t^^i /'^ Mm '^m^'^W^'m: .:/f^i >a/^ ^^-^^/^î; r^^. ^^/ TU ɧ!^M^ ^ê^^^^ y FORTHE PEOPLE ^ FOR EDVCATION FOR SCIENCE LIBRARY OF THE AMERICAN MUSEUM OF NATURAL HISTORY Sound "î MÉMOIRES SOCIÉTÉ ZOOLOGIQUE DE FRANCE POUR L'ANNÉE 1 902 LILLE LE BIGOT FRERES, IMPRIMEURS MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ ZOOLOGIQUE DE FRANGE (RKGONNUE D'UTILITÉ PUBLIQUK) ANNÉE 1902 TOME XV PARIS AU SIÈGE DE LA SOCIÉTÉ ZOOLOGIQUE DE FRANCE S8, rue Serpente, Hôtel des Sociétés savantes (6« arrondissement). 1902 V/ ^T^fé^. ^cU^^ OBSERVATIONS SUR QUELQUES REPTILES DU DÉPARTEMENT DE L'INDRE (I). Mœurs, reproduction et domestication de la Cistude d'Europe l'Ait RAYMOND ROLLINAT La Cistude d'Europe, Cistudo- Europœa Duniéril et Bibrou, est commune dans presque tous les étangs du département de l'Indre. C'est surtout dans une contrée appelée Brenne, située dans les arrondissements du Blanc et de Chàleauroux, où les étangs, au nombre de plusieurs centaines, ont parfois une superficie consi- dérable, qu'on rencontre cette intéressante espèce; mais elle est aussi fort commune dans les étangs assez éloignés de la Brenne proprement dite, dans ceux des environs d'Argenton, par exemple. L'étendue de l'étang n'est pour rien en ce qui concerne l'habitat de cette Tortue : on m'a apporté des Cistudes capturées dans les immenses étangs de Brenne, d'autres qui avaient été prises dans de minuscules étangs, d'autres enfin qui avaient été ramassées dans de simples mares. Souvent, on m'a donné des sujets capturés dans la Creuse ou dans la Bouzanne, mais les individus, ordinairement isolés, qui vivent sur ces rivières, sont pour la plupart des Cistudes évadées des jardins où elles avaient été placées pour y détruire les Limaces et les Escargots. (Cependant, si la Cistude habite dans la plupart de nos étangs, elle n'existe pas dans tous. Je tiens même de mon collègue et ami René Maiitin, qui a beaucoup parcouru la Brenne en naturaliste savant et passionné, que cette espèce intro- duite dans certains étangs n'y était pas restée. Il est fort difficile d'étudier les mœurs des Tortues dans les endroits où elles vivent en liberté. A l'étang des Feuilloux, aux (1) Raymond Rollinat. Observations sur quelques Reptiles du département de l'Indre. Mœurs et reproduction de l'Orvet fragile. — Mémoires de la Société Zoologiqne de France, X, 1897. Raymond Rollinat. Observations sur quelques Reptiles du département de l'Indre. Mœurs et reproduction du Lézard des murailles. — Bulletin de la Société nationale d'Acclimatation de France, juillet 1897. Raymond Rollinat. Observations sur quelques Reptiles du département de l'Indre. Mœurs et reproduction du Lézard vert. Mémoires de la Société Zoolo- gique de France, XIII, 1900. b R. ROLLINAT environs d'Argeuton, la Cistude est commune. Des sujets étaieût presque continuellement rassemblés, pendant les belles journées du printemps ou de l'été, sur un petit monticule situé dans les joncs, à une faible distance des bords ; mais dès que j'approchais de leur observatoire, ils se précipitaient immédiatement dans l'eau et disparaissaient ; ce n'est que rarement que je rencontrais un individu isolé, dans l'une des queues de l'étang, où il errait à la recherche de sa nourriture. Après de fortes pluies, lorsque les fossés qui conduisent l'eau aux étangs sont à peu près pleins, des Tortues s'aventurent assez loin des lieux qu'elles habitent d'ordi- naire; c'est là qu'elles se font prendre, ou dans les queues d'étangs, ou bien encore lorsque les femelles s'éloignent de l'eau pour aller déposer leur ponte dans les terrains secs avoisinants. Les habitants des campagnes connaissent peu les mœurs de cette espèce. Ils disent que c'est en avril ordinairement qu'a lieu l'accouplement, parce qu'ils entendent le faible bruit produit par les chocs répétés du plastron du mâle sur le bouclier de la femelle, dans les instants et souvent aussi les jours qui précèdent la copulation. Ils savent que la femelle va déposer ses œufs à une petite distance de Tétang, parce qu'eu labourant ils mettent à découvert les pontes de cette espèce, et qu'ils trouvent des œufs contenant des petits, ou des jeunes fraîchement éclos qui reposent près des œufs dont les embryons sont morts pendant le développement. Ils croient que l'éclosion a lieu au printemps de l'année qui suit celle de la ponte, ce qui est une erreur, ainsi qu'on le verra plus loin. Près des mar- chands de Poissons, qui, chaque année, en automne et en hiver, pèchent de nombreux étangs, je n'ai pu recueillir aucun renseigne- ment utile. Ils ne trouvent que rarement des Tortues lorsque les eaux se sont écoulées par le déversoir et ont mis en grande partie à nu la vase du fond de l'étang, car notre Chélonien hiverne sous les amas de joncs pourris, le long des bords, sous terre ou enfoui à une très faible profondeur dans la vase de l'étang, et il sait fort bien se cacher. Sur beaucoup de Tortues, on observe un ou plusieurs trous aux bords postérieurs libres du bouclier. Ces trous sont faits par les petits bergers qui gardent leurs troupeaux aux environs des étangs, où il leur arrive parfois de capturer ce Reptile ; ils s'amusent alors à attacher les paisibles Tortues et à leur faire traîner des morceaux de bois ; puis ils leur rendent la liberté, car personne ne tue cette espèce, considérée à juste titre comme inoflfensive. Je n'ai entendu dire qu'une seule fois que quelques braconniers des environs de OBSERVATIONS SUFî QUELQUKS REPTILES DE L INDRE 7 Migné, mangeant des Hérissons à l'instar des nomades étrangers vivant dans des voitures, avaient fait la soupe à la Tortue de Brenne, et que, l'ayant trouvée bonne, ils apportaient chez eux et mettaient à mort les malheureuses Tortues qui avaient la mal- chance de tomber entre leurs mains. Mais c'est là l'exception. La Cistude a peu d'ennemis. Dans son jeune âge, elle est proba- blement la proie des Loutres, des Visons, des Renards, rôdant aux abords des étangs, de quelque Rapace ou de quelque grand Echas- sier. Je n'ai jamais trouvé ses débris dans l'estomac d'aucune bête. Il n'est pas rare de rencontrer des sujets ayant la carapace défor- mée, à bords atrophiés et ne dépassant pas les limites du corps de l'animal, ou bien à bords libres, relevés comme le seraient ceux d'ufi chapeau en mauvais état; cette anomalie affecte presque tou- jours le bouclier et n'est aucunement nuisible à la santé des ani- maux. J'ai eu chez moi des femelles ainsi déformées qui se repro- duisaient parfaitement. J'ai élevé des sujets qui présentaient aussi, plus ou moins accentuée, celte curieuse anomalie, et j'ai remarqué que la difformité n'était que rarement visible sur les très jeunes individus et ne commençait à se montrer que pendant le cours de la première ou même de la seconde année ; c'était alors seulement que les bords libres du bouclier se relevaient d'une façon absolu- ment anormale. En 1893, j'avais envoyé au professeur Raphaël Blanchard deux sujets monstrueux capturés dans un étang des envi- rons de Migné (Indre). Le professeur Blanchard a publié, dans le Bulletin de la Société Zoologique de France, en 1893, une note sur ces Tortues et deux gravures les représentant très exactement. Il a donné ces sujets difformes à la Ménagerie des Reptiles du Muséum d'Histoire Naturelle de Paris, où ils vivent peut-être encore. On trouve aussi des individus à carapace plus ou moins endom- magée, par suite d'un accident quelconque. Dans les étangs où elle vit, la Cistude d'Europe se nourrit de larves de Batraciens, d'Insectes aquatiques, de leurs pontes ou de leurs larves, de Mollusques qu'elle trouve à terre ou dans l'eau, et très rarement de Poissons, car elle ne peut parvenir à les capturer. Si elle commet quelques dégâts insignifiants, c'est en mangeant parfois les œufs de Poissons, ou des alevins qui, au moment de la sécheresse, se trouvent isolés accidentellement dans des trous minuscules et momentanément séparés de l'étang par suite du retrait des eaux. D'après mes observations, cette Tortue est plus utile que nuisible, car elle détruit une grande quantité d'Insectes et de Mollusques terrestres ou aquatiques. 8 R- ROLLINAT Mœura et reproduction de la Cistude d'Europe cm captivité. Dômes ticaiion de cette espèce. — Depuis mon enfance, je connais ce Reptile, car mes parents avaient placé dans leur jardin quelques Cistudes qui avaient pour mission de détruire les Escargots. J'ai joué avec ces inoffensives Tortues; je leur ai fait bien des taqui- neries, bien des misères, et j'ai appris peu à peu à les aimer, car elles sont intelligentes et bonnes. Habitant à quelques lieues seulement du centre de la Brenne, j'ai pu me procurer bon nombre de sujets quand plus tard, devenu naturaliste, j'ai voulu étudier les mœurs de notre Tortue indigène. Je me suis adressé aux cultivateurs, aux pêcheurs de Sangsues qui m'ont apporté beau- coup de Cistudes capturées aux environs de Bélabre, de Rosnay, de Migné, de Nuret, etc.; j'ai reçu aussi en nombre bien des sujets pris dans les petits étangs des environs d'Argenton et dans les rivières de Creuse et de Bouzanne, où des individus, ayant reconquis leur liberté et vivant dans ces cours d'eau, avaient la mauvaise fortune de se faire prendre à nouveau. Aujourd'hui encore il me reste une quarantaine d'adultes en pleine reproduction. Le jardin dans lequel vivent mes Cistudes est assez grand, bien clos et pourvu de bassins dont l'un, plus vaste que les autres, est réservé aux Tortues adultes; c'est dans ce bassin, bien exposé et en forme de large cuvette ovale, où d'habitude je place leur nour- riture, qu'elles se tiennent ordinairement pendant la belle saison. Au début de l'automne, elles quittent ce bassin d'elles-mêmes et vont s'installer, soit dans de très petits bassins situés près d'un mur exposé au nord-ouest, soit dans un tas de fumier que j'ai soin de faire placer à cette époque le long d'un autre mur exposé au sud-est. Retour à la vie active. — Selon que les beaux jours sont plus ou moins précoces, les Tortues commencent à circuler en mars ou en avril, et se rendent peu à peu au grand bassin. C'est en mars ordinairement que la Cistude d'Europe reprend sa vie active. Dès les premiers jours de ce mois, on voit les têtes des Tortues sortir du fumier lorsque le soleil brille et que la tempéra- ture s'adoucit ; puis, les jours suivants, les bêtes apparaissent entièrement hors du fumier, reposent au soleil pendant la plus grande partie de la journée, et, le soir venu, regagnent leur retraite. Celles qui ont hiverné dans les petits bassins s'agitent elles aussi et sortent de temps à autre par les belles journées. Quelques fortes averses suivies de soleil ont rendu la tempéra- ture plus chaude et plus humide, et, lentement, isolément, les OBSERVATIONS SL'H QUELQUES REPTILES DE L INDRE U ChélonieDS rega^neut le grand bassin qu'ils occuperont d'ordinaire pendant toute la période d'activité. Bien nettoyé, pourvu d'eau claire qui permet à l'observateur d'étudier les moindres mouve- ments de ses habitants, le bassin recueille une à une les Tortues qui viennent du tas de fumier ou des petits bassins d'hivernage. Malheureusement, l'eau dormante ne reste pas longtemps claire en cette saison, et les Algues microscopiques ne tardent pas, en s'y multipliant rapidement, à la rendre opaque à tel point qu'il est bientôt impossible d'y apercevoir les animaux qu'elle recouvre. Les Tortues affectionnent particulièrement cette eau trouble qui les cacl>e aux regards indiscrets, et c'est sous son manteau vert que s'abritent les intimes et mystérieuses amours de notre Ché- lonieu. Chaque année le premier occupant est presque toujours un mâle, bientôt suivi dune femelle sur laquelle il se hisse aussitôt ; à défaut de femelle, il se fixera sans façon sur un sujet de son sexe. Au début du printemps, s'il survient une période de mauvais jours, les bêtes quittent le grand bassin et retournent au fumier ou dans les petits bassins d'hivernage. Cette aversion pour l'eau pro- fonde et très froide est due à ce que l'instinct des animaux les porte à ne pas rester dans un endroit où ils n'auraient peut-être pas la force — leurs mouvements devenant lents et difficiles par suite du froid — de remonter vers la surface pour prendre, de temps à autre, l'air indispensable à la vie. Je dois cependant dire que, plus il fait froid, moins les Tortues ont besoin d'air, la circulation devenant à peu près nulle et le besoin de respirer ne se faisant sentir qu'à de très longs intervalles, mais en mars ou avril, elles ne resteraient pas sans danger quelques jours sans pouvoir remonter à la surface. Si la température continue à être favorable ; si le soleil, ce grand dispensateur des bons et des mauvais jours pour la gent reptilienne, se montre souvent, les Chélonieus se rassemblent au grand bassin et reprennent leurs habitudes, c'est-à-dire qu'ils circulent dans le jardin, font des stations plus ou moins prolongées dans les petits bassins qu'ils rencontrent dans leurs promenades, le grand bassin restant toujours leur lieu de prédilection. C'est dans la seconde quinzaine d'avril que je fais enlever le tas de fumier dans lequel un assez grand nombre de mes Tortues ont passé l'hiver. Nourriture. — Essentiellement carnassière, la Cistude d'Europe ne mange jamais de végétaux, et s'il lui arrive d'avaler de petites 10 n. ROLLINAT Algues d'eau douce, c'est en dévorant les pontes que les Insectes aquatiques sont venus déposer parmi ces piaules. Elle ne commence à manger que quand la chaleur se fait suffisamment sentir, vers la première quinzaine d'avril ordinaire- ment ; avant cette époque, elle refuse toute nourriture ; les jeunes sujets prennent parfois de la nourriture quelques jours avant les adultes. Ce n'est que pendant la seconde quinzaine de ce mois, que je commence à jeter dans le grand bassin et dans celui du terrarium où sont les jeunes, la viande crue hachée — poumon, cœur, rate de Veau, ordinairement — destinée à la nourriture de mes Gistudes, grandes ou petites. Mes bêtes ne sont pas très difficiles en ce qui concerne le choix et la qualité des morceaux, et je leur ai vu avaler jusqu'à des Souris écorchées et des tronçons de Couleuvres prove- nant de mon laboratoire; la chair en décomposition est seule refusée. D'avril à la fin d'août, chaque fois que la pluie engage à sortir de leurs retraites les Limaces et les Escargots, les Tortues se met- tent en chasse, dévorent quelques petites Limaces, dédaignant les grosses, trop gluantes et peu appétissantes, et s'emparent, si elles ont faim, de tous les Escargots qu'elles rencontrent. Quelle que soit la grosseur de l'Hélice, quelle que soit sa couleur ou l'espèce, elle la prend entre ses mandibules cornées, et, si la proie est d'assez forte taille, il lui faudra la porter dans l'eau d'un des bassins, où, tout en ne la quittant pas des yeux, elle attendra que le Mollusque, à moitié asphyxié, montre hors de sa coque une partie de son corps. Immédiatement saisi par les mandibules de la Tortue, qui, s'aidant des ongles puissants armant ses membres antérieurs l'arrache brusquement de sa demeure, l'Escargot est déchiré et avalé ; toute proie volumineuse — viande, Poisson, Hanneton, Escargot, etc. —, est déchirée afin d'être engloutie plus facilement. Un jour, je rencontre une de mes Tortues emportant un grand Lombric ; une heure après, elle se promène encore, le tenant tou- jours, et il lui faudra se rendre à l'eau pour l'avaler ; une proie, si elle n'est pas très petite, devra toujours être portée à l'eau. En mai, juin et juillet mes Chéloniens mangent beaucoup, et c'est à cette époque que j'ai pu les habituer à venir prendre dans ma main la nourriture que je leur offre. Intelligente, la Cistude reconnaît bientôt la personne qui lui apporte sa nourriture; elle la voit venir avec plaisir près du bassin et s'avance alors vivement vers elle, frappant l'eau de ses pattes de devant, dilatant sa gorge, redressant sa tète, tournant sur el'e-même et ayant l'air d'une Tortue OBSERVATIONS SUR QUELQUES REPTILES DE l'iNDRE 1 1 parfaitement heureuse ; c'est sa façon de faire la belle, de se montrer gracieuse et bonne bête. Elle n'est peut-être pas très physionomiste, et elle viendra facilement prendre à l'exlrémité des doigts d'un visiteur inconnu la proie qu'il lui présente ; cependant, elle sera très réservée vis-à-vis des dames parées de robes voyantes surmon- tées de chapeaux et d'ombrelles multicolores, et elle se dirigera tou- jours vers son maître, surtout si ce dernier change peu souvent la couleur de ses vêtements. La proie saisie, la Tortue s'en retourne au milieu du bassin, pour l'englouthr à l'aise ; mais elle est souvent poursuivie par ses com- pagnes, et si l'une d'elles prend une autre partie du morceau de viande ou de l'Escargot, une lutte s'engage, la proie est déchirée et chacune s'en va avec son morceau. Ce n'est pas toujours sans dan- ger que deux Tortues prolongent leur tête à-tête, hxées, museau contre museau, au même morceau de viande ; elles cherchent à déchirer leur proie avec leurs membres antérieurs; et parfois une d'elles met l'ongle dans l'œil de sa compétitrice ; j'ai eu des sujets éborgnés de la sorte, et aussi par des Chats qui venaient voler la viande distribuée aux Tortues et qui se faisaient un malin plaisir d'accueillir à coups de grilles les têtes des pacifiques Chéloniens qui venaient émerger à leur portée. Quand la Tortue a faim, elle devient extrêmement familière. Je me suis souvent assis à terre, près du bassin, en montrant à mes bêtes un plat rempli de viande hachée. Elles sortaient de l'eau, mon- taient sur mes jambes et venaient prendre à ma main ou dans le plat la pitance qu'elles convoitaient; cela fait elles retournaient au bassin. Souvent aussi je me piésentais devant elles sans avoir rien à leur donner; elles venaient à moi quand même, se hissaient sur mes pieds, levaient vers moi la tête et semblaient me demander si je n'avais rien à leur distribuer; quelques Escargots, récoltés à la hâte, faisaient alors leur bonheur. On s'étonnera sans doute qu'avec un aussi grand nombre de Gistudes je puisse avoir encore des Escargots dans mon jardin ; mais personne n'en sera surpris quand j'aurai dit que chaque fois que le temps le permet, c'est-à- dire après de fortes averses, je fais ramasser plusieurs centaines d'Hélices dans les terrains des alentours et que je les mets en liberté dans mou jardin. Comme la Tortue n'a pas une excellente mémoire, il est bon d'entretenir celte familiarité eu ne négligeant jamais l'occasion de lui être agréable. Au début de la belle saison, les animaux sont un peu craintifs lorsqu'on s'approche d'eux, et il leur faut quelques jours de bons soins avant qu'ils reconnaissent 12 R. ROLLINAT de nouveau un ami dans l'Homme; aux approches de l'automne, la faim ne se faisant plus sentir, ils deviennent indifférents et ne répon- dent plus aux appels de leur maître. Pendant l'été, si on néglige les Tortues, on ne tarde pas à s'apercevoir que leur timidité natu- relle revient très vite. En tout temps, l'apparition brusque d'un Homme efïraye quelque Chélonien reposant au bord de l'eau et qui exécute immédiatement un plongeon ; cette fuite entraîne ordinai- rement au fond du bassin un certain nonibre de sujets, qui ne tardent pas à remonter à la surface, à se remettre de leur frayeur et à venir regarder de près l'intrus, cause de la panique ; si ce der- nier a quelque chose à leur offrir et s'ils ont faim, ils viendront prendre dans la main la proie offerte. Le Poisson constitue pour la Cistude un véritable régal ; mais cette Tortue, quoique fort agile dans l'eau, est absolument incapable de capturer un Goujon, une Ablette, une Bouvière ou un Vairon lorsqu'ils sont en bonne santé et jouissent de tous leurs moyens de locomotion, et il doit en être ainsi pour les jeunes Poissons appartenant aux espèces qui peuplent les étangs : Carpes, Brochets, Tanches, Gardons, etc. Dans un espace très restreint, une petite flaque d'eau par exemple, la Tortue pourra facilement s'emparer des Poissons qui n'ont pas alors l'espace nécessaire pour faire leurs évolutions ; mais quand les Poissons peuvent évoluer facile- ment, dans mon grand bassin, par exemple, qui ne mesure pour- tant que 3 m. 60 de long, 2 m. 90 de large et 0 m. 80 de profondeur, dans le ciment duquel des petites marches ont été aménagées pour faciliter la sortie des Tortues, un Poisson bien vivant est imprenable pour mesChéloniens,qui cependant sont des nageurs émérites. Bien des fois j'ai distribué des Poissons vivants, tels que Goujons, Vairons, Ablettes, etc.; dans l'eau dormante, les Ablettes succom- baient les premières, et dès qu'elles commençaient à s'affaiblir et à perdre l'instinct de la conservation, elles étaient aussitôt saisies par une Tortue, avalées la tête la première si elles était de petite taille, et déchirées à coups d'ongles et de mandibules lorsqu'elles étaient trop volumineuses. Quant aux Goujons et Vairons, ils vivaient très bien dans le bassin en compagnie des Tortues et semblaient se jouer de leurs poursuites ; plus tard, l'eau devenant de plus eu plus impropre à leur respiration branchiale, ces malheureux Poissons, à moitié asphyxiés et considérablement affaiblis, se laissaient pren- dre et devenaient la proie des Cistudes. Cette espèce est beaucoup plus dangereuse pour les Batraciens, surtout pour leurs larves, et quand je m'occupais de l'élevage des OBSERVATIONS SUR QUELQUES REPTILES DE l'iNDRE 13 Anoures et des Urodèles, j'étais obligé de rendre inaccessibles pour les Tortues, les abords des petits bassins où les larves se dévelop- paient ; malgré cela, il arrivait souvent qu'une ou même plusieurs Cistudes pénétraient dans un de ces récipients, où elles exerçaient de terribles ravages parmi les Têtards des Anoures et les larves des Urodèles, cependant tort agiles, mais dont la vivacité dans l'eau n'est pas comparable à celle des Poissons. Elles étaient même par- fois dangereuses pour les adultes qui se laissaient surprendre ; j'ai trouvé des cadavres de Grenouilles, de Discoglosses et de Crapauds communs mis en pièces par les Cbéloniens. Les espèces les plus venimeuses ne sont pas à l'abri de leurs attaques : deux Crapauds calamités ayant eu la témérité de venir s'accoupler une nuit au grand bassin, furent saisis dans la matinée par les Tortues, et, près de leur long chapelet d'œufs, je trouvai le corps mutilé de l'un des amoureux. Mais si les Cistudes mangent avec avidité les larves des Batraciens, elles ne se nourrissent pas des animaux adultes et se contentent de les déchirer ; le venin sécrété par les Anoures ou les Urodèles adultes, ne leur étant sans doute pas agréable. Quand les grandes Libellules viennent, en tournoyant, déposer leurs œufs sui' les bords du bassin, dans l'eau peu profonde, les Tortues voient parfaitement les très petits œufs semés par les Insectes et s'empressent de les dévorer; j'ai assisté maintes fois à ce spectacle. En mai, juin et juillet, mes Tortues mangent beaucoup ; elles avalent gloutonnement les Poissons, la viande crue hachée, les Blattes et les Hélices que je leur offre. La trop grande chaleur semble les fatiguer ; elles se tiennent sous l'eau pendant les heures les plus chaudes de la journée et prennent alors moins de nourriture. Elles sont d'ailleurs très grasses lorsqu'arrive le mois d'août ; vers cette époque l'appétit est moins bon, et dès la seconde quinzaine de septembre, parfois même avant, je ne leur distribue plus de viande, car cela serait absolument inutile ; elles cessent entièrement de manger fin de septembre ou dans les premiers jours d'octobre, et, quand même une période de beaux jours viendrait adoucir les premières semaines d'automne, la faim ne se ferait plus sentir; jusqu'au printemps suivant, la Tortue vivra sur sa réserve de graisse et ne prendra aucune nourriture. Entre la peau des flancs et une couche de muscles minces, on trouve un amas de graisse assez considérable ; cette graisse est jaune ou d'un blanc jaunâtre, et plus compacte que celle des 14 R. ROLLINAT Sauriens et des Ophidiens. Disséminées dans l'intérieur du corps, et parfois entre cuir et chair, on rencontre souvent de petites masses de graisse, chez les sujets en très bon état. Les petites Tortues d'un an et de deux ans ont aussi leur réserve de graisse, blanchâtre ; pendant les années suivantes, cette graisse est d'un blanc grisâtre et devient jaune par la suite. Utilité (le cette espèce. — La Cistude d'Europe a à son passif la mort de nombreuses larves d'Anoures et d'Urodèles, de quelques adultes, des petits Poissons qu'elle peut attraper dans les flaques d'eau lorsqu'ils sont séparés des étangs par suite du retrait des eaux; les œufs des Poissons ne sont peut-être pas à l'abri de ses rapines; elle avale, lorsqu'elle peut les trouver, les œufs de nos grandes Libellules qui, d'après les récents et importants travaux de René Martin sur les Odonates (1), sont des Insectes utiles; R. Martin a même vu une Tortue tenant entre ses mandibules une Libellule adulte. Par contre, elle a à son actif la destruction de nombreux Insectes aquatiques plus ou moins nuisibles, de leurs œufs et de leurs larves, et celle d'innombrables Mollusques appartenant à des espèces vivant sur terre ou dans l'eau ; le Hanneton, la Sauterelle qui tombent à l'eau sont happés par elle, et j'ai vu mes Cistudes prendre des Hannetons dans mon jardin ; enfin, c'est un animal absolument inolïensif pour l'Homme, qui ne cherche jamais à prendre entre ses mâchoires la main qui le taquine, et qui de plus est dans nos contrées le dernier représentant d'une forme aujour- d'hui disparue. La Cistude est donc une espèce respectable par son antiquité et aussi par sa rareté sur notre territoire, car bien peu de départe- ment la possèdent ; bien sincèrement, je la crois plutôt utile ; elle mérite d'être protégée. Caractères, description. — Tête de moyenne grosseur ; pupille ronde ou plutôt très légèrement ovale dans le sens horizontal ; pas de dents; des mandibules cornées à bords durs et tranchants; la mandibule supérieure très légèrement échancrée en son milieu, l'inférieure relevée à son extrémité et venant s'encastrer sous l'échaucrure ; cou assez allongé, gros et bien musclé ; boîte osseuse ovale ; bouclier bombé, légèrement caréné chez les jeunes et chez quelques adultes, parfois un peu relevé vers ses bords libres, échancré sur la queue, portant cinq larges écailles vertébrales, (1) René Martin. Les grandes Libellules considérées comme animaux utiles. — Bulletin de la Société nationale d'Acclimatation de France, juillet 1897. OBSERVATIONS SUR QUELQUKS REPTILKS DE l'iNDRE 15 quatre larges costales de chaque côté des vertébrales, et entouré de vingt-cinq marginales plus petites dont une, la nuchale, est simple, ou plus rarement, divisée ; plastron plat ou légèrement concave, à peine relevé vers ses extrémités, échancré sous la queue, et portant six paires de larges écailles ; bouclier et plastron joints, de chaque côté, entre les membres^ par un cartilage. Membres forts et trapus,-recouverts d'un solide épiderrae écailleux. Pieds palmés, à cinq doigts; les antérieurs munis de cinq ongles roi)ustes; les postérieurs pourvus de quatre ongles seulement, le doigt interne, très rudimentaire, n'en ayant pas, mais plus allongés et plus forts que ceux des membres antérieurs ; queue peu allongée, recouverte elle aussi d'un épidémie écailleux. Le mâle est un peu plus petit que la femelle ; il est plus aplati et a le bouclier moins convexe ; son plastron est légèrement concave au lieu d'être plat ou même un peu convexe ; il a l'ouverture du cloaque plus éloignée du bord postérieur du plastron, et sa queue est plus grosse et plus longue; le bord postérieur de son plastron est ordinairement un peu moins échancré. Signalement d'un mâle très adulte ; poids, 680 grammes; lon- gueur du bouclier : 16<^"' ; largeur du bouclier : iS"^"' ; longueur du plastron : 14''"',5 ; largeur du plastron : O'^'^.S; tête et cou : S""^. Le mâle a la tête proportionnellement plus grosse, et la peau écailleuse qui la recouvre est plus noire que chez la femelle. Queue, longueur totale : 9'='" ; chez un autre mâle moins gros, la queue mesure 10^'". Du cloaque au bord postérieur du plastron : S*^'" ; chez un autre mâle moins gros, cette distance est de : 3om5. Ecailles du bouclier noirâtres, avec des points ou traits plus ou moins jaunes formant des rayons sur chaque écaille ; en-dessous, les marginales sont moins jaunes que chez la femelle; souvent, ces marginales sont noirâtres, tachetées de jaune indécis. En avant de la charnière qui relie le bouclier au plastron, un ou deux gros points d'un jaune vif. Le plastron a les écailles noirâtres, plus ou moins marquées de taches jaunâtres ou brunâtres ; chez quelques mâles, il a une couleur uniformément noirâtre. Le bouclier du mâle est ordinai- rement un peu plus caréné que celui de la femelle, qui, bien souvent, ne porte aucune trace de carène ; mais j'ai aussi vu des mâles n'ayant pas de carène. Les ongles sont noirs ou d'un brun noirâtre. Tète, membres et queue noirs ou noirâtres, moins mar- qués de jaune que chez la femelle. Signalement d'une femelle très adulte : poids, 1.022 grammes ; longueur du bouclier : 18"^™ ; largeur du bouclier : 14cm 5 ; longueur 16 R. ROLLINAT du plastron : IT^™ 5; larjçeur du plastron : ll^mo ; tête et cou : 8^™ ; longueur totale de la queue : S*=™ 5 ; du cloaque au bord postérieur du plastron : l^^'", mais parfois 2''^ chez certaines femelles. Ecailles du bouclier brunâtres ou noirâtres, semées de points et de petits traits jaunâtres plus ou moins apparents et formant des rayons ; eu-dessous du bouclier, les marginales sont jaunes et plus ou moins noirâtres ou brunes par endroits. En avant de la soudure du bou- clier et du plastron, un gros point jaune clair. Le plastron a les écailles d'un blanc sale jaunâtre, légèrement brunâtre ou noirâtre par endroits. Ongles noirs ou d'un brun noirâtre. Tête, membres et queue noirs ou noirâtres, marqués de points jaunes formant parfois, de même que chez les mâles, des raies longitudinales, plus ou moins interrompues, sur la queue et les membres. Entre la soudure des deux parties de la boîte osseuse et les membres, et entre les membres antérieurs et le cou, sous le cou et la gorge, l'épiderme est moins rude, moins écailleux que sur les membres et la queue, a une coloration un peu moins foncée et est semé de nom- breuses taches jaunes ou jaunâtres. Le plastron des femelles est ordinairement moins sombre que celui des mâles ; cependant, chez quelques-unes il est entièrement noirâtre. J'ai vu aussi des mâles ayant le plastron de couleur peu foncée. Des femelles ont le bouclier d'un beau brun rougeâtre uniforme ; d'autres l'ont entièrement noi- râtre. Quelques femelles ont l'iris brun ou rouge brique, semé de blanc; mais le plus souvent il est brun semé de jaune, ou jaune, jaunâtre ou blanc semé de brun. Chez la femelle, le plastron pré- sente presque toujours une surface plane, un peu relevée sur ses bords libres ; chez quelques-unes il est même très légèrement bombé. Le plastron du mâle, comme je l'ai dit, est toujours plus ou moins concave, de façon à pouvoir s'appliquer facilement sur le bouclier convexe de la femelle, au moment de l'accouplemenL L'iris des mâles est ordinairement rouge brique plus ou moins foncé et souvent taché de brun ou de noir; chez quelques-uns il a une coloration blanche fort belle. Chez les deux sexes, la queue se replie inditïéremment d'un côté ou de l'autre et vient se ranger sous l'un des bords postérieurs libres du bouclier ; quand la tète et le cou s'enfoncent dans la boîte osseuse et que les membres se replient entre les bords libres de la carapace, l'animal a ses parties vulnérables entièrement à l'abri. On remarque souvent des anomalies sur les écailles vertébrales ou costales, surtout sur les postérieures. J'ai eu des sujets ayant une ou plusieurs de ces écailles divisées chacune en deux ou trois OBSERVATIONS SUR QUELQUES REPTILES DE l'iNDRE 17 parties formant alors deux ou trois véritables écailles irrégulières au lieu d'une normale; j'ai eu aussi des Tortues ayant jusqu'à vingt sept marginales. J'ai vu des sujets ayant des écailles du plas- tron plus ou moins divisées. Chez les jeunes Tortues de cette espèce, on rencontre de temps à autre de curieuses variétés de coloration. J'ai eu des jeunes Cistudes d'un an, dont le bouclier était entièrement brun rougeàtre, de couleur acajou foncé. Jen ai eu d'autres, âgées de plusieurs années, dont la coloration du bouclier était très belle : écailles d'un brun très clair, un peu violacées par endroits et bordées de noir; mais cette brillante livrée ne persistait pas, et vers l'âge de quatre ou cinq ans la coloration revenait à peu près à l'état normal. Chute de répidenne. — Les changements de peau sont fort difti- ciles à observer chez la Cistude. Sur de très jeunes sujets, pendant les premières semaines qui suivent leur sortie de terre, j'ai cons- taté, chez quelques-uns, la chute de Tépiderme du cou, des membres, de la queue et des flancs. Sur les adultes, je n'ai vu se détacher l'épiderme que sur la partie engainante du cou. Je crois qu'à de très longs intervalles le dessus des écailles de la boite osseuse se détache, car j'ai vu, rarement il est vrai, cette couche supérieure des écailles se soulever et montrer en dessous une écaille nouvelle et mieux colorée ; j'ai aussi remarqué que la surface des plaques de la tète se soulevait. J'ai eu des sujets dont quelques-unes des larges écailles du bouclier se sont détachées entièrement, laissant l'os à nu, et ne se sont pas reformées pendant les années qui suivirent. Ou m'a apporté de Brenne des sujets, que j'ai eu le grand tort de refuser, qui présentaient des cas de chute complète de l'épiderme sur les membres, et, sous cet épidémie boursouflé, rompu par endroits, on voyait une nouvelle peau écailleuse entièrement blanche: mais je crois que ces Tortues étaient atteintes d'une maladie qui faisait se soulever la peau d'une façon anormale. Toutes les Tortues adultes qui vivaient dans mon jardin étaient marquées, au fer rouge, d'un numéro d'ordre, qui me rendait plus faciles les observations que je faisais sur mes animaux. C'était ordinairement à l'une des écailles postérieures du plastron que je marquais mes bètes, et, après deux ou trois ans, le numéro allant disparaître, je les marquais de nouveau. La brûlure occasionnée par l'apposition du numéro attaquait un peu les cellules osseuses avoisinanles. une escarre se produisait, se soulevait peu à peu pendant les années suivantes, et tombait, montrant une cicatrice Mém. Soc. Zûol. de Fr., 1902. 18 R. ROLLINAT sur laquelle une mince couche d'écaillé s'était formée. Chez les jeunes Tortues que j élevais, j'ai constaté la chute de la couche supérieure des écailles du bouclier. Période d'activité. — Notre Tortue indigène est en activité pendant huit mois chaque année, de mars à la fm d'octobre ; si les beaux jours sont tardifs, cette période peut être diminuée d'un mois et ne commence alors qu'en avril. J'ai décrit plus haut les habitudes de mes Gistudes dès leur retour à la vie active, c'est-à-dire en mars ou avril. En mai, les Tortues vivent la plupart du temps dans le grand bassin ou sur ses bords ; pendant les journées humides, beaucoup d'entre elles quittent l'eau et circulent dans le jardin. Pendant les belles nuits de printemps, il arrive parfois que les bêtes restent sur les bords du bassin, au lieu de passer la nuit dans l'eau ou à la surface, comme c'est leur habitude lorsqu'elles ne sont pas dis- persées dans le jardin, où alors elles vont passer la nuit dans les petits bassins, le long des murs ou même au milieu des carrés. On peut facilement constater qu'elles ne voient pas pendant la nuit, même pendant les nuits très claires. En s'approchant doucement, on aperçoit, immobiles, celles qui sont à la surface; si on les touche, elles s'affolent, ne savent où aller, et, au lieu de plonger dans l'eau, s'enfuient d'un autre côté, se frappant dans tous les obstacles. En juin, juillet et août, pendant les trop fortes chaleurs, les Tortues restent sous l'eau pendant les heures les plus chaudes de la journée, et ne montent à la surface que pour respirer. Souvent alors, ou remarque des individus qui dorment en se laissant flotter à la surface, la tête enfoncée dans l'eau ; j'ai même vu des Tortues dormir eu ayant le corps hors de l'eau, sur le bord, et la tête dans le liquide ; c'est une position bizarre pour des animaux munis de poumons, car leur sommeil devait être interrompu par le besoin d'air. Le matin et le soir, lorsque le soleil brille, toutes les bêtes sont le plus souvent réunies autour du grand bassin. Le moindre bruit insolite les met en éveil; les cous se tendent, les têtes se dres- sent; par contre, la vue et le bruit de nombreux trains qui passent à quelques mètres d'elles ne leur causent aucune préoccupation ; c'est affaire d'habitude ! Ce Chélonieu nage par bipède diagonal et marche de la même façon, mais un peu moins régulièrement. Dès le mois de septembre, et même fin août, si les nuits sont fraîches, les Cistudes cherchent à s'abriter sous t«rre ou dans l'eau OBSERVATIONS SUR QUELQUES REPTILES DE l'iNDRE 19 des petits bassins. Déjà eu septembre les journées sout moins chaudes, les uuits sont plus froides, et les animaux qui, dans le cours de leurs pérégrinations, se laissent surprendre parle crépus- cule, grattent la terre et cherchent à s'enfoncer sous le sol. C'est à cette époque que je fais^ilacer le long d'un mur du jardin, dans un endroit bien à l'abri des vents du nord, un tas de fumier mesurant 4 mètres de long, 0 m. 70 de haut, 1 mètre de large, et dont les deux petits côtés sout ménagés en pente douce, pour que les bêtes, qui viennent ordinairement le long du mur, puissent grimper dessus si bon leur semble. Dans une autre partie du jardin, des fûts sciés en deux et formant ainsi deux baquets, sont enfoncés au ras du sol, le long des murs, et remplis d'eau. Tout est prêt pour l'hivernage. Les Tortues quittent le grand bassin quand la température s'abaisse et vont s'installer dans le fumier ou dans les petits bassins d'hivernage. De beaux jours très doux ramènent quelques bétes au grand bassin, dont les temps couverts et froids, fréquents en cette saison, les chassent à nouveau ; ce manège dure pendant les mois de septembre et d'octobre. Hibernation. — La véritable période d'hibernation commence en novembre. Toutes les Cistudes ont quitté le grand bassin en ciment auquel on fait sa toilette d'hiver, c'est-à-dire qu'il est vidé, nettoyé, puis recouvert de planches sur lesquelles ou place une épaisse couche de paille et de fumier; ces précautions sont néces- saires pour éviter l'éclatement du ciment sous la pression de la glace. Les petits bassins d'hivernage, le gros tas de fumier déposé le long d'un des murs du jardin ont reçu leurs habitants, qui s'y sont définitivement établis. Une année, le fumier abrite plus de Tortues que les bassins; l'année suivante, c'est le contraire, sans raison apparente. En général, il y a un peu plus de sujets qui préfèrent le fumier; mais une année où le fumier avait été mis trop tard à la disposition des bêtes, presque toutes allèrent hiverner dans les petits bassins. La Cistude s'introduit dans le fumier la tète en avant, en s'aidant de ses membres pour faire son trou ; arrivée à une petite profon- deur, elle fait parfois demi tour et revient vers la surface, où, sans sortir de l'excavation qu'elle a creusée, elle eu ferme l'ouverture, ne laissant qu'un très pelit trou rond par lequel elle passera parfois la tête pendant les journées dont la température sera assez douce. Plus il fait froid, plus les Tortues s'enfoncent dans le fumier, dans lequel elles ne sont pas entièrement engourdies, car elles font toujours des 20 R- ROLLINAT mouvements lorsqu'on les touche. Celles qui hivernent dans l'eau des petits bassins ne s'engourdissent pas non plus, et, lorsqu'on les relire de dessous la glace, ou les trouve abritées dans leur cara- pace, mais en état de marcher; si même on place l'une d'elles sur le dos, elle ne tarde pas à sortir la tète, le cou, les membres et la queue, et, d'un coup de museau donné adroitement sur le sol, à se remettre sur ses pattes. Pendant les fortes gelées, il est bon de briser la glace des bassins, car, quoique les Gistudes peuvent rester très longtemps sans prendre d'air lorsqu'il fait très froid, la circu- lation et la respiration étant fort ralenties chez elles, ce ne serait pas sans danger qu'elles resteraient plusieurs jours sans commu- nication avec l'air, l'une d'elles pouvant avoir besoin de respirer. J'ai eu des Tortues qui, prises en partie dans une épaisse couche de glace, sont revenues à la vie. J'ai remarqué que beaucoup des sujets abrités dans le fumier, et même quelques-uns de ceux qui vivent dans l'eau, avaient les paupières collées pendant la plus grande partie de l'hiver; le prin- temps venu, les paupières se décollent. En décembre et janvier, les courtes périodes de beau temps ramènent parfois les Chéloniens à la surface de l'eau ou du fumier, ou ils montrent la tête pendant les heures les plus favorables; il peut même arriver que par un temps doux et humide l'un d'eux s'aventure à entreprendre un petit voyage qui le mènera de l'eau au fumier ou vice-versa. Le mois de février apporte un peu d'agitation dans les locaux d'hivernage ; les Tortues se montrent dès qu'il fait beau, et, dans les années où la température de ce mois est douce, j'ai même fait aménager le grand bassin, qui recevait bientôt quelques habitants, sans les conserver toutefois dès que le froid reprenait. Accouplement. — Pendant bien des années j'ai négligé de m'occu- per de la reproduction de la Gistude d'Europe. Mes études sur le développement des larves des Batraciens Anoures et Urodèles, m'avaient forcé pendant longtemps, la belle saison venue, A par- quer mes Ghéloniens dans une partie du jardin où ils ne pouvaient être nuisibles. Gette sorte de captivité ne leur plaisait en aucune façon; les mâles n'étaient guère entreprenants; beaucoup de mes femelles ne pondaient pas, et j'ignorais la plupart des pontes des autres, faute de surveillance. Ge n'est qu'à partir de 1894 que je me suis elïorcé de faire de mes Ghéloniens d'excellents reproducteurs, et que j'ai pris toutes les précautions nécessaires pour bien con- naître l'endroit où chaque femelle déposait sa ponte. OBSERVATIONS SUR QUELQUKS REPTILES DE l'INDRE 21 Toute l'année, sauf peodant les grands froids, les mâles sont en état de s'accoupler. J'ai vu des mâles fixés sur des femelles dans tous les mois de l'année, hormis pendant ceux de décembre et janvier. Bien entendu, durant la mauvaise saison les Tortues (jui hivernent dans le fumier ne s'accouplent pas ; mais dans les petits bassins d'hivernage, les accouplements ne sont pas rares en novembre et dans la seconde quinzaine de février. Chaque fois que l'on voit un mâle sur une femelle, il serait témé- raire de croire qu'on se trouve en présence d'un accouplement dans le sens propre du mot ; il y a beaucoup de tentatives d'accou- plement, mais la copulation est plus rare. Si, à chaque instant, le naturaliste qui est possesseur d'un grand nombre de Cistudes constate des accouplements, il ne lui est permis de voir que fort rarement la copulation véritable, qui a lieu au fond de l'eau ; et comme l'eau est bien plus souvent opaque et verte que claire, les amoureux échappent la plupart du temps à sa vue. Durant la belle saison, c'est ordinairement dans l'eau que le mâle chevauche sa femelle ; cependant, je l'ai vu se hisser bien des fois dessus quand cette dernière se promenait tranquillement sur terre. 11 est fort commun de rencontrer, dans le jardin, une femelle portant stoïquement un mâle sur'son dos et ne semblant pas trop gênée par ce surcroit de charge ; lorsqu'elle s'arrête, son cavalier applique son museau sur le sien, l'empêchant ainsi de sortir la tête hors de la carapace, ce qui lui rend les mouvements plus difficiles et souvent même l'immobilise. Pendant l'accouplement, il arrivait, malheureusement trop souvent, que des mâles, mais surtout des femelles, étaient noyés dans le grand bassin. Bientôt, sous la pression du gaz qui se formait dans le corps de l'animal, le cadavre remontait à la surface. Je uj'en emparais aussitôt et le disséquais. Maintes fois j'ai trouvé, au fond du grand bassin, des mâles et des femelles presque morts et ne faisant plus que quelques rares mouvements. Ils gisaient ainsi, les yeux fermés, la tête, le cou, les membres et la queue hors de la carapace. Il est bon de ne pas jeter ces bêtes, les croyant perdues. En pareille circonstance, je mets le moribond en cage, dans une chambre à température douce, et, la plupart du temps, j'ai le plaisir de constater que mon animal revient doucement à la vie ; après quelques jours, il est bien rétabli et assez fort pour être remis en liberté dans le jardin. De tous nos Reptiles de l'Indre, seul, le mâle de la Cistude d'Europe n'a qu'un pénis au lieu de deux; mais cet organe est 22 R. ROLLINAT déjà perfectionné, et, au lieu d'être un simple instrument de rap- prochement des cloaques, sans canal ni rainure, il porte, lui, énorme et noirâtre, une rainure sur laquelle coule le sperme pen- dant la copulation ; à l'état de repos, il est logé dans le cloaque. Comme chez nos autres Reptiles, les testicules sont situés à l'intérieur du corps, mais un peu plus rapprochés du cloaque que chez nos autres espèces ; ils ont ordinairement une forme ovale, ou sont parfois presque ronds ; ils mesurent? à 16 millimètres dans leur grand diamètre et 7 à 13 millimètres dans leur petit diamètre ; ils sont, chez les mâles très adultes, d'un beau jaune d'ocre, souvent assez foncé, à l'intérieur et à l'extérieur, ou, chez les individus plus jeunes, d'un blanc jaunâtre ; le plus souvent ces organes sont en travail et contiennent une grande quantité de spermatozoïdes plus ou moins bien formés. L'épididyme et le spermiducte, qui, de cha- que côté, correspondent avec chacun des testicules, sont recouverts de pigment noir, comme chez l'Orvet ; ils sont gonflés de sperme extrêmement riche en spermatozoïdes. Les spermatozoïdes de la Cistude ressemblent énormément à ceux des Lézards et de l'Orvet ; il sont à corps cylindro-conique un peu allongé et recourbé, et à appendice filiforme très fin et moins long que chez les Vipères et les Couleuvres. Les ovaires des femelles sont en travail pendant toute l'année, quoique cette espèce ne donne presque toujours qu'une seule ponte par an et qu'elle dépose ses œufs en une seule fois. Chez tous nos autres Reptiles, ce n'est qu'au début de la belle saison que les œufs pour l'année commencent à se développer d'une façon très appa- rente. Il n'en est pas de même de notre Tortue, car lorsqu'elle dépose sa ponte, ses ovaires sont déjà chargés de gros œufs ronds, jaunes, de différentes dimensions, destinés aux pontes futures. Une femelle, noyée le 28 juin par un mâle, avait aux ovaires des œufs jaunes, ronds, mesurant 7 à 10 millimètres de diamètre, qui se seraient développés l'année suivante, et beaucoup d'autres œufs plus petits, jaunâtres, blanchâtres ou incolores, selon leur taille, et qui constituaient la réserve pour les autres années. Dans ses oviductes, je trouve onze œufs de forme ovale, six à droite et cinq à gauche, entièrement formés, très gros et munis de leur enveloppe calcaire dure, sécrétée par la partie postérieure des organes ; le vitellus de chaque œuf est entouré d'albumen. Voilà donc une femelle noyée par un ou plusieurs mâles à une époque où les oviductes étant encombrés, l'accouplement ne pouvait être suivi d'aucun résultat utile. OBSERVATIONS SUR QUELQUES REPTILES DE l'iNDRE 23 Une femelle, noyée le 9 juillet, avait à ses énormes ovaires des œufs ronds de toutes les dimensions, les uns extrêmement petits, incolores, d'autres un peu plus gros et blanchâtres, puis d'autres encore plus gros et jaunâtres, et enfin de très gros œufs jaunes de 9 à 12"^™ de diamètre, ces derniers destinés à la ponte de l'année suivante et déjà très développés ; on voit que les ovaires des femelles de cette espèce sont continuellement en travail, même quand la bête est sur le point de pondre, puisque encore dans cette victime d'un mâle en rut qui n'avait rien à faire sur elle, je trouve, dans les oviductes, treize œufs à enveloppe duresur le point d'être pon- dus, sept à droite et six à gauche. Ainsi qu'on le verra plus loin, j'avais observé l'accouplement automnal de la Cistude d'Europe (1) ; depuis ce temps, j'ai constaté aussi l'accouplement pendant l'été. En 1901, quatre de mes femelles, qui avaient pondu en juin, déposèrent en juillet une seconde ponte qui, elle aussi, était fécondée ; il y avait donc eu accouplement, de suite après la première ponte de juin. Le 15 août 1899, une femelle est noyée par un mâle au moment de la copulation. Outre les petits œufs blanchâtres ou plus ou moins colorés qui constituaient la réserve pour les pontes futures, ses ovaires portaient des œufs jaunes dont les plus gros avaient 12 millimètres de diamètre, et qui étaient destinés à la ponte de 1900. Cette femelle avait pondu en juin ou juillet, car ses oviductes étaient épais, larges, énormes dans leur tiers postérieur, à l'endroit oii les œufs avaient séjourné pour prendre leur enveloppe dure. Dans son cloaque, je trouve une grande quantité de spermatozoïdes, ce qui prouvait qu'un accouplement très récent venait de se pro- duire ; aucun spermatozoïde n'avait eu le temps de remonter dans les oviductes, ainsi que me l'a prouvé l'examen microscopique de ces organes. Le même jour, une seconde femelle était noyée par un mâle. Aux ovaires, les plus gros œufs n'avaient que 10 millimètres de dia- mètre ; les oviductes étaient dans le même état que ceux de la femelle précédente et ne contenaient rien. Dans le cloaque, il n'y avait pas de spermatozoïdes, ce qui semble démontrer que les mâles ne copulent pas avec des femelles mortes sous eux avant que l'acte intime ne soit perpétré. L'année suivante, le lo août également, j'eus une femelle noyée par un mâle au moment de la copulation, car je trouve dans son (1) Raymond Rollinat. — Sur l'accouplement automnal de la Cistude d'Europe. Bulletin de la Société Zoologique de France, XXIV, 1899. 24 R. ROLLINAT clonque et à l'extrémité postérieure des oviductes un très graod nombre de spermatozoïdes. Les oviductes et les ovaires étaient dans le même état que ceux des femelles précédentes, mais les gros œufs jaunes des ovaires n'avaient que 9 millimètres de diamètre. Dans une autre femelle noyée quatorze jours plus tard, les gros œufs des ovaires avaient 13 millimètres de diamètre; le cloaque et la partie postérieure des oviductes contenaient aussi un grand nombre de spermatozoïdes. Le 24 août 1901, une de mes vieilles femelles portant le numéro vingt et que j'avais depuis bien des années dans mon jardin, a été noyée par un mâle, la veille probablement, car je trouve son cadavre gonflé, flottant à la surface de l'eau du grand bassin. Cette Tortue a certainement été noyée par un mâle au moment de la copulation ainsi que l'indique l'examen microscopique de ses organes. Dans le cloaque, je trouve un très grand nombre de spermatozoïdes. La vessie est à demi remplie d'urine claire et d'urine caséeuse, et dans cette urine, qui rougit rapidement le papier de tournesol, je trouve, à ma grande surprise, une énorme quantité de spermatozoïdes. Les sacs à eau sont à peu près vides; ils ne contiennent qu'une boue épaisse, verte, composée d'algues microscopiques qui se dévelop- pent dans l'eau du grand bassin ; dans cette boue verte, qui ne rougit pas le papier de tournesol, je trouve beaucoup de sperma- tozoïdes. Les ovaires sont énormes et portent un très grand nombre d'œufs ronds, les uns très petits, incolores ou blanchâtres, les autres plus gros, jaunes, dont les plus développés ont 13 milli- mètres de diamètre et auraient constitué la ponte de l'an prochain ; ces derniers sont au nombre d'une douzaine. Il y a aussi aux ovaires d'autres œufs jaunes, assez gros, ayant quelques milli- mètres de moins que ceux qui auraient constitué la ponle de l'an prochain, et qui sont aussi en voie de développement. Les ovi- ductes, allongés, larges, blanchâtres, à parois épaisses dans leur tiers postérieur, sont à parois plus minces dans leur tiers moyen et dans leur tiers antérieur où ils forment de nombreux replis ; dans la partie de ces organes qui avoisine le cloaque, je trouve de très nombreux spermatozoïdes. Après la mort de cette femelle, les sper- matozoïdes ont donc envahi la partie postérieure des oviductes, ce qui est normal, et les sacs à eau et même la vessie où leur présence était inutile; tous sont intacts, mais immobiles et semblent morts, ce qui n'a rien de surprenant, la femelle devant être noyée de la veille. Le 4 septembre 1899, un mâle et une femelle se noient pendant OBSERVATIONS SUR QUELQUES REPTILES DE L INDRE ZO la copulation. En faisant l'exploration du cloaque de la femelle au moyen d'une curette, j'en retire une certaine quantité de sperme très riche en spermatozoïdes ; j'ouvre les oviductes, où je constate que les spermatozoïdes n'ont pas encore commencé à s'introduire; les gros œufs des ovaires ont lo'"'" de diamètre. Le 8 octobre 1898, une de mes plus anciennes femelles, portant sur son plastron le numéro deux, et d'ailleurs facilement recon- naissable à son bouclier fortement déformé et relevé vers ses bords postérieurs, est noyée pendant la copulation. Le 30 juin précédent, j'avais vu celte femelle déposer une ponte de huit œufs. Son cloaque est rempli de sperme, et des spermatozoïdes ont déjà commencé à s'introduire dans l'ouverture des oviductes, mais ils n'ont pas eu le temps de remonter dans ces organes, car je n'en trouve aucune trace dans toute leur longueur. Ses ovaires sont très développés, énormes; le droit porte quatre gros œufs jaunes mesurant IG"^"^ de diamètre, et le gauche, cinq de même grosseur; ces neufs œufs auraient composé la ponte de l'année suivante. De nombreux œufs, d'un jaune plus clair et ayant un diamètre de 6 à 10""", avoisinent les gros œufs ; enfin, une énorme quantité d'œufs incolores ou blanchâtres, les uns extrêmement petits, les autres ayant de 1 à 5mm de diamètre, formaient une réserve immense pour les pontes futures Le 25 octobre 1897, une femelle noyée par un ou plusieurs mâles a résisté jusqu'au bout, car je ne trouve pas de spermatozoïdes dans son cloaque ou ses oviductes. Aux ovaires, les gros œufs ont 3mm de diamètre. L'évolution des œufs, jusqu'à leur arrivée à maturité, est donc fort longue chez cette espèce, et on peut dire, ainsi que je l'ai signalé plus haut, que les ovaires sont continuellement en travail, sauf peut-être pendant les grands froids, alors que les manifesta- tions vitales sont très ralenties. Je n'ai pas eu de mort à déplorer parmi mes Tortues pendant la mauvaise saison, les femelles ne se laissant pas noyer par les mâles dans les petits bassins d'hivernage (1). Mais le 14 novembre 1898, une malheureuse femelle était noyée si je n'étais venu à son secours. C'était la femelle numéro huit, qui, autrefois, avait été prise dans la glace d'un petit bassin d'hivernage et avait eu le bouclier for- (1) Je venais de terminer mon manuscrit, lorsque le 30 octobre 1901 la femelle numéro vinj,'t-deux fut noyée par un mâle dans un des petits bassins d'iiivernage. Cette femelle, qui, chaque année, pondait au même endroit d'une allée du jurdin, était une de celles auxquelles jej tenais le plus. 26 B. ROLLINAT tement endommagé à coups de pioche, lorsque mon domestique était venu briser la glace, l'enlever et remplir à nouveau le bassin, ce qu'il avait oublié de faire depuis plusieurs jours, malgré mes recommandations. Cette Tortue, qui vit encore aujourd'hui, c'est-à- dire à la fin de 1901, ne manquait pas de me donner une ponte chaque année. En 1898, elle avait pondu dans les premiers jours de juillet, car à cette époque j'avais touché les œufs à coque dure qu'elle avait dans les oviductes ; mais sa ponte fut perdue pour moi, car elle la déposa dans un endroit où on ne la vit pas creuser son trou. Le 14 novembre suivant, je trouve cette femelle presque morte dans un petit bassin en ciment situé à quelque distance du grand bassin et que je n'avais pas encore fait vider et recouvrir pour l'hiver. Je retirai du cloaque de cette femelle en prenant les précautions nécessaires pour ne pas la blesser, du sperme très riche en spermatozoïdes, prouvant que cette bête avait été presque noyée pendant la copulation. C'est à peine si cette malheureuse Tortue faisait encore quelques mouvements. Je la mis en cage, et quelques jours après elle était complètement revenue de ce com- mencement d'asphyxie. En mars, quoique ayant constaté de très nombreux accouplements, je n'ai eu aucune perte dans le grand bassin ; mais, en avril, que de catastrophes ! En 1893, j'eus en quelques jours six femelles noyées par de nombreux mâles en rut. Pendant ce mois, les gros œufs des ovaires sont un peu plus gros qu'en octobre. En mai, malgré de nombreux accouplements, je n'ai eu aucune perte parmi mes femelles. C'est dans l'eau claire, en mars ou avril, quand le bassin vient d'être nettoyé, qu'il est le plus facile d'observer l'accouplement. L'eau devenant verdàtre au bout de quelques jours, on ne voit plus le fond du bassin, et il faut renouveler le liquide. Pour cette opération, toutes les Tortues adultes sont enlevées du jardin et placées dans une petite cour. Je fais le recensement de mes bêtes ; je marque à nouveau celles dont le numéro d'ordre va disparaître ; en mai, juin ou juillet, je passe l'index de chaque main entre les membres postérieurs des femelles et l'endroit où, de chaque côté, le bouclier vient se souder au plastron, et je touche les œufs durs que con- tiennent les oviductes, me rendant compte ainsi des femelles qui vont pondre dans les jours qui suivront. Pendant ce temps, je fais vider, nettoyer et remplir le bassin. A peine les animaux sont-ils remis à l'eau, que quelques mâles viennent rôder autour des femelles, les touchent de leur museau, et, vivement, se placent sur OBSERVATIONS SUR QUELQUES REPTILES DE l'iNDRE 27 leur dos, en fixant les ongles de leurs quatre membres sous les bords libres du bouclier des femelles ; parfois la femelle observe le manège du mâle, et, au moment où celui-ci va se fixer sur son dos, elle exécute une volte rapide et l'esquive adroitement ; mais le plus souvent le mâle réussit à se placer sur la femelle. Le plastron concave du mâle s'applique sur le bouclier convexe de la femelle; le mâle tend le cou, recourbe sa tête à angle droit et applique l'extrémité de son museau sur celui de sa compagne qu'il force à conserver la tête et leçon dans la carapace: la queue du mâle s'abaisse et s'applique sur la partie postérieure du bouclier de la femelle; le mâle remue presque continuellement les mâchoires d'un mouvement régulier et caresse de ses mandibules le museau de la femelle ; si celle-ci, après de violents efforts, arrive à dégager sa tête et à allonger le cou, immédiatement le mâle lui applique des coups de ses mandibules dures et tranchantes : j'ai vu des femelles ayant les parties supérieures de la tête déchirées, ensanglantées par suite de morsures réitérées ; de son côté, la femelle cherche à se défendre du mâle au moyen des ongles de ses membres antérieurs, avec lesquels elle blesse souvent les côtés de la tête et du cou de son persécuteur. De nouveau, la tête de la patiente a disparu dans la carapace, où elle est maintenue par le museau du mâle ; des minutes, des heures passent ainsi ; de temps à autre, le mâle se secoue rapidement de droite et de gauche, et on entend parfaitement le bruit que produisent les chocs répétés du plastron du cavalier sur le bouclier de sa monture. Enfin, la femelle se livre et ne fait plus aucun mouvement. Le couple reposant au fond du bassin, le mâle écarte un peu les membres de devant et lâche ainsi la partie antérieure du bouclier de la femelle; il porte sou corps en arrière, toujours maintenu par les ongles de ses pattes posté- rieures aux bords postérieurs du bouclier de la femelle, abaisse encore sa queue et introduit son pénis dans le cloaque de sa com- pagne. 11 reste ainsi assez longtemps, immobile, la partie antérieure du corps soulevée, les pattes de devant écartées, lâchant même des membres postérieurs le bouclier de sa femelle, qui, elle, a la tète à moitié hors de sa carapace. J'ai surpris des animaux dans cette posture, mais rarement, car les préliminaires de la copulation durent longtemps, et il n'est pas rare de voir un mâle rester pendant plusieurs jours sur la même femelle et se laisser porter par celle-ci dans le jardin, lorsqu'elle peut parvenir à sortir du bassin, surmon- tée de son cavalier; je crois que la nuit ne les sépare pas, car certains soirs j'ai vu des mâles chevauchant des femelles à une 2» R. HOLLINAT heure fort avancée. La copulation n'a lieu que dans l'eau; je l'ai déjà dit plus haut. Le pénis du niàle gonfle sans doute dans le cloa- que de la femelle, car il m'est arrivé une fois, en mars, de retirer deux amoureux du bassin, et, tenant le mâle dans la main, de balancer la femelle fixée par le cloaque à la verge de celui-là, sans que les animaux se désunissent; remis à l'eau, ils ne tardèrent pas à se séparer. Très souvent, un ou plusieurs mâles en rut viennent se super- poser sur le dos du mâle fixé sur la femelle longtemps avant la copulation; j'en ai vu jusqu'à trois; parfois même l'un deux, dans sa folie génésique, se place la tête du côté de la queue du mâle qui esl sous lui ! Les mâles en rut n'hésitent d'ailleurs pas à se chevaucher, et il arrive que l'un d'eux se noie. Il est certain que ces noyades de mâles ou de femelles ne doivent se produire que très rarement à l'état sauvage, l'animal qui est dessous ayant plus de prise sur le fond d'une mare ou d'un étang que dans un bassin en ciment, aux parois glissantes, dans lesquelles cependant il a été tracé des sortes de gradins ou de marches facili- tant la sortie des Tortues. Il est évident que si mon grand bassin était plus long, plus large tout en ayant la même profondeur qu'actuellement; si, au lieu d'être en forme de cuvette, il avait la coupe d'un immense plat, les Tortues chargées d'un ou plusieurs mâles en sortiraient plus facilement. J'ai eu maintes fois l'idée de le faire démolir et établir à nouveau dans de meilleures conditions pour mes Cistudes, car rien ne me navre comme de trouver morte une bête qui, la veille, pleine de vie et de santé, venait franchement vers moi manger dans ma main. Et que de souvenirs lointains rappellent en moi certaines de ces vieilles Tortues, plus observées que d'autres par suite d'une ano- malie du bouclier qui me permettait de les reconnaître facilement sans avoir besoin de les renverser afin de lire le numéro d'ordre qu'elles portaient sur leur plastron ! En dehors des noyades, les cas de mort sont extrêmement rares parmi mes Ghéloniens adultes. Voici le résumé de mes cahiers de notes en ce qui concerne l'accouplement de la Cistude ; bien entendu, en disant accouple- ment ce n'est pas de la copulation véritable que je veux seulement parler, et qui, chez cette espèce, n'est pas toujours la conséquence de l'accouplement, mais aussi du fait de voir un ou plusieurs mâles fixés sur une femelle ou sur un autre mâle : OBSKRVATIONS SUR QURLQURS REPTILES DE l'iNDRR 29 En décembre et janvier, pas d'accouplements. En février, quelques accouplements dans les petits bassins d'hivernage. Ayant aménagé deux fois le grand bassin vers la fin de ce mois, par suite de beaux jours exceptionnels, j'ai constaté d'assez nombreux accouplements ; j'ai même vu une fois trois mâles s'agiter fortement sur une même femelle, que j'ai dû délivrer pour éviter un malheur. En mars, dans les petits bassins, et aussi dans le grand que j'aménage ordinairement à cette époque, beaucoup d'accouple- ments, même quand le froid revient, et alors les bêtes s'accouplent surtout dans les petits bassins. En avril, très nombreux accouplements dans le grand bassin. En mai, toujours des accouplements, mais moins nombreux que pendant le mois qui précède. En juin, époque où la ponte bat son plein, les accouplements sont ordinairement un peu plus rares, mais on en voit encore, et il en est de même en juillet, mois pendant lequel la période de la ponte prend fin. En août, les accouplements sont très nombreux, sauf pendant les grandes chaleurs, qui fatiguent les animaux. Les accouplements sont encore nombreux en septembre et octobre, mais en novembre on en voit beaucoup moins, et en décembre plus du tout. A lire cette nomenclature, on pourrait croire que la copulation est souvent répétée chez cette espèce ; mais il s'en faut de beaucoup que les femelles se livrent toujours après les premières tentatives des mâles : une femelle de forte taille, portant le numéro onze sur son plastron, était depuis plusieurs semaines tracassée par les mâles et en portait continuellement un sur le dos ; au moyen d'une curette, j'explore le cloaque de cette femelle et je n'y trouve aucun spermatozoïde; plus tard, elle fut noyée par des amoureux trop tenaces. J'ai la certitude qu'il y a copulation parfois dès le mois de juin et en juillet, de suite après la ponte, mais le plus souvent d'août jusqu'en novembre, et ensuite au début des beaux jours et au printemps, ainsi que je l'ai constaté en assistant à cet acte ou en disséquant des femelles noyées. Je ne puis dire si la même femelle se livre plusieurs fois au coït entre la ponte qu'elle vient de déposer et celle de l'année suivante; je le crois, sans pouvoir l'affirmer. Chaque mâle peut s'accoupler avec plusieurs femelles. Notre Gistude est un être pacifique et doux. Les femelles ne se 30 R. ROLLINAT battent presque jamais. Quant aux mâles, ils ne sont dangereux que pour les femelles, auxquelles ils font souvent des blessures à la tête au moment de l'accouplement; cependant, il m'est arrivé d'assister plusieurs fois à de véritables batailles. Un matin de juin, un mâle était fixé sur une femelle ; un autre mâle, en rut lui aussi, vint nager autour du couple, attaqua le premier occupant et se mit à lui appliquer de vigoureuses morsures au cou, sur les pattes et la queue; l'amoureux, rendu furieux par cette agression, lançait des coups de mâchoires à son adversaire, et cela avec une rapidité extraordinaire chez une Tortue ; enfin, le nouveau venu, voyant qu'il ne pouvait prendre la place du premier mâle, se fixa tranquil- lement sur son dos, de sorte que la malheureuse femelle portait deux mâles superposés ! Le 10 août, par une forte pluie, je trouve deux mâles se battant avec acharnement dans une des allées du jardin. Ils se portaient des coups de mandibules, mais mordaient toujours le bord antérieur du bouclier, chacun des adversaires rentrant brusquement la tête dans la carapace dès qu'il voyait arriver le coup ; le combat dura longtemps, sans aucun dommage pour les adversaires. J'ai arraché des griffes d'un mâle furieux, une femelle déjà grièvement blessée à la tête à coups de mandi- bules ; le mâle ne voulant pas lâcher prise, j'ai été obligé de lui écarter les pattes l'une après l'autre. Maintes fois j'ai enlevé dei femelles à l'étreinte de mâles qui, solidement fixés sur leur dos, leur blessaient la tête à coups de mâchoires; ces mâles étaient tellement habitués à être manipulés, qu'aussitôt remis à l'eau ils allaient se fixer sur une autre femelle ou sur un mâle. Une distri- bution de viande hachée ou d'Escargots occasionne souvent une bataille entre plusieurs animaux, sans distinction de sexe. Ponte. — Lorsqu'on ouvre dans le sens de la longueur le long cloaque de la Gistude femelle, l'animal étant sur le dos, on y voit l'orifice de plusieurs organes, auxquels il sert d'appareil excréteur. Tout au fond se trouve l'ouverture de l'extrémité du rectum, c'est- à-dire l'anus ; un peu plus bas, de chaque côté de l'anus, deux renflements représentent l'ouverture des oviductes ; toujours un peu en avant de l'anus, et cette fois sur la ligne médiane, on voit l'ouverture de l'urèthre, faisant communiquer le cloaque avec la vessie urinaire, qui contient souvent une certaine quantité d'urine claire, mais acide et qui rougit le papier de tournesol, ou d'urine caséeuse, épaisse et jaunâtre, qui le rougit également. Plus bas que l'ouverture des oviductes, à quatre centimètres environ de l'orifice du cloaque, on rencontre deux larges ouvertures mettant le cloaque OBSERVATIONS SUR QUELQUES REPTILES DE l'iNDRE 31 en communicalion avec les deux vessies accessoires, ou vessies lombaires, ou poches cloacales, véritables sacs à eau, qui, au moyen d'un jeu de muscles, s'élèvent ou s'affaissent, s'emplissant d'eau ou la rejetant à l'extérieur par la voie du cloaque. Si l'on introduit, au moyeu d'une seringue, par l'ouverture du cloaque, une assez grande quantité d'eau, les sacs se gonflent démesurément et deviennent énormes. L'ouverture qui fait communiquer chacune de ces poches avec le cloaque est tellement large, qu'on peut, avec une pince, pendant la dissection, faire passer la poche par celte ouverture et la retourner comme on ferait d'un doigt de gant, sans rien déchirer. Ces vessies accessoires existent aussi chez les mâles oîi elles semblent cependant moins développées. Elles servent d'ap- pareil d'hydrostatique aux animaux des deux sexes, l'eau qu'elles contiennent servant de lest. En disséquant des Gistudes, j'ai trouvé ces poches pleines d'eau claire, lorsque les animaux vivaient dans l'eau propre, et remplies d'eau verdâtre, quand celle du bassin avait la même coloration ; parfois ces sacs à eau étaient tapissés d'algues micros(;opiques, à tel point qu'ils apparaissaient verdàtres par transparence, dès que la Gistude était ouverte. Le liquide contenu dans les sacs à eau ne rougit pas le papier de tournesol. Quand la Tortue nagea la surface de l'eau et qu'elle veut plonger rapidement et se maintenir au fond, elle doit remplir ses sacs à eau, ce qui la charge d'autant, puisque cette eau prend la place vide à l'intérieur du corps et refoule les viscères. Lorsque les sacs sont pleins, les flancs sont moins creux, assurément, mais l'aug- mentation de volume ne se fait pas d'une façon sufTisante pour empêcher l'animal d'augmenter sa densité, puisque les viscères sont aussi refoulés vers l'intérieur; donc, en augmentant le volume de ses flancs, la Tortue ne gagne rien en densité, mais puisque cette augmentation du volume extérieur est moindre que le volume de la quantité de liquide emmagasinée, elle bénéficie du poids d'eau nécessaire au refoulement des viscères avoisinants. Quand la bête veut remonter, elle vide ses sacs à eau ; la pression devient moindre sur les viscères, et, quoique les flancs diminuent un peu de volume, la densité de l'animal diminue quand même et la Tortue remonte à la surface, tout en s'aidant, bien entendu, de ses membres palmés, qui lui permettent de nager avec la plus grande facilité. Je crois que les sacs à eau ne sont pas continuellement employés comme appareils permettant à l'animal de s'enfoncer dans l'eau ou de remonter à la surface, et que le plus souvent les membres seuls suffisent à ce déplacement. 