouches, c’eft que la mouche, pour forcir de fa coque, eft obligée de s’y retourner bout par bout. C’eft du côté où étoit la tète, que la coque doit s’ouvrir, qu’une pièce en doit être détachée. La nature n’a pas mis la tête de ces mouches en état d’agir, comme agiflent celles de plufieurs autres mouches, de fe gonfler 6c cle fe contracter; mais elle a donné à leur derrière, la force 6c l’activité qu’elle a accordées à la tête des autres, pour forcer leur prifon dans l’endroit où elle peut être forcée. La mouche cft donc obligée de fe retourner dans fa coque, de faire pafler fon derrière à la place où la tête avoit toujours été, 6c de faire prendre à celle-ci, l’an¬ cienne place de celui-là. Les mouches à deux aîles qui ont l’air de bourdons, font celles dont il s’agit dans le douzième Mémoire, 6c il n’en eft point de plus propres à nous faire admirer les diflferens moyens que l’Auteur de tous les êtres s’eft plu à employer pour multiplier 6c conferver les efpeces d’in¬ fectes, pour faire admirer cet inftinct qui conduit fine¬ ment les nacres-mouches à faire naître leurs petits dans les feuls endroits où ils peuvent trouver des alimens, 6c une PREFACE. xxiij température de chaleur convenable. Entre ces mouches à forme de bourdons, il y en a dont les vers ne peuvent croître que fous terre, & ce Mémoire nous donne l’hiftoire d’une de ces mouches qui ne confie fes œufs qu’à des oignons de narciiïe, parce que fes vers ne peuvent vivre que de cette efpece d’oignon. Mais nous devons être bien plus furpris de l’inftinét qui conduit les meres d’un autre genre de ces mouches, à aller dépofer leurs œufs dans l’anus d’un cheval, parce que les vers qui en éclofent, doivent vivre, julqu’à ce qu’ils foient près de fe transformer, dans les inteftins de cet animal. Pouvons-nous apprendre fans admiration que des mouches d’un autre genre ont été inftruites à aller percer le cuir des animaux qui l’ont le plus épais, celui des cerfs & des biches, celui des bœufs Si des vaches; qu’elles ont été pourvues d’inftrumens propres à le percer; que dans chaque trou qu’elles ont fait dans lepaifle peau de ces animaux, Si dans leur chair même, elles dépolènt un œuf; qu’une mouche feme, pour ainfi dire, fes œufs dans la chair d’un bœuf ou d’un cerf vivant. Chaque ver, après être éclos, fe trouve entouré d’un aliment convenable; il grofTit, Si en même-temps il fait croître fa cellule; l’endroit où il eft, eft marqué par une tumeur grofle quelquefois comme la moitiéd’un petit œuf. Le ver qui a befoin de refpirer l’air, en reçoit continuelle¬ ment, par une ouverture qu’il fçait conferver à la tumeur dont il occupe la cavité. La même ouverture donne un écoulement au pus qui pourroit s’amafter en trop grande quantité dans la playe que ce ver entretient. Enfin, quand ce ver a pris tout fon accroiftement, il lui convient d'être dans un lieu plus fec, & d’une chaleur plus modérée; il fçait aggrandir l’ouverture de la tumeur, il lort, Si va fe cacher quelque part lous une pierre ou ailleurs, pour fe trans¬ former. Les vers des inteftins des chevaux fortent aufft, xxiv PRETA CE. 6c vont fe cacher fous terre, 6c s’y métamorphofent. Un inftinél, au moins aulfi fingulier que celui des mouches précédentes, conduit une autre mouche à aller faire fes oeufs dans le propre nez d’un mouton, d’une chevre,*d’un cerf; c’efl dans les finus frontaux de ces grands animaux, que les vers qui fortent des œufs doivent aller chercher line matière vifqueufe, qui efl le l'eul aliment qui leur a été affigné. La mouche qui place fi finguliérement les œufs, n’eft point de celles qui ont l’air de bourdon; mais fins m’être arrêté à fa figure, j’ai cru la devoir mettre à la fuite des mouches remarquables par les endroits quelles choifififent pour y faire leurs œufs. Communément on ne connoît les infeéles que par ce qu’ils ont de haïffable, & il faut avouer que la haine qu’on a pour ceux de certaines efjjeces, n’efl que trop fondée. Les uns font d’étranges dégâts des feuilles, des fleurs 6c des fruits de nos campagnes 6c de nos jardins, & d’autres s’attaquent à nous-mêmes, 3c nous perfécutcnt jour 6c nuit. Les coufins font de ceux dont nous avons le plus à nous plaindre, ce font pourtant ceux que nous voulons faire admirer dans le treiziéme 6c dernier Mémoire. Nous ne croyons pas auffi qu’on puiffe refufer fon admiration à la trompe même avec laquelle ils nous picquent, qu’on puiffe voir fans furprife avec combien d’appareil elle efl confiante, 6c qu’on puiffe apprendre fans plaifir com¬ ment le coufin la fait agir, 6c même fans fentir quelque defir de la voir dans l’adtion, quoiqu’il nous en puiffe coûter de la douleur. Le coufin a pris fon accroiffement dans l’eau , fous la forme d’un ver qui pourtant vient fouvent à fa furface pour rcfpirer l’air par un tuyau qu’il a au derrière. C’eft dans l’eau même que le ver fe méta- morphofe en une nymphe agile comme il l’étoit lui-mê¬ me, 6c qui comme le ver a befoin de rcfpirer l’air; mais au lieu PREFACE. xxv au lieu que le ver le relpiroit par la queue, la nymphe le relpire par Jeux tuyaux faits en oreille J ane,qu’elle a lur le corcelet. Ce corcelet fe fenJ lorfque le coulin eft en état Je paraître avec les allés. C’eft à la furface Je l’eau que le coufin Joit fortir Je fa dépouille, & il en Joit for- tir fans fe mouiller; l’eau qui lui étoit néceflaire aupara¬ vant, eft pour lui ce qu’il y a Je plus reJoutable Jès qu’il commence à paraître à l’air. La manière Jont il fe foû- tient Sc s’élève fur fa Jépouille au Jeffus Je la furface Je l’eau, eft un tour J’équilibre 6c Je force très-difficile. Après avoir vécu Jans l’air, après avoir fuccé notre fang ou le fuc Jes plantes, c’eft fur l’eau que les fémelles Jes coufms viennent faire Jes œufs. Chaque œuf a la figure d’une quille: Je trois cens Je ces petites quilles & plus, chaque mere fait un petit bateau quelle met à flot fur l’eau. Au bout J’un jour ou Jeux un ver fort Je chaque œuf par le bout qui touche l’eau. L’art au moyen duquel le coufin parvient à conftruire le petit bateau d’œufs, ne doit pas paraître aifé à deviner, il Joit paraître fuppofer bien Je l’induftrie; car comment le coufin peut-il réuffir à pofer chaque œuf perpendiculairement à la furface Je i’eau î 6c ce qui femble encore plus difficile, comment maintient - il dans cette pofition, le premier œuf, ou un affemblage de peu d’œufs ï On verra Jans le Mémoire, comment tout cela s’exécute, au moyen de la direction dans laquelle l’œuf fort du derrière du coufin, & Je l’ulage adroit que le coufin fçait faire Je fes Jeux dernières & longues jambes. Les coufins font des mouches à corps long, & il y a un genre de mouches avec lequel ils ont beaucoup Je reflemblance, que nous avons déjà nommées Tipules ; ces mouches 6c d’autres qui paroiflent au printemps, appel¬ les mouches Je Saint Marc, en un mot quelques obfer- vations qu’il nous refte encore à donner fur les mouches . d xxv; PREFACE, à deux aîles, n’ont pû trouver place dans ce volume, dont la groffeur même a été portée trop loin; ces obfer- vations, dis-je, font donc renvoyées au commencement du cinquième volume. Ce cinquième volume eft fur-tout deftiné à fhifloire des mouches à quatre ailes. C’efl la partie de fhifloire des infeCtes, la plus propre à intéreffer ceux (pii font principalement touchés du génie & de fin- duftric de ces petits animaux. Quatre volumes qui paroiffent déjà fur les infeCtes, demandent que nous raffût ions ceux qui défirent que l’ou¬ vrage que nous avons entrepris, foit rendu complet, contre la crainte qu’ils peuvent avoir que cet ouvrage, pour être rendu tel, n’exige une trop grande fuite de volumes, une fuite que nous ne fçaurions fuffire à donner, & qu’on re¬ douterait d’avoir à lire, fi elle étoit donnée. Nous ne pou¬ vons mieux diffiper cette crainte, qu’en indiquant les prin¬ cipales matières dont il nous refie à parler: nous y lou⬠mes même engagés par une autre confidération, le goût de faire des collections d’infeCîes gagne journellement; on aime à voir raffemblés dans un cabinet, tous les infe¬ ctes que des yeux curieux & attentifs ne parviennent à trouver dans les campagnes qu’en les y cherchant en dif¬ férentes faifons, &même en différentes années. Ces fortes de colleétions forment d’amufans fpcCtacles, propres à nous montrer les richcffes & la féconde diverfité des pro¬ ductions de la nature. Nous donnerons ailleurs dans un Mé¬ moire féparé, les moyens qui nous ont le mieux réuffi pour confcrver pendant une longue fuite d’années, avec un air de vie,des infeCtes morts;mais je dois répondre d’avance à unequcflion qui m’a été fiiteparties fçavansqui ont com¬ mencé ces fortes de collections. Ils m’ont demandé quel eftr ordre dans lequel je croyois qu’il convînt d’arranger les iufcCtcs dans des cabinets. Comme je penfé que c eft celui P R E' F A C E. xxvi/ dans lequel ils le trouveront clans nos volumes, pour faire connoître cet ordre, ii ne me relie qu’à apprendre quel fera celui dans lequel je parlerai des inlèéles qui doi\uit le trouver dans les volumes qui n’ont pas encore vû le jour. Nous commencerons le cinquième volume par ce qu’il nous relie à dire fur les mouches à deux ailes; mais la plus grande & très-grande partie de ce volume, lera remplie par les mouches à quatre ailes. Les fourmis pa- roîtront à la fuite des mouches à quatre ailes, parce que dans toutes les fourmilliéres on trouve en certains temps de l’année, des fourmis ailées qui font de véritables mou¬ ches à quatre ailes; les fourmis ordinaires font parmi les mouches, ce que font parmi les papillons ceux qui n’ont point d’ailes. Les mouches & les papillons ont leurs ailes à découvert, mais il y a des infeéïes dont les ailes lont ca¬ chées fous des fourreaux, & ce feront ceux qui viendront après les fourmis. Les uns ont des fourreaux limplement membraneux, des fourreaux flexibles, & qui ont fouvent quelque tranfparence; ce feront ceux dont nous traiterons d’abord. Les fauterelles, les grillons, les grillons taupes, les punaifes de jardin, &c. ont de ces fourreaux membra¬ neux. D’autres infeéïes ont leurs ailes cachées & pliées fous des fourreaux roides & opaques, fous des fourreaux écailleux ou crufhcées; tels font tous les infeéîes de la nombreufe claffe des fearabés, parmi lefquels lont les charençons fi redoutables à nos greniers. Nous ne manque¬ rons pas de rapporter ce que nous avons tenté contre ceux- ci. Les perce-oreilles, les ftaphilins ont aulfi des fourreaux qui, pour être très-courts, n’en couvrent pas moins bien leurs ailes. C’eft une réglé générale que tous les infeétes ailés ont paffé par plufieurs états avant que d’avoir des ailes; mais il y a des infeétes dans la claffe defquels on n’en connoît point d’ailés, & qui cependant ont des xxviij PRE FACE. transformations à fubir; le nombre n’en elt pas grand, i’hifi- toire des puces nous donnera un exemple de ces lortes d’infeéles. Je finirai par les inlèétesqui n’ont point à palier par des formes differentes, qui, à la grandeur près, font, dès qu’ils naiffent, ce qu’ils feront pendant toute leur vie. Telles font les araignées, les cloportes, les mittcs,les poux de plufieurs elpeces d’animaux, les vers de terre, les lang- iues,&c. Voilà en gros les infedes fur lefquels il nous relie à donner des Mémoires. Quoique le nombre de ces inleéîes foit grand, fi on le compare avec le nombre de ceux dont nous avons traité, & fi on fait attention que les détails où nous avons été obligés d’entrer à l’occalion des infedes qui ont paru les premiers, nous en épargne¬ ront par rapport à ceux qui viendront enfuite, notre tâche doit paraître avancée; & on peut croire qu’on la verra remplie en peu d’années, lorfqu’on fçaura qu’on com¬ mence l’impreflion du cinquième volume. L’efîentiel pour un ouvrage de la nature de celui-ci, cil d’avoir les matériaux qui doivent y entrer, & il faut s’y être pris de loin pour les raflembler. Il n’en eft point de ceux qu’il me falloit, comme de ceux qu’un laborieux compilateur peut s’alfûrerde trouver avec un travail alfidu dans les bibliothèques; c’elt dans les livres de la nature qu’on doit lire, quand on veut travailler fur l’hilloire natu¬ relle, & on ne peut pas y lire quand on veut : il faut des lieux, des failons, & des circonllances favorables pour faire les obfervations nécelfaires. Quelquefois à la vérité on peut aider à frire naître des circonllances heureufes, mais plus fouvent il fuit que le hazard nousferve. Au relie, je refpede trop le public, pour avoir pris avec lui des engagemens, avant que de me lèntir en état de les remplir; & j’aurois mal répondu à fon attente, 11, pour fatisfaire à ces engagemens, je me fuflé trop prclfc PREFACE. xxix d’arriver au terme. J’enfle pourtant travaillé plus au gré de ceux qui craignent les longues ledures, & qui ne veulent fur aucune matière, des connoiflances trop appro¬ fondies , fi je me fufle contenté de renfler mes préfaces ; j’y aurois trouvé mon compte, fi c’eût été le trouver, que de m’épargner du travail. D’ailleurs quand on n'a dans Ion travail,que le frivole objet d’acquérir de la gloire, & qu’on a été afles heureux pour avoir donné fur une matière, un ou deux volumes qui ont réufli, on peut le tenir tranquille ; indépendemment du rifque de faire plus mal, on ne doit pas croire que la gloire qu’on a acquife, fe multipliera en même proportion que le nombre des volumes égaux en bonté au premier; fouvent ils n’y ajoûteront rien, c’efl beaucoup qu’ils ne la diminuent pas. Mais l’écrivain dont les ouvrages font cftimables, a agi par des motifs qui l’étoient peu, lorfquela feule paflion de fe faire eftimer lui a fait prendre la plume. J’ai eu fouvent de fenfibles plaifirs en voyant en détail une partie des merveilles que celui qui feul en fçait opérer de véri¬ tables, a prodiguées pour varier fl prodigieufement les efpeces d’infecles, 6c pour les perpétuer. Il m’a paru agréable de mettre a portée de jouir des mêmes plaifirs , ceux qui peuvent y être fen fibies; de leur procurer de ces plaifirs doux 6c tranquilles, qui valent à celui qui les goûte , d’excellentes leçons de morale, qui élevent l’efprit vers l’Etre des êtres, 6c de l’exiftence duquel nous fom- mes trop rarement occupés: enfin de leur procurer de ces plaifirs qui peuvent conduire à ce qu’on appelle des décou¬ vertes utiles. J’ai cru qu’on aimeroità apprendre toutes ces circonf- tances, 6c tous ces détails de la vie des infeétes,que j’avois vûs avec admiration; malgré la néceflité d’en devenir plus long, j’ai fur-tout cru devoir rapporter comment j’avois d iij XX* PREFACE. vû, afin qu’on fut en état de juger du degré de confiance qu’on pouvoit avoir dans mes obfervations ; qu’on fût en état de juger fi je ne m’en étois pas laide impofer par des apparences, & qü’on fût en état de revoir après moi. Pour ne m’en fier pas à moi-même au dc-là de ce que je le devois, j’ai conlulté lesSçavans les plus célébrés des différentes parties de l’Europe, avec lefqucls j’ai l’avantage d’être en relation. J’auroisàme plaindre de leur excès de politefle, fi, malgré les in flan ces fincéres que je leur ai faites dans les termes les plus forts, de me redreffer, ils euffent tous concouru à me laiffcr croire que je ne pou- vois mieux faire, que de ne me point écarter de la méthode que j’ai fuivie dans le premier volume, dans les volumes que j’aurois à flaire paraître fucceffivement. D’ailleurs, la manière obligeante dont ces Sçavans étrangers, auxdefirs & aux vues defquels je me fais gloire de déférer, cette manière obligeante, dis-je, dont ils m’ont témoignéfouhaiterque je fuiviffe, fans interruption, un ouvrage qui manquoit à la plus étendue des parties de l’hifloire naturelle, n’a pas peu aidé à me (oûtenir contre les dégoûts qui peuvent être à craindre dans toute carrière longue à parcourir. Je ferais pourtant trop peu fcnfible à la reconnoiffance, fi je laiffois ignorer que je n’ai pas eu befoin d’attendre du dehors du Royaume, les encourage- mens les plus propres à ranimer l’ardeur, & à la renouveller. Detelsencouragemcnsnefçauroient manquer aujourd'hui en France, à ceux qui travaillent avec zélé aux progrès des Sciences. Nous ne pourrions, fans ingratitude, oublier ces temps où l’immortel Colbert fit pour les Sciences ce que le Cardinal de Richelieu avoit fait pour la Langue Fran- çoife; ni des temps plus récents, où un Régent, à qui toutes les Sciences étoient fi familières & fi chères, leur donnoit la protection la plus éclatante. Sans pourtant avoir PREFACE . xxx; à craindre detre foupçonncs de louer les temps préfens, par des motifs indignes de quiconque aime le vrai, nous pouvons publier que jamais le Miniflére ne fut plus favo- rable aux Sciences qui font l’objet de l’Académie, qu’il l’efl aujourd’hui. Non-feulement il leur donne cette atten¬ tion fi flateufe pour ceux qui les cultivent, il n’épargne même aucune des depenfes néceffaires à leurs progrez. Dans quelle partie du Monde ignore-t-on aujourd hui les dépenfes vrayement royales qui ont été faites pour mettre des Académiciens auffi courageux qu’habiles, en état de nous découvrir la figure de laTerre! On fçait déjà le l uccès complet qu’ont eu les travaux de ceux qui ont été dans le Nord, s’expofer aux horreurs d’un froid qu’on n’eût pas cru fioûtenable à des hommes nés dans nos climats tem¬ pérés. Les nouvelles que nous recevons du Pérou, nous donnent lieu d’attendre d’au [fi grands fuccès de la part des Académiciens, qui ayant été braver les ardeurs de la zone torride, ont eu fous cette même zone, à fouffrir des froids auffi grands que ceux de nos rudes hivers. Il ne faut qu’entrer dans le Jardin du Roy, pour être frappé de ce qui y a été fait pour la Botanique, depuis que le foin de ce Jardin a été confié à M. du Fay, & qu’on lui a fourni les fonds néceffaires pour la confîrucJion de plufieurs ferres magnifiques, & pour y faire un très-grand nombre d’embelliffemens, & beaucoup de différens travaux uniquement utiles. Je laiffe à d’autres à parler de tant de précieufesacquifitions qui ont été faites, foit pour la Biblio¬ thèque, foit pour le Cabinet du Roy, ou plutôt pour les Sçavans. Mais qu’il me foit permis de comparer par un feul trait, le fort des Sçavans qui compofent l’Académie des Sciences, avec celui des Sçavans des autres Etats de l’Europe. Lorfque ceux-ci ont eu à faire paroître fur quel¬ qu’une des parties de i'hifloire naturelle, des ouvrages qui xxxij P P P' P A C P. demandoient une fuite de planches, ces planches n’ont pu être gravées, quautant que divers particuliers y ont con¬ tribué: jemengagerais dans une longue énumération, li je voulois citer tous les ouvrages de ce genre, dont chaque planche porte le nom de celui aux frais duquel elle a été gravée, & fou vent le nom d’un Sçavantou d’un Seigneur Anglois; les Anglois, qui contribuent à faire paraître au jour tles ouvrages utiles, ont un zélé pour l’avancement des Sciences, digne des plus grands éloges, une forte de zélé dont on trouve peu d’exemples parmi les François. Mais la magnificence du Roy ne nous permet pas de fçavoir ce que nous ferions capables de faire en ce genre; elle fournit à toutes les expériences que l’Académie juge devoir être tentées, à tout ce qui peut faciliter fes recher¬ ches , & contribuer à les rendre utiles au Public, aux deffeins & aux gravures des plus belles & des plus grandes fuites de planches. Sans parler d’une partie des planches des Mémoires de l’Académie, de celles qui regardent les Infeéles, combien de planches ont été gravées aux dépens du Roy, pour l’hiftoire des Animaux & pour l’hiftoire des Arts, ouvrage aufîi curieux qu’utile, & fur lequel je ferai paroître ce que j’ai raffemblé, dès que les Infeéles me lai (feront libre i Combien de planches gravées dans la plus grande perfeélion, pour l’hiftoire des Plantes, l’Académie n’a-t elle pas à faire paroître au jour î De quelque prix que puiflent être des inftrumens néccftaires à des expériences & à des obfervations , les Académiciens n’ont qu’à les fouhaiter; c’cft par la magnificence du Roy, que nos Aftronomes font abondamment pourvus de tant de Quarts- de-cercle & autres inftrumens du même genre, conftruits avec le plus de foin, &. par les plus habiles mains de l’Europe; qu’ils font pourvus des plus grandes Lunettes, dont les verres lont l’ouvrage des Maîtres les plus fameux. Mais PRE FACE. xxxiij Mais les motifs d’encouragement que je viens d’indi¬ quer, ne font pas les feuls par lefquels j’aye dû être foû- tenu; il m’efl glorieux de pouvoir publier que j’en ai eu un beaucoup plus puiffant. Si je le taifois, comme la mode (lie le voudrait, j’aurais à me reprocher d’être trop peu lenfible aux progrès des Sciences. Quels prodiges de valeur n’a pas fait faire en tout temps aux François, l’envie de plaire à leur Roy! Ne peut-elle pas leur faire faire de pareils prodiges dans les fciences& dans les beaux arts, ou plûtôt, neJ’a-t-elle pas déjà fait! Quinault & Lully,Racine, Moliere, &c. euffent-ils été tout ce qu'ils ont été, fans le defir de plaire à Louis XIV! N’eft ce pas ce même defir qui nous a valu des le Brun, des Mignard, des le Sueur, des Girardon, des Puget, Si tant de peintres & de fculp- teurs célébrés ! Les François feront toujours ce qu’il plaira à leur Roy qu’ils foient. Quoique l’étude que j’ai faite des infeéfes, m’ait appris un très-grand nombre de faits admirables, je n’en fçais pas à beaucoup près affésà mon gré; je ne me rappelle prefque que les myfléres qui refient encore dévoiler, lorfqu’un Roy qui n’a d’autre paffion que celle de rendre heureux des fujets qui l’adorent, îorfqu’un Roy que l’Europe entière fouhaite avoir pour arbitre, veut bien me demander fi les infeéles m’ont fourni quelque nouvelle découverte; lorfqu’il veut que je lui raconte celles de leurs merveilles, dont j’ai été nouvelle¬ ment frappé; lorfqu’avec une bonté, & des grâces dont on fent toute l’impreffion, fans les pouvoir peindre, il daigne me faire des queflions qui ne fembferoient devoir être faites que par ceux qui connoiffent le mieux toutes les branches de l’hiftoire naturelle. En quelle autre circonf- tance fe fentiroit-on des defirs aufli vifs de découvrir les fecrctsde la nature, des defirs auffi capables d’y faire réuffir! Combien de fois M. Caffini n’a-t-il pas été furpris des . e xxxiv P R E' F A C Eo connoiiïances dans l’aftronomie, que fuppofoient les queflions que le Roy lui faifoit! Nos Académiciens qui font de retour du Nord, 6c ceux qui font encore au Pérou, ont dû, comme ils l’ont fait, furmonter toutes les difficultés que le courage peut vaincre, lorfqu’ils ont appris combien le Roy s’intéreffioit aux fuccès de leurs voyages, avec quelle bonté il vouloit être inffiuit des plus petits détails qui y avoient rapport. Enfin les progrès des Sciences, qui font l’objet de l’Académie, ne font-ils pas certains, dès que le Roy les defire, 6c les defire en Roy! Ne devons nous pas elpcrer que les Sciences reconnues pour vraiment folidcs 6c utiles, feront portées fous fon régné , à un auffi grand dégré de perfection, que l’ont été la poëfie 6c les beaux arts fous le régné précédent ! TABLE DES MEMOIRES CONTENUS DANS CE VOLUME. PrêF A C E, ou l’on donne une idée générale des Mémoires contenus dans ce Volume, if quelques remarques fur la fuite de l’Ouvrage. Page iij H. Premier Mémoire. IJloire des Gallinfeftes. Page i Second Mémoire. Des Progallinfeftes de la Coche¬ nille, if de la graine d’Ecarlate de Pologne. 81 Troisième Mémoire. De la dijlribution générale des Mouches, en claf'es, en genres & en efpeces. 12 3 Quatrième Mémoire. Des clajfcs & des genres des Vers qui fe métamorphofent en Mouches, fit à deux ailes foit à quatre ailes. 161 Cinquième Mémoire. Des Trompes à levres groffes & charnues des Mouches à deux ailes. 199 Sixième Mémoire. Des parties extérieures if des parties intérieures des Mouches, èr principalement de cel¬ les des ADuches à deux ailes if à corps court, 239 Septième Mémoire. De la première & delà fécondé Mêtamorphofe des Vers qui fe font une coque de leur propre peau. 285 Huitième Mémoire. De la dernière Mêtamorphofe des Infeâes qui fort eut des coques faites de la peau du Ver, fous la forme de Abouches à deux ailes. 3 3 1 Neuvième Mémoire. Hifoire abrégée de divers genres & de diverfes efpeces de Adoucîtes à deux ailes, de la première clafe, & qui viennent des Vers de la pre¬ mière clajjè. Des matières dont elles fe font nourries fous la forme de Ver. De leur accouplement, de leur ponte, dr de la figure de leurs œufs. 353 Dixiéme Mémoire. Des Adoucîtes vivipares à deux ailes. Comment les petits Vers vivans font placés & ar¬ rangés dans le corps de la mere. 403 Onzième Mémoire. Des Adoucîtes à deux ailes qui ont l’air d ’Abeilles, & de celles qui ont l ’air de Guêpes dr de Frelons. ^ 9 Do uziéme Mémoire. Des Adoucîtes à deux ailes qui ont l ’air de Bourdons ; dr de la Mouche du Ver du ne^ des Moutons. Treiziéme Mémoire. Hifoire des Confins. 573 L A Vignette qui elt à la tête du premier Mémoire, repréfente une de ces magni¬ fiques Serres qui ont été conftruites au Jardin du Roi, depuis que l’intendance de ce Jardin a été donnée à M. du Fay. Sur le terrein qui elt en devant de cette ferre, on a placé d’un côté des caiffes, dont chacune contient un de ces petits chênes fur lefquels le Kermès croît; & dans chacune des caiffes qui font de 1 autre côté, elt un pied d’Opuntia, un pied d’une plante du genre de celles fur kfquelles la Cochenille fe nourrit. MEMOIRES MEMOI POUR SERVIR A L’HISTOIRE DES INSECTES. PREMIER MEMOIRE . HISTOIRE DES GALLINSECTES. ’EST une chiffe d’animaux bien étranges que la claffe de ceux que nous allons examiner dans ce Mémoire; ils paffent une partie con- fidérable de leur vie, plufieurs mois de fuite. Si ceux où ils croifient le plus, appliqués contre des tiges ou des branches de plantes, d’arbrifléaux Si d’arbres, fans fe donner aucun mouvement fenfible. Ils y font auffi immobiles que la portion de la tige à laquelle ils font attachés; ils femblent faire corps avec Tome IV. . A * PI. 9-g>8- 5 - % 3 - 2 MEMOIRES POUR LHlSTOIRE elle. Leur forme extérieure eft extrêmement fimple, 8 c elle l’eft à un point qui eft une grande fingularité. Tout l'extérieur de l’infeéle ne montre rien qui le fade l'oupçon- ner celui d’un infecfle *. Plus l’infedle eft grand, plus il eft: i, parfait, & moins il a l’air d’avoir vie. Dans le temps même où il eft devenu en état de fe multiplier, dans le temps où il eft occupé à pondre des milliers d’œufs, il ne paroît qu’une galle, qu’une excroiftance femblable à celles des arbres, dont nous avons parlé dans leMémoire xil. tome iii. qui doivent leur origine à des piquûres d’infeéles, 6 c dans lefquelles des inlèétes s’élèvent. Ce ne font pas feulement des yeux ordinaires qui jugent ces petits ani¬ maux de fimples galles d’arbres, ils ont paru tels aux yeux les plus accoutumés à obferver. M. le Comte de Marfilli après avoir étudié ceux d’une efpece, les a toujours mécon¬ nus pour des infectes, 6c eft refté convaincu qu’ils n’étoient que des galles. Des infectes qui reflemblent fi fort à des galles, quoi¬ qu’ils n’ayent de commun avec elles que la reftemblance extérieure, m’ont paru ne pouvoir porter un nom plus convenable que celui de Gûllinfeâes. Ce fera le nom commun à toute la clafle,qui en manquoit; 6c je diftin- guerai les efpccespar le nom de la plante fur laquelle elles croiftent, ou par d’autres particularités. Les gallinfeétes ne içauroient être placées plus convenablement, ce mefem- ble, qu’à la fuite de l’iiiftoire des Galles, par laquelle finit le troifiéme volume de nos Mémoires; ceux qui voudront obferver les galles, doivent être mis en état de ne les pas con¬ fondre avec des inlcétes qui leur rcffcmblcnt, & de donner à ces derniers une attention dont ils font très-dignes. C’cft fur les arbres, fur les arbrifteaux, 6c ordinairement fur des plantes qui paftent l’hiver, que croiftent les gallin- fcéïes. 11 faut à toutes celles que je connois, une plante qui 031 des Insectes. 7 Mem . 5 lesnourriffe pendant près d’un an, terme auquel efi fixée la durée de leur vie. Je ne fçais s’il eft des efpeces d'arbres ou d’arbriffeaux fur lefquels il ne s’en éleve pas, mais il n’efi gueres d efpeces d’arbres ou d’arbriffeaux dans ce pays-ci, où je n’en aye trouvé, 6c fouvent de plufieurs elpeces différentes. Les figures 6c les couleurs des gallinfecfies peuvent nous mettre en état d’en caraétérifer aifément plufieurs efpeces. Elles refient toutes d’afies petits animaux; après avoir pris tout leur accroiffement, les unes femblent de petites boules * attachées contre une branche par une afies petite partie de leur circonférence ; il y en a de celles-ci qui n’ont jamais plus de la groffeur d’un grain de poivre, & d’autres qui deviennent plus greffes que les plus gros pois*. D’autres font des elpeces de fpheres dont * PI. y. fig. lin lègment * a été emporté, & qui font attachées à L * PI. y. fig- j , 2 , 3 . g, < &c. l’arbre par la partie plane de la feclion; d’autres font des fpheres allongées, 6c dont le grand axe s’élève au-deiïùs de la branche; d’autres un peu plus applaties *, font plus pointues par un bout que par celui qui y cfi oppofé. Quelques-unes ont la figure d’un rein *, 6c c’eft par la partie la plus enfoncée du rein quelles font appliquées contre une petite branche, & qu’elles y tiennent. D’autres enfin, 6c celles-ci fourniffent un genre compofé de bien des efpeces, font des moitiés d’un fpheroïde allongé, coupé félon fon grand axe *, ou elles ont quelque reffem- blance avec un bateau renverfé *. Leurs couleurs n’ont rien de bien frappant, afies com¬ munément elles en ont une qui approche de celle de mar¬ ron , tantôt plus 6c tantôt moins foncé. Il y en a déplus rougeâtres ; il y en a qui tirent fur le violet ; il y en a d’un afies beau noir; il y en a dont le fond cfi jaune avec des ondes brunes*; j’en ai trouvé de brunes veinées de blanc, Ai; * PI. 2. fig. 6 & 7 . * PI. 3 . fig. 6,p. * PI. 6 . fig, I. r&g. * PI. T. fig. 1 & 9 -ë’S- * Fig- 3. *PI. 3-fig. 4 - & 5 -g* 4 MEMOIRES POUR L’HISTOIRE comme le iont quelquefois ces graines appellées lames Je Job *, dont on fait des chapelets. Des efpeces de tubérofités qui n’ont rien de propre, foit par leurfigure, foit par leur couleur, à s’attirer de l’at¬ tention, auroient pû être long-temps ignorées, fi elles ne fe multiplioient pas quelquefois à un point exceflif liir nos arbres, Si fur-tout fur les arbres fruitiers. Les pêchers en font quelquefois tout couverts, tant d’une efpece en forme de bateau renverlé *, que d’une en petits grains* qui approchent de la figure fpherique; leurs branches en font défagréables à voir, elles paroiffent toutes galeufes. Les jardiniers attentifs ont foin de les nettoyer de ces gal- liiifecftes, ils croyent qu’elles font fouffrir l’arbre, du moins efl-il fur quelles vivent & croiffent à iês dépens. Les feuilles Si les fruits qui font au-deffous des branches trop peuplées de gallinfcéles, font quelquefois lalis & noircis par l’eau qui, après avoir lavé lesgaliinfeétes, tombe fur ces fruits Si fur ces feuilles. Les orangers font une des efpeces d’arbres qu’on foigne le plus dans ce pays; ils ont tics gallinfeéles de celles qui font faites en bateau ren- verfé, Si ce font de tous les arbres ceux à qui on eftplus attentif a les ôter. Leurs gallinfeélcs font auffi les premières fur îefquelles nous ayons eu une fuite d’obfervations pres¬ que complctte, & propre à nous les faire bien connoitre. Elles ont été fiites de concert par deux habiles oblcrva- teurs, M. rs de la Elire Si Sedileau , qui les ont publiées dans les Mémoires de l’Académie de 1692. Là ils don¬ nent à ces infèèfes le nom de punaifes des orangers, nom qui leur a été auffi donné par des jardiniers, quoiqu’ils n’ayent rien rie commun avec aucune des efpeces de punaifes connues. Si des efpeces de gallinfeéfes font quelque mal à nos arbres, nous en fommes affurément plus que dédommagés des Insectes. I . Mem . 5 par les ufages que nous fçavons faire de quelques autres el'peces d’inlèétes du même genre ; elles tiennent une place parmi les animaux qui nous font utiles. Ii y a des gallinfeétes * dont les payfans de certains cantons du *PI. Royaume & de quelques pays étrangers font tous les ans ’ une récolte; fans avoir eu la peine de fèmer & de labourer, ils vont détacher de dedus certains arbriffeaux une moifTon de petits grains, fouvent très-abondante; je veux parler de la récolte qui fe fait chaque année en Provence &cn Languedoc de ce qu’on appelle le kermès, la graine d''écar¬ late, le vermillon, & que les Latins ont défîgné par Je nom de coccus baphica, & que Pline nomme fi triplement coccurn. C’eft avec ce kermès, cette graine d’écarlate qu’on frit le firop de kermès. Quand les avantages que la Médecine tire de cette drogue paroitroient douteux à ceux qui font un peu Pyri honiens par rapport à la plupart des remedes, au moins ne fçauroit-on douter de l’emploi utile que l’art île la teinturerie en fçait faire pour teindre la foye & la laine dans un beau rouge - cramoifi. 11 faut avouer pourtant que depuis que la cochenille a été découverte, le kermès a cefle d’être une drogue auffi importante qu’il l’étoit au¬ trefois; peut-être auffi n’en tirons-nous pas aujourd’hui tout le parti qu’on en peut tirer. Quoiqu’on fçache faire ufage du kermès depuis long¬ temps, quoique depuis long-temps on le recueille avec foin, cen’efl que depuis peu d’an nées qu’il a été bien connu pour ce qu’il eft par quelques fçavans. Outre fa propre forme, diverfes circon fiances fe réunifient pour ledéguifer fi bien, qu’il n’y a guéres que ceux qui l’ont obfèrvé avec atten¬ tion pendant le cours d’une année entière, qui ayent pû fe convaincre qu’il eft réellement un animal; il n’cft pas pris encore actuellement pour tel par tous les fçavans des pays mêmes où il croît; c’eft de quoi l’Académie a eu A iij c # 6 MEMOIRES POUR L’HiSTOIRE des preuves dans une differtation fur le kermès, qui lui fut envoyée il y a peu d’années. Au refte, la plûpart des autres efpeces de gallinfecles ne font pas des animaux moins bien déguifés que le kermès; dès qu’on lçaura l’hiffoire d’une de ceselpeces, il n’y aura plus rien qui puiffe faire de la peine par rapport au fond de celle de toutes les autres. Nous nous fixerons donc à donner en détail i’hiftoire d’une des gallinfedes des plus communes, *PI. j, fîg. & par conféquent des plus aifées à oblèrver, de celle * en forme de bateau renverfé qui croît fur les pêchers: nous n’aurons plus qu’à faire une application de ce que celle-ci nous aura appris, aux autres elpeces, & qu a faire remar¬ quer les particularités que ces dernières peuvent offrir- Enfin, nous reviendrons au kermès qui mérite une diftin- dtion particulière, & nous rapporterons les obfervations qui démontrent qu’il eft réellement une gallinlèéle du même genre que celles quenoustrouvons fur tant d’arbres, foit fruitiers, foit autres. La plupart des gallinfedes font parvenues à leur der-î nier terme d’accroilfement vers la mi-May, ou au plu- tard vers le commencement de Juin. Qu’on obferve alors les pêchers , & fur-tout ceux qui font mal tenus, fouvent fans avoir befoin de chercher beaucoup, on trouvera qu’ils en ont des deux genres dont nous avons parlé; les *PI. 2 . fig. unes * font de petits grains prefque ronds de la grofîeur 4 & s * d’un grain de poivre, tantôt de couleur rougeâtre, tantôt d’un rouge très-brun, & tantôt noirs & luilàns. Les au- * PI. ,. fjg. très font de celles * qui ont très en petit la figure d’un ï&a. bateau renverfé. Ce font ces dernières que nous allons fuivre d’abord. Leur plus grand diamètre edaffez fouvent dans ladiredion de la longueur de la branche, au moins n’elt-il prefque jamais placé perpendiculairement à cette direction. Leur peau, leur enveloppe extérieure, qui eft des Insectes. I. Mem. 7 tout ce qu’on en apperçoit alors, eft affez femblable à l’é¬ corce fine 6c lifie de quelques arbres, femblable à celle qu’on détache de deiïiis le cerifier. Sa couleur eft à peu- prés feuille morte , quelquefois elle tire fur le caffé ou furie marron clair, mais ordinairement elle eft plus rou¬ geâtre. Les tiges, les branches, les pouffes d’un an du pê¬ cher font fouvent fi chargées de ces gallinfeétes, qu’elles s’y touchent de tous côtés ; quelquefois elles font dif- polées à la file les unes des autres comme des grains de chapelet *, mais quelquefois elles y font écartées les unes * PI. 2 . %, des autres. 2 ' Toutes celles qu’on voit en même temps fur le pêcher, 6c dont l’extérieur eft affés femblable, & qui toutes font également immobiles, ne font pas pourtant dans le même état; les unes font des infeétes très-vivans, & les autres font des infeétes morts & defféchés dès l’année ou les années précédentes, & qui font reftés dans les places mêmes où ils ont péri, fans que leur extérieur en ait été fenfiblement altéré. Une partie de celles qui font fur les plus vieilles tiges, fur les plus vieilles branches, font des gallinfeétes defféchées, 6c toutes celles qui font atta¬ chées contre des jets d’un an , font des gallinfeétes très- vivantes ; les vivantes ont pourtant une couleur plus fraîche, plus vive que celle des mortes. Il eft encore aifé de diltinguer ces dernières des autres, par un moyen Am¬ ple. Si on pouffe les mortes avec le doigt, même affez légèrement, on les détache, elles tombent à terre; les autres plus adhérentes réfiflent davantage , 6c fi on y va rudement, on les écralè làns les faire gliffer. Quand on écrafe de celles qui font vivantes, on en fait fbrtir une efpece de liqueur épaiffe, une forte de bouillie, en un mot, des matières à peu près pareilles à celles qu’on fait fortir du corps de tout inièéte en l’écrafànt. Cette feule * *• g MEMOIRES POUR L’HISTOIRE circonhance apprend cpie les dernières ne doivent pas être confondues avec les vrayes galles des arbres. Les autres gallinfeches, celles qui font péries depuis long temps, ne paroilfent qu’une coque, ou qu’une demi-coque caftante & friable , dans laquelle une poudre blanche eh con¬ tenue. La galiinfcéle vivante eh fi adhérente à l’arbre, qu’il ch difficile de la détacher dans la faifon que nous venons de choifir pour la faire confidérer, fans 1 ecrafer ou fans la bleher, fi on ne fe fertquede fies doigts: mais on par¬ vient à l’enlever bien faine & bien entière, au moyen de la pointe d’un canif, ou de celle d’un couteau, qu’on giiffie entr’elle & l’écorce de l’arbre. La place d’où elle a PL i.fîg. été retirée, paroît tapififée d’une matière cotonneulè *. Dès que nous voulons qu’on regarde la gallinfeéïe com¬ me un véritable infecte, &. dès qu’on fe prêtera comme nous le demandons à cette idée , on n’héfitera pas à re- * F ‘g- 3- garder le côté extérieur*, ceiuy qui eh toujours en vûë, # Fig. j. comme le dos de l’animal; c’eh fon ventre * &tout le dehous de fon corps qui eh appliqué contre le lit de coton dont nous venons de parler. Le ventre eh auhr renflé, auffi plein qu’il ehpoffible qu’il le foit pour tou¬ cher de toutes parts lafurface fur laquelle il eh fixé; fi on luy ôte le coton qu’il entraîne fouvent , il paroît rou¬ geâtre , & d’un rougeâtre qui difpofe à le regarder comme une lùbflance charnue. La feule couche cotonneufe que nous venons de faire remarquer , auroit dû fuffire pour empêcher de confondre les gallinfeches avec les excroihances des arbres , les vrayes galles; ces galles font réellement recouvertes par lccorce, elles n’en font jamais féparées par une efpece de lit de coton. Les gallinfedes confidérées un peu plus tard que nous lie des Insectes. I. Mem. 9 ne venons de le faire, c’eft-à-dire, peu avant la fin de May, ont encore de quoy nous dérouter; alors il tft encore plus difficile de les reconnoître pour des animaux. Si environ quinze jours après qu elles lont devenues auffi gonflées qu elles le peuvent devenir, on les détache de leur place, elles ne paroiflent plus que comme une de ces gallinlèétes mortes Si deflechées, dont nous avons parlé ci-deflus; on n’y trouve plus rien de ce qu’on y avoit vû de charnu ; chacune d’elles elt devenue ièmblable à line petite écaille de tortue ou autre, d’où l’animal auroit été tiré; elle n’eflplus qu’une Ample coque, qui contient, & recouvre une infinité de grains * un peu rougeâtres, *PI. i.fig* Si moins adhérens les uns aux autres que des grains de 7 ‘ fable. Ils tiennent fi peu les uns aux autres, qu’ils tom¬ bent par terre avant que la gallinfeéle ait été détachée, fi on n’a attention de commencer à la détacher par la partie fupérieure. Mais pour mieux voir ces grains en place, on n’a qu’à couper tranfverfalement la galiinfeéle * avec un canif, Si * enlever la partie fupérieure; on fait tomber tous les grains J ' qui étoient contenus dans cette partie , mais ceux qui étoient logés dans la partie inférieure y relient, & on voit la petite épaiflcur des parois de la cavité qui les renferme. Si comment ils y font empilés. Dès qu’on conlidére ces petits grains avec un micro- fcopeou avec une forte loupe, leur figure oblongue Si arrondie ne permet pas de les prendre pour autre choie que pour des œufs. La gallinleéle que nous avions vûë charnuë ci-devant, ne femble donc alors qu’une coque, ou,comme des naturaliftes l’ont dit, qu’une elpece de goulfe remplie d’une infinité d’œufs. C’eft auffi ce qui a perfuadé à quelques fçavans, qui n’avoient pas oblené nos gallinfeéles dans tous les temps où il faut les oblerver Tome IV. 1 IO MEMOIRES POUR L’HlSTOIRE pour les bien connoitre, quelles netpient autre chofe que des coques femblables à celles clans lelquellcs divers inlèéles renferment leurs œufs; que ces prétendues galles avoient été conftruites, & peut-être hlées parqueiqu’in- feéle qui avoit longé à y mettre les œufs en fureté. Enfin fi on détache la giliinfeéle , ou fi on l’ouvre encore un peu plûtard, & qu’on obferve la cavité, l’in¬ térieur de l’efpece de coque, la loupe y fait voir des mil¬ liers de petits inlectes mêlés avec des elpcces de grains de pouffiére. Ce loin les inleétes qui font lortis des petits œufs; les enveloppes des œufs d ou ils le font tirés for¬ ment partie de i’elpece de pouifiére au milieu de laquelle ils font; on ne trouve plus alors d’œufs entiers. Quelques oblèrvations vrayes, & qui ont demandé de l’attention dans ceux qui les ont faites pour ia première fois, ont encore concouru à faire prendre de faulfes idées des gallinlèéles & des petits animaux lortis des œufs. On a très-bien remarqué que la peau de quelques gai I infectes étoit percée quelquefois d’un feul, quelquefois de trois à quatre trous ronds, placés tantôt dans un endroit, & tantôt dans un autre. Les véritables galles delqueiles font fortis les moucherons qui Ce font élevés dans leur intérieur, font percées de même; & comme s’il ne devoit rien man¬ quer à la reffemblancc parfaite entre les vrayes galles & les gallinfecftes, on a vû auffi de très-petits moucherons fortir de ces dernières, & qui avoient crû dans leur intérieur fous la forme de vers. Mais il ne falloit qu’obferver une gallinfeéle dans une circonftance favorable, dans un temps moyen entre ceux dont nous venons de parler, pour lui affiner bien fonétat, pourrcconnoître celui de toutes les autres, & pour voir le dénouement de toutes les difficultés qui en ont impofé. Nous avons confidéré la gallinfedc renflée & diflenduë. des Insectes. I . Mem . 11 & qui paroifToit charnue *, nous l’avons confédérée enfui te * PI. i.fig, deiïechée & devenue une efpece de coque très-remplie 5 * d’œufs; fi on faifit un temps moyen entre les deux précé¬ dons, ce qui fera ailé à qui ne mettra pas un intervalle d’un trop grand nombre de jours entre les obfervations, on détachera une gallinfeéle qui ne fera pas émincée au point de ne paraître qu’une membrane, & qui ne fera pas aulfi gonflée que celle que nous avons confédérée d’abord; il reliera entre fon ventre & l’arbre une cavité, mais confi- dérablement moins grande que celle qui y eût été, fi la gallinfeéle eût été détachée plûtard; il y aura dans cette cavité de ces petits grains que nous avons dit etre des œufs,mais il n’yen aura que pour remplir (a petite cavité, moins qu’il n y en eût eu dans la luitc. 11 efl bien ailé alors de le convaincre, fur-tout lur les galünleéles en forme de bateau renverfé, telles que celles des pêchers, que la gallinfèéie efl: un véritableanimal, puifqu’on peut s’alfûrcr quelle efl alors occupée à faire des œufs, qu’on l’a dé¬ tachée pendant qu’elle étoit en pleine ponte , & on la verra continuer de pondre. La première fois que j’obfervai dans cette circonftance favorable, &a\ec une forte loupe, une gallinfeéle que je venois de détacher, je vis dillinélement près d’un de lès bouts, près de celui que nous pouvons aélueilement appcller le poftérieur, je vis , dis-je, un petit œuf* qui n’étoit encore forti qu’en partie, & qui étoit ■> PI. i . 5g* encore logé en partie dans le trou dtftiné à leur donner 6, °* iffuë à tous. Mais pour ne m’en pas fier à cette feule ob- fervation , je frottai doucement le ventre de la gallinlèéle, & je foufflai deffus pour emporter les œufs qui pourraient y être retenus par quelques inégalités ; après quoy je pofai la gallinfeéle le ventre en haut fur du fable dont j’avois rempli un petit vafe. Quoiqu’elle fût làaflcs mal à fon aife, elle ne iaifla pas de continuer fon opération; 12 MEMOIRES POUR L’HiSTOIRE en moins d’une heure die lit fortir trois œufs de Ion corps par l’ouverture qui eft auprès du derrière. M. rs de la Hire & Sedileau ont de meme vû, & avant moy, des gillinfedes des orangers faire des œufs, & ion parvien¬ dra toujours à en voir faire à celles qui ont la figure d’un bateau renverfé, iorfqu’on les faifira dans le temps que nous venons de déterminer. La fuite de l’hiffoire de nos gallinfedes nous les mon¬ trera pendant plufieurs mois conlëcutifs avec des formes affés femblables à celles de divers autres inlcdes, mais à mefure quelles groffillent, leur extérieur fe défaçonne: elles ne groffiffent, elles necroiffent confidérablement que quand les milliers d’œufs renfermés dans leur corps croif- fent. Quand ces œufs font près de fortir du corps de l’in- fede, le ventre eft fi diftendu , que les filions qui féparent naturellement les anneaux, ne s’y trouvent prefqueplus; mais lorfque l’in feéfe a avancé fa ponte, lorfque fon ventre s’eft un peu vuidé , il redevient connoiffable pour un infede, fi on l’obferve du côté qui étoit appliqué contre l’arbre : alors les anneaux dont le ventre eft compofé, font aifés à diftmguer à qui les confidére avec une loupe; on en compte facilement cinq *, dans le dernier dcfquels eft l’ouverture qui donne fortie aux œufs. L’infedea fix jambes dont il n’a pas fait ufage depuis long-temps; il les tient alors appliquées contre fon corps; il yen a quatre* qu’on diftingue plus ailément que les autres. La der¬ nière paire de celles-ci eft immédiatement au-deffus du premier des cinq anneaux dont nous venons de parler. On peut encore, en obfcrvant avec attention, apperce- voir au-defïus de la première paire des jambes une efpece . de petit mammelon * que nous examinerons dans la fuite, & qui eft la partie par le moyen de laquelle l’infede fe nourrit. des Insectes. 1 . Mem. 13 Si on confidére fur la branche la place * d’où on a PI. i. fig.4» détaché une de nos gallinfeéïes qui n'a pas encore com- a b ' mencé fa ponte, on y voit, comme nous l’avons déjà dit, line efpece de lit d’un duvet cotonneux; ce duvet feui pourrait donner quelqu’idée de la figure & de l’arrange¬ ment des parties qui lont du côté du ventre; on y retrouve leur moule, on y difiingue fur-tout ceux des cinq anneaux & de quatre des jambes. N’héfitons donc plus à regarder nos gallinfeéles comme de véritables animaux, mais admirons la manière dont la nature les a inftruites à conlerver leurs œufs & les petits qui en éclofcnt; quantité d’autres infecfles fçavent filer clés coques dans lefquelles ils renferment leurs œufs avec Lien de l’art, c’efi fon propre corps que la gallinfeéïe em¬ ployé pour couvrir les liens ; fon corps leur tient lieu d’une coque bien clofe; elle ne les laifie pas un infiant expofés aux imprefiions de l’air, elle les met parfaitement à l’abri, elle les couve, pour ainfidire, dès i’inflant où elle vient de les pondre. Les petits qui fortent des œufs fe trouvent encore couvés, ou couverts au moins dès l’inftant de leur naiflance & pendant plufieurs jours par leur mere,ou au moins par fon cadavre ; de forte que la gallinlcéîe, même après être périe, efi utile foit à fes œufs, loit à fes petits, elle les couvre encore alors avec Ion corps, qui fe defieche fans tomber en pourriture. Mais pour mieux voir la manière finguliére que fa nature a choifie pour perpétuer les différentes efpeces de gallinfeéïes, retournons encore à confidérer une de celles du pêcher en forme de bateau, qui efi prête à commencer fa ponte *. Le contour ovale de fon corps *, cette ligne * "? : qui peut être regardée comme le terme de féparation de la partie convexe ou du dos, & de la partie prefir plane ou du ventre, efi exactement appliquée contre - 2 B iij 14 MEMOIRES POUR L’HiSTOIRE portion de l'arbre, Si la portion de l’arbre qui eft dans cette enceinte, eft tapiffée d’un duvet ou d un coton fur lequel le ventre eftpofé. Faifions pondre un premier œuf à notre gallinfeéle, elle ne le pouffera pas par-delà l’enceinte de Ion corps, comme plufieurs infedes pouffent leurs œufs par- delà celle du leur. Sur le champ elle va faire paffer cet œuf entre fon ventre & le lit de duvet; c’eft-là où elle conduira peu-à-peu tous les œufs qui doivent fortir à la file du premier; elle les pond fans leur permettre, pour ainfi dire, de paroître au jour. A mefure que le ventre le vuide d’une certaine quantité d’œufs, il lailfe la place nécelfaire pour les loger entre fon enveloppe extérieure, fa peau , Si le lit de coton; ainfi fuccelfivement les œufs fortent du corps. Si fucceffivement ils font conduits entre la peau du ventre Si le lit de duvet. La peau du ventre cède pour leur laiffer la place nécelfaire, elle s'approche du dos, d s'en approche de plus en plus. Le volume qu’avoit le ventre avant la ponte, étoitprefque tout dû aux œufs dont il étoit farci; quand la ponte eft finie, la peau du ventre fi diftenduë ci-devant , efl pouffée par les œufs qui ont paffé en dehors & fous elle jufqu’à toucher, ou à toucher prefque le dos; elle n’en eft féparée que par des parties affés minces, comme les intefiins & les ovaires; ceux-ci qui fe font vuidés, ne tiennent pas alors grande place, ils font deve¬ nus flafques. Le côté de la gallinfeéle qui eft tourné vers l’arbre + , eft donc devenu concave, il eft fait alors en coquille ou en cuilieron ; Si cette efpece de coquille appliquée contre l’arbre, forme une coque qui recouvre d’autant mieux les œufs, que fa membrane extérieure, celle de la partie convexe, eft forte, ferrée, &femblc ana¬ logue aux matières cruftacées. Après que la gallinfeéle a fini fit ponte, elle ne refte pas long-temps en vie; c’eft une loi affés générale que les des Insectes. I. Man. i5 infècfles périment quand ils ont fait tout cc qui étoit né- ceffaire a la multiplication de leur elpece; elle périt donc, & dans la meme place où elle s’éîoit taxée depuis long¬ temps ; Ion corps achevé de le deffécher,& cela fans rien perdre de ta forme extérieure, de celle de ton côté con¬ vexe, parce que, comme nous venons de le dire, celui- ci a une enveloppe qui cft comme cruftacée. Voilà donc notre galle qui femble transformée dans une efpece de coque qui couvre les œufs, & qui paroit fi bien en être une, qu’il n’ett pas étonnant que des obfervateurs atten¬ tifs ayent cru quelle netoit que cela, qu’ils n’ayent ni penté qu’elle avoit été animal, ni quelle netoit qu’un animal defféché; car rien ne peut conduire à prendre une idée véritable de fa nature, quand on ne l’a pas fuivie dans fes différais états, & fur-tout dans l’opération de la ponte. On nefçauroit voir comment la gallinfeéle, malgré fon immobilité, conduit jufqu’auprès de fa partie anté¬ rieure les œufs quelle fait fortir de fa partie poftérieure. Quoique tout le corps ne change point de place pendant qu’elle pond , il y a tans doute alors des mouvemens in¬ térieurs, les anneaux, mobiles du côté du ventre, peuvent aider par leur compreffion la fortie des œufs; mais j'ima¬ gine que des mouvemens fucceffifsde ces mêmes anneaux, conduifent les œufs vers la partie antérieure : le dernier, le cinquième anneau pouffe l’œuf qui vient de fortir, à î’anneau qui le précédé, au quatrième; celui-ci le fait avancer jufqu’au troifiéme, & ainfi d’anneau en anneau il eft conduit jufqu’au premier. Dès que les œufs fie trou¬ veront empilés vers les premiers anneaux, les mouve¬ mens des anneaux fur les œufs nouvellement fortis, fe communiqueront aux œufs entaffés, & les poufferont plus loin que les anneaux. Je crois avoir vû faire des mouye- i6 Mémoires pour l’Histoire mens femblabies à ceux qui font néceffaires à cette opéra¬ tion, aux galiinfeétes que je tenois clans !e labié, renverîées fur le dos, pour les observer pendant quelles pondoient. Une gallinlèéle d’un genre différent du genre oe celles que nous examinons actuellement, & dont ii fera parlé dans la Fuite, étant retournée Fur le dos, a fait palier devant • fig* moi des œufs arrangés comme les grains d’un chapelet*, jufqu’auprès de la teite. Mes oblcrvations ne m’ont appris rien de bien précis fur le nombre de jours au bout duquel les petites gallin- feéles fortent des œufs, mais il ma paru qu’elies en font au moins dix à douze à éclorre. 11 m a paru encore que plulieurs jours après leur naiffance, elles relient tranquilles lous la coque Formée par le cadavre de leur mere, & au milieu des fragmens des coques d’œufs d’où elles fe font tirées; elles y relient apparemment jufqu’à ce que leurs parties Fefoient affermies. Enfin , elies deviennent en état d’aller jouir du grand jour, & elles en ontbeFoin. On ima¬ gine affés qu’ellesdoivent être alors d’une extrême petiteffe, cen’cfi qu’avec une loupe Forte qu’on les peut bien voir; mais on n’imagineroit peut-être pas combien ces infeéles nouveaux-nés reffemblent peu , au moins par leur activité, à celui à qui ils doivent la naiffance, & à celui qu’ils doivent être un jour. Ils marchent, & marchent extrêmement vite. 2-fig- Leur forme n’a rien de finguiier *, leur corps efl très- f: 9 applati, Fon contour efl à peu-près ovale, auffi femble-t-il une petite plaque ovale. Ces gallinfeéles portent devant elles deux antennes; elles ont fix jambes qu’on apperçoit lorfqu’on les cherche avec un peu d’attention ; affés Fou- vent elles font cachées par la partie fùpérieure au-deffous de laquelle elles Font attachées. Ce qui me détermine à croire que les petites galbn- feéles ne prennent Feffor que plulieurs jours après qu’elles font des Insectes. I. Mem. 17 font nées, c’eft qu’une gallinfèéle-mere 6c defféchée, qui lie fert plus que de coque , peut être oblervée à la loupe pendant plulieurs jours, fans qu’on voye autour d’elle aucun petit vivant ; mais fi on la détache , 6c fi on cherche a voir à la loupe ce qui eft dans fa cavité, tout y paraît fourmiller des petits animaux qui y font nés; on les a déterminé à le mettre en mouvement, ils s’éparpillent de tous côtés, ils le difperfent, Sc cela avec vîtelfe; il yen a des milliers; on en peut juger par le nom¬ bre des œufs. Quelques auteurs ont compté plus de deux mille œufs fous une feule gallinfeéle de certaine efpece, 6c d’autres en ont compté plus de quatre mille fous des gallin- feétes d’une autre elpece. Quand on voit tant de milliers d’inleéïes dans un tas de poudre blanche, &. que celui qui leur adonné naiffance paroit réduit à être une fimple peau , on feroit tenté de les croire coupables d'une grande bar¬ barie, on feroit tenté de croire qu’ils ont dévoré toute la fubflancedu corps de leur mere. M. Ceftoni, qui d’ailleurs a fait de très-bonnes obfervations fur les gallinfeéîes, & qui acompte avec foin le nombre des œufs, l’a penlëainfi ; il a cru que les œufs écloifoient dans le corps de la mere, 6c que les petits le déchiroient pour fortir ; les apparences font très-propres à induire dans cette erreur. En y tombant, M. Ceftoni a bien prouvé au moins qu’il n’avoit eu aucune connoifTance des Mémoires de M. rs de la Hire & Sedileau, il y auroit vû quelesgallinleéles font des œufs, 6c que les œufs font hors du corps de la mere lorfque les petits naiffent. Enfin fi on confidére les gallinfeéîes - mcres 6c deffé- chées un certain nombre de jours après que leur ponte efl finie, on voit autour d’elles les petites qui font nou¬ vellement nées, 6c on en voit qui à chaque inflant fortent de deffous le cadavre deffeché qui leur formoit une coque. La nature leur a préparé une porte quelles ne font Tome IV . C uj 18 MEMOIRES POUR L’HlSTOIRE pas embarraffées à trouver; une petite portion de la partie poflérieurede la gallinfeéte-mere n’efl pas appliquée contre l’arbre , elle efl naturellement contournée de manière à ne pouvoirs y appliquer, & elle efl fendue. Cette portion dans quelques gallinfeéles, comme dans celles du tilleul, * PI. 3 . %. du coudrier * & de forme , efl faite comme la partie fupé- rieure d’un bec ; dans d’autres , comme l’efl la portion de la lèvre lupéricure d’une bouche qui fait la moue. Dans nos gallinfeéles du pêcher elle efl la moitié d’un court *PI. ï.fig. tuyau , dont la concavité efl tournée vers l’arbre *. , 5 , 6 & s. C’eflpar cet endroit que fortent toutes les gallinfeéles nouvellement nées. Des trous ronds paroiffent quelquefois fur la partie convexe des gallinfeéles - mer es , mais ils n’ont point été ouverts par les jeunes gallinfeéles; ils font, comme nous l’avons déjà dit, l’ouvrage de mou¬ ches qui, fous la forme de vers, ont crû & vécu dans le corps des gallinfeéles, comme il y en a qui croiffent 6c vivent dans les corps des infeéles de toutes efpeces; après que ces mouches fe font transformées, pour fortir elles percent le dos de la gallinfeéle. Ce font ces petites mou¬ ches qui ont le plus contribué à frire confondre les gallin- fcélcs avec les galles. Continuons de fuivre l’hiftoire de nos gallinfeéles du pêcher nouvellement nées, c’eft vers les premiers jours de Juin quelles commencent à fortir de défions lefquelette de leur mere. On les voit marcher ou plutôt courir, 6c même vite, fur toutes les branches de l’arbre; on ne les voit pourtant que quand on obfcrve ces branches avec une loupe forte. Après en avoir vu en très-grande quan¬ tité fur des branches de pêcher , je crus au bout de quel¬ ques jours les en trouver toutes couvertes, parce que dans le temps de mon obfervation le nombre de celles qui étoient forties de leurs coques, quoiqu’immenfe, étoit des Insectes./. Mem. 19 petit en comparaifon du nombre de celles qui n’avoient pas encore pris i’dfor; aulïi fus-je très furpris de n’y en rencontrer que quelques-unes difperfées par-ci par-là; je nefçavois ce que les autres étoient devenues. Nous avons dit ailleurs * que pour découvrir les puce- * Tome in. rons qui fe font établis & cachés fous les feuilles, 6c même AIün ' 1X ‘ fous les écorces de différens arbres, il n’y avoit qu’à fe lailfer guider par les fourmis, qu’a remarquer où lcurcourfe fe termine furies arbres où elles montent: elles fontaufïi les meilleures guides qu’on puifle luivrepour trouver les gallinfèdes ; elles les aiment comme elles aiment les puce¬ rons, elles fe tiennent autour d’elles; auffi m’ont- elles fouvent indiqué des gallinfeéles fur des elpeces d’arbres où je ne m’avilois pas d’en chercher. Ce furent auffi les fourmis qui m’apprirent où fe tenoient les jeunes gallin- fecïes du pêcher qui avoient dilparu pour moi; je vis des fourmis monter continuellement fur les feuilles de ces arbres, & s’y arrêter; jeloupçonnai qu’elles y cherchoient quelque chofe. J’obfervai ces feuilles avec une loupe, & je reconnus auffi-tôt quelles étoient remplies d’un grand nombre de petites plaques* qui étoient autant de gallin- * PI. 2 . fr. feifles. Elles avoient d’autant plus aifément échappé à mes 1 & z ‘ yeux, qu’outre qu’elles étoient extrêmement petites, elles étoient toutes fans mouvement, 6c hors des places où je croyois devoir les trouver, c’effà dire, hors des tiges fur ïefquelles on voit toutes les gai 1 infectes d’une groffeur fen- fible. Le fecours de la loupe me devint pourtant inutile pour les reconnoître fur les feuilles, lorlque je fçûs qu’elles y étoient; quelques-unes étoient grolfes de refte pour être apperçûes à la vûë fimple. Certaines feuilles en étoient toutes couvertes ; on y en voyoit de différentes grandeurs, 6c de différentes couleurs, de prefque blanches, d’un blanc verdâtre, d’un blanc jaunâtre, de jaunâtres, de rougeâtres. Cij 20 MEMOIRES POUR L’HlSTOIRE Pour Ii plûpart elles étoient fi minces, fiapplaties,&de plus fi immobiles, que j’étois très-difpofé à ne les prendre que pour des dépouilles quittées par ces infeéles. Pour commencer à m'affûter que ces plaques fi minces n’étoient pourtant pas de fimples dépouilles, je les preffai avec l’ongle, je lesécrafai, < 3 c je forçai auffi-tôt un lue jaunâtre de fortirpar un des bouts de leur corps, & de s y afTembler. Mais j’eus bien-tôt une preuve j>lus com¬ plète que les plaques les plus minces, que celles qui ne fèmbloient qu’une fimple membrane, étoient des infeéles très-vivans. Je portai dans mon cabinet des feuilles char¬ gées de toutes ces petites taches pour les obferver, & pour les faire deffiner. Au bout de quelques heures, je vis ces feuilles couvertes d’infecJes en mouvement ; toutes les pe¬ tites plaques s’étoient détachées ; elles marchoient, & mar- choient très-vîte. Ainfr ces infèéfes, après être nés fur les branches du pê¬ cher, les parcourent, & vont chercher les feuilles fur lefquel- les iis fe fixent, fins doute pour en tirer la f'ubftancenécel- faireà leur nourriture &à leur accroifTement. Ils ne rongent point les feuilles , ils en pompent le fucavec une trompe * Tom e M- afTés femblable à celle des faux pucerons du figuier *, ALm. .\. £ p| ac £ e t j c m ême près de la première paire des jambes. Ce n’efl pas fur ces jeunes gallinfeéîes qu’il faut chercher àla voir, c’efl tout ce qu’on peut faire que de la difiinguer fur les plusgroffes ; néantmoins fi on ohferve ces dernières dans des circonflances favorables, on découvre prefque ^ PI. i - fig. toujours vers l’origine de la première paire des jambes *, un petit enfoncement rebordé de quelque chofe de charnu, comme un couit tuyau évafé. Après avoir détaché peu à peu quelques gallinfeéïes de l’endroit où elles s etoient fixées, & fur-tout des gailinfeétes de la vigne, qui, comme celles du pêcher, ont la forme d’un bateau renverfé, jy des Insectes. I. Mem. 21 ai vu un filet blanc extrêmement délié, plus long que la moitié du corps de l’infeéfe; il tiroit Ion origine du court tuyau charnu : j’ai vu la pointe de ce filet piquée dans l’écorce lous laquelle elle devoit être enfoncée avant, ou y faire bien des circuits. Ce filet eft fans doute l’organe au moyen duquel la gallinfeéte fe nourrit, & le principal inftrument qui la tient affujettie dans fa place. M. Cef- toni avoit d’abord eu du penchant à croire que lesgallin- feétes ne tiroient rien des plantes, quelles fe nourriffoient d’air, comme on croit que certains coquillages fe nour- riffent d’eau; mais il fut convaincu que le fuc des plantes contribuoit à leur accroilfement, après avoir vû que quel¬ ques gallinfeéîes,qui avoient quitté les orangers, & qui s’é- toient établies fur des pieds de creffon de Hollande, avoient plus profité que les autres; il en a conclu que les pores de la plante leur fourniffent un fuc nourricier. Mais il 11e paroît pas avoir obfervé l’organe avec lequel elles le tirent, il paroît penfer quelles tirent le fuc des plantes, comme les plantes tirent celui de la terre. Les jardiniers attentifs nétoyent de leur mieux leurs arbres fruitiers des gallinfeéles, & fur-tout les orangers & les pêchers. L’expérience leur a appris quelles épuifent ces arbres de fève, qu’elles les font languir, & même périr. Quelque grande que foit la quantité des gallinfeéles qui fefont multipliées fur un arbre, il y a pourtant peu d’ap¬ parence que ce qu elles confomment en fève pour leur nourriture & leur accroiffement, foit afifés confidérable pour que l’arbre ne puiffe le leur fournir fans en fouffrir. Il y auroit peut-être plus de fève employée à nourrir aux dépens des greffes branches, un ou deuxpetits rejettons qui auraient toutes les feuilles qui leur font néceffaires pour faire monter le fuc nourricier, qu’il n’y en a de confommée par les gallinfeéles. Le mal qu elles font aux arbres eft 22 MEMOIRES POUR L’HlSTOIRE pourtant réel, & il meparoît réel encore que ce mal vient de lu quantité de lève quelles font fortir: mais c’eft quelles en font l'ortir beaucoup plus qu’il ne leur en faut; elles occafionnent la perte d’une quantité de fève qui furpaffe confidérablement la quantité néceffaire pour leur accroif- fement. C’efl ce qui me paroît bien prouvé par quelques obfervations faites entre la mi -May & la fin du même mois. Un matin je remarquai, & j’en fus furpris, que la terre qui étoit au-deffous des branches de quelques pêchers en elpalier, étoit bien mouillée, quoique toute la terre des environs fût très-léché; là elle fembloit avoir été arrofée. Je ne voyois pas ce qui avoit pû déterminer mon jardi¬ nier à arrofer ces pêchers, auffi.ne l’avoit-il pas fait. C’efl de la propre fève de l’arbre que la terre avoit été mouillée, & elle n’étoit mouillée qu’au-deffous des pêchers trop peuplés degallinfeéles, & même qu’au-deffous des bran¬ ches de chaque pêcher qui en étoient couvertes. Les pê¬ chers qui étoient nets de ces infeétes, n’étoient environnés que d’une terre féche, les branches de ces pêchers étoient féches, au lieu que les branches des pêchers fur lefquelles il y avoit beaucoup de gallinfecîes, étoient mouillées, elles avoient mouillé les échalas du treillage contre lefqucls elles étoient attachées, ces échalas étoient tout imbibés d’eau. Après avoir frotté mon doigt contre le pêcher, après l’avoir mouillé, je le fueçai, & je trouvai cette eau fucrée; je goûtai aufîi de la terre qui étoit mouillée, & je lui trouvai le même goût. Il fuit de cette obfervation, que j’ai répétée bien des fois, qu’il coule une quantité confidé- rable de liqueur par les trous des piquûres fûtes aux arbres par les gallinfeéfcs. Il eft plus aiféà la trompe de la jeune gallinfeéïe d’agir contre la peau d’une feuille, que contre l’écorce d’une tige; d’ailleurs le fuc quelle en tire peut alors lui être des Insectes. I. Alan. 23 plus convenable. Les feuilles que j’avois tranfportées chez moi dans des jours chauds, le defiechoient au bout de quelques heures, alors les gallinfeéles fentant qu’elles n’en tiraient plus de lue s’en détachoient; elles fe mettoient en marche pour en aller chercher ailleurs de plus fraîches & de plus lucculentes. Quand on a vû une fois marcher les gallinfeéles, on *PI. 2. fig. diftingue leurs jambes * dans le temps même où elles font J ^ tic >F> fixes ; les jambes font pourtant alors retirées fous le corps, mais le corps a afies de tranfpareiice pour les lailfer apper- cevoir. Il y en a au moins quatre * qui font très-recon- * Fig. 4. noilfables; elles font placées comme les quatre bras d’une croix à doubles bras, dont la ligne du milieu du corps de i’infeéle ferait la tige. Lorfqu’on trouve des gallinfeéles fur les feuilles, on en trouve atilfi de même âge fur les bouts des nouveaux jets du pêcher *. La même raifon les détermine à s’arrêter * Fig. 1. fur les unes & fur les autres. Quoique leur corps foit alors comme une plaque ex¬ trêmement mince, fi on l’obferve avec une forte loupe ou au microfcope, il paraît beaucoup de travail fur fa fur- face fupérieure. Un oval * plus petit que celui de la circon- * Fig. 3 & férence extérieure à laquelle il efi concentrique, femble 4 * marquer le contour du dos ; il efi uni , ou au plus marqué de quelques points ; mais de la circonférence de cet oval partent des lignes, ou plutôt de jolies cannelures qui fe dirigent comme des efpeces de rayons à tout le bord du contour extérieur du corps. Avec le temps les gallinfeéles de nos pêchers & celles des autres arbres deviennent réellement immobiles, inca¬ pables de faire aucun ufage de leurs jambes, mais les au¬ teurs qui ont traité de quelques efpeces de ces infeétes, ont cru quelles perdoient le mouvement pour toujours bien 24 MEMOIRES POUR L’HiSTOIRE plûtôt quelles ne le perdent. M. rs de laHire & Sedileau ont penîë que les gallinfedles des orangers ne dévoient marcher que pendant quelques jours. M. Ceftoni ne fait marcher les gallinfeétes dont il parle que deux ou trois jours. Ces fçavans les ont vu fe fixer peu de temps après leur naifTance, & ils ont cru qu’elles s’étoient fixées pour ne le jamais mouvoir. Dans la vûë d’apprendre jufqu a quel âge elles font ou peuvent faire ufage de leurs jambes, j’ai porté dans mon cabinet, foit des feuilles, foit de jeunes jets de pêcher con¬ tre lefquels elles étoient plaquées , pendant fix mois de fuite, àcommencer depuis celui de Juillet jufques au mois de Décembre inclufivement. Dès que les feuilles & les re- jettons ont commencé à fe delfecher, les gailinlèéles les ont quittés ,& par conféquent tantôt plûtôt, & tantôt plû- tard, tantôt au bout de quelques heures, tantôt au bout d’un jour, félon que l’air étoit plus chaud. Malgré l’immo¬ bilité apparente des jeunes gallinfeétes, il n’étoit pas vrai- femblablequ’elles fufient incapables de mouvement d’auffi bonne heure qu’on l’a cru; les infeétes font tous bien in- ftruits par la nature pour leur confervation, les nôtres le feroient mal fi ayant befoin de fe nourrir & de croître pen¬ dant une année prefqu’entiére, ils alloient fe fixer pour toujours fur des feuilles qui doivent tomber avant la fin de l’automne. Nos gallinfeétes tombent auffi vers la Touffaint avec les feuilles fur lefquelles elles fe font appliquées, mais on ne doit pas être embarraffé de ce qu’elles deviennent; bientôt elles abandonnent ces feuilles, comme jeleuravois vu abandonner celles que j’avois portées dans mon cabinet, elles regagnent l’arbre, & s’y attachent. Quoiqu’il n’y eut pas lieu de douter que nos gallinfeétes n’en ufalfent ainfi, j’ai pourtant marqué plufieurs feuilles que les premiers froids avoient fait tomber, & qui étoient entièrement des Insectes. I. Mem. 2 f entièrement couvertes de jeunes gallinledles ; de jour en jour ie nombre de celles que j’y avois vues me lembloit diminuer; les endroits de la feuille qui paroilfoient les plus defféchés étoient ceux où il en refloit moins ; enfin après trois à quatre jours il n’y en refioit plus du tout ; on pouvoit obterver dans le même temps , que les jeunes fejettons des arbres le peuploient de gallinleéles. Je ne me luis point trouvé à portée dans les mois de Janvier & de Février, d’oblerver fi elles étoient encore en état de marcher; c’eft au relie un fait de leur hilloire que je n’ai pas cru bien important; mais des oblervations pareilles à celles que j’ai rapportées, m’ont appris que dans le mois de Mars elles 11e peuvent plus quitter les tiges, les branches ou les rejettons des arbres contre lelquels elles font appliquées. Quand alors j’ai tranfporté chez moi des branches qui en étoient chargées, les infedes ont péri deffus fans faire un pas en avant ou en arriére. Leur accroilfement cl! très-lent pendant lesmois de Juin, Juillet, Aouft, Septembre & Odobre; elles font pour¬ tant fenfiblement plus grandes vers le commencement de Novembre,mais elles ne femblent de rien plusépaif- les; elles 11e paroiffent encore que comme des membranes ovales plaquées fur les feuilles. Alors elles lont toutes à peu près de même couleur, elles font toutes rouffeâ- tres, il n’y en a plus de blanches, de blancheâtres ni de jaunâtres , &c ; quand elles marchent elles ne parod¬ ient plus fiapplatics, elles s’élèvent un peu fur leurs jam¬ bes, elles portent devant elles deux antennes extrême¬ ment fines. Vers les premiers jours de Mars nos gallinfcdes du pêcher commencent à devenir plus renflées, tout du long de ieur dos elles prennent un peu de convéxité; leur dos yû à la loupe paroît alors chagriné, on y apperçoit un Tme IV. . û 26 MEMOIRES POUR L’HlSTOIRE grand nombre de petits tubercules ; on apperçoit suffi * PI. 2 . fg. alors fept à huit longs fils * ou poils cpii partentde divers 5. F, F ; f, endroits de la circonférence du corps , mais différemment <- • placés, & différemment dirigés. 11 y a de ces fils qui vont s’attacher au bois affés loin du petit animal. Vers les premiers jours d’Avril, non-feulement iesgal- linfcétes paroiffent encore plus renflées, elles commen¬ cent même à prendre une convexité très-fênfible. Quoi- qu’alors elles ne foient plus en état ou en difpoftion de changer de place, elles font des mouvemens qui prouvent bien qu elles font animées. J’en ai vû dans le commence¬ ment d’Avril, de celles du pêcher & de celles du noifetier, fe défaire de leur vieille peau; leur manœuvre étoit affés femblableàccliedes autres infeéfes en pareil cas. Quelque¬ fois elles recourboient leur corps , elles l’élevoient de façon qu’elles ne reffoient appliquées contre la petite branche que par la tête & par le derrière; on pouvoit appercevoir le vuide qui étoit entre leur ventre & la furface de f arbre; elles s’applatiffoient bientôt après. Dans d’autres momens j’ai vû des gallinfèéles qui élevoient peu à peu leur tête & toute la partie antérieure de leur corps, leur derrière étoit leur feul point d’appui; enfuite elles felaiffoient re¬ tomber peu à peu. J’en ai vti d’autres qui avoient le corps contourné de manière qu’il n’étoit appuyé contre l’ar¬ bre que par le milieu du ventre. Tous ces mouvemens Si toutes ces contorfions tendoient à forcer la dépouille qu’elles vouloient quitter, à le fendre & à fe brifèr; je dis à fe brifer, parce que je n’ai point vû de galiinfeétes fortir par la fente qui s’étoit faite à la dépouille, comme les chenilles fortent par celle qui sert faite à la leur. Nosgal- iinfeéfcs la font tomber par lambeaux qui font blancs, minces & très-tranfparens. 11 y en a à la vérité de très- grands , il y en a qui couvroient le quart de la furface de des Insectes. I. Mem. zy leur corps; il y a tel morceau dont elles ne parviennent à fe défaire qu après avoir répété pendant une ou deux heures les manœuvres que nous venons de rapporter ; aufft leurs mouvemens font-ils très-lents. Il y a même des gallinfedes qui ne parviennent pas à fe défaire de la partie fupérieure de leur peau, on la re- connoît quelquefois fur les plus greffes cfe ce genre; il femble que ce l'oit une petite gallinfeéle qui fe foit atta¬ chée fur une très-grande. Quoique je n’aïe vu nos gaîlinfecfles changer de peau que dans le mois d’Avril, elles en changent peut-être encore auparavant; mais c’eft après le changement dont je viens de parler quelles croiffent vite, & qu’elles pren¬ nent la vraye figure de galles : elles ne font plus reconnoiff fables au bout de l'ept à huit jours; cen’eft pourtant guéres que vers le commencement de May qu’elles font par¬ venues à leur dernier terme de grandeur. Si onlesécrafe dans ces derniers temps, on fait lortir de leur corps une grande quantité d’une efpece de bouillie compofée de matières de différentes couleurs, parmi lefquelles la loupe fait voir une infinité de petits grains blancheâtres, qui ne font autre chofe que les œufs dont i’accroiffement eft fort avancé. Enfin, vers le i 5. May elles font en état de pondre; elles fe délivrent peu à peu de leurs œufs, & à mefure qu’elles les font lortir, leur ventre s’applatit, il s’approche du dos, comme nous l’avons expliqué ci-devant. La ponte finie, la gallinfeéle périt & fon cadavre ne paroît plus qu’une coque, de deffous laquelle les petites fortent en- fuite pour croître & devenir à leur tour aufïï fécondes que leur mere l’a été. Mais comment ces gallinfeéles font-elles fécondées ? M. Ceftoni croit qu’elles font toutes mâles & femelles eu Dij i *8 MEMOIRES POUR L’HISTOIRE même temps, quelles font des hermaphrodites du genre le plus fingulier. Les deux féxes iont réunis dans chaque individu de quelques genres d’infeétes très-connus, comme les limaçons & les vers de terre; mais chaque limaçon , chaque ver de terre ne devient fécond que quand il s’elt accouplé avec un autre limaçon, avec un autre ver de terre; les deux infeélcs joints enfcmblc fe fécondent réciproquement. M. Ceftoni croit que les gallinfeéles font des hermaphrodites encore plus fingu- iiers, que chaque galiinfede fe fuffità elle-même, qu’elle n’a pasbefoin de s’unir avec une autre pour être en état de produire des œufs defquels des petits naiffent. M rs de la Hire & Sedileau ont penfé au contraire que parmi les gallinfeétes des orangers il y a des mâles & deslémelles, & que la fingularité qu’ils nous offrent par rapport à leur manière de fe multiplier, fe réduit à ce qu’elles s’accouplent les unes avec les autres de très-bonne heure, prefque dès qu’elles font nées, pendant ces deux à trois jours où on les voit courir fur les branches. M. de la Hire n’avoit pas pû reculer leur accouplement plus loin, parce qu’il penloit qu’après ces premiers jours elles fe fixoient pour toujours ; mais dès que nous avons prouvé quelles l'ont en état de marcher pendant l’hiver, il ne feroit pas néceiïaire qu’elles s’accouplaffent de fi bonne heure. Si les gallinfeédes des orangers s’accouploient, l’analogie demanderait que les autres efpeces de gallinfeéïes s’accouplaffent, mais ces M r$ . n’ont point dit qu’ils cuffentvû l’accouplement des premières, s’ils l’ont admis ce n’eff que parce qu’ils l’ont jugé d’une néceffité indifpcnfable. J’ai eu beau obferver des gallinfeéïes de quantité d’eff péces différentes, je luis relié incertain pendant plufieurs années fi je devois croire avec M. Cedoni, qu’elles fe multiplient fans s’accoupler, ou fi je devois penfer ayee des Insectes. I. Ment. 29 M. rs de la Elire & Sedileau qu’elles s’accouplent, quoique peut-être dans un temps plus éloigné de leur naiflance que celui où ces fçavans ont jugé que l’accouplement fe devoit faire. Enfin une obfervation heureul'e me mit fur la voye de décider; ce font des gallinfeéles du pêcher, de celles qui deviennent des grains plus qu’hémilphériquesqui me la fournirent *. Pendant que j’examinois vers la fin d’A- * PI. 2. fig. vril, des branches de cet arbre qui en étoient toutes cou- 7 & 8 - vertes, j’apperçus plufieurs petites mouches *, qui mar- * ri. ^. fl-, choient fur ces gallinfeéles; elles étoient afies jolies pour 7. s’attirer mon attention. La tête, le corps, le corceiet, les fix jambes des mouches dont il s’agit, font d’un rouge- foncé; elles n’ont que deux ailes, mais grandes propor¬ tionnellement à la grandeur du corps, elles font près du double plus longues qu’il ne l’eft. Dans leur état ordinaire ces ailes font parallèles au plan de pofition *, & croifées fur * Fig. 8* le corps de manière que la fupérieure cache l’inférieure prefqu’en entier. Elles font moins tranfparentes que celles des mouches ordinaires; elles font blanches, d’un blanc- fale, excepté leur côté extérieur qui eft bordé d’une bande qui eft pour elles un grand ornement, cette bande eft d’un rouge qui approche de celui du carmin. Ce qui caraétérife bien encore les petites mouches de cette elpece, ce font deux filets blancs * qui partent de leur derrière, & qui » Fiç. s & font à peu près du double plus longs que les ailes; ils font 9 ••/>/« écartés l’un de l’autre, & plus écartés vers leur extrémité qu’à leur origine. Entre ces deux filets il y a encore une partie remarquable, c’eft une forte de queue * faite en ma- * Fi". 9. a, niére d’aiguillon , qui a une longueur égale à celle du tiers ou du quart d’un des filets blancs. Cette efpece d’aiguillon plus gros, comme tous les aiguillons, à là bafe qu’à fon ex¬ trémité , fe recourbe un peu en défions. Les antennes * de * j--j-- , £ cette mouche font grainées à longs grains chargés de D iij 30 MEMOIRES POUR L’HlSTOIRE chaque côté cie poils qui paroiffent plus gros vers le bout qu’à l’endroit de leur infertion. Je regardai d’abord cette cfpece de mouche comme line de celles qui viennent des vers qui croiflent dans le corps des gallinfedes, & qui les font périr après avoir fuceéou rongé leurs parties intérieures. Je penfai que celles que je voyois, cherchoient à piquer des gallinfedes pour dépofer des œufs dans leur corps, pour y faire éclorre leurs petits. La queue ou l’elpcce de gros aiguillon que la mou¬ che a au derrière, favorifoit cette idée, elle faifoit juger la mouche d’un genre analogue à celui des ichneumons. J’eus bientôt après un foupçon fort différent, qui fut que ces mouches étoient peut-être deflinées à féconder les galiin- fedes, quelles en étoient les mâles. Ni les ailes, ni les autres parties qui leur donnent une forme fi différente de celle des gallinfedes, ni ladifproportion confidérahle qui cfl entre la grandeur de ces mouches &. celle des gallin¬ fedes, ne me firent point abandonner cette conjedure. La nature m’avoit déjà offert plus d’une fois des diffé¬ rences auffi frappantes entre les mâles & les fémelles des infedes de certains genres. Dans l’hiftoire des fearabés j’aurai occafion d’en faire connoître un qui efi fi petit par rapport à la fémelle à laquelle il fe joint, que l’affortiment de l’un avec l’autre do't paroître auffi fmgulicr qu’il le feroit de voir un taureau auffi petit qu’un mouton ou même qu’un lièvre s’accoupler avec la plus grande vache. Ce très-petit fearabé a des ailes & des fourreaux d’ailes écailleux , fa groffe fémelle n’a aucuns vefiigcs d’ailes & de fourreaux d’ailes; le deffus de fon corps cfl membra¬ neux & à découvert. Je crus même trouver divers traits île reffemblancc entre les mouches en quefiion & les gal- iinfedes; la couleur, l’odeur & la nature de la chair des unes & des autres me parurent être à peu près les mêmes. des Insectes./. Mem. 3 1 Les mouches écrafées fur mes manchettes les teignirent en rouge, & en un rouge un peu plus beau que celui que les galhnfeéîes y auraient lailié. Après avoir obfervé ces mouches & les avoir vues en très-grand nombre fur les gallinleéics, je tournai mes re¬ gards fur des branches de pêchers * auxquelles j’avois 2.%, donné attention les derniers jours de Mars & les premiers 9 ‘ jours d Avril. J’avois admiré alors combien elles étoient couvertes de petites gallinfeéles ; non-feulement elles s'y touchoient prefque toutes, elles y étoient en divers endroits en recouvrement les unes fur les autres. Elles étoient pour la plupart encore très-petites, elles avoient beaucoup à croître pour parvenir au terme de grandeur ordinaire à celles de leur efpece; cependant elles étoient déjà dans un âge où elles ne marchent plus, où elles ne changent plus de place: c’étoit là qu’elles dévoient achever de croître. J’avois été embarrafTé de fçavoir comment elles pourraient s’arranger après avoir pris tout leur accroiffe- ment, dans un elpace qui déjà avoit peine à leur fuffire. Je jettai, dis-je, mes regards à la fin d’Avril fur ces mêmes branches de pêchers fur lefquelles j’avois vu au commen- cementdu même mois tant degallinfeéles, qui m’avoient donné quelqu’inquiétude pour leur fort. De ce grand nombre il 11’en étoit relié que très-peu qui eulfentpris de faccroilTement*. Mais j’obfervai une quantité prodigieule * Fig- 9 -gjg* de dépouilles *; ce n’étoient pas des lambeaux de peau , 3 '* & , c n ] m m; tels que font les dépouilles que biffent ordinairement les &c, gallinièéles, c’étoientdes dépouilles très-complettesdont chacune avoit bien la forme d’une galïinfeéle, dont cha¬ cune n’étoit qu’une membrane mince qui renfermoit un efpace vuide. Qu’étoient devenues les gallinfeétes forties de tant de dépouilles! Avoient-elles été en état d’aller chercher des lieux où elles fe puffent placer plus à leur aifet Mémoires poür l’Histoire Ces dépouilles mieux étudiées m’apprirent qu’elles n’é- loicnt pas celles des galiinfeeftes ordinaires, que chacune avoit lervi d’enveloppe à une de nos petites mouches, quelle avoit été pour la mouche une coque dans laquelle elle avoit vécu lous la forme de nymphe, jufqu a ce qu’elle en fût l'ortie avec des ailes. Je trouvai de ces nymphes * dont le temps de la dernière transformation n’étoit pas encore arrivé, dans plusieurs coques de cette elpece. Falloit il croireque ces nymphes& ces mouches étoient chacune ve¬ nues d’un ver qui avoit mangé l’intérieur de la gallinlèéte, qui n’en avoit lailfé que la peau fous laquelle il s’étoit mé- tamorphofé! ou falloit-il penler que chaque mouche avoit été réellement unegallinleéte qui s’étoit transformée lous fa propre peau, comme fe transforment fous la leur tant d’elpeces devers qui deviennent des mouches à deux ailes! Bien des faits parlèrent pour ce dernier lèntiment : i.° Dans les premiers jours d’Avril j’avois écralé quantité de gallinfedtes, fi les mouches venoient d’un ver qui s’élève dans le corps de chaque gallinfeéle, j’euffe fait fortir le ver du corps de quelqu’une, puifque le nombre de celles qui en auraient eu eût furpalTé prodigieufement, dans ce cas, le nombre de celles qui n’en auraient pas eu. a.° Les mou¬ ches qui viennent de vers mangeurs d’infeéles, & nom¬ mément celles qui viennent de vers mangeurs de gallin- feétes, percent la peau del’inlèéle, elles lui font un trou rond par lequel elles fortent. Ce n’elt pas ainfi que nos petites mouches cà ailes blanches bordées de rouge fortent; la peau de la gallinfecfte leur fait une vraye coque, qui femble compofée de deux pièces, l’une de la peau qui couvrait le ventre, & l’autre de la peau qui couvrait le deffus du corps. Quand la mouche elt près de fortir, 6c quand elle fût effort pour y parvenir , ces deux pièces ôlécartcnt l’une de l’autre, lalupérieurc elt foulevéc au- delfu$ des Insectes. I . Mem . 33 tlelïus du derrière de la gallinfeèle ; là fe fait une porte par laquelle fortent d’abord les bouts des ailes * , après quoy * PI. 4.%. parodient les bouts des filets blancs * qui font au derrière ? ^ de la mouche. La partie poltérieure de la mouche fort 6. enfuite, & la mouche fe tire peu à peu, & adèment de cette coque, qui fe referme dès quelle en cd dehors. Nous ferons remarquer en paffant, qu’il elf particulier à cette mouche de faire fortir fa partie poftérieure la première, les autres font fortir d’abord leur partie antérieure; mais la nature paroît avoir tout difpofé de manière que la peau que l’infeèle a quittée lorfqu’il efl devenu nymphe , qui lui a fervi d’enveloppe lorlqu’il étoit en cet état, pût fe plier adèment près du bout poflérieur, & fe fendre là fur les côtés, lorfque l’infeèle foroit devenu mouche. 3. 0 Enfin j’examinai des coques vuides, de celles dont les mouches étoientforties, & j’en examinai de celles où des mouches étoient en nymphes; ni dans les unes ni dans les autres je ne trouvai aucun excrément, aucun débris, aucun relie de la gallinfeèle , comme il auroit dû y en avoir fi la nymphe & la mouche fuffent venues d’un ver qui eût mangé ce petit animal. Dans les coques d’où les mouches étoientforties j’ai vû feulement de petits relies de dépouilles, j’ai cru aulfien voir au bout du derrière des nymphes. Toutes ces remarques concourent à établir qu’entre les gallinlèèles il yen a qui relient petites, & qui fe transforment véritable¬ ment en mouches, pendant que d’autres qui deviennent plus grolïès pondent leurs œufs fans fè transformer; d’où l’analogie des autres infeéles veut qu’on conclue que les pe¬ tites mouches à ailes blanches font les mâlesdes gallinlèèles. Ce ne font pourtant encore là que des vrayfemblan- ces, mais de très-grandes vrayfemblances. Pour avoir quel¬ que choie déplus, muni d’une forte loupe, j’obfervai ces petites mouches pendant qu’elles étoient fur les brandies Tome IV . E * PI.*.fi, 1 5 * 34. MEMOIRES POUR L’HiSTOIRE tic pêcher ; elles ne cherchent point à faire ulage de leurs ailes, mais elles marchent volontiers, 6c c’cltlurle corps des gallinfeéles qu’elles fe rendent; elles vont & viennent fur leur corps, qui eft pour elles un terrein affés fpacieux. Quand j’obfèrvpis une mouche qui éloit en mouvement fur une gaiiinfeéte, je voyois qu’au lieu de porter fon cfpece de queuë ou d’aiguillon dans la direction de fon corps , elle l’inclinoit embas, & quelquefois au point de le tenir perpendiculaire à Ion ventre. Ainfi cet aiguil¬ lon étoit dirigé de manière à pouvoir être pouffe contre le corps de la gallinfeéle, comme fila mouche eut voulu en piquer la gallinfeéle. Mais étoit-ce pour lui faire quel¬ que piquürc fatale, où n etoit-ce point plutôt pour l’intro¬ duire dans une partie deflinée à la recevoir, pour i intro¬ duire dans la partie qui caraélérife le fexe de la femelle! Cinq à fix oblèrvations conlécutives ne me permirent pas de relier incertain fur ce qu’il en falloit pcnlèr. Je vis cinq à fix mouches introduire leur aiguillon dans les corps de cinq à fix gallinfeéles différentes ; toutes l’introduifirent dans cette fente qui efl à la partie poftérieure delagallin- £• feéle *, dans cette fente que les petits inlèéles nouvellement nés fçavent bien trouver pour fortir de deffous le corps déffeché de leur mere. Quelques-unes tinrent leur aiguil¬ lon enfoncé dans cette fente pendant plus detrois à quatre minutes. Enfin je n’ai obfervé aucune mouche de cette cfpece qui ait enfoncé fon aiguillon dans le dos , ou dans quclqu’autre endroit de la gallinfeéle. Pour quoy peut-on prendre une partie qu’un infeéle infère conflamment dans une fente qui eft auprès du derrière de la fémelle, que pour celle qui eft deflinée à féconder cette fémelle! On ne peut donc s’empêcher de reconnoître nos petites mou¬ ches pour les mâles des gallinfeéles. Si on ne trouvoit pas encore toutes ces preuves affés des Insectes. /. Mem. 35 démonftratives, fi on vouloir perfifter à croire que la mou¬ che que nous donnons pour celle qui cherche à s’unir de l’union la plus tendre à la gailinfeèle, eft au contraire une de fies plus cruelles ennemies, que fi elle choifit la fente qui eft auprès du derrière de la gallinfeèle pour y inférer fa partie poftérieure , c’eft que la nature lui a appris l’endroit où il lui ferait plus facile de la piquer, & d’introduire dans fon corps les œufs quelle y veut faire éciorre; quelques oblèrvations qu’il nous relie à rapporter, forceraient de reconnoître que cette dernière fin n eft pas celle qui les fait agir. En effet, fi elles étoient des moue lies prêtes à faire leurs œufs ou leurs petits vivans, les corps de celles qui cherchent à piquer les gallinfeèles feraient remplis des uns ou des autres: or j’ai fait lortir du corps de plulieurs mouches gallinfeèles tout ce qui y étoit con¬ tenu, loit en les preffant, loit en les écralant ; & j’ai eu beau obfcrver avec les plus fortes loupes ce que j’en avois fait fortir, je n’ai pûy appercevoir ni œufs ni embryons: beaucoup d’autres mouches auffi petites, & plus petites, telles que celles de certains pucerons , nous ont appris qu’en pareil cas j’euffe dû voir les uns ou les autres. Une preuve à mon fens encore plus décifive, eft prife du temps auquel ces mouches fe joignent aux gallinfeèles, ou, li on veut, du temps où elles les piquent. Ce n’eft que l’année fuivante que ces mouches doivent paraître, on n’en voit point fortir en été du corps des gailinlèèles qui ont fait leurs œufs. Si les œufs des mouches dont il s’agit, étoient dépolés dans les corps des galiinleèles, il n’y aurait qu’une manière dont les petits qui en devraient éciorre puffent parvenir à prendre leur accroifiement, ce ferait fi chacun d’eux étoit introduit dans un œuf de gal¬ linfeèle. Mais que deviendrait alors l’embryon de gallin- feèle î il périrait avant que de naître , il 11e pourrait pas 36 MEMOIRES POUR L’HiSTOIRE fournir à l’embryon de la mouche dequoy vivre. Les gall infectes m’ont elles-mêmes appris que loin que les j^etites mouches fufient pour elles redoutables, elles attendoient & aimoient leur approche. De tous les êtres animés elles font ceux qui le lemblent le moins, & les moins propres à montrer leurs fentimens, elles les mon- troicnt cependant à leur manière. Celles fur le corps def- queiles des mouches marchoient, fur-tout celles aux¬ quelles les mouches étoient prêtes à le joindre, ouvraient plus que les autres cette fente quelles ont à leur partie * PI. 4. fig. poftérieure * ; j’ai vû même alors fe former a cette partie & s’élever des bords qui n’y font pas en d’autres temps. Les parties charnues qui font aux environs de l’anus, ou l’anus même, entraient apparemment alors dans cette fente, & s’élevoient au-defius de les bords ordinaires. Il m’a même été aifé de voir que l’anus ou quclqu’autre ouverture char¬ nue étoit alors dans cette fente, car il m’eft arrivé devoir quelquefois une goutte de liqueur 1 e montrer peu à peu, Sc grofiir ; elle fortoit de l’ouverture que la loupe me faifoit découvrir. J’ai comparé les fentes des gallinfeétes dont les mouches venoient cle feféparer, dont l’accouplement ve- noit d’être fini, avec les fentes de diverfes autres galiinfe- étes, & les fentes des premières m’ont toujours paru lènfi- blement plus ouvertes que celles des autres. Si nos gallinfeétes ne nous offrent point la fingularité de fe féconder chacune elles-mêmes, que M. r Cefioni leur a cru, fi elles ne nous offrent pas celle de s’accoupler prefqu’en naiffant, comme M. rs de la Hire Si Sedileau ont penlè quelles faifoient , elles nous offrent au moins celle d’avoir des mâles d’une forme bien différente de la leur. Si d’une grandeur bien difproportionnée. Ilcflrplai- fànt que le mâle marche, fe promène fur le corps de la femelle à laquelle il veut fe joindre. O11 voit fouvent le des Insectes. I. Mem. 37 même mâle aller fucceflivement fur plufieurs femelles » les parcourir chacune d’un bout à l’autre, d’un côté à l’autre, tenant toujours la partie en forme d’aiguillon in¬ clinée vers leur corps; il s’arrête, il fehxe, il introduit cette partie quand il s’dî placé fur la fente d’une fémelle prête à la recevoir. Les arbres qui, au commencement du printemps, ont paru le plus chargésde petites gallinfeéles, n’ont fouvent en été , qu’un nombre ailes médiocre de groffes gallinfeéïes; c’ell qu’il en clf des gallinfeéles comme de quelques autres genres d’infecftes dont les femelles font extrêmement fé¬ condes , où le nombre des mâles lùrpalfe de beaucoup celui des fémelles; c’eft ce que nous font voir les républiques des guêpes, 6c fur-tout celles des abeilles. Quoique je n’aye encore obfervéque les mouches qui font les mâles d’une efpece degallinfeéles, il n’y a pas lieu de douter que d’autres eijjeces de gallinfeéïes n’ayent des mâles analogues, 6c qu’on reconnoîtra lorfqu’on cher¬ chera à les voir dans une faifon convenable. M. rs Se- dilcau 6c de la Hire avoient déjà remarqué qu’il n’y a qu’une partie des gallinlectes des orangers qui pondent des œufs, les autres font apparemment celles qui le tranf- forment en mouches. Parmi les mouches qui fortent du kermès la plus noble des gallinfecles, il y en a une dont les ailes font blanches, 6c qui a tant d’autres rapports avec nos mouches blanches des gallinfeéles des pêchers, qu’on rfhéfitera pas à la prendre pour un fécond exemple des mouches qui fervent à féconder des gallinfeéïes. L’effentiel de ce que nous venons de voir fur la fécon¬ dation des gallinfeéles, avoit déjà été comme prédit: on a annoncé en quelque forte dans les Acfles de Phyfique 6c de Médecine des Curieux de la nature, vol. 3. année 1733. page 57. de l’appendix, que l’on découvriroit que Eiij 38 MEMOIRES POUR L’HiSTOIRE les gallinfeéles ont pour maies de petites mouches, &on y paraît déjà convaincu que cela eft. Les efprits les ]>Ius philofophes aimeroicnt les prédirions, ils y adjoûteroient foy fi toutes étoient auffi-bien fondées que letoit celle- ci. M. r Brennilis a donné l’hiltoire du Coccus Polonïcus, ou de la graine d’écarlate de Pologne, nous en parlerons d’après lui dans le Mémoire fuivant fous le nom d’une pro -galhnfeâe. Cette h ifoire a été imprimée à Dantzic en 1731- elle a été réimprimée en 1733. dans l’appendix du volume des Aéles que nous venons de citer, & elle y paroît avec un fupplément. Lorfque M. r Brennius la mit au jour pour la première fois, il plaça, mais à ce qu’il allure,avec quelque répugnance, la graine d’écarlate de Pologne au nombre des infeéles qui fe fuffifent à eux-mê¬ mes , qui font mâles & femelles, & cela entraîné par le fentiment de M. r Cclloni fur ies gallinfeéles, & lur ce qu’il 11’avoit trouvé aucunes dilférences de fexe entre ceux qu’on appelle graine d’écarlate de Pologne. Mais comme il convient à tout galant homme & à tout vrai l'çavant, il s’eft fait un plaifir de donner un fupplément à cette Differtation dans lequel il avoué l'on erreur. Il l’y avoué d’une manière qui lui elt doublement glorieufe, car il nous apprend en même temps qu’il a découvert les mâles de ces inlééles qui jufques-là avoient été méconnus; il a reconnu pour tels des mouches à corps rouge, à ailes blan¬ ches bordées de rouge, en un mot des mouches parfai¬ tement femblables à celles de nos gallinfeéles du pêcher. Dans fi première Differtation il les avoit prifes pour des mouches venant de vers qui avoient mangé les graines d’écarlate, & depuis il a vu que les petites graines d’écarlate fe transforment en ces mouches; il a vû ces mouches monter fur les fémelles ou graines, joindre leur derrière au leur, & il lui a paru indubitable, comme il nous le paroît, 39 des Insectes. I. Mem. que c’étoit pour féconder les œufs des femelles. Mais pour revenir aux mouches de nos gallinfeéles du pêcher, lemblables à celles de la graine d’écarlate, il ne pourroit relier qu’une difficulté qui fît peine, qui empê¬ chât qu’il ne parût prouvé démonflrativement quelles font les mâles des gallinfeéles; leur queue a l’air d’un ai¬ guillon analogue à celui des mouches ichneumons, à celui des mouches des galles, en un mot il femble analogue à celui de plufieurs autres mouches qui ont befoin d’être munies d’un infiniment propre à percer les corps dans lefquels elles veulent introduire leurs œufs. La figure de cette queue des mouches des gallinfeéles, pourroit donc laiffier de la difpofition à penfer quelle eft un infini¬ ment propre à faire des blefiuresaux gallinfeéles. Mais fi ion veut examiner cette partie comme je l’ai frit,on fera convaincu que ce n’eft point là fon ufage, qu’elle n’efi nullement capable de percer, & qu’elle n’eft que le fourreau de la partie du mâle. Après avoir ftaift une mouche de gallinfeéte entre le pouce & l’index, près du derrière, en Liftant la queue en dehors de mes doigts, j’ai prefte le ventre de cette mouche que j’obfervois avec une très-forte ioupe ; alors j’ai vu fortir par le bout de la queue un filet cylindrique *, très - blanc , d’une confiftance mé- *PI. 3.%. diocre & moins ferme que celle des chairs ordinaires. Il l1 '^' eft devenu de plus long en plus long, à melure que j’ai prefte davantage, jufqu’à être égal à la moitié de la lon¬ gueur de la queue. Si la mouche avoit un aiguillon ou lin infiniment analogue, ce corps le feroit; mais au lieu que les aiguillons qu’on fait fortir de leurs étuis font d’une fubftance dure, femblableà la corne, & ordinairement bruns, le corps forti de la queue de notre mouche étoit blanc & d’une fubftance molle; en un mot il étoit bien éloi¬ gné de reffembler à un aiguillon. On ne peut donc prendre * py. 4. 16. & 18. * Fig. 16. 47. A. A. * Fig. x i, e. 40 MEMOIRES POUR L’HlSTOIRE cette partie que pour celle qui caracftérife le mâle.' Notre petite mouche à deux ailes eft d’une claffe très- particulière; j’ai eu heaume fervir des plus fortes loupes, îg- je n’ai pu lui appercevoir en deflous de la tète * rien qui pût être comparé aux trompes des mouches à deux ailes, ni rien qui reftemblâtà des dents: où les dentsdevroient être, fi elle en avoit, je n’ai vu autre choie que deux grains &■ hémilphériques *, ou plus qu’hémifphériques, noirs & luilàns, 6c qui refTemblent tout-à-fait à deux yeux. Si ç’en font réellement, ils font bien finguliérement placés; ces 7. grains font tout-à-fait femblables à deux autres petits corps* litués en-deffus de la tête, affés proche de l’origine des antennes, 6c qui ne peuvent être réellement pris que pour des yeux. Il femble donc que cette mouche a des yeux à la place de la trompe 6c des dents, 6c quelle eft privée des organes propres à prendre des alimens. Mais les papil¬ lons nodlurnesmâles6c fémelles, nous cmpêcheroicnt de regarder ce dernier fait comme un prodige dans l’Hiftoire naturelle; nous avons vu que plu Heurs elpeces de ces pa¬ pillons n aident avec affés de force Si de vigueur pour s’accoupler, les uns pour féconder les œufs, 6c les autres pour les pondre, fans qu’ils ayent befoin de prendre de nourriture pour réparer ladiftipation qui fe fait alors chés eux; ils n’ont paru que pour perpétuer leur efpcce, ils y travaillent dès qu’ils ont pris des ailes, & périllcnt quand ce grand ouvrage eft fini. Il en eft probablement de même de nos mouches des gallinfeéîes, qui dès qu’elles font forties de leur coque, cherchent à féconder les fémelles, 6c qui 11e doivent guéres furvivre à cette opération. Nous avons déjà fait remarquer qu’il eft particulier aux mouches rie ce genre de fortir de leur coque le derrière le premier, car toutes les autres mouches que j’ai obfcrvécs, 6c dont nous parlerons dans la fuite, fortent delà leur la - tête des Insectes. I. Mem. 41 tête la première. Si nous 11e pouvons fçavoir les raifons qui demandent qu’il y ait des mouches qui ouvrent leur coque par le bout oppofé à celui par lequel les autres ouvrent le bout de la leur, nous voyons au moins que tout a été dil- polè pour que lafortie de la mouche delà gallinfeéte fe pût faire commodément par le bout poftérieur. Dans les nym¬ phes des autres mouches toutes les jambes font pofées fur le corps, & vont fouvent jufqu’au derrière, au lieu que j’ai obfervé conftamment que chacune des jambes de la pre¬ mière paire remonte en haut,& entoure un des côtés de la tête de la nymphe de la gallinfeéte *. Je penfai d’abord * PI. 4. f \«ulo. que cette pofition des deux premières jambes venoit du ,k lH ‘ dérangement que j’avois fait lorfque j’avois tiré la nymphe de fa coque; mais les ayant toujours trouvées dans cette fituation quelque foin que j’aye pris pour mettre la nym¬ phe à découvert, & quoique c’ait été avec des précautions qui m’affûroient que je 11’avois pû déplacer aucune des parties, j’ai reconnu que cette difpofition des deux pre¬ mières jambes, toute extraordinaire qu’elle elt, leur étoit naturelle. Ce n’efi ni fans delfein ni fans raifon qu’elle leur a été donnée. Quand on a obfervé que la mouche fort par la partie poftérietire de fon fourreau , on voit que les deux premières jambes, placées comme deux bras autour delà tête, doivent fervir à cette mouche pour fe pouffer en arriére. Enfin , au lieu, comme nous le verrons dans la luite, que les coques des autres mouches peuvent fe fen¬ dre aifément à leur partie antérieure qui doit donner ifîuë à la mouche , il y a une portion * de la partie poflérieure *pi. 4.%. de la coque des mouches des galiinfecles qui peut aile- J. 4. 5 N 6 . ment fe relever en haut. Je ne fçais fi toutes les mouches des galünfeéles font nufii long-temps à fortir de leurs coques, que l’ont été quelques-unes qui font forties des leurs fous mes }eux, & Tome IV. . F 42 MEMOIRES POUR L’HiSTOIRE placées fur mon bureau. Celles-cy n’en ont été ordinai¬ rement dehors, que plus de dix à douze heures après que j’ai commencé à voir fortir du bout poflérieur une pctite portion de chaque aile, 8c même une portion des deux longs filets. Je n’ai pas bien vu comment ces derniers filets font placés fur la nymphe, je ne fuis pas parvenu à les y diftinguer; mais des parties d’un fi petit animal échappent aifément lorfqu’elles font dans i’inaétion, 8c de plus collées contre d’autres, comme le lont fans doute celles-ci. La plupart des gallinfeéies en forme de bateau renverfé, fe reffemblent à un point qui peut faire douter fi celles qui croiffent fur des arbres fort différens, font d’efpeces diffé¬ rentes; fi celles du pécher, celles de la vigne, celles de l’abricotier, celles du figuier,celles de l’oranger, 8cc. ne font point toutes des individus de la même efpece, qui peuvent vivre fur ces différens arbres. C’eflce que j’ai négligé d’é¬ prouver, &qui peut être éclairci par des expériences très- fimpies; mais on doit eflre accoutumé à voir qu’une infi¬ nité d’expériences très-faciles, & propres cependant à nous in ftru ire, refient faire, pendant qu’on employé beaucoup de peine 8c de foin pour en tenter d’autres; les difficultés nous déterminent fouvent à agir. Après s’être bien affûré dans la faifon où les gallinfccfes font le plus aifées à voir, qu’il n’y en a aucune fur un pied de vigne, qu’on attache à ce pied de vigne une gallinfeéte de l’orangèr, 8c adhé¬ rente à un peu d’écorce d’oranger, avec tous les œufs quelle a pondus, 8c qui font fous elle; qu’on ne l’y porte même que lorfque les petits font nés, on verra s’ils vivront 8c s’ils croîtront fur le pied de vigne. On portera avec les mêmes précautions une gallinfcéle détachée d’un pied de vigne fur un oranger bien net; en moins d’un an on fçaura fi les gallinfeélcs de la vigne vivent fur l’oranger ,8c réci¬ proquement fi celles de l’oranger vivent fur la vigne, 8c des Insectes. I. Mcm. 43 ainfi de celles de divers autres arbres. Mais il eftdéja très- certain qu’il y a des gallinfèétes qui peuvent vivre fur des arbres & des plantes de différentes efpeces. Une obfer- vation de M. Ceftoni rapportée ci - devant le prouve, Sc on en a fait plus d’expériences qu’on ne l’eût voulu, dans les ferres du Jardin du Roy, où les gallinfeétes d’une même efpece ont paffé' fur plufieurs efpeces de plantes des pays chauds , & s’y font multipliées tellement que pour con- ferver les plantes, on a été obligé d’employer beaucoup de temps à les nétoyer. Malgré les reffémblances extérieures qu’ont entr’cilcs les gallinfeétes en forme de bateau , qui vivent fur différens arbres, ileff pourtant déjà fur qu’il y en ad’efpeces diff éren¬ tes. Si on décidoit legerement fur les reffémblances, Sc fur- tout fi ons’arrêtoit à celles qui lont entre les gallinfeétes encore jeunes , qui font entr’elles jufques vers la fin de Mars, on feroit porté à confondre enfemble même celles qui font de genres différens. Alors, Sc c’eftun fait fingulier, celles qui doivent prendre les figures les plus fphériques, Sc celles qui doivent avoir par la fuite celle d’un rein , font comme celles qui doivent avoir des figures de bateau ren- verfé, des plaques ovales; ou quand elles ceflènt detre fi applaties, elles prennent une convexité qui difpofe encore à croire qu’elles feront des gallinfeétes faites en bateau. Ce 11’eff qu’après la dernière mue que celles qui doivent pren¬ dre une figure qui tient de la fphérique, commencent à s’arrondir, c’eft alors qu’elles croiflént vite, Sc qu’en peu de temps elles deviennent méconnoiffables. J’ai vu ces changemens fe faire dans les gallinfeétes du noifetier, Sc dans celles du tilleul , qui ne font guéres que des demi- boules, dans celles du pêcher, qui font plus que des demi-boules, Sc dans celles du chêne *, qui font de véritables boules. J’ai vû ces dernières en fimple plaque, 3 Fi) 44* MEMOIRES POUR L’H I STO I R E & enfuite en forme de bateau renverfé. La gallinfeéle efl encore très-petite lorfquefon accroiffement va être le plus fubit ; fi alors elle croît à peu près proportionnellement en tous les fens, que le dos s’élève feulement un peu plus qu’une exaéte proportion ne le demanderoit, & qu’il l'oit permis aux parties de s’étendre en avant & vers les côtés , autant que leur augmentation de volume l’exige, la gal- linfeéte prendra la ligure de bateau renverfé. Mais s’il ar¬ rive à d’autres gallinfeétes que leur tête & leur derrière peu diftans l’une de l’autre avant que leur grand accroii- lèment commence , & même tout le contour de leur corps, relient fixes dans leurs premières places, il efl clair que pendant l’accroilfement le dos & les côtés s’élèveront conlîdérablement, & s’arrondiront, afin que l’augmenta¬ tion de volume qui ne peut être portée allés en avant ni en arriére, ni vers les côtés, trouve place. Cette gallinfeéle parvenue à toute fa grandeur, ne le trouvera donc pref- qu’appliquée contre l’arbre que par la furface par laquelle * PI. 5. fig. elle le touchoit étant petite* : elle pourra être lemblable à 4 * une boule dont un très-petit fegment auroit été emporté. Si pendant l’accroilfement fubit le contour du corps s’ell un peu étendu, mais moins que ne l’eût exigé l’accroif- fement de la furface fupérieure, la gallinfeéle deviendra feulement une moitié, ou une plus grande, ou une plus petite portion de boule , comme font des gallinfeétes * PI. 3. fig. du noifetier *, & du tilleul *. Enfin fi pendant l’ac- Fî i croiffement tout le contour du corps ne prête aucune¬ ment, qu’il foit même obligé de revenir en delfous pour céder à l'effort que font les parties extérieures pour s’é- * Pi. 6. fig. tendre, la gallinfeéle quia crû, pourra 11e tenir à l’arbre * ,r, & fig. q l)C p ar un filet, comme y tiennent les gallinfeétes en J * pi. s . fig. forme de rein *, & d’autres plus fphériques * ; pendant 3 & 4 - p- i’accroiffement la tête & le derrière fe l'ont rapprochés des Insectes. I. Mem. 45 l'un de l’autre, & de même tous les côtés oppofés du contour le font rapprochés. Nous pouvons encore con¬ cevoir, & c’eft même ce qui arrive le plus fouvent, que quoique la membrane qui recouvre le ventre, celle qui étoit appliquée contre l’arbre, croilfe ailes confidérable- ment, l’infeéle prendra une forme fphérique, & cela li l’accroilfement des membranes du dos ou du côté qui elt en vue, fe fait dans une plus grande proportion que celui du côté oppofé. On voit des cloportes prendre dans un infrant la figure d’une boule bien ronde, parce que dans un inftant elles peuvent difpofer tous leurs anneaux com¬ me les fufeaux d’un globe, & ramener leur tête vers leur der¬ rière. Ce qui fe pâlie dans un inftant dans les cloportes, lé fiait peu à peu dans les gallinfeétes de certaines efpeces, elles fie roulent, pour ainfi dire, en croi fiant; elles 11e tiennent prefque plus à la brançhe que par l’efpece de trompe quelles fiçavent piquer dans l’écorce pour en pomper le fiuc. Plus les gallinlèéles font fphériques , & plus elles ref- femblent, après leur ponte, à une coque faite pour ren¬ fermer des œufs. Les gallinfeéïes en forme de bateau ne font que couvrir leurs œufs qui font entr’elles & l’arbre; mais les gallinfeéïes qui tiennent de la figure fphérique, font des efpeces de bourfes dans lefquelles les œufs font contenus. Tout fe pafie pourtant dans la ponte de celles- ci comme dans la ponte des autres. Le ventre remplif- fioit en grande partie l’intérieur de la boule; à naefurc qu’il fie vuide, à naefure que les œufs fortent, il lai fie une place en dehors de fies téguments, où les œufs fie logent; ils y fiont, & les petits y fiont placés enfiuite, comme les petits fortis du ventre d’une cloporte roulée fie trouveraient logés dans l’efpece de boîte fphérique que forme alors le corps delà cloporte. Le kermès, la plus renommée des gallinfieéles , cft de Fiij 4.6 MEMOIRES POUR l’HîSTOIRE celles dont la figure approche d’une boule dont un a fies petit fegment a été retranché. Il vient fur une très-petite *PI. j.fig. efpece de chêne verd * qui n’ed communément qu’un arbrideau qui s’élève environ à deux ou trois pieds; c’ed H/ex aculeata cocci glandifera C. B. pin. Ce jîetit chêne croît en grande quantité dans des terres incultes de Pro¬ vence & de Languedoc, qu’on nomme des garigues ; il croît auffi en Efpagne, & dans les illcsde l’Archipel, entr’autres en Candie. C’elî fur ces petits arbrifTeaux que les payfans vont faire la récolte du kermès dans la faifon convenable. Quoiqu’il ait excité depuis long¬ temps la curiofité des Naturalises, ce n’efi: que depuis peu d’années qu’il a été obfervé avec une attention &. une exaébtude qu’il méritoit. M. rs de la Hire & Sedileau avoient mis fur la voye de le connoître, par l’hidoire qu’ils ont donnée des gallinfectes des orangers ; mais ou n’a pas tiré parti auflï-tôt qu’on l’auroitdû, de leurs obfer- vations pour éclaircir la nature du kermès, pour voir en général le rapport qu’il y a entre lesgallinfeclesen forme de bateau & les gallinfeétes plus raccourcies & plus arron¬ dies. Les Mémoires de l’Académie en fournident des preuves. Dans ceux de l’année 1705. il y a un Mé¬ moire de M. de Tournefort qui contient des obfer- vations de M. Garidel Profeffeur royal d’Anatomie à Aix, & fçavant Botaniflc, que M. Garidel lui-même a délavouées dans un temps où il a été en état d’en don¬ ner de plus exaéles, & telles qu’il nous les falloit. Un Mémoire de M. Nidole, delà Société Royale de Mont¬ pellier , imprimé à la fin des Mémoires de 1714. a pour objet le kermès, & nous laide peu indruits de la nature. On y veut qu’il doit une coque qu’un infeéle a condruitc pour y dépofer fes œufs. M. r Ccdoni excellent obfcr- vateur, écrivit de Livourne le 20 Septembre 1714. une des Insectes. 7 . Mem. 47 Lettre à M. Vallifnieri, dans laquelle il l’entretient de ce qu'il a obfervé fur les gallinfeéïes des orangers, des fi¬ guiers, & principalement fur celles d’une elpece de petit chêne qui croit aux environs de Livourne. Là il prouve que les gallinfeéïes de ce petit chêne font de la même clafle que celles des orangers, & il en conclut très-bien que quoique ces gallinfecles ne donnent pas, comme le kermès, une teinture rouge , le kermès & ces gallinfecles ne différent qu autant que différent des efpeces d’un même genre. M. Vaflifnieri a fait imprimer parmi fes œuvres cette Lettre de M. Ceffoni, qu’il a fait précéder par une courte Préface, dans laquelle il rappelle ce qu’on avoit écrit jufqu’alors furie kermès. Quoique perfonne ne fût un plus grand juge que lui fur de pareilles matières, il a femblé n’ofer prononcer en faveur du fentiment de M. Ceffoni, il a laiffé au public la liberté entière de fe dé¬ terminer. J’ai pourtant peine à croire que M. Vallifnieri n’ait pas bien vû toute la force des indudions de M. Ceffoni, qui approche de la démonflration, mais j’ai bien du penchant à penfer que fapoliteffe pour M. le Comte de Marfilli l’a retenu. Il n’a pas voulu fe déclarer ouverte¬ ment contre le fentiment que ce dernier avoit cherché à établir dans une Differtation qu’il lui avoit adreffée à lui-même. M. le Comte de Marfilli adreffa de Bologne le 7 Mars 171 i.à M. Vallifnieri cette Differtation, dans laquelle il rapporte & tâche d’établir fon fentiment fur le kermès; il l’y met au rang des véritables galles dont la produéfion eft oc- cafionnéepar des infeeffes; il prétend qu’un infeéle dépofe fes œufs dans une entaille qu’il a faite au petit chêne fur le¬ quel on trouve le kermès: queces œufs dépofés avant l’au¬ tomne, reffent prefqu’invifibles pendant tout l’hiver, & qu’ils croiffent au printemps lorfque l’arbre leur fournit de la 4$ MEMOIRES POUR L’HlSTOïRE fève. La galle dans laquelle ces œufs font renfermés, croît en même temps, &. devient le grain decarlate ou de ker¬ mès de groffeur fenfible. Il compare l’accroifTemcnt des grains de kermès à celui des vcflies d’ormes, dont i’hifioire * Tome 111. des pucerons nous a engagé de parler au long *. La caufe Mem. i x. jy) goig ( { e j a production de ces veffies n’étoit pas affés con- ùr fumnus . mie dcM. le Comte de Marfilli; il anûre qu il y a un temps où elles font pleines d’œufs, & nous avons fait voir qu elles ne contiennent jamais que de petits animaux vivans. Si M. le Comte de Marfilli avoit eu le loifir de faire des ob- fervations plus fuivies, elles l’euffent fans doute détrompé de l'idée qu’il avoit prifede la nature du kermès. Il faut avouer pourtant que le fuccès d’une de les expériences étoit propre à féduire. Tout le monde connoît la compo- fition de l’encre, on fçait que c’eft par Je mélange de la noix de galle que la diffolution de vitriol prend une cou¬ leur noire, dont nous fçavons Lire tant d’ulàge. M. le Comte de Marfilli éprouva s’il feroit de l’encre avec le kermès &. le vitriol, & il en fit;& delà il fe crut fondé à condui re que le kermès qui produifoit un effet femblable à celui des galles des grands chênes, étoit une galle du petit chêne fur lequel on le trouve. Mais tout ce que cette expérience nous découvroit de curieux, c’efl que les ma¬ tières végétales propres à faire de l’encre, le font encore après avoir paffé dans le corps d’un animal. Les beaux Mémoires que nous a donnés M. Lcmery fur les com¬ portions des encres , nous font connoître auffi des matières végétales capables de noircir la diffolution de vitriol , & ils nous apprennent que les cxcrémcns humains ont la même propriété. L’expérience de M. le Comte de Marfilli fcmble nous faire voir que cette propriété réfide en desmatiéres animales auxquelles fc font incorporées ou prefqu’incorporées des matières végétales, des Insectes. 7 . Mem. 49 végétales, puifque les gallinfeéles & les œufs des gallin- fedes nourris de la lève du chêne font de l’encre avec le vitriol. Tout ce que nous avons dit ci-devant des gallinfcdes en général, fuffiroit pour prouver queM.de Marfiili n’avoit pas été aufli heureux dans l’idée qu’il avoit pril'ede la nature du kermès. Nous n’avons garde cependant de nous dif- penfer de rapporter les ohlervations qui ont été faites im¬ médiatement, & très bien fur cette efpece de gallinfedcs; nous les devons encore en partie à M. Garidel que nous avons cité ci-deflus. 11 les a fait imprimer dans fon hifloire des Plantes des environs d’Aix, qui a paru en 1715. M. Garidel étoit Correfpondant de l’Académie, & avoit été excité, comme il nous l’apprend *, par M. de Tournefort, * P“g- 2.46. à bien étudier le kermès. Pour le faire avec plusdeluccès, ils’alTociaM. EmericMédecin d’Aix;ce dernier fc chargea du foin defe faire apporter de la campagne tous les jours, ou tous les deux ou trois jours, des branches du petit chêne peuplées de kermès: il lesobfervoit ainfi régulièrement,& il faifoit vérifier fes obfervations par M. Garidel. Ce fut encore M. Emeric qui le chargea de les écrire, & M. Garidel les a publiées; nous allons en donner le réfultat. Le kermès qui a pris toute fa grofl'eur, paroît comme une petite coque fphérique * attachée contre l’arbrideau, *Pî- y.fig.ri ou, pour parler comme M. Emeric, comme une gonfle dont la peau ejl afles forte, luifante df de couleur de prune , couverte comme ce fruit d’une poufliere blanche quoti appelle la fleur. M. Nilfolle dit que fa couleur cil un rouge brun, mêlé de blanc-cendré. La comparailon de M. Emeric donne une plus jufte idée delà vraye couleur du kermès, lur tout fi on y ad joute qu elle refiemble à celle de diverfes prunes qui font prefque noires, telles que quelques efpeces de damas, que nos prunes de Monfieur, Tome IV. .G MEMOIRES POUR L’HiSTOiRE & que les petites prunelles fauvages des hayes. Ceux qui n’ont vû le kermès que dans des boutiques de marchands & cités les ouvriers, le croycnt rouge, d’un a des mauvais rouge brun, mais ce n’efl pas là la couleur naturelle delà bonne efpecede kermès, on lui a fait prendre cette couleur en l’arrofànt de vinaigre, comme nous le dirons bientôt. Celui que j’ai reçu lur des branches , & qui n’avoit point été mouillé de vinaigre, n’étoit nullement rougeâtre, il avoit la couleur des prunelles de buiffon. Les habitansdu pays où fe fait la récolte du kermès, le confidérent dans trois temps différais & très - marqués, ou dans trois différens états d’accroiffcment, & M. Emeric a fuivi leur divifion. Le premier temps efl vers le com¬ mencement du mois de Mars. En langage Provençal on appelle le kermès lou rermeou , & on dit que dans ce temps lou vermeou groue , c’eft-à-dire, que le ver couve; alors il efl plus petit qu’un grain de millet. M. Emeric penfe que c’efl alors qu’il commence à fè fixer , après avoir couru la campagne pendant tout l’hiver. L'hiver n’cfl guéres le temps où les infeéles courent; il y a toute appa¬ rence que celui-ci n’abandonne que très-rarement, le petit chêne fur lequel il naît, mais que c’efl à la fin de l’hiver qu’il commence à devenir d’une groffeur fenfible, & qu’il a peut-être comme nos gallinfeéles des pêchers, quitté les feuilles pour venir s’attacher contre les tiges. Confidéré dans ce temps au microfcope, il paroît d’un très-beau rouge, ayant deffus fon ventre & tout autour du ventre une efpece de coton qui lui fert de nid. Il aauffi fur fon dos de petits floccons de coton. Il ejl alors convexe comme la moitié d’une prune, c’efl à-dire, qu’il reffemble encore alors aux gallinfeéles en forme de bateau renverfé, com¬ me nous avons dit que les gallinfeéles oui doivent devenir les plus arrondies, leur reffemblent pendant qu’elles font des Insectes. I. Mem. 51 très-jeunes. Dans les endroits du deiïous du corps du kermès qui ne font point couverts de coton, le micro- fcope fait voir quantité de points qui ont le brillant de i’or. Le fécond temps de la divifion que fuit M. Emeric, efl dans le mois d’Avril; alors les gens du pays dilcnt que lou vermeou efpelis, c’eft-à-*lire, qu’il commence d’éclorre. M. Emeric remarque très-bien que leur façon de s’ex¬ primer n’eft rien moins qu’cxaéte, à moins qu’ils n’en¬ tendent par le ver éclos le ver qui a pris tout fon accroif- femcnt, 6c la forme à laquelle il doit parvenir; car c’cft alors qu’il a acquis toutes fcs dimenfions, qu’il eft devenu rond & gros comme un pois. Il cil pourtant plus ou moins gros félon que la faifon 6c le terroir lui ont été favorables. Sa peau eft devenue plus ferme, 6c le coton qui dans le premier temps étoit deflus par intervalles 6c. par petits floccons, y eft par-tout étendu en forme de poudre : il ne paroît plus qu’une coque, ou encore félon Î’expreftîon de M. Emeric , qu’une gouffe remplie d’une liqueur rougeâtre femblable à un fang pâle. Enfin le troifiéme temps tombe vers le milieu ou vers la fin de May, 6c c’eft celui où on trouve dans cette efpece de coque, 6c comme dit très-bien M. Emeric, fous le ventre de l’infeéle, 1800. ou 2000. petits grains ronds qu’011 appelle dans le pays lou freijfet. Ce font des ceufs qui venant enfuiteà éclorre , donnent autant d’ani¬ maux femblablcs à celui d’où ils font fortis. Ces œufs pa- roiftent aux yeux une fois plus petits que la graine de pavot; ils font remplis d’une liqueur d’un rouge pâle; vus au mi- crofcope ils femblent parfemés d'une infinité de points brillans couleur d’or. M. Emeric explique très-bien comment la peau du ventre du kermès fe retire vers le dos à mefure que les G ij 52 Mémoires pour l'Histoire œufs Portent , & que par-là les œufs trouvent une place en dehors du corps; en un mot,tout ce que nous avons rap¬ porté d’effentieifurla ponte des autres gallinfcéks, il l’a obfervé- fur celle du kermès. Il nous en caraélérife de deux efpeces; celui de la pre¬ mière eft celui même dont nousvenons de parler, qui félon ion expre/fion, a une couleur de prune, & qui pond des œufs rouges. Celui delà fécondé elpece eftblancheâtre; je ne fçais s’il ne l’appelle point blancheâtre par compa- raifon à la couleur foncée de l’autre, car j’ai lieu de croire que cette fécondé elpece en eft line qui m’a été encore envoyée fur des branches du petit chêne verd, & qui eft rougeâtre. Quoi qu’il en foit, M. Emeric adjoute que le kermès de la fécondé efpece eft, comme le premier, cou¬ vert d’une poudre iegere; il croît dans les mêmes temps & de la même manière; fes œufs font blancs. Les petits qui Portent des œufs rouges, & ceux qui Portent des œufs blancs, ont des figures affés femblables, qu’il compare à celle des cloportes, avec laquelle les jeunes gallinfeéles de toutes efpeces ont quelque reffemblance. Celui qui fort des œufs rouges eft rouge. Le contour de fon corps eft un oval un peu plus pointu du côté du derrière que du côté de la tête. Son dos eft convexe & en voûte affés ronde; des points brillent dédits, qui font couleur d’or; il eft rayé par défiais, & il a par defious diverfes lignes tranfverfales. Il a fix jambes; il a deux antennes prefque auffi longues que fon corps: ce qui ne lui eft pas commun avec les petits de la plupart des autres efpeces de gallinfeéles, c’cft qu’au derrière il a une queue fourchue formée par deux efpeces de cornes prefque auffi longues que les antennes que porte la tête. M. Emeric donne à celle-ci deux yeux noirs. Les petits qui Portent tics œufs blancs, font d’un blanc -iàle; leur dos eft plus applati que celui des autres ; les points des Insectes. I. Mem. 5> qui brillent fur leur corps, vus au microfcope, font cou¬ leur d’argent, & i’oval du contour du corps n’cft pas plus ouvert du coté de la tête que du côté du derrière. Il y a beaucoup moins de ces kermès blancs, que des rouges. Les gens du pays, qui ne doivent pas être bons natura¬ lises, les appellent la matre dou vermeou, c’elt-à-dire, la mere des kermès. Enfin M. Emeric nous décrit deux efpeces de nymphes qu’on trouve dans certains grains de kermès, qui le trans¬ forment en deux petites mouches de différentes efpeces, qui toutes deux ont de commun de fauter comme des puces ou comme des fauterellcs-puces. Lune de ces efpeces de mouches eft d’un noir de jayet, & l’autre d’un blanc-fale. Nous ne rapporterons point la defcription détaillée qu’a donnée M. Emeric de l’une & de l’autre. Une de ces mou¬ ches a les ailes blanches comme celles des mouches gaüin- feélesplus quehémil'phériques despêchers,&efilàns doute Je kermès mâle; c’eft cette mouche & quelques autres qui ont fait croire que le kermès étoit une véritable galle. Il y a long-temps néantmoins que Pierre de Quiqueran de Beau- jeu, Evêque de Senez, dans fon ouvrage^? laüdibus Provin- cia *, a donné le fond de l’hiftoire du kermès; il ne s’agiffoit Livre 2.pag. que de vérifier & de voir avec plus de détail ce qu’il en a 2 * 7 ' dit. L’endroit où il en a parlé mérite d’être rapporté ici en entier, le voici. Vere medio rorati imbribus fini ces, coccinn hoc modo ordïumur . U lu imüs fcirpus fe in duo brachia partitur, in horum medio inflarfocanei palmitis, in- crefcit rotundum quiddam magnitudine & colore pijt; hcc mat rem vocant , quod ex eo cet ter a gratta producuniur. Abat res porro habet ut plurimum quinque qualibet cefpitum familta , qua ineunie aflate , ccjluque rninutijffïmorum vermiculorum, ut tantum vifum non effitgtant , catervam profundunt, fatifeunt- que in fumnûtaie. In animalia prorepit noya foboles colore G iij 54 MEMOIRES POUR L’HlSTOIRE candida , profquiturque in fublime. At ubicunque vertnicüli, y cl germinantis furculi acellis occurrerint, dcfident, & incrc- vtentis audi rriüïi magnitudine finit. Inde liberïus adolefccn - tibus albus color in cin cri ci uni tranft, jamque ?ion animal, fed pifutn rurfus apparent. Tuncque eagrana maturitatem adepta colliguntur , jam coloratis vermiculis fœta. Rien n’eft plus précis que ce paflage, les principaux faits Je i’hiftoiredu kermès s’y trouvent. L’effentiel de cette hiftoire étoit donc bien fçû lorfque Quiqueran écrivoit , mais il n’étoit pas prouvé , & il avoit befoin de l’être par des obfervations fuivies & détaillées, qui empêchaient d’a¬ dopter les idées que quelques apparences & même des ob¬ fervations pouvoient faire prendre de cet infecte. Dans ces fragmens des obfervations de Jungius, qui ont été fauves des flammes, l’hiftoire du kermès efl encore rapportée à peu près comme par Quiqueran. Vermis cocci, infectum cocci, à" hccc befiola places metamorphofes fubir. j.° Vere in ax il lis cocciferee ilicis crefcit pilula pif magnitu¬ dine, quee mater cocci dicitur. Ea ajlate fat if cens prof,tin dit vùnutifimorum animaliwn catervam ; taies maires quinque funt in qualibet planta. 2.