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HARVARD UNIVERSITY.
L I B R A R Y
MUSEUM or COMPARATIVE ZOÔLOGY.
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MÉMOIRES COURONNÉS
ET
AUTRES MÉMOIRES
Pl'BLlÉS PAR
l'académie royale
DES SCIEKCES, DES LETTRES ET DES BEAIX-ABTS DEBELGIQl'E.
COLLECTIOIV II«-»o, — TO.IIK I.
SOMMAIRE:
Waltzing ;J.-P.). — Étude hislorique sur les corporations prof(?ssionnel!es
chez les Romains depuis les origines jusqu'à la chute de l'Empire d Occident,
VOLUME T.
» \ f/ u ' \/ / «
,^J^
BRUXELLES,
F. HAYEZ, IMPRIMEUR DE I/ACADÉMIE ROYALE DES SCIENCES, DES LETTRES
ET DES BEAUX-ARTS DE BELGIQUE,
rue de Louvain, 112
1895
MÉMOIRES COURONNÉS
ET
AUTRES MÉMOIRES.
MÉMOIRES COURONNÉS
ET
AUTRES MEMOIRES
PUBLIÉS PAR
l'académie royale
DES SCIEKCES, DES LETTRES ET DES BEALX-ARTS DE BELGIQUE.
COLIiECTIO.\ lIV-So. — TOME L,
VOLUME I.
mm
BRUXELLES,
F. IIAYEZ, IMPRIMEUR DE L ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES, DES LETTRES
ET DES BEAUX-ARTS DE BELGIQUE,
rue de Louvain, 112
Avril 1895
DEC 1895
ÉTUDE HISTORIQUE
SUU LES
mnmim pmssiiliis
CHEZ LES ROMAINS
DEPUIS LES ORIGINES
jusqu'à la chute de l'Empire d'Occident,
PAR
J.-P. ^Tv^ALTZING,
professeur .1 TCniversité de Liège.
(Mémoire couronné par la Classe des lettres dans la séance du G mai 1889.)
Tome L.
d)
(5
INTEODUCTION
SOURCES ET TRAVAUX MODERNES.
§ 1. Les Sources.
Les historiens romains ne s'occupent guère de la classe popu-
laire : dans cette société basée sur l'esclavage, le travail était
méprisé, les artisans et les petits marchands n'avaient nulle
influence sur la direction des affaires publiques, et ils furent
longtemps exclus de l'armée. Aussi, dans les monuments litté-
raires, nous ne trouvons, sur leur vie privée et sur leurs asso-
ciations, que quelques phrases insignifiantes et souvent
obscures pour nous. L'historien romain qui n'a pas de batailles
ni de sièges à raconter, qui ne peut décrire les luttes civiles,
trouve « son sujet ingrat et son travail sans gloire » ^. Même
sous l'Empire, quand les corporations ouvrières sont devenues
un rouage important de l'administration publique, les auteurs
n'en parlent que rarement. Nous avons tâché de réunir ces
renseignements épars.
Dès l'époque des Antonins, on rencontre une source d'in-
formations plus abondante : ce sont les divers Codes et les tra-
vaux des Jurisconsultes , principalement le Code de Théodose,
admirablement commenté au XVI® siècle par l'illustre savant
français Jacques Godefroy. En etfet, les empereurs durent fré-
quemment s'occuper des collèges, d'abord pour les proscrire
• Tacit., Ann.y IV, 32 : Nobis in arto et inglorius labor.
( ^ )
ou pour les autoriser, puis pour régler leur situation légale,
leurs droits et leurs privilèges, et surtout leurs obligations.
Par bonheur, nous avons d'autres témoins du passé que les
auteurs et les jurisconsultes : ce sont les documents épigra-
phiques ^. Leur importance, longtemps méconnue, aujour-
d'hui comprise de tous, est telle qu'il n'est plus possible d'étu-
dier l'antiquité sans les consulter.
Les inscriptions relatives aux corporations professionnelles
sont fort nombreuses. Toutes les parties de l'Empire romain
ont fourni leur contingent ; mais c'est principalement en Italie,
dans la Cisalpine, dans la Narbonnaise et dans les provinces
du Danube que la récolte a été riche.
Rien ne jette une plus vive lumière sur la vie intérieure des
collèges populaires que ces inscriptions. Elles sont gravées sur
les tombes des confrères, des dignitaires et des patrons de ces
collèges, sur les temples, les autels, les statues élevées à des
dieux ou à des protecteurs, sur les monuments destinés à per-
pétuer le souvenir des événements qui intéressaient la corpora-
tion. Ces pierres, qui étaient comme les archives des collèges,
nous procurent la bonne fortune de pouvoir faire revivre
aujourd'hui les associations nombreuses qui se formaient sur-
tout dans le sein de la classe populaire. Longtemps muettes,
parce qu'elles étaient enfouies dans les ruines des villes
antiques, elles nous révèlent mille détails sur lesquels les his-
toriens gardent le silence. Les textes qu'elles portent nous sont
parvenus tels qu'ils furent gravés, sans avoir éprouvé aucune'
de ces altérations que le temps a fait subir aux textes littéraires.
Parfois ces pierres ne se contentent pas de parler; elles mettent
sous nos yeux des scènes de la vie populaire, dans les bas-reliefs
plus ou moins artistiques qui accompagnent les inscriptions.
Peu nombreuses sous la République, les inscriptions relatives
* Voy. J.-P. Waltzing, L'épigraphie latine et les corporations profes-
sionnelles de l'Empire romain. Leçon d'ouverture, Gand, A. Siflfer. 1892,
32 pages.
aux collèges professionnels se multiplient pendant les trois
premiers siècles de l'Empire, pour redevenir très rares dès le
commencement du quatrième. Le même fait s'observe pour les
inscriptions de tout genre, et il a les mêmes causes.
Le temps a pu détruire les plus anciennes; d'ailleurs, sous
la République, les collèges étaient moins nombreux, et la cou-
tume de tout graver sur la pierre, d'élever des statues et des
monuments de toute espèce, était moins répandue. La rareté
des documents épigraphiques sous le Bas-Empire provient
d'une autre cause : elle est tout ensemble une preuve et une
conséquence de la misère générale. Les corporations, régle-
mentées, opprimées, sans liberté, accablées de charges, avaient
perdu leur prospérité. Si elles élèvent parfois des statues, c'est
pour flatter de puissants personnages, qui ne pourront les
soustraire à la ruine.
L'obstacle qui empêchait Th. Mommsen, en 1843, d'entre-
prendre une étude complète sur les collèges romains, c'était
l'absence d'une collection d'inscriptions ^. Aujourd'hui nous
possédons l'admirable Corpus inscriptionum latinariim, édité
par l'Académie de Berlin, et dont l'illustre et infatigable épi-
graphiste est lui-même le principal auteur. Onze volumes ont
paru complètement et plusieurs ont déjà des suppléments con-
sidérables ; il reste à publier le tome IV du volume VI, consacré
à la ville de Rome (tin des inscriptions sépulcrales), le tome II
du volume XI, qui contiendra les inscriptions de l'Ombrie, et
le volume XIII, consacré aux trois Gaules (Aquitaine, Lyon-
naise et Belgique) et aux deux Germanies.
Il a donc fallu consulter d'autres recueils, plus ou moins
récents; d'autre part, on ne cesse de faire des fouilles et des
découvertes. Pour compléter les volumes parus, en atten-
dant des suppléments définitifs, l'Académie de Berlin publie
VEpliemeris epigrapfiica, dont huit volumes ont vu le jour
(1872-1893). Les inscriptions nouvelles sont aussi publiées
* Th. Mommsen, De coll. et sodaliciù, p. 129.
(61
dans une foule de revues dont nous allons citer les princi-
pales ^.
Les inscriptions grecques relatives aux collèges sont relati-
vement peu nombreuses.
Éditions citées.
1® Auteurs. Nous citons généralement les éditions Teubner;
sinon, les éditions sont indiquées dans les notes 2.
2« Ouvrages de droit, avec nos abréviations.
BR\]iis = Fontes jiiris romani antiqui, éd. C.-G. Bruns, éd. V cura
Th. Mommseni. Fribourg-en-Brisgau, 1887, pp. 315-324, 392-395.
Une sixième édition vient de paraître.
Jiirispriidentiae antejustinianae qiiae siipersimt, recensuit Ph.-E.
HuscHKE, éd. III, Lipsiae, Teubner, 1874.
Et particulièrement dans ce volume :
Gaius, Inst. = Gai Institutionum jiiris civilis commentarii qiiattuor.
Paulli Sent. = Julii Pauli Sententiariim libri.
Ulpian. = DoMiTii Ulpiam Fragmenta.
Fragm. Vat. = Fragmenta juris romani Vaticana.
Ensuite le Code Théodosien :
C. Th. ou Cod. Theod. = Codices Gregorianus Hermogenianus T/ieodo-
sianus, éd. Haenel, Bonnae, 1842; 4^ éd., 1882.
Nov. Theod. II, etc. = Novellae Constitutiones Imperatorum Theodosiill,
etc., éd. Haenel, Bonnae, 1884.
GoTH. ou Gothofr. Codex Theodosianiis ciim notis J. Gothofredi. Ed.
Ritter, Leipzig, 1737, 6 volumes.
' Pour plus de détails, voyez notre ouvrage intitulé : Le recueil général
des inscriptions latines et Vépigraphie latine depuis cinquante ans. Louvain,
Charles Peelers, 1892, 150 pages.
2 On trouvera à la fin de ce mémoire une table de tous les passages
d'auteurs cités.
( 7)
Le Digeste, le Code de Justinien et ses Novelles sont cités
d'après :
Corpus jiiris civilis, éd. Th. Mommsen, Paulus Krueger et Rud. Schoell,
Weidmann, 1870-1886, vol. I, Digesta; voi II, Codex Jus tinianus;
vol. III, Novellae.
Lex ROM. VisiG. = Lex romana Vùigothorum, éd. G. Haenel, 1849,
Leipzig.
3° Ajoutons à ces ouvrages de droit les notices adminis-
tratives et autres :
NoT. Dion. = yotitia Dignitatum, accedunt notitia Urbis Constantino-
politanae et laterculi provinciarum, éd. Otto Seeck, Weidmann,
1876,
Preller, Regionen = Die Regionen der Stadt Rom, von L. Preller,
lena, Hochhausen, 1846 (contient le Ciiriosum Urbis et la Notitia
ou Regiones Urbis Romae).
Jordan, Topogr. = Topographie der Stadt Rom im Alterthum, von H. Jor-
dan, //ter Band, Weidmann, 1871 {contient les mêmes documents;.
¥ Documents épigraphiques.
a. Inscriptions latines.
C. 1. L. = Corpus inscriptiomim latinarum consilio et auctoritate Acade-
miaelitterarum regiae Borussicae editum, Berlin, 1863-1893.
Ont paru :
Vol. I, Inscriptions antérieures à la mort de César, par Th. Momm-
sen, 1863; 2e édit., fasc. I, en 1893.
Vol. II, Espagne et Portugal (1869), avec un supplément contenant
les tables (1892), par E. Huebner.
Vol. III, Egypte. Asie, Grèce, lUyricum, en 1873, par Th. Mommsen,
avec un supplément (par Hirschfeld et Domazewskij, dont deux
fascicules ont paru en 1889-1892.
Vol. IV, Inscriptions pariétaires de Pompéi, par Zangemeister, en
1871.
(8)
Vol. V, Gaule cisalpine, par Th. Mommsen, en 4872.
Vol. VI, Rome, par Henzen et Huelsen. Tomes I, II, III, V, en 1876,
4882, 4886, 4885.
Vol. VII, Angleterre, par E. Huebner, en 4873.
Vol. VIII, Afrique, par Wilmanns et Mommsen. en 4884, avec un
supplément donné par J. Schmidt et R. Gagnât, en 4892.
Vol. IX etX, Italie méridionale, Sicile, Sardaigne, par Th. Mommsen,
en 4883.
Vol. XI, tome I, Emilie et Étrurie, en 4888, par E. Bormann.
Vol. XII, Narbonnaise, par 0. Hirschfeld, en 4888.
Vol. XIV, Latium antiquum, par Dessau, en 4887.
Vol. XV, tome I, Instrumentum domesticum de Rome, par Dressel,
en 4894.
Malgré le recueil qui sera annexé à ce Mémoire et qui con-
tiendra toutes les inscriptions relatives aux collèges, nous
citerons toujours d'après le Corpus les inscriptions que celui-ci
renferme. Pour les inscriptions de Rome, de l'Ombrie, des
Gaules et de la Germanie, qui n'ont pas encore paru dans le
Corpus, ainsi que pour les inscriptions nouvellement décou-
vertes des autres parties de l'Empire romain, nous devons citer
des recueils spéciaux ou des périodiques, dont les principaux
sont :
Eph. epigr. = Ephemeris epigraphica^ corporù inscriptionum latinarinn
sîipplementum, éd. cura G. Henzeni, Th. Mommseni, J.-B. Rossii.
Vol. I-VIII, gr. in-8o, 4873-4893.
DE Rossi, Inscr. christ. = J.-B. de Rossi, Inscriptiones cliristianae
Urbis Romae, vol. I et II, 4. Rome, 4864-4888.
Pais = Corporis J. L. supplementa italica, consilio et auctoritate Acade-
miae regiae Lijnceorinn édita. — Fasc. /, additamenta ad vol. V
Galliae Cisalpinae, éd. Hector Pais. Roma, 4888.
NoTiziE ou NoTiz. DEGLI ScAVi = Notizic degli scavi di anticJiità commu-
nicate alla r. Accademia dei Lincei (pour les fouilles faites dans
toute l'Italie), depuis 1876, dans les Atti de cette Académie.
A. D. I. ou Ai\N. D. I. = Annali delV Instituto di correspondenza archeo-
logica diRoma, 4829-4885, un vol. in-8'' par an.
(9)
B. D. I. ou Bull. d. I. = Bidlettino delV Instiliito di correspondenza
archeologica di Roma, 1829-1885, un vol. in-S" par an ».
MiTTH. D. I. = Mittheilungcn des dentschen kais. arch. Instituts, rôm.
Abtheilung {Bidlettino delV imper. înst. arch. germ., Sezione rom.),
1886-1893, un vol. par an.
Bull. com. ou B. c. = Bidlettino delta commissione arch. municipale (ou
communale) di Borna, 1872-1893, un vol. par an. — Voy. surtout
les notices de G. Gatti : Trovamenti risguardanti la epigrafia
romana.
A:sS. ÉPiGR. = L'Année épigraphique, revue des publications épigraphiques
relatives à l'antiquité romaine, par R. Gagnât, 1888-1893, dans la
Revue archéologique et à part, Paris, Leroux.
Arch -ep. Mitth. ou A.-E. Mitth. = Archaeologisch-epigraphische Mit-
tlieilungen aus Oesterreich-Ungarn, herausg. vonO. BENND0RF,etc.,
Wien, 1877-1893.
Gruter = Thésaurus inscriptionum antiquarum totius orbis Romani,
industria et diligcntia J. Gruteri, Heidelberg, 1603; 2^ édit.. par
Graevius, en 1707.
Kelnesiis — Th. Reinesii Syntagma inscriptionum, Lipsiae, 1682, in-fol.
Mur. ou 3Iuratori = Novus thésaurus véterum inscriptionum, collectore
L. A. MuRATORio, MedioL, 1739-1742, -4 vol. in-fol.
Or. ou Orelli = Inscriptionum lat. amplissima collectio. Ed. Jo.-C. Orel-
Lius, Turici, 1828, 2 vol.
Or.-Henzen, ou ^E^ZEy = Inscriptionum lat, amplissima collectio, vol. III,
Collectionis Orellianaesupplementum, éd. G. Henzen. Turici, 18o6.
Wi[,M. ou WiLMA.NNS = Excmpla inscriptionum lat. composait G. Wil-
MANNS. Berlin, 1873, 2 vol. in-8o.
[>E BoissiEU = Inscriptions antiques de Lyon, par Alph. de Boissieu,
Lyon, 1846-1854, 1 vol. (Chap. X, pp. 373-430.)
Kev. ÉPIGR. — Revue épigraphique du Midi de la France, par A. Allmer,
1878-1893, 72 fascicules.
' Il y a six tables des matières contenues dans les Annali, le Bullettino et les Monu-
mevti publiés par l'Institut archéologique : 1831-1843, 1811- 1833, 1854 1836, 1837-
1863, 1861-1873, 1874-1883. Elles sont dans le format des Annali, sauf la troisième,
qui est annexée aux Monumenti in-folio. On y trouvera renseignées beaucoup
ilinscriplions relatives aux collèges, souvent commentées, et maints articles que
nous aurons l'occasion de citer à leur place.
( to )
Allmer, m. de L. = Allmer et Dissard, Musée de Lyon, inscriptions
antiques, Lyon, A vol., 4888-1892.
Bull, épigr. = Bulletin épigraphiqiie de la Gaule, dirigé par Florian
Vallentin, 3 vol., 1881-1883. — Bulletin épigraphique, dirigé par
R. MowAT, tomes IV- VI, 1884-1886.
C. Jlllian, Inscr. de Bord. = Camille Jullian, Inscriptions romaines de
Bordeaux, 2 vol., 1887-1890.
Steiner = Codex inscription uni rom. Danubii et Rheni, bearbeitet von
Stelxer, trois parties, 1851-1854, à Seligenstadt. Deuxième édi-
tion du Codex inscr. rom. Rheni, publié en 1837.
Brambach = Corpus inscriptionum rhenanarum, consilio et auctoritate
societ. antiq. Rhenanae, éd. G. Brambach, Elberfeld, 1867, 1 vol.
Th. Mommsen, Inscr. Helv. = Inscriptiones Confederationis Helveticae
latinae, éd. Th. Mommsen, 1854, à Zurich {Mittheilungen der A7îti-
quar. Gesellschaft in Zurich, X. Bd., 1854, in-4<»).
HageiN = H. Hageni prodromus novae inscriptionum latinar. Helveti-
carum sylloges titulos Aventicenses et vicinos continens, Progr.,
Bernae, 1878.
Wd. Korresp. ^ Korrespondenzblattder Westdeutschen Zeitschrift, 1882-
1893, Trier.
b. Inscriptions grecques.
C. I. Gr. = Corpus inscriptionum graecarum, auctoritate Academiae litt.
reg. Borussicae, éd. A. Boeckhius, vol. I-IV, 1828-1859. Indices,
subjecitU, RoEHL, 1877, in-fol.
Lebas = Ph. Le Bas et W.-H. Waddington, Voyage archéologique en
Grèce et en Asie Mineure pendant 1840-1844, vol. III, 5 et 6 (Asie
Mineure), in-4o, Paris, 1847 et suiv.
A. Wagener = Inscript, grecque inédite, par A. Wagener {Revue de
VInstr.publ. en Belgique, XVI, 1868, pp. 1-14).
Kaibel = Inscriptiones graecae Siciliae Italiae, etc., éd. G. Kaibel, Berlin,
1890, 1 vol.
Bull, de Corr. hell. = Bulletin de Correspondance hellénique, un vol.
par an , depuis 1877.
(11 )
3IiTT. D. I. IN Athen = Mitlheilungen des kaiserlich deutschen archdolo-
gischen Instituts in A then, depuis 1876, 1 vol. par an '.
31. J. Oehler {Eranos Vindobonensis, Vienne, 1893, p. 277-278) vient de
dresser la liste complète des inscriptions grecques, relatives à des
collèges professionnels et trouvées en Asie Mineure ; il indique les
recueils et les périodiques où elles sont reproduites.
§ 2. Travaux modernes.
Longtemps les modernes se sont fait une idée très fausse et
très incomplète des collèges d'artisans chez les Romains. Aussi
est-il presque inutile de consulter les travaux antérieurs h notre
siècle : ils sont surannés. Nous ne les mentionnerons que pour
être complet.
Deux dissertations, celle de Dirksen, publiée en 1820, et
surtout celle de Th. Mommsen, qui a vu le jour en 1843,
furent le point de départ de travaux plus sérieux. Depuis lors,
on n'a cessé d'explorer les diverses parties de cet intéressant
sujet.
Les uns ont étudié le côté juridique, qui présente deux
questions à élucider : le droit d'association et la capacité civile.
Après Dirksen et Mommsen, la première a été examinée surtout
par Kayser, Pernice, Cohn, Gaudenzi, Maué et Liebenam, et
l'on peut dire que, dans ses traits généraux, elle est à peu près
éclaircie, sauf toutefois l'origine des collèges d'artisans, qui
restera sans doute toujours enveloppée de nuages impéné-
trables, malgré les recherches de Cohn et de Wezel.
Dirksen, de Savigny et Mommsen ont également renouvelé
depuis longtemps l'étude de la capacité juridique des per-
sonnes civiles en général et des collèges en particulier. Après
eux, la question a été reprise, notamment par Houdoy, pour
les villes, par Pernice et plusieurs autres, pour les corpo-
1 Les autres recueils ou périodiques contiennent peu pour notre ujet et seront
ciiés à leur place.
( 12 )
rations; de nombreuses thèses de doctorat n'y ont pas apporté
d'éléments nouveaux. Les chapitres que Gierke y consacre nous
semblent mériter une mention spéciale.
C'est Th. Mommsen qui révéla pour la première fois, en 1843,
l'existence de nombreux collèges funéraires proprement dits,
et les moyens employés par la plupart des autres corporations
pour procurera leurs membres un enterrement décent. Le com-
mandeur J. -B.de Rossi a complété cette étude déjà ancienne,
en montrant que les communautés chrétiennes des premiers
siècles prenaient la forme de collèges funéraires pour se don-
ner un caractère légal. Enfin, depuis la composition de ce
mémoire, Traugott Schiess a réuni de nouveau, dans un
travail d'ensemble, tout ce que les inscriptions fournissent de
renseignements utiles sur les associations funéraires.
Le rôle des corporations ouvrières, en tant qu'associations
privées, et surtout leur but religieux et funéraire^ a été mis en
lumière dans plusieurs chapitres du beau livre de G. Boissier :
La religion romaine d'Auguste aux Antonins. Nous avons aussi,
sur ce point, de bonnes dissertations fondées sur les inscrip-
tions : celles de Maué et de Cam. Jullian, qui étudient les
collegia fabrum, centonariorum, dendropliororum et celle que
Liebenam a consacrée à tous les collèges industriels. Le but
politique, économique et charitable de ces collèges a donné lieu
aux opinions et aux conjectures les plus diverses : c'est l'une
des parties les plus difficiles de notre sujet. Willems, dans son
intéressant travail sur les Élections municipales à Pompéi, a fait
ressortir la part qu'ils prenaient aux luttes électorales de leur
ville, au moins pendant le premier siècle de notre ère.
Dès 1847, Wallon avait retracé à larges traits le rôle officiel
que jouèrent les corporations industrielles dans les diverses
administrations de l'État et des villes sous le Bas Empire;
Preller. Pigeonneau, Krakauer, Gebhardt, Hirschfeld etMatthiass
ont publié sur le même sujet des dissertations spéciales du
plus haut intérêt. Grâce aux auteurs et aux inscriptions, grâce
surtout au Code Théodosien et au célèbre commentaire de
J. Godefroy, ils ont pu faire connaître les obligations imposées
(13)
aux collèges de Rome et les privilèges destinés à les com-
penser. Mais quand et comment naquirent ces corporations
obligatoires et héréditaires du IV*" siècle? Quels rapports les
corporali de Rome et les collegiati des villes ont-ils avec les
corporations privées et libres du Haut -Empire? Quelle est
même la nature de ces collegiati ? Voilà des questions qui
n'avaient pas reçu jusqu'ici une solution satisfaisante.
Ce qui est le mieux connu aujourd'hui, c'est peut-être l' orga-
nisation intérieure des corporations romaines au 11^ et au 111^
siècle. C'est ici que l'épigraphie fournit une mine précieuse de
renseignements. Les inscriptions nouvellement découvertes et
les anciennes mieux comprises ont été l'occasion d'une quan-
tité innombrable d'articles, de dissertations ou do simples
notes, disséminés dans une foule de revues, et qui sont desti-
nés à élucider l'un ou l'autre point particulier. Ici encore nous
devons mentionner le tableau si animé que G. Boissier a tracé
de la vie intime, presque familiale, des collèges et de leur
administration intérieure. Le même sujet a été traité récem-
ment, d'une manière approfondie, par Schiess pour les collèges
funéraires et par Liebenam pour les collèges industriels.
On ne s'est pas borné à étudier séparément ces divers côtés
de la question qui nous occupe. Nous avons à citer quelques
travaux cTensembley tels que ceux de Botton, Gérard, Stemler et
Masson, et plusieurs autres thèses de doctorat, qui ne peuvent
être regardées que comme des essais incomplets i. La plus
sérieuse des études françaises est celle de Drioux, Un ouvrage
capital, celui de Liebenam, a paru au moment oii notre mémoire
était envoyé à l'Académie. Les trois dissertations qu'il contient
* Depuis dix ans, il parait annuellement une thèse de doctorat en
droit sur les collèges romains. La plupart de ces thèses de droit, il faut
bien le dire, méritent à peine d'être consultées. Les auteurs connaissent
peu ou ignorent les sources épigraphiques, et plusieurs copient servi-
lement leurs devanciers. Plus d'un n'a jamais vu le Corpus inscr. latina-
rum. Voici du reste l'appréciation d'un Français, M. René Gagnât, danj»
la Revue critique, juillet 1889, page 49 : u Les candidats au doctorat en
(14 )
reposent sur une connaissance à peu près complète des sources,
et elles nous ont été d'un grand secours pour la revision de
notre travail.
Enfin, dans l'étude de l'histoire, du droit et des institutions
de Rome, on commence à réserver aux corporations d'artisans
la place qu'elles méritent. Walter, Serrigny, Kuhn, Bouchard,
Wallon, Friediânder, G. Boissier, Duruy, iMarquardt, Momm-
sen, Willems, Madvig, Herzog, Karlowa ont cherché, dans
leurs ouvrages généraux, à déterminer le rôle officiel et privé
des collèges professionnels, et l'influence qu'ils ont pu exercer
sur le bien-être des classes ouvrières et même sur les destinées
de l'Empire ^
En somme, si nous connaissons à peu près la législation à
la faveur de laquelle les corporations se multiplièrent dès le
premier siècle de notre ère, les services qu'elles rendirent à
l'administration publique, leur organisation intérieure, il
reste encore bien des obscurités. Leur origine est un mystère,
l'histoire de leur développement et de leurs transformations
pendant ce long espace de douze siècles qui s'écoule depuis
Numa jusqu'à la chute de l'Empire, est remplie de lacunes ;
leur but même soulève les opinions les plus contradictoires ;
leur rôle dans l'administration centrale et municipale sous le
Haut-Empire n'a guère été étudié, faute de renseignements.
-Une foule d'autres questions n'ont pu être résolues jusqu'ici
d'une manière satisfaisante.
w droit ne se rendent pas compte des nécessités scientifiques actuelles . . .
» Je leur conseillerais d'abandonner ces grands sujets qui veulent une
» érudition à laquelle des jeunes gens ne peuvent pas prétendre aujour-
« d'hui, et de se limiter à l'étude consciencieuse de certains points précis,
« moins connus. » Il ne semble pas, jusqu'ici, que ce sage conseil soit
suivi.
» Cependant E. Desjardins disait encore en 1885 : « Dans l'ordre social,
Rome a produit une très grande chose, qui n'est pas assez connue : l'esprit
d'association. . . , les corporations de travailleurs. » {Géogr. de la Gaule,
III,. p. 445.) .
( 1^ )
Pour nous, nous avons cherché à rassembler tous les maté-
riaux utiles et nous avons essayé de débrouiller, autant que
possible, toutes les difticultés : suivant le programme de l'Aca-
démie, nous avons tenté la difficile entreprise de tracer un
tableau complet de Vhistoire, de r organisation, des droits, des
devoirs et de rinjluence des corporations d'ouvriers et d'artistes
chez les Bomains. Nous osons compter sur Tindulgence de nos
lecteurs. Nous avons tâché de réunir au moins et de combiner
les résultats obtenus par nos devanciers. On comprendra que,
dans un pareil sujet, il n'est pas possible de résoudre tous les
problèmes, de dissiper toutes les obscurités, et qu'il est souvent
plus aisé d'indiquer les questions que d'en donner une solu-
tion certaine; on ne nous fera pas un reproche d'avoir plus
d'une fois gardé le silence plutôt que de hasarder une conjec-
ture sans fondement £olide. Nous sommes le premier à
regretter d'avoir dû, en maints endroits, entrer dans de longues
discussions; pour les éviter, il eût fallu ne rien dire ou avancer
des opinions sans en fournir aucune preuve.
Nous nous sommes mis en garde contre deux écueils con-
traires. A défaut de renseignements précis et directs, on s'est
laissé guider souvent par l'analogie des corporations du moyen
âge et de l'ancien régime, et l'on a bâti des systèmes en l'air.
D'autre part, il ne serait pas raisonnable de nier tout ce que la
tradition a laissé dans l'ombre. Si la fantaisie et l'imagination
pure doivent être bannies de l'histoire, il faut cependant per-
mettre à l'historien les inductions et les hypothèses vraisem-
blables, pour reconstituer un tableau dont le temps a etfacé
les traits principaux.
Nous tenons à signaler une autre difficulté de ce vaste sujet,
difficulté déjà remarquée par Mommsen ^ : l'organisation cor-
porative pousse des racines si profondes dans toute l'organi-
sation sociale et politique des Romains, qu'il est difficile de
• De collegiis, p. 128 : ea enim natura est rei sodaliciariae, utperpcluam
interpretalionem vix recipiat; ita radiées egit in lotam rem Romanam.
( 16)
faire une étude séparée et complète des collèges. Leur histoire
et leur organisation intérieure sont intimement liées à celles
de l'État romain; leurs droits et leurs devoirs dépendent de la
place qu'ils y occupent, et cette place change sans cesse, en
même temps que les institutions politiques se moditient.
Ajoutons entin qu'en étudiant cette question des corpora-
tions professionnelles, que notre époque a remise à l'ordre
du jour, nous avons laissé de côté toute préoccupation
moderne. Les faits que nous exposons sans arrière-pensée
sont assez éloquents par eux-mêmes, et il sera facile au lecteur
d'en tirer les conclusions, sans jamais perdre de vue la diffé-
rence des temps : non sine iisu fuerit introspicere illa, primo
aspedii levia, ex quels magnarum saepe reriim moniîus oriuntiir '.
Nous accomplissons un devoir en remerciant publiquement
3LM. Wagener - et De Ceuleneer, professeurs à l'Université de
Gand, pour les renseignements qu'ils ont bien voulu nous
fournira plusieurs reprises. M. De Ceuleneer a eu l'obligeance
de mettre à notre disposition sa riche bibliothèque.
Nous allons énumérer les principaux travaux modernes, en
indiquant les abréviations par lesquelles nous les citons. Nous
donnons ici ceux qui seront mentionnés à plusieurs reprises;
les autres, moins importants, concernent des points de détail
et seront signalés à leur place •^.
» Tacit., Ann., IV, 32.
- Voyez ses rapports sur ce Mémoire dans le Bulletin de l'Académie,
mai 1889, pp. 402-419, et décembre 1893, pp. 667-674.
5 La liste qui va suivre contient quelques travaux que nous n'aurons
pas l'occasion de citer dans le cours de notre Mémoire; ce sont principa-
lement des thèses de doctorat, qui ne renferment rien de nouveau. Les
ouvrages que nous ne connaissons que par des citations, sont marqués
d'un astérisque; aucun d'eux ne semble indispensable.
Dans les citations du mémoire, où le nom de l'auteur est seul indiqué,
il faut se reporter à la présente liste pour le titre de l'ouvrage.
^' Il
PRINCIPAUX TRAVAUX MODERNES
I*. Allàrd = Histoire des persécutions, par Paul Allard, 1885-1890,
cinq volumes, que nous désignons par les chiffres I-V.
P. Allard, Esclaves = Les esclaves chrétiens^ par P. Allard, 1 vol., 1876,
pp. 433458.
Allmer, Inscr. de Y. = Inscriptions antiques de Vienne en Dauphiné, par
A. Allmer, Paris, Thorin, 4 vol. (Vol. II, pp. 324-341.)
Allmer, Trio)i = Antiquités découvertes en I88Ô et en 1886 au quartier
de Lyon dit Trion, décrites par A. Allmer et P. Dissard, Lyon,
1887-1888, 2 vol. (Voyez les Tables, au vol. II, p. 631 : Professions.)
Allmer, M. de L. = Musée de Lyon, Inscriptions antiques, par Allmer
et Dissard, Lyon, Delaroche, 1888-1893, 5 vol. (Vol. II, pp. 435-
517. Voyez les Tables au vol. V.)
Allmer, Rev. épiyr. — Revue épigraphique du Midi de la France, par
A. Allmer, 1878-1893, 68 fasc. ipassim). Voyez les Tables.
Henry Barled = De la cura annonae chez les Romains. Thèse de dioit.
Paris, 1893 (A. Rousseau, éditeur), pp. 1-180.
Belin-Delaunay = Progrès des corporations dans VEmpire romain, par
J. Belin-Delaunay, dans les Mémoires lus à la Sorbonne, 1867.
Belin-Delaunay — Mesures légales prises durant la République à l'égard
des collèges et des sodalité s, par J. Belin-Delaunay, dans le Journal
de VInstr. publ., XXX, 1861, pp. 129 et suivantes.
Benoit = Du jus sepulcri à Rome, par Aug. Benoit. Thèse, Nancy, 1890,
pp. 94-113.
Bi,uEMNER, Gew. Thàtigk. = Dr. Hugo Blueu^e^, Die geiverbliche Thàtigkeit
der Vôlkerdes klass. Alterthnms, Lei[)zig, Hirzel, 1869. Preisschrift,
153 pages.
Bluemner, Techn. = Technologie iind Terminologie der Gewerbe und
Kiinste bei Griechen und Romern, von Hugo Bluemner, Leipzig,
Teubner, 4 vol., 1874-1887. Voyez les Tables.
Bloch, Arbeiterstand = J.-l>. Bloch, Der Arbeiterstand bei den Palàs-
tinern, Griechen und Rômern. Wien. 1882.
Tome L. 2
( 18 )
G. BoissiER, Relig. yo}n. = La religion romaine d'Auguste aux Antonins,
par G. BoissiER, Paris, 1884, 3^ édit., petit in -8°, vol. II, pp. 238-
303. Ce chapitre a paru dans la Revue des Deux Mondes, ler dé-
cembre 1871 : Les associations ouvrières et charitables à Rome.
G. BoissiER, Prom. arch. = Promenades archéologiques, Rome et Pompéi,
par G. BoissiER, Paris, ^2^ édit., 1881, pp. 261-276.
G. BoissiER, Rev. arch. - Revue archéologique (n. s.), XXIIIe vol., 1872.
Étude sur quelques collèges funéraires romains. Les Cultores
deorum, pp. 81-9^
DE BoissiEU = lu.'^criptions antiques de Lyon, par Alph. de Boissieu,
Lyon. 18^6-18o4, I vol. Chap. X, pp. 373-430.
Botton = Max Botton, Des collèges d'artisans en droit romain. Thèse,
Paris, 1882, 186 pages.
Bouchard = Études sur les finances de l'Empire romain, dans les derniers
temps de son existence, par L. Bouchard, Paris, 1871, pp. 364-
367, etc.
Bouché-Leclercq = Manuel des Institutions romaines, par A. Bouché-
Leclercq, Paris, 1886, pp. 472-476.
Bremer — Zum Process der Fullonen, von Bremer {Rheinisches Muséum,
XXI, 1866, P^* Heft.)
Brissonius, Antiquitat. sélect., éd. Treckell, Luo;d. Batav., 1723. 1, c. 14.
Buechsenschuetz = B. Buechsenschuetz. Die Haupstdtten des Gewerb-
flcisses im klass. Alterthume, Preischrift. Leipzig, Hirzel, 1869.
Buechsenschuetz, Bem. = Bemerkungen ïiber die rômische Yolkswirth-
schaft der Konigszeit, von B. Bitchsenschuetz. Prog., Berlin, 1886.
Gagnât, De nuin. mil. = De municipalibus et provinc. militiis in imperio
romano, thesim proponebat R. Caoat, Parisiis, 1880, pp. 78-83.
Gagnât, Armée d'Afrique = L'armée romaine d'Afrique et l'occupation
militaire de l'Afrique, par René Cagxat. Paris, Leroux, 1892,
pp. 463 et suiv.; 487.
Galinesco = Les corporations d'artisans en droit romain, par D. Cali-
nesco. Thèse, Paris, 1890, pp. 1-61.
Cal^'ET = Dissertation sur un monument singulier des utriculaires de
Cavaillon. Avignon, 1766.
Ghampagny, Antonins = Les Antonins, par F. de Champ agny, 3^ édit..
1878, vol. III, pp. 398-406.
( 19 )
Choisy, Art de bâtir = LWrt de bâtir chez- les (ionumis, \vàt 31. Choist.
Paris, 1873, pp. 198 et suiv. Ce chapitre a paru dans le Bull, de la
Soc. de législat. comparée, 1873, sous ce titre : Essai sur l'organi-
sation des classes ouvrières chez, les Romains, et à part 29 pages.
Voyez le compte rendu de Caillemer. dans la Rev. critique d'hist.
et de législ., XV, p. 355.
Clerc == De rébus Thyatircnorum rommentatio epigraphica. Thèse par
M. Clerc. Paris, Picard, 1893, pp. 89-96 : de fabrorum collegiis.
CoHN = Zum rômischen Vereinsreclit, von l)^ Max Cohn, Berlin, Weid-
mann, 1873, pp. 1-231.
C. I. L. = Corpus inscriptionum lalinarum. 11 faut consulter les notices
placées en tête des inscriptions de chaque ville; on y décrit l'orga-
nisation de la ville, et notamment ses collèges.
Dai>- = Des associations en droit romain, par Dain. Thèse, Paris, 1879.
Daremberg — Dictionnaire des antiquités grecques et romaines, publié
sous la direction de Daremrerg et Saglio, 1877-1893 [A-Fasti).
Voyez les articles de Dechaume, Cybele, l, p. 168 i sq. ; Folcart, iHonysiaci arii-
Jices; Gayet, collegium; Guillaume, aerarii; Humbert, adlector , anabolicae
specles, auJiona, aquarii, argentarii, artifices, barbaricarii, catabolenses, caudi-
carii, colleciarii, cursus publicus, I, p. 1053. dardanarii ; G Jullian, fabri; Lafaye,
cisium, coriarius; MasqUELEZ, ceutonarii; MOWAT, cotisacranei; Paris, dendro-
phoria; Pottier, cnqitus, corallium, cornicines; Th. Reinacb, eranos el Saglio.
aedituus, aeneatores, mndarius, arenarii, aurifex, bestiarii, braiiiarii, colum-
barium, coinpilalia, coronarii; etc., eic.
De la Berge = Essai sur le règne de Trajan, par Camille De la Berge,
Paris, 1877, 1 vol., pp. 91, -214, 240.
Delassus = De la personnalité civile des sociétés et des associations en
droit romain, par Charles Delassus. Thèse de droit. Caen, 4892,
pp. 1-132.
De Ruggiero = Dizionario epigrafico di anlichità romane di Ettore De
RuGGiERO, 1886-1893. En cours de publication.
Vol. I {A-Augustales), voyez les mots : acceptor, acia ^p. 60), acior fp. 70), aedes
l'p. 189-141, 147-197), aedilis p. :2t38), aedituus (p, 272), aeneatores, aerarium,
(lerarius (p. 31^), Africae [caput , album (p. My;}), Alexandrina ctassis, aliectio
p. 421), allector, ambulaliva, amiciîia, anabolium, Antinous, anularium, anu-
larius, Apollinis Iparasiius), apparalor, apparatcrium, aquarius, aquatores, arca
'p. 629), archiereus, Arecarri, arenarius, argentarius, artifex, usinarius, Assota-
vum,athletae (p. 735), Attis (F. Gumont), Aventinensis Ipagus.
Au vol. II {C-Cappadocia], voyez les mots : calcariarius, caligaïus, candiJatus
p. 78), cannoptiorus iF. Gumonï), Capitolini, Cnpitularium.
Il faut voir en outre les articles consacrés aux villes.
{ 20 )
bESJkRmys-= Géographie historique et administrative delà Gaule romaine,
1885, t. m, pp. ^260-26i, 4274i29, 444447.
DE ViTA, Antiq. Benev. = Thésaurus antiquitatum Benevenlanarum (Jon.
DE Vita), Romae, 17o4, pp. 159-174 ; deveteribus collegiis Beneven-
tanorum. Dans le même ouvrage, il y a une dissertation sur les
mensores, par P.-M. Paciaudus, pp. 329-350.
Dezobry = Bome au siècle d'Auguste, par Ch. Dezobry, Paris, 1847,
vol. I, pp. 241 et suivantes.
DiRKSEN = Civilistische Abhandlungen, von H.-E, Dirkse>', Berlin, 1820,
vol. II, pp. 1-143 : Ueher den Zustand derjuristischen Personen nach
rômischem Becht.
Drioux — Étude économique et juridique sur les associations, etc., pré-
cédée d'une étude historique sur les collèges d'artisans {romains),
par J. Drioux, Paris, 1884, pp. 1-99.
Drumann = Die Arbeiter und Communisten in Griechenland und Bom,
von W. Drumann, Kônigsberg, 1860.
* Duboys = Le travail et Les associations ouvrières à Bome, Paris, 1866.
Dureau de la Malle = Économie politique des Bomains, Paris, 1840.
Duruy = Histoire des Bomains, par V. Duruy. Paris, édit. non illustrée,
vol. V, pp. 149-169, 1880*; vol. VII, pp. 248-251, 1885.
Duseigneur = Des corporations à Borne, par Marcel Duseigneur. Thèse,
Lyon, Plan, 1886.
Engelhardt = La tribu des bateliers de Strasbourg et les collèges de
nautes gallo-romains, par Ed. Engelhardt, Paris et Nancy, 1887.
Tiré de la Bévue Alsacienne, oct. 1887, 28 pages.
Eranos Vindobonensis = J. Oehler, Genossenschaften in Kleinasien und
Syrien, pp. 276-283. Wien, 1893, A. Hôlder.
P. FouRNiER = Des collèges industriels dans l'Empire romain. Thèse,
Paris, 1878, 147 pages.
FoDCART, Assoc. relig. = Des associations religieuses chez les Grecs, par
P. FoucART, Thèse, Paris, Klincksieck, 1873.
FoucART, De coll. scen. =De collegiis scenicorum artificum apud Graecos,
ihesim proj». P. Foucart, Paris, 1873.
* Ce chapitre a paru d'ahord dans la lievne historique, t. I, 1876.
( 21 )
Friedlaender = Sittengesrhichte Ro)n'<, von Fiuedlaender, vol. 1,
pp. 261-352, 5e édit., Berlin, 1881. Traduit par Vogel (Paris
Reinwald, 1865).
Frohberger — De opificum apud ueteres Graecos condicione. Diss. I,
scripsit Herm. Frohberger, Grimae, 1866, p. 26, note 82.
FusTEL DE CouLANGES = lUstoire des institutions politiques de Cancienne
France, 1»^ partie, 1 vol., Paris, 1877, pp. 255-257.
Gaudenzi = AuG. Gaudenzi, Sui coLlegi degli artigiani in Roma [estratto
delV Archivio Giuridico, 1884. XXXII, pp. 259 sqq.)
(iEBHARDT = Studlen liber das Verptlegungswesen von Rom und Constan-
tinopelin der spâteren Kaiserzeit, von Ed. Gebhardt. Thèse, Dorpat,
1881, 92 pages.
(iRRARD — Étude sur les corporations ouvrières à Rome, par Alb. Gérard,
Montbéliard, 1884, 78 pages.
GoTH., Gothofredus = Codex Theodosianus cum commentariis Jacobi
Gothofredi. Editio nova, J.-D. Ritter, Lipsiae, 4740, 6 volumes.
(iRADENWiTZ = Dtts Statut fur die Zunft der Elfenbeinarbeiter, von Otto
Gradennyitz {Zeitschrift der Savigny-Stiftung fiir Rechtsgeschichte,
Rom. Abtheilung. Weimar. 1890, XI, pp. 72-83, et 1891, XII,
pp. 138-145).
(iiDE = Du droit d'association en matière religieuse, par Ch. Gide. Thèse,
Paris, 1872, pp. 1-164.
GiEiiKE = Das deutsche Genossenschaftsrecht, Ill^r Ed., Die Staats- und
Korporationslehre des Alterthums, von Otto Gierke, Berlin, 1881,
pp. 34-181.
Hegel — Hegel, Geschichte der Stàdteverfassimg in Italien, vol. I,
pp. 53-57.
Heineccius == Jo. G. Helneccii, Opiisculorum variorum sylloge, Halae
Magdeburgicae, 1735. De origine et jure collegiorum et corporum
apud Romanos, pp. 378-414.
Herzog = Geschichte und Sijston der rôm. Staatsvenvaltung , von
Dr Er.\st Herzog, 2 vol. Leipzig, 1886-1887 (vol. I, pp. 95, 857,
1037-1038; vol. II, pp. 987-994, 1003-1005).
Herzog, Gall. Narb. = Galliae Narbonensis historia, etc., auctore
E. Herzog, Leipzig, Teubner, 1864 (pp. 187-190, 199-202).
( 22 )
HmscHFELD, Vcrn'. = Uiitersuchungen au f dan Gebiete der rôiii. Verwal-
tiimjsgesrliichte, von Otto Hikschfeld, It^r Bd., 10-8°, Berlin, 1876
(pamm).
HiRSCHFELD, Autioiui = PliUolocjus, \\W>^^ Bd., 1870. Die Getrdde-
verwaltung in der rom. Kaiserzeit, Annona, pp. 1-96.
HiRSCHFELD, Gull. St. III = GalL Studien von Dr. Otto Hirschfeld, III,
Der praefectus vigilum in Nemausus und die Feiierwehr in den rôm.
Landstatten {Sitzungsber. der Wiener Akad., 1884, CVII Bd.,
pp. 239-2o7, et à part, 21 pages, Wien, Gerold's Sohn).
HoLDOY = Le droit municipal, l^e partie, par R.-J.-A. Houdoy, Paris,
Durand, 1876 (pp 121-192, 504-512).
Hlmbert, Finances = Es.sai sur les finances et la comptabilité publique
chez les Romains, par G. Hlmbert, Paris, Tliorin, 1887, 2 volumes.
(Voyez Index général, p. 465, s. v. collegia, collegiati, et p. 469, s. v.
corporatif corpus.)
HuMBERT, Ouvriers libres = La condition des ouvriers libres chez les
Romains (Recueil de V Académie de législation de Toulouse, 1868»,
vol. XVII, pp. 386-4.56.
HuscHKE = Verfassung des Servius TulUus, Heidelberg, 1838, pp. loi,
160, 171,224, 713.
HuscHKE, Zeitschr. = Zeitschrift fïir geschichtliche Rechtswissenschaft ,
XII, 1845, pp. ^73-219. Ueber die in Siebenbiirgen gefundenen
lateinischen Wachstafeln, von Huschke.
Joi.Y = Les collèges d'artisans en droit romain. Thèse de droit, par
L.-E.-H. Joly, Caen, 1893, pp. 1-267.
C. JuLLiAN, Inscr. de Rord. — Inscriptions romaines de Rordeaux, par
Camille Jullian, Bordeaux, Gounouilhou, vol. I (1887), pp. 207-214.
C. Jullian, Gallia =« Gallia, Tableau de la Gaule sous la domination
romaine, par C. Jullia>', Paris, 1892 (pp. 107-117).
C. Jullian, [abri —. Dictionnaire des antiquités romaines, de Daremberg
et Saglio, s. v. l'abri (1892).
Kayser = Abhandlungen ans dem Process und Strafrecht, II. Die Straf-
gesetzgebung der Rômer gegen Vereine, Berlin, 1873, pp. 131-199.
Karlowa = Rômische Rechtsgeschichte, von Otto Karlowa, Veit,
Leipzig, vol. I (1885', pp. 71, 556, 613, 784, 813-817, 901-902,
913-918, 926-927, 940; vol. II (1892), pp. 59-69 : Juristisclie
Personen.
( 23 )
Krakaleu = Dus Verpflegnngsivesen der Stadl Hoin in der spàteren
Kaiserzeit, von D"" Gustav Krakauer, Leipzii^, 1874, 59 pages.
Krause = Die drei dltesten Kunsturkunden der Freimaurerbruderschaft,
II, Dresde, I''^ édit., 1813, pp. 92-190; 2^ édit., 1821, pp. 93-175.
KuHN — Die stàdtisclie und bïirgerliche Verfassung des rôm. Reiches,
Leipzig, 1864. Bd. I, pp. 75-83, etc.
I.ARLAT = Étude sur les collèges d'artisans. Thèse de droit, par Pierre
Lablat, Toulouse, 1893.
Lacombe = Le droit funéraire, par D. Lacombe. Thèse, pp. 105 et suiv.
Lacour-Gayet= A /i/o?zm le Pieux et son temps, par Lacour-Gayet. Thèse,
Paris, Thorin, 1888, pp. 154-155, 201-204.
Lacroix = L. Lacroix, L'organisation du travail dans l'Empire romain
(Revue des cours littéraires, 7 mai 1870).
Lafaye = Histoire du culte des divinités d'A lexandrie, Sérapis, his, Har-
pocrate et Anubis, par G. Lafaye. Thèse, Paris, 1883, pp. 144-148.
Lange, R. A. — Rôtnische Alterthiimer, von L. Lange, Berhn, Weidmann,
voL I, pp. 247, 470; vol. II, pp. 28-80 et suivantes, 83, 266, 464;
vol. 112, p. 623. vol. IIP (1876), pp. 232, 274, 298, 299, 340, 435.
Levasseur » Histoire des classes ouvrières en France, par É. Levasseur,
I, Paris, 1850, pp. 3-96.
Liebenam = Zur Geschichte und Organisation des rômischen Vereinswesens.
Drei Untersuchungen, von Liebenam, Leipzig, 1890, 334 pages.
Avec un appendice contenant 82 inscriptions.
Comptes rendus de cet important ouvrage : Revue de l'Instruction publique en
lielgique, 4891, XXXIV, 2« et 8e livr. (.J.-P. Waltzing). Jatiresberichte de BujsiafT,
1893, pp. 238-243 (M. Zoeller). Revue de Vliisioire des relir/ions. 1892, XXV, pp. iOo-
107. Berliner Ptiilologische Wochenschrift, 1890, 41 pages, 4298-lo00 (H. DessaU).
Wochenschrifi fur kl. Phil., 4891, n"* 17 et 18 Tr. Schiess), etc.
Liebenam, Zeitschr. f. Kulturgesch. ~ Aus dem rômischen Vereinswesen
im rômischen Reiche, von Wilhelm Liebenam (Zeitschrift fur
Kulturgescliichte, von Dr. Steinhausen, Berlin, Felber, 1894,
pp. 112-138 et 172-195).
Larcher = Des collèges d'artisans cliez les Romains, par Larcher.
Thèse, Paris, 1880.
Loening = Geschichte der deutschen Kirchenrechts, P*-"- Band, Strassburg,
4878, pp. 201-212.
{ 24 \
LuEDERS = Die Dionysischen Kilnstler, von Otto Lukders, Berlin, 1873.
LUMBROSO = Ricerche Alessandrine di Giacomo Lumbroso, pp. 78-90
= 260-272 : Dei Sodalizii Alessandrini {estratto dalle Hem. délia r.
Accademia délie scienze di Torino, ser. 2, XXVII).
VON Lykowski = Die collegia tenuiorum der Romer. Thèse, Berlin, 1888,
46 pages.
Madvig-Morel = L'État romain, sa constitution et son administration,
par J.-M Madvig, trad. par Ch. Morel, 5 vol., 1882-1889. Voyez la
table alphabétique du vol. V, p. 227, s. v. collegium, et p. 228, s. v.
corpora, corporations.
Mahaim = Étude sur V association professionnelle, par J. Mahaim. Thèse,
Liège, 1891, pp. 1-19.
Masson =: Les corporations {à Rome). Étude historique et juridique, par
Paul Masson. Thèse, Paris, Rousseau, 1888, pp. 1-175.
Matthiass = Zur Geschichte und Organisation der rômischen Zwangsver-
bânde, von B. Matthiass, Rostocker Festschrift, 1891, 41 pages.
Maué, Die Verei)ie = Die Vereine der Fabri, centonarii und dendrophori
im rôm. Reich. 1. Die Natur ihres Handiuei'ks und ihre sacralen
Beziehungen, mit eineni Anhang, enlhaltend die Inschriften, von
Dr. H.-C. Maué, Progr. Frankf. a/M., 1886, 78 pages. Cfr. Philolo-
gischer Anzeiger, 1887.
Maué, Praef. fabr. = Der Praefectus fabrum, Ein Beitrag zur Gesch.
des rôm. Beamtentums und Collegialiuesens wàhrend der Kaiser -
zeit, mit eineni Anhang enthaltend die Inschriften, von Dr. H.-C.
Maué, Halle, Nienieyer, 1887, 190 pages. Cfr. Philologus, 1889,
II. Bd., N. F., pp. 763-768. Comptes rendus de R. Cagnat, Revue
critique, 1888, pp. 434-436. J. Schmidt, Deutsche Literaturzei-
tung, 1888, n. 7. J. Jung, Neue philolog. Rundschau, 1888, n. 11,
pp. 220, etc.
Maué, Hastiferi = Die hastiferi von Caslellum Mattiacorum, von
C.-A. Maué (Philologus, 1888, N. F., I. Bd., pp. 487-513).
Cfr. Th. Mommskn, Korrespondenzblatt der wesid. Zeiisclirifi, iS89, VIII" Bd.,
pp. 49-28 et o0-o2. — Le même. Hennés, XXII, p. ooT.
Marquardt,S/.-F. // OU StaatsveruK II == Rômische Staatsverwaltung,
von J. Marquardt, II. Bd., (Finanzw^esen u. Militârvvesen). 2'^ Aufl..
1884, pp. 110-136, etc.
( 2S )
Marquardt-Vigié, Org. jin. = De U organisation financière chez les
Romains, par J. Marquardt, tiad. par Albert Vigie, Paris, 1888,
pp. 138-170. (Traduction du précédent.)
Marquardt-Brissaud, Org. mil. = De l'organisation militaire chez les
Romains, par J Marquardt, trad. par M. Brissaud, Paris, 1892,
1vol. pp. 215, 309 (Idem).
Marquardt, St -V. HI = Rômische Staatsverwaltung, von J. Marquardt,
III. Bd. (Sacrahvesen), 2te Aufl., 1885, pp. 133-144. Cfr. Index,
p. 591, sub V. collegia.
Marquardt-Brissaud, Le culte = Le culte chez les Romains, par J. Mar-
quardt, trad. par M. Brissaud, 2 vol., 1889-1890- Tome 1^^, pp. 161-
173. Voyez VIndex dans le tome II, p. 420, s. v. collegia, collegium.
(Traduction du précédent.)
Marquardt, Priv. = Das Privatleben der Rômer, von J. Marquardt,
1 vol., 1879-1882, en deux tomes. Voyez les tables.
Marquardt-Lucas et Weiss = La vie privée des Romains, par J . Mar-
quardt, trad. par Louis Lucas et A. Weiss, 2 vol., 1892. (Traduc-
tion du précédent.)
Mendelssohn — Senatus Consulta, qnae sunt in Josephi Antiquitatibus
{Acta Soc. phil. Lips., V, 1875, pp. 211 sqq.).
Merkel = J. Merkel, dans : Handbuch der Staatswissenschaften, von
Conrad, etc., vol. II, 1891, pp 844-857.
Th. m., ou Th. Mommsen, De coll. = De collegiis etsodaliciis Romanorum,
scripsit Th. Mommsen, Accedit inscriptio Lanuvina, Kiliae, 1843,
130 pages.
Th. Mommsen, Rom. Urk. = Rômische Urkanden, von Th. Mommsen
{Zeitschrift fur geschichtliche Rechtsivissenschaft, XV. Bd., 1850,
pp. 345-353; III. Die lex des collegium aquae, pp. 353-364; IV. Die
lex Julia de collegiis und die lanuvische lex collegii salutaris).
Th. Mommsen, Rom. Gesch. = Rômische Geschichte, von Theodor
Mommsen, 6'^ Aufl., 1881-1882, I, pp. 192-195, 220, 842; II, p. 392;
III, pp. 7, 308, 511, 514-515 '. Il y a une traduction française de
ces trois volumes par Alexandre, 8 vol. in-8<», Paris, 1863-1872, et
une autre par de Guerle, 8 vol. gr in-8", Bruxelles. Vol. V (2eéd.,
1885), Die Provinzen von Caesar bis Diocletian, trad. par Gagnât et
TouTAiN, Paris, 1887-1889, tomes IX-XI de l'ensemble de l'ouvrage.
Le volume IV de Mommsen n'a pas paru.
* Nous indiquons les pages d'après la li^ édition allemande ou ii'a|»rès la traduciion
OE GUKRLE.
( 26 )
Th. Mommsen, St.-R. = Rëmisclies Staats-Recht, von Theodor Mommsex,
3 vol., 1871-1888. Voyez vol. 1", p. 341 {= 2« éd., p. 326); vol. IP,
p. 886 (= 2e éd., pp. 850-851): vol. III', pp. 282-287, 1180, 1210,
1235.
Th. Mommsen, Droit public = Le droit public romain, par Th. Mommsen,
traduit par P.-F. Girard, l^e partie (ou vol. I de l'éd. ail.), La
magistrature, 1887, I, pp. 386-388; 3« partie (ou vol. III de l'éd.
ail.), Le peuple et le Sénat, en 2 tomes, 1889. Voyez I, pp. 320-326.
La traduction du 2^ volume de l'édition allemande n'a pas paru.
Naudet = Secours publics chez les Romaijis [Mémoires de VAcad. des
Inscr., XIII, 1838), par M. Naudet, pp. 58-62.
Naudet, Des changements = Des changements introduits da?is toutes les
parties de l' administration de l'Empire romain sous Dioclétien et
Constantin, par M. Naudet, 1817.
iSicoLE = Le livre du Préfet, ou VÉdit de Léon le Sage sur les corpora-
tions de Constantinople, par Jules Nicole, Genève, Georg, 1893.
V'oyez deux articles du même auteur, dans la Revue générale du
droit, 1893, pp. 74 et 132.
NissEN = Pompeianische Studien, von H. Nissen, Leipzig, Breilkopf, 1877,
pp. 297-303 ifullones) et pp. 344-357 (Forumsgildeii).
Oehler. Voyez Eranos Vindobonensis.
Orelli = Inscriptionum latinarum collectio, Turin, 1836. Note au n» 4136.
Pancirollus, De corporibus artificum, tome III du Tliesaunis de Grae-
vius.
Pauly = Realencyclopàdie der classischen Aller thumswissenschaft, von
A. Pauly, 6 vol. Stuttgard, 1840.
Voyez les articles artifices, collegium (Rein), curatores. decuria, magistri, opi-
fices, patroni, pistores, quaestor, scriba, sodalitas, etc. Cette encyclopédie, excel-
lente pour son temps, est vieillie. Une nouvelle édition est en cours de publication
sous la direction de G. Wissowa. Un tome a paru {A-Aleocander).
Pernice = M. Antistius Labeo, Das r'ôinische Privatrecht, von Dr. Alfred
Pernice, I. Bd., Halle, 1873, pp. 289-310.
Philippi = Zur Geschichte des Patronats iiber juristische Personen, von
E. Philippi {Rhein. Muséum, ^. F., VIII, 1853, pp. 497 et suiv.).
Pigeonneau, De conv. = De convectione urbanae annonae et de publias
naviculariorum corporibus apud Romanos. Thèse par H. Pigeon-
neau, Saint-Cloud. 1876, 114 pages.
( 27 )
Pigeonneau, Annone = l'annone romaine et les corps de naviciUaires,
particulièrement en Afrique, par H. Pigeonneau [tiev. de f Afrique
française, IV, 1886, pp. 220-237).
K. Platner, Decollegiis opificum disputationcs II. Lipsiae, 1809.
PRELLER, Reg.= Die Regionoi der Stadt Rom, voii L. Puelleu. Jena, 1846.
PRELLER, Rom und der Tiber (Rerichte derSiiclis. Gesellschaft der Wissen-
schaften, Phil.-hist. Classe, 1848, pp. 131-loO; 1849, pp. 5-37 et
pp. 134-151).
Rabanis, Recherches sur les dendrophores et sur les corporations romaines
en général, par J. Uabanis, Bordeaux, 1841, 71 pages.
J. RÉVILLE, La religion à Rome sous les Sévères. Paris, 1886, pp. 30-39.
Reygasse = Histoire des Associations, leur régime public, leur person-
nalité civile en droit romain et français. Thèse, par J.-B. Reygasse,
Toulouse, 1890, pp. 1-61.
RoBiou = Les institutions de l'ancienne Rome, par F, Robiou et D. Delai-
NAY, Paris, Didier, 3 vol., 1884-1888. Voyez 1, p. 212; III, pp. 10-
13, 52-60, 264-265, 354-357, 376-377.
Rodbertus "= Jahrbiicher f'àr National-Oekonomie, von B. Hildebrand,
Bd. IV, 1865, pp. 341-427: Bd. V, 1866, pp. 135-171, 241-315;
Bd. VIII, 1867, pp. 81-126 et 385-475 [Zur Geschichte der Tribul-
steuern seit Augustus, von Rodbertus).
DE Rossi, Comm. — Commenlalioncs in honorent Th. Mommseni, scrip-
serunt amici, pp. 705 et suiv. : 7 collegii funeraticii famiqliarii e
privati e loro deiîonwiazioni, di G.-B. de Rossi, 1877.
DE Rossi, Bull, crist. — G.-B. de Rossi, Bulleltino di archeologia cris-
tiana, 6 séries, Rome, depuis 1863. Voyez 1864, pp. 57 sqq., etc ,
et les tables de chaque série.
DE Rossi, Le horrea = Le horrea sotto IWventino e la statio annonae
Urbis Romae, di G.-B. de Rossi (Annali deW Instituio di Corresp,
arch., 1885, pp. 223 et suiv.i.
DE Rossi, Roma sott. — La Roma solterranea cristiana, descritta dal
Comm. G.-B. de Rossi, et surtout vol. III, pp. 37 et 507-514, Roma.
1877.
DE Rossi, La villa di Silio Italico cd il collegio salutare nel Tuscolo
(Bull, corn., 1882, p. 144). Tra(hiit dans le Bulletin épigraphique,
II, 1882, pp. 204-211.
( 28)
Rossignol = J.-P. Rossignol, Des services que peut rendre l'archéologie
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J. Roulez, Bulletins de l'Académie royale de Bruxelles, 1839, pp 216 et
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J. Roulez, Mœurs électorales à Borne. Discours, Gand, 1858.
RuDORFF, Zeilschr. = Zeitschrift fur geschichtliche Bechtswissenschaft ,
XV. Ed., 1850, pp. 203-272 : Die soyenannte lex de magistris
AQUARUM, eine altrômisclie Brunnenordnung .
RuDORFF, B. B.-G' = Bômische Bechtsgeschichte, von Rudorff, Leipzig,
1857-1859, 1, pp. 224, 227, 229; II, pp. 403-404.
* Sausas, Decollegiis opificum. Thèse.
VON Savigny = System des heutigen rômischen Bixhts, von Carl von
Savigny, II. Bd., pp. 235-373. Berlin, 1840. Traduction Guenoux,
Paris, 1840-1851.
Schaedler = Das rômische Begràbnissnesen, von Fr. Sghaedler. Tlièse,
Landau, 1888, pp. 17 et suivantes.
ScHiESS = Die rômischen collegia funeratigia iiach den Inschriften,
von Traigott Schiess, Munchen, 1888, 140 pages avec un appen-
dice de trois cent soixante-trois inscriptions.
J. ScHMiDT, Bh. Mus. = Statut einer Municipalcurie in Africa, dans le
Bheinisches Muséum, Neue Folge, XLV. Bd., 1890, pp. 599-611. Cet
article est résumé dans le CI. L. VIII, supplément, p. 1426. Gfr.
Ephem. épigr., V, p. 498.
* Schoell = Z)e communibus et collegiis quibusdam Graecorum, par
R. Schoell. Leipzig, 1879.
ScHWARTZ — Opuscula Academica de Ch.-G. Schwartz, éd. Harless,
pp. 33-66 : De collegio utriculariorum. Norimbergae, 1793.
Serrigny = Droit public et administratif romain, par D. Serrigny,
2 tomes, Paris, 1862. Voyez surtout vol. II, pp. 343-385 ou
no* 1064-1126.
SiGONius, De antiquo jure civium romanorum. Paris, 1576, II, p. 108.
Spencer Northcote = Bome souterraine (Résumé des découvertes de
M. de Rossi), par J. Spencer Northcote et Brov^nlow, trad. par
Paul Allard, 2e édit., 1877, pp. 63-84, 127.
( 29 )
Spon, Ra-henhe = ikCQiES Spon, Recherche des atiliquiléade Lyon, 1678.
nom. édit. par L. Renier et Monfalcon, en 18.^)8.
Stemler = Des collèges d'artisans {romains). Thèse, j)ar Octave Stemler,
Paris, Larose, 1887, pp. l-9(i.
Tramoyeres = Luis Tramoyeres Blasco, Instifuciones gremiales, su
origen y organisacion eii Vale7icia, V;ilenoia, Doineneck, 1889,
I vol. in-8o.
TROUErTE = Les collèges d'artisans à Rome. Thèse, par Paul Trouettk.
Montpellier, 189:2, pp. M3I.
Vauthier -= Étndes sur les personnes morales dans le droit romain et
dans le droit français. Thèse, par Maurice Vauthier, Bruxelles-
Paris. 1887, pp. 38-U.
Wagener = Inscription grecque inédite, par A. Wagener {Revue de
rinstr. publ. en Relgique, XVI, 18(38. pp. ï-lh.
Wallon = Histoire de l'esclavage dans lantiquité, par H. Wallon.
3 vol., '2^ édit., 1879, Paris, Hachette. Voyez surtout vol. 111.
pp. 136 et suiv., pp. 141, 166 et suiv., pp. 202, 220-252, etc.
Walter = Rômische Rechtsgeschichte, von Ferd. Walter, 3^ édit.,
Bonn, 1860, §§380-382.^
Waltzing I = Les inscriptions relatives aux eoUegia fabrum tignario-
rum de Rome et d'Ostie. (Rev. de Ulnstr. publ. en Relgique, 1888».
Le même II = Une inscription du collegium negotianlium corariorum
[lisez : eborariorum) de la ville de Rome {Ibid., 1890j.
Le même III = Vépigraphie latine et les corporations professionnelles de
V Empire romain. Leçon d'ouverture, Gand, Siifer, 1892, 32 pages.
Le même IV = Les corporations officielles de Vancienne Rome, d'après une
lettre de Symmaque (relatio U). \Rev. de l'Instr. publ. en Belgique,
1892, 4e livr., et à part chez Ch. Peeters, Louvain, 22 pages.)
Le même V = Compte rendu de Liebenam, ouvrage précité. {Ibid., 1891,
2^ et 3e livraisons.)
Wassenaer = Jo. L. H. de Wassenaer, IHss. juridico-philologica ad tit.
Digesti de collegiis et corporibus, Lugd. Batav. 1740. Dans : Juris-
prudentia antiqua, cur. H. Fellenberg, Bernae, 1760, I, pp. 399-
44o.
Wezel = De opificio opificibusque apud veteres Romanos, scr. F. Wezel.
Protrr. Berlin, 1881.
( 30 )
WiF.LEMS, Droit public = Le droit public romain, par P. Willems, 5^ éd.,
1883, pp. 634-636.
Wii.LEMS, Élect. de Pompéi = Les électiom municipales à Pompéi {Bull,
de l'Acad. roy. de Belgique, 3^ sér., XII, n» 7, 1886, et à part,
Louvain, Ch. Peeters, 142 pages, surtout pp. 26 et suivantes).
Wii.LEMS, Le Sénat = Le Sénat de la république romaine, par P. Willems,
3 vol., Louvain, 2e éd., 1883-1885; vol. II, 114, n. 4; 115, n. 1 et4 ;
116, n.l; 322-323; 326, n. 4 et 5.
J. WiLPERT = Eine neu entdektes Fresco in der Katakonibe der hl. Donii-
tilla und die coemeterialen Fresken mit Scenen ans dem realen
Leben, dazu Tafel I, II, IIL (Rômiscke Quartalschrift fiir christ-
liche Alterthumskunde und filr Kirchengeschichte, von Dr. A. De
Wael, I, 1887, pp. 20-41).
Zeller = Eine Arbeitereinstellung in Rom (celle des tibicines), von
E. Zeller, Heidelberg, 1865, et dans ses Vortrage und Abkand-
lungen, 2i«^ Sammlung, 1877, pp. 136 sqq.
ZUMPT, Criminalrecht = Dus Criminalrecht der rôm. Republik, von
A.-W. ZuMPT, IL Bd., 2te Abth., Berlin, 1869, pp. 367-404.
PERIODIQUES.
Les périodiques le plus souvent cités sont ceux que nous
avons énumérés ci-dessus, pages 8-9. Les autres sont assez
connus pour que nous n'ayons pas besoin de les mentionner
ici. La liste qui précède comprend du reste les travaux les plus
importants publiés dans les périodiques. Les autres articles,
très nombreux, seront indiqués à leur place.
Ce Mémoire sera suivi d'un Appendice renfermant :
lo Un Recueil complet des itisrriptinns (irecques et latiiie.-; relatives aux
collèges de tous genres, à l'exception des collèges sacerdotaux;
"2° Les Indices de ce Recueil. Ces tables détaillées comprennent : a. un
Index collegiorum ou liste de tous les collèges connus, soit par l'épigra-
phie, soit par les auteurs, avec des explications sommaires sur la nature
de chaque collège ou de chaque métier. Elles réunissent ensuite ce qui
concerne : b. l'organisation des collèges; c. le culte; d. le caractère
funéraire; e. le but et le rôle des collèges ; /". les finances.
Dans notre Recueil, composé suivant l'ordre géographique, qui est celui
du Corpus, chaque inscription portera un numéro spécial suivi de celui
du Corpus. Dans le Mémoire, nous citons d'après le Corpus toute
inscription qui y a paru. Ainsi C. I. L. VI 4412 ou simplement VI
U12 ==: Corpus inscriptionuni latiuarwn, vol. VI, n» -4412. Nous mettons
entre parenthèses ( ) les lettres ajoutées pour compléter les abréviations,
et entre crochets [ ] celles que nous suppléons pour remplacer ce que le
temps a détruit.
Pour éviter, dans les notes du Mémoire, de longues énumérations
d'inscriptions et de longues listes bibliographiques, nous renvoyons
souvent à nos Indices.
CHAPITRE PRÉLIMINAIRE
§ 1. LES DIVERSES CORPORATIONS ROMAINES. — § 2. EXTENSION DE
l'organisation CORPORATIVE PARMI LES GENS DE MÊME PROFESSION
ET DIVISION DU SUJET.
L'histoire des classes ouvrières à Home n'a pas encore été
traitée d'une manière approfondie; nous nous proposons d'en
écrire un chapitre, l'un des plus intéressants et des moins con-
nus, en étudiant les corporations professionnelles qui se for-
mèrent dans le sein de la plèbe romaine. On s'étonnera peut-
être, si nous disons que ces corporations étaient aussi nom-
breuses et, à certaine époque, aussi importantes dans l'ordre
social que les célèbres ghildes du moyen âge, dont elles diffé-
raient toutefois sous bien des rapports. Dès les temps préhisto-
riques, Rome possède des corporations, ou, comme on disait,
des collèges industriels, et leur nombre va toujours croissant ;
l'Empire en vit éclore une quantité vraiment prodigieuse.
3Iais ce n'étaient pas seulement les artisans, les marchands ei
les travailleurs de toute sorte qui tenaient à resserrer les liens
naturels créés entre eux par la communauté de la profession,
du commerce ou du métier. On peut dire, sans exagérer, que le
besoin d'association ne fut jamais nulle part plus vivement
senti que chez la race romaine, et Rome, à mesure qu'elle sou-
mit toutes les nations et qu'elle leur communiqua ses idées
et sa civilisation, semble avoir avivé partout ce besoin inhérent
à la nature humaine. A Rome et dans tout l'Empire, dans toutes
les classes de la société, se formèrent des collèges de nature fort
diverse : les uns sont publics, les autres sont semi-officiels,
d'autres-encore sont purement privés, ou bien ils ont un carac-
tère à la fois privé et public. Ils ont pour but la religion, la
politique, l'intérêt ou plus rarement le plaisir; beaucoup sont
destinés à satisfaire à la fois des nécessités publiques et les
( 33 )
intérêts de leurs membres. Ils ont tous des points de ressem-
blance entre eux, comme il est naturel, et notamment tous ou
presque tous ont un caractère religieux plus ou moins pro-
noncé. Les mots qui servent à les désigner sont à peu près
les mêmes : colleghmi, corpus, sodaîitas, sodalithnn, etc. ^.
Quand on étudie les corporations professionnelles, il
importe donc de les distinguer soigneusement des autres; en
revanche, grâce aux ressemblances multiples qui existent entre
toutes les sortes de collèges, l'analogie pourra souvent nous
guider. Pour ne pas devoir établir plus loin des distinctions
nécessaires, et pour éviter des confusions déplorables, il con-
vient de passer rapidement en revue les diverses espèces d'as-
sociations que virent naître la royauté, la république et
l'empire. Nous réserverons pour la fin les corporations profes-
sionnelles, et nous chercherons à donner une idée générale
de l'extension qu'elles prirent, surtout depuis le premier siècle
de notre ère; nous terminerons ce chapitre par un coup d'œil
sur le sujet.
§ 1. Les diverses corporations romaines.
Quoique la religion ne soit guère étrangère à aucune espèce
de collèges, nous pouvons distinguer, d'après leur caractère
dominant, les collèges religieux, les clubs politiques, les cer-
cles d'amusement et les corporations professionnelles 2.
Parmi les collèges religieux, les uns sont officiels ou semi-
officiels : ils sont chargés du culte public, dû aux dieux par l'État;
1 Voyez notre Index collegiorum, Appendice.
* Voyez des essais de classification dans :
Savig>y, II, pp. 253 et suivantes. Kayser, pp. 132-133. Marquardt,
St.-\., IIF, pp. 13o-U4 = Le culte, pp. 161-173. Mommsen, St.-R., P,
p. 326 sq. = Trad., I, pp. 386-387. G. Boissier, Rev. arch., 1872, p. 87. La
relig. rom., II, p. 252. Herzog, Gall. Narb., p. 189. Maué, Vei'eine,
pp. 1-2. Tramoyeres Blasco, p. 7. Kareowa, II, pp. 59-69.
Tome L. 3
(34 )
les autres se sont voués à un culte privé, librement choisi
par eux.
Nous ne parlerons pas des prêtres de l'Etat {sacerdoles
publici, populi Romain), fonctionnaires publics, qui célébraient
le culte officiel au nom du peuple entier [sacra pro populo)
et aux frais de l'État : c'étaient les quatre grands collèges des
pontifes, des VII viri epulones, des XV viri sacris fachindis et
des augures {quattuor summa coUegia), puis le collège des
fétiaux, les frères Arvales, les sociales Titii et les Saliens. Mal-
gré le nom de collèges que portent les premiers, il est toujours
facile de les distinguer, dans les textes, des corporations pri-
vées, notamment des collèges d'artisans ^.
Mais il y avait une autre catégorie de collèges officiels, éga-
lement chargés d'un culte public, dont plusieurs ont été plus
d'une fois pris pour des collèges professionnels. On les appe-
lait sodalités sacrées [sodalitates sacrae"^), et voici leur origine.
Dès la plus haute antiquité, certains cultes publics furent con-
fiés par l'Etat à des familles [génies). Quand l'une de ces
familles menaçait de s'éteindre, on lui adjoignait des étrangers
pour empêcher le culte de disparaître, et on la transformait
ainsi en confrérie semi-officielle, appelée sodalitas, rarement
collegium; telle fut l'origine des Luperques, qui se divisaient
en Fabiani, Quincliales et Julii, parce qu'ils appartenaient à
trois familles patriciennes. Lorsque l'État décrétait ou intro-
duisait un culte nouveau ou étranger, il formait également
une sodalité pour le célébrer en son nom. Tantôt les con-
* Et pourtant un moderne, voyant Titus appelé collegiorum omnium
sacerdos {Eph. ep., IV, 779. Marquardt, Le culte, I, p. 267), a cru que cet
empereur s'était fait nommer prêtre de tous les collèges d'artisans, et
plusieurs ont reproduit cette erreur !
2 Voyez Th. Mommsen, De coll., pp. 1-27. Marquaudt, St.-Verw., III,
pp. 134 et suiv. — Le culte, I, pp. 161 et suiv. Madvig-Morel, III, p. 149.
Karlowa,1I, pp. 61 sq. Macrgbe rapporte qu'on attribuait l'institution des
sodalitates à Numa et à Talius ; sacrificiis sodalitatibusque institutis
{Sat., I, 6, 3-2).
(35)
frères exerçaient la même profession, tantôt ils habitaient le
même bourg ou quartier {pagiis), tantôt il n'existait entre eux
aucun autre lien que la qualité de citoyens. 11 ne sera pas inu-
tile d'énumérer les principaux collèges de ce genre qui nous
sont connus, parce que plus d'un a été confondu avec les col-
lèges professionnels.
En l'an 49o = 2o9, le peuple délégua un centurion plébéien
pour dédier un temple à Mercure, au pied de l'Âventin, et pour
instituer un collegium mercatorum ou Mercurialium , chargé
de célébrer chaque année le jour de la dédicace. Il était com-
posé des marchands (de l'Aventin), comme l'indique le nom de
mercatores ^ ; celui de Mercuriales lui venait du dieu ; son jour
de fête tombait aux Ides de Mai, où le temple avait été dédié 2.
Le collegium Capitolinorum fut constitué en même temps que
les jeux Capitolins, en l'honneur de Jupiter Capitolin, après la
< Festus, Ep., p. 148 : Maiis Idibus mercatorum dies festiis erat, quodeo
die Mercurii aedes esset dedicata. Liv., II, 21 : Aedes Mercurii dedicata est
Idibus Maiis. — Sur cette délégation peu vraisemblable, voyez Willems,
Le Sénat, II, pp. 306-307. — Plusieurs regardent ce collège religieux
comme une ghilde de marchands de blé, chargée d'approvisionner Rome.
Voyez inf'ra, 3^ partie, chap. II.
2 Festus, /. /. Liv., II, 27, o : mercatorum conlegium instituere.
Cic, ad. Q. fr., II, 5, 2, en 698 : M. Furium Flaccum . . . Capitolini
et Mercuriales de collegio eiecerunt. Ovid., Fast., 699 et suiv. C. I. L.
XIV 2103 : mag(ister) coll(egii) Liipercorfum) et Capitolinor(um) et Mercu-
rial(ium) et paganor(um) Aventin(ensium) XXM vir ... (à Lanuvium,
sous Auguste. Cfr. B. d. L, 1842, p. 104). C. /. L. I 186. 206. Borghesi,
OEuvres, IV, pp. 407 et suiv. Mârquardt, /. /., p. 135 ^ Le culte, I, p. 162.
Preller, Rom. Mijth., II, p. 130, n. 4. Jordan, Topogr., I, p. 278. — En
542 = 212 furent voués les ludi Apollinares ; le collège des mimi parasiti
Apollinis fut probablement établi la même année pour donner ces repré-
sentations. Voyez Festus, p. 326, éd. Mueller. Merkel. Proleg. ad Ovidii
Fastos, p. ccxxxiv. Mârquardt, St-V., III-, pp. 140 et 5o0, en note = Le
culte, II, p. 270, n. 6; p. 315, n. 6. Th. Mommsen, Mittk. d. L, 1888, pp.
80-82. Les parasiti étaient une classe d'acteurs inlerieurs qui jouaient les
rôles de parasite. Leurs synodes qu'on rencontre dans les inscriptions,
n'étaient pas tous attachés aux ludi Apolliyiares. Voyez Th. Mommsen, /. /.
(36)
défaite des Gaulois (367 = 387). Composé des habitants du Capi-
tole et de la citadelle {pagus Capiîolinus), il célébrait les jeux
susdits 1.
Les sodalitates Magnae Matris, recrutées dans les premières
familles, datent de l'an ooO = 204, où l'on apporta de Pessinonte
la statue de Cybèle, qui fut assimilée à la déesse romaine
appelée Maia ou Magna Mater. Les confrères ne furent pas
chargés de célébrer les cérémonies de ce culte exotique, qui
avait ses prêtres spéciaux 2; ils se, bornaient à y assister et à
organiser tour à tour des festins, dont l'attrait principal était,
pour Caton, la conversation de ses confrères 3.
Quand Auguste inaugura le temple de Venus Genitrix, il
fonda un collège composé de membres de la gens Jidia *.
A la mort d'Octave, Tibère établit à Rome les sociales Aiigns-
taies, choisis dans la haute aristocratie, pour honorer la divi-
nité du premier empereur (17 sept. 14). D'autres princes, imi-
tant cet exemple, instituèrent les sociales Clauciiales, Flaviales,
Hadrianales, Antoniniani, etc. s.
< Liv., V, 50, 4 : ludi Capitolùd fièrent . . . collegiunujue ad eam rem
M. Furius dictator constitueret , ex Us qui in Capitolio atque arce habi-
tarent. V, 52, 11 : collegium. Cic, /. /. C. I. L, XIV 2105 (supra, p. 35,
n. 2). I, p. 805 : mag(ister) Capi[tol(ino7mni)]. Cfr. Ibid., p. 186.
2 Marquardt-Brissaud, Le culte, II, pp. 66-74 = St.-V., III, pp. 367 et
suivantes.
5 Cic, desenect., XIII, 45: sodalitates me quaestore constitutae sunt,
sacris Idueis Magnae Ma tris acceptis, dit Caton. Epulabar igitur cuni
sodalibus. Gell., II, 24, 2 : Principes civitatis qui ludis Megalensibus
antiquo ritu mutitarent, id est, mutua inter se convivia agitarent. Sous
l'Empire, on trouve un collège privé, C. I. L. VI 494 : Matri Deum et
NaviSalviae, Q. ISunnius Telephus mag(ister) col(legii) culto(rum) ejus, à
Rome. 3IARQUARDT, /. L, p. 67. — Selon Liebenam (pp.l2-13j, ces sodalitcs
se seraient formées (d'elles-mêmes?; en vue de banquets et de réunions
amicales (uni die Geselligkeit zit pflegcn) !
^ Plin., h. n., II, 93 : in collegio ab eo instituto. Jul. Obsequens,
68 (118) : ludis Veneris Genetricis, quos pro collegio fecit. Cass. Dio,
XLV, 6. Symm., laudes in Valent, sen., II, 32 : Veneris sacris famulaia
est gens Julia.
3 Marquardt, St.-V., III, pp. 463 et suiv. = Le culte, II, pp. 207-223.
(37)
Enfin, il semble qu'on doive ranger parmi les sodalités
sacrées le collegium Minervae, institué par Domitien pour
célébrer les Quinquatrus par des combats d'animaux, des jeux
scéniques et des concours d'éloquence et de poésie *.
Ces associations religieuses semi-officielles, établies pour un
culte public, semblent avoir pour nom technique celui de soda-
litates, qu'on peut traduire par confréries, tandis que le mot
collegium, qu'on applique aussi à certaines d'entre elles, avait
un sens plus étendu -. Leurs membres n'étaient pas des
prêtres, mais des cultures du dieu ; c'était pour eux un devoir
d'assister aux sacrifices auxquels présidaient régulièrement
leurs magistri dans des temples déterminés, et ils devaient
supporter les frais du culte; ils formaient des corporations
placées sous la protection d'un dieu et ils étaient unis par
l'exercice en commun de leurs devoirs religieux 3. Il existait
entre les sociales le même lien sacré qu'entre les parents {cognati
et affines); ils ne pouvaient intervenir ni comme accusateurs,
ni comme avocats, ni comme juges dans un procès contre
un confrère ^.
Les municipes avaient aussi leurs collèges de pontifes et
* SuET., Dom., 4.
2 Le mot sodales se dit indifféremment des membres des sodalitates et
ûescollegia. Gaius dit : Sodales simt, qui ejusdem collegii sunt ; quam
Graeci èxaipeîav vocant (DiG.,47, 22, 4). Festus, Ep., p. 296 : Sodales dicti,
quod una sederent et essent, vel quod ex suo datis vesci soliti sint, vel quod
inter se invicem suaderent quod utile esset. Le mot sodales est appliqué
très souvent aux membres des collèges privés. Voyez notre Index colle-
iliorum. Le nom de sodalicium n'est jamais donné aux sodalités sacrées.
5 Marquardt, St.-V., III, p. 211 = Le culte, I, p. 2oo.
* Th. Mommsen, de coll., pp. 2 et suiv. Marquardt, St.-V., III, p. 137
= Le culte, I, p. 164. Cic, De pet. cons., V, 16. Brut., 45, 166. Pro
Cad., XI, 26. C. L L. I 98 {lex repetund.), 9. 10. 20. 22 : queive ei[ei]
sodalis siet, queive in eodem conlegio siet.
Rien ne prouve que le même lien religieux existât, de par la loi, entre
les membres des collèges privés ayant un but religieux, funéraire ou
professionnel, comme plusieurs l'admettent aujourd'hui.
(38)
d'augures * ; certains avaient d'autres prêtres voués à des cultes
locaux. En beaucoup de villes, il existait des sodalités sembla-
bles à celles que nous venons de décrire, en ce sens qu'elles
étaient oftîciellement attachées à un temple déterminé d'Apol-
lon, d'Hercule, de Mars, de Mercure ou d'un autre dieu, sous
le nom d'Apollinares, Herculanii, Martiales, Martini ou Mar-
tenses, Mercuriales, etc. 2. Les magistri Bonae Mentis^ ou Laimm
Augmtorum ^, et d'autres magistri, attachés à un fanum ou à
un sacellum s, formaient des collèges de même nature 6.
Dès le premier siècle de notre ère, on trouve, dans toutes les
villes de l'Empire, une institution dont nous devons également
parler : ce sont les seviriAugustales. Leur histoire et leur carac-
tère restent assez obscurs, malgré les nombreuses études qu'on
leur a consacrées. Sous le règne d'Auguste, ils apparaissent
dans plusieurs villes, et dans le cours du premier siècle, cette
institution se répandit dans l'Italie et dans les provinces, soit
spontanément, soit par l'influence du gouvernement : au
second siècle, toutes les cités ont leurs sévirs Augustaux
annuels, généralement des affranchis qui sont tenus de célé-
brer à leurs frais des jeux et des spectacles en l'honneur de la
maison impériale. Cette fonction est devenue une charge
municipale; en revanche, elle procure certains honneurs.
Nommés pour un an par la curie parmi les affranchis riches,
les sévirs sont forcés d'accepter cette charge de plus en plus
onéreuse. L'année finie, ils conservent leur titre et constituent
* Voyez Herbst, De sacerdotiis Romanorum municipalibus, Hal. Sax.,
i883.
2 Voyez les Indices des volumes du Corpus, par exemple, IX, p. 791 fin.
Gfr. Schneider, de sevirum Augustalium muneribus, 1891, p. 38.
3 C. /. L. I 1237, à Neapolis.
* Ou magistri Augustales.
^ C. I. L.l Indices, p. 620.
^ Il ne faut pas les confondre avec les Venerii, Martiales, etc., qui
sont des esclaves attachés à ces temples. Les ministri esclaves figurent
souvent à la suite des magistri affranchis ou ingénus. CI. L. IX, p. 69 et
n. 2553 note.
( 39 )
Tordre des Augustaux, placé entre celui des décurions et la
plèbe : c'est Taristocratie des affranchis.
Le but ou du moins l'effet de cette institution est double :
elle associe les affranchis les plus riches à la fois au culte offi-
ciel de la maison impériale qui prit tant de formes diverses
dans l'Empire, et aux charges municipales dont les éloignait
leur origine '.
Si nous en parlons ici, c'est qu'ils formaient souvent de
véritables corporations, autorisées comme telles par l'empe-
reur ou le Sénat, organisées comme les corporations ouvrières,
ayant leur caisse et leurs propriétés de toute nature, leurs
présidents, leurs curateurs, leurs questeurs, placées enfin
sous la protection de patrons -.
Il arrivait fréquemment qu'au lieu de constituer un collège
nouveau pour le culte impérial, on le confiait à une sodalité
déjà chargée du culte d'un dieu : c'est ainsi qu'il faut expliquer
ces Herculanii Augustales, ces Mercuriales Augustales et d'autres
qu'on rencontre souvent 3.
Revenons k Rome. A côté des sacra pro populo, célébrés au
nom du peuple par les collèges de prêtres ou les sodalités, il
1 Voyez Marquardt, St.-V., II, jjp. 197-208 = Oyg((nisatw)i de VEm-
pire, I, pp. 291-307, où sont cités les travaux antérieurs. Nous ne mention-
nons que J. ScHMiDT, De sévir is Aiuj., Haiis, 1878. Th. Mommsen, Staats-
Recht, III, pp. 432-457 (1887) = Trad., VI, 2, pp. 40-46. E. Beurlier, Le
culte impérial, pp. 194-238(1888). Schneider, De sevirum Atig. mune-
ribus, Gissae. 1891, 64 pages. Nessling, De seviris Aug., Gissae, 1891,
51 pages. Ces deux derniers combattent la théorie tout à fait originale et
nouvelle de Mommsen, qui fait des seviri Augustales une institution
purement civile, créée dans l'intérêt financier des cités par le gouverne-
ment et destinée à imposer aux affranchis riches, que la loi excluait des
honneurs publics, leur part de charges municipales; suivant Mommsen,
ils auraient occupé dans les municipes la place que les chevaliers avaient
dans l'État romain. Cfr. Herzog, II, pp. 1000-1002.
* Voyez notre Index collegiorum, et Mommsen, /. c., p. 456 = Trad.,
p. 45.
* Voyez les Indices du Corpus, par exemj)le vol. IX et X. Cfr. J. Schmidt,
op. L, p 58. Schneider, op. L, p. 33.
(40 )
y avait les sacra popidaria, célébrés aussi en l'honneur des
dieux de l'État, mais par les particuliers {quae omnes cives
faciunt), à certains jours fixés par l'autorité. Ainsi les habi-
tants des sept districts urbains [montanï) avaient une fête com-
mune, appelée septimontiumy et les habitants des bourgades
rustiques [pagani] célébraient les paganalia '. Ils formaient des
communautés religieuses qui pouvaient avoir une caisse et des
biens communs '^. Dans les carrefours {compita) se trouvaient
les sanctuaires des deux Lares compitales; les habitants des
rues voisines {viens, vicinitas, compitum) les honoraient par
des sacrifices et par des jeux populaires, fixés annuellement à
l'un des premiers jours de janvier {liidi compitalicii) '^. Quoi
qu'on ait dit, ni les gens de ces voisinages, ni les habitants des
districts urbains ou des bourgs rustiques n'ont jamais formé
des collèges proprement dits, bien qu'ils eussent leurs magistri
et leurs tlamines 4, mais des divisions géographiques et des
communautés religieuses, comparables à nos paroisses, qui
n'agissaient en commun que pour célébrer ce culte particulier.
* MoMiMSEN, Die rômischen Tribus, pp. 15 sqq., 211 sqq., Hist. roui., I,
p. 132. C. L L. I 802, note de Th. Mommsen. Le même, St.-R., III,
pp. 112 et suiv. = Trad., VI, 2, pp. 125 et siiiv. Marquardt, St. -Y., P,
p. 7 et III2, p. 190 = Organisation de l'Empire, I, p. 6; Le culte, 1,
pp. 228 et suiv. Madvig-Morel, III, pp. 24-25. Detlefsen, Ann. d. L,
1861, p. 48 sq. Jordan, Topogr. der Stadt Rom, I, p. 199. de Rossi,
Fiante di Roma, p. 14. G. Gatti, Bull, com., 1887, pp. 156 sqq.
2 B. c, 1887 (XV), p. 156. C. /. L. VI 3823.
5 Marquardt, St.-V., IIP, pp. 203-204 ^ Le culte, I, p. 245 et suiv.
Gatti, dans le B. c, 1888, pp. 221-239 : di un sacello compitaledeW anti-
chissima regione Esquilina (Tav. XII).
* G. Gatti, B. c, 1887 (XV), p. 156, et Th. Mommsen, St.-R., III, 1,
p. vm, n. 1 = Trad., VI, 1, p. 128, n. 4 : m[ag(ïstri)] et flamin(es)
montan(oruni) montis Oppi de pequnia mont(anorum) mentis Oppi sacel-
lum claudend(umj et coaequand(um) et arbores serundas coeraverunt , du
temps de la république. On connaît le paagus Montanus (VI 3823), les
pagani Aventinenses (XIV 2105), des magfistri) pagi Janicolensis, I 801,
802 = VI 2219-2220. Voyez Th. Mommsen, Sr.-/Î., III, p. 1 16, n. 7 = Trad.,
VI, 1, p. 130, n. 7. Gilbert, Stadt Rom, II, pp. 177, 189.
(41 )
Ils ne portaient pas le nom de collegia; car Cicéron et son
frère Quintus les distinguent formellement des collèges *.
Cependant, il y avait un pac/us qui formait une véritable
sodalité, parce que l'Etat lui avait confié un culte public : c'était
le collegium Capitolinorum dont nous avons parlé. Monmisen
est disposé à croire que le collegium mercatorum, qui honorait
Mercure dans son temple de l'Aventin, correspondait aussi au
pagus Aventinensis : ces marchands auraient tous habité ce
quartier 2. Au premier abord, il semble peu vraisemblable que
ce nom de marchands ait pu être donné à tous les habitants
d'un quartier; cependant, il faut remarquer d'abord que ce col-
lège de marchands, comme celui du Capitole, disparaît quand
les pagi et les montes sont remplacés par les vici d'Auguste 3^
ensuite que le même phénomène semble se présenter à Capoue.
Quand cette ville révoltée fut soumise et privée de son organi-
sation communale, on lui permit d'avoir dans chaque pagus
des magistriy chargés de pourvoir au culte, de célébrer les sacri-
* Cic, Pro domo, 28, 74 : nidlum est in liac urb: collegium, nulli
pagani, aut montani, qiioniam plebei quoqae urbanae majores nostri
conventiciila et quasi consilia qitaedam esse voluerunt. De petit, cons.,
VIII, 30 : deinde habeto rationem. urbis totius : collegiorum omnium (Th.
M., St.-R., m, 1, p. 114, n. 5 = Trad., VI, 1, p. 1^27, n. 4, lit : collegiorum,
montium)^ pagorum, vicinitatum. Cfr. Cohn, p. 44.
MoMMSEN, au contraire, a soutenu que les gens des compita formaient
des collèges qu'il appelle collegia compitalicia, et cette opinion a
généralement cours. Nous chercherons à la réfuter plus loin, 1"^^ part.,
chap. le'-, § 4.
On trouve un collegium Ve[l]abrensium (VI 467), association religieuse
d'une autre nature. Cfr. ?^otizie, 1892, p. 3i5. B. d. L, 1884, p. 2. Huit,
épigr., 1885, p. 32.
2 C. I. L. I 637, et note p. 187; I 804.805 et notes; XIV 2105 (du com-
mencement d'Auguste), cité supra. Cfr. Mommsen, Staatsrecht, III, p. 115,
n. 2 = Trad. de Girard, VI, 1, p. 128, n. 2.
3 Th. Mommsen dans le C. /. L., I, pp. 186. 205. Die rôm. Tribus,
pp. 15-20, 211-215. St.-R., III, p. 116 =^ Trad., p. 128. Hist. rom., L c.
Jordan, Topogr., I, p. 278. Ce qui est sûr, c'est que le conlegium mcrca-
torum appartenait an pagus Aventinensis.
( 42 )
fices et les jeux; ils formaient des collèges de douze membres,
et l'un de ces collèges s'appelle collegium mercatonim, tandis
que les autres portent des noms religieux i. — Dans tout l'Em-
pire, d'ailleurs, on rencontre des listes de magisth pagi, aux-
quels sont souvent joints des mmistri'^.
A côté de ces corps otiiciels qui, sous des noms divers, sont
attachés ù des cultes publics et méritent plus ou moins le nom
de collèges, il y avait, dans tout l'Empire, des collèges reli-
gieux privés, qui honoraient en leur propre nom une divinité
librement choisie, et qui se distinguaient des collèges otiiciels
à un autre point de vue : c'est qu'à côté du culte privé, ils
avaient un autre but, souvent plus important, un but pro-
fessionnel, politique ou funéraire. Nous ne parlerons dans ce
paragraphe que de ces derniers.
Aucun de ces collèges privés ne s'appelle sodalitas, mais ils
prennent presque toujours le nom de collegium, qui s'appli-
(juait à toute association formée pour durer toujours, même
après la mort de ses fondateurs, quel que fût d'ailleurs son but.
Ils se nomment souvent aussi sodaliciiun, terme qui ne ditlere
pas de sodalitas par son origine, mais par son emploi; on ren-
contre une série d'autres dénominations, en partie grecques,
telles que : thiasus^.
Dès la république, on trouve de ces corporations qui ont
pour but le culte privé d'une divinité particulière, et la célé-
* C. I. L. l 563 et suiv. = X 3773 et siiiv. Voyez les explication?
de Th. Mommsen, C. I. L. I, p. 159 et suiv. = X, pp. 3ti6-368. G. Lafaye.
Revue de l'hi.^t. des relig., XX, 1889, p. 51. — Co)de(iium mercutonim à
Capoue, en 64'2 : I 563 =• X 3773. Les autres portent des noms reli-
gieux, par ex. : conlegium seiveniagistrei Jovei Compagei. On voit aussi
que le conlegium ne comprend que les niagistri du pagus; ils sont pré-
posés au culte. Voyez Schli.tex, i>p. e., pp. 7:2 et suiv. Liebenam, p 65.
n. 2.
- Voyez C. L L., les Indice,'' : dii deaeque et res sacra, sacerdotes
municipioruw , par ex. : vol. IX, p. 773, et )ys nnuticipalis , respublica ,
ibid., p. 788.
5 Voyez notre Inde.v collecjiorum , Appendice.
(43)
bration de sacrifices et de repas sacrés dans un sanctuaire déter-
miné. Elles se formèrent surtout parmi les sectateurs des dieux
étrangers, dont le culte s'introduisait malgré la loi et malgré la
défense expresse du Sénat. Pour célébrer les rites de Bacchus ',
l'Italie méridionale et Rome elle-même avaient vu naître, au
II« siècle avant notre ère, de véritables collèges d'hommes et de
femmes, ayant leurs chefs f?nrtr/i6/H) et leurs caisses communes^;
ils furent interdits en l'an 186 pour cause d'immoralité et étouffés
à grand'peine. Peu après la seconde guerre punique, le culte des
divinités égyptiennes, Isis, Sérapis, Osiris et Anubis, fut intro-
duit, et les défenses répétées, mais inutiles, du Sénat prouvent
qu'il ne tarda pas à s'implanter; il est probable qu'au temps de
Sylla, ses adhérents formaient déjà des collèges 3. La religion
juive eut de bonne heure ses sectateurs dans la capitale, oii la
colonie Israélite forma aussi une ou plusieurs communautés,
tour à tour tolérées et supprimées. César permit aux juifs de
se réunir et de posséder une caisse commune, c'est-à-dire de
former des collèges ^.
* S.-C. de Baccanalibus iâ. 568-186j : C. I. L. I 196, p. 44 == X 104,
p. 13. Bruns, Fontes, p. 151. Liv., 39, 8-19. Cic, De leg., II, lo, 37.
Voyez WiLLEMS, Le Sénat, II, pp. 316-319 (Registres, p. 7, s. v. Baccana-
lia). Preller, Mijth., IP, p. 714. LeiNOUmant, dans le Dictionnaire de
Daremberg, s. V. Bacchanalia. Marquardt, St.-V., Ul-, j). 43, n.'2 = Le
culte, I, p. 52, n. 3. Kayser, pp. 153-156.
* Liv., 39, 18 : 7ieu qua pecunia communis neii quis magister sacrorum
aut sacerdos esset. CL L. I 196, 1. 10 : sacerdos nequis vir eset. Magister
neque vir neque mulier quisquam eset. Neve pecuniam quisquam eorum
comoine[m h]abiiisse ve[l]et.
3 Apul., Metam., XI, 30 (éd. Hildebrand, p. 1094) : Ac ne sacris suis
gregi cetero permixtus deservirem, in collegium me pastophorum suorum,
immo in ter ipsos decurionum quinquennales adlegit (Osiris). Ritrsus
denique collegii vêtus tissimi et sub illis Sullae temporibus conditi munia
. . . obibam. Marquardt, St.-V., III^, p. 77, n. 7; Le culte, I, p. 95,
n. 5; p. 167, n. 5. G. Lafaye, pp. 44 et suivantes.
* Marquardt, St.-V., IIP, p. 82 = Le culte, I, p. 101. Maué, J)ev Praef.
fabr., pp. 26-27. Paul Ai.lard, Persccut., I, pp. 1-13. Voyez infra.
Impart., chap. I, § 4.
( 44)
Sous l'Empire, les cultes étrangers atiluèrent de plus en plus.
Mécène, selon Dion Cassius, conseillait à Auguste de ne pas les
autoriser, parce que leurs adhérents formaient des associa-
tions dangereuses pour Tordre public i. Plus que jamais, Isis
et Cybèle eurent leurs adorateurs particuliers; du reste, le
culte d'Isis fut adopté par l'État et celui de Cybèle fut réorga-
nisé. Dès lors, on trouve partout des coUeqia Isidis -, des col-
legia pastophoronnn 3 qui honorent la déesse égyptienne pour
leur compte, et surtout des collèges de dendrophores * et de
cannophores ^ qui semblent voués à la fois au culte public et
privé de Cybèle ^\ Sous les Antonins, il y a une véritable inva-
sion des dieux syriaques et perses " ; les collèges privés de
Mithra ^ ou de Sol invictus, de Jupiter Héliopolitain 9 et de
Jupiter Dolichène lû se multiplient.
Cependant les dieux du panthéon grec ou latin ne sont pas
délaissés, et les adorateurs de Jupiter, de Liber Pater, de Cérès,
de Mars, et surtout d'Hercule et de Silvain, etc., s'associent
fréquemment. Dans les villes où domine Tintluence grecque.
' CasS. DiO, 5-2, 36 : 6-: xa-.vâ -r-.va ox:-j.6-j:x o\ -zo^q^-o: àvT£T-j£povT£;
TToXXoù; àva-£'!rouj'.v àXXo':piovo!a.£"'v xàx toutou xa- juvou-toTia-. xal
auircâjci; Ïzol'.^v.olî tî vtyvovTai,
2 A Rome, Pompéi, Atina, Potaissa, Valeiilia, etc. Voyez notre IrnlM
collegiorum {collcgia funcraticia).
3 C. /. L. V :2806. 7468 ; coll. pastopliorum Indiistricnsium, sous
l'Empire.
* Voyez notre Index collegiorum et infra, 11^ part., cliap. 1, § 3.
5 Voyez le même IndtW et infra, 11^ part., chap. 1, § 3.
^ Voyez VI -HGd : sodale^ ballatores Cykiac; VI 494, supra, p. 36.
n. 3. H. R. GoEHLER, de matris magnac apnd Ronianos cultu , Diss.,
Misniae, 1886, p. 77.
" ôIarquardt, St. -Y., III-, pp. 83 et suiv. = Le culte, I, pp. 101 et suiv.
» Pour ces collèges, voyez notre Index collegiorum {coll. funeraticia).
3 Voyez ibidem. — M.uiquardt, Le culte, I, pp. 102-103 et notes =
Sr.-V'./lII, p. 83.
*^ A Rome, sur l'Aventin, C. I. L. VI 405-413 : colitore.^ liuju.-< loci.
Marquârdt, /. c. F. Hettner, De Jove Dolicheno, Bonnae, p. 55.
( 45 )
on honorait surtout Bacchus, et les thiases sont nombreux ^.
Une foule de collèges sont aussi voués au culte des empereurs
régnants '^ ou morts {(livi)'et de la famille impériale (donius
divina); beaucoup honorent les Lares impériaux, ou bien
les Lares du carrefour voisin, ceux de la ville ou ceux d'un
riche particulier : ce sont de pauvres gens, clients, affran-
chis, esclaves.
Les collèges de dieux étrangers étaient souvent composés de
pérégrins, établis à Rome ou ailleurs, qui avaient apporté avec
eux un culte national, comme avaient fait les marchands
syriens de Pouzzoles qui adoraient Jupiter d'Héliopolis 3. Mais
ce n'était pas toujours le cas pour les divinités orientales d'Isis,
de Mithra, qui eurent, à certain moment, une si grande vogue.
Qu'ils fussent formés d'étrangers unis par la communauté
d'origine ou de natifs, tous les collèges religieux privés étaient
des associations particulières, fermées, dont les membres
étaient unis par un même culte; c'étaient de véritables corpo-
rations religieuses qui s'obligeaient h l'exercice en commun
d'un culte déterminé. Pour subvenir aux frais des cérémonies,
pour bâtir et entretenir leur temple, les confrères n'avaient
que leurs cotisations et les contributions demandées parfois
au public sous le nom de stips-'^^; ils ne pouvaient attendre
» A Pouzzoles, C. I. L. X 1583-1585; à Antioche, C. L L. III 291; à
Philippi, C. /. L. 111 703-704; en Mésie, à Nicopolis, C. L L. III 6150.
Les collèges bacchiques s'appellent aussi spira. Cfr. VI 261, note; 461, etc.
Voyez FoucART, Assoc. relig. chez les Grecs, Paris, 1873.
2 C. L L.\ 1238 (à Nola) : Augusto sacrum restihierunt Laurinienses
pecunia sua cullores. Les cultores Larum sont des collèges funéraires.
V. Beirlier, Le culte impérial. Thèse, Paris, 1890, p. 257. Rôscher,
Lexikon der Mythologie, s. v. Kaiserkultus.
^ C. I. L. X 1579. 1634 : cultores Jouis Heliopolitani Berytenses qui
Puteolis consistunt, corpus Heliopolitanorum . Au n" 1634 : qui in ciiltu
corporis Heliopolitanorum sunt'. C. L Gr. 5853 : ol h Uo-z'.ôloi^ /.axo'.-
xouvTcc; Tupto'. (= Kaibel, 830) en l'an 174 après J.-C.
* Mar(;iardt, ^7.-V., 1112, j). 142. 212 = Le culte, I, pp. 170 et suiv.
et p. 255.
( 46 )
aucune dotation de l'État. Comme ils étaient attachés à un
temple déterminé, ils sont parfois désignés sous le nom de
collegium templi, cultures templi i.
En dehors de la célébration de ce culte privé, tous ces col-
lèges portant le nom d'un dieu avaient un autre but, et ils
n'étaient pas exclusivement religieux. Dès la république, nous
voyons les collèges d'artisans s'occuper de l'enterrement des
confrères défunts; il en fut sans doute de même des collèges
religieux dès cette époque. M. Cumont nous fait observer que
quelques-uns, tels que les collèges de Mithra, avaient même
une raison spéciale de le faire : c'est qu'ils avaient leurs
dogmes particuliers sur la vie future et leurs rites funéraires,
peut-être leurs cimetières spéciaux-. Or, il arriva que beaucoup
de ces collèges privés, fondés surtout pour adorer une divi-
nité, finirent par regarder la religion comme l'accessoire et
les funérailles comme leur but principal 3. Les innombrables
collèges qui furent établis au 11^ et au IIl*^ siècle de notre ère,
avant tout pour assurer aux confrères un enterrement conve-
nable, continuèrent à choisir un patron parmi les dieux natio-
naux et étrangers. Ces collèges, à la fois funéraires et religieux,
sont appelés collegia tenuiorum ^ par le jurisconsulte Marcien;
à l'exemple de Mommsen, on les appelle aujourd'hui collegia
• DiG., 32, 1, 38, 6 : collegium ciL}usdam ionpli. Ouelli, 5910 : cultores
templi, à Sundert. Voyez encore les cuUores hujus loci cilés supra (VI 405-
413), et à Ostie : ordo corporatorum qui pecuniam ad ampliandum tem-
plum contulerunt (XIV, 246 et note, années 140-172). Marquardt, St.-V.,
III2, p. 135, n. 10 ^ Le culte, I, p. 163, n. 4, a tort de compter ces collèges
parmi les sodalitates sacrae : ils n'ont aucun caractère officiel.
2 L'ouvrage de F. CumOxNT sur le culte de Mithra est sous presse.
3 G. BoissiER nous semble exagérer quand il dit des cultores Larum
et imaginum domus augustae : « Nous n'avons aucune raison de croire
que ces associations aient été fondées dans un autre dessein que de
sacrifier en l'honneur de l'empereur et de sa famille, et qu'elles se soient
occupées d'autre chose. » Rec. arcli., 1872, p. 84. Voyez infra, lie part.,
chap. II, § 4.
* DiG.,47, 22, 1 pr. et3,2.
( 47 )
f un eratici a ; eux-mêmes s' mhiuUini collegium ou cultores d'un
(lieu ou collegium salulare. Ils apparaissent sûrement dès la fin
(lu I^»" siècle et se multiplient à Tinfini; peut-être remontent-
ils à la n^publique.
Nous aurons à y revenir.
Les collèges portant le nom d'un dieu ont donc tous un
caractère ù la fois religieux et funéraire ^ et généralement ce
dernier domine. Il faut peut-être excepter les collèges voués
à ces cultes d'Egypte et d'Asie, qui restèrent si vivaces jusqu'au
triomphe du christianisme; ces collèges semblent avoir le mieux
conservé leur caractère sacré, à cùié du caractère funéraire, et
ceux de Mithra, par exemple, ont une double organisation : ils
possèdent des chefs religieux chargés du culte à côté de ceux
qui administrent les autres intérêts -.
Le commandeur J.-B. de Rossi a démontré que, vers la fin
du II® siècle, les chrétiens profitèrent, eux aussi, de l'autori-
sation accordée à tous ceux qui voulaient s'associer pour les
funérailles; sous des noms tels que fraternitas ou ecdesia
fratrum, peut-être de cultores Dei ou Verbi, ils formaient de
véritables collèges funéraires 3.
Nous n'avons pas encore épuisé toute la variété des collèges
religieux. Il faut ranger parmi eux les collegiajuvenum^, dont
la nature n'est pas encore bien éclaircie. Ils sont répandus
dans toutes les parties de l'Empire; les inscriptions nous les
montrent en Espagne comme en Asie, dans les provinces du
» C. JuLLiAN, Inscr. de Bordeaux, 1, [). 209 : « Toutes les associations
religieuses de l'Einpire étaient fondées en vue d'assurer à leurs membres
un locus sepuUurae, et lorsque ce n'était pas le but réel de ces fondations,
c'en était au moins le but avoué et le prétexte. »
2 C'est aussi le cas pour les initiés aux Bacclianales; ils avaient un
sacerdos pour le culte et un mayister pour administrer la caisse. Voyez
.supra, p. 43, n. % et Th Mommsen, C. I. L. I, p. 44.
5 Voyez infra, I^e part., chap. II, § 5.
^ Ou colleyia juventuds, juventus, jiiueiies. Voyez noire Index col legio-
rum, où l'on trouvera les inscriptions et la bibliograpliie.
( 48 )
Danube et du Rhin comme en Italie. Quel était leur but?
Quelle était leur organisation? Ils semblent organisés comme
les autres; quant à leur but, ils célébraient des fêtes (ludi
juvenaîes, Insiis jiivenwn), consistant en représentations dra-
matiques et en jeux du cirque. Beaucoup nomment parmi
leurs dignitaires des sacerdotes et l'on rencontre des curatores
lusus juvenum ', fonctionnaires municipaux chargés peut-être
de les surveiller. Ils avaient certainement une grande impor-
tance pour les municipes, puisque Cyzique demanda pour son
corpus v£wv l'autorisation du Sénat (vers 140) '^. Mommsen croit
que, outre leur office religieux, ils jouaient le rôle de garde
municipale. L. Renier et d'autres rattachent leur origine à
l'institution des ludi juvenaîes, par Néron 3, mais ils existaient
avant le règne de ce prince. A l'époque de Callistrate, ils étaient
devenus fort turbulents et ils se prêtaient aux acclamations
tapageuses du public; une loi défendit aux juvenes l'accès des
théâtres, menaçant les récidivistes de l'exil et même de la
mort *.
Tels sont les collèges où la religion domine; dans ceux dont
nous allons parler, elle joue un rôle plus etïacé ou nul, et on
peut les appeler profanes.
Associations politiques. Au Yll^ siècle de la république,
toutes les corporations, religieuses et professionnelles, prirent
une part plus ou moins active à la politique. Les unes, commo
les collèges sacerdotaux et les sodalités sacrées, se bornaient à
soutenir leurs membres aux élections ». Les autres, comme les
collèges privés, nés parmi le peuple, composés d'artisans, de
' X 6555. Voyez les Indices du Corpus : res municipalis .
« Ephem., III, pp. 156-160 = C. L L. III, suppl., no 7060.
^ IkC.^Ann., XIV, 15. On trouve un curator lusus [juvenalis] clans une
inscription de Tusculum (XIV 2592) antérieure à Néron. — Dans quelques-
uns de ces collèges, il y a des jeunes filles (XIV 2631. 2635).
* Di(i., 48, 19,'' 28, 3 (Callistratus).,
« Cic, 7in//., 45, 166. De petit., V, 16. ProSulla, II, 7. Cfr. Th. Momm-
SKN, De coll., pp. 3 et suivantes.
(49 )
commerçants ou d'adorateurs (iu même dieu ', se laissaient
corrompre en masse par les candidats et surtout devinrent un
instrument de désordre entre les mains d'ambitieux déma-
gogues. On établit même à cette époque une foule d'associa-
tions dangereuses qui prirent le nom et l'organisation de ces
collèges populaires pour cacher leurs intentions criminelles '2.
Les empereurs craignirent longtemps encore ces associations
de toute nature, qui prenaient plus ou moins ouvertement un
caractère factieux, et ils les surveillèrent, dans les provinces
comme à Rome, jusqu'à ce que le danger eût disparu.
Ce n'est pas d'elles que nous voulons parler ici. Sous la
république, il y eut des associations purement politiques et
électorales : on les appelait sodalitates, sodalicia, factiones 3,
jamais collegia. Elles se composaient de citoyens puissants,
désireux d'arriver aux honneurs; elles étaient permanentes,
avaient leurs agents, leurs chefs et sans doute leurs statuts 'K
< Marquardt, St.-V., I1I2, p. 77 = Le culte, I, p. 9o.
* AscoNius, in Or. pro Corn., éd. Kiessling et Schoell, p. 67 : Fré-
quenter tum etiam (689 = 6o) coetus factiosorum hominum sine publica
auctoritate malo publico fiehant . Cicéron (ihid., p. 66) parle d'un collegiuni
Corneliorum, composé d'affranchis de Sylla. Cfr. C. I. L.l 585, note de
Th. Mommsen. Suet., Aug., 32 : Plurimae factiones titulo coUegii novi ad
nullius non facinoris societatem coihant. Voyez infra, l^e part., ch. I et II.
3 Ces trois mots, qui avaient par eux-mêmes un sens fort honnête, sont
employés à cette époque pour désigner ces cluhs pohtiques, et impliquent
quelque chose de factieux. Cfr. Cohn, pp. 45 et 62, n. 130. Sodalitas : Cic,
de petit., V, 19. Ad Q. fr.. Il, 3, 5. Pro Plancio, 15, 37 : consens ioneni ,
quae magis honeste quam vere sodalitas nominaretur. Sodalicium :
AscON., in Milon., p. 34. Cic, Pro Plancio, 15, 36. 19, 47. Fragm. pro
Vatin. (éd. Mueller, IV, 3, p. 285). U\i\ciE^ dira encore collegia sodalicia
pour désigner les collèges factieux : Dig.,47, 22, 1 pr. Trajan, parlant de
la Bithynie, dit : Éxatpeïai (PuN., Ep. ad Traj., 43). Voyez plus loin,
l'e part., chap., II, § 2. Factio : Liv., VII, 32. Cic, ad Q. fr., 3, 1, 5, 15.
Festus, s, V. factio, éd. Mueller, p. 86.
* Cic, De petit, cons., V, 19 : quattuor sodalitates hominum ad ambi
tionem gratiosissimorum tibi obligasti, M. Fundanii, Q. Gallii, C. Cor-
nelii, C. Orchivii. Cass. Dio, 37, 57 : rà kaipixà acpwv; il parle des
Tome L. ' 4
( oO )
Destinées à soutenir les confrères ou leurs amis, elles
gagnaient les électeurs en masse : chaque associé travaillait
sa tribu. Les citoyens disposés à se vendre se faisaient inscrire;
ils étaient divisés en décuries [decuriati) par les agents de la
sodalité [divisores, séquestres), qui distribuaient le prix des suf-
frages; mais ces vendus ne formaient pas de collèges véri-
tables ^. C'est contre ces corrupteurs et ces corrompus que fut
rendu le Sénatusconsulte de l'an 696 = 58, ul sodalitates decu-
riatique discederent. La lex Licinia, quae est de sodalidis, comme
dit Cicéron, ne frappa que les premiers en 699 = 55. On a eu
tort d'appliquer aux collèges en général ces deux mesures,
qui n'étaient dirigées que contre la brigue'^.
Ces associations disparurent avec la république. Plus de
liberté dans les élections, et depuis Tibère, plus de comices
électoraux, du moins à Rome : les clubs n'avaient plus de
raison d'être.
Quelle fut leur origine? Les opinions diffèrent. Selon de
Savigny et Madvig 3, ce seraient des sodalités sacrées, trans-
formées par la politique. C'est difficile à croire. Selon Cohn '*,
il y aurait eu à Rome, dès les temps les plus reculés, des
sociétés d'agrément d'un caractère civil, formées de gens de la
classe élevée, sorte de clubs d'amis, ayant pour but des réu-
nions intimes et des festins, véritables sodalités moins le carac-
tère religieux. Aux élections, dit Cohn, ces amis se soutenaient
naturellement, et, avec le temps, ces cercles se changèrent en
sociétés électorales et perdirent leur caractère primitif. Mais
pourquoi ces sociétés politiques n'auraient-elles pas une ori-
triumvirs de l'an 60. Cicéron v avait recours : de petit., V, 19. Ad Q.
fr., m, 4.
• Th. Mo-mmsen, De coll., pp. o8. 60.
2 Voyez infra, ire part., chap. I, § 4.
3 C. VON Savigny, II, pp. 256-257. Madvig, II, p. 139 = trad. Morel,
III, p. 150. LiEBENAM, pp. 12-13. 20. Trouette, p. 38.
* Cohn, pp. 61-70. Voyez contra : Karlowa, II, p. 65. Les banquets
{epidae) se rattachaient au culte. Voyez supra, p. 36, n. 3.
( M )
gine indépendante? Le but qu'elles se proposaient suffit pour
expliquer leur naissance. En tous cas, l'hypothèse de Cohn ne
repose que sur une autre hypothèse; car l'existence de ces
cercles amicaux est loin d'être prouvée sous la république.
Nous n'en avons trouvé aucune trace. Il en est autrement sous
l'Empire.
Cercles d'amusement. L'amour des plaisirs toujours crois-
sant et l'aisance qui régnait partout aux deux premiers siècles
de notre ère durent faire naître des sociétés uniquement for-
mées en vue des divertissements et de la bonne chère. Si nous
en jugeons par ce que nous savons de Pompéi, les cercles
intimes devaient être fréquents Les (jrajfUi de cette ville nous
font connaître une société de joueurs de balle {pilicrein) i et
trois clubs qui portent les noms bizarres de tard-buveurs, lar-
ronneaux et dormeurs [seribibi, furunculiy dormientes) "^^ et qui
ne se font pas faute de recommander leurs candidats aux élec-
tions municipales. Willems pense que ces noms ne sont que
des sobriquets d'une même société de bons vivants 3. Dans un
distique, un habitant de Pouzzoles se dit ex Epicureio gaudi-
vigente choro ^.
Cependant nous ne devons pas nous laisser tromper par les
noms de certains collèges. On s'associait pour faire bombance,
dit Duruy, et il cite les convictores qui wia epiilo vesci soient '\ de
Fanum, en Ombrie^. Or, ce nom cachait un collège funé-
« C L L. IV 1147.
2 C. /. L. IV 575. 576. 581. Cfr. IV Î246: sicari. Apul., Met., Vil :
latronis collcqium. Horace dit plaisamment : amhuhaiarum collegia {Sat.,
1,2,1).
3 Willems, Élect. inun., j3. 42. C. Jullian, In.scr. de Bord., I, p. 299,
croit que les seribibi, comme les convictores, formaient un collège reli-
gieux et funéraire. - Ce sont peut-être des cercles de ce i;enre qu'Au-
guste dissout en l'an 732. Cassiis Dio, 54, 2 : twv -e auaa'.-îwv xà [xh
TTavxeXâii; xa-reXuas, xà ok ~p6^ xo aojcppovsaxspov a'jvsaxîiÀsv.
* C. /. L.X2971.
s Orelli 4073 = XI 6244.
^ Hist. des Rom.,\, p. 152, n 1. Il cite encore Tertullien lApol., c 39),
qui ne fait allusion qu'aux Saliens et autres collèges religieux, énumércs
au même chapitre.
( S2 )
raire, peut-être une communauté chrétienne t. D'autres col-
lèges funéraires portent des noms semblables - : nous verrons
en effet que leur but lugubre ne les empêchait pas de passer
gaiement leurs jours de fête. Les banquets étaient, du reste,
l'une des occupations principales des collèges professionnels et
religieux, et il ne faut nullement s'étonner si quelques-uns en
tirent leur nom; beaucoup pouvaient paraître institués pour
faire bombance 3.
Collèges professionnels. A côté de toutes ces associations,
les corporations professionnelles qui feront l'objet de cette
étude, occupent une place à part, malgré leur caractère reli-
gieux et funéraire. Nous comprenons sous ce nom tous les
collèges dont les membres sont unis par les liens d'une pro-
fession commune 4, quels que soient leur but, leur caractère,
leur origine et leur organisation, et qui prennent le nom de
l'industrie ou du métier que leurs membres exercent. Ce sont
par conséquent :
1^ Les collèges d'artisans, d'artistes et de commer-
çants {opifices, artifices, mercatores ou negotiatores). Il faut
observer que les Grecs et les Romains ne faisaient aucune dif-
férence entre l'art et le métier; pour les premiers, tous les
métiers étaient des arts (TÉ-y^vat.), et pour les seconds, tous les
arts étaient des métiers s. Sénèque refuse de compter les arts
parmi les études propres à faire l'éducation des jeunes gens,
* DE Rossi, Bull, cmt., 1864, août, p. 61 Cette circonlocution s'appli-
quait très bien aux chrétiens, dit-il, qui devaient se cacher, tandis que
les païens n'avaient pas besoin de périphrase pour trouver un nom.
2 Voyez notre Index collegiorum {coll. fiin.). Ils ont un locus sepulturae
commun (Or. 4073), ou bien ils enterrent un membre (IX 3693. 3815;
X 7039; III 3166''. Ephem. I 183 = C. L L., II o500). Voyez infra,
2e part., chap. I, § 4.
5 Voyez infra, ibid.
* DiG., oO, 6, 0, 12 : coUegia in quibus artifwii sui causa unusqitisqae
adsumitiir.
s Marquardt, Priv., U\ pp. 589-599. Friedlaender, SzVf ., IIP, pp. 261-
267.
( ^3 )
telles que la grammaire, la géométrie et l'astronomie; car, dit-il,
je ne saurais me résoudre à regarder comme exerçant des pro-
fessions libérales, ni les peintres, ni les statuaires, ni les sculp-
teurs, ni les autres serviteurs du luxe; il ne fait grâce qu'à la
musique ^. Les architectes sont mis sur le même rang que les
charpentiers "^. Sans expliquer ici cette manière de voir, nous
conclurons que, pour tracer une image exacte de la vie
romaine, nous ne pourrons pas distinguer non plus entre les
artisans et les artistes ♦^. Quant aux négociants, il est inutile de
dire qu'il ne s'agit pas ici des sociétés temporaires, formées
pour des entreprises commerciales, mais seulement des cor-
porations semblables à celles des artisans. Les sociétés de
* Sen., Ep., 88, 18.
' AuREL. ViCT., 14, o. C. Theod., 13, 4, i.
5 II y a une catégorie d'artistes qui forment, vers le temps d'Alexandre,
des collèges d'un caractère tout particulier : ce sont les artistes drama-
tiques grecs, c'est-à-dire des poètes, des acteurs et des musiciens. Dès
avant l'Empire, ils se répandent aussi en Occident, tout en conservant
leur C3ractère. Nous ne comprenons dans notre étude que les collèges
de scaenici, qui sont organisés à la romaine. Sur les aûvooot ou xo'.và xwv
TTcpt Tov A'.dvucrov -reyvtxôjv, c'est-à-dire les artistes dionysiaques, voyez :
0. LuEDERS, Die dionymchen Kiinstler, 1873, Berlin. Bull. d. J., 1874,
pp. 104-108. FoucART, De coll. scaenicorum artificum apud Graecos,
Paris, 1873. Sauppe, Commentatio de collegio artificum scaen. atticorum,
Gottingen, 1876. Friedlaender, De artificibus dionysiacis, Kônigsberg,
1874. Sitteng., IP, ]). 75. Lolling, Mitth. des arch. Inst. in Athen, 1878 (III).
pp. 135 et suiv. Alb. Mueller, dans Hermann's Lehrb. dergr. Antiq., III,
2, pp. 392-414. Aem. Reisch, De musicis Graecorum certaminibu.^, Vienne,
1885. FoucART, Diomjsiari artifices, Dict. de Daremberg, II, p. 246.
On trouve ces collèges grecs jusque dans la Gaule, à Mmes : C. I. L.
XII 3232. Cfr. Kaibel. Indices, p. 751, à Naples, Syracuse, Regium,
Rome, Nimes. Voyez une inscription récemment trouvée à Chalcis dans
le Bxdl. de Corr. hell., 1892 (XVI), p. 91. Une autre vient d'être trouvée à
Athènes et sera publiée dans les Mittheil. de l'Institut allemand.
• Pour la même raison, nous ne nous occuperons pas des associations
grecques d'athlètes : r\ Upà çoartx-q juvoSoi;, fj Upà auvooo^ xwv 'HpaxXstd-
Twv. Voyez Kaibel, Indices, p. 751. Daremberg, Dict. des autig., s. v.
athleta (Sagi.io). De Ruggiero, Diz. epigr., s. v. athleta.
(S4 )
publicains, quoique dotées de la personnification civile, res-
tent aussi en dehors du cadre de ce travail; nous n'aurons à
nous occuper que de quelques espèces de fermiers publics qui
formaient à la fois des sociétés et des collèges '.
Quant à leur condition, les artisans, les artistes et les mar-
chands sont ingénus, affranchis ou esclaves. Il y avait des col-
lèges d'artisans uniquement composés d'esclaves, surtout d'es-
claves de la même maison; ceux-là étaient tous funéraires et ne
rentrent pas directement dans notre sujet.
2« Les décuries d'employés subalternes des magistrats
romains ou municipaux (decuriae apparitorum), les uns civils,
les autres religieux : scribes, licteurs, viateurs, hérauts, vic-
timaires, joueurs de flûte et de lyre, etc. C'étaient des corps
officiels ou administratifs, destinés à servir les magistrats ou
l'empereur, et, dans les villes, les magistrats municipaux. Outre
leur service, étudié par Mommsen, ces décuries commencèrent,
dès la république, à s'occuper de leurs intérêts privés, et ces
corps administratifs se doublèrent, si je puis ainsi dire, d'as-
sociations privées, semblables aux corporations d'artisans '^.
Quelques-uns de ces appariteurs prirent même le nom de col-
' Nous laissons également de côté ces associations de citoyens romains
qui étaient établis dans les villes ou les bourgs des provinces pour faire
le commerce : ils ne formaient pas de collèges proprement dits, mais
des conventiis civium romanorum. Voyez les ouvrages de Kornemann
(p. 24) et de Schulten (p. 4 : in medio sunt inter^ rem mimicipalem et
coUegiaiem). Les plus importants des conventus c r. semblent avoir
contenu des corporations marchandes (Schulten, pp. 117 et suiv.). —
Cfr. Mommsen, Hermès, VII, pp. 319-321. Ch. Morel, Les associations de
citoyens rom. et les curatores civ. rom. conventus Helvetici. Lausanne,
1877 {Mém. et doc. de la Soc. d'hist. de la Suisse romande, XXXIV). — A
Délos, le nom de Conlegia est appliqué aux marchands romains, sous
Sylla (V 7235). Cfr. Homolle, Les Romains à Délos {Bull. Corr. Iiell., 1884,
pp. 75-158).
2 Th. Mommsen, De apparitoribus magistratuum rom. (Rhein. Muséum,
1848 (VI), pp. 1-57. St.-R , P, pp. 325-329 =P, pp. 340-344. Trad. Giraud,
I, pp. 386 et suiv. Marquardt, St.-V., IIP, pp. 224-227. Le Culte, \,
pp. 270-272. Voyez notre Index collegiorum.
( 8S)
lèges <. Dans cette étude, nous ne les considérons quh ce point
de vue 2, et nous aurons à nous occuper surtout de ceux qui
peuvent être rangés parmi les artistes, c'est-à-dire les tibicines
et les fidicines. Les joueurs de flûte et de lyre se distinguaient
d'ailleurs des autres, d'abord parce qu'ils exerçaient leur art
au profit du public, aussi bien que pour assister les magistrats
dans les sacritices; ainsi, ils se louaient aux particuliers pour
les funérailles et les mariages, et leur nombre n'était pas fixé,
comme celui des autres appariteurs. Puis leurs associations
ne furent jamais, semble-t-il, des corps purement administra-
tifs, mais des collèges privés; aussi portèrent-elles toujours
le nom de collegia 3.
3° Les collèges militaires, parmi lesquels il faut distin-
guer ceux des sous-officiers en activité de service [collegia mili-
' C L L. VI 19:20-194'J : conlegium viutorum{de la fin de la république
ou du commencement d'Auguste). Murât. 201o, 16 : permissu collefgii)
apfparitorum). C. I. L. VI 9861-9863 : conleg. apparat, annal. Voyez
Th. Mommsen, St.-R , P, p. 327, n. 5. = Trad. Giraud, I, p. 388, n. 3.
Honorius. parlant des Dœuriae Urbis Romae, dit : huic collegio (C. Theod.,
XIV, 1, 4, en 404). mais il se sert d'un terme impropre.
* Ils s'associèrent dans un but privé, dès que leur emploi fut devenu
viager. Les décuries s'occupent de l'enterrement des confrères (VI 1946-
1948); elles ont la personnification civile (DiG. 46, 1, 22); elles possèdent
des esclaves, qu'elles peuvent affranchir iDig. 29, 2, 25, 1) : Turanniis
verna labularius apparitorum {VI 4013); L. Quaestorius Cinyra ,
lih(ertus) librarioriun quaestoriorum (VI 1826). Cfr. Orelli 2461. C. L L.
VI 1930. 19.o9; elles ont leur local (VI 103 : schola Xantka ; VI 816. Voyez
nos Indices, s. v. schola); elles peuvent hériter (Dio. 37, 1, 3, 4); elles
figurent aux obsèques de Pertinax à côté des collèges. Voyez infra^
Ille partie, cliap I, § 2, 2^ section.
5 Voyez notre Index collegiorum, s. v. tibicines, victimarii. Ces derniers,
œllegium victimariorum qui ipsi (Hadriano) et sacerdotibus et magistr.
et senatui apparent, honorent Hadrien en 129, quod, ciuu commodis eorum
inpugnaretur, liberalitate ejus restituta sint. VI 971. — Th. Mommsen
pose en règle que cnllegium se disait des apparitores i*eligieux, et decu-
riae, des autres {Staatsr., I«, p. 327, n. 5 = Trad. Giraud, I, p. 387,
n. 1 et388, n. 3'.
( ^^6 )
tum), les brigades d'ouvriers attachés aux légions et les collèges
de vétérans. Nous verrons que les collèges de simples soldats
étaient défendus : ne milites collegia in castris habeant ' ; ceux
des sous-ofliciers apparaissent à partir de Septime Sévère, sur-
tout en Afrique, et ont un caractère particulier -. Quant aux
collèges de vétérans 3, ils sont fréquents au IP et au III® siècle
en Italie et dans les provinces : formés de gens de même con-
dition, ils entrent dans le cadre de cette étude, ainsi que ceux
des ouvriers qui étaient au service des légions et des flottes.
§ 2. Extension de l'organisation corporative 2)armi les gens
de même profession et division du sujet.
Les collèges composés de gens de la même profession sont
organisés sur la plus vaste échelle pendant l'Empire. Leur
caractère est fort complexe et leur nature diffère avec le temps
et même avec le lieu. Les auteurs et surtout les inscriptions en
citent une foule par leur nom et nous aurons l'occasion de
dresser une statistique complète de ceux que nous connais-
sons *. 11 suffira, pour le moment, de donner une idée géné-
rale de leur nombre.
Les collèges d'artisans datent de l'époque préhistorique,
mais sous la royauté et sous la république, ils eurent une
existence si obscure que leur but, comme leur organisation,
nous est peu connu. Au temps de Cicéron, leur nombre paraît
être devenu fort considérable, et toutes les classes de travail-
leurs semblent possédées du désir de multiplier les associa-
tions professionnelles. Sous l'Empire, nous voyons le régime
* DiG., 47, 22, 1 pr.
2 Voyez notre Fnde.v coUegiorum (collèges militaires), et infra, 11» par-
lie, chap. I, § 5.
' Voyez notre Index coUegiorum (collèges de vétérans).
* Voyez infra, Ille partie. Voyez aussi notre Index coUegiorum (col-
lèges professionnels).
(ST)
corporalif prendre une extension qui n'a peut-être pas été
dépassée depuis, si l'on tient compte des différences écono-
miques. On trouvera dans les listes que nous dresserons plus
loin, les artisans les plus pauvres comme les négociants les
plus opulents, et il vint un moment où toutes les catégories
d'ouvriers, fort nombreuses, parce que la division du travail
était déjà poussée très loin, semblent s'être constituées en col-
lèges. Il en fut de même des gens qui vivaient du commerce,
et, autant que nous pouvons en juger, des sous-officiers de
même grade ou de grades différents, des vétérans qui, après
avoir porté les armes sur différents points de l'Empire, allaient
s'établir au même lieu et confondaient leurs intérêts, enfin des
employés inférieurs attachés aux magistrats ou au prince. C'est
à Rome et à Oslie, plus tard à Constantinople, que l'on trouve
le plus de collèges d'artisans et de commerçants ^. La raison
de ce fait ne réside pas seulement dans la grande popula-
tion de ces villes ; elle est surtout politique, comme on le verra
plus loin. Toutes les villes de l'Italie et des provinces eurent,
du reste, des corporations industrielles ; à partir du II® siècle
de notre ère, nous les trouvons partout, et leur nombre grandit
sans cesse jusqu'au Bas-Empire. La partie orientale ou grecque
de l'Empire fait seule exception. Les corporations profession-
nelles, formées sur le modèle romain, y sont inconnues tant
que dure l'indépendance de la Grèce. A en juger par l'épigra-
phie, elles s'y répandirent avec la civilisation des vainqueurs,
mais d'une façon fort inégale. Ce n'est que dans quelques villes
' Nous ne comprenons |)as qu'O. Jahn, parlant de l'Empire, s'exprime
ainsi : « Die collegia, ausser einigen filr geivisse sacra erforder lichen,
beschrànken sicfi mehr und mehr auf die collegia tenuiorum, hauplsiich-
lich Leichengilden. n {Ber. der sàchs. Ak., 1856, pp. 298-299). Mommsen
nous semble aussi exagérer singulièrement « la limitation étroite à
laquelle le droit d'association était soumis dans la capitale à la meilleure
époque de l'Empire ». Il ne trouve à Rome que les decuriae apparitorum,
les collèges religieux, presque tous associations funéraires, et les socie-
tatespublicanorum. {St.-R., I«, p. 327 = Trad., I, pp. 386-587.)
( 88)
de l'Asie Mineure, à Thyatire notamment, qu'on les rencontre
en grand nombre.
Dans le cours des siècles, depuis Numa jusqu'à la chute de
l'Empire, tous les collèges professionnels, et spécialement
ceux des artisans et des commerçants, changèrent de caractère
et traversèrent des phases diverses. L'attitude du gouvernement
à leur égard se modifia à plusieurs reprises. Longtemps, sous
la royauté et sous la république, ils s'occupèrent tranquille-
ment de leurs intérêts privés et il paraît démontré que l'État
les laissa naîire et vivre sans s'inquiéter d'eux. Vers la fin de
la république, ils furent mêlés aux désordres qui ensanglan-
tèrent le forum et la rue, et ils attirèrent sur leur tète les
foudres de l'autorité. Supprimés à trois reprises, par le sénat,
par César et par Auguste, ils ne purent s'établir depuis l'an 7
avant notre ère, qu'à condition d'obtenir une autorisation spé-
ciale. Cette autorisation ne fut accordée que si le collège, non
content de s'occuper de ses propres intérêts, avait un caractère
d'utilité publique. Les corporations industrielles de l'Empire
sont donc à la fois publiques et privées, et elles sont organisées
pour atteindre un double but. Avec le temps, le caractère
otficiel, peu important dans le principe, prit le dessus et le
gouvernement se déchargea sur les corporations de certains
services publics: elles devinrent alors de véritables rouages de
l'administration. Alléchées d'abord par les privilèges, elles
furent ensuite accablées de charges et voulurent reprendre
leur indépendance. Mais l'État les rendit obligatoires et héré-
ditaires, et elles vécurent dans la servitude jusqu'à ce qu'elles
disparussent avec l'Empire romain lui-même.
Telle est, en résumé, l'histoire des corporations indus-
trielles. On voit que leur organisation, leurs droits, leurs
devoirs, leur influence changèrent avec le temps et dépendi-
rent surtout de leurs rapports avec l'autorité. Aussi commen-
cerons-nous par exposer les lois qui réglèrent le droit d'asso-
dation à Rome; cette étude nous fournira l'occasion de faire
voir l'origine des corporations ouvrières, et, d'une façon géné-
rale, le caractère qu'elles revêtirent dans la suite des siècles.
( 59 )
Dans une seconde partie, nous examinerons leur but privé;
nous rechercherons comment elles étaient organisées pour
atteindre ce but, et quelle influence elles eurent sur le bien-être
matériel et moral des travailleurs.
Dans la troisième partie, nous étudierons le rôle que les
corporations industrielles ont joué dans les diverses adminis-
trations (le VÉtat et des villes, les obligations qui leur furent
imposées, la surveillance qu'on exerçait sur elles, les droits et
les privilèges par lesquels on compensait ces lourdes charges.
Il ne sera plus question des collèges militaires ni des décu-
ries d'appariteurs.
Nous terminerons en tirant les principales conclusions de
cette étude.
(^)
PREMIÈRE PARTIE
LE DROIT D'ASSOCIATION A ROME.
CHAPITRE I«'
LA ROYAUTÉ ET LA RÉPUBLIQUE.
§ 1. NAISSANCE ET CARACTÈRE DES PREMIÈRES CORPORATIONS INDUS-
TRIELLES A ROME. — § 2. LA LIBERTÉ D'ASSOCIATION ET l'aUTO-
NOMIE INTÉRIEURE DES COLLÈGES. — § 3. LEUR DÉVELOPPEMENT
SOUS LA RÉPUBLIQUE. — § 4. LES MESURES RÉPRESSIVES A LA FIN
DE LA RÉPUBLIQUE.
§ 1 . Naissance et caractère des premières corporations
industrielles à Rome U
Jusque vers la fin de la république, tout est obscur dans
l'histoire des collèges industriels. Les rares textes que nous
* Voyez : Dirksen, pp. 7 et suiv. Hlschke, Verfassiing des Servius
Tullius, 1838, pp. 151. 160. 171. 224. 713. Th. Mommsen, De coll.,
pp. 27-32. Rôm. Gesch., I«, 192 = Trad. de Guerle, I, p. 232. Drumann,
Arbeiter, p. 154. G. Humbert, Recueil de l'Acad. de législation de Ton-
louse, XVII, 1868, pp. 388 et suiv. Kayser, pp. 131-137. Buechsenschuetz,
Bemerk., pp. 22-24. Cohn, pp. 21-26. Marquardt, Privatleben , II*,
pp. 376-377 = IP, pp. 393-394 = Trad., II, p. 6. Staatsv., IIP, p. 138 =
Le Culte, I, p. 160. Wezel, en entier. Gaudenzi, pp. 1-24. Liebenam,
pp. 1 et suiv. Madvig-Morel, III, p. 138. Herzog, I, p. 95. C. Julll^n,
dans Daremberg, s. v. fabri, p. 949. Schulten, pp. 110-111. Karlowa,II,
p. 63. On peut voir aussi le premier chapitre de toutes les thèses
françaises.
( 62)
possédons ont été l'objet de discussions longues et approfon-
dies, et les opinions les plus contradictoires ont été émises,
mais la lumière n'a pas jailli de leur choc. Nous voudrions
savoir quelle fut l'origine des collèges d'artisans et quel fut leur
caractère primitif; s'ils furent institués par le législateur, en
bloc ou successivement, ou s'ils sont issus de l'initiative privée;
s'ils avaient besoin d'une autorisation; si leur nombre était
limité ou non ; s'ils furent établis dans l'intérêt public ou privé,
ou s'ils servaient l'un et l'autre à la fois : autant de problèmes
qui ont reçu des solutions diverses. Interrogeons d'abord les
auteurs anciens.
Au 1^^ siècle de notre ère, il existait à Rome une tradition
indiscutée qui attribuait l'institution des collèges industriels
à Numa. Plutarque, mort vers l'an 120, s'en est fait l'écho et
donne le plus de détails. Après avoir parlé des efforts de
Numa pour faire aimer l'agriculture, il en vient à la plèbe
urbaine ^ : « Le plus admirable des établissements de ce roi,
)) dit-il, c'est la division qu'il fit du peupte par métiers {'/] xa-rà
)) TÉvva; oiavouTi toO ttXtjOouç). La ville était composée de
)) deux nations ou plutôt séparée en deux partis ..., qui enfan-
)) taient chaque jour parmi eux des querelles et des débats
)) interminables... Pour faire disparaître cette grande et prin-
» cipale cause de division entre les deux peuples, et la dissé-
» miner en quelque sorte dans plusieurs petites parties, il
» distribua tout le peuple (to a-6(jL7rav Tilrfio^) en plusieurs
)) corps. La distribution eut lieu par métiers; c'étaient :
» 1» Les Mûsies {olùIti-zclL, tibicines, sympho7iiaci);
» 2" Les orfèvres {y^çiiKJoyooi, aiiri/ices};
» 3<^ Les charpentiers ou plutôt les ouvriers du bâtiment en
y) général (textovs;, fabri, fabri tigiiarii) "^ ;
« Plut., éd. Sintenis, Numa, 17. On a rapproché ce passage de Cicéron :
idem que {Numa) mercatiis, ludos omnesque conveninndi causas et eele-
britates invenit {De rep., II, U, Ti).
^ Voyez notre Index colleqiorum , s. i\ (abri.
( 63 )
)) 4« Les teinturiers (fiacpe'Tt;, tinctores et non : fuUones ');
» o" Les cordonniers (arx'jTÔTotjLO'., sutores);
» 6^ Les tanneurs ou corroyeurs {ny.u-zooé^yj.^ coriarii)',
» T^' Les forgerons en cuivre (ya).xe^;, fabri aerarii ;
» 8" Les potiers (xepajjier;, fignli).
» Quant aux autres métiers, il les réunit en un seul corps et
» Ht de tous une seule corporation (TjTTr,ijLa). Ln leur don-
» nant des intérêts communs, des assemblées et un culte
» divin convenant à chaque espèce d'artisans, il fut le premier
» qui bannit de Rome cet esprit de parti qui faisait dire et
» penser aux uns qu'ils étaient Romains, aux autres qu'ils
» étaient Sabins, à ceux-ci qu'ils étaient sujets de Tatius, à ceux-
» là qu'ils étaient sujets de Romulus, et cette division amena
» un harmonieux mélange de tous. » Pline l'Ancien ajoute un
détail important; Numa, en fondant ces collèges, aurait établi
une hiérarchie parmi eux : les ouvriers en bronze auraient
occupé le troisième rang - et les potiers, le septième-^ Florus"^
nous dit que Servius Tullius, le premier, fit inscrire sur les
registres publics la répartition de la plèbe en collèges, sans
parler du nombre des corporations et sans citer les métiers;
1 Comme dit à tort Wezel, p. 25. Voyez Bluemner, Techn , I, p. 217.
* Plin., n. h., éd. J. Sii.lig, XXXIV, 1, 1 : et alla vetustas aequalem
urbi auctoritatem ejus (aeris) déclarât, a rege Numa conlegio tertio aera-
rium fabrum instituto.
3 Plin., n /i., éd. L. Janus, XXXV, 46, lo9 : Propler quae Xiwia rex
septmiuim conlcgium fujulorum instituit.
* Florus, éd. C Halm, I, 6, 3 : ab hoc {Servio Tnllio) popnlus Romanus
relatus in censum, digestus in classes, decuriis (Th. Mommsen, De coll.,
p 28, lit : curiis) adque collegiis (Huschke, Verf. des Servius, p. 149,
n. 62, lit : centiiriis) distributus, sumniaque régis soUertia ita est ordi-
nata i^espublica, ut omnia patrimonii, dignitatis , aetatis, artium ofjicio-
rumque discrimina in tabulas referrentur. Il faut maintenir collegiis à
cause de artium, qui suit. — Récemment Karlowa, II, p. 63, a fait
observer que Florus ne parle pas de l'établissement des collèges; il dit
seulement que Servius fit noter sur les registres publics (m tabulas
referre) la division du peuple en collèges professionnels, aussi bien que
les autres divisions.
(64)
cette institution ferait partie de l'organisation politique créée
par ce roi.
C'est tout ce que les anciens nous apprennent de l'origine
et de la nature primitive des collèges d'artisans. De ce « bour-
bier obscur de la tradition », comme dit Mommsen, on ne peut
tirer qu'un fait certain : l'existence d'une croyance bien solide,
qui faisait remonter les collèges aux origines de la cité. Rome
attribuait à l'un de ses rois chacune de ses vieilles institutions.
Comme ces corporations avaient un culte, on les croyait fon-
dées par Numa, l'organisateur de la religion, dont nous devons
écarter la personnalité comme légendaire. D'autres, envisageant
leur côté politique et y voyant une tentative d'organiser la
classe industrielle, les rattachèrent aux réformes serviennes i.
Évidemment, ni Pline ni Plutarque ne sont les inventeurs de
la légende dont ils se font les échos; ils l'ont puisée dans les
auteurs qu'ils consultèrent, et il est possible que l'un et l'autre
l'aient empruntée au vaste ouvrage de Varron sur les antiquités
romaines '^. En tous cas, cette tradition si ancienne et si soli-
dement établie sutiit pour démontrer la haute antiquité des
collèges d'artisans. Pour les Romains de l'âge classique, leur
origine se perdait dans la nuit des temps; ils existaient de temps
immémorial, il dpycâoii, comme dit Cassius Dion parlant des
collèges supprimés en l'an 64 (690); ils étaient « antiques »,
comme dit Suétone de certains collèges épargnés par César et
Auguste. Ils étaient compris parmi les associations à qui les
XII Tables garantirent une complète autonomie intérieure.
On a voulu contester cette origine lointaine. Sans doute, le
but assigné à leur institution par Plutarque est inadmissible
< Quelques modernes se rallient à cette opinion. Voyez Drumann,
Arbeiter, p. 154; Herzog, Yerf., I, p. 9o. Karlowa, 11, p. 63, admet que
les collèges étaient antérieurs à Servius et que ce roi les reçut dans son
système politique, avec ou sans modifications.
' A. Wagener, Bull, de VAcad. roy, de Belg., 1889, mai, p. 407.
— Cfr. A. ScHAEFER, QueUenkunde dergr. und rôm. Geschichte, 2ie Aufl.,
1885. pp. 111 et 122.
(68 )
et fut imaginé après coup; il est même invraisemblable,
puisque la division par collèges industriels ne pouvait s'ap-
pliquer qu'à une partie minime de la population. Mais si on
laisse les détails de la légende, la haute antiquité de ces col-
lèges n'a rien qui puisse surprendre. Les métiers que cite Plu-
tarque conviennent tous à la civilisation rudimentaire de la
Rome primitive; ils existaient tous, et ce sont précisément les
professions qui furent les premières exercées en dehors de la
famille par des artisans travaillant pour autrui i. La linguis-
tique et l'histoire sont d'accord pour le prouver. Les mots latins
qui désignent, soit ces métiers, soit les outils et le travail de
ces artisans, existaient avant la séparation des Grecs et des
Italiotes -. Dans la Rome primitive, les flûtistes étaient déjà
nécessaires aux sacrifices, aux mariages et aux funérailles; les
fabri construisaient en bois les maisons et les temples. On
avait l'habitude de teindre les vêtements en laine; les cor-
royeurs et les cordonniers travaillaient le cuir employé pour
les chaussures et l'armement. Le fer ne fut introduit que
plus tard; aussi Plutarque ne cite-t-il que les ouvriers en
bronze, d'accord avec d'autres auteurs qui nous apprennent
que les ustensiles du culte et les armes étaient faits de ce
métal 3. Enfin les potiers fabriquaient les vases qu'on retrouve
dans les antiques nécropoles de l'Esquilin, comme dans celles
* Voyez Th. Mommsen, Rom. Gesch., I^, p. 192. Marquardt, Priv., II',
pp. 376-377 = II-, pp. 393-394. BuechsExNschuetz, Bemerk., pp. 22-24.
Wezel, pp. o 25. LiEBENAM, pp. 5, 8-9. Gaudenzi, pp. 14-15. G. Jullian,
Dict. de Daremberg, s. v. fabri, p. 949. Karlowa, II, p. 63 On peut
consulter BLUEM^•ER, Techn., et Marquardt, Privatl.^ sur chacun de ces
métiers. — Il est à remarquer que ces métiers se retrouvent aussi dans
les poèmes homériques. Voyez A. Riedenauer, Handwerk und Handwer-
ker in den homerischen Zeiten, Erlangen, 1873.
2 Wezel, pp. 5-11.
- Marquardt, Priv. IV, p. 377, n. 1 = IP, p. 393, n. 1 = Trad., II, p. 7.
Bluemner, Techn., IV, p. 38. Th. Mommsen, R. G., I, /. l. Helbig, Die
Italiker in der Poebene, 1879, p. 77.
Tome L. 5
( QQ)
d'Albe 1, et qui servaient dans les ménages et dans les céré-
monies religieuses; les statues des dieux étaient aussi en terre.
Les orfèvres font quelque difficulté; mais si la monnaie d'or
était inconnue, la loi des XII Tables parle des objets en or et
défend d'en orner les morts 2. Il existait sans aucun doute
d'autres métiers encore: des bouchers, des bateliers, des
pécheurs, des commerçants 3. Us auraient formé, suivant
Plutarque, un collège à part, parce que ceux qui les exer-
çaient étaient moins nombreux; ce serait peine perdue de
rechercher si ce collège exista jamais 4. Il faut observer aussi
que plusieurs dénominations de Plutarque sont des collec-
tifs S; les fabri, par exemple, ne sont pas seulement les
charpentiers, mais tous les ouvriers du bâtiment et, plus
tard, ils comprirent les maçons 6. Ce qui est encore fort
remarquable et augmente la vraisemblance de la tradition,
c'est que la liste ne contient aucune des professions qui
* Mârquardt, L c. (Trad., II, p. 7, n. 4).
2 Plus., h. n., XXXIII, 1, 5, U : Romae ne fuit quidem auriim nisi
admodiim exiguum longo tempore. Bruns, Fontis juris, éd. 5, p. 35 :
^eve aurum addito. At ciii auro dentés juncti escunt, ast im cum illo
sepeliet uretve, se fraude esto. » Cfr. Cic, De leg., II, 24, 60. Voyez
BuECHSENSCHUETZ, Beuierk., p. 23. Le même, Haupstatten, p. 45. Bluemner,
Te(^/m., IV, p.28.
3 Niebuhr, Rom. Gesch.y IIP, p. 349. Liebenam, pp. 5-6, cite les pisca-
tores à cause de leur antique fête, mentionnée par Festus, pp. 210^, 33.
âSS"*, 23. Wezel (pp. 25-27) cherche à déterminer ces métiers. Il cite les
fullones (à tort% les carpentarii, les coatores, les lanii, et d'autres; il
admet un trop grand développement de l'industrie à cette époque reculée.
* Th. Mommsen, De coll., p. 29, croit que c'est une invention de Plu-
tarque, qui aurait appliqué la division en collèges au peuple entier, et
aurait ajouté ce neuvième collège renfermant les cultivateurs et le reste
des citoyens. De même : Cohn, p. 22; Liebenam, pp. 6-7; Trolette, p. 8.
Mais par xo aufjirav ttXt^ôo^;, Plutarque n'entend que la plèbe urhainey
qu'il suppose formée d'artisans ! II dit expressément que le neuvième
collège contenait les métiers restants. Cfr. Wagener, /. c, pp. 18-20.
s Wezel, p. 27.
6 C. JuLLiAN, /. c, p. 950 fin.
( 67 )
étaient encore inconnues, ou qui étaient exercées dans la
maison même. Plularque ne mentionne ni les tisserands,
ni les tailleurs, parce que les femmes filaient la laine et
tissaient les vêtements^ ; ni les foulons-, ni les meuniers-bou-
langers 3, ni les cuisiniers, ni les barbiers *, ni les médecins ^,
dont les métiers ou les arts n'étaient pas sortis de la famille;
ni les argentiers 6, ni les maçons '^, ni les forgerons en fer,
qui étaient inconnus.
Si l'on se demande quelle partie de la population romaine
exerçait les métiers de Plutarque à cette époque reculée, la
réponse ne sera pas facile. C'étaient les clients, peut-être les
clients de l'État et les affranchis, dit l'un 8; mais c'est une
pure hypothèse. Il semble établi que l'artisan libre n'avait pas
encore à redouter la concurrence des esclaves et des étrangers 9.
Denys d'Halicarnasse se trompe, quand il prétend que le travail
manuel était interdit aux citoyens ^0. Rien n'empêche donc de
< MoMMSEN, Rom. Gesch., P, p. 56. Sur les métiers qui suivent, voyez
Bluemner, Techn., et Marquardt, Priv. Nous citons seulement quelques
passages importants.
2 Cato, r. r., X, 5. XIV, 2. Vitruv., VI, pr., 7.
3 Plin, n. h., XVIII, 28, 107 : pistores Romae non ficere ad Persiciim
îisque belliim annis ab iirbe condita super DLXXX. Ipsipanem faciebant
Quirites, mulierumqiœ id opus erat, sicnt etiam nunc in plunnnis gen-
tium. Cfr. Gell., XV, 19.
^ Varro, de r. ?\, II, 11 : Omnino tonsores in Italia primiim venisse
ex Sicilia dicuntiir post R.c.a. CCCCLIIIL Cfr. Plin., n. h., VII, o9, 211 .
5 Voyez R. Briau, Introduct. de la médecine dans le Latium {Revue
arc/i., 1885, V, pp. 38-4 et suiv.; 1885, VI, pp. 192 et suiv.).
6 Bluemxer, Techn., IV, p. 28.
7 Dict. de Daremberg, s. v. domus.
8 Lange, Rom. Alt., I«, p. 221 = P, p. 248. Contra : Cohn, p. 23
et suiv.
9 Voyez Wallon, Histoire de l'esclavage, II, p. 11. Wezel, pp. 12-13.
10 DiONYS. Hal., II, 28. IX, 25. Il se contredit lui-même; voyez II, 9.
Nous lui opposons Plutarque, Pline, Florus et les centuries indus-
trielles de Servius Tullius. C'est par exception que Tarquin le Superbe
fait venir des [abri d'Étrurie pour bâtir le temple de Jupiter Capitoiin.
Liv., 1,56 : [abris undique e.v Etruria accitis. Plin, 35, 45, 3.
(68 )
croire que les artisans romains de l'époque royale étaient des
hommes libres : plébéiens, clients et affranchis, qui ne possé-
daient pas de terres et trouvaient un moyen d'existence dans
ces métiers détachés de la famille, que l'on ne méprisait du
reste pas encore. Les patriciens ne s'adonnaient qu'à la guerre
et à l'agriculture. Ils étaient aidés par des esclaves encore peu
nombreux et par des hommes libres; mais, comme dit Wal-
lon, (c ils étaient trop pauvres pour entretenir chez eux un
nombre d'esclaves capable de suffire à tous leurs besoins, et
trop fiers alors pour en réunir, comme à Athènes, dans la
pensée d'exploiter leur industrie ^ ».
Il n'y a donc rien que de vraisemblable dans la tradition.
Mais on lui a opposé d'autres arguments '^, fort peu convain-
cants, selon nous. Plutarque rapporte ailleurs que les flûtistes
avaient reçu de Numa leurs privilèges, dont le principal était
la permission de célébrer un banquet annuel au temple de
Jupiter Capitolin 3. Sans doute, ce temple ne fut bâti que sous
Tarquin le Superbe et inauguré par les premiers consuls; mais
on ne peut conclure de là qu'une chose : c'est que cette préro-
gative ne datait pas de Numa. On a soutenu que la flûte avait
été empruntée aux Étrusques avec le culte de Minerve ; mais
cette opinion manque de preuves ^K Du reste, ce collège fût-il
plus récent, cela ne prouverait rien contre l'ancienneté des
autres. On allègue encore l'organisation intérieure des collèges,
qui est républicaine; mais cette organisation ne nous est con-
nue que sous l'Empire, et elle a eu le temps de changer. Le
silence des historiens n'est pas non plus un argument. Il ne
faut pas s'étonner que de modestes collèges, sans influence
dans l'État, passent inaperçus; sous la république et même
* Wallon, Ib., pp. 10-11. Cfr. Buechsexschuetz, Bemerk., p. 22.
2 Surtout CoHN, pp. 22-2o. Lange, op. c, P, pp. 247 et suiv.
3 Voyez i7ifra, 11^ partie, chap. I, § 3. Sur Numa, auteur de ce privilège,
voyez. Plut., Quaest. rom.^ o6.
^ Preller, Rom. Myth., I-, p. 290. Th. Mommsen la rejette, Rôm.Gesch.,
P, p. 180.
(69)
SOUS l'Empire, quand l'importance des collèges est devenue si
grande, c'est à peine que les auteurs s'en occupent. Tite-Live
parle des artisans enrôlés comme soldats en cas de nécessité,
sans mentionner leurs corporations i ; mais c'est bien naturel,
car on ne les enrôle pas par collèges. Si l'on admet que les
collèges primitifs furent purement privés, on ne trouvera pas
inadmissible, enfin, qu'on les ait tolérés, et qu'on ait laissé à
des hommes sans droits politiques la faculté de former d'inof-
fensives associations, dont le caractère religieux était une
garantie d'innocuité, alors qu'on permettait bien les associa-
tions des montani et des pagani. De pareilles objections ne sau-
raient prévaloir contre une tradition ancienne qui a pour elle
une parfaite vraisemblance.
S'il faut donc admettre la haute antiquité des collèges d'ar-
tisans, il est bien plus difficile de dire comment ils naquirent
et quel fut leur caractère primitif, même quel fut leur carac-
tère durant toute la période républicaine.
Sont-ils issus de l'initiative particulière ou furent- ils
l'œuvre d'un législateur? Avaient-ils un but privé, ou bien
étaient-ce des corps publics? Ce que nous savons se réduit à
si peu de chose que l'on a pu soutenir les hypothèses les plus
variées. Une opinion fort répandue, c'est que les collèges
furent créés par l'Etat 2. Qu'elles furent donc les intentions du
gouvernement? Comme on n'en sait rien et qu'on ne peut lui
assigner un but précis, on lui a attribué tour à tour, et même
à la fois, tous les buts imaginables.
* Liv., VIII, 20, 4 : Quin opificum quoque vulgus et sellularii, minime
militiae idoneum genus, exciti dicuntur. {Guerre contre les Gaulois,
a. u. c. 424-426.) X, 21, 3 : His nuntiis senatus conterritus dilectum
omnis generis hominum haberi jussit (a. u. c. 458).
' Admettent l'intervention de l'État à des degrés divers : Th. Mommsen,
De coll., p. 31. Rom. Gesch.. P, p. 192 = Trad. de Guerle, I, p. 232.
StaatsrechL, III, p. 282. Herzog, I, 94, n. 3. 95. 1038. Madvig, II, 135,
rem. = Trad. Morel, III, p. 148, n. 3. C. Jullian, Dict. de Daremberg,
5. i'. fabri, p. 949. Pernice, pp. 290 et suiv. Karlowa, II, pp. 63-64.
Liebenam la rejette (p. 5 et Zcitschr. f. Kulturg., 1893, p. 117).
( 70)
II est à peine nécessaire de rappeler les conjectures
anciennes. Prenant au sérieux la légende de Numa, on a fait
des collèges industriels une institution sabine ^ ; cette opinion
tombe avec la légende sur laquelle elle repose. Ceux qui
croient que les collèges sacerdotaux leur ont servi de modèle,
leur attribuent une origine étrusque, en ce sens qu'ils auraient
leur source dans le jus sacrum, emprunté à l'Étrurie^; mais
ils ne ressemblent en rien à ces grands collèges de prêtres.
Enfin, on les a pris pour une importation grecque, parce
qu'une loi des XII Tables, empruntée à Solon, selon Gaius, les
aurait créés; on n'a pas vu que cette loi leur assure l'autono-
mie intérieure, sans parler de leur création 3. Dans ces der-
niers temps, on a renoncé à ces vaines hypothèses, mais on
s'est trop laissé guider par le désir de rattacher les collèges de
la royauté et de la république aux collèges de l'Empire, que
l'État autorise ou fonde, et dont il exige un caractère d'utilité
publique. Quel serait le but du législateur? Les uns allèguent
l'utilité économique de l'organisation corporative. Mommsen^
croit que, comme les collèges de prêtres, les corporations
industrielles avaient pour but de conserver plus sûrement les
traditions professionnelles; mais une pareille préoccupation
ne se montre nulle part chez les Romains ou du moins dans
les collèges romains, pas même sous l'Empire. D'autres sou-
tiennent que l'État aurait voulu satisfaire à la fois à des
besoins publics, religieux et militaires. Sans songer à régle-
menter l'industrie, il aurait voulu favoriser le développement
de métiers nécessaires aux familles, à la vie commune, et par
conséquent à l'État. Les collèges étaient, dit-on, des corps
publics plutôt que des corps industriels 3. La religion, elle
* Heineccius, I, § 5. DRUMA^'N, Rom. Gesch., II, p. 240.
2 DiRKSEN, pp. 7-8. 2L 33. Pernice, p. 290. Gierke, p. 79.
3 Wassenaer, c. 3.
-* MoMMSEN, Rom. Gesch,, l. c. Voyez infra, 11^ partie, chap. I, § 2.
Herzog, L c, est du même avis,
s C. JuLLiAN, /. c, p. 949. Herzog, Verfass., I, p. 94, n. 3. 95. 1038.
I
( 71 )
aussi, avait recours à ces artisans : ils construisaient les tem-
ples, fabriquaient les ustensiles et les vases sacrés; les flûtistes
assistaient les prêtres et les magistrats dans les sacrifices, et
ainsi de suite. Les collèges étaient donc destinés d'abord et
surtout au service de la religion de la cité, et c'est précisément
pourquoi on rapporte leur institution à Numa ^. Enfin, plu-
sieurs de ces métiers étaient indispensables à la guerre, et
suivant Dirksen, l'Etat n'aurait permis à l'origine que les
collèges utiles au culte ou à l'armée; suivant d'autres, il les
aurait créés en considération de cette utilité.
Sans doute, tous ces métiers étaient nécessaires à la vie
civile, puisqu'ils ne s'exerçaient plus dans la famille; sans
doute, la religion et la guerre réclamaient le maintien de plu-
sieurs d'entre eux. Mais était-il indispensable, pour les main-
tenir, que l'État les organisât en collèges? La Grèce n'a pas
connu cette organisation officielle; elle n'eut pas même de col-
lèges d'artisans. Plutarque attribue d'autres intentions à Numa,
et si les collèges avaient eu réellement le caractère qu'on reven-
dique pour eux, la tradition ne se serait pas si grossièrement
trompée. Quant aux ouvriers militaires, Servius les enrôla
dans des centuries spéciales, bien distinctes des collèges cor-
respondants 2. Il en est, du reste, plus d'un parmi ces vieux
collèges dont il serait impossible de déterminer les rapports,
soit avec le culte, soit avec l'armée. Faire des collèges romains
une institution officielle, des corps publics, considérés comme
nécessaires à la vie commune, à la religion et à la guerre, c'est
leur donner une importance qu'ils ne peuvent avoir eue à
l'époque royale et républicaine. C'est alors qu'il faudrait
s'étonner qu'ils n'aient pas attiré sur eux l'attention des his-
toriens et qu'il ne reste dans les lois romaines nulle trace des
droits qu'on n'eût pas manqué de leur accorder. Durant six
siècles nous ne voyons que les flûtistes agir de concert, et
^ Dirksen, p. 21. Herzog, /. c, p. 9o.
2 Voyez m/m, 11^ partie, chap. I, § 1.
( 72)
encore ne parle-t-on pas de leur collège. En l'absence de toute
preuve positive, mieux vaut avoir le courage d'avouer notre
ignorance; et quand on considère dans quelle obscurité végè-
tent les collèges, il paraît plus probable que l'État ne s'occu-
pait pas d'eux. La première fois qu'il reconnut publiquement
leur utilité, ce fut à l'époque de Clodius, quand les excès des col-
lèges populaires l'obligèrent à supprimer la plupart; alors,
le sénat crut devoir épargner quelques collèges d'artisans, les
[abri notamment, parce que l'intérêt public exigeait leur main-
tien : qiiae utiliîas reipiiblicae desiderasset ^. Jusque-là, n'ayant
pas eu à s'occuper d'eux, il n'avait pas eu l'occasion de recon-
naître otiiciellement leur nécessité. Rien ne prouve d'ailleurs
qu'à l'époque de Clodius même ils devinrent réellement des
corps publics; ils furent épargnés, mais laissés à eux-mêmes.
Le Sénat les déclarait utiles : cela veut dire seulement qu'il
trouvait l'association nécessaire pour favoriser le développe-
ment de ces métiers, et c'est une idée qui fera son chemin
sous l'Empire; mais sous la république, elle n'apparaît nulle
part. On rappelle que certains collèges jouissaient de privi-
lèges accordés par l'État, et l'on ne peut citer que les flûtistes
qui avaient le droit de dîner dans le temple de Jupiter Capi-
tolin et de parcourir les rues en un cortège carnavalesque le
jour des Quinquatnis"^. Mais ce privilège religieux prouve si peu
l'intervention de l'État dans la création de ce collège, ou sa
sollicitude pour le maintenir, que les flûtistes auraient pu l'ob-
tenir sans former un collège, et, de fait, les auteurs l'attri-
buent aux tibicmes et non au collegium tibicinwn.
On pourrait alléguer à plus juste titre le classement des
collèges, dans lequel, selon Pline, les forgerons en cuivre
occupaient le troisième rang et les potiers le septième, et pré-
tendre que ce classement a dû être l'œuvre de l'État. Mommsen
l'admet dans son mémoire de 1843, et voici quel aurait été le
Voyez infra, § 4.
Voyez infra, 11^ partie, chap. I, § 3.
( 73)
but de celte institution i. « A l'origine, dit l'illustre savant, les
)) tribus ne comprenaient que les propriétaires fonciers 2; on
)) voulut que la plèbe des travailleurs eût aussi son rôle dans
)) l'État et sa constitution. On forma donc huit collèges des
» métiers alors exercés hors de la famille, et l'on prit soin que
)) cet orclo collegiorum, comparable à' Vordo tribuum, ne fût pas
)) changé, et qu'aucun nouveau métier n'y fût reçu. Sans doute,
)) dit-il, les collèges postérieurs ne furent pas moins permis,
w mais ils ne jouirent pas des mêmes privilèges. « Mais la
plupart des modernes 3 reconnaissent que les tribus primi-
tives d'abord et les tribus locales de Servius embrassaient tous
les citoyens; le but allégué par Mommsen n'aurait donc pas eu
de raison d'être. D'autre part, une institution si importante
serait mieux connue, et si les collèges avaient joué ce rule, leur
nombre, comme celui des tribus, aurait dû être officiellement
augmenté avec le temps. Nous pensons que le prétendu classe-
ment attribué à Numa ne justifie pas une pareille hypothèse
et qu'il est beaucoup plus récent. 11 nous paraît peu probable
que les huit collèges furent établis ensemble, avec ou sans un
neuvième pour contenir les métiers secondaires. Ce qui est
sûr pourtant, c'est que les Romains de l'âge classique y
croyaient et que chacun des collèges antiques avait alors son
rang déterminé. Mais quel crédit mérite cette croyance? Pline
et Plutarque ne sont pas même d'accord sur l'ordre hiérar-
^ De coll., p. 31. — Karlowa admet aussi rauthenticité de ce classe-
ment (II, p. 63) et l'initiative royale (ÎI, p. 64). Les rois auraient eu pour
but : lo de perpétuer l'habileté professionnelle par la tradition ; 2o d'unir
par des intérêts communs les artisans exclus de la vie publique et de
l'armée. Cfr. Madvig-Morel, III, p. 148, n. 3 : « II semble qu'on peut
admettre de la part de l'État une certaine sollicitude pour le maintien de
ces collegia aniiqua et utilia, et l'on pourrait même y voir le premier
germe des corporations obligatoires des derniers temps de l'Empire. »
(Édit. all.,II, p. 13o.)
2 Staatsrecht, II, p. 391. III, p. 184.
' Voyez WiLLEMS, Droit public, 5" éd., p. 56, n. 3.
(74)
chique i. N'y a-t-il pas lieu de rechercher comment se forma
cette opinion, plutôt que de se demander si elle correspond à
la réalité? Pour nous, qui inclinons à croire que les collèges
sont issus de l'initiative privée, nous pensons qu'ils naquirent
successivement "^, à mesure que l'importance de chaque métier
grandit. Plus tard, ce furent peut-être eux-mêmes qui, par une
vanité bien naturelle, firent remonter leur origine à Numa,
surtout quand le Sénat les épargna en Tan 64 (690), en allé-
guant leur utilité et leur haute antiquité 3. Il devait y avoir
entre eux des rapports fréquents, et le classement peut s'expli-
quer simplement par le droit de préséance dans les fêtes com-
munes, droit qui se mesurait d'après l'importance de chacun.
Quant au nombre huit, Cohn suppose qu'il s'agit des collèges
que le Sénat épargna en les citant nominativement. Le neu-
vième serait une invention de ceux qui s'imaginaient que Numa
avait dû comprendre dans son institution tous les artisans ^.
Ce ne sont que des conjectures; il suffit, pour nous, qu'on
puisse expliquer ce fait autrement que par une intervention
de l'État, dont il ne reste aucune trace, ni dans l'histoire, ni
dans les lois.
Cohn fait encore observer que l'État intervient chaque fois
que nous voyons un collège se fonder aux temps historiques :
c'est le Sénat ou un magistrat délégué qui établit le conlegium
mercatorum y le conlegium Capitolinorum et les sodaUtates
Matris Magnae ^. La réponse est facile : l'État voulait charger
ces collèges d'un culte public. On insiste et l'on dit que les
collèges d'artisans avaient aussi un caractère religieux; Plu-
* C. JuLLiAN, l. 6*., p. 9^9, suppose tout gratuitement que les flûtisles
étaient à la première place et les fabri tignuarii à la seconde.
2 Herzog, Yerf., I, p. 94, n. 3.
5 CoHxN, pp. 25-26. BUECHSENSCHUETZ, Besitz, p. 24. Zoeller, dans
Jahresb. de Bursian, 1889, p. 209. 1893, p. 239.
"* Sur le nombre huit ou neuf, voyez : Dirksen, p. 21. Cohn, pp. 25-26.
Th.Mom.msen, De coll., p. 29. Huschke, Verf. des Servius Tullius, p. 150,
n. 63. Biechsenschuetz, Bemerk., p. 24. Lange, Rom. AU., P, p. 248.
s Voyez supra, pp. 35-36.
( '7o )
tarque le déclare : « Numa voulut que chaque métier célébrât le
culte divin qui lui convenait. » En effet, le caractère religieux
des corporations industrielles est hors de conteste, et elles
le conservèrent toujours. Mais il faut s'entendre. A l'époque
impériale, que nous connaissons bien, chaque collège a pour
patron la divinité dont les attributs se rapprochent de son
métier, et il lui rend un culte privé. 11 en fut ainsi dès l'ori-
gine. Dans les cités antiques, à Rome surtout, la religion
cimentait toute association durable; ce sera vrai même sous
l'Empire, quand le sentiment religieux aura baissé ; à l'époque
lointaine dont nous parlons, une corporation sans culte ne se
conçoit pas. Nous savons positivement que les flûtistes et les
fabri adoraient Minerve, et cette déesse devait être la patronne
de plus d'un autre collège i. A la fin de la république, nous
voyons les corporations industrielles s'occuper d'un autre inté-
rêt essentiellement religieux : elles enterrent les membres
défunts et l'on peut croire qu'il en fut ainsi dès le début 2. Pour
les pauvres artisans, exclus du culte comme de la vie publique,
le collège remplaçait donc la famille et la gens des patriciens.
Il formait pour eux une famille religieuse; sa constitution
était religieuse et son président était aussi son prêtre 3, Mais sa
religion n'avait rien d'officiel ; l'Etat ne s'en occupait pas plus
que du culte de la famille, de la gens et de la curie.
Jamais il n'imposa un culte quelconque à des artisans 4-;
jamais il ne les chargea d'un cuite public. Jamais, croyons-
nous, la loi n'établit entre eux cette parenté sacrée qu'elle
établit entre les membres des sodalités publiques s. G. Jullian
* Voyez infra, 11^ partie, chap. I, § 3.
2 Voyez influa, 11^ partie, chap. I, § 4.
3 Voyez ScHULTEN, pp. 110-111.
* Comme le croit Dirksen, pp. 7-8. 21. 23.
s Voyez ci-dessus, p. 37, n. 4. Madvig-Morel (III, p. 148, n. 1) dit avec
raison qu'on a exagéré la signification religieuse des collèges en les
mettant en relation étroite avec l'organisation des sacerdoces, et qu'on a
confondu l'emploi ordinaire des mots collegium et sociales avec les accep-
tions plus spéciales qu'on pouvait leur donner.
( 76 )
fait bien remarquer que Plutarque, quand il veut caractériser
les collèges de Numa, ne parle ni de la similitude de métier,
ni des intérêts de leur art, mais de la communauté de leur
religion, des prières adressées aux mêmes dieux ^. Mais il
exagère singulièrement le rôle de ces collèges, qui ne con-
tenaient qu'une partie de la plèbe urbaine, quand il dit : « La
» création des collèges eut une assez grande conséquence dans
» l'histoire de la plèbe, où ils se recrutaient exclusivement.
» Les plébéiens étaient, d'après le droit ancien, des hommes
» qui n'avaient ni famille ni religion; ils étaient en dehors de
» toute constitution; multitude confuse, ils ne formaient
» aucune société, ni religieuse, ni civile, ni politique. L'insti-
» tution attribuée à Numa fit précisément de la plèbe une
» société : en les groupant en collèges, sous la protection
» d'une même divinité, elle donna aux plébéiens l'unité reli-
)) gieuse qui leur manquait. » Ce qu'il dit de la plèbe ne peut
s'entendre que des artisans, relativement peu nombreux, parce
qu'ils eurent bientôt à lutter contre la concurrence servile. Il
se lance dans des hypothèses invraisemblables quand il
suppose que les collèges des fabri et des autres métiers furent
créés pour célébrer la Minerve du temple de l'Aventin, et
quand il part de cette conjecture pour dire : « Cette institu-
» tion de Numa établit entre les plébéiens un premier lien
» politique ; elle les rattacha aux dieux de l'État, qu'ils purent
» ainsi adorer; elle les souda en quelque sorte à la cité elle-
)) même... C'est sous la forme de collèges que la plèbe entre
» dans le droit religieux et dans la vie publique. » Non,
jamais les collèges n'eurent cette importance. Ils ne l'eurent
pas sous l'Empire, et ils ne peuvent l'avoir eue dans les temps
antérieurs. Tite-Live le dirait, comme il le dit des mercaloreSy
des Capitolini et des autres. Les flûtistes eux-mêmes, qui
peuvent se réunir dans le temple de Jupiter Capitolin et dans
celui de Minerve, ne sont pas chargés publiquement du culte
' C. JULLIAN, /. C, p. 9d0.
( 77 )
de ces dieux. L'idée ne pouvait guère venir aux fiers patriciens
de déléguer un culte de TÉtat à une classe inférieure,
méprisée et exclue de tous les droits. Jamais, avant le dernier
siècle de la république, les collèges d'artisans n'apparaissent
dans l'histoire politique, religieuse ou militaire de Rome. On
ne peut tirer du texte de Plutarque qu'une chose : c'est que ces
collèges avaient un culte, et c'était un culte privé, choisi par
eux-mêmes, comme nous le verrons sous l'Empire.
Rien ne permet donc de fixer leurs rapports avec les institu-
tions de l'État romain, et nous croyons que c'étaient des
associations purement privées '. Ils naquirent successivement,
à mesure que les artisans de chaque métier se virent assez
nombreux pour s'associer. Leur naissance se comprend, et à
défaut de témoignages précis, il ne faut pas aller en chercher
les raisons fort loin. Leur infériorité sociale rendait les arti-
sans faibles ; Tite-Live les traite dédaigneusement d'opificum
vidgus 2 : ils se rapprochèrent instinctivement pour devenir
plus forts. On les excluait de la vie publique, de l'armée et du
culte : ils sentirent le besoin de former des corps à eux et
d'avoir un culte à eux. De tout temps, les humbles et les
petits surtout ont éprouvé ce besoin de s'unir pour être plus
considérés; de tout temps, les gens de même profession, qui
ont des intérêts communs, ont aimé à se sentir les coudes, à
se soutenir réciproquement, à fraterniser ensemble. A une
époque où l'esprit religieux pénètre tout, ils ont tenu à se
réunir dans la célébration d'un culte commun, et ce caractère
religieux a dû désarmer l'autorité. Ils habitaient d'ailleurs les
mêmes quartiers, les mêmes rues 3; du moins, plus tard, c'est
des métiers que certaines rues et certains quartiers ont tiré
leur nom. Ils avaient aussi sous les yeux l'exemple des asso-
ciations des gens du même dislrict rustique ou urbain, à qui
Ton permettait bien de s'associer pour la religion. On parle
* Cfr. Kayser, p. 131.
■^ Liv., VIII, 20. X 21. Voyez plus iiaut, p. 69.
5 Voyez LiEBENAM, pp. 9-10.
(T8)
encore des grands collèges sacerdotaux, mais il nous semble
impossible que les ouvriers aient eu l'ambition de les prendre
pour modèles ^. Quant au but professionnel, il ne peut en être
question : tout au plus les gens du même métier cherchaient-
ils à défendre les intérêts communs, sans songer à se créer un
monopole ou à réglementer l'exercice de leur profession. C'est
une chose inconnue à Rome comme en Grèce 2; on ne voit
poindre de pareilles tendances qu'aux derniers temps du Bas-
Empire et à Byzance 3. Plus tard la concurrence servile devint
pour les artisans libres une raison de plus pour se rapprocher
entre eux, mais elle n'était pas encore à craindre au moment
où les premiers collèges naquirent.
§ 2. Le droit d'association sous la réjmblique
jusqu'à Van 690164 ^.
Les collèges d'artisans continuent à se former librement
jusqu'au milieu du VII* siècle de Rome. Les premières prohi-
bitions datent de l'époque de Cicéron et de Clodius, et elles
furent générales. Jusque-là le droit d'association demeura sans
entraves : c'est ce que Mommsen a prouvé depuis longtemps, et
son opinion, généralement admise, n'a guère trouvé de con-
tradiction sérieuse s.
* Th. Mommsen ne croit pas qu'ils aient imité les collèges sacerdotaux,
J)e coll., pp. 27-28. Contra : Dirksen, pp. 8. 27. Marquardt, St.-V., III,
p. 138, n. 4 = Trad., Le culte, I, p. 466, n. 1.
2 Voyez infra, 11^ partie, chap. I, § 2.
5 J Nicole, Le livre du préfet, Genève, 1893.
* Voyez Dirksen, ])p. 31 et suiv. Th. Mommsen, De coll., pp. 32-35-
U et sniY. Zeitschrift fur Gesch. R.-W., XV, pp. 354 et suiv. St.-R.,
III, p. 1180. 1235. Pernice, pp. 289-309. Cohn, pp. 27-36. Kayser,
pp. 134-156. Liebenam, pp. 16-19. 225. Gaudenzi, pp. 24 et suiv.
Karlowa, p. 64. Trouette, p. 27 et toutes les thèses françaises.
5 Elle a été combattue par Cohn, pp. 27-35.
( 79 )
Tout d'abord, s'il n'existait pas de loi garantissant expressé-
ment la liberté d'association, il n'y a pas de trace d'une loi,
d'une mesure quelconque supprimant cette liberté et exigeant
l'autorisation ^. C'est à tort qu'on a cité une défense de
Tarquin le Superbe, qui n'atteignit pas les collèges d'artisans,
mais les associations religieuses des districts urbains et
rustiques, à cause de leurs tendances politiques 2. C'est encore
à tort qu'on allègue deux lois, qui ne sont connues que par le
rhéteur Porcins Latro. L'une est des XH Tables, et ne défend
que les réunions nocturnes dans la ville; l'autre est une lex
Gahinia qui interdit dans Rome les assemblées clandestines 3.
C'est par erreur qu'on a cru qu'une autre loi des XII Tables,
citée par Gains, avait conservé ou accordé la liberté d'associa-
tion : elle octroie seulement aux collèges de tous genres la
faculté de se donner des statuts à leur gré, pourvu qu'ils soient
conformes au droit public '^^. Cohn, qui entreprit le premier de
réfuter Mommsen, s'appuie principalement sur le discours que
le consul Postumius adressa au peuple avant de sévir contre
* DiRKSEN (pp. 31-34) a fait bonne justice des inventions d'Heineccius
(suivi par Krause), qui disait que Tullus Hostilius, roi guerrier, devait
avoir aboli les collèges du pacifique Nuraa, que Servius Tullius les avait
rétablis, et que Tarquin le Superbe les avait de nouveau supprimés !
2 DiONYS., IV, 43 : auvd8ou<; xe au{ji.Tcaaac, oVai Trpdxspov èyi'vov-co xw[j.tj-
Twv Ti cppaxpiaaxôiv r^ yst'^dvwv l'v X£ x^ iroXei xal IttI xwv ^ypôiv £
iMSEX, St.-R., I, p. 327, et ci-dessus, p. 00). Heixeccius
lit (§ XTN) : tinctorumqiie (3a3£"tî de Numa); MA>TTas et Th. Mommsen
(J)e coll., p. 74, n. 9) proposaient : fictorumque. Maintenant Mommsen
{St.-R., III, p. 287, n. 2 et 3 = Trad., p. 3-26) lit : liticinumque. 0. Hirsch-
FELD, Gall. Stud., III, p. 20 i"2o6), conjecture : pistorumque ; m-àis ce col-
lège est plus récent, et on ne peut s'appuyer sur Gaius, Dig., 111, 4, 1.
LiEBEXAM, p. 23, maintient lictorumque. La conjecture la plus vraisem-
blable est, selon nous : fictorumque, synonyme de (igulorumque.
^ AscoN., in Pison., éd. Kiessllxg et Schoell, pp. 6-7 .- L. Julio C. Mar-
cio ronsiulibuSy quos et i/>.se Cicero supra memoravit , -^enatus consulta
collegia sublata sunt, quae adversus rempublicam videbantur esse-^ ea
Solebant autem magistri collegiorum ludos facere^ sicut magistri vicorum
faciebanty Compitalicios praetcrtati, qui ludi sublatis collegiis discussi
sunt. Post VI deinde annos quam sublata erant P. Clodius tr. pi. legelata
restituit collegia. Voyez la suite plus loin, p. 94, n. 2.
Les mss. portent : L. Julio C. Mario, consuls qui n'existent pas. Plus
loin, ils ont : post novem annos. La lejc Clodia est de l'an 696 = 08; neuf
ans plus tôt, ce serait en 687 = 67, sous le consulat de C. Calpurnius Piso
et M. Acilius Glabrio. Ces noms s'éloignent trop de ceux des mss. En
outre, Asconius {in Coïti., p. 67) dit que le sénatusconsulte est postérieur
à l'an 689 = 60. Si l'on change post IX annos en : ptjst TI annos, on
obtient Tannée 690 — 64, dont les consids sont L. Julius César et
C. Marcius Regulus. Nous adoptons cette conjecture d'ÛRELLi, Cic. opéra
(t. V, pai's 2, p. 9), approuvée par Mommsex [De oAL, p. 73-74. 77,
(93 )
triomphe aurait fait éclater la révolution. Il s'agissait de faire
échouer ses projets, et le Sénat prit différentes mesures :
il chargea les consuls de renforcer la loi contre la brigue et il
fit renouveler la loi de numéro sectatorum ; il supprima aussi
les collèges dangereux pour l'ordre public *, surtout qu'il
voyait se multiplier, sous le nom de collèges, les associations
factieuses -. La suppression des collèges entraîna celle des
jeux compitalices, réjouissances populaires célébrées en l'hon-
neur des Lares des carrefours par les habitants d'un même
quartier; en effet, si nous comprenons bien le texte d'Asco-
nius, c'étaient les « maîtres » ou présidents des collèges qui
présidaient ces jeux avec les maîtres des quartiers magisîri
vicorum . Il semble, du reste, que le Sénat avait interdit ces
jeux par une disposition formelle 3. Cela ne faisait pas l'affaire
des démagogues séditieux, tels que Clodius, qui trouvaient
dans ces fêtes une occasion de fomenter des troubles et dans
les collèges des bandes toutes prêtes à seconder leurs projets.
D'après eux, le Sénat, pouvoir administratif, avait outrepassé
n. i3) et la plupart des modernes. Ce}:»endant Orelli avait propose a ilti :
post V ariîio.^ (voyez Rixkes, Mneniosyne, X, p. ^08).
DmKSEX plaçait le sénatnsconsulte en 686 = 68 et lisait : L. Caecilio
Q. Marcio con-sulibius ; mais il faudrait : post decem annos. De même :
CoHN, pp. U) et oi-5o. Pebmce, p. 301. Gaude>'zi, pp. -37-38 et d'autres.
Ils croient qu'il ne s'agit pas du même sénatusconsulte dans les deux
textes d'Asconius, mais ne donnent pas d'ai^ments convaincants.
* Sur le sénatusconsulte de 64 = 690, voyez les deux passages précités
d'AscoMTS et Cic, pro Se-st , :2o, 55. In Pinn. IV, 8 et 9. Cass. Dio, 38,
13, 2 i voyez ces passages ci- dessous).
* AscoN., in Corn., p. 67 : Coetus factiosorum hominiun.
^ Cic, in Pis., IV, 8 : ludi compitalicii, tum primum facti... contra
auctoriiatem kujus ordinis. Et plus loin : cmn quidam tribunus pld>is
sua auxilio magistros ludos cimtra Senatus consiiltum facere jussisset.
Cependant ces passages ne sont pas décisifs. Cicéron pourrait s'exprimer
ainsi, même si la défense des jeux était seulement une suite de la disso-
lution des collèges. Il est toutefois certain que le Sénat avait en vue la
suppression des jeux. Th. Mommsen {St.-R., III, p. 1181, n. 1) dit : die
in jenem Senatsbe^hluss verbctenen Gassenspide.
(94)
ses droits ^. Ils contestaient sa compétence en cette matière
et ne voulurent tenir aucun compte du décret. Déjà, vers la
fin de l'an 61 = 693, un tribun inconnu promit son appui
aux magistri pour célébrer les jeux compitalices en dépit
du sénatusconsulte, en janvier 60; mais le consul désigné,
Q. Melellus Celer, parvint à les empêcher de son autorité
privée 2. En l'an 58 = 696, la fête des carrefours, fête mobile, fut
fixée au l^'" janvier. L. Calpurnius Pison était consul. P. Clodius
songeait à rétablir les collèges et voulait y préparer les esprits.
Ce fut à son instigation, sans nul doute, que le chef de ses
bandes, Sex. Clodius, présida lui-même, revêtu de la robe pré-
texte, à la célébration des jeux, malgré le sénatusconsulte et
< WiLLEMS, Le Sénat, II, p. 115, n. 1 et 4; p. 116, n. 1 ; p. 326, n. 4 et 5.
Th. Mommsen, Sl.-R., 111, p. 1181, n. 1. 11 est à remarquer qu'en ordon-
nant aux sodalitates et aux deairiati de s? dissoudre (698 = 56», le Sénat
ajoute : lexque de Us ferretur ut qui non discessissent ea poena, quae est
de vi, tenerentur. Il fallait donc une loi pour donner une sanction à
ces sénatusconsultes sur rassocialion.
2 Sur cette tentative et sur les jeux célébrés par Sex. Clodius, voyez :
Cic, in Pis., IV, 8 : Aude nunc, o furia, de tuo dicere ! Cujus fuit initium
ludi couipitalicii, tu m primum facti post L. Julium et Q. Marcium con-
sules (les noms sont également corrompus ici), contra auctoritatem hujus
ordinis : quns Q. Metellus... designatus consul, cum quidam tribunus
plebis suo auxilio magistros >il s'agit, selon nous, des magistri vicorum
et des magistri collegiorum) ludos contra Senatus consultum facere
jussisset, privatus fieri vetuit... Tu, cum in kalendas Januarias compi-
taliorum dies incidisset, Sex. Clodium, qui nunquam antea praetextatus
fuisset, ludos facere et praetextalum. volitare passus es, hominem
impurum. . Asconius, in Pis., pp. 6-7 (suite du passage cité) : hividiam
ergo et crimen restitutorum confert in Pisonem, quod, cum consul
esset, passus sit ante, quam lex ferretur, facere kal. Januar. prae-
textatum ludos Sex. Clodium Is fuit familiarissimus Clodii et operartim
Clodianarum dux... Quos ludos tune quoque fieri prohibere temptavit
L. Ninnius tr. pi. Ante biennium autem ^nte] quam restituerentur,
collegia, Q. Metellus Celer consul designatus magistros [ludorum del.
Baiter, vicorum in mg P^l ludos Compitalicios facere proldbuerat , ut
Cicero tradit, quamvis auctore tribuno plebis fièrent ludi ; cujus tribuni
nomen adliuc non inveni.
(93)
malgré le tribun L. Ninnius, mais avec rassontiment du consul
qui avait los faisceaux. Cicëron reproche amèrement à Pison
d'avoir laissé faire, et il l'accuse d'avoir ainsi facilité le réta-
blissement des collèges ^. Après avoir préparé le terrain,
P. Clodius, devenu tribun, ne perdit pas son temps; trois jours
après les jeux, il fit voter plusieurs lois dont l'une permettait
de rétablir les collèges supprimés "^ et rendait au peuple la
liberté complète d'association, car elle donnait la faculté d'éta-
< AscoMUS, pp. 6-7. Cic, Pro Sest. 15, 34. 23, 55. Posl red. in sen.,
13, 33. Pro domo, 21, 54. In Pison., 10, 23.
2 Clodius fit voter trois lois démocratiques : une le.v frumentaria décré-
tant les distributions gratuites de blé; une loi abolissant la lex J^liaet
Fiifia sur Vobnuntiatio, et la lex Clodia de collegiis (Cic, ad AU., III,
45, 4), ou, comme dit Ascomus An Pison., p. 8' : De collegiis restitiiendis
novisque institueyidis . Sur cette loi, voyez Ascox., in Pison., pp. 6-7
(ci-dessus). Cic, ad Att , III, 15, 4, en sept. 686 : nunquam esses passus
mihi persuaderi utile nobis esse legem de collegiis perferri. Post red. in
Sen., 13, 33 : Cum viderem... servos simulatione collegiorum nominatim
esseconscriptos. Post red. ad Qiiir., 5, 13 : Ego, cum homines in tribu-
nali Aurelio palam conscribi centicriarique vidissem. Pro Sest., 15, 34 ;
Isdem consulibus inspectantibus servoriun dilectus habcbatur pro tribunali
Aurelio nomine collegiorum cum vicatim homines conscriberentiir, decti-
riarentur, ad vim, ad manits, ad caedem, ad direptionem incitarentur.
Ibid.y 25, 55 : ut collegia non modo illa vetera contra senatusconsultiim
restituercntur, sed ab uno gladiatore inmunerabilia alia conscriberentur .
De domo, 5, 13 : cum desperatis ducibus decuriatos ac descriptos haberes
exercitus perditorum. Ibid., 21, 54 : cum in tribunali Aurelio conscri-
bebas palam non modo liberos, sed etiam servos ex omnibus vicis conci-
tatos. In Pison. y IV, 9 : collegia, non ea solum, quae senatus sustulerat,
restituta, sed innumerabilia quaedam nova ex omni faece urbis ac ser-
vitio. Ibid., 5, 11 : Pro Aurelio tribunali, ne conivente quidem te [PisonOy
quod ipsum esseï scelus, sed etiam hilarioribiis oculis quam solitus cras
intuente, dilectus servorum habebatur ab eo, qui... Ibid., 10, 23 : cwn
servorum dilectus haberetur in foro. Cassius Dio, 38, 13 : Kal -cà àxaip-xà
xoXXTqyia ÈTriytopitoc; xaXou{j.îva, ovta [j-èv éx zou àpyjX'.o\>, xaTaXuôsvxa 8è,
ypovov T'.và àvEvswaaxo. AscoN., in Pison., p. 8 : tertiam (legem) de
collegiis restituendis novisque institueyidis, quae ait (Cicero) ex serviiio-
rum faece constituta (à propos de Cic, in Pison,, IV, 9).
(96)
blir des collèges nouveaux et n'excluait aucune espèce. Clodius
comptait profiter lui-même de ce droit pour organiser des
bandes faciles à manier. Les chefs du parti aristocratique, qui
ne se sentaient pas capables de lui faire échec, ne tentèrent
pas même de faire une opposition sérieuse. Par faiblesse,
Cicéron se persuada qu'il était utile de laisser passer la loi, et
la vota ^. Il devait savoir pourtant qu'il fournissait des armes à
son ennemi mortel. Mais il raisonnait comme il le fit après la
mort de César, quand il ne s'opposa pas au maintien des actes
du dictateur, quoiqu'il les désapprouvât "^ : il lui semblait que
c'était le seul moyen d'éviter un mal plus grand et de sauve-
garder l'ordre et la tranquillité publique.
Il ne tarda pas à s'en repentir. Aussitôt le plébiscite voté,
Clodius se mit à l'œuvre {58 = 686) ; il dirigea lui-même le réta-
blissement des collèges et il en forma une « infinité » de nou-
veaux en les recrutant par quartiers et parmi les esclaves.
Disons-le dès maintenant, ces nouveaux collèges ne peuvent
pas donner une idée des collèges abolis par le Sénat. Cicéron
ne reproche pas au tribun d'avoir rétabli ces collèges anciens;
il ne le pouvait guère, puisqu'il avait fini par approuver la lex
Clodia de coUeyiis. Il lui adresse deux reproches : celui d'avoir
fondé une « multitude innombrable » de collèges nouveaux et
celui d'avoir fait appel aux pires éléments de la population
pour en remplir les cadres. Le tribun s'installa au Forum, sur
le tribunal Aurélien, avec son registre. Ceux qui voulaient
entrer dans un collège allaient se faire inscrire. On enrôlait
tous ceux qui se présentaient : des ouvriers, d'anciens soldats
de Catilina, des condamnés arrachés à la prison, non seule-
ment des ingénus et des affranchis, mais aussi des esclaves ; en
un mot, la lie de la populace 3. En réalité, ce n'étaient pas des
• Cic, ad Att., III, 15, 4, cité page précédente, n. 2.
2 Cic, Pliilipp. I, 7, 16 : non quoprobem, sed quia rationem habendam
maxime arbitrai' pacis atque otii.
5 II est question de soldats de Catilina : Cic, Po.H red. ad Quir., V, 13.
Post red. in sen., 13, 33. De domo, §§ o8 et 61. Les prisons furent ouvertes :
Pro Sest., 44, 95.
(97 )
collèges, mais des régiments de misérables, de gens sans aveu,
que Clodius organisait sous le nom de collegia. L'enrôlement
avait lieu par quartiers, et les hommes recrutés étaient divisés
en centuries et en décuries ^. C'est de ces troupes, décorées
du nom de collèges, que Clodius se servit dans sa lutte contre
Cicéron, Caton et Pompée; elles le rendaient maître de la rue,
du Forum et du Champ-de-Mars '•^. Les anciens collèges rétablis
prirent part, au contraire, aux manifestations favorables à
Cicéron, quand il fut menacé de l'exil et quand il rentra en
triomphe à Rome, après son bannissement '^.
Voilà le récit des faits. Remarquons d'abord c^e rien de tout
cela n'est contraire à l'opinion qui admet la liberté d'associa-
tion. Asconius parle bien de collèges factieux qui se forment
« sans autorisation publique ^^ » ; mais nous croyons qu'il se
met au point de vue de son temps, — il écrivait sous Claude
et Néron, — où l'autorisation était rigoureusement exigée. En
second lieu, c'est par voie administrative que cette liberté fut
abolie en Tan 64, non pour une espèce de collèges, comme
en 186, mais pour tous, ainsi que nous le prouverons. Jusque-
là la compétence du Sénat en cette matière avait été reconnue
' VicatÏDi (Pro Sest., io, 34), e vicis (De domo, 21, o^). Centuries :
Post red. ad Quir., o, 13. Décuries : Pro Sestio, 15, 34.
- Pro Sestio, lo, 34 : Ad vim, ad manus, ad caedem, ad direptionem...
armati homines forum et contiones tenebant ; caedes lapida tionesq ne
fiehant. Ces violences forcèrent le peuple de voter la loi d'exil qui frap-
pait Cicéron {ih., 24, o3), la mission de Caton en Chypre {Dedomo, 20, 53),
la démolition de la maison de Cicéron {De domo, 30, 79. 89, 131). Sur la
lutte entre César et Pompée, voyez Ad Qii. fr., II, 3. Il faut remarquer
([ue Clodius ne veut pas se procurer des électeurs à sa dévotion, mais une
armée de gens prêts à tout faire. Il ne s'a^^it donc pas de collèges ou
clubs électoraux. C'est par la violence que ces bandes influent sur les
comices. Clodius les avait enrôlées comme des troupes {exercitus, delec-
tiuu facere, conscr ibère). Sur les comices à cette époque, voyez iiifra,
Ile partie, chap. I, § 1.
•^ Voyez infra, même paragraphe.
^ CoHN s'appuie sur ce passage, p. o4. Contra : Liebenam, p. 24, n. 1.
Tome L. ' 7
( 98 )
par tous; en Tan G4, elle fut mise en doute par le parti popu-
laire, ù qui l'un des consuls prêta la main contre la haute
assemblée, et dorénavant ce fut par des plébiscites, par la voie
législative que la liberté fut tour à tour rétablie, supprimée et
restreinte *.
La question la plus difficile, c'est de savoir quels collèges
furent frappés en Tan 64 et rétablis par Clodius, en même
temps que le tribun leva ses régiments de misérables, sous le
nom de collèges nouveaux. On a émis les avis les (jIus divers.
Jusqu'il notre siècle, tous les savants ont cru qu'il s'agissait
avant tout déS collèges d'artisans '^. Dirksen a voulu prouver
que ce n'étaient pas du tout les collèges professionnels, mais
plutôt les montani et lespagani 3. Zumpt '*■ pensait que le Sénat
frappa des associations purement politiques, recrutées dans le
bas peuple, et Mommsen ^ a soutenu qu'il s'en prit surtout à
des associations religieuses formées des gens du même quar-
tier [compita), pour honorer les lares des carrefours, et qui
auraient porté le nom de coUegia compitalicia. Depuis 1843,
cette opinion a cours, et toutes les autres semblent lui avoir
fait place 6. Quelques auteurs cependant la repoussent ; Cohn
l'a longuement combattue pour reprendre la plus ancienne, et
il a essayé de démontrer que les principales victimes du Sénat
« Voyez WiLLEMS, Le Sénat, II, pp. 322-323. Th. Mommsex, St.-R., III,
p. 1480. 4235.
2 Brissonius, Select, antiq., I, 44. Sigonius, De antiquo pire civ.
rom., 2, 42. Helneccils, I, 8. Dirksen, le premier, essaya de les réfuter,
p. 31. ^
5 DiRKSEN. pp 34 et suiv.
* Zumpt, Criminalrecht der Rom. Rep., II, 2, pp. 383 et suiv.
^ Th. Mommsen, De coll., pp. 74-76.
« Marquardt, St.-V.,lU, pp. 438 et 204= Le culte, I, pp. 167. 245. Il
cite encore les collèges d'Isis (ibid., pp. 77 et 438 note = Le culte, ï,
pp. 95 et 167 note). Kayser, p. 438. Preller, Rom. Mijth., II, pp. 442-443,
Lance, II, p. 625. III, pp. 232-274. 298. 340. Wh.lems, Droit public,
5^ éd., p 57. Dans Le Sénat, II, p. 322, il est plus réservé. Lange, Jahresb.
de Bursian, I, 2 (1876), p. 885. Enfin la plupart des modernes.
1
(99)
furent les collèges professionnels ^. Nous croyons qu'il a raison
et qu'en tous cas les collèges professionnels ne furent pas
épargnés.
Selon Mommsen 2, chaque compitum ou quartier était com-
posé de plusieurs vici ; chaque vicus avait ses magistri et chaque
compitum formait un collège compitalice, ayant également ses
mafjistri . ces magistri vicorum et ces magistri collegiorum com-
pitaliciorum auraient célébré de concert les jeux compitalices 3.
Le Sénat aurait visé presque uniquement 'î- ces collèges com-
pitalices, associations populaires, propres à fomenter des
troubles. Le principal argument de Mommsen, ce sont les
relations des collèges supprimés avec les jeux de carrefour; le
Sénat avait en vue d'abolir ces jeux, et c'est sur la question de
leur rétablissement que le parti populaire commence la lutte
avec lui.
A première vue, ces observations paraissent décisives, mais
elles ne résistent pas à un examen attentif. Nous essayerons
de démontrer d'abord qu'il n'existait pas de collèges compita-
lices; ensuile que les collèges d'artisans furent certainement
atteints; il en résultera que leurs présidents ou magistri
célébraient probablement les jeux.
Le nom de collegia compitalicia est une invention de Momm-
sen, du moins pour Kome et pour l'époque de Clodius. Une
» COHN, pp. 39-58. Avant lui, Druma^^ (Arbeiter, p. 15")) et Wallon
{Esclavage, III, p 97. 460461] avaient maintenu que les collèges d'arti-
sans avaient pris un caractère politique et furent supprimés. De même :
Choisy, Art de bâtir, Stemler, pp. 10-12, et Gaudenzi, pp. 37-39.
Madvig (trad. Morel, I, p. 292) dit : « Parmi le bas peuple, il s'était con-
stitué, sous la forme de corporations de métiers, des sociétés (collegia)
poursuivant le même but (que les clubs électoraux). » Édit. ail., I, p. 175 :
Zîmftmàssige Vereine ans dem niederen Volke gebildel.
2 De coll., p. 75.
5 II ponctue : Solebant magistri collegiorum ludos facerc, sicul
magistri vicorum ; faciebant (utrique scil.) compilalicios praelc.vtali
(p. 76).
■* Mommsen dit : Praecipue (p. 57), ma.vime (p. 74).
( 100 )
inscription de Fésules •, qui date de l'Empire, peut-être du
III® siècle de notre ère, ne prouve absolument rien pour la
ville de Rome, surtout pour la république. Home était alors
divisée topograpliiquement on districts urbains (montes) et
rustiques [pagi), qui avaient un caractère à la fois religieux et
administratif"^. Ces districts se divisaient eux-mêmes en viei,
s'ils étaient assez étendus; le viens ou quartier comprenait les
habitants des rues aboutissant au même carrefour, qui hono-
raient ensemble les lares compitales. Le mot compitiim désigne
à la fois le carrefour, la chapelle des lares et l'association reli-
gieuse des habitants du quartier : en ce dernier sens, il est
synonyme de viens, vicinitas, viciiiia '^. Il n'est donc pas exact
que le eompitnm comprenait plusieurs vici. La fête des lares
[compitalia) était mobile et le préteur la fixait après les satur-
nales, au commencement de janvier. Elle comprenait des jeux,
sorte de cortèges qui parcouraient les rues ^ pour aller sacrifier
à la chapelle des lares, autour de laquelle avaient lieu toutes
sortes de réjouissances populaires s. Les viel ou vicinitates ne
portaient pas le nom de collèges, pas même passagèrement à
' (.'. /. L. XI 1550 : D. M. L. Terentio Fido et. Novidae contubernali
ejus, cullegius co)upitalicius. Cfr. Cohn. C'était peut-être un collège funé-
raire privé, honorant les lares d'un carrefour, un collegium Laruin.
Voyez notre Index coUegiorum j'uner. A Délos, en 96 ou 97 avant J.-C, on
trouve des KoijirsTaX'.aa-a' {Bull, de corr. helL, VII, p. 1^2). Ce mot
désigne les magistri d'un collegiuiu Ldniin. V. Schulten, p. 55.
- Voyez supra, p. 40.
5 Cohn, pp. 42-43. Gaudenzi, p. 39. Mommsex admet que compitumei
vicinitas sont synonymes. Pour vicus, voyez C T. L. IV 60, à Pompéi,
en l'an 707 ^- 7 : mag{ister) vici et compiti. Cfr. C. L L. 1. p. 448. Pline
rapporte qu'Auguste divisa Rome in regiones XIV conipita Larum CCLXV
{n. h , 3, 5, 6ij), tandis que Suétone dit : Spatiuni urbis in trgiones
vicosque dieisit (Oc/., 30). Pour viciiiia, voyez Suet., ib. : magistri e
plèbe eujusque eieiniae lecti. Leur origine est attribuée à Servius Tullius.
Preller, RGm. Mijth., I^^ p. 109. Marquardt, Le culte, I, pp. "245-246.
DiONYS., IV, 14.
* Cic, in Pis., [V, 8 : ludos facere et praetextatum volitare.
^ Preller, Rom. Mijth., II, 112, notes.
( 101 )
cette époque démagogique, comme disent Marquardt et Preller.
Us ne portaient pas plus ce nom que les mvnte>i et les pagi ^:
Cicéron et son frère Quintus - distinguent formellement les
districts et les quartiers, associations religieuses comparables
à nos paroisses, des collèges proprement dits. Quintus Cicéron
divise clairement la plèbe urbaine en coîlegia, montes, pagi,
viciuitates 3. Sauf le collegium Capitoîinorum du pagus Capi-
tolinus et le collegium Mercurialium du pagus Ave)itiuensis,ces
circonscriptions religieuses avaient une organisation trop
imparfaite pour mériter le nom de collèges. Les vici, en
particulier, n'étaient pas même oflSciellement constitués et
délimités, comme ils le furent par Auguste en l'an 7 747 . Ils
avaient cependant des magistri, Mommsen pense que ces
« maîtres » étaient nommés passagèrement, par les voisins,
pour procéder aux cérémonies religieuses et aux jeux ^. En tous
cas, leur existence sous la république est certaine. Tite-Live
nous apprend qu'ils portaient la robe prétexte et qu'on les
ensevelissait avec cet insigne de leur fonction •^. Deux inscrip-
tions les mentionnent avant l'Empire''. C'étaient des atiranchis,
' C0H>-, pp. 43 et suiv. Contra : Liebenam, p. ^.
- Cic, Pro domo, 28, 74, où Ton voit que les montani et les pagaiii ne
formaient pas des collèges, mais des conventicida et quasi concilia
qv.aedam, et où ils sont distingués des coîlegia. Voyez supra, p. 41. n. l.
^ De petit, cous., VIII, '^j. Voyez supra, p. 41, n. 1.
* Th. MoMiiSEN, C. L L. \ 802, note : nec certi videntur fuisse née
perpetui et sacrorum tantum ludorumque causa a vicinis constitua.
Cir. 5IARQUARDT, St. -Y., I, p. D^Org. de l'Empire rom., I, pp. 160-162.
5 Liv., 34, 7, 2 'an 557 ^= 195» : Hic Romae infivw generi, nmgistri.'<
vicorum, togae praetextae habendae jus peimitteimus, nec id ut vivi sohnn
habeant tantum insigne, sed etiam cum eo crementur mortui? Auguste
leur consena ces insignes iCassiis Dio, 55, 8).
6 VI 1324 (avant 731 = 23) : magdstrii veici. VI 2221 = I 804 :
magdstri) de duobus pageis et vicei Sulpicei. Jordan, Topogr. der Stadt
Rom, II, 52, croit que la première n'est pas de Rome; elle est actuelle-
ment au Musée des Thermes k Rome. Cfi-. C. I. L. IV 60, à Pom}>éi <'eité
supra) et Index du C. I. L. IV, p. 448.
M0M.MSEN 'C. I. L. l 802. note» reconnaît leur existence avant Auguste.
( 102 )
:ii(l('*s (le. minislri, csrlavc's <. Il n'csl |>:is inoiiis sfii" ^\\n', (1rs la
r«''|mhli(jin', ces iiiaîlrcs de (juailicr prniairnl pari à la vr\v-
bralioii (l<'s jriix «le rjn rrloiii-, Ascoiiiiis Ir dit. loiincllctinriit.
On V(iul «''carlcr son Irinoigiia^r' en (l/'claïaiil sou Irxic cor-
rompu "^ ; niais il c-sl corrohon'' pai" crlni (h* Tilc-Liv*^ (pii
rapporli^ (pic vrsmafiisiri poilaicnl la robe pn'lcxlc fcii Tan 11).')
•^T)?)?); on olï'ct, ils la poilaicnl ('vidcimMciil iioiii* (•(''l(''l)r(',r c.o.s
jcnx.conniic l<' lil Scxlus CJodius dans la niriiic occasion -K On
Il rilc AscoNii s, /// l'isoii., |». (>. Liv., iJi, 7. IMonys., i, l.'i. Cickuon (///
l*is(iii., IV, H) or-
laiicc » ; ccpendanl il \eul \\\'i\ : fiinuiil, cl il csl, appr()UV(! par A. YVACilc-
NKH, //////. (h' r.\,;ul. (le lirhj., mai I.S8'.), p. 101). Mais le ICîxK^ d'Asc.onius
csl, corroltoi'e par Tile |j\e el Ciceion, cl ne |>eul. (''Ire clian{^^('î sans
lUTcssiUî absolue. (loiiN, p. iO, n. &1, poneluf^ : SoIcIkuiI uidfiislri col-
lc(ju>nnn ludos fiurrr , sicnl inafiistri vironnu fiirirhinil coinjiilalirios
pmctcxlati, c'csl-;i-(lirc (pu' les nKUjisIri rollniioriun ('('dc'ltraicnl, d(;s
jeux (iiul(''l,(Tinin(''s), de niènie (pie les nitigisiri vicorum ('(''h'hraicnt
les jcnix i\o. carrciour. Ce sens est inadmissible, parce, (ju'il ressort
d'Asconius cl. de ('ac(^ron (/// /'/.s., IV, H) (pic les )iiit(iislri rollcqiorum
(•('îU'îbraicnl l(\s jeux coiiipitaliccs.
Cic , /// /»/.s., IV. S.
( lO.'î )
f]ir;j (\\n: \>: Sf'ri;jt (k- siipf>/iffj;i p;)S Iftft rnaîInîS Hft quarti^-j-, <;t
(JIJ^ [jr>urt.;)rjl Jf, sf'natiJHie/îron, qu'il y avait une connexion entre la suspension de ces
jeux et l'abolition ou le rfîtablissement des eolb';^es •''.
Quels sont ces collèges? Supposf)ns un moment, que ce
soient des collèges compitalices formés de geris du même
quartier. O^mme vicuM et compUum sont synonymes, il y aurait
donc eu, dans le même quartier, ^i la fois une association reli-
gieuse présidée p?jr les maîtres rlu quartier et un collège com-
pilalice ayant d^s raajjh^lri. O doubb- emploi paraît inadmis-
sible. Mommsen fait observer, à l'appui de son opinion, que
(Jr>dius recrutai précisément ses nouveaux r:ollèi.^es par quar-
tiers Ivicalirn , et qu'il y fit entrer en masse l^-s esclaves qui
partiripaiffji mu culte compiîalice ''^. Mais on ne peut se fonder
« Asr:05ius, p. i^imjrra, p. 1J3) : qui ludi mhlatix colU^^m dûmxn ni/al .
' StKT, ylw//., 31 : nonnuUa etiam ex aniiquU cmrimoniu , yaulatitn
ahoUta, rcatiluil, lit... Iwlr/x mecularen et comfdlulkws. Cassius Qio, Tvl, 8.
» AscoN., p. 7. Cic, în Pis., IV, 8. Y.u abolissant les r-ollègps, le Sénat
voulait roriflre impossibles tous lf;s rlésonJrcs que leur exislenr-e f'avo-
i-isait; cV;taient les émeutes et les violences sur les places publiques, cl
notamment celles qui accompaj^riaient les jeux.
* Dio>YS., 4, U. Th. Mommskn, p. 57, n. 6. 77. - Mommsen a voulu
récemment rapporter au rétablissement rJcs collèges par Clorliiis r-etle
inscription nouvellement découverte : Magfutri) U('\rf:nlanii?\ xuffruffin
( 104 )
sur l'organisation des collèges nouveaux, telle que la dépeint
Cicéron, pour fixer la nature des anciens, parce que la descrip-
tion de Cicéron ne s'applique pas aux collèges rétablis, mais
aux bandes nouvelles qui ne méritaient pas même le nom de
collèges 1. Du reste, les esclaves étaient aussi admis dans les
collèges industriels -, et beaucoup de ceux-ci étaient formés
d'artisans habitant le même quartier 3.
Marquardt a cru résoudre cette difficulté en supposant que
les prétendus collèges compitalices et les vici n'étaient qu'une
seule el même association, que les magistri vicorum agissaient
en cette circonstance comme magistri collegioriim compitali-
ciorum ^. Mais comment s'expliquer ce double titre des mêmes
personnages? Du reste, le texte d'Asconius n'admet pas cette
assimilation : il distingue nettement les uns des autres. Enfin,
nous croyons avoir prouvé que les habitants des quartiers ne
s'étaient pas organisés en collegia proprement dits.
Il faut donc chercher ailleurs. Pour nous guider, voyons ce
qui ressort des textes -5. On peut affirmer :
!« Que les associations supprimées par le Sénat et rétablies
par Clodius, portaient le nom technique de collegia. Cicéron et
Asoonius emploient invariablement ce terme, comme Suétone
le fera en parlant des lois de César et d'Auguste. Dion Cassius
dit même expressément que les Komains les désignaient par
ce nom : Ta ï'zy.'.z'.y.y. xoA/.rv'.a in'.yiiiZ'M^ xaAoJuîva 6. Ce terme
suffisait aux contemporains des auteurs susdits pour distin-
pagi pyim[i f'acti?] liidos fefer-u[nt]. {B.<:., 1887, p. 325.) Cfr. yotiiie,
1886, p. 443. Mitth. 4o-246 = St.-V., 111, {.. -204. Prelleu,
Rom. Mijth., Il, p. 11-2-113. Wili.ems. Droit public, o^ éd., p. o7.
2 CoHX, p. 48.
^ iVous avons cité tous les passages plus haut, p. 9o.
( \m ]
guer les collèges abolis des autres; ils devaient prendre ce mol
dans un sens particulier que l'on n'a pu fixer jusqu'ici ^ ; car,
dans son sens général, il convenait à tous les collèges, notam-
ment à des corporations que le Sénat n'eut pas même besoin
d'excepter nominativement, telles que les collèges sacerdotaux
et le collège des Capitolini.
2« Les collèges supprimés étaient anciens. Dion Cassius dit :
ovxa fjièv SX TO'J ipycuio'j, xaTaX'jQévTa ok yçiôvo^/ T',vâ '^. Cepen-
dant cette afiîrmation ne peut être prise à la lettre ; car le Sénat
visait aussi les nombreux collèges factieux de date récente ; c'est
même l'abus fait journellement de la liberté qui provoqua sa
rigueur 3, comme plus tard celle de César et d'Auguste ^.
3"- Ils étaient dangereux pour la république. Ce danger ne
consistait pas dans la corruption électorale; mais, comme le
dit Asconius, il s'agissait d' « associations factieuses w, tou-
jours prêtes à fomenter des désordres dans la rue. C'est pour
empêcher ces troubles que le Sénat veut mettre fin aux
jeux compitalices qui offraient chaque année une belle occa-
sion aux agitateurs; c'est pour les faciliter que Clodius fait
^ DiRKSEX, p. 38, suppose que collegia, pris absolument, désignait, à
l'époque de Cicéron. des communautés à qui l'État n'avait pas accordé la
personnalité juridique, des collèges non autorisés icoUegia illidta).
Zu.MPT, /. /., p. 384, dit : jeden politischen Vereiu nannte man ein Colle-
giinu. CoH>", qui réfute Zoipt «p. 4oj, dit : Collcgium ist in der Republik
ein (égaler Yerein mil sacralen Bexiehungen, dessen Bestand eine Gcneh-
migung erfordert hat. Il ressort de notre exposé qu'aucune de ces défi-
nitions n'est admissible.
2 Cic, Pro Sest., 25, 35, dit : l'elera illa ; mais cela peut désigner tout
simplement les collèges rétablis, par opposition aux collèges nouveaux
que forme Clodius. Slétoxe dit que César et Auguste épargnèrent les
collegia antiquitus constituta, collegia antiqua et légitima (div. JuL, 42.
Aug., 32); il veut désigner les collèges qui avaient échappé à toutes les
défenses antérieures. Auguste supprime, lui aussi, les factions formées
titnlo collegii wori(SuET., Aug., 32.)
3 AscoMUS dit que le sénatusconsulle fut provoqué par les excès des
collèges nouveaux, tels que le coll. Cornelioruni [in Corn., p. 67).
* Voyez infra les deux passages de Suétone, I^e partie, ch. IL § 1.
( 106 )
voter sa loi et recrute ses bandes organisées militairement ^.
4** Ils étaient d'espèces diverses. Les auteurs parlent toujours
en général des « collèges », ou des « collèges qui paraissaient
contraires à l'ordre public 2 w. Us les qualifient non par leur
genre, mais par leurs agissements 3. C'était une mesure géné-
rale : les collèges épargnés formaient une si minime exception
que le Sénat les désigna nominativement [pauca atque certa).
Si le Sénat n'avait supprimé qu'une seule catégorie, les auteurs
la désigneraient par son nom. Comme César et Auguste, il sup-
prima tous les collèges séditieux, quelle que fût leur nature ^.
0° Enfin, les magistri coUegiorum célébraient les jeux com-
pitalices. A prendre le texte d'Asconius à la lettre, il faudrait
croire que les présidents de tous les collèges abolis étaient
dans ce cas •'> ; mais ce texte a une lacune impossible à com-
bler. On conçoit cependant que tous les collèges recrutés
parmi les classes inférieures de la population et souvent com-
posés de gens du même quartier, aient participé à ces jeux
populaires et locaux.
En résumé, tout ce que nous savons, c'est que les associa-
tions supprimées portaient le nom de coUegia, que beaucoup
étaient anciennes, que toutes étaient animées d'idées sédi-
* AscoN., p. 6 : quae contra rcmpubltcani videbantur esse. Fréquenter
tum coetus factiosorion liominiun . . . fiebant. On a vu l'emploi que
Clodius tit de ses collèges.
2 Collegia sublata sunt ... Clodius restituit collegia. (AscoN., ib.)
Voyez les passages de Cicéron, supra, p. 93. Cassius Dion : -zà ï-zoL'.piy.x.
3 Trouette, p. 46
* Rien ne prouve que les rares collèges épargnés valaient mieux que
les autres; mais leur antiquité et leur utilité les sauvèrent. Du reste,
leur petit nombre devait les rendre désormais inoffensifs : praeter
pauca atque certa, quae utilitas civitatis desiderassct (AscoN., p. 67), et
l'imprudence que Dirksex (pp. 39-40) attribue au Sénat, n'existait pas.
— Voyez Gatti, Bull. Corn., 1888, p. 224 : abolite tutte le associazioni
urbane che avevano degenerato in turbulente fazioni politiche. Madvig-
MOREL, III, p. 151.
3 Solebant magistri coUegiorum ludos facere, p. 6. Cohn (p. 40, n. 62)
propose de combler la lacune au moyen des mots : ea (opificum eraitt),
ou : ea (a yuma instituta erant).
( 107 )
tieuses, qu'elles étaient d'espèces diverses et que leurs prési-
dents concouraient, avec les maîtres de quartiers, aux jeux
compitalices.
Il résulte de là qu'il ne s'agit pas de ces clubs électoraux
que formaient les candidats aux magistratures et dont Q. Cicé-
ron parle en 689, un an avant le sénatusconsulte i; en effet,
ils portaient le nom de soilalitates ou .sodalicia, et d'ailleurs,
composés de gens riches et puissants, ils ne prenaient aucune
part aux fêtes de carrefour. Zampt croit que le Sénat visa des
associations purement politiques, composées de pauvres gens,
qui nous apparaissent subitement, dit-il, dans ces temps trou-
blés -; mais les pauvres gens ne s'associaient pas uniquement
en vue de la politique. Ils vendaient leurs voix ou se faisaient
l'instrument des démagogues : dans le premier cas, ils entraient
dans les décuries d'électeurs (decuriati) enrôlés par les clubs
politiques, qui n'étaient pas des collèges et n'avaient aucun
caractère religieux; quant aux démagogues, ils se servaient
des collèges déjà existants ou de collèges nouveaux formés sur
le modèle des anciens. Il faut écarter de même les montani et
les pagani que les candidats cherchaient aussi à gagner et qui
prenaient part aux manifestations politiques 3; en etfet, ils ne
constituaient pas des collèges proprement dits '^ et ils avaient
d'autres fêtes que les jeux compitalices.
Il ne reste donc que les collèges professionnels d'une part,
et, d'autre part, les collèges religieux privés, voués surtout aux
cultes étrangers; à ces deux catégories, il faut ajouter les asso-
ciations factieuses qui se formaient en si grand nombre à cette
époque sur leur modèle. Asconius rani.re parmi ces dernières
un collegium Cornelioriim, composé d'affranchis de Sylla. Nous
croyons que c'est à ces collèges professionnels et religieux que
< De petit, cons., VIII. 30.
2 ZoiPT, op. L, p. 383. Il est réfuté par r.OH>-. pp. -io^ô.
3 Cic, De domo, 28, 74. De petit cons., VIII, 30 (en 689). Voyez infra.
Ile partie, ch. I, § 1.
* DiRKSEN le reconnaît, p. ÎÎS. Voyez supra, p. 41.
( 108 )
s'appliquait particulièrement le mot collegia K Dans le sens
général, on entendait par ce mot toutes les associations formées
pour durer au delà de la vie de leurs membres actuels, et qui
avaient toutes un caractère religieux; mais on l'appliquait
particulièrement aux corporations que l'initiative privée avait
fait naître et faisait naître encore dans les classes populaires.
Les collegia de Cicéron, d'Asconius et de Dion Cassius étaient
des collèges populaires privés, pourvus en fait d'un caractère
religieux. Parmi ces collèges, il n'en est pas auxquels les textes
s'appliquent avec plus de vraisemblance qu'aux collèges d'ar-
tisans. Sous la république, les auteurs et les inscriptions les
appellent toujours collegia; ils étaient antiques, puisque les
Romains attribuaient les premiers à Numa, et, dans le cours
des siècles, leur nombre s'était multiplié. Les artisans et les
marchands constituaient la classe la plus turbulente de la
population et la plus facile à ameuter '^; il faudrait s'étonner si
leurs collèges n'avaient pas pris le même caractère. La date du
sénatusconsulte n'est peut-être pas sans importance. Salluste
nous apprend que précisément en l'an 64 les complices de
Catilina comptaient sur les artisans et les esclaves 3. Si l'on
nous objecte '* que, dans le récit des troubles, les auteurs ne
parlent que des opifices et tabernarii et non de leurs collèges,
la réponse sera facile. Ils ne parlent pas non plus d'autres
collèges, quoique la participation des collèges aux désordres
soit certainement la cause des rigueurs du Sénat. Le point
* Même s'ils ne portaient pas officiellement ce nom. Les affi-anchis de
Sylla s'appellent simplement libertirii dans une dédicace déjà citée
(C. L L. I 585). Voyez supra, p. 91, n. 1.
2 Voyez infy^a. Ile partie, ch. I, § L Mommsen le reconnaît, De coll.,
p. 59. "
3 Sall., Cat., 27. 36. Lange, Rom. Alt., III, p. 232.
^ LiEBENAM, pp. 28-29. Il dit que les collèges ne contenaient pas tous
les artisans et que les passages où il est parlé de la turbulence des
opifices ac tabernarii, peuvent s'appliquer à ceux qui étaient en dehors
des collèges. Mais il nous parait certain que les collèges contenaient au
moins le plus grand nombre.
( 109 )
difficile, c'est la relation des collèges supprimés avec les
jeux de carrefour. Il faut absolument recouriu aux hypo-
thèses ; car l'existence de collèges compitalices n'était qu'une
hypothèse de Mommsen pour résoudre cette difficulté. Nous
croyons avoir montré qu'elle était fausse. Est-il invraisem-
blable que les artisans et les marchands, groupés par pro-
fessions dans les différents quartiers de la ville ^, aient pris
part à ces jeux locaux 2? Nous ne le pensons pas. Ajoutons
que leurs corporations recevaient des esclaves et que dans
plusieurs collèges industriels de la république on trouve des
magistri affranchis et des ministri esclaves 3, ce qui convient
au culte des lares compitalices '^ et put même fournir à
Clodius un prétexte pour enrôler aussi des esclaves dans ses
collèges nouveaux.
Dût-on contester cette participation des collèges d'artisans
aux jeux de carrefour et maintenir, malgré nos arguments,
que le Sénat visait avant tout de véritables collèges compita-
lices, encore faudrait-il admettre que les collèges d'artisans
furent frappés aussi. Quand les auteurs répètent invaria-
blement que les collegia furent supprimés , cette expression
doit nécessairement comprendre les collèges industriels, à
1 LiEBE^iAM, pp. 9-10. Rappelons les lanii Piscinenses. Voyez supra,
p. 88, n. o.
2 Le concours des magistri viconun et des magistri coUegioriim est
admis par Mommsen (p. 76. Cuiitra : A. Wagener, l. L, pp. 409-412).
CoHN admet de plus que ces collèges étaient les collèges d'artisans. Il
conjecture qu'ils avaient été chargés des jeux compitalices, de même
que plus tard les pisca tores concourent aux iudi piscatorii (p. 49).
Maué, Die Yereine, p. 27, n. 4. — Gaudenzi ne s'explique pas ce con-
cours de deux sortes de magistri et croit que les présidents des
collèges d'artisans avaient pris la place des magistri mcoritm qui
auraient disparu à cette époque (pp. 37-39). Nous avons réfuté cette opi-
nion, ainsi- que celle de Marquardt. Sans avoir été chargés officielle-
ment des jeux de carrefour, les collèges de chaque quartier pouvaient y
prendre part, et, avec le temps, ils ont pu y jouer un rôle prépondérant.
3 Voyez infra, 11^ partie, chap. II.
-* DiONYS., -4, 14.
( 110 )
moins qu'on ne puisse les compter parmi les exceptions. Or,
parmi les rares collèges nominativement désignés, pauca atque
certa, à qui le Sénat fit grâce, Asconius cite deux collèges
d'artisans par leurs noms : les fabri et les potiers ^ Si le Sénat
avait épargné tous les coUegia opificum, il ne les aurait pas
énumérés un à un, parce qu'ils étaient nombreux, et Asconius
n'aurait pu dire : pauca. Il est probable que le Sénat laissa
subsister ceux des collèges industriels qui étaient fort anciens;
peut-être leur fit-il grâce parce qu'on attribuait leur institution
à Numa, plutôt que parce qu'ils paraissaient nécessaires à
l'intérêt général. Il supprima le reste.
Nous croyons d'ailleurs qu'il en frappa beaucoup d'autres;
il visait tous les collèges dangereux, quels qu'ils fussent. Mar-
quardt suppose avec raison que si le culte d'Isis fut proscrit
à plusieurs reprises vers cette époque, c'est que les collèges
de ses fidèles n'étaient que des clubs politiques "^. Mécène con-
seillera à Auguste de chasser pour la même raison tous les
cultes étrangers 3. Il est donc probable que les collèges d'Isis et
des autres dieux étrangers furent aussi abolis en l'an 64 4. Quant
aux associations factieuses qui se constituaient dans le bas
peuple et qui amenèrent le Sénat à sévir contre tous les collè-
ges, on peut croire, ave(f Madvig, qu'ils prenaient la forme,
sinon le titre, de corporations industrielles ou religieuses s. Ce
qui leur donnait l'air de collèges véritables, c'était leur organi-
sation calquée sur celle des collèges : ils avaient leurs magisln.