32 n. ROLLINAT Mais si les sacs à eau ne sont pas toujours utilisés comme appa- reils d'hydrostatique, ils sont d'un très grand secours à la Cistude femelle lorsqu'elle veut déposer sa ponte. Lorsque mes femelles veulent pondre, elles deviennent inquiètes, et pendant deux ou trois jours elles se promènent dans le jardin, cherchant un endroit propice au développement de l'embryon. Avec leurs quatre pattes, elles grattent la terre, se tournent et se retour- nent, formant de larges excavations roudes ayant le diamètre du corps de l'animal et une profondeur d'un centimètre à peine. Si à ce moment on saisit une de ces Tortues, elle lâche aussitôt par le cloaque une invraisemblable quantité de liquide. On est étonné de voir sortir autant d'eau, et il est évident que la bête cherche à se débarrasser du liquide qui distend ses sacs et la gêne un peu dans les mouvements qu'elle fait pour redevenir libre ; si on la met en liberté, elle ne tarde pas à se rendre dans un bassin pour y puiser, par le cloaque, une nouvelle provision d'eau. Le 14 juin, une de mes Tortues a choisi sa place et gratte la terre pour commencer le trou dans lequel elle déposera ses œufs ; ayant rencontré une grosse pierre, presque dès le début de l'opération, elle abandonne la place ; elle n'a pas encore lâché une goutte d'eau. Je fais apporter une cuvette et je place la bète au-dessus. Elle commence aussitôt à vider ses sacs, et je l'aide en passant les doigts entre ses cuisses et les bords libres de sa caparace et en exerçant une légère pression. Le liquide recueilli rougit très légère- ment le papier de tournesol. Il est certain que l'urine contenue dans la vessie a été expulsée en même temps que l'eau des sacs, et c'est ce qui produit cette réaction légèrement acide. Je place la Tortue dans un bassin. Elle remplit promptement ses sacs à eau, car une demi-heure après elle vient creuser son trou à quelques centimètres de l'ébauche du premier ; une heure après, un gros tas de boue montre que les sacs à eau ont été remplis à nouveau et leur contenu utilisé. Le 20 du même mois, je prends une autre Tortue qui cherche un endroit où déposer sa ponte et je lui fais vider le contenu de ses sacs dans une cuvette ; le liquide était verdâtre et avait été pris par cette femelle au grand bassin dont l'eau présentait en ce moment la même coloration. Ce liquide ne rougissait pas, même légèrement, le papier de tournesol ; la vessie, certainement vide d'urine, n'avait rien fourni. Quand l'animal a ses sacs remplis d'eau, il n'attend pas que sa vessie soit pleine d'urine pour creuser son trou ; il se contente OBSERVATIONS SUR QUELQUES REPTILES DE l'iNDRE 33 d'utiliser l'eau des sacs. Mais je crois que si à ce moment la vessie est pleine de liquide, celui-ci est aussi utilisé. D'ailleurs, lorsqu'on prend, avant qu'elle n'ait eu le temps de se rendre à un bassin, une Tortue qui vient de pondre, on constate que ses sacs à eau et sa vessie sont absolument vides, car malgré la pression qu'on peut exercer sur ses flancs au moyen des doigts, il est impossible de lui faire rendre de l'eau ou de l'urine. C'est dans l'après-midi que la Cistude qui veut pondre cherche l'endroit favorable, et qu'elle trace sur le sol les ronds dont j'ai parlé plus haut. Il lui arrive de choisir définitivement un terrain plat, mais le plus souvent elle aime à avoir la partie antérieure du corps légèrement relevée, ce qui lui permet d'allonger plus facile- ment ses membres postérieurs et de faire ainsi un trou plus profond. Les endroits gazonnés lui plaisent, et dans mon jardin, pourtant assez grand, j'ai compté jusqu'à une dizaine de pontes dans l'espace d'un ou deux mètres carrés ; et chaque année il en est ainsi sur cette minuscule pelouse, lieu de prédilection des Chéloniens en gésine. Une différence de niveau telle que la jonction d'une partie gazonnée et d'une allée, cette dernière étant un peu en contre-bas ; une petite bordure de Buis limitant un carré, suffi- sent à lui élever la partie antérieure du corps. Toutes les pontes de mes Cistudes, sauf une qui se développa quand même, mais plus lentement, ont été déposées par les femelles dans la partie du jardin exposée au sud-est, au sud et au sud-ouest. Chaque année, la partie la plus chaude du jardin est seule occupée par les pontes. Dans la soirée, de trois heures et demie à huit heures, mais géné- ralement vers cinq, six ou sept heures, la femelle ayant choisi sa place couimeuce à creuser le trou qui doit recevoir ses œufs. Les membres postérieurs, aux ongles robustes, travaillent seuls alors, et je n'ai jamais constaté le rôle attribué à la queue, par certains auteurs, dans la confection du trou. Bien campée sur ses membres antérieurs, la tête à peine hors de la carapace, la Tortue travaille activement de ses pattes de derrière. Une légère excavation, sorte de cuvette ovale peu profonde, est d'abord creusée ; puis un peu d'eau s'échappe du cloaque et vient détremper la terre. Jusque-là, la femelle a travaillé souvent avec ses deux pattes à la fois ; désormais, chaque membre sera utilisé alternativement jusqu'à l'achèvement du trou. Les ongles d'un des membres postérieurs arrachent au terrain, maintenant humide, quelques parcelles de terre, qui sont déposées près de 1 ouverture du trou ; puis c'est l'autre membre qui. Mém. Soc. Zool de Kr., 1902. 34 R. ROLLINAT à son tour, vient enfoncer ses ongles dans le sol et continuer l'ou- vrage. L'orifice du trou se dessine de plus en plus, et à environ un centimètre de profondeur, la mesure étant prise du fond de la cuvette, la bête commence à excaver le sol en dessous de la surface, en imprimante chacun de ses membres postérieurs un mouvement demi-circulaire. Chaque patte retire son chargement de terre ; les sacs à eau se vident par le cloaque au fur et à mesure des besoins, et leur contenu détrempe de plus en plus le sol ; bientôt, deux petits tas de boue, qui finissent par se rejoindre en arrière, occupent les côtés de l'ouverture du trou. Alternativement, chaque patte de derrière travaille et vient déposer son chargement ; la queue pend parfois dans le trou et se couvre de boue, ainsi que les membres en action et la partie postérieure du plastron. Dans un terrain très meuble, et cependant assez solide pour qu'il n'y ait pas d'ébou- lements, ce travail peut ne durer qu'une demi-heure à trois quarts d'heure ; mais dans un terrain un peu ferme, il dure une, deux, ou même trois heures. Le trou, rond ou légèrement ovale, a maintenant les dimensions nécessaires au logement des œufs ; les membres, en s'allongeant, ne touchent plus de leurs ongles ses parois et ne ramènent plus de terre; la Tortue se rend compte ainsi que la première partie de son œuvre est achevée, et elle prend quelques instants de repos. Comme chaque patte introduite dans l'ouverture a travaillé seule en attendant que l'autre la remplace, l'ouverture du trou est beau- coup moins grande que le diamètre intérieur; elle a ordinairement cinq centimètres de diamètre environ. La Tortue fait un mouvement de tête vers l'intérieur de la carapace; elle fait un efiort ; le cloaque se gonfle démesurément, et un œuf, d'une blancheur immaculée, apparaît et sort rapidement. La bète a porté une de ses pattes postérieures près de son cloaque ; cette patte reçoit l'œuf, l'accom- pagne au fond du trou et le met soigueusement à la place qu'il doit occuper. Après un court espace de temps variant entre une minute et quelques secondes et quatre minutes, pendant lequel la Tortue emmagasine l'œuf fraîchement pondu en se servant d'une ou de ses deux pattes postérieures alternativement, un second œuf est expulsé, reçu et accompagné au fond du trou par une patte et convenablement rangé par les deux. La ponte est parfois rapide ; j'ai vu une femelle déposer sept œufs en huit minutes ; par contre, d'autres femelles vident leurs oviductes en une demi-heure ou un peu plus. Les derniers œufs sont touchés plus longuement que les premiers ; la femelle se rend parfaitement compte du peu de place OBSERVATIONS SUR QUELQUES REPTILES DE l'iNDRE âo dont elle dispose et elle tient à ce que tous ses œufs soient bien abrités. Les œufs se succèdent; quelquefois l'un d'eux, échappant à la patte qui doit le recevoir, tombe dans le trou, et le bruit du choc de sa coque sur celle du voisin est très perceptible. Bientôt la ponte est terminée ; le dernier œuf est touché encore plus longue- ment que les autres, et la femelle allongeant un de ses membres postérieurs, ramène avec ses ongles, vers l'orifice du trou, les premières parcelles de terre boueuse qu'elle tasse lentement sur ses œufs ; l'autre membre s'allonge, ramène de la boue et fait de même. Longuement, lentement, avec mille précautions ce manège se répète, et vers la fin de l'opération, quand le trou est déjà entiè- rement ou en grande partie bouché, les deux membres postérieurs s'allongent en même temps, se rejoignent, ramènent encore de la terre, tassée fortement du dessus et du dessous des pieds; et ce travail continue pendant de longs moments. Enfin, le trou est fermé; le sol a repris son niveau, et la Tortue foule la terre en s'aidaut tou- jours de ses membres de derrière et même parfois de la partie postérieure de son plastron; le travail est alors terminé. Après quelques instants de repos, la Tortue regagne un des bassins et Jie s'occupe plus de sa ponte ; mais souvent, avant de partir, elle ramène encore, celte fois avec ses quatre pattes, quelques parcelles de terre ou d'herbes sur l'endroit où elle vient de déposer ses œufs. Il est impossible de fixer une moyenne pour le temps que met cette espèce à creuser son trou, pondre les œufs et fermer ensuite l'excavation. Telle femelle travaille rapidement, alors que telle autre met des heures, quoique venant opérer au même endroit. De plus, l'ouvrage se fait plus facilement dans un terrain meuble que dans un sol très dur, comme celui d'une allée, par exemple. Selon que le travail est plus ou moins facile à exécuter, et selon que la Tortue est plus ou moins active ou plus ou moins soigneuse, il faut de une demi- heure à trois heures pour ouvrir le trou, — la ponte, comme on vient de voir, se fait assez rapidement, — et de cinquante minu- tes à deux heures pour le fermer. Telle femelle partira de suite après l'achèvement de son travail, ce qui arrive généralement ; telle autre restera en place plusieurs heures ou même jusqu'au lendemain matin, ce qui est l'exception. Plus le terrain est meuble, plus la femelle a la partie antérieure du corps relevée, plus la ponte est creuse, car la bête établit alors plus prolondément sous sa partie postérieure une cuvette ovale, avant de creuser le trou proprement dit. Certains œufs du dessus, les derniers pondus, sont à sept centimètres de la surface du sol; 36 R. IlOLUNAT dans d'autres pontes, les mêmes œufs touchent presque la surface, surtout dans les pontes où les œufs sont très nombreux. Les œufs pondus les premiers, ceux du fond du trou, sont parfois à treize centimètres du niveau du sol. Le trou qui contient la ponte a de huit à neuf centimètres dans son grand diamètre horizontal, car il a souvent une forme très légèrement ovale ; sa profondeur est de six centimètres environ, mesurée sous la voûte formée par la terre ramenée sur les œufs et dont l'épaisseur plus ou moins grande les sépare de la surface. Notre Cistude pond de quatre à seize œufs en une seule fois, et il est rare qu'elle fasse une seconde ponte dans la même année. Sur cent pontes dont j'ai compté les œufs, il y avait : une ponte de quatre œ.ufs, cinq pontes de cinq œufs, neuf de six œufs, onze de sept œufs, vingt-et-une de huit œufs, vingt-cinq de neuf œufs, qua- torze de dix œufs, neuf de onze œufs, une de douze œufs, une de treize œufs, une de quatorze œufs, une de quinze œufs et enlin une de seize œufs. Eu fait de choses bizarres en ce qui conc'erne la poule, j'ai fait les observations suivantes : Une femelle creuse son trou en partie, puis quitte l'endroit subi- tement, se rend au bassin et revient ensuite achever son trou et pondre. J'ai remarqué assez souvent que dans les endroits où le sol était très dur, les femelles manquaient parfois d'eau : jeu ai vu, rarement il est vrai, abandonner leur trou deux jours de suite, et chaque fois ces femelles creusaient un nouveau trou à une petite distance du premier. Je les ai (jnelquefois aidées en versant, au moyen d'un petit arrosoir, un peu d'eau entre leurs pattes de derrière, de façon à bien détremper le terrain dans lecpiel elles travaillaient. Une autre fois j'ai observé une femelle qui, travaillant dans un terrain très friable, était continuellement gênée par des éboulements qui comblaient son trou ; elle creusa ainsi fort longtemps, et, découragée, n'ayant plus d'eau dans ses sacs, elle partit et revint le lendemain établir son trou à proximité de l'endroit où elle avait creusé la veille, mais où le terrain était heureusement un peu plus solide. Une femelle fait son trou le 9 juin et ne pond pas ; elle a cependant ses œufs dans les oviductes, car je les ai touchés lorsqu'elle s'en allait ; elle creuse un second trou loin du premier, le 10 juin, et y dépose sa ponte. Celte femelle était facile à reconnaître sans qu'on OBSERVATIONS SUR QUELQUES REPTILES DE l'iNDRE 37 ait besoin de la renverser pour constater son numéro d'ordre, car elle avait une de ses écailles vertébrales absolument anormale. Un jour, une femelle pond huit œufs sur la terre, près du grand bassin, sans faire de trou ; je la trouve à 20 centimètres de ses œufs et je suis étonné de son attitude: au moyen de ses pattes de derrière, elle semble combler un trou imaginaire, et elle travaille ainsi longtemps, consciencieusement. Je constate qu'elle a encore un œuf dans l'un des oviductes ; elle le pond le lendemain, près du bassin, toujours sans faire de trou. En 1897, les femelles qui, cette année-là, devaient pondre, avaient déposé leurs œufs ; une seule portait encore ses œufs dans les oviductes le 18 juin, ainsi que je l'ai constaté ce jour-là en touchant toutes les femelles, et par suite d'une déformation du bouclier elle était facile à reconnaître. Plusieurs autres femelles, je ne sais pour quelle cause, n'avaient pas déposé de ponte et ne devaient pas eu donner cette année-là. Donc, parmi toutes mes femelles, une seule, facilement reconnaissable, avait ses œufs dans les oviductes le 18 juin; elle pondit dans la soirée du 24 juin. Le même soir, je vis, à quelques mètres d'elle, une autre femelle creusant son trou, et j'en étais fort étonné, puisque j'étais certain qu'à ce moment une seule femelle, celle à carapace déformée, qui creusait son trou tout près de là, était seule en état de pondre. J'étais à observer la femelle qui, j'en étais certain, ne pouvait donner des œufs, puisque ses oviductes n'en contenaient pas ; elle creusait son trou selon toutes les règles de l'art ; les petits tas de boue furent formés et le trou creusé consciencieusement ; vers six heures, le travail, com- mencé vers quatre heures, était terminé et la bète se reposait; elle resta ainsi jusqu'à huit heures, et je la vis partir, sans qu'elle ait pondu et pris la peine de fermer son trou. Elle n'avait pas fait un mètre dans la direction du grand bassin, qu'elle était prise par moi et sérieusement examinée. Il me fut facile de constater que ses oviductes étaient absolument vides et ne contenaient pas un seul œuf. Quoiqu'elle ne fût pas en état de pondre, l'instinct de la reproduction et de la conservation de l'espèce l'avait il poussée à creuser son trou à l'époque où, normalement, elle aurait dû pondre? C'est la seule fois que j'ai vu pareil fait se produire chez les Reptiles, mais j'ai souvent constaté des allures bizarres de certaines femelles d'Oiseaux ou de Mammifères à l'époque où elles auraient dû pondre ou mettre bas. Toutes ces femelles atteintes d'aberration des fonctions génitales, qu'elles appartiennent aux Reptiles, aux Oiseaux ou aux Mammifères, éprouvent, c'est certain, des sensa- 38 R. ROLLINAT lions d'ordre physiologique plutôt qu'elles n'obéissentà de véritables sentiments maternels. J'ai vu des Tortues côte à côte, se touchant, faire leur travail, pondre leurs œufs et fermer leur trou sans se gêner et sans se battre. J'en ai vu venir faire leur trou exactement à l'endroit où une autre femelle avait déposé sa ponte, détruire un ou deux œufs, s'aperce- voir de l'erreur commise involontairement et cesser le travail ; d'autres, au contraire, qui ne semblaient pas s'apercevoir qu'elles brisaient des œufs en faisant leur trou, qui détruisaient la ponte et la remplaçaient tranquillement par leurs œufs. J'ai remarqué que plusieurs de mes Tortues pondaient chaque année presque exactement à la même place. Une femelle portant le numéro vingt-deux et reconuaissable à une coupure de la partie gauche du bouclier, pond tous les ans au milieu d'une allée, à quel- ques centimètres de l'endroit où elle a déposé sa précédente ponte. Une autre Tortue, à carapace déformée par suites de blessures, pond aussi presque toujours dans le même carré du jardin. D'autres femel- les, au contraire, pondent tantôt dans un endroit, tantôt dans un autre, mais constamment dans les parties les pluschaudesdu jardin. Il est fort rare qu'une femelle donne deux pontes dans l'année ; cependant, cela arrive de temps à autre. 11 y a quelques années, vers la tin de juillet, je fus très étonné de constater que j'avais dans mon jardin une ponte de plus que le nombre de mes femelles. Je crus qu'une Tortue avait été dérangée et qu'elle avait pondu en deux fois. Mais en 1901, j'ai bel et bien constaté une seconde ponte chez quatre de mes femelles. Le 29 juin 1901, toutes mes femelles, sans aucune exception, avaient pondu, et toutes leurs pontes étaient marquées; il n'y avait pas possibilité d'erreur. Le 6 juillet suivant, je trouve une femelle en train de creuser sou trou et qui déposa une ponte de onze œufs. J'ouvre cette ponte vingt jours plus tard : trois œufs n'étaient pas fécondés ; un œuf contenait un embryon mort depuis peu et sept œufs renfermaient chacun un embryon bien vivant qui se déve- loppait normalement. Le 10 juillet, une seconde femelle dépose une ponte de onze œufs que j'ouvre seize jours après; tous les œufs étaient fécondés, et, dans dix, j'ai trouvé un embryon vivant; un seul œuf contenait un embryon mort depuis quelques jours. Le 12 juillet, une troisième femelle pondit. J'ouvre le trou qua- torze jours plus tard et je trouve huit œufs qui contenaient chacun un embryon bien vivant. OBSERVATIONS SUR QUELQUES REPTILES DE L'iNDRE 39 La femelle qui avait eu autrefois le bouclier brisé à coups de pioche alors qu'elle était prise dans la glace d'un petit bassin d'hivernage, pondit cinq œufs le 12 juin 1901 ; j'ouvre le trou quarante-quatre jours plus tard et de chacun des œufs je retire un embryon vivant et déjà assez bien développé. Un mois plus tard, le 13 juillet 1901, cette même Tortue au bou- clier brisé vient creuser un trou à deux mètres environ de celui qui contenait sa première ponte, et elle y déposa onze œufs que j'ouvris treize jours plus tard : huit œufs étaient fécondés et conte- naient chacun un embryon qui se développait et dont on voyait battre le c(Pur; trois œufs, dont un plus petit que les autres, n'avaient pas été fécondés. Ces quatre secondes pontes m'avaient donné un total de quarante- et-uuœufs, dont trente-cinq étaient fécondés, ce qui est absolument normal. Je dois attribuer ces secondes pontes à la suralimentation de mes Tortues, nourries abondamment, cette année-là, de petits Poissons et d'Escargots. La Cistude d'Europe pond ordinairement en juin ; quelques rares femelles déposent leurs œufs en mai, alors que d'autres ne pondent qu'en juillet. Sur cent pontes déposées devant moi, deux l'ont été en mai, quatre-vingt sept en juin et onze en juillet. Une année, je ne me souviens plus laquelle, une de mes Tortues pondit le 28 mai; c'était avant 1895. En 1895, la ponte commença le 9 juin ; je n'ai pas noté quand elle prit fin. En 1896, elle commença le 4 juin et se termina le l»"" juillet; en 1897, elle commençait le 30 mai, pour se terminer le 24 juin; en 1898, elle commence le 10 juin et se termine le 12 juillet; en 1899, elle commença le 5 juin et se termina le 6 juillet; en 1900, com- mencée le 9 juin, elle était terminée le 2 juillet. En 1901, la ponte commençait le 6 juin, et toutes les femelles avaient pondu dès le 29 juin; mais cette année-là quatre femelles me donnèrent une seconde ponte du 6 au 13 juillet. Un hiver rigoureux, un printemps froid à son début n'influent pas sur l'époque de la ponte de cette espèce; mais si le mois de mai est froid, la ponte se trouve un peu retardée, comme en 1898, par exemple, où elle ne commença que le 16 juin. Développement de l'embryon, éclosion. — L'œuf de la Cistude d'Eu- rope est entièrement blanc ; sa coque est dure, comme celle de l'œuf des Oiseaux, et non souple, comme celle qui protège l'œuf des Lézards ou des Couleuvres ; il est de forme ovale, et il a parfois un bout très légèrement plus petit que l'autre ; mais beaucoup 40 R. ROLLINAT d'œufs ont les deux extrémités à peu près semblables. Il mesure trente-et-un à trente-huit et même trente-neuf millimètres de lon- gueur, et de vingt à vingt-deux millimètres de largeur. Au moment de la ponte, le vitellus a dix-sept à dix-neuf millimètres de dia- mètre; il est rond, jaune, sauf la tache germinative arrondie, blan- châtre, mesurant environ un millimètre à un millimètre et demi de diamètre ; l'albumen, qui entoure le vitellus et est en grande partie placé vers les pôles de l'œuf, est incolore, transparent, assez com- pact et moins fluide que l'albumen des œufs des Lézards. Le vitellus est fécondé au pavillon de Toviducte par les spermatozoïdes remontés jusque-là ; puis, dans la première partie de cet organe il est entouré d'albumen. C'est aussi dans l'oviducte que l'œuf prend sa forme ovale et est revêtu de ses enveloppes, dont la dernière, sécrétée par la partie postérieure de l'organe, forme la coque dure qui le protège. Au moment de la ponte, il n'y a aucune trace d'embryon. Lorsqu'une Tortue a déposé sa ponte, je place, dès le lendemain matin, à vingt centimètres de l'endroit où sont les œufs, un piquet portant une étiquette indiquant le numéro et la date de la ponte. J'ai dû employer ce moyen, car j'ai remarqué que l'embryon de cette espèce se développait fort mal et fort lentement lorsque la ponte était changée de place et mise dans une des boîtes de mon invention installées dans mon jardin et où je faisais éclore avec succès les œufs des Lézards et des Tropidonotes ; cela m'a même fait commettre autrefois une erreur grossière en ce qui concerne la durée du développement de l'embryon de la Cistude. J'ai aussi essayé d'employer la chaleur artificielle pour le développement de l'embryon de notre Tortue indigène ; malgré l'humidité entretenue dans la boîte d'incubation, les œufs ont été entièrement desséchés. Il faut donc laisser en place, dans l'endroit clos par la femelle, les œufs de la Cistude; mais à la lin du développement, lorsque le fœtus, très développé, est sur le point de briser sa coque, on peut prendre les œufs et les installer sans crainte dans une des boîtes d'éclosion destinées aux œufs des Lézards et des Tropidonotes, — ce qui permet d'observer facilement la naissance des petits Chélo- niens — , ou bien encore dans un pot d'éclosion. La boîte d'éclosion, en bois de chêne assez épais, est installée dans l'endroit le plus chaud du jardin. Elle n'a pas de fond et mesure 25 cm. de hauteur, 33 de largeur et 40 de longueur; elle est fermée, en dessus, d'un couvercle formé d'un cadre de bois sur lequel est tendue de la toile métallique; ce cadre est fixé à la boîte par deux charnières et se ferme au moyen de crochets ; le tout est peint en OBSERVATIONS SUH QUELQUES KEPïlLES DE l'iNDKE 41 vert, pour éviter la détérioration du bois et de la toile métallique. Je fais un trou dans la terre et j'y place ma boîte de façon à ce qu'elle dépasse le niveau du sol de (i cm. seulement ; puis, je la remplis de terre jusqu'au niveau du sol extérieur, et j'enfonce verticalement dans cette terre, à 6 cm. de chacun des côtés, quatre morceaux d'ardoise bien taillés et ajustés, et j'enlève la terre de l'intérieur de ce cadre à côtés d'ardoise, jusqu'à une profondeur de 7 cm. ; j'en- fonce alors verticalement et parallèlement aux petits côtés, un morceau d'ardoise qui sépare la cavité en deux parties égales, puis deux autres morceaux, toujours enfoncés dans le même sens, par tageant encore ces parties en deux ; j'ai donc ainsi quatre cases ne communiquant pas entre elles et dont je recouvre le fond d'une très mince couche de sable, pour que les petites Tortues ne se salissent pas au contact de la terre, dès leur sortie de l'œuf. Dans chaque case, je place les œufs que je viens de retirer du trou de ponte où les avait déposés la femelle, et je n'oublie pas d'emporter l'étiquette et de la fixer en arrière de la boîte en bois, au niveau de la case; quand quatre pontes sont ainsi installées, je recouvre les quatre cases d'une grande ardoise bien entière, sur laquelle je place une couche de terre de cinq centimètres environ; je ferme le couvercle de la boîte en bois, et, chaque fois que je veux voir ce qui se passe dans les pontes, je n'ai qu'à soulever ce couvercle, retirer la couche de terre, relever la grande ardoise, et j'ai alors devant moi les quatre cases et leur contenu. Le pot d'éclosion est plus simple, plus rapidement établi, mais ne permet d'observer qu'une seule ponte. Voici comment je l'amé- nage : Je prends un petit pot à boutures, en terre cuite, de six à sept centimètres de hauteur et j'en enlève le fond. Je creuse dans la terre un trou de 15 cm., au fond duquel je mets un morceau d'ardoise placé horizontalement. Le pot est mis sur l'ardoise du côté de son grand diamètre. Parle fond défoncé, les œufs sont introduits un à un dans le pot ; le fond détruit est remplacé par un petit mor- ceau d'ardoise, et la terre est ramenée sur le tout. L'étiquette est fixée à quelques centimètres en arrière du pot. Dans la boîte d'éclosion et dans le pot d'éclosion que je viens de décrire, les petits naissent très bien et il est très facile de les observer. Toutes les pontes ouvertes par moi ont été utilisées de suite entièrement, et je n'ai jamais pris un œuf ou deux, fermé le trou et recommencé plus tard à prendre d'autres œufs dans la même ponte pendant le développement de l'embryon. Les œufs étaient 42 R ROLLINAT toujours laissés en place tels qu'ils avaient été emmagasinés par la femelle; lorsque j'ouvrais le trou de ponte, j'utilisais les œufs jusqu'au dernier. Quant aux pontes qui étaient destinées à rester intactes jusqu'à la sortie de terre des jeunes, elles étaient, dès la fin de septembre, munies d'un entourage en bois de 12 centimètres de hauteur et formant un petit enclos rectangulaire de 40 centimètres de côté, solidement mis en place au moyen de piquets et de pointes. Lorsque les jeunes Cistudes sortaient de terre, je les trouvais toujours dans ce parc minuscule, dans lequel je plaçais parfois un très petit récipient plein d'eau, fort peu profond pour éviter la noyade aux jeunes Tortues. Ne pouvant circuler libreuient dans le jardin, elles n'allaient pas se noyer dans les bassins, et on ne pouvait, par mégarde, les écraser en marchant dessus. De plus, les Chats, qui n'auraient pas manqué de capturer ces toutes petites bêtes circu- lant dans le jardin, ne les touchaient jamais dans l'entourage en bois, où, cependant, il leur eut été facile de les prendre. Comme c'est suitout pendant l'été que se développe l'embryon de la Cistude d'Europe, je n'ai remarqué que fort peu de ditïérence, chaque année, dans l'époque de l'éclosion des jeunes ; cependant, dans les années où l'été est relativement très humide, l'embryon se développe plus lentement; j'ai eu des pontes, déposées vers le milieu de juin par des femelles, dont les petits ne sortirent de l'œuf qu'à la fin d'octobre et dans les premiers jours de novembre. Sous l'influence de l'humidité qu'ils absorbent par endosmose, les œufs sont gonflés, craquelés, la coque dure s'eflrite et ne laisse que l'enveloppe souple et parcheminée, un peu semblable à celle des œufs des Lézards et des Couleuvres ovipares, et qui se distend de plus en plus ; j'ai même vu des œufs éclater, se fendre d'un bout à l'autre et laisser en partie sortir le petit ; on trouve alors, vers la fin du développement, beaucoup de fœtus malades et ayant une sorte de boursouflure du cou, qui, presque toujours, cause leur perte. Mais ordinairement celte saison est belle et chaude dans nos contrées, ce qui permet à l'embryon de se développer norma- lement. Le 22 juin, j'ouvre une ponte déposée par une femelle six jours avant, le 16 juin rancune trace bien nette d'embryon; la tache germinative est seulement un peu plus longue. Une ponte déposée par une femelle le 10 juin, est ouverte par moi treize jours plus tard, le 23 juin. L'embryon, minuscule, allongé, incolore, un peu recourbé sur lui-même, mesure dix milli- OBSERVATIONS SUK QUELQUES REPTILES DE l'iNDRE 43 mètres de longueur. Au microscope, on voit très bien la tête, les yeux qui se forment, et, par transparence, la colonne vertébrale; on voit les mouvements du cœur, et le sang circuler. J'ouvre, le 17 juillet, une ponte déposée par une femelle quinze jours avant, le 2 juillet. L'embryon, incolore, mesure environ onze millimètres de longueur totale. La tête est assez grosse et on voit bien les yeux, légèrement noirâtres. C'est à peine si l'on com- mence à apercevoir trace de la carapace, des membres encore à l'état de bourgeons informes; la queue est bien visible. L'embryon repose sur le vitellus, très fluide. J'ai remarqué que la fluidité du vitellus et de l'albumen augmentait beaucoup pendant les premières semaines du développement de l'embryon, pour, en ce qui concerne le vitellus, diminuer par la suite et avoir à peu près la même con- sistance qu'au moment de la ponte, Dans d'autres pontes, ouvertes aussi le quinzième jour, j'ai trouvé des embryons de neuf millimètres seulement de longueur. Une ponte, ouverte à dix-neuf jours, me donne des embryons de douze millimètres. Une femelle pond le 6 juillet ; j'examine les œufs vingt-trois jours après, le 29 juillet. L'embryon, incolore, à tête énorme, aux yeux noirâtres, au cou gros, allongé, a une longueur totale de dix-huit millimètres; le bouclier mesure huit millimètres de longueur sur quatre de largeur ; la queue est longue de quatre millimètres; les quatre membres sont à l'état de moignons aplatis vers leur extré- mité ; le vitellus est encore considérable. Le 11 août, j'ouvre une ponte déposée par une femelle le 5 juillet, c'est-à-dire trente-sept jours avant. L'embryon se développe déplus en plus; son bouclier mesure déjà douze millimètres de longueur et neuf millimètres de largeur ; il est caréné et on commence à voir la forme des écailles. Le plastron est aussi formé, et l'embryon ne communique plus que par l'ombilic avec la masse vitelline, sur laquelle il se développe ; la queue a huit millimètres de longueur. Les membres sont assez bien formés ; la tête, très grosse propor- tionnellement au corps, et le cou ont neuf millimètres de longueur ; les yeux sont noirâtres, saillants et volumineux, A l'extrémité du museau, le cône caduc osseux, avec lequel la petite Tortue enfon- cera plus tard la coque qui l'emprisonne, commence à se développer; la bouche est formée. De chaque côté de la carène du bouclier, on voit très bien une série de raies formées par les côtes. Les em- bryons sont incolores ; mais le bouclier et les parties supérieures de quelques-uns commencent à prendre une teinte gris clair. Un des 44 H. ROLLINAT dix embryons de cette ponte était un peu moins développé que les autres. Une femelle dépose sa ponte dans la soirée du 12 juillet; je l'ouvre quarante-six jours après, le 27 'août. Il y avait huit œufs de grosseur ordinaire et un tout petit œuf blanc mat, à coque dure, mesurant dix-sept millimètres de longueur et treize millimètres de largeur ; ce petit œuf avait un vitellus entouré d'albumen, mais n'était pas fécondé. Chacun des huit gros œufs contient un fœtus assez développé, qui ouvre et ferme les yeux et s'agite lorsque je le retire de l'œuf. Le fœtus ne communique que par l'ombilic avec le vitellus, encore assez gros. En dessus, il est noirâtre, et est blan- châtre en dessous ; on voit très bien les écailles, dont les vertébrales et les costales sout légèrement granulées ; nulle apparence de la coloration jaunâtre de certaines parties. Le cône caduc se montre comme un point blanchâtre à l'extrémité du museau ; il est encore peu développé. Le fœtus est bien formé ; sa tête et son cou mesurent treize millimètres de longueur; sa queue a dix-sept millimètres; ses membres sont bien développés et les ongles, encore blanchâtres, se forment. Son bouclier a dix-sept millimètres de long et quinze de large. Le H août, j'ouvre une ponte déposée par une femelle cinquante- trois jours avant, le 19 juin. Il y avait onze œufs, dont un de la même grosseur que les autres, mais à coque molle analogue à celle des œufs des Tropinodotes et qui contenait quand même un fœtus bien vivant. Cet œuf n'ayant pas séjourné assez longtemps dans la partie des oviductes où la coque dure est sécrétée, n'était revêtu que de sa première coque molle lorsqu'il a été pondu ; je n'ai vu qu'un seul cas de ce genre sur un très grand nombre d'œufs. Un œuf de cette ponte contenait un fœtus un peu moins développé que les autres, et deux autres œufs, non fécondés probablement, ren- fermaient un vitellus en putréfaction. Les fœtus contenus dans les huit autres œufs étaient à peu près dans le même état que ceux de la ponte précédente, mais leur cône caduc avait déjà son extrémité aiguë et durcie. Une ponte, déposée par une femelle le 26 juin, est ouverte le 26 août, à soixante-etun jours. Deux œufs, peut-être non fécondés, contenaient une matière en putréfaction. Les neuf autres œufs renfermaient chacun un fœtus noirâtre, chez lequel la coloration jaunâtre de certaines parties commençait à se montrer; le fœtus, retiré des membranes qui l'enveloppaient, était bien formé et s'agitait vigoureusement. Son bouclier mesurait 23 mm. de Ion- OBSERVATIONS SUR QUELQUES REPTILES DE l'iNDRE 45 gueur et 19 mm. de largeur ; sa queue avait 22 mm., sa tète et son cou 15 mm.; ses quatre membres étaient bien développés; la masse vitelline était encore considérable; le cône caduc était moins dur que chez les fœtus de la ponte précédente ; les écailles étaient bien formées, les vertébrales et les costales très granulées. Une ponte est déposée par une femelle le 4 juillet ; je l'ouvre le 13 septembre, à soixaute-et-onze jours. Les neuf œufs de cette ponte contenaient chacun un fœtus bien vivant, très développé, mais ayant encore une certaine quantité de vitellus à résorber. Aucun des petits n'avait percé sa coque. Il arrive parfois, dans les bonnes anuées où la chaleur est favo- rable, que des petits, provenant de pontes déposées dès les premiers jours de juin, sortent de l'œuf à la fin d'août. D'un trou de ponte creusé par une femelle le 7 juin, je relire sept œufs le 25 août. J'ouvre trois de ces œufs et je trouve dans chacun d'eux un fœtus bien vivant, sur le point d'éclore et n'ayant plus qu'un peu de vitellus à l'ombilic. Je place les quatre autres œufs daus un pot d'éclosion, que je visite le 31 août : tout va bien; deux petits sont éclos quatre-vingt-cinq jours après la ponte et reposent sur les débris de coques; ils sont encore humides d'albumen. Les petits contenus dans les deux autres œufs ont défoncé leur coque et sortent par l'ouverture leur tête et leurs pattes de devant; ils quittent définitivement la coque le lendemain matin. Je les laisse dans le pot jusqu'au 20 septembre suivant et je les place alors dans un terrarium portatif. Ils sont très vigoureux, pèsent de six à sept grammes et ont tous leur cône caduc. Le bouclier du plus gros a 27mm (^e long et autant de large. Le bouclier des jeunes qui, au moment de la naissance, a une forme ovale, s'arrondit rapidement par suite du relèvement des bords, surtout au niveau des char- nières; mais ordinairement il est un peu plus long que large. En septembre, les éclosions sont nombreuses. Le 2 septembre, j'enlève du trou de ponte neuf œufs pondus le 22 juin. Un fœtus était mort daus la coque. Je place les huit autres œufs dans une des boîtes d'éclosion installées dans mon jardin. Un petit perce sa coque le il septembre et naît le 12, quatre-vingt-deux jours après la ponte. Le 12 septembre, trois petits ont percé leur coque en face de la tête et des membres antérieurs ; ils ont les yeux bien ouverts, et sortent la tête de temps à autre ; deux naissent dans la matinée du 13 et le troisième le 15. Deux petits ont défoncé leur coque le 13 septembre; un naît le 13, daus la soirée, l'autre ne sort de l'œuf que le 17. Deux petits percent leur coque le 15 septembre et naissent 46 R. ROLLiNAT le 17. Lorsque la petite Tortue sort de sa coque, elle porte souvent, à l'ombilic, quelques derniers vestiges de ses enveloppes fœtales, qui se résorbent assez rapidement, et la cicatrice ombilicale se forme. Les huit petites Cistudes pèsent chacune de cinq à six grammes; elles sont très vigoureuses. Dès le 20 septembre, les bords libres du bouclier sont relevés aux charnières, sauf chez quelques-unes, nées les dernières. Une femelle pond le 8 juin; j'ouvre le trou le 31 août et j'y trouve huit œufs. Un œuf contient un vitellus eu putréfaction. Sur les sept autres œufs, ou voit que cinq petits ont défoncé leur coque ; j'installe les sept œufs dans une de mes boîtes d'éclosion. En moins d'une demi-heure, quatre petits sortent de leur coque, — quatre- vingt quatre jours après la ])onte, — et se promènent ; le dernier sort le lendemain. Ils n'ont plus que quelques faibles traces des membranes fœtales sous forme d'un petit bourrelet rose à l'ombilic. S'ils n'avaient été enlevés du trou de ponte et troublés par leur brusque arrivée à la lumière, ils n'auraient peut-être pas quitté entièrement la coque avant deux ou trois jours ; ils auraient attendu la résorption complète de leurs membranes. Ils pèsent de quatre à six grammes ; plutôt cinq grammes. L'un d'eux a perdu son cône caduc ; les autres l'ont. Des deux œufs qui restaient, un petit défonce sa coque le l'^i septembre et naît le lendemain; l'autre brise la sienne dans la soirée du l'^' septembre et naît dans la soirée du 2 ; ils ont leur cône caduc. Le 20 septembre, toutes ces petites Tortues ont les bords du bouclier relevés au niveau des charnières; elles sont très vives et je les installe dans un terra- rium portatif. J'ouvre, le 2 septembre, un trou de ponte dans lequel une femelle avait déposé dix œufs le 11 juin précédent. Un œuf contenait un embryon mort depuis longtemps; je place les neuf autres œufs dans une boîte d'éclosion. Le premier petit naît le 10 septembre, quatre-vingt-onze jours après la ponte. Trois petits ont défoncé leur coque le 10 septembre et naissent le 12, Le 12 septembre, deux petits ont percé leur coque, et l'un d'eux sort sa tête et ses pattes de devant par l'ouverture ; un naît dans la matinée du 13 et l'autre le 14; tous deux ont la cicatrice ombilicale presque entièrement formée. Un petit défonce sa coque le 13 septembre, en avant d'une de ses pattes antérieures ; le lendemain, il la perce en face de sa tète; il quitte l'œuf le 16. Un petit brise sa coque le 15 septembre et naît le 17. Le dernier petit ouvre sa coque le 18 septembre et sort sa tête et ses pattes antérieures par l'ouverture ; il nait dans OBSERVATIONS SUR QUELQUES REPTILES DE l'INDRE 47 la soirée du 19. Les neuf petits ont leur cône caduc; ils sont vigoureux et pèsent de quatre à six grammes ; leurs yeux sont bien ouverts. Un trou de ponte contenant six œufs pondus le 14 juin, est ouvert par moi le 2 septembre. Un œuf n'est pas fécondé et renferme une matière en putréfaction ; je mets les cinq autres œufs dans une boîte d'éclosion. Le 12 septembre, un petit défonce sa coque en avant de sa tète et de ses membres antérieurs ; il naît le 15, dans la matinée, quatre-vingt-treize jours après la ponte; il a encore un peu de vitellus et de membranes fœtales à utiliser, et sa cicatrice ombilicale ne se forme que huit ou dix jours plus tard. Le 13 sep- tembre, un petit a percé sa coque en avant de sa tête, et un autre l'a défoncée en avant d'une de ses pattes antérieures ; ils naissent le 16 ; leur cicatrice ombilicale est formée. Deux petits ont défoncé leur coque le 15 septembre, et naissent le 18 ; ils ont encore à l'ombilic un minuscule bourrelet d'enveloppes fœtales à résorber. Ces cinq petits out les yeux bien ouverts ; ils pèsent de cinq à six grammes ; tous ont leur cône caduc. Une femelle pond treize œufs le 9 juillet ; j'ouvre la ponte quatre- vingt-trois jours après, le 30 septembre. Sept œufs contenaient une matière en putréfaction ; ils n'avaient pas été fécondés ou les em- bryons étaient morts pendant les premiers temps du développement ; un œuf renfermait un embryon mort à moitié développé; les cinq autres œufs contenaient chacun un petit bien vivant et ayant plus ou moins percé et brisé sa coque en avant de la tête et des membres antérieurs. — J'ai remarqué que les jeunes Tortues brisent la coque qui les renferme non seulement au moyen de leur cône caduc placé à l'extrémité du museau pour cet usage, mais encore en s'aidant de leurs membres antérieurs ; j'ai vu des œufs laissant passer une patte armée d'ongles, alors qu'en avant de la tête, qui n'apparaissait pas encore, la coque était intacte. Le cône caduc, osseux, est situé entre le niveau des narines et la mandibule supérieure, en avant et à l'extrémité du museau, ou il apparaît plus ou moins aigu et blanchâtre, sous forme d'un très petit cône excessivement dur. Chez quelques sujets, il se détache peu de temps après la nais- sance, ce qui est fort rare ; d'autres individus le perdent au moment où ils établissent, du museau et des pattes, la galerie qui doit les conduire du trou de ponte à l'air libre; d'autres enlin, et ce sont les plus nombreux, le perdent quelques jours ou quelques semaines après leur sortie de terre. Chez les sujets qui sortent prématurément de terre à l'automne, le cône caduc ne se détache d'ordinaire qu'au 48 R. fîOLLINAT printemps suivant, à la même époque que celui des individus sortis du trou de ponte seulement à l'époque normale, c'est-à-dire au prin- temps. — L'un des petits de la ponte que je viens d'ouvrir naît devant moi et se met immédiatement à marcher avec aisance. Son bouclier mesure vingt-quatre millimètres de longueur et dix-neuf de largeur; il s'élargira, car à la sortie de l'œuf les bords du bouclier, aussi bien à l'endroit des charnières qui réunissent le bouclier au plastron que sur les parties libres, épousent la forme de l'œuf daos lequel le petit s'est formé, sout appliqués le long du corps et ne se relèvent qu'après la naissance. Le plastron est convexe, mais ne conserve cette forme que fort peu de temps ; il mesure vingt-et- un millimètres de long et quinze de large. La tête est proportion- nellement plus grosse que chez les adultes ; la tête et le cou ont quinze millimètres de long ; les ongles sont durs et bien formés ; les pattes sont proportionnellement plus larges que chez les adultes ; la queue, proportionnellement plus longue que chez ces derniers, a vingt millimètres. Le bouclier, caréné, brun noirâtre, a les écailles fineuient granulées; les marginales sont jauues en dessous; le plastron, noirâtre, est bordé de jaune ; la tête, le cou, les membres et la queue sout noirâtres et c'est à peine si l'on peut apercevoir les points jaunâtres qui les orneront plus tard ; les ongles sont noirs et leur pointe est blanchâtre ; les yeux sont bien ouverts ; l'iris est brun noir. La petite Tortue pèse cinq grammes ; sa boite osseuse est encore souple, car les plaques dermiques osseuses, soudées aux côtes et à une partie de la colonne vertébrale, ne sont pas encore très ossifiées. A l'ombilic, presque entièrement cicatrisé, on ne voit plus que quelques vestiges des enveloppes fœtales, sous forme d'un petit bourrelet rougeâtre. Le cône caduc est en place et ne s'est pas détaché lorsque le petit a brisé sa coque. Dans un trou de ponte ouvert à quatre-vingt-sept jours, je trouve, parmi les petits, une jeune Gistude ayant au plastron seize écailles au lieu de douze ; la troisième paire, divisée en partie dans le sens transversal et la cinquième dans le sens longitudinal, ont formé ces écailles supplémentaires; la cicatrice ombilicale est bien en place, au milieu de la quatrième paire et se prolongeant un peu sur la cinquième. Dans un trou ouvert quatre-vingt-huit jours après la ponte, je trouve un petit nouvellement né, entièrement sorti de sa coque et très vigoureux ; un petit ayant sou vitellus résorbé et ayant percé sa coque; deux petits sur le point de naître et ayant passé hors de leur coque la tête et une patte de devant ; deux petits ayant encore OBSERVATIONS SUR QUELQUES REPTILES DE l'iNDRE 49 un peu de vitellus à l'ombilic et n'ayant pas encore percé leur coque ; un œuf contenant un embryon mort peu de temps après la ponte, et enfin un œuf non fécondé. Cette ponte se composait de huit œufs. Une ponte de quinze œufs est ouverte aussi à quatre-vingt-huit jours. Le dernier œuf pondu est presque à la surface du sol, le trou de ponte n'étant pas assez vaste pour contenir tous les œufs. Je trouve là six œufs, peut-être non fécondés, dont le contenu est putréfié ; cinq œufs dont les embryons sont morts entre le début et la moitié du développement; un petit bien vivant qui a légère- ment défoncé sa co(|ue près de sa tête et d'une de ses pattes; un autre petit qui sort sa tête et une de ses pattes par l'ouverture faite à sa coque; enfin deux petits nouvellement nés et très vigou- reux. Sur quinze œufs, quatre seulement donnent des petits vivants; j'ai voulu montrer, en parlant de cette ponte, le déchet énorme qu'on rencontre parfois dans les œufs de cette espèce, qui, pour- tant, en ce qui con(;erne le dépôt des œufs, agit chez moi comme elle fait à l'état sauvage. J'ai vu des pontes entièrement perdues et dont tous les œufs contenaient des embryons morts ; j'ai vu aussi, tout à côté et déposées presque en même temps, des pontes dont tous les œufs donnaient un petit bien vivant et robuste ; de sorte que je ne sais à quoi attribuer la perte ou la réussite de telle ou telle ponte. Une ponte déposée par une femelle le l^' juillet, est ouverte trois mois après, le 30 septembre. 11 y avait neuf œufs, dont un contenait un embryon mort vers la moitié du développement. Deux petits ont défoncé leur coque en avant de leur tête et de leurs membres antérieurs; ils attendent que le vitellus et les membranes fœtales soient entièrement résorbés pour sortir de leur enveloppe, ce qui aurait demandé encore quelques jours. Six petits sont éclos et reposent près des coques; plusieurs ont des parcelles de coque collées sur la carapace, car les jeunes Tortues s'agitent dans leur étroite prison, et les débris d'œufs sont ainsi broyés en petits mor- ceaux qui se mélangent à la terre des parois du trou. Toutes ces petites Cistudes ont leur cône caduc en place. Elles ont l'ombilic situé sur la ligne médiane du plastron, au milieu de la quatrième paire d'écaillés et parfois aussi en partie entre la cinquième paire ; l'ouverture ombilicale est cicatrisée, sauf chez quelques petits où on remarque encore une très faible partie des membranes fœtales qui se résorbent. Ces jeunes Cistudes sont nées depuis peu, car les bords du bouclier, vers les charnières, sont encore rabattus en Mém. Soc. Zool. de Fr., 1902. xv. — 4. 50 R. ROLLINAt partie. Leur bouclier mesure eu moyenue 26™™ de longueur et 24 de largeur; la tête et le cou ont ié""^ de long et la queue 24™™. Elles ont une odeur fade particulière, que j'ai constatée chez toutes les petites Cistudes après la naissance et surtout au moment de la sortie de terre et qui provient, selon moi, de la putréfaction de ce qui reste d'albumen dans les coques ou sur les petits, et qui, dans cet espace restreint, produit une odeur très spéciale. J'ouvre une ponte du 13 juin à trois mois exactement, le 13 sep- tembre. Je trouve un œuf non fécondé. Sur les débris de leurs coques, dix petits reposaient, bien vivants et très vigoureux ; tous avaient les yeux ouverts et étaient munis de leur cône caduc. Le 13 septembre, j'ouvre une ponte à quatre-vingt-treize jours ; je trouve un œuf non fécondé et neuf petits éclos et bien vivants, ayant les yeux ouverts, et munis de leur cône caduc. Le 13 septembre, à quatre-vingt-treize jours encore, j'ouvre une ponte où je trouve neuf petits vivants, dans le môme état que les précédents et nés depuis peu. Le 30 septembre j'ouvre, à cent trois jours, une ponte déposée le 19 juin. A^igoureux et vifs, les yeux ouverts, huit petits nés récem- ment occupaient le trou de ponte ; tous ont leur cône caduc. Chez tous, l'ombilic est fermé par une cicatrice d'un blanc brunâtre ou jaunâtre et de forme ovale. 11 m'est arrivé de trouver dans des pontes quelques petits nou- vellement nés et d'une très petite taille, bien au-dessous de la normale ; ainsi, j'ai vu plusieurs fois des jeunes Cistudes dont le bouclier, quoiqu'ayant déjà ses bords relevés aux charnières, ne mesurait que viugt et-un millimètres de longueur et vingt de lar- geur, et dont le poids n'était que de trois grammes. Malgré leur taille exiguë, elles étaient très vives et vécurent très bien. A leur naissance, les Cistudes n'ont pas les écailles du bouclier rayonnées de jaune, cette coloration ne se montrant que plus tard, et même tous les sujets ne l'ont pas lorsqu'ils sont adultes, car on trouve de vieilles femelles dont les grandes écailles du bouclier sont uniformément brunes. Une femelle dépose sa ponte le 8 juin. Cent vingt-et-un jours après, le 7 octobre, le premier petit naît ; le dernier ne sort de l'œuf que le 30. Par de mauvaises années, quelques petits ne sortirent de l'œuf qu'en novembre ; mais cela est plutôt rare. J'ai ouvert un grand nombre d'œufs de la Cistude d'Europe ; dans trois de ces œufs, j'ai trouvé des embryons dignes d'une descrip- OËSERVATlONS SUR QUELQUES REPTILES DE l'iNDRE 5l tion spéciale. D'un œuf ouvert le 14 septembre, je retire un fœtus très développé, bien vivant et normalement constitué; ce fœtus a un peu de vitellus à résorber et a encore toute la moitié postérieure du corps dans ses enveloppes fœtales. A la partie postérieure gauche du fœtus normal, et fi.Ké à ses enveloppes, ou remarque un embryon minuscule, de huit millimètres de longueur totale, dont on voit très bien la tête avec ses yeux noirâtres, le bouclier, le plastron, déformés; c'est à peine si l'on peut observer sur cet embryon abso- lument anormal, des rudiments de membres et de queue, il est certain qu'un très petit vitellus, fécondé lui aussi, a été englobé dans l'albumen et les enveloppes de l'œuf en même temps que le vitellus normal. Cet embryon serait certainement mort dès la nais- sance de son compagnon qui, lui, était très bien développé. D'un œuf ouvert le 5 août, soixante-et-un jours après la ponte, je retire un fœtus bien vivant plus d'à moitié développé et n'ayant aucune trace d'yeux. A l'endroit où les yeux auraient dû se dévelop- per, on voit une cavité au fond de laquelle on peut observer, à la loupe, une fente palpébrale extrêmement petite. Chez les autres embryons de cette ponte, les yeux se formaient nornialement ; on les voyait très bien : énormes, saillants, noirâtres. D'un œuf ouvert le 25 août, quatre-vingts jours après la ponte, je retire un fœtus très développé, mais ayant encore beaucoup de vitellus à résorber avant d'être en état de naître. Ce fœtus est bieu constitué, sauf en ce qui concerne le bouclier et le plastron, très étroits et qui ne se sont pas développés d'une façon normale; il est certain qu'à sa naissance la petite Cistude aurait été un de ces indi- vidus qu'on rencontre de temps à autre et qui ne peuvent, vu 1 exiguïté de leur cuirasse, abriter entièrement leur tête, leurs membres et leur queue. Tous ces sujets présentant les cas curieux de tératologie que je viens de décrire, sont conservés dans ma collection. J'ai encore à signaler une monstruosité qu'on rencontre assez souvent chez les jeunes Cistudes : Des individus naissent avec la queue plus ou moins enroulée en spirale ; la queue reste ainsi sans se redresser, ce qui n'empêche pas les sujets atteints de cette infirmité de vivre et de grandir régulièrement. Sinrtie de terre des jeune.-;. — En trois mois ou un peu moins si la température est favorable, mais parfois plus lorsque l'humidité est trop grande, l'œuf pondu par la Cistude d'Europe arrive à éclosion. Ordinairement le jeune Chélonien, au lieu de sortir de terre à une époque de l'année où il serait forcé de disparaître bientôt, S2 R. HOLLINAT attend patiemment que les premières pluies du printemps aient détrempé le sol et que les beaux jours, enfin revenus, aient ramené un peu de chaleur, pour établir le couloir qui lui permettra d'arri- ver à l'air libre et à la lumière. Cependant, si en grande majorité les petites Tortues restent jusqu'au printemps dans le trou où elles sont nées, j'en ai vu bien souvent sortir dès le mois de septembre, d'octobre ou de novembre, lorsqu'à cette époque il se produit une série de jours ensoleillés et chauds, suivis d'une pluie douce à laquelle succède encore le soleil. Le 8 juin, une femelle dépose sa ponte. Le 20 septembre suivant, l'eau étant tombée en abondance, j'examine, dans la matinée, l'endroit où est la ponte: il n'y a rien; le sol est net, sans le moindre trou. Vers trois heures de l'après-midi, je visite encore cet endroit et j'y trouve un trou presque rond, d'environ vingt-cinq à trente millimètres de diamètre, par lequel tous les petits sont sortis. Les petits de deux pontes déposées dans la première quinzaine de juin sortent de terre le (5 octobre. Des jeunes provenant d'une ponte déposée par une femelle dans les premiers jours de juillet sortirent de terre le 29 octobre et jours suivants. Les sorties de terre à l'automne ne sont donc pas rares et j'en ai observé chaque année. Mais dans la plupart des pontes, les petits ne sortent qu'à la fin de l'hiver, ce qui leur est parfois funeste, et surtout au printemps, où ils apparaissent avec les véritables beaux jours. Enfermées dans le trou de ponte, pourtant à une faible profon- deur qui ne les préserve pas entièrement du froid puisque la terre est souvent gelée à plus de vingt ou vingt-cinq centimètres de la surface du sol, les petites Cistudes passent l'hiver dans cet endroit absolument clos. J'ai remarqué que le froid à l'air libre était beaucoup plus funeste aux Ghélonieus que celui qu'ils éprouvent dans la terre gelée ou dans les bassins couverts de glace, ce qui d'ailleurs est absolument rationnel, la température étant plus basse en plein air pendant les très grands froids. Le 12 janvier 1896, j'ouvre une ponte déposée par une femelle le 14 juin précédent. 11 fait très froid, la terre est gelée profondément. Dans le trou de ponte, je trouve dix petites Tortues engourdies, ayant la tête, les membres et la queue dans leur carapace, mais faisant cependant quelques mouvements lorsqu'on les touche ; sur chacune d'elles, on voit quelques petits cristaux de glace. Elles OBSERVATIONS SUR QUELQUES REPTILES DE l'iNDRE 53 ont toutes, sauf uue, leur côue caduc ; leur bouclier a vingt trois à vingt-cinq millimètres de longueur et vingt-deux à vingt-trois mil- limètres de largeur. Elles reposent sur les débris de leurs coques. Le 16 janvier (Je la même année, j'ouvre une ponte déposée le 13 juin précédent et j'y trouve cinq petits Tortues engourdies mais bien vivantes, et une morte depuis quelque temps déjà. Des cinq vivantes, quatre ont leur cône caduc. Les petites Cistudes de ces deux pontes, placées dans un terra- riuni portatif installé dans une chambre chauffée, se réveillent promptement et se rendent à l'eau de leur petit bassin ; elles sont très vigoureuses. D'une ponte datant du 8 juin, le premier petit sort de terre le 9 mars et meurt dans la nuit, tué probablement par le froid ; il n'a plus son cône caduc. Une petite Tortue se montre à l'orifice du couloir le 10 mars, mais par suite du froid elle se renfonce sous terre et ne sort du trou que le 5 avril ; elle a aussi perdu son cône caduc ; elle est très vigoureuse. Un autre petit sort le 17 avril, et je retire du trou trois petits morts après l'éclosion. Une femelle pond le 13 juin ; plus tard, je place où est cette ponte l'entourage en bois et le petit bassin dont j'ai parlé. Le 22 mars suivant, deux cent quatre-vingt-deux jours après la date de la ponte, une petite Tortue sort de terre dans la journée ; elle se repose près du trou qu'elle a fait pour arriver au jour; elle est couverte de terre. Une seconde Tortue est engagée dans la galerie, on aperçoit sa tête; la galerie est un peu oblique et a environ 3™ de diamètre; la petite Tortue ne sort complètement du trou que le 25 mars et elle se rend immédiatement à l'eau du minuscule bassin ; elle est un peu moins couverte de terre que la première. Dans la matinée du 28 mars, il sort une troisième petite Tortue, qui, aussi, se rend à l'eau; elle n'est pas sortie de terre par la même voie que les précédentes, mais elle a fait une galerie oblique semblable à la première et à une distance de quelques centimètres de celle-ci. Uue quatrième Tortue s'engage dans la nouvelle galerie, mais elle s'enfonce dans le trou pendant toute la journée du 29, et le 30 mars, dans la matinée, elle sort de terre et se rend à l'eau. Dans le trou, il ne reste plus que des débris de coques mêlés à la terre tombée des galeries. Ces quatre jeuues Cistudes ont perdu leur cône caduc, qui s'est peut-être détaché au moment du travail pour la sortie de terre.- leur bouclier a vingt-quatre à vingt-cinq millimètres de longueur et vingt-deux à vingt trois de largeur; la carapace est assez solide, sans être dure ; elles pèsent de quatre à cinq grammes. 