° Vermiculi ifi candidi primumfur- fini repunt, è" fut icis ax illis adhetrefinit & mutantur in pilulis pif magnitudine. Il paroît pourtant que cette obfcr- vation n’efl pas de celles que Jungius avoit faites lui- même, puifqu’il fixe comme Quiqueran au nombre de cinq celui des meres de chaque arhufte. Aux faits curieux que M. Emcric a obfervésavcc foin & avec attention, il aadjoûté quelques conjectures que nous ne croyons pas devoir adopter, par exemple celle par laquelle il tâche d’expliquer la production des mou¬ cherons qui fortent du kermès, foit de ceux que nous regardons comme les mâles du kermès, foit des autres. Ï1 fuppofeque les moucherons s’accouplent', qu’ils font des Insectes. I. Mem 5j des œufs; mais il fait prendre à leurs œufs une route trop longue & trop difficile pour arriver où ils doivent éclorre. Il imagine qu’ils peuvent être entraînés dans les racines de l’arbre par le lue qui s’y rend, affiler l'es canaux, & être déterminés par la ludion du kermès à le rendre fous lui. Les moucherons qui viennent de vers mangeurs du kermès, connoilfent fans doute une voye plus courte pour faire arriver leurs œufs dans l’intérieur même du kermès, fans doute qu’ils le piquent, & qu’ils dépolent leurs œufs dans les piquûres qu’ils lui ont faites. Une autre conjeélure de M. Emeric, dont nous avons déjaparlé , & à laquelle nous n’avons pas cru nous devoir prêter, c’efl que le kermès parcourt la campagne pendant l’hiver; dans cette faifon il a vû courir de très-petits vers rouges qu’il croit être les petits kermès. Malgré ce qu’il dit de leurs fix jambes, je fuis très-dilpofé à penfèr queJes in- fedes qu’il a vus alors font une elpece de ces mites écar¬ lates dont nous parlerons ailleurs; on en trouve en hiver d’une extrême petiteffe fur les plantes & fur les arbres. Selon que l’hiver eft plus ou moins doux, la récolte du kermès eff plus ou moins abondante; on efpére qu’cile fera bonne lorfque le printemps fe pafTe fans gelée & fans brouillards. A la fuite de cette remarque M. Emeric adjoûte qu’on obferve que les arbriffeaux les plus vieux, qui paroiffent les moins vigoureux, & qui font les moins élevés , font les plus chargés de kermès. Je croirois volon¬ tiers que c’eft parce que le kermès s’efl établi depuis plus long-temps furies arbriffeaux les plus vieux, qu’il s’y mul¬ tiplie d’avantage. Le terroir contribue à la groffeur & à la vivacité de la couleur du kermès ; celui qui vient fur des arbriffeaux voifins de la mer eff plus gros & d’une • couleur plus éclatante que celui qui vient fur des arbrif¬ feaux qui en font éloignés. MEMOIRES POUR L’HiSTÔÎRE Les inftrumens les plus néceffaires pour faire la récolte du kermès, l'ont de longs ongles; des femmes s’y occu¬ pent dans la faifon , dès le matin avant que la rofée ait été enlevée par le foleil. Les feuilles de l’arbufte font alors moins roides, oc les piquans dont elles l'ont armées en font moins à craindre. Outre l’adrelfe à détacher les grains, il faut fçavoir trouver les endroits où il y en a le pius: il y a des femmes qui en ramaffent julqua deux livres par jour. Bel on, dans fes obfervations des fingularites liv. i. pag. 19. raconte comment on fiit la récolte du kermès en Candie, voici fes termes. Le revenu de la grume d'é¬ carlate nommée Ceceus BAPHICà efl moult grand en Croie ; & pour ce que la cueillir cjl l’ouvrage des pajleurs ÙTpetites marmailles, les plus grands ne s’y veulent amufer; on la trouve au mois de Juin dejfus un petit arbrifeau ef pece de chêne verd qui porte du gland, Ce. Et pour ce que les feuilles font poignantes comme celles du houx, les bergers ont une petite fourchette à la main gauche pour les cliner à coté, & une petite faux à la droite dont ils coupent les pe¬ tites branches, defquelles ils ôtent ces petites vejfes ou ex- crémeus que fai ci-devant appelles graine d’écarlate, &c. Le prix auquel on le vend, varie comme celui de toutes les marchandifes , & peut-être beaucoup pius. Depuis que la récolte efl commencée jufqua ce qu’elle llnilTe, ie prix en haulfc tous les jours. La livre qui dans le com¬ mencement 11e vaut que 8 à 9 fols en vaut à la fin juf- qu’à 60, parce qu’à la fin ie kermès efl trèsdeger, c’ell- à-dire, qu’il y a alors moins d’œufs & de petits mêlés avec les cadavres des kermès-meres. M. Emeric dit qu’il en a vû vendre la livre jufqua fix francs. .Les marchands qui viennent acheter ie kermès pour • la teinture de la foye & de la laine, ont loin del’arrofer & les des Insectes. I. Mem . 57 & îes œufs qui s’eu léparent avec du vinaigre; ils l’ex- polènt enfuite au ioleil ou à une chaleur équivalente, pour faire périr tous les petits animaux éclos ou en état d’é- clorre, fansquoy il y auroit parla fuite une grande dimi¬ nution dans le poids de leur marchandilé. Le vinaigre altère la couleur du kermès , il la rend rougeâtre , & de-là il efl arrivé que ceux qui ont déterminé la couleur du kermès fur celle qu’il a dans les boutiques, ne lui ont pas donné celle qui lui efl naturelle. Il n’eft pas rare d’avoir dans une année deux récoltes de kermès ; la fécondé efl très-propre à confirmer la rcf- femblance que nous avons foupçonnée entre les galiin- fieélcs du pécher & celles de 1 ’ilex coccifera, par rapport aux endroits où elles fie nourrifferit dans leur âge le plus tendre. Les kermès de la féconde récolte , au rapport même de M. Emeric, font prefque tous attachés contre les feuilles. Ceux de cette féconde récolte ne font jamais fi gros que ceux delà première, ni propres à donner tant de teinture. Une faifon favorable frit croître avant l'hiver ceux qui euffent paffé l’hiver avant que de prendre leur accroiffement , s’ils fuffent nés plus tard ou fi l’air eût été moins chaud. Tout ce que nous avons dit ailleurs * des * Tome IL crifalides & des papillons, a affés appris qu’il peut y avoir Mm. dans telle année deux générations d’une efpece d’infèéle, dont il n’y aura qu’une génération dans d’autres années. Les pigeons aiment le kermès,quoiqu’il l'oit pour eux une affés mauvaife nourriture ; leurs petits à qui ils le por¬ tent, ont peine à le foûtenir; la plupart en périffcnt, ce qui n’eft que trop connu de ceux qui ont des colombiers à portée des endroits où croît le kermès. Les vieux pigeons en font quittes pour un cours de ventre; alors leursexcré* mens teignent en rouge les murs du colombier. Nous avons affés vu que les galiinfecles de Yilex coccï Tome IV . H 58 MEMOIRES POUR L'HlSTOIRE glandifcra, qui ont été nommées kermès, font des infec¬ tes utiles pour les teintures, & que la médecine en coin- pofe la confection d’Alkermes, quelle regarde comme un bon remede. Les gallinfe&es de ces petits chênes font- elles les feules qui peuvent être employées à ces deux ulages utiles ! Si on faifoit des expériences fur la teinture que don¬ nent celles de toutes efpeces , peut-être en découvri- roit-on quelqu’une qui ne léroit pas inférieure au kermès, ou qui même lui feroit préférable. Il y a au moins tout lieu de croire que par rapport à l’ufage qu’en fait la médecine, quclqu’efpece, & peut-être plufieurs efpeces de gallinfec- tes pourraient être fubffituées au kermès. Si on employoit à la confection dalkermes les gallinleCtes des pêchers, des orangers, &c. on en retirerait un avantage certain, ces arbres en feraient bien mieux nétoyés de ces inlèCtes par les jardiniers, qu’ils 11e le font. On peut penfer que l’arbre qui fournit de la nourriture à l’infeCte, entre pour quel¬ que choie dans les vertus du petit animal, mais au moins y a-t-il apparence que la lève des grands chênes donnerait aux infeCtes qui en vivent, des propriétés médicinales 1 cm- blables à celles que la lève des petits chênes donne au ker¬ mès. Sur le petit chêne on trouve des gallinfeCtes rouge⬠tres qui ne font pas propres à la teinture, & qu’on regarde comme aulfi bonnes pour la confection dalkermes que celles qui font d’une couleur foncée. On trouve aulîi fur de grands chênes des gallinleCtes rouges, qui ne font pas fen- fjblement différentes de celles de même couleur du petit chêne. II elt vray que les gallinleCtes qui croiffent fur de très-grands arbres doivent être négligées, par la feule difficulté qu’il y aurait d’en faire la récolte dès qu’elles n’y feront pas en très-grande quantité. Celles qui vien¬ nent fur l 'ilex coccï glandifcra le placent bien pour nous; elles y font à portée d’être vues & detre détachées. des Insectes. I. Mem. 59 commodément; cependant fi on parvenoit à içavoir faire ulàge de quelques - unes de celles de nos grands arbres, peut-être trouveroit-on enfuite des moyens de les y faire multiplier à un point tel qu’on y en pourroit recueillir beaucoup en peu de temps. Je fuppofe qu’on eût recon¬ nu que celles du pêcher, l'oit en boule foit en bateau ren- verfé, méritent d’être ramalfées; alors on pourroit avoir une certaine quantité de pêchers en plein vent, qui feroient moins deflinés à donner des pêches qu’à élever des gal- linlééîes, 6c on parviendrait à avoir chaque année de ces arbres dont toutes les jeunes poulfes 6c les autres branches en feroient couvertes. O 11 lëmeroit defius des gallin- lééïes pour ainfi dire ; on couperait dans la faifon conve¬ nable de petites branches où feraient attachées des gallin- feétesqui auraient fait leurs œufs, 6c dedefious lefquelles les petits ne feroient pas encore fortis, 6c on attacherait les petites branches contre de jeunes jets de l’arbre fur lequel on voudrait faire multiplier les gallinfeéîes. J’en ai tranfporté ainfi d’un arbre à un autre arbre de même efpece.qui y ont très-bien réuffi. Avec un pareil foin le même arbre en pourroit donner une quantité furpre- nante. Qu’on ne juge pas de celle qui s’y éleveroit par celle qui s’élève fur nos pêchers en efpaliers ; nos jar¬ diniers fans le fçavoir, ôtent chaque année à ces arbres une bonne partie des gallinfeéîes qui les devraient fuccer. La taille des pêchers lé fait ordinairement dans le temps où elles lé font fixées , 6c lé font fixées pour le refie de leur vie; alors il y en a beaucoup d’attachées contre les jeunes jets , 6c elles font attachées en beaucoup plus grande quantité contre la partie la plus élevée du jet, que contre fa partie inférieure. Il n’y en a fouvent fur cette dernière que quelques-unes femées par-ci par-là, pendant que l’autre partie du jet en efi toute couverte. 6o MEMOIRES POUR U HISTOIRE Le jardinier coupe fouvent un jet qui a deux ou trois pieds de longueur, à trois ou quatre pouces de l'on origine. En retranchant cette longue partie du jet, il ôte au pê¬ cher toutes les gallinfedles qui y croilïoient, & les fait toutes périr. La chaleur paroît leur être favorable, ainfi toutes choies d’ailleurs égales, elles doivent fe multiplier davantage fur les arbres en efpalier, que lur ceux qui lont en plein vent. Lagallinfedle qui en été 6c en automne, pendant quelle elt jeune , le lixe fur des feuilles ou fur les plus ten¬ dres rejettons, après l’hiver s’attache fouvent à de vieilles tiges. J’ai déjà parlé d’une gallinfeéïe du chêne en forme *PI. 6.fig. i. de rein *, c’eli par fa partie la plus échancrée qu’elle tient r ' s ‘ à l’arbre, & elle y paroît tenir par uncefpecede pédicule qui n’ell autre chofe que fon lucçoir ou la trompe. Ces gallinieéles (ont allés louvent attachées contre les nou¬ velles poulies , mais on en trouve en quantité fur les plus vieilles branches, les tiges même des plus gros chê¬ nes en lont quelquefois garnies. Mais j’ai oblené que ces dernières n’étoient pas obligées de percer une écorce extrêmement dure, elles font pofées dans des crevalles de la vieille écorce, où une peau plus tendre eft à décou¬ vert. La furface du corps de ces gallinlèéies a allés lou¬ vent des ondes blancheâtres fûtes d’une poudre très-fine. On rend ces coques brunes, lillcs & polies comme de i’ecaille, lion les frotte un peu avec le doigt mouillé; un frottement même alfés léger emporte la poudre blanche. On trouve aulîî fur différentes parties de nos chênes des gallinfeéfes de figure prefque fphérique, greffes com- ?PI.j.fig.2. me de très-petits pois + , qui y tiennent par une bafe cir¬ culaire qui a peu de diamètre. Elles font très-femblablcs par leur figure & leur grolfeur au kermès , & leur couleur dt peu différente dç celle du kermès pâle. PI. y. & 4.. des Insectes. I. Mem. 61 J’ai vu plus rarement fur le chêne une gailinfccfte pres¬ que iphérique grofle comme une petite cerife *, dont la peau a le poli &. le luifant des grains dont on fait les chapelets. Si on la regarde à la loupe. Ion poli paroît encore plus grand, & tel que celui d’une glace. Le fond de fa couleur eft un blanc jaunâtre, fur lequel font trois rayes noires; des points noirs font diftribués dans les in¬ tervalles qui font entre les rayes; les fourmis aiment cette elpece comme les autres, & me font fait découvrir. Le duvet qui forme une elpece de mince matelas entre le ventre des gallinfeéles & l'écorce de l’arbre, celui qui borde le contour de leur corps, le léger duvet qui blanchit le delfus de celui de quelques-unes, & enfin les longs poils, mais en petit nombre, qui partent de divers en¬ droits de leur corps dans certains temps, tous ces fils, & ces cotons parodient, dis-je , être produits comme la ma¬ tière cotonneufe des pucerons, ou comme celle d’une efpece finguliére de vers qui les mangent * ; apparemment * Tome ni. qu’ils s’échappent partons les pores de la peau, ou par des endroits de la peau où il y a des organes dilpolès pour la fécretion de la matière dont ils font faits. Toutes les gallinfeéles dont nous avons parlé jufqu’ici, Unifient leur ponte fans qu’on s’apperçoive quelles l’ont faite; après qu’elles ont fait lortir de leur corps des milliers d’œufs, on ne voit rien de plus qu’auparavant, & cela parce que leur corps même couvre les œufs, & les cache tous parfaitement; mais il y a plufieurs efpeces degallin- fecles qui pein ent être rangées dans un genre particulier, parce quelles ne couvrent qu’en partie leur nichée d’œufs avec leur corps. Leurs œufs n’ont pas befoin de cette efpece de couverture, ils font logés dans une mafie de fils île foye ou de coton très-blanc; ils fembient être dans une coque de foye blanche *. Dans quelques circonfiances Hüj 21, &.C. * PI. 6. fig. j, 9 & ii. 62 MEMOIRES POUR L’HlSTOIRE on prendrait cette nichée d’œufs de gallinlëélepour une nichée d’œufs d’araignée. La nichée d’œufs avec tous les fils ibyeux qui l’enveloppent extérieurement, 6c avec tous les fils foyeux qui dans l’intérieur féparent beaucoup d’œufs des autres, a un volume bien plus conhdérable que n’a jamais été celui de la gallinfeéle de laquelle elle * PI. 6. fig. efl fortie. La gallinfeéle defféchée * ou prête à fè deffé- cher, efl appliquée fur ce paquet blanc qu’elle ne recou¬ vre que d’un côté, encore ne l’y recouvre-t-elle fouvent qu’en partie. Quelquefois la gallinfcéle lèche tombe de deffus le paquet, 6c c’efl alors que la nichée feinhle le plus en être une d’œufs d’araignée. L’épine, la charmille, le chêne & la vigne m’ont fait voir de ces galiinfcélcs dont les œufs paroiffênt être dans une coque de foye, & l’efpece que j’ai trouvée fur chacun de ces arbres ou de ces arbuftes, étoit différente de celles que j’ai trouvées fur les autres. Je n’en ai vu nulle part autant que fur certains pieds de vigne en efpalier. Tout le jeune * F, o- 5' bois * & celui de l’année précédente étoient couverts de floccons ou petites maffes qui lembloient être de coton blanc; la vigne n’en efl pas alors plus agréable à voir, elle i’efl même moins pour qui n’aime pas les infeéles, elle a un air mal-propre. Un particulier de Paris fut étonné il y a quelques années, de trouver tous les pieds de vigne de fon jardin ainfi blanchis; cette fingularité lui déplût, il confulta pluficurs de fes amis pour en fçavoir la caufe, 6c par cafcades on s’adrefla à moy ; on m’apporta des *Eigj. branches * chargées de maffes de coton, ou plutôt de nids d’œufs de gallinfcéles. Les lioccons blancs ayant continué l’année fuivante à paraître fur les pieds de vi¬ gne de ce jardin, au moins enauffi grande quantité que dans l’année qui avoit précédé, le peu que le maître avoit appris de leur origine ne le réconcilia pas avec eux, il prit des Insectes. I. Mem. 63 Je parti de faire couper tous les pieds de vigne. J’ai vûà Tours dans la cour de l’auberge de Sainte-Marthe un haut & vieux pied de mulcat bien fourni de branches, qui cha¬ que année eft tout blanchi par ces nids; j’en ai eu, mais en moindre quantité, dans mon jardin de Paris. Les gallinlèétes qui fe multiplient fi fort fur certains pieds de vigne , ne le perpétuent qu’avec peine fur d’au¬ tres; j’ai inutilement attaché deux années de fuite des branches chargées de nids contre d’autres branches de mulcat & de chalfelas dans mon jardin de Charenton, où je n’aurois pas été fiché d’établir ces infeéles; ils ne m y auraient pas déplu comme ils avoient déplu à ce particulier qui en haine pour eux, fit couper tous les pieds de vigne, mais mes tentatives n’ont pas été heureufes; je 11’ai pas vu une feule de ces gallinfeéîes y venir à bien, quoique celles de diverles autres elpeces y viennent plus que je ne voudrais. Les circonftances néceffaires pour qu’un pied de vigne leur convienne, pour qu’elles y puifi- fent vivre & croître, me font encore inconnues ; peut-être que l’eftentiel eft que les pieds ne foient pas dans des en¬ droits où les ennemis de ces gallinfeélesfe loient trop mul¬ tipliés. L’expofition peut aufti y entrer pour beaucoup. Je femai dans mon jardin de Paris quantité de ces gallin- feéles naiflantes, fur des pieds de vigne qui font au levant; l’année luivante je n’y pûs trouver aucune grade gallin- feéîe de cette efpece, & j’en trouvai plufieurs fur d’autres pieds de vigne fitués à l’autre bout du jardin, & par con- léquentexpofés au couchant; les jeunes gallinfeétes avoient été chercher des lieux qui leur convenoient mieux que ceux que je leur avois choifis. La figure de ces nichées d’œufs n’a rien de confiant, afies ordinairement la mafle eft arrondie par deftùs, mais pour peu qu’on la touche, on la dérange, l’enveloppe 64 MEMOIRES POUR L’HlSTOIRE blanche s’attache aux doigts dès qu’ils s’appliquent defTus. Si l’on veut enfui te en éloigner les doigts , une infi¬ nité de fils qui leur font adhérans , les fuivent. Ces fils, à peu près parallèles les uns aux autres , fcmblcnt venir de la malle, comme s’ils y étoient en peloton ou en écheveau , & qu'ils fe devidaffent ; on peut les conduire de la forte à plufieurs pieds de diftance, mais dès qu’on a ainfi étendu un paquet de plufieurs milliers de fils en ligne droite à quelques pouces du nid, on entraîne en même temps des œufs. Ces œufs font oblongs, luifans & rougeâtres comme ils le feraient s’ils étoient de cor¬ naline. C’efl au centre de la maffe foyeufe ou coton¬ nade qu’eft le grand amas d’œufs. La facilité que ces fils ont à s’attacher fur les corps qui touchent le nid, fait que les pieds de vigne font tou¬ jours plus blanchis par les nids qu’ils ne fembleroient le * PI. devoir être *. Qu’une feuille ou une branche poufféepar le vent vienne toucher un nid, elle ne s’en retourne pas *f'f- fans emporter des milliers de fils *. De-là il arrive fou vent que les branches de vigne femblent couvertes de cette matière blanche Si legere qu’on voit voler en grande quantité dans les beaux jours du mois d’Oélobre, qu’on a nommée des fils de la Vierge, & qu’011 fçait à prefent n’être compofée que de fils d’araignées, que le vent a en¬ levés Si raffcmblés. Quelques efpeces d’araignées renferment leurs œufs dans une maffe de fils de loye tellement difpolés, que quand on tire la maffe en même temps en deux fens con¬ traires, 011 oblige un très-grand nombre de fils à s’éten¬ dre Si à fè placer parallèlement les uns aux autres. Ces fils de nids d’araignées, quoique lins, ne le font pas autant que ceux des nids de nos gallinfeéles, Si 11e paroiffent jamais fi longs. Mais nos gallinfeéles h lourdes, immobiles des Insectes. /. Mem . à un point qui a fait croire qu elles font fans vie, feroient-elles des fileufes aufii adroites que les araignées! Comment s’y prennent-elles pour recouvrir leurs œufs de toutes parts, d’une fî grande quantité de fils fi fins ! J’avois été d’autant plus curieux de fçavoir comment elles peuvent venir à bout d’un pareil ouvrage, que je n’avois pû découvrir aucune filière à leur partie po- ftérieure ni ailleurs. C’eft dans le temps de leur ponte qu’il falioit parvenir à les obferver. Le 12 Juin j’en¬ voyai chercher deux branches de vigne dans le jardin dont j’ai parlé ci-deffus, 8 c il étoit temps de m’y prendre; ces deux branches étoient couvertes de quantité de gal- linfedles, dont la plupart avoient déjà pondu; mais il en reftoit encore quelques-unes qui ne l’avoient pas fait. Entre celles-ci, j’en remarquai une dont la partie pofié- rieure étoit élevée au-defïus de la branche, & en étoit féparée par un cordon blanc * qui débordoit peu le corps de l’inlède. J’en conclus que fa ponte étoit coin- s mencée, mais peu avancée encore, que cette gallinfcéîe étoit précifément dans l’état où je la devois fouhaiter. Je la fuivis auffi pendant quelque temps, mais elle me parut aulfi immobile qu’elles le lont toutes. Quand je revins à l’obfei ver au bout de quelques heures, fia partie poftérieure étoit plus foûlevée , plus éloignée de la branche; il me fembla que le cordon blanc étoit deve¬ nu plus épais, 8 c qu’il débordoit plus le corps ; mais cela s’étoit fait avec une lenteur peut être égale à celle de la marche de l’aiguille d’un cadran , 8 c d’ailleurs tout s’executoit dans l’obfcurité entre le bois 8 c le corps de l’infeéle , tout étoit caché à mes yeux. Je me déter¬ minai donc à troubler la gallinfeéte dans fon opération, pour voir où elle en étoit, 8 c pour tâcher de parvenir à voir en quoi cette opération confifloit. ConnoifTant le Tome IV . I 66 Mémoires pour l’Histoire rifque qu i! y avoitde bleflerla gallinledtc, & de la faire périr fi je laprenois elle-même, j’enlevai avec un couteau la pièce d’écorce à laquelle elle tenoit, & par petites feuilles j’emportai peu à peu cette écorce; je parvins à l’enlever toute, & à mettre à découvert le délions de la gallinfeéte fans lui avoir fait de blelfure. Je \is alors que, comme je i’avois penfé , la gallmlecle avoit com¬ mencé fa ponte; je jugeai même par la quantité d’œufs qui parut à découvert,qu’elle en avoit fait le tiers ou la moitié. Ces œufs n’étoient point encore féparés les uns des autres par des filets loyeux ; ils fe touchoient tous, le ventre de la gallinleéîe les couvrait par delfus, mais par dtffous & tout autour ils étoient enveloppés de matière foyeu- l'e; ils y étoient comme dans une efpece de nid. C’cït le contour de ce nid qui lbûlevoit le derrière de la gallin- feéïe, Si qui le débordoit quand elle étoit dans fa fitua- tion naturelle d’où je l’avois tirée. Cette dilpofition de la matière foyeule me fit foup- çonner que la gallinfeéte n’avoit pas befoin , pour enve¬ lopper fes œufs, de fçavoir l’art de filer que les araignées fçavent fi bien, qu’elle executoit des ouvrages fembla- bles aux leurs fans fe donner prefque de mouvement; que fans s’en appercevoir, pourainfi dire, elle fourniffoit les fils qui dévoient couvrir fes œufs; que tout avoit été difpofé chés elle par la nature de façon que les fils for- toient nécelfairement dans le temps où les œufs en avoient befoin. En un mot, je penlai que la matière qui leur devoit faire une efpece de coque, étoit de la nature de celle qui s’échappe, quoiqu’en moindre quantité,des corps de quantité d’efjîeces de pucerons, de ceux de certains vers mangeurs de pucerons, Si même de ceux des gallin- feéïes, Si qui fournit la couche de duvet qui eft entre le corps de celles-ci Si l’écorce à laquelle elles font attachées; des Insectes. /. Mem . 67 mais que certaines efpeces de gallinfeétes fournifloient de cette matière en beaucoup plus grande abondance que ies autres'. Pour fçavoir fi je devois m’en tenir à cette idée ou l’abandonner, j’ôtai tous les œufs qui étoient fous le corps de la gallinfeéte , & toute la matière blanche & cotonneufe qui les y retenoit, & qui les enveloppoit en partie ; enfin je nétoyai bien tout le ventre, je le mis bien à découvert, je ne laiffai deAus aucun duvet blanc. Alors il parut rougeâtre, & encore afles renflé pour me faire juger qu’il contenoit beaucoup d’œufs. Après avoir ainfi tourmenté la gallinfeéle, je lalaiffai en repos, je la mis dans une petite boëte de bois, poféefur fon ventre. Au bout de cinq à fix heures je la retournai fur le dos * , & je vis que le ventre que j’avois laifle rou- * Pi. 6. 5 g. geâtre,étoit poudré de blanc, comme s'il l’eût été d’une 6 ‘ poudre cotonneufe; mais la couche de poudre coton¬ neufe étoit plus épaifle tout autour du corps * que par * c, c,c. tout ailleurs. Cette matière ne fembloit donc avoir rien de commun avec des fils de foye fortis d’une feule filière, elle fembloit avoir été fournie par toute la furface du ventre, elle fembloit avoir tranfpiré prefque par-tout; mais les endroits propres à en fournir davantage, les ou¬ vertures propres à la laifler échapper plus aifément.paroif- foient être auprès du bord extérieur. Sans avoir rien ôté à la gallinfeéle, je la pofai une fécondé fois fur fon ven¬ tre & dans la même boëte, & je l’y laiffai tranquille pen¬ dant 18 heures. Après lui avoir donné ce long repos, je la retournai, & alors la queftion me parut fuffifamment éclaircie. La gallinfeéle avoit recommencé fa ponte, elle avoit fait des œufs qui, comme les grains oblongs d’un chapelet, étoient à la file les uns des autres *; chaque œuf * touchoit par un de fes bouts celui qui le précédoit, & par fon autre bout celui dont il étoit fuiyi. La file d’œufs li i 68 Mémoires pour l’Histoire * PI. 6. fig. alloit du côlé de la tête * de l’infeéie, & de-là elle re- venQ.it d’où elle étoit partie, en faifant diverfes finuofnés. Tout le contour du corps étoit couvert de floccons de coton bien autrement longs, & bien autrement fournis qu’ils ne lctoient lorfque je les avois vus la première fois, & tous pôles les uns auprès des autres d’une ma¬ nière qui ne pcrmettoit pas de douter qu’ils n’eufTent crû, qu’ils n’euffent comme végété dans les places où ils étoient. Il paroît donc certain que cette matière cotonneufe ne vient point d’une feule filiérefemblable à celles des chenilles & des araignées, mais qu’il y a l'ous le ventre de la gallinfeéle un très grand nombre d’ouvertures imperceptibles, analo¬ gues, fi l’on veut, auxfiliéres des autres inlèéies, & que les principales de ces filières font tout autour du corps. Nous ne parlons actuellement que d’une matière cotonneufe qui devroit.ee femble, être compofée de fils courts, & quand nous avons décrit les nids d’œufs, nous avons dit que leur enveloppe peut fournir des milliers de fils fort longs. Cette matière cotonneufe efl gluante, puifqu’elle s’attache prefque comme une gluë à tout ce qui la touche, il y a apparence auffi que le ventre de rinfëéte contre lequel elle s”efl attachée , en s’éloignant parla fuite de l’écorce de l’arbre, tire cette matière en fils,comme en pareil cas on y tireroit de la gluë ou quelque gomme ou réfine ramollie. Je conçois même quelle efl encore tirée par les œufs en fils plus déliés & plus longs que ceux qu’elle forme na¬ turellement. Les chapelets d’œufs font pouffés avec force, puifqu’après avoir été conduits vers la tête, ils font ramenés vers l'anus, les œufs de ces chapelets qui rencontrent en chemin cette matière cotonneufe la tirent, l’étendent en fils, & s’en couvrent. Les efpeces de gallinfe&es qui font des nids coton- des Insectes. /. Mem. 69 neux, font de celles qui avant leur ponte ont la forme d’un bateau renverfé, comme celles de la vigne, ou qui font plus convexes fans l’être affés pour être plufqu’hé- miiphériqucs, telles font celles de l’épine *. Ces der¬ nières font bien moins groffes que les autres : j’en ai trouvé fur la charmille d’une grandeur moyenne. Le chêne m’en a fourni une efpece * dont j’ai fait croître des petits chés moi *, qui égale ou furpaffe en gran¬ deur celle de la vigne. Ces différentes efpeces font auffi de différentes couleurs. Celles du chêne font brunes & piquées en difîérens endroits de brun-clair; celles de la charmille approchent affés de la couleur du kermès des boutiques, ou du kermès arrolé de vinaigre; celles de la vigne tirent fur le candie brun. Il y a auffi dans leurs figures beaucoup de petites variétés qu’il fèroit affés inutile de détailler, ces inleéles étant de ceux dont il nous importe peu de pouvoir bien diflinguer toutes les efpeces. Il me refie encore à parler d’une efpece de gallinfeéle qui me femble avoir un caraélére propre à déterminer un nouveau genre de ces petits animaux , parce qu’on ne fçauroit guéres la ramener à l’un des deux autres genres que nous a,vons fixés ; le premier , celui que nous avons nommé à forme de bateau renverlë , efl cependant celui avec lequel elle a le plus de rapport ; mais au lieu que les deux bouts des gallinfeéles en bateau ren- verfé font à peu près également gros , celles que nous voulons faire connoître ont un de leurs bouts menu,6c même pointu par rapport à l’autre. Nous les nommerons des gallinfeéles en forme de coquille *, parce que leur figure reffemble affés à celle d’une de ces pièces dont deux en- femble forment la coquille entière d’une moule de mer; nos gallinfeéles font pourtant plus allongées par le plus Iiij * PI. 6. fig, I I & 12 . * Fig. 8 Sc • * Fjg. i o. * PI. j.%. 6 &. y. a, c, j 0 M E M 0 ï R E $ POUR L’HiSTOIRE menu de leurs bouts, que ne le font par le même bouc les moitiés des coquilles auxquelles nous les comparons. * Pi. 5. fi g. Ces gallinfecfles en coquille font extrêmement petites *, j. c,c, c. & e jj es m ’ en on t impofé pendant plufieurs années ; je les ai prifes d’abord pour une coque qu’un très-petit infeéte s’étoit faite pour fe métamorphofer ; les trouvant en- fuite pleines d’œufs, & ayant oublié que je les avois trou¬ vé remplies par un infeéte, je crus quelles étoient un joli nid dans lequel un infeéte avoit renfermé fes œufs. Mais enfin j’ouvris de ces nids dans un temps où les pe¬ tits étoient éclos, & la figure de ces petits me les fit re- connoître pour des gallinfeétes naififantes. Ce n’efl: pas qu’ils reflemblalfent à la gallinfeéte leur mere, mais ils relfembloient aux petits que j’avoisvû naître de plufieurs autres gallinfeétes. Alors les faits qui m’avoient embar- rafie,fervirent mutuellement à s’éclaircir, je penfai, com¬ me je le devois, que ce que j’avois pris autrefois pour un infeéte caché fous une coque pour s’y métamorphofer, étoit une gallinfeéte prête à pondre, & que je l’avoisprife pour un nid d’œufs, quand après avoir fait tous les liens die s’étoit defféchée. Cette efpece de gallinfeéte elt fi petite, qu’iî faut avoir de bons yeux pour la découvrir; elle efl brune, aflTés lifTe, & de la couleur de quelques écorces d’arbres. Près de la furface de celle contre laquelle elle efi appli¬ quée, elle a un étroit bordé de coton; fes œufs fe trou¬ vent aiiffi fur une couche de coton qui forme prefqu’une membrane. Les petits qui fortent des œufs font blancs, plats, peut-être pourtant le font-ils moins proportion¬ nellement à leur grandeur, que ceux de diverfes'-autres gallinfeétes ; ils ont deux antennes. Pendant quelques jours ils marchent afies vite fur leurs fix jambes ; enfin après s’être fixés ils croififent, & c’eft en croiflant, & peu à peu des Insectes. 7 . Ment. 71 qu’ils prennent une forme très-différente de celle qu’ils avoient immédiatement après leur naiffance. EXPLICATION DES FIGURES DU PREMIER MEMOIRE. Planche Première. La Figure première repréfente une petite branche cîe pêcher contre laquelle font attachées deux gaiiinfeêtes en forme de bateau renverfé. g, g, ces deuxgatlinfeéles par¬ venues à la groffeur quelles ont lorfqu’elles font leurs ce u fs. La Figure 2 fait voir une branche de pêcher prefque couverte de gallinfeéles de même efpece que celle de la figure première. On voit qifelles font à la file les unes des autres, & qu’elles fe touchent. La Figure 3 efl celle d’une gallinfeéle en forme de ba¬ teau renverfé, extrêmement groffie, & vûë par defl'us, ou du côté où on la voit lorfqu’elle efl attachée contre une branche, a, fa partie antérieure./?, fa partie poflérieure, où il paroît une fente. La Figure 4. nous montre en a,b> fur une portion de branche groffie, la place d’où la gallinfeéle de la figure 3 a été détachée. Les traits blancs font d’une matière co- tonneufe, & marquent les impreffions que le contour du corps, les jambes & les anneaux ont laiffées. La Figure 5 efl celle de la gallinfeéle de la figure 3 ren- verfée ou vûë du côté du ventre, a , la partie antérieure. p, fente qui efl à la partie poflérieure.montre par une ligne ponéluée, l’endroit où efl le fueçoir ou la trompe de la gallinfeéle. /, /, ï, i, quatre de fes fix jambes. Ses an¬ neaux font affez diflinéls. Cette gallinfeéle efl près de 72 MEMOIRES POUR L’HiSTOIRE pondre; auffi Ton ventre efî-il de niveau avec ie contour de Ton eljDece de coque, ou d’enveloppe cc, cc. La Figure 6 repréfente une gallinfeéte renverfée, qui a déjà fait partie de fa ponte, & qui la continue. On voit en o, un œuf prêt à fortirdu corps, & tout auprès en <7, un autre qui eft forti.Lcs anneauxde cette gallinfeéte font plus marqués que ceux de la gallinfeéte de la figure 5 ; ils ont déjà commencé à fe retirer du côté du dos; il n’y a plus rien ici de niveau avec les bords cccc.f, mammelon qui eft la bouche, la trompe ou le fueçoir de finfeéte. La Figure 7 fait voir, comme les figures 5 & 6 , une gallinfeéte par deffous, mais une gallinfeéte qui a achevé fa ponte, auffi n’y voit-on que des œufs. Les parties du ventre qui fe font affaiffées & retirées vers le dos, font réduites à rien, & couvertes par les œufs, qui ont pris la place qu’elles ont biffée. La Figure 8 eft celle d’une gallinfeéte qui s’eft contour¬ née comme il leur arrive quelquefois de fe contourner Jorfqu’on les détache. Elle efl encore vue par deffous. La fente p, paroît mieux ici que dans les autres figures. Cette gallinfeéte a fait tous ou prefque tous les œufs; mais on les a retirés pour faire voir combien les tégumens du ventre fe font éloignés du bord c c c, & fe font appro¬ chés du dos. o , l’anus. La Figure 9 repréfente une portion de farment ou de branche de vigne, fur laquelle font attachées des gallin- feéles en forme de bateau renverfé. g,g, de ces gallin- feétes. En h, il y en a deux dont l’une eft en partie en re¬ couvrement fur l’autre. Planche II. La Figure 1 repréfente une petite branche de pêcher, à laquelle tiennent deux feuilles, dont l’une eft entière, & des Insectes. /. Mcm. 73 & dont l’autre efl coupée. La petite branche & les feuilles font marquées d’une infinité de petites taches; ces petites taches font tout autant de gallinfeéles. On en trouve en aulfi grand & en plus grand nombre même qu’on ne les voit ici,fur les feuilles & les jeunes pouffes de divers pêchers dans les mois de Juillet, Aoufl, Sep¬ tembre & Qélobre. La Figure 2 efl: celle du bout de la feuille/", de la figure première, très-groffi à la loupe, & où les petites gallinfeéles font grofîies dans la même proportion. La Figure 3 nous montre une des gallinlëéles des figures précédentes, telle quelle paroît au microfcope iorfqu’elle marche, a, a, fes antennes, i, i , deux points qui femblent être fes yeux. p,p,p,p,p,p, les fix jambes. La Figure q. efl encore celle de la même gallinfeéle vûë au microfcope, mais dans le temps où elle efl en repos. Alors on n’apperçoit au tranfparent que quatre de fes jambes p , p, p, p. fes yeux i, i. Les antennes font cachées. La Figure 5 efl celle d’une des mêmes gallinfeéles, deffinée dans un âge plus avancé ; fi elle efl ici plus pe¬ tite , c’efl qu’elle n’efl groffie que par la loupe. FF, F f, f, f, &c. grands fils, & fils plus courts qui partent en hiver du corps de l’infeéle, & qui font couchés fur l’arbre. La Figure 6 efl celle d’une branche de pêcher fur la¬ quelle font des gallinfeéles en grains ronds, ou d’un genre différent de celui des gallinfeéles des figures i,& 2. pl. 1. Ces gallinfeéles g, g, g. ont aéluellement pris tout le volume qu’elles peuvent prendre. La Figure 7 efl celle d’une des gallinfeéles de la fi¬ gure 6, détachée. Tome IV ■ K 74 MEMOIRES POUR L’HiSTOIRE La Figure 8 fait voir la gailinfecfte delà figure 7beau¬ coup groffic. p, efl la partie poflérieure de cette galiin- fcélc.a fâ partie antérieure. La Figure 9 repréfènte une branche de pêcher fur laquelle des gallinfeébes du genre & de i’efpece de celles de la figure 6, fe trouvent en très-grand nombre; toutes n’ont pas encore pris leur parfait accroiffement, ni même leur dernière forme, plufieurs font plus allongées qu’elles ne le doivent être par la fuite. O11 y en diflingue de deux groffeurs, les plus brunes, & les plus groffes g,g, g, ont encore à groffir. Les plus blancheâtres & les plus petites, dont quelques-unes font marquées m, m, m, n’ont plus à croître, elles font prêtes à fe transformer en des mou¬ ches ailées, qui font les mâles des gallinfeéïes g, g , g. Planche III. La Figure 1 efl celle d’une petite branche de tilleul qui a des gallinfeélcs du genre de celles qui tiennent de la figure fphérique. k h; g, g, plufieurs de ces gallinfeélcs. La Figure 2 nous montre une coupe tranfverfale de la galle k h, de la figure précédente, faite par k lu La figure 3 efl celle delà figure 2 très-groffie. Cette coupe efl celle d’une gallinfeéle qui avoit fait tous fes œufs, p, la partie poflérieure de l’animal, celie où efl la fente ; la partie antérieure a été emportée. Tout i’efpace, u c e d e c efl rempli par des œufs ; avant la ponte cet efpace étoit rempli par le ventre de l’infeéle qui tou- choit l’écorce de l’arbre en u; l’infeéte n’a confervé que le peu de folidité qu’on voit en e d e, car les parties e c, e c, font minces comme un papier, e de, le devien¬ dra de même par la fuite. La Figure 4 efl celle d’une petite branche de noifetier fur laquelle font des galiinfeéîes. G, en efl une très-groffe des Insectes. I. Mem. 75 en comparaifon de celles^, g, qui doivent probablement relier petites & donner des mâles ailés. Quoique la gallin- feéte G, ait aéluellement la forme de celles en bateau ren- verfé, elle elt pourtant du genre de celles qui tiennent delà figure lpliérique ; elle a à croître, & doit s’arrondir. La Figure 5 Lit voir une gallinfeéfe du noilèticr qui a pris tout l'on accroifTement. G, cette gallinfeéle. La Figure 6 reprélente la galiinlèéte précédente grofi- Fie, & vûë par dellus. />, ell l’appendice où cil la fente. Cette galiinleéle elt affés joliment colorée; le jaunepref- que citron, eft fa couleur dominante, fur laquelle font des taches ondées, & rougeâtres. La Figure 7 fait voir une gallinfeéle du noifeticr cou¬ chée, & dont le delfous elt en vûë; ellefemble une pe¬ tite boîte remplie de très-petits grains, parce quelle ell pleine des œufs quelle va pondre. La Figure 8 fait voir plufieurs œufs de la gallinfeéle précédente,un peu grolfis. La Figure 9 cil celle d’une gallinfeéle dunoifetier, nouvellement née; elle ell plus groffie dans la figure 10. a,a, fes antennes. e,e, deux petites pointes quelle après du derrière; cette gallinfeéle eft alors rougeâtre. La Figure 11 appartient à la mouche des figures 7, 8 & 9. de la pl. 4. Elle repréfente la partie poflérieure de cette mouche vûë au microfcope, & du côté du ventre. e,e,deux éminences charnues. c,c, les deux filets blancs qui font une très-longue queuë à la mouche, q, la vé¬ ritable queuë, ou plus exaélement la partie propre au mâle, f, filet de matière blanche que j’ai fait fortir du bout de cette partie, lorfque j’ai prelfé le derrière de la mouche. Kij y( MEMOIRES POUR L’HiSTOIRE Planche IV. La Figure i repréfente une de ces gallinfecles du pê¬ cher, qui font marquées m,m, m, &c. pi. 2 figure 9, une de celles qui doivent fie métamorphofer en mouches. Ici elle eft extrêmement groffie; la peau de cette gallinfeéle fait aélueliement la coque dans laquelle ell la mouche fous la forme de nymphe. O11 peut remarquer fur cette figure & les fui van tes, diverfes petites taches, qui font tout autant de petits lloeconsde coton, a, la partie anté¬ rieure de la gallinfeéle, ou de la coque./?, la partie pofté- rieure. rr, efpece d’entaille qui fait que la pièce rp r , peut être foulevée quand la mouche tend à fortir de la coque. La Figure 2 eft celle d’une nymphe tirée d’une coque,, telle que celle de la figure 1, grollie au microfcope, & vûë du côté du ventre, ik/ik, les deux jambes de la pre¬ mière paire qui viennent fe rencontrer en k h, en devant delà tête. 44 les ailes pliées .n } n;m,ni, les quatre derniè¬ res jambes, p, queue. La Figure 3 fait voir la nymphe de la figure 2 du côté du dos. 44 les ailes. /?, la queue. La Figure 4 montre une coque dont la pièce rpr, a été foulevée, & qui commence à permettre à la mou¬ che de lbrtir. I, le bout des ailes de la mouche forti de la coque. Dans la Figure y une mouche eft plus avancée à for- tir de fa coque que dans la figure q,& dans la figure 6 la mouche eft encore plus fortie que dans la figure 5. rp r, la picce qui peut être & qui eft aélueliement foulevée. 4 les ailes, f, f, les deux filets qui font une longue queuci à la mouche. La Figure 7 eft celle de la mouche qui eft le male des gallinfeétes, dans fia grandeur naturelle. des Insectes. I. A / e / n . 77 La Figure 8 fait voir la même mouche pardeffus, très- groffie, Si ayant le port d’ailes qui lui cfi ordinaire. La Figure 9 repréfente la même mouche ayant fes ailes écartées du corps./j £ les deux filets qui forment la longue queue, q, la grolfe & courte queue, celle qui efl la partie qui caraélerife le mâle. La Figure 10 eft encore celle de la mouche des figu¬ res précédentes, mais vuë du côté du ventre. La Figure 1 1 nous montre une antenne de la mou¬ che, telle quelle paroît dans un microfcope qui groffit beaucoup. La Figure 12’ eft celle d’une gailinfecle femelle du pêcher, de celles qui deviennent prefque fpheriques, qui a la forme Si la groffeur qui leur ell ordinaire dans le temps de l’accouplement. La Figure 13 repréfente la galiinfeéle de la figure 12 groffie. u, l’endroit où eh la fente dans laquelle la partie du mâle s’introduit. La Figure 14. fait voir une galiinfeéle femelle plus en defTiis,& dans le temps où cette galiinfeéle femble lé pré¬ parer à recevoir le mâle; alors le bord de la partie anté¬ rieure de la fente u, efi relevé. Dans la Figure 1 5 une mouche m, le mâle de la gai* linfeéle introduit le bout de fa queue dans la fente de la femelle. La Figure 16 repréfente la partie antérieure de la mouche des figures précédentes, vue par-deffus Si h un microfcope qui groffit beaucoup. i, i, les jambes de la première paire. A, é,deux petits corps ronds &luifans,qu’on prendrait pour deux yeux, fi on avoit coutume de trou¬ ver les yeux d’un infeéle où devrait être une bouche dont on 11’apperçoit aucun veffige. a , a, les antennes cou¬ pées en a, a. 78 MEMOIRES POUR L'HiSTOIRE La Figure 17 eft encore celle de la partie antérieure de la mouche, autant groffie que dans la figure 16, mais vûë par-deffus. ï, i, les deux premières jambes. e,e, les yen \.a,a, refte des antennes. La Figure 18 fait encore voir la même partie anté¬ rieure, mais de côté, a,a, les antennes coupées, e, e, les yeux placés comme ceux des autres infeeftes. k, les deux globes qui femblent d’autres yeux. i,i, les premières jambes. Planche V. La Figure 1 repréfente une branche du petit chêne, appellé par les Botaniftes ilex coccï glandïfera, chargée de quantité de ces gallinfecftes, auxquelles 011 a donné le nom de kermès. La Figure 2 eft celle d’une petite branche d’un chêne ordinaire, à laquelle tient une gallinfecfte g, plus greffe que le kermès, Si qui eft prefque fpherique. La Figure 3 eft encore celle d’une petite branche de chêne ordinaire, laquelle eft attachée une gallinfecfte d’une efpece differente de celle de la figure 2,& une des plus fpheriques & des plus greffes. La Figure q. eft celle de la gallinfecfte de la figure 3, qui a été détachée, p, montre l’endroit par lequel elle étoit adhérente à la branche. La Figure 5 eft celle d’une branche d’orme, fur la¬ quelle font des gallinfecftes en coquille, de grandeur na¬ turelle, marquées c, c, c. La Figure 6 montre un bout de branche groffi, fur lequel eft une gallinfecfte en coquille,groffie dans la mê¬ me proportion, a, c, la gallinfecfte. g, une gallinfecfte nou¬ vellement née. La Figure 7 fait voir la gallinfecfte a, c, de la figure précédente, renverfée, Si dans un temps où elle a fait lés des Insectes./. Mem. 79 œufs; on en voit quelques-uns dans la cavité de fou corps. Planche VI. La Figure 1 efi celle d’une petite branche de chêne, à laquelle lont attachées plufieurs gallinfeéles en forme de rein, r, plufieurs de ces gallinfèéles qui lé touchent, g, une de ces gallinfeéles feule. La Figure 2 fait voir une gallinfeéle en forme de rein, grolfic à la loupe; on la voit de côté. En t, efi un tuber¬ cule qui pourrait être une dépouille laiffée par la gal¬ linfeéle pendant quelle étoit très-petite. La Figure 3 montre la gallinfeéle de la figure 2 re¬ tournée, & par le côté qui étoit appliqué contre la bran¬ che. b, partie par laquelle cette gallinfeéle tenoit à la branche. La figure 4 repréfente la gallinfeéle des figures 2 & 3 dont une portion a été emportée pour mettre à dé¬ couvert les œufs 000, dont elle efi remplie, lorfque fa ponte efi faite. La Figure 5 efi celle d’une branche de vigne chargée de ccs gallinfeéles, dont les œufsfe trouvent dans desef- peces de nids de coton, qu’elles ne recouvrent qu’en partie, g, une de ces gallinfeéles qui a fini fa ponte, c, nid cotonneux dans lequel les œufs font enveloppés. //! paquets de fils de coton tirés du nid c, de la gallinfeéle / par la branche b, à qui il efi arrivé de toucher ce nid. h, i, gallinfecîes qui n’ont point fait d’œufs. La Figure 6 repréfente une gallinfeéle de la figure pré¬ cédente, telle que la gallinfeéle k, qui n’avoit encore que commencé fii ponte lorfqu’elle a été renverfée fur le dos, & qu’on lui a ôté tout fon coton, & les œufs qu’il envcloppoit. g, la partie antérieure de cette gallinfeéle. fa partie poftérieure. c, c, bourlets formés par le coton, So MEMOIRES POUR L’HiSTOIRE qui a tranfpiré depuis que la gallinfeéle a été renverfée Sc netoyée. o, s, t, u } œufs collés les uns au bout des au¬ tres, de maniéré qu’ils forment une efpece de chapelet. La Figure 7 efi celle d’un des œufs de la figure 6 , groffi. Les Figures 8 & 9 montrent chacune une branche de chêne, fur laquelle efi une gallinfeéle, dont les œufs font dans un nid de coton quelle recouvre. Dans la figure 8 la gallinfeéle g, efi bien en vûë, mais on ne voit que le bord du nid, c, c. Dans la figure 9 on voit moins la gallin¬ fcéle, & on voit mieux le nid c c, qui efi gaudronné. La figure 10 reprélente une gallinfeéle venue d’un des œufs du nid des figures 9 & 10. Cette gallinfeéle a été defiinée pendant qu’elle étoit encore très-jeune, auffiefi- elle ici très-grofiie à la loupe. La Figure 1 1 fait voir une efpece de gallinfeéle à nid cotonneux, differente des efpeces précédentes , & groffie à la loupe. Cette efpece croît fur l’aubepine. g, la gallin¬ fcéle. n n, fon nid. La Figure 12 montre une branche d’aubepine qui a plufieurs gallinfeéles telles que celle qui efi groffie dans ia figure 1 1 ; toutes ont fait leur ponte, & recouvrent plus ou moins leur nid. g,g,g* ces gallinfeéles. SECOND PI- 1 ptief -8o, _ Ucrn î.de Ihist des Insectes ■ Tom y. A PI t pao 8* Afem j Je !/ust ////«Yw 7î»a CLLucas Sculp. A fO U A 741 dflHtst tirsIwfucte^r Tojn + F W S I de L/izst- de j' Insectes ■ Tem If" d 7 Jl! a -S,'"** ‘|î â r s J/ll CH u cas «/* cutf?- riSptiq So- .Vfm I de Ifttst des Insetits Tînt + CU.uctS**ty. /— A- . C 3X«.W .l't-My* des Insectes. //. Aient . 81 üffcJ* {: +üîi^ti5+!=!''+ W$wfc^Wtw$wfü£wtg- * Fig. I. £>g>g- * Fig. 3 & 4r. 82 Mémoires pou r l’Histoire elt vrai, comme j’ai lieu de le croire, que la cochenille leur appartient. Il y en a une efpece qui fe tient volontiers fur forme, & c’elt celle dont nous allons donner une hiftoire,qui ap¬ prendra mieux quels doivent être les caraéleres que nous demandons aux infeéles pour les placer dans la clalfe des progallinfeéîes. Je comtois encore peu d’eljreccs qui en dépendent, &. elle pourrait en avoir beaucoup qui relieraient long-temps inconnues, fur-tout desefpcces qui feraient aulfi petites & aulfi peu allantes que l’elpece qui fe tient fur forme. D’ailleurs fi les autres efpeces,comme cette derniere,font peu du goût des fourmis, nous n’avons point de guides pour les trouver,comme nous en avons pour trouver les gallinfeéïcs P> leur de la gomme copal. Ils portent devant eux, deux petites antennes *. La forme du contour de leur corps cd ^Fig.j&S, allez femblable à celle du corps des gallinfeéïes nouvel- a,a ' lement nées. Leur partie podérieure ed plus pointue que L j j 8-f MEMOIRES POUR L’HiSTOIRE l’antérieure. Ils marchent vite furfix jambes allez courtes. Mais en quelque temps qu’on ôte la progallinlccle- mere de l’on nid, jamais on ne découvre d’œufs dans Je nid; nos progallintècïes ont au nombre des animaux vi¬ vipares. J'ai,détaché dv.s meres, je les ai renverfées fur le dos dans le temps ou elles étoient dans le travail de l’ac¬ couchement : deux d’cntr’ellcs ont aulfi accouché lous mes yeux. Quoique je fulTe muni d’une forte loupe, je n’ai pourtant pû m affiner alfez à mon gré quelle étoit la partie du corps de l’infeéle nailfantqui fortoit la premiè¬ re. Il m’a paru que c’étoitfa tête; & en cas que cela foit, il fort dans une pofition oppofée à celle dans laquelle le puceron fort du ventre de la mere. Quand on écrafe le corps des meres vers le commen¬ cement de Juin, on met au jour une grande quantité de petits corps oblongs, auxquels on ne difhngue aucu¬ ne partie : on ferait difpofé à prendre ces petits corps pour des œufs; mais il eli plus naturel de les croire des embryons,dont les parties,qui feront même peu fenfibles dans l’infeéle naiffant, ne le lai lient pas encore diftin- guer. D’ailleurs ceux qu’on a fait fortir par violence du corps de la mere, font baignés de liqueur rougeâtre. Je les ai bien lavés, & tout ce que j’ai pû appercevoir,quand ils ont été nets & blancs, ç’a été deux points noirs qui pouvoient être les yeux. Jamais le nid n’clt aulïi rempli de petits qu’il femble- roit le devoir être, à en juger par la quantité de ceux dont le ventre de la mere eft farci; le temps de l’accouche¬ ment de chacune d’elles dure piulieurs jours, peut-être plus de huit à dix jours, & il y a apparence qu’un jour ou deux après fa naiffmee chaque petit infeéte s’échappe du nid. Si on obfervc avec une forte loupe des brandies d’orme des Insectes.//. Mem . 8 5 dans les temps dont nous parlons, on découvre bien¬ tôt de petites progallinfeéles qui marchent vite deflus, ou plutôt qui y courent. Mais ce n’elt que pendant quel¬ ques jours qu elles courent ainfi; elles nelont pas long¬ temps fans lé fixer : celles qui choififlént leurs places dans les bifurcations des branches, y ont le corps recour¬ bé *. Une fois fixées, elles ne changent pas, ou changent * pi. 7 . fi rarement de place; mais elles ne deviennent dans fini- 2 - h > & puiffance, ou ne perdent la volonté de fe mouvoir, que vers la fin d’Avril. Alors elles perilfent fur les branches qu’on a coupées : quoique ces branches fe deffechent, elles ne longent pas à en aller chercher d’autres. Leur accroifiément, comme celui des gnllinlccfles,n’efl confiderable qu’après l’hyver. Avant la fin d’Avril il y en a qui font près d’avoir acquis toute la grandeur à la¬ quelle elies peuvent parvenir. Dans le commencement du même mois, & dès celui de Mars, leur corps efl; un peu rougeâtre; mais il le paroît moins qu’il nel’elt, parce que chaque anneau efl bordé de poils gris & courts *, allez * Fig. gros par rapport à leur longueur. On ne retrouve plus ces poils aux progallinfeéles qui font dans un nid de co¬ ton ; elles les ont apparemment quittés en changeant de peau, & elles en ont pris une qui lailfe tranfpirer la matière cotonneufe. En tout temps le delfous de leur ventre efl plus rougeâtre que le deiïus du corps, parce qu’il n’a jamais de poils. Les jambes font petites & dé¬ liées par rapport au volume de l’infeéle; il en a fix *. On a peine à trouver la trompe ou fon fueçoir, qui m’a hh hh ’ pourtant paru femblable à celui des gallinfeélcs, & fem- blablement placé*; j’ai cru même bien diltinguer la poin¬ te qui le termine, & qui efl propre à picquer l’écorce de l’arbre. Dès le mois d’Avril on voit quelquefois entre l’écorce L iij Figure 6. h ii ii i- * Fig. 6 ./. oq aq * PI. 7. s- 86 MEMOIRES POUR L’HiSTOIRE de l’arbre, 6c le ventre de quelques-uns de nos infè- étes, une couche de duvet blanc 6c cotonneux, qui eft apparemment une matière qui s’eft échappée par l’infenfi- ble tranfpiration. Par la fuite cette couche cotonneufe s’épaiffit; les côtes du petit animal four ni dent aufft une femblablc matière ; peu à peu cette matière s’ac¬ cumule, 6c forme le nid mollet dans lequel l’infeéte mettra au jour fes petits. Nous avons dit que ce nid a la %• figure d’une petite corbeille gaudronnée *. Les gaudrons y font produits par les convexités 6c les creux ou cannelu¬ res des filions. Si les parties qui font en relief, &l celles qui font en creux, ou qui forment le fond des filions, laiffent tranfpirer une égale quantité de matière, la cou¬ che cotonneufe fera également épaiffe par-tout, 6c par conféquent elle fera néceffairement gaudronnée. Ainfi fc fait une efpece de nid très-bien arrangé 6c façonné, fans que l’adreffe de l’infeéte y contribue en rien. A mefure que le nid iè fait, l’infeéle groffit, 6c il de¬ vient déplus rouge en plus rouge, mais d’un rouge-fon¬ cé, qui pourtant m’a laiffé efperer que je pourrois tirer quelque bonne teinture de cet infeéle; mais celle qu’il m’a donnée a démenti l’efpérance que j’en avois conçue. Enfin l’infeéle met fes petits au jour; ils fortent par l’anus, ou par une ouverture qui en eft proche; ils pal- fent fous le corps de la mcre,qui s’applatit à mefure qu’il fe vuide. Quand elle a mis au jour tous fes petits, elle périt, elle fe defféche, 6c par la fuite elle tombe du nid. Quoique j’aye fuivi les progallinfeétes de forme de¬ puis leur naiffance jufqu’au temps où elles mettent leurs petits au jour, je né fuis point parvenu à les voir s’accou¬ pler. Mais fi elles ont des mâles aufïi petits que ceux des galiinfcétes, 6c ailés de même, comme il y a grande ap- pa ence, ces mâles ont pû très-aifément m’échapper, 6c des Insectes.//. Mem . 87 d’autant plus aifément que le temps pendant lequel les accouplemens le font, peut être d une courte durée, Sc être tombé dans des intervalles où mon féjour à Paris m obligeoit d’interrompre mes obfervations. Nous tirons la cochenille du Mexique; c’ch le fcul pays connu où elle croît, au moins le feul pays où l’on en fait des récoltés. Le nouveau Monde, en nous donnant cetteprécieufe drogue,nous a peut être fait un préfent plus utile, qu’en nous envoyant l'on argent Si fou or. Elle ch une importante branche du commerce. C’ch à la co¬ chenille qu’ehdûë la facilité que nous avons aujourd’hui de faire les plus belles teintures rouges de toutes les nuances d’écarlate Si de pourpre. On l’a employée pen¬ dant long-temps fans la connoitre, fans fçavoir ce quelle étoit; ce qui ne paroîtra pas fingulier à ceux qui ont fait une étude particulière de nos drogues fimples. ilsfçavcnt qu’il y en a encore actuellement dont l’ufage ch très- ancien Si très-commun, de l’hihoire delquelles nous fom- mes mal inhruits. Les marchands qui nous envoyait des drogues,& ceux qui nous les apportent, s’embarralfent peu de fçavoir Si de nous apprendre ce qu’elles font en elles- mêmes, Si d’où précifément elles viennent; ce qui les touche, c’eh de fçavoir ce qu’ils pourront gagner en les vendant. La cochenille, dans l’état où on nous l’apporte, eh en petits grains de figure affez irrégulière *; communément * Pi. 7 . convexes d’un côté *, fur lequel on apperçoit des efpe- ,2 - ces de cannelures. Si concaves de l’autre côté *. Leur I2 F,S ' ' contour, la féparation du côté concave au côté con- * Fi s- vexe, approche de la figure ronde, mais il a fouvent des enfoncemens plus ou moins grands fur différens grains; en un mot, il y a entre ces grains toutes les irrégularités qu’a pu prendre en fe dehechant ,un corps qui a été mol. 88 Mémoires pour l’Histoire La couleur de la cochenille la pluseftiméeeft un gris qui tient de l’ardoifé, mêlé avec du rougeâtre, & qui cft pou¬ dré de blanc. Ce qu’on a fçu d’abord de cette drogue, c’eft qu’on la ramaffoit au Mexique fur certaines plantes, qu’on en faifoit une récolté; de-là il étoit affez naturel de croire, comme les Sçavans mêmes l’ont cru pendant long¬ temps en Europe, quelle étoit un fruit. Ceux pourtant qui l’ont obfervée avec des yeux éclairés 6c attentifs, ont au moins douté quelle en fût un ; ils l’ont bientôt foup- çonnée un animal. En 1692. le P. Plumier communiqua à Pommet un mémoire, dans lequel il affuroit non feulement que la cochenille eü un irrfede qui croît dans le Mexique fur une efpece d’opuntia, il prétendoit de plus avoir trouvé le même infeéle à Saint-Domingue fur des acacias, 6c fur certains arbres qu’on appelle des cerificrs dans nos Ifles de l’Amérique. Pommet a fait imprimer ce mé¬ moire du P. Plumier dans fon hifloire générale des dro- ■» Pag. j 2. gués, qui a paru en 1694.. * mais il l’a fait précéder par une lettre,& fait fuivre par une autre, toutes deux d’un habitant de Saint-Domingue 6c fon correfpondant. Dans la première, ce correfpondant de Pommet l’affûre que la cochenille eft la graine d’une plante qui fe ramajfe dans de petites cafés faites en cœur, &c. Et dans la fécondé, il lui offre avec le plus grand air de confiance, de lui en¬ voyer la plante qui porte les gouffes dans lefquelles fe trouvent les graines qu’on appelle cochenille. Cet ha¬ bitant de Saint-Domingue y parle avec un grand mépris des connoifîances 6c des taiens du P. Plumier, dont il n’étoit pas apparemment en état de juger. Il ne le défi- gne pourtant que par le nom d’un Minime Provençal. Il dit qu’on fiffla ce Pere, lorfqu’il voulut faire croire que les infeéles des acacias 6c des cerificrs étoient de la cochenille. des Insectes.//. Merri. 89 Cochenille. Le Pere Plumier pouvoir avoir tort fur cet article; & eût-il eu raifon, il eût pû encore être fiffié. Enfin Pomrnet adopta le fentiment de Ion correlpon- dant,&ce qui le porta fur-tout à croire que la cochenille n’étoit pas un animal, c’efi que fon talent n’étant pas celui d’obferver, il ne put découvrir aucune des parties d’un animal à la cochenille qu’on nous apporte. M. Duhamel * nous apprend néantmoins que le décifif cor- * Duhamel refpondant de Pomrnet avoua dans la fuite que ce n’étoit Acad. que fur la foi d’autrui qu’il avoit parlé delà cochenille. Paris 170i t Mais des Sçavans d’un autre ordre, M. Harfœker en 1694.. M. de la Hire en 1704.. & M. Geoffroy en 1714.. ont décidé fur d’excellentes preuves, que la co¬ chenille eft un infeéte defféché. Us en ont mis tremper plufieurs grains, foit dans le vinaigre, foit dans l’eau; ils s y font ramollis & renflés; ils y ont repris en partie leur première forme ; alors ces fçavans ont pû reconnoître les anneaux du corps, auxquels ils ont trouvé quelquefois des jambes ou des relies de jambes attachés. Quand ces obl'ei vations faites au microfcope au¬ raient pû laifler quelqu’incertitude fur la nature delaco- chenille, il ne fçauroit plus y en avoir depuis que M. de Ruuffcher a fait imprimer un ouvrage * propre à démon- * a Ani/Ier* trer que la cochenille eft un infeéte, aux efprits les plus dam l 7 z i* prévenus de l’opinion contraire. C’eft peut-être la pre¬ mière fois qu’une queftion d’hifloire naturelle a été trai¬ tée & décidée juridiquement. La nature de la cochenille eft établie dans cet ouvrage par des dépofitions en forme, faites après prédation de ferment devant le juge, & re¬ çues par un Notaire dans la ville d’ Antiquera, fituée dans ia vallée à’Oaxaca, province du Mexique d’une grande étendue, où l’on fait récolté de cochenille. Ces dépofi¬ tions font celles de gens du pays, qui ont vû élever h Tome IV '1 M ço MEMOIRES POUR L'HiSTOIRE cochenille, ou qui en ont élevé eux-mêmes. Une ({if- pute qu’eut M. de Ruuffcher avec un de les amis lur la nature de la cochenille, nous a valu ces inftrucfions. Son ami foûtenoit qu’elle n’étoit point un infècle, qu’elle étoit un fruit. La dilpute s’échauffa, les deux amis pariè¬ rent l’un contre l’autre; enfin cette dilpute devint un procès qui fut jugé par des arbitres choifis par les deux parties, après qu’on eut fait venir les preuves authenti¬ ques & néceffaires à fa décifion. Les différentes pièces ou déportions produites pour i’inftruétion de ce procès, conviennent dans les faits ef- fentiels; mais les unes nous apprennent des circonftan- ces dont les autres ne parlent point, & toutes nous en laiffent ignorer quelques-unes qui ne pouvoient être rap¬ portées & obfervées que par ceux qui aiment à étudier la nature; fans avoir ce goût, on peut fort bien voir cul¬ tiver, &. cultiver la cochenille. Mais tous les témoigna¬ ges dont il s’agit, dépofent unanimement que la coche¬ nille efl un infècfle, & un infeéle vivipare; qui palTe une grande partie de fa vie fixé fur une plante dont il pompe le fuc, & où il fait les petits. Une des dépositions aver¬ tit que cet infeéîe n’eft fujet à aucune métamorphofe. Ces traits communs à la cochenille & aux progallinfec- tes, & quelques autres traits dont nous parlerons dans la fuite, nous donnent du penchant à la regarder comme étant de leur claffe. Enfin ces mémoires en forme dedé- pofitions, nous mettent en état de donner une efpece d’hiftoire Suivie de la cochenille, qui pourtant ne fera pas auffi complette que nous le voudrions. On diflingue deux fortes de cochenilles : l’une qui cil la cochenille par excellence, ou la cochenille fine; elle eft appeliée cochenille Mejleque, parce qu’on en fait des récoltés à Meteque dans la province de Honduras. DES I N S E C T E S. II. Aient. 9 r L’autre cochenille cft nommée cochenille filveftre; fa première cft, pour ainfi dire, la cochenille domeftique, 6c la fécondé cft la cochenille iauvage. On n’a l’une qu’au moyen des foins qu’on prend pour ielever fur les plantes qu’on cultive pour la nourrir;011 ramaffe l’autre fur des plantes qui croiffent naturellement, comme on ramaffe le kermès fur des arhuttes qui le multiplient fans notre fecours. On ne nous a pas mis en c'tat de dé¬ cider fi la cochenille mefteque ou line, & la cochenille filveftre font deux infeétcs d’elpeccs différentes, à quoi il y a beaucoup d’apparence; nous fçavons letilcmcnt que la cochenille filveftre eft moins chère que l’autre, parce qu’elle fournit moins de teinture. Peut-être fe nourrit- elle d’une plante d’où elle ne peut pas tirer un lue aufff bien préparé que celui qui eft fourni à la cochenille do« meftique. Les plantes fur lefquelles elles s’élèvent l’une 6c Tau* tre, font appellées par les Indiens nopalli, 6c connues en françois fous les noms d’opuntia, de figuier d’Inde, de raquette, de cardaffe 6c de nopal. M. Sloane, dans fà magnifique hiftoire des plantes de la Jamaïque *, a fait graver la figure de l’efpece de nopal ou d’opuntia, du fuc de laquelle fe nourrit la fine cochenille : elle y eft appel- lée Opuntia maxinia folio oblongo, rotundo , majore, fpinu- lis obtufis, molli bus & innocentïbus obfito : flore finis rubris rariegato. Cette plante eft le Tuna mitior, fore fangui- neo cochenilli-fera Dillenii horti Elthamenfs * ; 6c le Not- che7 nopalli, feu Nopalnochc7jli Hernandez *. Les opun¬ tia font des plantes dont la ftruéture eft bien différente de celle des nôtres telles ont plufieurs branches ou tiges, mais chaque branche n’eft qu’une file de feuilles mifes bout à bout, comme font les grains des chapelets. Cha¬ que feuille eflplatte, mais très - épaiffe ; fon contour eft M ij * TT[ff. JaiK. font. 2. tab. viij. fg. 7. àr 2. * P«S-399i tab. ccxcvij. fê-3 s s- * Hifl. Me- xic. pag. 7 3 . Ç2 MEMOIRES POUR L’HlSTOIRE oval ; elle tire fon origine de celle qui la précédé ; elle y tient par fou bout inférieur, & c’eft de Ion bout fiupé- rieur que part la feuille qui la fuit. C’elt apparemment la ligure de ces feuilles qui a fait donner le nom de ra¬ quette à la plante, chaque feuille cil une épaiffe palette. Ces plantes donnent un fruit qui a quelque reffem- blance grofîiére avec nos figues, & qu’on appelle figue d’Inde; on le mange, quoiqu’il n’ait pas le goût ïelevé de nos figues. Ceux qui en ont mangé pour la première fois, font effrayés lorfqu’ils voyent enfin ce couler leur urine, s’ils n’ont pas été avertis de la couleur que ces figues ont dû lui faire prendre : leur urine eft teinte de rou¬ ge à un point qui leur fait croire qu’ils rendent le fang clair. Ce fait nous apprend fuffifamment d’où la cochenille tire fa belle couleur. On affûre auffi que dans les pays d’Europe où l’on cultive la garence, lorfqu’il arrive aux vaches de manger cette plante, elles donnent du lait rou¬ ge. M. de la Hire avoit foupçonné que nos gallinleétes des orangers pourroient bien être des efpeces de coche¬ nilles ; que fi elles vivoient du fuc de l’opuntia, elles fie eoloreroient comme la cochenille du Mexique. Pour voir ce qui en arriveroit, il fema quantité de ces jeunes gallinfcétes fur un pied d’opuntia; mais cette plante ne parut pas être de leur goût, elles ne voulurent pas refter deffus. Une autre expérience à tenter, c’eft fi nos pro- gallinfeétes de l’orme ne s’accommoderont pas mieux du fuc de l’opuntia. Les Indiens plantent & cultivent autour de leurs ha¬ bitations des nopals ou opuntia, fur lefqueis ilsfepropo- fent d’élever des cochenilles, dont ils elpérent faire plu- fieurs récoltés dans l’année. La dernière récolté fe fait Iorlquc la laifon des piuyes approche. Les pluyes & les jemps froids font à craindre pour ccs petits inlcétcs . fi des Insectes. IL Mem. 9* bn les laiffoit alors expofés aux injures de l’air, il en pé¬ rirait trop.il 11’en réitérait peut-être pas alfezen vie pour donner de bonnes récoltés dans l’année fuivante. Par cette raifonavant que la fâcheufefaifon arrive, les Indiens cou¬ pent des feuilles de nopals fur lefqueifes font de petites cochenilles qui n’ont pas encore pris tout leur accroilfe- ment : ils les portent dans leurs habitations; les infec¬ tes dont les feuilles y font chargées , font à l’abri de la pluyc. Ces feuilles de nopals, comme celles de quan¬ tité de plantes gralfes des pays chauds, peuvent relier long-temps hors de terre fans fe delfécher. Si même y relier très-fucculentes. Elles fournilfent donc une nourri¬ ture fuffifante aux petites cochenilles qui s’y font atta¬ chées. Ces cochenilles grolfilfent & croiffent à un tel point, que quand la faifon des pluyes ell palfée, elles font près de faire leurs petits; car, comme nous l’avons dé¬ jà dit, les cochenilles font vivipares. Celles qui ont été confervées à couvert, font cel¬ les qui doivent être femées pour fournir les récoltés dans la belle lâifon. Pour les mettre en état de mul¬ tiplier d’une maniéré dont on puilfe profiter, les In¬ diens font des efpeces de nids femblables à ceux des oifeaux, mais beaucoup plus petits, foit avec de la mouiïe pareille à celle de nos arbres, foit avec un foin fin ou une paille fine, l'oit avec ces filamens bourreux qui en¬ veloppent les noix de cocos. Dans chacun de ces nids on met douze ou quatorze cochenilles; on porte ces nids dans les plantations d’opuntia qu’on a eu foin de faire & de préparer; on les place entre les feuilles, ou,félon le terme des Indiens, les pencas. Les épines qui s’y trou¬ vent , donnent la facilité d’y afiujettir luffifamment ces petits nids. La quantité de ces nids doit être confi- dérable, puilque les cochenilles mêmes qu’on a miles 94 MEMOIRES POUR L’HlSTOIRE dedans, deviennent feules l’objet d’une récolté qu’on n’cft pas long-temps à faire. On dit dans une des dépo¬ rtions, qu’à chaque origine de feuille on place deux à trois de ces nids. Les cochenilles ne font pas plus de trois à quatre jours dans les nids fans y faire leurs petits. C’elt un fait fur lequel toutes les informations parlent alfez uniformé¬ ment, d’où il fuit que les Indiens connoiffent bien le temps où elles font près d’accoucher. D’ailleurs l’air extérieur auquel elles font expofées, peut les y aider. Cha¬ cune d’elles fait des milliers de petits, qui, pour nousfer- vir des termes de quelques-unes des déportions, ne font pas plus gros que des pointes d’épingles, ou qui, félon les termes de quelques-autres, font gros comme de petites mittes, ou comme des lentes, ou comme de petites puces. Les cochenilles nouvellement nées quittent bientôt ic nid, elles vont fur les feuilles de nopal, elles s’y tlifper- fent, & elles y marchent apparemment comme nos jeu¬ nes gallinfedles, ou comme les progallinfeéïes; & de mê¬ me elles ne font pas long temps fans fe fixer. Elles ne rongent aucunement la plante, elles fe contentent de la picquer & de tirer le lue de l’endroit où elles fe font ar¬ rêtées pour y refier jufqu a ce quelles ayent pris tout leur accroilfement, & qu’elles foient elles - mêmes en état de mettre chacune au jour un très-grand nombre de petits. Les cochenilles par préférence s’attachent aux endroits de la plante les plus verds comme les plus fucculents, & auffi à ceux qui font le plus à l’abri du vent. Dans les pays les plus froids de ceux où on éleve la cochcniile, on couvre avec des nattes les nids & les feuilles fur lef- quellcs les jeunes infeéfes doivent grimper : ces nattes les défendent contre le froid & contre lapluye, qui en pour* roient faire périr beaucoup. des Insectes. II. Mem. 95 On ne doit pas s’attendre à trouver des defcriptions bien exactes de la figure de ces petits animaux, dans des dépofitions qui n’ont été faites que pour certifier qu’ils font réellement des animaux, & dans des dépofitions faites par des perfonnes, qui, quoiqu’elles euffentcultivé ou vû cultiver la cochenille, ne i’avoient pas obfervée en naturalises. C’efi beaucoup qu’on y parle des pattes ou jambes de ces infeéles, de leurs griffés, de leurs yeux, d’une efpece de bec ; on y apprend que la figure dit corps de l’animal eff ovale, & qu’il parvient à avoir la groffeur d’un petit pois. On adjoute quelque chofe de plus précis, lorfqu’on dit qu’il reffemble à i’infeéle qui s’attache volontiers aux chiens, & fur-tout à leurs oreil¬ les , aux bœufs, & à d’autres animaux, & qu’on appelle en latin minus, & en françois riccin ou tique. M. Geof¬ froy a auffi comparé la cochenille à cet infcéfe; & le Pere Plumier l’a comparée aux punaifes domeftiques. Les infeéles de ces deux genres, quoique très-diffcrens de celui de la cochenille, font de ceux avec iefquels elle ale plus de reffemblance. Les fourmis aiment les cochenilles comme elles ai¬ ment nos pucerons & nos gallinfcéles, & il y a lieu de croire qu’elles ne leur font aucun mal; mais quantité d’autres efpeces d’infecles les cherchent pour les dévo¬ rer. Les Indiens apportent tous leurs foins pour dé¬ fendre les cochenilles contre ces infecles redoutables ; ils nétoyent les nopals de certains fils ou certaines toiles fembiables à celles des araignées, filées par des infecles qui mangent apparemment les cochenilles. Sur quoi les dépofitions nous inffruifent le mieux,c’eff fur la maniéré dont fe fait la récolté de la cochenille. On en a plufieurs dans une année, dont la première efl celle de ccs mêmes meres qu’on a portées dans les petits nids £6 MEMOIRES POUR L’HiSTOIRË lurles nopals : elles ne quittent pas ces nids ; après s’y être délivrées de tous leurs petits, elles y pendent. On n’a donc qu’à aller ôter les nids de dedus les nopals, & eu retirer les mères qu’on y avoit miles. Au bout de trois à quatre mois , tantôt plutôt, tantôt plûtard, félon que la làifon a été plus ou moins favora¬ ble, on fait la lèconde récolté; alors les cochenilles, qui avoient été femées fur les nopals,pour ainfi dire, ont pris tout leur accroiffement ; quelques-unes mêmes ont déjà commencé à faire des petits. Les Indiens ramadent ces cochenilles, ils les détachent de deflus les plantes,en les frottant avec une efpece de petit pinceau fait de poils attachés à un des bouts d'un petit roleau ou d’un petit bâton qui fert de manche. Dans cette fécondé récolté on n’enleve pas toutes les cochenilles de deffus les nopals, on y en laide, & peut- être quelques-unes des grodes, à dedein de les y faire mul¬ tiplier; mais on y en laide toûjours beaucoup de nouvel¬ lement nées, de celles qui étoient déjà forties du corps des meres qu’on a détachées. Les jeunes cochenilles qu’on a laidees, donnent une troifiéme récolté au bout de trois à quatre mois. Quand on fait cette troifiéme ré¬ colté, le temps des pluyes approche, & ce font les jeu¬ nes cochenilles venues de celles qui ont été l’objet de la troifiéme récolté, que les Indiens confervent pendant la faifon des pluyes, dans leurs habitations fur des feuilles de nopal ; & qui doivent fournir dans l’année fuivante à des récoltés femblables à celles qui ont été faites dans l’année qui a précédé. La cochenille de cette derniere récolté n’ed pas audi nette que celle de la récolté précédente. Il y a alors fur les nopals quantité de petites cochenilles, plus qu’on n’en Veut conferver à couvert pendant la failon des pluyes. Pour des Insectes. II . Mem . 97 Pour ne rien perdre, les Indiens ratifient les feuilles,afin d’en détacher ces petites cochenilles; il leur faudrait trop de temps pour les faire tomber avec le pinceau; les ra¬ clures de la plante fe mêlent avec la cochenille, & font caufe que la drogue efi moins nette. D’ailleurs les coche- nilles-meres, ou prêtes à être meres, fe trouvent mêlées avec beaucoup de jeunes & petites cochenilles. Lorfque le tout efi declféhé, on a un mélange de gras 8 c de pe¬ tits grains ; aufii cette forte de cochenille efi nommée granilla par les Efpagnols. Après que les Indiens ont ramafie les cochenilles, ifs les font p rir, fans quoi ils pourraient perdre une partie de leur récolté. Les meres, quoique détachées des plan¬ tes, peuvent vivre pendant quelques jours & faire leurs petits : les petits nouvellement nés font vifs, ils aiment à courir; ils fe difperferoient bientôt, 8 c ce ferait autant de déduit fur le poids de la cochenille qui avoit été ramafi fée. Il y a différentes pratiques ufitéespour faire périr ces infedes. Quelques Indiens les mettent dans une corbeille,, ils les plongent enfuite dans l’eau chaude; & après les en avoir retirés, ils les expofent au foleil pour les faire fécher. D’autres ont de petits fours confiruits exprès, qu’on échauffe au degré de chaleur convenable pour faire mou¬ rir les cochenilles qu’on met dedans fur une natte. Ils appellent ces fours des temafcales. Les femmes des In¬ diens font cuire leurs pains ou gâteaux de maiz fur des plaques fous lefquelles elles allument du feu; on fait en¬ core périr les cochenilles fur ces mêmes plaques appel- lées des comales. C’efi de ces différentes maniérés de faire mourir les cochenilles, que dépendent principalement les différentes couleurs de celles qu’on nous apporte. Les cochenilles vivantes, comme la plupart de nos gallinfec- tes, font couvertes d’une poudre blanche; celles qu’on Tome IV .N 98 MEMOIRES POUR l’HïSTOIRE fait périr dans l’eau chaude, y perdent partie de cette poudre, elles paroiffcnt enfuite d’un brun roux : on ap¬ pelle cette cochenille renegrida. Celles qu’on fait périr dans les fours ou temalcales, ne perdent pas leur poudre' blanche, elles relient d’un gris cendré & jafpé , parce que le blanc fc trouve fur un fond rougeâtre, & c’elt de¬ là que vient cette cochenille qu’on appelle jalp ce, jàfpea- da. Celles qu’on fait périr fur les plaques ou comales, courent plus de rifque d’être trop chauffées ; elles de¬ viennent noirâtres, comme fi elles y culfent été trop gril¬ lées, & cette cochenille eh appellée negra. Les meres mortes qui ont été tirées des nids pofés fur les nopals, perdent plus de leur poids en léchant, que n’en perdent les cochenilles qui ont été prifes vivantes & pleines de petits. En faifant lécher quatre livres des pre¬ mières on les réduit à une livre, & trois livres des autres donnent cette même livre après avoir été féchées. On nous dit que la cochenille filvefirc croît fur une ef- pece d’opuntia qu’on ne prend pas foin de cultiver, &. dont les feuilles font chargées de plus de piquans,que ne le font les feuilles de l’opuntia fur lequel on éleve la belle cochenille. Nous fçavons donc très-bien que la cochenille cfl un infeéle; comment on l’éleve & la foigne pour la faire multiplier, comment on la fait périr; & que l’exté¬ rieur de cette importante drogue cfl un peu différem¬ ment coloré, félon la façon dont on s’y eil pris pour faire mourir les petits infècles. Nous devons ces inf- truélions complettes aux foins que s’cfl donnés M. de Ruuffcher ; mais comme il le remarque lui-même, pour fe convaincre que la cochenille efl un petit animal, il n’étoitpas néceflàire défaire venir du Mexique des obler- yations fi authentiques. Il fuffifoit de s’y prendre comme des Insectes. II Mcm. 99 l’ont fait M. rs Harfœkcr, de la H ire, Geoffroy, 6c com¬ me Al. deRuuffchcr l’a fait lui-même. Ilfuffifoit de met¬ tre tremper dans l’eau ou dans le vinaigre quantité de grains, de les y lailfcr renfler, 6c de les obferver cnfuite avec une bonne loupe; car alors lin obfcrvateur peut aifément reconnoître que chaque petit grain ell le ca¬ davre d’un inlecfle. Les grains les plus informes, ceux qui ont été les plus maltraités, montrent au moins les différais anneaux dont le corps efl compofé *. Mais qu’on parcoure avec la loupe un certain nombre de grains, 6 c on ne manquera pas d’en rencontrer plufieursqui four¬ niront des preuves qui ne fçauroient permettre de reflet dans le doute; on trouvera aux uns, comme j’ai trouvé, des fragmens de jambes qui font relié attachés au corps; on trouvera aux autres quelques jambes entières; on s’afi- fûrera aifément que l’infeéle a flx jambes *, 6c qu’il n’en a pas davantage. J’en ai vû à qui une paire de jambes étoit reliée bien faine 6c bien entière; à quelques-uns ç’étoit la première paire, 6c à d’autres la troifiéme. Enfin quand on a vû les jambes de différentes paires fur différentes co- chenilles, au moins diflingue-t-on très-bien les places où ont été les jambes des cochenilles à qui elles manquent. Tout cela efl fi vifible, même à ceux qui font les moins accoûtumés à obferver, qu’on ne fçauroit affez s’éton¬ ner que Lceuwcnhoek, à qui l’ufage du microfcope étoit fi familier, qui, avec le fecours de cet inftrumcnt, nous a donné tant de belles figures de quantité de corps d’une petiteffe inexprimable, on ne fçauroit, dis-je, affez s’éton¬ ner que Leeuwenhoekait fi mal vû la cochenille. M.Boyîe s’informa de lui par le canal de M. Heinfius qui réfidoit alors à Londres, de ce qu’il penfoit de la nature de la co¬ chenille. Lecuwenhoek répondit à M. Heinfius, qu’à fa confidération 6c à celle de M. Boyle, il avoit répété des Nij * Pi. 7 - «s- * Fig. i6; ij if h, /<; If U f * Continua - tio Epiftola- rum ad ré¬ glant Societa- iem, p. i ij. 100 MEMOIRES POUR L'HiSTOIRE obfervations qu’il avoit déjà faites plufieurs années aupa¬ ravant , & qu’il lui paroiffoit conflamment que la coche¬ nille ne devoit être autre cliofe que le fruit d’un arbre, 8 c lin fruit affez femblable à ces bayes que les botanifles appellent raifin d’ours, uva uijï. Mais M. Henfius ayant marque à Lecu\venhoek,dans la lettre de remerciement qu’il lui écrivit, qu’un gouverneur de la Jamaïque avoit alluré M. Boylc, que la cochenille étoit un ver qui naif- foit fur le fruit du figuier d’Inde, 8 cc. Lcemvcnhoek avoua de bonne foi * qu’après un nouvel examen, il s e- toit détrompé de fon ancienne erreur, 8 c qu’il avoit re¬ connu que chaque petit grain de cochenille étoit en effet la partie poflérieure de quelque petit animal, dont la tê¬ te, les pattes, la coque, 8 c la partie antérieure du corps avoient été emportées. 11 femble que Leeuwenhoek fçavoit bien mieux voir les objets d’une petiteffe prodi- gieufe,que ceux d’une grandeur fenfible; les petits objets étoient plus de fon domaine; c’eff de quoi je pourrais rapporter beaucoup de preuves, 8 c dont une nous eff fournie par fes dernieres obfervations fur la cochenille ; car il a encore mal vu la cochenille, quand il a cru voir que chaque grain étoit le corps d’un.animal, à qui la tê¬ te, la coque 8 c la partie antérieure manquoient; ordinai¬ rement rien de tout cela ne lui manque. Quelques autres auteurs,qui ont bien reconnu la co¬ chenille pour un petit animal, fe font prclfés de la met¬ tre dans une claffe d’infeeffes, avant que d’avoir affez étudié fa forme. Les uns veulent, comme Hernandez , qu’elle ne foit qu’une efpece de ver : d’autres la placent parmi les araignées; la plupart en ont fait une efpece de fearabé. Petiver eff; de ces derniers, il a cru même avoir des figures de la cochenille dans les différais états par iefquels il ayoit imaginé qu’elle paffoit, dans celui de ver des Insectes. II. Aient. i o i à fix pieds, dans celui de nymphe, & enfin dans celui de fcarabé. Il eft cependant certain par les informations venues du Mexique, que cet infecte ne fubit aucune métamorphofe. Plufieurs de ces différens auteurs ont apparemment cru avecLeeuwenhoek, que chaque grain de cochenille n’étoit qu’une petite portion du corps de l’infeétcA de leur grâce ils lui ont accordé les parties qui lui manquoient pour être i’infeéte qu’ils penfoient qu’elle devoit être. Mais quel¬ qu'un qui fera bien au fait des caractères des infeéîes, s’afîurera aifément que celui-ci n’appartient à aucune des claffes auxquelles ces auteurs l’ont donné. Dès qu’il l’aura obfervé avec foin, il reconnoîtra qu’il nous arrive plus entier qu’ils ne l’ont penfé, qu’il n’a guércs per¬ du que fes jambes, ou quelques-unes de fes jambes, & peut-être des antennes. Sur les cochenilles renflées dans l’eau ou dans le vinaigre, il diftinguera la petite tête * ; * PI. 7.%. il verra de chaque côté un tubercule * , qui peut être un '£• refie d’antenne ou un œil, car cela 11’eft pas ailé à déci¬ der. La première paire * des jambes eft aflez proche de ;. la tête de cet infeCte, & elle cfi poféedemême dans les gallinfcéles & les progallinfecftes. Entre cette première paire de jambes & la tête on diftingue un petit corps lon¬ guet *, placé encore comme l’efi la trompe des gallinfec- tes, & celle de divers autres infeéîes, & qui doit être la trompe de la cochenille. C eft peut-être cette partie que quelques-unes des atteftations envoyées à M. de Ruuf- feher, appellent un bec. L’endroit où eft l’anus,eft facile à reconnoître. Enfin dès que l’infeéîe a fa tête,on eft en état de décider qu’il n’eft point un fcarabé ,car il n’eftplus permis de fuppofer que les fourreaux écailleux des ailes membraneufes, & ces ailes elles-mêmes ont été empor¬ tées, parce que les infedes ailés qui ont de ces fourreaux. 102 M E M O I R E S 'PO U R L’H IS T 0 IR E ont un corcelct écailleux ou cru (lacée, placé entre fa *PI.7.fig. tête & le corps; Si la cochenille * n’a point ce corce- 1 5 * ict. Il 11’dl pas moins facile de voir, l'oit par la forme du corps, foit par le nombre de fcs jambes, qu’elle n'ap¬ partient point à la clafle des araignées. Mais lî 011 fe rappelle ce qu’on lçait fûrement de fa manière de vivre, qu’elle paffe une partie de fa vie immo¬ bile Si fixée fur les plantes; fi on fie rappelle l’endroit où la trompe efi lituée, on fera difpofé à la prendre pour une gai 1 infecte, ou pour une progai!infeéle : Si c’efi dans la clalfe des progaliinfcétes qu’on lé déterminera à la pla¬ cer, quand on aura fait attention qu’elle a des anneaux depuis la tête julqu’au derrière; que quelque gonflée qu’elle foit, fcs anneaux font fenfibles fur la partie fiupé- rieure du corps ; au lieu qu’il vient un temps où ceux des véritables gallinfeétes ceffent d’être vifibles, où tout le dcflùs de leur corps devient lifle Si luilant, comme s’il étoit écailleux ou cruftacée ; tel efi même le deiïus du corps des gallinfcéleslcs plus vieilles Si les plus féches, comme le kermès le fait alfés voir. Mais le definis du corps des cochenilles féches efi ridé; Si le defiùsdu même corps ra¬ molli Si gonflé, conferve des vefiiges des rides ; &il a alors un air membraneux & charnu. Dès qu’on a ignoré pendant fi long-temps en Europe comment les gallinfeétes font fécondées, on a bien pu ne pas fçavoir au Mexique comment les cochenilles le font ; là aflùrémcnt les obfervateurs ne font pas aufii com¬ muns qu’ici. Cependant comme fi les pièces publiées par M. de Ruuiïcher,dévoient nous donner une hifloirecom- plctte de la cochenille, nous y trouvons encore des lumiè¬ res fur la fécondation de la cochenille. Ce qu’on y en rapporte, n’efi néantmoins que fur un oui dire, mais fur un oui dire qui a du poids depuis que les mâles des des Insectes. //. Menu 105 gaüinfecflcs nous font connus. Dans le certificat du Cor- regidor *, nous trouvons que fa Seigneurie a dît avoir oui dire par tous ceux qui en font métier (d’élever la coche¬ nille) que dans le temps que la cochenille devient grojfe, il marche fur elle un petit papillon qui naît fur les memes no¬ pals , & par lequel on dit que la cochenille conçoit , Les mouches qui font les mâles de nos gallinfccles, pour- roient être prifes pour des papillons, même dans notre pays, par ceux qui ne font pas plus au fait de fhilloire naturelle que les Indiens qui cultivent la cochenille. Une mouche, à ailes colorées & moins tranfparentes que cel¬ les des mouches ordinaires, feroit fouvent appellée ici un papillon. Il y a donc grande apparence que les papil¬ lons dont il efl parlé dans le certificat, ne l'ont que des mouches; & que ces mouches qui fe promènent, qui marchent fur la cochenille,comme d’autres petites mou¬ ches marchent fur les gallinfeéles, y marchent pour la même fin. II efl donc très-vraifemblable que les mâles des cochenilles, comme ceux des gallinfecles, font de très-petites mouches. Si parmi les grains de cochenilles qu’on a mis tremper dans l’eau, on choilit ceux qui s’y font le plus renflés,& qu’on les prefle jufqu’à un certain point, on oblige ce qui efl renferme fous les enveloppes extérieures, à fortir par l’anus ou par quelque crevaffe qui fe fait aux envi¬ rons, ou fur l’un des côtés. Qu’on examine avec une forte loupe ce qu’on a fait fortir, on trouvera fouvent que c’efl un amas de petits grains rouges ou rougeâtres, & de quelques autresprefque noirs,dont chacun * a la fi¬ gure d’un œuf oblong. Je m’en ferois tenu auffi à pren¬ dre ces petits corps pour les œufs dont étoit remplie la cochenille de laquelle je les nvois fait fortir, fi je n’avois pas fçu que la cochenille efl vivipare. Dès que * Pag. 1 ? 140. F* PI. 7. %. 17 - * PI. 7. fil 18. * Fig. 19. * !, // !J<; h 104 MEMOIRES POUR L’HiSTOIRE ce dernier fait eft certain, cliaque petit grain doit être un foetus. Je me fuis fervi auffi d’une loupe d’un très- court foyer, pour tâcher de découvrir à ces petits corps quelques parties propres aux fœtus. Je leur ai vû à prcf- y. que tous des anneaux alfés marqués * : mais j’ai cru voir quelque chofede plus à plufieurs grains. Un de leurs côtés, * celui ou doit être le ventre du fœtus,m’a paru affés fem- blabîe au meme côté des nymphes, ou des crifalides; j’ai cru voir de petits filets blancs , qui ne pouvoient être l autre chofe que les jambes * , qui étoient étendues & difpofées fur le petit embryon, comme les jambes le font fur plufieurs nymphes. Les petits animaux defféchés qui compofent la cochenille que nous nommons filvefirc, différent beaucoup plus en grandeur entr’eux, que ceux de la cochenille line. Quand on fait la récolte des pre¬ miers, on n’a aucun ménagement, on ramaffe ceux de tout âge : parmi ces infedes defféchés j’en ai rencontré de très-gros, plus gros que ceux de la cochenille mefle- que; les plus gros ont été ceux que j’ai fait tremper dans l’eau par préférence. Lorfqu’ils en ont été imbibés, j’ai forcé par la preffion les petits grains qui étoient dans leur corps à en fortir. J’en ai fait paraître au jour des mil¬ liers ; chacun de ces grains étoit femblable à ceux que la cochenille mefteque m’avoit fait voir en pareil cas. Au refie , non-feulement il y a du choix à faire dans les petits grains pour difiinguer ces filets qui m’ont femblé.être les jambes, il y a encore à faifir un in fiant favorable. Dans le moment où le grain vient de fortir du corps, il cfi trop gonflé; quelques moinens plus tard il cfi trop ridé: c’efi dans un temps court pris entre les deux derniers, que l’on voit tout plus nettement, & ce temps cfi ailé à faifir, parce qu’il arrive pendant qu’on tient le grain au foyer de la loupe. Affés des Insectes. IL Mem. i o 5 Ailes de pays nous fourni fient l’argent & l’or, mais le Mexique bien partagé de ces précieux métaux, a leul le privilège de nous donner la cochenille; on l’y cultive dans pluhcursde lès provinces, dans celles de Tlalcalla, de (juu\aca,deGuatimala,de Honduras,&c. Le produit de la récolté qu’on fait de la cochenille dans cesdifiérentes pro¬ vinces , eft plus fur pour leurs habitansque le produit des mines d’argent du même royaume; il ne les expofe pas à d’auffigrands& d’auffi dangereux travaux,& ii elt trés-con- fidérable. Pour donner quelqu’idée de ce que la cochenille vaut au Mexique, je n’ai qu’à tranferire ce que je trouve fur cet article dans une içavante Differtation lur la coche¬ nille, envoyée d’Amfterdam à M. du Fay par M. de Neufville * en Janvier 1736. & lûë peu de temps après à l’Académie. Dans cette differtation M. de Neufville coniidére la cochenille dans deux points de vûë différens, dans celui qui intéreffe les Phyficiens, & dans celui qui touche le plus les négocians. Pour fatisfaire les Phyfi¬ ciens, M. de Neufville n’a rien obmisde ce que peut ap¬ prendre la leélure des Auteurs qui ont parlé de la co¬ chenille; & c’efl quand il la confidére comme l’objet d’un grand commerce, qu’il examine la quantité de celte importante drogue qui vient chaque année en Europe. On penfe bien que cette quantité ne doit pas être toû- jours précifèment la même; mais les plus grands négo¬ cians d’Amfterdam qu’il a confultés, lui ont dit que la flotte d’Elpagne apporte à chacun de fes retours en Eu¬ rope,deux à trois mille lurons de cochenille; le luron cft un ballot fait d’une peau de bœuf fraîche, dont lepoil cft en dedans; il pelé depuis 130 jufqu’à 200 livres. Les * Il eft bien connu du public par ta belle Vie de M. Leibnitz qu’il a mile à la tête de la Théodicée de ce célébré Auteur, & par Ion projet d’un Di¬ ctionnaire de Medecine. Tome VI. . O 10 6 MEMOIRES POUR L’HiSTOIRE azogues ou vaiflfeaux qui précèdent la flotte , font char¬ gés depuis 700. jufqu’à 14.00 furons. La Compagnie Angloife de l’Afiientc en apporte auffi une quantité qui n’efl ni fixe ni connue; on ignore aufli ce qu’il vient de cochenille par divers autres vaiiïeaux que ceux de la flotte, des azogues 6c de l’Aflicnte. Mais on peut fuppofer, comme le Lit M. de Neufviile , qu’il vient par an 44.00 furons de cochenille fine ou mefleque; 6c en fwppofànt chaque furon du poids de 200 livres , pour fuppléer ce qui peut manquer à leur nombre, c’eft huit cens quatre-vingt mille livres pefànt de co¬ chenille qu’il arrive tous les ans en Europe. Il les ré¬ duit à fept cens mille livres de cochenille mefleque, par¬ ce qu’il n’y a gucrcs plus des deux tiers de celle-ci dans le total, 6c un peu moins du tiers en cochenille filveflre. Il évalue comme à un prix moyen chaque livre de co¬ chenille mefleque à 10 florins 4 fols d’Hollande, ou à environ 2 1 livres de France ; ainfi, à fon calcul, il arrive chaque année pour fept millions cent quarante mille florins de cette cochenille argent de Hollande, 6c pour quatorze millions neuf cens foixante 6c dix-neuf mille vingt livres argent de France. Refle encore à ajouter 180000 livres pefant de cochenille filveflre, dont la livre n’étanr évaluée qu’à 30. fols de Hollande, font cnfcmblc 270000 florins ou 571678 livres d’argent de France. Ainfl le total de la vente de la cochenille cfl par année commune d’environ fept millions quatre cens dix mille florins de Hollande , ou de quinze millions cinquante mille fix cens quatre-vingt-dix livres d’argent de France. On ne peut s’empêcher d’admirer que les cadavres d’une efpece de très-petits infèétes, foient un fl grand objet de commerce; c’efl un objet digne d’être envié au Mexique par les pluspuiflfans E tats de l’Europe : il efl même éton- DES I N S E C T E S. IL Mem. 107 liant qu’ils n’ayent pas fait encore toutes les tentatives poflibies, pour parvenir à partager avec ce pays l’avantage de faire un pareil commerce. Les puiflances qui ont des colonies en Amérique, ont aflurément des climats où pourroient croître les mêmes elpeces de nopals qui croif- f'ent dans le Mexique,& iur lelquelles probablement les cochenilles pourroient vivre & le multiplier. Ces coche¬ nilles qu’on garde dans les maifons pendant lhyver, qui 11’y périlTent pas, pourroient apparemment être tranlpor- tées dans la même fai!on ou dans d’autres, fur des vaif- feaux fans y périr. C’eff une vûë que j’ai eu autrefois l’honneur de communiquer à un Prince très-éclairé, & très-capable de goûter les grands projets, à feu M. le Duc d’Orléans; auffi cette vûë lui plût-elle beaucoup. Ce que le P. Plumier prétend avoir obfèrvé d’une efpece de cochenille qui croît à Saint-Domingue, doit nous rendre attentifs à voir ce qu’on en peut tirer. M. Duhamel Doéteur en Médecine, qui réfide ac¬ tuellement à Saint-Domingue, où il eff pour l’Académie lin excellent correfpondant , a obfervé dans cette ifîe une efpece de cochenille qu’il croit être la même que celle du P. Plumier; il a même ramaffé de cette coche¬ nille qui s’étoit nourrie fur des pieds d’opuntia; 6c en a envoyé à M. du Fay & à M rs . de Juffieu. Elle a tout l’extérieur de la cochenille qui nous vient du Mexique; mais il eft à craindre qu’elle ne foït, par rapport à la vé¬ ritable cochenille, que ce que font les gallinlëctcs des pê¬ chers, des tilleuls, de la vigne, &c. par rapport au ker¬ mès. Si on lailfe infuferde la vraye cochenille dans l’eau, bientôt elle donne à l’eau une forte teinture d’un bon rouge, au lieu que la même quantité de la cochenille envoyée par M. Duhamel, n’a fait prendre à l’eau dans laquelle je l’ai mile, qu’une foibie teinture d’un alfez 108 MEMOIRES POUR L’HiSTOIRE mauvais rougeâtre. M. du Fay a même tenté inutilement d’en tirer une bonne teinture,au moyen de procédésfem- blables à ceux qu’on employé pour exalter la couleur de la vraye cochenille.L’efpecc de celle-ci qu’on élevé au Mexi¬ que, pourroit bien être à Saint-Domingue , quoiqu’elle n’y ait pas encore été découverte, au moins y pourrait-elle être tranfportée : 6 c il elt probable qu’elle y vivra, lorl'qu’on lui donnera les nopals qu’elle aime; 6 c qu’elle y fournira à des récoltés, lorlqu’on prendra pour l’élever les foins qu’elle demande & qu’elle mérite. Peut-être même que fi on tente de faire vivre l’efpece de cochenille qui fe trouve déjà à Saint-Domingue fur différentes clj)eces d’opuntia, entre les efpeces de cette plante, on en dé¬ couvrira quelqu’une qui nourrira mieux que les autres cet infecte, & qui le mettra en état de donner une belle teinture, & d’en donner fuffilâmment. îl ne tiendrait déjà qu’à nous de cultiver la cochenille, 6 c nous aurions de grands reproches à faire aux habitans de nos illes de l’Amerique, de leur négligence à nous la ^Jjkslte va P roci,rer > fi tout ce que le Pere Labat en rapporte * , merique. To- étoit bien certain. Il prétend que la cochenille eft com- me iv. page mune dans ces illes, 6 c qu’il l’y a élevée deux fois. Mal- \mtef. lieurcufement les circonftances dont fon récit cl! orné, prouvent que les infeeftes qu’il appelle des cochenilles, ne l'ont nullement les cochenilles du Mexique. On craint qu’il n’ait voulu que renchérir fur ce que le Pere Plu¬ mier avoit dit avant lui de la cochenille de Saint-Domin¬ gue , 6 c que dans l’endroit même ou il loue ce fçavant Botanific , il n’ait cherché à déprimer fes obfervations , comme il l’a fait, mais plus ouvertement tant d’autres fois. Au refie il ferait ailé de vérifier s’il y a dans nos ifles un infeefie très-commun, qui fubit des métamorphofes , qui devient allé, 6 c qui fe trouve, ainfi que le veut le Pere des Insectes. II . Mem . 109 Labat, fur les acajoux, les goyaves, lescerifiers,Ies oran¬ gers, les avocats,&c. mais, qui transplanté fur les figuiers d’Inde ou raquettes y relie; s’attache feulement au fruit de cette plante, fe nourrit de fon lue, qui lui fait pren¬ dre une couleur rouge , & le met en état de donner une forte de carmin. Si tout cela étoit vrai, nous au¬ rions dans nos illes une efpece d’infeclcs, qui, quoique d’un genre différent de celui de la cochenille, mériteroit comme elle d’étre cultivée. D’ailleurs ne fut-on pas difi- polé à avoir une grande confiance dans le récit du Pere Labat, c’efi affurément une recherche à tenter que celle des différentes efpeces d’infeéles qui peuvent vivre fur les opuntia, & cela dans la vue d’examiner s’il n’y en aura pas quelqu’une qui prendra une belle teinture rouge en fe nourriffant de plantes, dont les fruits donnent à nos urines la couleur du fang. Il y a au refte toute apparence que le Mexique ne ref- tera pas toujours feul en poffeffion de cette précieufe drogue, &. qu’il arrivera à la cochenille ce qui efl ar¬ rivé à des plantes utiles, aux cannes de fucre, aux caffiers &c. de fe naturalifer dans d’autres pays que celui 011 elle a toujours été jufqu’à préfent. Enfin pour pren¬ dre parmi les infectes mêmes un grand exemple, pour¬ quoi les cochenilles ne pourroient-elles pas être tranfpor- tées de leur pays natal, dans tous ceux où les nopals qui leur conviennent .peuvent croître, comme les vers à fove l’ont été des Indes, dans les pays qui peuvent leur four¬ nir des feuilles de meurier! Pour compofer les huit à neuf cens mille livres pefant de cochenille qu’on nous apporte peut-être chaque an¬ née en Europe, combien faut-il ramaffer de ces petits infeéles! Le calcul en cil ailé à faire; qu’on pelé un de¬ mi-gros de cochenille, & on trouvera dans ce demi-gros O iij 1 ID MEMOIRES POUR L’HiSTOIRE environ 255 infeéles, clans le gros 5 10 grains, & 4.080 dans l’once; par conféquent dans une livre de leize on¬ ces il y en a 6 5280. Il ne relie plus qu’a multiplier huit ou neuf cens mille par 65280, & on aura le nombre des in¬ fectes lecs qui lont apportes chaque année en Europe. M. de Neufville 11’a pas oublié dans là dilfertation, de remarquer une propriété de la cochenille, qui doit pa- roitre finguliére aux Phyficicns, & qui cil bien impor¬ tante aux négocians, c’ell que la cochenille, pendant quelque temps quelle loit gardée, ne lé corrompt pas; que quelque vieille qu’elle loit, elle eh tout aufli bonne pour la teinture, que la plus récente. Il en a envoyé à M. du Fay.qüi n’étoit aucunement altérée, & qu’on lui avoit alluré être reliée dans des magalms depuis plus de cent trente ans. Un lait duquel on peut moins douter, & propre à prouver que le précédent n’a rien d’impolhble; c’ch que M. Marchand m’a fait voir delà cochenille qui avoit été mile dans un poudrier par feu M. Ion pere il y a plus de foixante ans, & qui étoit aulfr faine que quand elle y avoit été renfermée. Ceux qui aiment les infeétes ,&qui le font un plaifir de lesconlérver lecs, nefçavcnt que trop com¬ bien il ell difficile d’y parvenir: des infeélesvivansdeplu- fieurs efpeces s’introduifent dans les endroits où 1 on a renfermé les morts; ils aiment à s’en nourrir, ils les ha¬ chent & les dépiécent; ils n’en épargnent aucune el'pece, fi ce n’ch peut-être la cochenille. Lne preuve que ces infeéles ne l’aiment point, c’eh que parmi les grains de cochenille de M. Marchand, je trouvai la dépouille d’un infeéle mangeur de cadavres d’inleéles , & cependant tous les grains étoient rehés entiers. Ell-ceque la coche¬ nille feroit par fà nature un mets dégoûtant pour ces in¬ fectes! ou ne feroit-ce point parce qu’en la faifant pé¬ rir, on la defléche plus qu’on 11c delféche les inledles des Insectes. IL Mcm. 111 qu’on veut conferver fecs! Cependant à Ja longue la cochenille doit être un peu ramollie par l’humidité ; elie cfî naturellement charnue ; Tes chairs ne redeviennent- elles pas moins dures que ne le font les parties carti- Jagineufes des infectes defféchés, lefquelies parties ne font pourtant pas capables de tenir contre les dents des i nie êtes mangeurs. Je nefçais fi le kermès n’a pas auffi la propriété de fc conferver; j’en ai dans des poudriers où il eit depuis bien des années, & il y cft dans le meme état où il étoit lorlqu’on l’y a mis. Au lieu que la cochenille aime les pays chauds, il nous reftc à parler d’un infeéte qui femble aimer les climats froids, qui les préféré même aux tempérés,& qu’on em- pioyoit autrefois pour teindre en rouge. Il a été, pour ainh dire, la cochenille du Nord; on y en faifoit des ré¬ coltes: mais ces récoltés moins abondantes, plus difficiles à faire que celles de la véritable cochenille, & qui don- noient une drogue moins bonne, ou au moins qui n’é- toit pas meilleure que la cochenitle, ont été abandon¬ nées. Cette drogue a été connue jufqucs ici fous le nom de coccus tindorius Polonicus, ou graine d’écarlate de Po¬ logne , parce que c’eft principalement dans ce Royaume qu’on prenoit le foin de la ramaffer. La Pologne n’exl pourtant pas le feul des pays du Nord où elle croiffe,& peut-être y en a-t-il dans des pays très-tempérés; mais elle pourroit être affez commune en quelques endroits, & y relier inconnue, parce qu’elle eft bien cachée, & qu'il n’y a que des hafards qui la puiffent faire découvrir mê¬ me à ceux qui la cherchent. C’efl fur les racines d’une plante qu’on trouve le coc- ens Polonicus, la graine d’écarlate, ou fi l’on veut, le ker¬ mès de Pologne. Lapiante fur laquelle on rencontre cette graine d’écarlate, au moins le plus fréquemment, eft le I i 2, MEMOIRES POUR L’HiSTOIRE golygonum cvcciferum Cajpari Bavluni, qu on croit être In même que I alchemïllagramineo folio, jiore majore hJmuiïo- tium Rei Herbariœ, de M. de Tourfiefort ,jv.g. joô. Di\ ers Auteurs prétendent que la même ou une lemblable graine d’écarlate croît fur les racines de plulieurs autres plantes, comme lur celle de la piloielle,dei’herniaire, de la pimpe- nelle & de la pariétaire. On ahure que ce n’efl que dans des terreins fablonneüx & arides qu’on la trouve lur les racines des plantes qui lui font propres. M. Brevniusa fait imprimer en 1731. à Dantzick, des oblervations curieu- fès fur cette graine décarlate, qui prouvent incontefla- blement quelle eft un inlêéle, & qui me donnent lieu de croire qu’il appartient à la clafïe des progallinlcétcs. M. Breynius n’a cependant pu voir ni tout ce que noi s euffions fouhaité qu’il eut vu, ni tout ce qu’il eut louhaité lui-même de voir; ce qui n’arrive que trop fouvent aux meilleurs obfervateurs, qui ne (ont pas toûjours maîtres de faifir ou de faire martre les oCcafions favorables auxob- r ■ 1 fervations. Pour moi je neiùis encore parvenu à trouver aucune graine d’écarlate attachée aux racines des plantes de ce pays; tout ce que je dirai de celle de Pologne ne fera donc que d’après M. Br ynius, parce que perfonne ne l’a auffi bien examinée (ju if l’a fait, & que perfonne ne nous a appris autant de faits fur ce qui la regardé. Il l’appelle cocais radïcùm, kermès des racines , ce qui la dis¬ tingue très-bien du kermès ou cotais dont nous avons parlé dans le Mémoire précèdent, qui vient fur les tiges ou fur les branches des arbres. Vers la fin de Juin on trouve la graine d’écarlate en état d’être ramaffée, & c’cff auffi le temps où on la dé¬ tache des racines de la plante. Chaque grain cfl alors à peu près fphérique & d’une couleur île pourpre violet. Ces uns ne font pas plus gros que les graines de pavot, év les des Insectes. II. Mem : 113 & les autres font aulfi gros que des grains de poivre. Chacun eh logé en partie dans une efpeee de coupe ou de calice, comme un gland l’ch dans le Tien; plus de la moitié de la furface extérieure du grain eh recouverte par le calice. Le dehors de cette enveloppe eh raboteux & d’un brun noir, mais Ton intérieur eh poli. Il y a telle plante fur laquelle on ne trouve qu’un ou deux de ces grains, & on en trouve plus de quarante fur d’autres. Les grains font quelquefois attachés près de l’origine des tiges de la plante. C’eh fur ces grains, ou plutôt fur les infeéïes conte¬ nus à moitié dans des efpeces de coques , que M. Brey- nius commença fes oblèrvations. Il en mit plufieurs dans des vafes de verre, & il dit que vers le 2q. Juillet, il fortit de chaque grain un ver à fix jambes qui portoit fur fa tête deux antennes. II garda plulieurs de ces vers quatorze jours & plus, pendant lefquels ils ne lui paru¬ rent pas avoir befoin de prendredesalimcns,au moins s’en palïerent-ils. Ils fe donnèrent cependant des mouvc- mens, ils marchèrent en différentes circonhances; enfuite ils devinrent plus tranquilles, ils commencèrent àfe rac¬ courcir, & enfin ils cefferent ablolument de marcher. Avant ce temps de repos ils donnoient diverfes contor- fions à leur corps, qui étoit couleur de pourpre. Quand ils furent devenus immobiles, leur corps fe couvrit d’un duvet extrêmement fin & blanc. Ce duvet leur forme à chacun une efpeee de toit qui a tantôt une figure fphé- rique , tantôt une figure irrégulière qui ne laiffe pas d’être élégante. M. Breynius penfe que ce duvet exude de leur corps, que leur corps fleurit en quelque forte, ce qui eh très-vraifemblable, par l’analogie qui fcmble être en¬ tre ce duvet & la matière cotonnculè de plufieurs autres infeéïes dont nous avons parlé ailleurs. En un mot ce Tome IV .P S, 9 > i * >& iz, Î 14 MEMOIRES POUR L’HlSTOIRE duvet reflemble à celui que nous font voir diverfes efpe- ccs de gallinfeétes, & les progallinfeétes de forme. Les vers relièrent ainfi en repos & couverts de duvet pendant cinq à fix jours, après iefquels chacun d’eux pondit cent cinquante œufs 6c plus. Ces œufs étoient attachés au papier fur lequel M. Breynius avoit pôle les vers, & embarraffés en partie dans le duvet. Audi le prin¬ cipal ufage de ce duvet femble devoir être d’envelopper les œufs ; il paroît être le même que celui de ce duvet, ou de cette matière cotonnade, dont le ventre de quel- * Mem. 1. dues efp eces de gallinlècfles fournit une fi grande quan- pT. 6. fig. 5, tité pendant le temps de leur ponte *. Enfin les vers de M. Breynius périrent quand ils eu¬ rent fait leur ponte. Le 24. Août il fortit de chaque œuf un petit infeéle, qui, à la vûë fimple, ne paroidoit qu’un petit.point oblong, rouge & opaque,qui le mou- voit. Ils vécurent près de quatre femaines, quoique M. Breynius les eût lailfé pendant tout ce temps fans leur donner de nourriture. M. Breynius , plutôt entraîné par l’autorité de M. Cedoni, que convaincu par fes raifons, ainfi qu'il a pris foin d’en avertir dans la fuite, parle dans la Diderta¬ lion dont nous donnons l’extrait, de la génération de ces infeéles, comme M. Cedoni avoit parlé de celle des gallinfeéles. Il les donne comme capables de mettre au jour des œufs féconds, fans avoir été rendus tels par au¬ cun accouplement. Mais c’ed un fentiment qu’il aban¬ donna l’année fuivante, après avoir fait des obfervations plus exaéles que les premières; elles lui ont fourni un ex¬ cellent fupplément à fa didertation, à la liiite de laquelle *ASlaphy- j| j’ a j m p r j mer dans J cs aéles des curieux de la natu- Jico-mecJ/ca , * T , f . . , *713- P a g- te *. Il avoit vu ci-devant de tres-petites mouches a pmdÏL 1 Ap ‘ deux ai ^ es blanches ,& bordées de rouge, fortir de plufieurs des Insectes. II. Menu 11 j graines decarlate ; des mouches Ton femblables à celles que nous avons prouvé être les mâles des gallinfeéïes des pêchers. Il les avoit prifes pour des mouches ichneu- mons , pour des mouches dans lefquelles Te transfor- moient des vers qui avoient vécu dans l’intérieur de cha¬ cun de ces infeéles, qui fembloit un grain rond. Nous avons dit qu’il y a de ces grains de deux fortes de grofi- feur : les uns ne l'ont pas plus gros que des graines de pa¬ vot ou de millet, & les autres font auffi gros que des grains de poivre. Il remarqua qu’à la fin de Juin il for- toit un ver de chacun des plus petits grains, de ceux qui n’étoient pas plus gros que des graines de pavot ou de millet; que ce ver étoit immobile au commencement de Juillet; que les uns devenoient couverts de duvet, & qu’il n’en paroiffoit point fur d’autres ; mais que tous quittaient une dépouille pour fe transformer en une nymphe qui refloit immobile jufques vers la mi-Juillet: qu’alors cette nymphe devenoit une de ces petites mouches à deux ailes blanches, dont il a été fait mention ci-deffus. Mais il obferva que les infeéles qui égaloient en grofieur des grains de poivre, ne fubifïoient point une femblable métamorphofe, qu’aucun d’eux ne fe transformoit en mouche. Les gros grains ou les gros infeéles font des fe¬ melles femblables à celles de nos gallinlêéles, fur lefquel- les M. Breynius vit enfin monter, marcher & s’arrêter les petites mouches; il vit que ces mouches joignoient leur derrière à celui des gros infeéles. Enfin il femble que ces petites mouches lui ayent fait voir tout ce que nous ont montré les mouches mâles des gallinfeéïes. Une obfervation qu’ajoute enfuite M. r Breynius, achevé de prouver démonflrativement que ces petites mouches fécondent les infeéles qui, par rapport à elles, peuvent être appellés de gros infeéles ; c’eft que ceux de Pij 116 Mémoires pour l’Histoire ces derniers qui avoient parte un ou deux jours avec de pe¬ tites mouches, fe couvraient bientôt de duvet, & failoient des œufs au bout de peu de jours; au lieu que ceux qui n avoient pu avoir de commerce avec les mouches, rertoient prefquc nuds, ou s’ils prenoient un peu de du¬ vet, ils ne parvenoient point à pondre. On n aurait pas cfpcré d’avoir une preuve aufli forte que celle-ci, ni d’avoir une preuve de cette efpece; car quoique l’ac¬ couplement l'oit néceffaire pour féconder les œufs, les infeétes qui ne le font point accouplés ne lailfent pas de pondre; tout ce qui en arrive ordinairement, lorfque l’accouplement a manqué, c’eft que les œufs font llériles. M. Frifch, qui communique au public les obfcrva- tions qu’il fait avec foin fur les infeéles des environs de Berlin , mais dont ne peuvent profiter ceux qui, comme moi, ignorent la langue Allemande dans laquelle elles font écrites, en avoit donné fur la graine d’écarlate des racines, avant que la dirtertation de M. Breynius qui en traite, eût paru au jour, comme cette meme dilferta- tion nous l’apprend. Elle nous apprend encore que M. Frifch a cru que la graine d’écarlate des racines fe trans- formoit en mouche. Son aflcrtion peut avoir été trop générale, & M. Breynius eût eu raifon de la rejetter comme telle; mais elle efl vraye au moins par les propres obfervations de M. Breynius pour les petits grains, pour ceux qui font les mâles. Nous avons donc i’hirtoire de la graine d’écarlate de Pologne,ou , comme je l’appellerais volontiers, des pro- gallinfeéfes des racines, depuis le temps où elles paroif- fent fous la forme d’une boule logée en partie dans un calice, jufqu’au temps où elles font fécondées, jufqua celui où elles font leurs œufs, & enfin jufqua celui où les petits forcent des œufs. Il s’en faut donc peu que Jes des Insectes. II. Mem. 117 obfcrvations de M. Breynius ne nous donnent cette hilloire complctte. Je 11e fuis point inquiet de ce que deviennent les petits après leur naiiïànce; quoique M. Breynius leur falTe courir la campagne, comme M. rs Garidel & Emeric la font courir aux petits du kermès, il y a grande apparence que ces jeunes infeéles, com¬ me ceux des gallinfecles & des progai!infeéles, fe fixent peu de jours après être nés, fur quelque plante ; qu’ils s’y nourrirent, & qu’ils y croiffent. Mais ce qui refle à éclair¬ cir, c’eff comment ceux qui parviennent à la groffeur des grains de poivre, 1e transforment, ou femblent le trans¬ former en une boule logée en grande partie dans un ca¬ lice ; & s’il y a réellement une fécondé transformation, lorfquc i’infecle en boule & immobile devient par la fuite un i ni cèle long & qui marche. J’ai bien de la peine à croire que la première transformation, celle en boule, foit réelle, c’eft-à-dire, qu’elle ait quelque chofe d’analogue avec la transformation des chenilles en crifalides, ou avec la première transformation des vers qui doivent devenir des mouches à deux ailes femblables à celles de la viande, 6 c que j’appellerai dans la fuite transformation en coque ; d’au¬ tant que dans les transformations de ce dernier genre, qui nous font connues, l’inlèéle ne fort de fa coque qu’après avoir pris fa dernière forme, & qu’il n’en eflpas de même au moins des progallinfeéles des petits grains, de celles qui font les mâles, 6 c qui doivent palier à l’état de mou¬ ches. Maisj’aurois bien du penchant à croire que la mé- tamorphole de la progallinfeéle en grain rond, 11’efl qu’apparente, qu’il arrive à l’inlèéle de fe gonfler & de s’arrondir peu à peu, à mefure qu’il croît, comme il arrive à diverfes gallinfeéles, foit à celles qui prennent des figures de rein, foit à celles qui deviennent des fpheres ailes parfaites. Or je n’appelle point ce changement une P hj îlS MEMOIRES POUR L’HiSTOIRE métamorphofe, non parce qu’il s’elt fait peu à peu ,mais parce que f infeéte devenu lphérique, a toutes les parties qu’il avoit quand il étoit plus applati, & qu’il ne montre point de nouvelles parties qui le foient développées ; or dans les métamorpholès l’infeéte doit perdre des parties & en faire paroître de nouvelles. Tout ce que je con¬ çois donc , c’ell qu’en croiflant, la progallinfeéte s’ell arrondie, qu’elle a pris la figure d’un grain, & qu’alors fa tète & fes jambes fie trouvent cachées fous fon ven¬ tre , comme le font celles des gallinfeétes en boule. Voilà à quoi fe réduit peut-être la première métamorphofe. A l’égard de la fécondé, peut-être n’efi-elle qu’un fimple changement de peau; peut-être que lorfque la progali infeéte elt parvenue à une figure arrondie, elle ell prête à quitter fa dernière dépouille. C’ell; après ce dernier changement de peau , qu’elle paroît plus allongée, comme quelques chenilles même le paroif- fent alors. Bientôt après elle ert en état de fouffrir l’ac¬ couplement & de faire des œufs. Le calice dans lequel elt logée la progallinfeéte, avant que de quitter fa dé¬ pouille, ell probablement fait de la matière cotonneule qu’une partie du corps a lailfé tranfpirer. Je compare ce calice au nid de nos progaliinfeéles de forme. Si le calice elt graveleux, c’clt que placé où il cil, il n’efl guéres polfible qu’il ne le charge de petits grains de fable & de terre. Mais il y a toujours une circonltance par laquelle la progallinfeéte des racines diffère des gallinfeétes en forme de boule, & des progallinleétes de forme, c’elt qu’après avoir été ronde pendant quelque temps, elle redevient oblonguc. Du relie, tout ce que je viens de dire ne doit être pris que pour des conjeétures, de la vérité ou de la faulfeté defquclles nous ne pouvons être éclaircis que par des obferyateurs qui font dans les pays C des Insectes. IL Mem. 119 où croiflent les progallinfeéîes des racines; & c’eft de M. Breynius principalement, que nous pouvons efperer une connoiffance parfaite de i’hifloire d’un infeéîe fingu- lier, par rapport auquel il nous a déjà donné tant de eu- rieules oblervations. La differtation de M. Breynius efl accompagnée de figures faites avec foin, & que j’ai lieu de croire exaéles, mais je n’ai pas cru les devoir faire paroître ici, parce que les figures perdent toujours à être copiées ; il vaut mieux que ceux qui feront curieux de les voir, conful- tent celles qui font de la première main, que celles qu’une fécondé main pourroit avoir altérées. EX P LIC AT ION DES FIGURES DU SECOND MEMOIRE. Planche VII. L A Figure première efl celle d’une petite branche d’orme fur laquelle font attachées des progallin- feéles, dont chacune cft dans un nid cotonneux, g, g, g, marquent des endroits où font ces progallinfeéles. La Figure 2 repréfente une petite branche d’orme fourchuë,& bien peuplée de progallinfeéles,un peu plus groffes que celles de la figure précédente. //, une pro- gallinlèéte qui eflpofée dans la bifurcation de la branche. La Figure 3 fait voir une progallinfeéle groffie par le microfcope, telle que celle qui efl marquée //, fig. 2 ; ou uneprogallinlèéte qui a été tirée d’une bifurcation, ac eda le nid cotonneux dans lequel efl la progallinfeéle; ce nid ne laiffeà découvert que la partie fupérieuredu corps du petit animal, qui paroît ici en brun. La Figure 4. efl encore celle d’une progallinfeéle vue 120 MEMOIRES POUR L’HiSTOiRE au microfcope, mais d’une de celles marquée g, fig. i 6 c 2 , ou qui font hors des bifurcations. Le nid coton¬ neux de cette progallinfeéle efl encore marqué par les lettres a c e d a. La Figure 5 efl celle d’un nid cotonneux, duquel la pïogallinlèéle a été tirée, c’eft un nid vuide.mar¬ quent deux progallinfeéles nouvellement nées, qui font reliées dans le nid. Quelquefois le nid a un affez grand nombre de ces infeétes nouvellement nés. La Figure 6 repréfente la progallinfeéle tirée de fon nid, vûë au microfcope, & du côté du ventre. 1,1, i, i,i,ï, fes fix jambes, qui font courtes 6 c déliées par rapport au volume du corps, f, le fueçoir. Les anneaux du deffous du corps, font très-aifés à diftinguer les uns des autres. La Figure 7 Sc la fig. 8. montrent une jeune progal¬ linfeéle groffie au microfcope, 6 c vûë par-deffous, fig. 7, 6 c par-deffus, fig. 8. Alors les jambes font plus grandes proportionellement à la grandeur du corps, que dans la progallinfeéle de la fig. 6. prête à faire fes petits, a, a, les antennes. La Figure 9 efl celle d’une progallinfeéle groffie au microfcope, qui s’dt fixée dans une bifurcation, & qui n’efl pas encore dans l’âge où elles ont un nid coton¬ neux ; mais alors fon corps efl chargé de poils courts, très- preffés, & bien arrangés les uns auprès des autres. O11 ne trouve plus de ces poils aux progallinfeéles qui ont des nids, fig. 3 6 c 4. La Figure 10 représente une progallinfeéle, telle que celle de la figure 9. qui a été détachée de l’arbre,& qui, comme celle de la figure précédente, efl couverte de poils courts. U des Insectes. IL Menti 121 La Figure 1 i eft celle d’un grain de cochenille ordi¬ naire, vu au microfcope par-defius, ou du côté convexe, du côté du dos. Communément les grains ont une ligu¬ re moins régulière que celle-ci ; le contour n’ell pas fi arrondi, t, eft la partie antérieure du petit animal deftéché. a, là partie poltérieure, où il y a prefque toûjours ren¬ foncement , la concavité qui cft ici. La Figure 12 fait voir dans la grandeur naturelle le grain qui eft grofli dans la ligure 1 1, & le fait voir du même côté. La Figure 1 3 eft celle d’un fragment de grain de cochenille, vûdu côté du ventre; on l’a delhnc, parce que l’anus a y étoit très-diftincl. La Figure iq. montre du côté du ventre la même cochenille lèche, qui eft vûë du côté du dos, lig. 11,& de même groflie au microfcope. La Figure 1 5 repréfente une cochenille qui a été ren¬ flée par l’eau dans laquelle elle a trempé, vûë du côté du dos. e, e, deux petits grains qui peuvent être des relies d’antennes, ou les yeux du petit animal. La Figure 16 fait voir par-deflous & groflie au mi¬ crofcope, la cochenille qui eft vûë du côté du dos dans ïa figure précédente. On lui a donné fes trois paires de jambes, ïi,kk, 11 , quoiqu’il ne me foit jamais arrivé de les trouver toutes trois entières à la même cochenille. J’ai vû à quelques-unes la première ii, à d’autres latroifiéme U, & à d’autres feulement une des jambes kk. e, e, les petits grains qui peuvent être des yeux, ou des relies d’anten¬ nes. f, la trompe ou le fueçoir. La Figure 17 eft celle d’un petit embryon grolfi au Tome IV. J . Q 122 MEMOIRES POUR L’HlSTOIRE miçrofcope, quon a fait fortir d’une cochenille filvefire, gonflée par l’eau. La Figure 18, 6c la figure 19 repréfentent cet em¬ bryon encore plus groiTi. Dans la figure 18 il cil vû du côté du dos ; entre a b on diftinguoit des anneaux. Dans la figure 19 il cfl vû du côté du ventre, 6c j’ai cru y appercevoir des jambes, ii, kk, II; il m’a paru qu’il avoit de ce côté-là une figure afles léniblable à celle d’unç mynphe, oud une crdàlide. // Ù'tJc des Insectes. III. Mem. 123 ♦;* >> ♦> *;* *;* •> *;<• <• : •> * # <{. ♦>«> ■>$. .j. »j *j. *$< ç .j. vf- : .j, * »j..;. ,j. T RO 1 S I EM E Al E MO 1 RE. DE LA DISTRIBUTION GENERALE DES MOUCHES EN CLASSES, EN GENRES, ET EN ESPECES. D A ns le cours de cet ouvrage nous avons déjà parlé de bien des genres, & de bien des eipeces de mou¬ ches , fans avoir encore établi les premiers principes de J biftoire de ces infeétes. Nous nous fommcs trouvé dans un cas femblable à celui d’un hiftorien qui ayant eu à faire connoître un grand empire, n’auroit pufe difpcnfer de donner quelqu’idée des différons peuples qui y ont des relations, quoiqu’ils ne l'oient pas lous la dépen¬ dance. Quelqu’un qui décriroit l’état aéluei de l’empire Ottoman, feroit obligé de parler des différentes nations de l’Europe qui ont des Ambaffadeurs à la Porte, des Allemands, des Mofcovites, & des Perlans avec lefquels les Turcs font fouvent en guerre; il feroit mention des Caravannes qui vont tous les ans à la Mecque, & des Arabes qui les pillent. C’elt ainfi que l’hifloire générale des chenilles nous a conduit à faire connoître plufieurs efpeces de mouches qui font leurs mortelles ennemies : que Part avec lequel des chenilles affés petites appellées teignes, fçavent fe vêtir, & que la manière dont des chenilles encore plus petites fe logent dans l’épaiffeur des feuilles, nous ont engagé à faire connoître des in (cèles qui fe trans¬ forment en mouches. Mais à préfent c’eff l’hiffoire gé¬ nérale des mouches que nous allons entreprendre, ou dont nous allons au moins raficmbler les principaux Q ij Ï 24 MEMOIRES POUR L’HiSTOIRE matériaux. Elle elt une grande branche de I hiftoire géné¬ rale des infeéles. Le nombre des elpeces de mouches furpaffe peut-être beaucoup celui des tfpeccs de papil¬ lons; mais communément les elpeces de mouches lont plus petites : il y en a pourtant de très-grandes elpeces, entrautres quelques-unes de celles de ces mouches ap- *PI. lo.fig. peilées demoifelles * , dont le corps ch confidérablc- ment plus long que celui des plus gros papillons. Les * PI. s.fîg.4.. cigales * appartiennent à la dalle des mouches, & il y en a dont le corps furpalfe en grofleur celui de très-grands papillons. Mais la plupart des elpeces de mouches ont à peine la grandeur des papillons de la dalle moyenne; & l’on en voit une inlinité d’efpeces que leur petitefîe ne nous permettra jamais de bien connoître, ni de bien diltinguer les unes des autres. M l°T 1 Nous avons rendu raifon ailleurs * de l’ordre que nous avons fuivi en traitant des papillons & des chenilles, de ce qui nous avoit déterminé à remonter des chenilles aux papillons; nous avons averti dès lors que quand nous en ferions aux mouches , nous fuivrions un ordre contraire, que nous dépendrions des mouches aux infeéles, fous la forme defquels elles font nées & ont crû. La plupart des chenilles fe tiennent à portée de nos yeux, & nous invitent, pour ainfi dire, à les examiner; elles excitent notre curiofité pour le papillon qui eft h bien caché fous leurs enveloppes : au lieu que la plupart des infeéles, fous la forme defquels les mouches prennent leur accroilfe- • ment, fe tiennent dans des endroits où on 11e peut par¬ venir à les voir que quand on les y cherche. Les uns lont fous terre, d’autres dans les eaux, d’autres font cachés dans différentes matières fouvent très-dégoutantes. Lorf- que ces infeéles viennent fe préfenterà nous, ilsontpalfé à Ictat de mouches. Ces mouches fouvent finguliéres des Insectes. III . Man . 125 Î xar leur figure, par la firuélure Je leurs parties, ou par eur induftrie, nous rendent curieux de l'çavoir ce quelles ont été dans leurs premiers temps. Il en eft, au refie, des mouches comme des papillons, dès quelles parodient mouches elles n’ont plus à croître. Cette réglé efi générale pour les infeéles qui fie transfor¬ ment; je n’y fçais encore qu’une exception , qui n’efi pas même fournie par des animaux ailés, elle i’efi par les gre¬ nouilles. Après avoir rejetté les dépouilles qui les faifoient paroître des têtards, il peut leur refier encore à croître. Si j’infifie fur ce que les mouches font aufii grandes qu’el¬ les le peuvent devenir dès qu’elles paroifient mouches, c’efi que j’ai connu bien des gens, des fçavans même, mais en d’autres genres qu’en hiftoire naturelle, qui croyoient que lespetites mouches qu’ils voyoient au prin¬ temps , dévoient être de grandes mouches en été. Le caraélére des mouches le plus aifé pour les faire difiinguer de quantité d’efpeces d’infeéles ailés, efi d’avoir des ailes tranfparentes qui femblent être de gaze, & fur lefquelles il n’y a point de ces jolies poufiiéres que laifient les ailes des papillons fur les doigts qui les ont touchés; & enfin d’avoir des ailes qui ne font cachées fous aucune enveloppe. On ne confondra point les mouches avec les papillons, dès qu’on fçaura que tout infeéle qui n’a point de poufiîére fur les ailes, n’efi pas un papillon ; & on ne prendra pas des fcarabès, des fauterelles, & quantité d’autres infeéles ailés pour des mouches, quand on fe fouviendra que les infeéles qui ont leurs véritables ailes cachées fous des fourreaux, ne font point des mouches; que les ailes des mouches n’ont point de couverture par¬ ticulière, & quelles peuvent feulement s’en fervir quel¬ quefois les unes aux autres. Les mouches ont une tête, un corcelet * 6c un corps *. Qüj I & 2. c. * lu * PI. 8. fig. 3. U. * PI. I II fig. 8 . * iit 1 26 MEMOIRES POUR L’HiSTOIRE Je continue de nommer corcelet ia partie analogue à celle des papillons à laquelle j’ai donné le même nom , à celle qui eft placée comme notre poitrine. Mais j’ai évité de lui donner le nom de poitrine, par lequel divers Auteurs l’ont défignée, parce qu’il porteroit à faire entendre que c’eft là que font lespoulmons,&que les trachées y l'ont raf- femblées,au lieu queces dernières font diftribuées par tout le corps. C’eft au corcelet que les ailes font attachées. J’ai déterminé pour le corps * cette partie dans laquelle font contenus les inteftins, l’eftomach, les parties de la génération, & le plus grand nombre des trachées. La tête des mouches tient ordinairement au corcelet par un col afles court, & fur lequel elle peut fouvent tour¬ ner comme fur un pivot. Il y a des mouches qui ont comme deux corcelets * féparés l’un de l’autre; le pre¬ mier * eft le plus petit, & c’cft au fécond que les ailes tiennent. Le corcelet eft la partie la plus arrondie, tou¬ jours la plus forte, & fouvent la plus épailfe, quoiqu'elle foit quelquefois moins large que le corps. Les formi- ca-leo & quelques teignes aquatiques fe transforment en des mouches qui ont, pour ainfi dire, un double cor¬ celet , ou un corcelet divifé en deux. Les mouches 11’ont point encore été mifes en ordre; on n’a pas encore cherché à nous donner des caraéïéres commodes pour les diftribuer en claffes, en genres & en c(]>eces; ce n’eft qu’après les avoir bien étudiées qu’on pouvoit y rétiffir : après même les avoir étudiées, on a pû être effrayé par les variétés quelles offrent, & encore plus par les reffemblanccsqui fc trouvent entre des mou¬ ches qui différent non feulement en efpcce, mais quel¬ quefois en genre & en claffe. Souvent notre imagina¬ tion nous fert mal, lorfqu’elle nous préfente beaucoup d’objets à la fois; elle nous étonne, elle nous fait croire des Insectes. 