» Voyez supra, p. 91, en note.
2 Le Culte, 1, p. 95 = S/. -F., IIl, p. 77. Voyez mpra, p. 49, n. 1.
5 Cassius Dig, 52, 36. Auguste proscrivit à Rome xà Upà xà A'-YUTrx'.a.
IBID., 53, 2. 54, 6.
* L'année même de la lex Clodia (58 = 696), le Sénat proscrivit le
culte d'Isis (Tertull., ApoL, 6). Voulait-il empêcher ses fidèles de pro-
fiter de la lex Clodia? La défense resta d'ailleurs lettre morte. Voyez
supra, p. 90. Les collèges des Juifs, quoique indifférents à la politique
romaine, ne furent probablement pas indemnes. César les épargna
(Joseph., Ant. jud., 14, 10, 8).
s Comme sous Auguste (Suet., Auy., 32 : tituJo collegii novi).
( m )
leur caisse commune, leur culte et leurs tètes, leurs réunions
et leurs banquets. Tous ces coetus factiosorum liominum furent
abolis évidemment aussi.
Bref, tous les collèges populaires furent supprimés, aussi
bien les anciens, entraînés par les démagogues dans la poli-
tique agitée de cette époque, que les nouveaux qui furent
formés expressément à cet etîet. Parmi eux, les collèges d'arti-
sans se distinguaient par leur nombre et par la turbulence de
leurs membres. Nous verrons que sous l'Empire, on continua
longtemps à les redouter pour le même motif; nous les trou-
verons partout impliqués dans les troubles. Quand on voit
combien la classe industrielle aimait Fagitation à l'époque de
Cicéron et, dans la suite, combien il fallut de temps pour lui
faire passer le goût de la politique et du désordre, on croira
ditficilement que le Sénat l'ait ménagée. Comme plus tard, ce
n'était pas à l'industrie et au petit commerce que le Sénat en
voulait; les artisans et les petits marchands ne songeaient pas
à améliorer leur condition sociale ou politique. On supprima
les collèges tout simplement parce qu'ils s'étaient compromis
dans les désordres civils et pour enlever aux factieux des
bandes organisées quasi militairement, toujours prêtes à les
seconder.
Il reste quelques mots à dire de ce qui se passa depuis l'an 64
jusqu'à Auguste. La mesure du Sénat qui avait supprimé les
collèges populaires et qui avait défendu de les rétablir, était
trop radicale pour durer : elle anéantissait le droit d'asso-
ciation. Nous avons vu qu'elle fut abolie par le plébiscite
Clodien de l'an 08 : les anciens excès reprirent de plus belle et,
sous la direction même du tribun, on abusa plus que jamais
de la liberté rendue sans limites. Avec la mort de Clodius,
l'ordre se rétablit probablement dans une certaine mesure; du
moins, le Sénat, qui avait échoué une fois, ne prit plus l'ini-
tiative sur ce terrain. En effet, le sénatusconsulle du 10 février
56 = 698 est dirigé contre les clubs politiques composés de
quelques personnages influents {sodalitates) et contre les mem-
( 112 )
bres des tribus enrôlés et corrompus par eux {decuriati ^). Il est
remarquable que le Sénat, en prononçant leur dissolution,
remit à une loi le soin de sanctionner son décret; la peine
devait être celle qui frappait les citoyens coupables de violence.
L'année suivante (oo = 699) fut effectivement votée la lex
Licinia desodaliciis : c'était une loi contre la brigue, qui punis-
sait de l'exil les candidats, membres des clubs électoraux, et
ne parle pas des decuriati 2. On ne sait si c'était la loi que le
Sénat demandait '^ ; en tous cas, ses intentions ne furent rem-
plies qu'à moitié. Ces deux mesures contre la brigue concer-
naient bien le droit d'association, mais non les collèges popu-
laires, qui continuaient à vivre et conservaient leurs tendances
séditieuses. Jules César, devenu maître de Rome, fut obligé de
les supprimer à son tour : cuncta collegia jjvaeter antiquitns
» Cic, Ad. Qu.fr., 11, 3. 11 raconte les événements du 0 février 698,
où les operae Clodiaiiae empêchent Pompée de parler, et du 10 février :
eodeni die senatus considtiun factum est, ut sodalitates decuriatique
discederent lexqm de iis fe)retiir,.Ht, qui non discessissent, ea poenaquae
est di vi, tenerentur. Voyez Th. Mommsen, De coll., p. 60. Cohn, p. 61.
LiEBENÂM, p. 23. ZuMPT, Crimimdreclit , II, 2, p. 385. — Kayser ip. 165)
croit à tort qu'il s'agit des collèges de Clodius, à cause du mot decuriati.
Voyez Th. Mommsen, De coll., pp. 58-59. De même Zoeller dans le
Jahresbericht de Bursian, 1893, p. 240.
- Cic, Pro Plancio, 15, 36 : veniamus ad causani; in qua tu nomine
legis Liciniae, quae est de sodaliciis, omnes ambitus leges complexus es.
ScHOE. Baeb., in or. pro Plancio, Orellï, p. 253 : qui (Cn. Plancius)
reus de sodaliciis petitus est lecje Liciiùa, quam M. Licinius Crassus
Pompeji Magni collega in consulatu suo pertulit, ut severissime quaere-
retur in eos candidatos, qui sibi conciliassent, ea potissimum de causa,
nt pro illos pecuniam tribulibus disper tirent . . . Voyez Th. Mommsen,
Dfîc'o//., pp. 42-73. ZuMPT, /. /., pp. 364-404. Kayser, pp. 168 et siiiv.
CoHN, pp. 45 et suiv., 58 et siiiv. Liebenam, pp. 25-26. Gohn prend soda-
liciis comme adjectif (sodaliciis honiinibus) ; il ne peut citer aucun
exemple concluant (p. 66). Plusieurs candidats furent accusés de soda-
liciis (Th. Mommsen, op.,c., pp. 70-71. Zumpt, Criminalprocess der Rôni.
Rep., 1871, pp. 547-549).
s Th. Mommsen, De coll. (p. 45), et Karlowa (p. 67) le contestent. Cohn
l'admet (pp. 66-67).
( 113)
constituta (listraxit '. On admet généralement qu'il s'agit d'une
loi {lex Julia) "^ ; en tous cas, le dictateur abolit tous les collè-
ges (cwicta), c'est-à-dire les collèges professionnels et les collè-
ges religieux, que le Sénat avait déjà supprimés, et il les
défendit à l'avenir. C'était encore une mesure radicale. [1 laissa
seulement subsister les anciens, c'est-à-dire ceux que le Sénat
avait déjà épargnés, parce qu'on les faisait remonter à Numa
{antiquitus constituta) et parce qu'ils étaient utiles. Nous savons
par l'historien Josèphe que, parmi les collèges religieux privés,
il fit une exception en faveur des Juifs établis à Rome : en
défendant les autres thiases, ou collèges religieux privés, il per-
mit aux Juifs d'avoir une caisse commune et de célébrer leurs
banquets, c'est-à-dire de s'associer. C'est en se fondant sur cette
mesure que le proconsul d'Asie, Servilius Vatia, autorisa les
associations juives de Paros (708-710) 3.
^ SuET., Div. Jidiiis, 42, éd. Roth.
2 D'autres croient qu'il s'agit d'une mesure prise par César comme
praefectus morum (Cohn, p. 71), ou comme pontifex maximus (Liebenam,
p. 27), ou comme dictateur chargé de réformer la constitution (Karlowa,
II, p. 67), comme le dit Josèphe, Ant. jiuL, XIV, 10, 8 : Taloç KaTaotp
6 7){jL£T£po(; aTpaxTjYOç xal uTzctToç h x(p SiatâyfjiaTi xwXuwv . . . Voyez
ci-après. Mommsen conteste que César ait jamais été praefectus moruni
{St.-R., II, 12, p. 685) et croit qu'il s'agit d'une loi (De coll., p. 73, n. 3.
St.-R., m, 1180. 1235).
5 Joseph., Ant. Jud., éd. I. Bekker, XIV, 18, 8 : louXio; Tuloc Oisez
^epouîXioç Oùaxîac;), axpa-Tjyoç uTiaxoc; PcL)[j.aûov, Hapiavcov oip'j^oMci
^ouX^ 8TQ|jit|j yat'psiv ... « 'E[j.ot' xoîvuv oùx àpÉaxsi . . . xwXûîaOai auxo'lx;
(xoùi; 'louoalouç) trjv xaxà xà aùxtov eÔtj, y.cà -/pTj|j.axa eIç aûvôîi-va xa-
xà Icoà siacoÉpsiv, xouxo Tîots'iv aoxwv ij.tiû' sv PcouTi xîxojAutj.£vcov. Kal
vàp raîo(; Ka"taap 6 ■fjjj.Exspo^ axpaxTjVcx; xal uTïaxo;, sv xôj o'.ax(XY[j.axi
xwXuwv Oiàao'jç auvâyeaôai xaxà TidXtv, jjlo'vouç xouxouc; oùx sxioXuasv ouxe
ypif^fjLaxa auvc'.a'spspciv o'jxs auvosnrva 7roi£"îv. ^0\t.oloiQ Os xàyw xo'jç àXXouç
6ta(Jou<; xtoXûwv, xouxouf; [xdvoiiç £7rtxp£7rto xaxà xà Tràxpta £'6t) xai vd(Ai[j.a
auvay£a6aî x£ xat Vaxaa6ai.. » Sur le nom du proconsul d'Asie, Servilius
Vatia (708-7 lOj, voyez Mendelsohn, Senati consulta qiiae sunt in Josephi
antiq. {Aeta Soc. philolog. Lipsiae, vol. 5, p. 216, 1875). Cfr. Jenaer
Litteraturzeitung, 1874, p. 363.
Tome L.
^^^J
CHAPITRE II.
LEMPIRE.
§ 1 . Lex Julia d'auguste ; sa portée; durée de cette législation.
— § 2. SON application a tout l'empire. — vi 3. RIGUEUR de la
LÉGISLATION IMPÉRIALE. — § 4. RÉPRESSION DES COlkgia ilUdla.
— § O. ADOUCISSEMENT DES LOIS EN FAVEUR DES COLLÈGES FUNÉ-
RAIRES {coUeqia tenuiorum). — § 6. changement dans la
POLITIQUE DES EMPEREURS A l'ÉGARD DES COLLÈGES. LE BAS-
EMPIRE.
Ainsi la république ne connut que des collèges d'artisans
libres et privés. Les plus anciens remontaient jusqu'aux temps
préhistoriques, d'autres suivirent, et leur nombre grandit insen-
siblement, sans provoquer l'intervention du pouvoir, parce
qu'ils s'occupaient tranquillement de leurs intérêts privés. Le
culte qu'ils adoptaient librement, l'utilité de leur métier les
faisaient regarder d'un œil favorable.
Liberté d'association et désintéressement de l'Etat : voilà ce
qui distingue la république. A partir de l'an 64 commence la
transition à une période nouvelle. Devenues turbulentes, la
plupart des corporations d'artisans, comme les autres collèges
privés, furent supprimées et interdites à deux reprises, par le
Sénat et par César. Elles purent se rétablir une première fois
grâce à la lex Clodia, et une seconde fois à la faveur de l'anar-
chie qui suivit la mort de César. Suétone compte les associa-
lions factieuses parmi les abus que la guerre civile avait engen-
drés et que la paix même ne put détruire '. Auguste se chargea
de régler définitivement le droit d'association et eut l'autorité
* Suet., Aug., 32, éd. Roth.
( 115 )
nécessaire pour faire respecter ses lois. Nous sortons enfin des
hypothèses et nous marcherons désormais sur un terrain plus
solide.
§ 1. Lex Julia; sa portée ^
La mesure d'Auguste fut l'une des premières qu'il prit pour
rétablir la sécurité publique. « Tous les jours, dit Suétone, se
formaient des associations factieuses et criminelles qui se
déguisaient sous le titre de collèges nouveaux; c'est ce qui
décida l'empereur à supprimer toutes les corporations, à l'ex-
ception de celles qui étaient anciennes et légales -. »
C'est par une loi qu'Auguste supprima les collèges et régla
le droit d'association pour l'avenir 3; cette loi n'est mentionnée
que dans une inscription que nous allons reproduire ^.
« Voyez DiRKSEN, p. 41. Rudorff, Zeitschr. /. gescli. R.-W., XV, 1850,
p. 213. Th. Mommsen, ibid., pp. 353-364; De collegiis, pp. 78-92; St.-R.,
12, pp. 326 sqq. P, pp. 341 sqq. Il», pp. 850-851. IP, p. 886. III, pp. 1180-
1235. Pernice, pp. 303 sqq. Kayser, pp. 178-195. Cohn, pp. 72-155.
DiRUY, Hist. de^ Rom., V, p. 154, n. 3. Marquardt, St.-Y., III-, p. 140
=r Le culte, I, pp. 166 et suiv. Gierke, III, pp. 81 sqq. Levasseur, I,
p. 27. Maué, Der Praef. fabr., pp. 22-46. De Rossi, Roma Sott., lll
(1877), pp. 509 et suiv. Liebenam, pp. 29. 60. 225. 238. Et toutes les thèses
françaises.
- Plurimae factiones titulo collegii novi ad nullius non facinoris
societatem coibant; igitur collegia praeter antiqua et légitima dissolvil.
SuET., A?^^., 32.
3 IIerzog {Gesch. u. Vei^., II, pp. 988 et 989, n. 1) admet deux mesures
successives, l'une pour supprimer les collèges, l'autre pour régler
l'avenir.
* C. 1. L. VI 2193 = 4416. Ligne 5 : c(oire) c(ogi) c(onvocari). Au
commencement de la septième ligne, la pierre est brisée. Henzen (n. 6097
et B. d. L, 1847, p. 50. A d. L, 1856, pp. 18. 97) et Wilmanns lisent :
[d(ivi)] Aug(usti). Mais dans le Corpus {VI 2193), Henzen déclare qu"il ne
manque probablement rien, et que l'inscription est contemporaine
d'Auguste. Après avoir examiné nous-même le marbre, nous croyons que
le graveur avait laissé un vide au commencement et à la tin de la lisfne 7.
( 116 )
DIS . MANIBVS .
COLLEGIO . SYMPHONIA
CORUM . QUI . SACHIS . PUBLI
GIS . PRAESTV . SVNT • QUIBUS
SENATLS . G • G . G PERMISIT- E
LEGE IVLIA EX AVGÏORITATE
AVG . LVDORVM GAUSA
Cette lex Julia de collegiis fit entrer la législation dans une
voie nouvelle i, dont il ne sera pas difficile de déterminer le
caractère; en effet, pendant deux à trois siècles, les empereurs
suivirent et développèrent la politique inaugurée par Auguste
à l'endroit des collèges, et l'esprit de sa loi se reflète dans toute
la législation postérieure.
Et d'abord, à l'égard des associations existantes, dont les
excès avaient provoqué la lex Julia, Auguste suivit l'exemple
du Sénat et de Gésar. G'est le sens des paroles de Suétone
reproduites plus haut, et Asconius met toutes ces mesures sur
la même ligne, quand il dit : Collegia et Sienatus) C{onsulto) et
phiribus legibus siint sublata praeter pmica atque certa "^. Les
collèges d'artisans, rétablis depuis Gésar, furent donc défini-
tivement dissous; Auguste n'épargna que ceux que le Sénat
et Gésar avaient maintenus et qui avaient pour eux l'antiquité
et la légalité {antiqua et légitima). Les collèges religieux privés,
voués aux cultes exotiques (Biaco!.) furent également défendus 3,
* Contra : Cohn, pp. 80 sqq.
2 MoMMSEN, St.-R., III, p. 1181, n. 2, entend aussi par pluyibus
legibus les lois de César et d'Auguste. Karlowa (II, p. 67) a tort de ranger
parmi elles la lex Licinia de sodaliciis. Voyez supra, pp. 91 et 112.
3 Mécène conseillait à Auguste de proscrire les cultes étrangers, à
cause des collèges que formaient leurs adhéreilts. Câssius Dio, 52, 36 :
ÔTi xaivâ Tiva ôaiiAcIvia ol xotoOxoi àvxotacpÉpovteç ttoXXoÙç àvaTrst'ôouaiv
àXXo-ptovop.elv xàx toutou xat auvto[j.oatat xat aua-àastf; Ixaipslaî xs
yi'Yvovxat, aTiep f^xicxa p-ovapylcf. aujjicpÉpst. Le culte même d'Isis fut sou-
mis à un contrôle. Ibid., 53, 2. 54, 6. Voyez Preller, Rom. Mijth., IP,
pp. 378 sqq., et la thèse de G. Lafa^t, citée supiYi, p. 90, n. 1. Marquardt
St.-V., IIP, p. 77 et suiv. = Le culte, I, pp. 95 et suiv.
( 117 )
à l'exception de celui des Juifs, qui était légal {legitimu7n) depuis
César ^ .
A prendre les textes de Suétone et d'Asconius à la lettre, il
faudrait croire que les collèges favorisés continuèrent d'exister
sans interruption. Mais diverses inscriptions relatives aux [abri
tignarii et aux syinphoniaci s'opposent à cette explication; en
effet, d'un côté , ces deux collèges furent certainement du
nombre de ceux que la lex Julia épargna, puisqu'ils comptaient
parmi les plus anciens et les plus utiles; d'autre part, nous
voyons que le premier commence son ère spéciale en l'an 7
avant J.-C, et que l'autre fut autorisé sous Auguste, on ne sait
en quelle année, mais en vertu de la lex Julia. Ils durent donc
cesser d'exister un instant. Cette contradiction disparaît si l'on
admet qu'en réalité Auguste fit table rase de tous les collèges
en désignant plus ou moins directement ceux qui pouvaient
se rétablir immédiatement, après avoir demandé l'autorisa-
tion î2.
En effet, pour ce qui regardait l'avenir, la loi décidait que
pour former un collège, il fallait obtenir une autorisation
spéciale du Sénat 3. Depuis le règne d'Auguste jusqu'au
1 Joseph., XIV, 10, 8. Cfr. XVI, 6, 2.
De Rossi {Royna sott., pp. 509-510) entend par légitima les collèges
qui seraient désormais établis lé£!,alement, comme par exemple les col-
lèges funéraires; mais il ne peut s'agir que de ceux qui avaient été de
fait autorisés avant la lex Julia. Herzog (II, p. 988) croit que la lex Julia
maintint trois sortes de collèges : 1° les antiques collèges d'artisans;
2» les sodalités sacrées; B® les collèges funéraires. Mais il faudrait
prouver qu'il existait déjà des collèges purement funéraires; quant aux
collèges sacerdotaux et aux sodalités sacrées, fondés par l'État, nous
croyons que la lex Julia ne s'en occupait pas, ni pour les permettre, ni
pour les interdire. Collegia est pris, ici encore, dans le sens restreint
indiqué plus haut, pages 107-108.
2 Voyez notre article de la Revue de riu.^tr. publ. en Belg., 1888,
pp. 155 sqq Liebenam (p. 31) soutient qu'on ne peut identitier les fam
aux fabri tignarii, ni les symphoniaci aux tibicines.
5 Cette autorisation ne constituait pas une exception k la lex Julia,
mais elle était donnée en vertu de la lex Julia, i\\ù avait prévu l'avenir
{elege Julia, VI 4416).
(118 )
III« siècle, nous voyons plusieurs collèges se dire autorisés
par un sénatusconsulte. Sous Auguste, les sympfioniaci disent :
quibus senatus coire cogi convocari permisit e lege Julia ex
audoritate Augusti K Plus tard, lee collèges disent simple-
ment : quibus senatus coire jjennisit; nous verrons tout à
l'heure pourquoi ils ne mentionnent plus la lex Julia. Cette
formule raccourcie est employée à Rome par les mensores
macfmiarii frumenti publia, en 198 '■^, par les dendrophores,
en 206 3, par le corpus piscatorum et urinatorum totius alvei
Tiberis, sous Élagabal, vers 220 4'.
On avait cru d'abord que dans ces inscriptions il pouvait
s'agir d'un seul et même sénatusconsulte général, dont on
aurait fait l'application à chaque coFlège nouveau qui se con-
stituait s. Mais celle des symphoniaci n'admet pas cette inter-
prétation, abandonnée aujourd'hui. Du reste, nous verrons
Gaius parler aussi d'une permission spéciale obtenue par plu-
sieurs collèges de la capitale 6.
Quelles étaient les formalités de cette autorisation? Le col-
lège adressait sa demande au Sénat i. Celui-ci devait prendre
l'avis du prince : quibus senatus coire cogi convocari permisit
* C'est à tort que Gierke (III, p. 83, n. 77) prend ici le mot coire dans
le sens de .se réunir, et non former un collège, s'associer.
2 VI 8o.
5 Orelli, 4075.
^ VI 1872. B. c, 1886, n. 1120.
s C'était d'abord l'opinion de Mommsen [De coll., pp. 80-81). Il a changé
d'avis. Voyez Zeitschrift /". g. R.-W., XV, pp. 3o4 sqq. — Pernice (p. 304),
CoHN (pp. 87-88) et AVallon(III, pp. 232 et 461) maintiennent la première
opinion de Mommsex.
6 DiG., III, 4, 1 : collegia Rotnae certa sunt, quorum corpus senatus
consultis atque constilutionibus principalihus confirmatam est, veluti
pistorum et quorundam aliorum, et naviculariorum. (Voyez l'Appen-
dice de ce chapitre).
' Il ne lui soumettait pas ses statuts, qu'il votait librement; il
avait une autonomie intérieure complète. Voyez infra, II» partie,
ch. II, § 1.
( 119 )
e lege Julia ex auctoritate Auijusti i. Il arrivait aussi qiK^ c'était
le prince qui faisait délibérer le Sénat sur la requête. Pline le
Jeune reproche aux mauvais empereurs, surtout à Domitien,
d'avoir consulté le Sénat sur de pareilles vétilles -; cela prouve
que si ces demandes ne donnaient généralement pas lieu à
discussion, il fallait cependant une décision pour chaque col-
lège.
Le Sénat examinait si les conditions requises étaient rem-
plies. 11 fallait naturellement tout d'abord que le collège eût
un caractère inoiiénsif. Cela ressort du motif pour lequel
Auguste avait pris cette mesure rigoureuse. Tout collège qui
cachait sous ce nom une association factieuse ou politique ne
pouvait espérer de voir sa demande accueillie. Il semble
ménie que plus tard le Sénat crut nécessaire de désigner
par un sénatusconsulte les corporations qui étaient dans ce
cas 3.
Mais il ne suffisait pas aux collèges d'être inotfensifs; ils
devaient, de plus, être utiles à l'intérêt public ^. Voici une
innovation très importante. En l'an 64, le Sénat avait déjà
remarqué que l'association favorisait l'exercice et la prospérité
de certains métiers utiles, et il avait épargné leurs collèges.
C'est une idée qui apparaît alors pour la première fois et qui
guidera désormais le législateur. Dorénavant l'État dit aux
particuliers : « Vous désirez vous associer pour travailler à
* Voyez Zeitschhft /. ij. R.W., l. l. Cohn. p. 83. Le mol confirmare
employé par Gaiis (Dic,.. III, 4. 1) et C. L L. III 7068 ([S. C. de p]ostu-
latione Kyz-icenor. ex Asia qui dieiint ut corpus, quod appellatur néon et
luibent in civitate sua, auctoritate [amplissitni o]rdinis confirmetur, h
Cyziquej prouve que le collège existait de fait avant d'élre autorisé.
2 Paneg., 54 : de ampliando numéro gladiatorum aut de instituendo
collegio fabrorum consulehamur .
'" Marcien parle d'un senatus consultum quo illicita collegia arcentur.
Cfr. Th. Mo.mmsen, Zcitschrift f. g. R.W., l. !., p. S.'ie, et infra, § 4.
* Permce, p. 304. CoHX. p. 76. Gierke, p. 82, n. 174. Hirschfeld.
6a//. StiuL, III, pp. 20-21 (2o6-2o7). Maué, Der Praef. fabr., p. 24.
Herzog, II, p. 987, n. 2.
( 120 )
vos intérêts privés; je le permets, si vous êtes en même temps
utiles à la chose publique, soit en corps, soit individuelle-
ment. Ceux qui ne rendent aucun service ne jouiront plus de
cette faveur. » On ne tolère plus ces associations privées dont
l'État ne s'était pas mêlé aussi longtemps qu'elles étaient res-
tées inoffensives. Toute corporation a besoin d'être autorisée,
et l'autorisation, une fois obtenue, lui donne le caractère d'une
institution d'utilité publique, d'un véritable organisme infé-
rieur de l'Etat, jouissant de certains privilèges, tels que la per-
sonnification civile. Désormais les collèges auront donc un
double caractère, public et privé.
Cette disposition de la lex Julia ressort du caractère nouveau
que prendront toutes les corporations autorisées. Elle ressort
aussi de la politique que les empereurs ne cesseront de suivre
à leur égard : ils n'autoriseront que les collèges nécessaires
aux approvisionnements de Rome, aux travaux publics, à l'ex-
tinction des incendies, ou présentant une autre utilité. Nous
avons, du reste, des preuves directes. Le collegium symphonia-
corum se dit autorisé par le Sénat ludorum causa • ; il devait
donc cette faveur au service qu'il rendait. L'autorité était per-
suadée que les joueurs de flûte seraient plus à même de rendre
le service qu'on attendait d'eux, s'ils étaient associés. Gaius
parle aussi des causae pour lesquelles les corporations auto-
risées de Rome avaient été permises 2.
Naturellement le Sénat et le prince pouvaient à leur gré
imposer d'autres conditions. Ces conditions servaient à faciliter
la surveillance ; on fixait, par exemple, le nombre des affiliés,
peut-être aussi celui des réunions; on défendait parfois de
• Sur ces litdi, voyez notre Index collegiorum, s. v. libicines et infra,
llf partie, ch. I, § 3.
- Le but est appelé causa ; voyez : VI 2193 : ludorum causa; DiG., III,
4, 1 : panais in cnusis (Gaius); 47, 22, 1,1; Plin., Ad. Traj., 34 : exqua-
cumque causa. Il s'agit bien entendu du but pour lequel l'autorisation est
accordée; les membres du collège avaient un autre but en s'associant,
im but privé.
[ m )
recevoir des gens étrangers au métier, qui pouvaient détourner
rassociation de son but i.
Telle fut la lex Julia. Elle est une preuve éclatante de la
sagesse politique d'Auguste. Ce prince aurait pu, à l'exemple
du Sénat, prendre une mesure radicale et essayer d'anéantir la
liberté d'association. Il préféra la restreindre et la contenir dans
de justes limites. Il savait qu'il se heurterait contre un besoin
impérieux de la nature humaine et contre une coutume enra-
cinée depuis des siècles, et qu'il s'exposerait à un échec cer-
tain. L'expérience prouvait qu'une loi trop sévère ne tardait pas
à être violée. Auguste comprit aussi l'utilité des collèges et il
entrevit peut-être les grands services qu'ils étaient appelés à
rendre.
Les historiens rapportent quelques mesures passagères prises
par ses successeurs. Tibère défendit les cultes étrangers, même
celui des Juifs -; Caligula, au contraire, laissa rétablir tous les
collèges, tandis que Claude les interdit 3 et tenta même de
réformer les mœurs du bas peuple, en supprimant les cabarets
où il se réunissait pour boire et en défendant de vendre en
public de la viande cuite et de l'eau chaude ^. Claude défendit
aussi aux Juifs de tenir des réunions et Néron poursuivit leur
culte avec rigueur •-•. Après ce prince, les mesures d'exception
' C. I. L. II 1167. Plix., Ep. 33, éd. Keil. Cette défense n'était i»as
générale; voyez infra, 11^ partie, chap, U, § i.
2 SuET., m., 36. Clr. Tac. Ann., II, So. Joseph. Ant. Jwi., 13. 3, o.
18. 4. Cass. Dio, 60. 6, 6 (infra). Voyez Fait Allard. I, pp. 3 et suiv.
MoitMSEN, De coll., p. 79. 3L\uÉ. Praef. fabr., pp. -27-:iî8.
^ Cass. Dio. 60, 6, 6 : Toi; -t lo-joa-ou? — or/. içT-Àa-s aiv, -(b oè of,
ra-p'tp \6'j.(jj ^iiv yptotjLs'vo-j; £X£Àî-j7£ af, s-j'^aOcoi^s-Oa*.. Tir -.t i-.OL'.zv.x^
srravayôî'ja; ô-ô toj Fato-j ois'X'jOc.
* Cass. Dio, ib. : -i -z 'Ki-zr,l='iz tU 5 tj^'-ov-te; irr-vov xi-ÉÀjte. Il ne
s'agit pas des réunions des collèges, comme on l'a cm. Cfr. Suet.,
Clawi., 38. Tibère avait déjà fait une défense de ce genre Suet..
Tib., 34; et Néron la renouvela Suet.. yero, 16).
3 Suet.. Claud., -2o. Cass. Dio, 60, 6. 6. Joseph.. Antiq., 19, o, 3.
Euseb., h. E., II. 18. Gros., Hist., 7, 6. La persécution des chrétiens par
Néron n'a rien de commun avec le droit d'association.
( 122 )
semblent cesser, sauf à l'égard des chrétiens et l'on se con-
forma, semble-t-il, à l'esprit de la législation inaugurée par
Auguste 1.
Mais la lex Julia ne put longtemps suffire. Il fallait la con-
firmer et la compléter : il y eut bientôt une série de sénatus-
consultes, de mandats et de constitutions, qui firent oublier la
loi d'Auguste. Aussi les jurisconsultes du 11^ et du III® siècle
ne parlent pas une seule fois de cette loi, dont ils maintiennent
les principes. Voici d'abord Gaius : Neque societas neque colle-
gium neque hiijusmodi corpus passim omnibus habere conceditur :
nam et legibus et senatusconsultis et principalibus constitutio-
nibus ea res coercetur '^. Marcien dit à son tour : In summaautem,
nisi ex senatusconsulti auctoritate vel Caesaris collegium vel quod-
cumque taie corpus coierit, contra senatusconsultum et mandata
et constitutiones collegium célébrât 3. Nous ne sommes pas
renseignés sur la teneur exacte de toutes ces mesures nouvelles ;
il y en a qui concernent la surveillance des collèges, les peines
à infliger, la sanction de la législation ; nous en parlerons plus
loin.
* Le culte d'Isis, proscrit sous Auguste par Agrippa, en l'an 21 (Cass.
Dio, 54, 6), pénétra sous Caligula dans la religion d'État et figura au
calendrier (C. /. L. I, p. 406). Il est probable que les collèges d'Isis
furent de nouveau autorisés. Voyez Marquardt, St.-V., IIP, pp. 77 et
suiv. = Le culte, I, pp. 96-97.
2 DiG., III, 4, 1. (Voyez l'Appendice de ce chapitre).
3 DiG., 47, 22, 3, 1. (Voyez Appendice). Cohn (p. 82, n. 4 et p. 85)
conjecture : Senatus consulta. Cfr. Mommsen, De coll., p. 80. Tertullien
{Dejejunio aclv. psychicos, 15, 4, éd. Reifferscheid) dit aussi : nisi forte
in senatus consulta et in principum mandata coitionibus opposita delin-
quimus. DiG. , 50, 6, 12 : Quibusdam collegiis, vel corporibus, quibus
jus coeundi lege permissum est.
( 123 )
§ 2. Application de la lex Julia à l'Italie et aux provinces.
Sous la république, il est probable que les municipes étaient
libres de réglementer leurs collèges i. Toutes les mesures
connues jusqu'à la lex Julia inclusivement ne concernent que
Rome 2. Si dans le principe la loi d'Auguste ne fut pas appli-
cable à l'Italie, il est certain du moins qu'elle reçut de bonne
heure cette extension. C'est ce que prouve un passage de
Tacite 3. Pendant les jeux de gladiateurs donnés dans l'amphi-
théâtre de Pompéi en Tan o9, une dispute s'était élevée entre les
habitants de cette ville et ceux de Nucérie, et s'était terminée
par un horrible massacre. Il est probable que certains collèges
y avaient joué un rôle; car, dit Tacite, le Sénat, chargé par
Tibère d'une enquête, défendit pour dix ans à la ville de
Pompéi ces sortes de réunions ou de fêtes, et supprima les
collèges qui s'y étaient formés contrairement aux lois: collegia,
quae contra leges instituerant, dissoluta. Il ne peut s'agir ici
que de la lex Julia ; quant à ces collèges, ils étaient surtout
composés de ces artisans que nous verrons mêlés aux élections,
à Pompéi même, quelques années plus tard.
Dès Trajan, les provinces sont également soumises aux lois
de Rome. On sait qu'en l'an 111 ce prince envoya Pline le
Jeune dans la Bithynie pour réformer cette province jusque-là
sénatoriale et mal administrée par des proconsuls. Dès son
arrivée, le nouveau gouverneur avait défendu les collèges
par un édit publié d'après les instructions reçues de l'Empe-
« Voyez CiCERO, De petit, cons., VIII, 32, et supra, p. 89.
2 Oic, In Pison., IV, 9 ; ex urhis faece constituta. Joseph., Antiq. Jud.,
14, 10, 8 : xa-zà TzdXtv. SuET., Aug., 32. Gaius dira encore : Item collegia
Romae certa sunt (DiG., III, 4, 1). Cfr. Mommsen, De coll., p. 78. Pernice,
I, p. 299. COHN, pp. 82-83. Contra : Lumbroso, Ricerche, p. 262. Nous
allons voir que le sénatusconsulte qui permit en bloc les collèges funé-
raires, fut d'abord restreint à Rome.
5 Ann., 14, 17.
( 124)
reur 1. Or, à roccasion d'un incendie qui avait causé de grands
ravages à Mcomédie, l'on constata le manque absolu des instru-
ments nécessaires; le peuple avait assisté à ce spectacle les
bras croisés. Pline proposa à Trajan d'établir un colleginm
fabnnn de loO membres pour faire l'otiice d'un corps de
pompiers. Il promit « de prendre soin qu'on n'y reçût que
des artisans et qu'on ne fît servir à autre chose le privilège
accordé; leur petit nombre rendrait d'ailleurs la surveillance
facile. )) On avait tellement peur des collèges que toutes ces
précautions et cet important intérêt public ne suffirent pas pour
obtenir la permission. Trajan refusa, quoique ces sortes de
collèges existassent dans plusieurs villes, en Italie sans doute
iseeimduîn exempla compluriiim). « Souvenons-nous, dit-il, que
cette province et ces villes surtout ont été troublées par des
associations de cette espèce : quodcumque nomen ex quacunque
causa dedehmus Us qui in idem contracti fuennî, hetaeriae aeque
hrevi fient -. Ces deux lettres sont importantes. Elles prouvent
que les provinces étaient soumises au même régime que
Rome; pour obtenir l'autorisation, Pline fait valoir précisé-
ment les deux raisons qui étaient exigées dans la capitale : ce
collège sera utile à la ville et sans danger.
Les inscriptions nous fournissent une preuve plus directe :
elles nous font connaître, en Italie et dans les provinces, un
certain nombre de collèges qui se disent autorisés, soit
par le Sénat, soit par l'empereur. Mommsen soutient qu'en
Italie et dans les provinces sénatoriales, il fallait s'adresser au
Sénat, tandis que dans les provinces impériales l'empereur
* Pli>'., Ad Traj., 97 : quod ipsum facere desis.se post edictum meum,
quo secundum mandata tua hetaerias esse vetuei^am. Sur la mission de
Pline, voyez : Mommse.n, Hermès, III. 1868, article traduit par Morel,
Étude sur Pline le Jeune, Paris. 1873. E. Bormann, Arch. epigr. Mitth.,
1892, pp. 37-43.
2 Pld.'., Ad. Traj., 34. (Voyez .\ppendice.) Texte de Hardy. Quel que
soit le texte adopté, sTaipîat est pris ici dans le sens péjoratif de collèges
dangereux.
( 12o )
aurait décidé ^. Cette règle est naturelle; eu etî'et, en Italie et
dans les provinces, le Sénat avait la haute surveillance des
affaires municipales, et nous verrons que tout collège apparte-
nait à son municipe et n'était autorisé que dans les limites du
territoire municipal. Mais les faits ne s'accordent pas avec
<'ette opinion.
En Italie, il y a bien six collèges qui portent la mention :
(juibus ex S. C. coire licet. Ce sont :
Collegium scabillariorum, à Puteoli, en i. 39-140 (X 1642-
1643) et en 161 X 1647).
Corpus fabrum navalium Ostiensiwn, àOstie, en 19o (XIV 168.
169. 256).
Collegium fabrum, à Casinum (X ol98).
Dendropfwri, à Cumes, en 2ol (X 3699. 3700).
Colleijium fabrum tignariorum, à Telesia, sous Caracalla ou
Élagabal (IX 2213).
Corpus pelliionum), à Ostie (XIV 10).
Mais à Brixia, nous trouvons des sévirs Augustaux, appelés
soci quibus ex permissu divi PU arcam habere permissum est
(V 4428). iMommsen croit qu'il ne s'agit pas de la constitution
d'un collège proprement dit - : chose difficile à admettre, parce
que les Augustales formaient souvent de véritables corpora-
tions {corpora, collegia], organisées comme celles des artisans 3,
et que le privilège accordé par Antonin le Pieux est précisé-
ment l'un de ceux qu'entraîne l'autorisation ^.
Dans les provinces sénatoriales, même anomalie. Sous
Antonin le Pieux, nous voyons bien les habitants de Cyzique
demander que le collegium juvemim, qui existait dans leur
« St.-R., IP, pp. 850-851. ir\ p. 886 et notes. III, p. 123o. Cfr. Kayser,
p. ilL CoHN, p. 83.
■' St.-R., II, p. 851, n. 2.
5 Voyez supra, p. 39.
* DiG., III, 4, 1. Cfr. supra, p. 83. —A Lyon, les inscriptions disent
seulement : omnia corpora Lugfudimi) licite coeuntia (Allmer, M. de L.,
II, p. UL De Boissieu, p. 206).
( 126 )
ville, soit confirmé par le Sénat : ut corpus, quod appellatur
néon (scil. vswv) et habent in civitate sua, auctoritate [amplissimi
o]rdinis confirmetur, et le sénatusconsulte qui autorise ce
collège a été conservé ^. L'intervention de l'empereur et de son
gouverneur en Bithynie s'explique aussi facilement, car cette
province sénatoriale était alors administrée par un légat pro-
préteur et elle devint impériale en l'an 135 '2. Mais il n'en est
pas de même d'une inscription de Séville. La Bétique était une
province sénatoriale 3, et cependant Antonin le Pieux y auto-
rise un collegium centonariorum, sans qu'il soit question d'un
sénatusconsulte ^.
Enfin, la même difficulté se présente dans les provinces
impériales. D'après les lettres de Pline, on pourrait croire que
l'empereur y décidait tous les cas directement; mais l'exemple
de Pline, qui demande toujours conseil, n'est pas concluant,
car Pline avait l'habitude de consulter l'empereur même sur les
choses les plus futiles, et puis il fallait déroger à un édit qu'il
avait publié d'après les instructions du prince. On peut
admettre que l'empereur déléguait ses pouvoirs aux gouver-
neurs. Quoi qu'il en soit, à Cimiez [Cemenelum), capitale d'une
province impériale s, les Alpes Maritimes, ce n'est ni l'empe-
reur, ni le gouverneur, mais le Sénat qui autorise les collegia
fahrum centonariorum dendrophororum 6.
Comment expliquer cette confusion? Nous pensons que ce
sont des exceptions apparentes, et que les inscriptions sont
mal rédigées; on a laissé de côté la mention soit du Sénat, soit
^ Ephem., III 165 = C. I. L. III 7060 et le commentaire de Mommsen.
2 Mommsen, St.-R., II, p. 850, n. L Marquardt, St.-V., I, p. 489
= Org. de l'Empire, II, pp. 267-271. Schoenemann, De Bithynia et
Ponio provincia romana, Gôttingen, lê55.
3 Marquardt, op. c.
* CL L. II 1167.
s Marquardt, SL-V., I, pp. 280 et 489. Cohn, p. 83, n. 3, se trompe.
6 V 7881 : tria collegia quibus ex S. C. c(oire) p(ermissuin) est. Cfr. ib.,
p. 1187, note.
( 127 )
de l'empereur, alors que ces autorités avaient dû légalement
intervenir pour accorder l'autorisation '.
En tous cas, c'était, comme dit Marcien, ou le Sénat, ou
l'empereur qui décidait ; dans les provinces et en Italie, comme
à Rome, tout collège devait avoir reçu l'autorisation de l'un de
ces deux pouvoirs : in summa autem, )iisi ex senatusconsulti
auctoritate vel Caesaris collcgium vel quodcumque talc corpus coi-
erit, contra senatusconsultum et mandata et constitiiîioues colle-
gium célébrât -.
La surveillance des collèges appartenait au gouverneur dans
les provinces 3 et au Sénat en Italie. Ce contrôle ne concer-
nait du reste pas l'organisation intérieure des corporations; on
' L'empereur consultait le Sénat Plln.. Pancg., 54. Tac. Aiin., XIV,
17), comme quand il s'agissait de Rome. Même quand il s'agissait de
l'Italie ou d'une province sénatoriale, il pouvait prendre l'initiative, et il
est naturel que sur une statue élevée par les centonaires de Séville à
Antonin le Pieux, ils ne parlent que du prince, qui était peut-être
intervenu en leur faveur au Sénat, Du reste, les termes sont vagues :
e.r indulgentia ejus.
- DiG., 47, 2-2, 3 py. Marcien semble distinguer d'un côté l'Italie elles
provinces sénatoriales, de l'autre les provinces impériales : e.v Senatus-
consulti auctoritate vel Caesaris. Rappelons que Gaiis cite parmi les
coDèges autorisés les naviculaires. qui, dit-il, existaient aussi dans les
provinces, sans aucun doute en vertu d'une autorisation spéciale (Gaius,
DiG., III, 4, 1, 1). Cfr. DiG., oO, 6, 6, l'^ : coUegils, quibus jus coeundi lege
pcnuissum est.
3 Plin., Ep. ad Traj., 33. 34. 93. 97. Bull. crr. helL, 1883. p. 504 :
édit d'un gouverneur à propos d'une grève de boulangers à Magnésie.
DiG., 47, 22. 1 : mandatis principalibus praecipitur praesidibus provin-
ciarum. Sous Tibère, le préfet d'Egypte, Avillius Flaccus, supprime les
hétéries établies sous des prétextes religieux et il continue à les défendre
sous Caligula. Philo, In Flaccum, p. 965 d, éd. Ti"r>'eb., en 1(340 et
1691 : ~i^ ~t iTaipsîa; xa'i tjvoooj;, al àst ï—\ —poz>i7i'. 6j7'.tov s'.tt'.wv-o,
ToT; Trpâyi^^^''' iuTrapo'.voûja'., O'.ihji, -ol; à'^T,v.â!IojT'.v È|jLopi6co; xa:
ÈvTOvco^ — poa'Yîpoasvo;. Ibid , p. 984 : ^'.OLio: xaTà -r// -oÀ'.v £•-•.
— oXuâvOptoTTO'., wv xa-apyî'. tt,- xo'.vcov'a; O'jOsv jy-à^, ÔlII' àxparo; xa'i
ule'Ôt, xal Trapoivîa'., xa: r, toJtiov ix^ovô^ 'Jopiz' s-jvooo*. xa\ xÀiva-.
( 128 )
les laissait libres, pourvu qu'elles ne troublassent pas la paix
publique.
La situation précédemment décrite ne s'appliquait pas à
certaines villes ; je veux parler des villes libres qui avaient
conservé leurs lois. Elles organisaient leurs collèges à leur gré.
Il reste deux lettres intéressantes dans le recueil de Pline. Les
Amiséniens avaient demandé la faculté de conserver leurs erani,
contrairement à Tédit du gouverneur. L'empereur répond :
« Si leurs lois permettent aux Amiséniens d'établir des éranes,
nous ne pouvons pas les empêcher d'en établir : eo facili'is, si
tali conlalioue non ad turbas et ad inlicitos coetiis sed ad sustinen-
dam tenuiorum inopiam utuntur. » Et il ajoute : « Dans les cités
soumises à nos lois, cette faculté ne peut être accordée <. »
§ 3. Hifiueur île cette législation au h' et au 11^ siècle.
Cette législation sévère resta en vigueur jusqu'à la fin de
l'Empire, car elle fut reçue dans le Digeste, comme le témoi-
gnent les passages précités de Gains et de Marcien. Ajoutons
que dans les premiers siècles, le gouvernement dispensa d'une
main avare l'autorisation nécessaire, sans faire aucune dis-
tinction entre les collèges.
Voyons d'abord les collèges d'artisans. On les défendait sou-
vent, même s'ils étaient directement utiles. Une considération
l'emportait sur toutes les autres : c'était la sécurité de l'État.
Les princes les plus libéraux dans leur gouvernement étaient
défiants en cette matière. La correspondance de Pline le
prouve suffisamment pour l'Asie et l'on peut croire que Tra-
jan ne suivait pas une autre politique dans le reste de l'Empire,
une fois que l'ordre était menacé. 11 ressort cependant de Pline
et de Tacite que les désordres étaient locaux et ne mettaient
pas l'Empire en danger; de plus, c'est en Orient surtout qu'il
* Ep. ad Traj., 92-93. Cfr. Liebenam, p. 38.
( 129 )
en est question. Cependant à Rome même on ne se montrait
pas plus large. Gains, qui était contemporain d'Antonin le
Pieux et qui écrivait dans Ja seconde moitié du IP siècle,
dit expressément : Paucis admodum in caiisis concessa sunt
hujusmodi corpora... Collegia Romae certa sunt quorum corpus
senatus consultïs atque constitutionibus priucipalibus confirma-
tum est. Et il cite comme exemple les boulangers et les arma-
teurs; ces derniers, dit-il, existent aussi dans les provinces '.
On a conclu plus d'une fois de ce texte qu'à l'époque de Gains
le nombre des collèges autorisés était fort restreint. Or, les
inscriptions prouvent qu'au commencement du IIP siècle
les corporations professionnelles étaient , au contraire , très
nombreuses, tant à Rome que dans tout l'Empire. Il en résul-
terait quïl y avait une foule de collèges non autorisés. Quel-
ques-uns, pour résoudre la difficulté, ont supposé que Gains
donnait une liste plus longue de collèges autorisés et que les
compilateurs du Digeste n'ont conservé que les deux collèges
les plus importants de leur temps ^. Cette hypothèse est inu-
tile : Gains ne dit nullement qu'il n'y avait que peu de collèges
permis, mais qu'il n'y avait que peu de motifs causae) pour
lesquels on les autorisait. Or, plusieurs collèges pouvaient être
autorisés pour le même motif. A Rome et à Ostie, et même
dans les provinces, il y avait, outre les boulangers et les navi-
culaires, une grande quantité de collèges nécessaires aux
approvisionnements de la capitale et pourvus, pour cette rai-
son, de l'autorisation et de privilèges. De même, chaque ville
pouvait avoir ses trois collèges de fahri, de centonaires et de
dendrophores, pour le service des incendies 3. Ceux de Ceme-
nelum s'appellent formellement : tria collegia quihus ex Sena^
tus consulta coire permissum est ^, et il en était de même de ces
* DiG., m, -4, i, pr. Voyez l'Appendice, infra, p. loo.
* CoHN, p. 160, Maué, Der Praef. fabr., p. 40, et Liebenaji, p. 4o.
3 Une autre causa, c'était le culte des morts et les funérailles, comme
nous verrons plus loin.
* V7881.
Tome L. 9
( 130 )
trois collèges dans les autres villes; l'oniission de la mention :
quitus ex SC. coire licet ne prouve rien ; elle n'était pas impo-
sée 'i. A Sentinum, ils s'appellent tria collegia principalia -.
A Apulum, en Dacie, le collegium fabrum, fondé sousSeptime
Sévère, associe, dans un vœu, ce prince au salut du collège et
il a pour premier patron un décurion de la ville «^ : est-il
admissible qu'il n'était pas autorisé, quoiqu'il ne le dise pas
une seule fois dans ses nombreuses inscriptions? Un très
grand nombre de collèges reçoivent des legs, et ce droit
n'appartenait qu'aux collèges autorisés ^. Les preuves de ce
genre abondent.
Ainsi l'on comprend que malgré le petit nombre de motifs
qui procuraient l'autorisation ipaucis in causis), il pouvait
exister beaucoup de collèges autorisés.
Nous croyons que la loi ne se montra pas plus facile pour
les collèges religieux. Nous ne parlons pas ici des collèges
sacerdotaux ni des sodalités sacrées, qui devaient leur existence
à l'État. Tous les collèges religieux formés par des particuliers
avaient besoin d'une permission spéciale. C'est par hasard que
la formule : quibus ex SC. coire licet n'est employée par aucun
• C'est l'avis tie Cohn, p. 87, n. 21, et de Liebenam, p. 230. Voyez
contra : Mommsen, St.-R., I-, p 326, n. C = Trad., I, p. 386, n. 6.
PeRxMCE, p. 302, n. 16.
^ XI 5749 = Wii.M. 28o8 : patromim trium coll(egioriun) priiicipa-
lium.
5 III 1043. lOol. Cfr. Mommsen, C. /. L. III, p. 183.
* DiG., 34, 5,20 (Paulus) : cum senatvs temporibiis divi Marcipermi-
serit collegiis legare, nulla dubitatio est, quod, si corpori oui licet coire
legatum sit, debeatur : eut autem non licet si legetur, non valebit, nisi
singulis legetur : lii enim non quasi collegium, sed quasi certi homines
admittentur ad legatum. Voyez infra, 111^ partie, eh. V. — L'autorisation
entraînait la personnification civile, comme nous verrons, mais Liebenam
va trop loin en disant : Nicht die Begrïtndicng der Genossenschaft war
von staatlicher Genehmigung abhângig, wohl aber ihre Rechtsfiihigkeit.
L'autorisation donnait le droit à l'existence ; bien plus, elle faisait des
collèges de véritables corps publics ayant certains droits privés.
( 131 )
d'eux ^. Nous avons vu accorder cette autorisation aux juifs
établis dans la capitale, sous César et sous Auguste 2, aux
socii Auguslales de Brixia, et au corpus vswv de Cyzique par
Antonin le Pieux. C'est à tort qu'on a voulu inférer d'une
pljrase de Marcien que l'on pouvait toujours s'associer pour
la religion; ce jurisconsulte ne parle que des assemblées tenues
par des collèges autorisés, les collèges funéraires, pour les
cérémonies de leur culte privé 3.
On fut plus sévère envers les soldats en activité de service;
Marcien rapporte que les mandais impériaux prescrivaient aux
gouverneurs de ne pas tolérer les collèges de soldats dans les
camps : neve jnilites collegia in caslris habeant ^. C'est une
défense absolue : les collèges militaires pouvaient nuire à la
discipline. Mais cette défense ne s'appliquait qu'aux simples
soldats, non aux sous-oftlciers. Sous le règne de Septime
Sévère, la 111^ légion Augustn stationnait à Lambèse, et dans
' Voyez MoMMSEN, Zc/7.s(-/ir/// /: g. R.-W., XV, p. 319. Maué, Praef.
fahr., p. 23, n. dO. Contra : Cohn, p. 87, n. 21. Les collèges que ce
dernier cite (dendrophori, tibicines, scabillarii) sont professionnels en
même temps que religieux. Les juvenes ont un caractère religieux, mais
leur but principal n'est pas le culte d'une divinité. Quant aux Augustales,
il faut bien distinguer cet ordre social des collèges qu'ils formaient sou-
vent. Voyez supra, pp. 88-39.
•^ Sur les autres cultes étrangers, voyez Maué, ï)er Praef. fahr.,
p]). 27-28.
•' DiG., 47, 22, 1, § 1. Voyez infra, p. 152.
•* DiG., 47, 22, 1. On avait cru que cette défense s'appliquait aux ofti
ciers comme aux soldats et l'on avait eu de la peine à s'expliquer
l'existence des collèges militaires de Lambèse. On les mettait sur le
compte de la tolérance de Septime Sévère, ou bien l'on disait qu'ils
étaient autorisés comme collèges funéraires, — ce qui serait encore
contraire à cette loi, — et qu'ils excédaient leur droit en s'occupant
d'autre chose que des funérailles. Tout s'explique si l'on admet que
milites ne désigne que les simples soldats, qui n'avaient pas besoin de
collèges, parce que l'État avait institué pour eux deux caisses. Voyez
infra, 11^ partie, ch. I, § 5. Cfr. Gaston Boissier, II, pp. 297 sq. Revue
arch., 1872, pp. 92-93.
( 132 )
le camp même, dont les ruines subsistent, il y avait divers
collèges de sous-otliciers d'un caractère tout particulier, qui
étaient certainement autorisés. On en rencontre aussi dans le
reste de l'Empire i.
Quant aux collegia vcteranorum, assez nombreux dans toutes
les provinces et en Italie -, il faut admettre qu'ils étaient tous
pourvus d'une autorisation spéciale. En effet, le Digeste repro-
duit un passage d'Ulpien, d'après lequel il leur était défendu,
comme aux autres, de se réunir sous un prétexte religieux :
Sub praetextu reîigionis vel sub specie solvendi voti coetus illicitos
nec a veteranis temptari oportet 3.
En résumé, tout collège, quel que fût son caractère, avait
besoin d'une autorisation spéciale. Il faut pourtant excepter les
collèges funéraires que nous étudierons plus loin.
§ 4. Contrôle de l'État sur les collèges. Collèges illicites ^.
11 en résultait que tout collège non autorisé était contraire
aux lois et illicite {collegium illicitum) : son existence même
était un délit 3. Mais en tait, les collèges non autorisés pou-
vaient être tolérés et ils l'étaient souvent; aussi cette expres-
sion de collegium illicitum est généralement employée pour
Voyez infra, l. c, et notre Inde.v collegiorum.
- Voyez notre Inde,v collegiorum.
5 DiG., 47, H, 2. Les mots nec a veteranis indiquent peut-être qu'il
était question des soldats dans ce qui précédait ce fragment (Wagener,
Bull, de rAcad. deBelg., 1893, II, p. 3-20j.
^ MoMMSEN, De coll., pp. 127-128. Savigxy, II, p. 2o7. Peilmce,
pp. 30-2-303. Kayser, pp. 195-199. Cohn, pp. 86. 89-96. U7-lo4. Loexlng,
I, p. 203, n. 3. HuMBERT, Dict. de Daremberg, I, pp. 1295-1296. Liebexam,
pp. 234 sqq. P. Allard, III, pp. 52-53.
° Tac, Ann., 14, 17 : collegia, quae contra leges instituerant. DiG., 47,
22, 3 : contra Senatus consultum et mandata et constitutiones collegium
célébrât.
( 133 )
exprimer quelque chose de plus que le manque d'autorisa-
tion; pour indiquer cette seule idée, l'on dit : collegium cui
non liceî coire^. Le collège non autorisé n'est qualifié d'illi-
cite que si l'on veut faire ressortir qu'il existe en violation de
la loi, qu'il est illégal. Il y a plus; généralement cette expres-
sion implique autre chose encore : elle est appliquée aux col-
lèges, autorisés ou non, qui avaient pris un caractère dange-
reux ^^. Deux auteurs nous parlent clairement de collèges
autorisés qui se transforment en collèges illicites. Quand Pline
propose de fonder à Mcomédie un collège de [abri pour l'ex-
tinction des incendies, il dit à Trajan : « Je veillerai à ce qu'on
n'abuse pas pour d'autres motifs de la faveur accordée », et
Trajan refuse parce que, quels que soient le nom et le but
assignés à ces collèges, ils dégénèrent bientôt en hétéries, c'est-
à-dire en associations factieuses, dont la Bithynie avait eu déjà
à souffrir ^. Marcien est encore plus explicite. Les collèges de
temdores sont permis, dit-il, à condition qu'ils ne tiennent
qu'une assemblée par mois, et cette restriction a pour but d'em-
pêcher qu'ils ne se transforment en collegia illicita ^. Voilà
donc des collèges autorisés qui deviennent illicites. Tertullien
semble dire la même chose des chrétiens de Carthage et d'ail-
leurs. La communauté chrétienne était alors légale, comme
^ Le contraire est : au licet coire. Au Digeste, -47, :li, 1. d, collegium
lidtum est synonyme de cui licet coire. L'opposition est bien marquée
au DiG., 34, 5. 20 : corpori cui licet coire — cui autem ivm licet. Voyez
supra, p. 130, n. 4.
^ C'est ce qu'on n'avait pas vu avant la dissertation de Cohx; cepen-
dant CoHN est trop absolu quand il soutient que le caractère illicite ne
résida jamais dans le manque d'autorisation, mais seulement dans le
caractère dangereux (p. 91). Loexixg i/. c.) a bien réfuté cette opinion.
5 Plix., Ep. ad Traj., 33 et 34. Remarquez les mots : neve jure con-
cesso in aliud utantur ; et dans la réponse de Trajan : quodcumque nomen
ex quacumque causa dederimus iis qui in idem contracti fuerint, hetae-
riae aeque brevi fient {Epist. ad Traj., éd. Hardy, Londres, 1889).
-* DiG., 47, 22, 1 : dum tamen semel in mense coeant, ne suh praeiextu
hujusmodi illicitum collegium coeat. Voyez la note de Mommsex, ibid.
(134)
nous veiTons, parce qu'elle avait pris la forme d'un collège
funéraire, et cependant on l'accusait d'être une faction illicite,
dangereuse pour la religion nationale et pour l'Etat, quoique,
dit l'apologiste, elle ne fît rien de ce que font les factions
illicites i.
Des corporations de toute nature, autorisées ou non, deve-
naient des foyers d'agitations politiques et de séditions -;
d'autres excitaient des conflits parfois sanglants pendant les
fêtes et les réjouissances publiques, comme à Porapéi; d'autres
enfin scandalisaient même les Romains par une débauche
éhontée 3. Autorisés ou non, ces collèges étaient un ilanger
pour l'ordre public et par là illicites. Dans l'Orient, on Its
appelait hétéries, sraicia!. ^. 3Iarcien qualifie ces collèges tur-
bulents du nom de coUegia sodalicia: c'était peut-être un souve-
nir des sodalicia de la fin de la république 5. Les mots fadio et
' TFRTriiTFN, dans son Apologétique, ne dit pas expressément que ta
communauté chrétienne était légale comme collège funéraire ; mais de
son temps, c'était généralement le cas. Voyez infra. Il prouve seulement
qu'elle n'agissait pas comme les factions illicites ou défendues comme
dangereuses. Apjlog., 38 : proinde — inter licita.^ factiones (inofifensives
et permises» sectam istam deputarioportebat, a qiia nihil taie committitur
quale de illicitis factionibus timeri solet (éd. Bdsdley, Oxford, 1889).
Ibid., 39 : Haec coitio christianorum merito sane illicita, si illicitis par,
mérita damnanda, si quis de ea queritur eo titulo, quo de factionibus
querela est.
* SuET.. Aug., ii : nullius non facinoris causa. Plis., Ep. ad Jraj.,
33. ai ifabri). 93 (eranij. 96 (chrétiens). Cassits Dio, 5-2, 36 (coll. reli-
gieux). Pour les collèges d'artisans, voyez IJe partie, ch. I, § 1.
5 Infra, H^ partie, ch. I, § 3.
* Pli>-., Ep. ad Traj., 34. 96. Philo, In Elacc, p. 96o, éd. 1640
Tiî -£ rra'.pîia^ xal t-jvooou^. CasS. Dio, l. c, ju'., Apc>l.,
38 et 39. De jejiin., c. 13 : principum mandata œitionibus opposiîa
(éd. RziFFERSCHEiD et WissowA, 1890). Cfr. supra, p. 49. n. 3.
' DiG.. 47, ^2d, i. Plln., Ep. ad Traj., 34. 96.
= DiG., 47. 5-2, 1, i Cfr. Cohn, p. 90. Katser, pp Î89-191. Ce sénatus-
consulte était prohibitif, comme les mandats impériaux dont Marcien
parle au commencement du même paragraphe. Il devait interdire les
collèges dangereiLx, même autorisés, puisque Marcien dit que les col-
lèges funéraires, permis en bloc, pouvaient tomber sous le coup de ce
sénatusconsulte, s'ils excédaient leurs droits. D'autre part, ce décret
rappelait sans doute aussi, comme divers mandats et constitutions, que
tout collège avait besoin d'une autorisation, et il se peut qu'il s'agisse du
même sénatusconsulte dans la lex 5. où il est question de collèges non
autorisés. Mommsen 9, 1 et -2 : His antea in perpetuum aqua et igni
interdicehatur ; nunc vero humiliores bestiis objieiuntur vel vivi exu-
runtur, honestiores capite puniuntur . . . Et ideo cum de eo quaeritur,
nu lia dignitas a tormentis e.vcipitur.
* De coll., p. 127.
^ CoHN (pp. 151 -lo3) admet qu'il s'agit de tous les membres des col-
lèges dangereux.
( 138 )
A Rome, Septime Sévère, qui régla définitivement la compé-
tence du Praefectus Urbi, soumit les fauteurs de collèges illi-
cites à la juridiction de ce fonctionnaire investi du jus glaclii;
tout citoyen pouvait les accuser i. Dans les provinces, le
gouverneur était juge, comme Pline et Philon l'attestent for-
mellement.
Quant aux simples membres, il est probable qu'ils pouvaient
aussi encourir un châtiment '^. Le plus souvent on les laissait
impunis. Nous ne connaissons, du reste, aucune mesure répres-
sive suivie de la punition soit des chefs, soit des associés ^.
Callistrate rapporte cependant une loi intéressante. Les collèges
dejuvenes, qui donnaient des jeux et des représentations scé-
niques, excitaient des acclamations désordonnées, et les gou-
verneurs avaient dû les admonester. A l'avenir, les jeunes
gens qui n'avaient pas encore reçu d'avertissement et qui
* DiG., I, 12, 1, 14 (Llpianus libro singulari de officio praefecti Urbi) :
Divus Severiis rescripsit eos etiam, qui illicitum collegium caisse dicuntur,
apud praefectiun urbi accusandos. Au lieu de caisse, il y a des variantes :
cogisse, coegisse. Cfr. Mommsen, De coll., p. 127. St.-R., IP, p. 1018, n. 3.
COHN, p. 1-47. IvAYSER, p. 198. Lss Basiliques disent : -ap'a-jTôJ xax-nyo-
po'Jv-3ci xal 01 à6£[jL'.Ta ttoioîjvte^ a"jaxTQ;j.a':a. Pour Constantinople, voyez
CoD. JusT., I, «28, 4 (CoD Theod., I, 10, 4. Basil., VI, 4, 13), en 391 :
Omnia carporatorum gênera^ quae in Canstantinapalitana civitate ver-
santur, iiniversos quaque cives atque popidares praefecturae urbanae régi
maderam ine recagnascas .
2 MoMMSEN {De coll., p. 127) et Cohn (p. 150) admettent que leur délit
était rangé parmi les crimina extraordinaria, parce que le Digeste en
parle en traitant de ces crimes (47, 11, 2 et 47, 22). Cela ne signifie du
reste pas qu'ils étaient jugés extra ordinem, le préfet de la ville et le
gouverneur étant devenus des instances ordinaires, mais bien que ces
crimes étaient punis d'après les nouvelles lois pénales, établies sous
l'Empire. Voyez Rudorff, R. R.-G , II, 346-347. 403404. J. E. Kuntze,
Jus extraordinarium der rômischen Kaiserzeit, Leipzig, Hinrichs, 1886.
3 A Pompéi, les instigateurs des désordres sont seuls punis. Tac,
Ann., 14, 17 : Livineius et qui alii seditianem conciverant exilia multati
sunt. On se contente de dissoudre les collèges, qui n'étaient pas
autorisés.
( 139)
n'avaient pas commis de délit plus grave, devaient être frappés
de verges, et les spectacles pouvaient leur être interdits ; en cas
de récidive, ils encouraient l'exil ou la mort. Callistrate ne fait
aucune distinction entre eux K
Telles étaient les lois contre les collèges illicites. On ne man-
quait pas de les appliquer aux collèges séditieux, qu'ils fussent
autorisés ou non. Mais quand un collège non autorisé se con-
tentait de vivre tranquillement, il passait d'ordinaire inaperçu,
ou du moins l'autorité fermait les yeux. Elle réservait pour le
cas de besoin ces lois rigoureuses qui ne furent jamais abo-
lies. Les chrétiens seuls ne profitèrent pas de cette indulgence,
jusqu'au jour où ils s'abritèrent sous le sénalusconsulte qui
autorisait les collèges funéraires. On les proscrivait, tandis
qu'on tolérait les collèges d'isis et de 3Iithra, et c'est précisé-
ment clans cette différence, comme dit 31. de Rossi, que con-
sistait l'iniquité -.
' DiG., 48, 19, 28, 3 : Soient quidam, qui volcjo se juvenes appellant, in
quibusdam civitatibus turbulentis se adclamationibus popularium accom-
modare. Q>:i si ampUus niliil admiserunt nec ante sint a praeside admo-
niti, fustibus caesi dimiltuntur aut etiam spectaculis eis interdicitur .
Quod si ita correcti in eisdem depreltendantur, exilio piiniendi sunt,
nonnunqucun capite plectendi, scilicet aun saepius seditiose et turbulente
se gesserint et aliquotiens adprehensi tractati ciementius in eadeni
temeritate propositi perseueraverint.
2 De Rossi, Roma Sot t., III, p. 509 : Uiniquità del rigore contra i
Cristiani consisteva in ciô, che nwltissime società religiose d'origine greca,
asiatica, egizia — furono generalmente tolerate ed anche permesse
nelU imperio romano. Le premier grief de Celse contre les chrétiens,
c'était, semble-t-il, de former des associations illicites : ITpàJ-ov -qj
KÉXato xîcpàXaidv iax'. oiaSaXîTv ypiaxtaviajjLOv, wi; auvôiQX.a; xp'JêSrjV Tipo;
àXAT^Xou? 7:otou|i.£vcL)v yp'.aT'.avôjv Tiapà xà v£ijLO|ji.ta[i.£va (OrigEN., Contra
Celsum, I). TertuUien repoussait cette accusation, car c'est ironiquement
qu'il dit : Nisi forte in sénat us consulta et in principum mandata
coitionibus opposita delinquimus (De jejunio adv. psijchicos, 13, ed. Reif-
FERSCHEiD et WissowA, 1890). Il est étrange qu'ici non plus il ne s'en
réfère pas formellement au sénatusconsulte autorisant les collèges
funéraires.
( 140 )
La tolérance à l'égard des collèges non autorisés, tant qu'ils
restent inoffensifs, est attestée dès l'an 59 par ce qui se passe
à Pompéi. Quoique contraires à la loi, comme dit Tacite, ils
n'auraient pas attiré l'attention délibère, s'ils n'avaient pris part
à une sédition sanglante. Si Pline promulgue un édit contre
les hétéries vers l'an 111, c'est que la Bithynie avait été trou-
blée avant son arrivée par les associations non autorisées;
toutes les dissolutions mentionnées ci-dessus eurent lieu dans
les mêmes conditions. Il faut en conclure qu'il devait exister
beaucoup de collèges non autorisés. Sans doute, nous l'avons
vu, l'absence de la formule : quibus ex SC. coire licet ne
prouve pas le manque d'autorisation. Mais quand à Lyon un
citoyen se dit patromis omnium corporum Luguduni licite coeun-
tiam, quand ailleurs on voit que les corpora Lugudtmi licite
coeuntia ^ sont seuls admis à des distributions publiques, on
a peut-être le droit de conclure qu'il y avait dans cette ville des
corporations non autorisées. A la fin du II® siècle, les juriscon-
sultes parlent des collèges non autorisés comme d'une chose
fort ordinaire et même avec bienveillance. La loi permet aux
confrères de recueillir les legs, pourvu qu'ils soient faits, non
au collège, mais aux membres individuellement "2, et si le col-
lège est dissous, la caisse est partagée 3.
Nous croyons cependant que le plus souvent les collèges
professionnels recherchaient l'autorisation, parce que l'exis-
tence des collegia quibus non licet coire est précaire; illicites, ils
peuvent à tout moment être dissous. De plus, ils doivent se
contenter du droit commun; pour eux n'existait aucun des
privilèges que l'État ou les villes assuraient aux collèges auto-
risés; pour eux, pas de personnification civile. Heureux encore
si, échappant à la sévérité de la loi, ils pouvaient continuer de
vivre !
* Supra, p. 125, n. 4.
2 DiG., 34, 5, 20 {supra, p. 130, n. -i).
5 Sîipra, p. 136, n. 1.
( 441 )
§ o. Collegia tenuiormn ou collegia funeraticia *.
Cette rigueur fut adoucie à des époques différentes et à des
degrés divers pour deux sortes de collèges : les collèges funé-
raires ou collegia tenuiorum et les collèges industriels. Nous
devons parler ici des uns et des autres.
Th.Mommsen a expliqué le premier le véritable caractère des
collegia tenuiorum '^, ainsi que la législation qui les concerne.
On les trouve mentionnés, au début du III*^ siècle, dans deux
textes de Marcien qui les appelle temmres, collegia tenuiorum,
mais ces deux fragments sont si vagues qu'ils ont longtemps
donné lieu aux interprétations les plus diverses et les plus
fausses •^. Marcien nous apprend que les esclaves pouvaient
' Sur la législation des collèges funéraires, voyez : Th. Mommsen,
De coll., pp. 87-91. Zeitschr. }. g. R.-W., XV, pp. 353 sqq. (1850 .
HuscHKE, ib., XII, pp. 208-213 (1845). Rudorff, ib., XV, p. 213 (1850).
Rom. Rechtsgesch , I, p. 224. Kayser, pp. 186-194. Cohn, pp. 100-147.
G. BoissiER, II, p. 279, et Revue archéolog., Xome XXXIII (1872) : Les Cul-
tores cleorum. Marquardt, St.-V., III, pp. 141-144 = Trad., Le culte, I,
pp. 168-173. 3IAUÉ, Praef. fabr., pp. 29-35. Liebenam, pp. 39-41.
Von Lykowski, pp. 7-13. Loening, I, p. 203, et surtout : Schiess, pp. 1-8.
2 DecolL, pp. 80-82. Zeitschr. f. g. R.-W., XV, pp. 357-360.
5 Heineccius (I, 24) pensait que c'étaient des collèges comptant peu de
membres. Cohn y voit des collèges de simples soldats ou de sous-officiers
(p. 100) ; il a été réfuté par Loening (p. 206, note) et par Schiess (pp. 2-8).
Le véritable sens est celui de pauvres gens. Voyez Dirksen, p. 22. C'est
déjà une expression consacrée dans Cicéron pour désigner la plus basse
classe {Verr., II, 1, 47, 123. Pro Mur., 23, 47. 34, 70. De leg., III, 10, 24.
Merguet, Lexikon zu den Reclen Ciceros, s. v. tenuis). Sous l'Empire,
tenuiores et humiliores sont opposés à houes tiores et potentiores (Dig.,
48, 19, 28, 2. Cod. Just., II, 13, 1. Heumann, Handlexikon zu den Quellen
des rôm. Rechts. Duruy, Hist. des Rom., V, pp. 487 et suiv.). - Les
collèges professionnels n'étaient pas compris sous ce nom, comme le
croit Herzog (II, p. 1004), car ils n'étaient pas exemptés de la lex Julia.
— Les Basiliques traduisent : loiq |j.£xp'!oi<; (LX, 32, a';, ~o"tc; TTcvsaxsoo'.i;
(Scholie, ibid.).
( 142 )
être admis clans ces collèges avec le consentement du maître ^.
11 nous dit encore que les pauvres gens [tenuiores) pouvaient
réunir des cotisations mensuelles, à condition de ne s'assem-
bler qu'une fois par mois; après avoir rappelé que \escollegia
sodalicia, c'est-à-dire les collèges à tendances politiques, ne
devaient pas être tolérés dans les provinces et que les soldats ne
pouvaient pas s'associer dans les camps, il ajoute : sed pomiit-
îitiir tenuioribus stijjem menstruam couferre , dum tamen semel
in mense coeant, ne sub proetextu liujusmodi illicitum collegium
coeat -. Ainsi donc, par une faveur spéciale, refusée aux soldats
et aux autres, les pauvres gens peuvent former des collèges.
Mais deux points sont obscurs : d'abord ctiaque collège doit-il
être pourvu d'une autorisation spéciale, ou tous les collcgia
tenuiorum sont-ils permis en bloc et d'avance? En second lieu,
quel est le but de ces corporations? En effet, il n'est pas admis-
sible que les pauvres gens pouvaient s'associer pour n'importe
quel motif. Une pareille loi équivaudrait à la suppression de
la lex Julia, car la plupart des collèges professionnels en
auraient profité. Or, elle date du premier siècle, et alors la
îex Julia était encore rigoureusement appliquée. Du reste, les
artisans continuent à demander l'autorisation {(jiiibns ex SC.
coire licet). Ajoutons que, suivant l'esprit de la législation, il
fallait un but utile et que la disposition législative à laquelle
Marcien fait allusion devait avoir nettement déterminé ce but.
Une inscription de Lanuvium, de l'an 136, vient nous donner
la réponse aux deux questions que soulève le texte de Marcien 3.
Elle contient les statuts d'un collège de pauvres gens, hommes
^ DiG., 47, 22, 3, 2. Voyez l'Appendice de ce chapitre.
■' DiG., 47, 22, 1, pr.
5 XIV 2112. Le texte a été publié correctement pour la première fois
et complété par Mommsen, De colleg., en appendice. Voyez son commen-
taire, Op. cit., pp. 98-115, et Cohn, pp. 101 sqq., 139 sqq., ainsi que les
auteurs cités supra, p. 141, n. 1. Nous suivons le texte donné par
Dessau dans le Corpus. Le collège fut établi en 133, mais la lex que
nous avons date de 136.
( 143 )
libres ou esclaves, associés uniquement pour procurer aux
confrères défunts un enterrement décent, au moyen d'une
caisse alimentée par des contributions mensuelles. A l'exemple
de Mommsen, on a donné à ces sortes de collèges le nom de
coUegin fiineraticia, qui était inconnu des anciens. Celui de
Lanuvium s'appelle coÙegium salutare Dlcuiae et Antinoi ou
corpus cultorum Dianae et Antinoi. Son caractère exclusivement
funéraire ressort de cette exhortation que les confrères s'adres-
sent à eux-mêmes ou plutôt de ce vœu qu'ils forment : Bene
atque industrie contraxerimiis ut exitus defunctorum fwnestepro-
sequamurl 11 ressort aussi du sénatusconsulte reproduit en
tête des statuts et qui autorisait en bloc tous les collèges funé-
raires, sans qu'ils eussent besoin de demander une autorisation
spéciale :
Kaput ex S[enatus) c{onsulto] j}{opuIi} Rfomani) :
Quib[us coire co]nvenire collegiumq{ue) Mbere liceat.
Qui stipem menstruam conferre volen[t in fun]era, in it coUe-
gium c[oeant co]nferendi causa, unde defunc'i sepeliantur ^.
Quelques-uns ont cru que ce sénatusconsulte n'autorisait
que le collège de Lanuvium. Mais les mots : Quibus coire con-
venire collegiumque liabere liceat ne se comprennent que si on
les prend comme un titre annonçant qu'on va faire connaître
ceux qui peuvent toujours former un collège, et la phrase
suivante nous dit que ce sont ceux qui se proposent de verser
une cotisation mensuelle pour les funérailles. Au reste, si les
adorateurs de Diane et d'Antinous avaient obtenu un sénatus-
consulte spécial, ils le reproduiraient tout entier, ou du moins
ils diraient qu'il leur a été spécialement octroyé -.
» XIV 21 12, 1, .10-13.
2 C'est l'avis de Mommsen, De coll., p. 81, et Zdtschr. f. g. R.-W.,
XV, p. 3o7; il est généralement suivi aujourd'hui. Henzen {Ann. d. L,
1856, p. 185) et de Rossi (Bull, crist., -1864, p. 61) avaient cru d'abord
qu'il s'agit d'un sénatusconsulte spécial, parce que les mots in it colle-
ijium, disaient-ils, ne peuvent désigner que notre collège. Mais ces
mots se rapportent à l'expression générale : quibus collegium habere
( 144 )
Kayser admet bien que nous avons affaire à un sénatuscon-
sulte général; mais, selon lui, ce sénatusconsulte avisait seule-
ment les pauvres gens que l'autorisation leur serait toujours
accordée, sans les dispenser de la demander dans chaque cas i.
Cette interprétation ajoute au texte des choses qui n'y sont pas;
aussi Kayser se fonde-t-il sur des considérations tirées d'ail-
leurs. D'abord il dit que les jurisconsultes n'auraient pas passé
sous silence une mesure aussi grave qu'un sénatusconsulte
autorisant en bloc tous les collegia tenuiorum. L'argument est
faible; du reste, nous allons voir que Marcien parle précisé-
ment de ce sénatusconsulte. Il ajoute que le texte suivant du
même jurisconsulte n'admettrait pas une exception si générale :
in summa autem, nisi ex senatus consulti auctontate vel Caesaris
collegium coierit, contra senatus consultum et mandata et consti-
tutiones collegium célébrât '^. Mais pourquoi les mots : nisi ex
senatus consulti anctoritate coierit ne s'appliqueraient-ils pas
aussi bien aux collèges permis en bloc par un sénatusconsulte
général qu'à ceux qui ont obtenu un sénatusconsulte particu-
lier? Enfin Kayser objecte qu'une exception si générale aurait
rendu la lex Julia illusoire et créé un grand danger. Mais la lex
Julia ne devenait illusoire que pour les petits; or, les empereurs
ne craignaient pas le peuple, mais les grands 3, et ils avaient
liceat, et it équivaut à ejmmodi. De Rossi est revenu de sa première
opinion {Roma Sott., III, pp. 507-514). Gohn est un des rares qui main-
tiennent que ce sénatusconsulte fut spécialement octroyé au collège de
Lanuvium (pp. 101-106. 144-146); mais les suppléments qu'il propose
(kapiit ex S. C. p. R , qm[ppe nobis cojnvenire) sont inadmissibles.
Voyez MoMMSEN, Zeitschr. /". g. R.-W., XV, p. 358. Schiess, pp. 6-7.
* Kayser, pp. 186. 189-191. Mommsen avait déjà songé à cette expli-
cation et l'avait rejetée {De coll., p. 88, n. 4).
2 DiG, 47, 22, 3, 1.
5 DuRUY, V, p. 154, n. 3. G. Boissier, II, p. 280. — Kayser cite encore
un collège funéraire muni d'une autorisation spéciale (collegium menso-
riim machinuriorum frumenti pubiici, quitus ex SC. cotre licet, VI 85) ;
mais c'est un collège professionnel, dans lequel le caractère funéraire est
accessoire, et qui ne pouvait s'en prévaloir pour obtenir l'autorisation.
( 145 )
toujours la lex Julia pour se défendre contre ceux-ci. De plus,
il était tout à fait conforme à l'esprit de la législation de per-
mettre des collèges si utiles au menu peuple ^. Enfin et sur-
tout, il n'était pas plus difficile de surveiller des collèges permis
en bloc que des collèges que l'on aurait quand même toujours
autorisés par un sénatusconsulte spécial : car, dès leur nais-
sance, ils devaient sans doute se faire connaître à l'administra-
tion compétente.
Nous croyons donc, et c'est l'opinion généralement admise
aujourd'hui, que les collèges funéraires étaient autorisés par
un sénatusconsulte général. Or, ces collèges funéraires étaient
certainement des collegia teniiiorum ; car nous verrons qu'ils
étaient uniquement composés de pauvres gens, d'esclaves, d'af-
franchis et d'ingénus appartenant au bas peuple. Nous allons
plus loin et nous affirmons qu'il n'y avait que cette seule sorte
de collegia tenuiorum.
On a prétendu que les collèges funéraires n'étaient qu'une
catégorie de collegia tenuiorum, qu'il y avait, en outre, des
collèges destinés à secourir les nécessiteux et les malades 2.
Marcien ferait allusion à un sénatusconsulte rendu en faveur
de ces diverses sortes de collèges, tandis que l'inscription de
Lanuvium ne reproduirait que le paragraphe (kaput) relatif aux
collèges funéraires, laissant de côté ceux qui concernaient
d'autres collèges. C'est ce qui expliquerait le silence de Marcien
sur le but des collegia tenuiorum : les ayant tous en vue, dit-on,
il n'entre pas dans les détails sur leur but, parce que ce but
varie.
Nous ne pouvons admettre cette opinion. La ressemblance
entre les deux textes ? est si frappante qu'on doit croire qu'ils
< Herzog, II, p. 911.
2 Telle est l'opinion de Walter, n. 348. Wallon, III, p. 462, n. 20.
DuRUY, V, pp. 1d2 et loi, n. 8. VI, p. 174. Kayser, p. 187. Loexing, I,
p. 203. Maué, Die Yereine, p. 3, n. 2. Praef. fabr., pp. 30-32. Schiess, p. 8.
3 CoHN (pp. 124 et suiv.) la nie sans raison plausible. Il a été réfuté par
LoENiNG, I, p. 204, et par Schiess, pp. 6-7.
Tome L. 10
( 14C) )
reproduisent la même phrase du même sénatusconsulte et, par
conséquent, qu'ils parlent des mêmes collèges. Voici, du reste,
une preuve décisive : on ne peut démontrer l'existence d'autres
collegia tenuiorum que les collèges funéraires •. Il n'y a pas de
traces de collèges charitables ayant pour but unique ou prin-
cipal de secourir les indigents et les infirmes. On allègue la
lettre de Trajan "^ sur les éranes d'Amisus, ville libre de Bithy-
nie, mais cette lettre ne prouve rien. Sans doute, ces éranes
étaient destinés à soulager la misère des pauvres {si tali conla-
tione — ad siistinendam tenuiorum inopiam utuntur) au moyen
des cotisations versées par leurs membres; mais Trajan ne dit
pas de quelle façon ils leur venaient en aide, si c'était par des
dons ou, comme dans tous les Ipavot., par des prêts rembour-
sables 3. Quoi qu'il en soit, c'étaient là des associations grec-
ques inconnues en Occident, et Trajan ajoute formellement :
« Dans toutes les autres villes soumises au droit romain, il faut
interdire les associations de ce genre. «Et en effet, il n'y a pas le
moindre vestige de ces sortes de sociétés mutuelles dans l'Em-
pire, ce qui serait inexplicable s'il en avait existé. On se fonde
encore sur un passage de Tertullien 4 qui rapporte que les
corporations chrétiennes employaient leur caisse commune à
nourrir et à ensevelir les confrères pauvres; or, dit-on, les
chrétiens formaient un véritable collège funéraire; donc les
collèges païens faisaient le même usage de leurs ressources.
Nous prouverons plus loin que cette assimilation n'est pas
fondée; mais fût-elle fondée, il en résulterait, non pas qu'il y
' MoMMSEN, De coll., p. 90. Les collèges religieux ne furent pas permis
en bloc. Voyez infra, p. 152. Les collegia juvemim n'étaient pas des
collèges funéraires proprement dits, comme le croit Walter, l. c.
2 PlixX., Ep. ad Traj., 92-93 (Voyez l'Appendice).
5 FoucART {Associât, relig. chez les Grecs, pp. 142 sqq.) et Th. Reinach
{Dict. de Daremberg, s. v. eranoi, pp. 807-808) n'admettent pas que les
éranes fussent des sociétés de secours mutuels; suivant eux, ils faisaient
des prêts remboursables.
* Tertull., Apolog., 39. Voyez infra, lie partie, chap. I, § 5.
( H- )
avait deux sortes de collegia tenuiorum, mais que ces collèges
avaient un double but : l'enterrement et les secours mutuels.
Nous montrerons dans un autre chapitre qu'ils n'avaient pas
ce double but; mais même dans ce cas, on ne pourrait pas dis-
tinguer entre collèges funéraires et collegia tenuiorum ^.
Ni dans les auteurs ni dans les inscriptions si nombreuses
des trois premiers siècles, il n'y a aucune trace d'une autre
sorte de collèges populaires qui aient pu être autorisés en bloc,
et il faut regarder les collèges funéraires et les collèges de
tenuiores comme idenliques. 11 en résulte que le sénatuscon-
sulte de Lanuvium est précisément la mesure dont parle Mar-
cien; donc les collegia tenuiorum avaient été autorisés en bloc.
Si Marcien emploie ce terme si vague pour nous, s'il n'indique
pas le but de ces collèges, c'est peut-être que l'expression était
consacrée et suffisamment claire pour les contemporains.
1 Pour prouver qu'il n'y avait qu'une sorte de collèges autorisés en
bloc, MoMMSEN (De coll., p. 89) s'appuie encore sur la défense de faire
partie de deux collèges licites à la fois. Dig., 47, 22, 1,2: non licet
aiitem amplius quam unum collegium licitum fiabere. Cette loi, dit-il,
avait pour but de prévenir les calculs cupides de ceux qui auraient
voulu jouir eux-mêmes ou faire jouir leurs héritiers des avantages de
deux collèges funéraires à la fois. S'il y avait eu deux sortes de collèges
autorisés en bloc, il n'y aurait pas eu de raison pour défendre l'entrée
dans deux collèges ayant un but différent, par exemple les funérailles
et les secours en cas d'incendie. Nous pensons que cette défense,
comme celle de tenir plus d'une réunion mensuelle, avait pour but
d'empêcher les collèges funéraires de se transformer en associations
séditieuses ; elle voulait surtout prévenir les coalitions. Nous verrons,
du reste, des exemples de personnes enterrées par deux collèges funé-
raires (C. I. L. III 5657. B. c, 1888, p. 468).
Wallon (III, p. 462, n. 20) et Duruy (V, p. 154, n. 3) croient qu'il
ressort, au contraire, de celte défense qu'il y avait plus dune sorte de
collèges permis par le sénatusconsulte général; il serait inadmissible
qu'on aurait cherché à entrer dans deux collèges funéraires, — Sans
doute, on se contentait généralement d'un seul, malgré les exceptions
citées ci-dessus. Mais nous croyons que collegium licitum peut aussi
bien désigner ici les collèges spécialement autorisés que les collèges
permis en bloc.
( 148 )
Peut-être aussi le Digeste ne reproduit-il pas fidèlement son
texte : sous Justinien, ces collèges funéraires avaient disparu.
Le peuple des villes était en majeure partie converti au christia-
nisme, et si ces collèges de pauvres gens existaient encore, ce
qui n'est pas prouvé, ils avaient changé de caractère. Les
inscriptions ne vont pas au delà du IV« siècle. Il n'est pas
étonnant non plus q«e le terme général [collegia tenuiorum)
ne se trouve pas dans les textes épigraphiques, où chaque
collège est nécessairement désigné par son nom spécial .
Le sénatusconsulte dérogeant à la lex Julia fut porté au
plus tard sous Hadrien, puisque nous le voyons appliqué en
133 à Lanuvium ^. Mais comme les collèges funéraires font leur
apparition à Rome dès le premier siècle, il est probable que la
permission générale remonte aux premiers empereurs, peut-
être à Auguste '^.
Dès avant Septime Sévère, ce sénatusconsulte avait été étendu
' MoMMSEN, De coll., p. 81. Zeitschr., XV, p. 359.
2 A Noia, on trouve des Laurinienses cultures (Augusti) contemporains
d'Auguste, car sur un autel élevé par eux on lit : Augusto sacrum
(X 1238. Cfr. G. Boissier, Rev. arch., 1872, p. 83. Schiess, p. 17, exprime
des doutes). — Un collège fondé en l'an 67 : Imaginum domus Augustae
cultores (VI -471). Sous Domitien : ciiUores Silvani, en Lucanie (X 4^4).
Sous Auguste bu Claude, à cause de l'orthographe (supra, p. 87, n. 6) :
conlig(ium) Pietatis (XII 286), [c]onlegium Honoris et Virtu[tis] (XII 4371),
conlegium (XIV 3659).
Voyez Schiess, pp. 17 et 39-40. Cet auteur ne distingue pas les socii
monumenti des collèges; cependant, au point de vue du droit d'associa-
tion, du jus coeundi, cette distinction est nécessaire. Quant aux collegia
domestica, si nombreux dès les premières années d'Auguste (voyez
infra)^ on peut se demander s'ils rentrent dans la classe des collegia
tenuiorum au point de vue légal, c'est-à-dire s'ils existaient en vertu du
sénatusconsulte général. Ces collèges domestiques se composaient des
esclaves et des affranchis d'une même maison, tandis que les collegia
tenuiorum pouvaient seulement recevoir des esclaves avec le consente-
ment du maître (DiG., 47, 22, 3, 2). Nous nous demandons si la loi
avait jamais défendu ces collèges domestiques, renfermés pour ainsi
dire dans les murs d'une maison. Voyez infra, 11^ partie, ch. I, §4.
( 149 )
à l'Italie et aux provinces par des mandats ou rescrits impé-
riaux que ce prince ne fit que confirmer <. Aussi, dès le pre-
mier siècle et surtout au deuxième, les collèges de ce genre se
rencontrent en grand nombre dans toutes les parties de l'Em-
pire, et dès l'an 167 on voit un collegium Jovis Cernent se dis-
soudre au fond de la Dacie -.
Il ne sera pas inutile d'insister sur le but de ce sénatuscon-
sulte, parce qu'il met une fois de plus en lumière le système
suivi par les empereurs à l'égard des corporations. S'ils usè-
rent d'une si grande bienveillance envers les pauvres gens, c'est
que le danger des séditions avait diminué et que la plèbe ne
leur inspirait plus aucune crainte. Ils s'appuyaient sur le peuple
et sur l'armée, et ils ne rencontrèrent d'opposition sérieuse que
dans les rangs de la noblesse. Voilà pourquoi ils enlevèrent le
droit d'association aux puissants et même à la classe moyenne,
tandis qu'ils le restituèrent à la classe populaire, qui se montra
reconnaissante. En tête de ses statuts, le collège de Lanuvium
fait des vœux pour le salut de l'empereur régnant. Une raison
plus importante encore avait guidé le législateur. Il exigeait de
tous les collèges un caractère d'utilité publique; or, les col-
lèges funéraires étaient éminemment utiles à la partie la plus
pauvre de la classe laborieuse; ils lui étaient nécessaires pour
satisfaire un important besoin religieux. C'était faire œuvre
démocratique que de relâcher sous ce rapport l'inutile sévérité
de la loi.
On s'était borné à prendre deux précautions : on avait limité
à une par mois le nombre des réunions pour affaires du
collège, et on avait défendu à quiconque était déjà affilié à
un collège de se faire recevoir dans un second 3. Toute per-
sonne affiliée à deux collèges était mise en demeure d'opter;
elle conservait le droit de réclamer du collège qu'elle quittait
• DiG., 47, 2^2, l pr. Le mot quoque, à cause de sa place, doit indiquer
que Sévère confirma des rescrits antérieurs.
2 C. I. L. III, p. 925.
3 DiG.,47, 22, 1, l et 2.
( 150 )
sa part de la caisse commune. Ces deux mesures avaient le
même but. Marcien dit expressément de la première qu'elle
était destinée à empêcher les collèges de devenir dangereux ^,
et la seconde, rapportée au même paragraphe du Digeste,
devait sans aucun doute prévenir les coalitions entre collèges 2.
Nous pensons que la défense de s'affilier à deux collèges ne
s'appliquait pas seulement aux collèges funéraires, mais à tous
les colleyia liciia, c'est-à-dire établis en vertu du sénatuscon-
sulte général ou autorisés spécialement 3.
Cependant ce sénatusconsulteeut des conséquences peut-être
imprévues. 11 suffit désormais aux pauvres qui voulaient s'as-
socier dans un dessein quelconque, de prendre la forme d'un
collège funéraire. 11 est possible que bien des collèges d'arti-
sans, peut-être aussi des collèges religieux, s'abritèrent sous
l'apparence légale de collèges funéraires ^. Le Commandeur de
Rossi a démontré que les chrétiens les imitèrent et que l'Eglise
interdite, persécutée pour sa religion o, fut licite comme cor-
* Voyez supra, p. U2, n. 2.
2 Voyez supra, p UT, n. 1. Nous reviendrons sur cette défense, au
chap. II, § 1 de la Ile partie. Elle était souvent violée. Plus tard elle eut
un autre but.
^ MoMMSEN {Be coll., p. 89, n. 7) le conteste, parce que 3Iarcien n'a
parlé, dans ce qui précède cette défense, que des collegia tenuiorinn
permis en bloc. Mais ici Marcien dit : amplius quam unum collegium
licitum, et il y avait d'autres collegia licita, c'est-à-dire autorisés et inof-
fensifs, que les collèges de tenuiores.
* Nous verrons qu'il y avait des collèges d'artisans qui semblent pure-
ment funéraires (Ile partie, ch. I, § 4).
s 11 semble bien établi aujourd'hui « que les opinions religieuses des
chrétiens étaient poursuivies comme telles »; on leur reprochait à la fois
le crime de lèse-majesté humaine, parce qu'ils refusaient de sacrifier à
l'empereur, et celui de lèse-majesté divine, qui consistait dan^, le seul
fait de se proclamer chrétiens. Voyez : Mo3IMSEn, Der Religionsfrevel
nach rôm. Recht {Historische Zeilsckr. von H. voN Sybel, vol. (54, 1890,
pp. 389-429). A. Wagener, La liberté de conscience à Rome [Bull, de
VAcad. de Belg., II, 1893, pp. 283-344). E. Leblant, Comptes rendus de
VAcad. des Inscr., 1866. Le même, Les persécuteurs et les martyrs aux
premiers siècles de notre ère, 1893. Paul Allard, Persécutions, passim.
( 1^1 )
poration funéraire : comme telle, elle put avoir une caisse
commune, posséder un cimetière, tenir des réunions, recevoir
des dons et des legs *. Elle abhorrait le nom païen de collège
et prenait le titre d'Ecdesia fratrum, fratres, fraternitas, sociales
ficaires, aSeXcpot, à8e).(poT7i;. A Rome, à Carthage et ailleurs, les
Églises chrétiennes jouirent de la paix, grâce à ce subterfuge.
Parfois de riches chrétiens formaient des collèges funéraires
plus restreints, composés des membres de leur famille et d'un
certain nombre de leurs correligionnaires, qui possédaient
une sépulture commune. M. de Rossi a prouvé l'existence de
ces collèges au III'' et au 1V« siècle, et il les a appelés collegi
famigliari; eux-mêmes se choisissaient un nom de bon augure,
tel que Eventii, Eiigenii, Angurii, Benedicti, etc. '^. Comme les
collèges funéraires païens, les communautés chrétiennes avaient
un autre but encore, la religion, et ce but conserva, chez elles,
toute son importance. Leurs assemblées religieuses étaient
permises, comme celles des collèges païens. Valérien fut le
premier qui, par son édit de 257, essaya de retirer aux chré-
tiens la base juridique sur laquelle s'appuyaient leurs associa-
tions; il mit leurs cimetières sous séquestre et leur enleva par
* G.-B. DE Rossi, BulL crist , 1864, pp. 57 et suiv. 1865. p. 90. 1866,
pp. il. 2^2. 1870, pp. 35-36. 1877, )». 23. 1885, pp. 83-84. Roma SotL, I,'
pp. 101. 209-210. II, pp. VIII et suiv., 370 et suiv. Bull. d. L, 1877,
pp. 49-50. Les résultats obtenus par M. de Rossi sont généralement
admis. Voyez Northcote et Brow^nlow, pp. 57-75, 2^ éd , pp. 63-83.
Paul Allard, II, ch. I. G. Boissier, Les chrétiens devant la législation
romaine (Rev. des Deux Mondes, 15 avril 1876). Kraus, Roma Sott.,
p. 58. Realcncydopàdie der christ. Alt., 1880, s. v. fraternitas. Neumann,
Der rom. Staat imd die allgemeine Kirche, 1890, I, pp. 101 et suiv. Duruy,
VI, pp. 149-150 et 174. Loening, I, ch. III, i)p. 201 et suiv.
2 G.-B. DE Rossi, Roma Soll., III, pp. 37-42, 507-513. Riill. d. /., 1877,
l)p. 47-49. Comment, in hon. Mommscni, i)p. 705-711. Bull, com., 1885,
p. 20. Paul Allard. II, pp. 463-466. Gatti, Bull, com., 1879, p. 124.
C.-L. ViscoNTi, ib., 1881, pp. 56-61. Marquardt, Le culte, I, p. 161,
n. 2 {St.-V., IIP, p. 134, n. 2). Schiess, pi». 30-33. C. L L. VI 10268-
10285.
( 152 )
là même le droit de s'associer et de se réunir, assimilant
l'Église aux associations illicites ^.
On a voulu conclure d'une phrase de Marcien que les col-
lèges religieux avaient obtenu la même faveur que les collèges
funéraires : secl religionis causa coire non proliibentiir, dum
tamen per hoc non fiât contra senatus consiiltum, que illicita
collegia arcentur 2. Mais une pareille loi, qui aurait annihilé
tous les effets de la lex Julia, même pour les riches et les puis-
sants, est contredite par un autre fragment déjà cité 3, qui
défend, même aux vétérans, les réunions illicites pour motif
religieux. Il faut rattacher la phrase de Marcien à celle qui la
précède, où il est dit que les tenuiores ne peuvent se réunir
qu'une fois par mois pour payer leurs cotisations, et alors elle
signifie qu'outre cette réunion mensuelle pour leurs atfaires
icojîventus], ils peuvent s'assembler quand il leur plaît pour un
motif religieux ^, par exemple pour un banquet, à condition
de ne pas abuser de cette faveur pour se transformer en col-
lège illicite ou dangereux. Et en réalité, il en était ainsi; les
inscriptions attestent que le collegium Dianaeet Antinoi SiVdLii
deux repas de corps au mois d'août et qu'un coUeyium Siîvani
de la Lucanie en avait également deux au mois de juin ^. Cela
serait inexplicable si l'on donnait un autre sens au texte de
Marcien 6.
* Paul Allard, III, pp. 51-53.
2 DiG.,47, t>2, 1, 1.
5 Supra, p. 132, n. 3.
* MoMMSEN, De coll., pp. 87-88 et 107-108, et dans son édition du
Digeste, ad 47, 2*2, 1, 1, note l (Voyez l'Appendice).
5 XIV 2112. X iU. ScHiESS (note 339) conjecture avec beaucoup de
vraisemblance qu'au n» X 444, il faut lire V k(alendis) [Jiin(iis)] , au
lieu de Jul{iis). Alors les deux banquets auraient eu lieu le 28 mai et le
20 juin, au lieu du 20 et du 27 juin, dates trop rapprochées. Ce serait une
erreur du lapicide. - Les eborarii et citrarii de Rome avaient deux
banquets en janvier, le 1" et le 25, mais c'est un collège professionnel
(Mi7//i. d. [., 1890. p. 287, 1. 9-lOj.
* Selon CoHN (p. 124), les mots de Marcien : dum tamen semel in
( 153 )
En résumé, les collèges funéraires (collegia tenuiorum) furent
seuls dispensés de demander une autorisation spéciale.
§ 6. Changement de politique envers les collèges industriels.
Mais tout en maintenant pour les autres les lois prohibi-
tives, les princes se montrèrent fort tolérants dans la pratique
et nous pouvons croire qu'à partir du II* siècle l'autorisation
fut accordée facilement et, d'autre part, qu'on laissa beaucoup
de collèges d'artisans et de collèges religieux s'établir sans
autorisation. A l'égard des collèges industriels, les empereurs
changèrent complètement de politique. Depuis que les comices
avaient perdu leurs attributions électorales et judiciaires, à
Rome d'abord, puis dans les colonies et les municipes, on
n'avait plus à craindre les désordres dont ils étaient l'occasion,
ni la corruption qui s'était exercée au grand jour. De plus, les
empereurs s'aperçurent de bonne heure qu'ils ne pouvaient
que gagner à la création de nouveaux collèges : c'étaient des
foyers de travail, où ils trouvaient les bras nécessaires ù
diverses branches de l'administration centrale et municipale,
ou, tout au moins, ils voyaient que l'association, en décuplant
les forces, devait favoriser le développement des métiers utiles.
Aussi l'initiative privée fut-elle encouragée par des primes et
des privilèges accordés aux membres de certaines corpora-
tions.
On alla plus loin : les princes fondèrent eux-mêmes des col-
lèges ou relevèrent ceux qui menaçaient de périr : c'est ce que
Trajan fit déjà pour le corpus pistorum. Ils leur concédèrent
mense coeant signifient : pourvu qu'ils se réunissent au moins une fois
par mois. Selon lui, un collège qui se réunirait moins souvent, aurait
paru dangereux! Dans le sénatusconsulte de Lanuvium, au contraire,
les confrères promettraient qu'il n'y aura pas plus d'une assemblée
mensuelle, afin d'attirer des membres nouveaux! Tout cela est forcé.
Voyez ScHiESS, pp. 5-7.
( 1S4 )
peu à peu les divers droits qui constituent la personnification
civile. Finalement, l'État et les villes prirent toutes les corpo-
rations à leur service; de leurs membres, ils firent de véritables
fonctionnaires publics. Cette révolution, que nous aurons à
raconter dans la troisième partie de ce mémoire, s'accomplit
lentement et s'acheva sous le règne d'Alexandre Sévère, qui
organisa en collèges toutes les professions, depuis les plus
infimes jusqu'aux plus importantes. Désormais donc toutes les
professions forment des corporations, à Rome du moins, et il
semble que la législation sur le droit d'association n'ait plus de
raison d'être pour les collèges industriels K Et cependant les
lois prohibitives sont insérées au Digeste; c'est que ces lois
s'appliquent encore à d'autres collèges, et puis il resta défendu,
comme par le passé, de fonder des collèges professionnels
libres. Ceux-ci n'existaient plus; tous sont devenus obligatoires
et héréditaires, c'est-à-dire chargés d'un service public auquel
^ ils ne peuvent se soustraire et qui passe de père en fils. Quant
aux collegia tenuiorum, nous avons déjà dit qu'ils semblent
avoir disparu, quoique le texte de Marcien figure au Digeste.
L'Eglise, qui recruta ses premiers adhérents parmi les petits,
fit sans doute de plus en plus le vide dans leurs rangs, et elle
se chargea de pourvoir elle-même aux besoins qui les avaient
fait naître, en ajoutant, comme nous verrons, les œuvres de
charité au soin des funérailles.
* «f Les restrictions au droit d'association n'existaient pas sous la
république et le régime se modifia de nouveau sous les empereurs
récents, en particulier depuis Sévère; en perdant sa situation domi-
nante, la ville de Rome reconquit le droit d'association, w Mommsen,
iS^-R. P, p. 3:26, n. 6 = Trad., p. 386, n. 6. Cela est vrai en fait, pas en
droit, comme le prouve le Digeste. Les lois restrictives n'avaient plus
de raison d'être pour les collèges devenus officiels; il fallait, au con-
traire, de grands eff"orts i)Our maintenir ces corporations.
APPENDICE.
I. Digesta, III, 4 : quod cujusmmque universitalis
nomine vel contra eam agatur.
1. Gaius libre tertio ad edidum provinciale. Neque societas
neque coUegium neque hujusmodi corpus passim omnibus
habere * conceditur : nam et legibus et senatus consultis et
principalibus constitutionibus ea res coercetur. Paucis admo-
dum in causis concessa sunt hujusmodi corpora : ut ecce
vectigalium publicorum sociis permissum est corpus habere
vel aurifodlnarum vel argenlifodinarum et salinarum. Item
collegia Romae certa sunt, quorum corpus senatus consultis
atque constitutionibus principalibus confirmatum est, veluti
pistorum et quorundam aliorum, et naviculariorum, qui et in
provinciis sunt. 1. Quibus autem permissum est corpus habere
coUegii societatis "^ sive cujusque alterius eorum nomine, pro-
prium est ad exemplum reipublicae habere res communes,
arcam communem et actorem sive syndicum, per quem tam-
quam in republica, quod communiter agi fierique oporteat,
agatur fiât.
II. Digesta, 47, 22 : de collegiis et corporibus.
1. Marcianus libro tertio institutionum. Mandatis principa-
libus praecipitur praesidibus provinciarum, ne patiantur esse
collegia sodalicia neve milites collegia in castris habeant. Sed
* haberi {ald.}'! Mommsen.
* societalisve? Mommsen.
( 156 )
permittitur ^ tenuioribus stipem menstruam conferre, dum
tamen semel in mense coeant, ne sub praetextu hujusmodi
illicitum collegium coeat. Quod non tantum in urbe, sed et
in Italia et in provinciis locum habere divus quoque Severus
rescripsit. 1. Sed religionis causa coire non prohibentur, dum
tamen per hoc non fiât contra senatus consultum, quo illicita
collegia arcentur 2. 2. Non licet autem amplius quam unum
collegium licitum habere, ut est constitutum et a divis fra-
tribus 3 : et si quis in duobus fuerit, rescriptum est eligere eum
oportere, in quo magis esse velit, accepturum ex eo collegio, a
quo recedit, id quod ei competit ex ratione, quae communis
fuit.
2. Ulpianus libro sexto de offlcio proconsulis. Quisquis illi-
citum collegium usurpaverit, ea poena tenetur, qua tenentur,
qui hominibus armatis loca publica vel templa occupasse
judicati sunt ^.
3. Marcianus libro secundo judiciorum jmblicorum. Collegia
si qua fuerint illicita, mandatis et constitutionibus et senatus
consultis dissolvuntur : sed permittitur eis, cum dissolvuntur,
pecunias communes si quas habent dividere pecuniamque
inter se partiri. 1. In summa autem, nisi ex senatus consuiti
auctoritate vel Caesaris collegium vel quodcumque taie corpus
coierit, contra senatus consultum et mandata et constitutiones
collegium célébrât s. 2. Servos quoque licet in collegio tenuio-
* Cela fut permis par le sénatiisconsiilte conservé dans l'inscription
de Lanuvium. Voyez supra, p. 143.
2 Note de Mommsen dans son édition du Digeste : Sic ordina et
supple : permittitur tenuioribus stipem menstruam conferre, dum tamen
semel in mense coeant [conferendi causa] : sed religionis causa coire non
prohibentur, dum tamen per hoc non fiât contra senatus consultum, quo
illicita collegia arcentur, ne sub praetextu hujusmodi illicitum collegium
coeat {ne sub . . . coeat fortasse del.). Quod non tantum — rescripsit.
* Marc Aurèle et Vérus.
* Voyez DiG. 48, 4, 1, i et Paul., Sentent., V, 29, i et 2 {supra,
p. 137, n. 2 et 3).
° Les mauvais manuscrits ont : cclebratur.
rum recipivolentibus dominis, ut curatores horum corporum
sciant, ne invito aut ignorante domino in collegium tenuiorum
reciperent, et in futurum poena teneantur in singulos homines
aureorum centum.
4. Gaius îibro quarto ad legem duodecim tabularum. Sodales
sunt, qui ejusdem collegii sunt : quam Graeci sraipeiav vocant.
His autem potestatem facitlex pactionem quam velint sibi ferre,
dum ne quid ex publica lege corrumpant. Sed haec lex videtur
ex lege Solonis tralata esse. Nam illuc ita est : ààv ôk ùr^iJ,oç r,
cppaTOpsç Y, t'epwv o'pyLwv r, va'JTaî. (GÙTat. ?) y, arùa-o-LTOi Yi ojJLÔTacso!.
r\ Q'.ao-wTat. y, etiI Xeiav oiyôixeyoi y, eiq IfjiTiopLav, oti av toùtwv
85,aQwvTat, Tupoç (iXkr\kouq, xup'.ov etvat,, eàv p.Y| dmoLyopeùvri
ôTjfjLocTia ypà(ji|jiaTa 1. (Ed. Th. Mommsen.)
111. Basilicorum liber VIII, Ut. II, l. CI.
oà. Ou 7rà(T',V £C2£lTa!, TZOlZÏv £Tat,0£{aç, Y, (3"J(7TYiULaTa, Y,
o-wuaTEra" àX).' £-1 ô-rjiJiOTiwv teXwv xal [jt.£TàXXwv apyOpo'j xal
ypu<70U, xa( àXuwv, xal uayxtTiwv, xal vaux^.v^pwv, xa{ T!,vwv
àXXwv aTiô v6{i.0!j p£êat,(i)9£VTWv. Kal £^£(7T',v auTorç xa-à [jlI!j.y,g-',v
TYJç ttoXewç £^£!.v TTpàyjJiaTa xoivâ, xal àpxav, xal évàyovTa Y.yo'jv
CTÙvStXOV, 8t OU TcpaTTETai Ta xo',vâ.
IV. Basilicorum /ifter LZ, /i^ .YZX/7.
Ilepl ÊTat.p'.xwv (7U77Y,[jiâTwv xal (TwjjLaTetwv,
xal o'/|!j.0T!.xwv âywywv.
a'. Mapx. 01 àp^ovTEç Travrayoû xwXuETWG-av £v ttgaetl xal
xwjJia!.; iO!.(i)Taç y, o-TpaTuôraç £v Torç xàaTpoLç a'JT(7)v È'yE'.v ÉTa»,-
* Voyez 5?^;)rfl, p. 79, n. 4.
( lo8 )
pt.xà (7!j(7T7,paTa 1. Tois àï pieTpio'.ç ioelzoLi a-'jvs'.a-cpopàv aTca^
§ 1. Kal '/ôrç^^^ Sî^X'^is Q£[J.t.Tw<; è'çe^Tt. a-uvLÉvat.3.
§ 2. 'Evoç û£ ij.ôvouTt.; ozeiXei 'j'jazr^iJ.cf.'zoc, eivar,, xalava^wpeîv
TWV XoLTïCOV, ).Y1^G{JL£V0<; Si' Tt. £X TO'J XOt.VoO ).6yOU X£^p£W(7Tr|Tat..
[3^ OuXtt. '0 7rapàvop.ov TtO'.wv 'i' o-ùa-TTipLa T'?, xarà twv o-ùv
ô-)vOt.ç T07I0V 0'ri|jLoa-(.ov Yj Upov xaTao-yovTWv Ù7:6x£t.Tat. ttolv?).
y'. Maox. Ta ';rapâvo[jLa a-LXTT'/ijj^aTa ôt,aA'j£Gr9wa-av , xai
[ji£pt.Ç£0-Bwa-av Ta xoivà y^^pr/j-aTa ol £v auTorç ov-:£ç.
'A9£[JLÎ.T0V Bk !7Û(7Tr,;j.a Xal '7WULaT£WV SaTt., TG ULT; (XTilO vÔ[JLOtJ Y,
[ja(7!.)v£wç (7ua"ïàv S.
'0 St.O!.XYiTY|Ç TO'J À£7ZToO a-wjJLaT£{o'J 6 0£^àjJl£VO; SoÙÀo'j; Tcapà
YV(î)UL*^V TO'J ÔEO-TTOTO'J, £7:1 ÉxàcTù) StSwO-t. 7rO!.VY,V p' V0Ji.{(7{JLaTa.
{3ou).opivwv yàp twv 8£(77roTwv, xaTaXÉyovTat. £v auTOÎ; ■<.
8'. Fat. Tar<; 9£[JLt.Ta»rç 8 £Ta'.p£iat,<; 9£[JL',Tà T'j[jicp(i)V£rv £^£arTt.v.
(M. Heimbach, tom. I, p. 419 et tom. V, p. 668.)
' On voit qu'il y a ici une confusion. Marcien ne dit pas que les
coUegia sodalicia (collèges k tendances dangereuses), mais tous les
collegia sont interdits aux soldats.
2 Tolç TTcVôtTxspotc;. Scliolie.
^ Les Basiliques ne semblent pas rapporter cette permission aux
réunions religieuses des temiiores. Voyez supra, p. 152.
^ Ttoiôov parait JDien s'appliquer aux fauteurs de ces collèges, non aux
membres. La Scliolie dit : 6 auva6poiTcov. Quant à TrapavojjLov (illicitum),
la Scliolie explique : à6£[ji.!,Tov, o (j.t) -rrapà xou vo[j.ou pTjTto<; eTriTexpaTixat,
T^ Tiapà paatXsoj;;.
s On voit que les Basiliques entendent toujours par collegia illicita,
■7Tapâvo|j.a cruc7XTjîJ.axa, les collèges non autorisés. Q.î\\ supra, pp. 132-137.
Ici encore la Scholie ne considère comme violant la loi que ceux qui
établissent ces collèges {o\ àviaxwvxeç).
•> 'Ev xqj xtJov TTSveaxepwv auveôpto). Scholie.
" To^ç TrevEo-xEpoii;* sv yàp xo"t<; TrXo'jattoxs'poi; ouâè [iouXo[JLévtov xwv
8ea7rox(J5v. Scholie.
8 Tolç vo[j.ot; EYvtoa[j.évai(;. Scholie.
( 159 )
V. Tacitus, Aimai, XIV, 17.
Sub idem tempus [eu 59), levi contentione atrox caedes orta
intercolonos Nucerinos Pompeianosque gladiatoriospectaculo,
qiiod Livineius Regulus, quem motum senatu rctuli, edebat.
Quippe, oppidana lascivia invicem incessentes, probra, deinde
saxa, postremo ferrum sumpsere, validiore Pompeianorum
plèbe, apud quos spectaculuin edebatur... Cujus rei judicium
princeps senatui, senatus consulibus permisit. Et rursus re ad
patres relata, prohibiti publiée in decem annos ejusmodi coetu
Pompeiani , collegiaque, quae contra leges instituerant, disso-
luta. Livineius et qui alii seditionem conciverant exilio multati
sunt.
(Ed. E. Jacob.)
VI. Plinii (7;?^/. ad Trajaimm •.
Epist. 33. Après avoir parlé d^un incendie qui avait causé de
grands ravages à Nicomédie, Pline ajoute : Tu, domine, dispice,
an inslituendum putes collegium fabrorum dumtaxat homi-
num CL. Ego attendam ne quis nisi faber recipiatur neve
jure concesso in aliud utantur; nec erit difticile custodire tam
paucos.
Epist. 34. Réponse de Trajan. Tibi quidem secundum exempta
complurium in mentem venit posse collegium fabrorum apud
Nicomedenses constitui. Sed meminerimus provinciam islam
et praecipue eas civitates - ejusmodi factionibus esse vexatas.
* Pline le Jeune fut gouverneur de Bilhynic depuis le 17 septembre 111
jusqu'à la fin de janvier 113. Voyez Mommsen, Étude citée supra, p. 124,
n. 1.
« Texte de l'édition akline i I0O8). Keu. lit : eam civitatem vexatam.
( 160 )
Quodcumque nomen ex quacumque causa dederimus iis qui
in idem contracti fuerint... hetaeriaeque brevi fient *. Satius
itaque est comparari ea quae ad coercendos ignés auxilio esse
possint, etc.
Epist. 92. Pline à Trajan. Amisenorum civitas libéra et foe-
derata beneficio indulgentiae tuae legibus suis utitur. In hac
datum mihi libellum ad eranos pertinentem bis litteris subjeci,
ut tu, domine, dispiceres quid et quatenus aut permittendum
aut prohibendum putares.
Epist. 93. Réponse de Trajan. Amisenos, quorum libel-
lum epistulae tuae junxeras, si legibus istorum, quibus de
officio foederis utuntur, concessum est eranum habere, pos-
sumus quominus babeant non impedire, eo facilius, si tali
conlatione non ad turbas et ad inlicitos coetus, sed ad
sustinendam tenuiorum inopiam utuntur. In ceteris civita-
tibus, quae nostro jure obstrictae sunt, res hujusmodi prohi-
benda est.
Epist. 96. Pline vient de parler des réunions tenues par les
chrétiens pour leur culte, et il ajoute : Quod ipsum facere desisse
post edictum meum, quo secundum mandata tua hetaerias
esse vetueram .
[Ed, Keil, Teubner,)
* fuerint. hetariae -K- çwae brèves fient. Ald. Le manuscrit d'Oxford
récemment découvert par Hardy porte : fuerint, hetaeriae quae brèves
fient {Plinii Epist. ad Traj. eclid. E. G. Hardy, London, 1889). Orelli
conjecturait : èxatpiai haipoigue brevi fient. Hardy propose avec beau-
coup de vraisemblance : hetaeriae aeque brevi fient.
i'"
DEUXIÈME PARTIE
LES COLLÈGES PROFESSIONNELS
CONSIDÉRÉS COMME ASSOCIATIONS PRIVÉES,
CHAPITRE l^'
BUT PRIVÉ DES COLLÈGES PROFESSIONNELS.
§ i. LES COLLÈGES DANS LA VIE PUBLIQUE. — § 2. LEUR BUT
ÉCONOMIQUE ET PROFESSIONNEL. — § 3. LEUR CARACTÈRE RELI-
GIEUX. — § 4. LEUR BUT FUNÉRAIRE. — § 5. LEUR CARACTÈRE
CHARITABLE. — § 6. LEUR CARACTÈRE FAMILIAL.
Il résulte de ce qui précède que les collèges professionnels
de l'Empire, comme ceux de la république, se proposaient un
but privé, mais que, de plus, ils étaient chargés d'un service
public. Dans cette seconde partie, nous allons les considérer
comme associations privées.
Pas un seul texte ne nous indique d'une façon précise le but
que se proposaient les artisans, les commerçants, les appari-
teurs et les vétérans, quand ils se groupaient en collèges : aussi
que d'opinions différentes n'a-t-on pas émises! Trop souvent
on s'est laissé tromper par le souvenir des florissantes ghildes
du moyen âge, si dégénérées sous l'ancien régime. La protec-
tion des métiers, la réglementation de leur exercice dans l'm-
térêt du public et du travailleur, l'apprentissage, l'influence
politique, les besoins religieux, la charité et même l'agrément,
telles étaient les raisons diverses qui poussaient alors les
Tome L. 11
( 162 )
ouvriers à s'associer. On a cru que les artisans romains étaient
guidés par les mêmes motifs, et l'on n'a pas hésité à assimiler
à certains égards leurs collèges aux corporations modernes.
Sans doute, il y a quelque ressemblance entre les unes et les
autres, mais les différences sont encore plus frappantes. Nous
allons examiner, tour à tour, le côté politique, économique,
religieux, charitable et familial des collèges romains, et, malgré
l'obscurité des sources, nous essayerons de déterminer nette-
ment leur caractère. Au chapitre II, nous montrerons com-
ment ils étaient organisés pour atteindre ce but.
§ 1. Les collèges dans la vie publique.
Sommaire : les coLLÈGts professionnels n'ont pas une place privilégiée dans
l'organisation politique. — LEUR INFLUENCE LÉGALE DANS LES COMICES A
ROME ET DANS LES MUNICirES. — INFLUENCE ILLÉGALE DANS LES AFFAIRES
PUBLIQUES ET EXCÈS DE TOUS GENRES.
Dans l'antiquité, l'homme qui n'avait que ses bras et son
métier pour vivre, celui qui, même riche, se livrait à un travail
manuel, était méprisé et regardé comme indigne de participer
aux affaires publiques. L'association seule était capable de
donner aux ouvriers une importance qu'ils ne pouvaient
acquérir dans l'isolement.
Le rôle des corporations professionnelles dans la politique
a été tour à tour exagéré et méconnu. Les auteurs modernes,
antérieurs à notre siècle, voyaient des artisans partout où il est
question de collèges; aujourd'hui règne la tendance opposée.
On est tombé des deux côtés dans l'excès. Sans doute, les col-
lèges professionnels n'eurent jamais dans la constitution de
l'Etat romain une place privilégiée, mais nous espérons prou-
ver que, sous la république et au début de l'Empire, ils par-
vinrent à exercer aux comices une certaine influence légale et
qu'ils se firent surtout remarquer dans les troubles politiques
et dans les désordres de toute espèce.
( 163 )
Au moyen âge, les corporations marchandes et industrielles
tenaient une place importante dans l'organisation communale
des villes. La municipalité parisienne était formée des syndics
des (( marchands d'eau », et ailleurs les ghildes concouraient au
moins à la nomination des magistrats communaux. La milice
urbaine se rassemblait par corps de métiers et ceux-ci por-
taient leurs glorieuses bannières sur les champs de bataille.
Rien de pareil dans le monde romain. On a soutenu que
Servius favorisa certains collèges utiles à la guerre ou au culte *;
on a voulu assimiler les collèges des fabri tignarii, des fabri
aerarii et des tibiciues, prétendument créés par Numa, aux
quatre centuries des fabri tignarii, des fabri aerarii, des liticiues
(ou tubiciues -) et des cornicines, auxquelles Servius accorda le
droit de sutï'rage.
Pour les flûtistes, on peut s'étonner d'une pareille asser-
tions; jamais ils n'eurent rien de commun avec les sonneurs de
trompette et de cor; sous l'Empire, les uns et les autres forment
deux collèges distincts : le collegium tibicinum^ et le colleguim
liticinum corniciuum ■\ Celui des flûtisies remonte à la plus
' DiRKSEX (p. 21) disait déjà : Ursprunglich liai der rômische Staat
lediglich dcnjenigen Gewerben, ivelche den Bedurfnissen des Krieges iind
des Goltesdienstes zundchst frôhnten, seinen unmittelharen Schutz iind
eine selbststdndige Communalverfassung bewilligt. Voyez supra, p. 70.
2 CicÉRON (De rep., II, 23, 40) dit : litidnes cornicines, et Tite-LiVe
(I, 43, 7) appelle les mêmes : cornicines tubicines. Voyez Mom.msen,
St.-R., III, p. 286 (1887) = Trad., VI, 1, p. 326. Lituus et tuba désignent
le même instrument (Mommsen, ib., p. 386 = Trad., p. 443), sauf que le
lituus, employé dans la cavalerie, éiait plus droit (Marquardt, St.-V.,
IP, p. 532 ^ Organ. milit., p. 295).
3 Elle repose sur une confusion des tibicmes et des tubieines. Voyez
Marquardt, St.-V., IIP, p. 436 - Le culte, II, pp. 168-169.
^ Voyez notre Index collegiorum {Urbs Ronia), et supra, p. 71.
5 Voyez notre Index collegiorum [Urbs Roiim), s. v. aeneatorcs, cor-
-nicines, liticines. L'inscription d'ORELLi 4106 est accom|)agnée de la
représentation des deiix instruments. Le collège est appelé aussi :
collegium aeneatorum. Festus, Epit., p. 20 : aeneatores cornicines dicun-
tîir. MoMMSEN (/. /., pp. 287-288 = Trad., p. 327).
( 164 )
haute antiquité, tandis qu'il n'est pas fait mention de celui des
liticines cornicines, ni parmi les collèges de Numa, ni même
sous la république; c'est qu'il datait d'une époque assez récente.
Remarquons ensuite que si les ouvriers de l'armée avaient eu
le privilège de former des collèges officiels, investis, comme
collèges, du droit de suffrage, il en serait évidemment de même
des musiciens militaires K Le silence que les auteurs gardent
sur ces derniers prouve assez que les collèges de charpentiers
et de forgerons n'avaient, eux non plus, aucun caractère offi-
ciel. En 1843, Mommsen a essayé de prouver qu'ils diff'éraient
des deux centuries de fabri tignarii et de fab?i aerarii, qui
votaient, soit avec la première, soit avec la deuxième classe 2.
Aujourd'hui il pense qu'on doit peut-être identifier les col-
lèges aux centuries, et il croit que rien n'empêche de regarder
les deux collèges comme des unités électorales 3. Malgré son
autorité, nous ne pouvons nous rallier à cet avis. Les deux cen-
turies ne contenaient pas tous les charpentiers et forgerons,
mais seulement ceux qui fabriquaient et réparaient les armes
et les machines de guerre; d'autre part, selon Denys d'Hali-
carnasse, elles renfermaient d'autres métiers capables de
rendre ce service ^. C'étaient des divisions politiques et mili-
* Mommsen, /. /., conjecture que le collegium liticinum cornicinum
(Orelli 4106) était formé des deux centuries de musiciens réunies. Mais
si ce collège avait le droit de suffrage, — et il devait l'avoir, si les collèges
des charpentiers et des forgerons l'avaient, — pourquoi n'est-il pas cité
sous la république parmi les antiques collèges ?
2 De coll., pp. 29 sq. De même : Cohn, p. 24, n. 14. Huschke, Verfas-
sung des Servius Tullius, p. 157, n. 5, et p. 160.
5 St.-R., m, p. 287 = Trad., VI, 1, p. 32o. 11 conjecture que le
collegium fahrum, épargné en l'an 64, était formé par la fusion des deux
collèges ou centuries. Cfr. Gérard, p. 5. Gaudenzi, p. 18 = 275. Lange,
I, 420. Récemment G. Jullian (Dict. de Daremberg, s. v. fabri, p. 957)
dit : « Les centuries d'ouvriers de Servius Tullius ne sont que les col-
lèges de Numa organisés militairement. » Mais où sont les preuves?
■* DiONYS. Hal., IV, 17 : O'jo aèv ottXotioiwv t£ xat T£>c:o'vtov xal twv
àXXwv xwv ay.Eua^dvTwv xà eli; xôv TrdAôfJiov Eu^pTjaxa. VII, 59 : Sûo Xd^ot
TEXxdviov xai yaXxoTÛrwv xai ô'aot àXXot 7roXEij.ix(Ji)v à'pytov TJaav X^ipo-
T£-y^vat.
(165 )
taires, sans aucun rapport avec les collèges; ceux-ci rece-
vaient tous les ouvriers du même métier et eux seulement; ils
devaient probablement leur naissance à l'initiative privée et
n'avaient en vue qu'un intérêt particulier i.
Donc, à Rome, aucun collège, sans excepter ceux qui ren-
fermaient des ouvriers utiles à la guerre, ne jouissait du droit
de suffrage ni d'aucun privilège politique. II en fut de même
dans les cités de l'Empire. Là, tout collège était attaché à son
municipe et formait une véritable institution communale. Les
corporations qui faisaient partie du troisième ordre, la plèbe,
étaient plus estimées que le commun de la populace; elles figu-
raient souvent à côté de la curie et des Aiigiistales ^2. Mais rien
ne permet de croire qu'elles aient joui de privilèges politiques,
ni qu'elles aient concouru, comme corps, à l'élection des magis-
trats. L'artisan, comme individu, devait se contenter des droits
dont jouissait tout citoyen; réunis en corps, les ouvriers
n'avaient pas d'autre influence que celle que la cohésion et le
nombre peuvent donner à tout groupe.
Or, cette influence peut s'exercer par des moyens légaux ou
illégaux, en vertu de la loi ou par la violence. Nous pensons
que les artisans romains eurent recours à ces deux sortes de
moyens à Rome, vers la fin de la république surtout, et dans
les municipes, au premier siècle de notre ère.
Sans doute, aux comices, ils furent longtemps sans compter.
Compris pour la plupart dans les tribus urbaines, les moins
considérées, ils votaient avec elles aux concilia pleins et aux
comices /ri/?îift's\* mais l'eussent-iis même emporté dans leurs
tribus, que pouvaient-ils contre les trente et une tribus rus-
tiques? Aux comices centuriates, la plupart étaient relégués
avec les affranchis dans l'unique et nombreuse centurie des
capite censi, qui disposait d'une voix sur cent quatre-vingt-
treize! Capite censi, ils étaient exempts de l'impôt, mais aussi
* Florus a peut-être fait la même confusion. Voyez supra, p. 63.
2 Voyez infra, Ille partie, chap. I, § % II® section.
( 166 )
exclus des légions. Tite-Live les qualifie dédaigneusement
d'opificum vulgus et sellularii, minime miUtiae idoneum genus K
On ne les admettait dans les rangs de l'armée que quand la
patrie était en danger. Depuis Mari us, ils purent servir comme
volontaires et ils entrèrent dans les légions qui achevèrent la
conquête du monde. Cette révolution dans les mœurs romaines,
qui modifia profondément la constitution de l'armée, et la
réorganisation démocratique des comices, qui s'accomplit au
VI® siècle, donnèrent aux artisans une importance inconnue
jusque-là -.
En effet, à l'époque de Cicéron, leurs suffrages devaient
avoir acquis une certaine valeur : on les recherchait. Leurs
collèges étaient probablement les plus nombreux parmi ces
collèges populaires auxquels, selon Quintus Cicéron, les can-
didats devaient faire leur cour. En 689 = 65 ^, c'est-à-dire un
an avant la dissolution des collèges, l'orateur se préparait à
briguer le consulat pour l'an 691 ; son frère lui écrit : a II faut
avoir une foule d'amis et des amis de tout genre; or, tu en as
plus que n'importe quel homme nouveau : tous les publicains,
presque tout l'ordre équestre, beaucoup de municipes, beau-
coup d'hommes de tout rang que tu as défendus, quelques
collèges, aliquot coUegia 4. » Plus loin, il revient sur la même
idée : « Attache-toi, lui dit-il, toutes les centuries, et avant
tout les sénateurs, les chevaliers et les hommes puissants de
tous les ordres; car il se rencontre à Rome beaucoup d'hommes
actifs, beaucoup d'affranchis influents. » Puis il continue :
« deinde habeto rationem urbis totius : collegiorum, montium,
pagorum, vicinitatum : ex iis principes si ad amicitiam tuam
adjunxeris, per eos reliquam multitudinem facile tenebis 3. « De
* Liv., VIII, 20, 4. Voyez supra, p. 69.
2 Voyez A. de Boissieu, Inscr. de Lyon, p. 376.
'" Sur cette date, voyez Klotz, Indices ad Ciceronem, éd. Teubner,
pp. 408 et 425. Cfr. AdAttic, I, 1, 1.
* De petit, cons., I, 3.
5 Ibid., VIII, 30. Lecture de Mommsen. Voyez supra, p. 41, n. 1.
meine dans toute Tltalie il doit se concilier les gens qui ont
du crédit dans leur tribu, ou dans une partie de celle-ci, par
exemple auprès des citoyens de leur municipe, de leurs voi-
sins, des membres du même collège : « qui apud aliquam par-
tent tribulium propter municipii, mit vicinitatis , mit collegii
ratioiiem valent ' . «
Mommsen admet que, dans ces trois passages, il s'agit des
collèges d'artisans; nous pensons qu'il s'agit des collèges popu-
laires en général, religieux ou professionnels, mais surtout de
ces derniers 2. Les corporations ouvrières avaient donc pris
un caractère politique; elles se laissaient corrompre, sans
doute, au profit de celui qui avait su gagner leurs chefs (prin-
cipes) : elles vendaient leurs suffrages 3.
Nous connaissons trop peu les comices électoraux d'alors pour
nous expliquer comment s'exerçait cette influence des collèges
populaires. Sans doute, depuis les réformes de 241 et de 179 4-,
* De petit, cons., VIII, 32.
2 Mommsen, De coll., p. 59. Madvig fl, p. 275 =- Trad., 1, p. 292) les
appelle : zunftmàssige Vereine ans dem niederen Volke gebildet. Et en
effet, rejeté toujours à la fin de Ténumération, le mot collegia ne peut
indiquer des collèges aussi importants que ceux des sacerdotes publiei.
D'ailleurs, le mot multitudines exclut des collèges qui comptent si peu
de membres. Mais ne s'agit-il pas d'associations électorales? Non, car
celles-ci s'appellent toujours sodalitates et Q. Cicéron en parle dans un
autre chapitre (V, 19). Il s'agit donc de tous les collèges populaires
(collegiorum omnium), parmi lesquels les collèges d'artisans sont les
plus nombreux et les plus importants.
5 Voyez Cic, Pro Mur., 34, 71 : noli igitur eripere hune inferion
generi hominiim fructum officii, Cato, etc.
* Belin-Delaunây attache trop d'importance à la réforme des tribus
opérée en l'an 179 = 575 par les censeurs M. Aemilius Lepidus etM. Fulvius
Nobilior. Tite-Live (40, 51) dit : inutarunt suffragia regionatimque
generibus kominum causisque et ijuaestibus tribus descripserunt . Selon
Belln-Delaunay, « les métiers formèrent dès lors des espèces de collèges
électoraux », et il cite à l'appui les affiches électorales de Pompéi!
Voyez infra, p. 169. Il ajoute : « le cens, comme il était fait depuis 179,
en fondant le vote, dans les récrions et dans les tribus, sur les divisions
(168)
au lieu d'être relégués dans les tribus urbaines et dans la
centurie unique des capite censi, les artisans furent disséminés
dans toutes les tribus et purent figurer au moins dans toutes
les centuries de la cinquième classe, c'est-à-dire dans trente-
cinq centuries de juniores et dans trente-cinq centuries de
seniores. Bien peu devaient être assez riches pour être rangés
dans une classe supérieure ^. Après la réforme des comices au
yi« siècle, on ne parle plus de capite cemi et il est possible
que cette centurie avait disparu '2. Faisant partie de toutes les
tribus, ils eurent leur mot à dire aux comices tributes; dans
les comices centuriates, en admettant même qu'ils formassent
la majorité dans les soixante-dix centuries de la cinquième
classe, il est difficile de comprendre qu'ils aient pu exercer
une influence sérieuse. Il faut croire que Quintus Cicéron n'a
voulu omettre aucun moyen de réussir, si faible fût-il.
A Rome, les comices furent dépouillés de leur compétence
électorale par Tibère, qui remit les élections au Sénat en
l'an 13 3; dans les villes italiennes et provinciales, ils la cou-
des citoyens d'après le rang, l'état et la profession de chacun, avait pro-
bablement donné lieu à la formation de collèges de tribus ; mais n'a-t-il
pas dû avoir comme conséquence inévitable de transformer surtout,
comme les métiers, les collèges de carrefours en associations politiques? »
{Joiirn. de VInstr. pubL, 4861, p. 129.) Mommsen {St.-R., III, p. 185 -=
Trad., VI, 1, pp. 207-208) explique : « Ils insciivirent dans les tribus
rustiques, auxquelles fait allusion le mot regionatim, certains citoyens
non-propriétaires qui y étaient appropriés par leur naissance, par leur
condition juridique et par leur profession. En l'absence de tout autre
renseignement, cette réforme ne peut se préciser de plus près. »
* Sallust., Jw^., 73 : opificia agrestesqiie omnes , quorum tes fidesqiie
in ynanibus sitae erant.
2 II n'est plus question non plus des quatre centuries d'ouvriers et de
musiciens, et les collèges, que ces artisans et ces artistes forment plus
tard, sous l'Empire, ne prouvent pas le maintien des centuries, comme
le croient Willems, Droit public, 5^ éd., p. 163, n. 4. Mispoulet, Instit.
roni., I, p. 47, n. 5. Mommsen, /. /., pp. 287-288 = Trad. VI, I, pp. 325-
326.
5 Tac, Ajin., I, 15.
{ 169 )
servèrent plus longtemps et nous y voyons les collèges d'arti-
sans jouer un rôle assez important, qui vient confirmer, dans
une certaine mesure, le rôle qu'ils avaient joué à Rome même.
L'une des surprises réservées à notre temps par les fouilles de
Pompéi, c'est précisément une image fidèle des élections de
l'an 79 dans un municipe romain. Willems a expliqué la part
qu'y prirent les collèges de tout genre et particulièrement les
collèges d'artisans ^.
Les artisans et les commerçants de Pompéi, dont le Sénat
avait supprimé les collèges sous Tibère, étaient quand même
restés unis et prenaient une part active aux élections. Pompéi
venait d'élire ses duumviri jure dicundo et ses deux édiles
quelques mois avant la terrible éruption qui l'engloutit au
mois d'août 79. La lutte avait été ardente, ces hautes fonctions
avaient été chaudement disputées : les murs déblayés après
dix-huit cents ans portent encore environ quinze cents affiches
électorales, où les sociétés et les particuliers recommandaient
leurs candidats. Un grand nombre de ces réclames émanent
des collèges professionnels. On a retrouvé celles des orfèvres
(aurifices universi, lY 710);
Des marchands de bois [lignari universi, IV 951. 960);
Des charrons ou voituriers ilignari plostrari, IV 485) 2;
Des muletiers [muliones universi, IV 97. 113. 134);
Des fruitiers (pomari universi, IV 149. 180. 183. 202. 206) ;
Des cabaretiers (caupones^ IV 336. 1838);
Des cuisiniers {cidinari, IV 373);
Des boulangers [pistoreSy IV 886) ;
Des pâtissiers [libari, IV 1768 );
Des clibanaires [clihanari, IV 677), qui cuisaient dans des
^ Willems, Élect. mun. de Pompéi, pp. 26 et suiv. C. I. L. IV, Préface.
G. BoissiEii, Relig. rom., II, p. 295. Promenades arch., pp. 368-369.
LiEBENAM, pp. 85-37. H. DE BousQUET DE Florian, Des élections munici-
pales dans l'Empii'e romain. Thèse. Paris, 1891. Overbeck-Mau, Pompéi.
2 Voyez Maué, VereiJie, p. 25, n. 24.
( 170 )
fours, appelés clibanes, des pains renommés pour leur
beauté i ;
Des marchands de volaille [gaUinari, IV 24t. 373);
Des pêcheurs [pisckapi, IV 826) ;
Des teinturiers {ofjedores, IV 864) ;
Des foulons [fullones, IV 815);
Des portefaix [saccari, IV 274, 497);
Des fabricants de blouses {sagari, IV 753) ;
Des barbiers [tonsores, IV 743) ;
Et des marchands de parfums (unguentari, IV 609) 2.
Ces corporations n'avaient jamais été reconnues ; elles
s'étaient formées en dépit de la loi et continuaient d'exister
malgré une défense formelle faite sous Tibère^ : aussi n'osent-
elles pas prendre le nom de coUegia. Il en est de même de ces
collèges religieux que nous trouvons à côté d'elles : les fidèles
d'Isis "^ et les adorateurs de Vénus, patronne de Pompéi s. Il
y avait aussi des cercles d'amusement portant les sobriquets
de tard-buveurs, larronneaux et dormeurs 6, et une société de
joueurs de balle '^. Enfin, on trouve des sodales dont le nom
spécial nous est inconnu 8. Toutes ces associations soutiennent
avec ardeur le candidat de leur choix. Elles vantent ses mérites:
c'est un excellent homme, il sera un bon édile et donnera des
jeux magnifiques 9; on déclare que c'est avec bonheur qu'on
* WiLLEMS, Élect. miiri., p. 30. H. Bluemner, Technologie, I, p. 84.
2 WiLLEMS, op. L, pp. 26 3o. Voyez encore : IV, 490 : agricolae ;
IV 99 : chypari?caepari? (Guarini) thurari? iMommsen) cupari, tonneliers
(LiEBENAM, p. 36). — Plusieurs de ces programmes sont antérieurs aux
élections de l'an 79.
5 Voyez supra, p. 123.
* IV 787. lOM : Isiaci.
s IV 1U6 : Yenerii. Cfr. supra, p. 38, n. 6.
« IV 575-576. 581. Cfr. IV 246 : skarii. Willems. pp. 40-41.
' IV 1147. Voyez supra, p. 51.
8 IV 221. Cfr. IV 275. 673 : discenles. 10783 : forenses.
9 IV 951. 3338.
( 174 )
s'est décidé en sa faveur i. Tant que les candidatures n'ont pas
été officiellement présentées, les collèges le recommandent
{roçfant, cupiunt) seulement comme candidat. Quand les pré-
sentations sont faites, ils proclament qu'ils voteront pour lui
ifaciunt), qu'ils l'appuyeront : Popidium Riifum aed{ilem) pisci-
capi fac{iunt) ^, comme si cette déclaration suffisait pour entraî-
ner les indécis. Souvent ils annoncent qu'ils voteront tous
pour lui, sans aucune exception (universi). Parfois ce sont des
particuliers qui s'adressent par voie d'affiche aux corporations
et les prient de voter pour leur candidat : Vettium Firmum
aed[Uem) o{ro) v{os] f(adalis). Caupones, facite'^, de même qu'on
adressait cette prière à des particuliers influents ■^.
Tous ceux qui croyaient jouir de quelque autorité, des
femmes même, recommandaient leurs candidats^. Il faut sup-
poser que les collèges aussi croyaient avoir une influence
sérieuse sur les élections, mais il y allait surtout de leur propre
intérêt; car les candidats appartenaient aux plus riches familles,
dans lesquelles les collèges choisissaient aussi leurs patrons 6.
Selon la juste remarque de G. Boissier, ce n'était souvent pour
les uns qu'une manière de témoigner leur reconnaissance et
* IV !221 : cupiens fecit.
2 IV 710.
^ IV 826. Sur le sens de rogant, cupiunt, faciunt, voyez C. I. L. IV,
p. il. DuRUY, V, p. 156. G. Boissier, Op. c, II. p. 332. Willems, Op. c,
pp. 79-85. Overbeck-Mau, Op. c.
* IV 183. Cfr. IV 336 : aux caiipones; 609 : aux unguentari ; 1147 :
aux pilicrepi. C. l, L. IV, p. 10.
^ Les mœurs romaines admettaient cette intervention des femmes.
Seneca, Consol. ad Helv., 17 : niliil mores obstiterunt , quominus pro me
ambitiosa fieret. Les femmes de Pompéi qui signent des affiches (IV 111.
3294) seraient, selon Willems (pp. 14 et 47) des cabaretières et leur but
serait d'attirer les partisans du candidat. Voyez une autre conjecture
dans DE Bousquet de Florian [Op. c, p. 42) : il suppose que Cosellius
Marcellus, qu'elles patronnent, était l'Alcibiade de Pompéi et que mainte
Aspasie s'intéressait à son élection î
® Voyez infra, chap. II, § 6.
( 172 )
pour les autres, de flatter un candidat qui n'avait pas d'échec
à craindre.
Quant aux membres de ces associations, chacun disposait
d'une voix, car les élections se faisaient au suffrage universel,
et l'électeur votait dans sa tribu ou circonscription électorale;
pour être élu, il fallait être nommé par la majorité absolue
des bureaux électoraux.
On le voit, les murs de Pompéi, dégagés après tant de
siècles des cendres du Vésuve, nous offrent un tableau vivant
de ces mœurs si curieuses, si semblables aux nôtres; nous ne
nous doutions guère de cette vie municipale si intense et si
animée. Sans aucun doute, les élections se passaient de la
même façon dans tous les municipes et dans toutes les colo-
nies; mais le temps en a effacé tout vestige. Les depiîiti de
Pompéi nous fournissent une preuve du rôle politique des
artisans et montrent qu'ils concouraient à l'élection indivi-
duellement, et que, comme corps, ils n'épargnaient aucune
peine pour faire passer les candidats qui avaient leurs sympa-
thies. Quant à ces sympathies, elles avaient pour origine, non
pas une raison politique ni religieuse, mais l'intérêt parlicu-
lier du collège, surtout les services qu'on lui avait rendus ou
qu'il espérait, et les libéralités qu'il avait reçues déjà ou qu'il
attendait dans l'avenir '.
Quand on voit leur ardeur, on est tenté de croire que leur
intervention exerçait une influence considérable sur le résul-
tat du scrutin. Mais quelle différence cependant avec nos
corporations du moyen âge, qui dirigeaient nos plus grandes
communes!
On admet généralement que dans les colonies et les muni-
cipes le peuple élut les magistrats locaux pendant deux siècles
encore, après la réforme qui s'accomplit à Rome sous Tibère.
* Les éloges que les collèges font des candidats ne diffèrent pas de
ceux que leur adressent les particuliers; la rédaction de leurs affiches
ne nous apprend pas les motifs qui les guidaient.
( "3 )
Cependant l'organisation municipale tendait aussi à devenir
de jour en jour plus aristocratique; peu à peu les comices
furent dépossédés du droit électoral, et au Kl® siècle, c'est
la curie ou le sénat municipal qui nomme les magistrats; les
comices n'ont plus que le droit de ratifier le choix par leurs
acclamations. Alors on voit souvent le peuple demander au
sénat la nomination d'un candidat préféré et il n'est pas rare
de rencontrer des dnumviri ex postulatione populi. Or, les
inscriptions prouvent qu'à cette époque encore les candidats
recherchaient la faveur des corporations professionnelles :
c'était pour eux un élément de succès que d'être populaires
dans cette partie importante de la plèbe ^.
Nous devons ajouter que, selon Mommsen '^, la date de cette
révolution qui dépouilla les comices municipaux de l'élection
effective, remonte nu l^'" siècle et suivit de près la réforme de
Tibère. Contrairement à l'opinion générale, il soutient qu'à
Pompéi même, en l'an 79, le peuple n'avait que le droit d'ac-
clamer les magistrats élus par la curie ; tel serait le sens du
mot facere dans les affiches électorales. Cela nous semble peu
vraisemblable; mais les collèges d'artisans n'en joueraient
pas moins un rôle important : leurs recommandations, au lieu
de s'adresser aux citoyens, s'adresseraient aux décurions.
C'est aussi le lieu de parler ici d'une particularité vraiment
curieuse que nous trouvons à Philadelphie, en Lydie. Les
* WiLMANNS, 2224 = Allmer, M. de Lyon, II, 144. Voyez de Boissieu,
Inscr. de Lyon, p. 380. C. I. L. XI 418, à Ariminum, à un // vir :
coUegia fabr. et centonar. ex aère conlato, qiiod in honore 11 viratus
industriae (sic) administrato omnibus plebis desideriis satisfecit. Voyez
nos Indices (Honneurs décernés à des magistrats municipaux).
2 St.-R., III, p. 350 = Trad. Giraud, VI, 1, 399-400. Cfr. Duruy, V,
pp 83 et suiv. Nous devons avouer que certains détails de ces affiches
semblent peu sérieux ; plusieurs d'entre elles ne viennent certainement
pas de vrais électeurs, par exemple celles qui sont signées par des
femmes ou par Vénus elle-même (IV 546). Il est vrai que dans ces pro-
grammes on ne trouve que les mots rogare, cupere et non facere (voter
pour). WiLLEMS, Op. c, p. 28.
( in )
ouvriers en laine et les cordonniers y portent les noms d'iepà
cpL>)rj Twv spioupywv et tepà cpu^Vi twv c7xut£0)v •. Une inscription
parle de sept phyles ou tribus sacrées existant dans la même
ville 2. Ces phyles, comme le dit Boeckh, ne peuvent être que
les subdivisions du peuple; il en résulte qu'à Philadelphie les
corporations d'ouvriers formaient la base de la division poli-
tique. Il faut, dit A. Wagener, descendre jusqu'aux communes
lombardes et flamandes pour trouver une institution sem-
blable. Tandis'qu'ailleurs les ouvriers {dpyoLoeïç) ne formaient
qu'une division du peuple, à Philadelphie les tribus génétiques
se confondaient avec les corporations d'artisans ou étaient rem-
placées par elles. C'est un fait exceptionnel que Wagener
explique par ce que raconte Strabon. A l'époque de cet écri-
vain, les tremblements de terre avaient fait fuira la campagne
la plupart des habitants. Quelques-uns restèrent; c'étaient
sans doute de pauvres ouvriers, qui se donnèrent peut-être
une constitution démocratique en identifiant les collèges avec
les tribus 3.
C'est là une particularité unique dont on ne retrouve pas le
pendant dans le reste de l'Empire romain. Ailleurs, en atten-
dant que la plèbe perdît le jus suff'ragii, le retour annuel des
comices ne devait pas peu contribuer à entretenir dans la classe
ouvrière ce goût de la politique et même des mouvements sédi-
tieux que les empereurs redoutèrent si longtemps et dont il
nous reste à parler.
En effet, à Rome surtout, vers la tin de la république, l'in-
fluence illégale de la classe ouvrière sur la politique fut plus
importante encore que sa participation légale. Nous ne pou-
vons pas remonter plus haut que le Vll« siècle; jusque-là les
1 Lebas, 648 (= C. /. Gr. 342^2). 6m.
2 C. I. Gr. 342i2, avec la note de Boeckh. Les sept phyles sacrées
votent des statues, et les ouvriers en laine sont chargés d'en élever une.
Ailleurs c'est la ;3ouX-n qui décrète la statue et confie à un collège le soin
de l'ériger {Bull, de corr. helL, II, 593, n. 1. Cfr. Lebas, III, 1743").
3 A. Wagener, Rev. de l'Instr. publ. en Belg., 1868, pp. 10-11. Bull,
de l'Aead. roij., 1889, vol. 59, 1, p. 413. Strabo, XIII, 4, 10, p. 6^28.
( 175 )
artisans et leurs collèges avaient vécu dans l'obscurité, et
l'amour du désordre n'avait pas pénétré dans leurs rangs. Sur
la foi de Cicéron, on suppose généralement que la petite bour-
geoisie de son époque avait gardé cet esprit conservateur i;
nous croyons que c'est une erreur et il nous sera facile de
montrer que les artisans, les petits commerçants et les « taver-
niers » furent mêlés bien des fois, pour ne pas dire toujours,
aux agitations qui troublèrent l'ordre public ou qui faussaient
le résultat du scrutin par la violence.
On ne saurait se figurer quel aspect présentait le Champ de
Mars en ces temps d'anarchie et ce qu'étaient devenus les
comices romains-. Les citoyens d'une tribu votaient dans une
autre 3. « Les Grecs et les Juifs, les affranchis et les esclaves
étaient dans les réunions publiques les visiteurs les plus habi-
tuels et les braillards les plus ardents, et, quand on allait aux
voix, le nombre de ceux qui avaient constitutionnellement le
droit de voter, formait la moindre partie de l'assemblée 4'. »
Cicéron, parlant de ceux qui avaient voté son exil, dit à Clo-
dius : (( Prends-tu pour le peuple romain cette assemblée com-
posée de mercenaires ->? » Or, ceux qu'il qualifie ici de merce-
naires et ailleurs de brigands *j, étaient en grande partie des
' Cic, In Cat., IV, 8, 17 : Mullo vero maxima pars connu, qui in
tabernis sunt, immo vero (id enim potius est dicendum) genus hoc univer-
siuu amantissimum est otii. Etenim omne eorum instrumejitiim, omnis
opéra atque qiiaestus frequentia civiwn siistentatur, aliiur otio : quorum
si quaestus, occlusis tabernis, minui solef, quid tandem^ incensis, futu-
runi fuit? Voyez Duruy, V, p. 159, n. ± Friedlaender, P, j). 271.
2 Madvig, I, ]). 273. Trad. Morel, L pp. 200 et suiv.
"' Cic, Pro Sest., 52.
* MoMMSEN, Hist. rom., trad. de Guerle. vol. VI, p. 365. Cfr. Roulez,
Discours sur les mœurs électorales de Rome Xnix. de Gand; Ouverture
des cours, 1858), p. 18.
5 De domo, 33, 89 : An tu popuiiim Romanum esse putas illum, qui
constat ex iis, qui mercede condueuntur? . .. Quon tu tamen populum
nisi tabernis clausis frequentare non poteras . . . Multitudinem liominum
ex servis, ex conductis, ex facinerosis, ex egentibus congregatam !
6 Ibid.^ 20, 53 : nisi omnia per servos latronesque gessisses.
( 176 )
artisans. En effet, nous voyons figurer les artisans dans tous
les désordres, dans toutes les émeutes ; ils formaient une partie
importante de cette « sentine » de Rome, qui se mettait aux
gages de tous les perturbateurs. Sans doute, cette populace
comprenait d'autres éléments : des paysans ruinés, une foule
d'étrangers, véritable lie de l'univers ^, qui employaient toutes
les fraudes pour usurper le droit de cité 2, enfin une multitude
d'esclaves fugitifs qui se cachaient dans cette ville sans police 3.
Mais les artisans et taverniers [opifices et tabernarii ^) sont tou-
jours au premier rang. En l'an 108, ils quittent leur ouvrage
et leurs ateliers pour faire cortège à Marins qui brigue le con-
sulat s. En l'an 63, quand les complices de Catilina sont en
prison, à qui fait-on appel pour les délivrer? Aux esclaves et
aux ouvriers 6. Us étaient donc faciles à ameuter. Sans doute,
Cicéron prétend qu'ils aimaient la paix, qui leur était néces-
saire pour gagner leur vie; mais l'orateur veut rassurer le
Sénat et il n'est pas sincère. Il dit aussi que les esclaves sont
prêts à défendre la république ; or, nous savons que les esclaves
répondirent en masse à l'appel de Catilina '7. Du reste, Cicéron
se contredit ailleurs, en affirmant formellement qu'il était aisé
de soulever les ouvriers et les taverniers 8. Pour exciter des
1 LucAN., VII, 399-401 : nulloque fréquentes cive suo Romam, sed
mundi faece repletam.
2 G. BoissiER, Cicéron et ses amis, p. 70.
3 Wallon, II, p. 372.
* Ou bien : operae, operarii.
^ Sall., Jug., 73 : opifices agrestesque omnes, quorum, res fidesquein
manibus sitae erant.
6 Sall., Cat., 50 : liberti atque pauci ex clientibus Lentuli diversis
itineribus opifices atque servitia in vicis ad eum eripiendum sollicitabant.
Cic, In Cat., IV, 8, 17 : lenonem. quemdam Lentuli concursare circum
tabernas. Ibid. : occlusis tabernis.
7 Cic, /. L, Sall., Cat., 24. 30. 44. 56.
8 Cic, Pro FLacco, VIII, 17 : quod Mithridates se velle dixit, id sutores
et zonarii conclamarunt. Ibid., VIII, 18 : opifices atque tabernarios,
atque iilam omnem faecem civitatum quid est îiegotii concitare? De domo,
V, 13 : quid est Sergius? concitator tabernariorum .
( 177 )
désordres, dit-il encore, les tribuns séditieux avaient coutume
de fermer les boutiques ^. C'est ce que fait Clodius, en l'an 58,
quand il veut exiler Cicéron 2, et c'est le moyen qu'emploie le
tribun Minutius Plancus, en l'an 52, quand il veut empêcher
son adversaire de plaider pour Milon 3.
Aussi pensons-nous que la plupart des collèges d'artisans
furent supprimés en l'an 64 comme contraires à la sûreté
publique -K On objectera que, dans les passages cités, on parle
des artisans et non de leurs collèges ». Cela est vrai, mais nous
ne saurions admettre que ces artisans si turbulents étaient
précisément ceux qui étaient restés en dehors des collèges. La
plupart des métiers formaient alors des corporations 6, dont la
grande majorité des artisans faisaient partie. Il était d'autant
plus facile de se servir d'eux qu'ils étaient enrégimentés dans
des corps divisés en centuries et en décuries, ayant leurs prési-
dents et leurs décurions. Nous ne soutenons pas, du reste, que
dans tous les cas on s'adressait à leurs collèges, mais on devait
le faire le plus souvent. Nous avons même un exemple certain
de l'intervention des collèges comme corps; il est vrai que
cette fois-là ils furent du côté de l'ordre, mais cela prouve
au moins que les collèges étaient mêlés, comme tels, aux
troubles de cette époque. Il s'agit de l'exil et du rappel de
Cicéron. Ce fut en l'an 58 que Clodius, voulant se préparer
des auxiliaires, rétablit les collèges. Pour bien comprendre le
1 Cic, Acad. quaest., IV, 47, 144 : ut seditiosi tribuni soient, occludi
tabernas jubés. Voyez ci-dessus : De domo, 33, 89.
2 De domo, 21, S4 : cum edictis tuis tabernas claiidi jubehas, non vim
imperitae muUitudinis quaerebas ? Cicéron dit du consul Gabinius ^an o8) :
venditabat se operis atque ab us se ereptum, ne de ambitu causam diceret,
praedicabat, etc. {Pro Sestio, VIII, 18.)
3 AscoNius, In Milon., §§ 28 et 29 fed. Kiessling et Schoell, p. 35) :
Postero die clausae fnerunt tota iirbe tabernae. Gic, Pro Mil., §§ 3 et 71.
A. Wagener, édition de ce discours, pp. xxiv et suiv. (Mons, Manceaux.)
* Voyez supra, pp. 98 et suiv.
^ LiEBENAM, p. 28.
« Voyez supra, pp. 87 et suiv.
Tome L. 12
(178)
rôle qu'ils jouèrent après la lex Clodia de collegiis, il faut se
rappeler quel parti le tribun tira de sa loi ^. Les anciens col-
lèges purent renaître, mais, sous prétexte de fonder des collèges
nouveaux, Clodius voulait surtout organiser la plus vile popu-
lace de Rome et former de véritables régiments d'esclaves et de
misérables. C'est de ces bandes ainsi recrutées qu'il se servit
dans sa lutte acharnée contre Cicéron et Caton, et plus tard
contre Pompée 2. Les véritables collèges, qui s'étaient rétablis,
prirent aussi parti dans cette lutte, mais ce fut en faveur de
Cicéron, qui avait fini par ne pas s'opposer à la lex Clodia.
Preuve évidente que les artisans ne se proposaient aucun but
de réforme sociale; ils ne songeaient nullement à l'amélioration
de leur condition , ils ne cherchaient dans ces désordres
qu'un profit passager ou l'intérêt de la corporation. S'ils
avaient voulu une révolution sociale, ils se seraient mis du
coté du tribun socialiste.
Cicéron fit tous ses efforts pour échapper à l'exil : ses par-
tisans, les sénateurs même, prirent le deuil. Tous les corps
politiques, toutes les associations rendirent des décrets en sa
faveur : JSullum erat Italiae municipium, nulla colonia, niilla
praefeclura, nulla Bomae societas vectigalium, nullum collegium,
aut concilium oui omnino aliquod commune consilium quod non
tune lionorificentissime de mea salute decrevisset 3. Mais grâce à
ses bandes, Clodius était maître des comices, et l'exil de Cicé-
ron fut prononcé. Quelques mois plus tard. Pompée parvint
à susciter un nouveau mouvement en faveur du grand citoyen
qui avait payé si cher son dévouement à la patrie. Les corps
' Voyez supra, pp. 9o et siiiv.
- Cic, Pro Sest., 12, "27 : qui — lionestissimos équités romanos, depre-
catores salutis meae — operarum suariim gladiis et lapidibus objecerit.
îbid., 17, 38 : erat autem mihi contentio non ciini victore exercitu, sed
cum operis conductis et ad diripiendam urbem concitatis. Ctr. Ibid., 27,
59 : cum. videant per tribunum aliqiiem et sexcentas opéras se fortunis
spoliari (il s'agit des rois étrangers). Supra, p. 97.
5 Oic, Pro Sestio, 14, 32. Voyez Mommsen, De coll., p. 78.
( 1T9 )
politiques et les associations renouvelèrent leurs décrets : on
eût dit, selon ses paroles, que la république elle-même le rap-
pelait par son deuil! En lisant son récit, on voit clairement
que les corps de métiers ne firent pas exception : Omnia illa
senatus consulta, jwpulijussa, Italiae totius, cundarum societa-
Uim, collegiorwn omnium décréta de me reipiiblicae causa esse
fada faleamur '. Et ailleurs il dit encore : Quod enim est in
terris tantum tantidumve consilium quod non de meis rébus gestis
ea, quaemihi essent optatissima etpulcherrima, judicaverit ? Puis
il cite la plus auguste assemblée de l'univers, le Sénat; ensuite,
l'ordre équestre, qui occupe le second rang, avec ses sociétés de
publicains, et les scribes; enfin il ajoute : yullum est in hac
urbecoUegium, nullipagani aut montani, — qui non amplissime
non modo de sainte mea, sed etiam de dignitate decrevennt '^.
Dans tous ces passages, il s'agit encore une fois de tous les
collèges populaires en général et surtout des collèges d'arti-
sans 3.
Tels sont les faits précis que nous connaissons. Avec César
et Auguste, la situation changea, mais la classe ouvrière con-
serva longtemps encore ce goût pour les séditions et les
désordres : sans aucun but politique ni social, elle se mêlait
aux troubles de tous genres, aussi bien dans les villes de pro-
vince qu'à îlome ^. Sans doute, comme Mommsen le fait
remarquer o, le changement de la constitution fit beaucoup
plus que les lois prohibitives pour mettre un terme aux
troubles politiques auxquels les associations participaient.
La suppression des comices par Tibère priva les collèges
populaires de Rome de toute influence électorale et leur
enleva les fréquentes occasions de se mêler aux violences et
« Cic, In Va tin., III, 8.
- Cic, De domo, 28, 73. Cfr. In Pis., 18, 41 : cum de me — eu décréta
publicanoriun, ea collegiorum (fuerinl).
5 C'est aussi l'avis de Mommsen, /. /., et de Liebenam, p. 25.
* CoHN, p. 91. DE BoissiEU, pp. 380-381.
3 Rom. Ge.wh., IIP, p. 514.
( 180 )
aux séditions dont le forum, le Champ de Mars et les rues
avaient été le théâtre. D'ailleurs, leur nombre était fort res-
treint dans la capitale depuis la lex Julia. Mais en Italie et
dans les provinces, les corporations professionnelles, souvent
établies sans autorisation, continuèrent à prendre part aux
agitations excitées par des rivalités de toutes sortes, aux atten-
tats contre la vie et les biens des citoyens. Elles n'étaient pas
seules dans ce cas, mais par leur nombre et par leurs habi-
tudes turbulentes, elles se distinguèrent sans doute parmi
ces collegia illicita, ces collegia sodalicia et ces hétéries que les
empereurs proscrivirent si rigoureusement. Assurément, à
Rome même, elles n'étaient pas restées étrangères aux crimes
qui provoquèrent la lex Julia. La révolte des ouvriers de la
monnaie, qui éclata plus tard, sous Aurélien, est restée
célèbre; il fallut 7,000 soldats pour l'étouffer i. En Italie,
rappelons les rixes sanglantes de Pompéi, qui firent sup-
primer les collèges non autorisés de cette ville. Si Trajan
redoutait les collèges de fabi en Bithynie, c'est que, selon ses
propres paroles, tous les collèges dégénéraient en associations
factieuses; il constate que toutes les villes de cette province
avaient été troublées par des associations de ce genre. Les cor-
porations d'Alexandrie furent interdites pour le même motif
par Flaccus 2, Remarquons que ces troubles n'avaient pas
un caractère politique; les collèges ne voulaient pas renverser
la constitution : c'étaient les réjouissances publiques ou les
fêtes des collèges qui étaient l'occasion de ces violences, et ces
désordres, purement locaux, n'étaient pas un danger pour
l'Empire. II sera question au chapitre suivant des grèves dont
il est parfois fait mention.
On ne saurait dire au juste jusqu'à quelle époque dura cet
esprit turbulent des collèges : toujours est-il que les auteurs
du Digeste ont cru devoir rappeler à plusieurs reprises les lois
• Vopisc, Vita AnreL, 38.
2 Voyez supra, p. 1*27, n. 3, et remarquez les mots : xol; TrpàyfjLaTiv
è{j.7rapotvoûaai.
( 181 )
édictées contre les associations factieuses. Il est à supposer
cependant que cet état de choses dut cesser à mesure que les
collèges entraient au service public et que la ruine les affai-
blissait. Quand ils furent écrasés par les charges, ils ne son-
gèrent jamais à se révolter en corps contre l'oppression; les
corporati et les collecjiati du Bas-Empire se contentaient de
déserter individuellement pour échapper à une condition
devenue intolérable t.
De ce qui précède, nous pouvons tirer une double conclu-
sion. D'abord, ni par leurs suffrages ni par des moyens
illégaux, les artisans ne s'efforcèrent d'obtenir des réformes
destinées à améliorer leur condition politique ou sociale;
mais, d'autre part, sur le terrain politique comme ailleurs, ils
essayèrent de tirer parti de la force que donne l'association.
A Rome même, leur rôle dans la vie publique cesse avec la
chute des institutions républicaines, tandis qu'il dure un peu
plus longtemps dans les autres villes. On voit que ce n'est pas
dans la politique qu'il faut chercher l'origine ni le but des
corporations professionnelles.
§ 2. But économique ou professionnel.
Sommaire : LEUR but n'est pas la conservation des procédés industriels,
NI l'apprentissage, ni l'exploitation en commun d'un métier. — ils pro-
fitent de l'association pour obtenir des avantages du pouvoir, pour
PROTÉGER leurs INTERETS CONTRE LES ESCLAVES ET CONTRE LES MÉTIERS
rivaux.
C'est au point de vue économique surtout qu'on n'a pas
manqué de rapprocher les collèges romains de ces corporations
fondées au moyen âge, qui eurent, jusqu'à la fin du siècle
passé, le privilège d'exercer seules, en une ville, une industrie
* Voyez nie partie, ch. II.
( 182 )
déterminée i. On a cru que les collèges romains avaient un
but analogue : la protection du métier, le perfectionnement
et la conservation des procédés industriels et jusqu'à des
écoles d'apprentissage. On a même voulu en faire des sociétés
commerciales constituées pour des entreprises communes.
Nous croyons que toutes ces affirmations sont sujettes à
caution.
Dans son Histoire romaine, Mommsen suppose que l'institu-
tion des collèges de Numa atteignit le même but que les cor-
porations de prêtres, qui leur ressemblaient par le nom. « Les
hommes habiles s'assemblaient, dit-il, pour conserver plus
solidement et plus sûrement leurs traditions. Il y eut sans
doute quelque moyen d'exclure les personnes incapables;
cependant nous ne trouvons pas de trace de tendance au
monopole, ni de système de protection contre la mauvaise
fabrication. » Aussi pense-t-il que ces corporations furent de
bonne heure d'une grande importance pour la vie urbaine de
Rome et pour sa position devant les territoires latins : elle ne
peut être mesurée, dit-il, par l'état misérable où l'industrie
latine se trouva plus tard. Mais le savant historien est obligé
d'ajouter : « Du reste, il n'y a pas de côté de la vie romaine
sur lequel les informations soient plus rares que sur celui
des industries 2. »
Cette conjecture, basée sur l'analogie des collèges sacer-
dotaux, fût-elle vraie des collèges primitifs, ne saurait être
admise pour les collèges du Haut-Empire. Choisy 3, parlant des
' Hubert-Valleroux, Nouveau Dict. cVécon. polit, de L. Say, I, p. 604.
2 Rom. Gesch., P, p. 127 (1854). F, p. 192. Trad. de Guerle, I,
pp. 231-232. Trad. Alexandre, p. 262. Cfr. Herzog, Gallia Narb., p. 198.
Staatsverf., I, p. 1038 : Die Form des Zunft vermittelte die richtige
Uebung iind Ueberlieferung des Gewerbes. L'opinion contraire semble
dominer. Cfr. Madvig, trad. Morel, III, p. 148 : « Il ne faudrait pas
forcer l'analogie (avec les ghildes du moyen âge) et admettre qu'il existât
des examens de compagnonnage et de maîtrise, des restrictions rigou-
reuses de la liberté de l'industrie, etc. » Liebenam, p. 257.
^ Art de bâtir, p. 200.
( 183 )
corporations de métiers relatifs à Tart de bâtir, a cru pouvoir
dire que dans chaque collège il y avait des règlements fixant
les méthodes de cet art et consacrant les leçons du passé. La
lex collegii, dit-il, comprenait donc aussi des prescriptions
techniques, semblables à ces statuts qui interdisaient à nos
anciens corps de métiers des procédés vicieux ou rendaient
obligatoires des méthodes traditionnelles. Gérard n'a pas hésité
à généraliser cette assertion : il aftirme hardiment qu'on avait
réglementé de même tous les métiers i.
Sur quoi s'appuient-ils? Nous verrons qu'il n'y a rien de
semblable dans les leges ni dans les décréta des collèges que le
hasard nous a conservés. On cite une lex Metella l'ullonibus
dicta, dont parle Pline l'Ancien - : mais cette loi, qui date de la
république et qu'on a prise à tort pour les statuts du collegium
fullonum, prescrit seulement les procédés techniques que
devaient employer les foulons. Dirksen a déjà fait remarquer 3
que c'est une mesure contre les fraudes des artisans individuel-
lement, et qu'elle n'a rien de commun avec le contrôle qui pou-
vait être exercé sur les collèges comme corps. On allègue
encore une loi qui précisait les saisons où les travaux de
maçonnerie pouvaient se faire dans les aqueducs, et les périodes
* GÉRARD, p. 41. J. Oehler dit des collèges de l'Asie Mineure : « In
jeder Genossenschaft bildeten sich cjeiuisse Satzungeii fur die Uebernahme
und Aitsfiihrung von Arbeiten » (Erânos Vindobonensis, p. 281). Il cite :
C. I. Gr. 3467 = Lebas, III 628, où il est question de querelles entre
entrepreneurs et ouvriers, ipyoSotai et ipyoldooi, et où le inagistrianus
L. Aurelius de Sardes s'adresse aux o'.xooo[j.o'., qui lui communiquent
leurs orip-oaia xavov.xâ, c'est-à-dire le règlement d'après lequel les travaux
sont entrepris et exécutés. Mais il s'agit du cinquième siècle (an 459),
c'est-à-dire d'une époque où les collèges ont pris un autre caractère, que
nous décrirons dans la troisième partie. Les lois qu'il cite (Cod. Just.,
IV, 59. VIII, 10. 12, 9) sont du même temps. Le Livre du préfet ou édit de
Léon le Sage (publié par Nicole, voyez supra, p. 26) est encore bien
postérieur, puisque le règne de ce prince va de 886 à 912.
2 PuN.,//. .Y.,3o, 17,'l97.
5 Dirksen, p. 75. Coilra : Xissen, pp. 297-303.
{ 184 )
où il fallait les suspendre. Mais ces règlements, comme le
précédent, n'avaient pas été imposés aux corporations: ils
concernaient les entrepreneurs de travaux publics i.
Nulle part nous n'avons trouvé la moindre trace de méthodes
imposées soit par l'autorité, soit par décret du collège lui-
même -. On peut croire qu'en rapprochant les hommes du
même métier, en multipliant et en resserrant entre eux les
relations, les collèges contribuèrent, même en l'absence de
tout règlement et de toute contrainte, à perfectionner, à con-
server et à transmettre l'habileté technique, à hâter le progrès,
et peut-être à rendre traditionnel dans certaines localités
l'exercice de tel métier ; mais on ne saurait en fournir aucune
preuve 3.
Il n'est pas non plus exact de dire que les corporations
organisaient l'apprentissage. Krause -^ s'est laissé tromper par
les scholae des collèges, qu'il prend pour des écoles où l'on
aurait instruit les apprentis. Mais nous verrons que ce mot
désigne le lieu de réunion, le local du collège •">. On pourrait
' Frontin., De aquaed., 123.
* Orelli (4136, note) dit aussi : A7i vero collegiorum rectores ac
magistri eo giioque offieio functi sint ut in ordinem cogèrent castiga-
rentqm collegiatos desidiosos et artem suani prave exercentes — nos
qiiidem ncscimiu'!. Sur les décrets des collèges, voyez cliap. IL
5 BuECHSENSCHUETZ, Die Hauptstàtten, p. 3.
^ Krause, p. 139, note. Cfr. Walter. n. 400 : mit Sclmlen vei'selien.
Levasseur, 1, p. OD : « Composé d'ouvriers, le collège se recrutait par
V apprentissage. » Ibid., p. 55 : « Quand il avait appris son métier,
l'ouvrier était admis dans la corporation. » Ces affirmations ne reposent
sur rien.
s IX 5568 : Schola Aug(usta) colleg(ii) fabror(um) tignar(iorum), à
Tolentinum. Ce n'est pas une école honorée du titre et du privilège
d'école impériale. Le mot Augustus est ajouté aux noms des dieux
honorés par les collèges et sans doute aussi aux objets qui leur appar-
tiennent, en signe de loyalisme (Maié, Die Vereine, p. 28. G Boissier,
Journal des Savants, 1887. p. 271). Ce collège fête aussi l'anniversaire
d'Auguste, le 21 juillet (IX 5568). - A Hiéropolis, en Phrygie, on trouve
une spyaata ôpsixaat'.xTj se rattachant au collège des teinturiers en
( 1«fi )
all('*}^|j('r \U'Ai\-(''ln'. «'iirorf, l<; rioiri (\ni: prrtriiK-fit ()r<;s(jij(; tous
l<^s collA^cs fl(î lî('*n(''vci)t, (\\i\ s';i|)[)i llt-ril sludia ^, syrioriyrix; de
colliufin, (îl l<',s discniles'^ rju'ils r<',nr<;rinrîr)t. Mais l<; S(;r)S (j(; ces
mots <'st tn)[) oiisciir [)()ur qu'on [)ijissr; (îd tirer rjuelquf; eon-
cliisioii; l(M;arîi(l<''r<î iriêjiie ries associations (ïc ccHi', vilh; est
fort douteux et il es! peu [iiohahle fju'elles soient de^ collè^fîS
d'arlisans.
On a voulu fairfî aussi d(îs coliïî^es romains des associatir)ns
induslri(;lles, consliluées pour (txfTcer leur m/îtifîr (;n com-
mun sous la din-ciion d(* IfHirs ctiefs. I)ans leurs .sï;//o/^;é;, ri it
Kraus(3, ils d<''lil)(*raient sur roxëcution et la n'fjartition des
travaux cntn'.f)ris; Nîurs décurir>ns assignaient à ("hacun sa
tûch(î. Orelli croit que; l'association assurait aux r)uvriers leur
pain quotidien d protégeait leur fortune •'. S(;lon Cfioisy, les
Coll(';g(;s sedivisai(;nt (;n groupes qui entreprenaient des travaux
sous la conduil(; et la responsabilité pécuniaire d'un ouvrier
plus habile ou plus riche; celui-ci traitait avec les magistrats et
jouait le rôh; d'entrepreneur ''^.
\>()Ui\n(t (l'iAMSAY, liei'. arch., 1887, p. 'iil'À. Lkijas, lf>87j Ot serait, sdon
A. WAGEMiU (li(w. de l'Inslr. jmhL en lieltj., 1808, |). 8. HuU. de CAcad.
rui/. de lielf)., mai 1889, p. 4 II;, urio corporation do jounos ouvriers, un
atelier d'apprentissage pour les enfanls jjauvres. Sur Opéfx[j.a-:a {infé-
rions condilionis liheri), voyez Hokckh, C. I. (ir., ad n. 3318. On pour-
rait y voir une institution de bienlaisance ; en tous cas, il s'agit d'une
particularité comme en présentent les collèges de l'Asie Mineure, et l'on
ne peut rien en conrlure pour les collèges romains en général.
< A liénévent : IX 1003 1081-1087. CA): J)k Vita. Anlifj. fknev. Dans
cette ville, le collège des jiwenes s'appelle aussi sludiuni. A Pisaururn :
Wu.MA.N.Ns, ^2112 ; Sludia Ayollinar. et Cunthar. CAr. XI 0-22-2.
2 IX 1087 : discens Av(jiLstiani studiis (= studii) amore rejdefj/s, h
Bénévent. Cfr. V 82, h Pola, des discentes, qui appartiennent peut-être
au collège des dendrojjhores Chez les gladiateui-s, on trouve des doctores,
mais en delior.; des collèges VI ;i3:i 03-2. Cfr. VI 80.-;9. VIII 2oo3.
5 Khaj.sk, /. /., et p. i04. Oiîki.li, 4130, note. Cfr. Nissk.n, /. /
* CiioisY, Art. de bâtir, p. i\)(y. A fiart, p. 13. 11 dit encore : « Aux
subdivisions administratives ou religieuses des collèges s'ajoutait une
autre subdivision fondée sur la nature même des occupations auxquelles
(186)
Ce n'est là qu'une conjecture. On ne voit nulle part qu'une
corporation entreprenne des travaux en commun; au con-
traire, chacun travaille librement et pour son compte 'i, à tel
point que, quand les membres de certaines corporations se
mirent au service de l'État, ce fut longtemps en leur nom privé
et non comme corporations. Nous aurons à parler plus tard
des corvées dont les collèges furent chargés avec le temps au
se livraient les membres d'un collège. Les collèges se répartissent en
classes d'ouvriers distinctes les unes des autres et dont les attributions
nettement tranchées accusent la division extrême qui existait dans les
opérations de l'industrie. « 11 se demande si la division du travail ne se
traduisait pas dans Torganisation des collèges par des catégories très
marquées, à savoir les centuries et les décuries. — Tout cela est de
l'imagination pure (Art de bâtir, p. 198; à part, pp. 15-16). Sur la
composition des collèges et sur les décuries, voyez le chap. II.
A Iconium, en Lycaonie, les ouvriers du bâtiment se divisent en quatre
axé{jL[jiaTa {zoiç Tsaaapatv axéfjLaaaiv xt^[(;] o'./.o[So[JL]ta<;, xal 'Hau^itjj
©eoôoa^ou tw 7:poa-àTïi, dédicace par deux Tsyvsîxai, originaires de Doki-
meion), présidés par un irpojxàxrjc; unique (C. /. Gr., 3995''). Rien ne
prouve que ces ax£fjiij.axa correspondaient à la division du travail, ni
que ce prostate était un directeur des travaux exécutés en commun.
Ailleurs on trouve à la tête d'un collège un 7rpc5xoç ipyxxriyôç (sptoîrXu-
xtov èpyaaîa, foulons, à Hiéropolis ; voyez : Mouastov xal ^ioXioÔtqxt) xtj;
sùayyeXixTiç (jyoXriç, \\ 79, n. 489), et un EpyîTrtaxàxTQç (Aùp. Qzô^ikoç
Muzikri'joCio:; oofJLOxsxxwv ùirô spYîTnaxàxTjv — Eùxt^''ÔT)v, LOLLING, Athen.
Mitth., VI, 227. Lebas, III, 1743°). Lolling dit du dernier : Derselbe
stand zu Tlieophilos im Ver/iàltniss des Bauunternehmers ziuri Baufuhrer.
Mais d'abord rien ne prouve que dans cette inscription il s'agisse d'un
collège; ensuite, repYaxïiyo'c; ou EpysTriaxàxTj; est tout simplement le prési-
dent des collèges qui s'appellent souvent spyov ou spyaaîa (Eranos
ViNDOB., p. 279). Cfr. C. I. Gr., 3498 : sTctaxriaàfjLevov xou l'pyo-j (xwv
pacpÉtov); il s'agit d'un stratège, personnage considérable de Thyatire,
sans doute étranger au métier des teinturiers. Au reste, les collèges de
l'Asie ont tant de particularités qu'il faut les étudier à part.
* Savigny, pp. 254-255. Karlovva, II, pp. 63-64. — Contra : Nissen,
1. 1., qui cite le conlegium aquae à Rome (vi 10298 et note) ; mais ce collège
et sa lex sont trop obscurs pour qu'on puisse en tirer des conclusions.
Voyez notre hidex collegiorum {Vrhis Romae, s. v. fullones).
( 187 )
profit de l'État ou des villes, et qu'ils remplissaient collective-
ment, ainsi que de la surveillance exercée par l'autorité ou
par les chefs des collèges sur ces travaux; il ne s'agit ici que
du but privé.
Herzog est allé plus loin i : pour lui, les collèges de l'Empire
ne sont que des sociétés commerciales. Les ouvriers ou
commerçants dont le métier ou le négoce exigeait de grands
capitaux s'associaient pour mettre leurs ressources en com-
mun. Il les compare aux puissantes sociétés anonymes
qui se forment de notre temps pour les vastes exploita-
tions -. Voici sur quoi il se fonde. Dans la Narbonnaise,
dit-il, on trouve deux sortes d'artisans : les uns apparaissent
isolés, les autres sont réunis en corporations; or, en les
comparant, on voit que les premiers exercent de petits
métiers et peuvent travailler isolément, tandis que les autres
ont besoin de fonds considérables que l'association seule
pouvait leur procurer. Il avoue que son opinion ne s'appuie
sur aucune autre preuve. D'abord l'examen des métiers de
Lyon ne conduit pas à la même conclusion : en effet, les fabri-
cants de saies (sagarii) 3 et les centonaires ^ ont-ils besoin de
capitaux plus importants que les banquiers ou les marchands
de vases d'argent s? Ensuite, dans beaucoup de villes, les
artisans les plus humbles forment des corporations, aussi
< Herzog, Gallia Narb., pp. 188-189. Il s'exprime avec plus de
réserve dans son récent ouvrage, Geschichte iind System, II, p. 1004,
et n. 3.
2 On pourrait alors les appeler d'un nom moderne : « Sociétés coopé-
ratives de production». Desjardins {Géogr. polit, de la Gaule, III, p. 444)
dit : « Les sociétés ouvrières de Lyon sont coopératives et les patrons sont
pris parmi les travailleurs, non parmi les plus riches. » Il ne fournit
aucune preuve; quant au choix des patrons, nous en parlerons plus
loin.
5 Allmer, Musée de Lyon, II, 168. 188.
* Ibid., I, 16. II, 162 (= XII 1898). 167. 168.
5 Allmer, Op. c, III, \)\). 52 et suiv.
( 188 )
bien que les plus riches. Le seul argument de Herzog est
donc sans valeur ^.
On voit que toutes ces hypothèses émises sur le but profes-
sionnel des corporations sont fort hasardées. Voici un fait qui
achèvera de prouver leur inanité : c'est que les collèges des
trois premiers siècles, complètement libres dans leur recrute-
ment, recevaient souvent des artisans qui exerçaient un autre
métier que celui dont ils portaient le nom '^. Il est évident
que ces étrangers ne seraient pas entrés dans une société
fondée pour former des apprentis, pour perfectionner ou
exercer en commun une autre industrie que la leur, et il n'est
pas vraisemblable non plus qu'on les y eût reçus : en effet,
un caractère constant des corporations de ce genre, c'est de se
montrer exclusives et de se fermer impitoyablement aux étran-
gers et parfois même aux gens du métier 3.
D'autre part, les collèges romains ne contenaient pas tous
les gens qui exerçaient le métier; chacun était libre d'y entrer
ou non. Quand l'Etat autorise ou fonde un collège, il n'a en vue
que l'intérêt public 4-; jamais il ne se laisse guider par l'intérêt
professionnel des membres et jamais il ne leur accorde un
monopole.
L'influence et l'utilité des collèges au point de vue écono-
mique furent-elles donc nulles? Certes non. Remarquons
* Les tailleurs de Thyalire avaient bâti, en l'honneur des Césars, avec
les revenus de leur travail et à leurs frais s?), un tripyle conduisant à des
j)ortiques, et des haljitations ouvrières (C. /. Gr., 3480 : xaç xe xaTayw-
yàç xai xà èv aùxoit; ipyaaxàiv olxTjxrjpia xax£; au commencement du IV^ siècle,
le coUegium fabrum tignanorum de Rome élève une statue à
son patron, parce qu'il les avait bien des fois soutenus de
' V 4341 : qiLocl ejus indus tria immunitas collegii sit confirmata.
2 Strab., X, 5, 3 : xcov àXtstov tivoc.
5 VI 266. 267. 268 et les notes. Liebenam, pp. 239 et suiv.
^ VI 971, en 129.
^ VI 1065, en 213 : conservatori suo.
( 191 )
son puissant patronage •; au IV« siècle encore, le corpus
magnarionim et le corpus corariorum témoignent leur recon-
naissance envers des préfets de la ville, leurs patrons, dont
l'un avait rétabli les finances des marchands en gros ■^, et
dont l'autre avait fait restaurer les boutiques des corroyeurs 3.
Tous les collèges, on le voit, cherchaient à sauvegarder leurs
intérêts communs, et ils avaient toujours soin de choisir pour
patrons de puissants personnages qui pouvaient les soutenir à
l'occasion. Les inscriptions que nous venons de citer sont pres-
que toutes du 111'' et du IV^ siècle; en etfet, longtemps l'État
ne s'occupa guère des métiers; il ne les favorisa que quand il
en eut besoin pour assurer certains services de l'administra-
tion. Nous parlerons ailleurs des immunités qui étaient une
récompense, un salaire pour les services rendus. Quant aux
industries qui n'avaient pour l'État qu'une utilité indirecte,
elles ne pouvaient guère compter que sur l'association pour lui
arracher des faveurs.
Il serait intéressant de savoir si les travailleurs n'avaient
jamais recours aux moyens violents et si les grèves, par
exemple, étaient connues dans le monde romain. Les auteurs
n'en parlent pas, mais l'épigraphie fournit un exemple
curieux 4. A Magnésie du Méandre, les boulangers s'étaient
entendus pour ne pas aller au marché et des troubles avaient
éclaté, on ne sait au juste à quelle époque. Le gouverneur
romain, dont le nom est perdu, était intervenu et c'est son
édit, suivi de la délibération du Sénat de Magnésie, que nous
avons en partie conservé. Ne considérant que l'intérêt de la
ville, le gouverneur n'a pas voulu sévir contre les grévistes,
' VI 1673 : imiUis in se patrocùnis lau Praefectus Urbi de 301).
' VI 1696 (au Praef. Urbi de 307).
5 VI 1682 au Praef. Urbi de 334) : iusulas — restaurari atque ador-
nari pervigilaniia sua providit. Voyez encore : XIV 18o = VI 1639 :
codicari 7iav[iculari] — foti aiixil[io ejus] — patrono. XIV 4144. Voyez
ce que nous dirons des patroni, au § 6 du ohap. II.
* A. FoNTRiER, Bull. corr. helL, 1883, VII, p. 504, n. 10.
( 192 )
comme il aurait pu le faire. Il espère que son édit suffira pour
les rendre plus sages à l'avenir; il défend aux boulangers de
se former en hétcrie ou collège et il leur ordonne de fournir
régulièrement le pain nécessaire. Le boulanger qui prendra
part à des réunions, celui qui excitera encore des troubles
ou une sédition, celui qui se cachera, ainsi que toute personne
qui lui fournira une retraite, seront punis sévèrement. Cet
édit prouve que les boulangers de Magnésie étaient associés
et que l'association les avait mis en état d'affamer la ville et
de troubler l'ordre. A Paros, sur la base d'une statue élevée
par le sénat et le peuple à un agoranome, on loue ce magistrat
d'avoir prévenu ou terminé une grève en obligeant les ouvriers
de travailler et les patrons de payer régulièrement leurs
salaires, mais il n'est pas question de collèges '.
Les artisans avaient des rivaux redoutables contre lesquels
il fallait soutenir une rude concurrence : c'étaient les esclaves.
La classe servile était encore fort nombreuse et elle envahissait
toutes les branches du travail : on trouvait les esclaves à la
ville comme à la campagne, dans le service public comme
dans le service privé. Les grandes maisons avaient des ateliers
domestiques, oii se fabriquaient des produits de toute nature
pour le commerce. Wallon pense que les ouvriers libres se
réunissaient pour opposer leurs corporations à ces compagnies
servi les, exploitées par de riches entrepreneurs, et Duruy est
du même avis 2. Sans nul doute, la concurrence des esclaves
' C. I. Gr., 2374'e, p. 1075 : iTravayxaÇcov xaxà xoùç vd[iji.o'jç] toùç
[j-èv tjL-r) àOcTîTv, àXXà £-1 xô ep[Yov] Tropsûsaôai, toÙi; oè à-ooioo'vat to"i^
[£pY]a^o|jL£voi,; TÔv [jLij6ov àv£'j BUtiq. Ailleurs encore les collèges hono-
rent ràYopavo[j.o4, qui avait la police de l'industrie. Bull. corr. fielL,
X, p. 422, n. 31 : axuxoTo'iJio'., à Thyatire. C. I. Gr., 349o : àpxoxoTTot, ibid.,
Lebas, m, 606 : Xivjcpoi, à Traites. Les fonctions de Vziiapj^o!;
xf/y'.xu>w sont difficiles à déterminer; voyez Wagener, Rev. de VInstr.
piibl. en BeUj., 1868, p. 8. — Sur les relations entre EpYoodxat et EpYoXàpoi,
voyez encore : C. I. Gr., 3467, en l'an 459, à Sardes. Supra, p. 183.
La grève des tibicines romains en l'an 443 = 309 et leur exode à Tibur
sont bien connus. Voyez infra, au § 3.
2 Wallon, III, p. 104. Duruy, V, p. loi
1
( 193 )
fit mieux sentir aux artisans libres le besoin de s'unir; mais
cette union n'eût été vraiment efficace que s'ils avaient formé
des établissements pareils aux ateliers serviles, et s'ils s'étaient
chargés d'entreprises communes i. Nous avons vainement
cherché des traces de pareilles associations. Du reste, les cor-
porations se forment partout et dans toutes les professions,
aussi bien dans celles qui n'avaient pas de concurrence à
redouter que dans les autres.
On se demande aussi si les corporations n'étaient pas destinées
à prémunir le métier qu'on exerçait contre les empiétements
de métiers rivaux. La rivalité entre les métiers existe toujours
et l'expérience nous enseigne qu'elle s'accroît une fois que
les corporations se sont formées : c'est alors que les préten-
tions au monopole se font jour, et le privilège, une fois
obtenu, est défendu avec un soin jaloux. Chez les Romains, il
n'y avait rien de pareil. En etîet, leurs corporations n'étaient
pas assez exclusives pour qu'on les puisse croire instituées afin
de protéger une industrie particulière : si elles avaient visé au
monopole, elles n'auraient pas reçu dans leur sein des gens qui
exerçaient un métier différent ^. Aussi n'y a-t-il pas de traces
d'un monopole établi en faveur d'un collège. On ne peut allé-
guer celui qui fut accordé au IV^ siècle aux portefaix du port
de Rome : en efïet, ce fut une mesure exceptionnelle en faveur
d'une corporation indispensable au service des approvisionne-
ments et qu'il fallait sauver de la ruine. Il s'agit encore là
d'un de ces privilèges destinés à récompenser un service
public 3.
En dehors du monopole, un métier pouvait avoir des inté-
rêts opposés h ceux d'un métier rival, et l'union en rendait la
défense plus facile. Ici encore on avait recours au patron. En
l'an 206, le corpus piscatorum et iirinatorum îotius alvei Tiberis
(juibus ex se coire licet élève une statue au sien pour plusieurs
< Kârlowa, pp. 63-64.
2 G. BoissiER, II, p. 2oo-2o6.
5 CoD. Theod., 14, 22, /. lin. (364).
Tome L. 13
( 194 )
motifs dont le principal est énoncé dans les ternies suivants :
pi^aesertim eum navigatio scapharum diligentia ejus adquisita et
confirmata sii '. Il est à supposer que les bateliers de tous
genres qui exerçaient leur industrie sur le Tibre voulaient
empêcher les pêcheurs et plongeurs d'y circuler avec leurs
barques, peut-être d'y transporter des personnes et des mar-
chandises, et que par l'intercession du patron de ces derniers,
ce droit leur fut formellement reconnu. En 389, les Mensores
Portuenses élèvent une statue à Celsus qui, comme préfet de
l'Annone, avait heureusement terminé une ancienne querelle
de ce collège avec les codicarii - ; il est évident qu'il s'agit encore
ici d'une rivalité de métiers 3.
En résumé, les corporations d'artisans étaient loin d'avoir
chez les Romains un caractère professionnel aussi prononcé
qu'au moyen âge : on ne rencontre chez elles ni règlements
sur les méthodes, ni apprentissage imposé, ni monopole ■*;
leur but n'était pas non plus de réunir les fonds nécessaires
pour exploiter une industrie. Tout ce qu'on peut dire, c'est
qu'en s'unissant, les travailleurs songeaient à devenir plus
forts pour mieux sauvegarder leurs intérêts communs, quand
ils étaient menacés, et en ce sens il est certain que l'organisation
corporative favorisa la prospérité industrielle.
Nous devons ajouter que tout ce que nous venons de dire
ne s'applique rigoureusement qu'aux collèges romains de la
république et du Haut-Empire. Dès le quatrième siècle de
notre ère, les corporations sont entièrement aux mains de
l'État, qui en fait ce qu'il veut. Nous verrons dans la troisième
1 VI 1872. en 206.
2 VI 1759.
3 VI 1016 : conlroversiae , qiiac inter inter mercatores et mancipes
ortae erant, sous Marc Aiirèle et Commode, après 175.
^ LiEBENAM, p. 82, affirme gratuitement que les collèges de bateliers,
ceux des nautes du Rhône, par exemple, avaient le monopole de la
navigation sur un cours d'eau. Levasseur, I, p. 31, dit : « Les collèges
furent une garantie contre la licence industrielle. » C'est un souvenir de
( 195 )
partie de ce mémoire qu'alors l'État en réglemente arbitraire-
ment l'entrée et la sortie et exige du collège des corvées col-
lectives; mais il ne semble pas encore se mêler des méthodes
ni de l'exercice du métier. Plus tard encore, à Constantinople,
dans l'empire byzantin, où les collèges subsistent et vivent
dans un dur esclavage, tout est réglementé par l'État en vue
de l'inlérét public : alors le monopole lleurit, l'entrée est
soumise à des conditions rigoureuses, la compétence de
chaque métier est étroitement limitée, l'exercice de chaque
profession, l'achat des matières premières, la vente et l'expor-
tation des produits sont réglés par mille prescriptions vexa-
toires, contraires à la liberté individuelle comme à celle du
commerce et de l'industrie. L'intérêt public paraissait l'exiger ^.
Mais dans le présent chapitre, nous ne voulons parler que
du but privé que les membres se proposaient en s'associant.
!^ 3. Caractère religieux.
Sommaire : OBJET DU CULTE : CHAQUE COLLÈGE SE CHOISIT UN DIEU PROTECTEUR; LES
COLLÈGES HONORENT AUSSI LE GENIUS COLLEGII ET D'AUTRES DIVINITÉS. — LIEU
DU CULTE : SCHOLAE OU TEMPLES DES COLLÈGES. — RÉUNIONS RELIGIEUSES ET
CULTE : MAGISTER, SACERDOS, FLAMEN; SACRIFICES, BANQUETS SACRÉS, JEUX. —
CARACTÈRE ET CULTE DES DENDROPHORES. — CONCLUSION.
Plutarque rapporte que Numa avait donné à chaque corpo-
ration le culte qui lui convenait 2 ; nous devons en conclure
qu'à l'époque du biographe les collèges d'artisans avaient un
caractère religieux 3. Et en effet, l'habitude n'existait pas seule-
' Voyez : Nicole, supra, p. 26.
- Niuna, 17 : ôeôiv 'ciiJiàç àTroooù; ï'/Aa-oj y^vs-. Trps'Ttouaa;.
^ Sur le culte des collèges, voyez : Schwartz, p. 60. Wezel, p. 29.
Marquardt, St.-V., III, pp. 138 et suiv. = Le culte, I, pp. 165 et suiv.
G. BoissiER, La relig. rom., II, pp. 265-270. Maué, Veirijie, pp. 27-46.
LiEBENAM, pp. 285 et suiv. Herzog, II, pp. 990-991. Cohn, p. 27. Fried-
l.AENDER, P, p. 272.
( 196 )
ment depuis les temps les plus reculés de s'associer pour la reli-
gion, mais dès qu'un groupe se formait, même dans un dessein
profane, il commençait par adopter un culte. Le motif est
facile à comprendre : la corporation était l'image de la cité ou
de la famille ; elle constituait, comme la famille ou la cité, un
tout, une unité vivante. Or, pas de cité, pas de famille sans un
culte public ou domestique ; de môme, pas de corporation sans
son dieu tutélaire. Chaque famille avait, outre ses pénates, son
lar familiaris, qui se confondait avec le génie du pater fami-
lias ; chaque maison et chaque cité, à côté de leurs divinités
protectrices, honoraient le Lar de la (jens ou \e genius jmblicus ;
ainsi chaque collège associait à son dieu protecteur son propre
Génie tutélaire.
Au commencement du III® siècle de notre ère, nous rencon-
trons un exemple frappant de la nécessité d'un culte pour tout
collège dès sa naissance. Les lieutenants de la 3^ légion, campée
à Lambèse, en Afrique, s'associent pour constituer une sorte de
caisse d'assistance mutuelle. Il semble que ce but matériel
aurait pu suffire; or, même à cette époque où le sentiment
religieux s'était refroidi, ils adoptèrent un culte, et dans
leur maison corporative figuraient, à côté des images de la
famille impériale, les statues de leurs divinités protectrices :
pro sainte Aug[ustorum) optiones scholam suam cum statiiis et
imaginibus domiis [di]vinae, item dus conservatorïb[us) eorum —
fecerunt K
Les auteurs et les inscriptions nous fournissent beaucoup de
renseignements sur le culte des collèges, mais les textes épigra-
phiques doivent être employés avec prudence : ce sont des
dédicaces faites aux dieux, soit par le collège qui leur érige une
statue ou un autel, soit par un confrère qui s'acquitte d'un
vœu, soit par un étranger qui fait cadeau à la corporation d'un
autel ou d'une statue. Le plus souvent rien ne prouve qu'il
s'agisse du dieu que le collège avait choisi pour son protecteur
* VIII 2554.
( 197 )
spécial 1. Du reste, bien que la coutume se maintînt de se
donner un patron particulier, les collèges adressaient leurs
hommages à une foule d'autres dieux, comme le prouvent les
statues nombreuses qui ornaient leurs temples et leurs maisons
corporatives. Ces réserves faites, nous allons exposer ce que
les auteurs et l'épigraphie nous apprennent de plus sûr et de
plus intéressant.
On ne pourrait mieux comparer le dieu tutélaire de chaque
collège qu'au saint patron que se choisissaient nos anciennes
ghildes. Quelques corporations ont pris soin de nous faire
connaître le leur; de même que les arbalétriers s'appelaient la
ghilde de Saint-Georges, de môme les collèges romains joignent
parfois à leur nom officiel celui d'une divinité : preuve évi-
dente qu'ils se sont mis sous sa tutelle. Ce que G. Boissier
dit des collèges romains en général est vrai des collèges
professionnels : « Toutes les fois que des individus isolés se
groupaient pour former une association, ils se réunissaient
autour du même autel; la divinité qu'on y adorait donnait
ordinairement son nom à la société nouvelle et en devenait
le centre et le lien '-. » Voici les exemples que nous avons ren-
contrés 3 :
Amatores regionis macelli cuUores Jovis Arkani, peut-être des
bouchers, à Préneste (XIV 2937. 2972).
Feronenses aquatores, peut-être des foulons adorant Feronia,
à Aquilée (V 992. 8307. 8308).
Cultures Jovis Heliopolitani Berytenses qui Puteolis consistunt,
marchands syriens établis à Pouzzoles (X 1578. 1579. 1634) 'K
CoUegium capulatorum sacerdotum Dianae, tonneliers d'Al-
lifae (IX 2336).
* Dans nos Indices on trouvera (sous la rubrique : Culte) une liste
complète des dédicaces faites par les collèges eux-mêmes, et (sous la
rubrique : Finances) une liste des autres dédicaces faites à des dieux et
contenant la mention d'un collège.
2 G. Boissier, Fin du paganisme, P, p. 416.
3 Voyez nos Indices (Culte).
^ Marquardt, St.-V., IIP, p. 83 = Le culte, I, p. 102.
( 198 )
Cultor[e]s [Libejri Patri[s] — caupon[e]s, cabaretiers, à Caesarea
(VIII 9409).
Cisiarii Tiburtini Hercidis, cochers ou charrons de Tibur (VI
9485).
Collegium fabriim Veneris, à Salone (III 1981) '.
Diana Augiista collegi lotorum, foulons d'Aricie (XIV 2156).
Medici Taiirini cultores Asclepi et Hygiae, à Turin (V 6970).
Mensores frumenlari Cereris Augustae, mesureurs de blé, à
Ostie, (XIV 409) 2.
Possessores inquilini negotiantes viae strat[a]e cultores Her-
cidis, marchands d'Interamna Nahartium (XI 4209).
Sagari t[hea]tri Marcelli cultores domus Aug{ustae), fabricants
de sayons, établis dans les boutiques du théâtre de Marcellus,
à Rome (VI 956).
Collegium Herculis salutaris cohortis piimae sagariorum, col-
lège de sagarii, qui avait choisi pour patron l'Hercule de la
première cohorte prétorienne (VI 339).
Collegium subrutor[um) cultor{um) Silvani, ouvriers démolis-
seurs, à Rome, sous Vespasien (VI 940).
Collegium venalorum sacerdotum Dian[a]e, chasseurs de bêtes
fauves dans le cirque, à Rocca d'Arce (X 5671) 3.
Collegium Geni fori vinari, peut-être des marchands de vin
adorant le génie du marché aux vins, à Ostie (XIV 430 = X
543).
Collegium Mercuri vestiariorum , tailleurs de Volubilis
(R. Gagnât, Amiée éjngr., 1891, n« 118).
Les marchands en général s'appellent, dans beaucoup de
* Ailleurs on lit : collegium Veneris (III 2106-2108) et collegium
fabrum (III 2026. 2087. 2107). C'est le même collège. III 2109 : col(lega)
et consacranius.
2 XIV 2; leurs quinquennales réparent un puits, monitu sanctissimae
Cereris et ISympharum.
5 Voyez ijifra, p. 204, n. 4. A Turicum, les ursari, chasseurs d'ours
dans le cirque, dédient aussi à Diane (Mommsen, Ber. der antiq. Ces. in
Zurich, 1868, p. 65 : Deae Diane et Silvano ursari posuerunt ex volo).
( 199 )
villes, de même qu'à Rome, Mercuriales, du nom de leur
patron, Mercure, et il semble que les vétérans portaient par-
fois le nom de Martenses, Martiales, Martis cultores '.
Nous verrons, au paragraphe suivant, que la plupart des
collèges qui tiraient leur nom d'un dieu, étaient avant tout des
collèges funéraires; mais il nous sera facile de montrer que
toutes les corporations s'étaient mises sous la protection
spéciale d'une divinité. Avant de s'associer, les artisans avaient
déjà leur patron : c'était naturellement le dieu dont les attributs
se rapprochaient le plus du métier. C'est ainsi que Minerve
trouva tant d'adorateurs : déesse de l'intelligence, elle fut
invoquée par tous ceux qui s'occupaient d'art, de science et
d'industrie. C'est la divinité protectrice de mille genres d'ou-
vrages de l'esprit et de la main, dit Ovide : mille dea est opcrum'^.
Le 19 mars, anniversaire de l'inauguration du temple de 3Iinerve
sur le Coelius, on célébrait la grande fête de la déesse {Quin-
quatnis) et ce jour s'appelait la fête des artisans [artificum dies)^.
Parmi ceux qui y prenaient part, Ovide cite d'abord les matrones
et les jeunes filles habiles à filer; puis d'humbles artisans : les
tisserands, les foulons et teinturiers, les charpentiers et les cor-
donniers; enfin, ce que nous appelons les professions libé-
rales et les artistes : les médecins, les maîtres d'école, les
peintres, les sculpteurs et les poètes. Minerve avait une autre
fête, le 13 juin [Quinquatrus minusculae) : elle était particu-
lièrement célébrée, dit Ovide, par les tlûtistes [tihicines] ^*.
* Voyez notre Inde.v coLlegiorum (veteranorum), et surtout XI 136 :
convibium veteranorum sive Martensiiun, à Ravenne. Voyez aussi VIndex
des coilegia funeraticia, s. v. Mars.
2 OviD., Fast., III, 833. Cfr. Lactant., I, 18, 21 : sed nimirum Minerva
est qitae omnia reparit ideoque illi opifices supplicaiit. III 3136: Artifici-
bus Minerfvae), dans Pile d'Apsoros; il s'agit des arts auxquels Minerve
préside. Voyez : E. de Ruggiero, Dix. epigr., s. v. artifex.
5 Cette fête dura plus tard cinq jours, du 19 au 23 mars. C. l. L. I,
p. 389, Mart. 23. Preller, R. M., I, p. 294, n. 3. 0. .Iahx, Ber. dersdch.
Ge.s., 1856, pp. 293 sqq. Jordan, Ephcm. epigr., I, p. 238.
* OviD., Fast., III, 308. 817-83i.
{ 200 )
Ce poète ne se sert pas du terme de collèges; cependant, il
ne nous sera pas difficile de montrer que plusieurs corpora-
tions, et non les artisans individuellement, fêtaient Minerve
comme leur patronne.
Commençons par les flûtistes. Depuis Numa, ils formaient
un collège que nous avons retrouvé à la fin de la république
et sous Auguste i. Sous l'Empire, les joueurs de lyre venus de
Grèce avec les rites grecs, tels que les lectisternes et les suppli-
cations, se joignirent à eux, et dans une inscription de l'an 102,
la corporation s'appelle Collegium tibicinum et fidicinum roma-
norum qui s(acris} p{iiblicis) piraesto) s{iint) -. Comme ce nom
l'indique, elle comprenait tous les joueurs de lyre et de flûte
qui figuraient dans les cérémonies religieuses de l'Etat
romain 3. C'est précisément en récompense de ces services que
les flûtistes avaient reçu, depuis un temps immémorial, des
privilèges qui prouvent qu'ils avaient un culte commun ^. Le
13 juin, aux Quinqnatrus minusculae, c'était leur jour de fête :
is dies festus est tibicinum qui colunt Minervam, dit Festus ; les
flûtistes parcouraient le Forum et les rues en un gai cortège,
couverts de masques et de vêtements de femmes, faisant
entendre des chants joyeux; ils se dirigeaient vers le temple
de Minerve, sur l'Aventin, où ils tenaient une réunion : « tibi-
cines tum feriati vagantur per urbem et conveniunt ad aedem
1 Voyez supra, pp. 62. 68. 72. 88. 116. Sous Auguste, ajoutez : VI
3877". "
2 VI 2191. Cfr. VI 2192: Coll. fid{icinitm) r(omanorum) ; VI 1054 :
Tibicines romani qui sacris public, praest. sunt, en l'an 200; de même :
VI 240. 2584. Nous regardons ces appellations comme des abréviations.
3 Voyez notre Index collecjiorum où sont réunis les textes des auteurs
et les inscriptions. Voyez Mommsen, Zeitschr. f. g. R. W-, XV, p. 354.
St.-R., P, p. 367. III, p. 567, n. 1. Marquardt, St.-V., III, p. 138. 326.
-=Le Culte, I, p. 166. 223-224. 272. Preller, R. M., P, p. 291. 295-296.
0. Jahn, Hernies, II, p. 430.
* Varro, de l. L, VI, 17. Liv., IX, 30. Valer. Max., II, 5, 4. Censorin ,
De die nat., 12, 2. Ovm., Fast., VI, 653 et suiv. Plut., Quaest. rom., 55.
Festus, p. 149% 22.
( 201 )
Minervae w, dit Varron. Minerve était donc leur patronne. Ils
avaient aussi, de temps immémorial, le droit de célébrer un
banquet sacré au temple de Jupiter Capitolin, mais on ne
nous dit pas si ce repas avait lieu pendant la même fête. Selon
Tite-Live, les censeurs de l'an 443 = 309 voulurent leur
enlever ce privilège et ils émigrèrent tous ensemble à Tibur.
Comme le culte ne pouvait se passer de leur concours, les
Romains s'adressèrent aux Tiburtins. Ceux-ci se servirent
d'une ruse : ils invitèrent les flûtistes à une fête et les enivrè-
rent facilement; car toujours, dit Tite-Live, la musique a aimé
le vin. Ils les placèrent, endormis et revêtus de leurs habits de
fête sur des chariots et les ramenèrent à Rome, où leur privi-
lège leur fut restitué, en considération du service qu'ils ren-
daient. Leur rentrée carnavalesque avait fait sensation, et on
leur accorda le droit de la renouveler chaque année : elle fut
l'origine de leur cortège annuel. Valère Maxime, Ovide,
Censorinus et Plutarque racontent la même histoire avec des
variantes qui ont fait douter de son authenticité, et peut-être
Zeller a-t-il raison de regarder tout ce récit comme une légende
imaginée pour expliquer l'origine de la sortie carnavalesque
des flûtistes '. Ailleurs, il est question de jeux du même
collège; nous y reviendrons plus loin.
Minerveétaitaussilapatronnedes autres collèges demusiciens,
par exemple des musiciens militaires ; du moins, au commen-
cement de l'Empire le C07ileginm cornicimim de Rome offre un
autel à cette déesse 2, et sur le Rhin, les trompettes d'une cohorte
gauloises s'acquittent d'un vœu en son honneur 3. En Pannonie
* Dr. E. Zeller, Eine Arbeitereinstellung in Rom. {Vortràge luid
Ablumcllungen, 2^^ Sammlung, 1877, pp. 136 sqq.) - Cfr. VI 3696 : Jovi
Epuhni sacrum, dédicace par les présidents du Ycon^egmmJ] teib(icinum)
rom., sous la république.
2 VI 524. Remarquez l'ortliographe conlegium, et voyez supra, p. 87,
n. 6.
3 Brambach 1738 = Wilm. 1531 : aeneatores coh(ortis) I Seq(uanorum)
et Raiir(acorum) eq(uitatae) v. s. l. l. m.
( 202 )
supérieure, elle est honorée en Tan 229 par une scola tubi-
cimim ^.
Le collège de poètes et d'acteurs que nous avons rencontré à
l'époque de Livius Andronicus, adorait également Minerve :
c'est dans le temple de cette déesse, sur l'Aventin, qu'il se
réunissait chaque année aux grandes Quinquatriis pour lui
offrir des sacrifices '^.
Parmi les plus fervents serviteurs de Minerve se trouvaient
aussi les foulons 3 ; leurs collèges lui élèvent des statues à Rome
et à Spolète; à Aquilée, ils reçoivent un autel qui lui est con-
sacré ^. A Rome un collegium fuUomim ou fontanoinim avait la
jouissance gratuite d'un lieu public et il y avait bâti une cha-
pelle avec une statue de Minerve, qu'on a retrouvée, afin d'en
faire un lieu consacré {locus dedicatus sacris imaginibus) et de
le soustraire à tout jamais à toute redevance s.
Les marchands d'étoupe d'Ostie reçurent un jour un édicule
avec tous ses ornements, dédié à Minerve conservatrice et
prêtresse de ce très splendide collège : Niimini evidentissimo
Minervae Aug{uslae) sacrum, conservatrid et antistiti splendidis-
simi corporis sluppatorum 6.
» Ephem., IV 503, et la note, à Brigetio, en 229.
2 Voyez supra, p. 82, n. 3.
3 Voyez : Mommsen, Zeitschr. f. g. R. W., XV, pp. 330 et suiv. 0. Jahn,
Ber. der saclis. Gea., 1856, p. 296, n. 35. Nissen, Pompeianische Studien,
p. 299 Mârquardt, SL-V., IIP, p. 138, n. o = Le culte, I, p. 166, n. 2.
Preller, R m., I, p. 294, n. 2.
* VI 404, en 122 (Rome). I 1406 = XI 4771 (à Spolète, sous la répu-
blique). V 801 : Gentilibus Artorianis lotoribus, à Aquilée. Ils lui asso-
cient Jupiter Caelestinus et les Fontes, VI 404. Cfr. Servius, Aen., XII,
139 : Juturnae ferlas célébrant, qui artificium aqua exercent. Ovid.,
Fast., III, 821 : liane {Miner vam) cale qui maculam laesis de vestibus au fers.
Plin., h. n., XXXV, 11, 40, 143 : Simus juvenem requiescentem ipijixit),
officinam fullonis Quinquatrus celebrantem.
5 VI 266. 268, avec les notes. Supra, p. 190.
« XIV 44. Cfr. VI 467 et Notizie, 1892, p. 345 : Deo sancto Numini deo
}nagno Libero, patri et adstatori et canserbatori hfujus) l(oci), coU(egium)
Ve[l]abrensiumy ille curat(or) et restaurator fratrib(us) suis.
( 203 )
Un collège de secrétaires impériaux porte aussi un nom très
significatif, il s'appelle : Colle(jium Minervium tabulariorum, sans
nul doute parce qu'il s'était mis sous la protection de Minerve '.
Notons enfin que le collège des fabri reçoit une statue de cette
déesse ù Corfinium - et à Barcelone'^; à Chichester, il lui bâtit
un temple en l'associant à Neptune, ce qui ne doit pas étonner
dans une ville maritime '*. A Pisaurum, il se réunit in schola
(leae Minervae Aug(ustae) coUegii fabnim, c'est-à-dire dans son
local, qu'il a consacré à cette déesse, sa patronne s.
D'autres divinités recevaient les hommages et les vœux habi-
tuels des artisans. Les meuniers et les boulangers honoraient
Vesta et nous parlerons plus loin de la fête qu'ils organisaient
chaque année. Les revendeurs (ï et les marchands en général
ont pour patron le dieu du commerce , Mercure , auquel
leurs collèges empruntaient souvent leur nom 7; les marchands
de vin et les cabaretiers lui associent parfois Liber ^. Les fabri-
1 III 6077, et la note.
2 IX 3U8 : Minervae sacriiun), ille coUegio fabroriiim) dédit.
5 II 4498 : Minervae Auij., ille collegio fabr. dono posuit.
^ VII 11, à Regni (Chichester). Ces fabri sont peut-être des ouvriers
militaires. Voyez la note du Corpus. Cfr. Maué, Vereine, p. 27. A Smyrne,
les argentiers et les orfèvres font don d'une statue de Minerve à la ville,
C. l. Gr., 3154.
s Notizie, 1880, p. 260 {Atti délia r. Accad. dei lincei, 1880, vol. 6,
p. 29). Cfr. II 4085 : exhedram ciun fronte teuipli Minervae Aug{ustae),
collège inconnu de Tarraco.
6 III 5929 : piscatores et propolae, à Carthagène.
7 OviD., Fast.,V, 669. Magrob., Sat., I, 12, 19 : hoc mense (Maio)
rnercatores omnes Maiaepariter Mercurioque sacrificant. Lydus, De mens.,
IV, 52, 13 : ^'uy ovTo ôè Ma-'a -£ /.où 'Epij.^ ol 7rpaY[jLaT£ud[i.£vo'... C. L L., I,
p. 301. Sur le culte du collegiiun mercatorum ou Mercurialium de Rome,
voyez supra, p. 35. Cfr. notre Index collegiorum , s. v. Mercuriales,
'Ep(i.at(rcaî. — Ephem., IV 76 : magistres Mercurio et Maia donu{m) d{ant).
Ce sont les 'Ep^jLaiaxat, à Delos. Ephem., V 317 : socli nitiones, à Giufitani.
» VI 8826 : coUegium Liberi patris et Mercuri negotiantium cellaruni
vinariarum Novae et Arruntianae Caesaris n(ostri), en 102, à Rome. VIII
9409 : cultores [Libe]ri Patri[s] — caupon[e]s? à Caesarea. Cfr. VI 8796.
( 204 )
cants de cabriolets de Tibur adoraient Hercule, qui était très
vénéré dans leur ville 'i. Nous voyons les armateurs, les bateliers
et les pêcheurs se mettre sous la protection de Neptune, sur les
bords du Rhin comme dans la Gaule Cisalpine '^. Les vétérans
et tous ceux qui touchaient de près ou de loin au métier des
armes rendaient leurs hommages à Bellone et à Mars, auxquels
ils joignent souvent Minerve ou la Victoire 3. Les chasseurs de
bêtes fauves dans le cirque avaient naturellement pour patronne
Diane 4. A Avenches, médecins et professeurs reçoivent une
statue d'Apollon o. Dans les provinces, certains collèges sem-
blent avoir préféré des divinités indigènes, et les marchands
établis loin de leur pays, continuaient à honorer leurs dieux
nationaux. Les cordonniers d'Uxama, en Espagne, adorent les
Lugoves et les fermiers des pêches de la mer du Nord hono-
rent Hludena. Les marchands tyriens de Délos ont conservé le
culte de l'Hercule de Tyr, et les négociants asiatiques fixés à
Pouzzoles se disent serviteurs de Jupiter d'Héliopolis 6.
^ VI 9485 : cisiarii Tiburtini HerciUis. Cfr. Dessau, C. I. L. XIV,
p. 367. Preller, R. M., I, IL 316. II, 285.
2 Bull. corr. helL, VII, 468, à Délos : tô xotvov BiQputttov Hoastocoviaa-
xûv £(j.7ropoi)v xal vauxAi^pcov xal syôoyscov. Brambach, 1678 : contuber-
nium nautariim, à Etlingen. V 7850 : piscatores, à Pedo. Sur les hidi
'piscatorii, voyez infra.
3 III 5790 : Deo Marti et Victoriae contubernmm Marti{s) cnltoriim
posuerimt v. -s. /. /. m., à Aiig. Vindelic. Ephem., II 687 : Marti et
Minerv(ae) Augg. collegiiim armaturar um) leg(ionis) II adj., à Aquin-
cum. Cfr. VIII 2636, à Lambèse. Brambach, 1336 : Deae Virtuti Bellonae
hastifejH civitatis Mattiacorum. Les vétérans s'appellent parfois Mar-
tenses; voyez supra, p. 199, n. 1.
* Venu tores, ursari. Cfr. supra, p. 198. Tertull., De spect., 12 :
Martem et Dianam utriusque ludi {gladiatorii et venatorii) praesides
novimus.
s MoMMSEN, Inscr. Helv., 164.
6 Lugoves, II 2818; voyez Max Ihm, Jahrb. d. Ver. /'. Altertumsfr. im
Rheinlande, 1887, 83, pp"! 102 et 174, n. 442 et 467. - Hludena, Westd.
Korresp., 1889, p. 2. Marchands de Délos, C. I. Gr. 2271. Marchands de
Pouzzoles, supra, p. 45; cfr. Marquardt, St.-V.^ IIP, p. Si =^ Le culte.
( m )
Pendant les deux premiers siècles, les divinités orientales
envahirent l'Empire romain et leurs adorateurs formèrent des
collèges spéciaux i ; mais il semble que parmi les artisans elles
ne trouvèrent pas beaucoup de fidèles. Si nous laissons de côté
les dendrophores voués au culte de Cybèle, nous ne trouvons
guère que les bijoutiers de Rome qui s'unissent à des prêtres
égyptiens {pausarii) pour bâtir un temple à Isis et à Osiris -.
Les mystères d'isis, comme les tauroboles, coûtaient proba-
blement trop cher pour les pauvres gens •'^.
Les collèges ne s'en tenaient pas à ce culte, rendu à leur
patron spécial. Il était naturel, en eiîet, que les confrères, soit
en commun, soit individuellement, adressassent leurs vœux à
d'autres divinités. Mille occasions se présentaient où, selon la
coutume, ils leur élevaient des statues ou des autels, soit dans
le local ou temple du collège, soit ailleurs, pour les remercier
ou pour leur demander une faveur. Les protecteurs {patroni),
les dignitaires et les simples membres des collèges leur font sou-
vent don d'une statue destinée à orner la maison corporative.
Dans ces dédicaces occasionnelles, il est presque toujours
impossible de savoir si le dieu honoré est le dieu tutélaire du
collège; mais elles sont des preuves de l'esprit religieux qui
animait les confrères, et à ce titre nous devons en donner
quelques exemples caractéristiques.
Après avoir gagné en première instance son procès contre le
fisc, le collège des foulons romains élève une statue h la Victoire,
I, p. 102. — Dms yemaitsus, à Mmes, XII 3133. o9o3^'^'i. — Deus Seda-
tus, III 8086. Ephem., II 603. Cfr. Maué, \ereine, p. 30. - J(ovi) 0. M.
Taviuno — Galatae consistentcs municipio, à Napoca, III 860 et note.
Cfr. HmscHFELD, Epigr. Xachlesc, Sitzungsber. des Wienei^ Akad., ISli,
vol. 77, pp. 367.
' Voyez supra, pp. 43-46. Renan, Marc Aurèle, p. 571.
2 VI 348 : Isidi et Osiri mansionem aedificavimus ex corpore pausario-
rum et argentariorum. Voyez encore : VI 349. — VI 3728 : S{oli) i{nvicto)
M{itfirae) et sodalicio ejus, actores de foro suario. VII 1039 : collège
militaire à Bremenium : Deo invicto Sali soc(ioj sacrum.
3 Apul., Met a m., XL 28.
( 206 )
et après le gain définitif du procès, il place l'image d'Hercule
dans le lieu même qui lui avait été contesté ^. A Apulum, Escu-
lape était le dieu tutélaire de la ville; il y possédait un prêtre
municipal : aussi est-il honoré, avec Hygie, par des membres
du coll. fahrum -. Ailleurs encore, on le remercie pour un vœu
exaucé^. On conçoit aussi qu'un mesureur de blé, membre d'un
collège de boulangers romains, élève un autel à l'Annone
sainte ^. Les divinités les plus populaires parmi les pauvres et
les travailleurs semblent avoir été Hercule et Silvain. Hercule
est honoré à Rome par les fabri, les employés des greniers
publics et de la monnaie; à Brixia, par un faber tignarius; à
Mantoue par les bateliers; à Cimiez, par les tailleurs de pierres;
à Mylasa par les teinturiers o. On ne saurait aftirmer qu'il était ^
patron de tous ces collèges, mais il est certain qu'il était celui
de beaucoup de collegia juvemim 6, ainsi que celui du corpus
custodiariorum, car en l'an 149, un membre de cette corporation
lui dédie un autel avec cette inscription : Sanctissimo Herculi
Invicto corporis custodiariorum ''. Silvain, dieu des forêts, qui
préside au travail du bois et aux industries qui en dépendent 8,
reçoit les hommages des charpentiers à Feurs en Provence, et
à Aquincum en Pannonie, des sectores înateriarum à Aquilée,
comme aussi ceux des bateliers de Genève, conducteurs de
< VI 266. 267 et note. Supra, p. 190.
2 III 975. 984, et page 183.
3 V 731, à Aquilée, par un dec(urio) coll. fabr. Allmer, Rev. ép.,
n. 765 : lapida[ri] structures, à Saintes. Le texte est douteux.
i VI 22.
^ VI 321 : mag. quinq. fabr. tig. — VI 237. 338 et Comptes rendus de
rAcad. des Inscr., 1886, p. 29 : horrearii. — VI 44. 278 : employés de la
monnaie. — V 4216, à Brescia. — Pais, 669, à Mantoue : collegium
nautarum. — V 7869, à Cemenelum : lapidarii. - C. l. Gr. 3912^ :
pacpsiîç (?), à Mylasa. — IX 3907 = 1 1172 : milites Africani Caecilianis. -
Ephem., II 838, à Siscia, par un praefectiis collegii centonariorum.
«5 Juvenes Herculis cultores, ou Herculanii ; voyez VIndex coUcgiorum.
' VI 327.
8 MowAT, Bull, epigr., I, 1881, pp. 62-63.
I
( 207 )
radeaux et de trains de bois Hotte '. Il est aussi honoré par les
ouvriers de la monnaie, à Rome, par ceux des mines d'or en
Dacie, par les gladiateurs de Commode, par les chasseurs d'ours
dans le cirque à Turicum et par quantité d'autres petits
collèges -. A Préneste, c'était pour la Fortune Primigénie que
les artisans, comme toute la population ''>, avaient la plus
grande vénération : les charrons, les cuisiniers, les fabri, les
marchands de bestiaux, les ivoiriers et d'autres s'acquittent des
vœux qu'ils lui ont faits 4. Fors Fortuna, qui avait le pouvoir
de contenter les vœux du pauvre comme ceux du riche, était
du reste invoquée partout^; à Pons Augusti, en Dacie, deux
époux construisent au collège des utriculaires un temple con-
sacré à cette déesse sous le nom de Némésis *j. En Dacie elle est
d'ailleurs invoquée plus d'une fois sous ce nom par les mem-
bres des collèges '^. Jupiter, très bon et très grand, le maître
des dieux et des hommes, n'avait pas non plus à se plaindre
de la classe laborieuse; les statues et les autels que les mem-
bres des collèges lui érigent, sont en assez grand nombre 8.
* Orelli-HeiXzen, o216. C. I. L. 111 3580 : C. Julius Severus ob honorem
magisteri coll(egio) fabrum Sil{v}a?2iunpecimia sua fecit, en 210, à Aquin-
cum. V 815, à Aquilée. XII 2597, à Genève.
2 VI 675, à Rome; III 7827 et la note, à Alburnus Major; VI 631. 632.
1713 (gladiateurs) ; Mommsen, Ber. dcr antiq. Ges. in Zurich, 1868, p. 63 :
■ursari. Cfr. VII 830 : venatores Bannie(n)s{es), à Amblogenna.
3 RoESCHER, Lexikon der Mijth., s. v. Fortuua. Pueller, R. M., II,
pp. 189 et suiv.
* XIV 2874-2883.
3 VI 167. 168 {lanii Piscijumses); 169 {violaries, etc.)) 188. 236
(liorrearii); 43 (monetarii) ; 3678 {collegium fa[bmm tign.]). Les forge-
rons de Dijon iferrari Diviouense.s) remercient Jupiter et la Fortuna
Redux de l'heureux retour de leur patron, Oreeli, 4083.
« m 1547. Cfr. Ephem.epigr.,IV43J, note. Prei.i.er, iî. M., Il, p. 193.
7 III 1438. 7767, à Sarmizegetusa. Inscription copiée par F. Cumont :
Nemesi Avg. \ Tuarenivs \ Gallicanus, \ dec(uno) coUeg(ii) fabror. \
col(oniae) Sarniiz. \ metrop(olcos), \ ter mag(ister), \ ex vota \ posuit.
8 III 1043. 1051. 1082. 1083 (membres du coll. fabrum h Apulum). —
111941 : J. 0. M. pro sfalute) iuipcraloris colleg(io) aurariarum ille d. d..
( 208 )
Enfin, aucune divinité ne recevait plus d'honneurs et de flat-
teries que le prince et sa famille, la « maison divine. » Plu-
sieurs collèges se déclarent adorateurs de la maison Auguste
ou des Lares Augustes ^ ; la plupart ne perdent aucune occasion
de prouver à ces puissantes divinités leur dévouement et leur
fidélité. 3Iais comme les honneurs divins qu'on rendait aux
princes se distinguent difficilement des hommages dont on les
accablait comme chefs de l'Etat, nous préférons ne pas les en
séparer et nous en parlerons plus loin.
Il est inutile de prolonger cette énumération qui pourrait
devenir fastidieuse, mais il faut ajouter quelques mots sur le
culte du Genius collegii 2. Le génie désignait primitivement le
principe générateur dans l'homme, qui gignit. L'idée du génie
s'élargit et il devint l'être invisible qui veille à la destinée de
l'homme auquel il est attaché. Chacun avait son génie, qui le
protégeait toujours, et partageait ses joies et ses douleurs.
Allant plus loin, on crut que tout groupe d'hommes, l'Etat, la
famille, les cités et les associations avaient un génie qui veillait
sur leur sort. C'est ainsi que tout collège eut son génie tutélaire,
honoré par les confrères. L'épigraphie nous en fait connaître
à Brucla. — III 1431. 7910, membres du coll. fahrum^ à Sarmizegetusa.
III 3438, un dignitaire du coll. fabrum, à Aquincum. — V 784. 2475.
VIII 2618. 2626, vétérans à Aquilée, Ateste et Lambèse. — V 5738, un
ciLvator arcae collegii fabr. et cent, de Milan. — VI 384, un magister
qidnqiiennalis collegii aromatariorum. Orelli, 1993, autel élevé par
les nautae Parisiaci. — Or.-Henz., 7237 = Bull, épigr., 1881, p. 52,
laniones , à Périgueux. — A Jupiter aeternus (dieu syrien, selon
F. CuMONT, Rev. arck., 1888, pp. 184-194) : III 1082. 1083. k Jupiter Doli-
chenus : III 1431 ; cfr. Hettner, De Jove Dolicheno, Diss., Bonn, 1877.
* VI 956, en 164, sous Trajan : Sagari t[hea]tri Marcelli cultores domus
Aug. — Cfr. Roescher, Lexik. cl. Myth., s. v. Kaiserkultus. E. Beurlier,
Le Culte rendu aux empereurs romains. Thèse, pp. 257-263.
2 Sur le culte des génies, voyez Roescher, Op. /., s. v. Genius. On y
trouvera la bibliographie. Preller, R.-M., I, pp. 75-88. II, pp. 195-203.
C. JuLLiAN, Inscr. de Bordeaux, I, pp. 11. 17 et 62. Marquardt, Le
culte, II, pp. 390 sqq.
( 209 )
de nombreux exemples; nous avons trouvé des dédicaces
faites aux génies suivants :
Genius are[na]norum, à Trêves (Brambach, 770).
Genius du coUegium centonariomm, h A\h3. Pompeia et à Vasio
(V 7595. XII 1282).
Genius du collegimn dendrophororum, à Patavium et à Rusi-
cade (V 2794. VIII 7956).
Genius du coUegium fabnim, à Apulum, Sarmizegetusa,
Ratiaria, Mevania, Lyon et Heddernheim (lil 1016. 1424. 7905.
8086. XI 5023. Allmer, M. de L., II, 185 et p. 502. Brambach,
1447).
Genius collegi [f]ocanorum, à Cologne (Brambach, 2041 add.).
Genius des {ft)astifen, à Vienna (XII 1814).
Genius coll{egii) jumentariorum, à Brixia (V 4211).
Genius nautanim, à Marbach (Brambach, 1601).
Genius commerci et negotiantium, à Brigetio (III 4288).
Genius collegi pavimentariorum, à Rome (VI 243).
Genius corporis pell(ionunï), à Ostie (XIV 10).
Genius collegi peregrinorum , à Voorburg et à Marbach
(Brambach, 11. 1602).
Sigillum Geni argenteuni donné au corpus piscatorum et uri-
natorum à Rome [B. c, 1888, p. 387. ISotizie, 1888, p. 279).
Genius saccariorum salariorum totius urhis [Bull, com., 1888,
p. 83).
Genius du coUegium scaenicormn, à Aquincum (III 3423).
Genius collegi tibicinum romcmorum (VI 240).
Genius utriclariorum, à Vienna (XII 1815).
Genius soda[lic{ii)] Jovis Conservatoris cursorum Caesaris
(VI 241).
Genius familiae monetcdis (VI 239) ^ .
^ Haug, Kônigreich Wurtemberg, p. 169 : Geniinn cum bas[e vete]ranis
et per\egrï\nis — posuer[unt], à Viens Aurelii.
Génies de collèges militaires : III 6577. VU 1035. VIII 10717. BuU.
corn., 1882, p. 150, n. 543. Brambach, 69-2.