54 K. HOLLINAT Une ponte est déposée par une femelle le 11 juin. Les petits ont sans doute un peu gratté la terre à l'automne, car, pendant l'hiver, après quelques pluies abondantes, le trou s'ouvre de lui-même. On voit les jeunes Tortues, et, pour qu'elles ne soient pas incommodées par le froid, je ferme le trou d'un morceau d'ardoise et je place dessus quelques feuilles tombées des arbres. Malgré les grands froids, les Tortues restèrent bien vivantes. Le printemps venu, j'enlève feuilles et ardoises. Deux petits sortent de terre le 31 mars, dans la matinée ; ils ont chacun leur cône caduc ; ce cône tombe le 15 avril suivant chez l'un, et le 16 avril chez l'autre. Un troisième petit sort le 31 mars, dans la matinée ; il a son cône caduc et le perd le 18 avril. Dans la matinée du le^ avril, un quatrième petit est hors du trou ; il a son cône caduc, qui tombe le 5 mai. Deux petits sortent le 2 avril : le cône caduc se détache le 10 mai chez l'un et le 16 mai chez l'autre. Dans le trou de ponte, je trouve un œuf non fécondé et un autre contenant un fœtus mort très déve- loppé. Un des petits sortis de terre a la queue enroulée sur elle- même; comme je l'ai dit, cette monstruosité n'est pas rare. — J'ai remarqué que l'extrémité de la queue se desséchait et tombait chez beaucoup de Cistudes pendant la première année de leur existence ; j'avais même cru un moment que cela arrivait à toutes les jeunes Tortues, mais j'ai eu par la suite des sujets qui conservèrent leur queue bien entière. A l'état sauvage, beaucoup de petites Cistudes doivent perdre le bout de leur queue, car il est extrêmement commun de rencontrer des Tortues adultes ayant perdu l'extré- mité de leur appendice caudal. Les petits d'une ponte déposée par une femelle le 30 juin com- mencent à sortir le l^r avril suivant. La terre était durcie par quel- ques jours de sécheresse, lorsque l'eau tomba les 30 et 31 mars, ce qui permit à la petite Tortue qui établissait la galerie de travailler plus facilement. Dans la matinée du l'"^ avril, le couloir est achevé et une jeune Tortue sort de terre, une autre la suit de près, sort du trou et se met en marche, cherchant à s'échapper du cadre de bois qui l'environne ; une autre petite Tortue présente la tête à l'ouver- ture du trou. A une heure de l'après-midi, deux Tortues ont la tète engagée dans la galerie; l'une d'elles repousse l'autre et sort vers deux heures ; une autre arrive à la surface à trois heures et demie, une autre à six heures. La journée a été douce, l'après-midi ensoleillée ; dans la soirée le vent tourne au nord et la température se refroidit. Le 2 avril, le soleil brille, il fait assez chaud. Deux petites Tortues se montrent à l'orifice du trou, mais ne sortent pas OBSERVATIONS SUR QUELQUES REPTILES DE l'iNDRE 35 parce qu'elles se gèneut mutuellement. Le 3 avril, le temps est couvert, et il fait froid ; les Tortues restent au fond du trou. Le 4 avril, uue petite Cistude sort vers midi. Le 5 avril, j'aperçois d'autres petites Tortues au fond du trou; il fait sec; le soleil est très chaud. Je verse quelques gouttes d'eau dans le trou, pour rafraîchir les petits ; cela semble les ranimer ; l'un d'eux sort à une heure de laprès-midi, ud autre à deux heures, puis un autre encore à deux heures et quart. Une petite Tortue paraît bientôt à l'orifice du trou, mais elle ne sort que le lendemain, 6 avril, vers une heure de l'après-midi. Dix petits sont sortis du trou de ponte, dans lequel je trouve un œuf non fécondé et un autre contenant un embryon mort vers la moitié du développement. A leur sortie de terre, ces Tortues avaient leur cône caduc ; presque toutes avaient les yeux ouverts, d'autres les avaient fermés de boue. Une femelle pond le 10 juin; les petits achèvent d'ouvrir leur galerie dans la matinée du 5 avril, par un temps assez chaud et pluvieux, et une jeune Tortue sort immédiatement. Cette petite Cistude pèse quatre grammes et demi; elle a son cône caduc qui tombe le 23 avril. Une seconde Tortue sort dans la matinée du même jour; elle pèse cinq grammes, a son cône caduc et le perd le 27 avril. Une troisième la suit de près, elle pèse six gram- mes, a son cône caduc et le perd le 26 avril. Une quatrième sort le 6 avril, dans l'après-midi; elle pèse 5 grammes, a son cône caduc et le perd le 2 mai. J'ouvre le trou de ponte le 12 avril et j'y trouve encore un petit qui n'avait pu sortir parce que l'orifice de la galerie était trop élevé au dessus de lui et qu'il ne pouvait monter sur ses frères pour l'atteindre; avec lui, je trouve deux œufs non fécondés et un autre contenant un embryon mort. Le petit que je retire de terre est vivant; il a les yeux fermés de boue séchée ; nettoyé, il pèse 5 grammes; il a son cône caduc et le perd le 27 avril. Le bou- clier des jeunes de cette ponte mesurait, à la sortie de terre, vingt- sept millimètres de longueur et vingt-trois à vingt-quatre millimè- tres de largeur. Les petits d'une ponte déposée par une femelle le 17 juin, com- mencent à sortir de terre le 15 avril suivant, jour où l'une des petites Tortues fait une galerie par où elle sort ainsi que deux de ses sœurs, qui la suivent immédiatement et arrivent à la surface du sol. La galerie, qui a vingt huit millimètres de diamètre, est creusée verticalement, c'est-à-dire que la petite Tortue qui l'a faite prenait un point d'appui sur les autres jeunes Cistudes qui étaient agglo- mérées les unes sur les autres dans le trou de ponte. Les trois Tor- 56 R. ROLLINAT tues sorties, les autres avaient beaucoup de difficultés à monter jusqu'à l'orifice de la galerie, car, comme je l'ai dit, elle était ouverte verticalement contre la paroi. Le 16 avril dans la matinée, il sort deux nouvelles Tortues. Le 17 avril, entre midi et trois heures, il en sort trois autres, avec beaucoup de ditficultés. Le 18 avril, il en sort une autre vers midi. Le 20 avril, dans l'après- midi, une Tortue est à l'orifice de la galerie; elle ne peut sortir, malgré ses efforts, et retombe au fond de l'excavation où elle est née; elle recommence à se hisser vers l'ouverture, et tombe sur le dos ; dans la soirée, elle est toujours dans la même position. En regardant au fond du trou, par l'orifice, j'aperçois une autre petite Tortue, elle aussi renversée sur le dos. Ces jeunes Cistudes sor- tent enfin, l'une, le 22 avril, vers deux heures du soir, l'autre le 24 avril, à onze heures du matin. Les onze petits de cette ponte ont donc mis dix jours pour sortir de leur trou; si la galerie commu- niquant avec l'extérieur avait été creusée obliquement, la sortie eut été plus facile et plus rapide. Pendant la sortie de terre, il est tombé plusieurs fois de l'eau en abondance; aussi les petits étaient presque tous couverts de terre et avaient les yeux fermés de boue. Tous, sauf un, le dernier sorti, avaient leur cône caduc. Je n'ai trouvé au fond du trou que des débris de coques mêlés de terre; chaque œuf avait donné un petit. D'une ponte déposée par une femelle le 16 juin, les petits sortent de terre le 30 avril. Dans la matinée de ce jour, une des petites Tortues atteint la surface du sol par une galerie qu'elle vient de creuser verticalement en s'appuyant sur ses sœurs, qui remplissent le trou de ponte ; à dix heures du matin, trois autres Tortues sortent de la galerie; elles sont vigoureuses, quoique couvertes de terre desséchée; leurs yeux sont fermés de boue durcie, sur laquelle el'es passent inutilement leurs pattes de devant, car elle ne se détachera que lorsqu'elle aura été désagrégée par l'eau du petit bassin; trois ont leur cône caduc ; une l'a perdu. A onze heures, une cinquième Tortue sort, couverte de terre; elle a son cône caduc. A onze heures et demie, il en sort une sixième, dans le même état que la précédente. A une heure de Taprès-midi, une septième arrive à la surface, toujours dans le même état que ses sœurs. On voit encore, remuant au fond du trou, deux petites Tortues qui font des efforts pour gagner l'ouverture, malheureusement à pic; main- tes fois, pendant les jours qui suivent, elles essayent vainement de sortir; elles ont les yeux bouchés de terre et grattent au hasard les parois de leur prison. Le 22 mai, voyant que les petites Cistudes OBSERVATIONS SUR QUELQUES REPTILES DE l'iNDRE 57 finiraient par mourir, j'ouvre en partie l'excavation pour permettre aux prisonnières d'arriver à l'extérieur par une pente douce, ce qu'elles ne tardent pas à faire, car elles sortent dans la journée ; elles ont leur cône caduc. Au fond du trou, je rencontre, au milieu des débris de coques, un œuf non fécondé contenant un vitellus en putréfaction. Cette ponte se composait donc de dix œufs dont neuf ont donné des petits. Il arrive parfois que les petits ne peuvent sortir de terre. Exami- nant l'emplacement d'une ponte de juin vers la fin de mars suivant, je vois un très petit trou. Les jeunes Ctiéloniens ont dû gratter à l'automne et l'eau a ramolli la mince couche de terre et ouvert le trou. D'ordinaire, les jeunes Tortues n'ouvrent leur trou que pour en sortir le plus tôt possible. Une petite Tortue montre sa tète et une de ses pattes le 4 avril et retombe dans le trou. Jusqu'au 17 avril, les petits font des etïorts inouïs pour sortir de terre, sans pouvoir y parvenir. On les voit remuer de temps à autre dans le trou. L'eau tombe souvent ; ils sont couverts de boue, qui sèche et les aveugle, de sorte qu'ils ne peuvent trouver facilement l'ouver- ture du trou; plusieurs fois ils sont sur le point d'atteindre la surface; enfin, craignant de les voir mourir, je les retire moi- même du trou. J'ai vu plusieurs fois des jeunes Tortues périr avant de pouvoir arriver à la surface du sol. D'une ponte déposée par une femelle le 30 mai, les petits sortent de terre le 30 avril suivant, c'est-à-dire exactement onze mois après. Ce jour-là, trois petits sortent du trou ; un autre sort le 3 mai, et je trouve au fond de l'excavation un œuf contenant un fœtus en putréfaction. Une femelle pond le 11 juin; huit petits sortent de terre le l*?'' mai suivant, trois cent vingt-quatre jours jours après la ponte. Ces petits Tortues sont vigoureuses ; deux ont perdu leur cône caduc. Le terrain est sec, le temps chaud. Le lendemain, j'aperçois deux petits qui remuent au fond du trou ; ils ont les yeux fermés de terre. Le couloir est vertical ; les petites bêtes n'ont plus la ressource de se hisser les unes sur les autres pour atteindre la galerie, car elles sont maintenant trop peu nombreuses. Après plusieurs jours d'efforts, elles se laissent mourir au fond du trou où elles sont nées. A l'état sauvage, combien de jeunes doivent ainsi périr ! Près des deux petits cadavres, je trouve un œuf non fécondé dont le contenu est en putréfaction. Si je me suis étendu longuement sur la sortie de terre des jeunes Cistudes, c'est que j'ai voulu faire connaître les dilTicultés, parfois 58 K. ROLLINAT insurmoDtables, qu'éprouvent ces petites bètes pour arriver à la surface du sol. A leur sortie de terre, les petits provenant de pontes déposées hors de ma présence se promenaient dans le jardin, soit en automne, soit au printemps, et se rendaient aux bassins, où, la plupart du temps, ils ne tardaient pas à se noyer. A l'état sauvage, la jeune Cistude se rend à l'étang voisin; mais elle trouve là de petites flaques d'eau très peu profondes, herbues, desquelles elle peut sortir quand bon lui semble et où elle ne court aucun risque de se noyer ; puis elle gagne les queues d'étang, où les plantes aqua- tiques, nombreuses, lui donnent le point d'appui lui permettant de se reposer en se tenant à la surface. Dans les bassins du jardin, aux bords lisses et dépourvus de plantes, la petite Cistude, d'abord heureuse de prendre son premier bain, se débattait bientôt et se noyait si je n'arrivais à temps pour la secourir. J'ai eu des jeunes Tortues, plus prudentes que d'autres et s'éloignaut moins des bords, qui vécurent plusieurs jours dans les bassins ; mais elles disparu- rent, écrasées peut-être, ou peut-être aussi tuées par des Chats. Lorsqu'on fait l'élevage de cette Tortue, il est indispensable de protéger les jeunes pendant un certain nombre d'années. Élevage en terrarium portatif. — La petite Tortue est sortie de terre; elle pèse de quatre à six grammes; elle est munie de lous les moyens qui peuvent permettre à une bète libre de vivre d'elle- même sans aide d'aucune sorte. En captivité, il n'y a donc qu'à lui aménager un local convenable et à lui offrir la nourriture qui lui convient, pour la voir grandir et se développer normalement. Quand mes jeunes Cistudes des pontes étiquetées arrivent à la surface du sol, je les retire du cadre de bois qui ne leur a pas permis de circuler librement dans le jardin, et, s'il est nécessaire, je les nettoie de la terre dont elles sont plus ou moins maculées. Leur première demeure est un aquarium de cinquante centi- mètres de long, trente de large et trente de haut, muni en son centre d'un trou de vidange destiné à laisser s'écouler l'eau qui s'échappe du bassin lorsqu'on le nettoie ou lorsqu'on change le tout de place. Les quatre côtés de l'aquarium sont en verre; le fond est en zinc peint; le couvercle est supprimé. J'aménage cet aquarium en terrarium portatif. Pour cela, je place une ardoise sur le trou de vidange; j'étale sur le fond de l'aquarium une couche de sable humide de trois centimètres d'épaisseur; je mets sur le sable un bassin en porcelaine mesurant trente centimètres de longueur, vingt trois de largeur et cinq de profondeur; je place, OBSERVATIONS SUR QUELQUES REPTILES DE l'iNDRE o9 au-dessus du sable, dans la partie non occupée par le bassin et autour de celui-ci, une couche de Mousse très humide ayant la hauteur du bassin, et, sur cette mousse humide, dans les angles de l'aquarium, un peu de mousse sèche; dans le bassin toujours plein d'eau, des petits cailloux, bien disposés le long des bords, permettront aux jeunes Tortues de prendre un point d'appui pour sortir facilement hors du liquide. L'eau du bassin est renouvelée une ou deux fois par jour en été. Placées dans le terrarium, les jeunes Tortues se cachent quel- quefois dans la mousse, mais le plus souvent vivent dans l'eau, mangeant avec avidité, si le temps est chaud, les morceaux de Blattes, les très petits Poissons morts que je leur donne. Quand la température se rafraîchit, l'appétit est moins ouvert; généralement, mes jeunes élèves mangent pendant toute la belle saison, d'avril à septembre et premiers jours d'octobre. Lorsqu'on s'approche brusquement du terrarium, les Cistudes s'agitent et semble effrayées ; elles reprennent vite leur assurance et bientôt toutes les petites têtes se dressent, les corps émergent à moitié de l'eau, les bêtes se hissent sur les cailloux de leur bassin, et, le cou tendu vers le visiteur, regardent longuement, sans trop remuer. Si alors on place de la nourriture dans l'eau, elles se mettent immédiatement à manger. Dans la matinée, le terrarium est exposé au suleil, et cela semble être agréable à ses habitants ; mais pendant la plus grande partie de la journée, en été, je le laisse à l'ombre, dans un endroit bien abrité, le rentrant à la maison chaque soir ou lorsqu'il fait trop mauvais temps. Une pluie douce et fine n'est aucunement nuisible aux petites Tortues. La Cistude d'Europe a une croissance extrêmement lente ; il lui faut de nombreuses années pour être en état de se reproduire. Je place, dans le terrarium que je viens de décrire, une vingtaine de petites Cistudes sorties du trou de ponte du 31 mars au 17 avril. Naturellement, elles proviennent de plusieurs pontes. J'ai indiqué plus haut le poids des jeunes Tortues à leur arrivée à la surface du sol. En septembre suivant, c'est-à-dire un an après l'éclosion et environ six mois après la sortie de terre, ces petites bêtes pèsent de dix à dix-sept grammes. Bien nourries, bien soi- gnées, elles sont vives et vigoureuses ; il est à remarquer que cer- taines d'entre elles, douées sans doute d'un meilleur tempérament, ont beaucoup plus grossi que leurs sœurs du même âge, et cette proportion dans l'accroissement se poursuivra ordinairement pen- 60 R. noLLiiN Ai- dant les années suivantes : une jeune Gistude qui se développe bien pendant la première année de son existence, continue dordinaire à croître normalement, tandis que celle qui vient mal, qui, quoique très vive et très vigoureuse, reste petite, se développe beaucoup plus lentement. Les jeunes Cistudes ont la tête, le cou, les mem- bres, la queue et la peau des flancs noirâtres, légèrement marqués de jaune pâle de couleur indécise, sauf sur les côtés de la tête et sous la gorge, où les points jaunes sont bien apparents; l'iris est brun noirâtre et chez quelques unes déjà marqué de points blan- châtres ou jaunâtres, sur un fond roussâtre ou brun. Le bouclier, légèrement caréné, mesure de trente-quatre à quarante-et-un milli- mètres de longueur et trente deux à trente-neuf millimètres de largeur; il est brun noirâtre foncé, ou, chez d'autres, brun foncé ou brun clair plus ou moins olivâtre, avec les marginales marquées de jaune. Le plastron a de trente-et-un à trente-sept millimètres de long et de vingt-trois à vingt-huit millimètres de large ; il est noir marqué de jaune clair sur ses bords; chez quelques unes il est moins foncé et d'un noir jaunâtre, toujours entouré de jaune clair ; on ne voit plus trace de la cicatrice ombilicale. La tête et le cou mesurent de dix neuf à vingt trois millimètres de longueur, et la queue de quinze à vingt-et-un millimètres. A cet âge, il est impos- sible de reconnaître le sexe sans ouvrir l'animal. A l'intérieur, les organes génitaux sont extrêmement petits ; chez les mâles on ne trouve pas de spermatozoïdes dans les testicules, encore rudimen- taires. La réserve de graisse est peu considérable. Chez la Cistude d'Europe, les écailles qui recouvrent la boîte osseuse s'accroissent delà façon suivante : Vertébrales : eu avant et sur les côtés, très peu en arrière : on voit une partie granuleuse, qui représente l'écaillé qu'avait la jeune Tortue au moment de sa naissance, et, sur les côtés et en avant de chaque écaille, une partie légèrement rayonnée, non gra- nulée, représentant l'accroissement de chaque écaille. Mêmes obser- vations pour les costales, mais on remarque aussi un très léger accroissement en arrière, alors que l'augmentation en avant et sur les côtés est considérable. Marginales : en les observant à partir de l'échancrure située au-dessus de la queue, l'accroissement se fait surtout en avant et sur les côtés; la nuchale s'accroît en avant, en arrière et sur les côtés. Ecailles du plastron : elles s'accroissent principalement en avant et aussi et surtout du côté où elles joignent la ligne médiane ; ces OBSERVATIONS SUR QUKLQUES REPTILES DE LINDRE 61 écailles sont lisses dès la naissance de l'animal et non {^ranulées coinme celles dn bouclier. En octobre qui suit la sortie de terre, je profite d'une journée douce et humide pour installer les petites Cistudes dans le terra- rium du jardin; c'est là qu'elles passeront l'hiver, enfoncées dans le fumier, en compagnie des autres jeunes Tortues; c'est là aussi qu'elles vivront désormains. Lorsque des jeunes Tortues sortent à l'automne du trou de ponte au lieu d'en sortir au printemps, elles ne passent que quelques jours dans le terrarium portatif. Le terrarium du jardin étant aménagé pour la saison d'hiver, les petites Tortues sont placées sur le fumier, dans lequel elles s'enfoncent aussitôt. D'autres vont au petit bassin; il est alors bon de les surveiller et de les remettre souvent sur le fumier; malgré cela, quelques-unes se noient. Au printemps, au fur et à mesure que ces très petites bêtes sortent du fumier, on les remet dans le terrarium portatif, dans lequel elles doivent achever la première année de leur existence. J'ai essayé bien des moyens pour faire hiverner les jeunes Tortues sorties prématurément de terre à l'automne ; j'ai placé quelques-unes de ces petites bètes dans une boîte grillagée, pleine de sable humide et de mousse, installée dans ma cave; mais le meilleur moyen de leur faire passer la saison des frimas est encore de les mettre sur le fumier du terra- rium du jardin, dans lequel elles s'enfoncent d'elles-mêmes. Elecage en terrarium fixe inHalié en plein air. — Les six mois passés en terrarium portatif ont permis à la jeuue Cistude de se développer et de prendre plus de force ; elle a maintenant la vigueur nécessaire pour éviter de se noyer dans un bassin plus large et plus profond que celui qu'elle a habité jusque là ; sa boîte osseuse est un peu plus dure et plus solide. C'est près d'un If touiïu, mais taillé en cylindre d'un assez faible diamètre, que j'ai installé mou terrarium en plein air. L'été, lorsque le temps est très chaud, l'ombre de cet arbre est salutaire aux petites prisonnières, tout en n'étant pas assez large pour couvrir entièrement la surface du terrarium, ce qui permet à ses habitants de se mettre à l'ombre ou au soleil quand bon leur semble. Un entourage eu zinc peint, de quarante centimètres de hauteur, enfoncé de dix centimètres dans le sol et ayant sa parlie supérieure légèrement recourbée en dedans, limite le terrarium et ne permet pas aux Cistudes de s'enfuir au dehors. Cet entourage donne au terrarium un mètre soixante-quinze centimètres de long et un mètre soixante de large. Une moitié de tonneau en bois, bien propre et 62 it. ROLLINAT placée daus la terre jusqu'au niveau du sol, forme le bassin qu*oii remplit d'eau très claire qu'il ue faut pas oublier de remplacer chaque fois qu'elle commence à devenir malpropre. Des cailloux de très petite taille, des petits galets bien lavés, sont placés dans le bassin et formeut une pente douce, allant du fond au bord, pour pemettre aux Tortues de sortir facilement de l'eau. Le bassin est donc, diagonalement, occupé moitié par les cailloux formant pente douce et moitié par l'eau ; cette disposition est indispensable pour éviter les noyades. Quelques plautes touffues, basses, sous les feuilles desquelles les Cistudes aiment à se caclier, sont plantées dans le terrarium, entre le bassin et les côtés en zinc : c'est l'aménagement pour la belle saison. L'automne venu, le bassin est enlevé, et l'excavation laissée par son enlèvement est creusée, élargie et remplie de fumier ; près du fumier, un bassin beaucoup plus petit que le premier, plein d'eau et toujours muni de cailloux en pente douce, reçoit les Tortues qui le quittent bientôt pour aller s'enfoncer dans le fumier où elles prennent leurs quartiers d'hiver. Dès le mois d'octobre, le terrarium est aménagé pour la mauvaise saison. Pendant le jour, les petites Tortues, qui ont cessé de manger, habitent tantôt dans le minuscule bassin, tantôt sur terre ou dans le fumier; beaucoup même restent continuellement à l'eau, alors que d'autres se réfugient le soir dans le fumier. Par les journées ensoleillées, elles se promènent, se pla- cent près d'un des côtés de l'entourage de zinc, dans l'endroit le mieux exposé et le plus chaud, restant ainsi des heures à recevoir les rayons bienfaisants d'un soleil déjà à son déclin. Puis, avec novembre, les froids commencent à venir; les Tortues sortent plus rarement, quittent l'eau, pas assez profonde pour bien les abriter, et s'enfouissent définitivement dans le fumier. Vers la fin de l'hiver, rarement en février mais souvent en mars, l'activité renaît dans ce monde engourdi ; les petits Chéloniens s'approchent de la surface du fumier, se frottent de leurs pattes de devant le museau et les yeux pour les débarrasser des impuretés qui les souillent, et semblent revoir avec plaisir le soleil qui chaque jour prend plus de force, et qui, peu à peu, les invite à se rendre à l'eau. Un nuage qui passe et, momentanément, refroidit l'air, fait disparaître tout ce petit monde, qu'un nouveau rayon attire vers la surface ; enfin, les belles journées aidant, quelques jeunes Cistudes se rendent à l'eau et finissent même par y séjourner. Le nombre des bêtes revenues à l'activité s'accroît de jour en jour, et au début d'avril, dès que la température est favorable, le fumier OBSERVATIONS SUR QUKLQUES REPTILES DE l'iNDRE H3 est enlevé avec soin, les jeunes Tortues sont comptées et placées dans un bassin plus grand, le terrarium étant aniéuagé pour la belle saison comme je l'ai décrit plus haut. Nourries de viande crue hachée, de cœur de Veau principalement, de petits Poissons frais, de Blattes et autres Insectes qu'elles déchirent et se disputent à coups d'ougles et de mandibules, elles deviennent assez rapidement vives, alertes, sortant de leur bassin, plongeant au moindre bruit mais revenant bientôt à la surface regarder le visiteur. Pendant les grandes chaleurs, il est bon de visiter de temps à autre le terrarium et de remettre sur ses pattes la Cistude qu'on trouve renversée sur le dos, car j'ai eu des jeunes qui, ne se relevant pas assez vite, étaient bientôt tuées et desséchées; mais d'ordinaire une Tortue qui se renverse a vite lait de se remettre sur ses membres sans le secours de personne. Les Tortues d'ailleurs se mettent à l'ombre ou restent à l'eau lorsqu'il fait trop chaud; dans la soirée, dans la matinée aussi et surtout, elles s'exposent voluptueusement aux rayons du soleil. Les jeunes Tortues vivent d'ordinaire en bonne intelligence ; elles se battent rarement, sauf lorsqu'elles se disputent une proie. J'ai remarqué de temps à autre des couples de ces petites bètes s'essayant à l'acte de l'accouplement, et, sauf la copulation, se comportant absolument comme des adultes, alors que, âgées seule- ment de quatre ou cinq ans, elles étaient encore bien loin d'être en état de se reproduire; chez ce Reptile, il en est donc comme chez certains de nos Mammifères, dont les jeunes, non eu état de s'accoupler et chez lesquels les désirs génésiques ne se font pas encore sentir, imitent innocemment et saus but précis l'acte qui perpétue l'espèce. Les jeunes Tortues ont l'ouïe très développée ; j'ai remarqué cela bien des fois. Par une soirée assez douce de la lin d'octobre, des personnes étant à causer près du terrarium, je vis, après quelques instants, plusieurs Cistudes sortir leur tête, puis leur corps du fumier, attirées par le bruit fait près de leur demeure. Pendant la mauvaise saison, la Tortue ne continue pas à se déve- lopper ; elle ne prend d'ailleurs aucune nourriture, et quelques sujets, hivernant dans un endroit un peu plus sec que d'autres, diminuent plutôt de poids. C'est donc en septembre de chaque année, qui correspond à l'époque de l'éclosion, et à la fin duquel les Cistudes sont en bon état, que je pèse et mesure mes jeunes élèves et que je prends leur signalement. 64 R. ROLLINAT A deux ans, les Cistudes pèsent de treize à vingt grammes. La colo- ration de la tète, du cou, des membres, de la queue et de la peau des flancs est la même que chez les jeunes d'un an, mais les taches jaunes sont plus vives et plus apparentes. Les écailles du bouclier commencent à être un peu rayonnées de jaune chez certains sujets, et les marginales sont bordées de jaune ; le plastron est moins noirâtre en son centre et est toujours bordé de jaune. Le bouclier, légèrement caréné, mesure 44 à 55""" de longueur et 42 à 50 de largeur ; le plastron a 39 à 50"" de long et 32 à 38 de large. La tête et le cou ont 27 à 33™'" de longueur, et la queue 23 à 26™"'. L'épiderme ou couche supérieure des écailles se détache un peu au centre des vertébrales et des costales, à l'endroit où il est le plus ancien ; en observant bien l'animal, on voit de combien s'est accrue la dimension de chaque écailledansle courant delà deuxième année. Plus tard, dans les années suivantes, la couche du dessus de la partie centrale des écailles continuant à se détacher, les rugosités ou granulations des écailles du bouclier disparaîtront peu à peu. H est toujours impossible de reconnaître les sexes à l'extérieur. En ouvrant l'animal, on voit que les organes génitaux sont très peu développés. Les os de la carapace, encore un peu souples, devien- nent de plus en plus durs. La réserve de graisse est plus considé- rable que chez les sujets d'un au. A trois ans, la Tortue pèse de vingt-deux à vingt-six grammes. Sa coloration est la même qu'à deux ans, sauf pour le plastron qui s'éclaircit de plus en plus en son centre et devient jaunâtre chez beaucoup d'individus. Le bouclier mesure quarante-cinq à cinquante-six millimètres de long et quarante-deux à quarante-neuf de large. A quatre ans, elle pèse de trente à trente-trois grammes. La gorge, les côtés de la tête, les membres et les flancs sont marqués détaches d'un beau jaune clair; chez la plupart des sujets, le plastron est devenu jaune pâle et n'a plus que quelques traces brunâtres de sa coloration noire d'autrefois. Le bouclier mesure, en moyenne, cinquante-neuf millimètres de long et cinquante-deux de large. A cinq ans, le bouclier a soixante-cinq millimètres de longeuret cinquante-neuf de largeur. A six ans, le bouclier mesure soixante-douze millimètres sur soixante deux, et, à cet âge, le plastron a soixante-quatre millimè- tres de longueur sur quarante-cinq de largeur; la tête et le cou ont quarante-et-un millimètres, et la queue, qui ne s'allonge que très OBSERVATIONS SUR QUELQUES REPTILES DE l'iNDRE 65 lentement, en a trente. Le bouclier est d'un brun noir, avec les vertébrales et les costales un peu rayonnées de jaune ; plastron jaune et brunâtre chez beaucoup de sujets. Points et taches jaunes de la tête, de la gorge, des membres, des flancs et de la queue ayant une belle coloration. Le centre des écailles du bouclier se soulève à l'endroit où il est le plus ancien ; sous lui, on observe une autre écaille ; la surface externe des écailles se soulève donc par couches n'embrassant pas la totalité de la surface ; c'est la partie la plus ancienne qui se détache et tombe. Les organes génitaux sont fort peu développés. Les testicules des mâles sont d'un blanc rose presque incolore et ne contiennent pas de spermatozoïdes ; ils sont légèrement ovales et ont à peine trois millimètres dans leur plus grand diamètre. Les ovaires des femelles sont encore fort petits ; ils ont une forme allongée de dix millimètres sur trois, et les œufs incolores et microscopiques qu'ils contiennent auraient encore besoin de nombre d'années pour fournir une poule ; les oviductes sont également fort petits. Les sacs à eau se développent normalement et servent d'appareil d'hydro- statique en attendant de jouer plus tard un rôle important, chez les femelles, au moment de la ponte. Dans le cloaque et les oviductes des femelles, on ne rencontre aucun spermatozoïde, puisque ces petites Cistudes ne sont pas en état de s'accoupler et que les organes génitaux de leurs compagnons de captivité ne renferment pas le moindre zoosperme; cependant, j'ai vu plusieurs fois les mâles de ces jeunes Tortues faire absolument le simulacre de l'accouplement, ainsi que je l'ai déjà dit. Il est encore fort difficile de reconnaître les sexes par l'examen externe de l'animal. Toutefois, le plastron, qui était d'abord bombé pendant les premiers jours qui ont suivi la sortie de l'œuf, qui, ensuite, est devenu légèrement concave chez presque tous les sujets, est maintenant à peu près plat chez les femelles, et, chez ces dernières, le cloaque est un peu plus près du bord du plastron et la queue plus faible à sa base. Ces Tortues, qui pèsent de quatre-vingts à quatre-vingt-dix grammes, ont déjà une réserve de graisse assez considérable ; cette graisse est d'un blanc cendré et deviendra jaunâtre par la suite. Par cet exposé, on peut se rendre compte de la lenteur de la crois- sance chez cette espèce. Peut-être, à l'état sauvage, l'animal se développe t-il plus vite. Je dois pourtant dire que des Tortues de différents âges, qui m'ont été apportées de Brenne et dont j'ai examiné attentivement les couches d'accroissement des écailles de Méin. Soc. Zool. de Fr., 1902. bb R. nOLLINAT la ijoîte osseuse, ce qui peut donner une idée approximative de l'âge de chaque bète, ne m'ont pas semblé beaucoup plus déve- loppées que les miennes, élevées en captivité. J'ai aussi élevé en terrarium des jeunes Tortues nées en Brenne, en pleine liberté. Elles ne se sont pas développées plus vite que celles nées chez moi. J'en prends une comme exemple. Voici les dimensions de son bouclier au moment de la capture, alors qu'elle était dans sa deuxième année, et pendant les années qui suivirent. Cette bAte m'est apportée le 26 avril 1893, par un pécheur de Sang- sues qui l'avait capturée dans un étang des environs de Nurei. Elle semble être dans sa deuxième année, et n'est pas très forte pour son âge, car son bouclier ne mesure que 32 mm. de long et 30 de large. En septembre 1894, c'est-à-dire à trois ans, son bouclier a 45 mm. sur 40 ; à quatre ans, 49 mm. sur 44 ; à cinq ans, 38 mm. sur 50; à six ans, 71 mm. sur 62; à sept ans, 80 mm. sur 70; à huit ans, 95 mm. sur 83 ; à neuf ans, 100 mm. sur 84; en septembre 1901, par conséquent, à dix ans, le bouclier, toujours un peu caréné, mesure 108 mm. sur 90. Les écailles du bouclier de cette Tortue de dix ans ont plus de relief que celles des adultes ; par suite de la chute du dessus des écailles, les traces des premières augmentions en surface ont entièrement disparu et il serait main- tenant impossible de reconnaître son âge en comptant les couches. La coloration est la même que chez les adultes ; la bête pèse deux cent vingt cinq grammes. A dix ans, la Cistude peut être mise en liberté dans un jardin bien clos ; sa carapace a la dureté suffisante pour porter un certain poids sans fléchir, et une personne qui marcherait dessus par mégarde ne l'écraserait certainement pas. Il est, je crois, prudent de la conserver en terrarium pendant quelques années encore, car elle est exposée, quel que soit son sexe, aux entreprises des mâles adultes qui la noieraient facilement. Des bêtes de dix à douze ans, capturées dans les étangs des environs d'Argenton et placées dans mon jardin, disparurent au bout de quelque temps, tuées je ne sais comment, ou emportées ailleurs lors de l'enlèvement des détritus, ou bien encore brûlées sous les amas de plantes mortes que des employés n'avaient pas pris la précaution de visiter minutieuse- ment, malgré mes recommandations, avant d'y mettre le feu. D'après ce que j'ai pu observer sur des Tortues adultes, les mâles sont en état de s'accoupler avant les femelles, vers quinze ans peut- être ; mais quand même ils auraient eu réserve, depuis plusieurs années déjà, les spermatozoïdes nécessaires à la fécondation, ils ne OBSERVAtlONS SUR QUELQUES REPTILES DE L*INDRE 67 pourraient embrasser de leurs ongles le bouclier des femelles vrai- ment aptes à la reproduction ; ils devront attendre encore pour que la copulation puisse avoir lieu. Quant aux femelles, il leur faut sans doute dix huit à vingt ans avant d'être en état d'opérer leur première ponte. Longévité. — L'embryon de cette espèce se développe assez vite, en trois mois, un peu moins ou un peu plus ; on ne peut donc tirer un pronostic avantageux sur la longévité de la Cistude, si on se borne à cette observation. Mais ensuite le développement du petit être est d'une extrême lenteur ; il lui faut des années et des années pour être adulte et en état de se reproduire ; je crois donc pouvoir affirmer que la Tortue de Breune atteint un âge considérable, et que le nomade qui l'emporte dans son sac, ou le petit berger qui la taquine et s'amuse de ses ellorls, manipule parfois une vénérable bête. D'ailleurs, j'ai lu, je ne sais où, que certains Chéloniens appar- tenant, il est vrai, aux grandes espèces, avaient vécu pendant plus de cent ans dans des jardins zoologiques ; notre petite Cistude indi- gène compte peut-être aussi parmi les êtres doués du privilège de vivre pendant plus d'un siècle. Autrefois, des Tortues plus grandes ont peuplé la contrée habitée aujourd'hui par ce modeste Ghélonien. On a trouvé les restes de Tortues terrestres ou fluviatiles d'assez grande taille, mêlés aux ossements fossiles des Crocodiles de la marnière du domaine des Prunes, près Argenton. 68 GEPH YROCRINUS GRIMA LDII, CRINOÏDE NOUVEAU PROVENANT DES CAMPAGNES DE LA PRINCESSE ALICE PAR R. KŒHLER * F.-A. BATHER Le Crinoïde qui fait l'objet de cette note a été dragué le 15 juillet 1901, par la Princesse Alice, dans les parages des Açores, à une protondeur de 1786 mètres. Long. 0. 20^14' ; Lat. N. 27o41. Statiou 1123. Un seul échantillon a été recueilli. L'étude minutieuse (|ue nous avons faite de ce Crinoïde nous a conduit, comme nous l'expliquerons plus loin, à le placer dans la famille des Hyochinidés, à côté du genre Hyocrinus, dont il s'éloigne d'ailleurs par plusieurs caractères importants. La découverte d'un nouveau représentant des Hyocrinidés otïre un très grand intérêt, car cette famille n'était jusqu'à ce jour connue que par le seul genre Hyocrinus, lequel à son tour ne renfermait qu'une espèce unique, VH. BethelUanus, trouvée par le Challenger. Une deuxième espèce d'Hyocrinus, draguée par la Deutsche Tiefsee Expédition dans les mers antarctiques, par 4636 mètres de profondeur, a été indi- quée, mais elle n'a pas encore été décrite (1). L'échantillon de ta Princesse Alice comprend la thèque complète, la plus grande partie des bras et la tige qui n'est conservée que sur une longueur de 45™"™ environ. La thèque, qui est composée de la patina et du tegmen, offre les dimensions principales suivantes : hauteur maxima 1^^^\ largeur maxima 5mm2 ; largeur à la base immg. Patina. — Elle a la forme d'un cône tronqué, ayant 4,5mm de hauteur et faisant un angle de 60°. Elle est composée des basa les et des radiales. Les basales sont complètement soudées de manière à former une coupe de 2™*» de hauteur sans la moindre trace de suture. La por- tion supérieure, distale ou adorale, de cette coupe va en s'élargis- (1) Chun, Aus den Tiefen des Weltmeeres, 1900; pp. 226 et 486. CRlNOÏbE NOUVEAU DES CAMPAGNES DE LA PRINCESSE-ALICE 69 sant sous un angle de 62°, mais elle est légèreineut déprimée dans les interradius ; sa région inférieure constitue un cylindre court, dont le bord proximal offre une couronne d'une dizaine de petits tubercules coniques. Les radiales sont au nombre de cinq. Leurs dimensions princi- pales sont les suivantes : hauteur suivant le radius jusqu'au rebord de la facette . 2™«i2 hauteur sur la suture interradiale ^'^m^ largeur à l'extrémité inférieure Imm7 largeur à l'extrémité supérieure 2™™5. Le bord inférieur de chaque radiale est légèrement convexe et repose sur la coupe formée par les basales. Le bord supérieur offre une facette concave de Immg à 2^^ de large, complétée par des épaulements inclinés. Dans les radius, le cercle des radiales est moins incliné que la partie supérieure du cercle des basales ; dans les interradius, il se montre déprimé, surtout dans la partie infé- rieure, et ces dépressions interradiales se continuent avec des dépressions analogues du cercle des basales. Chaque radiale offre donc un dos arrondi formant une arête large qui se continue avec les brachiales et qui passe en bas au cercle des basales. Immédiate- ment en dessous du point de réunion des épaulements des radiales adjacentes, la dépression interradiale est interrompue par une légère élévation qui correspond probablement à l'emplacement de la commissure nerveuse radiale. Les bras restant rattachés aux cinq radiales, aucune facette de ces dernières n'est découverte, mais il n'y a aucun doute que ce ne soit une vraie surface articu- laire, ainsi que le prouvent le bord extérieur taillé en chanfrein, la présence d'un ligament dorsal, l'apparence de crête fulcrale qu'on aperçoit quand on regarde le bras de côté, enfin l'état de forte contraction que paraissent avoir les muscles ventraux, contraction qui a eu pour effet de rapprocher les bras et d'abaisser les angles ventro-latéraux proximaux de la première brachiale en dessous du rebord de la facette. Bras. — Les bras sont libres, non ramifiés ; ils sont formés de brachiales unies normalement par paires syzygiales dans lesquelles l'article épizygal, à partir de la quatrième brachiale, porte une pinnule (1). (1) Par le mot syzygie, nous n'entendons qu'une forme de jointure, et nous comptons chaque élément brachial primitif pour une brachiale. Voir F.-A . Batbek, The term Syzygy. Zool Ànz., XIX, p. 37, fév. 1896. 7o R. KŒHLER ET F. -A. BATHER Aucun bras n'est complet. Les parties qui restaient attachées, quand l'échantillon nous a été remis, étaient les suivantes : bras antérieur, 30 brachiales ; longueur 30"""^ bras antérieur gauche, 14 brachiales; longueur . . . 14"ira5 bras postérieur gauche, 14 brachiales ; longueur . 14mm3 bras postérieur droit, 3 brachiales; longueur .... 3™™4 bras antérieur droit, 8 brachiales; longueur .... 9™»». La longueur totale du bras antérieur devait atteindre au moins 40 et peut-être même 50i»™. La disposition normale des syzygies offre toutefois quelques exceptions. Dans le bras anté- rieur et dans le bras antérieur droit, les brachiales 3 et 4 pa- raissent unies par une articula- tion ordinaire, mais la quatriè- me brachiale porte, comme d'ha- bitude, la première pinnule, et, au delà, les bras offrent la con- formation normale. Dans le bras postérieur gauche, les brachiales 1, 2 et 3 sont unies par syzygies ; les brachiales 3 et 4 sont reliées par une articulation ordinaire; les brachiales 4 et 5 forment la première paire syzygiale à pin- nule et, au delà, les articles se succèdent conformément à la règle générale. Dans le premier cas, l'anomalie consiste en ce que l'union, au lieu d'être faite par syzygie, se fait par articula- tion ; dans le deuxième, un arti- cle surnuméraire s'intercale dans la première paire syzygia- le, mais celle-ci, au lieu de s'al- longer de moitié, n'atteint que 3™'» de longueur, tandis que sur les bras voisins, elle est de 2ni™4. Dans chacun de ces trois bras irréguliers, la pinnule proximale part du côté gauche du bras, tandis que sur le bras gauche anté- rieur, qui d'ailleurs est normal partout, elle part du côté droit. Fig. 1. — Vue antérieure de la thèque et des parties proximales des bras et de la tige. Les huit premiers arti- cles de la tige sont marqués par les chiffres I-IV qui indiquent leur ordre de grandeur. G = 5 — Lettres commu- nes à toutes les figures : anib, plaques ambulacraires ou tectrices ; B, cercle formé par les basales; df, fossette dorsale; iÀmb, plaques interambula- craires; lig, fossette ligamentaire; m, membrane entre le tegmen et les brachiales proximales ; mf, fossette musculaire; 0, plaques orales; pn, articles pinnulaires; R, radiales; .s, syzygie; sv, sillon subvectif. CRINOÏDE NOUVEAU DES CAMPAGNES DE LA PRINCESSE-ALICE 71 Les brachiales décroissent progressivement en longueur, en lar- geur et en épaisseur, depuis la base du bras jusqu'à sou extrémité. La largeur, vue de dos, et l'épaisseur, mesurée le long de l'axe dorso- veutral, sont toutes deux un peu supérieures à la longueur. Toutes les brachiales sont légèrement rétrécies en leur milieu, surtout dans la région dorsale qui forme une arête arrondie, tandis que les parties ventrales qui conservent à peu près la même largeur, tendent à former des saillies La largeur est moindre au niveau de la syzygie que sur les articulations adjacentes. Les deux brachiales proximales diffèrent des suivantes par leur largeur relativement plus grande et leur épaisseur beaucoup moindre au niveau de leur réunion avec les radiales ; mais comme elles suivent la courbe du tegmen, leur épaisseur augu)ente vers leur extrémité distale. Voici quelques dimensions relevées sur le bras antérieur gauclie, qui est normal : brachiale 1 : largeur à l'extrémité proximale 2^™; » largeur à l'extrémité distale i^'^3; brachiale 2 : largeur à l'extrémité distale Imm7- brachiale 7, hypozygale : larg. à l'extrémité proximale. Imm3; )) .) largeur à l'extrémité distale . l'»'». La facette articulaire pour la pinnule s'étend obliquement et sous un angle passablement aigu, du bord distal à peu près au milieu de l'article épizygal. La facette articulaire distale de l'article épizygal est inclinée en seus inverse de celui de la facette articulaire de la pinnule ; cette disposition est particulièrement marquée vers les extrémités des bras où les articles épizygaux tendent à prendre la forme d'articles axillaires et où l'arête dorsale du bras ondule d'un côté à l'autre. Les brachiales s'unissent, soit par syzygie, soit par articulation. La figure 3, A montre la facette syzygiale de la troisième brachiale du bras postérieur droit. La coupe de cet article rappelle un triangle équilatéral à sommet arrondi, à côtés latéraux légèrement convexes; sa base offre au contraire un angle rentrant limité par des bords convexes dont la courbe s'accentue vers le sillon ventral médian. Le canal axial occupe le centre du triangle (complété). La surface de la facette s'incline légèrement, aussi bien vers le côté dorsal que vers le côté ventral, à partir d'une ligne transversale située à égale distance entre le canal axial et le sommet du triangle. Il y a aussi une inclinaison légère vers les côtés du sillon ventral. La ng.3,B représente la surface articulaire de l'extrémité distale d'un article épizygal (brachiale 14) du bras antérieur gauche. Ici, la 72 R. KOEHLER ET F. A. BATHBR pinnule part à gauche, mais sa facette est tout à fait distincte de la facette brachiale et elle est séparée de celle ci par un espace lisse. On peut retrouver sur cette facette brachiale toutes les parties d'une articulation perforée ordinaire : une fossette dorsale, une crête fulcrale avec canal axial, des fossettes ligamentaires et des fossettes musculaires. La fossette musculaire de droite forme une aire semi- circulaire aboutissant au sillon ventral, tandis que celle de gauche occupe un champ plus réduit en dessous de la facette articulaire delà pinnule. La largeur des pinnules à leur naissance est un peu supérieure à la moitié de celle de la brachiale correspondante ; la largeur décroît graduellement à mesure qu'on se rapproche du sommet. Les premiè- res pinnules (proximales) de chaque bras sont les plus longues : elles sont formées de 12 à 15 articles sur une longueur totale de 9 à lO"»"". Ces arti- cles pinnulaires sont plus épais que Fig. 2. - A, Partie inférieure du '«ngs et leur coupe rappelle un trian- cercle formé par les basales et gle ; ils sont légèrement concaves sur articles supérieurs de la tige; la face dorsale entre les sutures mais on voit les articles pédoncu- jgs côtés sont presque droits. Sur la laires de quatrième grandeur troisième pinnule du bras antérieur, de formation récente. G = 12.3 ... . , . ,, n o - B, Face distale d'un article quatre articles pinnulaires (les 2», 3», internodai, à l'extrémité de la 4° et 5») ont ensemble une longueur de partie qui subsiste de la tige. 3">°^4 sur une largeur d'environ O"^""?. G = 9*j Dans chaque pinnule, le 1" article est articulé avec la brachiale épizygale et le 2» article avec le 1°, mais les jointures suivantes paraissent plus simples et plus solides (fig. 4). On remarque qu'à l'union du 2» article pinnulaire avec le lo, la pinnule se courbe brusquement en dessus et subit une torsion de telle sorte que ses côtés plats se trouvent disposés parallèlement à la face dorsale des bras ; ainsi les pinnules paraissent-elles plus larges qu'elles ne le sont en réalité. Il peut arriver que certains articles des pinnules se fusionnent ensemble. Ainsi la troisième pinnule du bras antérieur gauche est formée de 10 articles; mais les 4t> et 6» articles offrent vers les deux tiers de leur longueur, une ligne transversale foncée, rejoignant, sur le 6o article, une légère encoche du bord ventral ; sur le 7° article, on retrouve une ligne identique, au tiers de la longueur. De tels articles peuvent être considérés comme analogues aux CRINOÏDE NOUVEAU DES CAMPAGNES DE LA PRINCESSE ALICE 73 articles composés qu'on rencontre communément dans les bras des Crinoïdes paléozoïques et dans la tige du Bathycrinus. Tegmen (fig. 1 et 3, A). - La hauteur du tegmen est d'environ 3min5 à partir de l'angle des radiales ; en d'autres termes, il s'élève jusqu'au tiers de la 4» brachiale. Il est formé par les plaques orales et les plaques interambulacraires et il offre le tube anal dans l'interradius postérieur. Les plaques orales, au nombre de cinq, entourent la bouche centrale et se trouvent situées entre les sillons subvectifs. Elles ont une forme subtriangulaire, avec un sommet arrondi ; la forme de leur base dépend de celle des plaques interambulacraires adja- centes. La surface de chaque plaque orale peut être divisée en trois aires triangulaires qui se réunissent en un point situé un peu Fig. 3. — A, Tegmen vu d'en haut et du côté du bras postérieur droit; celui-ci est brisé au niveau d'une syzygie. La plaque orale postérieure, avec son tuber- cule perforé, se voit près de l'anus. G = 6 — B, Surface articulaire distale d'un article épizygal (14" brachiale du bras antérieur) G =5 . au-dessus du centre. L'aire limitée par la base est par conséquent la plus grande ; elle continue la courbure générale du tegmen : vers son sommet, en un point qui correspond à peu près au centre de la plaque orale, cette aire offre un tubercule, qui dans la plaque orale postérieure tout au moins, est percé d'un pore. Les autres aires triangulaires s'étendent obliquement des bords proéminents des sillons subvectifs jusqu'à l'aire qui vient d'être décrite et elles se rencontrent suivant une ligne médiane distincte. Les plaques orales offrent de légères variations de grandeur : les deux plus grandes sont la postérieure et la postérieure droite, dont la lon- gueur, de la base du sommet, est de l^m^. Ces plaques sont 74 R. KŒHLER ET F. -A. BATHER disposées comme d'habitude, en tant que la plaque droite et la postérieure gauche ue se touchent pas ; mais comme la plaque antérieure droite est petite et n'arrive pas au centre du cercle que forment les orales, la disposition triradiée ordinaire des sillons subvectifs est modifiée dans notre échantillon. Les plaques interambulacraires sont imperforées, polygonales, de forme et de taille variables ; il y en a une douzaine dans chaque espace interbrachial (fig. 1 et 3, A). Elles sont comprises dans un tégument flexible et leur minceur permet d'apercevoir le contenu foncé de la cavité viscérale. Aussi leur teinte foncée contraste-t-elle avec la coloration claire de la patina et des plaques brachiales. Ceci s'applique, bien entendu, à l'exemplaire en alcool, la couleur sur le vivant n'ayant pas été notée. Le tube anal est conique (fig. 3, A) ; il se dégage insensiblement de l'aire interbrachiale postérieure, s'infléchit vers le côté interne du bras postérieur gauche et atteint une hauteur dun peu moins d'un millimètre au-dessus du pôle oral : son extrémité distale libre offre une longueur d'environ l^rag. Les plaques qui le limitent deviennent plus allon- gées vers son extrémité, mais elles ne montrent aucun arrangement régu- lier. Les plaques interambulacraires ne sont pas attachées aux bords des pre- mières plaques brachiales, mais elles passent au dessous d'elles. Cependant, le sillon subvectif ne va pas directement, entre les plaques inter- ambulacraires, de la bouche à la base des bras ; il est porté par une membrane mince, et, à ce qu'il nous semble, non garnie de plaques, qui est la continuation du tégument du tegmen. Cette membrane unit les trois premières brachiales au tegmen en suivant le radius et elle forme une expansion triangulaire située entre le sillon, le bras et le tegmen. Le sillon, ainsi soutenu comme un pont suspendu, s'étend donc du bord de la plaque orale jusqu'à la base de la quatrième brachiale. Une' disposition analogue n'a encore été constatée chez aucun Crinoïde jusqu'à ce jour. Bien qu'aucune plaque ambnlacraire ou adambulacraire ne prenne part à la constitution du tegmen en raison de la disposition parti- culière des sillons ambulacraires que nous venons de décrire, on observe cependant des plaques tectrices (ambulacraires) sur toute Fi^. 4.— Portion d'un bras, mon- trant ^in^-e^tion de la pinnule et les plaques tectrices. G = 9. CRINOÏDE NOUVEAU DES CAMPAGNES DE LA PRINCESSE-ALICE 75 la loûgueur des silloDS, excepté entre les plaques orales. Mais ces plaques sout si délicates qu'il est difliriled'en reconnaître la forme exacte ; elles paraissent être irrégulières et certaines d'entre elles sont relativement grandes, car il peut y en avoir 2 ou 3 par article pinnulaire. C'est dans leurs intervalles que passent les tubes ambu- lacraires qui sont très petits (fig. 4). Tige. — La tige est composée d'articles circulaires dont la longueur atteint 0™™ 5 et le diamètre 0™"i7 en moyenne ; ces articles deviennent un peu plus larges dans la région distale et considéra- blement plus larges et plus courts dans la partie immédiatement proximale. On peut distinguer des articles d'au moins quatre grandeurs différentes, surtout dans la moitié proximale du pédon- cule : les plus gros, qui représentent les articles de première gran- deur, peuvent être appelés articles nodaux; les autres, qui représen- tent les deuxième, troisième et quatrième grandeurs suivant leur taille décroissante, peuvent être appelés internodaux. Les huit articles complets les plus voisins de la thèque occupent ensemble une longueur de lmm9 (fig. 1). Le 2° et le 8» sont des articles nodaux et leurs diamètres respectifs sont de l™°i, 2™™ et ImmO ; le 1'^, le 4° et le 6° sont de deuxième grandeur et ils sont moins longs et moins larges ; le 3°, le 5» et le 7", encore plus petits, sont de troisième grandeur. Entre le 40 et le 5°, entre le 6° et le 7° et entre le 7^ et le 8t>, on aperçoit des parties intercalaires représentant des articles de quatrième grandeur. Quand ou examine le premier article sous un bon éclairage, on distingue également en dessus et en dessous de cet article, une légère suture et ces deux sutures correspondent à deux articles naissants de quatrième grandeur (tig. 2, A). Dans cette partie supérieure de la tige, les articles nodaux et ceux de deuxième grandeur, portent chacun une couronne de dix tubercules, ideuti- ques, comme forme et comme situation, à ceux du bord inférieur de la coupe formée par les basales, mais moins proéminents sur les articles nodaux et encore moins proéminents sur les autres. Les articles de troisième ordre n'offrent que de légères dépressions correspondant aux dépressious qui séparent les tubercules sur les autres articles. La présence de ces tubercules produit sur cette région de la tige une apparence de cannelures longitudinales et ces cannelures sont radiales et interradiales. Partout les tubercules sont lisses et ils n'offrent pas trace de facettes pouvant porter des cirres qui d'ailleurs ne sont pas représentés du tout. La partie de la tige qui suit cette région proximale se carac- térise, en premier lieu, par un allongement de tous les articles, 76 R. KŒHLER ET F. A. BATHER mais particulièrement de ceux de quatrième ordre ; les entre- nœuds deviennent aussi plus longs; les articles nodaux se trouvent placés à des intervalles respectifs de S""™, 4™™, 4™°^ et 3™™ et ainsi de suite, tandis que tous les articles internodaux tendent à prendre la même longueur et le même diamètre les uns et les autres. Le der- nier article nodal occupe, avec les six articles internodaux qui le précédent (et qui sont de troisième et de quatrième ordre, peut- être même de cinquième), une longueur de 3m«>7, ce qui fait une moyenne de Om™o pour chaque article internodal et de O"»™? pour l'article nodal. Une deuxième différence consiste dans la diminution progressive de la taille des tubercules, de telle sorte que les articles nodaux finissent par ne plus en offrir que de simples traces : mais les dépressions qui séparent les tubercules restent distinctes jusqu'au bout de la partie conservée du pédoncule ; il est vrai que vers cette extrémité, on ne les aperçoit qu'à la condition de prendre un éclairage tout à fait favorable. Nous n'avons pu examiner minutieusement que la surface distale d'un entre-nœud (fîg. 2, B), mais il n'y a pas de raisons de supposer que les autres jointures aient un caractère différent. Cette face offre, à sa périphérie, de très légers sillons radiaires qui ne sont pas visibles quand on regarde la jointure par le côté (du moins sur l'échantillon en alcool). Du reste, la surface est plane, sauf au centre où l'on trouve une dépression dont le diamètre est le cinquième de celui de l'article. Il est probable que le canal axial se trouve au fond de cette cavité, mais les contours ne sont pas distincts. AFFINITÉS Notre Crinoïde est à base, soit monocyclique, soit pseudo-mono- cyclique, mais sans dissection microscopique la question ne peut être tranchée d'une manière définitive. Si le Crinoïde est monocycli- que, la seule famille à laquelle on [puisse le comparer est celle des Hyocrinidés, dont le seul genre connu, VHyocrinus, est le seul repré- sentant vivant des Monocydica inadunaîa (1). Si le Crinoïde est pseudo- monocyclique (cryptodicyclique), nous devons d'abord écarter tout rapprochement avec les Flexibilia, car, dans notre (1) La classiflcation des Crinoïdes, prise comme point de départ de cette discus- sion, est celle que F. -A. Bather a proposée dans le tome III du Treatise of Zoo- logy rédigé par E. Ray Lankester, Londres, 1900. CRINOÏDE NOUVEAU DES CAMPAGNES DE LA PRINCESSE-ALICE 77 exemplaire, les brachiales ne sout pas incorporées dans le calice (coupe dorsale), et il n'y a aucune raison suflisante pour admettre la présence d'un article proximal persistant dans la tige. L'article que nous avons considéré plus haut comme le premier article de la tige, est certainement de deuxième grandeur et il semble séparé des basales par le rudiment d'un autre article. La région proximale, légèrement élargie de la tige, ne peut être confondue avec le cône proximal des Apiocrinidés, puisqu'elle renferme incontestablement des articles à différents états de croissance. On pourrait penser que les tubercules marginaux du cercle formé par les basales indiquent la fusion d'une pièce proximale avec les basales, mais on cherche- rait vainement un argument en faveur de cette idée, dans la struc- ture, soit de notre Grinoïde, soit des Crinoïdes de l'ordre des Flexihiiia pinnata. Si nous cherchons une comparaison avec les Dicyclica inadunata, nous devons évidemment écarter tout d'abord les Peutacrinidés et la comparaison n'est possible qu'avec le seul genre Bathycrinus, à moins qu'on ne place le Rhizocrinus dans cet ordre plutôt que parmi les Bourgueticrinidés. La comparaison se restreint donc aux trois genres Hyocrinus, Bathycrinus et Rhizocrinus. La ressemblance à peu près unique qu'on puisse trouver avec ces deux derniers genres, consiste dans les caractères des bras et elle est plus marquée avec le Rhizocrinus dont les bras ne sont point ramilles. Dans les deux genres, les articles brachiaux sont unis en paires, soit par syzygie (Rhizocrinus) soit par articulation trifasciée [Bathycrinus). Mais ce mode d'asso- ciation n'est pas particulier à ces deux genres et les syzygies de notre Grinoïde sont tout à fait différentes de celles que présentent le Bathycrinus et le Rhizocrinus. D'autres points de ressemblance peuvent être trouvés dans la présence de petites plaques orales dans le genre Rhizocrinus et dans une espèce de Bathycrinus, ainsi que dans l'union intime des basales dans le g. Rhizocrinus et leur fusion dans le g. Bathycrinus. D'un autre côté, ces deux genres différent de notre Grinoïde, par leur tige très caractéristique, par la forme et les dimensions des facettes radiales, par la hauteur à laquelle naît la première pinnule et par la structure du tegmen. Les ressemblances avec le g. Hyocrinus sont plus nombreuses et importantes. La tige offre la même structure générale, et les faces d'union des articles, notamment, sont identiques et tout à fait caractéristiques. Dans le g. Hyocrinus, les bras ne sont pas ramifiés et les brachiales sont réunies par syzygie en groupes de 78 R. KœHLER Et F. A. BATHER deux ou trois. Daus ce même genre, le tegmen est formé par les plaques iuterambulacraires et par les plaques orales, et la ressem- blance de ces dernières avec celles de notre Crinoide est frappante. Les sillons subvectifs paraissent quitter le tegmen au niveau du bord des plaques orales, mais au lieu d'être portées jusqu'aux bras par une membrane, elles sont supportées par de très longues plaquettes qui représentent, soit une extension des plaques tectrices, soit des plaques marginales adanibulacraires. L'examen nouveau que l'un de nous a pu faire du type original de VH. bethellianus, a révélé quelques autres ressemblances de moindre importance. Mais les différences sont considérables ; les plus importantes consistent dans la fusion des basales chez notre Crinoide, l'épaisseur plus grande des plaques de la coupe, l'état plus réduit des plaques ambulacraires, la forme et la disposition des pinnules. On pourrait encore mentionner d'autres différences d'ordre moins important, telles qu'on en rencontre entre espèces d'un même genre, mais celles que nous venons d'indiquer justifient amplement une séparation générique. Les ressemblances avec VHyocrinus nous paraissent suffisantes pour placer notre Crinoide dans la famille des Hyocrinidés ; mais d'autre part, il se distingue nettement du g. Hyocrinus et son introduction dans la famille nécessite une modification de la diagnose des Hyocrinidés. Nous proposous donc d'établir cette diagnose de la manière suivante : HYOCRINIDAE Monocyclica Inadnnata dont les basales sont au nombre de trois ou sont complètement fusionnées; bras distincts, non ramifiés; brachiales unies par syzygie eu groupes de deux ou de trois, dont l'article épizygal porte une pinnule ; tegmen formé de cinq plaques orales subtriangulaires et de plaques interambulacraires distinctes, la plaque orale postérieure étant constamment perforée par un pore aquifère que les autres plaques orales offrent habituellement ; tube anal conique, arrivant juste au-dessus du niveau du tegmen; articles de la tige courts, cylindriques, reliés par des faces lisses ou légèrement striées, offrant une dépression centrale; pas de cirres; mode d'attache inconnu. Cette famille comprend actuellement deux genres, le genre Hyocrinus déjà connu et le nouveau genre auquel nous proposons d'appliquer le nom de Gephyrocrinus (de yé^upa pont), pour rappeler CRINOÏDE NOUVEAU DES CAMPAGNES DE LA PRINCESSE-ALICE 79 le caractère des sillons subjectifs qui sont soutenus par une sorte de pont. La diagnose de ce genre est la suivante : Gephykocrinus geu, nov. Hyocrinidé dont les basales sont fusionnées ; brachiales réunies en paires syzygiales ; sillons subvectifs supportés par une mem- brane s'éteodant des plaques orales aux quatrièmes brachiales; plaques interambulacraires non perforées. Le type du genre (lephyrocrinm est le G. Grimaldii décrit ci-dessus : nous prions S. A. S. le Prince de Monaco de vouloir bien en accepter la dédicace. 80 REVISION DES SEPIOLIDAE L. JOUBIN Professeur à l'Université de Rennes. Ayant eu depuis quelques années un nombre assez considérable de Céphalopodes à étudier, provenant des expéditions de la Princesse- Alice, du Sihoga, de la collection Eudel, de divers musées, j'ai maintes fois constaté dans quel embarras l'observateur se trouve lorsqu'il n'a pour faire ses déterminations que des documents incomplets et épars dans des mémoires écrits en langues diverses (par exemple, ce qui est très fréquent, en danois). Trop souvent, les descriptions sont imprécises, les unes trop courtes, les autres diffuses, les genres et les espèces sont mal délimités, et n'ont pas dans les divers auteurs la même compréhension. J'avais cherché, afin de simplifier mes recherches, et pour mon usage personnel, à compiler un catalogue destiné à m'éviter des pertes de temps considérables et pouvant m'amener rapidement à une classification naturelle et pratique des diverses familles de Céphalopodes. Je me décide à publier celui que j'avais établi pour les SepioUdae ; il a été fait à l'aide de nombreux documents recueillis sur de nombreux échantillons et d'après les descriptions des auteurs. J'espère que les naturalistes qui s'intéressent aux Céphalopodes tireront quelque profit de cette modeste revision, qui leur évitera, tout au moins, des recherches aussi longues que fastidieuses. L'examen de tous les matériaux mis à ma disposition et l'étude des travaux de mes prédécesseurs m'avait conduit à une classifica- tion qui ne différait pas beaucoup (sauf pour les Sepiadmii) de celle que récemment mon savant collègue de Bergen, M. Appellôf, a proposée dans son important mémoire sur les Céphalopodes deTer- nate. Je n'hésite donc pas à l'adopter presque textuellement. Je retranche seulement la première sous-famille, celle des Sepiadarii ; non pas que je n'approuve la place que lui attribue Appellôf; mais je préfère laisser de côté des animaux que je n'ai pu étudier et qui constituent une branche un peu aberrante de la famille. Je me res- treins donc aux SepioUdae, en leur donnant les limites des anciennes Sepiolidées [Sepiolini de Steenstrup) telles qu'on les comprenait avant que Appellôf y ait ajouté les Sepiadarii. Le petit tableau ci-dessous donne une idée des rapports de ces divisions entre elles. soudé à la Sepioladae I lête Manteau non soudé à la tête REVISION DES SEPIOLIDAE 81 Bras ventral gauche heclocotylisé Sepiadarii I Bras dorsaux / A. Sepiolini j I hectocoty lises \ B. Beteroteuthinae { ' { ) Sepiolidae ( C. Rossiae \ Laissant donc de côté les Sepiadarii, je suivrai pour le reste presque exactement la classification d'AppELLôF que j'ai cependant légèrement modifiée eu quelques détails secondaires. Je l'ai con- densée en un tableau (page 82) qui est, en quelque sorte, le résumé de ce mémoire. Avant de commencer Texposé des Sepiolidae, je crois devoir remercier les personnes qui ont bien voulu m'aider, soit par l'envoi de matériaux, soit par les déterminations qu'elles ont bien voulu revoir, soit par le prêt de livres que je ne pouvais arriver à me procurer. Ce sont : S. A. le Prince de Monaco, le Professeur iMax Weber, d'Amsterdam; le professeur Hoyle, de Manchester; le profes- seur Appellof, de Bergen, le professeur Jensen, de Copenhague ; le professeur Viguier, d'Alger, le professeur Pruvot, directeur du Laboratoire Arago; le professeur Delage, directeur de la Station de Roscofï. Le matériel que j'ai pu examiner m'a été donné ou prêté par ces naturalistes ; je me suis procuré également un grand nombre d'échantillons dans des localités très diverses des côtes de France. Je dois maintenant avertir le lecteur que dans les descriptions d'animaux que j'ai prises dans divers auteurs, je ne me suis pas astreint à reproduire textuellement leur langage. Ce n'est donc pas une citatio» littérale que l'on trouvera à chaque espèce. Souvent j'ai copié des passages entiers, surtout lorsqu'il s'agissait d'animaux que je n'avais jamais vus. Mais le plus souvent j'ai simplifié les descriptions et supprimé des détails inutiles. J'ai, notamment, presque toujours enlevé les descriptious de couleurs sur lesquelles certains auteurs s'étendent complaisamment. J'ai constaté maintes fois eu effet que ces colorations n'ont aucune fixité chez les animaux vivants el qu'un même animal peut être tantôt décrit comme très clair, tantôt comme très foncé. A plus forte raison, quand leur étude est faite sur un des animaux conservés, les détails de colorations ne signifient plus rien, car elle varie avec la nature du liquide conservateur ou fixateur, avec le temps que les échantillons y ont passé. Meni. Soc. Zool. de Fr., 1902 xv, — 6. Sa L. JOUBIN J'ai supprimé aussi les tableaux de mesures des échantilloDS. 5 o - 'a, 6 ^ a . S < Autant ils sont utiles lorsqu'il s'agit de décrire une espèce nouvelle, REVISION DES SEPIOUDAE 83 autant ils ne servent plus lorsqu'il y a un bon nombre d'échantil- lons connus, car alors on peut en tirer une moyenne et établir les proportions des parties entre elles, ce qui est le point capital. Il résulte de ces observations que ces diagnoses ou descriptions ne sont pas des traductions ou des citations textuelles, d'autant plus que maintes fois j'ai corrigé, dans la description donnée par un auteur, soit des erreurs, soit des passages trop vagues, qui modi- fient profondément la description originale. Comme je renvoie tou- jours au texte primitif par un numéro correspondant à un index bibliographique, il sera très facile de retrouver tous les détails en cas de besoin. SEPIOLIDAE Tryon. Céphalopodes, dibranchiaux, décapodes, myopsidés. Corps en forme de bourse, arrondi en arrière, jamais fusiforme; pourvu de deux nageoires toujours distinctes, ne se soudant pas l'une à l'autre, arrondies, insérées sur les côtés du corps. Coquille très grêle, mince, beaucoup plus courte que le manteau, pouvant manquer. — Le manteau est tantôt soudé à la nuque par une bride cutanée, tantôt libre dorsalement, mais alors pourvu d'un organe adhésif spécial. Tentacules plus longs que les bras, toujours pourvus de ventouses, presque toujours très petites, à leur extrémité seule- ment. — L'hectocotylisation n'intéresse ({ue les premiers bras dorsaux (un ou deux). Nota. — Cette division des Sepiolidae correspond aux anciens Sepiolini de Steenstrup, mais comme celle-ci a été employée avec une autre acception, je crois devoir, pour éviter toute confusion, y renoncer. A. SEPIOLINI Appellôf (non Steenstrup). Bord dorsal du manteau soudé à la tête. Pas de cartilage adhésif nuchal (Appellôf). Genre L SEPioLA(Roiidelet, 1554) Leach, 1817. Diagnose du genre : Tète, aussi large que le corps et attachée dor- salement au manteau par une bride étroite. Yeux petits, médiocre- ment saillants, pourvus d'une paupière cutanée inférieure. Corps court, ovale ou oblong, arrondi en arrière. Nageoires rondes, latéro- dorsales. S4 L. .TOUBIN Tentacules longs, rétractiles, à palette dilatée, à ventouses petites, en plusieurs séries. Bran coniques, subégaux, à ventouses en deux rangées, quelquefois en quatre rangées à la pointe. Ombrelle réduite. Bras dorsal gauche hectocotylisé, le troisième bras est plus gros chez les rnàles que cliez les femelles, et incurvé vers la bouche. Boutons palléaux-ventraux consistant en une longue crête entrant dans une fossette de forme analogue sur l'entonnoir. Siphon conique à valvule développée. Gladius lancéolé, ayant environ la moitié de la longueur du corps. Je commence la description des Sépioles par celles des mers européennes qui devraient de beaucoup être les mieux connues si l'on en juge par le nombre de mémoires qui ont été consacrés à l'étude spéciale de ces animaux, ou qui contiennent des indications importantes sur eux. Or, rien n'est plus compliqué, étant donnée la multiplicité des synonymes et des acceptions diverses sous les- quelles un même nom est pris, que d'arriver à une détermination précise de nos Sépioles. Parmi toutes celles qui ont été signalées dans notre région, je crois que l'on peut n'en conserver que quatre. Deux sont caractérisées par la présence à tous les bras de deux rangs de ventouses seulement : ce sont Sepiola Rondeleti et S. scan- dica, les deux autres ont plus de deux rangées de ventouses au moins sur deux bras, ce sont S. ntlantica et S. oweniana. Nous étudierons tout d'abord les deux premières qui se distinguent facilement l'une de l'autre par la forme de leur poche à encre qui qui est trilobée chez S. Hondeleti et simple chez S. scandica. On a voulu nier la valeur spécifique de cette forme de la poche du noir et attribuer sa simplicité ou sa complexité à des variations corres- pondant aux saisons ou à l'état des glandes génitales. Mais, sans nier l'influence que ces causes peuvent avoir sur le plus ou moins de netteté et de gonflement des lobes, je ne crois pas, d'après les très nombreux exemplaires de toutes provenances que j'ai exami- nés, qu'elles soient suffisantes pour faire passer un individu de la forme typique simple à la forme lobée. Dans cette première section à ventouses bisériées, nous trouvons une espèce de petite taille, S. Hondeleti, qui atteint rarement 3 centi- mètres de long pour la tête, plus le corps, et une beaucoup plus grosse, S. scandica, qui atteint et dépasse même 6 centimètres (cette mesure comprend le corps, plus la tète, sans les bras). KEVISION DES SEPIOLIDAE 85 1. S. KoNDELKTi Leach, 1817. 