111 . Mem. 127 qu’il y a une forte d’immenfité clans un nombre d’objets quelle ne l'uffit qu a nous repréfenter confufément. Mais vient on à confidérer par parties le tout qu’on avoit mal vû, ce tout ceffe de paroître inépuilàble, 6c on lepuile. Quelque prodigieux que femble au premier coup d’œil le nombre des efpeces des mouches, dès qu’on fixera fon attention à examiner les particularités propres feule¬ ment à un nombre d’efpeces ,on remarquera des caractè¬ res communs, les uns à plus, les autres à moins d’efpe¬ ces; en un mot on trouvera des caractères propres à di- ftinguer les clafTes, les genres, 6c les efpeces les unes des autres. Ce qui fe préfente de plus fenfible 6c de plus aifé à faifir dans les différentes mouches qu’on obferve,c’efî que les unes n’ont que deux ailes, & que les autres en ont quatre : de-là naît un partage fi fimple & fi commode, qu’on doit être furpris que la plûpart des naturaliftes qui nous ont parlé des mouches, comme Aldrovande, n’y ayent point eu d’égard; qu’ils ayent mis pêle-mêle des mouches à quatre ailes,6c des mouches à deux ailes; 6c qu’ils ayent fouvent négligé de nous avertir du nombre des ailes de la mouche qu’ils vouloient faire connoître. Kay cft pour¬ tant bien éloigné de mériter ce reproche. Nous devons donc commencer par divifer les mouches en deux clafTes générales, dont l’une feracompofée des mouches à deux ailes, 6c l’autre le fera des mouches à quatre ailes. Nous devons paffer enfuite aux caractères propres à faire diftinguer les différentes clafTes, les différens genres, & les différentes efpeces de mouches à deux ailes, 6c de même les caractères propres à faire diflinguer les unes des autres les mouches à quatre ailes. Mais comme entre ces caractères plufieurs de ceux qui peuvent être em¬ ployés pour les mouches à deux ailes, le peuvent être * PI. 8. fi, II. & 2. t. $ Fig. j.4 * Fig. J. 128 MEMOIRES POUR L’HiSTOiRE pour les mouches à quatre ailes, & que réciproquement plufieurs de ceux qui conviennent aux mouches à quatre ailes, conviennent à celles qui n’en ont que deux; nous donnerons en général les caraéléres qui peuvent fervir pour ranger les mouches en clafTes, en genres & en elpe- ces. Le même caraétére pouvant quelquefois fervir à dé¬ terminer une claffe de mouches a deux ailes, & une de mouches à quatre ailes, il fera alors employé pour déter¬ miner deux clalfes à la fois, une de chacune de ces fortes de mouches. Quand un caraétére ne fe trouvera que dans les mouches à deux ailes, ou que dans les mouches à quatre ailes, il 11e fervira que pour les unes ou pour les autres de ces mouches. Ordinairement un examen affés greffier fuffit pour faire reconnoître le nombre des ailes ; fi 011 vient en- fuite à confrdérer les mouches avec quelque attention, û on oblérve l’organe au moyen duquel elles prennent des alimcns, on remarquera que les unes peuvent por¬ ter le bout de cet organe à une affés grande diftancc 2 * de leur tête *; que cet organe qui eft plié ou raccourci, ou contourné, ou couché, lorfqu’il eft dans l inaétion, fe déplie, s’allonge, fe redreffe, ou s’élève lorfque la mouche en veut faire ufage; cet organe eft ce que nous appelions une trompe. Il y a d’autres mouches auxquel¬ les on ne trouvera point de trompe , elles n’ont qu’une '!• ouverture entourée de levres * & de quelques autres par¬ ties ; une ouverture que fa pofition, le peu quelle peut s’éloigner de la tête, & fes efpeces de levres nous dé¬ terminent à appellcr une bouche. Il y a de ces bou¬ ches autour defquellei; ; & dans lefquellcs on 11’ap- perçoit aucun corps dur analogue aux dents *. Mais d’autres mouches ont, comme les chenilles, des dents, des mâchoires, ou ferres mobiles placées en dehors de la des Insectes. III. Mem. 129 île la bouche * , avec lefquelles elles hachent les feuilles, *pi. 8. fîg. les fruits, les chairs, pour les réduire à un volume pro- d>d% portionné à celui de la. cavité où elles doivent entrer. Enfin on remarquera encore des ferres femblables ai* précédentes, qui ont efié accordées à des mouches à trompe *, & qui font placées au-deffus de la trompe. Leur ufiige, comme celui des ferres des mouches à bou- *Fig che, eft bien de hacher des feuilles éc différais corps; mais c’eft pour une fin différente, ce n’efi pas ordinaire¬ ment pour rendre les parcelles de ces corps propres à paffer dans la trompe. Ces obfervations nous fourniffent des caractères bien marqués de quatre claffes de mouches,fubordonnées aux deux générales. La première claffe comprendra les mou¬ ches qui ont une trompe, & qui n’ont point de dents ou de ferres *. * Fig.i, 3 & La fécondé claffe fera compofée des mouches qui 4 - u ont une bouche * fans dents fenfibles. * Fig. 5&6. 11 La troifiéme claffe raffemblera les mouches qui ont une bouche * munie de dents *. Enfin nous rangerons dans la quatrième claffe les mouches qui ont une trompe * & des dents *. Entre les mouches qui ont une bouche & des dents, il y en a qui n’ont pas feulement des dents en dehors de la bouche, elles en ont même en dedans. Ces mouches pourroient être placées dans une cinquième claffe; mais ce feroit prefque tirer des caractères des parties intérieures, 6c il ne convient pas d’y avoir recours, lorfque les par¬ ties extérieures nous en fourniffent fuffifamment. Car ces mouches qui ont des dents dans la bouche, ont affés de quoi fe faire diftinguer des autres par leur extérieur. Tous les genres de mouches à deux ailes que j’ai obier- \ées jufqu’ici (& j’en ai obfervé beaucoup) appartiennent Tome IV. . R * Fig. 8./-.' *d,d. * Fig. 7. r, *d,d, I}0 MEMOIRES POUR l’HîSTOIRE à la première ou à la fécondé des deux claffes que je viens de déterminer ; je n’en ai encore trouvé aucun genre qui eût les caraéléres des deux autres clalfes. Les vroffes mouches bleues des vers de la viande, par exem¬ ple , toutes ces petites mouches qui nous inquiètent dans nos appartenons, & les couhns ont des trompes fans avoir de dents, & font de la première claffe. Cer¬ taines mouches qui paroilfent des premières au prin¬ temps dans nos jardins , qu’on appelle des mouches * PI.8.fî?. de Saint Marc, & dont nous parlerons ailleurs plus au $• long , ont une bouche * fins dents. On trouve de *Fig. 6 . 11 . même une bouche *, & point de dents à d’autres mou- * Pi. xi. %. c j îes * a fles lèmblables par leur forme aux coufins, mais fouvent beaucoup plus grandes. Ces dernières mou¬ ches font donc de la fécondé clalfe de celles à deux ailes. Cependant, quoique je n’aye point encore Vu de mouches à deux ailes qui ayent foit une bouche, l'oit une trompe accompagnée de dents, je me hâterois affû- rément trop, fi j’en concluois qu’il n’y a point de telles mouches dans la nature ; fi on en découvre qui ayent l’un ou l’autre de ces caraéléres, on fçaura où elles doivent être placées. Les mouches à quatre ailes nous fournilïènt au con¬ traire beaucoup de genres pour remplir les deux claffes que les mouches à deux ailes laiffent vuides. Pour nous borner à un petit nombre d’exemples, toutes les efpeces *PI. d’abeilles ont une trompe & deux dents au-deffus de la 7- trompe. * Toutes les efpeces de guêpes ont une bouche * F ou au moins elles n’y font pas plus déliées. 2. 0 Les mouches de quelques autres genres ont des antennes compofécs, comme les précédentes, d’une fuite de vertèbres, mais qui deviennent de plus groffes en plus groffes à rnefure qu’elles s’éloignent de la tète. Ces an- * PL 9. fig. tennes * ont une forme femblable à celles de certains 3 ‘ papillons diurnes, que nous avons appcilé des anten- *PI. u.g*, nés en maffuë. La mouche du formica-leo * a de ces fortes d’antennes qui font diftinguer le genre auquel elle appartient, du genre des mouches des lions mangeurs de pucerons; ces dernières ont le même port d’ailes que l’autre, mais leurs antennes font à filets grainés. 3. 0 Nous avons admiré dans les papillons ces antennes que nous avons nommées à barbes de plumes; plufieurs cfpeces de très-petites mouches comme les confins, & *Pi. 9. fig. certaines tipules ont de ces fortes d’antennes qui leur 4; &9. font d’admirables panaches *. des Insectes. III. Mem. 139 4. 0 Faute de fçavoir un meilleur nom , nous avons donné celui d’antennes prifmatiques à des antennes arti¬ culées des papillons, qui, à leur origine & près de leur bout, font plus déliées que dans tout le relie de leur étendue. Nous avons dans les mouches, des antennes ana¬ logues à celles-là, quoiqu’elles ayent des formes diffé¬ rentes. Une mouche tipule qui vient d’un ver qui vit des agarics du chêne,nous donnera un exemple de cette forte d’antennes *; celles de cette mouche pourraient être * PI. 9.Gg. appellées des antennes en râpe. I0 ’ y.° Quelques mouches ont des antennes branchuës *, *Fig.6.&r. ou fourchues, des antennes compofées de deux pièces articulées, des antennes dont chacune paraît double. Les papillons ne nous ont point encore donné d’exemples de ces fortes d’antennes. 6.° Un autre genre d’antennes encore dont les papil¬ lons ne m’ont point fourni d’exemples, de que je n’ai pas trouvées même parmi les mouches à quatre aîles, ell propre à beaucoup de genres de mouches à deux aîles ; ce l'ont des antennes extrêmement courtes, mais grades par rapport à leur longueur. Elles n’ont que deux ou trois articulations; deux ou trois grains pôles i’un fur l’autre forment un pied, un fupport à un grain d’un volume plus confidérable par lequel l’antenne elt termi¬ née. Ce dernier grain a fouvent la figure d’une petite palette, d’une lentille, ce qui nous détermine à donner en général à ces lortes d’antennes le nom d'antennes à palettes. La petite palette * eft par quelqu’endroit de fes bords en- * Fig. ij. châlfée dans le derniergrain du pied qui eft fendu pour la re- & 1 cevoir. Le petit corps qui termine ces fortes d’antennes, n’a pourtant pas toujours la forme de lentille; dans quelques- unes il ferait une lentille trop allongée *, une lentille *Fig. 17. plus qu’elliptique. II a même dans beaucoup d’autres la Si] *PI. 9 .f 13 & 14.. * Fig. 1 * Fig. 1 * Fig. I * Fig. 1 '>• 46 . p . ? Fig. 140 MEMOIRES POUR L’HiSTOIRE ,g> figure d’un prifme *. Dans d’autres le dernier grain eft 8> femblable à ceux qui precedent *. Ces variétés que nous offrent les antennes à palettes, 6c qui, pour être bien fenfibles, demandent qu’on fe ferve de la loupe, nous mettent en état de connoître que des mouches affés femblables au premier coup d’œil, font néantmoins de genres différens. La loupe fait encore voir que chaque palette, ou chaque petit corps qui termine une de ces T fortes d’antennes, a un grand poil * :ce poil, fouvent fi 4- branchu qu’il paroît une petite antenne à barbes, part du bord de la palette, 6c ordinairement de fon côté exté¬ rieur. Mais ce poil part du bout fupérieur du petit grain qui a une figure femblable à celle des grains de la tige *, comme on peut le voir dans cette mouche à deux ailes , qui reffemble à la mouche feorpion ; ce poil y eft fimple. Le poil de la palette de certaines mouches de vers à queue de rat, elt fimple de même. Les mouches qui nous incommodent dans nos appartemens, ont leur palette Lite en prifme, 6c un poil très-branchu fort de leur bafe. Le poil de la palette en forme de lentille eft & fouvent un poil fans barbes *. Enfin la lentille elle-même a quelquefois plufieurs articulations, 7. 0 Nous mettrons dans un feptiéme genre des anten- I9 ‘ nés * qui m’ont paru très-commodes pour faire diftin- guer de beaucoup d’autres mouches, les efpeccs de ces mouches à deux ailes qui aiment fur-tout à tirer le fang des bœufs, quoiqu’elles tirent auffi celui des che¬ vaux. Ces antennes tiennent quelque chofe de celles en palette, mais le corps qui les termine a une figure très-différente de celle du corps qui termine toutes les antennes à palettes que nous venons de décrire. 11 a quelque chofe de celle d’un croiffant ; de la bafe de cette efpece de croiffant part une branche plus courte, 6c qui. y des Insectes. III. Mem . 141 fcmble avoir été tronquée. Le bout du croiffant * ob- *ep. fervé avec une forte loupe, paroît articulé, au lieu que la plupart des palettes de forme foit lenticulaire, foit prifmatique, ne biffent appercevoir aucune apparence d’articulation. La grandeur des antennes peut aider auffi à faire re- connoitre certains genres rie mouches. La manière dont elles les portent y peut encore fervir. Les mouches ich- ncumons ont les leurs dans une agitation continuelle, elles leur font foire des efpeces de vibrations; auffi Jun- gius a-t-il donné à ces mouches les noms de vibrantes & de vibrions. Nous avons employé les trompes pour caractérifer deux claffes de mouches, nous en avons compofé une des mouches qui ont fimplement une trompe, & l’autre des mouches qui, outre une trompe, ont des dents ou ferres. Ces mêmes trompes peuvent nous fournir de plus * PI g fi(T# les caractères de bien des genres : les unes ont un four- 4- 1. reau * compofé d’une feule pièce *, les autres en ont un foit par la réunion de plufieurs pièces différentes : les unes ont des fourreaux comme écailleux, les autres en ont de charnus ; ceux de quelques-unes font terminés par * Fig. 1 .t. un empâtement charnu *, par des efpeces de groffes levres : ^ 6 em fi ' c , v ^ d’autres n’ont point de levres, ou au moins de levres fen- 5 .//. 0 Cibles ; d’autres trompes font faites comme une efpece de fufeau dont le bout feroit creux. Nous nous conten¬ tons actuellement d’indiquer ces variétés, dont on aura affés d’exemples dans le cours de cet ouvrage. Souvent il eft néceffaire de fe fervir de la loupe pour bien voir les différences qui font entre des trompes de même genre; mais comment fe difpenfer d’avoir recours à la loupe quand on veut connoître les parties d’animaux, dont le volume total eft fi peu confidérable! Nous remet- S üj *PI. 8. r. t. * Fig. * Mem. pl. 16. I j o & II. ^ Fig. 7 *PJ. 8. 4 * 142 MEMOIRES POUR L’HiSTOIRE tons donc à un autre temps, à expliquer mieux les flru- étures des différentes trompes, à décrire ce que quelques unes ne nous font voir que quand nous avons recours à des verres qui augmentent confidérablement les objets. Mais fans microfcope Si fans loupe, on peut voir dans les mouches de différais genres, trois manières diffé¬ rentes de porter leurs trompes,dans les temps où elles n’en font point ufige. Plufieurs elpeces de mouches ont une trompe * qu’elles raccourciffent quand elles 11e veu¬ lent pas s’en fervir ; elles la tiennent en devant de leur tête dans une cavité * deftinée à la recevoir. Dans quel¬ ques efpeces de mouches cette cavité n’eft qu’un fini pic enfoncement de la partie antérieure de la tête, mais dans d’autres mouches cette cavité eft mieux façonnée; le v. bout antérieur de la tête s’allonge pour lui former une elpece de voûte *. D’autres mouches ont des trompes * ’ { qui, pendant l’inaétion , font contournées, un peu rou¬ lées de haut en bas; c’eft ainfi que font difpoféesalors les trompes des abeilles & celles des bourdons. Enfin d’au¬ tres mouches en ont une * contenue en entier dans un étui où elle cil droite; elles 11e la contournent ni ne la plient, mais elles peuvent l’incliner différemment par rapport au plan fur lequel leurs jambes font pofées ; elles peuvent la rendre perpendiculaire à ce plan, Si l’y ren¬ dre parallèle, lorfqu’elles la couchent contre le deffous de leur corcclet, Si enfin elles peuvent la mettre dans toutes les pofitions moyennes entre les deux precedentes. Telles font les trompes non accompagnées de dents, des confins, des cigales, &c. Les formes & les proportions de la plupart des parties extérieures des mouches, nous fourniront encore de quoi nous mettre en état de difiinguer les uns des autres, des genres de ces infectes ailés. La figure tic la tête de des Insectes. III. Mem. 143 toutes les demoifelles, par exemple, n’eft pas la même : les unes ont une tête prefque ronde *, 6 c les autres ont une tête plus large que longue *,quia moins de diamè¬ tre du devant au derrière, que d’un côté à l’autre. Nous avons déjà parlé de certaines mouches qui ont un double corcelet. Ce n’eft pas feulement par les an¬ tennes que la mouche du formicaieo * diffère de celles des lions des pucerons. La première a deux corcelets, une paire de jambes * eft attachée au premier, 6 c ce premier eft capable de quelques mouvemens fur l’autre ; le cor¬ celet des mouches que nous venons d’oppofer à celle-ci, eft fimple. Le corcelet de quelques mouches s’élève beaucoup plus que celui des autres , 6 c s’élève fouvent à un tel point qu’il femble obliger la tête à fe recourber en bas,& ren¬ dre i’infeète boffu. Les confins & les tipules * ont ordi¬ nairement de ces corcelets relevés. Toutes les mouches n’ont que fix jambes, mais les propo'rtions de ces jambes à la grandeur du corps, ne lont pas toujours les mêmes ; les unes en ont de très- longues, 6 c les autres de courtes. Les coufins 6 c les tipu¬ les dont nous venons de parler, femblent montés fur des cchâffes. Mais ce qui mérite encore plus d’être remar¬ qué , c’eft que quoique les jambes foient pour l’ordinaire attachées au corcelet, il y a des efpeces de mouches qtii ont une de leurs paires de jambes attachée à un des an¬ neaux du corps. * Entre les mouches que la forme du corps fait placer dans la même claffe, on en trouvera dans chaque claffe qui ont entr’elles des différences même par rapport à la forme du corps, qui demanderont qu’elles foient mifes dans des genres différens. Nous avons déjà fait remar¬ quer que parmi les mouches à corps court ou ellipfoïde* * PI. io. fig; 4 * * PI. ii. fig. * Figure 8» * Figure j. * PI. ii, fig. 9. ii. * pr. r i I, 2 ,& 3 144 MEMOIRES POUR L’HiSTOIRE il y en a dont le corps efl très-mince', très-applati, tel eft celui des mouches des vers mangeurs de pucerons; Si que d’autres ont le bout du derrière recourbé en crochet. Le bout du corps efl communément moins gros que ce qui le précédé; cependant on trouve dans les nids des hi- . fig. rondelles une mouche déjà finguliére * par la forme de Tes ailes, dont le corps efl plus gros à fon bout que par-tout ailleurs, & qui clt échancré en cœur. Il y a des différen¬ ces analogues à celles que nous venons d’indiquer, entre les mouches de la claffe caraélériiée par le filet fenfible qui fait la jonélion du corps au corcelet; mais il feroit long & affés inutile de parcourir toutes les variétés de cette nature , que les mouches de ces deux dernières claffes peuvent nous offrir. La feule partie pofférieure peut nous aider à diflinguef les uns des autres bien des genres de mouches. Les mou¬ ches qui font armées de ces aiguillons dont nous redoutons les picquûres, n’ont que trop de quoi fe faire connoître. D’autres portent au derrière des inflrumens que' nous ferons d’autant plus difpofés à admirer, que nous 11’a- vons rien à en craindre. Ce ne font, à la vérité, que les fe¬ melles qui les ont : mais pour bien connoître un genre de mouches, il en faut connoître les femelles & les mâles. Quelques-uns de ces inflrumens font desefpecesde tarrie- rès logées dans un étui. Cet infiniment forme quelque¬ fois une longue queue à l’infeéle; il lui fert à percer,& à entailler les corps dans lefquels il veut dépofer les œufs. Plufieurs femelles ichneumons ont cette longue queue. Il y a des infeéles, comme la cigale, qui ont une forte & grande tarriere,qui cependant 11e leur fait pas une lon¬ gue queue; elle efl logée en partie fous leur ventre, ou dans leur ventre même. Ainfi certaines mouches doivent être appellécs des mouches à aiguillon, Si d’autres des mouches à tanière. Nous des Insectes. III. Mem. 145 Nous en devons appeller d’autres des mouches à fcie, & il y a beaucoup d’elpeces qui méritent ce nom, à caufe d’un infiniment fmgulier dont elles font pourvues, 6c quelles ne nous montrent gueres que quand on les y force en leur prefiant le corps : on fait fortir alors une fcie dont la firuéture l’emporte beaucoup fur la ftrudlure de celles que nous fçavons faire; 6c que la mouche met en atftion par le moyen de reflorts qu’on 11e fçauroit affés admirer. D’autres mouches portent au derrière de longs filets* * Pi. n.fig. qui par leur forme 6c par leur firuéture, ont quelque 9 refiemblance avec les antennes, 6c dont l’ufage ne nous efi pas mieux connu que celui des antennes. Ils n’en font pas moins propres à nous faire diftinguer ces fortes de mouches. Parmi les mouches à quatre ailes, les épheme- res ont de ces nous en avons gallinfedes. Communément les mouches font ovipares, mais il y en a des efpeces qui font vivipares. Celles qui mettent au jour des petits vivans, ne doivent pas être laiflees dans le genre des mouches, qui d’ailleurs leur font femblables, mais dont elles différent par la manière defe perpétuer. Enfin quand nous décrirons les induflries des diverfes efpeces de mouches, nous trouveronsdes mouches qui dif¬ férent de plufieurs autres dont elles ont affés l’extérieur,par des endroits plus propres à nous intéreffer,que ne font les figures de certaines parties, par des procédés ingénieux qu’on aime à apprendre, 6c qui refient bien mieux dans notre fouvenir que les particularités de toute autre nature. Les mouches qui fçavent vivre en fociété, comme diver¬ fes efpeces d’abeilles, de bourdons 6c de guêpes, ne doi¬ vent pas refler confondues avec celles qui vivent folitai- Tome IV , T filets, 6c parmi les mouches a deux ailes déjà vu à celles * qui font les mâles des * Mem.n P l. 14 6 MEMOIRES POUR L’HlSTOIRE res. Mais plufieurs efpeces de mouches folitaircs, plufieurs crpcces d’abeilles, de bourdons Sc de guêpes, pourront être Caractérifées par des procédés qui ne nous paroî- tront jDas moins admirables que ceux des mouches répu¬ blicaines. Les parties extérieures des mouches nous fourniront encore beaucoup de caractères dont nous n’avons rien dit, quoiqu’ils prudent donner des genres; mais ce font des caractères dont nous avons cru devoir différer de parler, jufqu’à ce que nous faffions connoitre les mou¬ ches à qui ils font propres : alors nous en donnerons aifé- ment des idées claires, & pour donner à préfent ces idées, il nous faudrait remonter trop haut. Voilà de quoi didinguer bien des genres de mouches, auffi y en a-1-il tant que le grand nombre de marques diftinctives que nous avons indiquées, fuffira à peine à mettre en état de ne les pas confondre les unes avec les autres. Les efpeces de chaque genre ne doivent avoir entr’eües que des différences plus légères, moins efïcn- tielles que celles qui font entre les genres; telles feront auffi pour les efpeces des différences de grandeur. On trouve, par exemple, des mouches bleues beaucoup plus petites que celles que nous voyons fouventfur la viande, Sc qui ont les mêmes caractères , elles font auffi une ' efpece du même genre. De même, des différencesprifes des couleurs,& de quelques variétés peu effenticlles dans ia forme des parties, ferviront à diftinguer les efpeces. * pi. 8 . %. Certaines efpeces de mouches * font auffi velues que les • chenilles qui le font le plus : d’autres ne font que demi- veluës ; d’autres font prefque rafes Sc luifantes; d’autres n’ont que le corps ou le corcclct de velu. On trouve, par exemple, des efpeces de bourdons entièrement velus, dont tous les anneaux font cachés par les poils, Sc on en des Insectes. III. Mem . 147 trouve d’autres dont tous les anneaux font à découvert. Au relie, nous nous Tommes contentés d’indiquer les caractères qui peuvent aider à diftribuer les mouches en clafles, en genres & en efpeces; nous n’avons pas cru devoir nous arrêter à faire paraître toutes les mouches en ordre; ce ferait un long ouvrage, même en fe bor¬ nant à celles des environs de Paris. Ce feroit même un ouvrage dont on aurait raifon de ne pas tenir grand compte, malgré ce qu’il aurait coûté. Nous 11e nous fommes pas même embarraffés de mettre les genres en ordre jufqu’à un certain point, je veux dire que nous avons placé les premiers des genres, auxquels d’autres n’auroient peut-être accordé que les fécondés ou les troi- fiémes places. Ce que nous nous fommes propofé, 6 c ce que nous avons cru nous devoir propofer unique¬ ment , c’elt que malgré la confufion, &. le cahos où font reliées jufqu’ici toutes les mouches, on puilfe, lorfqu’on en trouvera dans la campagne, fçavoir fur le champ à quelle dalle elles appartiennent; & par quels caraéléres leur genre doit être diftingué des autres genres de la même clalfe ; & qu’on foit même en état de 11e pas con¬ fondre leur elpece avec les autres eljpeces de même genre. Montrons par quelques exemples, l’ufage qu’on peut faire de tout ce que nous avons dit jufqu’ici. Ma curiofité me détermine à prendre une mouche que je vois pofée fur une fleur; dès que je la tiens, je reconnois bientôt fi elle a quatre ailes, ou fi elle n’en a que deux, & par conféquent dans laquelle des deux clalfes générales elle doit être placée. Suppofons qu’elle appartienne à celle des mouches à deux ailes : la forme de fon corps m’a frappé, même avant que je me fuffe affûté du nombre des ailes; elle m’apprend dans laquelle des trois claffes fecondaires 6 c déterminées par la figure Tij 14-8 MEMOIRES POUR L’HiSTOÏRE tl li corps, la mouche doit être mile. Je vois quelle eft de la première des clartés fecondaires, rt le corps eft court & elliploïde, fcmblable ci celui des mouches de la viande. Je l’examine de plus près, je cherche à reconnoître li elle a une bouche ou une trompe, 6c enfuite fi elle a des dents ou fi elle n’en a pas. Je lui trouve une trompe, mais point de dents ou de ferres ; dès lors je fçais que ma mouche à deux ailes ert de la première des qua¬ tre clartés générales de ces mouches, de la clarté des mouches à trompe fans dents, 6c de la première des claf- fes fubordonnées à celle-ci, dans laquelle lont les mou¬ ches à corps court. Pour reconnoître fon genre, je me rappelle comment elle portoit fes ailes quand je l’ai prife; je me fouviens, par exemple, quelle les tenoitparallèles au plan depofition. Je confidere enfuite fes antennes, fi je les lui trouve à palettes en prifme, 6c que je ne lui apperçoive rien d’ailleurs de particulier, je fçais quelle eft du même genre que les groftes mouches bleues de la viande; mais qu’elle eft d’une efpece qui diffère de celle de ces dernières mouches, foit par la grandeur, foit par la couleur, foit par le velu, 6cc. Si malgré toutes les autres rertemblances je remarque que les antennes ne font pas à palettes en prifme, je donne cette mouche à un genre dif¬ férent de celui des mouches de la viande. Si j’ai vû que la mouche portoit fes ailes croifées fur fon corps, je la placerai dans un genre caradtérifé par cette forte de. croifement. Si la mouche à deux ailes que j’ai prife,a un corps< long qui approche de la forme d’un bâton , je fçais quelle appartient à la fécondé des clartés fecondaires. Je lui trouve une trompe 6c point de ferres; 6c de-là je vois encore qu’elle eft de la première clarté générale des mouches à deux ailes. Je l’eulfe mile dans la féconde de des Insectes. III. Mem. i49 ces clafles fi je lui eufle trouvé une bouche fans dents. La figure de fit trompe, letui dans lequel elle eft, fes antennes, la longueur de fes jambes, &c. me détermine¬ ront enfuite à la placer dans le genre des coufins, & d’autres petites variétés m’aideront à en déterminer i’eft pece. Des caradéres afles femblables à ceux des coufins trouvés à une mouche * à deux ailes, qui a une bouche fans ferres, m’apprendront qu’elle eft du genre des tipules. Si la mouche que j’ai prife, a quatre ailes & un corps court, dont le gros bout eft appliqué contre le corce- let, je la place fur le champ dans la première des claftes fecondaires des mouches à quatre ailes. Après l’avoir exa¬ minée je lui trouve une trompe & des dents ; je ftçais donc qu’elle appartient à la quatrième des quatre claftes géné¬ rales. U11 aiguillon avec lequel elle a tenté de me pic- quer, m’apprend de plus qu’elle eft d’un genre d’abeilles, ou d’un genre de bourdons; parce que les guêpes qui ont pareillement un aiguillon, n’ont point de trompe. Enfin les cara&éres qui feront établis ailleurs, m’appren¬ nent fi elle eft un bourdon ou une abeille ; & de petites variétés me mettent en état de fixer de quelle efpece elle eft du genre auquel j’ai jugé qu’elle étoit dûë. Au refte, on trouvera dans la même clafte, des genres qui s’éloignent plus, ou qui fe rapprochent plus de divers autres genres. Par exemple on y trouvera des genres qui différeront entr’eux parles antennes, par le port des ailes, & par du plus ou du moins dans la forme du corps. On y verra d’autres genres qui différeront par les antennes & le port des ailes feulement; d’autres qui ne différeront ou que par les antennes, ou que par le port des ailes, ou que par la forme du corps, ou celle de quelques autres parties. On employera d’une manière femblable toutes les, T iij * Pt. 1 r. fïg. 7 * 150 MEMOIRES POUR L’HiSTOIRE variétés que nous avons indiquées, & qui font prifesfoit des parties extérieures, foit de l’adreffe & du génie des mouches, pour fixer les genres & les efpeces, de manière à 11e pas courir rifque de les confondre les unes avec les autres ; & c’efi le principal objet que nous avons eu dans ce Mémoire. EXPL ÎCATION DES FIGURES DU TROISIEME MEMOIRE. Planche VIII. LA Figure première efi celle d’une groffe mouche bieuë de la viande repréfentée de grandeur naturelle, ayant la trompe t allongée. Cette trompe efi: de celles à levres charnues. O11 ne l’a pas fait voir ici en grand &. féparé¬ ment , parce qu’on n’a qu’à confulter les planches 16 & 1 7 pour s’inftruire de la figure & de la ftruclure des trompes de ce genre. La Figure 2 montre en grand & de côté la tète d’une mouche à trompe à levres, dont la trompe efi actuelle¬ ment raccourcie, & rentrée dans la cavité deftinée à la contenir, c de, les bords de la cavité. /, les levres de la trompe. La Figure 3 repréfente de grandeur naturelle une mouche jaunâtre du genre de celle que Moufet a fait graver , & qu’il nomme mouche loup ; fit trompe efi: à levres, elle la tient toujours au moins autant allongée quelle l’efi ici. La firucture de cette trompe efi fem- blable à celle des trompes des taons, &. efi développée dans la planche 18. Deux barbes charnues lui forment une efpece d’étui. La Figure q. frit voir une cigale fémellc du côté du ventre ; ce qu’on s’efi propofé principalement, c’cfi de des Insectes. 111 . Mem. 15 1 mettre fa trompe t à découvert. Elle eft ici tirée hors du fourreau e , dans lequel elle eft logée ordinairement. Cette figure q., & les figures i & 3 donnent des exemples des mouches qui ont des trompes & qui n’ont point de dents. Les Figures 5 & 6 font deftinées à montrer des exem¬ ples des mouches qui ont une bouche & qui n’ont point de dents. La figure 5 eft celle de la tête d’une petite mouche, dont il fera parlé dans la fuite, appelléc mou¬ che de Saint Marc; & la figure 6 cft celle de la tête d’une de ces mouches appellées tipulcs. L’une & l’autre tête font vûës par-deffous, & extrêmement groffies. 1 , 1 , les levres, qui ne font jamais portées plus loin quelles le font ici. a, a, fig. 6,& a, a, e,e, fig. 5, bar¬ bes qui font autour de la bouche. En c eft le col ou la jonélion de la tête avec le corcelet. La partie/ - eft ccail- ieufe, & n’eft qu’un prolongement de la tête. Les levres 4/ font charnues. La Figure 7 eft celle d’une tête de mouche qui a une trompe & des dents: elle eft prife d’après celle d’une tête d’abeille, & vue par - dëffous, & beaucoup groffie. d, d, les deux dents, t, la trompe qui eft roulée, en c eft le col ou la jonétion du corps avec le corcelet. La Figure 8 fait voir la tête d’une mouche qui a une bouche, & des dents en dehors de la bouche. C’eft une tête de guêpe reprelëntée très en grand & par-deffous. d, d, les deux dents, a, a, i, i, quatre barbillons qui font autour de la bouche, b, la levre qui conduit les alimens dans la cavité ou bouche e. La Figure 9 eft celle d’une mouche feorpion de gran¬ deur naturelle, t, le prolongement écailleux de fa tête qui a l’air d’une trompe, & qui nous a fait nommer ces fortes de têtes des têtes en trompe. La tête de la figure 6pour- roit être appellée tête en demi - trompe par une raifon 152 MEMOIRES POUR L’HlSTOI RE fcmblable. f la partie de cette mouche par laquelle elle imite le feorpion. Je ne connois pas encore l’origine de cette mouche. La Figure 1 o repréfente en grand la tête de la mouche de la figure 9. t, le prolongement écailleux de la tête, qui a l’air d’une trompe. b,b,d,d, quatre barbil¬ lons qui font autour de la bouche, autour du bout du prolongement écailleux. Les Figures 11, 12 & 13 font voir la même mouche qui efl de grandeur naturelle dans les figures 12 & 13, Si grolfie dans la figure 1 1. Celle-ci, & la figure 12 la montrent du côté du ventre, & la figure 13 la montre du côté du dos. Cette mouche voltige volontiers fur les fleurs; elle efl extrêmement velue; les poils des côtés font blancs, & ils lui font un bordé blanc ; une bonne partie de ceux du defllis du corps font noirs, elle en a aufli de jau¬ nes. Elle peut être mile parmi les mouches à tête en trompe, parce que la partie t qui a l’air d’une trompe, efl écailleufe, & a toujours la même longueur, elle 11e femble qu’un prolongement delà tête. La Figure 14. efl celle du bout du prolongement écailleux /, fig. 1 1, ouvert ; il forme une elpece de bec : fa partie h a dans l’intérieur des efpeces de filions afles femblables à ceux .d’un palais; ils font tous parallèles les uns aux autres. Si perpendiculaires à la longueur du bec. Les filions parodient hérifles de petits grains qui leur donnent une parfaite reflemblancc avec ceux d’une lime. Planche IX. Toutes les Figures de cette planche, excepté une feule, font groflics au moins à la loupe, Si font deftinées à donner une idée générale de celles des antennes des mouches. U des Insectes. III. Man. 1$3 La Figure première reprélente une antenne g rai nce à petits grains, qui diminue de grofleur depuis Ion ori¬ gine julqu’à Ion extrémité. La Figure 2 reprélente encore une antenne grainée, mais cà plus gros grains, un peu applatis & faits en cœur. Eile elt prile d’après l’antenne d’une tipule jaune fémelle, dont il lera parlé ailleurs. La Figure 3 elt celle d’une antenne en mafTuë, telles que font celles de la mouche du formica leo. La Figure 4. nous montre pardevant la tête delà tipule mâle, & jaune comme une guêpe, de la fémelle de la¬ quelle une antenne elt vue dans la figure 2. b, la bouche de cette tipule. a, a, les antennes qui font à barbes, 5 c dont les barbes fontfouvent lacées finguliércment comme elles le font ici. La Figure 5 eft celle d’une des antennnesde la figure 4., dont les barbes ne font pas lacées. On peut remarquer dans l’une 5 c dans l’autre figure les poils dont les barbes font garnies. La Figure 6 fait voir dans fa grandeur naturelle une mouche dont les antennes font fourchues; dont chaque antenne eft compofée de deux branches. La Figure 7 repréfente plus en grand la mouche de la figure 6. a, b ; a, é, les deux branches dont chaque an¬ tenne eft compofée. La Figure 8 eft celle d’une antenne dont les barbes fines imitent celles des plumes Elle a été deftinée fur une antenne d’une très-petite efpece de tipule aquatique. La Figure 9 eft encore celle d’une antenne à barbes très-fines, mais difpolées autrement fur leur tige, que les barbes de l’antenne précédente; leur fuite eft inter¬ rompue aftes près du bout, en b ; après quoi elle eft continuée par des barbes plus courtes, dont l’antenne fe Tome IV. . V 154 Mémoires pour l’Histoire trouve garnie jufqu a ion extrémité. C’cfl ainfi que les barbes font arrangées fur les antennes de pluficurs cou- fjns mâles. La Figure io repréfente une antenne en râpe. Une tipule mâle qui vient d’un ver qui fe nourrit de l’agaric, & dont on donnera l’hiltoire ailleurs, en a defemblablcs à celle-ci. Les Figures 11 & 12 font celles de deux antennes à palettes, vûes de côtés différcns. Chaque palette porte un grand poil p, qui efl en petit une antenne à barbe, q, divers poils plus courts qui partent du fupport de la palette. La Figure 13 montre une antenne à palette prif- matique d’une groffe mouche bleue de la viande; cette antenne efl vûe par un de fes angles curvilignes, par le fupérieur. p, le poil à barbes. La Figure 14. donne la coupe de la figure 13 prife en c. On voit par cette coupe que le contour de l’an¬ tenne efl formé par trois furfaces curvilignes. Ces for¬ tes d’antennes font propres à beaucoup d’efpeces de mouches. La Figure 1 5 repréfente une antenne de celles que j’appelle à palette lenticulaire, a, la palette, p , grand poil qui n’a pas de barbes fenfibles. La Figure 16 efl celle d’une antenne à palette en len¬ tille cannelée. La Figure 17 efl celle d’une antenne à palette très- allongée, & du bout de laquelle part un poil, a, la palette. p, le poil. La mouche repréfentée pl. 8, fig. 3, a des an¬ tennes de cette efpece. La Figure 18 fait voir une antenne compofée de trois grains affés cylindriques, articulés enfemble, & du der¬ nier defquels part un poil /;. La mouche reprefentée pl. j o, fig. 5 & 6 a des antennes de cette efpece. des Insectes. III. Mem. 155 La Figure 19 reprélente une el'pece d’antennes que jufqu’ici j’ai trouvée ci toutes les elpeccs de taons. Elle a quelque choie d’une main dont on ne voit que le doigt index, & un pouce très-court, c, la partie qui rcftemble au pouce, e, le long doigt, fur lequel on voit des traits comme ceux des articulations, mais plus foibles . a, b , le pied ou fupport de l’antenne. Planche X. La Figure première eft celle d’une mouche grifâtre à deux ailes, qui eft vûe par-deflous & groffie au micro- feope. La même mouche eft repréfentée de grandeur na¬ turelle, & vue par-deftus dans les figures 2 & 3. Elle eft 1111e des premières qui paroifTent au printemps; on la voit fuccer les fleurs des poiriers avec fil trompe. On recon- noît aifément dans la figure, que cette mouche n’a point de dents; mais il faut faire remarquer que fa trompe, écailleufe en grande partie, peut le plier en deux, & quelle ne peut pas fe raccourcir fenfiblement. Son corps & fon corcelet font d’un gris roufleâtre ; le devant & le deflous de fa tête font tout blancs; elle femble avoir un mafque blanc. On l’a principalement fait repréfènterpour donner un exemple des mouches dont le corps le re¬ courbe vers le deflous du ventre, r, endroit où le corps fe recourbe, p, le bout poftérieur. La Figure 2 montre la mouche précédente prefque dans fa grandeur naturelle & de côté, pour faire voir la courbure du corps. La Figure 3 fait voir encore la mouche des deux pre¬ mières figures, mais dans fa vraye grandeur & par-deftus; les taches de les ailes & leur arrangement paroifTent mieux dans cette pofition, que dans celle de la figure 2. La Figure 4. eft celle d’une de ces mouches appellées Vij 156 MEMOIRES POUR L’HlSTOIRE demoifelles, d’une des grandes efpeces, niais non d’une des plus grandes. Elle donne un qui ont le corps en baguette. Les Figures 5 & 6 repréfentent la meme mouche à deux ailes, marquées à peu près comme celles de la mou¬ che feorpion. Cette mouche efl de celles qui ont le corps médiocrement allongé. La Figure 7 fait voir par-definis une pew’te mouche du genre de celles dont les femelles ont des feies au der¬ rière. Celle-ci vient d’une faufîe-chenille de 1 ’ofier, dont il fera parlé ailleurs. On 11e l’a placée ici que pour un exemple des mouches dont les ailes s’arrondi (lent fur le corps. La Figure 8 efl en grand celle de la mouche de la figure 7 repréfentée du côté du ventre. Cette pofition qui permet de voir les ailes par-delïous, & qui en met prin¬ cipalement en vûë la partie qui excedc le bout du corps, efl plus propre que la pofition de la figure précédente à montrer comment les ailes fe courbent. On peut di- ftinguer en c, qu’elles font une efpece de goutiére. La Figure 9 repréfente un frelon vu par-deflus, ayant les ailes étendues & dépliées. On y voit, & on a eu fur-tout intention d’y faire voir l’efpece de filet qui fait la jonchon du corps avec le corcelet ; il cil pour la jonélion de ces deux parties ce qu’elt le col pour la jomftion de la tête avec le corcelet. Ce filet efl fenfihle dans le genre des guêpes, & ne l’efl pas dans les genres de la plupart des autres mouches. La Figure 10 efl celle d’une des grandes ailes a de la figure 9, qui efl plus étroite ici, parce qu’elle efl pliée en deux comme la mouche la tient pliée ordinairement. La Figure 1 1 ell encore celle de l’aile de la figure 10, mais qui a été renverfée de haut en bas, & dont le exemple des mouches des Insectes. III . Mem . 157 deflous a été retourné en defiiis pour mettre en vue le pli de l’aile. La Figure 12 repréfente une mouche ichneumon, dont la forme du corps peut fe rapporter à celle du corps du frelon, fig. 9, mais dont le corps efl joint au corce- let par une elpece de filet f, plus long que celui qui efl: employé à la même fin dans le frelon, La Figure 13 montre une mouche ichneumon , dont le filet qui part du bout pofiérieur du corcelet,fe groflit infenfiblement pour former le corps ; c’eft-à-dirc que le long corps de cet ichneumon va toujours en grofîi fiant depuis fon origine jufqu a l'on extrémité. La Figure 14 repréfente un peu plus grande que na¬ ture, une mouche ichneumon, dont le corps efl fait comme celui de la mouche précédente. Mais elle efl finguliére par la manière dont elle porte fon corps lorfi- qifclie vole; elle le tient élevé au defiiis de fes ailes, quelquefois prefque perpendiculaire à leur plan. La pre¬ mière fois que je vis une de ces mouches en l’air, je ne pouvois deviner quelétoit i’infeéïe que jevoyois, tant fa forme me paroiffoit bizarre & différente de celles de tous les infeéles qu’on voit voler, p, efpece de queue coin- pofée de trois filets qui partent du derrière. La Figure 1 y efl en grand celle de la mouche précé¬ dente,- à qui on a ôté la tête, les premières jambes & les ailes, c c, le corcelet. i, ï, les reftes des jambes qui ont été coupées. Ce qu’on a voulu faire voir, c'efl l’owgine finguliere du corps. f } l’endroit d’où le corps part. Ici le corcelet fembie fie prolonger affez confiderablement par- delà l’endroit où le corps lui efl attaché, au lieu que dans les autres mouches ie corps part du bout du corce- 1 let. m, le prolongement du corcelet par-delà l’origine du corps, rf. k, k, les jambes poftérieures de cet ichneumon V üj I 5 S MEMOIRES POUR L'HiSTOIRE ont une figure différente de celle des mouches des figures p, 12,13, &.c. pj q, q, les filets dont la queue eff compo- iëe; ce 11’eff pas ici le lieu d’examiner ce que font ccs filets. On ne les a pas repréfentés dans toute leur lon¬ gueur. Planche XI. La Figure première repréfente une petite mouche à deux ailes , de la première chiffe, ou à trompe fans dents, d’un genre qui diffère par bien des caractères, de ceux des autres mouches. C’eft dans des nids d’hirondelles que je l’ai trouvée. Je ne fçais fi on n’en trouverait pas dans ceux de quelques autres oifeaux. Les nids où j’en ai trouvé, étoient remplis de puces, 6 c de vers de puces, ou de puces fous leur première forme; un feul nid m’a quelquefois donné plus d’une trentaine de ces mouches. Communément leur corps & leurcorcelet font d’un vert foncé. Les ailes font très-étroites, elles laiffent tout le milieu du corps à découvert, mais elles en couvrent les bords. Je n’ai jamais vû cette mouche le fervir de fes ailes; avant que de l’avoir aflfés examinée pour reconnoître fes ailes on la prendrait pour une araignée, 6c on peut bien la nommer mouche araignée. La Figure 2 eff celle de la mouche de la figure pré¬ cédente , groffie au microfcope, 6 c vûe par-deff us. a, a, les ailes, b, b, fes antennes, c, c, deux pièces écailleufès qui forment l’étui de la trompe, e, la partie poftérieure du corps qui eff ce ha n crée en cccur,& qui d’ailleurs eff plus large que l’antérieure. La Figure 3 fait voir par-deffous, 6 c encore en grand, fa mouche qui eff vue par dcfflis dans la figure z.c,c, les deux pièces qui forment Ictui delà trompe, écartées./,la trompe allongée. C’eff en preflant le corçelet de la mou- des Insectes. III. Mem. \ 5 9 che, qu’on la force d allonger ainfi fa trompe, b, l } les antennes, p, partie qu’011 trouve au derrière de quelques- unes de ces mouches, & qui eft peut-être celle qui cara- étérife le mâle. La Figure 4 met plus en vûë la partie marquée p dans la figure précédente. On y peut voir qu’elle eft com- pofée de deux pièces, entre lelquelles une troifiéme eft renfermée, e, le bout de la pièce renfermée entre les prêt cèdent es. La Figure 5 eft en grand celle d’une des jambes de la mouche, c, c, iix crochets par lefquels le pied eft terminé. La Figure 6 repréfente une de ces petites demoifelles qui portent leurs ailes fur leur corps, perpendiculaires au plan de pofition. Leur tête a plus de diamètre d’un côté à l’autre que du devant au derrière. Elle n’eft pas aufli arrondie que celle de la demoifelle de la pi. 1 o. fig. 4. La Figure 7 eft celle d’une tipule mâle,d’une efpece très-commune dans les prairies. La Figure 8 repréfente la demoifelle dans laquelle le formica-leo fe transforme. Ses ailes font un toit qui cou¬ vre le corps. Cette mouche a comme deux corcelets, ou un corcelet divifé. i, t, la première paire de jambes qui part du premier corcelet, ou de la partie antérieure du corcelet. Les Figures 9 & 1 o repréfentent la même mouche ; l’une la fait voir par-deflus,& l’autre la fait voir par-def- fous : elle a quatre ailes, dont les deux fupérieures ont une teinte de brun; une de celles-ci couvre prefqu’entié- rement l’autre, & a en deftlis un peu de convexité. La mouche a au derrière deux filets, ff faits comme les an¬ tennes à filets grainés; ils s’écartent l’un de l’autre, à me- fure qu’ils s’éloignent de leur origine. Une particularité encore, qui feule fuffiroit pour caraétérifer un genre ,c’eft 160 MEMOIRES POUR L’HlSTOIRE que les jambes de la dernière paire /, r,fig. 10, lont atta¬ chées au corps. Cette mouche paroît dès le mois cl'Av ril ; je la crois aquatique, & je crois même qu’elle vient d’une teigne aquatique. Il m’en ell né deux ou trois du même genre,mais d’une efpece plus petite,dans une cloche plei¬ ne d’eau en partie & couverte , où je n’avois mis que ries teignes de différentes efpeces. Son corps efl d’abord d’un vert jaunâtre, il brunit par la fuite; le corcelct ell brun. QUATRIEME 9 -■■—'j'!' ni F,., Pl. S p.t.j ic.' - fftm .ï ./f l'Hi.'t ■ Instett*. T.'rrt Fui S. 4 - À "»/ c*ht- Wi. y y /w*» Fc«/ 6 j/4 F,., F/ u.paq. /Pi'. jU:m i* I Ht/f. cL* Tn.'-s.-tts Tjrti + Fui * Fur J des Insectes. IV Mm. \6 1 QU AT RIE M E MEMOIRE. DES CLASSES ET DES GENRES DES VERS QUI SE METAMORPHOSENT EN MOUCHES SOIT A DEUX AISLES SOIT A QUATRE AISLES. N O us avons donné le nom de chenilles à tous les infeéles, & nous l’avons fixé à ces feuis infeéles qui doivent devenir des papillons ; nous avons diltribué ccs chenilles en différentes claffes, dont les caractères diflin- élifs ont été fournis, foit par le nombre, foit par le diffé¬ rent arrangement des jambes. Tous les infeéles qui par la fuite doivent paraître fous la forme de mouches, por¬ tent le nom de vers , 6 c il ferait à fouhaiter qu’ils en fuf- fent feuis en poffeffion, qu’il ne leur fût point commua avec des infeéles qui doivent devenir des fcarabés, des fauterelles, des punaifes, ou avec des infeéles qui ont à fubir d’autres métamorphofes, 6 c avec d’autres qui confervent leur première forme pendant toute leur vie, comme font les vers de terre. Nous aurons occafion de faire connoître fucceffivement toutes ces fortes de vers, mais ce Mémoire n’a pour objet que ceux qui fe méta- morphofènt en des mouches foit à deux aîles, foit à qua¬ tre aîles. Il y a entr’eux affés de différences marquées, pour les pouvoir ranger en plufieurs claffes; 6 c des diffé¬ rences dont quelques-unes doivent fembler beaucoup plus confidérables,quecellesquenous avons employées pour mettre les premières diftinélions entre les chenilles. Tome IV .X *> PI. 12. fig. 1,2,4-, IO & 162 MEMOIRES POUR L’HiSTOIRE Lapins remarquable des différences qu’on peut obfer- ver entre ces vers, & la plus propre cà nous frapper, cft celle des conformations de leurs têtes. Plufieurs ont des têtes qu’on a peine à reconnoître pour ce qu'elles font; elles ne nous offrent rien de ce que les têtes ordinaires nous montrent. Nous femmes accoutumés à voir une figure confiante à la tête des animaux qui nous font les plus familiers, une figure qui ne peut être altérée, au moins confidérablement.fans que l’animal périffe; Si nous trouvons à quantité d’cfpeces de vers * qui deviennent des mouches, des têtes dont la figure eft étonnamment varia¬ ble, des têtes qui font tantôt plus, & tantôt moins lon¬ gues, tantôt plus & tantôt moins applaties, tantôt plus 8 c tantôt moins raccourcies, qui font contournées tantôt clans lin fens,& tantôt dans le fens oppofé. Non feulement ces têtes font charnues, mais elles font faites de chairs très- flexibles. Les boëtes offeufes ou comme offeufes, néceffai- res Sc employées par la nature pour défendre le cerveau de tant d’autres animaux, font donc inutiles au cerveau de ceux-ci ; le leur ne craint point de changer de forme. Mais les vers dont nous parlons ont-ils un cerveau î il 11’y a pas lieu d’en douter, quoiqu’il ne foit pas aifé de mettre en évidence les parties qui le compofent ; on 11e pourroit nier fa réalité fans admettre une merveille encore plus grande que celle qu’011 a peine à recevoir. Enfin on 11e peut s’empêcher de regarder comme la tête d’un animal, ia partie antérieure auprès de laquelle fe trouvent les orga¬ nes néceffaires pour prendre les aiimens, Sc les faire pafler dans le corps; auprès de laquelle fe trouve une forte de bouche, & des accompagnemens qui lui conviennent. Si parmi les vers qui doivent devenir des mouches, il y en a beaucoup d’efpeces dont les têtes molles peuvent changer de figure au gré de l’infeéte, comme diyerfes des Insectes. IV. Mem, i 6- parties de fon corps en changent, il y en a auffi un grand nombre d’efpeces dont les tètes * d’une confiftance plus folide, confèrvent conftamment la même figure; ce qui nous fournit la première & la plus générale divifion des vers qui fe transforment en mouches, en deux claffes, fça- voir en celle des vers à tête de figure variable, & en celle des vers à tête de figure confiante. Si nous faifons enfuite attention au nombre, à l’arran¬ gement, à la difpofition, à la nature, à la firuéîure des différentes parties des vers de ces deux claffes générales, nous trouverons de quoi en faire des fous-divifions en plufieurs autres claffes qui feront fubordonnées aux pre¬ mières, mais qui ne laifferont pas d’être fort étendues. Nous trouverons des vers qui n’ont point du tout de jambes; nous en trouverons d’autres qui en ont, mais qui les ont toutes Amplement membraneufes; d’autres qui n’en ont que d ecailleufes, ou d’une firuélure femblable à celle des écailleufes; & d’autres qui, comme les chenilles, font pourvus de jambes écailleufes & de jambes mem¬ braneufes, mais qui ont plus de cesdernieres que les che¬ nilles. Nous trouverons auffi des différences dans la con¬ formation des têtes à figure variable, & dans la confor¬ mation de celles à figure confiante. Nous obfèrverons des formes de corps fort différentes; certains vers font maîtres de faire changer celle du leur quand ils veulent, ils l’allongent, ils le raccourciflent, ils en renflent certai¬ nes parties,ils en contraélent ouapplatiffentd’autres. Le corps de quelques autres vers efi prefqu’incapable d’être allongé ou raccourci, d’être renflé ou applati,il n’efica¬ pable que de flexions en des fens différais. L’enveloppe des uns efi une membrane très-délicate, celle des autres efi écailleufe ou cruftacée. Enfin les différentes efpe- ces de vers nous offriront bien des variétés finguliéres X ij * PI. 12 . fig. i >2,3 1 2, 1 5& 16. 164 MEMOIRES POUR L’HlSTOIRE dans la pofition, le nombre 6c la figure des organes , au moyen defquels ils relpircnt l’air. Nous allons expli¬ quer mieux ce que ces variétés ont de plus remarquable, en même temps que nous nous en fervirons pour cara- éïérifer les différentes claffes de nos vers. Nous mettons dans la première claffe, des vers à tête de figure variable *, & qui ont fur leur derrière les prin¬ cipaux organes de larefpiration ,les ftigmates * les plusfen- fibles; qui n’ont point de jambes écailleufes, ni même de membraneufes bien formées; ils ont au plus fous le ven¬ tre quelques mammelons charnus, dont chacun ne femble être qu’une portion d’un anneau qui fe gonlle en certains temps. Ces caractères font communs à un très-grand nombre de genres 6c d’efpeces devers qui fe transforment tous en des mouches à deux ailes, mais je ne connois aucune efpece des vers qui fe transforment en des mou¬ ches à quatre ailes, qui les ait. La régie n’efl pourtant pas réciproque, je veux dire qu’il n’efi pas vrai que toutes ïes mouches à deux ailes ayent été des vers de cette claffe. Mais pour donner des idées un peu moins vagues des vers qui lui appartiennent, que celles qu’on en peut pren¬ dre fur le fimple énoncé de leurs caraétéres effentiels, 6c pour en donner qui puiffent fervir à en faire diftingucr les genres 6c les elpeces, nous croyons devoir commen¬ cer par en faire bien connoître une efpcce ; il fera aifé enfuite de faire entendre ce qui leur eft commun à tou¬ tes, 6c en quoi différent celles de différens genres. Les vers les plus dégoûtans pour nous, 6c qui n’ont peut-être pas peu contribué à l’averfion que nous avons pour tant d’autres, ces vers trop connus dans les cuifines, parce qu’ils naiffent fur la viande, d’œufs qui y ont été dépofés par de groffes mouches bleues, font cependant ceux que nous allons prendre pour exemple, parce que ce des Insectes. IV Menu 1 6 > font les plus aifés à avoir ; d’ailleurs les imaginations les plus délicates ne doivent pas être bleflees lorfqu’elles n’auront qu’à craindre les repréfentations des figures qui fie trouvent dans nos planches. Ces vers * fiont charnus & blancs; leur corps compofié de différens anneaux, peut prendre fuccefli veinent diffé¬ rentes figures * ; il efl tantôt plus, tantôt moins allongé, Sc par confiéquent tantôt plus ou tantôt moins gonflé. Quoi¬ que dépourvus de jambes, ils marchent, Sc même afies vite, & c’efit dans leurs premiers efforts pour frire un pas, qu’ils s’allongent le plus : dans ce premier infant, Sc dans diverfies autres circonflances ils prennent une figure qui tient de la conique *, dont le bout pointu * eft l’anté¬ rieur. L’anneau qui forme ce bout, n’eflfiéparé de celui qui le fuit, par aucune incifion plus marquée que celles qui font les féparations des autres, cependant ce premier anneau eflla tête. En quelques circonflances on voit for- tir du bout de fia partie fiupérieure ,deux cornes moufles*. Mais ce qu’on remarque plus aifément Sc plus volon¬ tiers, ce font deux crochets bruns & écailleux *; ils font quelquefois entièrement cachés *; ils ont chacun dans l’intérieur du corps, une efipece d’étui particulier dans lequel ils peuvent rentrer. La tranfparence des chairs permet de les voir dans leurs loges lorfqu’ils y font; Sc ïorfqu’ils en font fortis, on croit entrevoir les parties * qui peuvent fiervir à les y ramener. L’ouverture par la¬ quelle ils fortent, efl en deflous, environ à la moitié de la longueur de l’anneau. Quand l’infieéte fait entièrement fortir fes deux crochets, il peut les porter par-delà Je bout de la tête. *. Ils fiont recourbés en arc, dont la concavité efl tournée vers le plan fur lequel le ver efl pofé. Depuis leur origine jufqu’à leur extrémité ils dimi¬ nuent de groffieur pour fie terminer par une pointe fine * PI. i2.fig; i. * Fig. 2. * Fig. i; * Fig. 5 & 6, e,e. * Fig. 3 & 5. or. * Fig. 2 & 4. * Fig. 6 , * Fig» 53. * Tome III. A le m. i. * PI. I 2. frg. 6. d. *ff- * Fig. 6. b. 1 66 Mémoires pour l’Histoire quoique roide. Ce qu’on doit fur - tout remarquer J c’efl que la pofition relpeélive de ces crochets, eft dire¬ ctement contraire à la pofition des dents ou des ferres des chenilles, & à ceile des ferres de divers infeéles. Les deux crochets font parallèles l’un à l’autre, ils ne vien¬ nent jamais fe rencontrer l’un l’autre; ils ne font ni l’office de dents qui agiffient l’une contre l’autre, ni même l’office de cifeaux. Je veux dire qu’ils ne font pas des in- ffiumcns qui doivent agir l’un contre l’autre pour broyer &. pour couper; ils fervent pourtant tous deux à déta¬ cher, à rompre en petites parcelles les libres charnues dont lever fe nourrit, mais c’efl en ratifiant, en piochant,pour ainfi dire, qu’ils dépiécent la viande. Nous avons expli¬ qué ailleurs * comment des vers mineurs des feuilles de la jufquiame, piochent dans le parenchyme de ces feuilles avec deux crochets femblables. Outre les deux crochets, ce ver a une efpecc de dard * qui n’a pas plus du tiers de leur longueur; il cft placé entr’etix, à diffiance égale de l’un 6c de l’autre; comme eux il cfl brun, 6c de même de nature écailleufè; mais il efî tout droit, 6c fe termine par une pointe fine: fa figure 6c fa confiftancc femblent apprendre qu’il cfl fut pour divifer par des coups redoublés, les petits fragmens que les crochets détachent. Les crochets ont vers les bafes comme deux épines * écailleufes. Immédiatement au deffous des deux endroits percés pour laiffer fortir les crochets, efl la bouche *; caron ne peut prendre pour autre choie une petite ouverture, qu’on ne découvre que quand par la preffion, on force le ver à la montrer. La preffion bien ménagée fait aulîï paraître au milieu de cette bouche, une petite partie en forme de mammclon, qu’on peut, malgré fi figure, nom¬ mer la langue, ou, fi l’on veut, le fueçoir. Ces vers des Insectes. IV. Mem. 167 ne fe nourriffent pas fimplement du fuc qu’ils ont ex¬ primé de la viande, ils font palier de petits grains de viande, pour ainfi dire, dans leur intérieur; cela ne fçauroit être apperçûdans le ver qui mange, maison voit que cela efl dans le ver qui a beaucoup mangé. Ceux qui 11e font pas raffafiés, qui ont befoin de prendre des alimens, font blancs, & ceux qui ont beaucoup mangé font rougeâtres; on reconnoît que cette couleur rou¬ geâtre vient de l’intérieur, quelle efl dûe à la fubftance qui remplit l’eflomach & les inteflins. Les crochets qui tiennent lieu de dents aux vers de ce genre, leur tiennent auffi lieu dé jambes. Quand ils veu¬ lent marcher, ils allongent au moins leur partie anté¬ rieure; pendant quelle efl allongée ils font fortir leurs deux crochets, ils les cramponnent dans la viande, ou dans les inégalités d’un terrein plus ferme, s’ils fe trou¬ vent deffus. C’efl fur ces deux crochets que tombe en- fuite le principal effort du ver qui raccourcit fon corps pour le porter en avant. Affésfouvent néantmoins il s’aide de fon derrière, il s’en fert pour pouffer le refie de fon corps vers la tête : les anneaux même facilitent fa marche; ils ont chacun une ceinture étroite de picquans ou de grains roides, h petits qu’ils ne peuvent être vus qu’avec une loupe très-forte; ils n’en font que plus propres à s’engrai¬ ner dans les inégalités des corps qui nous paroiffent les plus polis. Ces grains durs font placés dans l’endroit où un anneau efl en recouvrement fur celui qui le précédé. Le verre même donne prife aux crochets de ces vers & à leurs autres petites inégalités. Il y a des temps où ils fçavent fe donner encore plus de prife fur une matière fi polie, il y a des temps où ils jettent une liqueur gluante par leur bouche, & ils font enfuite paffer cette liqueur tout du long du deffous de leur corps. * W>f- lùS MEMOIRES POUR LHïSTOIRÉ Ces vers grofliffent, quand ils veulent, leur partie an¬ térieure, ils font rentrer le premier anneau dans le fé¬ cond, & le fécond rempli du premier dans le troifiéme. Cependant leur partie poflérieure eft, comme nous l’a¬ vons dit, plus groffe que l'antérieure; elle n’a pas de for¬ me bien confiante; quelquefois fon bout, quoiqu’un peu * Pi. r2.%. gaudronné, eft prefque circulaire * comme celui d’un 3 - cylindre; mais dans l’état le plus ordinaire, & qu’on peut * Fig. 4. & 8. appel 1 er le naturel, ce bout forme un plan incliné *, une efpece d’onglet; le dos s’abbaiffe, s’abbaiffe de plus en plus, à mefure qu’il devient plus proche de l’extrémité du ventre; près de l’endroit où le dos commence à s’ab- baiffer, près de l’endroit où commence le plan incliné, Fig. 3 & font placés les plus remarquables des organes * de la refpi- ration du ver. Deux petites taches brunes, à peu près rondes, y peuvent être apperçûes d’autant plus aifément que tout ce qui les environne eft blanc. Si on donne à fes yeux le fecours d’une loupe, chaque tache paroît Être une petite lentille, une plaque circulaire de cou¬ leur feuille-morte, un peu relevée au-deffus des chairs. * Fig. 8 .ff Sur chacune de ces plaques * on voit trois efpeces de & «aa‘bb cc k° utor iniéres * de figure d’oval allongé, toutes trois paral¬ lèles, dont la longueur efl à peu de chofe près perpendi¬ culaire à celle du corps. Ces efpeces de boutonnières font tout autant de fligmates, autant d’ouvertures defli- nées à donner paffage à l’air néceffaire pour entretenir la vie de l’infeéle. 11 a donc fix fligmates fur fa partie po- flérieure, dont trois font pofés près les uns des autres fur une même plaque. La tranfparence du corps permet auffi d’appercevoir qu’il a de chaque côté, dans toute fa longueur, un gros vaiffeau blanc * : la route de chacun de ces deux vaif- feaux efl ailée à fuiyre, furgtout yers la partie poflérieure, & on ? Fig des Insectes. IV . Mem . 169 & on voit aifément que chacun deux va aboutir à la pla¬ que des ftigmates, qui eft de Ton côté; en un mot on reconnoît fans peine, qu’ils font les deux principales tra¬ chées. Mais quand on difleque le ver , on trouve de cha¬ que côté, au moins près de la partie poftérieure, deux trachées prefqu’également greffes ; j’ai même cru voir tout près du bout de cette partie,trois trachées, dont cha^ cune alloit joindre à un des ftigmates. Nous avons fait regarder la partie fur laquelle font les plaques des ftigmates, comme plane, & ayant un contour qui approche de la ligure circulaire.Cette image peu exaéle fuffifoit pour faire entendre ce que nous avions d’abord à en dire; mais pour en donner une plus vraye, nous devons adjoûter que le contour de cette partie a des mam- melons, des elpeces de rayons charnus * qui font tantôt plus longs, Si tantôt plus courts. L’infeéïe les raccourcit en certains temps au point de les faire entièrement dif- paroître; dans d’autres temps j’en ai compté jufqu’à onze à la fois. Le bord inférieur & celui des côtés en font plus fournis que le bord fupérieur. Au refie, non feulement cette partie n’a pas toujours la figure plane fous laquelle nous l’avons confidérée ; fouvent elle efl très - concave, très-creufe. Pour fe faire une idée du point auquel elle le devient, de la forme qu’elle prend quelquefois, & pour¬ quoi elle la prend, il faut fçavoir que les vers qui fe nourriffent de viande, fe trouvent prefque continuelle¬ ment dans l’eau , ou dans une liqueur glaireufe qui vient de la chair qui fe corrompt 6 c fe diffoud. Si cette li¬ queur couloit fur les ftigmates, fi elle s’y attachoit, elle boucheroit les paftages à l’air. Les vers font en état d’em¬ pêcher que cela n’arrive, ils rendent creufe la partie où les ftigmates font placés, ils en relevent les bords, Sc les rapprochent au point de fe toucher; de forte que,quand Tome IV . Y * Tome 111. Mun. i. *PI. la.fig. 3 -fd il. * Fig. 3 & 5 ■ “• * Fig- 7 - 'Ï70 Mémoires pour l’Histoire il en eü beloin , les üigmates font renfermés clans le fond d’une efpcce de bourfe de chair. D’autres vers de la viande, dont nous parlerons ailleurs, ont une bourl'e bien mieux formée. Nous aurons aulfi occafion de voir plus d’une fois, que la nature a donné un femblable moyen de mettre leurs üigmates à l’abri de l’eau, à piu- lîeurs autres vers qui, quoiqu’ils ne foient pas des vers aquatiques, doivent croître dans certaines terres ordi¬ nairement humedées par l’eau,& que l’eau délaye trop en beaucoup de circonüances. Les naturalises modernes ont connu les üigmates po- îlérieurs des vers de la viande, ou les üigmates analogues de quelques autres vers de la même clalfe; mais ce lojit peut-être les feuls qu’ils ayent connus,ou du moins font-ce les feuls dont ils ayent parlé. Nous avons déjà dit ailleurs *, que des vers de cette clalfe ont deux üigmates antérieurs. Pour les trouver, on n’a qu’à fuivre la principale tra¬ chée * d’un des côtés 6 c qui y paroît au travers des chairs; quoique l’une 6 c l’autre de ces trachées diminuent de diamètre à mefurc qu’elles s’approchent de la te te, 011 voit fort diflindement ou elles vont fc terminer: en pre¬ nant la tête pour un anneau, c’eü à la jondion du fécond anneau avec le troiüéme. Je foupçonnai qu’il déçoit y avoir là un üigmate de chaque côté, & dès que je l’eus foupçonné, je reconnus bientôt que cela étoit. La vue fimple m’y fit appercevoir un petit point * qui méritoit d’être obfervé avec une loupe d’un court foyer. Au moyen decefecours, le petit point devint un üigmate très-lèn- fible, & dont la figure me parut digne d’être confidérée. lia celle d’un entonnoir * dont une moitié a été empor¬ tée, 6 c dont les bords font joliment dentelés, & comme frangés. J’ay depuis trouvé les deux üigmates antérieurs à toutes DES I N S E C T E S. IV Menu 171 les efpeces de vers qui en ont de poftérieurs placés comme ceux des vers de la viande. Mais j’ai inutilement cherché à nos vers de la viande,des fiigmates fur les côtés, dans des endroits femblables à ceux où font les ftigmates des che¬ nilles; je n’ai pû parvenir à y en découvrir, quoique des raifons très-fortes difpofalfent à croire qu’il y en doit avoir; car les mouches dans lefquelles ces vers fe méta- morphofent, ont, comme nous le dirons dans la fuite, deux fiigmates de chaque côté de leur corcelet, & elles en ont furplufieurs des anneaux de leur corps. Il y auroit donc dans la mouche non feulement de nouveaux fii- gmates, mais aulfi de nouvelles trachées, ou des trachées qui le feroient développées. J’ai quelquefois vûavec plai- firdans les trachées principales des vers, des mouvemens d’ondulation femblables à ceux qu’on fait faire à une corde tendue. Les ramifications des principales trachées peuvent être très-bien vûes avec la loupe, & ne peuvent être vues fans plaifir. On admire la quantité prodigieufe de branches que ces trachées jettent, les divifions de ces branches, leurs fous-divifions, leur entrelacement avec d’autres ; tout cela forme un fpeélacle que j’ofe dire grand. Le côté du ventre * le donne plus beau que celui du dos *, il efiplus *PI. fourni de ces vailfeaux à air :mais dans la difpofition des branches des trachées, je n’ai rien vu qui prouvât qu’il y ü eût fur les côtés des fiigmates qui m’échappaflent. C’efi inutilement aulfi que j’ai cherché aux vers de cette efpece,tout du long du dos, un vailfeau femblable à celui que les chenilles y ont, femblable à celui que M. Malpighi a regardé comme une fuite de cœurs, & que nous nous fommes contentés d’appeller la principale artère. Si nos vers avoient ce vailfeau, il y feroit très - aifé à apperce- yoir, au moins s’il avoit des contractions & des dilatations Yij lyl MEMOIRES POUR L’HISTOIRE alternatives, aufli confidérables que font celles de la grofîe artere des chenilles. Mais je crois avoir bien vû à ces vers, un véritable cœur que je n’ai pu obl'erver dans les che¬ nilles. Quelquefois j’ai apperçû vers le quatrième anneau line partie charnue qui avoit des battemens alternatifs ; j’ai fait de longues playes à pluficurs de ces vers, en leur emportant d’un foui coup de cizeau fur un des côtés,une portion du quatrième,du troifiéme & du fécond anneau : entre les parties qui font forties furie champ par la playe, j’en ai vû quelquefois une qui avoit des mouvemens de contraction 6c de dilatation pendant pluficurs minutes, 6 c qui par là fombloit être un cœur. Tout le dérange li fort dans des parties fi molles, pour peu qu’on les tou¬ che, que je ne puis être parfaitement certain que celle que je voyois alors fût la même, comme il y a grande apparence, que j’avois vû battre dans le corps, 6c la même que j’ai vû tranquille en divers autres temps, 6c de la¬ quelle fomble partir un très-grand nombre de petits cor¬ dages qui ne font fans doute que des vaiffeaux foit à fang, l'oit à air. Parmi les parties qui fortoient du corps après la grande blefïuredont je viens de parler, étoit une veffie à col très-long, lequel va s’attacher auprès de la bouche du ver. Cette veffle cil enflée, mais elle s’affaiffo dès qu’on la picque avec une épingle , ce qui prouve que quand elle eft gonflée, elle l’efl par l’air. Elle efl probable¬ ment un poulmon du ver, 6c ce que nous dirons dans la fuite, des poulinons des mouches, dilpofo à croire que le ver en a deux pareils. Tous les vers de la première claiïe n’ont pas leurs fti- , gmates pofléricurs difpofés 6c faits comme ceux de fefpccc que nous avons confidéréc jufqu’ici ; aufïi les variétés qu’of¬ frent les fligmates, nous mettront en état de diflinguer divers genres de ces vers à tête de figure variable. Au lieu des Insectes. IV Mem . 173 que les deux plaques polëes fur le derrière des vers de la viande,qui le transforment en mouches bleues, ont cha¬ cune trois boutonnières *, qui font autant de ftigmates; *P 1 .12. fig. fur le bout poftérieur de plufieurs autres vers *, on ne 8 & 9 ‘ voit que deux plaques bien circulaires, fur chacune def-y^ Flg ’ IZ ' quelles il y a feulement un petit bouton , mais nulles boutonnières. D’autres vers ont leurs ftigmates au bouc de tuyaux cylindriques placés fur leur derrière comme des cornes. Quelques vers 11’ont que deux de ces tuyaux, & d’autres en ont trois *. Les deux tuyaux des ftigmates * Fig. iÿ. de quelques-uns, font écartés l’un de l’autre; ceux de^ f * quelques autres vers font accolés l’un à l’autre. Quel¬ ques vers tiennent ces tuyaux couchés l'ur le corps, d’au¬ tres vers les portent relevés. Si l’on veut voir des exemples de ces dernières variétés, on 11’a qu’à confulter le onzième Mémoire du troifiéme Volume, page 367. Enfin les par¬ ties qui environnent les ftigmates, & qui peuvent fervir à les couvrir dans le befoin,donneront encore des caractères propres à faire diftinguer des genres de ces vers. Le nombre, la difpofition Si la figure des crochets qui fervent de dents à ces vers, Si même de jambes, nous fourniront encore des caraétéres de divers genres* Nos vers de la viande nous montrent deux crochets* * F; g- égaux Sc fembiables, pofésàcôté l’un de l’autre, Si paral¬ lèlement l’un à l’autre, entre iefquels eft un dard *. D’au- * Fig. 6. d. très vers qui ont deux pareils crochets, n’ont point de dard. Nous trouverons des vers qui ont deux crochets de grandeur inégale, dont l’un eft au-deflus de l’autre, & qui font tous deux dans le même plan vertical. * Nous en trou- * Fig. i0 , verons d’autres qui n’ont qu’un feul crochet*, mais plus-^ 7 ' fort. Et d’autres enfin qui n’ont point de crochets, ou ll '^ qu’on ne peut au moins obliger d’en montrer. La forme du corps de plufieurs autres vers de la même y üj 174- MEMOIRES POUR L’HlSTOIRE claffe, peut encore offrir des variétés aifées à faifir. La * PI. ra.fig. partie poflérieure de quelques-uns efl coupée court *, 12,a ‘ elle reffemble à un bout de cylindre. Il y en a de beau¬ coup plus raccourcis que d’autres; il y en a dont le bout antérieur elt prefqu’auffi gros que le poftérieur. Les uns font plus applatis, & les autres plus arrondis. Enfin dès qu’on voudra être attentif aux différences qui fe trou¬ vent entre des vers qui, regardés groffiéremcnt, feroient affés femblables, on remarquera entr’eux des différences fuflifantes pour les ranger dans des genres féparés. Quoiqua proprement parler, ces vers n’ayent point de jambes, ceux de plufieurs elpeces fçavent gonller, faire fortir des portions du deffous de leurs anneaux, de * Fig. i j. manière qu’elles paroiffent des jambes * membraneufes, & qu’elles en font les fondions : on trouvera même des variétés dans la difpofition de ces mammelons paffngers, dans des vers de différentes efpeces. On en voit aux uns de pofés par paire en deffous de chaque anneau, comme * E a lefquellcs ces vers fe transforment, dans le Mémoire où nous expliquerons comment les mouches à deux ailes de plufieurs genres, parviennent à fe tirer de l’elpecc de coque dans laquelle leurs parties fe font développées & fortifiées. r Sus revenons aux vers dont la forme du corps cfi longue & arrondie, & nous mettrons dans le quatrième genre, des vers membraneux qui feroient c)lindriques en certains temps, fi alors leur partie antérieure & leur partie poflérieure n’étoient fouvent plus menues que le refie. Nous nommons ces vers des vers de tipules *, * Fi S- 9 * parce qu’ils fe transforment en des mouches à deux ailes, appeilées tipules, qui font a fies femblables à des coufins. Comme nous donnerons l’hifloire de ces vers & de leurs mouches, nous nous contenterons à préfent de dire que la tête des tipules * efl écailleufe, & plus petite propor- * t. tionnellement à la groffeur du corps, que celle des vers du fécond genre. Mais les tipules ont leurs deux principaux fiigmates pofés fur leur partie poflérieure, & entourés d’appendices charnus. Entre les tipules il y en a d’aqua¬ tiques * affés femblables aux terreflres. * Fîg. 9. Certains vers * aquatiques qui fe transforment encore * Fig. 11. en des mouches tipules, doivent cependant être placés 0 " l2 ' dans un cinquième genre, & peut-être qu’on trouvera qu’ils mériteraient à eux feuls une clafie. La plupart des clpeces de ces vers font entièrement rouges, & d’un Z ij * PI. 14. î 12.p,p. * r, y. * Fig. 13 14. * Fig. 14. * Fig. 8. 180 MEMOIRES POUR L’HiSTOIRE ailes beau rouge. Iis ont près de la tête comme deux jambes courtes qui relTembîent à deux moignons de bras. Mais ce qui caraétérife le plus ces vers, c’eft qu'auprès de leur partie poflérieure, en dellous du corps, ils ont îg- quatre cordons * charnus&affés longs, qui ayant quelque relfemblance avec les cordons du poilTon app e\\é polype, femblent nous devoir déterminer à donner à ces vers le nom de vers -polypes. Ils ont encore à leur partie poflé- ricure deux efpeces de tuyaux prefque cylindriques *, qui ont bien l’air d’être les organes de la refpiration. Leçon- tour du bout de chacune de ces dernières parties elî bordé de poils. & Les vers aquatiques * qui fe métamorphofent en cou- fins, doivent encore être mis dans un nouveau genre qui fera le fixiéine. Nous les décrirons ailleurs plus au long, nous avons beaucoup à en dire; mais il fuffitde faire re¬ marquer actuellement, que s’ils ont de commun avec les vers du fécond genre, de refpircr l’air par le bout de leur r. partie poltérieure, qui cil un tuyau ouvert *, ils ont en¬ core en delfous du corps, un fécond tuyaudeftiné à don¬ ner ilfue aux excrémens, que les vers du fécond genre n’ont point. Des vers + longs comme les vers tipules, qui comme eux, ont une petite tête écailleufc, qui vivent en terre & dans les bouzes de vache, méritent d’être placés dans un fep- tiéme genre. Ils font hérilfés de poils qui leur donnent plus de relfemblance avec les chenilles, qu’avec les vers ti¬ pules auxquels ils relTembîent par des parties plus elfentiel- les. Ils différent pourtant de ces derniers par la difpofi- tion des organes de la refpiration. On ne leur trouve point deux fligmates fur le derrière, entourés de divers appendices charnus. Je ne puis d’ailleurs déterminer où font leurs principaux fligmates : lorfquc j’ai fait mes des Insectes. IV Mem. \ 81 obfervations fur ces vers il y a plufieurs années, je ne pen- fois pas afies combien la détermination des fiigmates étoit nécefiaire à celle des claffes 6c des genres. 11 y a plufieurs efpeces de ces vers qui fe métamorphofent en autant d’efpeces de mouches à deux ailes, qui n’ont point de trompe,de que nous avons nommées avec le peuple du Poitou, des mouches de Saint Marc. Je crois que nous devons faire un huitième genre de vers longs + , blancs, lifïes fans être écailleux, tels que ceux qui fe trouvent dans plufieurs efpeces de champi¬ gnons, qui n’ont point de fiigmates fur la partie pofié- rieure, mais à qui on en trouve fur chaque anneau *, ils y font placés comme ceux des chenilles. Jeparlerai ail¬ leurs des mouches à deux ailes, du genre des tipules, que ces vers m’ont données. Tous les genres que nous venons de déterminer pour cette troifiéme chiffe, font dénaturé à pouvoir êtrefous- divifés en plufieurs autres; 6c ce ne font peut-être pas les feuls genres premiers que nous euffions pu lui donner; nous en trouverions apparemment à lui adjouter, fi les efpeces des petits infedes qu’elle embraffe, nous étoient plus connues, ou même fi les différences qui font entre celles que nous connoiffons, nous étoient plus préfentes. Nous pafferons à préfent a caradérifer la quatrième claffe des vers des mouches, 6c la première de ceux qui donnent des mouches à quatre ailes. Nous la compol’ons de vers * dont la tête * a une figure confiante, 6c qui a deux dents * mobiles ou mâchoires qui font toujours à découvert, 6c qui fe rencontrent l’une l’autre vers le mi¬ lieu de l’ouverture de la bouche, 6c d’infedes qui font dépourvus au moins de jambes écailleufes. C’efi fur les côtés de ceux-ci qu’on trouve les fiigmates, quand les leurs font affés grands pour être \ifibles ; ils n’en ont point fur le Z iij * PI. i 3 .fig. 7 > 9 - * Fig. io. ire. 4- c Classe. *PI. I A. %. 'S- * Fig. 1 6. * d,d. * Tome III. Alan. XII. il? j, c Classe. 182 MEMOIRES POUR L* HISTOIRE deffus de leur partie pofiérieure. Les vers de cette claffe donnent un très-grand nombre de mouches de clafics 8 c de genres différens, telles que font les abeilles, les bour¬ dons, les guêpes, les frelons, les ichneumons, les mou¬ ches les plus communes dans les galles, &c. 11 n’efi pas aifé de diflinguer les vers de cette clafie en genres ; pour la plupart ils font blancs; ils fe reffemblent affés par l’ex¬ térieur ; il y en a pourtant de plus ou de moins allon¬ gés; quelques-uns ont même des particularités remar¬ quables. Nous avons fait connoître ailleurs * un ver de galles qui a fur le dos, à chacun de fes anneaux, un mam- melon qu’il fait fortir, 8 c qui peut lui tenir lieu de jam¬ be. Heureufement il importe peu d’avoir des caractères pour diltinguer les genres de ces vers, les endroits où on les rencontre , apprennent fuffifamment ce qu’ils doivent devenir. Les vers trouvés dans des gâteaux de cire,doivent être des abeilles: des vers trouvés dans des nids de bour¬ dons, doivent être des bourdons. Ceux qu’on trouve dans une chenille ou dans fa coque, doivent devenir des ichneumons. Ceux des galles, feront des mouches de gal¬ les , ôcc. Nous mettrons dans la cinquième clafie, tous les vers qui ont une tête de figure confiante, armée de dents qui jouent l’une contre l’autre, 8 c qui ont fix jambes écail- ieufes. Le nombre des genres de ces fortes de vers efi très-grand, 8 c j’aimerois affés à leur donner un nom par¬ ticulier. Celui d’hexapodes, fans en faire un nouveau, leur conviendrait; mais peut-être vaudroit-il autant leur en donner un plus françois, les appeller des fix -pieds , on s’accoutumerait à ce nom, comme on s’efi accoutumé à celui de mille-pieds, que d’autres infeétes portent. Entre les hexapodes ou fix-pieds, il y en a qui fe transforment en des inlèélcs de bien des claffes différentes, comme des Insectes. IV. Mem. 183 en fearabés, en punaifes, en fauterelles,. &c. Nous n’a¬ vons actuellement en vue que ceux qui doivent deve¬ nir des mouches. Les pucerons ailés, les faux pucerons ailés, les cigales, &c. viennent des vers hexapodes. Des vers aquatiques * de la même claffe, nous donnent beau¬ coup de differentes efpeces de demoifeHes. Diverfes ef- peces d’hexapodes aquatiques font aifées à difiinguer des autres, parce qu’elles ont de chaque côté une fuite d’une forte de nageoires * qui règne prefque tout du long du corps. Ces mouches, que la courte durée de leur vie a fait nommer des éphemeres, ont été de pareils hexapodes. Nous ne pouvons guéres nous difpenfer de faire une fixiéme claffe des vers à hx jambes, qui nous donnent quelques efpeces de demoifeHes, quoique nous ne con- noiffions encore que peu de genres qui puiffent lui ap¬ partenir; mais on ne fçauroit laiffer confondus avec les autres, des vers qui, quoiqu'ils ayent une tête de figure confiante, & des jambes écailleufes, différent de ceux avec qui cela leur efi commun , en ce qu’ils nefemblent pas avoir de bouche : cependant au lieu d’une ils en ont deux, mais bien finguliérement placées. Car on doit don¬ ner le nom de bouche à chacune des ouvertures qui efi à chaque bout des deux cornes roides & fines * qu’ils portent en devant de leur tête, puifque ces ouvertures font les feules par lefquelles les alimens entrent dans le corps. On voitaffés que les infeéfes dont je veux parler, font le formica-leo, & les lions des pucerons *; ils mé¬ ritent d’être mis dans une clalfe particulière, & apparem¬ ment ils n’y refieront pas feuls. Le caraélére que nous prenons pour celui des vers de la feptiéme claffe, n’a rien d’auffi frappant que celui des vers de la fixiéme. Ceux de la feptiéme claffe ont un corps allongé comme celui des chenilles, & fix jambes * Pi. t^. %. 17- *Pi. 15. %. J & z. 11,11,n, djTc. 6 . c Classe. * PI. 14. fig,. 1 8 &, 1 9. c,c. Tome 1 TI. Metn. Xi . y. c Classe. 184 MEMOIRES POUR L’HlSTOIRE écailleufes ; mais ce qu’ils ont de plus , 6c ce qui leur eft propre, ce font deux efpeces de courtes jambes,ou, plus * pi. i s • %• exactement, deux efpeces de crochets * placés à leur bout &’i 9 i W * postérieur; ce font deux parties dont le bout au moins eft écailleux, 6c qui leur fervent plus à fe fixer, à fecram¬ ponner, qu’à fe pouffer en avant. On trouve ces deux * PI. 1 5 . fig. parties à pïufieurs efpeces de ces teignes aquatiques * qui fe 11 • font des fourreaux finguliers de diverfes matières, 6c qui fe * Tome 1 11. métamorphofent en mouches papillonnacées *. On les y)Av;i. y . t rOLlV e auffi à d’autres infectes ras qui vivent en fociété fur les arbres, 6c dont le corps a affés la forme de celui des chenilles; qui, comme pïufieurs efpeces de ces der- * Fig. 6. niércs, courbent les feuilles qu’ils veulent manger *,au moyen des fils dans lefquels ils fe tiennent. J’en ai ob- lervc fur l’abricotier 6c le cerifier des efpeces fembla- blcs en apparence. Le corps de ces vers étoit verd, leur tête, leur partie poftérieure, 6c leurs jambes étoient noi¬ res, leurs crochets étoient de cette même couleur. J’en ai vû d’autres fur le poirier , dont le corps eft d’un jaune de chair d’abricot meur, 6c qui ont les jambes, la tête, le bout du derrière, 6c les crochets d’un affés beau * Fig. 7. noir. Ils s’ctabliffent au milieu d’un bouquet de feuilles, * ils s’y trouvent foûtenus par des fils qu’ils ont attachés aux différentes feuilles de ce bouquet, qu’ils rongent fucceffi- vement. Ceux que j’ai tranfportés chés moi, foit de cette dernière efpece, foit de la première, font entrés en terre pour s’y métamorphofer; ils s’y font fait des coques de terre; mais ils ont péri fuis parvenir à paroître fous leur dernière forme : les uns s’y font defféchés lorfque la terre eft devenue trop leche; 6c lorfqu’elle a été humide, les autres y ont moifi. C’eft l’analogie qu’ils ont avec les tei¬ gnes aquatiques, qui me fait foupçonner qu’ils fè trans¬ forment en mouches à quatre ailes. J’aurois quelque choie de des Insectes. IV. Mem. 185 de plus qu un loupçon, fi j étois certain qu’une mou¬ che brune a quatre ailes * que j ai trouvée clans un des poudriers ou j avois mis de ces vers, étoit venue d un d’en- tr eux qui s y étoit métamorphoié; mais j’ai lieu de croire quelle étoit la mouche d un ver qui en avoit mangé un de ceux à crochets. Aibinus a fait graver des figures d une de ces elpeces de vers, mais il 11a pas été plus heureux que moi pour les avoir dans leur dernier état. Enlin ceft pour la huitième clafîe que nousavonsré- 8 fervé ces vers auxquels nous avons donné ailleurs le * nom de fuijjes-chenïlles, parce que la forme de leur corps 1 les peut faire prendre pour des chenilles, à ceux qui ne fe donnent pas la peine d examiner en quoi ils en diffé¬ rent. Les fauffes-chenillesont,comme les chenilles,fix jam¬ bes écailleules * ; mais elles ont plus de jambes membra¬ neufes que les chenilles,elles en ont toujours plus de dix;& 1 quelquefois elles en ont juiqu a quatorze. Les leurs ne font pas bordées de crochets comme le font celles des che¬ nilles. Elles différent encore des chenilles, en ce qu elles ont une tète plus arrondie, fur laquelle on ne trouve de chaque côté qu’un feul œil, au lieu que les chenilles ont de chaque côté cinq à fix yeux dilpofës en arc. Toutes les fauffes-chenilles que j’ai vues jufqu’ici, & j’en ai vû beaucoup, lé transforment en des mouches à quatre ailes, dont les fémelles portent au derrière une feie dont j’ai déjà loué plulieurs fois l’admirable ffruéfure. Le nombre des jambes membraneufes n’étant pas le même dans tou¬ tes les fauffes - chenilles, il fournira des diffinéfions gé¬ nériques. On placera dans un genre, celles qui n’ont que dix-huit jambes * en tout, fçavoir fix écaiileufes, & douze membraneufes ; dans un autre genre, celles qui ont vingt jambes; & dans un autre, celles qui en ont vingt- deux, On aura d’ailleurs de quoi en diftinguer les e peces. Tome IV. . A a Fig. 8» .' Classe. Pl-1 s fig* 3 & * Fig. 13» , i, i. * Fig. Ï4> 186 Mémoires pour l’Histoire par les variétés des couleurs, & fur-tout par leurs atti¬ tudes : les unes tiennent toujours la partie poflérieure de *F%. r5. leur corps élevée *; d’autres font roulées; d’autres font étendues. Communément les faulTes-chenilles fontrafes, mais il y en a qui lont chargées de picquans ou d’elpe- ces d’épines finguliéres, & arrangées avec fÿmmétrie. On croira peut-être convenable de mettre les épineufes dans un genre particulier, & peut-être de les divifer en plu- fieurs genres diftingués par les ligures des épines. EXP LICATÎON DES FIGURES DU QUATRIEME A 4 EMOI RE. Planche XII. I_iA Figure première cfî celle d’un ver qui doit deve¬ nir une grolfe mouche bleue de la viande, de grandeur naturelle, & allongé. La Figure 2 elt celle du ver de la figure précédente, mais qui s’cfl raccourci, t, fon bout antérieur, q, fon bout poflérieur. La Figure 3 fait voir de côté & groffi , le ver des figu¬ res 1 & 2. On l’a ainfi pofé pour mettre en vue la grolfe trachée d’un des côtés, c, c, les deux crochets de la tête. u, un des fligmates antérieurs, f, f, les deux ffigmates po- flérieurs .fn, une des deux trachées principales, qui paroi t au travers de la peau. On voit auffi une partie des peti¬ tes branches qui partent de cette trachée, & dont les unes fe rendent & fe ramifient fur le dos, & dont d’autres en plus grand nombre vont fur le ventre, d, le dos qui ici cfî un peu concave , pendant que le ventre efl convexe. La vio¬ lence qu’on faifoit au ver pour le tenir pendant qu’on le deffinoit, le déterminoit à prendre cette figure qui ne lui efl pas naturelle. des Insectes. IV. Afnn. i87 La Figure q. reprélente le ver au/fi grcfh que dans la figure précédente, & vû par-défi us. t, la tête f, f, les deux lligmates poftérieurs. f x,f x, deux proportions des principales trachées. En a eh i anus. La Figure 5 eh celle de la partie antérieure du même ver, extrêmement grohie, & vue de côté, c, c, les cro¬ chets. e, une des deux elpeces de cornes charnues, que l’inleéle 11e montre qu’en certains temps, u, un des lli¬ gmates antérieurs. La Figure 6 montre en grand la partie antérieure du ver, vue par-dehous. e,e , les mammelons charnus qui lui font deux elpeces de cornes, c, c, les deux grands cro¬ chets. f, f, deux elpeces de courts crochets dont il y en a un à l’origine de chacun des grands, d, le dard qui ch placé entre les grands crochets, b, la bouche du ver, l’ou¬ verture qui donne entrée aux petits morceaux de viande. g, g, bord d’un anneau du côté du ventre, qui eh rem¬ pli de petits grains durs. La Figure 7 eh celle d’un higmate antérieur avec par¬ tie de l'a trachée, reprél'enté léparément. u, l’ouverture du higmate, l’endroit où il fait l’entonnoir, f, la partie découpée & comme frangée, qui s’élève au dehus de l’ouverture de l’entonnoir. La Figure 8 repréfente la partie pohérieure du ver, vue en dehus, & grohie au microfcope; c’eh la partie f t a, de la figure 3, beaucoup plus grohie r, r, r, ire. font divers rayons charnus; le ver en montre tantôt plus & tantôt moins; & il les tient tantôt plus allongés & tantôt [dus raccourcis, & différemment arrangés, c’eh à dire plus ou moins couchés, & plus ou moins relevés, f, fd eux pla¬ ques circulaires fur chacune desquelles font trois elpeces A a ij I 8 8 MEMOIRES POUR L’HiSTOIRE de boutonnières. Chacune des boutonnières eh un des fligmates. a, l’endroit où elt l’anus. La Figure 9 montre une des plaques f de la figure 8 , beaucoup plus en grand; les trois fligmates a a, b b, cc } qui font faits en boutonnières, y lont plus diflinefts ; on voit leur cavité & leur rebord. La couleur de ces fligmates eft feuille-morte. La Figure 10 repréfente très en grand, la partie anté¬ rieure d’un de ces vers courts des inteflins des chevaux, qui fe transforment dans des mouches à deux ailes. Au lieu que le ver de la figure 9 a deux crochets c, c, fé- parés, qui tiennent à deux tiges différentes; le ver de celle-ci a un crochet double, ou une feule tige de laquelle partent deux crochets, l’un plus grand f & l’autre plus petit i, qui efl au deffus de l’autre, c, c, efpeces de cornes. d, d, deux parties qui peuvent fervir à pouffer les alimens dans la bouche. La Figure 11 efl en grand celle de la partie antérieure d’un ver jaune qui vit dans les bouzes de vaches, f, le crochet de ce ver qui efl feul & fimple. c, c, deux petites cornes charnues, u , un fligmate antérieur. La Figure 1 2 fait voir en entier & dans fa grandeur na¬ turelle, le ver dont la partie antérieure efl repréfentée dans la figure 1 o. Ce ver montre encore ici fon unique & fim¬ ple crochet. Le bout poflérieur de ce ver efl terminé par un plan circulaire./j f, les fligmates poflérieurs. Ils feront repréfentés en grand dans la fuite; ce font des plaques lenticulaires & brunes, qui ont une élévation au milieu, 6 c qui n’ont point des boutonnières femblables à celles des figures 8 & 9. La Figure 13 efl celle d’un petit ver d’un blanc un des Insectes. IV Mem. 189 peu jaunâtre, qui fe tient dans le coton des efpis de ce Taule appelle marfau. On trouve fouvent un grand nom¬ bre de ces vers dans un leul efpi. La Figure 14. efi celle d’un de ces efpis e, c, c } dans le coton c, c, duquel vivent les vers femblables à celui de la figure 13. La Figure 15 repréfente le ver de la figure 13 , grofll au microfcope. c, c, les deux crochets de la têt e.f f, les deux principaux fiigmates poftérieurs,qui font deux petits tuyaux cylindriques, t, autre tuyau cylindrique plus petit que les précédens, & pofé au déifions d’eux, & à diftance égale de l’un & de l’autre. Ce dernier tuyau paroît être un troifiéme fiigmate. Les autres vers qui ont des fiigmates en tuyaux cylindriques, n’en ont que deux. Le long du corps de ce ver on voit une rangée de onze mammelons charnus qui lui tiennent lieu de jambes. La Figure 16 & la figure 17 font des coupes d’un même anneau de ce ver, mais faites en diffiérens temps. En certains temps le ver montre deux mammelons m, m, fig. 16, & fernble avoir deux jambes à chaque anneau. Dans d’autres temps on ne voit qu’un mammelon M, au milieu de l’anneau, fig. 17, & alors le ver ne fernble avoir qu’une jambe par anneau. Planche XIII. La Figure première efi celle d’un ver fans jambes à tête de forme variable, & armée de deux crochets; fou corps a beaucoup de poils longs, gros & durs. Ce ver le tient dans ces nids de bourdons, qui font couverts de moulfie. La Figure 2 fait voir en grand le ver précédent, c, c, fes crochets, A a iij 190 MEMOIRES POUR L’HiSTOIRE La Figure 3 repréfente encore plus en grand la par¬ tie antérieure du même ver. On y voit mieux la dilpofi- tion de fes crochets c, c. Cette figure & la figure 2 don¬ nent celles des poils qui font gros a leur baie, & qui vont enfiiite en diminuant pour fe terminer par une pointe line. La Figure 4. eft celle d’un ver de la première claffe, dont le corps eft court, & couvert d’efpeces d’épines. Je l’ai trouvé dans des agarics du ficomore de Paris, & dans quelques champignons. La Figure 5 eft celle d’un de ces vers que j’ai mis dans la féconde claffe, & que je nomme des vers à queue de rat. Le détail de ce qui les regarde, fe trouvera dans les planches d’un des Mémoires fuivans. Les autres Figures de cette planche 1 3 , & une partie de celles de la (uivante, donnent des exemples de difîérens genres de vers à tête écailleule, qui ont été rangés dans la troifiéme claffe. La Figure 6 eft celle d’un ver aquatique, dont il fera parlé au long dans le feptiéme Mémoire; les figures du meme Mémoire repréfentent pluficurs vers du genre de celui-ci. t, fa tête vue par-deffus. p, fa queue qui eft un tuyau avec lequel il refpire l’air. La Figure 7 & la figure 8 repréfentent un ver blanc de champignon ; dans l’une il a la grandeur naturelle, & il eft grofii dans l’autre. /, la tête qui eft brune & écail- leulê. /', f, ï, ï, /, dre. mammelons rangés fur une même ligne tout du long du milieu du ventre, qui tiennent lieu de jambes au ver II les fait difparoître quand il lui plaît. Quand ces jambes font rentrées de manière qu’il n’en paroît que le bout, ce bout eft applati, & lèmble fendu. des Insectes. IV. Mon. 191 La Figure 9 eft encore celle d’un ver de champignon, dont la tête eft brune & le corps blanc, qui fe transforme dans une mouche tipule, dont il fera parlé ailleurs. La Figure io repréfente le dernier ver grofïi au mi- crofcope, & de côté, t, fa tête. &c. les ffigmates. £ u, x y, les deux principales trachées qui paroiffcnt au travers de la peau. On voit que la trachée £ u, jette une branche vers chaque ffigmate, & que cette branche va fe rendre à ce ffigmate. Chaque ffigmate eft un petit grain noir. Quoique cet infeéte foit recouvert par une peau fort tranfparente, je n’ai point vu le long de fon dos, un vaif- fêau femblable à celui que les chenilles y ont, & qu’on voit à beaucoup de vers, je n’ai point vu le vaiffeau que j’ai appellé la principale artere, & que M. Malpighi a regardé comme le cœur. Mais dans l’intérieur, dans le troifiéme & le quatrième anneau j’ai obfervé un corps d o, brun, long & gros, & contourné affés irrégulière¬ ment, qui a bien l’air d’être le cœur; il s’allongeoit, & fe raccourciffoit alternativement. Le temps où on en voit mieux la pofition, eft celui où il ne refte plus à l’infeéte affés de force pour marcher & pour fe tourmenter ; ce corps eft quelquefois un peu plus proche, & quelquefois un peu plus éloigné de la tète. La Figure 1 1 fait voir par-deffous, une portion du corps du ver précédent, c, c, marquent une efpece de bou¬ tonnière qui a une inflexion au milieu, & qui eft faite de deux rangs de crochets roux, au moyen defquels l'infeéte peut fe pouffer en avant, & s’arrêter. La Figure 12 repréfente plus grand que nature le ver qui eft repréfenté de grandeur naturelle dans la figure 13. 192 MEMOIRES POUR L’HlSTOIRE Ce ver m’a cte donné par M. de Jufiieu qui l’avoit trouvé dans de la terre venue de Canada, autour des plantes qu’elle étoit deftinée à conlèrver. 11 a le luilant des vers écailleux, quoiqu’il 11e le loit pas. t, la tête qui eft écailleulê, & qui le termine par une pointe fine ./q / Ion bout pollérieur qui eft coupé obliquement.// les deux ftigmates poftérieurs. c, c, deux cornes qu’il a au der¬ rière. Tout du long du dos on voit de chaque côté un gros vaifTeau qui aboutit à un des ftigmates, & qui eft fans doute une des trachées. La Figure tq. montre la partie antérieure par-dcfTous, & groflie. j, fente qui eft celle de la bouche. La Figure 1 5 fait voir la partie antérieure par-defFus & de côté, dans le temps où l’infeéte fait fortir de fa bouche deux doubles crochets b, b, qu’il lçait faire jouer fucceffivement avec vîtefTe; il s’en fèrt aufîi pour le tirer en avant, & apparemment pour couper les racines. Les taches qui paroiffent près de la tête, lont cafté-clair. La tête & le derrière font bruns, & le reltp eft blanc. La Figure 16 eft celle de la partie poftérieure du ver, vûe par-defFous. c, c, les cornes, a, l’anus. La Figure 1-7 eft celle d’un ver qui - reffemble aftes en petit à un ferpent. La confiftance de les anneaux eft moyenne entre la membraneufe & l’écailleufe. Il eft tout blanc, à fa tête près qui eft brune. Il le tient volontiers dans les fumiers. Nous parlerons ailleurs de la métamor- pliolè des vers de ce genre. La Figure 18 repréfente en grand, la partie antérieure de ce ver. t, la tête, a, le premier anneau. La Figure 19 fait voir en grand, un \er brun ou grilatre, des Insectes. IV. Alem. 193 gri(atrc,qui a toute fà grandeur naturelle dans la figure 20. On trouve beaucoup de vers de cette efpece dans les bouzes de vache pendant l’automne. t, fa tête, i, i, fes yeux qui font petits & peu tranfparens./î f, fes fhgmates antérieurs. Planche XIV. Les Figures 1,2, 3,4 appartiennent au même ver, qui efl repréfenté dans les figures 1 9 & 20 de la planche 1 3. La figure première fait voir fa partie antérieure par-def- fous,& groffie au microfcope. d, d } deux portions de cy¬ lindre creux, qui font écailleufes. ï, /, les yeux. La Figure 2 montre la partie poflérieure par fon bout qui femble ouvert comme une bouche en r. C'cft dans cette ouverture que font les organes pofîérieurs de la refpiration. Dans la Figure 3 le bout pofîérieur du ver eft vu par- deiïous. a, l’anus. La Figure 4. efl encore celle d’un des vers précédais groffi, mais defliné après une mue que je crois fa dernière ; s’il avoit des jambes, il auroit l’air d’un poux vû au mi¬ crofcope. i, i, fes yeux qui font plus faillans alors & plus gros. La forme de fa tête efl auffi mieux marquée alors. Ce qui efl brun dans la figure, l’efl auffi fur l’infeéle, & l’entre-deux des bruns efl jaunâtre. La Figure y repréfente la tête du ver de la figure 6 , dans le temps où il fait paraître fes deux crochets c, c. La Figure 6 efl celle d’un ver du même genre que le précédent, mais dont l’efpece diffère de celle de l’autre, en ce qu’elle a plus de poils & de plus longs poils. La Figure y nous montre le ver de la figure 6 dans fa Tome IV . B b 194 Mémoires pour l'Histoire grandeur naturelle. J’ai trouvé de ces vers à la Touffaints dans un agaric du ficomore de Paris. La Figure 8 efl celle d’un ver fans jambes, du genre de ceux qui donnent les mouches appellées de S. Marc. t, fa tête écailieufe. La Figure 9 repréfente un ver aquatique du genre des vers qui donnent les mouches tipuies. Ï1 diffère ries vers terreflres des tipuies, en ce que les efpeces de cornes, les appendices ronds 6c charnus qu’il a auprès du der¬ rière, font plus longs que ceux des autres vers de tipuies. f,f ces appendices. La Figure 10 fait voir en grand le bout du corps de ce ver .ff fix grandes cornes charnues, u, u, quatre cor¬ nes beaucoup plus petites./j f les fbgmates. La Figure 11 efl celle d’un de ces vers rouges aqua¬ tiques, que j’ai nommés vers polypes, 6c qui le transfor¬ ment en petites tipuies. La Figure 12 repréfente très en grand, lever de la figure 1 1. t, fa tête qui efl écailieufe. m, un de fes deux moignons ou courtes jambes, p, p, les cordons charnus qui m’ont déterminé à donner à ces vers le nom de polypes, i, i, deux longs mammelons. r, r, les organes de la refpiration. La Figure 13 efl celle d’un de ces vers qui fè meta- morphofent en confins,dans fa grandeur naturelle. La Figure 14. montre le \cr de la figure 13,extrême¬ ment groffi. r, tuyau dont ce ver tient louvent le bout à la furface de l’eau pour refpirer l’air, b, barbillons qu’il fait paroître en devant de fia tête écailieufe. La Figure 15 efl celle d’un ver qui fe transforme en des Insectes. IV. Mem. 195 line efpece d’abeille,qui l'çait faire avec un art fingulier, des tuyaux de feuilles dans lefquels elle renferme les œufs. Il n’a été placé ici que pour donner un exemple des vers de la quatrième clalfe. La Figure 16 repréfente en grand & en defïous, la tête du ver de la figure précédente. Outre qu’elle a une figure confiante, elle a deux dents ou mâchoires d,d, qui vont à la rencontre Tune de l’autre. La Figure 17 efi celle d’un ver qui par la fuite doit paraître une demoifelle. Il efi de la cinquième clalfe, par¬ ce qu’il a fix jambes écailleufes ou crufiacées. 11 efi de la clalfe de ceux que nous nommons tout court des hexa¬ podes ou fix-pieds. La Figure 18 repréfente dans fa grandeur naturelle, un formica-leo qui efi grolfi dans la figure 19. Ces vers font de la fixiéme clalfe. Tous ceux qui appartiennent à cette clalfe, font caraétérifés par les cornes dont les bouts ouverts tiennent lieu de bouche à i’infeéle ; ainfi chaque ver a deux bouches. Planche XV. La Figure première & la figure 2 repréfentent le mê¬ me hexapode aquatique ; il a fa grandeur naturelle dans la figure 2, & il efi grolfi dans la figure 3. Il efi de la cin¬ quième clalfe, & du genre des vers de cette clalfe qui ont de chaque côté des nageoires difpofées comme des avirons, n, n, n, &c. ces nageoires. Ce ver fe métamor- phofe dans une efpece de mouche ephemere. /, i, i, i, /, 4 fes fix jambes. La Figure 3 montre par-deffus,&: la figure 4 montre par-delfous, un de ces vers à fix jambes, que nous avons cru devoir mettre dans une clalfe particulière, dans la B b ij 196 MEMOIRES POUR L’HiSTOIRE feptiéme ; à caufe de deux efpeces de crochets écailleux qu’ils ont à leur bout poftérieur, qui leur tiennent lieu de deux jambes pour marcher , ou au moins de deux bras pour fe fixer. Ceux de ces deux figures vivent en fociété fur l’abricotier; ils fe tiennent quelquefois trente à qua¬ rante enfemble dans une toile, ou plutôt dans unemaffe de fils de fioye. Leur tête, Leurs antennes, leur premier anneau, leurs jambes, & leur bout poftérieur l'ont d’un brun prefque noir, & luifant comme celui d’une matière écailleufe. Tout le refie efi d’un allés beau vert. Ils font ici un peu plus grands que nature. La Figure 5 efi en grand celle du bout poftérieur d’un des vers précédens. c, c , les deux crochets. a, le bout du derrière qui efi comme bordé d’écaille noire. Deux pièces, l’une fupérieure, & l’autre inférieure le compo¬ sent, & laîuent entr’elles une ouverture qui a l’air d’une bouche. La Figure 6 repréfente une feuille d’abricotier pliée en r, f, par les toiles que les vers ont filées, t, u, toiles dans lefquélles font des vers encore jeunes, a, en marque un qui a prefque toute la grandeur à laquelle parvien¬ nent ceux de cette efpece. Comme ifs fe tiennent pref¬ que toujours dans des toiles, ils n’ont pas befoin d’être bons marcheurs fur un terrein ferme; ils y marchent auiïi volontiers fur le dos que fur leurs jambes. Quand ils font dans leur toile, ils ont fou vent le dos tourné vers l’en¬ droit de la feuille qu’ils mangent. Ils percent cette feuille, ils font pafter leur tête par le trou pour ronger les bords de fon ouverture. La Figure 7 repréfente un paquet de feuilles de poi¬ rier, liées enfemble par des fils, comme le font fouvent celles tics pommiers, fur lcfquellcs fe font établies des des Insectes. IV. Mem. 197 chenilles qui vivent en fociété *. Ce font des vers de ia * Tome IL clafle & du genre de ceux de la figure 6, qui filent ces P Li 2 -fs- '• toiles, & qui fe tiennent dedans, comme 011 le voit ici, pour être à portée de manger les feuilles, fans être pofés deffus. La Figure 8 eft celle d’une mouche fortie d’un des vers de la ligure précédente, plufieurs femaines après que le ver le fut enfoncé fous terre; mais que je ne crois pas la mouche dans laquelle il fe devoit transformer. La Figure 9 fait voir le ver par-defïus,& la figure 10 par-deffous. Dans l’une & dans l’autre il a fa grandeur na¬ turelle. i, i, les jambes, c, c, fes crochets. La couleur du corps de ces vers, tff précifément celle de la chair d’un abricot bien meur. Près de la tête ils ont deux petites taches en croiffant. Leur tête & leurs jambes font noires. La Figure 1 1 & la figure 1 2 ont déjà été gravées dans le tome 3. pl.i 2,fîg. 12& 13.La ligure 1 1 eft celle d’une teigne aquatique qui appartient à lafeptiémeclaffe des vers, parce qu’outre fes fix jambes, elle a au derrière deux cro¬ chets écailleux. La ligure 12 fait voirie bout du derrière de la teigne précédente, par-deffous & groffi. c, c, les deux crochets, a, l’anus. Les Figures 13, 14. & 15 représentent des fauffes che¬ nilles , ou des vers de la huitième claffe, de ceux qui ont fix jambes écailleufes, & un plus grand nombre de membraneufes. La faufTe-chenille de la ligure 1 3 eft de celles qui ont vingt-deux jambes, fçavoir,lèize membra¬ neufes. Son quatrième anneau eft le feul qui n’ait point de jambes. Elle vit de feuilles de chêne, fur lefquelles elle eft étendue, comme elle le paroît ici Le fond de fi cou¬ leur eft un blanc-jaunâtre. Sur chaque anneau elle a deux Bbiij ï9? Mémoires pour l’Histoire taches quarrées & alfés noires, & entre celles-ci une ta¬ che plus longue d’un jaune un peu rougeâtre. La Figure 14. eft celle d’une faulfe-chenille de l’ofier, qui a vingt jambes, fçavoir, quatorze membraneufes & fix écailleufes. Le fond de fa couleur eft un blanc-verd⬠tre fur lequel il y a des rayes d’un brun-noir, qui vont de la tête à la queue. Mais il fera parlé ailleurs plus au long de cette faufle-chenille qui tient ordinairement fon der¬ rière en l’air, comme l’eft celui de la faulfe-chenille de la figure i 5. La Figure 15 reprélènte encore une faulfe-chenille à vingt jambes, qui vit fur le grofeillier, & du genre de cel¬ les qui tiennent ordinairement plus de la moitié polté- rieure de leur corps, relevée au delfus du plan fur lequel elles font. Nous aurons encore occafion dans la fuite, de faire mieux connoître cette faulfe-chenille. PL /jî.• /. des Insectes. V Mem . 203 mencc où l’autre finit, eft au contraire plus menue à Ion origine,que dans le relie de Ion étendue ; mais Ion bout *, qui n’a rien moins qu une hgure confiante, efi confidé- rablement plus renfié que ce qui le précédé, & lui forme une forte d’empâtement. Nous la nommerons aufii la lè- conde portion, ou celle qui a un empâtement. Le deffous de celle-ci efi en partie cartilagineux ou écailleux, de d’un brun iuifimt. En defiùs de la portion conique s’élè¬ vent deux elpeces d’antennes * obiongues, fans articu- * lations, de couleur de marron, & garnies de poils. Avant que d’aller plus loin fur la firucfure de la trom¬ pe , permettons à celle que nous tenions allongée en pref- fant le corcelet, de rentrer dans Ion efpece de boîte; nous verrons dans l’inftant la partie conique *, celle qui * efi entièrement membraneufe, comme charnue, & par f d conféquent mufculeufe, lé retirer en dedans de la cavité *. * Sa bafe efi fixe, & le refte le raccourcit en fe pliffant, comme fe pliffe le cuir d’un fouffiet dont on chalfe l’air, en approchant un des panneaux de l’autre : elle le rac¬ courcit en faifant des plis parallèles au fond de la cellule, elle y entraîne avec elle les deux barbes ou antennes * * dont elle efi chargée. Ces deux antennes fe placent cha¬ cune de leur côté contre une des parois. La fécondé portion efi en même temps tirée dans la cavité, mais dans l’inftant où eile commence de l’être, elle fe redreffe *, * elle fait fucceiïïvement des angles de plus aigus en plus aigus avec la première partie; de façon que quand elle arrive à l’ouverture de la cellule, fa longueur efi parallèle à celle de cette cellule qui a toute la capacité néceffaire pour recevoir cette fécondé partie. Le bout, i’empate- inent s’allonge alors, & s’appiatit un peu, il defeend en embas fur l’efpece de tige dont il part, & il la recouvre de façon que lorfque la trompe efi bien entrée dans fa Ce ij 204 MEMOIRES POUR L'HISTOIRE loge, ce qui en paroît, n’elt guéres que la tranche Je cet * PI. j 6. fig. empâtement * , car on ne voit Je plus qu’une affés petite SL ' l \ e% portion * Je la féconde partie Je ia trompe ou delà tige Je Icmpatement. En un mot, toutes les parties Je la trompe s’arrangent à merveille & en un in liant, dans l’efpece de petite boîte qui a précifément la capacité né- celiaire pour les contenir. Obligeons une féconde fois la trompe à paroître éten¬ due pour mieux l’examiner, & principalement pour don¬ ner plus d’attention à l'on bout; c’eft là que fe trouve * Fig- "S l’ouverture * qui peut être regardée comme la bouche de la mouche, Si comme une bouche munie de deux grandes & épaiffes levres La partie que nous avons nom¬ mée l'empâtement, cil compolëe de ces deux levres *, dont la ftruéture eft digne d’être décrite. Quand la mou¬ che allonge de bon gré là trompe, ou quand on la force de ia tenir allongée, les deux levres forment enfembic une ei’pcce de dilque perpendiculaire * à l’axe de la trom¬ pe. Ce difque cil ovale, il eft pourtant un peu échancré * Fig. 8 & à un des bouts de Ion grand diamètre *,au bout antérieur. 9.0. Ce grand diamètre ell marqué par une elpece de fente * Fig. 8. 0 y. ou d’entaille * qui divife le difque en deux parties égales Si femblables, dont chacune peut être prifepour une des levres. Le corps de la trompe elt confidérablement dé¬ bordé par les deux levres, mais il ne l’elt pas également en tous les feus, parce que fon axe ne répond pas à beau¬ coup près au centre du difque, au moins dans les trom¬ pes aufquelles nous nous lommes fixés; dans celles-ci le corps de la trompe elt pôle fi proche du bout du difque * Fl S- 5 & échancré * , que là furfàce antérieure elt là prefqu a fleur du bord de ce difque. Les levres examinées à la loupe, * Fig. 8 & paroiffent extrêmement travaillées *; elles ont chacune un grand nombre de cannelures parallèles les unes aux * Fig. 8 & 9 II. * Fig. j & 6 1 , 1 . des Insectes. V. Mem. 205 autres, & toutes à peu près perpendiculaires à l’efpecede fente ou grand diamètre de i’oval. Ordinairement ces deux dcmi-difques ne font pas abfolument plats, & plus on preffe le corcelet ou la tête, plus ils fe renflent; plu» iis prennent de convexité, mieux aufîi on découvre leur ftrudure; on reconnoît que toutes les cannelures font formées par une fuite de vaiffeaux pôles les uns auprès des autres. Quand on confidére à la loupe les levres de certaines mouches, dans un temps où elles ne font que médiocrement gonflées, les côtés des cannelures, les fil¬ ions entre lefquels elles font, paroilfent des fibres noires; qu’on preffe extrêmement la trompe, & qu’on oblige les levres à fè gonfler autant qu’il leur efl poffible, alors les fibres noires ou noirâtres deviennent plus groffesô; blan¬ ches, &. on reconnoît que chacune d’elles efl un vaiffeau qui a été diflendu par la liqueur qui ya été introduite. Ce qui aide à en convaincre, ce font des bulles d’air qui y font portées avec la liqueur, & qui y font des féparations fenfibles. Nous venons de faire par violence ce que la mouche exécute quand il lui plaît, elle l’exécute toutes les fois qu’elle a befoin d’appüqucr exactement fes levres fur quelque corps dont elle veut tirer le fuc. Lorfque la mouche ne cherche pas à faire ufage de fa trompe, lorfqu’elle ne la tient dépliée qu’en partie *, & fur-tout quand elle l’a renfermée dans la cellule *, les deux levres l'ont appliquées l’une contre l’autre, de ma¬ nière que les cannelures de l’une font pofées contre les cannelures de l’autre; ou, pour continuer à nous fervir de la comparaifon du difquejes deux moitiés du difque, comme fi elles étoient affemblées par des charnières, peuvent fortir chacune de leur plan, & venir mutuelle¬ ment fe chercher & s’appliquer l’une contre l’autre : alors la trompe, au lieu d’avoir à fon bout cet empâtement Ce iij * PI. 16. flg. * Fig. 2. 20 6 MEMOIRES POUR l’HISTOIREï elliptique qui y formoit une forte de couronne com- poiée de deux demi - dilques , tft terminée par une * PI. 16. fig. elpece de gros crochet * charnu, &. cela parce que, 3 ,/> comme nous l’avons fait remarquer ci-devant, le corps de la trompe eft polé prefqu a fleur du bout échan- cré ou antérieur des levres; l’autre bout des levres, qui devroit faillir, eft ramené vers la tige contre la¬ quelle il eft fouvent pofé, & dont il cache une grande partie; la figure de la trompe en devient méconnoifla- blc, les deux levres qui fe font applaties, & qui fe ca¬ chent mutuellement, femblent être dilparues. II feroit à fouhaiter qu’il fût aufli ailé de connoître les ufages de toutes les parties des animaux, qu’il l’eft de connoître quelques-uns de ceux des levres de la trompe, & qu’il fût auflî ailé de les obferver dans l’aéfion, qu’il eft aile d’y obferver celles-ci. Il n’eft perfonne qui n’ait vû mille & mille fois des mouches qui appliquoient le bout de leur trompe ou fes levres fur du firop, fur du fucre, quelles fueçoient; mais ceux qui ont vû tant de fois cette petite opération, ne fe font peut-être jamais mis à portée de la bien voir, & de fe donner le Ijreéfacle philofophique qu’elle peut offrir : le moyen de fe pro¬ curer ce fpeéïacle, eft pourtant bien fimple. Sur les parois intérieures & minces d’un poudrier de verre bien blanc & bien tranfparent, j’ai étendu de legeres couches d’un firop épais; j’ai renfermé enfui te des mouches, & des mouches de différentes efpcces dans ce poudrier : friandes comme elles font des liqueurs fucrées, elles oublient alors quelles font captives, & il y en a toûjours quelques unes qui fur le champ, vont fe fixer fur les endroits qui leur offrent des mets agréabies.Qu’on s’attache à en obferver une de celles- ci, on verra quelle commence par faire fort ir fa trompe de la cellule; quelle l’allonge, quelle en applique le bout. des Insectes. V . Mem . 207 ou la furface cannelée des levres fur le firop. Les parois tranfparentes du poudrier, & la couche mince de firop, n’empêcheront pas qu’on ne puifTe bien voir avec une loupe, ce qui f'e pafTe au bout de la trompe; j’invite les curieux à lé donner ce fpetflacle, ils en feront afîurément fatisfaits, comme je l’ai été bien des fois. Pendant que le corps de la trompe efl fixe, fon bout efl dans une grande agitation; on y voit des mouvemens de plusieurs elpeces, & tous d’une vîteffe furprenante. Ce font les levres qui agiiTent continuellement, & de cent façons différentes , & toujours avec rapidité. Alternativement le petit diamètre du difquequ’elles forment, s’allonge &. le raccourcit ; tantôt la furface des deux levres , ou des deux demi-difques, efl dans un même pian , tantôt ces deux levres font enfem- ble un angle, & un angle qui varie à chaque infant , qui de très-obtus pafTe à être très-aigu ; fouvent elles fe difpo- fent en entonnoir plus ou moins évafé: mille autres mou¬ vemens fe combinent avec ceux-ci; tantôt les levres de¬ viennent plus applaties, & tantôt elles deviennent plus gonflées ; tantôt ce font les levres entières qui fe gon¬ flent, & tantôt ce n’en font que des portions. Quelque¬ fois les deux bouts de lovai s’approchent ou s’éloignent l’un de l’autre, mais cela efl plus rare; ce qu’il y a de plus confiant, c’efl une efpece de mouvement d’ondula¬ tion qu’on peut appercevoir dans toutes les cannelures des levres, & des vibrations vives dans le total ou dans quel¬ ques parties des mêmes levres. Enfin je le répété, tous ces mouvemens fe varient & s’exécutent avec une rapidité qu’on ne fçauroit décrire, & qu’on ne fe laffe point de voir. Ils donnent une grande idée de l’organifation de la partie qui les exécute. La fin à laquelle tendent tous ces mouvemens, n’efl pas équivoque ; ils tendent à faire entrer le firop dans 20 o MEMOIRES POUR L’ H I S T OI R E l’intérieur de la trompe. Pendant quon confidéreles levres, on doit remarquer, & on remarquera ailcmcnt quelles fe touchent toutes deux vers le centre du dilque, & dans une allés grande portion de Ion diamètre; mais elles iem- hlent laifler entr’elles deux ouvertures, l’une proche du *PI. 16. fig. bout antérieur ou échancré, * & l’autre proche du bout s & 9 ' °' poftérieur *. La première de ces ouvertures pourrait être '* appellée la bouche de la mouche; c’eft à cette ouverture qu’eft conduite la liqueur qui doit être, & qui cil bientôt introduite dans la trompe. On s’en allure h on cil atten¬ tif à oblerver ce qui le palfe lorfque la liqueur, fur la¬ quelle la trompe eft polcc, eft très-fluide, comme l’cft une (impie eau fucrée ; on diftingue dans la goûte divers petits courans qui aboutiflent tous à celte ouverture. C’clt qu’à mefure que la liqueur y arrive, elle entre dans la trompe. Nous n’en fommes pas encore à examiner le conduit par lequel elle monte, mais nous pouvons de¬ mander d’avance, quel que foit ce canal, quelle eft la » force qui contraint la liqueur à monter dedans. 11 y a grande apparence que c’eft celle de la fuélion ; peut-être pour¬ tant que la fuélion n’eft pas la feule force qui y eft em¬ ployée; on peut appercevoir dans le corps de la trompe, des mouvemens d’ondulation , de longues portions qui s’enfoncent, qui fe rapprochent de l’axe, & qui enfuite s’en éloignent , ce qui peut produire des preftions capa¬ bles de faire avancer vers la tête, la liqueur introduite dans le canal. On ne peut pourtant s’empêcher de regarder la dic¬ tion comme la principale caufe qui fait monter la li¬ queur dans la trompe, de regarder cette trompe comme une forte de pompe afpirante, dans laquelle la liqueur eft poufléc par la preftîon de l’air extérieur, quand on fait attention à une circonftancc, c’eft que, dans certains inftans, des Insectes. V . Mem . 209 inftants, la portion de ia goutte fur laquelle le bout de la trompe elt appliqué, devient toute mouffeufe, parce qu elle lè remplit de bulles d’air que la trompe y intro¬ duit. Là de temps en temps le font des bouilionne- mens, c’eft-à-dire, qu’ils s’y font dans les inftants où les petites bulles d’air y lont leringuées. Suppolons donc que la mouche ait vuidé d’air le canal de la trompe, & , h on veut, une partie des canaux intérieurs; en un mot fup- polbns dans le canal de la trompe un vuide d’air, ou un air plus rare que l’extérieur, & luppol'ons en même temps line goutte très-liquide appliquée contre l’ouverture de la trompe, cette goutte doit êtrealpirée dans l’inftant; c’eft- à-dire, que la prefiion de l’air extérieur doit la faire en¬ trer fur le champ dans le conduit de la trompe, & l’y faire monter. Mais on demandera peut-être comment la trompe, compofée en grande partie rie membranes molles & fle¬ xibles, peut conferver un vuide dans fon intérieur, com¬ ment lès membranes peuvent le foûtenir contre la pref- bon de l’air extérieur! La réponle à cette difficulté, eft que les membranes font muiculeufès, que ce font de vrais mufcles, dont la force eft confidérable par rapport au volume de la trompe, que la force de ces mufcles eft capable de réfifter à l’aélion de l’air extérieur. Pendant que par la preffion des doigts on contraint une trompe à être gonliée, elle peut conferver fa forme contre une force peut-être plus grande que celle de l’air qui eft ap¬ pliqué delTlis, êc par le moyen de les mufcles, la mou¬ che peut mettre fa trompe dans le même état où la pref fion des doigts la met. Le deffous de la partie qui porte les levres, eft d’ailleurs fortifié par des pièces éeailleufes *, Si le deffus de cette partie eft très-foiide. 6 . e , e . Mais enfin c’elt fur un firop très-épais, peu coulant. Tome IV. . D d * Tome 1 . Aient. V.pag. 24J. 210 MEMOIRES POUR L'HiSTOIRE que nous avons vû la trompe de la mouche appliquée, comment une telle liqueur, malgré l'a ténacité, peut elle monter dans un conduit très-étroitï 11 y a plus, les mou¬ ches ne cherchent pas leulement des liqueurs lucrées, elles font attirées par le lucre le plus dur, & elles fça- vent le fuccer. Les papillons nous ont déjà donné un dénouement de cette difficulté *, que nous avons admiré. Nous avons vû que la nature leur a appris à délayer, & à rendre très-liquides les fubltances vifqueufcs & mê¬ me dures, dont ils doivent le nourrir, & qu’elle les a pourvus de ce qu’il faut pour y parvenir. L’expédient quelle a donné aux papillons, die l’a auffi donné aux mouches. Quand une mouche rencontre un firop trop épais, elle fçait le rendre fuffifamment liquide; quand elle rencontre du lucre très-dur, elle fçait en fondre de petites portions. Elle a dans fon corps une provifion d’une liqueur très-fluide; dans le befoin elle en fait fortir une goutte par le bout de fa trompe; elle ne manque pas de faire tomber cette goutte fur le lucre qu’elle veut met¬ tre en état de palfer dans fa trompe, & fur le firop trop épais pour y être introduit. Une mouche qu’on tient entre les doigts, même fans l’y trop prelfer, fait fouvent voir la liqueur dont nous parlons, elle en conduit une goutte au bout de la trompe. Cette goutte elt ordinai¬ rement très-fluide & très-tranfparente. L’eau verfée, pour ainfi dire, fur le firop, ne s’infi- nueroit pas toujours alfés vite entre toutes les parties, le mouvement des levres de la mouche hâte l’opération ; les levres retournent, manient & paîtriffent le firop, afin que l’eau le pénétre promptement, comme on manie & paîtrit avec les mains, une pâte dure qu’on veut ramollir, en y faifant entrer l’eau qui la couvre. C’efi ainfi encore que la mouche en ufe pour le fucre. Quand la trompe des Insectes. V. Mem. 2 1 r eff obligée d’agir fur un grain d’une figure irrégulière & raboteufe, fur lequel elle ne peut pas s’appliquer com¬ modément, fon bout fe contourne pour le lailir, pour l’embralfer. Quelquefois il ell très-plailànt de voir com¬ ment la mouche retourne le grain en divers fcns; il 1cm- ble quelle joue avec ce grain comme un linge joue avec une pomme; ce n’efl pourtant que pour parvenir à le bien tenir, à le mouiller avec plus de fuccès,& à pom¬ per enluite l’eau qui l’a diffous en partie. Ce n’elt pas feulement lorfque les mouches veulent délayer du lucre ou des liqueurs trop épaiffes, qu’elles font paraître une goutte d’eau au bout de leur trompe, j’ai vû fouvent cette goutte d’eau au bout des trompes de différentes mouches qui venoient de fe ralfafier au point d’être indifférentes pour l’aliment qu’elles avoient cher¬ ché avec avidité. Mais la même goutte que la mouche avoit conduite au bout de fa trompe, elle la faifoit ren¬ trer fur le champ; quelquefois ce manège a été répété fous mes yeux plufieurs fois de fuite,& apparemment ce netoit pas fans nécellité. Il femble que ces mouches, comme plufieurs efpeces de nos quadrupèdes , ayent beloin de ruminer; que pour mieux digérer la liqueur quelles ont fait paffer dans leur eftomach, elles foient obligées de la faire revenir dans leur trompe, pour l’y faire rentrer enfuite mieux préparée. Ce qui paraît ap¬ puyer cette idée, c’elt que j’ai goûté de l’eau qu’avoit ra¬ menée au bout de fa trompe, une mouche qui serait foulée de fucre, & j’ai trouvé cette eau fucrée. Une au¬ tre obfervation m’a encore prouvé plus décifivcment, que la liqueur que la mouche faifoit revenir au bout de fa trompe, étoit celle-là même qu’elle avoit fuccée aupa¬ ravant. J’ai offert de la gelée de grofeille à une mouche qui l’a trouvée fort à fon goût; quand j’ai jugé quelle D d ij 2 12 MEMOIRES POUR L’HiSTOIRE s’en étoit fuflifamment remplie, je l’ai priie doucement par le corps pour confidérer à mon aile le bout de la trompe, & j’y ai vu arriver fuccelfivement plufieurs gout¬ tes d’une liqueur d’un beau rouge, d’une liqueur de la couleur que dcvoit avoir de l’eau très-chargée de gelée de grolèille. Il étoit ailes inutile de goûter celte eau, je l’ai goûtée cependant, & je lui ai trouvé le goût que la couleur lui eût fait croire. La facilité qu’ont les levres de la trompe, à prendre line infinité de ligures différentes, celle qu elles ont à fe gonfler, à le contracter, l'oit en total, loit en partie, montre qu’il eft ailé à la mouche, de les appliquer exa¬ ctement fur les corps des figures les plus irrégulières, quelles peuvent y contenir l’eau que la trompe a lailfé tomber fur les corps qui ont befoin d’être délayés. La plu¬ part des mouvemens des levres tendent à pouffer la liqueur avec laquelle cette eau s’efl mêlée, vers l’ouverture qui lui donne entrée dans le canal de la trompe ; la force & l’agilité de ces levres , nous apprennent encore quelles font en état d’exprimer le fuc dont certains corps font mouillés , par exemple, celui qui humecte les fibres d’un morceau de viande, de raflembler ce fuc, 6 c de le con¬ duire jufqu’où il doit être conduit. La ftructure de la trompe de nos mouches feroit déjà très-admirable, quand il n'entrerait dans fa compofition , que les parties dont nous avons parlé, mais il lui faut plus; elle a befoin d’être munie d’un infiniment dont la conftruction fuppofe bien de la méchanique. Les mouches ne trouvent pas toûjours à leur portée des lues liquides, 6 c tout prêts à être avalés, ou elles ne trou¬ vent pas toûjours des lues épailfis comme le fucre, qu’el¬ les n’ont qu’à délayer avec l’eau quelles jettent par leur trompe. Des liqueurs dont les mouches font friandes. des Insectes.. V . Man . 2 13 font renfermées fous la peau d’une poire, d’une prune, d’un raifin, & fous celle de mille autres fruits. Bien des ef- peces de mouches, dont les trompes n’ont point de four¬ reaux, dont les trompes font telles que celles que nous examinons , n’abhorrent pas le fan g, & elles aiment encore ie lue des chairs des animaux. Ce n’eft pas feulement fur les viandes coupées par morceaux, quelles vont chercher leur nourriture, elles s’arrêtent fur des chairs couvertes d’une peau lèche & ferme, fur la peau des animaux vivans. Quand elles fepofent fur des animaux patiens & peu fen- fibles, ou fur des endroits du corps d’où l’animal ne peut les chaffer, elles viennent à bout d’en lliccer le fang, ou quelqu’autre des liqueurs. Comment la mouche par¬ vient-elle à tirer le liquide contenu dans des vaiffeaux cachés fous les peaux des fruits, ou fous celles des ani¬ maux! La trompe auroit beau afpirer, elle ne contrain¬ drait pas les lues à s’échapper; elle pourrait tout au plus produire une petite élévation de la peau & des chairs qui font deffous, faire en petit ce que les ventoufes font plus en grand; mais pour faire fortir quelque chofe de la chair tuméfiée il faut des fcarifications. Ces réflexions m’ont paru prouver que nos mouches ordinaires dévoient être pourvues d’un infiniment propre à couper ou à percer, qu’elles avoient quelqu’efpece d’aiguil¬ lon. Loii'qu’en été des mouches s’arrêtent fur quelque partie de notre corps, fur nos jambes, par exemple, elles nous fontfentir, au travers même des bas, une douleur femblable à celle d’une picquure, & qui ne reflemble point du tout à celle qui ferait produite par la Ample fuéiion de la trompe. La trompe étant le feul organe par lequel les mouches agiflent fur les corps dont elles tirent leurs alimens, il faut donc quelle foit munie d’une efpece d’aiguillon. Convaincu que la trompe des mouches D d iij 214 MEMOIRES POUR L’HlSTOIRE les plus communes en devoit avoir un, je me luis obftiné à le découvrir ,& j’y fuis parvenu. Sur le deffus de laie- conde partie de la trompe, fur le deffus de celle qui eft terminée par les levres,on peut obferver une partie d’un * PL 16. fig. brun de marron *, qui a du luifant, & qui lémble 5 -â- écailleufe; on pourroit penfer quelle eft un tendon, ou au moins qu’elle fert à foutenir la portion de la trompe fur laquelle on la voit, à lui donner de la foli- dité. Comme je cherchois à trouver un aiguillon, je foupçonnai que cette partie l’étoit, ou quelle le conte- noit. Mon foupçon fut fortifié par la figure même de cette partie, qui diminue infenfiblement de largeur, en s’approchant du bout de la trompe, & qui le termine par une pointe. 11 le fut bien davantage, lorfqu après l’a¬ voir tâtée avec une épingle à pointe fine, pour juger de fa folidité, jem’avilai de chercher à lafoûlever; elle céda * Fig. 7. t,f. aifément, elle fe laiffa féparer * du corps de la trompe, elle fortit d’une coulifTe charnue dans laquelle elle étoit logée. La confiftance de cette partie, fa figure & fil pofition étoient donc celles de l’inftrument dont la mouche peut *Fîg. 7./. fe fervir pour percer. Sa pointe * pourtant me paroiffoit un peu greffe, un peu mouffe, & par-là difficile à in¬ troduire dans les chairs; il me paroiffoit qu’elle ne pou- voit y être introduite, fans faire des blelîures plus con- fidérables que celles que font les mouches auxquelles elle eft propre : ainli il étoit naturel de penfer quelle n’é- toit point une partie fimple, quelle étoit l’étui folide defliné à recevoir un aiguillon extrêmement fin. Elle n’eft auffi que l’étui du véritable aiguillon, mais qui y eft fi bien caché, & fi bien contenu, quoiqu’il n’y foit pla¬ cé que dans une coulifTe, que j’ai defefperé de le trou¬ ver après l’avoir cherché à diverfes repriiès pendant plu- des Insectes. V . Ment . 