Les collèges funéraires avaient naturellement aussi leur génie. Voyez
nos Indices (culte).
Tome L. 14
( 210 )
Genius collcgl juventutis, à Mayence, Zahlbach, Altenstadt,
(Bramrach, 1000. 1138. 1410),
Le collège des flûtistes romains et celui des artistes scéniques
d'Aquincum reçoivent la statue de leur génie; dans les autres
dédicaces, c'est un dignitaire du collège, ou un confrère, ou
même un étranger qui élève en l'honneur du Genius collegii une
statue ou un autel pour implorer sa protection ou pour le remer-
cier d'un vœu exaucé. Si ces inscriptions ne parlent donc pas
précisément d'un culte commun, au moins prouvent-elles com-
bien ces hommages rendus au génie étaient fréquents. Les
subdivisions des collèges , appelées décuries , avaient leur
génie à part ^. L'idée et le culte des génies s'étaient tellement
étendus chez les Romains que non seulement tout homme et
tout groupe d'hommes, mais même tout être inanimé, tout
objet avait son génie : il n'y avait pas de lieu, de rue, de place
qui ne fût sous la tutelle d'un génie protecteur. De même la
schoïa, ou maison corporative, avait le sien, que les confrères
honoraient -.
La statue du dieu tutélaire, celle du Genius collegii, et celles
des autres dieux pour lesquels les confrères avaient une dévo-
tion particulière, occupaient une place d'honneur dans la
maison corporative ou dans le temple du collège.
Nous connaissons des corporations de toute nature qui se
réunissaient dans des temples publics, soit pour leurs affaires,
soit pour le culte. Le collège funéraire d'Esculape et d'Hygie
vote son règlement dans une chapelle consacrée au divus Titus,
au temple des divi, sur le Palatin 3, et deux fois par an il y
distribue des sportules à ses membres •*. A Ra venue, le collège
1 VI 2M. 245. m 7905. BiUL corn., 1882, p. 150, n. 543.
2 VIII 2601-2603. Cfr. VIII 1548 : Statuam Genii curiae.
5 Voyez sur ce temple : Marquardt, St.-V., III, p. 468 = Le culte, IL
p. 218. ScHiESS, rem. 245. Preller, R. M., IP, p. 447, n. 3. De Ruggiero.
Diz. epigr., s. v. aedes, p. 177.
* XIV 10234, I. 9. 10. 23, en 153. Il célébrait ses cinq repas annuels
dans la scliola reçue depuis ce décret, 1. 9-16. Voyez infra, p. 213.
( 211 )
(les fabri reçoit des sportules, distribuées annuellement dans
le temple de Neptune K A Lanuvium, en 136, le dictateur fait
tenir une assemblée générale du collège de Diane et d'Anti-
nous dans le temple de ce dieu, pour voter les statuts, et ces
statuts sont atlichés, par son ordre, sous le tétrastyle ou pro-
naos de ce temple -. A Truentum, les ciiltores Uerculis célè-
brent annuellement des sacrifices et un repas dans le temple
de ce dieu 3. Nous venons de voir que les poètes et les acteurs,
ainsi que les tibiciues se réunissaient dans le temple de Minerve,
sur l'Aventin, et que les flûtistes avaient de plus le droit de
tenir un banquet au temple de Jupiter Capitolin ^.
C'était là une faveur que n'obtenaient pas toutes les corpo-
rations, et chaque collège un peu prospère avait son local
propre qui lui servait de lieu de réunion pour toutes ses
assemblées, religieuses ou profanes. La description de ces
hôtels ou temples suftirait pour prouver le caractère religieux
des collèges; aussi allons-nous tâcher d'en donner une idée
d'après les documents épars S. Puis nous y suivrons les con-
frères pour assister avec eux aux fêtes religieuses qu'ils y célé-
braient et au culte qu'ils y rendaient au dieu protecteur.
Ces lieux de réunion, qui portaient le plus ordinairement le
nom de scholae, pouvaient être de nature fort diverse. Les col-
lèges funéraires ayant un monument commun se réunissaient
souvent dans une partie de leur monument funèbre. De Rossi
' XI 1-26
"- XII;>1^2. 1. i-3. 7.
- Ephem.ep., VIII -210.
^ Voyez encore : III 1828: Omvictores Concordme, à .\arona. C. Julliax
{Inscr. de Bord., I, p. 209) croit que ce nom signifie qu'ils tenaient leurs
banquets clans le temple de la Concorde.
3 Sur les scholae en général, voyez : K. Laxge, Haus iind Halle, pp. 200-
29o. DE Rossi, Bull, cri.st., 1864, pp. .57-62. Roma sott., III. p. 475.
G.-L. ViscoNTi, Ann. d. L, 1868, pp. 387 et suiv. Marqiardt. St.-V., III,
pp. 160. 212 ^ Le culte, I. p. 192, n. i. II, p. 840. .^chiess. pp. 7.5-78.
I.IEBENAM, pp. 275 280.
( 212 )
a fort bien montré l'origine de ces sortes de scholae 'i. Les monu-
ments sépulcraux des riches particuliers avaient deux parties
souvent superposées : Tune, inférieure et souterraine, où repo-
saient les défunts ou leurs cendres; l'autre, supérieure et des-
tinéeaux banquets que les vivants célébraient en leur mémoire:
cubiculum superiorem ad confrequentendam memoriam quiescen-
tum, dit une inscription de Pouzzoles -. Les monuments com-
muns des sociétés et collèges funéraires étaient construits sur
le même plan. Ainsi l'on voit des gens associés pour bâtir un
monument se réunir dans ce monument pour délibérer sur les
intérêts de la société 3. Les sodales Syncratii, collège familial,
appellent leur sépulture memoria ciim cubicido et solario, monu-
ment avec chambre funéraire et terrasse ^. Cette terrasse, qui
pouvait être couverte 3, servait ici de salle de réunion, comme
celle que le collège d'Esculape et d'Hygie possédait près de la
voie Appienne. On comprend que les collèges, ayant besoin
de salles plus spacieuses, se bâtirent des scholae à côté du
monument funèbre ou dans Varea sépulcrale : leur local fut
donc souvent un édifice à part ou une annexe du monu-
ment. Quand les sépultures privées des riches chrétiens se
transformèrent en sépultures collectives, poussant leurs galeries
sous le sol de la campagne romaine, elles eurent aussi des
chambres réservées aux réunions. De Rossi a découvert à
Sainte-Domitille une vaste salle, ornée de peintures et entou-
rée de bancs en pierre 6; à côté, on remarque un puits et une
1 Bull, crist., 1864, pp. 26. 60. 1865, p. 89. Roma sott., III, pp. 473
et siiiv. NoRTHCOTE et Brownlow, trad. Allard, 2^ éd., pp. 78-79. 106.
2 X2015. Voyez le fameux testament de Bàle, où cette salle de réunion
est appelée cella memoriae. Wilmanns, 315. Bruns, Fontes juris, p. 297.
5 VI 10294 : ad monument lun sociorum in conventu habendo.
^ XIV 3323, à Préneste. Les inscriptions VI 6058-6067 furent trouvées
dans un monument dont l'étage supérieur servait de schola, selon Lan-
ciANi, Bull, com., 1874, p. 37. Le n° VI 3756 fut découvert dans une schola
de ce genre.
« XIV 10234 : solarium tectum.
6 De Rossi, Bull, crist., 1865, p. 95. Renan, Marc Aurèle, p. 539.
( 213 )
citerne : c'était la scliola où les chrétiens s'assemblaient
et célébraient leurs agapes. A Césarée, un généreux chrétien,
qui prend le nom de culto?' Verbi, donne à ses frères [fratres,
eclesia fratrum) une area pour y élever des tombeaux et une
cella qu'il y avait construite pour servir aux réunions ^. Parmi
les collèges païens, qui portaient le nom de cultores, plus
d'un avait sa schola dans le lieu de sépulture. Sur la voie
Ai)pienne, il devait s'en trouver beaucoup. Un collège de Sil-
vain y avait reçu, entre la deuxième et la troisième borne mil-
liaire, un champ, locu\rn], in quo aedi/icata est schola sub
])or{tîcu) consecrata Silvano et collegio ejiis sodaliciio) mancipio
acceperwit, et c'est dans cette schola que le collège faisait les
sacrifices et tenait les banquets 2. Fea, qui en vit les ruines,
nous dit quelle était de forme absolument circulaire 3; au
milieu, il y avait un autel 'K Entre la première et la deuxième
pierre milliaire, c'était un autre collège funéraire qui avait son
local : Salvia C. f. Marcellina — donum dédit collegio jEsculapi
et Hygiae locum, aedicula{m) ciim pergula et signum marmoreiim
.^sculapi et solarium tectum junctum, in quo populus collegi
siujjra) s{cripti) epuletur, quod est via Appia ad Martis intra
milliariimi I et 11, ab urbe euntibus parte laeva, inter adfines
Vibium Colocaerum et populuni. Ce collège d'Esculapeetd'Hy-
gie avait donc reçu de Marcellina une chapelle avec une statue
d'Esculape, une treille et une terrasse couverte, qui est appelée
schola dans la même inscription et où le collège prenait part
* VIII 9585 : Aream ad sepidcra cultor Verbi contulit et cellam struxit
suis cunctis siimptibus. Ecclesiae sanctae hanc reliquit memoriam. —
Eclesia fratrum hune resiituit titiUum. P. Ai.lard, II, p. 87. Northcote
et Brownlow, p. 79. De Rossi, BîUL crist., 1864, p. 28. Roma sott.,
I, pp. 96. 107. — Les chrétiens se réunissaient aussi dans les catacombes,
dans les cubiciUa ou chambres sépulcrales, qui prirent parfois les dimen-
sions d'églises souterraines.
2 VI 10231 : et ad eum locum itum actum aditum atubituni sa[c]rifina
facere, vesci, epulari ita li\c\eat, qiiamdiu is collegius steterit.
3 Fea, Varietà di Notizie, pp. 175. 180. Il en donne le plan aav. II).
* Selon C -L. Visconti, /. /., pp. 387-388.
(
h des distributions de sportules deux fois par an i. Il n'est pas
dit formellement que ces deux locaux se trouvaient dans des
lieux de sépulture, mais leur situation au bord de la voie des
tombeaux, hors ville, peut le faire croire. Il n'y a pas de doute
pour un autre collège funéraire, composé d'esclaves, dont une
inscription de l'an 16 décrit longuement le lieu de sépulture 2.
Nous y reviendrons au paragraphe suivant; notons ici qu'on y
trouvait un portique et un pavillon [trichila) meublé d'une table
carrée et d'un buffet, un puits à margelle où Ton prenait l'eau
pour les sacrifices, et une cuve à supports de marbre pour les
bains. La fameuse schola des sociales Seirenses nous est encore
mieux connue 3. Elle fut trouvée en juillet 1864 près de la voie
Nomentane, non loin de Rome. C'était une chambre {cella)
carrée, ayant cinq mètres de côté et pouvant contenir cinquante
personnes. Elle n'avait qu'une seule entrée. Tout autour de la
salle régnait un banc en pierre, adossé au mur et peint en
rouge foncé. Au milieu, il y avait un autel en marbre, peint
de la même couleur et assez bas ; une inscription du IIP siècle
indique que cet autel, ainsi que l'emplacement du local, était
un don du président : C. Hedideius Januarius, q{uin)q[uenna'
lis)f aram sodalibus suis Serrensibus donum posiiit et locum
schol[a]e ipse acquesivit ^. Ici encore, on ne saurait affirmer
que ce collège avait au même endroit son locus sepulturae. On
rencontre d'autres collèges funéraires ou religieux qui ont
leur local ou un sanctuaire dans les domaines d'un particulier,
ensuite d'une concession gracieuse de celui-ci, sans y avoir
' VI 10234, 1. 11 : ad Martis m sckolam n(ostram); 1. 13 : ad Martis
eodem loco dividerent sportulas. C'est Vaedicida avec le solarium qui est
appelée schola, à moins que ce ne soit le solarium seul.
2 II 10237.
5 De Rossi, Bull, crist., 1864, pp. 57-62. Rama sott., III, p. 475.
C.-L. ViscOxXTi, Giornale di Roma, 1864, 9 juin. Ann. d. L, 1868, p. 387.
^ VI 839 et note. On y a trouvé aussi deux vases en bronze servant à
mesurer les rations de vin et d'huile dans les banquets ; l'un contient un
sextarius, l'autre une hemina. De Rossi, Bull, crist., L /., en donne le
dessin; leurs inscriptions sont reproduites en note au n. VI 839.
( 216)
un lieu de sépulture ^. Les collèges formés par les esclaves
et les affranchis d'une riche famille {colleyia domeslka) trou-
vaient naturellement un local dans la maison de leur maître "^ ;
ceux qui honoraient particulièrement la divinité impériale en
obtenaient parfois un dans les annexes d'un temple d'un
divus : coUegium Aumiiiis dominonan, quod est sup templo divi
Claudi 3.
Voilà ce que nous savons des scliolae des collèges funéraires ;
nous reparlerons au paragraphe suivant de celles qui étaient
bâties dans les domaines funéraires. Certains collèges religieux
et certains collèges professionnels, pour qui le soin des funé-
railles était le but principal et qui avaient aussi un monu-
ment commun, ne possédaient peut-être pas d'autre local pour
se réunir. Mais le plus souvent leurs maisons corporatives
étaient situées en ville, sur l'une des places publiques ou près
du temple de leur dieu. Nous en connaissons des exemples
nombreux. Pour commencer par les collèges religieux, citons
* VI 404 : collegium sanctissimum quod consistit in praedi(i)s Larci
Macedonis in curia, vers 122. — VI 461 : ex concessu in praediis suis
saci^ariiim dei Liberis cum aedicula — suis impendis marmorarunt, et
aram et ortulum super Nymphis, qui locu^ appellatur Memphi, donum
dederunt spirae. — Bull. d. L, 188o, p. 138. Bull, coin., 1883, pp. ol-53.
1886, pp. 75-77 : collegium salutare (quod consistit in praediis Galbanis?).
— VI 543 : iiî templo sancti Silvani Salutaris quod est in ho[rtis . .]t prae-
dio suo, en 113. — Cfr. VI 671 : liorti Aboniani (collegium magnum Lar.
et imag.).
2 VI 7458 : collegium cocorum Aug(usti) n(ostri), quod consistit in
Palatio; et plus loin : corpori qui sunt in hac slationem. Cfr. VI 8730. —
XII 4449 : {collegium sa]lutare [f]amilia[e] tabellarior(um) Caesaris
n(ostri), quae sunt Carbone in domu. — I 1340 = XIV 2873 : coquies
atriensis, à Préneste; voyez la note. — VI 9148. 9149. 10260-10264 : colle-
gium quod est in domu Sergiae L. /". Paullinae. Dans les inscriptions,
consistere et esse indiquent souvent la résidence du collège, le local où il
siège. — Cfr. Festus, p. 333, s. v. scriba, supra, p. 82, n. 3, et VI 9404.
10251=' {infru). III 4779. 4017. 7337. Pline {Epist., VIII, 16) dit : servû
respuhlica quaedam et quasi civitas tlomus est.
5 VI 10251'.
( 216 )
d'abord les Isiaci de Pompéi ^. L'Isium de cette ville, derrière
le grand théâtre, comprenait une area rectangulaire, entourée
d'un portique ; au milieu s'élevait le temple, et derrière cet édi-
fice se trouvait, adossée à l'enceinte, une grande salle qui com-
muniquait avec Varea par cinq larges arcades s'ouvrant du côté
du temple ; on y a trouvé un piédestal qui supportait deux
statues en granit, mais pas de bancs; auprès d'une table, il y
avait encore des restes d'un repas. On peut regarder cette salle
comme le lieu de réunion du collège des Isiaci de Pompéi. Au
Portas, les adorateurs de Sérapis avaient aussi une schola,
peut-être au temps de Caracalla, et ils avaient chargé deux des
leurs de l'élever à frais communs '^. En 1890, en construisant
l'hôpital militaire, on a découvert sur le Célius la résidence
des dendrophores romains 3, porteurs des arbustes sacrés dans
les processions du culte phrygien de Cybèle et d'Attis : une
grande salle rectangulaire, pavée en mosaïque blanche et
noire, avec figures symboliques, conduisait au local propre-
ment dit, appelé basilica Hilariana, parce qu'il avait été bâti
par M'. Poblicius Hilarus, marchand de perles et président à
vie des dendrophores ^*. On n'a pas pu pousser les fouilles
assez loin pour se faire une idée de son architecture. La scliola
qui était probablement possédée en commun par les dendro-
phores et les cannophores d'Ostie, nous est mieux connue s.
* OvERBECK, Pompéi 2, p. 111. G. Lafaye, Le culte d'isis, pp. 184-185.
X 850, sur un marbre trouvé devant la porte du temple d'isis : M. Faecius
Sttavis M. Faecius Primogenes scholam de suo.
2 XIV 123. Bull, del Inst., 1870, p. 20. G. Lafaye, /. l. Cfr. XIV 18 :
\Isi]aci magar{um) de suo restitu[erunt) . Ce [jisyapov était la salle où
allaient dormir les initiés qui voulaient recevoir les conseils de la déesse
pendant le sommeil. Lanciani, Bull, del L, 1868, p. 228. Lafaye,
pp. 183-184.
3 C.-L. ViscoNTi, Bull, corn., 1889, p. 483. 1890, pp. 18-25. 78. G. Gatti,
Notizie, 1889, p. 398. 1890, pp. 79. 113. Huelsen, Mitth. des Inst , 1891,
pp. 109-110. P. BiEiNKOWSKi, Eranos Yindobonensis, p. 285.
* Il était déjà connu par VI 641.
3 C.-L. ViscoNTi, Ann. d. Inst., 1868, pp. 365 et suiv. Mon. delV Inst.,
tav. LX, tig I. Henzen, Bull, com., 1874, p. 37. K. Lange, op. c, p. 291.
( 217 )
L'enclos consacré à Cybèlc renfermait un sacrarium, un temple
quadrangulaire (.1/e^roo7i) et une scliola. Celle-ci était adossée au
temple, mais sur un plan inférieur. Sa forme est irrégulière, à
cause de l'espace dont on avait pu disposer; c'était un pentagone
irrégulier, dont un côté était formé par le mur postérieur du
Metroon. L'un des côtés extérieurs avait une entrée à chaque
bout; les autres étaient entourés d'un banc en pierre, comme
la scfiola des Serrenses. La salle contenait un grand et un petit
autel, consacrés probablement à Cybèle et à Attis. L'un et
l'autre étaient hauts de deux mètres. La surface avait une cavité
destinée à contenir le feu des sacrifices, et elle était entou-
rée d'un bord, ouvert d'un côté pour retirer les cendres. Les
murs, le banc et les autels étaient crépis et peints en rouge
foncé. Une inscription de la seconde moitié du IIP siècle nous
apprend que les dendrophores d'Ostie avaient bâti cette schola
et l'avaient reconstruite entièrement à leurs frais : Nuinini
domus Aug[ustae] d[eudrophori Ostieiijses scolam, quam sua
pecunia consUt[ueranty novis simijptibus a solo [restitueru7it]^.
Comme les murs n'ont plus qu'un mètre de hauteur, on ne
saurait dire si elle avait un toit ou si elle était à ciel ouvert.
La description de ces scholae des collèges funéraires et reli-
gieux nous sera utile pour nous faire une idée de celles des
collèges professionnels, qui en différaient pourtant. D'abord,
elles étaient souvent situées sur un forum de la ville, comme
à Ostie '^, à Bénévent^, à Falerio 4, à Préneste ^, à Pompéi 6, et
* XIV 45. Voyez infra, p. 229, n. 1.
2 Voyez infra, p. 219.
' IX 1685 : collegium Martensiiim infraforaninn.
* IX 5438 : collegia quae attingant foro pecuario.
^ XIV 2937. 2972 : amatores regionis macelli, ou cultores Jovis Arkani
rcgio{nis) macelli.
« Cependant cela est fort douteux. Nissen, Pomp. Stud., pp. 287-303,
croit que le vaste et splendide édifice d'Eumachie, sur le forum de Pompéi,
était le local {Festsaal) des fullones. C'est peu probable, et la dédicace
qu'on y a trouvée, X 813 : EumachiaeL. f. sacerd{oti) public ae) fullones.
( 218 )
comme celle des scribes ^ et peut-être des flûtistes'^, à Rome.
Souvent elles se trouvaient dans un quartier où habitaient et
travaillaient les membres du collège : ainsi les marchands de
vin de Lyon avaient probablement leur local dans ces canabae
qui leur servaient d'entrepôts et qui se trouvaient dans la partie
N.-O. de l'île actuelle d'AinayS; à Rome, les corroyeurs avaient
le leur au delà du Tibre, entre le temple de Fors Fortuna et
la porte Septimiana, où étaient leurs tanneries 4; il était voisin
de celui des ivoiriers et des ébénistes 3; enfin, les tabeniarii
ne suffit pas pour le prouver. Mau (Fiihrer durch Pompei, p. 27) en fait un
marché pour les tissus en laine. — Nissen regarde aussi comme des
scholae : l» un édifice situé à l'est du forum, dans lequel d'autres ont
reconnu la curia ou senaculum ; 2<» une maison située derrière la curie
(pp. 304-305. 345). L'un était consacré au culte impérial (Mau, p. 26),
l'autre est un atelier de foulon. — K. Lange, op. c, p. 294, a pris pour des
scholae les trois curiae ou salles de séances du sénat, des duumvirs et des
édiles, situées au sud du forum (Mau, p. 30). Il regarde aussi (p. 295)
comme des scholae différents fragments du plan de Rome publiés par
JoRDAxN, Forma Urbis Romae, n. 18. 45. 130. 184. 224. 228. 231. 233. 236.
259. 284.
* Lâschola Xantha; voyez infra, p. 219.
2 Leurs inscriptions ont été trouvées près de l'arc de Constantin
(VI 240), près du Septizonium de Septime Sévère (2191) et au forum (3696).
— La ç'ja-'.xTj (jûvooo:; OU collège des athlètes avait peut-être son local près
de Saint-Pierre in Yincoli; voyez : S. Ricci, Bull, corn., 1892, pp. 195 et
suiv. C. I. L. VI 10153-10154. Kaibel, 1102-1110.
5 Allmer, Musée de Lyon, II, p. 451, n. 171 et suiv. Mommsen, Hermès,
VII, pp. 304, n. 2. 310, n. 1. KorrespbL, 1889, p. 23. Schulten, pp. 3.
112. Ils se servent aussi du mot consistere pour indiquer la résidence
de leur collège : negotiatores vinari [Liuj.] in kanahis consis tentes,
Allmer, II, n. 171. Nous verrons encore un autre emploi de ce mot.
* De Rossi, Bull. d. but., 1871, p. 163.
5 Nous lisons : [Julius'] Aelianus jus scholae tetrastyii [quod est a
dextra aedis Fortunae] Aug. quo conveniretur a negotiantibus [citriaris
et] eboraris dédit, au coin de la piazza S. Callisto et du vicolo délia
Cisterna. Mitth. des Inst., 1890, p. 288. Mommsen (Mitth., l. l.) complète
autrement la troisième ligne; nous croyons qu'il y avait un vide au
commencement.de cette ligne, comme à la fin, pour faire symétrie.
Jus n'indique que le droit de s'y réunir et non la propriété.
( 219 )
avaient leur schola au centre de la ville, près du Panthéon
d'Agrippa ^. Les sous-officiers deLambèse avaient bâti les leurs
dans le camp même, où beaucoup de place était devenue dis-
ponible depuis que Septime Sévère avait permis aux légion-
naires mariés d'habiter avec leurs femmes à Lambèse.
Malheureusement, les touilles n'ont mis à découvert aucune
schola proprement dite des collèges professionnels, qui pour-
rait servir à nous en faire une idée générale. On a négligé de
nous décrire la sclwla Xantha - des scribae librarii et praecones
aedilium curulium, découverte au XVI« siècle sur la via sacra,
près des Rostres : nous savons seulement que c'était un édifice
petit, mais somptueux, construit tout en marbre et splendide-
ment réparé par des curateurs qui l'avaient orné de sièges en
bronze, de statuettes d'argent et d'autres ornements : scholam
ab incfwato refecerunt, marmoribus oniaverunt, VictoriamAugus-
tam et sedes aeneas et cetera ornamenta de sua pecunia dede-
runt. — hnagines argenteas deorum septem post dedicationem
sclwlae et mutulos cum tabella aenea de sua pecunia dederunt 3.
Le forum d'Ostie avait des portiques sur ses deux longs côtés ;
sur le côté oriental , on avait relié les colonnes au mur
d'enceinte par des cloisons qui partageaient le portique en
autant de compartiments rectangulaires qu'il y avait d'entre-
colonnements. Ces salles, placées au centre des affaires com-
merciales, servaient de scholae à des corporations marchandes;
en effet, devant chacune d'elles il y avait, dans la mosaïque, un
cartel contenant le nom d'une corporation : corpus pellion{um)
Ost(iensium) et Porte{nsium) hic {consistit). — Naviculariorum
lignariorum. — Navicîd{ariorum) Tarriciinensium)^. Sur le côté
* VI 9920, k gauche du portique du Panthéon. De Rossi, Bidl. d. lus t.,
1855, p. 51. C.-L. ViscoNTi, Ann. d. 1., 1868, p. 388.
2 HuELSEN, Mitth. d. Imt., 1888, pp. 208-222 : Il sito e le Ucriûoni délia
schola Xantha sul foro romano.
3 VI 103, et HuELSEN, l. t., pp. 220-221.
* XIV 277-279. Fiorelli, Nolizie, 1881, Atti délia r. Acad. dei Lincei,
ser. 3, vol. 7, pp. 199-201. 203 et tav. I. André, Mélanges des écoles fran-
( 220 )
opposé de la place, il y avait deux salles semblables, qui
semblent avoir servi aussi à des collèges^. Toutes ces salles
étaient vides. Nous venons de dire qu'on a retrouvé les traces
des scholae de sous-officiers dans le camp de Lambèse. « Les
textes épigraphiques trouvés à Lambèse -, dit R. Gagnât,
signalent un certain nombre d'édifices, qu'ils désignent sous
le nom de scola : c'était le lieu de réunion des cercles de sous-
officiers. Ces inscriptions sont gravées, toutes sans exception,
sur des hémicycles ornés de moulures, en grandes pierres de
taille, qui devaient entrer dans la construction ou dans l'orne-
mentation d'une absidiole 3 ; par suite, on peut penser que
le monument auquel ils appartenaient se terminait par une
abside plus ou moins grande. Il est fâcheux que ceux qui
ont découvert ces textes épigraphiques n'aient pas songé ;\
çaises, 1891, XI, p. 501 : Le théâtre et lefoj'um d^Ostie, avec des planches.
Il y avait de ce côté cinq scholae. Devant celle des mensores frumentarii,
le cartel est remplacé par un mesureur de blé agenouillé tenant la main
gauche sur le bord d'un modiiis et ayant dans la droite une règle. La
cinquième schola est d'un collège inconnu.
* FiORELLi, /. /., pp. 201-203, et vol. 6, p. 479. Il y avait de ce côté deux
scholae : l'une, dit Fiorelli, des sacvmarii (?), l'autre d'un collège inconnu.
Cfr. XIV 409 : patronus togatorum a fora et de sacomar(is?). XIV 309 :
functus sacomari, et la note. Le même patron est grath adlectus dans un
collège résidant ad quadrigam fori vinari; il s'agit peut-être du collegium
negotiantium fori vinari, ou du coll. Geni fori vinari (XIV 430). Voyez
Dessau, au n«> 409. Dans les ruines du théâtre, on a trouvé des fragments
d'inscriptions mentionnant des collèges (Fioiœlli, p. 479, n. 18. 20. 22),
et des bases de statues élevées à des dignitaires de collèges (Fiorelli,
pp. 470 et suiv.) : ces pierres provenaient du forum et furent employées
au Vie siècle dans la reconstniction du théâtre.
2 VIII 25o2 et suiv.
5 L. Renier donne le dessin d'une de ces pierres , Archives des
missions, 1851. planche I. Elle est actuellement au Louvre. L. Renier et
d'autres croyaient que le mot schola désignait ces pierres {Ibid., p. 217).
WiLMANXS {Commentationes in hon. Mommseni, p. 2(X), n. 1) a fait
remarquer Terreur. Ces pierres, dit-il, formaient probablement la base
de l'abside opposée à l'entrée, comme dans les basiliques.
( 221 )
relever le plan des salles où ils se trouvaient ; ils nous
apprennent seulement qu'ils se sont rencontrés tous, — et l'on
en connaît plus d'une demi-douzaine, — dans la partie méri-
dionale du camp, entre le prétoire et la porte décumane i. )>
K. Gagnât décrit un édifice situé au même endroit et affec-
tant, comme un autre qui lui est adjacent, la forme d'un rec-
tangle terminé par une abside, et il croit qu'il s'agit d'une
suite de ces scfwlae de collèges militaires -.
Voilà ce que les fouilles nous apprennent sur les scholae.
Les inscriptions, qui mentionnent un grand nombre de ces
lieux de réunion, pourront compléter, dans une certaine
mesure, ce qui précède.
On remarque d'abord que, quant à leur forme, les scholae
différaient beaucoup : elles étaient rectangulaires, polygonales
ou circulaires. De Kossi et Lange 3 ont voulu établir qu'elles
étaient généralement bâties en forme d'abside. Schola, disent-
ils, est synonyme (ïexedra et désigne une salle semi-circulaire,
servant de salon de conversation , avec des jDancs disposés en
hémicycle pour la commodité des auditeurs. De Rossi cite la
schola circulaire du collège de Silvain et les oratoires chré-
tiens, qu'on trouve au-dessus des catacombes et qui affectent
une forme circulaire, avec plusieurs absides, ou une forme
rectangulaire avec trois hémicycles. Ce seraient de véritables
scholae où se réunissait le peuple chrétien '^. Il faudrait donc
se représenter la schola comme une salle semi-circulaire ou
' R. Gagnât, L'armée romaine d'Afrique, pp. o40-o^l. Cfr. Le même,
ibicL, pp. 4o2. 467. 476. 514.
2 R. Gagnât, op. c, pp. 539 et 541.
5 De Rossi, Bull, crist., 1864, pp. 25. 60. Lange, op. c, pp. 291 et suiv.
* Huelsen, Mit th. d. Inst., 1890, p. 291, parait être du même avis.
Suivant lui, la sdiola tetra.stijli des eborarii serait une exedra contiguë à
un édifice tétrastyle : c'est dans celui-ci que ce collège aurait tenu ses
banquets : qui ad tetrastijlum epulati fuerint. (Moalmsen, Savigny's
Zeitschr., 1890, p. 75, croit qu'elle était située dans un tétrastyle, édifice
entouré de quatre rangées de colonnes). Huelsen cite la schola labrorum
des bains romains (Vitruv., V, 10, 4); mais ces scholae désignent l'espace
( 222 )
bien comme un rectangle terminé par une abside; celle-ci
aurait donné son nom à l'ensemble. Les scholae décrites ci-
dessus et même celles que mentionne De Rossi ne nous semblent
pas confirmer cette opinion. A la vérité, il paraît certain que le
mot scfiola avait pris le sens d'hémicycle, banc semi-circulaire
[exedr a) ^.Mms par lui-même, il n'implique aucune forme déter-
minée; c'était proprement le lieu du loisir et du repos ((t-^oXyi),
et nous croyons que c'est dans ce sens que cette dénomination
fut appliquée aux maisons des corporations, comme aux écoles
des philosophes et aux salons de conversation et d'attente qu'on
trouvait dans les thermes et sous les portiques : c'est là que les
confrères se réunissaient, pendant leurs loisirs, pour se délas-
ser, pour s'entretenir, pour discuter leurs intérêts, pour pren-
dre part aux mêmes sacrifices et pour s'asseoir à la même table.
Telle était, en effet, la destination de la scfiola: dans les mieux
conservées, on a retrouvé généralement deux choses bien
caractéristiques : les bancs où s'asseyaient les confrères et
l'autel où l'on faisait les sacrifices. On s'y réunissait tant pour
entourant le bassin, où les baigneurs attendaient, et qui |)Ouvait être
circulaire (Rich, Dict. des antiquités gr. et rom., s. v. schola. Overbeck.
Pompéi 5, pp. 209. 213). Selon nous, ce nom leur était donné parce que
c'étaient des salles d'attente, de repos. Il en sera de même des scholae
in Octaviae pariicibus (Plin., h. n., 35, 10, 114. 36, 5, 22. 29j, dont la
forme n'est pas indiquée : on y passait les moments de loisir pour causer.
* Voyez : X 5069 : statua et schola; IX 4112 : signa Serapidis et Isidis
cum ergasteris suis et aediculam in scholam, où il s'agirait de niches semi-
circulaires (aedicula) destinées à des statues. V 8801 : schola et solarium.
VIII 978: aediiles^ pluteum perpetu[um], scholas II, I [h]orologiu[m], h
Curubis. X 831 : scol{am) et horol{ogium), dans un hémicycle près du
temple d'Hercule, à Pompéi X 1453, à Herculaneum : pondéra et chalci-
dicum et scholam. X 1236, à Xola : campum publiée aequandum curavit,
maceriem et scholas et solarium, semitam de s. p. /". c. Remarquez :
VI 21960 : schola ollarum XX, un ensemble de vingt ollae, peut-être dis-
posées en demi-cercle. Schiess, n. 311. Schola est aussi synonyme de
eollegium, surtout poiu' désigner des collèges militaires : schola medi-
corum, à Rome, Gruter, 632, 4; schola armatur{arum), à Misenum,
en 159, X 3344; voyez V Index colleginrum (coll. militaires).
( 223 )
le culte que pour les délibérations, et la sclwla était à la fois le
local et le temple du collège.
Scïwla, lieu de repos et de délassement, était son nom ordi-
naire 1 ; mais elle en portait beaucoup d'autres, dont plusieurs
font bien ressortir sa destination religieuse. On trouve quelque-
fois curia '^, salle de délibération, domus ^, maison, locus ^
local, et basilica o. A côté de ces noms, qui n'ont par eux-
* Nous le trouvons chez les Augustales corporatif à Puteoli, X 1888;
cannophori Ostienscs, XIV 285; centonaires, -â Apulum (III 1174j et à Ostra
(XI 5750); dendrophores, à Cemenelum (V 7904), à Ostie (XIV 45), à Tuscu-
lum (XIV 2634); eborari et citriari, à Rome, Mittli. cL Inst., 1890, p. 288;
fabri, à Apulum (III 1215), au Portus (XIV 424), à Pisaurum (Xotizie, 1880,
p. 260), à Ostra (XI 6191), à Sentinuin (XI 5748), à Sestinum (XI 6018), à
Vulsinii (XI 2702); fabii soliarii baxiarii, à Rome, VI 9404; fabri
ticjmiarii, à Tolentinum IX 5568; fontani, à Rome, Bull, corn., 1876,
p. 139; collèges militaires à Lambèse, VIII 2552-2554. 2562. 2601-2603.
10717, et à Aquincum, III 3524; cfr. XI 3344; nautae, à Aventicum,
Inscr. conf. Helv., 182; negotiatores civitatis Mattiacorum, KorrespbL,
1890, p. 186, n. 98; quaestores et caplatores, à Rome, Preller, Regionen,
p. 126; scribae librarii et praecones aedilium ciirulium, VI 103; viatores
quaestorii, VI 816; viatores III virinn etUIIvirum, VI 1936; enfin chez
des collèges funéraires (VI 839. 10231. 10234. V 8801. XI 3810. XIV 123.
Arch. Ep. Mitth., VIII, 1884, p. 92, n. 3). Cfr. X 850. VI 10344. Bormjlvn,
Inscr. Sassinat.es, 9.
- Centonaires de Côme, V 5447, cfr. 5446; decuriones in hac curia qui
descendunt, VI 541 ; collegium sanctissunum quod consistit in praedis Lard
Macedonis in curia, VI 404. Cfr. Gilbert, Stadt Rom, I, 199 sqq. Sur
curia Jovis (VIII 14683), voyez la note de J. Schmidt dans le Corpus.
^ XI 5749 : donius c{ollegii) c{ent.), à Sentinum. En grec : oTxo;; voyez
LiEBENAM, p. 275.
* III 4038. Cfr. VI 10350.
^ VI 10295 et supra, p. 216 : basilica Hilaria)ia. Auti-es noms : canopu^s
collegii Martensiuu) ,3iBéné\enl,l\ 1685; familiaricuin Prosmonifecerunt,
à Apulum, III 7807, et note; juventutis Manliensia)u gentiles, qui con-
sistunt in Manlia, à Virunum, III 4779; Isidi et Osiri mansioneni aedifi-
cavimus ex corpore pausariorum et argentariorum, VI 348; phretnum
Augustaliiim, à Caere, XI 3614; sacrarium dei Liberi cum aedicuia ispira);
VI 461; sedes epicurei clwri, à Pouzzoles, X 2971; solariwn, VI 10234;
statio(?), III, p. 924. VI 7458, cfr. supra, p. 215. n. 2: labcrnae (?), X
1759.
( 224 )
mêmes rien de religieux, on trouve fréquemment ceux de
templum ^ aedes, aedicula 2. Ce ne sont pas seulement des
collèges religieux, tels que les dendrophores, et les collèges
funéraires qui emploient ces termes, mais beaucoup de col-
lèges professionnels, tels que les fabri, les centonaires, les
marchands de blé, les utriculaires et il nous paraît évident
qu'ils désignent par là leur local. Nous avons vu que certains
collèges avaient obtenu le droit de se réunir dans un temple
public de la ville, notamment dans celui du dieu protecteur.
Les collèges prospères construisaient k leur divinité tutélaire
un temple particulier, destiné avant tout au culte privé : tel
est le cas pour les dendrophores de Sitifis, associés avec des
religiosi de la grande Mère des dieux 3, et d'un collège bachique
{spira) de Rome '^; mais c'était dans ce temple qu'ils tenaient
aussi leurs réunions de toute nature. Les collèges profession-
nels faisaient de même; ils bâtissaient des temples dédiés à
leurs protecteurs :
Neptuno et Minervae templum — [coUe]gium fabrorum et qui
in eo [sunt] d(é) s(iio) d[edenint), à Regni, VII 11.
Deae Nemesi illi templum fecerunt collegio utriclariorumy à
Pons Augusti, III 1547.
Ce sanctuaire de leur dieu était aussi leur local. En revanche,
les locaux appelés d'un nom profane, scliola, cuiia, basilica,
étaient le plus souvent de véritables temples. On disait schola
ou templum, suivant qu'on songeait plutôt à la destination
' Centonaires, à Padoiie (V 2864) et à Cemenelum (V 7906); dendro-
phores, à Sitifis, VIII 8457; fabri, à Regni (VII 11) et à Regium Lepidum
(XI 970); negotiatores frumentarii, VI 814; utridarii, à Pons Augusti, III
1547; collèges funéraires et autres : III 633. VI 349. 543. 647. 692. 815.
114085. 1X5177. XIV 246.
■^ Fahri, à Cetium (III 5659) et à Ravenne? (XI 126); fabri ferrarii,
à Rome, VI 1892; horrearii, VI, 338; negotiatores vestiariae et lintiariae,
à Aug. Vindel., III 5800; collèges funéraires et autres : III 8795. 8675.
VI 253. 425. 455. 642. 10234, 1. 3. VII 39. 1039 (?). X 6483. 6679.
5 VIII 8457.
^ VI 642. Cfr. II 4085. III 8675. VI 338. 642.
( 225 )
profane ou au caractère religieux du local, sans égard à sa
forme architecturale. La schola, comme le temple, était solen-
nellement consacrée à la divinité :
Scfiola deae Minerv(a)e Aiigitistae) col{legii) fab{rum), à Pisau-
rum I.
Schola sub porticu consecrata Silvano et collegio ejus soda-
lk{io), à Rome, II 10231.
Le jour de la dédicace était une fête pour le collège - ; on la
célébrait par un banquet ou par une distribution de sportules -^
et on la rappelait par des monuments. Nous voyons du reste
schola et templum servir aux mêmes usages. Les [abri de Senti-
num, de Pisaurum et de Vulsinii et les centonaires d'Ostra se
réunissent dans leur schola, les centonaires de Sentinum dans
leur maison [domus) pour le choix d'un patron, affaire pro-
fane ^\ mais les [abri et les centonaires de Regium Lepidum
s'assemblent pour le même motif dans leur temple commun :
in lemplo collegi fabrum et centonariorum Regiensinm 3. D'un
autre côté, si à Cemenelum nous vovons les centonaires, à
« Notizie, 1880, p. !260 (Atti delta r. Accad. dei linrei, ser. 3, vol. 6,
p. 29).
2 Dédicace de la schola : Un consularis des trois Dacies fait la dédicace
AeY^ schola des centonaires à Apulum, sous Seplime Sévère (III 1174).
Un légat propréteur dédie la scola specidatorum legionum I et II, à Aquin-
cum/en 228 (III 3o24). .Allusions à la dédicace : V o447. VI 103. 253.
541. 647. Beaucoup sont dédiées in honorem domus Augustae : III 1174.
5659. VI 338. 816. VU 11. XIV 45. 123. Korrespbl., 1890, p. 186. Voyez
supra, p. 184, n. 5.
•^ V 7904. VI 253. IX 5568.
i WiLMAXNS, 2857. 2858. XI 2702. 5750. Notizie, 1888, p. 260 {Atti delta
r. Accad. dei lincei, 3^ série, vol. 6, p. 29), à Pisaurum : iyi schola deae
Minerv(a)e Aug ustac) cot{legii) fabirum) coltegae universi convenerunt. —
Les mots convenire, conventus se disent des assemblées tenues pour les
affaires du collège : V 5il {in curia). MittJi. d. Inst., 1890, p. 288, supra,
p. 218, n. 5.
3 VI 970, en 190. - Vote des statuts dans un temple : VI 10:234.
XIV 2112. \o\ez supra, pp. 210-211.
Tome L. lo
( 226 )
Rome, à Anagnia et à Ulubrae des cidtores tenir leurs ban-
quets, affaire essentiellement religieuse, dans leurs temples ^,
nous savons que les scholae servaient aussi à cet usage : on y
faisait les sacrifices et elles contenaient des triclinia 2. Les
détails ëpars que les inscriptions fournissent sur l'architecture
des scfwlae tendent même à prouver que souvent elles ne
différaient en rien des temples. Ceux-ci étaient divisés en
deux parties : l'une intérieure, le corps principal de l'édifice,
appelé cella, demeure du dieu ; l'autre extérieure, située devant
la première et appelée pronaos, avant-temple, espèce de vesti-
bule ouvert de tous côtés et entouré de colonnes. Or, telle
devait précisément être la schola des dendrophores de Cimiez :
magister coll{egii) dendro[p]hororum aram et pavimentum scholae
et pronavi de suo fecit 3. Elle avait la forme d'un temple. Une
autre preuve, c'est le fronton qui ornait la façade; en effet, les
temples seuls, habitations des dieux, pouvaient en avoir un, et
cet honneur fut même décerné aux empereurs comme marque
de leur divinité 4. Or, dans une inscription d'Apulum, nous
lisons : coU{egiwn) centonarior{um) scholam cum aetoma pecu-
* V 7906 : in templo ex more epulareniur. VI 10234 : in templo divorvm
inaededivi Titi {\oyez supra, p. 210, n. 3j. X5904: [aedes — in qiio cultores]
vesce[rentiir]. X 6483 : aedes ut in ea semper epulentur. XI 126 : sportules
distribuées in aede Nept{imi\ à Ravenne.
2 WiLM., 28o8 : Sentini in triclini{aribus) domus c{oltegii) c{ent.), en 261.
YI 10234, 1. 11-16 : sportutas dividerent ad Martis in scholam n{pstram);
cinq fois par an, le collège d'Esculape et d'Hygie recevait ses sportules
dans sa sehola. Mitlh. d. Inst., 1890, p. 288, dans le règlement des
ehorari et citriari : qui ad letrastylum epulati fuerint. VI 10231 : et ad
eum locum itum — sa\c]rificia facere, vesci, epulari ita li[c]eat; il s'agit
de la schola consecrata Silvano et coltegio ejiis sodaliciio). On voit que
Marquardt dit à tort que les scholae servaient seulement aux réunions
[St.-Y., III, p. 160 = Le culte, I, p. 192, n. 4).
3 V 7904.
^ Cic, Phil., II, 43, 110. Flori'S, IV, 2 fin. C. Jullian, Inscr. de Bord.,
II, p. 467.
( 227 )
nia sua fecit K Donc schola ei templum sont synonymes.
Si nous pénétrons à l'intérieur d'une maison corporative,
quel que soit son nom, nous voyons loul de suite que nous
sommes dans le sanctuaire et dans le lieu de réunion. Un
autel s'élève au centre ou devant la statue du dieu tutélaire.
Celle-ci, souvent abritée sous un édicule ou dais supporté par
des colonnes, occupe la place d'honneur 2 ; à côté d'elle se
trouvent les images des autres dieux, du génie de la corpora-
tion 3j du génie de la schola ^^, les statues des empereurs, des
patrons ^ et des confrères 6 à qui l'on voulait prouver d'une
façon particulière sa reconnaissance. Le petit temple du collège
d'Esculape et d'Hygie renfermait une statue en marbre du
dieu guérisseur ". L'hôtel des scribes et des hérauts des
édiles contenait une Victoire Auguste et les statues en argent
des dieux préposés aux sept jours de la semaine 8. Les lieu-
tenants de la 3® légion Auguste avaient dans leur local, à Lam-
bèse, leurs dii conservatores et les images de tous les membres
de la famille impériale -^ Les exemples abondent 'lo et il n'est
^ III 1174. — Cfr. 111 h21"2, où aetoma se rapporte probablement aussi
à une schola. V 2864 : patroniis collecjio centonariorum frontem templi
vervis et liermis marmoreis ornavit. III 7960 : j'rontalem. II 4085 : exedra
citm fronte templi Minervae. — La schola du collegium SUvani (VI 10231,
supra, p. 213' était circulaire comme le temple de Vesta.
' Elle est dans sa demeure, mansio, VI 348.
3 VI 244.
•* VIII 2601. 2602, sur deux arae : Genio scholae ille q(uaestor) ariilas
ami statiunciilis coll.egio) donavit, à Lambèse. Cfr. 2603.
^ XI 2702 : statuamque ei (patronaei aeream in schola collegi n(ostri) —
jvxta maritum suum ponamus.
c VI 10302 : x-othecam. IX 5177 : clupeus.
' VI 10234 : sigmnn marmorciun Aesculapi.
8 VI 103. \o\ez supra, p. 219. Brambâch, 1602 : \ictoriam cu)n base.
a VIII 2554. Voyez supra, p. 220. Statues de Trajan (\l 543. 8686), de
Galba (VI 471', de Faustine (VI 3576), de Marc Aurèle, Vérus, Septime
Sévère, Caracalla (voyez /?2/ra, j). 228, n. 3 et 229, n. 1).
'0 VII 1069. 1070: sign{u})i) Mercurii, cohumna liginea) Mercurii. VIU
1936 : schola cum statuis et imaginibus. V 552: .\ijmphas posait et c[olle]gis
d. d. VIII 2555 : tabularium principis cum imaginibus domus divinae —
optiones fecerunt. X3810 : scholam statui{s\ e.i'lornavit]. VIII 8457 : siinu-
lacrum cleae arge[nteum], dans le temple des dendrophoi-es, h Sitifis.
( 228 )
pas nécessaire de les citer tous ici, mais il est curieux de voir
comment s'y étaient pris les adoratem-s de Silvain, à Philippes^
L'un d'eux avait poli la surface d'un rocher, dans lequel ils
avaient taillé un temple consacré à Silvain; on y montait par
des degrés taillés également dans le roc par un confrère. Plu-
sieurs autres avaient contribué selon leurs moyens, donnant
l'un trois cents tuiles pour le toit, l'autre le pavement, d'autres
encore une somme d'argent ou des statues pour orner l'inté-
rieur. C'est ainsi que, dès sa construction, ce modeste temple
renferma non seulement deux statues de Silvain, mais encore
celles d'Hercule, de Mercure, de Liber et un tableau peint
d'Olympe. Un confrère avait gravé dans le rocher le nom des
donateurs; un autre, la liste des membres. Une foule d'inscrip-
tions parlent de statues, d'édicules ou niches, d'autels dont on
fait cadeau à des collèges : sans nul doute, tous ces dons ser-
vaient à décorer leurs temples ou maisons corporatives 2. C'est
dans les ruines de la schola des dendrophores d'Ostie qu'on a
trouvé les bases qui avaient supporté les statues de la Terra
Mater, de Mars, de Silvain, de la Vertu et de Vérus, que ce
collège avait reçues de différents bienfaiteurs 3. Dans l'une des
inscriptions, on voit que ces statues étaient solennellement
dédiées au dieu par le prêtre de ce collège ^. Dans les ruines de
la même schola, on a retrouvé les piédestaux de statues données
aux cannophores : c'étaient celles de la Mater deum et d'Attis,
» III 633.
2 VI 671 : ara marmorea cum suo sibi sigillo Silvani. V 5738 : aram
cum aedicula. VI 26 : aedcscum sigillo Apollinis. II 2008 : Joveni Pantheum
Aug. cum aede et tetrastylo. V 3312 : .sign{um), abaciim, cum signis II
Hercule et Amphale ; VI 471 : signum Libertatis Restitutae, en 68. VI 675 :
Silvamim monolithum sanctum. VIII 2636 : Marti et Minervae sacrum, ille
scolae suaev. s. l. m. — Nos Indices [sons les rubriques Culte et Finances)
donneront une liste complète de ces dons faits aux collèges. Remarquons
que aedes et aedicula désignent ici l'édicule ou le dais sous lequel on
plaçait les statues.
5 XIV33. 53. 67. 69. 70. 71. 107.
^ XIV 70 et note.
( 229 )
divinités qu'ils servaient, de Marc Aurèle, de Septime Sévère et
de Caracalla ^. Plusieurs de ces statues étaient en argent.
Les réunions religieuses et les assemblées profanes se
tenaient dans le sanctuaire même, dans la cella, comme le
prouvent les bancs qui s'y trouvaient -. Cependant l'édifice
pouvait comprendre une salle spécialement aft'ectée aux
banquets et appelée tridinaria par les centonaires de Senti -
num 3. Les temples publics avaient à cet effet une espèce de
cour ou de halle entourée d'un portique et à moitié ouverte,
ou une salle munie d'un impluvium, semblable à Vatinum des
maisons privées ^. De même, le collège d'Esculape et d'Hygie
avait, à côté de sa chapelle {aedicula), une cour ombragée de
treilles où les confrères prenaient le frais, et une terrasse cou-
verte où ils tenaient leurs repas de corps s. Plusieurs inscrip-
tions parlent des dépendances et de l'ameublement des
scholae 6 : on mentionne des portiques ornés de peintures ',
avec des sièges 8, des cuisines 9, des puits ou des citernes i^,
des apparatoria ^^ ou salles destinées aux préparatifs des festins.
La salle à manger contenait naturellement les meubles et
ustensiles nécessaires : tables rondes ou carrées '•-, buffet ou
* XIV 34. 37. 116-119. Les cannophores se servaient peut-être de la
même schola. Sur ces trouvailles, voyez C.-L. Visconti, Ann. d. Inst.,
4868, et supra, p. 216.
2 Voyez siipj^a et VI 103 : sedes aeneas, VI 8117 : scamna (dans un
monument funèbre).
3 WiLMANNS, 2858.
* Marquardt, St.-V., III, p. 160 = Le culte, I, p. 192, n. -4.
^ Voyez supra, p. 213.
6 Voyez nos Indices, où nous donnerons une liste comi)lèle. Il faut, du
reste, bien distinguer ce qui a rapport aux monuments funéraires.
' III 4792. VI 2o3. 542. 67o. 10231. 10237. IX 1618. XI 1552. 3810.
* III 7960 : porticum et accubitum. X 1894 : porticus et sedilia.
9 Culina, III 7960. Cfr. III 7954. Marquardt, /. /., n. 3.
*o Puteus, XIV 2. Cisterna, IX 1579. Cfr. VI 552.
<« III 3960. IX 1618. XIV 53. VI 12258.
'2 V 815 : mensa. VI 10253 : inensam marmoream rotundam (dans un
monument funèbre). VI 10237 : mensa quadrata. Bull, corn., 1882, p. 150.
n. 543 : mensa aerea.
( 230 )
armoire, lits de table, cratùres, amphores i, vases de toutes
sortes, les uns pour conserver l'huile et le vin, les autres
pour mesurer les rations, une balance pour peser celles-ci '^.
On rencontre encore des bassins pour les bains 3, des cadrans
solaires 4, etc.
Telles étaient les parties essentielles du local. Les confrères
tenaient à honneur de le rendre aussi beau et ausi agréable
que possible; les patrons, les dignitaires et les membres
plus riches que les autres mettaient tous leurs soins à orner
Textérieur et l'intérieur. Ils y ajoutaient des décorations, des
peintures, des mosaïques et des embellissements de toute
sorte; quelques-unes de ces scholae devaient être somptueuses.
Les fabri d'Ariminum reçoivent six mille sesterces pour orner
la leur, ad exornandam scholam s. A Rome, un certain Ti.
Glaudius Secundus bâtit une schola pour les viateurs, avec ses
statues, ses images et ses ornements 6, Les centonaires romains
reçoivent d'un de leurs décurions une statue avec un socle de
marbre et deux candélabres d'airain qui tigurent un Cupidon
tenant des corbeilles '^. D'autres cadeaux de ce genre ne
* Abacus, V 3312. 10237. Triclinia, acmbitum, III 7960. VI 327 :
crateram argyrocorintham cum basi sua et hypobasi marmorea. VI 612 :
crateram cum sua basi. IX 6079, 1, sur une amphore : sociorum.
2 X 3864 = XI 3018, sur un vase d'airain pour l'huile. V 9224, sur un
vase de marbre. VI 839, en note : me{n)siiralia, sur deux vases des sodales
Serveuses. Supra, p. 214, n. 4. VI 10237 : trutina et pondéra. VI 832 :
s ta fera.
5 VI 10237 : labrum cum fulmentis marmoreis.
* II 4316 : horilegium. On y conservait aussi, dans une armoire ou
dans un coffret {scrinia) les chartes ou privilèges obtenus de l'État.
MoMMSEN, Savigmfs Zeitschr., Rom. Abth., 1892, XII, pp. 146-147. Voyez
la nie partie, Privilèges.
•• Orelli, 4069 == XI 6191. Cfr. V 4059, à Mantoue : hic reip{iiblicae) suae
legiavit) ad scholam exornandam [sestertios centum).
6 VI 1936. Cfr. VI 103 : scholam marmoribus ornaverunt. III 5800 :
aedem cum suis ornamentis.
- VI 9254.
( 231 )
pouvaient que servir à parer la maison corporative; nous y
reviendrons en parlant des libéralités faites aux collèges.
Suivons maintenant les confrères dans leur temple ou dans
leur schola, pour assister à leurs réunions. Nous laisserons
pour plus tard leurs assemblées profanes [convenlus), que le
règlement du collège de Diane et d'Antinous distingue nette-
ment des fêtes religieuses : « Si quelqu'un a une plainte ou un
rapport à faire, dit-il, qu'il le fasse dans une assemblée (m
conventu), afin qu'aux jours de fêtes nous puissions dîner tran-
quilles et joyeux, lit quieti et hilares diebiis solemnibus epule-
mur K » Les fêtes comprenaient ordinairement un sacrifice et
un banquet; dans certaines occasions, des jeux pouvaient s'y
ajouter. C'étaient là les trois actes du culte romain : festis
insunt sacrificia, epulae, ludi, feriae, dit Macrobe 2.
Les sacrifices et les banquets étaient pour ainsi dire insépa-
rables. Les collèges se contentaient d'offrir aux dieux des liba-
tions de vin, de lait et de l'encens. Sur un autel consacré aux
Lares Augustes par les cidtores Urae Fontis de Nîmes est repré-
senté un homme, la tête couverte d'un voile et tenant de la
main droite une patère au-dessus d'un autel 3. Les inscriptions
parlent aussi des sacrifices faits par des collèges profession-
nels ^, et même de victimes immolées s. Les dendrophores et
les cannophores, comme nous verrons, offraient des tauroboles
à Cybèle, leur patronne. Au génie, on ne faisait jamais de sacri-
fices sanglants.
1 XIVi>lJ2, II, 1. 24.
2 MACROB.,Sa/., I, 16.
3 XII 3076 (Ile unie siècle).
* Collèges professionnels : ut die k{aL.) Febr. sacrif{icetiir) et in profu-
sione{m), à Brixia, V 4449; ut per officiales sacrificetur (ibid.). — Collèges
funéraires : sacrificia facere, vesci, epulari ita liceat, VI 10231. Ad cultum
tutelamque et sacr[i\ficia in omne tempus posterum, X 444. Sacrum in
re praesenti fieret, convenirentque ii qui in collegio essent ad epulandum
(ibid.). Dies sacrificiorum (ibid.). Lignis quoque — et aqua sacrifici causa
et de vivario promiscue licebit uti (ibid.).
s V 4203 : sacrum extis celebretur (seviri socii, à Brixia).
( 232 )
C'était généralement le président du collège {magister) qui ac-
complissait la cérémonie : « Aux jours de fête, dit encore le
règlement déjà cité *, le président {quinquennalis) de l'année
doit faire les supplications en offrant de l'encens et du vin, et
il doit s'acquitter des autres devoirs religieux de sa charge,
vêtu de blanc. » Il en était sans doute de même ailleurs; mais
beaucoup de collèges, notamment ceux qui avaient un carac-
tère religieux prononcé, avaient un prêtre spécial (sacerdos,
iezeùç) pour faire les sacrifices; nous en parlerons plus loin.
Après le sacrifice venait un festin, ou du moins une distri-
bution de sportules, c'est-à-dire d'argent ou de vivres ou des
deux à la fois. Les banquets étaient une partie essentielle du
culte antique: c'était un acte de dévotion, c'était l'acte religieux
par excellence 2.
Sans parler ici des fêtes funèbres, dont il sera question au
paragraphe suivant, les fêtes religieuses {(lies solemnes) que
chaque collège célébrait par des sacrifices et des repas 3 étaient
plus ou moins nombreuses. Les unes étaient régulières ou
fixes, c'est-à-dire revenaient annuellement à la même date; les
autres étaient passagères.
Parmi les premières, la principale était l'anniversaire du
collège [natalis collegi), qui se confondait avec celui de son dieu
tutélaire [natalis dei) et avec celui de l'inauguration du temple
{natalis templi)'K II ne faudrait pas croire, en effet, que le jour de
* XIV 2112, II, 1. 29-30 : Item placuit, ut quinquennalis sui cujusque
temporis diebus soiemn[ibus tiire] et vino supplicet et ceteris o/fictis albatus
fungatur.
2 FusTEL DE CoULANGES, Cité antique, I, 3.
3 Dies solemnes, XIV 2112, II, 1. 24. 29; voyez supra, p. 231, n. 1 et 4.
Dies sacrificiorum , dit le collegium Silvani {X 444) en parlant de ses fêtes
célébrées par des sacrifices et des banquets.
* MoMMSEN, De coll., p. 113. Marquardt, St.-V., IIP, p. 136. 273 = Le
culte, p. 163, n. o. 164, n. l. 327. Preller, R. M., I, p. 133. Ephem.
EPiGR., I, pp. 233-233. PoTTiER, Dict. de Daremberg, s. v. dedicatio, II,
p. 42. ScHiESs, note 339.
( 233 )
naissance d'un collège était celui de sa fondation. Kemarquons
d'abord que les collèges n'étaient pas voués au culte d'un dieu
conçu comme un être idéal, mais au culte du dieu adoré dans
un temple déterminé, et Ton sait que l'anniversaire de l'inau-
guration de ce temple ou celui de la dédicace de sa statue
était considéré comme celui de la naissance du dieu. Or, les
collèges regardaient cet anniversaire comme celui de leur
propre naissance. Ainsi le collège de Diane et d'Antinous avait
été fondé le 1^^ janvier 133, mais parmi ses fêtes figure celle
du nataîis Dianae et collegi, le 13 août : ce jour-là, on avait
inauguré dans le temple de Lanuvium la statue de Diane qu'il
honorait ^. De même, le coUeginm Silvani de Lucanie fêtait le
28 mai la dedicatio Silvani "^ : c'était le jour où la statue de
Silvain avait été dédiée, et le collège regardait ce jour comme
celui de sa propre naissance. Le collège d'Esculape et d'Hygie
célébrait de même son natalis collegi le 4 novembre 3 : c'était
sans nul doute le jour où la statue d'Esculape avait été dédiée
dans la chapelle reçue de Marcellina. Nous avons vu que le
collegium }]ercatoriim datait du jour où fut faite la dédicace du
temple de Mercure et que c'était là sa fête principale 4, A
Antium, le collège des esclaves et affranchis impériaux avait sa
fête le 17 octobre, où son calendrier porte : venianum] dies
l'estus; Mommsen suppose avec raison que c'est le nalalis de
ce collège 3.
Il s'agit, dans ce qui précède, de collèges religieux ou funé-
raires, et nous n'avons pas trouvé de traces certaines de fêtes
pareilles dans un collège professionnel. Cependant les faim de
Ravenne avaient reçu une somme dont les intérêts devaient
* XIV 2112, II, 1. 12. Le natalis Antinoi tombait le cinquième jour avant
les calendes de décembre et était également fêté par le collège. Ibid., I,
1. 5-6. II, 1. 12. 30-32.
2 X 444.
3 VI 10234, 1. 11-12.
* Voyez ,mpra, p. 35, n. 1. Marquardt, Le culte, p. 162, n. 1 et 2.
5 X 6638 note. C. I. L., I, p. 295, n. 15 et p. 326. iMommsen montre que
ce collège date du 17 septembre de l'an 10 de notre ère.
( 234 )
être distribués annuellement à ses décurions, à raison de deux
deniers à chacun, le jour des Neptunalia (23 juillet). Cette dis-
tribution devait se faire dans un temple de Neptune, bâti par
le donateur, affranchi honoré des ornamenta decurionalia et
membre de ce collège ^. Dans cette ville maritime, Neptune
devait être fort en honneur, et l'on peut se demander si ces
fabri ne s'étaient pas mis sous la protection du dieu de la mer,
surtout qu'il devait y avoir parmi eux beaucoup de fabri
navales j qui ne formaient pas une corporation spéciale 2, et
que le donateur était peut-être lui-même constructeur de
navires. Dans ce cas, les Neptunalia auraient été leur fête
patronale 3. Mais il est possible aussi qu'il ne s'agisse que
d'une dévotion particulière au donateur. Quoi qu'il en soit,
comme les collèges professionnels avaient leurs dieux et
leurs temples, il est à supposer qu'ils fêtaient, eux aussi, la
dédicace de leurs dieux tutélaires.
Formant une grande famille, les confrères se réunissaient
aussi à l'occasion de diverses fêtes domestiques. Notre usage
des étrennes vient d'une fête païenne : le premier janvier, les
parents ou amis se faisaient des cadeaux, et l'on fraternisait
dans de joyeux festins, qui dégénéraient parfois en orgies 4'.
Ce jour-là, les ébénistes et les ivoiriers romains se réunis-
saient dans leur schola, au delà du Tibre; ils recevaient cinq
deniers, des gâteaux, des dattes et des figues sèches de Carie,
distribués par les soins de leurs curateurs, aux frais de la
caisse s. Les adorateurs d'Esculape et d'Hygie recevaient
comme étrennes un denier chacun ; leurs dignitaires en rece-
vaient deux ou trois, suivant leur grade 6. Le collège de Sil-
* XI 126.
2 XI 139.
3 Maué, Vereine, p. 29.
* Marquardt, Piiv., p. 245 = Vie privée, I, p. 296.
5 Mitth. cl. hist., 1890, p. 288, 1. 8-9. Voyez notre article dans la Revue
de l'Instr. publ. en Belg., 1890, pp. 9-20. L'argent reçu servait ordinai-
rement à organiser le banquet (Mommsen, De coll., pp. 109-111).
6 VI 10234, 1. 12-13 : strenuas dividerent.
( 235 )
vain célébrait également le 1<^' janvier par des sacrifices suivis
d'un banquet '. Le 22 février, ils fêtaient aussi la Chère
Parenté {Cara Cognatio ou Caristia); à cette date, dans toutes
les familles, on se faisait des présents comme au l^'' janvier et
Ton se réunissait à la table du festin. Les huit jours précédents,
on avait pleuré et honoré les morts; maintenant les vivants
resserraient les liens qui les unissaient. On sacrifiait aux dieux
de la famille, aux Lares qui la protégeaient et la perpétuaient.
La concorde se rétablissait souvent et l'on oubliait les vieilles
querelles. Le collège d'Esculape et d'Hygie s'assemblait, lui
aussi, dans sa scfiola, sur la voie Appienne, où avait lieu une
distribution d'argent, de pain et de vin 2.
Quelques collèges fêtaient l'anniversaire de l'avènement du
prince régnant [dies iînperi); les ivoiriers et ébénistes célé-
braient celui d'Hadrien (24 janvier) par des distributions de
sportules 3. L'anniversaire de la naissance d'Auguste et d'autres
empereurs figurait au calendrier comme jour de fête, et toute
la population de l'Empire s'efforçait de donner à cette occasion
des preuves de loyalisme ^. Des collèges s'y associaient d'une
façon spéciale. Les ivoiriers et ébénistes romains célébraient
l'anniversaire d'Hadrien, alors régnant, par des distributions
d'argent et par un festin •^. Le collège d'Esculape et d'Hygie,
fondé sous Antonin le Pieux, avait un banquet le 19 septembre,
anniversaire de ce prince c. A Pouzzoles, la corporation des
marchands tyriens parle des dépenses que lui occasionnent
les jours de fête de l'empereur ". Parfois la célébration de l'an-
niversaire impérial est imposé par un donateur. Le collège des
« X444.
2 VI 10234, 1. 12-13.
3 Mitth. cl. Inst., 1890, p. 288, 1. 17-18.
* Marquardt, St.-V., III, p. 268, n. 10 = Le culte, I, p. 320, n. 8.
Preller, R. m., II, pp. 202-203.
5 Mitth. d. Inst., l. L, 1. 9-10. Voyez notre article précité.
6 VI 10234, 1. 9-10.
7 C. L Gr., o853 = Kaibel, 830, 1. 23.
( 236 )
centenaires romains reçut d'un de ses décurions une somme
assez élevée dont les intérêts, 600 deniers, devaient être dépen-
sés le 23 septembre, fête d'Auguste i. Un affranchi de Domi-
tien avait donné au collège de Silvain précité quatre fonds de
terre dont les revenus devaient servir à célébrer, par des sacri-
fices et des banquets, la fête de Domitien, le 24 octobre, et celle
de Domitia, le 11 février. A Narbonne, les sévirs Augustaux
reçoivent également des libéralités à condition de fêter l'anni-
versaire de Vespasien 2.
Il arrive plus souvent qu'un patron fasse célébrer son propre
anniversaire. C'était pour ainsi dire une fête domestique : au
jour de la naissance du père de famille, tous ses descendants,
ses esclaves et ses affranchis allaient le complimenter, sacri-
fiaient à son génie, et la fête se terminait, comme toujours, par
un repas. De même, le collège fêtait par un banquet l'anniver-
saire de son patron qu'il appelait souvent son père (pater) et
qui lui en fournissait parfois les moyens. D'autres bienfaiteurs,
membres ou non, faisaient aux collèges des donations à cette
fin. Les collèges suivants ont reçu des rentes de leur patron
ou d'un autre, avec l'obligation de célébrer son (lies natalis :
Corpus piscatorum et urinatorum totius alvei Tiberis 3.
Fabri subaediani Narbonenses, XII 4393.
Collegium fabrum tignuarionim, de Tolentinum, IX 5568.
Collegium centonariorum, d'Ameria, XI 4391.
Collegium dendrophororum, d'Eburum, X 451.
Collegium medicorum, de Bénévent, IX 1618.
Eborari et citriaii, à Rome, sous Hadrien 4.
< VI 9254.
2 XII 530.
3 VI 1872, en 206. Notizie degli Scavi, 1888 (Huelsen, Atti délia r.
Accad. dei lincei, 1888, sér. 4, vol. 4, pp. 279-281). Bidl. corn., 1888,
p. 387. Ce sont les pêcheurs et plongeurs du Tibre.
* Mitth. d. Imt., 1890, p. 288, 1. 12-15. Donations semblables à des
collèges funéraires : VI 10234, 1. 14. 10297. X 5654. XIV 2112,11, 1. 11-13.
A des juvenes : X 5657. 6465. A des Augustales : IX 4691. X 1880. A des
collèges incertains : V 1978. Cfr. XIV 246. 325. 326. A la vérité, pour les
( 237 )
A Brixia, une statue est élevée au génie et en l'honneur de
trois hommes, anciens présidents des collèges de cette ville;
ces personnages donnent mille sesterces pour faire un sacrifice
annuel devant cette statue i. Les fêtes que nous venons de
citer restent perpétuellement sur la liste {ordo cenarum) du
collège 2. Il y avait d'autres fêtes religieuses, tout à fait passa-
gères, mais très nombreuses. Ainsi la dédicace du temple ou
Hchola •^, l'inauguration de la statue d'un dieu élevée ou reçue
par les confrères '^ étaient accompagnées de sacrifices et d'un
banquet ou du moins de distributions qui avaient un caractère
religieux comme ces cérémonies elles-mêmes.
Les sacrifices et les banquets ne constituaient pas tout le
culte des collèges; plusieurs avaient un rôle à remplir quand
venait la fête publique du dieu. Ainsi il est probable que le
corpus piscatonim et urinatonim totius alvei Tiberis quibus ex
S. C. coire licet s prenait une part active aux ludi piscalorii.
Voici ce que Festus rapporte sur ces jeux 6. Le 23 août, fête
eborari, pour le collège d'Esculape et d'Hytçie et pour celui de Diane et
d'Antinous, la chose n'est pas sûre. Ces trois collèges fêtent le dies natalis
de leurs patrons ou bienfaiteurs, mais ne disent pas que ceux-ci leur ont
donné des rentes à cet effet; néanmoins on peut le supposer. (Voyez
ScHiESS, p. 104, n. 349. Friedlaender, Sitteng., l^, p. 274, n. l.) 3Iommsen
{De coll., p. 112) suppose qu'ils les invitaient chez eux.
< V 4449.
2 Les teinturiers en pourpre d'Hiérapolis célèbrent la fête des Azymes
et celle de la Pentecôte. Ils étaient probablement juifs. Voyez l'inscription
pubhée par A. Wagener, Revue de l'Insb'. publ. en Belg., 1868, p. 1, et
son commentaire, pp. 3-4.
3 V 7904. VI 2o3. 349. IX 5177.
* V 4294. VI 85 030. 740. XIV 114. yotiue, t. L, p. 279. Allmeu,
M. de L., II, 144.
- VI 1872, en 206.
^ Festus, p. 210 : Piscatorii ludi vocantur qui menseJunio trans Tiberim
fieri soient pro qiiaestu piscantinm. P. 238 : Piscatorii ludi vocantur qui
quotannis mense Junio trans Tiberim fi^ri soient a Praetore urbano pro
piscatoribus Tiberinis, quorum quaestus non in macellum pervenit sedfere
in aream Volcani, quod id genus pisciculorum vivorum datur ei Deo pro
animis luunanis. Voyez Pueller, II. M., II, pp. 133. 251.
( 238 )
principale de Vulcain, chaque père de famille jetait dans le
feu du foyer domestique de petits poissons, qui servaient de
victimes expiatoires pour lui et ses enfants. Ces poissons étaient
livrés, gratis sans doute, par les pêcheurs du Tibre, non au
marché ordinaire {forum jnscarium), mais sur Varea Vulcaiii,
au forum. En récompense de ce service, la cité faisait célébrer
par le préteur urbain les ludi piscatorii, le 7 juin suivant; ces
jeux avaient lieu au delà du fleuve, en l'honneur du pater Tibe-
rinuSy pour le bien de la corporation des pêcheurs et pour la
prospérité de leur commerce. Gilbert ^ pense qu'à l'origine il
n'y avait aucun rapport entre ces deux fêles si éloignées l'une
de l'autre. Les jeux seraient une antique réjouissance des bate-
liers et pêcheurs du Tibre; quant aux Volcanalia, les mêmes
pêcheurs les auraient d'abord célébrés entre eux. Plus tard
l'État aurait adopté les deux fêtes et alors on les aurait mises en
rapport l'une avec l'autre. Tout le peuple prit part aux sacri-
fices expiatoires pour lesquels les pêcheurs fournirent les vic-
times ; en même temps, l'État, s'intéressant aux ludipiscatorii,
les fit présider par le préteur urbain et en supporta les frais.
Si la partie officielle de la cérémonie avait lieu au delà du Tibre,
la partie populaire, les jeux avaient lieu sur le Champ de Mars,
du moins à l'époque d'Ovide, qui dit :
Tune ego me memini ludos in gr aminé Campi
Aspicere et dici, lubrice Tfiybri, tiios.
Festa dies illis, qui Hua madentia ducunl,
Quique tegunt parvis aéra recurva cibis'^.
Nous avons vu que le collège des tibicines romani fut autorisé
sous Auguste ludorum causa 3. Mais on ne sait au juste ce qu'il
faut entendre par là. Le plus simple serait d'admettre, comme
^ Gilbert, Gescfi. und Topogr. der Stadt Rom, I, p. 2o0, n. 2.
2 Fasti, VI, 237-240.
5 Voyez supra, p. 116.
( 239 )
on le fait généralement, que ce collège fut permis à cause de
la part que les flûtistes prenaient aux jeux publics : cantat tibia
luiUs, dit Ovide ^. Mais il y a une première singularité : les
flûtistes étaient aussi nécessaires aux sacrifices publics, qui
sacris publicis praesto sunt "^^ et l'on ne voit pas pourquoi ils
seraient seulement autorisés à cause de leur participation aux
jeux, ludorum causa, et non sacrorum causa 3. De plus, Cen-
sorinus dit formellement qu'ils avaient la permission de célé-
brer des jeux publics, ludos publice facere, et il rattache ces
jeux à leur banquet au Capitole, les opposant à leur cortège
carnavalesque qui se rendait au temple de iMinerve, le jour des
Quinquatrus minusculae ^. Il faut donc bien admettre qu'ils
avaient des jeux propres à eux, autorisés par l'État '">, mais on
ne sait en quoi ils consistaient. On peut croire que c'était
quelque chose d'analogue aux jeux compitalices ^' et aux ludi
piscatorii, c'est-à-dire des réjouissances populaires avec un
sacrifice et un banquet en l'honneur de Jupiter Capitolin i.
Il est à croire que les processions d'artisans, à l'occasion
de leurs fêtes, étaient fréquentes. Une peinture murale de
Pompéi semble représenter un cortège de menuisiers : on y
1 OviD , Fa.s/., YI 653.
2 Comme le dit leur nom officiel; voyez supra, p. 116, et VIndcx colle-
yiorum. Tite-Live (IX, 30 : qui sacris praecinerenb, Valère Maxime
(II, 5, 4 : quorum ministerio déserta sacra), Censorinus (De die nat.,
XÏI, 2 : nec tibicen omnibus supplicationibus in sacris aedibus adhiberetur)
et Ovide ( /. /. : cantabat fanis) insistent là-dessus.
•" CoHN, pp. 74-75.
^ Censorin., De die nat., XII, 2 : non tibicinibus, per quos numina
placantur, esset permissmn aut i.udos publice facere ac vesci in Capi-
TOLio, aut Quinquatribus minusculis, id est idibus Juniis, urbem vestitu
quo vellent personatis temulentisque pervagari . Voyez supra, p. 200.
^ Publice a peut-être ce sens.
^ Voyez supra, p. 93.
^ Valère Maxime (II, 5, 4) appelle lusus leur cortège des Quinquatrus :
Quibus et honos pristinus restitutus (banquet au Capitole) et liujusce lusus
jus est datum.
( 240 )
voit des hommes munis d'une scie et d'autres figures de per-
sonnes paraissant appartenir au même métier et que des
jeunes gens portent sur des brancards i. Une autre peinture
murale de Pompëi représente probablement la fête des meu-
niers-boulangers -. C'était le 9 juin que tombait la fête prin-
cipale de leur patronne, Vesta, déesse du feu et des foyers. Les
pistores la célébraient d'une façon particulière. Ovide rapporte
qu'ils ornaient leurs ânes de guirlandes et d'enfilades de pains
et qu ils couronnaient leurs moulins de fleurs :
Ecce coronatis panis dependet asellis,
Et vêlant scabras florida sert a molas 3.
Mais aucun collège privé ne jouait dans le culte public
un rôle aussi important que les dendrophores et les canno-
phores; aussi bien ces deux corporations exigent-elles une
étude spéciale, et nous les avons réservées à dessein jusqu'à
la fin 4.
La nature même des dendrophores est longtemps restée
obscure; elle nous semble à peu près élucidée depuis la dis-
' 0. Jahn, Darstellungen des antiken Handwerks, p. 213, planche IV.
Cfr. Friedlaender, Sitteng., P, p. 272.
2 Helbig, Wandgemâlde, n. 777. Jahn, Abhand. der sâchs. Ges., 1861,
V, p. 345. Taf. VI. 12. Gehrard, Antike Bildwerke, 62, d.Arch. Zeitiing,
XII, 192.
3 OviD., Fast., VI, 311-317. Cfr. Lydus, De mens., IV, 59. Lactant., I,
21, 26. Ovide dit encore :
Inde fociini serval pistor, dominamque focoriun,
Et quae pumiceas versât asella molas.
* Nous nous bornons à donner les textes qui regardent ces deux
collèges; pour les autres détails du culte d'Attis et de Cybèle, nous ren-
voyons à Marquardt, SL-V., III, pp. 367-374^ Le culte, II, pp. 65 et
suiv. H. R. Goehler, De matris magnae apiid Romanos cultu. Diss.
Misniae, 1886.
( !241 )
sortalion de Rabanis ^. Depuis Godefioy, l'un croyait qu'il y
avait deux sortes de dendrophores, les uns civils, les autres
religieux, et l'on distinguait la confrérie religieuse, consacrée
à Cybèle, de la corporation professionnelle.
L'existence du collège industriel n'est pas douteuse. En effet,
dans les inscriptions, les dendrophores sont très fréquemment
joints aux fabii, ouvriers du bâtiment, charpentiers surtout,
ou bien aux centonaires, qui fabriquaient les cenlones de
toute nature, notamment les bâches servant à éteindre les
incendies. Plus souvent, on rencontre ensemble les [abri, les
C(!ntoiiaires et les dendrophores, presque toujours dans cet
ordre. Quoiqu'ils ne laissent pas de former trois collèges dis-
tincts'-, ils avaient entre eux des relations inlimes, que nous
aurous à décrire dans la troisième partie : nous verrons que
sous le Haut-Empire, ils constituaient un corps de pompiers
dans toutes les grandes villes italiennes et provinciales. Ces
rapports entre les trois collèges avaient sans doute préparé la
loi de Constantin qui, en l'an 315, prescrivit d'unir les dendro-
phores, dans toutes les cités oi^i ils existaient, aux fabri et aux
' Voyez : Gothofredls, ud Cod. Theod., 14, 8, 1 et 16, 10, 'iO. Kabanis,
Recherclœs sur les dendrophores. A. de Boissieu, Inscr. de Lyon, pp. 412-
414. Allmer, Musée de Lxjon (Tables, p. 170). Serrigny, n. 1097. Wallon,
m, pp. 478-480. C.-L. Visconti, Ann. d. Inst., 1868, pp. 373 etsuiv. Mon.
d. Inst., VII, lav. LX, fig. 1. Marquardt, St.-V., III, pp. 144. 371. 395
(en 1878) = Le culte, I, 172. Il, 71. 100. Privatleben, p. 698 (en 188-i) --
Vie privée, II, p. 379. G. Hirschfeld, Gall. Slud., III, pp. 12 (248) et suiv.
BlueMxXER, Techn., II, p. 242. Maué, Vereine, pp. 19-26. 33-39. P. Paris.
Dictionnaire de Daremberg, s. v, doidrophoria. Decharme, ibid., s. v.
Cybele. Rapp dans PiOescher, Lexik. d. Mylh., s. v. Atlis. G. Boissier,
Rev. arch., 1872, ]). 88. C /. L.. I, p. 389, 22 3Iart. V 81, note.
' Maué, Vereine, p. 19, n. 6. Marquardt, Prie, l. L, cite deux inscriiH
tions fausses, où l'on voit des fabri dans un collège de dendrophores :
Orelli-IIenzen, 4160 et 7198 = C. L L. V 59*. VI 3075*. Il cite aussi IX
1459 (Orelli-Henzen, 7018), où il faut lire : collegium dendrophoram
ilenique (et non : atqué) fabruni, à Ligures Baebiani; item veut dire qu'il
s'agit de deux collèges difterenls (Gagnât, Cours d'épiyr., j). 96, n. 2).
To3iE L. 40
( 242 )
centenaires, parce qu'il convient, dit-il, d'augmenter l'effec-
tif de ces deux collèges '. Nous verrons qu'au ÏV^ siècle les
empereurs s'occupaient activement du maintien des corpora-
tions chargées d'un service public, et il s'agissait évidemment
ici de faire porter le poids d'un service municipal par un plus
grand nombre d'épaules. Ces relations étroites des trois col-
lèges, finissant par un fusionnement, ne se comprendraient
pas si les dendrophores étaient seulement une confrérie reli-
gieuse : évidemment ces trois corporations remplissaient dans
toutes les villes une charge commune atî'érant i\ leur métier.
Les dendrophores, comme les fabri et les centonaires, exer-
çaient une industrie, et c'était une industrie qui les rendait
propres aux mêmes corvées. Leur nom a fait dire qu'ils
transportaient le bois pour le chauflfage des thermes -; c'est
à tort, car à Rome cet office était rempli par les mancipes
thermarum, aidés des naviculaires, et dans les autres villes
il n'exigeait probablement pas une corporation spéciale.
Leur nom a fait croire aussi qu'ils coupaient et transpor-
taient les arbres et qu'ils fournissaient le bois pour les con-
structions et la marine de l'État. Mais nous pensons qu'il faut
faire abstraction ici de leur charge officielle, leur nom ne pou-
vant pas leur venir de cette charge, puisqu'ils l'eurent bien
avant le temps où les collèges entrèrent au service public. Il
leur fut donné à cause de leur rôle religieux dans le culte de
Cybèle, comme nous allons voir, mais il devait convenir aussi
* Coi). Theod., 14, 8, 1, en 315 : Imp. Constantinus ad Evagriiim Pf. P.
Ad omnes judices literas darc tiaun convenit gravitatem , ut in qiiibiis-
cumqiic oppidis dcndrophori fuerinl, ccntonariorum atquc fahrorum
collegiis anncctaiitur, qiioniam hacc corpora fréquent ia ho)ninu)n multi-
plicari e.vpediet. Remarquons que les dendrophores continuent à exister,
puisque nous les retrouvons en 415 {infra, p. !248, n. 6).
2 RoDBERTUS (Vlll, p. 4^21, n. 62), 0. Hirschfeld (/. /., p. tl (248), n. 2j
et Maué {Vereine, p. 21, n. il) ont tort de reconnaître une traduction de
leur nom dans ces mots de Symmaque (rel. 14), qui énumère les collèges
de Rome -.pars urenda lavacris ligna conportat. Voyez notre article de la
Rev. de llnstr. publ. en Belg., 1892, 4e livr., et infra, Ille partie.
( U3 )
à l'industrie qu'ils exerçaient déjà pour leur compte, avant
d'être chargés d'un service public y afférant, puisqu'ils n'ont pas
d'autre nom pour désigner celle-ci. Ce métier, .comme celui
des l'abri, avait probablement rapport au bois : ce qui nous
porte à le croire, c'est leur nom, leur culte pour Silvain i,
leur place dans les rites de Cybèle, leurs rapports avec les
[abri et leur rôle officiel même que nous chercherons à déter-
miner plus loin. C'étaient donc des ouvriers du bois, des
bûcherons peut-être '^, ou plutôt des marchands de bois, fai-
sant ce commerce pour leur compte, des vendeurs de merrain,
comme dit Godefroy •^. En tous cas, ils formaient une cor-
poration industrielle, et l'on voit dans les inscriptions qu'ils
avaient tout à fait la même organisation intérieure que les
autres corps de métier.
Le caractère religieux des dendrophores n'est pas moins
indiscutable. Leur nom leur vient de la dendrophorie qui leur
avait été confiée dans le culte de Cybèle. On appelle dendro-
phorie une procession oii l'on porte solennellement des arbres
symboliques ou consacrés à un dieu. On les célébrait en l'hon-
neur de plusieurs divinités grecques, par exemple en l'honneur
de Dionysos, d'Apollon et de Déméter ^. Les dendrophores
* Voyez infra, p. ^51.
2 Sur le bas-relief que Rabanis décrit et reproduit, on voit des hommes
transportant un tronc d'arbre au moyen de cordes. Rabanis a raison d'y
voir des ouvriers au travail et non des dendrophores relii^ieux. — Dans le
poème du Cnd. Paris. 8084 (Hermès, IV, p. 3oO), v. 106, on lit : vidimus
— egregios proceres citrrum servare Cybelae ; il ne peut s'agir des dendro-
phores, qui n'étaient pas des proceres.
•' G. L. ViscoNTi, Ann. d. Inst., 4868, p. 366, dit : provcditori e nego-
zianti dei legname. La présence parmi ceux de Rome d'un marcliand de
perles (VI 641. 1925. Bull, com., 1890, p 18, tav. I) ne doit pas étonnei\
attendu que les collèges recevaient souvent des gens étrangers au métier.
A Pola, on trouve peut-être parmi eux un foulon (V 82 add.), et à Alba
Fucens, un cuisinier (IX 3938j. Voyez infra, au chap. II, § 2.
^ Rabanis, pp. 25 et suiv. Visconti, /. /., p. 364. 3Iarquaiidt, St.-V.,
m, p. 371, n. 5 -= Lé mite, II, p. 71, n. 1. Malé, /. /., p. 36. P. Paris.
l. t., s. v. daphnephoria, dendrophoria.
( 244 )
sont ceux qui portaient les arbres ou les rameaux sacrés dans
ces divers cultes.
Les dendrophores de la Magna Mater deum de l'Ida et d'Attis
sont les seuls qui formèrent des collèges. La Grande Mère des
dieux fut introduite à Rome en 550 = 204, et elle fut iden-
tifiée avec Maia ou Ops, femme de Saturne. On institua en
son honneur les Megalesia (du 4 au 10 avril) et on lui bâtit
un temple au Palatin. Son culte fut confié à un prêtre pliry-
gien [archigallus) et à une prêtresse phrygienne, dont les aides,
appelés Gain, étaient également tirés de l'Asie.
On conserva le culte asiatique, avec la procession que les
Gain faisaient selon leurs rites nationaux et en chantant des
hymnes grecs; mais le Sénat défendit aux citoyens d'y prendre
part. Le préteur présidait la fête du Palatin suivant des règles
fixées par le Sénat; quant aux membres des sodalités sacrées
qui furent instituées à cette occasion, ils se bornaient à célébrer
des banquets, qu'ils donnaient à tour de rôle chez eux, pour
symboliser la migration de la déesse qui était venue à Rome
de Pessinonte ^.
Sous l'empereur Claude '^, ce culte se modifia. Il y eut une
fête nouvelle, célébrée du 15 au 27 mars, avec le caractère
orgiastique propre à l'Asie, et les Romains purent y participer.
Elle devait symboliser l'histoire d'Attis et de Cybèle. Le 15 mars
avait lieu une cérémonie préparatoire, rappelant la mort du
jeune homme : c'était l'entrée des cannophores {hlibus canna
' Ovu) , Fa.s//, IV, 3o3 et siiiv.
Cu7^ vicibus factis ineant convivia, quaero,
Tune magis, indictas concélèbrent que dape.s.
« Quod bene miUarit sedem Berecijntia, di.vit.
Captant mutatis sedibus omen idem. »
Ailu-Gelle (II, 2-4, 2. XYIII, 2, 11) dit : mulitare. Voyez supra, p. 36.
- Lydus, de mens., IV, 41 : tt, -npo o£xa[j.ia(; KaXsvôcov 'AirpiXccov
oevopov TT^Tu; Trapà twv osvopocpo'pcov ioirjzzo h xtf) WolXxxIi^- ttjv 8è
EopT-r)v KXauOio; 6 ^atriXcù; xatôati^aatû.
( 245 )
intrat '), collège de jeunes gens et de jeunes filles'^, portant les
joncs où Cybèle découvrit son amant mutilé et expirant -i Le
22 mars, 1 arbre sacré sous lequel Attis dans sa fureur s'était
mutilé, un pin couronné de violettes et entouré de bandelettes
de laine, comme autrefois le corps d'Attis, était porté proces-
sionnellement au temple du Palatin; cette cérémonie {arbor
intrat'''^) devait être confiée à des aides spéciaux, appelés dendro-
phores, d'un nom grec, parce que la langue grecque avait été
conservée dans ce culte s. Le 24 mars, jour du sang, était un
jour de deuil et d'abstinence : Varchigallus se déchirait le bras
et en faisait jaillir le sang, en souvenir de la mutilation d'Attis.
Le 2o commençait la fête joyeuse {Hilaria) en l'honneur d'Attis
ressuscité; le 27, on allait baigner et laver la statue de Cybèle
dans l'Almo et on la ramenait triomphalement sur un char,
sous la direction des XV viri sacris faciundis, qui avaient la
surveillance des cultes étrangers '5,
Le rôle que nous venons d'assigner au collège des dendro-
phores dans cette fête n'est pas contestable. A Rome, il s'ap-
' C. I. L., I, p. 388.
2 On trouve un collège de cannophores à Ostie (XIV 34-37. -40. 118. 119.
284. 283) sous Marc Aurèle, sous Septime Sévère et sous Caracalla ; à
Milan (V 5840), à Locri (X 24. 8339d). A Saepinum, il y a un col. canofo-
rarum (IX 2480). A Locres, on rencontre un cannophore âgé de 10 ans
(X 24). C'étaient des confréries exclusivement religieuses, formées par des
jeunes gens et même des enfants. — A Ostie, leur corpus re<;oit des
statues d'Attis (XIV 3o. 37) et ils prennent part à un taurobole (XIV 40j.
Voyez F. Cumont, dans E. De Ruggiero, Diz. epigr., s. v. Attis, canno-
phorus. A Milan, ils reçoivent un legs en même temps que les dendro-
pliores. — Voyez notre Index collegiorum (collèges religieux).
' C L. ViscoNTi, Ann. d. Inst., iSm, p. 242 et Mon.llX, 8% l-\ Selon
Decharme (Rev. arch., 1886, p. 288>, il s'agirait des joncs du fleuve
Gallus, où Attis enfant fut exposé, et où Cybèle le recueillit.
^ C. /. L., I, p. 369.
•' Lydus, /. /.
•■' On trouve un collège de sodales ballaiore[s] Cybelae , compagnons
danseurs de Cybèle (VI 2265 . Henzen (en note) croit que ce sont des
Cwalli. BaXXiÇco, danser.
( 246 )
pelle collegiiim dendrophorum Matris deum m{agnae) l(daeae)
et Attis^. A Rusicade, un dendrophore dédie une statue au
Sanctus Attis, et à ïomi, un archidendrophore s'acquitte d'un
vœu envers le même dieu 2. A Lyon, en 160 et en 190, à
Valence et à Mactaris, ils offrent, soit en corps, soit indivi-
duellement, des tauroboles ou des crioboles à la Grande Mère,
pour le salut de l'empereur et de sa famille, et pour la pros-
périté de leur ville 3. Ces sacrifices n'étaient pas présidés par
eux, mais par un sacerdos de Cybèle; les dendrophores ne les
faisaient pas au nom de l'État ni de leur ville, mais en leur
nom privé; cependant ils prouvent au moins que les dendro-
phores comptaient parmi les plus fidèles serviteurs delà déesse.
A Césarée de Numidie, on les voit honorer un prêtre de la
Magna Mater, décurion de la colonie 4. Dans plusieurs villes,
on trouve des hommes voués au culte de Cybèle, dont ils se
déclarent les religiosi ou sacrati, les fidèles; on ne sait s'ils
avaient un caractère public et s'ils jouaient un rôle officiel dans
les cérémonies; mais on voit plusieurs fois les dendrophores
associés avec eux pour honorer la Mater Magna, à Sitifis et à
< Sous Hadrien, BiUL corn., 1890, p. 18. Tav I. 11. Cfr. VI 461 :
dendrophori M. d. M. Orelli, 4075 : collegium dendrophor. romanor.,
quitus ex S. C. coire licet, en 206. Orelli, 4412 : collegium dendroph.,
en 107. VI 4925 : colleg. dendr. roman. On les trouve encore sous
Septime Sévère : VI 1040. - Sur leur schola et les figures symboliques
du pavé, voyez les articles cités supra, p. 216, n. 3.
2 VIII 7956, à Rusicade. III 763 et note, à Tomi.
3 Allmer, m. de L., I, 5 len 160) et L 6 (en 190 : tauribolium fecerunt
dendrophori Luguduni consistentes . XII 1744 : M{atri) m. d. L tauro-
boliium) dendrophorii) Valientini) sua p(ecunia) f{ecenmti. R. Gagnât,
Ann.épigr., 1892, n. 18 : un eques romamis, sacerdos, offre un taurobole
à la Magna Mater, pour le salut de Probus (?), una cuu universis dendro-
foris et sacratis utriusque sexus v(otum) s{olvit) L a., à Mactaris. Dans
Allmer, op. c, I, 5, c'est un dendrophore isolé qui offre le taurobole.
Cfr. Goehler, pp. 52 et suiv.
* VIII 9401 : re[li]gioso anti[s]stiti sanctissimi Numinis Matris deum.
( 247 )
Mactaris <. A Cumes, nous avons conservé l'album des den-
drophores ou leur liste officielle de l'an 251 ; ils étaient alors
qualre-vingt-sept, et en tête de la liste, nous lisons : Ex s{enatus)
cîomulto) ilendrophori creati, qui sunt snb cura XV vir{orum)
s{acris) [f{aciundis)] 2. Ceci prouve mieux leur caractère officiel :
ils sont nommés par décret de la curie de Cumes 3 et ils sont
sous la surveillance d'un collège de prêtres qui avaient dans
leurs attributions les cultes étrangers adoptés par l'État. Il
semble donc qu'à cette époque leur nombre était fixé et que
leur élection était réglée ^. A Cumes, ils ont pour patron et
président un sacerdos Matris deum^. Ces sacerdotes, hommes et
femmes, étaient les assistants de Varchigallus 6. A Pola, les den-
drophores reçoivent un lieu de sépulture d'un sacerdos Matris
deum Magnae Idaeae, qui était peut-être lui-même dendro-
* A Mactaris, supra, p. 246, n. o. A Sitifis, VIII 8457 : ima ciim religiosi.s
et dendroforils] ; il s'agit d'un temple qu'on orne de statues, notamment
d'un simulacrum deae arge[nteum]. M 2262 : religiosvs a Matre capi-
liatus; cfr. Arnob., V, 7, 16. VI 2263 : religiosus de Capitolio. X 1894 :
ager religiosorum. Apul., XI, 16 : agmen religiosnm — cimcti populi
tam religiosi qiiam profani vannos — congerunt. A Rome , on trouve
également des cultures Matris Magnae qui honorent cette déesse et le
navire qui l'apporta à Rome, d'un culte privé : Matri Deum et Mavi Salviae
Q. Nunnius Telephus, magdster) col{legii) cultoirum) ejus d{e) s{uo}
d{onum) d edit), VI 494, sur un autel dont le bas-relief représente le
navire. Il est aujourd'hui au Musée du Capitole. Voyez la note de Hekzen
au Corpus, et Goehler, p. 46. G. Boissier, Relig. rom., I, p. 373.
2 X 3699.
"' VIII 79o6, à Rusicade : dendroforus decretarius. Ils semblent parfois
donner des jeux : dendropliorus munificus, à Vienna, XII 1917.
* Ceci ne prouve pas que les dendrophores religieux n'étaient pas les
marchands de bois. On peut supposer que c'est parmi ces derniers qu'ils
sont élus. En certaines villes, les marchands de bois étaient peut-être trop
nombreux pour figurer tous dans le cuite, et les membres de leur collège
élus par la curie pour faire la dendrophorie, étaient mis sur une liste
spéciale, dont nous avons ici un exemplaire. Cfr. Maué, p. 35.
» X 3699.
'"' Goehler, pp. 40 et suiv.
( 248 )
phore '. A Suessula, il y a un deiidrophore qui est prôfre
lui-même de Cybèle : Inimiinis deiidrioplionis) Siiessul{anus) et
sacer(l{os) M. d. XV viralis in vico Novanensi 2; ce nom de
XV viraliSj qu'on voit donné à des prêtres et à des prêtresses
de Cybèle 3, lem^ venait sans doute de ce qu'ils étaient élus,
eux aussi, par la curie, mais confirmés par les XV viri s. f. -K
C'est lu une exception : ordinairement les dendrophores
n'étaient pas prêtres de la déesse, mais des aides chargés de la
partie de la cérémonie que le calendarium Pliilocali désigne
par les mots : arbor intrat. Rappelons encore qu'à Ostie leur
schola était située dans l'enceinte consacrée à Cybèle et adossée
au iAJetroon ^. Les renseignements qui précèdent datent de la
tin du deuxième siècle et du troisième; mais nous avons
un témoignage qui prouve que les collèges des dendrophores
conservèrent leur caractère religieux jusqu'au commencement
du cinquième siècle : c'est une loi dans laquelle Théodose et
Honorius les citent parmi les corporations dont les biens-
fonds atiéclés aux dépenses des banquets sacrés et des autres
cérémonies païennes, doivent être confisqués et adjugés au fisc
impérial ^>.
» V8L et note.
2 X 3764.
5 Autres exemples : IX 981. lo38. lo4t. 1542. X 4726. Orelli, 2332.
^ X 3698. GoEHLER, p. 48, pense qu'ils formaient, dans les villes, un
collège chargé du soin de ce culte, comme les XV viri s f. à Rome,
s Voyez supra, pp. 216-217.
6 CoD. Theod., 16, 10, 20, 2, en 415 : Ea autem, quae multiplicibus
constituas ad venerabilem ecclesiam voluimus pertinere, Christiana sibi
mérita religio vindicabit, ita ut omnis expensa illius temporis ad super-
stitionem pertinens, quae jure damnata est, omniaque loca, quae Fre-
diani, quae dendrophori, quae singula quoque nomina et professiones
gentiliciae tenuerunt epholis (lisez : epulis) vel sumptibus deputata, fas
sit, hoc errore summoto, compendia nostrae domus sublevare. Rabanis,
qui admet avec raison que les dendrophores civils et religieux n'étaient
qu'un même corps, pense que Théodose ne confisqua que la partie de
leurs biens qui était affectée au culte païen, et qu'il laissa subsister la
corporation avec sa charge civile (p. 25). Il explique de même ce fait
( 249 )
Cette confrérie religieuse était-elle distincte du collège indus-
triel des dendropliores, comme beaucoup l'ont cru ^?Non, les
inscriptions, où le caractère religieux est évident, prouvent que
la confrérie avait la même organisation et les mêmes particu-
larités que la corporation professionnelle 2. Et puis le nom
des dendropbores, appliqué à des gens de métier, ne se com-
prendrait pas s'il ne leur venait pas du rôle qu'ils jouaient
dans la fête de Cybèle; aucune profession ne porte dans l'Em-
pire un nom grec, et les marchands de bois durent avoir, à
Torigine, un nom latm, peut-être celui de liqnarn'K Ils durent
échanger ce nom contre le nom grec de dendropbores qui
n'indiqua d'abord que leur fonction religieuse dans un culte
qu'en 41^2 Honoriiis et Théodose rappellent à leur devoir divers collèges
religieux, les nemesiaci, signiferi, cantabrarii (Cod. Theod., XIV, 7, 3) :
le dévot empereur, dit-il, ne les aurait pas rappelés à leur service originel
si, derrière l'association religieuse, il n'y avait eu des obligations civiles,
des devoirs sociaux, qui ne pouvaient être désertés sans inconvénients
pour la chose publique. Honorius fait abstraction du rôle civil des den-
dropbores pour n'attaquer que leur caractère religieux, et il fait abstrac-
tion du caractère religieux des nemesiaci et autres, pour les rappeler à
leurs obligations civiles (pp. 64-65). — Certes, si la loi de 313 n'est pas
reprise au code Justinien, cela ne suffit pas pour prouver que les den-
dropbores civils avaient disparu après la loi de 415, comme le croit
Marquardt, Privatleben, l. L
» Marquardt se contredit dans sa St.-V. et dans son Privatleben, l. /.,
mais dans ce dernier il n'admet qu'un collège, ayant un double caractère.
2 Maué, Vereine, p. 20, n. 8. P. Paris, L L, p. 101. Ils ont les mêmes
chefs : quinquennales, etc. A la vérité, cela n'est pas concluant, parce que
tous les collèges se ressemblent sous ce rapport.
5 Liv., 3o, H : inter lignarios (rue devant \?l porta Trigemina). IV 9ol.
902 : lignari; IV 960 : lignari universi, à Pompéi. IV 48o : lignari plos-
trari. Ici Maué, /. /., p. 23, croit qu'il s'agit des lignari, transportant le bois,
et des plaustrari, transportant les pierres (Cfr. DiG., IX, % 27, 33 : si
ex plaustro lapis ceciderit, et quiil ruperit vel fregerit, Aquiliae actione
plaiistrarium teneriplacet, etc.). Il y aurait asyndéton. C'est peu vraisem-
blable. On a vu à tort un col{legium) lign{arioruni\ dans l'inscription VII
1069 (cfr. 1070), où il faut lire : col{umnam) lign(eani), avec Mommsen.
dans Orelli-Henzen, III, p. 207, et Hukb.ner dans le Corpus.
( 250 )
où tous les noms étaient grecs, et qui finit par désigner aussi
leur métier et par faire oublier leur nom primitif. Ce change-
ment se conçoit si le nom de dendrophore convenait aussi h
leur profession : rappelant leur fonction religieuse en même
temps, il était de nature à leur donner plus de considération
et devait être préféré par eux-mêmes.
Quand et pourquoi les bûcherons ou les marchands de bois
devinrent- ils les serviteurs de Cybèle et prirent-ils ce titre
nouveau? Selon de Boissieu, la corporation des dendrophores,
chargée de la fourniture du bois pour les services publics, eut
d'abord pour patron Silvain. Mais quand le culte de la Grande
Déesse eut envahi Rome et les provinces, quand les empe-
reurs eux-mêmes s'y associèrent, les dendrophores, qui, par
l'obligation de leur charge civile, devaient fournir les pins
nécessaires à ces fêtes, devinrent tout naturellement les sodales
de Cybèle ^. Cette explication a un défaut grave : c'est que les
dendrophores se vouèrent au culte de Cybèle avant l'époque
où les collèges furent chargés d'un service public. On peut
supposer avec plus de vraisemblance que, depuis l'organisa-
tion de la grande fête d'avril par Claude, ils fournirent, comme
simples marchands, les arbres nécessaires k la dendrophorie,
qu'ils choisirent pour patronne la déesse phrygienne, déjà
fort en vogue et dont le culte convenait à leur profession, et
qu'alors ils furent chargés, peut-être en échange de l'autorisa-
tion, d'abord à Rome, puis ailleurs, de porter le pin sacré 2.
Leurs collèges datent donc probablement de cette époque ;
cependant le document le plus ancien où figure un colleghim
deiîdrophorum est de l'an 79, à Regium JuliumS ; à Rome, on le
trouve pour la première fois en l'an 97 ^; à Ostie, ils florissaient
* A. DE BoissiEU, Insc7\ de Lyon, pp. 413414.
2 Rabanis, p. 61. Maué, Vei'eine, p. 24. Ils se disent autorisés par un
sénatusconsulte dans Orelli, 4075. Voyez supra, p. '246, n. 1.
5 X7.
* VI 642. Voyez svpra^ l. /., et iufra^ p. 231, n. 4.
( 251 )
sous Hadrien et sous Antonin le Pieux i. A mesure que s'accrut
la vogue de ce culte, ils apparurent dans toutes les villes de
l'Italie et des provinces : au 11^ et au III^ siècle, on les trouve
partout, et nous avons constaté leur existence dans soixante-
cinq villes, répandues dans toutes les parties de l'Empire 2.
Tous ces collèges avaient un double caractère, civil et reli-
gieux, et ils le conservèrent jusqu'à la fin de l'Empire : ni la
loi qui les réunit partout aux fabri et aux centonaires, ni celle
qui confisqua leurs biens, ne fait aucune distinction; cepen-
dant dans la première il s'agit d'une corporation civile et dans
la seconde d'une confrérie religieuse, et la distinction était
nécessaire si elle avait existé dans la réalité.
Quoique serviteurs officiels de Cybèle, les dendrophores
honoraient d'autres divinités. A Rome, ils semblent avoir une
grande vénération pour Silvain, dieu et habitant des forêts,
protecteur des industries du bois 3. Un de leurs présidents à
vie leur fait cadeau d'une niche contenant la statue de Silvain
dendrophore ^; en effet, on représentait cet antique dieu
tenant à la main un pin ou un cyprès :
Et teneram ah radiceferem, Silvane, cupressum^.
Cette épithète de Silvain a donné lieu à deux conjectures.
C.-L. Visconti suppose qu'à coté des dendrophores de Cybèle,
voués uniquement au culte de la déesse, il y aurait eu des den-
1 C. L L., XIV, p. o74.
2 Voyez notre Index collcgiorum (Rome. Provinces). Partout on trouve
aussi des temples de la Magna Mater (Goehler, pp. 60-64'.
5 MowAT, Bull, épigr., I, 1881, pp. 62-63. Rabams, p. 62.
* VI 641 et note. Cfr. VI 642, dédicace à [Silvamis] .sanclus d[endro-
plwrus], par des ùmnunes collegi, idem curatores - qui sunt cult[ore^<\
Silvani d[endrophori]. Cfr. Gatti, Bull, com , 1890, pp. 21-23.
3 ViRG., Georg., I, 20. Cfr. Xrch. epigr. Mitth., VIII, p. 86, un bas-relief
représentant le dieu avec un couteau et une branche coupée. Preller,
iR. M., I, p. 397, n. 2.
( 252 )
drophores, marchands de bois, qui adoraient Silvain et auraient
emprunté à ce dieu leur emblème et leur nom. On a vu que
cette distinction n'est pas soutenable ^. A. de Boissieu et Maué
croient que Silvain fut d'abord lem^ unique patron et qu'il céda
le premier rang dans leur culte à Cybèle dans les circonstances
exposées plus haut -. Celte conjecture est assez vraisemblable.
A Ostie, un serviteur subalterne de Cybèle {apparator M. D. M.)
donne aussi une statue de Silvain aux dendrophores 3.
Notre étude sur les dendrophores montre que leur caractère
religieux était plus apparent, que leur rôle dans le culte était
plus important que celui des autres collèges. Non content
d'adorer Cybèle comme leur patronne et de lui rendre un culte
privé pareil à celui des autres collèges, ils figurent dans son
culte public et c'est même parmi eux que l'on choisit parfois
les prêtres de cette déesse. Sous ce rapport, ils ressemblaient
aux cannophores de la même divinité, aux cistophores de Bel-
lone î- et aux pastophores d'Isis s, collèges purement religieux.
^ C. L. ViscoNTi, Ann. d. Inst., 1868, pp. 366-375. Remarquez qu'au
n. VI 641, ce sont les dendrophori Mjitris) d. M. L qui reçoivent un
Silvain dendrophore.
2 Maué, /. /., p. "21. A. de Boissieu, /. L
'' XIV 53 : signum Silvani. Uapparator fait les préparatifs de la céi'é-
monie. — A Lyon, on trouve des dendrophori Augustales Lugudunenses
(Allmer, m. "de L., II 102. 167. 169. Cfr. Mowat, Bull, épigr., 1885,
p. 319, à Amsoldingen). A. de Boissieu (p. 414) dit : « Les dendrophori
Augustales étaient probablement les agents des forêts appartenant au
domaine privé des princes. Peut-être cumulaient-ils avec cette charge
civile certaines fonctions religieuses à remplir dans les fêtes de la divinité
des Césars; peut-être formaient-ils, dans le collège des dendrophores,
une décurie spéciale. » Cela est peu vraisemblable. Il est plus probable
qu'ils étaient, comme les seviri Augustales avec qui ils sont en relations
intimes (Allmer, II 167), attachés au culte impérial, en même temps
qu'à celui de Cybèle. Cfr. Allmer, II, p. 441 fin. P. Paris, /. /., p. 101.
* Orelli, 2318.
5 V 7468 : collegium pastophoruni Industriensium. XII 714, 10. Il :
pastophori t(empli) I(sidis), à Arles. Cfr. 697, note. Apul., Metam., XI,
30, supra, p. 43, n. 3. G. Boissier, Relig. rom., I, pp. 372-373.
( i253 )
Le culte de Cybèle, coninic tous les cultes de lOrieut, exigeait
des aides nombreux ; les fonctions des prêtres et des assis-
tants y étaient plus importantes que dans les cultes romains
et elles imprimaient à ceux qui en étaient revêtus un caractère
spécial '. Nous avons vu d'autres métiers prendre part aux
fêtes de leur dieu tutélaire, mais ils n'y jouaient pas un rôle
public comparable à celui des dendropliores dans le culte de
Cybèle. En tous cas, c'est une rare exception 2.
il faut maintenant tirer les conclusions de ce paragraphe.
Nous avons vu d'abord que chaque collège est placé sous l'invo-
cation d'une divinité. Chaque collège a donc un culte, mais ce
n'est pas un culte public, célébré au nom de l'Etat : c'est un
culte privé. On ne peut alléguer contre cette opinion ni le
collegiiim Capitolinorum ni le collegium mercatonim, qui sont
des sodalités semi-otficielles : les collèges profanes n'avaient
pas ce caractère. Nous avons admis, à la vérité, que sous la
république leurs présidents participaient à la célébration des
jeux compitalices; mais en dehors de cette fête populaire,
chaque collège avait son culte spécial; Plutarque le dit for-
mellement. Si beaucoup d'autres artisans prenaient part à la
fête otlicielle de leur divinité protectrice, ils y participaient
pour leur compte, pas au nom de l'Etat. Tel devait être le rôle
des pêcheurs dans les hidi piscatorii que le préteur célébrait
oliîciellement. Les dendrophores, véritables aides des prêtres
de Cybèle, étaient ù la vérité chargés d'une cérémonie impor-
tante de la fête officielle de cette déesse, et ils avaient peut-
être obtenu l'autorisation à cause de ce service, mais sans nul
doute ils rendaient, eux aussi, à Cybèle un culte priv('', propre
au collège. Heinecci as a donc bien qualifié le culte des collèges
' G. BoissiER, Op. <•., |)|). 356 et siiiv. On peuî, se demander si leurs
collèges, outre leur ori^^anisalion civile semblable à celle des auti'es col-
lèiçes, n'avaient pas une organisation spéciale l'our le cuite. On trouve,
par exemple, un arcliidendropfwrus (III 763 1, un apparator (XIV 53).
2 Les capulatores dWllifae (IX 2336) et les veiiatorcs d'Arpinum
(X o671) sont appelés sacerdotes Dianae. Voyez supra, pp. 197- 198.
( 254 )
par les mots sacra propiia velut domestica ', et Plutarque a bien
dit que les collèges avaient Bswv Tijjiàç exào-Tco yÉveî, TipsTroùo-aç.
S'il en est ainsi, il faut admettre que le culte n'était pas
imposé aux corporations par l'État, comme le prétendent
Dirksen et d'autres -. En effet, l'État, qui se désintéressait du
culte domestique et gentilice, restait aussi indifférent à celui
des associations privées : on ne conçoit pas un culte privé
assigné par l'État. L'intervention de Numa ou d'une autorité
quelconque doit donc être écartée. Les corporations romaines
choisissaient leurs divinités tutélaires aussi librement que nos
corporations du moyen âge choisissaient leurs saints patrons ;
le plus souvent du reste, pour les uns comme pour les autres,
le choix ne restait plus à faire quand la corporation se consti-
tuait, car le métier avait son patron depuis longtemps.
On est tenté de conclure de là qu'à l'origine les artisans
romains s'associèrent peut-être uniquement pour honorer ce
patron et que les corporations romaines ne furent d'abord que
des associations pieuses 3. A Rome, comme souvent au moyen
âge, la confrérie aurait donné naissance à la corporation.
Quoi qu'il en soit, plus tard, dès le commencement de l'Em-
pire tout au moins, ce n'était plus cette pensée unique qui
guidait les artisans ; la religion ne faisait que consacrer d'autres
liens : la communauté de la profession et des intérêts, le désir
de sortir de l'isolement et de se fortifier, l'appât de certains
avantages, tels qu'un enterrement décent et des banquets
fraternels, firent naître ces groupes; mais suivant la coutume
ancienne, c'est par un culte commun que tout collège continua
d'aftirmer son existence.
Nous n'admettons pas non plus que le culte était une con-
dition exigée par l'autorité. Sans doute, à l'origine comme plus
tard, le gouvernement redoutait les groupes qui se formaient
en dehors de la religion, et le culte des collèges paraissait une
^ Heineccius, I, § 6.
" DuiKSEN, p. 8. 19 : ihre eignen vom Staate zugetheilten sacra.
5 Wassenaer, cap. 4. Raph. Fabrettus, Inscr., c. 6, p. 429.
( 255 )
garantie sérieuse. II est certain aussi que la religion fut sou-
vent un prétexte mis en avant par des collèges pour cacher un
autre dessein; cela prouve seulement que la religion suftisait
pour donner des apparences inoffensives, pourvu qu'il ne
s'agît pas d'un culte interdit. Mais rien n'autorise ù croire que
le culte fût une condition de l'autorisation ou seulement de la
tolérance accordée par le gouvernement.
Selon quelques-uns, les artisans voulaient imiter des asso-
ciations religieuses existantes ; ils auraient pris pour modèles
les collèges sacerdotaux i. Avec Mommsen, nous avons pré-
féré accorder aux collèges d'artisans une origine indépen-
dante. Les ressemblances que l'on peut découvrir, et qui sont
du reste peu frappantes, sont fortuites ; elles étaient inévitables
entre des associations qui avaient toutes un caractère religieux.
Autant conclure du caractère religieux et funéraire des corpo-
rations du moyen âge qu'elles dérivent des collegia teniiiorum 2
ou des corporations d'artisans romains : ces ressemblances
tiennent à la nature des choses 3.
Sans aucun doute, avec le temps, l'esprit religieux s'affaiblit
dans les corporations professionnelles, comme dans le reste
de la société romaine : au moins conservèrent-elles longtemps
les pratiques et le culte. Cependant nous dirons dès mainte-
nant que certaines corporations puissantes, qui s'établirent
exprès pour le service de l'Etat, telles que le corpus navicula-
riorum, semblent n'avoir jamais eu de but religieux : c'étaient
de véritables institutions administratives sous la forme corpo-
rative. Au IV« siècle , il est probable que tous les collèges
perdirent peu à peu leur caractère religieux, parce que leurs
membres se convertirent au christianisme, comme nous le
verrons dans la suite de ce mémoire.
< DiRKSEN, pp. 8. 27. Marquardt, Sl.-V., III, p. 138, n. 4^ = Le culte,
I, pp. 166, n. 1. 173. Bouché- Leclercq, Manuel, p. 473.
- Comme Rodbertus, VIII, 1867, p. 421, n. 62.
5 C'est l'opinion de Mommsen (De coll., p. 27) et de Schwartz (p. 61).
( 256 )
Ji 4. But fiuiéraire.
Sommaire : IMPORTANCE DE LA SÉPULTURE. — SOCII COLUMBARIORUM, — COLLÈGES
FUNÉRAIRES; NATURE ET ESPÈCES DIVERSES. — COLLÈGES PROFESSION^ELS AYANT
UN CARACTÈRE PUREMENT FUNÉRAIRE. — COLLÈGES PROFESSIONNELS PRENANT
ACCESSOIREMENT SOIN DES FUNÉRAILLES. — TROIS MOYENS EMPLOYÉS : FUNERATI-
CIUM, SON EMPLOI; CONTRIBUTION AUX FRAIS; MONUMENTS ET DOMAINES FUNÉ-
RAIRES. — CULTE DES MORTS.
Dès la république, les collèges professionnels se rattachèrent
à la religion par un autre lien que le culte d'un dieu : je veux
parler du soin des funérailles et du culte des morts. Ce fut
certes l'un des plus grands services qu'ils rendirent à la classe
populaire, et nous étudierons ce nouveau caractère en détail.
Cependant, il faut distinguer nettement les collèges profes-
sionnels des collèges funéraires proprement dits, et pour
éviter toute confusion, nous devons, tout d'abord, donner
quelques explications préliminaires sur ces derniers; ce que
nous en dirons nous aidera, du reste, à bien comprendre
comment le soin des funérailles était entendu dans les collèges
industriels.
Les Romains, comme tous les peuples de race aryenne,
attachaient une grande importance à la sépulture. D'après
leurs croyances, tout ne finissait pas avec la mort, la vie con-
tinuait dans la tombe et le défunt ne jouissait du repos que
s'il avait été enseveli suivant les rites. On ne tenait pas moins
aux honneurs funèbres rendus après la mort, à certains jours
de l'année. Le tombeau était comme une demeure ou plutôt
un temple, où habitait l'âme divinisée {DU Mânes). Et l'on ne
croyait pas cette âme assez dégagée de l'humanité pour se
passer de nourriture; on lui portait régulièrement un repas
aux fêtes des morts, qui revenaient nombreuses dans le cours
de l'année : on faisait des libations sur la tombe, on y semait
des tleurs et des plantes agréables. Les Romains aimaient
aussi d'être enterrés avec leurs parents ; chaque maison avait
( 257 )
sa sépulture commune : associés dans le même culte pendant
la vie, les gentiles restaient unis après la mort. Ils continuaient
ainsi d'habiter ensemble et ils recevaient les mêmes honneurs
funèbres. Plus tard, quand les liens se furent relâchés entre
les gentileSy chaque famille eut du moins une sépulture com-
mune '.
Il était bien ditiîcile aux classes pauvres de satisfaire à ce
besoin religieux ; tous ne pouvaient pas supporter les frais
d'un tombeau. Souvent les affranchis et les clients étaient
admis dans celui du patron, comme l'indiquent de nom-
breuses inscriptions ainsi conçues : Hoc monumentum feceinint
sibi, suis, libertis libertabus, postejnsqiie eorum 2. Les grandes
maisons bâtissaient pour leurs esclaves et leurs affranchis de
vastes mausolées pouvant contenir parfois plus de mille urnes;
on les appelle aujourd'hui colombaires, parce que les niches
[colamharia)^ disposées en rangées sur les quatre murs, avaient
la même forme que l'ouverture d'un colombier 3. « Situés
tout autour des murs de la ville, dit Saglio 4-, et, comme les
autres tombeaux, sur le bord des grandes voies qui en sor-
taient, ces vastes édifices consistent en de grandes salles (géné-
ralement) rectangulaires, à moitié souterraines, à moitié élevées
au-dessus du sol, dans les murs desquelles les niches [locuSy
* Cic, De off\, 1, 17, o5 : magnum est, eadem. Iiabere monumenta
majoriim, iisdem uti sacris, sepulcra habere commimia. Cic, De leg.y II,
2'i, 55. MoMMSEN, De coll., p. i26. Marquardt, Priv., p. 353 = Trad., 1,
p. 425.
2 Wallok, m, pp. 454-455 : Les esclaves et les affranchis dans les
tombeaux de famille.
5 Columbarium ne se rencontre que pour désigner la niclie qui peut
recevoir généralement deux urnes ipllae). On a retrouvé beaucoup de
monuments; leurs inscriptions sont données au vol. VI, t. 2 et 3. Voyez,
par exemple, celui des esclaves et affranchis de Livie (VI 3926-4326),
celui de la familia Marcellae Minoris (VI 4414-4880), celui des Statilii
Tauri, des Volusii, etc.
* Dictionnaire des Antiquités, s. v. columbarium, où l'on trouvera le
dessin de plusieurs.
Tome L. 17
( 2o8 )
loculus, ollavium i), ordinaireinent voûtées en demi-coupoles,
quelquefois carrées, sont régulièrement espacées et alignées
en files. Dans chaque niche se trouvent le plus habituellement
deux urnes [olla, urna); quelques-unes en renferment trois ou
quatre, d'autres une seule; ces urnes sont fixées dans la
maçonnerie... Des inscriptions gravées sur des tablettes de
marbre clouées au mur au-dessus ou au-dessous de chaque
niche, indiquent les noms, l'âge, la condition des défunts,
souvent aussi les noms des personnes qui ont pris soin de
leur assurer la sépulture et d'autres circonstances encore. »
Que faisaient les indigents, les esclaves et les affranchis
dont les maîtres et les patrons étaient moins riches ou moins
généreux? Ils ne pouvaient se procurer une sépulture de
famille ni des tombes isolées. Sous la république et au com-
mencement de l'Empire, il existait pour eux d'immenses fosses
publiques construites en forme de citernes et fermées par une
dalle, où leurs cadavres pourrissaient pêle-mêle.
Hoc miser ae plebi stabat commune sepidcrum -.
Il fallait être bien misérable pour se contenter d'une telle
sépulture, et l'on s'adressait parfois à des spéculateurs qui éri-
geaient de vastes colombaires et vendaient les niches en détail 3.
Mais le meilleur moyen était de s'associer à plusieurs et de con-
struire un monument commun. Sous les premiers empereurs,
on trouve beaucoup de ces socii columbarii, de ces sociétés
funéraires, qui n'étaient pas de véritables collèges. Nous en
connaissons une de trente-six membres, qui se partagèrent en
l'an 748 leur monument sur la voie latine 4; une autre, plus
' Ou columbarium; y on ez supra, p. 257, n. 3.
2 HoRAT.,S'a/., I, 8, 10. C'étaient les pzi^iczi/i, puits. Marquardt, Priv.,
I, pp. 232. 361. Trail, I, p. 401.
5 Cfr. VI, p. 926, n. 4881-5178. VI, p. 956, n. 5539-5678.
*■ VI, p. 1437, n. 11034-11054. Gatti, Bull, com., 1882, pp. 3 et siiiv.
( 259 )
nombreuse, renfermait les gens de toute condition, ingénus,
affranchis, esclaves de familles diverses •. C'étaient de véri-
tables sociétés par actions, que Saglio décrit de la façon
suivante : « Les associés constituaient un fonds commun et
versaient une contribution mensuelle {slips menstriia) pour
alimenter la caisse (arca) d'où était tiré l'argent nécessaire, non
seulement à la construction de l'édifice, mais encore à la
dépense des funérailles {funeratichnn) -. La société était divisée
en décuries [dccuriae), chacune ayant son décurion; elle choi-
sissait un desservant (sacerdos), un trésorier (qnaeslor) ; on
trouve aussi dans les inscriptions la mention de quinquen-
nales; enfin des curateurs [curalores] chargés de bâtir et de
tenir en bon état le monument et d'y marquer les places
{sorles, locus, partes virileSy jus) auxquelles avait droit chacun
des contribuants, au prorata de sa cotisation, et qui étaient
désormais sa propriété : il pouvait en conséquence les donner,
les vendre ou en disposer par testament. Les places étaient
réparties par le sort {ex sorlilione)... Le privilège de les choisir
n'était accordé que par exception, comme Tétait aussi la dis-
pense des charges {immunitas), en récompense de services
rendus à la communauté 'i. »
Tels étaient les socii columhariorum. Ces sortes de monu-
» VI, p. 939, n. 5179-5538. Cfr. Henzex, Ami. d. /., 1856, pp. 18 etsuiv.
VViLMANNS, n. 369 et siiiv. Ce colombaire comporte neuf rangées de niches
superposées et pouvait contenir six cents urnes. Il est du temps de Tibère
et de Claude. - VI 10415 = I 1041 : trois socei.
2 VI 11034 : qui in eo momuncnto contulerunt pccunia{))]) iili aedifica-
relur. VI 10332 : is monumentum e.v pecunia collata sociorum aedificavit.
Chez les socii, nous n'avons pas trouvé une seule mention de funerati-
cium, et nous nous demandons si leur but n'était pas exclusivement la
construction et la conservation du monument.
5 Dict. des A7it., I, p. 1334, s. v. columbarium. HenzKxN, Ann. d. /.,
1856, pp. 8 et suiv. G. BoissiEii, II, p|). Tii-TiZ. Marchâudt, Priv.,
pp. 359-360. Trad., I, pp. 433-435.
( 260 )
ments semblent n'avoir existé qu'aux environs de Rome * . Les
plus anciens datent de la fin de la république, et les plus
récents ne dépassent pas le temps des Fiaviens. Dès cette
époque, les sociétés disparaissent et elles sont remplacées à
Rome et dans tout l'Empire par de véritables collèges, qui
s'en distinguent par le culte d'une divinité et probablement
par la façon dont ils prennent soin des funérailles. Nous les
avons appelés, avec Mommsen, collèges funéraires, et Marcien
les appelle collegia tenuiorum '^. Eux-mêmes empruntent leur
nom au dieu qu'ils ont choisi comme patron; car leur carac-
tère religieux est encore plus prononcé que celui des collèges
d'artisans. Ainsi ils s'appellent, par exemple: Collegiiim
Silvani, plus souvent encore Cultores Silvanij parfois Colle-
* Henzen croit que le n. VI 10275 {fructuarii), retrouvé à Sabioneta,
provient de Rome. Ailleurs on rencontre des socii, mais ils semblent
avoir des champs de sépulture et non des monuments : V 2590. 2603.
2732, 3554. X 8110. Wilm., 335. Cependant à Teate, on a des socii monu-
menti, Ephem., VIII 123-125.
2 Sur les collèges funéraires proprement dits, voyez : MOiMMSEN,
De coll., pp. 92-116. Zeitschr. f. g. R. W., XV, pp. 357 et suiv. St.-R., I,
p. 325. Trad., I, p. 386. Huschke, Zeitschr. f. g. R. W., XII, pp. 173-219.
G. Boissier, Rev. arch., N. S., 23, 1872 : Les cultores deorum, pp. 81-94.
Rev. des Deux Mondes, lardée. 1871 : Associations ouvrières et charitables
à Rome. Relig. rom., II, pp. 273 et suiv. Marquardt, St.-V., III, pp. 140-
144. Le culte, I, pp. 168-173. Duruy, Hist. des Rom., V, pp. 152-154.
De Rossi, Bull, crist., 1864, pp. 57 et suiv. Bull, com., 1882, pp. 144
et suiv. : La villa di Silio Italico ed il collegio salutare nel Tuscolo.
Henzen, Ann. d. L, 1856, p. 18. Bull. d. L, 1885, pp. 141-143. I. von
Lykowski, Die collegia tenuiorum der Rômer, Diss., Berlin, 1888.
Max Cohn, pp. 135-146. Loening, I, pp. 204 et suiv. D. Lacombe, Le
droit funéraire, thèse, pp. 104-114. Fr. Schaedler, Das rôm. Begrllb-
nissivesen, 1888, pp. 17 et suiv. Liebenam, passim. Friedlaender,
Sitt., I, p. 273. Maué, Praef. fabr., p. 29. L. Renier, Athenaeum franc.,
II, 1853, pp. 1207-1209. Tr. Schiess, Die rôm. collegia funeraticia,
Miinchen, 1888. Ce dernier ouvrage est capital; il est suivi des inscrip-
tions. Pour la liste des collèges funéraires, nous renvoyons à nos Indices,
où ils sont classés.
( 261 )
gium salutare^ Silvaniy ou Collegium SilvanisalutariSj ou Soda-
licium dit Silvani Pollentis '-î. Les plus fameux sont: le Colle-
giinn saluiare Dianac et Autinoi de Lanuvium, le Collegium
Aesculapi et Hjjgiae, à Rome, les Cultures eollegi Silvani de
Philippes, le Collegium Jovis Cerneni d'Alburnus Major, en
Dacie, et un Collegium Silvani, de Lucanie, qui nous ont laissé
de belles inscriptions 3.
Ces dénominations pieuses que portaient la plupart des col-
lèges les ont fait prendre longtemps pour des confréries reli-
gieuses. Et, en effet, chacun était voué au culte d'un dieu parti-
culier; ils avaient leurs fêles religieuses, où ils faisaient des
sacrifices, et nous avons vu que la principale n'était pas l'anni-
versaire de leur fondation, mais celui de la dédicace du dieu
ou du sanctuaire 4.
Malgré ces apparences, leur principal but était funéraire :
ils étaient constitués avant tout pour procurer aux confrères
un enterrement décent. Le sénatus-consulte qui les avait auto-
risés en bloc assignait formellement cette destination à leur
caisse, alimentée par des cotisations mensuelles; et, après
avoir reproduit le passage de ce sénatusconsulte dans leurs
statuts, les membres du collège de Diane et d'Antinous adres-
sent à eux-mêmes celte exhortation significative : Bene adque
1 On admet généralement que l'épithète salutare, choisie boni ominis
causa (De Rossi, Bidl. com., 1882. pp. 141-148), indique un collège funé-
raire. Voyez les notes de Henze>' aux n. VI 338. 10J3. Le même, Bull. d. !..
1883, pp. 141 et suiv. Bull, com., 1885. pp. 52 et suiv. G. Gatti, Bull,
com., 1886, p. 75. 1890, p. 147. Huebner, Monatshcr. derBerl. Ak., 1861,
p. 777. ScHiESS, pp. 18-19. 11 en est sans doute de même des collèges
qui prennent l'épithète sanctissimum et de ceux dont le dieu tutélaire
porte le surnom Salutaris. Nous en donnons la liste dans notre Inde.v
collegiorum.
^ VI 647. Voyez noire Inde.v collegiorum (coll. funeraticia).
5 XIV 2112. VI 10234. III 633. III, p. 925. X 444. Le premier s'appelle
aussi : Cultores Dianae et Antinoi.
* Voyez supra, p. 232. Sacrifices : VI 10231. X 444. XII 3076. XIV
2112, II, 1. 29-32.
( 262 )
industrie contraxerimus ut [e]xitu [defu]nctorum Iwneste prose-
quamur ^ ! Ce règlement, comme celui de la curia Jovis, de
Simitthus2, consiste principalement en prescriptions sur l'en-
terrement. On trouve des preuves non moins évidentes dans
les belles inscriptions des Cultores Aesculapi et [îijfjiae, à Rome,
en 153 ; des Cultores Jovis Cerneni, en Dacie, en 167, et des
Cultores 577î;a/ii, à Philippes3. Beaucoup de ces Cultores ou
Collegia deorum, ou Collegia salutaria ont des monuments
communs ou des champs de sépulture ; on voit une foule
d'entre eux pourvoir à l'enterrement d'un confrère ou aider
les parents à supporter les frais des funérailles 4. On peut donc
conclure avec certitude que la plupart des collèges à dénomi-
nation pieuse, si nombreux du l^*" au III<^ siècle, sont avant
tout des collèges funéraires. Il semble même que le mot cultor,
employé isolément, devienne synonyme de membre d'un col-
lège funéraire; ainsi l'on dit : cultores collegii Mercurii, membre
du collège funéraire voué à Mercure ».
Ces collèges eurent-ils dès l'origine ce double caractère? Il
est très difficile de le dire. On remarque cependant que cer-
» XIV 2112, 1, 1. 10-16. Voyez supra, p. 143.
2 VIII 14683, et la note, en l'an 185. C'est une curie municipale orga-
nisée en collège funéraire.
3 VI 10234.' III 633, et p. 924. Mommsen, De coll., pp. 92-97. Infra,
p. 272, n. 4.
* Voyez infra, pp. 268 et suiv., et nos Indices.
2 VII 1070. Cultores [colleg]i Silbani, III 633. Cultores fabrorum,
X 4855. Cultores collegi Larum, V 4432. Cultor{es centuriae) Corneliiae),
V 4866, Cultores centonari et dendrofori, IX 3837. Cultores fabrorum,
X 4855. Ctdtores Flaminiani, IX 2483. [C]ultores [c]ollegi Promes,
X 4853. Cultores veterani, VIII 2618. Cfr. IX 3422. Cultor seul, VI 835.
II 5811. Voyez : Mommsen, Zeitschr. f. g. R. W., XV, 1850, p. 359.
C. I. L. X, p. 1162. G. BoissiER, Rev. arcJi., 1872, pp. 86-87. Schiess,
pp. 17-18. Maué, \er., p. 39, n. 2. — Mommsen dit : Cultores sunt qui
adscripti sunt collegio funeraticio (IX 2483, note). Les chrétiens s'appe-
laient peut-être Cultores Dei. Lactant., Divin. Instit., V, 11 : eos, qui se
cultores Dei confiterentur. Voyez supra, p. 213, n. 1 : Cultor Verbi, et
De Rossi, Rull. cris t., 1863, pp. 59-60. 1877, p. 25.
( 203 )
tains (collèges, porlant le nom d'un dieu, seniblcnl avant lou
religieux : tels sont les collèges de Mithia; d'autre part, on
trouve, au comniencement du premier siècle, des niltores qui
paraissent exclusivement associés pour le culte; tels sont les
Cultures Aug(usti) Laurhnenses qui existaient à Nola, sous le
règne d'Auguste i. Il est donc probable que les premiers cul-
tores n'eurent qu'un but religieux. Leurs cotisations {stips) ne
servirent d'abord qu'aux frais du culte. Mais, comme tous les
collèges, ils songèrent en même temps aux funérailles, et,
plus tard, ce qui était l'accessoire devint le principal : le culte
céda le pas aux funérailles sans jamais disparaître. C'est ainsi
que s'explique ce caractère religieux des collèges funéraires;
c'est peut-être ainsi qu'ils adoptèrent l'usage des cotisations
mensuelles, qui a une origine religieuse '^. Naturellement,
les nombreux collèges qui naquirent quand cette transfor-
mation fut accomplie, eurent, dès leur naissance, un carac-
tère plutôt funéraire que religieux 3.
Nous avons vu qu'un sénatusconsulte, qui date peut-être
de la tin du premier siècle, permit ces collèges en bloc; aussi
se répandirent-ils rapidement dans tout l'Empire, sauf dans le
inonde grec, où les thiases, les éranes et les orgéons les rem-
placèrent peut-être ^^. Ils sont nombreux en Afrique même où
il n'y a presque pas de collèges d'artisans.
On peut les diviser en plusieurs catégories, d'après la condi-
tion de ceux qui les composent. Une première classe peut
» X 1238. (i. BoissŒii, Rev. arcli., 1872, pp. 88-84. Cfr. supra, p. 4(),
n. 3. ScHiESS, pp. 16-18. — Sur les collèges de Mithra, voyez supra,
pj). 46-47.
2 Mauquardt, St.-V., III2, p 142 = Le culte, I, p. 170, n. 4.
3 Mârquaiidt, /. /. MoMMSEN, Dc (vll , p. 92, a établi le premier la
véritable nature des cultores deorum, mais il ne distingue pas entre ce
qu'ils furent au commencement el ce qu'ils devinrent ensuite. Kar-
LOWA (II, p. ^Q) rattache leur origine aux sodalités semi-officiollos isupra,
p 34) qui avaient aussi un culte comnum el une sépulture commune;
mais à ce com[)le, il faudrait y rattacher aussi les collèges professionnels.
* FoucART, Associât, relùj. chez les Grecs, p. 46.
s'appeler collegia domestica K La maison impériale et beau-
coup de familles opulentes possédaient des légions d'esclaves
et d'affranchis. Tous ces serviteurs d'une même maison for-
maient un ou plusieurs collèges funéraires, qui se disent
souvent adorateurs des lares de leurs maîtres. A Rome, l'un
des plus connus est le Collegium qiiod est in domu Sergiae
PauUinae ^^. A Brescia, il y avait des Cultures Larum M. Nonii 3 ;
à Aesernia, un Collegium cultorum statuarum et clipeorum
L. Abulli Dextri ■^, etc. Souvent les esclaves et affranchis se
divisaient, suivant leur métier ou leur service, en familles,
et chaque famille assez nombreuse formait peut-être un col-
lège On doit remarquer surtout ces collèges d'affranchis
et d'esclaves impériaux qui portent un nom de métier et
qu'il ne faut pas confondre avec les corporations profession-
nelles : Collegium iwaegustatorum^ Soda[licium] Jouis Conser-
vlatoris] cursorum Caesa[ris], Collegium tabellariorum s, et une
foule d'autres 6. Ce sont des collèges purement funéraires.
D'autres collèges de la maison impériale, qui portent seule-
ment un nom religieux, étaient sans doute formés de métiers
divers : Collegium magnum Larum et Imaginum domini n[ostri)
Caesaris ^.
Les villes possédaient également des troupes d'esclaves et
d'affranchis attachés au service municipal : ces servi et liberti
jmblici constituaient une seconde sorte de collèges funé-
' Voyez noire Index collegiorum.
2 VI 9148. 9149. 10260-10264.
3 V 4340.
-* IX 2654. Cfr. Cultores Larum Sex. Antoni Mansueti, à Alba Helvo-
rum, XII 2677. Cidtores GeniBritti Cordi, à Sulmone, IX 6320; Cultores
Flaiainiani, à Saepiniim, IX 2483; Coll. Larum Marcellini, ib., IX 2481.
A Rome, ces collèges sont nombreux.
5 VI 9004. 241. ÎII 6077. VIII 1878. XII 4449.
^ Coll. cocorum, VI 7458. Corpus lecticariorum Caesaris, VI 8872. Etc.
" III 4038. Au no VI, 671, Collegium magnum Lar{iim) et Imag{inum)
domn{i) Invicti Anfonini PU. Ailleurs : CoUegiwn magnum., VI 692. 4035.
10252-10254. III 6077. XIV 2045. — Cfr. Bull, corn., 1887, p. 164.
(
( 265 )
raires : Collegiiim familiae publicae, à Venafrum ' ; Corpus
familiae publicae libertorum et servormn, à Ostie '^^ etc.
Enfin vient la classe presque innombrable des corporations
composées d'affranchis et de pauvres gens exerçant toutes
sortes de métiers pour leur compte : car telle devait être la
composition de ces collegia tenuiorum portant le nom d'une
divinité 3, et répandus partout. Ils pouvaient aussi recevoir des
esclaves appartenant à des maîtres divers, avec le consentement
de ceux-ci ^. Ce sont les collèges funéraires proprement dits,
les seuls peut-être que visait le sénatusconsulte général, car les
esclaves des particuliers, qui formaient des collèges dans une
maison, et ceux de l'Etat ou des villes n'avaient peut-être
besoin que de l'autorisation de leur maître '>.
Si nous sommes entré dans tous ces détails, c'est que parmi
les pauvres gens qui formèrent des collèges funéraires, il faut
citer avant tout les artisans. Chose remarquable, ici encore ils
se réunirent souvent par métier. Même quand le but des arti-
sans est simplement de se prêter une aide mutuelle en des cas
qui n'ont rien de commun avec leur profession, ils ont en tout
temps préféré s'unir à des ouvriers de la même industrie. Cela
se comprend : nous aimons à nous trouver avec des hommes
qui ont les mêmes occupations que nous, dont la condition
sociale est pareille à la noire, qui ont les mêmes idées et les
mêmes intérêts. Les collèges d'artisans dont il est question en
1 X4856.
2 VI 479 = XIV 32. Gfr. XIV 255, album de la familia publica; XIV
409 : liberti et servi pubtici. Voyez notre Index coUegiorum (servi et liberti
publia).
3 Beaucoup d'inscriptions portent seulement collegiuin, sodaticium,
collegae, sodale.s; dans ce cas, on n'a pas mis le nom du collège. — Gatti,
Bull, eom., 1890, pp. 145-147. Nous avons déjà parlé des collegi j'uneratici
famigliari. Voyez supra, p. loi, et nos Indices, Voici un exemple d'un
collège païen, VI 10416 : Rutilia Prepusa hune collegium constituit con
illo conjugi suo libertis libertabusque posterisque eorum.
* DiG., 47, 22, 3.
•"' Voyez supra, p. 148, n. 2.
ce moment ne différaient donc des collèges funéraires que
parce qu'ils étaient composés de gens de même profession. En
formant un collège purement funéraire, les artisans n'avaient
pas besoin d'une autorisation spéciale, mais aussi ils étaient
soumis à la loi sur les coUegia tenuiorum, qui leur défendait,
par exemple, de se réunir plus d'une fois par mois pour leurs
affaires. Ces collèges ne sont pas rares : nous croyons pouvoir
regarder comme tels tous ceux qui prennent le nom de cultores
d'un dieu, ou qui ont un nom religieux. A Rome, on les trouve
dès Vespasien; sous ce prince, les ouvriers démolisseurs for-
maient un collegium siibrutorum cultorum Silvani ^
Nous avons déjà donné une liste de collèges composés d'ar-
tisans, dont les noms paraissent indiquer le caractère exclu-
sivement funéraire et religieux - ; on peut y ajouter les
suivants :
Sodalic{ium] horr(eorum) Galhan{orum) cohortium [trium], en
159; il fait une dédicace à Hercules salutaris, VI 338 et note.
Collegium salutare (quod consistit in praediis Galbanis?); ce
sont également des ouvriers des greniers publics 3.
Collegium sanctissimum quod consistit in praedis Larci Macedo-
nis, foulons, vers 122, VI 404.
Cultores fabrorum, à Venafrum, IX 4855.
Cultores centonari et dendrofori, à Marsi Antinum, IX 3837.
Amici subaediani, à Antium, X 6699.
Coll[egium) Victoriae Aug{ustae), à Micia, III 1365 ^.
Collegium fabrum Veneris, à Salone, III 1981 •">.
Les collèges professionnels, qui font l'objet de ce travail,
n'avaient pas pour but principal le soin des funérailles, mais
< VI 940.
2 Voyez supra, pp. 197-198.
3 BiUl. d. L, 188o, p. 138. Bidl. corn., 1885, p. 56. Tav. VI. — VI 237,
dédicace au Genius horreorum Leonianorwn et à HerciUes Salutaris,
probablement par des horrearii.
* C'est une dédicace d'un lapi(darius); cependant il n'est pas sûr du
tout que le collège soit composé de lapidarii.
3 Cfr. Maué, Ver., p. 29, et supra, p. 198, n. 1.
( 267 )
ils se préoccupaient presque tous de la sépulture de leurs
membres. En d'autres termes, ils n'avaient pas seulement un
caractère plus ou moins politique, économique et religieux,
ils avaient aussi un caractère funéraire. Cette remarque doit du
reste s'étendre à presque tous les collèges de l'Empire : aux
collèges religieux, tels que les cannophores et les pausarii
Isidis, aux collegia jiwenum, aux collèges des Augiistales, aux
collèges de vétérans, aux collèges militaires, aux apparitores
magistratiium, enfin et surtout aux collèges d'artisans et de
marchands. Tous ou presque tous ajoutèrent à leur but primi-
tif et principal ce but accessoire : le soin des funérailles; en
eflét, ils ont un lieu de sépulture ou du moins on les voit
enterrer un de leurs membres i.
Cela n'est pas étonnant, pour les artisans surtout : pauvres
pour la plupart, ayant souvent de la peine à s'assurer une
tombe, ils devaient naturellement songer à y consacrer une
partie de leurs ressources communes, destinées d'abord à un
autre usage. D'autre part, le lien religieux qui unissait les con-
frères devait leur inspirer le désir de reposer ensemble après
la mort : unis comme \esgentiles dans un même culte pendant
la vie, ils voulaient, comme eux, dormir ensemble l'éternel
sommeil.
Disons tout de suite que cette pensée ne leur fut pas suggérée
par l'exemple des collèges funéraires proprement dits : ceux-ci
datent de l'Empire, tandis que dès la république nous trouvons
des collèges d'artisans qui ont des tombeaux communs. Ce sont
le conlegium anulariorum, le conlegium restionum, le conlegium
secto[ruTn] serrarium, le conlegium teibicinum et la synhodus
magna psaltum -. Cependant les uns et les autres se servent à
peu près des mêmes moyens pour arriver à leur but. C'est pour
les collèges funéraires que nous avons le plus de renseigne-
ments, parce que nous avons conservé le règlement complet du
* Nous renvoyons à nos Indices (but funéraire).
2 1 1107 (= vi 9144). VI 9836. 9888. 3877. Bull, corn., 1888, pp. i08-410.
Cfr. supra, pp. 87-88.
( 268 )
collège de Diane et d'Antinous, à Lanuvium. Nous commen-
cerons par eux et nous verrons ensuite que les collèges pro-
fessionnels n'en différaient point sous ce rapport.
On se servait de l'un des trois moyens suivants : à chaque
décès, la caisse payait une prime funéraire, appelée funerati-
cium, suffisante pour couvrir tous les frais; certains collèges
se bornaient à couvrir une partie des dépenses; beaucoup
enfin possédaient un monument ou un champ de sépulture
commun, dans lequel ils assignaient une place à chacun de
leurs membres. Nous examinerons tour à tour chacun de ces
trois moyens ^.
Nous avons des détails fort intéressants sur l'emploi de la
prime funéraire et sur les funérailles. Voici d'abord les dispo-
sitions du règlement des cultures Dianae et Antinoi.
Tout confrère décédé avait droit à des funérailles honorables
et l'héritier institué par son testament pouvait, le cas échéant,
réclamer en justice la prime fixée -. Les statuts avaient prévu
deux exceptions : ils privaient de tout droit celui qui était en
retard de six mois pour le payement de la cotisation men-
suelle 3 et celui qui avait attenté à ses jours 4. H est fort
remarquable que pour le suicide notre collège n'admettait
pas la distinction qu'établissaient la loi et les philosophes. Le
jurisconsulte Neratius déclarait indignes d'être pleures ceux
qui se faisaient justice à eux-mêmes pour échapper au châti-
ment, mais non ceux qui se tuaient par dégoût de la vie, et
* ScHiESS, pp. 87-102. Maué, Ver., pp. 3946. Liebenam, p. "263.
- XIV 21 12, 1, 1. 18-19 : {p\nus legem perlege et sic intra, ne — lieredi
tuo conlroversiam relinquas. L. 23-24 : Item placuit : Quisquis ex hoc
corpore n(ostro} pariatus decesserit, eum sequentur ex arca (sestertii tre-
centi) n(ummi). L. 29. 31 : funeratichim . L. 32 : sa[tisdato ampli\us
neminem petituriim. II, J. 1-2 : neque — ulla petitio esto.
- XIV 2112, II, 1. 22-23.
* Ihid., 1. 5-6. Cfr. C. I. L. I 1418 (Boilal\Xx\, Inscr. Sassiuates, 54) :
Horatius Balbus fait don d'une sépulture à ses concitoyens, mais exclut
ceux quei sibei [la]queo manu[.s] attuh'ssent et quel quaestum spiircum
professi es sent.
( 269 )
aux yeux de Sénèque, ce dernier genre de suicide est hono-
rable : c'est, dit-il, un moyen de reconquérir la liberté ^
Notre collège considère tous ces criminels comme des infâmes,
quel que soit le motif qui les pousse au désespoir '^. C'est peut-
être la seule prescription morale qu'on rencontre chez les col-
lèges romains.
Pour les autres, le règlement de Lanuvium distinguait
deux cas : le défunt avait fait un testament ou il était mort
ab intestat.
Une loi ordonnait que si le défunt n'avait désigné personne
pour veiller à son enterrement, ce soin retombait sur l'héri-
tier institué, ou, en cas de mort ab intestat, sur ses parents,
selon l'ordre de leurs droits à la succession 3. En conformité
de cette disposition légale, le collège de Lanuvium avait
décidé que s'il y avait un testament, l'héritier institué rece-
vrait la prime funéraire, fixée à trois cents sesterces ^, à charge
de subvenir à toutes les dépenses de la cérémonie funèbre. Le
surplus lui revenait 3, de même que c'était lui qui perdait la
* DiG., m, 2, 11, 3. Sen., De ini, III, 15 : illac ad libertatem
descenditur.
2 XIV 2112, II, 1. 5-6 : Item placuit : Qiiisquis ex quacumque causa
mortem sibi adsciverit, ejiis ratio funeris non hahebitur. Mommsen,
De coll., p. 100, n. 11. Audibert, Les funérailles païennes, Paris, 1885,
pp. 14-15.
5 DiG., XI, 17, 12, 4(Ulpien) : Fumis autem eum facere uportet, queni
decedens elecjit, sed si ille non fecit, nullani esse hujiis rei poenam, nisi
aliquid pro hoc emolmnentum et relictum est; tune enim, si non paruerit
voluntati defuncti, ab hoc repellitur. Sin autem de hac re defunctus
non cavit, nec ulli delegatum id munus est, scriptos Iieredes ea res con-
tingit ; si nemo scriptus est, legitinios vel cognatos, quosque suo ordine
quo sîiccedunt. Ulpien écrivait au commencement du III^ siècle.
* Cela n'est pas dit expressément, mais ressort de plusieurs textes. II,
1. 1-3 : neqne — ulla petitio esto, nisi si quis testamento hères nomina[tu]s
erit. Si quis intestatus decesserit, w arbitrio qninq(uennalis) et populi
funerabitur.
s Monuments funéraires élevés avec le surplus : V U95. VI 10322.
XII 286. 732. 736.
( 270 )
somme si le défunt l'avait léguée au collège i ; car dans ce cas
la loi mettait tous les frais à sa charge.
Les esclaves étaient nombreux dans les collèges funéraires ; or,
la loi ne reconnaissait aucune valeur à leurs testaments. Notre
collège, plus généreux, plus humain, déclare qu'il tiendra
compte du testament des esclaves et que le maître ne pourra
réclamer la prime que s'il est institué héritier. Si l'esclave a
institué un autre, elle sera remise à celui-ci 2. Wallon a bien
montré que ce n'est qu'une dérogation apparente à la loi. « Il
s'agit non pas des biens du défunt, mais exclusivement de cette
somme que la loi même de l'association attribuait aux frais de
ses funérailles, l^e maître, en permettant que son esclave entrât
dans une association, en l'autorisant ainsi à consacrer une
partie de son pécule aux cotisations ordinaires, avait dû accep-
ter la loi qui en réglait l'usage. Or, cette loi consacrait aux funé-
railles de chaque membre mourant, une somme prise sur la
masse commune, avec cette réserve que chacun pût y com-
mettre une personne de son choix. L'esclave, par un acte de
dernière volonté, que le collège nommait testament^ comme on
donnait quelquefois le nom d'épouse à sa compagne, avait donc
la faculté d'en disposer, sans que le maître eût aucun droit d'en
disposer contre sa décision : c'était la conséquence légale de
l'autorisation qu'il avait donnée. Que si l'esclave ne désignait
ni lui ni un autre pour ce devoir, le soin en revenait à la com-
pagnie, qui s'y trouvait naturellement appelée 3. »
* Nous avons deux exemples de ce cas dans d'autres collèges : III
633 et VI 9626.
2 XIV 2112, II, 1. 1-2 : [A n(ostro) co\llegio doliis malus abesto. Ncquc
patrojio neque patronae, neque d\omin6\ neque dominae neqve creditori ex
hoc collegio ulla petitioesto, nisisi quis testamento hères nomiimltuls erit.
Voyez : Mommsen, De coll., p. 102. Schiess, n. 326. Plin., Epist., VIII,
46 : Permitlo servis quoque quasi testamenta facere caque ut légitima
custodio. Mandant rogantque quod visum ; pareo ocius. Suis dividunt^
douant, relinquunt duntaxat intra domum ; nam servis respublica quae-
dam et quasi civitas domus est.
3 Wallon, III, pp. 451-452. — L'esclave qui vient à être affranchi
doit donner au collège une amphore de bon vin, II, I. 7.
( 271 )
En effet, si un confrère mourait sans testament, le collège,
déchargeant les héritiers naturels de leur obligation légale,
prenait soin de Tenterrement et conservait naturellement la
prime funéraire, pour couvrir les frais : Si quis intestatus
dccesserit, is arbitrio quinq(ueunalis) et pojmli funerabitur i.
C'était donc le président qui y veillait, d'accord avec l'assem-
blée générale des membres qu'il convoquait le cas échéant.
Il y avait un cas où le président devait être remplacé par des
délégués ou commissaires : un confrère pouvait mourir 5
l'étranger. Le collège de Lanuvium avait pris des précautions
minutieuses. Quand le décès avait lieu à vingt milles au moins
de la ville, et que le collège avait été informé à temps, il
envoyait trois membres pour le remplacer et pour prendre
soin de l'enterrement. Ces délégués devaient rendre un compte
exact et sincère de leur mission. Ils recevaient la prime et en
outre vingt sesterces chacun comme indemnité de voyage.
S'ils étaient infidèles, ils rendaient le quadruple -. Quand un
confrère venait à mourir plus loin encore, si bien que le décès
ne pouvait être annoncé à temps, le collège promettait la
prime à celui qui se serait occupé des funérailles, à trois con-
ditions : il devait prouver qu'il n'avait pu annoncer le décès;
il devait démontrer, par la signature de sept citoyens romains,
qu'il avait réellement rendu les derniers devoirs au défunt;
enfin, il devait garantir le collège contre une action funé-
raire : sa[tisdato ampli]us neminem petiturum 3. Nous venons de
voir, en effet, que le collège était exposé à une action de la
part de l'héritier institué, s'il y en avait un. Peut-être même
ses parents et héritiers naturels, s'il était mort sans testament,
' XIV 211'2, II, 1. ^. ScHiEss, n. 3:28. C'est sans doute par défiance que
ce collecte avait exclu les héritiers non institués : il voulait être sur que
la prime serait bien employée. Il n'en était pas de même dans tous.
^ XIV 2112, 1, 1. 26-29.
•> Ibid., 1. 30-32. Th. AIommsen, De coll., pp. 10-4-106. Schiess (p. 102,
n. 336) n'admet pas que la première de ces conditions soit dans le texte:
il faudrait, dit-il : testa[tor] {cur nun iiuntiaverit). Les mots probala
causa ne seraient qu'une re[)rise de ce qui précède.
( 272 )
pouvaient-ils venir prétendre qu'à défaut du collège, ils avaient
pris soin des funérailles et réclamer, suivant la loi, le rem-
boursement des dépenses i.
Pour les esclaves, il y avait encore une disposition spéciale.
Un maître barbare refusait parfois leur corps et le jetait à la
voirie. Si l'esclave était mort sans testament, le collège lui
faisait des funérailles en effigie [funus imaginarium) ; on élevait
un tombeau et l'on y célébrait les cérémonies ordinaires :
cela suffisait, croyait-on, pour procurer aux mânes le repos et
le bonheur '^.
Les autres collèges funéraires ne nous ont guère laissé que
des épitaphes, mais nous y reconnaissons à peu près l'applica-
tion de ces mêmes prescriptions. Il devait y avoir des diffé-
rences de détail, mais il semble qu'en général les collèges
funéraires avaient des règlements analogues. Le droit aux
funérailles existait naturellement partout3, et il est question de
la prime versée à chaque décès ^. Quant à celui qui s'occupait
des funérailles et qui recevait la prime, les épitaphes peuvent
^ DiG., XI, 7, 12, 2 : Praetor ait : « Quod funeris causa sumptus factus
erity ejus reciperandi nomine in eum, ad qiiem ea res pertinet, judicium
dabo. » AuDiBERT, Op. cit.^ p. 7o.
2 XIV 2112, II, 1. 3-5. AuDiBERT, Op. c, pp. 16-17. S'il avait fait un
testament, la prime était remise à l'héritier institué, qui devait sans
doute célébrer le funus imaginarium, bien que cela ne soit pas dit.
5 III, p. 924 : aut ab eis aliquem petitionem. funeris (hjabiturum
dans le coUegium Jovis Cerneni. Liebenam, p. 256.
* II 10234, 1. 7, dans le collège d'Esculape et d'Hygie : partem dimi-
diam funeratici. III, p. 924, dans le collegium Jovis Cerneni : neque
funeraticis sufficerent ; plus loin le mot funeraticium désigne la cotisa-
tion mensuelle. Y 1495 : funérarium. III 633, dans un collegium Silvani :
Ille sacerdos {collegii) vivus {denarios singulos) mortis causa sut remisit.
Schiess (p. 100, n. 330) nous semble avoir le mieux expliqué cette
phrase : dans ce collège, la caisse ne payait pas tous les frais funéraires;
à chaque décès, les confrères se cotisaient et chacun versait un denier.
Le prêtre les en dispense, de sorte que les frais seront entièrement à
la charge de ses héritiers. VI 10322 : quoi ex funere ejus superfuit. De
même : XI 286^*^^ : ex pecunia quae funere su[pe7^]f{uit}, c'est-à-dire :
de ce qui restait de la prime après les funérailles.
( 273 )
fournir quelques indices L Généralement, elles disent que c'est
le collège qui a rendu les derniers devoirs : J}{is) M{anibus).
Madriae Audue sociales Géniales posuerunt '^; ou bien que le
collège a chargé un de ses fonctionnaires de ce soin 3.
Ailleurs encore nous voyons agir des commissaires spéciale-
ment désignés à cet effet ^. Toutes ces formules indiquent
que le collège a dirigé les funérailles lui-même : c'est le
cas du décès ab intestat prévu par les statuts de Lanuvium.
Souvent, ce sont des proches ou des amis qui intervien-
nent au nom du collège ou qui agissent de concert avec le
collège : D. M. C[aio). Aullio Amaranto f[ilio), Amarantus pater,
nomine cultowum) Geni Britti Cordi s ; parfois même la parti-
cipation du collège n'est pas indiquée : D. M. Zmaragdi — ex
collegiio), curante Aicostrato amico h{ene) m{erenti) 6. Il se peut
que dans quelques-unes de ces inscriptions, il s'agisse de l'héri-
tier institué, car on instituait naturellement des parents ou des
amis; mais nous pensons qu'en l'absence d'héritier institué,
beaucoup de collèges, au lieu de se charger des funérailles,
en laissaient le soin aux proches, aux héritiers naturels, que
la loi désignait pour ce devoir et qui recevaient la prime.
Il semble que certains collèges ne tiraient pas de la caisse
toute la somme nécessaire, mais qu'à chaque décès ils la com-
plétaient par des cotisations. Dans le collège de Silvain, à Phi-
lippes, cette contribution était tixée à un denier'*; il serait
* Nous les avons classées dans nos Indice^s (but funéraire).
2 X 8109, à Volceii.
^ VI 10322 : C. Julio — iutestato quoi ex f'unere ejus superfuit, per Spi-
ronte(m) et Dextrum, quaestores quartum. Remarquez intestato.
^ VI 9004 : curavit Eridanus. Les formules curantibus, adininistran-
tibus illis, curam agit ille, etc., sont assez fréquentes.
= IX 6320^'^^ à Sulmone. Cfr. Arch. ep. Mitth., VII, 1883, p. 92, n. 19 =
C. I. L. III 10514, à Aquincum : nomine colleg{ii) Cereris. IX 3526 :
colliegium) Silvani cur{avit), ibsio pat er Surcessa mater p(osuere).
6 VI 9310.
■^ Voyez supra, p. 272, n. -4. L'or2;anisation des collegia domestica, à
qui le patron ou maitre donne un colombaire, semble différente. Ces
Tome L. 18
( 574 )
difficile d'admettre qu'elle servait li couvrir tous les frais,
puisque la loi exigeait que des cotisations mensuelles fussent
versées pour les funérailles.
Trois inscriptions espagnoles et une inscription africaine
présentent un cas particulier i. II s'agit de confrères morts et
enterras à l'étranger, l'un pendant un voyage à Home. Le col-
lège, avec les parents, élève un tombeau dans la ville natale;
il s'agit évidemment d'un cénotaphe : le collège qui n'avait pas
dû supporter les frais de l'enterrement à l'étranger tient, par
piété, à honorer le confrère de son côté et lui fait peut-être,
le cas échéant, des funérailles en effigie.
Ce qui vient d'être dit des collèges funéraires, s'applique
aux collèges professionnels, sauf quelques difïérences. Chez un
très grand nombre, il est pourvu aux funérailles au moyen
d'une prime et l'on doit en conclure que les confrères ver-
saient une cotisation mensuelle à cet effet : qiiitquit ex coiyore
mensorum machinariorum funeratici nomine sequiîur, reliqn[u)m
pênes r[em) }){iiblicam) s{tipi'a) scrijHain remanere volo, dit un
mesureur de blé qui lègue son f'iineraticium à ses confrères,
et celui-ci était fort élevé, puisque, placé à intérêts, il rappor-
tait quarante-deux deniers et demi ''^. Les sonneurs de cor à
Lambèse payaient cinq cents deniers '^. Sur la tombe d'un
charpentier d'Arles, nous lisons : D. M. Pompei Lucidi, fabri
lignuari corporali Arelate, funeratido ejus -K A Vienna, les
collèges ne s'occupaient j)eut-être pas toujours des funérailles; on voit
une partie des confrères se cotiser à cet effet et nommer des commis-
saires. VI 6220 : amici contulcrunt ad funus, euratoribus (hominibus
decem). VI 6221 : sodales ei funus fpccrnnt hom(mes) CXXX [denanis)
ce XXV, euratoribus Maximo, Helicone, Dapno, dans le monument des
Statua. VI 9289 : ei aes a familia conlatum est. X 8099 : ex col(latione)
coUegium.
' Il 379, à Conimbriga : m itinerc urb(ano) defuneto et sepulto. II 3076,
à Toletum. II 4064, à Dertosa : peregre defuncti. VIII 14608, à Simitthus :
interceptus in itinere (vétérans).
2 VI 9626. Cela fait 425 deniers, à 10 %. Le denier valait 1,08 fr.
3 VIII 2557. Voyez infra, § 5, et page 275.
* XII 736, c'est-à-dire : au moyen de sa prime.
( 275 )
présidents des fabri, qui avaient négligé de rendre les derniers
devoirs à un confrère, élèvent un autel à sa ménrioire pour
réparer cet oubli i. A Bath, un fabricant d'armes est enterré aux
frais du collège : e colegio fabrice[nsimn) elatus-. Comme dans
les collèges funéraires, l'héritier recevait la prime et devait se
charger de toutes les dépenses. Un article du règlement des
cornidnes de Lambèse dit : Si qui ohitum nalurae red[d\dent),
acc[ipiet) heries) ips(iiis) sive jrroc[urator) denarios [quingentos) 3.
Nous trouvons beaucoup d'inscriptions qui déclarent que le
monument a été élevé par l'héritier, par un parent ou par un
ami : hères et conlegœ, hères et procurator ejus^. C'est alors l'hé-
ritier qui a reçu la prime et qui a rendu les derniers devoirs.
Plus souvent c'est le collège lui-même qui figure seul sur
répitaphe : D. M. Oaio) M essieux Zoili colleg{ium) deudro-
phiorum) Comensium ^. Sur la tombe d'un constructeur de
navires d'Arles, on lit quatorze vers, notamment ceux-ci :
{^Cyiecilius Aiger est hic ille s[epul]tu[s ad undas];
Quo ceruis titulum stab[at et ipse loco].
[j\]unc tibi navales pauci damus ul[tima doua];
Ho[c] et del'uuclo corpore muuus [erit] c.
' XII 1911 : quod fraudem ejusdem funeneris (sic) fecerunt.
- VII 49, à Aquae Sulis. Cfr. XII 73^2 = V 7869 : lapidari Aimant icenses
ex J'unere ejiis — posuer(unt). Ici funus désigne la prime. — Quand l'épi-
taphe dit qu'un collège a élevé le monument funéraire, nous admettons
qu'il s'est aussi occupé des funérailles. Il peut y avoir des exceptions.
Ann. ép., 1891, n. 118 : impensa collegi Mercuri vestiariorum, à Volubilis.
XII 5874 : possessor(es) Aqueyises publiée . XII 1189 : l'abr(i) corp(orati)
Apt(enses) colleg(ae) d(e) sfuo) f(ecerunt). V 4004 : lanari coatores d(e)
p(ecunia) s(ua).
^ VIII 2557. Voyez infra, au § 5.
* III 196. 265. 5976 (coll. militaires). VI 8809. X 3479. 3483. Parentes,
VI 9559. ScHiESS, pp. 98-99.
- V 5296.
6 XII 5811^''^^ : [Caé\ci[lio\ Sigro fa[br{o) nav(ali)]. La pierre était au
bord du Rhône, là où ces ouvriers avaient leurs chantiers.
( 276 )
Parfois on voit que le collège désigne des commissaires :
D. M. Sex[to) Cornelio Vitalioni , exoneratori calcariario, —
colleg{a)e sui pro sua pietate bene merenti fecerunt ; curam egit
Iconhis ^. Il est probable que la plupart des collèges qui nous
ont laissé des inscriptions de ce genre s'occupaient régulière-
ment des funérailles de tous les aftiliés. Pour montrer jusqu'à
quel point cet usage était répandu dans les corporations pro-
fessionnelles, nous allons dresser la liste des collèges qui ont
élevé un monument à un de leurs membres "^ :
Sodales aerari apulv\nar{i), à Rome, VI 9136. Cfr. 9137.
CoUegius aquariorum, à Venusia, IX 460.
Centonarii, à Brixia (V 4415. 4491), à Comum (V 5283), dans
une ville inconnue de la Narbonnaise (XII 2754), à Sassinum
(BoRMANN, Inscr. Sass. 26), à Interamna Praet. (IX 5077).
CuparU à Alba Helvorum, XII, 2669.
Dendrophori, à Comum (V 5296), à Ligures Baebiani (IX
1463), à Atina (X 8100), à Volceii ( X 8107. 8108).
Socii dissignatores, à Falerio, 1X5461.
Exoneratores calcariani, à Rome, VI 9384.
Fabri, à Sarmizegetusa (III 1505. Cfr. 1398. 1504. 1507), à
Narona (III 1829), à Verona (V 3387. 3411), à Apta (XII 1189),
à Faesulae (XI 1149), à Vulsiniae (XI 2724), à Aquincum (III
3554.3569, centonarii et fabri), à Milan (V 5761. 5854, cent, et
fabri).
Fabri argentarii, à Caesarea, Ephem., VII 518.
{Fabri) navales, à Arles, XII 5811^'^
Fabri tignuarii, à Arles (XII 736) et à Amsoldingen (laser,
Conf.Helv.^^i^).
Inundatores (?), à Rome, VI 9484.
1 VI 9384. Cfr. XII 3347 : illis administrantibus.
'^ Nous citons ici les collèges qui figurent seuls sur les épitaphes; nous
verrons plus loin ceux qui concourent aux funérailles avec les parents.
Il faut avertir aussi que les collèges décrétaient souvent des funérailles
honorifiques à leurs patrons et à leurs bienfaiteurs; il en sera parlé au
chapitre des finances. Maué, Yereine, pp. 41-42.
( 277 )
Lanari, à Brixia, V 4501. 4504. 4505.
Opifices lapidari, à Vaison, XII 1384.
Marmorarii, à Turin (V 7044), à Catina (X 7039) et à Home
(VI 9550).
Medici, à Misenum, X 3441.
Memores machinarii, à Rome, VI 9626.
Mercuriales, à Atina, X 340.
Muliones et asinnrii, à Potentia, X 143.
Plumarii, brodeurs, à Rome, VI 9813.
Possessores Aqueuses, XII 2459. 5874.
Scaenici, à Arles (XII 737) et à Nîmes (XII 3347).
Subaediaui, h Rome (VI 9558. 9559. Bull, corn., 1888, p. 468,
no 99) et à Antium (X 6699).
Unctores, à Rome, VI 6376.
Vestiarii, à Volubilis, Anu. ép., 1891, n. 118.
Veterani, à Simitthus (VIII 14608), à Garda (V 4001), à Lam-
bèse (VIII 3228).
Ce qui est à remarquer, c'est que quelques collèges profes-
sionnels enterrent aussi des femmes et des enfants ' ; il s'agit
sans doute de la famille des confrères, car les femmes n'étaient
pas admises comme membres dans ces collèges. Une ëpitaphe
de Sarmizegetusa semble dire formellement que le collège des
fabri, qui participe aux frais de l'enterrement d'un de ses
membres, ne s'occupe pas des funérailles de sa femme; il
laisse ce soin au fils du défunt '^.
La prime funéraire ne servait pas seulement à couvrir les
frais de la cérémonie funèbre, mais encore ceux de la tombe.
Après les purifications d'usage et l'exposition du corps, les
restes mortels étaient portés au lieu du bûcher [usirina). On
» Enfants : VI 9484 (deux ans). 9559 (quatre ans). IX 5847 (quatorze
ans). X 7039 (dix-sept ans\ Ann. cpigr., 1891, n. 118 (onze ans). Femmes :
V 7044. VI 9558. XII 732. 5874. Elles sont aussi admises dans les sépul-
tures communes : VI 1948. X 6136 : uxoribus conciibinisque. Voyez infra,
p. 286.
2 III 1504. Une distinction semblable : IX 1463.
( 278 )
sait qu'à Rome le convoi funèbre des riches était splendide.
Les collèges, eux aussi, avaient pris des mesures pour que leurs
cortèges {exequiae) fussent aussi nombreux et aussi pompeux
que possible ^. Celui de Lanuvium prescrit seulement qu'on se
rendra à pied jusqu'au bûcher, sans en faire un devoir à per-
sonne ^2; mais pour attirer les confrères, on distribuait aux
assistants, devant le bûcher, une somme de cinquante ses-
terces, déduite de la prime funéraire, de sorte qu'il restait deux
cent cinquante sesterces pour l'héritier. Cette somme ainsi
distribuée s'appelait exequarium 3. A Simitthus, il y avait une
curie municipale organisée en collège funéraire sous le nom
de curia Jovis ^. Elle avait eu recours à l'amende pour procu-
rer à ses membres des funérailles convenables. Quand un
confrère mourait, le trésorier devait en informer ceux que
les statuts obligeaient d'assister aux obsèques; sinon, il encou-
rait une amende. Or, c'étaient les parents qui étaient tenus d'y
assister, et le règlement menaçait également d'une amende
ceux qui négligeaient ce devoir. Celui qui s'absentait des funé-
* CoMMODiEN {Jnstruct., lib. II, 33, 8 et siiiv.) dit qu'on entrait dans les
collèges pour cette raison : Quid proderit pompa defuncto? hicusatus erù
qui oh ista collegia quaeris.
^ XIV 2112, I, 1. 25 : exequiae aulem pedibus fungentur. Mommsen
{De coll., p. 103) pense que cela signifie seulement que l'héritier n'est
pas tenu de fournir des voitures.
5 XIV 2112, I, 1. 25. Cfr. 1. 31 : deduclis commodis et exeqitario.
Mommsen a cru retrouver Vexequariuin dans le collège de Philippe
(III 633) : le prêtre dispenserait le collège de distribuer à chacun un
denier lors de son enterrement Mais alors les confrères y perdraient, la
caisse seule y gagnerait. Nous préférons l'explication de Schiess, donnée
supra, p. 272, n. 4.
* VIII 14683, avec le commentaire de J. Schmidt et son article du
Rhein Mus., 45, 1890, pp. 599-602. Ephem. ep., V 498. R. CaGxXat. Arch.
des Miss, scient., 11, 1883, p. 126. Bull, épigr., III, 1883, p. 175. Schmidt
a vu, le premier, quelle était la nature de cette curie : division électorale
de la population, comme ailleurs les tribus, elle comprenait naturelle-
ment les familles entières, et c'est ce qui explique les prescriptions
relatives à l'assistance aux funérailles des parents.
( ^279 )
railles de son père, de sa mère, de son beau-père ou de sa
belle- mère payait cinq deniers; celui qui ne se rendait pas
aux obsèques d'un autre proche parent était puni d'une
amende de quatre deniers; s'il s'agissait d'un parent éloigné,
on ne payait que deux deniers. Enfin ces règles ne s'appli-
quaient que si le décès avait lieu à une distance de six milles
au plus. Nous ne savons si les collèges professionnels avaient
pris des précautions semblables, mais cela n'est pas impossible.
Une fois le bûcher éteint, l'assistance disait un dernier adieu
au confrère défunt et se retirait; les proches recueillaient les
ossements, y mêlaient des parfums, et, plusieurs jours après,
les cendres séchées A l'air étaient placées dans une urne qu'on
déposait dans la tombe ou dans le monument. Neuf jours plus
tard, on venait leur faire un sacrifice {novemdinle sacrificium '•).
A Rome, les collèges pouvaient s'adresser aux spéculateurs ou
aux sociétés dont nous avons parlé pour obtenir une place
dans leur colombaire. En province, oii la terre ne coûtait pas
si cher, on pouvait acheter un emplacement pour chaque
tombeau -, et le funeraticium y suffisait peut-être. Parfois,
une place était donnée par un ami, par un confrère plus
riche ou par le collège lui-même, s'il avait des propriétés 3.
Quelques confrères parvenaient à se procurer des tombeaux de
famille ^.
Les funérailles finies, il restait à ériger un monument com-
mémoratif, ou du moins à inscrire le titulus sur l'urne. Le
monument était fort simple : une colonne, un cippe, un autel
* VI 6220 : corimmptum est in fnnere et in ossibus [et in] novemdi[alibus]
{(lenarii) CCCCLKXXX, dans le monument des Statilii. Rev. arch.,
1889, n. 156, p. 174, note 2 ; viclimis ordinariis rite expiatis.
2 WiLMANNS, vol. I, p. 118.
5 V 4483 : amicus locurn sepultur(a)e dédit, dans le colleg. fabr. et
cent., à Brixia. V5872 : [lo]cfo)datoab [p]ossessoribu[s Ln]ciBardorna[g].,
dans \e coll. junientarioriun, à Milan, X 5647. XI 4749 : eollegius jumen-
tariorvm huic cippo locuni dédit (pour un étrans^er). Voyez p. 288. n. 5.
^ II 3114.
( 280 )
avec une inscription^. Une épitaphe nous dit que la valeur
du cippe qui la porte est de quinze sesterces*^. Il est probable
que le funeraticium servait parfois aussi à l'acquisition de cette
humble pierre 3, mais ce n'était pas toujours le cas : on voit
un collège se cotiser pour ériger le monument -K
Nous passons aux corporations qui se contentaient de con-
tribuer aux funérailles. Leur caisse n'était pas assez riche pour
subvenir à tous les frais; elles ne pouvaient que s'associera la
famille du mort, et elles ne remettaient à l'héritier ou aux
parents qu'un secours pour les aider à lui rendre les der-
niers devoirs et à lui ériger un humble monument. Dans ce
cas, tout le soin retombait sur l'héritier ou sur les parents.
Voilà sans nul doute comment il faut entendre les inscrip-
tions ainsi conçues : T{ito) Octavio Saturnino sod{nles) Claudiani
cont{ulerunt) ad funus {sesterlios ducentos) ^. Nous rencontrons
fréquemment cet usage dans les collèges professionnels, dont
le but principal n'était pas le soin des funérailles. A Sarmize-
getusa, un fils érige un monument à ses parents, et l'épitaphe
dit : ad funus autem Zosimi et titulo contuler[unl) colleg[ium)
fabr{um denarios quadringeiitos) 6. Malheureusement, les in-
scriptions ne s'expriment pas toujours avec la même clarté.
' Titulus, III 196. 1504. 1.553. XII 734. X 445. Columna, IX 459. XIV
2653. Cippus, XI 1550. 1555. 1906. 2720-'i722, etc. Ara, II 1293. IX
4794, etc. Tertull., Apolog., 13 : aras mortids vestris confertis. Lapidem,
IX 3383. Tumulum, Bull, ép., 1885, p. 30. Mesuleum, VIII 14613.
2 X 445 : feci{t ffS] XV. Le sesterce valait sous l'Empire 27 centimes.
5 V 1495 : [ex sii]perfluo fimerari faciond(um) cnravere, à Aquilée.
VI 10322 : Illi intestato, quoi ex funere ejus super fuit. XI 286"^'^ : expecu-
ni(a) qu(a)e funere su[per]f(uit).
* IX 3383 : Collegius Herc(idis) ex collato — lapidem p(osuit), à Peltui-
num. XII 22 : ad quod opus collig7i{him) juvenu{m) — inpendium dédit, à
Vintium.
s II 3114. Cfr. 5879. Pour les autres collèges funéraires de ce genre,
voyez nos Indices.
6 III 1504.
( 281 )
Voici une liste de collèges qui paraissent seulement participer
aux frais :
Centonaires, à Verona (V 3411), à Aquincum (III 3588).
Dendrophores, en Lucanie, X 445 ^.
Fabri, à Sarmizegetusa (III 1504)'^, à Auximum (IX 5857), à
Tibiscum 3.
Fabri etcentonarii, h Brixia (V 4483) et à Milan (V 5888) 4.
Fabji, centonarii, dendropfwri, à Fanum Fortunae, XI 6231.
Lapidari, à Arles (XII 732 = V 7869^''*^).
Mercuriales, à Turin, V 7016.
Possessores Aqueuses, à Vienna, XII 2459 s.
Subaedicmi, à Rome, VI 9558 ^>.
Vient enfin la troisième catégorie de collèges. A côté de ceux
qui se contentaient de débourser une somme déterminée à
chaque décès, il y en avait un grand nombre qui possédaient
une sépulture où tous les confrères défunts reposaient côte à
côte. C'était ou bien un colombaire, ou bien un champ, par-
fois un domaine funéraire.
Hors de Rome, il semble que peu de collèges possèdent un
colombaire proprement dit"?. En Italie et dans les provinces,
le terrain était bon marché, et les collèges pouvaient se pro-
* III 3583 : des parents enterrent leurs deux tils; pour le second,
l'inscription ajoute : is ad qnem sepultura m) coU{egmm) cent, {denarios
trecentos) dédit. Ailleurs les coll. fabr. et cento. d'Aquincum figurent seuls
sur l'épitaphe, III 3555. 3569. X 445. Une femme à son mari : : in [q]uo
opère dedi[t] coUeyius dendrophororum [HS ...]
2 Ailleurs il figure seul, III 1505. Cfr. 1398. 1507.
5 III 1553 : A FaJDricius Jucundus : Fab. J[ii\c[uud\us her{es) et F[ab]rici
S[i]lv[an{us)] et Licinia[n{us)] f'ratres [cum'\ collegio fa[b]roruni tititUum)
pos{uerunt) fratri pien(tis.mno).
* Aux nos V 5761. 5854, ces deux collèges sont seuls nommés.
6 Cfr. XII 5874.
6 Cfr. VI 9559. Btdl. corn., 1888, p. 468, n. 99. — Les formules
employées n'indiquent pas toujours clairement si les funérailles ont été
faites à frais communs.
' WiLMANNS, I, p. 118. SCHIESS, p. 89.
( 282 )
curer des domaines plus étendus. Du reste, à Rome même, les
colombaires n'appartenaient guère qu'à des collèges d'affran-
chis et d'esclaves des grandes maisons ; ou, pour mieux dire,
ils n'étaient pas même réservés à ces collèges domestiques,
mais à tous les esclaves et affranchis du même maître ou
patron. C'est ainsi que le collegium magnum tribunontm divae
Augustae semble avoir une place spéciale dans le Monumentum
Liviae \ destiné à tous les esclaves et affranchis de l'impéra-
trice ; dans le monument des Volusii, on rencontre un collegium
castreuse ^^, et peut-être un collegium Larum Volusianorum 3.
II arrivait souvent qu'un collège professionnel se procurait
une place dans un colombaire trop grand pour ceux qui
l'avaient construit. Ainsi on a trouvé des inscriptions du cou-
legium tibicinum dans un colombaire du temps de Sylla^; le
conlegium centonariorum avait peut-être une place dans le
monument des Octavii sur la via Salaria »; le collegium sympho-
niacorum et peut-être \essaccani et les coronari en avaient une
dans le colombaire de la familia Marcellae^ du temps d'Au-
guste 6. Dans le monument des Statilii, on trouve des fabri
tignaiii, mais nous ne saurions pas dire s'il s'agit d'ouvriers
« VI 4012. 4305.
2 VI 7281. 7281\ 7297. 7303. 7304. 7373. 7379. 7387. 9423. 9424.
3 VI 10266. 10267. — De même les esclaves de T. SlaLilius Taiinis,
consul en 44, formaient deux collèges au moins (Mon. Statiliorum^ VI
6220. 6221).
* VI 3877. 3877^ Lanciani, Bull, corn., 1875, pp. 44-45. Voyez siiprn,
p. 88, n. 8.
5 VI 7861-7864. Cfr. 9254. Il est à remarquer que les dignitaires de ce
collège, enterrés dans ce monument, portent le nom de L. Octavius L{ucii)
l{ihertus), de sorte qu'ils pourraient bien n'avoir obtenu une place dans
ce monument qu'en leur qualité d'affranchis de L. Octavius. En 1888, on
a trouvé, dans un monument de la via Labicana, des inscriptions de
plusieurs centonaires appelés M. Octavius M. /., dont l'un est mag{ister)
conleg. centon.; c'était le monument des esclaves et affranchis d'un
M. Octavius (G. Gatti, Bitll. corn., 1888, p. 398, n. 2 et 3^
6 VI 2193. 4414-4417.
( 283 )
libres ou d'esclaves de cette maison ^. Citons encore la dixième
décurie du collège des fabrilujnarii, qui hérite de trente-deux
places [ollaé) dans la sépulture d'un particulier -. D'autres col-
lèges ont leur monument propre; ce sont :
Apparitores et praecones nedilium vêler es [et] vicarii eorum, à
Rome 3.
Coleghim fab\rum), de Carnuntum ^.
Fruduarii, marchands de fruits, probablement de Rome ^.
Palangarii, portefaix transportant les tonneaux de vin; ils
avaient un monimentum sur la voie Aurélienne, VI 7803.
Synhodus magna psaltum, chanteurs ou musiciens; ils
avaient un monument à droite de la voie Labicane, sous la
république 6.
CoUegium scabillanorum, artistes de la scène jouant du
scabillum; leur colombaire était non loin de la Porta Mag-
giore"^.
Corpus subaedianorinn, menuisiers faisant la boiserie inté-
rieure des maisons; leur monument était au premier milliaire
de la via Flaminia 8,
Conlegium vialorinn, à Rome, VI 1942 = 7446.
' VI 6363. 6365.
2 VI 9-405 : ille pLuictem dextrum ollas XXXI f donavit eis qui Inj'ra
scripti surit singulis sincpdas. Suivent les noms du déeurion et des
vingt et un membres de la dixième décurie.
3 VI 1946 : hocmonumentum', 1947 : ciibic{ulum\ hypetr{um). Cfr. 194(S.
* Arch. ep. Mittli., 1887, p. 11, n. 12 : titulus monnmenti.
s VI 10275, et note. La pierre est à Sabioneta, mais vient peut-être de
Rome, parce que hors de Rome, les colombaires sont rares. Elle porte :
Dis M. Ab oslio intrvitus partem dcxteriorem porticuni subsolariuin
aedidam et ollaria fructuariorum. Le mot subsolarium désigne une
place située sous une terrasse (solarium). Voyez supra, p. 260, n. 1.
6 Voyez supra, p. 88. G. (;âtti, Bull, corn., 1888, pj). 408-411.
" G. Gatti, Bull, com., 1888, pp. 110-114. Voyez notre bidcx collegio-
rum Urbis Bomae.
8 0. Marucchi, Bull, coin., 1888, j)i). 468-469, et 1877, pp. 235-264.
C. /. L. VI 9558. 9559.
( 284 )
'H a"j{i.3{wo-',(; Twv ^U7rTï',vâX(i)v, à Smyriie i.
La plupart des collèges, hors de Rome surtout, se conten-
taient d'une area plus ou moins grande, assez semblable à nos
cimetières actuels. Voici d'abord la liste des collèges profes-
sionnels qui avaient un champ de sépulture commun :
Conlegium anidariorum, fabricants de bagues à Rome; il a un
locus sepulchri de vingt-cinq pieds carrés, I 1107 = VI 9144.
Feronenses aquatores, foulons d'Aquilée ; ils ont un l{ocus)
m{onumenti) ou m[emonaé), de quarante pieds sur septante;
voyez supra, p. 197.
Collegium centonariorum , à Interamna Praetuttianorum;
quatre-vingts pieds sur quarante, IX 5084.
Collegium centonarïorum, à Altinum, V 2076 : hortos cum
aedificio Inde sepiilturaejundos.
Dendrophori Polenses; ils ont un locus cum sepultura de
quarante-deux pieds carrés, V 81.
Dendrophori, à Volceii, X 8107. 8108 et la note.
Cultores fabrorum, à Venafrum {locus, X 4855).
Collegium fab?'um, à Vaison ; il avait une area de cinq pieds
carrés, XH 1386.
Splendidissimum corpus fahrorum tign{ariorum) [i]temque
ai'tificum lectorum, à Lyon ; ces deux collèges ont ensemble un
locus sepulturae, Allmer, M. de L., II 185.
Sodalicium fabrum tig., à Forum Sempronii; il reçoit un
loc[us) sepiulturae ) ayant vingt pieds de profondeur, XI 6135.
Conlegium jumentariorum portae Gallicae, conducteurs de
bêtes de somme , de la même ville ; il reçoit un loc{us) sepiul-
turae], XI 6136.
Collegiusjinnentariorum, au vicus Martis Tudertium, XI 4749;
il accorde une place pour un cippe funéraire dans sa sépul-
ture.
Juvenes a fano Jovis, à Aginnum, Orelli, 4097.
* C. I. Gr., 3304 : xaixàpav. A. Wagener, Rev. de l'Instr. publ. en
Belg., 4868, p. 11, corrige en au[j.7riXôaoe"t<;, ouvriers en feutre.
( 285 )
Lanariorum carminatorum sodalichim, ouvriers qui apprêtent
la laine pour le tissage, à Brixellum ; ils reçoivent des loca
ayant cent pieds sur cinquante-cinq, XI 1031.
Sociaemimae, à Rome (quarante pieds carrés, VI 10109).
Mulioiies, muletiers, à Modènc (quinze pieds sur douze,
XI 962).
Conledu{in)reslionu{m), cordiers, à Rome (vingt pieds carrés,
VI 9806).
Scaenici Asiaticiani et qui in eodem corpore siint, artistes dra-
matiques d'un certain Asiaticus, à Vienna, XII 1929.
Coulegium secto[rum] serrarium, scieurs de pierres, à Rome,
XI 9888.
Gentiles veterani, à Aquilée; ils ont un locus sepulturae de
vingt-cinq pieds en largeur, V 884.
Il nous reste un bien plus grand nombre d'inscriptions qui
proviennent de monuments ou de champs de sépulture ayant
appartenu à des collèges funéraires proprement dits 1 ; ils res-
semblaient naturellement à ceux des collèges industriels, et
dans l'essai que nous allons taire pour donner une idée de ces
sépultures, nous pouvons mettre à profit les inscriptions qui
en parlent 2.
Les sépultures les plus simples n'étaient qu'un terrain (area) 3,
un champ entouré d'un mur ^ et situé le long d'une des
grandes voies publiques, hors de la ville; parfois les bornes
n'étaient marquées que par des cippes s. Sur une tablette de
marbre placée à l'entrée ou sur les cippes plantés aux limites
' On en trouvera la liste dans nos Indices (but funéraire).
2 WiufANNS, I, pp. 117-119. Marquaudt, Priv., pp. 353 et suiv. Trad.,
I, pp. 42"2 et suiv. Saglio, Dict. des Antiq., s. v. columbarium. Paul
Allard, vol. II, Appendice : Domaines funéraires païens et chrétiens.
C. I. L. VI, vol. 2. Nous renvoyons à nos Indices (but funéraire), et
nous ne donnerons ici que ce qu'il y a de plus caractéristique.
5 Area, XII 1386, sur un cippe.
* VI 22437 : hic locus macercolàciusus.
^ Cippi terminales, voyez nos Indices (but funéraire).
( 287 )
qui avaient un lieu de sépulture enterraient tous les morts, et
que ceux qui avaient un monument ou colombaire seuls les
brûlaient^. Cette distinction n'est pas exacte; en effet, voici
comment le P. Delattre nous décrit les deux nécropoles décou-
vertes assez récemment ù Carthage et qui ont servi aux esclaves
impériaux résidant dans cette ville : « Toutes les sépultures se
composaient d'un cippe rectangulaire, construit en maçonnerie
et renfermant une ou plusieurs urnes. La principale était tou-
jours au centre, recouverte d'une patère percée d'un trou
auquel aboutissait un tuyau de terre cuite communiquant à la
partie supérieure du cippe. Les autres étaient placées dans les
angles inférieurs du pilier sépulcral , avec un tube assez large
de terre cuite, communiquant à la face verticale correspon-
dante -. » Le même savant suppose que ces tuyaux servaient à
faire glisser les cendres jusqu'au vase funéraire; en etîét, les
urnes étaient noyées dans la maçonnerie, et on les y fixait lors
de l'érection du cippe. Ces communications, comme il le sup-
pose encore, pouvaient servir aussi k recevoir les libations en
l'honneur des dieux Mânes. Dans ces deux nécropoles, dont la
seconde remplaça la première quand celle-ci fut pleine, les
sépultures étaient groupées par famille et par corps de métier.
Une tombe est élevée, par exemple, par le collège des messa-
gers impériaux à deux de ses affilies : D. M. s{acrum). Saturii[s]
Augiiistorum) ser{vus) et Tittcus Aucjg. ser. cursores hic s{Ui)
s(iint)y collegium ciirsonim et i\nmidaru{m) fecit 3. I^es domaines
^ ScHiESS, p. 87. Il est vrai que ces derniers brûlaient toujours les
morts ; les sarcophages trouvés dans les colombaires y ont été placés à
une époque postérieure; ceux du monument de Livie étaient couverts de
tuiles de l'an 134.
2 P. Uelattre, De Vutilitc d'une mission arch. à Carthage, pp. 62
et suiv. Alger, 1881 . Les missions catholiques, 1882, n. 679-685, Lyon.
Revue arch. XII, 3^ série, 1888, p. 151. Mommsrn, Ephem. ep., V,
pp. 105-120 C. /. L., VIII, pp. 1301-1303. 1337. Les inscriptions sont
données au Corpus, VIII 12590-13214.
3 Ephem., V 428 = C. ï. L VIII 12905, d'une nécropole (jui servit
jusqu'à la tin du règne d'Antonin le Pieux, Ephem., V, pp. 108-109.
( 288 )
de beaucoup de collèges devaient ressembler en petit à ces
deux grandes nécropoles : on y trouvait des tombes nom-
breuses et isolées ^ Le cippe qui surmontait chacune portait
une épigraphe indiquant le nom du défunt dont les cendres y
reposaient : D. M. L{ucio) Bruttio Uirpiniano colle{gium) dendro-
pliororum '^. Il arrivait sans doute aussi qu'une famille assez
aisée se construisait un monument commun à l'endroit qui
lui avait été assigné 3. Quand un collège avait de la place
disponible, il concédait ou vendait des sépultures à des étran-
gers 4. A Carthage, les chrétiens avaient également de ces aires
où leurs sépultures étaient construites à ciel ouvert, tandis
qu'à Rome on les creusait sous le sol s. Ces sortes de cime-
tières, païens ou chrétiens, pouvaient contenir des édifices
pour les réunions <5 et, s'ils étaient grands, des jardins cultivés,
comme ceux qui entouraient les vastes monuments dont nous
allons parler : ils étaient alors situés dans de véritables
domaines funéraires.
Les collèges de Rome, comme nous l'avons vu, possédaient
plus souvent un monument commun assez grand pour rece-
* VI 10237 : ne déserta vacent ignotis dévia busta. Voyez infm, p. 293.
Orelli, 4405 : loci vero sive agri ... quiun habeat pliirima et dispersa
locis sepulchra. Le pluriel loca (XI 1031, supra, p. 286) désigne peut-être
aussi les tombes séparées. De même : VI 10237 : haee loca liheat bene
cuncta tueri. Cfr. DiG., I, 8, 6 {supra, p. 286, n. 2j.
2 X 8107, à Volceii. Cfr. X 8108-8112.
3 VI 10257
* X 1746. 1747, à Puteoli : locum émit ab ordine Baulanorum. XI 4749 :
Collegùis jiLiueîitariorum huic cippo locum dédit. Cfr. X 4855 : locus datus.
La formule l ociis) d{atus) decreto) c{ollegii) revient assez souvent, mais
rien n'indique qu'il s'agit de domaines funéraires. Voyez infra, décréta
collegiorum, chap. II, § 4.
5 Tertull., Ad Scapulam, 3 : Sub Hilariano praeside, cum de areis
sepullurarum nostrarum adclamasset : Areae non sint ... Voyez Paul
Aklârd, II, pp. 86-88.
« VIII 9585. Voyez supra, p. 213, n. 1.
( 289 )
voir les cendres de tous les confrères et de leurs familles *. Ces
monuments ressemblaient à ceux des riches maisons, ayant
une vaste chambre funéraire en bas et une salle de réunion en
haut, ou bien c'étaient de véritables colombaires, comme ceux
que nous avons décrits, c'est-à-dire des salles spacieuses, à
moitié souterraines, ayant sur chaque côté des rangées de
niches s'étageant les unes au-dessus des autres. A la première
catégorie appartiennent les sépultures des hérauts édiliciens et
des Sijncratii -; dans la seconde, il faut ranger celles des fruc-
tnarii et des pal angarii'^. Bâti à frais communs, comme ceux
des sociétés funéraires, ou reçu d'un bienfaiteur, le monu-
ment était partagé entre les confrères qui tiraient les places au
sort -^j ou bien les niches étaient assignées par les autorités du
collège à chaque décès. Parfois les noms des confrères étaient
gravés sur une table de marbre encastrée dans l'intérieur 5.
Sur la façade du monument, on lisait une inscription de ce
genre : Hoc monimentum appariîonim praeconum aediliiun vete-
rum (et) vicarium est posterisque eorum ^. C'était la demeure des
* On les appelle : monumentum, sepulchrum, maesoleum, memoria,
doiTuis aeterna, failli liaricum, etc. Voyez nos Indices.
2 VI 19 iT : cubiciulinn), Iujp{a)et[liyr{U}ii) cum ornam{e7itiS' suis. Cfr.
VI oo32 : lujpa[eflinnu] suiperpositum]. C'est une chambre à ciel ouvert
au-dessus de la chambre funéraire. XIV 33*23 : liane memoiiam cum
solario et cuviculo a solo fecit — Syncratiorum. Voyez supra, p. îîliî.
VI 9477 : ciibiculum superius. VI 10276 : cubieulum memoriae. VI 10284 :
cubicidum superpositum (collèges funéraires).
5 VI 10273. Voyez supra, p.'' 283, n. o. VI I02o9 : D. M. Sepulcrum
cum solo et ollariis Anni Phylletis et collegii Phylletianorum (collège
familial). VI 7803 : Ille émit in monimento palangariorum — eolumbaria
niumero) X, ollarvm niumero) XXXX. On voit que les collèges vendaient
des ollae h des étrangers; ils en donnaient aussi : VI 4709. 6874.
* V 4418 : ollae distributae et insciiptae. VI 10046 : ollae divisas (coU.
fun.j.
° Ou ils étaient gravés sur la façade : V 8307.
6 VI 1946. Cfr. 1947. 1948. Arcli. ep. Mitth., 1887, p. 11. n. 12 = III
112oo, à Carnuntum : titulu\s mo]numenl[i po]situs ex co[l{lata) p{ecu-
nia)] cohDegi fa[br{um)l V 8307. 8308.
Tome L. i9
{ 290 )
morts, le temple des Mânes à qui il était consacré et à qui l'on
y sacriiiait. Il contenait donc tout ce qui était nécessaire au
cullc funèbre : l'autel et des lampes qu'on allumait aux jours
de fête et même tous les jours i. Une aire plus ou moins spa-
cieuse l'enlourait- et renfermait la place découverte où Ton
bridait les corps {ustrina) 3. Le banquet qui suivait le sacrifice
funèbre ''* se tenait dans la salle d'en haut, ou bien il y avait, à
cet eflet, une salle de réunion [schola], contiguë au monument,
ou un édifice à part^: un pavillon (î, une chapelle'', une
dépendance quelconque. Cette salle à manger devait avoir les
installations nécessaires : tables avec lits, buffets, puits ou
citerne, balance avec poids pour mesurer les rations, etc. 8.
Elle était ornée suivant les ressources du collège; les digni-
taires nouvellement élus et les patrons trouvaient là une occa-
sion d'exercer leur générosité. C'est là ou dans le sépulcre
même qu'on plaçait les images ou les statues de ceux qui
avaient bien mérité des confrères 9. Dans l'aire sépulcrale, on
* II 21052 : lucerna quolidiana.
2 VI 7803 : ila lit area, qiiae ei cedit monumento commYunï\ter u[l\i
liceat, et sacrificium facere (scil. iii monumento). VI 11998 et XII 138G :
area. VI 10284 : Pclagiornm. Hoc monumentum cum cohacrenii arcola et
diiabus in gamma porticibus, superposito cubiciUo, aolario, triclinio, etc,
(collège familial).
5 VI 4415 : area ustrinae symphoniacorum. Cfr. VI 4414. 4416. 4417.
10237 {infra). 10346. V 3ooi. X 557.
* Voyez infra^ p. 298.
s Voyez supra, p. 212.
0 Trichila : VI 10237. 21383; tricla cmn columnis et mensis, VI 430o.
Marquardt, Priv., p. 358, n. 4 = Trad. I, 433, n. 1.
7 AediciUa, VI 10275. 18329.
8 Cenatio, XI 6222. TricUnium, VI 4710. 4711. 10284. 10315. Trichili-
nium, VI 10332. Abacus, VI 10237. Mensae, VI 4305 {supra, n. 6). 8117;
wensa marmorea, VI 5346; mensa marmorca rotujula, VI 10353; mensa
quadrata in trichila, VI 10237 ; porticus cum mensis, B. c, 1885, n. 1002.
Trutina et pondéra, VI 10237. Puteale, ibid., et 10325. Puteiis, VI 4420.
5532. 10314. Cfr. IIenzen, Ann. d. /., 1855, p. 14.
9 Imago, VI 4421. 10332. 10409. 10410. Zothcca, VI 10302. 10409.
( 291 )
construisait encore des portiques avec sièges, surmontés par-
fois d'une terrasse, où l'on pouvait se promener ou se reposer,
ou même célébrer les banquets funéraires ^.
Toutes ces annexes se trouvaient aussi dans les champs de
sépulture sans monument commun -. Si le domaine consacré
aux tombeaux ou renfermant le monument était assez grand,
une partie était convertie en parterres semés de fleurs et de
plantes agréables; on y plantait des vignes et des arbres frui-
tiers; on y cultivait les violettes dont on faisait des bouquets et
des couronnes pour les offrir aux Mânes, en mai, et les roses
qu'on leur offrait en juin. Les vignes fournissaient les olfrandcs
d'automne [vindemiales) 3.
Ce n'était pas encore tout : le domaine comprenait souvent
des terres labourables, tontes sortes d'édifices nécessaires à
une exploitation agricole, et enfin une demeure pour le gar-
dien ^. Les servitudes nécessaires pour se rendre à la sépulture
étaient assurées aux collèges s.
Pour terminer, nous décrirons le domaine funéraire du col-
legium Silvani,,k Rome, dont une inscription nous donne une
vue d'ensemble 6. Les affranchis qui composaient ce collège
< Portims, VI 8117. 10237. 10275. Bull, corn., l. /., VI 10284 {mpra,
p. 290, n. 2. Porliculus, VI 10273. Solarium, XIV 3323. Orelli, 4240.
VI 10284. Suhsolarium , VI 1027o. Apparatorium , VI 122o8.
2 VIII 9o8o (Chrétiens, voyez supra., p. 213, n. 1).
5 Paul Allârd, II, pp. 448-449. XII 3637 : macsolcum excoluit et ut
esset frii[giferu)n fec,ï\t, positis arboribus vitibus rosa[riis\. C'est ce qu'on
appelait un cepotaphUun, Wii.manns, 258. VI 10237 (voyez infra). 17073
{viridarium). V 2176 : Ule col{lc(jio) cent{onariorum) liortos cum aediftcio
huic sepull[u]ra{e) jimctos donavit.
* VI 10245 : locîis momimenti, sive ager est — ibiquc labsrnam fieri.
VI 10411 : cui loco religioso acedere volo omne aedificium adjaccns, item
agrum, [sive]vinea[m), cinctum ;»rtc. Sur la tombe on gravait un extrait du testa-
ment ou de l'acte de donation, et le collège s'engageait formel-
lement à se conformer à toutes ces prescriptions ^ : c'était une
garantie pour le défunt et pour sa famille. Souvent il était
stipulé que si le collège négligeait son devoir, la libéralité
reviendrait à une autre communauté ou au trésor public ou
que le collège aurait une amende à payer t.
Il ressort de ce paragraphe que certains artisans paraissent
avoir formé de véritables collèges funéraires, qui n'avaient
pas d'autre but que les funérailles; mais c'était l'exception.
La plupart s'occupaient accessoirement de l'enterrement et du
lieu de sépulture; de plus, aux fêtes des morts, ils honoraient
les Mânes de leurs défunts et de tous ceux qui voulaient bien
leur faire des largesses à cette condition.
On peut se demander si les collèges d'artisans n'étaient pas
devenus, à l'exemple des collèges religieux, de véritables col-
^ In templo, V 7906. Ephem., VIII 210.
2 Praesentes, V 527-2. VI 10234, l. 11. 14. 15. XI 126 5047.
3 [arbit]7iatii) suo, V 5272.
* X 5047.
B VI 10234, 1. 16-17.
^ V 7906 : Qiiod se facturos receperunt. XI 1027 : His epul{a)e dchentur
a coll. cent. Brixellaiwrum. C. I. Gr., 3924 {supra, p. 297, n. 6.) —
Décrets du collècre : XI 120. Ephem., VIII 210. — Prière du défunt :
Peto a vobis, collegae, ut suscipere dicjncmini, etc., VI 9626. Hoc ut ita
faciatis fidei vestrae committo, Bormann, Inscr. Sass., 24.
7 VI 1925. 9626. V 4488. XI 132. 1436. Pais, 181. Lebas, 1687. C I. Gr.,
3028.
( 300 )
lèges funéraires. La réponse ne saurait être douteuse. Non,
tous ces collèges avaient conservé leur caractère primitif. On
en voit qui existent depuis longtemps quand ils acquièrent,
par achat ou par donation, un lieu de sépulture; tel est peut-
être le conlegium anulariorum; telle est certainement la dixième
décurie du collegium fabrum tignariorum de Rome. Evidem-
ment cette dernière avait conservé le même caractère que les
autres décuries du même collège. Dans le corpus mensorum
machinariorum frumenti publia y on voit clairement que les
funérailles restent l'accessoire : en 198, il met encore la for-
mule quibus ex SC. coire licet i, preuve qu'il n'était pas pure-
ment funéraire; car alors il n'aurait pas eu besoin d'une per-
mission spéciale, et c'était d'ailleurs l'une des corporations
industrielles au service public ^2.
L'enterrement et le culte des morts n'étaient donc que chose
secondaire pour les collèges industriels : ce n'était pas là ce qui
les avait fait naître, mais c'était certainement l'un des avan-
tages que les artisans recherchaient presque toujours quand ils
s'associaient.
§ 5. Les collèges et la chanté.
Sommaire : m LES collèges funéraires, ni les collèges d'artisans n'étaient
DES SOCIÉTÉS DE SECOURS MUTUELS. - DESTINATION DE LEUR CAISSE, DES COTI-
SATIONS extraordinaires, DES DONS ET LEGS. — CAISSES DES COLLÈGES MILI-
TAIRES. — ÉRANES D'AMISUS. — LES COLLÈGES PAÏENS ET LES COMMUNAUTÉS
CHRÉTIENNES.
Comme les collèges romains, les corporations du moyen âge
procuraient souvent à leurs membres une sépulture honorable;
mais elles allaient plus loin. Elles assistaient les confrères
« V85.
* VI 17o9, en 389. Voyez la III* partie.
(301 )
nécessiteux, surtout en cas de maladie et d'accident; les plus
riches avaient même parfois des hospices particuliers; d'autres
entretenaient dans les hôpitaux de la ville un certain nombre
de lits. De nos jours, nous voyons naître beaucoup de sociétés
qui ne se proposent que d'assurer à tous les confrères des
funérailles décentes et aux sociétaires éprouvés par la maladie
ou par un accident, les soins du médecin et les ressources
nécessaires à l'entretien de leur famille ^. On les appelle socié-
tés de secours mutuels.
N'y avait-il pas à Rome des collèges méritant ce titre? Les
membres des collèges professionnels en particulier n'étaient-
ils pas guidés par la charité, ou, si l'on veut, par la bienfai-
sance, par le désir de s'aider les uns les autres dans les revers
de la vie?
Avec nos idées modernes, nous sommes tentés de croire
qu'il devait en être ainsi. On a été jusqu'à soutenir qu'il y avait
deux sortes de collegia tenuiorum, les uns funéraires, les autres
destinés uniquement à secourir les indigents et les malades 2.
Nous avons réfuté cette assertion et ce que nous allons dire
complétera notre démonstration. Une opinion plus générale-
ment reçue veut que les collèges funéraires secouraient les
nécessiteux, les veuves et les orphelins ; qu'ils étaient à la fois
des sociétés funéraires et de secours mutuels. C'est Mommsen
qui l'a exprimée pour la première fois en 1843, sans chercher
aucune preuve, sous forme de conjecture : Fuerit arca collegii
quasi communi auxilio eorum collegarurrij qui subsidio indige-
rent, parata et solitum refugiiim orbormn pauperumqiie, quam ob
rem legataad pias causas, antequam Cliristiani imperatores melius
iis p'ospicercnt, plerumque collegiis data et ab eorum magistris
administrata esse arbitror 3. La plupart des modernes l'ont
< Cfr. Hubert- Valleroux, Les corporations d'arts et métiers, 1885,
68.
» Voyez sitpra, pp. 145-147.
3 Mommsen, De coll., p. 91.
( 30-2 )
reproduite i. Quelques-uns n'ont pas craint d'ajouter qu'à
l'exemple des collèges funéraires, les collèges d'artisans dis-
tribuaient des secours à leurs membres -, et même qu'ils pro-
curaient aux plus pauvres les ressources nécessaires pour
exercer leur métier ou se livrer à un pelit commerce 3.
Selon nous, ni les collèges funéraires ni les collèges pro-
fessionnels ne se proposaient un but charitable, en dehors des
funérailles. Avec G. Boissier, il faut poser la question de la
façon suivante : Peut-on établir que d'une manière régulière
et permanente des collèges romains venaient en aide à leurs
membres malades ou indigents? Se regardaient-ils comme
institués pour soulager ces misères? A-t-on la preuve qu'ils
avaient des fonds réservés à ces dépenses ^?
Avec lui, nous croyons que la réponse doit être négative.
Sans doute, on peut admettre que parfois les confrères se
cotisaient pour secourir un sociétaire malheureux, mais de
pareils secours, qui auraient dépendu de la bonne volonté de
chacun, devaient être rares et passagers : on n'en trouve aucun
exemple ni aucune trace "\ Quant à une assistance permanente
prévue par les statuts, on ne peut l'admettre. Nulle part, ni
dans les auteurs ni dans les inscriptions, on ne parle ni d'une
* Kayser, p. 187. ÎUTvQCArdt, St.-V., HT, p. 144. Le culte, I, p. 173.
Herzog, II, p. 901. LiEBE>'Aii, p. 40; il atténue son opinion dans Zeitschr.
f. Kulturgesch., 1804, p. 128. De Rossi, Roma Soit., lU, p. 510 : altri
pli offici e .sussidii alVinopia dei tenuiores. Uueb.ner, Monatsber. der Berl.
Akad., 1861. p. 777.
2 Durit, V, p. \^^. >L\uÉ, Th-aef. fabr., p. 30. Liebe>a3I, pp. 5o7--258.
Heezog, II, p. 1004 : dièse so fur gesellige, religiôse und UnterstûzungS'
zivccke vereinigten — Benifsgenossen.
3 ScHiLiJJi. Rôm. Gesch., I, p. 423.
* G. DoissiER, Relig. rom., pp. 206-30i- Sa réponse est négative, et
Merkel, p. 8.>0, est du même avis.
3 LiEBE>'.vM i>p. 158, n. 1 et 258, n. 2) renvoie ii Leoxtios, vita Johan-
nis Eleemonis (31ig.ne, P. Gr., XCUr, c. 21, où il est dit qu'à Jérusalem
un àpvjpoxû-oî reçoit et traite les àpY'->po~?i~2'- venus de l'étranger;
cela ne prouve é\idemment rien.
( 303 )
caisse, ni de œtisations extraordinaires, ni de libéralités
affectées au soulagement des indigents ou des infirmes.
Dans les collèges funéraires, la caisse, formée par les coti-
sations mensuelles, avait une destination précise et imposée
par la loi, à savoir les funérailles. Le sénatusconsulte qui avait
autorisé ces collèges en bloc le disait en termes formels ^ On
a imaginé que la prime funéraire pouvait être si élevée qu'elle
aurait constitué en njéme temps un secours pour la famille du
défunt -, de sorte que ces collèges seraient devenus une sorte
d'assurance sur la vie. Ce sont des hypothèses que rien ne
démontre, que tout ce que nous savons de l'emploi des primes
funéraires renverse au contraire 3 ; le fuueraticium était destiné
uniquement aux funérailles, puisque le collège de Lanuvium
le conserve quand il n'y a pas d'héritier institué, pour payer lui-
même les frais funèbres ^. Quand il en restait quelque chose
après l'enterrement, on consacrait le surplus à un monument;
et même si la famille en conservait parfois une part, il n'entrait
pas dans l'intention du collège de la secourir Hùbner s'est fondé
sur l'épilhète salutare que portent beaucoup de collèges; elle
viendrait de salus dans le sens de vie, parce que ces collèges
seraient une assurance sur la vie 5. Cet emploi du mot salus
n'est pas admissible 6, et le mot salutare ne sert probablement
qu'à effacer ce que leur but funèbre pouvait donner de lugubre
à ces collèges : il est employé boni omiuis causa ". Il n'est donc
nulle part question d'une autre destination charitable de la
caisse commune. Le silence n'est pas moins complet pour les
collèges d'artisans.
' Voyez supra, pp. 143 et '161.
« Herzog, II, p. 991, n. 1. Liebelxam, p. 30S, n. 5 fin.
* Voyez siipra, pp. :268 et suiv.
* Voyez supra, p. 271.
* HiEBNER. /. /.. à propos des collenium salulare de Conimbriga, 11,
379 : gcgâiueitige Leb:nsversicherung .
* De Rossi, Bull, corn., ISSi, p. 146, n. 1.
' De Rossi, /. /., et supra, p. :*6l.
( 304 )
Très souvent nous voyons, dans toutes sortes de collèges, les
confrères se cotiser volontairement ou en suite d'un décret de
rassemblée générale, pour faire des funérailles honorifiques
à un protecteur ou à un bienfaiteur; pour construire un local,
un temple, un monument funèbre; pour dédier une statue à
un dieu ou à un citoyen généreux {aère conlato) i : jamais ils ne
réunissent des fonds pour assister un membre malheureux ou
malade.
On a allégué les sportules distribuées fréquemment dans les
collèges et on les a présentées comme un secours accordé aux
confrères -. C'est ne pas les comprendre. Les collèges rece-
vaient de fréquentes largesses de leurs dignitaires et de leurs
patrons; ils attiraient à eux des donations et des legs nom-
breux. Le bienfaiteur fixait toujours l'emploi de ses libéralités :
c'était une fête religieuse ou funèbre qu'il fallait célébrer par
des banquets ou par des distributions de vivres et d'argent.
Souvent aussi les collèges assistaient à des distributions et à
des festins publics, donnés par de riches citoyens; ils en
organisaient avec leurs propres ressources. Et sans doute,
comme le fait remarquer G. Boissier 3^ « ces libéralités, à
les prendre par leurs résultats plutôt que par leur principe,
avaient souvent les mêmes effets que les secours qu'un homme
charitable distribue aux malheureux ; ces festins éternels que
le protecteur offrait aux associés devaient diminuer leurs
dépenses particulières; ils y trouvaient en réalité autant de
profit que de plaisir... Ces dons (de vivres et d'argent) que
chacun emporte chez soi 4, sont un secours utile pour les
* Voyez infra : Finances.
- Herzog, II, p. 991, n. 1.
3 G. Boissier, /. /., p. 297.
* Tantôt on offre aux confrères un festin, V 7906 : col[l{egio) cent, epii-
lum ex mor\e] déduit); Statuts des eborarii, Mitth. des Inst., 1890, p. 287,
1. 17 : cena [recta?y, XIV 2112, II, 1. 11 : ordo cenarum; tantôt on leur
fait des distributions (sportulae). Ces sportules peuvent être : 1«> une
somme d'argent qu'ils emportent, XIV 160 : sportul{as) numéro s{iipra)
sicripto) viritim dédit; XI 126 : sport{ulae denani) bini dividerentur ;
( 305 )
pauvres ménages et les aident à vivre; cependant ce n'est pas
là véritablement une aumône, une distribution de charité,
comme nous l'entendons aujourd'hui. » Ce qui le prouve, c'est
la façon dont les sportules sont réparties entre les membres :
ce sont les moins nécessiteux qui reçoivent le plus. Ainsi,
dans le collège d'Esculape et d'Hygie, le président, le « père »
et la « mère « du collège reçoivent six deniers et neuf setiers de
vin; les immunes et les curateurs, quatre deniers et six setiers
de vin; les simples membres, deux deniers et trois setiers de
vin J . Chez les pêcheurs et les plongeurs du Tibre, les patrons et
les présidents à vie obtiennent vingt-six deniers, les présidents,
seize; les curateurs, douze, et les simples membres, la plèbe,
huit seulement ''^. « Si le donateur avait eu le dessein spécial
XI 6033 : divisit collegiis omnibus (denarios) III I-, 2° une somme et des
vivres, ordinairement du pain et du vin, X 3699 : panem et vinum et spor-
tulas dédit ; Orelli, 267o: singiilis (sestertios) n{umero) L adjecto pane et
vino dédit. Dans ce second cas, la somme est destinée à payer le reste
du repas, la viande, si les confrères veulent organiser un festin. Certains
bienfaiteurs n'ajoutent le pain et le vin que dans le cas où l'on célèbre
un repas et pour ceux qui y assistent : singulis (sestertios) n(ummos)
XX XX. adjecto pane et vino citm epul{arentur) dédit, Wilmaxns, 2112.
De même : XI 439o : epuiantibus ; V 7920 : sportidas {denarios singulos)
et recumbentibiLs (s'ils dînent) panem et vinum praehuit (Th. Mommsen,
De coll., pp. 110-111. ScHiESS, pp. 103-107. xMarquardt, Priv., I, p. 203.
Trad., l, p. 242). Dans ce cas, les confrères sont sans doute libres
d'emporter la somme en renonçant au pain et au vin ; mais généralement
ils organisent un repas. Ailleurs ils reçoivent à la fois un repas et une
somme d'argent : singiilis (sestertios) XXXI / et epulum dédit, X 5968. Le
repas et les sportules sont bien distingués au n. VI 10234, 1. U : cenam
■ — vel sportulas. Sur toutes ces formules, voyez nos Indices (finances).
ScHiESS (p. 107) pense qu'ils pouvaient aussi emporter parfois une partie
du vin qu'ils recevaient, les quantités étant trop grandes (VI 10234).
' VI 10234. Cfr. Orelli, 407o : quae divisa siint per gradus collegi
niostri), chez les dendrophores, à Rome. Voyez nos Indices. Le denier
valait alors à peu près 1,08 fr. et le setier 0,547 litre.
2 Notizie degli Scavi, dans les Atti délia r. Ace. dei. Lincei, 1888,
sér. 4, vol. 4, pp. 279-281. Gruter, 1083, 10.
Tome L. 20
( 306 )
de soulager la misère, dit fort bien G. Boissier, il aurait donné
à chacun selon ses besoins ; au contraire, ce sont les magistrats
de la société, c'est-à-dire les plus riches, qui reçoivent le
plus 1. » Il faut observer encore que les collèges obtiennent des
legs, des donations, des libéralités de tout genre pour tojtes
sortes de motifs; pour célébrer un anniversaire, une fête
funèbre; pour entretenir une statue ou un tombeau ; pour faire
des sacrifices annuels ; pour bâtir ou réparer leur local et leur
sépulture, et ainsi de suite. Les inscriptions nous en ont con-
servé des exemples fort nombreux. Comment se fait-il donc
que pas une seule ne parle de libéralités ou de legs destinés
à secourir les pauvres, les malades, les orphelins? N'est-il pas
surprenant que parmi tant d'inscriptions qui rappellent les
largesses faites aux collèges, il ne s'en trouve pas une seule
qui mentionne des sommes données dans une vue charitable?
Sur les nombreuses statues élevées par les collèges à leurs
bienfaiteurs, on énumère avec complaisance les bienfaits reçus;
on loue les donateurs, on flatte leur vanité, on a l'air de les
encourager à persévérer et d'exciter les autres à les imiter.
N'est-il pas étonnant qu'il ne soit pas une fois question de
secours destinés aux membres éprouvés par des revers quel-
conques!'' Ci'la ne s'explique que si l'on admet que les collèges
ne songeaient pas à secourir les confrères nécessiteux et que,
par conséquent, il ne pouvait venir à l'esprit de personne de
leur faire des largesses à cet eff'et -.
On pourrait citer le médecin (Tpo'^{;ji.oç) auquel les chasseurs
de bêtes du cirque élèvent une statue à Corinthe, pour le
' C'est un honneur qu'on leur fait. XIV, 2112, II, 1. 21 : ob honorem.
- Depuis que Nerva et Trajan avaient établi leurs institutions alimen-
taires, beaucoup de citoyens riches les avaient imités et avaient donné
à leur ville natale des capitaux ou des terres pour nourrir les enfants
pauvres. Personne ne songea à faire des libéralités de ce genre aux
collèges. Pourquoi? Évidemment parce que les collèges ne s'occupaient
pas de bienfaisance et ne se regardaient pas comme établis pour sou-
lai^er la misère.
(307)
remercier de ses soins; mais on comprend que des gens de
cette profession aient eu un médecin pour soigner leurs bles-
sures après les représentalions K Parmi les douze décurions
qui ligurcnt sur Valbum des fabri lignuarii à Luna , il y a aussi,
à côté d'un hanjspex et d'un scriba, deux medici ^K Comme la
profession des sept autres décurions n'est pas indiquée, on ne
peut guère regarder ces titres comme des professions privées ^,
et l'on est tenté de croire qu'il s'agit bien de médecins attachés
à ce collège '^ et chargés de soigner les confrères malades; mais
la chose est trop peu sûre pour en tirer des conclusions géné-
rales.
Nous avons vu qu'à Hiérapolis il existait une épyao-^a OpejA-
(j(.aTt.xTi se rattachant au collège des teinturiers en pourpre, et
qu'on y a reconnu un atelier d'apprentissage pour les enfants
pauvres (Op£u.[7.aTa) ; ce serait là une sorte d'institution bien-
faisante; mais il convient de remarquer que le cas serait
isolé, et surtout qu'il se présente dans une de ces villes grecques
d'Asie, où les collèges semblent avoir eu des particularités
inconnues dans le monde romain s. Il faut en dire autant des
* C. I. Gr., 1106 : ^-^xz^zopôç àvopEç.
- XI i3o5. Cfr III 3583, à un médecin, par les centonnires d'Aquincum.
'■' Comme PiOdbeutus, VIII, 18G7, p. 422, en note.
^ Maué, Vereine, p. 32. Praef. fabr., p. 58, n. I. Liebenam, p. 211 :
Vereiîiscirzte.
s Voyez supra, p. 184, n. 5. D'après une autre inscription du même
collège, celui-ci devait être composé de Juifs, car il célèbre la fête des
Azymes et de la Pentecôte. (Voyez supra, p. 237, n. 2.) Dans l'inscrip-
tion de Lebas, 1687'*, on lisait d'abord : -ctp auvEÔpup xtîç Tipoaosta; twv
7ropcp'jpo,3âcptov. Lebas et, après lui, De Rossi avaient reconnu dans le
mot TTpoaoeia une société de secours mutuels (Lebas, Expiic, t. III,
p. 400. De Rossi, Roma sott., III, p. 510, n. 3). Le mot Trpoaosta est
inconnu et Lebas avait mal lu. La véritable leçon a été rétablie conjectu-
ralement par A. Wagener {Rev. de l'Instr. publ. en DeUj., 1868, p. 7),
et après revision de la pierre par Ramsay (Rev. arch., 1887, p. 354).
Il faut lire : Tt]> auveôpuij TTJt; Tiposoptac;, le comité de direction, la
commission directrice du collège.
( 308 )
maisons ouvrières bâties par les tailleurs de Thyatire, si tant
est qu'il s'agisse là d'une œuvre de bienfaisance ^.
Qu'allèguent donc ceux qui veulent faire passer les corpora-
tions romaines pour des sociétés de secours mutuels? Les uns
se fondent sur l'analogie des collèges militaires de Lambèse :
« Ces collèges, dit Duruy, avaient institué avec les cotisations
de leurs membres de véritables caisses de secours, et il n'est
pas téméraire de conclure de ce fait que des corporations
civiles avaient imaginé de semblables institutions -. » En effet,
ces collèges de sous-officiers et de spécialistes de la troisième
légion Auguste avaient des institutions tout à fait particulières,
et ils méritent qu'on s'y arrête 3.
Nous avons vu qu'il était interdit aux simples soldats de for-
mer des collèges dans les camps, c'est-à-dire tant qu'ils étaient
sous les armes. La discipline s'y opposait et l'État avait
assuré lui-même leur avenir et leur sépulture. A l'expiration
de leur service, les soldats touchaient une retraite qui s'élevait
à 12,000 sesterces pour les légionnaires. Pour ceux que la
maladie ou les infirmités obligeaient de quitter l'armée avant
le terme, il existait une sorte de caisse d'épargne, gardée par
les signiferi et alimentée par les retenues opérées sur les clona-
tiva^ si fréquemment distribués par les princes; ces retenues
formaient avec le temps un capital qu'on remettait tout entier
aux soldats quand ils quittaient le service, soit que leur terme
fût fini, soit qu'ils fussent devenus impropres au métier des
armes. S'ils mouraient au camp, cette réserve passait, avec le
peculium castrense, à leurs parents ou aux héritiers qu'ils avaient
' C'est peu vraisemblable. Voyez supra, p. 188, n. 1.
2 V. Duruy, Hist. des Rom., V, p. 158. Schiller, Rom. Gesck., I,
p. 423, n. 7.
^ Voyez G. Boissier, Relig. rom., II, pp. 297 sqq. Revue arch.,
XXIII, 1872, pp. 91-92, et surtout René Gagnât, L'armée rom. d'Afrique.,
pp. 457477. Marquardt, St.-V., II, pp. 562-563 = Organ. milit.,
pp. 389-310. Wilmanns, Comment, in hon. Momm^eni, p. 200. Liebenam,
pp. 297-309. CoHN, pp. 104-135.
( 309 )
institués. Une autre caisse, formée par les cotisations des
légionnaires, servait h procurer une sépulture honorable aux
soldats morts à l'armée. Les collèges étaient donc inutiles aux
simples soldats i. Tne fois leur congé obtenu, ils pouvaient
entrer dans les collèges de vétérans.
Il ne devait pas en être de même pour les sous-officiers, car
ceux-ci s'organisent en collèges dans tout l'Empire dès la fin du
second siècle 2. La naissance de ces collèges fut probablement
une suite des réformes militaires et de la tolérance de Septime
Sévère. Il semble que ce prince fut le premier qui les autorisa.
A Lambèse, il leur permet de se construire des salles de réu-
nion dans le camp même, et c'est par les inscriptions de ces
scholae que nous connaissons leur organisation; en effet, ces
inscriptions contiennent leurs règlements, dans lesquels
Gagnât retrouve avec raison le double but des caisses de
légionnaires : assurer la sépulture et créer une réserve destinée
à faire face à d'autres dépenses, inhérentes à la carrière mili-
taire. Nous avons les statuts des lieutenants (optiones) et des
sonneurs de cor {cornicines) ; il reste des fragments de ceux des
tesséraires et des optiones valetudinarii, associés avec d'autres
spécialistes, et d'un collège inconnu 3. A son entrée au collège,
chaque membre doit verser entre les mains du trésorier {quaes-
tor) une somme appelée scamnarimn, parce qu'elle donne le
droit de s'asseoir sur les bancs de la sclwla ; toutefois, il est
probable qu'il n'en payait de suite qu'une partie et que le reste
était réparti sur une série de contribulions mensuelles ^. Ce
droit d'entrée était de 7oO deniers (8I0 francs) chez les cojiii-
cines ; les élèves [tirones, discentes) payaient moins s. Ailleurs,
' René Gagnât, L'armée rom. d'Afrique, pp. 457-461.
2 Voyez nos Indices (collèges militaires).
5 VIII 2od2. 2553. 2554. 2556. 2557, sous Seplime Sévère.
^ C'est ce que Gagnât (p. 470) conclut de la clause qui n'accorde la
prime qu'à ceux qui arca .soluti sunt (VIII 2557). Contra : Liebenam,
p. 307.
s Car ils recevaient moins. VIII 2553 : item discentih{us) pro propor-
t{ione) scamnari sui[sestertios) m{ille) n{ummos). Cfr. 2557, 1. 37.
( 310 )
nous n'en connaissons pas le montant ^. Avec les fonds
recueillis, ces collèges assuraient des primes {anularia)^ dans
certains cas déterminés ; les statuts décident ce qui suit :
l® Voplio qui passe la mer pour aller travailler à son avan-
cement dans la capitale, reçoit une prime de 8,000 sesterces
(2,175 francs).
S** Le membre qui quitte l'un des quatre collèges pour cer-
taines raisons prévues, reçoit une prime déterminée.
Les trois règlements fragmentaires, moins développés que
les autres, déclarent que la prime est due à « quiconque quitte
le collège'-^ ». Les opliones ne parlent que de Vlionesta missio et
stipulent que les vétérans recevront 6,000 sesterces '^. Les cor-
nicines distinguent entre les cas suivants ^ :
1° L'associé promu à un grade supérieur dans la troisième
légion a droit à 500 deniers (544 francs).
2" L'associé qui passe dans une autre légion et qui est donc
obligé de traverser la mer reçoit également 500 deniers, et, en
outre, 200 deniers (217 francs) de frais de route, s'il est fantas-
sin ; 500, s'il est cavalier.
3" Les vétérans touchent 500 deniers; ceux qui sont dégra-
dés ou renvoyés n'obtiennent que 250 deniers.
¥ Quand un associé meurt au service, la caisse verse
500 deniers à son héritier ou à son procurateur, à qui la loi
faisait un devoir de pourvoir aux funérailles^.
Ces primes, payées par le trésorier au premier janvier, por-
taient le nom d'anularium, on ne sait pourquoi 6. Gaston Bois-
sier et, après lui, René Gagnât ont montré clairement à quoi elles
' 11 devait être plus élevé chez les optiones, qui paient des primes
plus considérables.
2 Qui ex collegio dimittentur, VIII ^io52. 2553. 2556.
* VIII 2o54 : ueter(ani) quoque missi.
* VIII 2557.
•"^ Voyez supra, p. 275, n. 3.
« LiEBENAM, p. 308.
( 811 )
servaient et (jue le but de ces collèges était avant tout funéraire .
Quand le sous-otlicier mourait au camp, la prime de oOO (h'ni<*rs
servait à sa sépulture, comme on le voit par les statuts des
covnidnes. Mais tandis que dans les collèges funéraires tous
les confrères mouraient membres du collège, et que la prime
était toujours consacrée à leur enterrement, ici il arrive sou-
vent qu'un associé quitte le collège, soit parce qu'il a obtenu
son avancement en Afrique même ou ailleurs, soit parce qu'il
a reçu son congé définitif. Dans ce cas, il ne perd pas ses
droits, et, s'il est en règle avec la caisse ', il touche la somme
de 500 deniers qu'on eût versée à ses héritiers ou à son procu-
rateur. « Uanularium est donc l'équivalent du fuueraticium ;
c'est le funeraticium payé d'avance à quelqu'un qui ne peut pas
l'attendre sur place 2. »
Le membre sortant pouvait s'associer avec ses nouveaux col-
lègues ou entrer dans un collège de vétérans, en y versant la
prime reçue : il continuait ainsi l'assurance contractée aupara-
vant.
La somme payée dans ces différents cas avait donc la même
destination : assurer la sépulture. 11 est à remarquer qu'elle
était inférieure au droit d'entrée; c'est que ces collèges se
proposaient encore un autre but. Ils avaient un caractère
moins exclusif que les collèges funéraires : ils voulaient mettre
leurs membres à même de faire face à certaines dépenses
qu'entraîne la carrière du sous-officier. Les statuts qui nous
' VIII 2ooJ : Lecture de Mommsen : [ei s(cilicet) t{antum)m{odo) qui
arc a) solut{i) sunt. ibid. : si quis de tironib'us) ab hac die satis arcae
fecierit), accipiet quiquit dehel{ur). Nous croyons que ces phrases sont
synonymes. Cagnat pense qu'il suffit que les élèves aient versé une cer-
taine somme (p. 470).
* G. BoissiER, Rev. arcfi., 1872, /. /. CâGxNat, Op. c, p. 475. Trois col-
lèges (VIII 2oo2. 2553. 2556) n'entrent pas dans les détails; la prime est
versée à ceux qui ex eo collegio dimittentur. Nous pensons avec Gagnai
(p. 474) que ces termes généraux embrassent tous les cas, même celui
où la sortie a lieu par suite du décès d'un membre.