1817. Srpiola Rondeleti Leach (23), 111, p. 140. 1822. Lûligo Sepiola Lamark (22), XI, p. 368. 1833. Sepiolamikjaris Grant (13), p. 78. 1838. » grantiana Gervais et V. Beneden (9). 1) desvigniana Id. Id. Id. p. 44. p. 421-430. Manche, Atlantique synonymes ci-dessus 1869. » »?«yor Targioni-Tozzetti (36), 1896. )) fl?/ranrmca Jatta (19), p. 130. Distribution géographique. Méditerranée, (Angleterre, Grœnland, Sénégal, Açores). HoYLE a cru devoir ajouter à la liste des S. Péterai de Steenstrup. Mais comme j'attache une grande impor- tance à la forme de la poche à encre qui est simple, je crois devoir réunir S. Pettrsi plutôt à .S. scan- dica. De même la S. aurantiaca Jatta me paraît être une simple variété de ^. Rondeleti. Je ne vois, en effet, dans la description de Jatta (19) aucun caractère suffisamment tranché pour jus- tifier la séparation de ces deux espèces. Malheureusement, Jatta n'a pas figuré ni décrit nettement la poche à encre, mais, comme je le crois du moins, il dit dans sa dernière phrase qu'elle ne diffère pas de celle de S. Ronde- leti, je ne vois pas la raison de créer une espèce nouvelle pour un animal aussi peu caractérisé. Description de l'espèce (fig. 1). — Tête de moyenne taille, un peu moindre que l'ouverture palléale ; yeux gros, à paupière inférieure. Corps ovale, plus arrondi en arrière chez les femelles que chez les mâles ; bride nuchale assez étroite. Bord palléal dorsal peu infléchi, légèrement sinueux sous l'entonnoir, Sepiola Bondeleti. Mâle vu par la face dorsale (les nageoires ont été représentéesun peu trop grandes). Nageoires arrondies, à échancrure antérieure bien marquée, insé- rées au milieu du manteau. Bras relativement courts (1. 4. 2. 3, d'après Jatta), à ventouses sphériques, disposées sur deux rangs; elles ont une ouverture obli- que, petite, à cercle corné lisse, un pédoncule grêle sur un tuber- cule conique bien marqué. Tentacules bien développés, dépassant la longueur du corps et de la tête réunis ; palette allongée, couverte d'innom- brables petites ventouses égales entre elles, pédonculées, caliciformes et pourvues d'un cercle corné délicat, armé de nombreuses petites dents arrondies. Ombrelle entre les bras, peu développée, — absente entre les ventraux. Entonnoir allongé, étroit à l'extrémité, à petite valvule pointue. Poche du noir à deux lobes latéraux bien déve- loppés. Gladius très grêle, filiforme, en lancette à la pointe. L'hectocotilisation est remarquable (fig. 2). Le bras gauche dorsal est élargi, à ventouses irrégu- lières, incurvé en cuiller ; vers le tiers inférieur une membrane transversale trilobée, recroque- villée, en forme d'oreille, barre obliquement le bras. Les bras de 3<^ paire sont très épaissis, très charnus à leur base, recourbés en demi-cercle par dessus la bouche ; cette région incurvée est pres- que dépourvue de ventouses; celles qui restent sont petites et comme atrophiées. Au contraire, sur les bras de la seconde paire les ventouses sont très grosses et peu nombreuses. Il en est de même pour la quatrième paire. Fig. 2. — Sepinla Rondeleti. Bras gauche dorsal du mâle. (Imitée de Jatta.) 2. S. scANDiGA Steenstrup, 1887 1887. Sepiola scandica. Steenstrup (34), p. 19. Distribution géographique. — Mer du Nord. Norvège. Danemark. Suède. Iles Ferœ. Manche. Méditerranée. Nice. Banyuls. Alger. Cette Sépiole paraît avoir été souvent confondue avec la S. Ron- deleti; elle en est cependant facile à distinguer par son réservoir à encre qui est simple, et par sa taille qui est bien plus grande. La description de cette espèce ne paraît pas avoir été suffisam- REVISION DES SEPIOLIDAE 87 ment faite; Steenstrup s'est borné en effet à donner quelques caractères les plus saillants, et Norman les a répétés sans les augmenter sensiblement. J'ai eu à ma disposition un exemplaire mâle provenant du musée de Copenhague, déterminé par Steenstrup. C'est celui que j'ai représenté dans le croquis ci dessous. Un exemplaire femelle que j'ai péché à Villefranche et que j'ai envoyé à mon savant collègue HoYLE, de Manchester, qui l'a déterminé ; j'ai reçu deux autres exemplaires femelles de Banyuls et plusieurs autres d'Alger. Ces derniers, un peu différents des précédents, constituent une variété locale intéressante ; ils m'ont été procurés par mon collègue le professeur ViGUIER. Descrfplion de l'espèce. — Taille des individus adultes (échantillons examinés à l'é- poque de la reproduction) sensiblement plus grande que celle de S. Hondeleti dans les mêmes conditions. Certains sont deux ou trois fois plus grands. Corps gros, assez long, cy- lindrique et arrondi en arriè- re chez les femelles, un peu plus étroit chez les mâles. Manteau attaché à la tête par une bride nuchale égale à environ 1/3 du diamètre; bord palléal à deux sinuosités de chaque côté de la bride, avec une échancrure très prononcée sous le siphon. Nageoires grandes, insérées au milieu du sac viscéral, légèrement plus près de l'arrière; ovales, à lobe arrondi au dessus d'une échan- crure supérieure profonde, non lobées en dessous. Tête à peu près du diamètre de l'ouverture palléale, plate dessus, peu creusée dessous. Yeux peu saillants, à paupière inférieure couvrant la moitié du cristallin, lobe palpébral supérieur un peu sinueux. Tubercule olfactif bien net. Siphon long, remontant jusqu'à la base des quatrièmes bras; Pig. 3. - Sepiola scandicn. Vue dorsale d'un échantillon femelle. pourvu d'une languette triangulaire aiguë assez grande chez les femelles, presque nulle chez les mâles. Poche à encre pyriforme, petite, simple, sans lobes. Bras. Chez la femelle 4.1.3.2; 4 étant le plus petit. Ils sont grêles; le plus long a sensiblement la même longueur que le sac palléal, le plus petit est d'un tiers plus court. Le troisième présente une légère carène au milieu de sa face externe. Ombrelle nulle entre les bras ventraux ; un quart de la longueur du 4™9 bras entre 4 et 3 ; nulle entre 3 et 2, très petite entre 2 et 1, un peu plus grande entre 1 et 1. Tentacules courts, dépassant peu la longueur des plus grands bras; la palette a une membrane marginale bien développée. Ventouses excessivement petites, sur la pa- lette tentaculaire et très nombreuses. Sur les bras elles sont en deux rangs, petites et por- tées par des tubercules plus gros qu'elles. Elles sont de même taille sur tous les bras. Bras du mâle. — La disposition générale est analogue à celle de S. Hondeleti. Le bras dorsal gauche est élargi en cuillère (fig. 4), mais au lieu d'avoir un fond plat, elle présente une pro- fonde rainure sur le bord interne de laquelle sont implantées des ventouses rapprochées, dont deux ou trois sont plus grosses que les autres sur deux rangs de chaque côté. Le bord externe est moins haut, plus plat, et porte moins de ventouses. Crête auriculaire média- ne, trilobée; un des lobes venant s'accoler au bord opposé du sillon. Entre la bouche et cette crête il y a quatre petites ventouses. Le premier bras dorsal droit a des ventouses plus grosses, le deuxième bras, des deux côtés, a des ventouses beaucoup plus grosses. Le troisième bras est plus charnu, plus large, à ventouses peu développées dans la moitié inférieure. Le quatrième bras présente deux lignes de ventouses et un tubercule conique inférieur près de la bouche, contre son similaire de l'autre côté. J'ai reçu d'Alger plusieurs échantillons de cette espèce; ils diffè- rent un peu de ceux d'autres provenance par des bras un peu plus grêles, des tentacules plus longs, et une tête plus petite par rapport à la masse du corps. A part cela tous les autres caractères se vérifient. Fig. 4.— Sepiola scan- dica. Premier bras dorsal gauclie d'un mâle. REVISION DES SEPIOLIDAE 89 Les deux Sepioles, Rondeleti et scandica décrites ci-dessus forment la série des espèces européennes à deux rangs de ventouses. Les deux qui restent portent sur deux ou plus de deux bras des ven- touses en quatre rangs. On peut les diviser et les reconnaître de la façon suivante : A, Ventouses sur quatre rangs sur tous les bras: S. oiceniana. B. Ventouses sur quatre rangs seulement à la pointe des bras ventraux, bisériés partout ailleurs : S. atlantica. 3. S. owENiANA d'Orbigny, 1839. 1838. Sepiola oweniana d'Orbigny (8), p. 229. 1879. Sepiola oweniana Tryon (35), p. L56. Distribution géographique. — D'Orbigny ne donne aucun nom de localité; Tryon donne Iles Vill, mais comme il n'accompagne sa note d'aucune description, il est permis de douter de l'exactitude de cette assertion. Steenstrup dit l'avoir reçue de Tanger, Carus de Naples. 11 est possible, d'après une phrase du travail de Girod (11) sur la poche du noir, mise eu relief par Giard (10), que S. oiveniana se trouve aussi à Roscofï. Note. — Dans sa description de cette Sépiole, d'Orbigny indique les ventouses comme étant en deux rangées alternes sur les bras. Steenstrup les dit plurisériées au sommet. Or, l'exemplaire qui m'a été envoyé du musée de Copenhague, qui a par conséquent été examiné par Steenstrup, et qui provient de Naples, est fran- chement et nettement à ventouses quadrisériés sur tous les bras, sauf à leur base où elles sont sur deux rangs plus ou moins distincts. Parle reste des caractères, l'exemplaire de Copenhague correspond bien à la description de d'Orbigny. Au milieu de toutes ces contra- dictions il est bien difficile de se reconnaître et de ne pas tomber dans quelque erreur, d'autant plus que l'exemplaire de Copenhague me paraît avoir une poche du noir lobée et non simple. J'aurais voulu reproduire ici l'exemplaire du musée de Copen- hague, mais il a été ouvert dorsalement et ventralemeut et n'est plus, dans cet état, susceptible d'être représenté. Je dois me con- tenter d'une des figures de d'Orbigny. Description de l'espèce. — Forme générale allongée, oblongue, à bras longs, tout enfin est beaucoup [ilus long que dans les autres espèces. CyOrps très lisse, oviforme, oblong, un peu acuminé postérieu- rement, rende au milieu, tronqué antérieurement, fortement 96 L. JOUBIN échancré sous le siphon ; bride nuchale occupant le tiers du diamètre. Nageoires très petites, très séparées, latéro-dorsales, placées sur le milieu du corps, dont elles occupent moins du tiers; presque circulaires, un peu échaucrés en avant et en arrière. Crête adhésive élevée, entourée d'une dépression ; boutonnière profonde entourée de bourielets sur le siphon. Tète plus étroite que le corps, presque sphérique, quoique très Fig. 5. — Sepiola oxoeniana. Vue dorsale de l'animal. (Imitée de Ferussac et d'Orbigny.) peu déprimée. Yeux saillants, ouverture latérale très grande entourée d'une paupière inférieure contractile. Bouche entourée par une membrane buccale et des lèvres charnues et ciliées. Deux ouvertures aquifères en avant du globe de l'œil (?). Trou auditif externe simple, sans bourrelet, ni saillie. Tète unie au corps par une très large bride nuchale bien plus développée que dans les autres espèces de Sépioles. Bras sessiles, longs, minces, conico-subulés, presque arrondis, très inégaux; 2. 3. 4. i ; 2, étant le plus grand. REVFSION DKS St:PIOLIDAE 91 Ventouses obliques, assez comprimées, arrondies, échaucrées près de leur pied, à ouverture très large, percée un peu décote, portées chacune sur un petit pied filiforme, court, placé près du bord et à l'extrémité d'un long pédoncule oblique d'arrière en avant, conique, tronqué à sou extrémité, appartenant aux bras. Alternant en quatre lignes distinctes sur la partie supérieure de tous les bras, diminuant graduellement vers la pointe. Cercle corné assez large, à bords entiers, plus grands que dans les autres espèces, plus large du côté opposé au pédicule. Tentacules très longs, très grêles, cylindriques, à palette pas plus large que le reste du bras, non comprimée, pourvu d'une légère carène, couverte, sur 13 millimètres, de cupules si petites qu'elle a l'aspect velouté. Membrane de l'ombrelle nulle entre les bras inférieurs, à peine visible entre les trois supérieurs, très grande entre les latéraux supérieurs et les inférieurs. Sip/ion gros, médiocrement long, attei- gnant les deux tiers du globe de l'œil. Gladius n'existe probable- ment pas. Couleur. — Echantillon alcoolique, très petits chromatophores rares sur le cou et la tête, rouge violacé. Rapports et différences. — Caractérisés surtout par ses formes allongées et la disposition des ventouses en deux rangs. Deux exemplaires seulement, de provenance inconnue, sont décrits par d'Orbigny. Carus se demande si ce n'est pas la même espèce que S. major de Targioni-Tozzeti; et Jatta, d'autre part, considère cette S. major comme une variété de grande taille de 5. Rondeleti. On vient de voir que la disposition quadrisériée des ventouses suffit à écarter cette assimilation. 4. S. ATLANTiCA d'Orbigny, 1839. 1839. Sepiola atlantica d'Orbigny (8), p. 233, pi. IV. Distribution géographique. — Côtes d'Angleterre, de France (Man- che, Océan), Norvège, Iles Féroë, Méditerranée, Algérie, Baléares, Banyuls, Nice, Sardaigne, Naples (Carus), Maroc. Description de l'espèce. — Forme générale raccourcie et trapue, arrondie en arrière, à bras relativement courts. Corps lisse, ovoïde, arrondi en arrière, échancré légèrement sous le siphon ; uni à la tête par une bride du tiers environ du diamètre du cou ; le bord palléal se retrousse sur un liseré blanc dans pres- que tous les échantillons conservés. 92 Trie de même lougueur environ que le corps, assez basse, yeux gros, à paupière iûférieure. Nageoires très écartées, dépassant la moitié de laliauteur du corps. Bras médiocrement développés, les inférieurs un peu comprimés. 3. 2. 4. 4, le premier étant le plus grand. Carène sur les bras infé- rieurs. Ventouses obliques, petites, presque globulaires ; portées sur un filet grêle et court surmontant un tubercule assez gros ; sur deux rangs sur tous les bras, sauf aux ventraux. La pointe de ceux-ci présente subitement quatre rangées de ventouses minuscules, qui sont très nombreuses et se mêlent à l'extrême pointe. Cercle très petit, à bord entier. Tentacules médiocres, assez grêles, pas très lougs, palette petite, couverte de très nombreu- ses ventouses très petites. Petite membrane bor- dant la palette qui semble se continuer par une crête courte et peu marquée sur le tiers distal du tentacule. Chez les mâles les ven- touses des bras sont plus grosses et plus rares que chez les femelles. Le pre- mier bras gauche est plus développé, élargi latérale- ment, avec une cavité vers le milieu de sa longueur. Comme dans d'autres es- pèces le troisième bras du mâle est fortement recour- bé vers la bouche. La poche à encre est trilobée ou auriculée. Legladius est lancéolé ou cultriforme. Il est singulier que Jatta n'ait pas rencontré cette espèce à Naples, alors qu'elle a été trouvée en mainte autre localité de la Méditerranée. Fig. fi. — Sep il) la alUinlica. Vue dorsale de l'animal. Fig. 7. — Sepiola atlmitica.ExlTé- mité du quatriè- me bras ventral. 5. S. STENODACTYLA Grant, 1833. 1833. Sepiola stenodactyla Grant (13), p. 84, pi. XI. 1892. Inioteuthis stenodactyla Brazier (6), p. 9. Distribution géographique. — Ile Maurice. N^He Galles du Sud. REVISION DES SEPIOLIDAE 93 Description de l'espèce. — Celte Sepiole a été décrite brièvement par Grant en 1833 et la description en a été résumée par d'Orbigny dans les Céphalopodes Acétabulifères. Depuis il n'en a plus été question et cette espèce, à ma connaissance, n'a plus été retrouvée. Je me contente donc de reproduire les deux figures originales de Grant et le résumé de d'Orbigny eu le modifiant légèrement. formes générales courtes, larges et massives, les bras longs en pro- If» '#11^ // V'vj:. 8. — Sepiola stenodaciyla. L'animal vu par la face dorsale. — Reproduction du dessin de Grant {13, I, pi. Il, (ig. 1). m Fig. 9. — Sepiola stenodaciyla. L'animal vu par la face ventrale. — Reproduction du dessin de Grant (ibid., fig. 2). portion du corps. Corps aussi large que haut, très lisse, renflé à la tète, arrondi en arrière et comme tronqué en avant. 11 est attaché à la tête par une bride du tiers de sa largeur ; le reste est entièrement libre et le bord en parait uni et retourné. Appareil de résistance? Nageoires presque circulaires placées vers le miliieu de la longueur du corps, dont elles occupent un peu plus du tiers. Elles sont légè- rement échancrées à leur insertion au corps. Tète aussi large que le corps, fortement renflée par les orbites. Yeux très grands, saillants, subdorsaux. Ouvertures aquifères ? liras sessiles épais, larges, longs, peu inégaux, couverts en dedans de cupules larges, sphériques, irrégulièrement assemblées, placées sur sept à huit de profondeur, chacune à l'extrémité d'un pédoncule long et épais. L'anneau corné est circulaire. Dans quelques parties 94 L. .lOUBlN des bras l'anangemenl serré des cupules dépeud de la direction irrégulière prise par les rangées des pédoncules, de chaque côté. Bras tentaculaires longs, grêles, cylindriques sur leur longueur, très peu élargis à leur extrémité et présentant une surface velue, mais n'offrant point de ventouses développées. Membranes de l'omhrelle. — Elles paraissent nulles partout, excepté entre le bras inférieur et le latéral inférieur de chaque côté. Tube locomoteur assez gros, ne dépassant pas le milieu de la hauteur de l'œil. Osselet interne 1 Couleur du sujet conservé dans l'alcool, d'un beau pourpre ; les bras couverts de larges taches transversales rapprochées de cette couleur. Le corps et la tête en sont tachetées. Hapports et différences . — Cette espèce nous paraît se distinguer de toutes les autres Sépioles proprement dites par son corps très large et court, par ses bras sessiles allongés, couverts de huit rangées de cupules pédonculées et par ses bras tentaculaires dépourvus de cupules. Note. — Il est à remarquer que sur la figure 6 de Grant il y a quatres rangées de cupules longitudinales paraissant plus longues que les autres, qui sont très petites. 11 est en outre à noter que la largeur de la bride nuchale donne à penser que cette espèce se rat- tache probablement au genre Ini Ole ut bis. Brazier (6) sans d'ailleurs donner aucune explication, place cette espèce dans ce genre Inio- teuihis, il l'a recueillie à Port Jackson (New SouthWales). 6. S. PACiFiCA Kirk, 1882. 1882. Sepiola pacifica Kirk (18), p. 83. Distribution géographique. — Nouvelle Zélande. Wellington. Description, de l'espèce. — Voici la traduction de la description donnée par Kirk ; elle n'est pas accompagnée de figures et, à ma connaissance, elle n'a pas été complétée par d'autres auteurs. Corps lisse, en forme de cloche allongée ; nageoires moyennes, à bord antérieur libre (?). Tentacules vermiformes, aussi longs que la tête et le corps ensemble. Palette recouverte de petites ventouses irrégulières et serrées. Bras sessiles inégaux, le ventral inférieur étant le plus grand, tous armés de ventouses en deux rangs alter- natifs et s'étendant doucement jusqu'au sommet de chaque bras. Tête épaisse, yeux proéminents. Couleur. — En dessus, couleur chair irrégulièrement tachetée de pourpre ; la couleur de la tête et de la partie antérieure du corps étant « almost hidden », taches devenant plus fines à leur approche REVISION DES SEIMOLIDAE 95 de la pointe postérieure du corps. En dessous, couleur chair pâle, tachetée comme en dessus, mais à taches plus grandes et plus espacées. L'entonnoir, les côtés des bras sessiles et la surface des nageoires blanches. Tentacules blancs à l'exception d'une rangée de taches pourpres sur le dos de la palette. Longueur totale, l-4inch; longueur du corps, 1 inch ; de la tète, 4 inch (?). 7. S. PENARES (Gray) Tryon, 1879. 1849. Fidenas penarcs Gray (14), p. 95. 1879. Sepiola penares Tryon (19), p. 157. Distribution géograpklri,i,'inale. leur pédoncule par un point de leur é(|uateur, dans une légère encoche méridienne. L'orilice est très petit, garni d'un bord corné non denté qui est légèrement saillant comme un petit goulot évasé. Le pédoncule est grôle, extrèmemeni court, porté sur le sommet d'un mamelon conique très peu saillant. Ce pédoncule est peu solide et se détache facilement (fig. 36). Les bras dorsaux sont tous les deux hectocotylisés. Leurs REVISION DES SEPTOLIDAE 137 ventouses, sur deux rangs, sont toutes à peu près de même taille et plus petites que celles des autres bras dont les moyennes sont bien plus grosses que les proximales ou les distales. Tout le lonj; du bras, sur leur bord ventral on remarque uue forte crête qui disparaît en arrivant aux dernières ventouses ; elle est sillonnée en dedans par des sillonsobliques secondaires partant des intervalles des pédoncules des ventouses. Le long du bord dorsal on voit une crête analogue mais moins nette que la ventrale. Les pédoncules Fig. 3o. — Uussia Caroli. Pliolograpliio do l'animal vu par la face ventrale, légèrement grossi. Originale. charnus des ventouses des bras hectocutylisés sont beaucoup plus longs que sur les autres bras. Tentacules. — Ces organes sont a peu près cylindriques, assez gros, et parcourus dans toute leur lougueur par un sillon qui vient aboutir à la base de la palelte. Les tentacules sont plus longs que Tensemble de la tète et du corps. La palette est étroite, et continue simplement la pointe du 138 L. JOUBIN tentacule. Une légère crête natatoire en occupe environ un tiers sur le bord inférieur, tandis que sur l'autre une très mince membrane borde les ventouses dans toute leur étendue. Celles-ci sont très petites et tranchent par leur couleur brune avec la blancheur du tentacule. Elles vont en diminuant insensiblement de la base vers la pointe, et sont sur 6 ou 7 rangées. Celles du bord interne ne sont pas plus grosses que celles du bord externe. Elles ont une large ouverture en forme d'entonnoir à bec ; l'orifice du fond est entouré d'une dizaine de dents mousses, moins saillantes près du bec. Sur la partie évasée de l'entonnoir corné on remarque 4 ou 5 rangs de tubercules cornés bruns, en forme de perles concentriques, plus nombreuses et plus petites au bord libre que près des dents de l'orifice interne. Ces ventouses sont revêtues en dedans par le prolongement du revêtement, ce qui leur donne une teinte jaune. Le pédoncule esttrès grêle, inséré latéralement. L'entonnoir a un tube assez étroit qui n'atteint pas la bifurcation des bras ventraux, mais sa base est très large, pourvue de deux fossettes adhésives très profondes et larges. L'or- gane de l'entonnoir est formé de quatre parties ovales très développées dont deux sont dorsales et deux ventrales. Les deux dorsales se réunissent à leur pointe et remontent jusqu'à la valvule qui est grande, bien dégagée et peut fermer complètement le tube de l'entonnoir. Les crêtes palléales correspondant aux fossettes de l'entonnoir sont très développées et plus fortes que dans les autres espèces du genre Uossia. Le coi'ps est conique, très évasé, court, pointu en arrière. La peau dorsale est garnie de très petites papilles, à peine indiquées comme celles de la tête. Le bord palléal dorsal fait une saillie angu- laire obtuse liés marquée, appliquée sur l'organe adhésif nuchal, mais sans tubercule saillant en ce point. L'organe adhésif est large, Fig. 36. — Rossia Caroli. Ventouses : A, ventouse tentaculuire ; B, ventouse bra chiale. Originale. REVISION DES SEPIOLIDAE 139 ovale, à bords libres, avec un fort sillon médian où vient s'appliquer le sommet du gladius. Le bord palléal ventral présente une incurvation peu marquée sous l'entonnoir, et deux autres, également atténuées, sous les yeux. Les nageoire!^ sont petites, demi-circulaires, insérées beaucoup plus près du bord palléal supérieur que de la pointe du corps. Leur insertion est oblique, très marginale, de sorte qu'elles sont très écartées l'une de l'autre ; elles présentent une échancrure en baut, non en bas. Cette Rossia ne peut être comparée qu'aux autres espèces à deux rangs de ventouses (F/v/n^'/mm). Elle diflère tellement de U.sublems Verrill et de R. megaptera Verrill qu'il est inutile de parler de ces espèces. 11 ne reste que H. glaiicopis Loven. R. glaiicopis est une espèce exclusivement polaire ; les plus méri- dionales proviennent des îles Lofoden ; elle a le corps épais, obtus et arrondi en arrière, les tentacules courts ne dépassent pas le milieu du manteau : les yeux peu proéminents ont une paupière épaisse et ridée ; les bras sont courts et réunis par une forte ombrelle. Les papilles cutanées dorsales bien développées sont sail- lantes, surtout celle qui occupe le sommet de l'angle palléal dorsal. Notre espèce au contraire est pointue en arrière, à tentacules longs, à gros yeux très saillants sans paupières, à peau presque lisse, à ombrelle très peu développée. Ces caractères sont plus que suffisants pour séparer les deux Sous-genre SEMIR0SSL4 Steenstrup. 31. RossiA TENERA (Verdll) Hoyle. 1880. Heterotheutis tenera Verrill (41), p. 392 ; (43), p. 17o et (42), p. 357. 1886. Rossia tenera Hoyle. Challenger, Céph. (16), p. 118. Distribution géographique. — Côte atlantique de l'Amérique du Nord, de 32" lat. N. à 40° lat. N. (Verrill, Hoyle), de 34 à 480 mètres. Description (résumée d'après Verrill). — Petite espèce délicate, translucide. Corps court, cylindrique, à peu près deux fois plus- long que large, arrondi en arrière. Nageoires très développées, plus longues que larges, à bord externe arrondi atteignant le niveau du bord palléal, dépassant beaucoup l'insertion supérieure de la nageoire qui est elle même 140 nettement antérieure. Longueur de la nageoire deux tiers, sa base un demi de celle du corps. Tête large, arrondie, à gros yeux saillants, à paupière inférieure libre, à pupille échancrée supérieurement. Bra!< plutôt petits, inégaux, les dorsaux considérablement plus courts et plus petits que les autres, la deuxième paire la plus longue. Fig 37. — Riissia tenera : A, mâle vu par la face dorsaW^ x 1,5 ; B, femelle id. X 1,5 ; C, vue frontale du mAle x 1,.t ; D, gladius x 3 ; E, ventouses du bras latéral très grossies Imitées de Verrill. Bras dorsal gauche du mâle hectocotylisé. il est épaissi et recourbé en arrière, se? ventouses sont plus petites et plus nombreuses que sur le bras droit, et sur quatre rangs, sauf à la base, où il y en a deux, leurs pédoncules sout épais et cylindriques. Le bras droit, normal, a deux rangs de ventouses décroissant régulièrement jusqu'au sommet, coiiime dans les deux bras dorsaux de la femelle. RKVISION DES SEPIOUDAF, 441 Dans les deux sexes et chez les jeunes, les ventouses du milieu des quatre bras latéraux et des deux ventraux sont beaucoup plus grandes que les autres, mais chez les grands mâles cette inégalité s'exagère au point que les huit ou dix médianes sont six à huit fois plus grandes que les distales et les proximales, elles sont profondes, fixées latéralement, à bande équatoriale saillante, à très petit orifice rond, à cercle corné lisse. Dans la femelle, les ventouses correspondantes des bras latéraux sont environ deux fois plus grandes que les autres. Elles sont, dans les deux sexes, sur deux rangs réguliers, excepté à la pointe des bras ventraux et latéraux où elles sont sur quatre rangs. Les tentacules sont longs et grêles, à palette nettement élargie, ordinairement roulée, à ventouses nombreuses, inégales, sur huit rangs serrés. Celles qui forment les rangées voisines du bord supé- rieur sont trois ou quatre fois plus grandes, à cercle corné à deux ou trois rangs de petites denticulalions en forme d'écaillés. Le gladlus mince et délicat, en forme de_ bec de plume en haut, plus rétréci en bas, à petites expansions latérales lancéolées sur la moitié postérieure. Màchoirex très incurvées, la supérieure sans échancrure basilaire, l'inférieure avec un grand lobe arrondi. Ihidida à dents médianes simples, aiguës, triangulaires, latérales internes à peu près comme les médianes, excepté à la base ; latérales externes beaucoup plus longues, fortement courbées en avant. Couleur sur le vivant pâle, corps translucide, rougeàtre sur les individus conservés, dont l'extrémité postérieure devient plus pointue. Le corps atteint de 25 à SO"""!. Conformément a l'opinion de Hoyle, il ne paraît pas possible de laisser cette espèce dans le genre Heteroteuthis, où l'a placée Verrill. Elle se rattache nettement au genre Rossia. 32. R. PATAGONiCA. E. A. Smith, 1881. 1881. liossia patagonlca. Smith (32), p. 22. 1886. » " Hoyle (16), p. 119. Distribution géographique.— Sud de l'Amérique, de 19 à 106 mètres de profondeur. Description de tespèce. — D'après Smith, avec quelques modifica- tions de Hoyle. L'auteur donne d'abord quelques indications sur la répartition et la couleur des chromatophores qui n'ont rien de spécial à cette espèce 142 Corps sacciforme, à bord marginal prolongé en une pointe médiane obtuse sur la nuque ; légère incurvation ventrale sous le siphon. Nageoires 6e taille moyenne, faisant les 5/7'n'^s delà longueur du corps; leur insertion est un peu plus courte; elles sont irrégu- lièrement semi-circulaires, assez écartées, mais cependant non marginales ; on y voit de fines stries superficielles partant du corps. Tète aussi large que le corps. Yeux situés sur les côtés de la tète, protégés par une mince paupière transparente dont le bord infé- rieur est probablement protractile par-dessus l'œil. Rras presque égaux, les paires dorsale et ventrale un peu plus c#*"" ^' & mm fi im JWim Fig. 38. — Rossia patagonica. Vues d'ensemble de l'animal; faces dorsale et ventrale (imitées de Smith). Entre les deux, en haut, bras dorsal gauche hectocotylisé x l,o; en bas, troisième loras gauche d'un mâle x 1,5 (imitées de Hoyi.e), courtes que les latérales ; ils sont plutôt grêles et se terminent en fine pointe ; légère ombrelle à la base, absente entre les bras ventraux. Ventomes grandes, subsphériques, élevées sur des saillies sup- portant des pédoncules excessivement courts, pourvues d'un cercle corné non denté, très petit ; elles sont sur deux rangs alternants, sauf à l'extrême pointe, où il y a quatre séries de ventouses très petites, mais le bras dorsal gauche eu a quatre à la partie centrale et moins de quatre à la base et à la pointe. Les ventouses aussi sont beaucoup plus petites que celles du reste des bras à l'exception de l'autre bras dorsal, où elles sont aussi également petites. Chez les mâles les ventouses des bras latéraux et ventraux gran- REVISION DES SEPIOLIDAE 143 dissent rapidement au milieu du bras, puis diminuent ; elles sont trois fois plus grandes que chez les femelles. Le bras dorsal gauche est hectocotylisé ; il a deux séries de ven- touses, excepté à la pointe extrême, où il y en a quatre comme dans les autres bras ; au milieu du bras les deux séries se disposent en zig-zag et prennent une apparence quadrilinéaire. Les ventouses sont portées par de longs pédoncules coniques à base recourbée extérieurement ; une membrane épaisse suit les trois quarts de la longueur du bras, latéralement. Tentacule grêle, double en longueur des autres bras, émergeant entre le quatrième et le troisième bras qui sont réunis par une membrane palmaire plus développée qu'entre les autres bras. Très nombreuses ventouses cupuliformes, à pédoncules plus longs que dans les ventouses brachiales. Elles sont à sommet uni, avec un bord externe saillant et un bord corné à denticules très petits. Elles sont plus grandes sur le bord interne de la palette qui est bordée par une étroite membrane. Gladius très réduit. INDEX BIBLIOGRAPHIQUE 1. — Appellôf, a., Japanska Cephalopoder. KongL Svenska Vet. Akad. Hand. Bd. XXI, n° 13, 1886. 2. — Appellôf, A., Bemerkungen ilber die auf der norwegescheri nordmeer Expédition (1876-78) gesammelten Cephalopoden. Bergens Muséums Aarborg, 1892, n» 1. 3. — Appellôf, A., Cephalopoden von Ternate. Abhand Sencken- bergischen naturf. Ges. XXIV. Heft IV, 1898. 4. — Ball. On a Loligo found on the sliore of Dublin Bay. Proc. R. Irish Acad. I, 1841, p. 362; ibid. 1842. 5. — Bêcher. Jan Mayen moUusken. Die ôsteireichische Polarstation Jan Mayen. Beobachtungs Ergebnisse. Kais. Akad. d. 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Jusqu'à ce temps, la faune de l*seiuloscorpions de rEquateur a été i)resque complèlemenl inconnue ; la seule coniniunicalion est, à ma connaissance, celle de L. Balzan, indiquant qu'on y trouve Chi'lifer inacrovhrlatus Tomosvâry. Grâce aux récolles de i\L Vicenle Ortoneda, faites à Naranjito, et, pour une scmie espèce, près deGuayaquil, récoltes dont il a bien voulu me confier l'étude, je peux donner ci-dessous la description de onze espèces (parmi lesquelles le Chelifer inacrocli<'latus, déjà trouvé. J'ai été forcé de décrire sept espèces comme nouvelles dans la science. Connue dans les recherches de Balzan sur les Pseudoscorpions sud- américains, il se manifeste que le sous-genre Ateiunus est le plus largement représenté, quatre sur onze des espèces appartenant à ce groupe. Comme appendice, j'ai donné quelques informations sui- d'autres Pseuduscorpions trouvés en d'autres parties de l'Amérique du Sud. Chelifeii NiDiFiCATOii Balzau. Subgenus : AteiMNUs. 1«9U. Chi'lijer itidijicutor Balzan, Kev. d. Pseu(loscor|t del bac. dei îiumi Paranà e Paraguay; p. 17, tav. XIII, I. o. 1891. Mf'iintus indiflcalor Balzan, Chernetes iu Voy. de M. E. Simon au Venezuela ; p. 14 (510), tab. !), f. 1. Pas d'yeux, mais des taches oculaires. Le corps allongé. (Céphalothorax brun, la dernière moitié plus claire; les seg- ments abdominaux dorsaux brun clair, les patles-màchoires brun foncé, les doigts [)lus obscurs, le reste du cor{)S très clair. Céphalothorax sans stries transversales, un peu plus long que large, s'élargissant légèrement en arrière, un peu lisse, pourvu de séries irregulièi-es de poils pointus et faiblement tienliculés. Les (|uatre premiers segments dorsaux de l'abdomen ne sont pas divisés longiludiualement,mais avec incisions anguleuses en ariière dans les segments 3 et 4, les segments 5-9 divisés longitudinalenieul, SUR LA FAUNE DE PSEUDOSCORPIONS DE l'ÉQUATEUR 147 le segment 10 peut être divisé ou indivis, avec une petite incision anguleuse par devant, le dernier segment entier. Aux bords posté- rieurs et latéraux des segments une série de poils pointus et en partie finement denliculés ; les poils des deux derniers segments considérablement plus longs. Les segments ventraux (à l'exception du dernier) sont aussi divisés longiludinalement, mais la division est plus indistincte ; les poils comme ceux des segments dorsaux. Pattes- mâchoires robustes, plus courtes que le corps, un peu lisses, en quelques endroits pourtant, et particulièrement sur le bord antérieur du fémur, finement chagrinées. Trochanter pédicule, environ aussi long que large, bord antérieur légèrement convexe, bord postérieur légèrement conique. Fémur à pédicule fort, environ deux fois plus long que large, bord |)ostérieur régulièrement et for- tement convexe, bord antérieur dans la première moitié légère- ment convexe, dans la seconde légèrement concave, se rétrécissant à peine à l'extrémité. Tibia à pédicule fort, y compris le pédicule presque aussi long que le fémur et aussi large, oblong, sur les deux bords régulière- ment et fortement convexe. Main à pédicule distinct, une fois et demie plus longue, environ, que le tibia et un peu plus large, un peu atténuée vers les doigts, sur les deux côtés fortement convexe, surtout sur le côté externe vers la base; les doigts forts, légèrement courbés, au moins d'un tiers plus courts que la main. Les poils des pattes-màchoires médiocrement longs, pointus et en partie légèrement denticulés, sur les doigts, quelques-uns très longs. Le doigt mobile des chélicères se rétrécissant légèrement depuis la base vers l'extrémité, le bord externe presque droit, le bord interne légèrement concave ; serrula avec 12 à 20 dents ; galea forte, presque droite, avec quelques dents à l'extrémité et le long du dernier tiers au-dessous. Les pattes pourvues de poils, fémur et tibia des deux dernières paires forts ; les griffes simples. Longueur de l'individu le plus grand 4™in5. Cttiq exemplaires recueillis près de Naranjito, dans les mois de février et mars 1901. Je les ai identifiés avec le Clwlifer nidificato)' Balzan, bien f(u'il y ait quelques ditïénuices insignifiantes avec la description de Balzan. J^a grandeur est assez différente de celle qu'indique Balzan dans sa descri|»tion principale (3'""'), mais dans un supplément à son ouvrage « Cherneies de Venezuela » il indique 4'"'"7o. 11 n'y a pas de stries sur les pattes-màchoires, seulement elles sont finement 148 E. ELLrNGSlùN chagrinées. Le nombre des segments abdominaux divisés (à l'ex- ception du dernier qui est certainement toujours entier) n'est pas, je crois, un bon caractère spécifique. 11 y a aussi, comme le montre la description, une tendance à une division du segment pénultième et de quelques-uns des quatre premiers segments. Un individu avait l'abdomen assez diiîérent, mais il était aussi contracté et plat; il n'existe aucune autre dilïérence. L'AteimiKS floridanus Tullgren est très voisin de cette espèce ou doit, peut- être, lui être joint. Tullgren attache beaucoup d'importance à la grandeur, mais il ne s'est certainement pas aperçu que Balzan a trouvé des exemplaires mesurant jusqu'à \^'^1d de longueur, et qu'il a même créé une variété ininor, du Venezuela, de 4^01 (_|e long. Cette espèce a été trouvée auparavant au Paraguay, au Brésil et au Venezuela. Chelifer gracilis imv. sp. Subgenus : Atemnus Pas d'yeux, mais des taches oculaires. Corps long et étroit. Céphalothorax et segments abdominaux olivâtre très clair, pattes-màchoires rose clair, main et doigts rose foncé, les derniers plus obscurs. Céphalothorax sans stries transversales, un peu plus long que large, comme tout le reste de l'animal, très brillant, pourvu de séries de poils simples. Tous les segments dorsaux de l'abdomen divisés longitudinale- ment, sauf le dernier, qui a cependant une petite incision angu- leuse claire en avant (une division commençante). Les bords postérieurs et latéraux des segments dorsaux pourvus d'une série de poils simples, entremêlés de quelques poils très longs sur les derniers segments. Les segments ventraux très clairs, il y a donc une division longitudinale indistincte, et même le dernier segment est presque divisé. Sur l'un des plus grands individus (9), il y a de chaque côté sur les six derniers segments ventraux une petite tache circulaire et obscure, dont il n'y a pas de traces sur l'autre (d^). Les poils des segments ventraux sont disposés comme ceux des segments dorsaux. Pattes-mâchoires moins fortes, plus courtes ou à peine aussi lon- gues que le corps. Trochanter à pédicule fort, aussi long que large, médiocrement convexe sur les deux côtés. Fémur à pédicule fort, SUR LA FAUNE DE PSEUDOSCORPIONS DE l'kQUATEUB 149 uu peu allougé, au moins deux fois plus lougque large, le bord pos- térieur régulièrement et médiocremeut convexe, le bord antérieur dans la première moitié très légèrement convexe, dans la seconde moitié très concave, en tout assez fortement atténué vers le tibia. Tibia à pédicule fort, aussi long et aussi large que le fémur, pres- que régulièrement ovale, le plus épais vers l'extrémité. Main à pédi- cule fort, une demi-fois plus longue et un peu plus large que le tibia, d'une base forte et un peu oblique, légèrement convexe sur les deux côtés, le bord externe le plus convexe, s'atlénuant gra- duellemeul vers les doigts un peu courbés, qui sont une demi-fois plus courts que la main. Les poils des paltes-màchoires longs, sim- ples, sur la main et sur les doigts, quelques-uns très longs, entre- mêlés. Le doigt mol»ile des cbélicères assez fort, légèrement atténué vers Textrémité ; presque droit ; galea graduellement acuminée, à l'extrémité 3 ou 4 dents droites de longueur inégale. Les pattes pourvues de poils simples, fémur et tibia des deux dernières paires de pattes assez forts ; les griffes simples. Longueur de l'individu le |>lus grand 2™'no. Trois exemplaires capturés près deNaranjito, en juin \dO\ ; deux grands et un plus petit. L'individu le plus petit est très jeune, les deux autres sont certai- nement assez jeunes aussi, mais il paraît qu'ils sont assez dévelop- pés pour avoir eu la forme définitive des pattes-màcboires. La seule espèce sud-américaine, qui se rapproche de cel-te espèce est Chelifer siibrobustas Balzan, mais en plus de la taille plus petite, il y a aussi d'autres différences. Chez Chelifer siihrobustus les pattes- màcboires sont beaucoup plus fortes et leur forme différente, par exemple, le fémur peu atténué vers le tibia, tandis que chez l'es- pèce nouvelle cette atténuation est singulièrement grande. Du reste il faut ajouter que le seul exemplaire de Balzan de Chelifer suhro- hustus était si mal conservé, qu'il était même impossible de cons- tater s'il appartenait au sous-genre Atemnii>;. Chelifer elong\tus nov. sp. Subgenus : Atemnus. Pas d'yeux, mais des taches oculaires. Le corps allongé, très étroit. Céphalothorax brun, plus clair en arrière; pattes mâchoires brun foncé, les segments dorsaux et ventraux brun olivâtre clair Je reste très clair. loO E. ELLINGSEN Céphalothorax sans stries transversales, considérablement plus long que large, arrondi en avant presque en demi- cercle, un peu brillant, avec des séries de poils assez forts, en partie légèrement denticulés. Le dernier segment dorsal de l'abdomen entier ; un seul ou plu- sieurs des premiers segments peuvent être entiers ; les autres divisés longitudinalement. Les bords postérieurs et latéraux des segments dorsaux pourvus de poils longs, pointus ; sur les derniers segments quelques-uns beaucoup plus longs, entremêlés. La division et les poils des seg- ments ventraux presque identiques aux segments dorsaux. Pattes-mâchoires grêles, environ de la longueur du corps, bril- lantes, un peu chagrinées pourtant, particulièrement sur le tro- chanter et sur les bords antérieurs du fémur et du tibia. Trochanter à pédicule fort, un peu plus long que large, le bord antérieur légè- rement convexe, le bord externe et le burd externo-supérieur pourvus de ilenx protubérances coniques, très fortes, séparées (Vuu sillon longitudinal, très profond. Fémur à pédicule long, environ deux lois plus long que large, le bord antérieur presque droit, le bord postérieur obliquement et fortement épaissi delà base, en suite légèrement convexe, en tout faiblement atténué vers le tibia. Tibia ■A pédicule lomj, au-delà du pédicule considérablement plus court que le fémur et presque sphérique, très régulièrement convexe sur les deux côtés, un peu plus épais que le fémur. La main presque deux fois plus longue et un peu plus large que le tibia, à base un peu oblique et tronquée, légèrement convexe sur les deux côtés, cependant un peu plus fortement sur le bord interne, presque gra- duellement atténuée vers les doigts forts, un peu courbés, qui sont environ un tiers plus courts que la main. Pattes-mâchoires pourvues de poils médiocrement longs, pointus, partiellement denticulés, les doigts avec quelques-uns très longs entremêlés. Le doigt mobile des chélicères atténué vers l'extrémité, presque droit, galea courte, forte, droite, sans trace de dents. Les pattes pourvues de poils, fémur et tibia des deux dernières paires de pattes assez forts ; les griffes simples. f.ongueur de l'individu le plus grand, environ '±^'^'"11), largeur à peine 1°"». Sept exemplaires capturés près de Guayaquil, en juin 1901. .l'ai rapporté à cette espèce distincte, 7 exemplaires, dont 4 ont, certainement, pris leur couleur définiiive et qui sont ainsi, sem- ble-t-ii. adultes ; les trois individus jeunes sont très clairs avec la SUR LA FAUNE DE PSEUDOSCORPIONS DE L'ÉQUATëUR 1d1 forme des pattes- mâchoires moius développée et avec quelques très petites dents à l'extrémité de la galea. (IhEUFER ROTUNDATUS UOV. S|). Subgenus : Atemnus. l\»s d'yeux, mais des taches oculaires distinctes. (Céphalothorax en avant bruu, eu arrière beaucoup plus clair, seft- n^ents dorsaux bruu olivâtre, pattes-màchoires bruu foucé, les autres parties claires. Céphalothorax un peu plus long que large, caractérisé par ce qu'on ne voit, certainement, nulle strie transversale e.rterne (le caractère d'après lequel ou peut référer l'espèce au sous-genre Atemnus}, mais, vu à lumière transmise, il y a vers le milieu une ligue transversale, qui dans sa partie centrale forme une forte cour- bure eu avant ; cette ligne transversale représente donc une divi- sion interne, et il esta noter que cette ligne forme une limite bien marquée en arrière, à la teinte brune plus foncée, que possède le céphalothorax dan« la |)arlie antérieure, tandis que la partie posté- rieure est considérar)lement plus claire. (Chez Chelifer nidifkutor il n'y a pas de traces d'une pareille ligne transversale chez aucun des exemplaires que j'ai examinés). Céphalothorax un peu brillant et pourvu de poils rares, partiellement denticulés. Le premier et le dernier segment dorsal de l'abdomen sont entiers, les autres distinctement divisés longitudiualement par une strie fine, mais bieu prononcée. Aux bords postérieurs et latéraux des segments dorsaux une série de poils en partie finement denticulés; sur la partie postérieure de l'abdomen quehiues poils très longs et pointus entremêlés. Le dernier et tpu'lques-uus des premiers seg- ments ventraux entieis, les autres divisés. L'arrangement et la forme des poils comme sur les segments dorsaux. Pattes-màchoires très fortes, un peu plus longues que le corps et très brillautes. Trochanter à pédicule fort, environ aussi long que large, le bord antérieur convexe, le bord postérieur un peu sailli, le bord supérieur un peu conique. Fémur à pédicule fort, très robuste et seulement une demi-fols plus lonff que larye, le bord posléi'ienr presque en denii-eerele, le bord antérieur distinctement chagriné, dans la premièie moitié légèrement convexe, dans la seconde distinctement concave, en tout assez atténué vers le tibia. Tibia à pédicule fort, considérablement plus court que le fémur et au delà du pédicule environ o«6"si long que large, presque s/y/zer/^z/p, le bord externe fortement convexe vers l'extrémité, le boni interne 152 E. EI.LINCSEN conique, vers l'extrémilé attéuué vers le pédicule de la main. La main environ une fois et demie plus longue et un peu plus large que le lii)ia, à base un peu irrégulière et un peu tronquée, les bords convexes, le plus légèrement sur le bord externe, plus fortement sur le bord interne ; les doigts forts, un peu courbés et pas plus de la demi-longueur de la main. Les poils des pattes-mâchoires médio- crement longs, pointus et partiellement deuticulés; sur les doigts quelques-uns très longs. Le doigt mobile des cliélicères forts, presque droit, à bords presijue parallèles ; galea forte, légèrement courbée en dehors, pourvue de dents presque depuis la base jusqu'à l'extrémité. Les pattes poilues: le fémur et le tibia des deux dernières paires de pattes très élargi. Les grifies simples. Longueui' au moins '2'^^^, mais l'individu est un peu contracté. Un exemplaire capturé près de Naranjito, juin 190L Je n'ai examiné qu'un individu, mais il se distingue de Chelifn- nidificatur Balzan entre autres par la ligne transversale interne du céphalothorax, mais particulièrement par la division différente des segments doi-saux et par les j)attes-màchoires, dont le fémur est plus fort et le tibia encore plus robuste et presque aussi large que long; de Chehfer rohusUa^ Balzan et de Chelifer suhrohustus Balzan, l'espèce nouvelle diffère entre autres par les caractères du fémur et du tibia, (|ue je viens de mentionner. Chelifer mackochelatus Tomosvâry. Subgenus : Cheknes. Lampmochernes. I S84 . Chrlifer macrochclatus Tomosvâry, .-^datok az A Iskorpiôk ism . p. iO, tab. 1, f. 12 13. ISVH. Ijimprochenies macrochclatus Tomosvâry, Balzan, Cherneles en Voy. de M. Simon au Venezuela, p. (17) 513. tab. il, f. 4. Pas d'yeux, mais des taches oculaires. Le corps large et robuste. La première moitié du céphalothorax et les pattes mâchoires brun foncé, la dernière moitié du céphalolhoi-ax et les segments doisaux et ventraux de l'abdomen brun grisâtre clair, les pattes rougeâtres, les autres parties claires. Céphalothorax un peu plus long que large, pourvu de deux stries transveisales, dont la première, située au milieu, forte, dans sa partie centrale légèrement courbée en avant, et de là il y a un enfoncement longitudinal environ à michemiu vers le bord frontal ; sua LA FAUNE DK PSKLIDOSCOIUMOXS DF, f/KQUATFdll 153 la dernière strie transversale située environ an milieu entre la |)re- niière et le boni postérienr et très faible. Céphalothorax pourvu de sérits de poils courts, pointus, en partie légèrement denticulés, comme les autres parties de l'animal, un peu brillant. Le premier et le dernier des segments dorsaux de l'abdomen entiers, les autres divisés longitudinalement. Les bords postérieurs et latéraux des segments dorsaux pourvus d'une série de poils, conformes à ceux i\n céphalothorax, sur les derniers segments des poils lougs, pointus, enlremêlés. La division et les poils des seg- ments ventraux comme chez les segments dorsaux. Pattes-mâchoires robustes, un peu plus longues tjue le corps, très brillantes, néanmoins un peu chagrinées, surtout sur le bord postérieur du trochauter et sur les bords internes du fémur et du tibia. Trochauter à pédicule fort, un peu plus long que large, le bord antérieur légèrement convexe, le bord postérieur pourvu de deux saillies coniques, assez fortes, séparées l'un de l'autre par un sillon longitudinal. Fémur à pédicule fort, environ deux fois plus long que large, le bord antérieur dans la première moitié légère- ment convexe, dans la dei-nière légèrement concave, le l»ord posté- rieur depuis la base régulièrement et fortement convexe, l'ensemble un peu atténué vers le tibia. Tibia à |)édicule fort, un peu plus court que le fémur et un peu plus large, le bord interne un peu gonflé au milieu, le bord externe convexe, le [)lus fortement vers l'extrémité, au-dessus un peu conique. IVlain fortement pédiculée, environ une demi-fois plus longue et large (|ue le tibia, à base un peu tron(iuée et oblique, le bord externe légèrement convexe, le bord interne un peu plus fortement convexe; pres(|ue graduelle- ment atténuée vers les doigts. rol)usles. assez courbés, environ un tiers plus courts que la main. Paltes-mâchoires pourvues de poils longs, forts, poinlus, en partie légèrement denticulés, sur les doigts quelques poils très longs, pointus, entiemèlés. r.e doigt mobile des chélicères à base assez forte, légèrement atténué et ensuite pres(iue parallèle; galea forte, la tige prescpie depuis la base |)ouivue d'une ou deux branches longues, la tige et les branches pourvues de poils longs, poinlus (la figure de Balzan en donne une assez bonne expression). Les pattes pourvues de poils; fémur et tibia des deux dernières |)aires de pattes non robustes ; les griffes simples. Longueur, 4™", mais l'abdomen assez rontracti' et par consé- quent très large. 154 K- KLIJNdSKN Un exemphlire capturé près de Naiiinjito, en février 1901. Celle forme, si connnune dans l'Amérique du Sud, a été rappor- tée |)ar Balzan au Clieliler marrochelalus ïômtisvâry. 11 paraît cependant un peu douteux que ces deux formes soient identiques. Si on prend la description el les lii-ures de Tomosvâry à la lettre, c'est impossible: l'espèce de T()M()SvAhy a une galea sur chacun des deux doijj;ls des cliélicères, mais cela est certainement une erreur, car en ce cas l'espèce serait isolée ]jarmi tous les Pseudo- scorpions ; de ])lus elle aurait deux yeux très grands: cela peu! être interprété comme les taches oculaires, si communes chez les formes des Lampruclicrnes sud-américains; mais il y a aussi d'autres caractères don! se distinguent les formes de Tomosvâry et (le liALZAN. Selon la description de Tomosvâiiy, son espèce avait le céphalothorax « fhrtiler ijraiiulalus », les doigis « triinco paiilo lircoioirs », (( (ihiloiiiinc i/rcninlatu », et, siiivanl la ligure, la base de la main sérail arrondie ; Tomosvâuy dit aussi du céphalothorax que son bord antérieur est (( nwdio sirnutiuiH » ; chez l'animal de l'Kqualeur il n'en est pas ainsi, mais chez un individu (,/') du Brésil une sinuosité i)eutétre observée. La (|ii('sti(>u de savoir quelle est la forme qui a été décrite par TomosvAiîy, ne sera certainement jamais résolue, car le !)•■ IIohvAtii, (lir(>('leur de la section de Zoologie i\i\ Musée national hongrois de Budapest, a bien voulu me communiipier, que le type de TomosvAky ne se trouve plus. Mug. V. Daday (I), il est vrai, fait mention (run(^ comparaison entre Chclifvv iiiiicrorhcUitus et Clielifcr noduliiiiunns T(')mi)svâry, et il dit (|ue ces deus esjièces sont synonymes, mais le fait ([ue cela est impossible est démontré, entre autres, par la fornie de la main chez les dtuix es[)èces ; d'ailleurs c'est un peu suspect, que de cette espèce fondue Dauay communiciue les endroits de provenance sui- vants : Dalmatia (?), Sumatra, Aschanti, sans un mot poui- men- tionner la Colombie, d'où provenait i)récisément le type du Clieliler nvieroclielatus TcimosYâry ; il semble donc (ju'il ait confondu les exemplaires. Cependant, la forme d(! Balzan peut bien conserver le nom (pi'on lui a donné. Le Chelifer niacrocheliilns Tomosvâry de Balzan est répandu sur une vaste partie de l'Amériipie du Sud. Bal/an indique : Brésil, Guyane, Equateur, Venezuela, Colombie. De ce dernier pays prove nait, (H)mme je l'ai déjà mentionné, le type de Tomosvâry. (I) UflKM'B. (t. Clicriicliden lii's iiii^. Nalioiialinn^cuiiis (In : irniiész Fiizclek \l, p. 173). SUU LA FAUNK DE PSKUUDSCOHIMONS DE l'ÉQUATKUK 155 (lHKLirr.15 MTIDIIS UOV. Sj). Subgenus : Chernes. Lamprocheunks. Pas d'yeux, mais cleiçrandes taches (x^iilaires. Le eoips allongé, environ trois fois plus long ([ne large. Céphalothorax hrnn, un peu plus clair (ui arrière, palles-niàchoi- res brun foncé, segments dorsaux et ventraux brunâtres (individus plus jeunes brun olivâtre) ; le reste très clair. Céphalothorax un peu plus long <|ue large, m; i-étrécissant légère- ment vers le front, arrondi par devant, le bord antérieur légèr»^- ment sinué au milieu, deux stries Iransiersales fortes, la première vers le milieu, la seconde aussi ra[)pi"0ch(''e de la première (|ue du bord postérieur, les deux stries |)res(|ue droites ou un peu courbées en avant. (Céphalothorax, comme Joules les autres parties du corps, très brillant, pourvu de séries de poils forts, d'une épaisseur honu)- gèue, en partie tincîment dcnticiilés. Le dernier st^gment dorsal de l'abdomen, entier; hî piemicr segment indistinctement divisé ou entiei-, les autres distinctement divisés longiludinalcment. Sur les bords postérieuis et latéraux des segments dorsaux, une série de poils coujuie ceux du cépha- lothorax, sur les derniers segments quel(|ues poils longs, pointus, entremêlés. Sur les segmenis ventraux, la division el les poils comme sur les segments dorsaux. Fattes-màchoires niédiocrement forles, un peu plus courtes que le corps, très brillantes. Trochanter à pédicule fort, un peu plus long que large, le bord antérieur légèrement convexe, le bord postérieur légèrement chagiiné, légèrement convexe près de la base. Fémur à pédicule foil, environ deux fois plus long que large, le bord antérieur légèrement, mais distinctement chagriné, le bord postérieur niédioci-ement convexe, île bord antérieur légèrement convexe dans la première moitié, distinctement concavci dans la .seconde, en tout peu atténué vers le tibia. Tibia à pédicule fort, à peine aussi loug que; le fémur el de la même largeur, oblong, forle- inen' et régulièrement convexe sur les deux côtés, un peu plus fortement dus la seconde moitit'i sur le bord externe. La main à pédicule, environ une fois et demie plus longue et large que le tibia, graduellement atténuée vers les doigts, à base presiiue régu- lièrement arrondie en hémisphère, les deux cotés médiocrement convexes. Les doigts robustes, nu peu courbés, seulement un pey plus courts qiu; la main. Pattes jnâ(îhoii-es assez fortement poilues. 15™. Cinq exemplaires capturés près de Naraujilo. en février ft juin 1901. La seule espèce sud-américaine qui se rapproche de cette forme, est Chelifer communls Balzan, mais celle-ci est plus robuste, avec un fémur plus fort, à base plus brusquement épaissie eu arriére, tibia subrotiinilatus ; elle est seulement un peu brillante, et la dt'rnière strie transversale du céphalothorax est presque invisible: les pattes-màchoires plus robustes, tibia plus irrégulièrement convexe sur les deux cùtés, les doigts des deux tiers de la longueur de la main : les dents de la galea sont un peu différentes, celles ci ne s'accroissant pas en longueur vers la base. .l'ai examiné quelques individus provenant de plusieurs endroits du Brésil, d'une forme que j'ai identifiée avec Chi'lijer commuins Balzan; son apparence générale est différente et elle est facile à distinguer de la forme de lEquuteur, malgré beaucoup de similitudes.— La nouvelle espèce est aussi très voisine du Chelifer acumiriaîus E. Simon (de Californie), mais celui ci est beaucou[) plus grand (4'°"^). entre autres le fémur à pédicule mince, son bord interne presque droit, le bord externe fortement convexe et arrondi : le tibia presque aussi large que long, à pédicule mince, relativement long, le bord interne presque conique: la main de ménie longueur que le tibia, à peine plus large; les doigts presque de moitié plus courts que la main. Chki.iikr bhevikkmomatls Balzan. Sultgenus : Chkiînks. Trachycher>ks. I!S«»0 rlii'llfi-r luenlemoratiis Balzan, Bev. d. Fseudoscorp. del bac. dei liumi Paranà e Paraguay, p. iO (420) tav. XIV. f. 7. Pas d'yeux, mais des taches oculaires. Le corfis ovale l'abdomen assez large. <'é|)halolhorax. serments dorsaux et paltes mâchoires bruns, les autres parties blanc grisâtre clair. SL'f\ LA FAL.NK Dt PSEL'l)t»SCORPIO.\> DE l'ÉQUATEIR 157 Céphalolltorax parabolique icoir.iiie iiêuéraleiut-uî iher. l'hei ms, Inichi/rhernes], c'est-à-dire régulièremeut arrondi en avant, seule- ment un peu plus long que large, plus large en arrière ; dt'ux stries transversales fortes, la première vers le ujilieu et légèrement courbée en avant dans la partie centrale ; la dernière strie droite, plus rapprochée du bord postérieur. Céphalothorax fortement chagriné, rugueux, pourvu de poils rares, claviformes : sur le front une série ivgulièrede six poils clairs. L'abdomen chagriné, le dernier segment dorsal entier, les autres divisés longltudinalement par une raie assez large : le bord postérieur des segments dorsaux pourvu d'une série de poils courts, claviformes, s'inclinant ; pas île poils Inmjs sur les derniers segments. Les segmenis ventraux très clairs presque sans poils (cela certai- nement individuel I. Palles-màchoires plus courtes que le corps, assez grêles, tine- ment chagrinées, cependant un peu brillantes, pourvues de poils claviformes, devenant ensuite tronqués et denliculés : les doigts pourvus de poils simples, pointus, en partie très longs. Trochanter environ aussi long que large, le bord antérieur presque hémisphé- rique, le bord postérieur légèrement conique au milieu. Fémur à pédicule court et fort, environ deux fois plus long que large, le bord postérieur fortement convexe depuis la base, ensuite plus légère- ment convexe, le bord antérieur très légèrement convexe dans la première moitié, légèrement concave dans la dernière, un peu atté- nué vers le tibia. Tibia à pédicule assez long et fort, à peine aussi long que le fémur et environ aussi large, régulièrement et forte- ment convexe sur les deux côtés, le bord externe un peu plus for- tement convexe vers l'extrémité. La main environ aussi longue que le fémur et un peu plus large, pédiculée. à base un peu irrègulière. le bord exterue très légèrement convexe, le bord interne plus for- tement convexe, régulièrement atténuée vers les doigts, qui sont de la même longueur que la main et légèrement courbés. Le doigt mobile des chélicères légèrement courbé ; galea d'une base assez large, aiguisée et presque droite, pourvue au-dessous de quelques dents très fines dans la dernière moitié. Les pattes pour- vues de poils, sur le bord externe des poils claviformes. sur le bord interne des poils rares, simples. Les grilles simples. Longueur : ^-^ii. Un exemplaire capturé près de Xaranjilo, en février lUul. Le seul caractère important par lequel Texciiiplaire de l'Equa- teur se distingue de la description de Balzan, consiste drms les 158 E. ELLINGSKN dents de la galea. Selon M. Ralzan la galea du mâle serait (( quasi sprocvista di denti ». Le mâle de l'Equateur a quelques deuts (ou poils) fines, apparaissant j)articulièrement quand la galea est vue de côté, et placées sur le bord externo-inférieur. L'espèce n'a été trouvée, auparavant, qu'au Paraguay. Chelifer nuFus Balzan. Subgenus : Chelifer sens. str. JS9U. Chelifer ru fus \jii\ziin, Rev. d. Pseudoscorp. del bac. dei fiuini Paranà e Paraguay, p, 31 (431), tav. XV. f. 15. 1891. Chelifer /"(////s Balzan, Clieruetes en Voy.de M. Simon au Venezuela, p. (37)533, lab. II. f. 25. Deux yeux. Le corps ovale, l'abdomen assez large. Céplialothorax brun grisâtre foncé, les segments dorsaux et venlraux brun grisâtre clair, les autres parties très claires. Céphalothorax un peu plus long que large, presque parabolique, le bord frontal un peu tronqué, ou presque droit, fortement et régulièrement chagriné, rugueux, pourvu de séries irrégulières de poils forlenieut claviformes ; deux stries transversales très fortes, la première droite et vers le milieu, la dernière très rapprochée du bord postérieur et légèrement courbée en avant. Les segments dorsaux de l'abdomen fortement chagrinés, ru- gueux,divisés tous longitudinalemenl; pourvus de poils courts, très fortement claviformes; ces poils peuvent être rangés en une série le long lies bords postérieurs et latéraux, mais chez quelques individus les poils sont rangés un peu irrégulièrement, en appa- rence en deux séries (cela a été, certainement, le cas chez les exemplaires de Ralzan) ; pas de poils longs, pointus sur les deux derniers segments; parfois quelques poils courts, pointus, pro- viennejit du côté inférieur; les segments ventraux divisés longilu- diualement, pas chagrinés, un peu brillants, pourvus de poils rares, simples. Pattes-mâchoires en général beaucoup plus longues que le corps, grêles, tous les articles (même la hanche), sauf les doigts, fortement chagrinés, rugueux, par conséquent pas brillants. ïrochanter à pédicule fort, environ aussi l()ng(|ue large, le bord antérieurconvexe, le bord postérieur à deux saillies basses. Fémur à pédicule irès court; allongé, le bord antérieur droit, le bord postérieur à base élargie, ensuite très légèrement convexe, puis fortement atténué SUR LA FAUNi; DK l'SKllDOSCORPIOiNS DE l/ÉQUATKIK 159 vers rextrémilé. Tibia à pédicule long et tort, nu peu plus court que le fémur et un peu plus large, le bord interne légèrement et régulièrement convexe, le bord externe d'abord très légèrement, puis un peu plus fortement convexe vers l'exlrémité, le tibia devenant ainsi en forme de massue. La main à peine aussi longue que le tibia et environ une fois et demie plus large, à pédicule distinct, à base un peu oblique et arrondie, faiblement convexe sur les deux côtés et graduellement atténuée vers les doigts ; ceux-ci un peu plus courts que la main, médiocrement foris et un peu courbés. Paltes-màcboires pourvues de poils : le troclianter, le fémur, le tibia et la main ont des poils fortement claviformes, les doigts ont des poils pointus, courts ou longs. Le doigt moijile des cliélicères à base forte, un peu atténué ; galea petite, droite, ([uelques dents (ou poils) excessivement iiues dans la pointe extrême ; les pattes pourvues de poils claviformes, des poils simples vers l'extrémité. Griffes simples. Longueur de l'individu le plus grand : â^m. Sept exemplaires capturés près de Naranjito, en février et en juin 1901. Dans la ligure (|u'il donne de celte espèce Balzan a représenté quelques poils pointus sur le dernier segment dorsal, ce sont cei- tainement des poils provenant du dessous. Balzan indique que la femelle a quelques dents fines à l'extrémité de la galea, et que le mâle n'en a pas. J'ai trouvé quel((ues petites dents dans la pointe extrême cbez les deux sexes ; ces petites dents sont très fragiles, ce qui peut avoir été le cas cbez les mâles de Balzan. Cbez l'un de mes mâles, aussi, on ne voyait pas de dénis. L'espèce a été trouvée, auparavant, en .Vrgeutine, au Paraguay, au Brésil et au Venezuela. Olpium OnroNKDxK nov. sp. Quatre yeux ; deux de cbaiiue cùlé, très rappiocbés ; l'anlérieur éloigné d'environ son diamètre du bord frontal du cépbalotborax. Céphalothorax, pattes-màchoires et pattes rouge Ijrunàtre, ou plus clair ou plus foncé, les doigts plus foncés ; segments dorsaux brun foncé, les segments ventraux brun clair ; les autres parties très claires. Céphalotiiorax presque ileux fuis plus long que large, les bords presque parallèles, sauf dans le tiers antérieur, qui est un peu arquément atténué eu avant, un peu rétréci à angle droit en avant 160 K. KI.LINOSKN des yeux. Le bord fioutal légèremenl convexe. La partie du cépha- lothorax aiitérieute aux yeux couvre uuc partie de la hase des chélicères. Sur le céphalothorax, tendance vers une division trans- versale interne vers le milieu, mais pas de strie externe. Céphalo- thorax pourvu de quelques poils rares sur les bords, mais d'ailleurs lisse et un peu brillant. Les segments dorsaux de l'abdomen divisés longitudinalement, sauf le premier et le dernier; le premier peut être cependant divisé ; les trois premiers segments très courts, les suivants considérablement plus longs et presque de jnême longueur, sauf le dernier qui est assez court. Les segments pourvus de poils médiocrement longs, pointus ; on trouve généralement un poil sur les bords latéraux des derniers segments; sur les bords postérieurs des deiuiers segments il y a deux poils sur chaque demi-segment ; seulement le dernier segment a des jmils plus denses, en partie très courts. Les segujents ventraux divisés longitudinalement sauf le dernier; poils comme sur les segments dorsaux. Paltes-màchoires médiocrement fortes, un peu biillantes, environ de la longueur du corps. Trochanler un peu plus long que large, perniforme, obliquement tronqué à l'extrémité, le bord antérieur régulièreu)enl convexe, le bord postérieur droitou un peu concave, pourvu de quelques poils pointus. Fémur plus court que le céphalothorax, à pédicule court, fort ; environ quatre lois plus long que large, le bord antérieur très légèrement convexe, le bord posté- rieur presque droit, le fémur, |)Ourtant, légèrement atténué vers les deux extrémités : le boi'd antérieur avec des poils simples, longs, plus courts sur le bord postérieur. Tibia à j)édicule courbé et assez long; environ de la demi longueur du fémur au delà du pédicule et un peu plus large; le bord externe légèrement et régulièrement convexe, le bord interne un peu élargi depuis le pédicule et ensuite un peu convexe, en tout un peu ovale. Main à pédicule distinct, à base un peu obliquement arrondie, convexe sui- les deux côtés, légèrement sur le bord externe, plus foitement sur le bord interne; environ aussi longue que le tibia et considérablement plus large, une demi-fois jtlus longue que lai-ge, graduellement atténuée vers les doigts ; sur les côtés internes, le tibia et la main ont des poils longs, sur les côtés externes des poils courts. Les doigts légèrement courbés, environ aussi longs ou un peu plus longs que la main ; pourvus de poils courts, quelques-uns très longs, entiemêlés ; le doigt lixe finement denticulé à l'intérieur, le SUR LA FAUNE DE PSEUDOSCORPIONS DE l'ÉQUATEUR IHl doigt mobile sans dents ou denticulé seulement vers l'extrémité. Les chélicères pourvues de quelques poils forts ; le doigt lixe très grêle, le doigt mobile à base plus large, lentement atténué, le bord externe droit ; galea forte, un peu courbée en dehors, à l'extrémité quelques dents fines. Les pattes pourvues de poils, les griffes sim- ples ; la tige de ventouse se divise en deux branches, chacune por- tant une ventouse {aroUain) saillante au dehors des griffes Longueur de l'individu le plus grand iS™'"; largeur, environ Omm;j_ Cinq exemplaires capturés près de Naranjito en avril 19U1. Sauf l'espèce nouvelle, nommée ci dessus, on ne connaît, autant que je sache, que deux espèces de Pseudoscorpions à deux ven- touses (aroUai à chaque patte, qui ont été décrites auparavant : Olpium hiaroliatum Tômosvàry de l'Inde et Garypinus dimidlatus (L. Koch) Daday ( = ? Olpium, dimidiatum. L. Koch) provenant de plusieurs endroits de la Péninsule balcanique et de la Syrie. L'es- pèce nouvelle est très voisine de Olpium biaroliatum Tôm(')svâry, et de la description très courte de Tomôsvary il n'est pas facile de trouver des différences importantes, mais les lieux, où sont trou- vées ces espèces, l'Inde et l'Equateur, étant si éloignés, l'identité de ces deux formes n'est pas probable. Outre cela, V Olpium biarolia- tum a tous les segments dorsaux divisés, tandis que chez l'espèce nouvelle le dernier segment, au moins, est entier. C'est avec beaucoup de doutes que j'ai rapporté cette espèce au genre Olpium, ce genre, tel qu'il est établi à présent, ayant plu sieurs caractères différents, en outre tous les segments dorsaux entiers et le céphalothorax seulement un peu plus long que large, tandis que l'espèce nouvelle a presque tous les segments dorsaux divisés et le céphalothorax presque deux fois plus long que large. — Aussi je serais tenté de la rapporter au genre Minniza E. Simon, niais selon Balzan, ce genre aurait une strie transversale sur le céphalothorax, et Slmon ne mentionne rien de la division des segments. Une diagnose générique quant à cette espèce y compris YOlpium hiaroliatium pourrait être établie ainsi : Céphalothorax beaucoup plus long, presque jusqu'à deux fois plus long que large, un peu rétréci en avant des yeux. Les segments dorsaux et ventraux de l'abdomen en partie divisés longitudinale- ment. Chélicères petites, pourvues de galea, et la serrula attachée dans toute sa longueur. Pattes-mâchoires médiocrement longues et médiocrement fortes. Le fémur des deux premières paires de pattes sans trochantin, mais celui des deux dernières en est pourvu. Les pattes à deux petites griffes ; deux vento'uses, la tige de cet appen- Mém. Soc. Zool. de Fr., 190:2. 