21 5 fleurs années. C’efl dans les infeétes qui ne viennent que de lé métamorphofer, qu'on découvre le plus aifément certaines parties de la nature de celle-ci ; alors celles qui doivent être dans des fourreaux, ou n’y font pas encore bien ajullées , ou elles n’y tiennent pas autant qu’el- les y tiendront par la fuite. C’efl: de quoi d’autres efpeces d’aiguillons nous donneront ailleurs d’autres exemples. Une groflfe mouche bleue qui n’avoit pris que depuis quelques inflants la forme de mouche, & que je forçai d’allonger la trompe, me lit voir cet aiguillon * qui m’a- *PI. voit échappé jufques-là. Lorfque je foûlevai la partie 13 ‘ z brune *, il s’en fépara de lui-même. Il a plus de largeur que d’épaiflfeur, & depuis fa bafejufqu’à Ion extrémité il devient de plus étroit en plus étroit, pour fe terminer par une pointe extrêmement fine. Sa couleur cfl beaucoup plus claire que celle de l’étui, celui-ci cfl très-brun, & l’ai¬ guillon eh blond. Enfin continuant de me fervir d’une loupe forte, je vis dans la grolfe pièce, l’entaille dans la¬ quelle l’aiguillon peut entrer. Quand l’aiguillon cfl: dans cette entaille, il la remplit parfaitement, Si il y tient fi bien que je n’ai pas réufii à l’en faire fortir, en tentant de l’en tirer avec une pointe fine, ni en coupant l’étui. Cependant les circonflances où il peut être vifible, font plus communes que je ne l’avois cru. Il arrive alfés fouvent, lorfqu’on retire l’é¬ tui de la coulifle charnue *, que l’aiguillon refie cou- * F, ‘ ché fur le fond de cette codifie; on l’y apperçoit com- ^ ’ me un trait un peu brun, Si il efi aile de l’en faire fortir. La partie brune efi même plus grolfe & plus épaif- fe, qu’il ne feroit néceflaire pour conferver l’aiguillon, aulfi cet ufage n’efi pas le feul auquel elle efi defiinée. Quand elle efi logée dans la coulifle charnue,elle fem- He unie à la trompe, faire corps avec elle. La nature a 16. %. 'ft. g-7 & 21 6 MEMOIRES POUR L’HiSTOIRE cherché à l’y tenir bien appliquée 6c bien affujettie, non feulement elle a voulu empêcher quelle ne pût aller à droite ni à gauche, elle a fongé à l’empêcher de s’élever, 6 c pour cela elle a placé près du bout de la couliffe, deux * pi. 16. fig. portions charnues, deux elpeces de mammelons *, qui S&7.7 n,m. v j ennent: f e toucher l’un l'autre au deffus du bout de l’étui de l’aiguillon , êcqui par conféquent le couvrent 6c l’arrêtent. Mais elles ne font que le toucher, elles 11e lui font aucunement adhérentes. Nous avons parlé d’une ouverture que biffent les deux * Fig. 8 & levres entr’elies * près de leur partie antérieure ou échan¬ gée, où fe rendent des ruiffeaux de la liqueur fur la¬ quelle les levres agiffent. C’efl précifément dans cette ouverture que fe trouvent le bout de l’aiguillon , & celui *f de l'on étui *; c’eff là que l’aiguillon elt en état d’agir contre la peau, foit d’un fruit, foit d’un animal, fur la¬ quelle les levres fe font appliquées. Cette ouverture peut * Fig. 8. prendre différentes formes , elle peut devenir plus étroite * * Fig.* 9. ou plus large *; pour l’élargir les levres s’écartent l une de l’autre, ce qui leur efl ailé, parce que là elles ne tiennent point l’une à l’autre; elles y font réellement féparées: mais il ne leur efl permis de s’écarter l’une de l’autre que jufqu’à un certain point, 6c les mouvemens quelles doi¬ vent fe donner en diverfès circonflances, les écartcroient par de-là ce point, fans une bride que la nature a em¬ ployée pour les retenir dans le bel'oin. Cette brille efl di¬ gne d’être connue, c’efl un filet d’un brun prefque noir, qui a l’air cartilagineux, 6; cpii, groffi par la loupe, n’efl pas plus gros qu’une bonne fibre. Cette efipece de filet * Fig. 9.39-7. tendineux efl plié en deux également *; il forme un an¬ gle tantôt plus 6c tantôt moins ouvert, dont la conca¬ vité efl tournée vers la tête. Un de tes bouts efl attaché allés près du bout antérieur d’une des levres, 6c l’autre efl DES I N S E C T E S. V. Mem. 2 17 eft attaché fémblablcment à 1 autre levre. De-là il eft évi¬ dent que lorfque les bouts antérieurs des levres fe tou¬ chent , l’angle que font entr’elles les deux moitiés de ce ligament, eft très-aigu ; que cet angle croît à mefure queles levres s’écartent l’une de l’autre; mais que lorfqu el¬ les veulent s’écarter trop, le ligament les arrête, & que peut-être il fert à les ramener l’une contre l’autre, quand la force qui les féparoit s’eft affaiblie; peut-être a-t-il en¬ core un autre ufage, peut être donne-t-il un appui fo- lide à l’aiguillon. Un filet brun de même couleur, & qui femble de même nature que celui qui fait l’office de ligament, bor¬ de & fortifie le contour intérieur de chaque levre. * Lorf¬ que nous nous fournies arrêtés à faire confidérer une mouche qui fucçoit un firop clair, étendu fur un verre tranfparent, nous avons fait remarquer que non feulement onappercevoit une ouverture à la partie antérieure des le¬ vres, mais qu’on en appercevoit encore une, &. même plus grande, à leur partie poftéricure *. L’ufage d’une fi grande ouverture par laquelle je ne voyois rien entrer ni fortir, m’a embarraflc pendant long-temps; auffi cette ouverture n’efl-elle pas réelle, quoique je l’euffe cru telle. Ce qu’il y a de réel, c’eft que les deux levres s’écartent là l’une de l’autre, mais elles ne laiffent pas pour cela en¬ tr’elles un vuide par où quelque liqueur ou de l’air puiffe paffer; cet efpace eft bouché par une membrane, mais fi mince & fi tranfparente, que je n’ai pu l’appercevoir que lorfque le hazard a voulu que j’aye regardé très-oblique¬ ment une trompe que je tenois gonflée entre mes doigts, comme elle eft quand elle fucce. Je reconnus alors que ce que fiait le ligament par rapport au bout antérieur de chaque levre, une membrane le fait pour le contour intérieur de chacune d’elles. Cette membrane eft attachée Tome IV . E e * PI. 16. fig, 9 - * Fig. ’i.y. 2 18 MEMOIRES POUR L’HiSTOIRE au cordon qui les borde; quand les bords intérieurs des levres fe touchent mutuellement, la membrane en queftion eft raccourcie & apparemment pliffée; quand elles veulent s’éloigner l’une de l’autre, la membrane le permet jufqua un certain point, mais elle ne leur permet pas de pafTer outre : dans les endroits où les levres font autant léparées qu’elles le peuvent être, la membrane eft parfaitement étendue, & fi tranlparente qu’elle ne peut être apperçue, à moins qu’on ne la regarde très-oblique¬ ment. Les levres ne laiflent donc entr’elles qu’une feule ou¬ verture , que celle où aboutiftent l’aiguillon & fon étui. C’eft à cette ouverture qu’elles conduifent toute la li¬ queur qu’elles ramaflent, & qu’elles mettent en mouve¬ ment, comme nous l’avons vu faire à des levres qui étoient pofées fur du firop; c’eft là que cette liqueur doit être fuccée :& il eft temps que nous difions que la pompe, *PI. que le fueçoir qui s’en empare, eft cette même partie * que nous n’avons confidérée jufqu’ici que comme l’étui de l’aiguillon; elle eft le feul canal par lequel la liqueur peut monter. On voit fur le bout antérieur & fupérieur *^ de chaque levre, deux petits enfoncemens * qui femblent deux petits trous, mais leur ufage m’eft inconnu ; ils ne donnent l'ortie ni entrée à aucune liqueur, peut-être donnent-ils l’une ou l’autre à l’air. Ce qui me difpoferoit à le croire, c’eft que j’ai trouvé fouvent dans l’intérieur d’une trompe, un filet qui partoit de la tête, qui égaloit la trompe en longueur, & qui fembloit une trachée. J’ai cru voir auffi à l’origine de la coulifte une efpece d’ou¬ verture. Mais la partie que je nomme à prélent le l'uc- çoir, eft la feule par laquelle j’ai vû fortir de la liqueur. Je lui en ai vû jetter de feule, je lui en ai vû jetter de mêlée avec des bulles d’air; je lui ai yû répandre de des Insectes. V. Mem. 21 9 la liqueur dans la couliffe des lèvres; j’ai vû enfuite que cette liqueur a été repompée, & je 11e voyois aucune au¬ tre partie qui la pût repomper, que celle que j’appelle le fueçoir. Mais l’ufage que nous lui attribuons lur des preuves fl peu équivoques, fera encore prouvé par l’ana¬ logie qui fe trouve entre cette trompe, & celle de quel¬ ques autres mouches dont il nous relie à parler. Cette même analogie nous laide incertains fi cet ai¬ guillon qui nous a échappé fl long-temps parfaflnefle *, *PI. i6.fig. n’eft pas cependant lui-même un aflemblage deplulieurs ' 3 ‘ z ‘ aiguillons; la furfàce fupéricure cil cannelée comme l’elt celle des aiguillons compofés, ou des aiguillons raffemblés plufleurs enfemble, que nous ferons bientôt connoître. Outre les parties dont nous venons de tracer une grof- fiére image, combien en entre-t-il d’autres dans la com- pofition de la trompe de ces mouches qui ne femblent faites que pour nous incommoder! Le plus adroit & le plus patient anatomifte trouveroit de quoi s’exercer long¬ temps à démêler les parties employées au jeu de l’aiguil¬ lon , à celui du fueçoir, à allonger la trompe, à en gonfler les levres, à les faire agir avec tant de rapidité. Quand on tient la trompe gonflée, en preflant le corcelct de la mouche, la première partie, celle qui eft faite en enton¬ noir, a une tranfparence qui permet de voir quantité de vaiffeaux, de voir la liqueur qu’on fait entrer dans les uns, l’air & la liqueur qu’on fait pafler dans d’autres. On découvre de chaque côté deux tendons bruns * qui vont * Fig. s , fe terminer au fueçoir, tous les quatre enfemble paroifl- n >hn,i. fent fervir au jeu de l’aiguillon. On voit de même dans l’intérieur, d’autres parties brunes d’un volume plus con- fidérable, qui font un prolongement du fueçoir, & qui font employées à le faire mouvoir *. On en voit encore * Figure 6 . d’autres plus proches de la tête *. Mais nous nous avifons ^p ja ^ E e ij 220 MEMOIRES POUR L’HlSTOIRE trop tard de nous appercevoir qu’on trouvera peut-être que nous ne nous fommes que trop arrêtés à confidérer ics parties d’un fi petit organe. C’eft aux trompes des mouches les plus communes dans nos maifons,que j’ai d’abord cherché un aiguillon, 6 c ce ne font pas celles où il eh le plus facile à trouver. PI uheurs autres efpeces de mouches, 6c entr’autres cer¬ taines efpeces qui, quoiqu’elles n’ayent que deux ailes , ont beaucoup de reflemblance avec les abeilles, en ont un ou même plufieurs, qu’elles ne tiennent pas fi obfii- nément caché dans la codifie. Dès qu’on force ces mou¬ ches d’étendre leur trompe, l’aiguillon, ou comme nous l’avons déjà dit, les aiguillons lé montrent, fe dégagent * PI. 17.6g. de la cavité charnue où ils étoient logés, & s’élèvent *. La fécondé partie des trompes dont nous voulons parler * Fig. i ,n. actuellement, la partie * qui eh terminée parles levres,eh l,l% beaucoup plus longue que la première partie, ou que *defn. celle qui eh conique * , 6 c elle eh capable d’être plus al¬ longée lorfqu’on prefie le corcelct, que ne l’eh la partie des mouches de la viande qui lui eh analogue : elle a en * Fig. 1 & defliis , comme cette dernière , une coulilfe * dont l’u- '■ fage eh le même, c’eh-à-dire, de loger l’aiguillon ou les * Fig. i.f aiguillons *. Lorfque par la preffion du corcelet on force cette partie de s’allonger beaucoup , elle s’applatit un * Fig- -• peu , & la codifie s’ouvre * ; on s’arrête volontiers alors à confidérer près de chacun des bords des côtes de cette *2>g- codifie, un cordon * noir, une efpece de tendon qui fert à les fortifier, 6 c qui va enfuite border le côté in¬ térieur des levres; on remarque dans le fond de la mê- :f h > h - me codifie deux autres cordons noirs * parallèles aux précédens, ou, pour parler plus exactement, un cordon dont les deux moitiés font parallèles l’une à l’autre, & qui, afin quelles prennent cette pofition, fe recoude des Insectes. V. Mem. 221 vers l’extrémité de la codifie; laies deux levres s’écartent l’une de l’autre, Si laifTent entr’ellcs une grande échan- crûre. Les parties qui étoient renfermées dans cette cou- liffe, lont donc alors en liberté, rien 11e les retient, Sc l’effort qu’on fait contre la trompe, tend à les faire dreffer. Au lieu d’une lèule ou au plus de deux parties qu’on tire avec peine de la codifie des mouches de la viande, on en voit fortir fix,prefque naturellement des autres trom¬ pes *. Toutes ces parties font brunes, cartilagineufes, * PI. 17.% ou comme écailleufes, incapables d’allongement, Si par ** conféquent de fuivre la codifie quand elle devient plus longue. Elles font placées deux à deux *, & cela parce qu’il y * k, /; k, /; en a trois *, dont chacune efl deflinée à fervir d’étui à une d e ’ des trois autres; elles font potées fur la même ligne; les ' deux pièces du milieu font plus longues au moins d’un quart que celles des côtés. Deux de celles-ci * font cour- * h, k. bées en goutiére, elles fe terminent par une pointe; leur contour efl bordé de poils roux; dans chacune de ces pièces en goutiére peut entrer une des autres pièces* des *’>*• côtés. Celles-ci plus larges qu’épaitfes, diminuent de lar¬ geur depuis leur origine jufqu’àleur extrémité,qui efl une pointe très-fine. La figure de ces dernières pièces, & la matière dont elles font faites, veulent que nous les pre¬ nions pour des aiguillons; car il efl à remarquer que ce que nous ne fçavons faire qu’avec des inflrumens d’acier, la nature le fait faire aux infeéles avec des inflrumens d’une efpece de corne ou d’écaille;les aiguillons, les tar- rieres, les fcies, &c. des infeéles, car ils ont des inflru¬ mens de toutes ces efpeces, font tous d’une matière ana¬ logue à la corne. Dans le premier inflant de la preffion, il ne paroît quelquefois qu’une feule pièce placée entre les quatre E e iij 222 MEMOIRES POUR L’HlSTOIRE dont nous venons de parler, elle femble fimple; mais dès qu’on la confidére attentivement, dès qu’on cherche à la * Pi. 17.%. développer, on reconnoît quelle efi: au moins double *, que là ell un étui dans lequel efl logée une lame platte 6c cartilagineufe comme l’étui, & dont le bout efl une pointe très-fine, & que par conféquent cette dernière pièce efl: encore un aiguillon, & même le grand, le plus confidé- rable aiguillon. Cet aiguillon n’a qu’une de fies deux grandes faces qui foit cachée dans l’étui ; les bords de ce¬ lui-ci recouvrent feulement un peu les bords de l’autre face; mais cet aiguillon 6c les deux petits n’ont befoin, pour ainfi dire, que de demi-fourreaux, parce que la * Fig. 4. r, r. codifie * de la trompe,dans laquelle ils font logés ordinai¬ rement, cache ce que des fourreaux peu complets Jaiffent découvert. * e> ; f i. Ces fortes de trompes ont donc trois aiguillons *, cha¬ cun defquels a fon étui particulier. On demandera peut- être à quoi peuvent fervir les deux petits aiguillons! Le plus long efl: toujours celui qui doit percer le premier, mais les autres aident apparemment à aggrandir les trous qu’il a ouverts. Quand la mouche les fait agir tous trois, ils ne font pas écartés les uns des autres, 6c relevés,com¬ me nous les avons fait repréfenter, afin qu’on les pût voir; ils font tous contenus dans la coulilfe, & par con¬ féquent réunis les uns auprès des autres comme dans un ? Fig. 1. f. paquet *; alors la partie de la trompe qui efi; terminée par les levres, n’eft pas allongée au point où elle l’eft dans la figure 4, elle n’a alors qu’une longueur telle que les petits aiguillons peuvent atteindre par de là l’origine des levres. Celles-ci étant appliquées fur le corps dont la mouche veut tirer le fiuc , les trois aiguillons font en état d’agir contre le corps, de percer les vaifleaux qui con¬ tiennent le fluide que la mouche veut fuccer. des Insectes. V. Mem. 223 Ail refle, ce que nous avons dit de l’étui de l’aiguil¬ lon des mouches de la viande, nous le devons dire de l’étui * du plus grand des aiguillons des trompes que nous confidérons. Cet étui n’eff pas uniquement deftiné à con¬ server un inftrument délicat, il a un ul'age plus impor¬ tant , il elt le fucçoir, le canal par lequel monte la li¬ queur qui entre dans le corps de la mouche. On s’affure ailé ment qu’il a une ouverture fuffîfante pour donner paflage à la liqueur, puifqu’il en lai (Te Sortir d allés grof- lès gouttes Souvent mêlées de bulles d’air, lorlqu’on for¬ ce la trompe à s’étendre. D’ailleurs on a beau confidérer les autres endroits d’une trompe très-gonflée, & la gon¬ fler exceflivcment par la preflion, pour rendre toutes Ses parties Senfibles, on n’y apperçoit aucune ouverture; Sa partie charnue n’en a réellement aucune même capable de laifler échapper l’air : ce qui le prouve, & qui prouve en même temps que l’air ert employé en grande partie à gonfler la trompe, c’eft que quand onia force d’être dif- tendue par-delà un certain point, on entend un petit bruit tel que celui d’une veflie que l’air trop prefle a fait crever ; & fur le champ la trompe s’affaifle, & devient in¬ capable detre gonflée. Enfin, fi on obferve cette par¬ tie que nous voulons être le fucçoir, on peut apperce- voir qu’elle n’efl pas entièrement de nature de corne; Son côté inférieur *, celui contre lequel l’aiguillon s’appli¬ que, a quelque chofe de charnu; on découvre même un petit bourlet de chair * aflès proche de fon extrémité, qui paroît comme le bout d’un tuyau charnu. Son bout au refle n’efl pas terminé par une feule pointe, comme l'eft celui des autres étuis, au lieu d’une pointe il en a deux,* mais placées différemment, il efl courbé en goutiére, & de chacun des bords du bout de la goutiére part une pointe. * pi. 17. fig, 4& s f- * Dg- S* * Fi g- 4 -/* *P 1 .17. fi, 8 . * PI. l 8 .fi; 2 . * 1 , 1 . Z24. MEMOIRES POUR L’HiSTOIRE Entre les mouches qui ont une trompe charnue, il n’y en a point de plus affamées de fang que celles qu’on nomme des taons', elles font bien connues dans la cam¬ pagne. Elles ont befoin plus qu’aucunes mouches à deux ailes, d’être pourvues d’inftrumens propres à percer, puis¬ que c’efl deffous lcpaiffe 6c dure peau des bœufs 6c des chevaux qu elles doivent puifer le làngdont elles fenour- riffent. Il y a au moins deux efpeces de ces mouches, g . dont l’une qui efl la plus grande *,paroît au printemps, ou dès le commencement de l’été, 6c c’efl vers la fin de g. la même failon que la plus petite * incommode les be- ftiaux à la campagne. J’ai trouvé fur des fleurs une autre efpece de petits taons verdâtres, qui avoient les yeux d’une couleur uniforme, au lieu que ceux de la petite efpe¬ ce qui cherche les bœufs, ont fur les yeux des couleurs i. difpofées comme celles des bandes de point de Hongrie *, 6 c ont le corps plus brun. Lors même que ces mouches ne font point ufage de leur trompe , elles ne la tiennent point cachée, elles fe contentent de la tenir un peu rac¬ courcie *. Elle elt alors perpendiculaire au deffous de leur tête, 6c reffemble affés à un petit clou qui en forti- roit. Il n’a point été accordé aux taons d’avoir une cavité dans laquelle ils puiffent faire rentrer leur trompe ; cepen¬ dant, dès qu’elle efl charnue comme celle des mouches dont nous avons parlé ci-devant, elle femble avoir autant de befoin d’être mife à couvert. Audi la nature n’a-l’elle pas oublié de défendre la trompe des taons contre les frottemens des corps étrangers, ou au moins d’en défen¬ dre la partie fupérieure qui demande le plus à être défen¬ due, mais elle l’a fait par un autre moyen. Nous avons dit (pie les mouches de la viande portent fur la première partie de leur trompe deux efpeces d’antennes, dont l’u- fàge nous efl inconnu; nous avons négligé d’avertir que les des Insectes. K Mem. 225 îcs trompes des mouches à plufieurs aiguillons, que nous avons examinées ensuite, n’ont point du tout d’antennes. Mais nous ne pouvons nous difpenfer de faire connoître deux efpeces d’antennes, ou plutôt de greffes barbes * qui ont été principalement données aux taons pour la confervation de leur trompe; elles forment une efpece d’étui à fa partie fupérieure. Elles tirent l’une & l’autre leur origine de la tête, * affés près de celle du deffous de la trompe. A peu de diftance de l’endroit d’où elles par¬ tent, elles ont une articulation après laquelle elles aug¬ mentent de diamètre alfés brufquement, & en diminuent enfuite jufqu’à leur extrémité : elles font blancheâtres & recouvertes en grande partie de poils courts. Quand la trompe eft dans l’inaélion, les deux efpeces d’antennes, ou les deux greffes barbes font appliquées l’une contre l’autre, & pofées fur la partie fupérieure de la trompe. Ces barbes confervent le deffus de la trompe des taons, comme nous avons vû ailleurs que d’autres barbes con- fervent les côtés des trompes des papillons. Au refie, la ftrudlure du corps de la trompe des taons a beaucoup de rapport avec celle du corps des trompes des mouches à plufieurs aiguillons, que nous avons décrites ci- devant ; elle en diffère pourtant en ce que fa première par¬ tie , celle en entonnoir, eft extrêmement courte, & à peine fenfible. Les levres peuvent beaucoup s’ouvrir, s’écarter l’une de l’autre. A la partie antérieure de ces trompes on trouve une couliffe * profonde, placée comme l’cft celle des autres trompes; mais pour la voir il faut relever les deux barbes * : on apperçoit aifément alors qu’elle eft remplie par un corps brun & luifant,qui doit être l’in- ftrument ou faffemblage des inftrumens deftinés à percer les peaux les plus dures. Si pendant qu’on tient un taon entre deux doigts, on obferye le bout de fa trompe. Tome IV . F f * PI. T 7. fig, 9, IO & II. pi. 1 8 . fig-2, 3,4-k * PI. 17. figi I I./. * PI. 17. fig* I I. * b. 2 i6 Meoires pour l’Histoire fouvent on voit qu’il porte par-delà le bord des levres ,une *Pi. 18. fig. groffe pointe brune * & un peu nîouffe, dont le con- 3 •/* tour eft oval : elle a un peu plus de diamètre d’un côté à l’autre, que de defl'us en deffous. Il retire enfuite cette pointe en arriére pour la reporter enfuite en avant; elle eft celle du corps contenu dans la couliffe. On a beau la regarder avec une loupe forte, elle paroît une feule & * Fig. 4. t. unique pièce * ; elle eft pourtant l’affemblage de fix piè¬ ces différentes, mais fi bien ajuftées les unes contre les autres, que les endroits des jonétions ne paroiffent point. Néantmoins on vient à bout affés aifément de voir tou¬ tes ou prelque toutes ces pièces, foit en tentant de les féparer avec quelque pointe line, foit en preffant outre mefurela trompe ou fes environs. Alors fe montrent plu- » Fig. j. c, fieurs lames minces *, luifantes,d’un brun plus clair que *>S' le marron , toutes terminées par des pointes fines, & dont *c,e,e t g. quatre* font plattes,& faites comme des lames de lan- cette, & dont les deux autres * font pliées en goutiére. Mais pour les faire mieux connoître, & leur arrangement, *dc. nous ferons remarquer que la fupérieure * cil la plus large de toutes; elle eft auffi la moins mince; elle n’elt pasab- folument unie; on diftingue quatre cannelures fur cha- * Fig. 6 .d c. cune de fes faces * ; fa face inférieure, ou celle qui eft tournée vers la coulilïè, eft un peu concave. Contre fa furface concave font appliquées les deux lames les plus * Fig. s.e,e. minces *; quoique plus étroites que la première , elles ne le font pas à un tel point qu’elles n’ayent befoin de lé croifer, & même beaucoup, pour ne pas déborder celle qui les doit couvrir. Ces deux ici font celles qui font le mieux fûtes en lancette, qui font les plus minces ; & elles * Fig. 7. f. font fi liffes *, & d’une fubltance fi égale, qu’on n’y ap- perçoit pas la moindre fibre. Les deux pièces pliées en 5 ë out ‘^ re * f° nt les plus étroites ; elles font pofées fur les des Insectes. V . Mem . 227 côtés, & c’eft dans la goutiére * de chacune de ces pièces, * pig. 8 ./h. que le loge de chaque côté le bord de la pièce fupérieure, & le bord extérieur d’une des pièces les plus minces,ou de celles qui font appliquées contre la précédente. En deffous les deux pièces en codifie laiffententr’elles un elpace qui eft rempli par une fixiéme pièce *, à peu près de la lar- i* Fig. j.g, geur des plus minces, mais celle-ci eft prefqu’auffi épaifle que la pièce fupérieure. Dans fon milieu & dans toute fa longueur elle a une groffe nervure, une efpece de cordon dont le relief eft fur fa face extérieure *, Toutes * R g , 5 ; ces pièces font de corne, ou d’une fubftance analogue; toutes, comme je l’ai dit,font terminées par des pointes fines, toutes font donc des outils capables de percer, & il y a apparence qu’elles y font toutes employées, & qu’el- les peuvent y travailler féparément, & peut-être auffi plu- fieurs enfemble. Les deux plus minces, celles qui ont le mieux la forme de lancette, femblentêtre celles qui doi¬ vent commencer à ouvrir la peau ,& s’y introduire les pre¬ mières. Pour être minces, elles n’en font que plus pro¬ pres à percer; plus un inftrument eft mince, s’il n’efl point en rifque de plier, & plus il eft en état de péné¬ trer avec facilité dans des corps durs. Toutes nos la¬ mes minces font très-bien foûtenues; la codifie charnue les maintient toutes & les conferve réunies; d’ailleurs la pointe de la lame qui agit, eft foûtenue par les lames qui font en repos. Ce n’eft au refte que la figure & la difpofition de ces aiguillons en lames, qui nous peuvent faire juger de la ma¬ nière dont ils agiflent, car on ne peut pas efpérer d’ap- percevoir leurs mouvemens fous la peau qu’ils ont per« cée. Ils ne font pas uniquement deftinés à ouvrir des vaifleaux pleins de fang; leur aflemblage forme le corps de pompe qui conduit dans i’œfophage du taon le fang 22 S MEMOIRES POUR L’HiSTOIRE de ces mêmes vaiffeaux. Lorfque les aiguillons intérieurs font dardés pour pénétrer plus avant l'ous la peau du bœuf, & lorlqu’ils en font lubitement retirés en arriére, ils font probablement i’offîce de pillons afpirans ou re- foulans, & peut-être font-ils l’office & des uns & des au¬ tres; il en elt peut-être de même des aiguillons des autres mouches dont nous avons parlé ci-devant. Ce qui me paroît au moins très-certain, c’elt que l’af- femblage de tous les aiguillons fait le conduit par lequel iefang de l’animal picqué, monte dans le corps du taon, que ce fang 11e paffie point par quelqu’ouverture placée entre les levres. Je vais rapporter l’oblèrvation qui m’en a convaincu. Vers la mi-Septembre, me trouvant dans lin chemin difficile, où dix bœufs tiroient ma breline, je mis pied à terre; quantité de taons de la petite elpece étoient alors fur ces bœufs; & je regardai comme une bonne aventure de ce qu’il y en eut un qui voulut bien donner la préférence à ma peau. Je vis voler un taon fur le delfus de ma main, & il 11’y fut pas plutôt pofé que je fentis fa picqûure. La douleur fut legere, & eût-elle été confidérable , elle ne m’eût pas déterminé à le troubler dans fon opération, j’étois trop aife d’avoir la plus favo¬ rable occahon que je puffie fouhaiter, d’obferver com¬ ment ces mouches font agir leur trompe; les poils du bœufle plus patient & le plus tranquille, 11e m’euffient pas permis de voir ce que je pouvois voir fur ma main. Muni d’une forte loupe, 8 c maître de mettre ma main dans la pofition la plus convenable, j’obfervai à mon aife le taon pendant qu’il bûvoit mon fang avec avidité. Sa trompe n’étoit pas plus allongée qu’elle l’cft dans l’état naturel, mais fes levres très-ouvertes, très-écartées l’une de l’autre à la partie antérieure, étoient pofées fur le bord de la playe qui yenoit d’être faite; elles en étoient entièrement des Insectes. V . Mem . 229 dehors, & le fang ne paroiffoit nullement venir auprès des levres , il n’arrivoit point jufqu au bord de la playe : les levres ne fembloicnt fervir qua donner un appui folideà la codifie qui maintenoit la partie compofée des aiguillons, Si qui forme le corps du fueçoir. Peut-être fervoient^elles de plus à prdfer le contour de la piaye pour aider le fang à s’y rendre Si à en fortir. Une des grolfcs barbes blanches, une des antennes de la trompe, appuyoit de temps en temps fon bout fur le defïus du fueçoir; elle y donnoit de petits coups comme le Chirurgien en donne quelquefois avec le bout de l'on doigt fur un vaifTeau au delFus de l’ouverture qu’il y a faite, pour déterminer le fang à fqrtir plus vite. Malgré toute mon attention, je ne pus diftinguer les pro¬ grès que le fueçoir faifoit en avant, parce que la coulilfeme le cachoit en grande partie; mais des redoublemcns de douleur que je lèntois d’inftant en inflant, m’apprenoient qu’il pénétrait davantage, ou que les aiguillons redou- bloient leur jeu. Enfin quatre à cinq minutes s’étant paf- fées fans que le taon me fît rien fentir ni voir de nou¬ veau, je priai une perfonne qui étoit auprès de moi, de le retirer promptement pendant que je ne difeontinuoîs pas de l’obferver. Mon intention étoit de voir la longueur de la portion de l’inffrument quiavoit été enfoncée dans ma chair, Si comment fon bout étoit difpofé alors; mais je ne vis fur tout cela qu’une partie de ce que je defirois voir. Cet infiniment tient de la figure conique, avant que d’être forti du trou qu’il a fait, il ceffe de le remplir; aufîi n’étoit-il pas encore hors de la playe, que le fang parut fur fes bords; Si quand il en fut entièrement forti, une greffe goutte de fang vint la couvrir. Quand j’eus em¬ porté cette goutte, je vis que la picqûure avoit plus de diamètre que n’en eût eu celle qui eût été faite par une très-greffe épingle. Je pris enfuite le taon des mains de la F f iij 2 .]C> MEMOIRES POUR L’H f S T OI R E perfonne qui s en étoit faifie. A peine i’eus-je un peu manié , qu’il rendit par le derrière une partie du fàng dont il serait gorgé; la quantité qu’il en rendit furpaffoit beaucoup celle que j’aurois cru pouvoir être contenue dans Ton corps. Il y en avoit de quoi faire plus de iept à huit bonnes gouttes. Auffi les taons qui ont jeûné ont le corps plat, 6c quand ils fe font raffafiés de fang, ils l’ont gonflé 6c prefque rond. Au relie je n’ai rapporté l’obfer- vation précédente, que parce quelle prouve décifive- ment que cette partie compofée de tant d’aiguillons, de tant de lames écailieufes, ell le vrai fueçoir, la pompe de la mouche. Quoique les taons aiment le lang, ils ne laiffent pas d’aimer les liqueurs fucrées, ils font du goût de prefque toutes les mouches à trompes; j’ai donné du lucre, ou du lucre diffous dans l’eau à des taons de la grande 6c de la petite efpece qui s’en font fort bien accommodés, 6 c j’ai obfervé que pendant qu’un des premiers fueçoit du firop, il tenoit fa trompe entre fes deux greffes barbes. EXPLICATION DES FIGURES DU CINQUIEME MEMOIRE. Planche XVI. jpRefque toutes les Figures de cette Planche 6c des deux fuivantes, repréfentent des parties vûes à la loupe ou au microfcope; cet avertiffement général nous dilpenlè de i’avertilTement particulier qui aurait été répété trop fou- vent : nous n’aurons qu’à faire remarquer quelques Fi¬ gures qui font de grandeur naturelle. Nous avertirons encore que toutes les figures de cette planche 16, excepté fes figures io, i i 6c 12, font deffinées d’après les têtes6c les trompes des greffes mouches bleues de la yiande. des Insectes. V Mem . 231 La Figure première repréfente la tête de la mouche vûe de face, a, a, les antennes./?,/?, poils des antennes. /, 7, ies yeux, c, cavité dans laquelle la trompe eft retirée. /, le bord des levres de la trompe. La Figure 2 montre la tête plus en deffous. c f c e, contour de la cavité dans laquelle la trompe eft contenue. /, le bord ou la tranche des levres. Au deffus de e, paroît line partie écailleufe qui appartient au deffous de la tige tle la trompe. La Figure 3 fait voir la trompe fortie de la cavité, niais qui n’eft pas étendue, & dont la partie conique fait un angle avec la partie qui eft terminée par les levres. a, a , les an¬ tennes. /, un des yeux à rezeau. f, le bord fupérieur de la cavité. b,b, les deux antennes ou barbes de la trompe, dn, la partie conique de la trompe, n 0, la partie terminée par les levres./, les levres appliquées l’une contre l’autre, &qui font ici une efpece de crochet avec la tige. 0, l’endroit où aboutiffent l’aiguillon de le fueçoir de la mouche. La Figure 4. eft celle d’une trompe gonflée & étendue en ligne droite, vue de côlc. fdn, la partie conique, no, la partie qui eft terminée par les levres. En deffus, en o n, eft la coulifle dans laquelle l’aiguillon & fon étui font ca¬ chés. /, les levres qui font encore ici le crochet avec leur tige, b, b, les deux barbes de la trompe. Dans la Figure 5 la trompe eft vûe par-deffus & allon¬ gée, ayant fes levres gonflées, d, d, bafe de la partie coni¬ que de la trompe. On n’a repréfenté ici qu’une portion de la tête, que la portion où eft la cavité d’où la trompe fort, o, a, les deux foffettes où les antennes font fouvent couchées, b, b , les barbes. /, /, les levres gonflées, m, ni, deux petits mamraelons charnus qui recouvrent & arrê- 232 MEMOIRES POUR L’HlSTOIRE tent le bout de l’étui de l’aiguillon./^ l’étui de l’aiguillon dont on ne voit que la furface fupérieure, parce qu’il elt logé dans Ta couliiïe charnue. Près de n, n, eft la bafe de l'étui de l’aiguillon, n, 71, deux filets noirs qui font dans l’intérieur de la trompe, Sc que la tranfparence permet de diftinguer. i, i, deux autres filets noirs comme les pré- céden s.f,f partie brune qui eft encore dans l’intérieur de la trompe. La Figure 6 repréfente la trompe étendue & vue par- deflbus. g, l’endroit où eft le col de la mouche, d d, bafe de la partie conique de la trompe, l’endroit où elle fort de cette cavité dans laquelle la mouche la loge quand il lui plaît, h, h , parties brunes qui font en dedans de la trompe, & qui font vûes au travers de fes parois tranf- parentes. b, b, les barbes, n, l’endroit où la trompe fe plie. e, e, parties du deftous de la trompe qui lont brunes de ccailleufes. I, l, les levres. La Figure 7 eft deftinée à faire voir la couliiïe char¬ nue dans laquelle l’étui de l’aiguillon eft logé ordinaire¬ ment. t f, cet étui qui eft relevé & hors de la couliiïe. r, r, la couliiïe qui eft ouverte ici. Elle ne le paroît que jufqu’en m m, où deux mammelons charnus fe touchent, & empêchent la pointe f de s’élever quand elle eft fous ces mammelons. La Figure 8 montre le bout d’une trompe, ou lès deux levres gonflées. I, 4 les deux levres. y, leur partie inférieure. Près dy on voit un endroit qui lemble percé, & qui ne l’eft pas; il n’eft rempli que par une membrane très-mince qui fert de bride aux levres, qui les empêche de s’écarter trop l’une de l’autre. Au deftous de 0 eft l’ouverture où aboutit la pointe de l’aiguillon, & où fe rend la liqueur pouiïfée par les levres. des Insectes. V. Mem. 233 La Figure 9 fait encore voir le bout de la trempe, mais dans une autre pofition, & dans un autre état, & avec partie de fa tige./, 4 les deux levres qui font ici écar¬ tées l’une de l’autre, & laiffcnt un vuide entrelles au milieu du difque. On peut remarquer le filet noir qui horde leur contour intérieur, q, q, deux portions d’un filet noir qui font enfemble un angle plus ou moins aigu, fé¬ lon que les deux levres de la trompe font moins, ou plus écartées l’une de l’autre./' t, partie de l’étui de l’aiguillon. La Figure 10 efi celle d’une mouche de grandeur na¬ turelle, dont la tête fe prolonge en b, & forme une efpece de bec, qui a en deffous une codifie propre à contenir la trompe. Je 11e connois point encore le ver de cette mouche, parce que j’ai perdu une occafion que j’ai eue de le connoître. Cette mouche m’efi née dans un poudrier où j’avois renfermé de la bouze de vache avec des vers qui s’en nourriflent. Dans cette même matière étoit fans doute le ver qui s’eft transformé dans la mouche dont il s’agit ici : mais ce ver m’avoit d’autant plus aifément échappé, qu’il étoit le feul de fon efpece qui avoit été renferme avec ceux d’une autre efpece, que je m’étois propofé de fuivre. La mouche a le corcelet brun, & le corps d’une couleur plus claire que le marron. Ses antennes font des palettes lenticulaires. La Figure 11 repréfente la tête de la mouche de h figure précédente, vue par-defious & grofiîe. On y voit la codifie c c, deftinée à loger la trompe, t, la trompe hors de la codifie. La Figure 12 efi: celle du bout d’une trompe d’une mouche d’une efpece différente de celle de la mouche, dont le bout de la trompe efl repréfenté fig. 8. 1 ,1, les Tome IV. . G g MEMOIRES POUR L’HiSTOIRE levres. y, la partie inférieure qui dans cette trompe efl; échancrée comme la lupérieure. La Figure 1 $ efl: encore celle de la trompe d’une groffe mouche bleue de la viande, dont la partie termi¬ née par les levres efl allongée, & dont la partie en enton¬ noir n’efl pas entièrement fortie de fa cavité. 11 , la jon- dlion de la partie conique avec l’autre, f r, l’étui de l’ai¬ guillon , & qui efl en même temps le fucçoir. £, l’aiguillon hors de l’on étui. Planche XVII. Les fept premières Figures font employées à faire con - noître les parties qui appartiennent aux trompes des mou¬ ches à deux ailes, en forme d’abeilles; on trouve une de ces mouches repréfentée pi. 20, fîg. 7; & on en trouve d’autres repréfentécs dans les Planches du Mémoire xi, qui donne i’hifloire des mouches de ce genre. La Figure première repréfente une trompe de ces fortes de mouches, qu’on a contraint de s’allonger en preffant le corcelet ou la tête de la mouche. /, /, les deux levres que la preflion a obligées à fe gonfler, & à montrer leur furface cannelée plus quelles ne la montrent naturelle¬ ment. Quand les levres font dans l’inaélion, la Furface cannelée de l’une efl appliquée contre la furface cannelée de l’autre, f, l’étui du grand aiguillon qui paroît feul aéluellement, les deux petits aiguillons & leurs étuis étant cachés dans la coulifle, O11 voit que le grand aiguillon peut aller jufqu’aux levres & par-delà, quand la trompe n’eft pas trop allongée, c, d, rebord de la cavité dans la¬ quelle la trompe peut rentrer, c f n, la partie conique de la trompe, n, l’endroit où la partie conique s’articule avec la tige des levres. des Insectes. V. Mem. 23 5 La Figure 2 fait voir par-defiiis une trompe très-éten¬ due, 6c gonflée à tel point, qu’on a obligé la coulifle des aiguillons à s’ouvrir, 6c à laifler les aiguillons en arriére. g, g, de ux filets noirs, dont un borde la coulifle dechaque côté, quand elle a bien la forme de goutiéi e. h, h, deux autres filets qui font près du fond de la goutiére. I, /, les Jevres. On peut remarquer qu’elles font bordées par un filet noir qui femble être un prolongement des deux filets g,g-f, le grand aiguillon qui efl ici dans fon étui, k, h, les deux petits aiguillons couverts aufli chacun de leur four¬ reau. Quand la trompe n’efl pas plus allongée qu’elle ne le doit être, les aiguillons f, k,k, fc trouvent dans la cou- iifleg,^'. Vers n efl la fin de la partie conique no. Les parties brunes />, font dans l’intérieur de la trompe, 6c fervent au jeu des aiguillons, ou des fueçoirs. La Figure 3 efl celle d’une tête de mouche, dont h trompe efl rentrée dans la cavité deflinée à la loger, c dd t contour de cette cavité. 4 bord des levres de la trompe. Dans la Figure 4. on voit les parties de la trompe des figures 1 6c 2, dans de tout autres pofitions. I, l les deux levres. r, r, la coulifle. f, l’étui du grand aiguillon, 6c que je crois être aufli le fueçoir. e, le grand aiguillon. h , k , les deux fourreaux des petits aiguillons, i, i, les deux petits aiguillons. La Figure 5 montre de côté l’étui du grand aiguil¬ lon, dans lequel cet aiguillon efl logé en partie. l’étui. e, l’aiguillon. Mais 011 voit de plus en 0 une elpece de tuyau charnu que je regarde comme le fueçoir, comme îa bouche, fi l’on veut; c’efl par l’ouverture 0 que la li¬ queur pafle pour fe rendre dans le corps de la mouche. La Figure 6 reprélènte à plat 6c de face l’aiguillon qui efl G g fl 2]6 MEMOIRES POUR L’HiSTOIRE vu de côté dans la figure précédente, e b b, cet aiguillon, au milieu, & tout du long duquel régné une cannelure. La Figure 7 efl celle de la trompe vue par-deffous. ?idJj fil partie conique, e, e, pièces écailleulès qui forti¬ fient la partie la plus proche des levres. I, /, les levres. C’efl dans l’angle f & près de fion fiommet, que les ai¬ guillons aboutiffent. ' La Figure 8 efi celle d’un taon de la grande efpece, d’un de ces taons qu’on voit au printemps. La Figure 9 repréfiente la trompe de ce taon vfie par- deflus,& un peu plus allongée qu’elle ne l’efl naturelle¬ ment. 4 4 les deux levres. fb,f b, deux grofies barbes qui font un fourreau à la partie fiupérieure de la trompe lorfi- qu’elle n’efl pas allongée. Dans la Figure 10 la trompe du même taon efl vue de côté, & moins allongée, f b, une des barbes. Les bouts des deux barbes vont jufiqu’aux levres. lo,\e s levres qui font le crochet avec la tige d’où elles partent. La Figure 11 montre une trompe de côté, dont une des barbes //' efl relevée, au moyen de quoi une moitié de la coulifîè des aiguillons efl mife à découvert. On voit auffi en f que la barbe y efl plus déliée qu’ailleurs, & quelle fe dirige pour aller trouver la tête en deffous de la trompe. En /les levres font appliquées contre leur tige, de manière quelles y femblent unies, on n’entre* Voit qu’une legere fente. Planche XVIII. La Figure première efl celle d’un taon de la petiteef- pece, dans une pofition qui montre que fion port d’aîies efl en toit. des Insectes. V . Mem . 237 La Figure 2 représente la tête du même taon, b, une des barbes de la trompe. I, les levres recourbées & appli¬ quées contre leur tige. Il n’y a point de cavité en devant delà tête,dans laquelle cette trompe puiffe rentrer, elle eft toujours aufTi allongée qu’elle le paroît ici. i, i, un des yeux qui dans Ton rezeau a des ondes de différentes couleurs. La Figure 3 ne repréfente de la tête que la partie d’où la trompe fort, & fait voir l’aiguillon ou le paquet d’aiguillons, qui, comme lorfqu’il picque, va plus loin que les levres. f, le paquet d’aiguillons. I, les levres. La Figure 4 a été deffmée d’après la tête du taon de la figure 8. pl. 17. i, un des yeux qui 11’a point les ondes qui paroiffent fur l’oeil de la figure 2. b, line des barbes; l’autre barbe a été coupée en 0. La barbe 0 ayant été coupée, & la barbe b étant relevée, on voit l’aiguillon, ou le paquet des aiguillons e , qui eft ici hors de la cou- iiffe, clans laquelle il eft caché, pl. 17, fig. 1 1. /, les levres appliquées contre le deffous de leur tige. La Figure 5 fait voir les pièces qui font raffcmblées en €j fig. 4, écartées les unes des autres, b, b, endroit où les barbes de la trompe ont été coupées, c à la pièce qui cou¬ vre tous les aiguillons par-defTus; on l’a coudée en d pour la relever davantage, e , e , les deux aiguillons les plus min¬ ces, & faits en lame de lancette, f f, les deux aiguil¬ lons à couliffe. g, la lame de deffous. La Figure 6 eft celle de la partie c d de la piece mar¬ quée par les mêmes lettres, fig. 5. Comme elle eft plus groffie dans la figure 6 , on y voit mieux fes cannelures. La Figure 7 eft celle d’un des aiguillons en lame de lancette, marquée e, fig. 5. G gfij 2 ^ 1 S MEMOIRES POUR L'HiSTOIRE La Figure 8 efi celle d’un des aiguillons à couliflc marqué f, fig. )■ E nf h on voit la coulifie deftinée à re¬ cevoir un des côtés de chacun des aiguillons en lame de lancette. La Figure 9 eft celle de la piece de defious marquée g, fig. ygr montrent la coulifié qui régné tout du long de cette pièce. e,f e, f font les relies des aiguillons en la¬ me de lancette, & des aiguillons à coulifié qui ont été coupés. 1 t i0. yaij-j.38, i JTi Jâ~-c/tUf Xrtet*c3&f. Ti>rri Ftq . S. a a ■Ftq O. I ' ft-SW frtif 0B des Insectes. VI. Mem. 239 SP I P» t « « J«{i=5 J$«=S$«^ r ’ mais qui ont peu d’étendue. Elle efl bien dédommagée * Fig. 3. t, t. du peu de furface de ceux-ci, par deux autres * qui ont chacun quelque chofe de la forme d’un turban, Si qui font pofés l’un à côté de l’autre au deffus de la tête. Ils tiennent auffi de la figure d’un champignon, dont le cha¬ piteau déborderoit peu le pied, & dont le deffus feroit taillé avec grand art à facettes extrêmement petites. Les premiers yeux à rezeau, les femblables à ceux des autres mouches font bruns; ceux en turban font d’une très- belle couleur de citron, Sc autant tranfparens qu’aucun des yeux à rezeau des autres mouches; car entre ces for¬ tes d’yeux il y en a de plus Si de moins tranfparens. Quand on regarde attentivement quelqu’un de ceux qui le font le plus, on y apperçoit une tache brune qui chan¬ ge de place à inclure que l’endroit fur lequel la vûe efl pointée, change : cette tache efl une portion de l’intérieur de l’œil de finfede, qui efl vûe au travers de fa cornée; au travers de la cornée, ou des cornées des yeux en turban de notre éphemére, 011 voit une tache, & on la croit éloignée, parce que l’œil a beaucoup d’épaiffeur. Cette éphemére efl née chés moi de très- pciits des Insectes.//. Mem. 24.1 petits vers aquatiques affés femblahles à d'autres d’où lor- tent des épheméres qui n’ont point de pareils yeux :ainfi il femble que de les avoir ou de ne les avoir pas, n’efi pas en foi quelque chofe d’aufîi confidérable qu il nous le pourrait paraître. Le corps de cette éphemére dl d’un jaune-pâle, & Tes ailes lont blanches; les deux inferieures l'ont li petites par rapport auxlupérieures, qu’on a peine à les trouver. La mouche précédente nous a déjà donné occafîon de dire qu’il y a des yeux à rezeau de différentes couleurs. Ceux de quelques mouches lont bruns,ceux de quelques autres font verds,ceux de quelques autres lont jaunes,ceux de quelques autres font rouges, & il y en a de différentes nuances de ces couleurs. Quelques uns ont l’éclat du métal le mieux poli; d’autres nous font voir des couleurs chan¬ geantes : enfin on trouve à d’autres un arrangement de différentes couleurs confiantes. Les yeux * d’une efpcce de taons des bœufs, par exemple, ont des bandes rou¬ geâtres, d’autres verdâtres, d’autres brunes, combinées alternativement; l’agrément que peut avoir cette difiri- bution de couleurs, eft augmenté encore par la figure de chaque bande, qui efi ondée comme i’efi le point de Hongrie. Il nous doit paraître qu’une mouche qui a tant de milliers de petits yeux raffemblés pour former chaque œil à rezeau, en a beaucoup plus qu’il ne lui en faut. Celui qui a fiait les mouches, celui qui voit les chofes d’une ma¬ nière infiniment fupérieure à celle dont nous les voyons, a cependant jugé quelle n’en avoit pas afies. II a jugé que d’autres yeux étoient néceffaires à la plupart des efpeces de mouches, & il leur en a donné d’autres. Nous avons averti ailleurs que pour abréger les expreflions, nous appellerions un œil à rezeau, ou un gros œil, chacun Tome IV. . H h pi. 18 .%. 242 MEMOIRES POUR L’HlSTOIRE de ces alfcmblages d’yeux d’une prodigieufe petiteiîe. Les nouveaux yeux que nous voulons faire connoître, ont une furface qui, examinée avec les meilleurs microfco- pes, paroît liffe & polie, une furface fur laquelle on ne voit point de rezeau ; ils font plus petits, & fouvent beaucoup plus petits que les yeux à rezeau ; aulfi par op- polition à ceux-ci les appellerons-nous tantôt les petits yeux, & tantôt les yeuxlilfes. M. de la Hire cft le premier,que je fçache, qui ait ob- fervé les petits yeux des mouches. Il en découvrit trois * difpolës triangulairement fur le derrière de la tête; il vit là trois petites convexités luifanîes; & ayant reconnu en- fuite quelles ctoient tranlparentes, il fe crut très-fondé à les regarder comme les cornées de trois j eux, & des cornées analogues à celles des nôtres. Il crut meme avoir trouvé plus de reffemblance à ces petits yeux des mouches avec les nôtres, qu'ils n’en ont réellement; il i. crut leur avoir vu des paupières. Des poils * finguliére- ment placés fur quelqu’une des mouches qu’il obferva, lui en impoférent apparemment ; car la nature n’a accordé des paupières à aucuns des infeéîes ailés qui nous font con¬ nus. Enfin M. de la Hire ne trouvant pas affés d’analo¬ gie entre les gros yeux, les yeux chagrinés des mouches Si les nôtres, il ne voulut reconnoître pour leurs yeux que ceux qu’il avoit découverts, il lui parut que c’étoit affés pour des mouches d’en avoir trois, pendant que nous n’en avons que deux. On trouve ces trois yeux lififes, difpofés triangulaire¬ ment fur le derrière de la tête des mouches de plufieurs genres, foit de celles à deux ailes, comme les mouches de la féconde claffc, foit de celles à quatre ailes, comme les abeilles, les guêpes, les ichneumons, &c. Mais il y a des mouches, foit à deux ailes, foit à quatre ailes à qui des Insectes. VI. Mem. 24.3 ils manquent. C’eft inutilement, par exemple, que je les ai cherchés à toutes les elpeces de couhns, & à toutes les elpeces de tipules. Aulii la tête de ces derniers infe- 1 ’ fi on fuit le contour de la plus petite ou de la fupérieure, * /. on trouvera qu’il fe joint au bord de l’inférieure *. Ce que nous avons confidéré comme deux parties , peut donc être regardé comme une feule partie, dont une grande portion efl faite en coquille, & qui auprès de fon fommet a un appendice qui s’élargit à mefure qu’il s’é¬ lève au deffus de la coquille, 6 c qui fe replie. Quoi qu’il en foit, nous pouvons nommer ces pièces la double co¬ quille ou les aîlerons. Nous ignorons les ufages des doubles coquilles, com¬ me nous ignorons ceux des balanciers, mais au moins fça- vons-nous que ces aîlerons n’ont été accordés qu’aux mouches à qui deux ailes ont été retranchées. des Insectes. VI. Mem . 255 Jufqu’ici j’ai trouvé ccs coquilles ou aîlerons à toutes les mouches à deux ailes qui ont des trompes femblablcs à celles des groffes mouches de la viande, comme font les mouches ordinaires des appartemens; les mouches de même forme dont le corps eft verd, &c. enfin toutes les efpeces de mouches à corps court, auxquelles j’ai cher¬ ché ces aîlerons, me les ont fait voir. Mais les aîlerons des mouches c!e différente efpece, n’ont pas exactement une même forme : la coquille fu- périeure des mouches, dont le corps eft d’un verd doré, n’eft point repliée comme l’eft fouvent celle des groffes mouches bleues, elle forme une véritable coquille comme l’inférieure ; la partie par laquelle elles tiennent l une à l’au¬ tre, eft très-étroite. Dans plufieurs mouches, & fur-tout dans les groffes mouches de la viande, le bord de la grande coquille ou de la coquille inférieure, va jufqu a la jon¬ ction du corps avec le corcelct, cette coquille couvre le balancier & le dernier fligmate; feroit-ce là fon ufageî II femble quelle devroit arrêter le mouvement du balan¬ cier, mais peut-être quelle l’empêche feulement de s’éle¬ ver trop. Je n’ai point trouvé de ces aîlerons aux aîles des cou- fins ; s’ils en ont ils font fi petits qu’à peine font-ils vi- fibles. Après avoir confïdéré les parties extérieures propres au corcelet, donnons un moment d’attention à celles qui compofent le corps. Toute 1a charpente eft formée par une fuite d'anneaux, dans la plupart des genres de mou¬ ches, au moins dans les genres de celles à corps court. Ces anneaux font écailleux ou cartilagineux,& par conlèquent d’une matière qui eft peu capable d’extenfion; cependant différentes opérations de la mouche demandent que fon corps, ou que certaines parties de fon corps puiffent fe * PI. IÇ.fig. 9. a a; b b, frc- * c. * PI. 20. fig. * PI. 19. fig. PI. 20. fig. 1. * Fig. 2. a, 1 ‘; Ô g; c, f. * a, b. ifc. * b, g. iXc. 256 MEMOIRES POUR L’HISTOIRE gonfler & fe contracter alternativement;# fl chaque anneau étoit d’une feule piece, un anneau entier d écaillé, de corne ou de cartilage, il l'eroit peu propre à tle pareilles alterna¬ tives. La nature s’y eft prife de différentes manières, pour que le corps des mouches fût défendu par des enveloppes comme écaiileufes, & pour que leurs anneaux ne laiffaf- fentpas d’être dilatables. Dans certaines mouches,chaque anneau eft entièrement recouvert par-deffus, & en grande partie par-deffous, par une feule & même piece d’écail- le;* elle eft une elpece de cerceau dont les deux bouts ne fe joignent point; il refte entr’eux un fillon * tout du long du ventre. Ce lillon eft plus ou moins large dans des mouches de différentes elpeces ; la groffe mouche bleue de la viande eft une de celles où il elt le plus étroit. Ce fillon n’eft quelquefois rempli que d’une fubfîance membraneufe ;p!us fouvent il a une file d’écaiiles* étroites, mifes bout à bout,& dont le nombre égale celui des an¬ neaux. Entre chacun des côtés de cette file de petites pièces roides, & les bouts des grands arcs écailleux, eft une membrane qui peut fe pliffer ou fe déplier, félon que le corps a befoin d’avoir moins * ou plus * de vo¬ lume. D’autres mouches ont à chaque anneau deux arcs d’é- caille * qui different peu en grandeur. L’un * recouvre la partie fupérieure ou le dos, & l’autre + recouvre la partie inférieure ou le ventre; mais une membrane muf- culeufe eft employée de chaque côté à faire la réunion des deux arcs : quand le corps a peu de volume, qu’il eft applati ou contracté, cette membrane fait différais plis très-preffés les uns contre les autres, qui la réduifcnt à occuper fl peu d’efpace, que l’arc inférieur paroît atta¬ ché immédiatement à l’arc fupérieur. Celui-ci a rie cha¬ que côté une faillie au deffous de laquelle fe place le bout des Insectes. VI. Mem. 257 bout de l’autre. Mais quand la mouche veut gonfler fon corps, la membrane de chacun des côtés Te déplie pour fournira l’augmentation de volume; les bouts de l’anneau inférieur s’éloignent de ceux de l’anneau fupérieur. Les mouches * des vers aquatiques appeilés à queue de rat, nous donnent un exemple de cette dernière méchanique. D’autres mouches * ont le corps encore mieux capa¬ raçonné d’écailles, chacun de leurs anneaux n’a cepen¬ dant que deux pièces, dont l’une * efl deflinée à couvrir le dos, & l’autre * à couvrir le ventre; cette derniere piece efl affés grande pour s’élever du côté du dos, de forte que les bouts de la piece fupérieure, font en re¬ couvrement fur ceux de la piece inférieure, & fi fort en recouvrement, qu’ils y font encore lorfque le corps efl: le plus gonflé. II y a ici quelque chofe de plus à re¬ marquer , chacune de ces pièces écailleufes n’eft atta¬ chée contre la membrane extérieure, contre la chair de la mouche, que par le contour de fon bord antérieur; or dès que l’attache du contour de la piece inférieure ne fe trouve pas dans le même cercle où efl le con¬ tour de l’arc fupérieur, il efl aifé à l’anneau, malgré les attaches de ces deux pièces, de fe gonfler du côté infé¬ rieur dans le refle de la circonférence qui répond à celle du côté fupérieur, que l’attache écailleufe rend prefque fixe; & de même il efl aifé à l’anneau de fe gonfler dans le refle de la circonférence fupérieure, qui répond à l’in¬ férieure où efl l’attache du cerceau inférieur. Les abeilles, les bourdons, & les guêpes nous donnent des exemples des mouches fi bien cuiraiïees,& ellesavoient befoin de i’être ainfi; il arrive fouvent des combats dans la même ruche, dans le même guêpier, entre les mouches qui l’habitent; munies, comme elles font, d’un aiguillon qui répand un poifon fatal dans les bleffures qu’il fait, Tome IV . KIç 2 $$ MEMOIRES POUR L’HlSTOIRE elles auraient eu trop de facilité à s’entretuer, fi quelque partie charnue de leur corps fût refiée à découvert. Nous expliquerons ailleurs plus au long ce que la diipofitioa de ces anneaux écailleux a de fingulier. En traitant des mouches des galles, nous avons eu occafion de faire remarquer encore une autre dilpofition des écailles qui recouvrent le corps de certaines mou- » Tome III. ches, nous y renvoyons *. La dilpofition des pièces donc r g les anneaux font compofés , nous offre bien d’autres variétés, mais dont nous ne parlerons que lorfque les infedes, à qui elles font propres, nous en donneront; i’occafion. Différens obfervateurs pourroient ne pas convenir entr’eux du nombre des anneaux d’une même mouche, s’ils n’étoient convenus auparavant de la même manière de les compter, car il peut y en avoir plus d’une. Celui qui, pour voir tous les anneaux d’une mouche, lui pref- feroit le corps, en compteroit fouvent davantage que ce¬ lui qui le contenteroit de déterminer le nombre de ceux qui paroiffent ordinairement. Le dernier efl fouvent ren¬ tré fous celui qui le précédé. Quand on a recours à la prefîion, il faut encore demeurer d’accord de l’endroit où l’on ceffera de compter les anneaux, & cela parce que dans certaines mouches la partie charnue au bout de laquelle l’anus fe trouve, peut l'ortir affés loin hors du corps, & quelle efl quelquefois entourée de cerceaux écailleux qui peuvent être pris pour des anneaux; mais ceux-ci n’appartiennent pas, à proprement parler, au corps, & n’ont pas la figure de ceux qui le couvrent. En fe contentant de déterminer le nombre des anneaux qui paroiffent fans y être forcés, on n’en trouvera que cinq *P 1 . 19.fi». aux groffes mouches bleues * de la viande, defquels il 5 * n’y en a que quatre de bien fenfibles ; le premier, celui des Insectes. VL Mem. 259 par lequel fe fait la jonction du corps avec Je corcelet, n’eft qu’une calotte d’un petit diamètre, & percée à fon centre. Les mouches à miel montrent lix anneaux,d’au¬ tres mouches en ont fept ailés à diftinguer, & d’autres en ont huit. Les jambes des mouches de différens genres font con- ftruites fur différentes proportions, elles font non-fèule- ment plus ou moins grandes par rapport à la grandeur du corps, mais chacune de leurs parties comprifcs entre deux articulations, différent plus ou moins en longueur entr’elles. Ce quelles ont de confiant, c’eft que la partie analogue au pied, celle fur laquelle la mouche fe pôle, *pi. I? , fy,. eft toûjours munie au moins de deux ongles * ou cro- 12& 13.0c. chets qui finiffcnt par des pointes fi fines, quelles trou¬ vent prile fur les corps les plus polis. Les mouches de la viande, & celles de quantité d’autres efpeces, ont là * comme deux paumes * de main, ou plutôt comme deux plantes de pieds; on pourroit donner ces noms à deux parties égales & femblables, aufquelles nous donnerons * Fig. t# pourtant celui de pelotes. Ces pelotes * qui ont cha- p,p* cune un contour oval, fe touchent à l’endroit où elles font attachées au pied, & laiffent entr’elles un vuide an¬ gulaire. Leur face inférieure eft un peu convexe, & gar¬ nie de poils courts très-preffés les uns contre les autres. Ces poils peuvent s’engrainer dans les inégalités des corps les plus polis à nos yeux, & doivent aider à fou tenir les mouches contre le verre plat, pofé même verticalement comme celui de nos fenêtres. M. Homberg a obfervé des mouches qui 11e pouvoient plus marcher fur des car¬ reaux de verre, il a cru que c’étoient celles qui par la vieilleffe avoient perdu les poils de leurs deux pelotes ou petites plantes de pied. Celles dont les crochets fe (croient émouffés, fe trouveroient dans le même cas; K k ij 2 Ô 0 MEMOIRES POUR L’HISTOIRE d’ailleurs entre tant cTelpeces de mouches qui marchent fur le verre, même placé verticalement, il y en a plu>- fieurs efpeces qui n’ont point de ces pelotes; il l'uffit de citer les abeilles pour exemple de celles à qui elfes m a ni¬ quent, & qui n’en marchent pas moins bien fur le verre. Un de ces fouhaits chimériques qui nous échappent ades fouvent, eft que les Médecins pu dent voir dans l’in«- térieur de notre corps, que notre corps eût des efpeces de fenêtres, par lefquelles les Médecins puflent voir di(- tinélement nos parties intérieures. Il y a adûrément des cas où onenfçauroitmieux où ed le fiége de la maladie, mais fouvent on n’en feroit pas plus en état d’y apporter remede. Pludeurs infeéîes ont mieux que ces fortes de fenêtres, leur corps très-tranfparent permet de voir la plupart des parties qu’il renferme, il permet de voir cer¬ tains mouvemens de ces parties; de forte que fi on ed attentif à obferver dans les différentes claffes d’infeéîes-, les efpeces qui ont le corps en entier ou en partie, très- tranfparent, on peut le promettre de voir même dans ceux qui font très-petits, des parties & des arrangemens de parties qu’on ne parviendroit jamais à découvrir dans des infectes de la même clalfc beaucoup plus grands, les didequât-on avec une adreffe, une patience &. une in¬ telligence fupérieures à celles qu’ont montrées Malpighi & Swammerdam, 6c c’ed tout dire. C’ed ainfi que dans les mouches à deux ailes qui viennent de vers mangeurs de pucerons, on peut oblerver des ehofes qu’on cher- cheroit inutilement dans des mouches beaucoup plus grandes. Nous avons déjà frit connoître les mouches dont nous voulons parler, dans le onzième Mémoire du tome III. elles ont le corps applati; mais ce qui nous im¬ porte actuellement, c’ed que lededousdu ventre qui ed prefque blanc, n’a qu’une legere nuance de jaune, & ed des Insectes. VI . Mem . 261 très-tranfparent. Le jaune du deffus du corps eft bien autrement foncé, mais il ne rend pas opaques les parties qu’il teint. D’ailleurs entre les anneaux lupérieurs il y a des intervalles moins colorés, & qui ont beaucoup de trans¬ parence; auffi peut-on voir plufieurs des parties intérieu¬ res de ces mouches, auffi bien qu’on les verroit fi elles étoient contenues dans une bouteille d’un verre blanc. Si on prend doucement entre fes doigts la tête d’une de ces mouches, de façon que le corps l'oit dans une pofi- tion renverfée, & qu’il s’élève au delfus des doigts qui faifilfent la tête , & fi on a de plus l’attention de ren- verfer les ailes fur la tête, afin quelles n’aillent pas cou¬ vrir le dos à leur ordinaire; fi, dis-je, tenant ainli dou¬ cement une mouche, on la regarde du côté du ven¬ tre vis-à-vis un grand jour, & au travers d’une loupe, on reconnoît bientôt que ces mouches ont un véritable cœur *; qu’elles n’ont pas feulement pour leur en tenir lieu un long & gros vailfeau placé tout du long du dos, femblable à celui que nous avons jugé après M. Malpi- ghi, en faire les fonctions dans les papillons & les che¬ nilles. Vers le milieu du fécond anneau, & quelquefois dans le troifiéme anneau de notre mouche, en commen¬ çant à compter du corcelet, on apperçoit une partie qu’on ne fçauroit prendre que pour le véritable cœur; fa figure varie pourtant plus que celle des cœurs qui nous font mieux connus; quelquefois ce cœur a la figure d’un rein * pofé tranfverfalement, & dont la partie échancrée eft tournée vers le corcelet, auquel femble fe rendre en ligne droite, un très-gros vailfeau * qui part du milieu de l’é¬ chancrure. Dans d’autres temps le côté échancré de ce cœur difparoît ; le cœur s’allonge , & prend la figure d’une efpece de bouteille *, à laquelle le vailfeau dont £ous yenonsde parler,fait un long col. Tantôt ce cœur Kk iij * PI. 20. fi 4 > 5 & 6 . C, i? c, 0. * Fig. 4.. r c. * *Fig. y ,co.. bc 2 62 MEMOIRES POUR L’HlSTOIRE eft plus, & tantôt il eft moins gonflé; quelquefois ledîa» nietre tranfverlàl furpaffe beaucoup celui qui eft pris lui- vant la longueur du corps, & quelquefois celui-ci furpaffe J autre. Mais on y voit toujours des mouvemens affés alternatifs de contraction & de dilatation ; on diftingue * Pt. 2o.fig. auffi très conftamment le gros vaiffeau * qui part du côté * & î. u,f ce cceur q U j tourné vers le corcclet, & qui s’y rend en ligne droite. Ce cœur & ce vaiffeau fourniffenc bientôt de quoi fixer agréablement l’attention ; de temps en temps on voit entrer dans le vaiffeau un jet de liqueur qui y femblc comme feringué, comme s’il y étoit pouffé par la contraction du cœur. La liqueur, quoique blan* cheâtre & tranfparente, eft auffi ailée à voir que de l’eau dans un verre; on la fuit dans le chemin qu’elle fait très- vite, on diftingue très-bien les endroits du vaiffeau où elle arrive, & qui étoient vuides auparavant, ou prefque vuides. Ce qui aide à la rendre fenfible, c’eft qu’elle fem- ble épaiffe; il y a même des inftans où la liqueur a été pouffée en moindre quantité dans le vaiftèau, où il n’y a qu’une portion de celle qui y a été introduite, qui prenne la figure du tuyau cylindrique qui la reçoit; elle fe termine alors par une queue lemblable h celles des gouttes des liqueurs graffes, à celles des gouttes de vif- argent chargé de plomb. On voit donc diftinctement ce jet de liqueur dans toute fa route, on ne le perd que lorfqu’il arrive auprès de l’endroit où le corps le joint ail corcclet. Souvent il y eft à peine arrivé, que le cœur pouffe ou plutôt verfe un autre jet; car on croit voir cette liqueur tomber du cœur dans le vaiffeau, comme tomberoit d’une eguiére l’eau qu’on en verièroit à diverlès reprifes dans un vafe placé au deffous. Cinq à fix jets de liqueur font pouffes ainfi fucceffivement; mais les inter¬ valles qui font entre chacun des jets que fait le cœur. des Insectes. VI. Mem. 263 pour ainfi dire , ne font pas toujours égaux; peut-être le feroient-ils davantage, fi la mouche étoit moins mal à fon aile qu’elle ne l’eft entre les doigts. Ce qu’il y a de très-fingulier ici, & ce qu’on nefçau- roit attribuer à la pofition gênée de la mouche, c’clt qu'après qu’un certain nombre de jets de liqueur, après que quatre à cinq jets font partis du cœur, on voit de femblablès jets revenir du corcelet vers le cœur; la li¬ queur paroît retourner précilement par la même route par laquelle on l'avoit vû venir. Le cœur, après avoir poulfé une certaine quantité de liqueur jul'qu’au corce¬ let, auroit-il la force d’afpirer cette même liqueur, ou plutôt y auroit-il auprès du corcelet, au bout du gros vailfeau, une cfpece de lècond cœur qui renvoyeroit au premier une partie du fang qu’il en auroit reçu! Ce qui fembleroit appuyer ce foupçon, c’elt que dans des mou¬ ches de quelques efpcccs que j’ai ouvertes vivantes, j’ai vû dans leur corps auprès du corcelet, une partie qui a fait plulieurs battemens alternatifs. D’ailleurs ayant oblèr- vé la mouche vivante du côté du dos dans un endroit très proche de celui où le corps le joint au corcelet, j’ai apperçù là dans fon intérieur, un mouvement alternatif & très-vif, qui avoit plus l’air d’un mouvement de con¬ traction & île dilatation, que d’un fnuple mouvement d’ondulation : mais la portion tranfpa rente par laquelle il m’étoit permis de voir cet endroit, étoit une fenêtre trop étroite, elle n’avoit pas plus de largeur qu’un fil a de diamètre; aulfi ne m’a-t-il pas étépolfible dem’afiu- rer de la figure Si de l’étendue de la partie dont j admi¬ rais les mouvemens. Mais jios yeux ne nous trompent- ils point , quand ils nous font juger que le fiuig elt repor¬ té au cœur par le même vailfeau qui l’en avoit apporté! Si au delfous ou à côté du vailfeau il y en avoit un autre 264. MEMOIRES POUR L’HiSTOIRE qui lui fût très-fembiable, quand la liqueur pafferoit par ce fécond vaiffeau, elle nous paroîtroit être dans le pre¬ mier. Une obfervation que je ne dois pas obmettre, eft propre à faire regarder ce dernier dénouement comme le vrai. Après avoir vu bien des fois dans différentes mouches delà même efpece, le lang pouffé du cœur vers le corcelet, après avoir cru qu’il ne paffoit que par un feul 6c gros vaiffeau, dans une circonftance particulière, * PI. 20.%. il m’a paru que deux vaiffeaux égaux * 6c femblables fer- <5-/ z;yZ' voient à le porter, & que j’avois pris pour un feul vaif- feau deux vaiffeaux appliqués l’un contre l’autre, 6c ren¬ fermés fous une enveloppe commune. Dans des temps où la partie du cœur qui eft tournée vers le corcelet, s’étoit plus élargie, j’ai vû les jets de liqueur entrer dans deux vaiffeaux qui laiffoient entr’eux un efpace, 6c il eft aifé d’imaginer que ces deux vaiffeaux n’étoient alors écartés l’un de l’autre, que parce que les parties du cœur d’où ils partent, s’étoient éloignées l’une de l’autre, 6c que lorfque ces mêmes parties font plus rapprochées, ces deux vaiffeaux peuvent fe toucher, 6c femblent n’en faire qu’un. Entre ceux-ci il peut y avoir un autre vaif¬ feau deftiné à reporter la liqueur, qui n’eft vilible que quand il la reporte. Mais je n’ai garde de vouloir donner quelque choie de pofitif fur la manière dont fe fait la circulation du lang dans de fi petits infeéles, où quoi¬ qu’on voye plus qu’on n’elpereroit de voir, 011 ne voit pas pourtant tout ce qu’il lèroit néceffaire qu ’011 vît. Ce que j’ai feulement prétendu établir, c’elt qu’il y a dans ces mouches, une partie qui eh le rélèrvoir de la liqueur qui eft analogue au lang; qifelle la pouffe à diverlès re- prilès vers le corcelet, 6c qu’enfuite une partie de la mê¬ me liqueur eft repouffée & reportée vers le cœur à diffé¬ rentes reptiles. Il paroît de-là que la manière dont fe fait des Insectes. VI. Mène 26 $■ h circulation du fang dans les infectes, eft différente de celle dont elle lé fait dans les grands animaux. Nous ne connoiffons point dans ceux-ci des interruptions Si des alternatives pareilles à celles dont nous venons de parler. 11 y a cependant dans les infectes, Si même dans nos mouches, des vaiffeaux où le mouvement du fang eft continu, comme il l’eft dans les grands animaux; tel eft le mouvement du fang dans le gros vaiffeau qui ré¬ gné tout du long du dos des chenilles, Si de celui des papillons, Si tel eft le mouvement du fang dans le gros vaiffeau qui eft intérieurement le long du dos de nos mouches : on voit dans ce vaiffeau les mêmes mouve- mens continus que l’on voit dans le vaiffeau femblable des chenilles, la tranfparence des anneaux du dos le per¬ met. Mais ne pourrions-nous pas foupçonner que le fang de nos infectes, avant que de devenir propre à circuler régulièrement Si continuellement, de devenir propre à paffer dans les plus petits vaiffeaux, a befoin d'être affi¬ né, pour ainft dire, d’être rendu moins groffier Si plus coulant! que c’eft à quoi fert le cœur; que le fang a be¬ foin d’en fortir & d’y rentrer plu fieurs fois, d’être balotté, pour ainft dire, à bien des reprifes, pour acquérir la flui¬ dité qui lui eft convenable! La liqueur analogue au chyle, eft peut-être portée des inteftins au cœur par un chemin très-court, prefqu’immédiatement; le cœur eft placé près de l’endroit où les inteftins font le plus de ftnuofités, de circonvolutions, Si prefque fur eux-mêmes;le chyle qu’il reçoit, eft peut-être encore trop groffier, il a befoin d’ê¬ tre travaillé avant que de prendre la route des petits vaift féaux. Au reftece ne font là que des conjectures qui ont quelque probabilité. Les mouches qui viennent de différentes efpeces de vers mangeurs de pucerons, ne font pas les feules dans Tome IV. . L 1 z66 MEMOIRES POUR L’HlSTOIRE lelquelles j’aye vu ie cœur, & où je lui ai vû verfer de la liqueur dans un gros vailTeau qui femblerfe rendre au corcclet; je dis dans un gros vailTeau, parce qu’il paroît fimple, quoiqu’une obfervation que nous avons rappor¬ tée , donne lieu de croire que deux vaifleaux appliqués l’un contre l’autre, ne nous en parodient ici qu’un lèul. Dans des mouches, dont le deflous du corps a quelque tranfparence, quoiqu’il en ait moins que celui des mou¬ ches précédentes, dans plufieurs elpeces de celles qui * PI. 20 , fig. ont la forme d’abeilles *, 6c dont nous avons décrit les trompes dans le cinquième Mémoire, j’ai vûle cœur qui avec le gros vailTeau, avoit conftamment la figure d’une bouteille à long col, mais tantôt plus 6c tantôt moins renflée; 6c j’ai vû, comme dans les autres mouches, la liqueur poulfée par jets fucceflifs, du cœur dans le gros vailTeau; j’ai vu aulfi des retours de cette liqueur vers le cœur, 6c qui ne me paroiflent le faire que par le gros vailTeau. 11 y a lieu de croire que toutes les efpeccs de mouches ont un pareil cœur, ou qu’elles en ont un équi¬ valent, mais on ne peut le voir que dans celles qui font tranfparentes. Après l’avoir obfervé dans ces dernieres, je leur ai fouvent ouvert le corps; j’ai enlevé des por¬ tions de leurs écailles, 6c alors je fuis parvenu à voir le cœur qui faifoit encore quelque mouvement; mais moins plein alors, afiaiiïe, défiguré par les traitemens que j’a- vois fait fouffrir aux parties auxquelles il tient, je ne l’eufle pas reconnu, fi j’eufle moins fçû où il devoit être. J’ai vû aulfi quelquefois les mouvemens d’un pa¬ reil cœur à des mouches bleues de la viande que j’avois ouvertes. Qu’on ne le confonde point dans ces dernières mouches avec une partie oblongue 6c blancheâtre, qui eft attachée au premier anneau vers l’endroit où ell la Communication du corps avec le corcelet : cette partie des Insectes. VI . Mem . 26 ? conferve bien plus long-temps fes mouvemens alternatifs de contraction & d’ondulation, que ne le conferve ce cœur placé vers le centre du corps. Cette partie qui lé trouve li proche du corcelet,a un volume alfés confidé- rable, c’elt celle que je foupçonne être le réfervoir qui reçoit la liqueur qui elt poulfée hors du cœur, c’elî celle que je foupçonne être comme un fécond cœur qui ren¬ voyé au premier la liqueur qu’il en a reçue. On ne trou¬ vera pas fort étrange que nous donnions deux cœurs aux mouches, li on le fouvient que M. Malpighi en adonné aux chenilles autant qu’elles ont d’anneaux. Ces chenilles & les papillons ont peut-être des cœurs, ou au moins un cœur tel que celui que nous voyons aux mouches; peut- être ne nous manque-t-il pour les voir, que de fçavoir failir ou faire naître des circonltances favorables. Nous avons même déjà vû* la liqueur retourner dans un vaif- leau du papillon, dans un fens contraire à celui où elle y avoit coulé d’abord; ce qui a aulfi été obfervé par M. Malpighi, & qui fuppofe peut-être deux cœurs tels que nous les foupçonnons dans les mouches. Les mouvemens du cœur, ceux de la liqueur qu’il darde dans certains temps, & qu’il reçoit dans d’autres, ne font pas le feul fpectade que puilfe fournir une mou¬ che de ver mangeur de pucerons, à l’obfervateur, qui, fans la prelfer trop, fans la faire trop foulfrir, la tient entre fes doigts, pendant qu’au travers des anneaux du ventre il examine avec une loupe ce qui fe palfe dans l’inté¬ rieur. Un autre fpeétacle encore plus fingulier, qui a quelque chofe de plus nouveau, de moins analogue à ce qui nous elt connu dans les animaux, s’ofïre- à lui. Auprès de la jonétion du corps avec le corcelet paroît tout-à-coup une efpece de nuage, fi mince qu’il nefem- hle être qu’un plan pofé félon une coupe tranfverfale du * Terne 1 , 268 MEMOIRES POUR L’H I ST O I RE corps de la mouche : ce plan marche toujours parallèle¬ ment à l'a première pofition, il s’élève, c’eft-à-dire, qu ? it avance vers le derrière de la mouche, ^ar nous la luppo- fons la tête en bas; en avançant il conferve toujours lon peu depaifleur, il a toujours la figure d’une coupe du corps faite à l’endroit où il le trouve. On le luit d’autant plus aifément qu’il ne va pas vite, on ne le perd que quand il palTe par-delà l’endroit où eft le cœur: mais avant que ce nuage loit difparu, on peut en apperce- voir un autre qui efi déjà en route; quelquefois on eu voit trois à quatre à la fois, quelquefois il n’en paroît qu’un feul; il y a même des temps où l’on peut obfer- ver la mouche fans en voir aucun. Une couche d hui¬ le , une couche de cire, ou plûtôt une couche de fu¬ mée, mais toujours une couche très-mince qui seleve- roit bien parallèlement à elle-même du fond d’un verre plein d’eau, efl l’image d’une de nos couches nebulcu- fes. J’en ai vu quelquefois paraître douze à quinze de fuite, après quoi elles ceffoient, & ce n’étoit qu’au bout d’une ou de plufieurs minutes que j’en voyois revenir de nouvelles* Mais quelle eft la matière de ces efpeccs de couches de fumée, quel efl leur ufage, que deviennent-elles lorf- qu’elles difparoiffent î c’efl fur quoi je ne puis propofer qu’une conjecture , mais qui me femble extrêmement probable. Je ne les crois point ce quelles nous paroil- lcnt, je veux dire que je ne penfe point que chacune fbit un plan qui ait la forme de la coupe de l’endroit du corps où elle fe trouve. Je foupçonne ici une illu- fion d’optique, qu’un anneau vu par fa tranche, y fiiit fur nos yeux la même impreffion qu’y ferait un plan circulaire ; que ce n’eft qu’un anneau qui marche. Mais comment ce plan annulaire eit-ii produit ou mis en des Insectes. VI. Mem. 2 6g mouvement! je penlè que c’eft par l’air que la mouche refpire. Mais je ne puis faire entendre comment on peut conce¬ voir que l’air introduit dans le corps de la mouche, opé¬ ré cet effet, quaprès que j’aurai fait connoître les deux grands refervoirs à air, qui le trouvent dans le corps de toutes les mouches à deux ailes & à corps court. D’ail¬ leurs la place confidérable qu’y occupent ces refervoirs, ne nous permet pas de lai lier ignorer qu’ils y font. Les fligmates du corps des mouches, comme ceux de tant d’autres infedles, ont chacun leur groffe trachée; chaque trachée fe dirige vers quelqu’une des parties intérieures en fe ramifiant; les ramifications des unes s’entrelacent avec celles des autres. Le nombre de ces ramifications & de leurs entrelacemens, eft prodigieux, & furpaffe tout ce qu ’011 en peut dire; il n’efl aucune des parties inté¬ rieures, quelque petite qu’elle foit, qui 11 e foit bien four' nie de ces vaiffeaux à air. Il femble que chaque partie ait befoin d’avoir fon poulmon, éé qu’elle l’ait, ou fi l’on veut, il femble que les poulinons de l’infeéle font répan¬ dus dans les plus petits recoins de fon corps. La mou¬ che a cependant encore deux très-grands poulinons, & fi grands, qu’ils occupent plus de la moitié & plus des deux tiers de la capacité du corps de certaines mouches. Les parties que j’appelle les poulmons, & auxquelles je ne crois pas pouvoir donner un nom plus convenable, font deux veffies * égales & femblables, pofées à côté * pi. l’une de l’autre, qui tirent leur origine de la jonélion de 9- u > corps avec le corcelet, & qui dans plufieurs mouches, dont le corps n’a que cinq anneaux , s’étendent jufques par-delà le troifiéme anneau ; elles empiètent fur une de ces du quatrième. La groffeur & la figure de chacune partie veffies, font telles qu’il faut pour remplir prefque L1 iij 2J0 MEMOIRES POUR L’HiSTOIRE entièrement la cavité du corps dans l’étendue où elles font placées. Ces veffies touchent les parois de cette cavité ; le *PI.2o. fig. . j C q ue j elles f e rencontrent l’une l’autre * efl Cf fi» i i >iir* i i applati, de maniéré qu elles forment par leur attouche¬ ment réciproque une double cloifon dirigée félon la lon¬ gueur du corps, & qui le partage en deux également. Cette double cloifon ne s’élève pourtant pas précilé- ment ju[qu’au dos, & ne defcend pas jufqu’au ventre; avant que d’arriver au point le plus élevé, &, avant que d’être defcendue au plus bas, chacune des veffics s’ar¬ rondit, elles laifTent entr’elles un petit vuide tant en haut qu’en bas. Ce dernier étoit néceflaire pour donner pal- fage au conduit des alimens, & le premier i etoit pour que la principale artère, le vaifleau qui règne tout du long du dos, trouvât oit fê loger, & que fes mouve- mens ne fuffent point gênés. Avant que d’avoir afTés examiné ces deux vcffies,lorf- que je ne connoiffois pas encore leur forme, je les ai prifes auiTi pour une fimple cloifon pofée comme une efpece de médiaflin, & dont l’ufage étoit de partager en deux également une grande portion du corps. Il efl aide de les voir dans letat où elles ne femblent être qu’une cloifon, & il efl bon de les y voir pour s affûter qu’elles font naturellement applaties par le côté par lequel elles lé touchent mutuellement D’un coup de cifeau on em¬ portera une portion des trois ou quatre premiers anneaux *Fig. 8. d’un des côtés de la mouche *; après cette opération , on n’aura qu’à regarder par la fenêtre qu’on Aient de faire , & on verra diftinéiement une efpece de cloifon, malgré l’enfoncement dans lequel elle efl; fa couleur qui ch très-blanche, aide à la rendre fenhble. Pour la voir encore mieux, & pour s’afïurer quelle a fes deux faces fomblables, on fera à l’autre côté de la mouche, une \ des Insectes. VI. Mem . 271 ouverture femblable à celle qu’on a faite au premier : alors par laquelle des deux ouvertures qu’on regarde dans l’intérieur de la mouche tournée vis-à-vis le grand jour, on verra une cloilon lemblablement placée : par en bas il femblera que cette cloilon eft polée iur un cordon d’une matière moins blanche & plus opaque que celle de la cloifon ; & par en haut elle femblera rebordée par un autre cordon un peu plus mince *. De ces deux * PI. 20. fig. cordons qui lui femblent faire une efj>ece de cadre, fin- S '" M ’ férieur eft le conduit des alimens, & le fupérieur eft le gros vaifféau que nous nommons la principale artère. La cloifon, comme nous l’avons dit d’avance, eft faite de deux membranes, & c’efl en haut &. en bas que la mem¬ brane propre à une des velfies, s’éloigne de celle qui eft propre à l’autre. Les mêmes coups de eifeaux qui ont fait une ouverture de chaque côté aux anneaux de la mouche, en ont fait une également grande à chacune des veffies appliquées contre les anneaux, & c’eft par l’ouverture de la veffie qu’on apperçoit la face intérieure & applatie de cette veffie. On peut voir les deux facs ou veffies pulmonaires faire ainfi la cloifon dans toutes les mouches dont le corps n’efl pas trop applati, comme dans les mouches bleues de la viande, & dans beaucoup d’autres; mais des mouches que l’on doit prendre par préférence pour cette obfervation, font de celles à forme d’abeilles *, qui font fi communes en toutes faifons fur les Heurs de nos jardins. La cloifon qu’on oblerve dans le corps de la plu¬ part des autres mouches, eft prefque iiffie, comme l’eft une membrane mince & bien tendue, & la cloifon qu’on découvre dans le corps de celles-là, piait aux yeux de l’ob- fervateur, & les arrête par la façon dont elle lui paroît travaillée : des fibres qui ont quelque relief, très-proches 2.J2 MEMOIRES POUR L’HISTOIRE les unes des autres, & toutes parallèles entr elles, font croilëes par un pareil nombre d’autres libres, & de mê¬ me difpofées avec une régularité agréable à voir. Nous avons affésdit que cette cloifon cft double, parce qu’elle eft faite par l’application d’un des côtés d’une des veffies, contre un femblable côté de l’autre veffie; le plan des fibres les plus marquées appartient à la veffie qu’on voit immédiatement, & le plan des libres qui croifent les pré¬ cédentes, appartient à l’autre veffie, & n’eft vû qu’au tra¬ vers des parois tranfparentes de la première. Si au lieu de la large ouverture que nous avons faite à chacun des côtés d’une mouche, on emporte le bout * PI-20. fig. poltérieur d’une autre mouche delà mêmeefpece * , par un coup de cifeau donné près de l’origine du quatrième anneau, on met à découvert au moins quelques por¬ tions du bout de l’une 6e de l’autre des veffies , qui ci- devant paroiffioient une cloifon. Ces portions le font aifément remarquer par la blancheur qui leur eft parti¬ culière; qu’on ôte enfuite peu à peu avec une pointe line, comme celle d’un canif, ou même celle d’un épin¬ gle , les inteffins 6e les autres parties intérieures qui fe trouvent proche du bord de la coupe, 6: on achèvera * l, d. de mettre à découvert le bout de chaque veffie *. Les deux bouts enfemble forment là un diaphragme , cha¬ cun d’eux en cfl la moitié; au lieu que les veffies vues 9 Fig. 8. par le côté *, femblent être une cloifon longitudinale ou un mediaffin; vues par le bout, elles femblent être une cloifon tranfverfale, ou un diaphragme. Chacune des moitiés de ce diaphragme n’eft pas plane, le côté qu’elle nous préfente alors, elt un peu convexe; toutes deux plaifcnt aux yeux non-feulement par leur blancheur, mais auffi par les fibres qui y paroiffient régulièrement diffiibuées 6c contournées, quoique fans croifcmcnt fenfiblc des Insectes. VI. Aient . 273 fenfible. C’eft la différente direction des fibres qui aide ie plus à difiinguer l’une de l’autre, deux pièces qui ne font pas fenfiblement féparées : on apperçoit feulement cntr’elles, un trait dirigé perpendiculairement vers ie dos & vers le ventre de l’infede, mais avant que de parve¬ nir à toucher les parois inférieures & les fupérieures, elles s’arrondiffent, & laiffcnt de l’un & de l’autre côté , un petit efpace curviligne; dans le fupérieur on trouve le Lotit de la principale artère *, & dans l’inférieur, celui * de l’inteftin ; l’un & l’autre tuyau ont été coupés là 1 quand les cifeaux ont agi. Ces deux veffies que nous n’avons encore vues que par le bout, & par un côté intérieur, & comme réunies, peuvent être vues * par delfus, par delfous, & par le* côté extérieur, & même être féparées l’une de l’autre: 9 mais pour y parvenir, il faut emporter peu à peu les por¬ tions d’anneaux qui cachent les fur faces qu’on veut met¬ tre à découvert; il faut donner les coups de cifeaux ou de lancette avec bien de la circonfpedion ; fi la pointe de l’inflrument rencontre une des veffies, elle la crève: on a pourtant affés de prife pour couper les anneaux, dans l’efpace curviligne fupérieur, qui n’efi pas rempli par les veffies; & quand on a ouvert les anneaux, on peut avec la tête d’une épingle, féparcr chaque veffie des parois intérieures contre lefquelles elle tend à s’ap¬ pliquer. Enfin avec de la patience on peut parvenir à avoir l’une ou l’autre des veffies entière, & même tou¬ tes les deux; mais il efi affés inutile de fe donner cette peine pour connoître quelle efi la figure de ces deux efpeces de bourfes, parce qu’on la juge très- bien telle qu’elle efi, quoiqu’on ne voye que fucccfiivement leurs différentes faces. Nous avons affés donné d’idée de la grandeur de ces Tome IV. . M m 274 MEMOIRES POUR L’HiSTOIRE veflies, quand nous avons dit qu’elles occupent plus des deux tiers de la capacité du corps de certaines mouches» & il n’en efl: guéres d’efpeces dont elles ne rempli dent au moins le tiers de cette capacité. Cependant ces dcuxvcf* fies fi confidérables par leur volume, ne font faites pour renfermer aucunes parties; elles paroiflent parfaitement vuides, Si elles ne font remplies que d’air. Ce ne peut être qu’à l’aide de l’air qui les tient gonflées, qu’avec des parois minces elles confervent les places qu’elles oc¬ cupent , quoique preflees par des parties folides qui fem- blent extrêmement à l’étroit dans le refte du corps. Si on veut jetter les yeux fur les Figures i, 2 Si 3 de la planche 28 du neuvième Mémoire on y pourra obier- ver que quoique les ovaires des mouches foient extrê¬ mement gonflés Si diftendus par un nombre prodigieux d’œufs prêts à être mis au jour, un vuide confidérable efl confervé dans la partie antérieure du corps, Si que ce vuide efl l’elpace renfermé par les parois des grandes veflies à air. Ces veflies deflinées feulement à contenir de l’air, doivent donc être regardées comme les poulinons de la mouche; l’air quelles reçoivent ne leur vient point des fligmates du corps, de ceux qui font fur les anneaux, elles ne paroiflent avoir aucune communication avec ces fligmates. Ceux qui font deflinés à leur en fournir, font fans doute ceux du corcelet; c’efl là la principale fon- éïion de ces quatre grands fligmates : aufli fi l’on coupe foit le corps près de fa joncflion avec le corcelet, foit le corcelet près de fa jonélion avec le corps, dans la coupe qu’on a faite, 011 trouve trois ouvertures circulaires; deux, dont une efl de chaque côté, font mieux rebor¬ dées que la troifléme, ce font les coupes de deux con¬ duits , dont un aboutit à une des veflies, Si l’autre à l’autre des Insectes. VL Mem. 27$- le troifiéme conduit, dont la coupeparoît moins arron¬ die, parce quelle n’eft pas celle d’un canal qui ait une confiftance cartilagineule, comme l’ont les trachées, eft la coupe de i’cefophage, ou du conduit par lequel paf- fent les alimens pour parvenir à l’eftomach 6c aux inte- ftins. Les trois ouvertures dont je parle, peuvent le voir fur des mouches à quatre ailes comme fur des mou¬ ches à deux ailes; on les trouve dans la coupe du cor- celet d’une abeille, ou dans celle du hlet qui fait la jon¬ ction du corcelet avec le corps. Les mouches à quatre ailes ont aufTi des poulmons analogues à ceux des mouches à deux ailes 6c à corps court, que nous venons de confidérer, mais autrement conftruits, 6c fouvent d’une fhuélure plus compofée; nous verrons ailleurs, par exemple, que ceux des abeilles & des bourdons ne conliftent pas en deux vefties auflt fimples que celles des mouches à deux ailes. Ce font au refte ces poulmons que les mouches ont dans le corps, qui m’ont déterminé à donner le nom de corcelet à la partie qui eft entre la tête de la mouche 6 c le corps; qui m’ont empêché de lui conferver le nom de poitrine qui lui a été donné par divers Naturaliftes; ce dernier nom fait imaginer une partie dans laquelle les poulmons font contenus, 6c ceux des mouches ne font pas dans le corcelet. Revenons à préfent à ces nuages minces, à ces tran¬ ches oblcures dont nous avons parlé ci-devant, qu’on voit partir du corcelet, 6c avancer peu à peu vers la par¬ tie poftérieure; nous avons dit fimplement que nous croyons devoir attribuer cette apparence à l’air qui s’in¬ troduit dans le corps de la mouche; nous fommes en état à préfent de nous mieux expliquer. Imaginons d’abord les facs pulmonaires autant gonflés qu’ils le peuvent Mm ij 276 MEMOIRES POUR L’HlSTOIRE être,& appliqués contre les parois intérieures du corps. Si nous luppofons enluite qu’une portion de ces Tacs, une tranche très-mince prife auprès du corcelet, fe fé- pare pour un in fiant de la partie de l’anneau quelle touchoit, que dans i’inflant luivant, la tranche la plus proche de celle-ci fe fèpare de même, pendant que la première reprend fa première pofition, & que ce mou¬ vement fe continue de tranche en tranche; alors il pa- roîtra à celui qui oblèrve la mouche, qu’il y a un an¬ neau mince, ou plutôt un plan qui du corcelet avan¬ ce vers la partie poftérieure; il croira voir deux ou trois plans femblables en mouvement, fi les premières parties des veffies recommencent leur jeu, avant que les der¬ nières parties ayent fini le leur. Il ne refleroit donc qu’à expliquer ce qui détermine les parties des veffies à fe dé¬ tacher ainfi fucceffivement des parois des anneaux, pour revenir fur le champ s’y rappliquer; fi ces parois avoient befoin d’avoir une efpece de mouvement vermiculaire pour agir fur l’air qu’elles renferment, ce mouvement fatisferoit à ce que nous demandons. Il y a encore une autre manière dont cet effet pourroit être produit ; s’il y avoit de l’air qui entrât à chaque inflant dans le corps même de la mouche. Si qui dût paffer en dehors des veffies, à mefure qu’une couche de cet air avanceroit du corcelet vers la partie poftérieure, il lépareroit les parois des veffies de celles des anneaux. Mais il en eft de cc phénomène comme de tant d’autres que la Phyfique nous offre, nous entrevoyons différentes caufès par lef- quelles il pourroit être produit, & nous ne fommes pas en état de prononcer décifivement à laquelle il eft dû. Outre le mouvement propre aux deux poulinons,' outre celui que l’air y produit quand il y entre, ils font agités par ceux du cœur, lorfqu’il fe dilate ; il les pouffe des Insectes. VI. Mem. 277 l’ün & l’autre. Nous avons dit ci-deflus qu’à l’origine du corcelet il femble y avoir un fécond cœur, qu’il y a là un rél'ervoir dont le diamètre furpaffe celui de la principale artere. Quand on regarde par l’ouverture faite à un des côtés de la mouche, & à un de fes lacs pul¬ monaires, la partie du fac pofée comme un mediaftin, ou encore mieux lorfqu’on a détruit le fac le plus pro¬ che de l’ouverture, on voit que les battemens du der¬ nier réfervoir à liqueur, agiffent contre l’enveloppe exté¬ rieure de l’autre fac, qu’ils la foûlevent. Dès que le conduit * des alimens eft parvenu par- delà les bouts des poulinons, par-delà l’endroit où ils forment un diaphragme, on lui trouve une efpece de gros & court nœud *, dont le diamètre furpalfe trois à quatre fois celui que le canal avoit auparavant. Ce nœud eft compofé de trois lobes charnus *, dont deux font beaucoup plus petits que le troifiéme. L’affcmblage de ces trois lobes eft apparemment l’eftomach de la mou¬ che; l’inteftin en fort affés près de l’endroit où le pre¬ mier canal s’y eft introduit. Cet inteftin fe dirige vers l’anus, il remonte enfuite vers le diaphragme, ou le fond des lacs pulmonaires, Si ce n’eft qu’après plulieurs cir¬ convolutions, qu’après avoir été plufieurs fois en arriére. Si être revenu plufieurs fois en avant, qu’il fe rend à l’anus où il aboutit. Nous pourrons donner des exem¬ ples de la longueur & des inflexions des inteflins, dans les Hifloires particulières de quelques mouches. Nous nous contenterons aéîuellement de faire remarquer qu’au lieu que dans les papillons Si dans les chenilles, il n’y a de la bouche à i’anus , qu’un canal prefque droit , dans les mouches Si dans les vers qui doivent devenir mouches, le canal analogue au précédent, efl très-tor¬ tueux, & fait beaucoup de circonvolutions avant que Mm iij * pi. 20. fig, i o. e. * Fig. r 0 & VIII. i, k, /. 278 MEMOIRES POUR L’HlSTOIRE d’arriver à Ton terme; d’où il eft aile de juger que les va¬ riétés qui fe trouvent dans l’intérieur des infedes de dif¬ férentes claiïes, font encore plus confidérables que celles que leur extérieur nous préfente. E X P L IC AT IO N DES FIGURES DU SIXIEME MEMOIRE . Planche XIX. L A Figure première repréfente une tête d’une greffe mouche bleue de la viande, vue par deffus, & greffe à la loupe, r, r, les yeux à rezeau. i, i, i, les trois petits yeux, ou les yeuxli(Tes difpoûés en triangle, autour def- quels font de grands poils. La Figure 2 fait voir par deiïus la partie antérieure d’une mouche d’un ver à queue de rat, qui fe nourrit dans le bois pourri des troncs d’arbre, & qui fera repré- fentée dans une autre planche, c c, partie du corcelet de cette mouche, r, r, yeux à rezeau. /, /, /, les trois petits yeux ou les yeux lilfes. La Figure 3 montre la partie antérieure d’une petite mouche éphémère, très-groffie au microfcope, & vûe par-delfus; & cela pour faire voir des yeux à rezeau de deux efpeces qu’a cette mouche, c c, partie du corcelet. r, r, yeux à rezeau qui font dans la même place que ceux des autres mouches, t, t, deux autres yeux à rezeau qui s’élèvent au deffus de la tête, & qui font faits en turban ou en champignon à groffe tige. j),p, poils qui partent des antennes. La Figure 4. eft celle de la partie qui eft vûe en def¬ fus dans la figure 3, vûe ici en deffous. c c, le corcelet. des Insectes. VI. Mem. 279 r, r, les yeux à rezeau. t, t, les yeux en turban. /, i, i, les trois yeux lifles qui font fur le devant de la tête, au lieu que dans les ligures i & 2 ils font fur le derrière. p, p, deux poils, dont chacun part d’une antenne, b, l’endroit où ell; la bouche, dont on n’a pas cherché à repréfenter ici les parties. La Figure 5 eft encore en grand le deffous de la par¬ tie antérieure d’une mouche épéhmere , d’une efpece différente de.i’éphémere des ligures 3 & 4., & dont les yeux font autrement faits & autrement difpofés. c c, le corcelet. b, les parties qui entourent la bouche, r, r, les yeux à rezeau. i, k, les trois petits yeux, ou les yeux lifles qui font grands & faillans dans cette mouche. p,p t deux poils dont chacun fort du bout d’une antenne. La Figure 6 repréfente vue par-deffus, la partie de la mouche éphémère qui eft vue par-delfous dans la ligure 5. c c, le corcelet. r, r , les yeux à rezeau. /, h, i, les yeux lilfes qui font clairs & luifans, & qui femblent fertis dans un chaton noir, a,a, les antennes. p,p, les poils qui par¬ tent des antennes. La Figure 7 fait voir en grand la partie antérieure d’une mouche papillonnacée, d’une efpece très-commu¬ ne, & de couleur cannelle, c c, le corcelet. r, r, les yeux à rezeau. ï, i, les deux feuls petits yeux que j’aye trouvés à cette mouche. La Figure 8 montre de côté une mouche bleue de la ^viande très-grofïie à la loupe, ayant les ailes relevées. un des deux premiers fligmates du corcelet. f, un des deux autres ûigmates du corcelet. m, un des balanciers ou maillets. La Figure 9 eü celle du corps & d’une grande partie 28o Mémoires pour l’Histoire du corcelet d’une mouche bleue, vus par-délions & grofiis. c c, le corcelet. n, n, les deux ailerons ou coquil¬ les fupérieures. k, k, les deux ailerons ou coquilles infé¬ rieures. Les deux ailes font ici arrachées, afin que les ailerons l'oient plus à découvert. ///, in, les balanciers ou maillets, a, a; b, b, deux des anneaux, les memes qui couvrent le dos, on voit que ces anneaux Unifient de part & d’autre lorfqu’ils arrivent à cette bande dont c marque un des bouts. La Figure io fait voir féparément deux des coquilles ou ailerons n & k de la figure précédente, n, la coquille fupérieure. k, l’inférieure. o,p, les attaches de la coquille. n 4 partie qui joint la coquille inférieure k, à la fupé¬ rieure n. En /les coquilles font aufli attachées au corcelet. La Figure i i repréfente une aile de la mouche de la figure 8. On voit en u une entaille. Làilfemble qu’une petite aile eft foudée à une grande. La Figure 12 eft celle du bout du pied d’une mou¬ che, du genre de celles de la figure 8, très-grofii & vû par-deftous. q, l’endroit où le bout du pied a été féparé île la partie avec laquelle il étoit articulé, x, x, grands poils dont il eft bordé de chaque œté.p,p, les deux pe¬ lotes du pied, c, c, les bouts des deux crochets, f grand poil. La Figure 13 repréfente une jambe de mouche, grof- fie à la loupe, dont le bout du pied eft plus groftî dans la figure 12. a, articulation d’une petite partie qui s’at¬ tache au corcelet. a e, la cuifte. e d, la jambe. Si en nom¬ mant les parties des mouches, on fuit l’analogie quefui- vent les anatonliftes en déterminant le pied des oifeaux; fô £> Vf Vf fera k P^d de k mouche. Après la grande partie des Insectes. VL Mem, 281 partie f il eft compofé de cinq petites g, g. c, c, les deux crochets, p, p, ies deux pelotes. La Figure 14 eft plus en grand celle d’un de ces ba¬ lanciers qui font marqués m dans les figures 8 & 9. m, la partie du balancier qui eft terminée par une palette ou un maillet.#, le bout de la verge du balancier qui étoit uni au corcelet. Planche XX. Les Figures 1, 2 & 3 font principalement deftinées à faire voir comment il eft permis au corps des mouches de différentes efpeces, de fe gonfler, quoiqu’ils foient couverts d’anneaux écailleux. La Figure première eft celle du corps de la mouche, qui eft repréfenté figure 9 , planche 19, ou celle du corps d’une mouche du même genre defîiné du même côté, mais dans un temps différent de celui où l’autre l’a été, fçavoir lorfque le ventre étoit diftendu par l’air ou par les œufs, c, le bout du corps, qui fe joint au corcelet. a a, b b, cc, dd, les bouts des anneaux qui cou¬ vrent le dos, & qui, lorlque le corps de la mouche n’eft pas gonflé, couvrent une grande partie du ventre, f h, bande de petites lames écailleufes qui font touchées,ou prefque touchées par les bouts des anneaux a, b, c, d, lorfque le ventre n’eft pas gonflé;& qui, lorfque le ven¬ tre eft gonflé, en font écartées, parce que les deux feuil¬ lets membraneux qui font ici en blanc, fe font dépliés. La Figure 2 repréfente en grand & vu de côté, le corps d’une mouche , dont chaque anneau eft compofé de deux demi-anneaux, a, b, c,d, portions des demi- anneaux fupérieurs, ou du dos. c, f g, h, portions des demi-anneaux inférieurs, ou de ceux du ventre. Quand Tome IV. . N n 2Ü2 MEMOIRES POUR L’HiSTOIRE la mouche n’eft point gonflée, le bout a de l’anneau lu- périeur, paroît appliqué contre le bout h de l’anneau inférieur, & ainfi des autres. Mais quand le corps de la mouche efl gonflé, une membrane qui s’ert dépliflee, comme elle l’eft ici, tient les bouts des anneaux du dos écartés des bouts des anneaux du ventre, f f f fligma- tes qui font vifibles lorfque le corps de la mouche efl gonflé, 6 c qui font cachés lorfque le corps a moins de volume. La Figure 3 fait voir le corps d’une guêpe, grofll, de côté, 6 c fous le ventre, c, partie du corcelet. f, blet qui joint le corps au corcelet. a, b, c , d, c, f portions des anneaux fupérieurs. g,h, i, k, l , portions des anneaux inférieurs. On voit que ces anneaux font en recouvre¬ ment les uns fur les autres; ils peuvent y être plus ou moins, 6 c ils y font aufli plus ou moins, félon que le corps de la mouche eft plus ou moins gonflé. Les Figures 4, 5 6 c 6 repréfentent toutes trois le corps d’une de ces mouches qui viennent de vers mangeurs de pucerons, beaucoup grofli, 6 c vu du côté du ventre. Ce corps étant plat 6 c tranfparent, permet de voir la plupart des parties qu’il renferme, 6 c fur-tout le coeur & le canal dans lequel il verfe la liqueur. Dans toutes ces figures d efl l’endroit où le corps fie joint au corcelet. Dans la Figure 4 le cœur c r a la figure d'un rein, u (l vaiffeau dans lequel la liqueur efl verfée à différentes reprifes, 6 c dans lequel on la voit aller jufqu’en t } où il femble y avoir un fécond réfervoir. Dans la Figure 5 le cœur c 0, rcflcmble à une bou¬ teille. u f, vaiffeau dans lequel la liqueur efl feringuée, 6 c qui paroît être le col de la bouteille. DES I N S E C T E S. VL Mem . 283 Dans la Figure 6 le cœur c 0, a une figure moyenne entre celles des figures 4 & 5 ; mais deux va idéaux y z, y Z, femblent partir du cœur; ils ont tous deux une en¬ veloppe commune. La Figure 7 efl celle d’une mouche en forme d’abeille, reprélèntée de grandeur naturelle. Celle-ci efl une des plus grofies mouches de ce genre. La Figure vm repréfente l’eflomach de cette mouche, avec une portion antérieure e du conduit des alimens, & une portion i des inteflins./î I , k , trois lobes dont cet cflomach paroît compofé. Il efl encore repréfenté dans la figure 10, mais dans une vue qui 11e montre que deux de fes lobes. Les Figures 8, 9 & 10 ont été deffinées principale¬ ment pour faire voir les poulmons des mouches à corps court; elles l’ont été d’après une mouche du genre de celle de la figure 7. II efl inutile d’avertir que les parties qu’elles repréfentent font confidérablcment groffies. La Figure 8 fait voir par le côté un corps de mou¬ che qui a été ouvert d’un coup de cifeau. c, la joncflion du corps avec le corcelet. La partie blanche d 11c d, qui paroît comme un joli rezeau blanc, & qui forme une cloifon, efl la face intérieure d’un des facs pulmonaires. 7 / u, partie plus charnue qui femble faire un cadre à la cloifon,& qui efl une portion de la principale art ere.ea d efl prefque la feule portion de la capacité du corps qui foit laiffée à toutes les autres parties intérieures. La Figure 9 montre les deux facs pulmonaires, ou les deux poulmons à découvert, u, f, les bouts des deux facs. f d a é, la feule portion de la capacité du corps qui foit iaiffée ici aux autres parties intérieures. Nn ij 284 MEMOIRES POUR L’HiSTOIRE La Figure 10 repréfente le corps tronqué d’une mou¬ che; fon bout poftérieur a été coupé dans l’endroit mai> qué b d, fig. 9* ou de, fig. 8 ; & on a emporté les par¬ ties intérieures qui pouvoient cacher les bouts des deux lacs pulmonaires, d, le bout d’un des facs. b, le bout de lautre. On voit qu’ils forment enfemble un diaphragme l, d. En u on'voit la coupe de la principale artere. e, le conduit des alimens. f, l’eftomach. ï, portion des inte- fiins. Ces dernières parties ont été conférées. * 4 // F, Fi. t- jo. J-,//.,!./ '.„ 4 - des Insectes. VIL Mem. 285 ÿÿ*4***+***:<$>:***+* *♦*♦***+**♦ ❖❖❖ ❖❖********.» SE P T 1 EM E MEMO IRE. DE LA PREMIERE ET DE LA SECONDE METAMORPHOSE DES VERS QUI SE FONT UNE COQUE DE LEUR PROPRE PEAU. D Ans les volumes précédons & dans celui-ci il a été Lit mention bien des fois des vers qui fe font de leur propre peau une coque dans laquelle ils perdent leur forme, pour prendre par la fuite celle de mouche à deux ailes ; mais ce n’a été qu’en général qu’on y a parlé des transformations de ces vers. Quoiqu’elles ne foient pas moins finguliéres que celles par lefquelles les chenilles deviennent crifalides, & enfin papillons, quoi¬ qu’elles le foient même davantage à certains égards, les Naturalifies ont jufqu a préfent négligé de les obferver avec l’attention dont elles font dignes : ils ne nous ont point expliqué comment elles s’accompliffent; peut-être l’ont-ils ignoré. Il y a grande apparence qu’ils ont penfé qu’à la coque près que chaque ver fe fait de fa peau, tout le refie fe pafloit dans fa métamorphofe comme dans celle d’une chenille; mais les obfervations que nous allons rapporter, apprendront des différences qui méri- îoient d’être connues. Au refie nous avons cru que nous devions différer à traiter de ces métamorphofes, & à les fuivre dans tous les détails où elles exigent que nous entrions, jufqu’au temps où l’hifioire des vers à qui elles font propres, feroit notre principal objet. N n iij 28 6 MEMOIRES POUR L’HlSTOIRE Tous les vers de mouches à deux aîies que nous avons mis dans la première clafle, tous ceux de la fécondé clalfe, & une partie de ceux de la troiliéme, fe font de leur peau une coque dans laquelle s’accompiilTcnt toutes leurs transformations. Celles des vers de ces differentes clalfes, Si quelquefois meme celles de vers de diffèrens genres, ont pourtant des fingularités à nous offrir, mais nous n’examinerons dans ce Mémoire que les transfor¬ mations des vers de la première & de la troiliéme clalfe. Nous donnerons dans un des Mémoires fuivans l’hiftoire des vers de la fécondé clalfe, Si ce fera là que nous par¬ ierons de la manière dont ils fe transforment. Par rapport aux vers de la première clalfe, par les métamorphofes dd'quels nous allons commencer, nous nous fixerons meme à celles d’une feule efpece de ces infeéles, à celles de ces vers qui vivent de viande, Si qui deviennent de grolfes mouches bleues. Ce qui s’y pâlie nous apprendra i’elfentiel des transformations des autres genres de vers de la meme clafle; nous n’aurons plus qu’à faire remar¬ quer ce qu’elles peuvent avoir de particulier. Quand les vers de la viande ont pris tout leuraccroif. fement, il ne leur convient plus de relier fur cette chair corrompue, où jufques-là ils s’étoient trouvés fi bien;ils la quittent, chacun va de fon côté chercher une retraite où il puilfe fe métamorphofer. La première fois que je mis dans un poudrier de la viande, fur laquelle des vers de cette elpece venoientde naître, je fus furpris au bout de quelques jours, de n’en trouver pas un fcul dans le poudrier : quand ils n’eurent plus befoin d’y prendre d’alimens, ils cherchèrent à en fortir, Si ils parvinrent à percer le papier qui couvroit le poudrier, ce que les chenilles n’eu fient pas fait en pareil cas. Je foupçonnai, & on ne pouvoit guéres foupçonner que cela, qu’ils des Insectes. VIL Mem. 287 avoient été chercher de la terre pour y entrer; qu’ils ai- moient à être fous terre iorfqu’ils fe transformoient, & jufqua ce qu’ils fliffent devenus mouches. Je n’ai pas manqué depuis de remplir en partie de terre les pou¬ driers dans iefquels je renfermois de la viande pleine de vers ou d’œufs de mouches, & jamais les vers, quand ils 11’ont plus eu befoin de prendre de nourriture, n’ont fait de tentatives pour fortir; ifs font toujours entrés dans la terre du poudrier, & fe font ordinairement arrê¬ tés dans celle qui étoit le plus proche du fond; ceux même que j’ai biffés dans des poudriers que j’avois né¬ gligé de couvrir, n’ont pas cherché à en fortir ; ils trou¬ vaient à leur portée ce qu’il leur falloir. Ils refient fouvent en terre deux ou trois jours avant que de s’y métamorphofer ; j’en ai vu mêmetoqui y font re¬ liés prefqu’autant de temps qu’ils en avoient employé de¬ puis leur l'ortie de l’œuf, à prendre leur parfait accroif- fement, fept à huit jours. Ils fe tiennent tranquilles dans la terre qui les couvre; quand on leur en refufe, quand on les biffe, comme je les ai biffés plufîeurs fois, dans des poudriers nets Si couverts de parchemin, on les voit marcher continuellement, ils ne fe laffent de chercher la terre qu’ils défirent que lorfqu’ils font près de perdre leur forme; mais ils la perdent, ils fe métamorphofent dans ces poudriers comme ils fe feraient métamorpholés fous terre. La circonflance du poudrier net cfl pourtant néceffaire, je veux dire qu’il ne faut pas les biffer dans un poudrier où il y ait encore une quantité un peu confidéra- ble de cette chair pourrie qui les a nourris; alors elle n’cfl plus propre qu’à les faire périr; l’eau qu’elle rend en con¬ tinuant de fe diffoùdre, les noyé; ils ne font plus aufft en état de l’empêcher de pénétrer dans leurs trachées, qu’ils l’ont été auparavant. 288 MEMOIRES POUR L’HîSTOIRE Mais le ver qui a pénétré Tous terre, ou le ver qui a été renfermé dans un vafe fec, y perd ordinairement fa première forme au bout de deux ou trois jours. Ce ver * qui ctoit blanc, tranfparent, charnu , 6c même dont la chair paroifloit tendre 6c molle, dont le bout anté¬ rieur étoitplus menu que le poftérieur, prend alors la figure d’un œuf * de couleur rougeâtre ou de marron, & il lem- ble être crufiacée; du moins fon enveloppe eft-elle opa¬ que 6c calfante. Il eft incapable de mouvement, il ne peut plus ni s’allonger, ni s’accourcir, ni fe gonfler, ni fe contraéter; il eft parfaitement roide, en quoi il diffère encore des crifalides, dont la partie poftérieure au moins eft mobile, & fe meut quelquefois. En un mot, ce que i’on voit alors n’a plus du tout l’air d’un ver, 6c ne pa- roît être qu’une efpece d’œuf rougeâtre. Redi aufli lui en a donné le nom, & femble l’avoir pris trop réellement pour une forte d’œuf. Notre ver blanc & mol a non- feulement perdu fa première figure, il femble aufli avoir perdu la vie. L’infecfte vit pourtant, & les changemens qui vien¬ nent de fe faire chés lui, en préparent de plus confidé- rables qui s’y feront par la fuite. Mais avant que de dé¬ crire ceux-ci, arrêtons-nous à confidérer davantage les premiers, à voir précifémcnt en quoi ils confident, 6c comment ils fe font faits. Nous avons admiré ailleurs l’art de fe filer des coques, connu de tant d’efpeces de che¬ nilles; ces chenilles, dont une efpece travaille fi utile¬ ment pour nous, ne fongent qu’à lé conftruire des cellu¬ les, dans lefquelles elles puiflent fe métamorphofer com¬ modément , 6c refter en fureté après leur métamorphofe. Nos vers ne fçavent point fe faire de fi jolies coques, mais le moyen que la nature a appris à chacun de s’en faire une très-folide 6c très-capable de les bien couvrir, des Insectes. VIL Aient. 289 après leur métamorphofe, ne doit pas nous paroître moins admirable. On nous raconterait lin pfodige, fi on nous apprenoit qu’il y a un quadrupède de quel- qu’elpece, de ia grandeur d’un ours, ou même de celle d’un bœuf , qui dans un certain temps de l’année, à l'ap¬ proche de l’hyver par exemple, Ce détache entièrement de fa peau, pour s’en faire une 'pece de boîte de la ligure d’une boule allongée; qu’il lé renferme dans cette boite, que non-feulement il fçait la rendre clofe de toutes parts, qu’il fçait de plus lui donner une folidité qui le met à l’abri des injures de l’air & des infultes des autres ani¬ maux. Ce prodige nous l’avons en petit dans la méta¬ morphofe de notre ver : il Ce défait de fa peau pour s en faire un logement folide & bien clos. Nous avons vû ail¬ leurs les chenilles & divers autres infectes laiffer des dé¬ pouilles très-complettes, leur opération , quoique diffi¬ cile, 11e nous le doit pas paroître autant que celle de notre ver : après que la chenille par fes efforts,a obligé fa peau à Ce fendre, elle s’en tire par l’ouverture qui s’y elf faite; mais notre ver doit détacher fa peau de toutes les parties auxquelles elle étoit adhérente, & relier cepen¬ dant fous cette peau, ce qui nous doit fenabler bien au¬ trement difficile à exécuter; il doit de plus faire prendre à cette peau une certaine figure. Nous ne pouvons encore nous empêcher d’admirer la confiftance & la folidité que prend cette peau qui étoit fi tranfparente, & qui nousfembloit fi mince. Quand elle forme une coque, elle efî capable de foûtenir une pref- fion des doigts affés forte; une pareille coque de parche¬ min ou de velin, ne ferait peut-être pas capable d’une auffi grande réfiflance. * Pi -> i fg. Quoique le ver foit plus menu à fa partie antérieure* i.a. qu’à fa partie poflérieure *, il peut, quand il le veut, * P1 --21.6g. Tome IV . . Q o 2 ' p ’ 2Ç0 MEMOIRES POUR L’HiSTOIRE rendre la première aulfi grohe à peu près que l’autre, & cela en la raccourcihant, & faifant rentrer fa tête & fes pre¬ miers anneaux fous ceux qui fuivent; & c’eh ce qu’il ne manque pas de faire, dès qu’il a pahe fous terre pour le préparer à fa transformation. Il s’y tient raccourci; il dif- polè fes parties à prendre, pour ainfi dire, le pli qu’elles doivent avoir par la fuite. Quand on le retire de terre huit à dix heures après qu’il y eh entré, il a fouvent cette *Fig. 2. forme d’œuf * qui lui elt efTentielle après fa métamor- phofe; quoiqu’il foit encore ver, on le croiroit déjà mé- tamorphofé, on croiroit qu’il.ne manque plus à fa peau que de changer de couleur. Bientôt pourtant il montre qu’il eh encore dans fon premier état; il fait fortir la tête de dehous les anneaux qui la cachoient, il s’allon¬ ge, il reparoît tel qu’il étoit fur la viande, il le remet à marcher, ou plutôt à fe traîner. Si on le laide ren¬ trer en terre, dès qu’il y eh, il reprend fa figure rac¬ courcie. Dans les premiers inhans où il a pris cette figu¬ re pour ne la plus quitter, il eh encore auhi blanc qu’il 1 ’étoit auparavant ; alors on ne peut dihinguer le ver qui s’eh véritablement transformé, de celui qui fe prépare à la transformationque parce que le premier, quoique tenu entre les doigts, ne s’allonge, ni ne fait des tenta¬ tives pour s’allonger, au lieu que l’autre ne tarde guéres «à montrer fa tête. Quand le changement eh prêt à fe faire, il s’acheve vite; tel ver que j’ai tenu entre mes doigts pendant cinq à lix minutes, qui d’abord s’y étoit montré capable d’allongement, s’y eh raccourci pour la dernière fois de fà vie, pour relier toujours raccourci. Alors le blanc de la peau prend de legeres teintes de rouge; en moins d’un demi-quart d’heure ces teintes font fenfibles, & au bout de deux ou trois heures la peau ch toute rouge, mais d’un affés mauvais rouge, & qui tend des Insectes. VIL Mem . 291 à la couleur de marron qui paroît au bout de quelques autres heures. Nous ne donnerons plus à cette peau rougeâtre que le nom de coque; elle en fait les fondions; elle ne tient plus au corps de finfeéte, elle efl déjà devenue roide & friable, & elle le deviendra encore plus à mefure quelle achèvera de fe deffécher. Elle commençoit fans doute à être roide, dans le premier inflant où l’infede a ceffé de fe pouvoir allonger, ou, ce qui elt la même chofe, dans le premier in fiant où il a ceffé de pouvoir écarter les uns des autres les anneaux dont cette peau efl compofée, & de pouvoir les étendre chacun en particulier. Les anneaux de la première peau devenus trop roides & trop emboî¬ tés les uns dans les autres, n’ont pû être dégagés les uns des autres, ils 11’ont pû céder aux efforts qu'une fécondé peau de i’infeéle plus intérieure & plus louple faifoit contr’eux. Mais les efforts de cette fécondé peau ont produit un autre effet nécelfaire, ils l’ont féparée de la première, ils ont rompu les libres & les vaiffeaux qui les iioient encore enfemble. La première peau a ceffé d’être une partie du ver fans ceffer de l’envelopper. Tant que le ver efl ver, fon état naturel efl d’être allongé, je veux dire qu’il a befoin de mettre fes muf clés en contraction pour prendre une figure raccourcie. J’ai tiré de terre des vers qui avoient pris cette dernière figure, mais qui nel’avoient prife encore que pour fe pré¬ parer à l’avoir conflamment & fans effort; je les ai jettés dans de l’eau bouillante; en y périffant ils fe font allongés, leur partie antérieure efl refiée très-menue en comparai- fon de la poflérieure. J’ai fendu avec une lancette la peau de quelques-uns des vers qui avoient ainfi péri, je l’ai foulevée, & j’ai vu qu’il étoit affés aifé de la féparer des chairs blanches qui étoient defTous. Le temps auffi où O o ij 2Ç2 MEMOIRES POUR L’HlSTOIRE elle s’en ferait féparée naturellement, étoit proche, elle étoit dure, femblable à un parchemin très-mince ; je n’y ai pu appercevoir des fibres qui euflent un arrangement régulier. Dès que cette peau efl devenue coque, lors meme quelle efi encore blanche, elle a déjà de iafiolidité; fi on la prefle, on juge que pour réfifier, autant quelle fait, fur-tout n étant pas encore abfolument féche, il faut qu’elle foit épaifi'e; elle l’efi aufii, & dans certains vers dont nous parlerons ailleurs, elle l’eft au-delà de ce qu’on imaginerait, elle a autant d’épaifleur qu’un cuir& plus de dureté. La nature femble aufii avoir fongé à ménager à la peau de nos vers de la viande, une épaifleur telle qu’il la lui falloit pour quelle pût devenir une coque folide. Nous fçavons que les chenilles changent de peau plu- fieurs fois dans leur vie avant que de fe transformer; tous ies inlècftes dont nous avons parlé, en changent plufieurs fois, pendant que leur accroiflement le fait ; mais il efi très à remarquer que tant que nos vers de la viande vi¬ vent & croiflent lous leur forme de ver, ils ne le dé¬ font d’aucune peau, d’aucune dépouille, du moins ne fuis-je jamais parvenu à leur en voir quitter, ni à en trou¬ ver qu’ils euflent laifiee. Il n’eût pas été poflible que les peaux quittées par plufieurs centaines de vers dans le mê¬ me poudrier, m’euflent échappé ; ces vers font apparem¬ ment dans une feule fois l’équivalent de ce que les che- nillles font quatre ou cinq fois dans leur vie. La peau que le ver laifle, a peut-être feule l’épaifleur des qua¬ tre à cinq peaux que les chenilles quittent fucceflive- ment. La peau du ver lui efi confervée pour qu’elle ait le temps de s’épaiflir autant qu’elle en a befoin. En¬ fin 1’épaifleur de la peau du ver efi encore augmentée par une autre circonftance ; après fa métamorphofe il a des Insectes. VU. Mem. 293 confidérablement moins de volume qu’il n’en avoit avant que de s’être transformé, ce que la peau perd en fe con¬ tractant efl employé à l’épaifïir. Si on oblerve la coque, fur-tout avec une loupe, on reconnoît quelle elt faite d’une fuite d’anneaux * qui font plus marqués & plus ailés à compter qu’ils ne i’é- toient fur le ver; on en trouve neuf entre les calottes qui forment les deux bouts. Deux anneaux au moins, fans comprendre la tête, font employés à compofer la calotte du bout antérieur; celle-ci efl froncée *, comme i'ert l’ouverture d’une bourfe fermée, mais qui ne l’efl pas entièrement; je veux dire que les plis ne parviennent pas julqu’au centre. A chaque extrémité d’un des diamè¬ tres de cette calotte, la loupe fait diftinguer deux petits corps * que la vue fimple ne fait qu’appercevoir. Cha¬ cun d’eux efl un des fligmates antérieurs. Sur les deux anneaux qui fuiventla calotte, immédiatement audeffous de chaque fligmate, fe trouve un petit cordon *, une petite élévation qui mérite d’être remarquée; par la fuite elles ont l’une & l’autre un ufage important. Ces deux- cordons fembleroient être les endroits les plus forts de la coque, ils font cependant les plus foibles, c’eft là que la coque doit fe fendre & s’entr’ouvrir pour laiffer fortir la mouche. Il m’a paru que chacun de ces cordons fe trouvoit au deffus d’une portion d’une des principales trachées; des ondulations, des efpeces de battemensplus vifs qu’à l’ordinaire, des portions des trachées qui répon¬ dent à ces endroits, & des battemens qui fe font faits îorfque le ver étoit près de fe métamorphofer, peuvent aider à produire les deux élévations ou les deux cordons dont nous parlons. J’ai déjà cru en appercevoir des verti¬ ges, voir un peu de relief fur la peau du ver qui ne s etoit pas encore transformé, mais qui étoit tout près de O o iij * PI. 2 1 . < 5 g. 3 - * FJg. 3. 0, * Fig. 6 . 1 e. 294 MEMOIRES POUR L’HïSTOIRE le faire; & je les ai inutilement cherchés à des vers dont la transformation ne devoit arriver que dans deux ou trois heures. Sur la calotte qui fait l’autre bout de la coque, on re- * PI. 21. fig. trouve les deux fligmates poftérieurs *, les deux plus con- fidérables du ver, 6 c dont chacun efl un affemblage de trois fligmates plus petits. Les deux grands fligmates font plus rapprochés l’un de l’autre, plus applatis, 6 c plus bruns qu’ils ne l’étoient lorfque le ver avoit fa première forme. On apperçoit auffi fur cette même calotte, une * r, r, r, r. efpece de couronne * compofée d’un nombre de grains égal à celui des cornes ou des rayons charnus qui étoient fur le derrière du ver. Chacune de ces cornes a été ré¬ duite à un de ces petits grains. Mais quelle forme a le ver immédiatement après qu’il s’efl fait une coque de fi propre peau! Je ne vois pas qu’on ait eu de doute fur cela; comme la chenille qui s’efl transformée, efl devenue une crifalide, comme une infinité d’autres infeétes, 6 c nommément des vers, font des nymphes dès qu’ils ont perdu leur première peau, on a jugé que dès que le ver de l’efpece de ceux que nous examinons, sctoit tiré de fa dépouille, il avoit auffi la forme de nymphe. Outre que l’analogie porte à le pen- fer, on fèmble en avoir une preuve, lorfqu’on vient à ouvrir la coque dans un temps où il efl permis de l’ou¬ vrir fans bleffer l’infeéle; alors on met à découvert une nymphe à laquelle il efl aifé de trouver toutes les parties d’une mouche. Mais des obfervations faites de meilleure heure, m’ont prouvé que la transformation du ver en nymphe n’étoit pas fi prompte, quelle devoit être pré¬ parée par une autre, comme celle en papillon i’eft par la transformation en crifalide. Lorfque j’ai ouvert des coques de vers qui s’étoient métamorphofés depuis vingt- des Insectes. VIL Man. 295 quatre heures, je n’y ai pû trouver aucuns vertiges des parties propres aux nymphes, comme des jambes, des ailes, de la tète, Sic. Si il me fembloit que d’autres n’au- roient pas mieux réulfi que moi à y en trouver. Mais on auroit pû croire que comme tout l’intérieur de l’infe- dte 11e fembloit alors qu’une bouillie de lait, toutes les parties de la nymphe étoient fi molles, quelles perdoient leur forme, & le détruifoient pour peu qu’on les touchât. Il ert vrai que l’infeéle elt extrêmement mol, qu’il ert prefque fluide dans les premiers temps où il ert logé dans fa coque, mais ii s’y affermit peu à peu. Nous parlerons ailleurs des vers qui fe nourrilfent dans les intertins du cheval, Si qui n’en fortent que lorfqu’iis font près de fe transformer; ces infeéles relient dans leur coque plus long¬ temps que nos vers de viande 11e relient dans la leur, ils font plus long-temps à parvenir à prendre la forme de mouche. J’ouvris des coques de ces vers de cheval plus de huit jours après qu’ils fe furent transformés, les par¬ ties intérieures avoient alors de la confirtance; je parvins auflî à dégager chaque infeéle de la coque, à l’en tirer entièrement. Sur cet infecle, que je n’avois aucunement bleflc, qui étoit bien entier, je ne pus voir ni jambes, ni ailes, ni aucune des parties propres aux nymphes; il n’é- toit alors qu’une marte de chair blanche artes informe; il n’avoit que la figure d’une boule allongée Cette malfe qui ne fembloit pas avoir vie, étoit cependant ce ver ca¬ pable auparavant d’allongemens & de raccourcilfemens, capable de divers mouvemens, Si cette malfe fi peu fa¬ çonnée feroit devenue une nymphe, fur laquelle toutes les parties extérieures d’une mouche auroient été très- reconnoilfables. Le ver s’étoit donc transformé, dans une boule allongée avant que de fe métaorphofer en nym¬ phe. Tous les vers de cette efpece doivent paffer par 296 MEMOIRES POUR L’HiSTOIRE cette métamorphofe, & probablement tous les vers Je la dalle de ceux qui fe font une coque de leur peau, doi¬ vent la fubir. J’ai retiré de même de leurs coques des vers qui le nourriflent des chairs des animaux jettes dans les voiries, & je les ai trouvés avec la forme d’une boule allongée, qu’ils ne dévoient perdre que par la fuite. Nous donnerons aulfi à cette première métamorphofe, le nom de métamorphofe en boule allongée, ou en Ipheroïde, ou en ellipfoïde. Sans beaucoup d’adrefle & de patience, on peut fe convaincre que nos vers de la viande ont, comme les précédcns, une première transformation , après laquelle iis ne parodient que des boules allongées : on n’a qu’à faire cuire de ceux qui font en coque, c’eft-à-dire à les mettre dans de l’eau , & les y tenir jufqu a ce que l’eau ait donné quelques bouillons. On ne réulîit pas toujours fi bien en les jettant dans l’eau bouillante, les chairs trop brufquement faifies par la chaleur, & trop gonflées ap¬ paremment par l’air qu’elles contiennent, s’échappent par quelques endroits de la coque qu’elles ont forcé de fe briièr. Si on fait donc cuire des vers qui 11e fe font mis en coque que depuis douze, vingt-quatre ou trente-flx heures, la cudfon frit prendre de la folidité aux parties de l’infeéle, & alors en commençant à ouvrir la coque par les deux cordons * que nous avons fait connoître ci-de- * Pi. ii.fig. vaut, & continuant à l’ouvrir de chaque côté avec des 6 ' le - cifeatix à pointe Une, on fera en état d’enlever la coque par pièces, fans déranger les parties de l’infecle, & on l’aura fous la forme d’une boule allongée *. *Fig.7& 8. Les vers qui, pour devenir mouches à deux ailes, fe font une. coque de leur propre peau, pafTent donc par une métamorphofe de plus que les chenilles qui devien¬ nent papillons, & par une métamorphofe de plus que beaucoup des Insectes. VIL Mem . 297 Beaucoup devers de différais genres qui deviennent des mouches à quatre ailes; dès que tous ces derniers infe- cfles fe font défaits de leur peau, iis font des crifalides eu des nymphes, au lieu que nos vers qui fe font des coques de leur peau, doivent palfer par l’état de boule allongée, d’ellipfoïde, avant que de devenir nymphes. Nous verrons de plus que le paffage de 1 état de boule allongée à celui de mouche, ne fe fait pas comme le paffage de l’état de chenille à celui de crilàlide. Mais on demandera peut-être fi on doit mettre au rang des métamorphofes, ce nouvel état de l’infeéle, dans lequel il n’a qu’une forme un peu plus raccourcie que celle qu’il avoit ci-devant; fi on ne le doit point re¬ garder comme ces changemens de peau qui arrivent à une chenille plufieurs fois dans fa vie. Nous donnons le 2îom de métamorphofe à des changemens confidérables faits tant dans l’extérieur que dans l’intérieur de l’ani¬ mal , & nous en avons affûrément ici de tels. Cet infe- éle qui étoit ci-devant plus gros à fa partie poftérieure, qu’à fa partie antérieure, a actuellement fes deux bouts également gros. Il efl devenu dans l’impuiffance de fe mouvoir ; en perdant fa peau, il a perdu fes ftignaates antérieurs & poftérieurs, lès bouches de la refpiration, eu du moins il y elt arrivé des changemens confidéra¬ bles; cesftigmates font reliés fur une peau qui ne lui ap¬ partient plus. Il elî vrai qu’ils tiennent encore au corps par les trachées qui n’en font pas forties, mais elles en font dégagées en partie. Le ver n’a pas encore entièrement perdu ces crochets & ce dard écailleux qui lui fervoient de dents, mais il elt dans le même cas que s’il les avoit perdus; ils ne font plus à fon ufage, ils tiennent à la coque par un bout *, par la peau des environs de la*PI.ar.%, bouche. Aulfi lorfqu’on emporte la calotte antérieure 9 ’ c * Tome IV ‘ f Pp 2 $S Mémoires pour l’Histoire de l’infeéte qu’on a fait cuire, les crochets iuivent cette calotte, & biffent un vuide, un enfoncement dans les chairs du bout antérieur. Ces crochets & ce dard font des parties qui ont des attaches confidérables, & placées alfés avant dans l’inté¬ rieur; aufli eft-ce un grand travail pour l’infeéle que de rompre de pareils liens. Il y réufîit apparemment, & y tend par des mouvemens que j’ai vus. Ces inftrumens écailleux font bruns, & tant que la coque efl blanche, 6 c qu’elle conlèrve quelque tranl'parence, elle permet de les voir. Lorl'que je les ai obfervés peu d’inftans après que la transformation s’étoit faite, j’ai vû les bouts des tiges des crochets qui par un mouvement alfés lent mais continu, décrivaient environ le quart de la circon¬ férence de la coque, un arc de 90. degrés, en allant dans un fens, & qui le décrivoient enfuite, en revenant dans le fens contraire ; c’étoit un mouvement d’ofcillation , dont la pointe des crochets étoit le centre. Quelquefois dans les inftans fuivans, mais plus tard ordinairement, j’ai vû les bouts des tiges avancer vers la partie poftérieu- re, & retourner enfuite vers l’antérieure. Les chairs aux¬ quelles les pointes des crochets tenoient, n’étoient pas encore fi bien collées à la coque, quelles ne pulfent cé¬ der un peu, mais elles cédoient en réûfîant : c’eff leur réfillance apparemment qui, lorfqu’elie devient plus for¬ te, achevé de détacher les crochets qui font tirés vers le derrière par des liens plus foibles que les chairs ou les peaux qui fe font defféchées & collées à la calotte anté¬ rieure. J’ai quelquefois apperçu les mouvemens alterna¬ tifs des tiges des crochets, de derrière en avant à des vers qui s’étoient transformés depuis près de vingt-quatre heures. L’infeéîe doit perdre cette forme groffiére tous laquelle des Insectes. VI /. Mem. 199 ïl n’a pas l’air d’un animal qui ait vie, ni propre à vivre. Si on ouvre une coque cinq à fix jours après que le ver sert transformé, on trouve qu’elle ell remplie par une nymphe * bien blanche, pourvue de toutes les par- * P!. 22.