( 312 )
restent ne prévoient que deux de ces cas : les frais d'un voyage
à Rome pour travailler à l'avancement et les frais de route
payés à ceux qui quittent Lambèse pour passer dans un
autre corps. On ne saurait dire si les collèges de Lambèse
ou les autres collèges militaires assuraient les affiliés contre
d'autres risques; en tous cas, il semble certain qu'ils ne pré-
voyaient que des dépenses auxquelles la carrière militaire
seule expose.
Comme dans tous les collèges romains, le surplus de la
caisse servait à pourvoir aux dépenses de l'association, à la
construction et à l'ornement de la schola, aux fêtes et aux ban-
quets, enfin au culte des dieux protecteurs*.
On voit donc que ces collèges ne formaient pas à propre-
ment parler des caisses de retraite 2, puisqu'ils ne servaient
pas à garantir l'officier retraité contre la misère. C'étaient des
sociétés de secours mutuels 3, si l'on veut, mais ces secours se
bornaient strictement à la sépulture et à quelques dépenses
inhérentes à la carrière militaire.
Faut-il admettre que cet usage était général dans l'armée
romaine? Les témoignages font défaut en dehors de Lambèse;
on trouve ailleurs des collèges militaires 4, mais on ne sait rien
de précis de leur but.
Peut-on surtout s'appuyer sur l'exemple des collèges de Lam-
bèse pour soutenir que de pareilles institutions existaient dans
les corporations civiles? Évidemment non ; la diff'érence est
< Pour le culte, voyez supra, p. 196, et III 1043o. 10997. VII 1035.
4039. VIII 2554. 2636. — Pour la scfiola, VIII 2551 : ex arca suafecerunt.
2 LÉON Renier, Arch. des miss, se, 1851, p. 218.
3 Marquardt {St.-V., 112, p. 563 = Tracl, p. 310) et Cohn (p. 130j
appuient surtout sur ce côté. Les collèges funéraires sont aussi des
sociétés de secours mutuels, mais ils ne s'occupent que d'un cas : les
funérailles. WissowA (note ajoutée dans Marquardt, St.-V., IP, p. 153,
n. 5 = Trad., p. 310) insiste surtout sur l'importance militaire de ces
collèges, et il renvoie à Wilmanns, Comm. in hon. Mommseni, pp. 200
et 204.
* Voyez notre Index collegiorum et Liebenam, p. 300.
( 313 )
trop grande entre la situation des artisans et celle des soldats
pour comparer les uns aux autres. Ce qui paraît avoir donné
cette idée aux sous-officiers de Lambèse, c'est la solde abon-
dante, ce sont les libéralités du prince, qui permirent aussi
aux optiones de construire leur local ^. Rien de pareil chez les
artisans et les pauvres gens. De plus, ces derniers ne rencon-
traient pas dans leur vie ces circonstances extraordinaires, mais
prévues, où les soldats auraient pu regretter de ne pas avoir
fait d'économies. Ils n'auraient pu songer qu'à la maladie ou à
toute autre cause d'incapacité. Or, n'est-il pas plus que témé-
raire de se fonder sur l'exemple des collèges militaires, où
l'on ne prévoyait pas même de pareils cas, pour prouver que
les collèges civils les avaient prévus?
On allègue encore deux textes, l'un de Trajan dans Pline le
Jeune, l'autre de Tertullien -. Ce sont précisément les passages
sur lesquels certains modernes se sont fondés pour prouver
l'existence d'une classe de collegia tenuiorum se proposant
uniquement un but charitable et existant à côté des collèges
funéraires. Nous croyons avoir montré que c'est à tort, et nous
pensons qu'on ne peut pas davantage conclure de ces textes
que les collèges funéraires et surtout les collèges industriels
secouraient les indigents et les malades.
Trajan, dans une réponse à Pline le Jeune 3, nous dit bien
que les éranes d'Amisus pouvaient être permis s'ils employaient
leurs cotisations pour secourir la misère des pauvres : ad
sustinendam tenuiorum inopiam. Mais d'abord on peut douter
que ce fût, chez eux, charité pure. En effet, le mot â'oavo;, qui
désignait en Crèce des associations religieuses de personnes
organisant des banquets avec des cotisations, avait aussi le
sens de cotisations réunies par plusieurs personnes pour
< VIII 2o52 : ex largissimU stipendiis fecerunt. De même : 2S53.
Cfr. ^55-4 : ex largissimis stipend[ii\s et liber alitatibius) quae in eos confe-
runt fecer{unt).
- Voyez supra, p. 446. Liebenam, pp. -40. 263, n. 6.
5 Plin., Epist. ad Traj., 92 et 93. Le texte se trouve supra, p. 160.
( 314 )
faire un prêt d'argent, gratuit, mais remboursable ^. Il s'appli-
quait à la fois ù ces corporations religieuses, qui ne faisaient
pas de prêts, et aux prêts remboursables sans intérêt. Ici, il
semble qu'il y ait une combinaison de ces deux choses; les
éranes d'Amisus sont des sociétés, puisque Trajan les défend
ailleurs pour ce motif, et ils secourent les nécessiteux. On peut
donc croire que, sous l'Empire romain, les éranes d'Asie,
institués en premier lieu pour célébrer des banquets sacrés à
frais communs, se cotisaient aussi pour secourir les confrères
nécessiteux par des prêts d'argent, et non par des dons faits
à titre gracieux -. C'était probablement là leur façon de sou-
lager la misère des pauvres, et c'était déjà un acte de bienfai-
sance. Mais ces associations grecques n'avaient rien de commun
avec les collèges romains et elles étaient même défendues dans
les villes soumises aux lois de Rome. Leur analogie ne prouve
donc rien •^.
Quant à Tertullien "i, il décrit les communautés chrétiennes,
spécialement celle de Carthage. Après avoir dit que les chré-
tiens forment un corps {corpus), unis qu'ils sont par la religion,
que dans leurs assemblées ils prient pour les empereurs et
lisent les Saintes Ecritures, il continue : « Nous avons pour
présidents les vieillards les plus vertueux, qui n'ont pas obtenu
^ Th. Reinach, Dict. de Daremberg, s. v. eranoi, distingue bien l'eranos-
société et l'eranos-prêt. Le premier est une association religieuse; le
second existe en dehors des associations, entre particuliers. C'est à lort
qu'on les a confondus et qu'on a cru que l'éranos-prêt n'était accessible
qu'aux membres d'une société [eranos) permanente de secours mutuels.
Cfr. FoucART, Assoc. relig. chez les Grecs, pp. 142-145, et supra, p. 146,
n. 3, où nous avons mal rendu la pensée de M. Reinach. Le sens premier
du mot, c'est : repas amical à frais communs, organisé par des cotisations.
' Trajan craignait qu'ils ne se servissent aussi de leur caisse pour
exciter des troubles : ad turbas et inlicitos coetus, et c'est pour ce motif
qu'il ne veut pas les tolérer ailleurs. Tous les collèges de la Bithynie
étaient dans ce cas. Supra, pp. 123-124.
•'' Elle est alléguée par Maué, Praef. fabr., p. 31 ; Liebenam, p. 40.
* Apoloy., 39.
( 315 )
cet honneur à prix d'or, mais par de bons témoignages, car
aucune chose de Dieu ne s'achète. S'il existe chez nous une
sorte de caisse, elle n'est pas formée par la « somme hono-
raire )) versée par les élus, comme si la religion était mise aux
enchères; une cotisation modique est apportée par chacun,
tous les mois ou quand on veut, et si l'on veut ou si l'on peut :
car personne n'est forcé, mais la contribution est volontaire.
Cet argent est comme un dépôt de la piété; car on n'y puise
pas pour organiser des repas, des beuveries et de stériles
mangeailles, mais pour nourrir et inhumer les pauvres, les
enfants des deux sexes, indigents et orphelins, puis les vieux
serviteurs et les naufragés ; si l'un de nos frères est condamné
aux mines, à l'exil, h la prison, pourvu que ce soit à cause de
sa foi, il devient le nourrisson de la religion qu'il a confessée.
C'est surtout cette pratique de la charité qui nous imprime, aux
yeux de beaucoup, une flétrissure. Voyez, dit-on, comme ils
s'aiment les uns les autres K »
Voici comment on raisonne '^ : Tertullien veut prouver que la
corporation chrétienne était légale, parce qu'elle avait la forme
d'un collège funéraire. Pour démontrer qu'elle constituait un
collège funéraire, il la décrit; donc sa description s'applique
* Tertull., ApoL, 39 : Praesident probati qiiique scniores, honorcm
istum non pretio secl testimonio adepti; neque enim pretio ulla res Dei
constat. Etiam si quod arcae geniis est, non de honoraria summa, quasi
redemptae religionis congregatur ; modicam unusquisque stipem menstrua
die, vel qunm velit, et si modo velit et si modopossit, apponit; nam nemo
compellitiir , sed sponte confert. Haec quasi deposita pietatis sunt. ISam
inde non epulis nec potaculis, nec ingratis voratrinis dispensatiir , sed
egenis alemlis humandisqiie, et piieris ac puellis re ac parentibus destitu-
tis, jamqiie domesticis senibiis, item naufragis, et si qui in metallis, si
qui in insidis, vel in custodiis, dumtaxat ex caussa Dei, sectae alumni
confessionis suae fiunt. Sed ejusmodi vel maxime dilectionis opcratio
notam nobis inurit pênes quosdam. Vide, inquiunt, ut invicem se diligant .
(Ed. T. H. Bindley.) Nous avons fait ressortir les traits communs aux
collèges païens.
2 Maué, Praef. fabr., p. 31.
( 316 )
aux collèges païens et puisqu'il montre qu'au soin des funé-
railles les chrétiens joignaient d'autres œuvres charitables, c'est
que la loi sur les collèges funéraires prévoyait celles-ci ^.
L'argument serait sans réplique, si l'apologiste se fondait
sur le sénalusconsulte rendu en faveur des collèges funéraires ;
mais il ne le faitpas. Certes, Tertullien, qui était jurisconsulte^,
l'aurait fait, s'il avait trouvé dans la loi un argument si décisif.
Il ne le fait pas, sans doute parce que l'Église, à son époque,
n'était pas organisée en collège funéraire. On admet qu'elle
prit cette forme dans le cours du IIP siècle, afin de pouvoir
posséder collectivement ses cimetières, mais il ressort de Ter-
tullien qu'elle ne l'avait pas encore prise en l'an 199, où il
écrivait3. En effet, il ne s'appuie pas sur une loi positive per-
mettant certains collèges, et il ne dit pas que l'Église est une
corporation autorisée et légale. Sa préoccupation constante,
dans ce passage, est de prouver que les chrétiens ne violent
pas une loi prohibitive; que leur corporation ne peut être
comptée parmi les factions illicites, c'est-à-dire parmi les fac-
tions dangereuses pour l'ordre public^; qu'elle n'est pas con-
traire au sénatusconsulte spécialement dirigé contre les collegia
iUicita^. Son argumentation commence au chapitre XXXVIII.
La voici : Ce ne serait pas montrer trop d'indulgence que de
compter parmi les factions licites cette secte qui ne commet
aucun des attentats qu'on a coutume de redouter des factions
• Maué (l. /.), LiEBENAM (p. 40) et LoENiNG (I, pp. 20o-21i) assimilent la
corporation chrétienne aux collegia tenidorum au double point de vue
funéraire et charitable. Parmi les collèges de tenviores, ils distinguent
deux classes : les uns funéraires, les autres charitables. L'Église aurait
donc formé une corporation réunissant les caractères de ces deux
classes! Cfr. De Rossi, Roma Sott., III, p. 510. P. Allard, II, p. 11.
2 EusEB., Hist. eccL, II, 2. Ses écrits le démontrent suffisamment.
5 II faut rectifier, d'après cela, ce qui a été dit plus haut, pp. 133-134.
139. 150-151.
* Sur le sens d'illicitiis, voyez supra, p. 133.
5 DiG., 47, 22, 1, 1 : senatus considtvm quo illicita collegia arcentur.
Voyez supra, p. 135, un autre passage de Tertullien et un de Celse.
(317)
illicites ^. Si l'on a diîfendu les factions, c'est pour maintenir
l'ordre dans l'Etat. Or, nous ne nous mêlons pas des querelles
politiques ni des rivalités du cirque. Dans nos réunions, nous
ne nous occupons que de prières en commun, de la lecture de
l'Évangile; notre caisse est consacrée à des œuvres de charité;
nos repas sont frugals et ne sont jamais suivis de désordres.
11 ne conclut pas : Donc notre corporation est conforme à la
loi, comme les collèges funéraires qui agissent de même;
mais il dit : Donc nous ne ressemblons pas aux factions
illicites, défendues par la loi : Haec coitio cfiristianorinn
merito sane illicita, si illicitis par, merito damnanda , si quis
de ea queritur eo titulo, quo de factionibus querela est ^. Tertul-
lien ne cherche pas même à prouver que la corporation
chrétienne est légale, c'est-à-dire reconnue par la loi ; en
effet, elle était strictement illégale, n'ayant pas reçu l'auto-
risation 3. Mais nous avons vu qu'on ne poursuivait plus les
collèges non autorisés s'ils étaient inoffensifs, et c'est le béné-
fice de cette tolérance que réclame l'apologiste. On se montrait
indulgent envers une foule d'autres collèges non autorisés,
envers tous ceux qui n'étaient pas ouvertement dangereux, et
les chrétiens avaient le droit de compter sur la même indul-
' Tertull., ApoL, 38. Le texte est douteux; le voici d'après Oehler :
Proimle nec paulo lenius inter licitas factiones sectam istam deputari
oportebat a qua nihil taie committitur, quale de inlicitis factionibus
timeri solet ? Il explique : « Ne fallait-il pas, avec un peu plus d'indulgence,
compter parmi ...» Bindley (cfr. supra, p. 134, n. 1) ne met pas de
point interrogatif et lit : Proinde, necpaïUo lenius, inter licitas — solet :
C'est pourquoi il fallait — et ce n'était pas montrer un peu trop d'indul-
gence — compter parmi ... En tous cas, le sens général est clair. — Il
faut remarquer la définition des collèges et factions illicites, qui suit :
Nisi fallor enim, prohibendarum facliomun causa de providentia constat
modestiae publicae, ne civitas in partes scinderetur, quae res facile comitia,
concilia, curias, contiones, spœtacula etiani aemulis studionun compul-
sationibus inquietaret.
2 Tertull., ApoL, 39 tin.
5 Voyez supra, p. 140.
(318)
gence; mais on ne la leur accordait pas à cause de leur reli-
gion ^ : c'est uniquement en cela que consistait l'injustice 2.
Tel est le sens de ce passage. Tertullien ne fait donc pas
allusion aux divers emplois que la loi permettait de faire de la
caisse commune. Nous allons plus loin. L'apologiste, en traçant
ce tableau, songe évidemment aux collèges païens, et plutôt
à tous qu'à une classe particulière. Il énumère les traits par
lesquels tous ressemblaient au corpus cliristianorum ; des chefs
élus, une caisse alimentée par des cotisations mensuelles, les
repas de corps, le soin des funérailles, ce sont des choses
communes à tous les collèges romains. iMais remarquez bien
que Tertullien trace un parallèle entre ces collèges qu'il ne
nomme pas 3 et les chrétiens, et que ce parallèle, loin d'avoir
pour but d'assimiler ceux-ci à ceux-là, tend au contraire à faire
ressortir les différences qui les en séparent. Nos chefs sont
pris parmi les vieillards les plus vertueux; ils ne paient pas de
somme honoraire. Nous avons parfois une caisse, mais les
cotisations ne sont pas obligatoires: les pauvres en sont dis-
pensés. L'argent n'est pas consacré à des orgies, mais à des
œuvres de charité. Nous enterrons ù frais communs, non tous
nos frères, mais seulement les nécessiteux. Nous avons nos
repas, mais ils sont frugals; ce sont avant tout des réunions
fraternelles, des agapes. On le voit, la comparaison est évi-
dente, mais chaque trait fait ressortir une supériorité des
chrétiens et les œuvres de charité sont l'une de ces supério-
rités, l'un des caractères distinctifs des chrétiens, qui faisaient
dire aux païens : « Voyez comme ils s'aiment! » Il est évident
que toutes ces œuvres étaient pour eux quelque chose d'incom-
< Voyez supra, p. 150, n. 5
* Cfr. supra, p. 139, n. 2.
* Plus loin, il mentionne des collèges religieux : Tôt trihubus et
ciiriis et decuriis ructantihus acescit aer. Saliis cenaturis creditor erit
necessariiis. Herculanarum decimarum et poUuctorum sumptus tabularii
suppiitabunt. Apaturiis, Dionysiis, mysteriis Atticis coquorum dilectus
indicentur. Ad fiimum cenae Serapiacae sparteoli excitabuntur. De solo
triclinio cliristianorum retractatur (c. 39).
( 319 )
préhensiblc, d'étranger, de nouveau, dont ils n'avaient aucune
idée, et que, par consc-qucnt, ils ne pratiquaient pas '.
Le passage de Tertullien démontre donc, pour nous, le con-
traire de ce qu'on a voulu en tirer. Il fait admirablement voir
l'esprit nouveau qui animait les chrétiens. C'était leur reli-
gion qui les inspirait : elle leur enseignait qu'ils sont tous
frères, étant tous « enfants (Tun même I*ére et cohérili(;rs des
mêmes espérances ». Elle leur faisait un devoir de s'aimer et
de s'entr'aider"-^. De là était née la charité, inconnue des païens,
et de là sortirent toutes les œuvres, toutes les institutions cha-
ritables. La bienfaisance purement humaine existait sans nul
doute, parce qu'une disposition naturelle de notre cœur nous
porte à secourir ceux qui sont dans le besoin. Un écrivain
païen a même pu dire : « Le premier devoir, c'est de se con-
tenter de ce qu'on possède; le second, d'assister, de protéger
ceux qu'on sait avoir le plus besoin et de les envelopper dans
une sorte de solidarité «i. » Mais ces idées n'étaient pas deve-
nues une règle de conduite, admise et pratiquée par tous 4. La
' Commodien [butruct., 11, 33, 12. V^oyez supra, p. 278, n. i) et saint
Cyprien opposent aussi les collèges païens aux chrétiens. Ce dernier
parle de l'évéque a[)Ostat Martialis : Cum Martialis quoque, praeter genti-
lium turpia et lutulenta convivia in collegis diu frequentata et filios in
eodem coUegio cxterarum gentiiun more apud profana sepulcra depositos
et alicnigenis consepiUtos, — contestatus sit, etc. (Epist., 67, 6. Ed. G. Har-
TEL, p. 740j. Cfr. De Rossi, Roma sott., III, p. 312. — Tertull., Adv.
\aL, I : Valcntiniani frequentissinum plane coliegium intcr haereticos.
- 3Iatth., 23, 8 : Umis est enim pater vas ter qui in coelis est. iMIiNUTIUS,
Fi:i.ix, Octau., 31 : Sic nos, qiiod invidetis, fratres vocamus, ut unius Dei
parentis liomines, ut consortes fidei, ut spei coheredes. Id., ibid., 3.
Tertui.l., ApoL, 39 : At quanto dignius fratres et dicuntur et habentur,
qui unum patreni Deum agnoverunt, etc. C. I. Gr , 9266 : Ko'.vôv xùiv
àôsX'iûiv. \o\Q-L supra, p. 151. De Rossi, Roma soit., 111, p. 512. Kraus,
Real-Encycl. der christ. Alt., s. v. fraternitas. Sur le mot fratcr chez les
païens, voyez infra, § 6.
5 PuN., Epist., IX, 30.
' Egger, Mémoires de littérature ancienne, pp. 351-363 : Observations
sur l'histoire du sentiment moral chez les anciens.
( 320 )
religion païenne y était étrangère; elle ne traçait du reste pas
(le règle morale et ce n'était pas leur caractère religieux qui
pouvait mettre les collèges sur le chemin de la charité. On s'est
laissé entraîner par l'exemple des corporations du moyen âge
pour dire que les collèges romains devaient aussi s'occuper de
bienfaisance. Mais si l'on veut conclure par analogie, il ne faut
pas oublier que les unes et les autres vivaient dans des mondes
tout à fait différents au point de vue religieux et moral.
Ce fut pourtant la religion qui porta les pauvres et les ouvriers
à s'associer pour les funérailles, et c'était là un secours mutuel
qu'ils se donnaient. 3Iais ici même, quelle différence! Dans les
collèges païens, chacun verse sa cotisation au jour fixé, et s'il est
en retard, il perd ses droits '; cette cotisation est calculée de
façon que les finances du collège ne soient pas compromises.
C'étaient là des sociétés d'assurance mutuelle, ce n'était pas de
la charité, comme les chrétiens l'entendaient. Chez les païens,
on ne distinguait pas entre pauvres et riches : tous avaient le
même droit. Chez les chrétiens, les riches payaient, et les
pauvres étaient seuls inhumés ou secourus à frais communs;
les cotisations étaient volontaires et ceux qui les versaient les
abandonnaient à leurs frères malheureux. Ce qui était là assu-
rance mutuelle, devenait ici charité pure.
Nous allons voir qu'il régnait dans les collèges païens une
grande fraternité et qu'ils semblaient dans la bonne voie pour
devenir des sociétés de bienfaisance, mais nous constatons
qu'ils ne le devinrent pas. G. Boissier, qui a si bien traité ce
sujet, arrive à ces conclusions négatives que nous nous appro-
prions : c( Nous ne pouvons pas nous flatter de connaître
toutes les formes que la bienfaisance avait revêtues dans les
associations antiques ; mais en admettant qu'il s'en rencontre
qui avaient tout à fait devancé nos sociétés charitables, nous
pouvons être sûrs qu'elles n'ont jamais formé qu'une très rare
exception. « Quant à celles que nous connaissons, « on peut
' Voyez supra, p. 268.
( 321 )
dire, qu'au moins d'une manière fixe et régulière, elles n'ont
jamais été tout à fait des sociétés de secours mutuels... Dans
cette voie de bienfaisance et d'humanité, où elles s'étaient
avancées si loin, elles n'ont pas atteint le terme. Ce n'est pour-
tant pas que le temps leur ait manqué pour accomplir ce der-
nier progrès; si, pendant ces deux siècles où elles ont été si
florissantes, elles ne se sont pas avisées de se servir de leurs
fonds « pour donner du pain aux pauvres, élever les orphe-
lins, secourir les vieillards », c'est qu'il n'était pas dans leur
nature de le faire. L'empereur Julien le constate lorsqu'il
attribue le succès du christianisme au soin qu'il prend des
étrangers et des pauvres, et qu'il recommande aux prêtres de
sa religion de bâtir partout des hospices et de distribuer des
secours aux mendiants de tous les cultes ^. C'est la preuve
manifeste que les associations païennes ne le faisaient pas, et
qu'elles s'étaient approchées de la charité sans l'atteindre 2. »
On peut se demander quelle influence le christianisme exerça
sur les collèges romains à ce point de vue. Mais cette influence
nous échappe; nous pensons qu'il ne les transforma guère :
en eff'et, les chrétiens désertèrent les collèges funéraires à
cause de leur caractère religieux, et quand ils finirent par être
majorité dans les collèges professionnels, ceux-ci étaient déjà
sous la main de l'Etat, écrasés de charges et incapables de
s'occuper d'autre chose 3. Pour soulager toutes les misères, la
religion chrétienne créa des institutions spéciales qui reçurent,
dès Constantin, la personnification civile sous le nom de bre-
photrophia, xenodochia, orplianotropfiia, ptochotrophia ^.
^ Julien, Epist., 49.
2 G. BoissiER, Relig. rom,, II, pp. 299. 300. 304.
3 On rencontre parfois des chrétiens dans les collèges au IV^ siècle,
et nous en parlerons dans la III^ partie.
* CoD. JusT., I, 2, 23. I, 3, 35. 46.
Tome L. 21
( 322
§ 6. La vie familiale dans les collèges.
Sommaire : noms de quelques collègks. — fréquence des kepas de corps :
OCCASIONS DIVERSES; LEUR CARACTÈRE RELIGIEUX ET FRATERNEL. — INDICES
DIVERS DE LA FRATERNITÉ QUI REGNE DANS LES COLLÈGES.
Si les collèges romains ne pratiquèrent le secours mutuel
que pour les funérailles et s'ils n'arrivèrent pas jusqu'à la cha-
rité, ils eurent du moins une autre intluence très heureuse :
ils servirent à resserrer les liens de la fraternité entre gens de
même condition. Il se forme aujourd'hui parmi les ouvriers, le
plus souvent par l'initiative d'hommes d'une classe plus élevée,
des associations qui procurent avant tout à leurs membres des
récréations honnêtes aux jours de repos. Après une journée
consacrée au travail, après une semaine passée dans un dur
labeur, les ouvriers se réunissent dans leur maison com-
mune où ils peuvent se délasser et se rencontrer avec leurs
confrères. Les jours de fête leur apportent des divertisse-
ments extraordinaires, parfois des banquets, ou encore des
conférences et des représentations dramatiques, auxquelles
toute leur famille prend part. Ainsi l'on apprend à se connaître;
les liens se forment et se resserrent; on se contie ses peines et
l'on s'entretient des affaires communes ; en un mot, on frater-
nise ensemble et on se rend la vie plus facile et plus agréable.
Quand on parcourt les inscriptions des corporations ro-
maines, il est impossible de ne pas reconnaître que tel était
aussi le but des artisans dans l'antiquité, et en général de
tous les collèges. C'étaient des associations amicales et reli-
gieuses, bien plus que des associations professionnelles ou
politiques; mieux encore, tout collège était une grande famille.
La communauté du métier et des intérêts remplaçait les liens
du sang, et les confrères n'avaient-ils pas, comme la famille,
leur culte commun, leurs repas communs, leur sépulture
commune? Nous avons vu que leurs fêtes religieuses ou funè-
( 3-23 )
bres étaient celles des familles : comme elles, ils célébraient
la c( chère parenté » et le culte des morts. Ils espéraient, nous
l'avons vu encore, reposer un jour dans la même tombe ou du
moins côte à cote; en attendant, ils s'asseyaient à la même
table dans leur maison commune.
Quelques-uns portent un nom significatif. Les marbriers de
Catina, par exemple, s'appellent coiiviv{a)e marmorari, et ù
Havenne on trouve un convibium veteranorum ^. D'autres
portent des noms pareils [comestores, convidores, cojwtores),
et tous les méritaient -. Ce qui ne peut manquer de frapper,
c'est le grand nombre de festins qui étaient célébrés ou de
distributions de sportules qui étaient faites dans les collèges
de toute espèce. Les banquets constituaient la partie la plus
importante des fêtes religieuses et des fêtes funèbres, et nous
avons vu combien ces fêtes étaient fréquentes 3. Les occasions
tout à fait profanes ne manquaient pas non plus. C'était l'une
des principales préoccupations des collèges de les faire naître.
' X 7039. XI 136.
- Voyez supra, pp. 51-52. Collegium coniestortini, à iMarsi Marruvium,
LX 3693. 3815; ccmvictor Concordiac, à Narona, III 1825; convictor, à
Firmum Piceniim, IX 5383; convictor{es) qui una epulo vesci soient, à
Faniim, XI 6244 (voyez supra, p. 51) ; convictus, lll 3166'' ; [c^onbivis m{e)is,
à Salonae, Arch. ep. Mitth., 1884, p. 127, n. 99; sodales ex symposio^
à Novaria, V 6492; tricUnunn Elveniamim, à Puteoli, X 1895; amici et
[c]onvictores civ[e]s, à Calecula, II 5500. Cfr. XI 6222, à Fanum : sed
tanlum modo convivium coieqmlantibus et refrigeranlibus pateat (ban-
quets funèbres). Ce sont pour la plupart, sinon tous, des collèges funé-
raires. C. JuLLiAN, Inscr. de Bordeaux, I, n. 84, pp. 207-21 J, à propos
des copotores de cette ville, dit : « Je crois que les compotores de
Bordeaux, comme les seribibi de Pompei, formaient une association,
non pas de buveurs ou de mangeurs, mais d'hommes se réunissant
ensemble pour célébrer les mystères d'un même culte. C'étaient sans
doute les adeptes de quelque religion mystique. » 11 croit qu'ils avaient
aussi une sépulture commune. Liebenam, p. 185, rapproche les aujjLSiio-
cxstç des Grecs, C. /. Gr., 2239»» et add. 3304. 3540. 3639 add. BuU. de
corr. hell., X, 176 : au[ji.6t(OTat.
3 Voyez supra, pp. 232-237 et 294-299.
( 324 )
Le patron qui recevait la tabula patronatus, les membres hono-
raires, les chefs, surtout les présidents qu'on venait d'élire,
payaient cet honneur par un banquet. C'est en grande partie
pour ce motif, comme nous le verrons, que les collèges cher-
chaient à posséder le plus grand nombre possible de patrons
opulents, de membres honoraires riches et généreux, dont ils
faisaient souvent leurs dignitaires. Les cotisations mensuelles
servaient à payer les autres frais : c'étaient surtout les patrons
et les confrères fortunés et de généreux étrangers qui subve-
naient aux dépenses des festins . Il s'en trouvait, comme le pré-
sident du collège d'Esculape et d'Hygie, qui promettaient d'en
donner un chaque année '. Et puis la dédicace d'une statue
élevée par le collège à un patron, à un de ses dignitaires, à un
citoyen influent, à un fonctionnaire haut placé, était généralement
suivie d'un festin otfert par l'intéressé. Souvent celui-ci ajou-
tait une somme, dont les revenus devaient servir à l'entretien
du monument et à un repas annuel.
Il y avait mille autres occasions : l'inauguration de la schola,
l'atiiehage de Valbum du collège, la dédicace d'une statue érigée
par les confrères à un dieu ou à l'empereur, la dédicace d'un
don quelconque offert par un membre ou par un étran-
ger, etc. -. De même que les bienfaiteurs d'un collège invi-
taient parfois toute la ville à un banquet donné aux confrères,
de même les corporations considérées avaient une part privi-
légiée aux festins ou aux distributions qu'offraient à tous leurs
concitoyens les magistrats et les patrons de la cité 3. Ajoutez,
enfin, les repas de corps que le collège organisait avec ses
propres ressources ^.
* VI 10234, 1. 14 : cenam, quam Ofiliits Hermès q{uin)q{uennalis)
omnibus annis dandam praesentibus promisit, vel sport idas sicut solitus
est dare.
* Voyez nos Indices (Finances, Banquets et distributions).
3 Voyez ibid. et la III^ partie, chap. I, § 2, section n.
* Les eborarii et citriarii disent : e.r arca nostra. Mit th. d. Inst., 1890,
p. 287, 1. 8-9.
( 32o )
On voit que le nombre des festins, religieux ou profanes,
revenant régulièrement chaque année ou offerts par le hasard,
était grand dans certaines corporations. Leurs règlements
donnaient la liste des banquets célébrés à date fixe {orilo cena-
rum). Le coHège d'Esculape et d'Hygie en avait sept t ; celui de
Diane et d'Antinous en avait six "^ ; celui de Silvain en Lucanie
en avait cinq 3, et c'étaient des collèges de pauvres gens! Encore
faut-il ajoutera ces listes les banquets qui n'étaient pas annuels.
Il en était de même des artisans : un fragment du règlement
des ivoiriers et ébénistes de Rome mentionne sept festins
annuels ^, et nous en connaissons trois des pêcheurs et
plongeurs du Tibre 3. C'était, du reste, une fort ancienne
coutume dans tous les collèges romains, et Varron parle sans
doute de tous dans cette phrase curieuse, où il attribue le
haut prix des denrées à la grande consommation occasionnée
par les « innombrables festins », notamment par ceux des
collèges «j. En tous cas, ces repas de corps étaient parfois
plus fréquents peut-être que les réunions d'aff'aires; tandis
que la loi ne permettait celles-ci qu'une fois par mois dans
les collèges funéraires, ceux-là pouvaient se répéter au gré
des confrères "7.
Quel était le but de ces banquets? Nous avons vu que ce
n'était pas la charité. Sans doute, le but direct était d'honorer
un dieu, les Mânes d'un défunt, ou de solenniser un événe-
ment plus ou moins important pour le collège. Cependant on
est tenté de croire que la religion et le culte des morts n'étaient
' VI 10234, 1. 9-16.
2 XIV 2112, II, 1. 11-13 : ordo cenarum.
5 X444, 1. lietsuiv.
* Mitth. d. but., 1890, p. 287, 1. 9-19.
» Voyez les inscriptions citées supra, p. 236, n. 3.
' Varro, r. T., 3, 2, 16, éd. H. Keil : Sed ad hune holum [uî\pervenias,
opus erit tibi aut epulum aut collegiorum eenae, quae nune iimumera biles
e,vcandefaciunî annonam macelli.
■ Voyez supra, p. 152.
( 326 )
souvent qu'un prétexte. Quand un collège acceptait un legs à
condition d'honorer un dieu, l'empereur ou son patron, ou
bien à charge d'entretenir la tombe d'un étranger, j'imagine
qu'il y voyait surtout l'occasion d'un gai festin et le moyen de
passer une journée dans une cordiale intimité ^. En effet, ces
fréquentes et joyeuses réunions étaient le meilleur moyen de
fraterniser ensemble et de resserrer les liens de l'amitié. La
religion augmentait d'ordinaire la solennité et l'union. Trans-
portons-nous au milieu des confrères. Aujourd'hui leur pénible
travail est oublié; ils ont mis leurs plus beaux vêtements,
comme le prescrivent formellement certains donateurs -.
D'abord, ils assistent dans un religieux silence aux libations
de vin et d'encens que le président, vêtu de blanc, fait sur
l'autel du dieu qu'on fête 3, ou bien sur la tombe du défunt
dont on honore la mémoire. Parfois le collège se donne le
luxe d'un bain ^; c'était, du reste, sous l'Empire un usage
général et quotidien avant le repas principal, et il était peu
coûteux S. Puis les confrères s'asseyent à la même table, soit
dans la maison corporative, soit dans un temple de la ville,
soit même dans la maison du bienfaiteur qui donnait le ban-
quet 6. Le festin se passe le plus gaiement du monde : une
fois le sacrifice fini et les fleurs déposées sur le tombeau, on
chasse toutes les pensées graves ou funèbres, et l'on ne songe plus
* « C'est sous le symbole d'un repas pris en commun que l'antiquité
s'est figuré la communauté de sentiments et de croyances : Bene enim
majores nostri accubitionem epularem amicorum, quiavitaeconjunctionem
haberet, convivium nominarunt ». (Cic, de Sen., XIII). C. Jullian, biscr.
de Bordeaux, I, p. 209.
2 XII 4393 : apietate vestrapeto ut — eodie [hones]tissimo habitu inter
praesentes et epulantes — dividatis (Fabri subaediani, à Narbo).
3 XIV 2112, II, 1. 29-30. Cfr. X 444.
* XIV 2112, II, 1. 31-32 : oleum in coUegio balineo publico pon[at ante-
quarri] epulentur. Cfr. V 4449. 7905. 7920. IX 4691 : oleum.
5 Marquardt, Priv., p. 262 et suiv. Trad., I, 317 etsuiv.
« Voyez supra, p. 236, n. 4, fin.
( 327 )
qu'à la bonne chère et au plaisir de se trouver ensemble <. Les
affaires sérieuses sont remises aux réunions mensuelles [conven-
tus) : le règlement du collège de Diane et d'Antinous défendait
expressément d'en parler. « Celui qui a une plainte ou un rap-
porta foire, dit-il, doit h^ faire i'il'assemblée, pour qu'il ne nous
empêche pas aux jours de fête de dîner joyeusement et tran-
quillement '^. » Sans doute, le plaisir que ces pauvres gens
trouvaient dans ces repas n'était pas aussi délicat que celui de
Caton : ce qui faisait pour lui le charme des festins auxquels
il assistait comme membre des sodalités sacrées, ce n'était pas,
dit- il, le plaisir de la table, mais la société et la conversation
de ses amis et confrères 3. Les membres de nos collèges aiment
aussi à fraterniser, mais nous savons que la bonne chère
n'était pas le moindre de leurs plaisirs. Même ceux qui parais-
sent composés de gens très pauvres et d'esclaves, comme les
collèges funéraires, ne se contentaient pas d'un repas frugal.
La générosité de leurs bienfaiteurs leur permettait parfois de
s'égayer outre mesure. C'est ce que prouvent ces curieuses
lignes du même règlement : « Quiconque aura quitté sa place
pour causer du désordre, payera une amende de quatre ses-
terces (1,08 fr.). Celui qui aura injurié un confrère ou occa-
sionné du tumulte payera une amende de douze sesterces.
Celui qui aura outragé d'une façon quelconque le président au
milieu du repas, encourra une amende de vingt sesterces ^. )>
Si l'on cherchait à prévenir ces désordres, c'est qu'ils étaient à
^ Cicéron, parlant des banquets funèbres, dit déjà -. Quus (jtddem (lies
quemadmodum agatis et in quantani hominum facetonnn urbanitateni
inciirratis, non dico {De fin.. Il, 31, 103).
2 XIV 2112, II, 1. 23-24. Voyez supra, p. 231. - Hic conviva fuit dulcis,
nosset qui pascere amicos, dit l'épitaphe d'un f'aber tignuarius, \\ Arles
(XII 722).
3 Cic, De senect., 13, 45. Voyez supra, p. 36, n. 3.
* XIV 2112, II, I. 25-28. Dans les statuts de la curia Jovis de Simitthus,
on lit aussi : Si quis flamini maledixerit aut manus injecerit, d{are)
d{ebebit denarios) II ; mais on ne dit pas que c'est à l'occasion des ban-
quets. VIII 14683, b, 1. 1-2.
( 328 )
redouter. Dans quelques inscriptions, il semble même qu'il
reste des traces d'un désaccord survenu entre les confrères et
d'une réconciliation : à Rome, deux personnages dédient une
statue cl la concorde des batteurs d'or *.
D'ailleurs, ces excès étaient communs à tous les collèges
romains. Tous les membres des sodalités sacrées ne pensaient
pas comme Caton, et la plupart cherchaient un plaisir plus
grossier. Le passage de Varron s'applique à eux comme aux
artisans. Le juif Agrippa, prenant la défense de ses coreligion-
naires auprès de Caligula, rappelle ijue si Auguste permit les
associations juives, c'est qu'elles étaient des écoles de tempé-
rance et de justice; si le préfet d'Egypte, Flaccus, interdit les
autres corporations religieuses (kTaipECa'. xal 'jÙ'./oooi) , c'est que
leurs festins troublaient parfois l'ordre public ^. Cujas a donc
raison de faire ressortir les excès culinaires des collèges; mais
il exagère en disant qu'Auguste les défendit pour ce motif
seul, et non par crainte des factions ^. Plus tard , les écrivains
chrétiens parlent de ces bombances, et Tertullien oppose la
sobriété des chrétiens aux « beuveries et aux ripailles » des
païens, à l'intempérance des Saliens, des décuries d'appari-
teurs et des collèges voués aux cultes grecs et orientaux K On
* VI 95 : Concordiiu' coUegi brattiarionon inauratorum illi a-, p. d. d.
V 5(vi!2 : Concordiae eonnu, à la suite d'une dédicace aux quatre cui'a-
tores arkae Titianae du collège des fabri et des centenaires à Milan.
V 7617 : Concordiae coll. dcmlr. Pollientinonun). V 7555 : Concordiae
coll(eyi) fabr{H)n) Hasten.sium ille in lueworiain - sorori{s).
* Philo, De legatione ad Caiiun, p. i035 (édit. 1640) : 6 (jlèv yàp
(Aîigushis) TipùiTov àirc'oTctXe toKi; £Trt-po7roi<; twv xaxà ttjv 'Aaîav èuixpa-
TeuÔv — , Vva £7riTp£7rcoat rot; 'louûat'ot; [j.dvoi; el^ xà auvaytôyia auvsp-
y Ejôar ult) yàp sîvai TaO-a auvdÔou; ix [jlÉOt)^ xat uapotvt'aç sirl auaxaaei, lo;
X'ju.at've(TOat xà xi]; ElpT^vTj;, àXXà ù'.OT.i/.'xlziT. aiocppoTuvT); xat oixatoauvTis.
Cfr. Phu.o, In Flacc, p. 965 o et 984-985, éd. 1640 (Voyez supra, p. 1-27,
n. 3). LuMBiioso, Rirerche Aless., pp. '261-26-2.
^ r.UJ.\s, Olhscrv., VII, 30. Philon parle aussi des désordres : xoT;
irpâyiJLaaiv ejjLTrapotvoOaat. DiON Cassius (supra, p. 1*21, n. 4) parle du
peuple (xo ttXtjôo; , non des collèges.
* Tertull., ApoL, 39. Voyez supra, pp. 315 et 318.
( 329 )
pouvail fairo le mémo irproclic à toutc^s les corporations :
toutes aimaient ù fairo l)()nn(' clièro dans les limil(;s de leur
budget et de la générosité (le. leurs patrons. Saint Cyprien
parle do collèges funéraires, (jnand il blâme un évoque apostat
d'avoir quitté les agapes chrr'lii^nnes pour ces « honteux et
immondes festins auxquels il a longtemps participt'î dans un
collège avec les g(mtils ' . »
On peut aflirmer, sans crainte de se tromper, que les col-
lèges professionnels ne faisaient pas exception. L'usage de ces
festins était telhMnenl entré dans les mceurs, qu'Arcadius et
lb)norius, d<''fendant en 3o9 les cérémonies païennes, sont
obligés de permettre les réjouissances populaires et notamment
les fesin convivia, qui s'y rattachaient -.
iMalgré des querelles passagères, ces fréquents repas contri-
buaient puissamment à faire naître l'esprit de corps et à trans-
former le collège en une grande famille : aucun mot n'indique
mieux la nature des rapports qui unissaient les confrères, et
bien des indices prouvent qu'une grande fraternité régnait dans
leur sein. Les membres se regardaient comme des frères, et
parfois ils se donnent ce nom entre eux. A la vérité, ils le fai-
saient rarement et ce n'était qu'un terme d'affection. Dans leur
bouche, il n'avait pas le même S(;nsque dans celle des chrétiens,
qui s'appelaient frères comme ayant le même Père dans les
cieux, Minutius Félix rapporte même que ce nom excitait
l'envie des païens. Les fidèles des dieux orientaux, surtout
ceux de Mithra, employaient aussi les mois paler, mater, frater,
soror; ils désignaient par \h des degrés d'initiation, les chefs
et les membres •^. Les termes frater et soi'or fun'nt peut-être
' Voyez supra, p. 819, n. I.
* CoD. JisT., I, il, .;.
' FratrcSj chez les chrétiens, voyez supra, p. 319. Dans les collèges
professionnels : fahn fratrcs, à Industria, V 7487. C'est le seul exemple.
LiEUENAM (p. 18o) cite des inscriptions où frater 2i son sens propre. Dans
les collôû;es relic^ieux : fralres carissinws et collegas hon(oratos), collège
de Jupiler Dolichenus, VI i06; fratribus suis (collegium Velabroisium^
( 330 )
empruntés par les sectateurs de Mithra aux chrétiens, à qui ils
firent plus d'un emprunt i. Les membres des collèges profes-
sionnels et funéraires s'appelaient ordinairement collegae '^,
c'est-à-dire membres du même collège ; amici 3 ou sodales 4-,
c'est-à-dire camarades et amis. Le terme sodalis, dans les soda-
VI 467 ; fmtri et domino suo, culte de Bellone, Orelli, 2318; fratres, BuU.
com., 1886, pp. 143-147; cum fratribus et sororibus, collège mithriaque,
VI 277. Cfr. MiNUT. Félix, 9, 2 : {christiani) se promisce appellant fratres
et sorores. — Sur l'emploi de ces termes par les fidèles de Mithra, voyez :
WiLMANNS, o7, note. C I. L. VI 377, note, et pp. 1164. 1166. P. Allard,
La transformation du paganisme au I\^ siècle {Congrès scientifique des
catholiques, en 4891). — L'inscription du collegium fratrom sellariom
(XI 344*) est fausse. III 2509 : peto vos, fratres; c'est un collège chrétien.
— Sur le mot frater chez les païens, voyez : G. Boissier, Rel. rom., II,
pp. 292-293. FriedlaeiNder, Sitteng., I, pp. 120 et 398, et les auteurs
cités supra, p. 319, n. 2.
* Saint Augustin, In Joann.y V : Mithra christianus est. P. Allard,
/. L, p. 14.
2 VI 9626 : peto a vobis, collègue (chez les mensores frumentarii). IX
1463 : collegiac) b{ene) m{erenti) f{ecit) collegium dendrophorum. Collegae
et a[mico], V 7372. Collegae singuli, XII 3335. Collegae universi, Notizie,
1880, p. 260. Etc. Voyez nos Indices (Composition des collèges).
5 Amici subaediani, X 6699. Amici {fabr. et cent.), V 4483. Collèges
funéraires : V 4395. VI 6220. 10332. II 4540 : L. Licinio Secundo —
collegium amico. II 5550 ; amici et [c]onvictores civ[e]s.
* Très fréquent : V 4501 : lanari pectinari sodales. XII 5811"'^'* : pauci
artifices ISigro damus ista sodali (fabri navales).' Voyez supra, p. 275.
V 4001, vétérans. VI 338, horrearii. IX 460, aquarii. Voyez nos Indices
(Composition des collèges et Liste des collèges funéraires). Gaius dit :
Sodales sunt qui ejusdem collegii sunt (voyez supra, p. 157). L'étymo-
logie du mot est douteuse; peut-être contient-il le préfixe sum, avec
(cfr. sumo, de sum et emo), et le verbe edere : compagnon de table.
Festus, p. 276'', 24, et Isidore, Or., X, 245, mentionnent déjà cette éty-
mologie, parmi plusieurs autres.
On trouve encore : collegiati et corporati, mots qui s'appliquent, au
IVe siècle, aux collèges obligatoires et héréditaires ; voyez la III^ partie,
et nos Indices (Composition des collèges». Consacrand, sacrati, III 2109.
VII 1039. XII 5379. XIV 286 (collège de Mithra).
Pour l'emploi de Socii, voyez infra, p. 340, n. 6.
( 331 )
lités sacrées, indiquait uik; sorte de parenté spirituelle ^ ;
appliqué aux autres corporations, il exprime au moins une
étroite fraternité. Dans le même ordre d'idées, le protecteur et
la protectrice portent le nom de père et de mère, concurrem-
ment avec ceux de patron et de patronne. Une preuve du
dévouement que les confrères avaient pour leur collège, ce
sont les legs et les donations qu'ils leur font. Ce sont aussi
ces monuments funéraires oi^i nous lisons : Pins in collegio, il
fut pieux envers son collège, comme on disait : Pins in siios -.
Nous verrons, en étudiant l'organisation des collèges, que
l'égalité, comme la fraternité, n'y était pas un vain mot et que
les collèges étaient à la fois une petite république et une grande
famille.
On s'explique donc facilement pourquoi de nombreuses cor-
porations admettaient des gens exerçant un métier différent,
et surtout pourquoi ces étrangers y entraient ^. Cette vie fami-
liale a tellement frappé Gaston Boissier qu'il ne craint pas d'af-
firmer que le principal but de toutes les corporations romaines
était de rendre la vie plus facile et plus agréable. « Même dans
les corporations ouvrières, dit-il, on s'associait avant tout pour
le plaisir de vivre ensemble, pour trouver hors de chez soi
des distractions à ses fatigues et à ses ennuis, pour se faire
une intimité moins restreinte que la famille, moin§ étendue
que la cité, pour s'entourer d'amis et se rendre ainsi la vie
plus facile et plus agréable. Ce but est en réalité celui de toutes
les associations romaines, aussi bien des collèges, « où l'on
* Voyez supra, p. 35, n. 4.
2 II 1976. 3244. VI 9384 : pro sua pietate bene mereuti.
5 Voyez infra, pp. 341-345. C. Julliax(/. /., p. 955) dit : « Les corpora
f'abrorum devenaient ainsi (par l'admission de gens étrangers au métier)
des associations religieuses, amicales ou politiques, beaucoup plutôt
que des confréries industrielles, des réunions d'hommes de toute ori-
gine s'occupant de tout plus volontiers que de leur art. » Ce que
C. JuLLiAN dit du rôle et du but des collèges de [abri est excellent ilbid.,
pp. 954-956).
( 332 )
est reçu à cause du métier qu'on exerce », que de tous les
autres. »
Exprimée dans ces termes, cette opinion nous semble un
peu exclusive, quoiqu'elle contienne une grande part de
vérité.
Conclusion.
Il se peut que la religion ait donné naissance aux premiers
collèges professionnels; mais sans remonter à leur obscure
origine, nous constatons qu'aux temps historiques, sous l'Em-
pire notamment, les collèges, considérés comme associations
privées, avaient un caractère fort complexe et que les gens du
peuple cherchaient dans l'union des avantages multiples. L'ar-
tisan, le petit marchand, l'ouvrier appartenaient généralement
à la classe des affranchis ; toujours ils étaient placés au bas de
l'échelle politique et sociale : ils voyaient dans l'association
l'unique moyen de sortir de l'isolement et de la faiblesse, d'ac-
quérir un peu de considération et même un peu d'intluence,
enfin de se créer dans la société, dans la cité, une place plus
honorable. Nés en dehors de la politique, les collèges ne s'y
laissèrent entraîner qu'à la fin de la république par les agita-
teurs populaires, et ils continuèrent, au début de l'Empire, à
se mêler aux élections municipales. Mais l'association leur
procurait des avantages plus réels. Grâce à elle, les artisans
jouaient un rôle dans leur ville et ils se relevaient à leurs
propres yeux ; car ils figuraient parfois dans les fêtes publiques,
et, presque exclus de la grande cité, ils avaient la conscience
de former une cité plus restreinte, où ils étaient seuls maîtres,
où ils ne rencontraient que des égaux, où ils pouvaient même
commander : leur vanité y trouvait la même satisfaction que
l'ambition du citoyen riche cherchait dans la gestion des fonc-
tions municipales, et que l'augustalité procurait aux affranchis.
Ils espéraient aussi être en état de défendre plus efficacement,
à l'occasion, leurs intérêts de toute nature, sans réclamer toute-
( 333 )
fois pour leur métier des privilèges contraires à la liberté
industrielle. Mais l'association leur permettait surtout de donner
satisfaction à certains besoins religieux; car, suivant l'antique
usage, tous les collèges avaient un culte, et de bonne heure,
sinon toujours, ils s'occupèrent des funérailles. Enfin, les asso-
ciés étaient guidés par ce besoin inné, instinctif, qu'éprouvent
tous les hommes de la même condition de se rapprocher entre
eux, de se créer un centre de réunion, de se délasser de leurs
fatigues avec ceux dont ils partagent les idées et les sentiments.
En résumé, la religion, le soin des funérailles, le désir de
devenir plus forts pour défendre leurs intérêts, pour s'élever
au-dessus du commun de la plèbe, le désir de fraterniser et de
rendre plus douce leur pénible existence, telles étaient les
sources diverses de cet impérieux besoin d'association qui tra-
vaillait la classe populaire. Les collèges professionnels romains
ressemblaient aux gildes du moyen âge : comme elles, c'étaient
des confréries religieuses, qui honoraient leur dieu protecteur,
de même que les gildes honoraient leur saint ; comme elles,
ils constituaient une caisse mortuaire ; comme elles, ils resser-
raient les liens de la fraternité professionnelle. Mais ces ressem-
blances viennent de la nature des choses. Les différences
étaient tout aussi caractéristiques ; si les collèges romains s'oc-
cupaient de certains intérêts communs à une profession, ils
ne réussirent et ne cherchèrent peut-être pas à s'assurer le
monopole d'un métier ni à organiser l'apprentissage; il semble
même que dans leur vie intérieure les choses du métier n'oc-
cupaient pas une grande place. S'ils intervinrent quelquefois
dans la politique, leur rôle n'est pas comparable, même de
loin, à celui que les gildes jouèrent dans nos communes.
D'autre part, les gildes n'étaient pas appelées à remplir des
services publics, comme le furent les corporations romaines
de l'Empire.
m)
CHAPITHE IL
ORGANISATION DES COLLÈGES PROFESSIONNELS
EN VUE DU BUT PRIVÉ ».
§ 1. AUTONOMIE DES COLLÈGES; FONDATION ET DISSOLUTION; NOMS
DIVERS. — § 2. C03IP0SITI0N DES COLLÈGES; ADMISSION. —
§ 3. HIÉRARCHIE ET DIVISIONS ! DÉCURIES, CENTURIES. — § 4. ADMI-
NISTRATION. ASSEMRLÉE GÉNÉRALE. — § 5. ORDO DECURIONUM.
— § 6. FONCTIONNAIRES ET SERVITEURS DES COLLÈGES. —
§ 7. PATRONS. — § 8. finances; budget DES RECETTES ET
DES DÉPENSES.
§ i. Autonomie intérieure des collèges.
Pour atteindre ce but privé si complexe que nous venons
de décrire, les collèges avaient la faculté de s'organiser comme
ils l'entendaient. Il est probable que dès l'origine l'Etat leur
laissa toute liberté sous ce rapport. Les Douze Tables confir-
mèrent cette autonomie de la manière la plus formelle :
Sodales sunt, qui ejusdem collegii sunt, quam Graeci ï-caipioLv
vocant. His aiilem potestatem facit lex, padioiiem, quam velint,
sibi ferre, dum ne quid ex publica lege corrumpant -. Cette loi
' Pour cette matière, les témoignages épigrapliiques sont excessive-
ment nombreux; afin de ne pas charger les notes, nous renvoyons aux
Indices de notre Recueil d'inscriptions, nous bornant ici à donner
l'essentiel.
2 DiG., 47, 22, 4. Voyez supra, p. 79, n. 4, et p. 157. Cfr. Dirksen,
pp. 88-89. Karlowa, p. 65. Foucart, Op. c, p. 47, dit d'Athènes :
« La liberté d'association était le droit commun. La loi de Solon n'a
nullement pour objet de reconnaître un droit que personne ne songeait
à contester ou à restreindre ; elle détermine seulement, au point de vue
juridique, les effets des engagements contractés par les membres de la
société. »
( 33o )
n'(^ctroYait pas la liberté dassorMalion, mais l'autonomie. On
conçoit, en eftet, l'une de ces deux chos(;s sans l'autre; on
comprend que l'autorisation soit exigée et que la corporation,
une fois qu'elle l'a obtenue, soit autonome ou non, c'est-à-dire
libre de se donner une conslitution ou forcée de la soumettre
à l'approbation du gouvernement A Home, les collèges
n'eurent le droit de se former spontanément (pie jusqu'en
l'an 64 avant notre ère, mais ils eurent toujours le droit de
s'organiser à leur gré. La loi des Douze Tables visait naturel-
lement les collèges existants, c'est-à-dire les sodalités sacrées
et les corporations professionnelles; mais elle s'appliqua aussi
à tous ceux qui naquirent ensuite par l'initiative publique ou
privée. Tous votaient librement leurs statuts, appelés ^^fld/o, lex
collegii ou conventio collcyii '. Ils devaient observer seulement
le principe : jus jmblicum privatoriun pad'is mutari non potest "^,
c'est-à-dire que rien dans leur règlement ne pouvait être
contraire aux lois. Il s'ensuivait que le collège qui se vouait à
un culte prohibé ou qui se proposait un autre but illicite,
n'avait pas le bénéfice de cette loi. Sous l'Empire, les collèges
non autorisés ne pouvaient pas l'invoquer non plus. Les princes
respectèrent cette autonomie; ils n'y apportèrent certaines res-
trictions que lorsque les collèges furent entrés au service public
et surtout quand l'Etat dut recourir à l'arbitraire pour main-
tenir ces rouages administratifs devenus indispensables ^. En
accordant aux collèges le droit de voter leur pacte, de conclure
cette convention, de se donner cette loi, l'Etat reconnaissait leurs
statuts comme un contrat obligatoire pour tous les membres et
il défendait les collèges contre les récalcitrants. Le règlement
fixait les droits et les devoirs réciproques de la corporation et
' Pactio, DiG., 47, '2% 4. Lex, VI 10-234, 1. 1. 10-2'.)8, 1. d. \'2. 17. VIII
25S7, 1. 38. XIV 2112. 1. 6. 18. 19. III, p. 924. Lex et conventio, X 1579.
Decretum publicum, VIII 14863. Cfr. Schiess, p. 79. Liebenam, pp. 180-
182.
2 DiG., II, 14, 38 (Papimanus).
' Voyez la III^ partie.
( 336 )
des membres, et il déterminait certains rapports du collège
avec les tiers. Les membres pouvaient réclamer leurs droits en
justice; d'autre part, ils s'engageaient à respecter les statuts,
et le collège avait le droit d'en exiger l'observation et d'exclure
ceux qui ne s'y conformaient pas. On lit en tête de la lexs col-
legi de Lanuvium : Tu qui novos in hoc coUegio intrare vole[s,
p]mis legem perlege et sic intra, ne postmodum queraris aut
heredi tuo controver[si]am relinquas i. Nous avons vu que l'héri-
tier institué avait la petitio funeris pour obtenir le paiement de
la prime funéraire '^, et que les statuts du collège de Lanuvium
prévoyaient le cas où le patron, le maître ou le créancier d'un
membre défunt s'aviseraient de réclamer cette prime sans avoir
été institués 3. Les cultores Jovis Heliopolitaiii de Pouzzoles possé-
daient un champ de sept arpents avec une citerne et des taber-
nae, et ceux-là seuls en avaient la jouissance qui ne contreve-
naient pas au règlement : Hic ager — eorum possessorumjuris est
qui in cultu corpuris Heliopolitanorum sunt eruntve, atque ita is
accessus jusque esto per januas itineraque ejus agri, qui nihil
adversus lecem et conventio7iem ejus corporis facere perseverave-
rint ^.
Le vote des statuts était une chose grave et solennelle : pour
voter les siens, le collège d'Esculape et d'Hygie ne s'était pas
assemblé dans sa schola, mais dans le temple des divi, dans
la chapelle de Titus, où il ne se réunissait que pour les ban-
quets sacrés s. Le règlement était aiFiché dans la maison cor-
porative, parfois dans un temple, où tout le monde pouvait
en prendre connaissance. C'est dans un temple d'Esculape,
voisin du camp de Lambèse, qu'on a retrouvé la lex des optiones
1 XIV 2112, 1,1. 18-19.
2 Voyez supra, pp. 268, n. 2 et 272, n. 3.
3 Voyez supra, p. 270, n. 2.
* X 1579. Voyez encore : VIII 14683, 1, 1. 6 : Placuit inter eis et conve-
rtit secundum decretiim publicum observare (règlement de la Curia Jovis
de Simitthus). Un exemple d'exclusion, supra, p. 35, n. 2.
» VI 10234, 1. 8 et 23. Voyez supra, p. 210.
( 337 )
de la troisième légion Auguste ^, et le collège de Diane et
d'Antinoiis avait obtenu du diclateur de Lanuvium, son patron,
la permission d'afficher la sienne dans le temple d'Antinous :
praecepit legem ah ipsis conslUutam siib tetra[stylo A]ntinoi
parte intehori perscribi "2.
On voit qu'ils ont soin de dire que la loi a été établie par eux-
mêmes. Voici donc comment il faut se représenter la naissance
des collèges privés -^ Les hommes de la même profession,
qui veulent s'unir (coire) pour travailler au but commun, ou
ceux qui veulent s'associer pour les funérailles ou pour le
culte privé d'une divinité, s'entendent, et puis ils s'assemblent
pour voter leurs statuts. Souvent c'est l'un d'eux (conslilutor
collegi ■^) qui prend l'initiative et invite les autres à se joindre
à lui. Quand le jurisconsulte Neratius affirme qu'il faut trois
personnes pour faire un collège, il ne parle pas d'une prescrip-
tion légale : il faut être trois au moins, parce que autrement
une majorité n'est pas possible 3. Ainsi se fondent les collèges ^>.
Sous l'Empire, on devait demander l'autorisation, qui était la
confirmation ou la reconnaissance légale d'un fait accompli,
car généralement le collège existait déjà de fait 7. Rarement
c'était l'Etat lui-même, c'est-à-dire l'empereur ou le gouverneur
de la province, qui prenait l'initiative; mais même dans ce
cas on n'usait pas de contrainte : les membres se faisaient
inscrire librement et, pour la poursuite de leur but privé, ils
s'organisaient comme ils l'entendaient.
1 VIII 2557.
2 XIV 2112, 1, 1. 6-7.
3 G. BoissiER, Relig. rom., II, p. 257. Liebenam, pp. 169. 176-177.
* VI 10251=' : constitutor collegi Numinis dominorum quod est sup
templo divi Clamli. XIV 3659 : Hic Eutactus conlegium primus constituit.
Ce sont des collèges funéraires.
s DiG., 50, 16, 85. Pernice, I, 292.
6 Constituerez Suet., Div. JuL, 42 {supra, p. 112). Cic, In Pis., IV, 9.
Instituere, Ascon., In Pis., p. 8. Tac, Ann., XIV, 17. Plin., Ad Traj.,
33. Paneg., 54. Dic, 50, 6, 6, 12.
' Supra, p. 119, n. 1.
Tome L. 22
( 338 )
La dissolution des corporations établies par l'initiative privée
dépendait sans doute des affiliés. Tant qu'elles étaient pros-
pères, qu'elles comptaient un nombre suffisant de membres
et disposaient des ressources nécessaires, elles continuaient à
vivre. La dissolution n'avait lieu que quand les membres
venaient à faire défaut, et alors elle devait être votée et publiée,
atin de prévenir les réclamations des associés, comme celles
des tiers envers qui le collège avait des obligations; sinon le
collège continuait d'exister aux yeux de la loi, même s'il était
réduit à un seul individu '. Nous possédons un exemple curieux
de la fin d'un collège funéraire composé d'affranchis et d'es-
claves employés dans les mines d'or de Dacie ^^. Sur l'une
des tablettes de cire retrouvées dans les mines de Verespatak
lAlburnus Major), on a déchiffré la copie d'un édit daté de
l'an 167, par lequel Artemidorus, magister du collegium Jovis
Ceiiieni, et les deux questeurs, Valerius et Offas, font savoir
que ce collège est dissous. Us donnent d'abord les motifs.
De cinquante-quatre membres, il n'en restait que dix-sept,
et depuis longtemps personne ne s'était plus présenté aux
assemblées statutaires pour verser les cotisations. Julius,
collègue d'Artemidorus (commagisler), n'a pas paru aux
assemblées ni même à Alburnus depuis son entrée en
charge. Par conséquent, la caisse n'est plus en état de
payer les primes funéraires. Voilà pourquoi ils ont con-
voqué les membres qui restent; ils ont rendu leurs comptes à
ceux qui se sont présentés; ils ont restitué l'argent qui était en
caisse et repris leur caution. Par la présente affiche, disent-ils,
ils font savoir que le collège est dissous, afin que personne ne
puisse s'imaginer « qu'il a encore un collège » pour l'enterrer,
< DiG., III, 4, 7, 2, Ulpianus : In deciirionibus vel aliis universitatibiis
nihil refert, utritm omnes idem maneant an pars maneat vel omnes
immutati sint. Sed si universilas ad uniim redit, magis admittilur posse
eum convenire et conveniri, ciim jus omnium in iinum recciderit et stel
nomen universitatis. Savigny, II, p. 341. Gierke, III, p. 18L
2 CIL. III, pp. 924 et suiv. Bruns, Fontes ", p. 319.
( 339 )
s'il vient à mourir, et afin qu'on ne réclame pas la prime funé-
raire. Il résulte de lu que les derniers membres se partagent
la caisse; nous avons vu que la loi prescrivait la même chose
en cas de dissolution d'un collège illicite par l'autorité ^.
C'est ainsi que les collèges disparaissent. Deux cas particu-
liers pouvaient se présenter : celui des collèges qui poursui-
vaient un but illicite et celui des collèges officiels. iN'ous avons
parlé de la suppression des premiers par mesure d'ordre - ;
quant aux corporations qui entrèrent au service public comme
corps, elles renoncèrent par là môme à une partie de leur
liberté : elles eurent des engagements à respecter. Aux premiers
siècles, du reste, elles furent comblées de privilèges et l'idée
ne leur vint pas de se dissoudre ; quand elles en eurent Tenvie
pour échapper aux charges, il était trop tard et l'Etat les
maintint de force, comme nous le verrons dans la troisième
partie.
Une conséquence de la liberté laissée aux collèges, de leur
complète autonomie, ce fut une grande variété dans leur orga-
nisation intérieure; ils ne se ressemblaient que dans les par-
ties essentielles.
Les noms que prenaient les corporations professionnelles
diff"éraient déjà : il n'y avait pas de règle fixe 3. Nous aurons
l'occasion d'y revenir et nous ne faisons ici que les énumérer *.
Le nom ordinaire est collegium S; il désigne toute réunion de
personnes formée pour travailler à un but commun, perma-
nent et non limité, comme celui de la societas, à la vie des
' Voyez supra, p. 136.
■2 Voyez supra, pp. 132-140.
'^ Makcien, Dig., 47, 22, 3, 1 : collegium vel quodcunque taie corpus.
Traj., Ad Piin., 34 : quodcunque nomen — dederimus. Gaius, Dig., 3, 4,
1 : neque collegium neque hujus modi corpus. Voyez supra, pp. 1S5-160.
^ Voyez notre Index collegiorum, Appendice. Liebenam, pp. 163-169.
2 Voyez supra, pp. lOo et 108. Conlegium (p. 87, n. 6), collegius,
collignium, collecium, colligeus, etc., sont des variantes du même nom.
Sur collegius, voyez Gatti, Bull, corn., 1890, p. 145.
( 340 )
membres qui !a composent actuellement i . Sodalicium, réunion
de sociales ou de compagnons de table, est employé comme
synonyme de collegium; il semble seulement exprimer mieux la
fraternité 2; il est plus rare, mais s'applique aussi à toutes les
sortes de collèges 3; dans les lois, on lui donnait parfois encore
le sens péjoratif qu'il avait pris sous la république ^. Depuis
la disparition des clubs politiques, le moi sodalitas ne désignait
plus que les sodalités religieuses officielles. Societas et socii
indiquent, dans leur sens propre, une association formée entre
personnes déterminées pour un temps fixé S; mais socii est
parfois mis pour collegium 6. Qrdo s'applique à ceux qui
ont le gouvernement d'une communauté, et peut remplacer
collegium, quand c'est l'assemblée générale qui gouverne 7.
D'autres termes sont usités suivant les localités : contabernium,
studium; et en grec : cTÙyooo!;, xoivoy, eoyaT-ix, è'pyov, o-jvipyLov
(Tuv£pya<7'!a, 'zi/vr^, G'j^myyL'y., (7uui6{w7t.;, sraipia, qui prend
parfois un sens péjoratif 8. Il y a un mot qui se distingue de
tous ceux qui précèdent : c'est corpus {(tùgt/]ixol) 9. Quand on
* DiG. III, 4, 7, 2 (voyez supra, p. 338. n. 1). X 1579 : qui — sunt
erunlve (voyez supra, p. 336). VI 9403 : reliquas ollas X, qui in hac
decuria allecti erint singulas do iego. VI 10231 : quandiu is collegius
steterit. Il 210i2 : collegas su[cc]edentes deiucepsq{uBi successores. X 444 :
iis qui in collegio Siluani hodie essent quique postea subissent.
2 Voyez supra, p. 330 : sodales.
3 Sodaliciuui fullonum (IX 5450), marmorariorum (V 7044j, juvenum
(V 6951), urbanorum (II 2428), Silvani (VI 630. 647), Solis Invicti
(VI 717), etc.
* Voyez supra, p. 134, n. 5.
^ MoMMSEN, De coll., p. 39. Dig., XVII, 2, 70 : NuUa societatis in
aetermun coitio est.
6 A Puleoli : socii scabillarii et collegium scabillariorum, IX 1642.
1643. 1647; socii coronarii, VI 4414; .socii dissignatores, IX 5461.
7 Ordo ou collegium Baulanorum, X 1746. 1747. Ordo proretarum,
X 3483. Ordo regalium, X 6094. Oy^do corporis, ou corporatorum, ou
collegi. Voyez nos Indices, et infra.
* Voyez supra, p. 134, n. 4.
« Voyez la 111^ partie.
( 341 )
veut indiquer de plus que le collège est autorisé, reconnu
comme un organisme public et, par conséquent, doté des
droits qui constituent la j)ersonnification civile, on l'appelle
corpus. Tel est le sens juridique de ce mot; mais dans l'usage
ordinaire, il est employé concurremment avec collcgium,
quand il s'agit d'un collège autorisé : collegium pistorum ou
corpus jnstorum ^.
L'organisation intérieure nous est assez bien connue grâce,
aux inscriptions, et nous allons la décrire dans ses traits
généraux, en examinant successivement la composition des
collèges, les conditions de l'admission, la hiérarchie, l'admi-
nistration et particulièrement l'administration financière.
§ 2. Composition des collèges. — Admission.
Les collèges professionnels, comme les autres, avaient des
membres effectifs, des membres honoraires et des protecteurs
ou patrons '-i.
On est tenté de croire qu'une corporation qui prend le
titre de cullegium fabrum, par exemple, n'admet que des fabri,
et cependant il n'en était pas ainsi : les corporations romaines
recevaient souvent des gens étrangers au métier dont elles por-
taient le nom 3.
Nous ne citerons pas les employés subalternes des magis-
trats, viateurs, licteurs et crieurs publics, que l'on trouve dans
les collèges d'artisans ; en eftét, beaucoup d'entre eux exer-
çaient un métier et, à ce titre, ils pouvaient entrer dans le
• VI 1002. 1692.
^ LiEBEXAM, pp. 182-189. ScHiEss, pp. 71-7o. C. JuLi.iAN, fabri, pp. 952-
953.
3 A. DE BoissiEU, Inscr. de Lijoîi, p. ^03. G. Boissier, llelig. rom.,
II, pp. 255-256. Maué, Vereine, p. 5, n. 7. C. Juluan, fabri, p. 955.
LiEBENAM, pp. 258-259. GiîADENWiTZ, Savigiiijs Zeit.schr., Rom. Abth.,
1890, XI, pp. 76-82.
(3i2 )
collège correspondant i. Il est vrai que la plupart des décuries
d'appariteurs ne formaient pas seulement des corps adminis-
tratifs, mais s'occupaient aussi de leurs intérêts privés; les
appariteurs religieux constituaient même de véritables col-
lèges -, et ceux-là n'avaient pas besoin de se faire recevoir dans
un collège d'artisans. Les vétérans, quand ils allaient habiter
une ville dépourvue de colle (jiumveteranorum, se faisaient par-
fois admettre dans une corporation quelconque pour jouir des
avantages de l'association, et nous en trouvons parmi les
joueurs de tlûte, à Rome; parmi les fabri, à Aquilée; parmi les
fahri et les centonaires, à Aquincum ; enfin parmi les cente-
naires de Carnuntum 3. Les artisans trop peu nombreux pour
former un corps agissaient de même : ils entraient dans un
collège de leur choix. Les exemples ne manquent pas dans les
inscriptions. A Lyon, les fahri tifjnuarii ont pour collègues un
fabricant de vaisselle et de fine poterie, un négociant en sau-
mure et un jeune homme «d'une habileté incomparable dans
l'art de façonner le fer '^w. Une inscription d'Amsoldingen nous
montre qu'une corporation de ces mêmes artisans avait parmi
* VI 1802. 1975. Un lictor curiatus a.sacris publicis — , viaior qui cos.
et pr. apparet est decurio conlegi fahrum ferrarium^ VI 1892. Marcjari-
tarius, VI 192o. Coacior, VI 1936. Mcrcator olei Idspani, VI 1933. Etc.
Cfr. VI 1872. XIV 296. Mommsen, Rliein. Mus., VI, 1848, p. 55.
2 Voyez supra, pp. 54-55.
5 VI 2854, à Rome. V 908, à Aquilée : un vétéran qui est dolahrar{ius)
col{legii) fa.b{rum). A Aquincum, deux vétérans sont enterrés par les
fabri et les centonaires, III 3554. 3569. A Carnuntum, un vétéran semble
être d{ecurio) c{ollecjii) c[ent.), ou plutôt : c{oloniae C{arnunti), III 11223;
un autre est magiister) du collegium coiweter{anorum), III 11189. D'autre
part, on trouve un [iiflagister colilegii) vei[er'\anoru{m) centonariuru{m),
ou peut-être col{legiorum) veteranoru{m) {et) œntonarioru{m), puisque
chacun de ces deux collèges se trouve à part, III 4496^ D'autres vété-
rans sont chefs ou patrons d'un collège industriel : IX 1459. 3923.
5843. I 1436. Maué, Yereine, p. 42, n. 10^
*• Allmer, Musée de Lyon, II 166 : negociator muriarius. 170 : exercens
artem cretariam. 184 : juvenis incomparabilis ingeni artis fabricae fer-
rariae. V^ilmanns, 2228. 2239.
( 343 )
ses membres un Lydien et son fils, orfVîvres de leur métier ^.
Sur la tombe d'un marchand de laine, i\ 3Iodène, on lit qu'il
appartenait au collegium lidrenarionim, di; Uome-. Un cuisi-
nier était dendrophore ù Alba Fucens •^. Les menuisiers {subae-
(liani) d'Anlium rendent les derniers devoirs ù un changeur
{numularius) '^ . Le collège des fabri tignuarii de Luna possède
deux décurions qui sont qualifiés de médecins S. Un membre
de la corporation de ces mêmes fabri tigmiarii, à Arles, était
regardé par tous comme un maître en son art, et il était surtout
habile à construire des machines hydrauliques et à installer des
conduites d'eau c. Enfin, à Lyon, les utriculaires avaient admis
dans leur collège un marchand de toiles et un peigneur de
laine''. On peut croire que ces artisans et marchands n'avaient
pas trouvé de meilleur moyen de s'assurer les bienfaits de
l'association^. Ils pouvaient aussi avoir d'autres raisons qui
» MoMMSE.N, Ini harenariorum Romae, negotians
lanariua.
5 IX 3938. C'est un sévir Aiigustalis et dendroforus Albensis. Sur les
côtés de la pierre, on lit : Coco optimo. Remarquez qu'il n'est pas seule-
ment membre du collège des dendrophores, mais dendrophore lui-
même. Cela semble étrange, à moins que le mot dendroforus n'ait ici
qu'une signification religieuse. — A Pola, il y a peut-être un fid{lo) dans
le même collège, V 82""^''.
*' X 6699. Sur le n^ V 7044 : tesseiyiria) liijuar{ia), voyez infra, p. 349.
^ XI 13oo. Voyez supra, p. 307.
« XII 722 : doctior hoc nemo fuit, potuit quem vincere nemo, organa
({ui nosset facere, ciquarum aut ducere cursum. A Pola (V 97), dit
C. JuLLiAN (/. /.), un membre du collège des fabri est représenté avec un
rouleau de cordes, une perche et un quart de cercle : il ressemble singu-
lièrement plus à un arpenteur qu'à un charpentier. A Aquilée, V 908 :
dolabrar{ius) col{legii) fabiruui', re|)résenté avec un centon et une hache.
' Allmer, /. /., II 18'J : lintiarius. 182: negotiator [aritis prossari[ae].
WiLMANNS, 2240.
^ Marquardt (Pny., IP, p. 694. 11^, p. 715. Trad., II, p. 375) cite encore
(iRUT., 235, 7, à Ostie, qui n'est pas dans le Corpus, et Grut., 261, 4.
qui est apocryphe (VI 738*).
( 344 )
nous échappent. Ce n'était pas ce motif qui avait guidé le
marchand de salaisons de Lyon, puisqu'il était aussi naule du
Rhône et qu'il y avait un collège de naiitae Rlwdanici ^. Il
semble qu'à Lyon il n'était pas rare que le même homme
exerçât deux négoces, deux ou plusieurs métiers tout à fait
divers; dans ce cas, il avait au moins qualité pour être reçu
dans deux ou plusieurs collèges, et cela arrivait souvent,
comme nous le verrons tout à l'heure'^.
On trouve aussi des hommes qui se disent fonctionnaires d'un
collège dont les membres exercent une profession différente de
la leur : à Rome, on connaît deux marchands de perles qui
sont présidents à vie des dendrophores -^ ; à Alba Fucens, un
vétéran préside le collège des [abri lignuaru ; à Ostie, un bate-
lier du Tibre et marchand de blé préside le collège des
boulangers 4.
On ne trouve pas seulement des corporations qui admettent,
par exception sans doute, des étrangers; il y en a qui sont
composées de deux métiers similaires. Nous connaissons un
exemple curieux d'un collège romain qui avait son local au
delà du Tibre et qui renfermait les ivoiriers et les ébénistes;
mais ses statuts défendaient à ses curateurs, sous peine d'exclu-
sion, de laisser entrer un autre artisan •>. A Tibur, les loueurs
de bêtes de somme étaient associés avec les cochers ou loueurs
' Allmeu, II 166.
- Alluier, II 173 : n[cgociat]or vina[rui.s et art^is creta[riae Lug[u-
dimi)]. Voyez infra, p. 351.
3 VI 641. 1923. Bull, corn., 1890, pp. 18-25. Voyez supra, p. 246, n. 1.
* IX 3923, à Alba Fucens. XIV 4234, à Ostie.
•^ Mit th. des Inst., 1890, p. 288 : si alius quant negotiator eborarius
aut citriarius per [fr]aude)u euratorum in hoc collegium adlectus esset, uti
curatores ejus [cau]sa ex albo raderentur ab ordine. Sur les citriarii^
voyez A. De Ceuleneer, Bull, de IWead, roij. deBelg.. 1891, t. XXI, n'^ 2,
pp. 280-291, cl t. XXII, no 7. Mauquardt, Pm., IP, p. 723. Trad , II,
p. 384. Il y avait des rai)|)orts entre ces deux métiers; les mensae citreae
étaient montées sur pied d'ivoire.
( 34o )
de voitures, sous rinvoc.ation d'Hercule '. Les fahri el les cen-
tonnires ne formaient ({u'iin seul et même collêi^c à Milan, à
ïrea et ù Regium Lepidum -; ailleurs, leurs collettes sont bien
distincts ^.
Tout cela prouve que les corporations ouvrières des Romains
étaient peu exclusives. Le Digeste nous en fournit une preuve
nouvelle : quand certaines corporations obtinrent des privi-
lèges attachés à l'exercice du métier, il ne leur fut pas défendu
de recevoir des étrangers, mais les artisans seuls jouirent de
l'immunité *. II arrivait parfois cependant que l'empereur,
en accordant l'autorisation, défendait l'entrée du collège aux
étrangers : Ego aîtendam, dit Pline, ne quis nisi faber recipia-
tiir^^; nous en concluons que, d'ordinaire, les corporations
étaient libres. Il est probable cependant qu'à tout prendre, la
plupart des membres appartenaient au même métier, sans quoi
le nom de ces collèges n'aurait plus eu aucune raison d'être, et
l'intérêt des confrères l'exigeait d'ailleurs aussi. En tout cas,
rien ne permet de croire que les collèges portant le nom
d'un métier étaient formés des possessores affectés à un service
' VI 9485 : collegium jumentariorum, qui est m cisiaiis tiburtinis
Hercitlis. Cfr. Friedlaender, Sitt., I^, p. 16.
2 V 5763. 5738, à Milan; dans les autres inscriptions, le mot colkgiuin
est abrégé. IX 5853, à Trea. XI 970, à Regium. A Salona, on a un
dec(urialis) coll{egii) on coUiegiorum) fab.etcent., III 2107; chacun des
deux collèges se rencontre aussi à i)art.
5 Nous le montrerons dans la 111^ partie. Il s'agit de deux collèges
distincts dans les inscriptions suivantes : Allmer, M. cl. L., II 185 :
corpus fabrorum tign... [it]emquc artifïcum tectorum; IX 1459 : collegium
dendroforum itemque fabrum, à Ligures Baebiani; Pais, 870 : c(o//^m)
fiabrum et) c(entonariorum): III 4496'^ {supra, p. 342, n. 3).
* DiG., 50, 6, 5, 12 : \ec o)nuibus pjvmiscuc qui assuinpti suut in lus
collcgiis immumtas dalur, sed artificibus dumta.vat. Il vient de men-
tionner le fabrorum corpus. — Nous ne savons sur quoi G. Boissier
s'appuie pour dire : « La loi promulguait des peines sévères contre ceux
qui se faisaient recevoir dans une corporation ouvrière quand ils étaient
étrangers au métier qu'on y exerçait. » Rev. arch., 1872, p. 93.
^ Épis t. ad Traj., 33.
( 346 )
public déterminé, et non tlartisans, comme le prétend Rod-
bertus '.
Comme les collèges se formaient librement, chacun était
libre d'y entrer ou de n'y pas entrer. Ni l'Etat ni le collège ne
forçaient personne de s'atlilier. Il est probable que tous ou
presque tous les artisans et commerçants se faisaient recevoir
dans le collège de leur profession, parce que Finlérét les y
attirait; mais cela dépendait d'eux, et, certes, l'exercice d'un
métier n'était pas interdit en dehors des corporations -.
Recevait-on les esclaves ^? Sous la république, les bouchers
romains {lanii) ont deux maghtri , l'un atïranchi, l'autre
esclave 'i' ; à la même époque, les cisiarii de Prénestc ont deux
magistri aûràïichis et deux mi)iistri esclaves i>, tandis que le col-
lège des foulons, àSpolète, avait quatre magistri quinquennales,
dont trois affranchis et un esclave G. Plus tard, les foulons
d'Aricie ont pour curateur un esclave de la ville ", et l'on trouve
des esclaves parmi les cardeurs de laine de Brixia^, sur la liste
des dendrophores de Luna, ainsi que sur celle des fabri tignua-
• RoDBERTLS, VIII, 1867, p. 421, n. 62. Voyez 111^ partie, chap. II.
MoMMSEN {Savignijs Zeitschr., Rom. Abtli., XI, 1800, p. 77) fait observer
que les fabri, étant employés comme pompiers, pouvaient recevoir
d'autres artisans que des fahri. En tout cas, les autres collèges où le
même phénomène se présente, n'avaient pas ce motif.
2 Voyez supra, p. 188. C'est ce que G. Jullian admet aussi pour les
fabri {l. /., p. %d).
5 Wallon, III, pp. -451453.
^ VI 167. Cfr. 168 : deux affranchis.
* I 1129 = XIV 287-4. Les coques atriensis, dans la même ville, ont
quatre magLstrcs esclaves; mais c'est probablement un collège domes-
tique, I 1540 =s XIV 2875, et la note. Les lani ont quatre magistri
affranchis, 11131 = XIV 2877.
c IU06=-XI4771.
" XIV 2156 : collegmm lotorum.
8 V 4501 : lanari pectinar{i) sociales, à un esclave. Cfr. Bull, com.,
4888, p. 468, à Rome : D. M. Felici ex corporae subaedianorum, etc.
Ephem., VII 518 : Vitulus argentarius caelator hic situs est, cura conleci
fabri argentar. (sic), etc., à Caesarea.
{ 347 )
rii de la munie ville i. Ces exemples sont contraires à Topi-
nion (le Dirksen (!t de Mommsen -, qui pensent que les esclaves
étaient exclus des corporations ouvrières. Et pourquoi les col-
lèges des petits artisans n'auraient-ils pas reçu des esclaves
aussi bien que les collegia tenuioriim? Les esclaves exerçaient
divers métiers, et ils trouvaient dans les collèges les mêmes
avantages que les hommes libres. De leur côté, les petits arti-
sans libres étaient, pour la plupart, des affranchis, auxquels
il ne répugnait nullement de sympathiser avec leur anciens
confrères dans l'esclavage. La loi permettait sans doute aux
corps de métiers, comme aux collèges funéraires 3, de rece-
voir des esclaves avec la permission des maîtres. Et ceux-ci
n'avaient garde de refuser : les distributions et les repas
de corps, si fréquents, leur procuraient un profit réel ^.
Quant à ce qui se faisait dans la réalité, il est probable que
si les riches marchands repoussaient toujours les gens de
la race servile, les artisans proprement dits les accueillaient
parfois.
Y avait-il des conditions d'âge? Nous avons vu des collèges
s'occuper de l'enterrement des enfants de leurs membres ; mais
cela ne prouve nullement que les femmes et les enfants fissent
partie de ces collèges ^. Quand les corporations devinrent
obligatoires et héréditaires, toute la famille du corporatus en
fit partie de toute nécessité ; mais tant qu'elles restèrent libres,
* XI 1355, B, I, 3 : Fortunatm Augiusti servies), dans la plebs. XI 135o,
A, III, M, et la note.
2 Dirksen, pp. 81-82. Mommsen, De coll., pj». 77-78. Cfr. supra, p. 109.
5 DiG , 47, 22, 3, 2 Supra, p. 156.
* Wallon, /. /. — On afifranchissait les esclaves pour qu'ils pussent
participer aux distributions de blé et on les forçait de rapporter leur
part au logis. Dionys. Hal., IV, 24. Suet., Aug , 42. Cass. Dio, 39, 24.
Marquakdt, S/-V., m, p. 452. Au IVe siècle, on chcrcliait encore à faire
admettre ses esclaves aux distributions frumentaires, Cod. Theod., 14, 17,
5. 6. 7.
5 Voyez supra, p. 277.
( 348 )
il n'en fut pas ainsi ^, car c'est par exception que Ton trouve
sur les listes (alba) antérieures au IV® siècle les mentions filius,
junior, major, senior, à la suite cfun nom, pour distinguer le
fils du père ou le frère cadet de l'aîné î^. On entrait par le choix
du collège, et il est sûr que certains collèges recevaient même
des enfants : nous trouvons à Home un membre du collège des
joueurs de lyre mort à huit ans-^. Toutefois, c'est probablement
une exception.
Les professions réservées aux femmes s'organisaient aussi
en collèges. Nous avons à Rome des sociae iniinae^^ à Saepinum
un collegium cannoforarum s. Mais les collèges composés
d'hommes admettaient-ils des femmes? C'est peu probable, du
moins avant le quatrième siècle. On a cru trouver une femme
dans le collège des fahri et des centonaires de Milan et dans
celui des marbriers de Turin; mais dans le premier cas, c'est
une protectrice (patrona) 6, et dans le second, une femme
' Dans les collèges, à qui l'État accordait des privilèges pour un ser-
vice rendu, Antonin le Pieux avait défendu, au contraire, de recevoir les
enfants et les vieillards : nec ab omni aetate allegi possimt, ut divo Pio
■plaçait, qui reprohavit prolixae vel imbecillae admodum aetatis homines
(DiG., 50, 6, 6, 12. Callistratus). Antonin le Pieux ne voulait pas
fermer l'entrée des collèges à ceux que leur âge rendait incapables, mais
il voulait les empêcher de jouir des privilèges. Gradenvvitz, /. /., XI,
1890, p. 80, n. 1.
2 VI 7861. 9405. XIV 44. 246. 251. Les inscriptions IX 2998, où le père
est mscrii cum [{iliis), et XIV 3649 {U7\ms — habens filios III) sont du
IVe siècle.
5 VI 2192 : dec urialis) coll{egii) fid{icinum) r[omanorum). Marquardt
{St.-V., III. p. 226. Le mite, I, p. 272, n. 4) lit, à tort sans doute : d[ecurio).
Cfr. VI 9407 : un decur[io collegii] fabr. tign., mort à 19 ans.
^ VI 10109.
^ IX 2480; voyez supra, p. 245, n. 2. — Cfr. G. Boissier, Relig. rorn.,
II, p. 200. L'inscription d'ÛRELLi, 2401 = VI 3458* {sodalitas pudicitiae
servandae) est fausse. V 2072. IX 4697 : Miilieres.
6 V 5869. Lisez : Jimoni Cissoniae — {centuriae duodecim) ex coll{egio).
La dédicace est faite par les douze centuries à Cissonia et à son mari,
patrons du collège.
(349 )
enterrée par les soins du collège i. On rencontre plus d'une
fois des femmes à qui un collège rend les derniers devoirs
ou élève un monument commémoratif; mais cela ne prouve
pas qu'elles en sont membres; il peut s'agir de la femme d'un
confrère - ou d'une bienfaitrice qu'on veut honorer •^. 11 faut
en dire autant de celles qui font des libéralités '<• aux confrères
et de celles à qui le collège érige une statue s. En ce point, les
collèges d'artisans différaient donc des collèges funéraires qui
admettaient les femmes et leur confiaient même des fonctions
collégiales •>.
Pour ce qui concerne le domicile, nous verrons que chaque
collège professionnel appartenait à une ville déterminée ; tous
les membres appartenaient à la même cité, soit par leur ori-
gine, soit au moins par leur résidence ".
Enfin toute corporation pouvait imposer telles autres condi-
tions qu'elle jugeait à propos. Ainsi le conlegium aqiiae de
Rome, composé de foulons, exigeait que chaque membre fût
locataire de deux fosses [fuUonicae) appartenant à l'État ; mais
* V 7044. Lisez : Dis M{anibm) Anlistiae, lesseryariae) lign{ariae),
sodaliciiiim) marmorarior{um). Le collège élève le monument à Antistia.
" Voyez supra, p. 277.
5 V 527t>. XIV 3677. XII 28^24 : Z). M. Mocciae C. f. Silvinae centonari
Ugernenses ob mérita. Remarquez ob mérita.
* X 7. V 4211.
s Voyez les Indices (Finances, Honneurs décrétés). — A Aquilée, il y a
des femmes parmi les Feronenses aquatores^ V 992 = 8307 ''"^^. ; c'est un
collège funéraire composé probablement de foulons. A Sassinum, une
femme qui fait un legs à trois collèges dit : fidei vestrae collegiali com-
mitto ut (BoiiMANN, Inscr. Sassinates, 24).
6 Magistra, VI 8639 = X 6637; quinquennalis, VI 10309; sacerdos,
VI 4497. 9044; curator, VI 10331. 103o0. 21383; lionorata, VI 2288. 5744;
quaestor, VI 10342; decurio, VI 4019, etc. Schiess, p. 7o, note 239.
Collegium mulierum, VI 10423. Cultrices collegi Fulginiae, XI 5223.
' Voyez la 111^ partie. A Lyon surtout, on trouve dans les collèges
beaucoup de gens qui sont venus s'étai)lir dans cette ville (Luguduni
consis tentes). A Ostie, il y a des pérégrins parmi les fabri navales,
XIV 256, 1. 148. 185. 294. '
( 3o0 )
la nature de ce collège est trop obscure pour que nous puis-
sions nous expliquer cette exigence *. Il n'est nulle part ques-
tion des garanties de moralité que réclament généralement
les corporations du moyen âge et que demandent nos sociétés
de secours mutuels '^. Sous l'ancien régime, les confrères se
préoccupaient vivement du nombre des atliliés; à Rome, ils
n'avaient aucune raison de le limiter, parce que l'exercice du
métier ne dépendait pas de l'attiliation 3. L'État seul, aux pre-
miers siècles de l'Empire, avait une tendance à intervenir :
quand il octroyait l'autorisation, il fixait parfois un chiffre qui
ne pouvait être dépassé 4. Pline trouve que le nombre de loO
pour un collegium fabrum est peu considérable s. Nous avons
quelques données certaines :
A Bovilles, adledi scaenici, 60 membres, XIV 2408, en 167,
A Corfinium, operae nrb[is) scahillar[ii) ; il reste 23 noms,
IX 3188.
A Cumes, dendrophori, 87 noms, X 3699. Cfr. 3700.
A Luna, dendrophori, 36 noms, X[ 1354, B tJ.
A Ostie, accepîores; il reste 12 noms, XIV 150.
A Ostie, ordo corporatorium] qui pecuniam ad ampliand{um)
templum contiiler{unt], 181 membres, XIV 246 et la note,
en 140.
• VI 10298, 1. U et siiiv.
2 De même les éranes grecs. C. I. Att., III ^3 : Nd{jio<; epav[icr]tojv.
3 En faisant sa donation au collège funéraire d'Esculape et d'Hygie,
Salvia Marcellina avait imposé ces conditions : il n'y aura que soixante
membres ; ils seront remplacés par adlectio après leur décès ; on n'admet-
tra que des hommes libres 'Ou des enfants des membres, iiberi,
MoMMSEN, De coll., p. 93); chacun pourra léguer sa place à un fils, à
un frère, à un de ses affranchis, en laissant la moitié de la prime funé-
raire à la caisse. VI 1023-4, 1. 5-7 Schiess, p. 73.
^ II 1167, à Antonin le Pieux : [Cynpus ccntonari[nrum] indu[lgentia
ej'\us [c]olleyio hominum [centum? dumta.t]at [constituto]. Plin., Ep. ad
Traj.^ 33; \o\ez supy^a, p. 159.
^ Plin., /. /. : iiec erit difficile ciistodire tam paucos.
^ XI 1355 A : liste incomplète du collegium fcibrum tign.
( 3rji )
A Ostie, ordo corporatortim lenim('iilarior[iim) lahularwr[um)
mixUiarc{n)s{ium) Ostieusium), 12o membres vu l'an 152
(XIV 2o0.!, et 258 en Tan 192 (XIV 251 et la iiotei.
A Ostie, ordo corporator{um) lenunc'ula[nor{mn)] plcromario-
rinn auxiliariorium) Oslen(sium), 10 noms en l'an 200, XIV 252.
Cfr. 253.
Au Portus, corpus fabnim nnvalium, d'^lOplebieii, XIV 256.
Au Portus, corpus sl[ïippargentarius caelator), Vitulus,
est enterré : cura conleci [abri (sic) argentar{iorum) et conleci Caesaiien-
sium crescentiium), EphexM., VII 518.
3 Heineccius, I, § 2o. DiRKSEN, p. 84. MojLMSEN, De coll., p. 89.
HuscHKE, Zeitschr. f. g. R. W., XII, p. 211. Kayser, p. 194. Cohn, p. 96,
n. 41. GiERKE, III, p. 87. Maué, Yereine, p. 42, n. 12. Praef. fabrum, p. 41,
n. 76. LiEBENAM, p. 44. 258, n. 3. — Les collèges procuraient de sérieux
avantages aux confrères pendant leur vie ; en outre, l'un des collèges ne
subvenait pas toujours à tous les frais des funérailles. On pouvait aussi
laisser l'un des funeraticia à ses héritiers, car on en disposait librement
(VI 9626). C'étaient des raisons d'entrer dans plusieurs {Contra : Wallon
et DuRUY, supra, p. 147, n. 1). Mais la loi n'aurait pas pris la peine ni
cru nécessaire de prévenir la cupidité et les spéculations, comme le sup-
pose MoMMSEN. Plus tard, elle eut une autre raison d'être : c'est que les
personnes et les biens appartenaient au collège et à un service public
déterminé (Dirksen); mais cela n'existait pas sous Marc Aurèle. Heinec-
cius avait imaginé qu'on voulait empêcher les repas trop fréquents et
( 3o5 )
Les termes propres pour indiquer l'appartenance à un col-
lège, la qualité de membre eflectif, semblent être corjwratus et
collegiatus. On dira, pour désigner un membre : coi^)ora[tus
corporis] mensonim fnwientanor{um) Ost[iensinm) ', corjwratus
utridariorum ou utridarhis corporatus, ou corporatus inter utri-
clarios; ou bien au pluriel, pour désigner le collège : utrklarii
corporatl -. Le mot colleijiatus est rare en épigraphie : inter
primas coUe[g]ialus in collegio naviculariorum Arelicensium 3.
Comment enlrait-on dans un collège? Quelles étaient les
formalités de l'admission -*? Celle-ci ne se faisait pas delà même
façon partout. Les termes employés sont adlegere, adledi, adro-
les orgies; Cohn pense que c'était une imitation des villes : on ne peut
être citoyen dans deux Villes, ni membre de deux collèges, et Gierke
ajoute qu'il devait en être nécessairement ainsi des collèges transformés
en corps administratifs placés sous la surveillance de l'État. Mais encore
une ibis, ce ne fut pas la raison primitive de cette défense qui datait d'une
époque oij les collèges n'avaient pas ce caractère et qui s'appliquait
aussi aux collèges funéraires qui ne l'eurent jamais. Il ne reste donc
qu'un but admissible : prévenir les coalitions et les désordres, qu'on
redoutait tant. Voyez I^e partie, chap. II.
* XIV 438. Cfr. 363.
■^ Cet emploi de corporatus est surtout fréquent à Lyon et dans la
Narbonnaise, mais on le trouve aussi à Ostie, à Rome et à Puteoli. Nous
renvoyons à nos Indices (Composition des collèges). Socii désigne parfois
aussi le collège. Voyez supra, p. 340.
5 V401o. Voyez nos Indices. Sur l'emploi de corporatus et collegiatus,
pour désigner les collèges officiels au IVe siècle, voyez la 111^ partie. —
Cfr. VIII 6970, colegiarii. Les mots collega, sodalis, etc., désignent les
membi'es entre eux, comme notre mot confrère. Voyez supra, p. 330. —
11 y a une série de circonlocutions pour indiquer ra|)partenance au col-
lège : pertinens ad collegium j'abroinim exercens artem cretariam,
Allmer, m. de L., II 170; adpertinens corporis utridariorum, Ibid.,
II 18:2; ex numéro collegii, ex collegio, deconlegio, qui in collegio sunt,
corporis fabrum, cptae fuit corpore juvenum, ou simplement {ex) collegio,
III 1507. XI 86ïi; ex decuriis XI collegii fabrum\ ex decuria illa, ou
decuria illa. Voyez les Indices, et infra, pj). 360, n. 4. 361, n. 1.
^ LiEBE.NAM, p. 170. SCHIESS, p. 72. GUADENWITZ, /. /., XI, 1890.
pp. 76-8-2. XII, 1892, p. 141.
( 356 )
gare, adscisco, c'est-à-dire adjoindre par choix ou par élection,
agréger ' ; ils semblent indiquer un vote de l'assemblée. Cepen-
dant, le soin de recevoir les aspirants était souvent confié à
des fonctionnaires. Dans les collegia tenuiorum, les curateurs
encouraient une amende de cent aurei, s'ils admettaient un
esclave sans le consentement du maître : c'étaient eux qui
décidaient [recïperent), puisqu'ils étaient responsables'^. D'après
les statuts des ivoiriers et ébénistes romains, s'il arrivait qu'un
étranger à ces deux métiers fût admis, par une fraude des
quatre curateurs annuels, ceux-ci étaient rayés de la liste des
membres, et les admissions ainsi faites étaient sans aucun
doute nulles : les curateurs étaient donc chargés de l'admis-
sion, mais, par surcroît de précaution, ils devaient toujours
consulter les quinquennales, présidents nommés probablement
pour cinq ans 3. Dans un collège d'Isis et dans deux collèges
funéraires, nous trouvons des allectores, qui étaient sans doute
spécialement nommés pour remplir cette fonction des cura-
teurs 4. Il est probable d'ailleurs que dans plus d'un collège ce
droit important était réservé à l'assemblée générale o.
* Adlegere eladlectus sont fréquents dans les inscriptions et les auteurs.
Voyez les Indices. Adrogare, V 61. Adsciscere, VI 10294. Recipere,
V 4048. 4316. DiG., 47, 22, 3, 2. Adsumere, DiG., 50, 6, 6, 12. Sicscipere,
V 61. Intrare, XIV 2112, 1, 1. 17-19.
2 DiG., 47, 22, 3, 2 {supra, p. 156). Schiess, p. 72, suppose qu'ils fai-
saient les propositions à l'assemblée générale et avaient le droit de veto.
5 HuELSEN, Mitth. d. Inst., 1890, p. 287. Gradenwitz, XI, p. 72, et
XII, p. 138. Dans certains alha, il y a des noms martelés : XIV 251, 1, 1. 2
(un quinquennalis). XIV 246, III, L 3. IV, 1. 28. V, 1. 4.
*• VI 355, 950. 3756. Cfr. De Ruggiero, Diz. epigr., s. v. allector collegii.
Voyez nos Indices (Fonctionnaires des collèges). Schiess, p. 53. Liebenam,
p. 170. — CL. ViscONTi {Bull, corn., 1874, p. 15} en faisait des trésoriers
{quaestores), comme V allector arcae Galliarum, Orelli-Henzen, 6950.
^ VI 10294 : sociumqiie eum adsciver{unt) ; XII 3861 : in eorum locmn, qui
mortui erunt, alios per suffragia substituant; ce ne sont pas des collèges
proprement dits. — Dans un collège funéraire de Rome, on achetait
une place dans une décurie. Dans les fastes de ce collège, on indique
chaque année les magistri et ceux qui decuriam emerunt., VI 10395.
Schiess, p. 72. Mommsen, Dr. publ., I, p. 385, n. 4. St.-R., I, p. 325, n. 5.
( 387 )
Les membres eifectifs payaient un droit d'entrée, dont il sera
parlé au paragraphe des finances, et dont étaient dispensés les
membres honoraires. Ceux-ci étaient compris parmi les corpo-
rati, ou collegiati, car nous ne trouvons pas de terme particu-
lier pour les désigner i.
C'étaient ceux qui, sans exercer la profession des confrères,
sans chercher pour eux-mêmes les avantages de l'association,
entraient dans un collège pour lui faire honneur. Ils ne
payaient pas le droit d'entrée, mais ils aidaient leurs nouveaux
confrères de leur bourse, de leur crédit et de leurs conseils.
Il faut regarder comme tels ces décurions municipaux, ces
citoyens influents, parfois ces riches affranchis que nous trou-
vons dans les collèges et qui souvent les président -. Citons"
seulement ce duumvir et décurion d'Ostie, qui se dit : gratis
allectîis inter navicularios maris Hadriatici et ad qiiadrigam fori
vinari, président et patron d'une foule d'autres corporations 3.
Enfin tout collège choisissait, en dehors de son sein, un ou
plusieurs protecteurs, appelés patrons. Nous en parlerons après
avoir fait connaître la hiérarchie et l'administration des
collèges.
§ 3. Hiérarchie et divisions.
Nous aurons souvent l'occasion de remarquer que, dans leur
organisation, les collèges avaient pris pour modèle la cité : ils
étaient constitués comme une république, ad exemplum reipu-
blicae ^, et l'imitation est visible jusque dans les mots. La
* Honoratus désigne celui qui est revêtu et ordinairement celui qui a
été revêtu d'une fonction dans un collège. Voyez infra, pp. 366-367.
■^ Voyez i7ifra : magistri.
3 XIV 409, du Ile siècle. Cfr. V 4048, deux affranchis, inuuunes recepti
in collegiium) fabrum. Cependant immiinis désigne plutôt un membre
efifeclif qui est exempté des charges, à perpétuité ou passagèrement.
Voyez infra : Finances.
* DiG., III, 4, 1 (voyez supra, p I5n).
( 358 )
réunion de tous les membres s'appelle populus i ou ordo,
parfois /mm^rîf^ 2. Comme le peuple aux comices et à l'armée, les
corporati étaient répartis en centuries ou en décuries ou bien en
centuries subdivisées en décuries 3. Cet usage était ancien et
Clodius n'avait probablement pas innové en enrôlant de cette
façon la populace et les esclaves dans ses prétendus collèges ^.
Il était d'ailleurs commun à la plupart des corporations privées,
qu'elles fussent professionnelles, religieuses ou funéraires, et
nous ne croyons pas que ce fût une imitation de ces décuries
d'esclaves que l'on trouvait dans les familiae serviles des riches
Romains. Parmi les collèges industriels, les suivants sont
divisés en centuries :
Centonarii, à Comum ».
CoUegium fabr. et centon., divisé en douze centuries dont
chacune comprend un certain nombre de décuries, à Milan f>.
* Populus désigne tantôt tous les membres, tantôt la plebs seule. Pour
le premier cas, voyez Oref.li, -4075 : quae divisa sunt populo per gradus
collegi n{ostri), chez les dendrophores romains. VI 10234, 1. 4 : in que
populus collegi epuletur. XIV 2112, I, 1. 27 : rationem populo reddere
debehunt. VI 349 : suo nomine et po[puli collegi], collège d'Isis. VI 198.
10296. Pour le second cas, voyez infra, p. 366.
2 Ordo seul et numerus désignent tout le collège (universi). Ils sont
fréquents; voyez nos Indices. L'ordo nautarum d'ÛRELLi, 396, résulte
d'une fausse lecture. Voyez Mommsen, Inscr. helv., 203\ Ordo désigne
tous les membres inscrits sur l'album : utcuratores — ex albo raderentur
ab ordine, c'est-à-dire rayés de l'album et retranchés de Vordo par là-
même (MoMMSEN, Zeitschr. d. Savignystift., Rom. Abth., 1892, XII, p. 140).
5 Voyez nos Indices (Composition et hiérarchie des collèges).
* Voyez supra, p. 97.
5 V 5446 : centuria centonariiorum) dolabr{ariorum) scalar{iorum);
MoMMSEN assimile cette centurie au collegium centonariorum (V 5283.
5447), Corpus, V, p. 565. Cfr. Hirschfeld, Gall. St., III, p. 10 (246).
Maué, Praef. fabr., p. 56.
6 V 5612. 5701. 5738. 5869. 5888. Voyez supra, p. 351, n. 2. Les {cen-
turiae) XII collegii) aerar{ii) c{oloniae) — M{ediolani\ V5892. 5847, sont
probablement le même collège. Voyez Mommsen dans le Corpus, V,
pp. 635. 1191.1199.
( 359 )
Fabri soliarii baxiarii, divisés en trois centuries, fi Rome,
VI 9404.
Un plus grand nombre ont des décuries i :
Centonarii, à Ravenne, où ils ont dix-sept décuries (XI 126.
133), et ù Rome (VI 7861-7864. 92i)4).
Fahri, à Apulum, où ils ont onze décuries (III 1043. 1082.
1210. 7767); à Aquilée (V 731. Pais 181), à Cetium (III o659),
à Emona (III 3893), ù Mayence (Bramu., 1299), à Ratiaria
(III 8086), à Ravenne, où ils ont au moins vingt-huit décuries
(XI 126); à Sarmizegetusa, où ils en ont au moins treize (III
1424. Ii31. 1493. 1494. 7905. 7910); à Tusculum (XIV 2630).
Fabri et centonarii, à Salonae, où ils ont quatre décuries, III
2107.
Fabri ferrani, forgerons, à Rome, VI 1892.
Fabri tignarii, à Luna, où ils ont douze décurions, XI
1355 A.; à Ostie, où ils ont seize déciiries, XIV 128. 160. 330.
370; à Rome, où ils en ont soixante, II 118. 1060. 3678. 9405.
9407. 9408. 10300 î^.
Fidicines, joueurs de lyre, à Rome, VI 2192.
Piscatores et urinatores, à Rome (Xoîizie, 1888, p. 279).
Psaltae, à Rome; ils ont trente et un décurions (Bull, com.,
1888, p. 408).
Scabillarii veteres a scaena, à Mevania, où ils sont divisés
en quatre décuries, XI 5054; à Rome, les scabillarii ont
au moins seize décuries (VI 10145-10148. Bull, corn., 1888,
p. 110, n. 1-4).
* Nous admettons qu'il y a des décuries là où il y a des décurions ou
des decurinles.
2 Certaines inscriptions du collège de Rome ont été confondues avec
celles du même collège à Ostie. Voyez notre article dans la Rev. de L'Instr.
publ. en Belg., \m, pp. 145-155. — Au n^ VI 1060, on a la liste des
décurions, et le nom de chacun est suivi de l'indication de sa décurie :
Munatius Epictetus [decurio) in d{ecuria XXX; il reste cinquante-quatre
noms. Le n'^ VI 10300 donne aussi une liste de décurions suivis ciiacun
du numéro de sa décurie; le chiffre le plus élevé est soixante. Voyez
les notes de Henzen à ces deux inscriptions.
{ 360 )
Vascularii, à Rome ^ .
Parfois les mots centurie et décurie ont leur sens propre et
désignent des divisions de dix ou de cent membres 2; le plus
souvent ils ont perdu cette signification et n'indiquent pas
le nombre des membres qui les composent : le collège des
fabri tignarii romains renfermait soixante décuries dont la
dixième comptait vingt-deux membres avec son décurion 3.
Les centuries sont assez rares, et môme les collèges qui avaient
un très grand nombre de membres se divisaient seulement en
décuries. Dans celui des fabri et centonaires réunis de Milan,
on trouve douze centuries, subdivisées chacune en un certain
nombre de décuries, probablement dix 4.
Les centuries et les décuries du même collège se distinguent
entre elles soit par un numéro, soit par le nom du centurion
ou du décurion, comme à l'armée, soit par un autre nom
propre : dans le collège des fabri d'Aquilée, il y avait une
decuria Apollinaris s. Les membres des collèges divisés en décu-
ries s'appellent souvent decuriales 6, surtout quand ils sont
' VI 9952 : decuriarimi vascularior{um). Pour les collèges religieux ou
funéraires, voyez nos Indices. Dans les collèges domestiques, l'usage est
général et on peut admettre ici une imitation de la division des familiae
d'esclaves en décuries. — Un collège inconnu de Savaria est composé
de cinq curiae, III 4150.
- VI 631, collegium Silvani Aureliani (gladiateurs de Commode).
'" VI 9405, et supra, p. 351. VI 647, sodalicium dii Siivani Pollentis :
il y en a trente ou trente et un par décurie. XI 1449, cultores Hercidis
Sonmialis decuria I ; il y a vingt et un noms. Cfr. VI 10396.
* V 5612 : decuria II ex (centuria) IIIl et decuria priima) [e^x [centuria]
XI[I] ; V 5869 : dec{urio) dec{uriae) V ex c(enturia) IIII.
s Pais, 181. Chez les Augustales, à Puteoli, on a : {centuria) Cornelia,
Petronia, sans doute du nom du centurion, X 1873. 1874. 1888. 8178.
Dans un collège inconnu d'Herculaneum : {centuria) Veneria, Concordia,
X 1403.
6 Decurialis n'est écrit en entier qu'une fois, VI 6719; ailleurs on a :
d. ou dec., et on peut lire aussi : dec{urio). Mommsen {C. I. L. III,
pp. 1179 et suiv. 1182) croit que c'est ordinairement decurialis; nous
pensons que c'est plus souvent decurio. Voyez nos Indices.
( 361 )
isolés : dec{urialis) coll{egii) fid[icinum) r(omanorum) veut dire :
membre du collège des joueurs de lyre romains^. La corpora-
tion elle-même est parfois désignée par le nombre de ses décu-
ries, comme c'était l'usage chez les appariteurs : Tib(enus)
Jnl{ius) Bubalus ex dec[urns) XI d{onum) d{edil) '^, c'est-à-dire
membre du collège des [abri d'Apulum. Cette désignation tient
donc lieu du mot collegiwn; elle peut aussi l'accompagner, ce
qui n'arrive jamais chez les appariteurs : Niiments caligalorum
decîinar{um) XVI colleg[ii) fabrum tignuariiorum) Ostis 3.
Chaque centurie avait son chef, appelé centurion ^, avec un
lieutenant, appelé optio^\ comme dans la légion. De même
chaque décurie était présidée par un décurion, dizainier, et
dans les listes, on voit figurer le décurion en tête de sa décu-
rie 6. Le centurion et le décurion étaient probablement élus
par les hommes qu'ils commandaient 7. Us étaient annuels et
rééligibles ^ ; ils sont souvent obligés de payer cet honneur
* VI 2192. Ici nous lisons dec(urialis), parce qu'il s'agit d'un enfant de
huit ans. L'appartenance à la décurie est souvent indiquée après le nom
d'un membre, par exemple : Ille ex deciiria {secunda\ scabillario{rum)^
Bull, com., 4888, p. -MO, n. 1. Ille {ex) dec{uria) pr(Lma) [e]x [centuria] XII,
V 5612.
2 III 1043 et la note de 3Iommsen. Cependant rien n'empêche de lire :
ex dec{uria) XI. — V 5869 : (centuriae) XII ex coll{egio) j'abr. et centon.,
à Milan; voyez supra, p. 348, n. 6, et cfr. V 5892." III 3893. VI 9952 :
decuriae vasculario(rum).
5 XIV 160. Cfr. XI 5054 : decuriae IIII scabillar{ioruiu) veteres a scaena.
* V 5738 ; centurio {centuriae) VU (collegii fabr. et cent.', à Milan.
° V 5701 : optio centiyuriae) III [e]x cotl{eyio) fabr. et cent., à Milan.
6 VI 9405. Sur VI 1060 et 10300, voyez supra, p. 359, n. 2. Deciirio est
souvent écrit en entier, mais parfois abrégé et peut être confondu avec
decurialis', voyez supra, j). 360, n. 6. V 5869 : dec{urio) decuriae) V ex
{centuria) IIII. On voit encore le décurion en rapport avec sa décurie :
VI 4421.
' Henzen (Ann. d I., 1856, p. 11) l'infère de ce qu'un décurion donne
un festin à sa décurie, VI 4421. Schiess, p. 64. Liebenam, pp. 192-193.
8 L'itération {decurio iterum, ter, quatcr) est fréquente dans les col-
lèges funéraires.
( 362 )
par une somme honoraire ou par des cadeaux, tels que des
travaux, embellissements, réparations à la schola ou au monu-
ment funéraire; ils donnent aussi des banquets. En revanche,
on leur décerne des honneurs, tels que des statues, une double
part dans les festins, et ils participent souvent à l'administra-
tion générale du collège.
Les décuries et les centuries avaient leur administration
propre : elles s'occupent parfois seules de l'enterrement de
leurs membres; une décurie reçoit un lieu de sépulture par-
ticulier, ou un autel, ou un banquet, et elle décrète une
statue au donateur t. A Salone, chaque décurie des fabri avait
sa caisse particulière (arcrt) -; chacune devait donc avoir son
trésorier, à moins que le décurion ne remplît ces fonctions. Les
decuriales honorent le génie de leur décurie 3; ils favorisent
leur décurie quand ils font des libéralités 4. A Sarmizegetusa,
la première décurie du coUegium fabrum avait son patron par-
ticulier 5.
Dans la hiérarchie des collèges romains, la cité avait encore
servi de modèle. Le municipe ou la colonie avait ses patrons,
ses magistrats, son sénat et sa plèbe : il en était de même des
collèges. Rien ne peut nous en donner une idée plus exacte
qu'un coup d'œil jeté sur les fastes et sur les listes matricu-
laires {alha) que le temps nous a conservés.
En effet, beaucoup de collèges faisaient graver sur le marbre
des fastes 6, espèce d'annuaire qu'ils mettaient à jour tous les
ans ou tous les lustres, suivant la chronologie adoptée ou la
durée des fonctions présidentielles. Chaque collège avait son
ère propre, commençant à l'année de sa fondation ou de sa
^ V 5888. VI 6719. — VI 9405. XI 1449. —VI 244. VI 4421. - VI 10302.
2 m 2107.
3 VI 244. 245. IV 7905.
^ III 2107. XI 126. 132. III 3893. Pais, 181. Maué, Vereine, p. 41.
s III 7960. G. BoissiER affirme à tort, d'après VI 9404, que chaque
centurie avait son local et ses magistrats.
« FastiLS (= Fasti), X 6679.
( 363 )
réorganisation : ainsi, l'ère du collegium fabrum tignariorum
de Rome commençait en l'an 7 avant Jésus-Christ, où ce col-
lège s'était constitué en vertu de la lex Julia i. Comme tous
ceux qui étaient présidés par des magislri quinquennales, nom-
més pour cinq ans, il comptait par lustres. Le numéro du
lustre est ajouté au titre des fonctionnaires qui restent en
charge pendant cinq ans : mag{ister) quinquenn{aliH) coll[egu)
aromalariiorum) lustri XXÏX -, ou : censor bis ad mag{istros)
crean({o[s] lust[ris] XIX et XX '^^. D'autres comptent par
années : curatores arcae Titianae coll[egii) fabrUim) et cenlon[a-
riorum coloniae A[ugustae) iM{ediolani) aiin{i) CXXXVII ^. Les
fastes relataient les consuls, les magistrats de Tannée ou du
lustre, et parfois les membres nouvellement inscrits. Nous
allons reproduire, à la page suivante, un fragment des fastes
d'un collège inconnu d'Ostie ; on y donne les quinquennaux,
présidents nommés pour cinq ans, puis, chaque année, les
deux curateurs et les membres nouveaux, adlecti ^.
* Voyez supra, p. 117, et Rev. de VInstr. publ. en Belg., 1888, pp. 155-
158. — De même les villes comptaient ah colonia deducta, post Interam-
nam conditam. I 577. Orelli, 689.
2 VI 384.
3 XIV 2630.
* V 5578. 5612. 5738. 5878. Cfr. Mommsen, C. I. L. V, p. 635. — Maué,
Vereine, p. 17, lit au n» 5612 : ann(o) CXXXVIl Concordiae eoriim, en
l'an 137 de leur fusion, à savoir des [abri et des centonaires; il faudrait
alors partout la mention Concordiae eorum. Pour Concordiae, voyez
supra, p. 328. — Ce collège fut fondé sous Trajan; voyez Hirschfeld,
Gall. Stud., III, p. 14 (250f.
K XIV 258. On donne les ciLratores aux lignes 5 et 6, 10 et 11, 15. Il y
en a deux par an, sauf la troisième année où c'est un nouveau membre
qui est curateur. Voyez encore : VI 10299, fragment des fastes du colle-
gium fabr. tign. de Rome pour les lustres 27 et 28 (années 124-133 de
notre ère) : pour chaque lustre, on donne les noms de dix consuls et
des six quinquennales. Pour les collèges funéraires, voyez nos Indices.
A Antium, les esclaves impériaux gravent leur calendrier spécial à la
suite de leurs fastes des années 37-51, X 6638 = I, p. 327, et les notes
de Mommsen. Schiess, rem. 271. Liebe.nam, p. 190.
( 364)
Quinquennal{es) :
[L.] Veralius Hermeros
[L.] Ver a tins Martialis .
Curaiores :
y M. Valerius Parthenopaeus et
C. Messius Apollonius
Cn. Cornélius Pacatus, adl{eclus),
C. Baebius Carpio, adl(ecUis),
L. Vincius Annianus, adl{ectus).
10 C. Julius Docimus II et
P. Marcius Romanus.
L. Vallius Flavinus, adl[ectus).
C. Servilius Othrus, adl{ectus).
M. Manlius Perpétuas, adl{ectus).
15 G. Julius Annianus, adl{ectus), cur[ator).
A. Herennuleius EubuUdes, adl{ectus),
C. Publicius Chryseros, adl{ectus),
C. Messius Hagnus adl{ectus), etc.
Sur Valhum, on laissait parfois aussi une place vide, afin de
pouvoir ajouter, année par année ou lustre par lustre, les noms
des dignitaires nouveaux i. L'ali3um était la liste officielle des
membres, dressée à un moment donné ^^. Il déterminait peut-
* XIV 246. L'album est de l'an 140. On ajouta les noms des quinquen-
nales insqu' en 172. Voyez Liebenam, p. 188. XIV 2o0. 2d1. 2o6. 258. 281.
2 Sur les alba conservés, voyez nos Indices. Sur les piédestaux de
statues élevées par le collège et sur les monuments funèbres et les
scholae, on a trouvé aussi des listes des fonctionnaires ou des membres.
Quelques-unes sont affichées par ordre du gouvernement. Voyez ibidem.
— Le mot album se trouve : XIV 2112, II, 1. 8-9. 14 : magistri cenarum
ex ordine albi facti. XIV 286 : album veteranorum; cfr. VIII 2626. Mitth.
des h2st., 1890, p. 287, 1. o-6 : ex albo raderentur ab ordine; ibid., 1. 20 :
Iteyn [curaiores qnaterni? omnibus] annis fièrent [ex aï]bo per ordinem.
Ailleurs, on a : Nomina collegi fabrum tig[n.], XI 13o5a; de même : III
870. 6150 = 7437. Schiess, pp. 72-73. Liebenam, p. 186.
( 365 )
être Tordre du vote, comme Valbum decurionum dans les
municipes; en tout cas, il fixait celui de certaines charges
imposées tour ù tour aux confrères ^. Nous en avons conservé
beaucoup, surtout ceux des grands collèges d'Ostie. Voici
celui des constructeurs de navires 2 :
Corporis fabrum navalimn [Portensiium) (jnibus] ex
[S.] C. coire licet.
Sous ce titre, il y a neuf colonnes; dans la première, on lit :
[Patroni], treize noms.
Q[um)q[uennales)y six noms.
Mater : Macia Menophile .
Hon(orati), treize noms.
Sur les huit autres colonnes, on lit :
Pleb{eij, en tout 320 noms, parmi lesquels :
Jidius Carpus sesquiplic{arius), 1. 141.
Ser()ius Bictor immun{is), 1. 159.
Voici celui d'un collège de bateliers d'Ostie, en l'an 200 3 :
Ti. Claudio Severo et C. Aufidio Vict[orino cos.]
Ordo corporator{um) lenuncula[norum]
pleromariorum auxiliarioi^um] Osten[siwn].
Patr{oni), deux noms.
Q{idn)q[uennales), six noms.
Plebs, seize noms.
Parfois les chefs sont mêlés à la foule ; malgré leurs fonctions,
ils conservent leur place dans leur décurie 4-. Mais d'ordinaire
' XIV 2112, II, 1. 8-9. 14. Mitlh. des Inst., l. t., 1. 20.
^ XIV 256. Plusieurs patroni, quinquennales et honorati reviennent
parmi les plebei. Parmi ceux-ci, quatorze noms reviennent deux fois; c'est
qu'ils sont portés par deux liommes. Voyez la note de Dessau au Corpits.
3 XIV 252.
* III 633. 4150. Ils figurent à la fois en tète et parmi la plebs : XIV 256.
( 366 )
l'album est l'image fidèle de cette hiérarchie qui commence aux
patrons pour finir à la plèbe. Les patrons, qui sont en réalité
en dehors des collèges, occupent la place d'honneur, comme sur
Vaïbum decuriomun des villes ^ ; suivent les dignitaires plus ou
moins nombreux et portant des noms divers suivant les col-
lèges : quinquennales perpetuiy quinquennales ou magistri, cura-
toren, quaestores, sacerdotes, etc. ; après eux viennent parfois les
anciens dignitaires, les quinquennalicii "^ y par exemple, et en
général les honorati; quelquefois aussi les décurions et les
immunes. Puis viennent les simples membres; ils sont rangés
par décuries, si le collège était ainsi divisé 3; sinon, on suit
l'ordre alphabétique ^ ou beaucoup plus souvent l'ordre d'an-
cienneté 5. A la fin sont placés les serviteurs, tels que les
scribes et les viateurs.
Opposés aux dignitaires, les simples membres portaient
généralement le nom de plebs, plebei 6, parfois jjopulus ^
et corporati 8; on trouve une fois sequella collegii centona-
riorum 9. Dans le collège des fabri tigmiarity à Ostie, on les
appelle caligati, comme les simples soldats, ou même milites
caligati i^.
Les dignitaires sortis de charge portaient le nom d'hono-
' Comparez ceux de Canusium et de Thamugadi (X 334. VIII 2403j.
2 XIV 246.
5 XI 1449. VI 647. 631. X 1403. Par ciiriae, III 4150.
* XIV 3951-39o4.
s XIV 2o0 et 251 avec la note; ce sont deux alba, d'un même collège
de lenuncularii, l'un de Tan 152, l'autre de l'an 192. Les membres de
l'an 152 qui vivent encore sont placés au commencement en l'an 192.
6 Voyez nos Indices.
"' XIV 2112, II, 1. 2 : arbitrio quinquennalis et populi. VI 10234, 1. 11.
12. Lepopulus est opposé aux décurions : VI 8744. 10351.
« XIV 247.
9 WlLMAN.\S, 2858.
*o XIV 128. 160 374 et les notes. Cfr. Fiorelli, Notizie, 1880, p. 472.
HffiSCHFELD, Galt. Stud., III, p. 15 (251), n. 5.
( H67 )
7'fl//^, comme les anciens magistrats de l'Empire -. Ceux qui
ont déjà géré une fonction prennent ce litre dans leurs
inscriptions, même quand ils sont revêtus de nouvelles
fonctions plus élevées ou continués dans les anciennes 3.
Souvent même ils indiquent combien de fois ils ont revêtu
des dignités dans leur collège; ainsi le reclor immunis bis y
honoralus ter, du corpus mensorum de Rome, avait été investi
à trois reprises d'une fonction dans son collège, quand il
devint recteur pour la seconde fois ^. Le titre dltonoratus,
ancien dignitaire, procurait des honneurs tels qu'une place
spéciale sur VaUnnn ^, parfois double part dans les sportules
ou les festins G, et peut-être le droit de siéger dans le comité
administratif ". Celui qui avait passé par tous les grades
se disait, comme dans les villes, fioiioribus omnibus apud eos
funclus, omnibus Iwnoribus per gradus functus «.
* Henzen, note au n° VI 3678, et Huebner. note au n» VII lOo.
MoMMSEN, Ber. der Berl. Akad., 1866, p. 798- Liebenam, p. 183. —
Dessau donne ce nom aux magistrats en fonctions, XIV 243-246. 251,
notes. Il paraît qu'il en est bien ainsi au n- VI 1116 — XIV 128, oii
tout le collège des fabri tign. d'Ostie est indiqué par ces mots :
honorati et deciirionies) et niimerus militum caligatorum. — Ce ne
sont pas des membres d'honneur; dans l'album du corpus fabrum
navalium (voyez supra, p. 365), ils sont placés après les dignitaires
et avant les plebeii, et plusieurs reviennent parmi ceux-ci. Voyez
supra, p. 3o7, p. 1.
■^ KuHN, I, p. 200. HuMBERT, Essai sur les Finances, I, p. 441.
"^ Exemple : codicanus curator Ostis et {ter) honor(atus), XIV 309.
Voyez nos Indices. XIV 2630 : honoratus ex lustro XI IX, dans le colle-
gium fabr , c'est-à-dire liunoratus depuis le 18^ lustre de ce collège.
^ VI 8o.
5 VI 1060. XIV 256.
6 VI 3679 : qtiod — commodis dup[lic{atus suui)]. VI 9044 : cenaticum
— duplum.
^ Voyez infra. — Leurs femmes sont favorisées dans les distributions
de sportules, XIV 2408.
« XI 2643. XIV 352. Inscr. helv., 212. Allmer, M. d. L., IL 165. 167.
169. Grut. 354, 1 = Xotizie, dans les Atti, 1888, p. 279.
( 368 )
Malgré cette hiérarchie, l'égalité existait en ce sens que tous
étaient admissibles aux fonctions. L'exclusion des honneurs
n'était prononcée que comme une peine, et dans certains
cas déterminés ^. Nous avons vu des esclaves présidents
imaçjislri) ou curateurs de petits collèges d'artisans, et cela
était fréquent dans les collèges funéraires, surtout dans les
collèges domestiques. Toutefois on leur réservait parfois des
fonctions particulières : à côté des magistri libres, on ren-
contre des ministri esclaves, subordonnés aux premiers, mais
figurant à côté d'eux dans les inscriptions '^.
Au fond, cette égalité n'était qu'apparente dans les grands
collèges : pour être admis aux dignités, il fallait être riche,
comme dans les cités, mais à l'assemblée générale régnait une
égalité parfaite et nous allons voir que c'était elle qui décidait
les questions les plus graves.
§ 4. Assemblée générale.
L'administration se partageait entre l'assemblée et les chefs.
L'assemblée générale de tous les membres était ordinairement
souveraine, comme dans la cité, et elle garda plus longtemps
sa souveraineté que dans la cité : tandis qu'à Rome et dans les
municipes, l'influence des comices populaires allait s'affaiblis-
sant et finit par disparaître, la constitution des collèges resta
démocratique 3.
L'assemblée s'appelait conventus : c'est par ce mot qu'elle
est distinguée des réunions religieuses dans cet article de la
lexcollegi salutaris Dianae et Antinoi qui veut que toute plainte
« VI 10298.
2 1 1129 = XIV 287^. X 6679. Voyez supra, p. 346.
5 Voyez notre article dans la Rev. de VInstr. piibl. en Belg., 1888,
pp. 149 et suiv. Schiess, p. 75. Liebenam, p. 279.
( 369 )
et tout rapport soient faits tu couventu, et non aux jours de
fête, qui sont consacrés à de fraternels banquets i.
Nous avons vu que les assemblées profanes, comme les
autres, se tenaient dans la schola ou dans le temple du collège,
parfois dans un temple public 2. La date des réunions ordi-
naires était fixée par les statuts : [diebus, quï\biis leiji continetur,
convenire 3, par exemple aux kalendes ou aux ides ^. C'était le
président qui fixait les assemblées extraordinaires S; les con-
vocations étaient faites par le secrétaire-trésorier t> ou par les
viateurs. L'assistance était parfois obligatoire pour le prési-
dent "7 ; les autres membres pouvaient s'absenter, mais il est
probable que, pour prévenir toute surprise, un décret n'était
valable que si un certain nombre de membres étaient présents ;
peut-être fallait-il les deux tiers comme dans les sénats
municipaux 8. Les collèges professionnels pouvaient sans
' Voyez supra, p. 231. In conventu pleno, VI 10234, 1. 8-9. 16. 23.
In conventu habendo, VI 10294 {socii de l'an 5). [In con]ventu, VI 10297.
Conventum haberi, XIV 2112, 1. 1-2; in conventu référât, ibid., II,
1. 23-24. In co[nventu], XI 1354 (centonaires). Concilium, VIII 14683.
Koivtovi'a; xal auvdSouc, Plut., Numa, 17. Convenire, III, p. 924. XI
5748. Mitth. des Inst., 1890, p. 288, 1. 2 (eborarii et citrarii). Notizie,
1880, p. 260, à Pisaurum.
Coire, XIV 2112, 1, 1. 12-13 : nisi seniel in mense coeant. DiG., 47, 22,
1, pr. et § 1 (voyez supra, pp. 155-156). Ailleurs il signifie : former un
collège : in it collegium coeant, XIV 2112, I, 1. 12; cfr. supra, pp. 118
et 125 : quibus coire licet.
'^ Voyez supra, pp. 210-211. 225-226.
^ C. /. L. III, p. 924 {collegium Jovis Cerneni).
■* II 4468 et note : collegia kalendarium et iduaria duo.
^ XI 2702 : in schola collegi fabruni — quem (= quod) coegerunt —
q{uin)q{iiennales), à Volsinii. XIV 2112, I, I. 2-3 : conventum haberijusse-
ratper — q{uin)q{uennalem). XI 5748 : numerum {= conventum) haben-
tibiis — q{uin)q{uennalibus). Ici numerum habere signifie : convoquer,
tenir une assemblée.
^ VIII 14683, 1. 7-8 : si qu{a)estor alicui non n{u)ntiaverit (scil. conven-
tus diem), d{are) d{ebebit denariiim unum).
' Ibid., 1. 5-6.
8 XI 1354 : in co[nventu cum frequens adesse]t n{umerus) cent{onario-
ToME L. 24
( 370 )
doute se réunir quand ils voulaient pour leurs délibérations;
si l'on avait limité les assemblées des collèges funéraires à
une par mois, c'est que ces collèges étaient permis en
bloc, tandis qu'on était sévère pour accorder l'autorisation
aux autres ^.
Toutes les décisions importantes étaient prises en assemblée
générale ; les fonctionnaires les exécutaient. L'assemblée
possédait des attributions législatives, électorales et judiciaires.
Tout d'abord, c'est elle qui, lors de la fondation du collège,
votait les statuts appelés lex collegii par imitation de la lex
inwiicipalis et de la lex coîoniae 2. Plusieurs fois il est dit que
le règlement est établi par les membres, ab ij)sis constituta 3,
en assemblée plénière, in conventu pleno ^. Toutefois, si les
collèges ne dépendaient pas du tout, sous ce rapport, de l'Etat,
ils dépendaient quelque peu de leurs bienfaiteurs; et quand
les statuts règlent l'usage des largesses reçues, ils doivent se
conformer naturellement à la volonté des donateurs; ceux-ci
imposent parfois d'autres conditions s. Pour le reste, les
collèges sont libres, et la forme même des statuts le montre;
les différents articles commencent généralement par les mots :
Placuit ou Placîiit inter eis et convenit secundum decretum
puhlkum observare *\
rum), à Luna. XI 5748 : cmn in schola sua freque{n)s numerus colkegii)
fabr. Sentinalium convenissent. XI 5749 : nwneriLin habentibus sequella
ejusdem collegi (scil. œntonariorum). XI 5750 : mm schola sua fréquentes
scribundo adfuissent. Notizie, 1880, p. 260 : collegae universi convenerunt .
' Voyez supra, p. 145.
- Voyez supra, p. 335. G. Boissier, Relig. rom., II, pp. 261-262.
Peilmce, I, p. 292. GiERKE, p. 83. Schiess, p. 79. Liebenam, pp. 180-182.
•' XIV 2112, I, 1. 6-7. Supra, p. 337.
* VI 10234, 1. 8 : ex decreto universorum, quod gestum est — conventu
pleno; 1. 46 : ea condicione qua in conventu placuit universis; 1. 20 :
hoc decretum ordini nostro placuit in conventu pleno. VIII 14683, a, 1. 6 :
Placuit inter eis et convenit, etc.
s VI 10234. Voyez supra, p. 350, n. 3.
6 XIV 2112. Mitth. d. Inst., 1890, p. 288. VIII 14683.
( 371 )
Nous avons conservé des fragments de la lex de deux
collèges professionnels : celle d'un collège de foulons (conle-
gium aquae) dont la nature est fort obscure ^, et celle des
ivoiriers et ébénistes romains "^. Nous possédons ensuite les
règlements de plusieurs collèges militaires de Lambèse, que
nous avons déjà expliqués 3. Les mieux conservés sont ceux
de deux collèges funéraires, du collège d'Esculape et d'Hygie ^,
à Rome, et du collège de Diane et d'Antinous, à Lanuvium '">;
on peut en rapprocher celui de la ctiria Jovis de Simitthus,
curie électorale organisée en collège funéraire ^>.
Quand on examine ces leges coUegiorum, on est frappé d'une
chose, c'est qu'elles sont incomplètes. Il ne faudrait pas y
chercher un ordre suivi ni un règlement parfait, comme dans
les statuts de nos associations actuelles. Ceux-ci sont divisés
régulièrement en articles, indiquant nettement le but de la
corporation, les conditions d'admission, les causes d'exclusion,
les fonctions des chefs et des serviteurs, les obligations et les
» VI 10298, de la fin de la république. BiiUNS, Fontes^, p. 322.
RUDORFF, Zeitschr. /'. g. R. W., XV, p. 203. iMommsen, ib., pp. 326. 345,
dans Bruns, L L, et dans le Corpus.
2 Sous Hadrien. Mittli. des Inst., 1890, p. 287-304 (Huelsen). Zeitschr.
dei^ Savigjiijstift., Rom. Abth., -1890, XI, pp. 72-83. 1892, XII, pp. 138-145
(0. Gradenwitz et Mommsen). RuU. corn., 1891, pp. 161-167 (Gatti)s
Bull, del Inst. di diritto rom.., 1870, p. 261. — Les articles suivant-
reposent sur un texte incomplet et en partie fautif : L. Borsari, Bull,
com., 1887, pp. 3-7. Notizie, 1887, p. 17. De Ceuleneer, Bull, de
l'Acad. roij., 1891, pp. 280-291. Et notre article cité supra, p. 234, n. 5.
5 Voyez supra, pp. 309-312.
^ VI 10234, en 136. Bruns, ibid., p. 318. Huschke, Zeitschr. f. g.
R. W , XII, pp. 185 et suiv.
s XIV 2112, en 153. Bruns, ibid., p. 315. Mommsen, De coll., pp. 98-115.
Zeitschr. f. g. R. W., XV, pp. 357 et suiv. Schiess, pp. 82-83. 103-107.
CoHN, pp. 101. 139.
6 VIII 14683, en 185. Voyez supra, p. 278, n. 4.
Allusion à des leges ou fragments : VI 1932» = 5179 (dans un colom-
baire). X 1579 : lex et conventio corporis Heliopolitanorum (marchands
syriens de Pouzzoles). VIII 12574, à Carthage. Cfr. XII 3861.
( 372 )
droits des membres. Rien de pareil ici; c'est à peine si l'on
fait clairement connaître le but du collège. Celui de Lanu-
vium seul cite un extrait du sénatusconsulte qui avait autorisé
les collèges funéraires; puis il exhorte les confrères à payer
leurs contributions avec zèle afin d'assurer aux défunts un
enterrement honorable et une longue vie au collège : on voit
qu'ici même le but n'est énoncé qu'indirectement. Le collège
d'Esculape et d'Hygie n'en dit pas un seul mot. Même silence
sur une foule d'autres détails qu'on s'attendrait à trouver. Les
collèges ne croyaient pas nécessaire de graver tout cela sur le
marbre. La coutume suffisait et l'on n'insérait dans les statuts
que ce qui était tout à fait particulier au collège. On peut
remarquer que c'est à propos de libéralités faites que plusieurs
des leges conservées furent gravées et affichées; la vanité du
donateur y était intéressée et c'était aussi une garantie pour
que sa volonté fût respectée i. Il est possible que le plus sou-
vent les statuts n'étaient pas gravés ni affichés. 11 n'y a donc
pas lieu de s'étonner qu'on n'en ait pas retrouvé davantage,
ni que ceux que nous possédons ne suffisent pas pour nous
donner une idée exacte de ces collèges. Voici les détails que
nous y trouvons réglés :
Formalités et conditions de l'admission ; cas d'exclusion "^ ;
Limitation du nombre des membres 3;
Droit d'entrée ^* ;
' La lex collegi Aesciilapi et Hygiae (VI 10234, 1. 1) n'est qu'une série
de dispositions relatives à l'emploi des 60,000 sesterces reçus de Salvia
Marcellina et de P. Aelius Zeno : conditions imposées relativement aux
membres nouveaux; emploi des deux sommes {sportules); règlement
d'ordre intérieur pendant les festins; amendes infligées aux chefs, si
ces conditions ne sont pas observées. Il y a d'autres leges votées ou
affichées à propos de largesses reçues : Mitth. des 1ns t., 1890, p. 287,
1. 1-3 [eborarii). XIV 2112, 1, 1. 3-7. VIII 2d52-2o57.
2 VI 10234, 1. 5-7. 10298, 1. 14-16. XIV 2112, I, 1. 20-21. Mitth. des
InsL, L. /., 1. 4-6.
3 VI 10234, 1. 14-16.
^ XIV 2112, l. L, VIII 2553. 2557. Mitth. d. L, L L, 1. 24-25.
{ 373 )
Cotisation mensuelle et déchéance des retardataires ^ ;
Prestations exigées, soit en argent, soit en nature, des
fonctionnaires et des membres "^i
Émoluments et avantages des chefs; salaire des serviteurs ^ ;
Dates des assemblées régulières '^;
Dates des banquets [ordo cenarum) ; parts dans les distri-
butions de sportules î>;
Police des repas de corps; cérémonies du culte G;
Droits et devoirs quant aux funérailles des membres
défunts "^ ;
Emploi des revenus, surtout des donations 8;
Cas où une prime est due (dans les collèges militaires) ;
Contraventions et amendes ^ ;
Multae dictio du président ; serment qu'il prête en sortant '•o.
Outre les statuts, l'assemblée votait les décisions nécessaires
pour l'administration du collège, décisions qu'on décorait du
nom de décréta collegii i>, à l'imitation des décréta deciirionum
de la cité. Tout membre pouvait prendre la parole et faire une
proposition : si quis quid queri aiit referre volet, in conventu
référant i-. Les propositions émanant du président avaient
naturellement plus d'autorité '3^ niais il n'avait pas seul le droit
* XIV 2112, 1, 1. 20-23.
2 XIV 2112, II, 1. 7-10 et 14-16 : magister cenae. III, p. 924 : munera.
Mitth. d. /., /. /., 1. 24-26. Gradenwitz, /. /., XII, 1892, pp. 142-143.
VIII 14683, a.
3 VI 10234. XIV 2112, II, 1. 17-22.
■* III, p. 924 : [diebus, qui]bns legi continetur, convenire.
3 VI 10234. XIV 2112, II, 1. 25-28. Mitth. d. i., /. /.,
6 VI 10234.
7 XIV 2112, I, 1. 24-33. II, 1. 1-6.
8 VI 10234.
9 VI 10234, 1. 19-22. 10298. XIV 2112, II, 1. 23-28. Voyez infra : Finances.
10 VI 10298.
»' V 5272. C'est fréquent; voyez nos Indices. ^'TÎcptarjLa : XII 3232;
Rfiein. Mus., 1872, 27, p. 464. — Dirksen, pp. 90-91.
*2 Voyez supra, p. 231.
'5 VI 3678 : aiictorita[te] magistroriiun) . VI 1690: auctonbiis patronis.
VI 9927 : sodalicii magister et hortator.
( 374 )
d'en faire •. On votait parfois par acclamation, surtout les
décrets honorifiques, tels que ceux qui nommaient les patrons
ou les fonctionnaires -; ordinairement les membres déposaient
leurs bulletins dans des urnes et le collegium fabriim de Tuscu-
lum ou d'Ostie avait, pour garder ces urnes, un nungentus ad
subfrag{ia), comme aux comices à Rome et dans les villes 3.
Quant à la forme des décrets, on devine que ceux des curies
municipales avaient servi de modèle ; nous verrons que les
décrets votés pour offrir la tabula patronatus, les seuls dont
nous ayons le texte, sont copiés exactement sur les décrets
analogues des cités 4-. Les décrets importants étaient gravés
sur une tablette de marbre ou de bronze et placés dans la
maison corporative. Les décrets honorifiques étaient parfois
gravés sur les monum.ents dont ils ordonnaient l'érection, sur
le piédestal de la statue, par exemple s. La tabula patronatus
portait le décret de cooptation et l'on priait respectueusement
le patron de la conserver dans sa demeure.
^ IX 1681 : majores rettilerunt. XI 970 : quod referentibits illis quaesto-
ribiis vierba) f{acta sunt) — Salubri consilio tam honesla relatione a
quaestoribius) et magistris collegi nostri factam et singuli et universi
sentimus.Xl 2702 : ibi idem q(uin)q{uennales) verba fecer{unt) — Recte et
merito retulisse qq. n{ostros) ut ... IX 5748 : numerum {h)abentibus illis
g{uin)q(iiennatibu6) et referentibus ipsis — Gtoriosam esse relationem b{onG-
rum) v(iroriun) q{iiin)q{uennalium) collegi n{ostri). XI 5749 : ibi referen-
tibus \\\o pâtre n{umeri) n{ostri) et illo parente — Atque ideo consentire
reletio[n]i. XI o7oO : ibique referente illo universoru{m) consensu verba
sunt facta — XI 1354 : ib[ique referentibus] illis magiistris) q{uod)
v(erba) f{acta) s(unt) - Placere cunctis universisq{ue) tam salubri rela-
tioni magistror{um) nostr(prum) consentiri. Ce sont des tabulae patro-
natus. Cfr. yotizie, 1880, p. 260 = Bull d. /., 1881, p. 51.
2 VI 10333 : sine suffragiis. Dans les tabulae patronatus, on lit : uni-
versi censuerunt, placuit universis, etc. V 1012 : suffragiis universis,
statue au patron.
5 XIV 2630. Voyez infra : nuugentus.
* Cfr. XI 970 : tabulamque aeream cum inscriptione liujus decreti.
Voyez infra: patronus.
s V 56 : exemplum decreti, dendrophores de Pola. XII 4393 : [exem-
plum cu]m tabula aerea conlatum(fabri subaediani, à Narbonne).
( 37o )
Quel était l'objet de ces décrets? La réponse à cette question
suflira pour prouver la souveraineté de rassemblée.
D'abord, c'est par des décrets qu'elle complétait et moditiait
la lex, le cas échéant. Le règlement d'un collège religieux de
Pompéi exigeait une statue de certains membres dans un cas
donné; sur le rapport du questeur, on décida, en l'an 45, que
L. Statius Faustus donnerait à la place deux piédestaux de
marbre. II s'agit peut-être de la summa honorana du pré-
sident 1.
Mais le plus souvent, c'est sur les atïaires courantes que
l'assemblée doit statuer. La cotisation est versée dans une
réunion mensuelle, du moins dans les collèges funéraires -, et
par la même occasion on délibère sans doute sur toutes les
affaires. Quant au culte, l'assemblée règle les sacrifices, les repas
de corps et surtout les honneurs à rendre aux morts : c'est elle
qui prend soin de l'enterrement, de concert avec le président,
si le défunt ne laisse pas d'héritier institué; dans certams cas,
elle nomme des commissaires pour y veiller, et ceux-ci lui
rendent compte de leur mission 3. Nous voyons des collèges
décréter des funérailles honorifiques ^, assigner par décret une
place dans le monument commun s, accorder un emplacement
* X825, en l'an 45 : pro signo qiwd e lege Fortunae Aiigustae ministro-
rum ponere debebat — , basis diias marmoreas decreverimt pro signo
poniret. X 6071, le président érige un autel, collegii decretu {= collegii
decreto); c'est peut-être un cas semblable.
2 XIV 2112, I, 1. 12-13 : neq(ue) ... nisi semel in mense c\oeant co]nfe-
midi causa imde defuncti sepeliantiir . DiG., 47, 22, 1 (voyez supra, p. lo5).
C. I. L. III, p. 924 : neq{ice) quisquam ta[m magna lempore diebiis,
qui]bus legi continetur, convenire voluerint, aut conferre funeraticia sive
munera.
•■> XIV 2112, II, 2 : is arbitrio quinquennalis et populi ff.nerabilur,
Ibid., I, 27 : rationem populo reddere debebunt. Voyez supra, p. 271.
* IX 5847 : decretio) fabrum, ù Auximum.
^ VI 6660 : ex dec[reto collegi] scabill[ariorum]. Bull, corn., 1888,
p. 110, n. 1 : ex decreto, même collège. On trouve aussi : permissu
rollegarum, VI 1948. Cfr. VI 4228. 14838. 15078. XIV 1658. 2639.
( 376 )
pour la sépulture ou acheter un tombeau ^, tantôt pour un
confrère, tantôt pour un bienfaiteur. Quant aux finances, elle
règle le budget des recettes et des dépenses et exerce un con-
trôle permanent sur l'administration de ses biens et de ses
revenus. Elle décrète les constructions à faire et les réparations :
elle nomme les surveillants des travaux, et elle vote l'approba-
tion de ceux-ci 2. Elle concède l'emplacement pour une statue
ou pour un autel 3. Elle accepte les libéralités, parfois faites
devant elle, et en règle l'emploi conformément aux volontés
du donateur ^^ ; dans ce cas, tous les membres réunis, pour
donner plus de solennité à leur décret, commencent parfois
par prêter serment au nom de Jupiter très bon et très grand
et par le Génie de l'empereur s.
L'assemblée reçoit aussi les serments des fonctionnaires à
leur entrée en charge et à leur sortie 6. Certains collèges exi-
geaient peut-être du président et des questeurs un cautionne-
ment qu'ils ne restituaient sans doute qu'après la reddition des
comptes "i.
* V 3411 : ex decreto aeorinn (scil. centonar.) locus emptus. La formule :
Kocus) d{atî(s) d{ecreto) c{ollegii), fréquente sur les monuments funéraires
et sur les statues, est copiée sur celle-ci : /. d. d. d(ecuriommi). Nous la
trouvons : V 5272. 5287 (fabri Comenses\ 5446. 5447 (centonaires de
Côme). V 5888. à Milan. XII 1815 (utriculaires, à Vienne). Allmer,
.)/. d. L., II 175. 177; De Boissieu, i?25cr. de Lyon, p. 391 (nautes du
Rhône et de la Saône). V 5773 : /. d. p{ermissii) c{ollegii). VI 460 -= XI
715 : ex indulgentia collegiii).
2 II 5929 : piscatores et propolae de pecunia sua f(aciendum) ciiirave-
runt) iidemqiie) pirobarunt?). III 4150 : jussi. La formule curantibus,
curam agentibiis illis, etc., est fréquente, VI 868. 1002.
5 Voyez page 375, note 4.
* Libéralités faites devant l'assemblée : VI 10297. XII 4393. XIV 2112,
1, 1. 1-14. Décret pour régler l'emploi : VI 10234, 1. 8-9 : ex decreto uni-
versonun. XI 126 : decrevit XII 4393. XIV 2112, I, 1. 1-4.
s Ephem., VIII 210, coll. fun., à Truentum.
6 VI 10298. 1. 9.
' III, p. 924 : se eis, qui présentes fuerunt, rationem reddedisse — et
cautionem siiam, qiia eis caverat, recepisset. Cela arrive quand le coll.
( 377 )
L'assemblée décrète les récompenses et les honneurs. Elle
récompense les confrères, surtout le zèle et la générosité des
chefs, soit par des avantages matériels, soit par des honneurs.
Elle décerne des statues aux patrons, aux bienfaiteurs, aux
concitoyens illustres, et elle ordonne d'inscrire sur le piédestal
leurs services et leurs largesses, afin d'en conserver à jamais
le souvenir ^, Parfois elle impose des cotisations extraor-
dinaires à cet effet 2.
Tels sont les détails épars dans les inscriptions, où l'on voit
d'une manière certaine l'assemblée générale rendre des décrets ;
ils suffisent pour montrer que c'est elle qui gouverne et qui
décide dans tous les cas importants.
Le pouvoir exécutif était aux mains des chefs ; mais il est pro-
bable que c'était ordinairement l'assemblée qui les élisait ^.
Quelques collèges, semble-t-il, confiaient le soin de nommer
les présidents à un ou à plusieurs membres des plus considérés,
appelés censores. Un membre du coUegium fabrum de Tusculum
ou d'Ostie, qui a été décurion pendant le quinzième lustre de
ce collège, préposé aux urnes électorales pendant le seizième et
président pendant le dix-septième, devient deux lustres de suite
censeur; il est appelé : censor bis ad mag[islros) creamtols] lus
Jovis Cerneni est dissous. Le sens de cautio est discuté : voyez injra :
ma gis tri.
^ V 56, exemplum decreti. V 1012, su(frag{iis) iinivers(is). V 5128,
censiierunt. VI 1690. 1872, ex decreto. Bull, corn., 1888, p. 387. X 4724.
IX 1590. XII 4393. — Notizie, 1889, p. 398 : qiiod — meruisset ad statua
ab eis décréta poneretiir, dendropliores, à Rome. XIV 161 : ex decreto
corporatoimm. Le décret est encore mentionné : V 1020. IX 4894. VI
4421. 10302. 10410. X 7. XII 3232. Voyez infra : Finances.
- V 56. 1012 : suffragiis universis, aère collato. VI 4421.
5 Allmer, m. d. L., II 169 : qiiiaestor) corporis ejusd{em) duplica-
rius ex consensu universorum ichez les dendropliores). VI 10333: solus
sine suffragiis ex omnium sententia — curator in k. Jan. designatus
(coll. fun.i.
Dans un collège inconnu de Rome, les ingénus semblent jouir seuls
du droit de suffrage : Ingenuiis qui ad suffragia descendunt, 1 1492.
( 378 )
tiris) XIX et XX '. Cependant, c'est un cas unique. Plus tard,
l'État imposa des chefs aux corporations officielles ; dès Hadrien,
chose assez étrange, nous trouvons à Préneste un quinquennalis
perpeiuus datus ab imp{eralore) lladriano Au(j{usto) collegio
fabr{iim] lign[arionim) "^ ; ce ne peut être, à cette époque, qu'un
président honoraire, donné par l'empereur à ce collège comme
une faveur.
L'assemblée nommait toujours les patrons, comme nous
verrons, et elle recevait ordinairement les membres nou-
veaux 3.
Quant à ses attributions judiciaires, il n'y a pas de rensei-
gnements certains. Elle décidait sans doute s'il y avait lieu
d'infliger les amendes fixées ou non par les statuts et elle pro-
nonçait l'exclusion dans les cas prévus par ceux-ci. Parfois la
multae didio était déléguée aux chefs ^.
' XIV 2630. WiLMANNS (n. 1742) et Dessau (C. i. L. XIV, p. 580)
rapportent ce censor au collège. Orelli (3891) le rapporte à la ville.
Cfr. Maué, Praef. fabr., p. 63. Schiess, note 69. — L'inscription est pro-
bablement originaire d'Ostie.
2 XIV 3003. Cfr. VI 10300 : decuriones a co{n)s{idibus). On ne peut
songer à des décurions nommés par les consuls, comme le praefectus
fabrum a consule (cfr. les tribuni militum a populo). Hirschfeld, Gall.
Sttid., III, p. 15 (251), n. 3, propose : a cas. [ad aerarium delati].
Mommsen, au Corpus, conjecture que cette inscription fragmentaire com-
mençait par une dédicace contenant les noms des consuls de l'année et
qu'il faut compléter : a cos. [supra scriplis] ; ces deux mots se seraient
trouvés sur une table perdue.
5 Voyez supra, p. 356, n. 5.
* Amendes, voyez infra : Finances. Exclusion : Mittli. des Inst., 1890,
p. 287 : iiti curatores — ex albo raderentur ab ordine; voyez supra,
p. 358, n. 2. Cic, ad Qu. fr., II, 5; voyez supra, p. 35. n, 2. Privation des
droits, X 1579. VI 10298, 1. 7. XIV 2112, 1, 1. 22. — Multae dictio du pré-
sident, voyez infra.
:{79
{^ 5. Comité administratif.
La constitution n'était pas aussi démocratique dans tous les
collèges; dans quelques-uns, elle se rapprochait plus encore
de celle des cités par son caractère oligarchique. Ils possédaient
une sorte de comité administratif, qui remplaçait, en bien des
cas, l'assemblée générale ^ .
Les décurions ou dizainiers, chefs des décuries "^, semblent,
en effet, jouer ce rôle dans plusieurs collèges. Le collefjium
fabmm lignuariorum de Rome, composé de soixante décuries,
renfermait près de loOO membres 3; il avait sans doute cru
nécessaire de ne pas laisser l'administration à une assemblée
si nombreuse, et il l'avait probablement confiée à ses soixante
décurions ou dizainiers, souvent nommés dans les inscrip-
tions 'K Elus par le collège, ils portaient le nom cVordo
decurionum s, et partageaient peut-être l'administration avec
les fonctionnaires sortis de charge : par un decretiim honora-
torum et decurionum, rendu sur l'avis des magistri, on les voit
» Wassenaer, V, p. 435. DirksExX, p. 48. iMaué, Praef. fabr., pp. o7-58.
ScHiEss, p. 44, n. 71 et pp. 44-66. Liebexam, p. 193, et notre article dans
la Revue del'Instr. piibl. en Belg., 1888, i)p. 147-153. Schneider, de sevi-
rum Augustaliiun muneribus, ])p. 61-64.
- Selon Maué, /. /., les décurions n'étaient pas toujours chefs de
décurie, mais l'inscription qu'il cite ne prouve rien (XI 1355). Elle donne
la liste des patrons et des décurions des fabri tignuarii de Luna;
comme la plèbe n'est pas divisée en décuries, Maué croit que ces décu-
rions forment un comité présidant le collège, qui n'aurait pas d'autres
chefs. Mais Borma.\n nous semble avoir raison de diviser l'inscription en
deux parties et de rapporter la plebs au collège des dendrophores.
5 Voyez supra, p. 351, n. 1.
* Vfl48. 1060. 3678. 9405. 9408 10300. Sur le n» 148, qu'on a eu tort
de rapporter à Ostie, voyez notre article précité. Au n» 3678, nous lisons :
Numini Fortunae col{legi) fab[r. tig.]. Les inscriptions ne mentionnent
pas de coUegium fabruni à Rome Voyez notre article dans la Revue
précitée, 1891, p. 119.
^ VI 148. Le don est fait à tout le collège, et non à une décurie.
( 380 )
doubler la part d'un membre bien méritant dans les sportules
qui étaient distribuées à certains jours de fête ^. Leurs
noms, suivis chacun du numéro de sa décurie 2, figurent
sur le piédestal d'une statue élevée par le collège à Caracalla,
à côté de ceux des dignitaires 3, tandis que d'autres collèges
gravent sur les monuments qu'ils érigent la liste de toute la
plebs ^.
Dans plusieurs collèges professionnels, on voit les décurions
prendre des décisions importantes : ils ordonnent des cotisa-
tions obligatoires pour tous à l'effet de réparer un temple ^ ;
ailleurs, c'est sur leur ordre que le curateur répare le monu-
ment funéraire 6 ; dans le collegium fabrum d'ApuIum, ils
décrètent, avec les principales, des funérailles à un décurion
qui est aussi patron du collège ^ ; il est question de réunions
où ils délibèrent seuls ou avec les chefs 8; dans quelques col-
lèges, il n'y a peut-être pas d'autres chefs que les décurions 9;
enfin, dans les distributions de sportules et dans les banquets,
ils sont avantagés '•0.
C'est dans les collèges funéraires et dans certains collèges
religieux surtout que le comité des décurions joue un rôle
' VI 3678 : quod — auctorita[té] magistror{um), dec7^et{d) honorat{orum'\
et decurionum — commodis du[plic{atus) stim]. Voyez supra, p. 378, n. 4.
2 Cela prouve qu'ils sont chefs de décurie. Cfr. VI 9405 ei supra, p. 361.
^ VI 1060 : six patrons (ou qiiinq.), seize honorati, six scribae.
^ XIV 2408. VI mm. BuU. com., 1885, pp. 51-53. Ephem., VIII 510.
Brambach, 1336. Etc.
2 III 5659, fahri de Cetium : [aère] publiée co[llato] decreto de[curiomim].
6 Bull, com., 1888, p. 408, synfiodus magna psaltum, à Rome, sous la
république : decurionum sententia.
■^ III 1210 : dec{uriones) et principales — aère conlato secundum decre-
tu[m ip^sorum.
« VI 10295 :wi basili[ca convenerunt ?] quinquennali[s'] —, magistri—,
decuriones. C'est peut-être un fragment du procès-verbal d'une séance.
VI 541 : decuriones in hac caria qui comveniunt, en 88.
9 XI 1355. Voyez supra, page précédente, n. 2.
«0 XI 126, coll. fabrum, à Ravenne. Cfr. VI 9044 a et b.
( 381 )
important, et il ne sera pas inutile de le faire ressortir ici •.
Ils décrètent des travaux ii exécuter par les nKiffistri ou par les
questeurs -; ils décernent des honneurs •^; ils nomment les
décurions et les présidents et ils fixent la somme honoraire ^.
L'administration du colombaire est souvent entièrement entre
leurs mains. Cest par décret des décurions que les niches
(ollae) sont réparties et reçoivent leurs inscriptions 5 ou que
les places sont assignées à chaque décès 6, que les confrères
obtiennent la permission de placer dans le monument des
urnes, des autels et des cippes funéraires "7, que des o//aesont
accordées à des étrangers pour leur faire honneur 8. Les chefs
ou le collège exécutent leurs décrets 9.
Quand les décurions ne décident pas seuls, et que tout le
collège concourt aux décrets, au moins les décurions y
prennent-ils une part prépondérante, comme l'indiquent ces
* SCHIESS, p. 65.
2 VI 10317 : ex d. cl VI 10237, en l'an 16 : de d{ecurionum) s{en-
tentia).
'" Bull, des Antiq. de France, 1891, p. 63 : exdecurion. decr. — C. L L.
VI 10409 : imaginem et zothecam \curatorib\us — soci honoris [caus]a
pecunia publica d. d. [piosueimnt)], en 36.
* VI 9044'' : [decurio]natum grat[uitum decreverunt]. 9289 : ex d. d.
pro magiistro) j{ure) d{icundo). 10341 : ex d.d. sa^liba]. V 6638, 1, c, 9 :
[pro magiistro)] ex d. d. allectus {sestertiis mille); de même : II, b, 15.
II, c, 3. 8. Cfr. III, A, 5. III, c, 8; remarquez que la somme diffère
chaque fois. 1 1492. IX 3424 : mag{istri) l{udos?) [{ecerimt) d. d.
^ VI 4418 : ollae distributae et inscriptae ex d. d. (Monument de Mar-
cella, en l'an 10.)
6 VI 7297 : loc{u.s diatus) dec{reto) decuirionum). VI 7303, en 58. VI
10257. X 1748. VI 1833^ 6222. Ex permissu deciirionum, VI 1^0i;jussu
decur{ionum), VI 10266.
7 L{oco d{ato) d(ecreto) d{ecurionum), ou permissu decuriomim, VI
1833^ 7373. 7379. 7387. 9423. 9424. 9534. 10354. 10355. 10399.
8 VI 10356 : ex decreto decur. olla publiée data est. VI 4226 : ex d. d.
d{e) siiio) d(pnum) diedit). VI 6213 : exd. d. — ollam dedenmt.
*•> VI 10237. 10257. 10317 (I 806). Bull, corn., 1888, p. 408. Le collège :
VI 6213. 10409.
( 382 )
mots : ex decreto decurionum et popiili S ex consensu decurionum
et familiae voluntate, etc. 2.
Ainsi donc la plebs collegn et les décurions auxquels sont
joints parfois les présidents et les honorati '^, formaient deux
ordres distincts, comme les décurions et la plèbe des villes,
et pour désigner tout le collège, les fabii tignuarii d'Ostie
disaient : honorati et decurion{es) et numerus militum caliga-
torum 4; de même, les collèges domestiques disaient : decu-
riones et familia s.
Ce comité, investi de pouvoirs plus ou moins étendus sui-
vant les collèges, portait rarement le nom d'ordo decurionum <^,
peut-être jamais celui à'ordo simplement "î. Le mot ordo
désigne, dans toute communauté, l'assemblée qui gouverne :
ordo ubique simt ii qui universitatem regunt 8. Voilà pourquoi
il désignait ordinairement, dans les collèges, l'ensemble des
membres, comme populus 9. Les décuries d'appariteurs avaient
* Place assignée dans le monument, VI 10351. Dédicace, VI 8744. Ex
decreto decurionum et plehis, XIV 3659.
2 VI 9288 : decurio adlectus ex consensu, etc.
5 VI 527. 1060. 1116. 3678. III 1210. Bull. d. L, 1884, p. 2. Dans un
collège funéraire : VI 9044. 10295. Décret des honorati seuls, XIV 370.
* XIV 128 = VI 1116, en 285.
5 VI 10352. 10357. 10045. — Liberti et decuriones, VI 10258. Decuriones
etplehs,^l\0?>^^.
c VI 148 = XIV 5 : allectus in ordinem decunon{um), chez les fabri
tignarii. VI 807 : [ordini dec]ur{ionum) adlectus (coll. inconnu). VI 10333 :
solus sine suffragis ex omnium sententia — decur{ionum) ordine
{= ordini) adsci tus {coll. fun.). Cfr. VI 632 : ordopotestatiumdncoUegium
Silvani Aureliani (gladiateurs de Commode). VI 9044 : ut — [in nume7^]o
decurionum recit[aretur]. V 8875 : ex niumero) decurionis (sic) lecticario-
rum. — On rencontre un collegium decurionum, difficile à expliquer,
m 6077. Cfr. VI 541. 10046. 10100. 10237. 10346. IX 4794. Il s'agit
peut-être des décurions préposés aux décuries servîtes.
7 XIV 260 : ab ordine lust\ro] XXII est obscur. Schiess, note 90.
» MoMMSEN, De coll., p. 120, n. 5.
'J Voyez supra, p. 358.
( 383 )
à leur tête un comité de ce nom ^; mais dans les collèges
professionnels et funéraires, le comité s'appelait le plus sou-
vent du nom de ceux qui le composaient : decuriones, ou
fionorati et deciiriones ; en effet, ses décrets portent le nom de
décréta decurionumy et non : décréta ordinis decurionum,
comme dans les cités.
Les collèges des villes grecques d'Asie avaient également un
comité directeur : les teinturiers en pourpre d'Hiérapolis
rappellent a-£{jivoTâTTi Tupoeopia, et dans le ixiyy o-'jvspy.ov de
Side, il porte le nom de yepoj^La '■^.
§ 6. Fonctionnaires des collèges.
Le pouvoir exécutif appartenait aux fonctionnaires, qui
avaient sous leurs ordres des serviteurs, comparables aux
appariteurs des magistrats municipaux. Les magistratures
collégiales formaient une carrière {cursus fionorum), et ceux
qui l'avaient parcourue tout entière s'intitulaient, comme
dans les cités, omnibus fwnoribus functi 3 ; ils finissaient par-
fois par devenir patrons de leur collège ^. Les noms des
dignitaires étaient en grande partie empruntés à ceux des
cités, et leur nombre variait suivant l'importance de la corpo-
ration; il semble qu'on les ait parfois multipliés à plaisir afin
de pouvoir contenter la vanité d'un plus grand nombre :
en effet, ces chefs étaient heureux et fiers de se trouver à la
tête d'une association souvent considérée, et de jouer ainsi un
rôle plus ou moins important dans leur ville. Les plus hauts
* MoMMSEN, St.-R., 1, 328 = Droit public, I, p. 388, n. 4.
2 A Hiérapolis : Lebâs, 1687^ Rev. arch., 1887, p. 354. A7»mc. Journ.
of Arch., III, p. 348. Philologus, XXXII, p. 380. A. Wagener, Rev. de
Vlnstr. publ. en Relg., 1868, pp. 1-8. A Side : C. /. Gr. 4346. Lebas,
1385. Cfr. supra, p. 307, n. 5.
5 Voyez supra, p. 367.
* Voyez infra : Patroni.
( 384 )
étaient le magister ou quinquennalis et le curateur; à un
degré inférieur est placé le questeur, et plus bas encore le
scribe et le viateur i. Telles sont les fonctions les plus ordi-
naires. On peut dire, d'une façon générale, que les fonc-
tionnaires étaient élus par l'assemblée pour un an ou pour un
lustre, mais qu'ils pouvaient être réélus plusieurs années ou
plusieurs lustres de suite, et même nommés à vie. Il arrive
fréquemment que la même personne est investie de plusieurs
charges à la fois, soit dans le même collège, soit dans deux
ou plusieurs collèges différents. Les élus entraient en fonc-
tions le 1®'' janvier ; ils devaient généralement payer l'honneur
qu'on leur avait fait par des cadeaux, par un festin ou par
une somme honoraire fixée ; en revanche, ils jouissaient de
privilèges ou d'avantages divers : dans les distributions de
sportules, ils obtenaient une part extraordinaire, et ils étaient
exemptés de certaines charges, soit pendant la durée de leurs
fonctions, soit après leur sortie. Les dignitaires les plus élevés
étaient éponymes et les inscriptions des corporations étaient
datées au moyen de leurs noms.
* Hiérarchie indiquée : VI 868 : trois patrojii, trois quinquennales,
trois quaes tores, un scriba corporatorum, dans un collège inconnu attaché
à l'annone, en 2o6. VI 1872 : deux patroni, deux quinquennales, trois
curatores, dans le corpus piscatorum et urinatorum, en 206. Notizie,
dans les Atti, 1888, p. 281 : patroni et quinq. perpetui, magistri ou
mag. qq., curatores, plebs, dans le même collège. VI 1002 : deux quinq.,
deux quaestores dans le corpus pistorum, en 144. VI 1060 : six patroni
(ou plutôt quinque lin aies, cfr. VI 10299), quinze honorati, soixante
décurions (cfr. VI 10300) et six scribae dans le coll. fabr. tign. Cfr. XIV
2630. Bull, com., 1888, p. 408 : trois magistri, un curator, trente et un
decuriones, tous affranchis, sauf trois ingenui, dans la synhodus magna
psaltum, sous la république. — Collèges funéraires : VI 10234 : pater,
mater, quinquennalis, immunes, deux curatores dans le coll. Aesculapi
et Htjgiae. XIV 2112 : patronus, quinq., scriba, viator, à Lanuvium. III,
p. 924 : deux magistri, deux quaestores, dans le coll. Jovis Ceimeni. —
Voyez ScHiESS, notes 60 et 80. Liebenam, p. 201, n. 5. Et nos Indices,
s. V. Album, Fasti, Fonctionnaires et serviteurs.
( 385 )
Tels sont les principes généraux J; dans la réalité, on
remarque une grande diversité suivant les collèges, comme
nous allons le voir, en passant en revue les différents fonction-
naires. Les délails que nous avons réunis sont empruntes à
des collèges fort divers et il faut bien se garder de les appliquer
tous à la fois à chaque collège en particulier.
Magistcr. Quinqucnnalis.
Le président ou les présidents 2 portaient des noms divers
suivant les collèges et les localités. On les appelait d'ordinaire
« maîtres », magistri 3, et leur fonction « maîtrise », magiste-
rium 4-. Élus par rassemblée s, ils étaient désignés d'avance
pour entrer en charge le premier janvier et ils portaient
jusque-là le titre de magistri designali •'. On les prenait géné-
ralement parmi les membres; car sur les alba de plusieurs
collèges leurs noms reviennent dans la liste de la plebs '^. On
* SCHIESS, pp. 42-S3. LiEBENAM, pp. 199^203.
* MoMMSEN, De coll., p. 406. St.-R., 1-, p. 7. ^ Trad , I, p. 7. Henzen.
Ann. d. /., 1851, p. 454, DtiU. d. L, 1874, p. 448. Ephem., I, p. 217.
DiRKSEN, pp. 50. 5C. ScHiEss, p. 42. LiEDENAM, pp. 203. 280. Dessau,
CIL. XIV, p. 44. Malé, Praef. fabr., p. 62. G. Boissier, Relig.
rom., II. p. 262.
5 Voyez nos Indices, s. v. Magistri,
* Ilf 3;i80. III, p. 924. V 4449. VI 541. 734. 996. 4051. 9289. 40298.
40320. Nolizie, dans les Atd, 4888, pp. 279-281 : mag.istcrium) qui
egierunl).
s V 3414 : magister collegi centonariorum candidatus, à Vérone.
XII 733 : ejusd{em) corp oris) (scil. ulriclarioriim) mag{ister) (quater)
fiaclns), à Arles. Voyez supra, p. 377 : censores.
« VI 10319 : [m'iagiisier) desiginaius). VI 40333 : cur{ator] in k{alendas)
Jan. design{atiis). Ce sont des socii ou des coll. funéraires.
' XIV 246, et noie de Dessau. IIenzex, Ann. d. Inst., 4851, p. 456.
XIV 251. 252. A Arles el à Lyon, la formule suivante est fi'équenle : faber
tigniui[riiiis)], magiistcr) ejusdem corp' oris priums, XII 719; utricl ariiis)
corp(oralus) Arcla({ensis), cju^dicm) corp'.oris) niagiister', XII 733; cfr. XII
738. At.lmer, Inscr. d. L., Il 405. 471. Wilm., 2ù06. 2590. Nolizie, dans
les Atii, 1888, pp. 279-281. VI 9077.
Tome L. 2S
( 386 )
les choisissait parmi ceux qui avaient déjà rempli d'autres
fonctions dans le collège ^ et qui étaient assez riches pour
supporter les charges de cet honneur. Dans les petites corpo-
rations, il y en a qui sont esclaves '2.
A leur sortie de fonction, ils pouvaient être réélus et se
disaient alors magister iterum, ter, quater 3. La durée de
leurs fonctions était en général d'un an 4. Dans les collèges
qui comptaient par lustres, ils étaient nommés pour cinq
ans; c'est alors qu'ils prenaient le nom de « maîtres quin-
quennaux », inagUtri quinquennales, ou simplement « quin-
quennaux », quinquennales s, et leurs fonctions, celui de
quinquennalitas c. Henzen a supposé à tort que le titre de quin-
quennales n'était donné qu'aux mngistri élus au commencement
de chaque lustre, de même que dans les municipes on nom-
mait tous les cinq ans des duumviri quinquennales pour faire le
recensement 7. Dans les collèges, il n'y avait pas de recense-
ment à faire et les inscriptions prouvent clairement que les
magisiri quinquennales restaient en charge pendant cinq ans.
Le lustre pendant lequel ils sont en fonctions est souvent
indiqué à la suite de leur nom : C. Baebius Philargurus Hono-
' VI 1060. 10300. Plusieurs quinquennales du n» 1060 figurent parmi
les décurions du n° 10300. — Chez les psaltae, les trois magistri sont
pris parmi les décurions, Bull, com., 1888, p. 408. De même: VI 7861.
XIV 330. 374. D'autres ont rempli une série de fonctions : XIV 280. 2630.
2 I -1540 - XIV 2873. 1 J 406 - XI 4771. XIV 2879. Voyez supra, p. 346.
3 Voyez nos Indices.
* X 444 : sui cujusque anni magistri, dans un collegium Siluani. Voyez
nos Indices.
^ C'est la même chose, car on emploie les deux désignalions dans le
même collège, par exemple chez les fubri tignuarii à Rome; comparez :
VI 148. 996.' 9406 avec 10299 Conlra : Cohn, p. 14, n. 31. Ces noms sont
du reste fi'équents; voyez nos Indices. Certains collèges ont eu d'abord
des magistri, puis des magistri quinquennales, comme les fonlani ou
fuUones : VI 268, en 57, et 267, en 226.
6 V 2704. OiiELU, 4075. XIV 2112, II, 1. 21.
' Henzen, Bull. d. /., 1871, p. 148.Ephem. ep., I, p. 217. Maué, Praef.
fabr.f p. 63. Contra : Schiess, p. 44.
( 387 )
rat{us), maifiister) quinq{uennaUs) fabr(um) ti(j[nariorum) lustri
XXIV ^. Sur une statue élevée à Sabine, femme dlladricn,
nous lisons : maf/istri qiuiifjueymales collegi fabnim tigna-
r{ioriim) luslri XXH{I], puis les noms des six présidents des
années 104-108 dont l'un, mort en fonctions, a élé remplacé.
Les fastes du même collège donnent pour le vingt-huitième
lustre les noms des dix consuls des années 129-133 et ceux des
six quinquennalcfi -. On peut admettre, en revanche, que tout
collège qui comptait par lustres était présidé par des quinquen-
nales Avec le temps, le sens de ce mot se perdit et il servit
à désigner le président, quelle que fût la durée de ses fonc-
tions. Dès lors on put nommer les présidents élus à viiî quin-
quennales pcrpclui, aussi bien que magislri pirjietui 3. Il faut
remarquer que le même collège peut avoir des quimiuennales
perpelui et des quinquennales : celait donc probablemenlun titre
honorifique décerné à d'anciens présidents qui avaient bien
mérité du collège; il leur conservait les privilèges honoritiques
de celte haute fonction et équivalait peut-être à notre titre
de président d'honneur ou honoraire ^. Chez les pêcheurs et
plongeurs du Tibre, ils reçoivent la même part dans les
* VI 321, de 100-113. Sur la chronologie de ce collège, mal établie
dans le Corpus, voyez notre article dans la Revue de L'Instr. publ. en
Belg., 1888, p. 154 — Celte indication est fréquente; voyez nos ludiccs.
2 VI 996. VI 10299. Voyez t,upra, p. 363, n. 5.
5 XIV 2299 (voyez infra, p. 394, n. 1). Ils sont fréquents; voyez nos
Indices.
^ VI 266 cl 268, fontcini. Orelu, 407o et VI 641. 1925, dendr. ù Rome.
XIV. 168. 169. 368. 372, [abri navales. XIV 250. 251, lemmcularii.
XIV 2. 4140, mensores adjutores. XIV 374. 4234, pisiores. XIV 281, all)iim
des dendrophores d'Oslle : [Sequil]ur universus [ordo q[uin ]q{uenna-
liuiu); suit une longue liste de quinquennales et de quimpieujiales
perpelui; cfr. 71. 3-24. On peut comparer les flamines perpctui et les
Auyuslaies perpelui. Sch.midt, De seviris Avg., p. 100. Beurliek, Le
culte rendu aux empereurs, pp. 184. 197. Sur les curatores perpctui,
voyez ùifra. — Dans le coll. d'Ksculape, le même président est a|»|)elé
tantôt quinquennales, tantôt quinquennales perpelui, VI 10234, 1. 10. 11
(SCHIESS, n. 75 .
{ 388 )
sportules que les patrons, tandis que les mag. quinquennales
ne viennent qu'au second rang. Ceux-ci, avec les curateurs qui
leur étaient subordonnés, suffisaient pour administrer cette
corporation ^, et les quinquennales perpelui n'avaient sans
doute pas de fonctions effectives.
Dans un seul collège, on rencontre un président élu pour
dix ans : magister deceym)annalis 2.
Il est rare qu'un collège n'ait qu'un seul présidents. En
l'an 144, le corpus pislorum en a deux, avec deux questeurs;
en "£0G, les pêcheurs et plongeurs du Tibre en ont également
deux 'k Les Jabri tignani en ont trois à Ostie et six j\ Rome »;
le collège des tlùtistes romains en a d'abord dix, puis deux 6.
Enlre eux, ils s'appelaient commagislri ou collègues 1. Schiess
fait observer que là où il y en a plus de deux, on ne rencontre
pas d'autres fonctionnaires, et il suppose avec assez de vrai-
semblance que les magistri formaient alors, comme les qua-
tuorviri des municipes, un collège qui se partageait les diverses
fonctions 8.
11 résulte de ce qui précède qu'en étudiant la charge du
président dans les corporations professionnelles, nous pou-
vons mettre sur la même ligne les inscriptions des quinquen-
nales et celles des magistri 9.
Pe par son nom, le magister est simplement celui qui a plus
de pouvoir, qui est placé à la tète; ce mot est d'un usage très
répandu pour désigner des présidences d'ordre religieux ou
' Voyez infj'a, p. 401.
2 \ÙA3, collège de Silvanus Salutaris. — XIV 246, quinquennalicii.
3 VI 85, mcnsores machinarii, en 198. X 1647, scabiilarii, en 161. Etc.
* VI 100-2. 1872.
3 A Ostie, XIV 128. 160. A Rome, VI 996. 1060. 10299.
c Deux : VI 140. 10o4, en l'an 200. Dix : VI 3696, sous la république;
cfr. VI 3877. Le corpus fabrinn navaliiim d'OsLie en a six, XIV 256; de
même les Icnuncidarii pleroviarii, XIV 236.
■ III, p. 924. Mitlh. d. /., 1887, p. 203, 1. 4-5 : collega tims,
8 Sghiess, p. 43.
3 II y a même des curaiores et des quaestores qui sont présidents.
( 389 )
privé, comme dit Mommsen i, et il ne semble pas que dans
les collèges privés il indique avant tout des fonctions reli-
gieuses - Le président a des fonctions religieuses parce que
le collège a un culte; il est à la télé du cullc, comme il dirige
lesaulres aflaircs. De même que le chef de la famille, celui de
la (/ens ou celui de l'Etat présidait au culte domestique,
genlilice ou public, de même le 7?îfl^i67e/' remplissait le rùle
de prêtre dans son collège. Aux fêtes religieuses ou funèbres,
il avait une double mission : faire les sacrifices et organiser
les banquets. « Aux jours de fête, disaient les statuts de
Lanuvium, le a quinquennal » fera les libations d'encens et
de vin, et il s'acquittera de tous les autres offices, vêtu de
la toge blanche 3. » Il en était de même dans les collèges pro-
fessionnels : les donateurs qui constituent des rentes aux fabii
et aux droguistes de Brixia et aux [abri de Ravenne, disent
formellement que les sacrifices imposés pour honorer la
mémoire d'un mort ou pour célébrer un annivôrsaire de nais-
sance devront cire faits par les « maîtres » de ces collèges ^.
Le mogister présidait aussi les banquets, qui étaient un acte
* Pauixs, Sent., l'26, 6 : }fngist7-i Jion soliim doclores arliiim, scd etiam
pagnrum, socielalum^ vicorum, collcgiorum, equitum dkuntur, quia
omnes là wagLs céleris possunt. Cic, Verr., II, \Tô : qui tum magiMer erat
ejus sociclalis. Voyez Mommsen, St.-R., 1», p. 7 = Trad., I, p. T.
* Comme l'ont soutenu Rein, dans la Realcncycl. de Pauly, 5. v. colle-
gium. CoHN, p. 14, n. 31. Maué, Praef. fabr., p. 6-2. Contra : Schiess,
p. 50. LiEBENAM, p. "280. — Mommsen range les niagi.stri parmi les
sacerdoles, au vol. III, Indices, p. 1 IGG, mais non dans les autres volumes.
5 XIV '2llîi, II, 1. 29-30. De même, dans le collegiina Silvani de Lueanie,
les sacrifices annuels doivent être faits curantibus sui cujusque anni
magistris X 444 ^
^ V 4480 : ut q(uot}a{nms) .^ili[a)e conjugi suo — per niagislros cele-
brentur, à Drixia. XI 120 : Ob quam liberalitatem coll{cgium, fab)-{um)
— sacrificiumque faciundum de {denariis) MIS per magisiros decrcvit, à
Ravenna. — Ailleurs les sacrifices sont faits par des o/ficiales, V 4*49.
4488. Voyez infra. — Voyez supra, p. 92, n. 1 : Solebant magistri cvlle-
gioruni ludos facere (Xsco^iilS). X 0079 : [idem ludos?] primi fec4:r{unt\
dans un collège d'esclaves impériaux. IV 3424 : niag. l{udos) f\ecerunt).
( 390 )
religieux; il y portait la toge blanche et on lui devait le
respect : le n-giement de Lanuvium menace d'une amende
de vingt sesterces quiconque Toutrageait pendant le festin ^.
Nous parlerons ici du prêtre qui, dans les collèges religieux
et funéraires, remplace le président dans les cérémonies du
culte et parfois joue lui-même le rôle de président ''^. Il porte
les noms de sacenlos, flamen^ Uoeùç, à.pyiezzùq 3. Nous laissons
de côté les corporations vouées à des divinités orientales, Isis,
Jupiter d'Héliopolis et de Doliche, Mithra, qui ont naturelle-
ment des prêtres spéciaux et, au-dessous d'eux, des serviteurs
du culte, portant des noms divers suivant l'office dont ils sont
chargés ^. Il est naturel que le sacerdos ou fiamen ^ se ren-
contre aussi chez les cullores et dans les autres collèges funé-
raires, où il est parfois président et éponyme, ensuite chez les
invenes, dont les collèges semblent avoir un caractère religieux
très prononcé ^. Quant aux collèges industriels, on peut dire
qu'ils n'en avaient pas et que le maciistcr remplissait toujours
son rôle. Cependant les corporations de marchands établies
à Délos et les synodes d'artistes dramatiques organisés à la
grecque ont généralement un àpyispùç ou sacerdos, même
dans la partie occidentale de l'Empire "7. Rappelons aussi que
le collège des fabri ticjnaiii de Luna compte un haryspex
parmi ses décurions {siiprUy p. 307).
Les fonctions civiles du président étaient nombreuses. Il
» XIV2li2, II, 1.27-28.
2 Voyez les nutcurs cités supra, p. 38o, n. 2.
3 Voyez nos Indices. Pour les dendrophores, voyez supra, p. 247.
. * Isù, VI3;i.-i. Mithra, Bull, corn., 1884, n. 869. Jupiter Heliopolita-
mis, VI 422 Dolirlumus, VI 406. 40'J. 413 note.
« VIII 1^683, dans le cnria Jovis. Pour les autres collèges funéraires,
voyez ScHiEss, pp 40-52 et nos Indices.
6 V44I6. 4459. X 5019.
' Bull. corr. kelL, VII, p. 470. V. voN Schaeffer, De Deli insulae
rébus, Berl. Stud., IX, 1, 4880, p. 189. — Pour les artistes dramatiques,
voyez VI 10117 et note. XII 3183. XIV 2113. 2977. Fiuedi.aender, Sitt.,
II,*p.334. Màrquardt, S/.-V., III, p. 538, n. 5. Le culte, II, p. 315, n. 6.
( 391 )
devait tenir la main à la stricte observation des statuts ^. Chez
les ivoiriers et ébénistes romains, les curateurs qui recevaient
les membres nouveaux devaient le consulter sur chaque
admission '^. Il veillait aussi à l'exécution des décrets volés
sous sa présidence. C'est lui qui convoque {cogit, liabet) 3 les
assemblées et qui les préside; il fait d'ordinaire rapport sur
les questions mises à l'ordre du jour et il dirige la discussion.
On suit ses avis et, sur un monument funèbre, nous voyons
même qualifier un magister de conseiller de son collège, soda-
licii magister et hortatoi\ mir(a}e bonitatis et mnocenti{d]e
{h)omo '^. Il figurait parmi les députés chargés de porter la
tabula patronatîis au patron nouvellement élu ^. Quand on
décrélait une statue à l'empereur, à un haut fonctionnaire,
au patron, à un bienfaiteur quelconque, le président devait la
faire ériger et inaugurer G. H surveillait les travaux que faisait
exécuter la corporation pour l'entretien ou l'embellissement
de son local; il s'acquittait des vœux du collège en élevant des
autels aux dieux. Aussi les formules : ciiram agenlibus magis-
tris ^ ou colleghim dédit, magislri ciiravenmt 8, sont-elles
très fréquentes sur tous ces monuments. Le président était
• VI 10298, 1. 4-G. En sortant de charge, il devait jurer : [se hoc con-
legimn rc\niqii{e) hojusce conlegi, qiiod quidquid pemis sese venit, [recte
adminis.tjasse,... nequese adversiis h((iric)] l{egein) fecisse scienlem d{olo)
imalo) in suo magisterio suosque prohibiiissse, [qiiomimis adversus fi{anc)
l{ege)iv facerent.]
2 Millli. d. /., 1890, p. 288. Sitpra, p. 3o6.
^ Voyez supra, p. 222, n. 6.
* Voyez svpra, p. 225, n. 12 et 13.
K Xfo7/t8-o750. Notizie, dans les Atti, 1880, p. 29. = B.d. 7., 1881,
p. M.
, il infli-
geait peut-être les amendes prévues par ceux-ci, sauf recours
(il n'a plus de caisse). 11 a la caisse, puisque seul il fournit caution :
se eis qui jnHa'e.sentes juerunt rationem reddedisse, et si qnit eorum (hja-
biœrat, reddedisscL sive fmieribus [\\ a rendu l'argent qu'il a reçu ou il
l'a employé aux funérailles) et cautionem siiam, in qua eis caverat,
reccpissct. On ne s'entend pas sur la nature de cette cautio. Selon
HusciiKE [Zeitschr. f. g. R. W., XII, p. 173), c'est un état des cotisations
reçues, tenu par le magister au nom du collège et sur lequel les héritiers
pourraient se fonder pour réclamer, en vertu du règlement, la prime
funéraire. Schiess, /. /., la regarde comme une caution versée par le
président en sa qualité de trésorier, on se demande entre quelles mains.
Karlowa, I, p. 815 : « die einzige von den Vorsteliern den Vereinsmitglie-
deren geleistete SicherlœitsbesteUung der ihren Handen anvertraiiten
Gelder. » Cfr. Liebena.m, p. 177, n. 1.
' Voyez infra : curator, quacstor.
* VIII 14G83 : Si magister qiiaestori imperaverit, et (quciestor) non fece-
rit, d{are) d ebebit^ vini amiplioram), dans la curia Jouis à Similtlius.
' Voyez la lU^ partie, chap. V. Cohn, p. 14, n. 31.
* Voyez infra : scriba. XIV 418 : magister qiioqnae (= qidnquennalis)
c.ollegi fabrum tignuarior(iun) Ost, lustri XXXVI, item scrib{a) ejiisdem
numeri. De même : XIV 419. XIV 2209 (supra, p. 394, n. 1). I, p. 476 =
XI 1356 : Uilario viliinis), magister^ posuit consules et nomina decur{io
mim), en fan 16, collège de servi lapicidae à Luna.
» VI 10298. Voyez stipra, p. 391, n. 1.
( 396 )
à l'assemblée. Dans le conlegium aquae, il avait la multae dictio,
c'est-;Vdirc le droit d'infliger une amende, quand il le jugeait
à propos et aussi souvent qu'il le voulait; seulement, un maxi-
mum élait fixé et l'amende ne pouvait pas dépasser un as
(6 centimes) : [Magister si cui fulloni ex h{ac) l{e(}c) miiltam dicere
volet] licelOy si semel, si saepius volet; diclio esto a{ssis) L Nous
n'avons trouvé ce droit du président que dans ce collège, qui
semble être d'une nature spéciale et imparfaitement expliquée.
Ses statuts accordaient même aux magistri une sorte de jwlicis
datio dans un cas fixé; nous n'y insisterons pas, parce que
les détails sont trop incertains et que cela est sans exemple '.
Dans un collège funéraire de Rome, on rencontre un aed{ilis)
et ex d{ecreto) d[ecunonum) pro mag[\stro) jiure) d{ieundo), diffi-
cile à expliquer "^. Il est possible que ce promagister était spé-
cialement chargé de trancher certains différends entre con-
frères : soit seul, soit avec d'autres membres, il aurait formé
une sorte de tribunal d'honneur. Ailleurs nous trouvons des
indices et des quaglaiores qui remplissaient peut-être cet
office 3.
La présidence était à la fois une charge et un honneur,
comme dans les cités. C'était une charge si lourde que
les pauvres n'auraient pu la porter et que l'exemption de
cette fonction était parfois accordée comme un privilège ■*.
En effet, les présidents ne devaient pas seulement au collège
leur temps, leurs soins et les conseils de leur expérience :
comme les magistrats à Rome et dans les villes, ils étaient
tenus de payer leur avènement par un don appelé summa
honoraria s. Plusieurs fois nous les voyons distribuer aux
VI 10298. Voyez 51omjisen et les auteurs cités ci-dessus, p. 371, n. 1.
GiERKE, III, p. 8.i n. 183.
2 VI 9289.
* Voyez in/Vrt, s. v. judices, quaglator,
* VI 5-il : immunes perpetui a magisterio (coll. inconnu).
^ Pais, V 669 : Uerculi Auginsto) — ex summis hon[ora]riis quas
colle[gio] naïUarum debuerant, ndj{ectis sestertiis) 3ÎMCC posuerunt. Les
sommes honoraires n'avaient pas suffi pour payer la statue. L'inscription
( 397 )
confrères une somme d'argent, donner au collège une statue
ou un autre objet quelconque, ob honorem magisterii ou ob
honorem quinquennalilalis '. Celte somme honoraire, en argent
ou en nalun;, était fixée par le règlement 2 ou exigée par la
coutume; parfois elle est déterminée par un décret spécial
de l'assemblée ou des décurions •^. Bien plus nombreuses
encore sont les libéralités faites par les magistri sans mention
du motif : on voit qu'ils veulent gagner les bonnes grâces
de leurs collègues et laisser un bon souvenir de leur pas-
sage h la présidence. Les uns font des distributions d'argent
ou de vivres, les autres offrent un banquet, ou, plus généreux
encore, promettent un repas annuel; quelques-uns donnent
une rente à cet effet. Ils bâtissent un local ou un temple au
collège; ils achètent l'emplacement, ou exécutent d'autres
travaux de moindre importance. Quant aux inscriptions qui
parlent d'un autel ou de la statue d'un dieu donné à un col-
lège par le président, elles sont fort nombreuses 4-.
ne dit pas pourquoi ces personnages (trois seviri) doivent ces sommes.
Tertull., ApoL, 39 {supra, p. 31o).
* Statues : III 3o80. 4272. V TiU. Dix livres d'argent et dix mille
sesterces à distribuer per gradus collcgi : Orelm, 4073. Listes des spor-
tules en argent distribuées par cinq quinq. ou quinq. perp. du corpus
piscatorum et urinatorum : Notizie, dans les Aiti des Lincci, 1888,
vol. 4, 4c série, p. 280 : in honorem. collecji sut. Statues de Maximinus
et de Maximus, in honorem col[t(cgi)] conveter{anorum), 111 11189. Statue
d'Hercule, ob hon{orem) col[legi), 111 4272.
^ Vlll 14G83 : Si qnis mngister [esse voluerit, d{are) d{ehebit)] vini
ampihoras) II, h Simillhus. Cfr. X 825 (signum). X G071 {aram}] voyez
sîtpra, p. 37a. n. 1.
5 Supra, l. l. X G679 : Mag{istri) duo, q uaestores^ duo, ministr[i duo.
aedeni lapide quad]rato et ostia et faslus de sua pccun[ia) fecer[unt. Idem
ludos] pri}ni) feccr. X 6G38, II, c, 3. 8 : [e]x d{ecrelo) d{ecurionum) pro
magiislralu) IIS MDC CCr. ibid., I, c, 0. II, B, lo. c, 33. III, A, 3-7. c, 8.
Ce sont trois collèges de la maison impériale. Dans le dernier, Mommsen
conjecture (ju'il s'agit de magistri suffecti ou clioisis au delù du nombre
ordinaire. Schikss (rem. 60 et 87) pense que c'est la caution du magisler
qui tenait la caisse. — IV 342G; mag. Uudos) f(ec.) d. d.
-* Voyez nos Indices (Fonctionnaires, magistri).
( 398 )
11 fallait donc, en général, èire riche pour aspirer à la pré-
sidence. Aussi, contrairement à la règle, il arrive que le prési-
dent est choisi en dehors du collège. Nous en trouvons qui
exercent un autre métier que les confrères \ et beaucoup sont
sévirs Augustaux-; mais ce ne sont pas des preuves con-
cluantes, parce que les collèges admettaient des étrangers
comme membres effectifs et que les artisans et les commer-
çants, qui appartenaient en grande partie à la classe des
affranchis, pouvaient être à la fois sévirs et membres d'un
collège industriel. Il en est qui président plusieurs collèges à
la fois ou qui sont présidents de Fun et patrons d'un autre :
à Falerio, un affranchi, nommé T. Sillius Prisons, était à la
fois président et trésorier des fabii et des foulons; sa femme
était c( mère » des foulons, et ses deux fils étaient présidents
et secrétaires des fabri 3. Beaucoup sont à la fois présidents
et patrons du même collège. On est tenté de croire qu'ils ne
sont pas membres effectifs, et pourtant des inscriptions de
Nîmes et de Lyon, où de pareils cas sont fréquents, prouvent
le contraire ^. Les collèges choisissaient des hommes riches et
influents : souvent des affranchis et des commerçants-^ par-
venus tiennent à honneur de présider une corporation ; sou-
vent des citoyens qui occupent les premières dignités muni-
cipales, daignent accepter cette fonction dans un ou plusieurs
collèges. Dans les villes commerçantes, comme Ostie et Lyon,
des membres des collèges industriels pouvaient certes arriver
aux honneurs municipaux; pourtant, il est ù présumer que
ces décurions, ces magistrats supérieurs de la cité, ces cheva-
* Voyez supra, p. 344^, n. 3 et 4.
2 Voyoz nos Indices, s. v. Magistri.
5 \\rAm.
*• Citons seulement ici : Nantia) Atr. et Ou{idis), curator ejiisdem cor-
poris, item utridariius) corp{oratus) Arelat(ensis), ejusdemq{ue) corp{oris)
curat{or)\ à Nimes, XU 4107. Voyez encore: VVilmaNxXS, 2506. Aluier,
M. d. L ^ ÏI 165. GuuTER, 3o4, 1 = Notizie, dans les Atti des Lincei,
1888, p. 279.
^ Allmer, II 171.
( 399 )
liers romains qui président des collèges de fabri tignuarii, de
fabri navales, de dendrophores et d'autres encore ', n'en sont
pas toujours membres etiectifs, et qu'ils s'en occupent moins
pour les administrer que pour les protéger : ce sont des pré-
sidents d'honneur ayant sans doute à leurs côtés des présidents
effectifs.
Les charges que les présidents avaient à supporter étaient
compensées par des honneurs. Ils donnaient leurs noms à
l'année, comme les consuls : ils étaient éponymcs. Ainsi
l'année de la dédicace d'une statue, la date d'une réunion,
celle d'un décret sont indiquées dans les inscriptions et dans
les procès-verbaux par les noms des consuls et par ceux des
présidents -. Dans les fastes ou annuaires, on compte les
années ou les lustres depuis la fondation du collège et on leur
donne les noms des présidents. C'est de là que viennent ces
litres : magisler anni iwïmi, mafjUler quinqncnnalis lustri
secundi. Sur Valbtim, les patrons seuls figurent avant les pré-
sidents^. Les confrères leur devaient le respect, surtout quand
ils étaient dans l'exercice de leurs fonctions: les statuts de
Lanuvium menaçaient d'une amende de vingt sesterces celui
qui outrageait le (juinfjuennalis pendant un festin. La prési-
dence d'un collège était, du reste, un honneur, même au yeux
du public, et ce qui le prouve, c'est le soin que Ton prend
de mentionner ce titre sur les tombes et sur les autres
monuments : ceux qui ont rempli les plus hautes fonctions
dans leur ville n'oublient pas de le citer dans leur cursus
honorum.
On décernait aussi des honneurs extraordinaires aux prési-
dents, par exemple celui de s'asseoir sur un siège honorifique
appelé bisellium ; ils recevaient alors le titre de bisellarius '*. On
* IX 3923. XIV 314. 372. 403. 2800. Orelli, 2675.
2 Exemples : VI 83. 1054. 10234, 1. 23-24. XI 5748.
5 Supra, pp. 363 et 365.
* XIV 307 : qq., itemque bisellari[iis] des pistorcs Ostiemes? et Por-
tenses. Sch.midt, Sev. Aiig., pp. 92-95. Saglio, Dict. des Antiq., s. v.
bLseUium. De Ruggiero, Dizionario epigrafico, I, p. 1007.
( 400 )
récompensait leurs services et leur bienveillance par des sta-
tues ^ qu'ils paient parfois de leur bourse -. Les centonaires de
Vérone achètent un emplacement où leur magisler se fait
construire une sépulture de famille; ailleurs on se cotise pour
ses funérailles 3.
A ces honneurs se joignaient des avantages matériels : le
président obtenait souvent une part plus grande dans les dis-
tributions de vivres et d'argent. C'était encore une coutume
empruntée aux villes : quand tous les habitants étaient invités
par quelque riche citoyen, les parts étaient mesurées d'après
le rang de chacun, et les décurions étaient les plus favorisés ^.
De même, dans les collèges, on suivait l'ordre hiérarchique. Le
collège des dendrophores romains reçoit de son président
10,000 sesterces (2,700 francs) : on les partage à toute la corpo-
ration per gradus collegi ». Voici le tableau des distributions
{sjwrtitlas, panem et vinum) faites au collège d'EscuIape et
d'Hygie, quatre fois par an, le 22 février, le 22 mars, le 11 mai
et le 4 novembre, dans la scliola reçue de Marcellina :
Le quinquennalis, \epater collegi reçoheni sixdeniers(6 fr. UO),
un pain et neuf setiers de vin (5 litres); la mater collegi^ qui
est Marcellina, reçoit la même somme, sans pain ni vin.
Les immunes et les curalores reçoivent quatre deniers (4 fr. 30),
un pain et six setiers de vin (3.2o litres).
* Les dendrophores romains à leur quinquennalis perpetuus ; quod
citmulata omni erga se henignitate meruisset oui statua ab eis décréta
poneretur, Bull, coin., 1890, p. 20. XIV 370 : liuic primum omnium
universi honorati statuam. ponendam dccreverunt ob mérita ejus {Fabri
tign. d'Oslie). XIV 374 : magistro optimo ob amorem et mérita ejus (môme
collège). XIV 303. VI 10302. XII 3637.
2 A un magister juventutis : qui oblata sibi statua ab eis honore
contentus impensam remisil, IX 4885. Cf. XII 3637.
^ V 3411, à Vérone. VI 9289 : et aes a familia conlatum est.
* Otto Toller, De spectaculis^ cenis, distribiUionibus in mîmicipiis
exhibitis, DLss., 1889, pp. 59-77.
5 OllELLI, 4075.
( 401 )
- Le populus collegi reçoit par tête deux deniers (2,15 fr.), un
pain et trois setiers de vin (l,6o litre) *.
Deux fois par an, le 4 janvier et le 19 septembre, le même
collège se réunissait dans le templinn divonnn pour recevoir
seulement des sportules réparties entre ces trois catégories de
participants dans les mêmes proportions : la première recevait
trois deniers (3,24 fr.), la seconde deux deniers (2,16 fr.) et la
troisième un seul (1,08 fr.) -.
11 en était de même dans les corporations professionnelles.
Trois inscriptions nous parlent de sportules distribuées à dif-
férentes occasions au collège des pêcheurs et plongeurs du
Tibre par six patrons ou présidents. Les donateurs divisent les
participants en quatre classes : les pat?'oniei les quinquennales
perpetui, les magistri^ les curateurs et la plèbe. Deux donateurs
leur distribuent respectivement 26, 16, 12 et 8 deniers. Un
autre leur donne respectivement oO, 26, 16 et 12 deniers ; un
quatrième leur distribue respectivement 100, 12, 8 et 4 ses-
terces 3. On peut remarquer quMci les quinquennales perpetui
* Le pain est le même pour tous : panem [a{ssium) NI]. Schiess
(note 361) a vu qu'il faut suppléer dans la ligne 12 : populo migitUis
denarios) II, mots oubliés par le graveur. Avec ces sportules et ces
vivres, le collège organisait un banquet. Nous avons dit plus haut
(p. 304, n. 4) que les sportulae exprimées en numéraire servaient à
organiser un repas, à acheter la viande, le pain et le vin étant donnés.
Dans le collège d'Esculape et d'Hygie, les sommes {sportulae de 3, 2, 1 ou
de 6, 4, 2 deniers) ne sont qu'une évaluation du repas; en réalité, on
veut dire qu'un repas de cette valeur est préparé pour chaque convive;
en effet, les statuts prescrivent de vendre la part des absents et d'en
distribuer le prix aux assistants. 1. 16 : il qui ad epulandum non con-
venissent, sportulae et pane{s) et vinum eorum venirent et praesentibus
divideretur. La mater n'assistait j)robablement pas aux banquets, car elle
ne reçoit ni pain ni vin.
2 VI 10234, 1. 10-16. Voyez supra, pp. 210. 213. 305.
5 Voyez supra, p. 38o, n. 2. Voyez le tableau dressé par Huelsen dans
les Atti des Lincei, l. /., p. 281. Rappelons que le denier valait sous
l'Empire 1,08 fr., et le sesterce 27 centimes — Cfr, XI 6017 (fragment).
Tome L. 26
( 402 )
ne sont évidemment pas les présidents effectifs : placés au-
dessus des magistri, à côté des patrons, ils sont probablement
des présidents honoraires nommés à vie.
On voit que les présidents viennent en tête, et dans quelques
collèges ces parts spéciales constituaient pour eux un avantage
sérieux. Pour stimuler le zèle de ses quinquennales ^ le collège
de Lanuvium leur avait assuré les privilèges suivants : l'exemp-
tion de la cotisation mensuelle pendant la durée de leurs fonc-
tions {a sigillis immunis) et double part dans toutes les distribu-
tions; après leur sortie de charge, ils obtiennent une part et
demie s'ils ont géré leurs fonctions avec désintéressement (quis-
quis quinquennalitatem gesserit intègre) , afin que leurs succes-
seurs les imitent dans l'espoir d'obtenir les mêmes récom-
penses ^ Dans quelques collèges, le président porte même un
nom qui indique qu'il était exempt des cotisations et quelle
part il obtenait dans les sportules ; nous trouvons un quin-
quennalis immunis triplicarius , et deux magistri sesq[uiplicarii]^.
Cependant l'immunité n'était pas toujours attachée aux fonc-
tions : on la voit accorder pour récompenser le zèle ou les ser-
vices du président 3.
Nous avons déjà dit que ces parts extraordinaires étaient
considérées plutôt comme un honneur que comme un avan-
tage 4-, et il en était sans doute de même de l'immunité. Quand
on donnait quelques deniers ou quelques sesterces de plus
aux sénateurs municipaux, aux patrons ou au président d'un
' XIV 2112. II, I. 17-22. i>>m' dgilla, poiw stips menstruel, voyez Momm-
SEN, De coll., p. 107. ScHiEss, p. 49, note 97.
2 VI 10295. 10302, avec la noie de Mommsen. Marquaudt, St.-V., I,
p. 207. Org. de l'Empire, I, p. 304. Schmidt, De Aiigiistalibus, p. 105.
5 XII 3637 : mag{ister), oblata sibi a collibertis immunitate, — [ne]qua
parte utiiitatibus eorum [gr]avis videretur, immunitatem [re]misit. (Coll.
fun., à Nimes.) VI 85 : rector im.m{unis iterum), chez les mensores
macfiinarii. XIV 367 : quinqitiennalis) et immunis \collegii) Larum Aug.,
à Ostie. ScHiESS, l. l. LiebenaiM, p. 200.
* XIV 2112, II, 1. 21-22 : ob honorem.. III 7960 : ob honorem. dupii.
Voyez supra, pp. 304-306.
( 403 )
collège, on ne pouvait avoir en vue que de leur accorder une
distinction honorifique. Le quinquennalis du collège d'Esculape
et d'Hygie est riche, car il a promis de donner un banquet ou
des sportules le 14 mars de chaque année. Le même usage exis-
tait dans l'Église : après les agapes fraternelles, on distribuait
parfois des sportules, et les prêtres recevaient double part.
Saint Paul recommande d'honorer ainsi ceux qui président
bien, surtout ceux qui prêchent l'Évangile. TertuUien atteste
(«tte coutume et saint Cyprien veut que les confesseurs de la
foi reçoivent une part sacerdotale K Les collèges accordaient
parfois le même honneur à de simples membres, qui témoi-
gnaient leur reconnaissance par des présents plus coûteux que
la part qu'ils recevaient -.
Il nous reste à parler du remplacement et de la sortie de
charge. Le président devait être remplacé dans deux cas. Il
pouvait arriver qu'il mourait en fonctions; alors on pourvoyait
ù son remplacement par l'élection, et son successeur prenait
sans doute le nom de siiffedus 3. Dans les municipes aussi
bien qu'à Rome, quand la magistrature supérieure était sans
titulaire, le Sénat nommait à l'origine un interroi pour pré-
parer et diriger la nomination du titulaire définitif. Cette
nécessité ne pouvait se présenter dans les collèges que s'ils
n'avaient qu'un seul président. On est tenté de croire que
' Paul., Ad Timoth., I, o, H : Qui hene praesunt presbyteri, duplici
honore digni haheantur : maxime qui laborant in verbo et doctrina.
18 : Dignus est operarius merceda sua. Tertull., De jejun., 17 : Ad
elogium gulae tuae pertinet, quod duplex apud te praesidentibus honor
binis partibus deputatur, cum apostolus duplicem honorent dederit ut et
fratribus et praepositis. Cyprian., Epist., 39, o : Ceterum presbyterii
honorem désignasse nos illis jam sciatis, ut et sportulis idem cum
presbyteris honorentur.
2 VI 3678. III U94. 7960. X 3441. XIV 2d6, 1. 141.
"' VI 4051 : qui in mag{isterio) dec{essit). VI 996, liste des magistri quin-
quennales du coll. fabr. tign. de Rome; il y a sept noms, au lieu de six-
(cfr. VI 10299), mais l'un est suivi des mots : m magi.sterio def'unctus. —
Sur VI 8638 -= X 6638, voyez supra, p. 397, n. 3.
( 404 )
nous en avons un exemple dans le magister quinqiieannaiis
ïnterrexs d'un collège inconnu de Formies; mais il devrait
s'appeler interrex tout court et l'on ne comprend pas qu'un
décret du collège lui impose une a somme honoraire » '.
Quand l'empereur était nommé duumvir d'un municipe, ce
qui arrivait assez souvent, il désignait un praefedus pour
administrer la ville à sa place, sans collègue '^. Un cas sem-
blable se présentait parfois dans les corporations. A Brixia,
cinq affranchis élèvent un monument à trois sévirs qui ont
été présidents de tous les collèges de la ville, ce qui veut dire
des fabri, des centonaires et des dendrophores : in omnib{us)
coll[egns) magislerio perfuncl[oru7n]. Les dédicants font suivre
leurs noms de ces mots : qui magisterio eorum officio fiincti suni.
Cette même inscription nous apprend que les sacrifices sont
faits dans ces collèges par les officiales et non par les magistri 3.
Nous croyons pouvoir en conclure que ces collèges avaient des
présidents honoraires, hommes riches et influents, à qui l'on
ne demandait que de se montrer généreux, et qu'à côté d'eux
il y avait des officiales, présidents effectifs, qui remplissaient
leurs fonctions [officium] et administraient le collège. Signa-
lons aussi à ce propos un adjutor magistri, à Alburnus Major,
un magiistri) v(ices) a{gens), à Rome, et un proma[g{ister}], à
Nîmes 4.
Quant à la sortie de charge, les curieux statuts du collegium
aquae de Rome nous donnent de minutieux détails. Le jour où
il déposait ses fonctions, comme tout magistrat romain, le
» Un autel à Fontanus, X 6071. Marquardt, St.-V., l-, p. 169 = Org.
de r Empire, I, p. 237.
2 Marquardt, l. L, p. 169. Trad., p. 236.
5 V 4449. De même au n» 4488 : [ut inde fiant] profusiones in perpe-
tu{um) per oficiales c{oUegi) cent{onariorum). Cfr. Maué, Die Vereine,
p. 46. Praef. fabr., pp. 59-61. Hirschfeld. Gcdl Sfiid., III. p. 16 (252).
SCHIESS, p. 50. LiEBENAM, p. 287.
^ III 7822, à Alburnus Major. VI 10306, à Rome. XII 3306, à Nîmes.
Cfr. VI 9289 (voyez mpra, p. 396).
r
( 40o )
u maître » de ce collège devait jurer qu'il avait bien administré
la c( chose publique » et les intérêts communs, que lui-même
n'avait pas violé le règlement, et qu'il n'avait permis à personne
. 11 tenait le livre des recettes et des
dépenses. On prenait des précautions contre ses malversa-
* XIV 281 (dendr. d'Ostie). Voyez supra {qq. pp.), p. 387 et page précé-
dente, n. 6, à la fin.
2 Voyez nos Indices, s. v. arcarim, (juaeslor. Schiess, pp. 61-62. Liebe-
NAM, p. 208. Voyez infra : quaglator.
5 III 4168. 10231. Etc.
^ Voyez supra, p. 408, n. 3. 410.
^ IX 5450 : mag. colleg{ii) fabr. Il et q{uaestor) II. Ibid. : mag. et
q. sodal(icii) fullon{um). XIV 374 : quaestor et qq. corporis pistorum
Ostiens{ium) et Port{uensium). VI 6214. 10318 : trih{unus), mag(ister),
q{uaestor} III. Dans le coll. fabr. et cent. Regie/nsiurn {XI 970), ils sont
appelés d'abord quaestores, puis quaestores et magistri. Sur curator^
quaestor, voyez supra, p. 409, n. 5.
*^ Collège militaire de Lambèse : quae anularia sua die quaestor
sine dilatatione admunerare curabit, VIII 2554. Les mots : neque funera-
tici{i)s sufjicerent (III, p. 924 : coll. Jovis Cerneni) se rapportent au prési-
dent et aux questeurs.
{ «4 )
lions ^ il devait obéissance au magister, qui avait la surveil-
lance de sa gestion 2.
Le trésorier ne tenait pas seulement la caisse; on l'adjoi-
gnait souvent au président pour exécuter les travaux décrétés,
pour ériger les statues dont la caisse supportait les frais; par-
fois on le chargeait seul de la surveillance 3 Dans la curïa
Jovis de Simitthus, le questeur annonçait les assemblées et
les décès.
Tant(5til n'y a qu'un questeur, tantôt il y en a deux ou trois.
Ils sont élus par le collège pour un an et rééligibles 4^. Leurs
fonctions sont moins un honneur qu'une charge (munus)^; ils
figurent dans les inscriptions avant le viateur, mais après tous
les dignitaires. Les collèges funéraires confiaient parfois ces
fonctions à des femmes 6.
Dans la curia Jovis de Simitthus, comme chez les fabri de
Lyon, le questeur devait une somme honoraire 7. Ailleurs
encore, ont les voit faire des présents à leurs confrères; les
fabri de Côme honorent un questeur ob quaesturam fideliler ac
liber aliter g estant 8.
Dans quelques collèges, c'est le président qui porte le nom
de quaestor : ainsi, celui des centonaires de Côme est épo-
nyme, et il leur donne un capital de mille sesterces à charge
d'entretenir la sépulture de sa famille 9. Des collèges funé-
< VIII 14683, c, 1. 3 {Curia Jovis de Simitthus).
2 Ibid., B, 1. 3-5.
- VI 868. 1002. 1022. III 7807.
^ Voyez nos Indices.
» Henzen, note au n. VI 10288. Wilmanns, 179 et 348, notes.
« VI 10342. — Souvent à un décurion : deciiirio), q.uaestor). De même :
deciurio) et quaestor coll{egii) fabr., à Patavium, V 2850.
' VIII 14683, deux deniers. AlliMER, M. d. L , II 170 : pertinentis ad
collegiurn fabror{um) redemptos honor{es^ quaestor{;ios).
« V 5304. — Cfr. VI 244. 10344. X 6679.
^ V 5446 ; quaestor anni primi. 5447 : q{uaestor) anni, quo curia
dedicata est. Mommsen, Corpus, V, p. 565. Le collège lui a fait don d'un
emplacement pour une sépulture.
( 415 )
raires indiquent la date sur leurs monuments communs par
les noms des questeurs i. Les collèges militaires de Lambèse
ne nomment jamais d'autres dignitaires sur les listes qui nous
restent; ils chargent le questeur de la surveillance des tra-
vaux et celui-ci leur fait des présents, comme ailleurs le
président ''^. Les caplatores d'Anagnia ont un questeur qui est
patron de la cité 3.
Cette variété est la meilleure preuve de l'autonomie des
collèges.
Scriba, tabularius.
Dans plus d'un collège, le président remplissait les fonc-
tions de secrétaire et prend le nom de scriba et magister,
magister quinquemialis item scriba 4-. Cependant, la plupart
des corporations possédaient un ou plusieurs secrétaires
spéciaux (scriba, tabularius, notarius) ^. Le collegium fabrum
tignuariorum de Rome en avait six 6. Le secrétaire fait les
écritures, rédige les procès-verbaux des séances et les inscrip-
tions du collège "î, il fait graver l'album et les fastes et il
garde les archives, peut-être les privilèges enfermés dans les
scrinia déposés dans la maison corporative 8. \\ n'est pas
' VI 9-291-9294. 10045. 10046. Wilman.ns, 179, note.
2 VIII i>oo4. i2o86 2601. 2602. 2603. 2733. 2751.
^ X 5917, s'il ne faut pas lire : itemqiue), au lieu de : item q{uaeiitor).
' XIV 2299 : scriba et magister perpeluus corporis scaenicorum latino-
mm. XIV 418. 419, dans le cott. fabr. tign. d'Ostie; cfr. 347.
s Voyez nos Indices. Schiess, p. 67. Liebenam, pp. 200. 201. 210.
6 VI 1060. Cfr. VI 868, où il y en a trois dans un coll. inconnu.
' V 784 : scribsit Utpius Amantius s{criba), vétérans à Aquilée. Cfr.
III 870.
•* Voyez une reproduction de deux scrinia, provenant de collèges
romains, dans Xeitsclir. /. Sarignjjslift., Rom. Abtli., XII, 1892, pp. 146-
149, avec rarticie d<^ Mommsen. Ces deux scrinia pol'lent celte inscrip-
tion : Constitutiones, corporis miinimenta . La auvoôo; ^uat'.XTi xwv Tuepl
-rov 'Hpa/./.s'a àOÀr^Twv avait reçu d'Hadrien un oVxriu.a oj; -zà ypajjLfjiaTa
( 416 )
annuel, mais nommé à vie, du moins dans le collège de
Diane et d'Antinous ^ ; quoique inférieur aux autres fonc-
tionnaires, il figure à côté d'eux dans les inscriptions '^. Dans
le collège de Diane et d'Antinous, il était exempté des con-
tributions mensuelles et il recevait une part et demie dans les
distributions 3.
Via! or.
Dans ce collège, il y avait un viateur qui jouissait des mêmes
avantages. Messager du président, il convoquait les confrères.
Le collège des centonaires romains en avait deux; on en
trouve un ou plusieurs dans quelques collèges funéran*es ^,
Tels étaient les fonctionnaires principaux et ordinaires.
Nous allons citer, par ordre alphabétique, les fonctionnaires et
serviteurs qu'on rencontre plus rarement.
Ador, esclave ou libre, qui représente le collège en justice
et dans les actes juridiques ; on le rencontre chez les vétérans,
à Mayence, et dans le coUegium magnum Lnrium) et lmag{inum)
— Antouini PU ^.
Adjulor magistri ; voyez supra, p. 404.
à-o-îôcjôai xà xo'.vâ, et Antonin le Pieux leur dit : Èxs'Xsuja Gijle^v olt.o-
ostyÔT^vai yoyoîo'^, £v w xal xà Ispà y.a":a6T,Tcj6£ y.y.\ zôc. Ypa|j.jj.a":a- Kaibel,
iOo4. 1055'. HOîlAm. Voyez supra, p. 230, n. 4.
' MoMMSEN, De coll., p. 106, n. 1. On ne trouve jamais scyiba iterum.
2 III 4168. VI 868. 1060. Il est affranchi du collège t Robert, Épigr. de
la Moselle, II 115 : nautarum Mosallicor. Iibe7'[tiis] tabularius.
5 XIV 2112, II, 1. 19-20. On a cru que les collèges avaient des sceaux;
mais sigillum a un autre sens : XIV 2112, II, 1. 17-20 (Mommsen, De
coll., pp. 106-107 : reçu ou quittance de la cotisation payée, de là ; coti-
sation). VII 1069. 1070, et notes : il s'agit d'une statue de Mercure, sigil-
l{um) col{umnam) lign{eam).
t VI 7861. VI 647 (trois). 10254. 10288. XIV 2112, II, 1. 19-20.
- Brambach, 1049 (libre). VI 671 (esclave). Schiess, pp. 23-24, com-
prend : Antouini PU ser{vu.s) actor. — Voyez Ille partie, ch. V.
( 417 )
Aedilis. On trouve un édile dans trois collèges de juvenes et
dans quelques collèges funéraires '. Rien n'indique ses fonc-
tions. Peut-être s'occupait-il de l'organisation des jeux que
donnaient les juvenes. L'édile des cultures collegi Silvani de
Philippes, pour reconnaître l'honneur qu'il a reçu {ob honorem
aedilitatis), fait polir la surface d'un rocher et y fait graver les
noms des confrères qui avaient offert des présents au collège
pour la construction de leur temple : peut-être l'édile devait-il
diriger cette construction.
Aedituus. Les collèges qui avaient un temple en confiaient
la garde à un aedituus ; V affranchi C. Julius Chrysantus s'ap-
pelle aedituus collegi tabernaclariorum, à Rome, et dans les
fastes des esclaves impériaux d'Antium on rencontre un Lysi-
machiis, aedil{uus) vern[arum) Ant{iatium) -.
Apparitor, huissier. On trouve un [ap^paritor navicular{io-
rum) à Arles. C'était un serviteur inférieur, comme le via-
teur 3.
Arcarius. Des collèges religieux ou funéraires donnent re
nom au questeur ^.
'kpyjiôYr\ç. Dans une ^•jvspyao-ia non spécifiée d'Hiérapolis :
ce serait le receveur des cotisations du collège ^.
Censos ; voyez supra, p. 377.
Custos monumenti, gardien du monument funéraire 6.
* Juvenes : III o678. XIV 2636 : aedilis et curator. 3864. Coll. fun. :
VI 9288. 9289 (aedilitas). A Philippes : III 633 : ob honorem aedilitatis
titulum polivit de suo et nomina sodalium inscripsit eorum qui numera
posuerunl (voyez supra, p. 228). Schiess, p. 62. Liebenam, p. 209.
2 VI 5183^ X C638, II, c, 23. III 1158 : aedis custos c(ivium) R{oma-
norum), à Apiilum. VI 406 : curator tempuli des colitores hvjus loci
(scil. Jovis Dolicheni), sur rAventin. Cfr. Marquardt, S/.-V., IIP, p. 215.
Le culte, I, pp. 258-259.
'" XII 718. HiRSCHFELD suspecte l'inscription.
^ m 6150= 7437. — V 3351. VI 9148, s'il s'agit d'arcamde ces collèges.
s Lebas, 741 et 1371. Explications, partie V, p. 224. C. I. Gr., 39Î2a.
Le mot àp)(^t6vT)(; désigne le fermier d'un impôt.
6 VI 10296 (coll. fun.); c'est probablement un esclave du collège.
Tome L. 27
( 418 )
Defensor. A Ostie, les bateliers de cinq corporations élèvent,
en l'an 147, une statue à un chevalier romain, patronus et
defensor [quinqiie) corporum lenunciilarior{um) Osliens{lum), qui
est aussi quinquennal du corpus codicariorum ; ù Rome, le
même honneur est rendu à un autre chevalier romain,
patronus et defensor codicariorum, qui est aussi patron des
marchands d'étoupe; on trouve encore un defensor des négo-
ciants à Sarmizegetusa et des porteurs de litières dans la
même ville *. A cause de leur rang social, ces personnages
semblent être au-dessus et en dehors des collèges, comme les
patrons. Ils sont bien antérieurs à ces defensor es qu'Alexandre
Sévère donna à toutes les corporations, et qu'il choisit dans
leur sein, en fixant la juridiction dont chacune dépendait :
ceux-ci étaient sans doute des avocats chargés de soutenir les
procès de la communauté -. Ceux des inscriptions sont du
deuxième siècle. On ne saurait dire s'ils avaient une mission
si bien définie et si spéciale; en tous cas, ils devaient défendre
les intérêts des collèges soit devant la justice, soit devant
l'administration, comme le prouve le motif pour lequel les
bateliers d'Ostie honorent le leur d'une statue : oh insignem
* XIV 4144, à Ostie. VI 1649, à Rome. III 1438 : defens{or) lectica-
r{iorum). III ISOO : CrassoMacrobio, negotiatores provinciae Apul. defen
sort optiuio.
2 Vita Alex. Sev., 33 : Corpora omiïium constiluil vinariorum, lupina-
riorum, caligariorum et omnino omnium artium idemque ex sese deferi-
sores dédit et jiissit, qui ad quos jiidices pertineret. Au lieu de : ex sese,
Madvig t Verfass., II, p. 142 conjecture : ex senatu. Cfr. Dirksen.
pp. 59-60. LiEBENAM, p. 211. — En droit, defensor désigne celui qui
représente un autre en justice, soit sans mandat, soit avec un mandai
extraordinaire conféré pour une affaire déterminée. Mais il a aussi un
sens plus général, celui de défenseur, protecteur. Heumann, Handlexilion
der Quellen der rôm. Rechts. Le defensor civitatis ne fut créé qu'en 364 :
c'était un fonctionnaire municipal chargé de défendre la plehs urbana
contre les vexations des puissants. Marquardt, St.-V., 11% p. 21o.
Trad., p. 316. — III 6150 = 7437 : ecd[ici) d'un bacchium vernaciUorunt ,
à Nicopolis.
( 419 )
ejits in d[efcnd]nulis .se et in (iiendis eximiam diligentiam,
dignissimo [ajlque ahstinentissinw viro, ob mérita ejus.
Dispenstitor, repundor. Ce dernier se trouve dans le collège
des l'abri et des centonaires de Milan, dont il est aussi patron.
On en connaît deux, qui sont tous deux chevaliers romains et
qui ont été revêtus, à Plaisance, des prêtrises et des magistra-
tures municipales ^. Mommsen les compare aux dispimctores
des municipes, fonctionnaires ou employés charges de faire la
revision des comptes, contrôleurs de la comptabilité, inspec-
teurs des finances "^. Comme ce sont des personnages considé-
rables, qui ont géré des fonctions élevées et qui ne sont pas
membres du collège, mais ses patrons, on peut croire qu'ils
ont été chargés par la ville de contrôler les comptes de cette
corporation, qui recevait probablement un subside de la
caisse communale 3. Le dispensalor, qu'on trouve chez les
decuriales geruli à Rome et dans un collège de Dertona, occu-
pait un rang moins élevé et remplissait sans doute l'une d^s
fonctions du trésorier, du caissier : le questeur reçoit et le dis-
pensalor débourse 4-.
llaryspex; voyez supra, p. 307.
Flonorati; \oyez supra, pp. 366-307.
Immunes; voyez infra : Finances.
Interrexs; voyez supra, p. 404.
Jiidex. Nous avons vu que les magistri avaient parfois une
certaine juridiction sur les confrères. Dans un collegium
* XI 4230 : repnnctor splendid{issimorum) collegiorum fabrum et cent,
ciploniae) M ediol.), à Placentia. V 5847 : patrondis) et repunctior) eoU{egii)
aerar(ii) col(oniae) M(cdioL); c'est le même collège (voyez supra, p. 356,
n. 6). Cfr. V o8i7, note. Liebenam, p. 208.
2 III 2026^^^ note de 3Iommsen. Cfr. Marquardt, /. t., p. 177. Trad.,
p. 260, n. 1. Pour les villes : III 2026. VIII 9020. 9699, et p. IIOI.
5 Voyez infra, p. 454. Hirschfeld, Gati. Stud., III, p. 19 (255).
* V 7372. VI 360. Cfr. VI 9320. 9321, où il s'agit d'esclaves, intendants
ou caissiers [dispensator) d'un particulier. Mo.mmsen (V 7372, note) rap-
proche celui de Dertona du repnnctor. A l'armée, dispensator est
l'officier payeur. L. Renier, Métanges, p. 177.
( 420 )
fabrum de Tusculum ou d'Ostie, on trouve un judexs wter
élection) XII ah ordine liist{ro) XXII, dans une énumération de
fonctions collégiales, c'est-à-dire l'un des douze juges choisis
par l'assemblée pour le douzième lustre de ce collège'". S'agit-il
d'arbitres qui tranchent les différends entre confrères '^?
Magislri cenarum, ordonnateurs des banquets. Dans le
fameux collège funéraire de Lanuvium, le soin des banquets
n'incombait pas au président; les confrères devaient remplir
tour à tour les fonctions de magister cenae, quatre par an,
suivant l'ordre de la liste matriculaire, ex ordine alhi 3. Les
quatre magistri cenae étaient tenus de dresser les Iridinia, de
placer sur les tables une amphore de bon vin chacun, un
pain de deux as et quatre sardines pour chaque convive, de
l'eau chaude qui devait être mélangée au vin; enfin, ils
devaient fournir les coussins et la vaisselle nécessaires ^. Sans
doute, ils devaient faire tout cela à leur frais, et c'est parce
que celte fonction était onéreuse que les statuts avaient prévu
le cas où un membre chercherait à s'y soustraire : le récalci-
trant était remplacé par celui qui le suivait sur Valbimiy
mais devait prendre à son tour la place de ce dernier
Tannée suivante et payer une amende de trente sesterces.
Évidemment les confrères ne se contentaient pas d'un si
« XIV 2630. Peut-être faut-il lire avec Schiess (p. 48, rem. 90) : judexs
inter elect. [liistro] X[X]I, ab ordine lust. XXII. Mais que signifient alors
inter electos ei ab ordine?
2 Cfr. V 8143 : ex jiidicato Aquili Rufini, iten Taciti Secidaris ex
colegio fabrum. Voyez supra, p. 396.
5 XIV 'tLïi% II, i. 8-10. 14-16. MoMMSEN, De coll., pp. 108-109. 112.
Zeitschr. f. g. R. W., XV, p. 364, et dans Gradenwitz, /. /., XII, p. 142.
Friedlaender, I«, p. 274, n. 1. Schiess, pp. 105-106 et notes 349-359.
LlEBENAM, pp. 224. 262.
* XIV 2112, II, 1. 14-16 : magistri cenarum ex ordine alhi facti,
quloqu^p ordine homines quaterni (mots apposés à magistri), ponere
debeb[unt] : vini boni amphoras singulas (chaque magister une) el panes
a{ssium) II, qui numerus collegi fuerit (un pain pour chaque convive),
et sardas n[u]mero qiiattuor, strationem caldam citm ministerio.
( «1 )
frugal repas : la partie la plus importante leur venait de bien-
faiteurs. En effet, à la fête de Diane et à celle d'Antinous, le
collrge recevait 400 sesterces de Césennius, son patron ; pour
les quatre autres fêtes, qui étaient les anniversaires de Césen-
nius et de ses parents, il y était sans doute pourvu par des
libéralités semblables, faites antérieurement, quoiqu'elles ne
soient pas mentionnées ^.
Mommsen suppose qu'il y avait une organisation analogue
dans la plupart des collèges -. Il pense que le colle()ium Silvani
de Lucanie avait également des magistri cenarum annuels pour
prendre soin des banquets : convenirentque ii qui in collegio
essent ad epulandum, curantibus sui cnjusqiie anni magistris;
mais il s'agit plutôt ici des magistri ordinaires ^. Récemment il
a conjecturé que les quatre curateurs annuels des ivoiriers et
des ébénistes romains avaient une mission semblable; et en
effet, ils étaient au nombre de quatre par an, suivant l'ordre
de Valbum ^\ ils étaient ordonnateurs des banquets, et, outre
les sportules qu'ils tiraient de la caisse et qui servaient à l'achat
de la viande (3 à 5 deniers par couvert), si l'on voulait célébrer
un festin, ils devaient fournir à leurs frais des accessoires déter-
minés par le règlement : au jour de l'an, des gâteaux, des
dattes, des figues sèches et des poires; aux autres fêtes, une
boisson composée d'eau chaude et de vin ^. Sous ce rapport,
* Voyez supra, p. 236, n. 4.
* Dans Gradenwitz, /. L, p. 142.
5 X 444. Mommsen, De coll., p. 113. VIII 14683, a, 1. 12 : si quis
magister [curiae] {essse voliierit), plutôt que : magister [cenarum]. Voyez
ScHMiDT dans Ephem., V 498 et dans le Corpus.