162 E. ELLINGSEN dice se bifurquant en deux branches, fortement saillantes hors des griffes, chaque branche portant une ventouse. Les deux premières paires de pattes se composent de hanche, trochanter, pars basalls feraoris. pars tibialis femoris, tibia et deux articles du tarse, en tout sept articles. Les deux dernières paires qui ont le fémur très fortement élargi, se composent de : hanche, trochanter, fémur à trochantin, tibia et deux articles du tarse, donc sept articles aussi. Chthonius naranjitensis nov. sp. Subgenus : Pseudochthonius. Deux yeux, un de chaque côté, éloignés du bord antérieur du céphalothorax de la longueur de leur diamètre. Le corps court et large. Céphalothorax, chélicères, pattes-màchoires, pattes et le bord antérieur des segments dorsaux rougeàtre (presque rosàtre), les doigts des pattes mâchoires plus foncé ; les autres parties presque blanches. Céphalothorax presque en carré, le bord antérieur presque droit, avec une petite pointe au milieu; pourvu de poils assez rares, forts, simples, surtout assez denses le long des bords latéraux. L'abdomen pourvu de poils de la même sorte, mais très rares et surtout sur les bords postérieurs des segments dorsaux ; sur le der- nier segment un ou deux poils plus longs ; au dessous pas de poils (cela certainement individuel). Pattes-mâchoires grêles, un peu plus courtes que le corps. Tro- chanter court, le bord antérieur fortement convexe. Fémur grêle, à peine pédicule, environ quatre fois plus long que large, le bord antérieur au milieu, légèrement convexe, le bord postérieur corres- pondant, concave; tout le fémur faiblement courbé en avant ; le bord antérieur pourvu de poils assez longs, le bord postérieur de poils très courts, simples. Tibia un peu courbé, en forme de calice, aussi large que le fémur et long d'environ un tiers, des poils assez longs sur le bord externe, pas de poils sur le bord interne. La main aussi longue que le tibia et un peu plus robuste, sans pédicule; pourvue de poils courts et de deux poils très longs, légèrement convexe sur les deux côtés, graduellement atténuée vers les doigts. Les deux doigts de même longueur, environ deux fois plus longs que la main, légèrement courbés (mais ne formant pas un inter- valle comme chez Chthonius curvidigitatus), tous les deux crénelés en dedans (à peine denticulés, comme l'indique Balzan pour SUR LA FAUNE DE PSEUDOSCORPIONS DE l'ÉQUATEUR 163 les autres espèces sud-américaines) ; les doigts pourvus de poils assez denses. Les chélicères sont comme chez le genre en général. Les pattes pourvues de poils simples, les griffes simples. Longueur, l"'" 5. Un exemplaire capturé près de Naranjito, en juin 1901. Cet individu, une femelle, avait, sur la face inférieure de l'abdo- men, une masse d'oeufs, qui se dégagea pendant l'examen de l'animal. Cette masse d'œufs,qui est entièrement blanche, d'environ 1mm (Je diamètre et un peu oblongue, se compose de onze œufs, dont deux sont situés au milieu et les neuf autres tout autour ; il a dû être assez difficile pour ce petit animal de porter cette masse ; or, l'abdomen se montra tiré en haut pour élever la masse autant que possible. Du sous-genre de Balzan : Pseudochtiionius (à deux yeux), deux espèces seulement sont décrites ; Chthoniusdiophthalmm Daday, de la Hongrie, et Chthonius Simoni Balzan, du Venezuela. La forme de l'Equateur ne peut être identifiée à aucune de ces espèces. — Du sous-genre Chthonius sens. str. (à quatre yeux), Balzan a décrit trois espèces dans l'Amérique du Sud, Chthonius parcidentatus, hirsutm et curvidigitatus. Décidément la forme de l'Equateur n'a qu'un œil de chaque côté; on peut supposer que Balzan a pris une tache accidentelle pour un œil postérieur. Aussi j'ai comparé la forme de l'Equateur avec les trois espèces nommées ci-dessus ; la forme des bords internes des doigts des pattes- mâchoires paraît donner un caractère spécifique assez bon ; curmdigitalus a un doigt sans dents, l'autre pourvu de grandes dents, éloignées, courbées ; d'ailleurs les doigts sont courbés, formant un intervalle large, quand même la pince est fermée ; hirsutus est pourvu de dents fortes, très éloignées, sur les bords internes des deux doigts ; parvidciitatus y est pourvu de dents très petites, serrées (la forme de l'Equateur a des dents très petites ou des doigts presque créne- lés) ; en cela la forme de l'Equateur se rapproche le plus de la dernière espèce, et il y a certainement une grande ressemblance entre elles, mais sauf les yeux, il y a encore un caractère qui les sépare l'un de l'autre : parvidentatus a les doigts au plus une fois et demie plus longs que la main, la forme de l'Equateur au moins deux fois plus longs. 164 Ë. eLlingsen Chthonius pulchellus nov, sp. Subgenus : Typhlochthonius. Pas d'yeux. Le corps un peu étréci au milieu. Tout l'animal gris brunâtre clair, sauf quelques taches transver- sales courtes, plus obscures sur l'abdomeu. Céphalothorax environ aussi long que large, distinctement atténué en arrière(la cause du rétrécissement); le bord antérieur presque droit, légèrement siuué au milieu, avec quelques dents extrême- ment petites; le bord postérieur un peu arqué, sur les bords quel- ques poils très forls. Abdomen un peu oviforme, au-dessus quelques poils rares, sauf sur les derniers segments, qui ont des poils plus denses, avec quel- ({ues poils très longs entremêlés ; les poils du dessous comme au-dessus. Pattes-raàchoires très grêles, un peu plus longues que le corps. Trochanter court, le bord antérieur convexe. Fémur grêle, à pédi- cule très court, au moins quatre fois plus long que large, le bord antérieur légèrement élargi et ensuite presque droit, le bord posté- rieur brusquement et un peu fortement élargi, ensuite légèrement concave, puis un peu élargi et enfin graduellement atténué à Tex- trémité ; le bord postérieur pourvu de quelques poils très courts, le bord antérieur possède plusieurs poils beaucoup plus longs. Tibia à pédicule court, en forme de calice, aussi large que le fémur et d'environ un tiers de la longueur ; le bord externe convexe, le bord interne presque droit, sur le bord externe quelques poils inclinés, sur le bord interne un seul poil à l'extrémité. La main un peu plus longue que le tibia et un peu plus large, à pédicule très court, le bord externe légèrement convexe depuis la base et graduellement atténué vers les doigts, le bord interne un peu élargi près de la base et ensuite presque droit, un peu rompu à la base des doigts. La forme des doigts très caractéristique : le doigt fixe au moins deux fois plus long que la main, depuis la base fortement courbé en dedans, dans environ deux tiers de sa longueur, en suite fortement courbé en dehors, en tout en forme d'une -i- allongée ; le doigt mobile un peu plus court que le doigt fixe et un peu plus grêle, régulièrement courbé en dehors dans toute sa longueur; au milieu, dans deux tiers de sa longueur, le doigt fixe a une série de dents pointues, alternativement grandes et petites, environ 20 ; le doigt SUR LA FAUNE DE PSEUDOSCORPIONS DE l'ÉQUATEUR 165 mobile n'a pas de dents. La main et les doigts pourvus de poils très rares, sur les doigts quelques-uns longs, entremêlés. Le doigt mobile des chélicères un peu plus fort que le doigt ûxe. Le doigt mobile pourvu, au bord externe vers la pointe, d'une dent assez forte, peu arrondie ; le doigt fixe pourvu en dedans de 9 à 10 dents petites, aiguës, de môme lougueur. Les pattes pourvues de poils forts, particulièrement denses sur les tarses ; les griffes simples. Longueur, i'^^o. Un exemplaire capturé près de Naranjito, en mars 1901. J'aurais été disposé à rapporter cette forme au Clitlioniiis {Pseudo- chthonius) Simoni Balzan, du Venezuela, les pattes-mâchoires et particulièrement la forme des doigts des pattes-mâchoires (à une exception près) étant extrêmement égales ; avec une petite modifi- cation que je vais mentionner, la figure des doigts chez Balzan pourrait avoir de la valeur pour l'espèce nouvelle. Mais les différences suivantes s'opposent à leur fusion (B^l'espèce de Balzan, E=respèce nouvelle) : B. deux yeux, E. pas d'yeux ; B. le céphalo- thorax presque parallèle, E. distinctement atténué vers derrière ; B. pourvu selon la description, de dents sur le bord interne du doigt mobile des pattes mâchoires (la figure cependant n'en montre aucunes, ce qui fait la ressemblance avec celles de la nouvelle espèce encore plus frappante), E. pas de dents; B. chelarum digiti, intus dentibns plurimis, crassis, arinati, E. des dents seulement sur le bord interne du doigt mobile. A ppendice. Dans une petite collection de Pseudoscorpions, reçue de MM. les docteurs Staudinger etBANG Haas (Blasewitz-Dresde), il y en avait quelques-uns de l'Amérique du Sud, dont voici les descriptions : Chelifer macrochelatus Tômôsvâry. (Voir ci-dessus). Brésil : Espirito Santo, Minas Geraes, Sào Paulo. Chelifer cervus Balzan. Subgenus : Chernes. Lamprochernes. 1890. Chelifer cervus Balzan, Rev. d. Pseudoscorp. del bac. dei fiuini Paranàe Paraguay, p. 12 (41'2), tav. XIll, f. 2. Pas d'yeux, ni de taches oculaires. Le corps fort et un peu allongé. 466 E. ELLINGSEN Pattes-màchoires et la première moitié du céphalothorax brun très foncé, la dernière moitié plus claire, les segments dorsaux et ventraux brun olivâtre, les autres parties claires. Céphalothorax un peu plus long que large, deux stries transver- sales, dont la première forte, presque droite, située au milieu ; il y a un enfoncement longitudinal du milieu de la première strie envi- ron à mi-chemin vers le bord frontal ; la dernière est un peu plus faible et située au milieu entre la première et le bord postérieur. Céphalothorax, comme les autres parties du corps, très peu brillant, très légèrement chagriné, pourvu de séries irrégulières de poils assez forts, en partie légèrement denticulés. Le premier et le dernier segment dorsaux de l'abdomen entiers, les autres divisés longitudinalement. Les bords postérieurs et laté- raux des segments dorsaux pourvus d'une série de poils comme ceux du céphalothorax, sur les derniers segments quelques poils longs, pointus, entremêlés. Les segments ventraux : le dernier entier, les autres paraissent divisés ; les poils comme chez les segments dorsaux. Pattes-mâchoires robustes, environ aussi longues que le corps, légèrement chagrinées. Trochanter à pédicule fort, un peu plus long que large, le bord antérieur légèrement convexe, dans la der- nière moitié presque concave, le bord postérieur et le bord supé- rieur, tous les deux avec une saillie conique forte, dont surtout celle du bord supérieur est assez aiguë. Fémur à pédicule fort, environ deux fois plus long que large, le bord antérieur dans la première partie, qui est la plus grande, très légèrement convexe, légèrement concave dans la dernière partie, le bord postérieur régulièrement et fortement convexe depuis la base, peu atténué vers le tibia. Tibia à pédicule fort, un peu plus court que le fémur et un peu plus large, presque rhombiforme vu d'en haut, le bord externe un peu gonflé, le bord interne ou plutôt le bord supéro- interne pourvu d'une saillie très forte, se terminant dans un mamelon, fortement chagriné, rugueux, pourvu de poils denses- La main très robuste, un peu plus longue que le tibia et presque deux fois plus large, à base obliquement arrondie, convexe sur les deux côtés, plus fortement sur le bord interne, graduellement atténuée vers les doigts robustes, assez courbés, environ un tiers plus courts que la main. Pattes-mâchoires pourvues de poils très denses, montrant un aspect presque velu, grisâtre ; les poils des saillies du trochanter et du tibia sont surtout très denses ; les poils sont partiellement longs et forts, et distinctement denticulés, sur les doigts quelques-uns très longs, simples. SUR LA FAUNE DE PSEUDOSCORPIONS DE l'ÉQUATEUR 167 Le doigt mobile des chélicères presque parallèle, un peu courbé ; {^alea forte, pourvue de branches et de dents (voir la figure de Balzan). Les pattes pourvues de poils, fémur et tibia des deux dernièies paires assez élargis; les griffes pourvues intérieurement d'une dent forte. Longueur 5™™. Un exemplaire de Surinam. Tandis que chez Clwlifcr macrochelatus les saillies coniques du trochanler et du tibia sont très fortes chez le mâle, très petites chez la femelle, cela n'est pas le cas chez cette espèce : l'individu examiné est une femelle et a des saillies extrêmement fortes. Chelifer communis Balzan. Subgenus : Chernes. Lamprochernes. 1890. Chelifer communis Balzan, Re\. d. Pseudoscorp. del bac. dei fîumi Paranà e Paraguay, p. d6 (41(3), tav. XIIL f. 4. Pas d'yeux, des taches oculaires manquantes ou très indistinctes. Céphalothorax, segments dorsaux et ventraux, pattes-màchoires brun foncé, les doigts un peu plus obscurs, la dernière partie du céphalothorax et les segments dorsaux souvent brun olivâtre ; les autres parties claires. Céphalothorax un peu plus long que large, graduellement atténué en avant ; le bord antérieur arrondi, la partie centrale légèrement sinuée ; deux stries transversales, la première au milieu et assez distincte, généralement droite, la dernière très peu distincte. Cépha- lothorax un peu brillant, comme les autres parties du corps, pourvu de poils rares, assez longs, en partie finement denticulés. Le dernier segment dorsal de l'abdomen généralement entier (sur un individu il y avait une ligne fine;, le premier segment dorsal aussi entier en général, les autres segments distinctement divisés longitudinalement. Les bords postérieurs et latéraux des segments dorsaux pourvus d'une série de poils (ils manquent souvent) comme ceux du céphalothorax ; sur les derniers segments quelques poils longs, pointus, entremêlés. La division et les poils des segments ventraux comme sur les segments dorsaux ; le premier segment, pourtant, souvent divisé. Pattes-màchoires robustes, environ aussi longues que le corps ou un peu plus longues, un peu brillantes. Trochanter à pédicule fort, un peu plus long que large, le bord antérieur légèrement convexe, le bord postérieur finement chagriné, à base légèrement convexe, 168 E. ELLINGSEN. — SUR LA FAUNE DE PSEUDOSCORPïONS DÉ l'ÉQUATEUR ensuite presque droit. Fémur robuste, à pédicule fort, à peine deux fois plus long que large, le bord antérieur légèrement, mais distinc- tement chagriné, légèrement convexe dans la première moitié, dis- tinctement concave dans la seconde, le bord postérieur brusquement élargi à la base et ensuite légèrement convexe ; le fémur peu atténué vers le tibia. Tibia à pédicule fort, environ aussi long que le fémur et au moins aussi large, oblong, fortement convexe sur les deux côtés, surtout sur le bord externe. La main pédiculée environ une demi-fois plus longue et plus large que le tibia, formant avec la base des doigts un angle très faible ; un peu obliquement tron- quée à la base, légèrement convexe sur les deux côtés ; les doigts robustes, un peu courbés, environ un tiers plus courts que la main. Pattes-màchoires pourvues de poils, assez denses, lougs, forts, en partie finement denticulés, sur les doigts quelques poils très longs, pointus, entremêlés. Le doigt mobile des chélicères robuste, presque droit, presque parallèle ; galea forte, droite, presque depuis la base et tout autour pourvue de dents courtes et fortes. Les pattes pourvues de poils ; le fémur des deux dernières paires très élargi ; les grilles simples. Longueur pouvant atteindre 4™'n5. Neuf exemplaires du Brésil : Espirito Santo et Sào Paulo. C'est avec quelque doute que j'ai rapporté cette forme au Chelifer communis Balzan, D'après la figure de Balzan ses individus parais- sent plus minces et plus petits que la forme que j'ai eu sous les yeux. Les autres petites différences sont trop futiles pour justifier la création d'une espèce nouvelle. 109 LA FAUNE DES POISSONS ACTUELLEMENT CONNUS QUI HABITENT LES CÔTES DE LA CORSE LOUIS ROULE Profcssour ;i l'Université de Touloiiso. I Je termiue en ce moment un travail sur la topographie zoolo- gique des côtes de la Corse. J'ai achevé les déterminations des animaux que j'ai recueillis ; j'ai repéré mes dragages et mes son- dages en m'aidant des cartes marines, et j'ai commencé la rédaction du mémoire définitif. Seulement, c'est là une œuvre de longue haleine, car il me faut classer de nombreuses notes, et j'en distrais volontiers, pour la publier de suite, la partie consacrée aux Poissons. Les Poissons composent, en effet, un groupe qui s'oppose volon- tiers aux autres par sa grande importance économique. A une époque où les questions de la pêche et de la pisciculture rationnelle intéressent, non seulement les zoologistes, mais encore les législa- teurs et les administrateurs, un travail s[)écialement consacré à de telles études a sa valeur propre ; il forme un tout à lui seul. Mais à la condition de ne point se borner à une stricte énumération. Il faut davantage, et compléter la liste en mentionnant, pour chaque espèce, outre son degré de fréquence, l'endroit où on la trouve et le fonds qu'elle habite. De cette manière, une simple étude zoolo- gique sur les Poissons constitue une introduction, et fournit une base naturelle, à l'examen pratique des conditions réglementaires qui doivent régir les pêches et le repeuplement. Je commencerai par donner de brèves indications sur les fonds littoraux de la Corse, depuis le rivage jusqu'aux falaises sous- marines qui entourent l'île d'une bande presque ininterrompue, et qui dominent les abysses profonds de la Méditerranée. La ligne de faîte de ces falaises passe, en moyenne, de 80 à 200 mètres de pro- fondeur. Un plateau côtier, plus ou moins étendu suivant les loca- lités, et dont les pêcheurs exploitent la plus grande part, s'étend ainsi du rivage à ce bord profond des falaises sous-marines. Je me bornerai, sur un tel sujet, à quelques notions succinctes, indispen- sables pour préciser les habitats des différentes espèces de Poissons. Mes observations complètes seront exposées dans le prochain mémoire définitif. 170 L. ROULE Je continuerai par l'énumération des Poissons qui vivent sur les côtes de la Corse. Cette liste n'est pas dressée d'après mes seules recherches. Un excellent travail, dû à M. J.-B. de Caraffa, consacré aux Poissons de la Corse, vient de paraître dans le Bulletin de la Société des Sciences historiques et naturelles de la Corse (Bastia,1902). Ce mémoire est fort bien fait pour son but. Destiné à la fois aux spécialistes et au grand public, il insiste peu sur les questions purement techniques de la synonymie ou de la variation, mais chaque espèce y est l'objet d'une description détaillée, suffisante, facile à lire par les personnes qui ne sont point des ichthyologistes de profession. Des illustrations photographiques, nombreuses et élégantes, ajoutent à la clarté du texte. Le mémoire de M. de Caraffa traite seulement des Poissons de la côte orientale de l'île, et surtout de ceux que l'on recueille depuis la région du cap Corse jusqu'à celle d'Aleria. L'auteur décrit 147 espèces. Le présent travail résume les recherches que j'ai faites sur le littoral de la Corse entière. La côte occidentale, plus accidentée, plus riche en fonds rocheux, abrite un certain nombre de formes qui paraissent manquer aux plages basses de la rive orientale, ou s'y trouver moins nombreuses. Aussi puis-je porter le chiffre des espèces actuellement connues à 172, en totalisant et rassemblant les deux collections, celle de M. de Caraffa et la mienne. Du reste, M. de Caraffa a eu l'obligeance de me soumettre la plupart de ses échantillons, afin de les comparer à ceux que j'ai recueillis, et je lui en exprime mes vifs remerciements. J'élimine de mon travail tout ce que le sien contient déjà, afin de ne pas faire double emploi. Je me borne à donner ici la liste complète des Poissons connus, en discutant, le cas échéant, leur synonymie ou leurs variations, et je termine par quelques considérations sur la faune ichthyologique de la Corse, touchant ses afiinités et ses différences avec les faunes des pays voisins. II Esquisse d'une topographie zoologique des côtes de la Corse I. Plateau côtier en général. — Ce plateau entoure la Corse entière. 11 plonge, depuis le rivage, sous les eaux marines, et s'étend au large à des distances variables. Il descend peu à peu, par une pente assez faible, plus ou moins accidentée, mais il ne continue pas ainsi jusqu'aux abîmes des grandes profondeurs. Presque partout il s'interrompt brusquement sur le bord de puis- santes cassures abruptes, qui s'infléchissent rapidement jusqu'à LA FAUNE DES POISSONS QUI HABITENT LES CÔTES DE LA COKSE 171 500-600 mètres, parfois davantage, et vont rejoindre les abysses. Lorsque ces falaises manquent, ainsi que cela existe en quelques rares points, elles sont remplacées par des pentes très déclives qui unissent le plateau aux grands fonds. D'une manière ou d'une autre, le plateau s'interrompt ainsi, soit sur la crête des falaises, soit sur celle des pentes rapides. Cette interruption se fait, suivant les lieux, à des profondeurs variables, et à des distances variables du rivage. D'habitude, elle se manifeste à deux profondeurs : vers 80-90 mètres dans plusieurs localités, vers 150-180 mètres en d'autres. La diversité, relative à la distance au rivage, est plus grande de beaucoup. La jonction du plateau avec le rivage s'elïectue aussi de plusieurs façons. Tantôt la falaise littorale plonge à pic dans la mer, et le fond descend rapidement à une profondeur assez grande. Tantôt la falaise littorale fait défaut. La terre émergée s'étale en une plage. Alors le fond s'incline plus lentement. Quoi qu'il en soit, les choses s'égalisent partout vers une profondeur de 25-30 mètres. Depuis cette limite jusqu'à l'interruption sur le bord des falaises ou des pentes sous-marines, le plateau côtier a partout la même allure. 11 descend faiblement, de manière à s'étendre sur un vaste espace, à former une ample terrasse à peine déclive, et parfois presque horizontale. Les différences ne portent que sur le mode de liaison de cette terrasse avec la terre émergée. A cet état presque général du plateau côtier de la Corse se sur- ajoutent un certain nombre de conditions particulières, variables suivant les localités. On peut, à ce sujet, diviser la Corse eu quatre régions : l" celle des grands golfes de la côte occidentale ; 2" celle du cap Corse ; 3° celle des plages basses et des étangs litto- raux de la côte orientale ; 4-^ celle de Bonifacio. La région des grands golfes s'étend, en allant du nord au sud, de l'îlot de Gargallo, situé non loin de Galéria, à la pointe de Senetose, placée entre Ajaccio et Bonifacio. Elle se caractérise en ce que le littoral se creuse à plusieurs reprises, et que la mer s'avance entre les terres de manière à former quatre vastes golfes, encadrés de falaises élevées. Ces golfes, en allant du nord au sud, sont ceux de Porto, de Sagone, d'Ajaccio, et de Valinco. Tous pré- sentent ce fait commun que le plateau côtier est, au pied des falaises qui les bordent, relativement étroit. Sa largeur moyenne varie de un à trois kilomètres. Seuls, quelques-uns des caps qui se dressent à leur entrée portent, sous leurs eaux, des bancs un peu plus étendus, où les pêcheurs de ces régions ont l'habitude de se rendre, 172 L. ROULE lorsque le temps le permet, pour y faire une récolte plus abon- dante. Le golfe de Porto est le plus petit, mais aussi le plus remarquable de tous. Les falaises qui l'encadrent sont des montagnes élevées, hautes parfois de 1.200 à 1.300 mètres, et dont certaines plongent à pic de plusieurs centaines de mètres. La terre explique la mer ; celle-ci reproduit en creux le relief de celle-là. La sonde marque, en certains points, 600, 800, 1.000 mètres de profondeur, à un kilomètre ou un kilomètre et demi du rivage. La cuvette de ce golfe n'est, en définitive, qu'une fosse abyssale, dont les parois dépassent le niveau de la mer pour émerger en hautes montagnes. Aussi le plateau côtier est il fort étroit. Souvent même, par exemple sur la côte méridionale et à l'entrée du golfe, fait-il complètement défaut. Ailleurs il existe, mesure au plus un kilomètre à un kilo- mètre et demi de largeur, puis s'interrompt brusquement, à la profondeur moyenne de 60 à 80 mètres, sur la ligne de crête d'une falaise sous-marine qui plonge droit dans les abysses. Le golfe de Sagone est moins accidenté. Plus spacieux que le précédent, grandement ouvert sur la mer du large, portant au fond des atterrissements dus aux alluvious d'une rivière importante, le Liamone, son plateau côtier se présente sous deux aspects. Il est relativement étendu sur la rive septentrionale du golfe. Sa moindre largeur dépasse souvent un kilomètre. Souvent elle atteint quatre ou cinq kilomètres, notamment entre Sagone et Cargèse d'une part, d'autre part entre Cargèse et les abords du golfe de Porto. Quelle que soit son ampleur, il offre partout ce trait constant, de s'incliner doucement jusqu'à une profondeur moyenne de 150 à 180 mètres, et de s'interrompre alors sur le bord d'une falaise sous-marine qui s'enfonce dans les abysses. Telle n'est pas la disposition de la rive méridionale. Le plateau est plus étroit ; ses dimensions en ce sens varient de un à trois kilomètres, et ne dépassent pas ce dernier terme. Ensuite, il ne descend pas au-dessous de 80-90 mètres de profondeur ; il cesse alors sur la crête d'une nouvelle falaise sous- marine. Cette manière d'être n'est pas spéciale au plateau côtier qui borde la rive méridionale du golfe de Sagone, On la retrouve aussi dans le golfe d'Ajaccio, dans celui de Valinco (ou de Propriano), et sur tout leur pourtour. Le plateau côtier montre les mêmes parti- cularités d'étendue restreinte et de brusque interruption à une profondeur identique. Il n'y a d'exception sur le premier point qu'en faveur des caps placés à l'entrée. La région qui s'étend du LA fAUNE DES POtSSONS QUI HABITENT LES CÔTES DE LA CORSE 173 cap de Feuo, dressé à l'entrée méridionale du golfe de Sagone, aux îles Sanguinaires, placées à l'entrée septentrionale du golfe d'Ajac- cio, domine un vaste banc sous-marin, large en certains points de 6 à 7 kilomètres. Les îles Sanguinaires correspondent, du reste, à des portions émergées de ce banc. Celui-ci n'est autre que l'habituel plateau côtier. élargi dans cette région, s'étendant plus loin sous les eaux, mais s'interrompant toujours dès que sa profondeur atteint 80 à 90 mètres. Le cap Muro, situé entre le golfe d'Ajaccio et le golfe de Valinco, les pointes de Campo Moro, de Senetose, placées sur la rive méridionale de ce dernier, montrent des dispo- sitions analogues, quoique sur un espace un peu plus restreint. La partie du littoral de la Corse, qui s'étale au nord de la région des grands golfes sur une étendue de 70 à 80 kilomètres, présente une allure spéciale. Elle va jusqu'à la base du cap Corse. Elle cerne d'abord le golfe de Galeria ; elle passe ensuite devant Caivi et l'île Housse ; elle borde la Balagne ; puis elle se termine au fond du golfe de Saint-Florent. Sa caractéristique principale tient à ce que le plateau côtier y est fort vaste ; ses dimensions moyennes en largeur varient, suivant les localités, de cinq à quinze kilomètres. Depuis le rivage, rocheux et escarpé, il plonge assez rapidement, jusqu'à 23 ou 30 mètres de profondeur ; puis il se redresse quelque peu, et prend une pente plus douce, allant parfois jusqu'à l'hori- zontale. Il s'étale ainsi sous les eaux du large ; puis il s'interrompt, comme sur la rive septentrionale du golfe de Sagone, à des profon- deurs de 160 à 200 mètres, sur la ligne de crête d'une falaise -sous- marine qui plonge rapidement dans les abysses de 500 à 800 mètres. Après quoi, dans ces zones profondes étalées bien au-dessous du plateau côtier, la déclivité plus faible reprend jusqu'aux abysses du grand large, inférieurs à 2000 et 3000 mètres. Le plateau côtier forme ainsi, dans la région de la Balagne, un vaste banc sous-marin, exploité avec fruit par les nombreux pécheurs de Calvi et de l'île Rousse. 11 n'est pas continu cependant. Il est coupé d'entailles profondes, situées devant les vallées d'éro- sion qui entament également les terres émergées. Celles-là prolon- gent celles-ci sous la mer. Ceci est important. Ce fait dénote que les affaissements qui ont donné à la Corse son étendue actuelle, en la séparant de la Sardaigne et en morcelant l'ancienne terre qui occu- pait une bonne part du bassin occidental actuel de la Méditerranée, sont postérieurs au creusement de ces vallées d'érosion. Ces entailles, qui découpent ainsi le plateau côtier, amènent les abysses à une faible dislance du rivage. Elles constituent autant de fosses 174 L. ROULE abyssales, encadrées de hauts fonds. Les principales sont : celle de Galeria, dépendance de la vallée du ruisseau le Faugo ; celle de Calvi, dépendance des vallées unies de deux torrents, le Fiume secco et la Ficarella; celle de l'île Rousse, qui prolonge la vallée du Régino; enfin celle de Saint-Florent, qui agit de même vis-à-vis de celle de l'Aliso, important ruisseau qui se jette à la mer non loin de la charmante ville de Saint-Florent. Le cap Corsée est une langue de terre qui, partant de la région comprise entre Saint-Florent et Bastia, pointe droit vers le nord. Il consiste en une presqu'île accidentée, étroite, qui mesure environ quarante kilomètres de longueur sur une douzaine de kilomètres de largeur. Malgré cette faible étendue, il porte des sommets élevés, dont plusieurs dépassent 1000 mètres d'altitude. En somme, ce cap n'est qu'une chaîne de montagnes, dirigée du nord au sud, soudée par sa base méridionale au corps même de l'île. Les deux versants diffèrent. L'un, occidental, abrupt et escarpé, découpe son littoral en nombreuses criques encadrées de hautes falaises. L'autre, oriental, plus étendu en largeur, descend moins brusquement vers la mer ; les ondulations du terrain y sont moins heurtées, et ses falaises sont plus basses. Ces dissemblances se répercutent sur le plateau côtier. La part de ce dernier, qui longe la rive occidentale, diffère de sa corres- pondante de la rive orientale. En outre, la pointe même du cap Corse possède une disposition spéciale, qui n'existe pas ailleurs. Le plateau occidental ressemble à celui des golfes d'Ajaccio et de Valinco ; sa largeur moyenne varie de un à deux kilomètres, et il cesse, vers 80-90 mètres de profondeur, sur le bord de la falaise sous marine. Semblable en cela au versant correspondant des terres émergées, le plateau oriental est moins déclive que le précé- dent. Les profondeurs de 80-90 mètres ne commencent à se montrer qu'à trois ou quatre kilomètres du littoral, parfois davantage. Ses fonds sont rocheux ; mais leurs interstices s'emplissent de dépôts meubles, menu gravier, sable, ou vase. Enfin, au lieu de s'inter- rompre sur la crête d'une falaise, il se prolonge sous les eaux du large, en conservant, à peu de chose près, la même pente. Contrai- rement à ce qui existe ailleurs, cette pente ne s'infléchit pas brus- quement pour donner une falaise abrupte ; elle va rejoindre progressivement les abysses, et elle descend à plusieurs centaines de mètres sans offrir des dénivellations trop rapides. Le sommet du cap Corse, à ne considérer que lui-même, montre une disposition remarquable. Au lieu de consister en une pointe, LA FAUNE DES POISSONS QUI HABITENT LES COTES DE LA CORSE 175 il est coupé carrénieot, et forme une falaise longue de huit à dix kilomètres, dirigée de l'est à l'ouest, perpendiculairement à la chaîne montagneuse qu'il termine. Le plateau côtier s'étale au large de cette falaise. De môme que sur le versant oriental, les fonds descendent assez vite jusqu'à 20 ou 30 mètres. Puis la pente se redresse, et, vers 50-60 mètres de profondeur, gagne presque l'hori- zontale. Le plateau côtier se prolonge ainsi fort loin; après quoi une différence s'établit entre sa portion orientale et sa portion occidentale. La première exagère l'allure du versant oriental de la presqu'île; elle descend progressivement aux abysses, avec une pente fort douce. 11 faut aller, au nord-est du cap Corse, jusqu'à quinze ou vingt kilomètres du rivage pour trouver des profondeurs de 100 mètres. 11 n'en est point ainsi dans la seconde, où se prépare le régime du versant occidental. Le plateau, vers 80-90 mètres de profondeur, s'y interrompt sur le bord d'une falaise, d'abord peu accentuée au nord même du cap Corse, qui se précise et se redresse en allant vers le sud, et va rejoindre celle du versant occidental. La partie orientale du littoral corse s'étend de la base du cap Corse au golfe de Porto- Vecchio. Sa longueur est de 120 kilomètres environ. Elle comprend deux parties. La première, septentrionale, beaucoup plus longue que l'autre, va de Bastia à la Solenzara ; la seconde est placée entre la Solenzara et Porto-Vecchio. La première région consiste essentiellement en une plage basse, coupée de lagunes et d'étangs littoraux. Elle n'est, en somme, qu'un immense banc sableux et vaseux, apporté par les cours d'eau des- cendus des montagnes de l'intérieur, qui a comblé les golfes, les indentations de la côte primitive, et les a recouvertes d'un uniforme revêtement détritique. Les étangs littoraux, seuls, permettent de discerner dans son ensemble la topographie ancienne. Le rivage est une plage basse, sableuse, peu déclive. Le plateau côtier descend faiblement jusqu'à 60 et 70 mètres de profondeur; sa largeur varie de 4 à 8 ou 9 kilomètres. Puis, au delà, les fonds descendent plus rapidement. Leur pente est assez forte ; mais, autant qu'il est permis de le comprendre d'après les sondages, ils ne forment aucune falaise rocheuse. Ils parviennent à la profondeur de 400 à 500 mètres sur une distance moyenne qui ne paraît point excéder 5 à 6 kilomètres. Leur pente serait donc de 10 pour 100 environ. Les étangs littoraux de cette région sont nombreux. Ils se distri- buent eu deux groupes : l'un septentrional, voisin de Bastia ; l'autre méridional, proche de l'antique cité d'Aléria, ruinée aujourd'hui. Le premier comprend seulement l'étang de Biguglia, long de H 176 L. ROULE kilomètres environ sur 2 kilomètres et demi de plus grande largeur. Ses rives sont basses, vaseuses ou sablonneuses. Il communique avec la mer par un goulet, long de deux kilomètres, dont la plus grande largeur ne dépasse guère vingt mètres et la plus grande profondeur deux mètres. 11 est alimenté par le Bevinco ; en outre, le Golo communique avec lui par l'entremise d'un canal construit depuis peu. Ses eaux sont saumàtres. Les profondeurs atteignent rarement 1 m. 80 cent. ; dans la moyenne, elles s'arrêtent à un mètre, ou même à moins. Le second groupe renferme plusieurs étangs, dont deux, ceux de Diana et d'Urbino, occupent une surface considérable. Les autres, plus petits, sont soumis à des régimes dissemblables, sursalés, desséchés, ou seulement saumàtres. Cette dernière qualité est celle des deux grands étangs. Parmi eux, celui de Diana mesure 750 hectares de superficie ; sa longueur dépasse sa largeur d'un peu plus du double ; ses profondeurs les plus con- sidérables atteignent 12 mètres. L'étang d'Urbino, à peu près circu- laire, est encore deux fois plus vaste, au moins, que celui de Diana; ses plus grandes profondeurs vont jusqu'à 15 mètres. Ils communiquent avec la mer par des goulets étroits, courts et peu profonds, fermés en été, maintenus ouverts pendant l'hiver. La seconde région du littoral oriental diffère grandement de la précédente. Son rivage consiste en falaises, et non en une plage basse continue. Pourtant ces monticules sont encore coupés de bancs sableux, de lagunes, de petits étangs littoraux. Le plateau côtier y est fort étroit ; sa largeur moyenne mesure environ deux kilomètres. Il cesse brusquement, vers 75 à 80 mètres de profon- deur, sur le bord d'une falaise qui plonge brusquement dans les fonds de 300 à 400 mètres. Cette falaise se prolonge, par son extré- mité septentrionale, sous les formations sableuses qui s'étalent au large de la première région ; elle se confond, par son autre bout, avec le plateau sous-marin de Bonifacio. La région de Bonifacio comprend toute la partie méridionale de la Corse. Elle a la forme d'un V dont la pointe, qui correspond à la ville de Bonifacio et au cap Pertusato, serait tournée vers le sud. La branche occidentale remonte jusqu'à la pointe Senetose, voisine du golfe de Valinco ; l'orientale jusqu'au golfe de Porto Vecchio. Le rivage est fait de falaises élevées, abruptes, qui souvent tombent à pic dans la mer. Les fonds descendent rapidement jusqu'à 20 et 30 mètres ; après quoi leur pente se redresse, ne s'incline plus que faiblement, et s'étend fort loin au large en formant un vaste plateau sous-marin, qui embrasse Textrémité méridionale de la Corse, LA FAUNE DES POISSONS QUI HABITENT LKS COTES DE LA CORSE 177 l'extrémité septentrionale de la Sardaigne, et constitue le plancher du détroit de Bonifacio. Ce plateau, rocheux et très accidenté, a une profondeur moyenne de 50 à 80 mètres. Eu outre, le rivage, en cette région, est entaillé de golfes longs et étroits, véritables fiords, dont la profondeur dépasse rarement 20 à 25 mètres. Les principaux sont ceux de Bonifacio et de Porlo-Vecchio. Ces golfes abritent une faune des plus riches, où les espèces côtières se mé- langent à celles des zones sous-marines situées plus loin au large. 11. Zones du plateau côtier. — 11 est inutile de donner ici, à ce paragraphe, une grande extension. Il suffit de montrer, au sujet d'une étude sur les Poissons, que les côtes de la Corse ont un régime identique à celui des autres régions de la Méditerranée occidentale. Je signalerai, dans mon travail définitif, les particu- larités locales, d'importance relativement secondaire, que ce litto- ral olïre parfois. Quatre zones se succèdent avec régularité depuis le rivage même : la zone strictement littorale ; la zone des prairies de zostères {Posi- (lonia Caulini); celle des graviers coralligènes; enfin la zone vaseuse du large, qui s'étend jusqu'à la crête de la falaise dominant les abysses. La première est la plus variée. Ceci se comprend, d'après la diversité de la côte. Elle présente trois faciès principaux, rocheux, sablonneux, à graviers, susceptibles de se mélanger parfois en quelques points. Le premier est le plus répandu ; il existe partout où la mer est dominée par des falaises. Le deuxième est presque caractéristique de la majeure partie de la côte orientale, ainsi que des estuaires si fréquents sur le pourtour de l'ile. Le troisième est à peu près localisé dans le fond des anses encadrées de falaises. Cette première zone s'étend du rivage jusqu'à 8 ou 10 mètres de profondeur, en somme jusqu'au niveau où la prairie des zostères commence à devenir toulîue. Assez large dans les régions sablon- neuses ou couvertes de petits graviers, elle se réduit à une étroite lisière partout ailleurs, c'est-à-dire dans la majeure partie du pla- teau sous-marin qui entoure la Corse. La deuxième zone se caractérise par sa richesse en Posidonies qui croissent sur le fond et s'y attachent. Ces végétaux commen- cent à se montrer dès la zone précédente, mais ils ne deviennent vraiment abondants qu'à partir de 8 ou 10 mètres de profondeur. Ils s'étendent alors, et couvrent le plateau jusqu'à une profondeur de 25 ou 30 mètres, rarement davantage. On remonte encore quel- ques feuilles en lanières des fonds mesurant 40 à 50 mètres ; mais Mém. Soc. Zool. de Fr., 1902 -xv. — 12. 178 L nouLE elles sont rnres. Les Zostères occupent, dans les limites indiquées, tous les fonds, rocheux et sablonneux. Mais elles ne forment que rarement, sur les côtes de la Corse, une prairie vraiment continue. D'habitude, elles se bornent à composer des. touffes éparses, de dimensions variables. Dans les fonds rocheux, trop accidentés, elles se tiennent dans les creux de roches, dans les anfractuosités, et non ailleurs. Quant aux fonds sablonneux, soumis à un régime d'apports détritiques, le sol a trop peu de cohérence pour permettre l'établissement d'un vaste tapis herbacé, et les sédiments charriés par les cours d'eau couvrent parfois plusieurs parties de la prairie. Cette zone, ainsi morcelée, mais pourtant caractérisée d'une manière suffisante dans son ensemble, ne parvient guère à une certaine largeur que sur quelques points de la côte orientale. Partout ailleurs, les fonds descendent trop rapidement jusqu'à 23 ou 30 mètres ; ils restreignent en conséquence l'espace qui lui est accorde. La troisième zone est de beaucoup plus vaste. D'ordinaire, le sol du plateau consiste en roches, dont les anfractuosités sont emplies de vase fine, parfois gluante, ailleurs quelque peu sableuse. Sur la côte occidentale, les roches sont souvent à nu et vives ; sur l'orien- tale, le manteau de vase les cache presque entièrement. De nom- breux Bryozoaires, des Algues calcaires, des Polypiers, des Gorgones, s'établissent sur les rocs ou sur les nodules de vase durcie. De grands Mollusques Gastéropodes et Lamellibranches abandonnent çà et là leurs coquilles, qui servent ainsi à la fixation de nombreux animaux plus petits. L'association si caractéristique des fonds coralligènes prend ainsi naissance, réussit à s'y maintenir, et cons- titue parfois une faune des plus riches. Les corailleurs allaient, dans ces fonds, rechercher le Corail et les Éponges. Les pêcheurs d'aujourd'hui y tendent leurs filets et leurs nasses. La zone coral- ligène procure les plus grandes ressources en Poissons et en Crustacés. Plus au large, la quatrième zone continue la précédente jusqu'aux confins du plateau côtier. A vrai dire, elle n'est que la suite de la zone coralligène. Seulement, à dater de 60 ou 70 mètres de profon- deur, les Algues calcaires, les Bryozoaires, les grands Mollusques, les Coraux, deviennent plus rares. La vase, plus fine encore, couvre entièrement le fond. D'autre part, la lumière du jour n'arrive que faiblement. Les conditions biologiques ne sont plus les mêmes. La faune change par suite. Elle se rapproche, par ses caractères, de celle des grandes profondeurs; elle montre même plusieurs de ses espèces. Cette zone est assez étroite dans les régions où le plateau LA FAUNE DES POISSONS QUI HABITENT LES CÔTES DE LA CORSE 179 s'interrompt à 70, 80 ou 90 mètres de profondeur. Par contre, elle est beaucoup plus vaste, lorsque le plateau s'étend sans disconti- nuité jusqu'à 150 et 200 mètres. Elle montre alors, par places, quelques associations de polypiers, de Bryozoaires, qui rappellent les fonds coralligènes. Mais elle contient cependant un certain nombre d'êtres, qui habitent d'ordinaire la vase profonde, et que les fonds coralligènes n'ont point. III Liste des espèces observées jusqu'ici sur les côtes de la Corse (1). CLASSE DES SÉLACIENS Famille des Scyllidés 1. — ScylUum canicula Cuv. (G). Zostères, fonds coralligènes et vaseux. Commun. 2. — Scyllium catulus Cuv. (CR). Habitat comme le précédent ; se rapproche davantage des rochers de la côte. Commun. Famille des Mustelidés 3. — Mustelus vulgaris MûU. et Hen. (C). Erratique. Famille des Zygénidés 4. — Zygœna maliens Val. (R). Erratique. 5. — Zygœna tudes Val. (C). Erratique. Famille des Spinacidés 6. — Acanthias vulgaris Risso (C). Erratique. Famille des Squatinidés 7. — Squatina angélus Risso (CR). Fonds vaseux du large. Famille des Torpédinidés. 8. — Torpeila marmorata Risso (CR). Quelques-unes dans les Zostères; surtout dans les fonds vaseux du large. Assez commune. 9. — Torpédo narke Risso (R). Habitat comme la précédente. Famille des Rajides. 10. — Raia clavata Rond (CR), Prairies de Zostères et fonds vaseux du large. Assez commune. 11. — Haia macrorhynchus Raf. (C). Fonds vaseux du large. (!) Chaque nom d'espèce est suivi d'une parenthèse qui enferme une ou deux majuscules : C lorsque cette espèce a été trouvée par M. de Carakfa ; R lors- qu'elle l'a été par moi-même : CR lorsqu'elle l'a été par nous deux. 180 L. ROULK 12. — Raid batix. L. (C). Fonds vaseux du large. 13. — Haia miraletus Rond. = R. qiiadrimarulata Risso (G). Ces deux espèces n'en font qu'une. La seconde diffère seule- ment de la première eu ce que les taches de la face dorsale sont un moins nombreuses, un peu plus grandes et plus foncées. Sur quel- ques individus, deux ou plusieurs de ces taches, placées dans la région postérieure des pectorales, deviennent encore plus amples que les autres. C'est l'aspect de ces taches, ainsi développées en complément des deux maculatures ocellées du milieu des pectorales, qui a conduit Risso à créer une espèce nouvelle pour cette simple variété de coloration. Il est suivi en cela par C. Bonaparte [Catalogo metodko dei Pe>ici enropei, 1846) et par Canestrini {Fesci de la Fauna cVltalia). A mon sens, après avoir comparé l'échantillon corse de R. quadrimaculata (trouvé par de Caraffa) à la R. miraletus des côtes languedociennes, l'opinion de Risso est inexacte. R. quadrimaculata n'est qu'une variété de R. miraletus. Du reste, R. miraletus typique a été trouvée également sur les côtes de la Corse par de Caraffa. 14. — Raia punctata Risso (C). Fonds vaseux et sablonneux. 15. — Haia asterias Rond., non Del. (C). Habitat comme la précé- dente espèce. 16. — Raia fuUonica Rond. (C). Habitat comme les précédentes espèces. 17. — Raia mosaica Lac. (C). Habitat comme les précédentes espèces, mais s'approche davantage du littoral. Famille des Myliobatidés 18. — Myliobatis aquila. Dum. (CR). Fonds vaseux du large; viennent quelquefois non loin de la côte, dans les fonds sablonneux et dans les prairies de Zostères. Assez commun. Famille des ïrygonidés 19. — Trygon vulgaris Risso (CR). Habitat comme l'espèce pré- cédente ; mais vient à la côte plus fréquemment encore. Assez commun. CLASSE DES TÉLÉOSTÉENS Famille des Syngnathidés 20. — Hippocampus guttiUatus Cuv. (CR). Rochers littoraux, prairies de Zostères. Assez commun. 21. — Syngnathus ruhescens Risso (R). Un seul exemplaire, recueilli dans l'étang de Diana. LA FAUNE DES POISSONS QUI HABITENT LES CÔTES DE LA CORSE 181 22. — Synijnathm tenuirostris Ratk. (R). Un seul exemplaire, recueilli dans le port de Bonifacio. 23. — Sijngnalhus abasfcr Risso (R). Un seul exemplaire, recueilli dans l'étang de Biguglia. 24. — Siphonostomn Hondeleti Del. (C). Prairies de Zostères. 25. — Nerophis maculata Raf. = A', annulatus Risso (C) Prairies de Zostères. Famille des Orthagoriscidés 26. — Orthaf/oriscus moln. Scbn. (R). Erratique, assez rare. 27. — Urnnoscopus scuber L. (CRi. Prairies de Zostères et fonds vaseux du large. Remonte parfois dans les anses encaissées et pro- fondes, comme les liords de Bonifacio et de Porto-Vecchio. Commun. 28. — Trachinm vipera Cuv. (C). Plages sablonneuses. Assez commun. 29. — Trachinns draco L. (CR). Cette espèce est plus répandue que la précédente; son aire de distribution est plus vaste. Elle habite aussi les plages sablonneuses, mais elle descend dans les prairies de Zostères et dans les fonds vaseux du large. Commune. 30. — Trnchinus radiatm L. (C). Fonds vaseux du large. Assez commune. 31. — Trachinm araneus Cuv. (C). Même habitat que la précé- dente espèce. Assez commune. FAiMILLE DES BlENNIIDÉS 32. — Blenniuspaw Risso (C). Rochers littoraux. Assez commune. 33. — BlenniiLH pahnicornis Cuv. et Val. (C). Même habitat que la précédente espèce. 34. — Blennius gattortiginc Briinn. (CR). Même habitat que la précédente espèce. Commune. J'ai recueilli, dans les eaux d'Ajaccio, un individu de cette espèce, qui présente les caractères essentiels de B. ruher Cuv. et Val. Sou œil est un peu plus grand que celui du type ; il égale l'espace préorbitaire. Son tentacule sourciller est plus court, plus petit que le diamètre de l'œil ; aussi branchu que celui du type, sa couleur est rouge, ses rameaux sont bruus. La teinte du corps ressemble à celle de la plupart des Gattorugines de la Méditerranée. Les bandes verticales noires sont bien marquées. D'autres bandes aussi larges, mais de couleur rouge, alternent avec les précé- dentes ; elles commencent sur le milieu des flancs, et descendent sous le ventre, oîi elles s'élargissent en s'atténuant et se perdant sur un fond roussàlre. Celte prédominance des teintes rousses est 182 L, ROULE à remarquer. Valenciennes a créé l'espèce B. ruher \)ouv un individu de cette sorte pris à Ouessant, et décrit par De Lapylaie. Sans doute, il en est pour cet exemplaire comme pour le mien ; tous deux constituent une simple variété de couleur de l'espèce B. Gatkwiigine. Du reste, Valenciennes n'était pas éloigné de se ranger à cet avis. 35. — Blennius tentacularis Briinn. (C). Même habitat que les espèces précédentes. 36. — Blennius ocellaris L. (CR). Même habitat que les espèces précédentes ; mais descend dans les prairies de Zostères. Commune. 37. — Blennius Montagui Flemm. (C). Rochers littoraux. 38. — Clinus argentatus Risso (C). Même habitat que les Blennies. Famille des Lophiidés 39. — LofMus piscatorius L. (GR). Fonds vaseux du large. Commune. 40. — Lophius budegassa sp. (R). Même habitat que la précédente espèce, mais moins fréquente. Famille des Gobiidés 41. — Gûbius capUo C. V. (C). Rochers de la côte, étangs littoraux, prairies de Zostères. Commun. 42. — Gobius cruentatus Gm. (C). Prairies de Zostères ; fonds coralligènes. 43. — Gobius minutus C. V. (CR). Rochers de la côte. 44. — Gobius geniporus Val. (R). Rochers de la côte ; prairies de Zostères. 45. — Gobius paganellus L. (CR). Rochers de la côte; descend dans les prairies de Zostères. 46. — Gobius niger L. (CR). Même habitat que l'espèce précé- dente ; fréquente aussi les étangs littoraux. Commun. 47. — Gobius longiradiatus Risso (R). Un seul individu, recueilli dans l'étang de Diana. Famille des Mullidés 48. — Mullus surmuletus L. (CR). Rochers de la côte ; prairies de Zostères. Commun. 49. — Mullus barbatus Will. (CR). Fonds sablonneux et vaseux de la côte ou des prairies de Zostères, mais surtout fonds vaseux du large et fonds coralligènes. Commun. 50. — Mullus fuscatus Raf. (CR). Même habitat que M. barbatus, mais moins abondant dans les fonds vaseux du large et plus répandu près de la côte. En somme, cette espèce occupe un domaine LA FAUNE DES POISSONS QUI HABITENT LES CÔTES DE LA CORSE 183 intermédiaire à ceux des précédentes espèces, et empiète sur eux. Commun. Les ictitlivùlogitiles ont parfois contesté cette espèce. Elle est» en tous cas, inoins nette que les deux autres. Plusieurs la rapprochent (le M. harhiitus. J'ai eu l'occasion d'eu examiner de nombreux exemplaires. A mon avis, elle ressemble davantage à M. sunnuletus. Je ne serai pas éloigné de la considérer comme une variété de cette dernière espèce, qui habiterait des zones plus profondes et plus envasées. Elle ferait ainsi la transition vers M. harbatus. Famille des Triglidés 51. — Dactiilopterus volitnnsL. (CR). Surface de la mer. Erratique. 52. — Peristedion calaphractum L. (CR). Fonds vaseux du large ; remonte parfois dans les fonds coralligènes et les prairies de Zostères. 53. — Trigla pini Bloch (CR). Habitat principal dans la vase pro- fonde du large, mais on en prend parfois dans les fonds coralli- gènes, et même dans les aires vaseuses ou sablo-vaseuses qui se trouvent dans les prairies de Zostères. Commun. 54. — Trigla lineata Bloch (CR). Même habitat que l'espèce pré- cédente. 55. — Trigla gurnardua L. (CR). Même habitat que les espèces précédentes. 56. — Trigla lyra L. (CR). Même habitat que les espèces précé- dentes. Commun. 57. — Trigla aspera C.V. (C). Même habitat que les espèces précédentes. 58. — ScorpœnascrofaL. (CR). Prairies de Zostères ; quelquefois dans les fonds coralligènes et les fonds vaseux du large. Commun. Les représentants de cette espèce ofïrent des nombreuses variétés de couleur. Tantôt la teinte est dans les tons jaunâtres, tantôt dans les rougeàtres, tantôt consiste en une bigarrure des deux. La Scor- pœna lutea Risso {llist. nat. d. pr. product. de r Europe mérid., 1826), n'est qu'une S. scrofa à teinte jaune prédominante. 59. — Scorpœna porcus L. (CR). Prairies de Zostères, comme la précédente espèce ; mais se rapproche davantage de la côte, et fréquente les fonds rocheux littoraux. Commun. Les auteurs qui ont étudié les ]*oissons des côtes italiennes décri- vent une troisième espèce du genre Scorpœna : S. ustulata Low [Proc. of. ZooL Soc. of London, iSiO). Cette dernière serait inter- médiaire aux deux précédentes. Ses principaux caractères portent; J84 L. ROULE 1° sur l'aspect général, semblable à celui de S. poreux, mais avec écailles plus grandes et pourvues de spinulesplus fortes ; 2° sur les lambeaux cutanés de la mâchoire inférieure, moindres que ceux de S. scrofa, et parfois absents ; 3° sur le nombre des épines margi- nales du sous-orbitaire antérieur, égal à 3, alors que S. scrofa en a 4 et S. porcm 2 seulement. Or, il convient de remarquer que les jeunes S. porcus ont en tout les caractères de S. ustulata, y compris les trois épines du sous orbitaire. Seulement l'épine intermédiaire, plus petite que les deux autres, cesse hâtivement de croître, et se transforme en un tubercule plus ou moins saillant, attaché à la base de l'épine antérieure. J'ai recueilli plusieurs échantillons de S. joorcu.s, de taille moyenne, qui avaient conservé les dispositions du jeune âge, alors que les autres individus les atténuent à divers degrés. C'est avec des exemplaires de cette sorte que les auteurs ont créé S. ustulata. Cette espèce, à mon sens, doit disparaître, et se confondre avec S. porcus. 60. — Sehastes dactyloptera L. (R). Vase profonde du large. Famille des Percidés 61. — Labrax lupus C.V. (CR). Surface : rochers de la côte ; étangs littoraux. Commun. 62. — Labrax punctaTiis Br. Cap. (CR). Je n'ai recueilli de cette espèce, également signalée par de Caraffa, qu'un seul exemplaire, pris dans le port de Bonifacio. On est souvent entraîné à considérer comme L. punctatus les Labrax dont le corps est tacheté. C'est une erreur. L. punctatus diffère de L. lupus par deux caractères principaux : son vomer porte des dents sur le corps et le chevron, et non sur îe chevron seulement ; les écailles de l'espace interorbitaire et celles des pièces operculaires sont garnies de petites spiuules sur leur bord postérieur. Ces deux dispositions existent dans l'individu que j'ai étudié ; mais le second est peu marqué, car les spinules sont remplacées par des créne- lures mousses. En somme, ces deux espèces diffèrent peu ; pour ma part, j'incli- nerai volontiers à les considérer comme n'en faisant qu'une, d'autant mieux qu'elles vivent ensemble dans plusieurs localités, certains étangs littoraux du golfe de Gascogne par exemple, i. punctatus est un L. lupus mieux armé. Quant à la présence ou à l'absence des taches, ce fait est de nulle valeur. Dans un lot de Labrax pris en même temps en un même lieu, on en voit des tache- tés, à côté d'autres qui ne le sont point, et on trouve tous les inter- LA FAUNE DES POISSONS QUI HABITENT LES CÔTES DE LA CORSE 185 médiaires entre ces extrêmes. Moreau, dans son Histoire Naturelle des Poissons de In France, met en garde contre une confusion pareille ; et je me suis convaincu de la bonté de son avis. 63. — Polyprion cetnicum Val. (R). Prairies de Zostères, et fonds coralligènes. 64. — Serranus scriba G. Val. (CR). Fonds rocheux de la côte, et prairies de Zostères. Commun. 65. — Serranus cabrilla L. (CR). Même habitat que l'espèce précédente, et aussi répandu. 66. — Serranus hepatus L. (CR). Même habitat que les espèces précédentes, et aussi répandu. 07. — Anîhias sacer Bloch. (C). Même habitat que les espèces précédentes. 68. — Apogon imberhis L. (C). Même habitat que les espèces précédentes. Famille des Sciénidés 69. — Umbrina cirrosa L. (CR). Roches et plages littorales. Commun. 70. — Corvina nigra C. V. (CR). Même habitat que l'espèce pré- cédente. Commun. Famille des Scombridés 71. — Scomber scomber L. (CR). Surface. 72. — Scotnher colias L. (C). Surface. 73. — Âuxis bisus Raf. (CR). Surface. 74. — Titgnnus thunnina C. V. R). Surface. 7o. — Thgnnus thi/nnus L. (CR). Surface. 76. — Pelamgs sarda W'ill. (R). Surface. 77. - Trnchurus trachurus L. (CR). Erratique, commun. 78. — Naucrates ductor L. (C). Erratique. 79. — Lichia glaucus Lac. (CR). Surface, 80. — Seriola Dumeribi Risso (C). Grands fonds du large; remonte parfois vers la surface. Assez rare. 81. — Ze.us faber L. (CR). Prairies de Zostères, d'où il .se répand parfois vers les rochers littoraux d'une part, vers les fonds coralli- gènes de l'autre. Commun. 82. — Brama Haii Schn. (R). Grands fonds du large. 83. — Xiphias gladius L. (R). Erratique. 84. — Echeneis rémora L. (C). Erratique. Famille des Trichiuridés 85. — Lepidopus argenteus Bronn. (R). Rochers et régions pro- fondes des plages sablonneuses littorales. Rare. 186 L. ROULE Famille des Toenioïdés 86. — Cepola ruhescens L. (CR). Fonds vaseux du large et fonds coralligènes : remoute parfois dans les prairies de Zostères. Assez commun. 87. — Hegalecus gladius C. V. (C). tirands fonds du large, d'où il remonte parfois jusqu'à la côte. Famille des Sparidés 88. — Sargus vulgaris. G. St-Hil. (CR), Rochers littoraux ; prai- ries de Zostères. Commun. 89. — Sargus Rondeletii C. V. (CR). Même habitat que l'espèce précédente, et aussi répandu. 90. — Sargus annularis L. (CR). Même habitat que les espèces précédentes, et aussi répandu. 91. — Charax pantazzo Risso (CR). Même habitat que les espèces précédentes, mais moins commun, 92. — Box boops L. (CR). Surface et rochers littoraux, descend parfois dans les prairies de Zostères. Commun. 93. — Box salpa L. (CR). Même habitat que l'espèce précédente, et aussi répandu. 94. — Oblada melanura L. (CR). Rochers littoraux et prairies de Zostères. Commun. 95. — Pagellus crythrinus Risso (CR). Fonds coralligènes et fonds vaseux du large; remonte parfois vers les rochers littoraux. Commun. 96. — Pagellus breviceps C.V. (C). Même habitat que l'espèce précédeute, 97. — Pagellus tnormyrus L. (CR). Rochers littoraux, plages et prairies de Zostères, parfois dans les fonds coralligènes. Commun. 98. — Pagellus hogamveo Brunn. (CR). Surface et rochers lit- toraux. 99. — Pagrus vulgaris. C.V. (CR). Fonds vaseux du large, d'où il remonte assez souvent dans les fonds coralligènes et les prairies de Zostères. Commun. 100. — Pagrus orphus Risso (C). Mêmes habitats que l'espèce précédente, mais moins répandu. 101 . — Chrysophrys aurata L. et C. crassirostris C.Y. (CR). Rochers littoraux; étangs ; prairies de Zostères. Commun. 102. — Cantharus griseus Duh. (CR), Même habitat et aussi commun que Tespèce précédente, 103. — Cantharus orbicularis C. V. (C). Même habitat que l'espèce précédente, mais beaucoup plus rare. LA FAUNE DES POISSONS QUI HABITENT LES CÔTES DE LA CORSE 187 104. — Dentei: vulgaris C. V. (CR). Même habitat que les espèces précédentes. 105. — Mœna mlgaria C. V. (CR). Rochers littoraux et prairies de Zostères. Commun. 106. — Mœna Osheckii C. V. (CR). Même habitat et aussi répandu que l'espèce précédente. 107. — Mœnajusculam C. V. (CR). iMème habitat, mais descend plus profondément. 108. — Smaris vulgaris C. V. (CR). Même habitat et aussi répandu que les espèces précédentes; se rapproche davantage des zones littorales. 109. — Smaris Maurii CBp. (CR). Même habitat et aussi répandu que l'espèce précédente. 110. — Smaris alcedo Risso. (C). Même habitat que l'espèce pré- cédente (1). Famille des Labridés 111. — Labrus turdiis L. (R). Rochers littoraux; prairies de Zostères. 112. — Labriis merula L. (CR). Même habitat que l'espèce précé- dente. Commun. 113. — Labrus lineolatus CW. (C). Même habitat que les espèces précédentes. 114. — Labrus fcstimis Risso (C). Même habitat que les espèces précédentes. 115. — Labrus luscus L. (R). Même habitat que les espèces pré- cédentes. 116. — Labrus viridisL. (CR). .Même habitat que les espèces pré cédentes. Commun. 117. — Labrus mixtus L. (CR). Même habitat et presque aussi répandu que l'espèce précédente. Parfois les femelles, lorsqu'elles sont encore jeunes et de petite taille, n'ont sur le dos qu'une seule tache au lieu de trois ou de quatre. 118. — Crenilabrus ocellatus Forsk. (CR). Rochers littoraux ; prairies de Zostères. 119 — Crenilabrus Hoissali Risso. (R). Même habitat que l'espèce précédente. 120. — Crenilabrus melops L. (CR). Même habitat que les espèces précédentes. Commun. (1) Pendant la rédaction de ce travail, M de Caraffa m'a envoyé plusieurs échan- tillons de Smaris, que je rapporte aux formes suivantes : S. chryselis CV., S. gagarella CV., S. gracilis CBp. 188 L. ROULE 121. — Crenilabnis melanocercus Risso. (C). M. de Caraffa a eu l'obligeance de me remettre un exemplaire de cette espèce. Cet individu a la nageoire dorsale de teinte plus faible que celle du type, et la nageoire anale est presque décolorée. Les pectorales manquent de bordure. Si l'on accordait grande importance à ces faits, on serait entraîné à créer pour lui une espèce nouvelle. Mais ces particularités montrent seulement l'ampleur des variations individuelles qui portent, chesc les Crénilabres, sur les couleurs du corps et des appendices. C. cœnilem Risso, comme Moreau incline à l'admettre, équivaut aussi, selon tontes probabilités, à une variété ex colore de C. melanocercus. Même habitat que les espèces précé- dentes, mais moins répandu sans doute, car je ne l'ai jamais trouvé moi-même. i2i. — Cretiilabrus Méditerranens Risso (R). Même habitat que les espèces précédentes. 123. — Crenilahrus tincaBvun. (R). Même habitat que les espèces précédentes. 124. — Crenilahrus pava Rrunn. (CR). Même habitat que les espèces précédentes. Commun. 125. — Crenilabrus massa Risso (CR). Même habitat que les espèces précédentes. 126. — Coricus rostratus Bloch (CR). Rochers littoraux et prairies de Zostères. Commun. 127. — Julis vulgaris C. V. (CR). Rochers littoraux et prairies de Zostères. Commun. 128. — Julis Giofredi Risso (CR). Même habitat et aussi répandu que l'espèce précédente, avec qui elle se confond, du reste, par de nombreux intermédiaires. La présence de mâles parmi ses repré- sentants empêche pourtant de la considérer comme équivalant au sexe femelle de /. vulgaris. 129. — Julis pavo Lac. (R). Même habitat que les espèces précé- dentes, mais plus rare. 130. — Xyrichthys novacula L. (CR). Plages intercalées aux rochers littoraux ; plaques sableuses éparses dans les prairies de Zostères. Assez commun sur la côte occidentale. Famille des Pomacentridés 131. — Chromis cnstnnea Cuv. (CR). Rochers littoraux et prairies de Zostères. Commun. Famille des Mugilidés 132. — Mugil cephalus Del. (CR). Zone littorale et étangs littoraux. Commun. LA FAUNE DES POISSONS QUI HABITENT LES CÔTES DE LA COHSE 189 133. — MufjU aumtnsRissoiCR). Même habitat et aussi répandu que l'espèce précédente. 134. — Mugil saliens Risso (CR). Même liabilat et presque aussi commun que les espèces précédentes. 135. — Mugil chelo C. V. (CR). Même iiabitat que les espèces précédentes. Commun. Famille des Athérinidés 136. — Mherina hepsetus L. {CR). Erratique. Surface. Commun. 137. — Atherina fio//er/ Risso (CR). Krratique. Surface. Commun. 138. — .1 therina moch.o C.V. (R). Mêmes habitudes que les espèces précédentes, mais se montre moins fréquemment. Famille des Ophidiidés 139. — Ophidium barhatuw L. (CR). Rochers littoraux et prairies de Zostères. Commun. 140. — Ophidium Vassali. Risso (C). Même habitat que l'espèce précédente, mais plus rare. Famille des Gadidés 141. — Gadus niinutufi L. (CR). Fonds vaseux du large. 142. — Merlangus vulgaris Cuv. (CR). Fonds vaseux du large. 143. — Merlangus poutassou Risso (CR). Même habitat que l'es- pèce précédente. 144. — Meiiucius vulgaris Cost.(R). Même habitat que les espèces précédentes. 145. — Phycis mediterrnneas Del. (CRj. Rochers littoraux et prai- ries de Zostères. Assez commun. 146. — Motella f'usca Risso (CR). Même habitat et aussi répandu que l'espèce précédente. Famille des Pleuronectidés 147. — Solea vulgaris Risso (CR). Plages sableuses entre les rochers des côtes ; bancs sablonneux littoraux; plages sableuses ou vaseuses des prairies de Zostères et des fonds coralligènes. Assez commun. 