%. ties d’une mouche. Les jambes & les ailes, quoique con- r * tenues dans des fourreaux, font très-diftinéles; les four¬ reaux font fi minces qu’ils ne les cachent pas. La trom¬ pe de la mouche eft couchée fur le corcelet, on diftin- gue fes levres & l’étui de l’aiguillon *. La tête efî greffe * f. Si bien façonnée, fes yeux à rezeau font très-reconnoif- fables. Mais comment notre infecfle a-t-il quitté fa fé¬ condé forme pour prendre cette troifiéme! n’a-1-il eu qu’à fe défaire d’une fécondé peau pour mettre en évi¬ dence des parties quelle tenoit cachées! L’analogie vou¬ drait encore que cela fût ainfi,& elle nous tromperait encore. Au lieu que les chenilles deviennent fur le champ crifalides, & que les vers des mouches à quatre ailes devien¬ nent nymphes fur le champ, ce n’eftquepeu à peu que nos infeéles en boule allongée, parviennent à paraître des nymphes parfaites. Rien n’efl plus ailé que d’avoir grande provifion de vers de la viande en coque, Si l’expédient de les faire cuire, donne beaucoup de facilité à les tirer de leur coque. Si de ceux qui fe font métamorphofés à peu près en même temps, on en fait cuire chaque jour quel¬ ques-uns pendant plufieurs jours de fuite, on pourra voir que la métamorphofe fe fait peu à peu, & en fuivre les progrès. Au bout de deux ou trois jours on verra des * pi.21.%. jambes très-courtes à la partie antérieure *. Le jour fui- I2 - vaut les ailes * commenceront à fe faire diftinguer, & les * Flg ‘ Ij * O clj CL» bouts des jambes * fe feront rapprochés du‘derrière: un */,/. autre jour fera voir le bout de la trompe *; la trompe * Fi s- , 4- r * entière paraîtra enfuite ", Si la tête fe montrera. Enfin * pi. 2I .fi 3 . p p ij >7. ^oo MEMOIRES POUR L’HîSTOIRE on ouvrira des coques dont les nymphes auront des jam¬ bes qui atteindront ie derrière, des nymphes dont la. tête fera très-bien formée, & ayant les yeux à rezeau très- diftincffs. Ainfi on pourra voir journellement la fuite des pro¬ grès qui fe font faits, jufqu’à ce que l’infcéle foit deve¬ nu une nymphe à qui rien ne manque; & on reconnoîtra que ce n’eft qu’en plufieurs jours que la nymphe par¬ vient à être telle. Il lèmble donc que les parties propres à la mouche fe produifent, ou au moins qu’elles croiffenl chaque jour. Cet accroiffement de tant de parties, pen¬ dant que le corps ne croît nullement, car il remplit tou¬ jours la coque, préfente bien des difficultés. Les atten¬ tions que j’ai faites pour en trouver le dénouement, m’ont conduit à voir comment fe fait le paffage de l’état de boule allongée à celui de crifalide, & m’ont donné une partie des éclairciffemens que je défïrois. J’ai donc reconnu qu’il ne falloit pas croire que les ailes, les jam¬ bes & la tête de la nymphe, cruffent journellement, comme les apparences fembloient le prouver, qu’il n’y avoit ici qu’un développement de parties déjà toutes for¬ mées , & que la méchanique qui développoit, qui éten- doit ces parties, étoit extrêmement,fimple. $F!g. 8 . a. J’ai parlé d’une cavité * qui paroît au bout antérieur de i’infeéte, qui a la forme de boule allongée, & qu’on a tiré hors de fa coque, d’une cavité d’où font fortis les crochets & dards dont l’infeéîe s’eft défait. Je remarquai une pareille cavité à tous les infeéles en boule oblongue que je tirai de leurs coques, j’obfervai en deux endroits des bords de cette cavité diamétralement oppofés, une * Fig. 12 efpece de petite corne, une éminence *, dont chacune * ^ to j t un ftjg ma t e , j e jugeai que ces fiigmates,& je ju¬ geai bien, dévoient appartenir au corceletde la mouche.. des Insectes. VIT . Menu 3o 1 Delà il s’enfuivoit que la tête de la mouche, ou ce qui la devoit devenir, étoit aduellement plus près de la partie poftérieure que ne l’eft le corcelet, &l qu’il en étoit de même de toutes les parties qui ne paroiffoient pas. En un mot je penfai que toutes ces parties qui fembloient croître journellement, étoient réellement bien formées, mais qu’elles occupoient le fond de la cavité ; qu’elles en fortoient peu à peu en fe développant. Pour fe faire une image de ce que je veux faire entendre, repréfen- tons-nous une efpecc de mon lire humain, dont nous pourrions trouver des exemples dans i’hiftoire des mon¬ tres , un enfant dont on auroit fait entrer la tête, le col, les épaules, les bras dans la cavité du corps, où toutes ces parties feroient enfoncées fi avant, 6c fi bien cachées qu’il n’en paroîtroit aucun veftige à l’extérieur, 6c même qu’il relierait un enfoncement au bout du tronc . Une image fj bizarre 6c fi difforme, eft celle de l’état naturel de notre infeéle, dont la fécondé métamorphofe n’efî pas encore commencée. Qu’il nous foit poffible de ramener peu à peu notre monftre humain à la figure d’homme ; les mains fortiront d’abord de la cavité, elles viendront fe pofer fur la poitrine; les bras paraîtront enfuite; enfin peu à peu la tête fè montrera fur fon col, 6c tout fera rétabli. Pour prouver inconteftablcment que ce qui eft fi bizarrement imaginé 6c exécuté fur une figure humai¬ ne, eft précifément ce qui fe paffe dans l’infeéle, je n’ai qu’à dire que j’en ai pris un * qui n’avoit guéres en¬ core que la forme de boule allongée, à qui il ne paroif- foit encore que des bouts de jambes, des jambes extrê¬ mement courtes, 6c comme effacées, tant elles étoient minces ; à qui oit ne voyoit ni tête, ni rien d’approchant; un infeéle dans l’état femblable à celui de notre monftre humain, qui ne montrerait que les mains 6c une partie p P "l PI. il.fig#- 302 MEMOIRES POUR L’HlSTOIRE des bras ; j’ai preffé le corps de cet infeéle, ayant attention de tenir fa partie poilérieure fixe, afin que tout l’effet de la preffion fût vers la partie antérieure. Quoique je prefîaffe doucement, bientôt j’ai vû la cavité du bout antérieur difparoître; des parties comme charnues fe font préfentées pour la remplir; ces parties fe font élevées au deffus de l’endroit où ctoit le bord de la cavité ; là elles ont pris une convexité confidérable; & cette convexité a été bientôt ailée à reconnoître pour la tête de la nym¬ phe ou de la mouche : cette tête étoit très bien formée, tontes lès dépendances étoient très - diffncles ; les yeux, les antennes, la trompe, s’y trouvoient, & étoient aulfi vifibles qu’on le pouvoit fouhaiter. En même temps les jambes font devenues plus longues; non-feulement j’en ai vû paraître des portions qui étoient cachées aupa¬ ravant , mais leur partie qui étoit vifible avant la preffion, a pris plus de relief; il en a été des ailes comme des jam¬ bes. L’augmentation de relief étoit due à la liqueur qui étoit forcée de pénétrer dans certaines parties; on la voyoit faire des bulles lorfqu’clle entrait dans les ailes. Enfin, fur le champ j’ai fait une nymphe, j’ai ache¬ vé fur le champ la féconde transformation de cet infe¬ éle, qui n’eût dû être accomplie qu’en plufieurs jours. Ce n’eft que peu à peu que la nature exécute ce que j’ai fiit trop brufquement, 6 c l’infcéle s’en trouve mieux. Les parties les plus effentiellcs à la nymphe & à la mou¬ che, & celles dont nous fommes le plus frappés, com¬ me la tête, les ailes, les jambes, &c. font donc logées dans la cavité du corps du ver qui n’a encore fubi que fit première transformation; elles y font chacune avec leur enveloppe, car elles en fortent avec ces envelop¬ pes. Il en cft de toutes ces parties comme des doigts d’un gand qui feraient enfoncés dans la main du garni; DES I N S E C T E s.T/7. Mem. 303 ces parties font bien formées dans la cavité qui les cong tient, elles 11 e demandent qu’à en être tirées peu à peu pour fe développer 6c s’étendre. 11 eff difficile de concevoir comment les jambes, dont les bouts paroiffient d’abord à la partie antérieure de la coque, paroiffient par la fuite à fa partie pofférieure ; com¬ ment étant auffi molles qu’elles font, font-elles tout ce chemin fans fe chiffonner, fans fe défigurer! mais on verra que le chemin quelles ont à faire, eff beaucoup plus court qu’il ne le paroît d’abord, fi on fiait les attentions fui- vantes. Soit que l’infedle ait la forme de boule allongée, foit qu’il ait celle de nymphe, il remplit entièrement fa coque; quand il 11 ’eff encore qu’en boule allongée, les ffigmates du corcelet de la nymphe ou de la mouche *, touchent la calotte antérieure; & quand i! eff en nym¬ phe, ces ffigmates font éloignés de la même calotte de tout le diamètre de la tête *. Dans le premier état, le corps * fembloit remplir feul toute la coque, 6c dans le fécond état il y occupe moins de place que n’en occu¬ pent la tête 6c le corcelet *. Quand le corps fe vuide de la tête, des jambes, des ailes,6c de partie du corcelet, il fe raccourcit, fes anneaux fe rapprochent, parce que la tête 6c le corcelet doivent occuper dans la coque le mê¬ me efpace, 6c un plus grand que celui qu’ils occupoient dans le corps. De tout cela il fuit que les bouts des jambes qui ont commencé à fe montrer, croient pofés fur le premier ou le fécond anneau du corps : quand ils refferoient fixés fur le fécond anneau, par la fuite ils de- viendroient affiés proches du dernier, parce que la tête qui cherche fa place, force les premiers anneaux à s’ap¬ procher du dernier. Mais ce qui auroit plus befoin d’être expliqué, c’eff la méchanique qui fait fortir la tête 6c les autres parties. * PI. 2 J. fig. i2Ôi L$.e,e. * Fig. 1 S. * Fig. 15 ).y. * o, 0, a, a, ** PI. 2 I. no & 11 504 MEMOIRES POUR l’HîSTOIRE de la cavité dans laquelle elles éfoient contenues. On voit bien qu’une preffion plus foible, & mieux ména¬ gée que celle à laquelle nous avons eu recours pour faire loi'tir fur le champ ces parties, les fera fortir peu à peu ; & que fi le corps tend à fe raccourcir & à lé contracter, U fera fur les parties qu’il renferme , l’effet de cette preffion douce. Mais nous ne pourrions donner que des conje¬ ctures très-incertaines fur la caufe qui le fait contracter. Nous pourrions dire que le lue nourricier s’y porte moins abondamment, pendant qu’il s’unit aux parties qui doi¬ vent par la fuite paraître au jour; & que celles-ci acquié¬ rent du volume, pendant que le corps perd du fien : mais tout ce que nous ferions, ce feroit de rejetter un peu plus loin la difficulté à expliquer; du refte fi on nous de- mandoit pourquoi il arrive alors que le corps décroît, pour ainfi dire, pendant que la tête, les jambes, les ailes acquiérent du volume, voilà fur quoi il nous feroit im- poffible de rien dire de fatisfàifant. Nous avons fait remarquer que le ver qui venoit de fe transformer en boule allongée, avoit encore fes cro¬ chets & fon dard, & qu’il leur fàifoit faire divers mou- vcmens qui tendoient probablement à rompre leurs atta¬ ches; dès qu’elles font rompues, ces crochets & ce dard ceffent d’appartenir à l’infeCfe qui 11’en a plus befoin. Il ne s’en défait pas pourtant alors, ils refient encore dans la cavité, & ils n’en fortent que quand la tête s’élève; alors elle les pouffe (levant elle, elle les couche contre la %• coque *, à laquelle ils tenoient déjà par leurs pointes & ils s’y collent. Pluficurs c ircon flan ces, & fur-tout la chaleur & le .froid, la féchereffe & l’humidité peuvent contribuer à retarder ou avancer chacune des trois métamorphofes de nos vers. En été j’ai eu des vers qui font reliés dans une des Insectes. VIL Mem. 305 une terre humide pendant fix à fept jours fans fe méta- morphofer en coque ou en boule allongée, & d’autres qui le font transformés après avoir été lèulement deux jours dans une terre lèche. L’humidité doit de même influer fur la fécondé transformation; car pendant qu’elle s’accomplit, il fe fait une évaporation qui doit être plus lente dans une terre abreuvée d’eau, que dans un lieu fcc. Je n’ai point cherché à déterminer la quantité pré- cife de ce qui s’échappe de l’infeéle en coque, jufqu’à ce qu’il foit en état de devenir mouche, mais je fçais quelle eft afles confidérable. Quand j’ai jetté dans l’eau des coques que les infeétes ne s’étoient faites que depuis peu de jours, elles ont été à fond; mais quand j’y ai jetté de plus vieilles coques, celles qui renfermoient des nymphes, elles ont furnagé; elles étoient devenues plus legeres que l’eau, de plus pelantes quelles avoient été auparavant. Le froid retarde encore beaucoup plus que l’humidité, les mêmes métamorphofes, car il en elt des vers de la viande comme des chenilles. Ceux qui ne fe mettent en coque qu’à la fin de l’automne, ne deviennent mouches qu’après que la rude faifon efl paflee. Delà il fuit que les changémens qui fe font journellement dans des vers de la même elpece, qui fe font mis en coque; ne font pas toûjours, ou plûtôt font rarement les mê¬ mes. Mais pour donner au moins une idée de l’ordre dans lequel ils fe font, je vais rapporter les obfervations que j’ai faites fur des vers qui étant entrés en terre le 2i. Avril, ne parurent mouches que le 16. Mai, le temps ayant toûjours été afles froid pour la faifon. Les vers fe transformèrent en coque le 2 6. & le 27. Avril. Dans toutes les coques que j’ouvris le 28. & le 29; je trouvai l’infeéte en forme de boule allongée *, & je ne pou vois lui découvrir aucune des parties de la nymphe, Tome IV . Q q * PI. 2 t. fi®*, 7&tS. * PI. ’ r. fi; 12 . * Fi». 14. ü, O. * Fig. r 2. & 13. * Fig. 14. t, * Fig. 17. t, 506 MEMOIRES POUR L’HlSTOlRE Mais le 3 o Avril j’ouvris des coques dans lefqueiley i’inlêéte avoit déjà des jambes auffi longues que le tiers du ;• corps *, j’ouvris cependant d’autres coques dont les infe- dles avoient les jambes plus courtes. Le bout antérieur de chacun de ces infeétes avoit une cavité dans laquelle étoient encore les tiges des crochets & du dard. Les infeéîes tirés de leur coque le 2 & le 3 de Mai, n’a- voient plus de cavité leur partie antérieure; la tête * s’étoit élevée, les tiges des crochets & du dard, étoient appliquées contre la calotte du bout antérieur de la co¬ que, & y étoient collées. Alors l’infede avoit déjà la figure de nymphe, au lieu qu’avant que de montrer la tête, ■ il femble une nymphe tronquée*; la trompe * étoit déjà allongée. Les nymphes miles à découvert le q. Mai, avoient encore une trompe mieux formée, fon bout pa- ■ roilfoit refendu *, parce que les levres étoient devenues fenlibles. Les contours des yeux à rezeau étoient bien marques, mais on démêloit alfés que celles des parties de la tête qu’on voyoit, n’étoient vues qu’au travers d’une enveloppe faite d’une peau mince. J’ai cru bien diftinguer de l’eau dans l’intérieur de l’enveloppe d’une des ailes, il fcmbloit que l’aile nageoit dans cette liqueur. Sur fix nymphes que j’obfervai le y Mai, je vis les an¬ tennes en palette prifmatique que je n’avois pas encore Vues diftinéïemcnt ; elles paroiffoient encore fous une membrane qui fervoit d’enveloppe commune à la tête. Cette membrane étoit devenue plus fenfible, quoique plus tranfparente, peut-être parce quelle étoit plus foû- ievée. Les jambes s’étoient allongées; mais il eftà remar¬ quer que lorfqu’elles étoient courtes, elles fembloient comme grainées, comme faites de grains mis bout à bout, & que dans la dernière oblêrvation le grainé avoit pref- que dilparu. Si ce grainé eft produit par une eipçce des Insectes. VIL Man. 307 <îe pliffement des jambes, il doit s’évanouir lorfque les jambes s’étendent. Le 6 de Mai je ne diftinguai rien de plus fur les nymphes, que ce que j’y avois trouvé le jour précédent. Mais le 7 je commençai à voir les yeux liffes * fur le derrière de la tête de quelques nymphes. Sur les unes ils fembloient réunis dans une maffe,& fur les autres ils étoient écartés comme ils le doivent être. Le plus grand des changemcns que m’offrit le même jour, fut dans les yeux à rezeau qui avoient pris une teinte de couleur de chair, car tout le rede étoit encore d’uii très-grand blanc. Le 8 Mai les yeux à rezeau des nym¬ phes étoient devenus plus rougeâtres. Le 9, les mêmes yeux des nymphes tirées de leurs coques, avoient encore une couleur plus haute, & les yeux liffes commençoient à fe colorer. Le 10 Mai le rouge des yeux à rezeau étoit devenu plus foncé, & les yeux liffes avoient rougi; on trouvoit encore fur les fligmates de quelques nym¬ phes, des trachées du ver qui y tenoient. Le 11, les poils paroiffoient fur la plupart des nymphes, ils étoient pref? que noirs fur quelques-unes *, & fur d’autres d’un ch⬠tain-clair *. Les plus gros des poils fembloient de groffes fibres qui avoient du relief fur la peau qui fert d’enve¬ loppe commune; mais ils étoient réellement fous cette peau.puifque je la pouvois frotter fans les déranger aucu¬ nement. Il n’efl pas à croire que ces poils ayent été for¬ més, ou qu’ils ayent pris tout leur accroiffement d’un jour à l’autre, mais ils ne commencèrent à être vifibles que quand ils eurent pris une couleur différente de celle des parties qui les entouroient. Le 12, tous les poils des nymr phes étoient encore mieux marqués, plus colorés, & tous ï’étoient. Les jambes qui avoient fait tout leur chemin, étoient devenues grifes. Les levres de la trompe étoient plus que grifes, prefque noires. Les antennes commen- Qq '/ * PI. 22. t ig. * Fig. 2 & 2* * Fig. I» 30S MEMOIRES POUR L’HiSTOIRE çoient à fe colorer, enfin toutes les parties de la mouche* étoient alors très-diftinéles. Les derniers jours, le 13, le 14. 6c le 15, n’ont plus eu de changemens notables à m’offrir. Les parties n’avoient befoin que d’achever de prendre de la confifiance. L’infeéte n’avoit plus befoin que de fe fortifier pour être en état de fe tirer de fa coque. L’état de foibleffe dans lequel il refte jufqu’à ce que ce moment foit affés près d’arriver, eft fi grand que toutes les nymphes que j’ai tirées des coques la veille du jour où les autres fe font tirées des leurs d’elles-mêmes, & quelles en font forties mouches, que toutes les premières nymphes, dis-je, étoient abfolument incapables de mouvement; quelque faines & entières qu’elles fuffent, 011 ne pouvoit les déterminer à fe donner la plus legere agitation; j’étois tenté de les croire toutes mortes, & je n’ai été con¬ vaincu qu’elles étoient vivantes que lorfque j’ai vû fortir les mouches des coques que je n’avois point ouvertes Mais lorfque j’ai ouvert la coque le jour même où la dernière métamorphofe devoit fe faire, j’ai vû que la nymphe fe donnoit des mouvemens dont nous 11e par¬ lerons que dans le Mémoire fuivant,où nous explique¬ rons comment les nymphes parviennent à paraître au jour fous la forme de mouches à deux ailes. Les coques que fe font de leur propre peau quantité d’efpecesde vers qui vivent foit dans les excréinens de di¬ vers animaux, foit dans des chairs corrompues,& même les coques de différentes efpeces de vers qui vivent des plan¬ tes, ne different en rien d’effentiel des coques dans ief- quelles fe transforment les vers de nos greffes mouches bleues. Sur les unes pourtant les anneaux font un peu plus marqués que fur les autres; il y en a fur lefquellcs ils font à peine fcnfibles. Certaines coques ont leurs deux bouts plus pointus que ne le font ceux des autres des Insectes. VIL Mem . 309 coques ; quelquefois un des bouts eft plus renflé que l’au¬ tre, dans quelques-unes c’eft le bout antérieur, & dans d’autres c’eft le bout poftérieur. Quand nous avons dé¬ crit la métamorphofe des vers mangeurs de pucerons, nous avons fait remarquer que le bout antérieur du ver qui étoit effilé, & très-menu en comparaifon du pofté¬ rieur, formoit le bout antérieur d’une coque, qui eft beaucoup plus gros que le bout poftérieur, car la coque a fouvent la figure d’une larme *. Nous n’avons pas ou- blié de parler alors de coques qui font épineufès, parce «£r 2. J ° que la peau du ver l’eft communément. Les coques font pour l’ordinaire d’une couleur qui tire fur celle de marron, il y en a pourtant de grifàtres, de prefque noires, de jau¬ nâtres; celle du ver du bigarreau eft d’un jaune-pâle. Mais nous ne croyons pas devoir nous arrêter davantage à piu- fieurs autres variétés qui n’ont rien de bien intéreflant, 6 c que nous pourrons faire remarquer dans l’occafion. Nous ne mettrons pas au nombre de ces variétés qui ne méritent pas que nous nous y arrêtions, des cornes qui paroiffent fur les coques de quelques vers, 6 c que ces coques fem- bient pouffer, mais nous différerons d’en parler jufqu a ce que nous en foyons à i’hiftoire des mouches qui for- tent de ces fortes de coques. Il nous refte feulement, avant que de finir ce Mémoire, à faire connoîtrc des vers qui après leur métamorphofe font logés dans une coque, dont la figure eft très-différente de celle des co¬ ques en ceuf. Ces vers * font aquatiques 8 c de la troifiéme claffe, * ou de la claffe de ceux qui ont une tête * de figure con- p i. 2 3?’%. liante, &: qui n’a point de dents ou de crochets qui ail- 3 > 4 » fent à la rencontre les uns des autres. Je les ai ordinai- r ' renient trouvés dans des efpeces de mares dont l’eau avoit peu d’écoulement, & dans des étangs, Scc. Le meilleur Q q »j 3io Memoires pour l’Histoire des endroits que je fçache pour s’en fournir aux envN ions de Paris, c’eft auprès de Livry, dans un fofle qui borde le chemin vis-à-vis Notre-Dame des Anges, dans l’endroit où eft une belle 6c grande piece d’eau entou¬ rée d'arbres, 6c à laquelle aboutirent plufieurs allées. Dans les autres eaux des environs de Paris, à peine m'eft- il arrivé de trouver deux ou trois de ces vers par an, & dans les fofles que je viens d’indiquer, j’en ai pêché des centaines en quelques quarts-d’heures. Ils font ailés à prendre, ils nagent cependant, mais ce n’eft pas avec la vivacité ordinaire aux poilTons; d’ailleurs ils fe tiennent volontiers à la furface de l’eau; lorfqu’elle eft couverte de lentilles aquatiques, on n’a qu’à enlever des paquets de cette petite plante, 6c les éplucher pour avoir des vers. Leur tête efl petite, oblongue 6c écailieufe; leur corps eft long, un peu applati, je veux dire qu’il a moins de diamètre à chaque endroit de deffus en defious, que d’un côté à l’autre. Il eft compofé de onze anneaux, le *PI. 22 .fig. dernier * eft le plus rond, le plus menu & le plus long de îous - Dans quelques vers * il a feul la longueur des 3 & 4 ..h i. cinq à fix premiers pris enfemble. Il n’eft pourtant pas * Pi- %• à beaucoup près fi long dans d’autres vers *. Cette re- marque fert déjà à faire diftinguer deux efpeces , ou Ig ’ I4 " même deux genres entre des vers qui font d’ailleurs affés femblables. Le premier des anneaux a un peu moins de diamètre que celui qui le fuit, le fécond en a plus que le précédent 6c moins que le troifiéme. Ce dernier, le qua¬ trième, le cinquième, le fixiéme, le feptiéme 6c même le huitième différent peu entr’eux en grandeur, mais les trois derniers plus longs que les autres, ont moins de circonférence, &. en ont de moins en moins. La peau qui les recouvre tous, a beaucoup de confiftance; quoi¬ que plus flexible que les peaux cruftacées, elle i’eft moins des Insectes. VIL Mem. 311 que les peaux ordinaires, c’elt une elpece de parche¬ min. A la jonélion de deux anneaux, l’antérieur a un appendice oblong * qui va en recouvrement fur celui * PI. 22.%. qui le fuit. io.m, m. La couleur la plus ordinaire à tous ces vers, eft un verd déjà brun, un peu veiné ou fouetté de traits plus bruns; il y en a pourtant de couleurs plus claires, & j’en ai vu qui avoient du brun veiné de jaunâtre. Ils n’ont point de jambes, on leur trouve feulement au deffous du ventre, des crochets écailleux *, & fi petits qu’on ne * P! - -î-% l a 10 CC CC les apperçoit que quand on les cherche; je 11’en ai yû ' qu’aux jonctions des trois derniers anneaux. Quand on rencontre de ces vers également prêts à fe métamorphofer, dont les uns n’ont que fept à huit lignes de longueur *, & dont d’autres ont plus de trois * Pi. 22.%, pouces de long * ; on ne fçauroit s’empêcher de reconnoî- tre qu’il y en a des efpeces qui différent en ce que les unes font plus grandes, & les autres plus petites. Il elt rare que leur corps foit parfaitement étendu dans l’eau en ligne droite, cependant il efl peu capable de raccourcit- fement, les anneaux ne peuvent rentrer que de peu les uns fous les autres; mais le corps peut fe plier à la jon- dlion de fes anneaux de deffus en deffous, ou de deffous en deffus, il peut faire que deux de fes anneaux * for- * Eig. 16, ment enfemble un angle dont le fommet foit à l’endroit où ils fe rencontrent. Ces angles peuvent être plus ou moins fermés, rarement pourtant le font-ils plus que l’an¬ gle droit, ils font communément obtus. C’eft en fàifant faire fucceffivcment & ptellement à fes derniers anneaux, des angles tournés tour à tour en des fens contraires que le ver bat l’eau, & qu’il elt en état d’avancer du côte où il veut. Nous avons déjà dit que la tête de ces fortes de vers * PI. 2 3 • fîg. 8 . cc. * Fig. 9-/cf. * PI. 22. fig. IJ. * b, b, b, b . * n. * b, b, b, b, ! 5 ï2 MEMOIRES POUR L’HïSTOIRE n’a point de dents, mais elle efl fournie d’un grand nom* bre de crochets charnus, au moins en grande partie, & d’efpeces de barbillons. H y a tel ver à qui je n’ai vû que deux croehets * au bord du bout antérieur de la tête, & j’en ai trouvé quatre de plus * à d’autres, deux plus petits de chaque côté, qui m’ont laide incertain fi le ver à qui je n’en avois vû que deux, étoit d’une efpece différente de celle du ver à qui j’en avois trouvé fix, ou s’il m’avoit caché quatre crochets. On voit outre cela deux corps * que nous nommerons les barbillons, dont le bout * efl beaucoup plus gros que ce qui précédé. L’infecfte les fait fortir de deffous fa tête avec vîteffe, il les retire de mê¬ me en dedans, il les agite lorfqu’ils font fortis en les reti¬ rant un peu en arriére, & les pouffant enfuite en avant. Leurs bouts examinés au microfcope, montrent des hou- pes de poils; ils m’ont paru avoir quelque reffemblance avec une main * attachée à un petit bout de bras. Cinq gros poils noirs * & un peu courbés imitent les doigts ; mais entre ces gros poils il y en a une infinité de petits qui font comme les barbes des grands. J’avois foupçon- né que ces vers fe nourriffoient de lentilles aquatiques » mais jamais je ne leur ai vû entamer aucune feuille des plantes de cette efpece que je leur ai données; quelques- uns ont vécu plufieurs femaines chés moi dans de grands poudriers où il n’y avoitque de l’eau dans laquelle je n’a- vois laiffé aucune plante, & au fond de laquelle je n’avois pas mis de terre. Les mouvemens de leurs barbillons dé¬ terminent l’eau à fe rendre vers leur bouche; on voit de petits courans d’eau qui fe dirigent vers la tête : cette eau peut n’être pas auffi pure qu’elle nous paroît, outre les parties terreufes dont elle efl chargée, une infinité de petits animaux que le microfcope feul peut nous ren¬ dre fenfibles, y nagent continuellement; ces animaux peuvent des Insectes. VII . Aient . 313 peuvent fournir un bon aliment à nos vers. Je ne fçais fi deux endroits un peu plus bruns que le refie, & un peu plus unis, dont l’un * efl d’un côté de la tête, & l’autre *PI- 23.6g. de l’autre côté, peuvent être pris pour les yeux; li ce ne y ' les font pas, je ne connois point d’yeux à ces infeétes. Un mammelon charnu qui efl en deffous de la tête, & dont le bout m’a paru enfoncé *,pourroit bien être la *Fîg. î.m, Louche ou le fueçoir. Quoique ces vers foient aquatiques, quoiqu’ils vivent dans l’eau, ils ont befoin de refpirer l’air; le bout de leur anneau poflérieur * ell ouvert, & efl pour eux ce que font * Fig. 1,2, à tant d’efpeces de vers les fligmates poftérieurs. Souvent 3 » & c - h • auffi ce dernier anneau fait un angle avec celui qui le précédé, & efl redreffé au point néccffaire, pour que fon bout foit à la lurface de l’eau *; dans l’endroit où *PI. 22.6», il y efl, on voit un petit entonnoir formé par un grand l6, nombre de poils qui tous partent du bout de l’anneau, & qui s’élèvent en s’inclinant en dehors. Chacun de ces poils efl en petit une plume * bien garnie de barbes, *pi. 23.%. dont 1’ufage efl ailé à reconnoître, elles empêchent l’eau 12 ‘ d’entrer dans l’entonnoir; elles l’empêchent d’aller mouil¬ ler le bout de l’anneau, lorfqu’il efl même un peu au deffous de fa furface, l’air feul alors y a accès. Si on avoit quelque doute que l’organe de la refpira- tion du ver fût placé là, pour lever ce doute on n’au- roit qu’à difféquer un de ces vers; la diffeêlion que nous propofôns efl ailée à faire. Avec des cifeaux on coupera tout du long d’un côté de l’infeéle, une bande la plus étroite qu’il fera poffible; alors la partie fupéricure n’é¬ tant plus adhérente de ce côté-là à l’inférieure, on la relevera peu à peu, & on la jettera fur le côté oppofé * ; * PI. 22. fig. tout l’intérieur de l’infeêle du côté du dos, fera ainft II,r,r * mis à découvert. Dans i’inflant on fera frappé de deux Tome IV . R r 314 Mémoires pour l’Histoire * Pï. 22. fig. vaifTeaux * d’un blanc luflré & fatiné, & dont le diamètre a - a J, af. e q ç x confidérable, que ces deux vaifTeaux enfembie oc¬ cupent plus de la moitié de la largeur du corps; ce font les deux principales trachées. A leur origine elles ont * a. chacune une efpece de col *, par lequel elles s’attachent affes près de la tête, chacune dans un endroit où l’on peut foupçonner un fligmate. Leur diamètre augmente enfuite tout-à-coup, il refte à peu près le même tant qu’elles font entre les anneaux les plus larges, & elles de¬ viennent de plus menues en plus menues, à mefure qu’elles répondent à des anneaux plus étroits & plus longs ; enfin ces trachées font fort déliées lorfqu’ellcs entrent dans le dernier anneau ; elles vont jufqu’auprès de l'on bout, toujours parallèles l’une à l’autre. Notre deffein n’eft pas de donner l’anatomie de ce ver, nous nous contenterons de faire remarquer que les */,/. inteflins * font un nombre prodigieux de circonvolu¬ tions, qu’ils defcendent de la tête vers la partie poflé- rieure, qu’ils remontent enfuite, & cela un très-grand nombre de fois; c’eft de quoi on ne trouvera qu’une image groffiére dans la figure que nous avons fait graver. On n ’y verra auffi que deux ou trois vaifTeaux blancs * fur un des côtés, quoiqu’il y ait tout du long du ver i n grand nombre de ces vaifTeaux; ils font tortueux, leur couleur efl un blanc de lait & mat, au lieu que le blanc des trachées efl un blanc luflré; leur flruélure reffemble affés à celle des vaifTeaux variceux des chenilles; i’ufage des uns & des autres efl difficile à connoître. =» af , af . Nous reviendrons encore aux trachées* de nos vers, comme elles font d’afTés gros tuyaux, il n’en efl point déplus propres à faire connoître la flruélure des trachées des infeéles en général, & à la faire admirer. Quand on ies regarde avec une loupe, on croit voir très-diffinéle- */• des Insectes. F//, 315 ment qu’elles font faites d’une fuite d’anneaux cartila¬ gineux extrêmement minces, 6c on ne doit voir que cela alors. Mais fi on s’avilê de rompre une de ces tra¬ chées avec une pointe telle que celle d’une épingle , 6 c qu’on ne fépare pas entièrement les deux parties l’une de l’autre, ce qui arrive toujours lorlqu’on le veut, 6c qui arrive même làns qu’on ait fongé à le vouloir, une des parties * tiendra à l’autre * par un fil blanc *; qu’on * PI. 2 prenne une des parties entre deux doigts, 6c qu’on la lz ' a tire doucement pour l’éloigner de l’autre, le fil la fui- vra, il femblera qu’il fe dévidé, 6c bientôt on aura le plaifir de s’aflùrer qu’il fie dévidé réellement; on n’a qu’à continuer de tirer doucement, le fil fe dégagera de la tra¬ chée, il fe détortillera fans qu’on y apporte beaucoup de foin , comme tout fil dont on tire le bout, fe de- vide de delTus un peloton. Je fuis quelquefois parvenu à en avoir un brin qui avoit plus d’une aune de long, 6 c avec un peu d’attention 6c de patience on en auroit, je crois , des centaines d’aunes , autant d’aunes qu’on voudroit. Mais à mefure que le fil fe dévidé , la por¬ tion de trachée de laquelle il fe dévidé, fe raccourcit; d’où il efi clair que les trachées de ces vers, quoiqu’elles forment des tuyaux très-continus, lont faites d’une efpece de fil qui eft tourné en fpirale, comme l’ell le fil des refi forts à boudin ; un fil d’argent trait roulé fur un cylindre, 6 c dont tous les tours fe toucheroient, nous montreroit la difpofition du fil cartilagineux dont chaque trachée ell formée. Les trachées des grands animaux ne font pas confiantes ainfi, elles ne font réellement que des an¬ neaux attachés les uns contre les autres. Mais M. Mal- pighi a trouvé aux plantes, des tuyaux qu’il a cru avec beaucoup de vraifemblance être leurs trachées , des tuyaux qui font formés comme les trachées, de nos vers, R r ij 2. fi». ♦ Pi. 22 . fig. * 3 - 3 I 6 MEMOIRES POUR l’H I S T O I R E d’un fil, d’une fibre qui fait lin très-grand nombre Je tours de Ipirales. Cette firuClure des trachées qui fe voit fi bien dans nos vers, efl, félon les apparences, celle des trachées de tous les infectes, ou au moins de la plupart des infeéîes. Tl y a plus de vingt-cinq ans que je l’ai trouvée à des trachées beaucoup plus petites, à celles des nymphes d’une efpece d’ephémeres. Je vis alors avec une furprife agréable que je devidois un fil des trachées que j’avois rompues; mais je penfai que ce fil étoit tortillé autour d’un tuyau membraneux ; je ne m’aiïûrai point alors que la trachée fe raccourciiïoit pendant qu’on devidoit le fil. L’intérieur du tuyau formé par le fil tortillé, peut bien être revêtu d’une membrane qui peut-être même aide à contenir les tours du fil les uns contre les autres; mais en cas que cette membrane ex-ilte, elle efi fi mince quelle fe déchire lorfqu’on détortille le fil. Le fil qu’on dévidé, quoique délié, efl toujours d’une grofleur afies fenfible, il n’eft jamais plus fin qu’un fil de coque de ver à foye; on en peut tirer de beaucoup plus gros, mais je n’ai pas réufli à avoir de ces derniers d’une longueur un peu confidérable, comme d’un pouce. J’ai examiné au microfcope des portions d’un fil afies fin,& qui l’étoit au point où il efl plus ailé d’en dévider bien long fans qu’il fe cafle. Le microfcope m’a fait voir qu’il étoit plat, qu’il étoit une efpece de lame * plus fembla- ble à du fil trait d’argent qui apafle fous le moulin,qu’à celui qui n’a paflfé que par la filière; il m’a montré de plus que la lame avoit fix côtes relevées, de forte quelle fembloit être composée de fix fils à peu près cylindriques collés les uns contre les autres; d’où il paroît que la tra¬ chée cft Laite comme le feroit un reflort à boudin com- pofè de fix fils pofés les uns auprès des autres, & roulés des Insectes. VIL Aient . 317 tous enfemble fur un cylindre. Ces fils ne font peut-être pas limplement ce qu’ils nous paroiffent, ils font peut- être creux, comme des efpeces de tuyaux. Quoique les organes dont ces inledes font pourvus pour*refpirer l’air, leur foient inconteftablement nécef- faires, ils peuvent pourtant vivre fans le refpirer, & pen¬ dant un temps plus confidérable que je ne l’eufle cru; ils peuvent même vivre au milieu d’une liqueur peu ana¬ logue à celle dans laquelle ils le tiennent, & capable de faire périr en peu d’inlîans les autres inledes. Je fis entrer deux de ces vers vivans dans une petite bouteille, pleine d’efprit de vin, & longue comme font celles à eau de meliire, ils allèrent au fond, & ils s’y tinrent,fe donnant des mouvemens qui montraient qu’ils s’y trouvoient mal; cependant au bout de vingt-quatre heures je trouvai un de ces vers encore plein de vie, il agitoit encore la tête, il fut peut-être encore plus de huit a dix heures fins périr. Retournons à conlidérer nos vers par rapporta l’ob¬ jet qui leur a fait trouver place dans ce Mémoire. Ils doivent devenir des mouches à deux ailes; & après tout ce qu’on a lu dans les autres volumes, on n’elt plus étonné d’apprendre qu’un infede qui elt né & a cru dans les eaux, devienne par la fuite habitant de l’air & ailé. Mais on s’attendrait à voir fortir d’un h long ver une très-longue mouche, une mouche qui aurait un long corps, comme l’elt celui des demoifelles, & on peut être furpris de ce que ce ver fe transforme en une mouche dont le corps elt très-court. Il fcmble que la nature veuille dérouter ceux qui auraient envie de pré¬ dire, qu’elle veuille forcer à voir fes produdions. Cer¬ taines demoifelles qui ont le corps long, ont eu jufqu a leur dernière transformation, des corps alfés courts, & nos vers fi longs doivent devenir des mouches très-courtes. Rr iij * PI. 22. 1 6 . h. & ij.hg.3. «g- îh\ 31S MEMOIRES POUR L’HiSTOIRE D ailleurs, quand un de ces vers fe transforme, & après qu’il s’ed transformé, fon extérieur n’offre aucune fingularité ,& cela même en ed une. Le ver transformé efl fi fèmblable à ce qu’il étoit auparavant, 6c à ceux qui ne font pas transformés, que les yeux ne peuvent le didinguer de ceux-ci; on 11e reconnoît qu’il a changé d’état que quand on vient à le toucher; on le trouve roide, inca¬ pable de fe plier & de fe mouvoir, au lieu que les vers non niétamorphofés, font mois, Toupies Sc fe meuvent. Alfés ordinairement le dernier anneau,celui delà queue du ver métamorphofé ed redreffé en haut *, il fait un angle plus ou moins ouvert avec celui qui le précédé. Souvent le neuvième anneau fait auffi un angle avec le huitième anneau, mais tourné dans un fens contraire au fens du premier angle, de forte que la partie podérieure efl alors en ziczac. Les vers qui font encore dans leur pre¬ mier état, font faire à leurs anneaux des angles fembla- bles à ceux dont nous venons de parler, mais des angles variables,& que l’infeélefait difparoître quand il lui plaît, au lieu que les angles de l’infeéte métamorpholé, redent con dam ment les mêmes. Quand donc parmi les vers qu’on retire de l’eau, on en trouve de roides, on peut juger fûrement que ceux- ci ont perdu leur première forme, & que leur ancienne peau leur fertde coque. Il n’ed guéres d’infeéle dans le¬ quel la fuite des métamorphofes s’accomphffe en moins de temps. J’ai eu de ces vers chés moi qui cinq à fix jours aprèsêtre devenus roides ,font fortis de leurs coques fous la forme de mouches. La célérité avec laquelle ils fe mé- tamorpholènt, jointe à des occupations qui m’ont didrait pendant le temps que leurs transformations fe faifoient, m’a empêché d’ouvrir des coques à temps pour voir fi, comme nos vers de la viande, ils paffent par l’état de des Insectes. VIL Mem. 319 boule allongée. Dans toutes les coques que j’ai ouver¬ tes, j’ai trouvé la nymphe bien complette, ayant Tes par¬ ties bien formées & aufli longues qu’elles le dévoient être. L’ancienne peau fait à cette nymphe un logement qui nous doit lembler beaucoup trop Ijxacieux *; elle * PI -~î* n’en occupe que la première partie, encore relie-1-il un vuide entre le bout de fa tête & la tête du ver dont elle s’efl défaite; il y a une partie du premier anneau * * b,d. quelle n’occupe pas. Mais le grand vuide ch dans les trois derniers anneaux &. dans le quatrième, car le bout poflérieur de la nymphe n’occupe qu’une petite portion de celui-ci. Ce grand vuide elt-il inutile.' il y a bien de l’apparence que non; je ne fçais fi la nymphe, au moins dans les premiers temps, n’a pas beloin que les anneaux quelle n’occupe pas, donnent palfage à l’air. Ayant te¬ nu fous l’eau le bout poflérieur d’un de ces infeéles nouvellement transforme, j’ai cru lui voir alpirer l’eau. Ce ne fera au relie que dans le Mémoire fuivant que nous verrons cette nymphe fe tirer de fa coque, & en fortir mouche à deux ailes. EXP L IC AT 10 N DES FIGURES DU SEPT1EME MEMOIRE . Planche XXI. T 1 A Figure première eft celle d’un de ces vers de la viande, qui deviennent de grofles mouches bleues. La Figure 2 repréfente la coque que le ver précédent s’efl faite de fa propre peau, & dans laquelle il eft renfermé. La Figure 3 eft la figure 2 vûe très en grand, & par fon bout antérieur, f, f, les deux ftigmates antérieurs, o, enfoncement dont les bords font froncés, & qui a été fait par les chairs des environs de la tête, qui fe font 320 MEMOIRES POUR L’HiSTOIRE retirées en dedans.Les différens anneaux dont la coque ef compoféc, font ailés à diftinguer ici les uns des autres. La Figure 4 fait voirie bout poltérieur p de la ligure 3, 8 c le fait voir du côté du dos. r, r, r, r, &c. mammqlons qui font des relies des rayons charnus que le ver allongeoit dans certains temps. f } f , les deux lligmates poférieurs. La Figure y montre le bout poltérieur p de la figure 3 , par le côté du ventre, a, l’anus qu’on voit ici, & qui ne pouvoit paroître dans la ligure 4. f , f , les lligmates. La Figure 6 cil ceile du bout antérieur de la ligure 3, mais prélénté dans une autre vue. Dans la figure 3 chacun des lligmates eft fur un des côtés, & ici un lli- gmate f eft en face, & l’aufe ef derrière. / e , cordon, ou languette qui fe trouve fur deux anneaux, immédia¬ tement au défions de chaque fligmate antérieur. La Figure 7 repréfente un ver tiré de fa coque, &qui y a fubi fa première métamorphofe, qui y ef devenu un fpheroïde allongé, ou qui a pris la ligure d’un œuf. Dans la Figure 8 011 a plus en grand celle du ver mé- tamorphofé de la figure 7. a ef Ion bout antérieur, & y marque un petit enfoncement. La Figure 9 repréfente en grand une portion de co¬ que dont le bout antérieur a été brifé, en f 0 f a , le bout antérieur de l’infeéle. o les crochets du ver adhérais en o à la coque, 8 c qui ne font pas encore entièrement fortis du corps de ce ver. La Figure 10 & la Figure 11 font celles d’une demi- calotte du bout antérieur de la coque, dans deux diffé¬ rais points de vue. b 0 b, la demi-calotte vue par dedans. c, les crochets fortis du corps du ver,& collés à la coque par la membrane blanche à laquelle ils tiennent en o. On les trouve dans diférentes pofitions, ainfi que ces deux figures le montrent. Les des Insectes. VII. Mem. 323 Les Figures 12, 13, & la plupart de celles du refte de cette planche, font employées à faire voir les change- mens qui fe font dans l’extérieur de l’infeéte, loriqu’it pade de la forme de boule allongée, fig. 7 & 8, à celle de nymphe parfaite. La Figure 12 montre à découvert la moitié antérieure de l’infeéte. cp c, la moitié poftérieure de la coque, dont la moitié antérieure a été enlevée. On voit ici les fix jam¬ bes de l’infeéte, dont les deux dernières font en i, i. e e, éminences qui appartiennent au corcelet,& au bout de chacune defquelîes eft un ftigmate. Toutes ces parties font forties de l’enfoncement marqué a, fig. 8. Dans la Figure 1 3 les jambes de l’infeéte font plus diftinétes, plus grainées, & plus avancées vers le derrière, quelles 11e le font dans la figure 12. c p c, refte de la coque. La Figure 14. fait voir l’infeéte tiré de fa coque dans un temps où il a pris la figure de nymphe, mais d’une nymphe encore imparfaite, dont beaucoup de parties ne font pas encore bien développées.Les jambes de la dernière paire font arrivées en p tout proche du bout poftérieur. a, a, les ailes, o, 0, la tête, de chaque côté de laquelle on commence à entrevoir en o o, les yeux; on voit auffi la trompe qui commence à fe montrer. La Figure 1 y repréfente une portion de trachée qui aboutit à un des ftigmates antérieurs f, fig. 3, 6,&c. <5c une portion de membrane qui y tient, f, cette trachée. g, la membrane. La Figure 16 montre la partie poftérieure d’une nym¬ phe , dont le bout de la coque a été emporté, c, c, bords de la coque, t, t, trachées du ver. Dans la Figure 17, où tout eft un peu plus développé Tome IV. . S f 324 MEMOIRES POUR L’HlSTOIRE que dans la figure 14, la trompe / efi plus allongée & refendue par le bout. La Figure 18 repréfente une nymphe dont on a laide la partie pofiérieure dans une portion de la coque c p c. La trompe t de cette nymphe efi encore mieux formée que celle de la nymphe de la figure 16. D’ailleurs là tête efi beaucoup mieux façonnée. y, y, les deux antennes. La Figure 19 fait voir du côté du dos une nymphe telle que celle de la figure 17, qui a été tirée entière¬ ment de fa coque. 0, 0, les yeux à rezeau bien formés, a a, les ailes entre lefquelles efi le corcelçt. p, le bout du corps. La Figure 20 montre une nymphe parvenue à Ion état de perfection, qu’on a laiflee en partie dans un refie de coque c p c. La trompe t efi bien mieux formée que celle des nymphes des figures précédentes. Les yeux*?,*? ont pris une teinte rougeâtre. Entre les yeux paroifient les antennes y, y. La Figure 21 efi celle de la nymphe de la figure 20 tirée entièrement de fa coque, & vue du côté du dos .p, le corps, a, a, les ailes. Le corcelct qui efi entr’elles a quantité de poils couchés les uns auprès des autres, o, o, les yeux, entre lefquels plufieurs grands poils font couchés. Planche XXII. La Figure première repréfente une nymphe de grofie mouche bleue , dans un état moyen entre celui de la nymphe de la figure 17, & celui de la nymphe de la figure 19, pl. 2 1 , & beaucoup plus grolfie. Elle efi en¬ core blanche, & cependant on apperçoit fur le corps p, & au defious de la tête en 0 o, des traits un peu moins clairs que le refie, qui font des poils, y,y, les deux an¬ tennes. 0, o, les yeux qui ont commencé à lé colorer, t f, des Insectes. Vil. Mem. 325 Ja trompe,elle paroît avoir une fente en f. Ce qui donne cette apparence, c’eft l’étui de l’aiguillon qui efl là cou¬ ché Si étendu, a, a, les aîles. La Figure 2 efl celle d’une nymphe prefqua terme, telle que celle de la figure 19, pi. 21, mais repréfentée plus en grand, & entièrement hors de fa coque. Le coup d’œil montre la différence qui efl entre fa couleur, & la couleur de la nymphe de la figure première. y, y, les antennes. 0,0, les yeux, q, q, poils qui font en devant & en deffous de la tète, t f l, la trompe. Le fourreau f de l’aiguillon efl ici aifé à reconnoître. I, les levres de la trompe, p, p, poils couchés fur le corps. /, i, les jambes de la dernière paire. La Figure 3 fait voir du côté du dos, une nymphe qui efl au même terme que celle de la figure 1.0,0, les yeux à rezeau. q, q, poils qui font fur le mufeau. a, a, les aîles pliffées. Les poils couchés fur le corcelet entre la tête & les aîles, Si ceux qui font couchés fur le corps p, p, font très-fenfibles. La Figure 4 efl très en grand celle de la tête de la figu¬ re 3 , Si vue du même côté, o, 0, les yeux à rezeau, mais dont les mailles ne font pas encore bien fenfibles. m, le mufeau. p,p;p,p, quelques-uns des grands poils qui vont à la rencontre les uns des autres; ils font couchés ici, & par la fuite ils font le berceau. On peut remarquer que chacun d’eux part d’un grain qui leur fait une bafe qui a beaucoup plus de diamètre qu’ils n’en ont. r, r, deux grands poils qui fe croifent fur le derrière de la tête. Les Figures 5, 6, 7 & 8 appartiennent au huitième Mémoire, à la fin duquel elles font expliquées. La Figure 9 reprélente dans fa grandeur naturelle, un de ces vers aquatiques qui donnent des mouches à cor¬ celet armé. Celui-ci efl un des plus grands de ce genre, Sf ij 32 6 Mémoires pour L’HisfoiRE & d’une des efpeces dont le dernier anneau efl: très-long. La Figure 10 fait voir de côté & par deffous, quel¬ ques anneaux du ver de la figure précédente, pour ren¬ dre fenlibles les mammelons m, m, m, dont il s’en trouve un de chaque côté, à chaque articulation. Dans la Figure i i le ver de la figure 9 efl repréfenté ouvert tout du long du dos, & groffi. p,p;p,p, les tégu- mens du corps jettés fur les côtés, & arretés avec des épin¬ gles. t, la tête, a f, a f, les deux principales trachées qui font les parties qu’on s’eft propofé de montrer en place, z, i, i, les inteflins, qui font des circonvolutions & qui ont des appendices qu’on ne s’eft point arrêté àrepréfenter exactement. Ce qu’il y a de blanc en u, u, font des refies de vaiffeaux variceux, très-blancs, h, houpe qui entoure le bout du dernier anneau. La Figure 12 efi celle d’une portion d’une des trachées af, af,ï\g. 11, groffie au microfcope. a & f l'ont ici deux portions féparées l’une de l’autre. A l’une & à l’autre tient le fil f qui a été dévidé du bout de l’une ou de celui de l’autre. Dans la Figure 13 une portion du fil f de la figure précédente, efi repréfentée vue au microfcope; elle lèm- ble faite de fix fils plats, collés les uns à côté des autres pour compofer un ruban étroit. La Figure 14. efi celle d’un ver du même genre que celui delà figure 9, mais d’une des plus petites clpeces de ce genre, car il paroît ici dans toute la grandeur qu’il peut avoir, il y efi même repréfenté trop grand. Il efi d’une des efpeces dont l’anneau pofiérieur n’a pas une longueur confidérable. La Figure t 5 repréfente en grand un des deux barbil¬ lons que le ver de la figure 9 a en defious de la tête, & cju’il fait jouer continuellement, n, efpece de main, dont des Insectes. VIL Mem. 327 partent cinq tiges courbées qui fe terminent en pointe, & qui font garnies de poils fins. La Figure 16 qui ne femble être que celle du ver de la figure 9, plié en ziczac, eft celle de ce ver en coque. La Figure 17 eft celle de la mouche dans laquelle fie transforme le ver de la figure 14.. Planche XXIII. La Figure première eft celle d’un ver aquatique à tête écailleufe, de même genre que celui de la figure 9, pl. 22./, fa tête, h, l’ouverture par laquelle il reipire l’eau, qui eft entourée d’une houpe de poils, qui ne parodient pas dans cette figure, & qui aufii font rarement fenfibles à la vûe fimple lorfque le ver eft hors de l’eau. La Figure 2 eft celle d’un autre ver plus grand & plus brun que le précédent, & qui eft peut-être d’une autre efpece, ou qui, s’il eft de la même, eft plus vieux, t, la tête .h, houpe de poils qui entourent le bout poftérieur. Cette figure peut aufii être celle de la coque du ver méta- morpholê en nymphe; car la peau conferve encore là première forme, lorlqu’elle ne l'ert que d’enveloppe à la nymphe; la coque dans laquelle eft la nymphe, paroît feulement à la vûe fimple, un ver roide & incapable de mouvemens. Les Figures 3 & 4 repréfentent le même ver, mais celui de la figure 4. eft allongé, & celui de la figure 3 eft tortueux. Le dernier eft cenfé fous l’eau , au de fins de la furface de laquelle il éleve le bout de fa partie poftérieure pour refpirer l’air. On remarquera que quoique le ver de ces deux figures foit un peu moins gros que celui de la figure 2, fon dernier anneau ï 4 eft beaucoup plus long que le pareil anneau de l’autre. Ce qui prouve que ces yers 11e font qup du même genre. 328 MEMOIRES POUR L’HlSTOIRE Les Figures 5, 6, 7, 8 & 9, font voir les parties an¬ térieures des vers précédais, grofîies au microfcope, & les font voir en différais fens & en différais états. La Figure 5 eff prife d’après le ver de la figure 2. a t y, la tète vue de côté. a eff fa jonéfion avec le premier anneau, y, montre une tache brune qui a l’air d’un ceii Divers poils ou barbes paroiffent fortir du bout de la tête, f marque un petit tubercule noir que jefoup- çonne un fiigmate. La Figure 6 eff celle de la tête de la figure 5, vue par deflous. d, d, deux efpeces de houpes en forme d’an¬ tennes. La Figure 7 & les deux fuivantes ont été deffinécs fur le ver des figures 3 & y. Cette figure 7 fait voir la tête de côté, & dans le temps où deux crochets qui for- tent de fon bout antérieur, font appliqués l’un contre l’autre, on les prendroit alors pour le bec d’un oifeau. O1111’a point marqué fur cette tête la tache^ de la figure ^.;auffiy étoit-elle beaucoup plus foible, mais elle y étoit. La Figure 8 fait voir les deux crochets c, c écartés l’un de l’autre, m eff un mammelon charnu bordé de poils, ouvert par le bout, & que le ver ne montre qu’en cer¬ tains temps. On pourrait le prendre pour la bouche ou le fucçoir de l’infeéfe. La Figure 9 montre la tête des figures précédentes plus en deffus, alors outre les deux crochets c , c , on en voit quatre autres, ou quatre cornes c, e, f f. Je ne fçais pas fi ces crochets c, c, & ces cornes e, e,ff ne fe trouvent point à la tête des figures y & 5, quoiqu’on ne les y ait pas vues lorfqu’on l’a deffinée; car le ver les ca¬ che quand il veut. La Figure 10 rcpréfente.le bout pofiérieur du ver de la figure 2, vû au microfcope & par deffous. cc, cc, c c } des Insectes. K//. Mem. 329 crochets qui fe trouvent à la jonélion des anneaux, ex¬ cepté, je crois, à celle des premiers, a b, l’anus, h h, poils en plume qui bordent l’ouverture poftérieure. La Figure 1 1 fait voir par la tranche,par le côté, le bout poftérieur. 0, ouverture qui donne entrée à l’air. h,i\ les poils en plume. La Figure i 2 eft très en grand celle d’un des poils du bout poltérieur, qui paroîtune vraie plume. La Figure 1 3 eft celle d’une coque dans laquelle le ver s’elt transformé en nymphe. En a étoit la tête du ver, & fon premier anneau, on les a fait tomber; pour les faire tomber, il ne faut que les pouffer allés legerement. La Figure 14. repréfente très en grand la partie a r de la figure 13. aa } bord de la coque d’où le premier an¬ neau Si la tête ont été détachés. En dedansparoît la tête de la nymphe, dont on diflingue très-bien les antennes & les yeux. Planche XXV. La Figure première de la planche 25, placée à la fuite du huitième Mémoire, appartient au Mémoire dont nous expliquons les figures. La Figure première de cette planche 2 y montre très en grand & très-bien,comment l’infeéle qui eft repréfenté dans les planches 22 & 23 , (pus la forme d’un long ver aquatique, eft logé dans la coque faite de fon ancienne peau lorfqu’il eft devenu nymphe, t b d a p, la peau du ver qui forme une coque, Si qui eft vue du côté du ven¬ tre. Cette coque a été ouverte depuis b d, jufqu’en c 0. Une partie de la peau e f g a été coupée tout du long de b l c, Si a été enfuite relevée & jettée de l’autre coté, pour mettre l’intérieur de la cavité à découvert. On y Yoit la nymphe, & quelle partie de cette cavité elle 330 MEMOIRES POUR L’HiSTOIRE occupe, h, une des antennes de la nymphe, i, un de Tes yeux à rezeau. Au ddîous des deux yeux à rezeau eft la trompe, k, l, m, les trois paires de jambes. Depuis n juf- qu’en a p la coque ell vuide. t, la tête du ver. b, le pre¬ mier anneau du ver. Cette portion d t b U .l détachée, ou au moins renverfée lorlque la mouche fort de la coque. HUITIEME /'/.*/ -f',u} ■Va/M’/'i . ; . ff&! Je., /aw/v To„i + Fi.r .r m / Fid i Fi,/ .v 1 /P y /V." û w Pi 9 « ^fi/ /«’• C-V* <* ‘ ‘ Fif.iS. r '-J„ fi<7 2i’ :i: ¥ n: S' » V -f I w If P Fui 1 % Fi,/ ( Fi,/, a. Fi,/ id Fi ,y tf F, >./ ■F.'/.r, ./'/.T £ , !*3 i i.i -Æ- »$% HUITIEME MEMOIRE. DE LA DERNIERE METAMORPHOSE DES. INSECTES QUI SORTENT DES COQUES FAITES DE LA PEAU DU VER, SOUS LA FORME DE MOUCHES A DEUXAISLES. L Es nymphes dont nous avons vu les parties exté¬ rieures fe développer & le fortifier peu à peu dans ces coques faites de la peau du ver, y lont devenues de véritables mouches,emmaillottées dans une membrane ft mince & fi tranfparente,qu’elle n’empêche pas de recon- *PI. 22. %. noître les parties qu’elle couvre *; les ailes femblent pourtant encore informes, parce qu’elles font plilfées & comme empaquetées :mais ce qui paroît le plus manquer à chaque nymphe, c’efl d’être animée. Elle le devient en quelque forte quand fes parties ont acquis la confiftance qui leur elt néceflaire; elle devient même forte & vigou- reulê, & a befoin de l’être. Quoique la membrane qui la revêt immédiatement, foit mince, c’eft pourtant pour la nymphe un grand ouvrage que de s’en tirer, parce que cette membrane fait une enveloppe particulière, une elpece d’étui à chacune des parties extérieures ; car on 1 e feroit une faulfe idée de cette enveloppe, fi on la regardoit comme une efpecede fac, elle a plus de rcftemblance avec un gand, elle a autant de cavités particuliéies, que la mouche a de parties extérieures. Ce qui femble exiger le plus de force, c’eft d’ouvrir cette coque que nous avons vû être épaiffe. Tome IV . T t * PI 24. I. * PI. 22 . l6. * PI. 24 . B &. z.a, * F! g- 3 * Fig. 2 .1 * Fig. 4. 332 MEMOIRES POUR L’HïSTOIRE folide & dure, mais tout a été dilpolè & préparé pour que la mouche ne trouvât pas une réliftance iupérieure à celle qu’elle eft capable de vaincre. Nous avons diltin- gué deux lortes de coques dans le Mémoire précédent, îg- des coques en forme d’œufs *, & des coques longues * „ qui ont la ligure du ver. Les mouches ne fortent pas a précifément de la même manière des unes & des autres coques, & nous allons commencer par voir comment elles fortent des premières. C’elt conftamment par le même bout des coques en forme d’œuf, que chaque mouche fort de la fienne, par celui où eft fa tête, & où étoit auparavant celle du ver. La tête de la mouche n’a pourtant été pourvue d’aucun inftrument propre à percer une grande ouverture; car iaiguillon de la trompe eft encore très-mol, & lorfqu’ii eft le plus ferme, il ne peut faire que des trous prelque imperceptibles. Mais la nature a donné à la mouche un autre moyq^ d’agir avec fuccès contre le bout de la co¬ que ; & ce qui eft encore à remarquer, c’eft que quoi¬ que le bout contre lequel elle doit agir, paroilfe aufti épais, aulfi folide que lé refte, il a été conftruit de façon %. qu’il peut plus aifément être ouvert. Ce bout *, cette L partie que nous avons nommée la calotte, eft comme compolée de deux pièces, de deux demi-calottes appli¬ quées l’une contre l’autre. Ces deux demi-calottes peuvent facilement être détachées l’une de l’autre, & du refte de la . c. coque : qu’une des deux * ait été détachée, c’en eft alfés i b. pour la mouche, elle a une porte fuffifante pour fortir *. Nous avons déjà fait faire attention dans le Mémoire le. précédent, à deux cordons, à deux arrêtes *,à deux pe¬ tits reliefs qui fe trouvent fur deux des côtés de la calotte diamétralement oppofés. Ces deux arrêtes fembleroient être deftinées à renforcer la coque, elles le font au des Insectes. VIII. Ment. 533 contraire à l’affoiblir, & c’efi de quoi il efi très-aiië de le convaincre. Si on prend une coque entre le pouce 6c l’index, par le bout oppolë à celui où l'ont ces cordons, par le pofiérieur *, 6c qu’on laprefie enfuite allés pour * la brilër, les fentes qui s’y feront feront irrégulières, 6c les pièces qui fe détacheront le feront de même. Si enfuite on prclfe le bout antérieur 4 de la coque avec les deux mêmes doigts, on s’appercevra aifément que fans avoir employé une prelfion fi forte que la première, on obligera ce bout de s’entrouvrir, & qu’il s entrou¬ vrira tout du long de l’un * & l’autre des cordons. Là les deux demi-calottes fe répareront l’une de l’autre, une des deux * tombera, 6c peut-être tomberont-elles toutes deux; au moins ne refera-t-il qua pouffer lc- gerement avec le doigt celle qui ef demeurée en place pour achever de la détacher. Ainf le bout antérieur de la coque femble fait de deux pièces qui ne font que col¬ lées l’une contre l’autre, 6c contre i’anne^i à qui elles tiennent. Un obfervateur qui veut fuivre dans les coques, tous les progrès de la nymphe, doit même profiter de la fa¬ cilité avec laquelle elles s’entr’ouvrent par le bout que nous venons d’indiquer; dans toute coque'qui fera de¬ venue dure, il parviendra toujours, au mcqen d’une prelfion legere, à mettre la partie antérieure de l’inlcéte à découvert, fans le blelfer; 6c il en pourra ouvrir plus commodément 6c avec moins de rilque, le refie de la coque. Chacune de ces arrêtes fe trouve au defius d’une des principales trachées du ver, comme je l’ai fait remar¬ quer dans le Mémoire précédent; aulfi eft ce dans l’inté¬ rieur de la coque, vis à-vis chacune des arrêtes, que lent appliquées les trachées lorfque la nymphe %n défait; il Ttij pi. 24. tîg. ■P' * a, b. * Fig. 1. a & fig. 4. e. * Fig. 3. * PI. 24.. ■f. L e. 334 MEivioîREs pour l’Histoire ieroit donc naturel de penfer que les trachées par leur prdïion , contribuent à former les deux reliefs. Mais alors il devroit y avoir dans la coque un creux, une can¬ nelure au deffous de chacun des reliefs; j’ai cherché avec grand foin ces cannelures; n’ayant pu parvenir à les trou¬ ver, ayant vû qu’au deffous des arrêtes, comme ailleurs, tout étoit très-uni, j’ai f té forcé d’abandonner une ex¬ plication qui m’avoit paru très-vraifemblablc, 6 c que j’a- vois en quelque forte adoptée. Une autre plus vraie s’efl préfèntée lorlque j’ai confidéré les arrêtes avec une très- forte loupe; j’ai vû que tout du long du milieu de cha- % cune il rcgnoit une fente * réelle, quoique très-étroite; par conléquent que chaque arrête étoit compofée de deux parties qui ne font qu’appliquées l’une contre l’au¬ tre. La fente que j’ai apperçûe ne pénétré pas à la vérité julques dans l’intérieur de la coque, mais apparemment qu’elle pénétre affés avant pour que la coque foit plus foible où fe trouve cette fente, que par-tout ailleurs. Des parties de la peau qui fe font pliffées quand le ver sert raccourci, ont concouru à former l’arrête, les deux plis fe font touchés fans fe coller l’un contre l’autre, & ont laiffé à leur bafe une peau plus mince que celle du refîe de la coque. Quoiqu’au moyen des deux arrêtes ou languettes, ou plûtôt de leurs deux fentes, les deux calottes du bout antérieur de la coque, puiffent être détachées par une preffion des doigts qui efl legere pour nous, on éprouve pourtant une réfiflance qui doit être confidérable pour une mouche; on a peine à imaginer que la mouche puiffe furmonter cette réfiflance, & fûrement onn’imagineroit pas comment elle la furmonte , puifque c’efl avec des parties qui femblent les moins propres à agir, comme il ie faut ici, ^ par des mouvemens qu’011 ne voit point des Insectes. VIII. Aient. 335 faire à ces parties dans tous les autres temps de la vie de i’iniecle fous la forme de mouche, ni dans ceux qui ont La mouche eh renfermée de toutes parts lorfqu’elle travaille à lè mettre en liberté, il eh pourtant aifédevoir quels ]ont les moyens dont elle fe fert pour y parvenir, quand on l’obferve dans les circonhances où j’en ai ob- fervé plufieurs, 6c où iLfera ailé d’en obferver à qui en aura quelqu’envie. Ayant vu fortir trois à quatre mou¬ ches de trois à quatre coques pareilles à celles dont il me rehoit un grand nombre, & qui toutes avoient été faites à peu près dans le même jour, je détachai les deux demi-calottes du bout antérieur d’une de ces coques, 6c enfuite celles de plufieurs autres, pour voir en quel état étoit la mouche qui y étoit contenue; fi elle profiterait de la porte que je lui avois ouverte, 6c fi elle étoit en état d’en profiter; pendant quejetenois entre mes doigts ïa coque ouverte *, je vis des mouvemens dans une par¬ tie de la mouche, où je 11 e me ferais pas attendu à en voir. Le crâne des mouches eh folide, il eh fait de parties plus que cartilagineufes, 6c comme écailleufes; en un mot, la figure de la tête des mouches, comme la figure de la tête des grands animaux, eh confiante, cette figure réfulte de l’affemblage de parties peu capables deceder. Je fus donc furpris, 6c je dûs l’être lorfque je vis des mou¬ ches * qui gonfloient 6c qui contraéloient leur tête alterna¬ tivement. Lorfque je vis que les deux yeux à rezeau étoiert tantôt plus écartés 6c tantôt plus proches l’un de l’autre * ; que la mouche enfin avoit une tête tantôt plus grohe 6c tantôt plus petite; que fa tête avoit des mouvemens de fihole 6c de diahole. Ce n’eh pas le feul mouvement que me montrèrent les têtes des mouches qui étoient prê¬ tes à naître, 6c qu’elles montreront toujours en pareil cas; T t iij * PI. 24. fig, s- * Fig. 6 . * Fig. 7 9. 0 , 0 , 33 6 Mémoires pour l’Histoirë elles ferfibloient d’inftant en inflant, & cela lorlqu elles fe gonfloient le plus, s’allonger en devant. La partie anté¬ rieure & fupérieure du crâne, paroît lé terminer près de *Pl. 24.. fi g . l’origine des antennes*, là on peut voir un petit cordon to.nijin. en arc> d on t | a concavité eft tournée vers le devant de la tête; en dehors de cet arc elt une fente qui n’elt fen- fible qu’à la loupe. De cet endroit la mouche prête à naître, & même la mouche nouvellement née fait iortir une velfie blanche; elle porte fouvent fi loin le volume * Fig. 7 & de cette velfie *, qu’il égale ou furpalfe celui du relie de j a tête. Les antennes * font attachées à la membrane & < l u ‘ f° rme velfie, de forte qu’elles font alors très éloi¬ gnées des yeux à rezeau. Quelquefois la mouche fait rentrer fur le champ cette velfie d’une grandeur fi dé- mefurée, elle la fait totalement difparoître pour la mon¬ trer aulfi grande ou plus grande dans l’inftant fuivant; elle lui fait prendre fuccelfivement différentes figures;. Fig. 6 & quelquefois elle lui donne celle d’une forte de muleau * allongé, mais elle en fait un muleau bien difforme quand elle l’arrondit en boule *. Au bout de ce muleau paroît un pli *, un petit enfoncement qui marque apparem¬ ment l’endroit par lequel il elt tiré quand ii rentre lous le crâne. Les antennes font attachées par-delà ce pli, le fond de la cavité où elles font dans l’état ordinaire, & lorfque la mouche les tient baiffées, s’élève dans le cas que nous confidérons, & prend du relief; la mouche gonlîe de meme * les membranes, les chairs qui lont à l’origine de la trompe; là on voit comme deux petites boules blanches *. Dans les plus vieilles mouches de l’efi-, pece de celles dont ii s’agit ici; on peut voir un échan¬ tillon de la veffie de grandeur déni durée, en prefîànt la tête delà mouche, on en peut faire Iortir une véhiculé *. L’air eft la feule matière que la mouche nailfante puilfe sfr 32 . * Fig. 7. * Fig. 9 .c. Fig. 8. + h,b. * Fig. « 0 a n,m. des Insectes. V J1 1. Mem. 337 employer pour produire un fi grand gonflement dans fon efpece de muieau & dans toute fa tête. Nous ver¬ rons bientôt aufli qu’elle fe iërt pareillement de l’air pour gonfler tout fon corps. Enfln on 11e fçauroit afles admi¬ rer la facilité avec laquelle la mouche prête à naître, ou nouvellement née, change la figure de la tête, & com¬ bien fubitement elle la change. Dès qu’on a vu faire de pareils mouvemens à la tête d’une mouche, on devine fans peine à quoi ils tendent; on voit afles que la veflTie & la tête en fe gonflant, pouf¬ fent les deux demi-calottes du bout de la coque, &que ces deux demi-calottes ne font pas en état de tenir long¬ temps contre de pareils efforts : mais on n’eût pas penfé apparemment qu’il y avoit un temps où la mouche avoit belôin de pouvoir gonfler & contracter fa tête, & de faire paraître un tel muieau. J 1 lûffit à la mouche qu’une des deux pièces du bout de la coque tombe, la porte qui relie alors ouverte, efl alfés grande pour la laifler fortir *; cependant il y a des *PI. 24. C». mouches de la même efpece qui font tomber les deux 2 ' pièces *, leurs efforts ont tantôt plus & tantôt moins de * Fi s- s* i'uccès, mais ils en ont toujours alfés. Enfin l’aétion de ce mufeau en velfie que la mouche montre alors, & qu’elle ne fera plus paraître du relie de fa vie, Si faétion de la tête qui fe gonfle, viendraient à bout de furmonter de plus grandes réfiltances que celles que la coque oppofe, s’il en étoit befoin, & il en elt be- foin pour certaines mouches. Dans le troifiéme volume * *Mem.xrr. nous'avons décrit & fait repréfenter une petite & très- ' y 7 'lf jolie mouche qui vient d’un ver de la première ciafle, le- 13 <£r 14. quel croît dans les galles du chardon hémorroïdal *. C’elt * Fig. i-j, dans cette galle clofe de toutes parts que ie ver fe trans¬ forme, qu’il fe fait de fa peau une coque en forme d’œuf, 338 MEMOIRES POUR L’HlSTOIRE dans laquelle il le change en nymphe. Quand cette nym¬ phe pâlie à i état de mouche, la moindre partie du tra¬ vail quelle a à faire, cil d’ouvrir fa coque; eile le trouve dans une fécondé prilon plus difficile à forcer que la pre- * PI. 24..%. miére;il faut quelle brile & foûleve plufieurs libres * de 17 ‘ la galle, qui tiennent bien autrement enlemble que les deux demi-calottes ne tiennent à la coque; eile nacependant pour en venir à bout, que le gonflement de la tête & de * b,m. l’on mufeau * : c’efl auffi pour elle un très-grand ouvrage, & quelquefois trop grand, fur-tout quand la galle self delféchée, & que les libres font devenues trop roides & trop dures. Auffi ai-je vû plufieurs de ces mouches périr après avoir allongé leur mufeau, & gonflé leur tète une infinité de fois pendant une journée toute entière, fans avoir pu réuflir à aggrandir alfés l’ouverture quelles . * avoient faite; elles avoient eu le malheur de trouver des libres trop bien liées, trop dures, & qui s’étoient trop deffiéchées chés moi, où les galles avoient été dans des poudriers tenus en un lieu fec pendant plufieurs mois. Les galles du même chardon qui relient dans la campa¬ gne, lont attendries par la pluie, & à demi pourries peut- être lorfque les mouches doivent en lortir. Plufieurs de ces mêmes mouches lont cependant forties heureufe- ment chés moi de galles deffiéchées. Quoique la mouche le ferve utilement de la faculté qu’elle a de gonfler & d’allonger fa tête dans Huilant qu’elle veut ouvrir fa coque, il n’y a pourtant pas appa¬ rence que cette faculté lui ait été accordée pour cette feule fin. Des mouches que j’ai tirées de leur co'que, ont continué de faire prendre à leur tête alternativement plus 6 c moins de volume , pendant un temps bien plus long que celui qui leur eft néceffiaire pour s’ouvrir une porte, 6 c dans un temps où elles n avoient point befoin de fe l’ouvrir des Insectes. VIII. Mem. 339 l’ouvrir. On pourroit dire que la machine ctoit montée pour fe mouvoir de la forte dans le temps où la mou¬ che avoit befoin de la faire agir pour fe mettre en liberté; mais fi elle 11’étoit montée que pour cette fin, des mou- vemcns d’une fi longue durée lui feraient inutiles. 11 eft vraifemblable que ces grands mouvemens de la tête font encore néceffaires pour mettre en jeu toutes les parties de l’infeéte , & fur-tout les liqueurs, pour déterminer celles-ci à circuler avec une vîteffe plus grande que celle qu’elles avoient auparavant, & peut-être à élargir des vaiffeaux trop petits; ce qui le prouve, c’eft que j’ai vû plufieurs mouches qui, après être nées fans que j’euffe avancé leur naiffance, continuoient encore à faire jouer leur mufeau en vefTie. Au refte, dès que la mouche a forcé une des demi- calottes, ou les deux calottes, dès qu’elle a ouvert à moi- * » tié ou en entier le bout de fa coque, elle préfente fa tête à l’ouverture *; elle l’avance enfuite en dehors, & bientôt même elle fait fortir une partie de fon corcelet. Ses an- * pr. 24. fîg, neaux lui aident plus alors pour fortir, que fes jambes 5 * qui font encore empaquetées. Tout le corcelet n’eff pas long-temps à paraître, & lorfqu’il fe trouve en entier par- delà les bords de la coque, les jambes achèvent de fe tirer de leur enveloppe ; la mouche met d’abord les deux pre¬ mières hors de la coque, & enfuite les quatre autres. Dès que les premières jambes font forties, tout ce qu’il y a de plus difficile à faire, eft fait,1a mouche s’en fert pour fe tirer en avant ; & pour achever de dégager les autres jambes & fon corps, elle laiffe en arriére la peau mince & blan¬ che qui lui fervoit d’enveloppe, & les trachées qui ap- partenoient tant aux fligmates pofférieurs qu’aux anté¬ rieurs. Les fligmates tant pofférieurs qu’antérieurs, font collés contre la coque, chacun eft uni à fa trachée, de-là, Tome IV. * V u * PI. 24. fig. JU. * Fig. 12 , &P' 340 Memoi res pour l’Histoire il arrive néceflairement que lorfque la nymphe avance, les vieilles trachées ou leurs dépouilles font retenues par les ftigmates. La mouche qui vient de naître, eft encore très-diffé¬ rente de ce qu elle fera bientôt : cette mouche qui doit être bleue, eft alors grifâtre,& encore ne l’efl-elle que parce qu elle a des poils noirs, car le fond de la couleur de fon corcelet, de fon corps, ôc même de fes jambes, eft blanc ou blancheâtre. Mais peu à peu ce blanc s’altère de façon qu’en moins de deux ou trois heures, toutes les parties deviennentaufii colorées, aufii bleues qu elles le feront pendant le refte de la vie de l’infeéle. Tout achevé en même temps de prendre confiftance, les an¬ neaux, le corcelet, & les jambes s’affermi dent; ces diffé¬ rentes parties qui ne fembloient d’abord que membraneu- fes, deviennent plus que cartilagineufes, comme écaiileu- fes; de fi grands changemens fe font dans un temps très- court. Ce n’eft pas feulement par fa couleur & par fa confi¬ ftance que la mouche * qui vient de paroître au jour, diffère de ce qu’elle doit être dans la fuite; on ne lui voit alors que des moignons d’aîles, & fi courts, qu’on ne croiroit pas que de tels moignons puffent jamais deve¬ nir les grandes ailes qui la foûtiendront dans l’air, & qui la porteront par-tout où elle voudra aller. Mais qu’on l’obferve, &on verra fes efpeces de moignons s’étendre, on leur verra prendre la figure d’un ziczac * compofo d’un très-grand nombre de ziczacs femblabies, appliqués les uns contre les autres, ceux-ci font les plis de l’aîle. Enfin peu à peu cette petite maffe s’allonge & fe déve¬ loppe; fou vent le développement eft plus de trois heures à fe faire,quelquefois il eft fait beaucoup plus vîte. Mais nous ne nous arrêterons pas à expliquer comment ces aîles fi des Insectes. VIII. Mem. 341 raccourcies, fi pliffées parviennent à acquérir de l’étendue, à devenir planes ; ce que nous avons dit ailleurs * du déve¬ loppement des ailes des papillons, ell l’elfentiel de ce que nous pourrions dire de celui des ailes des mouches; mais fi on compare les plis des ailes des mouches avec ceux des ailes des'"papillons, on remarquera qu’ils Font différemment dilpolés. Prel'qu’auffitôt que la mouche s’ell tirée de fa coque, elle jette quelques excrémens d'un gris blancheâtre & de confiftance de bouillie. Dès l’in liant de fa nailfance elle paroît grolfe par rapport à la capacité de la coque dans laquelle elle étoit contenue auparavant, elle femble cepen¬ dant beaucoup plus petite encore que la mouche à la¬ quelle elle doit là naiffance. Quand on fçait que les infe- éles n’ont plus à croître après leur dernière métamor- phofe, on ell porté à penler que la mouche nouvelle¬ ment née a dégénéré; mais on ell bientôt détrompé,on n’elt pas long temps à voir augmenter fes dimenfionsen tous fens, & à la voir même devenir plus grolfe que ne le font les mouches de fon efpece *. Cet accroilfement fubit n’ell pourtant pas un accroilfement plus réel que celui des ailes; les parties trop rapprochées les unes des autres, emboitées, pour ainfi dire, les unes dans les au¬ tres, s’écartent les unes des autres, la capacité du ventre augmente, & le corps paroît plus grand. Nous avons déjà parlé de ce phénomène à i’occalion des mouches des vers mangeurs de pucerons *, nous en avons expliqué la caufe qui efl la même qui donne un accroilfement li fu¬ bit au volume du corps de toutes les mouches nouvel- ment nées; l’air quelles commencent à refpirer, & qu’el- les refpirent en grande quantité, ell ici le principal agent; î’air qui s’introduit dans la capacité du corps, le gonfle. J’en ai eu des preuves toutes les fois que je l’ai voulu; Vu ij * Tome /. Mem. xiv . * PI. 13 «St i£. * Tome II), Mem. XI. f ag. 47;. 342 MEMOIRES POUR L’HiSTOIRE fur le champ j’ai rendu les corps de plulieurs de nos grofles mouches bleues, aulfi petits qu’ils letoient une demi-heure auparavant, & cela en les perçant avec une épingle; l’air en fortoit fur le-champ avec bruit. D’ailleurs le mouvement des liqueurs qui devient plus prompt, & qui agit contre des parties encore molles & capables de céder, fait fur la plupart de celles qui com- pofent l’infeéle, quelque choie d’équivalent à ce qu’il fait fur les ailes. Les mouvemens de dilatation & de contra- «flion du crâne, fi utiles pour ouvrir la coque, 1er vent aulîi apparemment à faire prendre au crâne meme encore flexible, i’extenfiqn qu’il doit avoir. Mais, je le répété, l’air elï le principal agent employé par la mouche pour le développement de toutes les par¬ ties; je fuis même alfés tenté de croire qu’il a befoin d’etre introduit jufques dans les ailes, pour les obliger de le dé¬ plier. Ce qui me conduit à le foupçonner, c’elt que j’ai vû quelquefois de l’air qui avoit pénétré en trop grande iPl.24.fi". quantité dans l’aile d’une mouche; l’aile alors * devenue j 6, très-épailfe, relfembloit à une petite couche decume de favon ; l’aile avoit une efpece d’hydropifie d’air. Ce Lit m’a appris de plus que l’aile d’une mouche, toute mince qu’elle nous paroît, elî compofée de deux membranes qui peu¬ vent être féparées, quoique de les féparer l'oit une opé¬ ration qui furpaffe notre adrelfe. La même aile que j’avois obfervée pleine de bulles d’air, lémblables à celles du favon, elï quelquefois devenue une efpece de fac d’une épailfeur fcnlible,deplus d’une ligne en certains endroits. L’air qui avoit continué de s’y introduire après la forma¬ tion des bulles, avoit achevé de féparer les deux mem¬ branes dont l’aile eft compofée, d’en rompre tous les liens. Mais ce qui m’a paru encore plus fmguiier, c’el 1 d’avoir vu une telle aile revenir en moins de vingt-quatre t>ES Insectes. VIII. Mem. 345 heures à l'on épaifleur naturelle. Nous 11e guéririons pas aufîi aifément, même avec le fecours de la Médecine, d’une hydropifie tympanite, ou d’un emphifême, que l’aile de la mouche avoit été guérie deTon hydropifie d’air. a ‘ Jettes prifmatiques : les ailes des dernières ne fe croifent jamais, au lieu que celles de nos mouches aquatiques font croifées fur le corps *; elles le font même d’une * pig. 4, façon particulière, car le corps les déborde de chaque côté, & elles forment une pointe fur le derrière. Mais un troifiéme caraétére qui les diflingué non feulement des mouches de la viande, mais qui les diflingué de tous les autres genres de mouches que je connois, eft fourni par deux petits corps, chacun de la groffeur d’une épingle, & terminés de même par une pointe : ces deux efpeces de courtes épingles * font écailleufes & un peu courbes ; * Fig, 7 & elles partent du bout de la partie fupérieuredu corcelet, 8 - cc ‘ d’où elles font dirigées vers le derrière, & vontfouvent par-delà fe milieu du premier anneau. Ces deux picquans '* PI 2 . a 346 MEMOIRES POUR L’IÎISTOÎRE font durs, roides, & 11e font aucunement mobiles. Lettf ufage m’eft abfolument inconnu, ils femblent devoir être des armes ofïénfives ou deffenfives; &. comme s’ils en étoient, je m’en fervirai pour donner un nom à ces mou¬ ches que j’appellerai à corcclct armé de qncquans , ou fim- planent à corcelet armé. J’ai eu au moins trois efpeces de ces mouches à cor¬ celet arme, qui différoient principalement par la gran- deuriles plus grandes, venues des plus longs vers, étoient un peu plus longues que les abeilles,mais avec un corps qui avoit beaucoup plus de diamètre d’un côté à l’autre, que n’en a le corps des abeilles; celui de nos mouches aquatiques eftapplati. Les plus petites font des mouches extrêmement petites, & les autres font d’une grandeur moyenne entre les grandeurs des deux efpeces dont nous venons de parler. De quelqu’efpece que foit la mouche à corcelet armé qui vient de naître, qui vient de fe tirer de fa coque, fes .25.% ailes * dans ce premier inftant font encore moins con- ’ a ' noiffables que ne le font dans un temps pareil celles des mouches de la viande; il ne leur manque pourtant rien du côté de la longueur, mais chacune d’elles eft fi pliiTée &. à plis fi fins &. fi proches les uns des autres, qu’elle ne forme précifément qu’un filet qui va en ligne droite du corcelet au derrière ; chacun de ces filets s’élargit bientôt, il fe développe, & en moins d’une heure il eft devenu une aîle plane & large. Les mouches nouvellement nées font vertes, d’un verd un peu pâle; le deftous du ventre de quelques-unes refte toujours verdâtre, mais dans le plus grand nombre i! devient feuille-morte. Il y en a dont le deftiis du corps Fig. 7. eft d’un brun prefque noir *, on voit feulement aux jon- éîions des anneaux, des bandes de couleur de feuille-morte qui des Insectes. VIII. Mem. 347 celles qui font triangulaires, elles s’étreciffent en s’appro¬ chant Judos. Le deffusdu corps * de quelques-autres n’a qu’une large bande d’un brun noir, qui va du corcelet juf- qu’au derrière, tout le relie du corps efl feuille-morte; il efl très liffe, & la loupe y fait à peine appercevoir quelques poils courts & très-ccartés les uns des autres. Le corcelet efl brun; les deux picquans * qui en partent, font jaun⬠tres à leur origine, & dans une partie de leur longueur, mais leurs pointes font prelque noires. Les jambes des mouches qui ont le deffous du ventre verd, font d’un jaune-pâle, & celles des mouches dont le corps efl feuille- morte, font de cette dernière couleur. Elles ont trois petits yeux * difpofes en triangle fur le derrière de la tête. Les grands yeux * ou ceux à rezeau font bruns; pardevant, l’efpace qui efl entr’eux efl rem¬ pli de petits poils * qui demandent à être vûs à la loupe, parce qu’ils font courts; ils font d’un jaune doré. Tout le contour extérieur de chacun des yeux à rezeau, a un bordé de pareils poils. La dépouille que chacune de ces mouches laiffe dans fa coque de ver lorfqu’elle en fort, ell femblabie à celles que les autres mouches biffent dans la leur, elle confifte dans une peau mince qui enveloppoit chacune des parties de la crilàlide, & en plufieurs trachées. Ces deux trachées fi remarquables dans le ver & fi confidérables , dont nous avons beaucoup parlé dans le Mémoire précédent , ne fe trouvent plus dans la mouche. Dans le quatrième Mémoire nous avons décrit des vers * de la même claffe que nos longs vers aquatiques, mais qui font d’un genre très-différent du leur; ils ont le corps plus applatti & beaucoup plus court. Quelques efpeces de ces vers auxquels nous revenons, fe tiennent dans des bouzes de vaches, & on les y trouve en grand nombre dans les mois de Septembre &d’Oélobre. Toutes Tome IV , X x * PI. 2 5. fig, 8 . * Fig. 8. * Fig. 7 & 8 . c t c. * Fig. 7* * ii. * Fig. 9, * PI. 13. figo' 19 & 20. & pi. 14-fig. 4, 6 & 7. 348 MEMOIRES POUR L’HlSTOIRE leurs métamorphofes s accomplirent fous leur propre peau, comme celles des vers aquatiques. Je n’ai pour¬ tant pu le vérifier fur l’efpece de ces inledes qui m’en a fourni le plus. Peut-être qu’ayant laiffé trop deffécher la bouze de vache avec laquelle je les ai renfermés, ils fe font eux-mêmes trop ddféchés dans cette matière, où je les ai trouvés tous péris à la fin de l'hiver. Mais j’ai eu les mouches d’une efpecede ces vers que j’avois mis dans lin poudrier fans fongerà les y mettre. J’avois eu inten¬ tion d’y renfermer, & j’y avois renfermé des vers à tète de figure variable, Si parmi ceux-ci il y en avoit à tête de figure confiante. Je ne le fçûs que lorfque je vins après un certain temps, à regarder ce qui étoit dans le J’y trouvai cinq à fix mouches* qui n’étoient celles que les vers à tête de figure variable au- roient pû me donner. Ayant enfuite fouillé davantage, *Fîg. 5 & 6. je mis à découvert les cinq à fix coques * d’011 ces mou¬ ches étoient forties. Ces coques m’apprirent que les mou¬ ches avoient vécu Si crû fous la forme d’une efjiece de ver à tête écailleufe, du même genre que ceux de l’ef- pece dont je n’avois pû parvenir a voir la dernière trans¬ formation. Chaque mouche, pour fortir de la coque, en avoit fait fauter le bout antérieur, c’efl-à-dire la partie qui formoit la tête du ver Si le premier anneau, il ne manquoit à la coque pour qu’elle eût la forme extérieure du ver, que cette partie, qui en étoit tombée : ainfi les coques des vers de ce genre, comme celles des longs vers aquatiques, femblent elles-mêmes de véritables vers. On trouvoit à leur bout poftérieur la pièce qui recou¬ vre dans le ver lesfligmates poflérieurs. Le deffus de cha¬ que coque a fur un fond d’un blanc-jaunâtre, fix rayes brunes, & ondées de façon qu’une étoffe qui en auroit de telles plairoit. J’ai trouvé dans l’intérieur de chaque coque, les trachées que l’infeéle y avoit laiffécs pour * Fi. 22.fig. poudrier. point de 349 des Insectes. V IIL Mem. parvenir à paroître fous fa dernière forme. Nous avons dit ailleurs que i’accroiffement des vers à tête de figure variable, de toutes les efpeces que nous avons obfervées, fè fait fins qu’ils changent de peau, qu’ils confervent pendant toute leur vie la même peau qui eu efl plus propre à leur faire une coque épaule & loiide. Mais nous devons avertir que cette réglé, qui efi vraye peut être pour toutes les efpeces de vers de la première claffe, ne l’eft pas pour celles des vers de la troifiéme claffe, ou à tête écailleu/è, qui, comme les autres, le transfor¬ ment fous leur peau. Car j’ai vu, & je l’ai dit dans le quatrième Mémoire, les vers à tête écailleufe des bouzes de vache quitter une dépouille. Ces fortes de vers ont une peau opaque qui paraît très-ferrée, celle des autres efl tranfparente & plus molle; la peau des derniers pour faire une coque folide, a befoin d’une épailfeur qui n’efl pas néceffaire à la peau des premiers. La mouche * de nos vers de bouze de vache à tête *pi. écailleufe, efl de la première claffe des mouches à deux 7 &8. ailes ; elle a une trompe à levres, & elle n’a point de dents. On ne fçauroit l’ôter de la première des claffcs fubordon- nées à la précédente, de celle dans laquelle font les mou¬ ches à corps en eilipfoïde, mais elle efl d’un des genres des mouches de cette claffe qui ont le corps le plus long. On peut compter fix anneaux au fien. La tête qui efl affés arrondie, qui approche de la figure fphérique, efl groffe par rapport à la groffeur du corps; elle porte des antennes à palettes lenticulaires. Les yeux à rezeau font d’une couleur de marron foncée. Les trois petits yeux font placés à l’ordinaire. Le corcelet efl d’un verd doré; il efl plus difficile de donner une jufle idée de la couleur du deffus du corps, elle efl changeante 6 c compo- fée de violet, de rouge cuivré ou de rofette & d’un cuivré plus pâle. Le déifions du ventre efl d’un jaune-pâle; les Xx ij 350 MEMOIRES POUR L’HiSTOIRE jambes & les balanciers font encore d’un jaune plus pâle. EX P LIC AT 10 N DES FIGURES DU HUITIE ME MEMOIRE. Planche XXII. Les Figures 5, 6,7 & 8 de cette planche,qui eft pla¬ cée à la fuite du lèptiéme Mémoire, appartiennent au hui¬ tième Mémoire. La Figure 5 repréfente dans fa grandeur naturelle une coque qui eft groffie dans la figure 6. Cette coque effc celle que s’eft faite de fa propre peau, un ver du genre de ceux qui l'ont repréfentés pl. 13. fig. 1 9 & 20, & pl. 14, fig. 4 & 6. La coque n’eft pas entière dans ces deux figures 5 & 6; la mouche qui en efl fortie, en a frit tomber le bout antérieur, a, l’ouverture par laquelle la mouche efl fortie. f fente faite à l’anneau par la mour che,pour aggrandir l’ouverture qui devoit lalailfer fortir. La Figure 7 fait voir dans fa grandeur naturelle, & la figure 8 montre plus grande que nature la mouche qui eft fortie de la coque des figures 4 & 5. Quand cette mouche eft en repos, elle porte fes ailes fur fon corps parallèlement au plan de pofition, &. en ayant une qui couvre l’autre en grande partie. La Planche 23 ne regarde pas ce Mémoire, & a été expliquée à la fin du feptiéme Mémoire. Planche XXIV. La Figure première repréfente une coque de laquelle une mouche bleue de la viande eft prête à fortir, & elle la repréfente un peu plus grande que nature, a b, fente qui s’eft faite fur le côté qui eft en vue. 11 s’en eft fait une femblable du côté oppofé, qui eft caché ici. La Figure 2 eft celle d’une coque dont une mouche des Insectes. VIII. Mem. 3 5 1 eft fortie. a b , marquent une demi-calotte, de laquelle une demi-calotte pareille a été détachée. La Figure 3 ell celle de la demi calotte, qui étoit po- fée en a b, fig. 2. La Figure q. fait voir très en grand le bout antérieur ou la calotte d’une coque. / e, montrent une des arrêtes, ou des deux languettes; chacune d’elles palTe fur deux an¬ neaux. Ici la pohtion de la languette eft plus exaéïc que dans d’autres figures, où il importoit moins de la faire remarquer. Mais ce qu’on doit encore plus remarquer, c’eft que tout du long de cette languette il y a une couliffe. La Figure 5 «repréfente une mouche qui a fait fauter entièrement la calotte du bout antérieur de fa coque, & dont la tête eft à découvert. Les Figures 6, 7, 8 & 9, &c. toutes très-groffiesà la loupe, font deftinées à faire voir comment la mouche vient à bout de faire fauter une des pièces, ou les deux pièces du bout antérieur de fa coque. Ces figures mon¬ trent les différentes formes que la mouche naiffante peut faire prendre à fa tête. Dans la Figure 6 la mouche a un mufeau oblong. m, ce mufeau.9', y, les antennes. 0, o, les yeux à rezeau. La Figure 7 fait voir à la tête de la mouche de h figure précédente, un mufeau m m, plus gonflé, plus arrondi, & qui a plus la forme de vefîie. Le mufeau en fe gonflant, a fait paffer en deffous les antennes qui paroiffent dans 'la figure 6. On ne voit dans la fig. 7 que deux poils p,p qui partent des antennes. Mais ce que nous devons fur-tout faire obferver dans cette figure, c’elf qu’il y a entre les yeux à rezeau o, 0, un efpace beaucoup plus grand que celui qui efl entre les mêmes yeux dans la figure 6. i, les petits yeux. La Figure 8 montre par deffous une tête encore plus gonflée, & plus allongée que celle de la figure 7. m m? Xx iij Mémoires pour l’Histoire! ie mufeau ou la veffie. y, y, les antennes qui font rame¬ nées près de la trompe, t, la trompe, o, o, les yeux à re- zeau. Tout l’elpace qui cil entre les antennes, la trompe &. les yeux à rezeau, eft gonlîé. La Figure 9 eft encore celle d’une tète de mouche dont le mufeau eft gonflé, & vû par defius. m m, ce mufeau dont la figure ne différé pas beaucoup de quel¬ ques-unes des précédentes. Mais on doit remarquer à Ion bout c, un enfoncement Si un froncement; ce bout s'é¬ lèverait & fe dériderait fi la mouche le gonfloit davantage. La Figure 10 repréfente en grand la tête d’une mou¬ che, qui s’efi affermie, qui a pris fa confiflance, Si qui tient au corcelet. On a prefle cette tête, Si la preffion a fait paraître la petite portion de mufeau m m. Cette por¬ tion peut aller plus loin, & fe gonfler dans la mouche naiflante, Si lorlque cela arrive, les antennes y, y font portées plus loin ; quand la partie qui efl entre m, m fe gonfle beaucoup, les antennes font conduites en deffous comme dans les figures 7 & 8. La Figure 11 efl celle d’une mouche naiflante dans fit grandeur naturelle, Si qui doit devenir aufli grande que les mouches des figures 13 Si 14.. Elle a fes ailes pliflees. La Fig 1 2 repréfente la mouche de la figure 1 1 groflie à la loupe. />, p, fes ailes pliflees. m, mufeau que cette mouche allonge encore pendant que les ailes fe déployent. Les Figures 1 3 Si 14. font celles de la mouche bleue de la viande, dont les aîies font développées, Si dont le corps a pris tout le volume qu’il doit avoir. Dans la figure 1 3 cette mouche a le port d’ailes qui lui efl ordinaire lorfqu’elle efl pofée, & dans la figure 14. elle fait ufage tic fes ailes pour voler. La Figure 15 efl celle de la mouche des dernieres figures, groflie. , La Figure 16 fait voir une aile de la même mouche des Insectes. VIII. Mem. 353 beaucoup plus épaifle que les ailes ne le font ordinaire¬ ment. Elle eft remplie d’une infinité de bouillons faits par des bulles d air qui lé font introduites entre les deux membranes dont l’aile eft formée; i’exiftence des deux membranes eft prouvée par ces bulles. La Figure 17 repréfente une portion d’une de ces groffesgalles du chardon hémorroïdal,dont il a été parlé tom. III. Mem. xn.^ p f q, cette portion de galle qui eft groflie à la loupe, gf h, galle plus petite qui eftau bout de la groflè. Les mouches qui viennent des vers qui ont crû dans ces galles, font de la première clafle des mou¬ ches à deux ailes, f g efl une bande d’écorce qu’une mouche a foûlevée avec fon mufeau m. Les lettres m b t montrent une autre mouche plus avancée à fortir. m, le mufeau gonflé & allongé de cette mouche, b , fa tête, t, fia trompe. En c efl une cavité de laquelle une mouche efl fortie. Planche XXV. La Figure première de cette planche a été expliquée à la fin du feptiéme Mémoire. La Figure 2 fait voir de grandeur naturelle & fortant de fa coque, la mouche qui efl en nymphe dans la figure première, b, fente faite à la coque pour laifler fortir la mouche. La partie marquée d t b, fig. i, efl tombée ou elle efl au deflous du ventre de la mouche, a, a, ailes de la. mouche, dont chacune ne paroît qu’un filet blanc. La Figure 3 fait voir une coque dont la mouche vient de fortir. d t b, la tête & le premier anneau. Ce premier anneau ne tient plus au fécond que par une petite por¬ tion de fa circonférence, f fente que la mouche a faite au fécond anneau. La Figure 4. efl celle de la mouche de la figure 2 , dont les ailes font développées, & qui font pofées comme 554 Mémoires pour l’Histoire elles ont coutume de letre quand la mouche cil en repos, La Figure 5 eft celle de la même mouche vûe du côté du ventre. La Figure 6 repréfente en grand un des balanciers de cette mouche. La Figure 7 eft celle de la mouche groffie à la loupe. a, a, les antennes qui font articulées en vertebres. i, 7 , l'es yeux à rezeau, entre lelquels font les trois petits yeux. Les deux balanciers ne font pas marqués par des let¬ tres, mais ils font ailés à reconnoître. Ce qu’on doit le plus remarquer, &. ce qui caraétérife ce genre de mouches, ce font deux crochets qui partent du bout du corcelet, La Figure 8 ne fait voir que le corps & le bout du corcelet d’une mouche du genre de la précédente, & de la même efpece, mais dont le delTus du corps eft diffé¬ remment coloré, c, c , les crochets qui partent du corcelet. La Figure 9 nous montre en grand & de côté, la tête de la même mouche, avec fa trompe allongée & renflée, a, a, les antennes, i, œil à rezeau. c , cavité dans laquelle la trompe fe loge, t, le filet noir qui eft le fueçoir ou la vraie trompe. 4 4 levres de la trompe renflées & cannelées, e, partie en forme de coquille, qui renferme les levres de la trompe quand ces levres font retirées en dedans. La Figure 10 fait voir le bout de la trompe dans un temps où les deux coquilles c, e cachent les levres. La Figure 11 eft celle du corps de la mouche deffiné par deffous, & vu vis-à-vis le grand jour, c o e, la partie qui peut être prife pour le cœur, parce qu’on la voit fe dilater & fe contrader fucceflivement./j f, f, des ftigma- tes auxquels des trachées aboutiffent. NEUVIEME /V I^ f.i./jyf .H.tn y .!■ 'M// Va- T.--n y DES I N S E C T E S. IX. Mcm. 355 NE U V 1 E' AI E Al E MO 1 RE. HISTOIRE ABREGEE DE DIVERS GENRES ET DE DIVERSES ESPECES DE MOUCHES A DEUX AISLES DE LA PREMIERE CLASSE, ET QUI VIENNENT DE VERS DE LA PREMIERE CLASSE. Des matières dont elles fe font nourries fous la forme de Ver. De leur accouplement, de leur ponte, de la fgure de leurs œufs. P resque toutes les mouches à deux ailes de la pre¬ mière dafle, ou à trompes à levres, ont un goût qui leur ell commun; s’il y en a quelques-unes qui cher¬ chent le fang dont les autres ne fe fbucient pas, elles aiment, comme celles qui ne font pas fànguinaires, les liqueurs fucrées ou mielleufes. Toutes vont chercher fur plantes de ces fortes de liqueurs, ou des fubftances ana¬ logues. Il n’en eft point à qui j’aye préfenté du lucre, qui n’ayent paru l’aimer. Qu’on s’arrête pendant de beaux jours d’automne à confidérer un mur tapifTe de lierre en fleur, & éclairé du foleil, on y pourra diflinguer cent différentes efpeces de mouches qui y prennent leur nour¬ riture , 6c qu’on aura vûes fucceffivement en d’autres temps fur un très-grand nombre d’autres efpeces de fleurs. Cette reflemblance de goût devient finguliére quand oïl fe rappelle que ces différentes efpeces de mouches ont été auparavant des vers de différentes efpeces, qui avoient Tome IV . Ÿ y * Tome III. pl- 44- fig- 3 4- * Fis;, j 2. i? 13. * Tome III. pl. 2.fis,. 14. * Tome II. pl. 3 S. fig. j 9 . * Fig, 22 & 23, 356 MEMOIRES POUR L’HISTOIRE des goûts très-differens : car entre les vers qui devien¬ nent de ces fortes de mouches, les uns ne vivent que de matières végétales, les autres que de matières animales, & les autres que de matières qu’on peut appeller partie végétales & partie animales. L’hiftoire des galles, celle des vers mineurs & celle des vers des fruits, nous ont déjà fait connoître des vers de la première claffe qui aiment différentes plantes; & d’autres qui,s’ils ont de commun avec quelques-uns d’aimer la mê¬ me plante, différent cependant de goût,en ce que les par¬ ties de cette plante que les 11ns cherchent, font celles que les autres n’aiment pas. C’eft à la première claffe des vers, par exemple, qu’appartient celui qui croît dans line des cel¬ lules d’une galle du chardon hémorroïdal *, & qui s’y transforme dans une jolie mouche *. Nous avons vû dans le premier Mémoire du même volume, beaucoup d’efpeces de vers de la même claffe, dont les unes mi¬ nent les feuilles de certaines plantes, & les autres celles d’autres plantes. Les mineurs de la jufquiame * peuvent être les mêmes que les mineurs de la poirée, du moins ils leur reffemblent, mais ils font très-différais de ces vers à tête variable qui minent les feuilles du chèvrefeuille, celles du iaitron, celles des renoncules, celles des trefles, &c. Les vers qui donnent fou vent du dégoût pour les bigarreaux, font auffi de la première claffe. Nous avons rapporté ailleurs que chacun de ces vers * fort du bigar¬ reau après y avoir pris fon accroiffement, qu’il entre en terre, qu’il s’y fait une coque de fa propre peau, & qu en¬ fin l’infeéle fe tire hors de cette coque fous la forme d’une très-jolie mouche à deux ailes *, qui a une trompe à levres. Les truffes font du goût d’une efpece de vers de la pre¬ mière claffe, comme elles font du nôtre. J’ai eu des vers de la même claffe, qui ont vécu de fruits plus durs que des Insectes. IX . Aient . 3 57 fa fubftance charnue des truffes & que celle des cerifes ; j’en ai trouvé au milieu des graines de laitues que mon jardinier confervoit pour lemer. Ils n’avoient d’ailleurs rien de par¬ ticulier dans leur couleur, qui étoit blancheâtre, ni dans leur figure. Ils le font métamorphofés comme tous ceux de la même clalfe, & après leur dernière transformation ils ont été des mouches brunes d’une grandeur au défi fous de la médiocre. Ces vers * qui fe font des fourreaux femblables à des manchons avec le coton du faule, font 1 auffi de la première claffe, & fe nourriffent des graines du même arbre. Nous avons fait graver ci-devant les figu¬ res d’autres vers * qui vivent des graines du marfau, mais * qui ne s’avifent pas de lé faire un fourreau du coton de cet arbre. Des vers de la même claffe que les précédens, & qui par la dernière de leurs transformations deviennent com¬ me eux des mouches à deux ailes de la première claffe, ne fe nourriffent que de matières animales. Il y a un très- grand nombre d’elpeces de ces vers, quoiqu’elles foient fouvent difficiles à diftinguer les unes des autres, parce qu’elles ont des figures affés femblables, & qu’elles font pour l’ordinaire de la même couleur. Mais des différen¬ ces confiantes & fenfibles qui s’obfervent entre les mou¬ ches dans lefquelles des vers carnaciers fe font métamor¬ phofés, prouvent inconteflablement que malgré une affés grande reffemblance, ces vers font d’efpeces différentes. Les goûts peuvent feuls aider à faire diftinguer plufieurs de ceux qui différent en efpeces. Les uns 11’aiment que les chairs, ou les liqueurs des animaux vivans, & les autres n’aiment que les chairs des animaux morts. Quand nous avons fait connoître les ennemis des chenilles, nous avons parlé au long de ces mouches à quatre aîles appellées ich- neumons, dont chaque fémelle perce le corps d’une Tome IIT, >/. 10. fi g. 1 S. & 1 g. PI. li.fig. 3 ar- tie antérieure, on voit diflinélement les deux tiges noi¬ res * des deux crochets noirs * dont ils loin armés. Ils piochent la truffe avec ces crochets, comme d’autres vers piochent la viande avec les leurs. Leur anus qui efl très- aifë à trouver , efl en deffous du ventre près du bout poflérieur; il jette une matière blanche & gluante, qui aide apparemment à Lire corrompre la truffé; chaque ver efl toujours entouré de cette liqueur épaiffe. Quand ils ont pris tout leur accroiffément, & ils l’ont pris en peu de jours, ils quittent la truffé comme les autres quittent la viande, & pour la même fin : j’avois prévu qu’ils dévoient en ufer ainfi ; aulfi avois-je eu l’attention de remplir plus d’à moitié de terre féche, les poudriers dans lef- quels j’avois renfermé des truffés ramollies. A mefure que les vers fortirent des truffés, ils entrèrent en terre, mais ils 11e relièrent pas auffi long-temps à s’y transfor¬ mer en coque, que les vers de la viande y feroient reliés. Ceux qui étoient entrés le foir, étoient métamorphofés le lendemain matin, & leurs coques * étoient déjà de couleur de marron. La coque du ver des truffés, comme celle de tous les vers de leur claffé, efl faite de leur peau, & a de même, à peu près, la forme d’un œuf. Ce quelle a de particu¬ lier, c’efl que fon bout antérieur * efl un peu applati, il a moins de diamètre de déifias en deffous, que d’un côté à l’autre. Dans l’étendue de cette portion applatie, cha¬ que côté efl bordé par une efpece de cordon * analogue à celui des coques des vers de la viande, mais qui dans celle que nous examinons, va jufqu’au bout. Le cordon finit pourtant à un des fligmates antérieurs *, mais ces ftigmates font fur la ligne droite par laquelle le bout plat efl terminé. Au milieu de ce bout paroiffent des plis Aaa ij k Pi. 27. fig. 17. e, e. * c, c. *Fig. 19, * Fig. 1 6. * d a. * a. •*74 MEMOIRES POUR L’HiSTOIRE difpofés comme ceux d’une bourfe, qui entourent ffou- * PI. 27. fig. verture * par laquelle le premier anneau eft rentré en l6,0 ’ dedans Divers contre-temps, dont je 11e fçais pas bien la caul'e, ont fait périr toutes les mouches que je m’atten- dois à voir lortir de ces coques. Je crois pourtant que ce qui y a le plus contribué, c’eft que j’ai tenu les pou¬ driers dans lelquels elles étoient, lur la tablette de ma cheminée, où la terre des poudriers s’eft trop tôt def- féchée. L’efpecede vers dont nous venons de parler, n’eft pas la feule qui mange les truffés; j’en ai fouvent vû lortir d’autres vers fans jambes, qui ont une tête noire & écail- leufe, & qui font de la troifiéme clalfe. Nous aurons ail¬ leurs occafion de parler de vers femblables qui mangent les champignons, & qui font peut-être de la même efpece. On n’a pas attaché une aulfi grande idée de mal-pro¬ preté aux excrémens des vaches, qu a ceux de la plupart des autres animaux; & cela efl heureux, car dans bien des provinces du Royaume, où l’on ne bat pas le bled en grange, c’elt fur de la bouze de vaches qu’on le bat: pour achever de préparer faire, pour la rendre plus unie & plus ferme, on étend defliis de cette bouze réduite par l’eau, qui l’a détrempée, à la confiance de bouillie claire. Lorfque cet enduit eft fec, il arrête les grains de bled que les coups de fléau feroient entrer dans la terre, fi ces grains la touchoient immédiatement. Les gens les plus délicats & les plus propres, ne s’avifent point d’a¬ voir du dégoût pour le pain fait de grains qui ont roulé fur un pareil enduit. Si un Naturalifle ctoit aflès délicat pour 11e pas vouloir examiner les infeéîes qui fe nourriflént de bouze de vaches, il y en auroit de bien de différentes claffcs dont il ne pourrait apprendre l’hi- ftoire par fes propres yeux; car il y a peu de matières, il des Insectes. IX. Mem. 37$ n’y a point au moins d’excrémens qui foient recher¬ chés par autant de différens infeétes. Plufieurs efpeces de vers, 6c entr’autres de ceux de la première claffe, qui fe transforment en des mouches à deux ailes, ne con- noilfent point de meilleur aliment. Nous avons déjà fait repréfcnter un ver qui fe nourrit de bouze de vache.de grandeur naturelle, 6c quelques-unes de fes parties plus grandes que nature *. Il fe transforme dans une mou- *pi. 12 .%, che * qui ne le cede point en grandeur aux grolfes mou- 11 & IZ - ches bleues, 6c que nous devons faire connoître, par- * 0 P1 ‘ ce que nous aurons encore à en parler dans la fuite par rapport à elle-même, 6c en la citant pour terme de com- paraifon. Son corps, fon corcelet, fes jambes Si fa tête font d’un beau noir. Ses yeux à rezeau ne font que d’un châtain - foncé ; mais ce qui aide le plus à la re- connoître, c’eft qu’à l’origine de chaque aile elle a une grande tache * de couleur feuille-morte. Les coquilles * des ailes 6c les bouts des pattes font de cette même cou¬ leur. Ce qui relie d’efpace en devant de la tête, entre chaque œil à rezeau, 6c la folfette dans laquelle les an¬ tennes fe couchent, femble être d’un velours couleur d’or, parce que cette couleur efl celle des poils très- courts 6c très-j^refTés les uns contre les autres, qui rem- plifTent ces petites places. Par fes antennes cette mouche elt du même genre que la mouche bleue; elles font com¬ me celles de cette dernière mouche, des palettes prifma- tiques. Mais le ver, fous la forme duquel elle a crû, a trois caractères, dont un feul fuffiroit pour le mettre dans un genre différent de celui des vers des mouches bleues. i.° Son derrière * elt coupé quarrément,ou, ce * Fîg.7. qui revient au même, il elt prefque terminé par un plan circulaire. 2. 0 Deux plaques brunes *, circulaires 6c un *Fig peu relevées en bolfe, forment les deux Itigmates polté- A a a iij 376 MEMOIRES POUR L’HISTOIRE rieurs, au lieu que le ver de la mouche bleue en a fix en boutonnières. 3. 0 Enfin la tète de ce ver ne montre qu’un * PI. 26. fig. feul crochet écailleux *. Quand il le veut, il fait paroîlre 6 ‘ c ' quatre courtes cornes, qui font comme autant de petits mammelons charnus. La peau de ce ver eft luilante fans être enduite de matière vifqueufe-, car elle eft lèche fur la plus grande partie du corps; elle efl d’un jaunâtre qui tire fur celui du karabé pâle. La coque que le ver fe fait de là propre peau pour fe métamorphofer, cft plus * Fig. 9. a. menue à là partie antérieure * à celle où le ver étoit le plus menu, qu’à fa partie pofiérieure. Le fioul de celle- * Fig 8. ci cft terminé par neuf pans *, il relfemble à une elpece P 0, oi, ’ en deffius ; je n’en ai pourtant obfervé aucun dans l’in- flant où il naiffioit, mais ce qui elt équivalent à l’avoir oblèrvé, c’efl qu’on peut remarquer qu’après que les vers font éclos, le bout lûperieur de chaque œuf* efi plus * Fig. 10* large & plus plat, 6 c que les deux ailerons font plus écartés l’un de l’autre. Chacun de ces vers 11e refie pas plus long¬ temps dans fon œuf, que le ver de la grofî'e mouche bleue relie dans le fien;& fon accroiffement eft, je crois, auffi prompt que celui de l’autre; car ceux qui font fortis d’œufs pondus vers le 7 & le 8 d’Oélobre, étoient transfor¬ més en mouches à la fin du même mois. J’avois eu foin défaire mettre de la terre dans le fond des poudriers où ils étoient nés, ils entrèrent dans cette terre lorlque le temps de leur première métamorphole fut proche, & ils s’y firent chacun une coque de leur propre peau , femblable à celles des vers des grolfes mouches bleues, mais plus petite. Les femelles des papillons ne s’accouplent qu’une fois dans leur vie, mais quelques-unes relient pendant un temps confidérable jointes à leur mâle; dès quelles s’en font féparées, elles commencent leur ponte, & la conti¬ nuent prelque fans interruption. La fécondation 6 c la ponte des mouches y. deux ailes, ou au moins de quelques Tome IV . Bbb 380 MEMOIRES POUR L’HiSTOIRE efpeces de mouches à deux ailes, reffemblent moins à celles des papillons qu’à celles des oifeaux. Les mouches des excrémens de cochons me l’ont appris, & peut-être feroit-il difficile d’en avoir la preuve, ou au moins une preuve auffi fûre,en obfervant d’autres efpeces de mouches. Il y en a peu d’efpeces de celles que j’ai renfermées dans des poudriers, qui, comme les mouches de celle-cy , ayent oublié qu’elles étoient prifonniéres , & qui fe foient accou¬ plées dans leur prifon, comme elles eufficnt fait fi elles cul- fient été en liberté dans la campagne. J’ai dit cy-deffiis que j’avois mis deux paires de mouches dans un poudrier où il y avoit de la fiente de cochon ; elles y furent mifes le foir, le lendemain fur les neuf à dix heures les mou¬ ches étoient encore accouplées, quoique la fiente parût piquée de beaucoup d’œufs; elles avoient donc pondu. Si s’étoient raccouptées depuis. Elles continuèrent ce manège au moins pendant quatre à cinq jours qu’elles vécurent. Quelquefois je n’en trouvois que deux accou¬ plées, Si quelquefois les deux paires letoient; le nombre des œufs augmentoit journellement. A la fin la furface de la fiente en fut fi couverte, qu’il ne reffoit pas de place pour y en mettre d’autres, fans trop preffer ceux qui y étoient déjà. La ponte de cette efpece de mouches. Si fans doute celle de beaucoup d’autres efpeces, fe fait donc à plufieurs reprifes, comme celle des oifeaux, Si les accoupleinens fe réitèrent de même pendant plufieurs jours de fuite. Quelques-uns de ceux des mouches que nous examinons, duroient plufieurs heures. Je n’ai jamais vu faire qu’une ponte aux greffes mou¬ ches bleues, mais je ne fçais pas fi avant que de pondre dans le poudrier où je les avois renfermées, elles n’a- voient pas déjà pondu ailleurs , & fi elles n’euffent point fait plus d’une ponte dans les poudriers, fi le mâle eût été des Insectes. IX. Menu 3 81 d'humeur à les y chercher, & fi elles eufïent voulu le louffrir. Les œufs de diverfes efpeces de mouches à deux ailes, ont des figures différentes de celles des œufs de nos groffes mouches bleues, & de celles des œufs des excré- mens de cochon, & ont fouvent des figures fort jolies: mais il n’efl pas toujours aifé, ou plutôt il l’eft rarement, de pouvoir deviner les raifons pour lefquelles les formes qui ont été données aux uns, font très-différentes de celles qui ont été données aux autres. J’ai vu quelques djreces de mouches qui attachoient des œufs oblongs contre les parois de baquets pleins d’eau; ce qui les déterminoit à les placer là, n’efl pas ce qui m’embarraffoit,& nous en verrons affés la raifon ailleurs. Les œufs de celles d’une efpece, étoient Amplement oblongs & très-liffes. Ceux* * p! -^6. fig. des mouches d’une autre clpece, oblongs comme les 19 précédais, avaient d’un côté, de celui qui ne devait pas toucher le baquet, de jolies cannelures*, très-bien * Fier. ig.< marquées, & parallèles les unes aux autres, l’autre côté n’en avoit point. Ce que ces œufs officient de plus re¬ marquable, c’efl que tout du long, des deux côtés dia¬ métralement oppofés, ilregnoit une lame mince *, dont * Fig. 19 le bord extérieur étoit bien coupé en ligne droite; au 1 d moyen de ces deux bandes, l’œuf fembloit comme en¬ cadré dans un cadre de papier. Il y a apparence que ces bandes aident à tenir l’œuf mieux coilé contre le baquet, & que les œufs qui n’en ont point de pareilles, fortent du corps des mouches enduits de plus de colle, ou enduits d’une colle plus forte que celle des autres. Enfin il y a des œufs qui demandent à être attachés, & folidement, pour que le ver puiffe parvenir à les ouvrir; & il y en a qui, pour tenir contre les mouvemens que le ver fait alors, demandent à être attachés plus folidement que d’autres. Bbb ij ♦ PI. 26. fi 21 . ♦ Fig. 2 & 23. ♦ Fig. 2: ♦ Fig. 23. ♦Fig. 15. * Fig. 1 & 17. [• * Fig. 1 : ♦ Fig. 1 A. b. 3S2 MEMOIRES POUR L’HiSTOIRE g. Une mouche * d’une grandeur médiocre, d’une grandeur qui eft au-deffous de celle des mouches bleues de la viande, & qui eft une efpece du meme genre, dont le corcelet eft gris-brun, parce que des taches cen¬ drées y font jettées fur un fond prefque noir, cette mouche, dis-je, dont le corps eft prefque noir, dépofe 2 auffi fur la viande des œufs*, dont la figure eft différente de celle des œufs des grandes mouches bleues. Ils font pfiis courts que ces derniers, & plus renflés au milieu qu a I un & à l’autre de leurs bouts. Comme ils font un peu >. applatis, on peut leur diltmguer deux côtés, l’un * plus arrondi, plus convexe , eft tout couvert de cannelures très-fines, & l’autre * plus applati, n’a que cinq groflès côtes, & par conféquent cinq cannelures. Les vers qui fortent de ces œufs, font afles lemblables, au premier coup d’œil, à ceux des grades mouches bleues, & je n’ai point cherché à appcrcevoir les différences peu frappan¬ tes qui pourraient être entre ceux de cette elpece & ceux de l’autre. ?. Souvent j’ai trouvé fur des tiges de gramen des œufs *, dont je ne parvenois à bien voir la figure, qu’avec le fecours de la loupe; ils avoient celle d’une navette ou 6 d’un petit bateau, * ou plûtôt d’un petit vaiffeau extrême¬ ment blanc, dont le milieu du tillac ferait plus relevé que les bords du vaiffeau. Les endroits où ils font placés prouvent la prévoyance de la mouche qui les pond ; cette mouche m’eft inconnue, je fçais feulement quelle vient 3 . d’un ver blanc * à tête variable, armée de deux crochets. II eft ailé de remarquer fur certaines tiges de gramen, j. des plaques jaunes *, affés épaiffes, & qui, fi on les exa¬ mine de près, ne femblent être qu’un amas d’une infinité d’œufs extrêmement petits. Mes obfervations ne m’ont encore pû apprendre fi ces taches ne font réellement des Insectes. IX. Mem. 383 qu’un affemblage d’œufs, ou fi elles font une maladie de la plante; mais j’ai prefque toujours trouvé fur ces taches les petits œufs en forme de bateau, dont je viens de par¬ ier, 6c j’y en ai trouvé tantôt plus 6c tantôt moins; quel¬ quefois plus d’une vingtaine fur la même plaque ,& quel¬ quefois feulement cinq à fix; quelquefois j’ai trouvé les œufs fermés ,6c quelquefois je les ai trouvé ouverts. Lors¬ que les œufs étoient ouverts, j’ai vû que la plaque jaune étoit rongée * en divers endroits, 6c quelle i’étoit par * de petits vers blancs * à tête variable, 6c armée de deux 1 crochets, mais je n’ai pû parvenir à avoir la métamor- phofe de ces vers. Tous les accouplemens que j’ai vû des mouches à deux ailes de la première claffe, ont été commencés de la même manière; j’ai toujours vû le mâle voler ou mon¬ ter fur le corps de la femelle, 6c recourber fon derrière pour parvenir à toucher avec lôn bout le bout du derrière de la fèmelle. Les mâles de pluficurs cfpeces relient dans cette polition tant tjue l’accouplement dure; ceux de quelques autres efpeces demeurent unis à leur fémeilc fans relier fur fon dos. Après que l’accouplement efl affermi, le mâle fe place fur lemêmeplan où efl la fèmelle,alors les têtes des deux mouches font tournées vers des côtés oppofés. Parmi les mouches à deux ailes, comme parmi les au¬ tres infeéles, le mâle efl plus petit que la fèmelle, c’efl la réglé générale, à laquelle le mâle de la mouche qui pond des œufs à ailerons dans les excrémens, efl une excep¬ tion; il furpaffe, ou au moins il l'emble furpaffer la fe¬ melle en grandeur; le volume de fon corps efl eonfidé- rablement augmenté par les poils jaunes & allés k ngs qui Je couvrent; le corps de la fèmelle n’a pas, à beaucoup près, autant de pareils poils. C’efl encore une réglé & plus générale, elle l’eft pour B b b iij 384 MEMOIRES POUR L’HiSTOIRE unîtes les efpeces d’animaux, que le male aille agacer la femelle, qu’il faffe les avances, les premières carelies ; ceux des mouches à deux ailes la fuivent. Ils ont tous à leur der¬ rière des parties propres à faifîr celui de la femelle, des parties qui les mettent en quelque forte en état de s’en rendre maîtres. Mais dans certaines efpeces la mouche femelle qui fouvent a femblé repouffer le mâle, non- feulement ccde lorfqu’il s’elî emparé d’elle, comme cè¬ dent en pareil cas les fémelles des autres animaux, elle achève elle-même l’opération. Les fémelles, & fur-tout celles de la plupart des efpeces de la claffe que nous exa¬ minons , peuvent allonger beaucoup leur partie poflé- *PI.27. fig. rieure * par-delà le dernier de leurs anneaux, elles peu- am fm! 8 ’ vent faire fortir de leur corps une efpece de cône charnu compofé de quatre, ou meme de cinq anneaux : l’anus * Fig. îy.h. efl au bout du dernier *, & je crois que l’ouverture qui caraéïërife la fémelle, efl en deffous la jonètion de celui-ci avec celui qui le précédé. Le dernier anneau a de chaque * Fig. 17 & côté une petite languette prefqu’écailleufe * ; ces deux pie- 7 ces écailleufes femblent être faites pour former une pince. e 3 e, ' 0 7 Quoi qu’il enfoitde cette pince, il y a long-temps qu’on fçait, & Ariflote la dit, mais trop généralement, que la mouche fémelle , ou au moins la mouche fémelle de cer¬ taines efpeces, introduit dans le corps du mâle cette par¬ tie charnue & conique, au bout de laquelle efl fon anus. C efl ce qu’il efl aifé de vérifier fur les mouches les plus communes en automne dans nos appartemens, elles s’y accouplent par-tout, & fouvent fur les carreaux des vitres : qu’on tue un couple de celles qui font unies, en pref- fantfubitement avec deux doigts leurs parties antérieures; après leur mort elles refieront encore jointes enfemble comme elles l’étoient pendant leur vie. Si alors 011 les fépare doucement, on verra fortir du corps du mâle une des Insectes. IX . Mem . 385 aiïcs longue portion de la partie conique de la femelle. On 11e craindra pas d’avoir pris la femelle pour le mâle, c’eftfur quoi il ne peut y avoir d’erreur, parce quec’eft lin temps où la femelle a le ventre plein d’œufs. Ce qui ell encore très à remarquer ici, & qui nous montre combien l’Auteur de fi petites machines s’eft plù à en varier les confîruéfions, c’eff que ce n’cft pas par l’anus du mâle, comme on paraît l’avoir cru, que la fe¬ melle fait entrer fa partie poltérieure dans le corps de fou mâle. Les fémelles des autres animaux ont une ouverture deftinée à recevoir la partie qui doit féconder leurs œufs, c’clt le mâle de nos mouches qui a une ouverture parti¬ culière , & placée comme i’eft dans les autres inieétes celle de femelle ; cette ouverture de la mouche mâle a été faite pour recevoir & laiffer introduire dans fon corps la partie poltérieure de la mouche fémellc. Si on obferve le derrière d’une mouche mâle de l’ef- pece fi commune en automne dans nos maifons, & fur- tout fur nos tables, on verra au bout de l’échancrûre du dernier anneau, comme deux petites coquilles brunes, ou plutôt comme deux paupières tantôt écartées l’une de l’autre *, tantôt appliquées l’une contre l’autre, & fépa- *Pi. 2S. %. rées par une fente; elles font deftinées à recouvrir l’anus *; ^ b ' un collier écailleux ou au moins cruftacée *, forme le con- * p/ d , tour de l’enceinte dans laquelle font les coquilles. Au deffous de ce collier il femble y en avoir un fécond *; * Fig. 4 .c,c. mais fi on y regarde de plus près, on voit que celui-ci ne remplit pas toute la circonférence*. Il efl ouvert fous le * Fig. 5. c, c -, ventre, c’efl une efpece de cerceau qui a été coupé,& de la circonférence duquel une portion a été retranchée. Les deux bouts de ce cerceau font dentelés, & paroiffent pro¬ pres à former une pince, avec laquelle le mâle peut pren¬ dre le derrière delafémelle. E11 continuant de confidércr MEMOIRES POUR L’HiSTOIRE le bout polfèrieur du mâle du côté du ventre, on remarque * pi. 28. fig. aifément fur le premier anneau une plaque * qui a fon ori- 4, 5 & 6. gj ne à celle de cet anneau ; elle eft plus brune & l'emble plus dure que le relie, elle s’élargit en s’approchant de l’anus ; les deux angles s’élèvent plus que le relie, & ils forment deux picquans, avec lefquels le mâle peut encore arrêter le corps de la fémelle. C’elt où finit cette plaque écailleufe, vïs-à- * u. vis le milieu de fon bout, qu’efi fituée la fente * deltinée à recevoir la partie poftérieure de la femelle. Quand on prclfe * Fig. 6. le corps du mâle, on rend cette ouverture fenfible *, par¬ ce qu’on oblige des parties contenues dans le ventre à chercher à s’échapper, & à fortir par le premier endroit qui le leur permet. On fe tromperoit cependant fi on jugeoit qu’elle a été faite pour iailfer fortir des parties propres au mâle, elle l’a été pour Iailfer entrer la partie poftérieure de la fémelle. C’elt de quoi il elt ailé de fe convaincre, lorfqu’après avoir tué deux mouches accou¬ plées, on vient à les fcparer l’une de l’autre, car c’elt par cette ouverture qu’on retire peu à peu la partie charnue de la fémelle hors du corps du mâle. Des voiles trop épais cachent ce qui fe palfe dans l’intérieur du mâle, on ne fçauroit y voir agir la partie avec laquelle il féconde la fémelle. On peut obliger une partie, qu’on pourrait foupçon- ner être la partie qui caraéférife le mâle, de fe montrer en dehors de l’anus.Quand on ne prelfe que jufqu’à un certain point le derrière du mâle, on fait Amplement fortir par l’a¬ nus un peu de matièregrifâtre& liquide, un peu d’excré¬ ment; prelfe-t-on davantage, on voit paraître en dehors a F5g. 5. a. comme le bout d’une efpece d’inteftin aveugle * de cou¬ leur jaune; la prelfion étant encore un peu augmentée, cette efpece de bout d’inteftin prend une figure fphéri- que, ou qui approche de la fphérique. De cette efpece de boule des Insectes. IX. Mem. 387 de boule jaune fortent les unes après les autres quatre cornes coniques * qui ont quelque refTemblance avec * PI. 28. fig. celles des limaçons; louvent il y en a quelques-unes qui Vi¬ te meuvent, en s’inclinant en diiférens fens, en fe recour¬ bant, & enfiuite en fe redreiïant; celles-ci femblent alors être de petits vers. Il y a grande apparence que ces petites cornes agiffent dans certains cas dans le corps de la mou¬ che mâle, comme elles agi dent alors en dehors, & il et naturel de foupçonner que c’cfl contre la partie pofié- rieurede la femelle qu’elles doivent agir, fur-tout quand on a vû des cornes qui leur femblent analogues, contri¬ buer à la fécondation des œufs de mouches à quatre ailes, beaucoup plus grandes que nos petites mouches des appartemens. Nous nefçaurions actuellement infifter fur cet exemple, fans nous jetter dans une trop longue digreffion. Mais il y a beaucoup de faits qui ne permettent pas qu’on juge ces cornes de l’intérieur de nos petites mou¬ ches, deftinées à l’ufage pour lequel il fembloit d’abord fi naturel de les croire faites. Les mâles des grolfes mou¬ ches bleues ont une partie ainfr armée de cornes char¬ nues, c’eft même d’après cette mouche que la figure 13 a été delfinée; cependant, comme nous l’allons dire, la fémelle de cette mouche n’infére point fa partie pofté- rieure dans le corps du mâle. Enfin j’ai fait lortir du der¬ rière de quelques mouches femelles, une boule charnue chargée de cornes. A quoi donc fervent ces cornes mo¬ biles, ne feroient-elles que des appendices del’inteftin.du rectum! je lailferai encore bien des chofes à démêler fur tout ceci. Le mâle de la mouche qui fait des œufs à ailerons, & les mâles de plufieurs autres mouches, dont nous par¬ lerons dans la fuite, ont au delfous du derrière deux Tome IV. . C cc * PI. 28. % 7. c, c. 6 -//. 388 MEMOIRES POUR LHlSTOIRE crochets * écailleux, bruns, tournés l’un vers l’autre, qui font enfemble une forte pince, & bien propre à faifir le derrière de la femelle. Si on preffe le derrière de cette der¬ nière mouche, on l’oblige d’allonger une partie char- * Pf 2 7 - fi s- nue * au bout de laquelle efl une ouverture deftinée à recevoir la partie qui caraéférife le mâle. Nous venons déjà de faire entendre que l’accouple- ment de toutes les mouches à deux ailes, ne s’accomplit pas de la même manière, je veux dire qu’on ne doit pas croire que toutes les fémelles jouent dans cette opération un rôle auhi différent de celui des fémelles des autres animaux, que l’eft celui des mouches fémelles commu¬ nes dans nos maifbns. Si on ohferve à la loupe la partie pofiérieure d’un mâle d’une groiTe mouche bleue, dont on aura preffé le ventre, on jugera que tout fe doit paffer dans fon accouplement, plus conformément aux accouple- mens des autres animaux. Après avoir vû que fon anus efl logé, comme celui de la petite mouche des apparte¬ nais, dans l’échancrure du dernier anneau, & de même re¬ couvert dedeuxefpeccs de coquilles,on pourra remarquer quatre corps longuets *, comme quatre petites baguettes noires, chargées de quelques poils-, & raffemblécs en un paquet, qui tirent leur origine d’au-deffus de l’anus, & fe couchent contre le ventre; plus on preffe le ventre, & plus on oblige ces petites baguettes à s’élever & à s’écar¬ ter les unes des autres. Leur ufàge paroît être analogue à celui des crochets qui font au derrière de diverfes autres mouches mâles. Si on porte la preffion au point nécef- faire pour obliger les crochets * à s’élever fuffifamment ». on fera paroître & redreffer une petite partie *, qui parla confiftance & fa figure, rcffemble beaucoup à celle qui earaélérife le mâle des papillons, & qui doit être la par¬ tie de la mouche mâle propre à féconder les œufs de la * Pf. 28. fig, 9 & 10. c. * P*S £■' c . ni. des Insectes. IX. Mem. 389 femelle. Elle efl écailleufe & couieur de marron. Sa for¬ me a des contours difficiles à décrire, & qui femblent recherchés; elle le termine par une efpece de bec * fait * PI.28.%. comme le bout d’un cure-dent. Au delfous de ce bec il X ~' L y a deux parties angulaires * qui forment deux ailerons. * m ,m. De-là jufqu’à fa baie elle a des renflemens qui forment ces contours que nous avons dit difficiles à décrire. Alfésprès de fa bafe elle paroît percée à jour; je ne crois pourtant pas quelle le foit réellement, mais je crois que la por¬ tion qui paroit percée, n’eft recouverte que d’une mem¬ brane tranfparente, pendant que le relie cft écailleux. A quelque diftance delà bafe de la même partie, on trouve quatre petits corps, deux * plus proches de l’anus, & * e. deux * plus proches de la partie antérieure. Us reffem- */• Lient allés à ces petits corps en forme d’antennes , qui font fur la trompe de la même mouche. La forme feule du corps écailleux, voudrait qu’on le prît pour la par¬ tie du mâle; mais ce qui prouve mieux qu’il l’efl , c’efl qu’après avoir preffé le ventre de la mouche, j’ai fouvent fait fortir par le bec de ce petit corps, un filet dune ma¬ tière blanche, fembiable au filet qu’on fait fortir en pareil cas de la partie du papillon mâle. Si à tout ceci on ajoute que l’on ne trouve point aux mâles de ces mouches bleues & à ceux de plufieurs autres, la fente finguliére * qui efl * F! aifée à trouver aux mâles des petites mouches brunes de ^ 6 ' nos maifons, il paraîtra décidé que l’accouplement des unes fe fait différemment de celui des autres, que l'es m⬠les de certaines mouches font fortir hors de leur corps, & introduifent dans le corps de la fémelle la partie qui la doit féconder, & que dans d’autres efpeces de mou¬ ches la fémelle efl obligée, pour fe faire féconder S’intro¬ duire fa partie poflérieure dans le corps du mâle. Si i’011 prend une fémelle, de quelqu’efpece que ce C c c ij C 03 390 MEMOIRES POUR L’HlSTOIRE foie île ces mouches, qui ait le ventre renflé & tendu, on parviendra facilement à voir, & on verra avec plaifir comment les œufs iont arrangés dans fon corps. Avec des cifeaux à pointe fine, qui font les meilleurs de tous les inflrumens pour des difleélions telles que celle qu’il faut faire ici, on coupera une partie du contour, ou tout le contour du corps de la mouche, en prenant à ia fois une portion du deflus, & une du deflousd’un ou de plufieurs anneaux. L’ouverture faite ainfi feulement d’un * PI. 2 8. fîg. côté *,fuffira pour mettre en vue les œufs, puifqu’ils occupent toute la capacité intérieure depuis l’anus juf- * a b, qu’à l’endroit * où font les facs pulmonaires. Mais pour voir à la fois les œufs qui font de l’un & de l’autre côté, après avoir coupé tout le contour du corps, on enlevera la pièce compofée de plufieurs demi-anneaux, qui cou- vroit le dos; une épingle, ou quelqu’autre outil à pointe fine, efl celui dont il faut fe fervir alors; à mefure qu’on tâchera d’enlever une portion de cette couverture, on rom¬ pra fes attaches, dont la plupart & les plus folides font des trachées; on fera enfuite en état l'oit de renverler * Fig. 3. rr. cette pièce * fur le corcelet, foit de la couper près de l’endroit où il s’unit au corps; on mettra ainfi l’intérieur * p; gi de la mouche à découvert *. Ce qui y fera le plus fenfi- • f oo, 00 . ble, ce feront deux paquets d’œufs *; on ne fera pas em- barrafle à les diflinguer du relie; ils occupent ordinaire¬ ment enfemble plus de place que n’en occupent toutes les autres parties. D’ailleurs, la figure de plufieurs des œufs efl: très-vifible; un des paquets efl d’un côté, & l’autre efl de l’autre côté vis-à-vis du précédent. Les œufs des mouches font pour l’ordinaire longuets, ceux de chaque paquet font tous parallèles les uns aux autres, Sc paroilfent très-joliment arrangés: chaque paquet efl une efpece de difque plus ou moins épais, félon que des Insectes. IX . Mem. 391 ïes ceufs font plus ou moins longs. Souvent on dérange un peu la pofition du paquet, quelqu attention qu’on ait eu en difféquant, aufli leur pofition ne paroît pas toujours précilëment la même; peut-être auffi efl-elle un peu différente dans des mouches de differentes efpeces; fouvent le paquet paroît compofé d’œufs, dont la lon¬ gueur eft à peu près perpendiculaire au ventre *,6c fou- * pi. a8.fîg. vent les œufs font tous inclinés vers le derrière, plus ou 3 * moins*. * *r lg .i&z. Quoique nous venions de donner le nom de paquet à chacun de ces amas d’œufs, nous ne voulons point du tout faire penfer que les œufs y font Amplement pofés les uns auprès des autres; ils lont contenus dans des vaif- feaux flexibles *, dont les contours, les plis de replis font * Fig. 14,, tellement difpofés *, que les œufs fe trouvent tous paralle- * Fig. 15. les entr’eux. Ces vaiffeaux font les oviduélus, nous ne biffe¬ rons pas de les appeller fouvent les ovaires. Ce que nous avons dit de la difpofition des œufs dans le corps des pa¬ pillons * , 6c de la manière dont ils font conduits julqu’à * Tomeih l’anus, peut fervir à faire entendre comment les œufs 1 7> des mouches arrivent à un femblable terme. Dans certai¬ nes mouches j’ai cru trouver de chaque côté quatre vaiffeaux ou conduits des œufs qui fe dirigeoient vers le derrière de la mouche, 6c qui, avant que d’y arriver, fe réuniffoient à un tronc commun. Les ovaires des mou¬ ches de différentes efpcces, ont des quantités d’œufs fort différentes; on en peut compter plus d’une centaine à chaque ovaire de certaines mouches, 6c il y a telles mou¬ ches dont chaque ovaire n’en a que huit à dix. Mais de toutes les mouches que j’ai ouvertes, celle qui en a le moins, efl la groffe mouche * qui vient du ver jaune * Pî.26.