* Voyez supra, p. 411, 1. 1.
s MiUh. d. Inst., 1890, p. 288-289. Voyez les articles cités supra, p. 371 ,
n. 2, et Rev. de l'histr. piibl. en Belg., 1890, pp. 17-19. La construction
des phrases distingue les sportules puisées dans la caisse et les pres-
tations exigées des curateurs : (Placuit) item sportulae ex arca darenlur
{denarii très), et a cur{atoribus)lpaneni? et caldam pas].sive praestari
placuit, 1. 12-13. — Sur la tabida ccrata XV de Verespatak (C. /. L.
III, p. 9o3), voyez infra : Finances.
( 422 )
ces curateurs ressemblaient donc aux magistri cenarum de
Lanuvium, mais nous avons vu qu'ils avaient d'autres fonc-
tions importantes qui leur étaient communes avec les cura-
teurs ordinaires. Dans les autres collèges on ne trouve rien
de certain ', et nous croyons qu'il serait diftlcile de prouver
que cet usage était général.
M edicus ; voyez supra, p. 307.
Ministri. « Dans les associations qui contiennent des
hommes libres et des esclaves, on réserve d'ordinaire à ces
derniers une petite part d'autorité dans un ordre inférieur.
Les fonctionnaires libres, appelés magistri, ont sous leurs
ordres des fonctionnaires esclaves sous le nom de ministri '^. »
Les cochers de Préneste (cisiariei) ont deux ministri esclaves
ù côté de deux magistri affranchis; dans un collège inconnu
de la même ville, il y a quatre [m]inistr[ei] esclaves et
quatre magistrei affranchis; dans un collège d'esclaves et
d'affranchis impériaux d'Antium, nous trouvons deux 7na-
gistri affranchis, deux questeurs et deux ministri esclaves 3.
Ces fonctionnaires libres et serviles figurent C(jte à côte
dans les inscriptions; ils administrent ensemble le collège.
On ne les trouve que dans les petites corporations pr-ofession-
nelles à l'époque républicaine. A cette même époque, on ren-
' MoMMSEN cite encore : XI 1356. X 6637. 6638, fastes de collèges ser-
viles donnant chaque année quatre ou six noms; dans le premier, ce
sont les décurions.
2 G. BoissiER, Relig. rom., II, p 294. \ oyez supra, pp. 346. 368.
- I 1129 (= XIV 2874). XIV 2982. X 6679; de ces six fonctionnaires, il
est dit : [aedem lapide qua]drat,o) et oslia et fastiis de sua pecun{ia)
fecer[unt, idem ludos] prim{i) fecer{unt\. VI 10312 : ministri. VI 10330 :
ser{viis) minist{er). XI 5737 : menesterio (= ministro) Servio Felice, dans
un collège de Miihra, à Sentinum; ici c'est un serviteur du culte. Les
ministri sont membres et non esclaves du collège, comme le croit
LiEBENAM, p. 24o, n. 2. — On Jes trouve aussi à côté des magistri qui
desservent un sacellum : I, p. 159 et suiv. X 3789 : ministri Larum,
douze esclaves. X 3790. A Pompéi : X 824-828. 885. 910. 924. Cfr. X
137. 205. 1269. 4789 4791. 7953. Etc.
( 423 )
contre aussi des esclaves parmi les magistri et les curateurs '.
Notarius, dans un collège de Jupiter Dolichenus, à côté d'un
scribe -; celui-ci est le secrétaire, celui-là le sténographe.
Nungentus ad snbfrag{ia) lustra XVI, dans le collegium
fabrum de Tusculum ou d'Ostie 3. Momnisen, se fondant sur
un passage de Pline, pense que c'est un fonctionnaire chargé,
pendant le seizième lustre du collège, de garder les urnes
électorales.
Officiales. Dans les collèges de Brixia, c'étaient les rempla-
çants des magistri ^. A Cômo, on trouve un magister officio-
r[um) colleg{ii) fabrmm) , qui est difficile à expliquer •^.
Praefectus. Ce seraient, suivant quelques-uns, les comman-
dants des collèges organisés quasi militairement, tels que les
[abri qui faisaient l'office de pompiers; voyez la IIl« partie,
chap. III.
Praetor. A Nepet, on trouve un praetor juventiitis, qui a été
mag{ister) juben{um) 6 ; on peut se demander si c'est un fonc-
tionnaire municipal placé à la tête de la jeunesse ou un
magistrat collégial.
Principales. A Apulum, les décurions et les principales du
collegium fabrum décrètent une statue à un patron de ce col-
lège; c'est peut-être une façon de désigner les présidents "7.
' Voyez supra, p. 346.
2 VI 406408 et 413 note.
3 XIV 2630. Plin., n. h., 33, 'i, 31; éd. Sillig : Praeter hos etiamnum
nongenti vocahantur, ex omnibus elecLi ad custodiendas suffragiorum
cislas in comitiis. Voyez supra, p. 374.
•* Voyez supra, p. 404.
^ V 5310. Un de ces ofp.cia semble être mentionné au n» 5272 :
officiiim) tesserarior{um). Il s'agit peut-être des subdivisions de ce collège
en vue de l'extinction des incendies; car chaque membre devait être
exercé à un service spécial. Les tesserarii portent les ordres, et le
magister dirigeait tous ces offices. Voyez la 111^ partie.
« XI 3215. De même à Sutrium : pr. juv., XI 3256.
^ III 1210. A l'armée, ce sont les sous-officiers inférieurs aux centu-
rions. Cauer, Ephem., IV, pp. 355-481. Mommsen, ibid., pp. 531-537.
Marquardt, Sl.-V., II^ p. 544.
( 424 )
Procurator. Le procurator juvenum, à Carsulae, est un per-
sonnage considérable, qui a rempli dans sa ville toutes les
fonctions publiques et qui est devenu patron du municipe. Le
colleyiianjuvenum l'honore ob plurima bénéficia et munificenliam
ejus ertjase collata ^. Faut-il l'assimiler au curator juvenum ou
bien au curator lususjuveiialis -? Le procurateur des échansons
impériaux {collefjiumpraegustatorum) est un affranchi qui prend
soin des funérailles d'un membre : curavit Eridanus Aug{iisti)
libiertus) procurator; ces mots expliquent ses fonctions 3.
Qmiijlator . A Cales, les centonaires ont un quaglator et
patronuSy qui a géré toutes les magistratures municipales; les
cultures {Jouis Tutoris) d'Ostie ont deux quaglator[es) et cura-
tor[es). Dans le premier de ces deux collèges, le quaglator est
un haut personnage, placé en dehors de la corporation, et
dans tous les deux c'est plutôt un arbitre chargé de trancher
les différends entre confrères qu'un receveur ou caissier *.
Bepunctor; voyez dispensator.
Sacerdos; voyez supra, p. 390.
Tribunus. Le tribunus fabrum navalium Portens{ium) ^ est
patron des fabri navales d'Ostie; selon Maué, ce serait le com-
mandant de ces ouvriers, employés au Portus comme pompiers.
Le tribun se rencontre aussi dans les collèges funéraires; quand
le collegium magnum Larum et Imaginum domini n{ostri) Caesn-
lis de Poetovio décerne l'honneur du tribunat à un décurion
de la colonie, il ne peut s'agir que d'un titre honorifique 6;
' XI 4579. SCHMIDT, MisceM. Capitolina, p. 29, n. IL
■ 2 II 2008. XI 3123. XIV 2636. — XI 4371. 4393. 4406. XIV 409.
'' VI 9004. Il peut s'agir aussi de son emploi dans la maison impériale.
— On ne peut songer à un mandataire : procurator est qui aliéna
negotia mandatu domini administrât (DiG., 3, 3, 1, pr.).
* X 3910. XIV 25. Le mot vient de coagulare. Mo.mmsen (X 3910 note)
le rapproche de conctor, receveur. Hirschfeld, Gall. Stud., III, p. 17 (253),
n. 4, le prend pour un arbitre. Cfr. XIV 2405 : coaglavi semper amicos.
Augustin., Psalm., 75, 8 : pacem coagulare.
"' XIV 169. Maué, Praef. fahr., p. 76.
« III 4038 : loca collegio — ob honorem tribunatus [pe\c[unia) sua fecit.
'est un collège de la maison impériale. Schiess, p. 24, et nos Indices.
( 425 )
mais cette fonction se retrouve dans le collegium magnum^ ù
Laurentes vici Augustani, et dans d'autres collèges funéraires *,
et il est impossible de la définir. Il semble qu'on affublait de
titres pompeux des fonctions qui n'avaient rien de commun
avec leur nom.
Vexillifer, vexillarms, porte-drapeau. Nous avons dit que les
collèges prenaient part à des processions religieuses et nous
verrons, dans la troisième partie, qu'ils figuraient dans les
funérailles publiques et dans les cortèges triomphaux. Ils y
étaient précédés de leurs bannières ; les collèges de fabri de
Salone et de Sarmizegetusa, ainsi qu'une association bachique
de Nicopolis ont un porte-drapeau spécial, et l'on peut croire
qu'il en était de même partout ^-i.
§ 7. Patrons des collèges. Pater, Mater.
Nous avons dû réserver une place spéciale aux patrons,
parce qu'ils sont en dehors et au-dessus des fonctionnaires
des collèges.
Nulle part ne se montre plus clairement la tendance des
corporations à imiter en tout les cités. Le patronat et la clien-
tèle sont d'antiques institutions : elles remontent aux pre-
* XIV 204o : tribunicius collegi magni. Cfr. VI 4014 : 9290 a et b.
10311. 10366. 10318 : trib{inms), mag(ister), q{uaestor) III . Voyez
ScHiESS, p. 62. LiEBENAM, j). 209. On trouve des collèges composés de
tribuni (VI 4305 : collegium magnum trib{unorum) divae Augustae.
X 6666 et note : tribuni sociales); ici ce mot désiçjne peut-être ceux qui
sont préposés aux familiae d'esclaves impériaux, comme les decuriones.
2 III 7900 : vex{illi fer) coll. fabror. III 8837 : ve.villarius collegi j'abrum.
III 6150 = 7437, 1. 11. 13 : vix{illarius), dans le bacchium vernaculorum.
Voyez les notes à ces inscriptions, et Ephem., II 432. IV 370. Arch. ep.
Mitth., XII, 34. HiRSCHFELD, L L, p. 16 (252). Liebenam, p. 283. Cfr. III
1583 = 8018. V 5272 : schola vexillarior{um) du collegium (abrorum, à
Côme. — Voyez supra, pp. 237-240.
( 426 )
miers temps de Rome. Plus tard, les colonies, les municipes,
toutes les villes, des provinces et des nations entières imitèrent
Texemple des clients romains; sous l'Empire, l'usage est
devenu général : toutes les cités ont des patrons. Elles atten-
daient d'eux aide et protection, le cas échéant : « Les patrons
assumaient, pour eux et pour leurs descendants, l'obliga-
tion de détendre en toutes circonstances les droits de la
connnune, d'agir toujours au mieux de ses intérêts, de prêter
leur concours à tous ceux de ses membres qui pourraient
avoir ^ plaider à Rome, et même de favoriser l'accomplisse-
ment de leurs souhaits individuels *. » Sous l'Empire, elles
comptaient plus encore sur leurs libéralités; des sportules,
des festins et surtout des édifices et des travaux d'utilité
publique : voilà ce qu'on attendait d'eux. Comme il est natu-
rel, la vanité et la mode s'en mêlèrent : les cités voulurent
avoir une foule de patrons, et les citoyens riches ou influents
étaient fiers de se dire patrons de nombreuses villes. Ainsi le
nombre des patrons municipaux se multiplia : Valbiim decurio-
num de Canushun, dressé en l'an 223, en compte jusqu'à
trente-neuf -.
Les collèges imitèrent les villes; nous possédons au moins
deux cents inscriptions qui meniionnent des patroni coUegio-
riim 3, et l'on peut affirmer qu'à l'époque impériale, la cou-
tume s'était étendue aux collèges de toute espèce. Comme les
villes, ils se reposaient sur les patrons pour la défense de
« 5IARQUARDT, St.-V., I, pp. 187-188. Trad., pp. 276-277; il donne une
bibliographie complète. Cfr. Duruy, V, p. 145. MommsKiN, Ephem., II,
p. 146. Aem. Sebastun, Depatronis coloniarum et miinicipiorum , Diss.,
Halis Sax., 1884.
2 IX 338.
5 Nous en donnerons la liste dans nos Indices, auxquels nous ren-
voyons pour les détails de ce paragraphe. Voyez : Dirksex, pp. 61-68:
Krause, pp. 136-180; G. Boissier, Relig. rom., II, pp. 284-287; Maué,
Pracf. fabr., pp. 67-71; Schiess, pp. 69-71; Liebenam, pp. 212 219;
ScHMiDT, De Aiicjustalibus, p. 106; E. Stevenson, .47?n. d. Inst., 1882.
pp. lo7-181 (sur XI 270-2).
( 427 )
leurs intérêts, mais ils leur demandaient surtout de se montrer
généreux : ils attenrlaienl plus encore de leur bourse que de
leur crédit. Du reste, ici la mode et la vanité exercèrent égale-
ment leur empire : les collèges se faisaient gloire de mettre
en tête de leur albu7n les noms d'illustres ou d'opulents person-
nages, et, d'autre part, c'est une preuve de la considération
dont jouissaient les collèges que l'empressement avec lequel
les hommes les plus haut placés recherchaient cet honneur.
Pour s'en convaincre, il suffit de lire une des îabiilae patro
natus que nous avons conservées K En 1882, on fouilla une
maison antique à Bolsena, en Étrurie; incendiée peu après
l'an 270 de notre ère, elle avait appartenu, cinquante ans plus
tôt, à Laberius Gallus et à Ancharia Luperca, sa femme. Parmi
les débris gisant à terre dans le tablininn, on trouva une plaque
de marbre de 70 centimètres de long sur 48 de large, terminée
au sommet par un faîte triangulaire. Cette plaque avait été
remise, en l'an 224, à Ancharia, patronne des fabîi de Yulsinii,
pour être affichée dans sa demeure et elle porte le décret
suivant :
« Sous le consulat d'Appius Claudius Julianus, consul pour
)) la seconde fois, et de Lucius Brultius Crispinus, le dixième
n jour avant les kalendes de février (2o janvier 224), le collège
» des fabri de la cité de Vidsinii se réunit dans sa schola, con-
» voqiié par T. Sossius Hilarus et Caetennius Onesimus, ses
» quinquennaux.
» Attendu le rapport des quinquennaux, d'où il résulte :
» La grande bienveillance et la grande aftection avec laquelle
» Laberius Gallus, primipilaire, homme distingué, traite notre
* II 2211 : tessera patironatus). XI 2702 : tabula paîrocinalis. Nous en
avons neuf, provenant des fabri (XI 2702, en 224, à Vulsinii; 5748, en
iiiCO, à Sentinum; Notizie, 1880, p. 260, Atti des Lincei, 1880, p. 29, en
•io6, à Pisaurum), des centonaires (XI too4, en 2oo, à Luna; XI 3749,
en 261, à Sentinum; XI o7oO, en 260, à Sentinum, ou Ostrai, des fabri
et centonarii Regienses, en 190 (XI 970), des fabri siibidiani de Corduba,
en 348 (II 2211), et des juvenes de Bénévent (IX 1681). Cfr. II 5812
Ephem., II 322.
( 428 )
» collège, étant prouvées par les bienfaits dont il nous comble
» depuis longtemps ;
» Qu'il convient que nous nommions patronne de notre
)) collège Ancharia Luperca, son épouse, fille de feu Ancha-
» rius Celer, homme de vénérée mémoire, dont la descendance
» a géré toutes les magistratures de notre ville avec une probité
» sans tache, afin de leur faire honneur, et en considération
» de la pureté de ses mœurs et de sa vertu semblable à celle
M des anciens temps; qu'il convient, en outre, que nous
» placions sa statue d'airain à côté de son mari, Laberius
» Gallus, dans noire scliola ;
» Après délibération, on a décidé à l'unanimité :
» Que nos quinquennaux ont bien fait en proposant
» qu'Ancharia Luperca, très honorable matrone, femme douée
» d'un naturel vertueux, de mœurs pures et d'une grande piété,
» soit choisie comme notre très digne patronne, pour honorer
» Laberius Gallus, primipilaire, homme distingué, son mari,
)) patron de notre collège, et en mémoire de feu Ancharius
» Celer, son père; et qu'une statue d'airain lui soit élevée dans
» la schola de notre collège, à côté de Laberius Gallus, son mari,
» afin qu'un monument exposé aux yeux de tous témoigne de
» vsa piété envers nous et de notre respect pour elle; enfin
» qu'une table patronale soit affichée dans sa maison *. »
On voit que la cooptaîio patroni revêtait toutes les formes
solennelles qu'elle avait dans les municipes. Le collège se
réunissait au complet {collegae universi) ou très nombreux
{fre(juens) dans sa maison corporative ou dans son temple :
premier hommage au futur patron. Le rapport était fait par le
président ou par d'autres fonctionnaires influents du collège
ou du moins par des membres autorisés. Naturellement ce rap-
port, fait p.our la forme, contenait un grand éloge de celui
qu'ils proposaient et qui était accepté d'avance. On énumérait
• XI 2702. :Sotizie, 1882, p. 316. Ann. d. Inst., 1882, pp. 157-181
(E. Stevenson). Sur la forme de ces tables, voyez : Ann. d. L, 1882,
p. 180, n. 3, et Bull, corn., 1887, p. 69 : La tavola di Pesaro.
( 429 )
les qualités par lesquelles il avait « provoqué » le choix du
collège : qui nos per dignationem suam et mérita sua provocave-
runt. On vantait sa naissance, l'illustration de sa famille; on
rappelait les fonctions qu'il avait occupées; on exaltait ses vertus
privées, sa simplicité et sa modération. Mais ce qu'on louait
surtout, c'était sa générosité : quand on l'avait déjà éprouvée,
on ne manquait pas de le rappeler; parfois on allait jusqu'à
déclarer ouvertement qu'on comptait sur des libéralités plus
abondantes encore : speramus bénéficia uberiorapos se consequi-
tiiros ipost nos consecuturos), disent, dans un langage barbare,
les juvenes de Bénévent. Après la lecture du rapport, les assis-
tants constataient que la proposition était « salutaire, utile,
opportune, et de nature à relever le collège, à lui procurer de
la considération, à l'orner d'une gloire éternelle )>. Le décret
mentionnait que le vote avait été unanime et, pour comble de
flatterie, on y exprimait le « regret de ne pas avoir songé plus
tôt à un homme si honorable ».
Le collège proposait aux autres son choix judicieux comme
un modèle à suivre : ut sit ceteris exemplo judicii nostri testi-
monium ! Il concluait en priant l'élu de daigner accepter l'hon-
neur du patronat, patronalis honor. On nommait séance tenante
une députation chargée d'aller lui présenter une tablette en
bronze, tabula ou tessera patronatus, sur laquelle était gravé ce
décret si flatteur, et dont le collège conservait une copie dans
ses archives. Naturellement, parmi ces envoyés figuraient les
principaux magistrats du collège ; l'ambassade des (abri de Sen-
tinum était composée de seize membres. La tablette d'airain,
testis futura in aeternum Inijus consensus nostri, était alors
affichée dans la demeure du patron, dans un endroit apparent,
dans l'atrium ou ailleurs, selon qu'il le jugeait convenable.
C'est dans les ruines de maisons antiques qu'on a retrouvé les
exemplaires que nous possédons. Parfois, en attendant la remise
de la tabula pair onatus, on envoyait au patron un diplôme ^
' XI 5749 : jampridem patronos per diiploiniim a numéro n{ostid)
cooptatos.W 5750 : patronum aeum jaiuludinn lectum.
( 430 )
Une fois l'honneur accepté, il s'établissait entre le patron et
le collège les mêmes liens quentre le patron et le client i. 11
si^mblc que le patron reçoive parfois le nom de « père du col-
lège », patei' colleçjii : il veillait aux intérêts des confrères
comme un père veille aux intérêts de ses enfants -. Beaucoup
de collèges avaient pour protectrices des femmes, qu'ils uppe-
h'ieni patronae, peut-être aussi maires. Souvent c'est à la femme
du patron qu'on décerne ce titre ;^. Il arrive même qu'un col-
lège se mette dans la clientèle de toute une famille; il confère
1q litre de patron ou de patronne à la fois au mari, à la femme
et aux enfants ^. Souvent, le patronat d'un collège, comme
celui d'une ville, devenait héréditaire dans une maison, et c'est
ce qui explique que certains collèges ont pour patrons de tout
jeunes gens et des enfants s. Seulement chaque membre est
formellement choisi. Il ne faudrait pas croire que le titre de
patrona désigne simplement la femme du patron : il est cer-
tain que la coutume existait de se mettre sous le patronage
d'une puissante ou riche matrone, sans que son mari fût patron
du collège ^.
Ainsi des rapports intimes existaient entre la famille du
patron et la corporation. Le patron et la patronne faisaient
pour ainsi dire partie de la famille corporative. Ils assistaient
à ses festins et, pour les honorer, on leur donnait, dans les
sportules, une part plus grande que celle des présidents t. Le
♦ Clientes : X 1697. Orelli, 4083.
2 Voyez infra, p. 449, n. 1 et 2.
3 V 5293. 5869 (voyez supra, p. 348. n. 6). IX 4894 et note. XI 2702.
5749. Notizie, 1880, p. 260 =- Atti, p. 29 = B. d. 1., 1881, p. 61.
* IX 1684. XI 5748. 5749. Notizie, l. L
s ÏX 1684 : ab avo et majoribus collegi et civitatis patroniis. XI 5748 :
ut per ordinem generis sui omnes in niimerum n{ostrum) patroni in col-
legiitm nostrum appellarentur . De même : XI 5749. 5750. Notizie, 1880,
p. !£60. — Un patron de douze ans : XIV 341. In prima aetat{is) flore
praerept{o) : V 5275. C{larissimo) p{uero) : X 1697.
6 IX 1578. 5368. V 4432. Or.-Henzen, 7415.
' VI 10234. X 451. Notizie, 1888, pp. 279-281 ; voyez supra, pp. 400-401.
( 431 )
collège faisait tout son possible pour resserrer ces bonnes rela-
tions. Il mettait les noms de ses patrons en tête de son album;
s'ils daignaient assister aux assemblées, leur voix était écoutée
avec respect et leurs conseils étaient suivis; ils s'asseyaient sur
un sièg(^ (rhonneur appelé /;?.vg//ji/m et s'appelaient alors bisel-
larii : encore une imitation des cités, qui accordaient cet hon-
neur aux décurions et aux augustales ^.
Tous ces honneurs, toutes ces flatteries avaient naturelle-
ment un but intéressé : le patron devait y répondre surtout
par des libéralités. Aujourd'hui une foule de nos sociétés popu-
laires subsistent grâce aux subventions du trésor public ou
d'un président d'honneur. Les corporations romaines atten-
daient ces secours du patron. C'est souvent par leur générosité
qu'ils ont provoqué le choix du collège, et celui-ci les nonmie
dans l'espoir de recevoir des largesses nouvelles. Les patrons
faisaient ces largesses sous différentes formes. A peine élus, Ks
plus généreux répondaient déjà aux désirs du collège : tlattés
du choix et des termes élogieux du décret, ils s'empressaient
(le payer l'honneur patronal {patronalis honor). A Apuluni,
rn Dacie, le patron des fabri donne, ob honorem palronatiix,
6,000 sesterces (1,G20 francs) pour ajouter un fronton à leur
local. Un patron des pêcheurs et plongeurs du Tibre donne
une statuette d'argent et un capital de 12,000 sesterces pour
célébrer son anniversaire, [ob honorem'] patrocini sibi oblatum"^.
Les patrons tenaient à honneur de soutenir et de faire vivre
leur collège, lis lui fournissaient parfois une schola, ou ils
ornaient le local de statues 3; ils enrichissaient la caisse com-
' En lête de Valbum : XIV 246-2o6. 281. XI 1355. Voyez siipra, p. 305.
— VI 1690 : Statue décrétée auctorihus patronù. — XI 1355 : pater col-
lecji bisellarius. Voyez supra, p. 399, n. 5.
2 XI 970 : patronal{u) honor. III 1212. — VI 29700. 29702 - Notizie,
1888, p. 279. Grut. 354. 1. Bull, corn., 1888, p. 387. — XI 1159 : ob
hon[orem) patroainii), une statue (d'Hercule?) donnée à un sodalirium
cullor{um) Uerculiis), à Veleia.
, ^ m. 7960. V 2864. VI 1872. 10234. IX 1685.
( 432)
mune par des dons en argent, par des rentes perpétuelles,
destinées à célébrer des banquets; ils ne manquaient pas de
réserver à leurs protégés une place spéciale dans les festins
qu'ils offraient à toute la ville *.
Les occasions de se montrer généreux se présentaient d'elles-
mêmes au patron ''^. Les collèges connaissaient d'ailleurs à
merveille l'art de provoquer ses libéralités. Décrets honori-
fiques et statues avec inscriptions flatteuses, tout était mis en
œuvre. La plupart des inscriptions qui mentionnent des
patrons proviennent de monuments érigés en leur honneur.
On se cotisait {aet^e collato), mais on savait d'avance que ce petit
sacrifice serait amplement compensé. On ne laissait passer
aucune occasion de rendre au patron ces honneurs intéressés.
Si la curie, par exemple, lui décerne les ornamenta (iuumviralia,
aussitôt le collège lui élève une statue '^. Si le patron a rendu
des services éclatants à la cité, s'il a mérité la reconnaissance
de tous les citoyens par sa bienveillance, par ses largesses, par
l'intégrité dont il a fait preuve dans l'administration des fonc-
tions publiques, s'il a remédié à une disette, s'il a réparé un
aqueduc, s'il a construit une fontaine ou un amphithéâtre, s'il
a donné des jeux, le collège y trouve encore une occasion pour
l'honorer d'une statue ^. Plus souvent le collège allègue les
bienfaits dont il a été lui-même l'objet : il veut remercier le
patron pour ses services, ob mérita ejus, optimede se meiito, etc.,
pour ses libéralités, ou simplement pour sa bienveillance, pour
son affection, ob insignem ejus erga se largition{em) et liberali-
ta[tem], ob exsimiam erga se benivolentiam et spem perpétuant s.
* Grut. 484, 9, à Pisaunim.
2 Dédicace de Valhum, X 3699 (dendr. de Cumes) : dedicationi hujus
panem vinum et sportidas dédit.
5 III 1493, coll. jabrnm, à Sarmizegetusa. X 3909 : honore quinq(uen-
nalitatis).
* V ^[118. 7375. 7881. IX 663. 1459. 1686. 5835. 5836. X 4865. XI 3938.
XII 410.
° V 1012. X 451. Les formules sont nombreuses et diverses. Voyez
nos Indice.<> (Statues aux patrons).
( 433)
Fallait-il du reste un motif particulier? Le titre de patron ne
suffisait-il pas? Aussi une foule d'inscriptions disent simple-
ment qu'une statue a été érigée par tel collège à son patron, à
son très bon, très digne, très rare, très illustre, très distingué
patron, pour l'honorer, honoris causa, ou pour lui témoigner
une affection méritée, ex a/fectu eidem jure debito^.
Ces flatteries atteignaient toujours leur but, et nous voyons
sur l'inscription de la statue même que le patron n'est pas resté
en arrière. Sans doute, après le décret, on lui envoyait une
ambassade, comme au jour de son élection, pour lui annoncer
la décision. Le patron acceptait l'honneur et prenait ordinai-
rement les dépenses à sa charge : Jionore contentus impensa sua
posait, honore accepto impensam remisit. Cet usage devint géné-
ral, et au V® siècle, le désir des hauts fonctionnaires de rece-
voir des statues étant devenu onéreux pour les collèges et les
villes, Théodose le Jeune ordonna que toute statue demandée
serait élevée aux frais de l'intéressé 2. Le plus souvent, le patron
ne s'en tenait pas h\. Afin d'inaugurer dignement sa statue, il
donnait la somme nécessaire pour un banquet, ou du moins
pour faire des distributions; ou bien, il faisait distribuer lui-
même des sportules en argent ou en vivres : ob cujus statuae
dedicationem dédit ^. Tous ces bienfaits étaient alors mention-
nés dans l'inscription, que l'on ne gravait qu'après avoir tout
' VI 1690. Pour toutes ces formules, voyez nos Indices. — Un patron
demande que la statue qui lui a été offerte, soit élevée à son père,
IX 5439. Statue au patron pour des services rendus par le père de celui-ci,
Grut, 440, 8. Au Génie du patron, V 7469. 7470.
2 CoD. JusT., I, 24, 4, en 444 : ejiis, cufus ad honorem petitur, expensis
propriis statuam cotlocari praecipimus. Cfr. Friedlaender, Sitt.^, III,
p. 226.
^ Orelli-Henzen, 5122 : Honore contentus ïjnpendium remisit et
dedicalione statuae numéro collegi (cent.) sportul{as) déduit) sin(jul{is)
denarios binos, à Mevaniola. De même : VI 29700. IX 3842. X 451.
4580. 5654. 5657. 5928. 5968. XI 4580. 6017. 6070. 6071. XIV 2408. XII
411. 440, 8. Orelli, 2675. 5122. Wilmanks, 2112. Allmer, M. d. L ,
II 171. 172. 177.
Tome L. 28
( 434 )
réglé. L'inscription faisait l'objet d'un nouveau décret •. Il
arrive parfois qu'au banquet inaugural assistent non seule-
ment les membres du collège, mais les décurions, \esAiigustales
et le peuple de la ville, et c est là un indice de la place impor-
tante que les collèges tenaient à côté de ces trois ordres-. Il est
à remarquer que, dans ce cas, les confrères sont plus favorisés
que la plèbe; parfois même ils reçoivent plus que les décu-
rions. A antinum, les dendrophores s'étaient cotisés pour éle-
ver une statue à leur patron et, au jour de la dédicace, celui-ci
fit distribuer aux décurions 8 sesterces (2 fr. 15) par tête,
aux sévirs augustaux, 6 sesterces (1 fr. 60), aux membres du
collège, 12 sesterces (3 fr 25), enfin, à la plèbe urbaine,
4 sesterces (1 fr. 08).
Bien des patrons comblaient les désirs du collège en lui
fournissant, outre le banquet de la dédicace, un capital dont
l'intérêt suffisait pour fêter chaque année l'anniversaire [ciies
natalis) du généreux donateur par un banquet, sans charge
aucune ou à la seule condition d'entretenir la statue : in tute-
lam statuae dédit '^. Nous avons déjà parlé de ces sortes de fon-
dations faites par les patrons 4, mais une inscription de Nar-
bonne est particulièrement intéressante. Elle se trouve sur le
piédestal d'une statue élevée en 149 par les fabri subaediani
Narbonenses à leur patron, Sex. Fadius Secundus Musa. Celui-
ci a tout l'air d'être un affranchi parvenu, car le nom de son
père n'est pas indiqué et son dernier surnom est servile. Cepen-
dant il est membre d'une tribu romaine et il avait rempli à
Narbonne toutes les fonctions municipales; il est probable
' ^' zi^ : ejcemplum decret[i].
■' IX 3842. De même : X 451. XIV 2408. Cfr. Maué, Vereine, p. .^K).
0. ToLLER, Op. Cit., p. 29.
^ Grut., 440, 8, à Pisaurum (Mur., 317, 2) : in tutelam statiicu'
HS n. M.
^ Voyez supra, p. 236. Les inscriptions suivantes parlent de patrons :
V 1978.' X 451. XII 4393. X 5654. 5637. 5928. ^otizie, dans les Atti, 1888,
p 279 - VI 29700.
(433 )
qu'il avait reru, par privilège impérial, les honneurs fie l'in-
génuité, grâce ù l'influence de son gendre. En effet, sa fille
avait épousé un homme de rang sénatorial, et c'est avec orgueil
qu'il parle de son petit-fils, qui est clarissme. Lesfabri l'avaient
choisi pour patron et lui avaient élevé une statue. Touché de
ces égards, Secundus leur écrit, le l^»" octobre 149, qu'il leur
fait cadeau de 16,000 sesterces (4,3^0 francs), à la condition fort
agréable de se réunir une fois par an, le jour de sa naissance,
en habits de fête, pour célébrer par un banquet son anniver-
saire. Ce jour-lù, le 27 avril, les intérêts de la somme, à 12 V^î
pour cent (2,000 sesterces, ou o40 francs), devaient être distri-
bués entre les convives. S'ils oubliaient de se conformer à ces
prescriptions, la somme revenait au fisc. S'ils acceptent, ils
doivent faire graver cette lettre sur le piédestal de la statue
et sur une table de marbre qui sera affichée sur la façade
d'un temple, probablement de celui d'Auguste. Il leur annonce
que, le 27 avril 150, jour de sa naissance, il viendra lui-même,
avec ses fils et son noble petit-tils, verser dans leur caisse la
somme promise avec les intérêts de la première année.
A cause de l'importance de cette inscription, nous la don-
nons ici tout entière. Voici d'abord la dédicace de la statue :
c( A Sextus Fadius Secundus Musa, de la tribu Papiria, qui a
» géré tous les honneurs municipaux dans la colonie de Nar-
)) bonne, [flamine d'Auguste], le premier depuis la reconstruc-
» tion du temple à Narbonne; les fabri subae{lia[ni] de Nar-
)) bonne, à leur patron, à cause de ses bienfaits. Emplacement
» donné par décret des décurions, w
Sur le côté gauche du piédestal, on lit :
(( Lettre de Sextus Fadius Secundus Musa, de la tribu
)) Papiria. Copie conforme à l'original dont la teneur suit :
)) Fadius Secundus au collège des fabii Narbonenses, salut.
» Témoigner ma reconnaissance pour vos mérites si nom-
w breux et si constants à mon égard, est chose ditticile; cepen-
« dant, sachant que, sous la forme d'une largesse, elle sera le
)) plus agréable à votre affection, j'irai, accompagné de mes
» enfants et de mon clarissime petit-fils, Jucundus, verser
( 436 )
w dans votre caisse une somme de 16,000 sesterces, le cin-
» quième jour avant les kalendes de mai prochaines, anniver-
» saire de ma naissance; ce même jour, je vous compterai les
» intérêts d'une année, calculés à 12 ^2 pour cent. Afin que
w mon petit présent vous soit encore plus agréable, je demande
» à votre piété que les intérêts de cette somme soient partagés,
)) à pareille date, perpétuellement, à ceux qui seront présents
)) et prendront part à un banquet, en tenue de cérémonie. Je
» vous demande aussi que cette somme ne soit jamais con-
» vertie à un autre usage; et par cette lettre je stipule, et par
» mon testament je stipulerai plus tard que, si la condition
)) susdite est changée ou inexécutée, la somme sera remise aux
» [sévirs augustaux?] ou, s'ils négligent de la réclamer, au fisc
» du très grand prince.
» Si vous approuvez ma volonté, je vous demande instam-
» ment d'atficher [en public], sur la façade du temple (ou d'af-
» ficher sur la façade du temple [d'Auguste]), votre assenti-
» ment gravé sur une table d'airain, ainsi que sur la base de
» la statue que vous m'avez élevée, afin que ce soit une garantie
)) plus certaine de la future observation de mes désirs.
)) Ensuite, au bas de la lettre, Fabius Secundus avait mis
cette apostille de sa main :
» Ainsi fait par mon ordre. Écrit le jour des kalendes d'oc-
» tobre, sous le consulat d'Orfitus et de [Priscus]. Vous gar-
» derez cette lettre pour tenir lieu d'un titre régulier. Je désire
» que vous soyez en bonne santé, excellents et très chers
» seigneurs (dominï).
)) Afin de conserver à jamais le souvenir de cette libéralité
» et de la rendre publique, les fabri subaediani de Narbonne
» ont décrété d'afficher une copie de cette lettre, faite d'après
» la table d'airain, devant le temple, en un lieu très fré-
» quenté ^ »
^ XII 4393. Nous avons suivi le texte de Hirschfeld et quelques con
jectures d'ALLMER. Celui-ci croit que le temple était celui d'Auguste et
( 437 )
Les largesses des patrons étaient certainement la plus abon-
dante source de revenus pour les collèges; ils leur procu-
raient un local, ils l'ornaient et ils donnaient surtout aux
confrères les moyens de s'y réunir souvent en de joyeux ban-
quets.
Malgré ces nombreux exemples de libéralités faites par les
patrons à toutes les occasions, nous croyons que G. Boissier
exagère quand il dit que « leur unique fonction semblait être
» de procurer aux collèges par leur libéralité des occasions de
» se réunir plus souvent ^. » Sans doute, c'était là leur princi-
pale mission, mais ils devaient en outre défendre et protéger
les collèges. De même que les patrons des villes « étaient les
défenseurs officiels de la cité auprès du gouvernement et des
citoyens devant les tribunaux 2, » de même les patrons des
corporations devaient soutenir celles-ci de leur crédit en toute
occasion. A la vérité, elles n'avaient pas besoin du patron pour
assurer leur existence, comme le suppose Heineccius ^ : les
collèges autorisés n'avaient rien à craindre. Mais les artisans
avaient d'importants intérêts à sauvegarder, des privilèges à
obtenir ou à maintenir, et ils choisissaient des patrons capables
de les défendre. En 301, les fabri tignuarii de Rome élèvent
une statue à leur patron, « parce que son patronage leur avait
été souvent utile ». Les bateliers de Rome honorent leur patron
qui les a « sauvés par son aide puissante ». Les fabri tignuarii
qu'il se trouvait sur le Forum, où l'on a retrouvé des substructions.
Voyez : Mommsen, BulL d. Inst., 1853, p. 27. Revue cpigr., fasc. 12,
p. 191. Allmer, Revue épigr., n 188, pp. 154-159. Devic et Vaissette,
Épigraphie de Nai'bonne, l^r fasc. de VHistoire du Languedoc, Toulouse,
1887, pp. 140-142.
< Relig. rom., II, p. 284. iMeukel, p. 853.
- DuRUY, V, p. 147. Voici comment s'expriment les décurions de
Peltuinum, dans une tabula patronatus : ut — singulos tiniversosque
nos remque publicam nostram in clientelam domus suae recipere dignetur ,
et in quibuscumque ratio exegerit, intercedente auctoritate dignitatis
svae, tutos defensosque praestet (Wilmanns, 2856 = C. I. L.l\ 3429).
5 Heineccius, I, § 6.
( 438 )
de Vienne donnent au leur le nom de praesidium siium K Ces
patrons étaient des magistrats municipaux ou de hauts fonc-
tionnaires impériaux qui pouvaient soutenir leurs clients dans
leurs rapports avec l'autorité. Sous Élagabale, les pêcheurs et
plongeurs du Tibre décrètent une statue au leur, parce que,
par son zèle, il leur a procuré et fait confirmer le droit de
naviguer avec leurs barques sur le fleuve "^. A Brescia, les den-
drophores remercient un patron qui avait fait confirmer une
de leurs immunités 3. Anicius Paulinus, consul et préfet de la
ville en 334, fut patron des corroyeurs romains : ce collège lui
élève une statue parce qu'il a pris soin « que le quartier où
étaient leurs boutiques et leurs ateliers (insulae) fût restauré et
orné suivant les lois de Septime Sévère et de Caracalla K »
Attius Insteius Tertullus fut préfet de la ville en 307 et patron
des marchands en gros ; ce collège « était en proie à une grande
crainte et courait un grand danger », parce que « ses finances
étaient près de sombrer » ; le généreux patron leur vint en
aide et les rétablit si bien qu'il leur rendit une « force éter-
nelle » s. Ragonius Vincentius Celsus était préfet de l'annone
• VI 1673. — VI 1639 = XIV 185 : codicari nav[icula7i] — foti ai(xii[io
ejîis]. XII 1877 : fabri tigmiari Viennenses pra{é\sidio suo. Le coll. fabr.
Dertipnensiiun) appelle son patron yatromis causarum fidelissimus
(V 737o). Voyez supra, pp. 190-194.
- VI 1872 : praesertim ciim navigatio scapharum diligentia ejus
adquisita et con^rmata sit, en 206. C'est un deciirialis lictor, qui leur a
donné deux statues et 20,000 sesterces.
•> V 4341 : M. Nonio — qiiod ejus induslria immuni[t]as collegi nostri
sit confirma[ta], patrono. C'est un juridicus region{is) tran\spad{anae)].
* VI 1682 : CUJ21S providentia adque [u]tilitas et integritas reipublicar
corporis corariorum insulas ad pristinum statum suum secundum leges
principum priorum imp{eratorum) [L.] Septimii Severi et M. Aur(elii)
Antonini Aug{ustorum) restaurari adque adornari per vigilantia{m)
sua{m) providit. Sur insulae, voyez Bureau de la Malle, Économie poli-
tique des Romains, 1840.
•' VI 1696 : \ob curam quam egit ut fortunae eorum] inopia in[genli
afflictae sollicitudine ejus'] miseriae atque incomparabili [indus tria, cum
H] apertum pericuium proruebant, recreatae atque confotae redditis
( ^39 )
on 389. a 11 administra cette charge avec une telle équité que
tous ceux qui lui demandèrent justice, trouvèrent en lui un
père plutôt qu'un juge. » En cette année-là, il eut à juger une
vieille querelle qui divisait depuis longtemps les mesureurs
de blé du Portus, dont il était patron, et les bateliers qui
transportaient le blé du port îi Rome. Il le fit « avec tant
de sagesse et de justice que chacune des deux parties put se
dire victorieuse, >> disent ses clients, qui lui élevèrent une
statue dès qu'il fut sorti de charge K Nous avons vu que
le patron prenait parfois le titre de defensor collegii; c'était,
semble-t-il, le titre d'une fonction spéciale, puisqu'on le ren-
contre seul, et qui exprimait mieux encore le rôle de pro-
tecteur, que le patron, lui aussi, devait assumer en toutes
circonstances -.
Quant à l'administration intérieure des collèges, les patrons
n'y intervenaient guère sans doute ; on leur demandait parfois
conseil, et leurs noms figurent parmi ceux qui ont pris soin
d'ériger les monuments décrétés par les collèges 3.
En résumé, le rôle des patrons peut s'exprimer par ces deux
mots : protection et générosité. Pour achever de nous en con-
vaincre, il suffira de rechercher de plus près à quels person-
nages on conférait ordinairement ce titre : nous verrons qu'on
pristinis viribus convalescerent et aeternnm robur acciperent, atque [oh)
ejus aegregia facta et in se munificentiam singularem, corpus magna-
rioriim gravi vietii et discrimine liberatum ei statuant aère insignem
locavit. Restitution de Mommsen.
' VI 1759 : Voici la fin : nam, ut hoc esset indicio, jam posito magis-
tratu statuam patrono praestantissimo testimonium gratulationis exsol-
vimus, cum res non adulatione privât o, sed judicio posito in otio et quiète
reddatur. Cfr. X 4865 : [collé\gia urbis Vena[franae'\ ... Quintiliano,
[rectori s]amnitico pa[trono optim]oet examina[tori aequis]simo.
- Voyez supra, p. 418.
■■' VI 1690 : auctoribus patronis, en 340. — Curantibus ou curam agen-
tibus : VI 868. 1117. 1872. X 5647. XIV 102. Cependant ces inscriptions
sont d'une époque où certains collèges appelaient patroni leurs prési-
dents. Voyez la III*- partie et VI 9765. XIV 44. 281.
( 440 )
choisissait ceux qui possédaient au moins l'une de ces deux
qualités : crédit et richesse ^.
A Rome, les grands collèges ont pour patrons des citoyens
de rang sénatorial, qui ont parcouru toutes les magistratures
et toutes les fonctions impériales réservées à leur ordre, jus-
qu'au consulat et jusqu'aux grandes préfectures. Presque toutes
ces inscriptions datent du III^ et du IV« siècle, où les corpora-
tions industrielles sont sous la surveillance des préfets de
l'annone, de la ville et du prétoire; aussi leur choix se porte
sur ces hauts fonctionnaires qui pouvaient leur rendre de
grands services, soit en usant d'indulgence, soit par leur puis-
sante médiation. Nous venons de voir plusieurs exemples 2. Il
faut y joindre ce L. Aradius Valerius Proculus Populonius qui
fut préfet de la ville en 337 et consul en 340. Il était patron
des charcutiers, des marchands de porcs et des boulangers qui
lui élevèrent des statues au Forum 3. D'autres corporations de
Rome prennent leurs patrons dans l'ordre équestre, parmi les
simples chevaliers romains ou parmi les gens d'une condition
plus basse encore 4.
Dans les colonies et les municipes, les patrons de l'ordre
sénatorien ne sont pas rares non plus, surtout à Ostie. En 152,
les lenunculaiii tabulani auxiliarii Ostienses ont quatre patrons
sénatoriens et cinq de l'ordre équestre ; en 192, ils ont pour
patrons quatre sénateurs et six chevaliers. Un autre collège a
dix patrons sénateurs ». Les collèges qui étaient au service de
• Voyez nos Indices : Condition sociale des patrons. Cfr. Maué, Praef.
fabr., pp. 67-70. Schiess, pp. 69-71. Boissier, Relig. rom.. Il, p. 285.
LiEBENAM, p. 215.
^^ VI 1639. 1682. 1696. 1759.
'" VI 1690. 1692. 1693. Sur ce personnage, voyez Borghesi, OEuvres,
V, p. 611. ToMASSETTi, Museo italiano di antichità classica, t. III, p. 65.
Hekzen, après VI 1695. — Le collegium fabrum tignuar. a pour patron un
curator operum publicorum (VI 1673).
' VI 1625^ 1649. Un decurialis lictor (VI 1872); un aedituus aedis
Concordiae (Vl'l'iOQ).
3 XIV 250. 251. 246. 247, et les notes de Dessau.
( 441 )
l'annone choisissaient les hauts fonctionnaires de cette admi-
nistration : les marchands d'huile de Bétique ont pour patron
M. Petronius Honoratus, préfet de l'annone sous Marc-Aurèle,
et les mariniers d'Arles sont dans la clientèle d'un procura-
teur de l'annone pour la Narbonnaise et la Ligurie^. Pourtant, la
plupart des collèges municipaux se mettent sous la protection
de magistrats de leur cité : on prenait des décurions ou des
citoyens qui avaient reçu les ornamenta decurionalia, des
duianviri ou quatuorviri jure dicundo, des praefecti jure dicundo,
qui avaient sans doute la surveillance des corporations com-
munales, des édiles, des questeurs, des prêtres municipaux,
des personnages enfin qui avaient géré toutes les fonctions
municipales, omnibus honoribus municipalibus functi. On préfé-
rait ceux qui étaient comblés d'honneurs : praesertitn cum sil
et dignitate accumulatius) et honore fascium repletus, disent les
centonaires de Luna dans un décret 2. On trouve ensuite des
fonctionnaires impériaux dont dépendait la cité, tels que le
curator reipublicae^ ou qui avaient autorité sur une province
entière 3. Les nautes du Rhône et de la Saône avaient pour
protecteurs des trésoriers généraux des Gaules ^. Nous avons
dit que chaque ville avait son patron, appelé pntronus civitatiSy
coloniae, munkipii; les collèges étaient déjà placés sous son
patronage par cela même qu'ils étaient composés de citoyens,
mais ils tenaient d'ordinaire à resserrer ces liens en décernant
au patron de la cité le titre de patron spécial du collège 3.
Naturellement les collèges importants pouvaient seuls pré-
tendre au patronage de gens si haut placés. Les collèges pauvres
étaient contents, s'ils rencontraient un homme qui, sans occu-
« VI 1623^ XII 672.
- XI 1354. Voyez nos Indices.
3 Curator reipublicae : V 60. 4341. 4484. 8667. XI 379. 1926. Juridwus
regio{nis) tra7i[spadanaé\ : V 4341.
^ Allmer, m. de L., II 127 : inquisitor Gatliarum, II 129 : allectipr)
ark{ae) Galliar{um).
^ Nous en donnerons la liste dans nos Indices (Patroni).
( 442 )
per une si haute place dans l'échelle sociale, pouvait leur faire
du bien par ses largesses, et il ne devait pas leur être difficile de
trouver des gens riches, tout heureux de pouvoir se dire patrons
d'un collège quelconque. Aussi n'est-il pas rare de rencontrer,
parmi les patrons des corporations, des hommes qui n'ont
pas d'autre titre et qui tiennent d'autant plus à celui-là : des
négociants enrichis, ce qui est fréquent à Lyon, des affranchis
parvenus, d'autant plus désireux de cet honneur qu'ils étaient
exclus des fonctions municipales, des sévirs augustaux, qui
formaient l'aristocratie des affranchis, des vétérans, des
employés subalternes des magistrats, tels que les scribes, les
licteurs, les accensi velati j même un simple gardien d'un
temple^. « Les corporations plus humbles, dit Gaston Boissier,
par exemple les pauvres collèges funéraires, devaient avoir
plus de difficulté à se procurer des protecteurs. L'honneur était
moindre; il ne devait pas être si recherché. Elles étaient aussi
moins difficiles et s'adressaient un peu plus bas. S'il en était
besoin, elles descendaient jusqu'à ces affranchis que la faveur
de leurs maîtres ou les chances heureuses du commerce avaient
amenés à l'aisance, et qui formaient la classe industrieuse de
l'Empire. Ces anciens esclaves avaient besoin de se relever de
quelque façon du mépris de la société. Ils recherchaient avec
avidité toutes les distinctions, et les plus médiocres avaient du
prix pour eux qui n'étaient pas accoutumés à la considération
publique. C'est ainsi que, la vanité aidant, tous les collèges, à
quelque degré qu'ils fussent placés, trouvaient des protec-
teurs 2. »
Beaucoup de collèges avaient dans leur sein des hommes
opulents, qui avaient fait fortune dans le commerce par
* Voyez nos Indices, l. l. On trouve rarement des fonctions militaires :
un tribunus legionis (IX 5835. 5836), im praefectiis legionis (XI 1059), un
centurion (IX 5839), des vétérans (IX 1459. 5843). Maué, Praef. fabr.,
p. 70, n. 100.
2 G. Boissier, Relig. rom., II, pp. 285-286. Schiess, /. /. On trouve
peu de patrons de collectes funéraires.
( 443 )
exemple : ils leur offraient le titre de patrons. A Lyon et à
Ostie, deux villes commerçantes, ce cas est fréquent ^. Il arrive
d'ailleurs fort souvent que le patron est fonctionnaire de la
corporation : magister, quinquennalis, qiiimj . perpeluus^ praefec-
tus surtout, repunctor, quaglalur, rector, curator, sacei^dos, decu-
rio, tiibunus, defensor , entin, omnibus honoribus apud eos
fundiis. Souvent aussi, notamment à Lyon, il est dignitaire
d'un autre collège -.
Cela suffit pour montrer que les corporations cherchaient
ordinairement des patrons capables de les aider à la fois de
leur crédit et de leur bourse; et si ces deux qualités ne pou-
vaient être trouvées réunies, ils choisissaient au moins des
citoyens riches et généreux.
Dirksen exagère donc 3 quand il prétend que le seul mobile
des collèges était leur vanité, qui les poussait à imiter en tout
les municipes. Cette assertion contient cependant une part de
vérité; en effet, il est incontestable que la mode joua un grand
rôle dans le choix du patron : les inscriptions nous offrent des
témoignages irrécusables. Il n'est pas rare de voir un seul
^ Allmer, m. d. L., II 172 : n{auta) Arariciis, patroims ejusdem cor-
poris. De même : Allmer, Il 165. 171. 176. 177. 6'. /. L. V 5869,
à Milan. Wilmanns, 2506 = VI 29722. Notizie, 1888, p. 287 = Grut.,
354, 1 = VI 29700. Un patron, père d'un corporatus : XIV 44. Dans les
alba des collèges d'Ostie, des patrons reparaissent dans la plebs collegii :
XIV 250. 251. 256. 341, et les notes de Dessau. III 1210 : patronus et
(kc{urio) ou dec{urialis) colliegii) fabr(um), à Salone.
' Voyez nos Indices. E. Desjardins, Géog)\ de la Gaule, III, p. 444,
dit : (A Lyon), les patrons sont pris parmi les travailleurs, non parmi
les plus riches. Si ce n'est pas la fortune qui dicte le choix, il faut
bien que ce soient la probité, la notoriété du travailleur et du négociant
qui soient la cause unique de sélection. » Mais rien ne prouve qu'ils ne
soient pas pris parmi les plus riches. — Quand le titre de patron est
décerné à un membre qui a passé par toutes les dignités du collège, il
.semble qu'on veuille l'honorer en le nommant patron. Allmer, M. d L ,
II 165. 167.
^ Dirksen. p. 67.
( 444 )
homme patron de tous les collèges d'une ville ^. A Ostie, où
il y avait tant de corporations, dix-sept avaient pour patron un
certain Cn. Sentius Félix, ancien duumvir et décurion 2. Un
patron de la colonie de Pisaurum était aussi patron de sept
collèges de cette ville 3. A Lyon, tous les collèges autorisés
avaient un patron commun : patronus omnium corporum Lug{u-
diini) licite coeuntium ^; il en était de même à Mevania, à
Brixia, à Dertona, à Trea, à Venafrum et ailleurs s. Parfois ce
sont les trois collèges principaux 6, c'est-à-dire les fabri, les
centonaires et les dendrophores, qui ont le même patron ; à
eux se joignent les naviculaires ou les nautes dans les villes
maritimes '^. Partout nous trouvons plusieurs collèges placés
* Valer. Max., IX, 15, 1 : collegiaque fere omnia patronum adoptarunt
{scil. Herophilum).
2 XIV 409, au Ile siècle. Cfr. Dessau, au n«> XIV 246. 247-249.
^ WiLMANXS, 2il2 = 0RELLI, 4069.
^ De Boissieu, biscr. de Lyon, p. 206. Wilmanns, 2226.
^ Patronus collegiorum omnium : V 4484. 7375. Omnium corpor(um)
patr{onus) : XI 5054. [Patronus collegiorum] plurium : XI 6070. Les
[colle]gia urbis Vena [fj'anae], à leur patron : X 4865.
^ Patronus collegiorum trium [principalium) : V 7881. XI 5416. 5749.
Cette expression est employée pour désigner les fahri, cent., dendr.
Cfr. MoMMSEN, C. I. L., V, p. 1187. De même : patronus collegiorum,
IX 5439. Cfr. 5653, où il s'agit des deux premiers. On trouve encore un
patron commun à ces trois collèges à Feltria et à Berua (V 2071), à
Brixia (V 4477), à Aquilée (V 1012), à Bergomum (V 5128), à Falerio
(IX 5439), à Pisaurum (Grut., 484, 9. Wilmanns, 2112), à Ariminum
(Grut., 484, 9), à Parma (XI 1059), à Fanum (XI 6235); un patron
commun aux fabri et aux centonarii : à Pisaurum (Mur., 520, 4), à
Apulum (III 1209), à Aquilée (V 749), à Concordia (V 8667), à Milan
(V 5869. XI 1230), à Industria (V 7469. 7470), à Âuximum (IX 5835. 5836),
à Trea (IX 5653), à Ravenna (XI 124), à Ariminum (XI 379 1, à Viterbo
(XI 3009), à Regium Lepidum (XI 970); un patron commun aux fabri et
aux dendr. : à Apulum (III 1217), à Bellunum {Notizie, 1888, p. 408),
à Ligures Baebiani (IX 1459); un patron commun aux dendr. et aux
centonarii : à Igg {III 10738).
" A Pisaurum (Grut. 484, 9. Wilmanns, 2112. Mur., 520, 4), à Apulum
(III 1209).
( 445 )
dans la clientèle du même homme ^. Evidemment, c'était affaire
de mode de se donner un patron : en effet, quelque généreux
et influent que fût le patron, tant de collèges à la fois ne pou-
vaient raisonnablement attendre d'un seul et même citoyen de
grandes libéralités ni une protection permanente. Une autre
preuve, c'est le nombre des patrons que se donne le même
collège : les fabri tignuarii de la petite ville de Luna en avaient
quinze ^^. A Ostie, la plupart des collèges, dont Yalbiim est con-
servé, en ont au moins une dizaine. Parfois chaque décurie
avait son patron spécial 3.
Du côté des patrons, d'ailleurs, la vanité n'avait pas moins
d'empire. Pour eux, c'était un titre de plus, c'était un honneur
à ajouter à ceux qu'ils possédaient déjà, ou d'autant plus pré-
cieux s'ils n'en possédaient pas d'autre. On en voit qui « pro-
voquent » les collèges par leur générosité à les choisir. Sous
la phraséologie si flatteuse des tabidae patronatus, on voit per-
cer la conviction des corporations qu'elles faisaient plaisir au
nouveau patron. A Regium Lepidum, un collège ose prier un
certain Julianus d'accepter a l'honneur » du patronat 4. Plu-
sieurs patrons font des largesses, ob lionorem patronatus ^. Les
centonaires de Sentinum choisissent Coretius Fuscus, sa femme
et son fils, pour les récompenser {j^emunerare) de leurs libéra-
lités; c'est un honneur qu'ils méritent, osent-ils dire {merito
honore) j et ils leur demandent de daigner accepter l'honneur
que le collège leur fait : digne honorem sibi oblatum suscipere
dignentur^.
' V 6515. VI d649 IX 1682. 4067. 29722. XI 4086. XII 700. 982. 2438.
XIV 303. Aluœr, 31. d. L., II 129. 171. 172. 176. E. Desjardins {Op. cit.,
p. 447) dit : « Les patrons étaient comme l'expression vivante de la
fusion des métiers (c'est-à-dire des collèges). » Le mot fusion dit trop ;
il n'y avait entre les collèges que des rapports intimes.
* XI 1355. Les cidtores de Mitthra, à Sentinum, paraissent en avoir
trente-cinq (XI 5737. F. Cumont, Textes relatifs à Mithra, n. 157).
3 III 7960.
^ XI 970.
2 Voyez supra^ p. 362, n. 6.
6 XI 5749 = WiLMANNS, 2858. Cfr. XI 5748.
( 44(3 )
Et en effet, nous l'avons vu, cet honneur valait au patron
toute une série de flatteries, auxquelles il était d'autant plus
sensible que le collège était plus important et plus considéré.
Il avait la place d'honneur aux réunions; on lui décrétait des
inscriptions honorifiques et des statues; parfois on lui élevait
encore un monument après sa mort ^. De tous ces hommages,
aucun ne le touchait autant qu'une statue élevée sur une place
publique : sur le piédestal, tout le monde pouvait lire ses titres,
parmi lesquels figurait celui de patronus collegii, même à côté
des plus hautes dignités.
En résumé, cette institution, empruntée aux villes, destinée
d'abord à défendre, n'était souvent qu'un moyen de remplir
la caisse ou d'allonger la liste des festins : parfois même elle
ne servait qu'à satisfaire une double vanité.
Pater, mater, filia collegii.
On peut se demander si les titres de pater et de mater col leyii
correspondaient exactement à ceux de patron et de patronne.
Nous avons vu que le mot pater avait un sens spécial dans les
collèges des dieux orientaux, où il désignait le degré d'initia-
tion le plus élevé, et aussi le chef de chaque ordre d'initiation.
Chez les sectateurs de Mithra, « il y avait sept ordres d'initiés :
le corbeau, le griffon, le soldat, le lion, le perse, le courrier
du soleil, le père [corax, grypfiius, miles, leo, persa, heliodro-
miis, pater). Chacun de ces ordres semble avoir eu son chef,
ou pater : pater leonum, pater patrum ; ce dernier était le chef de
toute l'association, le président de la loge -. » Ce chef religieux,
^ m 1210. 1501. 3931. Voyez supra, p. i>76, n. ± — Remarquez :
patronus primus (III 1051. Allmer, M. cl. L., II 163), c'est-à-dire le
premier que se donna le collège, et patronus perpetuus (XIV 281. 324),
d'où il ne faudrait pas conclure qu'il y a des patrons nommés à temps.
' P. Allard, dans l'article déjà cité (voyez supra, p. 329, n. 3), p. 16.
VI 1779 : pater patrum. XI 5737 : pater leonum, chez les Cultores Mithrae,
( 447 )
vc pater se trouve aussi dans le collège syrien de Jupiter Uoli-
chenus sur TAventin, dans les collèges d'isis et ailleurs K
Dans les collèges professionnels et funéraires, le président
civil semble parfois porter le même nom. Chez les centonaires
de Sentinum, c'est le pater et le 2)arens du collège qui font
rapport sur Téleclion d'un patron, tandis que ce sont ailleurs
les quinquennaux ou les questeurs ^^ ; en tous cas, on dislingue
ici ces deux titres de celui de patron. Il en est de même dans
\e collège des fabri tignunrii de Luna; la liste de ses quinze
patrons se termine parce nom : Niimisius Tacitus, pater collefji
bisellarius. Ce Numisius Tacitus est donc à la fois patron et
père du collège, de même que Terentius Mercurius dans le
collegium fabrum de Salone 3. Cependant, ordinairement, les
titres de pater coUegii et de mater coilegii qu'on trouve dans
toutes sortes de collèges, chez les fïibri, les (abri navales, les
centonaires, les dendrophores, les artistes dramatiques, les
foulons, les vétérans, les juvenes, les cultores et les juifs ^, ne
désignent ni un dignitaire ni un patron proprement dit.
Purement honorifiques, ils sc»nt donnés uniquement pour
à Sentinum. XIV '286 : pater, en tête d'un album sacrato[riim], collège
de Mithra, au Portus. Fr. Cumont, Op. cit., n. 7-58. 15. 140. 157. etc.
< VI 406. 408. 413 et note; le patronus hujus loci est distingué du
pater. — III 882 : pater dans un coll. Isidis avec un questeur, à Potaissa.
XIV 69 : mater, et 70 : pater et sacerdos (dendr. d'Ostie). XIV 37 : pater
et mater des cannophores d'Ostie. III 8147 : pater, chez des collitores {tlei
Heronis). VI 377 : pater deoru{m) omnium. Cfr. III 870 : mater (Asia-
norum\ à Napoca.
2 XI 5749. Voyez supra, p. 374, n. 1. V 784 : collegium veteranor[um]
posuit sub pâtre Titiano, à Aquilée. Les juvenes de Petovio ont deux
praefecti, deux patres, et deux q.uin)q{uennales) ou q{uaestores), qui
s'acquittent ensemble d'un vœu (III 4045).
•^ XI 1355 A. III 8837 : pater et patro[n{us) ?] {coilegii fabrum?). Cepen-
dant ce dernier est douteux.
* Voyez supra, n. 2. Pater collegi ou numeri noslri : VI 10234, 1. 10.
11. 12. XI 1355 B. 5749. XIV 2408 {infra, p. 448, n. 2). Mater collegi ou
numeri nostri : III 1207. 7505. 7532. 8833. VI 8796. 10234, 1. 10. 12.
IX 2687. 5450, XI 1355. 5748. XIV 256. Mater sijnagogae : V 4411. VI 29756.
( 448 )
faire honneur et par reconnaissance. Ils sont accordés par le
collège, mais sans tabula patronatus; du moins il n'y a pas
d'exemple. Le patronat des collèges est une imitation d'une
institution publique, dont il a pris toutes les formes solen-
nelles; il est décerné cérémonieusement à des gens haut
placés, influents ou du moins riches, capables de défendre le
collège et de le soutenir par des libéralités. Il n'en est pas de
même du « père w et de la « mère. » Ceux-ci appartiennent
souvent à une condition sociale inférieure ^ ; s'ils ne sont
pas membres du collège, ils sont les égaux des confrères, et
ils ne semblent guère en état de remplir le rôle de patrons.
Les dendrophores de Troesmis ont pour mère la femme d'un
vétéran; les foulons de Falerio ont donné ce titre à la femme
de leur magister; à Bovilles, les artistes de la scène appellent
pater l'un des leurs '^.
En résumé, pater et mater sont des titres moins solennels,
décernés le plus souvent à des gens de même condition que
les confrères, pour leur faire honneur, et non pour avoir des
protecteurs puissants ni des bienfaiteurs généreux, quoique
les intéressés prouvent parfois leur reconnaissance par des lar-
gesses 3. C'est dans le même sens probablement que les fabri
lignuarii de Luna avaient décerné le titre de filiae à deux
femmes, et c'est peut-être aussi dans ce sens qu'il faut com-
prendre les matronae collegii fabrum, à Aquilée *.
• Affranchis : VI 10234. XIV 37 (cannophores d'Ostie). IX 2687 :
Gavilliae Optat{ae) contubernali, matri collegii) centonarior., à Aesernia.
Vï 8796.
2 III 7a0o, à Troesmis. IX 54o0, à Falerio. XIV 2408 : quem primum
omnium adlectU scaenicorum) patre{m) appellarunt; il s'agit d'un archi-
mimus, à Bovillae Cfr. Foucart, Assoc. relig. chez les Grecs, n. 67 :
Trax-np auvd[ôou], et page 242.
5 XIV 2408. VI 10234. — Stevenson, Ann. d. Inst., 1882, pp. 168-170,
fait aussi une distinction. Liebenam, p. 218, n. 2, les confond.
■* XI 13oo A. Les filiae ne portent le nom d'aucun des quinze patrons ;
elles ne peuvent donc être leurs filles. Pais, 181 : ut de(n)tur decuriae
meae {denarii) XV, ma[t]ron{is) collegii fabr. (denarii) XXV, etc. Bull.
( 449 )
Pourtant il est possible que pater et mater soient mis parfois
pour patron et patronne. Memmia Victoria, « inèrc w des
fabri de Sentinum, appartenait à une grande famille, et son
fils, Coretius Fuscus, est élu patron par ce collège i. Les fabri
et les centenaires d'Apulum ont également pour a mère » une
femme de haut rang 2.
§ 8. — Finances des collèges.
L'examen détaillé du budget des recettes et des dépenses
achèvera de mettre en lumière le but privé des collèges et
complétera ce que nous avons dit de leur organisation inté-
rieure.
Chaque collège avait sa caisse, aira collegii, arcacommiinis'^,
arka) reip{ublicae) collegii •*, arca publica ^\ ratio piiblica 6,
respiiblica collegii "; chaque décurie avait parfois sa caisse
de Corr. helL, VII. p. 47:2 : 'j-.o^ toû xoivo-j, dans un collège de mar-
chands à Délos. Cfr. V. von Schaeffer, Op. c, p. 189 (supra, p. 390.
n. 7).
1 XI 5748
2 III 1207. Cfr. XIV 236, fabri navales d'OsXie.
5 Voyez Orelli, au n» 4068. G. Boissier, Relig. rom., II, p. 261. Maué,
Vereine, p. 51, n. 12. Rudorff, Zeitschr. /. g. R. W., XV, p. 210.
Gierke. 111, p. 86, n. 186 Schiess, pp. 81-86. Liebenam, pp. 243-237. 304.
Gradenwitz, /. /., 1892, pp. 143-144.
Arca est fréquent; voyez nos Indices. Arca communis : DiG., III, 4, 1. 1
(voyez supra, p. 133). Ratio communis : Dig., 47, 22, 1, 2 (voyez
supra, ib.). Pecunia communis : Dig., 47, 22, 3. C I. L., 1 196, 1. 11.
VI 10237. XIV 3639. La caisse des fabri et centonaires de Milan s'appe-
lait : arka Tiliana (voyez supra, p. 408, n. 3).
* VI 9234.
5 VI 9044. 10348. 14413. Bull, corn., 1886, n. 1289 (coll. fun.).
6 II 2102 : ratio publika vestra.
7 III 7483. VI 1682 9626. XIV 2299. Orelli, 4412. III, p. 924 : loculus ;
ScHiESS, pp. 87, note 272. « Aux frais de la caisse » se dit : ex publico,
pecunia publica, de publico, publiée. Voyez nos Indices.
Tome L. * ^9
( m )
parliculière K Outre les fonds en numéraire, les collèges
pouvaient être propriétaires d'immeubles, de maisons et de
terres. Toute cette fortune {res commums, res coUegii, jortunae '^)
était propriété de la personne morale et non propriété indivise
des membres, du moins dans les collèges autorisés et dotés,
par là-mème, de la personnification civile 3.
Budget d£s reeette^i.
Nous allons rechercher d'abord quelles étaient les sources
de revenus des corporations et ce qui alimentait leur caisse.
Elles avaient des recettes ordinaires et des recettes extra-
ordinaires; les unes et les autres ressemblaient beaucoup c»
celles des villes.
Les recettes ordinaires étaient :
1° Le droit d'entrée. Dans le collège de Diane et d'Antinous,
chaque membre nouveau donnait une amphore de bon vin et
100 sesterces [11 francs), c'est-à-dire le tiers de ce que le collège
déboursait pour les funérailles; ce droit portait le nom de
kapitidariuni ^. Dans les collèges militaires de Lambèse, il
s'appelait scamnariiun ; chez les sonneurs de cor, il était de
7o0 deniers (815 francs-, mais les tirones ou élèves payaient une
somme moindre, ce qui était aussi le cas chez les optiones
valet[udinarii] 3.
Dans un collège d'esclaves et d'affranchis impériaux, ce droit
semble être indiqué par les mots : deciiriaui émit ou emerunt,
qui figurent chaque année dans les fastes et sont suivis des
noms des membres nouveaux ; il fallait acheter le droit d'entrer
» III 2107 : [inferet} decuriac meae (denarios) XXV. Pais, 181.
- DiCt., III, -4, 1, 1. VI 1696; voyez supra, p. 438, n 5. Res huiosce
conlegi : M 10-298, 1. 4. Ils avaient des provisions de vin pour les ban-
quets : VIII 14683. XIV 2112, L 1. 21. II. 1. 7-8. Pais, 181.
^ Voyez la tin de la III^ partie.
* XIV 2112, 1, 1. 20-21. ScHiESS, p. 81.
5 VIII 2oo7, l. 30. 37. 2od3. Voyez supra, p. 309.
( 451 )
dans une décurie et, par conséquent, dans le collège ^. Les
corporations professionnelles exigeaient également un droit
d'entrée; les statuts des ivoiriers et ébénistes en parlent, mais
la somme est effacée '^. L'usage devait être généraL L'assemblée
pouvait exempter du payement, car on rencontre un gratis
adleclus inter navicularios, et des immunes recepti in colle(j[ium,
fabr{um); nous les avons considérés comme des membres
d'honneur •^.
2° La cotisalion mensuelle. Elle s'appelait stips, stips mens-
trua 4-, et avait peut-être son origine dans un usage des con-
fréries religieuses privées. Tandis que les sodalités à qui l'Etat
confiait l'exercice d'un culte, recevaient de lui les ressources
nécessaires, les collèges privés, notamment ceux des divinités
étrangères, étaient réduits à des cotisations volontaires s.
La coutume de payer par mois commença peut-être aussi
dans certains de ces collèges, où les cérémonies étaient men-
suelles 6. Les collèges funéraires auraient usé de ce moyen
» VI 10393, 1. 6. 42. 23. 32. Peut-être s'agit-il de l'achat du décurionat.
Voyez supra, p 336, n. 3.
- Mittli. cl. Inst., 1890, p. 287, 1. 23-26 : Item plaœre uti [quisrjuis
adlectus e]sset, inferret arcae [(denarios) ...] Texte douteux.
"' V 4048. XIV 409. Voyez supra, p. 337.
4 Stips menstrua : XIV 2112, I, 1. 11. DiG., 47, 22, 1. Tertull., Apol.,
39, chez les chrétiens. Voyez supra^ pp. 143. 136. 313. — Cfr. Hlschke,
Zeitschr. f. g. R. W., XII, p. 211. Mommsen, De coll., pp. 98 et 113.
Kayser, pp. 187 188. Coh>-, pp. 140-143. Marquardt, cité supra, p. 43,
n. 4. SCHIESS, p. 81. LiEBENAM, p. 171.
2 Les Juifs : Joseph., Ant. Jud., 14, 10, 8 (Voyez supra, p. 113, n. 3).
Marchands tyriens de Pouzzoles : C. I. Gr., 3833 = Kaibel, 830; ils
disent que leur nombre a diminué, xal àvaÀîcr/.ovTEç zlc, -e ôuj-'a; xai
6oTj!7X£Îa^ Twv TraTOttov riadiv Oîojv £v6âoî àotoa'.toasvojv èv vao"ï;; o'!»"/.
£'j':ovoO;j.£v -rov ij.uOovttj; a-ra-îwvo; Trapsys'.v xa-u' è'xo; (denarium centum
milium nummum), ixâ/'.a-a i^ xal xà àvaXtoij-axa i\:, xov àywva xov sv
IloxtdXo'.c; iTiC, pouOujt'a; •fjas'tv TrpoffôTcôr^. MoMMSEN, Ber. der siichs. Ces.
der Wiss., 1830, pp. 37-62. Cfr. Apul., Met., VII, 4 : communi conferebat
arcae.
^ COHN, p. 140.
( 452 )
pour subvenir aux frais des funérailles, parce que celte cou-
tume était déjà en vigueur chez eux pour couvrir les dépenses
du culte, et Marquardt trouve dans l'existence seule de cet
usage une preuve de leur origine religieuse ^.
Quelle que soit son origine, dans les collèges funéraires la
cotisation mensuelle était uniquement destinée aux funérailles;
les statuts de Lanuvium et le Digeste sont formels à cet égard -.
On l'appelle ordinairement stips menslrua, peut-être aussi
sigilla 3; l'édit d'Alburnus Major emploie par abus le mot
funeraticia ^. C'est pour le versement de cette cotisation que la
loi permettait l'unique réunion mensuelle 5. Dans le collège
de Diane et d'Antinous, elle était de cinq as (0,335 franc), c'est-
à-dire 60 as ou environ 15 sesterces par an; en comptant le
droit d'entrée (100 sesterces), on trouvera qu'il suffisait de
payer la cotisation pendant treize à quatorze ans pour avoir
remboursé la prime funéraire (300 sesterces) 6. H semble que
les collèges avaient des difficultés pour faire rentrer ces coti-
sations, et le collège de Lanuvium a recours aux exhortations
et aux menaces ; celui de Jupiter Cernenius dut se dissoudre
pour ce motifs.
Dans les collèges militaires de Lambèse, le scamnarhim était
si élevé que Gagnât a supposé qu'on n'en payait qu'une partie
en entrant et que le reste était versé sous forme de cotisations
mensuelles. On peut le conclure aussi de la clause qui n'ac-
' Voyez supra, p. 263, n. 2.
- Voyez supra, pp. d43. 261. 303.
5 Voyez supra, p. 416, n. 3. Mommsen, Dô coll., p. 106.
-* m, p. 924 : conferre funeraticia.
^ XIV 2112, I, 1. H-13. DiG., 47, 22, 1. C. I. L. III, p. 924 : diehus
quibus legi continetur.
« XIV 2112, 1, 1. 20-21 : dabit — in menses singiilos) aisses) V. Schiess,
p. 81. — MoMiMSEN, Op. cit., p. 99, dit : vingt ans; mais d'après son
texte, la prime serait de 400 sesterces.
' XIV 2112, II, 1. 22 : quisquis — non pariaverit. II, 1. 24 : quisquis —
pariatus decesserit. Voyez supra, pp. 261-262. C. /. L. III, p. 924.
( 453 )
corde la prime qu'à ceux qui sont en règle avec la caisse ^.
Quant aux collèges professionnels, nous ne sommes pas
renseignés; mais ceux qui payaient la prime funéraire devaient
aussi exiger la stips menstrua '^ ; celle-ci était du reste néces-
saire pour couvrir d'autres dépenses et elle était sans doute
d'un usage général.
3" Sunuria fwnoraria. Comme dans la cité, ce mot désignait
le don, en argent ou en nature, offert par les fonctionnaires
pour payer l'honneur qu'on leur a fait en les élisant. Ce don
était imposé soit par les statuts, soit par l'usage. Tertullien et
une inscription de Mantoue le désignent par le mot siimma
honoraria 3. Nous le trouvons dans ces largesses faites ob fiono-
rem mayisterii, quinquewialilalis, praefedurae, quaestiiraey Iri-
bunatus, ilecurionatiis, aedilitatis, patronatus, que nous avons
déjà mentionnées ^. Beaucoup de libéralités faites par des
dignitaires sans indication du motif sont probablement dans le
même cas 3. Les statuts fixaient la siimma honoraria, soit en
argent, soit en nature G; le collège pouvait toujours demander
' Voyez supra, p. 311, n. 1,
- Voyez supra, p. 274.
5 Tertull., ApoL, 39. Pais, 669 : une statue à Hercule, par trois per-
sonnages, ex summis lion[ora]7iis quas coUe[gio] naiitarum debuerant,
adj{ectis sestertium) 3IMCC. Pour les villes, voyez 3Iarquardt, St.-V.,
I, p. 180. Org. de L'Empire, I, p. 264.
^ Voyez supra, pp. 397. 361. 414. 417. 424, n. 6. 431. Ob sacerdotium,
VI 10348. In sacerdotio, VI 9044 a et b. Redemptos honor{es) quaesto-
r(ios), Allmer, M. d. L., II 170. Ob honorem praefecturae, XIV 2634.
5 Surtout celles qui sont appelées munera, ou imposées par décret :
VI 10343 : muner{e) func{tus ter). VI 4709 : Tata curator primus dédit
munus, etc. VI 4710 : Malchio decurio munera quae dédit. Cfr. VI 4711;
ce sont des collèges funéraires. Un curateur répare à ses frais le monu-
ment de la synfiolus psaltum en vertu d'un décret des décurions, Bull,
corn., 1888, p. 408.
* En nature, VIII 14683, pour le flamine, le magister et le quaestor
(voyez supra, pp. 397, n. 2 et 414, n. 7). En argent, X 6638 (voyez supra,
p. 397, n. 3).
( 4o4 )
que la somme fixée fût remplacée par autre chose, par une
statue ou un ouvrage utile à tous i.
4° Prestations régulières des membres. De ce nombre sont les
accessoires que les magistri cenarum du collège de Lanuvium
et les curateurs des ivoiriers et ébénistes doivent fournir pour
les banquets. Chez ces derniers, les membres nouveaux
avaient certaines sommes à payer dans le courant de la pre-
mière année, à moins qu'il ne s'agisse du droit d'entrée -. Dans
le collège de Jupiter Cernenius, il est question de mimera que
les membres doivent fournir aux jours fixés par le règlement
pour le versement de la cotisation 3.
o*' Subsides ou salaires. Nous parlerons, dans la troisième
partie, des indemnités par lesquelles l'Etat payait certains col-
lèges chargés d'un service public. Le collegium fontanorum de
Rome était exempté de la redevance due au trésor (solarium)
pour un lieu public dont il jouissait •^. Il ne faudrait pas
s'étonner si plusieurs collèges professionnels avaient reçu des
subsides réguliers de la caisse municipale. C'était probable-
ment le cas pour ceux qui faisaient l'office de pompiers. A
Milan, on trouve un collegium aerar{ii?) coloniae Mediolanensis,
qui a de grandes ressemblances avec le collegium fabrum
et ceuîonariorum de la même ville : même nombre de centu-
ries, mêmes dignités. Mommsen conjecture que ces deux col-
lèges n'en font qu'un seul et que le premier nom vient des
subventions accordées par la caisse communale s.
' X 6071. 82o. Voyez supra, p. 375, n. 1. Peut-être : IX 3^24 (ludos?).
X 6679. Bull, corn., 1883, p. 161, n. 1083.
2 Mitth. d. Inst., 1890, p. 288, 1. 24 : Item placere uti adlect[i om]ne
eod{em) anno praestarent. Mommsen explique : les nouveaux doivent
payer tout, c'est-à-dire tout ce que payent les anciens, pendant l'année
de leur entrée, même s'ils entrent quand l'année est commencée
(Zeitschr. der Savignystift., Rom. Abtli., 1892, p. 143).
^ 111, p. 924. Sur munus, cfr. page précédente, n. 5.
■* VI 266 : nunquam liaec loca pensionem pensi tasse. Voyez la note de
Mommsen.
^ V o847. o892, et pp. 633. 1191. Hirschfeld croit qu'il en était de
\
( 45o )
6" Travail des esclaves et des a/franchis^. Les collèges,
comme les villes, avaient des esclaves. Les inscriptions nous
font connaître des esclaves appartenant à des ajiparitoreSy à des
tignuarii et à des collèges funéraires. Ils remplissent l'office de
secrétaire, de gardien du monument funéraire, ou iVaclor '^.
Les jurisconsultes se demandèrent longtemps si les collèges
pouvaient acquérir, par leur intermédiaire, la possession et
l'usucapion, qu'ils ne pouvaient acquérir eux-mêmes faute
d'aiiimus possideiidi; il aurait fallu d'abord, disaient-ils,
acquérir l'esclave. A l'époque de Paul et d'Ulpien, cette diffi-
culté théorique avait été tranchée en faveur des collèges ^>.
Marc-Aurèle fut le premier qui accorda le jus manumittendi
aux collèges autorisés 4. Le Digeste et les inscriptions men-
tionnent souvent des servi et des liberti coUegiorum 5. On les
reconnaît à leur nom gentilice qui est dérivé du nom de la
corporation : Qiiinta Centonia, Fabricius, Collegius Fahricius,
Fabricius Centoniiis coUegiorum lib{ertus) Cresimns et sa femme
Fabricia Centonia Arethusa, Q. Navicularius Victorinus, Qiiaes-
toriiis, Sympfionins, T. Velatius accensorum velatorum l{ihertus)
même des fabri tignuarii de Rome, et au n» VI 10300, il lit : decuriones
a co{n)s{idihus) [ad aerarium delati], Gall. Stud., III, p. 19 (^oo), n. 2.
Voyez supra, p. 359, n. 2.
* MoMMSEN, De coll., p. 121. ScHiEss, p. 68, n. 204. Liebena.m,
pp. 245-246.
2 VI 4013 (voyez supra, p. 55, n. 2). VI 671 (cfr. supra, p. 416, n. 5).
VI 10296. Ephem., III, p. 312; cfr. C. I. L. VII 179. Brambach, 1661.
Ser{vus) sociorum, VI 4386. Diaria Jovensium p{ublica serva?), c'est-
à-dire esclave de la ville de Bordeaux, mise à la disposition des Jovenses,
selon C. JuLLiAN, Iiiscr. de Bord., 85. M. Hirschfeld nous écrit : Portasse
sic legendum : Jovensium iserva) p{atri) \e\ piatrono^.
5 DiG., 41, 2, 1, 22. Ibid., 1. 2. Cfr DiG., X, 4, 7, 3, et la Ille partie, à
la fin.
* DiG., 40, 3, 1 (Ulpien) : Divus Marcus omnibus collegiis, quibus jus
coeundi est, manumittendi potestatem dédit. Voyez la III^ partie.
^ DiG., II, 4, 10, 4 : qui manumittitur a corpore aliquo, vel collegio vel
civitate; 29, 2, 25, 1 : servus municipum, vel collegii, vel decuriae; 48,
18, 1, 7 : in ceteris servis corporum.
( 4o6 )
Ganijmedes ^ ; ou bien ils prennent le gentil ice Publicins,
comme les esclaves de l'État '-i.
7° Rentes perpétuelles 3. Les libéralités reçues par les collèges
étaient incontestablement pom* beaucoup d'entre eux la prin-
cipale source de leurs revenus. xXous avons à parler ici des libé-
ralités qui leur rapportaient un revenu annuel et régulier.
C'étaient en premier lieu les fondations, c'est-à-dire les sommes
si souvent données ou léguées siib modo. Nous avons déjà vu
quelle était généralement la condition imposée : on voulait
faire célébrer l'anniversaire de sa naissance ou celui de l'em-
pereur; on voulait s'assurer, après sa mort, des honneurs
funèbres à certains jours déterminés ou faire rendre ces hon-
neurs aux Mânes d'un parent, d'un patron défunt ; on tenait à
faire célébrer des fêles religieuses, à assurer Tentretien d'une
statue, d'un tombeau, de la maison corporative 4. A cet effet,
on donnait de la main à la main ou bien on léguait soit un
capital, soit des immeubles de rapport à un collège qui se
chargeait de remplir les intentions du bienfaiteur. Nous avons
vu que depuis Marc-Aurèle les collèges autorisés pouvaient
recueillir des legs 5. Ceux qui favorisent les collèges de pareilles
largesses sont le plus souvent des patrons, des présidents,
1 XII 1383. V 4422. III 1553 (voyez supra, p. 281, n. 3). VIII 3543.
XII 833. VI 1826 (voyez svpra, p. 53, n. 2). BulL del bist., 1879, p. 139 :
Sympfionius. Orelli, 24G1. A Fésules, on a : Collegius compitalicius (XI
1350); c'est plutôt le nom d'un collège (voyez supra, p. 100, n. 1). Un
affranchi des (abri navales à Ostie s'appelle Colocaerus : XIV 168. 169 et
note. Cfr. VI 9634 : C. Mimariits, affranchi de socii miniariarum.
VI 9953 : P. Monetius, soc{iorum) l{ibertus), Pliilogenes. VI 8744 :
Argaeus l{ihertus), collège de la maison impériale.
2 Robert -Gagnât, Épigr. de la Moselle, II, 115 : M. Publicius
Secundanus nautarum Mosallicor{um) liber[tus] tabularius, à Divo-
durum.
5 ScHiEss, pp. 82-84. LiEBEXAM, pp. 246-254. Maué, Vereine, pp. 43 et
suivantes.
* Voyez supra, pp. 233-237. 294-299, sur ces fêtes.
5 Voyez supra, p. 130, n. 4. Mommsen, De coll., pp. 123 et suivantes.
( 457 )
parfois des membres ou des étrangers >, Ils y sont provoqués
par les honneurs reçus du collège, mais souvent aussi c'est
spontanément qu'ils s'adressent à lui pour faire célébrer une
fête funèbre ou religieuse. Les collèges le plus souvent favo-
risés sont les corporations professionnelles ; les sommes ainsi
données ou léguées sont plus ou moins élevées, les immeubles
sont plus ou moins importants. Quoique nous ayons eu l'oc-
casion de citer de nombreux exemples, nous dressons ici une
liste complète des fondations connues, afin de montrer quelle
était l'importance de cette source de revenus pour les collèges.
Nous avons dit plus haut quels sont les bienfaiteurs les plus
ordinaires et quel est leur but. Nous indiquerons ici les col-
lèges et les largesses qui leur sont faites.
Voici d'abord ceux qui reçoivent un capital - :
BaçsiTç, teinturiers, à Hiérapolis (C. 1. Gu. 3924)3.
CûUegium cannophoriim, à Milan (^8,000 sesterces, V 5840).
Centonarii, à Rome (5,000 deniers, rapportant 600 deniers
par an, VI 9254), à Ameria (5,000 sesterces, XI 4391), à
Aquilée (2,000 sesterces, V 1019), à Brixellum (XI 1027), à
Cemenelum (V 7900), à Comum (1,000 sesterces, V 5447), à
Mevania (même somme. Xi 5047), à Milan (2,000 sesterces, V
5658), à Padoue (même somme, V 2864), à Placentia (V 7357).
Dendrophori, à Piome (10,000 sesterces, VI 1925; 1,000 ses-
terces, OuELLi 4412), à Brixia (1,000 sesterces, V 4418), à
Eburum (8,000 sesterces, X 451), à Milan (4,000 sesterces, V
5840).
* Patrons, voyez suprm-, pp. 434436. Présidents et autres fonction-
naires, p. 397. Membres, Ouelu, 4412. III 3893. XI 126. 5047. VI 9626.
V 4015. 4016. XII 731. Étrangers, XI 4391. IX 5568. X 6465. IX 1618.
XIV 2112, et presque toutes les fondations pour honneurs funèbres.
* Un sesterce vaut, sous l'Empire, 27 centimes, et un denier, 1,08 fr.
Le follis denariorum vaut 0,66 fr.
* L'inscription dit seulement : Touxo tô r)pwov atc'pavot tj èpyaat'a xtliv
pacpéiov. Comparez XI 1027 : His epiUe debentur a collegio centonariorum
Brixellanoriim. V 8755 : Queni arcam vetranibus comiuendavi.
( 458 )
01 èy 'EcpÉo-w èpyaTa', TûpOTruXerra', Tipb(; tw noa-6',owv!., à
Éphèse (500 deniers, C. I. Gr., 3028).
Fabri, à Aquilée (1,000 deniers. Pais, 194), à Bellunum
(500 folles de deniers, V 2046), à Brixia (somme effacée,
V 4448), à Comum (2,000 sesterces et 72,000 sesterces rappor-
tant un intérêt de 1200 deniers, V 5272. 5287 ^), à Emona
(200 deniers, III 3893), à Laus Pompeia (1,000 sesterces,
V 6363), à Pisaurum (1,000 sesterces, Grut., 440, 8), à Ravenne
(30,000 sesterces au collège et .1,000 sesterces à la septième
décurie du collège, XI 126. 132).
Fabri navales, à Pisae (4,000 sesterces, XI 1436).
Fabri subaediaui, à Narbonne (16,000 sesterces, XII 4393) -.
Fabri tignuarii, à Tolentinum (10,000 sesterces, IX 5568).
Fabri et centonarii, à Brixia (500 et 2,000 sesterces, V 4416.
4488) 3.
Fabri, centonarii, dendrophori, à Brixia (trois fois 1,000 ses-
terces, V 44i9) et à Sassina (6,000 sesterces à chacmi des trois
collèges, BoRMANX, Inscr. Sass., 24).
Jumentarii, à Brixia (400 sesterces, V 4294).
Juvenes, ù Fabrateria vêtus (2,000 sesterces, X 5657), à
Milan (400 deniers, V 5907), à Bergomum (20 deniers qui en
rapportent trois, V 5134), et à Setia (4,000 sesterces, X 6465).
KaipooaTZ'.TTai, à Hiérapolis (150 deniers, Wagexer, Rev. de
rinstr.jmbl. en Belg., 1868, p. 1).
Marienses, à Milan (8,000 sesterces, V 5840); sodales Mar-
tenses, au vicus Martis Tudertium (2,000 sesterces, XI 4749).
Un collège militaire, à Lambèse (VIII 3284, somme effacée).
Medici, à Beneventuni (125 deniers par an, avec des immeu-
bles, subsidiairement, IX 1618).
Mensores, à Rome (une somme rapportant au moins
42 V, deniers, VI 9626).
* Voyez supra, p. 297.
* Revenu annuel de 2,000 sesterces ou 540 francs (voyez supra, p. 43o).
* Aux 2,000 sesterces sont ajoutés des immeubles; le tout rapporte
200 deniers.
{ 459 )
Naiitae, à Brixia (60,000 sesterces, V 4990), ù Arilica ou à
Verona (2,000, 12,000, 600, 4,000, V 4015-4017. Cfr. Pais,
669), à Atria (400 sesterces, V 231 o).
Piscatores et urinalores totiiis alvei Tiberis, à Rome (10,000,
12,000 sesterces, et un troisième don effacé, VI 1872. Huelsen,
Nolizie, dans les Atti des Lincei, 1888, pp. 279-281. Bull, com.,
1888, p. 387 = VI 29700-29702).
Ilopcp'jpopâcpo'., à Hiérapolis (300 et 200 deniers, Lebas, 1687".
Ramsay, Aïiier. joimi. ofarch., 1887, III, p. 348. VVagener, /. /.).
Utridariù à Arles (200 deniers, XII 731).
Velerani, à Concordia (V 8755. Voyez supra, p. 457, n. 3).
Schola vexillariorum, à Gomum (30,000 sesterces rapportant
1,200 deniers, V 5272) i.
Voici maintenant ceux qui reçoivent des immeubles. A Alti-
num, les centonaires reçoivent des jardins et un édifice atte-
nant à la sépulture où ils doivent offrir des sacrifices (V2176).
A Brixia, Valeria Ursa donne aux fahri la moitié d'un champ
[agellum Aeseianum); une partie au moins du revenu, soit
100 deniers, doit être dépensée en l'honneur de son mari
défunt (V 4489). A Aquilée, M. Antonius Valons lègue sa maison
à ses affranchis et leur prescrit de donner chaque année
52 Va deniers au collège des fabri, dont il était membre, pour
< Fondations au profit d'un collège d'Aiiguslales : V 4203. 4440.
IX 4691. XII 530. 4334. 4397; d'une curia Caelestia : VIII 14613; de col-
lèges funéraires : VI 10234 (00,000 sesterces au collège d'Esculape et
d'Hygie pour six sportuies; le président lui a promis en outre une
cena ou des sportuies annuelles à date fixe; voyez supra, pp. 400-401).
XIV 2112, I, 1. 3-6 (le revenu annuel de 1S,000 sesterces, soit 800, au
collège de Diane et d'Antinous pour fêter les natales de ces deux
divinités; ce collège fête en outre quatre anniversaires (II, 1. 11-13),
sans doute avec des rentes établies à cet effet par les intéressés; voyez
supra, p. 236, n. 4. Schiess, pp. 82-83. Liebenam, pp. 250 251). X 5654
(4,000 sesterces aux cultures antist[it]es Cereris, à Fabrateria vêtus).
V 4440 (500 deniers à un un coll. Larum de Brixia). III 703. 704,
Thiasus [L]ib{eri) pat{ris) Tasibast{eni) , à Philippi. III 11042. V 1978.
2072. 4871. VI 10297. XII 5905. XIV 246. Ephem., VIII 210.
( 460 )
que sa décurie honore sa mémoire et celle de sa femme ^.
Outre un legs de 2,000 sesterces, partagé entre les fabri et les
centonaires de Brixia, les centonaires seuls avaient reçu des
tabeniae ciim coenaciilis (boutiques avec chambres à l'étage), au
quartier d'Hercule, rapportant 200 deniers par an (V 4488). A
Brixia, Valeria Ursa avait donné aux pharmaciens publics un
champ [agellum] rapportant 100 deniers (V 4489). A Bénévent,
Nasellius père et fils avaient construit, pour des pagani, un
portique avec une chapelle des lares et un apparatorimn ; ils
leur avaient constitué, en outre, une rente annuelle de
12o deniers; s'ils n'observaient pas les conditions prescrites, le
tout devait revenir au collegium mediconnn (ÏX 1618) 2.
Ces fondations, fréquentes surtout dans l'Italie et dans la
Gaule cisalpine ^, rapportaient aux collèges des revenus
annuels. Il est vrai que l'emploi de ces revenus était minutieu-
sement prescrit par le bienfaiteur : il énumérait souvent les
fêtes à célébrer et fixait la somme qui devait être consacrée à
chacune. Un mesureur, qui lègue sa prime funéraire à ses con-
^ Pais 181. Sa décurie, la quinzième, recevra 15 deniers, les matronae
du collège auront "io deniers ; enfin, 12 deniers et demi seront con-
sacrés aux parentalia. En outre, sa décurie recevra le vin que devait
à Antonius la taherna Marciani, pour faire les libations. La décurie
devait organiser un banquet funèbre i)rès du tombeau, sans doute avec
es lo deniers.
- Aux seviri de Pouzzoles : X 1880 {praedia). Aux cidtores Jouis
Axorani, à Tarracina, X 6483 (aedem). A un coUegiiun Silvani, en
Lucanie : X 444 {fundiim Jullianum et LoUianum et Percennianum et
Statideianum siios cum villis finihusque attribuit, pour célébrer cinq
fêtes annuelles. Voyez supra, pp. 233, n. 2. 235, n. 1. 236. 297, n. 4). Il
y ajoute certains usufruits et des servitudes actives. A un collegium
Silvani, à Rome : VI 10231 (locus sive is ager est qui est via Appia — , in
quo aedifîcata est schola siib portion consecrata Silvano, avec servitudes).
Au collège d'Esculape et d'Hygie (VI 10234; \o\ez supra, p. 213).
3 LiEBENAM (p. 249, n. 2) a tort de supposer que dans les provinces les
collèges n'étaient pas autorisés à recevoir ces dons et legs; plusieurs
exemples prouvent le contraire.
( 461 )
frères, veut qu'ils dépensent pour des sacrilices, à son jour
anniversaire, 25 deniers ; aux parentalia, 12 '/i deniers; au jour
des roses, o deniers K Des mesures sont prises pour assurer
l'exécution de ces prescriptions : il est souvent stipulé que, si
le collège néglige de s'y conformer, le capital ou les immeubles
reviendront soit au fisc, soit à une autre corporation dési-
gnée '-î, ou qu'ils feront retour à la famille du défunts. Ailleurs,
c'est une amende à payer au fisc soit par le collège -^t, soit par
le président ou les curateurs i>. Parfois le bienfaiteur a plus de
confiance et il compte sur la loyauté, sur la religion des con-
frères 6. Ceux-ci prenaient un engagement formel : ils votaient
un décret par lequel ils promettaient d'exécuter la volonté
du donateur, et ce décret, ou du moins l'engagement 7, était
gravé sur le monument du bienfaiteur défunt. Tout n"(Mait donc
pas profit pour les collèges : il arrive même qu'ils se mettent
en frais pour honorer le donateur. Mais les sacrifices, les
fleurs déposées sur la tombe, l'entretien de la statue ou du
monument n'absorbaient jamais la rente entièrement : il restait
au moins assez pour un banquet sacré, prévu le plus souvent
1 VI 9626. On trouvera des détails de ce genre: V 2072. 4015-4017.
4488. 4489. 5272. VI 10234. XI 126. XIV 2112, I, 1. 1-6. Bormann, Ijisct.
Sass., 24. D'autres prescriptions concernent l'assistance des membres
aux fêtes ; voyez supra, pp. 299 et 326.
2 V4488. 5907. IX 16l8. X5654. XI 132. 1436. 4391. XII 4393. Pais, 181.
Lebas,1687^ C. I. Gr., 3028.
3 V 5134. VI 10231.
^ VI 1925. 9626. Ephem., VIII 210.
^ VI 10234, 1. 19-22. Voyez infra : Amendes.
*^ Bormann, biscr. Sass-, 24 : Fidei vestrae collegiali committo uii —
Hoc ut ita faciatis fidei vestrae collegiali committo. X 444 : Iluic rei doluin
malum afuturiim, quominus ea quae siipr{a) scripta siint fiant, mani-
festum est, cum pro salute optumi principis — fundi consecrati sint, etc.
VI 9626 : Peto a vobis, collegae, ut suscipere digncmini, etc.
' Nosez supra, p. 457, n. 3. XI 126 : ob quam libcralitatem coll. fabr.
— decrevit. XII 4393, à la fin (voyez supra, p. 436). V 7906 : Quod se
facturos receperunt. Ephem., VIII 210 : décret et serment par Jupiter et
par le Génie d'Hadrien.
( m )
par le bienfaiteur et partie intégrante de la fête. L. Publiciiis
Italiens donne aux fabri de Ravenne 30,000 sesterces, dont les
intérêts seront employés comme suit : la vingt-huitième décurie
de ce collège, à laquelle il appartenait, recevra loO deniers, à
charge d'en employer ^2d pour orner de roses les sarcophages
des deux fils et de la femme d'Italiens; elle doit en consacrer
lïî 7. à un sacrifice funèbre, et le reste, soit 112 '/^ deniers,
à un banquet funèbre; le surplus des intérêts, soit, ùG^/o,
300 deniers, sera distribué en sportules aux déeurions du col-
lège, à raison de 5 deniers par tête, à la fête des Neptunalia,
dans un temple de Neptune construit par le donateur 1. Parmi
les conditions imposées tigure presque toujours un banquet
sacré ou funèbre, et il est même possible que parfois, après
les libations, les sacrifices et le festin, le collège conservait
un boni dont il disposait librement.
8. Revenus des autres capitaux et immeubles. — Outre ces
fondations, nous devons mentionner ici les capitaux et les
immeubles donnés ou légués sans condition aucune; en efl'et,
ils entraient dans le patrimoine corporatif et devenaient une
source de revenus annuels. A Brixia, cinq personnes, sans
doute membres du coUegium fabrorum, lèguent i^i ce collège
toute leur fortune et la corporation reconnaissante leur élève
des monuments -. Les juvenes Fificulani reçoivent, par testa-
ment, près de iOO arpents de terres 3. Ailleurs, ce sont des
sommes d'argent données sans destination indiquée : i\ Pisau-
rum, les fabri reçoivent 10,000 sesterces; à Aquilée, ils reçoi-
» XI lîie : et de reliq{uo) ibi epulentur. Voyez supra, pp. iî33-234.
Au n° V 5272, 30,000 sesterces produisent 500 deniers par an. — Si
chaque décurie des fabri de Ravenne n'avait qu'un décurion, ce collège
aurait eu cent cinquante décuries; cela n'est pas impossible, si cha-
cune ne comprenait que dix membres.
2 V 4122. 4391. 4433 : qui facultates suas coll{egio) reliqiuerunt) ou :
qui rem suam coll{egio) reliq{uit). V 5135 : dendrophoris legavit, h.
Bergomum.
--> IX 3578.
f
( 4G3 )
vent 1,000 deniers; à Arilica, les nautes reçoivent 2,200 ses-
terces; à Brigelio, un collège achète un local {scolam) au
moyen d'une somme reçue ^. Les collèges avaient, en outre,
des lieux de réunion, des sépultures et des monuments
communs, dont ils jouissaient, mais qui ne rapportaient rien ;
cependant ces propriétés étaient souvent entourées de champs
et de jardins exploités à leur profit "K On mentionne parfois
des terres et des immeubles, dont l'origine nous est inconnue»^.
Nous verrons enfin, dans la troisième partie, que l'État fit une
dotation à certains collèges officiels, pour les aider h sup-
porter leurs charges, tandis qu'à d'autres il payait un salaire;
au IV<^ siècle, les biens des membres devinrent même, jusqu'à
un certain point, la propriété du collège. Ici nous ne parlons
que des propriétés que les corporations peuvent consacrer
à leur but privé, et l'on voit que, grâce aux largesses dont
elles étaient l'objet, elles pouvaient amasser peu à peu des
capitaux considérables, se faire un patrimoine important,
dont elles tiraient des revenus annuels et réguliers.
A ces revenus ordinaires venaient se joindre des recettes
citraordinaires et occasionnelles, dont les principales étaient :
1° Prestations irréijulièrès. Nous appelons ainsi les dons en
nature ou en argent, volontaires ou prévus par les statuts,
que les membres font au collège. Dans le collège de Diane et
d'Antinous, l'esclave qui devient libre doit une amphore de
bon vin. Dans celui d'Esculape et d'Hygie, celui qui veut laisser
sa place à un fils, un frère, un affranchi, doit abandonner à la
caisse la moitié de la prime funéraire. Parmi ces prestations,
il faut citer aussi les matériaux, statues, tableaux et sommes
' Grut., 440, 8. Pais 194. 669. III 11042. Coll. fun. : VI 647. 8738.
Cfr. V 4428 : primae bene merenli; voyez la note. XI : ob munificentiam
earum qiiae dendropfioros honoraverunt .
- Voyez supra, p. 291.
•'' VI 1682, insiUae coriarionim. X 1894 : ager religiosorum , porlicus et
sedilia. X 1379 : hic ager jugerum Vfl, cum cisterna et tabernis suis
(voyez supra, p. 336).
( 464 )
donnés volontairement par certains membres du collège de
Silvain à Phi lippes [munera] pour bâtir et orner le temple de
la corporation i.
2" Cotisations extraordinaires. Certaines dépenses passagères
étaient couvertes par des souscriptions volontaires ou obliga-
toires -, ouvertes entre les associés [aère conlato, corporatis
conferentibus). On se cotisait ainsi pour bâtir un local ou un
temple 3, pour construire un monument commun ^, pour
faire des funérailles à un membre bien méritant 3, pour con-
sacrer une statue â un dieu 6, mais le plus souvent pour
honorer d'une statue un patron du collège, un patron de la
cité, un décurion ou un curateur qui a rendu des services à ses
confrères, un bienfaiteur quelconque '^. Cependant les person-
nages honorés payaient eux-mêmes les frais de la statue et de
' XIV 2il2, II, L 7-8. Il s'agit d'esclaves, membres du collège. —
VI 10234, 1. 6. — III 633; voyez supra, p. 228. — Cfr. IX 5177 : Si qui
clupetim ponere volet {dans le temple du coll. Fortunae Reducis, à
Asculum), dahil arc{a)e (sestertios) II 7i{ummum). — Sur le mol munera,
voyez supra, p. 453, n. 5.
2 Voyez sup7'a, pp. 377, n. 2. 380, n. 5. III 1210 : secundum decretum
ipsorum. III 5659 : [aère] publiée co[llato] decreto de[ciirio7iuni]. V 1012 :
suffracj(iis) univers{is) ex aère [coUiato)]. VI 4421 : ex aère collato imagi-
nem decreverunt. Etc.
3 III 5659 {aedem). VI 349. 409. 815. XIV 246 (templum). Armée épigr.,
1893, n. 98 : corpus fullonum qui in aedificium contulerunt, à Mactaris.
* VI 5077. 5818. 10258. 10408. 12361. 21771. 23328. Ce sont des col-
lèges funéraires. III 11255 : titulu[s mo]7iument[i po]situs ex co[l{lata)
piecîinia)] col{l)egi fa[br{um)] doloniae) C{arnunti). Schiess, pp. 81-90.
2 III 1210. VI 6220. 9289. X 8099. Orelli, 4412. Voyez supra, p. 273,
n. 7.
8 XIV 3564.
7 Patrons : III 1493. 2026. 2087. V 1012 VI 29700. 29702 {piscatores et
urinatores). IX 1459. 3842. 5657. X 5968. XI 4580. 5054. XIV 2408.
Au patronus coloniae : V 56. A un décurion : V 8289. VI 4421. A un
curator : VI 10332. A des bienfaiteurs : XI 418. 3210. XIV 2408. La
formule est toujours : (ex) aère conlato. Ailleurs on lit : pecunia sua (VI
1639. 1872. XI 3938. Etc.), qui peut avoir le même sens.
( 465 )
la dédicace ; la formule est alors : Honore contentus, ou Honore
accepto impensam remisit <.
3° Produit des amendes '^. Il y avait d'abord les amendes
fixées par les statuts ou par un décret spécial. Grâce à l'auto-
nomie accordée par la loi aux collèges, ceux-ci avaient le droit
de frapper d'une amende les sociétaires ou les dignitaires qui
commettaient une infraction au règlement, qui ne remplis-
saient pas leurs devoirs de membres ou de fonctionnaires. Ce
pouvoir disciplinaire était exercé par l'assemblée générale ou
délégué au président, et il ne nous semble pas douteux que les
collèges autorisés aient eu une action en justice pour faire
exécuter leurs décisions 3. Les amendes de ce genre sont
souvent très élevées, mais elles étaient rarement appliquées. Si
le président et les curateurs du collège d'Esculape et d'Hygie
ne veillent pas à ce que les donations de Marcellina et de
Zenon soient consacrées au but prescrit, ils sont punis d'une
amende de 20,000 sesterces 4 Chez les ivoiriers et ébénistes,
les curateurs sont caissiers et semblent responsables de la
rentrée des cotisations : en cas de retard, ils doivent payer
eux-mêmes un pour cent par mois des sommes arriérées i>.
Dans le collège de Diane et d'Antinous, les commissaires
envoyés pour enterrer un confrère décédé à 20 milles de Lanu-
vium, reçoivent la prime funéraire, mais doivent payer une
amende du quadruple, s'ils ont manqué à leur mission ^> ; le
magister cenarum qui se soustrait à cette charge est frappé
* Voyez supra, p. -433.
2 Cfr. DiRKSEN, II, pp. 417-118. 131. Maiiquardt, St-V., II, pp. 288-
291. Org. jinanc, pp. 365-367. Schiess, pp. 84-85. Liebenam, pp. 221-224.
■' GiERKE, III, p. 85, n. 183, fin. Liebenam, p. 221.
^ VI 10234, 1. 19-22.
^ Lignes 23 et 24 de la lex (voyez supra, p. 371, n. 2) : [aut si quid
tardius] inferrent centisim(is) datis a curât orib{us) sing{ulis) [mensibus]...
Suppléments de Mommsen. Le sens est douteux.
«XIV 2112, 1, 1. 26-29 : si qui in eis fraudis causa inventum fuerit,
eis rnulta esto qîiadruplum. Cfr. XII 1911 : quud fraudem ejusdem fune-
neris fec{erant).
Tome L. 30
( 466 )
d'une amende de 30 sesterces, sans être dispensé de ses obliga-
tions ^ ; nous avons parlé des amendes de 4, 12 et 20 sesterces
dont les statuts menacent ceux qui troublent les banquets soit
en changeant de place, soit en injuriant un confrère, soit en
outrageant le président 2. Le règlement de la cima Jouis de
Simitthus 3 prévoit les amendes suivantes : celui qui injurie ou
maltraite le flamine, paye 2 ou 3 deniers ; le questeur qui déso-
béit au président, doit une amphore de vin ; le président qui
s'absente d'une assemblée, doit un congé (?) de vin ; le questeur
qui néglige d'annoncer la date d'une assemblée, paye un denier ;
s'il oublie d'annoncer le décès d'un membre, il paye une
amende dont le montant est effacé; si le questeur s'approprie
le vin fourni par un membre, il restituera le double; si un
membre a fait un don au collège et que le questeur ne l'an-
nonce pas, celui-ci devra donner le double ^', enfin, ceux
qui n'assistent pas aux funérailles d'un parent sont punis
d'une amende de 2, 4 ou 5 deniers s. Dans le conlegium aqiiae
de Rome, le magister, avant sa sortie de charge, doit prêter le
serment qu'il a bien administré le collège : à défaut de le faire
ou de faire valoir à temps ses excuses, il encourt des amendes
de oO à 500 deniers. Les statuts de ce collège fixent toute une
série d'amendes sur lesquelles nous n'insistons pas, parce que
le texte est trop peu sûr et que ce collège est d'une nature spé-
ciale. Rappelons seulement que le magister a le droit d'infliger
une amende d'un as aux membres, chaque fois qu'il le juge
bon; c'était un moyen de coercition qui appartenait aussi
aux magistrats publics 6.
1 XIV 2112, 1. 8-10. Voyez supra, p. 420.
■^ Ibid., Il, 1. 25-28. Voyez supra, p. 327. Le même collège tirait profit
de la déchéance dont le règlement frappe ceux qui sont en retard de
payement et les suicidés; leur prime était conservée par la caisse. I,
1. 22. Il, 1. 0-6.
5 VIII 14683. Voyez sicpra, p. 278, n.4.
^ Ces deux dispositions sont énoncées d'une façon obscure (C, 1. 1-4).
s Voyez supra, p. 278.
^ VI 10298. Voyez supra, p. 396. Voyez les auteurs cités supra, p. 371,
( 4(37 )
A Truentum, les cultores Hercidis s'engagent par décret et par
serment à fêter l'anniversaire de Ti. Claudius Himerus; s'ils
omettent de le faire une année, ils verseront 200 sesterces
dans la caisse des cultores imayimnn Caesaris nostri. Il nous
semble que ce n'est pas à proprement parler une amende; il
est probable qu'ils avaient reçu un capital rapportant 200 ses-
terces par an, pour célébrer cet anniversaire : s'ils négligent
d'exécuter les volontés du donateur, les intérêts seront remis
à un autre collège, qui devra sans doute se charger de la fête
cette année-là i.
Les amendes testamentaires étaient celles que le testateur
imposait à l'héritier, au cas où celui-ci n'exécuterait pas ses
dernières volontés. Un soldat lègue 4,000 sesterces au collège
des fabri navales Pisani, à charge de lui rendre des hon-
neurs funèbres, et il stipule que si cette condition n'est pas
observée, ce collège devra payer 4,000 sesterces aux [abri
tUjnuarii Pisani, qui devront assumer les charges imposées -.
On voit qu'il s'agit ici d'un transfert de la fondation, sous
forme d'amende.
Les amendes sépulcrales sont comminées, dans les inscrip-
tions des tombeaux, contre les profanateurs. Les membres des
collèges font inscrire sur leurs tombeaux, préparés de leur
vivant ou élevés d'après leur testament, des amendes au profit
de leur corporation; des étrangers favorisent également des
collèges de leur ville. A Salone, un décurion du colleginm
fabriim et centonarioriim veut que celui qui oserait ouvrir son
n, 1, et en outre : Huschke, Multa und Sacramentum, pp. 289-30ti.
VoiGT, XII tabulae, II, p. 750. Rudorff et Mommsen, Zeitschr. /'. g. R. ^y.,
XV, pp. 227. 34o. GiERKE, /. /., Liebenam, pp. 222-223.
« Ephem., VIII 210 = Notizie, 1885, p. 167. — III 8676 : p(ecunia)
nVidtatitia?).
' XI 1436 : acceptis pro poena a fabri^ nav. HS IIII m. n. — Quand
Lollianus lègue son funeraticium aux mensores, il stipule qu'ils célébre-
ront trois fêtes en son honneur; sinon ils payeront le double au fisc de
h.statioannonae : VI 9626.
( 468 )
sarcophage, paye 2o deniers à sa décurie. Un affranchi impérial
construit une sépulture de famille et il prend des dispositions
diverses pour que le monument reste la propriété de ses des-
cendants; il décide notamment qu'en cas d'extinction de sa
famille, le tombeau passera au collège des cuisiniers impé-
riaux. Quiconque enfreindra cette lex monumenti payera
50,000 sesterces à ce même collège. Nous avons plusieurs
autres exemples d'amendes sépulcrales à payer à des corpo-
rations, qui avaient donc la sepulchri violati actio ^, Par ces
amendes, souvent élevées, on espérait effrayer ceux qui
auraient l'idée de profaner la tombe '^; elles devaient être
rarement payées et ne comptaient guère dans le budget des
collèges.
4° Vente de places dans le monument funèbre. Les sociétés
funéraires et les collèges qui avaient un monument trop grand
pour eux-mêmes vendaient souvent des places (locus), des
niches {ollae, columbaria) à des étrangers, au profit de la caisse
commune. Un affranchi avait acheté, pour lui et pour sa
famille, dix columbaria contenant quarante ollae dans le
monument des portefaix appelés jmlangarii : il avait acquis
par là-même la jouissance de l'aire attenant à ce monument et
le droit d'y faire les sacrifices funèbres 3.
5« Hérédité ab intestat d'un affranchi. Depuis que Marc
Aurèle avait permis aux collèges autorisés d'affranchir leurs
esclaves, ils purent revendiquer l'héritage de leurs affranchis
morts sans héritiers et ab intestat^. Les naviculaires, depuis
1 DiG., 47, 12. m 2107. 9450. 9672. VI 7458 = 8750. 9485. XI 130.
C. I. Gr., 3639'"'^. Ann. d. Inst., 1868, p. 142 ou Dumont, Inscr. et
mon. figures de la Thrace, 1876, n. 65 : ôwasi x^ iioXst ÔTjvàpta cp' xat xf,
TÉyvT^ Tô5v XîÔoupywv OT]vdpia cp', à Périnthe. Athen. Mitth., VI, 1882,
p. 125, n. 8. Notizie, 1890, p. 172. En faveur de VAeclaesia Saloniica),
eu 358 (III 2654).
2 50,000 sesterces : VI 7458 = 8750. 9485.
3 VI 7803. Socii : VI 6150. 7459. 10331. 14413. X 1746 : locum émit
ab ordine Baidanorum. Voyez supra, p. 288, n. 4, et Schiess, p. 85.
^ DiG., 40, 3, 1. 2 (Ulpien). Voyez infra, III^ partie, chap. V.
( 469 )
354, et les fabricenses, depuis 438, purent même hériter de
leurs confrères morts dans les mêmes conditions i.
6« Libéralités une J'ois faites, sans revenu annuel. Parmi les
recettes extraordinaires, il faut ranger enfin les dons que rece-
vaient les collèges et qui ne leur procuraient pas un revenu
annuel. Ces dons étaient très fréquents et l'épigraphie nous en
fournit de nombreux exemples. Les donateurs étaient ceux que
nous avons vus plus haut constituer aux collèges des rentes
perpétuelles : c'étaient avant tout les patrons et les magistrats
des collèges qui voulaient prouver leur attachement, leur bien-
veillance ou leur reconnaissance '-î. Mais ils n'étaient pas seuls :
tous les membres s'intéressaient naturellement à la prospérité
de la corporation et rien ne prouve mieux l'union et la frater-
nité qui régnaient parmi eux, que ces lil)éralités nombreuses
que les plus riches faisaient à leur collège; ils l'aidaient de leur
vivant et ils ne l'oubliaient pas dans leur testament : c'était un
dernier témoignage d'amitié donné à leurs confrères '^ Ceux
qui avaient reçu l'immunité ou un honneur quelconque
tenaient surtout à montrer leur gratitude *. Dans leur ville, les
collèges rencontraient de nombreuses sympathies, comme
nous le verrons dans la troisième partie, et ces sympathies se
traduisaient également par des dons souvent importants : des
citoyens opulents, de riches matrones, les magistrats de la
cité favorisaient les collèges communaux de largesses de toutes
sortes s.
Ces libéralités une fois faites étaient de nature fort diverse;
elles correspondaient sans doute aux principaux besoins des
1 CoD. Jisï. VI, 62, i. 5. i\ov. Val. III, 48, l. Nov. Theod., VI, 3.
Voyez infra, L i.
- Voyez supra : patronus, magister, curator, quaestor, decurio.
'" Voyez nos Indices : Libéralités une fois faites.
^ Immunes : VI 327. XIV 119. — III 1494 : oh duplaw sportulam colla-
t(am) sibi.
^ Voyez nos Indices, ibid. Femmes : V 4428 : primae bene merenti.
X7. '
(470)
collèges et peuvent nous éclairer sur le but que ceux-ci se
proposaient. C'est pourquoi nous allons les passer en revue.
Nous avons dit que les rentes perpétuelles établies en faveur
des collèges servaient presque toujours à la célébration d'un
banquet sacré. A ces banquets, qui revenaient régulièrement,
il faut ajouter les festins ou les spectacles donnés occasion-
nellement, et les occasions étaient nombreuses. Le patron à
qui le collège élevait une statue offrait, au jour de la dédicace,
un banquet ou distribuait des sportules ^ ; quand sa ville natale
l'honorait d'une statue, il donnait un banquet de dédicace à
toute la population, mais le collège qui l'avait choisi pour
patron y obtenait une place privilégiée-. La dédicace de
Valbum était aussi fêtée par un repas, dont le patron faisait les
frais 3. Le quinquennalis nouvellement élu distribuait des
sportules pour reconnaître cet honneur, et les autres magistrats
des collèges agissent parfois de même ^K Les corporations éri-
geaient des statues à leurs dignitaires, comme à leurs patrons :
c'était pour les dignitaires une occasion de régaler leurs con-
frères ^. Quand on inaugurait le local, le temple, le monument
commun, quand on y avait fait des réparations, le président
ou le curateur qui avait dirigé les travaux, offrait parfois un
banquet ou des sportules^. Les dignitaires ou les simples
membres qui donnaient au collège la statue d'un empereur,
d'un dieu ou un autre objet, qui devait être dédié, faisaient
souvent des distributions ob dedicationem ^. Les bienfaiteurs à
qui le collège élève une statue répondaient à cette attention
* Voyez supra, p. 434.
- (iRUT., 484, 9 {fabri, cent., dendr., navicularii de Pisaurum).
5 X 3699 (dendr. à Cumes). Orelli-Henzen, 7415 (cultores).
^ Voyez svpra, p. 397.
3 Magistri : V 4449. XII 3306. Praefectus : XI 4404. Sacerdos : VI
9044 a el b. XI 4395 : curât or Ivsus jitvenum.
tî Magister : V 7904. Curatores : VI 253. Decurio : VI 4421. Autres :
VI 349- IX 5177.
■ Rector : VI 85. Immunes : XIV 119. Autres : V 4294. VI 630. 740.
Allmer, m. d. L., II, 175.
( 471 )
par un banquet ^. Les riches citoyens, quand ils obtenaient les
honneurs municipaux ou quand le peuple leur votait une
statue -, invitaient les collèges aux distributions faites à la
population et leur donnaient souvent une part spéciale •'^. C'est
ainsi que la liste des repas de corps s'allongeait : il est évident
que les collèges cherchaient à provoquer ces sortes de libé-
ralités.
Une seconde catégorie, non moins importante, comprend
les largesses relatives à la scfwla. Les collèges comptaient
souvent sur leurs patrons et leurs dignitaires pour se procurer
un local ou un temple, ou du moins pour le décorer et pour
l'entretenir. Beaucoup d'inscriptions provenant de ces édifices
nous disent qu'ils ont été bâtis ou rebâtis par un patron, par
un président, par un curateur ou par une personne qui s'in-
téressait à la corporation K Parfois le bienfaiteur fait cadeau
^ XI 403. 4391. XIV 160.
* V 790o. XI 6038 (h l'occasion de statues élevées par la civitas Cemc-
nelensis et par le popidus Urvinas). IX 25o3 : ob lionorem (}uinquen{nali-
tatis). Allmer, /. /., II, 144 : oh honorem perpetui pontifiicatus). Il y
avait d'autres occasions : V 7920. IX 4691. X 1881. 5796. XI 4389. 6017.
6070. 6071. XII 697. XIV 2793. 4014 a et b. Ephem., VII 720. Grut., 484, 9.
5 Autre occasion : une mère dédie une statue à son fils défunt et offre
un banquet aux centenaires — outre une rente perpétuelle pour sacri-
fices funèbres \\ 7906).
* Construction : VI 1936 : viatoribiis III vir(um) et IIII viriiim) scholam
cum statîds et imaginibus ornamentisque omnibus sua impensa fecit.
III 1347, templum ex suo fecerunt collegio u[t]riclariorum. XIV 283,
scholam sumptu suo cannophoris fecit. IX 1683, quod is a solo canopum
propriis sumptibus fecerit (collegio Martensium). A des collèges funé-
raires : aedes, III 8673. X 3904 (?). 6679 (?).; aedicula, VI 338. 642;
schola, V 8801. VI 10344. Aux scribes : curator scholam de suo fecit,
VI 103. Cfr. X 830. Loca, III 4038. Sacrarium dei Liberi, à une spira,
VI 461. Phretrium, aux Augustales de Caere, XI 3614. — Reconstruc-
tion : VI 103, schola des scribes. 233. aedes? de cultores. 692, temple
du coll. magnum. VII 39, [aedesl'] deae Sulis Minervae. X 3810, schola
co[llegi Saluta]ris Fortunae. II 4083, temple de c[ultoresZ) : exhedra{m)
cum fronte templi Minervae Aug. — de suo ref{ecit).
(472)
aux associés d'un temple qu'il avait construit dans une de ses
propriétés i, ou bien il leur donne une somme suffisante pour
acheter ou bâtir un local ^i. 11 y en a qui fournissent l'emplace-
ment ou une aire qui avoisine la schola 3 ; d'autres agrandissent
la maison corporative ^. Nous avons vu que les ivoiriers et
ébénistes n'avaient reçu que le droit de se réunir dans un local
compris dans un tétrastyle 3. Quand le local était acquis, il
restait à l'orner, et ce n'était pas l'aftaire d'un jour. Ici encore
la générosité des patrons, des dignitaires et des bienfaiteurs
était mise à contribution. Une femme donne aux [abri d'Ostra
6,000 sesterces, que son grand-père avait promis pour embellir
leur schola, ad exornandam scholam 6. A Apulum, un patron
nouvellement choisi donne également 6,000 sesterces aux fabii
pour ajouter un frontispice à leur local, ad exstructionem
aelomae'. A Padoue, un patron orne la façade du temple des
centonaires de têtes de bélier et de bustes d'Hermès en marbre,
et il ajoute 2,000 sesterces pour l'entretien de Tédifice ^. Il en
< VI 10231 : schola et ager. 10234 : aedicida et autres édifices (voyez
supra, p. 213). Cfr. VI 10350 : cur{atores) loc{um) colUegio) et Nym(pliis)
d[e^d{icarunt\
* III 11042 : scola coll[egii] empta ex pecunia [qiiam vijvos dederat ille,
à Brigetio. D'autres contribuent aux frais : VI 647. IX 5177 (collèges
funéraires).
5 VI 839 : locum schole ipse acquesivit (sodales Serveuses ; voyez supra,
p. 214). VII 11 : donante areani [Clein]ente, pour le temple du coll.
fabror., à Regni. IX 5568 : solo dato ab T. Furio, pour la schola des
fabri tignuarii, à Tolentinum. Collèges funéraires : VI 455 (soliinn.
647 (area). 10232 (aria).
J XIV 2634 : ob honorem oblatum sibi praefectur{ae) a collegio dendro-
forum scholae eorum, loco inpetrato ab ordine, partem auxit totamque
omne opère pecunia sua consummavit , à Tusculum.
5 Voyez supra, pp. 218, n. 5 et 221, n. 4 : jus scholae tetrastijli. —
Cfr. X 5904 : et locum — precario, [in quo cultores] vesce[rentur'\. Voyez
supra, p. 215, n. 1.
6 XI 6191.
' III 1212. Cfr. m 1174. Voyez supra, p. 227, n. 1.
** V 2864. Voyez supra, l. l. A Sarmizegetusa, le fils d'un patron,
( 473 )
est qui prennent soin des dépendances du local ; ils font cadeau
de jardins, d'une aire ou place qui servira de cour a la schola
ou au temple, ils font paver cette place; ils construisent un
portique avec des bancs, précédé d'un trottoir et surmonté
d'une terrasse; les inscriptions rappellent que l'un a fait cadeau
d'un avant-toit ou marquise, d'un avant-portique ; qu'un autre
a doimé une cuisine, un portique avec une salle pour les pré-
paratifs des fêtes. Puis viennent ceux qui ont songé à l'ameu-
blement et à la décoration intérieure : celui-ci a donné les
portes, des sièges ou bancs, une table, un sofa ou lit de table,
une horloge ; celui-là a fait couvrir les murs de marbre ou les
a fait décorer de peintures ^ ; à Cimiez, le magister des dendro-
phores a fait paver la schola et son pronaos -. Enfin on men-
tionne les autels et les statues de divinités et d'empereurs,
donnés pour orner le local ou le temple, qui étaient le
sanctuaire de la divinité protectrice choisie par le collège >">.
honoré par le collège des [abri {ob honorem diipli), fait les frais d'un
proporticuSy d'une ciilina et d'un frontalis. Ce dernier mot ne se trouve
pas ailleurs (III 7960). — A Rome, les curateurs des scribes placent des
corbeaux {niutulos) à leurs frais (VI 103). — Sur les dons de différents
membres pour construire le temple des cidtores Silvani à Philippes,
voyez supra, p. 228.
' Voyez supra, pp. 227-230. Extérieur : VI 461, aream et ortuium.
VI 541, ariam silic{e) straverunt. V 8801, solarium. VI 9422, pavimenlum,
ariae straturam. III 4792 et IX 1618, porticum cum apparatorio. VI o42,
porticus. III 7960, picturam porticus et accubitum, — proportiami et
culinam et frontalem (aux fabri de Sarmizegetusa). Bull, corn., 1882,
p. l.')0, n. 543, mensam aeream et protectum. Vl 67o, port{icnm), crepi-
(linem (trottoir devant le portique ou parapet au-dessus?). Intérieur :
X 6679, ostia. VI 542, cum cultu et pictura. VII 39 : repingi. VI 103,
marmoribus ornaverunt, — sedes aeneas et cetera ornamenta (schola des
scribes). VI 3877% mainnoribitis]. VI 461, marmo[r]aruîi[t]. Bull, com.,
l. L, mensam aeream. II 4316, horilegiitm (aux fabri de Tarraco).
2 V 7904 : uram et pavimentum scholae et pronavi de suo fecit.
* Voyez supra, pp. 228-229 et infra : Honneurs rendus. Ajoutons les
jastus (X 6679) et Valbum (VI 647), sans doute aussi placés dans le
local. Cfr. III 633, titulum polivit, etc.
( 474 )
Quand nous voyons qu'une corporation reçoit des objets
mobiliers, il est évident que ces objets trouvaient place dans
le local, même si l'inscription ne le dit pas formellement.
C'est ainsi que les sodales Serrenses reçoivent des vases pour
mesurer les rations de vin et d'huile; les chaufourniers, un
vase en marbre; un coUegium Apoîlinarnim de Cumes, un vase
en airain pour conserver l'huile^. A d'autres, on donne une
balance (statera) pour peser les rations, un cratère monté sur
une base, une tablette de marbre, un buffet 2. Le collège des
geôliers impériaux reçoit un cratère en airain de Corinthe,
qui avait l'éclat de l'argent, avec une double base en marbre;
un décurion donne à ses confrères, les centonaires romains,
une statue placée sur son piédestal, avec deux candélabres
d'airain qui figurent un Cupidon tenant des corbeilles 3.
Les dons relatifs au monument funèbre et au lieu de sépul-
ture sont aussi faits très fréquemment à toutes sortes de col-
lèges par leurs patrons et leurs dignitaires; ces derniers
s'acquittaient souvent ainsi d'une obligation que l'usage ou le
règlement leur imposait. Les corporations suivantes reçoivent
ainsi un monument ou un lieu de sépulture : les anularii, la
dixième décurie des (abri tignuarii, à Rome ; les dendrophores,
à Pola ; les fabri, àVenafrum ; les jwme?i/fln/, à Forum Sempro-
nii; les lanarii carmmaloreSyh.^v\\Q\\\xïn\ la o-uuipiwa-t.ç twv
2u7U7rt.vàXo)v, à Smyrne^-. Les cuisiniers du palais impérial auront
un monument en cas d'extinction de la famille de celui qui l'a
construit s. A Altinum, L. Ogius Patroclus donne aux cento-
* VI 839. 9224. IX 6079, 1. X 3864. Bull, ardu du Comité hist., 1890,
p. 429. Voyez supra, p. 230, n. 1 et 2.
2 VI 832, statera. 612, crateram cum sua hasi. II 1131 et XIV 326,
tabulam marmoream. VI 103, tabella aenea (dans la schola des scribes >.
V 3312, abacum. Sur ces tabulae, encastrées dans le mur, on pouvait
graver des inscriptions, Valbum par exemple.
^ VI 327. 9254. Voyez supra, p. 230, n. 1.
* I 1107 = VI 9144. VI 9405. V 81. X 4855. XI 1034. 6136. C I. Gr ,
3304. Voyez supra, pp. 283-285.
s VI 7458. 8750.
( 475 )
naires des jardins avec un édifice, continus à une sépulture
qui appartenait peut-être déjà ù ce collège •. A liome, les appa-
riteurs édiliciens avaient un monument commun, auquel
D. Caesilius Singenus, l'un d'eux sans doute, ajoute une
chambre funéraire et une salle à ciel ouvert avec ses orne-
ments '-J. Les collèges funéraires et domestiques qui reçoivent
un monument ou un lieu de sépulture, sont encore plus nom-
breux 3. Les gens moins riches ou moins généreux se conten-
taient de donner une place oii l'on brûlait les morts (ustrina),
d'entourer le petit domaine d'un mur, d'y creuser un puits, de
surmonter celui-ci d'une margelle, d'offrir un bassin pour les
ablutions, de construire un pavillon meublé de tables, une
maison pour le gardien, un triclinium pour les banquets
funèbres, de revêtir de stuc l'intérieur du monument, la voûte
des escaliers par lesquels on y descend, la salle à manger; de
faire peindre ou décorer les murs ; ils fournissaient une porte
avec la clef, des tablettes de marbre pour les inscriptions pla-
cées au-dessous des niches, le pavé ou des carreaux de
mosaïque, et ainsi de suite 4. Les petites bourses, comme les
« V 2176.
2 VI 1946. 1947. Voyez supra, pp. 283, n. 2. 289, n. 2.
5 Lochs, loca, VI lÔ237. 10242. IX 26o4. 2673. 48o0. Bull, corn., I88f),
n. 1607-1610. Peut-être : III 4038. Locus sepiilturae, III 11485. V 3331.
X 5386. — Locus sepulchri, VI 9268. — Locus monumenti sive ager est,
VI 10245. Bull.com., L /., n. 1612; cfr. 1607-1611. — Monumentum,
VI 10346. — Monumentum [sive sepul]chnim, VI 7006. — Sans indica-
tion : VI 8659. 9320. 9321. X 8182. — Chrétiens : locum sepulturae cor-
porum, VI 10411. — Servitudes actives, VI 10237. 10411.
* Tous ces dons sont faits à des collèges funéraires. Locum ustrinae,
VI 10346. X 557. — Maceries, VI 4305. 10333. - Puleus, puteal,
VI 5532. 10314. 10325. — [Labrum cum ful]mentis, VI 5532. Labrum,
B. c, 1884, p. 94, n. 1002. — Tricla cum columnis et mensis, VI 4305.
— Porticum cum mensis, B. c, l. l. — Vigilu{m) locum, VI 10346. —
Taberna, VI 10245. — Solarium, VI 25527. — Triclinium expolitum,
VI 4710. 4711. 10315. Trichiliniu{m) — opère tectorio perpolit, VI 10332.
— Hypalethrum], VI 5532. — Pavimentum, V 5531. VI 4419. 8738.
Vermiculmn, pavimentum spicam, VI 25527. — Ostium et clavim.
( 476 )
grandes, trouvaient dans la décoration du monument funèbre
un moyen d'exercer sans cesse leur générosité.
Enfin, nous avons vu que les statues et les autels du dieu
protecteur et des autres divinités, qui faisaient l'ornement du
local ou du temple, étaient souvent un cadeau reçu du patron,
des dignitaires, des membres et de personnes qui portaient
intérêt au collège. Les inscriptions qui rappellent ces dons sont
particulièrement nombreuses, mais il faut éviter la confusion;
on trouve, en effet, beaucoup de statues et d'autels élevés à un
dieu par des personnes qui sont patrons, dignitaires ou
membres d'un collège, sans qu'il soit dit que ces statues sont
données à la corporation. Dans ce cas, il se peut qu'il s'agisse
d'un cadeau fait aux associés, mais cela n'est pas sûr; nous
laisserons de côté toutes celles-là, et nous mentionnerons seu-
lement celles qui ont été certainement offertes à un collège.
Cette liste viendra compléter ce que nous avons dit du caractère
religieux des corporations professionnelles. Ces statues et ces
autels étaient généralement placés dans le temple, dans la
schola ou dans une propriété consacrée au dieu i. Dans la
schola des dendrophores d'Ostie, on a retrouvé les bases d'un
grand nombre de statues données aux dendrophores et aux
cannophores; c'étaient les curateurs des scribes qui avaient
orné de statues la scfiola de cette corporation au forum ; à
Rome, les viatores triumvinim et quatuorvirum avaient reçu un
local orné de statues et d'images; à Lambèse, nous voyons des
VI 4710; ostium, VI 5532. — Titulos marmoreos, VI 4709. — Tessellas
ce, scrinia, etc., VI 4709. — Parietem — pingendum, VI 21388. —
Parietes et camaras scalariorum opère tectorio expolitum, B. c, 1886,
p. 368, n. 1397. — Subscalaria, V 5531. Scalaria, VI 5532. — Tectoria,
VI 10332. — Sedilia drcumitum refecerunt, VI 25527.
' Cfr. X 444 : locus, sive ea pars ag[r]i sUvaequ[e] est, — quae cippis
positis circa Silvanum determinata est, Silvano cedet (dans les fonds de
terres donnés à un collège de Silvain). XI 3810, à Veii : schola eo[Uegi
Saluta]ris Fortimae — statui[s] ex[ornavit]. XIV 266 : vidi locum dedica-
tum imaginibus sacris. VI 671 : hortis Abonianis aram marmorea{)n)
cum suo sibi sigillo Siluani. VI 10350 : loc{um) coll{egid) et Nymiphis) d. d.
( 477 )
sous-officiers placer des autels et des statues dans la scola de
leur collège * . Voici maintenant une liste de statues ou d'autels
donnés à des collèges professionnels -, sans indication de la
place où ils se trouvaient :
Apollon, aux médecins et professeurs, à Aventicum ilnscr.
llelv., 164), et SiVixjuvenes Oeciani, à Rome (VI 26).
Attis, aux dendrophores de Kusicade (VIll 7956).
Deux Castor es, aux mesureurs de blé, à Home (VI 85).
Diane, au collegium aiirariarum, à Alburnus Major (III 7822y,
aux lotores d'Aricia (XIV 2156), à la juventus c[mtalis) Sum-
(elocennensis) (Brambach, 1629).
Fides, aux fahri tiguuarii de Rome (VI 148 = XIV 5).
Fortuna, aux mêmes (VI 3678).
Genius collegiiy aux dendrophores de Padoue (V 2794), de
Rusicade (VIII 7956); les [vete]ram et i)er[egr]mi de Vicus
Aurelii, et les pêcheurs et plongeurs du Tibre reçoivent un
Genius (Haug, Kônigreich Wurtemberg, p. 169. Notizie, dans
les Atti des Lincei, 1888, p. 279 = VI 29702).
Hercule, aux nautes de Mantoue ou d'Arilica (Pais, 669);
'HpaxXïi; à un collège (de teinturiers?) de JVIylasa (C. I. Gr.,
3912 a).
Jupiter, Junon, Neptune, Mars, au collège des negotiantes
d'Aquincum (III 10430); Jupiter, aux juvenes Laurenses de
Nescania 3..
Liber Augiustus), aux foulons de Mactaris (Bull, du Comité
arch. des trav. hist., 1893, p. 124).
Minerve, aux fabri de Barcino (II 4498), de Corfinium (IX
3148), aux foulons romains (VI 268), à des lotores à Aquilée
(V 801), aux stuppatores d'Oslie (XIV 44).
» A Ostie, voyez supra, pp. 528-229. Scribae, VI 103. Viatores, VI 1936.
A Lambèse, VIII 2601-2603. 2636. Collège d'Esculape et d'Hygie, VI 10234,
1. 3. Collège de Silvain, à Philippi, III 633 (voyez supra, p. 228).
* Nous y ajoutons les juvenes. Pour les autres collèges, voyez nos
Indices.
3 II 2008, Jovem Pantheum Aug. cum aede et tetrastylo.
( 478 )
Nem[ausus] Aîig{ustus)j aux centonaires et aux dendrophores
de Nîmes (XII oOSS^'^^).
Neptune, aux nautes, à Ettlingen (Brambach, 1678).
Silvain, aux dendrophores romains (VI 641-642), comme à
ceux d'Ostie (XIV o3), aux fabri d'Aquincum (III 3o80), aux
monetarii, à Rome (VI 675).
Victoria, aux foulons romains (VI 267), aux peregrini, à
Marbacb (Brambach, 1602).
Volkanus AugusluSy aux jumeiitarii de Brixia (V 4294).
0£w ayicj), aux couteliers de Sidon {Rev. arch., 3® série,
XVII, 1891, p. 107, en Tan 47 avant notre ère).
Une multitude d'autres statues sont érigées par les patrons,
les dignitaires et les membres en leur nom personnel, en
accomplissement d'un vœu, pour leur propre salut, pour le
salut d'un parent ou de l'empereur ou sans motif indiqué i ;
une grande partie d'entre elles furent sans doute données aux
corporations : c'étaient des cadeaux destinés à reconnaître
l'honneur reçu du collège ou bien à lui prouver sa bienveil-
lance et son attachement.
En résumé, toutes ces libéralités permettaient aux corpora-
tions professionnelles, comme aux autres, de se procurer un
local et un monument communs, de les meubler, de les orner,
de les entretenir et de s'y réunir fréquemment en de fraternels
banquets; c'était là leur destination principale, leur emploi
ordinaire. Comme les bienfaiteurs ne pouvaient se rendre
plus agréables aux corporations qu'en les aidant à atteindre
le but qu'elles se proposaient, nous pouvons conclure de ce
qui précède que les collèges romains, professionnels et autres,
étaient avant tout des associations amicales, religieuses et
funéraires; le culte, les funérailles, la fraternité : voilà ce qui
leur donnait naissance.
* On en trouvera la liste dans nos Indices.
( 479
Budget des dépenses.
En examinant les dépenses des collèges^, nous arriverons
aux mêmes conclusions. Elles concernaient principalement,
autant du moins que nous le savons, la maison corporative, le
lieu de sépulture, le culte et les repas de corps, les funérailles
et les honneurs funèbres, le salaire des chefs, les récompenses
et les honneurs décernés.
1" La scfiola ou le temple. Dès leur naissance, tous les collèges
cherchaient à se procurer un local pour leurs réunions pro-
fanes et religieuses. Beaucoup y parvenaient à peu de frais.
Souvent ils recevaient en pleine propriété une schola ou un
temple, ou bien ils obtenaient la permission de se réunir dans
un local ou temple public; certains collèges funéraires avaient
la jouissance d'un édifice placé dans un domaine privé et
les collèges domestiques s'assemblaient dans la maison de
leur maître 2.
Parfois l'emplacement seul leur était donné, soit par un
particulier 3, soit par l'Etat ou par la ville; l'autorité compé-
tente accordait volontiers aux collèges utiles à la cité ou à
l'État une partie du domaine public, un terrain, les portiques
d'une basilique, d'une place publique ou d'un théâtre : il
leur était facile de s'y aménager un local, et c'est ainsi qu'à
Ostie les collèges occupaient presque tous les portiques autour
du forum 4-.
' SCHIESS, pp. 80-86. LiEBENAM, pp. 254-257.
2 Voyez supra, pp. 210-215. V 7906 : in templo ex more epularentur
(centonaires de Cemenelum ; est-ce le temple du collège?). X 5904
(Voyez supra, p. 472, n. 5. Sur Dion Cassius, 60, 6, 6, voyez supra,
p. 121, n. 4.
5 Voyez supra, p. 472, n. 3.
* VI 814, ex auctontate imp. Caesaris T. Vespasiani Aug., in loco qui
designatus erat per Flavium Sabinum, operum publicorum curatore.m),
templum extriixserunt negotiatores frumentari. Ce temple était-il leur
( 480 )
Beaucoup de corporations étaient assez riches pour se bâtir
elles-mêmes une maison commune et elles avaient soin de le
dire dans l'inscription de l'édifice : Pro salute Aug(îistorum) —
coll[egium) centonarior[um) schoîam mm aetoma pecunia sua
fecit, dedicante L. Pomp{onio ?) Libérale co[n)s[ulan) Dac{iarum
trium) 1. Outre les centenaires d'Apulum, sont dans ce cas les
collèges suivants :
Dendrophori Ostienses (XIV 45, scola; supra, p. 217).
[Cor]piis fabrîi[ml à Ostie (XIV 424, schola).
Fabri tignuarii, à Tolentinum (IX oo68, schola).
Corpus fullonum qui m aedificium contulerunt, à Mactaris
{BulL arch. du Comité des trav . hist., 1893, p. 124).
Collèges militaires de Lambèse (VIll 2o52-255o, schola 2).
Nautae Aruranci Aramici, à Aventicum (Mommsen, Inscr.
Conf. Helv., 182, sc/io/a).
Negotiatores c(îvitatis) M{attiacorum) {KorrespbL, 1890, n« 98,
en 212, schola).
Les suivants ont reconstruit leur local à leurs frais :
Speculatores legionum 1 et II, à Aquincum (III 3o24, scola
refecta, en 228).
V{iatores) q{uaestorii), à Rome (VI 816, scholam ref{ecerunt),
en 238) 3.
local? — XIV 2634, loco impetrato ab ordine (dendr. de Tusculum; voyez
supra, p. 475, n. 4). XI 3614, loco accepto a repiihlica, sous le portique
d'une basilique (Augtistales de Caere). VI 9404, colleg . fabriun soliarium
baxiarium —, qui consistunt in scola sub theatro Augiitsti) Pompeian{6).
VI 102ol% sup templo divi Claudi. Cfr. VI 455. VII 11. Sur les collèges
d'Ostie et d'autres villes, qui avaient leur local près d'un forum, voyez
supra, pp. 217-219.
» m 1174, à Apulum, entre 198 et 211.
' VIII 2554 : Pro salute Augg., optiones scholam suam — ex largissi-
mis stipend[ii]s et liber alitatib{us), quae in eos conferunt, feceimnt. Cfr.
2552. 2353. D'autres disent : ex arca sua fecerunt (2551), de sua fecerunt
(2555).
3 Collèges divers : III 7807, familiaricum Prosmoni ex sua fecerunt,
à Apulum. XIV 123, [cuUores Ser]apis scholam — sua pecunia [fece]runt,
à Ostie.
(481 )
Pour réunir les fonds nécessaires, on s'imposait des cotisa-
tions extraordinaires ^ ; parfois chacun offrait spontanément,
soit une somme d'argent, soit des matériaux de construction,
soit des objets d'ornement, tels que des tableaux et des sta-
tues 2. Quand les ressources étaient faibles, on y mettait le
temps et l'on achevait l'édifice quand on pouvait 3. Nous
venons de voir que l'ameublement et la décoration étaient
surtout l'affaire des chefs et des patrons.
â'' Monument funéraire ou lieu de sépulture. Les sociétés funé-
raires («ocu) avaient pour but unique la construction et l'entretien
d'un colombaire; chaque associé versait une contribution et
recevait une part proportionnelle à sa contribution dans le
monument construit sous la direction d'un curateur 4.
Quand les collèges industriels et les collèges funéraires ont
un monument ou un lieu de sépulture, c'est souvent de la
générosité d'un patron, d'un chef, d'un bienfaiteur quelconque
qu'ils le tiennent ^. Pourtant beaucoup se les procurent à leurs
frais, et une inscription viennoise est ainsi conçue : Scaenici
Asiaticiani et qui in eodem corpore sunt vivi sibi fecerunt 6. Le
plus souvent, l'inscription se borne à indiquer le collège au-
quel appartient la sépulture '', et l'on peut admettre qu'il l'a
acquise lui-même; en effet, quand il s'agit d'un don, on avait
l'habitude de rappeler le nom du bienfaiteur.
1 Voyez supra, p. -464, n. 3.
2 III 633. Voyez supra, p. 228.
5 VI 349 : templum corpor[atis conferentibus a]uctum et consumma-
t{uni). — Les formules ordinaires sont : pecunia sua, impendio suo, e.v
suo, desiio fecerunt, restituerunt ; voyez les inscriptions citées page -480,
n. 2 et 3. — Autres édifices : XI 1552, den[drophori] porticus - usibus
suis [pecunia'] sua fec{erunt), à Faesulae.
.* Voyez surtout : VI 10326. 10332. 10338. 11034. 11035, et supra,
p. 258. ScHiESS, pp. 88 et 90.
s Voyez supra, p. 474.
6 XII 1929. De même à Pisae : Viivi) f{ecerunt) cultores Herculis
Somnialis decuria I, XI 1449; à Aginnum : Juvenes a fano Jovù sibi et
suis, Orelli, 4097.
' Voyez supra, pp. 281-290.
Tome L. 31
( 482 )
On voit des collèges domestiques acheter un monument i et
plus souvent réunir des cotisations pour le bâtir; ils faisaient
sans doute comme les sociétés funéraires -, mais il est à sup-
poser que dans les collèges où tous étaient égaux, chaque
membre versait la même somme et avait le même droit que
ses confrères. De quelle façon s'y prenaient les collèges pro-
fessionnels? Nous n'avons absolument aucun renseignement
pour répondre à cette question. Pour l'ornement et l'entretien,
on se reposait en grande partie sur les bienfaiteurs ordinaires.
3'' Le culte. Les dépenses étaient occasionnées par les sacri-
fices, les banquets et distributions, les jeux et les cortèges,
enfin les dédicaces aux dieux. Les sacrifices et les festins
étaient presque tous organisés au moyen des revenus d'une
fondation ou grâce à une libéralité occasionnelle 3. Pour les
sacrifices, il ne fallait du reste que de l'encens et du vin ''*; les
dendrophores et les cannophores seuls avaient besoin de
victimes pour leurs tauroboles et leurs crioboles s. Quant aux
repas, il pouvait arriver sans doute que les sportules reçues
ou la rente ne suffisaient pas pour les organiser et que la caisse
devait suppléer ce qui manquait. Les accessoires, pain, vin,
sardines, etc., étaient parfois à charge des curateurs ou des
magistri ceiiarum^; le vin fourni dans certains cas par les
membres y était peut-être employé aussi '^. Les collèges riches
célébraient leurs banquets aux frais de la caisse : c'est ce que
faisaient probablement les ivoiriers et ébénistes romains. A
* VI 23328 : qui ad id emendiun contiderunt .
2 Voyez supra, p. 464, n. 4. La formule est : qui in hoc monumentum
contiderunt (VI 5818). Au n» VI 5077, on indique le montant de la coti-
sation de chacun. XIV 36o9 : Hic Eutactus conlegium primus constituit
et ex pecunia publica hoc monumentum aedificauit. VI 10237 : ex pecunia
publica adornaverunt.
5 Voyez supra, pp. 436462.
* Ture et vino, XIV 2112, II, 1. 29-30. Voyez supra, p. 231.
» Voyez supra, p. 246. Ajoutez : XIV 40.
« \oyez supra, pp. 420-421.
' Voyez supra, p. 450, n. 2.
( 483 )
chaque fête, dit leur règlement, les curateurs doivent donner
à chacun des sportules de 5 ou 3 deniers, c'est-à-dire un repas
de cette valeur, aux frais de la caisse commune, et ils doivent
fournir eux-mêmes la boisson chaude et d'autres accessoires i.
Partout ailleurs, quand on parle de banquets, les frais sont
prévus par des libéralités. Il est à remarquer que la part des
absents ne restait pas dans la caisse : dans le collège d'Escu-
lape etd'Hygie, on la vendait et on distribuait le produit de la
vente; chez les ivoiriers et ébénistes romains, les sommes
destinées aux sportules et non retirées étaient distribuées par
les curateurs à parts égales, à la fin de l'année 2. Schiess a
calculé que dans le collège d'Esculape et d'Hygie, qui avait
soixante membres, un banquet pouvait coûter 715 à 760 ses-
terces 3. Le collège de Lanuvium ne reçoit pour la fête de
' Mitth. d. L, 1890, p. 287, 1. 12 : [Item ... natali] Juli Aeliani spor-
tulae ex arca darentiir (denarii très) et a cur{atoribus) [... pas\swe yraes-
tari placuit us qui ad tetrastylum epiilati fuerint. Cfr. \. S : ex arca
n[ostra); 1. 14 et 16 : ex arca. Voyez supra, pp. 420-421. On peut sup-
poser, malgré les mots ex arca nostra, et malgré le silence de la lex
incomplète,' que la caisse des ivoiriers avait reçu une rente perpétuelle
d'Aelianus C'était peut-être aussi avec les revenus d'une fondation, anté-
rieure à sa lex, que le collège de Lanuvium fêtait les natales de ses
bienfaiteurs.
« VI 10234, 1. 16-17 (voyez supra, p. 401, n. Ij. Mitth. d. /., 1890,
p. 289, 1. 22-23. Gradenwitz, /. /., pp. 139 et 141. Voici le texte restitué
par MoMMSEN : [Singulis annis k... quod sîipere]sset in arca corporis,
curatores dividerent acquis [portionibus].
3 ScHiESS, pp. 104-103. VI 10234. Il y a soixante membres ; en prenant
les chiffres indiqués (voyez supra, pp. 400-401) et en comptant cinq
immunes, on arrive à 150 deniers ou 600 sesterces; il faut 216 setiers de
vin, de 15 à 2o sesterces, soit 67 et demi à 112 sesterces et demi et
62 pains à 3 as, soit 46 sesterces et demi, au total 715 à 760 sesterces. Il y
a quatre banquets qui coûteraient environ 3,000 sesterces. En outre, il
y a deux distributions de sportules; pour chacune il fallait 7o deniers ou
300 sesterces, donc pour les deux, 600 sesterces. La dépense annuelle
serait donc d'à peu près 3,600 serterces. Les 60,000 sesterces reçus de
Marcellina et de Zenon rapportaient précisément celte somme, s'ils sont
placés à 6 %. Cfr. V 5272, où 30,000 sesterces rapportent 500 deniers ou
2,000 sesterces.
( 484 )
chacune de ses deux divinités tutélaires que 400 sesterces, mais
les magistri cenarum fournissaient le pain, le vin et des fruits '.
L'une des tables de cire trouvées dans les mines d'or de
Verespatak semble contenir la note des frais d'un banquet.
Elle monte à 169 deniers environ, ou 676 sesterces; en voici
le détail : cinq agneaux, 18 deniers; un cochon de lait,
5 deniers; pain blanc, 2 ou 3 deniers; de l'encens, 2 ou
3 deniers; du vin pur, 2 deniers; 194 hémines de vin ordi-
naire, 97 deniers; de la salade, 1 denier; du vinaigre, un
demi-denier; du sel et de Tail, un demi-denier; le reste est
fragmentaire '-.
Une inscription de Pouzzoles est fort intéressante. Elle émane
(les marchands tyriens établis dans cette ville ; ils demandent
un subside à leur métropole parce que, réduits à un petit
nombre, ils ne sont plus en état de supporter les frais qu'ils
doivent faire pour le culte de leurs dieux nationaux, pour
orner leurs statio aux fêtes impériales et pour le sacrifice d'un
bœuf pendant les jeux (à'ywv) 3. Dans un collège inconnu de
Rome, qui semble présidé par des sacerdotes et administré par
des décurions, les prêtres versent dans la caisse une somme
honoraire destinée, ce semble, à des certamina ou jeux 4.
Au culte il faut rapporter aussi les frais occasionnés par la
construction d'un temple destiné, sinon toujours, du moins
souvent, à servir de local au collège, ensuite les dépenses
faites pour élever un autel, pour consacrer une statue à une
divinité. Les collèges suivants bâtissent un temple à leurs
frais :
Dendrofoh, avec des religiosi, à Sitifis (VIII 8457, templum).
* XIV 2112, 1, 1. 1-3. ScHiESS, p. 105.
2 m, p. 933. LiEBENAM, p. 261. Suivant Zangemeister (dans le
Covpiis, l, /.), le banquet était destiné à la célébration des Laralia au
l^'' mai.
5 Voyez supra, p. 451, n. 5.
^ VI 9044 : [in] sac[e7'dotio in a]rcaTn publicam o[b] cert[amina ? c]on-
tulit (sestertium) X {milia).
( 485 )
[Colle]gium fabror{um) et qui in eo [siint], ^ Regni (VII il,
templum à Neptune et à Minerve).
[Collefiiimi] fabrum, à Cetium (III 5659, aedem).
Negotiatores frumentari, h Rome (VI 814, templum).
Ne(}otiator{es artis) vestiariaeet lintiariae, i^ Aug. Vindelicum
(III 5800, aedem).
Corpus pausariorum et argentariorum, à Rome (VI 348, Isidi
et Osiri mansionem aedificavimus) ^.
Les collèges qui dédient un autel ou une statue à un dieu
disent souvent qu'ils le font à leurs frais ou, ce qui revient au
même, en accomplissement d'un vœu '^. Voici ces collèges :
A Adrastia, par les utriculaires, à 3Iikhaza (III 944).
A Esculape, par les lapîda[ri] structo[res] de Saintes 3 ; des
horrearii à Rome {B. c, 1885, pp. 51-53) y associent Salus
Aug(usta).
A Dea Diana et à Silvain, par les ursari, à Turicum ^.
A Fors Fortuna, par les lanii et les coronarii, à Rome iVI
167-169).
A Fortuna Primigenia, par les cisiarieiy les coques, les fabres,
les mercatores pequarii, les [eb]orari (?) et d'autres collèges, à
Préneste, sous la république (XIV 2874-2883).
A Fortuna, par les ojficinatores monetae, à Rome (VI 43);
les fabri ferrari Divionenses associent la Fortuna Redux à
* En 236, les hastiferi civitatis Mattiacorum (milice municipale vouée
au culte de Bellone, à Cassel) rétablissent à leurs frais un mons Vaticanus
consacré à Dea Virlus Bellona. Brambach, 1336. Mommsen, Hermès, 1887,
XXII, pp. 557 et suiv. Korresphl, 1889, VIII, pp. 19-28. o0-52.
Autres collèges : VI 349 {templum par des corporati). 6-47 [templum
par un sodalicium dii Silvani Pollentis). XIV 246 (templum par des cor-
porati, à Ostie). III 633 iaedes par des cultores Silvani, à Philippes).
Collèges inconnus : VI 425 (aedem). 813. 815 {templum).
2 Pecunia sua, publiée, voto ou v(oto) s(oluto) l{ibentcs) m{erito) ou
d(onum) d(ederunt) Kibentes) m(erito), etc.
'» Allmer, Revue cpigr., II, p. 419, n. 765, lit : E[sculapio] Augu\std].
HiRSCHFELD nous écrit qu'on peut conjecturer : [S]e[i^^ro] Augu[sto].
* Mommsen, Ber. der anticpiar. Geselt. in Zurich, 1868, p. 65.
( 486 )
Jupiter dans un vœu pour le retour de leur patron (Orelli,
4083).
Au Génie de leurs patrons, par les centonaires, les fabri et
les pastophores d'Industria (V 7468-7470).
A Hercule, par des lapidari, à Cemenelum (V 7869); des
ouvriers de la monnaie, à Rome (VI 298, cfr. 44); des joveni
ijîivenes), à Milan (V 5742).
A Jupiter, Junon et Minerve, par des cuisiniers falisques
établis en Sardaigne, sous la république (XI 3078).
A Jupiter et au Génie de Tibère, parles laniones de Périgueux
{Bull, épigr., 1, 1881, p. 52); à Jupiter, par les nautes de Paris
(Ibid., I, pp. 49 et 111); par les vétérans d'Aquilée, d'Ateste
et de Lambèse (V 784. 2475. VIII 2618).
Aux Lares Augustales et à Mercure, par les piscatores et
propolae de Carthagène (II 5929); aux Lares Augusli, par les
struc[tores], à Rome (VI 444).
A Mars et Minerva Aug[ustï), par le collegium armatura{rum)
leg(ioms) Il adj{utricis), à Aquincum (III 10435); à Mars et à la
Victoire, par les Marti(s) cultores, à Aug. Vindelicum (III 5790).
A la Magna Mater, par les dendrophores de Sitifis et de
Mactaris (VIII 8457. Aîin. épigr., 1892, n*^ 18).
A Mercure, par les reliarii de Pouzzoles (X 1588); par les
marchands de vin de Lyon (Allmer, II 174); à Mercure et à
Maia, par des négociants de Délos ('Epii-ato-Tai, III 7218).
A Minerve, par les argentiers et orfèvres de Smyrne(C. I. Gr.,
3154), les cornicines, à Rome (VI 524); les foulons de Spolète
(1 1406 = XI 4771); unescola tubicinum, à Brigetio (III 10997);
les aeneatores coh{ortis) I Seqmanorum] et Raur{acorum) eqiui-
tatae), à Steinbach (Brambach, 1738).
A Neptune, par les pêcheurs, à Pedo (V 7850).
Aux Nymphes et à tous les dieux, par les TiX^j-^r^ç d'Athènes,
au IV^ siècle avant notre ère (C. I. Gr., I 455).
A Silvain, par les [abri tigmiarii de Feurs (Orelli-Henzen,
5216); les sectores materiarum d'Aquilée (V 815); les venatores
Bannie{n)s[es) d'Amblogenna (VII 830); les ouvriers des mines
(487 )
d'or, à Alburnus Major (III 7827); les ursari de Turicum (/. /.);
la familia gladiatoria de Commode (Vi 632. 3713) ^.
A" Funérailles et honneurs funèbres. A chaque décès, le
collège paie une prime funéraire {fimeraticium) -, déterminée
par les statuts. Le règlement du collège de Diane et d'Antinous
la fixait à 300 sesterces 3. Les mesureurs de blé romains
payaient une prime qui rapportait au moins par an 42 Vg^^'i^'ers,
soit, à 10 Vo, 42o deniers ou 1,700 sesterces 4. Les cornicines de
Lambèse accordaient oOO deniers et les opliones G, 000 sesterces
ou l,oOO deniers î^. Nous voyons un collège de la maison des
Statua dépenser pour un affranchi 490 deniers et pour un
esclave 22o deniers : il semble que la somme n'était pas fixée
par les statuts, puisqu'on la met chaque fois dans l'inscription
du colombaire 6. Ailleurs la somme est effacée ou n'était pas
indiquée '^. D'autres collèges supportent seulement une partie
des frais : les centonaires d'Aquincum contribuent pour
300 deniers; les fabri de Sarmizegetusa, pour 400 deniers;
les sodales Claudiani, pour 200 sesterces 8. j\ous avons vu
que la prime servait parfois aussi à l'érection du monument
funèbre 9. A Crémone, une femme dit qu'elle a consacré aux
funérailles et au monument de son mari une somme de
300 deniers lO.
Le collège de Lanuvium donnait une indemnité de voyage
* Pour les collèges funéraires et autres, voyez nos Indices.
^ Voyez sîipra, p. 272, n. -4.
3 XIV 2112, 1, 1. 23-24. Voyez supra, p. 268, n. 2.
* VI 9626. Voyez supra, p. 274, n. 2.
^ Voyez supra, p. 310.
6 Vf6220. 6221. Voyez supra, p. 279, n. 1.
T V 1495. VI 10234,1. 7. X 445. XII 22. 732. 736. 1911, III, p. 924.
Voyez svpra, pp. 272-275.
» II 3114. III 1504. 3583. Voyez supra, pp. 280-281. Parfois les collèges
prenaient part à des funérailles publiques (V 337) ou accoudaient des
funérailles honorifiques; voyez pp. 488-489.
9 Voyez supra, p. 280, n. 1 et 3.
*o V 4100 : 27Î funus et memoria{m) erog avit denarios trecentosy
( 488 )
(viaticum) de 20 sesterces à chacun des commissaires envoyés
pour présider aux funérailles des confrères morts à 20 milles
de cette localité ^.
La somme de SO sesterces répartie par le même collège, sous
le nom d'exequariumy entre ceux qui assistaient aux funérailles,
était déduite de la prime, et cette diminution n'occasionnait
donc pas de nouveaux frais à la caisse 2.
Le culte des morts consistait en sacrifices et en banquets;
il fallait des aliments pour les libations, de l'encens et des
fleurs de toutes sortes, que fournissait la caisse commune.
Parfois on brûlait sur la tombe ou dans le sépulcre une lampe
allumée toujours; du moins les parents d'une jeune fille qui
avait fait partie d'un collège funéraire, demandent aux con-
frères de renouveler tous les jours, aux frais de la caisse, la
lampe qui brûlait en l'honneurde ses Mânes : peut-être avaient-
ils fait une donation à cet effet 3.
Nous n'avons pas à parler ici des cérémonies célébrées
annuellement, à jour fixe, en mémoire de défunts étrangers :
il y était pourvu par des fondations. Mais il n'est pas rare
qu'un collège élève un monument funèbre ou une statue à un
patron défunt, à des particuliers qui n'ont pas été membres
de ce collège, notamment à des femmes, qui lui ont rendu
des services pendant leur vie, ordinairement par leurs largesses
sans doute, ou qui lui ont légué leur fortune en mourant 4.
On les voit encore acheter ou donner un emplacement pour
leur tombe; à Parentium, les fabri prennent part aux funé-
* Voyez supra, p. 271.
* Voyez supra, p. 278. Sur III 633 : {denarios singulos) tnortis causa
sui remisit, voyez supra, pp. 272, n. 4 et 278, n. 3.
' II 2102 : Propter quam rogamus parentes pientissimi collegas sn[cc]e-
dentes deincepsqiue) successores, sic, ne quis vestrum talem dobrem
experiscatur, ut huiius Manib(us) lucerna quotidiana ex ratione publik a)
vestraponi [placeat], à Ossigi.
* m loOl. 1210. V 4122. 4391. 4415. 4433. 4491. XI 6164. XII 2824. Etc.
Voyez nos Indices • Honneurs décernés par les collèges.
( 489 )
railles publiques décernées à un décurion de 18 ans : ils
ont eu l'honneur, disent-ils, d'envoyer de l'encens i.
o" Avantages matériels accordés à certains membres. C'était
une cause de dépenses ou de pertes pour la caisse commune.
Tels étaient d'abord les émoluments que certains collèges don-
naient à leurs chefs et à leurs serviteurs sous la forme d'une
part plus grande dans les sportules.
Les statuts du collège de Lanuvium attribuent double part
au (juinquennaliSy une part et demie aux anciens quinquennales
qui ont bien géré leurs fonctions, au scribe et au viateur-. Chez
les dendrophores lyonnais, on trouve un quaestor duplicariiis,
mais cet honneur lui avait été accordé extraordinairement, du
consentement de tous, après qu'il eut rempli toutes les fonctions
dans son collège 3. Une corporation funéraire a un quinqucnna-
lis triplicarius et une autre a des ma(jislri sesquiplicarii : celui-
là reçoit une part triple et ceux-ci, une part et demie '»•. De
simples membres obtiennent parfois des avantages semblables ;
parmi les trois cent vingt /;/e/^di du corpus fabrum navulium,
au Portus, figure Julius Carpus, qui est sesquiplic[arius) ^. A
Sarmizegetusa, des membres font des cadeaux au collegium
fabrum parce qu'on leur a accordé une sportule double ^.
Quelques inscriptions parlent de commoda. Sur la proposi-
tion des présidents, les honorati et les décurions des fu[b{ri)
* V 3-iM. 5272. 5287. - A Parentium : V 337.
« XIV 21 12, II, 1. 19-22. Voyez supra, pp. 402 et 416.
3 Allmer, 3/. f/. L., U\69.
* VI 10295. 10302. Cfr. VI 9044, où un prêtre nouvellement élu et Julia
Egloge, honorée du décurionat gratuit, donnent un cenalicuni dvplum aux
sacerdotes, aux honorati et aux décurions d'un collège funéraire ou
religieux; c'est à leurs frais.
s XIV 256. C'est un personnage assez important, si c'est le même
M. Julius Carpus qui est patron des stiippatores d'Ostie (XIV 44).
® III 1494 : ob duplam sportidam collat{am) sibi. III 7960 : ob honorem
ditpli. X 3441 : duplic{arius). Cet usage existait aussi chez les Sévirs
Augustaux : Aug. duplicariiis, à Puteoli (X 1790 1871. 1873. 1875. 1882.
1886). ScHMiDT. Deseviris Aug., p. 105.
( 490 )
tig{7iua7ii)] romains doublent les conimoda d'un honoratus qui
témoigne sa reconnaissance par le don d'une statue de la For-
tune; il semble qu'il s agit ici des sportules i. Le règlement
des ivoiriers et ébénistes prescrit que les curateurs reçoivent
chaque année exactement tous leurs commocla ; c'est probable-
ment une indemnité, destinée à compenser leur charge d'or-
donnateurs des festins 2. Enfin, les statuts de Lanuvium déci-
dent qu'on déduira de la prime funéraire les commocla et Yexe-
quaniim ; Mommsen conjecture qu'il s'agit d'une somme payée
au président et au scribe parce qu'ils tiennent la caisse 3.
Il faut également parler ici des immunes ^K L'immunité,
qui n'est définie nulle part, doit être considérée comme une
exemption des cotisations mensuelles ^. Cette exemption était
accordée de droit, dans certains collèges, aux fonctionnaires
et aux serviteurs; elle était temporaire, c'est-à-dire limitée à la
durée des fonctions : c'est ce que dit expressément le règle-
ment de Lanuvium, et s'il ne fait pas cette restriction pour le
scribe et le viateur, c'est que ces oftices étaient donnés à vie 6.
Le redo)' immunis itenim des mesureurs de blé était pour la
seconde fois recteur et par là même exempté de la cotisation;
dans un collège funéraire, un personnage qui avait été trois
fois décurion et trois fois questeur devient quinquemialis immu-
nis tîiplicarius, c'est-à-dire président jouissant, en vertu de
* VI 3678. Voyez svpra, p. 379, n. 4.
2 L. 19-21 : Item [curatores quaterni omnibus annis fi,erent [ex al\bo
perordinem. Item placere [qui curatores facti erunt? u]t suiannicom-
vioda cuncta acciperent. Gradenwitz, /. /., p. 14L
5 XIV 2112, I, 1. 33. Les commissaires envoyés par le collège rece-
vront la prime, deductis commodis et exequario. Mommsen, De coll.,
p. 104.
^ ScHiESS, pp. 68-69. LiEBENAM, pp. 486. 200-201.
^ LiEBENAM, p. 186, la regarde comme une exemption des autres
charges imposées aux membres.
c XIV 2112, II, 1. 18 : a sigillis ejus temporis, quo quinqiiennalis erit,
immunis esse debebit; 1. 19 : scribae et viatori a sigillis vacantibtis.
Voyez supra, pp. 402 et 416.
( 491 )
cette fonction, de l'immunité et d'une triple part dans les spor-
tules''. Ailleurs ce ne sont pas les fonctions qui entraînent
l'immunité; elle est accordée par surcroît, comme un honneur
nouveau, ou pour récompenser des services rendus -. Souvent
aussi l'exemption est accordée, soit temporairement, soit à per-
pétuité, à d'anciens dignitaires ^y ou si la fonction entraîne
l'immunité, on la rend quelquefois perpétuelle après la sortie
de charge ^. Des membres bien méritants recevaient aussi fré-
quemment une exemption pour une ou plusieurs années ^ ou
pour toujours ^. Nous trouvons deux affranchis qui jouissent
de rimmunité dès leur admission dans un collegium fabriim;
ce sont peut-être des membres d'honneur '^. Le titre d'immunis
était du reste une distinction autant qu'un avantage : sur
1 VI 85. 1030-2.
2 VI 6^2 : imm[unes colllegi idem [ciii'atlores (dendr. romains).
XII 3637 : mag{ister), ohlata sibi a collibertis immunitate — [né] qua parte
utilitaiibus eoriim [(jr]avis videretur, immunitatem Yré\misit. XIV 367 :
quinq. et immunis Lariim Aug., à Ostie. VI 950 : allectores cuUores
Silvani, idem immunies).
5 VI 541 : immunes [p]er[pe]tiii a (depuis?) magisterio, coll. inconnu;
cfr. supra, p. 396, n. 4. VI 4019 {imm. lion.) et 4222 {immunis et liono-
ratus), dans le monument de Livie.
* VI 10332 : curatori sociorum secundo — o[b] officium et majestatem
ejus in perpetuom immunitas data est.
^ Imm. a{nnorum)IIIly dans le corpus custodiariorum , VI 327.
^ Immunis perpetuus, dans le coll. tibicinum et fidicinum romanorum
qui s. p. p. s., en 102, VI 2191; chez des Cultores Numinis Victorie,
VIII 4483. Cfr. B. c, 1877, p. 6, n. 1.
Immunis seul a le même sens : XIV 119 (cannophores d'Ostie).
X 3764 (dendr. de Suessula ; il a rempli toutes les charges municipales
et il est patron des Cultor{es) J(ovis) 0. M.). XI 1355 b (dendr. de Luna).
XIV 107 (dendr. d'Ostie). XIV 256 (fabri navales d'Ostie). VI 5183"^ coll.
tabernaclariorum). XII 1815 (utriculaires de Vienna). B. c, 1885, pp. 51-53
{horrearii). Dans des collèges funéraires et autres : III 4150. VI 647.
8826. 10231. 10289. 10321-10323. 10363; dans le monument de Marcella :
VI 4712; dans celui de Livie, il y en a beaucoup, dont deux femmes
(VI 4087. 4265j; B. c, 1880, n. 166, p. 16.
' III 4048 : immunes recepti in colleg. fabrum. Voyez supra, p. 357.
( 492 )
Valbiim et dans les inscriptions, les immwies occupent une
place à part, après les présidents ^ ; ils reçoivent parfois une
meilleure partdans les distributions de sportules'^. En revanche,
ils remercient le collège par des largesses et lui offrent des sta-
tues de dieux ou d'empereurs 3.
6° Honneurs décernés par les collèges. L'immunité et une part
extraord inaire dans les sportules étaient regardées plutôt comme
une distinction que comme une source de profits. Les collèges
tenaient en réserve d'autres honneurs qu'ils décernaient tant
à des étrangers qu'à leurs chefs et à leurs membres.
C'étaient tout d'abord les décrets honoriliques . Sous la répu-
blique, tous les collèges de Rome, imitant les corps politiques,
votèrent des décrets en faveur de Cicéron menacé de l'exil, et
plus tard pour demander son rappel ^.
Les collèges accordaient aussi des titres honorifiques : tels
étaient probablement ceux de magister perpetuus, quinquennalis
perpeluus, curator perpetuus, destinés à récompenser les prési-
dents et les curateurs qui s'étaient bien acquittés de leurs fonc-
tions; ils conservaient aux titulaires les honneurs et les privi-
lèges attachés à leur ancienne charge s.
Le droit de s'asseoir sur un double fauteuil ipisellium) était
une distinction spéciale que nous voyons parfois accorder à un
patron, à un président ou à un décurion 6.
' VI 10231 : immuncs et curator et pleps universa coUegi {Silvani).
10234 (voyez la note suivante). Place spéciale dans l'album : XI 1335 b
(dendr. de Luna). B. c, 1883, pp. 31-33. VI 647. Ailleurs ils sont confon-
dus dans la plebs : XIV 236. III 4130.
* VI 10302. 10234 (la même part que les curatores, avant lesquels ils
sont toujours cités).
5 VI 8826 : ob immunitatem. XIV 107, statue de Vérus donnée aux
dendrophori Ostienses, [o\b {h)onorim immunitatatis (sic^ XIV 119, statue
de Caracalla aux cannophores. VI 2191 : h{onoris) c{ausa). Statue.
VI 4712 : Genium ... adornavit.
* Yoyez supra, pp. 178-179.
» Voyez supra, pp. 387. 412, n. 8.
» Voyez supra, pp. 390 431. III 8086 : dec{urio) primus bis'ellarius), en
même temps magist{er) coll{egi fabrum), à Raliaria.
( 493 )
Ces honneurs ne coûtaient rien aux collèges, tandis que les
statues et autres monuments qu'ils érigeaient si fréquemment
devaient parfois leur occasionner de grandes dépenses ; nous
y consacrerons un paragraphe spécial ^ .
Statues et autres honneurs décernés par les collèges.
L'érection d'une statue était le moyen le plus ordinairement
employé par les collèges pour honorer soit leurs chefs, soit
des étrangers. Ce fut une véritable « statuomanic » qui régna
sous l'Empire, dans toutes les villes romaines 2, et il vint un
temps où, suivant une parole de Cassiodore 3, le peuple muet
qui faisait l'ornement des places publiques égala presque en
nombre celui des vivants. Les villes accordaient volontiers un
emplacement aux particuliers ^ et elles-mêmes élevaient sou-
vent des statues aux empereurs, à leurs favoris, aux fonction-
naires et aux personnages influents dont elles voulaient se
concilier les bonnes grâces. Les corporations imitèrent natu
rellement les cités. Nous n'avons pas besoin de reparler ici des
statues qu'elles érigeaient si souvent à leurs patrons et à leurs
dignitaires; il y avait en outre, dans la ville ou dans l'État,
une foule d'hommes puissants ou riches qu'il était bon de se
rendre favorables, parce qu'on comptait sur leur crédit pour
obtenir des services ou sur leur générosité pour obtenir des
largesses.
Le premier de tous était l'empereur. C'était de lui et du
' Un collège contribue à la construction d'une chaussée. IX 5438.
2 Marquardt, Priv. \ p. 597. Vie privée, II, pp. 262-263. Friedlaender,
Sitt., II13, pp. 183-239. G. Boissier, Prom. arch., p. 364.
5 Cassiod., Var., VII, 15 : Has (statuas) primum Tusci in Italia inve-
nisse referuntur, quas amplexa posteritas paene parem populum urbi
dédit, quant naliira procreavit.
*■ DiG., 43, 9, 2. La formule : l[ocus) d(atus) d{ecreto) d{ecurionu7n) est
excessivement fréquente.
494 ;
Sénat que tous les collèges industriels tenaient leur autorisa-
tion; tous dépendaient plus ou moins directement de ce
maître tout-puissant, surtout à partir du jour où ils entrèrent
au service public; aussi ne perdaient-ils aucune occasion de
le flatter. Les flatteries adressées au prince ou à sa famille
revêtent des formes diverses et ne s'expriment pas toujours
par l'érection d'une statue. Les collèges employaient toutes
sortes de moyens pour témoigner leur dévouement au maître
et pour se concilier sa bienveillance. Nous réunirons ici tous
ces témoignages, parce qu'ils prouvent le loyalisme des classes
populaires et leur attachement à l'Empire ^. Sans doule, les
collèges ne faisaient que suivre l'exemple donné autour d'eux :
la flatterie publique et privée envers les princes ne connaissait
plus de bornes et sous les mauvais on faisait par crainte ce
qu'on faisait par reconnaissance sous les bons. Mais on ne
peut s'empêcher de voir aussi dans les nombreuses dédicaces
faites en l'honneur des empereurs par les corporations une
preuve de leur fidélité : le peuple était satisfait du régime
impérial. Voici un exemple curieux de l'empressement que
les collèges mettaient parfois à présenter leurs hommages aux
empereurs nouvellement investis du pouvoir. En l'an 139, à
l'avènement d'Antonin le Pieux, le collège des scabillarii de
Pouzzoles orne de la statue de ce prince le frontispice d'un
bâtiment qui lui servait peut-être de local, et l'année suivante
il y place la statue de l'impératrice Faustine; en 161, Marc
Aurèle monte sur le trône : aussitôt notre collège se hâte de
lui adresser la même flatterie 2.
Les statues impériales sont érigées soit par la corporation
elle-même, soit par ses chefs agissant en leur nom personnel
ou bien au nom de tous leurs confrères 2, soit enfin par un
de ses membres. On les élevait sur un emplacement concédé
' Voyez supra, pp. 144. 479-181 et nos Indices : Inscriptions impériales.
« X 1642. 1643. 1647. — En l'an 68, Galba devient empereur et les
cultores imagùium domus Aug{iistae) lui élèvent une statue (VI 471).
3 X 1647 : quinqtiennalis nomine sociorum scabillarior{um).
( 495 )
par la ville {locus dadis decreto decurionum), ou dans une pro-
priété (lu collège, le plus souvent dans sa schola ou dans son
temple ^; là figuraient aussi les nombreuses statues que les
collèges recevaient en cadeau. C'étaient quelquefois des sta-
tuettes ou des portraits [imagines] en métal précieux, en argent,
en métal corinthien, mélange d'or, d'argent et d'airain, ou
même en or pur 2; il y en avait de minuscules, comme ces
portraits en argent de Septime Sévère et de Caracalla dont on
a retrouvé les inscriptions dans la schola des dendrophores
d'Ostie et qui pesaient une livre 3. Ailleurs ce ne sont pas des
statues, mais des autels consacrés à l'empereur comme à un
dieu ou élevés « pour son salut » ou « en l'honneur de la
maison divine », à la « divinité de la maison auguste » ^.
Quant aux raisons qui ont guidé les collèges, le plus souvent
les inscriptions ne mentionnent aucun motif spécial, et les
confrères ont pour seul but de donner au prince une preuve
de leur respect. Ils se déclarent dévoués à la divinité et à
la majesté impériales, devotl numini majestatiqiie ejus ^; ils
honorent « le meilleur des princes », le « maître très indul-
gent » 6. Au II« et au III® siècle apparaissent les formules
hyperboliques et les longs éloges des victoires impériales ' :
celui qu'on honore, c'est le prince qui étend les limites du
monde et qui enrichit ses concitoyens (Trajan); c'est le bien-
faiteur de l'univers (Hadrien) ; c'est le maître de la terre et de
' Voyez supra, pp. 227-229.
2 VI 8686 : imago Corinthea Trajani, sur une colonnette. VI 543 :
Trajani imagines argentea{s) parastaticas. VI 1936 : statuae et imaginei^.
VIII 2oo4. 2ooû : statuae imagines domus divinae. VIII 2386 : imagines
sacras atireas. IX 3887 : imagines et Lares. VI 266 : vidi locum dedicatum
imaginibus sacris ; ici, ce sont des images de divinités.
3 XIV 3^. 116. 117. 119. Ils avaient été donnés aux cannophores. —
VI 3756, à Faustine, ex arg{enti) p{ondo) I.
* X 1238. VI 236. 541. 930. 1038. Brambach, 1410. Etc.
3 III 11189. VI 1065. 1096. 1101. 1117. 1118. XIV 131. Brambach, 1551.
« VI 956. 1052. 1065. XII 1797. XIV 105.
' VI 1080.
( 496 )
la nier, le grand et invincible empereur, surpassant tous les
princes par son courage et par son bonheur (Caracalla); c'est
le restaurateur de la liberté publique, le défenseur de Rome,
le sauveur de tous (Constantin) K Ce sont là des formules
banales et que tout le monde employait; les collèges ne font
que suivre le courant. Quelques-uns pourtant ont des motifs
particuliers. Les centonaires de Séville remercient Antonin
le Pieux de l'autorisation accordée; les victimaires employés
aux sacrifices publics proclament que la générosité d'Hadrien
a rétabli leurs finances menacées; les [abri tignuarii d'Ostie
ont été secourus par la providence et la libéralité d'un prince
très indulgent, L. Yerus; les négociants de vases d'argent
de Rome appellent Caracalla « leur maître très indulgent et
leur sauveur » ; les mancipes et les jwictores jiimeiitarii de
plusieurs chaussées italiennes ont été « sauvés grâce à la
divine providence » du même prince -.
Un monument unique parmi ceux que bâtirent les collèges,
c'est l'arc de triomphe construit sur le marché aux bœufs par
les argentiers et les marchands de bestiaux : ils le dédièrent à
Septime Sévère, à sa femme Julia Domna, à ses tils Caracalla
et Géta, et à Fulvia Plaulilla, femme de Caracalla, comme
preuve de leur dévouement pour la divinité impériale 3. Les
chaufourniers romains, qui ne pouvaient élever un édifice
si grandiose, voulaient pourtant manifester, eux aussi, leur
loyalisme : ils gravèrent sur un cippe dont la destination nous
est inconnue, ces simples mots : « Si Auguste est sauf, nous
sommes heureux 4. »
Les collèges avaient d'autres moyens pour rendre hommage
à l'empereur et à sa famille. Ils érigent des autels « pour le
salut » du prince, pour sa « perpétuelle conservation », pour
» VI 958. XIV 131. C. I. Gr., 3485. Aiin. cpigr., 1891, n. 26 = Journ.
ofhell. stnd., XI, 1890, p. 340, n. 8.
2 II 1167. — VI 971. - XIV 105. — VI 1065. — Bull, corn., 1884, p. 8.
3 VI 1035, en 204. Bull. d. /., 1867, p. 208.
* VI 9223. Comparez : VI 632 {infra, p. 505, n. 2).
( 497 )
le salut de la maison divine ou de la maison auguste. Ils
adressent des vœux aux dieux en faveur de la famille impé-
riale et, en accomplissement de ces vœux, ils élèvent des
statues, des autels et des temples aux dieux ^. Sur les sanc-
tuaires qu'ils construisent, sur la scfiola qu'ils inaugurent, sur
la base d'une statue qu'ils élèvent eux-mêmes à un dieu ou
qu'ils reçoivent, en tête de leurs statuts et de leur alburriy
nous trouvons inscrits les mêmes vœux pour le salut de
l'empereur, de la maison auguste, de la maison divine 2.
Quand l'empereur est parti pour une expédition, on forme
des vœux pour son retour et pour ses victoires. Après la
délivrance de l'impératrice, on consacre un autel à Junon
Lucine 3.
Il faut remarquer que le but et l'occasion de la dédicace d'une
statue ou d'un autel à une divinité n'est pas toujours le vœu
qu'on y grave pour l'empereur et pour sa famille; très souvent,
c'est avant tout la divinité qu'on a voulu honorer et l'on a
saisi cette occasion de rendre en même temps un hommage à
l'empereur, de former un vœu pour sa conservation. Bref, à la
dédicace faite à un dieu, on associe occasionnellement le
prince. A mesure que les habitudes de tïatterie augmentèrent,
on s'accoutuma à ne plus dédier aucun monument sans le
mettre sous la protection du prince et de sa famille ou sans
y graver un vœu pour leur salut. Les dédicaces deviennent
doubles : d'un côté, en l'honneur d'un dieu ; de l'autre, pour
le salut du prince régnant, de la « maison auguste » ou de la
« maison divine 4- ». Cette dernière appellation, qui apparaît
sous Claude et se généralise au milieu du IP siècle de notre
* Sur ces décicaces faites simplement j9?'o sainte imperatoris ou domxcs
divinae, ou bien faites à une divinité pour le salut de l'empereur et de
sa famille, voyez nos Indices; elles sont très nombreuses.
2 Exemples nombreux; vovez nos hidices et supra, p. 225, n. 2.
3 VI 360.
-* Sur le sens de ces doubles dédicaces, voyez : C. L. Viscomi,
Ann. d. L, 1868, p. 389. Mommsen, note au n" IX 3887.
Tome L. 32
[ 498 )
ère 1, était surtout fort en vogue dans les provinces rhénanes ;
elle figure sur presque toutes les dédicaces émanant des col-
lèges de la Germanie. Les doubles dédicaces se rencontrent
souvent sur les schoïae et les temples construits par les col-
lèges, sur les statues élevées par eux aux dieux -, jusque sur
la première pierre d'un édifice qu'ils bâtissent 3.
Quelques collèges donnaient des témoignages plus éclatants
de leur dévouement au prince. Les dendrophores et les
cannophores offraient des tauroboles et des cri oboles à la
Grande Mère des dieux pour le salut de l'empereur et de sa
famille, et ils érigeaient un autel en souvenir de ce sacrifice
solennel ^. D'autres célébraient annuellement le jour de la
naissance ou de l'avènement d'un prince; il est vrai qu'ils
avaient presque tous reçu à cet effet une rente perpétuelle et
qu'ils ne faisaient que se conformer aux désirs d'un bien-
faiteur s ; mais c'est à leurs frais que les ivoiriers et les
ébénistes romains fêtent l'anniversaire (25 janvier) et l'avène-
ment (11 août) d'Hadrien et que les marchands tyriens de
Pouzzoles célèbrent les fêtes impériales 6. On a remarqué aussi
que certains collèges choisissent, pour inaugurer leur local, le
jour natal d'un empereur ''.
' Sur domus divina, voyez : Mommsen, St.-R., Il-, pp. 792. 806.
E. Desjardins, Rev. de Philologie, III, 1879, pp. 33 sqq. Mowat, Bull,
épigr., 1884, p. 251. 1885, pp. 221. 308. 1886, pp. 31. 272. Beurlier, Culte
des empereurs, p. 52. Beaudouin, Culte des empereurs dans les cités de la
Narbonnaise, Grenoble, 1891, pp. 28-29. Marquardt, St.-V., II, p. 463.
Le culte, I, p. 177. Henzen, Bull. d. I., 1872, p. 105. C l. L., II 3531.
^ hiscr. Conf. Heiv., 182. VI 338. 348. VII 11. Bull, corn., 1885, p. 51.
Sur le Rhin : Brambach, 11. 692. 770. 956. 1000. 1138. 1410. 1603. 1629.
2041. Bonner Jafirb., 83, p. 251. Voyez nos Indices.
5 VI 240 et note.
* A Lyon : XIV 40. Allmer, M. d. L., I 5. 6. A Ostie : XIV 40. A
Mactaris : R. Gagnât, Bull, du Comité des trav. hist., 1891, p. 509
= Chronique d'épigr. africaiyie, 1892, p. 23. = Ann. épigr., 1892, n. 18.
5 VI 9254. 10234, 1. 9-10. X 444. XII 530. Voyez supra, p. 235.
'• Voyez supra, pp. 235 et 451, n. o.
■ VI 253.
( 499)
Aux honneurs humains venaient s'ajouter des hommages
divins ou quasi divins. On sait que le culte de l'empereur
associé à la Dea Iloma et le culte des princes qui avaient reçu
l'apothéose {divi) étaient ofticiellement organisés dans tout
l'Empire t. A Rome, les princes divinisés après leur mort
avaient seuls leurs prêtres {sodali's Aiujustales), leurs flamines et
leur culte public; dans les provinces et dans les cités, l'empe-
reur vivant, aussi bien que les divi, était honoré d'un culte oth-
ciel. Le culte impérial, dit Bouché Leclercq, « fut l'expression
Il la fois officielle et populaire du loyalisme dans l'Empire
romain : il signifiait attachement au grand corps dont le
prince était la tête, foi en la primauté de Rome et l'éternité
de son œuvre, subordination du patriotisme local au senti-
ment de solidarité que développait de jour en jour parmi le
peuple l'habitude d'obéir aux mêmes maîtres '^. » Et ce qui
prouve qu'il était l'expression du sentiment général, c'est qu'il
devint autre chose qu'un « programme de cérémonies ponc-
tuellement exécutées » par les prêtres publics, par les flamines
provinciaux et municipaux; il pénétra dans la vie des grands
et des petits, où il fut entièrement libre et volontaire. Les
particuliers et les collèges privés s'associèrent à ce culte spon-
tanément et de façons diverses 3; nous n'avons à parler que
de la part qu'y prirent les corporations professionnelles.
Celles de Rome assistaient aux cérémonies de l'apothéose ^,
mais on voit rarement les collèges professionnels honorer les
princes divinisés, comme fit le corpus salariorum, qui éleva
une statue au « divin « Constantin; les medici Taurini avaient
« Bull, de Corr. helL, 1883, Vil, p. 468, à Délos : Pwar.v 0£àv EÛapys-
ZTjv To xoivov BtqP'jticov Iloo-î'.ocovtaaTâjv sjjLTûdpwv xa- vauxXrjpiov xai
ÈYOoy^Ewv sùvoîa;; à'vExa ttjç sU '^o xoivov xal 'tjv raxpi'oa.
- Manuel des Inst. rom.^ pp. 555-556. Voyez aussi les ouvrages cités
de Beurlier et de Beaudolin.
5 E. Beurlier, Op. cit., pp. -257-263.
^ Dio Cass., 74, 4 : xal Ta £v tt, toXe-, rjaTTiaaTa (Funérailles et apo-
théose de Pertinax).
( 500 )
hérité d'un buste du « divin )> ïrajan, qu'ils avaient sans doute
placé dans leur schola ^. Les collèges semblent réserver leurs
hommages à l' « Auguste », c'est-à-dire à l'empereur vivant,
dieu présent et corporel, à qui sont dus tous les hommages,
comme dit Végèce 2. Ils jurent par son génie en même temps
qu«î par Jupiter très bon et très grand «^; le culte des images
impériales était surtout fort répandu et les collèges plaçaient
dans leur local ou leur temple l'image du prince, les images
des membres de la maison auguste ^ et les Lares Augustes,
que le premier empereur avait fait adorer avec les Lares des
carrefours, et que les collèges associaient à leurs dieux pro-
tecteurs. Nous les avons vus consacrer des autels au prince
comme à un dieu î>, à son Génie et à sa Divinité, ou bien à
la Divinité de sa maison 6. Nous avons dit aussi que souvent
ils associaient l'empereur et sa famille aux dieux dans les vœux
et dans les dédicaces des autels érigés en accomplissement de
ces vœux. Un autre usage est à signaler ici ; il était général et
il consistait à donner aux dieux tutélaires des collèges et aux
autres dieux honorés par eux le surnom d'Augustes : mensores
frumenlarii Cereris Augus{tae], à Ostie "ï. On voulait ainsi, dit
G. Boissier, « associer le nom et l'autorité de l'einpereur à la
puissance suprême des dieux, et montrer que les deux souve-
rainetés sont de même ordre et se complètent l'une par l'autre.
Ce n'est au fond qu'une flatterie qui correspond à l'apo-
théose. )) C'était pour tous une façon toute simple de témoi-
gner leur soumission à l'Empire et leur dévouement à l'empe-
< VI 1152. V 6970.
2 Veget., II, 5. G. Boissier, Reliy. rom., I, p. 73.
s Ephem., VIII 210 (coll. fun.); voyez supra, p. 376, n. 5.
* Voyez supra, p. -493, n. 2.
2 Vovez supra, \). 49o, n. 4.
e Genio ou Numini : VI 252. 253. III 3487. 4779. VII 1070. Ouelli-
HEXZEiN, 5216. Inscr. Helo., 164. Allmeu, M. d. L., I 6. Bull, épigr.,
1881, p. 52- Numini domus Augustae, VI 236. 240. 338. 541-543. B. c,
1885, pp. 51-53. XIV 45.
7 XIV 409. Vovez nos Indices.
( SOI )
rcur K Les collèges n'ont pas d'autre but, quand ils donnent
même cette épilhète à des objets qui leur appartiennent,
par exemple i^ leur local ; schola Augnsta] coUeg[u) fabror[um)
i\gnuar[iorum\ à Tolenlinum 2.
De même que dans les grandes familles romaines il s'était
formé, après la mort d'Auguste, des confréries de cullores
Aîigusti ^, on vit naître dans le peuple une foule de collèges
(|ui rendaient un culte au prince régnant ou i^ un empereur
divinisé; ils portent les titres de cultores Aiigusti, culiores
imaginum Caesaris nostri, cultores Larum et imaginum domus
Avgustae, cullores domus divinae, etc. ^ Ce sont des collèges
funéraires et même des collèges domestiques de la maison
impériale, et parmi les artisans nous ne trouvons qu'un seul
collège portant un nom semblable : les sagari l[hea]l7i Marcell{i)
cultores dormis Augiustae); ils élèvent une statue à Trajan en
104 s. Certains collèges, qui avaient déjà un autre dieututé-
laire, associent l'empereur au culte qu'ils lui rendent, suivant
l'exemple de certaines sodalités officielles : tels étaient pro-
bablement les dendrophori Augustales de Lyon et d'Amsol-
' G. BoissiER, Journal des Savants, 1887, p. 272. — Selon L. Renier,
(16 surnom indique qu'on a affaire à une divinité étrangère qui a été assi-
milée aux Lares Augusti pour la rendre romaine. Comptes rendus de
l'Acad. des Inscr., 1872, p. 410. De même : Desjardins, Géogr. de la
Gaule, III, p. 212. Jullian, Inscr. de Bord., I, p. 11. Allmer, M. d. L.,
II, p. 14. — Selon d'autres, celle épilhcle serl à mettre l'empereur sous
la protection du dieu, et c'est encore un acte de loyalisme. Preller,
Rom. Myth., II, p. 441. Maué, Vereine, p 28, n. 10, et p. 53. De Boissieu,
Inscr. de Lyon, p. 201, n. 30.
2 IX 5568. Voyez supra, p. 484, n. 5.
3 Tacit., Ajin., I. 73 : per omnes domos.
* Voyez nos Indices (coll. fun.). Les cultores Laurinienses {Augusti) de
Nola, contemporains d'Auguste (X 1238), lui rendaient certainement
un véritable culte; sur l'autel qu'ils lui élèvent sont représentés un
vase à sacrifice, une patère, un aspersoir, un prêtre conduisant une
victime à l'autel et prêt à la frapper. Peut-être n'avaient-ils pas d'autre
but que ce culte. Voyez supra, pp. 45, n. 2. 263, n. 1.
= VI 956.
( o02 )
dingen, voués à la fois au culte de Cybèle et au culte impérial <•
Pour montrer la fréquence de ces hommages divers rendus
au prince et à sa famille, nous allons dresser la liste des
empereurs personnellement honorés par les collèges; on
pourra voir quels princes furent les plus populaires et l'on
constatera que c'est à l'époque la plus prospère que ces hom-
mages se multiplient : ils sont clair-semés au commencement,
parce que les collèges sont peu nombreux, et ils redeviennent
rares vers la fin du troisième siècle, parce que les collèges
sont alors ruinés par des charges écrasantes -.
A Auguste : calcarienses, chaufourniers, à Rome 3; les cen-
tonaires romains célèbrent son dies natalis avec les revenus
d'une fondation (VI 92o4).
A Tibère : laniones, bouchers de Périgueux {Bull, épigr., 1,
4881, p. 52); un curator lusus [juvenalis]y à Tusculum (XiV
2o9â, en 32-33).
A Caligula : ratiari yoludnienses, conducteurs de radeaux,
à Vienna(XI[ 2331, en 37).
A Claude : lictores (6. c, 1882, p. 159, n. 557); cives romam
manticulari negotiatores, à lAIayence [KorrbL, 1884, p. 31, en
l'an 43) 4.
A Titus : co[ll.] suhrutor[um) cultor{um) Silvani iXl 940, autel
réparé par le curateur à ses frais) s.
* Voyez supra, pp. 39, n. 3 et 252, n. 3.
- A des empereurs incertains : VI 1080. VIII 15527 et Brambach, 1661
(à des Antonini). — III 4777. V 2475. VI 261. Orelli-Henzen, 5216. Inscr.
Helv., 164. C. I. Gr. 3480 (en l'honneur de deux Augustes). Ajoutez les
nombreuses dédicaces générales : in honorem ou pro sainte domiu^
Augustae ou divinae; voyez nos Indices.
' VI 9923 : Salvo Aug(usto); cela peut désigner aussi l'empereur
régnant. X 1238, autel à Nola par les Laurinienses cultores {Angusti)\
voyez supra, p. 501, n. 4.
*■ VI 471, des cultores imaginum domus Augustae reçoivent un signum
Lihertatis restitutae Ser{vilii) Galbae imp. Aug., de leurs cinq curateurs,
en l'an 68, aussitôt après l'avènement de Galba.
'' VI 541, autel élevé par des décurions à propos de travaux faits à leur
(S03)
Sous Vespasien, deux horrearu font une dédicace j[;?(' sainte
dominorum, en Tan 7o (VI 235).
A Trajan : sagari t[hea]tn Marcellii), en 10i(VI 9o6); à Turin,
les mexiici adtores Asclepi et Ifygiae héritent d'un buste du
dirus Trajanus (V 6970); un affranchi donne au coUeg'Aum)
faenariormn une imago corinthea Trajani Cacsaris, placée sur
une coUonnette (Vl 8686) ^ ; les marchands de Béryte établis a
Pouzzoles lui dédient une statue en 116 (X 1634) -.
A Sabine, femme de Trajan : les magistri quinquennales des
fabri tignuarii romains au nom du collège, de 104 à 108
(VI 996).
A Hadrien : collegium victimariorum , parce qu'il avait aidé ce
collège par ses libéralités (VI 971); ^uvzey^noL ).î.vojpywv, à
Anazarba, en 136 Journ. oj'hell. stud., XI, 1890, p. 240, n. 8 ;
les Hautes du Rhône, en 119 (XII 1797); cives romani cultores
Larum et imaginum Aug{usti), à Tipasa, en 128 (Ephem.,
V 813) 3. Les ivoiriers et ébénistes fêtaient chaque année le
2o janvier, jour de sa naissance, et le 1 1 août, jour de son avè-
nement (voyez supra, p. 23o).
A Matidie la Jeune, belle-sœur d'Hadrien : les centonaires
de Vicetia(V3111; cfr. 3112).
A Antonin le Pieux : les centonaires d'Hispalis, pour le
remercier d'avoir reçu Tautorisation (II 1167); les scapharii,
bateliers, de la même ville (II 1168), les boulangers de Rome,
local Icuria) : yumini domus Augustae, en 88 (Domitien). — VI 950.
à Nerva par deux allectorcs cultores Silvani, en 97. — X 4-4-4, les cul-
tores Silvani fêtent l'anniversaire de Domitien et de Domitia, avec les
revenus de terres qu'ils ont reçues (voyez supra, p. 236).
< Dédicaces à Trajan, à son Génie, ou Numini domus Augustae, par des
collèges funéraires ou par leur membres : VI 2o2 {collegio d. d.). VI 542.
543 : Imp. — Trajani imagines arg{enteas) parastaticas cum suis orna-
mentis. VI 9o8 '.cultores Larum et imaginum domus Augustae, à Trajan,
sur un epistylium, en 108. Les cultores Herculis de Truentum jurent liai-
son Génie (Ephem., VIII 210).
- Cfr. supra, pp. 451, n. 5. 484 (marchands tyriens>.
•> VI 253. 978. X 6483 (coll. fun.)
( 504 )
en 144 (VI 1002); des vétérans, à Isca (Vil 105), le collegium
Augiistal{ium) d'Aquincum (III 3487); les Galates établis i^
Napoca élèvent une statue à Jupiter Tavianus pour le salut de
ce prince (III 860) ; un tribun de la cofiors l Vardullorum, avec
ses cousecranei ou confrères d'un collège religieux, élève une
statue au Soleil pour la conservation d'Antonin, h Bremenium
(Vil 1039). Le collège des scabillarii de Pouzzoles (en 139),
les centonaires de Suasa, les dendrophores d'Ostie (en 139), les
(iomini navium Carlhaginienshim ex Africa (en 141, à Ostie)
lui érigent des statues (X 1642. XI 6162. XIV 97. 99). En 160,
un taurobole est célébré à Lyon pour le salut d'Antonin, de
ses enfants et de la colonie de Lyon ; un dendrophore y pré-
side (Allmer, m. d. L., I o) 'i.
A Faustine, femme d'Antonin le Pieux : les scabillarii de
Pouzzoles lui élèvent une statue un an après avoir rendu cet
honneur à son mari (X 1642. 1643, en 140) 2.
A Marc Aurèle, encore César : les scapharii, en 147 (II 1169);
les Galates l'associent à Antonin le Pieux dans la dédicace
rappelée plus haut.
A Marc Aurèle, empereur : corpus pistorum d'Ostie et du
Portus ;XIV 101) 3; corpus suburrariorum d'Ostie (XIV 102) 4.
Les fab?'i de Cetium , après avoir rebâti un temple, le
dédient pour le salut de Marc Aurèle (III 5659). Un président
* VIll 5523, à Hercule, pour le salut de ce prince, par des cultores
HerciUis de Thibilis. VI 10234, 1. 9-10 : le collège d'Esculape et d'Hygie
célèbre son dies natalis avec les revenus d'une donation. Année épigr,,
1893, n. 104, à Volubilis : cultores domus Aug. area{m) privatam
emptam, templum cum porticihus a solo sua pemnia fecerunt, et statuant
posuerunt, en 158.
2 VI 3756 : Divae Faustinae — imag{inem) ex arg{enti) p(ondo) I. Le
collège est inconnu (peut-être la familia gladiatoria impériale; cfr. VI
631. 632. 3713). Cette Faustine peut être aussi la femme de Marc Aurèle.
^ L'inscription est fragmentaire et peut être rapportée aussi à Faustine,
femme de ce prince.
^ Voyez supra, pp. 228-229. Cette schola leur était probablement
commune ave es dendrophores.
( 505 )
des scabillarii de Pouzzoles lui élève une statue, en liil, au
nom de son collège (X 1647). A Nîmes, des collèges reçoivent
des libéralités pour fêter son anniversaire (Xil o90o^^<^ Rev.
épigr., 11, pp. 24 et 44) K
A LuciLS Verus : les dendrophores d'Ostie reçoivent une
statue de Verus, qu'on a retrouvée dans leur schola (XIV 107);
en 166, les [codica]ri navicula[ri], et les fabri tignuarii d'Oslie
l'honorent d'une statue (XIV 105. 106 = VI 1022); il avait
secouru ces derniers par des largesses.
A Commode : ol vaùxXrjpoL toO -ogî-jt'.xo'j 'AXe;avoc£'!vou
2),
et de cultores Plutonis, à Manliana (VIII 9609).
2 VI 9428, dédicace par plusieurs hommes dont l'un est collegii fiujus
loci fullo. XIV 123, dédicace de la sclwla des [cultores Ser]apis{?), à Ostie.
^ VI 461 (autel), un sacrarium dei Liheri avec édicule, place et jardin,
donné à un collège bachique {spira) pour leur salut et leurs victoires.
VIII 4483, cultores Numinis Victoriae X 1585, thiaso Placidiauo.
( 508 )
A DES Antoxins incertains : les pêcheurs et les plongeurs du
Tibre (VI 1080), les tiguarii, à Baden Bramrach, 1661), les
dendrophores à Tugga (VIII 15527).
A Alexandre Sévère : inancipes el junctores jumentarii
vinrum Appiae Trajanaeitem Anniae, en 226 {Bull. corn. y 1884,
p. 9, n. 710); collc[gm]m juvent\id]i[s), à Oehringen (Brambach,
1551).
A Tranquillina, femme de Gordien I : décimales gei'uli, à
Home (VI 1096).
A Déce le Fils, alors César : argentarii et exceptores itemque
negotiantes vini supeniat{is) et Armin{ensis), en 251 (VI 1101).
A AuRÉLiEN : les vétérans dédient leur album à Jupiter pour
le salut de ce prince, à Lambèse (VI 2626).
A Probls : à Mactaris, les dendrofori ctsacrati utriusque sexus
offrent un criobole et un taurobole à la Mater Magna, en
acquit d'un vœu pour le salut de Probusi?) (voyez supra,
p. 498, n. 4).
A DiocLÉTiEN : les fabri tigniiarii d'Ostie, en 285 (VI 1116 =
XIV 128); les corroyeurs romains {corpus corariorum magna-
riorum solatariorum), en 287 (VI 1117).
A Maximiex : les corroyeurs romains honorent à la fois ce
prince et Dioclétien (VI 1118).
A Constantin : à Ostie, les codicari nabiculari infernates lui
élèvent une statue comme au restaurateur de la liberté, au
défenseur de Rome, à l'auteur du salut de tous, et le préfet
de l'annone en surveille l'érection (XIV 131) ; les corroyeurs
remplacèrent le nom de Dioclétien par celui de Constantin et
le nom de 3[aximien par celui de Constantin II, encore César,
sur les statues mentionnées plus haut (VI 1117. 1118. De
Rossi, Bull, d. Inst.y 1871, p. 161). Le corpus salariorum élève
une statue à Constantin après sa mort (VI 1152).
A Constant, encore César : collegiutyi fahrum Veneris, de
Salone (III 1981).
Ici s'arrête la liste; depuis Constant, on ne rencontre plus
d'hommages rendus aux empereurs.
( 509 )
Après le prince et sa famille venaient les représentants de
l'autorité avec qui les collèges avaient des rapports continuels.
C'est encore un point fort important, car il prouve le caractère
officiel des corporations, et nous aurons à y revenir dans la
troisième partie. Nous avons vu que les collèges cherchaient à
se mettre sous le patronage des hauts fonctionnaires impé-
riaux, tels que le préfet de la ville, le préfet de l'annone et
les autres employés de cette administration à Ostie et dans les
provinces, les curatores operum publiconun : c'est par les
statues qu'ils leur élevaient que nous le savons '. Nous les
voyons rendre le même honneur à ces hauts fonctionnaires
sans qu'ils les aient choisis comme patrons. Memmius Vitra-
sius Orfitus fut préfet de la ville à deux reprises vers le milieu
du [V« siècle - : les boulangers en gros qui faisaient le pain de
farine grossière (paiiis castrensis), les naviculaires, le corpus
omnium mancipum, les susceptores d'Ostie et du Portus lui
avaient élevé à Rome des statues d'airain, et les deux derniers
collèges font l'éloge de son administration 3. Le coUcgium
fabrum tignuariorum élève une statue à un curateur des travaux
publics, L. Aelius Helvius Dionysius, qui devint préfet de la
ville en l'an 301 et qui était peut-être leur patron, car ils
proclament qu'il les a souvent protégés -^^ Les marchands qui
importaient le blé et l'huile d'Afrique honorent de la même
façon un préfet de l'annone, C. Junius Flavianus s. Mention-
nons encore les statues érigées par les scapliarii de Séville à un
« XI 1625". 1673. 168-2. 1690. 1692. 1693. 1696. 1759. XII 672. Voyez
sur ces patrons, supra, pp. 440441.
2 G. GoYAU, Chronologie de L'Empù^e romain, pp. 456. 465.
3 VI 1739-1742. Les susceptores disent ; Ob ejiis temporibus difficiUimis
egregias ac salutares provisiones, siisceptorum Ostiensium sive Por-
tuensium antUjuissimum corpus ob utililatem urbis Romae recreatiun
(VI 1741); les mancipes l'honorent ob providentiain et stalum optimum
urbi Romae ab eo redditum (VI 1742).
* VI 1673 : multis in se patrociniis.
"- VI 1620.
( olO )
adjudant du préfet de l'annone en Espagne ^; par les cinq
corporations des mariniers arlésiens à un procurator Augus-
torum ad annonam provinciae Narbonensis et Liguriae^ qui est
leur patron '^; par le corpus me{n)sor[um) frum[entanorum)
Ost{iensium)y par le corpus me{n)sorum frument{ariorum) adju-
torum et accep torum Ost{iensimn), par les [abri tignuarii, les
mercatores frumentarii, les ly)Ue[arii?] de la même ville, à
différents procurateurs de l'annone résidante Ostie; le second
de ces collèges déclare que ce fonctionnaire a été très bon à
son égard 3. Les codicaires, avec cinq autres corporations de
bateliers d'Ostie, élèvent une statue à un procurator portus
utriusque, à cause de son insigne bienveillance envers eux et
de son désintéressement extraordinaire ^.
A Ariminum, une statue avait été érigée à un jurid[icus) per
Flamin[iam) et Umbri[am], par les collèges des fabri, descento-
naires et des dendrophores des villes soumises à sa juridiction,
à cause de sa modération et de la peine qu'il s'était donnée
pour prévenir une disette s.
Les statues élevées aux fonctionnaires municipaux, qui
avaient sans doute la surveillance des collèges, sont également
très fréquentes ; les corporations les décernent à des //// viri
juri dicundo, à des // viri quinquennales, à des édiles, à des
questeurs, à des décurions, à des préfets des vigiles, à des
defensores reipublicae, etc. On saisit l'occasion de leur élection
et on loue leur amour pour leur patrie, la façon dont ils gèrent
^ II 1180 : adjutori Ulpii Salurnini praef{ecti) annon{ae) ad oleum
Afrum et Hispanum recensendiim, item solamina (blé et huile) transfe-
renda, item vectiiras (indemnités pour le transport) naviciUariis exsol-
vendas, proc{uratori) Augg. ad ripam Baetis (sous Marc Aurèle et
Verus?).
'^ XII 672.
- XIV 154. 160. 161. 172. Notizie, 1888, p. TS = Ami. épigr., 1889,
n. 77. Erg a se henignissimo (XIV 154).
^ XIV 170, en 247 ou 248.
^ XI 377.
( oïl )
les affaires publiques, mais rien ne montre quelles étaient
leurs relations avec les collèges '.
Les corporations municipales avaient la conscience d'appar-
tenir à la cité et elles se sentaient unies à la grande famille
municipale par des liens de solidarité. Aussi honorent-elles
les patron de la cité, dont beaucoup portaient le titre spécial
de patrons du collège; on les honore pour leurs bienfaits, oh
mérita, à cause de la bonté, de l'affection qu'ils témoignent aux
confrères ou aux citoyens -. Les corporations n'oublient pas
les autres bienfaiteurs de la ville : ceux qui ont acheté et fait
distribuer du blé en temps de disette, qui ont aidé à construire
des bains publics, enfin tous ceux qui se sont montrés géné-
reux envers leurs concitoyens 3. Après les bienfaiteurs de la
ville viennent ceux des corporations elles-mêmes ; ce sont
souvent des femmes qu'elles honorent pour leurs bienfaits, ob
meiila, c'est-à-dire pour leurs largesses; malheureusement, la
raison n'est indiquée que par ces mots vagues ou même com-
plètement omise 4.
Les frais occasionnés par tous ces hommages sont générale-
ment supportés par la caisse commune ou par des cotisations
extraordinaires {aère collato). Parfois les intéressés imitaient
l'exemple des patrons ^ : ils acceptaient l'honneur et prenaient
sur eux la dépense, honore accepto sumptus remisit, titido
* Voyez nos Indices : Honneurs décernés par les collèges. A la femme
d'un un virj. d. : V 3137. A l'eTrap^oc; xE^vitàiv, C. I. Gr., 3858 C; voyez
supra, p. 192, n. 1.
2 Voyez nos Indices, ibid.
^ 11 4468. V 3111. VIII 12474. XI 418. XII 3165''. C. I. G., 3422, à Phi-
ladelphia : xal ttîi; Traiptôoç sv Traatv îùspYÉxTiv. 3495 : oIxtaxTjç xyj; ttoXôio;;.
3496 : avôpa cptAoTiarpiv. 3499 : xxtaxTiv x(ai) etj£pY[£]xT)v zt\^ Tcaxptooc;.
4346^*^^., à Side : xtjv cptXoTraxpiv. Formules semblables : C. I. Gr., 3504.
Bull, de corr. helL, II, 1878, p. 593, n. 1. XI, 1887, p. 100, n. 23. MouasTov
xal ^têioÔT^xT) xTJi; c'jayy. ay., 1884-1885, p. 79, n. U7r6'. Voyez nos
Indices, ibid.
* Voyez nos Indices, ibid.
^ \o\ez supra, p. 433.
( 512 )
usas. Ils y ajoutaient même un banquet de dédicace et une
somme pour l'entretien du monument ou pour la célébra-
tion de leur jour natal i. Au lieu d'être coûteuses, ces llatteries
devenaient ainsi lucratives, et l'intérêt des collèges s'accordait
avec la vanité de ceux qu'ils honoraient.
Conclusion.
A cause de la nature fragmentaire des documents dont nous
avons dû faire usage dans ce chapitre, notre exposé contient
nécessairement des lacunes nombreuses et des obscurités qu'il
est impossible de dissiper actuellement. Cependant nous en
savons assez pour nous faire une idée nette et claire de la
manière dont les collèges professionnels étaient organisés en
vue de ce but privé que les membres se proposaient avant
tout en s'associant.
Un fait aura frappé le lecteur : c'est la ressemblance que l'on
constate sous ce rapport entre les collèges professionnels, les
collèges funéraires et les collèges religieux privés. Nous avons
tâché, autant que possible, de les distinguer et de ne rien
attirmer des collèges professionnels qui ne soit prouvé par
des documents qui les concernent; mais, presque toujours, les
monuments relatifs aux diverses sortes de collèges se ressem-
blent d'une manière étonnante. C'est qu'au point de vue du but
privé, il n'y a guère de dififérence entre eux : le culte, le soin
des funérailles, les banquets fraternels, ce sont des choses com-
munes à tous. Les collèges religieux, comme les collèges pro-
fessionnels, se mêlèrent même de politique, jusqu'au jour où
• V 1020. 4416. 5658. 7485. IX 690. 4885. X 6094. XI 4391. XII 372.
3637. 4406. Titiilo usits ou usa : V 4324. 4386. 4387. 4406. 4428. 4452.
4498, à Brixia. Filia reponouliun curavit : XI 390. 391; cfr. V 3137.
4396. Sportules : XI 405. 4391. Fondation pour l'entretien de la statue :
V 4416. 5658; pour fêter le (lies natalis du donateur : XI 4391.
( M3 )
cela devint impossible aux uns et aux autres. Les collèges
comp<)sés de gens de même métier n'ont en propre que le but
économique, dont nous savons peu et qui paraît n'avoir pas
joué un grand rôle dans leurs préoccupations. C'est qu'en
effet, si Ton excepte les puissantes corporations de négociants
et celles de l'annone, des naviculaires en particulier, qui
devaient beaucoup différer des humbles collèges d'artisans,
les associations industrielles recrutaient leurs membres dans
la classe populaire, tout comme les collèges funéraires, et les
avantages que les artisans cherchaient dans l'union étaient en
grande partie ceux que lui demandaient les cultores deorum.
L'identité presque complète du but devait avoir pour résultat
la similitude de l'organisation.
Mais cette ressemblance s'explique par une autre raison : c'est
que tous les collèges suivirent un modèle commun, à savoir la
cité. Ils jouissaient tous d'une complète autonomie intérieure ;
l'Etat, qui, depuis l'an 7 avant notre ère, ne reconnaissait plus
le droit d'exister qu'aux collèges autorisés, leur permettait de
se donner librement une constitution, et cette constitution est
modelée sur celle de la cité dans laquelle ils sont établis,
ad exemplum reipublicae (Dic, III, 4, 1; supra, p. loo). Ils
imitent la constitution municipale jusque dans les détails; ils
lui empruntent une foule de noms et, une fois qu'ils sont dans
la voie, ils poussent si loin cette sorte de vanité qu'ils adoptent
des titres qui semblent bien ambitieux pour leurs humbles
fonctionnaires et dont il est parfois difficile de s'expliquer le
sens. Le collège était une famille, mais il était aussi une répu-
blique, une cité. Citoyen de la ville, l'ouvrier n'avait pas
grand'chose à dire; membre du collège, il était l'égal de ses
confrères. Ce que le riche citoyen était dans le municipe,
l'artisan l'était dans le collège, et les sacrifices que fun s'impo-
sait pour gagner la considération de ses concitoyens, l'autre les
faisait pour gagner celle de ses collègues. Et cette petite cité,
où il cherchait les satisfactions d'amour-propre et les avan-
tages de toute sorte que ne lui procurait pas la grande, il
Tome L. 33
( S14 )
la faisait à Timage de celle-ci. Les affranchis, les esclaves, les
pauvres gens {tenuiores) agissaient de même : les collèges qu'ils
constituaient, soit dans la maison du maître ou du patron, soit
en dehors, ressemblaient également à une petite république
organisée. Pline le Jeune ne dit-il pas que pour les esclaves la
maison elle-même est comme une république et comme une
cité : servis resjniblica quaedam et quasi civitas domus est {Epist.,
VIII, 16).
La liberté complète qu'on laissait aux collèges eut, du reste,
pour conséquence une infinie variété dans les détails de leur
organisation ; cette organisation peut cependant se résumer en
quelques mots, si Ton ne considère que les grandes lignes.
En somme, la constitution des collèges est démocratique.
Bien qu'on distingue les simples membres, la jjlebs collegii, des
fonctionnaires, la constitution est basée sur ce principe que le
collège tout entier, le populus collegiiy gère ses affaires lui-
même, soit directement, par les décrets votés en assemblée
générale, soit par le contrôle exercé sur ses fonctionnaires.
Les chefs sont élus généralement pour un an ou pour un lustre
par l'assemblée générale; ce sont : les magistri ou les quinquen-
nales, présidents investis du pouvoir exécutif, les curateurs
qui les aident dans l'administration des finances et des affaires
courantes, le questeur qui tient la caisse et le scribe ou secré-
taire. Il sont responsables devant l'assemblée, qui juge s'ils ont
bien rempli leurs fonctions et leur décerne des récompenses,
comme la curie en décernait aux magistrats municipaux; la
loi ou l'usage leur impose des charges (summa honoraria)
comme à ces derniers. Dans quelques corporations, la décision
des affaires courantes semble remise à une sorte de comité
administratif. Comme la cité, le collège peut être divisé en
corps distincts, en centuries ou en décuries, qui ont leurs chefs
et leurs intérêts propres.
Nous avons cherché à reconstituer le budget des collèges
professionnels et nous avons vu que les recettes et les dépenses
se rapportent au but précédemment indiqué. On y rencontre
peu ou point de preuves décisives de leur caractère officiel; si
( M5 )
nous n'avions que les inscriptions, on pourrait douter qu'ils se
soient occupés d'autre chose que de leur culte, des funérailles
et de leurs fraternels banquets. Il n'y a pas de preuve plus
frappante du caractère privé des collèges que la liberté inté-
rieure sans limites que l'État leur laisse et l'emploi que nous
les avons vus faire de cette liberté. Cela suffirait pour réfuter
ceux qui ont voulu voir dans les collèges professionnels, dès
leur naissance, des corps exclusivement officiels, uniquement
institués par le gouvernement pour remplir un service public.
Ce n'est que sous l'Empire que les collèges professionnels
devinrent, peu à peu, des institutions officielles, chargées d'un
service public, et l'histoire de cette transformation, l'étude de
leur rôle dans les diverses administrations, de leur organisa-
lion en vue de ce rôle, des charges qui leur furent imposées,
des privilèges destinés à compenser leurs obligations, feront
l'objet de la troisième partie de ce mémoire. Nous verrons
comment ils entrèrent au service de l'Etat et des villes; com-
ment, satisfaits d'abord, puis incapables de supporter leurs
charges de jour en jour plus lourdes, ils finirent par dispa-
raître dans le chaos des invasions barbares. Mais il ne faut
pas oublier que, même à cette époque, ils conservèrent leur
but privé à côté de leur rôle officiel et que, tout en rendant
service à l'État ou aux villes, ils s'efforcèrent longtemps encore
de procurer à leurs membres les multiples avantages que
ceux-ci y avaient cherchés dès l'origine.
ISIL)
ADDENDA ET CORRIGENDA
Page 7. Ont paru en 1894 : Corpus, vol. III, fasc. 3; vol. VI, tome 4,
fasc. 1; vol. VIII, 2^ fascicule du supplément.
Voici les inscriptions du vol. VI, 4, que nous avons citées d'après
d'autres recueils :
VI 2oo27 = Orelli 4240.
VI 29691 = Orelli 4075 (voyez infra : addenda à la p. 233).
VI 29700 — 29702. Inscriptions du corpus piscatorum et urinatorum
totius alvei Tiberis (Gruter, 334, 1 et d083, 10. Bull, corn., 1888,
p. 288), que nous avons citées jusqu'à la p. 430 d'après Huelsen, dans
les Notizie, 1888, pp. 279-281. La lecture est du reste la même.
VI 29722 = Orelli, 4077. Wilmanws, 2306.
VI 29814. 29815. Inscriptions de deux scrinia, ayant contenu les
privilèges de collèges romains; nous les avons citées d'après Mommsen,
Zeitschr. d.Savignystift., XII, 1892, pp. 146-149 (aux pages 230, n. 4
et 415, n, 8).
Grâce à l'amabilité de M. E. Bormann, nous avons pu citer d'après
la recension du Corpus, XI, 2, qui n'a pas encore paru, les inscriptions
que voici ;
4086
Orelli, 911.
4579
ScHMiDT, Mise. Capit
4209
WiLMAxXNS, 2907.
p. 29, n. II.
4371
Orelli, 2211.
4580
Ibid., p. 30, n. III.
4391
— 2428.
4589
Orelli, 3948.
4393
— 4100.
4669a
DoNATi, 465, 7.
4404
fi. d./., 1840, p. 87.
m%
MURATORI, 181, 3.
.U06
Gruter, 1104, 6.
4749
- 525, 2.
4413
- 1104, 4.
4771
Corpus, 1 1406.
( 517
4813
Gruter, 467, 7.
6018
Inédile.
5023
MURATORI, 77, 1.
6033
Orelli, 3714.
5047
Orelli, 3099.
6070
Inédite.
5054
— 2643.
6071
Muratori, 718, 5.
5243
- 2409.
6074
Gruter, 175, 1.
5416
— 3906.
6075
Inédile.
5716
Inédite.
6135
B. d. /., 1879, p. 120
5735
Orelli, 5846.
6136
Orelli, 4093.
5736
WlLMANNS, 135 a.
6162
Muratori. 1082, 6.
5737
WiLMANNS, 135 6.
6164
- 517,4.
5748
- 2857.
6191
Orelli, 40S9.
5749
- 2858.
6214
I 1425.
5750
Muratori, 563, 2.
6222
Inédile.
5816
- 2015, 7.
6231
Gruter, 410, 9.
5818
Inédite.
6235
Muratori, 762, 2.
6014
Orelli, 3902.
6244
Orelli, 4073.
6017
ToNLM, Rimini,
p. 348 a.
MM. Hirschfeld et Zangemeister ont eu la gracieuseté de revoir
nos inscriptions des Gaules, de la Belgique et de la Germanie.
P. 17. Bibliographie. Ajoutez :
Gaston de Buretet de Chassey, Des associations religieuses dans le
Bas-Empire. Thèse de droit. Paris, 1893.
F. CuMONT, Textes et monuments figurés relatifs au culte de Mithra,
fasc. I et II, Bruxelles, Lamertin, 1894-1895.
Ch.-E. Lefèvre, Histoire et organisation des collèges d'artisans à
Rome. Thèse de droit, Paris, 1894, pp. 1-85.
Pauly-Wissowa, Real-Encyclopaedie, vol. I, 1893-1894, jusqu'au
mot : Apollokrates.
Voyez les articles : acceptores, adcresceutes, adleclio, adlector, aedilis
(p. 46i), aedicula, aedituus, aeneaiores, album fp. d33(j), anula-
rium, auularius, Apollinares.
Maurice Travers, Les corporations d'avocats sous l'Empire romain.
Thèse de droit, Paris, 1894, pp. 1-162.
J.-P. Waltzing, Les corporations romaines et la charité. Charles
Peeters, à Louvain, 1895, 30 pages.
P. 33. n. 2. Ajoutez : Merkel, pp. 845-851,
( M8 )
P. 34, n. 1. Ajoutez : IX 4955, sacerdoti [c]onlegioriim omnm[m]. Il s*agit
de Domitien. Voyez : Gsell, Le règne de Domitien, Paris, Thorin,
1894, p. 16, n. 1.
P. 39. n. 1. Ajoutez : A. voN Premerstein, dans De Ruggiero, Diz. epigr.,
s. V. Augustales.
P. 44, n. 3. Pastophores. Supprimez : 2806. Voyez infra, p. 252, n. 5.
P. 44, n. 6. Voyez infra, p. 245, n. 6.
P. 45, n. 1.1116150 = 7437.
P. 45, n. 2. Sur X 1238, voyez infra, pp. 263 et 501, n. 4.
P. 46, n. 1. Orelfj 5910 = Brambâch, 132.
P. 46, n. 2. Les fascicules I et II de l'ouvrage de F. Cumont ont paru.
P. 47, 1. 15. Ce qui est dit aux pages 47. 133-134. 139. 150-151, sur les
chrétiens, doit être modifié d'après la page 316.
P. 51, n. 2. Apul., Met., VII, 1 : quidam de numéro latronum pervenit ...
Is — taie collegio suo nuntium facit. Emploi plaisant, comme
dans Horace.
P. 53, n. 3. L'inscription athénienne donne les Statuts d'un thiase ou
érane d'îdêaxyot voués au culte de Dionysos. Athen. Mittli., XIX,
1894, p. 248 (du 11^ siècle après J-C).
P. 54, n. 1. Au lieu de V 7235, lisez : III 7235. Ajoutez : V. von Schaeffer,
De Dell insidae rébus (Berliner Sludien, IX, I, 1889, pp. 184-
197).
P. 55, n. 1. VI 1942 - VI 7446.
P. 57, fin. A Sidon, on trouve, dès l'an 47 avant J.-C, un ap)(^wv [xa^^aipo-
TTotcov {Rev. arch., 1891, t. XVII, pp. 107-108).
P. 66. Sur la fête des piscatores, voyez infra, pp. 237-239.
P. 74, n. 3. Au lieu de : Besitz, lisez : Bemerk.
P. 75. Merkel (pp. 845-846), partant du caractère religieux des collèges
primitifs, qui avaient des dieux tutélaires, des sacrifices et des
repas communs, pense que, si ces collèges étaient précisément
formés d'artisans du même métier, c'est que le métier avait un
caractère sacré. — Les flûtistes étaient employés au culte, mais
les autres? Il faudrait au moins prouver qu'il en était ainsi de
plusieurs métiers de Numa, et il ne suffit pas de dire qu'une
partie de ces collèges sont d'origine postérieure et furent formés
sur les modèles des collèges primitifs.
( 519 )
P. 82, 1. 18. Lisez : vers l'an 90.
P. 82, n. 3. Lisez : Festus, éd. MiiiXER, p. 333. Voyez infra : p. 202.
P. 90, L 9. Lisez : caprina{riorum) Galla{rum).
P. 113, n. 3. Lisez : Joseph., Anliq. Jiid., XIV, 10, 8. A la fin, lisez :
Senatus.
P. 120. C'est à cause du service qu'ils rendaient, que les flûtistes (qui
sacris publicis praesto sunt) avaient part aux distributions fru-
mentaires. VI 2854, sur la tombe d'un vétéran : frumento piiblico,
coUegio tibwinum. — Il en était de même des aeneatores ou corni-
cines. VI 10220 : reliqui — frumentiim [pnbl]icum et aeneatorum
{corpus?). VI 10221, conlegio aeniatorum, frumento publico.
MoMMSEN, Ephem., VIII, 2o7, n. 2. St.-R., III, 288. Trad., VI, 1,
pp. 326-327. B. d. l , 1845, p. 229. D'autres expliquent à tort
aeneati par : gravés sur les tables d'airain {in aère incisi) pour
prendre part aux distributions de blé. HenzExN, note à Vi 10221
et B. d. L, 1859, p. 230. Hirschfeld, Ber. der Berl. Ak., 1891,
p. 853. Huelsen, B. c, 1891, p. 351. Cfr. Liebenam, p. 126.
Mommsen dit : Henzeni opinatio — et linguae contraria est et
rerum notitiae (Ephem., /. /.).
P. 125, n. L Lisez : Allmer, M. d. L., II 144. De Boissieu, pp. 160. 206.
P. 126, n. 1. Lisez : Ephem., III, p. 165.
P. 131, n. 4. Lisez : G. Boissier, Belig. rom., II, pp. 297 et suiv. Rev.
arch., 1872, 1, pp. 92-93.
P. 131, n. 2. Lisez : Suet., Aug., 32.
P. 146, n. 3. Comparez la page 314, n. 1. Ajoutez : C. Schaefer, Die
Privatgenossenschaften im Peiraeius, Jahrbiiclier de Fleckeisen,
26, 1880, pp. 417-427.
P. 151, n. 1. Ajoutez : De Rossi, Borna sott., I, pp. 105-108. III. pp. 509-
512. Revue arch., 1866, 1, p. 225.
P. 170, 1. 3. Supprimez : 373.
P. 184, n. 5. L'inscription d'Hiérapolis a été corrigée par Ramsay, Amer.
Journ. of. arch., III, p. 348. Bev. des Études grecq., II, p. 31, n. 1.
P. 185, n. 4. Le mot epysTi'.a-âTTii; peut désigner aussi, en dehors des
collèges, wncurator operum municipal, un surveillant des travaux.
Bull.de Corr. helL, XI, 1887, p. 100, n. 23.