148. — Solea Kleinii Risso (R). Ports profonds, notamment celui de Ronifacio ; plages sableuses des prairies de Zostères. Assez commun. Les individus dont la taille est moyenne ou grande portent bien, sur le côté droit, conformément à la description de l'auteur, des taches ou des points gris ou noirs. Mais les individus jeunes, de petite taille, ont une teinte sensiblement uniforme, gris brunâtre. 190 L. ROULE En revanche, les nageoires impaires sont plus fortement colorées chez ceux-ci que chez ceux-là. 149. — Microchirus Mangili Risso (R). Plages sableuses ou sablo- vaseuses intercalées dans les prairies de Zostères et les fonds coral- ligènes; vase profonde du large. 150. — Monochirus pegusa Risso (CR). Même habitat que l'espèce précédente, mais plus rare. 151. — Pleuronectcs Grohmanni GBp. (R). Même habitat que les deux espèces précédentes. Assez commun. 152 — Pleuronectes conspersus Gan. (CR). Même habitat et aussi répandu que la précédente espèce. 153. — Rhomhus maximus L. (R). Fonds vaseux du large. Assez commun. 154. — Bothus mancus Risso(R). Plages sableuses intercalées aux rochers littoraux ; prairies de Zostères. Assez commun. La capacité de variation, possédée par les représentants de cette espèce, est connue, du moins dans sou ensemble. J'ai recueilli assez d'échantillons pour pouvoir la préciser. Je me borne ici à signaler les résultats de mes comparaisons. La variation porte sur deux faits : l'écarlement des yeux (dimension de l'espace interor- bitaire), et le volume du sourcil de Toeil inférieur. Sur le premier point, Técartement des yeux augmente à mesure que le corps grandit. Ce rapport n'est pas constant. Il diminue avec l'âge, sur un même individu. Il varie d'un individu à l'autre. Par- venu à un certain terme, il ne change plus, bien que la taille du corps continue à croître. Mais, à ce degré, les yeux sont relative- ment fort distants l'un de l'autre, et presque exorbités, tellement ils font saillie en dehors. Sur le second point, le sourcil de l'œil inférieur, peu proéminent dans le jeune âge, augmente progressivement avec la taille du corps. Il se change finalement en une crête saillante, que précèdent deux saillies, mamelons obtus chez les uns, épines solides chez les autres. 155. — Bothus podas Del. (CR). Même habitat que l'espèce précé- dente. Je n'en ai, pour ma part, recueilli qu'un exemplaire, dans le port de Bonifacio. A mon avis, cette espèce fait partie du cycle des formes de b. mancus. Elle diffère à peine de celles qui, parmi ces dernières, ont une taille moyenne, des yeux rapprochés, et le sourcil de l'œil inférieur peu saillant. Les taches dont le côté gauche du corps est LA FAUNE DES POISSONS QUI HABITENT LES CÔTES DE LA CORSE 191 parsemé sont plus nettes, eu général, chez H. podm, mais il eu est souvent ainsi chez B. manciis de petite taille. Famille des Cycl(jpteridés 156. — Lepadogaster Gouani Lac. (R). Fonds rocheux de la zone littorale, surtout dans les anses abritées. Assez rare. 157. — J.epadognster Browni Risso (C). Même habitat que l'espèce précédente, mais plus rare. Famille des Clupeidés 158. — Alosa vulgaris C. V. (CR). Surface; étangs littoraux; remonte les cours d'eau. Erratique. Assez coramuu. 159. — Alosa jïnta Cuv. (R). xMême habitat, et plus rare, que l'espèce précédente. 160. — Alosa sardina Risso (CR). Surface. Erratique. Commun. 161. — EngranliH encrasicholus L. (CR). Surface. Erratique. Commun. Famille des Exocétidés 162. — Bflone ncus Risso (CR). Zone littorale. Assez commun. 163. — Belone hnperialis Raf. (C). Même habitat et plus rare que l'espèce précédente. 164. — Ëxocœtus Rondeleti C. V. (R). Surface; assez rare. 165. — Ëxocœtus volitans L. (CR), Surface ; assez rare. 166. — Ëxocœtus spilopusC. V. (C). Surface ; rare. Famille des ScopÉLmÉs 167. — Saurus fasciatus Risso (G). Fonds coralligènes et fonds vaseux du large. Famille des Anguillidés 168. — Anquilla vulgaris Cuv. (CR). Etangs littoraux, estuaires et ports. Remonte les eaux douces. Commun. 169. — Cotiger rulgaris Cuv. (CR). Rochers de la zone littorale et prairies de Zostères ; descend parfois à des profondeurs plus grandes. Commun. La plupart des individus appartiennent à la variété nigra, dont Risso a fait une espèce {Conger ni-ger Risso). 170. — Congromurœna halearlca Del. iR). Plages sableuses inter- calées dans les prairies de Zostères. Rare partout, mais encore assez fréquente sur la côte occidentale. Famille des MuRiiNiDÉs 171. — Murœna lielena L. (CR). Rochers de la zone littorale et 192 L. ROULE prairies de Zoslères ; descend parfois à des profondeurs plus grandes. Commun. Cette espèce, fort abondante en certains points de la Corse, notamment sur la côte occidentale, prête à de nombreuses variétés de coloration. Risso, qui les avait observées sur le littoral de la Ligurie, en a fait plusieurs espèces qui ne peuvent point être con- servées, comme M. fulca et M. guttata. Les principales variétés corses sont au nombre de trois, réunies entre elles, du reste, par des transitions fréquentes : 1" Dos et lianes complèlemeut noirs; ventre gris jaunâtre foncé; petites taches blanc-jauuàtres assez espacées, tantôt isolées, tantôt rassemblées par groupes de deux, trois ou quatre. 2° Mêmes teintes, mais un peu plus claires ; taches plus nom- breuses et plus serrées. 3° Fond roussàtre sur tout le corps. De grandes macules blanc- jaunâtre semées de taches ayant la même couleur que le fond ou un peu plus foncées. Les macules sont parfois continentes, surtout dans la partie antérieure du corps, qui paraît comme marbrée. Cette variété fait une traDsition vers l'espèce suivante : 172. — Murœna unicolor Del. (R). Même habitat que l'espèce pré- cédente, mais plus rare. IV Cette liste, comprenant les 172 espèces recueillies par M. de Caraffa et par moi-même, n'est sûrement pas complète. Elle contient les formes les plus communes, et quelques-unes des plus rares, mais elle ne mentionne pas toutes ces dernières. Les nou- velles recherches, entreprises par M. de Caraffa, permettront de la compléter peu à peu. Telle qu'elle est, elle permet cependant de connaître et d'apprécier d'une façon suffisante la nature du littoral de la Corse en ce qui concerne les Poissons. Sans entrer ici dans de longs détails, qui seraient inutiles, il suffit de faire ressortir les analogies de cette faune, plus grandes avec celle de la Sardaigne, de la Sicile et de la partie méridionale de la Méditerranée, qu'avec celle des côtes liguriennes, fort proches pourtant. On ne peut trop tabler, au sujet d'un bassin relativement exigu comme celui de la Méditerranée occidentale, sur la distribution des espèces de Poissons, pour en tirer des conclusions rigoureuses au sujet de la répartition géographique. Les Poissons se déplacent aisément, et les conditions de milieu ne diffèrent pas beaucoup de l'Algérie à la Provence, de l'Espagne à l'Italie. D'autre part, les LA FAUNE DES POISSONS QUI HABITENT LES CÔTES DE LA CORSE 193 œufs d'un assez grand nombre de ces animaux se maintiennent entre deux eaux, llottent au lieu de s'accoler à des corps étrangers, et se laissent emporter par les courants. Pour ces diverses raisons, un tel bassin possède forcément, sous un pareil rapport, une allure uniforme. Cependant, parmi cette uuiformité essentielle, on distingue quelques nuances dilïérentielles, qu'il est possible de faire ressortir. La faune ichthyologique de la Corse ressemble plus à celle de la partie méridionale et occidentale du bassin, comprenant la Sicile, l'Italie méridionale, l'Algérie, les Baléares, le littoral catalan, qu'à celle de la partie septentrionale, renfermant les côtes provençales et liguriennes. L'atllnité est plus grande, dans cette dernière, avec le littoral de la Ligurie, de Nice à Livourne, mais elle ne masque point l'analogie plus forte encore avec la partie méridionale du bassin. Par là, la faune de la Corse se sépare de celle de Marseille, de Nice et de Gènes, pour offrir des relations indiscutables avec celle de Messine, de Naples, d'Alger, et même de Madère. Ces rela- tions ne sont établies que par un petit nombre d'espèces, mais elles existent pourtant, et il est nécessaire d'en tenir compte. Blennius Montagui Flemni. est une espèce atlantique, rare par- tout. On la trouve assez fréquemment dans la partie méridionale du bassin méditerranéen, et en Corse. Par contre, sa présence sur la côte ligurienne est des plus rares. Il en est de même pour Apogon imberbi^. L. que l'on trouve dans la partie méridionale du bassin, que l'on pêche à Madère, qui a été recueilli eu Corse, mais qui est également très rare sur le littoral ligurien. Un erratique, Auxis bisus Raf., est dans le même cas. Il fréquente les côtes méridionales de la Méditerranée, d'où il se répand dans l'Atlantique; il remonte au nord jusqu'à la Corse, mais ne la dépasse guère. Regaleciis gUidius CV., Cantharus orbicu- laris CV., A'yrichthijs novacula L., Ophidiuin Vassali Risso, Belone imperialis Raf., se trouvent aussi dans un cas semblable ; assez fré- quents eu Sicile, en Algérie, sur le littoral espagnol, leur limite extrême et septentrionale de répartition géographique s'arrête à la Corse ; ils ne la franchissent pas, et c'est seulement à titre excep- tionnel qu'on les prend dans les eaux liguriennes. Une distribution similaire est aussi celle de Congromurœna balearlca Del. Cette espèce, d'abord trouvée aux îles Baléares, a été recueillie ensuite dans toute la partie méridionale de la Méditerranée. Elle est encore assez fréquente en Corse ; par contre, ses exemplaires sont des plus rares sur le littoral de la Ligurie. Mém. Soc. Zool. de Fr., 1902. lî)4 I-. HOIll.K. LA TAIINK DKS POISSONS (,1111 IIAIIITKNT, KTC. L:i laisoii èceH de HÏ'Iendn! plus aisément vcus l(! sud (|iU3 de loul autn; côlé, où il faul fran(;liir les f^^randes |)rolondeurs sur des espaces assez vasicis avant d(î nm- contrer d(! n()uv(dl(!s cAles. J^es (;onditions top()}^iaplii(|U(îs actuelles inllLKîut, par consé(|uent, d'une manière assez j^randt;. Mais la véri- table causes, plus profonde et |)lus lointairuî, porte sur l(!s condi- tions topoKiaplii(jU(is d'autrefois, sur celles (|iii cxislai(înt à une épo(|ue relativement lécente, vers la lin du tertiaires, est (|ui dillé- raicsnl beaucoui» d(s cesINss d'aujourd'hui. Voici unes vingtaines erannées, Foiisytu Majou (Die Tyrrhenis; Kosnios, VII, 188.'{. — Ance)ra la Tyrrlienis ; Atli dcilaSocicla toncana iU Scienze rudnralc, iHH'.\) ele'smontra, esn ses basant sur des obsesrva- tie)ns liréess des la paléonte)le)^ie comme de l'actuelle distribution };ée);j;raplii<|U(' eless animaux est eless |)lant(ss, (jues la (^orsc et la Sar- elaii;ne5, uniess (sidres eslle;s vers la lin du pliocènes et le elébut élu (jua- lesrnaires, ses resliaient en e)utres, vers la menus espe)e|ues, à la Siciles, à l'Italie mérielie)nales est h l'Afrie|ue du Norel. Il y avait alors, dans ceslles parties eles la Méelitesrranées, unes vaste terre émerjjjées (|ui pro- lemi^esail l'Atrieiues dans la directie)n se'[»tentrie)nales, comprenait la (;e)rses aetueslle', est ses trouvait sé|)arée esepe'uelant, par la mer, des cAtess lij^urienmss. (le e'e)ntinesnl s'est allaissé se»us less (saux pour la majesuns parties, ne laissant eles lui eju'un assemblaf^cs ePlless etd'lle)ts aussi distinests aujouieriieii des l'Afriepies sept(sntrie)nales (|ue de la liigurie. Tout réeesmmeni, .le)bn ihiiQUKT (Ueselie'resbess sur la Uore des me)ntaj^iies de la Corse et ses ori^iness. Annuaire du Conserva- toire cl du jardin hulanUjuva de ('•cnhie, V, 11)01), après unes étude appre)le)ndi(s eles asse)esiatie)ns végétales eles la Ce)rses, souli};ne à son le)ur la vérité d'une teslle assertion. IJien (ju(5 less ele»nnées fe)uiiiies par les l*oisse)ns littoraux ne se)ient pas aussi pre)bantess, pe»ur less raise)ns déjà si^^nalées, (|ues ceslless des animaux et eles véf-étaux terreslress, elles ne laissesnl pas d'apporter une preuve nouvcsllo en favtsur de ceslle e)pinion. Les côtes de la Corse abritent un cortaiii nombre d'espèces, que \\n\ ne trouve point sur les rives li{.çuriesnues ni proveii(;ales, ou qui y sont fort rares, alors (lu'elles vivent et eiu'on les renesontre assez souvent dans (les réj^ions plus méridionales. Ces espèces se sont sans doute conservées en Corse depuis le temps où l'île prolonj^eait l'Afrique vesrs les ne>rd. 195 CLASSIFICATION DE LA FAMILLE DES CULIGIDAE M. NEVEU -LEM AIRE I. — Aperçu historique. Linné, en 1735, puis eu 1761, désigue sous le uom de Culex tous les Insectes qui font actuellement partie de la famille des CuUcidae. Meigen, en 1818, démembre le genre Culex et établit les genres Anophèles et Aëdes. Robineau-Desvoidy, dans son « Essai sur les Culicides » en 1827, ajoute à ces trois genres européens trois genres exotiques : Megar- hinus, Psoropkora et Sahetkes. Macquart, en 1834, dans les « Suites à Buffon », n'admet pas les trois genres créés par Robineau-Desvoidy et n'accepte que les trois genres établis par Meigen ; en 1838, il revient sur sa première opi- nion et conserve le genre Megarhinus, rattachant les genres Psoro- phora et Sabethes au genre Culex. A cette époque les Culicides étaient donc divisés en quatre genres, qui sont actuellement les types des quatre sous-familles des CuUcidae, des Anophelinae, des Aëdëinae et des Megarhininae. Beaucoup plus tard, en 1891, Linch Arribalzaga, dans un travail sur les Moustiques de la République Argentine, rétablit les genres Psoropkora et Sabethes et sépare des Culex les genres Ochlerotatus, Tœniorhynchus, lanthinosoma et Heteromjcha, et des Aëdes le genre braiiotsenia. WiLLisTON, en 189G, sépare du genre Aëdes un Moustique prove- nant de Saint-Vincent et crée pour lui, le genre Hiemagogus. La question en était là lorsqu'en 1901 et en 1902, P'.-V. Theobald, en faisant la révision des Culicides appartenant à la collection du British Muséum, décrivit, soit dans sa « Monographie des Culi- cides )) (1), soit dans une série d'articles publiés dans le « Journal of Tropical Medicine », un grand nombre de genres nouveaux. Il conserve tous les genres préexistants, sauf les genres Ochlero- (1) F. y. Theobald, .4 Monograpfi of the CuUcidae of the World. London, 1901, vol. et 1 vol. de planches. 196 M. NEVEU-LEMAIHE tatus et Heteronycha, et établit dix-neuf autres genres, sans compter les genres Corethra et Mochlonyx (1). Enfin en octobre 1902, Laveran crée pour un Moustique décrit par SiMOND et provenant des environs de Rio-de-Janeiro, le genre Simondella (2). II. — Classification de Theobald. Section. A. — Trompe faite pour piquer ; métaootum nu. a. Palpes longs chez le cf. a. Palpes longs dans les deux sexes, environ aussi longs que la trompe, articles terminaux en spatule ou renflés chez le (^ ; première cellule sub-marginale de la même longueur ou plus longue que la seconde cellule posté- rieure Sous - famille : Anophelina. Ailes généralement tachetées. Genre 1. Anophèles. fi. Palpes longs chez le o^, plus courts chez la 9 ; première cellule sub-marginale très petite, beaucoup plus petite que la seconde cellule postérieure ; trompe longue, recourbée Sous-famille : Megarhinina. Palpes à 5 articles chez la $ , Genre 2. Megarhinus. Palpes à 3 articles chez la $ (courts) Genre 3. Toxorhynchites. y. Palpes courts chez la 9 , longs chez le cf ; première cellule sub-marginale de la même longueur ou plus longue que la deuxième cellule postérieure. Sous-famille : Culicina. yy. Pattes avec des écailles plus ou moins longues. Transverse moyenne de l'aile plus près du sommet de l'aile que la surnuméraire ; transverse postérieure plus près du som- met de l'aile que la transverse moyenne ; 3^ nervure longitudinale prolongée à l'intérieur de la cellule basale Genre 4. Sabethes (3). Nervures transverses comme chez Culex ; écailles de la couronne et del'occiput larges et fusiformes; pattes posté- rieures avec de nombreuses écailles. Genre 5. lanthinosoma. (1) Nous verrons plus loin que ces deux genres ne doivent pas rentrer dans la famille des Culicidae. (2) SiMOND, Description d'un Moustique dont le mâle possède une trompe en faucille. C. R. Soc. de Mol. LIV, 25 octobre 1902, p. 1158-1460. (3) Ce genre doit être transporté dans la section B, parce que le métanotum présente des poils et parce que les palpes sont courts dans les deux sexes. (Note de Theobald). CLASSIFICATION DE LA FAMILLE DES CULICIDAE 497 Transverse postérieure plus près de la base de l'aile que la transverse moyenne; ailes avec des écailles fines; toutes les pattes avec des écailles. Genre 6. Psorophora. Transverse postérieure plus près du sommet de l'aile que la transverse moyenne ; ailes avec des écailles larges et pyriformes en partie colorées . . Genre 7. Mucidus. Transverse postérieure plus près de la base de l'aile que la transverse moyenne ; tête revêtue d'écaillés plates ; pattes postérieures avec les tarses pourvus de Ioniques écailles cbez le cf ; écailles des ailes longues et épaisses. Genre 8. Eretmapodites. YYT- Pattes uniformément couvertes d'écaillés plates. 5. Ecailles de la tête et du scutellum plates et larges. Ailes avec de petites écailles en spatule et linéaires; 3'^ ner- vure longitudinale ne se prolongeant généralement pas dans la cellule basale; palpes du cf nus ou avec des poils; palpes de la 9 courts . . Genre 9. Stegomyia. Troisième nervure longitudinale prolongée à l'intérieur de la cellule basale; palpes du d^ nus, longs et minces; palpes de la $ plus longs que chez Steyomyia. Genre 10. Armigeres. 8o. Ecailles de la tête étroites et courbées, quelques-unes sont bifurquées, d'autres plates, ces dernières sont latérales. 1. Second article de l'antenne petit ou de taille moyenne. Ecailles des ailes petites, les écailles latérales sont linéaires , Genre 11. Culex. Ecailles des ailes très grandes, larges, plates et asymé- triques Genre 12. Panoplites. Ecailles des ailes nombreuses, les écailles latérales sont grandes, ovales ou lancéolées. Genre 13. Tœniorhynchus. 2. Second article de l'antenne très long. Genre 14. Deinocerites. aa. Palpes très courts chez le d^ et chez la 2. beaucoup plus courts que la trompe . . Sous-famille. Aëdkomyina. a. Palpes à 2 ou 3 articles ; pas de reflets métalliques. Ecailles des ailes larges et plates ; fourchettes normales. Genre 15, Aëdëomyia. Ecailles des ailes petites et linéaires comme chez le Culex; fourchettes normales Genre IQ. Aëdes. aa. Palpes à 3 articles ; fourchettes normales ; reflets métal- liques Genre 17. Hœmagogus. 198 M. NEVEU-LEMAIRE aaa. Palpes à 2 articles ; fourchettes très petites ; avec quelques taches formées par des écailles plates à reflets métal- liques sur le thorax .... Genre 18. Uranotaenia. Section. B. — Trompe faite pour piquer; métanotum pré- sentant des soies ; palpes petits, trompe longue. Genre 19. Wyeomyia. Section C. — Trompe faite pour piquer; métanotum portant des soies et de écailles. Sous-famille. Trichoprosoponina. Palpes longs chez le cf , courts chez la 9. Genre 20. Trichoprosopon. Section D. — Trompe courte, non conformée pour piquer. Sous-famille. Corethrina. Métatarse plus long que le l^r article du tarse. Genre 21. Corethra. Métatarse plus court que le l^r article du tarse . . . Genre 22. Mochlonyx. Dans un appendice à sa monographie des Culicides, Theobald (1) crée trois autres genres ; Cycloleppteron, Brachiomyia et Limatus. Le premier ne diffère des Anophèles que par les écailles de l'aile, le second se rapproche du genre Deinocerites et le troisième doit être placé dans la section C à côté du genre Trichoprosopon. DÉMEMBREMENT DE LA SOUS-FAMILLE DES ANOPBELINA (2) Thorax et abdomen avec des poils seu- lement; palpes avec peu d'écaillés. Thorax avec des écailles étroites et courbées; abdomen avec des poils. Lobes du prothorax simples Lobes du prolhorax mamelonnés Écailles Écailles des ailes lan- céolées (flg. i; . . Anophèles. Écailles des ailes lon- gues et étroites (fig. 2) Grassia. Écailles des ailes grandes et larges, (fig. 3) Cycloleppteron. Écailles des lancéolées . jiles Stethomyia. petites et lancéolées. Howardia. (1) F.-V. Theobald, A Monograph of the Culicidae of the World, London 1901, II, Appendix, p. 312, 343 et 349. (2) F.-V. Theobald, The classification of the Anophelina. Journal of Tropical Medicine, June 16 th. 1902, p. 181-183. CLASSIFICATION DE LA FAMILLE DES CULICIDAE 199 Thorax et abdomen avec des écailles; palpes avec de nom- breuses écailles. Ecailles abdominales sur la face ventrale seulement; écailles du thorax sem- blables à des poils . Rossia. Écailles abdominales disposées en touffes latérales et en taches dorsales ; écailles du thorax étroites et courbées ou fusiformes Laverania. Abdomen complètemeni couvert d'écail- lés et présentant des touffes d'écaillés sur les côtés Cellia. Fig. i. — Ecaille de l'aile d'Anophèles. Fig. 2. — Écaille de de Grassia. Fig. 3. — Écaille de l'ail de Cycloleppteron. Quelques-uns des noms donnés par Theobald à ses nouveaux genres existaient déjà dans la nomenclature zoologique, aussi R. Blanchard (1) les a-t-il remplacés, pour se conformer aux lois de priorité, par les dénominations suivantes : Desooidya R. Blanchard 1901 (en l'honneur du diptérologiste français Robineau-Desvoidy) = Armigeres Theobald 1901 (non Armiger Hartmann 1840 et 1842). Mansonia R. Blanchard 1901 (en l'honneur de Patrick Manson) = Panoptites Theobald 1901 (non Panoplites Gould, 1853). Joblotia R. Blanchard 1901 (en l'honneur de Joblot, naturaliste français qui a découvert les larves dWnopheles) = Trichopi'osopon Theobald 1901 (non Trichopfosopus Macquart 1843). Myzomyia R. Blanchard 1902 (de [jlûCco, sucer et [xura, Mouche) = Grassia Theobald 1902 (non Grassia Fisch 1885). Pyretophorus R. Blanchard 1902 (de 7rup£Tda,opoç, qui produit la fièvre) = Howardia Theobald, 1902 (non Howardia Dalla Torre 1897). ^yssorliynchusR. Blanchard 1902(devû(7a-oj,piqueretpûy/o(;, trompe) = Laverania Theobald 1902 (non Laverania Grassi et Feletti 1890). Myzorynchus R. Blanchard 1902 (de [xu!;a), sucer et puy/oç , trompe) = Rossia Theobald 1902 (non Rossia Bonaparte 1838; non Rossia Owen 1838). (1) R. Blanchard, Observations sur quelques Moustiques. C. R. de la Soc. de biol., LUI, 6 décembre 1901, p. 104.^-1046. - Nouvelle note sur les Moustiques. C. B. de la Soc. de bioL, LIV, 28 juin 1902, p. 793-795. — Histoire naturelle et uiidicale des Moustiques [sous presse). 200 M. NEVEU-LEMAIRE Cyclolepidopteron R. Blanchard 1901 doit évidemment, d'après l'étymologie du mot, remplacer Cycloleppteron Theobald 1901. III.— Examen critique de la classification de Theobald. 1° — Theobald fait rentrer dans sa quatrième section des Insectes qui, par bien des caractères, par la conformation de l'aile en parti- culier, se rattachent aux Moustiques, mais qui diffèrent essentiel- lement en ce que leurs pièces buccales ne sont pas transformées en trompe capable de perforer la peau de l'Homme ou des animaux. D'accord avec R. Blancbaru (1), et beaucoup d'autres auteurs, je propose de laisser ces Insectes, qui comprennent les genres Corethra et Mochlonyx, parmi les culiciformes et de les exclure par consé- quent de la famille des Culicidae, qui ne comprendra que les Mous- tiques vrais capables de piquer. 2° — Les trois premières sections établies par Theobald, ne diffé- rent entre elles que par le métathorax ou métanotum, qui est dénudé dans la première (fig.4), présente des poils dans la seconde, des poils et quelques écailles s^^h^j s-v^l-'—j^ V-— ^-^ ^^"^^ ^^ troisième. Or, ces Y"~^y \~^l \\hi caractères ne semblent même ^- — -^ \l^ N^V pas avoir la valeur de carac- tères génériques. D'ailleurs Fig. 4. - Différents aspects du métathorax ^g^g division tout à fait arbi- ou métanotum, d'après Theobald. , . ,,. , . ,, , D •♦ , traire a 1 inconvénient de A, métanotum nu; B, métanotum présen- tant des poils; G, métanotum présen- partager les nombreuses espè- tant des poils et quelques écailles. CCS de MoustiqueS en groupes tout à fait inégaux. Tandis que la première section renferme presque tous les Culicides, la seconde ne renferme qu'un genre avec sept espèces et la troisième qu'un genre avec une seule espèce ! Comme d'autre part il est très facile de rapprocher ces genres de ceux que renferme la première section, je crois qu'il est inutile de conserver ces trois groupes et qu'il est bien préférable de diviser directement en quatre sous- familles la famille entière des Culicidae. 3° — Les quatre sous-familles admises par Theobald (2) : les (1) R. Blanchard, Instructions à l'usage des médecins, des naturalistes et des voyageurs, rédigées^ an nom de la commission du paludisme. Butl. de l'Acad. de médecine, (3), XLIV, 3 juillet 1900, cf. p. 31. (2) Theobald emploie les termes de : Anophelina, Megarhinina, Culicina, AëdëomyiJia, mais pour me conformer aux règles de la nomenclature zoologique établies aux Congrès internationaux de Zoologie, je remplacerai a par sb, les noms des sous-familles devant se terminer en inse. Cla.ssinca.tion des CULICIDAE 'Hipos mnxillaircs Piilpoa iiiasIHulrcs Transverse postôrlo» , ou lourchette aiiti^ripur« Palpes maxillaires sensiblement égaux à la trompe chez o" et 9 Première cellule sub-marginale de l'aile, ou fourchette antérieure de la même longueur ou plus longue que la seconde cellule pos- térieure ou fourchette postérieure oheles. Palpes maxillaires sensiblement égaux à la trompe chez le çf; sen- aihlpmpnt ^caiiY il la trnmne. nu Première cellule sub marginale de l'aile, ou fourchette antérieure hcniif.nu-n nlus neMlp. nue la se- CLASSIFICATION DE LA FAMILLE DES CULICIDAE 201 Anophelinae, les Meyarhininae, les Culicinae et les Aëdëomyinae sont très nettement délimitées et leurs caractères répondent à ceux des anciens genres Anophèles, Megarhinus, Culex et Aëdes, plus ou moins démembrés depuis. Toutefois, je proposerai de remplacer le nom d' A ëdëomjiinae par celui d'Aëdëinae, car c'est le genre Aëdes Meigen, 1818, beaucoup plus ancien que le genre .4érféV>m//mTheobald, 1901, qui doit être le type de celte sous-famille. 4° — On peut dire que la classification de Theobald est basée presque exclusivement sur l'écaillure des Moustiques, sur la forme et la position relative des écailles de la tête, du thorax, de l'abdomen ou des ailes, ce qui lui a permis de créer un grand nombre de genres nouveaux et de démembrer, souvent sans grande utilité, les anciens genres. Nous verrons plus loin qu'on peut caractériser ces différents genres en examinant des organes plus faciles à étudier, surtout sur des échantillons desséchés ou conservés depuis long temps dans l'alcool et ayant perdu par suite presque toutes leurs écailles. A côté de genres très bien caractérisés comme lesgenres Mansonia et Mucidus, Theobald en a créé d'autres tels que les genres Eretma- podites et Deinocerites, dont les caractères ne sont pas assez impor- tants pour être considérés comme génériques. Aussi les rattache- rons-nous dans la classification qui va suivre à des genres plus nettement définis. IV. — Essai d'une classification nouvelle. Cette classification des Culicidae est basée sur la longueur relative de la trompe et des palpes maxillaires, sur le nombre d'articles et la forme de ceux-ci, enfin sur la nervation de l'aile. Ces caractères me semblent suffisants pour permettre d'établir les différents genres de cette famille. Je ferai tout d'abord une remarque importante relativement au nombre d'articles des palpes, car ce nombre, qui est absolument fixe dans chaque espèce, sauf dans des cas tératologiques (1), varie suivant les auteurs. Cela tient simplement à ce que pj^ - _ p^jpg certains auteurs, Ficalbi entre autres, comptent niHxiiiaire à 4 comme articulations distinctes les encoches (fig.5), dér^parcertians auteurs comme / dont les palpes ont 3 articles et non 4, comme le prétend Theobald. (2) M. Neveu-Lemaire, Description de quelques Moustiques de la Guyane. Archices de Parasiiologie, VI, 1902, cf. p. 19 et 20. 212 M. NEVEU-LEMAIRE l'eau et non disposés en radeaux comme ceux des Culex ; ils sont ovoïdes, un peu plus effilés à un de leurs pôles, qu'à l'autre et sont enlourés d'une série de petites chambres a air (1). Espèce type : Stcgomyia fasciata (Fabricius 1805). Observations sur le genre Stegumyia. Ce genre se rapproche beaucoup du genre Culex et malgré les caractères donnés par Theobald, il est très difTicile de l'en distin- guer; la forme des palpes maxillaires de la $ peut seule permettre de la reconnaître, au moins chez les espèces que j'ai examinées. Les femelles semblent piquer aussi bieu le jour que la nuit, et ou les trouve généralement en compagnie d'autres espèces du genre Culex. Les larves des deux genres se rencontrent le plus souvent dans les mêmes endroits. Aussi est-ce plutôt une considération d'ordre pathologique qui m'a poussé à conserver ce genre. On sait eu effet que les expérien- ces des Américains à Cuba, relativement à la propagation de la fièvre jaune, ont été faites avec Stegomyia fasciata, espèce très répandue dans les régions tropicales et qui semble jusqu'ici avoir le triste privilège d'inoculer les germes de cette maladie. De même qu'il est malheureux de démembrer le genre Anophèles qui, jusqu'à présent, semble être le seul capable de transmettre le paludisme ; de même il me semble utile de conserver le genre Stegomyia, qui est actuellement le seul accusé de propager la fièvre jaune. Au genre Stegomyia doit se rattacher le genre Desmidya R. Blan- chard 1901 en remplacement de Armigeres Theobald 1901, nom déjà employé dans la nomenclature zoologique [Armiger Hart- mann 1840 et 1842, Mollusque). En effet, d'après Theobald, ce genre ne diffère des Stegomyia que par les caractères suivants : « Palpes du d^ e/filés pourvus seulement desoies et non de touffes de poils; abdomen et tarses non annelés ; grande taille ; les larves se tiennent perpendiculairement à la surface de l'eau. » Mais ces caractères ne me semblent avoir que la valeur de caractères spécifiques. 3. Toeobaldia Neveu-Leinaire 1902. (en l'honneur de F.-V. Theobald) M. Neveu-Lemaire, Sur la classification des Culicides. Comptes- rendus de la Société de biologie, 29 novembre 1902, p. 1331. (1) Skuse prétend cependant que les œufs de S. nnloscripla sont déposés en masses ayant la forme d'un bateau. CLASSIFICATION DE LA FAMILLE DES CULICIDAE 213 Diagnose du genre : « Palpes maxillaires sensiblement de la même longueur ou plus longs que la trompe chez le d^, plus courts que le tiers de la trompe chez la 9 ; trois articles chez le cf, quatre articles chez la $ ; le quatrième article est très petit et a la forme d'une petite sphère plus ou moins ir régulière (fig. 5), placée à l extrémité du troi- sième article et plus ou moins cachée par les poils et les écailles de cet article. Antennes plumeuses et à quinze articles chez le cJ^, à quatorze articles chez la Ç. Première cellule snb -marginale de l'aile de la même longueur ou plus longue que la deuxième cellule postérieure. Transcerse postérieure plus près de la base de l'aile que la transverse moyenne. Écailles des ailes comme dans le genre Culex, c'est-à-dire étroites et allo7igées. Oeufs, larves et nymphes comme chez les Culex. Espèce type : Theobaldia annulata (Schrank 1776). Observations sur le genre Theobaldia- Ce genre renferme tous les Moustiques appartenant à l'ancien genre Culex, dont les palpes maxillaires présentent quatre articles chez la femelle, le dernier article étant toujours très petit, globu- leux et en partie caché par les écailles du troisième article. A côté de Theobaldia annulata (Schrank 1776), type du genre, viennent se ranger un grand nombre d'espèces telles que T. nemo- rosa (Meigen 1818), T. tsenlorhyncha (Wiedemann 1821), T. atripes (Skuse 1889), etc. Le genre Heteronycha Arribalzaga semble se rattacher, d'après la conformation des palpes de la femelle, au genre Theobaldia. 4. Mansonia R. Blanchard 1901. (en l'honneur de Patrick Manson). Syn. : Panoplites Theobald 1901 (non Panoplites Gould 1853, Oiseau). F. V. Theobald, Journ. of Trop. Med., July 15 th. 1901, p. 229-235; A Monograph of the Culicidae of the World, 1901, II, p. 173. — R. Blancbard, Observations sur quelques Moustiques. C. R. de la Soc. de biol., 6 décembre 1901, p. 1045. — M. Neveu- Lemaire, Sur la classification des Culicides, C. R. de la Soc. de biol., 29 novembre 1902, p. 1329-1332. Diagnose de Theobald : « Palpes courts chez la 9, longs chez le jf avec une touffe de poils chez ce dernier à quatre articles chez la 9 et chez le çjf ; chez la 9 le premier article est petit, le troisième long et le quatrième petit et ridé. Tête couverte d'écaillés étroites et courbées et 2i4 M. NEVEU LEMAIRE de longues écailles fourchues; thorax 'présentant de longues écailles semblables à des poils et de nombreuses soies ; i-cutellum aoec des écail- les semblables ; abdomen couvert d'écaillés plates à sommet très convexe. L'abdomen de la $ est habituellement renflé et l'avant-dernier segment peut porter une rangée d'épines courtes et épaisses. Ailes ouvertes et nombreuses écailles plates larges et asymétriques situées de chaque côté des nervures seulement ; il n'y a pas d'écaillés médianes ; dans certains on trouve aussi de longues écailles latérales claviformes ; bifurcation de la seconde cellule postérieure généralement plus rapprochée de la base de l'aile que la bifurcation de la première cellule sub-marginale. Pattes généralement plus ou moins tachetées ou annelées de blanc ; ongles de la 9 égaux et simples, inégaux chez /ecf, le plus grand porte une dent, le second est simple {in P. titiUans). » Trompe courte, épaisse et trapue. Palpes maxillaires plus longs que la trompe et à quatre articles chez le c^, le dernier article est petit; palpes plus courts que la trompe, mais atteignant au moins le tiers de sa longueur, et à quatre articles chez la Q, le troisième article est aussi long que les deux premiers réunis, et le quatrième très petit. Antennes courtes, à quatorze articles chez la Q, à quinze articles chez le cf. Première cellule sub-marginale plus longue que la seconde cellule postérieure ; bifurcation de la seconde cellule postérieure quelquefois plus rappro- chée de la base de l'aile que la bifurcation de la première sub-marginale ; transverse posté- Fig. 8. — Ecaille de . ^ , . ^ , u j ,. -, i l'aile de Mansonia. ^jeure plus près delà base de 1 aile que la transverse moyenne. Écailles des ailes larges et asymétriques (fig. 8), disposées de chaque côté des nervures seulement. La femelle possède deux réceptacles séminaux (1) ; ceux-ci sont sphériques, plus grands que chez les Culex mais plus petits que le réservoir spermatique unique des Anophèles. Les nymphes et les larves ne sont pas connues. Les œufs de Mansonia, que j'ai vus une seule fois grâce à l'obli- geance du D'' Daniels, à l'École de médecine tropicale de Londres, ont une forme très spéciale; ils sont resserrés à l'une de leurs extré- mités, qui est effilée et étroite, et présentent l'aspect d'une petite bouteille. Ces œufs s'agglomèrent de la même manière que ceux des Anophèles. Espèce^type : Mansonia titillans (Walker 1856). (1) M. Neveu-Lemaire, Sur les réceptacles séminaux de quelques Culicides. Loc. cit. CLASSIFICATION DE LA FAMII.LR DES CULICIDAR 215 Observations sur le genre Mansonia. Outre les écailles très spéciales des ailes, le genre Mansiona possède des caractères extrêmement précis, qui permettent de le reconnaître à première vue. Chez la femelle, la longueur des palpes maxillaires, qui dépassent le tiers de la trompe, est, entre autres, un excellent caractère. La piqûre des Mansonia est très irritante, et la salive de quelques espèces est nettement acide. Certaines espèces peuvent transmettre la Filaire du sang, mais, d'après les expériences de Daniels sur M. africana (Theobald 1901), ces Moustiques sont incapables de propager le paludisme. 5. — T^NioRHYNCHUS Liuch Arribâlzaga 1891. (dexatvta, bande, anneau, et pûy/oç, rostre). LiNCH Arribâlzaga, Dipterologia argentina, 1891, p. 47, pi. Il, fig. 4. — F. - V. Theobald, A. Monograph of the Culicidae of the World, London 1901, II, p. 190. — M. Neveu-Lemaire, Sur la classi- fication des Culicides. C. R. de la Soc. de bioL, 29 novembre 1902, p. 1329-1332. Diagnose de Linch Arribâlzaga : « Antennae feminae simplices, filiformes, sat longe mllosulae articulationibus parée verticiUatim setu- losae, maris articulis 2-12 dense plumosis, obconicis, basi tenuibus apice subcapitulatis, apicalibus duobus elongatls, linearibus, pilosuUs, parce verticiUatim setosis. Palpi maxillares prohoscide evidenter longiores, apicem versus incrassati, retiusculi cum proboscide paralleli, articulis 2 primis minutis, 3° elongato apice incrassato, proboscidis prope i^ parte breviore, dense et prsesertim subtus pennicillato-plumoso, 4" 5^ que inter se fere œquelongis at simul sumptis 3° parum breviori- bus, his ambobus longe pennicUlato villosis, 5° oblongo apice acutius- culo (cf) vel in fœmina prohoscide multo brevigres, apicem versus sensim crassiores (5° excepta) articulis duobus primis brevissimis, obconicis ; tertio elongato obconico, leviter arcuato, quarto elliptico subfusiforme, prœcedentibus fere œquelongo, ultimo 5° minutissimo, VfX conspicuo, submembranaceo. Prohoscis recta, thorace parum longior, palpis maxillaribus paulo crassior ($), apicem versus in utroque sexu nonnihil incrassata s. tumidula. Thorax ovatus, convexus. sat longe denseque villosus, utrinque setulosus ; scutellum trans- versum , 3 lobatum, lobo medio distincto lateralibus obsoletis , postice longe selosum. Alae tenuissime pilosuli, dense squamulatae, cellvla prima submarginalis 4^ postica subœquœlovga sed augustior. 216 M. NEVEU-LEMAIRE cellula basilaris interna externa distincte brevior. Pedes longissimi ; tarsorum articulo i° tibia sequelovgo vel breviore; reliquis simul sumptis t° œquelongis ; ungues feminae slmplices, elongati, inœquales, modice arquati, maris unguicula externa interna duplo longiore subtus pone médium dente elongato armata, interna mutica acutiuscula, modice arcuata. Abdomen thorace duplo (Q) vel prope triplo longius i^^) sub- parallelumapice rotundalum (Q) vel truncatulum (^) sat longe mllosum at in maris utrinque longius villosolanatum. » Trompe généralement annelée de blanc. Palpes maxillaires plus longs que la trompe chez le cT» plus courts chez la $ ; palpes du (^ à trois articles dont le dernier est long ; palpes de la 9 à cinq articles, l'avant-dernier et surtout le dernier sont très petits et en partie cachés par les écailles du troisième article. Antennes à quinze articles chez le (j^, à quatorze articles chez la 9- Première cellule sub-marginale de l'aile longue, plus longue que la seconde cellule postérieure; nervure trans- verse postérieure plus près de la base de l'aile que la transverse moyenne. Écailles des ailes Fig. 9. — Écailles de compactes, ordinairement allongées, soit limi- ers''^^^'""'^^'^^ *^^^ ^" sommet par une ligne convexe, soit cou- pées en diagonale, soit enfin terminées en pointe plus ou moins émoussée (fig. 9) ; à première vue ces grandes écailles rappellent celles des Mansonia, mais leur forme est tout à fait différente. On ne connaît rien relativement aux œufs, aux larves et aux nymphes des Tœniorhynchus. Espèce type : Tœniorhynchus fasciolatus Linch Arribalzaga 1891. Observations sur le genre T^morhynchus. Ce genre, établi par Arribalzaga, a été modifié par Theobald, qui lui donne comme caractère distinctif la forme des écailles des ailes. Je l'ai conservé à cause de la particularité de ses palpes maxillaires, formés de trois articles chez le mâle et de cinq articles chez la femelle. Le genre Ochlerotatus Arribalzaga, dont les palpes présentent également cinq articles chez la femelle parait devoir être rattaché au genre Tœniorhynchus. 6. Psorophora Robineau-Desvoidy 1827. (de ^^opoç qui a la peau rugueuse et op£o) porter). Robineau-Desvotdy, Essai sur la tribu des Gulicides. Mém. de la Soc. d'Hist. nat. de Paris, III. 1827, p. 412, pi. 10, fig. 8. — CLASSIFICATION DE LA FAMILLE DES GULICIDAE 217 Latreille, Règne animal, 1829, p. 440. — Linch Arribalzaga, Dipte- rologlaargentina, 1891, p. 38. — F.-V. Theobald, .4 Monograpk of the Culicidae o/ the World, 1901, I, p. 259. — M. Neveu-Lemaire, Sur la classification des Culicides. C. R. Soc. de biol., 29 novembre 1902, p. 1329-1332. Diagnose de Robineau-Desvoidy: « Ocellivalde distincti. Prothorax, laterc utroque appendiculato. Mesothorax gibhus, ulroque latere fovea trigona distinctus. Antennae breoes in utroque sexu, quarto articulo longiore, quinto minimo styliformi. Pedes feminarum ciliati. Me pri- mum existimaveram incenisse rudimenta alarum in prothoracis lateri- bus,quodque illustrissimo domino Latreille denunciaveram. Respondit vero mihi dominus Latreille se eadem appendicula anterius vidisse monstrata ab inclyto doctore Léon Dufour in Psycoda hirsutaria : quod tamen factum nunquam typis fuerat creditum. » Trompe droite , courte et forte chez le cf, longue et recourbée chez la 9 . Palpes maxillaires plus longs que la trompe chez le cf et à cinq articles (d'après Theobald) ; palpes de la $ plus courts que la trompe, ne dépassant jamais la moitié de sa longueur et à quatre articles (1). Antennes courtes dans les deux sexes. Première cellule sub-marginale de l'aile courte, un peu plus longue que la seconde cellule postérieure ; nervure transverse postérieure très rapprochée de la transverse moyenne, mais elle est toujours un peu plus près de la base de l'aile que la moyenne. Écailles des ailes longues et minces comme dans le genre Culex. Les fémurs et les tibias portent de longues écailles qui peuvent s'implanter jusque sur le premier article des tarses. D'après Lutz, les larves sont très carnassières, elles se jettent sur les autres larves de Culicides, les saisissent par le cou et les dévo- rent ; on voit souvent des larves de taille égale se dévorer entre elles. Espèce-type : Psoropliora ciliata (Fabricius 1794). Observations sur le genre Psorophora. « M. RoBiNEAu Desvoidy a considéré l'appendice du prothorax comme suffisant pour établir le genre Psorophora » ; c'est ainsi que s'exprime Macquart dans sou article sur Culex ciiialus, où il n'admet pas le genre Psorophora. Mais il existe d'autres caractères importants dans la nervation de l'aile et la direction de la trompe, qui permettent de conserver ce genre, sans faire intervenir les appendices du prothorax que Theobald avoue n'avoir jamais vus. (1) D'après Robineau-Desvoidy ot Arribalzaga les palpes maxillaires de la femelle auraient cinq articles. 218 M. NEVEU-LRMAIRE Ce genre semble cantonné dans le sud de l'Amérique du Nord, dans l'Amérique centrale et dans la République argentine. 7. JoBLOïiA, R. Rlanchard 1901. (en l'honneur de Joblot). Syn. : Trichoprosojwn Theobald 1901 (non Trichoprof:opus Mac- quart 1843, Diptère). F.-V. Theobald, Jotirn. ofTrop. Merf., July 15 th. 1901, p. 229-235; A Monograph of the Culicidae o/ the World, 1901, II, p. 283. — R. Blanchard, Observations sur quelques Moustiques, C. R. delà Soc. debioL, 6 décembre 1901, p. 1045. — M. Nkveu-Lemaire, Sur la classification des Culicides. C. R. de la Soc. de bioL, 29 novembre 1902. p. 1329-1332. Diagnose de Theobald : « Tête revêtue d'écaillés plates avec une rangée transversale d'écaillés bifurquées sur la moitié postérieure ; antennes à 14 articles chez la 9, les articles présentent deux rangées de poils verticillés, alternativement longs et courts, l'article hasillaire de l'antenne présente des poils. Palpes de la Q à S articles couverts d'écaillés; chez le d^, 4 articles à peu près égaux, effilés, avec une touffe de soies à la pointe ; chjpeus couvert de poils, quelques longs poils sur le front ; trompe longue couverte d'écaillés et pubescente à son extré- mité prolongée. Thorax avec des écailles plates et fusiformes ; lobes du prothorax distincts avec des écailles plates ; scutelluni avec des écail- les plates et fusiformes ; métanotnm avec une touffe de poils et quel- ques écailles plates par endroits. Abdomen recouvert d'écaillés plates, chez la 9 la pointe présente ds nombreux poils ; chez le cT le lobe basai de l'armure génitale est couvert d'écaillés. Ongles de la 9 petits, égaux et simples ; chez le d^, ceux des premières paires de pattes sont inégaux et simples, ceux de la dernière paire sont très petits, égaux et simples. Ailes couvertes d'écaillés le long des nervures ; ces écailles sont larges et plates, quelquefois comme celles des Taeniorhynchus, mais plus courtes ; fourchettes longues, la seconde nervure longitudinale est très rap- prochée de la base de l'aile, la, cellule anale est très grande et la transverse moyenne plus près du sommet de l'aile que la surnumé- raire ; la transverse postérieure est dans le prolongement de la transverse moyenne. » Trompe longue et effilée. Palpes maxillaires plus longs que la trompe et à quatre articles chez le cf, plus courts que la trompe et à trois articles chez la 9. Antennes d(! la 9 à quatorze articles ; chaque article présente deux rangs de poils verticillés alternative- ment longs et courts. CLASSIFICATION DE LA FAMILLE DKS CULICIDAK 219 Fourchettes longues; la première cellule sub-marginale plus lon- gue que la deuxième cellule postérieure ; la cellule anale est très grande ; la deuxième nervure longitudinale est prolongée jusqu'au voisinage de la base de l'aile ; transverse surnuméraire plus rappro- chée de la base de l'aile que les transverseK postérieure et moyenne qui sont dans le prolongement l'une de l'autre. Ecailles des ailes larges et plates, ressemblant à celles des Tceniorhynchus mais plus courtes. On n'a jamais étudié ni les œufs, ni les larves, ni les nymphes. Espèce type : Joblotia nivipes (Theobald 1901). Observations sur le genre Joblotia. Ce genre mérite d'être conservé à cause de la disposition très particulière des nervures de l'aile, spécialement des nervures trans- verses. La présence de quatre articles aux palpes du ^, la confor- mation des antennes de la 9 sont de bons caractères accessoires ; mais les quelques poils et les rares écailles du métanotum ne permettent pas de former pour lui une section à part, quand tous ses caractères autorisent à le placer dans la sous-famille des Cuiicinae. 8. MuciDUS Theobald 1901 (de mucidus, moisi). F.-V. Theobald, Journ. of Trop. Med., July 15 th. 1901, p. 229- 235 ; A Monograph of the Culicidae of the World, 1901, I, p. 268. — M. Neveu-Lemaire, Sur la classification des Culicides. C. R. Soc. de bioL, 29 novembre 1902, p. 1329-1332. Diagnose de Theobald : « Tête revêtue d'écaillés étroites et courbées, d'écaillés bifurquées en haut et d'écaiiles en vrille. Thorax avec des écailles étroites et courbées et des écailles en vrille espacées au sommet comme sur la tête. Abdomen couvert de nombreuses écailles qui font saillie et ont l'appa- rence de moisissures. Ailes portant de larges écailles pyriformes ; beaucoup d'entre elles sont en partie colorées. Palpes de la 9 d'une longueur égale à la moitié de la trompe : antennes de la 9 à 14 articles, y compris l'article basilaire, à io articles chez le o^ ; palpes du cf à 5 articles, un peu plus longs que la trompe. Ailes à nervation ressemblant à celle des Culex, mais la nervure transverse postérieure est plus près du sommet de l'aile que la transverse moyenne. Pattes annelées et présentant de nombreuses écailles ; ongles des deux premières paires de pattes inégaux chez le cf, le plus grand possède deux TÂU M. NEVKU LEMAIRE dentft, le plus petit une seule ; ongles de la paire postérieure égaux, petits et munis d'une dent ; ches la 9 tous les ongles sont petits, égaux, épais et présentent une dent courte et large. » Palpes maxillaires un peu plus lougs que la trompe et à cinq articles chez le c^; plus courts que la trompe chez la 9, bien que leur longueur soit à peu près égale à la moitié de celle de la trompe. Antennes plumeuses et à quinze articles chez le d^ ; à quatorze articles chez la 9 . Première cellule sub-marginale de l'aile plus longue que la seconde cellule postérieure ; nervure trans- verse postérieure plus rapprochée du sommet de l'aile que la transverse moyenne. Ecailles des Fig. 10. - Écaille de ailes larges et pyriformes (fig. 10). l'aile de Mucidus. Le corps et les pattes sont complètement garnis d'écaillés saillantes, ce qui fait que l'Insecte semble couv(;rt de moisissures, d'où son nom de Mucidus. On ne sait rien des œufs, des larves et des nymphes. Blspèce type : Mucidus alternans (Westwood 1835). Observations sur le genre Mucidus. Ce genre est très bien caractérisé, outre la disposition toute spéciale des nervures transverses de l'aile, par l'aspect particulier que présentent ses écailles et par la forme des écailles de l'aile. Le genre Mucidus renferme de grandes espèces dont la piqûre est fort désagréable; on n'a aucun renseignement sur leur genre de vie. 4. — Aëdëinae. Palpes maxillaires beaucoup plus courts que la trompe dans les deux sexes. Première cellule sub-marginale de l'aile tantôt plus longue que la deuxième cellule postérieure, tantôt beaucoup plus petite. La sous-famille des Aëdëinae comprend six genres qui sont : les genres A^des, Aëdëomyia, Wyëomyia, Hœmagogus, Sabethes et Urano- tœnia. 1. Aëdes Meigen 1818. (de àTjOTjÇ, déplaisant). Meigen, Syst. Beschr. Europ. Ziveiflûgel Ins., 1818, I, p. 13. — Robineau-Desvoidy, Essai sur la tribu des Culicides. Mém. Soc. d'Hist. nat. de Paris, 1827, 111, p. 411. — Macquart, Suites à Buffon, CLASSIFICATION DE LA FAMILLE DES CULICIDAE 221 1834, I, p. 37. — E. Blanchard, Hist. des Insectes, 1845, II, p. 4o4. — Zetterstedt, Dipt. Scand., 1850. — VValker, Ins. Brit. Dipt., 1851, III. — ScHiNER, Fauna austriaca, 1864, II. — Ficalbi, BuU. Soc. en t. itai, 1896, p. 299. — F.-V. Theobald, A Monorjraph of the Culicidœ ofthe World, LoDdou, 1901, II, p. 224. — M. Neveu-Lemaire, Sur la classificatiou des Gulicides. C. R. Soc. debloL, 29 novembre 1902, p. 1329-1332. Diagnose de Meigen : « Antennae porrectae, filiformes, i4-articu- latne ; maris plumosae, feminae pilosae. Prohoscis porrecta, lonfiitudinc thoracis. Palpi brevissimi. Alae squamatae, incumhentes. » Palpes maxillaires très petits, beaucoup plus courts que la trompe dans les deux sexes et formés de deux articles. Antennes à peu près de la longueur de la trompe et à quatorze articles, plumeuses chez le cf , avec des poils chez la 2- Première cellule sub-marginale de l'aile généralement plus lon- gue et plus étroite que la deuxième cellule postérieure ; nervure transverse postérieure ^^ ^ plus près de la base de l'aile que la transverse V moyenne. Écailles des ailes comme chez les „. ,, • .,, , / I-ig. H. —Ecailles de Culex{i\g. 11). l'aile d'.lède... Les œufs, les larves et les nymphes sont peu connus. Osten-Sacken dit toutefois que les larves d'Aëdes ont une certaine ressemblance avec celles des C'u/ea? et qu'elles possèdent un tube respiratoire. Quelques auteurs prétendent que ces Moustiques ne s'attaquent ni à l'Homme ni aux animaux, en Europe tout au moins, d'autres atfirmeut que certaines espèces sont parfaitement capables de piquer. Espèce type : Aëdcs cinereus Meigen 1818. Observations sur le genre Aèdes. Le genre Ai'des comprenait primitivement tous les Moustiques, dont les palpes maxillaires étaient beaucoup plus courts que la trompe dans les deux sexes. Arribalzaga en détacha d'abord le genre Uranotxnia, puis Williston le genre Hsemagogus et enfin Theobald les genres Aëdëomyia et Wyëomyia. Actuellement ce genre renferme exclusivement les espèces, dont les palpes maxillaires ne présentent que deux articles. 222 M. iNEVEU-LKMAIRE 2. — Aëdëomyia Theobald 1901. (de àrjOYjÇ, déplaisant et [xma, Mouche.) F.-V. Thkobald, /owrn. of Trop. Med., July 15 .h. 1901, p. 229- 235; A. Monograph of the Culicitlae of the World, London, 1901, II, p. 218. — M. Neveu-Lemaire, Sur la classification des Culicides. C. R. Soc. de bioL, 29 novembre 1902. p. 1329-1332. Diagnose de Theobald : « Tète revêtue d'écaillés droites, étroites, en Jorme d'éventail, clypeus présentant des écailles ; palpes courts dans les deux sexes et portant des écailles ; antennes à quatorze articles chez la $, l'article basai présentant des écailles; chez le °^, D'après les caractères de l'axe, car les polypes des Stichopathes n'ont pas encore été décrits avec précision, cette espèce paraît se rapprocher de Stichopathes occidentalis Gray-Brook ; mais les épines de cette dernière sont disposées moins régulièrement, et ne se distribuent pas aussi bien selon l'arrangement en quinconce. Cette espèce a été recueillie en deux localités ; dans les parages de Madère (St. 806, par 1425 mètres; St. 1236, par 1500 mètres), et dans ceux du Maroc (St. 1116, par 2165 mètres). Stichopathes dissimilis nov. sp. Axe colonial sensiblement de même forme et de même allure générale que dans l'espèce précédente. Epines fortes et grandes, poin- tant au travers des tissus mous des polypes (contractés), mesurant de 250 à 400 \i. de hauteur, disposées assez irrégulièrement sur cinq ou six rangées longitudinales, coniques, perpendiculaires à la tige axiale. — Polypes de deux sortes, différentes par les dimensions, alternant régulièrement de telle manière que chaque gros polype soit placé entre deux petits et chaque petit entre deux gros. Les dimensions des petits polypes égalent environ la moitié de celles des gros. Ceux-ci sont volumineux ; ils forment sur l'axe des zones épaissies bien visibles. Leurs six tentacules sont larges, saillants et groupés en trois paires comme ceux des Parantipathes; les médians mesurent environ l'°'n,25 de longueur moyenne et les latéraux 0™™80. En certains points de la tige axiale, notamment dans sa partie supérieure, les petits polypes n'existent point, mais les gros conservent entre eux une dislance intertentaculaire presque égale à celle qu'ils auraient si les petits étaient présents ; cette distance mesure 4"^'» en moyenne. Ailleurs, la distance intertentaculaire, NOTICE PRÉLIMINAIRE SUR LES ANTIPATHAIRES 231 d'un gros polype à chacun des petits qui le suivent et le précèdent, compte en moyenne â'""» à 3^^. Cette espèce rappelle, d'après sa tige axiale, Cinipathes fUiformis Gray {Ann. and Mag. of Nat. Hist., 1868), que G, Brook [loc.cit.], après avoir étudié les échaatillons du Bristish Muséum, place dans le genre Stichopathes ; seulement les polypes n'eu sont pas connus. Les épines, dans les deux cas, se resemblent par leur grande taille. Mais celles de Stichopathes dissimilis soot franchement coniques et plus espacées que celles de Stichopathes fiUformis ; en outre, elles ne montrent aucune disposition spiralaire. Les échantillons connus de Stichopathcii fUiformis viennent de l'Australie et de Sainte- Hélène. Cette espèce a été recueillie dans les parages de Madère (St. 806, 1.425 mètres). Stichopathes Richardi nov, sp. Axe relativement court et épais, mesurant, sur les beaux échan- tillons, 0^40 de longueur sur l^-nSà li""^75 de plus grand diamètre; base empâtée, couvertes de petites granulations, semblables à des épines minuscules. Epiues assez fortes, couiques, souvent mousses au sommet, mesurant 200 à 300 u. de hauteur, disposées en quin- conce avec assez de régularité, sur 7 à 8 rangées longitudinales. Polypes gros et courts, pressés les uns contre les autres, revotant (contractés) la tige d'un étui continu et offrant presque partout le même diamètre, sans épaississements au niveau des insertions des tentacules médians. Quelques polypes sont plus petits que les autres ; mais, moins nombreux que dans l'espèce précédente, tantôt ils manquent par places, tantôt ils alternent avec les gros, tantôt ils se suivent par groupes de trois ou de quatre ; du reste, les différences de taille sont moindres que dans l'espèce précédente. Les tentacules sont caractéristiques : longs et étroits, ils se groupent également autour de la bouche et ne s'assemblent point en trois paires équidistantes. Les tentacules médians mesurent en moyenne 2">™25 de longueur, les latéraux lmm5. La distance intertentaculaire compte en moyenne lm"5. Cette espèce se rapprocherait, par les caractères de la tige (car ce sont les seuls que les auteurs aient mentionné au sujet des Sticho- pathes), de deux autres espèces du genre : Stichopathes echinulata Brook, et Stichopathes gracilis Gray. — Stichopathes Richardi diffère cependant de la première (Brook, lot. cit.) par ses épines moins pointues, moins serrées, moins aplaties et nullement couchées vers le haut delà tige. Stichopathes echinulata vient de l'île Maurice. — 232 L. ROULE Stichopathes gracilis Gray (Anîipathes gracilis Gray in Proc. Zool. Soc. London, 1857; Stichopathes gracilis Brook, loc. aL) habite la zone littorale de l'île Madère où Johnson la signale (Proc. Zool. Soc. Lon- don, 1899). L'absence des polypes rend l'identification impossible en sus des quelques différences que l'on peut relever dans la distribution des épines. Elle l'est d'autant plus, que Brook (loc. cit.) incline à grouper en une même espèce Antipathes gracilis Gray et Antipathes setacea du même auteur, alors que Jonhson (loc. cit.) les distingue soigneusement. Or, tous les deux s'appuient, pour ce faire, sur les seuls caractères de l'axe et des épines. Ces caractères sont trop insignifiants et trop variables pour permettre de décider. Cette espèce a été recueillie dans les grands fonds au large de Madère (St. 203, par 1557 mètres ; St. 1236, par 1500 mètres). Stichopathes abyssicola nov. sp. Axe colonial court et grêle, comparable à une tige mince, souple, flexueuse, courbée en divers sens ; sa longueur moyenne ne dépasse guère 12 à 25 centimètres ; son diamètre varie de 0'^™,4 à 0'"™,75. Epines grandes et fortes relativement à la tige, mesurant 200 à 250 [x de hauteur, aplaties et assez distantes, inclinées vers le haut de la tige, disposées sans aucun arrangement spiralaire ni quinconcial, sur quatre à cinq rangées longitudinales.— Polypes petits, délicats, distants, à peine visibles (contractés). Tentacules longs et étroits, également groupés autour de la bouche comme dans l'espèce précédente ; les tentacules médians mesurent en moyenne 0"''",8 à à 1"™ de longueur et les latéraux 0°a°»,5à 0™™,6. La distance inter- tentaculaire moyenne mesure 2"^'", 5- Cette espèce rappelle encore Stichopathes filiformis Gray (Cirri- pathes filiformis Gray dans Ann. and Mag ofNal, Hist. 1868; Stichopathes filiformis Brook loc. cit.), dont les échantillons proviennent d'Aus- tralie et de Saiûte-Hélène (zone littorale). Toutes deuxse ressemblent par leur allure grêle et menue , et par leurs fortes épines ; l'absence de documents sur les polypes de Stichopathes filiformis empêche d'aller plus loin. Cependant, je n'ai point rencontré sur mes échantillons une disposition spiralaire des épines aussi nettes que chez Stichopathes filiformis. Aussi, et tout au moins de façon provisoire, jusqu'au moment où les polypes de ce dernier seront décrits, faut-il distinguer entre ces deux types. De nombreux échantillons de cette espèce ont été recueillis, la plupart à des profondeurs considérables, les uns au large de Madère (St. 1236, par 1500 mètres), les autres dans les parages des côtes du Maroc (St. 84, par 1674 mètres ; St. 116, par 2165 mètres). NOTICE PRÉLIMINAIRE SUR LES ANTIPATHAIRES 233 Antipathes ^nea von Koch. Litlwphytes n^ 9. Marsigli ; Histoire physique de la mer, 1725. Antipathes dichotoma. Pallas ; Elenchus Zoophytorum, 1766. Antipathes scoparia. Lamarck ; Histoire naturelle des animaux sans vertèbres; 1816. Antipathes mediterranea. Brook ; Report of Challenger, XXXII, Antipatharia, 1889. Antipathes Ainea. Von Koch; Mittheilungen... Zoolog. Station... Neapel, 1889. La synonymie de cette espèce est des plus confuses. Pallas, après Marsigli, la nomme le premier. Ensuite Lamarck donne un nouveau nom d'espèce à l'une de ses variétés. Dana, en 1846 (Report on Zooph.), rapporte Antipathes scoparia Lam. à Antipathes vir g ataEsper, qui est autre chose. Brook (loc. cit.) ?i(\met Antipathes dichomata Pall, mais en surplus une espèce nouvelle, Antipathes mediterranea, pour l'une de ses variétés. Toutes ces descriptions, sauf celles de Brook, sont données d'après l'axe colonial seul, les polypes n'étant point mentionnés. Dans la réalité, ces diverses formes me paraissent composer une même espèce, que seul Koch a complètement décrite. En bonne justice, et malgré la louable modestie de cet auteur, malgré ses scrupules, c'est le nom créé par lui qui doit prévaloir. Cette espèce est très polymorphe. Les variations n'atteignent point les polypes ; il suffit de comparer à cet égard les descriptions de Brook à celles de Koch, les exemplaires envoyés par la station de Naples à ceux du Prince de Monaco, pour s'en convaincre. Elles portent seulement sur la forme de la colonie, les longueurs relatives des branches, le nombre des rameaux et les dimensions des épines. Dans une même colonie, pour peu qu'elle soit de forte taille, ces qualités varient d'un point à un autre, dans les liuiites où les auteurs en tiennent compte pour créer leurs espèces. Aussi ne peut-on leur accorder aucune importance dans la systématique. Cette espèce appartient aux zones littorale et sub-littorale. L'échantillon recueilli par le Prince de Monaco mesure un peu plus d'un mètre de hauteur. Il fut pris dans les eaux espagnoles, au large du Ferrol (St. 60, par 300 mètres). Antipathes viminalis nov. sp. Axe colonial rameux, de dimensions médiocres, mesurant de 16 à 32 centimètres de hauteur; la plus longue branche atteint 28 centimètres, et 3 centimètres la plus courte ; le diamètre de la tige et celui des principales branches varie de 0'"'",60 à 1™™,25. Les branches, placées dans un môme plan, peu nombreuses, souvent indivises, sontaussi longues et aussi larges que la tige même. Leurs insertions sur la tige alternent; elles se disposent à des distances variables, tantôt proches des unes des autres, tantôt fort éloignées. Les branches et la tige sont également très souples. Les épines sont assez courtes, coniques ; elles mesurent en moyenne 150 à 200 [x de longueur. Groupées en quinconce avec assez de régularité, elles s'assemblent sur cinq à six rangées longitudinales. — Les polypes sont petits, espacés, très contractés. Leurs six tentacules .se groupent également autour de la bouche ; les tentacules médians mesurent 1™™,5 à 2^^ de longueur, les latéraux 0™fn,75 à Imm; leurs bases sont larges. Parfois les tentacules latéraux et médians du même côté placent leurs bases d'insertion sur une même ligne, de manière à les mettre sur une seule rangée. La distance interten- taculaire mesure en moyenne 3""™. Cette espèce se rapproche sensiblement d'Antipathes .Enea Koch, mais elle eu diffère par plusieurs points. On ne peut ainsi les con- fondre. Les branches d' A ntipathes viininalis sont, toutes proportions gardées, moins nombreuses et plus longues que celles d'Antipathes /Enea ; ses épines sont plus longues, ses polypes plus espacés, car ceux d'Antipatlu's .Enea se serrent les uns contre les autres; enfin, toutes choses égales d'ailleurs, ses polypes sont plus petits que ceux d'Antipathes .Enea, souvent des deux tiers, parfois de la moitié, et leurs tentacules sont plus courts. On pourrait encore la comparer à Antipathes gracilia Koch (loc. cit.) des fonds corail igènes de la baie de Naples. Antipathes viminalis diffère de cette dernière par ses branches moins nombreuses et surtout beaucoup plus longues, par ses épines plus abondantes, enfin par ses polypes un peu plus gros. Le nom donné par Koch à sa nouvelle espèce est fautif, car Gray l'avait déjà employé {Antipathes gracilis Gray, Ann. and Mag. of Nat. Hist. 1860). Or, l'espèce de Gray a précisément été retrouvée par Johnson (loc. cit.) dans la zone littorale de l'île Madère. Les branches de cet Antipathes gracilis sont plus fines, plus nombreuses, plus rameuses, que celles d'Antipathes viminaiis ; en outre, ses polypes sont plus petits et plus serrés. Deux échantillons recueillis dans les grands fonds, au large des côtesdu Maroc (St. 1116, par 2165 mètres). Tylopathes Grayi nov. sp. La collection ne renferme que des fragments d'axe coloniaux, NOTICE PRÉLIMINAIRE SUR LES ANTIPÀTHAIRES 235 dont quelques uns portent des polypes; il est impossible de recons- tituer, d'après eux, la colonie entière. Branches assez nombreuses, étalées en divers sens, bien qu'il y ait une sorte de plan principal, où se trouvent la plupart des rameaux. Ceux-ci sont minces et grêles, relativement longs, assez rigides ; leur longueur varie de 3 à 0 centimètres, leur largeur égale 0'"m,50 ; les distances entre leurs bases d'insertions varient de 1 à 2 centimètres. Les échantil- lons portent trois ordres successifs de rameaux. Epines nombreuses et assez fortes vu l'exiguïté de l'axe, car elles ont 40 à 80 ix de hauteur; elles se disposent avec régularité sur 5 à 6 rangées longitudinales. Polypes de petite taille, distants, séparés, ainsi qu'il est de règle chez les Tylopathes, par des aires de cœnenchyme qui dépassent parfois, et égalent souvent, leur propre diamètre. La petitesse de l'axe permet à chacun d'eux, même contracté, de faire une saillie assez forte. Tentacules médians plus longs, mais plus grêles que les latéraux, ils mesurent environ 1 millimètre de longueur et les latéraux O^-^jTO à O^^SÛ. Parfois, entre ces polypes se trouvent d'autres zooïdes plus petits, qui alternent avec eux et ne se laissent souvent discerner, tellement ils sont menus à l'état de contraction, que par leurs tentacules. Ils manquent assez souvent ; en ce cas, leur place reste libre, occupée par le cœnen- chyme, car les gros polypes ne se rapprochent pas davantage. Leur dimension moyenne égale le tiers ou le quart de celle de ces derniers. La distance intertentaculaire des gros polypes mesure environ 2 millimètres. Cette espèce ressemble de près à la suivante. Elle se sépare d'elle, notamment, par ses branches beaucoup plus courtes, plus diver- gente^et moins serrées, formant une colonie plus étalée, et par la présence de petits polypes complémentaires. Tylopathes Grayi est presque une espèce côtière (St. 882, détroit de Pico-Fayal, par 98 mètres). Tylopathes atlantica nov. sp. Axe colonial rameux, ayant l'allure d'un buisson aux branches grêles et souples ; la plupart des rameaux sont placés dans un même plan, mais non tous. Les branches ne naissent pas eu alternance; souvent deux, trois ou quatre, se suivent et s'attachent du même côté; après quoi viennent, sur le côté opposé, un autre rameau, ou une autre série de rameaux. La ramification, sur l'échantillon, est poussée jusqu au 4^ ordre. La plus longue branche mesure 21 cen- timètres de longueur, sur 0™nn70 de diamètre à sa base. Les épines 236 L, ROULE sont courtes, larges et quelque peu aplaties, lisses, disposées eu quinconce avec assez de régularité. Les plus fines branches en portent 4 rangées longitudinales, les moyennes 6, et les plus grosses 8 ou 9 ; souvent les épines des grosses branches sont courtes, mousses, et manquent parfois. La longueur moyenne des épines varie de 60 à 80 a. Polypes fort petits, délicats, très espacés. Leurs tentacules, gros et courts, sont presque égaux; les médians dépassent de peu les latéraux. La longueur moyenne des tentacules médians est de Ot^niSO. La distance intertentaculaire moyenne mesure environ 2^^ à 2^^5. Cette espèce est suffisamment caractérisée par son port, son mode de ramification, la petitesse et l'écartement de ses polypes. L'échantillon a été recueilli dans les parages de Ténérife (St. 1121; par 540 mètres). Leiopathes Grimaldii nov. sp. Axe colonial très rameux, capable d'acquérir des dimensions assez fortes; le plus gros des échantillons mesure 40 centimètres de hauteur. Les branches principales sont dénudées, privées de cœnen- chyme et de polypes; les petites branches terminales sont complètes. Tous ces rameaux sout'placés dans un même plan. Les insertions des grosses branches alternent ; celles des petites, placées du même côté, donnent à l'ensemble un aspect qui rappelle celui des inflorescences scorpioïdes de certaines plantes. La tige principale mesure of"™ de diamètre; les branches principales ont 2 et S"*"; lesramuscules ter- minaux comptent seulement 0mm,20 à 0°i°i,30. Seuls, ces derniers portent de minimes spinules fort espacées, parfois à peine discer- nables : partout ailleurs. Taxe est lisse. — Les polypes sont petits, souvent assez distants, bien distincts les uns des autres. Leur! ten- tacules ont une forme presque cylindrique ; les médians mesurent en moyenne O^^^SO de longueur, les latéraux 0™^oO. La distance inter- tentaculaire est des plus variables ; parfois les polypes se touchent presque : ailleurs, ils sont séparés par une distance égale à une fois, une fois et demie, et même deux fois, la longueur d'un tentacule médian. L'espèce typique du genre Leiopathes est Leiopathes ylaberrima Esper. Leiopathes Grimaldi, bien que lui ressemblant, se distingue d'elle par des caractères suffisants ; sa ramification est plus serrée et plus toutïue : elle se fait dans un seul plan, non dans plusieurs ; ses rameaux sont plus proches les uns des autres, plus courts, plus rigides ; ses polypes sont de moitié plus petits et moins serrés. J'ai établi cette comparaison d'après les échantillons de Leiopathes NOTICE PRÉLIMINAIRE SLR LES AMIPATHAIRES 237 glaberrima envoyés par la Station de Naples. — Johnson (loc. cit.) décrit une espèce nouvelle, prise à Madère ; il la nomme Leiopathes expansa. Les caractères invoqués par lui, et surtout l'orientation des rameaux suivant un même plan, m'auraient permis de rapporter à son espèce les exemplaires que j'ai étudiés, si sa description en était plus complète. L'auteur ne parle des polypes que pour signaler leur teinte rouge pâle et leur possession de six tentacules. Comme les caractères principaux de Leiopathes Grimatdii tiennent, non seulement aux dispositions mutuelles des branches, mais encore à la ramification serrée, courte, et à la petitesse des polypes : comme rien de pareil n'est mentionné par Johnson, il est impossible d'identifier ces deux types avec certitude, bien que provenant de la même région. D'après la description donnée par Johnson, on ne peut guère décider si Leiopathes expansa constitue vraiment une espèce nouvelle, ou si elle se rapporte soit à Leiopathes Grimaldii, soit à Leiopathes glaberrima. Cette espèce est représentée par plusieurs échantillons, pris au large de Madère et du Maroc (St. 837, par 880 mètres; St. 846, par 1638 mètres; St. 1116, par 2165 mètres). Parantipathes larix Esper. A ntipa t hes larix Esper ; die Pflanzenthiere, 1788. Parantipathes larix Brook ; Report of... Challenger; XXXII, Anti- patharia, 1889. Les exemplaires, conformes au type, ont été pris dans plusieurs localités : St. 60, par 388 mètres, au large du Ferrol; St. 47o, par 552 mètres, sur les côtes du Maroc; St. 886, par 599 mètres, près de Terceira; St. 1199, par 875 mètres, aux îles du Cap Vert. Bathypathes patula Brook. Bathypathes patula Brook ; Report of. . . Challenger, vol. XXXII, Antipatharia, 1889. Les échantillons ressemblent au type créé par Brook, et n'en diffèrent que par quelques détails peu importants de la ramification. L'un a été recueilli dans les parages des Açores (St. 213, par 1384 mètres), l'autre sur les côtes du Maroc (St. 1116, par 2165 m.). III Les échantillons privés de polypes, et dont on ne peut déterminer le genre avec précision, appartiennent à quatre espèces : deux 238 L. ROULE d'Antipathes, uue d'AntipatheUa, et une de Tylopathes. Ces attri- butions génériques ne sont données ici que sous réserves, d'après les caractères tirés de l'axe colonial, et des comparaisons avec des espèces connues; aussi sont-elles forcément imparfaites. Antipathes? virgata Esper. Antipathes virçjnta Esper; Die Pflanzenthiere, 1788. Les exemplaires ont été recueillis dans plusieurs stations, aux îles Açores. Madère, du Cap Vert : St. 213. par 1384 mètres; St. 833, par 1230 mètres; St. 838, par 880 mètres; St. 1190, par 628 mètres. Antipathes? squamosa W. Koch. Antipathes squamosa W. Koch, Neue Anthozoen an der Golf von Guinea, 1886. Nombreux échantillons provenant des mêmes parages que ceux de la précédente espèce, et pris à des profondeurs fort dissem- blables : St. 1121, par 540 mètres; St. 1152, par 52 mètres; St. 1223, par 1642 mètres ; St. 1236, par 1500 mètres. Antipathella? assimilis Brook. Antipathella assimilis Brook; Report of... Challenger; XXXII, Antipatharia, 1889. L'unique échantillon, privé de toute indication de provenance, se rapporte, autant qu'il m'est permis d'en juger, à l'espèce décrite par Brook. Tylopathes ? hirta nov. sp. L'échantillon, entier, porte des polypes; mais ceux-ci, presque détruits, ne peuvent donner aucune indication. Pourtant, les probabilités les plus grandes sont en faveur du genre Tylopathes. L'axe colonial est dense, serré, épineux. Les branches se rami- lient suivant une dichotomie régulière; elles sont relativement résistantes et peu flexibles, étalées dans un seul plan. Quelques unes s'anastomosent, mais elles sont rares. L'échantillon mesure 21 centimètres de hauteur sur 17 de largeur ; le diamètre de la tige principale est de 2 millimètres à sa base ; celui des bases de la plupart des branches varie de 1""' à 1""°\50. Les branches sont opposées, disposées par paires qui font avec la tige des angles aigus égaux ; elles se suivent à distances presque égales qui mesu- rent 7 à S millimètres ; en revanche, elles diffèrent de longueur, de 4 5 à 14-15 centimètres. Ces branches portent de petites pinnules, NOTICE PRÉLIMINAIRE SUR LES ANTIPATH AIRES 2.39 opposées et disposées par paires, se suivant à 6 ou 8 millimètres de distance et mesurant 7 à 10 millimètres de longueur sur 0""",r)0 à l millimètre de diamètre à leurs bases. Chaque pinnule, semblable à un aiguillon presque rigide, se termine brusquement en pointe. Les épines sont remarquables par leur grand nombre et par leur extrême petitesse; elles couvrent les pinnules, sauf à la pointe ; elles existent aussi sur les branches, mais émoussées, comparables à de menues granulations , et parfois effacées complètement. Cette espèce se rapproche beaucoup de Tylopathes crispa Brook (loc. cit.). Elle s'en écarte par la régularité complète de sa ramifica- tion, chose que Tylopathes crispa ne montre point, et par le nombre plus grand comme par la petitesse excessive de ses épines. L'échantillon provient de Flores, près de Santa-Cruz (St. 703, par 1360 mètres de profondeur). 