%, des bouzes de vaches. Dans toutes celles que j’ai ouver- I0, les, je n’ai jamais trouvé que deux œufs, un de chaque Ccc iij- 392 MEMOIRES POUR L’HlSTOIRE côté. Il elt vrai que ces deux œufs font très-gros, & qu’iî ne feroit pas poffible au corps de la mouche d’en con¬ tenir même cinq à fix d’un pareil volume. Cette mou¬ che ne feroit-elle dans fa vie que deux œufs! il efi plus vraifemblable que c’efi que fa ponte dure long-temps, & que fes oviduélus, comme ceux des poules, le rem- plilfent journellement ou de temps en temps, de nou¬ veaux œufs, qui prennent les places lailfées par ceux qui ont été pondus. C’efi: quand on ouvre certaines mouches fémelles dans un temps où leur ponte efi prochaine, qu’on leur ttouve deux paquets compofés chacun d’un grand nom¬ bre d’œufs oblongs; ouvertes dans un temps plus éloi¬ gné de la ponte, elles n’ont que deux paquets qui font compofés d’un beaucoup plus petit nombre d’œufs, & d’œufs qui 11e différent pas fenfiblement en grandeur de ceux des plus gros paquets. Mais on découvre alors élans le corps de ces mouches, tout proche des poul¬ inons , plufieurs vaiffeaux dans lefquels font de petits grains ronds, & pofés à la file les uns des autres; ces grains font des œufs encore très-petits. Les vaiffeaux où ils font contenus font les vrais ovaires; les œufs y doivent prendre leur accroiffement avant que d’être joints à l’un ou l’autre des paquets; lorfqu’ils y font réunis, ils font apparemment dans les oviduélus. Mais il refie bien des chofes à découvrir fur les endroits où ces œufs croiffent, fur la manière dont ils croiffent, & dont ils font con¬ duits des ovaires jufqu’à l’anus. Ce font des recherches auxquelles je n’ai pu donner le temps quelles euffent demandé. des Insectes. IX. Mem . 393 EXPLICATION DES FIGURES DU NEUVIEME MEMOIRE. Planche XXVI. T 1 A Figure première efl celle d’un ver, de l’efpece du¬ quel j’en ai eu des centaines, & même des milliers dans un grand poudrier qui avoit été rempli d’abeilles mortes. Ce ver efl blanc &. très-tranfparent. 11 y a en deffous du corps des crochets très-courts & roux qui fuppléent aux jambes. La Figure 2 repréfente en grand la partie antérieure du ver de la figure première. Ses deux crochets paroif- fent en c. En f eft un de fes deux fligmates antérieurs» / f, une des greffes trachées des côtés qui tire Ion ori¬ gine du ftigmate f. La Figure 3 montre le bout poflérieur du même ver. Ce bout eft plat & circulaire. f,f, les deux fligmates poflérieurs. La tranfparence de la peau permet de voir les trachées qui font ramifiées dans le corps, & qui fe rendent aux fligmates. La Figure 4 fait voir dans favraye grandeur, la coque que le ver s’efl faite de fa peau pour s’y métamôrphofèr. La Figure 5 eft celle de la mouche foriie de la coque de la figure 4, elle a des antennes prifmatiques; elle eft brune, & de l’efpece de ces petites mouches qui nous in¬ commodent en été dans nos appartemens, ou d’une efpece très-femblable. Les Figures 6, 7, 8, 9 & 10 fervent à la fuite de l’hi- ftoire du ver jaune des bouzes de vaches, qui eft repré- fenté pl. ï 2. fig. 12. La Figure 6 eft la partie antérieure de ce ver grofïL €, foa crochet, f, un de fes fligmates antérieurs. -94 Mémoires pour l’Histoire La Figure 7 repréfente en grand la partie poftérietirë du même ver .f, f, Tes ftigmates poftérieurs. a, plis fous lequel eft 1 anus. La Figure 8 montre très en grand le bout de la co¬ que faite de la peau du ver. Ce bout eft comme bor¬ dé par une lame à neuf pans, f />, p o, o r, r f, &c. côtés ou pans de cette lame, a & a marquent deux des arrêtes, dont une fe trouve à la jonétion de deux côtés. f, f, les deux ftigmates poftérieurs, dont la forme eft plus diftinéle ici que fur le ver même, figure 7, parce qu’ils font plus grolfis. On voit au milieu de chacun d’eux un petit mammelon qui n’eft pas fenfible dans la figure 7. La Figure 9 donne dans fa grandeur naturelle, celle de la coque entière dont le bout eft dans la figure 8. Cette coque eft quelquefois d’un brun preique noir, a, Ion bout antérieur, p 0, l'on bout poftérieur. La Figure 10 eft celle de la mouche qui fort de la coque de la figure 9 -ff la partie de chaque aile qui eft de couleur feuille-morte. Le refte de chaque aile, quoi¬ que repréfenté plus brun dans cette figure, eft plus tranf- parent. La Figure 1 1 repréfente un morceau de viande ré¬ duit en uneefpecede rezeau par les vers qui l’ont mangé. On voit des coques de vers entre plufieurs des mailles de ce rezeau. La Figure 1 2 eft celle de trois œufs d’une grofte mouche bleue, deiïinés de grandeur naturelle. La Figure 13 repréfente un des trois œufs de la figure précédente, extrêmement groftï,& vu du côté où il a une languette ou arrête, a dd, cette languette qui a deux branches en d d. La Figure 14 eft encore celle de l’œuf de la figure 13, mais des Insectes. IX. Mem. 393 mais prife dans un temps où le ver étoit prêt d’en lor- tir. Au travers de la membrane de cet œuf, on diftin- gue des traits circulaires, parallèles entr’eux,& aux deux bouts de l’œuf; ces traits marquent les anneaux du ver. En d d les deux parties de la languette font plus écartées l’une de l’autre que dans la figure 1 3, parce qu’il fe fait là une ouverture propre à laiffer fortir lever. La Figure 1 5 repréfente une portion d’une tige de gramen ; les parties e a, b f de cette tige font vertes à l’ordinaire; mais la partie a c efi jaunâtre, parce qu’elle efi recouverte d’une efpece de croûte jaune, qui femble uneépaifi'e moififiure. En c d, la croûte efi plus brune qu’ailleurs, & rongée en partie, o, œuf dépofé là par une très-petite mouche. La Figure 1 6 fait voir l’œuf marqué c dans la figure précédente, grofii au microfcope, & de côté, c d, por¬ tion de la tige fur laquelle efi cet œuf. La Figure 17 montre l’œuf des figures précédentes, encore grofii au microfcope, Sc dans une autre vûe,fur la portion de tige de gramen, c d. La Figure 18 efi celle du ver qui fort de l’œuf des figures précédentes, très-grofii. La Figure 19 repréfente un œuf qui a été dépofé par line mouche contre les parois d’un baquet, & proche de la furface de l’eau contenue dans le baquet; il efi grofii par une forte loupe, c e f ^efpece de cadre dans lequel l’œuf femble enchafie. Le côté de l’œuf qui efi en vûe ici, efi plein de cannelures. Dans la Figure 20 le même œuf efi vû du côté op- pofé à celui où on le voit dans la figure 19, du côté qui 11’efi pas cannelé. La Figure 21 efi celle d’une mouche du même genre que la mouche bleue de la viande, & qui de même vient Tome IV. . D d d 39 6 MEMOIRES POUR L’HiSTOiRE d’un ver carnacier qui s’enfonce dans ia chair qu’il ronge, de qui, huit à neuf jours après fa nailfance, entre en terre pour s’y métamorphofer. La Figure 22 & la figure 23 repréfentent un des œufs de la mouche précédente, grolfi par une forte loupe,de vû par-delfus dans la figure 22, de par-deffous dans la figure 23. Planche XXVII. La Figure première eft celle d’une mouche mâle qui fe tient volontiers fur les excrémens de divers animaux, de même fur ceux des hommes, de grandeur naturelle, mais une des plus grandes de Ion efpece. La Figure 2 de la figure 3 repréfentent la mouche de la figure première, groffie; l’une la fait voir de côté, de l’autre la fait voir par-delfus. Ci ttederniére figure apprend que les ailes fe croifent de manière qu’une des deux eft prefque cachée par l’autre. Les Figures 4, de 5 montrent l’une de côté, de l’autre par-delfus, la mouche fémeile de la mouche mâle des figures précédentes. La Figure 6 efi celle de la partie poftérieure de la mouche fémeile,deffinée à une très-forte loupe, dans le temps où la prelfion force la partie ail, à fè montrer. Cette partie ell celle qui caraélérife la fémeile. C’elt une efpece de canal dont le bout ell évafé, de plus ou moins allongé, de plus ou moins ouvert, félon qu’il a plus ou moins de longueur. Dans la figure 7 la mouche de la figure première ell accouplée avec celle de la figure 4. La Figure 8 fait voir quatre œufs 0 de la mouche pré¬ cédente , picqués dans des excrémens. La Figure 9 fait voir plus en grand de en plus grand des Insectes. IX . Mem . 3 pé¬ nombre, des œufs tels que ceux de la figuie 8, pitqués dans une lemblable matière, dans laquelle ils nelonten¬ foncés qu’en partie, o, o, 0, quelques-uns de ces œufs. Dans la Figure 10 lont encore repréfentés des aufs tels que ceux des figures précédentes; ils paroi fient plus gros, non pas feulement parce qu’ils y lont plus grandis, mais fur-tout parce que ce font des œufs qui ont été ouverts, comme dépliés &. étendus par les vers qui en font fortis. La Figure 11 niontre en entier un des œufs qui, dans les figures précédentes, font cachés en grande partie dans des excrémens. /», le bout pofiérieur de l’œuf p, o, la par¬ tie qui doit être enfoncée dans la matière molle, c, c, les deux ailerons ou cornes qui arrêtent la partie fupérieure de l’œuf, a, bout de l’œuf qui efi entre les ailerons. Dans la Figure 12 l’œuf de la figure 1 1 efi mis dans une autre vûe. c, c , les cornes./», le bout pofiérieur. La Figure 1 3 efi celle d’un ver de truffe qui a pris tout fon accroificment. La Figure iq. fait voir le ver de truffe,groffi.y^ f, les fiigmates pofiérieurs. a, les fiigmates antérieurs, e, les ti¬ ges & étuis des tiges des crochets vus au travers du tranfi parent de la peau, c c , les crochets. , La Figure 1 y efi celle du ver de la figure 13, qui s’efi fait une coque de fa peau. La Figure 16 repréfente la coque de la figure 1 y ex¬ trêmement grofiie. f, f, les fiigmates pofiérieurs. d a o a d bout antérieur qui efi applati. a d, a d, deux efpe- ces de cordons, a, a, les fiigmates antérieurs. 0, refte de la cavité qui efi formée par des plis lèmblablcs à ceux qui ferment l’ouverture d’une bourfe. La Figure 17 fait voir par-deffous & très en grand, la partie poftérieure d’une petite mouche femelle, de l’efpeçe D dd ij 3 9 3 Mémoires pour l’Histoire de celles qui nous incommodent dans nos maifons pen¬ dant l’automne, q q , le dernier des anneaux du corps. a a, b b, 11 , h, & c. partie charnue & blanche , ordi¬ nairement renfermée dans le corps, & que la mouche en fait fortir quand elle veut s’accoupler; en preiïant le ventre, on force auffi cette partie de paraître. a a, b b; b b, pp ; PP’ e e > e e > ë ë> ëé’ II’ l es anneaux charnus qui compofènt cette partie, c; f; Il filets noirs qui proba¬ blement fervent à faire rentrer les anneaux les tins dans les autres, h le bout de cette partie qui efi ouvert en demi- tuyau , & qui reçoit la partie du mâle, m, m, efpeces de petites palettes. En p p, g g, h, on voit des ceintures ou des touffes de poils. La Figure 18 montre par-deflus, la partie qui efi vue par-defious dans la figure précédente, mais un peu moins grolfie Ôc moins allongée, q q, le dernier anneau écail¬ leux. d d, filet brun à deux branches, ou fourchu, i, i; k, k, deux paires de filets bruns, h, le bout de la partie pofiérieure qui efi creux dans la figure 17. m, m } les deux palettes chargées de poils du côté qui efi ici en vûe. Planche XXVIII. Les Figures 1 ,-2 & 3 de cette planche, font defiinées à Lire voir quel efi l’arrangement des œufs dans le corps des mouches à deux ailes de plufieurs efpeces, & à faire voir que malgré la grande quantité qu’il y en a dans le corps, les deux facs pulmonaires y confervent un grand vuide. La figure première repréfente en grand le corps d’une grolfe mouche bleue de la viande, vû de côté, & qui a été ouvert du côté qu’il efi vû, par des coups de cifeaux qui ont emporté des portions d’anneaux. En c le corps étoit joint au corcelet. a, l’anus, d efi le deflusdu corps. des Insectes. IX. Mem. 399 m marqué cette efpece de cloifon qui fe trouve faite au milieu du corps, par les deux lacs pulmonaires, appli¬ qués là l’un contre l’autre. La capacité qui eh de cha¬ que côté dans le corps depuis c julqu’en b, n’eh prefque remplie que d’air. Depuis b jufqu’en a les œufs parodient couchés & empilés dans la partie qui a été mife à dé¬ couvert. La Figure 2 fait voir le corps de la même mouche, mais elle le fait voir par-delfus. a, l’anus, c, l’endroit où le corps fe joint au corcelet. r, r marquent des relies d’an¬ neaux, les parties fupérieures de tous les autres ayant été emportées, m, m, la cloifon faite par l’application mu¬ tuelle des deux facs pulmonaires, c m b, c m b, les deux cavités des facs pulmonaires, qui ne font remplies que d’air, o, o, 0, les œufs. La Figure 3 elt encore celle du corps d’une de ces mouches, mais dont la partie fupérieure a été mife preff qu’entiérement à découvert, r, r, une portion des anneaux qui a été relevée, & qui ell jettée en dehors. p,p, les facs pulmonaires ou les poulmoms. m, l’endroit du milieu du corps où ils s’appliquent l’un contre l’autre. 00, 00, les œufs, i, canal des intellins qui fépare les ovaires. Les Figures 4, y & 6 repréfentent en différais états, mais toûjours par-deffous, & très-groffi, le bout polté- rieurdu corps de la mouche, qui ch le mâle de la fémelle dont les parties pohérieures font delfinées dans les figu¬ res 17 6 c 18 de la planche 27. La Figure 4 montre le derrière de cette mouche mâle dans l’état où il eh lorfque la prelfion agit très-peu fur le ventre, a, l’anus où l’on voit une membrane blanche. b, b, deux membranes en forme de coquille ou de pau¬ pières. c, c, deux crochets écailleux avec lefquels le mâle faifit le bout du derrière de la fémelle. Entre les deux D d d iij 400 MEMOIRES POUR L’HISTOIRE crochets c c,& les paupières b b eft une ei'pcce de collier cruftacée q, il elt marqué d d, fig. 5, il forme le con¬ tour de l’ouverture, p p, plaque écailieufe terminée en c roi (Tant, dont les pointes peuvent encore fervir à accro¬ cher la partie poflérieure de la femelle. 11 marque près du bord du croiffant, l’endroit du mâle qui a une ouverture deftinéc à recevoir la partie de la femelle, marquée m m, h, 4 g g> à’c. fig. 17 & 1 H.pl. 27,& à la laiffer introduire dans le corps du mâle. La Figure 5 repréfente le derrière de la mouche mâle dans un état où la preffion des doigts agit fenfiblement fur le ventre, a, velfie qui s’élève alors, c, c, les deux crochets écailleux qui alors ne fe trouvent plus couchés autour de l’ouverture poflérieure. d d, collier crufiacée qui entoure l’ouverture poflérieure. Les paupières b b qui paroiffent figure 4, fe font plus écartées l'une de l’autre pour laiffer fortir la velfie a , & ont difparu. p,p, la pla¬ que échancrée en croiffant. u, l’ouverture du mâle defti- née à recevoir la partie poflérieure de la fémelle, cette ouverture eft plus fenfible ici que dans la figure 4, quoi¬ qu’elle foit entourée de chairs blanches. La Figure 6 eft celle du derrière d’une mouche, dont le ventre a été encore plus preffé que le ventre de celle de la figure 5. a velfie blanche, qui eft plus groffe que dans l’autre figure, c, e, les crochets. p,p, plaque en croif¬ fant , qui ici s’eft écartée des crochets, u, chairs blan¬ ches que la preffion force de fortir par l’ouverture defti- née à laiffer entrer la partie de la fémelle. La Figure 7 eft deffinée d’après le bout poftérieur du corps de la mouche mâle de la pl. 27. fig. 1, 2 & 3, vue du côté du ventre, c , c, les crochets avec lefquels le mâle fai lit le derrière de la fémelle. a, velfie que la preffion fait fortir. des Insectes. IX . Man . 40 ï La Figure 8 fait voir en grand & par-deffous, le bout poftérieur du corps d’une mouche femelle , qui eft la groffe mouche bleue de la viande, a a, b b, c c, d d, la partie que la prefïion fait fortir hors du corps; les an¬ neaux dont elle eft compofëe, ont des plaques brunes, dont l’ufage eft apparemment fembiable à celui des filets bruns des anneaux des fig. 17 & 18. pl. 27. d d marquent un endroit où eft une petite ouverture rebordée, qui pourroit être celle qui caradérife la femelle, e, e, elpece de pince qui termine cette partie. La Figure 9 repréfente le bout poftérieur du corps de la grofTe mouche bleue & mâle dans l’état ordinaire. En c font des efpeces de crochets ou de baguettes qui alors ne font aucunement vifibles. La Figure 10 nous montre le bout poftérieur de la mouche dont il vient d’être parlé, dans un temps où les doigts qui prefTent le ventre, ont forcé des efpeces de crochets à fe montrer ; alors on en voit quatre en c. La Figure 11 eft encore celle de la partie poftéricure de la figure 1 o, mais fur laquelle la preffion a agi plus fortement. En a eft l’anus, c, les quatre crochets, m, la partie qui caradérife le mâle, e, f, quatre corps plus gros vers leur bout qu’à leur origine, placés affés près de la bafe de la partie du mâle. Dans la Figure 12 on voit de face la partie du mâle, qui eft vûe de côté, & marquée m dans la figure 1 1.4 le bout de cette partie qui eft fait en quelque forte en bec de plume. La Figure 1 3 fait voir le bout poftérieur de la même mouche encore dans un autre état, dans celui où la pref¬ fion a fait fortir de l’ouverture marquée a figure 1 1 , un corps charnu qui a une forme de veffie. a, ce corp.s.y^ f, f, f, fes appendices ; il en montre fouvent quatre, & 402 MEMOIRES POUR L’HiSTOIRE quelquefois peut-être un plus grand nombre. Ces appen¬ dices qui ont des figures de cornes, font mobiles. On remarquera les cannelures traniverfales qui font fur la veffie a, elles finiffent avant que d’arriver au milieu, c, les crochets écailleux. La Figure 14 repréfente en grand une portion d’un vaiffeau dans lequel des œufs font contenus; le vaiffeau eft ici étendu en ligne droite, a b, b c,c d, d e, quatre œufs. Dans la Figure 1 5 la portion de vaiffeau qui eh éten¬ due dans la figure 14, eft repliée. Les quatre œufs a b } bc,c d, d e, y font prefque parallèles les uns aux autres. Il eft aifé d’imaginer que fi ces œufs étoient rapprochés les 11ns des autres jufqu’à fe toucher, & que fi les coudes l, c,d étoient faits d’une membrane à peine vifible, à caufe de fa grande tranfparence; ces œufs, quoique con¬ tenus dans un vaiffeau, fembleroient fimplement pôles les uns contre les autres, comme ils le paroiffent dans les figures 1, 2 & 3. DIXIEME Fl ■ 2 6 ■ pcup. y. 07. de lïtu>'l~ desIrze’eetee . Tom . q . Ft $3 ^■4f3£iSi>- s Fuf -2 Fu> ■ I. ; F&J & PI i 6 ■ pn*t ■ 4.' a Aient ç de Ifturi (U* Insectes Tom ■ 4 Put 1 Fia 4 Fut 3 Pu? é Fyj Fia 13 ,0 ' qui fuit tout le contour du corps, ou qui le fuit autant qu’il eft poffible, en laiffant feulement près du corcelet une cavité alfés petite qui doit être remplie par les lacs pul¬ monaires. En continuant de confidérer ce cordon, 011 reconnoît que le tour qui d’abord a paru le plus fenfible, n’cft pas le feul de ceux qu’il fait, qu’il eft le dernier de plufieurs autres ; que le cordon eft tourné en fpirale : on compte affés aifément cinq tours de celle qu’il décrit, dont le centre eft vers le milieu du corps, 6c marqué par un petit vuide. Ce que font la mouche ovipare les ovaires ou les paquets de vaiffeaux dans lel'quels les œufs font contenus. des Insectes. X. Mem. 415 ce cordon i’cfl à la mouche vivipare; il efl le vaiffeau ou i’affemblage des vaiffeaux dans lelquels les embrions, les fœtus & les vers font renfermés, il cft la matrice de la mouche. Qu’on 11e l’imagine pas iiffe, il y paroît un tra¬ vail qui détermine à le regarder avec plaihr. Dans quelques endroits ce cordon efl rempli de petites boffes, de petits reliefs, dont la bafe eft circulaire; dans d’autres on voit des cannelures couchées parallèlement les unes aux autres; en certains endroits ces cannelures font en forme d’anneau, Si dans d’autres elles font dirigées obliquement comme les fibres d’une corde. En un mot,ce cordon paroît par-tout très-ouvragé, Si différemment ouvragé en différens en¬ droits. Ses plus grands tours, fes tours extérieurs font grifâ- tres,&les intérieurs font blancs. Mais pour fçavoir Si la raifon de ces différences de couleur, Si pourquoi il pa¬ roît fi bien travaillé Si différemment en différens endroits, il faut mieux connoître fa véritable forme Si fa vérita¬ ble compofîtion, qu’on ne peut la connoître au pre¬ mier coup d’œil, & nous venons de nous arrêter à ce qu’il offre. La partie que nous confidérons, ne paroît d’abord que comme une efpece de cordon, parce qu’on la voit par la tranche, mais fi on la tire de place, fi on la dé¬ plie , on voit qu’elle efl une forte de ruban *, ou plutôt une * îame platte, mais épaiffe, Si pourtant bien plus large qu’épaiffe, Si qu’elle efl roulée comme le font ces lames d’acier, dont les montres tirent le principe de leur mou¬ vement. Tout le travail dont cette lame paroît ornée,efl dû aux fœtus qui y font, ou plutôt dont elle efl compo- fée, car elle n’efl prefque qu’un affemblage de petits vers arrangés les uns à côté des autres, Si les uns au deffus des autres, Si tous parallèles les uns aux autres, autant que les circonvolutions de la lame le permettent; ils le font au moins lorfqu’elle efl dépliée & étendue. L’épaiffeur de Fff iij PI. * Pi. 2p. il; '7. * m* 416 MEMOIRES POUR L’HiSTOIRE la lame eft précifément égale à celle d’un des fœtus. Ils ont chacun un de leurs bouts fur une de fes faces, 6 c l’autre bout fur l’autre. Ce font ces bouts des fœtus qui forment de chaque côté fur le plat de la lame les petits reliefs qui y parodient fi bien travaillés. Lorfqu’on ne voit la lame que par fa tranche, elle y femble cannelée avec bien de l’art. Les vers oblongs, prefque cylindri¬ ques, & pofés à côté les uns des autres, forment ces cannelures. On ne parvient point à mettre l’intérieur de la mouche à découvert, fans caufer quelque dérangement dans le tour extérieur de cette lame, & même dans quel- g. ques-unsdes autres tours * , 6 c c’ed de-là qu’il arrive qu’on voit en même temps quelques endroits marqués de tuber¬ cules ronds, d’autres qui ont des cannelures annulaires, 6 c d’autres qui en ont de torfes. Si on a bien ménagé tout en relevant la piece qui re- couvroit le ventre, une portion * de notre lame ou de la matrice fera relié attachée à cette piece; cette portion eft étendue en ligne droite, & il eft aifé de juger que lorfque tout étoit en place, la lame, après avoir fait fon dernier tour, après être arrivée aftes près du corcelet, prenoit fa routeen ligne droite vers l’anus, auprès duquel elle fe terminoit. Cette matrice a à peu près le même volume & les mê¬ mes dimenfions dans les deux groiïes efpeces de mou¬ ches qui ont une tache feuille-morte à l’origine de leurs ailes. Après avoir déplié celle d’une de ces mouches, je l’ai mefurée, aftes groftiérement pourtant : je lui ai trouvé plus de deux pouces 6 c demi de longueur, ce qui eft confidérabîe par rapport à la longueur du corps de la mouche qui n’a qu’environ quatre lignes. Ce 11’a pas été feulement dans la vue de connoître le rapport de la lon¬ gueur de la matrice à celle du corps, que je l’ai mefurée ; la quantité des vers qui y étoit contenue, m’a paru être fi confidérabîe, que j’ai été curieux de fçavoir en gros à des Insectes. X. Mem, 417 quoi elle pouvoit aller. Pour cela j’ai compté combien il y avoit de vers placés les uns Tous les autres dans la lar¬ geur de la lame, & j’y en ai trouvé vingt; fur une lon¬ gueur de la même lame d’environ trois lignes, j’ai compté cent vers, ainfi il y avoit deux mille vers dans cette lon¬ gueur de trois lignes. Or puifque la matrice avoit au moins deux pouces & demi de long, & quelle contenoit par¬ tout à peu près une égale quantité de vers, cette matrice qui avoit dix fois trois lignes de longueur, logeoit dix fois deux mille ou vingt mille vers. Malgré leur extrême petitefîe les vers contenus dans la matrice font ailés à reconnoître pour des vers,dès qu’ils font mis à découvert dans quelqu’endroit déchiré: avec le fecours d’une loupe forte, non feulement ondiltingue leurs anneaux, 011 voit encore mieux de petits traits noirs qu’ils ont à un de leurs bouts, à celui où elt la tête, & qu’on juge être les crochets qui font propres à tant d’ef- peces de vers de la première clalfe. Les vers qui lont dans la partie de la matrice qui elt blanche, font moins près d’être à terme que les autres. Nous ne fçaurions nous empêcher d’admirer la prodi- gieufe fécondité qui a été accordée aux mouches de cette efpece. Ce que nous devons admirer enfuite, c’eft que malgré une fécondité fi étonnante, ces fortes de mou¬ ches 11e foient pas plus communes que d’autres qui leur relfemblent, & dans les ovaires defquelles on ne trouve que deux œufs. Les vers des premières ont été deltinés apparemment à nourrir d’autres infeéîes auxquels il en échappe très-peu. On connoîtroit mal l’appareil que la nature elt obli¬ gée d’employer pour faire croître les fœtus dans le corps de leur mere, fi, fur le premier rapport des yeux, on ju- geoit que cette lame, qui occupe une fi grande partie de 41 8 MEMOIRES POUR L’HISTOIRE Ja cavité du corps des mouches vivipares, n’cft, comme elle le paroît, qu’un affemblage de vers arrangés avec beaucoup d’ordre les uns à côté des autres, & les uns fur les autres; fi on croyoit que les vers s’y touchent im¬ médiatement, qu’ils y font à nud; chaque ver y doit avoir fon enveloppe, & chaque ver l’a. Toute mince quelle efi, on parvient à la voir en différentes circonftances & par différens moyens. Lorfqu’on ouvre une mouche qui efi à terme ou proche d’y être, on détermine des vers à naître, & on voit les efforts qu’ils font pour fe tirer d’une membrane. Cette membrane qui étoit tranfparente quand elle les recouvroit, quand ils s’en font défaits, efi d’un blanc pareil à celui de ces toiles d’araignées qui vol¬ tigent en l’air dans les beaux jours d’automne, & qu’on appelle de Ja filaffe de la Vierge. Les membranes blan¬ ches, que nous avons dit être entraînées hors du corps d’une mouche, dont les vers fortoient en foule, étoient cïe celles dont nous parlons. Enfin fi avec une pointe fine, comme celle d’une très-petite épingle, on fait des tentatives pour dégager quelqu’un des vers du relie de la maffe ou de la lame, on reconnoît qu’il a une enveloppe; on réuffit même à brifer cette enveloppe, & à en tirer le ver, fur-tout lorfqu’il a pris tout fon accroiffement. 1 Chaque ver a donc des enveloppes qui lui font une ef- pcce de loge ou de cellule qui efi: à lui feul; mais il eft difficile d’en fçavoir davantage fur ces efpeces de loges,' de connoître mieux la ft ru dure de cette matrice defti- née à faire croître un fi prodigieux nombre de vers. Il y a beaucoup d’apparence qu’elle n’efl qu’un grand vaif- feau plié un nombre de fois égal à celui des vers qu’elle contient; que le pli qui efi à chacun des bouts de cha¬ que ver, fait la féparation de fa cellule, de la partie du tuyau qui lui appartient, avec la partie du vaifleau qui appartient des Insectes. X. Mem. 419 appartient au ver qui le précédé, & à celle qui appar¬ tient au ver qui le luit. Nous avons vû ailleurs que les œufs des mouches, quoique contenus dans des vaiffcaux, femblent à découvert, & que ces œufs oblongs forment de petits paquets femblables à des paquets de baguettes courtes, & cela par les plis des vaiffeaux, ménagés & répé¬ tés *; la dilpolition du canal qui eft la matrice de la *pi. 28 . %< mouche vivipare, reffemble apparemment à la difpofi- * 5 ° tion des conduits des œufs des mouches ovipares. Pour bien voir la forme de cette lame, qui 11e paroît qu’un afTemblagc de vers, pour la voir dans fon entier, & fans qu’il s’y foit fait de dérangement confidérable, il faut que le temps où l’on cherche à la voir, ne foit pas trop proche de celui où les vers doivent naître; car les grandes bleffures qu’on fait à la mere, les commotions qu’on caufe dans fes parties intérieures, déterminent les vers qui ont prefque pris leur accroiffement, à faire des efforts capables de brifer leurs enveloppes. Mais on trouvera quelquefois une matrice dérangée, & détruite même en grande partie, qu’on n’avoit pas lieu de foupçonner en cet état, & quoique le corps de la mouche ait été ouvert avec toutes les précautions nécef- faires; on trouvera le corps rempli de vers vivans qui fe font répandus dans fa capacité après avoir brifé leurs en¬ veloppes. Ce fait eft plus fingulier qu’il ne le femble d’a¬ bord, & j’ai eu befoin de le voir bien des fois avant que d’être convaincu de fa réalité; il prouve que ces vers ne naiffent pas comme naiffent les autres animaux; dès que ceux-ci fe font tirés de la matrice, dès qu’ils fe font dé¬ gagés de leurs enveloppes, ils paroiffent au jour, au lieu que les vers de nos mouches vivipares ont, pour ainfi dire, à naître deux fois. Après leur première naiffance ils fe trouvent dans la capacité du corps de leur mere, & ils Tome IV , Ggg 420 MEMOIRES POUR L’HlSTOIRE s’y tiennent pendant un temps dont j’ignore la durée, avant que de chercher & de rencontrer ia porte qui les doit conduire à voir le grand jour, à naître pour la fécondé fois. Voici ce qui me l’a perfuadé. Après avoir pris des mouches grilès des deux premières efpeces que nous avons décrites, & qui avoient le ventre très-renflé, louvent je les ai tenues entre mes doigts fans que je leur vifle mettre des vers au jour, & même lans que la preffion des doigts en dé¬ terminât à fortir du corps. Je me promettois de voir la ma¬ trice de ces mouches bien conditionnée, lorfque j’aurois rnis leurs parties intérieures à découvert ; cependant il m’eli fouvent arrivé que dès qu’un coup de cizeau avoit fait une ouverture à un des côtés d’une des mouches, je la fai- fois accoucher par une opération équivalente à la cé- fa rien ne. Dans i’inftant même, des vers le préfentoient à l’ouverture, & en profitoient pour lortir; quelquefois il n’en eft forti que cinq à lix par cette ouverture, & quelquefois plufieurs douzaines en font lorries. Ces obfervations ne pouvoient manquer de faire naî¬ tre la curiofité de fçavoir comment les vers déjà nés, ou au moins fortis de la matrice, étoient arrangés dans le corps de leur mere, s’ils y avoient encore quelques enve¬ loppes. Pour y parvenir, aulfi-tôt que j’avois vu un ver le prélènter à l’ouverture que le premier coup de cizeau avoit faite, je me hâtois de couper tout le contour du corps, & d’enlever les tégumens du ventre. J’ai vu plufieurs fois que la capacité du corps que j’avois naife fi vîte à dé¬ couvert, étoit remplie de vers qui n’avoient aucune en¬ veloppe , & qui étoient arrangés auffi irrégulièrement qu’il étoit polfible. Les uns étoient Amplement couchés fur les autres, d’autres étoient entrclaffés enfemble; la tête des uns étoit tournée vers la partie antérieure de la mou¬ che, la tête des autres l’étoit vers la partie poftébeure. Tous des Insectes. X. Mem. 421 enfin étoient dans un très-grand mouvement, & ne cher- choient qua s’échapper. Dans telle mouche j’ai trouvé plus de trente à quarante vers de nés, quoiqu’il en rcflat encore beaucoup à naître. Après avoir permis à ceux qui étoient en mouvement de s’échapper, ou après les avoir fait tomber, j’en ai obfervé d’autres qui tenoient encore à la matrice ou à ce qui refloit de matrice, parmi leiquels il y en avoit qui travaillent à fe défaire de leurs en¬ veloppes, quelques-uns y parvenoient lous mes yeux. La partie de l’enveloppe dont ils s’étoient tirés, étoit blanche; près du derrière de la mouche je trouvois de petits paquets de femblables membranes blanches, de celles apparemment dont s’étoient défaits les vers que j’avois trouvé nés. Quoique ces vers naifTent afTés vîte, & quoiqu’on puifTe les hâter de naître en failant violence à la mou¬ che , il n’efi nullement vraifemblable que toutes les fois que j’ai trouvé des vers répandus dans la capacité du ven¬ tre, ils y fufTent contre l’ordre naturel; j’y en ai trouvé trop de fois pour que ce fait puifTe être regardé comme un cas rare & contre nature. Quoique j’aye vû naître de ces vers afTés vîte dans les mouches auxquelles j’avois ouvert le corps, ce n’a jamais été avec une vîtefTe afTés grande pour me faire foupçonner que trente à quarante vers euffent pu parvenir à fe défaire de leur enveloppe, dans le temps que j’avois employé à couper, le plus vîte qu’il m’avoit été poffible, le contour du corps de la mouche, Sc à enlever les tégumens du ventre. S’il fuffifoit de prendre la mouche & de l’agiter, pour faire naître une partie des vers qui font dans fon corps, la plupart des mouvemens que fe donne une mouche, les feroit naître de même; ainfi il faut regarder cette première naiffance comme natu¬ relle, & par conféquent comme néceffaire. G gg ^22 MEMOIRES POUR L’HlSTOIRE Il paroît donc certain que ies vers des mouches vivi¬ pares naiflent deux fois, qu’après s’être tirés de toutes leurs enveloppes, du conduit dans lequel ils ont pris leur accroiffement, ils le trouvent dans la capacité même du corps de leur mere, fur les parties, & entre les parties qui y font contenues ; peut-être ont-ils befoin d’y relier quel¬ que temps pour achever de s’y fortifier, ou au moins pour préparer & trouver l’ouverture qui doit leur donner fortie; car il eft prouvé par quelques-unes des obferva- tions rapportées cy-delfus, que les vers, quoique nés dans le corps de la mouche, ne peuvent pas encore fortir par fon anus, puifque je n’ai point fait accoucher certaines mouches à qui j’ai prelfé le ventre,& que dès que le ventre des mêmes mouches a été ouvert par un coup de cizeau, les vers font fortis. Mais par où ces vers fortent- ils du corps de leur merci feroient-ils avec leurs crochets l’équivalent de ce que nous avons fait avec les cizeauxî au moins n’incommodent -ils pas beaucoup leur mere lorfqu’ils marchent ou qu’ils fe traînent fur fes parties intérieures. Si on accorde dufenti- ment aux infeéles, on croira que les accouchemens des mouches font très-douloureux. Mais peut-être que les mouvemens que les vers fe donnent dans le corps de leur mere, n’ont pour elle rien de violent. Nous avons dit qu’ils fortent par l’ouverture où efl l’anus de la mouche : voilà donc une ouverture toute faite; mais il relie à découvrir comment ils parviennent à enfiler cette ouverture fans blelTer le canal des inteflins. Au moins me paroît-il prouvé par une expérience que je vais rapporter, que ces vers même dans la plus grande néceffité, ne font point alfés barbares pour faire ulàge de leurs crochets contre le corps de leur mere,pour s’en iTs & 6 ?’ ^ erv ' r ' d k P crcc r. Ayant pris une mouche grife vivipare N DES I N S E C T E S. A'. Mefn. 423 dont ie ventre étoit très-renflé, 6c que je jugeai prête à faire fes petits, je lui preffai le corps, 6c lur le champ deux vers en fortirent par l’anus. Alors je pofai le bout d’un de mes doigts fur l’ouverture, pour arrêter ceux qui s’y préfenteroient. Mon deffein étoit de forcer les vers qui feroient retenus malgré eux dans le corps de la mere, à fe faire une nouvelle iflue. Pour les y contraindre, je pris avec un pinceau une goutte d’un vernis épais 6c ficcatif, je l’appliquai fur le derrière de la mouche, dans l’inftant que j en retirai le doigt. Malgré cette goutte de vernis,& quelques autres que je mis tout de fuite,plufieurs vers par¬ vinrent à paroître au jour; ils 11e donnèrent pas le temps au vernis de prendre confiftance. Je fus obligé d oter le vernis, 6c de rappliquer mon doigt fur l’anus, pour avoir recours à un autre expédient qui me réufflt mieux. Après avoir fait allumer une bougie, je fis tomber une goutte de cire fur le derrière de la mouche, dans l’inftant où je venois d’en ôter mon doigt. Un ver qui fe prefla trop de fortir, fut pris dans la cire; mais ce que je voulois arriva, la cire tint bien, 6c le derrière de la mouche fut folidc- ment bouché. Je renfermai alors la mouche dans un pou¬ drier avec un morceau de viande, fur lequel elle le pofa; elle périt même deflus; mais ce ne fut qu’au bout de huit à dix heures, c’eft-à-dire, qu’après avoir autant vécu dans le poudrier, qu’elle y eût vécu peut-être fi elle s’y fût délivrée de fes petits. Mais aucun ver ne fortit du corps de la mere-, aucun ver ne le perça, ni n’entreprit appa¬ remment de le percer. Au bout de trois jours prefque complets, & plus de deux jours & demi après la mort de la mouche, je lui ouvris le corps; j’y trouvai encore qua¬ torze à quinze vers, tous très-vivans, de la grofleur de ceux qui naiiïent, 6c la plûpart contenus encore dans leurs enveloppes, donc ils ne manquèrent pas de fe tirer fur le Gggi'j 424 MEMOIRES POUR L’HlSTOIRE champ. Ces vers n’avoient donc fait aucune tentative pour fortir, depuis que la porte qui aurait dû le leur per¬ mettre, avoit été bouchée. Il aurait été curieux de pouf¬ fer l’expérience julqu’au temps néceflaire pour les faire périr dans le corps de la mere, & je croyois qu’il avoit fuffi pour cela qu’ils y enflent été retenus deux jours & demi après fa mort; à préfent que je fuis mieux inflruit, lorfque j’aurai occaflon de répéter la même expérience, j’ouvrirai encore plus tard le corps de la mouche. Il eft pourtant vrai qu’il arrive de grands dérangemens dans le corps de la mouche vivipare lorlque les petits naiflent. On ne peut guéres donner d’autre nom que celui de matrice, à cette partie dans laquelle tous les em¬ bryons font arrangés : aimât-on à lui en donner un autre, on ne pourrait s’empêcher de la regarder comme une partie de la mouche très-confidérable en elle-même, or cette partie efl détruite dans le temps que les vers naif- fent. Nous avons vû quelquefois ceux qui fortoient en emporter avec eux des lambeaux, & nous avons trouvé de ces lambeaux dans le corps des mouches même. Mais un animal qui n’efl fait pour mettre au jour des petits qu’une fois dans fa vie, n’a pas befoin d’avoir une ma¬ trice qui fubfifle après une portée. Enfin nous ne devons plus être étonnés de voir que des parties très-confidéra- bles foient détruites dans les infeétes, lorfque le temps vient où elles leur font inutiles, fi nous nous rappelions toutes les parties que perdent à chaque transformation, ceux qui fe métamorphofent plufieurs fois dans le cours de leur vie. Nous devions nous attendre à trouver des différences, comme nous en avons trouvé entre la forme des parties ©ù les œufs des mouches ovipares font contenus, & la forme des parties où font contenus les vers des mouches des Insectes. X. Mem. 4.25 vivipares ; mais rien ne femble* demander que les for¬ mes des matrices de deux efpeces de mouches vivipares, 6c de deux efpeces du même genre, ibient très-différen¬ tes; cependant la matrice d’une des mouches grilès à corps court, & qui a les yeux rouges comme la plus grande 6c la plus longue de ces efpeces de mouches, diffère tout-à- fait par l'a ligure, de la forme des matrices dont nous avons admiré jufqu’ici la conformation. Cette matrice n’eft point roulée en fpirale, Ôc elle ne relfemble nullement à une lame épailfe. La première fois que je vis à découvert l’in¬ térieur d’une de ces mouches *, je crus ny voir que des œufs très-oblongs, ôc arrangés comme le font les œufs des mouches ovipares; à cela près, qu’au lieu que dans ces mouches les œufs font diftribués en deux pa¬ quets, dont il y en a un de chaque côté, ici tous les œufs ne formoient qu’une feule maffe *, dont la partie la plus relevée étoit vers le milieu du ventre. Cependant lorfque j’eus examiné avec plus d’attention ces prétendus œufs,& avec des yeux aidés d’une loupe, je les jugeai de véritables vers. Les petites incifions, les traits qui mar- quoient les féparations des anneaux de chaque ver,étoient fenfibles au travers de l’enveloppe traniparente dans la¬ quelle le ver étoit contenu. Les vers que j’examinois alors, étoient proches du temps où ils dévoient naître, ce qui contribuoit encore à les rendre plus recon 110i(Tables. Ce n’eft pas feulement par leur groffeur que je jugeai que le temps de leur naiffance étoit peu éloigné; avec la pointe d’une épingle je déchirai une de ces membranes h fem- blable à celle qui forme la coque des œufs de mouches ordinaires. La déchirure que j’y fis devint une porte dont le ver profita fur le champ; comme s’il eut fouffert impa¬ tiemment d’être retenu dans fa prifon, il en fortit auifi- tôt, 6c parut aufft vif, aufli vigoureux qu’il l’eût paru s’il * Pi. 2 * Fig. 426 MEMOIRES POUR L’HiSTOIRE fut né d’une manière pliîs naturelle. J’ouvris ainfi les unes après les autres plufieurs cle ces loges qui avoient la figure d’œufs, j’en ouvris trente ou quarante, & il lortit, ou je tirai de chacune un ver très-bien formé. Tous pourtant n’étoientpas également gros ni également vifs. Je ne tirai même des deux dernières cellules, que deux corps oblongs, fur lefiquels il ne paroiffoit aucun anneau, & à qui on ne voyoit aucuns veltiges des crochets qu’on trouvoit à tous Iesvers,& les deuxbouts decescorps avoientlamême grof- feur. Le blanc de ces deux corps étoit un blanc de iait, au lieu que celui des vers étoit plus tranfparent. Enfin ces deux corps oblongs étoient incapables de le donner des mou- vemens, & ils reffembloient beaucoup plus aux œufs des mouches bleues de la viande, qu’à des vers. Peut-être aufli étoient-ils des œufs; peut-être que chaque ver des mouches vivipares croît dans un œuf, & que lorfqu’il y a pris affés d’accroiffement, il en fort fans Toi tir de là cellule; car ces deux œufs étoient d’ailleurs aulfi gros que des vers. Au moins rélulte-t-il de la dernière obfervation, que tous les vers des mouches vivipares ne font pas à terme à même temps, que ces mouches doivent accoucher pen¬ dant plufieurs jours de fuite. Ce ièroit aufli une étonnante opération pour une mouche, telle qu’une de celles dont la matrice eh roulée en fpirale, de mettre au jour tout de fuite les vingt mille vers qui y font contenus. Le corps de la mouche n’auroit pas allés de capacité pour loger à la fois tous les vers qui auroient la grandeur qu’ils ont lorfqu’ils naiffent. D’ailleurs ces mêmes mouches à ma¬ trice roulée en fpirale, nous ont déjà fourni des obfer- vationsqui prouvent que leurs vers ne doivent pas tous naître en même temps ; nous avons vû que les derniers & les plus grands tours de la fpirale font gris, & que les autres des Insectes. X. Ment. 427 autres font blancs. Cette difféiènce dans la couleur des tours de fpirale, vient du différent ctat où font les vers renfermés dans les uns & dans les autre-. Les vers dont les anneaux font plus marqués, ont auffi des crochets plus noirs; d’ailleurs les vers les plus prêts à naître font moins blancs que les autres. Les tours de fpirale remplis par les premiers vers, doivent donc être griffures pendant que les autres tours font blancs. Les tours griffures m’ont femblé pourtant l’être davantage qu’ils ne le devroiefit paroître, à en juger par la couleur du ver qu’on vient de tirer de fon enveloppe; mais c’eft que le ver s’allonge & s’étend en tout fens lorfqu’il eft hors de fa cellule, il en devient plus tranfparent, & la nuance de gris en eflmoins fenfible. Lorfque les vers des mouches grifes, dont la matrice n’eff pas roulée*, font dans leurs cellules,on iesprendroit *PI. 29.fi». pour des œufs; leurs cellules font d’ailleurs arrangées, '* comme le font les œufs des mouches ovipares. Il y a donc grande apparence que ces cellules ne font faites que par les étranglemens d’un long vaiffeau replié plufieurs fois, comme le font les vaiffeaux dans lefquels les œufs font contenus, & que la matrice de ces mouches n’efî que ce long vaiffeau replié plufieurs fois, ainfi que nous l’avons déjà foupçonné de celles qui font faites en lame roulée en fpirale, mais oit cette conformation n’eft pas fi déve¬ loppée que dans nos dernières mouches. Ces mouches grifes, dans le corps defquclles les petits font arrangés à peu près comme les œufs le font dans le corps des mouches vivipares, m’ont paru beaucoup moins fécondes que celles dont les petits fe trouvent dans une lame roulée en fpirale; je 11’ai guéres trouvé dans leur corps plus de cinquante à foixante vers. Mais les vers que j’ai trouvés dans celles que j’ai ouvertes, étoient gros, & Tome IV. . Hhh * PL 29. fi * Fig- 3 -O 428 MEMOIRES POUR L’HlSTOIRE cette circonftance fait t|Ue je ne puis rien dire de pofiîif fur la fécondité de ces mouches, parce que cette circon- ftance lai (Te incertain fi la mouche n’avoit pas déjà mis au jour un nombre de vers beaucoup plus grand que celui des vers qui reftoient à naître. Non feulement il ne manque plus rien aux vers fortis de leurs cellules, & qu’on trouve répandus dans le corps de leur mcre, non feulement ces vers ne demandent qu a voir le jour & à trouver des alimens; ceux même qui font encore contenus dans la matrice, ont déjà alfés de vigueur & de force pour vivre & croître, fi on les met à portée d’une nourriture convenable. Je nfintereffai pour les vers de cette mouche grife que j’avois accouchée avec la pointe d’une épingle, pour ces vers que j’avois fait naître en dé¬ chirant l’une après l’autre toutes les cellules de la matrice; dès qu’ils eurentvû le jour, je les mis fur un morceau de bœuf dont ils fe trouvèrent fort bien; ils en mangèrent: & ils devinrent en huit à dix jours prefqu’aufh gros que les vers des mouches bleues. Je fis même deffiner leur partie poftérieure, parce que ces vers, quoiqu’affés fembla- bles d’ailleurs aux vers de ces mouches bleues, y ont quel- s- que chofe tic particulier. Leurs ftigmates pofiérieurs * fe trouvent logés au fond d’une elpece de bourfe de chair qui a la figure d’un cône creux, tronqué & renverfé. Quand le ver veut il ferme cette bourie qui fait au derrière c. une elpece de couronne *. Les mouches vivipares dont nous avons parlé jufqu’ici, font d’alfés grandes mouches, mais parmi les plus petites efpeces de mouches à deux aîles il y en a apparemment de vivipares & d’ovipares. Le petit & le grand ne font rien , ou plutôt font la même chofe pour l’Auteur de la nature. Il a fait des çombinaifons & des arrangemens aullî admirables dans ce qui eli pour nous le plus petit, que des Insecte^, X. Man. 429 ceux qu’il a faits dans ce qu'il y a de plus grand pour nous; auffi n’y a-t-il guéres loin de ce qui efl le plus grand pour nous, à ce qui efl pour nous le plus petit. Quelques circonftances favorables m’ont misa portée de voir qu’une des plus petites elpeces de moût lies que nous puiflions connoître*, efl viv ipare. Il rn’eft né des milliers de ces pe¬ tites mouches dans des poudriers où j’avois renfermé de la bouze de vache avec d’afies grands vers que je fouhai- tois voir paffer par tous leurs états. Je ne m’étois pas apperçu que cette même matière étoit remplie de plu- fieurs milliers d’autres vers, & je ne fçus qu’elle l’avoit été, que quand je vis le deffous du papier blanc qui fai- foit un couvercle au poudrier, & les parois du poudrier noircies par les petites mouches qui s’y étoient attachées. Quoique ces mouches ayent de très-grandes ailes pro¬ portionnellement au volume de leur corps, leurs ailes & leur corps enfemblc égalent à peine en groffeur la tête d’une groffe épingle. Malgré leur petiteffe , une forte loupe m’a mis en état de reconnoître quelles font delà leconde claffe des mouches à deux ailes, de la claffe de celles qui ont une bouche fans avoir de dents. Leur bou¬ che efl femblable à celle des tipules; mais la petite mou¬ che n’eft pas du genre de ces dernières ;fon genre différé du leur parle port de fes ailes, elle les adifpofées en toit qui couvre le deffus du corps * ; fes antennes font à filets grainés ; fon corcelet efi extrêmement noir & un peu relevé, il oblige la tête à fe recourber embas. Le corps efl en deffus du noir du corcelet, mais plus blancheatre fur les côtés; les ailes font blanches. Pour m’être avifé trop tard de m’appercevoir que ces mouches naiffoient dans mes poudriers, je n’ai pu en découvrir qu’une fous la forme d’une nymphe fans coque,mais en avoir vu une dans cet étatjc’eft en avoir vu mille, & d’ailleurs leurs nymphes H h h ij ’ * PI. ly. fig. 1 o. * Fig. i ï . 430 MEMOIRES POUR L'HISTOIRE ne différaient en rien des nymphes de cent efpeces de mouches delà même claffe. Ayant prefléle corps d’une de ces mouches entre mes doigts, je fis fortir par Ion derrière * PI. 29. %. un petit corps * que je foupçonnai être un ver dont je l’a- 12 ‘ vois fait accoucher: je n’eus plus lieu d’en douter, loif- qu ayant preffé fuccefiivement plufieurs mouches de cette efpece, je fis fortir de leur derrière fouvent quatre à cinq * Fig. 13. de ces petits corps * à la fois; & fur-tout lorfque j’en ob- fervai qui, pendant qu’ils fortoient, fe donnoient des contorfions ; & qu’enlin je vis ramper fur mes doigts quelques-uns de ceux que j’y avois fait paffer. Lorlqu’on ne ménage pas aflcs la preffion, les côtes de la mouche fe crèvent, & c’eft par la fente qui s’y efl faite que fortent les vers qui auraient dû fortir par le derrière. Ces vers font de ceux que j’ai nommés en ferpentaux. Une por- * Fig. 12. tion de leur partie antérieure * efl un peu jaunâtre, & le a b ' refie efl très-blanc. O11 ne doit pas s’attendre que nous donnions les caractères fpécifiques de ces vers fj petits que le microfcope peut à peine faire difcerner leur tête de leur queue. Les plus petites des mouches que nous voyons, ne font pas apparemment les plus petites de celles qui exi¬ gent; il efl même probable qu’il y en a des efpeces par rapport auxquelles ta dernière mouche vivipare que nous venons d’examiner, efl d’une grandeur énorme. Le mi¬ crofcope nous a découvert des milliers d’efpeces de vers dans les liqueurs,que nous ne nous billions jamais avifés d’y foupçonner. Pourquoi n’y aurait-il pas beaucoup d’ef¬ peces de ces atomes organisés qui, après avoir pris leur accroiffement dans l’eau, fe transformeraient en mouches comme s’y transforment tant d’efpeces d’infedes aquati¬ ques , que leur grandeur met à la portée de nos yeux ! L’analogie veut que nous croyons qu’il y en a, & d’autres des Insectes. X. Mem. 431 raifons encore plus fortes que celle de l’analogie, le prouvent. On examine des eaux dans lefquelles les meil¬ leurs microfcopes ne fçauroient rien faire découvrir; on jette dans ces eaux différentes matières, des grains de poi¬ vre, des fragmens de certaines plantes,&c. & en très peu de temps toute la maffe de l’eau paroît animée. La quan¬ tité des animaux y eft quelquefois fi prodigieufe, quelle égale prefque celle de la liqueur. Enlin ces animaux pa- roiffent dans la liqueur après un temps très-court. Si nous voyons que les carpes ou d’autres poiffons fe fuffent prodigieufement multipliés dans un étang, il nous paroîtroit démontré que leur multiplication feroit due au frays que des poiffons des mêmes especes y auroient laiffé. Les petits animaux, dont le microlcope nous it voir des millions dans des liqueurs où il ne nous en fai [décou¬ vrir aucun quelques jours ou quelques heures pii rôt, font louvent des poiffons auffi parfaits que des carpes : ce font certainement leurs meres qui les ont fait naître dans la liqueur. Ces meres qui nous échappent par leur petiteffe, font apparemment des habitantes de l’air, comme le font les différentes efpeces de meres mouches de grandeur fenfible, qui donnent naiffance à autant de différentes efpeces de vers aquatiques, qui deviennent de fèmblables mouches à leur tour ; comme les meres qui donnent naif- * pi. 23. %, lance aux vers * qui deviennent des mouches à corcelet l,2& armé *, aux vers qui deviennent des demoifelles, aux vers * 11- a6 ' qui deviennent des coufms ,& enfin aux différentes efpeces devers aquatiques qui fe transforment en tant de différen¬ tes autres efpeces de mouches. Les meres mouches,pour être extrêmement petites, n’en fçavent pas moins con- noître les eaux qui font conditionnées, comme il con¬ vient qu’elles le foient, afin que leurs petits puiffent s’y nourrir. Entre ces mouches que leur petiteffe dérobe à H h h iij, 432 MEMOIRES POUR L’HiSTOIRE nos yeux, il doit y en avoir de vivipares. Les inleéles qui paroi iTent fi fubitement dans certaines infufions, y ont dû être dépofés tout vivans. Les inleéles qui viennent d’œufs dépofés dans les mêmes ou dans d’autres infu¬ fions, y doivent paraître plus tard. • Il edau moins ailé de prouver inconteflabIement,que tant d’elpeces de petits poilfons que le microfcope nous fait découvrir foit dans l’eau fimple, loit dans différentes infufions, y ont été apportées, ou y font venues d’ail¬ leurs. 11 elt aifé de démontrer que ces infeéles fe multi¬ plient dans une eau dans laquelle il n’y en avoit d’abord aucun germe, 6 c que les germes n’étoient pas non plus dans les matières qui ont infufé avec l’eau. Malgré tout ce qu’on a débité autrefois fur la falamandre, il n’y a point de grand animal , & à plus forte raifon il n’y a point d’infeéle & point d’embryon d’infeéle qui puiffe relier vivant, étant tenu plongé dans l’eau bouillante pendant plufieurs minutes. Or j’ai rempli différens tubes, l’un avec de l’eau ordinaire, un autre avec de l’eau dans la¬ quelle j’ai mis du poivre infuler,un autre avec de l’eau dans laquelle j’ai mis de l’ccorce de chêne, & un autre avec de l’eau dans laquelle j’ai mis des truffes, &c. Je fçavois que le microfcope me ferait découvrir par la fuite des infeéles dans les eaux de ces différens tubes. J’ai rem¬ pli d’autres tubes, l’un avec de l’eau fimple que j’avois fait bouillir, l’autre avec de l’eau dans laquelle j’avois fait bouillir du poivre, l’autre avec de l’eau dans laquelle j’avois fait bouillir de l’écorce de chêne, & l’autre avec de l’eau dans laquelle j’avois fait bouillir des truffés, &c. Quand au bout de quelque temps le microfcope m’a fait voir des infeéles dans l’eau fimple, & dans des infufions qui n’avoient pas bouilli, il ne m’a pas fait voir moins d’infè- éles dans les eaux qui avoient bouilli, & m’en a fait voir de des Insectes. X. Ment. 433 toutes les efpeces dont j’en avois trouvé dans les infufions qui n’avoientpas pris le degré de chaleur capable de faire périr des animaux. LesinfeéTes qui fe trouvoient dans les infufions qui avoient bouilli, s’y étoient donc rendus, ou plutôt y avoient été apportés d’ailleurs. Cela eft cer¬ tain, & il eft probable qu ils dévoient leur origine à de petites mouches habitantes de l’air, qui avoient dépofé leurs œufs ou leurs vers fur ces différentes eaux. Mais on demandera comment il fe peut faire que nous ne voyons pas avec le microfcope tant de petites mou¬ ches, s’il eft vrai quelles exiftent, puifque nous voyons les infeéles auxquels elles ont donné naiffance, quoiqu’ils doivent être beaucoup plus petits que leurs meres. La réponfe eft facile. Nous fommes les maîtres de placer & de tenir au foyer du microfcope la goutte de liqueur peu¬ plée d'une quantité innombrable de vers imperceptibles à la vue fimple, mais nous ne pouvons pas placer & re¬ tenir à volonté la même bulle d’air au foyer du microf¬ cope. D’ailleurs la quantité d’air répandue dans notre atmofphére, étant prodigieufement grande par rapport à la quantité d’eau qui eft propre à nourrir les vers aquati¬ ques, que le microfcope feu! peut rendrefenfibles, il s’en faut beaucoup que les mouches qui viennent de ccs infeéles, ne rempliffent autant l’air que ces vers rem- pliffent l’eau. De plus gros infeéles aquatiques peuvent nous donner une image de cette différence; qu’on con- fidére dans des jardins des baquets où de l’eau croupit depuis long-temps, en certaines faifons on verra qu’il n’y a pas de pouce cubique de l’eau de ces baquets, dans lequel il n’y ait peut-être des centaines de vers de con¬ fins; or combien y a-t-il peu de pouces cubiques de l’air de ce jardin, dans chacun defquels il y ait un couftn ! Il y a même quelque lieu de douter fi nous n'entre- voyonspas dans l’air avec nos propres yeux, les mouches 434 M emoires pour l’Histoire qui donnent n ai flan ce à tant d’efpeces de vers d’une petî- tcfle fl prodigieufe. Si dans un jour ferein on regarde fixe- ment le ciel, on apperçoit dans l’air une infinité de pe¬ tits tourbillons qui approchent afles de ceux qui paroif- fent dans l’eau prodigieufement peuplée de nos petits in- feétes. Ces petits tourbillons font-ils de pures illufions de nos yeux! on peut le foupçonner; il feroit cependant fingulier que les illufions fuflent à peu près les mêmes pour tous les yeux. Mais fi ces tourbillons font réels, ils peu¬ vent bien n’être autre choie que des mouches qui volti¬ gent en l’air. Imaginons des yeux qui ne pourroient voir diftinétement un animal moins gros qu’un bœuf; quand de tels yeux fe trouvcroient dans un marais plein de nuées de coufins, les nuées de coufins leur paroîtroient ce que paroiflent à nos yeux les petits tourbillons dont nous venons de parler, ce que paraîtrait à nos yeux un air tout rempli de mouches d’une petitefle proportion¬ née à celle des infectes aquatiques que lefeul microfcope peut rendre vifibles. Entre cesinfeétes des liqueurs,les plus gras, & ceux qui ont été obfervés les premiers , font les an¬ guilles du vinaigre. M. Mentzellius efi parvenu à voir la métamorphofe de ces anguilles, il les a vû devenir des mou¬ ches. S’il nous étoit permis de fuivre les plus petites ef- peces de ces infeétes, peut-être les verrions-nous de même femétamorphofer. Ce quenousfçavonsde mieux en phy- fique,efl aflurémcntce que nous pouvons voir, mais pour¬ tant nous pouvonsy étendre nos connoiflances par-delà ce que nous voyons. Nos yeux nous ont montré que les corps en repos n’étoient mis en mouvement que par d’au¬ tres corps eux-mêmes en mouvement ; quand nous voyons un corps qui fe meut,quoique les corps qui l’ont déterminé à fe mouvoir, ne nous (oient pas vifibles, nous fommes fon¬ dés a croire qu’il a été mis en mouvement par d’autres corps. 11 elt des Insectes. X. Mem. 435 II efl donc extrêmement probable, & il n’eft peut- être que trop vrai, que notre air efl peuplé d’inleéles ailés; peut-être que ces petits infecfles, de l’exiftence def- quels le commun des hommes ne s’avife pas même de fe douter, l'ont plus redoutables pour nous que ceux que nous connoiffons réellement pour venimeux, que les feorpions, les tarentules, &c. Certaines années peuvent être beaucoup plus favorables que d’autres à leur multi¬ plication , comme il y a des années plus favorables à la multiplication de diverfes efpeccs de chenilles, de lau- terelles, de mouches, decoufins, &c. Dans certaines an¬ nées l’air peut donc fe trouver exceffivement chargé de ces petites mouches, 6c en être tellement chargé, qu’à chaque infpiration nous en faflions entrer dans nos pouî- mons des milliers, 6c même des millions, avec l’air qui s’y introduit. Outre que nous ne relpirons pas alfés d’air «durs, nous rcfpn v».» o. . ». *-*-* o I rl iti/'iTVn f‘ • tiaitc 1/=» fn r_ fons même fortir plus pur de nos poulinons qu’il n’y efl; entré; la chaleur qui y régné eft capable de faire périr fur le champ les mouches mêlées avec l’air; ou au moins ces mouches devenues incapables de fe foûtenir avec leurs ailes, relient dans les cellules où elles font entrées ; elles ne peuvent y féjourner, s’y accumuler, s’y corrompre,fans que nous en fouffrions. Bien des maladies épidémiques qui attaquent toute une yiile, 6 c même une grande éten¬ due de pays en peu de temps, peuvent avoir une fem- blable caui'e. Que fçavons-nous fi les rhumes, auxquels on a donné le nom de follettes, 6 c qu’on a attribués à des brouillards, n’ont pas été occafionnés par un air trop peuplé d’infeélesî L’air n’entre pas feulement dans nos poulinons, il femêle avec nos alimens,il palfedans no¬ tre eflomach, & les corps étrangers dont il ell rempli, y palfent avec lui. Nous voyons les chenilles, les fautcrelles Tome IV «lit * PI. 2 5 & 6 .' 9 - %• 436 MEMOIRES POUR L’HiSTOIRE qui ravagent nos campagnes, mais s’il y a des infedes d’une petiteffe prodigieufe, qui fartent d’auffi grands rava¬ ges dans notre intérieur, nous 11e pouvons pas les voir. Avant que de finir ce Mémoire, je dois faire remar¬ quer que lorfque les mouches ovipares s’accouplent avec leur mâle, elles font bien plus près d’être à terme, que ne le font les mouches vivipares dans le temps de leur ac¬ couplement. Alors le ventre des mouches ovipares eft plein d’œufs, dont la plupart ont toute leur groffeur;le ventre des femelles papillons ert: de même rempli d’œufs en pareille circonftance. Mais dans le temps que les mouches vivipares s’accouplent, les embryons ne font encore aucunement fenfibles dans leur corps, du moins n’ai-je pû découvrir avec le fecours d’une forte loupe, ni œufs, ni vers dans le corps des fémelles * de la première efpece des mou¬ ches grifes, lorfque je le leur ai ouvert fur le champ, après loc nvAir Gif. arronplépc EXPLICATION DES FIGURES DU DIXIEME MEMOIRE. Planche XXIX. X , A Figure première fait voir très en grand une mou¬ che grife vivipare, d’une efpece plus petite que celle de la mouche des fig. 4, 5 , &c. éc dans le corps de laquelle les vers font autrement arrangés. Le corps de cette mou¬ che paroît ici tout plein de vers difpolés à peu près com¬ me les œufs le font dans le corps des mouches ovipares. La Figure 2 efftrèsen grand, celle du bout portérieur d’un des vers qui fe transforment dans la mouche précé¬ dente, 6c vu par-deffus. f, f les ftigmates poftérieurs. c,c, c, c, le contour d’une efpece d’entonnoir charnu, ou de bourfe où font les ftigmates. Le ver ferme cette bourfe des Insectes. X. Mcm. 437 quand il veut, a, a, appendices entre lefquels eft l’anus. La Figure 3 montre en deflbus la partie qui eft vûe par - défiais, fig. 2. c, c, la couronne de l’entonnoir dans lequel font les ftigmates. a, a, les deux appendices char- inis d’auprès de l’anus, f fente de l’anus. Les Figures 4, 5 Si 6 font celles d’une mouche grife vivipare, fort commune, & dont les vers fe nourriflent de viande. Elle eft repréfentée les ailes ouvertes, fig. 6, Si ayant les ailes fur le corps, fig. 5 Si 4. La figure 4 eft plus petite que la figure 5, Si eft peut-être celle du mâle. La Figure 7 repréfente le corps d’une des mouches précédentes, ou celui d’une mouche telle que celle de la figure 9, très-grofti, Si dont les moitiés des anneaux qui le recouvroient par-défiais, ont été enlevées, f rf la couverture qui a été enlevée Si renverfée par-delà l’en¬ droit où le corps fe joint au corcelet. Quand cette pièce étoit en place le bout r fe trouvoit en a. Tout ce qu’on voit ici dans l’intérieur eft la matrice de la mouche, qui fe roule plufieilrs fois autour d’elle-même, Si. qui eft rem¬ plie de plufieurs milliers de vers.//; eft la portion de cette matrice qui fe rend à l’anus. On caufe nécelfairement des dérangemens dans cette partie lorfqu’on la met à dé¬ couvert, Si fur-tout dans fes tours extérieurs, de-là vient que ce qui eft en o, o, paroît autrement travaillé que le font les tours du centre; d’ailleurs la partie de la lame qui forme ces derniers tours, eft vûe par fa tranche. Si la par¬ tie qui forme les autres, eft vûe à plat. La Figure 8 fait voir en grand une matrice tirée du corps d’une mouche. La partie nn m a été tirée de défiais le rouleau 0 0, p. Dans le bout p du rouleau on voit la tranche de l’efpece de lame qui le forme; cette tranche a une épaifleur égale à la longueur d’un ver. Sur la partie de la lame vûe à plat, comme en 0 0, en n //, Si chacun 438 MEMOIRES POUR L’HiSTOIRE des petits ronds qui y font vifibles , eft un des bouts d’un ver. En rn la lame a été comme déchirée, on y voit plufieurs vers qui font droits, ou inclinés différemment les uns par rapport aux autres; au lieu qu’auparavant ils étoient tous couchés parallèlement les uns aux autres. La Figure 9 eft celle d’une groffe mouche vivipare ejue j’ai trouvée en automne fur des fleurs de lierre, t, t, une tache jaunâtre qui eft à l’origine de chaque aile. La Figure 10 eft ceile d’une très-petite mouche vivi¬ pare, de ta claffe des mouches à bouche fans dents, qui vient de vers en ferpentaux qui vivent dans la bouze de vache. La Figure 1 r repréfente la mouche de la figure 1 o, très-groffie. La Figure 12 fait voir un des vers de la dernière mou¬ che, groffi au microfcopc. La Figure 1 3 montre le derrière de la mouche pré¬ cédente, très-groffi, & dans l’inflant, où en preffant le ventre on force les petits vers qui y étoient contenus, à en fortir. u , trois de ces vers qui fortent appliqués les uns contre les autres, r, un ver qui s’eft féparé des autres, & qui fait des efforts pour achever de naître. . . „ des Insectes. XI . Man . 439 .* A À *. .* . >, A A A A A A A A A. A, .+. A A A A. A. A. A. A. A. A A, A. A, . A- A, A. A. A* »** v v v v v v v v v v • v v v v v v v v v v v v v v v v v v v v v v v v v v ■ v v v v v v. ONZIEME MEMO IRE. DES MOUCHES A DEUX AISEES QUI ONT L’AIR D’ABEILLES; ET DE CELEES QUI ONT L’AIR DE GUESPES ET DE FRESLONS. Q uoique nous n’ayons pas encore donné l’hiftoire des abeilles, nous pouvons fuppofer qu’on connoît leur figure; nous croyons même pouvoir fuppofer qu’on connoît les bourdons, qui, comme les abeilles, ont un aiguillon Sl quatre aî!es,mais qui ont le corps plus rac¬ courci, & ordinairement plus velu;leurs ailes agitées,qui les loûticnnent & portent en l’air, font un bourdonnement auquel ils doivent apparemment leur nom. Ces bourdons font très-communs dans la campagne. Les guêpes font auffi connues que les abeilles, & nous ferions connoître les frelons à ceux qui ignorent quelles font les mouches qui portent ce nom, en leur difant que les plus groffes cïe toutes les guêpes qu’ils ayent vues, font des frêlons. Toutes les mouches que nous venons de fuppofer con¬ nues, ont quatre ailes; mais il y a des efpeces de mou¬ ches à deux aîles, qui,au premier coup d’œil, ont beau¬ coup de reffemblance avec les abeilles, d’autres qui en ont avec les bourdons, & d’autres qui en ont foit avec les guêpes, foit avec les frêlons. Ce font même ces ref- femblances qui en ont impofe dans des temps où on n’y regardoit pas d’affés près; ce font ces reffemblances qui ont fait croire que les abeilles, que les bourdons, que les frêlons & les guêpes venoient de certaines matières pourries lii iij 440 MEMOIRES POUR L’HîSTOIRE fur iefquelles on trouvoit les autres mouches. Nous raflemblerons clans ce Mémoire les mouches à deux ailes qui, au premier coup d’œil, peuvent être pri- fes pour des abeilles, & celles qui le peuvent être pour des guêpes ou pour des frelons, & nous laiderons au Mémoire fuivant les mouches à deux ailes qui ont l’air de bourdons. Rien n’ed plus commode pour dé ligner une mouche qui fe préfente à nous,que de dire, c’ed une mou¬ che à forme d’abeille, c’ell une mouche à forme de bour¬ don , c’ell une mouche à forme de guêpe. Quelquefois pourtant cette efpece de détermination pourrait tenir un peu de l’arbitraire, & ne donner pas des ca radié res alfés précis pour contenter des naturalilles exaéls; aulîi ne né¬ gligerons nous pas de déterminer les clalfes & les genres de ces mouches,dont la dénomination ed prife des pre¬ mières apparences dont nous foinmes frappés. La redemblance de certaines efpeces de mouches à deux ailes* avec les abeilles, edfi grande, quequelqu’ac- coutumé que je fois à voir des abeilles, quoique leur figure me foit très-familiére, il ne rn’ed guéres arrivé d’ofer pren¬ dre avec la main, fans héfiter,unedes mouches à deux ailes dont je veux parler; j’ai même Iiéfité quelquefois dans des momens où je devois avoir l’image des mouches h miel le plus préfente. Je me fouviens, & j’ai eu foin d’en écrire la remarque, que dans un temps où j’avois be- foin de ces mouches abeiïïformes pour les faire dediner, il en vint une fepofer fur une plante qui étoit auprès d’une ruche vitrée dont j’obfervois les mouches; avant que d’a¬ vancer ma main fur la mouche à deux ailes, avant que d’être aduré que je pouvois la fàifir fans rifque d’être picqué, je donnai alternativement plus d’un coup d’œil fur cette mouche & fur les abeilles. Les couleurs, les grandeurs, les dgures & les proportions des différentes des Insectes. XL Man. 441 parties extérieures de ces mouches de deux claffcs fi diffé¬ rentes, font à peu près les mêmes. Les abeilles ont pour¬ tant le corps un peu plus allongé, elles font moins gref¬ fes, elles ont lur-tout la tête plus petite proportionnelle¬ ment à leurs autres parties, que la tête des mouches qui leur reffemblent. Ces dernières mouches d’ailleurs tiennent toûjours leurs ailes parallèles au plan depofition, mais en dehors de leur corps; au lieu que les abeilles couvrent fou- vent leur corps avec les leurs, elles les y croifent. Si ce port d’ailes des abeilles étoit confiant, on ne feroit pas cm- barraffé à les diftinguer des autres mouches, mais il arrive fouvent aux abeilles qui fuccent des fleurs, qui ra- maffent de la cire, d’avoir leurs ailes écartées du corps, fur-tout dans finflant où elles viennent de s’appuyer. En¬ fin nos mouches à deux ailes le comportent lurles fleurs quelles cherchent, &. qu’elles aiment beaucoup, à peu près comme les abeilles. Si elles 11e fongent point à y faire une récolté de cire, elles ont une trompe avec la¬ quelle eues lçavent en tirer le miel. i\ous avons expliqué d’avance la flruéture de leur trompe dans le cinquième Mémoire. Là même nous avons vû que cette trompe 11’eft pas accompagnée de dents, d’où il fuit que ces mou¬ ches appartiennent à la première des claffes générales des mouches à deux ailes ; & la forme de leur corps apprend affés qu’elles font de la première des claffes lubordon- nées aux générales. Leur corps efi un peu plus court que celui des abeilles,& plus applati. Il y a plufieurs efpeces de ces mouches. Ray en a dé¬ crit fix différentes dans fon hifloire des inlèéîes, & il feroit ailé d’en adjoûter à ce nombre. Elles différent entr’elles en grandeur. Quelques-unes de ces efpeces font plus petites que les groffes mouches bleues, mais la plupart des autres les égalent ou les furpaffent en grandeur; ces 442 Mémoires pour l’Histoire efpeces different auffi entr’eiles par des nuances de COU- 3 1.fig. leur brune, & quelques autres efpeces * du même genre & 11 ' ont des taches très-noires, & d’autres très-jaunes qui les éloignent fort de la couleur des abeilles. Les temps les plus finguliers de la vie de ces mouches ; font ceux quelles ont paffé fans avoir encore des ailes, ceux où elles étoient des nymphes, ou des vers, fous la forme defquels elles ont pris leur accroiffement. Ces vers n’ont pas été inconnus à plufeurs naturalises : Goedaert, M. e Merian, Albinus, 6 cc. ont vu du moins le gros de leur forme extérieure; mais ils n’ont cherché à en voir que le gros, & ils ont négligé, ou n’ont pas eu occafion d’obferver ce que ces vers peuvent nous montrer de plus remarquable. Le vrai eft qu’ils ne femblent offrir à l’ob- fervateur, que du dégoût 6 c de l’éloignement pour eux. Gocdaert les a nommés des vers pourceaux : les en¬ droits où il les a trouvés, 6 c où on les trouve quelque¬ fois . font déterminé à leur rlnnnpr cp nom. Il a cru que les matières avec lefquelles les pourceaux le ragou- tent, étoient celles dont ces vers fe nourriffoient, par¬ ce qu’on en rencontre, fur-tout à la campagne, dans les lieux où l’on fatisfait au plus vilain de nos befoins : on m’en a apporté plufieurs fois qu’on avoit pris dans ces fortes d’endroits. Ils font de la fécondé claffe des vers qui don¬ nent des mouches à deux ailes. Leur tête eft groffe, pure¬ ment charnue, 6 c de figure variable. Mais ce qui les fait aifément diflinguer de tant d’autres vers, qui comme eux ont des têtes qui changent fouvent de figure, c’efi qu’ils 30. fig. ont une queue toujours très-longue *, 6 c quelquefois d’une longueur démefurée par rapport à celle du corps; elle eft d’ailleurs finguliére par des ufages que nous explique¬ rons bientôt. Le même ver obfervé en différens temps, fait voir la fienne de longueur fort différente, mais elle « • n’eft des Insectes.!/ Mem . 443 n’eft jamais fi raccourcie qu’elle ne foit plus longue que le corps; elle eft ronde, raie 6c allés menue par le bout en certaines circonftances ; elle a quelquefois une reiïem- blance grolfiére avec la queue des rats; relfemblance qui ma déterminé à donner à toutes les efpeces de vers qui ont une pareille queue, le nom de vers à queue de rat. Nous courons grand rifque de nous tromper fur les ufages que nous attribuons aux parties des animaux, quand ces ulàges ne font pas bien manifelles, quand il nous les faut deviner. Une b longue queue 11e doit pas être inutile à nos vers. Goedaert qui a cherché à quoi elle pouvoit leur fervir, a cru quelle leur avoit été donnée pour les mettre en état de marcher fuis être expolés à rouler continuellement; que le frottement de la queue, contre le plan fur lequel le ventre de l’infeéle eft pôle, maintenoit \o ivuiiL Ait Ai-iic Knaiîrrviij^ (Ig VOIS fl P rliffprpnt^c efpeces, au moins auiïi ronds que les vers à queue de rat, à qui il n’eft pas même auiïi fticile d’applatir leur corps, 6c qui ne font pas auiïi enduits d’une matière gluante, que l’eft tout le corps de ceux-ci, beaucoup de tels vers, dis-je, vont en avant fans rouler, quoiqu’ils 11’ayent point de longue queue ni de jambes. Nos vers à queue de rat ont d’ailleurs des jambes que Goedaert a apparemment négligé de chercher. Ils en font mêmeaiïes bien pourvûs, ils en ont fept paires qui laiflent entr’elles des efpaces à peu près égaux; la première * eft proche * pi. 3 o.fip; de la tête, 6c la dernière eft peu éloignée de l’origine de 61 p 1 - y- la queue. A la vérité toutes ces jambes font courtes 6c ê " 5 membraneufes, mais elles font plus propres à le cram¬ ponner que celles des faillies chenilles;leur bout *, leur * pi. elpece de pied qui eft circulaire, eft bordé d’un grand l > 1 ' nombre de crochets très-fins, femblables à ceux des jam¬ bes membraneufes des chenilles, 6c difpofés à peu près Tome IV .Kkk 1 *PI. 32. J. 1 , 1 . * i'ig. 6. 44-4. MEMOIRES POUR L’HlSTOIRE de même. Ces crochets ne peuvent être découverts qu’a¬ vec le fecours de la loupe; le ver d’ailleurs les cache en certains temps. Il peut même faire difparoître prelque tou¬ tes fes jambes déjà peu longues, parce qu’il les retire, quand il veut, dans ion corps; mais auiTi il les fait fortir quand il lui plaît de s’en fervir pour marcher. Les crochets qui les terminent lont fi fins, qu’ils trouveroicnt prife fur des corps durs & polis. Ils font difpofés en deux rangs; ceux du rang le plus proche du bout font les plus longs, mais leur nombre eit plus petit que celui des crochets plus courts qui compofent le rang qui précédé; les uns & les autres lbnt roux. Les jambes de la première paire feter- % minent par une partie applatie en main *, & non par un l ( bout cylindrique, comme l’efi celui des autres jambes *. La queue du ver eil dcilinée à un autre uiage & plus fin eu lier nue celui qui lui.a été attrih»'^ p"-- ‘ '^/1-wt ; mais pour le connoïtre.il falloir être mieux inilruit de la nature du ver même, que ne font été la plupart tics natu- raüfies qui font fait graver. Ils font cru un inieéle ter- refire, & il efi un inlééle aquatique; ce qui pourtant n’a pas été inconnu à Swammerdam, & à Vallifnieri. C’efi dans l’eau qu’il prend tout fon accroiffement; il n’en fort que lorfqu’il fe prépare à la première des métamorphofes par lefquclles il doit palfer pour devenir aîlé. Comme je n’avois jamais trouvé ces vers que fur terre, & que quel¬ ques-uns qu’on m’a voit apportés y avoient été pris, je ne m’étois pas avilë d’alltr les chercher dans les eaux; je n’en avois jamais eu qu’un à la fois, & dans des temps alfés éloignés les uns des autres; mais il vint un jour où j’en eus dans un infïant un grand nombre à ma difpofi- tion. Je fai fois vuider devant moi une cloche de verre remplie d’une eau qui me paroi (Toit trop corrompue; beaucoup d’infectes aquatiques avoient péri dans cette des Insectes. XI. Man. 44^- eau, & quantité de feuilles s’y étoient pourries, auffi le fond de la cloche étoit couvert d’une boue noire & puante. Sa puanteur ne m’empêcha pourtant pas de l’ob~ ferver, & je vis bientôt que cette boue demandoit à être obfervée. J ’apperçûs quelle étoit pleine de vers qui ne fu¬ rent pas difficiles à reconnoître; leur longue queue les ca- raeftérifoit alfés.Je fis retirer de cette boue plus de deux cens vers à queue de rat. Je les fis laver pour la plupart dans de l’eau claire : après avoir été lavés, ils parurent du blanc dont font communément les vers de la viande & ceux des fruits. Je les diftribuai en différens poudriers, où je ne leur donnai prefque que de l’eau pure, & qu’autant qu’il en falloit pour qu’elle pût s’élever de deux pouces au deffiis de leur corps. Je jettai feulement dans les pou¬ driers quelques petits paquets de feuilles à demi pourries, que j’avois tirées de la boue, & fait laver. Ces vers ne furent pas long-temps dans une eau claire, fans me faire voir à quoi leux feu leux longue queue; je fçûs bientôt que, quoiqu’ils duffent croître ious l’eau, ils avoient belôin, comme beaucoup d’autres inleéles aqua¬ tiques, de refpirer l’air, & que leur queue étoit l’organe par le moyen duquel ils le relpiroient; qu’au bout de cette queue étoit l’ouverture, l’efpece de bouche qui donne entrée à l’air qui doit être conduit dans le corps qui eft fous l’eau ou au milieu de la boue. D’abord que les vers eurent été mis dans le poudrier, ils s’y agitèrent de diffé¬ rentes manières, chacun fe chercha une bonne place; les uns nagèrent entre deux eaux, les autres marchèrent loit le long des parois, loit fur le fond du vafe ; mais en moins d’un quart d’heure tout fut à peu près tranquille, & quand je vins alors à les obferver, ils m’offrirent un petit fpeélacle auquel je ne m’attendois pas, & qui me plut beaucoup. Je vis * trente à quarante petites tiges ou * Pf 3°* Kkkij 446 Mémoires pour l’Histoire tuyaux, c’eft-à-dire, autant qu’il y avoit de vers, qui paral¬ lèles les uns aux autres, au moins dans leur partie fupé- rieure, s’éfevoient jufqu’à la furface de l’eau. Tous ces tuyaux,- toutes ces tiges étoient les queues d’autant de vers; chacun avoit fait en forte de conduire le bout delà Tienne précifément à la furface de l’eau. Entre ces vers, les uns avoient la tête cmbas, leur derrière étoitla partie de leur corps la plus élevée; la queue de chacun de ceux- ci montoit prefque perpendiculairement, elle faifoit tout au plus quelques legeres ondulations; d’autres vers étoient fur le fond du valè, quelques-uns même y marchoient; les queues de ces dernières, comme les queues des autres, atteignoient la furface de l’eau, chaque queue fe coudoit affés proche de fou origine, pour fe mettre dans une dire¬ ction Verticale. Les unes s’élevoient en ligne droite, d’au¬ tres faifoient des finuofités dans une partie de leur éten¬ due, des S fimples ou doubles. La furface de l’eau étoit Vlevée environ de deux pou¬ ces au de du s du fond du vafe dans lequel étoient les vers; leurs queues étoient donc longues de près de deux pou¬ ces, &. c’étoit adurément là d’ades longues queues pour des vers dont le corps avoit au plus fept à huit lignes de longueur. Mais je crus qu’ils pouvoient les allonger encore plus, & je voulus fçavoir jufqu’où ils en pouvoient porter l’allongement; le moyen de ievoirétoit fimple :dès que ces vers aimoient à rederfur le fond du vafe, & qu’ils avoient befoin de tenir le bout de leur queue fur la furface de l’eau, il n’y avoit qu’à obliger cette furface à s’élever, pour voir jufqu’à que! terme le bout de la queue la pour¬ voit fuivre, fins que le ver fût obligé d’abandonner le fond du poudrier, de verfai d’abord a des d’eau pour faire monter la furface de celle du poudrier d’un demi-pouce, & après quelques inftans je vis le bout de la queue de des Insectes. XI. Mem. 447 chaque ver, qui s'etoit aufli élevé d’un demi-pouce, j’o¬ bligeai encore la furface de l’eau à s’élever de nouveau d’un demi-pouce, 6c les vers élevérent d’autant le bout de leur queue. Enfin à diverfes reprifes je conduifis l’eau à avoir la furface difiante du fond de plus de cinq pou¬ ces, les queues fuivirent la furface julqucs-là, fans que les vers quittalfent le fond du poudrier. Mais il y a un terme à tout, 6c celui de la longueur de la queue d’un ver long de fept à huit lignes, efi porté loin, lorfque cette queue elt devenue longue de près de cinq pouces. Audi celle des vers dont je parle, ne peut-elle pas s’allonger davantage; quand je fis monter l’eau à plus de. cinq pouces 6c demi ou à près de fix pouces, au deiïùs du fond du vafe, les vers abandonnèrent ce fond ; les uns s’attachè¬ rent contre les parois, les autres fe mirent entre deux eaux à une hauteur d’où ils pouvoient atteindre la furface de l’eau avec le bout de leur queue. L’organe qui a été donné à cet infeéte afin qu’il puilTe refpirer l’air, pendant que fon corps efi couvert de plu- fieurs pouces d eau, mérite que nous nous arrêtions à l’examiner. La tranlparence de cet organe, 6c celle du corps même du ver, font heureufement telles qu’on peut mieux voir qu’on ne l’efpéreroit, les principales pièces' qui font mouvoir cette curieufe machine. La nature fem- ble avoir voulu nous inviter à les obferver,en les renfer¬ mant fous des enveloppes qui ne les cachent point à nos yeux, car on voit les parties intérieures de ceux de ces vers qui ne font pas encore fortis de l’eau, 6c fur-tout des plus jeunes , prefque comme on les verroit fi elles étoient dans un tube de verre. En tout temps on recon- noît très bien 6c fans peine, que la queue efi compofée de deux tuyaux *, dont l’un, comme ceux des lunettes, * peut rentrer entièrement dans l’autre. Le premier &. plus } K k k iij 44-3 MEMOIRES pour l’Histoire * Pi. 30. fig. plus gros tuyau * femble être un prolongement des par- z >i&ç.çf. t ; es charnues qui forment les anneaux du corps; il eft blanc comme le corps , & compofé de i’affemblage d’une infinité d’anneaux ou de fibres circulaires. Dans ce grand * r u tuyau, entre un tuyau moins blanc * dont une longue portion ell: brune & prefque noire, c’eft ce qui donne le moyen de diftingüer le fécond tuyau, lors même qu’ileft abfolument rentré dans l’autre. J’appelle celui qui a le moins de diamètre, le tuyau de la refpiration. On voit déjà que la queue peut être de plus en plus longue, félon que le tuyau de la refpiration fort plus ou moins de celui qui lui fert d’étui. Mais ces deux tuyaux font par eux-mêmes capables d’allongemens & de raccour- cilTemens, car dans des temps où le tuyau de la refpiration difparoît entièrement, la queue 11’eft pas toujours éga¬ lement courte. Le lècond tuyau, & le premier, font compofésde fibres annulaires. Lorfque ces fibres font ré¬ duites à avoir moins de diamètre, chaque tuyau gagne en longueur ce qu’il a perdu dans une autre dimenfion ; aufïï quand la queue a etc portée à une longueur exceffive, eft-elle beaucoup plus déliée qu’elle ne i’eft lorfqu’elle eft très-raccourcie, ou moins allongée, alors elle ne paroît quelquefois que comme un gros filet, & la plus grande portion du tuyau de la refpiration, & la plus procheMu bout femble être un crin de cheval & un crin noir. Le tuyau de la refpiration eft terminé par un petit mam- * PI. 32. fig. melon brun *, dans lequel j’ai cru voir deux trous defti- z ' r " nés à donner entrée à l’air; deux pareils trous font beau¬ coup plus vifibles dans un ver d’une efpcce à queue plus courte, dont il fera parlé à la fin de ce Mémoire. Le mam- melon qui doit recevoir l’air, eft élevé au deftùs de la furface de l’eau, & c’eft apparemment pour aider à l’y te- * t, e, e,e,e. nir en équilibre, que cinq petits corps * qui fe terminent des Insectes. XL Mem. 449 en pointe, qui, comme cinq petits pinceaux de poils, partent de l'on origine, font étendus & flottent fur l’eau. Ces petits pinceaux lont diipofés autour du bout de la queue à la manière des rayons des étoiles. La méchanique qui efl employée pour faire fortir le tuyau de la refpiration de dedans l’autre, & pour l’y faire rentrer, efl extrêmement fimple; on a le plaifir de bien voir les inflrumens d’où elle dépend, & de les pouvoir fui- vre à l’œil pendant leur jeu. Pour faire connoître ces in¬ flrumens, nous n’avons qu’à faire connoître deux gran-*Pï. 30. fig. des trachées * qui occupent une place confidérable dans f l’intérieur du ver; elles lont parallèles l’une à l’autre, & dirigées de la tête vers la queue, comme le feroit un ca¬ nal desalimens qui n’auroit point de finuofités. Elles ont l’une & l’autre leur origine * afles près de la tête, l’une * PI. 30. fig, l’a à droite , & 1 autre à gauche. Là leur diamètre efl h c ’ petit, infenfiblement elles en prennent un plus grand,& ^lioo jyuj illlL LeaUW'w j/ *1 - — 1- *>.-»-».»•» r /p 10 lûiil* ■». ' o lume efl devenu confidérable. Elles conlèrvent le même volume dans le refle de leur longueur julqu’affés près de l’origine de la queue; elles font deux très-gros vaifleaux, dont la blancheur & le luftre imitent celui d’un latin. Près de la queue ces trachées le rétrécifïent fubitement dans le refle de leur étendue, chacune d’elles n’eft j)lus qu’un tuyau délié, mais fi long qu’il ne trouve à fe pla¬ cer qu’en faifant plu fleurs plis & replis * dans unafles *PI. 32.%. petit elpace ; elles font pourtant tantôt plus & tantôt 0 moins de ces plis au ziczacs, & cela, félon que cette partie de la queue que nous avons nommée le tuyau de la refpiration, efl plus rentrée dans la partie de la queue qui lui lert d’étui, ou en efl plus fortic. Les portions lon¬ gues & déliées de nos deux grands réfervoirs d’air, font deux elpeces de cordes, mais creufcs, dont les bouts font 45O MEMOIRES POUR L’HlSTOIRE attachés au tuyau de la refpiration. Quand ce tuyau fort de fou étui, quand il paraît à découvert en partie, qu’il rend la queue plus longue, les deux cordes le fuirent, elles fe déplient, elles entrent dans la première partie de v pi. 3 o. fîg. la queue *; alors ces cordes 11e font que peu de ziczacs, 10. q y. ou q UC jes z j czacs ailes à diftinguer les uns des autres. Si le tuyau de la refpiration fort davantage & autant qu’il peut fortir, fi fon bout poflérieur arrive jufqu’au bout ou *F, g . 9 .qf. près du bout de l’étui, alors les deux cordes * font éten¬ dues en ligne droite, & elles font parallèles Tune à l’autre dans l’étui qui a été lailfé vuide par le tuyau de la refpi¬ ration. Quand ce dernier tuyau rentre, les cordes lui cè¬ dent la place, elles viennent s’arranger auprès de l’extrémité des grands réfervoirs à air dont elles font des prolonge- mens. Tout ce que nous venons de rapporter fe voit très- diftinélement, fi on obfcrve le ver dans différentes circon- ftances avec une loupe; mais ce qui ne peut pas être vu, v,vn r. V.WI Æi yua ituicmem a îanc rum* lement à faire rentrer le tuyau de la refpiration, ou fi elles ne fervent point à l’un & à l’autre. Il me paraît que fans leur attribuer trop, on peut croire que c’efl à leur aeftion que font dûs les deux mouvemens oppofés du tuyau de la refpiration, qu’elles peuvent le pouffer en arriére & le tirer en avant. Nous aurions tort fi nous ne les regardions que comme de fimples fils exceffivement flexibles, & par là incapables d’efforts; nous ne devons pas même les comparer à de fimples fibres charnues ou à de foibles paquets de ces fibres, nous devons les regar¬ der comme des efpeces de raiforts à boudin faits d’une matière cartilagineufe, comme des raiforts faits d'une ef- pece de corne, & par là capables de pouffer le corps contre lequel ils fe déplient, & de tirer à eux ce même corps lorfqu’ils fe retortillent. Ces des Insectes. XI. Mem. 451 Ces elpeces de cordes, comme nous Taxons vû ci- dedus, iont ces deux trachées fi grades dans le rede du corps du ver, réduites près du derrière à avoir peu de diamètre. Or dès qu’on Te rappellera quelle ed la nature & la dructure des trachées, on ne trouvera rien qui man¬ que à i’exaélitude de la comparaifon de ces elpeces de cordes, avec des redorts à boudin de corne ou de carti¬ lage. D’autres vers aquatiques nous ont déjà appris * que leurs trachées font faites d’un lil roulé en Ipirale au¬ tour d’un cyiindre,& roulé de manière que les tours le touchent les uns les autres. 11 n’y a voit pas lieu de dou¬ ter que les trachées de vers à queue tle rat, ne fudent faites de même d’un bl tortillé, cependant je me fuis en¬ core aduré que cela ed, en rompant une de ces tra¬ chées , & en dévidant le bout du lil qui pouvoit alors être laid. Or ce dl roide de blanc, roulé pour former une trachée, n’ed point d’une fubdance charnue, il ed vifi- blement ou cartilagineux ou de corne. Mais il réitéra à expliquer quelle ed la caufe qui détermine ces redorts à s’allonger, & quelle ed celle qui les détermine à le plier. Ces redorts font en même temps des tuyaux, ils font de- ftinés à conduire l’air; n’cd-ce point ce même air qui en quelques circondances, les détermine à s’allonger! leur état naturel, ou, plus exactement, l’état dans lequel ils fe met¬ tent lorfqu’aucune force n’agit contr’eux, elt peut-être celui où ils font plifles 6 c contournés. Si l’infecte fait paf 1 er une partie de l’air qui remplit le corps de la trachée, dans fa portion deliée, il forcera celle-ci à s’étendre, à fe dé¬ plier, comme l’air introduit dans un courcaillet en écarte les plis les uns des autres, comme l’air force defegonder & de s’allonger, un tuyau dexibledans lequel on l’introduit. Notre tuyau cartilagineux ne peut fe déplier fans pouüer en avant le tuyau de la relpiration, fans l’obliger defortir Tome IV. .LU * Mem. VIT pi. 2 2. fs 12 . 452 Mémoires pour l’Histoire de Ton étui,& ce tuyau fera porté d’autant plus haut, que les refforts le feront plus dépliés. Le premier tuyau & celui de la refpiration peuvent d’ailleurs avoir chacun des mufcles qui fervent à les allonger; il peut y avoir une méchanique qui oblige chacun de leurs anneaux à deve¬ nir plus longs en perdant de leur diamètre; mais cette méchanique n’eft pas de celles qui dépendent entière¬ ment de caufes que nos yeux peuvent appercevoir. Le tuyau de la refpiration ne rentre pas feulement dans la première partie de laqueue, quelquefois il eft ramené dans le corps même entre les deux grands refervoirs à air, & quelquefois il eft tiré jufqu’auprès de la tête; enfin quelquefois il eft non-feulement porté jufqu’où nous ve¬ nons de le conduire, il y efl plié en deux, il y fait lin coude femblable à celui d’une corde pliée, dont une des moitiés efl: ramenée fur l’autre. Nous avons déjà dit que les vers à queue de rat font de ceux dont la tête eft toute charnue; aulii, lorlqu'on les touche, font-ils prendre à la leur différentes figures. Le bout de la tête eft arrondi, elle montre en certains * Pi. 30. fig. temps deux petites cornes charnues *, dont on ne voit fc.+. p ]'a. 2 * g L *êres bien l’origine qu’en la cherchant en deffous *. Un » pi. 30. peu plus bas que l’origine de ces cornes efl l’ouverture 6. & pl. ° ‘ ' ' - - - S* 32. *b. * PI. 30. fig. 4 - de la bouche *; une efpece d’arcade brune & cartilagi- neufe en entoure le deffus & les deux côtés. Sous cette arcade on voit quelquefois un mammelon charnu qui peut être pris pour la langue du ver. On 11e parvient à voir ce mammelon qu’en preffant le corps de l’infeéle. Le plus fouvent lorfqu’on tient le ver, il fronce fa tête en deffous comme une bourfe,elie fait alors des plis dans lefqucls les cornes, la bouche, & même les jambes de la première paire fe trouvent cachées *. Quand on voit au microfcope la partie antérieure de ce ver, elle paroît cou- des Insectes. XL Metn . 453 verte tant par-deffus que par-deflous, de poils roux & très-courts que la vûe fimpie 11e découvre point. Leur anus, l'ouverture par laquelle ils font fortir leurs excrémens, n’eft qu’une fente dirigée tranfverfalement, & fituée entre la dernière paire de jambes & l’origine de la queue. Autour de la meme ouverture, on voit quel¬ quefois dix à douze appendices * longs de quelques li-*pi. ?0 . f gnes, qui flottent & jouent dans l’eau, & qui font au- ”^] tour de l’anus une frange compofée de très-gros brins./?/,/. J’ai fouvent cherché à voir cette frange fans y pouvoir par¬ venir ;aufli n’y a-t-il qu’un temps où les vers font paraître tous ces appendices, c’eft celui où ils fe déchargent de leurs excrémens. Il femble que le ver, pour vuider fes inteflins de la matière qui y eft contenue, foit obligé de les faire fortir de fon ventre. Si on obferve ces appendices à la loupe, * ils paroifleni 11’étrc faits que par un vaifleau plié * Fig. 12 & pluheursfois; dans l’endroit où chaque appendice femble fe 1 3- ° terminer, il fe recoude pour retourner vers l’anus. Quand le ver n’a plus d’excrémens à rendre, il fait rentrer dans fon corps cette efpece de frange de vaiiïeaux. Des fragmens de feuilles pourries, beaucoup d’autres matières corrompues qui fe trouvent dans les eaux, & di- verfes fortes de boues qui ne font pas purement terreu- fes, fourniffent à ces vers leurs alimens les plus ordinai¬ res. J’en ai tenu dans des vafes remplis d’eau claire, où je ne leur ai donné que du pain, qui m’ont paru y croître, ils y ont au moins vécu pendant plufieurs femaines, c’eft- à-dire, jufqu’à ce qu’ils ayent été en état de fe métamor- phofer. Auffi quoiqu’on rencontre de ces vers au milieu d’une boue d’une puanteur infupportable, il ne s’enfuit pas qu’une telle boue leur foit effentielle, il s’enfuit feu¬ lement qu’elle ne leur eft pas contraire, & qu’ils peuvent s’en accommoder. Mais ils peuvent naître & vivre dans LU ij bjO rj cr\ 454 MEMOIRES POUR L’HiSTOIRE de moins vilaines matières : j’en ai trouvé dans des mares & dans des étangs ordinaires; j’en ai vu beaucoup naître & croître cités moi dans des baquets dont l’eau n’avoit point de mauvaife odeur,& qui m’ont paru delà même efpece que ceux que j’avois trouvés dans la boue la plus puante. D’autres vers aquatiques dont nous avons parlé dans ce *Mem. vu. volume *, & ceux de plufieurs efpeces différentes dont nous avons parlé dans le volume précédent, ne quittent l’eau dans laquelle ils ont pris leur accroiffement, que quand ils deviennent aîlés; mais nos vers à queue de rat aban¬ donnent l’eau lorfqu’ils Tentent approcher le temps de leur métamorphofe. L’infeéte qui juiques-là a conftam- ment vécu dans l’eau, s’expofe donc à marcher lur la terre; le voilà dans des pays qui lui doivent paraître bien nouveaux, & où il ne trouve pas la même facilité à chan¬ ger de place, qu’il trouvoit dans ceux qu’il liabitoit au¬ paravant. Il traîne après lui là queue, qui, quoique rac¬ courcie , eft toûjours très-longue ,& qui ne fert plus guéres qu’à l’embarraffer. Son corps fi propre, fi blanc & fi tranf- parent lorfqu’il étoit dans l’eau, devient bientôt opaque» laie & grilàtre; des grains de la terre contre laquelle le corps frotte, s’y attachent, le ver en eft bientôt tout fali» & rendu grifâtre. Outre qu’il eft forti de l’eau tout mouillé, les pores de Ta peau laiffent échapper une li¬ queur gluante, très-propre à retenir des grains de terre. L’objet de là marche eft de trouver un endroit où il Te puiiïe métamorphofer commodément & en fureté. Je penfai que pour en trouver un tel, il falloir qu’il pénétrât fous terre; j’eus donc foin de mettre de la terre dans des boîtes, où je renfermai des vers qui avoient abandonné l’eau. Ils ne relièrent pas long-temps fur la furftice de cette terre, celle que j’avois mife à leur difpofuion étoit des Insectes. XJ . Mem . 455 apparemment telle qu’ils la cherchoientjegere & médio¬ crement humide. Ils s’enfoncèrent fous cette terre, ils y fubirent toutes leurs métamorphofes, & n’en fortirent que lous la forme de mouches. Amfi les mêmes inleéles doivent palier la première & la plus longue partie de leur vie fous l’eau, ils en doivent palTer une autre fous terre, & enfin ils paffent la dernière partie de leur vie dans l’air. Je n’ai pas toujours offert de la terre aux vers à queue de rat qui étoient prêts à fe métamorphofer; la terre fous laquelle ils aiment à i'e cacher, ne m’auroit pas permis d’obferver les changemens qui fè dévoient faire dans leur extérieur; j’en ai renfermé Couvent dans des boîtes de bois vuides. j’ai parlé, en palTant, d’une liqueur que le corps laide échapper; cette liqueur cfi gluante, quand le ver s’arrête, elle colle contre le bois la partie du corps qui le touche. Lorfque la colle n’attachoit que la partie po- jfiérieure 6 c un bout de la queue, la métamorphofe ne s’en faifoit pas moins bien ; mais lorfque tout le deffbus du ventre fe trouvoit attaché contre le bois, Je ver périf- foit fans pouvoir fe transformer. J’en ai quelquefois fe- couru de ceux qui fouffroient pour avoir une trop gran¬ de portion de leur corps collée; en les mouillant je dé- trempois la colle qui les retenoit ; auffi-tôt ils fe met- toient à marcher, 6 c alloient fe fixer dans un autre en¬ droit où ils fe métamorphofoient. Ces vers font de ceux qui fe transforment fous leur propre peau, de ceux dont la peau devient une coque, lous laquelle l’infeéleperd la forme de ver,& prend peu à peu celle de nymphe, qu’il conferve jufqu’à ce qu’il foit en état de fe défaire de fes dernières enveloppes, 6 c de paraître avec des aîles. Pendant que le ver eft tranquille, le blanc de fa peau s’efface peu à peu, elle devient jau¬ nâtre, la queue s’afîaiffe 6 c fe ride; elle refie pourtans Lil iij 456 MEMOIRES POUR L’HlSTOIRE * Pi. 31. fîg. longue ; quelquefois une partie du tuyau de la refpiration * r f’ & même ailes confidérabie, paroît encore hors du premier tuyau; le corps le raccourcit fenfiblement, mais il gagne plutôt qu’il ne perd en grolfeur. Enfin au bout de dix à douze heures, quelquefois plutôt & quelquefois plûtard, la peau eft devenue grife ou brune, Si elle a perdu toute fa tranfparence; alors elle eft dure, i’infeéîe s’en elt déta¬ ché au moins en partie; elle forme une coque qu’on peut manier fans déranger fa ligure, on fent quelle réfille à la prelfion des doigts. La peau s’elt delféchée & s’ell ridée, de ces deux circonftances lui viennent fa fermeté, fon augmentation d’épailfeur & l'on opacité. L’extérieur des coques que fe font, Si dans lefquelles fe transforment les vers des mouches dont nous avons parlé dans le fixiéme Mémoire, n’ont plus rien à nous offrir de digne d’attention, depuis l’infant où elles fe font endurcies jufqu a celui où l’infeéle en fort avec des ailes; mais les coques de nos vers à queue de rat, ont encore dans cet intervalle de quoi attirer nos regards. Si on revient à en voir une au bout de vingt-quatre ou de trente-fix heures, on eft furpris de lui trouver quatre cor- * PI. 31. fig. nés * qui ont poulfé, qui fe font élevées dans le temps 2, 3 q U ’ OI1 a pafTé fans la voir. Deux de ces cornes * égales & ^ ; femblables font pofées aftes près du bout antérieur, & laif- fent entr’elles un petit efpace, elles s’élèvent quelquefois en fe courbant vers le dos. A l’origine de ces cornes com¬ mence une efpece de petit plan incliné qui monte vers le dos. & forme le delfus de la partie antérieure,c’eft-à- dire que cette partie eft plus plane que le refte. Où ce plan incliné finit, où la coque commence à prendre la rondeur qu’elle a par-tout ailleurs, & où elle a le plus de *c,c. diamètre,là,dis-je,fe trouvent deux autres cornes * qui font fouvent du double plus grandes que les premières; en des Insectes. XI . Mem . 457 s’élevant elles Te courbent, & elles s’inclinent quelquefois dans un fens contraire à celui de la courbure ou de i’incli- naifon des autres *, elles fe dirigent vers la tête comme *PI. pour aller à la rencontre des deux antérieures. Ces quatre cornes font à peu près poféesaux quatre anglesd’un petit qu3rré ou d’un trapeze qui approche du quarré; les deux d’une même paire s’écartent l’une de l’autre en s’élevant; les plus grandes ont fouvent plus de deux lignes de long. Comment & pourquoi ont pouffé ces quatre cornes, comment ont-elles pu paffer au travers de la peau deffé- chée, la percer! quelle efl la force qui les fait élever! enfin que font ces quatre cornes! renferment-elles des parties effentielles à la mouche, qui n’ont commencé à fe développer que quand l’infeéle a commencé à fe trans¬ former, ou font-elles des parties propres à la feule nym¬ phe! Nous devons d’autant plus nous arrêter à tâcher d’éclaircir la nature de ces cornes, & tout ce qu’elles nous offrent de curieux, que la fuite de cet ouvrage appren¬ dra qu’il n’eft pas particulier aux feuls vers à queue de rat d'en prendre de telles en rc uauoL.m.ne. Loo co is en partie à découvert, & que j’avois 'bief ie, fût en état d’avancer des Insectes. XI. Mem. 465 fa transformation; j’eus donc lieu d’être très-fiirpris au bout de cinq à hx heures, de ne le plus trouver le même que je l’avois laide. Entre les changemens que j y vis, celui qui me frappa le plus, de que je confidérai avec plus de plaifir, ce fut celui de la pofition des deux grandes cornes; je les avois biffé couchées toutes deux *, ayant l’une & *PI. 32. fig. l’autre leur bout très proche de ceiui de la coque, & je 8,0 c ’ les vis l’une & l’autre dreffées, prefque perpendiculaires au corps de l’inlecle*, &. ayant leurs bafes où elles les * Fig. 9.0*» euffent eu fi tout fe fut paffé dans l’ordre ordinaire, fi la portion de coque que j’avois emportée, fut reliée en place. En même temps que je voyois ces cornes en place, il m’étoit ailé de juger comment elles y avoient été con¬ duites. Des chairs voifines de la tête avoient été pouflées du côté du dos,& setoient renverfées de ce côté-là, elles avoient donc dû obliger les cornes àavancervers le même côté & à le dre fier. Si on fe rappelle ce que nous avons dit *Man.yji. ailleurs * rpfir\(é pour la première fois dans la coque, parvient enfuite à le méta- morphofer en nymphe; fi on fe rappelle qu’il y a au bout antérieur de l’inlèéle, une petite cavité de dedans laquelle fortent fucceffivement les jambes, les ailes & la tête de la mouche, on concevra ailément que lorlque de pareilles parties ont commencé à lortir du bout antérieur de notre dernier inlèéle, fes cornes ont dû être pouffées en arriére, & redreffées; les parties molles & comme charnues, qui de l’intérieur de l’infeéle font venues en dehors, ont dû produire tout ce jeu. On doit pourtant avouer que c’eft là un jeu de média- nique, qui demande une grande précifion dans l’execu- tion; il faut non feulement que chaque corne foit renver- fée en arriére, il faut qu’elle ie foit de manière que fon bout foit précisément pointé contre l’endroit de h 466 MEMOIRES POUR L’HiSTOIRE * Pi. 32. fig. coque * par lequel il doit fortir. Ce bout feroit des efforts 7-0,0. inutiles contre tout autre endroit, il ne vaincroit pas la réfiflance qui lui lèroit oppofée, & il furmonte ailcment celle qu’il trouve dans l’endroit marqué, parce que cet endroit n’a pas été fimplement marqué, il a été préparé. Pour s en convaincre, on confidérera, comme je l’ai fait, la * Fig. 8 .p,p. piece * qui a été enlevée à la partie antérieure d’une co¬ que dont les grandes cornes 11’avoient pas encore paru; on confidérera, dis-je, cette piece vis-à-vis le grand jour, d’abord on fera porté à la croire percée dans les deux en- * 0 >°• droits* par-où les cornes dévoient fortir; pendant que le refie fera très-opaque, ces deux endroits circulaires laiffe- ront paffer la lumière: ce n’eft pas pourtant qu’ils l'oient réellement percés, mais c’eft qu’ils ne font fermés que par une membrane tranfparente. Le deffus de la coque efl grilâtre d’une affés mauvaife couleur, mais le deffous efl d’une couleur argentée, ou plutôt d’une couleur fem- blablc à ccIR vies pcilcs, (X qui en a l'éclai. Cuit couleur efl due à une membrane très-mince qui tapiffe la furface intérieure de la première & épaiffe peau à laquelle la co¬ que doit toute fa folidité. Les deux trous circulaires par lefquels les cornes doivent fortir, font percés dans la pre¬ mière peau, & ne font bouchés que par la membrane ar¬ gentée, & extrêmement mince. Un rebord brun qui en¬ toure chaque trou, fe fait même voir au travers de cette membrane. Suivons à prefent, fans interruption, ce qui fe paffe depuis l’inflant où les deux cornes commencent à être miles en mouvement jufqu a celui où elles font conduites * Fig. 8.or- en dehors de la coque; reprenons les deux cornes * cou¬ chées parallèlement l’une à l’autre, ayant l’une & l’autre icur bout proche du bout antérieur de la coque. Si des chairs fortent alors de l’intérieur de l’inièèle par fon bout antérieur, des Insectes. XL Ment. 467 antérieur, les chairs l'ur lefquelles pol'ent les bafes des cornes, pourront s’enfoncer & occuper dans le corps, une place qui y a été laiffée; quelles s’y enfoncent, alors les cornes perdront leur pofition horifontaie, elles en au¬ ront une inclinée; letirbout deviendra plus élevé que leur baie, & s’élèvera de plus en plus par rapport à cette bafe à raclure que les chairs qui fervent d’appui à cclle-ci, s’en¬ fonceront davantage. Si outre cela les chairs fur lefquelles les bouts des cornespofent, fe portent vers le derrière, les cornes feront redreffées, & elles prendront une pofition perpendiculaire : que les mêmes chairs continuent d’avan¬ cer vers le derrière,elles commenceront à faire incliner les cornes vers le côté oppofé à celui auquel elles 1 etoient ci-devant. Enfin fi on fuppole que non feulement les chairs auxquelles tient la bafe, s’enfoncent, mais quelles fe tirent un peu vers la tête, chaque corne * fera la pirouette qu’il lui convient de faire, bientôt elle fera courbée fur un plan charnu & incliné, ayant la pointe contre ce trou qui n’elt bouché que par une fimplc membrane. Le relie fera aifé à achever : fi les cffSfcs auxquelles les bafes des cornes font unies, tendent enfuiteà s’élever & à fe porter vers le derrière, elles poufferont les cornes contre les mem¬ branes qui bouchent les trous, ces membranes feront bif¬ fées , & les cornes feront pouffées & conduites hors la coque. La feule obfervation que j’avois frite des deux cornes qui s’étoient dreffées & miles dans une pofition perpen¬ diculaire fur le corps de l’infeéle où je les avois trouvé couchées, après que j’eus enlevé la partie antérieure Sc fupérieure de fa coque, cette feule obfervation, dis-je, prouvoit ailes que le redreffement des cornes devoir le faire comme nous venons de l’expliquer. Mais c’eft une de ces obfervations qu’on doit aimer à répéter, & qu’auffi Tome IV. .N n n *PI 3z. 10. c. *,Fig- 9-0 » PI. 31 . fi Z & 4. 468 MEMOIRES POUR L’HlSTOIRE j’ai répétée bien des fois. J’ai enlevé à plufieurs co¬ ques, dont les deux grandes cornes étoient encore ca¬ chées, cette partie antérieure au deffùs de laquelle elles fe dévoient trouver par la fuite avec les deux petites, & j’ai toujours vu les deux grandes cornes femblablement placées dans l’intérieur ; Ôc j’ai eu prefque toujours le plaifir de les voir enfuite fe redrefier, lorlque je n’ai opéré que fur des infectes dont les parties intérieures s’é- toient alférmies, fur des inléétes dont les cornes étoient bientôt prêtes à aller prendre les places qui leur font de- ftinées; plus elles font proches de ce temps, & moins on court rifque de blcffer le petit animal. J’en blefiai un plus heureufement que je 11c feu fie fait fi je me le fufie pro- polé, je ne le blefiai que legeremcnt lans doute, & aux parties qui avoient rapport à une leule des cornes. Lere- ; g- drefièment & le renverfement de cette corne * ne lé fit point, & celui de l’autre * fe fit parfaitement De lorte que les deux moitiés delà partie antérieure du meme in- feéîe, me montroient en même temps ce qu’on ne peut voir ordinairement que dans un infeéte obfervé dans des temps différéns, ou dans deux infeéles qui font pris à différais termes de transformation. Dans le mouvement que nous avons fait faire aux c. deux cornes * pour parvenir à enfiler les deux trous par lefquels elles doivent fortir, nous ne nous fonimes pas contentés de les redreffer, nous les avons fait paffer à être inclinées, & à avoir chacune leur bout tourné du côté oppofé à celui où il l’étoit ci-devant. Cette pofi- tion a été celle que j’ai vu prendre à prefque toutes les cornes que j’ai mifesà découvert; il y en a auffi de celles qui s’élèvent naturellement au deffus de la coque, qui refient inclinées vers le derrière; mais il y en a beaucoup £• plus qui après s’être élevées, s’inclinent vers la tête *,& il des Insectes. XI . Mem . 469 y en a quelques-unes qui relient perpendiculaires au deffus de la coque. Nous ne connoiiïons point encore dans les animaux de produirions nouvelles; à parler exactement, il ne s’y fait que des developpemens, mais les deux cor¬ nes ne font pas même nouvellement développées; non feulement on ies trouve à 1 infecte qui ne fait que com¬ mencer à fe transformer, on les lui trouve lorfqu’il eft ver; alors la tranfparence de fa peau permet d’obferver quelles font déjà colorées & placées dans fon intérieur, comme elles y font dans le temps qui précédé leur ren- verfement. Enfin lorfque les deux grandes cornes de î’infeéte commencent à paraître, c’eft alors que fa fécondé trans¬ formation commence à fe faire, c’eft alors qu’il com¬ mence à prendre la forme de nymphe, & il y parvient affés vite. Tout fe paffe au relie dans fa féconde transfbirna- tion, comme dans la fécondé transformation des vers qui a été décrite dans le feptiéme Mémoire, mais celle de nos vers à queue de rat eft plus prompte que celle des vers de la viande. Vingt-quatre heures après que les der¬ nières cornes avoient paru, j’ai ouvert des coques dans lelquelles j’ai trouvé des nymphes *, dont non feulement * PI. 33- la trompe, les ailes & les jambes étoient difti notes, mais 1 e ' dont les bouts des jambes étoient même déjà arrivés piès du derrière. Cette longue queue qui avoit été fi nécef- fiire au ver pour le fournir d’air, eft devenue un organe avec lequel la nymphe n’a aucune communication. Prèsde l’origine de cette queue * on trouve divers vaiffeaux tor- * Fi S- 2 - 1 - tillés & ramaffés dans un paquet, qui font probablement ces portions déliées par lelquelles l’une & l’autre des gref¬ fes trachées fe terminoit, qui Envoient la queue dans le temps où elle s’allongeoit le plus, & qui peut-être la for- çoient de s’allonger. Mais les corps de ces deux mêmes N il n ij 47 ° MEMOIRES POUR L’HlSTOIRE trachées fe trouvent encore alors dans la nymphe. C’efï par leur queue que ces vers ont d’abord attiré notre attention : nous 11e nous fommes prefque arrêtés à confidérer dans leur intérieur, que les inflrumens & les cordages emj)loyés à l’allongement & au raccourciffement de cette queue; nous avons liir tout fait remarquer les deux groiïes trachées qui y ont fi grandepart; mais nous n’avons rien dit de deux vaiffeaux du ver, auffi confidérables ou plus confidérables que les trachées, & dirigés comme %• elles de la tête vers la queue, qui fouvent font plus plats*, & dont les côtés font quelquefois ondés ; ils font d’un blanc de lait, au lieu que les trachées lont d’un blanc fatiné & luifant; auffi lont-ils pleins d’une liqueur lai- teufe, plus épaiffe que le lait. Ces vaiffeaux ont un volume d’autant plus grand par rapport à celui du corps, que la métamorphofe du ver efl plus prochaine; auffi penfai-je que la liqueur épaiffe & laiteufè qu’ils contiennent, y a été préparée & raffemblée de loin, qu’elle efl deflinée à nourrir les parties de la nym¬ phe , que ces deux vaiffeaux font dans notre ver ce que lont les corps graiffeux dans les chenilles. Qu’on 11e crai¬ gne pas que nous prenions ici les conduits des alimens du ver, pour les refervoirs du fuc nourricier de la nym¬ phe; le canal continu qui forme l’œfophage, l’eflomach & les inteflins de ce ver, efl ailé à trouver, il efl aifé de le voir dès fon origine, & de voir où il aboutit; mais il n’eft pas auffi aifé de le fuivre dans tous fes contours & dans toutes fes dépendances; quoique moins gros que les vaiffeaux laiteux, il efl d’une groffeur affés confidé- rable lorfqu’il efl plein, comme il i’efl en certain temps, d’une matière d’un brun un peu verdâtre; il ne devient qu’un filet lorfqu’il s’efl vuidé. On voit pourtant encore alors de petits grains d’un brun-verdâtre, rangés à la file des Insectes. XI. Menu 471 les uns des autres. Ce canal & fes dépendances font en¬ core vifibles, & quelquefois plus viables dans la nym¬ phe, parce qu’ils y ont une couleur rougeâtre, & même en certain temps une couleur d’un alfés beau rouge-pour¬ pre. Les parties intérieures de plufieurs inlèéles aquati¬ ques prennent en fe pourri fiant une couleur rouge ; les vaiffeaux qui dans cette nymphe de notre ver font de¬ venus rouges, font peut-être de ceux qui ne doivent pas refier à la mouche, & qui commencent à le difToudre. Lorfque la faifon efl très-favorable, toutes les méta- morphofes font accomplies huit à dix jours après que le ver s’efl transformé pour la première fois ; alors la mouche cfl en état de fe défaire des enveloppes & des parties pro¬ pres à la nymphe, cfc fortir de fa coque, & elle en fort. .C’efl la partie de la coque où font placées ces quatre cornes qui font quatre organes rie la refpiration, c’efl cette partie, dis-je, qui doit être détachée par les efforts de la mouche, & lui laiflcr une ouverture qui Toit une porte proportionnée à la grandeur de fon corps; mais cette partie n’efl pas enlevée toute entière, les efforts de l’in- feéle la divifent en deux pièces d’inégale grandeur; l’an¬ térieure * efl la plus grande,les deux plus courtes cornes* * PI. 33.% lui refient attachées; la mouche qui agit contre cette piece * & y eeb - après l’avoir foûlevée,la renverfe par-delà le bout de la co¬ que. La fécondé piece * plus étroite que la précédente, * Fig- 6.* n’efl que détachée & foûlevée,mais elle prête & cedelorf- dde ‘ que la mouche tend à fortir par l’ouverture faite par le dé¬ placement de la première piece. Les deux grandes cornes refient engagées dans la féconde pièce. Si on obferve la coque dont la mouche efl fortie, on y trouve, outre la membrane blanche qui enveloppoit les parties de la nym¬ phe, les deux veffies à air; chacune d’elles tient comme elle tenoit ci-devant, à une des cornes; ces veffies & ces N n 11 iij *P1. 3 3- 4- & S- 472 MEMOIRES POUR L’HiSTOIRE cornes font des organes qui iont devenus inutiles à la mou- clic; on trouve pareillement une grofle trachée qui tient à chacune des petites cornes. Si toutes les mouches de vers à queue de rat ne peu¬ vent parvenir à fortir de leur coque, qu’au moyen d une manœuvre à laquelle j’ai vu qu’une mouche de cette ef- pece avoit eu recours, leur lortie cil beaucoup plus labo- rieufe que ne l’cft celle des autres mouches. Il leur eft apparemment plus difficile de fe défaire des organes de la refpiration, ou de quelqucs-autres parties propres à la nymphe. Nous avons vû que les autres mouches fortent non leulement de leur coque la tête la première, nous avons vu même que leur tête efl le leul infiniment quelles peuvent employer pour ouvrir leur coque, & qu’elles la font agir alors d’une façon bien fmguliére, quelles la gon¬ flent ik la contraéfcnt, qu’elles l’allongent & la raccour- cifTent lucceffiveinent. Il m’avoit paru (1 général aux mou¬ ches à deux aîles, de parvenir à ouvrir leur coque par cette méchanique, que je n’avois pas foupçonné qu’il y en eût des el'peces qui s’ypriffent autrement; auffi n’ai je point cherché à furprendre nos mouches de vers à queue de rat, dans l’inflant quelles fortoient de leur coque, mais un halard m’a montré cette année ce que je ne fçavois pas qu’il fallût chercher à voir. J’obfervai une coque dont la mouche netoit pas encore fortie, mais dont elle étoit prête à fortir; elle venoit de faire fauter la piece fig. antérieure *, celle à laquelle tiennent les deux petites cornes; le trou que cette piece avoit laide à la coque, me permettoitde voir une partie de la mouche, qui s’al- longeoit eces de mouches de vers à queue de rat, font les mêmes. Nous avons fait repréfenter ailleurs *, * PI. tp. très en grand, les parties qui compofent leurs trompes. Les baquets que je tiens en partie pleins d’eau, dans des jardins, m’ont fourni chaque année beaucoup de vers à queue de rat, & de différentes dpeccs;6c il étoit d’autant plus ailé de les y trouver, que ces vers 11e fe tiennent pas conflamment fous l’eau, il y a des temps où ils paroi f- fent à fa furface. J’ai vû venir fur ces mêmes baquets les moudlCS dans Icfqucllcs ccj vers Ce transforment. L’in- tention ou l’inftinél qui les y amenoit quelquefois, ne pouvoit être équivoque, elles doivent s’y rendre pour y faire leurs œufs, 6c je devois être curieux de voir com¬ ment elles les y font. J’ai fouvent pris plaifïr à fuivre des yeux une mouche abeilliforme qui venoit voler autour d’un baquet ,6c voici le manège que j’ai obfervé bien des fois. Lorfque l’eau ne s’élève pas jufqu’aux bords du ba¬ quet, qu’elle en eft éloignée de huit à dix pouces, la mouche toujours en volant, entre dans le baquet 6c elle s’y tient en décrivant divers cercles proche de la furface de l’eau; de fois à autres elle laiffe tremper le bout de fes jambes dans l’eau; enfin lorfque cette mouche qui a envie de faire fes œufs, a, ce fembie, affés examiné le baquet 6c fon eau, quelle a reconnu que le tout convenoit à fes œufs,eile va fe pofer fur les parois intérieures du ba¬ quet, à quelques pouces delà furface de l’eau. Là'on lui voit allonger confidérablement le derrière, 6c de manière Tome IV. . Ooo MEMOIRES POUR L’HlSTOIRE qu’il fe termine en une pointe un peu recourbée vers le ventre; elle frotte cette pointe contre le bois; elle rac¬ courcit enfuite fon derrière, elle fait rentrer dans fon corps ta pointe qu’elle en avoit fait fortir, & cela pour l’en faire rcffortir bientôt. Après avoir répété ce manège plufieurs fois dans la même place, la mouche va foit en volant, foit en marchant, fur un autre endroit du baquet, où elle fe fixe, &. où le derrière fe donne des mouvemens femblables aux premiers. La mouche s’arrête ainfi fuccdfivement fur dif- fërens endroits du baquet, avant que de prendre fon vol pour le quitter. Dès qu’elle efi partie, on n’a qu’à aller examiner ies places où clles’efi arrêtée,& fur-tout celles où elle s’eft arrêtée plus long-temps, & on ne manquera pas d’y trouver des œufs; dans quelques endroits elle en laiffe plus d’une vingtaine les uns auprès des autres.Ils font blancs de oblongs, en un mot nlïca femblables pai leur grandeur 8 c par leur figure, aux œufs des greffes mouches bleues de la viande, il ne leur manque que la languette que ces derniers ont tout du long d’une de leurs faces. Lorf- qu’on les obferve avec une forte loupe, leur furface pa¬ raît chagrinée à très-petits grains. Ordinairement la mou¬ che dépofe fes œufs dans la fente que laiffent entr’elles deux des douves d’un baquet, Sc dans un endroit éloigné de la furface de l’eau d’un pouce ou deux, & qui efi humide. C’efi apparemment parce que ces entre-deux des douves fe defféchent plûtard que le refie, que la mouche les choifit pour y laitier fes œufs. Les vers qui doivent fortir de ces œufs, ont befoin de trouver de l’eau dans laquelle ils puiffent entrer dès qu’ils feront nés ; mais ils péri- roient fi les œufs étoient dans l’eau, & ils périraient en¬ core fi les œufs étoient dans un endroit trop fec; la mou¬ che fçait la place qui leur convient, & elle la leur donne. Nous avons vu affés de fois que les œufs qui fortent des Insectes. XI. Man. 477 du ventre de diverfcs mcres infectes, lont enduits d’une matière vifqueufe, propre à les attacher contre les corps fur lefquels ils font dépofés ; les œufs de nos mouches font retenus contre les parois du baquet par une pareille colle. * Des arbres, quoique fur pied & vigoureux, ont quel¬ quefois des cavités dans des endroits où ils fe font pour¬ ris; ces cavités confervent l’eau de pluie, elles s’en rem- plilfent, Si valent alors des baquets pleins d’eau pour les mouches des vers à queue de rat qui cherchent à faire leurs œufs, Si même valent mieux, parce que fur le fond de ces cavités, il y a une efpece de terreau qui eft une nourriture très-convenable à leurs vers. J’ai trouvé auffi des vers à queue dans tles creux de troncs d’orme, Si dans des creux de troncs de faille pendant l’hiver, temps où il n’y en avoit point dans mes baquets. Les mouches qui préfèrent les baqiieiscn etc , préfèrent apparemment à la fin de l’automne les creux des arbres, pour y lailfer leurs œufs ; ils font alors pleins d’eau, Si en été ils font à fec. Entre les vers à queue de rat que j’ai trouvés dans ces troncs d’arbres, il y en avoit à très-longues queues. Si précifément femblables à ceux que j’ai eus dans mes baquets; mais j’y en ai trouvé auffi des efpeces que mes baquets ne m’ont point données, entr’autres , une ef- pece * qui avoit une queue courte *. Les vers de cette efpece font femblables dans le relie à ceux qui ont de plus longues queues; leur tuyau de la refpiration * efi noir; celui qui le reçoit*a à l'on origine deux tubercules charnus plus qu’hémifphériques *. Dans le mois de Janvier je mis fur ma cheminée un poudrier dans lequel j’avois renfermé deux vers de la der¬ nière efpece avec un terreau bien imbibé d’eau. Au bout de quelques jours je vis deux coques dans lefqvielles ils O o o ij * PI. 31. fîg. 1 3 * *fr. */?• * < 1 > !• 478 MEMOIRES POUR L’HlSTOIRE seraient métamorphofés; l’une étoit attachée contre (es parois du poudrier, < 5 c 1 autre contre fon couvercle. Je crus que l’infeéle renfermé dans chaque coque, y avoit péri, qu’il étoit pourri, & cela parce quelles me paru¬ rent couvertes l’une & l’autre d’une épailfe naoififlùre blanche; mais cette prétendue moififlure étoit une pâte blanche qui venoit apparemment d’une liqueur épailfe que le ver avoit jettée lorfqu’i! avoit été près de fè trans¬ former. Cette matière deflechée fc trouvoit de même fous chaque coque, &. fervoit à en attacher une contre le papier du couvercle, & l’autre contre le verre; & elle étoit en plus grande quantité qu ailleurs, autour de l’en¬ droit où le ventre étoit collé. Les coques de ces vers avoient comme celles des autres, quatre cornes, mais plus courtes. Il fortit de chacune, à la mi-Février, une % mouche * qui avoit de l’air d’une petite abeille. Elle porte fes aîles un peu croifées; la trompe efl à lèvres charnues, & j’ai vû la mouche en faire grand ulàge pour fuccer du fucre que je lui avois offert. Son corcelet & fes anneaux font d’un brun prefque noir, mais cette couleur efl adoucie par des poils blancheâtrcs ou un peu roux, le ventre efl prefque couvert de ces poils; en deffus, les jointures des anneaux en font bordées, comme le font les côtés du corcelet ; le deflùs du corcelet a aufli de ces poils. Dans un trou d’orme plein de terreau, qui étoit furnagé fig. par l’eau, j’ai aufli trouvé des vers * de la fécondé clafle, ou de la même que ceux à queue de rat, mais d’un genre fort différent de celui de ces derniers. Us n’cflit qu’une q. queue fi courte * qu’on pourrait les appelier des vers à queue coupée. La leur ne fernble être qu’un court tuyau de la refpiration, qui efl brun & de confiftance écailleufe. Ce bout obfervé à la loupe paraît percé par deux trous . q . ronds *, deflinés fans doute, à donner paflage à l’air. On des Insectes. XL . Mem . 479 peut d’autant moins douter de leur ulage, que la tranfpa- rence de ces vers, qui furpaffe même celle des vers à queue de rat, permet de fuivre leurs deux groffes trachées * dans * PI. 33. fig. toute leur longueur, & de les voir entrer toutes deux dans 8 ‘ la queue écaillcufe. De chaque côté de cette queue part une corne charnue *. Le ver peut faire rentrer fa queue *Fig. n.a, écailieufe dans fon corps, jufqu’à la faire dilparoître. Sur a ‘ la partie antérieure de ces vers on trouve deux petits corps jaunâtres * qui ont quelque relief, qui femblent deux petits * F'g- 9* '•> tuyaux; une des groffes trachées tire fon origine de l’un, & l’autre tire fon origine de l’autre; d’où il paroît que ces deux petits corps jaunâtres font les ftigmates antérieurs. Près de l’un & de l’autre de ces ftigmates l’infeéle a de chaque côté une double corne *, farte de deux crochets noirs & écailleux. Il a d’ailleurs deux cornes charnues *, femblables à celles des vers à queue de rat, qui toutes deux ont leur nailfance un peu au deffus de la bouche. Les vers à queue de rat ont quatorze jambes, on 11e fçait fi on en doit compter autant à celui-ci, ou fi on doit lui en compter la moitié moins. Au delfous du ventre on trouve fur le milieu de fept anneaux difïérens, une partie charnue bordée de crochets écailleux & noirs*; on peut la regarder comme une feule jambe, ou comme compofée de deux jambes réunies. Ce qui favorife cette dernière idée, c’eft que la coupe de cette partie charnue eft ovale, & que fon petit diamètre eft dans la longueur du ver, enfin que ce petit diamètre eft marqué par un enfoncement. Ce ver fe frit de fa peau une coque lèmblable à celle que fe fait de la fienne le ver à queue de rat courte, dont il a été parlé ci-devant, & enduite de même d’une efpece de pâte blan¬ che; la mouche dans laquelle il fe transforme, reffemble beaucoup à celle dans laquelle fe transforme l’autre ver. Mais il y a des vers à queue de rat * qui ne font pas de la O o o iij * c, c. * Fig. 9. A A. * Fig. 10, / m j l m. *PI. 31. fig. 18 & 19. s*> # 480 MEMOIRES POUR L’HiSTOIRE clarté de ceux que nous avons examinés julqu’ici, leur tête clt écaillcufe; ils appartiennent à la troifiéme clalTe des vers. La mare du Eois de Boulogne m’en a fait voir beau¬ coup de ceux dont je veux parler. Ils s’y tenoient fur des feuilles à moitié pourries, & ils y étoient roulés. Ils ont, comme les autres, une très-longue queue qu’ils accour- cifTent & allongent à leur gré : Elle eft, comme celle des * p|. ,premiers, compolce de deux parties*, dont l’une, celle ) 8 10 héfiter à prendre avec leurs doigts une mouche * d’une des efpeces de celles de vers à queue de rat, quoiqu’elle foit de toutes, celle qui reffemble le moins aux abeilles; ils pourroient craindre qu’elle ne fût une guêpe; un corps un peu long, marqué de jaune & de noir, elt ce qui frappe le plus dans les guêpes, & on trouve tout cela à notre mouche de ver à queue de rat. Plufieurs efpeces de mou¬ ches qui viennent des vers mangeurs de pucerons, ont des Insectes. XL Mem. 481 auffi cette reffemblance grodiére avec les guêpes. Il y a line mouche d’un autre genre *, qui reffemble fi fort à * Pi. 33.