P. 197, n. 1. Voyez infra : pp. 477-478 et 485-486.
P. 108, 1. 19. Lisez : sous Titus (VI 940).
( 520 )
P. 202, n. l. Ephem., IV 503 - Corpus, III 10997.
P. 202, n. 2, et 82, n. 3. Le temple de Minerve sur l'Aventin était le lieu
de réunion des poetae qui s'y assemblaient pour délibérer sur
leurs intérêts communs et qui y plaçaient en ex-voto les récom-
penses obtenues {consistere ac dona ponere). Sur consistere,
voyez pp. 215, n. 2. 218, n. 3 et la III^ partie : collèges des muni-
cipes. Il n'est pas question des quinquatrus. Vers l'an 90 avant
notre ère, ce collegium poetarum était devenu une sorte d'aca-
démie, de tribunal critique en matière de poésie. En effet, Valère
Maxime rapporte (III, 7, 11) que quand C. Julius Caesar Strabon
s'y rendait, le poète tragique Accius ne se levait pas devant lui,
parce qu'il se sentait un talent supérieur : no7i majestatis ejus
immemor, sed quod in comparatione communium stndiorum ali-
quanto superiorem esse confideret. Quapropter insolenliae crimine
caruit, quia ibi voluminum, non imaginiim cer Lamina exerce-
bantur. Cfr. 0. Ribbeck, Histoire de La poésie latine, I, pp. 21-22.
P. 203, n. 7. Ephem., V 317 - III 12377 Ephem., IV 76 = lll 7218.
P. 204, n 3 et 6. Ephem., II 687 - III 10433. Ephem., II 605 = III 10335.
P. 206, n. 6. Ephem., II 838 - III 10836.
P. 208, 1. 9. Voyez infra, pp. 493-508.
P. 209, n. 1. M. Zangemeister a bien voulu nous signaler cette inscription.
P. 210, n. 4. Voyez infra, pp. 400-401.
P. 214, 1. 1. Lisez : cinq fois.
P. 217, n. 1 et 229, n. 1. D'après XIV 285 : sclwlam sumptu suo canno-
pfioris fecit, les cannophores d'Ostie auraient eu une schola à eux;
pourtant c'est dans celle des dendrophores qu'on a trouvé les
statues reçues par les cannophores (infra, p. 229, n. 1). Dessau
(XIV 285) dit : Vereor ne error subsit.
P. 219, n. 1, Ajoutez : VI 9404 : collegium fabrum soliarium baxiarium
{centiiriarum trium) qui consislunt in scola siib theatro Avg[iisLi)
Pompeiano. Sur les collèges d'Asie Mineure qui indiquent, dans
leur nom, le lieu où ils se réunissent ou bien où ils travaillent
(cpopTTiyoî ol TTspl TÔv ^sr/ov, Epyd-at TrpoTruXslTai -k^oc, xôj Iloast-
oàivt, etc.', voyez : Mordtmann, ALhen. MiLLli., VI, pp. 125-126.
P. 219, 1. 2. Huelsen montre que la scfiola XanLha fut réparée par Bebryx
Drusianus au I^r siècle et par Avillius, sous Caracalla.
P. 223, n. 1. Ajoutez : VI 29805 : translata de schola medicorum, sur une
statue d'Amazone. Il y a deux exemplaires; voyez le Corpus, —
Arch. ep. MiLth., 1884. n. 3 = III 11042 (coll. inconnu).
1
(521 )
P. 523, n. 3, oTxoç, voyez : Henzen, B. d. /., 1846, pp. 73 74. Statio,
oraTtwv, désigne le siôge du collège et, de là, le collège lui-
même : VI 7458. 8750. 'm, p. 925. XI 1436. Kaibel, 850, 1. 5.
10. 956, B. 2. 10. 23.
P. 225, n. 4. WiLMANNS, 2857. 2858 = XI 5748. 5749. — Lisez : Notizie,
1880.
P. 226, n. 2. WiLMANNS, 2858 = XI 5749.
P. 227, n. 10. Lisez : VI 1936 et XI 3810.
P. 229, 1. 1. Supprimez : Marc Aurèle.
P. 229, n. 1. Lisez : XIV 34-35, et voyez les addenda à la page 217, n. 1.
P. 229, n. 3. WiLMANNS, 2858 = XI 5749.
P. 230, n. 2. VI 832 = VI 29685. Huelsen la rapporte à un municipe.
P. 230, n. 4. Inscriptions des scrinia : Corpus, VI 29814. 29815.
P. 231. Sur les sacrifices des collèges, voyez encore les bas-reliefs de
VI 236. VI 868 (coll. de l'annone) et X 1238 {infra, p. 501, n. 4).
P. 233-234. Ajoutez : VI 29671 = Orelli, 4075. Ti. Claudius Chresimus
donne aux dendrophores romains 10 livres d'argent et 20,000 ses-
terces iquae divisa sunt populo per gradus, kal{endis) Aug{ustis)
n[atali) collegi, en 206. Unique exemple du natalis d'un collège
professionnel.
P. 235. 2e alinéa, 1. 3. Lisez : 11 août. Le natalis d'Hadrien tombe le
25 janvier.
P. 235, n. 7. Voyez infra : p. 451, n. 5.
P. 236, n. 4 fin. Les eborarii prennent l'argent dans leur caisse [ex arca
nostra), mais il est probable que celle-ci avait reçu des rentes de
Julius Aelianus pour fêter son anniversaire et celui de ses parents.
Voyez p. 421, fin, et p. 483, n. 1. Quant au collège d'Esculape,
son quinqucnnalis lui a promis une cena ou des sportulae chaque
année aux Ides de Mars; c'était peut-être son natalis.
P. 240, n. 1. Peintures de Pompéi; voyez encore : Nissen, Pomp. Studien,
p. 344. Arch. Zeitg., XVII, 1850, p. 177.
P. 246, n. 1 et 250, n. 5. Voyez addenda à la page 233.
P. 248, n. 6 fin. Lisez : Si la loi de 415 ...
P. 252, n. 5. Pausarii [Isidis), VI 348. XII 734.
P. 260, n. 2. Glotin, Coll. (un. à Rome au IW siècle ^Ann. de la Soc.
acad. de Nantes, 1894).
( .522 )
P. 263, n. 1. Voyez sitpra, p. 45, n. 2.
P. 266, 1. 10. Lisez : dès Titus.
P. 270, n. 1. Sur III 633, voyez : p. 270, n. 4.
P. 271, 2e alinéa, 1. 10. Lisez : Quand un confrère était mort à vingt
milles au moins et que le décès ...
P. 273, 1. 11. Lisez : C{aio) Aullio.
P. 275, 1. 14. Lisez : C{ai).
P. 276, 1. 13. Lisez : Sassina. A. 22, lisez : Vulsinii.
P. 283, n. 4. C'est le no III 11253. Voyez infra, p. 289, n 6.
P. 286, dernière ligne. Lisez : que tous les collèges ... enterraient les
morts.
P. 294, 1. 4. Lisez : des défunts.
P. 296 et 307, n. 5. ITop^pupopà^oi. Ramsay, Amer. Journ. of arch.,
III, p. 348. L'inscription de Wagener porte : Ilopcpupapàcpot.
P. 297, n. 1. Arch. ep. Mit th., 1884, p. 92 - III 11042.
P. 300. Sur le § 5, voyez notre dissertation citée sup^'a, p. 517.
P. 304, n. 4. Voyez infra, p. 401, n. 1 et Otto Toller, Op. cit. [infra,
p. 400, n." 4).
P. 305, n. 1. Orelli, 4075; voyez addenda à la p. 236, n. 4.
P. 307, n. 1. Lisez : ^T^^^\ixoç>^ç,. Note 5. L'explication de Lebas, lôS?*», est
de Waddington.
P. 319, 1. 1. Lisez : d'étrange.
P. 319, n. 1, 1. 4, lisez : in collegiis.
P. 321, fin. Une inscription de Flaviopolis en Cilicie mérite d'être
signalée. Elle est d'une corporation de foulons du III^ siècle,
uniquement composée de chrétiens, qui font un vœu pour le salut
de r« humble corporation » et demandent pardon au Seigneur
pour leurs péchés. Journ. ofhellenic Studies, XI, 1890, p. 236, I :
TTTÈp awTTjpi'aç xoij sùitsXoO; auvspyiou xwv | yvix'fiu)'/ ttjv
{ji.£xpiav I Tjfxwv TauxT)v xapTto'iiolpi'av §£^ou, AsaTToIxa, Tiapà
Tôjv à^pîwv aloû ôoûXtov Trapsycolv àcpsaiv àfjLapxttJov | zouç
:Q[ji£X£patç ^uyfjxiç \ xal xaXfjv aTroXoYi'av.
P. 323, n. 2. Arch. ep. Mitth., 1884, p. 127, n. 99 = III 9672 : [c]o7ivibis.
P. 329-330. Les textes relatifs à Mithra sont maintenant réunis dans
l'ouvrage de F. Cumont, cité plus haut. On y trouvera de nom-
breux exemples de pater (voyez infr^a, pp. 446-447) et quelques-
uns de frater (n. 324. 336. 351. 353 - III 3384. 3415. 3908. 3959),
( 523 )
pour désigner des initiés de rangs divers. F. Cumont pense (n. 15,
p. 95) que les femmes n'étaient pas admises aux mystères
mithriaques; il n'y aurait donc parmi eux ni maires ni sorores.
Quant au n" VI 377, il doute qu'il ait rapport à un collège de
Mithra.
P. 329, n. 3. A VI 406, ajoutez : III 3908. Lisez : VI 377, au lieu de : 277.
Plus loin, lisez : III, pp. 1164. 1166 s. v. Mithra. Ajoutez : Henzen,
Ephem., I, p. 217.
P. 342, n. 3. III 11223. Lisez : d{ecurio) c{oloniae) C{laudiae) S{avariae).
P. 343. Ajoutez : VII 11 : coUegium fabrum et qui in eo [corpore s{unt)?],
à Regni. XII 1929 : scaenici Asiaticiani et qui in eodem corpore sunt.
P. 349, 1. 11. A Milet, les tisserands s'appellent : xo oIxo'j|j.£vf/.ôv xal
(j£|j.ToxaTov auvÉôptov Ttov X'.voupyôiv {Rev. arch., 2« série, 28,
1874, p. 112). L'épithcte oîxou(ji.£vixd(; est prise surtout par des
collèges d'artistes dionysiaques et d'athlètes sous l'Empire.
A. MuELLER, Handbuch der gr. Alt. de Hermann, III, p. 411,
n. 5. Kaibel, 747. 956, b, 19.
P. 350, n. 3. Voyez addenda à la p. 450, n. 4.
P. 356, n. 3. Voyez : Pernice, Zeitschr. derSavignystift., 1884, V, p. 103.
P. 363, n. 4. Lisez : V 5869, au lieu de : 5878.
P. 367, n. 6. Lisez : VI 3678.
P. 371. Sur les leges collegiorum conservées, voyez : Karlowa, 1,
pp. 813-816.
P. 371, n. 1. HuscHKE, Multa, soutient que ces statuts furent donnés par
l'Élat : staatlieh verliehene Kollegialordnung . Mo.mmsen, /. /.,
p. 345, et RuDORFF, /. l., p. 209, sont d'un avis opposé.
P. 371, n. 2, 1. 4. Lisez : 1890.
P. 380, n. 1. Voyez supra, p. 379, n. 4.
P. 384, n. 1 et 385, n. 4. Notizie, 1888, p. 281 = VI 29700 — 29702 et la
note de Huelsen. Celui-ci lit : mag{istris) qui eg(erunt). Pourtant
il y a : curam qui adm(inistraverunt), VI 29700 ; cfr. 29702 :
cura(m) qui adm. (voyez infra, p. 409, n. 4). Nous croyons donc
qu'il faut lire : magiisierium), et que les anciens magislri et les
anciens curateurs seuls reçoivent des parts extraordinaires dans ce
collège. A la fin du no 29700, il est question des curateurs actuels,
corporis curatores, qui ont surveillé l'érection du monument.
( 524 )
P. 387, n. 4, fin. Lisez : tantôt quinqmnnalis , tantôt quinqtiennalis
perpetuiis.
P. 401, n. 3. Il faut distinguer le pater collegii et la mater collegii, qu'on
trouve partout, du pater, du pater sacrorum, du pater patrum, etc.,
qu'on ne trouve que dans certains collèges religieux (peut-être
aussi de la mater, dans certains cultes, XIV 37. 69). Employés sans
collegii, ces mots ont ordinairement un sens religieux et indiquent
dessacrati d'un ordre supérieur, un degré élevé dans la hiérarchie
des initiés. (Exceptions : V 784. XI 1355 b, dans un album, XIV
2408.) Quand les sacrati ou fidèles d'un dieu sont organisés en
collège, par exemple pour les funérailles, ils ont, en outre, des
chefs civils qui administrent les affaires de la corporation :
magister, décurions, questeur, scribe. Ils ont alors deux hiérar-
chies, l'une civile, l'autre religieuse. Pour les dendrophores,
voyez supra, p. 253, n. 1, et XIV 69 70. Pour les collèges
mithriaques : VI 47. 556. 717. 734. 1675. XI 5737, etc.; voyez
supra, p. 47, n. 2. — Le pater collegii et la mater collegii, si fré-
quents dans toutes sortes de collèges, sont autre chose : parfois,
ils semblent jouer, le rôle de magistri ou présidents; ordinaire-
ment ils ressemblent aux patrons, dont ils se distinguent pourtant,
comme nous l'avons montré.
P. 417. Aeditims de collèges funéraires : VI 10291. 9102. Ephem., V,
p. 751. Aediti{mus) du corpus fahrum navalium [Portens?] :
XIV 256, I. 179.
P. 417, 2e ligne d'en bas. Lisez : censor.
P. 417, n. 1. Lisez munera, au lieu de numera.
P. 437, 4e ligne d'en bas. Il s'agit du Praefectus Urbis de 301.
P. 450, n. 4. Le kapitularium , sous-entendu : tributum ou vectigal, c'est
littéralement un droit payé par tête, la capitation. Cfr. Lex metalli
Vispasc. (II 5181, 1. 12 : capitularium in singula capita. Bruns,
Fontes juris, éd. 6, p. 142). — Dans le collège d'Esculape et
d'Hygie {supra, p. 350, n. 3), il y a des conditions d'entrée impo-
sées par Marcellina, qui a donné 50,000 sesterces à ce collège, sub
hac condicione, lU ne plures adlegantur quam niimerus s[upra)
s{criptiis) — à savoir soixante —, et ut in locum defîinctorum loca
veniant, et liberi adlegantur, vel si quis locum siium legare volet
filio vel fratri vel liberto dumtaxat, ut inférât arkae n{ostrae)
partem dimidiam funeratici. Donc le nombre des membres ne
pourra dépasser le nombre actuel, soixante; en cas de décès, les
nouveaux sont admis par un vote du collège (adlegantur) et
( 523 )
pourtant les places vacantes sont vendues {veniant — veneant).
Cela veut dire : en cas de décès, la place vacante est vendue par
le collecte, qui se réserve de voir si l'aspirant est digne d'être
reçu et procède à Vadlectio. Il y a vente sous réserve A'adlectio.
Le prix de vente correspond au droit d'entrée, excepté qu'il peut
varier. Marcellina l'évalue à moins de la moitié de la prime funé-
raire, puisqu'elle impose aux membres actuels qui veulent jouir
du privilège de laisser leur place à un fils, à un frère ou à un
affranchi — privilège qui supprime Vadlectio — Tobligation
d'abandonner au collège la moitié de leur funeraticium. Huschke
croit à tort qu'il s'agit de soixante membres nouveaux et c'est ce
que Karlowa conclut aussi du mot adlegantiir; mais ce mot se dit
de toute admission d'un membre nouveau, même s'il remplace un
ancien isupra, p. 3o,^). Voyez ; Pernice, Parerga, p. 101 {Zeitschr.
des Savigmjstift., 1884, V). Schiess, p. 82, n. 274-275. Liebenam,
p. 250, n. 2. CoHN, p. 137. Huschke, Zeitschr. f. g. R. W., XII,
p. 185. Karlowa, I, p. 814. Ce dernier a raison de dire qu'il ne
s'agit pas de la loi fondamentale {GrundstaliU) de ce collège, mais
d'une lex votée pour régler l'emploi des donations de Marcellina
et de Zenon; mais la loi fondamentale n'avait peut-être pas été
gravée.
P. 457, n. 3. Même inscription des pacpelt;, à Tralles. Bull, de Corr. fielL,
X, 1886, p. 519, n 16.
P. 458. Lisez : Katpooain[c7]xaî.
P. 459. Lisez : Tropcpupaoàcpot. Ramsay, Revue des Études grecques, II,
p. 31, n. 2, dit qu'il faut lire : (ôr^vapta) 'y, au lieu de : t', donc
3,000 deniers au lieu de 300.
.)
Tome L, vol.
NOV 3 lîiJ?
TROISIÈME PARTIE
LES COLLÈGES PROFESSIONNELS
CONSIDÈRES COMME INSTITUTIONS OFFICIELLES
iXTRuDUCTlOX '.
Nous croyons avoir prouvé, dans la seconde partie de ce
mémoire, que les ouvriers, les artisans et les marchands
romains cherchaient dans l'association un moyen de travailler
plus efficacement à certains intérêts particuliers, qui leur
étaient communs et qui leur tenaient à cœur. Leurs corpora-
tions auraient donc eu leur raison d'être sans autre but que
ce but privé que nous avons décrit ; mais ce qui leur donne
une importance capitale, c'est qu'elles se transformèrent peu
à peu en institutions officielles, en véritables rouages de Tadmi-
nistration publique. Sans doute, artisans et commerçants ne
furent jamais guidés que par leur intérêt propre ; mais si l'État
leur accordait Tautorisation, c'est qu'il attendait, soit du col-
lège, soit de ses membres pris isolément, un certain service.
L'Etat n avait en vue que l'intérêt public qui pouvait résulter
* Sur les abréviations employées pour citer, voyez la bibliographie au
premier volume, pp. 17-30.
( 4 )
de la fondation des collèges, où étaient groupés les travail-
leurs dont il avait besoin.
C'est à cause de cet intérêt public qu'il faisait plus que de les
reconnaître; il ne leur donnait pas seulement le droit d'exister
et de travailler à leurs intérêts particuliers, il en formait des
corps publics {corpora), faisant partie intégrante de la collecti-
vité politique, de l'État ou du municipe ^. Les services qu'il
attendait d'eux étaient du reste de nature fort diverse, comme
nous verrons, et ce mot doit être pris dans le sens le plus
large.
Quelle qu'elle fût, la charge avait été à l'origine acceptée
librement et avec plaisir, car elle procurait à tous la faculté de
s'associer pour leurs intérêts privés, et à beaucoup elle valait
de précieux avantages. Il se fit ainsi que la plupart des admi-
nistrations de l'État et des villes finirent par renfermer des
corporations professionnelles. Mais avec le temps leurs rela-
tions avec l'autorité se modifièrent complètement.
Durant deux siècles, elles consentirent sans répugnance à
fournir des garanties à l'État, qui, de son côté, se montra peu
exigeant, assuré qu'il était de leur concours. Il ne s'immisça
que discrètement dans leurs affaires intérieures; en un mot,
tout en devenant de plus en plus officielles, les corporations
ne cessaient pas encore d'être libres.
Au commencement du III® siècle, l'Etat ne peut plus s'en
passer; beaucoup sont devenues un rouage indispensable de la
machine publique, qui s'arrêterait sans elles. Si elles avaient dis-
paru, il n'y aurait eu personne pour remplir les services qu'elles
avaient assumés. D'autre part, leurs charges augmentaient
de jour en jour, si bien qu'un moment vint où leurs membres
voulurent refuser tout travail; alors l'État les contraignit de
rester à son service, et, pour assurer leur recrutement, les
rendit héréditaires. Au IV« siècle, il les traite en esclaves et les
réglemente à son gré.
Voyez le premier volume, pp. 119-120.
( 5 )
Le côté officiel des collèges professionnels pendant Ifes trois
premiers siècles a été fort peu étudié jusqu'ici : c'est qu'avant
Constantin les renseignements font prescjue défaut. A partir
de ce prince, le Code Théodosien nous permettra de tracer un
tableau à peu près complet, mais seulement des Corpora Urhis
lîomae.
Nous essayerons cependant de remonter jusqu'aux origines,
de faire voir sous l'influence de quelles causes les corpora-
tions furent admises dans les diverses administrations et de
décrire en détail le rôle qu'elles y jouèrent (chap. !«'). Puis il
nous sera plus facile de montrei* comment elles y entrèrent et
d'étudier les différentes phases que traversèrent leurs relations
avec l'autorité, depuis la liberté la plus entière jusqu'à la ser-
vitude la plus complète : corporations privées d'abord, elles
deviennent des institutions officielles, puis de véritables corps
de fonctionnaires, attachés à l'administration (chap. II). Nous
verrons qu'elles perdirent aussi leur autonomie et le droit
de s'administrer librement; la servitufle se montre jusque
dans les changements que subit leur constitution intérieure
et dans le contrôle de plus en plus sévère, de plus en plus
minutieux, que l'Etat exerce sur leur organisation (chap. III).
Enfin nous ferons connaître les privilèges par lesquels sont
compensés tous ces services et ces charges de plus en plus
écrasantes (chap. IV et V).
CHAPITKK 1-»
ROLE DES COLLEGES DANS L ADMINISTRATION.
§ l. CAUSES on AMÈNENT l'ÉL\T ET LES VILLES A PRENDRE DES
COLLÈGES A LEUR SERVICE. — § 2. RÔLE DE CHAQUE COLLÈGE DANS
l'administration. PREMIÈRE SECTION I ROME ET CONSTANTINOPLE.
I. LANNONE. 11. COMMERCE ET INDUSTRIE PRIVÉS. Ul. TRAVAUX
PUBLICS. IV. POLICE. V. RELIGION ET FÊTES. OBSERVATIONS GÉNÉ-
RALES SUR LES Corpora Crbis Romae. deuxième section :
VILLES DE l'iTAIIE ET DES PROVINCES. 1. STATISTIQUE : LISTE DES
COLLÈGES DU HAUT-EMPIRE : LISTE DES COLLÈGES DU RAS-EMPIRE
'coUegiaîil ii. rôle des collèges dans les cités sois le
haui-empire; rôle des collèges dans les cités sous le bas-
empire, troisième section : administration centrale.
i^ l. Cause.^ ijénéraîea.
Quelles causes générales, quelles circonstances amenèrent
l'État et les villes i\ prendre les collèges à leur service? Quel
rôle leur assignèrent-ils dans les diverses administrations?
Pour répondre ii ces deux questions, il faut connaître l'ad-
ministration romaine tout entière et se rendre un compte
exact des règles suivies pour son recrutement. Aussi, ce n'est
que dans une étude complète sur l'administration de l'Empire
qu'on pourrait entrer dans tous les détails. Tel n'est pas notre
but; cependant nous tacherons d'abord de mettre en lumière
les principes sur lesquels reposait l'organisation des divers
services publics dans l'Etat et dans la cité, et nous parcour-
rons les branches nombreuses de l'administration qui con-
( 7 )
iutnnc.ul les r;olI<''j^r;s, afin <\(t (léUtinninT \u \t\'à(M que chacun
y occupe.
L'afJminislration romaine fut créée presque Umi entière par
l'Kmpire. La république, même à l'époque où elle dominait
déjà le monde, n'administrait pas; elle n'avait que peu de
fonctionnaires et d'agents financiers. Elle se bornait à gou-
verner. Sans doute, il y avait quelques bureaux permanents,
tels que ceux du trésor, de la monnaie, de l'entretien ries rues
et des distributions publiques; mais leur organisation était
fort simf)le. Pour tout le rest<;, on s'en remettait à l'activité
privée. Les sociétés de publicains percevaient l'impôt, les
entrepreneurs exécutaient les travaux publics, et la livraison
des fournitures nécessaires h VÉUd était adjugée par la voie
des enchères et au rabais. La tache du Sénat se bornait à fixer
la quotité de l'impôt et à décider quelle somme les œnseurs
devaient payer aux adjudicataires des travaux publics *.
Avec l'Empire, l'administration prit un développement rapide
et extraordinaire. Si les empereurs rompirent avec les tradi-
tions de la république, c'est qu'ils y furent forcés. L'adminis-
tration dépend de la constitution politique. Or, la révolution
qui était en germe dans les réformes d'Auguste, quoiqu'elle
ait mis trois siècles pour arrivera son complet développement,
ou mieux, pour se débarrasser de ses apparences demi-répu-
blicaines, peut se résumer ainsi : tous les pouvoirs sont con-
centrés dans les mains de l'Empereur. Chargé de tous les
pouvoirs, le Prince doit aussi assumer tous les devoirs : à lui
de maintenir l'ordre et la paix, la sécurité et la prospérité sur
cet immense territoire. César est tout-puissant; dès sa vie, il
est dieu : mais il est aussi la Providence terrestre 2 de ces
' Voyez Duuuy, Hist. de.s liom., vol. V, p. 266. Misfoi let, fri.stitutiom
politiques des Romains, II, f). 229.
'^ Les iriscriplioris le disent dès le début de l'Ernpirc : Saluti perpettuie
Augustae Liherlalique jmhlicae populi Romani, — Provvlentiae Tiiberii)
Caesaris Augiisii, nali ad aelernitalem Romani nominis (Wii.manns, 64».
Orelli, 689). Voyez Godefroid Kurth, Origines de la civilisation moderne,
rhap. ï*"". (Paris, Picard.)
( 8 )
innombrables sujets qui lui obéissent depuis l'Océan jusqu'à
l'Euphrate, depuis le Danube jusqu'aux sables brûlants de
l'Afrique. Or, pour maintenir l'ordre partout, un prince tout-
puissant met partout ses fonctionnaires. Ainsi furent créés peu
à peu de grands services, comparables par leur extension
aux administrations si compliquées de nos États modernes.
Leur nombre s'accrut d'année en année, et chacun d'eux
s'étendit de plus en plus; ils finirent par couvrir l'Empire de
leurs ramifications. L'un des plus importants, celui de
l'annone, avait pour seul but d'approvisionner Rome et plus
tard Constantinople : dans les coins les plus reculés de l'Em-
pire, des masses innombrables d'ouvriers travaillaient, tous
les jours et à toute heure, pour nourrir la populace des deux
villes souveraines. Dans son cercle étroit, chaque municipe,
soit pour lui, soit pour l'Etat, dut imiter l'administration cen-
trale.
Jetons un coup d'œil sur l'immense personnel administratif
de l'Empire et des villes : nous verrons qu'il différait sensible-
ment de celui des États modernes. A la vérité, les agents
supérieurs étaient des magistrats élus, et surtout, comme chez
nous, des fonctionnaires nommés par l'autorité; mais dans
les rangs inférieurs, la différence est frappante.
A côté du Prince, les anciens magistrats de la république
ont conservé une certaine part dans l'administration, mais
elle devient de plus en plus restreinte. Le Sénat, sans pouvoir
réel, n'a plus la gestion des finances; il partage avec l'Empe-
reur la surveillance du culte et les provinces, puis il perd
même ces deux attributions. Les questeurs sont chargés du
pavage des rues et des combats de gladiateurs. Les préteurs
remplacent les questeurs dans la gérance du trésor, et les
édiles dans le soin des jeux et la surveillance des régions
urbaines. Les consuls finissent par n'avoir plus aucun autre
droit que de donner des jeux et des spectacles, où seuls,
curieux privilège! ils peuvent distribuer de l'or. En somme,
depuis Dioclétien surtout, les magistratures ne sont plus
guère que des corvées ruineuses.
»
( 9 )
En réalité, le maître absolu, c'est l'Empereur. Chargé en
mémo temps de toutes les fonctions, il a besoin d'auxiliaires
nombreux. Pour les avoir à sa dévotion, il ne les choisit pas
parmi les magistrats élus, mais il crée peu à peu une série de
fonctionnaires, de préfets, de curateurs, de procurateurs et
d'employés inférieurs, pris en partie dans l'ordre sénatorial,
mais plus souvent dans l'ordre équestre et, au bas de l'échelle,
parmi les aflranchis du palais. Tous ces fonctionnaires étaient
nonuDcs par le Prince, révocables à son gré; ils restaient en
charge tant qu'il plaisait au maître et ils étaient rétribués par
lui. A partir de Dioclélien, ils dépendirent hiérarchiquement
les uns des autres : une puissante centralisation établit l'unité
dans ce vaste État. Avec le* temps, le nombre de ces représen-
tants du Prince devint énorme, car les attributions furent de
plus en plus morcelées. La centralisation et le fonctionnarisme,
tels sont les deux caractères de l'Empire romain, (|ui les a
légués à nos Etats modernes. Ajoutez-y, comme une consé-
quence nécessaire, la bureaucratie : placés à la tète des diverses
administrations, les dignitaires impériaux ont sous leurs
ordres de nombreux employés ou commis, appelés, au IV^
siècle, officielles, cohorUdcs, apjjctritores, qui forment un per-
sonnel considérable.
Mais les fonctionnaires et leurs bureaux ne suffisaient pas;
il fallait partout des légions d'ouvriers pour les travaux sou-
vent pénibles que comportaient tous les services. Un caractère
spécial du système financier de Rome avait pour conséquence
d'exiger un personnel plus nombreux encore que de nos jours.
En effet, tous les services avaient quelque rapport avec les
finances publiques; or, si nous examinons le budget romain,
nous verrons qu'il diffère essentiellement des budgets mo-
dernes. Aujourd'hui l'État ne demande aux citoyens que de
l'argent. Puis « il se charge de pourvoir à tous les besoins
du gouvernement. Il passe les marchés pour la fourniture des
matières et des denrées, pour l'entreprise des travaux; il
n'impose aucun service personnel, sauf le service militaire
et le jury, ne contraint aucun citoyen à exercer une magis-
( 10 )
trature ou des fonctions publiques, ne force aucun ouvrier
à se rendre sur ses chantiers. L'individu, placé en face de l'Etat
comme d'un particulier, traite avec lui et débat la somme qui
doit équitablement payer son temps, son travail et ses fourni-
tures. Dans ce système, l'argent étant le signe qui exprime i^i
la fois la charge du contribuable et le droit du créancier,
Tespèce avec laquelle le citoyen acquitte son impôt et l'Etat
ses dépenses, l'administration des tinances manie uniquement
des deniers. Toutes les opérations qu'elle efiéctue et qu'elle
enregistre, consistent dans des recettes et des dépenses de
fonds ^. »
Le système romain était tout autre. A côté de l'impôt en
argent, l'Etat exigeait l'impôt en nature. A l'origine des Etats
antiques, on ne connaissait que ce dernier. Toutes les transac-
tions consistaient en échanges de produits fie la terre ou de
l'industrie. A Rome, l'impôt en argent ne supplanta jamais
entièrement l'impôt en nature. Sous le Bas-Empire, les con-
tributions foncières {jugatio ou capitatio terrena), dues par les
possessores et divisées en ordinaires [canonica] et extraordi-
naires [superindicta), se payaient encore soit en argent (aurana\
soit en denrées {aunoiiahae). Il y avait une autre contribution
assise sur la terre, Vaiinona, comprenant une foule de presta-
tions ordinaires ou extraordinaires, généralement en nature,
mais dont les contribuables pouvaient s'acquitter en argent
[adaeratio -.
L'Etat recevait donc, en guise d'impôts, des produits de tout
genre : du blé, du vin, de l'huile, de la viande, des porcs, du
fourrage, des vêtements, du fer, du bois, de la chaux, des
* Bouchard, Administration des Fina)ices de l'Empire romain, pp. o05-
506. Cfr. DuRUY. Hist. des Rom., V, pp. 30-2 sqq.
2 Sur l'impôt en nature, voyez : Marquardt, St.-V., II-, pp. 231-234.
Org. fin., pp. 291-293. SERRiGm% II, p. 135. Rodbertus, VIII, pp. 407 et
suiv. Bouchard, pp. 299 sqq. Willems, Droit public des Romains,
6e édit., p. 610. HuMBERT, Dict. des Antiq. de Daremberg, I, p. 279,
c^. V. annonariae species.
( il )
chevaux, des cristaux, du papyrus, de la toile de lin, de
l'étoupe, etc. '. A son tour, il payait ses serviteurs à la fois en
argent et en nature. Tous les fonctionnaires et employés rece-
vaient un traitement composé d'une somme d'argent et d'un
nombre déterminé de rations alimentaires de toute sorte î^. Les
dignitaires de la cour recevaient des habits de soie et de pour-
pre. Le gouvernement fournissait aux soldats les vivres, et
en outre les vêtements et les armements, faits avec les matières
de l'impôt. Pour venir en aide à la population de Rome,
l'empereur lui distribuait toutes sortes de denrées.
Ainsi les objets en nature encombraient le budget des
recettes et des dépenses. Quelle multitude de bras devait exi-
ger ce système! Quelle foule de magasins il fallait entretenir!
Combien de matières se perdaient par la négligence ou la
fourberie du personnel !
On s'est étonné que les princes aient maintenu ce système.
On les a accusés d'avoir manqué de prévoyance et de perspica-
cité. On a dit que les Romains avaient des idées fausses en
économie politique 3, qu'ils avaient vu dans l'intermédiaire de
l'argent une complication inutile 4.
Ceux qui parient ainsi oublient que l'état social et écono-
mique des anciens différait complètement du notre. A l'origine,
l'argent était si rare que l'État ne pouvait songer à en exiger
des contribuables. Il lui était d'ailleurs plus facile de subvenir
à ses propres besoins au moyen de denrées. Quand le com-
merce se développa, quand l'argent devint plus commun et
servit d'intermédiaire aux transactions, il resta toujours rare
dans la classe la plus imposée, celle des laboureurs. Au
111® siècle, la raréfaction du numéraire se fit même sentir par-
• Vopisc, Aza-e/., 45 : Vectigal ex Aegypto urbi Romae Aurelianiis vitri,
chartae, Uni, stuppae atque anabolicas species aeternas constituit.
L'Afrique et Terracine fournissaient du bois.
- Frontin., De aquaeduct., 100 : mercedem et cibaria ex aerano.
"* Naudet, Secours publics, p. 57.
*■ Choisy, Art de bâtir, p. 208.
( 12 )
tout. Chez nous, plus on est riche, plus on achète; à Rome,
c'était une preuve de richesse que de ne rien acheter : « Ne
croyez pas qu'il achète quelque chose, dit un personnage de
Pétrone, tout naît chez lui L » Les colons payaient leur loyer en
nature 2. La monnaie n'était pas seulement peu répandue, elle
différait aussi de forme et de poids. L'impôt en nature était
donc bien en rapport avec les habitudes du pays, avec l'éco-
nomie sociale de l'Empire. Pour les modifier, il eût fallu
changer celle-ci. Une réforme radicale était impossible, elle
ne pouvait s'opérer que lentement; la volonté du Prince pou-
vait tout au plus la hâter, s'il avait trouvé des circonstances
favorables 3.
Tel était le système financier de l'Empire; il était adapté à
son état économique et on ne pouvait le transformer. Voyons
quelles conséquences il eut pour le personnel des diverses
administrations. La perception, le transport, la conservation,
la préparation et l'emploi de toutes ces matières exigeaient un
nombre considérable de bras. Tous les services s'en ressen-
taient : le blé d'Egypte et d'Afrique, par exemple, passait
par une foule de mains avant d'être distribué sous forme de
pain au peuple de Rome; il en était de même des armes et
des vêtements militaires.
Où trouver le personnel nécessaire pour assurer à jamais
l'exécution régulière de tous les services?
Dans l'antiquité, le travail matériel était fourni en grande
partie par l'esclavage. De tout temps, l'État avait à son service
des troupes [familiae) d'esclaves {servi piiblici), divisées en décu-
ries -'k Aussi, il semble que la première idée du gouvernement
1 Petron., Satir,, 38 : Nec est qiwd putes illinn quicquam emere;
omnia domi nascuntur.
2 COD. JusT., XI, 48, 1. 20. pr. et § 2. 1. 23, § 2. 50, 1. 2.
3 Cfr. RODBERTUS, op. L, VIII, p. 40o et 418, note 60. Sur la défense
de Vadaeratio, voyez Krakauer, p. 9.
*■ Voyez Lehmann, De piiblica Romcmoymm servit 11 te quaestiones, Diss.,
Lipsiae, 1889. Wallon, II, p. 85 et suiv. III, pp. 135-136. 473. Mommsen,
St.-R., I-, pp. 306-317. P, pp. 321-332. Droit public, I, pp. 362-375.
( 13 )
ait été de s'adresser ù eux. On fit du moins un essai pour deux
services. En réorganisant celui des incendies, Auguste mit à
la disposition des édiles une troupe de six cents esclav, un marchand de saumures, un marchand de blé, un
marchand de vin, un fabricant d'outrés, un charpentier ^, et
ils ont des rapports intimes avec d'autres corps de métiers.
Ils sont tous de condition libre, souvent étrangers, Trévires
ou Vangions, par exemple i. « Le Rhône, que Pline appelle
le plus riche fleuve de la Gaule, était, d'après Strabon, la
grande voie commerciale par excellence entre la Méditerranée
et les contrées du Nord 8. » De la Saône, les marchandises
étaient transportées par terre à la Seine ou h la Moselle
et arrivaient jusqu'à l'Océan, voire même en Bretagne, ou
bien dans la Belgique et la Germanie. Les échanges entre
l'Italie et la Gaule étaient réciproques. Les marchandises du
Nord arrivaient jusqu'aux grands ports de Lyon, Arles,
Narbonne, Nîmes et Marseille, où elles étaient transbordées
sur les vaisseaux des naviculaires.
' XII 2331, en l'an 37.
2 XII 3316. 3317.4107.
5 Allmer, }L deL., II, 129. De Boissieu, p. 259.
^ De Boissieu, pp. 386-387.
•"i De Boissieu, p. 393 : negotiator. Voyez le premier volume, p. 352.
« Allmer, M. de L., II 162. 165. 166. 171. 178.
^ Ibid., p. ^65. Voyez inp'a, deuxième section.
« Ibid., p. 463. Plin., H. N., III, 4. Strab., p. 177.
( 33 )
Les nautes énumérés ci-dessus ^ servaient d'intermédiaires
à ces relations continuelles; cela n'est pas douteux. Mais
étaient-ils aussi au service de l'annone publique? Alph. de
Boissieu argue de la considération dont ils jouissaient et qui
est sutiîsamment prouvée par le haut rang de leurs patrons,
par la place honorable qu'ils occupent à côté des décurions
dans les distributions publiques, par l'honneur que leur avait
fait la ville de Nîmes. Ils ont pour chef un praefedus ; or, ce
titre est généralement donné à des fonctionnaires nommés par
l'Empereur '^. Au IV^ siècle, on trouve sur le Rhône des pj-ae-
fecti classhnn •'^, résidant soit à Vienne, soit à Arles; ce seraient,
selon de Boissieu, des agents impériaux surveillant le service
des nautes, et non des commandants de flottes militaires. Tout
cela est, ou peu concluant, ou problématique ; et pourtant,
quoique nulle part on ne voie ces collèges en rapport avec un
fonctionnaire impérial, il est tout au moins très probable que
du IP au III^ siècle, ils furent chargés du transport des rede-
vances en nature, comme les scapharii de Séville ^.
En Suisse, l'Aar avait ses nautae Aniranci Aramki o. 11 y
avait encore un collège de bateliers à Marbach (sur le Neckar);
à Mayence (sur le Mein); sur le Rhin, près d'Ettlingen; sur la
< Allmer, m. de L., II, 175 : oumes navigaiites.
- Celui des nautae Rkodanici est un sévir Augiistalis, à la fois naute et
fabei' tignarius, Allmer, II, 165.
3 iSotitia Dign., éd. Seeck, p. 215, XLII, 1-4 : praefectus classis fliuniiiis
IViodani, Viennae sive Arelati. Cfr. Not. Or., XL, 36, p. 91, à la disposi-
tion du duc de Mésie : praefectus navium amnicarum et militum ibidem
deputatorum. Il s'agit évidemment de flottes militaires.
^ On rencontre encore, dans une inscription lyonnaise, un c\orpus
an]nonariorum ripariorum, surveillant, dit de Boissieu {hiscr. de Lyon,
p. 297), Temmagasinement temporaire et l'embarquement des approvi-
sionnements destinés à Rome ou aux armées; ce seraient des agents du
préfet de l'annone en Gaule. Mais l'inscription est fausse ou singulière-
ment interpolée. Léon Remer, dans Spon, Reclierche des Antiquités de
Lyon, 1858, p. 240, n. 3. Allmer, II, p. 517.
2 MoMMSEN, Iiucr. Conf. Helv., 182. 203rt. Cfr. Engelhardt, La tribu
des bateliers de Strasbourg {Revue Alsacienne, oct. 1887).
Tome L, vol. IL 3
( 34 )
Moselle, à Metz ' ; en Dacie, à Apulum (sur le Maros); en Pan-
nonie inférieure, à Emona (sur le Savus) ^; enfin, tous les
bateliers du bas Danube étaient associés {nautae iiniversi
Danuvi) 3 sous Septime Sévère.
Dans V Histoire Augmtey Vopiscus cite une lettre où Aurélien
se vante d'avoir établi en Egypte de nouveaux bateliers du
Nil ^; il veut dire sans doute qu'il a augmenté le nombre
de ces nautes, qui devaient être organisés depuis longtemps.
Au VII^ siècle, l'Église d'Alexandrie avait sa corporation de
bateliers S.
On voit combien peu de renseignements nous avons sur les
rapports de ces collèges avec l'annone; l'organisation de leur
service n'est pas connue. On sait que les villes étaient respon-
sables de l'impôt ; les curies dirigeaient la répartition et la
perception. Il est donc vraisemblable que le soin du transport
leur incombait aussi et que c'étaient elles qui, sous la haute
surveillance des agents de l'annone, répartissaient le service
des transports entre les bateliers de leur territoire, et au
IV^ siècle ce fut peut-être l'une de ces charges dont les colleyiali
s'acquittaient sous le contrôle des curiales. Mais nous sommes
réduits aux conjectures.
Quand les subsistances étaient arrivées à un port de mer,
elles étaient remises aux navicularii, ou armateurs chargés
des transports publics ^'. Sous le Haut-Empire, ce mot est pris
' Brambach, 1601. 1678. 939. Le n^ 1668 parait imité de 1678.
Robert-Câgxat, Èpigr. rom. de la Moselle, 11, p. Ho : nautae Mosallia.
2 III 1209. 10771.
^ III 7485, à Axiupolis.
* Vopisc, Yita AiireL, 47 : yavicularios yHiacos apud Aegyptiiyn
novos ... posui.
" Liebenam, p. 158, n. 1 : va'jxÀT,poi. Leontios, Vita Johannis Elee-
monis (Migxe, P. Gr., vol. 93).
6 Sur les navicularii, voyez spécialement : Gebh.\rdt (p. 16), Kra-
KAUER (p. Hj, Pigeonneau, De convectione et Annone (pp. 220-237).
Matthiass (pp. 12-30). Dig., 3, 4, 1. 50, 5, 3. 50, 6, 6 i5). G. Th., 13, 5
et 6, et le Paratitlon de Godefroy, vol. V, pp. 61-65. 83. — Syno-
{ 35)
dans un sens plus général; il désigne tous les propriétaires de
vaisseaux {domini navium)^, soit qu'ils louent leurs navires à des
négociants, soit qu'ils fassent eux-mêmes le commerce, soit
qu'ils transportent le blé de l'Etat. Tous ceux qui apportaient
les denrées d'outre-mer dans la capitale furent peut-être com-
pris sous le nom général iVanabolicaiii -. L'appât des privi-
lèges qui leur étaient réservés dut accroître rapidement leur
nombre. Du reste, l'approvisionnement des greniers de l'État
exigeaitdéjà une multitude de navires; Pigeonneau calcule que,
vers la fin de la république, il fallait une flotte de quatre cents
vaisseaux, ou au minimum de cent à cent cinquante, si l'on
suppose que chacun fasse plus d'un voyage par an 3. H faut y
ajouter les navires employés au commerce et aux spéculations
privées. Les naviculaires, propriétaires de tous ces navires,
formèrent des collèges, qui finirent par devenir des institutions
exclusivement officielles, si bien qu'au !¥•« siècle, qui dit navi-
culaire, dit armateur de l'État. Avant de rechercher comment
ces collèges, d'abord libres et privés comme tous les autres, en
arrivèrent là, nous allons énumérer ceux que nous connais-
sons.
On n'en trouve pas au l^"" siècle 4, mais au temps de Gains,
c'est-à-dire vers le milieu du 11^ siècle, il y en a partout,
à Rome et dans les provinces, et ils sont autorisés : collegia
nyme : nauclerus, vaûxXfipoç. Navicularius s'applique aussi aux bateliers
des fleuves (jiautae); voyez notre Index collegiorum, s. v. navicularii
amnici. Pour les distinguer on dit : navicularii marini.
1 Domijii navium, C. I. L., XIV 99. 4142. DiG., 19, % 13. 1. 27, 1, 17, 6;
)uayiste[r] navium. Or. -H., 7242. Magister navis désigne d'ordinaire le
capitaine. Voyez plus loin, chap. IL — Les propriétaires s'appellent
aussi exercitores naviiim. DiG., 4, 9, i, 3. Gfr. Heumann, Handlexikon,
p. 192.
2 Fragm. Vat., 137. Cependant le sens de ce mot est fort discuté. Voyez
notre Index collegio7itm.
5 Annone, p. 222. Deconvect., pp. 17-18.
* On trouve sous Auguste des Ostienses navindariei {XIV 3603, à
Tibur).
( 36 )
Romae certa sunt, quorum corpus senalusconsultis atque consti-
tutionibus principalibus confirmalum est, veluti pistorum et
quorundam aliorum, et naviculariorum, qui et in provinciis
sunt '.
Le collège de Rome était peut-être aussi ancien que celui des
boulangers auquel Gaius le joint et qui existait dès avant
Trajan. Son existence est encore attestée vers le milieu du
IV® siècle par une inscription romaine et par plusieurs
constitutions impériales adressées au préfet de la ville ^, dont
les pouvoirs ne s'étendaient qu'à un rayon de 100 milles
autour de la capitale. On peut se demander de quel service
spécial ce collège était chargé, car chaque province frumen-
taire 3 avait son collège particulier.
Sous la république, Rome était nourrie par la Sicile et par
la Sardaigne ; sous l'Empire, il n'est plus guère question de
la Sicile, mais en l'an 173 nous voyons les domini navium Sar-
dorum (sic) honorer un riche négociant en blé, premier magis-
trat d'Ostie -^j et au IV« siècle. Prudence parle encore d'une
flotte apportant le blé de Sardaigne ^.
Cependant, dès le temps d'Auguste, les véritables greniers de
Rome furent l'Egypte et l'Afrique : sous le règne de ce prince,
la première fournissait le canon de quatre mois, soit 20 mil-
lions de boisseaux, et l'Afrique donnait le reste; sous les
Flaviens, l'Egypte fournissait un tiers et l'Afrique les deux
autres c. Dans sa Vie d'Auguste, Suétone parle d'une flotte
qui apportait d'Alexandrie des marchandises de toute nature
' Gaius, Dig., 3, 4, 1, pr. Voyez le premier volume, p. 155.
2 VI 1740. C. Th., 13, 5, 1. 9. 11. 13. 29. 38. 6, 1. 2 (au Praef. Urbi).
5 Sur ces provinces, voyez Krakauer, pp. 4-8. Pigeonneau, De convect.,
pp. 27-33. GoTHOFR., ad. C. Th., 14, 15.
* Voyez infra, p. 37, n. 6.
^ Contra Symm., II, 943.
^ AuR. ViCT., Epit., 1. Joseph., B. Jud., II, \Ç), 4. Depuis Aurélien,
l'Egypte fournit aussi du verre, du papyrus, du lin et de l'étoupe iVopisc.
Aurel., 45). Cfr. Marquardt, St. -Y., IP, pp. 126. 234. Trad., pp. 158.
294. Pigeonneau, Annone, p. 223.
( 37 )
(Alcxandrinae merces) et pas seulement les denrées de l'an-
nonc '. On la retrouve sous Caligula et sous Claude; Sénèque
l'appelle classis et dit qu'elle était composée de navires
d'Alexandrie; sous Commode, une statue est élevée à ce
prince par les yTJxXr\poi toO 7:op£'jT!.xoû 'AAe^avopsivoj o-toAo'j "'^,
qui formaient alors un collège, sans qu'on puisse dire depuis
quelle époque. Sous Septime Sévère (193-211) et sous Cara-
calla (198-217), nous trouvons un procuralor de toute la (lotte
alexandrine 3 ; au IV^ siècle, cette flotte existait encore (Alexan-
drinus stolus ou Alexandrina classis) ; elle appartenait au corpus
mtviculanonim d'Egypte et fut réservée par Constantin à la
capitale nouvellement fondée 4. Justinien parle encore du blé
apporté d'Egypte ^.
Quant à l'Afrique, en l'an 141, les domini navium Cartha-
(jinïensium ex Africa élèvent une statue à Antonin le Pieux à
Ostie, et en l'an 173, les domini navium Afrarum luiiversarum
s'unissent à ceux de Sardaigne pour honorer un duumvir
d'Ostie ^. 11 ne s'agit pas là de collèges, mais on voit que déjà
' SuET., Aiig., 98 : in emplionem Alexandrinarum mercium.
2 Joseph., Antiq. Jiid., t9, 2, 5. Senec, Ep., 77, 1 (éd. Haase, X,
1, 1) : ex ipso génère velorum Alexandrinas quamvis in magna turba
navium intellegit. C. I. Gr., 5889. Kaibei.. 918. Voyez infra, p. 51.
3 C. I. Gr., 5973 =^ Kaibei., 919 : F. O'jaXô'p-.oc; Sôpr^vo:, 6 ETrifjLEÀTjTT);
7rav-ô? Toij 'AXsçavôpeîvou aTo'Àoo, sous Seplime Sévère.
* Voyez les auteurs cités supra, p. 21, n. 5. — C. Th., 14, 46 : De
frumento Urbis CP. Pour le blé d'Egypte réservé à CP., voyez Gothofr.
ad C. Th., 14, 26, 1. 1. Claudian., Bell. Gild., vers 52 et suivants.
SOCRAT., Hist. EccL, II, 43, en 342 : to'j aiTou ex Trjc; 'AAsçavcpstov xoai-
l^o[j.£vo'j TTo'Xswç. Sur les événements de 403, auxquels sont mêlés les
naviculaires venus d'Egypte, voyez : Socrat., Hist. EccL, VI, 15, et
SozoMEN., Hist. EccL, VIII, 47 : lo oè xwv 'AXs^avSpEwv t6 va-jxixov. Sur
le concours de VAlexandrimts stolus (I. 7) ou Alexandrina classis (I. 32),
voyez C. Th., 13. 5, 1. 7 (en 334). 44 (374). 48 (390). 20 (392). 32 (409).
s Edict. Just., XIII, 4 à 8. 42. 22. Cfr. Johann. Episc. Ephes. Histor.
fragm., p. 249, éd. d'Amsterdam, 4889 : Ji naucleri, annonae publicae
adveclores, cum omnes fidèles essent (VI^ siècle). Liebenam, p. 284, n. 5.
« XIV 99, en 444.4442, en 473.
( :^8 )
les armateurs africains avaient conscience des intérêts com-
muns qui les unissaient. Lampride rapporte que Commode
(176-192) institua à Carthage une classis Africana, appelée
Commodiana Herculea, pour assurer l'approvisionnement de
Rome, si les blés d'Alexandrie faisaient défaut '. Au IV^ siècle,
il est encore fréquemment question des navicularii Africani ou
Afri, appelés aussi navicularii per Africain ou intra Africam,
qui formaient une corporation spéciale '^.
En Espagne, il y a, sous Marc Aurèle et Verus, un adjulor
Praefecti annonae, chargé de surveiller le transport de l'huile
et du blé d'Espagne et d'Afrique et de payer leur salaire aux
naviculaires '^, Deux lois du Code Théodosien s'appliquent
spécialement à ceux d'Espagne que Constantin appelle navicu-
larii Hispaniarum *. Depuis ce prince, l'Afrique et l'Espagne
doivent, h elles seules, approvisionner Rome; cependant, en
cas de besoin, l'Egypte venait au secours de l'ancienne capi-
tale s, comme l'Afrique venait parfois en aide à la nouvelle ♦^
' Lamprid., Commod., 17 : classem Africanam instituil quae subsidio
esset, si forte Alexandrina frumenta cessarent. Voyez infra, p. 5"i.
2 C. Th., 13, 5, 1. 10 (364). 36 et 37 (412). 9, 1. 3 (380). 11, 28, 1. 8 (414;. -
Le.*; lois qui les concernent spécialement sont nombreuses : C Th- , 6,
29, l. 11. 12, 1, l. 149. 13, r>, 1. 6. 10. 12. 14, § 3. 21. 24. 23. 30. 36-38.
13, 6, 1. 3. 4. 6. 7. 10. 13, 9, 1. 2. 3. 6. Dans la suscription du C. Th., 13,
5, 1. 16 (380), GoDEFROY propose de lire : Corpori naviculariorum
(Afrurum), comme dans C. Th., 13, 9, l. 3, qui est de la même année.
C. Th., 13, 6, 1. 4 (367) : navicularium corpus. 12, 1, 1. 149 (395) : ordo
naviculariorum. Tertullian., Adv. Mareionem, IV, 9 : naviculariorum
collegium (éd. Migne, II, p. 374). Symmach., ReL, 44, § 2 (X, 38). C. I. L..
VIII 969 : ex t{ransvectiirario) et nav{iculario), en l'an 400; cfr. 913 : ext.,
et 970 : [^]r. et nav. Tissot, Fastes de la province d'Afrique, p. 278.
^ C. /. L., Il 1 180 : adjutor praefecti annonae ad oleum Afrum et Hispa-
num recensendum, item solamina (le blé et l'huile) transferenda, item
vecturas (prix de transport) naviculariis exsolvendas. Voyez Hirschfeld,
Annona, p. 80.
^ G. Th., 13, 3, 1. 4 (324). 8 (336).
- SiDON. Apoll., Ep., I. 10. Symm., Rel, 9. 33. 37. 48.
c G. Th., 13, 9,1.2.
( 39 )
Il arrivait aussi que Rome demandait un supplément à la
(iaule, Il la Germanie ' et à d'autres contrées - ; de partout
les naviculaires lui apportaient les denrées. La Gaule eut de
bonne heure des collèges spéciaux de riavicularn marini; au
II« et au III« siècle, on les trouve à Arles, à Narbonne et peut-
être à Lyon 3; dans chacune de ces villes, ils formaient une
corporation et celle d'Arles était si importante qu'elle compre-
nait cinq corps ou sections. G'est par leur entremise sans
doute que l'Italie, la Gaule et les pays voisins échangeaient
leurs produits, mais ils dépendaient aussi de l'annone, car le
collège d'Arles honore un patron qui est procurator Augusto-
rum ad annonam provinciae Narbonensis et Liguriae ^.
Une inscription d'Ostie et une autre de Kome nous parlent
de naviculaires de la mer Adriatique, et nous trouvons des
armateurs et même des collèges d'armateurs dans différents
ports de cette mer : à Pisaurum, à Salone, à Ravenne. il y en
avait certainement aussi dans la mer Tyrrhénienne, par
exemple à Tarracine, à Oslie et ailleurs ., II, 459.
* C. I. L., XII 672 : nav{icidariorum) marin{orum) Arel. corp{ora)
quinqiue), au I^ siècle.
5 Collegium navic. colon. Pisaiirensis : Grit., 484, 9. Murai., 520, 4.
WiLMANNS, 2112. — Nauclerus, à Salone, IX 3337. Nauta, à Ravenne,
XI 135. 138. yavlicn'jliarii) Tarric{inenses), XIV 279. Naû[xXTi]po'., Kaibel,
401. Ostienses navictilariei, XIV 3603, sous Auguste. Corpus maris
Hadriatici, VI 9682; navicularii maris Hadriatici, au 11^ siècle, XIV 409.
6 C. I. L., VI 9682, à Rome : Negotiaris vi7iarius, item navicularius,
curator corporis maris Hadriatici.
( 40 )
tion de l'annone, leur rôle devait être secondaire, sauf peut-
être quand Milan et Ravenne furent devenues résidences
impériales ; alors ces deux villes tirèrent leurs subsistances
d'illyrie et de Lucanie, et elles étaient probablement desservies
par les naviculaires de l'Adriatique *.
Ce fut Constantin qui organisa les navicularii Orientis, ou
Orientales navarchi^ pour desservir, avec ceux d'Egypte, la
ville de Constantinople; ils formaient une corporation (cor/?ws)
que le Code Théodosien appelle aussi navarchorum coetus ou
concilium, et ils possédaient deux Hottes : celle d'Asie ou de
Syrie et celle de Carpathos -. Cependant, bien avant cette
époque, il existait des naviculaires dans les principaux ports
de l'Orient, et il est probable qu'ils y formaient des collèges
locaux, par exemple à Smyrne ou à Éphèse (en l'an 154), ù
Arados, en Phénicie, enfin à Tomi, sur la mer Noire, au
Il« siècle 3.
Entre les collèges que nous venons de passer en revue, il
faut faire une distinction. Un certain nombre sont des collèges
municipaux, tels que ceux d'Arles, de Narbonne, de Lyon, de
Tarracine, d'Ostie, des ports de l'Adriatique, de Tomi, de
Smyrne, d'Ephèse et d'Arados, comme le prouve suffisamment
leur nom ^^\ ils exerçaient leur activité bien au delà du terri-
1 Pigeonneau, A7inone, p. 233. — D'Istrie venaient le vin et l'huile
(Câssiod., Var., XII, 24) : sed vos, qui numerosa navigia in ejus confi,niû
possidetis, pari devotionis gratia providete, ut, quod illa [scil. Histria)
parata est tradere, vos studeatis sub celeritate portare.
2 C. Th., 13, 5, 1. 7. 14. 32. Pigeonneau, Annone, p. 232. De convect.,
pp. 76 et 94.
5 C. /. Gr., 5888 : [ol itiq [jLTjTpoTroXew; 'Ajaiai; — vauxXïjpoi. A Arados,
C. I. Gr., 4536*^ : TrpdoouXo; xûv vaoap^Tjaccvxwv, sous Auguste. A Tomi,
6 oTxoi; Twv sv Td[jL£i vauxX/jptov, C. I. L., III, p. 144.
* Ils y ajoutent le nom de la ville : navicularii marini Arelatenses, etc.
Ceux de Pisaurum ont le même patron que plusieurs collèges munici-
paux. Il faut surtout remarquer Wilm., 2112 : patronus coU{egiorum)
fabrum, cent{onariorum), naviciulariorum), dendr{ophorum), où ils sont
intercalés entre des collèges qui se suivent toujours dans le même ordre.
( 41 )
toire de leur ville, mais ils ne transportaient pas les denrées
jusqu'à Home. Tout en faisant le commerce de cabotage pour
leur compte, ils jouaient dans l'administration de l'annone un
rôle qui est peu connu et qui devait ressembler à celui des
bateliers fluviaux: ils faisaient les transports dans leur pro-
vince. Les autres naviculaires, grands et puissants collèges,
apportaient directement les denrées dans les deux capitales. Il
ressort de ce qui précède que, dans le cours du II« et du
11 1« siècle, un corps spécial s'était formé dans chaque pro-
vince frumentaire, outre celui qui résidait à Rome même i :
le Code ïhéodosien distingue clairement ceux d'Espagne,
d'Afrique, d'Egypte et d'Orient; l'administration faisait dresser
à part la liste des membres inscrits dans chacun de ces col-
lèges -; des privilèges différents leur étaient accordés 3 ; des
faveurs spéciales leur étaient octroyées 4 ; des mesures de pro-
tection sont décrétées tantôt en faveur des uns, tantôt en faveur
des autres i>; enfin ils sont surveillés par les gouverneurs et
autres fonctionnaires de leurs provinces respectives, à qui sont
adressées les constitutions impériales 6. Us sont donc bien
distincts et l'on s'attend à les entendre qualifier de noms tels
que : corpus naviculariorum Afrorum, Hispanonun, etc. Or,
jamais les empereurs du IV« siècle ne désignent ainsi les divers
collèges de naviculaires; quand ils emploient le terme corpus
naviculariorum, ils ne le font jamais suivre d'une épithète indi-
quant la province, et l'on peut se demander s'ils n'entendent
pas par là une corporation composée de tous les armateurs de
TEmpire, soumise à des règlements communs à tous, mais
* Karlowa, I, p. 915, va jusqu'à dire : Die navicularii bildetcn in den
einzelnen civitates ein corpus, consortium, concilium.
2 C. Th., 13, 5, 1. 14. Leur nombre était fixé : certus mnnerus. Voyez
infra, chap. III.
5 Ibid., § 3 : privilégia Africana.
* C. Th., 11, 28, 1. 8 : naviculariis intra Africam.
* Voyez infra, chap. IV.
6 Vovez infra, chap. III.
( 4-2 )
divisée en sections provinciales bien distinctes, qui ont parfois
des droits et des devoirs différents. Quoi qu'il en soit, qu'il
s'agisse d'un collège unique, divisé en sections, ou de collèges
entièrement différents, les naviculaires de chaque province ont
un service public spécial, restreint aux limites de leur province.
Nous devons dire maintenant comment ce service était
organisé et quel rôle les armateurs jouèrent dans l'administra-
tion de Tannone. Ce rôle se modifia dans le cours des siècles
et il n'est pas facile de dire quelles phases il traversa avant de
devenir tel qu'il apparaît au Bas-Empire. Cependant on peut
en distinguer trois : la première, la moins connue, s'étend jus-
qu'aux Antonins; sur la seconde, souvent mal comprise, on
trouve quelques renseignements dans les jurisconsultes clas-
siques (11^ et 111^ siècles) ; la troisième apparaît clairement dans
le Code Théodosien (IV^ et N^ siècles).
Les premiers efforts des empereurs tendirent à augmenter
le nombre des propriétaires de navires [naviciilani, domini
navium) qui concouraient aux approvisionnements de Rome,
qui annonae urbis serviunt. Ils encouragèrent la construction
de vaisseaux destinés au transport maritime des denrées à desti-
nation de la capitale, en accordant des privilèges à leurs pro-
priétaires : Claude promit, le premier, le droit de cité aux
Latins, l'exemption de la Lex Papia Poppaea aux citoyens et le
jus trium îiberorum aux femmes. Ces armateurs rendaient à
l'État un important service, car de l'arrivage régulier des sub-
sistances dépendaient la sécurité de Rome et le maintien de
l'Empire; or, les charges qui incombaient à tous les provin-
ciaux dans leur ville d'origine rendaient difficile l'accomplis-
sement de cette sorte de service public, qui les forçait de
s'absenter presque toujours; voilà pourquoi on les dispensa
de toutes les charges municipales. Dès avant Hadrien, cette
immunité fut accordée à tous les propriétaires de navires
desservant Rome et même aux simples négociants qui fournis-
saient le marché romain des denrées d'outre-mer '. A mesure
' Sur ces privilèges, voyez infra, chap. IV.
( 43 )
que, dans le cours du I'-'" siècle, le gouvernement renonçait
aux publicains, il dut engager un certain nombre d'armateurs
pour fair*c les transports publics, c'est-à-dire pour amener à Home
les céréales, l'huile et le vin nécessaires aux distributions et
à la vente à bas prix. Ces naviculaires qui transportaient les
denrées de l'Etat, jouissaient des privilèges communs à tous
ceux qui approvisionnaient la capitale par le commerce, mais
l'État devait leur assurer, en outre, un équitable salaire ou prix
de transport [vecturae). Sans doute, ils pouvaient continuer à
trafiquer pour leur compte, parce que les transports publics
ne réclamaient ni tout leur temps, ni tous leurs navires; mais
leurs immunités, qui n'étaient pas plus importantes que celles
des autres naviculaires, ne suffisaient pas pour compenser les
frais qu'ils avaient à supporter. On ne peut admettre que dès
l'origine la charge qu'ils assumaient fût considérée comme un
ïnimus publicum suffisamment compensé par l'exemption des
autres munera imposés à la généralité des contribuables *.
Qui eût voulu, à ce prix, assumer spontanément une charge si
lourde, surtout qu'il suffisait, pour jouir de l'immunité, d'ap-
provisionner le marché de Rome? Et à cette époque, il ne peut
être question d'un munus imposé par contrainte à une classe
spéciale de contribuables, puisque nous allons voir que sous
Septime Sévère les naviculaires jouissaient encore d'une liberté
* C'est l'opinion récemment soutenue par Matthiass. Le transport
aurait été imposé, dès le début, comme un munus publicum, à un certain
nombre de provinciaux, propriétaires de navires, requis par les gouver-
neurs. Ainsi se seraient formées d'abord les flottes d'Alexandrie, d'Afrique
et de Sardaigne. Ensuite l'État les aurait organisées en collèges enrôlés
dans l'administration de l'annone, comme employés subalternes.
L'exemption des autres munera n'est qu'une compensation du munus
spécial qui leur est imposé et dont les autres sont déchargés. Cfr, Rod-
BERTUS, pp. 417. 420 et suiv. Matthiass (p. 16, n. 36) est forcé d'admettre
que ces collèges de naviculaires existaient déjà sous Claude, qui accorda
les premiers privilèges ; mais ces privilèges sont accordés à tous les pro-
priétaires de navires, et il n'y avait certainement pas encore de collèges
à cette époque.
( 44 )
entière. Nous avons, du reste, des preuves de l'existence de
ces indemnités payées aux entrepreneurs des transports
publics. Pigeonneau a cru que c'était Trajan qui, le premier,
« traita de gré à gré avec les particuliers et suspendit les adju-
dications publiques des transports » '.Il nous semble que le
passage de Pline qu'il allègue ne parle que de l'impulsion
donnée par ce prince au commerce : diversas gentes ila corn-
mercio inisaiit iit, quod genitum esset usquam, id apud omiies
natum esse videretur. Plus de réquisitions de blé, plus d'achat
forcé, plus d'indictions extraordinaires : les alliés nous
apportent eux-mêmes les produits de leurs campagnes, deve-
hunt ipsi qitod terra genuit. S'agit-il ici d'armateurs provinciaux
engagés par l'Etat, ou plutôt de négociants provinciaux qui
approvisionnent librement le marché romain? Ce dernier sens
nous semble résulter du contexte : au lieu d'exiger les denrées
des provinces, Trajan s'adressa au commerce. Cependant les
marchés directs avec les armateurs sont hors de doute; nous
en avons une preuve certaine : c'est cet adjutor Praefecti
anuonae... advecturas naviculariis exsolvendas, qui résidait en
Espagne sous Antonin le Pieux ^. Au 1V« siècle, nous trouve-
rons encore des traces de ce salaire 3. Nous ne saurions dire
* Pigeonneau, De convect., p. 46. Annone, p. 227. Voici tout le passage
de Pline : Diversasque gentes ita commercio miscuit, ut, quod genitum
esset usquam, id apud omnes natum esse videretur. Nonne cernere datur,
ut sine ullius injuria omnis usibus nos tris annus exuberet? Quippe non,
ut ex hostico raptae perituraeque in horreis messes, nequidquam quiri-
tantibus sociis auferuntur. Develiunt ipsi, quod terra genuit, quod sidus
aluity quod annus tulit : nec novis indictionibus pressi ad vetera tributa
deficiunt. Emit fiscus, quidquid videtur emere. Inde copiae, inde annona,
de qua interlicentem vendentemque conveniat (Paneg., 29).
2 Voyez supra, p. 38, n. 3.
5 Voyez infra, chap. IV. L'existence d'un véritable contrat conclu par
l'État avec les naviculaires ou avec leurs collèges est admise par
HiRSCHFELD, Aunona, p. 60. Marquardt, Vriv., p. 390 (407). Trad., II,
pp. 24-25. Schiller, Gesch. der rom. Kaiserzeit, II, p. 80. Karlowa,
I, pp. 556. 914. 926-927. Liebenam, pp. 49 et 69. — Matthiass ne
l'admet naturellement pas.
( 45 )
s'il était variable et librement débattu entre les intéressés et
l'État, ou s'il était offert par l'Etat et accepté par qui le trouvait
suHisant. En tout cas, il devait être assez élevé pour que, joint
à l'appât de l'immunité, il attirât un assez grand nombre de
naviculaires et les retînt au service des transports. Ces entre-
preneurs des transports publics devaient posséder de nom-
breux navires appropriés à cet usage ^ comme il en existait
pour le transport du marbre -. Il est probable qu'ils formaient
des compagnies, parce que l'association présentait de nom-
breux avantages 3 : les petits capitalistes et les sénateurs pou-
vaient participer à ces affaires sous une firme étrangère •*; il
était aussi plus facile de réunir les fonds considérables qu'exi-
geaient des flottes marchandes et les risques étaient partagés.
On ne sait rien de l'organisation de ces sociétés : elles devaient
ressembler à celles des publicains. Grâce aux privilèges, ce
régime avait une grande stabilité; pour les conserver, les
armateurs engagés par l'Etat et ceux qui approvisionnaient le
marché pour leur compte ne demandaient pas mieux que de
continuer, et le transport des subsistances d'outre-mer à desti-
nation de Rome devint une profession habituelle. Tous ces
armateurs obtinrent la permission de former des collèges, qui
apparaissent peut-être pour la première fois dans le passage
cité de Gains, mais qui existèrent probablement avant ce juris-
consulte. A l'époque de Septime Sévère commence la période
de transition entre les compagnies libres et les collèges obli-
gatoires du IV^ siècle. Ce que le Digeste rapporte des collèges
de naviculaires prouve qu'à l'origine ils étaient complètement
libres, composés d'armateurs de toutes sortes et pas seulement
* Liv., XXI, 63, 3 : maritima navis. DiG., 50, 6, 6 (3), § o : naves
maritimae.
•2 Plin., iV. H., 36, 2 : navesque marmoris causa fiunt.
5 3IARQUARDT, Priv., II', pp. 388-389. IP, p. 40o. Trad., II, p. 24.
Karlowa, I, p. 556, dit des corporations de l'annone en général : iiiie
sind — zu freien Societaten vereinigt, dann luerden sie, eben jener daiiern-
den Leistungen halber, stândige vom Staate genehmigte Korporationen.
^ DiG., 4, 9, 7, § 5 : sipliires navem exerceant.
( 46 )
de naviculaires engagés par l'Etat; ils se constituaient pour
travailler à leurs intérêts particuliers et non pour servir le gou-
vernement. Il ne faudrait donc pas croire ' que dès leur institu-
tion les collèges furent chargés collectivement des transports
et que les collèges furent établis pour remplacer les compa-
gnies libres, avec cette seule ditiérence que le collège était
perpétuel et la société temporaire. Non, l'Etat ne contractait
pas avec les collèges; les contrats continuaient à être indivi-
duels et temporaires. Cela résulte de ce que nous savons des
privilèges et de la composition même des collèges de navicu-
laires, depuis Antonin le Pieux jusqu'à Caracalla.
Nous connaissons deux rescrits, l'un d'Antonin le Pieux,
l'autre de Marc Aurèle et de Verus. Voici le premier : Divus
quoque Puis rescripsit, ut, qiiotiens de aliquo naviculario quae-
ratur, iJlud exculiatin\ an effugiendoriim munerum causa ima-
ginem navicidarii indiiat ^. D'autre part, voici ce que dit
Callistrate : Lket in corpore navictdariorum quis sit, navem
tamen vel naves {si) non habeat nec omnia ei congniant, quac
principalibus constitutionibus cauta sunt, non poterit privilegio
naviculariis indulto uti. Idque et divi fratres (Marc Aurèle et
Verus) rescripserunt in haec verba : ^Ho-av xal aX).o'. tiveç e-1
— GOcpaTE!. Twv yxuyX'f^più'^ xal twv o-rTOV xal è7a',ov èuizopz'jo-
juévwv eiç, t7,v dyopàv to'j OTitjLO'j to'j Pto^ualxoCi ôvTwv àT£Awv
àç'.o'JVTEç Ta; "XeiTovpyioLç Siaôs.opào'xst.v, iJif^ze £-'.7t)iovT£ç [jly,t£
t6 ttâÉov iJ.époç Tfjç o'jo-iaç év Tatç vaux^Yipia!.; xal -zyXq ia-o-
pîaiç â'yovTEç. 'A'^a!.p£G'/iTW twv towjtwv yj aT£X£!.a 3.
On voit que, sans aucun doute, les collèges étaient princi-
palement composés de domini navium ou naviculaires, qui
mettaient à la disposition de Tannone des navires d'une capa-
cité déterminée, navicidarii qui annonae urbis serviunt ^, c'est-
à-dire qui entreprenaient le transport des denrées publiques
' Avec Pigeonneau, Annone, p. 227.
2 DiG.,oO, 6, 6(5), §9.
•"' DiG., ibid., § 6. — Sur le 11^ et le Ille siècle, voyez : DiG., 50, 6.
^ DiG., ibiiL, § 3 {infra, p. 49, n. -4). Cfr. DiG. 50, 5, 3 : His, qid naves
( 47 )
OU qui approvisionnaient librement le marché de Rome i.
Des corporations instituées par l'Etat pour remplacer les
publicains, chargées d'office et collectivement du transport des
denrées publiques, n'auraient pas compris les armateurs qui
apportaient les céréales sur le marché romain pour leur
compte personnel, et au IV<^ siècle, quand les collèges sont
réellement devenus des institutions ofiicielles, ils ne sont plus
composés que d'armateurs qui transportent les denrées
publiques. Au JI« siècle, ils se recrutaient encore eux-mêmes
et l'on voit par le rescrit de Marc Aurèle et de Verus qu'ils
renfermaient même des membres qui n'avaient pas de navires
ou qui du moins ne remplissaient pas les conditions exigées
pour jouir des privilèges : « ils vendaient le blé et l'huile sur
le forum romain, mais ne naviguaient pas et ne consacraient
pas la majeure partie de leur fortune à la navigation et au
négoce w. L'admission de ces faux naviculaires, que l'empereur
n'exclut pas des corporations, mais des privilèges, ne prouve-
t-elle pas suffisamment que les corporations n'étaient pas
tenues, comme telles, au transport des denrées publiques?
C'étaient donc certains membres des collèges qui s'engageaient,
individuellement ou par compagnies, à transporter les céréales
et rhuile pour l'Etat; ils pouvaient du reste renoncer à cet
engagement et perdaient alors les subventions, et aussi les
privilèges dont ils ne jouissaient que pendant qu'ils étaient
au service actif {quamdiu in ejusmodi aclu siint; ^-2. D'autres
membres apportaient les denrées au marché et ne recevaient
aucune subvention de l'Etat, mais seulement des immunités.
marinas fabricaverunt et ad annonam popiUi Romani praebuenint —,
nnmeris pubiici vacatio praestatur ob navem (Scaevola).
* La distinction semble faite clans les mots : èttI -oc'^âcrs'. -div
va'JxXrjpcov xal twv — £ui7iop£uo[X£vcov, et plus loin : £v xal? vauy.ÀTjp'a'.;
xal -cC.c, £[j.7ropîai<;. Les uns et les autres avaient Vimmunitas a muneribus
publias (DiG., 50, 6, 6 (5), § 3). Kuhn affirme à tort (II, p. 11) qu'à cette
époque les naviculaires sont tous des commer(;ants fournissant le marche
romain.
- DiG., îbid., ^ 3 [infra, p. 49, n. i).
(48 )
11 pouvait en exister d'autres enfin qui n'avaient ni privilèges
ni subventions, parce qu'ils ne servaient pas l'annone du tout.
On ne conçoit pas que des collèges ainsi composés soient
tenus collectivement à un service public, qu'ils constituent des
corps de contribuables formés par l'État pour assurer l'exécu-
tion d'un munus spécial. Non, le collège n'est pas chargé d'un
munus; ses membres concluent, quand ils le veulent, des enga-
gements individuels et temporaires, comme leurs privilèges.
Ces privilèges ne dépendaient pas primitivement de l'affiliation
à un collège, mais ils étaient attachés aux navires : l'immunité
était donnée ob navem ^ ; on l'appelait immunitas navium
maritimarum -, et elle était accordée aux armateurs qui four-
nissaient le marché romain comme aux entrepreneurs du
transport des denrées publiques 3.
Sans doute, peu de ces naviculaires négligeaient de s'affilier
à un collège, et la plupart des membres étaient en passe de
jouir des immunités. Une conséquence naturelle, ce fut que
l'immunité parut attachée à la qualité de membre du collège.
L'affiliation était au moins une présomption qu'on remplissait
les conditions voulues et il y eut des gens qui, pour jouir des
privilèges, entrèrent dans une corporation. Cela se passa dès
le règne d'Antonin le Pieux, qui dut prendre des mesures
contre ces faux naviculaires : « Chaque fois, dit-il, qu'il s'agit
d'un naviculaire, il faut s'assurer s'il n'a pas pris l'air d'un
naviculaire pour échapper aux charges. » Callistrate dit de
même : « Bien que quelqu'un soit dans le corpus naviculario-
» DiG., 50, 5, 3. Cfr. Ulpian., Fragm., III, 6.
2 DiG., 50, 6, 6 (5), § 5 : Diviis Hadrianus rescripsit immunitatem
naviiim marinarum dumtaxat habere, qui annonae urhis serviiint. § 6 :
navem tamen vel naves (si) non haheat.
5 Tout ceci est contraire au système de Matthiass (voyez snpra,
p. 43, n. 3). Il est forcé d'admettre que la sortie du collège n'était pas
libre, mais il ne le prouve pas. Et comment expliquer que le collège
renferme tous les naviculaires, même ceux qui ne transportent pas les
denrées publiques, et que les empereurs y tolèrent même ceux qui ne
remplissent aucune des conditions exigées?
(49 )
riim, s'il n'a pas de navires et ne remplit pas toutes les condi-
tions exigées par les constitutions impériales, il ne pourra
jouir du privilège accordé aux naviculaires ». Marc Aurèle et
Verus renouvelèrent ces mesures. Ces rescrits prouvent que le
collège était libre dans son recrutement et que si tous les
membres élevaient des prétentions aux privilèges en leur qua-
lité de membres, ces prétentions n'étaient pas toujours
admises. Pourtant cette idée que le collège procure l'immu-
nité fait son chemin, et sous Septime Sévère déjà, Callistrate
parle de colleginm, qiiod immimitatem pariât ^, et de œrpora
quae immunitaiem praebent, ut navimlariorum -.
En même temps une autre idée s'était fait jour. Les privi-
lèges fixés définitivement sous Septime Sévère et Caracalla ^
consistaient avant tout dans l'exemption de toutes les charges
municipales. Pour justifier cette immunité contraire à la règle
de l'égale répartition des charges et onéreuse pour les autres
possessoreSy Callistrate déclare que l'importation des denrées à
Home est aussi une charge publique {miinus publicum) et qu'il
est par conséquent raisonnable d'exempter des autres charges
ceux qui ont assumé celle-ci ^, La fonction du naviculaire,
comme on dira au IV^ siècle, quoique rétribuée, commence
donc à être assimilée à un \ érit^hle munus publicum; il ne
s'agit pas encore de l'imposer, mais de justifier le privilège
qu'elle procure. Cette conception était naturelle, mais ne
remontait pas à l'origine, comme l'affirme Matthiass ; jusque-
• DiG.,50, 6, 6(5), §7.
- DiG., ibid., § 13. Cfr. § 6 : licet in corpore naviculariorum quis sit.
3 DiG., ibid.^ § 4 : hmnunitati, quae navicidariis praestatur, certa
forma data est (Câllistratus).
* DiG., 50, 6, 6 (5), § 3 : iSegotiatores , qui annonam urbis adjuvant,
item naviailarii, qui annonae urbis serviunt, inimunitatem a muneribus
publicis conseqimntur, quamdiu in ejusmodi actu sunt. Nam renmneranda
pericula eorum, quin etiam exhortanda praemiis merito placuit, ut qui
peregre muneribus et quidem publicis cum periculo et labore fungantur,
a dames ticis vexationibus et sumptibus liberentur : cum non sit alienum
dicere etiam hos reipublicae causa, dum annonae urbis serviunt, abesse.
Tome L, vol. IL i
( 30 )
là elle n'apparaît nulle part, et dans la pensée de Callistrate
même elle n'est encore qu'une simple comparaison (cum non
sit alienim dicere etiam hos...) destinée à expliquer l'exemption
des naviculaires. Le jour où l'immunité fut considérée comme
attachée au collège, et le collège comme investi d'une charge
publique, celui-ci apparut comme une institution ofticielle,
destinée à assurer un service public et établie dans ce but,
comme beaucoup d'autres collèges professionnels '. Institués
pour assurer un service public et exemptés, pour ce motif,
des autres charges, tels apparaissent les collèges de navicu-
laires aux contemporains de Callistrate. Il ne restait qu'un pas
à faire pour arriver à la situation du IV« siècle : il fallait que le
collège fût chargé collectivement, comme collège, du transport
des denrées publiques, de la functio naviciilaria. D'institutions
privées, favorisées par le gouvernement qui aimait de voir
les naviculaires se grouper entre eux, les collèges devinrent
alors des institutions oftîcielles. On ne sait comment les choses
se passèrent, mais on devine ce qui arriva sous le règne de
Dioclétien ou avant lui. « L'État, dit très bien Pigeonneau ^-2,
avait intérêt, au lieu de conclure avec de simples particuliers,
• DiG., 50, 6, 6 (o), § l'2 : Quibnsdam collegiis vel corporibits, quitus j ils
coeundi lege permissum est, immunitas tribuitur : scilicet eis collegiis vel
corporibus, in quibus artificii sut causa uniisquisque adsumitur, ut
fabrorum corpus est et si qua eandem rationem originis habent, id est
idcirco instituta sunt, ut necessariam operam publicis utilitatibus exhi-
bèrent. A l'époque de Callistrate, tous ces collèges avaient pris un carac-
tère officiel si prononcé que l'on crut qu'ils avaient eu ce caractère dès
l'origine. Déjà Antonin le Pieux était intervenu dans leur recrutement :
Nec omnibus promiscue, qui adsumpti sunt in fus collegiis, immunitas
datur, sed artificibus dumtaxat. Nec ab omni aetate allegi possunt, ut
divo Pio placuit, qui reprobavit prolixae vel inbecillae admodum aetatis
homines (Ibid.). Cfr. infra, chap. II et III.
2 Annone, p. 227. Pigeonneau a seulement le tort de croire que dès
l'institution des collèges de naviculaires, ceux-ci s'engagèrent collective-
ment envers l'État. Il ne distingue pas la période de transition dont nous
venons de parler. Cfr. Karlowa, I, p. 556.
( 51 )
des marchés d'une durée limitée et toujours soumis à la loi de
l'offre et de la demande, à traiter avec des corps constitués,
qui prendraient une fois pour toutes des engagements perpé-
tuels et qui assureraient sous leur responsabilité les services
publics; les particuliers avaient intérêt de leur côté à trans-
former en privilèges permanents et héréditaires des immunités
qui jusque-là avaient eu un caractère temporel et personnel.
De ce double calcul sortirent ces collèges de naviculaires,
corps officiels et perpétuels qui ont tenu une si grande place
dans le monde romain jusqu'aux derniers jours de l'Empire
d'Occident. » Ainsi les corpora naviculariorum finirent par être
collectivement chargés d'un mwius publicum. Or, au IV« siècle,
par suite de causes que nous exposerons au chapitre suivant,
tous les sujets de l'Empire furent attachés à leur condition
originelle; alors les corporations de naviculaires devinrent
obligatoires et peu après héréditaires, comme tous les collèges
et toutes les conditions de l'Empire romain.
Nous n'avons pas voulu interrompre l'histoire de leurs
rapports avec l'Etat par la discussion de deux points douteux.
Selon Pigeonneau, les naviculaires d'Egypte et d'Afrique
commencèrent par où les autres finirent, et furent dès le début
des corps de contribuables voués aux transports de l'annone.
Il croit que dès l'origine les blés d'Egypte * ne furent pas
transportés par entreprise, mais aux frais des armateurs et des
négociants d'Alexandrie, qui étaient tenus de fournir chaque
année à l'État le nombre de navires nécessaire, c'est-à-dire
soixante-dix à quatre-vingts. Le transport, dit-il, était considéré
comme un impôt qui les dispensait d'une partie des autres
charges publiques. Ce serait, dès Auguste, la situation qui
devint générale au IV« siècle. Pigeonneau s'appuie sur les
traditions que les Komains auraient trouvées établies en
Egypte depuis les Ptolémées : avant la conquête romaine, les
propriétaires fonciers auraient payé un impôt ou des presta-
* De convect., pp. 49-59. Annone, pp. 225. 235. Cfr. Matthiass,
pp. 14-15.
( 52 )
lions destinés aux frais de la marine. Il conjecture d'abord
que les riches citoyens d'Alexandrie, armateurs et négociants,
devaient fournir annuellement aux rois d'Egypte et réparer un
certain nombre de navires de guerre et de commerce, et que
pour répartir cette charge, ils avaient formé un corps. Il con-
jecture ensuite qu'Auguste et ses successeurs continuèrent à
leur imposer cette charge. C'est une double hypothèse, qu'il
faudrait prouver autrement qu'en alléguant l'organisation des
corps de naviculaires prétendument créés sous les Antonins;
du reste, ceux-ci existaient bien avant les Antonins et, même
à cette époque, n'étaient pas ce que croit Pigeonneau. On ne
peut pas arguer non plus de l'existence d'un STrLfjiEXYiTriç TravToç
TO'j 'A)^£^avôp£ivou (jToko'j sous Sévère et Caracalla ^ ; ce pro-
curateur remplissait probablement un rôle de surveillant
semblable à celui de Vadjutor praefecli annonae en Espagne 2.
Nous croyons donc avec Marquardt 3 que les propriétaires
de la flotte marchande d'Alexandrie, dont il est question à
partir d'Auguste ^, ne différaient pas des autres naviculaires :
c'étaient à l'origine des armateurs-négociants égyptiens, asso-
ciés sans doute, puis réunis en collège, qui prêtaient leur libre
concours à l'approvisionnement de Rome, apportant dans la
capitale toutes sortes de marchandises pour leur compte s,
et se chargeant du transport des blés d'Egypte.
Quant aux naviculaires d'Afrique, Pigeonneau 6 fait remonter
leur origine à Commode (176-192). Nous les avons vus agir de
concert en 141 et en 173 '' ; ils existaient donc bien avant Com-
mode. Peut-être avaient-ils disparu, car il semble que Rome
tirait alors tout son blé d'Egypte 8. Commode rétablit donc
» C. /. Gr., 5973 ^ Kaibel, 919 (voyez supra, p. 37, n. 3).
2 C. /. L., II 1180.
5 Marquardt, Privatl, II», p. 390. H-, p. 406. Vie privée, II, p. 24.
'' Voyez supra, p. 36.
s SuET., AiLg., 98 (voyez supra, p. 37, n. 1).
<■• Deconvect., pp. 76 sqq. Annone, pp. 228-231. Matthiass, p. 65.
^ Voyez supra, p. 37, n. 6.
** Lampr., Commod., 17 : si forte Alexandrina frumenta cessassent.
( '^3 )
une classis Africana ii Carthage ', mais on ne sait rien de
l'organisation qu'il lui donna. On peut admettre que l'inter-
vention de ce prince se borna à engager au service public les
armateurs propriétaires de cette Hotte, réunis en collège ou
non; un contrat perpétuel et collectif assura peut-être, dès
cette époque, le transport des denrées de cette province.
Rien ne permet d'affirmer avec Pigeonneau que ces navicu-
laires n'ont jamais été « une association volontaire, mais un
ordre de contribuables, dont les membres étaient désignés par
le proconsul d'Afrique, sous réserve de ratification impériale w.
Sans doute, telle fut leur situation au ÏV« siècle; mais alors
tous les naviculaires de l'Empire sont soumis, comme des
contribuables, à des obligations personnelles et à des charges
pécuniaires dont répond la totalité de leurs biens. On ne peut
se servir de documents postérieurs de deux siècles à Commode
pour donner une idée des naviculaires africains sous ce prince.
Nous verrons au chapitre suivant par suite de quelles circon-
stances tous les naviculaires du monde romain se transfor-
mèrent peu à peu en corps de contribuables chargés d'un
service spécial avec dispense de tous les autres.
Organisation de leur service. — 11 reste à décrire leur service.
Il ressort de ce qui précède que, durant près de trois siècles,
les naviculaires n'eurent pas de service public comme collèges;
c'étaient les compagnies libres formées par certains membres
qui faisaient les transports de l'État. D'autres apportaient au
marché des denrées de toutes sortes pour leur compte ou pour
celui des riches négociants. Nous ne savons rien de particulier
de ceux qui alimentaient ainsi le marché. Quant aux flottes des
entrepreneurs publics, peu de prescriptions sont connues
avant le IV« siècle. Le tonnage de leurs navires était fixé, et la
règle s'appliquait du reste à tous ceux qui prétendaient aux
privilèges accordés aux naviculaires "^. Nous savons encore que
* Lampr., Commod., 17 : Classem Africanam instituit, quae subsidio
esset, si forte Alexandrina friimenta cessassent.
- Voyez le chapitre IV.
( 54 )
la flotte d'Alexandrie mettait à la voile en août, relâchait à
Malte, en Sicile ou à Rhegium et abordait à Pouzzoles en
septembre ^ Elle était sous les ordres de procurateurs
romains -, qu'il ne faut pas confondre avec les préfets de la
flotte de guerre d'Alexandrie 3. Elle se composait de navires
d'un fort tonnage, dont quelques-uns jaugeaient de quinze
cents à deux mille tonneaux ^ ; il en fallait, suivant Pigeonneau,
soixante-dix à quatre-vingts 3. Dans les autres provinces, nous
avons rencontré également des fonctionnaires chargés de sur-
veiller les naviculaires ^.
Sous le Bas-Empire, nous sommes mieux renseignés "ï. Les
naviculaires sont tous au service public; ce qu'ils transportent
est qualifié de ce cargaisons de l'Etat 8 » ou « espèces publiques,
fiscales^», par opposition aux marchandises d'un particulier i^^;
ils sont voués « à l'expédition des denrées publiques ti ». Ces
denrées sont avant tout le blé et Thuile i"-^ destinés h Rome et à
* Act. Apost., !28. Joseph., A)it. jud., 19, 2, o. Sen., ep., 77, l (éd.
Haase, X, 1, 1). SuET., Aug., 98. Philo, in Flacc, 5, p. 5^21 Mang.
Cfr. Marquardt, Priv., p. 890 (406). Vie privée, II, p. "24. Pigeonneau,
Annone, p. 2'25.
2 C. I. Gr., 5889. S973. Voyez supra, p. 37, n. 3.
3 C. /. L., II, p. 265 et n. 1970. III, p. 852, DipL XIII.
^ LuciAN., nXolov Tj t'jyjxî, 5. 13.
^ Annone, p. 225.
6 C. I. L., II 1180. XII 672. Voyez supra, pp. 38 et 39.
^ Voyez Pigeonneau, De convect., pp. 84-111. Krakauer, pp. 17-29, et
surtout Gebhardt, pp 8-18.
» Omis publiciun, onns fiscale : C. Th., 13, 8, 1. 1. = Cod. Just., XI, 5, 1.
C. Th. 13, 5, 1. A.
» Species publicae, species fiscales : Cod. Just., XI, 2, riibr. C. Th., 13,
5,1.33= Cod. Just., XI, 2, 5.
«« Sarcina privata : C. Th., 13, 8, 1. 1 = C. J., XI, 5, 1.
•' Adpublicas nécessitâtes expediendas : C. Th., 12, 1, 1. 149. Cfr. 13, 7,
1.2.
^* Species annonariae : C. Th., 13, 5, 1. 9 = C. J., XI, 2, 1. Onusfrumen-
tarii commeatus : C. Th., 13, 5, 1. 32 = C. J., XI, 2, 4. Sur l'imile, voyez
infra.
l ^^ )
Constantinople; à vrai dire, ils n'existaient plus que pour ces
deux villes : s'ils ont reçu des privilèges, dit Honorius, c'est
« dans l'intérêt de la ville vénérable »; si Constantin crée un
collège nouveau en Orient, c'est « pour la commodité de la
ville à laquelle, sur l'ordre de Dieu, il a donné son nom
éternel ' ». Une partie des naviculaires d'Afrique amenaient à
Rome le bois nécessaire pour chauffer les bains (navicularii
lig^arii ^). C'est par exception sans doute, et en cas de besoin
seulement, que les naviculaires transportent l'annone militaire
dans certains ports, d'oii les soldats partaient pour une expé-
dition 3.
Ce service s'accomplissait sous la surveillance du préfet de
l'annone et des agents qu'il avait dans les provinces. En Afrique
et en Espagne, il y avait alors un préfet de l'annone spécial.
Ailleurs, les naviculaires furent, à partir de Septime Sévère
probablement, sous le contrôle des préfets du prétoire, parce
que les pouvoirs du préfet de l'annone de Rome furent
restreints à la capitale ^.
Les naviculaires avaient à transporter le ca}wn sacraiissimae
urhis s jusqu'au Portus. Déposées dans les greniers des pro-
vinces, les denrées leur étaient remises par les collecteurs de
l'impôt, à mesure que Rome en avait besoin ^\ Pour hâter leur
départ, il était prescrit aux collecteurs de leur délivrer dans les
dix jours leurs lettres de voiture ", qu'ils n'avaient qu'à exhiber
' C. Th., 13, o, 1. 7. 30.
- C. Th., 13, 0, 1. 10 {lignea idonea piiblicis necessilatibus). 13. Symm.,
Ep., X, 58 {Bel. U). C. I. L., XIV :>78, à Ostie : navicularii lignarii.
Voyez infra : mancipes ihermariim.
5 C. Th., 13, o, 1. 35 {expeditionalis annona, expeditionales portus) et
13, 9, 1. '2. GoTHOFR., ad h. l. Ces ports sont opposés aux deux capi-
toles. Voyez encore Zosim., IV, 10 = Ed. OxoN., 1679, p. 212.
^ HmscHFEi.D, Vi'rwalt., pp. 137-138, et infra, ehap. III.
•' C. Th. 13, o, 1. 3o. Canon urbaiius : 1, 27.
'•• Ibid., 1. 8.
' C. Th., 13, 5, 1. 8 : relatoriae traditarum specierum. Gebhardt,
p. 12, n. 1. — GoDEFROY croit qu'il s'agit de quittances (ad. l. 8).
( o6 )
pendant la traversée dans les îles, ports, rivages, stations où
ils faisaient escale, pour ne pas être molestés '. A Alexandrie,
on rencontre des crithologiet des zygostatae qui correspondaient
aux collecteurs (susceptores) ou qui les assistaient 2. De
novembre à mars, la navigation était suspendue à cause des
tempêtes; du 1^'' avril au lo octobre, on pouvait charger et
mettre à la voile 3. Le tiers du canon devait partir dès l'ouver-
ture de la navigation ^K A Alexandrie, le chargement devait
être fini à la fin d'août, et la cargaison devait arriver à Gonstan-
tinople la même année 3. Chaque naviculaire ne devait con-
courir au transport qu'une fois tous les deux ans; ce délai
passé, il devait se retrouver dans sa province 6.
Avant le départ, les naviculaires devaient déclarer devant
les curateurs des cités, les gouverneurs ou les magistrats de
la ville qu'ils avaient reçu les denrées en bon état, et ces auto-
rités devaient s'en assurer de visu ". Une fois en route, ils
devaient prendre le chemin le plus court et ne s'arrêter nulle
part. S'ils s'attardaient dans un port sans motif, ils étaient
punis de mort ou déportés. Les gouverneurs, les décurions et
les corporati du lieu devaient les forcer de partir sous peine de
confiscation de leurs biens. Il est vrai que cette mesure fut
prise en 410, année de famine, où la flotte dut se mettre en
^ Nous parlerons au chapitre IV des mesures destinées à les protéifer
contre les vexations.
2 C. Th., 14, 26, 1 1. Gebhardt, p. 12.
5 Ç. Th., 13, 9, 1. 3, 3 = C. J., XI, 6, 3, 3. La première partie de l'impôt
en nature devait être livrée au commencement de mars, la deuxième
était exigible au 1^»- juillet. — En cas de besoin, les naviculaires devaient
mettre à la voile pendant la mauvaise saison ; en 380, ils réclamèrent
pour ces traversées un supplément de diametron pour avaries; ils
essuyèrent un refus (C. Th., 13, 9, 1. 3j.
^ C. Th., 13, 5, 1. 27 : intra prima navigationis exordia.
3 C. Th., 13, 5, 1. 26 = C. J., XI, 2, 2. Edict. Just., XIII, 6.
6 C. Th., 13, 5, 1. 6. 21. 26. = C. J., XI, 2, 2.
' C. Th., 14, 15, 1. 2 = C. J., XI, 23, 1 (en 366) : incorruptas se species
suscepisse.
( o7 )
route, même l'hiver '. A leur arrivée, le préfet de Tannone
devait se rendre au port pour constater que tout était en règle
et délivrer quittance dans les vingt jours. La quittance devait
être rapportée au gouverneur de la province sous peine de
confiscation -. S'il manquait quelque chose, le préfet de la ville,
aidé du préf(it de l'annone et de trois sénateurs, devait faire
une enquête et renvoyer le naviculaire coupable au préfet de
l'annone d'Afrique, qui lui faisait payer les dommages -» ;
tout vol ou détournement était puni de mort K Les pertes
essuyées à cause d'une tempête ou d'un naufrage étaient ù la
charge du fisc ^.
Il restait aux naviculaires beaucoup de temps pour faire le
commerce, et plusieurs passages des codes prouvent qu'il leur
était permis de s'y livrer pour leur compte. Théodose et Hono-
rius exemptent les naviculaires de la douane, s'ils font le
commerce pour leur compte : ciim sibi rem gerereprobabuutur,
et non pour d'autres ^^; en effet, certains négociants, pour pro-
titer de cette immunité, chargeaient leurs marchandises sur les
vaisseaux des naviculaires '. On voit aussi que Tune dos
fraudes de ces derniers consistait à trafiquer avec les denrées
de l'État, ce qui était possible à cause du long intervalle de
temps qui s'écoulait entre la livraison des denrées et le moment
où elles devaient être rendues au port 8. Une loi qui prouve
< C. Th., 13, 5, . 33. 34 (C. J., XI, 2, 5. 6). Edict. Just., XIII, c. 4. 5.
— Une loi parle d'un prosecutor (C. Th., 13, 9, 1. 4), chargé, selon
Gebhardt (p. 74, n. 1), d'accompagner la cargaison et de surveiller la
livraison à l'autorité compétente.
2 C. Th., 13, 5, 1. 21. 26 (C. Just., XI, 2, 2).
3 C. Th., 13, 5, 1. 38. 9, 1. 5. 14, 1. 2 (C. Just., XI, 23, 1). Cfr. Krakauer,
p. 30. Gebhardt, pp. 15-16. S'il était d'une autre province, on le ren-
voyait sans doute au gouverneur.
' C. Th., 13, 0, 1. Û iC. Just. XI, 2, 5). Cfr. C. Just., IV, 40, 3.
^ C. Th., 13, 9. Voyez les chapitres II et IV.
'• C. Th., 13, 5, 1. 23 (393). 24 (395).
■ Ibid., 1. 16, § 2 (380).
^ Ibid., 1. 26 : stiscepta.s species in negotiationis emolumenta convertere
(396).
( o8 )
encore qu'ils faisaient le commerce avec leurs navires, c'est
celle qui n'exempte ces navires des corvées publiques que pen-
dant le temps où ils transportaient l'annone *.
Ostie et le Portus -. — Sous la république, les navires
venant de Sicile, et plus tard d'Afrique, s'arrêtaient à Pouz-
zoles, où se trouvaient des greniers publics 3. Sous l'Empire,
une inscription nous parle encore d'un dispensator a frumenîo
Puteolis et Ostiae 4, mais bientôt les navires ne firent plus
qu'un court arrêt à Poifzzoles, et au IV^ siècle, ils vont directe-
ment à Ostie. Dans le port, l'administration de l'annone était
dirigée par le quaestor Ostiensis, que Trajan remplaça par
un procurator annonae, placé sous les ordres du jyraefecttis
aunonae, et ayant à sa disposition une caisse affiliée au fiscus
frumentarius et un nombreux personnel de bureaux et d'ou-
vriers distribués en corporations. Au IV^ siècle, le port est
administré par un cornes porlus et un ceutenariiis portus suif
dispositioiie praefecti urbis Romae.
Les navires de plus de trois mille boisseaux ne pouvaient
pas remonter le Tibre ^ et s'arrêtaient ù l'embouchure. Claude
fit construire le magnifique port d'Ostie et Trajan y ajouta, ^
l'intérieur des terres, le Portus Trajanus, autour duquel s'éleva
rapidement la petite ville appelée Portas. Les navires entraient
dans le port de Claude, puis dans celui de Trajan. Le blé
déchargé était mis dans des greniers appelés horrea Portuen-
• C. Th., 13, 5, I. -4 : navicularii navis, quae omis dinitaxat fiscalf
convexerit (324).
- Sur le Portus Romaiius, voyez Preller, Roju und der Tiber, II,
pp. 5 sqq. {Ber. der siichs. Gesellsch. der Wiss., 1849). Hirschfeld,
Annona, pp. 56-57. 75-79. Marqiardt, St.-V., II, p. 113 = Trad., p. 442.
Priv., pp. 361-394 (407-410). Trad., Vie privée, II, pp. 25-29. Dessau,
dans le C. I. L., XIV, pp. 4-9. G. Boissier, Promenades arch., pp. 250-278.
5 Cic.,/)^/înt7^.,II, 26, 84.
' C.LL.,\ 1562.
^ DiONYS. Hal., III, 44 : xa\ twv ôXxâotov al [i-iyp<- xptaytXtocpdptov.
( o9.)
sia •. En 866, Valentinien ordonna que celte opération se
fît en présence des employés du préfet de l'annone, qui
devaient s'assurer que le blé était en bon état ^. A mesure que
les provisions s'épuisaient à Rome, on rechargeait le blé sur
des bateaux qui le transportaient dans la ville, et on l'y con-
servait dans des magasins, jusqu'il ce qu'il fût employé.
Les corporations dont ces travaux exigeaient le concours
étaient : les saccarii ou portefaix, les mensores ou mesureurs,
les horrearii ou personnel des greniers, les codicarii ou bate-
liers du Tibre, les urinatores ou plongeurs, et beaucoup
d'autres.
Les saccarii''^ portaient les sacs i^ de blé des navires dans
les greniers du port, et des greniers dans les barques. « Cne
peinture découverte à Ostie même nous montre comment
s'accomplissait celte opération. Cette peinture représente une
de ces barques qui servaient à la navigation du Tibre et qu'on
appelait naves caudicariae. Chacune d'elles, comme les vaisseaux
d'aujourd'hui, avait son nom par lequel on la désignait et
qu'on inscrivait en noir ou en rouge sur quelque endroit
apparent. Celle-ci avait reçu le nom d'une divinité, auquel on
ajoutait, de peur de confusion, celui de son propriétaire : on
l'appelait l'Isis de Geminius {Isis Geminiana). Sur la poupe, au-
dessus d'une petite cabine, le pilote Pharnacès tient le gou-
< Dessau, C. /. L., XIV, p. 8. XIV 194. Horrea Portuensia : C. Th.,
14, 23, /. un. i400 . Condita Portuemia : C. Th , 14, 4, 1. 9. Horrea
fiscalia : C. Th., lo, 1, 1. 12. Cfr. 11, 4, 1 1. 2. En 408. Alaric trouva
au Portus. Traaav xf^v ttJ!; tto'Xîoji; TpocsfjV à7:ox£'.u.£VTjv (ZoziM., VI, 5>.
Cfr. SozoM., Hist. Eccl, IX, 6.
2 C. Th., 14, 15,1. 2fC. J.,XI,23, 1).
5 Saccarii portus Romae : C. Th., 14, 22, /. un., en 364. Leur métier
s'ap|)elle : [res) .saccaria; voyez Apll., Metam., I, 7 : saccariam faciens.
— Saccarius désigne aussi un fabricant de sacs ou de cribles. Buambach,
827 = Okeij.i 4176 : cuparius et saccarivs, à Trêves. — Quinlilien parle
de saccariae naves (VIII, 2, 13 . — Sur les saccarii salarii d'Ostie, voyez
infra.
* ni(i., 18, 1, 40, 3 : si quid c.v sacco saccarii cecidùset.
(• 60 )
vernail. Vers le milieu, le capitaine Abascantus surveille les
travailleurs. Du rivage, des portefaix, courbés sous le poids
d'un sac de blé, se dirigent vers une petite planche qui joint
la barque à la terre. L'un d'eux est déjà arrivé et verse le
contenu de son sac dans une sorte de grande mesure (modius),
tandis qu'en face de lui le mensor frumentarius , chargé des
intérêts de l'administration, s'occupe à voir que la mesure soit
bien pleine, et tient les bords du sac pour que rien ne se perde.
Un peu plus loin, un autre portefaix, dont le sac est vide, s'est
assis et se repose, et toute sa physionomie respire un air de
satisfaction qu'explique le mot que le peintre a écrit au-dessus
de sa tête : « J'ai fini, feci * ».
A Rome, il fallait également des portefaix pour le décharge-
1 G BoissiER, Promenades archéologiques, pp. 272-273. Nous avons
vu cette peinture dans la bibliothèque du Vatican. Elle est parfaitement
conservée. La description de G. Boissier est exacte, sauf quelques détails.
Ainsi Abascantus est le nom de celui qui tient le sac (non le modius) dans
lequel un saccarius verse le contenu de son sac. Le mot feci est écrit sur
le sac placé à côté de celui qui se repose. Sur les sacs pleins portés par
les autres saccarii est écrit le mot : RES. - Les catacombes fournissent
aussi plusieurs fresques relatives aux corporations de l'annone. A Sainte-
Domitille, dans la cjùpta degli Apostoli grandi, une peinture représente
un pistor, d'abord avec un modius, symbole du collège, puis prenant un
pain dans un panier, enfin présentant ce pain à la plèbe frumentaire.
Au-dessous il y a une scène de chargement (à droite) et de déchargement
(à gauche) de deux barques : on voit huit hommes qui montent par des
échelles sur des barques ou en descendent; six d'entre eux ont des sacs
pleins sur les épaules. Wilpert a réuni, décrit et expliqué toutes les
scènes de la vie réelle qu'on trouve dans les catacombes (Rom. Quartal-
scfirift, I, 1887, pp. 20-41). Elles sont au nombre de six. On y reconnaît
toujours des gens de métier et Wilpert pense que ces artisans et com-
merçants avaient \k des sépultures communes {pistores, tonneliers, sac-
carii, palangarii, bateliers). — A ces scènes, ajoutez la coupe dont il
sera parlé tout à l'heure (De Rossi, Ann. d. /., 1885, pp. 230-231.
Tav. 1.) et un bas-relief du Musée de Capoue représentant un magistrat
assisté d'un agent de l'annone, qui vérifie le pesage de grands paniers
placés sur le plateau d'une grande balance (De Rossi, /. /., p. 231,
n. 2).
( 61 )
ment et le transport des denrées. Ceux du Port et ceux de Rome
formaient deux collèges différents. Vers l'an 10, on trouve
déjà des saccarii associés ii Rome pour s'assurer un enterre-
ment décent, et ils possédaient une ustrina près du colombaire
des esclaves et des affranchis de 3Iarcella ' : il s'agit probable-
ment à cette époque de portefaix de toute espèce -. Au IV«siècle,
Symmaque nous parle de frugis et olei bajuli ^, formant une
corporation attachée à l'annone : ils transportaient sans doute
le blé et l'huile déchargés au quai du Tibre. Dans deux consti-
tutions de Valentinien I^% il est question d'un corpus catabo-
lensium, associé aux boulangers et recruté au IV« siècle parmi
les affranchis possédant une fortune valant au moins trente
livres d'argent 4-. Nous ne savons rien de précis sur leur ser-
vice. A Ravenne, Cassiodore appelle du même nom des gens
(jui transportaient le marbre s. 11 est certain, d'autre part, que
ceux de Rome étaient attachés à l'annone, comme les bou-
• C /. L., VI 4417. Cfr. Cassius Dio, LIX, '28 : ta àvopà~ooa xà (j.'.7-
Oocpopoùvta. — On trouve des saccarii associés à Pompéi, IV 274. 297.
- On trouve encore, à Rome, des decuriales geruli, VI 360, en 166:
ilecuriale.s geruli et h{onore) uisi), VI 1096, sous Gordien II; dec{urialis)
(jeridiis, VI 9439; geruli, VI 9438, sous Auguste. B. corn., 1886,, n. 1274;
gerulus, VI 1937. 9189. 9440. 9441; [ojsxoupîa yspoûXcov, Or.-H., 5973.
Caligula mit un impôt sur les geruli (Suet., Calig., 40 : ex gerulorum
diurnis quaestibus par octava. Cfr. Marquardt, St.-V., II, p. 237 — Trad.,
Org. fin., p. 297), Mommsen les considère comme des appariteurs publics,
à cause de leur nom de decuriales (St.-R., I, pp. 3o2-3o3 = Trad., I,
p. 418). Ces décuries de gernli se retrouvent encore "ailleurs : à Puteoli
(X 1810), à Anagnia (X 5917), au Vicus Augustanus Laurentium (XIV
î2045). Gerulus signifie aussi messager : Cod. Just., XII, 63, 1. Cfr.
Heumann, Lexicon, s. h. v.
' Symm., ReL, 14 {Ep., X, 27). Voyez supy^a, p, 26, n. 1.
^ C. Th., 14, 3, 7'ubr. : de pistoribus et catabolensibus. Ibid., 1. 9 et 10
(365? 368, selon Godefroy) : catabolensium corpus. Dans l'album de
Thamugadi (VIII 2403, 1. 33. 34), il faut lire : ex c[pnsensu) T(hamugaden-
simn), plutôt que : ex c{a)t{abolensis).
'■• Cassiod., Var., III, 10. IV, 47 : declaramus ut marmora — ad Raven-
natem urbem per catabolenscs — dirigantur.
( 62)
langers, et qu'ils dépendaient du préfet de la ville, à qui sont
adressées les deux lois précitées. Godefroy conjecture avec
vraisemblance que c'étaient des conducteurs de bêtes d(^
somme ou des charretiers, transportant le blé du Tibre aux
greniers, et des greniers aux moulins, la farine aux boulan-
geries et le pain aux lieux de distribution ^. Les bajuli de
Symmaque, comme leur nom le prouve, portaient les fardeaux
sur les épaules.
Quant aux portefaix d'Ostie et du Portus, une loi de Valen-
tinien I^'' assura aux saccarii portus Romae le monopole du
déchargement de tous les navires, même de ceux des particu-
liers 2. Citons enfin l'opinion de Dessau, qui croit retrouvei*
le même collège dans le susceptorum Ostiensium sive Por-
luensium antiquissimiim corpus oh urbis Romae utilitatem rec-
reatum, vers le milieu du IV« siècle 3.
A Ostie, le blé était mesuré quand il arrivait, pour constater
ou prévenir les fraudes des naviculaires. Les bateliers du Tibre
et les boulangers ne méritaient pas plus de confiance, et il
fallait mesurer de nouveau le blé au départ d'Ostie pour Rome,
et à l'arrivée au port de Rome, avant l'emmagasinement, enfin
• GoTHOFR., ad C. Th., 44, 3, 1. 9 et 10. Humbert, dans le Dict. de
Daremberg, I, pp. 278. 965. Gebhardt, p. 26. Liebenam, pp. 80-81.
De Ruggiero, Diz. epigr., II, p. 142. — Sur une coupe du IV^ ou V« siècle,
décrite par de Rossi (voyez infra, p. 64), on voit un homme tirant une
charrette chargée, et d'autres qui conduisent des charrettes attelées
de chevaux.
2 C. Th., 14, 22, l. im. (364).
•■• C. /. L., VI 1741. Dessau, C. /. L., XIV, p. 8; voyez le premier
volume, p. 509, n. 3. L'inscription est gravée sur une statue élevée à
Memmius Vitrasius Orfitus, Praefectus urbi en 353. 355. 356. 359
(BoRGHESi, OEuvres, III, pp. 473 sqq.; Goyau, Chronologie de V Empire
romain, pp. 456. 465), ob ejiis temporibus difficillimis egregias ac salu-
taris provisiones. De Rossi {B. d. /., 1885, p. 231) entend par susceptores
ceux qui reçoivent le blé, quand il est déchargé et pesé. — Cfr. Liebe-
nam, p. 75, n. 2; Habel, dans Pauly-Wissowa , RealencycL, s. v.
acceptor.
( H3 )
quand on le portait des magasins romains aux boulangeries.
A l'arrivée, le mesurage était fait par les mensores frumen-
tarii i, sous les yeux des tabularii Pracfedi Awionae, qui
donnaient quittance et décharge {apochae) -. Plusieurs inscrip-
tions d'Ostie mentionnent un corpus mensorum frumenlariorum
Ostiensium 3, ou mensores friunenlarii Cereris Auguslae ^*, au
II*' siècle. A la même époque, on rencontre un corpus menso-
rum frumentariorum adjutorum, Ostiensium •">, ayant le même
président que les collèges des naulicarn et des acceptores. Ces
deux dernières corporations g portent du reste aussi les noms
de corpus mensorum frumenlariorum acceptorum et corpus men-
sorum frumentariorum nauticariorum '^. C'est ce qui a fait
penser 8 que les mensores adjutores, les nauticarii et les accep-
lores 9 formaient trois sections différentes d'un même collège
de mensores, sans qu'on puisse préciser le service spécial de
chacune. Plus tard, en 389, les mesureurs du port s'appellent
plutôt mensores Portuenses ; il est parlé de leurs vols et d'une
longue querelle qu'ils eurent avec les codicaires dont ils
» GoTHOFR., vol. V, p. 179. BoRGHESi, OEuvres, VI, 12 (sur. XIV 16).
Pigeonneau, De convect., p. 73. Dessau, C. L L., XIV, p. 8, et les notes
après XIV 2 et loO. Liebenam, pp. 74-75. Henzen, B. d. 1 , 1851, p. 154.
1852, p. 155. 1859, p. 240. 1883, p. 205.
2 Pigeonneau, De convectione, p. 73. Sur la coupe décrite par de Rossi
(p. 330), un magistrat préside au pesage.
3 XIV 172 (en 184). 303. 309. 363. 364. 438. 4139.
* XIV 409, au lie siècle.
s XIV 2 (en 197). 4140.
*^ Acceptores mentionnés à part : XIV 2. 150; cfr. 16. Nauticarii à part :
XIV 2.
■ XIV 154 (vers 210). 289.
^ Dessau, note après XIV 2.
'J Les nauticarii sont généralement pris pour des bateliers. Mar-
ouARDT, PrivatL, p. 393 (489). Trad., Il, p. 28, en note [Seeschiffer);
Liebenam, p. 84 {Sckiffsherren). Les acceptores prenaient peut-être
livraison des denrées à leur arrivée. Liebenam, p. 75. Habel, dans
Pauly-Wissowa, ReaiencycL, s. v. acceptor. De Ruggiero, Diz. epigr.,
s. v. acceptores.
(64)
devaient contrôler les cargaisons •. Au IV« siècle, ils avaient la
garde des greniers du Portus '^.
Il faut les distinguer de ceux de Rome qui formaient égale-
ment une ou plusieurs corporations. En 198, une inscription
romaine nous parle de me{n]sores machinani frumenti publia,
(luibus ex Senatus consulto coire licet 3 ; dans une autre, on voit
que ce collège s'occupait des funérailles de ses membres et
qu'à chaque décès il payait une somme assez élevée ^. Le nom
de machinarii n'est donné qu'aux mesureurs de Rome, et il
est expliqué par une figure trouvée sur une coupe du IV« ou
du V« siècle; cette figure représente un fonctionnaire de
l'annone qui préside au pesage; devant lui est placée une
grande balance montée sur un chevalet {machina) élevé; un
portefaix tire une charrette et deux conducteurs amènent les
denrées pour le pesage, chargées sur des voitures ^.
Le Digeste parle des immunités des mensores frumentarii ; il
mentionne un rescrit de Marc Aurèle et de Commode adressé
au préfet de l'annone. Ces immunités étaient accordées aux
mesureurs d'Ostie et de Rome, mais pas à ceux des provinces 6.
1 C. /. L., VI 1759 (en 389). C. Th., 14, 4, 9 (417) : Portuensium furla
mensorum. C. Th., 14, 15, 1. 1 (364) : mensores. 11, 14, 1. 1 (364) : custos
ac mensor. Gothofr. ad 14, 4, 1 9.
2 C. Th., 14, 4, 1. 9 (417).
3 C. L L., VI 85 (en 198). ♦
- VI 9626. Voyez supra, vol. I, p. 274.
5 De Rossi, Ann. cl. L, 1885, pp. 230-231 et planche I. — Wilpert,
/. /., pp. 20-23 et 35-38, décrit pour la première fois et explique une
fresque curieuse de Sainte-DonitiUe, qu'il croit de la fin du Ille siècle.
On y voit, selon lui, un mensor machinarius qui tient une balance à la
main (donc pas machinarius) et un mensor frumentarius placé devant un
panier et tenant la règle destinée à niveler le contenu. De ce dernier, il
rapproche le bas-relief du tombeau de Maximinus (au Latran, VI, 39.
MuRAT, 1912, 8. Wilpert, Tafel II, 3. Martigny, Dict. des A^it. chrét.,
2e éd., p. 467. Krause, Realencijcl. der christ. Alt., p. 401. Peret,
Catacombes, V, pi. XXVI, n. 61). Maximinus est placé devant un modius
d'où sortent des épis et tient aussi une règle {vircja) dans la main droite.
Ce monument provient peut-être aussi de Sainte-Domitille.
6 DiG., 27, 1,1. 26 (Pallus). 50, 5, 1. 10, 1 (Paulus).
( 6o )
Greniers ou magasins. — i^our conserver les denrées de
l'Etat, il y avait d'immenses magasins h Rome et à Ostie ^. Dès
le temps des Gracques, des greniers publics [horrea Sempro-
nia -) furent réservés au blé vendu par le gouvernement à bas
prix ; César en bâtit de nouveaux pour le même usage 3. Sous
l'Empire, leur nombre augmenta à mesure que grandissait
l'importance de l'annone. Dès les premiers siècles, beaucoup
nous sont connus ; ils tiraient leur nom de ceux qui les avaient
bâtis ou des matières qu'ils contenaient : horrea Sulpicia ou
Galbana, Agrippiana, Lolliana, Seiana, Vespasiani, chartaria,
eandelaria, etc. ^. Les plus vastes étaient les horrea Sulpicia ou
Galbana, qui s'élevaient sur un ancien domaine des Sidpicii
Galbae^; ils dataient de la république et s'étendaient entre le
Tibre, l'Aventin et le Testaccio, dans cette troisième région,
occupée en grande partie par les locaux de la préfecture de
l'annone G. Sous l'Empire, ils faisaient partie du patrimoine
impérian, ainsi que la plupart des greniers susdits. C'étaient
d'immenses édifices, séparés par de vastes cours, destinés
avant tout aux provisions de l'annone : blé, huile, vin et autres
' Sur les horrea de Rome, voyez Preller, Die Regionen, pp. 101-104.
Jordan, Topogr., II, pp. 67-69. Hirschfeld, Annona, pp. 60-63. Mar-
QUARDT, St.-Y., II, p. 13'^. Or g an. financière, pp. 165-166. 0. Richter,
dans IwAN von Muller, Handbuch, III, pp. 852-854. V^oyez surtout les
dissertations spéciales de Stevenson, B. d. L, 1880, pp. 98 sqq. Henzen,
B. d. /., 1885, pp. 138 sqq. 1886, pp. 42 sqq. B. c, 1885, pp. 51-53.
Gatti, B. c, 1885, pp. 110 sqq. B. d. L, 1886, pp. 62 sqq. Mitth. des
InsL, 1886, pp. 65-78. De Rossi, A. d. L, 1885, pp. 223-234. Lanci.\ni,
yotiziedegli Scavi, 1885, pp. 157. 476. 527.
2 Festus, p. 2906.
•' Caes., b. c, m, 42.
* Nous connaissons dix-huit noms. Vovez Gatti, Mit! h., L L, pp. 67-
68. B. c, 1885, p. 115.
3 Gatti, B. c, 1885, p. 112. Mitth., l. L, pp. 69-72. Ephem. ep., IV
732 a. Henzen, B. d. L, 1885, p. 139.
« De Rossi, A. d. L, 1885, pp. 224 sqq.
" Gatti, B. c, 1885, p. 115 (on les appelle horrea Caesaris). Mitth.,
L L, pp. 68-75. Henzen, B. d. L, 1885, pp. 139-140. B. c., 1885, p. 52.
Tome L, vol. II. o
( 66 )
denrées '. Le Testaccio, près des horrea Galbana, se forma peu
à peu des débris de vases en terre, employés pour transporter
toutes ces matières 2. Cependant une partie des magasins
impériaux était affermée par le procurator patrimonii Caesaris à
des entrepreneurs {conductores horreorum) qui les louaient en
détail aux particuliers 3.
Nous avons conservé une lex horreorum, ou contrat entre le
procurateur impérial et l'entrepreneur, entre celui-ci et les
particuliers "i-. Alexandre Sévère établit dans toutes les parties
de la ville des greniers nouveaux à l'usage du public s. De
riches citoyens possédaient également des greniers qu'ils
exploitaient de la même façon ^.
Les magasins impériaux furent d'abord administrés par
des fonctionnaires de l'empereur '. Au II« siècle, ils étaient
régis et desservis par les affranchis et les esclaves du prince,
et ils dépendaient du procurator patrimonii Caesaris. Chaque
grenier avait à sa tête un ou plusieurs horrearii ou vilici
horreorum 8, qui, comme les ouvriers qui travaillaient sous
leurs ordres [operarii 9, horrearii), appartenaient à la maison
impériale. Les horrea Galbana sont le mieux connus 10. Situés
^ On y trouve des armaria, apothecae, compendiaria, intercolumnia ,
toca, etc. Gatti, B. c, 18"85, pp. 113-114. 128. Preller, Regionen,
p. 104. PoRPHYRio, ad Horat. Carm., IV, 12. 18.
2 Dressée, A. d. /., 1878, pp. 118 sqq. De Rossi, B d. /., 1870, p. 20.
Ann. d. /., 1878, p. 118. 1885, p. 232.
5 Sur ces conductores, voyez : C. I. L., VI 9471. DiG., 20, 4, 21, 1.
Hirschfeld, Annona, p. 62, n. 83. Pigeonneau, De convectione (p. 73),
les confond avec les horrearii.
•i Gatti, B. c, 1885, pp. 110-129.
•' Lamprid., Alex. Sev., 39
^ Gatti, B. c, 1885, pp. 115-116.
' Selon Hirschfeld, /. /., p. 62. Marqlardt, St.-V., II, p. 132.
« C. L L., VI 4226. 4226a. Epliem. ep., IV 723a.
'■> B. d. /., 1886, p. 42.
'0 Les inscriptions et les textes sont cités par Gatti, B. c, 1885, p. 113.
Vers l'époque d'Hadrien, il existait un collegium salutare iquod consistit in
praediis Galbanis?) de cinquante-neuf membres, qui avait pour magistri
( 67 )
dans les praedia Galhana, ils dépendaient du procurator prae-
(liorum Galbanorum ; leur personnel était divisé en trois corps
ou collèges différents : 1° Sodalicium horreorum Galbanorum
cohort{is l?), en Tan 159'; 2° Horrearii cohorlis secundae et
operari Galbenses ^ ; 3'' Galbienses de cohorte tertia 3. On a cru
que ce nom leur venait de ce qu'ils auraient approvisionné
les trois cohortes urbaines, lesquelles auraient eu leur caserne
dans cette région 4-; mais Gatti avance avec plus de vraisem-
blance que le mot cohors désigne ici les trois grandes parties
de ces greniers, pourvues chacune d'un collège spécial
d'affranchis et d'esclaves '\ Le vilicus horreorum Galbanorum
cohortium Irium qu'on trouve sous Auguste, aurait alors dirigé
tout le magasin 6. Ces trois collèges étaient voués au culte
d'Hercules Salutaris "^^ et cette épithète prouve qu'ils étaient
trois vilici prediorum Galbanorum, et à qui le procurator patrimonii
CaesarU accorde l'emplacement d'un autel. C'était un collège funéraire
composé d'esclaves et d'affranchis travaillant sur ces domaines, mais
non de horrearii (Henzen, B. d. L, 1885, pp. 138 sqq.; B. c, 1885,
p. 51-53). Rectifiez d'après ceci ce qui a été dit au premier volume,
p. 'im.
^ VI 338. Un de ses quinquennales donne aediculam novam a solo
sodalibits suis, et la dédie : Numinibus domus Aug{ustae) sacrum, Her-
culi SaLutari. C'était donc un collège funéraire. Cfr. VI 339 : coilegium
Herculis Salutaris c{o)hortis primae sagariorum, c'est-à dire un coilegium
sagariorum ayant pour patron V Hercules Salutaris c{o)hortis primae.
2 B. d. /., 1886, p. 42.
^ VI 710. Cfr. VI 588 : horrearius c{o)hortis tertiae.
^ Th. Mommsen, Epliem. ep., IV 732 a. Stevenson, B. d. /., 1880, p. 98.
Henzen, ibid., 1885, p. 139. B. c, 1885, pp. 51-52. Henzen croit que cette
hypothèse est corroborée par le curator horreorum Galbanorum siib
dispositione P. U. (Not. Dign., Occ, IV, 15); mais au IV^ siècle, le P. II.
avait la surveillance générale de l'annone (C. Th., 11, 14, 1 et Gothofr.,
ibid.). Lacouk-Gayet {Antonin le Pieux, p. 70j donne une explication
moins probable encore.
•' Gatti, Mitth. des Inst., 1886, pp. 72-77.
•' Ephem. ep., IV 732a. Gatti, /. /., p. 73.
' VI 338; voyez encore : VI 236, dédicace faite Genio conservatori
horreorum Galbianorum, par un magister affranchi.
{ 68 )
funéraires '*. Les autres magasins impériaux avaient une
organisation analogue; du moins, nous trouvons une dédicace
au Genius horreorum Leonianorum et à Hercules Salut aris - ;
ailleurs, il est question de deux magistri priini qui dédient un
autel à la Fortuna horreorum 5.
Ces collèges, on le voit, ne ressemblaient nullement aux
autres collèges dç l'annone, formés d'hommes libres. On ne
sait pas même s'ils avaient un but administratif ou un but
purement privé, comme tous les collèges funéraires. Dans
tous les cas, le personnel des greniers devait être placé, pour
ce qui concerne le service, sous la haute surveillance du
préfet de l'annone et de ses employés.
Au IV^ siècle ^, on nous dit que le nombre des horrea publica
était de deux cent quatre-vingt-dix s, répandus dans toutes les
régions; sans doute, une partie seulement était réservée aux
denrées de l'État, et le reste affermé. Leur organisation est
modifiée. Il n'est plus question de familles d'esclaves impé-
riaux; mais les apothecarii 6 et autres ouvriers qui y travail-
laient devaient être attachés à leur condition et former des
collèges. On ne cite que des fonctionnaires et des employés,
qui les dirigent ; on rapporte quelques prescriptions sur l'en-
trée, la sortie et la conservation du blé, et c'est tout '^.
' Voyez le premier volume, p. 261, n. 1, et p. 266.
- Yl 237. Preller, Reg., p. 103 note, lit : Lollianorum.
-' VI 188.
^ Sur les horrea de Rome au IVe siècle, voyez Gothofr., IV, p. 108;
V, p. 308, et les lois qu'il cite. Gebhardt, pp. 19-20.
^ Selon le Curiosum Urbis. La Notitia U. dit 291. Voyez Preller, Reg.,
pp. 101-104. Jordan, Top., II, p. 67; Forma Urbis, pp. 4344.
« CoD. JusT.,XII, 57, 12, 3.
' Ils sont appelés horrea publica : C. Th., 7, 4, 1. 32. 11, 14 rubr. ;
horrea fiscalia : C. Th., 15, 1, 1. 12. 10, 1. 1; horrea Romana : Symm.,
Ep., III, 55. — Nous avons déjà cité le curator horr. Galb. Léon parle
d'un cornes horreorum : C. J., XI, 15 (16), /. un. — Parmi les prescrip-
tions sur la garde du blé, notons qu'en 364 Valentinien fait nommer par
le P. U. un custos ac mensor, pour surveiller le mesurage, et tenir note
( 69 )
Quant aux magasins d'Ostie ou plutôt du Portus \ nous no
savons rien de précis avant le IV^ siècle. A cette époque, la
garde des condila Portuensia ^ était confiée aux mesureurs
et aux codicaires, dont les chefs s'appelaient aussi paUvni hor-
reorum Porhiensium 3. Il en sera question plus loin ^.
Les eaux du Tibre étaient sillonnées par des embarcations
de toutes sortes, appartenant à des particuliers ou à des col-
lèges. En effet, la navigation de ce fleuve occupait une foule de
collèges, qu'il n'est pas facile de distinguer. Le blé était trans-
porté du Port à Rome dans les naves caudicariae, radeaux faits
de madriers à peine dégrossis •"> et tirés par des bœufs qui
suivaient la via Ostiensis ^. On les construisait de la sorte
pour remonter facilement le fleuve malgré la rapidité du cou-
rant. Les patrons de ces bateaux s'appelaient caiidicarii (codi-
carii) navicularii ou simplement caudicarii '. lis étaient à la
de ce qui est en magasin : quanta habeantur in comlito (C. Th., 11, 14-,
1. 1). S'agit-il d'un membre du corpus mensorum, et ce collège avait-il la
garde des greniers de Rome, comme à Ostie? — Pour le reste, voyez
GoDEFROY et Gebhardt (supra, p. 68. n. 4).
' Horrea Portuensia : C. Th., 14, 23. /. un. — Voyez Gothofr., vol. V,
pp. 201. 253. 293. 323 et C. Th., 14, 4, 1. 9. 15, 1. 1. 23, I. un. t5, i,
1. 12. Gebhardt, pp. 19-20.
2 C. Th., 14, 4, 1. 9 (417). Gothofr., vol. IV, p. 108.
5 C. Th., 14, 28, 1. un. (400).
^ Au cliap. III.
s Sen., De brev. vitae, XIII, 4 : plurium tabularum contextus caudcs
apud antiquos vocabatur, unde ... naves mine quoque, quae ex antiqua
consuetudine commeatns per Tiberim subvelmnt, codicariae vocantur.
NoNius Marc, XIII, 12 , p. 535, qui cite Sall., Hist., 4, et VarrOxN, De
vita p. R., 1. III : quod antiqui plures tabulas conjunctas codices dicebant.
a quo in Tiberi naves codicarias appellamus. Paul. Diac, p. 46. GtV.
RoscHACH dans Daremberg, art. caudicariae naves.
'■' Dio^YS. Hal., III, 44 (c'tpsaia xal puixacrt) et Procope [B. G., I, 26 :
xat pdsç o'jx dXtyo'. sv Trapaaxî'jf, a.yyozi'zoi saTôca'.v) mentionnent des
barques tirées par des bœufs; ils parlent de celles des marchands (oc
efXTTopoO aussi bien que de celles des collèges.
' Sur les caudicarii, voyez Gothofr. ad C. Th., vol. V, p. 171.
Preller, Rom und der Tiber, p. 147. Pigeonneau, De convect., pp. 69-7 -î.
( "iO )
fois bateliers et négociants i. Les denrées de l'État qu'ils trans-
portaient, ne sortaient pas toujours des greniers du Port;
parfois le transbordement se faisait dès l'arrivée des navires "^.
Les codicaires résidaient à Ostie et à Rome; les uns et les
autres formaient probablement une seule corporation, corpus
codicariorum ''\ qui avait des curateurs dans les deux villes 4'.
Ces bateliers existaient depuis une haute antiquité^; sous la
république, ils louaient sans doute leurs services aux publi-
cains ou au quaeslor Ostiensis ^>. 11 est vraisemblable qu'ils
constituaient dès lors une corporation. Sous l'Empire, leur
collège est fort important, à en juger par sa hiérarchie de
dignitaires "^.
Vopiscus nous apprend qu'Au rélien (270-275) créa des
navicularii amnici nouveaux à Rome 8. Nous ne voyons
Annone, p. 228. Krakâuer-, p. 29. Gebhârdt, pp. 18-19. Marquardt,
St.-V., II, 113. Org.fin., p. U3. PrivatL, p. 394 (411). Vie privée, II,
p. 29. HuMBERT, dans le Dict. de Daremberg, s. v. caudicarii, I, p. 972.
DeSSAU, C. 1. L., XIV, p. 8. LlEBENAM, p. 72.
' XIV 4234, à Tibur : codicarius item et mercator frumentarius .
- DiONYS. Hal. et Procop., /. /.
"> Corpus splendidissimum codicar{iorum), en 147 (XIV 4144) ou
\codica]ri naviciUairi] (XIV 106 = VI 1022, en 166). Voyez VI 1624
(= XiV 170, vers 247). 1639 (- XIV 185). XIV 309. 4144 (en 147). 4234.
XI 2643. Peut-être aussi les Ostienses naviculariei : XIV 3603 (Dessau,
C. I. L., XIV, p. 8, n. 1). Les corpora quinque (XIV 170. 4142) désignent
plutôt les quinque corpora lemmculariorum Ostiensium (XIV 3o2) que
cinq sections des cudicarii. Pour le corpus nauticariorum, voyez supra,
p. 65.
^ XIV 309 : codicar{iorum) curat{or) Ostis. Cfr. Henzen, Ann. d. /.,
1851, p. 162. Il y a de même un seul corpus piscatorum et urinatorum
totius alvei Tiberis.
^ Voyez supra, p. 69, n. 5.
« Pigeonneau, De conv., p. 71. G. Humbert dans le Dict. de Darem-
berg, I, p. 972.
' Voyez les inscriptions et Henzen, /. /., p. 166.
^ Vopisc, AureL, 47 : Navicularios Niliacos apud Aegijptum novos et
Romae amnicos posui. Preller {Rom und der Tiber, p. 147) veut con-
clure de là que le nombre de leurs collèges était fixé.
{ n )
pas pourquoi il faudrait les distinguer des codicaires ^.
Avant le même prince, la corporation s'était divisée. En
163, le collège des codicari naviculari Infernales s'en détacha;
ce fut peut-être une conséquence de la construction du port
de Trajan -. En 166, il fait élever une statue à Verus par ses
curaloves anni {quartii ^ ; plus tard, il décerne le même honneur
à Constantin -i. En quoi ces bateliers se distinguent-ils des
codicaires, et d'où vient ce nom d'Infernates? Henzen suppose
qu'ils faisaient le transport d'Ostic à Rome, et que leur nom
sert à les distinguer de ceux du haut Tibre S; mais les codicarii
proprement dits font le même service, puisqu'ils résident à
Rome et à Oslie. Du reste, Infernas et Supernas se rapportent
d'ordinaire à la mer supérieure (l'Adriatique) et à la mer infé-
rieure (la mer Tyrrhénienne) ^K Transportaient-ils d'Ostie à
Rome les marchandises venues de la mer Tyrrhénienne, c'est-
à-dire de Sicile et de Sardaigne'? Ou faut-il même admettre,
avec Pigeonneau, que de tout temps une partie des naves
caudicariae allaient chercher les denrées sur les côtes de cette
• LiEBENAM, p. 72. Suivant lui, les navicidarii amnici auraient été
créés par Aurélien. A la page 70, n. 3, il cite des passages où il n'est pas
question d'eux. Sans doute les mots navicidarii amnici [Nov. Valent.
III, tit. 28, § 2 (450)], et nautae Tiberini [C. Th., 14, 21, /. un. (364)]
désignent parfois tous les maîtres de barques du Tibre; mais ceux
d'Aurélien sont officiels et desservent Tannone. Nous croyons que ce
prince augmenta le nombre des codicaires.
- Marquardt, Priv., p. 394. Vie privée, II, p. 29.
5 XIV 106 (\T 1022), en 166. Annus intelligendus est corporis, dit
Henzen dans le Corpu.s, VI 1022. Cfr. Ann. d. L, 18ol, p. 161. Pigeon-
neau, De conv., p. 69, n. 1. Dessau, XIV 106, note.
* XIV 131. Preller, /. /., p. 148, veut lire : codicari et naviculari
Infernates.
■• Ann. d. L, 18ol, p. 161. Dessau, XIV 131, note. Sur les bateliers du
haut Tibre, voyez Plin., Ep., V, 6, 12 : Medios ille (Tiberis) agros secat,
navium patiens, omnesqiie fruges devehit in urbem.
'■' VI 1101, en 2d1 : negotiantes vini Supernat{is) et Aiiminiensis).
' Preller, L L, p. 148. Marquardt, Pjdv., p. 394, n. 4; Vie privée, II,
p. 28, n. 10. Liebenam, p. 70, n. 4.
( 72)
mer, ou faisaient le cabotage en Campanie, en Sardaigne, en
Sicile? Faut-il distinguer ces codicaires marins des codicaires
du Tibre 1? Il est impossible de résoudre ces questions. On
trouve encore des codicari naviculari infra pontem S[ubli-
cium ?] ^, qui s'identifient peut-être avec les précédents.
Les rapports des codicaires avec l'État traversèrent proba-
blement les mêmes phases que ceux des armateurs maritimes.
Les renseignements manquent; tout ce que Pigeonneau 3 rap-
porte de leur service et de leurs privilèges ne repose sur rien,
car les passages qu'il cite parlent d'autres collèges, surtout des
boulangers. Aurélien augmenta leur nombre, comme nous
venons de le voir ^. Au IV« et au V^ siècle s, ils continuent à faire
les transports du Port à Rome ; ils ont aussi la garde des maga-
sins d'Ostie, en concurrence avec les mesureurs, qui semblent
avoir été souvent en dispute avec eux 6. La capacité de leurs
bateaux était fixée par l'État"? ; quand ils n'en avaient pas assez,
les employés de l'annone pouvaient réquisitionner les barques
des riverains, pourvu qu'elles eussent la capacité voulue 8.
Enfin les inscriptions nous les montrent honorant le préfet
de l'annone ou ses subordonnés, dont ils dépendaient 9.
Nous rencontrons encore à Ostie des curatores navium
• Pigeonneau, De conv., pp. 69-71. Dans l'ile d'Igilium, il y a une
inscription du corpus codicar{iorum) d'Ostie (XI 2643).
2 XIV 18d (VI 1639).
5 De conv., pp. 69-74. Annone, 1886, p. 228.
^ Voyez supra, p. 70, n. 8.
s C. Th., 14, 3, 1. 2 (3o5). 14, 4, 9 (417). 14, 15, 1. 1 (364).
6 C. Th., 14. 4, 1. 9. C, I. L., VI 1759. Voyez supra, p. 64, n. 1.
■ 2000 modii. Voyez : Nov. Theod. II, t. 8 (439) et Nov. Val. III, t. 28,
§2(450).
s Voyez : C. Th., 14, 21, /. un. (C. J., XI, 26 : De nantis Tiberims), en
364. Nov. Theod. II, lit. 8 (439) : De navibus non excusandis. Nov. Val.
III, t. 28, § 2 (450) : De naviculariis amnicis.
» VI 1759. XIV 106 (VI 1022). 131. 170 lau procnrator portus
utriiLsque). 185. Cfr. Marquardt, St.-V., II, p. 113, n. 9. Org. fin.,
p. 143, n. 2. Dessau, C. I. L , XIV, p. 8.
( 73 )
marinarum *, qui forment une seule et même corporation
avec les curatores navium amnaliiim''^ . Leur nom indique qu'ils
n'étaient pas patrons de navires, comme les naviculaires et les
codicaires, mais simples curateurs. L'Etat fournissait-il leurs
navires et en etait-il propriétaire? Quel service leur était con-
fié? On n'en sait rien '^.
Notons également ici le corpus suburrariorum '^ qui élève
une statue à Marc Aurèle au Portus; il est composé d'ouvriers
qui portaient le lest dans les navires.
Il y avait sur le Tibre d'autres bateliers qui tiraient leur
nom de la forme de leurs embarcations : les lenuncularii,
les scapharii, les lintrarii.
On appelait lenunculi (diminutif de lembus) de petites
barques, mues par un grand nombre de rames et terminées en
pointe à la partie antérieure; elles étaient d'une extrême
vitesse et servaient souvent au transport des personnes, par
exemple des courriers et des pêcheurs s. Nulle part il n'est dit
quelles étaient les occupations des lemincularii du Tibre, et
nous sommes réduits aux conjectures c. Au IP et au IIP siècle,
ils formaient à Ostie cinq collèges : quinque corpora lenuncula-
riorum Ostiensium, en 147 et en 251 "7, et corporum quim/ue
• XIV 363 409, 7. 4142 (en 173j.
- XIV 364 : corpiiis) [curatorum n]avium marinarum [et navium a^^m-
naliiim Ostiens{ium).
5 LiEBENAM, p. 84, les rapproche des domini navium (XIV 99). Pigeon-
neau (De conv., p. 70, n. 3; Annone, p. 228) les confond avec les caudi-
caires, sans aucune preuve.
* XIV 102. 448.
s Caes., b. c, II, 43. Tac, Ann., 14, o. Gell., .\. A., X, 2o, 5. Ammian.,
XIV, 2, 10 : piscatorii lenuneuli. Xonius, XIII, 8. Cfr. Preller, /. L,
p. 149, n. 214.
^ Voyez sur les lenuncularii : Preller, /. /., p. 147; Regionen, p. 235.
Pigeonneau, De conv., pp. 74-75. Marquardt, PrivatL, p. 394 (410).
Vie privée, II, p. 28. C. /. L , XIV, pp. 8. 574, et les notes sur 250-253
(Dessau). LiebExNam, p. 85. E. Q. Visconti, Opère varie, fasc. IV, p. 56.
■ XIV 352, en 251, et note après 253. Cfr. XIV 4144, en 147 : universi
navigiarii corporum quinque. Page 8, Dessau hésite s'il faut y voir les
( •74 )
navigantes, vers 247 '. Les inscriptions font connaître les noms
spéciaux de plusieurs de ces collèges; ce sont d'abord les deux
suivants, dont nous avons les listes matriculaires du II® siècle :
1° Ordo corporatorum leminculariornm 'pJeromariorum auxilia-
riorum Ostiensium, qui n'a que deux patrons, six quinquen-
naux, et seize membres en l'an 200 2; 2^ Ordo corporatorum
leminculariornm tabulariorum auxiliariorum ou auxiliare{n)-
s{inm) Ostiensium, collège qui possède, en 152, neuf patrons de
l'ordre sénatorial ou équestre et cent vingt-cinq membres,
tandis qu'en 192 il a dix patrons et deux cent cinquante-huit
membres 3. Marquardt explique le nom û'auxiliarii, commun à
ces bateliers, par un passage de Strabon. Cet auteur dit que,
pour remonter le Tibre jusqu'à Rome, les navires devaient être
allégés au moyen de barques qu'il appelle 'j-Y.ps-Lxal c7xacpa{,
allèges [lenuncuîi anxiliarii) ^. Un siècle plus tard, Callistrate^
parle aussi de scapliae, dans lesquelles on transbordait une
partie de la cargaison. Enfin, au IV<^ siècle, tout vaisseau des
naviculaires semble avoir eu ses déchargeurs, appelés levamen-
tarii 6. Il suit de là que les lenuncuïarii auxiliarii (bateliers
lenunciUarii, tandis qu'à la page 57-4 il les assimile aux corpora quinque
du numéro 35'2. Preller, p. 149, veut en faire cinq sections des cau-
dicaires.
• XIV 170 (VI 1624), en 247 ou 248.
2 XIV 2o2 (en 200). XIV 253 et la note. Index, p. 574.
5 XIV 250 (en 152). 251 (en 192). 341. Index, p. 574. Marquardt, /. /.,
p. 394 (410). Vie privée, II, p. 28.
^ Strabon (mort en 24 J.-C), V, 3, 5, p. 232 : t) xtliv uTrTjpsx'.xwv
axacpwv euTTopta xtov £vo£yo;j.£vtov xà cpopxt'a xal àvxtcpop-t^dvxtov xa^ùv
7rot£"t xov à-o'-Xo'jv 7:p\v Vj xou -oxa[j.oi3 a'|aj0a'.. Cfr. DiONYS. Hal., III,
44 : xa"î^ 7:o-a|j.T,Yo'î; à-o^fZwZo'jzoii x£ xal àvxr^opxi'^ovxai axàcpatç. Il
parle d'un transbordement complet. De même, Procope, L l. Denys
[ihid.) et Dion Cassius (LX, 11) parlent aussi de navires qui vont jusqu'à
Rome après avoir été allégés. — Voyez encore Dessau, XIV, p. 6.
'• Dig., 14, 2, 4 pr. : navis onustae levandae causa.
" C. Th., 13, 5, 1. 1 (314) : si navicularius originalis levamentarius
fuerit, apud eosdem, apud quos et parentes ejus fuisse videmus, per-
manebit. Goth., ad h. L : a levandis navibus. Pigeonneau {De conv., p. 74)
en fait un collège spécial.
( 75 )
auxiliaires, équipages d'allèges) du II« et du III^ siècle étaient
probablement des patrons de barques légères, montées par
des rameurs, au service des gros navires, qu'ils allégeaient
pour leur permettre d'entrer dans le port ou de remonter le
fleuve *, tandis que les caudicaires transportaient, sur des
radeaux tirés par des bœufs, les denrées déchargées à Ostie.
Comment distinguer les plej'omarii des tabulariH nArjOWM.a,
équipage ou cargaison, désigne parfois un bateau de trans-
port -. Le mot yleromarii n'ajouterait donc guère au nom
(i'auxiliarii ; peut-être indique-t-il simplement des patrons
de barques pourvues d'un équipage (7:AY,po3v.a), de rameurs,
par opposition aux codices, que tiraient des bœufs 3. Les
tabidarii formaient une autre sorte de lenunculariï. Prcller les
assimile aux tabellarii, courriers portant les dépêches entre
Rome et Ostie ^. Selon Marquardt ^, c'étaient des ouvriers
< C'est l'explication admise par Dessau, C. I. L., XIV !2o3 note : qîii
mm leimnculis suis majoribus navibus auxilio esse debchant, maxime
puto in accipiendis mercibus et in naves imponendis. Selon Pigeonneau,
Deconu., pp. 74-75, ils aidaient les navires à franchir l'entrée du Tibre,
en les remorquant à l'aide de barques spéciales, et les conduisant jusqu'à
l'endroit où le service de halage était organisé. Cfr. Lacour-Gayet,
Antonin le Pieux, pp. 202 et suivantes.
- Marquardt, Priv., p. 394, n. 1; Yie privée. II, p. 28, n. 10. Voyez
Hesychius, s. V. 7:Xrjpto!j.a. Or. -H., G866, où Hexzen exi)lique par navis
oneraria. Servius, Ad Aen., XI, 320. Lucian., Ver. Hist., II, 37. 38. On
trouve des pleromarii : C. /. L., IX 1 : Jiovi) Oiplimo) Maximo), Q.
Cordius Aquilinus vot(um) sol{vit) l{ibens) m{erito) cum pleromaris.
5 Muratori, p. 71o, explique : socii navales. E. U. Visconti, Opère
varie, fasc. IV, p. 56 : / pleromarj doveano formare come suol dirsi
l'equipaggio délie nave di guerra, in opposizione de lenuncularj chi servi-
vano nelle minore barche da trasporto. Preller, /. /., p. 149, n. 2lo, fait
remarquer qu'il n'y avait pas de flotte de guerre sur le Tibre à cette
époque; il explique : Mannschaft der Staats- und Wachlschiffe, station-
nant au Portus.
' Preller, /. /., p. 149. Regionen, p. 23o. Voyez sur les tabellarii :
E. DES.IARDLNS, dans les Mélanges de r École des Hautes Études, Paris.
1878.
•"' Marquardt, /. /.
( "6 )
chargeant et déchargeant les planches {tabulae\ en même temps
que patrons d''J-r,p£T',xa'. o-xa^ai. Entin Pigeonneau propose
une troisième explication. Dans le port fort encombré, il était
difficile, dit-il, de faire tirer par des bétes de somme les radeaux
faits de planches; les tabularii les remorquaient et tiraient
leur nom de ces radeaux, assemblage de planches [tabulac^
Vn troisième collège de lomnciilarii semble avoir desservi
un bac sur le Tibre; c'est du moins ce qu'indique son nom :
corpus scaphariovum et lenuuciilanonim trajectus LucuJli '. On
voit qu'il comprenait aussi des scapharii qui se distinguaient
sans doute des autres par la forme de leurs barques-. Nous
connaissons deux autres corporations qui semblent avoir
desservi un passage sur le ïibre : corpus treject.us] ioqaten-
sium 3, et corpus trejectus marmorariorum ^.
Entin nous trouvons un quinqueiwalis, qui se dit lyntrarius ;
il présidait sans doute une corporation spéciale de canotiers,
dont il ne nous est pas possible de préciser les occupations^».
Sur le Tibre, il y avait aussi des plongeurs pour repêcher les
marchandises submergées. Ce malheur était fréquent (5. Les
« XIV 409, au 11^ siècle. Cfr. XIV ïioi, avec la note. Henzex, Aun. d. I..
1859, p. 230, et Ephem. ep., I, p. 217.
- Les scaphae transportaient des marchandises (DiG., 14, 2, 4 pr.) ou
des personnes (Suet., Claud., 38). — XIV 453 : [len]iinculariiu;.
- Ephem. ep., I, p. 217, note = XIV 403.
^ X 542 uMV 425). Cfr. P. Luigi Bruzza, Iscriiioni dci uiarmi ijrcz-zi
{Aun. d. /., 1870, pp. 106-20*). A Ostie, les navires chargés de marbre
devaient déposer une partie de leur cargaison, qu'on transportait au
moyen de barques. Selon Bruzza : In Ostia troviamo appunto un corpo
di navicellai costituito pel trasporto di manni (p. 137). — XIV 254 : lenun-
c[ularii] ... trejectus ..., avec un vigilliarùun].
2 VI 9531. Nous avons vu des lyntrarii à Séviile, II 1182. Voyez.
Liebex.\m, p. 86 fin, et Dig., 4, 9, 1, 4 : de lyntrariis. C. Th., 13, 5, 1. 13
(369), où GoDEFROY propose de lire : de linlt'ariis. Sur VI 9531, voyez
Th. Mommsen, dans Borghesi, OEiivres, II, 22.
«^ Liv., 44, 10, 3. Cic, Acad., fragm. 10 (Mueller) = Non., p. 474, 27.
s. v. urinantur. Marquardt, Priv., p. 391, n. 4 (408, n. 1). 451. n. 3
(468, n. 9). Vie privée, II, p. 26, n. 1, et 97, n. 9.
[ ii
plongeurs se livraient aussi à la pèelic; de là leur nom ordi-
naire : jjiscatores et urinatores ou piscatores urinatores '. Au
commencement du lll** siècle, tous les pêcheurs et plongeurs
du Tibre ne formaient qu'un seul collège, ayant ses patrons,
ses magistri ou quinquennaux et ses curateurs; il avait son
siège d Rome : corinis piscaturum et urinaiorinn lolius alvei
Tiberis qiiibus ex S. C. coire licet -. II élève une statue à son
patron pour trois motifs, dont voici le dernier : praesertim
mm navirjalio scapliarum (lili(jentia ejus adqumta cl confirmata
.sil. 11 est probable qu'avant cette époque les pêcheurs et plon-
geurs ne pouvaient exercer que ce double métier : il leur fut
permis de transporter les hommes et les marchandises, en
concurrence avec les collèges déjà mentionnés-.
Tels étaient les bateliers du Tibre. On voit qu'ils n'étaient
pas tous au service de l'annone: ils desservaient aussi le public,
le commerce privé. II en était sans doute de même des plon-
geurs; leur service officiel leur avait valu l'autorisation dont
ils se vantent. Quant aux passeurs d'eau, ils étaient seulement,
cela se comprend, au service des particuliers.
Pour compléter la liste des corporations occupées au trans-
port, il faut citer encore l'important collège des constructeurs
de navires, qui travaill lient dans les grands chantiers de TEtat'^.
En 19o, Ostie et le Portus avaient chacun sa corporation de
fabri navales, autorisée par un sénatusconsultc s. L'une et
' VT ^9700. 29702. C'est peut-être un cmjmleton. Ailleui's, on \\i pisca-
toriim et urinatorum : VI 1080 et 1872. Le ro 29701 se rapporte aussi à
eux. Voyez Hlelsen, après VI 29702. yotizie, 1888, p. 279. BulL corn.,
1888, p. 388. LiEBENAM, p. 87. Marquardt, /. /. Voyez le l^"" vol., p. 237.
2 VI 1872, en 206. Cfr. VI 1080, k un xVnlonin. À Ostie, on trouve un
corpus urinatorum qui ne ditiérait sans doute pas du précédent (XIV 303).
•> PiŒLLER, Piom und der Tiber, p. loO, n. 217.
^ Sur les chantiers, voyez : Preller, Regionen, p. 242; Rom und
der Tiber, 1849, pp. 1/^3. 150. G. Boissier, Prom. arc/i , p. 263. Liebe-
NAM, p. 97, n. 2.
•■' Quibus ex S. C coire licet, XIV 168 et 169 (en I9û). 2o6. Sur les fabri
navales Ostienses : XIV 168 et 169. 292 (XI 1447 a). 368. 372. Sur les fabri
( 78 )
l'autre ont laissé plusieurs inscriptions, qui témoignent de leur
importance. On les trouve ensemble dans une inscription
d'Ostie en 195, où l'on voit qu'un tribunus fabrum navaliiim
Portensium était patron du corpus fabrum navalium Ostiensium
(juibus exs{enatus) c{onsuUd) coire licet '. Vers la même époque,
la liste matriculaire de l'un de ces deux collèges comprenait
treize patrons, six quinquennales, une mater, treize honorati et
trois cent vingt pîebeii 2.
Distribution ou vente. — Il faut montrer maintenant
comment le blé était préparé pour la distribution ou la vente.
Quand on remplaça les distributions mensuelles de blé par des
distributions journalières de pain, la corporation des bou-
langers (pistores ^) acquit une importance capitale ; mais
elle existait depuis longtemps. Cependant, il ne faut pas la
faire remonter trop haut. Pline 4 rapporte que le métier de
la boulangerie ne fut introduit à Rome que vers Tan o83 = 171 ;
navales Portitenses : XIV 169. 2o6 (?). 456. Cfr. 124. 424. Dessau, dans le
C. 1. L., XIV, pp. 7-8 et note après le n. 256; il suppose que les fabri
navales Portiienses étaient une partie du corpus fabrum navalium Ostien-
sium; dans ce cas, dans V album trouvé au Portus (XIV 256', il faudrait
suppléer : Ostiensium (voyez supy^a, vol. I, p. 365). On les appelle aussi
naupegi, naupegiarii, architecti wf/i'a/e^ (Bluemner, Teclin., II, p. 241 et
LiERENAM, p. 97j. Selon Dessau (C. /. L., XIV, p. 8) les privilèges de
Claude {si navem marinam aedificaverint) s'appliquaient à eux. Nous
croyons que Claude favorise les propriétaires de ces navires.
i"^XIV 169. Maué, Praef fabrum, p. 80.
- Voyez supra, vol. I, p. 365.
^ Sur le corpus pistorum, voyez : Gothofr., ad XIV, 3 : De pistonbus
et catabolensibus, vol. V, pp. 168-169, et le commentaire des lois 1-22.
Prei.ler, Regionen, p. 111. Hirschfeld, Annona, pp. 20. 21. 44. 45.
Krakâuer, pp. 40-42. Gebhardt, pp. 20-26. Marquardt, Priu., pp. 398-
400 (415-418). Vie privée, II, pp. 36-40. Guidi, Bull, com., 1884, p. 228.
Liebenam, pp. 36. 37. 42. 43. 53. 56. 76-78. Gatïi, Mitth. d. /.J886,
p. 66. Matthiass, pp. 30-32.
* Pll\., //. iV., XVIII, 28, 107-108. Il ne parle pas d'un collège de
pistores. Voyez supra, vol. I, p. 67, n. 3.
(79 )
auparavant c'étaient les femmes qui, aidées des esclaves, fai-
saient le pain. Du temps de Plante, on trouvait déjà plus
commode de s'adresser au boulanger, mais les familles riches
eurent toujours des pistores parmi leurs esclaves *.
Dès la république, les édiles veillèrent à ce que le peuple
pût acheter du pain de bonne qualité à des prix modérés;
à cet etiét, ils concluaient des contrats avec les boulangers '^.
Les empereurs ne se contentèrent pas non plus d'approvision-
ner la capitale de blé; ils encouragèrent le métier des boulan-
gers, qui étaient trop méprisés pour être nombreux -K Mais
quand se formèrent-ils en corporation 'i- ? Aurélius Victor rap-
porte que c( Trajan trouva un moyen admirable de faire régner
à Rome une perpétuelle abondance : ce fut d'établir et de
consolider le collège des boulangers '"> )). 11 semble qu'il y ait
contradiction, car si Trajan consolida ce collège, c'est qu'il ne
le fonda pas, qu'il le trouva établi. 11 est probable qu'il fixa ses
rapports avec l'annone et ses privilèges. Vers le milieu du
IP siècle, Gains compte le corpus pistorum parmi les col-
lèges autorisés 6; le même jurisconsulte et Llpien parlent des
privilèges que le collegium pistorum ou les urbici pistores
avaient reçus de Trajan '^. En 144, le corpus pistorum élève une
i VI o077. 0337. 6687. 9293. 946i>«, I, 6. 9732. De même, VI 6219 :
T. Statilins Anaptes, pistor deconlegiio), il s'agit d'un collège domestique.
2 I 1013-1015 = VI 19o8 : pistor redemytor , antérieurement à
Auguste. Voyez Th. Mommsen, St.-R., II-, p. 492, rem. 3. Bull, d, /.,
1839, p. 174. Ann. d. /., 1838, p. 202. Mon. d. /., II, 58.
5 SuET., Aug., 4. Marquardt, Priv., p. 400 (416), n. 5. Vie privée, II,
p. 37, n. 10
^ L'inscr. de DoNi, IX, 11, est fausse : collegiiun siliginariorum, sous
Auguste.
•'' De Caes., XIII, 5 : et annonae perpetuae mire consultitm, reperto
firmatoqiœ pistorum coUegio. EiRSCHFELDy Aimoiia, p. 44, lit : reparato.
BoRGHESi {OEuvres, III, p. 134) lit : recepto. 3I.\rquardt, /. /., et Liebe-
NAM, p. 37, expliquent de même. — Duruy [Hist. des Rom., V, p. 150)
dit : « constitué dans un but utile ».
f' DiG., 3, 4, 1, pr. (voyez supra, vol. I, p. 155).
' Gaius, I, 34. Fragm. Vat., 233 : collegium pistorum. 235 : urbici
pistores. Sur leurs privilèges, voyez infra, cliap. IV.
(80 )
Statue à Ântonin le Pieux; la base porte les insignes du col-
lège, un boisseau rempli d'épis, une meule et au-dessous le
nom du préfet de l'annone, dont la corporation dépendait *.
Une inscription sans date parle d'un corpus pistorum siligina-
rioriun -, que Borghesi assimile avec raison au corpus pisto-
rum; en effet, depuis Aurélien, le pain distribué est fait de
fleur de farine {panis siligineus) '^ ; de plus, ce collège a un
mensor perpetuus, qui dédie un autel à l'Annone sainte, et le
bas-relief représente l'Annone versant des épis dans un bois-
seau et tenant de la main gauche une corne d'abondance, ce
qui prouve que ce collège avait rapport à Vannona civica.
A la même époque, sous Antonin le Pieux, nous trouvons à
Ostie un corpus pisto[rum] coloniae 0[stiensis et] Portiis iitriu[s-
qiie] 4, qu'il ne faut pas confondre avec celui de Rome. Il n'avait
pas de privilèges », ce qui prouve qu'il n'avait rien de commun
avec l'annone.
1 VI 1002. Sur le modiiis, symbole des boulangers, cfr. VI 868 et De
Rossi, Am2. d. I., 188o, p. 229. Inscr. christ., I, p. 213. Wilpert, /. l.,
pp. 27-28 (voyez supra, p. 60, n. 1).
- VI 22. — Borghesi, OEuvres, III, p. 134. — Marquardt {Priv.,
p. 400 (416), n. 8. \ie privée. II, p. 38, n. 3) et Liebenam (p. 78) croient
qu'il s'agit d'un corps spécial de boulangers.
5 Vopisc, Aiir., 35. Vopiscus assure qu'il en est encore ainsi de son
temps, c'est-à-dire sous Constance. Sur ce pain, voyez Bluemner, Techn.,
I, p. 78. Marquardt, Priv., II, p. 403 (419). Vie privée, II, p. 41. Liebe-
nam, p. 78, n. 2.
■* XIV 101; cfr. De Rossi, Bull, crist., 1866, p. 39. Sous Dioclétien :
corpus pistorum Ostiens. et Port{uensium), XIV 374. A Tibur, on a un
q(îtin)q{uennalis) pistorum. (tertium), et perp{etuus), et codicarius, item
mercator frumentarius, XIV 4234; il s'agit sans doute des pistores
d'Ostie. Voyez Dessau, C. I. L., XIV, p. 8 et la note après le n» 101. Il
veut mettre ce collège en rapport avec le partis Ostiensis (G. Th., 14, 19,
1. l); mais voyez supra, p. 24, n. 1, et ci-après.
2 Fragm. Vat., 234 (Ulpianus) : Sed Ostienses pistores non excusantur,
■ut Filumeniano imperator noster (Caracalla) cum pâtre (Septime Sévère)
rescripsit. Dig., 27, 1, 46 (Paulus) : Sed urbici pistores a coUegarum
quoqiie filiorujn tutelis excusantur.
( 81 )
Quant ù ses rapports avec l'administration au 11^ siècle,
le corpus pistorum ressemblait beaucoup aux naviculaires.
D'abord il n'était pas lié envers l'État comme corporation,
et il renfermait des membres qui n'étaient pas boulangers
et ne jouissaient d'aucun privilège. En accordant des privi-
lèges aux boulangers, Trajan exigea plusieurs conditions : ils
devaient, comme le disent Gaius et Ulpien, exercer eux-mêmes
le métier, moudre et faire cuire par jour au moins cent bois-
seaux de blé, enfin figurer sur une liste dressée par l'adminis-
tration de l'annone. Il fallait un certificat [litterae) du Praefec-
tus annonae, constatant qu'on remplissait ces conditions '. Les
membres du collège étaient donc libres, ils recevaient qui ils
voulaient, et il résulte du texte d'Ulpien que le collège conte-
nait en réalité des membres qui n'étaient pas boulangers;
seulement tous ne jouissaient pas des privilèges. Ceux qui
rendaient le service exigé y avaient seuls droit et figuraient
sur une liste {numeiiis) distincte de V album du collège. Au com-
mencement du III« siècle, la situation n'était pas changée,
comme l'atteste Paul, qui s'exprime dans les mêmes termes
qu' Ulpien 2. Ces boulangers privilégiés s'engageaient probable-
< Gaius, I, 34 : Denique Trajanus constituit, ut si Lalimis in urbc
triennio pistrinum exercuerit, [qiiod in] (lies singulos non minus quam
centenos m[odios] frumenti pinseret, ad jus Quiritium perveniat. Fragm.
Vat., 233 (Ulpianus) : Sed qui in collegio pistorum sunt^ a tutelis excu-
santur, si modo per semelipsos pistrinum exerceant. Sed non alios puto
excusandos quam qui intra numerum constituti centenarium pistrinum
secundum litteras divi Trajani ad Sulpicium Similem exerceant. Quae
omnia litteris praefecti annonae significanda sunt. Cfr. 235. Sur le
sens de centenarium pistrinum, voyez Gaius, I, 34 {supra). Matthiass
(p. 31) parle de l'entrée dans les Staatsbackereien créées par Trajan;
il s'agit évidemment de boulangeries privées, mais privilégiées sous
certaines conditions. Quand Ulpien (Fragm. Vat., 235) parle de ab
ipso (Caraca lia) créa ti pistores, ou de gens qui ont assumé une tutelle
antequam pistores essent, il s'agit de l'inscription sur la liste {intra
numerum constituti) des boulangers qui sont au service public.
^ DiG., 27, 1, 40 (Paulus).
Tome L, vol. II. 6
(82 )
ment à fournir au public, non à l'État, du pain de bonne
qualité à un prix modéré; peut-être achetaient-ils le blé à bas
prix aux magasins de l'État. Ainsi l'État était rassuré quant au
prix du pain, à la qualité et à la quantité. Ils dépendaient du
préfet de Tannone, à qui l'empereur adresse les rescrits qui les
concernent et dont le nom figure dans leurs inscriptions ^.
Entre le règne d'Alexandre Sévère et d'Aurélien, on com-
mence à distribuer du pain au lieu de blé, et le corpus
pistorum devint indispensable. Le nombre des boulangers
augmenta et leur situation changea ; ils furent chargés de faire
le pain et de le distribuer au peuple. Il en fut de même à
Constantinople, où Constantin établit sans aucun doute un
collège. Dans chacune des deux capitales, le corpus pistorum
est la plus importante et la plus nombreuse des corporations,
après celle des naviculaires. A Rome, il nous a laissé une
belle inscription vers l'an 340 ^ ; le Code Théodosien lui con-
sacre tout un titre 3 ; le Digeste et le Code Justinien en parlent
encore, et il semble qu'on le retrouve à Ravenne, sous le roi
Théodoric^^. Dans les deux capitales, on les appelait aussi
1 Fragm. Vat., 233. 234. 235. C. I. L., VI 1002, en 144. Cassiod., Var.,
VI, 18.
2 VI 1692 : collegium pistorum. Cfr. VI 1739, au IVe siècle : corpus
pistorum magnarioriim et castrensarioinim. Ce dernier collège diffère
probablement du premier. Le panis castrensis est un pain de farine
grossière. Marquardt, Priv., p. 403 (419). Vie privée. II, p. 41.
5 Le Code Théodosien (14, 3, 1. 1-22) l'appelle souvent corpus pistorum,
jamais collegium. 14, 3, 1. 20 : ordo pistorius; 1. 11 : consortium pisto-
rum; 13, 5, 1. 2 : consortium pistorum urbicorum. Symmach., Rel., 14,
§ 3, et 33, § 2 : pistores publicae annonae. Sur ceux de Rome, voyez
encore : C. Th., 6, 37, /. un. 9, 40, 1. 3. 5-7. 9. 14, 15, 1. 1-4. 14, 17, 1. 3-4.
Pour Constantinople, voyez : 14, 16, 1. 2. 3 (C. J., XI, 16, 1. 1. 2); 14, 17,
1. 9. 10. Nov. JusT., 80, c. 5.
* Marini, I papiri diplom., n» CXXII, p. 187, 1. 40 : Florentinus, v. c,
e^p{rae)p(psitus) pistorum, vers la fin du VI^ siècle. Ibid., p. 353, note.
C. /. L., XI 317 : Florentins pater? pistorum régis Theoderici, à
Ravenne. Voy. la note, ibid.
{ 83 ,
mancipes, comme l'a montré Godetroy '. Maucipium dësignait
de même la boulangerie, et ïnancipatus \d functio pistoria -. Un
seul passage semble contraire à cette interprétation ; il est de
Socrate : ol t£ TrpoVa-Tâuevo?. toûtwv, ol aâyxi-eç t'ÀJ PwfjLaiojv
yXwdo-y] xaXoOvTaiS ; mais ol Trpoi,(7Tâ[A£vot. doit s'entendre de tous
ceux qui exploitent la boulangerie, de tous les boulangers, et
non de leurs chefs''^, qui s'appelaient alors palroni^. Comment
manceps a-t-il pris ce sens? Manceps sutrinae se dit du loca-
taire d'une boutique de cordonnier 6, et peut-être le sens de
boulanger date-t-il du temps où les boulangeries de l'État
étaient affermées au corims pistorum, ou plutùt à des membres
du collège. On disait alors mancipes pistrini, puis on a dit
• GoTHOFii., ad 12, 16, l. un. et 14, 3, 1. 18. De même Cujac, ad
C. J., XI, 16, 1. 1. Gebhardt, pp. 24-25, et notre article dans la Revue de
rinstr. publ. en Belgique, 1892, p. 223. — Les suivants les regardent
comme les intendants d'une boulangerie : Goth., Glossarium nominum.
HiRSCHFELD, AmioYia, p. 45, n. 62 {Geschàftsfûhrer). Marquardt,
Privatl., p. 403 (419). Vie privée, II, p. 40. Krakauer, p. 40. Humbert,
Dict. de Daremberg, I, p. 278. Liebenam, p. 76, n. 5. Ils s'appuient sur
les passages de Socrate et de Lydus cités ci-dessous. On trouve man-
ceps : C. Th., 8, 8, 1. 4 : mancipum corpus. 14, 3, 1. 18. 14, 16, 1. 2. 3.
C. J., XI, 16, 1. 1 : mancipum collegium consortium que. Ibid., 1. 2.
Suidas, 'Ap-oTiwXeTov tô [Lccy-KiTzeiov^ ev ^) ol àpxot ^^Ivo'^-cx.i. Dans les
inscriptions VI 1016. 1742, le sens est douteux. Dans C. Th., 12, 16, rubr.,
et il, 20, 1. 3, ce sont les mancipes thermarum.
2 GoTH., ad 14, 3, 1. 18. Cfr. 8, 7, L 9. 16. 19.
^ SOCRAT., H. E., V, 18 : ~Haav ec, àp-^aiou xaxà --riv li-syi'jXT^v PwfXTiv
olxoi T:(xix\ieyé^Biq, ev oTç 6 xrî uo'Xît y^opTjyoufj-Evo^ àûxoç iyrjcxo. Ol xe
7rpoVaxa[j.£voi xoûxwv, ot (j-dcYXiireç x^ Pwfj.ai(.ov yAcotrciTi xaXoûvxai ...
Voyez la note de l'édition Migke, P. G., vol. 67, p. 610. Plus loin, on
lit : yvohq xauxa ô PaatXeùc; xoù<; \i.iyKi)'Ka(; fxèv âxtijLtopTiaaxo. Cfr. Nov.
JUST., 80, 5 : xoTç 7rpo£ax(J5at xœv àpxoTiotrixixùJv £pYaaxT]pûov. Lydus, De
mensib., VI, 30 : ol oè iji.âYxnrc(; oIo^^ei xsyvlxat xoo àvopaTrcoocôôoui; apxou.
De mag., III, 7 : {JL^yxiTreç, ol xoÛ OTjfjicaoouç xal àvôpaTTwStoôouç apxou
ÔTjjjLioupyoî.
* Gebhardt, p. 25. Cfr. Hirschfeld, Annona, p. 45.
5 C. Th., 14, 3, 1. 7.
« Plin.,^. iV., 10,43,60.
( 84 )
simplement maucipes, de même que ce mot désignait parfois
les mancipes thermarum ou mancipes salinarum '.
Au IV^ siècle, la corporation est tout entière au service
public; les boulangers sont devenus les pistores publicae
annonae, comme les appelle Symmaque '^. Ils fabriquent deux
sortes de pains, \epams graclilis, qu'ils distribuent gratuitement
dans les deux capitales, et \e panis fiscalis (ou Ostiensis), qu'ils
vendent à bas prix au peuple de Rome, et, depuis Théodose II,
à celui de Constantinople. Pour le premier, les préposés des
greniers leur livrent gratuitement le canon frumentaire con-
servé dans les greniers de Rome et de Constantinople 3 ; il
leur est strictement défendu d'y prendre eux-mêmes du blé et
Gratien décida qu'ils seraient responsables de tous les vols
commis dans les magasins 4. Pour faire le pain qu'ils ven-
daient à bas prix s, ils achètent le blé à bon marché des
patrons des caudicarii et des mesureurs, qui avaient la garde
des greniers d'Ostie 6. Pour conserver le blé reçu ou acheté,
les boulangers avaient leurs magasins propres à Rome et au
Portus '^. Afin de prévenir les famines, Théodose le Jeune créa
à Constantinople une caisse frumentaire destinée à l'achat de
blé, quand le canon frumentaire devenait insuffisant. Ce fut
d'abord le préfet de la ville, puis les boulangers qu'on chargea
* Voyez infra.
2 Reiat., 23, § 1 . Cfr. Gebhardt, p. 21. C. Th., 14, 3, 1. 15 : lex, per quam
utilitati annonae publicae providetiir.
3 C. Th., 15, 1, 1. 12. 14, 3, 1. 16. A Constantinople : C Th., 14, 16, 1. 2
(G. J., XI, 23 (24), 1. 1) : integer canon mayicipibus consignetur .
* C. Th., 14, 3, 1. 16 (380)/
^ Lepaiîis Ostiensis. Dessau nous semble avoir tort de faire intervenir
ici les pistores Ostienses {C I. L., XIV, p. 8); cette corporation existait
avant qu'on vendît le panis Ostiensis et elle n'avait pas de privilèges.
Voyez supra, p. 80, n. 4.
6 La quantité à fournir était fixée. C. Th., 14, 15, 1. 1 (364) :
200,000 boisseaux.
' G. Th., 14, 15, 1. 4 (398) : liorreis cellulisve quaeintra urbem Romain
atque in Portn constituta pistorio jure retinentw'.
( 85 )
de ces achats. Les boulangers recevaient le blé et revendaient
du pain à bon marché ^.
Le poids et la qualité du pain étaient déterminés-. Le préfet
de l'annone devait visiter les boulangeries pour exercer son
contrôle 3.
Quant aux bâtiments eux-mêmes, nous verrons qu'à une
époque inconnue, ils avaient été mis à la disposition des bou-
langers par l'Etat. Au IV^ siècle, il y avait à Rome deux cent
cinquante-huit boulangeries publiques; à Constantinople, dix
sont qualifiées piiblica et cent vingt privata ^*. Un triple travail
s'y faisait : la mouture, le pétrissage et la cuisson^. Tant qu'on
ne connut que les moulins tournés par les hommes et par les
bêtes, les métiers du meunier et du boulanger ne furent pas
distincts 6. Or, les moulins à eau ne furent introduits qu'au
IV^ siècle; alors seulement le moulin fut séparé de la boulan-
gerie. L'eau était fournie par les aqueducs passant sur le Jani-
cule et les moulins étaient situés au pied de la colline'. Il était
défendu aux particuliers de prendre de cette eau, même en
payant une redevance 8. Dès lors, les meuniers (molendi-
narii) formèrent un collège spécial, résidant près du Janicule;
c'est là qu'on a trouvé un édit du préfet de la ville contre leurs
« G. Th., 14, 16, 1. 1 (409). 3 (434). G. J., XI, 23(24), 1. 2. Gfr. Gothofk.,
Parât, ad. G. Th., 14, 16. Serrigny, I, n. 34o. Gebhardt, p. 22.
2 C Th., 14, 15, 1. 1. 14, 17, 1. 5. Gfr. Schol. de Perse, Sat., III, 112.
5 Gassiod., Var., VI, 18. Formula P. A. : per o/ficinas pùtorum
cibosque discurris, pensum et mimditiam panis exigu.
^ Curiosum Urbis : 258; Not. U. : 254. Gfr. Preller, Regionen, i». 111.
Jordan, Top., II, p. 69. A Gonstantinople , le sens de pistrina publica
et privata est douteux; voyez Notitia U. CP., éd. Seeck, XVI, 39.
^ Bluemner, Techn., I, pp. 83 sqq.
6 VI 1002, inscription du corpus pistorum, en 144. A gauche, une
meule; à dioite, un boisseau rempli d'épis.
' Marquardt, Priv.y p. 407 (422). Vie privée, II, p. 45. Bf>uemner,
Techn., I, p. 83, n. 4. Prudent., Adv. Sijmm., II, 950 : Aut qiiae
Janiculi mola muta quiescit ?
8 G. Th., 14, 15, 1. 4 (398) : aqua molarum.
( 86)
fraudes (vers 488). Ce fonctionnaire constate qu'ils se servaient
de faux poids et mesures et il tixe leur salaire à trois nwnmi
par boisseau *. Ils livraient la farine aux boulangers.
Il nous reste à parler de la distribution du pain'^, également
confiée aux boulangers; nous ne sommes pas renseignés sur
la vente. Dans chaque région des deux capitales, il y avait des
estrades sur lesquelles on montait par des gradins {gradus,
panis gradïlis). Elles étaient voisines des boulangeries 3, et
chaque boulangerie en avait une ou plusieurs à desservir 4-. Sur
ces estrades étaient placées des tables d'airain portant les noms
des ayants droit et la quantité de pain qui revenait à chacun s.
C'était un greffier du préfet de l'annone qui dressait ces listes 6.
Des règles précises étaient tracées aux boulangers pour la
distribution, et les employés du préfet de l'annone devaient
veiller à leur observation : ainsi, ils ne pouvaient fournir du
pain dans la boulangerie même, secrètement et par faveur;
d'autre part, ils ne pouvaient forcer personne à y venir
chercher sa part. Chaque participant avait son gradin déter-
miné et il ne pouvait pas changer "7; il devait être muni de sa
tessère frumentaire 8.
Il nous reste à exposer l'organisation des distributions
d'huile, de viande et de vin.
* VI 1711. Preller, Regionen, pp. 214-215. Krakauer, p. 43.
Bluemner, Techn., I, pp. 39. 49. Marquardt, Priv., pp. 405 (421) et
suivantes. Vie privée, II, pp. 43-45. Liebenam, p. 76.
2 Voyez HiRSCHFELD, Annona, pp. 63 sqq. et 72 sqq. 3Iarquardï,
St.-V., II, pp. 128-131; Org. [m., pp. 161-163. Humbert, Dict. de Darem-
BERG, I, p. 278, 2e colonne.
3 GOTH., ad G. Th., 14, 17, 1. 2, p. 268.
^ G. Th., 14, 17, l. 6 : pistrino, quodfraudabat, inserviat (en 370).
= G. Th., 14, 17, l. 5 (369) : panis modus et percipientis nomen.
6 G. Th., 14, 17,1.6(370).
7 G. Th., 14, 17, 1. 2. 3. 4. 5. 6.
8 Celte tessère pouvait être vendue et passait aux héritiers. Vopisc,
AureL, 35. G. Th., 14, 7, 1. 2. Nov. Just., 88, 2. Voyez Krakauer, p. 44.
Marquardt, St.-V., II, p. 130. Org. fin., p. 161.
( 87 )
Huile. — Pour assurer l'approvisionnement du marché en
huile *, les empereurs ne cessèrent d'encourager le commerce
privé. Le Digeste contient encore les mesures prises de bonne
heure à cet effet : les marchands d'huile (mercatores olearii),
comme les naviculaires, obtinrent l'exemption des charges
publiques après cinq ans de commerce, à condition de con-
sacrer aux affaires une grande partie de leur fortune -.
Dès le 11^ siècle, ils formaient des collèges, surtout ceux
qui trafiquaient avec la Bétique et avec l'Afrique. Ils résidaient
à Rome et à Ostie ; c'est ù Rome que les mercatores frumentari
et oleari Afrari 3, et les negotiatores ole[arii\ ex Baetica érigent
des monuments à leurs patrons '^; c'est dans la même ville
que nous trouvons un chevalier romain qui se dit diffusor
olearius ex Baetica, curator ejusdem corporis, c'est-à-dire mar-
chand en gros de l'huile de Bétique s. A Ostie, nous rencon-
trons au 11^ siècle des olearii {negotiatores) 6. Les patrons des
deux premières corporations sont des préfets de l'annone, ce
qui prouve que ces collèges avaient des rapports avec le service
des approvisionnements; peut-être s'engageaient-ils à pourvoir
le marché, par des contrats analogues à ceux des boulangers.
Scévola nous fait connaître qu'ils étaient exemptés des
charges publiques, comme les naviculaires ".
•
^ Voyez Krakauer, p. oO. Hirschfeld, Annona, p 19.
2 DiG., 50, 4, O (SCAEVOLA).
5 VI 1620. Selon Hirschfeld, Annona, p. 32, n^ 17, l'inscription est
postérieure à Hadrien. Cfr. Marquardt, St.-V., Il, p. 137, n. 1. Org.
fin., p. 172, n. 7.
* VI 1623'', sous Marc Aurèle ou Commode, selon Hirschfeld. Amwyia,
p. 31, n» 15. — Voyez encore : VI 1935, mercator ulei Hispani ex pro-
vincia Baetica, qui est viator tribimicms decuriae majoris à Rome.
3 VI 29722 - WiLMANNS, 2506. II 1481 : diffusor olearius. XII 714, 1 :
diffiusores), à Arles. Le diffusor de Wilmanns, 2506, est aussi negotiator
vinarius et nauta Araricus à Lyon. Ce sont des marchands d'huile en
gros. Sur diffundere, voyez Bull. d. L, 1880, p. 95. Cfr. Marquardt, Priv.,
p. 452 (469). Yie privée] II, p. 98.
« XIV 409.
' DiG., 50, 4, 5. Voyez le chapitre IV.
( 88)
Quant à l'huile nécessaire à l'État pour la vente et pour les
distributions gratuites {canon urbicarius olei '), elle était fournie
en guise d'impôt par l'Espagne "^ et par l'AfriqueS. Sous César,
cette dernière province donnait trois millions de litres ^.
Nicée et, depuis Septime Sévère, Tripoli fom^nissaient chaque
année, ù titre gracieux, une certaine quantité, mais cette libé-
ralité devint une lourde charge et Constantin y renonça s.
Le transport de l'huile était fait par les naviculaires; il y
avait en Espagne un adjntor Praefecti annonae ad oleum Afrum
et Hispanuni recensendiim, item solamina (les denrées) transfe-
renda, item vecturas naviculariis exsolvendas 6. Au IV*^ siècle, ce
fonctionnaire est remplacé par les gouverneurs''. A Rome,
Symmaque nous parle d'un collège de frugis oleique bajuli^.
Ces portefaix déchargeaient- ils les bateaux et portaient-ils
rhuile aux magasins où elle était conservée 9, et des magasins
aux lieux de distribution? On ne sait. Le Cunosum et la
Notitia U. R. parlent de deux mille trois cents mensae oleariae
dispersées dans les divers quartiers 'lO. C'étaient, disent Preller
et Humbert ", des boutiques privilégiées chargées de ce scr-
» C. Th., 14, 15,1. 3 (en 397).
2 VI 162o''. II 1180. CIV. Pigeonneau, De convect., p. 38. Hirschfeld,
Annona, p. 80.
5 II 1180. VI 1620. Symm., Rid. 35 (X, 48). C. Th., 14, 15, 1. 3.
* Plut., Caes., 55.
5 Auii. ViCT., De Caes., 41, 19. Cfr. Spart., Sev., 18.
6 C. /. L., II 1180 au Ile siècle. Cfr. XIV, 20 à Ostie, en l'an 175 :
■procurator ad oleum in Galbae {horreis) Ostiae portus utriusque. L'huile,
déchargée à Ostie, était amenée à Rome par des bateliers. Wilpert
(/. /., p. 25) décrit une fresque représentant un bateau à voiles, avec des
rameurs et chargé d'amphores.
7 En Afrique, par les judices Africain. Symm., Rel., 35, 2 (X, 48).
« Symm., Rel., 14(X,'27).
^ Symm., Rel., 35 (X. 48) : super hac specie Romanis horreis inferenda.
, et quand on favorisa les commerçants utiles à
l'annone, ceux qui fournissaient la viande ne furent pas
oubliés. Aussi formèrent-ils plusieurs corporations : les mar-
chands de bœufs, de moutons et de porcs constituaient trois
collèges différents (boarii, peeuarii, suarii).
En 204, les marchands de bœufs, unis aux banquiers ou aux
bijoutiers, élevèrent à Septime Sévère un arc de triomphe sur
le marché au bétail (>. On trouve, d'autre part, un negoîiator
[campi) peeuarii "i, et enfin, vers la fin du II*" siècle, des adores
^ C. Th., 14, 17, 1. 5. 14, 24, 1. 1. Goth., ad h. I. Vopisc, Aiird., 48.
2 Voyez surtout : 0. Th , 12, 11. I. 2 (en 386) et Gothofr., ad h. L
— HmscHFELD, Annona, note 102. Humbert, /. L, croit qu'il s'agit
des magasins.
5 Voyez le premier volume, p. 88.
^ C. I. L., XIV 2878 = I 1130 : co)ilegiu{m) mercatoru{m) pcqua-
rioru.m).
s DiG., 1, 12, 1, 11 : cura carnis omnis, ut justopretio praebeatur, ad
luram Praefecturae pertinet : et ideo et forum suarium sub ipsius cura
est; sed et ceterorum pecorum, sive armentorum, (juae ad hujusmodi
praebitionem .spectanty ad ipsius curam perti)tent.
^ VI 1035 : argentari et negotiantcs boari luijus Loci qui invehent (sic).
" VI 9660 (un decurialis).
l 90 )
de foro suario, qui dédient S[oli] l{nvicto) 5J(ithriie) et sodalicio
ejiis '*.
Les siiarii '^, ou marchands de porcs et charcutiers, étaient
les plus nécessaires. Sévère et Caracalla accordèrent pour la
première fois à tous ceux qui trafiquaient sur le marché aux
porcs {(jiii in foro suario negotiantur) l'exemption de la tutelle,
immunité, disent-ils, dont jouissaient déji\ tous ceux qui ser-
vaient Tannone ; on exige qu'ils consacrent les deux tiers de
leur fortune ù leur commerce. Comme pour les boulangers,
l'autorité tenait une liste des membres qui remplissaient les
conditions voulues: pour y être inscrit, il fallait un certificat
du préfet de la ville 3. La corporation était donc encore libre
d'admettre qui elle voulait.
Au IV^ siècle, Symmaque compte les trois collèges parmi
les corporations réglementaires de la capitale : hic lanatï
pecoris invector est, ille ad victum populi cogit armentum, Iws
siiillae carnis tenet finictio ^. Depuis l'institution des distribu-
tions gratuites de lard sous Aurélien ^^ le corpus suariorum fut
indispensable.
En quoi consistait leur a glorieux service », comme dit
Cassiodore 6? Ils s'occupaient de la perception ou de Tachai
* VI 3728. — Notifie, 1892. p. 4 : ncgoliatori cclcberrimo suariae et
pecuariac, oriundo civttate Miscni, sur la via Pracncstiyia, près de Rome.
2 Sur les siiarii, cfr. Gebhardt, pp. 29-36; Krakauer, pp. 46-49.
Marquardt, Priv., pp. 449-450 (446-467). Vie privée. II, pp. 95-96.
LiEBENAM. pp. 78-79 GoDEFROY, vol. V, pp. 190. 193. 195. Ils sont
appelés aussi porcinarii : G. Th., 14, 4, 1. 6. G. J., XI, 17 (16), 1. 1.
5 Frag-m. Vat., 236 (Ulpianus) : sed et qm in foro suario negotiantur,
.SI duabus partibus bonorum annonam juvent, habent excmationem
littei'is allatis [a praefecto] urbis te.'itimoniaUbiu'; negotiationis ; ut impe-
rator noster et divus Severus Man[iUo] Cereaii rescripserunt ; quo rescnpto
declaratnr, ante vos non habuisse immunitatem, sed nunc ris dari eam,
quae data est fiis, qui annonam populi Romani juvant. Cfr. 237 (Paulus).
* Symm., Rel. 14 (en 384 : voyez supra, p. 26, n. 1.
•"^ Voyez supra, p. 23, n. 1.
* Cassiod., Var., XI, 39 : erat quidem illis qloriosum Romam pasceir.
( 91 1
des porcs, de la préparation et de la distribution du Jard. Les
porcs étaient fournis par les propriétaires du sud de l'Italie, et
cet impôt était exigible avant tous les autres ^. On cite "^ la
Campanie jusqu'aux murs de Rome, la Lucanie et le Brut-
lium, le Samnium, et enfin, pendant un certain temps, la
Sardaigne; comme les tempêtes rendaient le transport par
mer fort difficile, Valentinien III décida que l'impôt de cette
île serait versé dans la caisse prétorienne 3. La perception était
confiée à la corporation des siiarii ou }wrcinani *. A l'origine,
on le percevait en nature : les suarii parcouraient les provinces
précitées et amenaient les animaux à Kome. Plusieurs proprié-
taires se réunissaient sans doute pour fournir un porc d'un
certain nombre de livres. Cependant il y avait un autre mode
de perception : les contribuables pouvaient fournir un nombre
minime de livres de lard, et une loi ordonna que celui qui ne
devait qu'une livre par mois, fournirait plutôt tous les cinq
mois cinq livres à la fois s.
Quand les porcs étaient livrés vivants, leur poids diminuait
pendant le trajet, et les marchands y perdaient ^>. Us cher-
• Nov. Val. m, 35, l (en 452).
2 C. Th., 14. 4, 1. 3. 4. Nov. Val. III, 35, 1 (en 452). Cassiod., Var.,
XI, 39 : ut Lucania stu-s penderet. Expositio totius inundi, dans Riese,
Geogr. lut. min., p. 119 : Lucania ... po.st eam, Ccuupiuiia, ... cellarium
regnanli Romae. Cfr. De Rossi, Bull. d. L, 1885, p. 227, n. 4.
Th. Mommsen, Rom Feldmesser, II, pp. 199 sqq. C. Jlllian, Les trans-
formatious politiques de l'Italie {Bibl. des Écoles françaises d\ithènes et de
Rome, XXXVII), pp. 188-189. C. /. L., VI 1747. 1771. 1784.
3 Nov. Val. III, 35. §1.3. 4 (en 452).
^ C. Th., 14, 4, I. 6. C. J., XI, 17 (16), 1. Sur les suarii à Rome, à
partir du IVe siècle, voyez : C. L L., VI 1690. 1693. 1771. Symm., Rel.,
14 (384) : hos suillae carnis' tenet functio. C. Th., U, 4, 1. 1-8 et 10. Nov.
Val. m, t. 35 (en 452). Cassiod., Var., VI, 18 et XI, 39 (Vie siècle). Il
dit : suarii quoque Romanae copiae causa reperti (VI, 18).
5 C. Th., 14, 4, 1. 10 (en 419). VI 1771.
« Cassiod., Var., XI, 39 : quanto dispendio videbatur posse constare,
addiœere tam multis itineribus quae darentur ad pondus? ... Redactum
est ad pretium, ubi pati non poterant detrimenfum.
( 92 )
chaient naturellement à compenser ces dommages par la
fraude; aussi les princes furent-ils obligés de prendre de
minutieuses précautions pour sauvegardera la fois les intérêts
du peuple, du collège et des contribuables. Avant Constantin,
pour éviter des pertes à la corporation, on avait imaginé de
faire payer cet impôt en argent, mais les contribuables furent
victimes de cette mesure, parce que les sucuii estimaient la
viande trop haut. Constantin laissa le choix aux propriétaires
imposés; en même temps, il ordonna que, s'ils préféraient
s'acquitter en numéraire, la viande serait évaluée au cours de
la province : les percepteurs ne pouvaient se mettre en route ^
chaque année que quand les gouverneurs avaient informé le
préfet de la ville du prix de leur ressort; avec les sommes
reçues, ils achetaient des porcs dans la même région'^. En 363,
.lulien décida que, dans la Campanie, la perception devait
se faire en argent; le prix serait celui de cette province 3.
De plus, la perception fut retirée aux suaiii, et elle fut confiée,
non à l'office du préfet de la ville, trop élevé, dit ce prince,
pour ne pas vexer les provinciaux, mais à l'office des gouver-
neurs, aidé des curiales de chaque cité, sous la responsabilité
des gouverneurs. Ensuite l'argent était remis aux siiarii,
qui devaient acheter une quantité suffisante de lard ^. Sous
Valentinien 1«% on laisse de nouveau le choix aux contri-
buables o ; niais dans toutes les provinces, la perception semble
avoir été confiée aux employés du gouverneur; en effet, on
ne peut voir autre chose dans cet ordo suarius dont parlent
Valentinien et l'édit du Praefediis Urbis Apronianus^; car il
• Ils pouvaient se servir de clievaux, ce qui était défendu dans le
sud de l'Italie, par mesure de siireté publique. C. Th., 9, 30, 1. 3 (365).
•2 C. Th., U, 4, 1. 2 (en 326). Cfr. 1. 4, §§ 3 et A.
5 C. Th., U, 4, 1. 3 (363). Cfr. 1. 10 : sous Honorius, en 419, pour
20 livres on paye 1000 deniers, donc un solidus pour 120 livres. Cfr.
Gebhardt, p. 29.
\Ibid., 1.3(363).
- Ibid., 1. 4 (367).
6 Ibid., 1. 4, § 3 et C. I. L., VI 1771. C'est l'avis de Winckler, Opusc,
minora (Leipzig, 1792), I, 219. Autrement : Gebhardt, pp. 35-36.
( 93 )
|)ei'cevait l'impôt pour le renielti'e aux suarii. On peut suppo-
ser qu'il s'était formé comme un ordre spécial dans l'office des
gouverneurs. Conformément à Tédit d"Apronien, Valentinien 1'"'
ordonna formellement aux percepteurs de peser l'animal avant
la livraison, et de ne pas évaluer le poids par la simple ap[ta-
rence; il défendit aux propriétaires de le livrer autrement; eu
outre, il suffisait de le laisser à jeun depuis la veille. En ca.^
iVadaei^atio, le prix devait être débattu entre les percepteurs el
les propriétaires.
Vordo siiarius remettait aux suarii de l'argent ou de la
viande, à volonté ; dans le premier cas, l'estimation est
faite de commun accord d'après le cours de Rome; car c'est
au marché de Rome que les percepteurs vendraient les
porcs ^.
Apronien et Valentinien voulurent aussi compenser les
pertes que subissaient les percepteurs par la diminution
du poids pendant le trajet. Apronien décida que 2o,U00
amphores de vin seraient prises dans les magasins publics
alimentés par l'impôt des mêmes provinces {ex titulo canonico
vinario); les deux tiers ou 16,6662/3 devaient revenir aux
suarii et un tiers aux ordines qui suariam faciunt ou recognos-
cunt -. Valentinien confirma cet édit, tout en permettant aux
habitants du Bruttium et de la Lucanie de fournir 70 livres
de lard au lieu d'une amphore de vin; c'était plus facile à
transporter 3. Valentinien nous apprend que les percepteurs
du lard recevaient en outre, comme tous ceux qui percevaient
' C. Th., 14, 4, 1. 4, § 3 : isque ordo suariis (Goth. et Uaenel, au lieu
de lidque ordo suariua) ... aiU legitimum pretium, id est fort Romani,
cui carnem fuerat illaturiis, tradat, aut carnem débitant subministrel.
Cfr. Gebhardt, pp. 35-36; ses objections sont faibles.
- L'édit d'Apronien est au Corpus inscr. lut , VI 1771.
5 Cfr. C. Th., 14, 4, 1. 4(367). Cfr. Gebhardt, pp. 32-36. Gothofr.,
ad C. Th., 14, 4, 1. 4. Heineccius, Opusc postfmm., pp. 58-68. C. G. vo.\
WiNCKLER, Opiisc. min., Leipzig, 1792, I, pp. 200-225. Valentinien, dans
le C. Th., 14, 4, 1. 4, dit : 17,000 amphores, au lieu de 16,6662/3.
( 94 )
un impôt en nature, un epimetron de 5 %, qui n'était natu-
rellement pas exigible en cas d'adaeratio ^.
Plus tard, en 452, Valentinien II laisse aux patroni suario-
rum le choix entre deux modes de perception : ou elle sera
faite par l'office prétorien, aidé de cinq suarii, ou bien par
les suarii eux-mêmes, sous la surveillance du gouverneur de
la province, qui était responsable '2.
Ainsi, les suarii ne furent pas toujours chargés de la percep
tion. Dans tous les cas, ils devaient veiller, sous leur respon-
sabilité, à ce qu'il y eût toujours à Rome une quantité suffi-
sante de lard 3. Les primiscrinii Praefecti Urbis et ceux de son
vicaire devaient prendre soin que les sumii remplissent leur
devoir, et ils étaient responsables sur leur patrimoine 4-. En
effet les suarii dépendaient du préfet de la ville, et les gouver-
neurs des provinces en question dépendaient de son vicaire s.
La viande une fois perçue ou achetée devait être pré-
parée; c'était encore l'affaire des suarii, qu'on appelait aussi
charcutiers : corpus suariorum et confectuariorum 6. Pour la
« C. Th., U, 4, 1. 4, §§ 1 et 4 (en 367). Gothofr., ad h. L Au § 1 : sin-
fjulas semidecimas ; au §4 : decimae semis. Cfr. C, Th., i% 6, 1. 15: laridi
uero et vint vicesimam conseqiiatur , donc Vso^ c'est-à-dire 5 «/o. C'est
ce que l'édit d'Apronien appelle : propriiun qiiod appellatur (C. I. L.,
VI 1771). De même, 1. 4, il faut lire : cum possessore proprium ordo
décidât ac transicjat, au lieu de propriiis. Gebhardt (p. 35) n'admet pas
cette correction.
2 Nov. Val. 111, t. 35, §§ 3 et 4. — Au Vie siècle, c'est ïadaeratio qui
est en vigueur : Cassiod., Var., XI, 39.
3 c. Th., 14, 4, 1. 3 (363) : periculo suariorum populo porcinae species
affatim praebeatur.
^ IbicL, ]. 10, § 4 (419) : ut ex propriis facultatibus débita suariae
functionis exsolvant.
5 Gebhardt, p. 32. Les lois 2-8 du C. Th., 14, 4, sont adressées au
P. U.
6 VI 1690, après l'an 337. Ils ne forment qu'une seule corporation,
puisqu'ils ont les mêmes chefs, appelés à cette époque patroni, comme
dans Nov. Val. III, t. 35, §§ 3 et 4 (en 452). Cfr. C. /. L., VI 9278, un
confectorarius isolé.
(9S )
distribution, elle était probablement aussi faite par eux *.
Évidemment la quantité distribuée ne sutfisait pas à l'entre-
tien de Rome, et les suarii devaient faire le commerce de lard
et de charcuterie sur le fotmm suarium, qui avait son tribunus
j'ori suarii 2.
Constantinople avait aussi ses suarii, encore sous Justinien ;
mais nous n'avons aucun renseignement sur eux 3.
On ne distribua jamais de la viande de mouton et de bœuf;
cependant nous joindrons aux suarii les deux corporations
chargées de fournir le marché, l'une de moutons, l'autre de
bœufs ^. On ne les trouve qu'à Rome. Nous avons vu que
Symmaque les cite, en 384, parmi les collèges de l'annone 5 ;
en 419, Honorius réunit les pecuarii aux suarii^; en 452, sous
Valentinîen III, les suarii, les pecuarii et les hoarii forment de
nouveau trois collèges distincts 7.
Les deux derniers ne percevaient pas d'impôt; ils ache-
taient des moutons et des bœufs, qu'ils vendaient au forum
pecuarium et au forum boarium sous le contrôle de l'État ; ils
' GoTHOFR., ad G. Th., 8, 7, 1. 22, p. 614, 2e colonne, tin. — Gebhardt
le nie sans raison, p. 35.
2 Preller, Regionen, p. 139. Cfr. G. Th., 14, 4, 1. 4, § 3 : legi-
limum pretium fori romani, cui cay^nem fuerat illatiu^us. — Sur le
tribunus fori suarii, voyez Not. Dign. Occ, IV, 10, et Bocking, N. D.,
II, 197.
5 G. Th., 8, 7, 1. 2i2 (426). G. J., XI, 16 (17), 1. 1, en 389 : porcinani
urbis aeternae. Ibid., 1. 2, en 395-397. Sont obscurs : G. Th., 14, 4, 1. 4,
Jî 3. Nov. Val. III, t. 35, §1 • patronis, etc.
^ Sur les boarii, voyez : C. I. L., VI 1035 (sous Septime Sévère).
Symm., Rel., 14, § 3 (X, 27 1, en 384 : ille ad victum populi Romani cogit
armentum. Nov. Val. III, t. 35, §§ 2 et 8 (en 452). Gfr. Gebhardt, p. 37.
Sur les pecuarii, voyez : C. L L., VI 1770 (vers 363). Symm., l. l. G. Th.,
14, 4, 1. 10 (419). Nov. Val. III, ibid. Gfr. Gebhardt, p. 36. Krakauer,
p. 49. Liebenam, p. 79.
2 SYMM.,i?e/., 14, §3 (X, 27).
'' G. Th., 14, 4, 1. 10 : Suariis pecuarii jungantur.
7 Nov. Val. III, t. 35, §§ 2 et 8.
( 96 )
étaient responsables sur leurs personnes, leurs enfants et leur
patrimoine ^.
Rien n'indique si la vente se faisait à bas prix. Certaines
règles étaient prescrites, et nous avons un édit du préfet de la
ville, Apronien, qui nous en fait connaître quelques-unes.
Il est de Tan 363 et concerne seulement les pecuarii. Les mou-
tons seront vendus après avoir été soigneusement pesés. Le
boucher qui abattait l'animal en recevait certaines parties : la
tête, les pieds, etc.; le reste était pesé et compté au vendeur,
c'est-à-dire au pecuarius. Le préfet de la ville défend aussi,
sous peine de mort, aux divcrsiemployés du marché, au tribu-
nus y au cancellarius et au scriba, de s'approprier une parlic;
de la viande, selon leur habitude, au détriment du marchand -
Vin. — Ce fut Aurélien qui fit le premier vendre du vin pai-
l'État 3; mais comme le commerce de cette denrée était fort
important à Rome, il est probable que l'administration de
l'annone s'occupa de bonne heure du marché {forum vinarium .
En tous cas, les négociants en gros formèrent des collèges K
et, quoi qu'en dise Lampride, qui attribue l'institution du
corpus vinariorum à Alexandre Sévère (222-235), il est pro-
bable que ce prince ne fit que donner une existence officiel Ir
à ce collège comme à beaucoup d'autres ^. Une inscription
» C. Th., /. /. — Les bœufs venaient surtout du Bruttium. Cassiod.,
Var., XI, 39 : ut Bruttii boumpecus indigena uhertate praestarent.
2 C. /. L., VI 1770. Cfr. VI 1784. 1785. Sur cet édit, cfr. Haubold.
Mon. tegalia, qui cite les travaux antérieurs. Gothofr., ad C. Th., 14,
4, 1. 4, qui a cru à tort qu'il s'agit des suarii. L'édit auquel cette loi fait
allusion parle du pesage des porcs avant la livraison, et il est perdu.
Voyez encore Krakauer, p. 48. Gebhardt, p. 36. Les mots : ut ... cl
emptor norit et vendit or sont obscurs.
5 Voyez supra, p. 2o.
* Voyez Marquardt, Priv., p. 432 (448). Vie privée, II, p. 75. Dessai,
C. /. L., XIV, pp. 8. 574-575, et la note après le n. 318.
s Lampru)., Alex. Sev., 33. Cfr. infra, chap. II, § 1.
( 97 )
prouve qu'au milieu du HI® siècle les marchands de vin en
gros formaient à Rome plus d'une corporation; elle parie, en
effet, des ne(jOtianl[es) vini Supernatiis) el Arimin{ensis) ou
Supernat(es) et Arimin{enses) S qui faisaient probablement le
commerce dans l'Adriatique, et il existait, sans doute, un
collège de nefjotiantes vini Infernalis, faisant le commerce
dans la mer Tyrrhénienne ou Inférieure'^. A Ostie, nous trou-
vons, au II« siècle, deux collèges : les negotiatores vinarii ab
urbe^, et les negotiantes fort vinarii^. Les uns fournissaient
probablement le marché de Rome et les autres celui d'Ostie.
Tous ces négociants faisaient le commerce outre-mer •'>,
Nous ne savons s'ils avaient des rapports avec l'administra-
tion de l'annone. Depuis Aurélien, la vente du vin par l'État
' VI 1101, en 251. Dans deux caves (cellae) on a trouvé une inscription
d'un collège domestique de la maison impériale de l'an 102 : collegio
Liberi Patris et Mercier i uegotiantium cellarum vinariarum Novae et
Arruntianae Caesaris u{ostri}, VI 8826. Lanciani, B. c, 1878, p. 102.
Hull. cl. L, 1879, p. 70. — Cfr. Bull, corn., 1884, p. 11, n. 71o : neg{otia-
torum) vinarioriun citm, fragment.
2 Cfr. XIV 131 : codicari nahiculari Infernates, où il s'agit du cours
inférieur du Tibre. Voyez supra, p. 71.
5 XIV 409, au Ile siècle.
* X 543 == XIV 430. Leur curator est en même temps (j{iiin)(]{uennalis)
colleg{i) Geni fori vinari; ce dernier collège est formé de gens qui ado-
raient le Genius du forum vinarium, peut-être parce qu'ils étaient
voisins de ce marché. Une autre inscription d'Ostie distingue les vinarii
urhani et les vinarii Ostienses ; XIV 318 : q{uin)g{uennalis) corpor{um)
vin{ariorum) urb(anorum) e[t] Os[t{iensium)]. Dessau(C. /. L , XIV, p. 8,
et au n. 318) admet que ces vinarii urbani sont le même collège que
les vinarii ab urbe (XIV 409). Marquardt aussi lit : corporum). Priv.,
p. 432 (448). \ie privée, II, p. 75. Il n'est pas rare de trouver deux
collèges ayant le même chef; voyez le premier volume, p. 398.
^ Cfr. VI 9682 : negolians vinariiis, item navicularius, curator corporis
maris Hadriatici. — Il y avait à Rome un portas vinarius, et le Monte
Testaccio est formé de débris d'amphores, dans lesquelles on apportait
le vin à Rome. Voyez supra, p. 66, n. 2. On a trouvé un autre dépôt près
des castra praetoria {B. c, 1879, pp. 36-112, et 143-195}.
Tome L, vol. IL 7
( 98 )
exigea deux corporations : l'une pour le percevoir, l'autre pour
le vendre. En effet, la livraison du vin nécessaire était à la charge
des propriétaires des régions suburbicaires ' : il y avait un
titulus canonicîis vinarius ^2, et une arca vinaria 3, administrée
par un ralionalis vinorum k Ces prestations devaient être four-
nies en nature et apportées à Rome par les contribuables eux-
mêmes s {jwssessores, professionarii), h l'endroit du Champ de
Mars appelé ad Cicomas nixas ^. Elles étaient reçues par la
corporation des susceptores vini '^. Une inscription 8, que
Hirschfeld croit postérieure à Aurélien, énumère les indem-
nités que recevaient les contribuables et les employés. Voici
ce tarif :
A chaque possesseur, pour le transport des tonneaux {cupae)
ad Ciconias nixas ^20 nummi par tonneau
A celui qui ouvre et referme le ton-
neau (exasciator) 10 —
Au dégustateur [haustor) .... 30 —
Au gardien des tonneaux [custos
cuparitm) somme efï'acée.
' C. Th., 11, 1, 1. 6. 11, 2, 1. 3 et 14, 4, 1. 4, § 1 : Lucanus possessor et
Bruttius. Expositio tôt. miLndi, dans Riese, Geogr. lut. min., p. 119, 11.
2 C. I. L., VI 1771. Symm., Epist., VII, 96 : titulus vinarius. IX, 150.
X, 29. 44. Cfr. Humbert, Dict. des Antiq., I, p. 276.
3 Symm., Epist., VII, 95. IX, 131. Relat., 34, § 2. C. Th., 14, 6, 1. 3.
^ NoT. DiGN., Oc, IV, 9. Dans Symm., X35(rel. 22), il faut lire : tribunus
fori suarii, et non : vinarii.
» C. L L., VI 1785. C. Th., 11, 2, 1. 2, pr. : vina Ronmm portentur.
Ihid., 1. 3. 14, 4, 1. 4, § 1 : longue suhvectionis damna.
« C. /. L., VI 1785. Curiosum et Not. Urbis, reg. IX, et Preller,
Regiomn, p. 173. Il était situé près du temple de Mars. De Ruggiero,
Diz. epigr., II, p. 57.
' Susceptores vini. C. Th., 14, 4, rubr. (G. J., XI, 16). C. Th., 12, 6,
1. 26 (C. J., X, 72 (70), 11). Cfr. Gebhardt, pp. 26-29. Krakauer, p. 40.
* C. I. L., VI 1785. Elle a été expliquée par Th. Mommsen, Ber. der
sàchs. Ges. der Wiss., III, 1851, p. 76. Cfr. Gebhardt, pp. 27-28.
( 99)
Aux falancarii ^ qui portent les
tonneaux de la place appelée ad
Ciconias nixas^ au temple du So-
leil, où la vente avait lieu . . . somme effacée.
Le contribuable apportait un flacon {ampulla) pour la dégus-
tation; le percepteur lui remettait quittance '^, et le secrétaire
qui la rédigeait avait droit à 20 sesterces. Tous ces frais étaient
à la charge du trésor [arca vinaria).
Les percepteurs, comme tous les employés de l'annone,
cherchaient à voler; en 400, Honorius dut prendre des
mesures. Souvent le vin fourni n'arrivait pas aux magasins
{arca vinaria); l'empereur ordonna au Vicaiius Urbis de faire
rentrer les arriérés, et une foule de contribuables que les
percepteurs déclarèrent en retard , apportèrent leurs quit-
tances. Le prince força les smceptores de couvrir le déficit 3.
Une autre fois, il fallut les obliger de prendre immédiatement
livraison du vin apporté par les contribuables ^.
Le vin perçu et versé dans Varca vinaria servait à deux
usages : 1° certaines corporations en recevaient gratuitement
comme salaire de leur service : c'étaient les chaufourniers, les
charretiers qui voituraient la chaux à Rome, les suarii et les
collectarii » ; 2" une partie plus considérable était vendue au
• VI 1785, falancaiii. 7803, in monimento paUnujarionim (colomhaire).
Voyez le premier volume, p. 283. Nonius, p. 163, 26 : palangarios dici-
inus qui aliqidd oneris fustibus transvehiint. Wilpert {Roem. Quartal-
schrift, I, 1887, pp. 23-24) décrit deux fresques des catacombes : sur
l'une on voit un homme qui transporte un grand tonneau sur un chariot
attelé de deux bœufs; sur l'autre, huit hommes portent un grand ton-
neau sur des perches, et des tonneaux gisent sur le sol. Wilpert voit
dans ces derniers des tonneliers (ne seraient-ce pas les palangarii?) et
conjecture que ce collège avait un cubiciihun à lui à Sainte-Priscille. Les
deux fresques sont du IV^ siècle.
2 C. Th. ,12, 6, 1. 26 (C. J., X, 72, 11).
•^ C. Th., /. l.
*• C. Th., 11, 2, 1. 3 (377) : viniun... illico mscipiatur advcctum.
^ Voyez infra, chap. IV.
( 100 )
peuple, depuis Aurélien i. Sous ce prince, qui tit le premier
vendre du vin, la vente avait lieu sous les portiques du Tem-
plum Solis, qu'il avait bâti 2. Au IV^ siècle, Symmaque parle
d'un collègiî de caupones 3, qui était peut-être chargé de la
vente; quoi qu'en dise Gebhardt'*, ils étaient liés à leur condi-
tion, car Symmaque les range parmi les corporati U. R. En
377, Gratien dut prescrire de vendre d'abord le vin qui ne se
conservait pas longtemps s. Quant au prix, Valentinien le fixa,
en 365, à un quart au-dessous du cours 6.
Le Code Justinien rapporte la loi du Code Théodosien, 12, 6,
1. 26 (=C. J., X, 72, 1. 11); on peut en conclure que les habi-
tants de Constantinople pouvaient également acheter du vin à
bas prix "ï.
1 C. Th., 11, 2, 1. 2 : popiUi udbus profutura. Ibid., 1. 3 : popidaribus
commodis — ut ea vinapopuli iisibus erogentur.
2 VI 1783, ad tempiiun. Vopisc, Aurel., 33 et 48, § 4 : quod in porti-
cibus Templi Solis fîscalia vina ponuntur, non gratuita populo eroganda,
sedpretio. Les magasins étaient sous les portiques. Hirschfeld, Annona^
p. 19, n. 26. Voyez supra, p. 23.
3 Symm., Rel., 14. Voyez infra, p. 110.
* Gebhardt (p. 7, n. 3) les identifie au corpus tabernariorum[C. I. L.,
VI 9920) qui étaient plutôt de petits boutiquiers. Cfr. Marquardt, Priv.,
p. 453 (470); Vie privée, I, p. 99, sur les tabcrnae, et infra, p. 109.
5 C. Th., 11, 2, 1. 3 i377).
^ C. Th., 11, 2, 1. 2 (363) : ut etiam pretio laxamenta tribuantur. —
Tout ce que Krakauer (pp. 30-31) dit des vinarii est faux. Nulle part,
il n'est question de la distribution gratuite du vin. Les caupones de
Symmaque ne sont pas les vinarii ou negotia tores vinarii des inscrip-
tions d'Ostie (XIV 419. 430). Enfin, les marchands de vin {caupones)
n'avaient pas de monopole. Le vin vendu au peuple provenait de l'impôt
(voyez supra, p. 98, n. 1), et Valentinien fixa le prix à un quart au-
dessous du cours du marché (C. Th. 11, 2, 1. 2 : quae habetur in foro
reruni venaliuni); en dehors de cela, le commerce était libre. Les affir-
mations de Krakauer ne reposent sur rien. Dans le C. Th., 11, 2, 1. 2,
mercantes désigne le peuple qui achète les vina fiscalia.
^ Gebhardt, p. 27. Gothofr., ad C. Th., 11, 2, 1. 2, p. 32, deuxième
colonne, fin, et les citations.
( 101
II. Commerce et industrie privés.
Nous avons vu que le préfet de Tannone ne s'occupait pas
sj^ulement des collèges nécessaires aux distributions et aux
ventes organisées par l'Etat, et qu'il avait sous sa surveillance
bien des corporations qui approvisionnaient directement le
marché de Rome : tels étaient les marchands de vin, d'huile,
de bœufs, de moutons, de porcs et les boulangers eux-mêmes
avant l'introduction des distributions de pain. Tous ces collèges
furent de bonne heure encouragés et surveillés parce quïls
étaient utiles, nécessaires au public. Beaucoup d'autres étaient
dans le même cas : tous les genres d'industrie et de commerce
que l'activité privée invente pour satisfaire les divers besoins
de la vie, furent reconnus utiles, et favorisés, protégés, mais
aussi contrôlés. Avec le temps, tous ces industriels, ces artisans
et commerçants se réunirent en collèges, et nous croyons qu'au
IV« et au V^ siècle, il n'y avait pas un métier, pas un négoce
qui ne formât, à Rome et à Conslantinople, une corporation
considérée comme d'intérêt public. En effet, Lampride nous dit
formellement que, sous Alexandre Sévère (222-23o), tous les
artisans et commerçants de Rome furent réunis en corpora-
tions officielles ^. Au IV^et au V® siècle, tous ces collèges exis-
taient encore à Rome et à Conslantinople. On voit dans une loi
du Gode Théodosien qu'à Constantinople tous les mercatores
ou negotialores formaient des corporations : omnia corpora-
îorum gênera, quae in Constantinopolitana urbe versantur "^'^
or, à cette époque, on appelait negotiatores tous ceux, négo-
ciants et marchands, qui payaient le chrysargyre et vivaient de
' Lampr., Alex. Scv., 33. Il cite parmi eux jusqu'aux lupiiiarii et
ailigarii.
- C. Th., i, 10, 1. 4 (391). — Cfr. 13, 1, 1. 9 (372) : omnes jam 7mnc
studio negotiationis intenti, seu conchyliolegiili, seu ex aliquolibet corpore
mercatores. Ibid., 1. 16 (399; : omnes corporatos ... negotiatores.
( 10-2 )
leur commerce ï. Un passage de saint Âmbroise semble tout
aussi décisif. Il raconte que le retard des convois de blé avait
occasionné une famine i\ Home : on expulsa tous les étrangers
dont la plupart étaient des marchands de denrées alimentaires
et des commerçants de toutes sortes subvenant aux divers
besoins de la population, et saint Ambroise nous apprend que
tous étaient cotyorati, enrôlés dans des corporations -. Rappe-
lons enfin le rapport adressé par Symmaque à Valentinien,
pour le détourner d'imposer la coUatio equonim aux corporati
negotiatores, membra aeternae urbis. Et quels sont ces corpo-
rati'/ Symmaque les énumère; après avoir cité les peciiaru,
boarii, suarii, muncipes thermarum, fabri, le pompiers, les
caupones, les boulangers, les portefaix, c'est-à-dire les prin-
cipales corporations de l'annone, il ajoute qu' « il serait fasti-
dieux de rappeler les nombreux collèges de ce genre, qui
servent la patrie 3 )>. En dehors de l'annone, il y en avait donc
une foule d'autres.
Nous ne connaissons malheureusement pas toutes les cor-
porations vouées au commerce et à Tindustrie. Les négociants
« GoTHOFR., Parât, ad C. Th. 13, 1 : De liistrali collatione, et 12. 1,
1. 72 : De decurionibus. Voyez C. Th., 13, 1, 1. 8 (370) : qui merces emendn
atque vemiendo commutantes, qui in e.vercitio tabernarum u. VI 384.
10 VI 9202.
( 112 )
CoUegium bratliariorum inauratorum^ batteurs d'or ^.
Corpus caligariorum, bottiers 2.
Negotiatores citriarii, marchands de meubles en bois pré-
cieux, ébénistes 3 ; sous Hadrien, ils ne formaient qu'un
seul collège avec les ivoiriers {negotiantes eborarii) et nous
avons un fragment du règlement qu'ils se donnèrent à cette
époque.
Caplatores, tonneliers (?) •^.
Conlegiiim centonariorum, fabricants de centons, à l'époque
d'Auguste, où il renfermait surtout des affranchis s. Le Code
Théodosien atteste encore son existence au IV® siècle, aussi
bien à Rome que dans les villes de province ^>.
Corpus coriariorum^ corroyeurs, vers 334. Il élève une statue à
un préfet de la ville, son patron, qui avait fait restaurer les insu-
lae corariorum^ « suivant les lois de Septime Sévère et de Cara-
calla "^ ».
Corpus corariorum magnariorum solatariorum, marchands de
cuir en gros, sous Dioclétien et Constantin, à qui ils élèvent
des statues 8.
' VI 9o.
2 I.AMPRiD., Alex. Sev., 33.
5 HuELSEN, Mittli. des Inst., 1890, pp. 287-304, et les articles cités
dans le premier volume, p. 371, n. 2.
^ Preller, Regionen, p. 126.
^ VI 7861. 7863. 7864. Bull, corn., 1888, p. 398, n. 3. Voyez le premier
volume, p. 282. Ces inscriptions sont du commencement du I«i" siècle
(VI 9254), un peu après Auguste. On a cru à tort que Symmaque {Rel. 14,
3) les désigne en ces termes : per alios foriuita arcentur incendia. Voyez
infra, deuxième section.
« C. Th , 12, 1, 1. 162 (en 399). 14, 8, 1. 1 et 2 (en 315 et en 369).
-' VI 1682, au Praefectus Urbi de 334. Cfr. VI 9667. — Voyez le premier
volume, p. 438, n. 4.
8 VI 1117 et 1118. Cfr. J.-B. de Rossi, Bull. d. /., 1871, pp. 161 sqq.
Voyez le premier volume, p. 508. L. Borsari, B. c, 1887, p. 5, où il
faut lire : eborari. — Il est à remarquer qu'au n" 1117 le collège est
désigné à la fin par le simple nom : c{orpus) corariorum, et c'est peut-
être le même que le précédent.
( liî^ )
Coronarii, fabricants de couronnes, au commencement du
l«' siècle, collège funéraire 1.
Eborarii, ivoiriers, voyez citriarii.
CoKegium fabrinn solianum bdxiarium, cordonniers faisant
des chaussures de femmes -.
Colle (jium faenariorum, marchands de fourrages, au com-
mencement du 11^ siècle •^.
Figuli, les potiers, collège deNuma; ils sont cités encore
dans une loi du Code Théodosien K
Collegium fiillonum ou fontanorum, foulons; on trouve un
collège de foulons sous Auguste icoulegiuin aquae), un autre en
l'an 57 ; ce dernier existe encore au III'' siècle i>.
[Collegium ]}\el[lwnum], pelletiers VI 329, et la note. Cfr. VI 936, en 104.
•0 VI 2206.
«• VI 1649. Cfr. Dll'EMNEU, Techn., 1, p. 182.
<2 Plut., Numa, 17 : cr/.utoToVoi. C. Th., 13, 1, 1. 10 (en 374).
Tome L, vol. li. 8
(lu)
Aîiifex artis tessjlania)e lusorHa)e, qui est sodalicii magister,
fabricants de dés à jouer '
Unctores, frotteurs d'huile -.
Argeutarii 3, banquiers. Les banquiers romains portaient
des noms fort divers, les uns latins {argeutarii, nummularii,
mensarii , etc.), les autres grecs {-py.T.eÇi'zxi, y.olXu6ir;':y.i .
àpYupâu.o',00',, etc.). Il faut faire une distinction entre les argeu-
tarii et les immmularii ^^ : les premiers ne faisaient que la ban-
que, à laquelle se rattachaient les ventes aux enchères «>, et le
recouvrement des créances ; les autres y ajoutaient l'échange
des monnaies ^. Les établissements des uns et des autres étaient
ouverts au public, mais leurs affaires étaient privées. De bonne
heure, l'État, considérant la délicatesse de leur commerce, leur
imposa des règles pour sauvegarder l'intérêt public; il fallut
aussi une concession spéciale à chacun d'eux, et on ne l'accor-
dait qu'à un nombre limité; ils étaient sous la surveillance du
préfet de la ville "'. Ils formèrent ainsi une classe à part qui se
constitua, non en société financière, mais en collège privé; du
moins, en l'an 251, les argeutarii, unis pour la circonstance
' YI 9927. Bluemner, Teclin., II, p. 361. L. Brlzza, Suite taMe lusorie
(Bull.com., 1877, pp. 81-99).
2 VI 9995.
^ VI 1101. Sur les banquiers, voyez Marquardt, St.-V., IP, pp. 64 et
suiv. Org. fin., pp. 78 et suiv. Saglio, Dict. des antiq., I, p. 408, s, v.
argentarius. Th. Mommsen, St.-Recht, I, p. 539. Hermès, XII, pp. 92 sqq.
A. Deloume, Les manieurs d'argent à Rome, 2« édition, Paris, 1892.
M. VoiGT, ik'ber die Bankiers ...der Romer (Abli. der sdclis. Ges. der Wiss.,
X, pp. 515-577), où sont cités les autres travaux assez nombreux (p. 515
note). De Ruggiero, Dix,, epigr., s. v. argentarius, p. 657.
^ Marquardt, St.-V., IP, p. 65. Org. fin., p. 78.
2 Th. Mommsen, Hermès, l. l.
« Nummularii désigne aussi des employés de la monnaie: voyez
infra : les monetarii.
'' DiG., 1, 12, 1, § 9 et 1, 12, 2. Sur ce contrôle, voyez Th. Mommsen.
Hermès, XII, pp. 99 et 100. Marquardt, St.-V., IP, pp. 67-69. Org. fhi.,
pp. 82-85. M. VoiGT, Op. cit.
Uo
aux excepîores cl aux neyotiatores vint Su})ernat{is} et Arimh
ii{ensis), élèvent un monument au fils de Dèce *.
III. Travaux publics.
Pour les travaux publics, le préfet de la ville avait sous ses
ordres plusieurs fonctionnaires dont les noms indiquent assez
les attributions : le curaîor aqiiarum, les curalores alvei et
riparum Tibehs et cloacarum nrbis, les deux curalores operum
publicorum, les curatores viarum, un pour chaque chaussée, etc.
Tous ces fonctionnaires, dont les noms furent modifiés au
IV« siècle, avaient à leur disposition des offices ou bureaux
et des collèges pour surveiller et exécuter les différents tra-
vaux.
Il nous est impossible de tracer un tableau complet de ces
diverses administrations; nous devons nous borner à passer
en revue les corporations connues.
Il fallait une grande quantité de chaux pour la construction
et la réparation des édifices publics, des murs et des aqueducs,
dans les deux capitales '^. A Rome, les pierres à chaux étaient
fournies par certains propriétaires des quatre régions subur-
bicaires, où il y avait des domaines spécialement affectés à ce
service, notamment dans TEtrurie et dans laCampanie 3. En
36a, Valentinien décida que trois mille charretées par an suf-
' VI 1101. C'est tout ce que nous savons de leurs collèges. Le corpus
œllectariorum du Bas-Empire, appelé aussi argenlarii ei nummularii, se
rattache à l'administration de la monnaie. Voyez infra, la 3'- section. —
Remarquons que les orfèvres s'appellent aussi argenlarii (voyez VI 348.
1035), et qu'il est souvent difficile de distinguer : ainsi au n» VI 1035,
Saglio (I, p. 407, n. 4) traduit par banquiers, et Duruy (éd. ill., VI,
p. 289; par orfèvres.
« C. Th., 14, 6, 1.3 (365) et 4 (382).
3 C. Th., ibid.^ 1. 1 (359) : praediis, quae jamâudum praestationi calcus
corpoitnt obnoxia altineri. Ibid., 1. 3 (Étrurie et Campanie).
( 116 )
tiraient, sans compter ce que fournissait Terracine i. Pour
cuire la chaux destinée 5 Kome, il y avait une corporation
spéciale de chaufourniers [eos, qiios coclio calcis tenel) "^ : on
les appelle calcis coctores ou calcarienses 3. Us étaient
surveillés par un praepositus calcis, placé lui-même sous l'auto-
rité du préfet de la ville : des cinq lois qui les concernent,
quatre sont adressées h ce fonctionnaire et une à son vicaire.
Dans une inscription du h'" siècle, on trouve déjà des sociales
calcare[n)ses '<■ ; ils étaient libres alors, tandis que ceux du
IV® siècle ont à supporter une charge publique [anus, (juodsus-
tinent publia muneris). En revanche, ils recevaient, au IV^ siè-
cle, un salaire en nature et jouissaient de privilèges; ilsavaient
notamment le monopole de la chaux nécessaire à l'État s.
Une autre corporation, celle des vecturarii ou vectores,
voituriers ou charretiers, transportait la chaux fi Rome ^K
En 365, Valentinien lui prescrivit de livrer annuellement mille
cinq cents charretées à l'office du préfet de la ville, pour la
réparation des édifices publics; les mille cinq cents autres,
destinées aux aqueducs, étaient sans doute fournies au cornes
formarum '^. Il n'était pas permis de donner cette chaux aux
particuliers, à moins que l'Etat ne pût s'en passer facilement 8.
Ce collège était également sous la surveillance du praepositus
calcis 9.
« C. Th., 14, G, 1. 3. Symmach., ReL, 40, § 3 (X, 53).
2 Ibid., 1. 2.
3 Sur les calcis coctores, voyez : C. Th., 14, 6, 1. 1-5 : De calcis cocto-
ribiis U. R. et C. P. Symm., ReL, 40, § 3 (X, 53). Cassiod., Var., VII, 16 :
formule du praepositus calcis. C. Th., 12, 1, 1. 37 (344) : cette loi défend
aux curiales de se réfugier parmi les calcarienses.
* VI 9224. Cfr. 9223 : calcarienses, et 9384 : un collège (V exonéra tores
calcariarii, décliargeurs de chaux,
s G. Th., 14, 6, 1.'2. Voyez infra, chap. IV.
6 Ibid., 1. 1-4.
■ Ibid., l. 3 (365).
« Ibid., 1. 4 (382), au Praef. Urbis.
■' Cassiod., Var., VII, 16.
( in )
Nous ne savons rien des chaufourniers et charretiers de Con-
slanlinople, mais leur existence est certaine K
On rencontre plusieurs collèges qui concouraient probable-
ment à IVxécution des travaux publics. L'un des plus impor-
tants devait être le collegium fabrum ou fahrorum, collège
des ouvriers constructeurs, des ouvriers en bâtiments. 11 exis-
tait de toute antiquité, puisque Plutarque le cite parmi les
collèges dciNuma (t£xtov£;). Asconius le mentionne parmi ceux
qui furent épargnés par le Sénat en l'an 64, puis par César
et par Auguste, parce que leur suppression aurait nui à
l'intérêt public -, et le Code Théodosien en parle encore en
l'an 36i '^. Callistrate et Scévola '* citent le corfws fabrorum
comme exemple, tantôt des collèges qui reçoivent des legs,
tantôt des collèges institués pour donner leur concours aux
services publics. Il serait vraiment surprenant que ce collège
si important n'eût laissé aucune trace dans l'épigraphie de la
capitale, qui nous parle d'une centaine de collèges difïérents;
aussi croyons-nous^ qu'il se confond avec le collegium fabrum
tignariorum, qui ne comprenait pas seulcnK^nt les charpen-
tiers, mais tous les ouvriers employés à la bâtisse G. Il fut réor-
< C. Th., 14, 6, rubr. Cfr. 15. 1, I. 50 (412) et 52 (424), où l'on parle
du déplacement des fours à eliaux.
2 Plut., Niuna, 17. Ascomus, éd. Kiessling-Sciioell, p. 67. Voyez le
premier volume, i)p. 02 et 91, n. 1.
5 C. Th., 12, 1, 1. 62 (364). Cfr. 13, l, 1. 10 (374) : figulos aut fabros.
* DiG.,32, 94, 3. 50, 6, 6 (5), § 12.
^ Voyez nos articles dans la Rev. de Vlnsir. piibl. en BcUj., 1891,
pp. 117-121. 1892, pp. 224-227. 3Iauquardt, Priv., p. 698 (729-730,.