240 QUATRIÈME CONTRIBUTION A LA CONNAISSANCE DES MUTILLIDES DE L'AUSTRALIE ERNEST ANDRE. Grâce à l'activité et à l'extrême obligeance de M. Gilbert Turner, que je ne puis trop remercier de sa générosité à mon égard, je me trouve en mesure de faire connaître un certain nombre d'espèces et variétés nouvelles de Mutillides d'Australie, ou de mieux préciser les caractères de quelques-unes de celles déjà décrites. Les maté- riaux qui servent de base au présent travail proviennent, comme ceux mis en œuvre dans mes trois premiers mémoires (1), de l'Etat du Queensland ; mais taudis que les précédents avaient été recueillis aux environs de Mackay, ceux dont j'ai à m'occuperici ont été récoltés au voisinage du bourg de Cairns, ou plus exactement dans les environs de Kuranda, station située à 15 milles de Cairns et à une altitude d'à peu près 1100 pieds au-dessus du niveau de la mer. Comme on devait s'y attendre, en raison de la proximité relative de ces deux régions, beaucoup d'espèces de Mackay ont été retrou- vées à Kuranda, mais d'autres, en assez grand nombre, sont spéci- fiquement distinctes, et quelques-unes constituent des variétés plus ou moins caractérisées. M. G. TuRNER a remarqué que ses chasses les plus abondantes avaient lieu dans les endroits occupés par de nombreux nids de Fourmis, et cette constatation l'a amené à supposer, sans qu'il ait pu en acquérir la preuve absolue, que certaines espèces de Mutilles pourraient être parasites des Fourmis. Cette conjecture demanderait à être confirmée, mais elle n'a rien qui puisse la faire rejeter à priori, puisque nous savons que les Mutilles sont parasites des Hyménoptères nidifiants et, à ce titre, leur présence chez les Four- mis ne constituerait pas un fait anormal, bien qu'aucune observa- tion directe ne nous autorise encore à le considérer comme acquis à la science. Ce qui pourrait, dans une certaine mesure, corroborer (1) E. André, Mutillides d'Australie nouvelles ou imparfaitement connues. Mém. Soc. Zool. de F/"., VIII, 1895, p. 475-517. — Id., Contribution à la connaissance des Mutillides de l'Australie. Loc. cit., XI, 1898. p. 256-308.— Id., Nouvelle contribution à la connaissance des Mutillides de l'Australie. Loc. cit., XIV, 1901, p. 467-513. CONTRIBUTION A LA CONNAISSANCE DES MUTILLIDES DE l'aUSTRALIE 241 l'opinion de M. G. Turner à cet égard, c'est le remarquable mimé- tisme offert par ÏEphutomorpha mernnoptoides André et dont j'ai parlé dans un précédent travail, en décrivant cette Mutille alors inédite (1). M. G. Turner m'avait signalé la ressemblance frappante qu'elle présente, à l'état vivant, avec le Memnoplm hirsutus Mayr, Fourmi appartenant à la tribu des Cryptocérides et habitant les mêmes parages. Cette ressemblance était si trompeuse qu'elle ren- dait difTiciie la distinction au premier coup d'oeil des deux Insectes, qui n'étaient guère reconnaissables qu'à leur allure sensiblement différente. M. Turner me dit, dans une nouvelle lettre, n'avoir jamais rencontré la Mutille que là où se trouvait aussi le Merano- plus, ce qui le conduit à penser que la Mutille pourrait être parasite de la Fourmi dont elle emprunte la physionomie. Pour éviter de répéter inutilement les indications de patrie, disons, une fois pour toutes, que, sauf énonciation contraire, les espèces décrites ou mentionnées dans ce mémoire ont été recueillies par M. G. Turner aux environs de Kuranda, prèsCairns (Queen- sland) et font partie de ma collection. 1. Odontomutilla australica nov.sp. 9 Nigra, pronoto utrinque rufo-maculato ; abdominis segmento secundo macula média basait, segmento tertio vitta interrupta, flaw- sericeis^ ornatis. Caput subquadratum, genis inlerioribus obtuse den- talis. Thorax subtrapezoidalis, postice inermis. Abdomen sessile, ovatum, segmento primo breci, disciformi, pygidio scabro, sine area distincta. Long. 12- 13 mill. o^ Nigra, pronoto, mcsonoto, scutello tegulisque ferrugineis ; abdo- minis segmento tertio vitta late interrupta, albo sericea, ornato. Caput transversum, thorace angustius, oculis profonde emarginatis. Thorax subquadratus, scutello piano, postice sinuato et hidentato. Abdomen subsessile, primo segmento disciformi. Alae violacese, cellula radiali magna, truncata, cellulis cubitalibus duabus, nervo récurrente unico. Long, ii-15 mill. 9 Entièrement noire ou d'un noir brun, avec les pattes et le funicule des antennes d'un brun rougeàtre ; pronotum orné, de chaque côté, d'une tache irrégulière mais bien distincte, d'un rouge ferrugineux; second segment de l'abdomen paré, au milieu de son bord antérieur, d'une tache ovalaire, longitudinale, de pubescence d'un jaunâtre soyeux ; troisième segment muni d'une large bande (1) Mém. soc. Zool. de Fr., XIV, 1902, p. 484. Mém. Soc. Zool. de Fr., 1902. .kv. — 16. 242 E. ANDRÉ de semblable pubescence, fortement interrompue eu son milieu ; les segments ventraux deux et suivants ciliés de poils jaunâtres à leur bord apical. Tout le corps éparsement hérissé de poils brunâtres ou jaunâtres. Pattes avec les tibias intermédiaires et postérieurs armés de fortes épines ; éperons d'un testacé pâle. Tête subquadrangulaire, faiblement plus large que longue, un peu plus étroite en avant et sensiblement moins large que le tho- rax ; elle est visiblement prolongée derrière les yeux, avec le bord postérieur presque rectiligne et les angles bien marqués; joues net- tement carénées en avant, se terminant en dessous par une forte dent mousse; épislonie étroit, trapézoïdal, faiblement saillant ; arêtes frontales courtes, élevées, contournées, n'atteignant pas le bord antérieur des yeux qui sont grands, ovales et situés vers le milieu des bords latéraux. Mandibules simples, acumiuéesau som- met ; antennes robustes, funicule court, large en son milieu, atténué au sommet, ses articles intermédiaires transversaux, le second article plus étroit mais à peine plus long que le troisième. Thorax subtrapézoïdal, rétréci en arrière, son bord antérieur recti- ligne, avec les angles un peu dentiformes, ses bords latéraux fai- blement crénelés ou tubercules, il est fortement et longitudinale- ment ridé-réticulé en dessus, beaucoup plus faiblement sculpté sur les flancs, avec la concavité des mésopleures lisse et luisante ; mé- tathorax obliquement tronqué en arrière, mais sans limite distincte entre sa face dorsale et sa face postérieure qui est plane et sans dents latérales. Abdomen sessile ; premier segment court, large, disciforme, avec la face antérieure luisante et éparsement ponctuée; sa partie annulaire est rugueuse, plus fortement et plus densément ponctuée ; second segment assez densément ponctué-fossulé en dessus, plus éparsement en dessous ; le dernier segment est con- vexe, rugueux et hérissé de petites aspérités comme les dents d'une râpe. cf Corps noir, sauf le pronotum, le mesonotum, le scutellum, le postcutellum, les écaillettes et partie des mésopleures qui sont fer- rugineux ; antennes et pattes noires ; troisième segment de l'abdo- men orné à son bord postérieur d'une bande très largement inter- rompue, de pubescence d'un blanc d'argent. Dessus du corps hérissé de poils noirs ou d'un brun noir, ceux du devant de la tête, du dessous du corps et des pattes blancs ou d'un blanc jaunâtre ; éperons blanchâtres. Tète transverse, plus étroite que le thorax, sensiblement prolon- gée derrière les yeux, avec le bord postérieur faiblement arqué et CONTRIBUTION A LA CONNAISSANCE DES MUTILLIDES DE l'aUSTRAUE 243 les angles distincts, quoique arrondis ; front et vertex fortement et densément ridés-réticulés; joues carénées ^en avaut, munies en dessous d'une dent plus aiguë que chez la femelle ; épistome et arêtes frontales comme chez l'autre sexe; yeux grands, profondé- ment échancrés en dedans ; ocelles petits et très groupés ; mandi- bules inermes en dehors ; antennes assez allongées, tous les articles du funicule beaucoup plus longs que larges, le second article distinctement plus court que le troisième. Thorax assez court, quadrangulaire, aussi large en arrière qu'en avant ; pronotum rectiligne à son bord antérieur, faiblement rétréci en avant avec les angles bien marqués, largement et un peu anguleusement échancré à son bord postérieur ; sa surface est fortement ponctuée- réticulée ainsi que celle du mesonotumetduscutellum ; mesonotum sans sillons parapsidaux ; écaillettes grandes, luisantes, éparsement ponctuées, relevées en arrière ; scutellum plan, en rectangle transverse, avec le bord postérieur sinué et les angles prolongés en une forte dent mousse ; métathorax réticulé avec le fond des mailles plan et très luisant ; il s'incline en déclivité arrondie et est armé de chaque côté, au point de jonction de sa face supérieure et de sa face postérieure, d'une forte dent triangulaire, comprimée et à peine émoussée. Abdomen subsessile; premier segment court, disciforme, luisant et très éparsement ponctué en avant, plus forte- ment ponctué sur sa périphérie et un peu plus étroit que le segment suivant qui est fortement et assez densément ponctué, sauf sur le disque où il est lisse et luisant ; les segments suivants sont finement et éparsement ponctués. Ailes obscures, violettes; stigma petit et peu distinct; cellule radiale grande, nettement tronquée au sommet; deux cellules cubitales fermées et une seule nervure récurrente reçue vers le milieu de la seconde cellule cubi- tale. Tibias intermédiaires et postérieurs inermes sur leur tranche externe. Bien que les deux sexes de cette espèce n'aient pas été capturés in copula, leur assimilation ne fait aucun doute par suite de l'iden- tité de leurs principaux caractères. C'est le premier représentant du genre Oclontomutilla rencontré en Australie. Les espèces connues jusqu'à ce jour provenaient d'Afrique, d'Asie ou de la Malaisie, mais aucune n'avait été rapportée du continent australien. 244 2. Ephutomorpha (1) addenda André. Mutilla addenda André, Mém. Soc. Zool. Fr., XIV, 1901, p. 474$. Var. RUFOciNCTA nov. var. Q. Le type de l'espèce a été décrit d'après un seul individu provenant de Mackay. D'autres exem- plaires recueillis à Cairns s'en distinguent par le bord postérieur du premier segment abdominal largement ferrugineux, cilié de poils dorés, et par les segments 3 à 5 plus ou moins teintés de ferrugineux ainsi que la totalité du pygidium. Les caractères de forme et de sculpture sont d'ailleurs exactement semblables à ceux de l'exemplaire typique, ce qui ne permet pas de confondre cette variété avec Vabjecta André, dont la rapproche son mode de colo- ration. Longueur : 4 à 6 mm. Var. FERRUGiNEiPES nov. var. 9 semblable à la variété précédente, mais les antennes et les pattes sont entièrement ferrugineuses ; le pygidium est tantôt brun, tantôt d'un rouge ferrugineux. Longueur : 5 à 10 mm. 3. Ephutomorpha Turneri André. Mutilla {Sphserophtalma) Turneri André, Mém. Soc. Zool. Fr. VIII, 1895, p. 506 9. Var. coNVERGENs nov. var. 9 Tout à fait semblable au type sous le rapport de la coloration générale et des caractères plastiques, mais l'abdomen est entièrement bleu et les bandes pubescentes du second segment, au lieu d'être à peu près parallèles et de se continuer séparément sur les segments suivants, convergent en se réunissant au sommet du second segment, pour se continuer en une bande médiane unique sur les segments suivants. Ces bandes sont d'ailleurs, comme chez les exemplaires typiques, formées de pubescence fine, éparse, peu distincte et disparaissant facilement. Longueur 5 à 7 mm. 4. — Ephutomorpha illustris nov. sp, 9 Caput nigrum vel obscure nigro-cyaneum, punctato-reticulatum, post oculos subito arcuatum, mandibidis, antennis pedibusque nigro- piceis, femoribus plus minusve cœrulescentibus , calcaribus albis. Thorax piriformis, ferrugineus, punctato - reticulalus . Abdomen ovatum, subpetiolatum, cyaneum, segmentorum 2-5 margine apicali macula (1) Le genre Ephutomorpha a été créé par moi dans le volume des MuliUidae faisant partie du « Gênera Insectorum » de Wytsman CONTRIBUTION A LA CONNAISSANCE DES MUTILLIDES DE l'aUSTRALIE 245 média, tramversa, flavo-sericea ornato ; segmento sexto area pygidiaii plana, longitudinaliter striata, prsedito. Long. 5 à 8 mm. Tête noire ou d'un bleu-noir très foncé, avec les tubercules antennaires, le sommet du scape et le milieu des mandibules d'un rouge ferrugineux sombre ; antennes et pattes noires ou d'un brun noir, hanches ferrugineuses, cuisses plus ou moins bleuâtres. Thorax ferrugineux ; abdomen bleu avec le dessous et parfois les côtés du premier segment ferrugineux ; le bord apical des segments 2 à 0 est orné d'une petite tache médiane, transverse, de pubescence blanchâtre, peu serrée, dont l'ensemble forme une bande longi- tudinale. Dessus du corps avec une pilosité noire, éparse ; le dessous, les côtés, ainsi que les pattes, hérissés de poils blancs ; éperons blancs. Tète subarrondie, à peu près aussi longue que large, à peine plus large que le thorax, densément ponctuée-réticulée ; elle est brus- quement et fortement arquée derrière les yeux, sans angles postérieurs ; tubercules antennaires luisants et arrondis ; arêtes frontales saillantes et prolongées jusqu'aux yeux ; second article du funicnle des antennes un peu plus long que le troisième. Thorax assez allongé, piriforme, faiblement rétréci en avant, beaucoup plus en arrière et contracté après son milieu, son bord antérieur faiblement arqué, avec les angles arrondis ; métathorax subtronqué, avec le sommet de la troncature arrondi et sans onglet scutellaire. Le thorax est grossièrement et densément ponctué- réticule en dessus et sur les côtés, avec la concavité des pleures lisse et très luisante. Abdomen ovale, subpétiolé ; premier segment beaucoup plus étroit que le suivant, un peu nodiforme, éparsement ponctué en dessus ; second segment luisant, assez fortement et densément ponctué en dessus, plus éparsement en dessous ; les suivants finement ponctués, le dernier muni d'une aire pygidiale plane, nettement et longitudinalement striée, lisse à son extrémité. Pattes avec les tibias intermédiaires et postérieurs armés d'épines disposées sur deux rangs. Par sa coloration générale et par la forme de son thorax, cette espèce ressemble beaucoup à Turneri André, mais elle s'en dis- tingue facilement par sa sculpture bien plus forte et par l'orne- mentation différente de son abdomen. Elle se rapproche davantage de Ixlabiiis André, dont elle reproduit tout à fait le mode de coloration, de sculpture et d'ornementation, mais la tête est beaucoup plus rétrécie et plus fortement arquée derrière les yeux, le thorax est plus étroit, plus allongé, plus piriforme, avec les 246 E. ANDRÉ aDgIes autérieurs plus etïacés, et le premier segment abdominal est plus étroit, ce qui rend l'abdomen plutôt subpétiolé que subsessile. 5. — EPHUTOMORPHA VIRIDI^NEA nOV. Sp. $ Viridi-œnea, tuberculis antennalibus, mandibulis, apice nigro excepto, pedibusque ferrugineis; antennis fuscis, calccmbus pallidis. Thorax longulus, piriformis, rude reticulato-punctatus. Abdomen elongato-ovaîum, subsessile, segmento primo parce (laro-ciliato, seg- menti secundi margine apicali macula magna, triangulari, flaw- sericea ornato ; segmento ultimo convexo, sine area pygidiali. Long. 8 mm. Tout le corps d'un vert bronzé assez foncé, avec les tubercules antennaires, les mandibules, à l'exception du sommet qui est noir, et les pattes ferrugineux ; éperons blanchâtres, antennes d'un brun rougeâtre. Premier segment de l'abdomen ferrugineux au sommet et en dessous, éparsement cilié à son bord postérieur de poils d'un blanc jaunâtre ; second segment orné, au milieu de son bord apical, d'une grande tache en triangle équilatéral, dont le sommet s'avance jusqu'au tiers du segment ; cette tache est formée de pubescence jaunâtre, soyeuse, peu serrée, et se relie par une frange très étroite au bord externe du segment. Dessus de la tête, du thorax et des derniers segments de l'abdomen éparsement hérissé de poils brunâtres, ceux des côtés et du dessous du corps blanchâtres; pattes avec des poils blancs assez épars. Tète à peu près aussi longue que large et un peu plus large que le thorax, faiblement prolongée derrière les yeux avec le bord postérieur peu arqué et les angles arrondis mais bien sensibles ; front et vertex densément et assez finement ponctués réticulés. Yeux grands, courtement elliptiques, assez convexes, munis de facettes distinctes et plus éloignés de l'articulation des mandibules que des angles postérieurs ; tubercules antennaires arrondis ; mandibules acuminées au sommet, inermes ; antennes assez courtes, avec les articles intermédiaires non ou à peine plus longs que larges ; second article du funicule environ une fois et demie aussi long que le troisième. Thorax allongé, subpiriforme, for- tement rétréci en arrière, son bord antérieur faiblement arqué, avec les angles etïacés ; metanotum en déclivité arrondie, non tronqué postérieurement, sans limite entre ses faces supérieure et postérieure. Le dos du thorax est grossièrement ponctué-réticule et presque ridé-réticulé ; la concavité des pleures est luisante et CONTRIBUTION A LA CONNAISSANCE DES MliriLLIDES DE i/aUSTRALIE 247 marquée de points épars. Abdomen subsessile ; premier segment à peu près aussi large en arrière que la base du suivant, non con- tracté à son articulation postérieure, peu densément ponctué en dessus, chargé eu dessous d'une carène peu saillante ; second segment assez superficiellement ridé-ponctué eu dessus, éparsement ponctué en dessous ; les segments suivants finement et éparse- ment ponctués ; dernier segment convexe, sans aire pygidiale. Pattes avec les tibias intermédiaires et postérieurs armés de quatre épines noirâtres. Un seul individu. Par sa forme et sa coloration, cette Mutille rappelle beaucoup la mctallica Sm., mais elle est plus petite, ses articles antennaires sont bien plus courts (chez mctallica ils sont tous beaucoup plus longs que larges), son abdomen est plus finement sculpté et plus sessile, le premier segment n'étant pas contracté en arrière, et ses pattes sont ferrugineuses et non bronzées. On ne peut la confondre avec (lustralis André dont la coloration est toute diffé- rente, qui a l'abdomen subpétiolé et le thorax d'une autre forme. 6, — Ephutomorpha bicolorata Sm. Mutilla bicolorata Fr. Smith, Descr. new Hym. Coll. Brit. Mus. 1879, p. 20G 9 . Mutilla fSpliœropthalma) bicolorata Ern. André, Mém. Soc. zool. Fr., VI U, 1895, p. 504 $. 9 Quand j'ai cru reconnaître l'espèce de Smith dans un exem- plaire que M. TuRNER m'avait envoyé de Mackay, je faisais remar- quer que cet Insecte ne concordait pas parfaitement avec la description originale, notamment en ce qui concernait la couleur de la t(^te et du thorax ([ui étaient plutôt bleus que verts. Un nouvel échantillon provenant de Cairns, qui appartieni évidemment à la même espèce, nous démontre que la /^/co/o?v;/«, comme beaucoup de ses congénères, est extrêmement variable sous le rapport de la coloration. Sa tète et son thorax sont d'un vert sombre, se rappro- chant en cela du type de Smith, mais l'abdomen est lui-même d'un vert bronzé, tant en dessus qu'en dessous, et ne présente pas la teinte pourprée indiquée par le premier auteur et qu'offrait aussi l'individu de .Mackay. Les caractères plastiques et morphologiques étant d'ailleurs identiques chez les deux échantillons que j'ai sous les yeux, leur assimilation ne peut laisser aucun doute. La taille du spécimen de Cairns et de li millimètres. E. ANDRE 7. — Ephutomorpha .émula André. Mutilla aemula Ern. André, Mém. Soc. Zool. Fr. XIV, 1901, p. 488 9. 9 Parmi quelques individus nouvellement reçus et dont la taille varie de 4à 6 mill., l'un deux porte sur le disque du thorax une grande tache quadrangulaire, d'un rouge sombre. C'est une variété, peut-être accidentelle, qu'il suffit de signaler, sans y attacher d'importance. 8. Ephutomorpha sanguineiceps André. Mutilla {Sphserophtalma) sanguineiceps Ern. André, Mém. Soc. Zool. Fr., VllI, 1895, p. 503 9. Mutilla sanguineiceps Ern. André, loc. cit. XI, 1898, p. 267 9. Var. TRisTiFicA nov. var. Entièrement noire ainsi que les antennes et les pattes. Les taches abdominales sont disposées comme chez le type, mais formées de pubescence un peu plus jaunâtre, et le premier segment porte deux taches de pubescence blanchâtre, bien distinctes, tandis qu'elles sont oblitérées chez les individus typiques, bien qu'on puisse en apercevoir quelques traces. La ponctuation de la tête, du thorax et du second segment abdominal semble un peu plus serrée, mais tous les autres caractères sont ceux de sanguineiceps. Longueur : 8 mm. Cette variété, dont je n'ai vu qu'un seul individu, est tellement distincte du type par sa coloration entièrement noire, qu'on pourrait la considérer comme constituant une espèce particulière, mais, sachant combien la couleur des téguments est peu constante chez les Mutilles, j'ai cru préférable de ne pas séparer ces deux formes entre lesquelles il doit exister des individus de transition que des recherches ultérieures nous feront probablement connaître. 9. Ephutomorpha morosa Westw. Mutilla morosa Westwood, Arcana Eut. II, 1843, p. 19, pi, LIV, fig. 1, &• Mutilla (Sphceropktalma) morosa Ern. André, Mém. Soc. Zool. Fr., VIII, 1895, p. 495 9 d^. Mutilla morosa Ern. André, loc. cit. XI, 1898, p. 261 9 d"- cT Un exemplaire du mâle offre un cas de rufinisme consistant eu ce fait que l'abdomen est éparsement revêtu de pubescence d'un CONTRIBUTFOX A LA CONNAISSANGK DES MUTILLIDES DE l'aUSÏRALIE 2i9 brun rougeàtre, mais c'est une particularité accidentelle qui a déjà été observée chez un certain nombre d'autres Mutillides. 10. — Ephutomorpha associata nov. sp. 9 Nigra, antcnnls nturo-bnmneis, pedibus farrugineU : ahdoimnis segmenti primi apice testaceo, segrnentis 2-5 macula média apicali, transversa, testacea, parce piibe flaoa vel aurea vestita, ornatis ; segmento secundo macula média basait aureo-sericea praedito. Caput post oculos distincte productum, leviter arcuatum. Thorax piriforinis, postice angustior, metanoto haud abrupte truncato. A bdomcn subsessile, ovatmn, area pygidiali longitudinaiitcr striata. Calcaria ferruginea. Long. 5 à8 mm,. Tête et thorax noirs ou d'un noir brun, tubercules antennaires, mandibules et antennes d'un brun noir ou d'un brun rougeàtre, pattes ferrugineuses ainsi que les éperons. Abdomen noir avec le bord postérieur du premier segment testacé, cilié de pubescence jaunâtre, et une tache transverse, également testacée, au bord apical du second segment, se continuant par des taches semblables, mais un peu moins larges, sur les trois segments suivants, ces taches peu densément revêtues de pubescence jaune ou dorée ; une autre tache, assez vague et irréguliére, de pubescence d'un doré soyeux, se voit près de la base du second segment; souvent le pygidium est ferru- gineux. Derrière de la tète et dos du thorax avec une pubescence dorée, extrêmement éparse et qui disparaît même complètement chez certains individus. Une pilosité fauve ou brunâtre et très éparse hérisse le dessus du corps, tandis que le dessons et les côtés, ainsi que les pattes, sont éparsement hérisses de poils blancs ou jaunâtres. Tête subquadrangulaire, plus large que longue et à peu près de la largeur du thorax : elle est un peu prolongée derrière les yeux, avec le bord postérieur arqué et les angles très arrondis mais non complètement effacés ; front et vertex densément ponctués-réticules. Yeux grands, convexes, situés vers le milieu des bords latéraux ; mandibules courtes, robustes, acumiuées au sommet; second article du funicule des antennes à peu près de la longueur du troisième. Thorax piriforme, plus étroit en arrière, densément ponctué réticulé, avec la concavité des pleures lisse et luisante ; pronotum faiblement arqué en avant avec les angles peu distincts; métathorax en déclivité arrondie, sans limite entre sa face dorsale et sa face postérieure, et sans onglet scutellaire. Abdomen ovale, subsessile ; premier segment beaucoup plus étroit que le suivant, 250 E. ANDRÉ mais non contracté à son articulation postérieure, peu densément ponctué en dessus ; second segment densément et loogitudinalement ridé- ponctué en dessus, éparsement ponctué en dessous ; les seg- ments suivants finement ponctués ; dernier segment muni d'une aire pygidiale plane, longitudinalement et régulièrement striée. Tibias intermédiaires et postérieurs armés d'assez fortes épines brunes. Cette Mutille semble assez rapprochée, pour la forme générale, de morosa Westw., mais, indépendamment de rornementation différente de sou abdomen, elle s'en écarte par le premier segment bien plus étroit, passant presque au subpétiolé, et par ses pattes ferrugineuses. 11. — Ephutomorpha brachynota nov. sp. Ç Migra, antennis pedibusque nigris, tarsis piceis; ahdominis segmenta primo postice late fulvo-ctliato, segmenti secundi apice vitta fulvo-sericea, lateraliter angusta, in medio triangnlariter producta, ornato ; segmentis 3-5 macula média transversa, fulvo-sericea, prœdilis, Caput thorace paulo angustiuê, post oculos arcuatum. Thorax brevis, subhexagonalis, postice angnstior, liaud longior quam latior, metanoto oblique truncato. Abdomen sessile, ovatiun, area pygidiali subco- riacea, basi striata. Calcaria pallida. Long. : 3-6 mill. Noire, ainsi que les antennes et les pattes ; tarses d'un brun noir, éperons blanchâtres ; tubercules antennaires et milieu des mandi- bules parfois un peu rougeâtres. Premier segment de l'abdomen largement cilié, à son bord postérieur, de poils serrés, d'un fauve- doré soyeux, formant une large bande un peu raccourcie sur les côtés ; second segment avec une bande apicale semblable, très étroite latéralement, mais largement dilatée en son milieu en une tache triangulaire ou semi-circulaire qui s'avance jusqu'au milieu du segment ; les segments 3 5 parés chacun, en leur milieu, d'une grande tache transversale qu'on peut aussi définir comme une bande raccourcie sur les côtés, dont l'ensemble, qui fait suite à la bande du second segment, couvre tout le milieu de la moitié postérieure de l'abdomen. Pilosité du corps éparse, blanchâtre, mélangée à quelques poils bruns ; celle des pattes blanche et peu serrée. Tête subarrondie, un peu plus étroite que le thorax, immédiate- ment arquée après les yeux, sans angles postérieurs distincts ; front et vertex fortement et densément ponctués-réticules. Yeux grands, arrondis, convexes, assez éloignés de l'articulation des CONTRIBUTION A LA CONNAISSANCE DES MUTILLIDES DE l'aUSTRALIE 251 mandibules ; ces dernières acuminées au sommet ; second article du funicule des antennes à peu près de la longueur du troisième. Thorax très court, subhexagonal, ne paraissant pas plus long que large quand il est vu en dessus, plus étroit en arrière qu'en avant, densémenl ponctué-réticule ; son bord antérieur rectiligne avec les angles un peu dentiformes ; métathorax obliquement tronqué, avec le bord supérieur de la troncature arrondi et sans onglet scutellaire. Abdomen ovale, assez allongé, sessile : premier seg- ment court, aussi large que la base du suivant, peu deusément ponctué ; second segment densément ponctué ; dernier segment muni d'une aire pygidiale plane, finement chagrinée, marquée, à sa base, de quelques courtes stries longitudinales. Tibias intermé- diaires et postérieurs armés de fortes épines rougeâtres. Très rapprochée de morosa Westw. sous le rapport de la couleur générale et de l'ornementation de l'abdomen, mais se reconnaît aisément à son thorax plus court, à sa tête non prolongée derrière les yeux et à son aire pygidiale non striée sur toute son étendue. Elle avoisine aussi la fnlla.r André, mais son thorax est beaucoup plus court et d'une forme toute différente. M. G. TuRNER pense que cette espèce pourrait être la femelle d'E. adjacens André, mais ce n'est là qu'une simple hypothèse qu'on ne doit accepter que sous toutes réserves. 12. — Ephutomorpha adjacens André. Mutilla adjacens Ern. André, Mém. Soc. Zool. Fr., XIV, 1901, p. 502 cf. cf' Les exemplaires de Cairns sont tout à fait semblables à l'unique individu de Mackay qui a servi à ma description. J'ajouterai seule- ment que la taille varie de 5 à 8 mill. Je viens de dire que, d'après M. J, Turnfr, Vadjacens pourrait être le mâle de brachynota qui précède. 13. — Ephutomorpha hospes Sm. Mutilla hospes Fr. Smith. Descr. new Hym. Coll. Brit. Mus., 1879, p. 202 9. Mutilla (Sphderoplitlialma) hospes Ern. André, Mém. Soc. Zool. Fr., VIII, 1895, p. 494 $. Var. rufovariegata nov. var. — 9 Antennes et pattes ferrugi- neuses, plus ou moins variées de brun ; le premier et le second segments de l'abdoruen plus ou moins largement ferrugineux ou 252 E. ANDRE tachés de ferrugineux au milieu de leur bord postérieur, cette coloration se continuant d'une façon plus ou moins distincte au milieu des segments suivants; les parties ferrugineuses éparsement recouvertes de pubescence jaune ou rougeâtre qui figure la série de taches médianes offerte par les exemplaires typiques. Ces différences de coloration donnent à cette variété un aspect assez spécial, mais la forme de toutes les parties du corps, la sculpture et la disposition générale de l'ornementation étant tout à fait identiques à celles d'E. Iiospes, il ne me paraît pas douteux qu'il s'agisse de la même espèce. — Long. 9-H mill. Indépendamment des individus que M. G. Turner m'a envoyés de Cairns, j'en possède un autre tout semblable qui provient de la Nouvelles-Galles du Sud. 14. Ephutomorpha alata nov. sp. 9 Obscure aenca, abdominis seginentis ultimia nigris, hiberculis antennalibtis, mandibuUs, antemiis jiedibuaque fernigineis ; segmen- torum 1-5 marginc, apicnli macula média testacea, pube flava vcstita, ornatu. Caput svbquadratum, thorace vir latins, post oculos pro- ductum, postice rectum. Thorax piriformis. Abdomen sessile, ovatum, primo segmoilo antice utrlnque lamina lo, quasi alato ; area pijgidiali longitud inaliter striata. Long. 6 à 9™™. Tète et thorax d'un bronzé obscur, parfois un peu verdâtre sur le front ; abdomen avec les deux premiers segments bronzés et les autres noirs; majeure partie des mandibules, tubercules anten- naires, antennes et pattes ferrugineux, plus ou moins variés de brunâtre, éperons d'un blanc sale. Une tache au sommet du pre- mier segment, une autre au milieu du bord apical du second et d'autres plus ou moins dictinctes au milieu des segments 3 à 5, formées par une décoloration de la chitine et recouvertes de pubescence peu serrée d'un jaunâtre soyeux. Dessus du corps hérissé de poils bruns, assez épars; dessous du corps et pattes avec des poils jaunâtres peu abondants. Tète subquadrangulaire, plus large que longue et à peu près de la largeur du thorax, sensiblement prolongée derrière les yeux, avec le bord postérieur droit et les angles arrondis; front et vertex densément ponctués-réticules ; yeux arrondis, convexes, à peu près aussi distants des mandibules que des angles postérieurs ; tubercules antennaires arrondis ; arêtes frontales distinctes et s'étendant jusqu'aux yeux ; épistome armé d'un tubercule denti- forme de chaque côté de son bord antérieur ; mandibules étroites, CONTHIBLTION A LA CONNAISSANCE DES ML'TILLIDES DE l'aUSTRALIE 253 arquées, acuminées au sommet; antennes robustes, avec le second article du funicule un peu plus long que le troisième. Thorax piriforme, un peu rétréci en avant, beaucoup plus en arrière, denséinent ponctué-réticule, avec la concavité des pleures lisse et luisante ; le pronotum est presque recliligne en avant avec les angles un peu dentiformes ; métathorax nettement tronqué en arrière avec le bord supérieur de la troncature denticulé ; pas d'onglet scutellaire. Abdomen ovale, sessile ; premier segment assez court, aussi large que la base du suivant, assez densément ponctué en dessus, dilaté de chaque côté de son bord antérieur eu un appendice lamellaire, élargi en forme d'aileron et qui tient la place des dents latérales dont sont pourvues la plupart des Mutilles. Second segment densément ponctué en dessus, plus éparsement en dessous ; les segments suivants finement ponctués ; le dernier segment est muni d'une aire pygidiale plane, bien circonscrite, longitudinalement et régulièrement striée. Tibias intermédiaires et postérieurs armés de quelques épines noires. Cette espèce présente la forme générale et le mode d'ornemen- tation d'^. hospes Sm., mais elle s'en distingue par sa coloration métallique et se reconnaît facilement aux remarquables ailerons de son premier segment abdominal. 15. Ephutomorpha mutabilis nov. sp. 9 Nigra, thoracis disco sœpe rufo, tuberculis anlennaUbufi, niandi- bulis, antcnnia pedibusque testaceis, plus minusve brunnco-cariegatis ; abdominis segmenti primi apice, segmentorum 2-5 macula média apicali, pggidioque toto testaceis, parce pubeflava veslitis. Caput post oculos arcuatum. Thorax subhcxagonalis, brevis, postice truncatus, margine postico subdenticulato. Abdomen sessile, ovatum, area pijgi- diali plana, nitida, subtiliter stria ta. Long. 4 à 5 mm. Tête noire ou d'un noir brun, avec les tubercules antennaires, les mandibules et les antennes d'un testacé un peu rougeâtre ; souvent le sommet des mandibules et du funicule rembruni?. Thorax noir, ordinairement marqué sur son disque d'une grande tache ferrugineuse qui peut se réduire plus ou moins ou même disparaître complètement. Pattes testacées, plus ou moins variées de brun ; éperons blanchâtres. Abdomen noir, avec le bord posté- rieur et plus rarement la totalité du premier segment, une assez grande tache au milieu du bord apical du second, une plus petite, transversale, au milieu de chacun des suivants, et la totalité du pygidium d'un testacé rougeâtre. Les taches des segments 2 à 5 sont 254 E. ANDRÉ éparsemeat revêtues de pubesceace d'un jaunâtre soyeux. Pilosité du corps jaunâtre, mélangée de quelques poils bruns; pattes éparsemeut hérissées de poils blancs. Tète eu ellipse transverse, à peu près de la largeur du thorax, immédiatement arquée derrière les yeux, sans angles postérieurs distincts; front et vertex densément ponctués-réticules. Yeux grands, arrondis, convexes, assez éloignés de la base des mandi- bules ; épistome avec deux petites dents spiniformes de chaque côté de son bord antérieur ; mandibules étroites, arquées, acuminées au sommet ; antennes robustes avec tous les articles intermédiaires plus larges que longs, le second article du funicule plus étroit et à peine plus long que le troisième. Thorax court, subhexagonal, à peine plus long que large, plus étroit en arrière qu'en avant, densé- ment ponctué réticulé avec la concavité des pleures lisse et luisante; pronotum droit en avant avec les angles antérieurs peu accentués; métalhorax nettement tronqué en arrière avec le bord supérieur de la troncature subdenticulé ; pas d'onglet scutellaire. Abdomen ovale, sessile; premier segment court, aussi large que la base du suivant, densément et finement ponctué en dessus, luisant et épar- semeut ponctué en avant; second segment densément ponctué en dessus, les suivants finement ponctués ; dernier segment muni d'une aire pygidiale plane, luisante, avec quelques stries longitu- dinales faibles et souveut peu distinctes. Tibias postérieurs et intermédiaires armés de quelques épines d'un brun rougeàtre. Appartient au groupe d'E. Iwspes Sm., mais se reconnaît facile- ment à sa petite taille, à sa tète non prolongée derrière les yeux, à son thorax court, souvent marqué de rouge sur le disque, à ses antennes et à ses pattes plus ou moins testacées et à son aire pygi- diale luisante et à peiue gtriée. 16. Ephutomoupha am.bna André. MutiUa (Sphaerophthalma) aniœna Ern. André, Mém. Soc. Zool. Fr., VIII, 1895, p. 309 $. 9 Les individus de Cairns ressemblent à ceux de Mackay, sauf que, chez la plupart d'entre eux, les taches d'un jaune soyeux qui ornent le bord apical des segments 2-5 de l'abdomen s'étendent plus ou moins latéralement, de façon à former des bandes ou des franges qui cependant n'atteignent pas en général les côtés de l'arceau. Chez d'autres spécimens la couleur bleue de l'abdomen passe au verdàtre et le second segment porte des traces d'une impression apicale, comme chez l'espèce suivante. CONTRIBUTION A LA CONNAISSANCE DES MUTILLIDES DK l'aUSTRALIE 255 17. Ephutomorfha impressiventris nov. sp. 2 obscure œnea, tubercuUs antennalibus, funiculo, mandibulanim parte média pedihusque ferrugineis. Caput post oculos arcnatum. ThoraT piriformis, rude reticulato-ruyosus. Abdomen subpetiolatuni. seyinento secundo lato, postice impresso ; ejnsdem margiiie apicali ser/mentisque 3-5 macula média, transversa, flawsericea, ornatis ; area pygidiali subtiliter striata. Calcaria pallida. Long. 5-10 mm. Tout le corps d'un bronzé obscur, plus noirâtre sur la tête et le thorax, un peu plus verdàtre sur l'abdomen ; tubercules anten- naires, milieu des mandibules, tout ou partie du funicule et pattes ferrugineux, parfois variés de brunâtre. Second segment de l'abdomen orné, au milieu de son bord apical, d'une tache trans- versale de pubescence d'un jaune soyeux, qui se continue par des taches semblables sur les trois segments suivants, de façon à former une bande longitudinale, continue, sur la seconde moitié de l'abdomen. Dessus du corps hérissé de poils bruns, longs et épars, ces poils devenant blancs au métathorax, sur les côtés et le dessous du corps ; pattes hérissées de poils blancs ; éperons d'un jaune pâle. Tète à peu près de la largeur du thorax, sensiblement arquée derrière les yeux, avec les angles postérieurs presque indistincts ; front et vertex densément pondues -réticulés. Yeux grands, arrondis, très convexes, luisants, plus éloignés de l'articulation des mandibules que des angles postérieurs ; tubercules anten- naires arrondis, lisses et luisants ; mandibules acuminès au sommet et plus ou moins distinctement unidentées au bord interne ; antennes robustes, avec le second article du fuuicule à peine plus long que le troisième. Thorax allongé, piriforme, plus rétréci en arrière qu'en avant, grossièrement ridé-réticulé ; concavité des pleures presque lisse et très luisante ; bord antérieur du pronotum faiblement arqué avec les angles distincts ; metanotum arrondi en arrière, sans limite entre sa face supérieure et sa face postérieure et sans onglet scutellaire. Abdomen subpétiolé, son premier segment court, un peu nodi- forme, beaucoup plus étroit que le segment suivant, ordinaire- ment ferrugineux en dessous, où il est muni d'une carène un peu échaacrée ; second segment large et très convexe sur les côtés, marqué en son milieu d'une dépression longitudinale assez faible, qui s'élargit et s'accentue en arrière où elle forme une aire triangu- laire assez distincte, quoique toujours peu déterminée; le second 2o6 E. ANDRÉ segment est fortement et assez densément ponctué en dessus, aussi fortement mais moinsdensémeut en dessous ; les segments suivants linement ponctués, ciliés en dessous de poils pâles. Aire pygidiale assez plane, luisante, faiblement et longitudiualement striée, les stries .s'évanouissant parfois en arrière. Tibias intermédiaires et postérieurs armés de fortes épines disposées sur deux rangs. Cette espèce est très voisine d'E. amœma André ; elle s'en distingue par sa coloration différente, surtout celle de son abdomen qui est nettement bronzée, par le premier segment non bordé de ferrugi- neux, par le second segment beaucoup plus large, plus convexe latéralement, plus distinctement impressionné en arrière, et par son aire pygidiale longitudinalement striée. M. G. TuKNEK me dit être à peu près certain que cette Mutille est la femelle de la suivante que je regarde comme étant la nephelop- tera Kohi. Il a, m'écrit il, fréquemment capturé le mâle volant au dessus de la femelle. Toutefois, comme il n'a pas observé les deux sexes à l'étatd'accouplemeut, je préfère, jusqu'à plus ample informé, donner à cette femelle un nom particulier plutôt que de risquer une assimilation qui n'est que probable et pourrait être inexacte. 18. — Ephutomorpha nepheloptera Kohi, Mutilla nepheloptera Kohi, Verh. zool. bot. Ges. Wien, XXXII, 1882, p. 483. cf Je rapporte à cette espèce quelques mâles qui s'accordent tout à fait avec la description de Kohi, sauf certaines divergences que je vais signaler : la pilosité du front et du vertex est plutôt fauve que grisâtre ou brunâtre, la frange blanche du troisième segment abdominal est peu distincte et visible seulement sur les côtés ; le septième segment est également cilié de quelques poils blancs. Les ailes, assez enfumées et un peu plus hyalines à la base, portent une nervulation passée tout à fait sous silence par l'auteur et qu'il est utile d'indiquer : le stigma est petit et opaque, la cellule radiale est assez longue, nettement tronquée au sommet, les cellules cubitales sont au nombre de trois, dont la seconde reçoit la première nervure récurrente vers son milieu et dont la troisième reçoit la seconde nervure près de son extrémité. Tous les autres caractères concordent avec ceux indiqués par Kohi et il est donc très probable qu'il s'agit de la même espèce. Longueur 10 à 14""n. Voir ci-dessus ce qui a été dit à propos de la présomption d'iden- tité d'E. impressiventris ? et nepheloptera cf. CONTRIBUTION A LA CONNAISSANCE DES MUTILLàDES DE l'aUSTRALIE 257 19. EpeUTOMORPHA LIOPYGA DOV. Sp. 9 Nigro-brunnea, tuberculis antetmalibus, mandibulû, anten- narum ^néral inclinés à 25 degrés et la largeur à la ligne d'eau est d'environ lUO mètres. La troisième région du canal proprement dit serait comprise entre la sortie du canal des lacs Amers et la rade de Suez. Son étendue totale est donc seulement de 28 kilomètres. Le canal y traverse un seuil, celui de Chalouf (18 mètres), puis, après avoir décrit plusieurs courbes, pénètre dans la rade de Suez, en débou- chant, comme nous l'avons dit, sur la plage est de la baie. Dans cette région les terrains sont, presque partout, d'argile dure, et, en plusieurs points, il existe, soit sur les talus, soit sur le plafond, des parties rocheuses. Les talus sont en général inclinés à 25 degrés ; la largeur à la ligne d'eau varie quelque peu : de 100 à 110 mètres. Lac Timsah. — Nous avons dit, qu'en partant de Port-Saïd, le canal débouchait au kilomètre 76, dans une première vallée qui est 282 J.-B. TILLIER celle du lacTimsah (1). La vallée a reçu, à partir de 1863, mais en très petite quantité tout d'abord, les eaux de la Méditerranée. — C'était à cette époque un marais où arrivaient les eaux du Nil dans les crues exceptionnelles. En 1867, la dépression était remplie au niveau des mers, mais ce fut seulement en 1869, que les eaux de la mer Rouge purent y pénétrer, par la coupure, alors ouverte, du seuil du Sérapéum. La surface actuelle du lac est de 2000 hec- tares elle volume d'eau de 67 millions de mètres cubes. De la dépression principale, dont le fond est à 6 mètres en contre-bas du niveau des mers dans sa partie la plus déclive, partent de nombreuses petites dépressions secondaires, en général moins profondes, souvent 2 à 3 mètres seulement, s'étendant plus ou moins loin dans des directions diverses. Les eaux, en même temps qu'elles remplissaient le lac proprement dit, ont rempli toutes ces vallées secondaires. Aujourd'hui, par conséquent, le lac est entouré de tout un système de lagunes s'y rattachant par des embouchures plus ou moins larges et dont quelques-unes pénètrent profondément dans l'intérieur des terres. La plupart de ces lagunes sont entourées de dunes de sable assez élevées qui font de certaines d'entre elles des sortes d'étangs, communiquant avec le lac, mais très abritées et où l'eau, peu profonde, est, en tout temps, complète- ment calme. Le lac ne reçoit aucun cours d'eau permanent — on sait, du reste, qu'il n'en existe pas en Egypte en dehors du Nil — mais un canal à écluses, l'ismaïlieh, qui part du Caire, suit la vallée de rOuaddy et amène à Ismaïlia l'eau douce nécessaire à l'alimentation de la ville et aux quelques cultures des environs. Jusqu'en 1891, le trop-plein du canal Ismaïlieh se déversait, plus ou moins abon- damment suivant les crues du fleuve, dans une des lagunes qui entourent le lac : les eaux, dans ces conditions, devenaient de plus en plus saumâtres, et un grand nombre d'espèces marines qui s'étaient d'abord acclimatées, disparaissaient. A partir de cette époque, 1891, la compagnie de Suez ayant prolongé le canal Ismaï lieh jusqu'à Port-Saïd pour l'alimentation de cette ville, il fut possible de déverser le trop-plein des eaux du Nil dans le grand lac Menzaleh et non plus dans le lac Timsah. Celui-ci ne reçoit plus maintenant que l'eau douce d'un drain récemment établi pour (1) Timsah est, en arabe, le nom générique du Crocodile. On infère de cet étymologie que lorsque le Nil se jetait à la mer par la branche pélusiaque, près de Port-Saïd, la vallée actuelle était un lac d'eau douce habité par des Crocodiles. LE CANAL DE SUEZ ET SA FAUNE ICHTHYOLOGIQUE 283 assécher quelques marais de la vallée de l'Ouaddy et les eaux d'iu- filtration. Aussi beaucoup d'organismes marins, qui étaient en voie de disparition, sont-ils devenus, de nouveau, fort abondants. Laça Amers. — La deuxième vallée, dans laquelle ont pénétré les eaux du canal, est le bassin des lacs Amers. Elle a été remplie, en 1869, à la fois par la mer Rouge et par la Méditerranée : les eaux ont coulé pendant six mois avant que le niveau s'établît à la même hauteur que dans les deux mers. Aucune vallée secondaire ne se détachant de la vallée principale, les rives des lacs Amers, au lieu d'être déchiquetées, comme celles du lac Timsah, par tout un chapelet de lagunes, sont à peu près régulières, sans golfes ni enfoncements importants ; mais comme la vallée était beaucoup plus large au nord qu'au sud et que son niveau était également plus bas au nord, les lacs se divisent, aujourd'hui, en deux parties distinctes. Dans la région nord, sur une étendue de 20 kilomètres, le lac prend le nom de grand lac Amer; dans la partie la plus profonde les fonds sont de 9"»50 envi- ron; la largeur moyenne est d'à peu près 9 kilomètres, et, comme on n'a pas eu besoin de draguer, les fonds sont restés ce qu'ils étaient au moment du remplissage de la vallée. Dans la région sud, le petit lac Amer s'étend sur une longueur de 16 kilomètres — du phare sud à la gare du kilomètre 133 — avec une largeur moyenne de deux à trois kilomètres : les fonds sont très variables, mais partout inférieurs à 9 mètres. Il a donc été nécessaire de creuser un chenal pour les navires, et on a profité, bien entendu, des plus bas niveaux, ce qui a amené à faire suivre au chenal deux courbes dans sa traversée du petit lac. Sauf dans ce chenal, de 40 mètres de largeur, les fonds n'ont pas été touchés et sont restés ce qu'ils étaient à l'époque où le bassin était encore une vallée. La surface totale des deux lacs est de 19600 hectares et leur cube de 1450 raillions de raètres cubes. Le canal, en remplissant la vallée, a, en résumé, créé une véri- table petite mer intérieure — où le clapotis est souvent assez fort — là où se trouvait, avant 1869, une simple dépression à peine marécageuse, dans son plus bas niveau. Il est intéressant de remar- quer que cette mer a certainement existé à une période précédente. On a trouvé, en effet, dans la partie la plus déclive de la vallée, sur une étendue de 6500 hectares, un banc de sel d'une très grande épaisseur dont la présence ne peut «'expliquer que si on admet l'existence antérieure d'une communication avec la mer. il a suffi que le seuil de Chalouf se soulevât légèrement (10 mètres) ou que 254 J.-B. TILLIER le niveau de la mer Rouge baissât de la même quantité, pour que la vallée qui constituait autrefois un golfe, prolongement de la rade de Suez, devînt un lac communiquant avec la mer, d'abord aux grandes marées seulement, puis, le soulèvement continuant, défi- nitivement séparé. Le soleil, avec les hautes températures de la région, a dû rapidement dessécher le lac, et les eaux, en s'abaissant graduellement, ont nécessairement laissé déposer, dans la partie la plus basse, le sel qu'elles contenaient. Le creusement du Canal aurait ainsi, pourrait-on dire, remis les choses en leur état primitif. Pas plus que le lac Timsah, les lacs Amers ne reçoivent aucun cours d'eau permanent, aucun canal dérivé du Nil n'y déverse, non plus, le trop plein de ses eaux. § 2. Courants et salure des eaux. En rade de Port-Saïd le courant général porte de l'ouest à l'est : il est parfois assez fort, quatre à cinq kilomètres et même davantage dans les grands mauvais temps d'hiver. Sa direction est bien constante surtout au moment de la crue du Nil, août et septembre. On ressent de plus, en rade même, les courants peu sensibles des très faibles marées de la Méditerranée. Ces courants entrent dans le port et le canal et en sortent suivant le flot et le jusant. En rade de Suez, on observe les courants ordinaires des régions à marée. La mer marne de 1"'80 au maximum, par conséquent, ces courants sont faibles, du moins dans la rade, car ils augmentent beaucoup de vitesse en pénétrant dans le chenal resserré du canal. Celui-ci, au point de vue des courants, se divise en deux régions parfaitement distinctes que sépare le bassin des lacs Amers. Dans la région sud, c'est à-dire de Suez au petit lac, les marées de la mer Rouge se font sentir, et il y a flot et jusant régulier comme dans la baie. Mais la quantité d'eau qui pénètre ainsi dans le bassin à chaque marée de flot ou en sort à chaque marée de jusant, n'est pas suffisante pour se porter bien avant dans les lacs. A deux ou trois kilomètres de l'entrée le courant s'irradie et disparait entièrement : de telle sorte que sauf sur cette petite étendue de deux ou trois kilomètres à l'extrémité sud du petit lac il n'y a aucun courant sensible dans les lacs Amers. La force du courant dans la partie du canal qui va de Suez aux lacs (30 kilomètres) varie, bien entendu, comme dans les mers, suivant l'âge de la lune et l^direction, l'intensité ou la durée des vents. Les vitesses de 5 à 6 kilomètres ne sont pas rares ; on a observé des vitesses de plus de 8 kilomètres. LE CANAL DE SUEZ ET SA FAUNE ICHTHYOLOGIQUE 285 De Port-Saïd aux lacs Amers, au contraire, nous voulons dire à l'extrémité nord de ces lacs, le courant général dépend uniquement des saisons. En été, le niveau moyen de la Méditerranée est plus élevé que celui de la mer Rouge — 0'n40 en septembre — et, par conséquent, il s'établit un courant du nord au sud, c'est à-dire de la Méditerranée vers les lacs. Inversement, en hiver, le niveau moyen de la mer Rouge est plus élevé que celui de la Méditerranée — 0"30 en juillet — et le courant porte des lacs vers Port-Saïd. Les faibles marées delà Méditerranée viennent, il est vrai, influencer la direction du courant, sinon dans tout le canal, du moins dans sa partie méditerranéenne, mais cette influence est restreinte et ne se fait pas sentir plus loin que le kilomètre 50. En résumé, le mouvement des eaux est du nord au sud en été et du sud au nord en hiver. Il est intéressant de remarquer que cette direction générale des courants peut avoir une certaine importance au point de vue de la dispersion des espèces marines inférieures. En effet, suivant l'époque de l'année à laquelle apparaissent les formes larvaires non fixées de ces organismes, le passage est, à quelque degré, facilité par la direction du courant. La salure des eaux varie beaucoup à Port-Saïd suivant les saisons. Elle passe de 35 grammes par litre, salure moyenne de la Médi- terranée, à 26 grammes, du moins à la surface, au moment de la crue du fleuve, alors que le grand courant général dont nous avons parlé, pousse les eaux sortant de la branche de Damiette vers les plages de Port-Saïd. En rade de Suez, au contraire, la salure, qui est la même que celle de la mer Rouge, varie peu, et reste en moyenne de 45 grammes par litre. Nous avons exposé plus haut les conditions particulières dans lesquelles se trouve le lac Timsah relativement à la petite quantité d'eau douce reçue, soit par infiltration des cultures, soit par le drain récemment creusé pour assécher certains marais de la vallée de rOuaddy. Ce dernier débouche, sur la rive Afrique bien entendu, dans une lagune assez éloignée du lac et communiquant avec lui par un « boghaz » très étroit — à peine une cinquantaine de mètres — et très peu profond, 30 à 40 centimètres environ. Le débit du drain est assez considérable en tout temps pour que l'eau de cette lagune soit à peu près douce : sa salure ne dépasse jamais 8 kilog. au mètre cube et est souvent de 2 kilog. à peine. Partout ailleurs, même à l'extrémité, des découpures s'avançant le plus dans l'inté- 286 J.-B. TILLIER rieur des terres, l'eau du lac est toujours au moins aussi salée que celle de la Méditerrauée. En hiver, lorsque le courant général vient des lacs Auiers, la salure du lac Timsah augmente beaucoup. Nous avons eu des analyses d'eau prise au milieu du lac, en février, qui nous ont donné presque la même quantité de sel que dans le grand lac Amer lui-même : 68 kgr. au me. On devrait s'attendre à ce que la salure des eaux des lacs Amers soit intermédiaire entre celle des eaux de la Méditerranée qui y pénètrent par le nord et celle des eaux de la mer Rouge qui viennent du sud : mais, à cause de la présence du banc de sel dont nous avons parlé, il n'en est nullement ainsi. Presque en toute saison on trouve 75 grammes de sel par litre, c'est-à-dire le double du chiffre moyen de la Méditerranée et to grammes de plus que dans la mer Rouge. Ce résultat ne doit pas étonner, si l'on remarque que le banc de sel qui constitue le fond même de la partie profonde du grand lac Amer a une épaisseur très considérable sur une étendue de 6.500 hectares. Le sel de cette énorme masse se dissout lentement: les sondages exécutés à dix années d'intervalle ont démontré qu'une épaisseur de 0'"10 environ disparaissait chaque année. C'est dans le grand lac seulement qu'on trouve cette extrême salure. Dans la région sud, c'est-à-dire dans le petit lac où les eaux de la mer Rouge pénètrent à chaque marée jusqu'à une certaine distance, la salure est moindre. Nous avons trouvé 50 grammes dans la région du milieu du petit lac au mois de mai. Dans le canal proprement dit, comme on le comprendra en se reportant à ce que nous avons vu du courant général, la salure varie suivant les saisons. Etant donné l'extrême densité des eaux des lacs Amers, on comprend, en effet, que lorsque le courant porte vers la Méditerranée, c'est-à-dire en hiver, l'eau du canal soit beaucoup plus salée que l'eau de la mer elle-même, et c'est bien en effet ce qu'ont démontré les analyses puisqu'on a trouvé 51 gram- mes par litre au kilomètre 60, à un moment où l'eau de la Méditer- ranée n'est pas à 35 grammes. Inversement, en été, le canal qui reçoit surtout de l'eau de la Méditerranée, se dessale en partie ; on ne trouve plus que 40 grammes par litre au kilomètre 60 et 67 grammes par litre à l'entrée nord du canal dans le grand lac Amer. Les mêmes phénomènes ne se produisent pas entre les lacs Amers et Suez. La salure de l'eau, dans cette région, varie bien légère- ment suivant les saisons; mais ces variations, analogues à celles qui LE CANAL DE SUEZ ET SA FAUNE ICHTHYOLOGIQUE 28/ se produisent daus la mer Rouge elle-même, sont peu importantes. La salure moyenne de celle mer est, comme nous l'avons vu, de 45 grammes par litre. § 3. Nature des fonds. Rade de Port- Sdid. — Les plages de Port-Saïd sont à peu près semblables à celles des côtes d'Egypte, depuis le golfe des Arabes jusqu'à la frontière de Syrie. La ligne d'eau est presque partout de sable pur ; les fonds sous-marins sont de sables vaseux recouverts d'une couche de limon. Elles sont doucement et régulièrement inclinées vers le large. On trouve la ligne des fonds de 10 mètres à 5 kilomètres environ de la lerre, et celle des fonds de 100 mètres à 40 kilomètres. Rien n'abritant la côte du côté du nord d'où viennent les vents régnants, un ressac presqu'incessant bat la plage, mais la brise étant, en général, modérée, ce ressac est assez faible, et la lame est haute et dure seulement pendant les mauvais temps rela- tivement rares de la saison d'hiver. Les conditions locales, au point de vue spécial qui nous occupe, ont été quelque peu modifiées depuis que le canal existe. On peut, en effet, considérer les deux jetées est et ouest comme constituant des fonds de roche qu'auparavant on ne rencontrait pas sur la côte. Uade de Suez. — Si les fonds sur les plages de Port-Saïd, peuvent être considérés comme remarquablement uniformes, ceux du golfe de Suez sont, au contraire, très variés. En nous bornant à envi- sager la baie jusqu'à 10 ou 12 milles au sud par exemple, nous trouvons toutes les natures de sous-sol marin, vase, sable, herbe, coraux, madrépores et rochers, avec des profondeurs atteignant 46 mètres et de nombreuses irrégularités de fond. Comme nous l'avons vu, la mer marne au maximum de 1™80. Contrairement à ce que nous avons constaté pour Port-Saïd, le creusement du canal n'a apporté aucune modification, si peu importante qu'elle soit, à ce qui existait antérieurement, et si l'on néglige, ce que l'on peut évidemment faire, le très étroit chenal creusé sur la côte est, la laisse des basses mers est restée partout ce qu'elle était, les plages couvrant et découvrant sur la même étendue qu'auparavant. Lac Timsah.— Sur les fonds naturels, et nous entendons par là les fonds non remaniés, on trouve partout une mince couche de sable recouvrant un fond de vase. En dehors de ces fonds qui n'ont jamais été touchés depuis que la vallée a été remplie, il existe dans le lac ZQO J.