%. line petite guêpe, que je ne l’ai jamais prife avec les 12 & 1 3 * doigts, qu’avec les précautions avec lel'quelles on prend une mouche armée d’un aiguillon, & je ne me fuis af- fûré quelle en étoit dépourvue, qu'après avoir reconnu qu’elle n’avoit que deux ailes. Ses antennes font auffi de celles qui font les plus ordinaires aux mouches de cette dernière dalle, elles font à palettes, mais à palettes très- allongées. Au rede je ne puis donner l’hiftoire de cette mouche, n’étant pas parvenu à la faire naître chés moi. Les frèlons font du genre des guêpes, ils ne différent prefque des guêpes les plus communes, que par leur gran¬ deur; ils peuvent être mis au rang des grolfcs mouches à quatre ailes. Il y a une mouche * à deux ailes qui ne le * Fig. i$. cede pas en grandeur aux frelons, & qu’on ne peut gué- res manquer de croire un frelon la première fois qu’on la vnir pofée fur une* plante: elle y arrive, & en part avec un bourdonnement d'ailes fcmblable à celui des hélons, avec iefquels elle a une grande refîemblance par les cou¬ leurs de fon corps & de fon corcelet. Le jaune domine fur fon corps, mais il y ed coupé par deux larges rayes tranfverfales, qui toutes deux font noires; le corcelet ed noir; & i’intervale qui ed entre les deux yeux à rezeau, ed jaune. La première des mouches de cette efpece que j’attra¬ pai, fut mife dans une boîte. Quand je voulus l’en tirer au bout de cinq à fix heures, je trouvai quelle y avoit fait plus d’une quarantaine d’œufs blancs & oblongs *, * Fi ’g* c’ed-à-dire, de la forme la plus ordinaire aux œufs. Je gar¬ dai ces œufs pendant quelques jours, après Iefquels je vis quantité de petits vers qui en étoient fortis.Cesversnaiffans étoient parfaitement femblables à d’autres vers beaucoup 482 MEMOIRES POUR L’HlSTOIRE plus grands que j’avois trouvés dans des nids de bourdons, &. qui, malgré les foins que j’en avois eus,avoient péri fans fe métamorphofer. C’efl inutilement auffi que je tentai d’élever les petits vers fortis des œufs de la mouche; comme je les fçavois d’un naturel carnacier, je leur don¬ nai de la viande ordinaire, mais qui ne fut pas de leur goût; il leur failoit une chair plus tendre & plus délicate; ils moururent, & apparemment de faim, auprès d’une * PI ^. 3 viande trop groffiére. Ceux* de la même efpece, que je 7 ° " n’ai vus que beaucoup plus âgés & plus grands, font de grands ravages dans ces nids où des bourdons vivent en lociété, dans ces nids qu’ils recouvrent de mouffe & de gazon, & où ils portent du miel & de la cire brute. Ce n’eft pourtant ni au miel, ni à la cire des nids, que ces vers en veulent, comme tant d’autres infeètes en veulent au miel &à la cire des abeilles; ce font les petits mêmes des bourdons, & les nymphes des bourdons qu’ils cherchent pour les dévorer. * Fig. 17 Ces cruels ennemis des bourdons font des vers * qui & 1 deviennent affés gros, comme on en peut juger par le volume de la mouche dans laquelle ils fe transforment, fis font de la claffe de ceux qui n’ont point de jambes; ils font très-blancs; leur bout antérieur eft affés pointu, mais leur corps devient de plus en plus gros jufqu au¬ près du derrière, où il a plus de diamètre que par-tout ailleurs. Cette dernière partie donne de quoi caracté- rifer le genre de ces vers, qu’on peut appeller le genre des vers à derrière rayonnant. Leur bout poftérieur eft ♦ r,Y,r,r, orné de fix efpeces de rayons * charnus, difpofés à peu r,r • près fur la circonférence d’un demi-cercle, dont le dia¬ mètre eft à la partie fupérieure du corps. A peu près au * f, centre de ce demi-cercle font placés deux tuyaux * adof- fés l’un contre l’autre, plus courts que les rayons, & dont l’ulage des Insectes. XI . Mem . 483 fumige doit nous parodie plus néceflaire, ou au moins nous efl mieux connu, ce lont les deux bouches poflé- rieures de la refpiration, les deux fligmates Quoique les deux fligmates antérieurs foiei fi blés, on peut les trouver; il y en a un de chaque côté au fécond anneau près de fa jonélion avec le troifiéme. Le corps femble compofé d’un prodigieux nombre d’an¬ neaux, fion veut prendre pour autant d’anneaux tous les cordons qui l’entourent, & qui le font paroître tout fil- lonné. La féparation du deffus & du defîous du corps, eft marquée par deux rangs d’efpeces de courts picquants. Quand il marche il montre deux cornes charnues * allés * Fig. 18. courtes, qui fe touchent toutes deux à leur origine, & ° c ' poftérieurs . * PI - 33 -%’ r 17 & 18.y; ît moins fen- quien s’éloignant, s’écartent l’une de l’autre. Elles font fourchues à leur bout *. Lorlqu’on l’oblige à montrer tous les accompagnemens de la tête, & qu’on la confé¬ déré par deffous *, on voit /le rhaque côté froie parties charnues en forme d’épines, dont les deux fupérieures font égales entr’elles, & la moitié moins longues quel in¬ férieure qui efl du même côté. La bouche de ce ver eft faite & placée comme celles de tous les autres vers de la première claffe, de ceux à tête variable. Cette bouche efl une fente d’où fortent deux parties analogues aux crochets écailleux des autres vers de la même claffe. Mais les crochets de nos vers enne¬ mis des bourdons, pourraient être appellés des dents; le bout de chacun efl large & refendu, chaque bout vaut deux dents brunes & dures. Quand nous en ferons à l’hifloire des bourdons, nous verrons qu’ils ont été, comme les abeilles, les guêpes Sc tant d’autres mouches, des vers blancs fans jambes. C’efl fous cette forme qu’ils prennent leur accroiffement. Les bourdons ailés ont foin de tenir ceux qui font encoie Tome IV . P p p * Fig. 19. e. * e, 4 P- O d,p. I * Afem de TAcadémie. j 7 ,g. pag. 230. 484 MEMOIRES POUR L’HiSTOIRE vers, enveloppés d’une épaifTe couche de cire brute, moins dure que la cire ordinaire. Nos vers ennemis des bour¬ dons percent ces couches de cire pour parvenir aux in- feétes quelles couvrent; ils les hachent, ils les mangent &ils n’en biffent au plus que la peau. Les nymphes des bourdons ont des habitations plus bolides, elles font dans des coques de foye dont le tilTu eft fort, parce qu’il cft épais & ferré. Je 11’ai point vû que nos vers voraces foient venus à bout de s’ouvrir une entrée dans de pareilles co¬ ques; mais lorfque j’ai ouvert à deffein quelques-unes de ces coques, ils s’y font introduits, & ont mangé la nymphe fans en biffer prefque rien de relie. Quand on efl fpeélateur de tous ces carnages, on a peine à comprendre 1 indolence des bourdons. A quoi leur l'ert, demande-t-on, l’aiguillon dont ils font armés! que! ufage en veulent-ils faire, s’ils ne l’employent contre de f cruels ennemis, qui d’ailleurs (emblent peu en état de fe défendre contr’eux, Sc qui ne fçauroient leur faire de mal à eux-mêmes! Les vers carnaciers ont des dents alfés fortes pour entamer la tendre peau des vers ou celle des nymphes des bourdons, mais incapables d’agir contre le bourdon , tout cuiraffé comme il l’eli d’écaiiles. La na¬ ture a-t-elle voulu que les bourdons fouffrifTent ces vers patiemment, & fans s’appercevoir de tout ce qu’ils font ! On peut penfer bien autrement fur le compte des bour¬ dons, & avoir une idée qui femblera d’abord très-para¬ doxe, mais qui peut-être efl vraie. Les vers carnaciers ne font peut-être qu’épargner aux bourdons bien des cruau¬ tés : ils agiffent pour eux. Si on fe rappelle ce que nous avons rapporté ailleurs dans fhiftoire des guêpes *, on fe fouviendra qu’il vient un temps où les guêpes elles-mê¬ mes font les meurtrières de toutes celles qui font encore fous la forme de nymphes ou de vers, qu’elles les arra- des Insectes. XL Mem. 485 chent des cellules, qu’elles les portent hors du guêpier. On peut fçavoir aufîi qu’il y a un temps où les abeilles tuent tous les mâles, & où elles tirent impitoyablement des cellules, ceux qui y font encore en vers ou en nymphes. Il ne nous importe pas actuellement de chercher à jufhfier des procédés où il paraît tant de barbarie & de fureur, ils font fans doute nécefiaires & fages ; mais dès qu’il cft vrai, comme nous le prouverons dans le temps, que par¬ mi les bourdons, comme parmi les abeilles & les guêpes, il y a des mouches de trois fexes, ne peut-il pas y avoir un temps où les mouches des deux autres fexes font bien aifes que les mâles qui fe multiplieraient trop, foient ex¬ terminés! Ne peut-il pas y avoir un temps où les bour¬ dons qui ont la forme de vers, doivent être détruits, com¬ me il y en a un nù Irç vers des guêpes le doivent être! Si ce font nos vers carnaciers qui le chargent en partie de ce cruel office, ils épargnent aux bourdons des barbaries, ils font leurs amis. Ce qui me dilpoferoit encore à le penfèr ainfi, c’eft que je n’ai trouvé de ces vers que dans les vieux nids de bourdons, & que j’en ai trouvé beaucoup dans le fond de tous les vieux nids, dans ceux qui au mois d’Août étoient reftés entiers & peuplés. Il eft vrai pourtant que j’ai vû des nids dans lefquels ces vers s’étoient beaucoup multipliés, qui étoient défèrts, les bourdons les avoient abandonnés; mais il n’eft pas lûr qu’ils euffent été forcés à s’en retirer par les vers, car il vient un temps où les bourdons ne le foucient plus de leur ancien nid, où ils l’abandonnent. Enfin j’ai vû en quelques circonflances les bourdons acharnés contre leurs propres vers, contre ceux qui dévoient devenir bourdons; je les ai vus les tranf- porter hors du nid, & les tuer. P PP 48 6 MEMOIRES POUR L’HISTOIRE EXPLICATION DES FIGURES DU ONZIEME MEMOIRE. Planche XXX. X-iA Figure première repréfente un tube de verre plein d’eau juiqu’en r, r. Quantité de ces vers que nous avons nommés à queue de rat, occupent le fond du tube, u, u,u, plufieurs de ces vers, dont les queues allongées s’élèvent prefque toutes à lafurface de l’eau rr, pour y refpirer l’air. Les Figures 2 & 3 font celles d’un ver à queue de rat, vû par deffus,& p \é lürun terrein ferme,figure 2. Si vû par defious Si comme s’il étoit dans l’eau,figure 3. a, le bout antérieur du ver. q r , fa queue compofée de deux tuyaux q f, f r. Le tuyau f r efi celui que nous avons appellé tuyau de la refpiration. L’autre q f, plus gros, fert d’étui au précédent. Les points bruns Si alignés qui paroiffent fur le ver de la figure 3, font les jambes. Il y a des vers à queue de rat qui refient toujours plus petits que ceux de ces deux figures, & il y en a d’autres qui viennent beau¬ coup plus gros. La Figure 4 montre par-defious, la tête d’un ver à queue de rat, très-grolfie, & dans le temps où il fronce les environs de fa bouche qui efi en b. Des cornes cour¬ tes qui paroiflent en d’autres temps. Si fa première paire de jambes font alors cachées dans les plis. I, l, les jambes de la fécondé paire. La Figure 5 fait voir la tête en grand Si par-defiiis, dans un moment où les deux petites cornes charnues Æ, k fe montrent. La partie qui efi entre a a, Si kk, efi remplie de poils jaunâtres qui ne font guéres vifibles qu’à la loupe. Dans la Figure 6 la tête reparoît encore en grand Si par-defious, comme dans la figure 4 ; mais les plis de cette des Insectes. XI . Mem . 487 dernière figure ne fe trouvent point dans la figure 6. Audi y voit-on les deux cornes marquées k, k, la bouche b, Si la première paire de jambes l, /. La Figure 7 cfi celle d’une jambe repréfentée de côté, & groffie. La Figure 8 repréfente un ver par-deffus, vû au tra¬ vers d’une loupe, & celles des parties intérieures de ce ver, que la tranfparence de fa peau permet d’appercevoir. Il a été deffiné dans un temps où le tuyau de la refpira- tion r f étoit prefque tout rentré dans le gros tuyau f q. Les deux greffes trachées, les deux grands rélervoirs à air font très-remarquables, t o,t o, ces trachées. En £ & £ paroiffent les plis Si replis, les ziczacs que font les por¬ tions déliées de ces trachées, lorfque le tuyau delà refpi- ration r f defeend jufqu’en q dans le tuyau f q. La Figure 9 ne repréfente que le bout poftérieur du ver de la figure précédente, mais elle le repréfente extrê¬ mement groffi, Si dans un temps où le tuyau r/eft pref- qu’entiérement forti du tuyau q f. Auffi 11e voit-on plus dans cette figure, les plis Si replis £ £ des deux trachées qui fe trouvent dans la figure précédente; mais on y voit la partie déliée de chacune de ces trachées, qui monte jufqu’en f dans le tuyau q f. En t Si t eft la coupe des troncs des trachées. Dans la Figure 1 o encore plus groffie que la précé¬ dente, le tuyau de la refpiration eft plus forti du tuyau q f, qu’il ne l’eft dans la figure 8, Si moins qu’il ne l’eft dans la figure 9. Auffi ne trouve-t-011 pas ici au deffous de q, les ziczacs marqués £, £ fig. 8 ; Si les trachées qui font étendues en ligne droite dans le tuyau q f fig. 9, font pliffées en y y dans le tuyau de la figure 10. Dans cette dernière figure les bouts de ces trachées ne vont que juf¬ qu’en u u, parce que le tuyau de la refpiration r f, Ppp iij 488 MEMOIRES POUR L’HlSTOÏRE defcend jiifqncs-Ià, :,/, v.V.i J. . ‘1 +■ Fuji!' 1 ' 4 des Insectes. XII. Mcm. 497 DOUZIEME MEMOIRE. DES MOUCHES A DEUX AISLES QUI ONT L’AIR DE BOURDONS; ET DE LA MOUCHE DU VER DU NEZ DES MOUTONS. ES bourdons, comme les abeilles, font armés d’ai- J_jguiilons; comme elles, ils vont faire des récoltés de cire Si de miel fur les fleurs ; mais ils different des abeilles, en ce qu’ils ont le corps plus gros & plus court propor¬ tionnellement à leurs autres parties : leurs ailes moins lon¬ gues que celles des abeilles, font obligées de s’agiter avec plus de vîtefle, pour foûtenir une malle plus lourde par elle-même. De-la naît un bourdonnement, auquel, com¬ me nous l’avons déjà dit, ces mouches doivent le nom quelles portent. Ce qui frappe le plus dans la plupart des efpeces de bourdons, & ce qui augmente confidérable- ment leur volume, c’eft qu’ils font extrêmement velus ; leur corcelct fur-tout l’efl beaucoup. Il y a des bourdons qui font de très-grofles mouches, & il y en a qui font des mou¬ ches d’unegrofleur moyenne; enfin il yenad’auiïi petits, & bien plus petits même que des abeilles. Si on s’en fioit aux premières apparences, on n’héfiteroit pas à prendre certaines mouches à deux ailes pour des bourdons d’une petite efpece, & d’autres pour des bourdons de moyenne grandeur. Ce n’eft qu’après avoir examiné ces mouches avec quelqu’attention , qu’après avoir vu qu’elles n’ont point une trompe lèmblable à celle des bourdons, & qu’une 49S MEMOIRES POUR L’HISTOIRE paire dalles leur manque, qu’on reconnoît quelles 11e font pas de leur claffe. Les mouches àdcux ailes qui reffemblent aux bourdons, different non-feulement entr’clles en elpece & en genre, il y en a qui font de différentes claffes; il yen a qui ont- des trompes, & il y en a d’autres auxquelles 011 trouve à peine une bouche. Mais ce n’efl pas par leurs formes que ces mouches peuvent le plus picquer notre curiohté, elles ne font pas auffi propres à nous intéreffer par ce quelles font, que par ce quelles ont été. Toutes ont été des vers, à plufieurs efpeccs defquels la nature a affigné pour les faire croître, des habitations qui nous doivent paroître bien fingulieres. C’eft dans les inteffnsdes chevaux qu’une efpece de ces vers doit prendre fon accroiffement. Des vers d’une autre efpece 11e peuvent fe trouver bien que fous l’épaiffe peau des bêtes à corne; chaque ver frit élever fur le dos du grand animal, ou ailleurs. une grnffe tumeur qui lui fournit tout ce qui lui eft nécefîuire pour fa nourriture & fon logement, & du milieu de laquelle il peut refpirer l’air. A la fuite de ces vers, finguliers par les endroits où iis croiffent, nous croyons en devoir ajouter une efpece qui fe métamorphofe en une mouche à deux ailes qui 11e reffemble pas aux bourdons; nous croyons y devoir placer ces vers qui ne peuvent croître que dans les fînus du nez du mouton: ce n’efl que là qu’ils peuvent trouver une mucofité qui efl leur aliment néceffaire. Au relie toutes les efpeces de mouches à deux ailes & à forme de bourdons, n’ont pas été des vers qui fe nourriffent dans des animaux vivans,ou au moins de matières animales; il y en a des efpeces dont les vers vivent de matières végétales; nous allons même donner d’abord l’hifioire d’une de ces mou¬ ches dont le ver fe tient dans l’intérieur de certains oi¬ gnons de fleurs, & nous viendrons enfuite à fhiftoire des autres vers. Les des Insectes. XII. Afetn. 499 Les curieux qui cultivent les fleurs avec tant c!c loin , qui nous procurent le plailir de voir dans leurs jardins ce que la nature peut montrer de plus fléau pour la vivacité, l’éclat, la variété, les comflinailons & les arrangemens des couleurs, ces curieux qui femfllent forcer la nature à nous faire voir en ce genre de nouvelles beautés, ou à expofèr à nos yeux celles quelle tenoit cachées; ces curieux, dis- je, ont à défendre leurs plantes contre bien des infectes difïërens, dont les uns les attaquent hors de terre, & dont les autres les attaquent fous la terre même. Mais les ama¬ teurs des fleurs pardonneront plus volontiers à I’inlêéle, dont je veux parleï à préfent, de ronger les oignons de narcifle, qu’ils ne lui pardonneroient un goût auffi mar¬ qué pour les oignons de tulipe. I! y a quelques années que M. r Bernard de Juif eu me donna, dans le mois de Novembre, plu heurs oignons de narcifle tirés de terre depuis peu de temps, dans chacun defquels il y avoit un gros ver qui le rongeoit; je trouvai même deux vers lo’gés dans un de ces oignons. L’oignon qui efl habité, elt ailé à diftinguer des autres : il efl percé par un trou rond *, qui efl la porte par laquelle le ver efl entré très- * Pi. 34.%. petit, & peut-être encore la fenêtre par laquelle il a une l ’ a ' communication avec l’air extérieur. Si on prefle cet oi¬ gnon entre deux doigts, on ne lui trouve pas la fermeté qu’ont les autres oignons; les différentes robes, les feuil¬ lets dont il efl compofé/ont été coupés & mangés en partie. Il y a même plus de vuide & plus d’altération dans l’oignon, qu’il ne devroit y en avoir à rai! on de ce qui en a été ôté ; l’intérieur s’efl pourri ; chaque ver * efl entouré * Fig. 2. d’une efpcce de boue brune : ies excrémens liquides que j’ai vu rendre au ver, font propres à faire pourrir, à réduire en terreau les feuillets qui ont été hachés. + Dans l’in liant qu’on vient de tirer un de ces vers * Tome IV . Rrr 500 MEMOIRES POUR L’HlSTOIRE d’un oignon, on ne fçait pas diftinguer fa partie anté¬ rieure de la poftérieure, fes deux bouts font un peu poin¬ tus, & à peu près également pointus. L entredeux eft prefque cylindrique, mais ridé, & comme formé d’un grand nombre de libres annulaires pofées les unes auprès des autres. Mais le ver ne refie pas long-temps fans faire voir où eft fa partie antérieure; il n’a pas envie de demeu¬ rer où on l’a mis, il fuit autant qu’il le peut : pour cela, *PI. 34.. fig. H allonge fa tète, & fait fortir deux crochets écailleux * parallèles l’un à l'autre, dont le feui uf'age n’eftpas de dé¬ tacher la fubftance de l’oignon, le ver s’en fert auffi à fe tirer en avant. Mais pour mieux voir ces crochets, & toute la partie anterieure, ou tout ce qui tient lieu de tête, il faut preffer le ver; alors on le force de montrer les deux cro¬ chets prefque en leur entier. Depuis leur bafe, qui eft aftes large & épaiffe, ils vont en diminuant & en fè recour¬ bant fe terminer chacun par une pointe line tournée du côté du ventre; près de leur pointe & dans une afTés grande partie de leur longueur, ils font d’un brun pref¬ que noir, mais leur bafè eft blancheâtre. Au deflùs de * d > d ' chaque crochet eft une corne charnue * dont le bout eft refendu ; ce bout femble fait rie deux mammelonsqui peu¬ vent s’écarter l’un de l’autre tantôt plus & tantôt moins. Un peu plus loin & un peu plus bas que les cornes, * e - il y a de chaque côté une petite tache noire & luifante * que j’ai négligé d’examiner, parce que je ne fçavoispas, lorfque j’ai eu ces vers, que ceux de cette claffc ont ries ftigmates très-proches de leur bout antérieur; les deux taches font probablement les deux ftigmates antérieurs de celui-ci. Je me fuis mieux aflùré des ftigmates poftérieurs; pour les bien voir, il faut pourtant faire violence au ver, prefler fa partie poftérieure; on en fait fortir alors une efpccede des Insectes. XII. Mem. 501 barillet * brun ou prefquenoir, que le \cr tient fouvent * PI. 34.% caché entre les plis de les anneaux comme dans une el- 5 ‘ P' pece de bourfe; il retire même en dedans de Ion corps, des chairs de la partie poflérièure pour ménager la ca¬ vité néccffaire à ce barillet. Dans le bout 4 de cette partie * F;g ^ que nous nommons le barillet, lont deux petites cavités , dont le contour ell circulaire : au centre île chacune de ces cavités ell un petit grain noir qui paroit être la moitié d’une boule *. C’elt là que l'ont les lligmates. Le barillet * f,f. tient lieu à ce ver des deux tuyaux adofles, qui le trou¬ vent fur le derrière de plulieurs autres vers de la même dalle. Au deffous du barillet .font deux appendices charnus *, * Fig. <;.m, ou deux allés grands mammelons : cclt entre ces mam- m ’ melons qu’eü l’anus, c’ed de-là que j’ai vû fort ir de la liqueur. Lorfqu’on confidére à la loupe le corps de ce ver, on y apperçoit des poils femés en différents endroits, & les rides de les anneaux parodient chagrinées. J’ai mis dans des poudriers quelques oignons, dans chacun defquels un de ces vers étoit loge, & je les y ai entourés de terre de toutes parts ; j’ai mis d’autres oignons dans d’autres poudriers, & cela fans aucune terre; les vers des oignons des derniers poudriers, ont été les lêuls qui fe foient métamorpholes; les autres fe font trouvés ap¬ paremment dans un lieu trop humide, ils y ont péri. Les notions que nous avons priées des différentes manières dont les vers lé transforment, nous apprennent que ceux des oignons de narciffe doivent fe transformer d’abord en une coque Lite de leur propre peau. Cette coque * ell de * Fi â - 6 - la forme de celle des vers de la viande, mais confidéra- blement plus groffe, beaucoup plus ridée, & d’une cou¬ leur grife. En quoi elle diffère encore plus des coques desvers de la viande, c’tll que fur fa partie antérieure & 1 Krrij 502 MEMOIRES POUR L’HlSTOIRE * U- H- %• fupérieure elle a deux cornes * qui ne feront plus line nouveauté pour nous, elles font du même genre que les * Alan. xi. quatre que nous ont fait voir ci devant * ies coques des vers à queue de rat, ou plutôt du même genre que les deux grandes cornes tleces dernières coques,& elles par¬ viennent apparemment à être élevées fur la coque par une méclianique femblable à celle qui y éleve les autres. J’ai tiré des nymphes cle ces vers hors de leur coque, & j’ai vu alors que les cornes av oient à leur origine une * Fig. 7 & velue * plus petite que celle de chaque corne des nym- 8 ' u> "* plies des vers à queue de rat, mais qui lui étoit d’ailleurs femblable. Ces velfies de nos nymphes des vers des oi¬ gnons, dont je n’ai pas alors ailes fuivi l’origine, parce que je ne fçavois pas ailes quel pouvoir être leur ufage, ces velfies, dis-je, étoient pofées fur le corcclet; lans doute que chacune d’elles communiquoit avec un des Uig- mates; en un mot, ies deux cornes ne peuvent être que deux tuyaux qui portent l’air au corcelet. Quand l’infeéte perd la forme de ver, il perd lés anciens ou de les anciens organes de la refpiration, Si il lui en vient d’autres qui font les fonctions de ceux qu’il a perdus. C’eft dans les oignons mêmes que quelques-uns de ces vers le font transformés pour la première fois, & d’autres fe font transformés fur le fond du poudrier. Je n’ai pas fçu précifément dans quel temps, mais ce n’a été-qu’après * Fig. 9 & l’hiver. Enfin j’ai eu des mouches * qui font forties de quelques-unes des coques dès le commencement d Av ril, Se d’autres ne loin iorties des leurs que vers la fin du même mois. Quand on jugera fur les premières apparences, on prendra affinement la mouche qui vient du ver des oi¬ gnons de narciffe, pour un bourdon; par fon corps & par fon corcelet, elle a tout-à-fait l’air de certains petits DES I N S E C T E S. XII. Mem. 503 bourdons, & affes communs. La partie antérieure du cor- celet efl très-couverte de poils d’un jaune fauve ou feuille- morte; le refie du corcelet efl peu velu & prefque noir; le deffusdu corps efl couvert de poils fauves comme la par¬ tie antérieure du corcelet ; & le deffous du corps efl noir, il n’a que peu de poils roux. Mais les antennes de cette mouche, qui font des antennes à palettes,apprendroient qu’elle n’eft pas un bourdon, avant qu’on fe fut donné la peine de s’afîùrer quelle n’a en tout que deux ailes, qu’elle 11 en a point de petites cachées fous les grandes. Sa trompe* » PI. 34. % efl logée comme celle des mouches des vers à queue de 11 lz ’ rat, &. elle efl de même une trompe à levres charnues. Pour avoir l’hiftoire complette de cette mouche, il faudroit lui avoir vû fouiller la terre, comme il y a appa¬ rence quelle la fouille, pour parvenir à confier un œuf à chaque oignon de narciffe ; mais le hazard ne m’a pas fourni d’occafions de faire cette obfervation, & j’ai né¬ gligé de me les faire naître lorfque j’ai eu les mouches. Mais nous devons être bien moins étonnnés de ce qu’une mouche s’introduit fous terre pour dépofer fes œufs ou fes vers dans un oignon de fleur, que nous ne devons l’être de ce qu’une autre mouche,femblable comme la précédente, à un bourdon, a le courage de braver nos plus grands animaux, pour loger fes œufs dans leur pro¬ pre chair. Elle fait au même animal un nombre con- fïdérable de petites playes; chaque playe efl le nid d’un œuf, c’efllà qu'il doit être couvé par la chaleur du grand animal. Dès que lever eflforti de l’œuf, il fe trouve dans le lieu le plus convenable, dans un lieu où les alimens lui font fournis en abondance, où il efl défendu contre les injures de l’air, où il jouit en toute faifon à peu près du même degré de chaleur, &. où enfin il prend tout R r r-iij * PI. 36. i. 504 MEMOIRES POUR L’HlSTOIRE l’accroilfement qu’il doit prendre pour parvenir à être mou¬ che à Ion tour. Celont fur-tout nos bêtes à cornes qui four- nilfent ainfi de leur propre chair, de quoi nourrir des vers jufqu’à ce qu’ils l'oient devenus très-gros & en état de le transformer; c’eft au cleffous de leur épaiffe peau que ces versfe tiennent. Les endroits qu’ils habitent font très-mar¬ ques en certains temps, & très-ailés à reconnoître : au def- %. lus de chaque ver il y a une élévation, une tumeur * alfés femblable à ces bollcs qui viennent liibitement au front dans l’endroit où l’on s’eft donné quelque rude coup; aulfi nous lervirons-nous fouvent du nom de bolîé, pour déligner chacune deVces tumeurs du dos de nos bêtes à cornes, qui eft habitée par un ver. Les gens de la campagne font mieux inftruits de la na¬ ture & de la caufe de ces boffes, qu’ils 11c le font de plu- fieurs autres faits d’hiftoire naturelle, qu’ils feroient égale¬ ment à portée d’obferver; ils fçavent très-bien que chacune renferme un ver, & même iis fçavent que ce ver vient d’une mouche, & que lui-même lé transforme en mou¬ che ; à la vérité ils connoilfent mal cette mouche, du moins tous les payfans qui m’ont paru les mieux inftruits,& qui me l’ont voulu defigner, m’ont dit quelle étoit un taon, & ils donnent le même nom au ver même. Comme les taons font de toutes les mouches, celles qui font le plus achar¬ nées fur leurs bœufs, & qui en tirent le plus de fang, il étoit allez naturel de penfer que ces mêmes mouches, quand elles étoient vers, s’étoient nourries fous la peau du bœuf. M. Vailifnieri eft peut-être le premier qui ait bien connu la véritable mouche qui occafionne la naif- fance dés tumeurs des bêtes à cornes; il en adonné une hiftoire curicufc & intérelfante, & ornée d’une agréable érudition. Après l’avoir lue avec un vrai plaifir, je n’en des Insectes. XII. Mem. 3 0 5 eus que plus d’envie de voir de mes propres yeux,tout ce que M. Vallifnieri a rapporté de cette mouche & de fon ver. Je ne croyois pas pourtant que je dufle revenir à parler fur un fujet qui avoit été traité avec foin & avec élégance par ce célébré auteur, mais m’étant procuré des occafions d’obferver, plus favorables que celles qu’avoit eues M. Vallifnieri, il m’a été facile de voit certains faits mieux &. autrement qu’il ne les avoit vus, d’en voir même quelques-uns qui lui a voient échappé, & de reconnoître que le deffmateur & le graveur qu’il avoit employés, n’a- voient pas des talens dignes de l’hiftorien. Je reviens pourtant à dire, & avec fincerité, que la forme & le fonds de l’hiftoire qu’a donnée M. Vallifnieri de ce ver & de fa mouche, font excellens. Ce n’eft pas une grande mer¬ veille de voir quelque chofe de nouveau dans un objet qui a été examiné par de très-bons yeux, quand on s’cft mis à portée de le confiderer de plus près, & dans des pofitions plus favorables; alors des yeux moins bons peuvent voir ce qui a échappé à des yeux plus perçans. Chaque bofFe * a intérieurement une cavité qui efî un logement proportionné à la grandeur du ver, auffi la cavité & la bolfe croiflent-clles à mefure que le ver gran¬ dit. Ce Ffcfl guère que vers la mi-Mai qu’on peut voir des boffes dans toute leur groffeur. Des circoniiances parti¬ culières font quelles ne parviennent pas toutes à en avoir une égale. Les plus grofles ont environ 16. à i 7. lignes 3e diamètre à leur bafe,& elles s’élèvent d'un pouce, ou plus : h peine font-elles fenfibles avant le commencement de l’hyver, & pendant l’hyver même. C’eft ordinairement fur les jeunes vaches, fur les jeunes taureaux, ou fur les jeunes bœufs, en un mot fur des bêtes qui n’ont que deux ou trois ans, qu’on trouve le plus de ces boffes; il efl rare d’en voir fur de très-vieilles 506 Mémoires pour l’Histoire vaches, & fur de vieux bœufs. La mouche qui, en perçant la peau de l’animal, occafionne la naifïunce de ces tumeurs, fçait choifir (les peaux qui ne lui oppolent pas trop de rcfifîance; d’ailleurs des chairs tendres ne feroient-elies point les plus propres à fournir une bonne nourriture aux vers de la mouche! Et pourquoi l’inftinél qui la conduit à ne confier les œufs qu’à la chair des animaux de certaines efpeces,ne la conduiroit-il pas à préférer entre les chairs des animaux de la même efpece, celles qui font préférables l Le nombre des loffes qui le trouvent fur une même bête, eft égal au nombre des œufs qui ont été dépofés dans fes chairs, ou, pour parler plus exactement, au nombre des œufs qui ont réuffi, car tous apparemment ne viennent pas à bien ; mais ce nombre eft fort différent fur différentes bêtes à cornes. Sur telle vache on ne pourra voir que trois à quatre boffes, pendant qu’on en verra plus de trente à quarante fur une autre. Elles n’y font pas toujours pla¬ cées dans les mêmes endroits, ni arrangées de la même façon; affez ordinairement il y en a près de l’épinealu • fi S- dos *, mais il y en a qui en font éloignées, qui font pla¬ cées près des cuiffes & des épaules , ou près les cuiffes & fur les épaules mêmes: il y en a qui font ifolées, & il y en a de fi proches des autres, qu’elles les touchent par leur circonférence. Dans certaines places il y a trois à quatre tumeurs qui fe touchent toutes, & j’ay vû d’autres pla¬ ces où il y en avoit plus d’une douzaine arrangées aufîi près les unes des autres, qu elles le pouvoient être. Au refie, les betes à cornes de tous les pays ne font pas fujettes à avoir de ces boffes, on n’en trouve pointa celles qui vivent dans des plaines, & on en trouve ordinairement à celles qui vivent dans des pays de bois : inutilement en ai-je cherché pendant plufîeurs années de fuite fur les yaches de certains environs de Paris, fur celles de Charcnton par des Insectes. A 77 . Mem. 507 par exemple, fur d’affez grands troupeaux de vaches qu’on amène paître dans le parc de Vincennes, où il ne refie depuis plufieurs années que des taillis. Ces mêmes boffes l'ont très-communes fur les befîiaux à Réaumur, en Poitou, Si elles m’ont fait regretter bien des fois, de ce que le temps des vacances n’étoit pas celui de les obferver, & de ce que je me trouvois fixé à Paris dans la laifon où il failoit ies étudier. L’envie que j’en avois me fit penfer que je par- viendrois à en trouver plus près de Paris dans des cantons boiffés, Si tel efl celui où eft fituéeen Brie l’Abbaye des Religieufes de Malnoue, à cinq lieues de Paris ou environ. J’ai des occafions d’aller de temps en temps à cette Ab¬ baye, & je fçavois qu’on y nourriffoit un grand troupeau de vaches. J’y allai donc vers la mi-Mai, & ma pre¬ mière vifite y fut rendue aux vaches, qui répondirent très-bien à l’empreffcment que j’avois eu pour elles. De trente, i’en trouvai plus de quatorze à quinze qui avoient des boffes, Si plufieurs en ctoient très-bien fournies. Le taureau de cette troupe, fort Si vigoureux, âgé d’environ trois ans, en avoit auffi un grand nombre. Je me trouvai donc à même d’obferver ces boffes que j’avois tant defiré de voir : il eft inutile de dire que je 11e négligeai aucune des obfervations qu’il me fut pof- fible de faire pendant fept à huit heures que je refiai dans cette Abbaye. J’avois à choifir fur les différentes vaches, des boffes en prefque tous les états; il y en avoit de très- petites encore, Si il y en avoit de très - groffes, d’auffî groffes quelles doivent le devenir. J’en trouvai dont je jugeai que les vers étoient fortis depuis peu de temps,& j’en trouvai même une qui me parut être dans le mo¬ ment le plus favorable, & le plus difficile à faifir, dans ce¬ lui où le ver en fort, le ver étoit à moitié forti; mais il n’étoit plus en yie, il étoit mort dans l’opération. Une des Tome IV.. . SfL 508 MEMOIRES POUR L’HiSTOIRE obiervations des plus curieufes étoit de voir comment le ver parvient à fortir de l’habitation où il a pris tout Ton accroiliement; mais ni cette obfervation, ni beaucoup d’autres ne pouvoient être faites en un feul jour. Dans le troupeau de vaches il y avoit deux genifTes d’environ quinze à feize mois, mieux fournies qu’aucune des au¬ tres, de bofTes en tous états. Jamais on n’a eu autant d’envie de devenir maître de deux genifTes, que j’en eus de l’être de celles-là, ou au moins de pouvoir les pofTé- der chés moi pendant quelque temps; ce defir me tour¬ menta dès que je fus de retour. Madame de Breauté étoit alors Abbeffe de Malnoue; toute la Communauté a de¬ puis un an pleuré fà perte , comme celle de la plus ten¬ dre & de la meilleure des meres; aufïî a-1-elle conduit fa Maifon avec une bonté, une fageffe, & un éloigne¬ ment d’efprit de domination, &, pour ainfi dire, de lu- périorité, qui devroient être pris pour modèle parles Ab- befles qui font flattées du plaifir d etre aimées, & de rendre leurs Communautés heureufes. Je fçavois les bontés qu’a- voit pour moi cette digne AbbefTe, & je n’héfitai point à lui écrire que je ne pouvois vivre content fi je n’avois chés moi, à Charenton, deux de fes genifTes , au moins pendant quelques femaines. Ma demande fut reçue com¬ me je le l'ouhaitois, toute la Communauté, qui eft très- bien compofée, applaudit à la grâce qui me fut accor¬ dée. J’eus donc le plaifir, au bout de peu de jours, de •voir arriver chés moi les deux genifTes fi fouhaitées, & qui m’ont mis en état de faire toutes les obfervations que je vais rapporter. Ceux qui ont foin de conduire les befîiaux à la cam¬ pagne, fçavent, comme je l’ai déjà dit, que chaque bofîe contient un ver, iis fçavent même qu’il vient un temps- pu le ver en fort; iis difent que le ver perce la tumeur des Insectes. XII. Mem. 509 quand die eft à maturité. I^a tumeur dont le ver eft prêt à fortir, a un trou * aftes grand pour fè faire remarquer * PI. 36. h- par des yeux qui ne font guéres accoutumés à s’arrêter 3 ‘ lürde très-petits objets; mais cen’eft pas feulement lorf- que le ver eft bientôt en état de paraître au jour, que la bolfe dont il occupe la cavité, a une ouverture,elle en a une en tout temps. Le trou par lequel l’œuf a été in¬ troduit , a apparemment fubfifté; non feulement il ne s’eft point fermé, il s’eft aggrandi à mefure que la bofte a crû. Mais il vient à la vérité un temps où ce trou a befoin de croître, & où il croît bien autrement vite qu’il n’avoit fait auparavant. Le trou d’une de ces tumeurs pourrait ' néantmoins être aftes grand, & 11’être point vû par des gens qu’aucun motif ne porte à chercher à le voir ; il peut être, & il eft très-fou vent couvert par les poils de la peau. Pour m’aflurer fi toutes les boftes étoient percées, & pour être en état de mieux voir comment leur ouverture eft aggran- die iorfque le ver n’a plus à croître, je coupai avec des cizeaux, le poil à fleur de la peau * au deffus de huit à dix * des boftes de chacune de mes deux vaches; ces boftes furent comme rafées. Entre celles qui le furent , il y en avoit des plus grades & des plus élevées, des plus petites &des plus applaties ; toutes avoient un trou bien circulaire, mais d’un diamètre fort différent.Le diamètre du trou des plus grofles boftes étoit d’environ trois lignes, & celui du trou des plus petites n’étoit pas d’une ligne. Le contour d’une bofte ifolée* eft ordinairement aftes rond, mais le * Fig. 2. contour de celles qui font raftemblées en groupe * eft * Fig. 3. moins régulier, elles s’oppofent réciproquement à leur ac- croiftement vers le côté où elles fe touchent. Je n’ai rien trouvé de confiant dans la pofition du trou, je l’ai vû très-rarement au fommet de la bofte, & aftes fouvent très- proche de quelqu’endroit de fa circonférence *. Le hazard * Ffr 2 * S ff ij 510 MEMOIRES POUR L’H I S T O I R E a voulu au contraire que M. o Vallifnieri ait toujours vû le trou placé au milieu de la boffe. Nos observations peu¬ vent pourtant lé concilier jufqu’a un certain point. Les plus greffes tumeurs lé feront plus attirées que les autres, i’atterition de ce célébré Auteur; & dans les grolfcs tu¬ meurs le trou m’a paru bien plus voifin du Sommet, qu’il ne l’eft dans les petites. Tel trou qui étoit proche de quel- qu’endroit de la circonférence d’une bolfe petite & ap- platie, je l’ai vu alfcs près du milieu de la même bolfe, lorsqu’elle a eu pris tout Son accroilfemcnt. Il eü bien elfentiel au ver que le trou de la tumeur relie toûjours ouvert,c’ed par ce trou qu’il conServeune communication avec l’air qu’il a befoin de relpirer; aulïi le ver ell-il preSque toûjours dans la pofition la plus fa¬ vorable pour recevoir l’air. Ses grandes bouches de la ref- piration, fes plus grands ûigmates, comme ceux de tant de vers dont nous avons parlé. Sont à Sa partie pollé- *Pi. rieure, directement même à Son bout pollérieur *; or le ver preSque toûjours poSé ayant le derrière en haut 8 c vis-à-vis du trou. C’ell ce que les yeux Seuls Sont en état d’appercevoir lorfque le trou ell grand, & qu’ils apper- çoivent avec le Secours d’une loupe dans des trous ailes petits, parce que le derrière du ver y ell Souvent de ni¬ veau avec le bord intérieur du trou, 8 c que l’endroit où font les deux principaux organes de la refpiration, ell * F;g. 3 & marqué par deux croilfans allés confidérables *, ôc plus è‘f>f k bruns que le relie. Le ver de la tumeur d’un animal ell un ver d’une galle animale; nous n’avons pas autant d’exemples des galles de ce genre, que nous en avons des galles végétales. Quand * Tome III. nous avons décrit * les Surprenantes variétés que ces der- Mem. xu. n ié r es nous offrent, nous n’avons point vû qu’il fûteffen- îiel aux inlédes qui les liabitent, de fe conferver une des Insectes. XII. Mem. 511 communication avec l’air extérieur; nous n’avons pointvû d’ouvertures fenfibles & confervées pour laifler pafler i’air dans l’intérieur de la galle d’un arbre. Le ver qui habite celle-ci, auroit-il moins beloin de refpirer l’air, que le yer qui habite une galle de chair! Non fans doute, mais les ouvertures par lefquelles l’air parvient à l’habitant de la galle ligneufe, n’en font pas moins réelles pour être pe¬ tites au point de nous échapper. Nous fçavons que quel¬ que foin qu’011 apporte à faire entrer un bouchon de bois dans un tube de verre, le mercure dont on remplit ce tube, n’y eft pas à l’abri de l’aétion de l’air qui pefe fur le bouchon, que cet airpalfe au travers du bouchon , & pefe fur le mercure du tube : l’air peut donc palfer aufïi au travers des parois de la galle ligneufe, quand il n’y refteroit ni trou ni fêlure fenlible; mais l’air ne peut pas paffer de même au travers des peaux & des membra¬ nes des animaux. Le mercure fe foutient pendant quel¬ que temps dans un tube bouché avec de la velfie de co¬ chon, comme il s’y foûtiendroit h le tube avoit été bou¬ ché de fa propre matière au feu de la lampe. Le feul ufage du trou de nos galles ou tumeurs ani¬ males, n’eft pas néantmoins de donner entrée à l’air, il y fuffiroit quand il feroit plus petit qu’il ne l’eft dans les temps où il a le moins de diamètre; fon autre ufage, au moins auffi important, nous oblige de conhdérer l’inté¬ rieur de la cavité, le logement du ver, dont la capacité eft telle qu’il s’y peut retourner; il ne la remplit pas, à beaucoup près, en entier. Pour voir l’intérieur de cette cavité, j’ai ouvert quelques bolfes foit avec un rafoir, foit avec des cizeaux, opération qui ne pouvoit manquer d’être douloureufe à la vache, & quelle ne fouffioitpas patiemment. On devoit s’attendre à trouver l’habitation du ver auifi dégoûtante que je l’ai trouvée; je n’enfçaurois Sff iij £12 MEMOIRES POUR L’HISTOIRE donner une vraie image fans en rappelierde defiigréables, Le ver fe tient dans une playe affés confidérabie, où il Te doit faire une fuppuration, une partie de la cavité ne peut donc manquer detre remplie de pus. La bofl’e eft une efpece de cautère qui a été ouvert par la picquure de la mouche, comme les cautères ordinaires le font par un cauftique; lever entretient ce cautere, il l’empêche de fe fermer. Si le pus qui eft dans la cavité, celui qui s’y forme journellement, n’avoit point d’iflùe, chaque tu¬ meur deviendrait un abfcès confidérabie dans lequel le ver périrait;mais le trou de la bofte,qui donne entrée à l’air, permet au pus de fortir,cepus colle fouventenfemble les poils qui font au deftùs des petits trous; quand il fe defteche, l'oit autour de ceux-ci, foit autour des plus grands trous, & qu’il y prend confiftance, il forme dans * pi. 36.%. l’intérieur de l’ouverture, une efpece d’anneau * qui pa- 3 * roîtfait d’une matière femblable à la chaftîe des yeux. Notre ver a donc été deftinc par la nature à croître dans un endroit où fe trouve la plus dégoûtante de toutes les matières. Cette matière occupe le fond de la cavité, & c’eft auffi au fond de la cavité qu’eft la tête du ver; fa tête eft donc continuellement ou prefque continuellement dans le pus, & fans doute quelle y eft très-bien. Malgré tout ce que notre imagination nous en peut dire, la tête du ver y eft plongée dans une elpece de lait ou de chyle plus ani¬ mal & plus préparé que le lait & le chyle ordinaires : car qu’eft-ce que ce pus! eft-il autre chofe que des matières animales, & lur-tout des chairs bien diftoutes, & pour ainfi dire, bien digérées & mêlées avec ce qui s’échappe des vaifteaux ouverts! Enfin ce pus paraît être l’unique aliment accordé au ver, car il n’y a pas d’apparence que ce ver vive comme ceux des mouches de la viande, de la chair même, qu’il en faft'e pafler de petites parcelles dans fon eftomach. des Insectes. XII. Mem . 513 Nous décrirons dans un moment tout fon extérieur, êc nous pouvons dire d’avance qu’on ne trouve point à la îête, des crochets écailfeux, pareils à ceux avec lefquels les autres vers dépiécent la viande : le ver des tumeurs ne paraît avoir qu’une bouche propre à recevoir la liqueur dont elle eft toujours environnée. L’état d’une bête à cor* nés, qui a fur l'on dos trente à quarante bolTes, ou plus, ferait un état bien cruel, un terrible état de fouffrance, fi fa chair étoit continuellement déchiquetée par trente à quarante gros vers ; mais il y a toute apparence qu’ils ne font point fouffrir,ou qu’ils ne font fouffrir que peu le grand animal : chaque ver ne fait par rapport à la playe dans la¬ quelle il fe trouve, que ce que fait une tente par rapport à une playe ordinaire, ou ce que fait un pois par rapport à un cautère. Aulfi les bêtes à cornes dont le corps ch le plus couvert de bolfes, non-feuiement ne donnent aucun ligne de douleur, ii ne paraît pas même que ces bolfes leur foient préjudirinhlM en aucune façon Cie qui prouve très-bien quelles ne leur font nullement nuihbles, c’efl que les payfans, non - feulement ne craignent point de trouver de ces bolfes fur leurs beftiaux, ils font même bien ailes de les y voir; ils achètent les jeunes bêtes qui en ont, par préférence à celles qui n’en ont point, ils les regardent comme les mieux venantes; ils en jugent d’après la mouche qui leur a confié fes petits, & ils en jugent bien; car au moins y a-t-il apparence que la mouche picque, foit en été foit en automne, plus volontiers que les autres, les bêtes qui ont la peau tendue & relevée, celles qui font gralfes; & les bêtes qui étoient gralfes alors, foûtiennent mieux l’hiver que les autres, & toutes chofes d’ailleurs égales, va¬ lent mieux au printemps. Les Médecins qui ont de ia con¬ fiance dans les cautères, qui les regardent comme de bons 514 MEMOIRES POUR L’HISTOIRE remèdes, ne croiront-ils pas avoir de quoi jufîificr leur fen- timent & leur pratique, en ce que des bêtes à cornes, qui fe portent très-bien, ont quelquefois fur le corps trente à quarante bofl'cs, dont chacuneeft équivalente à un cautère! Sans ouvrir les tumeurs, 011 peut avoir une preuve qu’elles contiennent du pus; on n’a qu’à les prelîer, 011 fent fouvent une fîuéïuation, Si fouvent même on fait fortir par leur trou, de la liqueur purulente. Aux preuves que j’ai rapportées cy-devant, que le ver fe nourrit de cette vilaine matière,j’en adjouterai encore une. En général les infedes fe préparent à leur métamorphofe par la diète ;& notre ver ne fort de fa tumeur, que lorfqu’il efl prefl de fe transformer. J’ai preffé des tumeurs hors defquelles des vers venoient de le tirer, Si j’en ai fait fortir une quantité tic pus, de la confftance & de la couleur de celui que les Chirurgiens appellent louable , qui furpaffoit confiderabfe- înent la quantité du pus que j’ai trouvée dans les tumeurs que j’ai ouvertes, dont les vers n’étoient pas fi à terme; il y en a de celles-ci où l’on ne trouve cjuo très-peu de pus. Les excrémcns que le ver jette, car je lui en ai vu jetter fouvent, font liquides; ils ont auffi de la relTemblance avec le pus, mais ils font plus liquides & moins jaunâtres. On pourrait croire que la matière qui fe trouve dans la cavité, n’eft autre chofe que les excrémens, qui, en y féjournant, fe font épaiflis, & ont pris une couleur plus foncée, (i on 11e fçavoit pas que les parois de cette cavité doivent néceffairement fournir une matière purulente. En preffant jufqu’à un certain point une tumCur habitée, on en fait non-feulement fortir du pus, on en fait même quelquefois fortir, Si plus aifément, le ver, fur-tout lorfque le trou commence à s’aggrandir. Quoique le diamètre du trou ne réponde pas à celui du corps de l’infeéîe, celui-ci ne laiffe pas d’aller en avant,fes chairs peuvent des Insectes. XII. Mem. 515 peuvent prêter; & il fuffit que chacune des portions qui pafient fucceffivement par le trou, foit forcée, dans le temps quelle paffe,à devenir plus menue quelle ne l’eft naturellement. Tant que ces vers font petits, ou d’une grandeur mé¬ diocre, ils font blancs, du même blanc que celui des vers de la viande & de beaucoup d’autres; mais quand ils font près d’avoir toute leur grandeur, ils prennent une nuance de brun qui n’efl pas également étendue par tout. Enfin, quand le temps ou ils doivent fortir de leur cellule, appro¬ che, ils deviennent d’un brun plus foncé, qui efi une efpéce d’ardoifé. Entre les vers à terme, il y en a de plus & de moins grands; différentes circonfiances peuvent con¬ tribuer à faire prendre aux uns plus d’accoiffement qu’aux autres, ce qui leur eft commun avec tous les animaux; & il leur efl apparemment commun avec la plupart des autres infeéles, que ceux qui fe doivent transformer en des mouches femelles, font plus grands que ceux qui doivent devenir des mouches mâles. Les plus grands de ceux que j’ai mefurés, avoient treize à quatorze lignes de longueur, & fept lignes & un peu plus de diamètre, dans l’endroit où le corps étoit le plus renflé. De tels vers peuvent eftre placés parmi les gros infeéles. Leur forme * n’offre d’abord rien de remarquable; * leur corps efl dépourvu de jambes; le bout antérieur * efl 1 & -• un peu moins gros que le poflérieur, & c’efl plus près de celui-ci que de l’autre, que le corps efl le plus renflé. On peut compter en tout onze anneaux, en y comprenant celui où efl la bouche; le huitième efl celui qui a le plus de diamètre. Les anneaux ne font pas fphériques, une de leurs moitiés efl plus applatie que l’autre; ceci ne feroit pas une particularité, mais ce qui en efl une, c’efl que la moitié la plus platte efl fur le dos. Il en arrive que le Tome IV. .Ttt * PI. 37- fi S- z. * Fig. I. * Fig. I. ^ Fig. 4& 6. * Pî. 3 6. fig. $.î,t,ee,aa. * F*g- 5’ ee > ■a. * cc. 51 6 MEMOIRES POUR L’HlSTOIRE corps du ver efi un peu concave du côté du dos *, au lieu qu il ell convexe du côté du ventre *. Cette conformation dt contraire à celle des autres vers, 6c à celle de prefque tous les infedles dépourvus de jambes, 6c il convient quelle le foit; un inleéle fans jambes, qui fe tient 6c fe meut ordinairement fur un terrein plan, pour appliquer fou ventre contre ce terrein, doit l’avoir moins arrondi ou plus applati que le dos ; mais un ver qui ne peut trouver d’appui que contre la furface concave d’une calotte, telle qu’eft I intérieur d’une tumeur, pour appliquer Ion ventre contre une telle furface, doit l’avoir convexe. Au relie, ce qui nous détermine à appeller le côté convexe le côté du ventre, c’ell qu’il eft le côté où ell la bouche, 6c celui dont l’anus ell le plus proche, 6c enfin celui qui fera le ventre de la mouche. Six filions alfés marqués, 6c deux plus foibles ou moins profonds, font tirés de la partie antérieure à la poltérieure. Deux des grands filions, 6c les plus érartés l’un de l’autre, font fur le dos *, 6c quatre font dillribués deux à deux fur chaque côté, 6c y font proches l’un de l’autre; les deux autres font fur le ventre. Ces filions, qui entaillent les anneaux *, rendent la furface du ver raboteufe; il y a encore des divifions, mais moins marquées, qui hachent les arcs compris entre des filions. D’ailleurs, toute la peau du ver paroît à la vue fimple comme chagrinée, mais à grains prodigieufement fins. Ces grains demandent à dire examinés avec une forte loupe, elle fait voir qu’ils font des épines plattes, triangulaires, 6c de couleur jaunâtre *. L’arrangement de ces épines mérite attention. Pour le faire mieux entendre, fixons-nous à une portion * d’un anneau antérieur, prife du côté du ventre, ou du côté convexe entre deux filions. Cette portion ell elle-même comme diviféeen deux par une cannelure irreguliére 6c annulaire *, comme des Insectes. X//. Mem. 517 formée de deux portions d’anneaux * appliquées 1 une contre l’autre. La partie antérieure * eft garnie d’épines miles en quelques endroits par bouquets, & toutes tour¬ nées vers le derrière. La partie poftéricure * de la même portion d’anneau eft plus couverte d’épines que la précé¬ dente, elle en eft comme carrelée, aulli les bennes lont- elles plus petites ; mais ce qui eft le plus à remarquer, c’eft quelles font dirigées dans un l'ens oppofé à celui des pré¬ cédentes. Le fond des cannelures n’eft que g rai né, & n’a point d’épines. Du côté du ventre, on trouve des épines difpofées de la forte, à toutes les portions d’anneaux compriles entre des filions, excepté lur le onzième & le dixiéme *; le neuvième en a, mais moins que ceux qui le précédent. Le côté concave, ou le dos, n’a de pareilles épines que fur les trois premiers anneaux; ailleurs il en eft dépourvu, ou ellesyfont fi petites, que vûes avec une forte loupe, elles ne parodient que des points. Les ufàges pour lefquels toutes ces épines ont été données à notre ver fans jambes, font ailés à deviner; il s’en fert pour fè fixer, & il s’en fert auffi pour changer de place; il gonfle & appuyé contre la chair qui fait les parois de fa cavité, la portion d’un anneau, ou des portions de plufieurs anneaux qui ont des épines dont les pointes font tournées vers le derrière, lorfqu’il veut fe pouffer en avant, ou fe tenir contre l’effort qui le poufferoit en ar¬ riére *; au lieu qu’il gonfle des portions de plufieurs an¬ neaux qui ont des épines tournées vers la tête’ 1 ', & il les preffe contre les parois de la cavité lorfqu’il veut tenir con¬ tre les efforts qui le pouffent en devant, & lorfqu’il veut aller à reculons. Les épines ne dévoient lé trouver que lur la partie convexe, & au plus, fur les premiers anneaux de la partie concave, parce que celle-ci eft moins concave que le refte; il ne devoit pas auffi y en avoir lur les derniers Ttt ij * ee,cc,aa, * ee. * a a. * Pt. 37-%» * PI. 3 6. figi ee. * tt, aa+ £l8 MEMOIRES POUR L’HiSTOIRE anneaux qui font toujours proche du trou. Enfin , ces épines peuvent par leur frottement, irriter l’intérieur de la playe, y cauièr un épanchement de lue, & une fup- p u rat ion nécelfaire au ver. Nous avons trouvé jufqu’ici deux crochets, ou au moins un crochet au-deffus de la bouche des vers que nous avons mis dans la première cbffe de ceux des mou¬ ches h. deux ailes. Nos vers des tumeurs des bêtes à cornes, * PI. 37. fig. 0 nt l a bouche placée * comme l’ont les vers de cette cl allé, mais iis 11’ont pas de crochets, du moins n’ai-je pû les forcer à m’en montrer. A la place où devraient dire les *c,c. crochets, font deux petits boutons * écailleux d’un brun prefque noir, qu’on regardera, fi l’on veut, comme ana¬ logues aux crochets, pour être en droit de biffer ces vers des tumeurs, dans la claffe rie ceux avec lefquels ils ont d ailleurs bien des rapports. La bouche n’efl qu’une cavité dont la moitié poftérieure efl environnée de quatre mammelons charnus très-moufles. C’eft à la partie anté- n c, c. rieure que font les deux boutons noirs *, ils s’y touchent; à côté de chacun de ceux-ci efl un mammclon charnu, plus petit que ceux dont il vient d’être parlé : une por¬ tion d’anneau garnie d’épines, forme comme une levre fupérieure. Avant que de quitter la partie antérieure, nous devons *Fig. s-re, faire remarquer une efpece de cordon * plus liffe & plus blancheâtre que le refie, qui partage en deux le bout du ver; il paffe au-deffus de la bouche, il s’étend enfuite de chaque côté, fur le fécond, le troifiéme & quatrième anneau; & près de la fin de celui-ci, il fe recourbe vers le dos, pour fe terminer par un filet. Ce cordon marque * Fig. 10& déjà fur la peau du ver le contour de la pièce *, qui doit être détachée & foulcvée, lorfque l’infeéle devenu mou- * Fig. 9 & che voudra fortir de la coque * qu’il s etoit faite de fa propre peau. des Insectes. XII. Mem. 519 Le bout poflérieur du ver ed allés fou vent terminé par un plan circulaire + . J’ai vu plufieurs fois ce bout bien plat, *PI. 37. %. à des vers qui étoient encore dans leur tumeur,mais qui fe difpofoientà en fortir,&. qui avoient élevé leur derrière jufqu’au bord extérieur du trou *; & jamais je n’ai fi bien * Fig. 5; vu l’arrangement des parties qui s’y trouvent, que dans ces dernières circondances. Le ver en vie qu’on tient à la main, fronce le bout de fon derrière, au lieu qu’il l’étend & le déride, lorfqu’il ed tranquille dans fon habitation. Le plan à peu-près circulaire qui termine fon corps, ed divifé en deux parties + , dont l’une un peu plus petite que l’autre, *Fig. 3 St ed la plus proche du ventre ou du côté convexe, & dont tut> la plus grande ed, par conféquent, la plus proche du dos. ■La féparation entre ces deux portions, ed marquée par une efpece rie ligne tirée comme une corde de cercle; c’ed dans le plus grand fegment que fe trouvent les deux grands digmates podérieurs, analogues à ceux des autres vers. Deux pièces brunes *, dures comme de la corne, qui * r, r. ont du relief, & qui font contournéesen croiflant prefque fermé, & dont les bouts font moufles, forment chacune l’enceinte d’un digmate *. Les deux croiflàns l'ont tournés * l’un vers l’autre : à peu-près au centre de chaque croilfant, ed un petit rond blanc, qui ed fans doute un digmate. Mais ce qui m’a paru de plus particulier, ce qui m’avoit échappé fur les vers que j’avois confïderés pendant que je les tenois à la main, & qui a échappé à M. Vallifnieri, qui n’avoit pas eu occadon apparemment de bien voir ces vers dans leur trou ; ce qui m’a, dis je, paru particulier, c’ed qu’en dehors de cette efpece de corde qui fait le partage des deuxfegmens, on apperçoit huit petits trous, dont le contour ed un peu brun. Ils fl nt rangés régu¬ lièrement fur une ligne droite comme les trou? d une flûte. On trouve aufli quelques autres petits trous en T tt iij 520 MEMOIRES POUR L’HlSTOlRE * PI. 37. fig. dehors de la ligne. Un peu plus loin, on voit des chairs * 3 * a ' relevées & froncées, comme pour boucher une ouver¬ ture,qui ell celle de l’anus. J’ai vu aufti autour de l’anus quelques trous beaucoup plus petits que ceux qui font dilpofés fur une même ligne droite. L’endroit où font placés ces trous , me ht l'oupçonner qu’ils étoient des ftig- mates, que peut-être ils étoient deftinés à laifler lortir l’air, comme les grands fligmates, ceux des c roi (fan s, le lont à lui donner entrée. Pour avoir quelque choie de plus que des probabilités, je jettai quelques gouttes d’eau lur le *p J(y> derrière d’un ver* qui montroit très-bien tous ces petits trous; mon but étoit de voir h des bulles d’air fortiroient des petits trous; elles dévoient être fenfibles, lorlqu’elles paflferoient au travers de l’eau. Mais l’eau ne plût pas au ver, elle le détermina à le renfoncer dans fa cavité ; il s’éleva enfuite, & le rapprocha ries bords de l’ouverture, il vou- Joit le débarralfer de l’eau qui I’incommodoit. Il ht lortir, comme je m’y attendois, pluheurs bulles d’air, mais je ne pus juger avec alfés de certitude, d’où elles étoient parties, fi c’étoit des trous rangés fur une ligne, ou des ftigmates des croiftans. Le hazard me fervit mieux dans une autre circon- ftance ; il me mit à portée de faire l’oblèrvation par rapport à laquelle mes premières tentatives avoient mal réulîi. Un matin j’apperçûs un ver dont le bout poftérieur étoit ?» Fig. 3. tout proche de l’ouverture du trou *, & je remarquai que ce bout étoit couvert d’une couche d’une liqueur aufli limpide que l’eau la plus claire, quoiqu’elle eût plus de conhftance ; elle n’étoit autre chofe que les excrémens que le ver venoit de rendre. J’eus bientôt le plaifir de voir fous cette épailTe liqueur, la hle de bulles d’air que j’avois inuti¬ lement tenté de faire paroître fous l’eau. Jediftinguai très- bien fept bulles rangées fur une même ligne. Ces bulles ainfi difpofëes, ne pouvoient eftre formées que par l’air des Insectes. XII. Mem. 521 quefept des petits trous avoient rendu. Il elî donc certain au moins que ces trous font des bouches par lefquelles l’air fort du corps du ver. D’autres elpeces de vers, aux¬ quelles nous n’avons pas apperçu ces trous, peuvent les avoir; peut-être que les leurs font beaucoup plus petits, Si qu’ils nous ont échappé par leur petitefle. Mais il elt temps de voir comment le ver qui a pris tout fon accroilfemem, parvient à fortir d’une habitation où il ne lui convient plus de relier. Quoique la porte, l’ouverture d’une grolfe bolfe foit déjà plus grande que celle des petites, elle 11’eft pas encore proportionnée au volume du corps du ver. Le ver, quoique gros, pourroit abfolument palfer par un trou allés petit, car la pref- fion des doigts, en force de gros à fortir par de petits trous; mais il ne feroit pas dans le pouvoir du ver de mettre fon corps à une fi grande toi ture, de le faire palfer, pour ainfi dire,à la filiere. M. Vallifhieri apenfé qu’à mefureque la bolfe grolfilfoit, la peau qui la cou¬ vrait devenoit plus mince, Si que le trou croilfoit en même-temps; il peut bien fe faire que la peau diminue d’épailfeur en s’étendant, mais ce dont elle diminue n’elî pas fenfible. J’ai ouvert une bolfe dont le ver venoit de fortir, Si j’en ai ouvert une qui étoit encore applatie, je 11’ai pas trouvé fenfiblement moins de réfidance à couper la peau de la première, qu’à couper la peau de l’autre, Si mes yeux n’ont pu appercevoir de différence entre leurs épailfeurs. D’ailleurs, la peau pourroit s’émincer fans que le trou en devînt plus grand; il feroit même plus favorable à l'augmentation du diamètre du trou, que la bolfe devînt plus grolfe, fans que la peau devînt plus mince Si plus étendue, car alors la peau lailferoit du côté du trou plus de vuide, un vuide proportionné à l’augmentation de là furface de la bolfe. Mais ce n’eft point du tout par cette '$22 MEMOIRES POUR L’HISTOIRE méchanique que ie diamètre du trou efl augmenté. Des bolfes devenues auffi grandes qu elles le doivent devenir, ont encore des trous beaucoup trop petits pour donner paflage au ver ; c’efl à lui à rendre le trou auffi grand qu’il lui convient qu’il le foit: la nature en a appris au ver le plus fur, le plus doux Si le plus fimple des moyens, c’efl celui auquel nos Chirurgiens ont iouvent recours, pour tenir des playes ouvertes, ou pour étendre leur ouver¬ ture; ils tiennent des tentes preflees dans le trou qu’ils veu¬ lent aggrandir. Deux ou trois jours avant celui où le ver doit fortir, il commence auffi à faire ufàge de fon der¬ rière , comme d’une tente, pour augmenter le diamètre du trou de fon habitation. Nous avons fait remarquer qu’en d’autres temps il tenoit le bout de fon derrière à fleur du bord intérieur du trou, mais alors il fait entrer fon derrière dans le trou même, il l’éleve quelquefois jufqu’à la furface du bord extérieur; il le tient-là quelque temps; mais la gêne qu’il y fouffre, le détermine enfuite à l’en tirer : bientôt il l’y fait rentrer, pour l’en retirer encore ; c’efl; lin manège qu’il répété pendant deux à trois jours, Si plus il le répété de fois, & plus ileften état détenir long-temps fon bout portérieur dans le trou, il y efl moins à l’étroit. Lors même que l’on ne voit point le bout poflérieur du ver dans le trou, Si qu’il n’y efl pas actuellement, on peut connoître fi le ver a déjà commencé àl’aggrandir; on en a une preuve fi le contour du trou efl net, s’il n’y a point un anneau de matière purulente defféchée autour de fon bord intérieur. Le ver qui revient d’intervalle en intervalle dans le trou, ne permet pas au pus de fortir auffi: librement qu’il fortoit auparavant, & ne permet pas à celui qui fort, de fe durcir autour du bord intérieur du trou, ni même d’y relier. Enfin le jour qui précédé celui où le ver doit fortir, & quelquefois des Insectes. XII . Mem . 523 6 c quelquefois même un jour & demi ou deux jours au¬ paravant, on trouve prefque continuellement la partie pof- térieure du ver dans le trou : de temps en temps même le ver fait plus, il élevé fon bout poftéricur au de (Tu s des bords, tantôt d’une ligne 6c tantôt de deux ou trois, il le retire enfuite en dedans. En même temps qu’il force la circonférence de ce trou de devenir plus grande, il éprouve fi elle l’efl devenue au point où il lui convient qu’elle le Toit : quand il l’a rendue & reconnue telle, achever de fortir n’efl plus pour lui qu’une affaire de quelques minutes. J’ai louhaité de l’obferver dans cet infant même où il achevoit de fe mettre en liberté, 6 c j’y fuis parvenu fans perdre trop de temps à l’épier. J’ai pofîé des gens pendant plufieurs jours de fuite auprès de vaches dont les vers fe difpofoient à fortir, qui étoient chargés de venir m’avertir lorfque quelque ver s’éleveroit plus qu’à l’ordinaire au défais des bords de fon trou. Quand les deux derniers anneaux du ver font fortis du trou, ils ceffent d’être comprimés, ils fe gonflent natu¬ rellement; le ver cherche encore à les tenir le plus ren¬ flés qu’il lui efl poflible, 6 c à comprimer, à rendre plus menu l’anneau qui les fuit. Les anneaux fortis 6 c renflés *, trouvent un appui fixe en dehors du trou; alors le ver, en faifantdes efforts femblables à ceux qu’il fait lorfqu’il veut marcher à reculons, mais plus grands, tire hors du trou l’anneau qui y efl gêné. C’efl ainfi que tous les anneaux en font mis dehors fuccefflvement; mais le grand travail du ver efl fini, lorfque quatre anneaux font fortis: car, comme nous l’avons dit, le huitième anneau efl celui qui a le plus de diamètre; des efforts affés légers fuffifent donc pour tirer hors du trou les fept premiers anneaux ; ils compofent la partie antérieure du ver, un peu plus menue que la poflérieure. Tome IV * PI. 3 G, fl», 4 - . Vu II 524 MEMOIRES POUR L’HiSTOIRE Le ver fort donc de fon trou à reculons; quoique ce fait 11e l'oit pas de grande conléquence, je fuis facile que M. Vallifnieri l’ait nié, qu’il ait affûté comme un fait pofitif, qu’il n’y avoit que les vers qu’on obligeoit de fortir par la prefïion, qui fortiffent ainfi, & qu’il ait affuré que ceux qui fortent librement, fortent la tête la première, comme tant de vers de diverfes autres efpeces fortent des endroits où ils font trop à l’étroit : il a oublié d’avenir que c’étoit cette analogie qui le portoit à le croire. De plus d’une douzaine de vers qu’on a vu fortir chés moi librement de leurs trous, & dont j’en ai vu moi-même fortir cinq à fix, il n’y en a pas eu un feul qui foit forti la tête la première. Si M. Vallifnieri eût eu occafion d’ob- ferver des vers qui fe difpofoient à quitter leur habitation, un raifonnement plus fort que celui tiré de l’analogie, l’eut conduit à croire qu’ils fortent à reculons ; il auroit vu que chaque ver aggrandit fon trou, qu’il l’aggrandit en y introduifant fa partie poftérieure, en la failant élever même au-deffus des bords du trou. Il eft naturel que le ver achevé de fe tirer de ce trou, pendant que les efforts le tiennent élargi, & il 11e le feroit pas qu’il rentrât dans la cavité pour s’y retourner; il perdroit une partie du fruit delà première aélion, lorlqu’il reviendrait à agir contre des libres que leur reffort auroit rétablies en partie dans leur première filiation. Revenons à ce ver que nous avons laiffé tout prêt à être hors de fon trou; que va-t-il devenir, lorfqu’il fera fur le fommet du dos d’une vache, ou fur une de fes épaules, ou fur une de fes cuiffes, félon l’endroit où la boffe fe trouve placée! I! n’a été pourvu d’aucun des inflrumens propres à l’accrocher contre la peau : dans i’inftant même où il paraît au jour, il doit faire une affés grande chute; il roule un peu fur le corps du grand animal. des Insectes. XIL Mem. 525 & tombe dans l’inhant à terre. La nature qui i’a mis dans ia nécehité de faire cette chute, i’a mis auiii en état de ia foûtenir fans en fouffrir. Peu après que le ver cil tombé à terre, il marche, ou plutôt il iè traîne en avant, mais ailes pefammcnt & ailes lentement. M. Vallifnieri ne nous a encore dit que ce qu’il crôyoit devoir être, quand il l’a fait le traîner fort vite. Je crains bien que ce ne ibit encore en parlant félon l’ana¬ logie, qu’il a dit que le ver iè vuidoit alors. Aucun des vers que j’ai vus fortir des boifcs, ne sert vuidé; la réglé eit pourtant que les infeétes prêts à fe transformer, rejettent les excrémens de leurs inteilins; mais nos vers fatisfont apparemment à cette règle, pendant qu’ils font encore dans la cavité de la boife; c’eh ahes pour eux d’avoir à faire paifer leur corps par un trou étroit, fans entre¬ prendre de l’y foire paifer plein d'excrémens. D’ailleurs, la compreifion que chacun des anneaux fouffre fucceifi- vement dans ce trou, eh très-propre à obliger les intehins à fe vuider. Le ver étoit tout mouillé lorfqu’il eh forti, & il n’eh pas long-temps à l’air fans devenir fec. Je croyois qu’il fe traînoit en avant, pour chercher quelque terre dans laquelle il pût s’enfoncer, & où il reheroit tranquille & caché, pendant qu'il paiferoit par fes différentes métamorphofes. Pour aller au-devant des befoins d’un ver qui fe traînoit de fon mieux, je mis à fon paifage un petit tas de terre legere, il paifa deifus fans en tenir compte: je mis une autre fois devant un autre ver, delà bouze de vache, pour voir fi ce ne féroit pas une matière dans laquelle il aimeroit mieux entrer, mais il paha fur la bouze de vache, comme le premier avoit pahe fur la terre. J’ai mis d’autres vers dans des poudriers, foit avec de h terre feule, foit avec de la terre couverte d’un gazon verd; V u u ij 526 MEMOIRES POUR L’HiSTOIRE les premiers n'entrèrent point en terre, & les autres fe contentèrent de Te tenir dans le gazon. Le ver ne paroît chercher que quelqu’efpece de petite caverne où il puiffe relier tranquille. Deux de ceux qui loi tirent devant moi, parurent le trouver bien, lorfqu’ils furent arrivés fous une pierre, ils y relièrent. Mais je ne dois pas obmettre une remarque qui peut épargner du temps à ceux qui pourraient être curieux d’oblerver de ces vers dans Enflant ou ils fortent de la tumeur, c’efl qu’il y a apparence qu’ils ne prennent pour fortir, ni la nuit, ni les heures de l’après-midi, ni celles qui précédent midi de près. Il ell au moins arrivé que tous les vers qui font fortis chés moi librement de leurs boffes, en font fortis le matin. Ceux qui s’en font tirés le plutôt, s’en font tirés vers les fix heures 6c demie; 6c ceux qui s’en font tirés le plûtard, font tombés à terre vers huit heures du matin. Il ferait fmgulier qu’il fût arrivé à tous les vers que j’ai obfervés, de parvenir à fe mettre en liberté à ces heures précifément, fi ce temps n’étoit pas celui où il leur convient de s’y mettre. Il y a appa¬ remment des heures plus favorables que d’autres à cette aélion, une des plus importantes de leur vie. A midi 6c aux heures qui en font proches, ils courraient rifque détre expofés à un foleil trop ardent, dans l’inflant où ils pa¬ raîtraient au jour; la nuit efl peut-être trop froide, & les heures du foir font trop voilines du temps où l’air doit devenir froid. Le temps où le ver fort, efl celui où l’air commence à s’échauffer. Enfin, celui par qui ces vers ont été inflruits, a prévû des inconvéniens 6c des avantages que nous ne fçavons pas même imaginer. Au refie, la tumeur d’où un ver efl forti, s’affaiffe Lien vite, la peau que le ver avoit fait élever, s’applatit; & le pus qui étoit deffous efl chaffé; c’efl uneplaye qui efl des Insectes. XII. Mem. 527 bientôt guérie; j’cn ai vû qui ont été fermées au bout de vingt-quatre heures, mais j’en ai vû d’autres qui ont fuppuré pendant trois à quatre jours. Ces vers ne croilfent pas feulement dans les tumeurs des vaches, des bœufs, des taureaux , les mouches qui leur donnent naifiance, trouvent dans les bois d’autres grands animaux fous la peau defquels elles 1 çavent que leurs petits feront bien logés. Redi a parlé des vers de même elpece, qui le nourrilfent dans des tumeurs de cerfs; M.Val- lifnieri croit que les daims & les chameaux font fujets à avoir de ces boUcs, & que les chevaux en ont quelquefois. M. Lineus, fçavant naturalise, m’a appris que dans le Nord, les rennes étoient fujettes à nourrir fous leur peau des vers du même genre. Dans le temps où l’Abbaye de Malnoue étoit inftruite des recherches que je fàiiois fur ces bolfes, un cerf chafie par M. le Prince de Dombes & par M. le Comte d’Eu, vint finir fes courtes dans la cour de cette Abbaye ; les gens qui ont foin de l’œconomie du dehors de la maifon, remarquèrent que ce cerf étoit tout couvert de bofTes femblables à celles des vaches. Auffi les chafleurs fçavcnt non-feulement que les cerfs font très- fujets à avoir de ces tumeurs, & que l’intérieur de chacune efi occupé par un ver, auquel ils donnent le nom de taon; ils ont de plus fait un fyfieme phyfique fur l’ufage dont ces vers font au cerf. Ils ont imaginé qu’ils fervent à faire tom¬ ber fon bois; qu’il vient un temps où les vers s’acheminent fous la peau, pour fe rendre à la racine du bois; que tous ia rongent de concert ; & que le bois dont l’appui a été coupé, eft obligé de tomber. Ce que nous avons rapporté fur la manière dont chaque ver fort de la tumeur d’une vache, apprend affés ce qu’on doit penfer de ce que les chalfeurs débitent très-férieufement fur la caule de la chute du bois des cerfs. V u u iij * PI. 37. fig. 7 & 8. a,a. * Fig- 7- * Fig. 8. 528 MEMOIRES POUR L’HlSTOIRE Mais retournons aux vers que nous avons iaiiTes dans des retraites bien différentes de ccües où ils ont pris leur accroiffement, à ceux qui ont trouvé à fe logerions une pierre, ou à ceux que nous avons laiffé enfoncés dans le gazon de nos poudriers. Là ils ceffent de fe donner du mouvement, ils refient parfaitement tranquilles; ils y vont perdre leur état de ver, & paffer par les transforma¬ tions qui les conduifent à devenir des mouches. Ceux qui fe font tenus dans le gazon, m’ont appris qu'ils n’affec¬ tent aucune pofition ; j’en eus trois qui s’y placèrent la tête ernbas, comme chacun d’eux avoit été pofé dans la tumeur charnue; mais trois autres que j’eus quelques jours après, fe fixèrent dans le gazon ayant la tête en haut. Dès que le ver commence à être tranquille, tout fe prépare pour fa transformation; fa peau doit devenir, comme le devient celle de tant d’autres vers, la coque fous laquelle toutes fes métamorphofes s’accompliront, & elle devient une coque bien autrement folide que ne le font celles de la plupart des autres vers. La peau prend peu à peu de la confifîance, celle de quelques-uns de nos vers réfifle à une légère preffion des doigts, au bout de vingt-quatre heures, & au bout de deux jours elle efl en état d’en foutenir une affés forte. Les changemens qui fe font dans l’extérieur pendant que la peau fe durcit, ne font pas confidérables; le bout an¬ térieur * relie toujours moins gros que le poftérieur; il devient même,par rapport à celui-ci,un peu plus menu qu’il ne l’étoit auparavant. Le côté du ventre * prend plus de convexité qu’il n’en avoit, & au contraire du côté du dos, la partie qui efl compofée des quatre premiers anneaux, s’applatit, fon bout fe rçleve de manière que cette partie fait un angle obtus avec la partie poflérieure qui efl plus arrondie*; les anneaux s’effacent un peu , ils deviennent plus foiblement marqués : enfin la couleur des Insectes. XII. Mem. 529 de la peau qui étoit articulée, fe change en une couleur noire , & d’un noir alliés foncé. Alors l’infeéïe s’elt détaché en entier ou en grande partie, de la peau, elle elt devenue pour lui une elpece de boîte ou de coque très - lolicle, dans laquelle il peut fubir en fûreté fes différentes métamorphofes, & de la¬ quelle il fortira mouche. Je n’ai pu m’affûrer h le verpaffoit, comme l’analogie le demande, par l’état tle boule allon¬ gée, avant que de. venir à celui de nymphe, & s’il ncpre- noit celui-ci que peu à peu. J’étois fur-tout curieux d’a¬ voir la mouche dans laquelle ce ver fe transforme, & j’ai voulu conferver affés de coques entières pour être certain d’avoir cette mouche. Malgré les précautions que j’avois prifes pour avoir une grande quantité de ces mouches, je n’ai eu de vers qui fe l'oient transformés, que ceux qui font fortis des boffes fous mes yeux, ou fous les yeux de ceux que j ’avois apodéspour les prendre au moment deleurnail- fance. Un traité de commerce que j’avois heureufement conclu, m’avoit pourtant donné de grandes dpérances d’avoir de ces vers & de leurs mouches en profulîon. Après avoir gagné les bonnes grâces de l’homme qui con* duifoit journellement aux champs le troupeau de vaches de Malnoue, je lui propofai d’être attentif à voir fortir les vers des boffes de fes vaches, & de me les conferver. Je lui promis de lui payer chaque ver plus cher que la moitié de fa journée ne lui étoit payée. Ce marché fut accepté, & j’eus bientôt une preuve peu équivoque qu’ii avoit été au moins auffi agréable au vacher qu a moi. Je reçûs bientôt trente & tant de vers, mais qui m’apprirent que mon homme n’avoit pas été hdele à tous fes enga- gemens. Plufieurs vers, quoique gros, étoiert encore blancs. Pour être plus fur de les avoir, il avoit hâté leur fortie, & il ayoît hâté même celle des vers qui étoient bruns 5^0 MEMOIRES POUR L’HiSTOïRE ou un peuardoifés; aulfi aucun des vers de ce premier en voï, ni aucun de ceux des envois fui vans, ne parvint à fe faire une coque de fa peau : la peau de chaque ver, au lieu de s’éten¬ dre, fe rida ; en un mot, ils périrent tous fans fe transformer. La même choie ell arrivée à des vers que j’ai fait foi tir moi-même peut-être un jour plutôt qu’ils ne feroient fortis, 6 c qui avoient tout l’extérieur des vers à terme. Le ver qui fort par un trou qui n’a pas été ailes dilaté, y foudre une comprelfion qui dérange trop fes parties inté¬ rieures. Il fuit que le ver lui-même employé tout fon art pour palier par une ouverture toujours étroite par rap¬ port au volume de fon corps. Je ne fuis donc point fur- pris que M. Vallifnieri ne foit parvenu à voir lortir de la coque qu’une feule mouche, 6 c encore mal condition¬ née, 6 c que tous les foins qu’il s’etoit donnés pour avoir des vers, ne lui en ayent procuré qu’un feul en état de fe transformer. Les vers même bien conditionnés, qui s’étoient mis en coque dans mes poudriers, me donnèrent de l’inquié¬ tude, lorfque les premiers jours de juillet fe palférent fans que je vilfe paraître au jour aucune de leurs mouches ; j’apprehendai que les nymphes ne fulfent péries dans les coques; mon inquiétude fut augmentée, lorfqu ayant pris une coque dans ma main, je la trouvai legere. Je me déterminai le 6. juillet, à ouvrir cette coque, qui étoit celle d’un ver transformé le 29. ou le 30. may. Mes cizeaux trouvèrent plus de réfiftance à la couper, qu’ils n’en eulfent trouvé à couper le cuir le plus delféché, il me fembloit que je coupois de la corne; d’ailleurs, i’épailïèur de cette coque égaloit au moins celle d’un bon maroquin. C’étoit par un des côtés, plus près du bout antérieur que du pollé- rieur.que j’avois commencé à ouvrir la coque, & les coups de cizeaux avançoient vers le premier bout ; en la fendant des Insectes. XII Mem. $3 1 ils I'ébranlérent, & cet ébranlement fut plus efficace que les coups de cizeaux, une pièce triangulaire * le détacha, * PI. 37. fîg. & ladîa une grande ouverture. Cette pièce elt celle qui 10 & l2 ’ forme la partie antérieure & lupérieure de la coque, que nous avons dit ci-devant être applatie : c’elt cette même pièce que la mouche détache, lorfqu’elle ell en état de paroître au grand jour; elle 11’a que des efforts allés mé¬ diocres à faire, pour forcer une porte, ou plutôt pour foülever une trappe dont les bords font arrêtés alfés foi- blement; par-tout ailleurs la coque oppoferoit une réfi- ftance bien fupérieure aux forces de la mouche. Quand cette pièce a été feparée du relie, la coque a alfés l'air d’un labot*. Nous avons fait remarquer lur le ver *, un * Fig. 9 & cordon liffe qui divife en deux lcpailfeurdefon bout an- ”' fit térieur, & qui après avoir fuivi de chaque côté les qua¬ tre premiers anneaux, vient fe terminer fur le dos : ce cordon marque le contour de la pièce qui doit être déta¬ chée dans la fuite; où ce cordon régné, la peau cil caffante. Par la porte, & vis-à-vis la porte qui venoit d’être ouverte, je vis le deffusde la partie antérieure de la mou¬ che *, qui étoit en bon état & bien en vie, quelques *PI. 37-%. mouvemensque la têtefe donnoit, le prouvoient ; il 1cm- 9 & bloit quelle travaillât à fe défaire d’une peau blanche & fine qui fervoit d’enveloppe à toutes fes parties. Cette peau étoit déjà briféeau deffusde la tête, & lailfoit à découvert les trois petitsycux,& partie de chacun des yeux à rezeau. Pour tâcher de la remettre à peu-près dans fon premier état, de crainte qu’elle ne fût trop tôt frappée par l’air, je rebouchai le trou avec un petit morceau de papier, que de la falive colla fuffilamment contre la coque. Deux jours après,la mouche n’étoit pas encore fortie. Lorlque j’eus enlevé le couvercle de papier, je la vis fans mou¬ vement, & je la crus morte ou mourante, ce qui me Tome IV. . Xxx 5^2 MEMOIRES POUR L’HlSTOIRE détermina à fendre la coque tout du iong, pour mieux réuffir à en tirer la mouche fans altérer là forme. Ce fut une choie ailée, mais je reconnus que je m’étois trop preffé ; je n’en fus pas fiché néantmoins, je pus obferver divers faits que je n’eu (Te pas vus, ou que je n’culfepas vus fi bien * PI - 3 s * fi g* fi j’avois différé plus long-temps. Le corps de la mouche * étoit beaucoup plus gros, proportionnellement à les autres parties, que ne l’efl, en un femblable état, celui de divc ries autres mouches, comme celles de la viande, celles des ^ ers mangeurs de pucerons, &c. Quelques efpeces de ces der¬ nières mouches, ont la tête aulfi groffe, & quelques autres l’ont plus grolfc que le corps, c’elt pourquoi bipartie anté¬ rieure de la coque de quelques-unes, cft auffi grolfc,& celle de quelques-autres eft plus grolfe que la partie poflérieure, au lieu que la partie antérieure de la coque des vers des tumeurs eff beaucoup plus menue que la poflérieure, par¬ ce que la tête de leur mouche en nymphe elt petite en comparaifon du corps. Le corps de celle dont j’avois avancé la naiflance, avoit la figure d’une de ces cerilcs que les Botanilles appellent cenfes eti cœur , il avoit de même une cannelure qui regnoit tout du long du milieu du * Fig. 3. t. ventre; du bout du derrière partoit un petit cylindre * d’un brun prefque noir, dont la longueur étoit prefqu’c- gale à celle de la moitié du corps, & qu’on comparera en¬ core, fi l’on veut, à un court pédicule de cerife. La mouche étoit encore en nymphe, c’eft-à-dire que toutes lès parties, à quelques portions de la tête près, étoient enveloppées d’une membrane blanche Si extrê¬ mement mince. J’ai déjà dit, à l’occafion de diverfèsautres mouches, que la membrane qui couvre une nymphe, ne forme pas un fimple fie, qu’elle forme autant de petits fies que l’extérieur de la nymphe a de parties, quelle en forme un pour chaque jambe, un pour chaque aile, &c. Si des Insectes. Xîî. Mem. 533 c’efl: ce que je n’ai jamais mieux vû que fur la nymphe dont il s’agit actuellement, j’entrepris de la mettre dans l’état de mouche, c’eft-à-dire, de la tirer de la membrane blanche qui recouvrait toutes fes parties, de les dégager peu à peu de cette membrane. L’opération me parut bien faite ; je mis la mouche en pouvoir de marcher, & elle marcha bien ; peut-être pourtant qu’il m’arriva de trop tirailler les ailes, d’y caufer quelque altération, car elles ne fe dépliè¬ rent qu'imparfaitement. Mais au bout de peu de jours deux autres mouches * fortirent d’elles-mêmes de leurs coques, & elles fe trou¬ vèrent bien de n’avoir pas eu mon feeours; elles fortirent en très-bon état, & rien ne manqua au développement de toutes leurs parties. Si on eût vû ces deux mouches, ou de pareilles, auprès d’un nid de bourdons, on n’eût pas héfité à les prendre pour des bourdons d’une grandeur médiocre. Un bourdon ne rdfemble pas plus à un autre bourdon, que ces mouches y reflembient,au moins lorf- qu’on s’en rapporte aux premières apparences; leur forme prife en gros eit la même; elles ont, comme les bourdons, le corps court : aulfi ai-je peine à concevoir comment M. Vallifnieri les a comparées à des guêpes, il faut que celle qui lui eft née, foit lortie bien défigurée de fa coque. A la vérité il prétend en avoir vû de vivantes fur des bêtes à cornes, mais fi celle qui étoit fortie informe de fa coque, lui avoit donné une faillie idée de la figure des mou¬ ches de cette efpece, il aura pû prendre pour des mouches qui font naître des tumeurs fur le corps de ces animaux, d’autres mouches qui n’y contribuent en rien. Enfin les véritables mouches meres des vers de ces tumeurs font auffi velues que les bourdons les plus velus, & font ren¬ dues telles par des poils diftribués & colorés comme ceux de certains bourdons. *PI. 18. fig. 7 & 8. Xxx ij *PI. 38. 11. b. *«, * Fi?. £cn. h 534 MEMOIRES POUR L’HiSTOIRE Cette mouche eft de la fécondé clafte, ou de la clafte fig- de celles qui ont une bouche fans dents. L’ouverture * qu’on peut appeller ia bouche, eft très-petite, fon con¬ tour eft bordé d’un filet noir, & elle n’a point de ievres ; à peine la preflion peut-elle faire fortir de cette bouche une petite partie noire, à laquelle on donnera, fi l’on veut, le nom de langue. Les environs de la bouche & le devant de la tête font couverts de poils jaunes, qui tirent fur le a. feuille-morte. Un peu plus haut fe trouvent les antennes + ; chacune eft placée dans un enfoncement lifte, qui a d’au¬ tant plus l’air de l’orbite d’un œil, que chaque antenne étant courte, arrondie par fon bout, & luilante, lemble elle-même être un œil. Il part pourtant du bout de chaque antenne une efpece de gros poil ou de filet. L’orbite d’une antenne eft féparée de l’orbite de l’autre par une forte de cloifon aftes mince, qui s’élève un peu plus que les bords de chaque orbite, & qui forme une efpece de nez à la mouche, de forte que le devant de la tête de cette mouche a beaucoup d’air du devant d’une tête de chat- huant. Au deftous des antennes fe trouvent des poils ci¬ trons; le refte de la partie fupérieure & poftérieure de la tête eft prefque lifte & de couleur brune. Les yeux à re- to zeau * font d’un marron-foncé fur ce qui les environne, & • fur la moitié antérieure du corcelet régné une foreft d’aftes longs poils d’un jaune de citron de la plus haute nuan¬ ce; la plus grande partie du refte du deffus du corcelet eft noire, lifte & luifante, & a quatre efpeces de filions dirigés félon la longueur de l’infeéle : enfin le bout du corcelet a des poils d’un citron pâle. Le deftiis du corps a trois bandes tranfverfalcs de trois couleurs différentes, la première eft d’un citron pâle, la féconde eft brune,& la troifiéme, qui s’étend fur toute la partie poftérieure, eft d’un jaune un peu rougeâtre, d’un jaune qui approche de des Insectes. XIL Mem . 5 3 5 l’aurore. Toutes ces couleurs fe trouvent clans un arran¬ gement ailes femblable du côté du ventre. Une portion de chaque aile terminée parle côté extérieur, a une nuan¬ ce de brun, qui ne le trouve pas fur le relie, & qui porte d’abord à croire que la mouche a quatre ailes; il lèmble que l’endroit moins tranfparent foit rendu tel par une aiie plus petite que la fupérieure, & appliquée contrelle; mais ce loupçon elt bientôt clilîipé, lorfqu’on remarque que cette mouche a deux coquilles ou ailerons à l’origine de chaque aile, & qu’on fçait que les mouches à quatre ailes n’ont point d’ailerons. Ceux de notre mouche font d’un blanc l'ale ou jaunâtre, ils couvrent les balanciers de ma¬ nière que ceux-ci ne font vifibles que lorfqu’on a relevé les ailerons. Au relie nous ne nous fommes engagé dans une deferip- tion li détaillée de l’extérieur de cette mouche, que pour mettre en état de la reconnoître fur les bêtes à cornes fur lefquelles elle fe ferait pofée, pour mettre en état de la difiinguer de tant d’autres mouches qui aiment à fe tenir, mais pour d’autres fins, fur les mêmes animaux; car d’ail¬ leurs toutes celles de fes parties dont nous avons parlé, n’ont rien de bien propre à picquer notre curiofité; mais elle ne fçauroit manquer d’être excitée par une partie accordée à la feule femelle. On doit être curieux de con- noître l’inllrument que la nature lui a donné pour parvenir à percer l’épais cuir d’un grand animal, au-déifions du¬ quel feulement peuvent croître les vers dont elle doit être la mere. Ce n’a été fans doute que pour donner une première idée de cet infiniment, mais bien grolfiére, que M. Vallifnieri la compare aux feies de diverfes mouches. Ces feies font faites pour fendre & pour entailler, au lieu que l’autre infiniment doit percer un trou rond ; mais la def- cription de M. Vallifnieri fait prendre une idée plus julte de Xxx iij 536 Mémoires pour l’Histoire la ftrucflure de cet infiniment, dont il ne nous a pas donné de deffein. Les pièces néceffaires pour le faire repréfenter, lui ont apparemment manqué. Cet infiniment eft placé au * Fi. 38.%. bout du derrière de la mouche*, il n’efl autre chofè que *Fi«. >.t. cette queue * que nous avons fait remarquer à celle que nous avions tirée delà coque; il étoit alors bien plus vifible que ne l’cfl celui des mouches de même efpece & de même fexe, à la forme defquelles rien ne manque; il efl plus rentré dans le corps de celles-ci : d’ailleurs,des poils longs, plantés & élevés alors autour de fa bafe, le cachent en partie. Au bout du derrière de la mouche, on peut pourtant toujours *Fig .6.t. a-ppercevoir, même à la vue fimple, une partie oblongue *, une efpece de cylindre d’un brun noir & luifant, & comme écailleux; mais ii faut donner à fes yeux le fecours d’une loupe forte, pour parvenir à voir que cette partie efl une forte de tarriére très-compofée; enfin il faut preffer le corps de la mouche, pour obliger la tarriére à paraître dans toute fa longueur; mais, comme je l’ai déjà fait entendre, de tous les temps, le plus favorable pour bien voir cet inf¬ iniment , c’cft celui où la mouche efl prête à fie tirer de fes enveloppes de nymphe, & où elle n’eflpas parvenue en¬ core à s’en tirer. Ayant preffé entre deux doigts le ventre de la mouche que j’avois heureufement prife dans ce temps favorable, je vis que cette efpece de cylindre écaiileux qu’elle avoit au bout du derrière, pouvoit s’allonger beaucoup, & autant qu’il efl néceflaire pour porter les œufs dans les chairs qui fe trouvent au-deffous du plus épais cuir de bœuf; que * Fig. 12. cette efpece de cylindre étoit compoféc de quatre tuyaux* qui pouvoient rentrer les uns dans les autres, comme ceux d’une lunette. Le premier, celui qui part immédiatement du corps de la mouche, efl un peu plus gros que ceux qm le fuivent. Le dernier efl le plus brun, ii 11’a guéfes des Insectes. XII. Mem . 537 que le tiers cte la longueur Je celui qui le précéJe, & il elt le l'eul auquel nous Jevions notre attention. Si le côté par lequel on le regarJe, efl celui Je Jelïous *, celui Ju ventre, il femble terminé par cinq petits boutons écail¬ leux *, qui ne font pas placés prcciiëment fur la même ligne, ou à même hauteur, ils font les bouts Je cinq Jiffé- rentes parties écailleules. Deux Je ces parties *, aufii lon¬ gues que le dernier tuyau, font égales, & pofées fembla- blement, il y en a une à chacun Je fes côtés. Les trois autres boutons * font par Jerriére, & difpofés en fleurs de lys. Si on prefle le ventre au-delà de ce qui efl Amplement ncceflaire pour obliger les quatre tuyaux Je fe dégager les uns Je dedans les autres, on oblige l’anus* de fe mon¬ trer. Des chairs froncées bordent Ion contour, il paroît entre les cinq parties écailleufes; une efpece Je bouillie d’un brun grilatre fort par fon ouverture, ce font des excrémcns dont on oblige la mouche de fe vuider, & dont elle fe vuide naturellement, quand fa transformation efl accomplie. Si on continue, & encore mieux, A l’on augmente la preflion, après que la matière grilatre efl fortie, l’ouverture qui la laifloit échapper, laide lortir des œufs * en plus grande ou moindre quantité,.félon que la preflion efl plus ou moins continuée, ou plus ou moins forte. Nous reviendrons à ces œufs, il fufflt actuellement d’avoir vu où efl leur iffue, qu’elle efl tout près des parties def- tinées à leur préparer un logement dans la chair du bœuf. Ces parties font celles-là même *, dont nous avons dit que les bouts étoient difpofés en fleurs-de-lys les uns par rapport aux autres, mais nous devons recïifler l’idée que nous en avons laifle prendre, & qu’en donne la pre¬ mière apparence. Sur cette apparence nous les avons nommées des efpeces de boutons, & chacune d’elles efl un véritable crochet *. Le coude du crochet fe préfente 38. fîg. 12. * m,m, c, e, c. * m, m. *c,e,c. * Fig. 13 .a. * Fig. 4 Si S* * Fig. 12. c> e > c. * Fig. 14, » PI. 38. !<£.. c. 53B Mémoires pour l’Histoire d’abord aux yeux, la pointe j>ar laquelle il le termine, eft plus proche du ventre que 11e l’elt ce coude, de iorte qu’il faut écarter les trois crochets les uns des autres, & les regarder un peu en de flou s pour voir leur pointe. Ces trois crochets l'ont les feules parties que j’ai trou¬ vées à la mouche, propres à agir contre une peau dure & épaiffe. Enfemble ils doivent compoièr un très-bon fig. in Uniment; leurs pointes * font fines, mais ce qui les pré¬ cédé eh: épais, folide & dur. Réunies, elles forment une cavité femblable à celle de nos tanières qui fe terminent en cuillier; mais cette cuil lier, compofée de trois pointes, eh bien plus en état que celle de nos tarriércs, de mordre fur le corps qu’elle doit percer. Au relie , il faudroit avoir vû la mouche dans l’aétion , pour fçavoir comment elle fait agir cet infiniment, pour fçavoir fi elle le contourne fuc- celTivement en différens feus, ou pour décider fi elle ne manœuvre pas autrement. La mouche pourroit préfenter fes crochets contre la peau, de manière qu’ils la touchaffent par leurs pointes, y faire pénétrer ces pointes en les prel- lant; enfuite retirant ces mêmes crochets, mais félon une direction différente de celle dans laquelle elles auroient été introduites, les crochets détacheraient des fragmens de peau; mais c’efl là deviner, & j’en dois être dégoûté. Lorfque j’ai pû parvenir à voir des infeétes en œuvre, ils m’ont prefque toujours montré qu’ils s’y prenoient tout autrement que je 11e l’avois cru. Malheureufement je n’ai pas été maître de faire venir une mouche percer fous mes yeux la peau d’une vache, comme je l’ai été de fuivre dans les tumeurs de ces vaches & dans leurs métamor- phofes, les vers auxquels cette efpcce de mouche donne naiffance. La douleur que nous caufent les picquûres des guê¬ pes & des abeilles, quoique fûtes par des aiguillons d une finefie des Insectes. XII. Mem. 339 finefTe extrême, peut porter à penier que les blefiuies qui lont faites à une bete à cornes par la mouche cui veut loger les œufs lous la peau de cette Ixte, lui lont extrêmement douloureufes. L’inflrument qui fait ces bief fures elt d'une groffeur énorme en comparail'on de l'ai¬ guillon d une abeille ou de celui d’une guêpe. Mais les blclîLires n’en lont pas plus douioureules précifèment, parce quelles font plus grandes ; c cil la liqueur vcnimeufe que l'abeille ou la guepe a laiffée dans la picquùre, qui nous fait louffrir de fi vives cuilfons, & rien ne demande que nous pendons avec M. Vallilnieri, que la mouche lailfe une liqueur âcre dans la playe où elle a laillc un de fesœufs, & que cette liqueur y caufe de cruels picote- mens. J’aurois meme affes de penchant à cioirc qu’ordi- nairement la bleffure ne caufe qu’une legere douleur au grand animal. La peau de nos bêtes a cornes n’eft pas douée d’un lentiment exquis; dans la plupart des pays où l’on employé les bœufs au labour, on les preffe de hâter leur pelante marche, en les picquant avec un aiguillon, c’elbà-dire, avec une pointe de fer engagée dans le plus menu des bouts d’un long bâton. Cette pointe de fer eft peut-être aulfi groffe, ou plus groffe que la tanière de notre mouche, & la mouche peut introduire fa tarriére dans la peau du bœuf, avec plus de ménagemens que n’en a le bouvier à y faire entrer la pointe de ion aiguillon. Si toutes les picquûres de ces mouches étoient extrêmement douloureufes au grand animal, la même mouche, ou des mouches différentes, auraient peine à parvenir à lui en faire trente a quarante. Il eft vrai que AI. Vallilnieri a cru que les mouches fçavoient choifir, pour picquer la bête à cornes, les endroits où elles n’avoient pas à craindre d’être chaffées par fa queue; mais il eft vrai auffi que j ai vu des vaches qui balayoient fort bien avec leur queue, des endroits remplis de boffes, qui en faifoient palier & Tome IV . Y y y 540 Mémoires pour l'Histoire repartir le bout de fias ces boiïes. J’ai vû la queue d’une genifle qui chaiToit des mouches ordinaires qui venoient le pofer dans un endroit où il y avoit un groupe defeptà huit boiïes. Or h lorfque la mouche à forme de bourdon picquoit la vache dans cet endroit, elle lui eût caufé delà douleur, la vache eût bientôt donné des coups de queue contre lefquels la mouche n’eût pû tenir. Quoique les picquûres de ces mouches ne foient pas communément bien douloureufes, il peut y avoir des circonftances où elles le feront beaucoup; par exemple, li des blets de nerfs, conbdérables & très-fenhbles ont été déchirés; c’ert alors qu’il arrive à la bête à cornes de faire des gambades, de courre enfuite avec une telle vîteffe, que rien ne peut l’arrêter,& enhn d’entrer dans une efpece de fureur. Les anciens ont connu une mouche qui par fes picquûres, faifoit quelquefois entrer en fureur les bêtes à ce rues de leurs troupeaux: lesGrecs font nommée Oejhos, nom qu’ils ont enlùite annobli, au bguré, en le don¬ nant à fentlioufiafme ou à la fureur poétique. Mais il cfl ordinairement abcs difficile de déterminer l’infedle que les anciens ont défigné par un certain nom, parce qu’ils ont rarement pris la peine de bien décrire cet in- feéte, &. que même ils en ont fouvent rapporté des chofes qui le font méconnoître. Ainfi Pline veut que Y O e/hv s des Grecs foit le Tabanus ou X Afillu s des Latins; les naturalirtes conviennent cependant que le Tabanus ou taon, qui eft une mouche bien connue, eft différent de X Afillus ; mais ils ne conviennent pas de la mouche à laquelle le nom d’Afllus ert propre : M. Vallifnieri veut qu’il foit donné à notre mouche qui occafionne la pro- duéhon des tumeurs des bœufs, auffi l’appellerai-je volon¬ tiers en françois, Afille, & Swammerdam a donné le nom d ’Afillus à la mouche que nous avons nommée à corcelet armé, qui vient des vers aquatiques. des Insectes. XII. Mem. 541 Le hazard a voulu que toutes les mouches affiles ou des tumeurs des bœufs, qui loin nces chés moi, avent été des femelles; il m’a mieux lérvi que s’il ne m’eût fait voir que des mâles. Celles que j’ai ouvertes avoient le corps rempli d’une fi prodigieufe quantité d’œufs, que je crois qu’une feule de ces mouches auroit pu ludire à faire venir des bolTes fur tous les befliaux d’un affés grand canton. Les animaux en faveur defquels la nature lémble avoir fait uneplus grande profufion de germes, ne font pas toujours ceux qui paroiffent en plus grande quantité; elle a prodigué les œufs, quand elle aprévû que des circonflances (croient caufe qu’il n’y auroit que très-peu de ces œufs dont les infeétes pourraient parvenir à l'état où ils fe multiplient. Chacun des œufs * de notre afille efl blanc & applati ; il a la figure d’une graine de concombre, dont un des bouts auroit un appendice * femblable à la tête de certains vers du terreau, ou même à celle d’un pou. Cet appendice m’a fait foupçonner que le ver éclofoit avant que de fôrtirdu corps de la mere; il femble que l’appendice foit la tête du ver, cachée fous une membrane; mais je n’ai pu fçavoir fi ce fbupçon devoit être reçu ou rejetté, parce que je n’ai point eu occafion d’ouvrir des mouches affés près du terme où elles font des œufs, ou des petits. Le cheval efl affurément digne d’être mis au prem er rang des animaux qui nous font utiles ; mais ce grand animal, qui nous plaît d’ailleurs par fa forme, par les belles proportions qui fe trouvent entre toutes fes parties, ne nous a pas été accordé à nous feuis. Une efpece de mou¬ ches * peut fe croire fur lui des droits plus fondés que les nôtres; s’il nous efl utile, il lui efl abfolument néceffaire. L’auteur du cheval efl auffi celui de cette efpece de mou¬ ches, qui ne pourrait fubfifler & fe perpétuer,s’il n’y avoit point de chevaux. Les mouches dont nous voulons parler, Yyyij * PI. 34.. fi î 4‘ *PI. 37 fi 3 ^ 542 MEMOIRES POUR L’HISTOIRE comme celles de toutes les autres efpeces naiffent, & prennent leur accroiffement fous la forme de vers, mais de vers qui ne peuvent éclorre 8 c le nourrir que dans les inteftins du cheval. C’cft-là feulement qu’ils peuvent jouir de la température de chaleur qui leur convient, & qu’ils peuvent trouver les alimens qui leur font néceflaires. Les vers du corps humain ne font pas mieux, ni peut-être plus anciennement connus que le font ceux des chevaux ; 011 s’eft de tout temps intérefïe à la confervation de ces ani¬ maux qui nous rendent de fi grands fervices; aulfi y a-t-il long temps qu’ils font en poffefïion d’avoir leurs méde¬ cins. Outre les vers longs, 8 c très-longs, qu’on a obfer- g. vés dans le corps îles chevaux, on y en aauffi obfervé de courts * : tous les auteurs, tant anciens que modernes, qui ont traité des maladies des chevaux, ont parlé de ces vers courts; mais M. VallÜhieri eft, je crois, le premier qui les ait fuivis jufqu’à leur dernière métamorphofe, qui g. les ait vus devenir des mouches velues * 8 c femblablcs à de petits bourdons. Ces mouches habitent la campagne, elles napprochent point de nos maifons, au moins de celles des vides; aulîi les chevaux ne font aucunement fujets à avoir des vers courts dans leurs corps, lorfqu’on les a tenus à l’écurie, 8 c fur-tout en ville, pendant l’été 8 c l’automne. C’eftdans la première de ces laifons, 8 c peut-être encore dans le com¬ mencement de l’autre, que les femelles de ces mouches cherchent le derrière des chevaux, 8 c tâchent de s’y in¬ troduire pour y dépofer leurs œufs, ou peut-être leurs vers Le moment où elles y parviennent, efl de ceux qui ne peuvent être offerts à l’obfervateur que par quelque heureux hazard. M. Vallifnieri rapporte que le Doéteur Gafpari efl parvenu à voir une mouche dans un de ces momens rares. Ce Doéleur regardoit un jour fes jumens des Insectes. XII. Mem. 543 à la campagne, & tout d’un coup, de tranquilles qu’elles étoient, il les vit le tourmenter, faire des bonds, des gam¬ bades & des fauts, donner des ruades & agiter leur queue. Il ne douta pas quelles n’eu fient été déterminées à ces mouvemens extraordinaires par le bourdonnement d’une mouche qui voloit autour d’elles,& qui faifoit des tenta¬ tives pour parvenir à l’anus de quelqu’une de ces cavales. La mouche n’ayant pûy réuffir, il la vit voler avec moins de bruit vers une cavale qui paifloit féparée des autres ; cette fois la mouche prit mieux fes mefures .elle paffa fous la queue, & fçut trouver l’anus. D’abord elle n’y excita apparemment qu’une fimple demangeaifon qui détermi- noit la cavale à faire fortir le bord de fon intcfhn, à l’ou¬ vrir &. à en aggrandir l’ouverture. La mouche en fçut profiter, elle pénétra plus avant, & fe cacha fous les plis & replis de l’inteftin. Ce fut apparemment alors qu’elle acheva fon opération, quelle fut en état de faire fa ponte. Peu de temps après la jument parut devenir furieufe, elle fe mit à courir, à faire des fauts & des gambades, elle fe jetta par terre; enfin elle ne devint tranquille, & ne re¬ commença à paître qu’au bout d’un quart d’heure. La mouche fçait donc trouver le moyen de dépofer fes œufs, ou peut-être fes vers, dans le derrière d’un cheval; dès qu’ils y font, elle a fait pour eux tout ce qui leur étoit néceffaire. Si les vers ne font pas éclos, ils ne font pas long-temps à éclore dans un lieu où les œufs font couvés par une chaleur douce. Enfin les vers font leur chemin dans les inteftins du cheval; ils fe placent dans les endroits d’un fi grand pays qui leur parodient les plus commodes; quelquefois même, comme nous verrons bientôt, ils pénétrent jufques dans l’eftomac. Tout ce qui pourrait paraître à craindre pour eux, c’efl d’être chaffés des lieux où ils le trouvent fi bien,par lesexcrémens dont Y y y iij 544 Mémoires pour l’Histoire les intellins le vuklent, que ces excrémens ne les pouf- falient devant eux; mais la nature a pourvû à tout, & dès que nous aurons décrit ces vers, on verra qu’ils font maîtres de relier dans le corps du cheval tant qu’il leur plaît. 11 vient un temps où ces vers cherchent d’eux-mêmes à fortir de leur habitation, elle ne leur ell plus conve¬ nable dès qu ils n’ont plus bel'oin de croître : c’elî hors du cheval qu’ils le doivent métamorphofer; aulfi quand le temps de leur transformation ell peu éloigné, ils s’ap¬ prochent de l’anus du cheval, & ils en fortent alors loit d’eux-mêmes, foit avec les excrémens, par lefquels ils veulent bien le laiffer entraîner. Lorfqu’il en a paru quel¬ ques-uns, les palfreniers & les cochers attentifs à leurs chevaux, fçavcnt en trouver d’autres; ils enfoncent leur main dans l’anus, & les cherchent dans l’intérieur du ca¬ nal. Ç’a été aulTi mon cocher qui le premier m’a fait voir de ces vers, & qui m’en a donné pendant trois différen¬ tes années. Dans chacune de ces années, de quatre ju- mens que j’avois à Paris, une feule en nourriffoit dans fes intellins. Celle qui en fourniffoit avoit été amenée à Paris la même année,après avoir vécu à la campagne dans des pâturages jufqu’au mois d’Qéiohrc. * PI. 34,. fig. La ligure de ces vers * n’offre d’abord rien de remar- quable;au premier coup d’œil, ils font allés femblables à piufieurs vers de la première claffe a laquelle ils appar¬ tiennent. Ils font beaucoup plus grands que les vers des mouches bleues de la viande, & beaucoup plus petits que ceux des tumeurs des bêtes à cornes; ils tiennent de la * a. figure conique, leur bout antérieur * cil; plus menu que * jj. le pofiérieur *. Entre ceux qu’on tire & ceux qui fortent d’eux-mêmes du corps du cheval, on en trouve de différen¬ tes couleurs; les uns font verdâtres, les autres font jaunâtres. des Insectes. XII. Alem. 545 & les autres font prefque bruns. Ces derniers font les plus à terme, les plus près de leur transformation, & les verdâtres en l'ont les plus éloignés. Ils appartiennent à la première claiïe des vers qui le transforment en des mouches à deux ailes; comme la plupart des vers de cette claiïe, ils font pourvus de crochets écailleux, placés immédiate¬ ment au delfus de leur bouche, & avec lefquels ils fe tirent en avant. Nous avons dit ailleurs que le nombre & la difpofition de ces fortes de crochets, étoient pro¬ pres à faire diftinguer divers genres de vers de la première clalfe, & je ne fçais fi je n’ai point manqué de faire de cette réglé, l’ufage que j’aurois dû par rapport aux vers courts des chevaux. Je ne fis point delfiner les premiers que j’eus, faute d’avoir dans le temps un delfinateur à ma difpofi¬ tion , je me contentai d écrire les remarques qu’ils m’a- voient fournies; une de ces remarques étoit que ces vers avoient à leur partie antérieure deux crochets égaux &. femblables, parallèles l’un à l'autre, & l’un à côté de l’au¬ tre, placés en un mot, comme ceux des vers des mou¬ ches de la viande. Lorfque quelques années après j’eus d’autres vers des chevaux, & que je les fs dciïiner, j’ob- fervai qu’ils avoient deux crochets tout autrement pofés que je ne l’avois écrit, & deux crochets d’inégale gran¬ deur *; le plus petit * étoit du plus grand *, & environ très vers que j’eus une autre année, avoient encore des * /. crochets femblables à ceux des derniers, & femblable- */. ment pofés. J’en conclus que je n’avois pas aïTés étudié les crochets des premiers vers, que j’avoiscru, fans alfés d’examen, les deux crochets égaux & femblables, & pofés à côté l’un de l’autre, comme le font ceux des mouches de la viande; mais je ne fçais à préfent fi je ne mepreïfai point trop de me condamner, du moins dois-je être plus retenu placé directement au deffus *Pï- »-■%• d’un tiers plus court. D’au- 5 46 MEMOIRES POUR L’HiSTOIRE fur le jugement que je pourrais continuer de porter contre moi, il tomberait lur M. Valliinieri, qui a donné, loit dans Tes delcriptions, foit dans les ddleins , deux crochets égaux ,& pôles à coté l’un de l’autre, aux vers des chevaux, dont il a parlé. Si M. Vailiinieri & moi avons bien vû cette difpofition des crochets , il y a deux genres de ces vers qui différent par leurs crochets, mais qui le relîemblent par¬ faitement dans le relie, Si qui le transforment en des mouches h femblables, au moins en apparence, quelles ne m’ont point fait l'oupçoimer quelles pu lient venir de vers de différens genres. Quoi qu’il en loit, les vers que nous allons continuer « Pi. 3 j. (îg. de fuivre, ont deux crochets inégaux, * dont le plus court 1 ell pofé au-deffus du plus grand : ces crohetsont une baie commune, le petit cil comme une branche du grand; ils font blancheâtres à leur origine, & ailleurs d’un brun noirâtre & luifant. Ils font l’un & l’autre allés forts, Si ter¬ minés par une pointe line Si roide. Depuis que j’ai connu ces crochets, & fur-tout depuis que j’en ai éprouvé l’effet, je n’ai point été embarraffé de fçavoir comment les vers pouvoient tenir dans les intellins du cheval, contre les excrémens qui tendent à les en faire fortir. Un de ces vers que je maniois, que je retournois, & qui étant des moins prêts à le transformer, étoit de ceux qui lont le plus en état de faire ufage de leurs crochets, ce ver, dis-je, pic- qua & enfonça les Tiens dans la chair d’un de mes doigts, de façon qu’il me fut allés difficile de les dégager; ces crochets font une ancre à deux bras autrement difpofés que ceux de nos ancres ordinaires, mais propres à pro¬ duire furement leur effet. Outre ces deux crochets, la nature a accordé à chaque *PI. 34. fig. ver un très-grand nombred’efpecesd’épines triangulaires*, l3> très-capables de le retenir contre les parais des intellins, &dc des Insectes. XII. Mem. 547 & de ré fi fier à la force qui tendroit à le pouffer vers l’anus, pourvut que la tête foit tournée du côté de l’eftomac du cheval. Le ver a onze anneaux ; le cercle poftérieur de chaque anneau eft bordé de ces épines; elles font des efpeces de lames dures & triangulaires , dont l’angle le plus aigu efl tourné vers le derrière. Au dcffus du corps, les anneaux du bout poftérieur, & ceux qui en font les plus proches, 11’ont point de ces picquans, mais les mêmes anneaux en ont du côté du ventre. Les deux crochets écailleux font ce que la partie anté¬ rieure a de plus remarquable, la bouche eft au-deffous; plus haut au-deffus des crochets, le ver montre quelquefois deux petites cornes charnues *. Sa partie poftérieure a plus * El. 12- fig? de quoi nous arrêter, fon bout * fe fronce comme une f 5 P c, 3 f f* bourfe, il femble former une el'pece de bouche. De temps * Pi- 34- en temps la bourfe s’ouvre, les parties charnues qui en 1 font les plis & les replis, laiffent alors une grande ouver¬ ture circulaire, & permettent de voir une cavité affés pro¬ fonde. Dans le fond de cette cavité on découvre aifément fix efpeces de doubles filions*, cannelés tranfverfalement, * F, o- J 7 * Si parallèles les uns aux autres. Ces fix filions font les ftigmates poftérieurs du ver, fes fix principales bouches de la relpiration ; ils paroiffent travaillés avec beaucoup d’art. L’ufage de la bourfe charnue dans laquelle les ftig¬ mates font renfermés, n’a pas befoin d’être expliqué, on voit affés quelle étoit néceffaire pour les défendre dans des temps où ils auraient pu être inondés ou bouchés par des excrémens trop liquides. Quelques expériences m’ont appris que l’huile n’eft pas un auftï bon remède contre ces vers, qu’on l’aurait pû croire; il étoit affés naturel de penfer qu’on employe- roit contre eux avec fuccès des lavemens d’huile, mais j’ai huilé le corps de ces vers; j’ai fait plus, j’ai introduit Tome IV . Zzz N 54S MEMOIRES POUR L’HlSTOIRE de l’huile dans la bourfe où les fligmatesfont renfermes, Kàns que les vers ayent paru en fouffrir. Soit que ceux qui font dans le corps d’un même cheval ne viennent pas d’une même mere ou d’une même ponte, foit qu ils n’y croiflent pas tous également vite, il eft fûr qu’ils ne font pas tous à terme en même temps. Des vers fortirent du derrière d’une de mes jumens près de la fin de may ,& d’autres n’en lortirent que près de la fin de juin. Tel jour, lorfque le cocher la panfoit, il ne lui en trouvoit qu’un, un autre jour il lui en trouvoit deux ou trois,& trois à quatre jours le palfoient quelquefois fins qu’il en vît aucun; ainli dans un mois il m’en donna environ une trentaine. Mais il n’eft pas fur que le nombre des vers qui fortirent, fût auiïi petit, ou plutôt il efl probable qu’il étoit confidérablement plus grand, car il en a dû lortir à d’autres heures qu’à celles où on panfoit la jument, à moins que ces vers, comme ceux des boffes des bêtes à cornes, n’ayent une heure pour paroître au jour. On demandera fans doute fi ces vers font fort à craindre pour les chevaux. Les jumens qui m’ont fourni pendant plulieurs années ceux fur lefquels j’ai fait mes oblèrvations, ne m’ont pas paru fe porter moins bien que celles qui n’en avoient point ; mais il peut arriver des cas où ces vers feront en trop grande quantité dans le corps du cheval, & où ils lui feront funeftes. C’elt aulfi à ces vers que M. Vallifnieri a attribué la caufe d’une maladie épidémique qui fit périr beaucoup de chevaux dans le Veronnois & le Mantouan en 1713. Lesobfervationsqui lui furent com¬ muniquées par le Docffeur Gafpari. ne permettent pas de douter que cette caufe ne fût la vraie. Ce Doéteur ayant dilfequé quelques cavales mortes de la maladie épidémique, trouva dans leur eftomac une quantité fi lurprenante de Vers courts, que pour nous en donner quelque idée. des Insectes. JV//. Mon . 549 il compare le nombre des vers qui y paroiftoient, à celui des grains d’une grenade ouverte ; chaque ver s'étoit, peur ainfi dire, fait une efpece de cellule, en rongeant la mem¬ brane de l’eftomac. Dans la cavité occupée par chaque ver, on pouvoit facilement loger un grain de bled de Tur¬ quie. Il elt ailé de croire qu’un tel eftomac étoit réduit à un pitoyable état; les membranes extérieures étoient enflammées, & les internes étoient ulcérées & puantes. II trouva très-peu de ces vers dans les inteftins grêles, & quelques-uns feulement dans les gros inteftins, auxquels ils s’étoient accrochés , mais fans les avoir rongés. Ce n’eft peut-être que quand ces fortes de vers fe trouvent en très- grand nombre dans les inteftins des chevaux, & qu’ils s’y incommodent, qu’ils prennent leur route vers l’eftomac. Au refte, peu de mouches pourraient furfire à peupler trop l’intérieur des chevaux, fi elles y dépofoient tous leurs œufs, & qu’ils y vinflent tous à bien. M. Vallilnieri en a compté fept cens & tant dans le corps d’une feule mouche. Après qu’un de ces vers cft forti de l’anus du cheval, il tombe à terre, & ilfe cherche une retraite où il puifle être en fûreté, pendant qu’il prendra les dernières formes par lefqueiles il doit pafler fuccefli ventent pour parvenir à être mouche. Bientôt fa peau fe durcit, s’épaiflït, & lui fait une coque folide *. La forme de la coque ne *PI. diffère guéres de celle du ver ; elle eft plus menue, comme 1 * ferait le ver, à fon bout antérieur * qu’à fon bout pofté- * rieur*. Sa couleur eft d’abord d’un rouge pâle, qui fe *}*• change en couleur de marron : enfin cette couleur prend des nuances de plus en plus brunes, & la coque devient noire. Le ver, avant que de pafler à l’état de nymphe, fe change en boule allongée; il refte fous cette forme bien plus long-temps que n’y relient nos vers de la viande. J’ai trouvé des vers qui l’avoient encore, quoiqu’ils fuflent Z z z ij 5)0 MEMOIRES POUR L’HiSTOIRE en coque depuis cinq à fix jours. On ne leur appercevoic encore aucun vertige des jambes, des aîles & de la tête de la nymphe. Ces vers font aidrt les premiers qui m’ont appris que les vers qui fe transforment en coque, ne font pas nymphes dès que leur première métamorphofe dl finie, dès qu’ils fe lont fait une coque de leur peau;& que pour devenir mouches, ils ont à fubir une transformation de plus que les chenilles n’en fubirtent pour devenir pa¬ pillons. En différentes années les mouches font forties plûtard ou plûtôt des coques que je gardois dans des boîtes ou dans des poudriers. Celles qui ont paru au jour les pre¬ mières, ont paru plus d’un mois après la première tranf- formation du ver, & d’autres n’ont paru qu une ou deux femaines plûtard. Quand la mouche ert en état de fortir, 3 î- %• elle s’ouvre une porte *; elle fait fauter de la coque une pièce affés fëmblable à celle que fait fauter la mouche des tumeurs des bœufs. * Fig. 3. Dans l’efpece des mouches des chevaux, les mâles * ref- femblent beaucoup plus aux bourdons, que les femelles, au * Fig. 5 - moins que n’y rertemblent les femelles * qui n’ont pas fait leur ponte; celles-ci ont le corps allongé, au lieu que lecorps des mâles eft court. Les mouches de l’un & de l’autre fexe font très velues. Leur clarté ert la même que celle des aflles ou des mouches des tumeurs des bœufs; elles font de la fécondé clarté des mouches à deux aîles, elles n’ont ni dents ni trompe en dehors de la bouche ; la leur n’ert marquée Fig. 7 .b. q lie p ar trois petits tubercules noirs *. Le devant de leur * a, a. tète, comme celui des afillcs, a l’air d’une tête de chat- huant; leurs antennes *, extrêmement courtes, & dont chacune paroît un grain luifant duquel fort un poil, font aurtî logées chacune dans une fortette qui femble être l’orbite d’un œil; une cloifon quifepare ces deux fo dettes. des Insectes. XIL Mem. 551 6 c qui s’élève un peu en defcendant vers la bouche, a la forme d une efpece de nez. II n’eft pas ordinaire à différentes mouches de la même efpece, d’être auffi différemment colorées que ie font les mouches de celle-ci. Ce font les couleurs de leurs poils qui le font le plus remarquer. J’ai eu de ces mouches dont le corps, le corcelet 6c le devant de la tête étoient couverts de poils d’une même nuance, 6c tous d’un jaune doré. D’autres n’avoient des poils dorés que fur le devant de la tête 6c fur le corps; ceux de leur corcelet étoient bruns; d’autres avoient fur le corps trois bandes de trois couleurs différentes. La bande la plus proche du corcelet de quel¬ ques-unes étoit d’un citron pâle prefque blanc, & fur d’au¬ tres mouches cette bande étoit d’une autre nuance de jaune; la bande du milieu étoit noire ou brune, & la der¬ nière étoit d’un jaune doré. Leurs ailes ne font pas auffi tranfparentes que le font celles de plufieurs autres mouches ; celles des femelles principalement, font comme enfumées en certains en¬ droits, 6c cela avec irrégularité. J’ai vu auffi des ailes de mâles enfumées, mais j’en ai vu de plus tranfparentes. Quand la forme du corps ne feroit pas fuffifamment diffinguer le mâle de la femelle, le mâle feroit toujours aifé à reconnoître. On n’a qu’à examiner fon derrière, en y trouve deux folides crochets bruns *, tournés l’un vers * pi. l’autre, 6c appliqués contre le ventre; le mâle les redreffe 6 - c > quand il veut, 6c s’en fert pour accrocher le derrière de la femelle. Ceux mêmes qui ne font nés que depuis peu de temps, montrent bientôt à quoi leur inclination les porte; fi on les tient avec des femelles, ils oublient qu’ils font renfermés pour monter fur leur dos. M. Vallifnieri a déjà remarqué qu’ils ne font point de façon de s’accoupler de¬ vant le fpedateur. 552 MEMOIRES POUR l/Histoire Des vers qui naiftent dans ie nez des moutons, dans celui des chevres, dans celui des daims, dans celui des cerfs, &c. demandent à être mis à la fuite des vers qui fe nourrirent dans les tumeurs des bêtes à cornes, 6c de ceux qui vivent dans les inteftins des chevaux. Les vers du nez des moutons, qui font ceux auxquels nous allons nous fixer, fe métamorphofent en une mouche qui ne fera pas auffi bien placée à la fuite de celles qui ont l’air de bourdons; mais fi elle n’eft pas du genre des mouches dans iefquelles fe transforment les vers des tumeurs des bœufs, 6 c des mouches dans Iefquelles fe transforment les vers des inteftins des chevaux, elle eft au moins de leur clafte. Les cavités ou finus qui font au haut du nez du mouton, les finus frontaux, font le lieu où fe tiennent les vers dont nous voulons parler, 6c où ils prennent leur accroifte- ment. Ces finus, dont la capacité eft aftes confidérable, font remplis d'une matière blanche 6c molle, qui eft un aflemblage de glandes ahbreuvées d’un mucilage que les moutons rendent par le nez. C’eft de ce mucilage que les vers fe nourriflent, jufqu’à ce qu’ils ayent toute la grandeur à laquelle ils doivent parvenir. Quand ce temps eft arrivé, ils fortent du nez du mouton, ils vont chercher de la terre, dans laquelle ils s’enfoncent 6c fe cachent ; là ils paftent tranquillement par les différens états qui les conduifent à celui de mouche. La mouche femelle, après avoir été fécondée par le mâle, fçait que c’eft dans le nez des mou¬ tons qu’elle doit aller pondre, pour que lesvers auxquels elle donnera naiflance, puiflent devenir mouches à leur tour. M.Vallifnieri, à qui nous devons tant de nouvelles 6c de curieufesobfervations fur les infcèles, eft le premier qui nous ait donné la véritable hiftoire de ces vers: il eft le premier qui nous ait appris qu’ils doivent leur origine à une mouche, 6c qu’ils fe transforment en une mouche des Insectes. A 7 /. Mem . 553 femblable à ceile qui leur a donné naiffance. Ces vers néantmoins ont été connus anciennement ; un clés plus cé- lébresMédecins Grecs, AlexandreTraliien, queAl.Freind place vers l’an 560. fait mention de ces vers, comme d’un remède contre l’épilepfie, & d'un remède qui avoit été indiqué par Apollon meme. Il dit qu’on racontoit que Démocrate, Athénien, étant tourmenté dans fa jeuneffe par des attaques d cpilepfie, fe détermina à aller confulter i’Oracle de Delphes, fur le remède qu’il devoit choifir entre tous ceux qu’on lui conleilloit. La réponfe que la Pythie lui fit, a été rapportée par Alexandre de deux ma¬ nières différentes, que voici : Quos madidis cerebri latebns procreare Capella Dïciiur humons, Vcrmem de vertïce longum. Ou autrement : De grege fume Caprce majores rurïs alumnee Ex cerebro vermes; ovis dato tergora circum Aiultiplici vermi pecoris de fronte revulfo . Démocrate étoit apparemment peu au fait de I’hiftoire des infecfles, auffi eut-il beau méditer la réponfe du Dieu, il n’y put rien comprendre : il crut que le meilleur parti qu’il eut à prendre, étoit d’aller trouver un vieillard de quatre- vingt-dix- huit ans, qui devoit être au fait du langage des Dieux, & de le prier de lui expliquer l’oracle. Le vieillard, après avoir médité, admira la grande fcience d’Apollon & l’obfcuritédelaPythie,& expliqua fon oracle à Démocrate. Il lui dit que des vers s’engendroient dans la tête des chevres, vers la bafe du cerveau; que les chèvres les rejettoient par le nez en éternuant, & que Démocrate devoit fonger àfe procurer de ces vers, avant qu’ils euffent touché la terre. 554 Mémoires pour l’Histoire que pour cela il falloir la couvrir de vêtemens, fur lefquels les vers tomberaient ; qu’il n aurait enfuite qu’à en enve¬ lopper un ou trois dans un morceau de peau d’une brebis noire, & les attacher à fou col. Le bon vieillard avoit voulu, ce femble, mettre du lien à l’oracle, qui n’avoit rien dit de l’importante & difficile circonffimce, de prendre les vers avant qu’ils euffien t touché la terre. Si cette circonftance pourtant eût été effentielleà un remède fur. Démocrate eût pû lever la difficulté, en renfermant', comme le remarque M.Vallifnieri, le nez du mouton dans un fac. J’aurois eu recours à ce fie plus volontiers, pour me procurer des vers fains & prêts à fe métamorphofer, que pour avoir un remède à offrir à quelque malheureux épileptique. Réellement j’ai été tenté d’avoir recours à ce fac, après avoir inutilement cherché à engager des bergers à épier le moment où des vers fortiroient du nez de leurs moutons. Les bergers auxquels je me fuis adreffé, ne fçavoient pas même que leurs moutons fuffem fujets à avoir de ces vers ; & foit par incrédulité, foit par indolence, ils n’ont pas daigné s’inffiuire du fait. Les bouchers connoiffent mieux ces vers, & j’ai mieux trouvé mon compte à avoir recours à eux. Chaque année j’en ai engagé quelques-uns à m’ou¬ vrir un grand nombre de têtes de mouton. Affés fouvent de trois à quatre de ces têtes qu’ils m’ont ouvertes, il y en a eu une qui avoit des vers. J’ai trouvé trois vers dans celle où j’en ai vû le plus. D’autres têtes n’en avoient que deux, & il eft plus ordinaire de n’y en trouver qu’un feul. Mais ce qui m’avoit déterminé à chercher à me concilier quelque berger, c’eft qu’outre qu’il arrive fouvent au boucher qui ouvre une tête, de bleffer le ver, ou les vers, le cas d’ouvrir Sa tête précifément dans le temps où le ver efl prêt à en fortir, eft rare ; il ne faut pourtant les en tirer que dans cette circonftance. V des Insectes. XII. Mem. 55j cîrconfiance, pour parvenir à les voir fe métamorpholèr en mouche. Redi a fait graver une figure d’un ver de cette efpece, que M. Vallifhieri a trouvée très-mauvaife, comme elle l’efi réellement. Je ne fçaurois néantmoins louer les figures que M. Vallimieri lui-même nous a données du même ver; les fiennes, quoique beaucoup meilleures que celle de Redi, ne lont rien moins que parfaites. Le ver eft de la première clafte, & du genre de ceux qui, près du bout de la tete, ont deux crochets parallèles, ou prelqucparallèles l’un à l’autre; & les figures de M. Vallifinieri portent à croire que ces crochets forment enfemble un angle très-ouvert. Ce ver * eft compofé de onze anneaux, qui enfemble forment une efpece de cône un peu applati, dont la tête eft le fommet. Tant qu'il eft jeune *, & tant qu’il n’a pas fait tout fou croît, il eft très blanc, il n’a prefque de brun que deux plaques circulaires *, pofées à côté l’une de l’autre, à fon bout poftérieur; ce lont les deux fligmates pofté- rieurs. Chaque plaque * eft partagée en deux parties par un cercle concentrique, dont le rayon n’a pas la moitié de la longueur de celui de la circonférenceextérieure.La répara¬ tion île la petite plaque circulaire & de la plaque annulaire, eft fenfible & biancheâtre; c’efl cette réparation apparem¬ ment, qui tlonne paftageà l’air. Souvent le ver montre ces deux (bg mates; mais quand il lui plaît, il les renferme dans fon dernier anneau, comme dans une bourfe. En défions du même anneau, affés près de fon extrémité, efi l’anus, ordinairement caché dans les replisdes chairs. De chaque côté il efi accompagné d’un appendice charnu,d’un gros mammelon *. Les deux crochets * dont la tête du ver eft armée, font bruns & forts; la bafe * de chacun de ces cro¬ chets efi folide, & s’élève au défiais des chairs, de manière quelle a l’air d’une grofTe & courte corne, & quelle a été Tome IV . Aaaa * El. 33 fig. 8 & 9. * Fig. 8. * Fig. 10; * Fig. 10 & 11 -F-P- . * Fig. 9 ^ 14 .. c,c° */• * PI. ' y* fig ÿ Si 14 .. d, d ■* b% *Fig. 9. ? t, t. * Fig. 13 9 ,o, 0,0. * Fig. 11 556 MEMOIRES POUR L’HiSTOIRE prife pour teiie par M. Vaililnieri. Le ver a de plus ai! . delfus des crochets, deux cornes charnues * ; la bouche * • eft placée entre les deux crochets, près de leur baie. M. Vailiinieri allure être parvenu à en faire loi tir un petit corps brun, ce que je n’ai pu Lire. Quand le ver a pris toute fa grandeur *, il eft plus grand que celui des inteftins des chevaux, mais plus petit que celui des tumeurs des bêtes à cornes: alors fa blancheur s’efface en différens endroits. La partie la plus élevée de la plupart des anneaux, & fur-tout de ceux qui font depuis le milieu du corps jufqu’au bout poftérieur, cette partie, dis-je, des anneaux commence par devenir d’un blanc fale, pour palier fucceffivement par des nuances de plus en plus brunes. Quand le ver eft devenu grand, on croiroit qu’il a de chaque côté un ou deux ftigmates à chaque anneau. De petits grains * bruns & arrondis qui s’y font appercevoir, ont tout-à-fait l’apparence de ftigmates, quoiqu’ils n’en foient pas. Dans le brun de chaque anneau . on peut auiïi remarquer de chaque côté quatre taches * plus brunes & rondes, qui n’ont que peu de relief, & qui font difpofées fuivant la courbure de l’anneau. Lorfqu’on confidére le ver en delfous* avec une bonne loupe, on apperçoit quelque chofe de plus remarquable. La partie charnue qui eft entre deux anneaux, eft toute remplie de petites épines rougeâtres, dont la pointe eft: tournée vers le derrière. On peut s’alïïirer encore de l’exiftence de ces épines, en conduifant un de fes doigts fur le ventre, du derrière à la tête. Il s’en faut bien que ces vers foient auiïi engourdis que les vers des tumeurs des bêtes à cornes; quand on les a pris, ils paroilfent tou¬ jours inquiets; ils marchent, ou plutôt ils le traînent fort vite; lorfque de la main fur laquelle on les a pôles, ils palfent entre deux doigts qui fe touchent, ils font fentir les pointes DE; Insectes. XII. Mem. 557 de leurs crochets, dont ils fe fervent pour tenter de s’ouvrir un partage. Il peut arriver fouvent a ces vers de n’étre pas tranquilles dans les finus frontaux des moutons, d’y vou¬ loir changer de place, & d’agir trop fortement contre des membranes lenfibles, loit avec leurs épines, loit avec leurs crochets; alors ils doivent faire fentir au mouton des dou¬ leurs vives, qui font la caufe la plus probable à laquelle on puiffe attribuer ces efpeces d’accès de vertige ou de frenefie auxquels eft fujet un animal fi doux & fi pacifique: c’eft fans doute alors qu'on voit les moutons bondir, & aller heurter leur tête à diverfes reprifes contre les corps les plus durs,contre les arbres, contre les pierres, &c. Lorfqu’on a tiré des vers de la tête d’un mouton, ou ne peut rien faire de mieux pour eux, que de les mettre fur une terre legere, bientôt ils la fouillent & s’enfoncent dedans. Ils ont toitjours pénétre jufqu’au fond de mes poudriers. Mais les vers qu’on fevre trop tôt de l’aliment qui leur étoit néceffairc, tous ceux qui ont encore le corps blanc, périffent dans cette terre, au lieu que ceux qui ont des rayes d’un brun affés foncé, s’y métamor- phofent. J’en ai retiré de terre de ceux qui y étoient entrés, ayant déjà leur blanc fali, ayant des commencemens de nuances de brun ; ils y étoient devenus plus bruns, cepen¬ dant ils ont péri fans parvenir à fe transformer. Ceux qui fe transforment, lé font, comme tous les vers de la même claffe, une coque de leur propre peau. J’ai enlevé la terre fous laquelle un de ces vers étoit caché depuis vingt-quatre heures, fa peau s’étoit déjà affermie, elle commençôit à réfifter au doigt; mais la peau du même ver découvert une fécondé fois au bout de vingt-quatre autres heures, étoit devenue très-dure; elle étoit devenue une vraie coque, fous laquelle s’étoit faite la première transformation de l’infeéle. Cette coque* efl toute entière d’un brun noir; Aaaa ij * PI. 3 fi?; 16,17 & 18» * p I- 3S*%- 20 . *Fïg- 19. 