\ie privée, II, pp. 379-380. Liebenam (p. 104) les distingue. Mommsen
iSf.-R., m, p. 287. Trad., p. 325) conjecture que le coUeguim fabrum
naquit de la fusion des deux centuries militaires des fahri tignarii et des
[abri aerarii ; mais le eollegium fabrum datait de Numa et subsista sans
interruption jusqu'à l'Empire, à côté de ces centuries. Voyez le premier
volume, p. 164.
6 DiG., 50, 16, 235 (Gails) : Fabros tignarios dicimus, non eos dum-
taxat, qui ligna dularent, sed omncs gui aedific.arent. Le mot tignum
désignait anciennement tous les matériaux de construction : omne gcnus
materiae, ex qua aedifieia constant (Dig., 47, 3, 1, et 50, 16, 62].
( 118 )
ganisé en l'an 7 avant Jésus-Christ ù la suite de la lex Julia de
collegiis, car c'est de cette année que date son ère spéciale •.
Les inscriptions nous permettent de le suivre jusqu'au
IV« siècle. Au commencement du 11^ siècle, il a six prési-
dents élus pour cinq ans {magistri quinquennales)"-; il se divise
en soixante décuries, comprenant en tout plus de mille trois
cents membres; il est donc l'un des collèges les plus nom-
breux; ses soixante décurions, ou chefs de décurie, forment
un comité administratif appelé ordo decurionum 3. Sous
Septime Sévère, il a six patrons et six scribes. Il s'occupe de
ses intérêts privés, tels que l'enterrement de ses membres 4.
Nous venons de dire que l'utilité publique de ce collège fut
reconnue dès la république par le Sénat ->, et Callistrate croyait
même, sous Septime Sévère, que telle était la raison de son
établissement : l'immunité, dit-il, est accordée à des collèges
déterminés oii l'on est reçu à cause de son métier, tels que le
corpus fabrorunij et il ajoute : ut fahrorum corpus est et si qua
eandem rationem originis hahent, id est idchxo instiluta sunt^ ut
necessarinm operam publicis utiUtaîihus exhibèrent 6. Au IV« siè-
cle, le Code ïhéodosien appelle officium le service public exigé
du collegium fabrorum '^, et nous voyons le collegium fabrorum
* Voyez notre article, Revue citée, 1888, pp. lo4-lî)8. Nous y établissons
la chronologie des inscriptions de ce collège, que Hexzen avait mal indi-
quée dans le Corpus. Lustre 18 du collègerde 79-83 (VI 9034); lustre !23,
de 104-108 (VI 91)6); lustre 24, de 109-113 (VI 321), lustre 27, de 124-128
(,VI 148 = XIV 5. VI 9406); lustres 27 et 28, de 124-133 (VI 10299);
VI 10300 est un peu antérieur; VI 1060, sous Septime Sévère, entre 199
et 210; lustre 43, de 204-208 (VI 9415/^ : col. fabrum); VI 1673, peu avant
301. Inscriptions non datées : VI 9405. 9407. 9408. Les n^^ 9409 et
9415a ne se rapportent pas à ce collège. Voyez le premier volume, p. 117.
2 VI 996. 10299.
5 Voyez le premier volume, pp. 351, n. 1 et 379.
-i VI 1060 : six patrons ou six quinquennales.
5 AscOiMUS, éd. KiESSi.iNG et Schoell, p. 67 : quae utilitas civitatis
desiderasset. Voyez le premier volume, p. 91, n. 1.
6 DiG. 50, 6, 6 (5), § 12.
7 C. Th., 12, 1, 1. 62 !364).
1
( 119 )
ti(jnuarionimé\e\L'i' une statue à un curntor opcruni publiconim
(jui devint préfet de Home en l'an oOl •. On admet générale-
nientqueSymmaque parle aussi des fdbri quand il range parmi
les corporati de Uonie ceux ({ui fubrilcs maiius aufiustis operibus
accommodaiit -. Tous ces indices prouvent évidemment les
relations de cette corporation avec les travaux publics, mais ils
sont trop vagues pour que nous puissions préciser la nature
des réquisitions auxquelles les membres étaient soumis. C'est
se jeter dans la fantaisie pure que de faire comme Choisy,
qui bâtit tout un système sur ces données si incomplètes et
sur d'autres qui ne se rapportent pas même aux fabri. 11 sup-
pose que ce collège avait reçu, comme les pistores, une
dotation de l'État {fundi dotales) ^ et devait en échange livrer
son travail : l'État, par ces agents dotés, construisait les
monuments, comme il effectuait les transports et produisait
directement les matières destinées à l'alimentation publique
uavicularii, pistorcs, etcJ. En vertu du pouvoir que les
collèges avaient depuis la loi des XII Tables, de s'organiser
librement, les ouvriers auraient pu, selon Choisy, se grouper
sous la conduite et la responsabilité pécuniaire d'un ouvrier
plus habile ou plus riche qui s'interposait entre eux et l'Etat,
traitait — ordinairement à forfait - avec les magistrats char-
gés des édifices publics, et jouait dans les travaux le rôle d'un
véritable entrepreneur public {redemptor ou locator operis).
il avance que les collèges se répartissaient en classes
d'ouvriers distinctes les unes des autres, et dont les attri-
* VI 1673.
2 Symm., Relat., U, §3 (voyez .supra, p. 26, n. 1). Uodbertus, VIII,
p. 421, n. 62. Gebhardt, p. 7, n. 3. Hirschfeld, Gall. Studieriy III,
p. 12 (248), n. 2. Maué, Der Pracf. fabrum, p. 49, n. 8. — Duruy,
IILst. des Romains, VII, p. 248, n. i (éd. non ill.) dit : « Ceux qui confec-
tionnent de leurs mains industrieuses les objets destinés à un auguste
usage », c'est-à-dire les manufacturiers; mais ceux-ci n'étaient pas î»
Rome.
5 Voyez iyjfra, chap. IV.
( 120 )
butions nettement tranchées accusent la division extrême qui
existait dans les opérations de l'industrie. Cette division se
retrouverait jusque dans la structure des édifices, par
exemple dans le Cotisée. Outre les dispositions d'ordre inté-
rieur, les statuts auraient contenu des articles fixant les
méthodes de Tart de bâtir, consacrant les leçons du passé,
interdisant les procédés vicieux et rendant obligatoires cer-
taines méthodes traditionnelles. Enfin, les collèges d'ouvriers
constructeurs auraient eu sous leurs ordres des esclaves nom-
breux, qu'ils auraient fait travailler pour eux. Clioisy conclut
qu'il y avait une frappante conformité d'instituiions et de cou-
tumes entre ces collèges et les corporations du moyen âge K
Nous craignons bien qu'il ne se soit laissé abuser par le sou-
venir de celles-ci. La liberté de s'organiser à leur gré n'a rap-
port qu'au but privé età l'administration intérieure des collèges;
nous verrons que l'État intervient dans Torganisation destinée
à régler leur service public -. Nous avons vu que les statuts
ne s'occupent pas des méthodes ^. Quant aux confrères se
groupant sous les ordres de l'un d'eux pour l'entreprise
de travaux, il n'en est nulle part question; sans doute ils
étaient libres de se mettre sous les ordres d'un entrepre-
neur, mais cela n'a rien de commun avec l'organisation
corporative. De plus, chaque collège est formé d'ouvriers
exerçant le même métier et la division en décuries n'est
nullement basée sur la division du travail ^. L'analogie des
aquarii, qui constituaient une familia publica, non un collège,
et qui comprenaient des catégories diverses d'esclaves attachés
aux aqueducs, ne prouve rien. Pour tirer une conclusion de
la structure d'un édifice, il faudrait prouver qu'un seul et
même collège a construit cet édifice, ce qui est invraisem-
< Choisy, Art de bâti)', pp. 198 et suiv. A part, pp. 12-19.
2 Voyez infra, chap. III.
'' Voyez le premier volume, pp. 181 et suiv.
* Ibid., pp. 357 et suiv.
( 121 i
blablc. Enfin, los esclaves que possédaient certains collèges,
paraissent avoir été peu nombreux '.
Ce qui est certain, c'est qu'en échange de Timmunité -, les
membres du coUcfjium fabrum devaicMit ù l'État des corvées ou
journées de travail en rapport avec leur métier, sans qu'on
puisse rien dire de plus. Ces corvées étaient sans doute égale-
ment réparties entre les membres et accomplies sous la direc-
tion d'un curator opennn publicorian 3. Étaient-elles perma-
nentes pour chacun des membres? Nous ne le croyons pas.
Elles ne les empêchaient pas de consacrer une partie de leur
temps à un travail librement choisi.
Ceux qui s'enrichissaient étaient privés de l'immunité, réser-
vée aux pauvres lîenuinribus). Antonin le Pieux ordonna déjà
de n'admettre ni les enfants ni les vieillards *.
Choisy se trompe aussi, avec beaucoup d'autres, en attri-
buant à Hadrien la transformation des collèges d'ouvriers
occupés à la bâtisse. Voici ce que rapporte Aurélius Victor :
Ad spécimen legiomnn militarhim fabros, perpetidiculatores,
archilectos geniis(jue cunctum extvuendorum moeuium, seu déco-
randorum, iti cohortes centuriaveraî •\ c'est-à-dire : « Hadrien
enrôla par cohortes et centuries, sur le modèle des légions
militaires, les ouvriers en bâtiments, les géomètres, les archi-
tectes et toutes les sortes d'ouvriers qui construisent ou déco-
rent les édifices. » Cela ne signifie nullement que ce prince
transforma les collèges d'ouvriers constructeurs, libres jusqu'a-
lors, en institutions régulières, officielles de l'État. La phrase
qui précède prouve qu'il ne s'agit pas des collèges de Rome,
ni des autres villes, mais des artisans que cet empereur bâtis-
seur et voyageur menait à sa suite dans ses courses â travers le
inonde pour relever les villes détruites. Ces légions et ces
< Voyez le premier volume, p. 4o,-), et infra, cliap. III.
2 DiG., 50, 6, 6 (o), § 12 (voyez supra, p. oO, n. 1).
^ HiRSCHFELD, Verw., pp. d 55- 156.
^ I)iG.,50, 6, G(5^§, 12.
^' Epit., XIV, 5.
( 122 )
cohortes crun genre nouveau furent sans doute licenciées
quand les entreprises d'Hadrien furent finies. Il y avait d'autres
collèges dont le métier se rapportait plus ou moins à l'industrie
du bâtiment ; voici ceux qui ont laissé des traces :
CoUegium aerahoriim fabrum, ouvriers en bronze. Plutarque
et Pline les rangent parmi les collèges de Numa <.
Conlegium fabnim ferrarmm, forgerons, travaillant les
métaux destinés aux constructions -.
Collefj{ae) marm[orarn), marbriers, tailleurs de marbre"^.
Mensores aecUficiorum, arcliitectes 4.
CoUegium pavimentariorum, paveurs, en l'an 19 ».
Corpus subaediauorum, ouvriers faisant les travaux de menui-
serie dans l'intérieur des maisons, ébénistes c.
Conleg. secto[rum] serrarium, scieurs de pierres, sous la répu-
blique '^.
Co[l{legium)] subrutoiium) mltor{iim) Silvani, démolisseurs,
sous Titus 8.
CoUegium struc[torum], constructeurs, maçons 9.
Ajoutons le coUegium clendropfior{um) Romanor{um), quibus
ex S{enatus} c[onsuUo) cotre licet, appelé aussi coUegium dendro-
< Plut., Numa, 17. Plin., H. T , XXXIV, 1. Voyez \o premier volume,
p. 63.
* VI 189'i, au commencement du h' siècle.
3 VI 9370. Map[xapîtov xô ysvo;, Kaibel, 1093; oi xzyyzr.ai, artefcces,
Kaibel, 1092, et la note. Leur métier est expliqué dans Kaibel, 297
= C. I. L., X 7296 : tituU heic ordinantur et sculpuntur aidibus sacreis
cmn operwn publicoriim. Marquaudt, Priv., pp. 605. 615 (623. 633).
Vie privée, II, pp. 272. 283.
* Cfr. Hirschfeld, Venu., p. 156.
3 VI 243.
6 VI 9558. 9559, BiUl. coin., 1888, p. 468, n. 99. Voyez le premier
volume, p. 277. Ce collège s'occupait des funérailles. On le retrouve dans
les villes de province; voyez iiifra. La nature du métier est douteuse.
' VI 9888 = 1 1108. Cfr. VI 9887 : sector.
» VI 940.
'j VI 444. CoD. Jusï., X, 64, 1 : structores, id est aedifica tores.
( 123 ■)
pliorum Matris itexnn m{af)nae) !{dueac) et Atlis i. Ce collège
existait dans la plupart des villes de l'Empire. A Uome, nous
trouvons, dès l'an 97, des i:ull[ores] Silvcuii d[en(lro])hori'!] -,
qui sont peut-être des dendrophores; le collège des dendro-
phores romains apparaît, à coup sûr, en l'an 107, puis dans
deux inscriptions du règne de Septime Sévère ''>. A Ostie, le
collegiiim dcndrophorum Ostiiensium) fut très florissant durant
tout le 1I« siècle 'k II est probable qu'à Rome comme dans les
provinces S, cette corporation subsista jusqu'en l'an 415, où
Honorius et Théodose la supprimèrent partout comme con-
frérie païenne et attribuèrent ses biens au fisc G. Elle avait donc
conservé son double caractère religieux et professionnel, que
nous avons établi plus haut. Elle jouait un rôle très important
dans le culte de Cybèle et d'Attis, et son caractère profession-
nel est aussi hors de doute, mais le métier qu'elle exerçait est
difficile à déterminer. Nous avons vu que l'industrie privée des
dendrophores devait avoir rapport au bois et qu'ils étaient
probablement marchands de bois. Leur service public devait
se rattacher à cette industrie, mais nous n'avons pas la moindre
indication. L'opinion la plus vraisemblable paraît être celle de
Rabanis '7. Le collège des dendrophores existait dans presque
< VI 641. 29691 = Oiii^LLi, 4075, en ^206. Bull, corn., 1890, p. 18 et
ïav. L II.
2 VI 642.
5 Orelli, 4412, en 107. VI 29691, en 206. VI 1040, sous Septime
Sévère. Voyez encore : VI 1925, colleg. dcndr. Roman. Sur \e\iY schola,
voyez le premier volume, p. 216, n. 3.
' Inscriptions des années 139. 142. 143. 147. 196. 203 (XIV 97. 67. 33.
280. 71. 324). Sous Vérus : XIV 69. Au II« siècle : XIV 409. Inscrii)tions
non datées : XIV 45. 53. 69. 282. 295. 364. Sur leur schola, voyez le
premier volume, p. 216, n. 5.
2 Sur le double caractère des dendrophores, voyez le premier volume,
pp. 240-253.
•• C. Th., 16, 10, 1. 20, îj 2 (415). La loi de 315 iC. Th., 14, 8, 1. 1, en
315) s'appliquait également à toutes les cités.
" Rabanis, pp. 52-58. Voyez les auteurs cités dans le premier volume,
p. 241, n. 1.
( 424 )
toutes les cites dès le 1I« siècle avec son caractère à la fois civil
et religieux ; il est probable, comme le soutient Rabanis, qu'en
415 il fut dissous seulement comme collège religieux et que
la partie de ses biens affectée au culte fut seule confisquée. La
corporation civile subsista avec sa charge civile. Kabanis fait
remarquer que les curiales étaient exemptés de la charge
patrimoniale de la fourniture et du transport des matériaux
de construction, des poutres nécessaires aux bâtisses publi-
ques, du bois à brûler et du charbon K Cette « fonction »,
rangée parmi les mimera sordida et extraordinaria, était réser-
vée aux dendrophores. « Qui aurait, en effet, à la place des
dendrophores, fourni et transporté l'immense quantité de bois
nécessaire aux constructions navales, militaires, civiles el
autres, sans compter le chauffage des établissements publics?
Nous sommes positivement sûrs que l'Etat n'achetait point
le bois dont il avait besoin, puisque la plus grande partie des
forêts de l'Empire lui appartenaient. Il ne le transportait pas
davantage, puisqu'il ne transportait à ses frais ni son blé, ni
son huile, ni les espèces provenant des caisses publiques.
Cependant il fallait veiller à l'aménagement des forêts, pro-
céder aux coupes, débiter le bois, le faire arriver aux
(thantiers et aux magasins de toute espèce. Les dendro-
phores, aidés des navicularii, suffisaient à cette fonction 2. »
Il en était sans doute de même des dendrophores de Rome :
tout en faisant le commerce de bois pour leur compte,
ils fournissaient et transportaient celui qui était nécessaire
à l'État.
Là s'arrêtent nos renseignements sur les corporations du
bâtiment, mais non sur la division du travail, qui était poussée
* C. Th., II, 16, 1. t5 (382^ : materiam, lignum atqiie tahulata excep-
iorum virorum patriiiwnia non praebeant, carbonis quoque — ab hujus-
modi viris praebitio désistât. De même : 1. 18 (390).
- Rabanis, pp. 57-59. — Pour le chauffage des thermes de Rome, le
hois était transporté par les mancipes tlicrmarum et une partie des
naviculaires. Voyez supra, p. 55.
( i2:i )
très loin *; le nombre des collèges était e(îrtainenient beau-
coup plus grand -.
Nous connaissons aussi quelques collèges chargés de Pen-
tretieii des édi liées publics : en |)remier lieu, les mancipes
thermarum ou salinarum -K
Les lliernies étaient de vastes et niagnili(|ues établissements,
où l'on n'allait pas seulement prendre des bains, mais cher-
cher le repos et les divertissements : selon la Aotitia, Home
en comptait 956 '*■. Deux corporations étaient attachées à leur
service : les naviculaires et les mancipes Ihermarum. Ces
derniers n'avaient pas d'autre service : c'était leur façon de
ce contribuer à la splendeur et à la prospérité de la patrie
commune » ^. Mais ce service était double. En premier lieu,
ils étaient chargés du transport du bois de chautiage ^> en même
temps que les naviculaires africains (navicularii lignarii) ;
car celait la province d'Afrique qui fournissait la plus grande
partie du bois nécessaire pour chauffer les thermes de
» II. BiXTMNER, Tcchn., III, pp. 84-3-23 Mauquaudt, Vriv., pp. o99-71î;
(617-738). Yie privée, II, pp. 265-400.
2 La liste du Digeste, 50, 6, 7 (6), énumère des ouvriers militaires, et
celle du C. Th., 13. 4, 1. 2 = C. .)., X, 64 (66), 1, concerne les provinces.
2 Sur les mancipes thermarum, voyez : C. Th., 11, 20, 1. 3 (400). 12,
16, 1. un. de mancipibus (389). 14, 5, De mancipibus thermarum Urbis et
subvectione lignorum. Cod. Just., IV, 61, 11. Svmm., Epist., I.\, 103. 105.
liel., 44 (X, 58). Rel. 14, 3 (X, 27), éd. Seeck : pars urenda lavacris
ligna conportat. Goïhofr., Paratitlon ad C. Th., 14, 5. Cohn, p. 165.
C-AGNAT, Impôts indirects, p. 241. Naquet, Impôts indirects, pp. 142-143.
(Iebhaudt, p. 37. Notre article dans la Revue de l'Instr. publ. en Belg.,
1892, pp. 221-224. A part, pp. 5-8.
* Preller, Die Regionen, pp. 30-31. Selon le Curinsum, il y en avait
856.
^ Symm., £";;., IX, 100 : Juvandi sunt mancipes salinarum, i/uispiendori
atque iisui patriae cnunnunis inserviunt.
6 G. Th., 14, 5. Voyez supra, dans la note 1, la rubrique de ce titre.
Symm., Epist., IX 103 : Mancipes salinarum, qui exercent lavacra ligno-
rum praebitione. Epist., X, 58 {Rel., 44) : navicularios, aeque lignorum
functioni obnoxios.
( 126 )
Uome ^. Constantin décida que soixante naviculaires seraient
astreints à ce service, en échange de privilèges spéciaux, sans
quitter leur collège: leurs confrères devaient eux-mêmes les
désigner parmi ceux qui étaient assez riches, et pourvoir au
remplacement de ceux qui venaient à mourir ou devenaient
incapables pour une autre raison. Valentinien l^"" confirma ces
dispositions en 364 et en 369 -. Sous Valentinien II, Théodose
et Arcadius, la corporation des maucipes thermarnm était fort
réduite; elle réclama à plusieurs reprises auprès du préfet
de la ville, qui fit rentrer les récalcitrants et lui donna des
membres nouveaux. Elle s'adressa aux naviculaires, astreints
comme elle au transport du bois, et ce collège, dit Sym-
maque, plutôt que de coopérer tout entier à ce service, livra
aux mancipes une partie de ses membres; il est probable
qu'il n'existait plus aucun des soixante naviculaires tenus
à la lignaria fiinclio depuis Constantin 3.
En second lieu, les mancipes Uiermariim étaient seuls char-
gés du chauffage et de l'entretien des bains : mancipes, qui
thermarnm exhibitionem Romae curant ^.
On les appelait aussi mancipes salinarnm ou conductores sali-
narum, parce qu'ils furent d'abord locataires des entrepôts de
sel situes dans la ville de Rome, où tous les marchands étaient
obligés de déposer le sel moyennant une redevance; ensuite
ils curent Pexploitation de ces magasins à titre gratuit '\
^ Terracine, en Campanie, fournissait aussi du bois, que transpor-
taient sans doute les posscssores. Symm., X, o3 {Rel, 40), en 384.
2 C. Th., 13, 5, 10 (364). 13 (369). Cfr. C. 1. L., XIV 278, à Ostie :
navicularii lignarii. Voyez supra, p. S5.
5 Sym.m., A>., IX 103 et X, 58 (RcL, 44) en 384. En 389, des mesures
furent encore prises pour compléter ce collège. C Th., 12, 16, /. un.
^ C. Th., 14, 5, 1. 1 (363).
•• Sur ce privilège et sur ce double nom, voyez infra, chap. IV. — On
les appelle aussi mancipes tout court : C. Th., 11, 20, 1. 3 (400). 12, 16,
rubr. (389). Symm., Rel., 44, § 3, et leur service est appelé simplement
mancipatus : C. Th., 12, \6, l. un. (389). — Cfr. supra, p. 81 : les
pislores sont également appelés mancipes tout court. — C. I. L., VI 1742
( 127 )
A Constantinople, il n'est pas rjueslion (fune corporation
semblable.
Les aqueducs étaient placés sous la surveillance du ci//Y//or
(i(jU(inn)i, |)!us tard du conies j'ormarum; sous Auguste, leur
garde lut conliée à des esclaves (aquarii) *. Sous le Bas-
Empire, il y avait à Constantinople un nombreux personnel
iVaquarii, appelés aussi aquarum custodes ou Injdrophijlaces.
Étaient-ils esclaves ou libres? Formaient-ils un collège ou une
f'amilia puhlica? On ne saurait le dire. Zenon ordonna de mar-
(juer l(; nom du prince sur leurs deux mains pour les empêcher
de se sauver ou d'être affectés à un autre service ^.
IV. Police et autres services publics.
La police de Rome était confiée au praefectus vigilum, subor-
donné au préfet de la ville. (Chargé, depuis Auguste, de veiller
à la sécurité de la capitale, il avait sous ses ordres une garde
de nuit [vigiles], composée de sept cohortes et spécialement
affectée au service des incendies ; cette garde avait donc pris la
place des six cents esclaves qu'Auguste avait d'abord mis à la
disposition des édiles 3.
.'iprès Dioclétien : corpus omne mancipum, et VI 1016, sous Marc Aurèle :
inancipes, où il s'ai;it des fermiers du vectigal foricularii et ansarii
promcrcaliiun (Ca(inat, Impôts indirects, p. 149 .
• Voyez supra, p. 13, les renvois de la note 2.
'^ ci., XI, 42 (43), 10 § 1 {Zenon, 474-491). — Ceci ne prouve pas
(ju'ils étaient esclaves, car les fabricenses [C. Tu., 40, 2-2, 1. 4. G. J., XI,
9, 3) et les recrues (Veget., I, 8 et II, o) portaient la même empreinte.
Voyez IIuMBEiiT dans le Dict. de Darembehg et Sagijo, s. v. aquarii.
5 Marqlaudt, St.-V., II, pp. 484-487. Th. 31ommsex, St.R., II,
pp. 1054 sqq. Hirscufeld, Verwalt., pp. 142-148. — Il n'est nulle part
(picstion ni de [abri ni de centonarii pour le service des incendies à
Rome, comme on Ta supposé plus d'une fois. Gothofr., ad G. Th., 12,
1, 1. 62 {corpus fabrorum). IIodbertls, VIII, 1867, p. 421, n. 62
0. IIiRSCHFELD, Gutl. Stud., III, p. 12 (248), note 2. Gebhardt, p. 7, n. 2.
Malk. Der Praef. fabrum, p. 47, n. A. Likuexam. p. 54, n. 1.
{ 128 )
Au IV* siècle, cette institution d'Auguste n'existe plus; le
l'ir clarissimus praefecius vigilum a sous lui, pour la police de
nuit, les trois cent sept viconiagUlri, et pour l'extinction des
incendies un corps de collegiati ou pompiers. A Constan-
tinople, il y avait également dis collegiati pour le même
service et nous commencerons par cette ville, parce que les
renseignements qui la concernent sont plus clairs ^
A Constantinople ^, les collegiati (pompiers) étaient sous
les ordres du praefecius vigilum, qui dépendait du praefecius
urbi. Sous Théodose le Jeune, ils étaient au nombre de cinq
cent soixante-trois, distribués dans toutes les régions de l;i
ville. On les choisissait dans diverses corporations et ils
étaient affectés pour toujours à leur nouveau service. Quand
l'un d'eux venait à mourir, le préfet de la ville devait choisir
sou successeur dans la corporation dont le défunt était sorti,
et veiller à ce que leur nombre ne fût ni diminué, parce
qu'il fallait sauvegarder la sécurité publique, ni augmenté,
parce que trop de gens auraient profité de leurs immunités.
Pourquoi les prenait-on dans diverses corporations? C'est
qu'il fallait, pour ce service, des artisans de divers métiers, et
il est probable qu'on les choisissait dans les collèges qui les
' Voyez notre article dans la lirvuc de l'Inst. piibl. en Belg., 1892,
pp. 2-27--231.
* COD. Jlst., IV, 63, o. Théodose le Jeune au préfet de la ville
Aétius : Cessante omni amhitione, omni licentia, quingentorum sera-
ginta trium collegiatoriim riumej'us maiieat, mdlique hisaddendi mutan-
dive vcl in defuncti locuin substituendi pateat copia, ita ut jiidicio tuae
.
* Les lois citées sont adressées au P. l . La Nov. .^9 est adressée au
P. P. d'Orient.
• Xov. JusT., 43 et 59. Xov. Léon., 1^. Sur ces defensore^, voyez Arei,
Desjardlns, dans le Dict. de Daremberg, II, p. 48.
'■ De Rossi, Roma sott., III, p. 534. E. Michox, dans le Dict. de
Daremberg, et Kraus. Realencycl. der christ. Alterthumei', s. v. fossor.
— Kraus croit que les fossores de l'Église étaient clercs et que les
copiât ae étaient laïques.
" En 423, Honorius dit : pagaiws, qui supers loit, ijuujnquamjam nnllos
esse credamus (C. Th., 16, 10, 1. 25); mais il exagère. Voyez G. Boissier,
La fin du paganisme, II. p. 23i 2<^ édition .
l U« )
saîres aux jxmvres gens, quand ^^ersonno no os d'une élection.
- Voyez WnjXMS, Droit public, pp. oTo et 584. Bouchard, ehap. L\.
et les sources qu'ils citent. Sur les médecins {archiat)i), voyez D"^ Briai
dans Daremberg, Archiairus. De Ruggiero, Di.:-. ep., s. v. archiatcr.
Walter, .^ 38o. S. GoLDHORN, De archiattis Romanis, Leipzig, 1841. Sui-
tes professeurs, voyez Walter. j; 384. G. Boissier, La fin du paganisme,
1. pp. UîO et suiv.
5 VI 9ot?(5. :iK^^. Grut., t>o"2, 4. Voyez le premier volume, p. )1±2, n. 1.
et Addition îi la p. ±13^ n. i.
* Voyez en général : Serricay, n^^* 10-25-1063. 11U>. Wallon, llf.
pp. 398-409. Friedlaexder, dans M.vrquardt, St.-R., IIP, pp. 482-5(^>.
Le adte, II, pp. -247-350.
( 133 )
qu'au IV« siècle, cent soixante-quinze jours par an y étaient
consacrés^. Aux trois premiers siècles, le personnel nécessaire
se recrutait librement et sans ditficulté : le magistrat qui don-
nait les jeux s'adressait aux chefs d'associations dramatiques
ifjreffes), aux directeurs des factions du cirque, aux entrepre-
neurs {lanislaej de « familles » de gladiateurs '^. Ces associa-
tions, factions et familles étaient formées dans un but de
spéculation; mais les acteurs, les cochers, les gladiateurs et
d'autres encore constituaient souvent aussi des collèges privés,
tant à Iiome que dans le reste de l'Empire.
Artistes du théâtre. — Haj)pelons que du vivant de Livius
Andr(jiii(us (o47 = 207) fut établi à Home un collefjium poeta-
rum composé de poètes et d'histrions, que Valère Maxime
mentionne encore, mais dont la nature est peu connue 3. Sous
l'Empire, on trouve encore les mimiparasiti Apollinis, sodalité
sacrée, qui date probablement de l'institution des jeux Apol-
I inaires (542 = 212), s'il est vrai qu'elle était destinée à con-
courir à la célébration de ces jeux presque tous scéniques ^.
Les collèges d'acteurs {scaenici), venus de Grèce, s'étaient répan-
dus dans tout l'Empire; ils portaient un nom grec (tjvooo;)
et avaient un caractère religieux : leur président s'appelle
doyyzzc'jq, ^. A Home et dans les environs, on rencontre plu-
sieurs collèges se rattachant au théâtre : un corpus scaenicorwn
latviorum c, opposé aux acteurs grecs ; un commune mimorum
et omnia corpora ad scaenam dans une inscription de Bovilles "^ ;
' Marc Aurèle en avait conservé cent trente-cinq. Voyez C. I. L.,
I, p. 378.
2 Friedlaendeu, /. /., pp. ol7. 538. oo9. Le culte, II, pp. 294. 31o. 340.
3 Voyez le premier volume, pp. 82. 202. 320.
* Marquardt, St.-V., IIP, pp. 501, n. 3. 538, n. 3. Le culte, II, pp. 270,
n. 7. 315, n. 6. Th. Mom.msen, Mitth. des Inst., 1888, pp. 70 sqq.
^ Voyez le premier volume, pp. 53, n. 3. 390, n. 7. Ajoutez : F. Pola>'d,
de coLleyiis artificuin Diunijsiacorum, Progr., Dresde, 1895, 26 pages in-4".
<"' XIV 2299, dans l'ager Albanus.
■• XIV 2408, en 169.
( ru )
les comédiennes sont associées pour les funérailles {sociac
mi7nae)^; dès la république, il existait une synodiis magmi
psallum '-^j musiciens, joueurs de cithare, ayant une sépulture
commune; il reste plusieurs inscriptions d'un collegium sca-
billariorum, également funéraire : c'étaient des musiciens qui
donnaient la mesure par le scabillum, sorte de pédale qui réson-
nait à chaque battement du pied ; ils avaient également un
colombaire 3. Passons au cirque et à l'amphithéâtre : le colle-
gitim aurigatorum d'une inscription ^ est sujet à caution ; mais
les arenarii s, gladiateurs combattant les fauves dans l'arène,
et les venatores 6, chasseurs de bêtes, formaient certainement
des corporations à Rome. Les gladiateurs, esclaves pour la
plupart, s'associaient pour les funérailles. En l'an 177, ceux
de Commode formaient un collegium Silvani Aureliani '', qui
admettait des gens du même métier n'appartenant pas à
l'empereur. Il y avait aussi une familia ludi 7nagni, esclaves
publics associés peut-être dans le même but 8. Citons enfin
la très florissante association des athlètes grecs à Rome 9, et
» VI 10109.
2 BiUL corn., 1888, p. 408.
5 Ce colombaire a été retrouvé près de la Porta Maggiore (Gatti, Bull,
corn., 1888, pp. 110-114). VI 6660. 9862. 10145-10148. IX 3188. Bull, corn.,
1886, p. 279, n. 1274. 1888, p. 110, n. 1-4, et p. 315. Marquardt, Le culte,
II, p. 331, n. 8. — Horace dit, par plaisanterie : ambubaiarum collegia
{Sat., I, 2, l), danseuses s'accompagnant de flûtes, de crotales et d'instru-
ments à cordes. De même Ausone dit : collegia parasitorum (Epist., IX,
46). Sur cet emploi plaisant, voyez le premier volume, p. 51, n. 2 et
518.
^ Reinesius, X, 17 : collegium aurigatorum. Nous ne l'avons pas
trouvé au Corpus, ni parmi les fausses. G. /. L., VI, 5, 555* : eolleg.
aurigariorum.
^ XI 862, à Mutina : coUeg. harenariorum Romae.
'■' Bull, com., 1880, p. 16, n. 166, sous Commode : coll ... venator ...
7 VI 631. 632 et la note. 3713.
« VI 10168.
'■^ C. I. Gr., 5804. Kaibel, Indices, p. 751. Saglio, Dict. des antiq., s. v.
athleta. De Ruggiero, Diz. epigr., s. v. athleta. Liebenam, p. 124.
( 135 )
les (lissignatoi'es y distributeurs des places au théâtre, proba-
blement associés aussi L
Durant trois siècles, les artistes nécessaires aux jeux et aux
spectacles de Rome furent faciles à recruter et Tcmpereur
n'avait pas à s'en inquiéter. Au !V*^ siècle -, la passion des spec-
tacles n'avait fait qu'augmenter, tandis que les hommes néces-
saires devenaient de plus en plus rares. « Les jeux, dit G. Bois-
sier, furent la dernière passion de cet empire moribond -^ » ;
princes, magistrats et particuliers rivalisaient de somptuosité
pour amuser «cette plèbe oisive et paresseuse qui vivait du pain
et du blé distribues, qui passait son temps aux spectacles de
toute espèce ou discutait, dans les rues et sur les places, le
mérite des cochers qui allaient concourir aux jeux pro-
chains ^ ». « Le peuple, dit Symmaque à Théodose et à Arca-
dius ^, attend de votre Divinité les plus grands bienfaits; mais
il réclame comme une dette ce que votre Éternité lui a spon-
tanément promis : il prie donc votre Clémence qu'après les
secours que votre générosité lui accordera pour son alimenta-
tion, elle lui fournisse au cirque et au théâtre de Pompée le
plaisir des courses et de la scène ». Ammien Marcellin et Sym-
maque parlent encore comme Juvénal. C'était pour les empe-
reurs une nécessité de satisfaire cette fureur des jeux; il y
allait de leur popularité et de leur empire ! Aussi, peu après la
prise de Rome (en l'an 410), l'un des premiers soucis d'Hono-
rius est de rappeler à leur otiice les comédiennes [mimae],
« pour que les fêtes du peuple romain ne soient pas privées de
leurs ornements accoutumés 6 ». Tous ces gens nécessaires aux
' Marquardt, St.-V., IIP, p. 537. Le culte, II, p. 3U. On les trouve
isolés : VI 1074. 1223. 19oo. 8446. 9373. A Falerio, il y a des (lis.siçpm-
tores socii, IX 5461.
2 Voyez Wallon, III, pp. 397-409.
^ G. BoissiER, La fin du paganisme, I, pp. 80-83. II, pp. 168-175.
* Amm. Marcell., XXVIII, 4, 28.
=• Symm., ReL, 6 (X, 19). 9 (X, 22), en 384.
'■' C. Th., 15, 7, 1. 13 (414) : Mimas — ad propriuni officium aummci
instantia revocari decernimns.
{ 136 )
u voluptés publiques ' » donnaient ù la populace plus de
soucis que les barbares, et leur recrutement était devenu une
affaire d'Élat. Il y avait un tribunus voluptatum -, chargé d'ad-
ministrer les jeux, et les empei'eurs prirent les mesures néces-
saires pour que les acteurs, les cochers et tous les artistes de
ce genre ne tissent pas défaut. Attachés à leur condition, ils
formaient sans doute des collèges dont l'administration tenait
les listes, comme elle avait celle des boulangers, par exemple.
Nous trouvons dans ce cas :
1^' Les gens de théâtre en général 3, scaenici et scacnicae
artifices ou histrioues, avec leurs noms divers : thymeliei et tliy-
ïneîicae ^, actuarii thymelae <\ et en particulier les mimes
[mimae] et les pantomimes. Leur métier était réputé infâme et
leurs personnes « malhonnêtes ^' )), malgré les honneurs qu'on
leur rendait. Dès le commencement du IV^ siècle, deux ten-
dances opposées se tirent jour à leur égard : pour contenter
les exigences populaires, les princes les enchaînèrent â leur
état avec leurs descendants, tandis que le christianisme s'effor-
çait de les y arracher et de supprimer les spectacles eux-mêmes.
Acteurs et actrices étaient attachés à leur condition, qui était
qualifiée de « service des jeux )^ « otiice de la scène « ; ils
étaient « esclaves des voluptés populaires », « atîectés aux spec-
tacles' ». Les femmes, « nées dans cette vile condition, issues
' C. Th., 15, 7. 1. 3. 5 et 13 : voluptatc,'^ popiili.
2 Cassiod., Yar., VIL ^20. A Carthage : C. Th., lo. 7, 1. 13 414).
Cfr. Serrigny, n. 10-26.
5 Voyez GoTHOFR., Parât, ad 15, 5. 6 et 7, et surtout le volume V.
p. 409.' Wallon, IH, pp. 405-410.
» C. Th., 15, 7, 1. 5 (380). 14, 3, 1. t>i (403^
^' G. Th., 8, 7, 1. ï>i^426K
•' C. Th., 15. 7, 1. 4 : munus turpe ; ibid., 1. 12 : in/iom\-^; tous concouraient,
par leur travail, soit ù la splendeur, soit aux intérêts de la capi-
tale ^. Tous étaient sous la surveillance particulière du préfet
de la ville et de ses subordonnés; tous avaient donc un carac-
tère otliciel et constituaient des organismes inférieurs de l'État,
faisaient partie intégrante de la collectivité politique. Cepen-
dant il y avait entre eux de grandes différences. Les uns étaient
plus considérés que les autres, parce que leur service était
plus important, qu'ils étaient plus riches et que leur effectif
était plus nombreux. Les principaux étaient ceux de l'annone,
qui pourvoyaient aux besoins essentiels de la vie et assuraient
au peuple la jouissance de ses anciens privilèges, c'est-à-dire
collèges, à savoir les distributions gratuites. La loi 1, C. Th., 14, 2,
l)arle des privilèges des corpoiations : Ha privilégia, quitus pro reve-
rentia urbis aeternae varia corpora hominum vel priscarum legum
auctoritas vel antécédent iwn principum fovit huinanitas. — Les collèges
de l'annone sont encore spécialement désignés dans la rubr. du C. Th.,
H, 4 : ceterùque corporatis, qu'il faut expliquer i)ar les derniers mots
de la loi 8.
' Symm., ReL, 14 (X, 27) : patriae servientcs ... horuni corpvrum
)ninisterio tantaeurbis onera sustineri (en 384).
- Symm., ibid.
•' C. JusT., XI, 47, 23 pr.
» Nov. Val. III, tit. iS (455).
•• Symm., Epist., IX, 100 : mancipes thcrmarum, qui spiendori attjue
usui communis patriae inserviunt. Ambros., /. /., : qui solerent adju-
menlo esse vel in conferendis subsidiu, vel in celebrandis commerciis. —
Symm., ReL, 14 (X, 27), les appelle corporati ncgotiatores, mot qui dési-
gnait tous ceux qui vivaient du travail, de l'industrie et du commerce et
payaient le chrysargyre {aurum ncgotialoï'um).
( 144 )
les distributions gratuites et les ventes à bas prix. Parmi eux.
il y avait encore des de^i'és ; le puissant collège des navicu-
laires était bien au-dessus des humbles porte-sacs. Les fer-
miers des bains étaient presque aussi indispensables, si l'on
en croit Symmaque, qui insiste auprès de l'empereur pour
qu'il les soutienne; d'autres collèges ne sont que des mimiscula
corpora auprès de ces mancipes thermarum '.
Enfin, la feçon dont tous ces collèges servaient l'État
différait essentiellement, comme nous le dirons au chapitre
suivant. Les corporations de l'annone et des travaux publics
ne travaillaient généralement que pour l'Etat; ils lui consa-
craient presque tout leur temps - et leurs membres étaient
véritablement des employés de l'État, des agents otficieis
enrôlés dans une administration. Les autres étaient simple-
ment utiles; ils pounoyaient à l'alimentation du peuple, aux
autres nécessités de la vie ou au bien-être de l'existence;
ils desservaient le public directement dans leurs boutiques et
leurs magasins, par le libre exercice de leur industrie et par
le commerce 3, sans être incorporés dans une administration
publique.
DEUXIDIE SECTION*.
Villes de l'Italie et des Provinces.
Les villes de l'Italie et des provinces, dont la constitution
était modelée sur celle de Rome, avaient aussi des collèges
dans leurs diverses administrations. Partout les inscriptions
nous font connaître l'existence de nombreuses corporations
aux trois premiers siècles, et, au quatrième, le Code Théodosien
» C. Th., li, 16, /. un. (389).
- Cependant ils pouvaient aussi travailler pour leur compte. Voyez,
sur les saccarii, p. 63, n. i, et sur les naviculaires, p. 57.
* Valentinien UI dit du corpus des pantaftcdae : magna in emendis
vendendisque mercibus diligenîia (Nov. Val. LU, tit. 5, § 2, en 4iOv
( 145 )
signale des coUegia et des collegiati dans toutes les cités.
Mais toutes ces corporations municipales étaient-elles char-
gées d'un senice public? Peut-on déterminer ce senice?
Enfin, toutes les professions finirent-elles par être organisées
en collèges? Voilà trois questions qu'il est fort difficile de
résoudre. Avant de les examiner, nous croyons devoir faire
connaître les collèges dont l'existence est certaine et nous
commencerons par en dresser la statistique. 11 nous est
impossible de les ranger d'après les administrations aux-
quelles ces collèges appartenaient et nous sommes forcé de
suivre Tordre alphabétique, en distinguant toutefois deux
périodes. Pour les trois premiers siècles, c'est l'épigraphie qui
nous vient en aide, car la plupart des inscriptions proviennent
du deuxième et du troisième siècle; au quatrième et au
cinquième, nous n'aurons guère que les Codes pour nous
renseigner.
Liste des corporations municipales du Haut-Empire.
Nous dressons la liste alphabétique des collèges profession-
nels qu'on rencontre avant le IV® siècle, en indiquant seule-
ment les villes où leur existence est prouvée et le temps où ils
apparaissent, s'il est possible de le fixer i.
1. Collegium aeneatonim, musiciens jouant du cor : à Casi-
num (an 200) et à Aquinum.
2. CoUegius aquariorum, porteurs d'eau ou ouvriers des
aqueducs : à Venusia -.
3. Are!\nayii consxstentes col{onia} Aug. Treverorum , a
Trêves; on trouve un arenahu(s) à Vermand. On les prend
* Pour rindication des sources épigraphiques et la diseussioo sur la
nature de chaque métier, nous renvoyons à la Lùte des collèges que nous
donnerons dans les Appendices.
2 Les Feronenses aquatores d'Aquilée (V 992. 8307. 8306) sont de
nature incertaine. Voyez le premier volume, p. 197.
Tome L, vol. II. 10
{ 146 )
généralement pour des chasseurs de bétes fauves dans l'arène.
Voyez supra, p. 134, et infra : venalores.
4. 'H (Tuvepyao-La twv àpyupoxô-wv xal y^pjo-o^ôwv, batteurs
d'argent et orfèvres : à Smyrne.
5. 01 apToxÔ7:oi,, boulangers : à Thyatire et à Magnésie du
Méandre. Voyez pistores.
6. Coll[egium) muliionum) et asinar[iorum) , muletiers et
âniers : à Potentia.
7. Coll{egiiim) aurariarum, ouvriers des mines d'or : à Bru-
cla et à Alburnus Major, en Dacie.
8. Aurifices universi, orfèvres : à Pompéi *.
9. 'H épyoL'jiy. twv pacpswv, teinturiers : à Hiérapolis et à
Tralles; ol Pacper;, to è'pyov jSacpswv, à Thyatire (sous Caracalla).
10. 01 [jupTsrç, corroyeurs : à Thyatire; -i] ^sijLvoTaT-ri 7'x^zp-
yoL<7LoL Ttov o-xuToêupo-Éwv, à Cibyra.
11. CaplatoreSy peut-être des tonneliers : à Tibur, à Auscu-
lum (Apulie) et à Casinum ; collegiiim caplatonim, à Anagnia;
collegium capulatorum sacerdotum Dianae, à Allifae 2.
12. Caiipones, cabaretiers : à Pompéi et peut-être à Caesarea
de Maurétanie (VIII 9409).
13. Centonarii ou collegium ceutonariorum (une fois : corpus,
11 1167, et une fois : cultores centonari, IX 3837), drapiers,
fabricants et marchands de drap commun et de centons. On
les trouve un peu partout 3 :
En Espagne : à Hispalis (collège autorisé par Antonin le Pieux) et
à Tarraco.
En Dacie : à Apulum (collège fondé sous Septime Sévère) *.
En Dabnatie : à Salone et à Asseria.
^ Sur les collèges de Pompéi, voyez le premier volume, pp. 123 et 169.
■- De Ruggiero {Diz. epigr., II, p. 104; en fait des ouvriers attachés à
la culture du vin et de l'huile et occupés à transvaser ces liquides.
■■'' G. Gatti, dans le Diz. epigr., II, p. 180. Cfr. infra. Section II.
t m 1174, et p. 183. Cfr. Hirschfeld, GalL Studien, III, p. 14, n. 1.
( 147 )
En Pannonie inférieure : à Aquincum (en '210) et à Cibalis.
En Pannonie supérieure : à Igg, à Carnuntum et à Siscia.
Dans la Vénétie et illislrie : à Allinum, à Aquilée, à Berua, à
Brixia (en 134), à Concordia, à Fellria, à Palaviuin. à Vicetia (sous
Hadrien), à Verona.
Da7îs la Transpadane : à Hergomuni, à Comum, à Milan (collège
fondé sous Trajan) ', à Novaria, à Ticinum.
Dans les Alpes Cottiennes : à Sei^aisio.
Dans la Ligurie : à Claslidium, a Alba Pompeia, à Dertona, à
Industria, à Vada Sabatia, h Vardagate.
Dans les Alpes Maritimes : à Cemenelum *.
Dans l'Afrique proconsulaire : à Villî^ Magna ^.
Chez les Sainnites : à Aesernia.
Chez les Marses : à Antinum.
Dans le Picenum : à Interamna, à Firmum, à Falerio, à Trea, à
Auximum (en 137).
Dans la Campanie : à Cales, à Forum Popilii (en 367), à Nola.
Dans l'Aemilia : à Ariminum (sous Antonin le Pieux), à Ravenne,
à Regium Lepidi >en 190), à Brixellum, à Parma, à Placentia, à Imola.
En Étrurie : à Luna (en 253), à Perusia (en 205)^, à Clusium, à
Viterbo.
Eji Ombrie : à Ameria, à Asisium, à Fanum, à Mevania, à Meva-
niola, à Ostra len 260), à Pisaurum, à Sassina ipeu après Trajan)^,
à Senlinum (en 261), à Sestinum (sous Septime Sévère), à Suasa (sous
Antonin le Pieux), à Interamna, à Iguvium, à Urvinum.
Dans la ISarbonnaise : à Marseille (sous Marc Aurèle et Verus), à
* V 5869. Cfr. IIirschfeld, /. l. Ils ne formaient qu'un seul et même
collège avec les fabri; voyez infra. Une inscription de ce collège men-
tionne un flamien) divi Magn{i) Anton{ini), c'est-à-dire de Caracalla
(XI 1230).
2 V 7881. 7905 : collegia tria. De même à Asisium : collegia III
(XI 5416) et à Sentinum : tria coll{egia) principalia (XI 5749, en 261).
Cette expression désigne les fahri, centonarii, dendrophori. Il en est de
même de collegia omnia à Brixia et à Dertona (V 4449. 4484. 7375). Voyez
MoMMSEN, Corpus, V, p. 1198.
'• VIII 10523 : [cent?]onarii. C'est la seule trace de ce collège qu'on
trouve en Afrique, et elle est incertaine.
' Orelli, 95 (sous Septime Sévèie).
^ Une de ses inscriptions mentionne une sacerdos divae Marcian{ae),
sœur de Trajan (K. Bormann, Inscr. Sass., 24).
( 148 )
Aquae Sextiae, à Arles, à Vasio, à Vienna, à Nemausus, à Ugernura.
Dans la Lyonnaise : à Lyon.
14. Cisinriei Praenestinei (sous la république), cisiari Tibur-
tini, cisiarii hors la porta Stabiana à Pompéi, et à la porta
Stellalina à Cales; ce sont des loueurs de voitures pour les
voyageurs.
15. Clibanari, boulangers : à Pompéi.
16. Coci, cuisiniers : à Préneste et en Sardaigne, sous la
république. Voyez le premier volume, page 89.
17. Culinari, cuisiniers : à Pompéi.
18. Cupari, tonneliers : à Alba Helviorum.
19. Dendroplwri ou collegium dendrophorum (corpus, X 1786,
en 196 ; cultures centonari [et dendro]f(ori), IX 3837), marchands
de bois voués au culte de la Magna Mater ^. On les trouve dans
soixante-cinq villes :
Dans la Mésie inférieure : à Gergina, à Tomi, à Troesmis (après
l'an 170.
En Dacie : à Apulum.
En Pannonie : à Igg et à Siscia.
Dans la Dalmatie : à Salone.
Dans la Vénétie et dans l'Hùtrie : à Pola (en 2:27), à Aquilée, à
Belluniim, à Feltria, à Berua, à Patavium, à Brixia, à Verona.
Dans la Transpadane : à Bergomum, à Comum, à 3Iilan.
Dans la Ligurie : à Dertona, à Pollentia (après Antonin le Pieux).
Dans les Alpes Maritimes : à Cemenelum.
Dans la Byzacena ; à Mactaris.
Dans l'Afrique proconsidaire : à Carthage, à Thugga.
Dans la yuniidie : à Cirta, à Thamugadi, à Riisicade.
Dans la Maiirétanie Sitifienne : à Sitifis (en 288).
Dans la Mamrtanie Césarienne : à Caesarea.
En Apulie : à Volturara.
Chez les Hirpins : à Ligures Baebiani (sous Marc Aurèle).
Chez les Marses : à Antinum.
Chez les Èques : à Alba Fucens, à Carsioli.
* Voyez le premier volume, pp. 240-253, et supra, pp. 122-124.
( 149 )
Dans le Picemnn : à Falerio.
Dans le liruttiuni : à Reghim Jiilium (en 79).
Dans la Lncaiiie : à Atina, à Volceii, à Eburum et dans une ville
inconnue de la vallée du Silarus (X 445).
Dans la Campanie : à Cumae (en 251), à Puteoli (en 196), à Suessula.
Dans le Lalium : à Ostie (de 139 à 203, voyez supra, p. 123), à
Gabii, à Signia, à Tusculum, à Verulae 'en 197).
Dans VAemilia : à Ariminum, à Parma.
Dayu VÈtrurie ; à Faesulae, à Luna.
Dans l'Ombrie : à Asisium, à Fanum, à Ocriculum, à Pisaurum, à
Sassina^, à Sentinum (en 261), à Urvinum (sous Commode).
Dans la Narbonnaise : à Marseille, à Nimes, à Valentia, à Vienna.
Dans la Lyonnaise : à Lyon (en 160 et 190).
20. Diff[usores olearii ?), marchands d'huile en gros : à Arles.
21. Socii dissignat(ores), distributeurs des places au théâtre :
à Falerio.
22. 01 £v 'EcpÉcrw spyàTai T:po-tj);£!rTa!. rcpoç tw IlGTeiowvi,
ouvriers travaillant (vendant le blé?) sous un portique près
d'un temple de Poséidon.
23. 'H lepà cpuÂT, Twv spwupywv, ouvriers qui travaillent la
laine : à Philadelphia î^; r\ TEjjLvoTaTï, èpyyMoL twv spw-X-jTwv,
foulons : à Hiérapolis.
24. Fabri ou collepiiim fabrum ou fabrorurn, ou fabri
corjwi'ati {ciiltores fabrorum, X 485o), ouvriers en bâtiments.
Ces artisans, qu'il faut peut-être identifier avec les fabri
tignarii, formaient les collèges les plus nombreux de tous 3 ;
nous les avons trouvés dans soixante-quinze villes :
Dans la Tarraconensis : à Barcino et à Tarraco ill^ siècle).
Dans la Mésie supérieure : à Ratiaria fde 198 à 211).
^ Voyez supra, p. 147, n. 5.
- Voyez le premier volume, pp. 173-174.
3 Et les inscriptions qu'il ont laissées sont très nombreuses : onze h
Milan, treize à Apulum et à Sarmizegetusa, dix-sept à Brixia, etc.
Cfr. LiEBENAM, dans le Diz. epigr., III, j)p. 4-7, s. v. fabri.
( 150 )
Dans la Dacie : à Apulum (en "2(35) *, à Sarmizegetusa, à Tibiscum.
Dans la Pannonie supérieure : à Carnuntuin, k Emona.
Dans la Pannonie inférieure : à Aquincum (en 2i0), à Vindobona.
Dans la Dabnatie : à Narona, à Salone (sous Constance), à Asseria.
Dans la Norique : à Cetium (sous Marc Aurèle),
Dans la Vénétie et l'Histrie : à Pola, à Parenlium, à Tergeste, à
Aquileia, à Bellunum, à Concordia, à Altinum, à Berua. à Feltria.
à Patavium, à Brixia (sous Hadrien), à Verona.
Dans la Transpadane : à Bergomum, à Comum, à Laus Pompeia.
à Milan (collège fondé sous Trajan) 2, à Ticinum.
Dans la Ligurie : à Dertona, à Hasta, à Industria, à Pollentia.
Dans les Alpes Maritimes : à Cemenelum.
En Bretagne : à Regni.
En Numidie : à Lambaesis ^.
Chez les Hirpini : à Ligures Baebiani.
Chez les Samnites : à Aesernia.
Chez les Paeligni : à Corfinium.
Dans le Picenum : à Falerio, à Firmum, à Auximum, à Trea, à
Ricina.
Da7is la Lucanie : à Eburum.
Da72S la Campanie : à Venafrum.
Da7îs le Laiium : à Antium, à Tusculum, à Praeneste. à Tibur (en
172), à Ostie(?)^ à Casinum.
Dans l'Aemilia : à Ravenna, à Ariminum (en 165), à Favenlia, à
Regium Lepidum (en 190), à Parma.
En Étrurie : à Faesulae, à Viterbo, à Volsinii (en 224).
Dajis VOmbrie : à Asisium, à Carsulae, à Iguvium, à Inleramna,.
à Ostra, à Pisaurum (en 256), à Sassina s, à Sentinum (en 260 et 261),
à Sestinum, à Spoletium, à Suasa, à Tuiicum.
* C'est probablement l'année de la fondation, car l'inscription (III
1051) parle d'un patr(onus) prim(us) de ce collège.
- Voyez supj^a, p. 147, n. 1. Pline dit en parlant du sénat sous Domi-
tien : de instituendo collegio fahrorum consulebamiir {Paneg., 54).
'' VIII 2690. 3545, un affranchi appelé [Col]legius Fahricius. Voyez le
premier volume, p. 455. Il n'y a pas d'autre trace de ce collège en Afrique.
^ A Ostie, des inscriptions nombreuses mentionnent le collegium
fabrum tignariorum. Le mot tignariorum manque dans trois inscriptions
fragmentaires (XIV 359. 445. 446) ; au n» XIV 2630, qui semble d'Ostie, les
deux appellations permutent.
^ Voyez supra, p. 147, n. 5.
( 131 )
Dans lu yarbonnaise : à Apta, à Vasio, à Vionna, à Niiiics (?).
Dans la lAjonnaise : à Lyon.
Dans la Geiiuanie supcrieurc : à Mogunliaciini.
25. Conlecium [abri (sic) argenlariorum, bijoutiers : à Cae-
sarca de Maurétanie.
26. Fabri ferrari DivionenseSy forgerons : à Dijon.
27. Col{legium) fab)\um) naval{ium) Pi{sanorum) statio velus-
lissima et piissima, ouvriers constructeurs de navires, à Pisae;
on les trouve encore à Arles, à Catina (? XIV 364), et à Ostie
{supra, p. 77).
28. Fabri subaediani Narbonenses, appelés aussi collegium
fabrum Narbonensium (en 149); amici subaediani, à Antium;
fabri subidiani, à Corduba (en 348) ; subaediani, à Villa Magna
en Afrique. On admet généralement que ce sont des ouvriers
du bâtiment faisant la menuiserie intérieure des maisons.
29. Fabri tignuarii (tignariï) ou collegium (corpus, Inscript.
CoNF. Helv., 212; Allmer, M. de L., II, 185; sodalicium, XI
6135) fabrum tignuariorum ou fabri tignuarii corporatif char-
pentiers et ouvriers du bâtiment en général. On les trouve * :
En Illyrie : h Dyrracliium.
En Dalmalie : à Salonae.
Chez les Samnites : à Allifae, à Telesia.
Chez les Èqiies : à Alba Fucens (en 149) -, à Carsioli.
Dans le Picemim : à Tolentinum,
Dans le Latium : à Ostie (fondé au milieu du I^'' siècle, XIV 128,
note), au Portus, à Préneste (sous Hadrien), à Tusculuni '\ à Velilrae ■*.
En Étrurie : à Luna, à Capena, à Pisae.
Dans rOmbrie : à Ameria, à Forum Sempronii, à L'rvinum.
Dans les Alpes Maritimes : à Salinae.
Dans la Narbonnaise : à Arles, à Nimes, à Vienne et à Fours.
^ LiEBENAM, dans le Diz. epigr., III, p. 7.
2 IX 3923 et p. 371.
•■^ XIV 2630, peut-être d'Ostie.
^ X 6585, peut-être d'Ostie.
( 152 )
Dans V Aquitaine : à Revessio.
Dam la Lyonnaise : à Lyon.
Dans la Germanie : à Moguntiacum, dans la Civitas Taunensium,
dans la Civitas Aquensis * et à Amsoldingen.
30. Coll[egiîim) farmac(opolarum) imhlicor(um)y droguistes :
à Brixia.
31. \C\ollegium \f]ocanorum, chauffeurs des bains publics,
ou fabricants d'ustensiles de cuisine, ou cuisiniers : à Cologne.
32. Foreuses, marchands du forum : à Arles, à Narbonne
(1I« siècle), à Pompéi, à Theveste.
33. Sodal{icium) fullonum, foulons : à Falerio; fullones : à
Pompéi, à Spolète (sous la république), à Carthage.
34. Gallinari, marchands de volaille : à Pompéi.
35. Tyy'fziç, foulons : à Gyzique, à Acmonia i;r\ twv yvacpéwv
o-uvspyao-ia), à Flaviopolis (t6 s'jteXs; (7UV£pyt.ov twv yvacpstov,
foulons chrétiens au III^ siècle) et peut-être à Laodicée ad
Lycum 2.
36. Hastiferi, à Vienna et à Cologne ; hastiferii (sic) sive
pastor{es) consistentes Kastello Mattiacorum (en 224) et hastiferi
civitatis Matliacoimm (en 236), à Cassel. Suivant les uns,
c'était une milice municipale, ayant pour patronne la déesse
Bellone; suivant d'autres, c'était un collège religieux voué au
culte orgiastique de cette déesse.
37. 01 lfjiaT£'j6uL£vot., tailleurs : à Thyatire.
38. Collegium jiimentariorum, conducteurs et loueurs de
bêtes de somme établis aux portes des villes : à Tibur, à Brixia,
à Milan (à la j^orta Vercellina et Jovia), à Forum Sempronii (à
la porta Galîica)^ au vicus Martis Tudertium.
39. T6 Tzkrfioç Twv dnb zoù 'Apo-LvoetTOu xaOapoupywv xal
7rAaxouvT07roi.wv, à Arsinoé en Egypte ; ce sont des pâtissiers.
40. 01 xatpoBa7rt.(7[T]a{, fabricants de tapis : à Hiérapolis.
* BRAMBACH,d661, à un Antonin.
^ C. I. Gr., 3938. Voyez infra, le n^ 77.
( lo3 )
41. 01 x£pap.£rç, potiers : à Thyatire (sous Caracalla).
42. [l]6[oT]Yi[jia xriTTOupwv, jardiniers : à Pessinunte.
43. 01 xopalX'-oTuXaTTai, fabricants de figurines en terre
cuite : à Magnesia ad Sipylum.
44. 01 x'jvYiyo'!, chasseurs de bétes fauves dans le cirque : à
Steiris, à Haliarlus('ov. Valent. III, lit. 34, § 3 (4o2) : non corporatus Urbis Romae vel
cujuslibet tirbis alterius. Nov. Sev., tit. 2 (46o) : si qui vel qua ex
corporibus publias (des villes) vel excorporatis Urbis Romae. — C. Th., 7,
24, 1. 3 (396) : neque collegiatus obsequium propriae urbis effugiant.
42, 49, 1. 4 (400) : collegiati cultum urbium deserentes. 43, 5, 1. 34 (440) :
municipibus et corporatis ejusdem loci. 44, 7, 1. 4 (397) : collegiatos ad
proprias civitates retrahi jubeant. 14, 8, 1. 4 (345) : in quibuscumque
oppidis dendrophori fuerint. 46, 2, 1. 39 (408) : collegio (à un collège)
civitatis adjungatur. Nov. Major., tit. VII, § 3 (458) : ut collegiatis
extra territorium civitatis suae habitare non liceat. Edict. Theoderici,
64 : vicinae civitatis collegio (à un collège) deputetur.
5 Concilii Carthag. V Canones, 6: corporatorum ... qui coguntur ad
spectacula convenirc. Cfr. Gothofr., vol. VI, p. 318.
* C. Th., 7, 20, 1. 12, § 3 (400) : collegia toriwi, ci 42, 49, 1. 4 (400) :
collegiati.
2 C. Th., 44, 7, 1. 4 (397), au Consularis Campaniae : collegiis vel
collegiatis.
6 Ambros., Epist., I, 20, 6 (t. II, p. 853) : corpus nmne meiratorum.
' C Th., 44, 27, 1. 2 fon 436) : corporatos civitatis Alexandrinae, oi
46, 2, 1. 42 (446) : paupere a corporatis — praebeantur.
8 C. Th., 44, 4, 1. 24 (on 395) : a corporatis Karthaginis.
» Panegyr. vetcres, VIII, 8, éd. B.\ehrens, p. 487, sous Constantin :
omnium collegiorum.
Tome L, vol. II. 41
( 162 )
synonymes? Le savant Godefroy, en plus d'un endroit i, sou-
tient que non. Si nous le comprenons bien, il distingue parmi
la plèbe municipale les trois classes d'hommes que voici :
d'abord les corporati, attachés, aussi bien que les corporati
Urbis Romaey au service de la capitale 2; en second lieu, les col-
legiatiy employés au service de leurs villes respectives, de même
que les corporati desservaient Rome 3; enfin les artifices ou
artisans non incorporés ^. Laissons de côté, pour le moment,
ces derniers. Est-il vrai que le Code Théodosien, quand il se
sert du mot corporati en parlant des villes, les oppose aux
collegiati et désigne des corporations attachées aux approvi-
sionnements de Rome ou de Constantinople? Et ce mot n'est-il
pas synonyme de collegiati? Sur ces deux points, nous ne
croyons pas pouvoir adopter l'opinion de l'illustre commen-
tateur. Nous avons comparé tous les passages et nous en avons
trouvé trois où les corporati sont effectivement distingués des
collegiati. Mais cette distinction s'explique. Dans le premier,
Honorius assure aux curiales, aux collegiati et aux corporati
des villes la jouissance des édifices publics dont ils se servent
depuis longtemps S; dans les deux autres, le même empereur
* GOTHOFR., vol. IV, p. 655. V, pp. 158. 163-167. 214-215. 304-306,
ad G. Th., 12, 19, 1. 3. 14, 2. 14, 27, 1. 1 et 2.
2 Corporati enim dicebantur ministeria Urbis necessitatibus inservientia
(vol. V, p. 303). — Ac iLt in aliis Vehibus (Urbibus ?) ac nominatim in
urbe Roma et Consiantinopoli : ita et Alexandriae {Ibid., p. 305. Gfr.
p. 158). — JSolo ctiam eos misceri cum collegiatis (vol. V, p. 303).
5 Collegiati sunt singularum urbium corporati ... qui al terum corpus
in civitatibus constitucbant, cum curiaiibus publiée ministerium praebenles
... Denique collegiati erant qui publico manuariam aliquam artem,
operam et ministerium praebebant (vol. V, pp. 214-215. Ibid., p. 158,
2^ col., il distingue les decuriae, les corporati et les collegiati).
* Parlant d'Alexandrie : e plèbe porro alii artifices seu ergasiotani
fuere, alii corporati, alii collegiati. Ibid., vol. V, p. 303.
s G. Th., 10, 3, 1. 5 (400) : Aedificia, hortos atque areas aedium publi-
carum —pênes municipes {scil. curiales), collegiatos et corporatos urbium
singularum collocata permaneant.
( 163 )
déclare que les collefiiati et les corporatif quels que soient leurs
charges ou leurs oftices, sont liés pour toujours à leur corps
et qu'il faut les y faire rentrer, s'ils se sont enfuis ^. Il ressort
de ces lois, et particulièrement du texte de la seconde, qu'après
avoir cité des corps obligatoires, la curie et les collèges, l'empe-
reur embrasse dans le terme plus général de corporati tous
les autres corps obligatoires et héréditaires, quelle que soil
leur nature. Nous avons vu déjà que corporati peut avoir ce
sens général, comprenant tous les conditionales , tous les gens
attachés à leur condition : les ofjiciales, les cohortales, les
apparitores, les burgarii, les vétérans, les centurions, les
curiales, les employés communaux, les collegiati, etc. '^. Il en
est de même de corpus, et une loi le dit en termes très clairs :
« Celui qui est lié à une curie, à un collège, à un fort, ou bien
aux autres corps '•^. » Une loi d'Honorius prescrit de ne choisir
les palatins que parmi ceux qui ne sont enchaînés à aucun
« corps 4- ». Ainsi, opposés à collegia et à collegiati, les mots cor-
pora et corporati ont un sens général. iMais, dira-t-on, ces mots
ne peuvent-ils pas avoir ailleurs un sens spécial, celui de « gens
attachés, dans les villes de province, aux approvisionnements
des deux capitales ^ »? Sans doute, il y avait, en dehors de
* C. Th., 12, 1, 1. 156 (307) : omnes ordines, collegia, centuriones, ac si
qui qiiibuscumque muneribus vel ofjiciis ubicumque siint corporati, ita
generaliter illigcntur, ut ... C. Th., 14, 7, 1. 3 (412) : Collegiatos, ut
vituliario.s ..., et singularum urbium corporatos ... praecipimus revocari.
— De même : Nov. Valent. III, lit. 34, § 3 (452).
2 Voyez supra, p. 141 .
•' C. Th., 12, 19, 1. 2 (400) : qui curiae vel collegio vel burgis ceterisque
corporibus — servierit.
* C. Th., 6, 30, 1. 16 (399) : qui nullis suit corporibus obligati.
De mémo, C. Th., 12, 1, 1. 179, § 1 (415) : nulla veterum dispositione
ullius corporis societate conjunctos curiae atquc coUegiis singularum
urbium volumus subjugari.
•' Ce qui a conduit Godefrov à cette opinion, c'est que les corporati
Urbis Romae sont attachés à ce service et à d'autres de la capitale. Il a
cru que les corporati des provinces devaient être de la même nature.
( 464 )
Home et de Constantinople, des naviculaires, de bateliers flu-
viaux, peut-être d'autres professions qui desservaient Tannone,
mais ils n'existaient pas partout, ni même dans un assez grand
nombre de villes, pour que les lois puissent dire : corporati
urbium sivgidarum ^. Rien ne prouve, du reste, que corporati
1rs désigne, et, s'il ressort de quelques passages seulement que
corpus et corporati y sont employés eomme équivalents de col-
Icgium et collegiaii, il nous sera permis de croire que, partout
où corporati est appliqué à des corporations municipales, il
désigne ces mêmes colle(jiati. Or, il en est où corpus (ou cor-
porati) et colkgiinn (ou collegiati] sont employés concurrem-
ment, sans aucune nuance, pour désigner une même classe de
la population : ils ont donc la même valeur 2. Ce qui prouve
encore cette synonymie, c'est qu'on associe aux curiales tantôt
les collegiatiy tantôt les corporati, alors qu'on a évidemment en
vue une seule et même classe de la population 3.
En résumé, les corpoi^ati des villes sont les mêmes que les
collegiati ^, excepté quand le contexte prouve que les corpo-
rati embrassent tous les corps obligatoires et héréditaires.
Il nous semble évident aussi que les collegiati — nous nous
servirons de ce terme, qui est le plus usité — ne formaient pas
dans chaque ville un corps unique, distinct des collèges d'ar-
tisans et de négociants et recruté parmi ces derniers, comme
î C. Th., 10, 3, 1. o (400).
- C. Th., 6, 30, 1. 16 i399) : collegiatum propritun corpus (= collegium)
adstringat. Majorien (Nov. Major., VII, §§ 3. 4. 5) dit : collegiati et
collcgia, puis {ibid., §§ 7 et 8) : corporati, en parlant des mêmes. Cfr.
DiG., 47, 22, rubr. : De collegiis et corporibus.
"' Les collegiati sont souvent associés aux curiales. Pour les corporati,
voyez : C. Th., 13, 5, 1. 34 : ciim municipibus {= curialibus) et corporatis
ejîisdem loci. Nov. Major., VII, § 7 : curialis vel corporatus; § 8 : curiales
et obnoxios corporatos-, au § 3, après avoir parlé de curiales : De collé-
gial is vero:
^ Par exemple : C. Th., 11, 1, 1. 24 ',395) : corporati Karthaginis.
C. Th., 14, 27, /. un. (436) : corporati civitatis Alexandrinae. C. Th., 16,
% 1. 42 (416).
( 16o )
l'ont soutenu kulin ol liuiubort •. Nous croyons que les colle-
(jiati sont précisément les membres de ces collèges divers (jui
existaient dans toutes les villes avant le IV*' siècles et dont les
membres étaient soumis colleelivemcnt à des charges spé-
ciales -. Kulin oppose à cette opinion certains passages qui ne
sont pas concluants. Il est possible, en effet, que certains
services, tels (jue la conduite des animaux du fisc, aient
incombé à tous les coUeijiali d'une ville indistinctement 3^
qu'à Carthage tous les corporati aient dû fournir à bas prix
les matières premières aux manufactures impériales de celte
ville 4, que les corporati c'wiiatis Alexandrinae aiejit eu ù faire
en commun le curage du Nil, dont Théodose le Jeune les
dispensa en 43G s, sans qu'on puisse inférer de \\ que les
' KuHN, Die stâdl. Verfa.ss., I, pp. 79-82. 249. 283 elpassim. Humbert,
Dict. de Daremberg, s. y. Artifices. Voyez, par exemple, Kuhn, p. 249 :
1)1 diescm Falle wïirde es sich erklàren, dass die Collegiati von den Collé-
gien dey llandwcrker geschieden waren.
'^ Gebhardt et Madvig ne se prononcent pas. Le i)remier dit (p. 8) :
Jch glaube cnich, dass es kein Zufali ist, wenn in den Municipien ausser
den Curien iindden ratliselhaften Collegiati Kôrperschaf'ten mit lebenslàng-
licher und erblicher Mitgliedschaft nirgends erwiihnt werden : entweder
haben keine solche existirt, oder sie haben eine sehr untergeordnete Rolle
gespielt; an ihrer Stelle waren die Curien einmal da. — 3Iadvig, trad.
MoREi., III, p. lOi, dit : « On ne saurait dire quel rapport pouvait exister
entre ces corps de métiers obligatoires et les anciens collèges libi-es. >•
"■ (\. Th., 11, iO, 1. i (369) : Nullum autem, qui caupona vel propola
vel tabernaria lucriim familiare sectetur, cum animalia, quibus prose-
cutio debeatur, advenerint, si collegiati numéro impares videbuntur, ab
hoc obsequio (immunem) esse patiatur (scil. Praefectus Praetorio). Melius
enim est, ut oliosorum sit ista sedulilas, guam ip.^as quoque perdat urh.'s
tristis abduclio rusticorum. L. 2 (370; : Non ignoramus ... hune esse
morem, ut, quoties impares videntur, qui (e) prosecutionis officio {sunt),
majore animalium numéro repente venicnte, tabernariis oppidorum hoc
injungatur obsequium. Il s'agit de labernarii, qui sont otiosi^ c'est-à-dire
libres de tout service public {qui lucrum familiare sectetur).
' C. Th., H, i, 1. 24 (39o) : Textrinis vel gijnaeccis ex mure a corporatis
Karthaginis species solitas praestari cognovimus.
■■' C. Th., 14, 27, 1. 2 (436) : corporatos civitatis Alexatulrinae repur-
gandi fluminis onere liberamus.
( 166 )
collegiati ou les corporali de ces villes ne formaient qu'un
seul corps, n'ayant que des charges communes. La conduite
des chevaux du fisc jusqu'à une ville voisine était un service
imposé peut-être ù tous les collèges, et cela s'expliquerait
parce qu'à un moment donné, il fallait un grand nombre
d'hommes; mais chaque collège pouvait avoir en outre son
service spécial i. Le curage du Nil était une charge parti-
culière aux corporati d'Alexandrie, comme la livraison des
matières premières était une charge spéciale de ceux de Car-
thage; des circonstances locales expliquent ces charges que ne
subissaient pas les collèges des villes non situées sur le Nil ou
dépourvues de manufactures impériales. Kuhn s'appuie encore
sur ce que Libanius raconte d'Antioche "^. A l'époque de ce
rhéteur, sous Julien, il y avait à Antioche douze cents curiales,
divisés en deux sections égales : les uns supportaient les frais
des services publics; les autres étaient à leur disposition pour
les travaux manuels 3 et correspondaient, dit Kuhn, aux col-
legiati de l'Occident qui, eux aussi, accomplissaient certains
services publics sous l'autorité des curiales. Mais en supposant
que les six cents curiales d'un ordre inférieur aient réellement
remplacé à Antioche les collegiati des villes latines, on ne peut
en tirer aucune conséquence sur l'organisation de ceux ci.
^ On peut expliquer autrement les mots de Valentinien : si collegiati
numéro impares videbuntur (C. Th., 11, 10, 1. 1). Peut-être ne s'agil-ii pas
ici de tous les collegiati de la ville, mais seulement des membres du
collège chargé de cette corvée, par exemple du collegiumjumentariorum.
C'est ce qui explique qu'à certains moments leur nombre pouvait être
insuffisant. Dans la loi 2, ils sont appelés : qui {e) prosecutionis ojpcio
(sunt), ce qui semble indiquer un collège spécial. Cfr. Wallon, III,
]). 168, n. 5. La défense d'imposer ces corvées à des provinciales ou
rustici était conforme à une loi de Dioclétien (Cod. Just., XI, 5") (54),
1. 1).
2 Kuhn, Op. L, I, pp. 247-248.
•■' Libanius, éd. Reiske, vol. II, p. 527, 8 : rjv, ô't'fjv tj [3ouXt) -oXÀt] t'.s,
à'vSpeç e^axdatou Outoi |a.èv ÈXeiTOupyouv zoic, oôatv, sxcpot ôè ToaoÛTOt xo
xeXsudfxevov ettoiouv xô<.c, atofxaaiv.
( Ii-T )
L'Occident latin ditlV'i-ait trop de l'Orient grec. Du reste, les
textes sont trop clairs. Plus d'une fois, il est parlé des collegia^
et non du collegium d'une seule (;t même ville. Théodose n'au-
rait pu dire que les gens libres de tout lien devaient être
incorporés dans la curie ou dans les collèges des villes, si les
collcginti n'avaient formé plusieurs collèges distincts i. Deux
inscriptions sont aussi concluantes. Après une invasion bar-
bare, le peuple de Bénévent élève une statue h un personnage
qui avait contribué au relèvement de la ville, et il lui décerne
le titre de reparator colleijiorum -. A Anxanum, Antonius Jus-
tinianus, gouverneur de la province, fit atlicher les noms des
décurions et des membres des collèges : [nomin^n tam decu-
rionum quam etiam colle(jia[toriim collegiorum olimiiimi publiée
incidi praecepi 3. Nous croyons inutile d'insister sur ce point;
ce que nous dirons plus loin prouvera à l'évidence que les
collegiati n'étaient autre chose que ces collèges d'artisans et de
négociants, libres autrefois, maintenant asservis, que nous
avons vus se multiplier partout au H'' et au III^ siècle 4.
' C. Th., 12, 1, 1. 179, .^ 1 : vacantes — curiae atque collegiis
singularum urbium volumiis subjugari. Curia est au singulier et collegia
au pluriel. De même, Nov. Major., VII, § 2 : collegiis deputenhir ; § 4 :
collegiis applicetur; § n : collegiis dcputetur (aux collèges de leur ville).
Voyez au contraire C. Th., 12, 19, 3 (400) : ne passim vagari curiae vel
collegii dcfugas patiantur (d'une curie ou d'un collège».
- C. I. L., IX lo96 et note. L'origine de l'inscription est discutée.
•■• C./.L., 1X2998 et note.
•* GoDEFiiOY semble bien de cet avis au volume V, p. 215, ad C. Th.,
14, 7, 1. 1, où il dit : « Collegiati sunt singidarum urbium corporati :
» ciijusmodi qindam recensentur l. 2 hoc. tit. vitutiarii, nemesiaci, signi-
» feri, cantabrarii. Item centonarii, dendropliori , (abri et similes. Qui
)) alterum corpus in civitatibus constituebant, cum curialibus publiée
» ministcrinm praebcntes. Quorum collegiorum provincialium passiva
)i mentio ocairrit in veteribus Inscriptionibus. » Mais il se contredit
ailleurs; vol. V, p. 303, 2* col., nous lisons : neqiw horum (scil. collc-
giatorum) opéra in artificio consistebat. Vol. V, p. 305, nous lisons au
contraire : collegiati erant quipublico manuariam aliguam artem, opérant
( 168)
Kuhn a fait une autre hypothèse, qui tombe par là même.
Ces collegiali formaient, suivant lui, un corps tiré des collèges
de négociants; on aurait donc donné ce nom à un certain
nombre de négociants, choisis dans les collèges, on ne sait
comment, et chargés seuls des services inférieurs des villes et
de TEtat. 11 en était de même, d'après lui, des corjwrali de
Home et de Constantinople. Mais les preuves qu'il allègue ne
sont nullement concluantes. Symmaque, il est vrai, appelle
corporati negotiatores les corporations vouées à Home aux ser-
vices de l'annone, des travaux publics, des thermes, des
incendies et à d'autres encore '; mais il ne veut pas dire par
là qu'on les recrutait parmi les negoliatorcs. 11 leur donne ce
nom parce que leurs membres appartenaient à la classe des
négociants soumis au chrysargyre, qui comprenait tous ceux
qui faisaient un négoce quelconque ou exerçaient une profes-
sion mercantile. Ailleurs on voit que les pompiers, les fos-
soyeurs et les chauffeurs des bains sont recrutés dans d'autres
corporations; mais les pompiers et les fossoyeurs, auxquels
nous pouvons ajouter les parabolani d'Alexandrie, clercs voués
au soin des malades, faisaient exceplion. Us n'exerçaient pas
un métier, et pour remplir leur oftice il ne fallait pas des
ouvriers spéciaux -. Quant aux chauffeurs des bains, ce fut
et ministcriinn praebebant. Vol. V, p. 158, 2^ col. : collegiati erant ferme
sacris desserventia collegia. Vol. V, p. 303 : e plèbe porro alii artifices ...
fuere, alii corporatif alii collegiati. — Dlruy {Hist. des Rom., Vil,
p|). 250-251 — éd. ilL, pp. 192-193 1 admet que les collegiati sont les col-
lèges d'artisans exerçant librement leurs métiers, et accomplissant les
corvées imposées par les curiales. 3Iais il distingue entre les collèges
riches, tels que les nautes de Lyon, et les gens des petits métiers. Ces
derniers auraient seuls été voués aux bas otlices des cités. Rien ne
justifie cette distinction. — Herzog, II, pp. lOOi-1005, admet que ce
sont les anciens collèges libres : Allmiihlig legt die Verwaltung auch auf
die Municipalverbande ihre schwere Haml, in demselben Gang luie in der
Hauptstadt.
» SvMM., Relat., U.
2 Voyez supra, pp. 127-132.
( 169)
dans (les circonstances spéciales ({u'iin jour leur collège fut
complété par des membres tires du corpus naviculariorum et de
certains miiiuscula corpora, contrairement h une règle formelle,
qui défendait de priver un collège de ses membres au profit
d'un autre K Kuhn cite encore les suarii, que Ton aurait
recrutés dans les ordines qui suariam faciunl; mais nous avons
vu que c'est une erreur-. Entin, Valentinien I*^*^ défendit un jour
d'imposer aux paysans la conduite des animaux du fisc; son
but était de ne pas entraver l'agriculture. Si les collefjiati tenus
à celte corvée ne sufîisaient pas, il fallait leur adjoindre les
taverniers, les revendeurs et les boutiquiers « vacants ou
oisifs », c'est-à-dire libres de toute charge •^. Kuhn en infère
que les collediati étaient recrutés dans ces classes, puisqu'on
les complète au moyen d'elles en cas de besoin. On ne
peut en conclure qu'une seule chose : c'est que ces classes
devaient passagèrement participer à cette corvée, parfois
imprévue et pressante, quand les collcdiati, auxquels elle
revenait, n'étaient pas en nombre suliisant. Nous dirons
plus loin comment on recrutait les collegiati des villes et
les corporati de Rome ^ et nous verrons qu'on ne les
tirait pas de prétendues corporations qui auraient existé à
côté d'eux, sans que les textes prennent jamais soin de
faire une pareille distinction, qui aurait pourtant semblé néces-
saire s.
Ni les inscriptions, qui deviennent de plus en plus rares
depuis Dioclétien, ni les Codes, qui ne contiennent guère que
des règles générales, ne permettent de dresser une liste des
collèges municipaux au IV^ siècle. Voici l'énumération de
* Xoyez supia, pp. 125-126.
- Voyez aupra, p. 92.
•• C. Th , 11, 10, 1. 1 (369) et 1. 2 (370;. Voyez supra, p. 165, n. 3.
^ Voyez infra, chap. Il et III.
^ Nous avons réfuté cette opinion de Kuhn plus longuement dans la
Revue de Vlnstr. publ. en Bdfj., 1892, i)p. 233-237.
(170)
ceux qui sont expressément mentionnés à cette époque ou plus
tard encore :
1. Collegium fabrorum, ouvriers du bâtiment, dans toutes les
villes 1.
2. Fabii siibidiani, à Cordoue, en 348 2.
3. Centonarii, à Forum Popilii, en 367, sous Valenti-
nien 1" 3, et dans toutes les cités ^.
4. Dendrophori, dans toutes les villes ».
5. Corpus saponariorum, fabricants de cosmétiques, parfu-
meurs, à Naples, sous Grégoire le Grand, en 599 6.
6. Pistores, boulangers, à Sititis (VIII 8480), sous Valen-
tinien, Théodose et Arcadius.
7. KâTïYiXo',, à Alexandrie, au VI^ siècle ".
8. Honorius fait rechercher collegiatos, ut vitutiarios, neme-
siacos, signiferos, cantabi^arios, et singularum urbium corpo-
ratos 8.
1 (]. Th., 14, 8, 1. 1 i3l5) : /// (juibusciunque oppidis dendrophori
fuerint, centonariorum atqiie fahronun collegiis amiectantur, quoniam
haec corpora fr&iuentia hominum midtiplicari expediet. C. Th., 18, 1,
1. 10 : les figidi et fabri doivent être exemptés de la lustralis collatio
lau vicaire d'Italie). Fabri et figuli ont ici leur sens général : d'un côté
les ouvriers qui travaillent les corps durs, de l'autre ceux qui façonnent
une matière molle. Voyez C. Julliân, Dict. de Saglio, s. v. fabri. — Dig.,
32, 93, 4 : legs à un fabroriim corpus. Dig. 50, 6, 6 (5), lt2 : fabrorum
corpus. C. I. L , III 1981 : coll. fabrutu Veneris, à Salonae, sous Con-
stance; voyez les autres inscriptions de ce collège. Dans beaucoup de
villes, les inscriptions prouvent l'existence des coll. fabr., cent., dendr.,
au moins jusqu'à la fin du III"^ siècle. Dans le C. Th., 12, 1, 1. 62, il s'agit
àViColl. fabrorum de Rome. Voyez C. Jui.liax, /. /.
2 II 2211.
•' X 4724.
i C. Th., 14, 8, 1. i (315) : voyez supra, n. 1.
•• C. Th., 14, 8, 1. 1 (315). 16, 10, 1. 20, ^ 2 (415).
" Gregor., Epist., IX, 113, éd. L.-M. Hartmann {Mon. Geim. hist.).
' Leontios, Yita Johann. Eleemon., XV.
« C. Th., 14, 7, 1. 3 (412). Voyez supra, p. 138.
( 171 )
9. Scaenici et scaenicae i, artistes dramatiques de tous
genres, dans toutes les villes, notamment en Afrique - et dans
l'Orient 3.
10. Aurigae, les cochers du cirque, notamment en Afrique *
et en Orient ^, comme en Italie ♦».
Malgré la pénurie de nos renseignements, nous croyons
pouvoir affirmer que la plupart des collèges que nous avons
rencontrés avant le IV^ siècle, existaient encore; mais dans les
provinces, comme à Rome et à Constantinople, ils étaient
tyrannisés et leur misère était si grande qu'ils n'élevèrent plus
guère de monuments : c'est ce qui explique la rareté des docu-
ments épigraphiques.
Tous les métiers et tous les négoces formaient-ils des corpo-
rations? Et toutes ces corporations étaient-elles héréditaire-
ment attachées à un service public?
Quelques passages semblent faire croire que la première
question doit recevoir une réponse affirmative. « Que tous
ceux, dit Valentinien I^"" en 372, qui se livrent au négoce, soit
pécheurs de pourpre, soit marchands de n'importe quelle
corporation, soient tenus au payement de l'or exigé des
négociants ". » Comme tous les négociants étaient soumis à cet
impôt odieux, on peut conclure de ce texte que tous étaient
membres d'une corporation. Quand on considère la situation
économique et sociale de l'époque, on conçoit difficilement
qu'un artisan ou négociant ait pu rester isolé. Duruy n'hésite
pas à affirmer que tous les artisans de l'Empire se réunissaient
' GoTHOFR., volume V, p. 409.
2 C. Th., lo, 7, 1. 2. 3. 9. 13. Voyez supra, p. 136.
■• Ibid., 1. 10. 11 et 8, 7, 1. 21. 2-2. Voyez .supra, pp. 136-137,
' C. Th., 15, 7, 1. 3 (376). Voyez supra, p. 137.
■- C. Th., 15, 5, 1. 3 (409) : aurùiae cives; 15, 7, 1. 21.
••• C. Th., 15, 7, 1. 6 (381) et 15, 10, 1. 2 (38J).
- C. Th., 13, 1, 1. 9i372).
{ 172 )
dans les villes en collèges i. Wallon et Levasseur sont plus
réservés : le premier parle de corporations que la loi avait en
général créées pour toutes les industries - ; le second dit : « les
artisans élai\eni pi^esque tous membres d'un collège » 3. H me
semble qu'ils sont dans le vrai. Il y avait des artisans et des
marchands non incorporés. Quand Valentinien I^"" ordonne
d'imposer la conduite des animaux du fisc à celui qui caupona
vel propola vel tabernaria lucrum famïliare sedetur, à défaut de
coUegiati, il est évident qu'il s'agit de cabaretiers, de reven-
deurs et de boutiquiers non incorporés; il les qualifie même
expressément d'otiosi, c'est-à-dire de gens libres des corvées
ou charges publiques ^. En 337, Constantin exempte de toutes
les charges trente-cinq professions libérales ou industries
d'art, exercées dans toutes les villes s. Formaient-elles des
collèges? Peut-être pas toutes, mais le motif que donne l'empe-
reur prouve qu'il voulait y introduire l'hérédité : l'immunité
devait mettre ces artifices en état de se perfectionner eux-
1 Hist. des Rom., VII, pp. 250-251, éd. illustrée, pp. 192-193. Fustel
DE CouLAJS'GES {Hlst. des inst. polit, de Vanc. France, I, p. 255) dit aussi :
« Les artisans, dans chaque métier, formèrent une corporation. » Les
textes qu'il cite ne prouvent rien; ainsi Gaïus (Dig., 3, 4;, i) dit que les
naviculaires ont des collèges autorisés dans les provinces, sans parler
des autres professions.
2 Wallon, III, p. 2^8.
'" Levasseur, Hist. des classes ouvrières, 1, j). 71 : « Ces artisans étaient
presque tous membres d'un collège. Il serait sans doute téméraire
d'avancer qu'il y eut autant d'associations ouvrières que de métiers
distincts : bien des professions devaient, dans les villes secondaires,
être réunies sous un même patron et dans une même communauté ;
quelques-unes même devaient échapper à l'association. Néanmoins, en
Gaule comme dans le reste de l'Empire, le collège était de règle géné-
rale ; la grande majorité des artisans devait vivre sous sa loi. »
i G. Th., 11, 10, l. 1 (369) et l. 2 (370). Voyez supra, p. 422, n. 2.
■• G. Th., 13, 4, l. 2 (337) = God. Just., X, 64, 1 : yer singulas civitates
morantes. On trouve au Digeste, 50, 6, 7 i6), une autre liste de métiers
exemptés, mais ce sont des métiers militaires.
( 173)
mêmes dans leur profession et d'y iuslriiire leurs enfants <.
En 415, Honorius ordonne d'attribuer aux curies et aux col-
lèges des villes les gens « vacants et oisifs », c'est-à-dire non
enchaînés à un corps par une loi de ses prédécesseurs "K 11 y
avait donc encore des gens vaca)its, libres de tout lien cor-
poratif; mais il est clair aussi que de pareilles mesures
devaient avoir pour conséquence de les rendre de plus en
plus rares, et ils devaient depuis longtemps former le petit
nombre.
D'autre part, tout collège était attaché au service public.
En 413, Honorius parle de cl^ux qui ont mérité le rang de
comte du premier ordre par l'exercice d'un métier quelconque
au profit de l'État ou de la ville 3. Le passage n'est pas décisif,
et l'on n'en trouvera peut-être pas de catégorique. Mais nulle
part les lois ne distinguent les collèges publics des collèges
privés. « Dans tout métier publiquement constitué (la loi ne
)) distingue pas entre les corporations^ on était forcément,
» héréditairement retenu ; dans tout métier qui ne se ratta-
» chait pas à un corps, on était, comme oisif et vacant, spécia-
» lement destiné au recrutement des autres ^. » Ainsi s'exprime
Wallon. Levasseur dit de même : « Quelques métiers échap-
)) paient peut-être à la loi des corporations... iMais, en tout
» cas, les exceptions étaient rares. L'artisan ne pouvait avoir
» une place dans la société et trouver protection et sûreté
* Ut et ipsi peritiores fieri et filios erudire po.ssint. Cfr. DuiiiY, VII,
p. 191 (249).
- C. Th., 12, 1, 1. 179, § 1 : vacantes quoqiie et nulla vetennn disposi-
tioneullius corporis societate conjunct' s curiae atque collegiis siugularinn
urbium volumiis suhjugari.
'" C. Th., 6, 20, /. un. (413) : ///, ([nos aut vulgaris artis rujuslibct
uhsequium ... Le mot obsequiuni ne désigne pas seulement la pnitiiiue
d'un métier ^Wallon, III, p. 237 \ mais l'exercice d'un métier au profit
de l'État ou de la ville. Plus loin, du reste, cet obscquiiim est qualifié de
militia. Sur ces deux mots, voyez Helmann, Lexicon, et Godefrov,
tome VI, glossarium.
* Wallon, III, p. 249.
(174)
» qu'en se faisant membre d'un collège. Il est vrai qu'i/
» tombait en même temps sous la main de l'État, mais c'était
)) une loi commune à laquelle n'échappaient ni petits ni
)) grands, et la servitude de tous devait, sinon rendre à chacun
» sa chaîne plus légère, du moins ne pas lui laisser le regret
)) d'une condition meilleure^. )>
En quoi consistait cette servitude ? Quelles étaient les charges
des collèges? C'est une question plus obscure encore. Nous
allons tâcher de l'élucider, si possible, en commençant par le
Haut-Empire.
Rôle des collèges municipaux du Haut-Empire.
Avant l'Empire, nous ne savons rien du rôle public des cor-
porations dans les cités italiennes et provinciales; c'est à peine
si nous connaissons l'existence de quelques-unes-. Dès le pre-
mier siècle de notre ère, la lex Julia leur fut appliquée et elles
ne purent se former partout qu'avec l'autorisation de l'État, qui
conserva toujours la main haute sur elles, comme sur toute
* Levasseur, I, pp. 69-70. Cohn (p. 99) dit : Dass neben diesen Verhin-
dungen zu Justinians Zeit freie Vereinigitngen bestanden, ist nicht
nachweisbar ; sie wâren uberhaupt nicht geduldet worden. — Willems,
Droit public, 5^ éd., p. 635, dit : « Les métiers soumis à la corporation
héréditaire semblent avoir varié suivant les villes. » Cela est admissible,
en ce sens que les mêmes métiers n'étaient pas exercés partout. Mais
nous croyons que partout la presque totalité des métiers étaient incor-
porés. — Quant à ces corporations indépendantes, à qui l'utilité de leur
métier avait suffi autrefois pour obtenir l'autorisation dans les villes, il
n'en est plus question. — Durly distingue entre métiers riches et
pauvres; voyez supra, p. 167, n. i. — P. Allard {EscL chrét., p. 450)
admet qu' « outre les collèges voués aux services publics, on comptait
un grand nombre d'autres corporations composées de commerçants,
d'industriels, d'artisans unis librement avec l'autorisation et sous la
surveillance de l'État ». Il ne donne pas une seule preuve.
2 Voyez le premier volume, pp. 88-89.
( 175 )
Tadministration municipale. Mais s'il est vrai de dire que l'État
seul intervient dans leur institution et parfois dans leur orga-
nisation intérieure*, il n'en est pas moins certain qu'elles
étaient, dans toute la force du terme, des corporations commu-
nales, attachées à un municipe déterminé, autorisées dans les
limites de son territoire-, intérieures à la curie et soumises à
elle pour l'accomplissement de leur service public. Il nous
sera bien difficile de faire connaître ce service dans ses détails ;
mais répigraphie nous fournit des faits nombreux, qui nous
permettront au moins de mettre en lumière leur caractère
général pendant tout le Haut-Empire. Pour quelques-unes, elle
nous permettra même de sortir des généralités.
Et d'abord, le nom officiel que portent ordinairement les
corporations des cités prouve leur caractère exclusivement
municipal et le lien qui les unissait à leur ville : elles accolent
à leur nom professionnel celui du municipe et elles le font
de différentes manières 3.
Dans une première formule, le nom de la ville est au génitif
ou au locatif; en voici les variantes : collegiiim fabrum coloniae
Apul[ensis), dendropliori Osliensium, et en Gaule : utriclarius
corporatiis c[oloniae) J{uliae) P{aternae) A{relatensis), corporatus
coloniae Arel{atensis) fabrorum lignuariorumy faher tignuarius
corporatus Arelate, ou simplement : faber tignuarius colonia
J. P. Arel(ate). Ce génitif de possession ou ce locatif, ajoutés
au nom d'un collège, expriment l'appartenance légale de ce
» C. JuLLiAN, Dict. rf^DAREMBEUG, S. V. fabvi, II, p. 9o6.
2 Th. Mommsen, Si.-R., Il-, p. 851 = IP, p. 887 : Sammtliche ïiberhaupt
zugelassene Collégien iverclen als communale organisirt und auf die
Grenzen einer bestimmten Stadtgemeinde besckrânkt. Le même, Hermès,
VII, p. 312 : Aile Gilden, soweit sie ûberhaupt Corporalionsrecht haben,
lelinen sich mit recfulicher Nothwendigkeit an ein stàdtisches Gemein-
wesen an. Cfr. ibid., p. 310, n. 1. C'est ce que Schulten conteste [De
conientûnis civiiim romanorum, pp. 117 sqq.) ; mais il faudrait prouver
que les associations qu'il cite sont de véritables corporations, et des
corporations autorisées.
5 On trouvera tous les exemples de ces formules dans nos Indices.
(176)
collège à la ville et sa qualité d'institution communale.
i\ous rencontrons bien plus souvent l'adjectif tiré du
nom de la ville : dendrophori Ostienses, corpus dendrophorum
Ostiensium, et en Gaule Narbonnaise : centonarii corporati
Massilienses, corporatus fahrorum lignuariorum corp(oriii) Are-
l[atensis). Cette formule a le même sens que la première; ces
artisans ne veulent pas dire seulement qu'ils sont d'Ostie, de
Marseille ou d'Arles, mais que leurs collèges font partie inté-
grante de ces villes. En effet, cette formule alterne avec la pre-
mière et les boulangers d'Ostie s'appellent tour à tour : corpus
pistorum coloniae Ostiensis et corpus pistorum Ostiensium ^ .
Une troisième formule, moins fréquente, a un sens diffé-
rent; elle est formée du mot consistere suivi d'un nom de lieu,
par exemple : centonarii Luguduni consistentes ou qui Lugu-
duni consistunt. La valeur de cette locution a été établie par
Th. Mommsen, qui a prouvé que le mot consistere avec un nom
de lieu indique la résidence de fait dans une ville [Luguduni
consistentes), et non l'appartenance légale résultant unique-
ment de la naissance [Lugiidunenses). Il convient sans doute
aux citoyens nés dans la ville et y résidant, qui sont à la fois
' Th. Mommsen dit aussi : Das Wort consistere bezeichnet ... die
factische Dauer der Aufenthaltes, wogegen die rechtliche Zuge-
hôrigkeit zu dem Orte regelmiissig durch den Genitiv des Ortsnamens
oder diirch das gleichwertige Adjectiv ausgedrukt wird. Korrespondenz-
hlatt der west. Zeitschr., VIII, 1889, p. 19. V^oyez encore : Mâué, Die
Vereine, p. 48; Philologiis, N. F., I, 3 (1888), pp. 491498; Praef.
fahrum, p. 167. Hirschfeld, Gall. Stud., III, p. 19 (2o5). Liebenam,
p. 231, II est à remarquer que les collèges laissent souvent cette indi-
cation de côté ; le même collège la donne et l'omet tour à tour : on ne
peut donc rien conclure de son absence. — Le locatif et l'adjectif sont
employés concurremment par les [abri tignnarii d'Ostie. XIV 105. 160.
290. 370. 371 : coll. fabnmi tign. Ostis ; XIV 298. 299. 330. 374. 430 :
coll. fabriim tign. Ostiensium. A Altinum, on trouve les deux formules
réunies : collegia fab. cent, dendr. Feltriae itemque Beruensium (V2071).
Voyez nos Indices. A Ariminum, XI 377, il faut lire : collegia fabr.
cent, dendr. urb{iiim) juridicatus ejus, et non : urb[anorwn). Voyez le
premier volume, p. 310.
( 177 )
Lugudunenses et Lugudwù consistentes ; mais, comme il va sans
dire qu'ils y demeurent, il est inutile de l'exprimer, et comis-
tentes n'est employé que pour désigner le séjour de fait, là où il
n'y a pas appartenance légale à une cité. Voilà (juel est son sens
technique ^. C'est ainsi qu'il est suivi d'un nom de lieu qui
n'est pas relui d'une cité : vet{erani) et cives l{{omani) consds-
tentes) ad canab{as} legiionis) V Mac{edonicae)'^. En second lieu,
il peut être suivi du nom d'une civitas pour désigner la rési-
dence d'étrangers qui sont allés s'établir dans une autre ville
que leur ville natale, mais n'ont pas cessé d'être citoyens de
leur municipe d'origine; il oppose le séjour de fait à la
qualité de citoyen d'une ville, donnée par la naissance {origo)
et indiquée généralement par l'adjectif : Rus{gunienses) et
Rusg{uniis) consistentes 3. Le plus souvent on le trouve appli-
qué aux marchands romains établis dans les provinces : ils
y avaient le siège de leurs affaires, ils y résidaient, et quand
le lieu de résidence était un municipe, ils y avaient leur
domicile et y devenaient incolae ; ou bien, ils n'y avaient
qu'un simple établissement, tel qu'un atelier ou un dépôt de
marchandises ^. C'est aussi dans ce sens que les marchands
asiatiques de Beryte, établis et associés à Pouzzoles, s'appel-
' ÏH. MoMMSEN, Hermès, VII, p. 309 : Consistere bezeichnet technisch
den bleibenden Aufenthalt in einem Orte oder in einer Gegend, mit
welchem die Heimallisberechtigung sicli nicht verkniipft.
2 III 6166.
•■> VIII 9250.
^ Ces derniers n'étaient soumis qu'à la juridiction locale; les incolae
étaient admis aux honneurs et soumis aux charges. Voyez Ulpien, Dig.,
5, 1, 29, 2. Th. Mommsen, Hermès, VII, p. 310, n. 4. Kurrespondemblatt
der ivestd. Zeitschr., VIII, 1889, pp. 19-22. Schulten, De conveniibus
civ. rom., pp. 102-104. — Kounemann {De civibus rom. in proviiwiis
consistenlibus, p. Il) distingue mal les incolae des consistentes. — La
locution qui negotianliir, negotiantes, TrpaYJJ.aTeuofAEvoi, èpYaÇo[jL£voi,
suivie d'un nom de lieu, prend le même sens. Sur les marchands romains
lésidant dans les provinces, voyez 3ioMMSEN, Schulten et Kornemann,
0pp. IL
Tome L, vol. II. 12
(178)
lent : Cultores Jovis Heliopolitani Berytenses, qui Piiteolis
consistimt •.
Dans les noms des corporations professionnelles, consistere
est parfois employé, suivant son sens technique, là où il ne
peut être question d'appartenance à une cité, mais seulement
de résidence. Cela arrive d'abord dans les dénominations où
consistere est suivi du nom de la schola ou du lieu de réunion :
coUegimn fabriim soliarium baxiarium, qui consistunt in scola
snb theatro Ang{usti) Pompeian[o), et peut-être aussi dans : nego-
tiatores vinarii Luguduni in kanabis consistentes, les canabae
étant à la fois l'entrepôt et le lieu de réunion de ce collège '^.
Cela arrive encore dans les dénominations où consistere est
suivi du nom du viens dans lequel le collège a sou siège et
son local. Les bateliers de Vérone qui faisaient le négoce sur
le lac de Garde, demeuraient, pour exercer leur métier, à
Arelica, dépendance {viens) de Vérone, et ils y avaient sans
doute leur lieu de réunion ; c'est pourquoi ils s'appellent :
collegium nautarum Veronensiiim Arilieae eonsistentium, indi-
quant à la fois la cité dont ils font partie et le lieu où ils rési-
dent 3. De même les centonaires de Plaisance avaient leur
siège dans un vicus de cette ville, à Clastidium, on ne sait pour
quelle raison, et ils s'intitulaient : collegium centonariorum
Placentinorum consistentes Clastidi ^.
» X 1634. Cfr. X -1759 : Coryus Heliopolitanorum. Il faut comprendre
de même : Ga[lat]ae consistentes miiniciyi{d), à Napoca, III 860; cfr. III
1394, à Germisara : collegium Galatarum. Peut-être aussi VIII 5695 :
Cultores qui Siyus consistunt.
2 Nous avons déjà vu que le local ou lieu de réunion est parfois lui-
même indiqué par le mot consistere ou esse. Voyez le premier volume,
p. 215, notes 1 à 3. C. /. L., VI 404. 7458. 9404. Pour les marchands de
vin de Lyon, voyez le premier volume, p. 218, n. 3, et inf7'a, p. 180, n. 4.
3 V 4017. Le même collège s'appelle aussi abusivement : coll. navicu-
lariorum (ou nautarum) Arelicensium, V 4015. 4016. Voyez supra,
p. 30, n. 1. Il en est peut-être de même des ratiari Voludnienses, à
Vienna {XII 2331), et des cupari Yocronnesses, à Alba Helv. (XII 2669).
*• V 7357. Les centonaires de Corne avaient leur curie ou local à
( 179 )
La forinule qui co7isisliint ou cousistentes se présente dans
une série de dénominations de collèges, où elle est suivie du
nom de la ville; ainsi les centonaires de Lyon s'appellent :
centouarii Luyitdmii consisteules, comme s'ils étaient tous venus
s'établir à Lyon. On est surpris de voir donner des noms
semblables aux négociants en vin, aux dendrophores, aux
fnbh, aux fabri lignuarii, aux utriculaires, à certains bateliers
{Conileates et Arcarii), bref à presque tous les collèges do
Lyon, puis aux areuarii do Trêves, aux focarii de Cologne et
aux bateliers de Séville i. Faut-il admettre que dans ces villes
gauloises et espagnoles la formule qui consistunt est employée
abusivement comme synonyme do l'adjectif dérivé du nom
de la ville, et indique l'appartenance à la cité, ou simplement
a l'existence légale du collège dans une ville » '^? On serait tente';
de le croire à première vue, d'autant plus que les mêmes
collèges s'appellent aussi dendrophori Lugudunenses et fabri
tignuarii Lugudunenses. Ou bien faut-il conclure que ces col-
lèges étaient composés d'étrangers ou du moins que les étran-
gers y formaient la majorité, de sorte que leur vrai nom
devrait être, par exemple : dendrophori Lugudunenses et Lugu-
duni cousistentes 3, dendrophores lyonnais et dendrophores
Cliviiim, V 5446. 5447. Cfr. ibid., p. o6o. Hirschfeld, Gall. St., III,
p. 18 (234), croit qu'ils faisaient l'office de pompiers à Clastidium et à
Clivium, comme à Plaisance et à Come. — Th. 3Iommsen explique de
même : hastiferii sive pastor{es) cousistentes kastello Mattiacoriim ,
appelés ailleurs hastiferi civitatis Mattiacorum. Le castellum serait
une dépendance de la civitas Matt. {Korresp., l. t., pp. 24 sqq.) — 11
en serait de même des fabri lign. qui foro Segusiavorum consistunt
(Or. -H., 5216). Ce forum serait un bourcj de la civitas Segusiavorum.
J II 1183. Brambach, 770. 2041. Pour Lyon, voyez Allmer, Musée de
Lyon, vol. II.
2 C'est l'opinion de Maué, Die Yereine, p. 49. Philologus, 1888,
pp. 493-498, et KorrespondenxU. der West. Zeitscfir., VIII, 1889,
pp. 103-104. Maué explique ainsi le sens de consistere employé par
ces collèges : « als Collcg mit staatlicher Genchmigung seinen Sitz
an einem Ort liaben « (Philologus, l. L, p. 495).
3 Comme Rusgiunienses) et Rusg{uniis) consistentes (VIII 9250).
( 180 )
résidant à Lyon ? Chacune des deux formes simples, appli-
quée à tout le collège, serait une abréviation inexacte, mais
explicable. Ce qui donne du poids à cette seconde interpré-
tation, proposée par Mommsen 'i, c'est d'abord le sens con-
stant (lu mot consistere; ensuite, il faut remarquer qu'il s'agit
de villes gauloises et espagnoles, surtout de Lyon, cette
métropole commerciale de la Gaule, où les étrangers affluaient
pour faire le négoce; il ne faudrait pas s'étonner si, à la fin
du 11*^ siècle '^, le commerce avait été principalement entre
les mains de gens venus du dehors. L'existence d'étrangers
parmi les bateliers du Rhône et de la Saône est attestée, et
il devait y en avoir aussi parmi les Condeates et Arcarii '^.
Quand les marchands de vin s'appellent negotiatores vinarii
Luguduni in kanabis consistentes 4, ils indiquent deux choses
différentes : la ville où ils sont venus s'établir pour faire le
commerce [Luguduni), et leur lieu de réunion ou le quartier
où étaient situés leurs entrepôts [in canabis). Le vin lui-même
venait du reste de l'étranger, principalement d'Italie s : quoi
d'étonnant que les marchands ne fussent pas nés à Lyon,
mais dans les différents pays qui fournissaient le vin et où il
était transporté? Une inscription nous fait connaître un mar-
chand de vin qui était citoyen de Trêves <>. Il en est de
^ Korrespondenzbl., 1889, p. 23. Schulten, Op. c, p. 3, n. 1. C. Jul-
t.iân, Dict. de Daremberg, s. y. fabri, p. 9oS, n. lo. Contra : Maué,
PlùlologiLs, 1888, p. 492. Korrespondenzbl., 1889, p. 103.
- C'est l'époque de ces inscriptions.
■^ Allmer, Musée de Lyon, II 172. 177 178. 180, et p. 465.
5 Allmer, /. L, II 171. C. L L., VI 29722. — Ils se contentent parfois
de la première indication : negotiatores vinari Liigud. consistentes
(Allmer, II 171. 172. 173) ou de la seconde : [neg. vijnari C[anabenses]
ibid., II 174. Cfr. 176). Sur l'emplacement de ces canabae, voyez le
])remier volume, p. 218.
s DiOD., V, 26. Voyez Schulten, Op. /., p. 102. Allmer, II, pp. 4o0 et
suivantes.
'• Allmer, /. L, II 172-173 : [eivi] Trevero, 7i[egotiat]ori vina[rio et
a rt] is creta [riae Lug . ] consis t [en ti] .
( 181 )
iiKMne (les autres collrycs professionnels; nous rencontrons
parmi les ulriculaires un Viennois, un Veliocasse et un
Séquanais, naturalisés ou non, à côté d'un citoyen de Lyon ' ;
parmi les fabricants de saies, il y a un Kèmc -; parmi
les charpentiers, il y a un Trévire •^, et un autre qui se dit
expressément : cousisteus Luffudiiui, pertinens ad ('oUc(jium
l'abrum, ce qui semble signifier que tous lus fabri n'étaient pas
des consistentes Luguduni 'k Dans toutes les professions
exercées à l^yon, il y avait des étrangers •>, et ce qui est fort
remarquable, c'est que le même homme cumulait souvent
deux, trois ou quatre négoces et faisait partie de plusieurs
collèges. Les sévirs augustaux étaient également pris en
grande partie parmi ces négociants étrangers <> ; eux aussi
emploient les deux formules : seviri Aiif/wstales Luguduni con-
sistentes et seviri Augustaies coloniae lAujudunensis ~.
Sans contester le sens ordinaire de consistere, Maué a sou-
tenu que, dans les inscriptions des collèges, ce mot a souvent
un sens particulier, et désigne « Texistence légale d'un collège
dans une ville » 8. Le fait suivant semble contraire à cette
' Allmer, II 178: civis Viennensis ; 181 ; ex civitate Velocassinni
sublectus i)i numerum. colonorum Lug.; 182 : natione Sequanus, civis
Lugudanensis. Cfr. De Boissieu, p. 402, Il : civis Lugudunensis.
- Allmer, Il 183 : Remus, sagarius Lugud{imi).
5 Allmer, II 188: Treverus, j'aber tignuarius Lug. Il est aussi nego-
tiator corporis sploididissiiui (lisalpiiiorum et Trcuisalpinorinn.
^ Allmer, II, 170.
•■' Voyez Allmer, vol. III, inscrii)tions funéraires, pp. 90 et suiv.
WiLMANNS, 2498 = B. d. L, 1867, p. 204 : un Syi'lcn qui se dit ncgo-
tiator Lugudiud et prov{incia) Aguitanacica.
'■■ Allmer, II 159. 160 : domo Homu et civis Genuanicianus. Cfr. ibid.,
p. 37o.
: VI 29722. Allmer. I 54 et II pp. 375435. Schulten (p. 3, n. 1) veut
distinguer à Lyon deux classes do sévirs : ceux de la colonie de Lyon et
ceux des marchands étrangers établis à Lyon, delà me semble étrange.
— A Oslie, il y a des peregri)ii d;ms le <-(i)'pus fabnnti iiaruliiim (XIV 256.
1. 148. 185. 294).
*< Voyez supra, p. 179, n. 2.
( 182 )
opinion : c'est que Luguduni consistens est appliqué aussi bien
à chaque membre d'une corporation qu'à la corporation elle-
même. Les inscriptions disent : ceutonarius Liig{uduni) con-
sistens ^, fab.er) [îign.] Lug. cons{istens) "^, negoliator vinarhis
jAigudun{i) in canabis consistens^. Quand il s'agit d'un individu,
l'explication de Maué n'a pas de sens, et Luguduni consistens
ne peut signifier qu'une chose, à savoir que ce marchand est
établi à Lyon sans en être originaire. Or, quand Luguduni
consistentes est appliqué à tout le collège, il doit conserver le
même sens.
Nous croyons donc qu'à Lyon les marchands et artisans
susdits étaient en majorité des étrangers; c'est ce qui explique
le nom officiel de leurs collèges, qui convient, à la rigueur,
à tous leurs membres, aux citoyens de naissance comme aux
étrangers domiciliés, mais qui devait être plus exactement :
centonariiy fabri, fabri tignuarii, negotiatoirs vinarii, ulriclarii
Lugdunenses et Luguduni consistentes.
Il en était de même des charpentiers de Feurs, comme le
prouve une inscription, si elle est bien restituée par A. Allmer :
[fabri?] ou [tign. ? in Se] gusiavis n[egotiantes?] ; car negotiantes
est synonyme de consistentes ^. A Séville, les bateliers qui
faisaient le cabotage sur le Guadalquivir étaient également
étrangers; ils se donnent trois noms, dont les deux derniers
ont le même sens et sont seuls exacts : scapharii Hispalenses,
scajjharii Romulae consistentes et scapharii qui Romulae nego-
tiantur ^.
« XII 1898 = Allmer, II 162.
'2 Allmer, II 165.
s VI 29722. Allmer, II 171. 173.
i Allmer, II 189.
•■' II 1180. 1183. 1168. 1169. Scapharii Hispalenses est une abréviation.
Voyez supra, p. 30. — Il reste à expliquer : [cjoUegiwn [f\ocariorum
\consis]tentium ..., à Cologne, Bramb., 2041. Ar[en]arii comistentes col.
Aug. Treivirorum), ibid., 770. Coll. li{u)tio}i[mn quod consistit] Fale[riis],
XI 3209. Mais la nature des deux premières professions est peu connue
(183 )
Au reste, tous ces collèges, même s'ils étaient composés en
grande partie de meiidjres étrangers à la cité, étaient des
institutions comniiniales, aussi bien que les sévirs augustaux K
En eti'et, il faut admettre que ces négociants, autorisés îi forni(;r
des corporations, avaient quitté leur patrie sans esprit de
retour et qu'ils étaient domiciliés dans la ville où ils rési-
daient. Ils entraient dans la classe des incolae, admise aux
honneurs et soumise aux charges municipales. A Lyon, ces
collèges portaient un nom significatif: corjwra omnia LiKjiu-
duni) licite coeuntia. Ils n'étaient donc autorisés que dans les
limites de la cité de Lyon, et l'on ne peut croire que tous leurs
membres n'y fussent pas domiciliés. Les collèges de Lyon ne
faisaient donc pas exception : ils se rattachaient, comme les
autres, ù la colonie dont ils portaient le nom.
Quelle place les collèges occupaient-ils dans la cité? L'épi-
graphie permettra de répondre, dans une certaine mesure, à
cette question 2.
La place des collèges dans le municipe était importante et
prouve surtisamment qu'ils y jouaient un rôle otticiel, qu'ils y
formaient une classe spéciale, comme la curie, les Augustales
et la plèbe urbaine et rustique. Telles sont, en effet, les trois
classes principales de la population municipale sous le Haut-
Empire, et les inscriptions les énumèrent toujours dans cet
et la restitution de l'inscription de Nepet est peu sûre. Voyez encore :
opifices loricari qui in Aeduis consistyunt), à Autun, Bull, des Antiq. de
France, 1877, p. 199. — Mommsen pense [Wd. Korr., 1889, p. 23) que
dans plusieurs inscriptions où consistere est suivi du nom de la cité,
il peut s'agir du lieu de réunion, du siège du collège; ainsi, on pouvait
trouver utile de dire que les bateliers du Rhône avaient leur local à
Lyon. Toutefois il est probable qu'à Lyon tous les collèges emploient
consistere dans un seul et même sens. — Sur l'épithète : o'.xouuîvixo'v,
voyez le premier volume, p. 323, ligne 12.
' Bien entendu, cette idée n'est pas exprimée par la formule : cunsis-
tentes Luguduni, etc.
2 Maué, Die \creine, pp. 47-o3. Liebenam, pp. 281-284. C. Jlli.ian,
dans le I)ict. de Harembeug et Sagi.io, s. v. fahri.
( 184 )
ordre K Les collèges faisaient partie de la plèbe urbaine ; mais,
en beaucoup d'occasions, ils en sont nettement distingués, et
alors ils sont toujours placés au-dessus d'elle : ils forment,
pour ainsi dire, un ordre à part, qui prend rang immédiate-
ment après les décurions et les sévirs augustaux. L'organi-
sation de chaque collège, avec ses chefs et sa plèbe, en faisait
une véritable cité dans la cité, une petite patrie dans la
grande -. L'étroite union qui existait entre tous les collèges
de la même ville donnait à cet ordre une cohésion qui lui
assurait une place à part 3. Ce qui le montre bien, c'est que
les collèges ne se contentent pas d'avoir un patron commun
avec le reste de la ville, le patromis civitatis; ils se mettent
sous sa protection spéciale en le choisissant pour leur patron
particulier; le titre de patromis civitatis ou mwiicipi et colle-
gioriim n'est pas rare ^. Plus souvent encore on rencontre un
collège déterminé qui décerne le titre de patronus collegii
à un personnage qui est déjà patronus civitatis ».
Bien peu de leurs membres parvenaient aux honneurs
' Voyez, par exemple, IX 24-40. 3160. 3838. 5085. Indices du vol. IX,
p. 887.
- Respiiblica collegii nVxprime pas cette idée; ce mot désigne les
finances du collège. Voyez le premier volume, p. 449, n. 4 et 7.
5 On voit les collèges d'une ville agir de concert. Ils ont le même
patron : V 4484 et 7375 : patronus collegiorum omnium, à Brixia et à
Dertona; Mommsen (C /. L., V, p. 1198) croit que dans ces deux
inscriptions, il s'agit des (abri, centonarii et dendrophori. XI 5054 :
omnium corporum patronus, à Mevania. De même, à Venafrum (X 4865},
à Lyon (De Boissieu, p. 206), à Urvinum (XI 6070j ; cfr. XIV 409, où l'on
voit que Cn. Sentius Félix est patron de onze collèges d'Ostie. A Lyon,
à Carsulae et à Urvinum, ils participent ensemble à un banquet public :
XI 4589. 6033. 6071. Allmer, Musée de Lyon, II 144. A Falerio, les
collegia, quae attingunt foro pecuario, contribuent à la construction
d'une chaussée (X 5438, en 119 . Cfr. Liebenam, pp. 282-283.
i XI 5054. 6070.
- V 335. IX 665. 1682. 1684. 1685. 3836. 3837. 4067. 4894. 5439. 5653.
5835. 5836. X 451. XI 378. 379. 1059. 1926. 4086. 4580. 5054. 5416. 6014.
6070. 6235. WilmaNxXS, 2112. Muratori, 517, 3.
( 185 )
municipaux et au rang de décurions, qui étaient interdits aux
affranchis, et quand ils ont des dignitaires qui sont décurions
ou magistrats de la ville ou même de l'Empire, il faut croire
qu'ils les ont choisis hors du collège •. Il n'y avait donc guère
de relations entre la curie et les corporations, sinon des rela-
tions de protecteurs à protégés, de supérieurs à inférieurs. Les
rapports des collèges étaient plus intimes avec les sévirs augus-
taux dont la plupart appartenaient, comme eux, à la classe
des affranchis. Beaucoup de memhres étaient sévirs, — à Lyan
surtout les exemples sont fréquents, — et ils élevaient souvent
aux dignités collégiales ces confrères plus influents 2. Quant à
la plèbe urbaine, dont ils faisaient partie, ils s'en distinguent
volontiers dans les circonstances importantes, pour agir soit
de concert avec elle, soit seuls en leur propre nom ou au nom
de toute la population '^.
C'est surtout dans les banquets offerts par des citoyens géné-
reux à toutes les classes de la population que se montre leur
supériorité sur le reste de la plèbe 4-. La part de chaque classe
était proportionnelle, non à ses besoins, mais à la considéra-
tion dont elle jouissait; or, les collèges sont toujours favorisés
et ils viennent immédiatement après les curiales et les sévirs
augustaux, sans autre motif que l'estime qu'on avait pour eux
Parfois la plèbe est exclue, ou, si elle est admise, elle figure à
la fin de l'énumération et reçoit une part moins grande de ces
largesses -k A Lyon, un décurion fait un don à ses concitoyens
à l'occasion de son pontificat perpétuel, et au jour de la dédi-
* Voyez le premier volume, p. 399, n. 1. Maué, Die Vereine, pp. oi-oô.
- Voyez nos Indices.
•■» On les voit aussi unis aux iicani plèbe rustique) : XI 377. 379. -406.
418. V o872; aux incolae (étrangers domiciliés) : 1 142o. V 815; aux décu-
rions et à la plebs urhana (Grut., 440, 6, à Pisaurum).
* Otto Toller, De spectaculis, cenis, distribiitionibus in munidpiis
Romanis Occidentis imperatorum aetate cxhibitis, Altenburg, 1889, p. 69.
■-> V 7905. 7920. 1X2553. 4691. 4697. X 1881. 1890. XI 4589. 6017.
6033. 0070. 6071. XII 697. Ephem. ep., V 1264. VII 720. Grlter, 484. 9.
Allmer, Mmée de Liion, II 144.
( 186 1
cace, il distribue, à chaque décurion, cinq deniers; aux cheva-
liers, aux sévirs et aux marchands de vin, trois deniers; enfin,
aux membres de tous les collèges autorisés, deux deniers^.
Dans une occasion différente, un citoyen de Cemenelum donne
à chaque décurion deux deniers, à chaque membre d'un
collège, un denier et, en outre, du pain et du vin pour le festin
public, tandis que les gens de la plèbe ne reçoivent que de
l'huile pour le bain-. D'autre part, quand un collège a pro-
voqué les libéralités de son patron, toute la ville y est parfois
admise; mais alors il est naturel que le collège occupe le pre-
mier rang. Les dendrophores d'Antinum, dans le pays des
Marses, élèvent une statue à l'un de leurs patrons, qui distri-
bue, le jour de la dédicace, à chaque décurion, neuf sesterces;
à chaque sévir augustal, six sesterces; à chaque dendrophore,
douze sesterces; à chaque homme de la plèbe urbaine, quatre
sesterces ^.
Dans les cérémonies, les fêtes et les réjouissances, les col-
lèges municipaux obtenaient une place d'honneur. Ils figu-
raient avec leurs bannières dans les cortèges publics. Cassius
Dion rapporte que les collèges de Rome rehaussèrent par leur
présence les magnifiques funérailles que Sévère fit à Pertinax^^.
Quand Gallien eut vaincu Posthumus et massacré traîtreuse-
ment la garnison de Byzance, il courut à Rome pour monter
au Capitole et dans l'immense cortège qui l'accompagnait, bril-
lèrent les nombreuses bannières descorporations'>. Ces mêmes
bannières ajoutèrent beaucoup à la splendeur du triomphe
' Allmer, /. /.
- V 7920. A Urvinum, les décurions reçoivent cinq deniers, les collèges
quatre et la plèbe trois (XI 6033).
"' IX 38-42 : collegio s(upra) s{cripto) acpul{antihus) sing'uUs sestertios)
XII u{iimmos}, c'est-à-dire : douze sesterces à dépenser pour le repas
public (MOMMSEN, De coll., p. ilO). Cfr. X 4ol. XI 4380. XIV 2408.
* Cass. DiO, 74, 4 : oV ts ot,ulo'., xai -à sv 'rr, tco'Xe'. auaTTjaaTa
îV.
•• Trebell. Poll., GalL, 8 : ve.i'illa centena, praeter ea, quae coUegio-
nnn erant, dracones et signa templorum omniumque legiomnn ibant.
f 187 )
qui fut décerné à Aurélien après sa victoire sur Zénobie^. Il en
était de même dans les cités provinciales. Nous trouvons dans
les inscriptions les porte-drapeaux des collèges industriels et
des collèges funéraires '^, et nous connaissons une circonstance
où ils figurèrent dans une solennité publique. Lorsque la
ville d'Autun , qui venait d'être ravagée par les Bagaudes,
reçut la visite de Constantin, elle voulut orner de son mieux
ses rues désertes : on y étala les tentures que l'on put trouver
encore, on y porta les statues de tous les dieux, et Ton y vit
tlotter les bannières de toutes les corporations •^.
Les collèges s'intéressaient à la prospérité de la ville et se
joignaient au reste de la population pour honorer les citoyens
qui avaient bien mérité de tous. A Parentium, la curie décréta
un jour des funérailles publiques à un jeune décurion, sans
doute pour honorer et consoler ses parents « qu'il avait laissés
dans le deuil ;>. Le collège des fabri y prit part et eut « l'hon-
neur, dit l'épitaphe, d'envoyer de l'encens "^ ». Bien des fois
les collèges, de leur propre initiative, rendent des honneurs
aux bienfaiteurs de la cité, à ses magistrats, à ses patrons,
aux fonctionnaires impériaux dont elle dépend, par exemple
aux gouverneurs des provinces, ou bien à ses propres patrons,
pour des services rendus, non aux collèges, mais à tous leurs
concitoyens. Ils leur élèvent fréquemment des statues pour les
remercier de largesses faites ù la ville, de jeux donnés au
peuple, très souvent du soin qu'ils ont pris de l'annone en
temps de disette, de la construction d'amphithéâtres, de bains
1 Flâv. Vopisc, Aiirel., 34 : jam populus ipse Romamis,jam vexilla
collegiorum atque caslroriim ... mulliun ponipae addiderant .
- Voyez le premier volume, \^. 425. Sur les vexilla collegiorum,
voyez encore : Friedlaexder, I, |). 273. Gothofr., vol. V, p. 215. Maué,
Die Vereine, p. 53. Liebenam, p. 283. Levasselr, I, p. 58.
"• Panegyr. lat., VllI, 8, éd. Baehrens, p. 187 : omiiiiun sigiia colle-
giorum, omnium deorum nosirorum simulacra ... protulimus. Fried-
LAENDEii (IIP, p. 229, noie 11) prend loi sig)ia pour les statues de dieux
que possédaient les collèges.
' V 337.
(188)
publics, d'aqueducs, ou encore pour reconnaître la justice et
la modération de leur administration, l'affection et la bienveil-
lance qu'ils ont témoignées « à chacun en particulier et à tous
en général ^ ».
Ils font des vœux et des sacrifices pour la conservation du
municipe. En l'an 160, un dendrophore de Lyon offre un tau-
robole à Cybèle pour le salut de l'empereur auquel il associe
« la prospérité de la colonie de Lyon '^ ». En l'an 190, c'est tout
le collège des dendrophores résidant dans la même ville qui
offre un sacrifice du même genre pour le salut de Commode
et pour « le maintien de la colonie ^ ».
Ailleurs, les collèges contribuent à des travaux d'une utilité
générale : à Falerio, sous Hadrien, en l'an 119, les collèges
qui ont leurs locaux sur le Marché aux Moutons, s'unissent
aux propriétaires et aux marchands du même forum, pour
construire une chaussée qui traverse cette place ^. A Lyon, les
centonaires viennent en aide aux finances municipales, fort
délabrées après le sac de la ville par Septime Sévère, en recon-
struisant de leurs deniers une partie du cirque : ils réparent
les cinq cents places qu'un édile y avait autrefois aménagées à ses
frais s. A Thyatire, les tailleurs construisent à leurs frais, en
l'honneur des Césars, un tripylon, donnant accès à des porti-
ques, où étaient établies des habitations d'ouvriers 6.
En revanche, les villes tenaient à maintenir la prospérité de
leurs collèges. Elles leur donnaient des subsides ■<, elles éle-
' Les exemples sont nombreux. Voyez le premier volume, pp. 509-511.
- Allmeu, m. de L, lo : pro sainte imperatoris —, et status coloniae
LugudiLn i \
•■• Ihid., I, 6 : pro — situ ciploniae).
i L\ 5438.
•• Allmer, Op. t., I 16 et le commentaire. Cfr. De Boissieu, /. deL.,
p. 466.
6 C I. Gr., 3480. Cfr. Wagener, Rev, de Vlnstr. puhl. en Belij., 1868,
p. 9.
" Voyez le premier volume, p. 454. — Cfr. C. L Gr., 3408, à Magnésie
en Lvdie.
( 189 )
valent des statues aux bienfaiteurs, aux « restaurateurs » des
collèges ^. Très souvent elles leur concédaient gratis un empla-
cement pour élever leurs monuments, leurs statues - ou
pour bâtir un local 3. Au théâtre, au cirque, elles leur
accordaient des places réservées. A Nîmes, les nautes de
l'Ariège et de l'Ouvèze avaient reçu vingt-cinq sièges dans le
splendide amphithéâtre; ceux du Rhône et de la Saône en
avaient quarante, et les mariniers d'Arles, un nombre inconnu.
A Arles, on a retrouvé des places réservées aux nautes de la
Saône, aux marchands d'huile {diff usures) , aux pastophores et
aux scholastici, peut-être à d'autres; à Lyon, il en était pro-
bablement de même, mais on n'a de preuve que pour les
A ugustales •*.
Rappelons aussi, comme des témoignages éclatants de
l'estime qu'on avait pour les collèges, les nombreux dons
{[u'on leur faisait, les sommes et les immeubles qu'on leur
léguait si fréquemment, â charge de célébrer le jour de la
naissance ou des honneurs funèbres annuels, d'entretenir un
monument public ou une sépulture s. On s'adressait aux
collèges industriels plutôt qu'aux collèges funéraires, parce
qu'ils étaient plus en vue. Enfin, nous avons montré que
les citoyens les plus influents, les magistrats les plus élevés
des municipes, les grands fonctionnaires de l'Empire, ne
dédaignaient pas les titres de présidents, de curateurs et sur-
tout celui de patrons des collèges d'artisans 6. Et toujours
' V 790o : amp[liatori ur]bis et collegio[7mm III], à Cemenelum. XI
to96 : répara tori collegiorum , à Bénévent, après le pillage de la ville par
les barbares.
- La formule : lipcus) d{atus) d{ccreto) d{ecurionum), revient à tout
moment sur ces monuments.
5 Voyez le premier volume, p. 479, n. 4.
^ Au théâtre de Lyon, Allmer, M. de L., I 16. 100: à Nimes : XII 3316-
3318; à Arles : Xlf697. 710; à Trêves : Hettner, ^Yd. Koiresp., 1883,
11. 104, 5, et Provincialmuseum zu Trier, 14 : [loea XXX ?]juven[iuu].
•' Voyez le premier volume, pp. 4o6-462. 469-478.
'■' Voyez le premier volume, pp. 398. 408. 441.
190 )
ces hommes si haut lù-^
les monuments qu
de patron ou de «1
même s'ils ont pai
collegium (ubrum, f-
patron un décurioi
des trois î»
local des < •
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1674. i», p. il:
7 . Uûi, s.
( 191 )
Les détails qui prëcèdent sont tirés d'inscriptions des trois
premiers siècles; ils prouvent bien que les collèges industriels
des villes n'étaient pas, dès cette époque, des institutions pure-
ment privées, travaillant obscurément aux intérêts particuliers
d'un métier ou d'une profession quelconque. Non, ces collèges
avaient revêtu un caractère public, comme les corporati de
l'annone à Rome, gens de métiers et commerçanls comme
eux, à côté desquels les codes les rangeront plus tard sous le
nom de collegiati civitatum singularum i ; leur rôle public pou-
vait seul leur donner cette importance dans la vie sociale des
municipes.
Il s'agit maintenant de déterminer plus exactement le ser-
vice imposé à chacun. Dans les villes de province, comme à
Rome, c'était le métier qui devait leur avoir attiré les charges
avec les privilèges. Pour remplir les divers services munici-
paux, il était naturel qu'on prît, à l'exemple de l'État, les arti-
sans qui convenaient le mieux : tantôt on les trouva déjà réunis
dans des collèges privés qui furent chargés du service; tantôt
on créa exprès des collèges en leur permettant de s'occuper de
leurs intérêts particuliers, en même temps qu'on leur demanda
un service public.
Ce service était donc en rapport avec la profession, et cela
peut nous guider, en l'absence de témoignages précis. Il faut
p. 65. Athe?i. Mitth., VI, 1882, p. 252, n. 19 : xtf) UpwTàxqj auvsSptV xwv
[vjvacpÉwv, à Cyzique. Cfr. ibid., p. 125, n. 8. C. /. Gr., 3422 : r) Ispà
cpuXï) Twv sp'.o'jpyœv; cfr. Lebas, 656, à Philadelphie, et voyez le premier
volume, pp. 173-174. Sûaaxsij-a tojv ô'jysvsaTàTojv xpa-rc^'.-cojv, à Korykos,
C. I. Gr., 9179. 'H yepouaîa zou iiz-filo'j a'jvspy'ou, à Sida, C. I. Gr.,
4346^'*"^. Les foulons chrétiens de Flaviopolis en Cilicie s'appellent au
contraire : xb eÙTeXè; a-jvspyiov tôov yvcc'j^iayy (Jouni. of helLstiid., XI, 1890,
p. 236; voyez le premier volume, p. 522j.
1 ^'ov. Val. III, t. 34, § 4 (en 452) : non corporatus Urbis Romae, vel
cujiislibet urbis altérais. Nov. Sev., II (en 465) : Si ijui vel qua ex corpo-
ribiis publias, vel ex corporaiis Urbis Romae servis ... se crediderint
copulandos. C. J., I, 24, 4 (en 444) : a quocumque collegio seu officia vel
in hac sacratissima civitate, vel in provinciis.
I
( 192 )
observer, d'ailleurs, que le caractère public des collèges ne se
dessine nettement et ne se généralise qu'au 11^ siècle. Jusque-là,
les collèges sont assez clairsemés dans les provinces '*. L'au-
torisation était rarement demandée, parce que l'empereur
ne s'en montrait pas prodigue; en Italie même, comme le
prouve la suppression des collèges de Pompéi sous Tibère et
l'absence de tout collège autorisé dans les graffiti de cette ville
détruite en l'an 79, on chercherait en vain les nombreux col-
lèges du 11^ et du III^ siècle. Mais ce qui se passa à Nicomédie
sous Pline le Jeune (lll-112)démontre que les collèges n'étaient
guère autorisés qu'en vue d'un intérêt général '^. Dans le cours
du 11^ siècle, ils se multiplièrent, mais il ne faut pas encore
songer à des charges obligatoires et héréditaires ; ce fut pendant
le III^ siècle que l'organisation corporative des professions
industrielles, devenue à peu près générale, fut définitivement
mise à profit par l'Etat et les villes pour l'exécution de nom-
breux services publics, comme nous le verrons au chapitre II,
et c'est précisément l'époque sur laquelle nous avons le moins
de renseignements.
Il ne faut donc pas oublier que, sous le Haut-Empire, les
collèges variaient de ville à ville, qu'ils pouvaient être rares
dans l'une et nombreux dans l'autre, enfin qu'il n'y eut pas de
loi réglant leurs obligations dans tous les municipes. Il en
résulte que l'on ne doit pas chercher des dispositions univer-
selles dès cette époque, ni une réglementation sévère comme
celle du Bas-Empire.
Nous ne croyons pas que tous les collèges énumérés au
commencement de ce chapitre aient eu, dès leur fondation,
un rôle officiel bien déterminé. L'intérêt qu'on avait à favori-
ser le développement d'un métier utile ou nécessaire suffisait
pour accorder l'autorisation.
Nous sommes réduits à des conjectures sur le rôle de la
^ Les dates connues sont indiquées dans la liste que nous avons
dressée. Voyez supra, pp. 145-157.
2 Voyez le premier volume, pp. 123-124.
( 193 )
plupart des collèges, et nous préférons nous en tenir à ces con-
sidérations générales. Au moins pouvons-nous entrer dans les
détails pour trois corporations qui existaient à peu près partout
et qui étaient partout utilisées de la même façon : ce sont
celles des fabri, des centonarii et des dendrophori.
Les métiers qu'ils exerçaient ont donné lieu à de longues
discussions. Les coUegia fabrum ne renfermaient pas, suivant le
sens général du mot faber, tous les ouvriers travaillant les
corps durs, c'est-à-dire les maçons, les forgerons, les charpen-
tiers, les marbriers, les ivoiriers, etc. Ce mot, qui est généra-
lement déterminé par un adjectif ', quand il doit désigner un
de ces métiers, ne s'employait absolument, en dehors de son
sens général, que pour indiquer les fabri tiijnuaru, c'est-à-dire
les constructeurs en bâtiments, les charpentiers et les maçons'^.
Nous regardons, par conséquent, comme synonymes les deux
appellations de collegium fabrum et coUegium fabrum tignua-
riorum. Nous avons vu qu'à Rome la seconde est seule en
usage, du moins dans les inscriptions 3, Dans les autres
villes, il semble que l'on dise toujours fabri tignuarii, quand
la ville possédait aussi un collegiwn fabrum navalium, con-
1 Faber aerarius, argentarius, fcrrarius, eborarius, navalis, lectarius,
pectinarius, etc. De Boissieu (p. 412) croit que les collegia fabrum
étaient « formés d'artisans de diverses sorte? »; cela paraîtra tout à fait
invraisemblable, si l'on songe que l'extrême division du travail qui
existait sous l'Empire se reflète dans les autres collèges.
- DiG., 50, 16, 23o : fabros iignarios dicimus, non eos dumtaxat qui
tigna dotant, sed omnes qui aedificant. — Sur fabri, synonyme de fabri
tignuarii, voyez : BlueMxNEU, Tedin., II, p. 252; Maué, Die Vcreine,
pp. 7-8; C. JuLLiAN, Dict. de Daremberg, s. v. fabri, p. 952, et supra,
p. 147, n. 5. Contra : Liebe>'am, p. 104, n. 5, et Dit. epigr., s. v. fabri.
•' Voyez supra, p. 117. On ne trouve les deux appellations de cotlegium
fabrum et cotlegium fabru)n tignuariorum dans la même ville qu'à
Prénesle (XIV 2876. 2981. 3003. 3009), à Vienna (XII 1877. 1911 , à Lyon
(Allmeu, Musée de Lyon, II 165. 166. 170. 171. 184. 185. 188. 189; et à
Salone (111 8841). Nous croyons qu'on désigne par là un seul et même
collège.
Tome L, vol. II. 13
(194)
structeurs de navires, parce qu'il était nécessaire de bien
distinguer. Ce dernier cas se présente à Ostie, à Pise dans
une seule et même inscription, à Arles et peut-être ailleurs '.
Les ouvriers du bâtiment devaient être au service de l'Etat et
des villes pour construire les éditices publics que l'Etat possé-
dait partout et que les villes élevèrent en si grand nombre à
cette époque riche et prospère. Les constructeurs de navires,
que l'on trouve dans les grands ports et dans les métropoles
commerciales, étaient sans doute occupés dans les chantiers
publics d'où sortaient les Hottes militaires et celles de l'an-
none. « VoilCi peut-être, dit C. Jullian, ce qui explique l'impor-
» tance exceptionnelle de ces deux collèges. Ostie était la
» métropole commerciale de l'Italie, le port et Tentrepôt de
)) Rome; les ouvriers y abondaient, les arsenaux, les greniers,
)) les docks de TÉtat y nécessitaient un personnel nombreux
» d'entrepreneurs et d'ouvriers. Ostie est devenu, à certains
)) égards, comme l'atelier et le chantier de Rome. Si jamais
» corporations ont mérité d'être appelées « (futilité publique »,
» ce sont celles de la puissante colonie -. » Callistrate, parlant
des collèges qui « furent institués pour prêter une aide néces-
saire aux besoins publics », cite le collegiiim fabrorum, et il ne
parle pas seulement de celui de Rome ^. Rien que les témoi-
gnages précis fassent défaut et que nous en soyons réduits aux
conjectures, il est plus que probable que les ouvriers de ces
deux collèges durent partout mettre au service public leur
activité industrielle ^.
Mais on avait contié aux fabri un autre service, exclusive-
1 A Ostie : XIV 169. ^rl. 368. 37^2. 456. VI 1447 a. A Pisae : XI 1436.
A Arles : XII 700. 730. o8Il.
- C. JULLL\N, /. /., p. 956.
•■' DiG., 50, 6, 6 (5) 12; voyez supra, p. 50.
t Malé. Der Praef. fabnim, p. 55 : staatlkhe Banhandwerker . — 31ais
Choisy {Art de bâtir cliei- les Romains, pp. 198 et suiv.) va trop loin, en
voulant entrer dans les détails. Les passages qu'il cite sont mal inter-
prétés ou n'ont aucun rapport avec les fabri. Voyez supra, p. 119.
( 195 )
ment municipal , celui de l'extinction des incendies, pour
lequel ils étaient généralement associés aux centonaires et aux
dendrophores K
Les centonaires tiraient leur nom des cenlones qu'ils fabri-
quaient et qu'ils vendaient. L'usage des centons était fort
divers et fort répandu, ce qui explique la grande extension
de ce métier que l'on trouve exercé dans la plupart des villes
par des ouvriers assez nombreux pour former un collège.
En effet, on comprenait sous ce nom des couvertures de lit
et des vêtements faits de vieux morceaux d'étoffe, k l'usage
des pauvres et des esclaves ; puis des coussins ou sortes de
bâches faits de vieux habits ou de peaux, qu'on employait
pour éteindre les incendies et, à la guerre, pour protéger
les hommes, les chevaux, les navires et les machines contre
le feu et les traits de l'ennemi '^. Si les centonaires for-
mèrent de bonne heure des collèges partout où ils existaient
en assez grand nombre, c'est parce qu'ils étaient chargés d'un
service public.
Quant aux dendrophores, ils devaient leur nom à l'honneur
qu'ils avaient de porter le pin sacré dans les fêtes de Cybèle et
d'Attis. Ils avaient donc un caractère religieux, et ce service
qu'ils rendaient pouvait suffu'e pour leur valoir l'autorisation.
1 Sur ce service confié à ces trois collèges, voyez : Godefroy, ad
C. Th., 12, 1, 1. 62 . 14, 8, 1. 1 ifahri). — Rodbertus, Bd. VIII, 1867,
p. 421, rem. 62. — Herzog, Galliae Narb. hist., p. 224. — Marquardt,
Priv., p. 567. 698 (o8d. 719). Vie privée, II, pp. 229 et 379. St.-V., II»,
p. 513, n. 1. Org. milit., p. 267, n. 3. — Masquelez, Dict. de Darem-
BERG, I, p 1013. — Cagxat, De munidpalilms militiis, pp. 86-90. —
Bluemner, Techn., I, p. 199. — Liebenam, pp. 102-105. — Voyez surtout:
HiRSCHFELD, Gull. Stud., III, 21 pages, Wien, 1884. AIaué, Die Yereine,
pp. 14-18, 1886. Der Praefectus fabrum, pp. ^Q-m ei passim , 1887.
- Sur les cenlones, voyez Bluemner. Techn., I, p. 199. — Maué, Die
Yereine, pp. 8-14. Marquardt, Priv., pp. 567. 698 (585. 719). Vie privée,
II, pp. 229 et 379. St. -Venu., IP, p. 530. Org. milit., p. 267. Le vesliarius
centonarius d'Aquilée se trouve dans une inscription fausse (V 50* =
Orelli, 4296).
I
( 196 )
Mais ils exerçaient aussi une profession commune, qui était
peut-être le commerce du bois • .
On a pu remarquer, dans le cours de ce travail et particu-
lièrement dans notre description du rôle social que jouaient
les collèges dans les municipes, que nos exemples étaient le
plus souvent empruntés à l'un de ces trois collèges d'ouvriers
du bâtiment, de fabricants de centons et de marchands de
bois 2., C'est qu'il n'y avait pas de corporations plus répandues
que celles-là. Les inscriptions le prouvent avec une force à
laquelle on ne peut opposer le hasard; les textes juridiques ne
citent d'ailleurs nominativement que ces mêmes collèges. Les
chiffres suivants sont éloquents 3 : nous avons compté près de
cent quarante cités où l'on trouve au moins l'une de ces trois
corporations ; nous avons rencontré un collegium fabrum dans
quatre-vingts, un colleghim centonariorum dans soixante-
quinze, un collegium dendrophorum dans soixante-cinq; en
outre, un collegium fabrum tignuarionim ^ dans vingt-neuf. La
liste dressée au commencement de ce chapitre prouve. qu'on
les trouve dans toute Tltalie et dans toutes les provinces latines
de l'Empire. La Grèce, l'Asie Mineure, l'Egypte, enfin toutes
les provinces grecques en sont dépourvues. Très rares en
1 Voyez supra, p. 123, et le premier volume, p. 249. — Mommsen
assimile les dendrophori aux liastiferi qu'on trouve à Vienna (XII 1814, à
côté des dendrophores, XII 1917), à Cologne {Wd. Korr., 1893, p. 36), à
Civitas Maltiaeorum (Brambach, 1336. Wd. Korr., 1887, p. 189. 1889,
pp. 23. 27. 50), et il conjecture qu'ils formaient une milice municipale en
même temps qu'un collège religieux (Wd. Korr., 1889, pp. 26 et 52).
Cette extension du commerce de bois, dit-il. serait singulière. Sa thèse
mérite certes attention, mais elle nous semble loin d'être prouvée.
Voyez notre Index collegiorum, s. v. dendrophori et hastiferi.
- Nous dirons centonaires et dendrophores pour être plus exact. —
Nous avons vu {supra, p. 117, n. 4) que les codes citent aussi géné-
ralement comme exemple le corpus fabrorum.
5 Voyez nos Indices : Collèges des villes de l'Italie et des provinces.
* A Préneste, à Salone, à Lyon et à Vienne, ce nom se trouve à
côté de collegium fabrum. Voyez supra, p. 193, n. 3.
( 197 )
Afrique, en Espagne, clans les trois Gaules, en Bretagne, oi^i
tous les collèges sont du reste clairsemés, ils apparaissent
en grand nombre dans la Narbonnaise, dans la Cisalpine, dans
l'Italie centrale et sur le Danube, partout enfin où existaient
des colonies romaines ou latines. Il est probable que dans
POccident latin, toutes les villes qui avaient des collèges
industriels possédaient au moins l'un des trois collèges de
fabri. de centonaires ou de dendrophores. Ils étaient surtout
florissants dans les grands centres, tels que Lyon, Arles et
Narbonne, Milan, Brixia et Corne, Ariminum, Bavenne et
Pisaurum, Apulum et Sarmizegetusa^. Cette grande extension
est fort significative : on peut en conclure que ces trois col-
lèges étaient les plus importants et remplissaient un service
nécessaire à toute ville.
Un autre fait remarquable que révèle la statistique, c'est que
la plupart des villes possédaient au moins deux de ces collèges
et que beaucoup les possédaient tous les trois. Les fabri sont
seuls dans vingt-cinq villes -; les fabri tignuarii, dans quinze;
les centonaires, dans vingt, et les dendrophores, dans vingt-
quatre. Les fabri ou fabri tignuarli se trouvent à coté des
centonaires dans vingt-deux ; à côté des dendrophores, dans
onze; quatre n'ont que des centonaires et des dendrophores;
enfin on trouve les trois collèges à la fois dans une trentaine
' Sur l'extension de ces collèges, voyez nos Indices, l. L, et Maué,
Der Praef fabrum, pp. 49-o2. C. Jullian, /. /., pp. 932. 9o6. Hirschfeld,
GalL StucL, III, p. 13 (249). — C. Jullian (p. 9o6) explique leur rareté
dans certaines provinces et leur absence complète dans d'autres par
l'état troublé de ces provinces. Ce pouvait être le cas jusqu'à la fin du
If- siècle, mais pas au 11« ni au 111^. Il y a d'autres raisons : une civi-
lisation moins développée ou différente, la disparition ou la rareté des
monuments épigraphiques, la situation spéciale de certaines provinces.
(Pour l'Orient, voyez supra, p. 159. ! En Afrique, il se peut que les curies
municipales remplaçaient en grande partie les collèges. Voyez J. Schmidt,
Rhein. Muséum, vol. 45 (1891), pp. 599 et suivantes.
2 Remarquez Sarmizegetusa, où le coll. fabrum a laissé treize inscrip-
tions. Si le coll. cent, avait existé, il aurait aussi laissé des traces.
( 198 )
(le cités qui appartiennent presque toutes à l'Italie centrale ou
à la Cisalpine. Les découvertes ultérieures viendront natu-
rellement modifier ces chifî'res; mais il est utile de les donner,
parce qu'ils prouvent la coexistence de deux ou trois de ces
collèges dans la plupart des villes.
11 V a plus : là où ces collèges existent l'un à coté de l'autre,
on remarque entre eux des relations plus intimes que celles
qui unissaient généralement les autres corporations d'une
même ville ^. Ils figurent souvent dans une même inscription
et alors ils se succèdent presque invariablement dans l'ordre
suivant : fabri, centonarii, dendrophori "^. A Sentinum, ils se
qualifient eux-mêmes de tria collegia principalia dans un décret
des centonaires, et dans plusieurs villes on les appelle simple-
ment collegia tria, ou même, s'il n'y en avait pas d'autres,
colleyia omnia 3. ils ont pris souvent les mêmes patrons et les
mêmes patronnes ^\ ils ont parfois les mêmes chefs s. Ils se
cotisent pour rendre les honneurs funèbres 6, ils s'unissent
pour honorer d'une même statue un personnage important de
1 Sur cette union do trois collèges ou de deux d'entre eux, voyez :
Th. MOMMSEN, C. I. L., V, pp. 440. 565. 635. 1198. Hirschfeld, Gall.
Stud., III, p. 12 i248), n. 1. Maué, Die Vereine, pp. 15 et suivantes,
- Patrono collcgiorum fabror{um) et centonarior{um) et dendrophoro-
rum, V 4477. XI 1059; ou généralement avec l'asyndéton : collegia
fahrum, cent., dendr., Grut. 484, 9. V 5128. IX Wà^-^ C[olL?) fiabrum?)
cent.?). Pais 870; coll. fabr., coll. cent., XI 6164. Les seules exceptions
sont : V 4454. 4459 : collegia cent, et fabr., à Brixia; Bormann, Inscr.
Sass., 24 : collegia dendrophororum, fabrum, centonariorum, à Sassina
dans un testament; Ann. ep., 1888, n. 132 : coll. dendr. et fabr. ; Wilm.,
2112. XI 6378 : patronus coll. fabr. cent, navic. dendr., à Pisauruni. Sur
IX 1459, voyez infra, p. 199, n. 7.
•' Voyez supra, p. 147, n. 2.
' Voyez le premier volume, p. 444, n. 6.
" Les fabri et les centonaires ont le même praef{ectu.s) et patronus à
Aquilée (V 749j. A Brixia, on a un personnage qui est appelé : in omnibus
collegiis perfunctus magisterio (V 4449).
« A Brixia : V 4483 : à Aquincum : III 3554. 3569. Au n- 3583, le coll.
cent, est seul. A Fanum : XI 6231 >les trois collèges).
( 199 )
la ci lé <, ou si chacun d'eux lui oHiv sa statue à part, ils se
concerlent pour y mettre des dédicaces identiques -. Ils ont
parfois un local commun ^. Ils sont fréquemment l'objet de
libéralités communes '*, et quand l'un d'eux a provoqué les
largesses de son patron, l'autre y prend part -K II est vrai qu'ils
ont des rapports de ce genre avec d'autres artisans, avec les
foulons à Falerio, avec les nautes i\ Apulum et à Pisaurum c ;
mais c'est très rare.
Cette union intime ne les empêchait nullement d'avoir
chacun son existence propre, et c'est par exception qu'on les
voit désignés parfois sous le nom de colleyium f'abrum et cento-
uurionim, h Milan, à Trea, à Kegium Lepidum ". En effet, le
pluriel est toujours employé ailleurs, quand le mot n'est pas
abrégé 8. Nous avons cité plusieurs fois la loi de Constantin
1 Au patron commun : XI 379. 30U9. IX 0608 (fubri et cent.); IX 14o9
fabri et dcndr ' : V 7881. IX 3439 (les trois collèi^es). A d'autres person-
nages que le patron : V 1020. IX 3837. XI 377. 406. 418. 6164.
- A Ariminum, au patronus coloniae : XI 38o. 386 (cfr. 390. 391): à
Induslria : V 7469. 7470; à Auximum : IX o83o. 3836: à Suasa : XI 6164
■"^ecundum verba le.'^tamenti ejus).
•' XI 970, à Regium Lepidum : in templu cdlegi fabrum et centonario-
riuii.
^ X 451, à Eburum: V 7903, Cemenelum: Bormann, Inscr. Sass., 24,
à Sassina: XI 6164, à Suasa. Voyez le premier volume, p. 438.
•• A Brixia : V 4488.
'' A Apulum, les fabri, les cent, et les nautes ont le même patron
illl 1209 ; à Pisaurum, ce sont les fabri, cent., navic, dendr. (Wilm.,
2112. XI 6378;. A Falerio, le même homme est magister du coll. fabr. et
(lu sodalicium fuUonum (IX 3450j,
' Pour Milan, voyez infra, p. 433, n. 14. A Trea, on a dans la même
inscription : patronus collegiorum, puis collegium fabr. et cent. (IX
3633). A Regium Lepidum : collegium fabrum et centonariorum, à plu-
sieurs reprises XI 970,; voyez infra, p. 202, n. 6. A Ligures Baebiani :
collegium dendrophorum , itemque fabrum (IX 1459) : item veut dire qu'il
s'agit de deux collèges ditférents. Voyez C.\gnat, Cours d'épigr., p. 96,
11.2.
^ On trouve : coUegia fabr. et eentO)iar., à Ariminum (XI 418) et
( "200 )
qui prescrivit, en l'an 31o, de joindre les dendrophores, par-
tout où ils existaient, aux collèges de centonaires et de fabri K
Cet empereur voulait que les dendrophores entrassent dans
l'un ou l'autre de ces collèges {collegiis) utiles, afin d'augmenter
le nombre de leurs membres. Les collèges de dendrophores
disparurent donc et ils ne nous ont laissé aucune inscription
postérieure à cette date. Constantin fit bien plus que de consa-
crer l'union qui existait déjà entre ces trois collèges dans
beaucoup de villes '^, mais sa loi prouve au moins les rapports
qu'ils avaient entre eux depuis longtemps.
C'est particulièrement dans le nord de l'Italie, à Milan,
Brixia, Côme, Aquilée, Ariminum, Parme, Ravenne, Pisau-
rum, que deux ou trois de ces collèges étaient étroitement
unis.
A Brixia, les fabri et les centonaires sont mentionnés
ensemble sur beaucoup de monuments ^. Ils reçoivent
ensemble des less ^\ ils ont le même curateur s et le même
presque toujours à Brixia (V 4308. 4386. 4396. 4397 4406. 4416. 44:>-i.
4454. 4459. 4477); collegia fabr., cent., dendr. : V 2071. 4477. 5439.
XI 1059. Gruter, 484, 9. Bormann, Inscr. Sass., 24. A Suasa. on a : coll.
fabr., coll. cent. (XI 6164). Au n" XI 1059, la dédicace est faite patrono
collegiorum fabrum, cent., dendr. par le collegium cent. seul. De
mémo : V 1012. Partout ailleurs on lit : coll. ou colleg. en abrégé.
' CoD. Theod., 14, 8, 1. 1 (315). Loi citée au premier volume, p. 242,
n. t.
- C. JuLLiAiN, /. /., p. 956, a l'air de croire que c'est par un effet de
cette loi qu'on trouve les trois collèges réunis et même qu'ils ne forment
plus qu'un seul corps. C'est une double erreur. Les inscriptions sont
antérieures au IV« siècle, et il n'est question nulle part, pas même dans
cette loi, d'un collège unique composé de ces trois métiers. — Générale-
ment on dit que Constantin ne fit que consacrer ce qui existait depuis
longtemps, mais il fait plus. V^oyez Hirschfeld, Gall. Stiid., III, p. 21
(257).
^ V 4333. 4368. 4386. 4396. 4397. 4406. 4408. 4416. 4422. 4454. 4477.
4483. 4488.
' V 4488.
•• V 4333.
i
( 201 )
patron qui est aussi celui des dendrophores ' ; ils ont des
esclaves communs auxquels ils donnent le nom de Fabricius
Centonius, après leur atï'ranchissement "^ ; ils élèvent ensemble
treize monuments à leur curateur, à leur patron, à des bien-
faiteurs ou à des bienfaitrices'^. D'un autre côté, chacun d'eux
reçoit des libéralités particulières et recueille des legs auxquels
l'autre ne participe pas '>- ; chacun élève de son côté des statues
à ses bienfaiteurs et des monuments funéraires à des étrangers
qui l'ont institué légataire universel -K On trouve des gens qui
ont présidé les deux collèges *>, et d'autre part les fabri "? ont
leurs magistri à eux et les centonaires ^ ont leurs officiales.
C'est à Milan (|ue les fabri et les centonaires ont les relations
les plus étroites, tandis qu'ils semblent n'avoir rien de commun
avec les dendrophores 9. Us sont toujours nommés ensemble,
et, qui plus est, on les appelle toujours collegium fabrum et
centoiiariorum 'O; il semble bien qu'ils formaient à eux deux le
1 V 4477. 4484. Dans cettr ville, les dendropiiores n'ont pas d'autres
relations avec eux. On les trouve seuls : V 4341. 4388. 4418.
- V 4422 : Fabricius Cenlonius cnllegiorum libertus.
'' Voyez supra, p. 200, n. 3.
^ V 4122. 4391.4433 4488. 4489.
^ Coll. fabr. : V 4048. 4391. 4433. 4448. 4489. Coll. cent. : V 4324.
4387. 44lo. 4426. 4452. 4491 4498. Nous avons dit (p. 199, n. 8) qu'on
lit toujours coUegia fabr. et cent, ou collegia fabr. cent, dendr., ou coll.
abrégé, jamais collegium.
'■" V 4449 : i)i oinnib. coll{egiis) magisterio perfunct[oruui\. Cfr. V 4484 :
patronus colleg. omnium. Il s'agit, selon Th. Mommsen, des trois collèges
(C /. L., V, pp. 440 et 1198).
7 V 4489.
^ V 4488.
'• On y trouve des dendrophores : V 3465. 5840.
if Deux fois d'une façon certaine : V 5738. 5761. Ailleurs on a : coll.
ou colleg., mais il faut lire évidemment collegium aux numéros 5578.
5612. 5701. 5738 5869. 5888, où il s'agit, par exemple, d'une décurie de
ce collège, Voyez infra, p. 202, n. 5. On trouve une fois collegia fabrum
et cent, ciploniae) M^ediolanensis) ; mais l'inscription est de Placentia, où
l'on pouvait ignorer qu'à Milan les deux métiers ne formaient qu'un seul
collège (XI 1230 .
( 202 )
collegium aerar{ii), subsidié par la ville, que l'on trouve dans les
inscriptions '•. Ils ont une chronologie commune et comptent
les années par leurs curateurs annuels qui portent le titre de
curatores ark{ae) Titinuae coll{egn) fabr. et cent, '^. Ils ont le même
repundor ou vérificateur de la caisse, le même patron 3. Le
collège est divisé en douze centuries, comprenant chacune dix
décuries ^, dans lesquelles les deux métiers étaient confondus o.
A Regium Lepidum, il en était de même G.
Que faut-il conclure de ces faits, que l'épigraphie nous révèle,
à savoir l'immense extension de ces trois collèges, la considé-
ration dont ils jouissaient et l'union intime qui existait entre
eux? L'importance de ces métiers ne suffit pas pour expliquer
les deux premiers, et la similitude des professions ne rend pas
compte du troisième. Tout cela se comprend au contraire, si l'on
admet qu'ils assuraient l'exécution d'un service municipal très
important et que là où ils existaient ensemble, ils étaient
chargés en commun de ce service. Dans ce cas, le besoin d'as-
sociation, si vif dans la classe ouvrière, fut favorisé partout
par l'intérêt public, et l'on comprend que ces collèges soumis
aux mêmes charges se soient unis pour la défense de leurs inté-
rêts particuliers '^.
' Voyez Th. Mommsen, C /. L., V, pp. 634. 635. 1198.
- C. L L , V, p. 635. Voyez le i)remier volume, pp. 408 et 410.
s V 5847. XI 1230.
' C. I. L., V, pp. 635. 1198.
•''• V 5869 : dec{urialis) ou dec{iirio) dec{uriae quintae) ex c enturia
(juarta) coll{egii) fabr. et cent. On voit ici qu'il faut évidemment lire
Cdllegii, le même homme ne pouvant appartenir à la cinquième décurie
de la quatrième centurie de deux collèges à la fois. Cfr. V 5612. 5701.
5888. Voyez \x Salonae : dec{urialis) ou dec{urio] coll. fab. et cent., et
])lus loin : inferet decuriae meae (III 2107). Cependant le coll. fabr. y
apparaît souvent seul, et le coll. cent, aussi.
*' XI 970, en 190 : in templo collegi fabrinu et cenlonariorum Regien-
sium ... collegi nostri patromim ... collegium nostriim ... quaestoribus
et magistris collegi nostri.
"' On ne leur eût pas permis de s'unir pour défendre leurs intérêts.
{ '20>\ )
Quel était ce service? Le doute n'est plus permis depuis
rétude de Hirschfeld sur le Praefcctus viyilum et les pompiers
dans les villes de l'Empire romain. Nous ne citons que pour
mémoire l'opinion de ceux qui croyaient que ces trois collèges
étaient employés au service de l'armée et qu'ils construisaient
les édifices militaires et les Hottes, ou qui avaient avancé des
conjectures plus invraisemblables encore ^. Leur service était
celui de pompiers. Si l'on voulait s'adresser aux artisans pour
l'extinction des incendies, il était naturel ([u'on prît les plus
aptes, c'est-^-dire ceux qui étaient liabitués i\ manier ou qui
fabriquaient les instruments nécessaires aux pompiers, les
dolabres ou haches, les échelles et les centons 2.
Pour les [abri, charpentiers et maçons, ouvriers du bâtiment
en général, il n'y a aucun doute : ils lurent requis de bonne
heure. En l'an 111, un incendie avait dévoré une partie de la
ville de Nicomédie: il n'y avait ni pompiers ni instruments
pour l'éteindre. Pline, qui gouvernait la Bithynie, demanda à
Trajan la permission de constituer à Xicomédie un corpus
fabrinn pour éteindre les incendies; il veillera, dit-il, à ce
qu'on n'y reçoive que de véritables fabi'i '^. Qu'est-ce qui lui
avait donné cette idée? C'était, dit-il, l'exemple de beaucoup
de villes, et ces villes étaient sans doute des villes de l'Occi-
dent, car alors toutes les associations étaient sévèrement inter-
dites en Asie ^', bien plus, on peut croire que Pline songeait
s'ils n'avaient pas rendu un service public. 11 était interdit d'entrer dans
deux collèges (voyez le premier volume, pp. 353-354) ; à plus forte raison
ne permeltait-on pas la coalition de deux collèges.
1 Malé [Vereine, pp. 15-1(5) les résume et les réfute.
- Sur ces instruments employés pour éteindre les incendies, voyez
DiG., 33, 7, i'2, 18. Maiiquaudt, St.-V., 11-, p. 513, note l. Org. milit.,
p. 267, n. 3. Masqlelkz, Dict. de Dauemberg, s. y. Ccnto. Maué, Die
Vereine, p. 12. Hirschfeld, Gall St., III, p. 10 (246), n. 1.
'' Plin., Epist. ad Traj., 33-34, éd. Keil. Voyez le premier volume,
p. 123.
i PuN., Epist. ad Traj., 34. 92. 93. 97.
( 204 )
à Cônie, sa patrie, et aux villes de la Gaule cisalpine ^. Un
siècle plus tard, Callistrate, nous l'avons déjà dit, cite le
corpus fabrorum parmi les collèges institués pour prêter
une aide nécessaire aux besoins publics '^. Quand Domitien
faisait délibérer le Sénat sur l'institution d'un collège de
[abri 3, c'était sans aucun doute sur la demande des villes,
car à Rome ce collège existait depuis l'an 7 avant notre
ère ^. Remarquons encore qu'à Vérone le collegium fabrum
a un curator instrumenti Veronaes{ium), qui était probablement
préposé à la garde de l'outillage des pompiers s. A Aquilée,
on rencontre dans le même collège un dolabrarius, qui se
sert de la dolabre et de centons, comme le prouve le bas-
relief du monument sur lequel il est mentionné 6 ; ce ne peut
être qu'un pompier de la subdivision exercée spécialement
au maniement de ces instruments en cas d'incendie. Ajoutons
Toctroi de subsides au. même collège à Milan, indice certain
d'un service rendu à la ville, et le repunctor donné à ce
collège j)Our véritier ses comptes ''. On a remarqué enfin qu'à
Nîmes, où il y a un praefectus vigilum et armorum 8, on n'a
pas trouvé de vigiles, mais bien des fabri, et l'on a conclu de
là que les fabri remplaçaient dans cette ville les vigiles et qu'ils
étaitjnt sous les ordres de ce préfet -K
' HiiisCHFEi.D, GalL Si., 111, p. 14 (250). Le collegium fabrum et centon.
(le Milan fut fondé sous Trajan. Hirschfeld, /. /., p. 14 (250), n. 1. Les
autres dates connues sont postérieures et la plupart des inscriptions des
li'ois collèges de fabri, de ccMitonaires et de dondrophores sont du 11^ et
du m*" siècle. Voyez la liste qui commence ce chapitre.
■^ DiG., 50, 6, 6, 12. Voyez supra, p. 118.
•' Plin., Panegijr., 54. Voyez le premier volume, p. 119, n. 2.
' Voyez supra, p. 118.
■" V 3387. Hirschfeld, /. /., p. 17 ^253).
'■• V 908. Voyez Hirschfeld, /. L, p. 11 (247). Saglio, Dict. des Antiq.,
s. V. dolobra.
' Hirschfeld, /. /., p. 19 (255) et le premier volume, pp. 419 et 454.
*^ Sur ces arma, voyez Hirschfeld, /. /., p. 5 (241), n. 1.
■' Herzog, Galliae Narbonensis historia, p. 224. Gagnât, De provinc.
militiis, p. 86. Hirschfeld, l. L, pp. 4-6 (240-242)
( 20o )
L'usage des centons dans les incendies fit adjoindre les
centonaires aux ouvriers du bâtiment pour ce service muni-
cipal ^. Leur union presque constante avec \es [abri suffirait
pour le prouver. Cela ne veut pas dire qu'ils n'employaient,
eux, que les centons; de même que les [abri pouvaient se
servir des centons, de même les centonaires pouvaient manier
la dolabre et les échelles. A Corne, il y avait même, dans
leur collège, une cenluria centonariorum dolabrariorum scala-
riorum, sans doute spécialement exercée au maniement de ces
deux instruments de sauvetage, la dolabre et l'échelle-.
Pour les dendrophores, nous n'avons pas de preuve directe,
mais on admet généralement, à cause de leurs rapports avec
les deux collèges des [abri et des centonaires, qu'ils les aidaient
dans beaucoup de villes '^.
On s'est étonné de rencontrer partout des fabricants de
centons; mais, outre que l'emploi des centons de toutes sortes
était fort répandu, il convient de remarquer qu'il ne fallait pas
un grand nombre d'artisans pour former un collège. Il est clair
que, si l'on réunit les trois collèges ou deux au moins pour
un même service, c'est qu'un seul n'y suffisait pas. Là oh les
fabri étaient assez nombreux, on n'avait pas recours aux cento-
naires ni aux dendrophores '*. Nous avons quelques renseigne-
^ Dans un fragment d'inscription de Vérone publié par Kubitschek
(Arch. ep. Mitth., XVII, 1894, p. 164j, on lit : [arcendis subilis igiii?] um
casibus excuba[nt? ... coUeg]iiun centonario[rum ...
- V 3446. Le collège des centonaires de Côme est connu par quatre
autres inscriptions. Cette ville avait aussi un collegium fabrum, de même
qu'Aquilée avait un collegitim centonariorum, bien que des fabii y fussent
exercés à l'emploi des centons.
■' RoDBERïUS, p. 421, n. 62. Gebhakdt, \>. 7, n. Il Makqiakdt, Privait.,
II, p. 698 (7i9j. Vie privée, II, p. 379. IIirschfeld. /. / , p. 12 (248),
n. 2.
^ C'était j)eut-étre le cas à Saimizegetusa. Voyez supra, p. 197, n. 2.
Otto Hirschfeld a cherché une autre explication de la fréquence des
collegia centonariorum. Il a soutenu (/. /., pp 8-13 = 244-249) que les
centonaires de ces collèges n'étaient pas des fabricants de centons
( 206 )
ments sur le nombre des membres qui composaient leurs
collèges. A Rome, le collegium fiibrum ligniiariorum en avait
(comme les centonaires isolés ([u'ou rencontre», mais des pompiers
volontaires, choisis dans divers métiers, surtout parmi les fabri, et que
le nom de ces pompiers leur venait uniquement des centons qu'ils
employaient principalement poui' faire leur service. Collegium centona-
riorum signifierait : « Corps de pompiers armés de centons ». Les fabri,
membres de ce corps, auraient fait partie en même temps du coll. fabrum.
Là où celui-ci suflisait, il n'y aurait pas eu de corps spécial de pompiers
{coll. cent.). La thèse est fort ingénieuse, mais ne nous semble pas vraie.
HiRSCHFELD allègue d'abord la centui'ie de Côme (V 5446, voyez ci-dessus ',
où il s'agirait de sapeurs-pompiers maniant la délabre et les échelles;
mais nous avons vu qu'on peut y voir très bien des fabricants de
centons exercés à manier ces instruments. Quant au dolabrarius collegii
fabrum d'Aquilée (V 908), il prouve seulement ([ue dans cette ville, où il
y avait aussi des centonaires et des dendrophores, c'était en partie dans
le coll. fabrum qu'on avait choisi les pompiers armés de la dolabre, et
cela était naturel. Le col[legium] velle^ranoruYm] centonarioru\ji)i\ de
Carnuntum (III 4496a et 11097. Ephem. ep , II, 898» serait composé de
vétérans devenus pompiers, suivant Hirschfeld; nous avouons qu'il pré-
sente une difliculté pour nous; mais il peut s'expliquer par un asyndéton
(Maué, Die Ver'eine, p. 42. Cfr. Pais, 870 : c{oll.) f{abrum) c[entonario-
rumque), en lisant : [Julius V\ale{n)s e[t Flavius] Adauct[us m^agistri
col(legiorum) vet[e]7'anoru{m), centonariorit{m). Ce qui donne du poids
à cette explication, c'est qu'on rencontre à Carnuntum un col[l{egiwn)\
conveter[anorum) à part (III 11189). Valens était le magister des vétérans
et Adauctus était celui des centonaires. En tous cas, nous avons vu que
partout fabri et centonaires formaient des corporations bien distinctes,
sauf à Milan et à Regium, et que même dans ces deux villes les deux
métiers sont toujours distingués dans le nom du collège : collegium
fabrum et centonariorum. Ce nom ne se comprend pas si les fabri sont
seuls pompiers; car alors il faudrait: coll. fabrum centonariorum, le
corps des fflèri-pomiuers; il ne se comprend pas même si les fabri ne
formaient qu'une partie des pompiers \centonarii\ car ils seraient com-
pris à la fois dans fabri et dans centojmrii. L'expression ordinaire de
collegia fabrum et cent, s'expliquerait encore moins : les fabri (et
souvent aussi les dendrophores) auraient donc fait partie de deux col-
lèges, de l'un comme artisans, de l'autre comme pompiers; et ils
auraient été employés au service des incendies, d'abord comme cento-
narii 'pompiers), puis encore comme fabri, puisque Hirschfeld admet
207
plus de 1300 vers la fin du II« siècle. A Nicomédie, Pline trouve
que 150 membres, c'est très peu pour un collège de fahri. A
Milan, les fabri et les cenlonaru, réunis en un seul collège,
étaient bien au nombre de douze cents '. Des corps si nom-
breux convenaient pour une garde de sapeurs-pompiers.
Remarquons encore que, dans les trois collèges, on trouve
des vestiges d'une organisation toute militaire qui sera décrite
au chapitre III, et que presque seuls ils ont à leur tète des
praefeclij dont le nom trahit une fonction militaire, et l'on ne
conservera plus aucun doute sur leur rôle dans les municipes.
Les villes grecques faisaient encore exception. On n'y trouve
pas les trois collèges, ni même l'un d'eux ; mais on y rencontre
des magistrats municipaux, appelés vjxToa-ToâTriVO', et des
irenarchi : ceux-ci avaient pour mission de maintenir la tran-
quillité publique; ceux-là remplissaient le même service la nuit
et devaient veiller aux incendies. Ils avaient sous leurs ordres
une milice municipale -.
Voilà ce que nous pouvons dire des fabri, des centonaires et
des dendrophores. Les autres collèges étaient également
astreints à des corvées en rapport avec leur métier; tous les
artisans, par exemple, qui pouvaient contribuer à la construc-
tion des édifices publics, étaient requis, aussi bien que les
que les deux collèges faisaient ce service I Ou sait que la loi défendait
même de faire partie de deux collèges à la fois (Dig., Al, i2;2, 1, 1). Et
Constantin aurait fait entrer les dendrophores dans le corps des pom-
piers icentonarii), et dans le collège des fabri (C. Th. 8, 1. 1, on 315)!
Il nous semble bien évident enfin que si le mot ccntonarii est si souvent
intercalé entre deux noms de métiers, c'est ({u'il indique aussi un métier.
A Rome, ce ne sont certainement pas des pompiers, mais des fabricants
de contons. Voyez supra, pp. 112 et 128. 11 en est de même des cento-
naires isolés. Voyez pour l'opinion de Hirschfeld : Liebenam, pp. 102-
104, et contre cette opinion : Maué, Die Vcreiiw, pp. 16-19.
1 Voyez le premier volume, p. 351, n. 2.
- Voyez Gagnât, De miuiicip. niilitiis, pp. 7-40. Herzog, GalL Narb.,
p. 223. Hirschfeld, Gall. Stud., III, p. 5 (241). Maué, Der Praef fabr.,
pp. 100-101. Ils répondent au praefectus vigilum et armortini de Nimes.
( 208 )
fabri. Beaucoup d'autres devaient leur autorisation tout sim-
plement à l'utilité de leur métier. En les autorisant, l'État
avait pour seul but de favoriser le maintien et le développe-
ment de professions utiles. Mais pour éviter les conjectures
incertaines, nous allons passer au Bas-Empire. Les institutions
du IVe siècle, qui nous étonnent parce qu'il ne nous est pas
permis de rechercher leurs racines dans ce III^ siècle si peu
connu, prouveront suffisamment que depuis longtemps, depuis
les Antonins peut-être, les collèges autorisés des municipes
étaient au service de leurs villes respectives.
Les corporations municipales sous le Bas-Empire.
Ce n'est pas que nous marchions désormais sur un terrain
bien solide et que nous puissions exposer en détail les charges
imposées aux collegiati. Tel était, comme nous l'avons établi,
le nom collectif par lequel les codes désignent ordinairement,
sous le Bas-Empire, les corporations des villes de province.
En recueillant les indications éparses ^ on peut arriver à
certaines conclusions indiscutables.
Et d'abord le service imposé aux collegiati et à leurs descen-
dants était municipal. Chaque corporation appartient à sa
cité 2 ; défense fut même faite par Majorien à leurs membres de
quitter le territoire de la ville. « L'entretien et le soin de leur
patrie » leur sont contiés ; « ils exécutent tour à tour certaines
corvées sous la direction des curiales 3 ». Us étaient « néces-
* Voyez les passages énumérés supra, p. 160, n. 1.
- Voyez supra, p. 161, n. 2.
'" Nov. Major., tit. 7, § 3 (458) : De colley iatis vero illa servanda
sunt, quae praecedentium legum praecepit auctoritas. Quibus illudprovisio
nos trac serenitatis adjungit, ut collegiatos opéras patriae alternis vicibus,
pro curialium dispositione, praebentibus, extra territorium civitatis siiae
habitare non liceat.
( 209 )
saires à la splendeur de leur cité ^ ». Leur service est désigné
par les termes expressifs (.Voperae, publica ojjicia, obse(iuiiun
propriae urbis -; ils sont affectés aux nécessités publiques,
comme disent Honorius et Sévère : « corpora publicis nécessita-
tibus obligata 3 ». Faire revivre les collèges détruits, les
restaurer, c'est un bienfait que le peuple de Bénévent récom-
pense par l'érection d'une statue après une invasion barbare,
c'est l'un des litres qui valurent à un riche citoyen de cette
ville le nom glorieux de
Quelles étaient ces corvées? Ici commencent les difficultés et
les contestations. Les codes, qui s'expliquent longuement sur
les devoirs multiples de la curie, sont presque muets sur ceux
des collèges. Aussi s'est-on livré aux hypothèses les plus
diverses.
Voici comment s'exprime Duruy ^ : « Les corporations
vouées au service public (c'est-à-dire aux approvisionnements,
aux mines et aux manufactures) ne comprenaient qu'une partie
des artisans de l'Empire. Ceux qui n'y étaient point entrés
exerçaient librement leur métier, et, suivant la coutume
romaine, ils se réunissaient dans les villes en collèges.
Quelques-uns de ces collèges étaient riches et considérés,
comme l'avaient été, et, sans doute, comme l'étaient encore'^
les nautes de la Saône et du Rhône, et quantité de sociétés de
commerce ou d'industrie, derniers restes d'une prospérité
expirante. Mais les autres, formés par les gens de petits métiers,
végétaient misérablement dans les bouges des cités... On leur
imposait les obligations sordides. C'est une vieille loi, dit l'em-
pereur Majorien (dans la novelle déjà citée), que les collegiati
soient tenus de remplir à tour de rôle, sous la direction des
curiales, tous les bas offices de la cité, ministeria urbium. »
Cette opinion a un double défaut. Rien ne justifie d'abord la
distinction faite entre les collèges riches et les collèges pauvres;
au 1V« siècle, ils étaient tous également misérables et nulle part
les codes ne font une différence. En second lieu, les charges
sordides énumérées dans le Code Théodosien 3 n'étaient pas
imposées aux collèges des cités. Dans les deux capitales, où les
citoyens étaient exempts des impôts et en général de toutes
les charges, sauf de la défense des murs, il avait fallu des
^ Hist. des Rom., VII, pp. 250^251 . Ed. ilL, VII, pp. 192-193.
- Duruy oublie que depuis Septime Sévère, qui saccagea Lyon, cette
ville perdit sa prospérité et ne se releva plus. Voyez Allmer, Musée de
Lyon, II, p. 236.
3 C. Th., 11, 16, 1. 15 = C. J., X, 47, 12 (382). Cfr. C. J., XI, 47, 18
(390).
( 213 )
corporations spéciales pour remplir une partie de ces obliga-
tions sordides, pour faire le pain et pour cuire la chaux •.
Ailleurs, ces obligations reposaient sur la propriété de la
terre "^ et elles étaient imposées par capita ou unités fictives à
tous les propriétaires fonciers '^. Elles étaient d'ailleurs toutes
remplies au profit de l'État et non des villes, tandis que iMajo-
rien appelle les collèges ministeria urbium.
Stemler croit que les collèges étaient destinés à favoriser le
développement du commerce et de l'industrie, ce qui est vrai,
et qu'outre cette utilité économique, ils jouaient un rôle
public, celui de faire rentrer l'impôt du chrysargyre ^. C'est
une erreur manifeste, quoiqu'elle puisse avoir une apparence
de vérité. Une loi parle, en effet, du corpus neqotialorum
chargé de ce soin ; mais elle désigne sous ce nom l'ensemble
des négociants d'une ville, qui choisissaient parmi eux des
délégués [mancipes) pour faire l'assiette et la perception de cet
impôts. Les collèges n'y intervenaient en aucune manière.
L'opinion la plus originale est sans contredit celle de
Rodbertus c. Suivant lui, les collèges ne sont pas des corpora-
tions industrielles; ils ne sont pas composés d'artisans et de
marchands exerçant le même métier, se livrant au même
commerce. Ce sont des réunions de propriétaires fonciers
{possessores)j que l'Etat a chargés d'un service déterminé, avec
exemption de tous les autres. Au lieu d'imposer ces corvées
et ces dépenses à tous les citoyens tour à tour, l'État en avait
' Gebhardï, pp. 6-7.
2 Patrimonia : C. Th., 11, 16, 1. lo et 16.
3 Bouchard, pp. 301. 309.
^ Stemler, p. 74.
•■• C. Th., 43, 1, 1. 17. Corpus a ici le sens large : Cfr. Gôthofr., Pdrat.
ml C. Th., 13, 1. Bouchard, p. 362. Cfr. C. Th.,'i6,2, 1. 15(360) : quorum
nomina matricula neijoliatorum comprehendit. Saint Ambroise parle
aussi du corpus oiinie inercatorurn on iiegntiatorum à Milan, probablement
dans le même sens. Epist., I, 20, 6, Migne (t. II, p. 853). Voyez supra,
p. 139, n. 6.
<■• Rodbertus, vol. VIII, pp. 39i et 418-424.
( 214 )
cliargé un nombre fixé de propriétaires. Ceux-ci devaient
s'entendre pour exécuter leur service au moyen de leurs
esclaves ou de travailleurs loués ; ils en répondaient sur leurs
biens et sur leurs personnes. En un mot, nous avons affaire à
une forme de l'impôt et à des corporations financières. Quant
à leurs noms, ils étaient empruntés à la profession qui se
rapprochait le plus du service. Il en est ainsi, selon Rodbertus,
de toutes les corporations, depuis celles de Numa jusqu'à la
fin de l'Empire, en passant par le collegium Mercurialium ^,
chargé des approvisionnements, et par les nombreux collèges
du Haut-Empire.
Après tout ce que nous avons vu, cette théorie invraisem-
blable mérite cl peine une mention, is'ous ferons seulement
observer ici que les collèges de la république et du Haut-
Empire sont composés en très grande partie d'affranchis;
que les inscriptions nous font connaître dans les collèges une
foule de véritables artisans ou commerçants -; que Pline dit
expressément qu'il n'admettra que de véritables fabii dans le
collège qu'il veut établir à Nicomédie 3; enfin que le Digeste
dit formellement que les artisans seuls jouissaient des privi-
lèges accordés à la corporation 4.
Pour aboutir, il faut partir du texte de Majorien : coUe-
giatis, opéras patriae alteniis vicibus, pro curialium disposi-
tione praebeutibus, et de tous ceux qui associent les colleyiati
aux curiales^. Puisque les collèges remplissaient leurs corvées
publiques sous la direction des curiales, les charges mêmes
des curiales pourront nous expliquer les corvées qu'ils impo-
saient aux collèges.
Or, les curies avaient bien changé. Sous le Haut-Empire,
elles formaient des corps délibérants, de « petits sénats »,
' Voyez le premier volume, p. 35.
- Voyez surtout celles de Lyon.
'' Pmn., Epist. ad Traj., 4"2-43. Voyez le premier vohime, p. loO.
^ DiG., 50, 6, 6 (5), § 12. Voyez supra, p. 50, n. 1.
^ Voyez supra, pp. 209 et suivanl(»s.
( 215 )
comme on les appelait pompeusement en les comparant au
sénat romain •. I.cs magistrats et la curie, composée d'anciens
magistrats, dirigeaient toutes les affaires nmnici[)ales; les
comices n'avaient guère que des attributions électorales. Quant
aux charges de la cité, elles étaient imposées tour h tour aux
habitants, ou bien elles étaient assumées volontairement par
les magistrats et les citoyens fortunés; à cette époque prospère,
les honneurs qui accompagnaient les charges, les compensaient
amplement.
Au IV® siècle, tout s'est modifié. I.a révolution s'est opérée
lentement, car elle plonge ses racines jusqu'au 11^ siècle '^.
Les curiales ne sont plus seulement les membres d'un conseil
délibérant; ils forment une noblesse nmnicipale fondée sur
l'hérédité, car ils sont recrutés parmi les fils de curiales et,
le cas échéant, de force parmi les propriétaires non curiales
assez riches. La curie choisit les magistrats municipaux
dans son sein, tandis qu'autrefois on entrait dans la curie
par les magistratures. Les honneurs municipaux étaient
accompagnés de charges si lourdes que personne n'en voulait
plus. Dans ces charges \munevd) réservées exclusivement aux
curiales se montre la tendance générale de l'Empire à confier
des services déterminés à une classe déterminée de la popula-
tion. Cette règle fut appliquée aux curiales comme aux
collèges, aux fils de vétérans, aux employés des bureaux
[ofliciales). C'est ii eux seuls que sont réservés tous les mimera
civilia ou mumcipalia remplis autrefois par tous les habitants
(cives et incolae). Le terme miinicipes désigne les seuls décurions,
(ît munera civilia ou municipalia est devenu synonyme de
mimera ' decurionum ou decurionalia '^. Les décurions les
subissent par rang d'âge et n'en sont dispensés que quand ils
' AUL. (;ell., XVI, 3, 0. .\ov. Majou., lit. 7, pr. (458).
- Voyez KuHN, I, pp. 236-2o(3. Humbert, Essai sur les Fi)iances, I,
pp. 38^383. Il, i)p. ^211-224. Mauolaudt, SL-Verir., l, p. 195. Orgau. de
r Empire rom., 1, |). 288(tiad. Weiss et Lucas). Kaulowa, I, pp. 898-iX)0.
3 KuHN, I, pp. 59-GO. tioO.
iO )
nul parroiiru l'rclK'lle U)Ui ii« n- i.U"i*"l '«^'^ .uhh-n ,ii,,yens,
mûme riches, ils sont i'\eim> (ie ces charges, parce qu'ils en
onl assez d'autres -. La air est, en somme, une classe de
fonctionnaires ou d'enipl 'Tics, qui servent plus encore
l'Ktat que le municipe ; :, la direction des ser\ices
puhlics œmpris dans le tmitoire de la ville lui est imposée
(muuera cicitatum . Elle -
nisiration nuinicipale et
«•tait l'âme du municipe,
sommes nMuits à douze.
Th«^^dose; ces douze C4mi
seuls, ils supportent ttH.'
administrons tt>utes les.ii
ville, les ^ramies et 1
nous donne les liiro
Voici leurs charges pr
personnel II
les biens d« ...>.....,
parmi eux l'irenarque, «
h\à el de Phuile pc»ur li -
]r marché : ils chauf
«utt*s l«- - dr l'admi-
des ch-.^ Itlat. Elle
us. a De douze cents nous
di^urions d'Antioche sous
ils le sénat; à eux
lourdes. Car nous
Li ca m ftagne et celles de la
^ légères, et on
>épai To^: — - -
yiÀt'u» xai ctaxo? '
CM'
TWV TOTS,, t.
vol. Il, p. .*»•-'...
cxécutetii le> liii.
pp. 218, I. \ n «lu, u. ô.
* Iiu..,.*i(i. .;, 1 ri • C. Ti. :
12, 1 Ndl. IV, pp. 3.n.V:«7). Ki:h>
lUi
p. 8».
I' ~
( 217 )
et les aqueducs, dirigeaient les travaux publics, construisaient
et réparaient les édifices municipaux; ils célébraient les jeux
publics, et ils assumaient les onéreuses fonctions de députes
et de prêtres. Pour l'État, ils répartissaient et percevaient
rimp<3t en argent et en nature et la capitation ; ils distribuaient
une partie de ces impôts aux fonctionnaires impériaux en
guise de salaire et aux armées; ils surveillaient h; transport
[proseculio) des recrues, des chevaux, des vêtements et des
denrées du fisc, ainsi que la fourniture des chariots et de
leurs attelages; ils veillaient à l'organisation et à l'approvi-
sionnement de la poste publique; il choisissaient parmi eux
des préposés aux relais, aux pagi, aux greniers de l'Etat, des
directeurs à l'exploitation de certaines mines, et^c.
La curie tout entière était responsable pécuniairement et
solidairement de ces services, et ses membres devaient se
charger tour à tour soit des dépenses, soit de la surveillance
des travaux manuels qu'ils comportaient. Pour les corvées
pénibles, qu'ils ne faisaient naturellement pas eux-mêmes, mais
qu'ils surveillaient, ils avaient besoin d'ouvriers. Oij les trou-
vaient-ils? Sans doute, les villes avaient encore des esclaves
publics exerçant toutes les professions *, mais les esclaves
diminuaient partout, il fallait des hommes libres, des artisans
libres de tous genres. Où les prit-on? Ce fut sans aucun doute
aux corporations qu'on s'adressa, dans les villes comme à
' Cfr. Wallon, II, i». U8, noie 1 1. III, j)}). 1G8. ^249. Plln., Ep. ad Traj.,
40. 41. C. I. L., V 288G. C. J., VI, 1, 5 (en 319) : mancipia diversis arti-
bu.s praedita, quae ad reinpublicam pertinent, in iisdem civitatibiis placet
permanere. DiG., 4. 6, 10. Pour le Haut Empire, voyez notre bidex colle-
gioriun : collegia done.sdca, servi publici. Sur la /(unilia publica organisée
en collrge à Venafruin et attachée aux aqueducs j)i-obaljlenient, voyez
MoMMSEN, Zeitschrift /'. yesck. R.-W., XV (1850 , p. "297. — Inscr. fausse :
IX 215*, à Bénévent : Concordius colioniae) serru.s liorrcarius. Les magis-
trats municipaux avaient encore leurs employés subalternes, attachés
héréditairement à leur emploi {o/Jicia municipalia). 11 était prescrit de
ne conher ces offices (pi'^ des hommes libres iC. Th., 8, 2, 1. oy. Voyez
Kahlowa, \, p. 901.
( 218 )
Rome. Elles fournirent des aides au chef de police, à l'inspec-
teur des travaux, au curateur de l'annone, au chauffeur de
bains, à l'intendant des relais, des greniers puijlics, au percep-
teur des impôts, à ceux qui donnaient des jeux, à ceux qui
surveillaient la conduite des chevaux du fisc, et ainsi de suite.
Tels étaient, croyons-nous, ces collegiati qui travaillaient sous
les ordres des curiales, selon IVJajorien.
Si les preuves indiscutables font défaut, nous avons au
moins des indices d'une grande valeur. Les propriétaires
fonciers qui devaient à l'Etat des corvées pour divers services
publics, notamment pour le transport des denrées perçues sur
leurs terres, employaient, pour les exécuter, les colons attachés
à la glèbe t. De même les décurions avaient à leur disposition
les collegiati pour les services qu'ils devaient surveiller.
Ils avaient à surveiller, par exemple, la conduite des ani-
maux du fisc '2, et Valentinien I nous dit formellement que
certains collegiati de chaque ville devaient les conduire
jusqu'au territoire de la cité voisine '^\ en cas de besoin ^,
on leur adjoignait les cabaretiers et les boutiquiers libres
(tabernarii).
A Antioche, sous Julien, Libanius distingue six cents décu-
rions qui subvenaient aux frais des liturgies ou charges
nmnicipales, et six cents autres qui les exécutaient de leurs
bras s. Ailleurs, il raconte qu'un décurion d'une petite ville
1 KuHN, I, p. 253, note 1929: pp. 28-2-283, n. 2107-2108.
2 KuHN, 1, p. 50, n. 315.
5 C. Th., H, 10, 1. 1 (369). Voyez supra, p. 1(55, n. 3.
^ G. Th., 11, 10, 1. 2 (370) : majore animalium numéro repente adve-
niente.
" Libanius, Orat., vol. Il, p. 527, 9 (éd. Reiske, 1784) : ~Hv, ôx' 7)v r\]x<.v
fj PouXtj izoXkri Ttç, àvSpeç è^axo'ato'. • o'jxot, [xèv ÊXstTO'jpYouv xoic, ouaiv,
sxcpot 0£ ToaouToi To x£XEudji.£vov ETTOtouv xo"îç (TW{j.aatv. Cfr. KUHN, I, pp.
247-248. Tantôt Libanius compte les six cents derniers parmi les curiales
(voyez supra, p. 210, n. 3), lanlùt il les en exclut. — Reiske (vol. II,
p. 527) traduit autrement le passage : illi edebant niunera aedilicia; hi
exactores erant fiscales, aut opéra publica ab operis e.viiiebant. Il semble
que xo xôXsudfjLcvov s'oppose à cette explication.
( 219 )
se ddcida un jour à tout faire de ses deniers et de ses bras;
non seulement il surveillait les bains publics et fournissait à
ses frais l'eau et le bois, mais il portail lui-même les seaux
d'eau froide ou ehaude, et servait le public parce que les aides
manquaient '. Il parle aussi de porte-massues qui étaient
sous les ordres des irénophylaques (magistri patji) -. On peut
admettre avec Kuhn que ces auxiliaires des dëcurions orien-
taux correspondaient aux collegiati de l'Occident •^.
Quelques-uns de ces collèges occidentaux sont désignés
nominativement. Quoiqu'il n'y eût pas de distributions de
blé dans les municipes en i^énéral ^ les décurions devaient
' LiBAMLS, OraL, vol. I, p. \Si. Il y a i\e< villes où il ne reste presque
plus de curiales, dit-il, et le mrnic doit tout taire : 'AXX 's'.jtxwvTroXEtov,
£v ali; 6 aoTÔ^ sla-p aTts-., Àoûô'., xal ttczX'.v Àouî-.. Tî-oj-o ÈaT'.v 10 aVvtytjia;
XouEi xi TT, yopTjyîa twv ç-JXtov, xal tov à|j.cpop'!7y.ov Xao(ov, BaXavs'j; ô
Xsixo'jpywv y-'yvETa'.. Reiske : deciirio fit bahwator. Libanils ajoute que le
malheureux curiale, quand l'un demande de l'eau froide, tandis que
l'autre veut de l'eau chaude, doit subir la eolèi'O de ses administrés. —
Ailleurs, il parle d'un curiale de petite ville qui fait tout cela lui-même
l)ar avarice, II, p. 086, 9 : Dp^oTiv -u-.: TJyystXs [jloi tôv aÙTÔv àvôpw-ov èv
jjLtxpa Tivt koXc'. "zi -J ivÔov Ta tô twv i-j.jwi iço) ôtoixî'îv, xa\ roXXà;
sys'.v Ta; Taç£'.;, xa\ 7:po7T,yopîac;, £U~p3CTT0v-:a, to"?; kaoTou ypT,;xa7'.
XoOo-Oai To"-; èxe"? TzapÉyovta • tôv o'a-jTov à;j.cpop£a Xaêo'vra, ^aXavs'a
ysvÉaÔat, xai TqJ ^oyo^t-zi OaOua to'jto ÈvsyxETv, optovT'. tÔv 7:oA'-E'jo'|j.£vov
xal xauxa Èpyaî^o'u-Evov • -o-j-iu toV/jv èçt^v av ÈyE'.v xo'.vojvoùc O'jx oXtyo-j? •
xat TTpô; TO'JTto -a'jxl x'av to) ^aXavEt'qj oiaouyslv, £'. [jLr, XEpoo; fjV a'jxàj tô
[X£[j.ov(îjc76a'w. On voit que Libamus applique aux curiales les mots :
XE'.ToupyoOvTa;, yopr^y^a, ol t:oX'-e'jo;j.evo'., et à leurs aides les suivants :
-rj XEXEuo'aEvov ino'.o'XJ zol^ acoijiaa'.v, |3aXavEu;, TaÔTa Èpya^ofjiEvov. Clr.
C. Th., 12, 1, 1. 131 (393): I)i calefacieiidis apud A)itiochi(un tfier))ii.'<,
veterem praestationis consuetudinem servari placet.
- LlBANIUS, II, p. 530, 16 : xal [xirrr, -rapà to-; E'.pr.vo'^jXaç'.v 6 twv
XOOUVT/iOOOOV [jl'.jOo;.
•> KuiiN, II, pp. 247-2-48. Karlowa, 1, p. 902 : Im Orient srhcinensolche
Collegiati niciit vorgckommen xusein.
*■ HiRSCHFELD, Aunoua, pp. 83-85. De Iîlggieuo, IHz. epigr., 1, pj). 485-
480. Cependant il y avait des distributions de blé à Alexandrie. Gothofu.
ad C. Th., 14, 26, 1. 2. C. J., XI, 27, 2. Chhomc. Pasch., p. 711
( 220 )
veiller aux approvisionnements, sous le nom de curatores
frumenti ou annonae, c'est-à-dire qu'ils devaient acheter du
blé et le vendre à un prix parfois fixé •. Peut-être devaient-ils
même concourir au transport de Vannona Urhis Romae sur le
territoire de leur cité -. Ils devaient, en tous cas, assurer le
ravitaillement des troupes de passage et des relais de la poste
impériale 3. Ce service donnait lieu à des corvées, que le
curateur de l'annone avait probablement le droit d'exiger de
certaines corporations, par exemple des bateliers ^* et des
charretiers, pour les transports, puis de certains marchands
et des meuniers-boulangers. Une inscription de Sitifis, en
Maurétanie, nous apprend qu'il existait dans cette ville, sous
Valentinien, Théodose et Arcadius, des fours à cuire le pain
établis dans l'intérêt de l'annone publique. Le gouverneur
de la province les remet en bon état et fournit aux boulangers
le matériel nécessaire pour cuire le pain destiné au peuple S.
Il nous semble certain que ces pistores publicae annonae 6
étaient l'un des collèges soumis aux curiales.
(éd. DlndOUF) : rCo auyoûaxtjj [jltivI ccjztiç xt]; ç tyoïxxtwvoç àvrjptT^Ô-r)
■zzAzuû; t, yopTjyt'a Tùiv auTwv tzoXixixwv apTtov. EUSEB., tlist. eccL, VII,
^21, j). '218''. Procop., Hist. arc, 26, p. 77. Cfr. WallOxN. III, p. 244.
huRUY, Hist. des Rrnn., VI, p. 317. VII, p. 30. Il y en avait aussi à
f^almyre, où l'on a reti'ouvé des lessères frumentaires, des bons de pain
et d'huile. Vogue, hisi-r. sémit., i6, 446-147. Waddington, Inscr. de
Syrie, 2606a. 2607. 2629. Cfr. DuiiUY Hist. des Rom.. VI, p 67 (éd. non
illustrée). Peut-être aussi à Carlhage : G. Th., 14, 25, /. vu.
• KuHN, I, pp. 46 sqq. Hirschfeld. Annona, pp. 84-85. Houdoy, Droit
municipal, p. 469. Juu.iot, Musée de Sens, p. 35. Wallon, III, p. 180.
Sur le prix, voyez Dig., 50, 1, 9. 50, 8, 5. Cfr. III 6065 : promagister
frumenti munidpalis, et les tables du Corpus : honorati et principales
municipiorum, par exemple, vol. X, p 1158.
- Hirschfeld, Verwalt., p. 138, n. 1.
5 C. Th., 8, 5, avec le Paratitlon de Gothofr.
* Voyez supra, p. 34.
•'■ C. I. L., VIII 8480. Au lieu de molas (supplément de MoMiMSEN), nous
suppléons fornaces, à cause de coclionem
••• Cfr DE Rossi, Ann. d. /., 1885, p. 225.
( 221 )
De même les curiales chargés de la surveillance des travaux
publics sur le territoire de la cité répartissaient sans nul
doute les corvées entre les ouvriers du bâtiment [fabri, [abri
tignuariï), les dendrophores qui fournissaient le bois, et beau-
coup d'autres L
Ceux qui administraient les eaux de la ville avaient peut-être
à leur disposition les collèges de fontainiers que l'on rencontre,
par exemple, à Venouse et peut-être à Aquilée-.
Sous le nom de curatores liidorum 3, les magistrats muni-
cipaux et les curiales étaient astreints à surveiller et à donner
les jeux. A cet ett'et, ils avaient à leur disposition des collèges
de comédiens [scaenici] et de cochers du cirque. Le Code de
Théodose en atteste l'existence dans toutes les villes, comme à
Rome, et parle particulièrement de ceux d'Afrique et d'Orient 4-.
Nous avons vu, du reste, que dès le II« siècle, on trouve dans
toutes les parties de l'Empire des associations d'artistes drama-
tiques, de mimes, de pantomimes, de scabillarii, etc. î>. Pour
les cérémonies religieuses, sacrifices, banquets, cortèges, on
' Lacta>'CE parle des ouvriers et artistes requis dans les provinces
pour bâtir les édifices que Dioclétien faisait partout élever : Hue accede-
bat infinita qiiaedam cupidiîas aedificandi, non minor provinciarum
exactio in exhibendis operariis et artificibus et plaustris et omnibus
quaecumque sint fabricandis operibus necessaria {De Morte persec, 7);
mais il est probable que ces réquisitions étaient faites aux propriétaires
fonciers. Sur le passage d'Aurélius Victor (Epist., \l\, o), d'après lequel
on a aUribué à Hadrien la formation de collèges occupés aux bâtisses,
voyez supra, p. 121. Sur les hypothèses aventureuses de Choisy, voyez
supra, pp. 119 et suivantes.
'- C. I. L., IX 460. V 992. 8307. 8308. Saglio (s. v. aquarii) et
HiRSCHFELD, Vei^w., p. 172, n. o, pensent que ces aquarii étaient les
fontainiers de la ville. Voyez supra, p. 143, n. 2.
• C. /. L., XII, p. 942. XIV 375. 376. Th. Mom.mse>\ Ephem., ep., III.
p. 322. Cfr. HouDOY, Op. cit., pp. 194. 479. 489. Gothofr., Parât, ad
C. Th., lo, o, vol. V, pp. 393 et 414, 2^ col. Parât, ad 14, 10, vol. VI,
p. 280 : eligebantur sacerdotes excurialium corpore, etc.
* Soyez supra, p. 171.
'" Voyez la liste, supra, pp. 145 à 157 et 171.
0)99
trouve également partout, comme à Rome, des cantabrarii, des
signiferi, des frediani et des dendrophores ^. On rencontrait
aussi partout ces diseurs de bonne aventure, appelés nemesiaci
ou vitiitiariiy qui étaient regardés comme nécessaires aux
réjouissances publiques -. Toutes ces corporations étaient
affectées à leur condition ; sans doute les organisateurs de
spectacles et de fêtes pouvaient exiger leur concours 3. On
y forçait même les chrétiens, comme le prouve un très curieux
passage des canons d'un concile tenu à Carthage à la fin du
IV® siècle ou au commencement du V«. Les Pères d'Afrique
demandaient à l'Empereur la suppression des banquets
accompagnés de danses criminelles dans les rues et sur les
places et l'interdiction des spectacles et des autres jeux le
dimanche et aux fêtes chrétiennes. Ils ajoutaient : « Il ne
faut pas qu'un chrétien soit astreint à concourir aux spec-
tacles du théâtre et aux autres jeux, surtout parce que per-
sonne ne peut imposer, par la persécution, la nécessité
d'exercer une profession contraire aux préceptes divins; il
faut que tout homme conserve la volonté libre que Dieu
lui a donnée. En effet, il faut surtout envisager le danger
des corporati que l'on force, par la terreur, de prendre part
aux spectacles, contrairement aux lois divines ^. » Quels
1 Voyez supra, p. 138. Pour les dendrophores, voyez supra, pp. 12'2
et 170.'
2 Voyez supra, pp. 138 et 170.
3 GoDEFROY leur accorde trop d'importance parmi les collegiati des
villes, quand il déclare que ceux-ci étaient principalement religieux et
destinés à rehausser les fêtes et spectacles (vol. V, p. 158 : collegiati
erant ferme sacris deservientia collegia).
* yec non et illud petendum, ut spectacula theatrorum, ceterorumquc
ludorum die Dominica ... amoveantur ... Nec oportere etiam quemquam
cliristianorum cogi ad haec spectacula : maxime quia in his exercendis,
quae contra praecepla Dei sunt, nulla persecutionis nécessitas a quoquam
adhibenda est; sed oportet uti homo in libéra voluntate subsistât sibi
divinitus concessa. Corporatorum (var. : cooperatorum) enini ma.nnic
periculuni considerandv.m est, qui contra praecepta Dei magno terrore
( 2-28 )
sont ces corporali pour (|ui les Pères revendiquent la liberté
de se soustraire à une profession défendue par les préceptes
divins? Des lois de cette époque nous le disent. En Pan 899,
Honorius prescrivit que toutes les réjouissances populaires,
tous les jeux, toutes les réunions et les banquets qui accom-
pagnent les vœux publics soient permis, mais il ajoute qu'il
faut en bannir les sacrifices païens et toutes les superstitions L
Il s'agit (Jonc des artistes voués aux spectacles et aux jeux.
Treize ans plus tard, Honorius qui n'ose résister aux désirs
du peuple, rappelle en même temps que les autres corporati
fugitifs, plusieurs de ces collèges : les vitutiarii et nemesiaci,
siyniferi, canlabrarii '^.
Ce qui précède, quoique plein de lacunes, suffît pour donner
une idée des collèges dans chaque ville : ce sont des corpora-
tions d'ouvriers et d'artistes, autrefois libres, maintenant
astreintes chacune à une corvée particulière, sous les ordres
des curiales, et cette corvée était propre a leur métier ou à leur
art.
TROISIÈME SECTION.
Administration centrale.
H nous reste à étudier les corporations qui se rattachent à
l'administration centrale. Dans l'administration civile et mili-
taire, tout le personnel inférieur des bureaux est composé
(Vofficiales, d'employés qui ne formaient pas des collèges
proprement dits '^. Nous ne trouvons des corporations que
coijuntur ad speclactila convenire. Conciliorlm Tomls IV, Paris, 1644,
p. 531. Conciliiun Africanuin tenu en 424 (?;, sous Théodose, Canons 27
et 28, Cfr. Gothofr. ad 16, 10, J. 17, vol. VI, p. 318.
' C. Th., 16, 10, 1 17 (399).
2 C. Th., 14,7, 1. 12(412). Voyez supra, pp. 138-139.
^ KuHN les a étudiés dans son deuxième volume.
( 224 )
dans radministration financière. Les revenus de l'Etat com-
prennent les impôts directs et indirects et, en outre, les pro-
duits de la monnaie, des mines et carrières et des manufac-
tures impériales. Nous passerons en revue ces diverses
branches.
§ 1. Collecteurs des impôts et fermiers publics.
Nous avons étudié plus haut les corporations qui percevaient,
au profit de l'annone, certains impôts en nature dans les
régions suburbicaires : c'étaient les susceptores vint, les sunrii,
les pecuarii et les boarii ^. Les autres impôts levés directement
par l'Etat étaient perçus par des fonctionnaires véritables,
appelés susceptores, collecteurs, qui ne formaient pas de
collèges -.
Tandis que les impôts directs furent mis en régie sous
l'Empire, les impôts indirects et l'exploitation de certaines
mines et carrières et celle des salines continuèrent à être
loués à des publicains qui se constituaient en compagnies
[socielates] pour réuifir les capitaux nécessaires. Ces sociétés de
publicains subsistèrent jusqu'à la fin de l'Empire. Elles pou-
vaient former des corporations {corpora), dit Gains, qui men-
tionne particulièrement les publicains qui exploitaient les
mines d'or et d'argent et les salines '^. Mais le texte de Gaius
1 Voyez supra, pp. 89-100.
2 Le siisceptorum Ostiensuim sive Purluensiiim antigiiissimum corpus,
réorganisé au milieu du IV*^ siècle, était un collège relatif à l'annone,
qui, malgré son nom, n'avait probablement rien de commun avec la
perception des impôts. Voyez supra, p. 62.
5 DiG., 3, 4, 1, pr. : Neque societas iieque collcgium neque hujusmodi
corpus passim omnibus habere conceditur : nam et legibiis et senatus
consultis et principalibus constitutionibus ea res coercctur. Paucis adrno-
dum in causis concessa siint fwjnsmodi corpora : ut ecce veciigalium
pnblicoynim sociis permissum est corpus habere vel aurifodinaruni vel
argentifodinarum et salinarum. Voyez le premier volume, p. 155.
( 225 )
, ou ne prouvent rien c. A Rome, il existait, en l'an
202, un collège de saccarii salarii totiiis urbis {et) campi
sal{inarum] rom[anarum) "', portefaix, qui portaient peut-être
le sel des entrepôts [salinae) situés à Rome près de la porta
Trigemina chez les revendeurs 8. Au IV^ siècle, les locataires
pense qu'il s'agit d'ouvriers mineurs, A. d. L, 1870, p. 130. Yoyez supra,
p. 146. HmscHFELD {Sitz-imgsber. der Wiener Akad., 1874, p. 369) croit
qu'il ne peut s'agir d'ouvriers mineurs dans l'inscription III 941, parce
que le dédicant ne porte pas un nom servile. Voyez encore Hirschfeld.
Verw., pp. 76, n. 5, et 77, n. 4. Cohn, p. 183, n. 85. Liebexam, p. 116. —
Cohn cite encore : III 1284, où il s'agit d'un dec{urio) col{oniae), et non :
col{legii). Il cite à tort : V 5892 et VI 9136, comme parlant de publicains.
' III 1307 ; voyez infra, p. 236.
2 En Lusitanie, à Aljustrel, dans la lex metalli Vipascensis. Ephem.
EPiGR., III, p. 173. C./. L., II5181.
- XI 390. 391, à Ariminum. Cfr. Marquardt, St.-V., II, p. 160. n. 4.
Org. fin., p. 204, n. 1, avec la note de Dessau et von Domazewski.
Dessau, B. d. 1 , 1883, p. 215. Liebenam, p. 115. Salinatores désigne des
marchands de sel dans Arnob., II, 38 : salinatores, bolonas, unguen-
tarios, aurifices, aucupes.
^ Cohn, pp. 182-183. C. /. L., III 42* : coll. salinari{orum).
^ III 1363 : salinar[um), et non : salinari{i).
'■' III 1209. X 7856 : satariius) soci[orum) s{ervus) et non : salari[oru)n)
sociioriun) s{ervi(s). Cfr. Hermès, I, p. 136.
7 Bull, corn., 1888, p. 83.
8 Lanciani, dans le Bull, corn., 1888, p. 87. De Ruggiero, Diz. epigr.,
I, p. 311, et B. d. L di diritlo romano, 1888, p. 65. Gatti, Notizie, 1888,
p. 288. {Atti, p. 624.)
( 227 )
de ces magasins, misa la disposition des marchands moyennant
une redevance, formaient une corporation, chargée aussi du
chauffage des bains publics et portant le double nom de man-
cipes ou condudores salhiarum et de mancipes thermarum '. Nous
avons vu que l'exploitation de ces entrepôts, où tout le sel vendu
à Rome devait être déposé, leur procurait des bénéfices destinés
à rémunérer leurs services ''^. Nulle part il n'est question
d'un collège des fermiers des salines d'Ostie. Une inscription
fait connaître à Rome un corpus salariorum 3, qui sont peut-
être les marchands de sel en détail ou les marchands de sau-
mure, plutôt que des concessionnaires de salines ^.
D'autres publicains formaient-ils des collèges? Nous n'en
avons trouvé nulle trace. Le corims omnium mancipum de
Rome est très problématique; comme il élève une statue à un
ancien préfet de la ville avec d'autres collèges de l'annone '\ il
doit se rattacher aussi à cette administration, et nous sommes
tenté de croire qu'il s'agit des boulangers qui portaient le
nom de mancipes 6.
> C. J., IV, 61, 11 (Arcadius et Honorius).
~ Voyez supra, pp. 12o-126.
5 VI 1132 : Divo Constantino Augiislo, corpus salariorum posuerunt.
^ LANCIA^'I, /. /., p. 89 : pixxicagnoli o salsamentari. Marquaudt, Priv.,
112, p, 469. Yie privée, II, p. 99, n. 2 : Salinenpiichter. St.-V., IP, p. 160,
n. 6. Org. fin., p. 204, n. 3, De Ruggiero, Dii. epigr., I, p. 311.
•• VI 1742. Il honore Alemmius Vitrasius Orfitiis, P. U. au milieu du
IV^' siècle (voyez le premier volume, p. 509j. Parmi les collèges qui
honorent le même personnage, on trouve le corpus pistorum magnario-
rum et castrensariorum, qui ne renfermait qu'une partie des boulangers.
Sur le mot mancipes, appliqué aux boulangers, voyez supra, p. 83.
6 II est question d'autres mancipes [C. I. L., VI 1016. Ephem. ep., IV
787. Gagnât, Impôts indir., pjj. U7-lol), qui perçoivent le vectigal fori-
cularii et ansarii promercalium. Bull, com., 1884, p. 8, n. 709 : man-
cipes et i unctor es jument arii viarum Appiae Trajanae item Anniae cmn
ramulis, en 214; ils avaient entrepris l'entretien de ces routes et le
transport par bêtes de somme sous la surveillance des praefecti vehicu-
lorum. Rien ne prouve qu'ils formaient des collèges. Cfr. VI 948o. —
Le collegium mancip{um), à Herdonia (IX 690), est problématique; peut-
être est-ce un collège d'esclaves publics : mancip{iorum).
( 228 )
En résumé, l'épigraphie ne fournit qu'un seul collège, celui
(le la Dacie, qui semble bien être un collège de publicains, et la
thèse de Cohn, très vraisemblable d'ailleurs, a besoin d'être
confirmée par des preuves plus convaincantes.
§ 2. La monnaie.
a) Fabricatiox de la monnaie. Monelarii.
En l'an lo de notre ère, l'empereur partagea avec le Sénat le
droit de battre monnaie; il prit pour lui le monopole de l'or
et de l'argent, laissant au Sénat celui du cuivre. Durant trois
siècles 1, la monnaie impériale fut fabriquée par des affranchis
et des esclaves du prince, sous la direction d'affranchis impé-
riaux, et, depuis Trajan, d'un chevalier {procurator monetae).
Cette familia monetalis '^, divisée en plusieurs sections suivant
les diverses opérations du monnayage 3, était fort nombreuse,
puisque sous Aurélien un procurateur du fisc put susciter une
réyohe {belluin monetariorum), dont la répression coûta la vie à
sept mille soldats ^. Dans son sein s'étaient probablement
formés un ou plusieurs collèges funéraires, quoiqu'il n'y ait
pas d'indice sûr.
La monnaie sénatoriale était frappée, comme sous la répu-
blique, par les triumviri monetales et contrôlée par un fonc-
tionnaire impérial.
^ Voyez Th. Mommsen, Rom. Miinzwesen, \). lil. St.-R., II, pp. 984-987.
HiRSCHFELD, Verivalt., pp. 92-97. Wiij.ems, Droit public romain, 5^ éd.,
)). 50-2.
"2 VI 239 : Genio familia e monetal{is), par un esclave impérial. VI 298 :
Familiae monetari{ae) .
5 VI 42. 43. 44. 239. 298. 675. 1145. 8454-8465. Hirschfeld, Yerwalt.,
p. 95. Marquardt, St.-Y., II, p. 66, n. 4. Org. fin., p. 81, n. 2.
Th. Mommsen, Rôm.'Miinuvesen, p. 747.
* Vopisc, Aurel., 38. Hirschfeld, Yerwalt., pp. 94-96. Th. Mommsen,
Op. cit., p. 799.
( 2-29 )
Aiî IV' siècle ', la fabrication des monnaies était exclusive-
ment réservée au prince, et elle n'élait plus confiée à des
esclaves. En 317 -, ce service est déjà aux mains dliommes
libres {monetarii), formant des corporations bérédilaires. Les
mcits colle()ia et corpora '^ qu'on leur applique officiellement,
prouvent déjà leur liljerté. Ce qui la prouve encore, c'est que
Julien, pour compléter la curie d'Antiocfie, prend des mone-
tnrii, y-h twv ioyaa-aijivojv to vojjL'.^jjia '^; ils étaient donc libres
et pouvaient être riches. De plus, s'ils avaient été esclaves,
Constantin n'aurait pas eu besoin de leur interdire d'aspirer
au perfectissimat et au rang de ducenaires, de centenaires et
(ïeijregii ^. Enfin, leurs biens étaient affectés à leur service ♦!.
Quand avait eu lieu ce changement et pour quelle raison?
Voici ce qu'on peut conjecturer. Longtemps la monnaie ne fut
guère fabriquée qu'à Rome. Depuis Aurélien, elle fut aussi
frappée dans les provinces, et au 1V« siècle il y a des ateliers
à Home, à Siscia, à Aquilée, à Lyon, à Arles et à Trêves ". La
Notitia n'en renseigne pas en Orient, mais le Code Théodosien
en parle, spécialement de celles de Cyzique en Bithynie ^. il
' C. Th., 9, 21. 10, 20, 1. 1. 10. 16. Cfr. (;othofr , Parut, ad 9, 21, et
ad L 1 (10, 20). Walter, ^ 412. Bouchard, pp. 286 290. Wh.lems, Droit
public, 5e éd., pp. 611. 636. Serrigny, 1111. Karlowa, I. pp. 840. 916.
HuMBERT, Essai sur les finances, I, pp. 373. -497. 510.
2 C'est la date de la première loi connue (C. Th. 10, 20, 1. 1).
•' C. Th., 10, 20, 1. Ul
^ JuLiAiN., Misopogon, 28.
- C. Th., 10, 20, 1. 1.
<- C. Th., 10, 20, 1. 16.
7 }iot. Dig. Occ, XL 38-44. Or., XIII, 18. CIV. HniscHFEi,!), Verwalt.,
p. 97, n. 24.
^ C. Th., 10, 20, 1. 1. 16. Gothofr., ad l. 1. Sozomène parle de rnouc'
tarii chrétiens h Cyzique, sous Julien. Ce i)rince défendit à l'évêipie
Eleusis d'entrer à Cyzicjue avec des chrétiens étrangers. Il ci'aignait une
sédition, surtout s'ils se joignaient aux monetarii et lanarii chrétiens de
cette ville : aovaipo[ji.£vojv a'!>xoî; ... xiov aTiô zr^q, ttoXeco; Xpiaxiavor; y.al
Twv ÔTjtjLoaîtov èpioupyùiv, xal xtov xsyv.xcov toj voiJL''aaaxo; • oV Tî/rjOos
ovTEj;, xal £t<; Ôuo Tâyui.axa -oXuàv6pco-a O'.ïXcxptas'voi, £X 7:poaxaY;-».aTo;
( 230 )
fallut donc réunir un personnel pour ces ateliers nouveaux, et,
h défaut d'esclaves, l'empereur engagea des ouvriers libres;
dans chaque établissement, ces ouvriers formèrent un collège,
qm devint héréditaire.
La monnaie dépendait, au IV® siècle, du comte des Largesses
sacrées ' . Chaque atelier avait à sa tête un procurator monetae -.
Les ouvriers exécutaient tous les travaux relatifs à la fabrica-
tion : la gravure des coins, la fonte du métal, le façonnage et
le frappage des pièces ^. Les matières étaient fournies par la
caisse des Largesses sacrées ; elles provenaient des mines ou
des contributions payées en lingots; les particuliers pouvaient
aussi faire convertir en monnaie, moyennant un droit de
fabrication, leurs métaux autres que l'or 4.
b) Mise en circulation : nuinmularii, collectarii.
Sous le Haut-Empire, la familia monetalis renfermait des
nummularii, chargés de vérifier le titre de la monnaie. Il
faut les distinguer des banquiers ou agents de change ^, qui
portaient le même nom ; ils avaient, eux aussi, un comptoir
[mensa] où ils mettaient les monnaies nouvelles en circulation,
acceptaient au cours les monnaies anciennes et étrangères, et
vérifiaient les pièces qu'on leur soumettait G.
T(J5v Trplv ^aj'.Xicov à'aa yavai^i xal or/.EÔo'.; àvà ttjv K'j^ixov otstptêov,
sTouç exàaxou pT,TT]v aTiocpopàv -rw ot) p-oa-'w xaTaTiôsvxôç, o\ tjièv axpa-
TicoTtxwv yXaaOowv, o\ ôè, veoupywv vo;j.ta[j.aT(jav. SozOïM., Hist. eccL,
V, 15 (14). Éd. MiGNE. vol. 67, pp. 1236- 1237. A Constantinople, voyez
NoTiT. U. C. P.. Xlll, 12, éd. Seeck, p. 239.
^ NotitiaDign. Or., XIII, 19. Occ, XI, 38-44. Cassiod., Var., VI, 7.
C. Th., 1, 32, 1. 3.
2 Notitia Dign., l. L C. Th., 1, 32, 1. 3. § 2(377).
5 GoTHOFR., Paratit. ad C. Th., 9, 21.
* Bouchard, pp. 288-289.
•' Voyez supra, pp. 114-113.
« Marquardt, St.-V., II, p. 66, n. 4-7. Org. fin., \). 81, n. 2-5.
( 231 )
Au IV^ siècle ', nous trouvons -a Home un collège de collec-
tarii -, appelé aussi nummularii, àpyjpajjo-X'o'! •% etc. Cette
corporation semble avoir hérité des fonctions des nummularii
de Uifamilia monelalis. Elle fut peut-être établie par Constantin,
(|uand ce prince réorganisa la monnaie. Banquiers de l'Etat,
les collectarii avaient le privilège de mettre la monnaie nouvelle
en circulation. Ils devaient aussi vendre les pièces d'or {solidi)
au public, au prix fixé par l'Etat [laxatio). A la fin du IV^ siècle,
le prix de l'or, qu'ils devaient eux-mêmes acheter ù la bourse
(in fora rerum vcuaiium), montait sans cesse, et le prix fixé pour
la vente était presque toujours au-dessous du prix d'achat, de
sorte qu'ils faisaient des pertes considérables. L'arca vinnria
leur fournissait un supplément fixé par solidus vendu, mais
cela ne suffisait pas. « Incapables de supporter un fardeau »
dont ils ne pouvaient plus se débarrasser, ils supplièrent Valen-
linien II de fixer un taux équitable pour la vente, comme
l'avait déjà fait vainement Cratien. Symmaque, alors préfet de
Rome, appuya leur demande, mais on ne sait ce qui arriva 4.
' Voyez MoMMSEN, Be7\ dersàchs. Ges., I80I, p. 302. Rom. Mïinzwesen,
].. 84o. Trad., III, p. 151. Marquardt, St.-Y., II. pp. 45, n. 10, et 66, n. 5.
Org. fin., \)\^. 55, n. 3, et 81, n. 2. Bouchard, p. 289. Humbert, dans le
IHct. de Daremberg, s. v. collectarii. Voigt, Die rôm. Bankiers, p. 522
llO), n. 21. GOTHOFR., vol. III, pp. 203-204 {ad 9, 22, 1. 1). IV, p. 579
Uid 12, 6, 1. 13), et p. 600 {ad 12, 7, 1. 2).
2 Symm., Epist., X, 42 (49) ou Relat., 29. en 384. >'ov. Val. III, tit. 14,
§ 1 (445).
3 VoiGT, p. 522 (10), n. 28. - C. Th., 12, 1, 1. 37 (344) : Hoc et in cal-
cariensihus et fabricensibus et argentariis observetur — curiae restituti.
* Symm., 1. 1. : Vendendis solidis, quos plennnqiie pitblicus usiis exposât,
collectariorum corpus obno,nuni est, quibus arca vinaria statutum
prelium subministrat. Unie hominum generi taxationis exiguae vilitate
NUtanti divus [rater (se. Gratianus) muninis vestri tantum pro singulis
soiidis statuit conferendum , quantum aequitas illiiis temporis postulabat,
d.d.d. imppp. {scil. Valentinien II, Théodose et Arcadius). Sed paiilatim
auri enormitate crescente vis remedii divalis infracta est, et cvm in
l'oro venalium rerum majore siunma solidus censeatur, nummulariis
pretia minora peyidiintur . Petunt igitur de acternitate vestra pro ratione
( 232 )
En 44o, Valentinien III est encore obligé de prenrlre une
mesure semblable : il fixa le prix de vente du solidi(>i à
7000 deniers de cuivre au minimum, ajoutant que les coller-
tarii Tachetaient à 7200. Il dut menacer les contrevenants de h
peine capitale, et Totiicc du préfet de la ville encourait une
amende de 10 livres d'or, s'il permettait de violer cette loi '.
Plus d'une fois, il fallut prévenir les fraudes dont les coUectfirii
étaient victimes ou dont ils se rendaient coupables-.
Le corpus collectariorum dépendait du préfet de la ville «"î.
A Constantinople, il existait une corporation sembliible
qu'un édit d(; Justinien appelle tô twv apy'joo-paTwv a-toaâTcicv
ou ar'j7Tr,;j.a '«■ ; ce sont probablement les mêmes que les Codes
appellent nummiilarii ou argentarii ; ils étaient attachés à leur
service par des liens héréditaires ^.
§ 3. yfdmifacturi's de VKtnt : gynaeciarii, linteones ^K
Nous avons vu que les empereurs nourrissaient la cour
l'administration et l'armée; sous le Bas-Empire, ils leur four
praesenli fiuslae definilionis augmenta, qui jam tanto oneri smlinendu
pares esse non possunt. Cfr. C. Th., 12, 6, 1. 13 \Valcntinien I^'", en 367).
Th. Mommsen, Op. cit., pp. 845-846.
1 Nov. Val. III, /. /. : Xe unquani intra septem millia nui>nuoyu)n
solidus distraliatur, emptus a collectario septem millibus dueentis.
Cfr. Th. Mommsen, /. /.
2 C. Th., 9, 22, 1. 1 (317). 12, 6, 1. 13 (367^ 12, 7, 1. 2 363). Nov.
Valent. III, t. 14 (4io). C. J., IV, i>, 16 (408).
3 Symmaciiie était préfet de la ville. Les lois sont adressées au préfet
de la ville. Nov. Val. III, t. 14.
* Edict. Just., VII. IX pr. Nov. Just., 136 pr.
s C. Th., 16, 4, 1. 5, § 1 : in nummulariis eeterisque liujus abnae urbis
corponbus (à Constantinople, en 404). God. Just., I, 2, 0 = XI, 17 (18).
1 (439) : argentarii. On les retrouve sous Léon le Sage; voyez J. Nicole.
Op. cit., pp. 22-24.
« Sur les gynaeciarii, voyez C. Th., 10, 20, 1. 2. 3. 6-9. 16 {= C. Jlst.,
( 233 )
nissaient aussi les vêtements. Il y avait des ateliers impériaux
{(/ijnaecea ou teilrina principis) où l'on tissait les étoffes dont
l'empereur avait besoin. A l'origine, on confiait ces travaux à
des femmes; de là le nom de gynécées. Les ouvriers appelés
(fijnaedarii y confectionnaient les vêtements de soie et d'oi',
les habits de pourpre à l'usage de l'empereur, ainsi que les
vêlements nécessaires aux hauts fonctionnaires et à la maison
du prince. Les habits militaires étaient en toile de lin; ils
étaient fabriqués dans des ateliers spéciaux [linifîcia), par des
ouvriers appelés lintioncs, liutearii, textores.
Les gynécées étaient au nombre de dix-sept en Occident,
dispersés dans les provinces; ceux de Trêves et d'Arles éLiient
sous les ordres du comte des Choses privées; les quinze autres
dépendaient du comte des Largesses sacrées. Il y en avait
aussi en Orient, par exemple à Cyzique sur l'Hellespont. Il
existait des liuifîcia à Ravenne en Italie et à Vienne en Gaule i.
Chaque manufacture était dirigée par un procurateur impérial
iprocuratores yijnaeciorum, linyficionim) -.
Dans chaque atelier, les ouvriers formaient un collègf
héréditaire (corpus, collegium). Leurs biens étaient affectés au
XI, 7, 13;. 10, 21. 7, 6, 1. 5, 7, U, /. un. Cfr. Gothofr., Parât, ad 10, tîO
(vol. III, 1). o32). Bouchard, pp. 290-292. Willems, pp. 611. 636. Wallon,
m, p. 140. HuMBERT, Essai sur les finances, I, pp. 38o. olO. II, p. 16.
Karlowa, I, p. 916. DuRUV, Hist. des Rom., éd. ill., VII, p. 190. Ser-
RiGNY, n. 1109. — Pour le Haut-Empire, voyez Gagnât, Armée rom.
dWfriq., \). 404.
» yot. Dign , éd. Seeck, Or., XIII, 16. 20. Occ, XI, 4d-63. XII, 26. 27.
Gothofr., l. l. — S'agit-il d'eux dans cette loi de Constance : ^ego-
Hantes vestiarios, linteones, purpurarios et partliicarios, qui devotioni
nostrae deserviunt , visum est secundum veterem consueludinem ab omni
munere immunes esse (G. Just., X, 47, 7)? — Sozomène [Hist. EccL,
V, 15) parle des linteones chrétiens de Gyzique, sous Julien. Sosez supra,
\). 229, n. 8. — On y voit que chaque atelier devait livrer une quantité
fixe d'objets manufacturés, en proportion du nombre de ses ouvriers.
L'impôt fournissait les matières premières.
- ^ot. Dign., l. L G. Th., I, 32, 1. 3, 1^ 2 (377) : procuratores textrinorum.