-B. TILLIER Tinisah des « bancs de vidage », formés par les déblais des dra- gages d'une étendue de 60 hectares et sur lesquels il ne reste pas plus de 3 ou 4 mètres d'eau. On ramène sur ces bancs de très grandes quantités de coquilles mortes : la vase sous-jacente y est, en général, recouverte d'une couche de sable à peine sensible. Enfin, dans les lagunes, où les fonds sont de même nature, les profon- deurs sont très variables. Quelques-unes communiquent à peine avec le lac en ce sens qu'on ne peut y pénétrer qu'en passant par dessus des hauts fonds de O^âO à 0'"50. On peut admettre que la profondeur moyenne des lagunes se rapproche de deux mètres environ. Nous pouvons laisser de côté, dans cet examen des fonds du lac de Timsah, le chenal et le petit port creusés et entretenus à 9^50, ils représentent à peine tous deux 75 hectares. Locs Amers. — La nature des fonds est très variable, et on comprend qu'il en soit ainsi, puisqu'ils sont constitués par les sols de natures diverses de l'ancienne vallée. Dans la partie la plus profonde qui correspond au grand axe du grand lac, on trouve partout du sel que le plomb de sonde ramène sous forme de petites aiguilles ; niais alors que, sur certains points, ce sel est presque à nu, dans d'autres parties il est recouvert d'une couche assez épaisse de vase noire très molle. Sur la rive Asie, à partir de la limite du banc de sel jusqu'à la côte, le fond est souvent de sable comme celui des collines voisines qui ont la forme de dunes; mais dans quelques régions, soit que les Tamaris assez nombreux recouverts parles eaux se soient désagrégés, soit plutôt qu'il existât auparavant, en ces points, des dépressions marécageuses, ou trouve sous une très légère couche de sable (apportée sans doute par le vent) de la vase noire remarquablement molle et collante que nous avons pu parfois comparer à un épais sirop. Sur la rive Afrique, au contraire, les fonds sont assez homogènes et on les trouve, en général, composés d'aoord d'une couche peu épaisse de sable sur laquelle ont poussé, par paquets très séparés, des algues marines, et, en dessous de cette couche, de vase ou de sable très vaseux. Les fi)nds, dans le petit lac Amer, sont également loin d'être uniformes. Sans entrer dans des détails qui seraient inutiles ici, on peut dire qu'ils sont, en général, plus durs que ceux des grands lacs, et que les régions franchement argileuses n'y sont pas rares. Nous avons péché, rive Afrique, sur des plages fort étendues où il n'existe aucune trace de vase. Canal proprement dit. — En indiquant la nature des régions traversées par le canal, nous avons, par là même, fait connaître la LE CANAL DE SUEZ ET SA FAUNE ICHTHYOLOGIQUE 289 nature des fonds : vaselix dans la traversée du lac Menzaleh, de sable et d'argile dans le seuil d'Elguisr et du Sérapéum et d'argile dure, parfois de roche, dans le seuil de Chalouf. Mais il est un point d'une importance capitale que nous devons signaler. Nulle part, dans le canal, ces fonds ne sont stables. A chaque passage de navire, en effet, les violents courants produits par le déplacement des carènes arrachent à la ligne d'eau et sur les talus une certaine quantité de vase ou de sable qui finit par tomber dans la cuvette. Les fonds de celle-ci diminuent donc sans cesse. Dès qu'ils sont au dessous du minimum réglementaire on les reprend par des dra- gages. Sur les points les plus défectueux les dragues doivent être employées tous les deux ans, ailleurs tous les trois ou quatre ans : et il n'existe nulle part dans le canal une région qui ne soit pas draguée après 5à 6 années. Ainsi les talus et la ligne d'eau (1) elle- même se dérasant constamment et la cuvette se remplissant constamment, les fonds sont toujours en mouvement. Nous aurons à revenir sur ce sujet qui, on le comprend, est fort intéressant pour nous à cause de l'obstacle que peut apporter cette mobilité de la « surface » des fonds à l'établissement d'une faune marine dans le canal proprement dit. II. — FAUNE ICHTHYOLOGIQUE DU CANAL. La liste des espèces de Poissons que nous donnons ci-dessous comme constituant la faune ichthyologigue des eaux de l'isthme de Suez est le résultat des recherches continuées pendant plusieurs années. Afin que le lecteur puisse juger du degré de confiance que mérite notre relevé, nous dirons qu'il a été établi de la manière suivante : pendant une année entière nous avons pris ou fait prendre note, chaque matin, des Poissons apportés au marché d'Ismaïlia en indiquant le nombre des individus de chaque espèce — approxima- tivement bien entendu, pour les petites espèces très nombreuses en individus. — On notait également le lieu de capture, canal ou lacs. Nous avons, de plus, consulté le registre du concessionnaire de la pêche, registre sur lequel les lots sont répartis par espèces. Le marché d'Ismaïlia étant approvisionné par des barques qui pèchent depuis le kilomètre 50 environ jusqu'au milieu, à peu près, du grand lac Amer, nous avons pu arriver à connaître ainsi tous les Poissons de la région moyenne du canal, la plus intéressante à notre point de vue, puisqu'elle est à égale distance des deux mers. (1) La ligne d'eau a cessé d'èlre attaquée là où existent des empierrements. Mém. Soc. Zooi. de Fr., 1902. xv. - 19 290 J.-B. TILLIER Le même relevé a été fait, sinon chaque jour, du moins très souvent au marclié de Port Said, où se vendent les Poissons du canal et du port. A Suez, après plusieurs visites, nous avons reconnu que le mar- ché de la ville était approvisionné, pour la plus grande partie, de Poissons de la rade et qu'il était difficile, sinon impossible, d'y recueillir les renseignements que nous cherchions. Nous avons alors chargé les chefs des gares du canal du côté de Suez — après leur avoir apris à connaître les espèces — de visiter le plus souvent pos- sible les barques péchant au sud des lacs et de tenir une liste, aussi exacte que possible, de ces espèces. Pour les Poissons que leurs petites dimensions ou d'autres causes font rejeter, nous nous sommes adressé aux pêcheurs les plus intelligents, et, enfin, nous avons très souvent péché nous-mème dans différentes régions du canal. La quantité de notes ainsi recueillies après plusieurs années de recherches, s'est trouvée considérable : sans prétendre donc à une exactitude absolue, surtout sur le difficile sujet des migrations, nous pensons qu'où peut accorder quelque confiance à l'ensemble des renseignements que nous donnons. Une partie des déterminations spécifiques a pu être faite par nous, mais toutes les formes au sujet desquelles il nous restait le moindre doute ont été envoyées au laboratoire de M. Vaillant, qui a bien voulu les faire déterminer, et sans le bienveillant concours duquel, par conséquent, ce travail n'aurait pu être entrepris. Nous prions M. Vaillant, ainsi que M. Pellegrin, de bien vouloir accepter nos très sincères remerciements. Lorsque notre liste générale, comprenant toutes les espèces, même celles rencontrées une seule fois au cours de nos recherches, a été dressée, nous avons dû nous poser la question de savoir quels étaient les Poissons qu'on pouvait considérer comme constituant, à proprement parler, la faune du canal et ceux qu'on devait regarder comme n'y pénétrant que par exception. Il est évident, en effet, que si quelques conclusions intéressantes pour la biologie marine peu- vent être tirées de notre élude, tant au point de vue du peuplement d'un espace nouveau qu'à celui de la distribution géographique, ces conclusions doivent être exclusivement basées sur l'examen des Poissons habitant normalement le canal. Nous pensions tout d'abord nous baser, pour la répartition des espèces, en ces deux catégories sur un critérium de certitude absolue, celui de la reproduction dans les eaux de l'isthme, c'est-à- LE CANAL DE SUEZ ET SA FAUNE ICHTHYOLOGIQUE 291 dire que nous aurions considéré comme faisant partie de la faune de la région seulement les formes frayant dans ses eaux. Nous nous sommes aperçus immédiatement qu'il n'était pas possible d'adopter ce critérium : beaucoup d'espèces extrêmement abondantes dans le canal le quittent en effet pour aller se reproduire à la mer. Du reste, on sait combien il est délicat d'établir les diagnoses des espèces sur des individus à l'état de frais et dous aurions trouvé là, probable- ment aussi, d'assez grandes difficultés (1). Nous avons dû, par conséquent, comme l'ont fait les naturalistes qui se sont occupés de la faune ichthyologique d'une région déterminée, apprécier la rareté de chaque espèce relativement à son abondance dans la mer d'origine. Nos renseignements sur les faunes des rades de Port-Saïd et de Suez étant, en résumé, fort complets, cette comparaison, dans la plupart des cas, a été facile et nous n'avons été qu'assez rarement tout à fait embarrassé. Afin d'éviter la création de néologismes, tout en n'employant pas cependant de trop longues périphrases, nous avous, malgré le peu de propriété des termes, donné aux espèces vivant normalement dans le canal le nom d'espèces fixées, et, à celles du deuxième groupe, celui d'espèces erratiques. Nous donnons ci-dessous un tableau général des espèces fixées en les répartissant suivant qu'elles sont origioaires de la Méditer- ranée ou de la mer Rouge, et, à la suite, une brève notice pour chacune de ces espèces. Les espèces ont été inscrites, non dans l'ordre généralement adopté^dans la classification ichthyologique, mais suivant qu'elles pénètrent plus ou moins loin de leur habitat d'origine. ESPÈCES FIXÉES 1<» Habitant la Méditerranée avant l'ouverture du Canal. Sciœna aquila C.V. Temnodon saltator C.V . Engrauiis encrassicholus Lin. Lichia amia C.V. Umbrina vulgaris C.V. Chrysophrys aurata C.V. Morone iabrax Boul. Solea lascaris Risso. Morone punctata Boul. Epinephelus œneus Geof. (1) Comme toutefois la question du lieu de reproduction est des plus intéres- santes, nous ferons connaître les espèces se reproduisant certainement ou probablement dans le canal. 292 J.-B. TILUER Blennim pavo C.V. Gohius jozo Lin. Mullus fuscatus Raf. SardineLla (Clupea) granigera C.V. Alosa vulgaris C.V. Mugil cephalus C.V. M. auratm C.V. M. cnpito C.V. M. saliens C.V. 2o Habitant la mer Rouge avant l'ouverture du Canal Tricliiurus haumela Forsk. Uemiramphus Georgii (ou Rey- naldi) Day. Atherina Forskalii Riip. Mugil scheli C.V. Crenidens Forskalii C.V. Pristipoma stridens Forsk. Chrysophrys haffara C.V. Gerres oblongus C.V. Platycephalm insidiator C.V. Clupea quadrimaculata Forsk. Belone choram Riip. Plotoms arab Forsk. Caranx djeddabah Forsk. Teuthis [Amphacanthus] siga- nus Rupp. Monacantkus setifer Bennett. Upeneus ? Epinephelus tauvina Boul. Sillago sihama Day. Harengula punctata C.V. Tetrodon? 30 Habitant les deux mers avant l'ouverture du Canal Hippocampus guttulatus C. Sargus noct. C.V. 40 Espèces douteuses Serranus cabrilla. C.V. (1). Cyprinodon dispar Riip (2). ESPÈCES MÉDITERRANÉENNES Sciœna aquilaC.W. Khalil ; arabe Lout. Longueur 1^20 (3). Habitat : pénètre en rade de Suez. Se trouve en quantités énormes, à peu près en toute saison également, dans les eaux du canal. Les très (1) Le Serra» MS cabrilla C. V. est commun en rade de Suez el nous l'avons trouvé à Alexandrie, mais nous ne l'avons jamais vu à Port-Saïd où nous l'avons fait chercher. Du temps de Cuvier, ce Poisson n'était connu que dans la Méditer- ranée. Si les individus reçus par le British Muséum ont été envoyés de Suez pos- térieurement a 1869, il est possible que l'espèce ait pénétré dans la mer Rouge par le canal. (2) Le Cyprinodon dispar est une espèce d'eau douce pouvant vivre dans les lagunes 1res salées. On en prend beaucoup parfois dans les lagunes de Suez en été. Il est abondant dans le grand lac Amer, pendant la belle saison. (3) La longueur indiquée est celle du plus grand individu observé par nous, dans le canal, au cours de nos recherches. LE CANAL DE SUEZ ET SA FAUNE ICHTHYOLOGIQUE 293 jeunes y sont rares. Vente au marché d'Ismaïlia (1) en 1900, de 30.000 à 40.000 individus. Engraulisencrassicholns. Lin, Anchois; arabe Kashusha. Longueur 66 mm. Habitat : pénètre en rade de Suez. Séjourne très peu dans le canal, sauf cependant (mais presque exclusivement en hiver) dans le lac Timsah. Très commun dans le port de Port-Saïd également en hiver. Vente au marché d'Ismaïlia en 1900 : 80 à 100 kilogr. t/w^/mavM/^ff/is.C.V.Melacopi; arabe Schiff's. Longueur 800mm. Habitat : pénètre jusqu'aux lagunes de sortie du canal à Suez, du moins actuellement ; mais tous les pêcheurs disent qu'on en prenait dans la baie il y a quelques années. Paraît vivre dans le canal resserré entre berges plutôt que dans les lacs. A peu près également abondant en toute saison dans les eaux de l'isthme où cependant, on n'en voit jamais déjeunes. Vente au marché d'Ismaïlia, en 1900 : 3.000 à 4,000 individus. Morone punctata Boni. Brancine : arabe Nocte, Longueur 360 mm. Habitat : pénètre jusqu'aux lagunes de la sortie du canal à Suez, où. cependant elles sont rares ; encore très communes au sud du petit lac Amer. Extrêmement abondantes, en hiver, dans le port de Port-Saïd ; quittent en partie les eaux de l'isthme en été. Paraît préférer le canal resserré aux lacs. Vente au marché d'Ismaïlia en 1900 ; de 12.000 à 15.000 individus, peu de jeunes. Morone lahrax Boul. Loup. Lavaraki (grec); arabe Kharous. Lon- gueur 800 mm. Habitat: pénètre jusqu'aux lagunes de sortie du canal à Suez, mais y est rare ; sa limite est plutôt l'extrémité sud du petit lac Amer. Un certain nombre quittent les eaux de l'isthme en été pour retourner en Méditerranée. Vente au marché d'Ismaïlia en 1900 : 400 à 500 individus, tous adultes. . Temnodon saltator C. V. Gouiîar ; arabe Sou'hr. Longueur 900 mm. Habitat: pénètre jusqu'au sud du petit lac Amer, rare- ment jusqu'aux lagunes de sortie. Très commun dans le port de Port-Saïd en hiver ; pénètre dans les eaux du canal au printemps. Vente au marché d'Ismaïlia en 1900 : 2.000 à 3.000 individus, tous adultes, beaucoup de grande taille. Lichia amia. C. V. Liche ; arabe Loubi. Longueur l°i20. Habitat: pénètre jusqu'au sud du petit lac Amer, rarement jusqu'aux lagunes de sortie. Vente au marché d'Ismaïlia, 50 à 60 individus, tous de grande taille, en 1900. Le sujet mesuré, de 1™20, a été pris sur (1) Commenous l'avons dit, le marché d'Ismaïlia est alimenté par des pêcheurs qui ne dépassent pas, dans le nord, le kilomètre 50 el, dans le sud, le grand lac Amer. 294 J.-B. TILLIER la plage du lac Timsah, où il venait de s'échouer en se jetant sur un jeune enfant indigène qui jouait près de la rive, ayant de l'eau jusqu'aux genoux. Chrysophrys aurata C. V. Daurade ; arabe Dinn'is. Longueur 500 mm. Habitat : pénètre jusqu'au petit lac Amer, exceptionnel- lement aux lagunes de sortie. Les pêcheurs disent qu'il y a quel- ques années on en prenait assez souvent dans la baie de Suez. Deux migrations par an : quittent le canal en janvier pour aller à la mer, reviennent à « Pâques » ; deuxième migration en août et septembre. Vente au marché d'Ismaïlia : 300 à 400 individus, tous adultes, en 1900. Solea lascaris Risso. Sole ; arabe Samak Moussa. Longueur 350 mm. Habitat : pénètre jusqu'au nord du petit lac Amer. Entre dans le canal en quantités extrêmement variables suivant les années ; le quittent en partie pendant les mois d'été. Vente au marché d'Ismaïlia : 500 à 600, toutes adultes, en 1900. Epinephetus seneus Geof . Poisson noir ; arabe Ouakar. Longueur 750 mm. Habitat : pénètre jusqu'au sud du grand lac Amer. Très abondant dans le port de Port-Saïd et dans la région nord du canal en été ; mais s'avance vers le sud surtout au printemps. Vente au marché d'Ismaïlia en une année : 200 à 300, la plupart de grande taille. Blennius pavo C. V. Blennie : arabe? Longueur 150 mm. Habitat : pénètre jusqu'au grand lac Amer, mais ne dépasse pas son extrémité nord. Se reproduit peut-être dans les eaux de l'isthme, car on prend, dans le lac Timsah, des femelles pleines. N'est pas capturée par les pêcheurs : mais est assez commun dans tous les enrochements du lac Timsah et de l'entrée du grand lac Amer. Go6ms ;o^o Lin. Gobie : arabe Abou Kirsh. Longueur 120 mm. Habitat : pénètre, comme le Blennius pavo, jusqu'à l'extrémité nord du grand lac Amer. Vit en quantité prodigieuse, surtout en hiver, sur les plages de Port Saïd par les fonds de 20 mètres. Est diffi- cilement capturé dans le canal où, cependant, il n'est pas très rare de le voir entre les pierres des enrochements. On en a apporté une cinquantaine d'individus au marché d'Ismaïlia en 1900. MuUus fuscatus Ruf. Rouget, Barbone ; arabe Barbone. Longueur 180 mm. Habitat: pénètre jusqu'au lac Timsah mais ne le dépasse pas. Est un des principaux éléments de la pêche du large à Port Saïd. N'avait pas été vu dans le canal avant 1899 : a commencé à se montrer à cette époque dans le lac Timsah, où il en a été pris de 800 à 900 en 1900 et à peu près autant en 1901. Cette migration LE CANAL DE SUEZ ET SA FAUNE ICHTHYOLOGIQUE 295 récente s'expliquerait-elle par le fait que le canal ayant été élargi, les déplacements des Poissons y sont moins gênés et plus faciles. Sardinella (Clupea) granigera C. V. Sardine; arabe Sardina. Lon- gueur 120 mm. Habitat : pénètre jusqu'au lac Timsah, et parfois, mais exceptionnellement, jusqu'aux lacs Amers. Extrêmement abon- dante, surtout pendant l'hiver, dans le port et l'avant-port de Port- Saïd ; se pêche également en grande quantité à Alexandrie où elle atteint une plus grande taille : 0™18. Nous n'en avons jamais vu plus de 2 à 3 kilogs à une même pêche du marché d'Ismaïlia : la plupart sont prises dans les lagunes du lac Timsah. Abm vulgaris C. V. Alose; arabe Sardina. Longueur 300 mm. Habitat : pénètre jusqu'au lac Timsah : parfois quelques individus qui s'engagent par les écluses dans le canal d'eau douce à Ismaïlia, sortent de ce canal, également par une éclusée, dans les lagunes à Suez. Assez commune à Port-Saïd en hiver : c'est également à cette saison qu'elles viennent à Ismaïlia, où on en a apporté 300 à 400 individus au marché en 1900. Mulets de la Méditerranée. Quatre des espèces de Mulets de la Méditerranée sont fixées dans les eaux de l'isthme: 1" Le Mugii cephaliis, Bouri, va jusqu'en rade de Suez, mais n'y est pas commun. 2° Le Mugil capito, Touhar, ne dépasse presque jamais les lacs Amers. 3'^ Le Mugil auratas, Hallili, va jusqu'aux lagunes de la sortie du canal à Suez, mais est très rare enradcd^Le Mugil saUens,Gherrane\, dépasse peu le lac Timsah. Les migrations de toutes ces espèces sont très complexes : plusieurs se reproduisent dans les lacs. Ils se capturent en quantités consitlérables et la valeur de leur pêche sur le marché d'Ismaïlia représente le tiers de la valeur totale : 25.000 fr. en 1900. ESPÈCES DE LA MER ROUGE Trichiurus liaumelaForsk. arabe Zef. Longueur 600 mm. Habitat : a pénétré en Méditerranée au moins jusqu'à Alexandrie. Séjourne peu dans le Canal et les lacs, mais est extrêmement commun dans le port de Port-Saïd, où cependant, le fait est à signaler, on ne prend jamais d'individus de grande taille. Hemiramphm Georgii ou Reynaldi Day. Aiguille. Longueur 200 mm. Habitat : a pénétré en Méditerranée, au moins jusqu'à Alexandrie. Très commun dans le canal et les lacs, où on le voit nageant en troupes, surtout en été, à la surface de l'eau. Les pêcheurs d'Ismaïlia le prennent, occasionnellement, avec les Anchois et les Sardines, ceux de Port-Saïd en prennent beaucoup dans le port même. 296 .T.-n. TILLIER Atkerina Forskalii Rûp. Capone; arabe Kachucha (1). Longueur 100 mm. Habitat : pénètre dans la Méditerranée, et va (sûrement) jusqu'à Alexandrie. Très commune dans le grand lac Amer, où elle se reproduit, assez abondante à Port-Saïd en été, se prend rarement dans le canal, où, vraisemblablement, elle séjourne peu. Mugit scheli C. V. Mulet; arabe Seliheh. Longueur, 200 mm. Habitat : pénètre jusqu'en Méditerranée et suit la côte ouest au moins jusqu'à Gemileh (entrée du lac Menzaleh). Vit en très grandes quantités dans les lacs Amers, et parfois le lac Timsah; il n'est pas rare d'en voir 100 à 200 kilogrammes, à un même marché d'Ismaïlia. Crenidens Forskalii C. V. Fausse Daurade; arabe Botteit. Lon- gueur 200 mm. Habitat : pénètre jusqu'au port de Port-Saïd, mais autant que nous avons pu le savoir, ne sort pas eu rade. Est un des Poissons les plus communs dans les eaux de l'isthme. Beaucoup émigrent vers la mer Rouge en avril pour revenir en juillet; se reproduit dans les lacs. H en a été apporté plus de 6.000 kilo- grammes au marché d'Ismaïlia en 1900. Pristipoma stridens Forsk. Calabrais ; arabe Chouc'rom. Longueur 200 mm. Habitat : péuètre jusqu'au lac Timsah et très rarement au nord de ce lac. Cependant des pêcheurs nous ont affirmé en avoir pris quelques-uns dans le port de Port-Saïd. Très. commun en rade de Suez ; un peu moins abondant que le Botteit {Crenidens Forskalii) dans les eaux de l'isthme; a les mêmes migrations ; ilen a été apporté environ 1.500 kilogrammes au marché d'Ismaïlia en 1900. Chrysoplirys haffara C.V. Fausse Daurade ; arabe Hafïara. Longueur 280 mm. Habitat : pénètre jusqu'au lac Timsah, exceptionnel- lement quelques individus isolés vont jusqu'à Port-Saïd. Emigré comme l'espèce méditerranéenne du même genre Chrysophnjs aurata; se trouve en assez grande quantité dans les lacs Amers, où il en a été pris, il y a quelques années, 4.000 individus environ d'un seul coup de filet. Gerres oblongus C.V. Arabe : Ariane. Longueur 300 mm. Habitat : pénètre en petit nombre jusqu'au lac Timsah et très rarement par individu isolé, jusqu'à Port-Saïd, Très abondant en rade de Suez et dans la partie sud des lacs Amers, mais surtout en été. On en a apporté 2.000 à 3.000 individus au marché d'Ismaïlia en 1900. Platycephalus insidiator C. V. Arabe : Rag'had. Longueur 400 mm. Habitat : pénètre jusqu'au grand lac à l'extrémité nord, duquel il (1) Les Ai-abfts le confondent ;ivec l'Anchois. LE CANAL DE SUEZ ET SA FAUNE ICHTHYOLOGIQUE 297 n'est pas très rare ; on en voit quelques uns dans le lac Timsah : et il en a été apporté eo une année cinq individus, dont un presque à l'état de frai, au marché de Port-Saïd. Il en a été vendu une centaine au marché d'Ismaïlia en 1900. ■ Clupea quadrimaculata Forsk. Sardine ; arabe Sardina. Longueur, 100 mm. Habitat : pénètre jusqu'au grand lac Amer où elle est commune au printemps, et rarement jusqu'aux lagunes du lac Timsah, où elle est toutefois beaucoup plus rare que la Clupea granigera de la Méditerranée. Belone choram Rup. Aiguille ; arabe Hermann. Longueur, 600 mm. Habitat : pénètre, mais eu très petit nombre, jusqu'au lac Timsah, mais est encore assez abondante à l'extrémité nord du grand lac Amer, surtout pendant l'été. Commune en rade de Suez. On eu a apporté environ 200 au marché d'Ismaïlia en 1900. Plotosus arab Forsk. Arabe : Yalak. Longueur, 2o0 mm. Habitat : ce Poisson, autrefois très rare dans les eaux de l'isthme, y devient de plus en plus commun : il dépasse peu les lacs Amers, où il gêne beaucoup les pêcheurs relevant leurs filets, la nuit ; la blessure de ses épines est, comme on le sait, très dangereuse, et les accidents deviennent nombreux. Quelques très rares individus viennent aujourd'hui jusqu'au lac Timsah, mais si le mouvement de migra- tion vers le nord continuait, il serait possible que ce lac fût bientôt envahi. Caranx djeddabali Forsk. Arabe : Barr'ha. Longueur, 300 mm. Habitat : pénètre jusqu'au grand lac Amer, parfois en troupes assez nombreuses, ne paraît pas y séjourner longtemps. De rares individus viennent jusqu'au lac Timsah. Nous n'avons pas vu plus d'une centaine de ces Caranx au marché d'Ismaïlia en 1900. Monacanthus setifer Beunett. Arabe : Kanzir. Longueur, 150 mm. Epinephclus tauvina Boul. Arabe : Kouchar. Longueur, 400 mm. SiUago siliama Day. Longueur, 150 mm. Teutkis {Amphacantus) siyanus Riipp. Arabe : Sigane. Longueur, 150 mm. Harengula punctata G. V. Arabe : Sardina. Longueur, 80 mm. Upeneus barherinus? Dây. Arabe : Barbone. Longueur, 150 mm. Tetrodon lunaris Day (1). Arabe : Pharaon. Longueur, 90 mm. Habitat : tous ces Poissons ne dépassent pas ou dépassent peu le petit lac Amer où on les trouve surtout pendant l'été. Ils vont rare- ment plus au Nord que la pointe de Kabret qui sépare le petit lac (1) Nous classons avec doute le Tétrodon dans la faune du canal. Assez abondant dans le petit lac Amer en 1890, il y était extrêmement rare l'année suivante. 298 J.-B. TILLIER Amer du grand lac. Ils sont du reste relativement rares, on ne peut cependant pas les ranger parmi les espèces erratiques, car on en prend chaque jour quelques-uns pendant la saison favorable. Espèces habitant les deux mers avant l'ouverture du canal. Hippocampus guttulatus C. Cheval marin ; arabe : Hossane el bahr'. Longueur, 70 mm. Se trouve en abondance sur tous les enroche- ments et sur toutes les plages herbues, mais aussi bien dans la région nord que dans la région sud du canal : il est donc difficile de savoir si l'espèce a pénétré par la Méditerranée, par la mer Rouge ou par les deux mers. D'après l'abondance relative de l'espèce dans les deux régions, on doit plutôt admettre l'entrée par la Médi- terranée. Sargus noct C. V. Sar ; arabe : Abou dagga. Longueur, 120 mm. Abondante en rade de Suez, extrêmement rare à Port-Saïd, l'espèce a doue vraisemblablement pénétré dans le canal par la mer Rouge. Il ne s'avance pas beaucoup plus loin que le grand lac Amer : on en prend cependant parfois — près d'une épave de barque — dans le lac Timsah. On peut résumer dans le tableau ci-contre les renseignements qui viennent d'être donnés en détail, au point de vue de leur habitat, sur les espèces fixées, c'est-à dire, suivant notre définition, sur les espèces pouvant être considérées comme composant la faune des eaux de l'isthme. On voit qu'au total, la faune ichthyologique du canal se compose de 41 espèces : 19 venant de la Méditerranée, 20 ayant pénétré par la mer Rouge et 2 appartenant, antérieurement, aux deux mers. Nous laisserons de côté, dans ce qui va suivre, ces deux dernières espèces : Hippocampus guttulatus et Sargus noct, mais en faisant remarquer que la première vient probablement de la Méditerranée et la seconde presque sûrement de la mer Rouge. De nombreux Marsouins, venant de la Méditerranée, fréquentent, en toute saison, les bassins du port à Port-Saïd ; quelques-uns s'engagent chaque jour, dans le canal, jusqu'à mi-chemin d'Ismaîlia et, quoique rarement, quelquefois plus loin. Une espèce de Marsouin de la mer Rouge pénètre également jusqu'au grand lac Amer, mais occasionnellement. LE CANAL DE SUEZ ET SA FAUNE ICHTHYOLOGIQUE 299 o > > V) d s a « c = ~ ^ 8 .^ a. s se ^ ç» '" i= s co k: ^ s s s g ^ g I S 1 1 S !■! ^ ^ ^ ti >. :^ K « ^ •=; .2^ ^ -S Os Cîs OO ^ ^ ^ ., O 'S S co S «) î,5 !^ ->î ce liJimM. iHJ4.U.J.J * es: ï S. f-< 03 ■« ? > ■5|d i|i d ■2 u I K .£ .| ■e £ -S ^ & o s « e i> o a. ^ "ï! -2 S! "O 22 ÛH Ci, g 1 s -^ 5 ?= ^ >= i. => ï S « ^ *> '^ =3 ^ s s -2 S 5 S.^ Oh ^ S 1^ C/3 5 S -; S a, ^ S ►2 >?< t^.tH„^....l..iJJ.LJAJU- i U »» -«^m-c-H..^^». 300 J.-B. TILLIER III. — PEUPLEMENT DES EAUX DU CANAL CONDITIONS D'EXISTENCE DES POISSONS DANS SES EAUX CARACTÈRE DE SA FAUNE AU POINT DE VUE ZOOGÉOGRAPHIQUE. § 1. Peuplement des eaux du canal. Une des premières questions qu'on ait à se poser est celle de savoir si la faune des eaux de l'Isthme a pénétré graduellement et lentement dans le nouveau milieu qu'elle venait occuper, ou si, au contraire, toutes les espèces qui la composent ont envahi en masse la nouvelle voie qu'elles rencontraient devant elles. Quoi- qu'aucune recherche n'ait été faite à ce sujet au début de l'exploi- tation, il n'est pas très difficile de répondre, d'une façon assez précise, à cette question. Les travaux, commencés en 1863, ont été terminés seulement en 1869, et le canal, avant d'avoir sa forme et ses dimensions actuelles, se présentait, surtout du côté de Port-Saïd, sous l'apparence d'une rigole de faible largeur et de 2 à 3 mètres de profondeur dans laquelle travaillaient les dragues. Les plus anciens employés de la compagnie, qui, à cette époque, habitaient sur les chantiers, se sou- viennent qu'on faisait déjà des pêches fructueuses dans la rigole. De plus nous voyons, dès cette époque, le gouvernement égyptien, se préoccupant de l'intérêt des pécheurs indigènes, faire insérer, dans un acte de concession de la compagnie, uu article spéci- fiant que la pêche serait libre de tous droits de transit dans le canal et les lacs : une telle précaution n'aurait pas été prise si les produits de la pêche n'avaient pas eu déjà une certaine importance. Enfin nous pouvons ajouter une observation qui nous est person- nelle, faite en juin J87I, un an à peine après l'ouverture du canal à la grande navigation. Dans une traversée que nous avons eu occasion de faire à cette époque sur un grand navire, nous avons remarqué — et c'était une des distractions des passagers — que de très nombreux Poissons restaient à sec sur la risberme dans la dénivellation produite par le mouvement de la carène, jusqu'au moment où la volute qui suit les bâtiments en marche, les prenait pour les ramener dans les grands fonds. La plupart de ces Poissons étaient des Khalils [Sciœna aquila), quelques-uns de très grande taille, qui devaient nécessairement trouver, dès cette époque, en quantité suffisante dans le canal, les Mulets qui sont leur proie ordinaire. On comprend du reste que les Mulets eux-mêmes aient LE CANAL DE SUEZ ET SA FAUNE IGHTHYOLOGIQUE 301 pénétré dans les eaux de l'isthme tout-à-fait au début : les troupes innombrables de ces Poissons qui longent le rivage et entrent dans le lac Menzaleh par l'étroite ouverture du bogliaz de Gemileh n'ont pas dû, en elïet, éprouver d'hésitation à pénétrer dans les passes de Port-Saïd qui sont au moins aussi larges que le boghaz. Il y a donc, en résumé, des probabilités sérieuses pour admettre que les eaux du canal se sont très rapidement peuplées. Quoiqu'il en soit du reste, les Poissons y sont aujourd'hui fort abondants. On a pu le voir en parcourant les notices relatives à chaque espèce : les remarques suivantes permettront au lecteur de se faire une opinion tout à fait précise à ce sujet. Les Poissons vendus au marché d'Ismalïa en 1900 représentaient une valeur totale de 75.000 francs. Les petites espèces, peu estimées, se vendant en moyenne 0 fr. 90 le kilogramme et les grosses environ un franc, cette somme totale de 75.000 francs représente un npmbre très considérable d'individus ( 1 ). D'autre part, et quoiqu'il soit assez difTicile de donner une statis- tique exacte du nonibre, fort variable, des barques et canots de pèche qui exercent leur industrie dans l'isthme, on peut admettre, qu'en moyenne, 20 à i-io embarcations de dimensions diverses quittent chaque jour les ports de Suez, d'Ismalïa et de Port-Saïd pour pêcher dans le canal et les lacs. Les équipages étant de 2 à 4 et 6 hommes, on voit que la pêche dans les eaux de l'isthme pro- prement dit, c'est-à-dire en exceptant les rades de Port-Saïd et de Suez, nourrit une population de 100 à 150 pêcheurs. Comparés au peu d'étendue des eaux du canal, ces chiffres prouvent, par eux-mêmes, que les Poissons y sont abondants. La consommation est, du reste, considérable, car en dehors des besoins des habitants et des envois assez importants faits au Caire, la pêche doit fournir aux demandes des très nombreux navires à passagers qui fréquentent le canal (2). (1) Le marché d'Ismaïlia est loin de recevoir tous les Poissons du canal, puisque, comme nous l'avons vu, il est approvisionné par des pèches se faisant entre le kilomètre ciO et le milieu, à peu près, du grand lac Amer : c'est le 1/3 de la lon- gueur du canal environ, mais il est vrai, la partie la plus poissonneuse. (2) Les paquebots des trois grandes compagnies postales : Messageries mari- limes, Péninsulaire et Orientale, Nordeutsclier Lloyd, font à chacun de leurs séjours à Port-Saïd, tant à l'aller qu'au retour, des provisions de Poissons. En 1901, les Messageries Maritimes ont fait acheter sur le marché de cette ville 74,000 kilogrammes de Poisson représentant une valeur totale de 64,000 fr. Les achats de la compagnie Péninsulaire et Orientale ont dépassé t2.o,000 francs, et ceux de N. Lloyd 100.000 fr. La plus grande partie de ce Poisson vient du lac Menzaleh et de la mer, mais un tiers environ vient du port et du canal. 302 j.-b. tillier § 2. — Conditions d'existence des Poissons dans les eaux DE l'isthme. Si le lecteur veut bien se reporter aux détails que nous avons donnés sur la salure des eaux de l'isthme, leur température, les courants et la nature des fonds sous-marins, il verra que les condi- tions d'existence des Poissons habitant normalement la région ne sont pas les mêmes que celles de leur milieu d'origine. Ces condi- tions sont surtout différeates en ce qui concerne le canal creusé entre berges, dont nous nous occuperons tout d'abord, avant d'étu- dier ces mêmes conditions dans les lacs. Canal proprement dit. — On peut déduire des renseignements qui ont été donnés ci dessus, dans les notices relatives à chaque espèce, que quelques-unes d'entre elles habitent normalement les eaux du canal resserré entre berges, alors qu'elles sont très peu abon- dantes ou très rares dans les lacs, tandis que d'autres ne paraissent séjourner que très peu dans le chenal, probablement à peu près pendant le temps nécessaire pour aller de leur mer d'origine aux lacs, et qu'entîn d'autres formes, moins nombreuses, ne s'arrêtant pas ou très peu dans les lacs, semblent passer presque directement d'une mer à l'autre. Pour citer un exemple de chaque groupe, nous avons vu que Umhrina vulgaris se prend presque exclusivement dans le canal ; Solea lascaris, presque jamais ailleurs que dans les lacs, et que Trichiurus haumela venant de la mer Rouge, très abon- dant à Port-Saïd, ne se prend qu'exceptionnellement soit dans le canal soit daus les lacs. Le chenal creusé est donc, à la fois, un lieu de passage (de transit pourrait-on dire, pour employer l'expression usitée pour les navires) pour uu assez grand nombre d'espèces, et un « milieu » constituant un véritable habitat, pour un certain nombre d'autres. Comme « lieu de passage » et relativement aux conditions d'exis- tence des Poissons, le canal diffère des mers qu'il réunit à deux points de vue : d'abord il constitue un espace extrêmement réduit si on le compare aux étendues d'eau des plages de Port-Saïd et de la baie de Suez, et, ensuite, il est sans cesse parcouru par de nom- breux navires occupant la plus grande partie du cube d'eau dispo- nible. Nous ne devons nullement nous étonner de voir de nombreuses espèces vivant dans les espaces presqu'illimités vers le large des mers ouvertes, ne pas hésiter à s'engager dans un chenal aussi resserré que le canal, car les mêmes conditions, ou des conditions LE CANAL DE SUEZ ET SA FAUNE ICHTUYOLOGIQUE 303 presqu'identiques se retrouvent ailleurs dans la nature. Sur presque toutes les eûtes, en effet, il existe des lagunes des baies ou des golfes communiquant avec la mer par des passes souvent assez longues et contournées et parfois en même temps très étroites, ayant quelque analogie avec le canal. Les étendues d'eau communiquant ainsi avec les mers sont presque toujours très peuplées, surtout eu cer- taines saisons et, pour beaucoup d'espèces particulièrement à celle de la reproduction. Leur faune ichthyologique se compose toujours des mêmes formes que celle de la mer voisine. Les Poissons sont donc, si l'on peut s'exprimer ainsi, « habitués » à s'engager dans des chenaux étroits, et les conditions artificielles dans lesquelles ils se trouvent à cet égard aux deux entrées du canal, ne diffèrent pas beaucoup d'autres conditions tout à fait naturelles (1). On com- prend donc sans peine que beaucoup d'espèces puissent s'engager dans le canal de Suez. Nous comprenons très difficilement au contraire que le transit des navires n'oppose pas un obstacle presque insurmontable à la translation et surtout à la vie des espèces. Le canal est parcouru chaque jour par plus de dix grands navires : beaucoup déplacent 10.000""=, quelques-uns près de 20.000 ■"«. Leur vitesse moyenne est de 10 kilomètres. Lorsqu'un navire de 10.000 "^'^ de déplacement est en translation, à cette vitesse, dans les seuils, il occupe une grande partie de la cuvette et laisse entre sa carrière et la berge un cube d'eau disponible ne dépassant pas 35.000 "'''. Cette eau, d'abord refoulée sur la rive, se précipite ensuite brusquement dans le vide produit par le déplacement du navire : elle est donc agitée de courants extrêmement violents et, de plus, remuée en tous sens par les tourbillons d'une extrême intensité résultant de la rotation des hélices : ces tourbillons se font sentir de la surface jusqu'au fond. Dans ces conditions, il paraît à priori évident qu'à chaque passage de navire, les Poissons, pendant qu'ils se trouvent entre la carène et la berge, risquent d'être précipités violemment soit sur la coque, soit sur les talus : et cependant comme jamais on n'en voit aucun remonter à la surface de l'eau tué ou blessé, on doit nécessairement admettre qu'ils savent échapper aux dangers que leur font courir les violents courants dans lesquels ils sont obligés de se mouvoir (2). (1) Le lac Menzaleh est un des plus poissonneux du monde. Sa faune est presque tout entière composée d'espèces marines, et il communique avec la Méditerranée par une embouchure à peine plus large que les passes de l'avant- port de Port-Saïd. (2) Nous pouvons faire remarquer ici, que, toutes proportions gardées, les Poissons vivant dans les canaux d'eau douce où la navigation est active sont dans des conditions à peu près semblables. 304 J. B. TILLIER A l'autre point de vue auquel nous devons maintenant nous placer, celui du canal habité normalement par des espèces qui ne font pas que le traverser mais y vivent fixées et à demeure, nous remarquerons d'abord que relativement à la température des eaux, à leur densité, à leur salure et aux courants, la région qui va de Port-Saïd au lac Timsah diiïère peu de la Méditerranée et que celle allant de Suez aux lacs Amers diffère également peu de la mer Rouge. Il n'eu est pas de même de la nature des fonds sous-marins. Stables et naturels dans les deux mers, ces fonds sont, sur le plafond du canal, sans cesse remaniés par des dragages et sans cesse recouverts par des apports sur les talus. On pourrait donc être tenté de les considérer comme absolument stériles. Il n'en est rien cependant. Comme les dragages ne sont exécutés, en moyenne, dans la même région, que tous les trois ans, et comme les apports se font très graduellement et, par conséquent, très lentement, une flore assez riche et une faune assez abondante d'organismes marins inférieurs, et, notamment, de mollusques, peuplent les fonds du Canal. Les Poissons, du moins les espèces qui trouvent leur nourri- ture dans cette flore et dans cette faune, ont donc pu trouver des conditions favorables pour se fixer dans ce milieu tout spécial. Leur présence permanente à dû attirer d'autres formes auxquelles elles servent elles-méme de proies. Le résultat final a été que 3 espèces de Poissous au moins (voir notices) sont assez communes dans le canal et assez rares dans les lacs pour qu'on puisse considérer comme leur habitat réel le chenal étroit resserré entre berges. Les lacs. — Dans les lacs les Poissons tant de la Méditerranée que de la mer Rouge retrouvent, sinon l'espace illimité de leurs mers d'origine, du moins, un espace sulTisant pour que, à ce point de vue, il n'y ait pas à tenir compte de diflérences sensibles : ils ne sont plus gênés en rien par le transit des navires : enfin les fonds sous-marins qui se sont peuplés par des organismes des deux mers sont stables et ont pu se recouvrir d'une flore et d'une faune abondantes et variées. Dans le lac Timsah, comme dans la Méditerranée, il n'y aucun courant : et il en est de même dans le grand lac Amer. Mais à côté de ces similitudes, dont on semblerait pouvoir con- clure, à priori, que toutes les espèces y trouvant une nourriture appropriée ont dû s'acclimater dans les lacs, nous trouvons une énorme difiéreuce dans le degré de salure des eaux. Cette différence qui subsiste en toute saison pour le grand lac Amer existe surtout eu hiver dans le lac Timsah. Elle est si considérable (voir page 286) LE CANAL DE SUEZ ET SA FAUNE ICHTHYOLOGIQUE 305 que nous avons été amenés à penser, avant toute recherche précise, que le grand lac Amer devait être à peine peuplé et servir en quelque sorte de barrière naturelle entre les deux mers. La pre- mière pêche que nous y avons faite nous a démontré combien était grande notre erreur : le lac est très abondamment peuplé et il a fallu reconnaître que beaucoup d'espèces sont à peu près indiffé- rentes au degré de salure des eaux, du moins dans les proportions, cependant très élevées, dont il s'agit — du simple au double, 75 kilogrammes au me. au lieu de 35 kilogrammes pour les formes méditerranéennes — On a fait, du reste à ce sujet, quelques expé- riences, paraît il, assez concluantes : nos recherches prouvent, avec toute la différence qu'il peut y avoir entre des expériences de labo- ratoire et des faits naturels, combien certaines espèces sont « plas- tiques » à cet égard. Nous avons trouvé une autre preuve de cette « indifférence » dans une étude spéciale que nous avons entreprise de la répar- tition des Poissons de mer dans les différentes lagunes, quelques- unes à peine salées, du lac Timsah. Ce serait sortir de notre sujet que d'énumérer ici les faits que nous avons relevés, mais il nous paraît intéressant de signaler que dans l'eau presque douce (8 kilogrammes au me.) des lagunes de la rive Afrique nous avons capturé les espèces suivantes : Sciœna aquila, Solea lascaris, Morone punctata, Temnodon saltator, et toutes les formes de Mulets de la mer Rouge et de la Méditerranée. En résumé le grand lac Amer, extrêmement salé en toutes saisons, et le lac Timsah, très salé en été dans sa partie centrale, nourrissent une faune très-abondante (1). Quel a été le résultat d'ensemble des différences et des simili- tudes dans les conditions d'existence (relativement aux mêmes conditions d'esmis dans les mers voisines) que nous venons d'énu- mérer ? Nous pensons avoir vu à peu près toutes les espèces de Poissons de la Méditerranée habitant sur les plages de Port-Saïd : et aussi à bien peu d'exceptions près toutes les formes érythréennes vivant dans la baie de Suez. I^e total, de ces espèces réparties en trois groupes suivant qu'elles sont fixées dans les eaux du Canal, erra- Il) Nous ne pensons pas qu'il soit bien utile d'eavisaf^er spécialement le petit lac Amer. On peut la considérer comme étant pour ainsi dire, une prolonjL^ation de la baie de Suez, car la salure des eaux, leur température, leur densité et même les courants y sont à peu près semblables aux mêmes éléments dans la mer Rouge. Mém. Soc. Zool. de Fr., 1902. xv. — 40. Méditerranée M 1er Rouge 19 20 19 20 7 29 306 J.-B. TILLIER tiques ou absentes de ces eaux, est donné dans le tableau suivant Répartition des Espèces Espèces fixées Espèces erratiques Espèces n'entrant jamais dans le canal. Total. . 45 69 114 En ajoutant à ce total deux espèces communes aux deux mers avant l'ouverture du canal, on obtient un total de 116 espèces (1), 41 seulement, c'est-à-dire à peu près le tiers, se sont adaptées à vivre dans les eaux de l'isthme, ou tout au moins peuvent y vivre un certain temps. Nous devons nous demander si les 75 formes qui habitent les mers voisines, sans jamais pénétrer ou en pénétrant à peine dans le canal, restent confinées dans leur milieu d'origine par suite des obstacles dont nous avons parlé : espace resserré, transit des navires, nature des fonds sous-marins, ou si d'autres circonstances inter- viennent. Nous sommes encore, malgré l'importance des recherches rela- tives au plankton, extrêmement ignorants des lois qui régissent la distribution géographique des Poissons de mer ; et c'est à peine si, tout récemment, la Commission des pêches des États-Unis, et les naturalistes allemands de Kiel, sont arrivés à quelques résultats scientifiques établis à ce sujet. On en est encore, dans presque tous les cas, réduit à constater les faits sans pouvoir en donner aucune explication certaine : il est bien établi toutefois, et depuis long- temps que, malgré la plus grande perméabilité du milieu, certaines espèces marines sont aussi strictement confinées que peuvent l'être les formes terrestres les plus complètement localisées, tandis que d'autres formes sont, au contraire, pour ainsi dire à peu près cos- mopolites (formes littorales et formes pélagiques). Entre ces deux extrêmes on trouve, bien entendu, tous les modes possibles d'ex- tension. Nous avons essayé, en comparant deux milieux communiquant depuis des périodes géologiques reculées et cependant différents, de nous rendre compte du nombre des espèces communes à ces deux milieux à la fois. Nous avons envisagé, pour cette compa- raison, la Manche et la Méditerranée. Dans l'ouvrage du D-" Moreau (Histoire natureUe des Poisso7is de France), les espèces citées (1) Nous donnons plus loin la liste de ces espèces. LE CANAL DE SUEZ ET SA FAUNE ICHTHYOLOGIQUE 307 comme communes ou très communes sur nos côtes sont au nombre de 225. Sur ce total 40 espèces, c'est-à-dire 18 %, se trouvent à la fois dans les deux mers. Etant donné que nous n'avons tenu compte que des espèces mentionnées comme communes ou très communes, cette proportion de 18 % est sûrement un minimum. Ainsi 40 formes ichthyologiques sont assez « plastiques », si l'on peut s'exprimer ainsi, relativement aux milieux qu'elles habitent, pour trouver des conditions d'existence favorables, dans deux mers différant entre elles autant que diffèrent la Méditerranée et la Man- che au point de vue de la température des eaux, de leur densité, de leur salure, de la nature des fonds, de la profondeur et même des courants violents dans la Manche et pratiquement nuls dans la Méditerranée. Une autre preuve, plus positive encore, de cette sorte de « plasti- cité » nous est donnée par l'extension en profondeur de certaines espèces à la fois littorales et presqu'abyssales. Par analogie nous devrions donc conclure de nos recherches que les espèces méditerranénnes et érythréennes qui peuplent les eaux de l'isthme ont quitté leur milieu d'origine pour se fixer dans un milieu nouveau et différent, par suite d'une aptitude « organique spéciale » qui les rend moins sensibles que d'autres espèces à des changements dans les conditions de la vie. Cette conclusion générale ne donnerait aucune explication des faits, puisqu'elle consisterait à dire, en résumé, que les Poissons qui ont changé d'habitat sont ceux qui sont les mieux adaptés à ce changement. Nous allons montrer qu'en envisageant non plus l'ensemble des espèces, mais chaque groupe d'espèces semblables en particulier, ou peut, à quelque degré tout au moins, donner les raisons qui ont fait que certaines formes ont pu s'adapter au milieu nouveau, alors que d'autres restaient confinées dans leur mer d'origine. 11 résulte d'un relevé que nous avons fait que^Iesjl4 espèces de Poissons habitant les deux mers, dans les environs immédiats des embouchures du canal, se répartissent en 35 familles (1). Sur ce nombre 7 familles sont représentées par 5 espèces ou plus ; 3 par 4 espèces, 2 par 3 espèces, et 23 par une ou deux espèces seulement. Au sujet des familles les plus nombreuses en espèces, et ce sont (1) Nous avons considéré comme famille le groupe entier des Squales et celui des Raies. 308 J.-B. riLLIER celles qui nous intéresseut particulièrement, nous pouvons faire les remarques suivantes. Quoique les Raies, les Squales (1) et les Labridés soient repré- sentés sur les plages de Port-Saïd et dans la baie de Suez, respec- tivement par 6, 5 et 7 espèces, aucune forme de ces trois familles ne s'est fixée dans les eaux du canal, c'est à peine si quelques rares individus du groupe des Raies y pénètrent tout à fait exceptionnel- lement. Nous comprenons assez aisément l'absence des Labridés : les Poissons de ce groupe vivent presque tous sur des fonds de roche ou d'Algues et, souvent, sur des fonds de Corail, et ils ne trouve- raient sans doute pas la nourriture et l'abri qui leur conviennent sur les fonds réguliers et partout plus ou moins meublés du canal : tous ceux qui habitent la baie de Suez sont du resté de couleurs extrêmement brillantes. Peut-être devons-nous chercher également dans l'absence de leur proie ordinaire les raisons qui empêchent les Raies de quitter leur habitat d'origine. Les Squales, au contraire, se nourrissant, pour la plupart, de Poissons vivants, trouveraient aisément dans le canal et les lacs, les proies qui leur conviennent. Nous avons capturé presque toutes les espèces de Squales de la Méditerranée et de la mer Rouge en amorçant nos lignes avec des Poissons du canal. Il est donc probable que d'autres raisons s'opposent à ce qu'ils pénètrent dans les eaux de l'isthme ; et, étant donné que les Squales de la plage de Port- Saïd et de la baie de Suez atteignent tous une grande taille, on peut vraisemblablement admettre que les obstacles dont nous avons parlé et que crée pour le déplacement des Poissons le transit des grands navires, suffisent pour les empêcher de s'engager dans un chenal étroit et resserré. A côté de ces trois groupes qui n'ont aucun représentant dans le canal, nous trouvons deux familles dont toutes les espèces (à une exception près, Mugil chelo) y sont représentées : les Mugilidés et les Clupeidés. On connaît les habitudes errantes des Mulets qui, dans toutes les (l)Nous avons entendu souvent émettre l'opinion que les Requins de la mer Rouge avaient pénétré dans la Méditerranée par le canal : c'est une erreur. Il y a eu de tout temps des Squales, quelques-uns dangereux, sur les plages de Port-Saïd (et à Alexandrie). On nous a cité un accident remontant à 1867 et nous en avons vu se produire deux, de 1884 à 1902. — Un homme blessé et un enfant tué. — Pour ce dernier cas le Requin a été pris : il était de la Méditerranée. Nous pouvons affirmer que jamais un Squale ni jeune, ni adulte n'a été vu ni dans le canal, ni dans les lacs. LE CANAL DE SUEZ ET SA FAUNE ICHTHYOLOGIQUE 309 mers, pénètrent, en grandes troupes, dans les baies et les enmbou- chures des fleuves. Il n'est donc pas étonnant qu'ils soient extrême- ment abondants dans l'isthme. Pour cette famille il faut probable- ment admettre, comme pour toutes celles qui sont très cosmopo- lites, la « plasticité » spéciale relativement aux conditions du milieu, dont nous avons parlé. La grande famille des Glupeidés est représentée par 5 espèces (1). L'une d'entre elles, Engraulis encrassicholus, de la Méditerranée, passe nettement d'une mer à l'autre. Les deux autres espèces médi- terranéennes s'arrêtent au lac Timsah : les deux espèces de la mer Rouge dépassent peu les lacs Amers. Plusieurs de ces espèces se reproduisent sûrement dans les eaux de l'isthme ; elles y sont donc tout à fait acclimatées. Nous avons indiqué que les Aloses, qui viennent jusqu'à Ismaïlia, sont de taille très inférieure à celle des individus capturés dans les bassins de Port-Saïd, et qu'il en est de même des Sardi}ieUa granigera de Port-Saïd comparées à celles des environs d'Alexandrie. Nous remarquons que toutes les espèces de cette famille sont de petite taille et que les obstacles dont nous avons parlé doivent assez peu les gêner dans leurs translations. Cette manière de voir est corroborée par le l'ait intéressant que les deux espèces méditerranéennes sont extrêmement abondantes dans les bassins de Port-Saïd où la navigation est extrêmement active et qui sont sillonnés en tous sens, de jour et de nuit, par de très nom- breux canots à vapeur et remorqueurs. D'autre part, en considérant que les deux formes de la mer Rouge s'arrêtent aux lacs Amers et que deux des formes de la Méditerranée ne dépassent pas le lac Timsah, nous devons être portés à admettre que la famille, dans son ensemble, n'est pas du nombre de celles qui sont très indiffé- rentes aux conditions du milieu. Les deux autres familles, représentées dans les deux mers par plus de cinq espèces et dont il nous reste à nous occuper, sont celles des Percidés et des Sparidés. La première est représentée par 18 espèces réparties en 7 genres ; la deuxième par 10 espèces réparties en 6 genres. De ces 13 genres nous pouvons laisser de côté ceux qui ne comprennent qu'une unique espèce et qui sont au nombre de 5 pour les deux familles. Les remarques et considérations diverses suivantes peuvent être présentées au sujet des 7 autres genres. (1) Nous avons laissé de côté ime Dussumiéria, prise une seule fois dans le canal et qui est des mers de Chine. 310 J.-B. TILLIER Epinephelus. — Des neuf espèces de ce genre, une seule, E. œneus, de la Méditerranée, est nettement fixée dans le canal, où elle n'est pas rare, car VF. tauvina de la mer Rouge entre à peine dans le petit lac Amer. Il est intéressant de remarquer que la seule espèce fixée est de teinte générale uniforme et sombre et que les autres sont toutes tachetées ou de couleurs brillantes. Si VF. cabrilla, qui n'est pas rare en rade de Suez, a pénétré dans la baie par le canal, comme il ne se voit jamais aujourd'hui dans l'isthme et qu'il est de couleurs assez vives, nous aurions un exemple remarquable du rôle qu'ont pu remplir les couleurs des Poissons dans la répartition des espèces. Morone. — Il y a dans la Méditerranée deux espèces du genre Morone : toutes deux sont bien fixées dans les eaux dju canal. L'une d'elle, M. punctata, y est très commune. Ce sont deux espèces assez proches alliées pour qu'on les ait considérées pendant longtemps comme deux formes, à des âges difïérents, de la même espèce. Pristipoma. — Le P. Bennetii de la Méditerranée n'entre pas dans le canal ; le P. stridens de la mer Rouge vient jusqu'à Ismaïlia, rarement plus loin; il est très commun dans la région sud. Les deux espèces sont assez voisines. Chnjsophrys. — On trouve dans le canal, où elle pénètre en plus grande abondance à certaines saisons, mais où il en reste toujours quelques individus, la C. aurata de la Méditerranée. Des deux espèces très voisines de la mer Rouge, l'une, C. haffara, vient en grand nombre jusqu'à Ismaïlia, l'autre, C. sarba, n'entre jamais, mais elle est assez rare dans les environs immédiats de Suez. La troisième espèce, C. bif'asciata, ne se voit que par exception dans le petit lac Amer : elle est de couleur brillante. Pagrus. — Les trois espèces des deux mers ne s'engagent pas dans les eaux de l'isthme ; et cependant, une des espèces de la Méditer- ranée, et le P. spinifer de la mer Rouge sont parmi les Poissons les plus communs des environs immédiats des embouchures du canal. Sargus. — Nous en trouvons trois espèces dans la Méditerranée. L'une d'elles, S. noct, se trouvait dans les deux mers avant l'ouver- ture du canal : — elle est actuellement confinée dans la région sud. — Les deux autres, communes dans l'avant-port à Port-Saïd, n'entrent pas dans le canal proprement dit. Lethrinus. — Le genre est représenté par trois espèces en rade de Suez. Aucune n'a jamais été vue, même à l'entrée du canal. Elles sont toutes trois de couleurs assez vives. Crenidens. — Une espèce d'un groupe très voisin de celuidesSa?'^us, LE CANAL DE SUEZ ET SA FAUNE ICHTHYOLOGIQUE 311 C. Forskalii, est un des Poissons les plus communs, sinon même le plus commun de tous les Poissons de l'isthme. Il passe d'une mer à l'autre et n'est pas rare, en été surtout, à Port-Saïd. Nous énumérerons maintenant un certain nombre de genres, appartenant à des familles qui ne sont représentées que par deux espèces à Port-Saïd et à Suez et qui donnent lieu à des remarques analogues à celles que nous venons de faire pour les genres de Percidés et de Sparidés. Lichia. — Des deux espèces vivant dans la Méditerranée, l'une, VAmia, se prend assez souvent dans le canal, et les individus qu'on capture sont tous de très grande taille. Nous n'avons vu, de l'autre espèce, L. glaycos, que deux sujets très jeunes dans les bassins de Port-Saïd. Hemiramphus. — Ou trouve, dans la baie de Suez, deux espèces d'HemirainpIius. Celle de petite taille, H. Georgii (ou ReynakU) s'engage en troupes considérables par Suez, se pêche en grande quantité dans les bassins de Port-Saïd, et va jusqu'à Alexandrie. L'autre, très proche alliée, H. far, ne quitte pas la baie de Suez, et c'est à peine si on en voit quelques très rares individus isolés à l'entrée sud du petit lac Amer. Teuthies. — Il y a deux espèces de Teuthies dans les environs immédiats de l'embouchure du canal dans la mer Rouge. La T. siganm va jusqu'au grand lac, sans y pénétrer cependant. L'autre espèce n'a jamais été vue en dehors de la baie. Platijceplialus. — Une des deux espèces de la mer Rouge, P. insi- diator, vient, quoiqu'en petit nombre relativement à son abondance, à Suez, jusque dans le lacTimsahet parfois même jusqu'à Port-Saïd. L'autre espèce, qui est aussi abondante et très proche alliée, ne pénètre jamais dans le canal. Enfin, et pour terminer cette revue des espèces des eaux de l'isthme, nous remarquerons que la famille des Sciainidés est représentée en Méditerranée par deux espèces seulement et que de ces deux, l'une, Sclœnii aquila, vit dans le canal et les lacs, eu quan- tités souvent prodigieuses, et l'autre, d'un genre différent il est vrai, Umbrina viilgaris, paraît être la forme la plus uettement adaptée au nouveau milieu dans ce qu'il a de tout à fait spécial, puisqu'elle est abondante dans le chenal proprement dit et fort rare dans les lacs. Tous ces faits sont, évidemment, très complexes : on peut cepen- dant en tirer, non à la vérité, comme nous l'avons dit, une loi gêné- 312 J.-B. TILLIER raie, mais quelques conclusions particulières, qui seront les sui- vantes : 1° Certaines espèces ont dû rester confinées dans leur mer d'ori- gine par suite des obstacles et même des dangers que créerait pour leurs translations le transit des grands navires ; 2° La grande loi biologique générale dans les milieux naturels de la difficulté qu'éprouvent les espèces à habiter une région occu- pée par des espèces proches alliées se vérifie dans beaucoup de cas pour le milieu cependant artificiel et récent du canal : mais on peut citer un certain nombre d'exceptions ; 3° Le système de coloration a dû avoir une certaine influence sur la répartition des espèces puisque, à très peu d'exceptions près, toutes celles qui se sont fixées dans le canal ne sont pas de couleur très brillante ; 4» Un assez grand nombre de faits généraux tendent à prouver qu'il existe des groupes entiers d'espèces s'adaptant plus facilement que d'autres à des conditions d'existence qui nous paraissent très différentes : des faits particuliers de même nature, mais spéciaux à la faune ichthyologique du canal, démontrent que cette « plasticité » existe pour les espèces du même groupe, et qu'elle a joué un rôle assez important dans le peuplement des eaux de l'isthme. § 3. — Caractère de la faune du canal AU POINT de vue zoogéographique Le peuplement a-t-il été le résultat de l'émigration d'espèces méditerranéennes ou, au contraire, d'espèces érythréennes, ou s'est-il fait, à la fois, par les espèces des deux mers ? C'est ce que nous allons rechercher. En laissant de côté les deux espèces qui habitaient antérieurement la Méditerranée et la mer Rouge, et pour lesquelles nos renseigne- ments ne sont pas absolument certains, la faune du canal com- prend, comme nous l'avons vu, au total, 39 espèces, se répartissant à peu près également entre les deux milieux d'origine, puisque 19 espèces viennent de l'une des mers et 20 de l'autre. Le canal s'étant ainsi peuplé à peu près également par le nord et par le sud, on pourrait, à priori, conclure que sa faune actuelle, résultant du mélange des deux faunes par parties égales, a un carac- tère mixte. En analysant les faits de plus près, la conclusion à laquelle on arrive est un peu différente. Nous avons vu que 114 espèces de Poissons, au total, habitent les deux mers dans les environs immédiats du canal et que, sur ce LE CANAL DE SUEZ ET SA FAUNE ICHTHYOLOGIQUE 313 nombre, 45 appartiennent à la Méditerranée et 65 à la mer Rouge, Sur les 45 espèces de la Méditerranée, 29, c'est à-dire 44 %, se sont fixées dans le canal ; sur les 69 espèces de la mer Rouge, 21, c'est-à-dire 30 «/o seulement, sont dans le même cas. De plus 7 seulement des espèces des plages de Port-Saïd (15 "/o) n'entrent jamais dans le canal, tandis que la même proportion pour la mer Rouge des espèces n'entrant jamais dans les eaux de rislhme est de 42 o/o. Ces chiffres permettent, jusqu'à un certain point du moins, d'admettre que dans leur ensemble, les formes méditerranéennes s'étant tîxées en nombre relativement beaucoup plus grand, sont mieux adaptées à la vie dans le canal. D'autres considérations viennent du reste à l'appui de cette manière de voir. En nous reportant au tableau par lequel nous avons fait connaître les régions occupées par les espèces, nous voyons que o formes médi- terranéennes ne dépassent pas le lac Timsah et que 9 formes de la mer Rouge ne dépassent pas les lacs Amers. Ces 14 espèces ne peuvent pas être laissées de côté dans un catalogue de la faune du canal, mais ce ne sont évidemment pas elles qui doivent lui donner un caractère spécial, puisqu'elles restent dans le voisinage de leur merd'origiue.etil convient plutôt, à ce pointde vue, d'envi- sager les 25 autres espèces. Sur ces 25 espèces occupant soit la totalité, soit les deux tiers au moins de l'étendue du canal, 14 sont de la Méditerranée et 11 de la mer Rouge. Sur les 14 espèces de la Méditerranée, 10 sont représentées dans les eaux de l'isthme par de nombreux ou de très nombreux individus. Sur les 11 espèces de la mer Rouge 5 seulement sont communes, les 7 autres sont rela- tivement peu abondantes en individus. La partie la plus importante de la population ichthyologique du canal, si l'on pouvait s'exprimer ainsi, est donc certainement fournie par la Méditerranée. Nous pouvons ajouter une remarque intéressante. A trois excep- tions près, Epincphelus taucina, Belone choram, Trichiurus hau- mela, toutes les formes érythréennes qui habitent normalement le canal, sont de petites espèces, tandis que sur les dix-neuf espèces de la Méditerranée, cinq seulement sont de petite taille. Il n'est sans doute paspossible de trouver une explication de ce fait, mais, à quelque degré, il s'ajoute dans le même sens à ceux que nous venons de citer. Aussi, s'il nous fallait classer la région du canal dans une pro- 314 J.-B. TILLIER vince ichthyologique, proposerions-nous de la considérer comme faisant partie de la province méditerranéenne. A ce point de vue les lacs, envisagés à part, feraient partie : le lac ïimsah de cette même région de la Méditerranée, le petit lac Amer de la région indo- pacifique et le grand lac Amer servant de limite entre les deux zones appartiendrait aux deux régions à la fois (1). IV. - MÉLANGE DES FAUNES DE LA MÉDITERRANÉE ET DE LA MER ROUGE Ainsi que nous l'avons dit au début, nous nous sommes proposé dans ce travail,d'une part défaire connaître la faune ichthyologique d'un milieu nouvellement créé et, d'autre part, de rechercher jus- qu'à quel point les faunes de la Méditerranée et de la mer Rouge se sont mélangées par la voie maritime qui, depuis plus de trente années, réunit deux régions zoogéographiques autrefois nettement séparées. En donnant dans notre tableau de la page 299 les noms des espèces de la Méditerranée qui vivent maintenant dans la baie de Suez et ceux des espèces érylhréennes qui ont pénétré jusqu'aux plages de Port-Saïd nous avons déjà indiqué dans quelle limite s'est fait le mélange des deux faunes. Mais il nous paraît utile d'entrer dans quelques détails plus circonstanciés et plus précis sur ce sujet qui paraîtra sans doute un des plus intéressants parmi ceux que nous avons traités. Il a été établi par nos recherches que trois espèces méditerra- néennes se retrouvent dans la baie de Suez où elles n'existaient pas auparavant, et que quatre espèces de la mer Rouge se pèchent maintenant en Méditerranée dans les environs de Port-Saïd. Nous ne comprenons, parmi les espèces ayant totalement changé d'habitat, que celles que nous avons pu observer nous-mêmes, en quantités notables, dans la mer où elles ont pénétré par le canal, et nous avons pensé qu'il convenait de nous montrer très réservé et très stricts à cet égard. Il peut évidemment se faire que quelques individus appartenant aux espèces que nous donnons comme attei- gnant la sortie du canal — lagunes de Suez ou bassins de Port-Saïd — pénètrent par hasard, celles de la Méditerranée dans la baie de (1) Lac Timsah, dix-neuf espèces de la Méditerranée, douze de la mer Rouge; petit lac Amer, vingt-et-une de la mer Rouge, dix de la Méditerranée; grand lac Amer, quatorze espèces de la Méditerranée, douze de la mer Rouge. LE CANAL DE SUEZ ET SA FAUNE ICHTHYOLOGIQUE 315 Suez, et celles de la mer Rouge jusqu'au large des jetées de Port-Saïd : des faits de ce genre sont établis en ce qui concerne Chriisophrys aurata, Umbrina vulgaria, Morone punctata, et, peut-être, Chryso- phrys haffara, mais nous estimons que ces faits n'impliquent pas un véritable changement d'habitat et nous n'avons pas compris de telles espèces dans la catégorie de celles qui passent réellement d'une mer à l'autre. En résumé, nous nous sommes bornés à consi- dérer comme ayant une distribution géographique différente de celle qu'elles avaient antérieurement les huit espèces suivantes : Sciœna aqiiila G. V. : Méditerranée. Engraulis encrassicholus Lin, : Méditerranée. Mugil cephaiiis C. V. : Méditerranée. Trichiurus haumel a Forsk : Mer Rouge. Crenidens Forskali C. V. : Mer Rouge. Ilemiramphus Georgii (ou Reynaldi) Day : Mer Rouge. Atherina ForskalU Rup : Mer Rouge. Mugil scheli C. V. : Mer Rouge. Sciœna aquila. — Nous avons pris, parfois en assez grande quan- tité, des Poissons de cette espèce dans la baie de Suez. Dans la règle les individus capturés étaient de petite taille, M. le Docteur RûFFER, président du Conseil sanitaire d'Egypte, a bien voulu faire rechercher pour nous la Scixna aquila (eu arabe Khalil) par les pêcheurs bédouins du campement de Tor. Il est résulté de ces recherches que le Khalil est inconnu à Tor. Comme ce petit port est à 80 milles marins de Suez, on voit que la Sciœna aquila n'a pas pénétré très loin vers le sud. Engraulis encrassicholus. —On ne peut guère capturer des Poissons aussi petits que les Anchois autrement qu'avec des sennes ou des chaluts à très petites mailles. Nous en avons vu preudre, dans la baie de Suez, sur les plages du nord et sur la côte ouest, c'est-à-dire à l'opposé du débouché du canal ; mais nous ignorons si l'espèce va plus au sud et quitte les environs immédiats de Suez. Mugil cephalus. — Ce Mulet se prend assez souvent dans la baie et il en est apporté, quoiqu'assez rarement en réalité, au marché de la ville, où les pêcheurs de la rade le reconnaissent fort bien et le distinguent des espèces de la mer Rouge. Certains d'entre eux nous ont affirmé en avoir pris jusqu'au feu Zafarana, à 40 milles au sud, mais quoiqu'ayant péché une fois dans les environs de ce phare, nous n'avons pas eu occasion de vérifier l'exactitude de leurs dires. Trichiurus haumela. — L'espèce est extrêmement commune, à peu près en toute saison, dans les bassins de Port-Saïd, où, on doit le 316 J.-B. TILLIER remarquer cependant, on ne prend jamais d'individus de grande taille. Elle va certainement en Méditerranée puisque le Muséum en a reçu venant d'Alexandrie : on peut donc la considérer comme faisant partie de la faune de cette mer, c'est-à-dire comme ayant totalement changé d'habitat. Heuiiramphus Gcorgii (ou tieynoldi). — On fait des pèches très abondantes de cette espèce dans les bassins de Port-Saïd. Nous nous sommes assurés qu'elle allait jusqu'à Alexandrie, non pas par individus isolés, mais par quantités assez considérables pour qu'elle se vende à part, par paniers entiers au marché de cette ville. Cet Hemiramphus a donc totalement changé d'habitat. Atheriîia Forskalii. — I/espèce est très abondante en individus dans toute la région sud du canal et elle se reproduit certainement dans les lacs. Nous en avons vu prendre souvent dans les bassins de Port-Saïd, mélangée à des Anchois, et nous nous sommes assurés qu'elle allait jusqu'à Alexandrie où elle est, pendant l'été tout au moins, assez commune. Crerddens Forskalii. - Nous avons eu occasion de faire remarquer que le C. For.s'A;o/n, en arabe Botteit, était le Poisson le plus commun des eaux du canal de Suez à Ismaïlia où on en prend, dans le lac Timsah, en toute saison, en grandes quantités. Pendant l'été il n'est pas rare dans les bassins de Port-Saïd, et nous en avons vu plusieurs individus venant de la mer proprement dite, c'est-à-dire capturés au large des jetées; mais malgré toutes nos recherches nous n'avons pas pu savoir s'il s'avançait beaucoup le long des côtes, soit vers l'est, soit vers l'ouest. Des pêcheurs nous ont affirmé en avoir pris près du Boghaz de Gemikh, à 10 kilomètres à l'ouest de Port-Saïd. Mugit Kcheli. — Il en est de même pour ce Mulet qui n'est pas rare à Port-Saïd en été, et qui sort des jetées et se prend parfois en pleine mer : mais nous ignorons également s'il ne reste pas toujours dans les environs immédiats du port. En résumé on voit que parmi les espèces en nombre relativement considérable (114) qui habitent les deux mers, 8 seulement ont passé par le canal de la Méditerranée à la mer Rouge ou inversement et que, de ces