558 MEMOIRES POUR L’HISTOIRE elle eft, comme le ver 1 étoit, plus menue au bout anté¬ rieur qu’au bout pollérieur. Sa forme efl celle d’un ver plus raccourci. Selon que la faifon cfl plus ou moins favorable, & félon que l’endroit où l’on tient l’infeéle transformé pour la première fois, efl plus ou moins chaud, cet infede eft plus ou moins de temps à être en état de paroîire au jour avec la forme de mouche. M. Vallifnieri a obfervé qu’un ver qui avoit fubi fa première transformation le 5. Juillet, parut mouche au bout de quarante jours. U11 ver qui fe mit en coque chés moi le 24.. Avril, ne fortit mouche de cette coque que le 27. Juin. Quoique la coque foit dure, la mouche parvenue à terme, trouve la même facilité à en foi tir, que la mouche des tumeurs des bêtes à cornes & la mouche des intefhns des chevaux, trouvent à fortir de la leur. Sur la partie fupérieure ,de la coque, il y a une piece* qui peut être aifément détachée*, lorfque la tête de la mouche, en fe gonflant & allongeant fon rnufeau, agit contre cette piece. J’épargnai à la mouche dont je viens de parler ci-dcflùs, une partie de la réfiflance que les autres trouvent ordinai¬ rement à foûlever cette piece. Impatient de voir naître des mouches que j’avois grande envie de connoître, & appréhendant quelles ne fulient péries dans leurs coques, j’ouvris deux de mes plus vieilles coques ; je trouvai une très- grande facilité à faire fauter avec la pointe d’un canif, la piece dont je viens de parler. Par la porte que j’avois ou¬ verte, je vis à regret l’infeéte péri dans la première coque;, mais par la porte ouverte de la fécondé coque, je vis la tête d’une mouche, qui me parut en fort bon état. Je remis fa piece que j’avois détachée dans fa première place, & je fy arrêtai légèrement avec un peu de gomme arabique. Le lendemain à fa heures du matin, je trouvai la mouche des Insectes. XII . Mem . 559 hors de la coque; elle ne venoit que d’en fortir, elle allongeoit encore & raccourcifloit Ion mufeau; les ailes commençoient à peine à fe déplier, à montrer quelques ziczacs; mais au bout d’une demi-heure, les deux ailes furent parfaitement développées & bien étendues. Cette mouche*, dans tout le temps de fa vie, comme * Pi. 3 y. fig. dans celui où elle vient de naître, a un air parelfeux, elle JJ ; 22 ’ cherche rarement à faire ufage de lés jambes & de lés ailes. J’en ai gardé une en vie plus de quinze jours, dans un poudrier, où je l’ai toujours trouvée tranquille. Sa tête & ion corcelet pris enfemble, ont prefqu'autant de longueur que le corps; ce dernier elt compofé feulement de cinq an¬ neaux, qui en delfus, du côté du dos, font tigrés; un jaune chamois y elt mêlé par petites taches de figure irrégulière, avec de pareilles taches d’un brun-foncé. Les mêmes cou¬ leurs le trouvent fous le ventre,mais autrement diftribuées r le brun frit une efpece de raye fur chaque côté &. au milieu, & le relie elt jaunâtre. Mais ce brun du ventre n’efi bien lènfible que quelques jours après que là mouche elt née; il elt alors plus marqué que dans la mouche de la figure 24, qui fut delfinée peu d’heures après quelle eut paru au jour. Les deux ailes , dont la longueur elt à peu-près égale à celle du cor ps, s’inclinent un peu pour s’appliquer fut lui; elles ne le couvrent pourtant pas entièrement, il relie un efpace entr’elles. Elles font très-joliment gaudronnées *;. * Fig- 23. des garnirons fins font un ornement au côté intérieur & à divers endroits du milieu de l’aîle; mais pour voir ces orne- mens, il faut obferver les ailes à la loupe. Les ailerons ou coquilles qui fe trouvent au delfous de chaque aile, font blanchcâtres, & couvrent fi bien les balan¬ ciers ou maillets, qu’on ne peut voir ceux-ci que lorfqu’on foûleve les ailerons. Le delfus du corcelet elt tout chagriné de petits grains noirs, qui, vûs à la loupe, paroilfent comme A a a a ii$ * PL 33. fig. 23 & 2r. '* Fig. 2 3. h't. * Fig. 24.. * Fig. 25. 560 MEMOIRES POUR l’HîSTOIRE tics grains très-fins fie poudre à canon, collés fur un foiKf* jaunâtre. La tête eftgroffe par rapport au volume fies autres parties. Les yeux à rezeau * font d’un verd foncé 6c chan¬ geant ; mais je n’ai point vu entre leurs mailles, cette forêt fie poils que M.Vallifiiieri affûte y avoir vue avec étonne¬ ment, 6c qu’on trouve aux yeux à rezeau fie plufieurs mouches: je n’en ai jamais vu fie moins velus; les plus fortes loupes n’ont pu m’y faire découvrir un feul poil ; fi faut qu’il y ait fur cet article, fies variétés entre les yeux fie différentes mouches de cette efpece. Ces yeux n’occu¬ pent pas autant de place fur la tête, qu’en occupent ceux de beaucoup d’autres mouches; ils laiffent entr’eux un alfés grand elpace, dans lequel font les trois yeux liffes * qui fè touchent, & qui font, à l’ordinaire, difpofés en triangle. Le refîe dudeffusde la têteefi jaunâtre,& vû à la loupe,il paroît caverneux, comme l’cft une éponge ou une morille. Le fond de chaque cavité a un petit grain noir. Deux foffcttes affés confidérables fe trouvent en devant de la tête; dans chacune de ces foffettes eft logée une antenne * à palette plus arrondie que plate, & d’un des bouts de laquelle part un grand poil. Le deffous de la tète, plus renflé 6c plus ar¬ rondi que le deffus, efl blancheûtre oc affés liffe; il a feule¬ ment deux efpeces de cordons dirigés vers le bas, qui font des prolongemens de l’arcade qui renferme les foffcttes des antennes. Ce deffous de la tête n’eft point couvert de poils, comme l’eft le deffous de la tête de la plûpart des mou¬ ches; mais 011 trouve des poils affés grands fur diverfes parties de notre mouche, comme fur le deffous de fon cor- celet, fur fon ventre 6c fes côtés, 6c fur lès jambes. Le liffe du deffous de la tête fait qu’on y peut voir très-diftinc- temcnt trois petits tubercules * ou grains, dont le fupé- rieur * eft brun, 6c dont les inférieurs rangés fur une même ligne près l’un de l’autre, 6c du fupérieur, font feuille-morte. des Insectes. XII . Mem . $6 L J’ai déjà dit que cette mouche eft de la fécondé claffe, de la claffe de celles qui n’ont ni trompe fenfibie ni dents. Sa bouche me paroït cire entre les trois tubercules dont je viens de parler, immédiatement au de (Tous du fupé- rieur; je dis quelle me parôît être, parce que je ne luis point parvenu à en voir diffnéïement l’ouverture. Pour déterminer la mouche à me la montrer, je lui ai inuti¬ lement offert du fucre, elle n’en a tenu aucun compte; elle n’a même ni rejetté ni afpiré le firop que j’ai mis entre les trois tubercules. Cette mouche pafferoit-elle fa vie fans prendre aucun aliment! n’auroit-elle pas même d’organe pour en prendre! Ce fait, tout fingulicr qu’il feroit,n’auroit plus rien de nouveau après ce que nous avons dit ailleurs de plufieurs efpeces de papillons qui vi¬ vent 6 c font leur ponte fans prendre aucune nourriture pendant toute leur vie de papillon. Ce qui difpofe encore à croire que notre mouche dt dans le même cas, c’eft que M. Vallifnieri en a confervé une en vie deux mois, pen¬ dant lefquels il ne lui a offert aucun aliment. Il y a probablement chaque année au moins deux gé¬ nérations de ces mouches, car dès le 7. Avril j’ai eu des vers des finus frontaux des moutons, qui étoient en état de fe métamorphofer, & j’ai eu des vers de différentes grandeurs, tirés des têtes de différens moutons dans les- mois de Mai, Avril, Juin 6 c Juillet. EX P L ICA TI ON DES FIGURES DU DOUX IE Al E MEMOIRE. Planche XXXIV. î 1 A Figure première eft celle d’un oignon de narciffc percé en a 6 c en b. Un des trous a,a donné entrée à un ver qui a rongé l’intérieur de l’oignon, qui a aggrandi. 562 MEMOIRES POUR L’HlSTOîRE ce même trou, & qui par la luite a ouvert le trou b paf lequel il efl: lorti. La Figure 2 fait voir le ver des oignons de narciiïc, dans fa grandeur naturelle. 11 a quelques poils femés en différens endroits de Ion corps. Ses anneaux lont cha¬ grines. La Figure 3 repréfente la tête & la partie anterieure du ver, vûes au travers d’une forte loupe, c, c, deux cro¬ chets écailleux dont le bout efl brun, e, grain noir, arrondi & luifant. d, d, deux cornes charnues, & dont le bout efl: fourchu, & tantôt plus & tantôt moins ouvert. La Figure 4. efl très en grand celle du bout de la partie où font les deux ftigmates poftérieurs du ver. f, f, ces deux ftigmates. Là font deux petites cavités, dans chacune defquelles efl la place du petit grain noir hemifpherique qui marque le ftigmate. La Figure 5 montre fa partie poftérieure du ver, très- groflie. p, efpece de barillet au bout duquel font les deux bouches de la refpiration , les deux ftigmates poftérieurs. m, w,deux appendices, ou mammelons longs & charnus entre lefquels eft l’anus. La Figure 6 repréfente la coque que le ver s’eft faite de fa propre peau, c, c, deux cornes qui s’élèvent lur cette coque, & qui font analogues aux quatre cornes des coques des vers à queue de rat. La Figure 7 fait voir du côté du dos. la nymphe tirée de fa coque, u, u, velfies blanches qui fervent de baie aux deux cornes. Ces deux veffies rendent les cornes analo¬ gues aux deux grandes cornes des coques des vers à queue de rat. La Figure des Insectes. XII. Man. 563 La Figure 8 efl celle de la nymphe de la figure 7, vue du côté du ventre. c,c, les deux cornes. Les Figures 9 & 10 repréfentent de grandeur natu¬ relle, la mouche dans laquelle le ver de la figure 2 fe transforme, après être devenu la nymphe des figures 7 Si 8. Dans la figure 8 elle a Tes ailes écartées de deffus le corps, & dans la figure 10 lès ailes couvrent le corps, Sc le croifent. Les Figures 1 1 & 12 repréfentent la partie antérieure de cette mouche groffie par une forte loupe. Dans la figure 1 r elle efl vue de côté, & de face dans la figure 1 2. t, la trompe qui efl dans fa cavité ou loge écailleufe. a,a } les antennes. Les Figures 1 3 Si 14 font celles du même ver, de celui des intefhns des chevaux; il efl de grandeur naturelle dans la figure iq., Si il n’y montre pas les crochets. Il eflgroffi dans la figure 13, Si il y fait voir fcs crochets. / le grand crochet ou l’inférieur; i, le petit crochet ou le fupérieur. Les épines triangulaires qui bordent les anneaux, font fenfibles dans cette figure. La Figure 1 5 montre la partie antérieure par-deffous. Si très-grofîie, dans un temps Si une pofition où le plus grand des crochets/paroît feul. La Figure 16 repréfente le bout poflcrieur du ver, ouvert Si vû du côté du ventre. On voit la cavité dans laquelle font rangés les fix doubles friions qui font les fligmates poflérieurs. Si les chairs propres à fermer cette cavité, Si à mettre les fligmates à couvert. La Figure 17 n’eft qu’une portion de la figure pré¬ cédente, mais beaucoup plus groffie. Elle fait voir ces fix Tome IV . B b b b 564 MEMOIRES POUR L’HISTOIRE doubles filions, qui font les fligmates poftérieurs du ver. Planche XXXV. La Figure première repréfente la coque qu’un ver des inteftins du cheval s’eft faite de fa propre peau; celle dans lequel eft renfermé le ver de la figure 14. pl. 34. Cette coque eft vûe du côté du ventre, a, fon bout an¬ térieur. p, fon bout poftérieur. La Figure 2 fait voir par-deftus, la coque de la figure première, qui eft ouverte en a, parce que la mouche en eft fortie. Les Figures 3 & 4 font celles d’une mouche mâle du ver des inteftins du cheval. Elle a les ailes croilées fur le corps, fig. 3 , & elle les a écartées du dos, fig. 4. La Figure y eft celle d’une mouche fémeile, dont la mouche des figures précédentes eft le mâle. La Figure 6 montre le bout du corps du mâle, vu par-deffous & très-groiïi. c, c, deux crochets actuellement appliqués contre le ventre, & que le mâle redreffequand il veut faifir le derrière de la fémeile. La Figure 7 repréfente la tête d’une des mouches pré' cédentes, extrêmement groiïie & vûe de face, i, i, les yeux à rezeau. a, a, les deux antennes, c, efpece de cloi- fon qui fait à la mouche une forte de nez écrafë. b, la bouche. La Figure 8 eft celle d’un ver des finus frontaux du mouton, qui n’a pas encôre toute la grandeur à laquelle il peut parvenir, & qui alors eft tout blanc, f, f, fes ftig- mates poftérieurs. Dans la figure 9 le ver du nez des moutons a toute des Insectes. XII. Mem. 565 fa grandeur, & y eft même un peu plus grand que nature. La partie lupérieure de pluheurs de les anneaux, elt de¬ venue brune, />, anneau poftérieur qui s’eft un peu froncé & fermé, & qui cache les fligmates qui font à découvert, & marqués f } f, dans la figure 8. c, les crochets du ver. La Figure io fait voir de face le bout poftérieur d’un des vers précédens, extrêmement groffi. r, bord du der¬ nier anneau, f, f, les fligmates poftérieurs compofés d’un cercle écailleux brun, & entouré d’une couronne écail- leulé qui de même eft brune./’,/?, deux appendices charnus qui font à côté de l’anus. La Figure i i montre par-defïous, le ver qui eft vû par-defTus dans la figure 9. /.?,/?, appendices de l’anus, c, les crochets. La Figure 12 repréfente en grand la partie fupérieure d’un anneau du ver de la figure 9. r, g; /, g, grains ou tubercules qui femblent des fligmates, & qui lont mar¬ qués t fur le ver de la figure 9. o , o, • • ’7 - • - truX. Fût it Fi-J 4 Fut. F l’/J/tf.l.l ïn.'.-./.-.r T.'tn + DES I N S E C T E S. XIII. Merr . 573 •n$s*35s“&?*$s *■&§ T RE 1 Z 1 E' ME MEMO IRE. HISTOIRE DES COUSINS. I L y a peu de genres d’infeéles, s’il y en a, dont nous ayons autant à nous plaindre que de celui des Coufins: fi d autres inlèdes nous font des picquûres plus cuifantes, & même plus dangereufès, ils ne font pas fi acharnés à nous pourfuivre. Dans quelles campagnes les coufins ne font-ils pas incommodes pendant l’eftéi à peine efl-on en fureté contr’eux dans les villes. Il y a des pays où ils font bien autrement redoutables que dans le nôtre. Ceux qui nous ont donné des relations de leurs voyages en Afri¬ que, en Afie& en Amérique, nous parlent fouvent de ce qu’ils ont eu à fouffrir des coufins. ou maringouins. com¬ me de ce qu’ils ont eu à fouffrir de plus rude. Nous ferions heureux fi nous en étions quittes pour entendre pendant la nuit leur bourdonnement inquiétant, & même pour leur fournir ce qu’il leur faut de notre fang, dont ils font fi avides. Leurs bleffures faites par des pointes extrême¬ ment fines, font legeres par elles-mêmes, fouvent néant- moins elles font fuivies d’élevures qui durent pluficurs jours, de qui quelquefois deviennent confidérables. j’ai vû fur les bords de la mer, dans des pays marécageux, des gens dont les jambes, & d’autres dont les brasavoient été rendus monftrueux par les picquûres réitérées des cou¬ fins; des gens dont ces parties avoient été miles dans un état qui faifoit craindre qu’on ne fût obligé de les leur couper. Les coufins font donc nos ennemis déclarés, & des ennemis très-fâcheux; mais ce font des ennemis bons C ccc ij 574 Mémoires pour l'Histoire à connoître; pour peu que nous leur donnions d atten¬ tion, nous nous trouverons forcés de les admirer, & d’ad¬ mirer même i’inflrument avec lequel ils nous bleflent ; il n’efl befoin pour cela que d’examiner fa ftruélure. D’ail¬ leurs dans tout le cours de leur vie ils ont à offrir des faits propres à contenter les efprits curieux des merveilles delà nature : il y a même tel moment de leur vie où, après avoir fait oublier à l’obfervateur qu’ils le perfécuteront un jour, ils lui font refïentir des inquiétudes pour leur fort. Les naturalises modernes qui ont fait le plus d’ufage du microfcope, n’ont pas manqué de s’en fervir pour voir diflinélement les parties extérieures du coulin. Swammer- dam , Hook , Bonanni, Leeuwenhoek, &c. ont voulu prouver qu’une fi petite mouche nous paroîtroit admi¬ rable, fi nos yeux nous la montroient telle qu’elle paroît au travers des verres qui groffiirent beaucoup, & c’eft pour le prouver qu’ils font fait graver dans la grandeur que leur microfcope lui donnoit. Nous devons auffi à ces auteurs, & à quelque;, autres, plufieurs obfervations que j’ai véri¬ fiées, fur les confins, & fur les differentes formes qu’ils ont eues avant que de devenir ailés. M. Jean Mathieu Barth a même publié récemment une differtation fur les * Imprimée à coufins*, dans laquelle il a raffemblé ce qu’en ont dit de Rati(bonne en , -Ai i -i r 1 , /7 V mieux les anciens & les modernes : il y a lur-tout rapporte au long les obfervations de Swammerdam, de Leeuwen¬ hoek & de Blankard, auxquelles il a joint les fiennes. Ce¬ pendant il ne m’a pas paru que les auteurs qui ont pris plaifir à étudier l hifloire de ces petites infeéles, fe foient donnés affés de foins pour s’inftruire de ce qu’elle a de plus propre à exciter notre curiofité,ou au moins pour s’inffruire des faits qui ont le plus picqué la mienne. *PI. 39. fig. Si les figures de tous les autres infeéles étoient aufîî 4 °' connues que l’cft la figure propre au genre des coufins *, des Insectes. XIII. Mem. 575 nous pourrions fouvent abréger beaucoup les defcrip- tions que nous Tommes obligés d’en donner dans le cours de cet ouvrage. Il y a pourtant un genre d’infedes avec lequel le leur a une grande rcffcmblance, 6c avec lequel on le confond communément, c’ell celui des tipules. La tipuie * 6c le coulin font montés fur de hautes jambes , * PI. 1 i.fig; comme fur des échaffes: le corps de l’une, comme celui 7 ‘ de l’autre, efl long par rapport à Ton diamètre ; le corcelet de l’une, comme celui de l’autre, fait paroître i’infede bolfu , 6c femble obliger la petite tête à lé courber vers le ventre. Enfin la relfemblance efl telle, quelle peut fouvent lailfer incertain, même quelqu’un qui a fait une étude des infcdes. Mais dès qu’on a pris un infede de l’un ou de l’autre genre, dès qu’on le tient entrefes doigts, le doute eft aile à lever ; on n’a qu’à examiner le déifions de la tête, on ne trouvera point de trompe à la tipuie, 6c on en trouvera une fort longue au coufin. Le coufin efl un infcdefanguinaire.éclatipuleeftun infcde pacifique, qui ne nous fait, ni ne nous peut faire aucun mal. Le coufin efl une mouche de la première claffe générale des mou¬ ches à deux ailes, 6c de la troifiéme des claffies qui lui font fubordonnées, de celle des mouches à corps long; la tipuie qui efl: auffii de la troifiéme de ces claffies fubor¬ données, n’eft que de la fécondé des claffies générales. Nous avons dans ce pays diverfes efpeces de coufins, qui toutes font très-petites ; quoiqu’il) - en ait de beaucoup plus grandes les unes que les autres, il n’y en a aucune qui approche de la grandeur des grandes elpeces de tipules; ces dernières auffi ont toujours été bien diftinguées des coufins; mais des auteurs célébrés .comme Swammerdam, Goedaert 6c Lifter, ont fouvent placé de petites elpeces de tipules parmi les coufins. Ce n’eft guéres qu’avec le fecours d’une loupe qu’on peut diftinguer les unes des autres, Cccc iij 576 MEMOIRES POUR L’HiSTOIRE Ja plupart desefpecesde ces derniers, &dè-là il me paroît affés inutile de nous y arrêter; quelques variétés de couleur, qui même n’ont rien de bien frappant,ne valent pas la peine qu’on difpofeen ordre des infeélcs que leur petit elfe ne met pas allés à portée de nos yeux. Si on penlê pourtant que rien 11 efl à négliger de ce qui montre l'étonnante fécondité de la nature dans la produélion des petits animaux, 011 trouvera, & on pourra décrire des variétés qui caraéférbcnt fuffilaniment les diverfes efpecesdecoufms; on en trou* vera de telles dans les grandeurs, les couleurs, & même dans les formes & les proportions de quelques-unes de leurs parties. On peut diftinguer aifément trois eipcces diffé¬ rentes de coufins dans les campagnes des environs de Paris, dont la plus grande a le corps tigré de blanc & de noir, & a fur le corcelet des ondes noires ou très-brunes, mêlées avec des ondes blanches ou grifâtres; ces coufins ont les yeux bruns. Une autre efpece un peu plus petite, reffembleaffés à la précédente par la couleur du corcelet, & par celle des yeux, mais elle a le corps brun. La troifiéme efpece, la plus petite des trois, & la plus commune,a le corcelet roux ou feuiile-morte, & le corps blancheâtre; en deffous * Pî. 4.0. fîg. du ventre chaque anneau n’a qu’une tache brune *, & le û & jo. re f} e e q-g r j s . f es y CUX f ont t J’ un très-beau verd. Mais nous croyons qu’on aimera à nous voir paffer legerement fur de pareils détails, pour en venir plûtôt à ce qui efl de commun à tous les coufins, & à ce que certains genres ont de plus particulier. ^ Fig. j &2. Tous ont un corps long*,dont la figure approche de la cylindrique, & auquel on compte huit anneaux. Leur * Pi. 39. fig. corcelet *, quoique court, efl confidérabie par fon volume; c’efl au corcelet que tiennent les jambes, les deux ailes * Pi. 40. fig. & les deux balanciers * ou maillets. On y trouve aufîî quatre fligmates placés à peu près comme ceux des autres a. b, b. des Insectes. XIII . Mem . 577 mouches. Les deux premiers l'ont allés proches de la tête ; aufli ne mat il pas paru étrange que M. Barth ait foup- çonné qu’ils étoient les organes de l’ouye : quand on n’a pas été obligé d’étudier a fies les mouches pour connoître leurs organes de la refpiration, on peut trouver du rapport avec les oreilles, à deux fentes oblongues, polées très-près de la tête. Lorfque le coufin efi en repos, il tient ordinairement une de lès ailes croifée fur l’autre*, de manière quelle la recouvre. Ces ailes proportionnées à la grandeur de l’ani¬ mal , & par conlëquent extrêmement petites, ne femblent avoir rien de propre à attirer nos regards, elles méri¬ tent pourtant d’être vues au microfcope; alors on les trouve très-ornées. Nous avons parlé ailleurs*de ces petits grains que les ailes des papillons laifient fur les doigts qui les ont touchées; nous avons vû que ces grains, que les yeux feuls confondent avec ceux d’une pcufiiere commune, font tout autant de petites écailles; qu’entre ces écailles il y en a de formes très-différentes, & toutes très-agréables. Les ailes du commun des papillons en font entièrement couvertes, & les ailes de ceux qui en ont le moins, ont de grandes places qui en font rem¬ plies. La nature 11’a accordé de pareilles écailles aux ailes d’aucune des mouches dont nous avons parlé jufqu’ici; nous les avons même fait regarder comme le caraélére le plus propre aux ailes des papillons ; mais les coufîns nous apprennent qu’il efi feulement propre aux papillons d’avoir les ailes plus chargées de ces fortes d’écailles; la nature en a aufli donné aux ailes des coufîns; à la vérité elle les leur a plus épargnées, mais il femble que ce n’ait été que pour les y difiribuer plus élégamment. Les ailes du coufin, comme celles de prefque tous les infeéles, font d’une efpece de matière cartilagineufe, friable & * PI- 1 & 2 . * Tcme h Mem. v . 5 78 Mémoires pour l’Histoire tranfparente comme un talc : le contour & l’intérieur cîc * PI. 39- % chaque aile* font fortifiés par des côtes & parties nervures 5 c 7 ‘ qui ont des ramifications: ce nefontpeut-êtrepas de fimples nervures, ce font peut-être, & probablement,des tuyaux creux, qui portent les liqueurs, ou même l’air néceffaire à la confervation de l’aile. Dans les ailes des papillons, toutes les nervures, toutes les côtes font cachées par les écailles. Dans l’aile du coufin, comme dans celles des autres mouches, les nervures femblent à découvert; mais lorfqu’on confidére au microfcope l’aile du coufin, ces nervures avec leurs ramifications, paroiffent de petites *Fig.4&5. plantes*, de la tige, & des branches defquelles fortent des feuilles oblongues. Les petites écailles qui partent de chaque nervure, ont affés la figure de feuille, chacune fait un angle aigu avec la tige dont elle fort, & tourné vers le bout de l’aile. Ce nombre d'écailles, petit en com- paraifon de celui des écailles qui fe trouvent fur les ailes des papillons, fait un ornement plus leger & de goût. Il y a pourtant des ailes de coufins où l’on trouve des écailles entre les nervures, mais elles y font écartées les unes des autres, elles n’y font que femées. Les endroits de l’aile * Fig. 4. dépourvus d’écailles*, femblent eux-mêmes travaillés, ils font pointillés. Enfin tout le contour intérieur de l’aile, *Fig. 4 & efl bordé d’une frange d écaillés*. Les écailles qui com- 7 pofent cette frange, font toutes égales autour des ailes des confins de certaines efpeces, & autour des ailes de coufins d’autres efpeces, des écailles plus longues font entremêlées avec d’autres plus courtes. Le côté extérieur, * Fig. 6 . qui efl bordé d’un cordon plus fort * que celui du côté intérieur, au fieu d’écailles, a de diflance en difîance une *e,e, t, ire. forte de longs piquants *. La plupart de ces écailles font des palettes oblongues, * dont un des bouts efl plus pointu que l’autre. C’efl du premier des Insectes. XIII . Mem . 579 premier que part le pédicule par lequel 1 écaillé tient àl’aîie: le fécond bout, le plus évafé, cft tantôt plus, &. tantôt moins arrondi, quelquefois Ton milieu eft échancré*. Il y a * p I- 3 9. fTg» des écailles beaucoup plus allongées les unes que les autres, 9 ’ il y en a qui tiennent de la figure d’un croiffant très- ouvert; mais toutes ont un grand nombre de cannelures très-fines ,& dirigées fuivant la longueur de la palette. Ce n’eft pas au relie fur leurs ailes feulement que les coufins ont des écailles, ils en ont fur leur corcelet, ils en ont fur tous les anneaux de leur corps*. Là même, elles * PI. 4-0- leur ont été plus prodiguées que fur les ailes , elles fe tou- client les unes les autres, fans laifTer d’efpace à découvert. Outre les écailles, les coufins ont encore des poils longs, & extrêmement fins. Le corps de ceux de certaines efpeces, en a de chaque côté une rangée qui fait une frange* plus haute & plus fournie que ne l’efl la frange * Fig. 6 & d'écaillés qui borde les ailes. i0 * Les antennes des coufins font encore des parties qui mé¬ ritent d etre obfèrvées au microfcope; la vue fimpleluffit pourtant pour faire appercevoir que celles de quelques-uns font des pennaches*: ce font celles de certains mâles; les *Fig.2.o,v>p>P' aux autres, fi longs que la vûe limple les apperçoit très-bien. Nous avons déjà dit ailleurs que nous n’avons point trouve d’yeux liffes aux confins, mais qu’en revanche ils * !, i. ont des yeux à rezeau *, qui entourent & couvrent pref- que toute leur tète. Ceux de quelques-uns font d’un verd admirable, quoiqu’il l'oit changeant ; les mêmes yeux regar¬ dés en certains lèns, deviennent rouges. Les confins de plu (leurs eijicccs ont au devant de la tête * PI. 39. fig. deux petits corps longuets*, & dont le contour cft rond; 1. b, b. ik pl. jj t q Ue jq Ue reffemblance avec les antennes des mouches 7 .b,b. a corps court; nous les appellerons pointant les barbes, parce que c’cü au-deflousde ces petits corps, qu’eft placée la trompe du coufm , & qu’ils femblent avoir quelque ana¬ logie avec deux parties qui lont à côté de la trompe des papillons, & que nous avons nommées ailleurs des barbes. C’eftun infiniment, ou plutôt une machine bien digne de notre attention, que celle dont le coufm fefert pour nous * pi. 39. fig. picquer,& que nous appelions fa trompç *. Toute fine qu’ed cette trompe,ellen’eflpas moins compofée que celles des mouches à corps court dont nous avons parlé dans le cin¬ quième Mémoire; mais elle ch compofée tout autrement. Elle efl du genre des trompes, dont l’aiguillon,ou, pour parler plus exactement, les aiguillons font entièrement ren¬ fermés dans un fourreau. Ce qu’on voit ordinairement n’elt que l’étui des pièces deftinées à percer notre peau & à fuccer notre fang,& dans lequel ces pièces font contenues com¬ me les lancettes & d’autres inftrumens propres à opérer fur nous, font renfermés dans l’étui d’un Chirurgien. Toutes ces pièces, & l’étui lui-même, méritent d etre vus avec des * pl 4.2. fig. yerres qui les rendent bien fenfibles à nos yeux. Celui-ci * 1 .f. des Insectes. XIII. Mem. $ S 1 paroît cylindrique dans la plus grande partie de fa longueur; il eft couvert d écailles ailes femblables à celles du corps &. des ailes. Près de l'on bout il a un petit renflement ; là eft un bouton * un peu allongé, & plus menu à ion extrémité qu a * PI - fig- bon origine. Le bout de ce bouton efl percé, & laiiïe quel- I ’ 5 ’ quefois fortir une pointe*, que Swammerdam avoit prife * Fig. 3 .d. d’abord pour une pointe Ample, pour celle d’un feul aiguil¬ lon. Il l’a fait repréfentercomme telle,dans l'on Hiftoire des infèétes. Mais Leeuwenhoek après avoir étudié avec beau¬ coup d’application la trompe du couiin,a reconnu quelle étoit compoféede plulieurs aiguillons, dont il a fait graver des figures. Il n’a pas manqué de reprocher à Swammer- damde l’avoir décrite & fait repréfenter comme un infini¬ ment trop Ample; le reproche étoit fondé : Leeuwenhoek 11e pouvoit pas lçavoir qu’aux pièces dont il avoit cru cet infiniment compoië, Swammerdam en avoit encore ad- joûté lieux autres, lorlqu’il s’étoit appliqué à mieux décou¬ vrir fa llruélure; carc’ellde quoi on 11’a pu être inftruit, que depuis que toutes les œuvres de ce célébré auteur ont été miles au jour par les foins de l’illuflre M. Boerhave. Il ne fuit ni tout le talent d’obferver que Swammerdam avoit en partage, ni avoir recours à des microlcopes aufli forts que ceux dont fe fervoit Leeuwenhoek, pour dé¬ couvrir Amplement que la trompe du couAn eft très corn- pofée; il fuffit d’avoir envie de s’en alfûrer, & d’être muni d’une bonne loupe. Pendant qu’on tient le couftn entre deux doigts, par le corcelet & près de la tête, A 011 le preiïe un peu, fouvent on voit l’étui s’entr’ouvrir dans fa partie lupérieure + , tantôt plus, tantôt moins ; quelquefois il s’ou- * Fig. y. vre prefque tout du long, depuis fon origine jufqu’au bouton par lequel il eft terminé. Une efpece de Al un peu rougeâtre & luifant, fort en partie par l’ouverture qui s’eft faite; ce fil s’élève en dehors en fe courbant*. Bientôt * à, Dddd ij H 582 MEMOIRES POUR L’HiSTOIRE on reconnoît qu’il efl un faifceau de piufieurs nlets; on lesfépareles uns des autres, en frottant le paquet avec une pointe line 6 c roide, & fouvent c’eft de lui-même qu un des filets fe fépare en partie des autres, en le courbant. On juge donc que tous ces filets doivent entrer dans la compofition de l’inflrumentdefliné à percer notre peau, & à puifer le fang qui efl delfous; & on voit que quoique l’étui nousparoilfe dans l’état ordinaire, un tuyau continu 6 c cylindrique, il efl cependant fendu prefque tout du long, 6 c que les bords de la fente peuvent s’écarter l’un de l’autre quand il en efl befoin. II efl li ordinaire à l’étui de s’entr’ouvrir, foit tout du long, foit en partie, pendant qu’on tourmente le coufin, 6 c lur-tout pendant qu’on tourmente fa trompe, qu’il efl furprenant que Swammerdam ne l’ait jamais vu entrou¬ vert ;&qu’aj)rès avoir douté fi cet étui n’étoit point fendu, il fe foit déterminé à croire qu’il ne l’étoit point. La fente * PI. 42, fig. qui régné tout du long de l’étui *, efl très-réelle, & elle n’a 5 &7 ‘ pas été ménagée là fans deffein ; elle efl fans doute nécef- faire dans le temps où le coufin veut faire ufage des parties contenues dans l’étui ; c’efl apparemment alors qu’elle s’entr’ouvre, 6 c qu elle s’entr’ouvre le plus. Mais efl-ce pour biffer l'ortir les aiguillons qui doivent être renfermés en d’autres temps I ces aiguillons font-ils réellement tirés hors de l’étui l c’efl ce qui n’a point été examiné, que je fçaehe. On a cherché avec beaucoup de patience, à connoître la flruéïure de la trompe, le nombre & la figure des aiguillons, 6 c on a négligé d’obferver ce qui ctoit beaucoup plus facile fans être moins curieux, d’obfèrver ce qui fe paffe pendant que le coufin picque. Rien n’efl plus naturel, 6 c même plus raifonnable que de chaffer descoufins qui veulent nous picquer ; mais des Phy- fteiens à qui la trompe de ces infeélçs a paru mériter d’être DES ÎNSECTES. XIII. Mem. 583 étudiée,dévoient, cefemble .agir avec eux tout autrement quon en agit pour l’ordinaire; ils dévoient avoir envie d’ob- ferver ce qui le paffe pendant que les confins picquent. Après tout, fans un fort grand courage, & fans un amour cxcelfif pour l’hiftoire naturelle, on peut être capable de foûtenir patiemment leurs picquûres. Loin de tâcher de tuer le coufin qui me picquoit, ou qui cherchoit à me picquer, il m’eft arrivé plus d’une fois de 11 avoir d’autre crainte que de le troubler dans Ion opération. Plus d’une fois je les ai invités à venir fur le delfus d’une de mes mains; plus d’une fois je l’ai offerte à ceux qui étoient en l’air, en l’approchant d’eux tout doucement, & cela pendant que je tenois de l’autre main une loupe, pour m’aider dans la fuite à mieux voir le jeu de leur trompe. On croit bien que j’ai réulfi à me faire picquer; je n’ai pourtant pas été picqué toujours autant de fois que je l’eulfe voulu, & quand je l’eulfe voulu. Lorfqu’on a eu une fois le plaifir de voir le coufin dans l’aélion, on oublie le petit mal qu’il nous fait en nous blefïant, & les fuites de la bleffure, qui, fur la main, ne fçauroient être ni dangereufcs ni de lon¬ gue durée. Après qu’un coufin m’avoit fait la grâce de fe venir pofer fur la main que je lui avois offerte, je voyois qu’il faifoit fortir du bout de fa trompe * une * pi. 39 .% pointe très-fine, qu’il tâtoit avec le bout de cette pointe, ’• fucceffivement quatre à cinq endroits de ma peau. Il fçait choifir apparemment celui qui efl le plus ailé à percer, & celui au deffous duquel fe trouve un vaiffeau dans lequel le fang peut être puifé à fouhait. Enfin il a bientôt fait fon choix, & on fent qu’il l’a fait; on en efl averti par la petite douleur que la picquûre caufe fur le champ. La pointe de l’aiguillon compofé, car, pour nous exprimer plus briève¬ ment, nous ne regarderons déformais que comme une feule pointe, celle qui efl formée de plufieurs pointes Ddddiij 3 - d. 584, MEMOIRES POUR L’HiSTOIRE extrêmement fines, & que comme un leul aiguillon, i’affemhlage de plufieurs; la pointe, c!is-je, de l’aiguillon s’introduit dans la peau, elle y pénétré, elle iort parle bout * PI. 4.2. du bouton qui termine l’étui *. A quoi fert donc la fente qui eft prefquc tout du long de cet étui î ce fi ce qui mérite le plus detre expliqué, ou plutôt d’être vu ici; c’elt ce que la méchaniquc de la trompe des coufins a de plus particulier. L aiguillon doit pénétrer dans la chair, & la nature ne lapas fait capable d’être allongé, ou au moins d’être allongé d’autant qu’il y doit pénétrer; cependant il ne fçauroit s’introduire dans la chair couvert de fon étui, car le diamètre de cet étui étant beaucoup plus grand que celui de l’aiguillon, l’ouverture capable de lailfer palier l’étui, feroit beaucoup plus grande que celle que l’aiguillon peut faire; le bout de l’étui relie donc nécefiairement fur le bord de la playe. Si cet étui n’étoit compofé que d’une lêule membrane très-mince & très-flexible, il pourroit fe piilFer pendant que l’aiguillon s’enfonce, & lorfque l’ai¬ guillon feroit forti de la chair, le reffort de cette membrane lui feroit reprendre fa première forme. Mais les pièces dé¬ liées qui compofent l’aiguillon, demandoient un fourreau plus folide que 11e feroit une membrane fi mince; & quel¬ que mince quelle eût été, il eût été difficile quelle fe fût plifiee ailes, quelle eût été réduite à allés peu de volume: car l’aiguillon doit pénétrer prefque tout entier dans la chair, il s’y enfonce jufqu’auprèsde fon origine; un aiguil¬ lon qui a environ une ligne de longueur, s’enfonce dans la chair de plus de trois quarts de ligne. La nature a donc eu befoin d’employer ici une toute autre méchanique, pour que l’étui auquel de la folidité étoit néceflaire, pût être raccourci à mel'ure que la partie de l’aiguillon qui elt hors de la playe, devient plus courte. Le moyen auquel elle a eu recours, elt fimple; l’étui. des Insectes. XIIJ. Mem. 58y quoique folide, a une forte de flexibilité ; il fe courbe 4 à inclure que l’aiguillon pénètre dans la chair, il s’éloigne de l’aiguillon, qui doit toujours relier tendu & droit ; l’étui qui s’ouvre, peut le tirer en arriére, &. s’y tire fans y amener l’ai¬ guillon. Mais celui-ci a befoin d’être foûtenu immédiate- mentau défi us du bord du trou, aulfi l’étui ne fait-il, comme nous venons de le dire, que lé courber, il-devient d’abord un arc, dont l’aiguillon cil la corde. Le bouton 4 de letui doit toujours relier fur le bord du trou, pour aider h y maintenir &. à empêcher de vaciller, un inflrumcnt délicat & foiblc. C’efi par un expédient fcmblable que les ouvriers qui ont à percer de très-petits trous dans des corps durs, l’çavent maintenir la pointe déliée du foret. Enfin, à rne- ELire que l’aiguillon pénétré, l’étui fe courbe de plus en plus, il s’y fait même quelque part un angle dont le fommet cil variable, au moins ne m’a-t-il pas toujours paru placé dans le même endroit. Cet angle d’abord obtus *, le devient de moins en moins, il palfe à être aigu *, & l’cft à un tel point, quanti l’aiguillon a pénétré aulfi avant qu’il lui elt polîible, c’eft-à-dire, quand la tête du coufin ell prête à toucher la peau, qu’alors l’étui efi plié en deux *;fa moitié inférieure efi alors appliquée contre fa moitié fupérieure. Pour confiderer plus à mon aife l’étui ainfi plié en deux, j’ai quelquefois tué le coufin fur la blefiure, rendue auïïi profonde qu’elle le pouvoit être; quelquefois l’étui a con- fervé pendant un temps afics long, le pli qu’il avoit pris, mais le refi'ort de fes fibres, qui tend à l’allonger, fa enfuite déplié, & l’a redrefie. Pendant que certains confins nous picquent, & dès qu’ils fe préparent à nous picquer, ils font voir encore quelque chofe de plus. Il y en a qui ont l’étui de leur trompe plus compofé que celui que nous venons de décrire. Mademoiièlle 444 qui a fait des portraits fi * PI. 4 r . fig. * Fig y & î- £* * Fig. 4 .f. * Fig. 6 .f. * Fig. 7. * PI. 4 i • %• 4 & 5 . a, a j P O P £• * pe,pc. 586 MEMOIRES POUR l/HlSTOIRE reffemblans & fi finis, de la plupart des infeéfes que nous avons fait graver, ne le plaît pas feulement à faire leurs portraits, elle aime à connoître le génie Si l’induftrie de ces ]>ctits animaux. Pendant quelle étudioit les coufins pour faire les deffeinsqui font gravés dans ce volume, elle leur offroit volontiers une de lés mains ; ils paroiffoient fe con¬ noître en peau, ils préféroient ordinairement la fienne à la mienne. Pendant quelle obfervoit à la loupe un coufin occupé à fuccer fon fang, elle crut lui voir quatre longues antennes *, Si elle m’en avertit fur le champ. Tous les cou- fins que nous avions obfervés, ne nous en ayoient montré que deux; auffi foupçonnâmes-nous que les deux antennes qui paroiffoient de plus, n’étoient pas des antennes que le coufin fit voir en tout temps, quelles n’étoient pas même de véritables antennes, qu’elles étoient des parties de l’étui des aiguillons. Nous ne pouvions manquer d’avoir envie de voir d’où venoient ces deux efpeces d’antennes, * bj b. * PL 4,1. fig. 2. pe,pe. * Fig. 3 & 7. * PL 40. fig; 2. ep, ep. 588 Mémoires pour l’Histoire femblable, mais en petit, à celui de chaque antenne. Les coufins qui ont leurs antennes en plumes, font lesfeuls qui ayent des poils en plume au bout de l’une & de l’autre des pièces qui s’appliquent fur l’étui. Je n’ai point trouvé à ces derniers confins les deux barbes qu’on trouve placées au deffus de la trompe des autres coufins. Au refte, après que les deux pièces qui fortifient le fourreau de la trompe, fe font élevées julqu’à la tête, le coufin à qui elles font propres, achevé de picquer, d’en¬ foncer fon aiguillon, comme nous avons vû que le cou- fin à qui ces deux pièces manquent, enfonce le fien; je veux dire que pendant que l’aiguillon pénétré dans la chair, qu’à meliire que la portion qui en ell dehors de¬ vient plus courte, l’étui fe courbe de plus en plus, & cela jufqu’à fe plier en deux. Si on noiis demandoit pourquoi certains coufins n’ont pour étui de leur aiguillon qu’un fimple tuyau qui peut s’entr’ouvrir prefque tout du long en deffus, & pourquoi l’étui de la trompe de plufieurs autres coufins a lui-même une efpece de fourreau, on nous ferait une de ces quef- tions auxquelles nous ne fommes nullement en état de fatisfaire; nous ne fommes nullement en état de fçavoir pourquoi l’étui de la trompe de certains coufins devoir être plus folide que celui de la trompe de quelques au¬ tres ; mais nous voyons au moins que dès qu’il y avoit des étuis qui demandoient à être plus folides que les autres, l’Auteur de fi petites, mais fi admirables machines, ne de- voit pas augmenter lafoiidité de ces étuis en les rendant plus épais, ou en les faifant d’une matière plus raide; ils eufiTent celfé d’être aufii flexibles qu’ils ont befoin de l’être lorfque la trompe s’introduit dans la chair. Le vrai moyen de fortifier l’étui en lui laiffant toute la foupleffe né- ceffaire, étoit d’appliquer deffus le tuyau complet, des des Insectes. XIII. Mem. 589 portions de tuyaux capables de le défendre dans les temps ordinaires, & qui n’empêcheroient pas cet étui d’être flexible lorfque le coufin auroit befoin de le plier, parce qu’alors ces deux pièces s’en féparent & s’élèvent. Enfin il y a des efpeces de coufins, au moins il y en a une dont l’aiguillon plus fort que celui des coufins des ef¬ peces les plus communes, n’a pas befoin d’être foûtenu par Je bouton de l’étui, pendant qu’il picque. J’en ai ob- fiervé un de ceux-ci dans l’aéfion ; il avoit pofé le bout de l’étui à plus d’une ligne ou deux du trou percé par l’ai¬ guillon, & il s’appuyoit fur cet étui comme s’il fe fût ap¬ puyé fur une feptiéme jambe; l’étui faifoit alors un pli, un angle aigu qui imitoit l’articulation d’une jambe; le fommet de cet angle étoit pris une fois plus proche de l’origine que du bout de l’étui. Ce coufin n’enfonça guéres plus du tiers ou de la moitié de fon aiguillon dans ma chair, au lieu que les autres coufins font entrer leur aiguillon prelque tout entier dans la chair dont iis veulent tirer le fang. Cet étui fur lequel le coufin peut s’appuyer, a afles de folidité pour n’avoir pas befoin des deux pièces qui font un fourreau à beaucoup d’autres étuis. Le coufin avoit deux afles longues barbes * au defliis de fa trompe, terminées par un bout fut d’écailles blanches; le relie de chaque barbe étoit couvert d écaillés brunes ; le corps étoit encore plus brun, mais le corcelet étoit rougeâtre. Outre les attitudes dans lefquelles nous avons fait re- préfenter des coufins qui picquent, outre les attitudesoù le coufin pôle fur les fix jambes, ou au moins fur les quatre premières, fait agir fon aiguillon en tenant toujours là tête à peu près parallèle à la furface de la chair dans la¬ quelle l’aiguillon pénétré, je leur ai vu prendre beaucoup d’autres attitudes, & je les ai vû prendre fuccelfivement au même coufin. Un jour il y en eut un qui me picqua 590 Mémoires pour l’Histoire conftamment pendant plus de lèpt minutes, & qui me fit voir fucceffivement une fuite de pofitions très-différentes. Son corps ctoit parallèle au défi us de ma main quand il commença à y introduire Ton aiguillon; mais à mefure qu’il failoit pénétrer Ton aiguillon, & qu’il bûvoit mon fan g, il élevoit l'on derrière: il ceffa d’abord de s’appuyer fur lès jambes poftérieures; il éleva enfuite fou derrière de plus en plus, en lui fàilânt décrire un arc dont la tète ctoit le centre. II parvint à avoir la tète embas Si le corps en haut, & perpendiculaire au deffus de ma main; il 1 in¬ clina enfuite dans un lèns contraire à celui des pofitions précédentes; c'étoit alors le ventre qui étoit en vue; le coufin me parut près de tomber à la renverfe, mais avant que cela arrivât, il s’étoit autant gorgé de fang qu’il pouvoit l’être, & il s’envola. Ordinairement lorfque le coufin fucce à fon aile, & finis être troublé, il ne quitte point l’endroit où il s’cft fixé, jufqua ce qu’il ait rempli ton eftomac Si les intel- tins, de tout le fang qu’ils peuvent contenir. Les inteftins, pour donner plus déplacé au fang, fe vuident des ex- crémens qui y étoient reftés. Les feuls que j’aye vu rendre aux confins, font une liqueur claire Si tranlparente; on voit for-tir une goutte, ou même fucceffivement plufieurs. gouttes de cette liqueur, du derrière de celui qui eft occupé à boire le fang. Tel coufin dont le ventre étoit plat, fiafque & gris avant que d’avoir fuccé, a le ventre très-tendu, arrondi Si rougeâtre, quand il abû notre fang à fon aile. Le fang dont le coufin s’eft rempli,le colore; quoique contenu dan- les inteftins, il peut être apperçu au travers des peaux qui ont quelque tranfparence; après que i’infedle s’en cft raffafié, il s’envole. J’ai pourtant vû quel¬ quefois des coulîns qui ne font partis de deffus ma main, qu’après l’avoir picquée Si fuccé fon fang en trois à quatre des Insectes. XIII. Mcm . 591 différais endroits; peut-être qtéils avoient toujours perçé de trop petits vaiffeaux ; peut-être auiïi que ces jours-là mon làng n’étoit pas à leur goût, qu’ils cherchoient en différens endroits pour en trouver de plus agréable que celui qu’ils avoient bû d’abord. La picquure faite par une pointe auffi fine que l’efl celle de l’aiguillon d’un coufin, devroit être prefque infen- fible; la pointe de la plus fine éguille, efi, par rapport à celle de cet aiguillon, ce que la pointe d’une épée cfi, par rapport à celle tic cette éguille. Une fi légère bleffure fem- bleroit devoir être fermée fur le champ, & ne devoir être fuivied’aucun accident fâcheux; cependant des tumeurs, quelquefois affés confidérables, s’élèvent dans l’endroit qui a été picqué. Il n’y a aucune apparence que ces élevures foient, comme l’a voulu Leeuwenhoek, les fuites natu¬ relles d’ime bleffure , faite par un infiniment d une figure particulière: mais c’efi que la playe ncll pas une fimple playe; elle a été arrofée par une liqueur capable de l’irriter. On voit fortir cette liqueur en cliver lès circonftances,du bout de la trompe, on en voit fortir une petite goutte d’une eau très-claire; j’ai quelquefois apperçu cette li¬ queur dans la trompe même ; quelquefois pendant que j’obfervois une trompe vis-à-vis le grand jour, & avec une forte loupe, j’ai vû dans fon intérieur précifément ce qu’on voit dans des tubes capillaires de verre, dans des tubes tels que ceux des thermomètres, lorfquela liqueur qui y a été introduite, fc trouve partagée en diverfes co¬ lonnes, par des bulles d’air qui s’y l’ont engagées. Mais pourquoi le coufin qui n’a qu’à fuccer notre fang, ne fe contente t-il pas de le fuccer î Cherche-t-il à nous faire du mal pour nous en faire! veut-il empoifonner la blel- fure qu’il nous fait!S’il a des intentions, il n’en a pas de fi mauvaiies, ou,pour parler plus exactement, ce que l’Auteur Eeee iij 592 MEMOIRES POUR L’HlSTOIRE du coufin a voulu, ce n’cfl pas précisément que ce petit infeéïe nous fit Souffrir par lès picquûres, mais il a voulu que le coufin putfe nourrir du fang des animaux,du notre même; & notre fang elf apparemment trop groffier & trop épais pour lui. Nous avons vû ailleurs que les papillons & les mouches, pour mettre le miel des fleurs, pour mettre le fucre en état de paffer dans leur trompe, font obligés de délayer ces matières, que leur trompe verfe déifias une eau qui les rend j>lus fluides. 11 y a grande apparence que notre fang n’a pas le dégré de fluidité qu’il doit avoir pour cou¬ ler dans la trompe du coufin, qui, avant que de tenter de l’y faire entrer, le mêle avec une eau très-liquide. Cette eau d’ailleurs peut être néce(faire pour affaifonner le fang dont le coufin fe nourrit. Ce n’èft pas affés de faire en¬ trer dans notre eflomac des viandes hachées menu, ou broyées; pour qu’elles puiffent s’y bien digérer, elles doi¬ vent être imbibées de falive. Le coulin qui n’eft pas pourvu de dents , & qui n’en doit pas avoir pour agir contre l’ali¬ ment liquide qu’il fait paffer dans ion eflomac, imbibe cet aliment, notre fang d’une liqueur propre à le faire fermenter; nous nous trouvons mal de ce que cela doit êtreainfi. Il n’y auroit rien de mieux pour empêcher le mauvais effet des picquûres des coufins, que de délayer furie champ avec de l’eau, la liqueur qu’ils ont laiffée dans la playe. Quelque petite que foit cette playe, il ne feroit pas diffi¬ cile d’y introduire de l’eau ; en la grattant fur le champ, on l’aggrandiroit, & il n’y auroit qu’à la laver après l’avoir aggrandie: quelquefois je me fuis trouvé bien d’avoir eu recours à ce remède. Mais on efl fouvent picqué par un coufin, fans s’en appercevoir, on ne fçait quelquefois qu’on a été picqué, qu’au bout de plufîeurs heures, quand on en efl averti par la fermentation qui fe fait dans la bleffure; des Insectes. XIII. Mem. 593 alors il efl: trop tard pour que le remède ait tout Ton effet; plutôt, il croit facile de mettre à découvert & de laver le fond d’une playe qui n’a pas une ligne de profondeur. Tâchons à prêtent de prendre quelque connoiflânce de la ftrudure & de la compofition de cet aiguillon, qui après avoir percé notre peau, va deffous puifcr notre fang. En preffant la tète du coufin, en pliant la trompe, en la frottant avec une pointe, il eft ailé de mettre l’aiguillon à découvert ; fouvent il arrive alors que la fente de l’étui s’en- tr’ouvre, & que l’aiguillon en fort en partie ou même en entier, pour peu qu’on y aide *. Quelquefois quand on frotte l’étui, on le caffé en deux tranfverfalement *, fans cafTer l’aiguillon, & cela tantôt plus près & tantôt plus loin de fon origine. Reprélèntons-nous un fourreau d’épée trop fragile, caffé ou coupé quelque part tranfverfalement, en tirant la partie de ce fourreau qui eftdu côté de la pointe, jufqu’à ce que la pointe en fût dehors, on mettroit à nud une partie de l’épée plus ou moins longue, félon que le fourreau aurait été caffé plus près ou plus loin de la garde; on peut de même tirer la partie de l’étui de l’aiguillon du coufin qui a été féparée de celle qui tient à la tête, & mettre à découvert une plus longue ou une plus courte portion de l’aiguillon *. Dans ce cas, & même dans plufieurs de ceux où on l’a fait lortir par la fente de l’étui non caffé, l’aiguillon paraît un fimple filet * un peu jaunâtre, terminé par une pointe fine *. Quand on le regarde au travers d’un excellent microfcope, quoiqu’il y paroiffe confidérable- ment groffi, il n’en paraît pas moins un corps fimple, dont la circonférence efi circulaire, ou au moins ovale, & qui en diminuant infenfiblement de groffeur, va fe ter¬ miner par une pointe très-déliée. Lorfque cette pointe fe trouve favorablement placée, on apperçoit fur deux de fes côtés oppofés, des dentelures*; mais dans beaucoup * PI. 4,2. fig„ 5, 6 & 7. * Fig. 2 .f. * Fig. 2. J. * Fig. 4. * P- * Fig. 7. d , 594 Mémoires pour l’Histoire d’autres polirions,elle parait liffe; on croit voir fur une fig. de lès faces *, une couliffe qui va de la bafe à la pointe. Lorfqu’on a fait fiortir, foit en partie, foit en entier, l’aiguillon par la fente de l’étui , on peut fouvent re- connoître qu’il n’eft rien moins qu’un corps (impie , malgré ce qui en avoit paru dans le cas précédent; les courbûres qu’on l’oblige de prendre en le tourmentant, donnent occafion à une ou à plu (leurs des pièces qui le compofent, de fe féparer de celles contre lcfquelles elles étoient appliquées, & de s’en féparer, foit feulement dans fig. une partie de leur longueur ', foit dans toute leur lon- . gueur *. Jl e(t donc très-ailé de s'affûter que l’aiguillon cfl compoféde piufieurs pièces, mais il ne l’eft pas de même de s’affûrer du nombre de ces pièces, de bien voir quel eft leur arrangement, & enfin de voir comment chacune des pièces e(t faite; on n’eft pas maître de féparer toutes les pièces quand on le veut, quelque attention qu’on y apporte; quel¬ quefois on les brife, ce qui doit faire craindre que leur nombre ne paroiffe augmenté par les fragmens. Quand elles font réunies, elles le font fi bien, comme nous venons & de le dire, qu’elles forment un tout qui paroît continu *, quoique regardé avec les meilleurs microfcopes; & quand on les a féparées, on ne voit jamais a (Tés diftinélement leur figure, pour être en état d’en conduire la manière dont ces pièces étoient arrangées auparavant; car on n’eft pas toujours maître de mettre au microfcope des pièces fi petites dans les pofitions oit on les y voudrait, & de les en faire changer à fon gré. De-là vient qu’il eft difficile de parvenir à connoître la figure tic chacune de ces pièces en particulier. Mais on ne fçauroit mieux frire fentir combien il eft difficile des’afTurerdu nombre & de la figure des pièces de cette petite partie, qu’en faifànt remarquer combien fit compofition a paru différente aux plus grands maîtres dans l’art des Insectes. XIII. Mcm . 595 fart de diflequer les plus petits corps. Leeuwenhoek, après avoir pris beaucoup de peine à anatomifer l’aiguillon du coufin, 11e i’a pû lëparer qu’en quatre pièces; 6c Swam- merdam, qui d’abord l’avoit cru une partie fimple, l’a jugé enfuite compoféde fix pièces. Leeuwenhoek veut que les quatre pièces qu’il a obièrvées, l'oient terminées en pointe; qu’il y en ait une des quatre tailiée par le bout en bec de pjume, 6c qui foit faite tout du long comme un tuyau de plume fendu en deux ; quelle ferve d’étui aux trois autres. Selon lui, deux de ces trois pièces * font femblables, 6c pofées à côté l’une de l’autre; leur pointe eft courbée en * P!. 42.%. arc, dont la convexité efl hérifée de dentelures: enfin il ,;5 ‘ donne à la quatrième piece la figure d’une lame terminée par une pointe, 6c il veut que cette lame foit appliquée fur les deux pièces précédentes. Swammerdam, comme nous venons de le dire, donne deux pièces de plus à l’aiguillon; il le frit compofé de cinq pièces terminées en pointe, 6c contenues dans une fixiéme qui n’a pas de pointe, qui eft, 6c qu’il appelle, une cannule. Il veut que îorfque les cinq petits aiguillons pénétrent dans la chair, leur cannule y pénétré aulfi; ce qui eft difficile à concevoir, fi on regarde avec ce célébré auteur, le bout de cette cannule comme cylindrique. Enfin,ce queM. Barth nous a donné récemment fur la flrucïurc de cette trompe, ne convient en tout, ni avec ce que Leeuwenhoek, ni avec ce que Swammerdam en ont dit. J’avoue aulfi qu’il me paroît prefqu’impoffible de déter¬ miner avec afifés de certitude, de voir aulfi diftinétement qu’il feroit à fou liai ter, toute la compofition de la trompe du coufin. Je me contenterai donc de rapporter ce que j en ai vû, & vu conflamment un grand nombre de fois. Après avoir dégagé l’aiguillon d’un coufin de l'on étui, je lai coupé près de fa bafe, c.’eft - à - dire, près de la tête dg Tome IV. 1 • Ffff 596 Mémoires pour l’Histoire l’infeéle; je l’ai mis enfui te fur le verre qui fert de porte- objet aux microfcopes à liqueurs; je l’ai frotte avec une pointe extrêmement fine, ou j’ai quelquefois picqué une femblable pointe dans l’aiguillon. Quelquefois j’ai eu beau faire, je n’ai pu le divifèr en plus de quatre filets, ou quatre *P!. 42. fig. pièces*; mais quelquefois aulfi je fuis parvenu à féparer 9 * Fi". 10. c ‘ nc I P' eces ^ cs uncs d es autres*. Pour être plus fur de la réalité des pièces, pour n’avoir pas à craindre de prendre ics fragmens d’une même pièce, pour deux pièces diffé¬ rentes , je ne les féparois que depuis leur bafe jufqu’à quelque diflance de la pointe. Je crois donc être bien certain que l’aiguillon a une pièce de plus que Lcemven- hoek ne lui en a donné; mais je ne fçais fi c’eft faute d’adrefle que je ne luis pas parvenu à y trouver les fix pièces de Swammerdam, au moins ce 11’a pas été faute de foins. Dans quelques circonfiances , j’ai vu très - diftinéfe- *Fig. $. “• fourmillent en certaines années, depuis le mois de may, jufque vers le commencement de l’hiver. De-là vient que dans les pays marécageux on eft fi tourmenté de coufins ; 6 c de là vient auffi, que les années pluvieufes pendant lefquelles les mares nefontpoint miles à fec, donnent beau¬ coup plus de coufins que les années féches. Enfin quel¬ qu’un qui veut avoir le plaihr de fuivre les coufins dès leur première origine, n’a qu’à tenir dansfon jardin ou dans fa cour un baquet plein d’eau, & il peut être fur de voir au bout de quelques femaines pour le plus tard, cette eau bien peuplée de vers de coufins. F fff üj 6 oO MEMOIRES POUR L’HlSTOIRE * PI.43.%. Quoique ces vers foient toujours petits*, lors même ïo u> 11 ‘ qu’ilsont toute la grandeur à laquelle ils peuvent parvenir, on a plus de facilité à les voir, qu’on n’en trouverait à voir d’autres inicélcs aquatiques beaucoup plus grands, 6 c dont l’eau ferait également peuplée; leurs befoins les obligent de fe rendre à fa furface, 6 c de s’y tenir allés long¬ temps: s’ils s’en éloignent, ce n’eft que pour quelques inflans, bientôt ils y reviennent pour refpirer l’air. Pour l’ordinaire ils tiennent à la furface de l’eau , ou même un * Fig. 2. or. peu au-defliis, l’ouverture du conduit* par lequel l’air entre dans leur corps. Cette ouverture efl au bout d’un * r. tuyau qui part du dernier anneau; le bout * de ce tuyau efl dentellé, 6 c s’évafe: il forme à la furface de l’eau, 6 c avec l’eau même, un entonnoir. Le tuyau a feul plus de longueur, que n’en ont enfemble trais des anneaux qui le précèdent ; il a un peu plus de diamètre à fon origine qu’à fon extrémité. La fituation la plus commode à ces vers, celle où ils cherchent à fe mettre , en efl donc une dans laquelle la plupart des animaux ne pourraient vivre; ils ont toujours la tête embas. Si on en fait paffer un bon nombre du baquet dans lequel ils font nés, dans un verre ou un * f, 2- r * gobelet* plein d’une eau claire, dès que tout efl devenu calme, on a le plaifir de les voir pofés à peu-près paral¬ lèlement les uns aux autres : ils font très-vifs, 6 c un rien efl capable de les inquiéter; pour peu qu’en touchant le verre on donne de mouvement à l’eau, tous quittent fli furface, chacun s’enfonce, 6 c nage de fon côté; mais bientôt aufli ils reviennent tous fe placer comme ils l’étoient auparavant. Puifqu’il y a plufieurs efpeces de confins, il y a autant d’efpeces différentes de vers qui fe doivent transformer en ces petites mouches. De là peuvent venir en partie les différences qu’on remarque entre les figures de ces des Insectes. XIII. Mem. Soi vers, qui ont été données par différens auteurs; les diffé¬ rences qui fe trouvent entre celles du Pere Bonanni, de Hook,deS\vammerdam, &c. la différente manière dont iedelfinateur voit, & celle dont il rend ce qu’il a vu, peu¬ vent auffi entrer, & peut-être entrent-elles pour beaucoup dans les variétés qu’on obfcrve entre les figures du ver des coufins, qui nous font venues de differentes mains: mais il fuffit que ce que la conformation de ce petit animal a d’effentiel, fe trouve dans ces différentes figures, & il s’y trouve. Ces vers appartiennent à la troifiéme claffe de ceux qui fe transforment’en des mouches à deux ailes, c’efl-à-dire qu’ils font dépourvus de jambes, que leur tête a une figure confiante, & qu’elle n’a point deux dents ou deux mâchoires propres à jouer l’une contre l’autre; auffi les avons nous placés dans le fixiéme des genres de la troi¬ fiéme claffe des vers. Leur corps eft longuet; leur tête * efi bien détachée du premier anneau * auquel elle efi 2 jointe par une efpece de col. Ce premier anneau efi le plus gros& le plus long de tous, ilfcmble une efpece de cor- celet; il eft fuivi de huit autres anneaux, c’eft-à-dire que le ver en a neuf en tout; ils deviennent de plus en plus petits, à mefure qu’ils s’approchent du bout pofté- rieur, mais aucun d’eux n’eft autant furpaffépar celui qui le précédé, que le fécond l’eft par le premier. Nous avons déjà fait connoître ce grand tuyau * qui part du dernier des anneaux; ce tuyau, qui eft le conduit dans lequel font renfermés les organes néceflaires pour refpirer l’air; il fait fouvent un angle avec l’anneau doù il part; rarement il efi dans une même ligne droite avec le refie du corps. Mais nous devons faire connoître encore un autre tuyau * auffi gros, mais plus court que le pré¬ cédent , & qui part du même anneau du côté du ventre ; 3 PI. 43 »fig. & 3. e e. * r» * Fig, 2 & ÔO2 MEMOIRES POUR L’HlSTOIRE ii eft prefque perpendiculaire à la longueur du corps. Ce dernier tuyau a une ouverture dedinée à donner iffue aux excrémens du ver, elle ed Ion anus, j’en ai fouvent vû loi tir des excrémens verdâtres. Tout ion contour ed bordé de longs poils * qui fe difpofent en entonnoir quand ils flottent dans l’eau. Du bout du même tuyau, & du de- ■»/*• dans de l’entonnoir de poils partent quatre lames ovales*, minces, tranfparentes, & comme écailleufes,qui fembient quatre nageoires; elles font pofées par paires, dont l’une part du côté droit, &. l’autre du côté gauche. Ces quatre lames peuvent s’écarter les unes des autres. Chaque anneau a de chaque côté, & vers le milieu de fa longueur, une 2 & houppe de poils ; mais le premier anneau *, celui que nous avons comparé au corceiet des infeéles, ed beaucoup mieux partagé en houppes, comme fi iêul il valoit trois anneaux, il a trois houppes de chaque côté. Les anneaux des jeunes vers font verdâtres, & même blancheâtres ; mais ils deviennent grifâtres, lorfque le ver cd près de fe trans¬ former. Ils ont une tranfparence qui permet de voir affés bien les parties intérieures, & fur-tout les intedins. Swam- merdam reconnoît que Hook ed le premier qui ait vû les mouvemens que font ces intedins, pour pouffer jufqu’à l’anus la matière qu’ils contiennent. Quelquefois les in¬ tedins font verdâtres, quelquefois ils font bruns, félon la couleur de la matière dont ils font remplis ; quelquefois ils font blancs & tranfparens, & cela lorfqu’ils font vuides: enfin en d’autres temps, on y didingue des files de grains féparés les uns des autres, ce font les grains des excrémens. J’ai vû de ces petits grains dardés dans les intedins, qui fembloient s’échapper à la preffion, comme s’échappe un noyau de cerife, humide, d’entre les deux doigts qui le preffent. La tranfparence du corps permet encoie de voir 3 - tf, deux tuyaux blancs*, placés tout du long du dos à côté l’un des Insectes. XIII. A [cm. 6 03 l’un de l’autre; on les fuit tous deux depuis le premier anneau julqu’au bout du tuyau de la relpiration; ils lont auili les deux principaux conduits à air, les deux principales trachées. Pendant que le ver tient le bout de Ion tuyau de la relpiration à la furface de l’eau, on en voit lortir qaelq uefois des bulles d’air, qui apparemment y ont été apportées par les deux trachées dont nous venons de parler. La tête elt un peu plus brune que le relie; elle eft applatie de delfius en délions, & Ion contour elt arrondi. De chaque côté on apperçoit une tache brune*, qui elt un des yeux, *PI-4 au moins cette tache elt-elle placée 011 le trouvera par la 2 & fuite l’œil du coufin , mais elle n’a pas de rezeau. On ne trouve point de dents à cette tête; mais autour de la bouche on voit plulieurselpecesde barbillons; Swammer- dam *en compte iêpt,dont deux beaucoup plus conhdé- * F! S- râbles que les autres, ont la figure d’elpcces de croilîans, dont le côté concave elt garni d’une frange bien fournie de poils très-prelfés les uns contre les autres. On obferve avec plaifir la vîtelfe avec laquelle le coufin fait jouer ces deux efpeces de houppes. Si on les confit!ère au travers d’une loupe, on voit qu’alternativement le coufin les retire en arriére, & les porte en avant, & toujours très-vite; ces deux lens 11e font pourtant pas les leuis lèns dans lefquels elles paroilfent être agitées. On remarque enfuite de petits courans de liqueur, qui font fans doute déterminés par le mouventent des houppes, à lé diriger vers l’ouverture qui elt entr’elles, vers la bouche. Les autres barbillons d un volume moins confidérable , lont pareillement garnis de poils, & fervent encore à agiter l’eau. Les courans portent au ver l’aliment qui lui elt nécelfaire, des infeétes imper¬ ceptibles, de petites plantes, éé peut-être même des corps terreux qui nagent dans l’eau. Quand les vers ne trouvent pas auprès de la lurface de l’eau, de quoi fie nourrir, ils en Tome IK • Gggg *PI. 43.%. 2 & 3. d, d. * Fig. j. * a. * e, e, &c. *k. * d. * P> F- 604 . MEMOIRES POUR L’HlSTOIRE vont chercher ailleurs. Souvent je les ai vus defeendre au fond d’un poudrier de verre, & s y tenir pendant un temps allés considérable ; ils fe plaçoient auprès d’une elpece de terreau qui s’y étoit dépofé , ils en détachoient de petits grains avec les barbes de leurs croi flans; ilsdonnoient aux petits grains un mouvement qui les portoit vers leur bou¬ che, où ils entroient apparemment, car après les avoir vus aller en avant, je ne les voyois pas retourner en arriére. La tête de ces vers a un ornement dont nous devons dire quelque choie; elle a deux efpeces d’antennes* cour¬ bées en arc; la concavité de l’une ell tournée vers celle de l’autre. Ce font des antennes * d’une ffruéture différente de celle des antennes des infeétes ailés, car on n’y trouve aucune autre articulation que celle * de leur baie; mais elles n’en font pas moins agréables à voir au microlcope. Leur côté concave ell liffe ; fur la plus grande partie de la longueur de la partie convexe, il y a de dillance en diffance, un poil qui reffémble à une épine*, & qui eff prefque couché fur la tige dont il part, ou qui s’en éloigne peu en fe dirigeant vers le bout de l’antenne; à quelque dillance de ce bout ell une jolie houppe * bien fournie de poils très-longs quoique roides. Enfin le bout de l’antenne a trois à quatre poils * d’une médiocre longueur, & deux * plus longs Si plus gros que ceux de la houppe. Les auteurs qui ont publié des obfervations fur les coufins, paroiffènt avoir négligé de les fuivre pendant le cours de leur vie, ils paroiffènt s’être contentés de les obferver dans les états qui leur donnent des formes diffé¬ rentes. Ce qui le prouve, c’eft que je ne me boliviens pas d’avoir lu dans aucun auteur, que le ver du coufm change de peau; cependant, comme les chenilles Si beau¬ coup d’autres infeétes, il quitte plufieurs fois dans fa vie une dépouille complettc, avant que de fe défaire de celle des Insectes. XIII. Mem. 6 oj qu’il doit biffer pour paroître transformé. Lorfqu’il veut quitter une dépouille, il le met a la furface de l’eau, dans une pofition différente de celle où il avoit coutume de s’y tenir; il y eft d’abord allongé & étendu, ayant le dos en deffus;ilfe recourbe enluitcun peu, il enfonce fa tête queue fous l’eau, à fleur de laquelleeflfon premier anneau, celui qu’on peut appeller le corcelet. Cet anneau lé fend alors, bientôt la fente fe prolonge fur un ou deux des anneaux qui le lim ent, & dans l’inftant cette fente devient aiïcs confidérable pour biffer fortir le corcelet du ver, & fuccefli veillent toutes lés parties , qui paroiffent au jour cou¬ vertes d’unc peau plus tendre que celle dont elles viennent de fe tirer. Au refie, la dépouille que le ver biffe alors, eft très-complettc, il n’y manque rien de ce que l’extérieur du ver nous montre. J’ai reçû des obfervationsmanufcritesfur divers infectes, & en particulier fur les coufms , d’un fçavant Chartreux,qui fe plaît & s’occupe à admirer les ouvrages de f Eternel, dans le temps où il ceffede chanter fes louanges; il a étudié les confins plus conftamment que ne font faitlcs auteurs qui en ont parlé : auffi non feulement a-t-il \ u que leurs vers quittent des dépouilles, ils’eft aflùré qu’ils en laif- fent trois, outre les deux dernières , qui fontfuiviesdechan- gemensdans la forme de l’infcéle.Si ces pieux Solitaires qui compofent tant de nombreufés Communautés, avoient, comme Dom Allou, (c’eft le nom du Chartreux que je viens de citer, & que j’aurai à citer encore pl u fieu rs fois, foit dans ce Mémoire,foit dans d’autres, ) fi, dis-je, ces pieux Solitaires avoient, comme Dom Allou , le goût d obfér- ver les infeéles , nous pourrions efperer que les faits les plus effentiels del’hiftoire de ces petits animaux, nousferoient bientôt connus. Quel délaffement ces Religieux ié pour- roient-ilspropofer, plus digne de l’état qu’ils ont embraffe, que celui qui mettrait lotis leurs yeux les inerveilleufes' Gggg >‘j 6 o6 Mémoires pour l’Histoire productions d’une pui(Tance Tans bornes! Alors leu-loifir même les porterait à adorer cette puifTance, & leur fourni¬ rait de quoi la faire adorer plus Tou vent, par ceux qui en font diflraits par trop d occupations, Toit férieufes, Toit frivoles. Après avoir changé trois fois de peau dans quinze jours ou trais femaines , plutôt, ou plutard, néantmoins félon que la faifon a été plus ou moins favorable, le ver eft en état de quitter une nouvelle dépouille; il s’en défait pré- cifément, comme il self défait des autres, & avec la mê¬ me facilité. Cependant après avoir quitté celle-ci, il n’eft plus le même qu’il étoit auparavant, il a changé de forme & d’état; ainfi le ver du coufin n’eft pas de ceux qui le font une coque de leur propre peau quand ils veulent le transformer. Lorfque cet inleéte paffe à un nouvel état, il Te défait de la peau de ver, comme s’en défont diverfès elpeces de nymphes qui doivent devenir des mouches à quatre ailes, & comme les crifalides qui donnent des papil¬ lons , Te défont de la peau de chenille. L’infeéte qui doit devenir coufin , avoit dans Ton premier état une forme oblongue.dans celui qu’il vient de prendre, il y en a une rac- * PI. 43. fig. courcie & arrondie *. Le corps eft contourné de façon que 7 ' /( la queue*eft appliquée contre le deffousdelatête, & que lamaffe totale femble lenticulaire. Regardons laauffi pour un moment, comme ayant la forme,d’une lentille: cette efpece de lentille n’eft pas pofée à plat dans l’eau, le plan qui paffe par Ta circonférence, eft dans un plan vertical. Cette lentille ne reffemble pourtant pas par Ton liffe & par l’uniformité de Tes furfaces, à nos lentilles de verre ; lès bords font plus épais dans une partie de fa circonférence, *cf. que dans l’autre. La partie qui eft la plus épaiffe* eft en deffus.Mais par où cette lentille animée paraît d’abord plus différer des lentilles de verre, c’eft que de Ta partie la plus des Insectes. XIII. Mem . 607 élevée & la plus épaiffe, partent deux fortes de cornes *, ou * PI. 43. fig. plutôt deux cornets qui ont l’air d oreilles d’âne; l’endroit 7 ' r ’ r ’ d’où partent ces efpcces d’oreilles, eft celui où doit être par la fuite le corcelet de la petite mouche. En prenant ces cornes pour terme, un des côtés * a, d’efpace en elpace, * Fig. 7 & des entailles qui marquent les anneaux du corps, & ce 8- aaq ' côté eft le dos, & la partie poftérieure. L’autre côté*n’a * point de pareilles entailles, c’eft celui où eft la tête. Ce n’eftpourtant que quand finfeéïe eft en repos, qu’il a une ligure lenticulaire; il peut fe mouvoir, il peut nager aufti vite fous fa nouvelle forme, qu’il nageoit fous celle de ver; quand il nage, il déplie la partie* de fon corps, qui * Fig. 9 & dans le temps de repos eft recourbée en deftous, & dont I2 - le bout eft ramené jufqu’à la tête. Ce font les coups fubits que cette partie dépliée donne contre l’eau, qui y font mouvoir l’inlëéle, qui l’y font enfoncer, & aller à droite ou à gauche. Lorfqu’il fe donne de pareils mouvemens, il a une ligure allongée ; fa queue eft d’autant plus capable d’agir contre l’eau, qu’elle eft munie de nageoires* ou de * Fig. 10, palettes ovales, femblables à celles que nous avons fait n > n ‘ obferver au bout du tuyau, par lequel le ver rejette les excrémens. Nous avons évité jufqifici de nous fervirfoit du nom de nymphe, foit de celui de crifalide; avant que d’adop¬ ter l’un ou l’autre, nous avons cru devoir faire remarquer que notre inlëéle ne reftemble parfaitement ni aux nym¬ phes , ni aux crifalides des autres infeéïes; celles de fes par¬ ties qui feront propres à la mouche, les jambes, les ailes, la trompe, font prefqu’aufli bien cachées qu’elles le font dans les crifalides ordinaires, elles ne font pas aufti vifi- bles qu’elles le font dans les nymphes; mais il n’a point été accordé aux crifalides ordinaires de pouvoir changer de place, & d’être obligées d’en changer, au lieu que Gggg Ëî * PL 44 . fi; I. k, l, m. * t 0. * PL 43.fi: J. n, n. 608 MEMOIRES POUR L’HISTOIRE piufieurs nymphes peuvent marcher, & marchent jufqu’à i’initant où elles le métamorpholent. Nos inleétes aqua¬ tiques qui font en état de nager, & qui nagent julqu’au moment où ils deviennent ailés, relfemblent à pluheurs nymphes par la faculté qu’ils ontdefe mouvoir; & com¬ me cette relfemblance me paroît plus propre à le faire remarquer, que celle qu’ils ont avec les crilalides, nous nous déterminons à les appelier des nymphes; mais nous ne trouverions nullement mauvais que d’autres aimalfent mieux les nommer des crilalides. Les parties propres à la mouche, les parties propres au coulin, peuvent cependant être nppcrçûes au travers de la membrane qui les couvre, parce que cette membrane elt très-tranlparente; ellelailîe appercevoir la manière fin- guliére dont les jambes font contournées*, qui a déjà été bien décrite par Swammerdam. On voit encore mieux cet arrangement des jambes & la pofnion des ailes, h on fe donne la peine d’enlever la membrane qui les recouvre, qui, quoique mince, femble cartilagineulé, & a affés de foliclité pour fe loûtenir pendant qu’on la détache. Enfin lorfqu’on emporte cette enveloppe, on met la trompe * à découvert, elle efl étendue , <& va jufqu’au ]>remier des anneaux du corps , & elt placée précilément à diltance égale de l’un & de l’autre côté. Le coufin fous la forme de nymphe, comme fous celle de ver, aime non feulement à fe tenir à la furface de l’eau *, il s’y tient même plus volontiers; la legereté l’y porte na¬ turellement; il elt obligé de donner des coups de queue quand il veut defeendre fous l’eau, & dès qu’il celfe de lé donner du mouvement, il elt reporté à la furface. Dans fon nouvel état il n’a plus befoin de prendre de nourri¬ ture, & il n’a plus d’organes propres à la recevoir; mais il a autant ou plus de bcloin de refpirer l’air, qu’il en avoit des Insectes. XIII. Mem. 609 auparavant. Ce que là métamorphofe nous offre auffi de plus fingulier, mais qui ne nous doit pas paroître abfo- iument nouveau, c’ert la différente polition des organes par lefquels il refpire. Pendant que l’infeéte étoit ver, cetoit par le long tuyau * qu'il avoit à fa partie porté- * Pî - 45-%. rieure, qu’il recevoit ou qu’il chaffoit l’air. En fe défai- 2- a r * Tant de fa peau de ver, il a perdu ce tuyau jufqu’au bout duquel s’étendoient lès principales trachées. Les deux efpeces d’oreilles * qui s’élèvent fur le corcelet de la nym- * Fig. 7, 8 phe, font pour elle ce que le long tuyau de la queue &c ‘ r,r ' étoit pour le ver; auffi la nymphe tient-elle toujours au deffus de la furface de l’eau, les bouts de ces deux oreilles qui font fes ftigmates antérieurs. Si on 1 e rappelle ce que nous avons dit ailleurs * des cornes qui pouffent aux *Mem.xi. coques dans lefquelles les vers à queue de rat fc transfor¬ ment, on jugera que les deux oreilles de la nvmphe du coufin font analogues aux quatre cornes de ces coques, ces cornes font effentielies à notre nymphe pour relpircr l’air, fans elles elle périroit. Le long tuyau de la queue du ver du coufin fervoit au même ulage, auffi ne puis-je concevoir comment Swammerdam, après avoir bien connu les fonctions de ce tuyau, a avancé qu’il n’ert pas abfolument néceffaire au ver, qu’il ne l’a que pour fa commodité; la preuve qu’ii en a voulu donner, ert que lorfque i’infeéte fe métamorphofe, il fe défait de ce tuyau. Les dents n’auroient auffi été accordées aux chenilles que pour une fimple commodité, car quand ces infeétes devien¬ nent crifalides, ils perdent les dents de chenilles. Notre infecte , en devenant nymphe, a perdu auffi les parties qui fervoientà le nourrir pendant qu’il étoit coufin ; ces parties ne lui étoient-elles que commodes! Pour appuyer une propofition fi extraordinaire, il auroit fallu que Swammer¬ dam eût pû affurer qu’il avoit fait vivre des vers auxquels il *ï 6 IO MEMOIRES POUR L’HlSTOIRE avoit retranché la queue, ce qu’il ne dit point avoir tenté, & qui ne lui eût pas réufîi apparemment. J’ai toujours eû à la fois dans le même vafe, un trop grand nombre d’infeétes qui dévoient devenir des coulins, pour pouvoir m affiner combien île temps chacun d’eux ])a(foit lous la forme de nymphe; il m’a paru que c’étoit environ huit à dix jours, & cela cependant lelon la iai- fon, félon que l’eau a été plus ou moins chaude. Je fçai au moins que dans le mois de may, l'inlcifte eft en état de devenir ailé, environ trois femaines après fa naiffance : avant la fin de ce mois, j’ai vû loi tir de leurs dernières dépouilles, beaucoup de coufins, dont les vers n’avoient commencé à paroître que les premiers jours du même mois. Dont Allou rapporte qu’il a vû de ces infèéfes qui nefe font métamorpholës en coufins, que quatre lemaines après être fortis de l’œuf, & qu’il en a vû d’autres devenir cou¬ fins onze à douze jours après leur naiffance. Si le grand nombre des nymphes de coufins que j’ai eues à la fois dans mes baquets, m’a empêché de pouvoir m’affûrerdu temps précis qu’elles refient lous cette forme, il m’a, en revanche, mis à portée de voir & de revoir cent & cent fois de ces infèéles, pendant que leur dernière transformation s’accompliffoit ; de voir cent & cent fois naître des coufins, de les voir le tirer île l’enveloppe qui leur donnoit la forme de nymphe. Cette métamorphofè fe fiait très-vîte, & elle eft accompagnée de quelques circonflances propres à intéreffer l’attention d’un obier- vateur. Quand il s’eft procuré un baquet bien peuplé de vers de coufins, ou, ce qui par la fuite eft la même choie, de nymphes, il vient un temps.où à toutes les heures du jour il peut voir de ces petits imeéfes aquatiques dans }’inflant où ils pafient a l’état il habitans de l’air: il y en a pourtant plus qui deviennent ailes vers le midi, qu’aux autres des Insectes. XIII. Mem. 611 autres heures. L’infede qui efl parvenu au moment où fes enveloppes ne lui l'ont plus néceflaires, & qui veut s’en tirer, fe tient, comme auparavant, en repos à la fiurface de 1 ’cau ; mais au lieu que dans les autres temps où il ne changeoit pas *de place, la partie poflérieure de Ion corps étoit contournée & comme roulée en delfous, alors il redrefTe cette partie, il la tient étendue à la furface de l’eau, au delîus de laquelle Ion corcelet eft élevé. A peine a-t-il été un moment dans cette pofition, qu’en gonflant les parties intérieures & antérieures de l'on corcelet, il oblige là peau de fe fendre afles près de ces deux fligmates, ou même entre ces deux fligmates, qui ont la figure d’oreilles ou de cornets. Cette fente n’a pas plutôt paru, qu’on la voit s’allonger & s’élargir très-vite, elle lailTe à découvert une portion du corcelet du coufin, ailée à reconnoître par la fraîcheur de fa couleur, qui d’ailleurs efl verdâtre, & diffé¬ rente de celle de la peau qui l’enveloppoit auparavant. Dès que la fente a été afles aggrandie, & l’aggrandir afles efl l’affaire d’un inflant, la partie antérieure du coufin ne tarde pas à le montrer; bientôt on voit paroître fa tête, qui s’élève au deflùs des bords de l’ouverture. Mais ce mo¬ ment & ceux quifuivront julqu a ce que le coufin foit entiè¬ rement horsdefidépouille,fontdesmomens bien critiques pour lui, des momens où il court un terrible danger. Cet infeéle qui vivoit dans l’eau, qui feroit péri fi on l’en eût tenu dehors pendant un temps afles court, a fubitement pafle à lin état où il n’a rien autant àcraindreque l’eau. S’il étoit ren- verfé fur l’eau, fi el le touchoit fon corcelet ou fon corps, ç’en feroit fiait de lui. Voici comment il fe conduit dans une fitua- tion fi délicate. Dès qu’il a fait paroître la tête & fon corcelet, il les éleve autant qu’il peut au deflùs des bords de 1 ouver¬ ture qui leur a permis de paroître au jour. Le coufin tire la partie poflérieuredefon corps vers la même ouverture,ou Tome IV. . Hhhh * PI. 44. fig, ÿ & I O. * e €' * a a. * e, e. * F‘g- 1 A, /; m. 612 MEMOIRES POUR L’HiSTOIRE plutôt cette partie s’y pouffe en fe contractant un peu, & s’allongeant enfuite ; les rugofités de la dépouille dont elle s’efforce de fortir, lui donnent des appuis. Une plus longue portion du coufin paroît donc à découvert, & en même- temps la tête s’eft plus avancée vers le bout antérieur de la dépouille; mais à mefure quelle s’avance vers ce côté, elle fe redreffe, elle s’élève de plus en plus *; le bout anté¬ rieur du fourreau * & fon bout poflérieur * fe trouvent donc vuides. Le fourreau alors eft devenu pour le cou fin une efpece de bateau dans lequel l’eau n’entre point, & où il feroit bien dangereux qu’elle entrât ; elle ne fçauroit trouver depaffige pour arriverait bout poflérieur, & les bords de la fente du bout antérieur * nefçauroient être fubmergés, que lorfque ce bout efl confidérablement enfoncé. Le coufin eft lui-même le mât du petit bateau qui le porte. Les grands bateaux qui doivent paffer fous des ponts, ont des mâts qu’on peut coucher; dès que le bateau eft hors du pont, on biffe fon mât, en le faifant paffer fucceffivement par différentes inclinaifons, on l’amene à être perpendiculaire au plan horifontal. Le coufin s’élève ainh fucceffivement jufqu’à devenir lui-même le mât de fon petit bateau , & un mât pofé verticalement. Toute la- différence qu’il y a ici, c’eft que le coufin eft un mât qui devient plus long à me¬ fure qu’il s’élève davantage; à mefure qu’il s’élève, une nouvelle partie du corps fort du fourreau : quand il eft parvenu à être prefque dans un plan vertical, il ne refte plus dans le fourreau qu’une portion affés courte de fon bout poftérieur. On a peine à s’imaginer comment il a pu fe mettre dans une pofition h finguliére, qui lui eft abfolument néceflaire, & comment il peut s’y conferver. Ni fes jambes ni fes ailes n’ont pu l’aider en rien; cel¬ les-ci font encore trop molles, éé comme empaquetées, &. • les autres * font étendues & couchées tout du long du des Insectes. XIII. Mem . 613 ventre; l'es anneaux feuls ont pû agir. Le devant du bateau elt beaucoup plus chargé que ie relie, aulfi a-t-il beaucoup plus rie volume. L’oblervateur qui voit combien ce devant de bateau enfonce, combien les bords font près de l’eau, oublie dans Imitant que le coufin cil un inlede auquel il donnera volontiers la mort dans un autre temps; il devient inquiet pour fon fort, & il le devient bientôt davantage, pour peu qu’il seleve de vent, pour peu que ce vcntagilfe fur la furface de l’eau. On voit pourtant d’abord avecpiaifir la petite agitation de l’air, qui fuffit pour faire voguer le coufin avec vîteffe; il elt porté de différens côtés, il fait différens tours dans le baquet. Quoiqu’il ne loit que comme une elpece de bâton ou de mât, parce que les ailes &. les jambes font appliquées contre le corps, il cd peut-être, par rapport à fon petit bateau, une voilure beaucoup plus grande qu’aucune de celles qu’on ofe donner à un vaiffeau. On ne peut s’empêcher de craindre que le petit bateau ne foit couché fur le côté; ce qui arrive quelquefois dans des temps ordinaires, & très-fouvent, lorlque lescoufins fe transforment dans des jours où le vent a trop de prife fur la furface de l’eau du baquet. Dès que le bateau a été renverfé, dès que le coufin a été couché fur la furface de l’eau, il n’y a plus dcrefTource pour lui. J’ai vu quelquefois l’eau toute couverte de confins qui,par cet accident, avoient péri en naiflant. Il ed pourtant plus ordinaire que le cou- lin parvienne à finir fon opération heureulèment, elle n’ed pas de longue durée; tout le danger peut être palfé dans une minute. Le coufin, après s’être dreffé perpendiculairement, tire fes deux premières jambes du fourreau, & il les porte en avant; il tire enfuite les deux fuivantes; alors il ne cherche plus à conferverfa polition gênante, il fepanche vers l’eau, il s’en approche, il pôle delfus fes jambes; H h h h ij 614 MEMOIRES POUR L’HiSTOIRE l’eau eft pour elles un terrein allés ferme & ailes lolicfe, qui lânsceder trop, peut lesfoùtenir, quoique chargées du corps de 1 ’inleéle. Dès que le coulin cil ainfi fur l’eau, il y eft en lureté, fes ailes achèvent de le déplier & de fe lécher, ce qui eft fait plus vite qu’on ne peut le dire ; enfin le cou- fin eft en état d’en faire ulagc, & bientôt on le voit s’envoler, fur-tout fi on tente de le prendre. Je ne Jçais s’il eft arrivé à Swammerdam de faifir des coufins dans l’inftant où ils le dégageoient du fourreau de nymphe ; ce qui m’en fait douter, c’eft qu’il dit, qu’après avoir fait fendre leur fourreau, ils y lai lient lécher leurs ailes; il eft pourtant vrai qu’auflitôt que le fourreau s’eft fendu > le coulin en fort. Le coulin qui vient de naître a le corps blancheâtre, & le corcelet verdâtre, mais ces couleurs prennent bientôt des nuances plus brunes. Il n’en eft pas de même des cou¬ leurs des yeux, ceux qui doivent être verds, font comme ils feront parla fuite,du plus beau verd; vus cependant dans certains fens, ils paroilfent rouges ou rougeâtres. Dont Allou qui a fiit cette dernière remarque, en rend une très- bonne raifon; il dit que les mailles du rezeau font rouges, & que chaque maille a au milieu une petite convexité, une petite cornée, qui eft comme une petite émeraude. Quand nous voyons l’œil du coulin de face, ou en un certain fens, ce font les petites émeraudes.qui feules font impreftion fur nos yeux; mais l’œil du coulin étant regardé oblique¬ ment , des rayons réfléchis par les mailles, font en état de parvenir à nos yeux. On ne doit pas être bien aife d 1 'apprendre que les coufins font des infecîes qui le multiplient prodigieufement, car nous ne fçavons pas aftés ce que nous gagnons à leur multiplication, & nous fçavons combien elle nous eft incommode. Outre qu’ils font féconds, il y en a plu- des Insectes. XIII. Mem. 6 i $ fieurs générations dans une année; s’il ne faut à chaque génération qu’environ trois ièmaines, ou un mois, pour être en état de donner naiffance à une nouvelle généra¬ tion, il y a de quoi être effrayé du nombre des coufms qui doivent être produits par an. Quand la première géné¬ ration ne lcroit en état d’en donner une fécondé que vers la fin de May, Si quand la dernière génération lcroit celle de la fin d Octobre, il y auroit au moins fix à fept généra¬ tions par an ; or chaque femelle donne naiffance à deux cens cinquante, ou à trois cens, ou même à trois cens cinquante coufms. Mais heureufemem ils font defîinés à nourrir beaucoup d’autres animaux ; les oilèaux ne les épargnent pas, Si ce n’efl peut-être que lorfqu’ils commencent à devenir trop rares, que les hirondelles nous quittent. Ce qu’il y a de certain, c’efl que peu de jours après que l’on a vu les nymphes d’un baquet le transformer en coufms, on peut voir dans le même baquet, unefemence propre à remplacer avec ufure, les inleCtes qui en font fortis. Qu’on regarde avec quelque attention la lurface de l’eau de ce baquet. Si on y verra nager les œufs que les fémellcs y ont laides. Ceux qui ont été pondus par chaque fémelle, font tous réunis dans un petit tas; ce petit tas d’œufs fera vû affûrément avec plaifir. Ils for¬ ment enfemble un petit radeau *; ou, pour ne point rejetter une comparaifon convenable, précilément parce que nous l’avons déjà employée, ils forment enfemble un petit bateau, mais un bateau d’une toute autre ftruClure que celui qui foutenoit le coufm lorfqu’ila paru au jour. Celui que nous voulons faire connoître * n’a point de mât, il a de commun avec les bateaux ordinaires, d’avoir les deux ' bouts pointus, & d’en avoir un des deux qui l’eft moins que l’autre, Si de les avoir un peu plus relevés que le refie; mais c’efl un bateau auquel il ne faut pas chercher de bords. Les œufs de l’affemblage defquels il efî formé, ont chacun la H h h h iij * PI. 44. fi s* * Fig. 3 I 4 ~ * Fig 8. * « 616 MEMOIRES POUR L’HISTOIRE g. forme d’une quille * ; ces quilles font polées le gros bout en bas, les unes contre les autres, leurs pointes font à la ftirfice fupérieure du bateau *, qui eff toute hérifTée. Ce petit bateau paroît avoir été inconnu à plufieurs auteurs qui ont donné des obfervations fur les confins, comme a Hook, à Leeuwenhoek, à Blankard & à Swam- merdam ,&c. Ce dernier même,& quelques autres, parlent des confins comme s’ils laiffoient leurs œufs difperfésun à un fur la furface de l’eau. M. Pierre Paul Sangallo a pourtant fort bien décrit la forme de ce bateau , dans une lettre adreflee à M. Redi, & imprimée à Florence en 1679, dont le P. Bonanni a donné un extrait dans le fixiéme chapitre de fa Micrographie curieufe. M. Barth a aufli très bien obfervé ce petit bateau. Mais perfonne ne l’a mieux vû que Dom Allou, qui a même pris foin de le deffiner. Je ne connois néantmoins aucun ouvrage où on fait fait graver, & où l’on ait bien décrit la forme de chacun des œufs, de l’affemblage defquels le bateau eft compolè. Chaque œuf peut être détaché affés aifément de ceux contre lefquels il efl: appliqué, & legercment collé. Quand on conhdére avec un microfcope, ou avec une loupe forte, celui qu’on aféparé des autres,on reconnoît que fa forme n’elt ]>as précifément celle d’une quille; fou gros bout * s’arrondit, & vient brufquement fe terminer par un col court*, femblable à celui qu’ont certains fla¬ cons à liqueur. Le bout de cet elpece de col, efl rebordé, & lemble avoir un bouchon. Le col de chacun des petits œufs entre dans l’eau, au-déifias de laquelle le bateau flotte, car il efl à remarquer que le bateau doit flotter fur l’eau; fi les œufs étoient fubmergés, les vers n’éclo- roient pas. L’infeéJe qui efl dans l’œuf efl entouré de la liqueur propre à l’œuf, & quand il fe dégagera de celle-ci, il trouvera l’eau toute prête à l’entourer de tou¬ tes parts. des Insectes. XIII. Mem. 6 17 Les œufs qui ne viennent que detre pondus, font tout blancs; peu à peu ils prennent des nuances de verd, au bout de quelques heures ils font verdâtres; mais ils deviennent enfuite grifâtres, & ils le font en moins d’une demi-journée. Rien n’a plus excité ma curiofité, dans l’hifloire du coufin , que le joli arrangement de ces œufs qui forment enfemble un petit bateau. Inutilement ai-je cherché à m’inftruire fur la manière dont cet infedle par¬ vient à les arranger fi bien, & à en faire une malle qui flotte fur l’eau ; inutilement, dis-je, l’ai-jc cherché dans les auteurs à qui ce petit bateau n’a pas été inconnu. Dom Allou ed le l'eul qui m’ait paru avoir obfervé le coufin dans la ponte; mais je fouhaitois voir moi-même tout ce qu’il avoit vu, & quelque chofe de plus. 11 n’y avoit pas à douter que le coufin ne fit fortir fes œufs les uns après les autres : or comment peut-il parvenir à placer un œuf fait en quille *, fur la furfàce de l’eau ! Comment peut-il venir * Pi.44. fig. à bout de l’y faire tenir droit, de l’empêcher de s’y coucher! 8> Si l’œuf s’y couche, comment le coufin parviendra-t-il à le redrelfer! Il me paroifloit qu’il devoity avoir en tout cela bien de i’induftrie, & quelque méchanique qui méritoit d’être vue; aulfi ai-je fait tout ce qui a dépendu de moi,pour furprendre quelque coufin dans le temps de fa ponte. Quel¬ quefois lorlque j’allois obferver l’eau de mes baquets, j’y trouvois des bateaux d’œufs encore tout blancs, qui me fai- foient regretter de n’avoir pas été vif ter les baquets plu¬ tôt. Ce furent pourtant ces mêmes bateaux encore blancs, qui m’apprirènt qu’il y avoit pour cette obfervatior, une heure favorable que je n’avôis point connue; ç’étoit fur-tout à midi ou quelques heures , foit auparavant, foit après, ou même fur le foir, que j’avois d’abord cherché à voir pon¬ dre des coufins. Des ma fiés d’œufs encore blancs ou blan- cheâtres,que je trouvai à neuf heures du matin, m’avertirent 6ï8 MEMOIRES POUR L’HlSTOÏRE qu’il faiioit m’y prendre de meilleure heure. Vers la fin de May je laiffai ie travail du cabinet dès fix heures du matin, pour aller oblerver les coufins; la liqueur du thermomètre étoit à i 3 degrés^-. Je ne manquai pas de trouver fur l’eau des coufins occupés à l’opération dans laquelle je les vou¬ lais^ cela pendant trois à quatre jours de fuite, c’efl-à- dire, jufqu’à ce que macuriofité eût été pleinement fatis- faite ; car je ne vis pas tout ce que j’avois befoin de voir, dès le premier jour. Ce jour-là, en arrivant, je commen¬ çai par voir plus de trente paquets d’œufs qui venoient d’être pondus; mais heureufement je remarquai un cou- fin dont la ponte n etoit pas encore finie. Ce coufiii avoit fes quatre jambes antérieures cramponnées fur un * PI. 44-fig. fragment de feuille * placé contre les bords du baquet; fou ï2, corps étoit en dehors de cette feuille, & fon pénultième * o. anneau touchoit l’eau. Un paquet d’œufs * qui étoit pofé auprès de fon derrière, & qui n’avoit pas encore le volume des paquets ordinaires, m’apprit que la ponte étoit avancée, niais qu’elle n’étoit pas encore finie. Le coufin occupé de fon importante opération, ne fut point troublé par ma préfence; il me permit même de m’approcher affés près de lui pour le confidérer avec une forte loupe. Bientôt je fçus comment il parvenoit à pofer fes œufs perpendi¬ culairement à la furface de l’eau, & comment il parvenoit à les arranger. C’eft fon derrière qui fait tout, par rapport à l’un & à l’autre article. Nous avons dit que le pénultième anneau du corps touchoit l’eau, & nous devons dire à préfent que le dernier anneau, celui où eff l’anus, formoit avec le refie du corps une efpece de crochet-, pour s’élever un peu au deffusde la furface de l’eau. Du derrière ainfi con¬ tourné, |e vis bientôt fortirun œuf; je vis qu’il fortoit dans une direction différente de celle dans laquelle fortent ordi¬ nairement les œufs des autres infeôtes; ceux-ci font pouffés horifontalement. des Insectes. XIII. Mem. 61 9 horifontalement, ou même enibas, & celui-là étoit pouffé en haut, dans unedireétion verticale. Cet œuf fortoit ainfi tout près de la nichée des œufs déjà mis au jour. Des qu’il étoit entièrement, ou prelque entièrement lorti, le coufm n’avoit qu’à l’appliquer contre ceux du petit bateau, dont il étoit le plus proche; car cet œuf, comme ceux de prelque tous les inlèèles, étoit fans doute enduit d’une matière gluante, propre à le coller aux corps contre lefquels il feroit appliqué. De pondre un œuf & de le mettre en place, efl pour le coufm l’affaire d’un inffant; & dès qu’il en a pondu un, il en fait lortir un autre de fon corps. Le coufm que j’oblervois ht ainfi, fans interruption, plus de trente œufs en moins de deux minutes; foit que fa ponte fût alors finie, foit qu’enfin il eût été inquiété par ma préfence, il s’envola, & laiffa fur l’eau le petit bateau flottant, mais dont le contour n’étoit pas auffi régulier que l’eff celui de la plupart des autres bateaux d’œufs. J’eus beau chercher alors, je 11e pus trouver aucun autre coufm occupé à pondre. Cependant je n’avoispas vu encore tout ce quieft effentiel à cette opération ; j’avois été affés inflruit de la manière dont le coufm parvient à pofer chaque œuf perpendicu¬ lairement à la furface de l’eau, & à l’attacher contre la maffe compolée des œufs déjà fortis; mais il reftoit àlçavoir comment il pouvoit foûtenir cette maffe fur l’eau, lorf- qu’elle a encore trop peu de bafe par rapport à fa hauteur, comment il parvenoit à y foûtenir le premier œuf, ou un affembiage feulement de deux ou trois œufs. Des confins que j’allai obferver les jours luivans dès les fix heures du matin, ou plutôt, me donnèrent fur tout cela des éclair- ciffemens complets; j’en trouvai d’occupés à pondre, j’en trouvai dont la ponte étoit très-avancée, & d’autres dont elle l’étoit très-peu. Ces derniers m’inllruifirent fufhfamment Tome IV. . I i i i 62 O MEMOIRES POUR L’HiSTOIRE fur ce qui fe paffe dans i’inftant où les premiers œufs font mis au jour, ce qui efl: un inftant très-difficile à fai- fjr. Entre les coufins que j’obfèrvai dans cette opéra¬ tion, qui leur attiroi mes regards, j’en vis plulieurs qui avoient leurs quatre premières jambes cramponnées con¬ tre les parois du baquet, & d’autres qui, comme le premier dont j’ai parlé, s’étoient pôles fur un fragment de feuille flottant; le corps des uns & des autres étoit étendu fur la furface de l’eau, & la touchoit feulement par une portion de fon pénultième anneau. Mais ce qui étoit plus effientiel à remarquer, c’étoit la pofition des deux dernières & plus longues jambes, ou plutôt les pondons, car j’en obfervai deux différentes. Les coufins dont la ponte étoit prefque finie, dont le petit bateau étoit prefque achevé, avoient * PI. 44..%. ces deux longues jambes étendues, & prefque parallèles 12. 1,1. p une à l’autre*. Le bout de chacune étoit étendu à la fur- face de l’eau, & même un peu élevé au deffus; mais elles étoient toutes deux un peu enfoncées dans l’eau auprès du derrière, elles étoient forcées à l’être par un poids; ce poids étoit celui du petit bateau : ce petit bateau étoit, pour ainfi dire, fur le chantier, il n’étoit point abandonné à l’eau ; les deux jambes, comme deux longues poutres, le foûtenoient à la furface de l’eau, ou au deffus; le coufin fondent ainfi ce bateau tant qu’il a des œufs à lui adjouter, il ne le met à flot que lorfqu’il ne lui en manque aucun. Les coufins dont la ponte étoit encore peu avancée, dont le bateau n’avoit pas encore la moitié de fa longueur, *Fi«. 11 .!,i. me firent voir leurs jambes dans une poftion différente de celle dont nous venons de parler; les jambes* fe croi- foient l’une l’autre, elles formoient un X; & l’endroit où elles fe, croifoient étoit d’autant plus près de l’anus, que l’affemblage d’œufs étoit plus petit, ou que la portion de bateau étoit plus courte; l’angle intérieur que faifoient les des Insectes. XI IL Mem. 6z r jambes, foûtenoit cette petite malfe d’œufs. De-là ii cil aifé d’imaginer que lorfque le coufin fait ion premier œuf, les jambes lont croifées très-près du derrière, & à portée de foûtenir cet œuf; quelles foûtiennent de meme les œufs qui font fucceiïivement collés contre celui-ci ; qu amefurc que la malfe d’œufs s’allonge, l’endroit où les jambes fe croilènt, devient plus éloigné du derrière, & qu enfin les deux jambes fe pofent parallèlement l’une à l’autre, quand le bateau cil à moitié, ou plus d’à moitié fait; & qu’a in fi depuis que le premier œul cil pondu, jufqu’à ce qu’ils le foient tous, iis font toujours foûtenus. Ce n’eft que quand la ponte eft finie, que le coufin abandonne le petit bateau, qui eft en état de voguer fans rifque. Si on met un de ces petits bateaux dans un verre plein d’eau, au bout de deux jours, tantôt plutôt, tantôt plû- tard, on verra nager dans cette eau quantité de petits infeeftes , qui, examinés à la loupe, feront aifés à recon- noître pour des vers de conflits ; rien ne leur manquera, par rapport à la figure. C eft par le bout inférieur de l’œuf que chaque ver en fort; dès qu’il eft né, il ft trouve dans l’eau où il doit croître. Chaque nichée eft compofée d’environ deux cens cinquante, ou de trois cens, ou même de trois cens cinquante œufs, qui ordinairement donnent chacun un ver. Les bateaux compofés de coques vuides refient fur l’eau, & ce n’eft qu’avec le temps qu’ils font détruits. Ces œufs, comme ceux des autres infeeftes, ont fans doute été fécondés pendant qu’ils étoient dans le corps de la fémelle. On diftingue les confins qui font des œufs, ou les fémelles de ceux qui n’en font point, & qui doi¬ vent être les mâles : cependant il ne rn’eft jamais arrivé de trouver deux coufins accouplés, & aucun des auteurs qui ont examiné les coufins avec attention, ne dit avoir vu leur accouplement. Quel temps, quels lieux choifilfent- I i i i ij * PL 40. fig, 6 . * Fig. 1 o. * Fig. 6, 7, S & 9. c, c. * Fig 8. a. * e, e. * Fig. 9 . i, i. * Fig. 10 & 1 1. I, /. 622 MEMOIRES POUR L’HiSTOIRE ils pour fe joindre enfemble î leurs accouplemens ne fe feroient-iis que la nuit, ou feferoient-ils dans l’air, comme je fçai que s’y font ceux de quelques autres infeéles! ii faudrait qu’ils le filTent affés haut dans l’air, pour qu’on n’y apperçût pas de jour, deux coufins qui feraient joints en- fembie; mais ils voient volontiers pendant la nuit, & fi c’elt pendant la nuit qu’ils s’accouplent, & dans l’air, on pourra être encore long-temps, avant que d’en furprendre d’accouplés. Le corps du mâle* cil plus allongé que celui de la femelle*; il cil plus effilé, & terminé par deux grands & forts crochets*, qui enfemble forment une pince recour¬ bée vers le ventre: en prelfânt les derniers anneaux, on force aifément ces crochets a s’écarter l’un de l’autre, & l’anus à fortir du corps *. Vers l’endroit d’où il fort, on peut voir du côté du ventre deux nouveaux crochets * bruns, & très-petits; & on en peut voir deux autres de mê¬ me couleur, & à peu près de même figure, femblablement placés du côté du dos*. Voilà les inftrumens que la nature a coutume de donner aux mâles des infeéies, pour faifir le derrière de la fémelle. Celui de la fémelle du cou- fin n’a point de pareils crochets, mais il a deux petites palettes * qui peuvent s’appliquer l’une contre l’autre : beaucoup d’autres mouches fémelles, & les papillons fe¬ melles entr’autres, en ont de femblables; ces papillons s’en fervent avec bien de l’adreffe pour s’arracher leurs poils, & pour en couvrir leurs œufs. Le coufin qui fait fa ponte, fait apparemment auffi quelqu’ufage de ces deux palettes , au moins pour maintenir l’œuf qui fort. Je 11e doute point qu’on n’aimât mieux fçavoir un moyen de nous mettre à l’abri des picquûrcs de ces in- feétes, que les faits les plus curieux que leur hifloirepeut fournir, & peut-être n’efl-il pas impolfible d’en trouver des Insectes. XIII. Mem. 623 quelqu’un auquel on feroit heureux d’avoir recours dans les pays où l’air efl: tout rempli de ces petites mouches fi incommodes. Ces pays fi peuplés de couflns,'font ceux où il feroit plus facile de faire des épreuves de ce qui peut les éloigner de nous. L’envie que j’ai eu d’en faire de cette elpece, m’a fouvent donné du regret de ne me pas trouver, au moins pour quelques jours, dans un pays où l’on eft expofé à chaque infant à leurs picquûres; car lorfqu’on efl dans une campagne où il n’arrive que de fois à autres, & cela en plufieurs jours différens, qu’on efl pic- qué par les couflns, on ne peut guéres compter fur les expériences qu’on auroit tentées pour s’empêcher de l’être, & il n’efl pas poiïible de les varier aiïes. J’avois cru qu’en me tenant auprès des hacquets où les couflns naiflfoient chaque jour à milliers, je pourrais me faire pic- quer autant que je le voudrais, mais les confins qui vien¬ nent de naître n’ont pas encore foif de notre fang, ils ne longent qu’à s’envoler. Au moins indiquerai-je les expé¬ riences que j’aurais eu envie de flaire, & que d’autres que moi fe trouveront à portée de tenter plus qu’ils ne vou¬ draient. Il y a des chairs que les couflns préfèrent à d’autres. Non feulement des payfannes dont la peau efl brûlée par le foleil, & endurcie par le travail, ne font pas aufli fou- vent picquées que des Dames dont la peau efl plus déli¬ cate; j’ai obfervé même qu’entre des Dames avec qui j’étois à la campagne, il y en avoit qui, quoiqu’elleseuf- fent une peau très-fine, n’étoient jamais picquées, pen¬ dant que d’autres Dames qui n’avoient pas la peau plus belle, l’étoient fréquemment; & j’ai eu tant de fois occa- fion de faire cette remarque, que je ne fçaurois douter qu’il n’y ait des peaux plus au goût des couflns, que d au¬ tres qui nous femblent également délicates. Si ce fait efl Ii i i üj 624 MEMOIRES POUR L’HiSTOIRE aufli certain que je le crois, il paroît qu’il doit y avoir des moyens de rendre notre peau dégoûtante pour les coufins; que fi celle de nos mains & celle de notre vifage étoient lavées d’une certaine eau, les coufins n’aimeroicnt pas à la percer, ni même à fc pofer defliis. Pour découvrir s’il y a une telle eau, il faudrait éprouver les jus & les infufions d’un très-grand nombre de plantes, l'oit des plantes aro¬ matiques, foit des amères, foit des acides, loit des fîipti- ques, loit de celles qui ont des goûts brûlans. On pour¬ rait éprouver des infulions de poivre, de cannelle, d’ab- fynthe, de perfil, de rue, d’ofeille, &c. du verjus, du vi¬ naigre; enfin le nombre des eflais qui fe préfente elt très- grand , & ils ne peuvent être faits que dans des en¬ droits où on a à chaque inflant des occafions de fe faire picquer. Si on remarquoit quelque plante fur laquelle les coufins n’aimaffent pas à fe pofer, les eflais feraient bien abrégés, probablement cette plante ferait propre à pro¬ duire l’effet qu’on fouhaite. Les liqueurs grades,les hui¬ les, les pommades mériteraient aufli d’être éprouvées, & fi par elles-mêmes elles étoient propres à éloigner les cou¬ fins, peut-être les y rendrait-on encore plus propres en les imprégnant de certaines odeurs, ou de certaines faveurs. Toutes ces expériences font fimples, & elles ont un objet d’utilité qui ne doit pas permettre de les négliger. EXPLICATION DES FIGURES DU TREIZIEME MEMOIRE. Planche XXXIX. La Figure première repréfente un coufm fémelle très- grofli à la loupe, c, fon corcelet. i, i, fes yeux à rezeau. b, b, fes barbes, a , a, fes antennes, t, la trompe. des Insectes. XIII. Mem. 62 5 La Figure 2 eft celle du coulin précédent dans fa gran¬ deur naturelle. La figure 3 montre une portion d’une des antennes <1, fig. première, vue au microfcope. Outre les poils qui parodient fur tous les petits anneaux, on voit d’elpace en elpace quatre grands poils p,p,p,p, pôles à chaque articulation. gros poil, efpece de picquant par lequel l’antenne eft terminée. La Figure 4 fait voir une grande partie d’une aile de cou lin, groffie au microfcope. Elle a été rompue en e e e, & en 1 r. f f, frange d’écailles inégales, qui borde le côté intérieur de cette aile, b, la bafe de l’aîle bordée d’une femblabie frange, n n n, gros cordon qui fortifie tout le contour de l’aîle. t, une des principales nervûres ou côtes qui lé trouvent fur l’aîle. r, b , c,d, branches ou rameaux qui partent de la tige précédente. Cette tige & les bran¬ ches font chargées d écaillés, qui femblent des feuilles. On peut remarquer que les elpaces compris entre les ramifi¬ cations des nervûres, font tout picqués. La Figure 5 repréfente une portion d’une autre aîle, moins groffie que celle de la figure précédente; ici on voit en entier le bout ou la bafe de l’aîle, g. Cette aîle a été coupée en at 11 b. e, le côté extérieur, f, le côté in¬ térieur dont la frange a perdu ptufieurs de fes écailles, t, t, t, trois nervuures ou côtes. La Figure 6 eft encore celle d’un fragment d’aile vu au microfcope. Il eft pris près de l’origine de l’aîle qui eft en o. On s’eft fur-tout prop'ofé de repréfenter le bord ex¬ térieur de l’aîle qui manque dans la figure 4, pour faire voir qu’il eft fimplement garni d’épines e, e, e, au lieu que le bord intérieur a une frange. On y peut voiraufti que les côtes ou nervûres op,ot, n’ont point d’écailles. La Figure 7 eft celle d’une portion d'aile, encore 626 MEMOIRES POUR L’HlSTOIRE extrêmement grofîie, & prife à l’origine de l’aile comme la portion de la ligure 7, mais fur laquelle le trouve le feu! côté intérieur. Il efl bordé d’une frange dont les écailles font plus fines & plus pointues que celles de la frange de la figure 4. Auffi appartenoit-il à l’aile d’un coufin d’une efpece différente de celui d’après l’aile duquel l’autre ligure a été deffmée. Les Fig. 8, 9, 10 & 11 repréfcntent différentes écailles prifes deffus le corps d’un coufin, & vues au microfcope. Planche XL. La Figure première efl celle d’un coufin mâle, de i’efpece de ceux qui ont des antennes à barbes, ou en plume, deffiné de grandeur naturelle. La Figure 2 repréfente le coufin de la frg. précédente, très-groffi. i, i, fes yeuxàrczeau. a, a, fes antennes, t, la la trompe, p e, p e, deux pièces terminées par des pcn- nacbes, qui fervent de fourreau à l’étui de la trompe. O11 remarquera que les deux barbes h, b, de la figure pre¬ mière pl. 39,11e fe trouvent point à la tête de ce dernier coufin. r, r, les balanciers. Le bord intérieur ff efl celui qui efl auffi marqué f,f fig. 4 & 7, pl. 39. Dans la Figure 3, une des pièces p e, de la figure 2, efl repréfentée vue au microfcope. En c efl le coude où la piece s’écarte de la trompe. La tige ce e de cette piece paroît ici cylindrique, c’efl qu’elle fe ferme lorfqu’elle efl tirée de fa place; quand elle efl pofée fur l’étui de la trompe, elle forme un tuyau, e, e, diverfes écailles. La Figure 4 fait voir très en grand, une portion d’an¬ neau d’un coulm , & cela pour rendre fenfibles les écailles dont il efl recouvert. Sur cette portion d’anneau il y a des écailles de deux couleurs, p, p, poils qui partent de cha¬ que côté de l’anneau. La Figure des Insectes. XIII. Mem. 6 zy La Figure 5 montre une portion de l’antenne a, fig. 2, grolfie au microfcope. t, tige de l’antenne, h, h, houppe de poils, qui part d’une articulation. k } k ,autre houppe compoféc de poils plus courts que ceux de la houppe précédente; les poils des houppes fuivantes font de môme de plus en plus courts, b a, bout de l’antenne dont les poils font encore plus courts, & 11e font point diftribués en houppe. La Figure 6 cft celle d'une portion du corps d’un coufin mâle, vue par-deffous, &dont le ventre a fur chaque anneau une tache brune. c,c, deux forts crochets par lef- quels le derrière elt terminé. La Figure 7 montre de coté, & encore plus en grand, le bout poftérieur du corps du coufin mâle, pour faire voir que les crochets c, c font recourbés vers le ven¬ tre, & font très-velus. La Figure 8 fait voir encore le bout poftérieur du cou¬ fin mâle, très-groin ; elle le fait voir par-deflous, & dans lin inftant où la preffion des doigts a obligé l’anus a de fe montrer, c, c, les deux grands crochets, e, c, deux au¬ tres efpcces de petits crochets. Dans la Figure 9 c’eft par-dcfïùs qu’eft vu, mais delà même grandeur, le bout poftérieur du coufin mâle, qui eft vû par-deftous dans la figure précédente, c, c, les deux grands crochets appliqués ici l’un contre l’autre.^l’anus. j, i, deux petits crochets différens des crochets e, e de la figure 8. La Figure 1 o repréfente en grand quatre anneaux du corps du coufin fémelie. On y voit que ce corps eft moins allongé que celui du mâle, fig. 6 ,&. moins pointu à fon bout. Mais ce qu’on y doit fur-tout remarquer,c’eft que ce bout eft terminé par deux palettes, par deux lames plattes /, l, au lieu que celui du mâle l’eft par deux crochets./, fente en Tome IV • Kkfck 6 28 MEMOIRES POUR L’HlSTOIRE croiffant qui paroît deftinée à recevoir la partie du mâle. La Figure 11 repréfente encore le derrière d’une fe¬ melle, vû du côté du ventre, mais dans un temps où en preffant les derniers anneaux, on a obligé les deux palettes 4 /à s’écarter l’une de l’autre, a , l’anus, f l’endroit où cfl la fente qu’on croit propre à la feule femelle. Planche XLI. Toutes les Figures de cette Planche font groflies au microfcopc. La Figure première repréfente la partie antérieure du cou fin delà planche 40. figure 2, & cela principalement pour montrer comment les pièces pe,pe, qui dans la fi g. qui vient d’être citée, font appliquées contre l’étui de l’aiguillon, s’en feparent quand il plaît à l’infeéle. t, l’étui dans lequel l’aiguillon efî logé, pe, pe, les deux pièces qui fervent de fourreau à l’étui de l’aiguillon, & qui en font écartées actuellement, a, a, les antennes, dont chacune eft articulée fur un petit bouton. i, i, les yeux à rezeau. La Figure 2 fait voir la partie antérieure d’un coufin, dont les pièces qui forment le fourreau de l’étui de la trompe, ne font pas terminées par des pennaches, comme celles de la figure précédente, de qui s’appliquent dans toute leur longueur, contre cet étui, au lieu que les autres en font féparées en tout temps près de leur bout. Pour repré- fenter ces pièces, on a fai fi à deffein, le moment où elles s’étoient écartées de l’étui ; il n’eft prefque pas poffible de les en diftinguer, quand elles les couvrent. On a même fait voir dans cette figure comment l’étui s’écarte des aiguillons, quand lecoufinleveut. i, i,lesyeuxà rezeau. a,a, l’endroit où on a coupé les antennes, b,b, les deux barbes, ep, cp, les deux pièces deflinées à fervir de fourreau à l’étui de l’ai¬ guillon. t, partie de l’étui dans laquelle l’aiguillon eft logé. des Insectes. XIII. Mcm. 629 f, portion de l’étui de l’aiguillon qui s’ell courbée, & qui laide l’aiguillon à découvert en d. La Figure 3 nous montre une tête de coufin dont l’étui de l’aiguillon n’efl point accompagné des deux pièces ep, ep, des figures i & 2, dont l’étui n’a point de fourreau./', l’étui, d, l’aiguillon, qui ell en partie hors de l’étui, b, b, deux barbes plus longues que celles qui font reprélentécs dans les autres figures. Il n’efl pourtant pas général à tou¬ tes les trompes qui n’ont pas les deux pièces qui forment un fourreau à l’étui des autres trompes, d’avoir deux lî longues barbes, a, a, les antennes coupées. Les Figures 4, 5, 6, &c. ont les parties femblables marquées par les mêmes lettres, & nous montrent comment l’étui de l’aiguillon fe plie de plus en plus, à induré que l’aiguillon s’enfonce davantage dans la chair, a, a, antennes coupées, ep, ep, les pièces qui fervent de fourreau à l’étui de l’aiguillon, qui font alors relevées, & qui femblent être des antennes. Le coufin de la figure 7. n’avoit point ces deux pièces ep, ep. ce, morceau de chair dans lequel on fuppofe que le coufin frit entrer la trompe. L’aiguillon 11e fait que commencer à s’introduire dans la chair des figures 4 & 5. d, l’aiguillon, f le fourreau. Je ne fuis pas fur que l’angle que fait le fourreau de la figure 5 , ne fort pas placé trop haut, mais je l’ai vû fouvent à différentes diflances de la tête. Le fourreau peut fe plier en difiérens endroits, comme le montre la figure 2. g, bouton qui refie toujours applique contre le bord du trou que l’aiguillon a percé dans la chair, qui foûtient là l’aiguillon, & l’empêche de vaciller. Dans la Figure 6, deux parties du fourreau font déjà appliquées l’une contre l’autre, quoique l’aiguillon ait encore bien du chemin à faire. Dans la figure 7 ,1 aiguillon ell à peu-près autant enfoncé qu’il le peut être, & alors le fourreau efl prelque plié en deux; il l’cfl à fon bouton près, & à la portion près de la bafe, qui le joint à la tête. K kkkij 630 MEMOIRES POUR L’HiSTOIRE Planche X L I I, Toutes les Figures de cette Planche font groffies au microfcope, mais toutes ne le font pas également. La Figure première repréfente la partie antérieure d’un couftn, vue en defiùs, avec fa trompe. a,a,\zs antennes. b, b, deux barbes .f la trompe, ou, plus cxaclement, i’étui de l'aiguillon, g, le bouton par lequel cet étui eft terminé. On voit tout du long une legere fente, qui eft celle qui s’ouvre davantage pour laiffer fortir l’aiguillon. La Figure 2 eft aufti celle d’une tête, à laquelle on n’a donné, ni antennes, ni barbes, mais feulement la trompe» j étui de l’aiguillon, qui a été cafte en f, & dont le refte a été tiré comme on tireroit le fourreau d’une épée, pour mettre la partie f d de l’aiguillon à découvert; il paroît ici un corps fimple. La Figure 3 ne montre que le bout d’un étui d aiguillon. f, portion de l’étui, g, le bouton, d, pointe de l’aiguillon qui fort par le bout du bouton. La Figure q. eft celle d’un aiguillon tel qu’il paroît en bien des cireonftances où 011 l’a tiré de l'on étui ians que les pièces dont il eft compolé fe foient feparées les unes des autres, cp, efpece de fente ou de couliffe, qu’on croit voir tout du long d’une des faces de l’aiguillon. La Figure 5 fait voir par-deflùs, une trompe & toutes fes dépendances, dans un temps où la fente de l’étui s’eft élargie, & a laide fortir une partie de l’aiguillon, b, b, les' barbes, ep, ep, les deux pièces qui fervent de fourreau à i’étui de l’aiguillon, écartées de cet étui, g, le bouton de i’étui. Depuis/"jufqu’en b, l’étui paroît entrouvert en deftùs. d, l’aiguillon, qui, en fortant de fon étui, s’eft décompofé en partie. I, une des pièces qui s’eft détachée des autres pièces, qui font le gros de la malfe d. La Figure 6 fait yoir la tête d’un coufm par-deffous; des Insectes. X ITT. Mem. 6 31 ou renverfée, ainfiledeffousde l’étui de l’aiguillon efi ici en defTus ; auffi efi-ce en défions que lé trouv e la fente qui a permis à l’aiguillon d prefqu'entier, de fortir de l'étui ; il n’v efi plus retenu que par fa pointe, i, un des filets, une des pièces qui compofent l’aiguillon, qui s’efifeparée des autres pièces dans une afies petite étendue. L’étui de cet aiguillon, & celui de l’étui de la figure luivante, ne font point accompagnés des deux pièces qui font un fourreau à d’autres étuis, b, b, les barbes. Dans la Figure 7, la tête du coufin efi vue en défiais," comme dans la fig. y. fg, l’étui; on y difiingue en defTus une efpece de coulifié, qui efi la fente qui a permis à l’aiguillon de fortir. d, l’aiguillon, compolé dans la plus grande partie de la longueur de toutes lés pièces, à une près, i, qui s’efi entièrement leparée des autres; mais pro¬ che de fa bafe,en/:, on difiingue quatre pièces différentes. En d, la pointe de l’aiguillon paroît dentellée, comme elle le paroît quelquefois quand elle efi vue au rnicrof- cope dans une pofition favorable. La Figure 8 repréfente un aiguillon, comme je l’ai vû quelquefois au microfcope, après l’avoir tiré de Ton étui. d,d> deux pièces qui lèmbloient logées dans une efpece de cannule, c; mais je fuis incertain fi cette cannule étoit complette, fi elle étoit réellement un tuyau fimplement fendu dans toute fa longueur, ou fi elle n’étoit qu’un demi-tuyau. La Fig. 9 montre un aiguillon tel qu’il m’a paru quel¬ quefois dans le microfcope, lorlque j’étois parvenu à lé- parer les unes des autres, quatre des parties qui le com¬ pofent. c , la piece qui fenable être une cannule. d e d trois autres pièces. Dans la Fig. i o, on voit, comme je l’ai vû au microfcope, lin aiguillon compofé de cinq pièces, d, e, e, c, d, qui ne Kkkkiij 632 Mémoires pour l’Histoire tiennent plus les unes aux autres que par leur pointe. Les proportions entre les diamètres de ces pièces, n’ont pas été bien obfervées dans cette figure ni dans les précé¬ dentes, & il n’étoit pas ailé de les obferver. Si la piece c, par exemple, n’eft qu’un demi tuyau, il peut fe faire quelle fe ferme, quand les pièces quelle logeoit en ont été leparées, & quelle paroi (Te alors avoir moins de diamètre quelle n’en paroi doit avoir auparavant. Les Figures 11, i 2 & 13 nous montrent les différences que j’ai cru obferver dans les figuresdes pointes des diverfes pièces de l’aiguillon ; mais je ne fuis pas lûr à laquelle de chaque piece, félon quelle efi arrangée dans le paquet, ces pointes appartiennent. La figure 1 3 efi celle d’une des deux pièces qui font paraître l’aiguillon d dentellé, figure y, & une piece que Leeuwcnhoek a fait reprélenter. Mais je ne fçais pas fi la figure 1 1 ne nous donne pas la pointe de la fig. 1 3, vue par le côté concave ; car une pointe courbe paraît lé redreffer lorlqueles rayons de lumière tombent à plomb deffus; ce qui me ferait croire que la pointe de la figure 1 1 peut être celle de la figure 1 3 , c’elt que la piece de l’une & de l’autre de ces figures m’a paru faite comme une lame d’épée à trois quarts, ainli qu’une piece pareille l’a paru à Leeuwenhoek. Pour la pointe de la figure 12, elle m’a femblé être celle de la piece marquée c dans les figures précédentes. Planche XLIII. La Figure première efi celle d’un gobelet de verre rempli en grande partie d’eau, à la lurface de laquelle des vers & des nymphes de coufins tiennent les organes avec lefquels ils relpirent l’air; toutes les autres parties de ces vers & de ces nymphes font au défions de la furface de l’eau. Les vers font en u, & les nymphes en n. des Insectes. XIII. Mem. 6 33 Les autres Figures de cette Planche, fi 011 en excepte la fixiéme, font grofties à la loupe ou au microfcope. La Figure 2 reprélente un ver de coufin, vu de côté, dans la pofition où il eft.lorfque tranquille dans l’eau, il tient à là furface le bout du tuyau avec lequel il refpire l’air. Le même ver de coufin elt repréfenté dans la figure 3, dans une autre pofition, propre à mettre en vue des parties qui ne fçauroicnt paroître affés dans la pofition de la figure 2. Dans l’une & dans l’autre figure, les mêmes parties font marquées par les mêmes lettres, ro, tuyau de la refpiration. r, bout de ce tuyau, que le ver met de niveau avec la furface de l’eau, b , figure 3, mammclon charnu, que j’ai vû fortir quelquefois du bout du tuyau de la refpi¬ ration. a, tuyau plus court que le précédent, & qui tire de même l'on origine du dernier anneau; il donne fortie aux excrémens. pp, poils dilj:>ofés en entonnoir autour de l’anus ou de l’ouverture du dernier tuyau. n,n, nageoires articulées ou bout de ce tuyau; il y en a quatre, comme dans la figure 3, quoiqu’il n’en paroi fie fouvent que deux, comme dans la figure i.oft, oft, figure 3, les deux prin¬ cipales trachées, ee, le premier anneau, qui femble un Corcelet. i,i, les yeux. d,d, les antennes. c,c, figure 2, deux crochets dont la concavité eft bordée d’une frange de poils. Le ver fait continuellement jouer ces deux crochets. La Figure 4 fait voir plus en grand, une des nageoires marquée n dans les figures 2 & 3. La Fig. 5 montre une des antennes du ver, telle quelle paroît au microfcope. a, bafe de l’antenne. e } e, &c. poils difpofés à la file fur le bord le plus convexe de l’antenne. h, houppe de grands poils roides. d, poils d’une médiocre longueur, qui partent du bout de l’antenne./>,/>, deux grands poils, dont l’origine eft moins proche du bout que 11e i’eft celle des poils précédens. 634 MEMOIRES POUR l/HlSTOIRË La Figure 6 efl celle d’une nymphe de cou fin, dans fa grandeur naturelle. La Fig. 7 repréfente la nymphe grofTie, & dans l’attitude où elle eh lorfqu’elle fe tient tranquillement près de la furface de l’eau, au ddl'us de laquelle s’élèvent lès deux organes de la refpiration. Elle eft alors roulée, de façon que fa queue recouvre fa tète, & elle a une forme qui tient de la lenticulaire, r,r, deux cornets faits en oreilles, qui font les organes de la refpiration, & dont la nymphe tienr, pour l’ordinaire, les bouts au delfus de la furface de l’eau. e, la partie antérieure du corcelet, dont c efl la partie pofié- ricurc. an, les anneaux du corps, q, la queue appliquée contre la tète, ou la partie antérieure, n, n } les nageoires. La Figure 8 nous montre la nymphe de la figure pré¬ cédente, dans un temps où fon corps efi moins roulé, dans un temps où elle le redrefiè pour battre l’eau, pour changer de place. Les mêmes lettres, dans cette figure & dans la précédente, marquent les mêmes parties. La Figure 9 fait voir en delfus, la nymphe, qui efi vue de côté dans les fig. 7 & 8, & ayant le corps plus déroulé que dans la figure 8. L.a partie antérieure du corcelet ne paroît pas ici. r, r, les deux organes de la refpiration, ou les deux fiigmates antérieurs, e, partie pofiérieure du cor¬ celet. a a, les anneaux du corps, n, les nageoires. La Figure 1 o ne repréfente que le bout du corps de la nymphe. n,n, les nageoires, p, deux grands poils qui ont l’air d’antennes. La Figure 1 1 ne montre que la partie antérieure de la nymphe, vûe de face, julqu a l’origine des deux cornets ou fiigmates. Dans la Figure 12, la nymphe efi vue comme dans la figure 9, mais entièrement allongée. Planche des Insectes. XIII. Mem. 6 35 Planche XLIV. La Figure première repréfente une nymphe de coufin, plus groffie que celles de la planche précédente, & vûe de côté, r, un des cornets ou ihgmates. /, un des yeux. /, o, la trompe du coufin. k, l, m, les trois jambes du coufm qui appartiennent à ce côté,& qu’on peut diftinguer au travers de la membrane tranlparente qui les couvre. On fuit les contours que fait la troifiéme jambe ni; on voit qu après être venue près d ’o, elle retourne vers m, 6 c vient finir en q. a, le corps, 11, les nageoires. La Figure 2 eft celle d’une nichée d’œufs de coufins, de grandeur naturelle. Dans la Figure 3 la même nichée d’œufs eft groffie à la loupe, & elle eft groftïe au microfcope dans la figure4. La Figure y fait voir un tas d’œufs détachés de la figure 4. La Figure 6 nous montre prefque de face, le bout d’un tas d’œufs détachés de la nichée de la figure 4, & retournés fans defifus deffous, ou ayant en haut le bout qui doit pofer fur i’eau. La Figure 7 repréfente un paquet compofé feulement de fix œufs, mais vus de côté & non par le bout, comme dans la figure 6, au moyen de quoi, on voit i’efpece de col court, par lequel fie termine le gros bout, ou Je bout inférieur de chaque œuf. La Figure 8 fait voir un œuf du coufin féparédes au¬ tres. i, fon bout pointu qui eft le fupérieur des figures 3 & 4. c, col par lequel le gros bout eft terminé. En b pa- roît une ouverture comme celle du goulot d’une bou¬ teille, 6 c qui femble avoir fon bouchon fait dune ma¬ tière criftalline. Les Figures 9 & 10 repréfentent un coufin prefque Tome IV . LUI 6} 6 MEMOIRES POUR L’FIiST. DES INSECT. entièrement hors* de Ion enveloppe de nymphe, dans laquelle il eft comme dans un batteau auquel il fert de mât. La figure 9 le fait voir de grandeur naturelle, & il eft très - grolfi dans la figure 10. Dans cette dernière fi¬ gure a a marquent les anneaux de la dépouille de la nym¬ phe. e e, la partie antérieure, celle où étoient le corcelet, la tête, &c. ci d> les antennes du coufin. t, fa trompe./:, m, les jambes encore appliquées contre le corps. La Figure 11 repréfente un peu plus grand que na¬ ture, un coufin occupé à faire fa ponte, & qui ne l’a prefque que commencée, f f feuille fur laquelle fes qua¬ tre premières jambes font pofées. i, ï, fes deux jambes po- fiérieures croifées à la furface de l’eau. Entre le derrière du coufin, & l’angle que font les deux jambes, eft un petit tas d’œufs 0. Dans la Figure 12 un coufin eft repréfenté plus grand que dans la figure 1 1, & ayant plus avancé fa pont e.ff feuille qui flotte fur l’eau, & fur laquelle les quatre pre¬ mières jambes font appuyées, i, i, les deux jambes pofté- rieures qui, après être un peu entrées dans l’eau, revien¬ nent à fa furface. Ici les deux jambes /, i font parallèles l’une à l’autre, parce que la ponte eft plus avancée, <7, la nichée d’œufs foûtenue par les deux dernières jambes. Fin du quatrième Tome. Figp. Fùj.io H ^Opap.6^6 Metn ifl .h-ltit.tr de* Insecte* Trm- 4 F r>* F,y., Fur. 4 Fur h l t F( ■xV V • •A. c/ [y . . 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