( 234 )
service, ce qui prouve qu'ils étaient de condition libre '. Il y
avait cependant parmi eux de nombreux esclaves [manci\na) "^,
formant des familiae 3.
Les matières premières étaient fournies par l'impôt ou par
les mines publiques. La soie était achetée aux barbares par le
comte du Commerce *. La pourpre était recueillie par les
murlleguli, dont nous allons parler.
§ 4. Pêcheurs de la powyre et teinturiers s.
Les murileguli ou conchylioleguli étaient les pêcheurs du
coquillage [murex, conchylium) qui fournit la pourpre. Ils
avaient à leur disposition des flottilles, dont les particuliers ne
pouvaient pas se servir; en effet, la pêche, comme l'usage de
la pourpre, était un monopole du prince 6. n y avait des
murileguli en Occident et en Orient ''. Ils travaillaient aussi
' C. Th., 10, 20, 1. 16 (426). Cfr. Wallon, 111, i.p. 136-137.
2 C.Th.,10, 20, 1. 2(358). 9(380'.
"' C. Th., 10, 20, 1. 7 (372). — Godefroy distingue ces familiae des
corpora : horum certa corpora seu colleyia fuerunt, et familiae. De même
pour les mwileguli. Wallon (III, p. 140) croit que les collèges et les
familiae sont la même chose. En tout cas, au IVe siècle, ce mot ne
désigne pas toujours des esclaves. Il désignait, par exemple, les recrues
non réparties encore dans les cadres de la légion. C. Th., 7, 4, 1. 19 1 377)
et GoTH., ad h. l.
* Bouchard, p. 294.
s Sur les murlleguli, voyez : C. Th., 10, 20, 1. 5. 12 (C. J., XI, 7, 9).
14-18. 10, 21 (C. J., XI, 8). 9, 4d, 1. 3. 13, 1, 1. 9. Not. Dign., Or., XIII,
17. Occ, XI, 64-73. Gothofr. ad 10, 20. Serrigny, n. 1108. Bouchard,
pp. 290-293. HuMBERT, Essai sur les finances, I, j). 385. II, pp. 16. 362.
Wallon, III, p. 140. Karlowa, I, pp. 840. 916. — Sur les bapliia avant
le IVe siècle, voyez Hirschfeld, Venu., p. 193, n. 1.
6 C. Th., 10, 20, 1. 12 (385) et 18 i436).
■ Ibid., 1. 5 (371). 12 (3851 14(424). 15 (425). 16(426). 17(427). 18 (436).
Not. Dign., Or., XIII, 17. Occ, XI, 64-73.
( 235 )
dans les ateliers de teinture (ta/^/Ha), par exemple en Phénicie i,
où étaient teintes les étoffes de pourpre destinées à l'empereur,
sous la direction de procuratores haphiorum -.
Ces ouvriers étaient libres, puisqu'ils étaient propriétaires ;
leurs biens, comme leurs personnes et leurs enfants, étaient
affectés à leur service. Ils avaient à fournir une quantité fixe
de coquillages [canon conchyliorum), et ils en étaient respon-
sables sur leur patrimoine 3. Us formaient des collegia ^,
appelés aussi familiae s.
§ 5. Ouvriers des mines et carrières.
Nous avons quelques détails sur les premiers siècles de
l'Empire. Il a été question plus haut des fermiers de mines et
carrières; nous parlerons ici des ouvriers mineurs •> travaillant
au profit des particuliers, des fermiers et surtout du fisc, qui
finit par posséder la plupart des exploitations. Généralement,
c'étaient des esclaves, souvent des chrétiens et des criminels
condamnés à ces durs travaux. Ils formaient des corporations,
du moins dans les exploitations du fisc, qui furent presque
toutes mises en régie dès le second siècle ' . Les mineurs du fisc
* C. Th., 10,20,1.18(436).
■2 Xot. Dign., l. L C. Th., 1, 32, 1. 1 (C. J., XI, 7, 2). en 333. Leur
négligence était punie de mort; quand une étoft'e était gâtée, les procu-
rateurs étaient frappés du glaive, c'est-à-dire décapités.
•' C. Th., 10,20,1. Uetl6.
i Ibid., 1. 16.
••• Ibid., 1. o.
'' Sur les metallarii, aux premiers siècles, voyez Hhischfeld, Ycnv.,
pp. 72-91. Bruzza, Ann. d. L, 1870, i)p. 129-130 : Iscrizioni dei marmi
(jrezzi. De Rossi, Dei cristiani condannati aile cave dei marmi, Bull,
crist., 1868, pp. 17 et suiv. Willems, 5^ éd., p. 353. Marquaudt, Priv.-,
p. 623. Vie privée, II, p. 272.
" HiRSCHFEi.D, Venu., p. 77.
( 236 )
étaient sous la direction cremployés impériaux, le plus souvent
afîVanchis ou esclaves du prince. 11 reste quelques traces de
leurs collèges. A Luna, près de Carrare, on a trouvé les fastes
d un collège d'esclaves et d'affranchis des années 16 à 22 de
notre ère i. On croit généralement qu'il s'agit de tailleurs de
pierres occupés dans les carrières de Carrare, qui appartenaient
au fisc -. Sous Tibère, il y avait en Aquitaine, chez les Rutènes,
une familia Tiberii Caesaiis, quae est in metallis; elle était
organisée en collège, et l'intendant [vilicus] y remplissait les
fonctions de trésorier et de président 3. A ces ouvriers, qui
s'occupaient de l'extraction, il faut joindre ceux qui travaillaient
et préparaient le marbre : ainsi, à Séville, nous trouvons une
statio seirariorum Augmtorum ^, esclaves impériaux, scieurs-
de marbre ou de pierres. Dans les mines de cuivre du Mom
Marïanm en Espagne, nous trouvons des coufeclores aeris,
dépendant d'un procurateur impérial et formant peut-être un
collège s. Enfin, dans les mines d'or de la Dacie travaillaient,
au 11^ siècle, des affranchis et des esclaves impériaux, lih[erli)
et familia et lequli aiirariarum 6, qui élèvent un monument
« C. L L., I, p. 476. XI 1356. Or.-H., 6444. Cfr. Bruzza, l. l.
- Cfr. HiRSCHFELD, Verwalt., p. 88. Il pense que ces carrières étaient
alors aftérmées, parce que le vilicus et les décurions ne paraissent pas
être des esclaves ou atïranchis impériaux.
^ Bull, des Antiq. de France, 1891, p. 63.
* C. L L., 11 1131. 1132, et la note de Huebner. — Voyez encore :
I 1108 (VI 9888) : conleg. secto[rum] serrarium, dès la république. —
V 815 : scctores materiarum Aquileienses , à Aquilée. — V 7869. 7869"*^'',
XII 73'i : lapidari Almanicenses, à Cemenelum. — XII 1384 : opifices
lapidari, à Vasio. — X 7039 : conviv'a)e marmorari, à Catina, en Sicile.
— A. DuMONT, Inscr. de la Tlirace, p. 33, n. 65 : r) -rsyvrj twv X'.ôoupywv,
à Perinlhus. — VI 9550 : collegae marm{orarii). — VI 9558. 9559 : corpus
suhaedianum. Voyez ces noms dans notre liste, supra, pp. 145-157. —
VI 9634 : socii miniariarinn . Liebenam (p. 116, n. 4) les prend pour des
ouvriers des mines de cinabre. Il semble que le mot socii indique des
fermiers.
• II 1179. Cfr. HiRSCHFELD, p. 77, n. 4.
•' III 1307. Cfr. HiRSCHFELD, p. 77, n. 4. Voyez supra, p. 226, n. I.
( 237 )
à Lucilla, femme de Lucius Verus, ce qui prouve l'exploi-
tation directe de ces mines. Il est probable que le colle-
(jiiim Jovis Cerneni d'AIburnus Major, comprenant à Torigine
cinquante-quatre esclaves associés dans un but funéraire et
dissous en 167, était aussi formé d'ouvriers employés dans les
mines du fisc i. Il faut bien remarquer que tous ces collèges
des premiers siècles n'avaient rien de commun avec l'exploita-
tion des mines; leur but principal était funéraire. Au IV^ siècle,
leur caractère est changé.
La situation des mines et carrières, telle que la dépeint le
Code Théodosien, prouve combien cette industrie, autrefois
si florissante, était tombée -. Il y avait des mines privées;
or, l'empereur dut encourager les propriétaires à les exploi-
ter. La production du marbre, par exemple, était si rare
que les prix étaient devenus énormes 3. Les particuliers
payaient au fisc le dixième des revenus; s'ils n'exploitaient
pas leurs mines, l'Etat en accordait la jouissance au pre-
mier venu, à condition de payer en outre un dixième au
propriétaire ^.
Les mines et carrières impériales étaient mises en régie et
formaient une branche du département des Largesses sacrées.
Elles dépendaient, suivant les provinces, de Comités meîallorum,
qui étaient sous les ordres du Cornes Sacrariim Largitiouitm, ou
de fonctionnaires supérieurs, tels que le préfet du Prétoire, les
vicaires ou un rationalis s. La direction de chaque exploitation
^ III, p. 92o. Voyez le premier volume, p. 338.
- Sur les metaUarii au IV^ siècle, voyez : C. Th., 1, 3% 1. 5 '386}. 10,
19 (C. J., XI, 6). 11, 28, 1. 9. Cfr. Gothofr., ad C. Th., 10, 19. Walter,
i? 411. Serrigny, §§ 876-884 et 1104-1106. Bouchard, pp. 293-294. Wh.lems,
oe édit., pp. 611. 636. Humbert, Essai sur les finances. II, pp. 273. 362-
o63. Karlowa, I, p. 916.
•' C. Th., 10, 19, 1. 1 et 2. Cfr. 1. 13.
^ C. Th., 10, 19, 1. 10 (382). 11 (384). 14 (393).
•"• Not. Dign., Or., XIII, 11 : cornes metallorum per Illyricioii. C. Th.,
10, 19, Parât, ad fin.
( 238 )
était confiée à un iwocurator metallorum pris parmi les curiales
du lieu ^. Les mineurs formaient des corporations obligatoires,
recrutées par l'hérédité et par les condamnations. Constantin
ordonna que les condamnés fussent marqués au fer rouge,
mais sur les bras et les jambes, non sur le visage, « afin que
)) la figure, faite à la ressemblance de la beauté céleste, n'en
» fût pas souillée » 2. Les ouvriers mineurs (metallarii)
n'étaient généralement pas des esclaves, puisqu'ils étaient
propriétaires fonciers. Attachés au sol natal, comme dit une
loi 3, ils étaient affectés à l'exploitation avec tous leurs biens
et leur famille •^. Comment s'était opéré ce changement dans
la condition des mineurs? Il est probable que, voyant dimi-
nuer le nombre des esclaves dans les carrières et les mines,
on se mit à recruter des hommes libres. Peut-être l'exploi-
tation des carrières et des mines fut-elle une charge sordide
imposée aux propriétaires voisins, qui y faisaient travailler
des ouvriers libres ; finalement l'État s'empara de ceux qu'il
y trouva occupés. Ils avaient à fournir un canon metalUcus,
recueilli par les susceptoîxs canonis metallid , et fort lourd
pour eux ^. Ammien iMarcellin raconte que les ouvriers
des mines d'or d'Illyrie se révoltèrent en 376 et se joignirent
aux Goths, parce qu'ils ne pouvaient payer les redevances
au fisc ^K
Chaque exploitation était sous les ordres d'un prociirator
* C. Th., 1, 32, 1. 0 (386) : pyvcuj'atores metallorum intra Macedoniiuu ,
Daciam médit erraneam, Moesiam seii Dardaniam, soliti ex curialilms
ordinari ...
^^ C. Th., 9, 40, 1. 2 (315).
3 C. Th., 10, 19, 1. 7 (370) : regrediad solum génitale compellant.
* C. Th., 10, 19, 1. 13 (424) : metallica loca. Cfr. 1. 4-9. Hirschfeld.
Verwalt., p. 90.
•i GoTHOFR., Parai, ad C. Th., 10, 19.
'■• Amm. Marc, 31, 6, 6 : Qiiibus accessere sequendarum auri vemiriun
periti non pauci, vectigalium perferre posse non suffieientes sarcinas
graves. Cfr. Gothofr., ad 10, 19, 1. 7 et Hirschfeld, Verwalt., p. 90.
( i239 )
metallonim, choisi parmi les curiales de la cité voisine '. Le
Code Théodosien parle des carrières de l'Afrique, de l'Illyrie,
de la Macédoine et de l'Asie. Il y avait aussi des mines d'or
dans le Pont, dans le diocèse d'Asie, en Thrace, en Macédoine,
en Illyrie, en Italie, dans la Sardaigne et dans les Gaules.
§ 6. Fabricenses.
On sait que jusqu'au F"" siècle avant notre ère, les capile censi,
particulièrement les ouvriers, furent exclus des cadres de la
légion; ils ne pouvaient être soldats. Servius Tullius avait créé
deux centuries d'ouvriers militaires, celle des [abri aerarii et
celle des [abri tignarii, placées sous la direction d'un praefect us
fabrum -. Au dernier siècle de la république, quand tous les
citoyens sont enrôlés comme soldats, les centuries dispa-
raissent. Les ouvriers de toutes sortes {[abri] servaient comme
légionnaires; seulement, à l'occasion, on en formait un corps
du génie pour faire les travaux militaires : c'est ce que fit César
quand il eut besoin de navires pour passer en Bretagne. Enrô-
lés parmi les soldats, les ouvriers ne formaient plus un corps
spécial ; mais, le cas échéant, on les chargeait de réparer les
armes et les machines et d'exécuter tous les travaux techni-
ques 3. Tarruntenus Paternus, à l'époque de Commode, énu-
mère une longue série d'ouvriers de Farmée qui sont exemptés
des corvées militaires, parce qu'ils ont leur service particulier'*.
' C. Th., 1, 32, 1. 5 (C. J., XI, 6, 4, en 386).
2 Pour la république et le Haut-Empire, voyez : 3Iarquardt, St.-V.,
IP, p. 515 = Org. milit., )». 249. Kraner, Uarmée romaine au temps
de César, trad. de Baldy et Larroumet, p. 48. Gagnât, L'armée romaine
iV Afrique, p. 187.
3 C. JuLLiAN, Dict. de Daremberg, s. y. fabri, p. 9o7. Veget., II, 11 :
Hahebant (legiones) etiam fabricas scutarias, loricarias, etc.
' DiG., 50, 6, 7.
( 241 )
!>i(jniU's nous donne d'amples détails '. Elles dépendaient des
préfets du Prétoire, mais depuis la révolte et la chute du préfet
lUifinus, en 396, elles furent comprises dans le département du
maître des otTiccs, ministre de la police-, il y avait quinze fabri-
. Les provinciaux fournis-
saient les métaux et le charbon 7. Les armuriers [fabricenses)
fabriquaient tous les instruments de guerre, nécessaires aux
armées 8; une partie d'entre eux, appelés barbaricarii ou argen-
• C. Th., 10, 22 (C. J. XI, 9) : de fabricensibus. Cfr. 7, 8, 1. 8 (400). 20,
I. 10 (369). 12, 1, 1. 37 (344). 81 (380). Nov. Theod. II, l. 6 : rfe bonis
Jabricensium (438) = C. Just., XI, 9, 5. Nov. Just., 8rî. Not. Dign., Or.,
XI, 18-39. 44. Occ, IX, 16-39. 43. Lydus, De mag., II, 10. III, 40-41.
Amm. Marc, 29. 3, 4. 31, 6, 2. Cassiod., Var., VII, 58. Voyez Gothofr.,
Parut, ad 10, 22. Serrigxy, §§ 1100-1103. Walteu, 419, n. 60. Wallon,
m, pp. 141. 475. Bouchard, pp. 86-88. Willems, 5»^^ édit., p. 574.
Cagnat, Op. cit., pp. 405 et suiv. Karlowa, I, p. 916. Humbert, Essai
.sur les finances, I, pp. 245. 496-497. II, p. 362. Et surtout : D. Kalopo-
THAKES, dans le Diz. epigr. de De Ruggiero, s. v. fabyica. C. Julllxn,
Dicl. de Daremberg, s. v. fabrica, pp. 960-961.
- Lydus, l. l.
"' yot. Dign., II. IL
^ Not. Dign,, Occ, XI, 24 : Corcordiensis sagittaria.
'•' Not. Dign., Occ., XI, 33 : Augustodunensis loricaria, balistaria et
iiibanaria. Cfr. Bull, des Antiq. de France, 1877, p. 199 : opifices lori-
carii qui in Aeduis consistunt et vico Brivae Suguntiae respondent quiq{ue)
.'iubcura ejus f'uerunt, à un centurion de la legio lll Aug.
'• Nov. Just., 85.
- C. Th., 10, 22, 1. 2 (C. J., XI, 9, 1, en 388). Gothofr. ad h. L G. Th.,
II. 16, 1. 15 (382). 18 (390). 11, 20, 1. 6 (430).
^'^ Xov. Theod. II, l. 6, pr. : hoc enim armât, hoc nostrum ornai exerci-
ium (438).
Tome L, vol. IL IG
{ 242 )
tarii, ornaient les casques d'or et d'argent i. Chaque arsenal
avait à sa tête un praepositus fabricae "^^ qui avait sous ses ordres
un primicerius 3 fabricae, premier des ouvriers, et un biarcus,
intendant ^. Chaque homme avait sa tâche : dans les ateliers de
Constantinople, un ouvrier devait, en trente jours, orner d'or
et d'argent six casques avec leurs mentonnières. Dans chaque
fabrique, les ouvriers formaient une corporation héréditaire «>.
Pour les empêcher de fuir, on les marquait aux bras 6. Ils avaient
à fournir par mois une quantité déterminée d'armes". Ils étaient
aidés par des esclaves publics 8, mais eux-mêmes étaient libres :
en effet, ils étaient propriétaires et leurs biens étaient atîectés
au service. Ce service est qualifié militia 9. Leurs maisons
étaient exemptées de l'obligation de fournir des logements
militaires lO. En cas de déconfiture de l'un d'eux, le collège
1 C. Th., 10, 22, 1. 1 (374). 12, 1, 1. 37 (344). 13, 4, 1. 2 (337). Nolil.
Dign., Or., XI, 4o : barharicaria . Occ, XI, 74-77 : praepositi branhari-
cariorum sive argentariorum Cfr. 3Iarquardt, Priv.-, pp. 541. 693.
Vie privée, II, pp. 179. 331. Allmer. Musée de Lyon, II, pp. 405-413;
Revue épigr., II, pp. 99-101. Liebenam, p. 118. Gothofr. ad 10, 22. On
les trouve à Constantinople et à Antioche et ils dépendent du Conies
sacrarum largitiouum (C. Th., 10, 22, 1. 1).
2 C. /. L., V 8697. 8721. ^otizie, 1892, p. 335. \T 1696. XI 9, à
Ravenne. Amm. Marc, 29. 3, 4.
s GoTHOFR., Parut, ad 10, 22 et C. Th., 10, 22, 1. 3 (C. J.. XI, 9, 2,
en 390).
*■ V 8754. 8757. On trouve encore un c{entonarius) (yotizie, 1890,
p. 172) et un cornes fabricarum {IX 1590j. Voyez Kalopothakes. /. /.
s Xov. Theod., lit. 6, pr. : fabricensium corpus. 11 s'agit de toutes les
fabriques. Ibid., § 2 : velut in corporc.
6 C. Th., 10, 22, 1. 4 (C. J., XI, 9, 3, en 398).
" Ibid., 1. 1.
« C. J., VI, 1, 8 (389) : Si gui publicorum servorum fabricis seu aliis
operibus deputati, tamguam propriae conditionis immemores... S'ils
épousent une esclave d'un particulier, ils doivent être ramenés à l'atelier
avec leur femme et leurs enfants.
9 C. J., XI, 9, 6. V 8742 : militantes — veteranus. III 6 (voyez supra\
«0 C. Th., 7, 8, 1. 8 (400).
( 243 )
était responsable '. On leur infligeait des amendes -. Il:
perdaient leurs biens s'ils s'engageaient comme colons 3.
§ 7. Bastagarii.
A chacun des ministres des Largesses sacrées et de la Chose
privée se rattachait un service spécial de transport, les deux
bastagae 'k ■
Le comte des Largesses sacrées avait sous ses ordres cinq
praepositi bastagarum î>. « Les sommes ou fournitures perçues
comme impôt par les décurions ou les officiâtes du gouver-
neur de province étaient transmises au receveur de province
[susceptor), envoyées par celui-ci dans les caisses ou magasins
impériaux et enfin versées par les soins du praepositus thesauro-
rum dans les caisses centrales du Cornes Sacrarum Largitionum.
Le transport était fait par les bastagahi, commandés par les
praepositi bastagarum ^. » Ils transportaient aussi les produits
des manufactures '.
Le comte de la Chose privée n'avait sous ses ordres que deux
< iNov. Theod., lit. 6, §§ 1 et 2 (C. J., XI, 9, 5, en 438) : unius dammun
ad omnium transit dispendium.
2 C. Th., 10, 22, 1. 5 (404) : ipsc vero fuhricensis — muleta duaruni
librarum auri feriatur.
5 C. J., XI, 9, 7 (Léo et Anthemius) : post facultatum suarwn amis-
sionem.
* Voyez C. Th., 10, 20, rubr. et 1. 4 et il. 8, 4, 1. 11. Ao/. Dkjn., Or.,
XIII, 19. 33. Occ, XI, 78-8o. 99. Ba.'itaga privata : Or., XIV, o. Bastaya
rei priva tae : Occ, XII, 28. 29. Voyez : Walter, § 412, n. 102. Serrig.nv,
n. 1112. BoLCHARD, pp. 296-298. Wallon, 111, pp. 137-138. 140. IIhibeh r,
Dict. de Daremberg, s. v. bastagarii; Essai sur les finances^ l, pp. 497.
olO. II, p. 414. Karlowa, I, p. 841. Whxe.ms, S» édit.. pp. 611, n.8. Gl,').
620-621. 636. Gothofr., ad C. Th., 10, 20.
•• Not, Dign., Or., XIII, 19. Oec., XI, 78-85.
« WlLLEMS, 5e édit., p. 615.
7 Bouchard, /. /. Willems, p. 611, n. 8.
( 244 )
jn'aepositi bastagarum rei privntae ', chargés du transport îles
revenus de Vaerarium phvatum -.
Les ouvriers (bastagarii) se servaient de bêtes de somme '\
Ils formaient des corporations héréditaires. Lem- service est
qualifié de milice, et ils ne pouvaient le quitter même pour
s'engager dans l'armée K
Telles sont les corporations professionnelles qui se rattachent
à l'administration centrale. Peut-être pourrait-on citer encore
les burgarii et les autres soldats qui, sous le nom de limitanei,
ripenses, riparieuses, étaient établis dans les petits forts des
frontières, qu'ils devaient garder de père en fils ^; ensuite les
ouvriers delà poste publique : muletiers (muliones), palefreniers
ihippocomi), vétérinaires (muîomedici), charrons {carpentarii) *%
employés dans tous les relais au bon entretien des voitures et
des bêtes de somme et affectés héréditairement à ce service ' .
' Sot. Dign., Occ, XII, 28. 29.
- WiLLEMS, 5« édit., pp. 620-621.
•• C. Th., 10, 20,1.4.
^ C. Th., 10, 20, 1. 11.
■' C. Th., 7. 14-15. Nov. Theod. II, t. L C. J., I, 27, 2, § 8, XI, 59, 2. 3.
PROCOP., Hist. Arc, 24. Cfr. Gothofr. ad C. Th., 7, 14, 1. 1. Boecking,
Not. Dign., I, 290 sqq. Serrigny, §§ 451. 1117. Kuhn, I, pp. 138-140.
Wallon, 111, p. 141. Willems^ p. 643.
•• C. Th., 8, 5 : de cursu publico, surtout les 1. 17 (364). 31 (371). o8
(398). 7, 14, /. un. Cfr. Gothofr., Parât, ad C. Th., 8, o. Serrigny, II.
pp. 259-277. Bouchard, pp. 77-82. Humbert, Op. cit., II, p. 470, s. r.
cursus publicus; Dict. de Dare.mrerg et Saglio, I, p. 1653. IIirschfei.d,
Verwalt., pp. 98-108. Mispollet, II, pp. 244-245. Wallon, III, p. 167.
WiLLEMS, 5e édit., p. 489. Il semble qu'il y avait des esclaves parmi eux :
1. 21 : qui familiae praesunt. 1. 58 : servum publicum ... cum omni peculio.
Cfr. Gothofr., Parât, ad C. Th., 8, 5, p. 523.
■ C. Th., 8, 5, 1. 58 (398) : mulionem mutationibus deputatum — l't, si
niuliones publici reparti fuerint, licet sene.'^ aut débiles, cum uxoribus suis
et omni peculio atque agnatione retrahantur . — Les mancipes et junctores
jumentarii viarum Appiae Trajanae item Anniae cum ramulis suis, —
agentes sub cura — praefiectormn trium) vehictilorum {Bull, corn., 1884,
pp. 8 et 9, en 214 et 226) étaient peut-être des entrepreneurs de la poste
imblique sur ces chaussées.
( 2i5 )
Tous ces" ouvriers travaillant pour l'Ktat ou pour 1h prince
étaient libres i. iNous réunissons ici les preuves, qui abondent.
I.e service des armuriers et des haslagnrii est appelé milice -;
or, tous ceux qui « portaient les armes » (mililare;, même dans
l'administration civile, devaient être libres. De presque tous il
<;st dit expressément qu'ils formaient des colle(/ia ou corpora •^;
or, comme le dit Wallon, les collèges, en tant (jue corps de
métiers, ne pouvaient être publiquement constitués que par
. Il y en a qui deviennent
curiales '% et les armuriers, eux aussi, se réfugiaient souvent
dans les curies "^ : on ne les aurait pas reçus dans ces corps s'ils
n'avaient été propriétaires. Pour plusieurs de ces corporations,
le Code Théodosien dit expressément qu'elles étaient attachées
au sol natal {solum génitale), que leurs biens connue leurs per-
sonnes étaient affectés au service ^. A la vérité, on marquait au
fer rouge les mineurs et les armuriers •^; mais cela ne prouve
rien, car les soldats étaient également marqués aussitôt après
leur enrôlement 'O.
' Wallon, 111, pp. 13.>138. Lkvassluk (1, p. 38) CDiilond les L'po AU III^ SIÈCLE. — § 3. OBLIGATION ET
HÉRÉDITÉ DU SERVICE AU IV« ET AU V<^ SIÈCLE : CAUSES GÉSÉ-
KALES, PÉRIODE DE TRANSITION; IV« SIÈCLE ! CHARGE PATRIMO-
NIALE, CHARGE PERSONNELLE, AFFECTATION PERPÉTUELLE DES
BIENS, AFFECTATION PERPÉTUELLE DES PERSONNES, HÉRÉDITÉ
(origo), moyens légaux de s'affranchir, enquêtes, recrute-
ment, FUITE DES corporati et des coUegiati, chasse aux
fugitifs; fin des corporations.
Nous avons vu que l'Etat et les villes, poussés par la néces-
sité, appliquèrent aux corporations le principe si ancien des
corvées et leur confièrent des branches importantes et nom-
breuses de l'administration centrale et municipale. Nous avons
décrit le rôle de chaque corporation en particulier, et il sera
plus facile de répondre à la question suivante : Quelle est l'ori-
gine des corporations officielles? Durent-elles leur naissance à
l'intérêt public ou à l'intérêt privé, à l'initiative de l'Etat ou à
celle des particuliers? L'autorité créa-t-elle spontanément des
collèges destinés avant tout à la servir? Ou plutôt, comme nous
l'avons supposé dans tout le chapitre précédent, les corpora-
tions ofticielles ne sont-elles que des collèges privés, nés de
rinitiative privée, et transformés peu à peu par l'Etat? Nous
devons achever ici la démonstration de cette opinion, encore
fort controversée. Ensuite nous mettrons en lumière la nature
des relations que les collèges avaient avec l'État ou avec les
( 248 )
villes, et les différentes phases de cette transformation, qui fut
si radicale, qu'elle commença par la liberté pour aboutir à
l'esclavage.
§ 1^'. Naissance des collèges officiels.
Rodbertus voit partout l'action de l'État ; selon lui, toutes les
corporations furent instituées par le gouvernement, depuis
celles de Numa jusqu'à celles du Bas-Empire, et cela unique-
ment pour satisfaire des besoins publics, dont la totalité des
citoyens aurait dû se charger sans elles. C'étaient, dit-il, des
institutions purement financières et non industrielles, com-
posées de possessorcs et non d'artisans. Chaque collège tirait
son nom de la nature de ses corvées, et il faisait faire celles-ci
par des artisans et des ouvriers placés à son service ^. Cette
opinion, dans sa partie la plus importante, est admise par
d'autres auteurs, qui, sans être d'accord avec Rodbertus sur la
composition des collèges otliciels, admettent que tous devaient
leur naissance à l'État et furent institués pour le service
public -. Plusieurs distinguent nettement les corporations
libres, nées de l'initiative privée sous la république et dans les
premiers siècles de l'Empire, des corporations otTicielles du 1 V«^
1 Rodbertus, 1865, t. V, i». 301, n. 74. 1867, t. VIII, pp. 394. 418-4i24,
et note 62.
- Pernice, I, 290 : Sie waren da ocler cntslanden sammtlick zur Erfïd-
lung eines ausserhalb ikres eignen Willens liegenden, staatlicken oder
religiôsen Zweckes. — Gebhardt, p. 7 : Sic waren aile vom Staate diirch
Gesetz ins Leben gerufen und dienlen dem Staate. — Gierke, p. 79 :
Wàhrend die meisten coUegia als analoge sacrale oder politische Instilu-
tionen erschienen welcfie direkt vom Staat begrundet und mit staatlicken
Funktionen betraut ivaren. — G. Jullian, Dict. rf Daremberg, s. v. fabri,
p. 956 : Les collegia fabrorum étaient surtout des confréries religieuses
créées par l'État pour assurer des services publics. Le même auteur dit
des collèges de Numa, p. 949 : Avant d'être des corps industriels, les col-
lèges ont été des corps publics.
( 2i9 )
et du V*" siècle, et n'osent se prononcer sur les rapports qui
existaient entre les unes et les autres K
11 résulte clairement des chapitres précédents que les corpo-
rations chargées d'un service public sont précisément celles
qui se proposaient aussi un but privé : les noms sont les
mêmes, et les détails que nous avons donnés sur leur but
privé et sur leur rôle ofliciel sont puisés en grande partie aux
mêmes sources. Mais nous allons plus loin : la part de l'initia-
tive privée fut bien plus grande durant deux siècles que celle
de l'initiative publique. Ordinairement, ce n'est pas l'Etat qui
fonde les collèges pour son service en leur permettant de
s'occuper accessoirement de leurs intérêts particuliers. Au
contraire, ce sont les membres qui prennent l'initiative, et,
pour accorder l'autorisation, l'État se contente le plus souvent
d'une utilité publique très vague : beaucoup de collèges
n'entrent pas à proprement parler dans l'administration dès
leur fondation, et même pour ceux qui, dès leur naissance,
rendent un véritable service public, comme les fabri qui font
l'office de pompiers, c'est l'initiative privée qui est la règle, et
c'est uniquement le but privé qui guide les membres. xMais,
instituées d'abord par l'initiative privée dans l'intérêt des
membres, autorisées, parce que l'Etat y trouvait son intérêt -,
^ Maué, Die Vereiiie, p. 4. Herzog, GalL Narb., p. 200; cfr. pp. I8S-
489. Madvig, Verfass., II, p. 95. Trad. Morel, III, j). 104 : Ob und wie
die gewerblichen Zwangsinnungen mit den ehemaligen freien collegia
zusammenhingen ist schwierig xk entscheiden. Ailleurs, Madvig trouve W
premier germe des collèi^es obligatoires dans le soin que l'État aurait pris
dès la république de maintenir les collegia antiqua et utilia. {Verfass.,
II, p. 135, en note. Trad. Morel, III, 148.)
2 HiRSCHFELD, Gall. Stiui, III, p. 9 (245), dit fort bien : Es scheint eheii
das Redit, ein Colleg zit bitden, zumeist nur solchen ertheilt zu sein, die
ein dem ôffentlichen Interesse dienendes Gewerbe betrieben. Et dans la
note 2 : Der ziemlich besckrdnkte (?) Kreis der Collégien ist wohl eben
daraiis zu erklàren dass die Concession nur solchen Vereinigungen gegeben
wvrdedie eineti gemeinniitzigen Zweck verfolgten. Voyez encore la note 2.
p. 20 (256).
( 2o0 )
puis encouragées par lui, les corporations passèrent enfin à
son service et comptèrent parmi les institutions officielles
régulières. Une fois convaincu de leur utilité, l'Etat généralisa
lui-même cette institution et organisa, à Rome du moins,
tous les métiers et négoces en corporations ; dès lors, les cor-
porations libres ont vécu. Nous allons discuter brièvement
les faits et les textes favorables ou contraires à cette thèse.
Sous la république, TÉtat se désintéresse complètement des
corporations. Que ceux qui prétendent que, dès l'origine,
l'État institua tous les collèges pour le service public, essaient
donc de montrer quel service public fut confié aux collèges de
foulons, de cordonniers, d'orfèvres, qui remontaient à la plus
haute antiquité, ou bien aux collèges de fabricants d'anneaux,
de bouchers, de centonaires, de cordiers, etc., dont l'existence
est démontrée sous la république. On cite le collcgiiim fabrum
tignariorum et le rollegium fabrum acrariorum, puis le coUegium
liticinum et cornicinum, utiles à la guerre, dit-on; mais nous
avons vu qu'il faut distinguer soigneusement ces collèges des
centuries d'artisans et de musiciens militaires '. On allègue
encore le conlegium mercatorum ou Mercuriales que plusieurs
prétendent destiné à satisfaire, par le transport et le commerce
du blé, un besoin public; mais on ne cite pas la moindre
preuve, et ce collège avait un tout autre caractère : c'était une
sodalité sacrée instituée par l'État pour le culte de Mercure 2.
Sans doute, les tibiciues étaient indispensables au culte public,
mais leur collège avait un caractère absolument privé 3.
Nous maintenons donc que sous la république il n'y a pas de
trace de corporations officielles.
^ Voyez le premier volume, pp. 163-164.
- Voyez le i>remier volume, p. 35.
- Voyez le premier volume, p. 200. — C. Jullian (/. /., pp. 949-950)
dit que les collèges de Numa étaient destinés d'abord et surtout au
service religieux de la cité. Les [abri tignarii construisaient les temples,
les fabiH acrarii fabriquaient les vases sacrés, etc. Tous étaient d'utilité
publique parce qu'ils étaient d'utilité religieuse. Ce sont des conjectures.
Voyez le premier volume pp. 70-72.
( 251 )
L'idée de rmilité des collèges apparaît [)uur la première fois
et très vaguement dans le sénatusconsulte de Tan 64, qui
maintient quelques collèges déterminés : (juar utilitas civilatis
desidcrasset '. Elle se développe sous l'Empire, et depuis la lex
Julid, l'autorisation n'est plus accordée qu'aux collèges utiles 2.
Mais cela veut-il dire que l'Etat les fondait lui-même pour
leur imposer un service public? Au contraire, la formule assez
iré(iuente : quibus ex senatus consulto coire licet ^, prouve que
l'initiative venait des artisans et que le caractère d'utilité
publique n'était qu'une condition exigée par l'État des associa-
tions formées avant tout dans un but privé. En effet, il est
évident que, si l'Etat avait pris l'initiative et fondé ces collèges
pour son usage, on ne pourrait parler d'autorisation accordée.
Dira-t-on peut-être que les collèges qui emploient celte for-
mule ne sont pas des institutions otticielles? Mais le corpus
mnisorum macJiinarioruni frunwnti publia était certes chargé
d'un service public, et il n'oublie pas encore les mots (juibus ex
senatus consulto coire licet, en ïan 198 's c'est-à-dire à une
époque où l'État avait déjà comblé de privilèges les corpora-
tions officielles et ne pouvait plus s'en passer. Il en est de
même des autres collèges qui emploient cette formule : tous
remplissent un service public ou municipal.
AUéguera-t-on Pline qui propose à Trajan d'établir à
JXicomédie un collcgium j'abrum pour éteindre les incendies?
Mais il résulte de sa correspondance que c'était là une faveur
ardemment désirée par ces artisans, peut-être demandée par
eux, que le collège aurait eu un but privé, et que c'est en
échange de cette faveur qu'il aurait dû s'organiser en corps de
pompiers. Il en est de même de ces collèges dans les autres
villes, et l'on ne peut pas nous opposer cette phrase de Pline
qui dit que, sous Domitien, le Sénat était consulté de imti-
* Voyez le premier volume, p. 91, n. 1.
- Voyez le premier volume, p. lio.
^ Voyez le i)remier volume, pp. 118 et i'io.
' CI. L., VI 8o. Cfr. XIV 168. 169 : fahri nandrs d'Osiie. eu 19:
( 252 )
tuendo colleiiio fabrorum '. Cela ne veut pas dire que c'est
Tempereur qui l'institue ; mais l'autorisation d'établir le collette
lui a été demandée, et il consulte le Sénat sur la question df
savoir s'il l'accordera. Nous concédons du reste qu'une ville
pouvait demander cette autorisation de commun accord avec
les artisans - : les deux parties y trouvaient leur compte, mais
cela ne donnait pas au collège un autre caractère. Il est vrai
aussi qu'il arriva un moment où les empereurs, oubliant leur
sévérité, virent avec plaisir la fondation de collèges nouveaux
et ne se bornèrent pas à encourager individuellement certains
artisans ou négociants, mais favorisèrent l'établissement des
collèges : c'est ainsi que Trajan réorganisa le corpus pistorum •'.
Mais rien ne permet de voir dans les corporations ainsi
fondées ou restaurées des institutions purement officielles. Si
l'on trouvait même à cette époque un collège institué par le
gouvernement, encore faudrait-il se demander s'il n'est pas
formé sur le modèle des collèges existants; mais jusqu'à
Alexandre Sévère il n'y a pas d'exemple.
Nous avons vu que les « légions w d'ouvriers bâtisseurs
ennMés par Hadrien ne formaient nullement des collèges '^
(^aius, qui vivait sous Antonin le Pieux et sous Marc Aurèle,
s'exprime de telle façon à l'endroit des collèges otiiciels qu'on
voit clairement qu'ils ne devaient par leur existence au pou-
voir; en effet, il ne parle que de concession et de permission :
Paucis admodum in caiisis concessa sunt hujusmodi eorpora...
Collegia Romae cerla sunt, quorum corpus Senatusconsiiltis et
Constitiitionibus principalibus confirmatum est, veliiti pistorum
t't quorumdam al'wrum, d navirulariorum, qui et in provinciis
sunt... Quibus autem permissum est corpus habere collegii... •>.
* Paneg., 54. Voyez le premier volume, p. 119, n. 2.
2 Amisus, dans Pline {Ep. ad Traj., 92). Cyzique : C. I. L., lit 7060.
Voyez le premier volume, pp. 120 et 128.
'• Al'Relil'S Victor, Caes., XIII, 5. Voyez supra, p. 79, n. 5.
* AiRELius Victor, Caes., XIV, 5. Voyez siipy^a, p. 121.
* DiG., 3, 4, 1, pr. et§ 1. Voyez lo premier volume, p. 154.
( 253 )
Il nous semble évident que dans tous ces cas le Lçouvernement
irinlervient que pour autoriser.
Nous arrivons au passage capital et sur lequel on s'appuie
toujours. Callistrate, qui vivait sousSeptime Sévère, s'exprime
:iinsi : Quibusdam collcgiis rel rorporibuSy quibus jus cocundi
li'gi' pcrmissum est, imnnniild.s tribuilur : srilici'l eis collegiis vel
corporibus , in quibus artilicii sui causa unusquisque adsumitur,
ut f'abrorum corpus est et si qua eaudem rationem originis
habent, id est idcirco iust'ituta sunt, ut neeessariam operam
publicis utilitatibus exhibèrent '. Il s'agit évidemment ici de
toutes les corporations industrielles, telles que celles des char-
pentiers, de toutes celles a où l'on est reçu à cause de son
métier w. Callistrate veut-il dire que toutes les corporations
privilégiées ont été instituées par F État pour servir les intérêts
publics? C'est mal entendre le passage; en effet, au commen-
cement il dit lui-même que ces collèges n'ont reçu de l'État
(|ue \3i permission de s'établir et des immunités. Il veut dire,
selon nous, que les collèges se sont institués, établis dans l'in-
térêt public, et en cela il tombe dans une erreur qui s'explique
à son époque. Le but des confrères avait été avant tout l'intérêt
privé, mais ils avaient dû servir l'État pour obtenir l'autorisa-
tion, et ces collèges étaient déjà devenus un rouage indispen-
sable de l'administration : à un siècle de distance, on pouvait
croire qu'ils ne s'étaient établis que pour cela 2.
Ce n'est qu'au commencement du IIP siècle qu'un empereur
^ DiG., oO, 6, 6 (5), § 42. Dans la suite (voyez supra, p. 50, n. 1),
Callistrate parle d'une intervention dans le recrutement des collèges,
non dans leur institution; celte intervention s'explique pour les collèges
» . , ,^^^
It'S suant, l;i ste dn'SMv p.î luHl
avec Vathum d la corporation. Cest et* qui existait dëj& sous
(',aHi>tral«*. " " •-'i IfXtes
prouvent (j , ..r toutes
les conditiniisequises pour la jouissance des privilèges; car
il MI (lisait ler M>n titre de corporalus ^. Dés
lors le siTM . . , ; < n (ait, et l'on comprpnti que par
un con^Mii* iint récipnw|ue. mais tacite, pr l'effet d'une
longue liahitus, on le considéra comme tel eo droit. Voilà
(l(»nc la rttl' ' ' -, ' ' * * ' \int per-
njant-nt. ( ■ ^ t , .r consé-
quence naiiiKe que les biens de* membres, affranchis des
autn-s rhai ' «it n^gar' ^ -«nire :
de même «j ^ : jpriétiS i! , , : l'impôt
destiné ù d'aires services, de même les biens du naviculairc
furent roii^ nme att;irh«S al :ria; ils
sont eoiniii - iti travail • • inr par
' ,\itmrru.\ vttzsMfrm, pp. Il, n. î f»l ♦•< *'
en iioUM croît (p les ëlkë des coUèfte^
(vu i;.i, M, -il) et eo, forent afficK: , ... , .
rolUycs jouissant des privilégrs. Mais les roll^ites rr
.«fliclient au- ' ^ |>rrfiiier\-
• iMi... .Ml tiam m <
tnimumlaU'> I ,d.. f 13 : in tvrfPfièmi,
V^th'hl'nf, II' If 111 V<>V«*» (^nr/i f. lu
Mt ». i^e corpus catabolensium
était recruté parmi les affranchis, mais on ne pouvait prendre
que ceux qui possédaient 30 livres d'argent c. Les soixante
« C. Th., li, 15, 1. 1 (364). Voyez supra, p. 84.
2 C. Th., 14, 4, 1. 4 (367) : suariorum dispendia. Voyez supra, pp. 90-95.
5 C. Th., 14, 4, l. 8 (408) : circa reliqua corpora, qiiae ad privilégia urbis
Romac pertinere noscuntur.
* C. Th., 13, 5, 1. 14 (371) : si qui vuluerinf freti facultatibus, consortio
naviculariorum congregentur.
5 C. Th., 13, 5, 1. 18 (390) : idoneos facultatibus.
e C. Th., 14, 3, 1. 9 (365?).
( 278 >
confrères que les naviculaires durent désigner un jour pour
assister les chauffeurs de bains, devaient être idonei ; si l'un
d'eux venait à s'appauvrir subitement, il fallait le remplacer ^.
Défense était faite aux boulangers enrôlés de force tous les
cinq ans par le gouverneur d'Afrique de se racheter à prix
d'argent : ils étaient donc choisis parmi les riches possessores '2.
Ceux que l'on condamnait à une corporation y entraient avec
tous leurs biens ^. D'autre part, nous allons voir qu'on excluait
quelquefois les faillis et les gens ruinés. L'affectation du patri-
moine au collège explique aussi le droit de succession ab
intestat, en l'absence d'héritiers légitimes, que Valentinien III
accorda aux naviculaires vis-à-vis de leurs membres *.
Charge personnelle.
Il ne faudrait pas croire cependant que les corporati pussent
se dispenser d'un travail personnel. C'est la théorie de Rodber-
tus. Selon lui, ce seraient des propriétaires (jwssessores), et non
des gens de métier ou des commerçants ; ils n'auraient fourni
que les ressources nécessaires, et confié le travail à des ouvriers
ou à des esclaves s. C'est une erreur : depuis le naviculaire
jusqu'au portefaix, tous doivent payer de leur personne,
comme de leur bourse.
Propriétaires des navires, les naviculaires devaient person-
nellement surveiller le transports; ils étaient négociants et
♦ C. Th., 13, 5. 1. 13 i369i : quos tamen idoneos et communis delectu.s
a,sseruit, et facultatum inspectio comprobavit.
2 C. Th., 14,3,1.12(365?).
' G. Th., 13, 5, 1. 36, pr. (4112) : patrimonium siiinn noverit utiles
functionis oncrilms addiccndum. 14, 17, 1. 6 (370?) : cum his, quae habet,
pistrini exercitio subjugetur.
* Nov. Val. 111, lit. 28, § 1 (452). Cfr. infra, p. 282, n. 2.
s Voyez supra, p. 248, n. 1. Krakauer (pp. 18-20) exprime le même avis.
Karlovva (I, pp. 913 sqq.) le réfute.
^ C. Th., 13, 5, 1. 7 (334) : cura sua fréquentent maritimes commeatus.
L. 6 (334) : labor omnibus par. L. 8 : inquieludo.
( 279 )
armateurs à la fois, nous l'avons vu et leur nom l'indique *.
Ils commandaient eux-mêmes leurs navires, ou se faisaient
remplacer par un magister navis -. Le Digeste dit qu'ils sont
en voyage pour la chose publique 3, et cela ressort de toutes
les lois du Code Théodosien. Ce sont les naviculaires eux-
mêmes que la loi protège contre les retards et les vexations
qu'on leur faisait subir dans les îles et les ports où ils faisaient
escale; ils sont eux-mêmes en route 4-.
Cependant, pour eux, le service personnel n'était pas aussi
strictement exigé qu'ailleurs. Ils avaient sans doute la faculté
de faire exécuter ces travaux par des employés qu'ils payaient.
Pour l'État, cela revenait au même. C'était du reste nécessaire
pour toute une catégorie de détenteurs de res 7iaviculariae, qui
n'étaient pas membres du collège 5. La nature de leur service
n'impliquait un travail personnel que dans un ordre infé-
rieur : je veux parler des levamentarii attachés à chaque navire
pour l'alléger, le cas échéant 6.
Pour les boulangers, la charge personnelle était bien plus
lourde. Sans doute, on comprendrait qu'ils n'eussent eu qu'i^
subvenir aux frais du service, sans exercer eux-mêmes le
métier; c'est ainsi que dans les municipes on imposait la
*' Navicularii, nauarchi, naucleri, nautici.
- C. Th., 43, 5, 1. 37 : a naviculario magislrove navis (capitaine de
navire). Cfr. Heumann, s. v. magister. Dig., 14, 1, 1, § 1 : magistrum
navis accipere dehemus, au totius navis cura mandata est.
3 Dig., 50, 6, 6 (5), § 3; \oyez supra, p. 49, n. 4. Ibid., § 6 : navigantes;
voyez supra, p. 46.
' C. Th., 13, o, 1. 6 : J2ec nécessitas fieret aliquos sempcr longiora
lustrare ... Labor omnibus par et jus tus adjunctus sit. L. 8 : cum ad
aliquas insulas accesserint — nullam — inquietudinem sustinerc. L. 9 :
nullam vim oportet navicularios sustinere, delegatas sperics annonarias
iransferentes, sed venientes ac remeantes omni securilate poliri. L 26.
33. 38 : intra quinque dits, ex quo {navicularius) portum venerabilis
Urbis esset ingressus. Voyez encore 13, S, 1. 13, dispense pour maladie
ou autre empêchement : nécessitas fatalis.
'■' Voyez i7ifra, pp. 289-290.
« C. Th., 13, 5, 1. 1 (314).
( 280 )
cura conficiendi poUinis, et la panis coctio à des propriétaires i.
Mais il en était autrement ici ; en effet, on applique à tout
moment au boulanger lui-même ces expressions que les lois
sur les naviculaires n'appliquent guère qu'aux biens : pistrini
consortioobnoxius, obnoxius functionï, etc. '^. Chaque boulan-
ger était donc attaché à une boulangerie, où il travaillait sous
la direction de patrons 3, et qu'il ne pouvait quitter pour une
autre ^. Son travail s'appelle panificium S; il consiste à moudre
le blé, à pétrir et à faire cuire le pain, et ensuite à le vendre à
bas prix ou à le distribuer. Ils devaient au moins diriger ces
opérations 6. Ils étaient aidés par des esclaves enchaînés et par
des ouvriers libres, travaillant sans lien, mais condamnés à
dette peine, sans faire partie du collège 7. Cette obligation per-
sonnelle explique que les enfants mineurs délaissés par un
boulanger sont exemptés eux-mêmes, jusqu'à leur majorité, du
service, mais doivent avoir un remplaçant 8, et que nul ne
peut s'affranchir à prix d'or; l'Etat exige du travail et de l'ar-
gent : illud convenu praecaveri ne (juis hanc, quae personalis est,
fïmctionem pretio jmtet esse taxandam ^J. Le boulanger qui se
défait de ses biens pour se soustraire à la charge, perd ses
biens, mais reste attaché à sa boulangerie lo. Le pistor était
* C. Th., 11, 16, 1. 15 (382) = C. J., X, 48, 12, 2.
2 C. Th., 14, 3, 1. 2 et 12. Cfr. 1. 14 : pistoriae necessilati et corpori
adstringi. L. 18: mancipatiii obnoxiiun ... Obnoxios sibimet recte vindi-
cat functio memorata.
s Ibid., 1. 7 (364). Cfr. 1. 2 : palrunos pistoribus constitulos.
* Ibid., 1. 8 i365j : Ne illiid quidem cuiquam concedi oportet, ut {ab) o/Ji-
cina ad aliam possit transitum facere,
•' Ibid., 1. 3 et 22.
^ Ibid., 1. 2 : mm — functionem liberae mentis nisibus exseqiiantur .
' Ibid., 1. 7 : offlcinam cum animalUnis, servis, molis ... 14, 17, 1. 6
(370?) : ipse sub vincidis pistrino, quod fraudabat inserviat. Gothofr.
adh.l.
* C. Th., 14, 3, 1. 5 (364). On ne parle pas d'immunités accordées aux
vieillards, comme c'était le cas pour les mimera civilia ou municipalia.
'^' lbid.,\. 12(365?).
'" Ibid-, 1. 1 (319) : in obsequio pistrini sine idla excusatione durabit.
( 281 )
donc toujours un véritable meunier-boulanger. Trajan exi-
geait déjà l'exercice du métier pour la jouissance des privilèges,
et Paul répète encore cette règle K
Les charcutiers, l\ leur tour, dit Valentinien II, devaient nuit
et jour travailler pour le peuple '^. Il en était de même des
catabolenses, des calcis coclores, des vecturariiy des mancipes
salinarum et de toutes les corporations « qui avaient rapport
aux privilèges de la ville de Kome ^ ». Il est à remarquer
cependant que leur service n'allait pas jusqu'à leur interdire
tout travail pour leur compte : les naviculaires faisaient le
commerce, les portefaix avaient le monopole de leur pénible
métier dans le port de Rome 'K Une fois qu'ils avaient fourni
les corvées exigées en proportion de leur fortune, ils étaient
libres, jusqu'à ce que leur tour fût revenu.
Les corvées intermittentes que devaient fournir certains col-
lèges exigeaient le plus souvent de l'argent et du travail. Quant
aux hommes libres qui avaient remplacé les esclaves dans les
mines et les manufactures impériales, leur charge était per-
sonnelle dans toute la force du terme; on serait même tenté
de croire qu'ils ne devaient à l'Etat que leurs bras, que ces
pauvres gens, qui travaillaient à côté des esclaves à leur dure
besogne, ne possédaient rien, ou du moins qu'ils disposaient
librement de leurs biens. Il n'en était pas ainsi. Les propriétés
des metaUarii étaient affectées à leur service s. A quoi servaient-
* Fragment. Vat., 233 : si modo per seiuet ipsos pistriiium exerceant.
Voyez supra, p. 81.
- C. Th., 14, 4, 1. 6 (389) : Porcinarii urbis aeternae cum pervigilem
laborem populi Romani commuais exhibeant.
5 Voyez comment s'exprime Symmaqle : Uic lanati pecoris inveclor
est, etc. Voyez supra, p. 26, n. 1.
' Les j9i5/or^5 pouvaient faire faillite (excoctores), mais nous croyons
avec GoDEFROY qu'il s'agit de patroni ou chefs de boulangerie {ad C. Th.,
14, 3, 1. i5).
s C. Th., 10, 19, 1. 15 (424) : Qui vero metallica loca, praediclae obnoxia
funclioni, émisse perkibentur , iisdem procul dubio, quae auctores eoru
implere consueverant, muniis subjacebunt.
m
( 282 )
elles? A leur nourriture, à l'entretien de leur outillage, à garan-
tir la livraison du canon metalliciis '. Telle était aussi la situation
(les manufacturiers. En cas de déconfiture d'un fabricant
d'armes, toute la corporation était responsable, de même
qu'elle héritait de celui qui mourait ab intestat sans héritier
légitime 2. Ils étaient sans doute responsables sur leur fortune
de la fourniture d'une certaine quantité de produits parmois-^.
Leurs maisons étaient dispensées de loger les soldats (a metaiu) 4.
Les biens des gynaeciarii, lintearu, numetarii, mwnleguli étaient
également atfectés à ces corporations : en cas de substitution,
le remplaçant devait être idoneus, et les biens du remplacé
restaient au collège avec ses enfants o. Les ouvriers de la mon-
naie étaient parfois riches, puisqu'on les prenait pour la
curie 6. Théodose parle formellement des biens des pêcheurs
de pourpre et les déclare soumis au service ^ ; ils avaient à con-
struire et à entretenir leurs lîottilles 8, et ils devaient fournir
un nombre déterminé de coquillages à pourpre. Enfin, les
humbles coUegiati des villes de province étaient responsables
sur leurs biens des corvées {opei^ae) qu'ils exécutaient sous la
direction des curiales ; en effet, en 397, quand Honorius et
Arcadius font rentrer dans leurs cités ceux qui se sont enfuis,
* Amm. Marcell., 31, 6, 3 : sequendarum aiiri venarum periti non
paud, vectigalium perferre passe non sufficientes sarcinas graves.
2 Nov. Theod. II, lit. 6 : de bonis fabricensium (438). Charge person-
nelle : propriis artibus inservire (C. J., XI, 10 (9), 5).
5 C. Th., 10, 24, 1. 1 (374).
* C. Th., 7, 8, 1. 8 (400). L'État leur fournissait les matières premières.
Ils devaient posséder quelque chose, puisqu'on leur intligeait des
amendes (C. Th., 10, 22, 1. 5, en 400).
s C. Th., 10, 20, 1. 16 (426). Pour les murileguli, voyez encore : 10,
20, 1. 14 (424) : ad propriae artis et originis vincula revocentur.
fi JuLlAN., Misopog., 28 : aTio tcTjv èpYaffa[j.Évcov xo vd[j.ia-|j.a. Cfr. GOTHOFR.
ad C. Th. 10, 7, 1. 2.
T C. Th., 10, 20, 1. 14 i424) : res, facilitâtes, etc.
^ C. Th., 10, 20, 1. 12 (38o) : naviculam functioni muricis et legendis
conchyliis députât am.
( 283 )
ils ordonnent de les ramener avec tous les biens qui leur
appartiennent ^.
En résumé, c'est presque partout à la terre que le gouverne-
ment demanda l'argent et le travail dont il avait besoin : nul
n'était astreint au travail sans avoir de quoi se nourrir et de
quoi subvenir aux dépenses que nécessitait son service. La
charge personnelle reposait elle-même sur la propriété '^. Voilà
le principe : nous allons voir quelles conséquences en sor-
tirent, à mesure que l'Empire s'appauvrissait et devait de plus
en plus recourir à l'arbitraire pour sauver ses corporations de
la destruction.
Obligation et hérédité.
Les premiers efforts des empereurs tendirent à rendre per-
pétuelle l'affectation des biens au service : en retenant les biens,
on était encore sûr de conserver les personnes. Ce fut un pre-
mier pas dans l'arbitraire. Mais avec le temps, les rangs des co7'-
porati et des collegiati s'éclaircirent ; de même que les curiales,
ils en vinrent à préférer la liberté à leurs biens et aux privi-
lèges. Pour la seconde fois, l'Etat usa de sa toute-puissance, en
retenant, non seulement les biens, mais aussi les personnes; et,
du moment que l'obligation exista pour les membres des col-
lèges, elle passa, par voie d'hérédité, à leurs descendants. Nous
croyons qu'il faut distinguer ces deux étapes dans la législa-
tion : l'affectation perpétuelle des biens précéda et prépara
celle des personnes, du moins dans les collèges où les biens
étaient affectés au service, et c'était le grand nombre.
C'était, au fond, un double abus de pouvoir, mais on ne se
rendit pas compte de la violence exercée. On ne s'en aperçut
guère, pour les raisons suivantes : d'abord, cette loi imposée
^ C. Th., 14, 7, 1. 1 (397) : retralii jubeant cum omnibus, quae eorum
eriint, ne desiûerio rerum suarum loco originario non valcant attineri.
'- Cfr. Wallon, III, . 173.
( 284 )
aux corporati de Rome et aux collegiati des provinces tendait
à devenir une loi universelle; ensuite, elle n'était que l'exten-
sion de la loi de 1' « origine », appliquée depuis toujours aux
citoyens pour la participation aux charges communales; enfin,
elle ne fut pas imposée du jour au lendemain, mais lentement,
et quand elle devint définitive, on y était habitué.
La loi de l'obligation et de l'hérédité, qui attachait le corpo-
ratus et le coUegialus à sa corporation avec ses enfants, tendait
à devenir une loi universelle. 11 est probable qu'elle fut d'abord
imposée aux curiales, et c'est une chose connue qu'elle s'appli-
quait aussi aux colons, aux soldats, aux employés des bXireaux^
aux appariteurs des magistrats. On la retrouve partout et elle
n'était pas aussi nouvelle qu'on serait tenté de le croire; elle
ne constituait qu'une extension à des catégories nouvelles
d'une règle bien connue. Depuis toujours, c'était la naissance
ou r « origine » {nativitas ou origo), comme on disait, qui
déterminait pour chaque individu l'obligation de participer
aux charges [munera) de sa ville natale ^. On avait beau chan-
ger de domicile, on restait soumis aux charges de sa ville
d'origine. Or, avec le temps, ces charges, au lieu d'être égale-
ment réparties entre tous, avaient été divisées en « fonctions »
spéciales, confiées à des classes déterminées de citoyens. Les
plus imposés étaient les curiales, à qui incombaient les munera
civilia ; de même, chaque collège avait été chargé de sa « fonc-
tion )) particulière. Tant que les honneurs et les avantages
attachés à la curie et aux collèges avaient compensé les charges,
l'État n'y avait retenu personne de force. Les charges des corpo-
rations étaient personnelles : l'État n'avait encore aucune peine
à trouver des personnes; ces charges étaient patrimoniales :
avec les personnes, l'État se procurait les biens. Quand la
désertion commença, l'État s'attacha d'abord à conserver les
biens, persuadé que, s'il retenait les biens, il ne serait pas
* RÉviLLOUT, Étude sur L'histoire du colonat chez les Romains, dans la
Revue hist. de droit franc, et étranger, 4857, pp. 217-220. Karlowa, I,
pp. 926-927.
( 285 )
difficile de retenir les personnes ou de les remplacer. L'affec-
tation perpétuelle des biens au service préparait celle des per-
sonnes, car elle avait pour conséquence naturelle celle des
propriétaires. Mais le moment vint où les biens ne suffisaient
plus à retenir les personnes : on préférait y renoncer pour
éviter les charges intolérables. C'est alors que le principe de
!'« origine », qui attachait le citoyen à sa ville pour la partici-
pation aux charges communales, fut étendu à ces corporations
investies de certaines charges spéciales, comme il avait déjà
été étendu aux curiales. Il suffisait d'être entré dans une curie
ou dails un collège ou d'y être né, pour ne plus pouvoir en
sortir, si ce n'est dans des cas fort rares. A l'époque de Callis-
trate, on entrait dans les collèges et on les quittait à son gré;
dès la seconde moitié du IIP siècle, on y fut retenu par le
patrimoine, atleclé désormais au service; enfin, au IV^ siècle,
il suffira d'avoir été reçu dans un collège ou d'y être né pour
lui appartenir à jamais.
Cette modification si profonde dans la situation des collèges
s'opéra lentement et sans secousse. Il n'y eut pas de loi géné-
rale embrassant toutes les conditions, ni même toutes les
corporations. On hésita, on prit des mesures partielles pour
sauver les collèges les plus menacés. On revint plus d'une fois
sur les mesures prises, et ce ne fut guère qu'à la fin du IV« siè-
cle qu'on put dire que tout corporatus était pour toujours et
indissolublement lié à son collège avec ses biens et sa postérité.
Nous allons tacher de suivre, dans les lois nombreuses et sou-
vent contradictoires, le développement des principes que nous
venons d'énoncer.
Affectation perpétuelle des biens.
On commença, disions-nous, par considérer le patrimoine
des corporali et des colleyiaU comme atïécté pour toujours à
leur fonction spéciale.
( 286 )
A l'origine, pas le moindre obstacle n'était mis à l'aliénation
des biens privés destinés au service; le corporatiis en disposait
librement, comme au temps de Callistrate : il pouvait les
vendre, les donner pendant sa vie ou par testament ^. Les
entraves mises à l'aliénation de res naviculariae ne furent que
passagères. En 326, elle est permise sous condition ; en 365, au
contraire, Valentinien I^*" fait rendre à la corporation tous les
biens qui avaient passé à des étrangers -. En 372, il permet de
nouveau tous les modes d'aliénation, vente et donation 3, et en
375, il déclare expressément que la vente ne peut être empê-
chée, sans doute parce que l'administration avait cofitesté ce
principe K Honorius ne parle pas autrement en 397, en 399 et
en 410 s.
Chez les boulangers aussi, la liberté de disposer de leurs
biens privés fut d'abord entière, mais les premières lois du
Code Théodosien sont déjà des restrictions qui la suppriment G.
Quant aux charcutiers et autres corporations au service de
Rome, ils purent toujours se défaire de leurs biens par vente
ou par donation "ï. En 424, on parle encore de la vente de
loca metallica, et Théodose ne la défend nullement ^. 11 en était
1 Cfr. Gebhaudt, pp. 74-75. Goth., Parât, ad C. Th., 13, 6.
2 C. Th., 13, 6, 1. 1 (326) : alienationes possessiomim a naviculariu
factas fugieiuli imineris gi^atia praejtulicare vobis non sinimus. — C. Th.,
13, 6, 1. 2 (365) : patrimonia naviculariorum, qui quolibet génère in
extraneorum dominia demigrarunt, in corporis sui jus proprietatemque
rement.
3 G. Th., 13, 6, 1. 6 (372). 11 le permet, à condition que les acquéreurs
assument la charge.
^ G. Th., 13, 6, 1. 7 i376j : quoniam intercipere contraction emendi
vendendique [as proliihet.
3 G. Th.,13, 5, 1. 27etl3, 6, 1. 8et9.
e G. Th.. 14, 3, 1. l (319) et 1. 3 (364) : Praedia rusticavel urbana, qvae
possidcnt priva to jure pu tores.
7 G. Th., 14, 4, 1. 5 (389) : nmltimoda donatione. L. 8 (408) : vel ex
empto, vel ex donato, vel ex quolibet titulo.
s G. Th., 10, 19, 1. 15 i424). Voyez supra, p. 281, n. 5.
( 287 )
sans (ioLite de mémo de toutes les corporations dont la charge
était patrimoniale.
Mais si les biens privés pouvaient être aliénés, ils ne pou-
vaient cesser d'être affectés au service public K Toute aliéna-
tion avait donc une double conséquence : le vendeur était
affranchi de la charge, qui passait à l'acquéreur.
C'était une règle du droit civil que tout acquéreur d'une
propriété foncière devait en assumer toutes les charges -. On
pourrait conclure de là que l'acquéreur de biens affectés à un
collège devenait ipso facto membre du collège. Mais il n'en
fut pas toujours ainsi. Au commencement, l'Etat ne tenait
qu'à la terre : il avait assez d'hommes. Son seul souci était de
ne pas laisser détourner les biens de leur destination, et il per-
mettait à l'acquéreur de contribuer pour sa part aux frais du
service sans devenir membre, sans être soumis à un travail
personnel. Longtemps on saisit avec empressement cette occa-
sion d'entrer dans le collège; mais quand les privilèges ne
compensèrent plus la peine, on préféra se borner à remplir
la charge qui grevait la propriété acquise; en effet, elle n'ab-
sorbait pas toujours entièrement les revenus, et les autres
biens que l'on pouvait avoir restaient exempts. Au contraire,
en entrant dans la corporation, on y était attaché avec tous ses
biens. 11 faut donc distinguer deux sortes de propriétaires de
rcs obnoj'iae : les corporati, ou membres du collège par la
naissance, attachés, personnes et biens, au collège, et les
acquéreurs de biens ayant appartenu à un corporatus, qui ne
devaient au service que cette partie de leur patrimoine, et pas
du tout leur personne.
* Wallon, III, p. 206 : c< Les biens (du citoyen) sont frappés d'une
hypothèque perpétuelle, comme gage de son travail pendant sa vie,
comme garantie des services qui se continueront, après lui, pour le bien
de l'État. »
2 C. Th., 11, 3, 1. 2 (327) : Sublalis pactionibus eorumdem (lege eniplo-
rum, GoTHOFii.) onera ac pensitationes publicae ad eoriim sollicitudinem
spectent, ad quorum dominium possessiones eaedem migravenint.
( -288 )
Cette faculté fut toujours laissée aux acheteurs ou donataires
de res imvi cul aria e, mais il n'en fut pas ainsi dans toutes les
corporations.
Constantin semble avoir hésité à l'égard des naviculaires ^ ;
ce fut Valentinien l^'' qui mit fin à tous les doutes "^. Le col-
lège, appuyé par l'administration, avait probablement voulu
s'adjoindre tous les acquéreurs de res naviculariae ; Valenti-
nien l""" décide que l'acheteur ne subira la charge qu'en propor-
tion de ce qu'il a acheté : emptor naviadani functionem pro
modo portionis comparatae subeat. Pourquoi? C'est que la
chose est soumise à la charge, et non la personne de l'acheteur:
res enim oneri addicta est, non persona mercantis 3. La per-
sonne n'est pas liée, parce qu'elle n'entre pas dans la corpo-
ration : neque navicularium illico jub émus fi eri eiim, qui aliquid
comparavit, sed eam partem, quae empta est, pro siw modo ac
ratione esse munificam. Nec enim totiim patrimonium ad func-
tionem navicularii muneris occupandum erit, quod hahuerit, qui
rei exiguae mercator accessity sed illa portio, quae ab initio navi-
cularii fuit, ad pensionem hujus functionis sola tenenda est,
residuo patrimonio, quod ab hoc vinculo liberum est, otioso et
immuni servando ^. w Honorius maintint cette règle en 897 •*>;
* En 319, il dit : sive pro solido, sive proportione hiiic mimeri teneantur
(13, 5, 1. 3, § 1). En 326, il semble les adjuger au collège : ideoque volii-
mus, ut comparatores suprascriptarum possessionum ad id obsequium
compellantur, oui se obnoxios esse fecerunt (13, 6, 1. 1). C'est l'avis de
(iOTHOFR., ad h. t., mais cfr. 14, 4, 1. 1 (334) : exe)nplum rei naviculariae.
2 C. Th., 13, 6, 1. 4 et S (367); 1. 6 i372); et surtout 1. 7 (373).
5 Krakauer, p. 18, et Wallon, III, p. 173, citent cette phrase et
l'appliquent à tort aux corporati eux-mêmes. Krakauer la défigure en
retranchant mercantis et il croit que la funclio navicularia n'est pas
personnelle pour les corporati. Cfr. Karlow^a, I, pp. 915-916. Gebhardt,
pp. 62 et 67, confond aussi.
1 C. Th., 13, 6, 1. 7 (375) = C. J., XI, 3, 2.
s C. Th., 13, 5, 1. 27 (397) et 13, 6, 1. 8 (399) : Hi, qui fundos navicu-
lariae functioni adscriptos a naviculariis acceperunt quolibet ad se titulo
transeuntes, secundum agri opinionem, quae antiquitus habetur adscripta,
naviculariam functionem suscipere cogantur.
( 289 )
enfin Tribonien reçut dans le Code de Justinien, non pas
la loi de Constantin, mais celles de Valentinien et d'Hono-
rius ^.
Aussi, en parlant de la functio naviculmia, le Code de Théo-
dose dislingue généralement les naviculaires , membres du
collège par leur naissance, et les simples propriétaires de res
naviculariae -. Celles-ci pouvaient, du reste, passer à des gens
qui étaient incapables d'entrer dans la corporation, ou à qui
c'était défendu. Ainsi, nous trouvons parmi les détenteurs de
ces biens : 1° le fisc {domus jyriucipis •^) ; 2° des personnages
d'une classe élevée, particulièrement des sénateurs, attachés
eux-mêmes à leur corps ^; 3«des ofjicialcs, principalement des
officiers de police appelés agentes in rébus -% et des cohnrtalcs
ou employés des gouverneurs de province, qu'une défense
expresse excluait de la corporation des naviculaires ^; 4° des
curiales, qui doivent rester dans la curie depuis 395, même
s'ils héritent ou acquièrent par achat ou donation d'un navi-
• C. J., XI, 3, 1. 2. 3. — Notons encore qu'en cas d'adjectio d'un
fundiLS naviculariiis abandonné, la terre à laquelle il était annexé d'ofïîce
restait exemptée de la functio navicularia, comme par le passé (C. Th., 6,
2, 1. 13 = HaEiNEL, 1 19, en 417).
2 C. Th., 13, 5, 1. 3 (319) : Si quis navicularius ... Sed et si quis patri-
monium naviculario muneri obnoxium possidet. L 20 (392) : Si nec génère
navicidariorum corpori cohaeret, nec navarchiae obnoœias functioni
rctinet facilitâtes. L. 22 (393) : yavicularionim vires ac débitas finir
necessitati origines. C. Th., 13, 6, 1. 1 '^326) : comparatores snpra scripta-
rnm possessionum. L. 8 (voyez snpra, p. 288, n. 5).
3 C. Th., 13, 6, 1. 3. 5 = C. J., XI, 2, 1. De même le fisc payait, le
cas échéant, lagleba senatoria : C. Th., 6, 2, 1. 17.
^ C. Th., 13, 5, 1. 3 : licet altioris sit dignilatis. L. o : cujuscnnque
fiierint loci vel dignitatis — sive decuriones sint, sive plebeii, seu potioris
altei'iiis dignitatis. L. 14 : de senatoria dignitate. Cfr. 15, 14, 1. 4 (326) :
sénateurs enrôlés par Licinius ; mais ils avaient cessé d'être sénateurs.
'' C. Th., 13, 5, 1.3(364). 20(392).
6 C. Th., 8, 4, 1. 11 (365) : non ad functioneni naviculariani devo-
mndos.
Tome L, vol. II. 19
( 290 )
culaire * ; 5*» des femmes 2 ; 6" l'Église dans la personne d'un
évéque 3.
Quelles étaient les obligations de ce genre de naviculaires?
Leurs personnes étaient libres, mais les irs naviciilariae qu'ih
avaient acquises étaient soumises tout à fait aux mêmes
charges que les biens des membres du collège ^. Ils devaient,
comme ces derniers, construire des navires, les équiper et les
mettre au service des transports sous leur entière responsa-
bilité '\ Les sénateurs, dans ce cas, devaient être dispensés de
la défense de posséder des vaisseaux au delà d'une certaine
capacité 6. Comme les corporati, les détenteurs de biens
devaient servir là où se trouvaient ces biens, et les femmes,
qui suivaient leur mari pour ce qui concerne la justice, devaient
remplir ces obligations dans leur municipe d'origine 7. Quant
à l'importance de ces charges, elles étaient naturellement
mesurées, comme celles des corporati, d'après la quantité de
res navicuJariae qu'on possédait 8. I /acquéreur étranger qui
ne voulait pas remplir ce devoir, devait abandonner les
' C. Th., 12, 1,1. 149(395).
■^ C. Th., 13, 5, 1. 12 (369;. Cfr. DiG., 48, 2, 13 : mulierem ad annonam
pertinentem.
3 Augustin., /. /.
^ C. Th., 13, 5, 1. 3. 27. 6, 1. 1 (326) : volumus, ut comparalores supra
scriptorum possessionum , interpella to Praefecto Annonae, ad id obsequium
compellantur, ciii se obnoxios esse fecerunt.
•' Augustin., L /.
6 DiG , 50, o, 3. — Les termes du Code ne permettent pas de voir une
dilFérence-- entre leur service et celui des corporati. 13, 6, 1. 4 : siibire
eorum onera, quorum possessione fruunlur — cognoscere naviculariam
functionem. L 6 : agnoscere débit am functionem. L. 6 : onus agnoscere.
L. 8 : naviculariam functionem suscipere. Cependant, voyez 1. 7 : ad
pensionem liujus functionis.
- C. Th., 13. 5,1. 12(369).
*• C. Th., 13, 5, 1 3 : pro virili portione. L. 27 : secundum possessionis
modum. 13, 6, 1. 4 : pro rata ex parte. L. 7 : pro modo portionis compa-
ratae, et plus loin : pro suo modo ac ratione. L. 8 : secundum agri
opinionem.
( 291 )
biens, qui revenaient au collège, c'est-à-dire à un de ses mem-
bres ^
En somme, le simple détenteur de l'cs naviculariac n'avait
qu'un avantage sur le ivrporatus : ses autres biens étaient
exempts; en effet, le service strictement personnel n'était
exigé ni de l'un ni de l'autre. Mais cet avantage était
immense.
Dans la plupart des autres corporations, la loi fut plus
sévère : l'acheteur, l'héritier ou le donataire devenait membre
du collège. Cela se comprend, car ces biens étaient grevés d'un
service strictement personnel. Aussi, chez les boulangers, char-
cutiers et autres corporations de Rome, il faut distinguer deux
sortes de membres : les corporati de naissance et ceux qui le
sont devenus par l'acquisition de biens.
Valentinien P^" s'exprime en termes très clairs concernant les
affranchis à qui le maître donnait ou léguait par testament une
ri's pistrinis obno.via; il dit : pistomm corpori copuleutur -!
Pour les autres acquéreurs de res pistoriac, les lois sont moins
claires : mercantes ad venditoris ofjicium voc(d)untur 'K Mais
comme c'est le motif pour lequel le même prince défend de
vendre des res pistoriae à un sénateur ou à un officialis, qui
étaient eux-mêmes liés à leur condition, il est évident qu'il veut
dire que tout acheteur devient boulanger; en effet, s'il ne
s'agissait que d'assurer la charge réelle, le sénateur aurait pu
êire détenteur de res pistoriae, aussi bien que de res iiaricu-
lariae. Cependant l'acquéreur étranger pouvait toujours opter,
et une donation, ou une institution d'héritier, n'était valable
* C. Th., 13, 6, 1. 4 (36Tj : Naviculariae facilitâtes naviculario corpori
reddantur, si bona rite retinentes siibire eorum onera nolint, quorum
possessione fruuntur. Cfr. 1. "1 (365) : patrimonia iiaviculariorum, quac
quolibet génère in extraneorum dominia demigrarunt, in corporis sui jus
proprietatemq-ie remeent. On voit qu'en 36o Valentinien I^"" s'était montri-
trop absolu et qu'il se ravise en 367 en laissant le choix.
2 C. Th., 14. 3, 1. 10(363?).
3 C. Th., 14, 3, 1. 3, pr. (364).
( 292 )
que si le donataire ou l'héritier acceptait les fonctions de bou-
langer ^.
Nous trouvons cependant un cas où le propriétaire de biens
affectés à la boulangerie était seulement soumis aux charges,
sans devenir corporatus, mais c'est un cas spécial : le navicu-
laire qui hérite d'un boulanger, ne pouvant être membre de
deux corporations à la fois, reste naviculaire, mais il doit
consacrer les biens hérités au service de la boulangerie, ou les
céder soit au corpus pistorum, soit à un proche du défunt, qui
devient boulanger'^.
Quant aux charcutiers, Constantin voulut qu'on leur appli-
quât la règle qu'il avait établie pour les naviculaires; les acqué-
reurs de res suariae doivent renoncer à ces biens ou devenir
suarii : De duobus alterum eligant, mit retineant boiia, quae
suariae functioni destriclasunty ipsique suario teneantur obsequio,
aut idoneoSy quos volunt, nominent, qui necessilati eidem satisfa-
ciant, jXullum enim vacare ah ejus rei munerepatimur^. Valen-
tinien II confirme cette décision en 389 ^ et en 397 flonorius
met sur la même ligne les détenteurs de biens et les suarii de
naissance : Non minus habeatur obnoxius quem possessio tenet,
quam quem successio generis adstringit. En conséquence, il
autorise les charcutiers à revendiquer tous les détenteurs de
res suariae, sauf ceux qui seraient attachés à un autre service 3.
En 408, il rappelle d'abord les charcutiers de naissance {origi-
narii suarii), puis il met les acquéreurs de terres atfectées à la
corporation en demeure d'assumer leur part de la charge ou
« C. Th., 14, 3, 1. 3, § 2 (364) : Haec forma aervabitur et in testaDientis
aut donatione vel novissima volunlate, ut in extraneos collata non
valeant, nisi pistoris officium sponte susceperint, qui pistorum sunt
munificentiam consecuti.
'■î C. Th., 13, 5, 1.2(315).
5 C. Th., 14, 4, 1. J (334) : exemplum rei naviculariac proponattir.
Voyez supra, p. 288, n. 1.
' G. Th., 14, 4, 1. 5 (389) : suheant cum fns communem sarcinam.
- G. Th., 14, 4, 1. 7 (397).
( 293 )
de restituer les biens : /// vero, (lui praedia obnoxia corpori vel
ex emplo vel ex donalo vel ex quolibet titulo teneiit, pro rata
publicum munns agnoscant, aut possessiouibus cédant. Et cette
règle, dit-il, s'applique à toutes les corporations qui desservent
Rome ^.
Quant aux pêcheurs de pourpre et aux mineurs, nous avons
une loi de Théodose (en 424) qui enrôle dans ces collèges les
acquéreurs de biens qui y sont affectés, à moins qu'ils ne pré-
fèrent y renoncer 2.
En résumé, l'acquisition des biens entraînait l'entrée dans la
corporation ou tout au moins la soumission aux charges. Rien
ne pouvait soustraire l'acquéreur à l'une ou à l'autre de ces
nécessités, sinon le renoncement aux biens. On n'admettait
aucune stipulation contraire, aucun privilège, aucune prescrip-
tion. Le vendeur ne pouvait stipuler qu'il conserverait la charge;
toutefois, si l'acheteur était incapable de la remplir, le vendeur
devait la partager avec lui et le fisc était satisfait 3. Les privi-
lèges dont jouissaient les sénateurs et les officiers de police
appelés agentes in rébus, ne pouvaient les dispenser des
charges, s'ils possédaient des biens affectés à un service K II
n'y avait pas de prescription contre les réclamations du col-
* C. Th., 14, 4, 1. 8 (408). — Nous avouons que les lois qui parlent des
détenteurs de ces res pistoriae, siiariae, etc., sont souvent vagues, et il est
possible (comme l'admet Gebhardt, p. (jo, contrairement à Godefroy,
vol. V, pp. 169 et 189) que ces détenteurs étaient traités comme les
acquéreurs de res naviculariae. Les mots : pro rata publicum munus
agnoscant (1. 8), semblent avoir ce sens que les acquéreurs ne sont
soumis au service que pour les res suariae dont ils sont détenteurs. Il y
a eu peut-être des variations dans la loi.
2 C. Th., 10, 19, 1. 15 (424). Voyez supra, p. 281, n. 5. C. Th., 10, 20,
1. 14 (424) : Quodsi alienigenae detentatores oneribus condicionis externae
maluerint subjacere quani restiluere facultates, et futura deinceps agnos-
cant munia sibi esse subeunda, et ... Ils doivent même payer le? arré-
rages en coquillages de pourpre dus par les vendeurs.
5 C. Th., 13, 6,^. 8 (399) = C. J., XI, 2, 3.
^ C. Th., 13, 5, 1.3 et 20.
( 294 )
lège, pas même pour la maison de l'empereur, c'est-à-dire
pour le fisc '. En 417, Honorius reconnut la prescription
de vingt ans pour les propriétés détournées suhhastaria
sorte -, cV'st-à-dire vendues à l'encan, et en 423, il fixa la
prescription à cinquante ans pour toutes les propriétés
situées en Afrique •'^. Quand la loi n'était pas observée, l'empe-
reur, de sa propre initiative ou sur les plaintes du collège,
ordonnait une enquête sur les biens affranchis et sur leurs
nouveaux propriétaires. Ceux-ci étaient sommés d'y renoncer
ou d'assumer les charges î^; souvent même on leur imposait
les charges, sans leur laisser le choix -K II ai rivait aussi qu'on
leur reprenait les biens pour les adjuger au collège '>. I.es
décisions diff'èrent suivant le temps et les corporations.
De même que l'acquéreur entrait dans le collège, de même
le corporatus qui perdait ses biens d'une manière quelconque
pouvait et devait même en sortir. Celte stricte application du
principe ne souffrait probablement aucune difficulté au début;
pourvu que l'État conservât la terre, il trouvait encore sans
peine un homme pour l'exploiter. Quant à l'homme qui ne
possédait plus rien, il ne rendait plus assez de services pour
le laisser jouir des privilèges. Nous trouvons encore de nom-
breuses traces de cette règle au iV^ siècle.
La déconfiture et l'appauvrissement étaient des motifs d'ex-
clusion. Le failli [decoctor) ne pouvait plus utilement servir le
collège, puisqu'il n'avait plus que ses bras à lui off'rir, alors
qu'on exigeait en outre de l'argent. Il était expulsé et en 377
i C. Th., 13, 6, 1. 3 (365?) et 1. 5 (367).
2 C. Th., 13, 6, 1. 9 (417).
•' C. Th., 13,6,1.10(423).
^ C. Th., 13, 6, 1. 4 et 6. K, i, 1. o et 8. 14, 3, 1. 3, ^ ± 10, 20, 1. 14,
en 424 (murileguli) .
3 C. Th., 13. 6, 1. 1. 3. 7. 8. 9. Cfr. 13, o, 1. 3. 19. 20. 27. 35 {navi-
cularii . 14, 3, 1. 1 et 10 [pistores). 14. 4, 1. 7 {suarii). 10, 19, 1. 15
{metallarii).
6 C. Th., 13, 6, 1. 2, en 365 (Valentinien I^') : in corporis sni J7is proprie-
tatemque remeent. Voyez supra, p. 291, n. I.
( 295 )
Gratien ordonne encore de ne plus laisser rentrer ceux que le
préfet de l'annone venait d'exclure du corpus pistorum K Celui
qui s'appauvrissait était exempté des charges et pouvait se reti-
rer du collège. A l'origine, cette règle ne présentait aucun
danger, mais dès le commencement du IV« siècle, les fraudes
étaient générales. Les mesures qu'on prit contre ces fraudes
prouvent au moins que la règle existait. Les boulangers se
débarrassaient de leurs biens, puis demandaient qu'on les rem-
plaçât, comme étant incapables; « cette ruse, ces détestables
mensonges » ne réussissaient pas toujours : dès 319, Constan-
tin décida que les biens de ces fraudeurs resteraient à l'acqué-
reur, mais qu'eux-mêmes seraient attachés à jamais à leur
boulangerie '^. Cette tentative prouve du moins que les bou-
langers appauvris étaient exempts, peut-être exclus. C'est
encore pour ce motif que parfois des étrangers qui avaient
épousé des boulangères dissipaient la fortune de leurs femmes:
ils espéraient ainsi les arracher à leur condition. Valentinien h''
les incorpora eux-mêmes '\ Enfin les naviculaires adjoints
aux chauffeurs de bains étaient aussi remplacés, s'ils perdaient
tout à coup leur fortune 4.
L'aliénation de tous ses biens par vente ou par donation
était un autre moyen d'échapper aux charges » ; mais elle n'était
valable que si le nouveau propriétaire consentait à remplacer
l'ancien.
Il est probable qu'au début tout membre qui renonçait à
son patrimoine pouvait aussi s'aff*ranchir ; ses biens entraient
• C. Th., 14, 3, 1. lo : lex, per quam lUilitati annonae piiblicae provi-
detur. GoDEFROY admet qu'il s'agit de patroni pislorum, qui ont mal
géré leur boulangerie {ad. d. /.).
2 c. Th., 14, 3', 1. 1 (319).
•' C. Th., 14,3,1.14(372).
' C. Th., 13, 5, 1. 13 (369) : Quibiis, si quem aut necessilas fatalis, aiU
irinpia repentina, mit aliguis casus inviderit, ex vacationibus obnoxih
nportebit idoneiun siirrogari.
^ C. Th., 13, 6, 1. 1 (326) : aliénai ioncs possessioniun a navirulariis
fadas, fuijiendi muneris gratin.
( 296 )
dans le patrimoine commun du collège qui en consacrait les
revenus au service, il les confiait peut-être aussi à celui qui
se présentait volontairement pour remplacer le sortant; dans
ce cas surtout, l'État, n'y perdant rien, ne faisait pas opposi-
tion et la liberté individuelle était sauvegardée.
Mais l'Etat ne put pas toujours se montrer si large; il éprou-
vait de jour en jour plus de ditlicultés à recruter des hommes :
aussi les restrictions furent-elles de plus en plus nombreuses.
Quand les bras manquèrent, on conserva même les faillis, et
l'on rendit la corporation solidaire de la faillite; du moins
c'est ce que Théodose II décréta en 438 pour les fabricenses '.
Pour l'aliénation, on eut recours à des moyens termes qui,
avec le temps, parurent insuffisants. On mit des bornes à la
libre disposition des patrimoines. Avant 319, les boulangers
avaient encore toute liberté sous ce rapport ^^; mais on vit que
cette liberté devenait préjudiciable au collège, et Valentinien I«'
commença par déclarer sans valeur l'aliénation faite à un étran-
ger qui refuserait d'entrer dans la corporation, ainsi quaux
sénateurs et ofticiales, qui ne pouvaient devenir boulangers ^.
Cinq ans plus tard, en 369, nouvelle mesure restrictive, qui
équivalait à une défense complète. Le même prince décida
que tous les biens qui avaient une fois fait partie du patrimoine
d'un boulanger, les eût-il acquis libres de toute charge, seraient
inaliénables; ils devaient appartenir à la boulangerie, comme
\es fundi dotales. Le boulanger ne pouvait plus disposer que
des biens qu'il avait lui-môme acquis d'un étranger : encore
ne purent-ils passer qu'à un confrère et seulement après la
mort du propriétaire. Voici comment s'exprime Valentinien l^*":
a A la boulangerie appartiennent, non seulement les biens qui
» à l'origine ont été assignés à la corporation et conservent
» encore le nom et le caractère de dotation, mais encore ceux
» qui, de la succession d'un boulanger, ont de notoriété
* Nov. Theod. II, t. C : De bonis fabricensium.
^ C. Th., 44, 3, 1. 1 (319;.
3 C. Th., 14,3,1.3(364).
( 297 )
» publique passé à leurs héritiers ou à d'autres; il est donc
» évident qu'ils ne peuvent être distraits. Les membres de cette
» corporation ne peuvent disposer librement que de ceux qu'ils
» possèdent, non par héritage d'un boulanger, mais par le tes-
r tament ou la générosité d'un particulier, par le mariage, ou
» à tout autre titre, et à condition qu'ils les transmettent à un
» de leurs associés, c'est-A-dire à un boulanger. Au reste, s'ils
» laissent ces biens dans leur succession, nous les compre-
)) nous, comme les autres, sous le titre de dotation, parce que
» la boulangerie doit avoir le bénéfice de ce qui est resté en la
» possession d'un boulanger durant sa vie ^. » Ainsi le bou-
langer communique son caractère à ses biens. De cette façon,
la sortie par l'aliénation des biens était devenue impossible et
la corporation conservait ses biens et ses hommes, elle aug-
mentait même son avoir. Pour les autres collèges, nous ne
trouvons pas de restrictions pareilles, mais elles devinrent
inutiles par suite d'une mesure plus radicale, dont nous par-
lerons bientôt. Quant à la sortie par cession, on y mit aussi
des obstacles invincibles. Elle ne fut plus permise sans condi-
tion que dans un cas spécial : par égard pour l'Eglise, on
accorda cette faveur aux membres de toutes les corporations
de Rome, s'ils voulaient entrer dans le clergé '^. Dans les autres
cas, le collège conservait ses hommes : qu aurait-il fait des
terres sans bras pour les exploiter? Où aurait-il trouvé des
remplaçants? 11 ne laissa donc plus partir ses membres que
s'ils fournissaient eux-mêmes un remplaçant. Cette substitu-
tion était permise en 334 chez les naviculaires et chez les char-
cutiers : Constantin fait rappeler les suarii qui sont parvenus
à s'affranchir de leur collège, à moins qu'ils ne préfèrent four-
nir un remplaçant capable; c'est la substitution des biens et de
« C. Th., 14, 3, 1. 13 (369).
- C. Th., 14, 4, 1. 8, § 1 (408) : Eoseliam, qui adclericaliLs se privilégia
contulerunt, aiit agnoscere oportet propriam functionem, aut ci corpori,
(juod déclinant, proprii patrimonii facere cessioneui.
( -298 )
la personne en même temps. Et il cite l'exemple des naviru-
laires K
Cet échange est permis aux boulangers, s'ils veulent devenir
sénateurs : ils doivent fournir un de leurs |)arentsqui consenleà
prendre leur place -. En l'an 42o, Théodose II accorde encore
cette faculté aux gynaeciarii, aux liutearii, aux monetarii et
aux murileiiiili ; mais les termes dont il se sert montrent
combien la chose était ditiicile; il fallait laisser à la corporation
tous ses descendants et ses biens; il fallait en outre faire agréer
le remplaçant, et le Comte des Largesses Sacrées devait y regar-
der de près ^. Il y avait longtemps qu'on refusait cette faveur
aux autres corporations. Elle était illusoire, du reste; car les
raisons qui poussaient les uns à sortir, devaient détourner les
autres d'entrer.
Affectation perpétuelle des personnes.
On voit qu'en déclarant les patrimoines affectés pour tou-
jours aune « fonction » déterminée et en rendant leur aliéna-
tion de plus en plus ditiicile, on retenait presque invincible-
ment leurs propriétaires 'k Et cependant cela ne sutiît pas. Les
♦ C. Th., 14, 4, 1. 1 :334) : aut idoneos, quos volunt, nominent, qui
necessitati eidem satisfaciant. Idoneus veut dire : qui, par sa personne et
surtout par ses biens, est capable de remplir la fonction.
- C. Th., 1-4, 3, 1. 4 (364) : in tantam paneficii substantiam idoneos de
suis surrocjare cogantur, quantam ipsi exhibuere pislores.
5 C. Th., 10, 20, 1 16 (426) : non quoscunque, nec facile in locum pro-
prium ... substituant, sed eos, quos omnibus idoneos modis, sub ipsis
quodanimodo amplissimae tune sedis obtutibus approbarint.
^ Pigeonneau [Rev. de l'Afr. franc., 1886, p. 232' dit très bien : « Déjà
)> les corporations, comme les cités, ne sont plus des associations de
)) volontés libres, unies sous la même loi par des att'ections et des inté-
» rets communs, ce sont des agglomérations de propriétés qui n'ont
» d'autre lien que la communauté de charges et de servitudes envers
» l'État. Ce n'est plus l'homme qui est le maître de la terre, c'est la terre
faveurs qu'on parvenait à arraclier au prince, les fraudes de
toutes sortes compromettaient l'existence même des collèges.
Bien plus, on désertait les corporations, au risque même de
[>erdre un patrimoine sans valeur, parce qu'il était grevé de
charges plus lourdes que ses revenus. Alors l'État n'eut plus
d'autre ressource que de mettre la main sur les personnes et
de les immobiliser à leur place. Il décida que désormais
chaque corporatus resterait où il était et qu'on n'abandonne-
rait plus son collège sous aucun prétexte. C'était la servitude
de la glèbe appliquée à l'administration i. Désormais la per-
sonne, comme les biens, sera la propriété inaliénable du col-
lège. Ce principe, introduit d'abord pour maintenir les collèges
les plus menacés, devint peu à peu une règle générale appli-
cable à tous. Rien ne prouve mieux le désarroi qui régnait
dans cette vaste administration que les mesures contradictoires
qui se succèdent dans le courant du IV^ siècle. Les décisions
diffèrent suivant les corporations ; tel prince décide le contraire
(le son prédécesseur, ou revient même sur ses propres déci-
sions. Tâchons de nous retrouver dans ce chaos.
En 371, Valens dit formellement des naviculaires d'Orient :
« Qu'ils soient à jamais attachés à leur fonction », perpétue si)it
obnoxii functioni -, et Théodose répète, en 390 : « Qu'ils soient à
jamais naviculaires y) , sint peipeluo navicularii'^ . L'intérêt public
)' qui devient la maîtresse de l'homme, qui le possède, qui l'étreint. et
)» qui étouffe sa liberté. Pour le naviculaire, comme pour le curiale,
') droits et devoirs dépendent de sa propriété: il est l'esclave de son
» héritage, il est le serf de sa glèbe. Servitude plus dure, féodalité
' plus oppressive que celle du moyen âge, car le serf peut renier son
» seigneur en abandonnant sa lenure. Je vassal peut renier son suzerain
» en abandonnant son fief, tandis qu'il viendra un moment où le navi-
» culaire et le curiale n'auront plus même le droit de renoncer à leur
-> pro|)riété et seront rivés à leur chaîne. »
1 Wallon, III, p. 174.
- C. Th., 13, o, 1. 14 (371 i : ita ut facultatibus propriis per siiccedaneas
fiereditatium vices perpctiio sint obnoxii functioni.
* C. Th , 13, 5, 1. 19 (390) Il s'agit de curiales enrôlés parmi les
naviculaires.
( 300 )
exige cette servitude : « Il convient, dit Honorius en il 2, que
tous ceux que l'antiquité a trouvés attachés au service du trans-
port, y restent attachés, pour que le canon frumentaire soit
livré à la ville très sacrée ''. » Quant aux boulangers, voici ce
que dit Valentinien I*"", en 365 : « Quiconque aura une fois été
attaché au corpus pistorum ne peut obtenir la faculté d'en sor-
tir, sous quelque prétexte que ce soit, pas même si tous ses
confrères y consentent '^. » Il n'en est pas autrement des char-
cutiers, des marchands de bœufs et de moutons 3. Dès 317,
Constantin dit des monetarii : Il faut que les ouvriers de la
monnaie restent toujours dans leur condition, monetariosin sua
semper durare coiulitione oportel ^. En 384, Gralien décide ce
qui suit des ouvriers attachés aux transports : Aeternam fiximus
legem, ne iinquam bastagariis militiam suam deserere liceat s. En
438, Théodose II parle d'une manière plus expressive des armu-
riers : « On a décidé avec raison, dit-il, que les armuriers soient
asservis à leur métier, au point qu'épuisés par le travail, ils
demeurent encore avec leur famille dans la profession pour
laquelle ils sont nés 6. » Les acteurs et actrices, les cochers du
cirque étaient attachés pour toujours aux jeux publics et aux
spectacles ''. Ce que nous dirons tout à l'heure de la fuite des
corporati et des collegiati et de la chasse aux fugitifs prouve
assez que vers la fin du IV^ siècle, cette règle était appliquée à
' C. Th., 13, 5, 1. 35 (4l2j. Pour les levamentarii, la loi l, en 317, ne
défend que le changement de navire.
2 C. Th., 14, 3, 1. 8 (365). Il défend même de changer de boulangerie.
3 Nov. Val. III, t. 35, § 8 (452).
^ C Th., 10, 20, 1. 1(317). C.J., XI, 7, 1.
« C. Th., 10, 20, 1. 11(384).
6 Nov. Theod. II, t. 6, § 1 (438). G. .Iust., XI, 9, 5.
" C. J., I, 28, 2 (Valentinien et Valens) : homines populares hujiis alnuic
urbis editioni (au lieu de : seditioni) ohnoxios. Pour les scaenici et scae-
nicae, voyez : G. Th., 15, 7, avec le Paratitlon de Gothofr.; 1, 16, 1. 2.
15, 5, 1. 1. Pour les aurigae : C. Th., 14, 3, 1. 21. C'est pour ce motif que
les acteurs et les cochers ne pouvaient pas épouser des filles de bou-
langers, comme on le voit dans cette dernière loi. — Cfr. supra, p. 137.
( 301 )
toutes les corporations de Home et des villes. C'est alors que le
service mérita les noms si expressifs (ïobseijiiium, nécessitas,
obnoxietas ^ ; les membres sont enchaînés au collège {corporïbus
obligati) 2; leurs obligations forment un filet qui les enlace et
qu'ils ne peuvent déchirer [nccessilalihus irrelitus) 3.
Hérédité ou lien du sang .origo, nexus sanguinisj.
Les corporati et les collegiati étaient donc voués à une éter-
nelle servitude. Leur famille échappait-elle au moins à cet
esclavage? Les vocations étaient-elles libres? On comprend que
non. Héritiers naturels de leurs parents, les enfants recevaient
la charge avec l'héritage; il en était de même de tous les héri-
tiers. Le lien patrimonial qui avait préparé l'obligation pour
les coiyorati, la prépara aussi pour leurs enfants; il conduisit
tout naturellement à l'hérédité de la charge, à ce qu'on peut
appeler le lien du sang (nexus sanguinis, origo).
Puisque tout membre pouvait à l'origine aliéner ses biens,
à plus forte raison les transmettait-il librement en mourant,
soit à ses enfants, soit à des étrangers, en respectant naturelle-
ment le droit commun : sa liberté de tester n'était pas entravée.
Plus d'une fois il est question d'héritiers de toute espèce,
d'enfants ou, en leur absence, de parents plus éloignés, ou
même d'étrangers favorisés par testament '^ Or, l'héritier, quel
' Voyez supra, p. 272. Obnoxietas se trouve dans Nov. Val. III, 28, § 1.
•^ C. Th., 0, 30, 1. 17 (399). L'homme est la chose du collège, sa pro-
priété : suo ordini altributos (C. Th., 14, 4, 1. 7j; ut {corporibus) suas
reddi jubeamus personas (C. Th., 14, 4, 1. 10). Obnoxius est fréquent dans
les Codes et dans les auteurs : Gregorius, Epis t., V, 29 (Migne, 77,
p. 757) : sinulli conditioni vel corpori teneris obnoxius.
5 C. Th., 7, 20, 1. 12, § 3 (400). Cfr. Gebhardt, pp. 47-48.
^ C. Th., 13, 5, 1. 7 (334), entre conjoints : et viri ex tcstamento uxorum
solidum capiant, et ad uxores intégra voluntas perveniat mantorum
(chez les naviculaires).
( 302 )
qu'il soit, successeur, légataire ou donataire, recevait la charge
avec les biens ^. Sans doute, à l'origine, il avait la faculté d'évi-
ter la charge en renonçant aux biens, parce que personne ne
peut être forcé de recueillir une succession onéreuse 2. La
terre suffisait encore à l'État : avec elle, il trouvait aisément des
bras. Mais, en ce temps-là, personne n'usait de cette faculté :
tout le monde tenait à une charge compensée par tant d'avan-
tages. Quand le fardeau devint tellement lourd qu'on eût pré-
féré renoncer à l'héritage, l'État retira cette faculté. Par un acte
arbitraire, qui seul pouvait sauver de leur perte des corps
nécessaires (uecessaria corpora\ il usa de contrainte envers
l'héritier, du moins envers les enfants du corporatus et peut-
être même, à leur défaut, envers les héritiers légitimes 3 : il
1 Naviculaires. C. Th., 13, o, 1. U, § 3 (371) : ita ut facultatihus pro-
priis per succedaneas hereditatum vices perpétua sint ohnoxii functioni.
L. 19 i390) : Ac si, cum ubierint, sobnlem non relinquent, guique ilie in
eorum facultatihus (jualibet ratione successerit, auctoris sui munus agnos-
cet. L. 35 (412) : Personas igitur memoratas et eorum heredes et praedia
perseguenda esse decernimus. — Boulangers. C Th., 13, 5, 1. 2 (315) :
negue ulla hereditatis succcssione pistoribus obnoxios, et plus loin : guodsi
hereditario jure forsitan pistoribus teneantur. Il s'agit du naviculaire qui
hérite d'un boulanger: voyez supra, p. 292, n. 2. Cfr. C. Th., U, 3. 1. 3,
§§ 1 et 2 (364) et 1. 13 (369). — Charcutiers. C Th., 14, 4, 1. 7 (397) :
heredes suariorum — reguirantur, et plus loin : guem successio generis
adstringit (lien du sang). — Corpus tabernariorum : C. L L , VI 9920. Sur
cet album, du IV^ siècle, on trouve plusieurs fois les lettres HH suivies
d'un génitif, c'est-à-dire : h[eredes illius). Exemple : HH Sabiniani; c'est
que Sabinianus était décédé.
2 C. Th., 12, 1, 1. 149 (395) : patrimonium, quod ex ordine navicula-
riorum advenerit, prodat pro moderatione [curialis), guem ditat, guia
nec emere, nec donatum assegui nec damnosam guisguam hereditatem
adiré compellitur. Cfr. C. J., VI, 30, 16.
5 Les boulangers, qui ne pouvaient favoriser des étrangers non
disposés à entrer dans ce collège, pouvaient, de leur vivant, faire de?
donations à leurs fils, petits- fils et autres parents qui devaient un jour
devenir leurs héritiers légitimes. Pourquoi? Qza'a et paneficii necessitatem
susdpere successionis jure coguntur (ii. 3, 1. 3, en 364).
( 303 )
déclara que tout membre appartenait à son collège avec tous
ses descendants. La charge qui était jusque-là transmise aux
enfants par les biens, leur fut imposée en vertu de leur origine
seule, de leur naissance (origo). Le sang constitua un lien à lui
seul. Dans celte dissolution de toutes choses, ditWallon, aucun
autre lien ne sembla assez fort et assez général pour contenir
TEtat : la fatalité de la naissance, telle devint la loi suprême
de TEmpire i.
Sous Constantin, la règle n'est pas encore définitivement
établie, mais elle ne tardera pas à devenir générale, non seule-
ment dans les collèges, mais dans toutes les administrations :
bientôt les hommes seront partout liés à leur condition avec
leurs biens et leur famille.
Ce furent probablement les curiales qui se virent d'abord
soumis à cette loi; peu à peu, elle fut appliquée à toutes les
conditions. On naissait curiale, membre d'une corporation,
employé d'un bureau, soldat d'une cohorte, colon d'un champ.
On était forcé de succéder aux charges de ses pères. Presque
tous les habitants de l'Empire sont assujettis de par leur nais-
sance à une condition déterminée : obnoxii condicioni, condi-
(ionales, originarii. Nous n'avons à nous occuper que des col-
lèges. Les lois parlent, avec une véritable richesse d'expressions,
de gens attachés à leur collège par les chaînes de la naissance,
par le lien du sang, par le lien de l'origine; ils sont affectés,
dus à leur fonction par leur origine; le fils doit subir « la
nécessité de la charge paternelle »; il est appelé originalis navi-
cularius, originarius suarius, par exemple; sa fonction est
qualifiée d'originaria functio, de genuina fundio, d'onginis
munus. Le fils est lié par l'origine de la mère aussi bien que
par celle du père : qui tam materno qiiam paterno génère inve-
niuntur obnoxii, même avant de posséder leurs biens !^. Nul ne
» Wallon, III, p. 207. Cfr. Klhn, I, pp. 147 et 259.
- Voici les priiu-ipaiix passages qui parlent de ce lien du sang : Pour
les naviculaires, C. Th., 13, 5, 1. 1 (314) : Si quis navicularius originalis
( 304 )
peut changer son origine; Majorien fait poursuivre ceux qui
« ne veulent pas être ce qu'ils sont nés ^, » et on fait tou-
jours rechercher le corporatus avec sa progéniture. Cela est
plein d'équité et conforme au droit, dit Valentinien II en
389 - : oui, puisqu'il était admis que la volonté de l'empe-
reur avait force de loi, et que tout ce qu'exigeait le salut de
l'Empire était juste. Mais au fond, c'était un acte purement
arbitraire : il violait les droits les plus sacrés du citoyen et de
l'homme.
levamentarius ftterit. L. 19 (390) : sobolem. L. "20 (392) : .si nec génère
navicularioriim corpori cohaeret. L. 22 (393) : débitas luiic necessitati
origines. Nov. Val. III, lit. 28, § 1 : cum agnatione (450). — Pour les
boulangers, C. Th., 14, 3, 1. 5 (364) : ut post einensum anninn aetatis
paterni muneris necessitatem subire cogantur. L. 14 (372) : originis
vinculo. Voyez supra, p. 302, n. 3. — Pour les suarii, C. Th., 14, 4, 1. 5
(389) : consanguineos quoque eoriim, vel originales. L. 7 (397) : quem suc-
cessio generis adslringit. L. 8 (408) : originaria f'unctio — , tam qui
pateiiio quam qui materno génère invemuntur obnoxii. L. 10, § 1 (419) :
geniiina functio. Nov. Valent. III, lit. 35, § 8 (452) : cmn agnatione ...
revocari. — Pour les reliqua corpora, C. Th., 14, 4, 1. 8 (408) — Pour les
fabricenses, Nov. Theod. II, t. 6, § 1 (438) : Hinc jure provisum est arti- '
bus eos propriis inservire, ut exhausti laboribus immoriantur (var. : im-
morentur) cum sobole professioni, oui nati sunt. — Pour les metallarii,
C. Th., 10, 19, 1. 15 (424) : ad propriae originis stirpem laremque revo-
centur ... Quiciinque ex ipsis et ex quocunque fuerint latere procreati.
Cfr. 1. 7. — Pour les murileguli, C. Th., 10, 20, 1. 14 (424) : ad propriae
artis et originis vincla revocentur. Quos in .ma origine permanere —
manifestum est. C. J., XI, 7, 13 (42G) : ad divinas largitiones nexu san-
guinis pertinentium. — Pour divers collèges publics, C. Th., 10, 20,
1. 16 (426) : Si quis ex corpore gynaeciariorum, vel lintearioriun sive
linyfariorum, monetarionun ac murilegulorum vel aliorum similium
ad divinas largitiones nexu sanguinis pertinentium. — Pour les colle-
giati en général, C Th., 14, 7, 1. 1 (397) : loco originario. L. 3 (402) :
ne originem, quod fieri non potest, commutare ullajussio videatur. Nov.
Major., lit. 7, § 7 (458) : qui nolunt esse, quod nati sunt. C. Th., 7, 21,
1. 3 (396) : conditione nascendi.
1 Nov. Major., tit. 7, § 7 (458).
^ C. Th., 14, 4, 1. 5 (389) : plénum aequitatis et juris est.
( 30o )
Ce qui prouve bien que les enfants étaient liés par le sang,
et pas seulement par les biens de leurs parents <, c'est d'abord
qu'ils appartenaient à la corporation dès leur naissance '^,
ensuite qu'ils n'avaient pas, comme les étrangers favorisés par
le testament d'un corporahis, le droit de refuser l'héritage et
la charge ^. Pour ces derniers, les liens du sang faisaient
défaut, et on ne pouvait faire dépendre la liberté individuelle
de la volonté du testateur.
Dans les collèges où le lien réel n'existait probablement pas,
les liens du sang suffisaient. II fallait des jeux et des représen-
tations scéniques : aussi les filles d'actrices devaient monter
sur la scène ; elles étaient « dues au service des spectacles,
apedaculorum debenlur obsequiis », à moins cependant qu'elles
ifeussent une conduite honnête ou qu'elles ne se fissent chré-
* Cependant les enfants sont souvent unis aux autres héritiers, quand
il s'agit de leur obligation : C. Th., 13, o, 1. 14, § 4 (371). 1. 19 (390). 14,
3, 1. 3 (364), ou compris parmi eux sous le nom d'heredes : C. Th., 13, 3,
1. 35 (412). 14, 4, 1. 7 (397). On avait encore conscience que le lien du
sang provenait du lien réel.
- C. Th., 14, 3, 1. 5 (364) : Filios pisiorum gui iji parvula aetate relin-
quuntur, etc. ; voyez supra, p. 280, n. 8. — Sur la liste des collegiati,
afliichée à Anxanum par ordre du gouverneur de la province, on lit :
Primiis mm f[iliis), Saturninus cum f{Uiis), etc., C. I. L., IX 2998. —
XIV 3649, à Tibur : Ursus, circitor, habens filios III, Leontium adcres-
centem et puellas IL Ephem. ep., VII 518 : conlecium Caesariensium
i'resœnt[ium). Voyez les notes à ces inscriptions, et infra, cli. 111.
'" Nous avons vu que le naviculaire héritant d'un boulanger avait la
l'acuité de céder l'héritage au corpus pistorum, ou à un proche parent
du défunt, qui devait alors entrer dans ce collège. Sinon il devait cumuler
les charges des deux corporations. C. Th., 13, 5, 1. 2 (315). Mais ce navi-
culaire est-il héritier légitime? Alors la faculté qu'on lui accorda s'expli-
.
Les ouvriers attachés aux ateliers de l'Etat ne jouissaient
• C. Th., U, 3, l.^il iWà).
2 DiG., 1, 5, 10 (Ck.sis) : Cu)n legitimcie nv.piiae faclae sinl, patrem
liheri sequuntur : volgo guae.silus matrcm sequitur. Cfr. DiG., 1. T), 5 § '2
(MahciaM'S). 24 (LhPiANUS). Cfr. Reviu.oit, Op. L, p. 237.
•'* C. Th.. 14, 7, 1. 1 (397) : De quorum aguatione hacc forma serrahilur,
ut, ubi non est aequale eoîijuyium, malrem sequatur agnatio; uhi vera
justum erit, palri eedat ingenua succe.ssio.
*■ C. Th., 12, 19, 1. 1 (400j : Ut inter ciritatem et eos, quoru)n inqui-
liiias, vel colonas, vel ancillas duxerint, dividantur.
'" >'ov. Sever., i. 2(465).
I
ft-- t^ ^ÎCIE ^-
I
{ 309 )
les sommations du maître, perdait sa liberté et ses biens cl
appartenait au maître de Tesclave '. Or, en 365, Valent i-
nien l" ordonna que toute femme ingénue qui s'unirait à un
ouvrier des gynécées, partagerait la condition de son mari, à
moins qu'après une dénonciation solennelle, elle ne se séparât
de lui, préférant « la splendeur de sa naissance à la bassesse
d'une pareille union - ». De même, en 380, Gratien et Valen-
tinien II décidèrent que toute femme libre qui s'abaisserait
jusqu'à épouser un ouvrier de la monnaie, perdrait l'éclat de
sa liberté native [decus nativui' Hbertdlis amillal) et entrerait
dans la corporation de son mari, avec les enfants issus de cette
union, à moins qu'elle ne renonçât immédiatement au
mariage ^^. Les monetarii et les yynaeciarii ne pouvaient donc
choisir leurs femmes que dans leurs propres collèges, et l'em-
pereur fut réduit à défendre aussi aux filles de inonetarii de
prendre des maris hors de leur corporation '^.
Qu'arrivait- il entin si le mariage avait lieu entre membres
de corporations différentes? Il est probable que les enfants
suivaient le père ; mais si la mère leur laissait un bien affecté
à sa propre corporation, les enfants étaient dans le cas du
naviculaire qui recueillait l'héritage d'un boulanger : il était
soumis aux charges des deux cotés •>. Honorius défendit ces
mariages aux boulangers ^.
Ainsi, il ne sutiisait pas que les enfants suivissent le père;
si le père était libre de tout lien et que la mère fût attachée à
un collège, ils suivaient même la mère, et la liberté du père
ne garantissait pas la leur. D'autre part, si la condition de la
« Tac, Ann., XII, 53. Suet., Vespas., 11. Gaius, Inst., I, 83-86. 91.
160. Ulpian., XI, 11. Paul., II, 21 a. C Th., 4, 9.
'^ C. Th., 10, 20, l 3 (365).
■' C. Th., 10, 20, I. 10(380).
^ C. Th., 10, 20, 1. 10, i^ 2(380) : Sed ut monetario nullam necti volu-
iinis, ila et monetario pâtre suscepta.s prokibenius cjctruneis copulan.
« C. Th., 13,5,1.2(315).
f> C. Th., 14, 3, 1. 21 (421).
( 310 )
mère devait, suivant la loi, les arracher au collège du père, on
changeait la loi. L'obligation passait du mari à la femme et
réciproquement par le seul tait du mariage : on était sûr ainsi
de conserver les entants. Toutes les règles juridiques étaient
bouleversées, pour empêcher le vide de se faire dans ces cor-
porations si indispensables et si menacées. La liberté même
du mariage était supprimée pour beaucoup de ces serfs de
l'atelier i.
Ln résumé, l'Etat mit d'abord la main sur les biens; quand
on voulut se défaire de son patrimoine ou même y renoncer,
il fut obligé de s'emparer des personnes, et pour assurer le
recrutement, il retint aussi les enfants. Cette règle de l'héré-
dité une fois établie, elle fut appliquée à tous les collèges -,
même à ceux oi^i le lien patrimonial n'avait jamais existé,
comme elle fut du reste appliquée à toutes les conditions,
même en dehors des collèges. La nécessité qui forçait l'Etat
de confisquer la liberté des sujets, se faisait sentir i\ tous les
degrés de l'échelle sociale.
Il y avait pourtant un grand nombre de corporations de
commerçants, d'industriels et d'artisans qui n'étaient pas trai-
tées si durement. Toutes étaient sous la surveillance de l'Etat,
mais toutes n'étaient pas tenues ii un service public ou muni-
cipal. Il y en avait qui travaillaient librement et pour leur
compte : l'État les protégeait et cherchait à les maintenir pour
favoriser la prospérité du conuiierce et de l'industrie. Dansées
collèges mêmes, où le travail était libre, le gouvernement
chercha à introduire l'hérédité; pour y attacher les membres
avec leurs enfants, il n'eut pas recours à la force, mais aux
privilèges. Une loi de Constantin, en 335, donne une liste de
trente-cinq métiers existant dans les cités provinciales, qu'il
exempte de toutes les charges; il veut, dit-il, donner à ces
' Levasseuu, 1, p|). o9-40.
- Pour les coUefiiati, voyez C. Th., 14, 7, 1. l (397) et 3 fi 1-2) : tw origi-
nem, qnod ficri non potest, conwnntare ulla jussio videatur.
( 311 )
artisans le loisir de se perfectionner eux-mêmes dans leur
art et d'v instruire" leurs enfants '.
Moyens légaux de s affranchir.
Pour les membres des corporations affectées à des services
publics et pour leurs enfants, on avait peu à peu supprimé la
liberté du travail et le libre choix d'une vocation. Pour le corpo-
ratus ou le coUeuiatns^ comme pour le curiale et pour tant d'au-
ires, il n'y avait plus de liberté individuelle, plus de propriété,
plus de famille : il ne s'appartenait plus, il n'était plus maître
ni de sa personne ''^, ni de ses biens, ni de ses enfants. C'était
« resclavage des hommes libres qui se créait à côté de l'autre,
et qui en dépassait parfois les souffrances •^. » Que nous
sommes loin du temps où le père de famille, véritable roi du
foyer, avait droit de vie et de mort sur les siens et donnait sa
fortune à un étranger, s'il le voulait, au détriment de ses
enfants!
Pour s'aff'ranchir de cette servitude si lourde, on inventa de
bonne heure toutes sortes d'expédients. L'Etat, de son côté,
redoublait d'efforts et de vigilance pour « déjouer les ruses de
ceux qui ne voulaient pas être ce qu'ils étaient nés ^ ». Cepen-
dant la loi leur permettait de s'aff'ranchir dans certains cas, que
< C. Th., 13, 4, ]. 2 (337j : Artifices artium brevi subdito coniprclwusa-
rum, per singulas civitates morantes, ab tiniversù muneribus vacarr
praecipimus, si quidem ediscendis artibus otium sit accommodandum ,
ijiio magis cupiant et ipsi peritiores fieri, et sitos fîlios erudire. La liste
cite les tignarii, lapidarii, argentarii, slructores, pictorcs, statuarii,
aerarii, f'errarii, fuUoiws, fignli, plinnbarii, etc. Constantin n'emploie
pas le moi col legiu m.
- Nov. Jusï., 38, § 1 : ruiii cl corporibns r.Ôy> zi»').i-o)\) ctiriain frau-
da re vellent.
•"' G. KiRTH, Origines de la civilisation moderne, P. |). 46.
* Nov. Major., tit. 7, Jj 7 (438) : qui nolunt esse, quod nati sunl. (-. Th..
['i, 19 (iOO) : de his gui conditionem propriatn reli
offlcii, c'est-à-dire une hiérarchie, et celui qui s'était élevé
jusqu'au sommet devenait libre. Or, le degré le plus élevé,
c'était le patronat, du moins chez les boulangers; c'est ce qui
explique cette loi de Valentinien I" qui accorde le droit à la
retraite au premier patron de cette corporation, après cinq ans
de fonctions -. Au contraire, le patron infidèle était privé de
ses biens et devait recommencer au bas de l'échelle '^. Dans les
manufactures d'armes, le chef d'atelier s'appelait primicerius
fabricae; après deux ans de fonctions, le priinicenus était
affranchi de toute charge et récompensé par des honneurs '^
' Nov. Valent. III, tit. [^ [W6].
' C. Th., 14, 3, 1. 7 [364 : Post quinqiiennii tenipiis eimnsum, loui^
prior e patronLs pistorum otio et quiète donetur. Toutefois il se peut ({u'il
ne soit déchai'gé que du patronat, e'est-à-dire de la direction d'une
0 freina.
'' C. Th., 14, 4, 1. 9 (417) : ad pistrini ctiam luunia pri}ua revocetur.
* C. Th., 10, S^, 1. 3 (390) : non sobou vacatione, verum etiam honore
donari (= C. J., XI, 9, 2). En l'an 400 ou 401, à Neapolis, dans l'Afrique
proconsulaire, il est question d'un ancien naviculaire : Coelius Titianui^,
liir) li{onestus), ex t{ramvecturario) et nav^iculano), ex mun{erario), et
ex curatore r{ei)p{ublicae). C. I. L., VIII 969. 970. 915; voyez mpra,
pp. 38, n. 2 et 61, n. 4. Une loi (C. Th., 13, o, 1. 14, en 371) parle de
veteres idonei navicularii, qu'on enrôle de nouveau. Gebhaudt (p. 87>
suppose que ceux qui sortaient dans ces conditions étaient obligés de
laisser leurs biens au collège; il se fonde sur l'analogie du droit muni-
cipal (C. Th., 12, 1, 1. 74. m. Ho. 119. 12i. 130. 160), mais les termes des
lois citées ci-dessus ne permettent pas de le croire, et ce ne serait plus
une récompense.
i 313 )
Toutes sortes de corporati cherchaient ;\ entrer dans le clergé.
En 36o, Valentinien l'^Me défendit absolument et sans exception
aux boulangers K En 408, Honorius est moins sévère, peut-être
par rinfluence du christianisme : il ne refuse pas l'accès de
la cléricature aux atrporati de Home, mais exige qu'ils aban-
donnent leurs biens au collège, ou qu'ils continuent à remplir
leurs anciens devoirs-. Cette faveur ne fut pas maintenue. En
445, V'alentinien IFI fit sortir du clergé les corporati i . li. qui
ne s'étaient pas encore élevés au-dessus du rang de diacre; il
veut, dit-il, pourvoir aux besoins de la Ville Vénérable par
cette salutaire mesure, en lui rendant ses serviteurs •"». En 4o2,
défense est faite à tout homme lié à sa condition par son ori-
gine, colon, corporatus de Rome ou d'une autre ville, curiale,
d'entrer dans le sacerdoce ou dans les ordres monastiques '^
Enfin, en 458, Majorien renouvelle et étend à tous les corpo-
rati et aux curiales la constitution publiée par Valentinien III
en 445 s.
Il y avait pourtant une catégorie de personnes que le chris-
tianisme parvint à affranchir en partie, mais non sans peine :
c'étaient les acteurs et les actrices, dont le métier était réputé
infâme et les personnes malhonnêtes. A Rome et dans toutes
les cités, ils étaient « au service des plaisirs publics w, ils
étaient liés au théâtre par la chaîne de leur condition natu-
relle f'.
» C. Th.. 14, 3, 1. 1) (365 : 7iiUli omnino ad ecciesias ob declinanda
pùtrina licenliam pandi.
2 C. Th., 14, 4, 1. 8 (-408). — En 398, il l'avait défendu aux muhleguli
(C. Th., 9, 45, 1. 3j.
5 Nov. Val. III, tit. 15 445, : restitiitis ministeriis.
* Nov. Val. III, tit. 34, § 3 (452,.
■"' Nov. Major., tit. 7, § 7 (458) : Et quoniam us(pieqiiaijue obviandum
est eorum doits, qui nolunt esse, quod nati sunt, quirunqiie se sub nomine
clericatiLS seii quodam religionis obtentu curialis vel corporatus fortasse
sublraxerit, secundum praecedentium legiim statuta, si intra diaconatus
qradum localus probatur, ad originem suam sine dilalione revocetur.
fi C. Th., 15, 7, 1.4. 12. 15.
(314)
En 371, Valentinien I'^' promulgua une première loi en h'ur
faveur : si, en danger de vie, ils avaient demandé les sacre-
ments de l'Église et s'ils échappaient à la mort, on ne pou-
vait les faire rentrer au théâtre. Mais une enquête sévère avait
lieu. Il fallait le consentement de l'évêque ; le gouverneur ou
le curateur de la cité devaient être avertis du désir exprimé
par le malade, et ils devaient envoyer des inspecteurs pour
constater que l'acteur ou l'actrice qui voulait se convertir
était réellement en danger de mort '. C'est la seule loi qui
concerne les acteurs. La même année, Valentinien K décida
que les filles d'actrices qui menaient une vie honnête avaient
le droit de se soustraire à leur condition ; on devait les y rame-
ner, si elles tombaient dans le désordre '^. Gratien fit plus :
en 380, il était à Milan et, sur les conseils de saint Ambroise
probablement, il exempta celles qui se convertissaient au
christianisme. Il fut obligé de rappeler cette loi en 381 «^ et
il ajouta que « si, par une vie déréglée, elles prouvent que leur
conversion n'était pas sincère, il faut les ramener sur la scène
et qu'elles n'ont plus rien à espérer : elles y resteront jusqu'à
ce que, vieilles et ridicules, ttétries par l'âge, elles ne pourront
plus faire autrement que de vivre honnêtement * ». Ces mesures
étaient inspirées par le christianisme, mais on voit que l'Etat
n'abandonnait que les acteurs et les actrices qui se réfugiaient
dans le sein de l'Église. « Pour affranchir la classe entière, dit
Wallon, il eût fallu obtenir la suppression des spectacles
publics. Rien ne montre mieux que cette résistance opiniâtre
combien était dure la chaîne dont l'État enserrait les corpora-
tions 'K »
Les corporati avaient recours à d'autres moyens. Les dignités
< C. Th., lo, 7. 1. 1 (371).
'' C. Th., 10,7,1.2(371.
■' C. Th.,15, 7,1.9(381).
' C. Th., 15, 7, 1. 8 (381).
•' Wallon, III, pp. 406 et 407. Cfr. P. Allard, Escl. chrétiens, pp. (33-
43o. GOTHOFR., Parât, ad C. Th., io, 7, vol. V, p. 409.
( 315 )
et les honneurs étaient incompatibles avec leur condition;
aussi en étaient-ils généralement exclus, ou bien, si on leur per-
mettait de les cumuler avec leur « fonction originelle », on les
avertissait qu'ils ne seraient nullement dispensés des anciennes
charges.
Ils ne pouvaient pas devenir s('nateurs ou clarissimes, ni
chevaliers ou perfectissimos. Les boulangers qui aspiraient à
la dignité sénatoriale, devaient chercher un remplaçant; leurs
biens demeuraient affectés au service et devenaient la propriété
de leur successeur i. Constantin leur interdit déjà le perfectis-
simat -. Le même prince défendit aux metallnru de prétendre
non seulement au perfectissimat et à Te^grégiat, mais encore
aux titres inférieurs de ducénaires et de centenaires •^.
Quant aux hautes fonctions impériales, civiles et militaires,
on les divisait en effectives et en honoraires. Les premières
étaient inaccessibles aux membres des corporations. L'empe-
reur Léon défend expressément aux boulangers de recfiercher
la dignité de comte des greniers publics, fonction inférieure
cependant, et qui avait quelque rapport avec leur condition.
Celui qui ne respectait pas la défense perdait sa place et
encourait une amende de 20 livres i. De Constantin à Théo-
dose, nous trouvons des lois qui excluent les naviculaires, les
charcutiers et les autres corporations de Rome de tous les hon-
neurs {quemlibet honorem) : pour eux, ce sont des honneurs
interdits {honores indebiti). S'ils ont réussi à se parer de ces
insignes défendus, on les rappelle à leur condition ^. On
leur permettait cependant d'accepter ces jouets qu'on appe-
lait les brevets de Thonorariat [honorarii codicilli ou testi-
moniales) : c'étaient des dignités purement honorifiques, et
l'empereur les distribuait aux personnages vaniteux, dont
' C. Th., 14. 3. 1. i (364).
- C. Th.. 6, 37, 1. un. (sans date).
•• C. Th., 10, ^20, 1. f (317).
' C. J.. XI, 15(16), 1. 1 (sans date).
^ C. Th., 13, ri. I. 11 (36o). 14, 4, 1. I (334). 1. 8 (408). 10, -20, 1. 1 i (4-24).
( 316 )
l'ambition s'en contentait à défaut de fonctions effectives.
Gratien dit en 379 : « Tout naviculaire qui désire le brevet de
l'honorariat doit savoir qu'il sera quand même soumis à la
praebitio equorum L » — « Les collegiati de toutes les villes, dit
Honorius en 396, peuvent accepter les dignités de protectores
et de domestici honoraires, pourvu qu'ils n'oublient pas les
devoirs de leur condition originelle, et leurs enfants ne pour-
ront pas non plus trouver dans la dignité mendiée par leur
père un prétexte d'éviter la charge héréditaire -. » — « Les colle-
giati, lescuriales, bref les corporati de toute nature, répète-t-il
en 397, doivent savoir que le lien qui les attache à leur condi-
tion est si fort, que le brevet de l'honorariat ne leur procure
aucun honneur, aucun privilège, aucune exemption 3. »
C'était du reste la situation de tous les particuliers qui
détenaient des biens affectés au service des naviculaires, et qui
occupaient quelque dignité, grande ou petite : ils ne pouvaient
jamais se prévaloir des privilèges attachés d'ordinaire à ces
fonctions ^.
Les emplois subalternes étaient également fermés aux col-
lèges. Les hauts fonctionnaires impériaux avaient tous sous
leurs ordres des employés appelés ofliciales, apparitores, decu-
riales. Ces employés forment une espèce de « milice », orga-
nisée comme l'armée qui s'appelle à cette époque « milice
armée ». Il y avait, par exemple, la milice palatine, composée
des employés du palais impérial; les fonctionnaires financiers
et militaires avaient également les leurs. Or, il était défendu
aux corporati de rechercher n'importe quel office, de « porter
la ceinture de n'importe quelle milice ^ ». Le service du palais
' C. Th., 13, 5, 1. 15 (379).
2 C. Th., 7, il, 1. 3 (396) : ut neque mioncipes curiam, neque collegiatus
(ibsequium propriae urbis effugiant.
- C. Th.. 12. 1,1. lo6(397).
* C. Th.. 13, o, 1. 3, § 1 : licet altioris sit dignitatis. 13, o, 1. 20 :
agent es in rébus.
5 C. Th., 14, 4, l. 8 (408) : suarii et reliqua corpora, quae, etc. 10, 20,
1. U (424) : murileguli. Nov. Valent, lll. tit. io dio) : decorporatis U. R.
( 317 j
leur était spécialement interdit. En 399, Honorius fixe le
nombre des ofjiciales du comte des Largesses sacrées à cinq
cent quarante-six et ceux du comte des Largesses privées à
trois cents, et il défend d'enrôler ni curiale ni collegiatus : les
municipes réclament les uns, les corporations enchaînent les
autres K a Si un boulanger est entré dans les décuries d'appa-
riteurs, dit Valentinien II en 386, pour échapper à la boulan-
gerie, qu'on le fasse revenir : sa fonction le revendique '^. «
On désertait généralement la curie, et c'était devenu un
privilège que d'en être exempt. Eh bien, le sort des cojyorati
était tel que certains d'entre eux y cherchaient un refuge. On le
leur défendit, comme on défendit aux curiales d'entrer dans
les corporations : c'est que chaque service devait conserver ses
hommes 3.
L'armée voyait ses cadres se vider; on dut avoir recours à la
contrainte pour avoir des soldats : le métier des armes fut
déclaré obligatoire et héréditaire pour certaines personnes.
Or, en 400, Honorius défend aux corporati d'y entrer. « Aucun
homme, dit-il, qui est retenu par les filets de sa condition,
comme le collegiatus, et qui aurait prêté le serment militaire,
ne peut se prévaloir de ses campagnes, pour échapper à son
collège ^. w
On comprend qu'il n'était pas permis non plus de changer
de corporation; on ne pouvait affaiblir l'une au profit de l'au-
tre. Ainsi, l'affranchi qui remplit les conditions nécessaires
pour être enrôlé parmi les boulangers ouïes catabolenses n'avait
pas le droit de choisir un autre corps 5. En 4o0, Valentinien IIÏ
< C Th., 6, 30. 1. 16. 17 ^399).
2 C. Th., 14, 3, 1. 18 (386).
•'• C. Th., 14, 8, 1. 2 (369). Valentinien I«^r dit : ?/t' qui.^ i\i ctnioiianonnu
corpore subtrahere se possit ad curiaiii. Nouvelle défense aux cenlo-
naires en 399 il2. 1. 1. 162). Cfr. 12. 1. 1. 62 f364), défense aux curiales
d'entrer dans le collegium (abrorum.
^ C. Th., 7. 20, 1. 12. §3(400».
= C. Th., 14. 3, 1. 10 355?.
( 318 )
rappelle à leur devoir tous les naviculaires qui s'y sont sous-
traits : aucun lien nouveau [obno.vietasj eontraelé depuis leur
sortie, ne peut faire obstacle à leur retour '. Cependant cette
rèt^le soutirait des exceptions, quand il s'agissait de venir au
secours d'une corporation menacée d'une ruine complète.
Il ne restait qu'un moyen : c'était de s'adresser au souverain
maître lui-même. L'empereur seul pouvait briser la chaîne de
cette servitude : par un rescrit, il pouvait accorder l'immunité
de toute charge, protéger contre les revendications d'une
corporation, donner accès aux honneurs publics. C'est ainsi
qu'en 307 un simple boulanger, appelé Jerentius, avait été
élevé à la dignité de corrector Tusciae unnonariae par Valen-
tinien P^ qui voulait le récompenser de services rendus en
dehors de son métier -. Le même décida que les condamnés à
la boulangerie ne pouvaient être atlVanchis que par un rescrit
spécial de Sa Sérénité; les grâces générales accordées par l'em-
pereur ne leur étaient pas applicables ^. L'un des trente tyrans,
Licinius, avait enrôlé des sénateurs dans le collège des navicu-
laires. En 3i26, Constantin, par déférence pour la dignité de la
haute assemblée, chargea le Sénat de désigner lui-même ceux
qui méritaient d'en sortir *. Ces faveurs spéciales ne devaient
pas être rares ; ce qui le prouve, c'est le grand nombre de lois
où les princes défendent de leur adresser des suppliques pour
obtenir un pareil rescrit. C'est surtout par la protection des
grands que l'on parvenait à les arracher au prince, soit que
l'empereur cédât à leurs sollicitations, soit qu'il se laissât trom-
per par les ruses des corporuli et de leurs protecteurs «>. En 384,
le préfet de la ville. Symmaque, tit rentrer dans le collège des
* Nov. Valext. 111, tit. -28 -ioO .
- Amm. M.vrc, il, 3, '1 : Terentius hutnili génère in iirbe ïiatuset pùlor.
11 avait accusé de péculat Ortitus, ancien préfet de Rome.
3 C. Th., 9,40, 1.7 ,364).
^ C. Th.. 15, 14, 1. 4 (326 .
^ Symm.. Epist., X, 58. Relat., 44 : callida fraude, obreptieLs iifippli-
cationibus. C. Th., 14, 4. 1. 10 : gratiosis sententiis.
( 319 )
mancipes salinarum, des membres qui en étaient sortis grâces
l'intervention d'un certain Macedonius. Seule la « Clémence
impériale » pouvait annuler un rescrit injuste ^. Aussi voyons-
nous souvent les empereurs déclarer nuls et sans valeur des
rescrits obtenus par surprise, ou arrachés par les intrigues des
puissants à eux-mêmes ou à leurs « divins » prédécesseurs '^. Ils
allèrent jusqu'à supprimer pour les coiporalileôrohile requête.
Mais c'est en vain qu'ils menacèrent de fortes amendes, de la
confiscation des biens, de la mort même, non seulement ceux
qui auraient réussi à leur arracher un rescrit favorable, mais
même ceux qui leur adresseraient une supplique : on revenait
toujours à la charge. Cela prouve que les princes ne savaient
pas faire respecter leurs propres décisions, que la corruption
était irrémédiable à la cour, et que le sort des corporati était
bien misérable, puisqu'ils bravaient la mort pour y échapper ->.
* S^THM., /. /. : Vestrae tanlum Clémentine liberum est inique eliciia
rescripta rescindere,
2 Symm., /. /. ; quos ostendilur ambitus libérasse — de kis, qiios Mace-
donii intei^ventus absolverat. C. Th., 14, 4, 1. 8 (408) : sub cujuslibet
desideiio auxilii. 14, 3, 1. 20 (398) : vel occultis vel ambitiosis precibus.
Nov. Val. III, tit. 28, § 1 (460j : onuii cujiLslibet personne privilégia et
defensione siimmota. C. Th., 15, 7, 1. 13 (414) : Mimas diversis annota-
tionibus liberatas ad proprium officium summa instantia revocari decer-
nimus.
"' Xaviculaires. Constantin, en 319 : si quis navicularius per obreptio-
nem, vel quacunque ratione immunitatem impetraverit, ad e.vcusationem
eum admitti nullo modo volumus (13, 5, 1. 3). Cfr. 13, 5, 1. 36 (Honorius,
en 412) et 13, 6, 1. 3 (Valentinien !•■', en 368'. — Boulangers. C. Th., 14, 3,
1. 6 (Valentinien l^''-, en 364) : yulli liceat pistorum, supplicatione delata,
subterfiigiendi muneris impetrare licentiam. 14, 3, 1. 20, i)Oui' le? con-
damnés. Symm., relal. 44 : Rappel de ceux qui ante discrcti atque excusati
fuerant. C. Th., 14, 3, 1. 18 (Valentinien II, en 386) : ut si qiiispiam ...
preces obtulerit, bonorum amissione plectatur. 12, 16, 1. un., en 389. —
Snarii et reliqua corpora. C. Th , 14, 4, 1. 1 : quolibet versutiae génère
(Constantin, en 334j. L. 8 , Honorius, en 408) : adnotationibus vel rescrip-
tis nostra^- serenitatis elicitis. L. 10 (419) : rescissis omnium privilegiis,
viriculis, gratiosis sententiis, si quas in abolilionem genuinue functionis
( 320 )
En 439, Théodose II décréta que, dans tous les cas, un rescrit
contraire aux lois ou à l'intérêt public devait être considéré
comme nul et non avenu; car, dit-il, il est évident qu'il a été
obtenu par surprise i.
Ces défenses sans cesse renouvelées prouvent qu'on réussis-
sait souvent à tromper la vigilance de l'autorité; mais on ne
vivait pas tranquille, car à tout moment on pouvait être
ressaisi. Ni la cléricature, ni les fonctions publiques, supé-
rieures ou subalternes, ni l'entrée dans la curie ou dans
l'armée, aucun subterfuge, aucune ruse ne pouvait sauver
détinitivemcnt, pas même un rescrit impérial!
Enquête.
Il y avait, en effet, deux intéressés qui veillaient constam-
ment : le gouvernement et les collèges. Il importait aux corpo-
ratiy comme à l'Etat, d'empêcher la désertion : ceux qui
i-estaient ne pouvaient plus « porter le fardeau de la nécessité
publique 2 )). Et ils avaient le droit et le devoir de revendiquer
les membres qui voulaient se soustraire au service, ainsi que
les biens qu'on essayait d'affranchir 3. Le collège s'adressait au
callida frande meruerimt. — Collegiati. 14, 7, 1. 2 (412) : Singulanun
urbium corporatos ... praecipimus revocari ... quibus etiam supplicandi
inhibendam facultatem esse censuimus, ne originem (quod fieri non pot est)
commutare ulla pissio videatiir.
1 Nov. Theod. II, til. 8, § 1 (439) : ut generaliter, si quid hujusmodi
contra jus contrave ulilitatem publicam proferatur, non valeat, ciim
haiid dubie subreptionem arguât precatoris.
2 Symm., Epist., X, o8 = Relat., 44 : Cuui mancipes salinarum magno
ex numéro ad paucos redacli neœssitatis publicae molem ferre non possent.
5 Revendication des biens : C. Th., 13, 5, 1. 2 (315) : ob vindicias. 13,
6, 1. 5 (367) : in vindicatione reruni ad navicularios pertinentium. L. 6
(372) : omis — , cui erat ille obnoxius, cujus nomine vindicatio competit.
La loi 1 (326) est une réponse à un decretum naviculariorum concernant
les biens aliénés par des naviculaires. Nov. Valent. III, tit. 28, § 1, à la
( 321 )
magistrat compétent, au préfet de l'annone, au préfet de la
ville ou au préfet du prétoire à Rome i, et au gouverneur, au
(lefensor civitatis ou aux chefs des curies, dans les provinces '^.
Naturellement le collège manquait rarement de le faire : il était
le meilleur gardien de ses intérêts. Mais, soit négligence, soit
découragement, il arrivait qu'il négligeait de réclamer. En 369,
Valentinien I«% Valens et Gratien durent même y forcer les cen-
tonaires, en les menaçant d'une amende-^. Le magistrat qui avait
reçu la pétition, la plainte 't, faisait un rapport à l'empereur, s'il
jugeait la demande fondée '">. L'empereur intervenait alors. Il
ordonnait au préfet de la ville, de l'annone ou du prétoire, ou
au gouverneur de la province, de faire revenir, avec leurs biens,
les membres qui étaient parvenus à se faire « excuser )>, et
d'enrôler ceux qui avaient échappé au recrutement : vel revo-
cando excumtos, vel débitas obligando ^. Si les récalcitrants
étaient nombreux et difficiles à trouver, si leur situation
n'était pas claire, on faisait une enquête. Cette enquête pouvait
être confiée au collège lui-même, mais il était à craindre qu'il
tin (4o0). Revendication des personnes : C. Th , 6, 30, 1. 16 et 17 (399).
14, 8, 1. 2 (369). Revendication des personnes et des biens : C. Th., 13,
6, 1. 3 (36n?j. Symm.. Epist., IX, 100 et X, 58.
' Symm., Epist., X, 58 = Relut., 44. C. Th., 13, 6, 1. 1 : interpellato
Praefecto annonae. L. 6.
- C. Th., 12, 19, 1. 3 (400) : Primates sane ordinum defensoresque eivi-
tatuin.
•'' C. Th., 14, 8, 1. 2 (369) : Ne quisex centonariorum corporesubtrahere
se possit ad curiam; poena eidem corpori proposita, ?iisi illico de ejus
abscessu querelam deposiierit.
^ C. Th., 13, 6, 1. 3 (365?) : adversus petitionem naviculariorum de suo
jure querentium. 14, 8, 1. 2 (369) ; voyez la note précédente. Symm., Relat.,
44 : delata supplicatione. Epist., IX, 100 : auditis eoriim querelis.
•"" Symm., Relat., 44 : relationem svper eorum muniminibus impetrarnnt .
Cette lettre est un de ces rapports; elle concerne les mancipes salinariuii.
De même : Epist., IX, 96.
•' C. Th., 13, 5, 1. 22. Symm., Relat., 44 : qui ante secreti atquc excu-
sât l fuerant.
Tome L, vol. IL 21
( 322 ) . •
ne s'altribuât des personnes enchaînées ailleurs i. En 393,
une enquête sur les naviculaires est confiée à l'élite des hono-
rati dans les provinces "^ ; comme les naviculaires pouvaient
être recrutés parmi eux :^, leur intérêt était en jeu. Mais ordi-
nairement on en laissait sans doute la direction au magistrat
compétent. L'enquête portait sur les membres excusés ou sortis
sans excuse, sur les étrangers qui étaient « dus » au collège,
et sur les biens disparus pour n'importe quel motif. Parfois
aussi on examinait la situation générale de la corporation 4,
Le collège était consulté : personne ne connaissait mieux ses
affaires que lui. On lui demandait les noms des membres
affranchis et des membres actuels. L'enquête se faisait parfois
en public devant le peuple romain, du moins quand il s'agis-
sait d'une corporation qui, comme les charcutiers, « travaillait
nuit et jour » pour lui 3 : tels étaient les grands intérêts qui se
débattaient encore devant ce peuple-roi, qui, autrefois, nom-
mait les consuls 6.
Enfin un rapport devait être fait à l'empereur, qui prononçait
en dernier ressort ~^. Les résultats de l'enquête étaient les
* C. Th., 14, 4, 1. 7 (397) : diimmodo siio ordini attributos suarii non
admittant, et propriis faciUtatibiis solitisque subsidiis aliéna atque lon-
ginqua et ab hoc, muncre distracta non qiiaerant.
- C. Th., 13, 5, 1. 22 (393; : in ipsis provinciis honoratorum fides lecta.
5 C. Th., 13, 5, 1. 14 (371) : ex administratoribus ceferisque konorariis
viris.
^ C. Th., 13, 5, 1. 22 (393). 1. 35 (412). 14, 4, 1. 1 (334). 1. 7 (397). I. 10
(419).
•• C. Th., 14, 4, 1. 6 (389).
'' C. Th., 14, 4, 1. 1, en 334 (Constantin) : Quoniam siiarioriun corpus
ad paucos devenit, jubenuis eos adstante populo RoDiano dicere, quibus
excusalio sit delata, quibus provenerit onus, ut his in médium publicae
rationis edoctis exemplum rei naviculariae proponatur. Et plus loin :
leste et audiente populo Romano.
' C. Th., 13, 5, 1. 22 : Quos {fionoratos) compositis omnibus, ad nos
referre necesse est, dit Théodose en 393, sciluros a nobis de suo judicio
jiidicandum. \\ s'agit des naviculaires. C. Th., 14, 4, 1. 1 (334) : ac nos
auper his consuli (rappel des suarii par Constantin).
( 3^:; )
suivants : les anciens corpoidli soiiis indûment (levaient
rentrer dans le collège avec leurs biens, malgré les honneurs
reçus, malgré la cléricalure, malgré les |)rivilèges, malgré les
rescrits, malgré les devoirs contractés ailleurs, malgré toutes
leurs ruses '. Ceux que leur naissance y vouait devaient y
entrer avec leurs biens -. Les acquéreurs de biens, soit par
achat, soit par donation, soit par succession, étaient mis en
demeure d'y renoncer ou d'en assumer les charges et même
d'entrer dans le collège '^\
Dès 334, Constantin va jusqu'à menacer les récalcitrants de
mort ''. Mais ces efforts étaient vains; ce qui le prouve, c'est le
grand nombre de constitutions qui rappellent les personnes à
leur devoir et les biens à leur destination, ou qui ordonnent
une enquête ^>. Il fallait donc des moyens plus énergiques.
Malgré tous ces attentats à la liberté, les empereurs avaient de
la peine à maintenir les corporations. A tout moment, au
IV*" siècle, on les voit se plaindre de ce que l'un ou l'autre
' Voyez mpra, pp. 311-320. C. Th., 14, 4, 1. 10 (419) : ut his quoqne suas
reddi jubeamus personas , quas rescissis omnium privilegiis, vinculis, (jrii-
tiosis sententiis, si quae in abolitionem genuinae functionis callidu fraude
meruerunt, restitui cum facuUalibus suis, posthabita dilationc.
'•î Rappel des originarii : C. Th., 13, 5, 1. 22. 35. 14, 4, 1. 5. 7. 8. 10.
Enquête sur eux : C. Th., 13, 5, 1. 22. 14, 4, 1. 7.
•"'' \o\Qz supra, pp. 287-293, et particulièrement, pour les naviculaii-es :
13, o, i. 35 (412). 13, 6, 1. 4 (367). 1. 6 (372). Pour les suarii : 14. 4, 1. 5
(389). 1. 7 (397). Pour toutes les corporations de Rome : 14, 4, 1. 8 (-408).
Pour les boulangers : 14, 3, 1. 3 (364). Pour les murileguli : 10, 20, 1. 14
(424). Voici comment Théodose et Valeulinien II parlent des scribes et
em[)loyés de bureaux : Pro delinitione legum inexoralnlium suam fortu-
7mm subire compelii, quatenus nec publias quid(iuam noceatur aut
minuatur utilitatibus, et suis cvrporibus illi reddantur, quos vel patris
vel majorum obligatio vel sua constringit (C. J., X, 69, 4).
' C. Th., 14, 4, 1. 1 (334) : salutis etiam periculum subituro
•'' Les voici : Naviculaires : 13, 5, 1. 11. 22. 35. 13, 6, 1. MO. Symm..
ReL, 44. Pis tores : 14, 3, 1. 18. Suarii : 14, 4, 1. 1. 5. 7. 8. 10. Murile-
guli : 10, 20, 1. 14. Mimae : 15, 7, 1. 13 (4!4). Collegiali des villes : 14, 7,
1. 1 (397). 12, 19, l. 1-3 (400).
( 3-24 )
collège périclite. En 315, Constantin est obligé d'écrire aux
préfets du prétoire, pour que les gouverneurs adjoignent les
dendropliores aux charpentiers et aux centonaires dans toutes
les villes oii existent ces deux corporations, parce qu'il convient,
dit-il, d'augmenter leur effectif '. Dès son règne, plusieurs
autres corporations sont sur le point de périr. En 334, les char-
cutiers sont réduits à un petit nombre -, et malgré tous les
efforts, cette décadence continue «^. Les chauffeurs des bains
étaient aussi très menacés 4, et sous Honorius, nous trouvons
les naviculaires fort affaiblis s.
Recrutement et enrôlement force.
Depuis longtemps les entrées volontaires ne parvenaient plus
à réparer les pertes. L'empereur usa encore une fois du droit
qu'il avait sur tous les citoyens : il eut recours à l'enrôlement
forcé. Puis, poussé à bout, il n'hésita pas à introduire dans la
corporation des condamnés qu'on avait autrefois fait travailler
dans les mines et dont la présence dans un collège aurait sutîi,
en d'autres temps, pour le déshonorer.
On comprend que les entrées volontaires étaient rares. Les
personnes libres de toute charge ne se présentaient presque
jamais. Cependant on comptait encore sur elles. En accordant
le monopole du déchargement dans le port de Rome aux
» C. Th., 14, 8, 1. 1 (315). Voyez le premier volume, p. 242, n. 1.
2 C. Th., 14, 4, 1. 1 (334) : ad paiicos devenit.
2 C. Th., 14, 4, 1. 5 (389) : siiariorum vires concidisse. C. Th., 14, 4,
1. 10 (419) : Honorius les fusionne avec les pecuarii. Nov. Valent. III,
tit. 3o (452) : occidid corporis.
■^ Symm., Relat., 44 : magno ex numéro ad paucos redacti (384).
Cfr. 12, 16, 1. un. (389).
s C. Th., 13, 0, 1. 22 (393). 1. 32 (409). 1. 35 (422). Pour les bateliers du
Tibre : Nov. Valent. III, tit. 28 (450) : post lot detrimenta lassato corpori,
et § 1 : redintegratis viribus.
( 32o )
saccaru, Valentinien I^"" dit expressément qu'il sera donné à
tous ceux qui désirent s'atlilicr à cette corporation : c'était
peut-être un vœu plus qu'une réalité '. De même, en réorgani-
sant le corps des naviculaires d'Orient, Valentinien l*'" recom-
mande aux naviculaires d'admettre tous les volontaires, pourvu
qu'ils soient fortunés 2 ; rnais les désirs de l'empereur s'accom-
plirent-ils? En 4112, Honorius parle encore de /i'//;r?cc/i.v<'.s- entrant
librement dans ce collège ■^. C'étaient surtout les membres de
corporations opprimées qui voulaient passer dans une autre;
si les corporati cherchaient à se faire curiales et même colons,
réciproquement les curiales et les colons croyaient parfois
améliorer leur condition en entrant dans un collège. Mais on
le leur défendait sévèrement; en règle générale, tout homme
affecté à un « ordre )), à un « corps )) quelconque ne pouvait
être admis dans une corporation; c'est ce que l'empereur
Honorius rappelle en 397 aux charcutiers '*. Cependant les
curiales eurent longtemps la faculté d'entrer dans le corpus
naviculariorum s. En 371, Valens cite les assemblées des
curiales parmi les corps oii il conseille de prendre les nou-
veaux naviculaires d'Orient c. En 380, Gratien dit formelle-
ment que, d'après d'antiques constitutions, s'était établi la
coutume qui permettait aux naviculaires de s'adjoindre, en cas
de besoin, des décurions ". En 390, Théodose le Grand
approuve le préfet du prétoire qui avait fait entrer des curiales
* C. Th., 14, 22. I. un. (364) r fpiise haie corpori pcrmisccrc desideraiH.
2 C. Th., 13, 5, 1. U (371) : si qui voluerint freti facullatibus, consortio
naviculariorum congregentur.
•-> C. Th., 10, 22. 1. 6(-il2) : S? quis consortium fabricensium crcdiderit
cligcndum ... Admilitiam, quam optaveriî, suscipiatiir.
i C. Th.. 14, 4, 1. 7 (397) : dummodo suo ordini attributos suarii non
admittant. Cfr. 6, 30, 1. 16 et 17 (399) : qui tamen nullis corporibus sint
obligati. 8, 7, 1. 22 (426) : hia retentis in suo ordine et gradu militiae.
^ C. Th., 13, 5, 1. 5 (326) : sive decurioncs sint (Constantin).
^ C. Th., 13, 5.1. 14(371).
7 C. Th., 13, 5, 1. 16(380). Cfr. 1. 17 (386) : cujuscumque loci fuerint vcl
dignitatis.
( 326 )
flans la même corporation, mais il décide que l'un des fils
restera à la curie '. En 393, en rappelant les curiales réfugiés
dans d'autres corps, il excepte celui des naviculaires 2. Hono-
rius confirme en 39o la règle établie par son père '^; mais la
même année, voyant les curies de plus en plus désertées, il
détendit aux curiales de se faire naviculaires, même s'ils étaient
devenus propriétaires d'une res navicidaria ; dans ce cas, ils
devaient cumuler la charge de curiale et celle de naviculaire 'k
La règle abolie par Honorius s'explique par cette considéra-
tion qu'il fallait de riches propriétaires pour le corpus navicu-
liiriunim. Quant aux autres corporations, il fut toujours défendu
aux curiales de s'y réfugier. En 344, nous trouvons la défense
d'entrer dans les collèges des chaufourniers, des fabricants
d'armes et des argentarii •"»; en 364, dans le corpus fahrorum, et
on 399, dans le corpus cenUmariorum 6. Les colons cherchaient
aussi à se faufiler dans les corporations de toutes sortes; mais
on les faisait revenir. En 400, Honorius fixe la prescription à
trente ans dans la province même, et à quarante dans une
province différente, et il faut que la prescription n'ait pas été
interrompue ". En même temps il décide que pour le curiale
et le coUegiatus qui ont déserté leur condition, il n'y a pas de
prescription ^. D'où cette différence? C'est, dit-il, qu'il faut
veiller avec plus de soin au salut public qu'à celui des parti-
culiers. En 419, il réduisit la prescription à trente ans pour
' C. Th., 13, 5, 1. 19 (390).
• C. Th., 12, 1,1. 134(393).
•' C. Th., 13, 5, 1. 25 (395).
' G. Th., 12, 1, 1. 149(395).
'■■ G. Th., 12, 1,1.37(344). 1.81(380). 10, 22, 1. 6(412) = C. J., XI. 9,4.
•■ C. Th.,12, 1, 1.62(304). 162 (399i.
■ C. Th., 12, 19, 1. 2 (400) : Eum iiiitur, qui curiae vel collegio vel
burgis ceterisque corporibus intra eandem provimiam post triginta annos,
in alla quadraginla sine interpella tione servierit, neque ?t.s" dominica,
neque actio privata continget, si colonalus quis aut inquilinalus quaestio-
nem movere tentaverit, etc. Gothofr., vol. IV, p. 656.
'^ G. Th., 12, 19, 1. 1 /400).
( 327 )
les serfs (coloni vel ùiquilhii) et à vingt pour les femmes serves
[colonae) i.
Tous ces obstacles ne pouvaient que diminuer le nombre
des entrées volontaires; de bonne heure on dut combler les
vides par renrôlement forcé. L'empereur affectait aux corpo-
rations qui il voulait. Cependant il n'avait recours ^ ce moyen
extrême que quand il était pressé par la nécessité. C'était
d'ordinaire sur les plaintes de la corporation qui, décimée de
plus en plus, ne se sentait plus en état de supporter ses
charges -. D'autres fois, l'empereur venait spontanément au
secours des collèges qui s'affaiblissaient, sur le rapport d'un
fonctionnaire chargé de les surveiller, par exemple du préfet
de la ville 3. Quant au recrutement, c'est parfois l'empereur qui
s'en occupe personnellement : le tyran Licinius (313-314) avait
enrôlé de force une quantité de sénateurs parmi les navicu-
laûres ^. Mais d'ordinaire l'empereur remettait ce soin à un
haut fonctionnaire; c'est ainsi qu'en 371 le préfet du prétoire
fut chargé de compléter le corpus naviculnriorum Orientis :
Valenlinien I^"" lui indiqua seulement les classes d'où il pouvait
les tirer s. Les gouverneurs d'Afrique devaient faire le recrute-
ment quinquennal des boulangers dans cette province ^k Quant
aux gardes-pompiers, en cas de décès d'un membre, le préfet de
la ville désignait son remplaçant; ce n'était pas une corporation,
mais un corps recruté dans les autres collèges, qui conservaient
les enfants ■?. Parfois les collèges recevaient la permission de se
compléter eux-mêmes par la force. Ainsi, en 380, Gratien écrit
< C. Th., 5, 10, 1. 1 (419).
- Voyez supra, p. 320.
•■' Symm., Epist., IX, 100 : Totis viribus adjuvundi sunt commuim
patriae corporati, praecipue mancipes salviariun. Cfr. IX 103. \ oS
[Relat., 44).
' C. Th., 15, 14, 1. 4 (326) : Super his, qui ex senatoribus ad navicula-
rium niunus a tyranno dejecti sunt (Constantin au Sénat).
•' C.Th., 13,5,1.14(371).
« C. Th., 14, 3, 1. 12 (365?) et 17 (380),
7 Voyez supra, pp. 128-130.
( 328 )
aux naviculaires africains : Quosciinque vacuos publico inveuc-
ritis officio, in complexum vestri ordinis applicate K Ce sont
encore les naviculaires eux-mêmes qui doivent livrer soixante
des leurs aux chauffeurs des bains, et remplacer ceux qui
meurent, sauf approbation du préfet de la ville, lequel doit
examiner si les personnes désignées sont « aptes », c'est-à-dire
assez riches '^.
Où prenait-on les malheureuses victimes de ce recrutement
arbitraire? Pour les collèges de naviculaires, il fallait de riches
propriétaires : aussi voit-on enrôler parmi eux des hommes du
rang le plus élevé, des sénateurs, des chevaliers, des fonction-
naires impériaux sortis de charge ou émérites, des décurions,
aussi bien que des employés et de simples plébéiens 3. Quand
on n'en trouvait pas d'autres, le collège ressaisissait les navicu-
laires qui avaient parcouru toute l'échelle des services et
s'étaient crus enfin libres ^. Pour les boulangers, il y avait un
mode de recrutement spécial établi par Constantin; il existait
en Afrique un office affecté à cette corporation [o/ficium, quod ei
corpori constat addictum). On ne sait quel est cet office, mais tous
1 G. Th., 13, 9, 1. 3, § 4 (380).
2 C. Th., 13, o, 1. 13 (369). Symm., Relat., 44. Epist., X, 58.
5 G. Th., 13, 5, 1. 14, 4 (371) : Et sunt corpora, de qitibus navicidarii
constituendi sunt juxta sacram jussionem, ita : ex administratorihm,
ceterisquehonorariis viris, praeler eos, qui intra palatiiim sacrum versati
sunt, de coetibus curialibus, et de veteribus idoneis naviculariis, et de
ordine primipila7'io, et de senatoria dignitate. — Sénateurs : IS, 14, 1. 4.
13, 5, 1. 14. — Equités : 13, 5, 1. S : seu potioris alterius dignitatis.
Les naviculaires avaient du reste tous la dignitas equeslris depuis
Gonstantin (1. 16). — Fonctionnaires impériaux, émérites, sauf ceux de
la cour (1. 14). Officiales, les primipilaires (1. 14). Dioclétien avait déjà
exempté les cohortales Syriae; Valens confirma ce privilège en 365
(8, 4, 1. 11 = G. J., XII, 58, 1. 3). Les employés du trésor privé 'caesariani)
ne pouvaient être enrôlés malgré eux dans aucun collège, sans la permis-
sion du prince (10, 7, 1. 2, en 364, Valenlinien et Valens). Décurions,
voyez supra, p. 289. — Plebeii : 13, 5, 1. 14. — En général : 13, 5, 1. 17 :
cujuscunqiie loci fuerint vel dignitatis.
^ G. Th., 13, 5, 1. 14, 4 (371) : dr veteribus idoneis naviculariis.
( 329 )
les cinq ans, les gouverneurs rrAfrique (judices Africae)
devaient procéder ù l'enrôlement; les bureaux de ces hauts
fonctionnaires devaient les envoyer au préfet de l'annone et
aux patroni pislorum. En cas de négligence, le gouverneur
et ses employés encouraient une amende de cinquante livn'S
d'argent '. Voici une mesure de Valentinien I^"" qui prouve
combien peu on respectait la liberté. Le fils de boulanger,
qui perdait ses parents avant l'âge de vingt ans, n'était pas
immédiatement astreint à l'exercice du métier. La corpora-
tion devait lui chercher un remplaçant capable {idoneus]\
or, lorsque le jeune homme atteignait sa majorité et entrait
au service, son remplaçant restait quand même boulanger à
jamais -.
Les affranchis étaient pour ainsi dire réservés au corpus
eatabolensuim ; tous ceux dont l'avoir valait trente livres
d'argent au moins, devaient entrer dans ce corps, à moins
qu'ils n'eussent reçu ou hérité de leur patron un bien
affecté à une boulangerie, auquel cas ils devenaient bou-
langers 3.
Bientôt aucun citoyen ne fut plus sûr de ne pas se voir
a adjuger )> [addicere] un beau jour à l'une ou à l'autre corpo-
ration. A mesure que celles-ci s'épuisaient, la coutume s'intro-
duisit d'y attacher iapplicare) tous ceux qui n'étaient pasretenus
ailleurs. Les citoyens non assujettis à une charge quelconque
étaient regardés comme inoccupés, comme oisifs : on les
appelait vacui, vacantes {publico officio), otiosi. On les appelait
^ C. Th., 14, 3, 1. i'I et 47, avec les notes de Gothofredus. Gebhardt,
pp. 56-57. Valentinien I" et Valens avaient d'abord décidé que le gouver-
neur en défaut remplacerait le boulanger qu'il aurait négligé d'envoyer
(1. 12); Gratien se contenta de le menacer d'une amende (1. 17). — Men-
DELSSOHN (dans Gebhardt, p. 93) propose de lire : corpiis, quod ci officio
constat addictum. Mais quel est ce corps d'où l'on tirait les boulangers?
2 G. Th., 14, 3, 1. 5 (364j : nihilouumis permaiientibus pistoribus his,
quos in lociim eorum constat subslitutos.
^- C. Th.,14, 3, 1.9 et 10 (365?).
( 330 )
encore privati \ simples particuliers, et extranci '^, étrangers,
par rapport aux membres des corporations. « Quoscumque
raciios jmblico invenentis offtcio, in complexum vestri ordinis
applicale », dit Gralien aux naviculaires d'Afrique, en 380 3.
En 384, Symmaque propose à l'empereur de compléter le
corpus mandpum salinarum au moyen de gens inoccupés [ex
vacanlihus) ^. En 389, Honorius veut qu'on ait toujours recours
à ce moyen pour aider ce collège •">. Enfin, en 415, le même
prince en fait une règle générale pour combler les vides tant de
la curie que des corporations des villes de province ^\ Ainsi,
pourvu qu'on fût assez riche pour remplir un service (idoneus),
on appartenait de droit aux collèges. On possédait, par exem-
ple, un bateau sur le Tibre : si le bateau avait la capacité fixée
par la loi, il fallait le mettre à la disposition des l)ateliers pour
une course par an et, s'il était plus petit, on devait leur payer
deux solidi, pour soulager ce « corps nécessaire » et lui rendre
des forces nouvelles, dit Valentinien III, en 450. Aucune
dignité, aucun privilège ne pouvait vous soustraire à ce
devoir "'. A la fin du IV^ siècle, tout navire pouvant tenir la
< C. Th., 14, 3, 1. 18 et 21 : privalas persoiias. 13, 7, 1. -2 (409) : priva-
tos. 10, 19, 1. 15 (424) : ex domibus privatonun. Nov. Valent. III, lit. 28,
$; 2 : privatorum naves.
2 G. Th., 14, 4, 1. 5.
■' C. Th., 13, 9, 1.3, §4(380).
* Relaî., 44 = Epist., X, 58.
•' C. Th., 12, 16, 1. un. (389) : Qiiicunque de oliosis idonem approbatur,
(unctioni mancipatus est addicendus. Le mot otiosus est aussi appliqué
aux biens : residuo patrimonio, quod ab hoc vinculo liberum est, olioso et
immuni servando. Voyez supra, p. 288.
^ C. Th., 12, 1, 1. 179, § 1 (415) : Vacaîites quoque cl nulla velerum
dispositione ullivs corporis societate conjunctos curiue atque collegiis
singularum urbium volumus subjugari.
' C. Th., 14, 21, 1. un. (364) : De nantis Tiberinis. La loi dit : Qui navem
Tiberinam habere fuerit ostensns, omis reipublicae necessarium agnos-
cat, etc. Nov. Valent. III, tit. 28, § 2 (450) : Privatorum naves légitimai
capacitatis necessitatem liujus functionis singulis cursibus, minores véro
( 331 )
mer était de droit affecté au service des transports maritimes ;
cherchait-on à éviter cette corvée, on encourait une punition
sévère et le navire était confisqué '. « A voir tant d'assurances
contraires données par la loi, dit Wallon, on ne devrait pas
être surpris qu'en plus d'un cas, non pas seulement la barque
ou le navire, mais tous les biens des propriétaires se fussent
trouvés grevés des charges de cette corporation '^! »
En désespoir de cause, on prenait des membres d'une cor-
poration pom' en compléter une autre, quoique ce iùt, en
général, défendu 3. En 31o, le préfet de l'annone avait adjoint
des naviculaires aux boulangers; Constantin les fit revenir K
Même comme châtiment, on ne pouvait transférer le coupa-
ble d'un collège à un autre s. Cependant, quand le besoin était
extrême, on s'adressait aux corporations plus nombreuses ou
moins importantes pour sauver les plus menacées et les plus
nécessaires. Ainsi, sous la préfecture de Symmaque, les fer-
miers des salines avaient reçu « de justes suppléments pris
hi)ii.s solidis adjuvabunt, ut necessarium corpus saluberrimae provisionis
uuxilio svhlevatum devotionem solilam redintegratis viribus possit agnos-
cere. La Novelle est intitulée : De navicidariis amnicv^.
^ C. Th., 13, 7 \de navibus non excusandis. L. 1 (399), en Egypte.
!.. 2 (406) : Ut priva tos quoque non prohibemus haberc navigia, ita frandi
locum esse non sinimns, cum omnes in commune, si nécessitas e.regerit,
conveniat utilitatibus publias obeiiire et subveclionem sine dignitatis
privilégia celebrare. Nov. Theod. Il, t. 8 (439) : jubemus nullam navem
intra milium duorum modiorum capacitatem ante felicem cmbolam vel
publicarum specierum transveclionem — excusari posse. Cfr. C J., XI,
3 f4j, 1 et 2. Ce n était en somme que le munus rei naviculans, charge
j)atnmoniale, dont parlent les jurisconsultes classiques (DiG., 49, 18, 4,
1. 50,4, 4, 1).
2 Wallon, III, p. 200.
•"' Voyez 52/pra, p. 317. Cfr. Giekke, p. 177, n. 109.
' C.Th., 13,5,1. 2(315).
• C. Th., 9, 40, 1. 9 (365) = C. J., IX, 47, 19 : Se quis pro coercitione
dt'licti vel pistoribus vel cuicunquc altcn rorpori, cum ultenus sit corporis,
addicatur.
( 332 )
dans d'autres corps t », et en 389, Honorius adjugea à leur
« fonction » tous les membres assez riches des collèges peu
importants [miuuscula corpora) '^. Ici, il fallait toujours l'inter-
vention de l'autorité, qui appréciait la nécessité ^.
Quand on ne trouvait pas assez de citoyens à Rome, on pre-
nait des étrangers établis pour toujours (Urbis incolae '*), ou
même passagèrement dans la ville {pereg7iin). Ainsi, les jeunes
gens de province, qui venaient y séjourner pour leurs études,
devaient être renvoyés, par les soins du préfet de la ville,
après un délai fixé, sauf ceux qui ont été soumis aux charges
d'un collège 'qui corporatorum sunt oneribus adjundi) 'k Gode-
froy suppose qu'il s'agit ici de corporations où l'étude des
lettres était nécessaire. Saint Ambroise parle aussi de peregrini
corporatif qu'on chassa pendant une famine pour avoir moins
de bouches à nourrir, privant ainsi la ville de leurs ser-
vices, qui étaient devenus indispensables c. Qu'y a-t-il d'éton-
nant? Les chevaliers pouvaient être pris eux-mêmes parmi les
pérégrins qui ne devaient pas être affectés à une corporation '.
Sous Valentinien III, il existait même à Rome toute une cor-
poration de marchands étrangers, appelés pantapoles 8.
' Symm., Relat., 44 : ex aliis corporibus justa supplementa.
- C. Th., 12, \Q, 1. un. (389) : Quicitiique — de miimsculis corporibus
idoneiLs approbatur, functioni mancipatus est addicendus. En 380, Gratien
assure aux naviculaires qu'ils n'ont pas à craindre l'enrôlement forcé
dans un alterum homimun geniis, spécialement dans la curie (13, 5, 1. 16).
En 364, Valentinien défend d'enrôler des caesariani, sans son avis (10,
7, 1. 2).
5 Voyez encore C. J., XI, 9 (10), 4 (412). C. Th., 10, 22, 1. 6, sur les fabri-
censes.
* C. Th., 14, 2, 1. 2 (391), et Gothofr. ad h. L
^ C. Th., 14, 9, 1. 1 (370). On les obligeait de retourner dans leur ville,
parce que des charges locales les y attendaient.
•' Ambros., Ofjic, III, 7. Voyez supra, p. 102.
' C. Th., 6, 36, 1 (364) = c' J., XII, 32, 1 : Equités romani — ex indi-
genis Romanis et civibus eligantur, vel fiis peregrinis, quos corporatis
non oportet année ti.
« Nov. Valent. III, t. 5 (440) : de pantapolis. Voyez supra, p. 110.
( 333 )
Enfin, les empereurs n'hésitèrent pas à recourir à un moyen
(|ui prouve combien les collèges étaient déchus : ils leur
u adjugèrent » les condamnés. Du reste, cette humiliation ne
fut pas même épargnée à la curie i. 11 fallait ù tout prix sau-
ver les corporations qui mouraient faute d'hommes. 11 fallait
surtout venir en aide à celles de l'annone : voilà pourquoi c'est
dans les boulangeries surtout qu'on jetait les condamnés '-i. Le
corpus pistonim recevait tous ceux qui avaient commis une
faute légère, du moins dans les provinces annonaires. C'est w
que Constantin décrète pour la Sardaigne '\ Valentinien h'
pour Rome et les régions suburbicaires, plus tard pour la
Lucanie et le Bruttium ^. La décision était laissée au juge cri-
minel respectif, à Rome au préfet de la ville ou au préfet de
l'annone, dans les provinces au gouverneur. Le gouverneur
devait envoyer les condamnés, dûment escortés, à Rome, au
préfet de l'annone, qui les livrait aux boulangers ^. En ?)(ji,
Valentinien I^', voyant que les directeurs de prison 6 se laissaient
corrompre, ordonna que les condamnés de Rome et des
régions suburbicaires seraient livrés aux boulangers sous les
yeux du préfet de la ville " ; les autres continuèrent à être
envoyés à l'office du préfet de l'annone ^.
Il y avait d'autres cas spéciaux oii le coupable entrait dans
une boulangerie. Nous trouvons les suivants : lepatronus cau-
ilicariorum et mensonim, qui était infidèle-*; le mari d'une
boulangère qui dissipait les biens de sa femme, pour l'atl'ran-
' C. Th., 7, 22, 1. 1 (319). 12. 1, 1. 66 (365). 108 (384). 16, 2, 1. 39 (408;.
- G. Th., 14, 3, 1. 2 : necessarium corpus fovendum est.
^ C. Th., 9, 40, 1. 3 : Quicunqne coercilionem mereri ex caiisis non
/jravibus videbuntur, in iirbis Romae pistrina dedanlur.
i G. Th., 9, 40, 1. 5 et 9. 1. 6 et 7.
•> C. Th., 9, 40, 1. 3 et 6 (319 et 364).
•■' Commentarienses. Gfr. Serrigny, n. 215.
- C. Th., 9, 40, 1.5(364).
^ C. Th., 9, 40, 1. 6 (364).
' C. Th., 14,4,1.9(417).
( 334)
chir 1 ; remployé du préfet de l'annone ou de la ville qui
faisait subir des vexations aux boulangers "^ ; lespidices Africac
qui n'envoyaient pas tous les cinq ans le contingent dû au
corpus pistorum '^ ; tout appariteur du préfet du prétoire ou
des offices du palais qui se laissait confier une mission fiscaU^
dans la province dont il était originaire ou dans laquelle il
avait son domicile 4-; ceux qui prenaient frauduleusement part
aux distributions de pain. Ici les peines diffèrent suivant la
condition du coupable; tous sont adjugés au corpus pistortwi,
mais les esclaves de sénateurs serviront enchaînés, les citoyens
pauvres travailleront sans liens, et les riches seront assujettis
à l'entretien de la boulangerie avec tous leurs biens '\ Enfin,
d'après une Novelle de Justinien, les hommes forts, mais qui
« ne sont qu'un fardeau inutile pour la terre », c'est-à-dire les
vagabonds et les fainéants, devaient être livrés aux préposés des
boulangeries ou à d'autres ateliers publics 6. Les boulangeries
étaient donc devenues de véritables prisons; on y subissait
les travaux forcés à perpétuité.
La raison de cette préférence donnée aux boulangers, c'est
qu'une grande partie de leur travail était pénible et convenait
aux c( esclaves de la peine «. C'est pour le même motif que
l'on condamnait si souvent aux mines et carrières, et les con-
damnations fournissaient encore plus de recrues aux corpora-
tions de mclallarii qu'aux boulangers. Cette peine était fré-
quemment appliquée et elle est si connue que nous n'avons
pas besoin d'insister ''.
1 C. Th., 14, 3, 1. 14 (375). Depuis 403, il y entre par le mariage (1. 21^
2 C. Th., 14, 3, 1. 22 (417).
5 C. Th., 14, 3, 1. 12 (365?). En 380, Gratien ne les menace plus que
d'une amende (14, 3, 1. 17). Voyez supra, p. 280.
* C. Th., 8, 8, 1. 4 (386).
•'• C. Th., 14, 17, 1. 6(370). Cfr. Gothofr., vol. V, p. 275, 2^ col., fin.
« .\ov. JusT., 80, c. 5 Cfr. G. Th., 9, 40, 1. 3 (319) : ergastidis vel
pistrinis esse dedendos.
' Voyez GoTHOFREDUS, Paratitlon ad C. Th., 10, 19 : de melatlariis
(p. 517, ad fin.).
( 885 )
Cependant certains condamnés entraient dans d'autres cor-
porations '. I>es gouverneurs et leurs employés qui ne respec-
taient pas les privilèges des naviculaires, furent avertis par
Honorius que leurs biens seraient affectés à ce collège -, mais
cela ne veut pas dire qu'ils devaient eux mêmes y entrer. Il est
certain cependant que, dans les provinces, les collèges de toutes
les cités se voyaient adjuger des condamnés. C'étaient, par
exemple, les enfants des curiales qui devaient être punis.
Exclure ces enfants de la curie, c'eût été combler les vœux de
leurs parents et les perdre : on les jetait donc dans un des col-
lèges qui servaient la curie"!. Cette mesure est de Majorien, en
4o8 : la misère des décurions était alors profonde ; ils quittaient
les villes dont ils étaient « les nerfs et les entrailles ». Pour
échapper h la curie, ils se cachaient et prenaient pour femmes
des serves {colunui'j ou des esclaves [ancillae). Il fallait quand
même les ramener à la curie, avec leurs enfants, mais ceux
d'entre leurs tils qui étaient issus d'une esclave, entraient dans
un collège 4. Il en était de même de l'intendant (^/c/(>/',/;ron(n//or)
qui, à l'insu de son maître, recevait un curiale parmi les colons,
pourvu que cet intendant fût libre; s'il était esclave, il péris-
sait sous les verges -j. Il en était encore de même du colon qui
osait épouser une Mlle de curiale, tandis que sa femme était
restituée avec ses enfants à la curie <\ Les receleurs de fabri-
* (iEBHARDT, p. 8, n. 1, Ic conteslc à tort. Le texte suivant le prouve à
lui seul : ^e quis pro coercitione delicti vel pistoribus, vel ctiicunqiw
alteri corpori, ciun alterius sit corporis, addicalnr (C. Th., 9, 40, 1. 9,
Valentinien L'"', en 36o).
2 (;. Th., 13, o, 1. 36 (412) : palrùnonium suum noverit istius functionis
onenbus addicendum .
•" Nov. Major., tit. 7, § 3 : pro curialium dispositione.
* Ibid., § 2 : si ex ancillis editi, collegiis depulentur, ne materni san-
giiinis vilitale splendor ordini.s poUuatur. Si la mère était colone, les fils
appartenaient à la curie; les filles devaient toujours suivre la mère.
~' Ibid., ^ 4 : si (jnis aclor procuratorve, — si ingemius probatur, collegiis
applicetur.
'• Ibid., § 5 : Ille vero, si originarius (colon de naissance) erit, — colle-
giis niliilominus deputetiir ; si famulus, servilibus poenis peribit.
( 336 )
cants d'armes étaient attachés à la fabrique avec leurs enfants •.
Le prêtre réfractaire ou indigne, exclu par son évéque, entrait,
suivant son rang et sa fortune, dans la curie ou dans un col-
lège de la cité'^. Théodoric, dans son édit publié vers l'an 599,
adjuge aux collèges de la ville voisine tout ingénu qui avait
séduit une esclave et ne pouvait ou ne voulait donner au maître
kl réparation fixée par l'édit ^.
Vue fois entrés dans un collège, les condamnés ne pouvaient
plus en sortir, même en cas de grâce générale, sauf en vertu
d'un rescrit accordé spontanément par l'empereur 4. Défense
leur était faite de chercher à surprendre un rescrit : le droit
de requête leur était même ravi. S'ils réussissaient à arracher
leur grâce à l'empereur, le gouverneur qui les avait condamnés
et son otîice encouraient une amende de 50 livres d'or ^.
Fuite des corporali et des collegiati; chasse aux fugitifs.
Malgré ces efforts désespérés, à la fin du IV^ siècle, toutes
les corporations étaient complètement désorganisées. Trouvant
leur existence pire que le néant, les corporati ne voulaient plus
donner la vie à des êtres qui devaient hériter de leur misère :
ils imitèrent les curiales, et ne contractèrent plus mariage ^K
Pour eux-mêmes, ils n'avaient plus recours ni à la ruse ni à
1 C. Th., 10, 22,1 4(398).
2 C. Th., 46, 2, 1. 39 (408). Cfr. C. J., I, 3, 53. I, 4, 34, § 4.
■"' Ediit. Theoderici, c. 64 {Mon. Germ. hist., Lcgum tomus V, j). loO;.
* C. Th., 9, 40, 1. 7 (364) : condamnés aiixpistrina.
^ C. Th., 14, 3, 1. 20 (398) : Adscripti semel per sentenliam judicis ordini
pistorio surrepticia rescripta non quaerant, nec ulla eis supplicandi praes-
letur facultas, etc.
•' Nov. JusT., 38, pr., § 1 : Denique, quoniam ipsis corporibus fraudarc
curiaui voluerunt, rem omnium impiissimam adinvenerunt, a nuptiis
hijitimis abstinentes.
( 337 )
l'intrigue pour recouvrer la liberté, ils s'enfuyaient en masse t.
Ils quittaient la ville où des charges si lourdes les tenaient
enchaînes, et ils cherchaient une 'retraite où ils espéraient
jouir au moins de la liberté, ils ne faisaient que suivre Texem-
ple des curiales, des oflkiales, des colons, bref, de toutes les
personnes liées à leur condition.
D'où venait cette dissolution universelle? Sans nul doute
les barbares y eurent une grande part : ils commençaient à
dévaster les provinces épargnées jusque-là, pénétraient jus-
qu'en Italie et saccageaient la Ville Eternelle elle-même. En 41i2,
Honorius rappelle à la fois les corporati de Rome, ceux de
l'Italie et des provinces, les décurions et les o/ficiales par une
constitution dont les fragments sont insérés dans quatre cha-
pitres différents du Code Théodosien 2. Godefroy montre très
bien que ce désordre général était dû à l'invasion des Goths
commandés par le roi Alaric. La Ville Eternelle fut prise
et pillée en 409, et la famine succéda aux barbares. Les habi-
tants la quittèrent, chassés par ce double lléau et s'enfuirent
en Afrique et en Orient. Home resta longtemps presque
déserte : en 419, les distributions de lard étaient descendues
à 4,000 livres par jour, tandis que sous Valentinien III, en 452,
elles remontèrent à 5,628,000 livres par an, c'est-à-dire par
cent cinquante jours, ce qui fait 24,086 % livres par jour 3. Les
autres cités de l'Italie n'avaient pas moins souffert. Partout
les curiales et les collegiali s'étaient dispersés. La ville de
Hénévent, par exemple, avait été ravagée de fond en comble :
son forum, ses basiliques, ses portiques, ses thermes étaient
devenus la proie des tlammes, allumées par l'ennemi (po.s/ Iiostilr
' l\ Allard, EscL chrétiens, p. 450, ne croit pas à une désertion en
masse des collegiati. Mais les lois que nous allons citer sont une preuve
iri'éfulable.
2 C. Th., 8, 4, 1. 2o. 12, 1, 1. 170. 14, % 1. 4. 14, 7, 1. 2 (412), avec \c
commentaire de Godefroy.
5 C. Th., 14, 4, 1. 10 (419). Cfr. Gothofr., ad h. L, cL Nov. Valent. lil,
lit. 3o, § 2 (4o2).
Tome L, vol. II. 22
( 838 )
incendiiim). Ses corporations étaient désorganisées. Ce fut un
riche citoyen qui vint ù son aide, restaura ses collèges et releva
ses édifices. Le peuple reconnaissant lui érigea une statue dont
nous avons conservé l'inscription '. Depuis longtemps les
provinces, plus exposées aux coups des barbares, devaient
avoir subi des calamités de ce genre. Mais les invasions no
firent qu'augmenter un désordre qui existait déjà : ce n'étaient
pas les barbares qui inspiraient le plus de terreur à tous ces
a esclaves de leur condition ». Sans l'épuisement, sans la
décrépitude où il languissait, l'Empire aurait pu les repous-
ser. Mais depuis longtemps les campagnes, comme les villes,
se dépeuplaient; depuis de nombreuses années, les collegiali,
comme les curiales et les colons, quittaient le sol natal. Il
suffit, pour s'en convaincre, de jeter un coup d'œil sur les
dates des constitutions qui rappellent les déserteurs. Les pre-
mières lois de rappel concernent les manufactures et les
mines : les yijnaeciariiy en 3o8, sous Constance; les tnetallarii,
en 369, sous Valentinien l^"" et Valens, en Orient aussi bien qu'en
Occident; les fabricants d'armes, en 388, sous Théodose; pour
les collegiali des cités, la première loi est de 39o, sous Hono-
rius -.
Ce qui les faisait fuir, c'étaient leurs charges de plus en plus
écrasantes. Enchaînés à leurs corporations, surveillés avec
une vigilance jalouse par celles-ci et par l'Etat, ils n'avaient pas
d'autre moyen que la fuite pour briser leurs liens. Le fisc
écrasait les curiales et les curiales écrasaient les collèges ; le
fisc écrasait aussi les corporations qui travaillaient directement
' IX 1596, avec la note. La provenance est incertaine.
- Lois qui ordonnent de ramener les fugitifs, Metallarii : C. Th., 10,
11), 1. 5 (369). 1. 6 (369). 1. 7 (370. 1. 15 (424). Gynaeciarii : 10, 20, 1. 2
(358). 1. 6 et 1. 7 (372). 1. 8 (374). 1. 9 (380). Fabriceiucs : 10, 22, 1. 4 (388'.
1. 5 (404). Corporati Urbis Romae : 14, 2, 1. 4 (412). Collegiati singalariuii
urbium : 12, 1, 1. 146 (395). 1. 162 i399>. 14, 7, 1. 1 (397). 1. 3 (412). 12, 19.
1. 1-3 (400i. Nauicularii : Nov. Val. III, lit. 28, § 1 (450). Suarii ; Ibki.
til 35, § 8 (452). Corporati : Nov. Major., lit. 7, § 3 (458). Nov. Sev., tit. 2
(465^
( -inî) )
pour lui, soit à Koinc, soit dans les provinces. Certains col-
lèges préféraient faire cause commune avec les envahisseurs
que de continuer ù servir TÉtat qui les opprimait. Ammien
Marcellin raconte qu'en 376, quand les Gotlis, établis en
Thrace, se révoltèrent, les mineurs du fisc se joignirent à eux,
parce qu'ils n'étaient pas en état de fournir le canon mctalli-
cus : Vecti(/(iHum perferre })usse no)i sullic'wnlessdmnds graves K
Les barbares étaient des libérateurs! Et à mesure que le nom-
bre des déserteurs augmentait, le fardeau devenait plus lourd
pour ceux qui restaient!
Où allaient tous ces fugitifs? De la capitale, ils se répandaient
dans les provinces, des villes ils se dispersaient au loin dans
les campagnes; ils erraient çà et là, ou bien ils cherchaient
une retraite dans des lieux déserts et sauvages -. Beaucoup
s'engageaient au service des grands propriétaires, qui les
accueillaient à bras ouverts. Les ouvriers des manufactures
allaient travailler dans les ateliers des particuliers, qui les pro-
voquaient même à la désertion : il fallut menacer d'une
amende et même de la proscription celui qui chercherait à
embaucher des ouvriers de l'Etat 3. Y avait-il dans tout l'Em-
pire une condition plus misérable que celle du colon? Serf
de la glèbe, il était vendu avec elle, et il n'avait aucun espoir
de la quitter. Eh bien ! les collegiati et même les curiales
n'hésitaient pas à chercher un asile dans cette classe si mal-
' Amm. Marc, 31, 6, § 6. Cfr. Gothofr., ad C Th.. 10. 19, 1. o et 7. Déjà
en 369 et 370, Valens et Valentinien I^'" rappellent les metallarii de Tiirace.
Les barbares étaient bien accueillis et souhaités. Voyez G. Boissier, La
fin du paganisme, II, p. 487. G. Kurth, Les origines de la civilisation
moderne, II', p. 217.
2 G. Th., 14, 7, 1. 1 : Ivngius abirrunt. 14, 2. 1. 4 : /// prregrina trans-
gressi sunt. 10, 10, 1. lo : ad exlerna migrarunt. 10. 19, 1. o : metallarii,
qui incolunt latebras. 1. 7 : vago errore. 10, 22, 1. 4 : lalitantes. 12. 19,
1. 3 : passim vagari. 12, 19, I. 1 : agrestem vitam secuti, in sécréta sese et
dévia contuleriint. 12, 1, 1. 162: quoscunqiie et iibiciinque latentes.
3 G. Th., 10, 20, 1. 6 (372) : Opifkes ve^tis linteae contexendae — solli-
citatos a plurimis esse cognovimus.
{ 3-40 )
heureuse, si dégradée ! Quelques-uns devenaient intendants
[procuratores], la plupart se résignaient à être de simples
colons {cultures) sur les domaines des grands propriétaires.
Ils épousaient des femmes serves ou esclaves i. « Les curiales
eux-mêmes, dit Majorien en 458, membres de ces assemblées
que l'antiquité appelait à bon droit de petits sénats, oublient
l'éclat de leur naissance, et non contents de se faire les hommes
d'autrui, ils vont souiller leur honneur en s'unissant à des
serves ou à des esclaves -. )> Là au moins ils vivraient tran-
quilles. Ils sacrifiaient la liberté, ils se soumettaient à un
dur et pénible travail, mais au moins ils seraient en sécu-
rité, sous la protection d'un maître puissant qui avait besoin
d'eux 3 !
La conséquence inévitable, c'était la ruine pour les villes, la
ruine de l'Empire. Ces municipes si florissants, ces provinces
si riches, cet Empire si prospère autrefois, périssaient faute
d'hommes. « Les cités ont perdu la splendeur dont elles bril-
laient jadis, » s'écrie Honorius en 400 *. « Elles ont perdu les
curiales, ces nerfs de l'État, ces entrailles de la cité, et les
collegiati qui accomplissaient les services publics sous les
ordres des curiales, » dit encore Majorien, en 458 ^.
1 C. Th., 12, 19, 1. 1 (397) : eos, quorum inquilinas vel colonas vel ancil-
las diixerint {scil. collegiati). Cfr. 1. 2 (400j et 14, 7,.l. 1 (397). Nov.
Seyeri, lit. 2 (465). — Pour les ouvriers des manufactures de l'État, qui
n'avaient guère un sort meilleur que les esclaves et les colons , cela est
moins étonnant. C. Th., 10, 22, 1. 5 (404) : Si quis posthac fabricensem
admiserit procuratorem, vel cultorem sui praedii detinuerit. Cfr. 10, 19,
1. 15 (424) : metallarii.
2 Nov. Major., lit. 7, pr. (458).
3 C. Th., 12, 1, 1. 146 1395) : Multos animadvertimus, ut débita praesta-
tione patriam defraudarent, sub umbra potentium latitare. Ce patronage
des puissants enlevait à l'Étal les contribuables et le privait du travail de
ses sujets; aussi était-il sévèrement interdit. Il diminuait le pouvoir cen-
tral et préparait la féodalité. Cfr. Serrigny, n^^- 1175-1180.
^ C. Th., 12, 19, 1. 1 (400).
- Nov. Major., lit. 7, pr. et § 3 (458).
( 3il )
Le (langer était grand; la mal était ineiirable. Cependant les
empereurs tirent des eiïbrts pour y remédier.
Ils ordonnèrent la chasse aux fugitifs par toute la terre :
« En quelfjue lieu de la terre qu'on trouve les colle()iati, dit
Honorius en 400, qu'on les ramèn(; à leurs olîices, sans excep-
tion •. » 11 faut qu'ils accomplissent les « fonctions qu'une
antique coutume leur a imposées » '^. Dés 309, Valentinien \" et
Valens s'écrient : « Qu'on recherche les mctallarii, et qu'on ne
laisse aucune partie du monde romain sans l'explorer '^! «
C'étaient les recteurs ou gouverneurs des provinces qui devaient
rechercher les corporali Irbù Ilomuc -^ et les collefjiati des
villes i>; c'était le comte des Largesses sacrées ou des Largesses
privées qui devait envoyer partout ses limiers [investUjatores)
pour traquer les ouvriers des mines et pour les ramener au sol
natal {ad sohim génitale)', les gouverneurs devaient leur prêter
main-forte ^. Et pour les retrouver, les agents de ces hauts
fonctionnaires pouvaient pénétrer jusque dans la maison du
prince "! En effet, ils se faufilaient parfois dans les milices du
palais 8. Les liens nouveaux qu'ils avaient contractés étaient
brisés; aucune intercession ne pouvait les sauver, on les rame-
nait impitoyablement avec leurs biens et leurs enfants '\ et il
• C. Th., 12, 19, 1. 1 (400).
2 C. Th., U, 2, 1. 4(412).
^ C. Th., 10, 19, 1. o (369) : XuUani partcm Romani orbis credidimus
reliquendam , ex qua non )uetaUarii , qui incolunt latebras, producan-
Inr, etc.
* C. Th., 14, 2, 1.4(412).
••• C. Th., 14, 7, 1. 1 (397).
'■• C. Th., 10, 19, 1. 5 (369) : et in comprchendendis eis investigatorcs
eorum rectores congruis auxiliis prosequantur.
' îbid., 1.5:^/ quos donms nostrae sécréta retinent.
8 C. Th., 10, 22, 1. 4 (398). Cfr. supra, pp. 316-317.
^ C. Th., 14, 7, 1. 1 (397) : cum omnibus, quae eorum erunt. Il s'agit des
colkgiati. — Nov. Valent. III, tit. 28, § 1 (430) : Navicularios (bateliers
du Tibre), qui munus propriuni diffugerunt, ad corpus suum cum agna-
tione et peculiis reducendos, omni vel conjunctionis, vel obnoxietatis , vel
{ 342 )
n y avait pas de prescription, ni pour les personnes, ni pour les
biens, ou elle était si longue que personne n'en pouvait pro-
fiter. En 365, Valcntinien l^*^ dit déjà : « Que le boulanger devenu
clerc sache qu'il peut et doit toujours être rappelé à partager
la charge de ses confrères ^. )> En 400, Honorius rappelle les
collcgiati fugitifs; pour eux, pas de prescription 2. En 423, il
veut bien accorder la liberté au naviculaire qui n'a pas été
inquiété pendant cinquante ans 'M L'année suivante, il est
moins rigoureux envers les mineurs devenus colons : ceux qui
ont quitté la mine depuis cinq ans au moins sont atîranchis
(le leur ancienne condition. 11 est vrai que la nouvelle n'est pas
meilleure! Leurs enfants sont partagés entre le collège et les
parents. Mais dorénavant, dit-il, il n'y aura plus de prescrip-
tion, pas même au bout de quarante ans K
Pour les collcgiati qui ont épousé un fille de colon ou même
une fille d'esclave, que deviennent les enfants? Nous avons vu
(ju'après avoir appliqué la règle qui voulait que l'enfant né
d'un mariage illégitime suivît sa mère, Honorius décida, en
l'an 400, que les enfants d'un collegiatus et d'une colone ou
esclave, seraient partagés entre la cité, c'est-à-dire le collège,
et le propriétaire du sol , à moins qu'ils n'eussent plus de
40 ans ». Honorius s'était laissé guider par l'intérêt des
villes et des collèges; en 465, Sévère statue, au contraire, (jue
si l'un des parents est colon ou esclave, désormais les enfants
suivront cette condition. H veut les punir et il prend cette
cujuslibet personae privilegio et defensione siimmota. — Tit. 35, § 8 (452) :
Obnoxias suario, hoario et pecuario corpori personas ad débita praecipi-
inus cum agnatione, pecidiis et praediis onera revocari, amotis omnibus,
'iiiae sibi contra leges praesumptio et ambitio vindicavit. Voyez les autres
lois citées supra, p. 338, n. 2.
' C. Th., 14,3,1. H{365).
^ C. Th., 12, 19, 1. 1 (400).
•^ C. Th., 13, 6, 1. 10 (423j.
' G. Th., 10, 19, 1. 15 (424).
'•' Voyez supra, p. 307, n. 4.
( 343 )
mesure sur les plaintes des provinciaux, qui ne voulaient pas
recevoir dans leurs collèges les enfants de serves ou d'esclaves ^.
Quel désarroi ! Ces collcgiali ne faisaient qu'obéir à la loi
d'Honorius. 11 est à croire cependant que ce châtiment com-
blait les vœux de la plupart des malheureux qu'il devait frapper,
et qu'il ne fut pas maintenu.
Nous avons dé]h vu qu'Honorius supprima pour les fugitifs
le droit de retjuéte et qu'il annula d'avance tout rescrit rendu
en leur faveur -.
Des mesures sévères furent décrétées contre les receleurs 3.
I.e propriétaire qui prend des fugitifs à son service est frappé
d'une amende de o livres d'or, si c'est un curiale, et d'une livre,
si c'est un collegiatus. En même temps, Honorius les somma
de chasser ceux qu'ils avaient accueillis, pour ne pas encourir
une plus grande indignation de la clémence impériale K Même
ordre pour les inetallarii dès 370 s. Quant aux esclaves des
fabriques de pourpre, les receleurs devaient les livrer au fisc,
sous peine d'une amende de 5 livres 6. De 372 à 380, il y a
(juatre lois menaçant d'une amende de 3 à 5 livres par homme,
et même de la proscription, les receleurs de gynaeciarii et de
Untearii ". Les receleurs de fabricenses sont enrôlés dans la
fabrique; ceux qui les engagent comme intendants, fermiers
ou colons perdent la terre qu'ils leur ont confiée 8. Enfin, le
' Nov. Severi, tit. 2 (465) : nunc sub specie publicae corporationis pro-
rreatos liberos conantur jugo servitutis absolvere.
2 C. Th., 14, 7, 1. 3 (412) et Nov. Valent. III, lit. 35, § 8 (454).
•'' Contre les receleurs des collegiati : C. Th., 12, 1, 1. 146 (395). 1. 162
(399); des metaliarii : 10, 19, 1. 7 (370); des gynaeciarii : 10, 20, 1. 2 (358).
1. 6 et 7 (372). 1. 8 (374). 1. 9 (380;; des fabricenses : 10, 22, 1. 4 (398). i. 5
(404).
^ C. Th., 12, 1, 1. 146 (395) : Onines igilur quos tegunl, expellant.
^ C. Th., 10, 19, 1. 7 (370) : Vt singulos potins regredi ad solum génitale
compellant.
" C. Th., 10, 20, 1. 2 (358) : qui nonprodiderit.
' Voyez supra, note 3.
"< Voyez supra, note 3. En 458, Majorien menace de la peine capitale
( 344)
capitaine de navire qui transportait en Sardaigne les ouvriers
des mines et carrières, subissait une amende de o solidi par
homme i.
Toutes ces menaces ne produisaient aucun effet. En 899,
Honorius s'étonne que les gouverneurs lui adressent des rap-
ports, au lieu d'appliquer les nombreuses lois qui frappent
d'une peine déterminée les receleurs de ciiriales et de coîle-
giati '^. On hésitait à les exécuter et, en 400, le même prince
s'en prit à ses fonctionnaires; il menaça de la relégation les
chefs des curies {primates ordinum) et les defensores civitatuDi
qui permettraient aux curiales et aux collegiati d'errer encore
çà et le, au plus grand détriment de l'État et de la cité 3.
On prit aussi des mesures préventives. Dès 31o, tous les
metallani, et en 398, tous les fabricenses sont marqués au fer
rouge, sur le bras, à l'exemple des soldats : ainsi on pourra
les reconnaître s'ils se cachent 4. Puis tous les collegiati furent
liés à leur domicile d'origine ; il leur fut défendu de voyager
et de quitter le territoire de la cité 3. Enfin, une inscription
fait connaître un autre moyen : à Anxanum, le recteur de la
province fait afficher les noms des décurions et de tous les
les grands qui dépouilleraient et vendraient des curiales ou des corporati
fugitifs ; s'ils avaient quelque sentiment d'honnêteté et quelque affection
pour leur patrie, ils les feraient plutôt rentrer dans leur cité, dit cet
empereur (Soy. Major., tit. 7, § 8, en 458).
« C. Th., 10, 19, 1. 6 [369).
2 C. Th., 12, i, 1. 162 (399).
3 C. Th., 12, 19, 1. 3 (400j.
* C. Th., 9, 40, 1. 2 (313). 10, 22, 1. 4 (398) = C. J., XI, 9, 3 : ut hoc
modo saltern pnssint latitantes agnosci.
De même les aquarii : C. J., XI, 42, 10, § i (Zenon, -474-491) et les
recrues : Veget., I, 8 : Quando tirones signandi sint. Cfr. II, o. Ambros..
de obitu Val. cons., p. 1189, § o8 : nomine imperatoris signantur milites.
Wallon, III, p. 150, n. 3.
5 Nov. Major., tit. 7, § 3 (458) : Collegiatis extra territorium dvitatis
siiae habitare non liceat. Cfr. Gebhardt, p. 75. Kuhn, I, p. 35. Il en fut de
même des curiales : C. Th., 12. 1, 1. 143. 144, et Wallon, III, p. 187.
( 345 )
collegiati : ces listes servaient sans nul doute à faciliter le con-
trôle '.
Vains efforts! Le sort des corporati et des collegiati, comme
celui de tous les hommes affectés à leur condition, était devenu
si misérable, qu'ils préféraient la mort à la vie. Quand un Etat
en est arrivé à ce point, sa fin est prochaine.
A lui seul, le nombre incroyable des lois qui se succèdent
d'année en année sans parvenir à se faire respecter et dans les-
quelles le classement opéré par d'habiles jurisconsultes n'a
pu faire disparaître les contradictions flagrantes, prouve quel
désarroi régnait dans les conseils du chef de l'Etat, aussi bien
que dans ce monde de fonctionnaires, d'employés et de ser-
viteurs de toutes sortes, qui travaillaient par force pour
l'Empereur, pour quelques citoyens immensément riches et
pour une populace oisive. Aussi de jour en jour les services
publics se désorganisent, les ateliers privés se vident, les
campagnes se dépeuplent comme les villes. Le colosse romain
se désagrège et une simple secousse suffira pour le faire tom-
ber en morceaux : ce fut l'œuvre des barbares -.
Les corporations, comme la plupart des institutions de
l'Empire, disparurent dans celte dissolution universelle. Ce
n'est pas sur leur modèle que se formèrent les corporations
libres du moyen âge, qui se proposaient un but tout différent,
qui se formaient librement, sans intervention publique, et
jouissaient d'une complète autonomie 3. Cependant, en atten-
» C. /. L., IX 2998 : Antonius Jiistinianus, rector [provijwiae, nomiji]a
tam decuriomun quam etiam collegia[torum collegiorum o]mnnun publice
incidi praecepi, nt \i{nj'ra) s(cripta) sHint)]. Voyez encore VI 9920, un
album du corpiL": tahernariorum de Rome, sous Arcadius, Honorius et
Théodose.
Sur les alba des collèges d'Ostie, voyez supra, p. 268, n. 1.
2 Voyez le tableau de la décrépitude de l'Empire, tracé par Godefroid
KuRTH. Origines de la civilisalkm moderne, I, pp. 213-220, et Clovis,
chap. I.
s LiEBENAM, pp. 59-60. FrsTEL DE CouL.\NGES, Op. Cit., p. 257, admet
( 346 )
dant que, dans l'Occident, la société et les États barbares se
constituent sur des bases nouvelles, les corporations romaines
continuent à végéter plus ou moins longtemps encore. Nous
avons vu que les dernières constitutions impériales sont de
Valentinien Ili, de Majorien et de Sévère i. Les rois goths
d'Italie maintinrent, autant que possible, les institutions
romaines et donnèrent à quelques-unes une vie nouvelle, mais
passagère ^2. Leur ministre Cassiodore parle encore des corpo-
rations de Rome, particulièrement des boulangers 3, des char-
cutiers 4 et des chaufourniers î>. A la fin du Vl« siècle, sous
saint Grégoire le Grand, on rencontre encore à Naples une
(|ue les naiites parisiens durèrent plus longtemps que l'Empire, et que le
système des corporations, bienfait de la domination romaine, a survécu
à cette domination ; mais il ne donne pas de preuve de cette filiation et,
si les corporations du moyen âge avaient ressemblé aux collèges du Bas-
Empire, elles n'auraient pas été un bienfait. Poullet {Hist. polit, de la
Belg., 2e éd., 1892, vol. I, p. 278, n. 576) dit que, dans quelques rares loca-
lités, de vagues souvenirs d'anciennes corporations marchandes romaines
ont pu contribuer à la naissance des gildes marchandes au X^ ou XI^ siècle.
Ce sont des mots et rien de plus. Les historiens des gildes du moyen âge
admettent presque tous qu'il n'y a aucun lien entre elles et les collèges
romains. Il est question pour la première fois d'associations dans les
Capitulaires de Charlemagne en 119 (Mon. Germ. hist., I, 36) et de Carlo-
man en 884 (art. 14). — Rodbertus conjecture, avec moins de vraisem-
blance encore, que les collegia tenuiorum servirent de modèle aux
artisans du moyen âge (VIII, 1867, p. -418, n. 62j. — Voyez encore
E. RoDOCANACHi, Les corporations ouvrières à Rome depuis la chute de
l'Empire romain, 2 vol., 1894.
* Cfr. Krakauer, p. 55. VI 9765, en 435 : corpus pustillariorum. VI
1711, en 488 : molendinarii. — La conquête de l'Afrique, de la
Sicile, de la Sardaigne et de l'Espagne par les Vandales fit tomber
les collèges de naviculaires de ces pays. Vovez Pigeo'nneau, Annone,
pp. 234-235.
- Edict. Tlieoderici (ou lex romana Ostrogothorum), § 64, vers l'an 5(X)
(Mon. Germ. hist., Legum tomus V, p. 159).
•' Cassiod., Var.,\l, 18.
' Ibid., VI, 18 et XI, 39.
•■' Ibid., VII, 17. Cfr. Krakaueh, pp. 55-57.
( 347 )
corporation de parfumeurs {saponarii) fortement organisée <.
Dans les lois des autres Etats barbares, fondés sur le territoire
romain, on retrouve des dispositions sur les corporations,
empruntées aux lois romaines ^^.
A Constantinople, les collèges de tous genres durèrent jus-
qu'à la chute de l'Empire byzantin. Une découverte récente de
M. Jules Nicole jette sur leur situation une lumière nouvelle.
Dans le Livre du préfet, ou Édit de Léon le Sage iH8()-f)i2) sur
les corporations de Constantinople •', on voit qu'ils ont continué
à marcher dans la voie où nous les avons vus entrer : la régle-
mentation est devenue minutieuse, plus oppressive que jamais,
et elle porte sur tout à la fois : le recrutement des membres,
l'exercice du métier transformé en monopole soigneusement
délimité; l'achat des matières premières, qui sont acquises par
le collège et distribuées aux membres suivant leur apport;
l'importation et l'exportation des produits; la fixation du prix
de vente, de la place et des jours où la vente peut se faire, et
ainsi de suite. Des mesures sont prises pour empêcher un
métier d'empiéter sur un autre, pour conserver à Constanti-
nople le secret de certains procédés industriels. C'était le
préfet de la ville, aidé par d'innombrables agents, qui contrô-
lait tout, visitant les magasins, examinant les livres de comptes ;
la loi faisait aux membres des collèges un devoir de dénoncer
leurs confrères. Ces prescriptions, qui anéantissaient toute
* Gregorii Epist., IX, 113, en 599 [Mon. C.enn. fii.si., Kplstolanun
lonius II; éd. L. M. Hartmann ^
- Lex Romana Raetica Curiensis, iib. XIV^ et XV'l Mon. Germ. hist.,
Legmn tomus V, pp. 390 et 392). — Lex Romana Yisigothorum, Iib. XIV,
1, et XVI, 1, 5 (pp. 24Î2 et 246, éd. Haenel); cfr. G. Th., 14, 7, 1. 1-3 et 16,
2, 1. 39. Cette loi est d'Alarie II (Bréviaire d'Alaric), et date de l'an 506. —
Lex Romana Burgundionum {Mon. Germ. Iiisl., Legum tomus III,
pp. 623-624).
' Jules Nicole, Le livre du préfet ou Edit de Léon le Sage sur le-s Mrpo-
rations de Constantinople, 1893, Genève. — L'auteur en a t'ait une analyse
dans la Revue générale du droit, de la législation et de la jurisprudence,
1803, pp. 74-81 et 132-135.
( 348 )
liberté individuelle et professionnelle, étaient sanctionnées par
des peines infamantes, telles que la flagellation et la tonsure,
applicables aux infractions les plus légères. On ne respectait
pas plus la dignité de l'homme que sa liberté.
Si intéressant qu'il soit de rechercher ce que le temps et
TEmpire d'Orient firent des corporations romaines, implan-
tées dans la nouvelle capitale par Constantin, nous devons y
renoncer, pour ne pas sortir de notre sujet. Nous laissons ce
soin aux historiens de Bvzance.
CHAPITRE III
ORGANISATION INTERIEURE DES COLLÈGES ET CONTROLE
DU GOUVERNEMENT.
.§ 1. ORGANISATION INTÉRIEURE EN VUE DU SERVICE PUBLIC AUX TROIS
PREMIERS siècles; INTERVENTION DE l'état ; pruefecti collegio-
rum. — § 2. AU iv« et au v^ siècle : composition des collèges;
ADMINISTRATION DES COLLÈGES ; LEURS FINANCES. — § 3. CONTRÔLE :
l'empereur et les FONCTIONNAIRES SUPÉRIEURS.
Pour achever ce tableau de la condilion des collèges officiels,
nous devons faire connaître leur organisation intérieure et les
moyens de contrôle établis par le gouvernement. Il nous res-
tera à parler aux deux chapitres suivants des privilèges et
avantages destinés à compenser leurs charges.
^ l^^ Organisation en vue du service, du /" au III^ siècle.
Nous avons vu que les corporations officielles des trois pre-
miers siècles se proposaient toujours un but privé; elles s'occu-
paient, à l'occasion, des intérêts du métier, enterraient leurs
morts, avaient un culte commun avec leurs fêtes et leurs ban-
quets; leurs membres cherchaient à se rendre la vie plus
agréable. A cet effet, elles s'organisaient à leur guise, s'admi-
nistraient elles-mêmes, se recrutaient librement, nommaient
leurs chefs : en un mot, elles jouissaient d'une complète auto-
nomie intérieure.
Une double question se présente ici : cette organisation ne
servait-elle pas en même temps à faciliter l'exécution du ser-
( 350 )
vice public, et l'État n'y intervenait-il pas pour régler ou
contrôler ce service? Le manque de renseignements ne nous
permet pas de donner une réponse complète; peut-être lu
pénurie de détails pour toute une classe de collèges prouve-t-
elle que cette réponse doit être négative. Dans les collèges de
Pannone, tant que le service ne fut pas obligatoire pour tous
les membres ni héréditaire, on comprend que l'organisation
du collège devait être tout à fait distincte de celle du service.
L'État dresse une liste ^ dont sont exclus les membres du col-
lège qui ne remplissent pas les conditions requises pour la
jouissance des privilèges : ]Sec omnibus promiscue, qui assumpîi
sunt in Iiis collegiiSy immunitas dalui\ sed artip,cibus dumlaxaî.
Il permet donc de recevoir des personnes impropres au service.
Aussi ne croyons-nous pas que l'on doive prendre à la lettre
la défense qui suit cette phrase : Nec ah omni aetate allegi pos-
sunt, ut divo Pio placuit, qui reprobavit prolixae vel inbecillae
admodmn aetatis homines 2. Sans doute, sous Antonin le
Pieux, les collèges pouvaient encore admettre des vieillards ;
seulement TÉtat, qui les regardait comme incapables, leur
refusait les privilèges [reprobavit). En somme, l'organisation
corporative ne se confondit que plus tard avec celle du
service. Quant aux artisans qui n'étaient pas chargés d'une
branche déterminée de l'administration, mais travaillaient
directement pour le public, il n'y a pas même lieu de s'en
occuper ici.
Il en fut autrement de ceux qui devaient certaines corvées
intermittentes, telles que les secours en cas d'incendie : ici la
corporation entière fut liée dès le début, et l'État ou la ville
exigeait naturellement qu'elle s'organisât de telle façon que le
* Fragm. Vat., 233 (Ulpianus) : intra numerum. constituti ipistores).
Voyez supra, p. 268, n. 1. C. Th., 13, 5, 1. 14 (371) : numerus naviailu-
riorum. — Pour les naviculaires, voyez supra, pp. 46-49. — Dans les
inscriptions, numerus collegii, numerus noster désignent tous les meni-
bî'cs du collège. Voyez le premier volume, p. 358.
« Du;., 50, 6, 6 (5), § 12 (Callistratus). Voyez supra, p. 50, n. 1.
( 331 )
service eût lieu avec ordre et ponctualité. Aussi son ingérence
se montre-t-elle de bonne heure.
Voyons d'abord les collèges qui faisaient roftice de pom-
piers '. Chez eux, la division en décuries et en centuries,
qui était du reste commune à la plupart des collèges, semble
revêtir un caractère plus militaire. La centurie a pour chef un
centurion, qui a sous ses ordres un lieutenant (optio) -; les
décurions commandent les décuries et ont sous eux des sous-
officiers, qu'un coUegium fabrum d'Apulum appelle peut-être
principales 'K Centurions et décurions sont parfois choisis en
dehors du collège, parmi les premiers citoyens 4-. A Ostie, les
simples membres s'appellent même caligati ou numerus mili-
tum caligatorum, la troupe des soldats ordinaires •>. Les centu-
ries ou les décuries se partageaient les différentes sections du
service : une centurie des centonaires de Côme était spéciale-
ment exercée à manier la hache [dolahra) et à monter sur les
échelles : centuria centonar[iorum) dolabrar{iorum) scalar[ï]o-
r{?/?w) '> ; à Aquilée, le fils d'un vétéran est appelé dolabra-
r(îMs) col\legii) fab{rum], et le bas-relief de son tombeau le
représente avec un centon dans une main et une hache dans
Tautre ". Ces différentes parties du service sont peut-être les
1 HiRSCHFELD, G(iU. Stiul., III, pp. 10-17 (246-233). Maué, Vereine,
p. 18. Der Praefcctiis fabrum, pp. 5o-82. C. Julman, Dict. de Daremberg,
IV, p. 953.
2 V oTOl. o738. Voyez le premier voluiiie, p 361, n. 4 et 5. Mommsen,
Epfieni. epigr., V, p. -113 : Optio proprie ad rem mililarem pertinet paritcr
atque tesserariiLs .
5 C'est encore un leime militaire; voyez le premier volume, pp. 361 et
423, n. 7.
^ V 5738. 5869, à Milan.
•"^ Voyez le premier volume, p. 366, n. 10.
c V 5446. MOMMSEN {C. I. L., V, p. 1198j dit : Eadem est qiiae alias
dicitur coUegium centonariorum. Cfr. Uirschfeld, Op. cit., p. 10(246 .
Maué, Die Vereine, p. 18. Sur l'emploi de la hache et des échelles dans
les incendies, voyez : Dio., 33, 7. 12, {; 18. 1, 15, 3, § 3. Petron., 7S.
Supra, p. 203.
7 V908.
( 352 )
officia divers que renfermaient ces collèges et que dirigeaient
les magistri i ; de là peut-être aussi ces officiales qui rempla-
çaient parfois les magistri, tant pour l'administration du col-
lège -' que pour la direction du service public, quand le
collège avait conféré la présidence k des citoyens influents pris
hors de son sein 3.
Le collegium fabi^um Comensium possède un offici[um) tesse-
rariorium), c'est-à-dire de porteurs de mot d'ordre, chargés de
transmettre aux hommes les ordres du commandant en chef 4.
La même inscription parle d'une schola vexillariorum qui
semble appartenir au même collège, mais dont la nature est
inconnue s. A Vérone, le coUegiiim fabrum a un curator instru-
menti, gardien de l'arsenal, chargé de surveiller le matériel
nécessaire à des pompiers 6. Quelque incertains que soient ces
détails, ils prouvent que ces collèges s'organisaient en vue de
leur service. Ces corps spéciaux étaient établis par eux, leurs
chefs étaient nommés par eux : l'Etat leur en faisait une obliga-
tion sans y intervenir lui-même.
Maué soutient que, dans beaucoup de villes, l'État leur avait
toutefois donné un chef supérieur, appelé praefectus coUegii et
chargé uniquement du commandement militaire ". Il est au
1 V 5310, à Comum : magisler officior(um) colleg{iii fabr{iim).
2 V -4449. 4488 : oficiales c{ollegii) cent., à Brixia, qui doivent faire les
sacrifices. Mommsen (C. /. L., V, pp. 440j les assimile aux magistri.
5 V 4449 : qui magisteiiio) eor[um) offic(io) fïmcti sunt. Voyez le premier
volume, p. 404.
^ V mn.
^ Mommsen, dans le C L L., V, p. o6o, et dans VEphem. epigr., IV, 370.
Voyez le premier volume, p. 425, et supra, p. 186.
6 V 3387 : curatores instrumenti Yeronaesiium) ex numéro cottegiii)
fabr{um). V 5446 : cunatori) praesidi{i}, à Comum. Hirschfeld, t. /.,
p. 18 (234), n. 3.
7 Sur le praefectus collegii, voyez : Henzen, Jenaer Literaturzeitung,
1847, p. 246. Hirschfeld, /. /., p. 16 (232). Maué, Praef. fabrum, pp. 60-
61. 72-82. LiEBENAM, p. 209, eiDix-. epigr., III, p. 14. Allmer, Rev. épigr.,
II, pp. 68-69. G. JuLLiAN, Dict. de Daremberg, IV, p. 933.
( 3o3 )
moins vraisemblable, comme Hirschfeld l'avait admis avant
Maué, que ces praefecli collegiorum étaient les commandants
qui dirigeaient le service. On ne les trouve guère que dans les
trois collèges chargés de l'extinction des incendies, qui étaient
partout organisés militairement '.
Praefcclus collegii fabriim, à Sarmizegetusa (111 1495), à
Salonae (IIl 2026. 2087), ù Aquincum (III 3438), à Vindobona
(III 4557), à Pola (V GO), ù Parentium (V 335), à Trieste (V 545.
546), à Concordia (V 8667).
Praefectus collegiorum fabr. et cent., à Aquileia (V 749) -.
f^raefectus collegii centonariorum, à Igg et à Siscia (III 10738.
10836).
Ob honorem oblatum sibi praefecturae a coltegio dendroforum,
à Tusculum (XIV 2634).
Praelleclm) fabr. ti[gn .] Ostiensium (XIV 298); fabri tignarii
praefecto suo jierpetuo, à Dyrrachium (III 611) 3.
Us ne sont pas choisis parmi les membres des collèges,
comme les dignitaires de ceux-ci. Sous le rapport de la condi-
tion sociale, ils ressemblent aux patrons : dix d'entre eux sont
on même temps patrons de leur collège, et ils appartiennent
tous à la classe la plus élevée de la cité, car deux sont équités
romani, quatre sont équités romani eqiio publico, huit se disent
' Il est vrai qu'il y a d'autres collèges divisés en décuries ou centuries
et qui n'ont pas de praefectus. Voyez le premier volume, j)]). 358-360.
- XI 4404 : [prae]f c{ollegii) centonar., [col{legii)] scabill[ariorum),
col{legii) [fabr]îun tignar., à Ameria.
^ Allmer, m. dcL., II, 165 : nauta Rhodaniens, praef [ejîis]d. cor poris\
Ibid., II 188 : negotialor corporis splemlidissimi Cisalpinorum et Transal-
pinorum, ejusdem corporis praef{ectus). C. I. L., III 3487 : praefectus
collegii Augustalium. On trouve un praefectus juvenum on juventutis
à Poetovio, à Naples et à Lanuvium : III 4045. X 1493. XIV 2121. On ren-
contre encore un praefectus chez les énigmatiques Ministri ad Tritones de
Salone (III 1967. 1968), et dans les collèges domestiques (VI 8639 = X6637.
VI 9109. 10313; cfr. XII 4371). Cfr. Scu.midt, de seviris Xug., p. 103. Dans
tous ces collèges, le praefectus paiait n'être qu'un président, connue
ailleurs le magister.
Tome L, vol. II. 23
( 354 )
décurions, et ils sont tous membres de la curie, à en juger par
les honneurs et les sacerdoces municipaux dont ils sont ou ont
été revêtus. Leurs fonctions ne peuvent pas non plus avoir été
celles de présidents du collège ; en effet, pour Tadministration
intérieure, ils ont à côté d'eux un mngisîer ou magister qiiin-
quemialis *. Une inscription est fort instructive ; elle est
d'Aquincum et nous dit que le praeflectus) coll{egii) fabr[um),
ancien duumvir et décurion de la colonie, conduisit ce collège
aux exercices et aux manœuvres : diixit colîiegium) supra)
scriptum) in amlndativis Vkal. Aug. -. On remarque enfin que
la praefectus collegii se rencontre surtout dans les pays où la
division des fabri et des centonaires en décuries ou en centu-
ries est attestée, et où ces deux collèges sont le plus étroite-
ment unis entre eux : double indice qui prouve qu'ils sont
chargés d'éteindre les incendies 3. H est donc probable que le
praefectus collegii était réellement le commandant du collège
pour tout ce qui concernait le service : instruction technique,
répartition des corvées, organisation des secours et direction
des manœuvres en cas d'incendie. Remarquons que même
dans les villes où les centonaires font l'otiice de pompiers avec
les faim, le titre de commandant est praefectus collegii fabrum ^ ;
quand il porte le nom de praefectus collegii centonariorum,
c'est que les centonaires sont seuls, ou plus nombreux que les
^abri s.
1 III 3-438 et 3580; XIV 298. Chez les naiitae Rhodanici, il y a un curator
à côté du praefectus. .Vllmer, Ji. de L., II 16o. Wilmânns, i?fî36.
2 III 3i38. HmscHFELD, /. /., p. 16 (fîoi>). n. 1. Maué {Die Yereine, p. o3,
n. i[. Der praef. fabr., p. 76) lit : in ambulati[07iem), dans une excursion,
ce qui est contraire au texte. Selon Liebenam. p. iîlO, n. 1, ambulativiun
désigne la place des manœuvres.
5 >L\uÉ, Op. cit., pp. 76-77.
* V 8667 : patnono) coll egiorum) fab. et cent., praef(ecto) coll(egii)
fabirum''.
2 III 10738. 10836. On ne trouve qu'un seul praefectus dendroforuni
(XIV 263-4, à Tusculum).
( 3o5 )
Qui nommait le praefeclus Cdllenii'/ Selon Maué •, c'était
rÉtat, c'est-à-dire Tempereur ou l'un de ses fonctionnaires, par
exemple le praefedus urbi, en Italie, et le gouverneur dans les
provinces impériales. La lettre de Pline à Trajan montre qu'il
se réserve la haute surveillance du collegiiim jnbrum qu'il veut
établir à Nicomédie -. Le titre de praefeclus, d'autre part, désigne
ordinairement le représentant ou remplaçant d'un magistrat,
qui le nomme et lui délègue sa juridiction ou son pouvoir
militaire ou administratif '■">. Enfin, à cause de la nature de ses
fonctions, \e praefeclus collegii devait être nommé par l'autorité
supérieure. Et pourtant la question doit rester indécise, parce
que deux inscriptions disent formellement que ce titre a été
décerné par le collège lui-même 'k Maué les considère comme
des exceptions: il s'agirait d'un titre honorifique, sans fonc-
tions effectives; mais il serait étrange que les collèges décer-
nassent, pour faire honneur, le litre d'une fonction réservée à
la nomination impériale.
A Ostie, le service des incendies semble être organisé d'une
façon particulière. Pour veiller à la sécurité des grands maga-
sins de blé, le procurator annonae Ostiensis avait à sa disposi-
tion une cohorte de vigiles, et cependant nous y trouvons un
praefeclus fabrum lignariorum s, qui est duumvir de la colonie.
11 est possible que ce dernier collège devait éteindre les incen-
dies dans le reste du port, et que les vigiles n'avaient que la
garde des greniers publics. Enfin, on trouve un curalor viae
Praenestinae que l'on appelle Iribunus fabrum navalium Por-
' Maué, Op. cit., p. 82.
- Voyez le premier volunie. p. 159.
3 Cfr. MoMMSEN, St.-R., P, p. 633, n. '2. II, p. 866, n. 7. 1011, n. -2. et
surtout III, p. ooT.
* III 611. XIV 263-4. Maué. Op. cit., pp. 81 et 82. Philologue, 1889,
pp. 767-768. — Les collèges leur décernent des statues, comme aux digni-
taires qu'ils se donnent et aux fonctionnaires qui les surveillent : III 611.
2026. 2087.
•' XIV 298.
( 356 )
lensium '. Ce titre militaire indique des lonctions analogues à
celles du préfet, et comme il y avait au Portus d'immenses
chantiers où travaillaient les [abri navales, on peut supposer
(jue cette corporation était spécialement chargée de les préser-
ver et que le tribun la commandait à cet effet !^.
D'autre part, ce préfet des charpentiers d'Ostie et ce tribun
des constructeurs de navires du Portus pouvaient aussi sur-
veiller les corvées afférentes à leur métier, que ces deux col-
lèges avaient à fournir '^. En effet, il semble que de bonne
heure l'autorité soit intervenue pour donner aux collèges de ce
genre des chefs particuliers, ou même pour nommer leurs
présidents ordinaires. A Préneste, nous avons déjà un quin-
p. 79-80.
•■ .Maué, /. /.
^ XIV 3003.
^ VI 10300. Voyez cei)eiulant le premier volume, p. 454, n. o, et la note
du Corpus.
•5 X 3699, en 251. Voyez le premier volume, p. 247.
' VIII 7956, et note. Voyez encore : X 1786, à Puleoli, où la curie rend
un décret sur la forme à donner à une inscription des dendrophores.
( :io7 )
i:i i2. Organisaliou en vui- duscrrict', au IV*^ cl au Y'' sièrh
Au IV« siècle, celte organisation a subi des modifications
profondes. Il faudrait la considérer au double point de vue du
but privé et du rôle officiel ; en eff'et, le tableau que nous avons
tracé plus haut au premier point de vue est tiré presque entiè-
rement d'inscriptions des trois premiers siècles. Malheureuse-
ment, au 1V% les témoignages font défaut, à tel point que Ton
peut se demander si les collèges déchus songeaient encore
à ce but privé. Avaient-ils encore leur culte et leurs réunions
fraternelles ? Se préoccupaient-ils encore des intérêts du métier
et de l'enterrement des membres? Nous croyons qu'il faut
répondre affirmativement. D'abord, plusieurs des inscriptions
dont nous nous sommes servi, sont de la seconde moitié du
II I« siècle 1, et postérieures au règne d'Alexandre Sévère (23o) ;
or, cl cette époque, toutes les corporations étaient déjà organi-
sées pour le service public, et les mesures décrétées plus tard
ne firent guère que donner force de loi à une coutume dès lors
établie. Ensuite, nous avons quelques indices pour le IV« siè-
cle : à Salone, le colletjium fabnim s'occupe encore de funé-
railles sous Constance -. Les collèges ont toujours leurs patrons
à (|ui ils off'rent la tabula patronatus 3, à qui ils élèvent des
statues ''s mais dont on semble demander plutôt la protection
que les libéralités. Quant au culte, les dendrophores, qui
étaient certes une corporation officielle, comme le prouve leur
adjonction aux fabri, continuent à jouer le même rôle qu'aux
' Voyez le chap. I, supra, p. 170.
- III 1981. — Il faut observer que l'inscription latérale : XIV 128 = VI
1116, ne se rapporte pas à la dédicace en l'honneur de Dioclëtien, v/. W
premier volume, pp. 437439.
( 3o8 )
siècles précédents ; car c'est précisément à cause de leurs rela-
tions avec le paganisme qu'ils sont supprimés. Cependant il
n'y a plus de trace d'un culte privé, et à partir de Constantin
il faut tenir compte du christianisme, qui recrutait beaucoup
d'adeptes dans les classes populaires. Il est possible même que
plusieurs des puissantes corporations de l'annone n'eurent
jamais aucun rapport avec la religion; ainsi, pour le corpus
naviculnriorum, nous n'avons aucun indice à aucune époque,
et il est probable que cette corporation, issue de compagnies
marchandes, eut toujours un caractère purement séculier K
Quoi qu'il en soit, au IV^ siècle, l'organisation intérieure,
telle que nous la montrent quelques passages des Codes,
semble elle-même destinée avant tout à faciliter le service
public -. L'autonomie même des collèges est devenue, sous
' Herzog, II, p. 993, n. 4.
- Dès la fin du IIl« siècle, des membres des corjjorations de raniione,
l)Oiilangers, mesureurs, bateliers, portefaix, semblent avoir eu leurs
places dans les catacombes, dont les peintures les représentent occupés
aux travaux de leur métier (voyez supra, \)p. 60, n. 1. 64, n. 5. 99, n. 1).
De Rossi, Inscr. christ., I 493, en l'an 401 : Hic est positus Bitalis pistor
M ... reg. Xll. I 972, en 520 : Hic requiescit in pace Laurentius patrunus
[pistorum de?] regione secunda. C. 1. L., VI 9765 : Lociis bene quesquentis
Marcelli, patroni corporis pastillariorum , en 435. Tertull., De praescr.,
30 : Ponticus nauclerus apud ecclesiam Romanensem. En 380, les navicu-
laires d'Alexandrie sont mêlés aux querelles religieuses : Greg. Nazianz.,
Carmen de vita sua, I, 12-13. Cfr. Am. Thierry, Saint Jérôme, I, p. 91.
En 403, ils acclament le patriarche Théophile à Constantinople : Sozom.,
H. E., VIII, 17. Socrat., h. E., VI, 15. L'Église d'Alexandrie avait ses
propres naviculaires : Leontios, Vita Joannis Eleem., 8. 9. 27 ^Migne,
P. Gr., XCIII). Au Vie siècle, les naviculaires sont reçus par l'empereur
d'Orient pour se justifier du crime d'hérésie : Johann. Episc. Ephes. hist.
fragm., p. 249, éd. Amstelod., 1889 : ii naucleri, annonae publicae advec-
tores, cum omnes fidèles essent, ad regem i l'empereur) convocali sunt,
quippe qui novisset eos dissidere cum sijnhodo. Liebenam, p. 284, n. 5. —
En 599, Grégoire le Grand intervient en faveur du corpus saponarioruin
de Naples; voyez infi^a, p. 367, n. 1. — Les conventus illiciti auxquels on
défend aux corporali de prendre part (voyez infra, p. 367, n. 2) étaient
des réunions religieuses qui donnaient lieu à des troubles
( 859 )
bien des rapports, un vain mot; sans doute, la loi des XII Tables
qui la consacrait pour toutes les corporations, figure au
Digeste, mais elle est insérée dans un chapitre où il no s'agit
nullement des corporations industrielles. En tous cas, nous
voyons l'Etat intervenir partout où il croit que l'intérêt public
est en jeu, qu'il s'agisse de la composition du collège, de
l'entrée et de la sortie, de la nomination des chefs, du contrôle
de l'administration, et surtout des finances. Pour mieux faire
ressortir les différences, nous suivrons le même ordre que
dans la deuxième partie.
Composition des collèges.
Les professions n'étaient plus mélangées dans le même col-
lège. On ne saurait en douter quand on songe que la collec-
tivité était responsable : ni l'État ni la corporation n'auraient
permis à personne de se soustraire aux charges. L'acquéreur
de biens affectés au service ne conservait sa condition première
que s'il n'entrait pas dans le collège, comme cela pouvait
arriver chez les naviculaires i. Pour les manufactures, il est
dit expressément que les recrues doivent connaître le métier-.
La condition sociale des membres différait naturellement
suivant les collèges. Les grandes corporations de l'annone
avaient besoin de riches propriétaires : ainsi, les naviculaires
se recrutaient aussi bien parmi les classes les plus élevées que
parmi les plébéiens fortunés 3. Dans d'autres corporations
encore, il fallait des gens aisés, mais dans les petits collèges
{minuscula corjwra] il y avait surtout des affranchis et des pau-
vres gens. Partout, même dans les manufactures et les car-
rières, les travailleurs élaientdes hommes libres '^ Les esclaves
' Voyez supra, p. 289.
- C. J., XI, 7 (8), 16 : xal 'r,A'.y,ix^ /.a- -i/yr^:, è-ittjOî'.o;,
■ Voyez supra, p. 328.
^ Voyez supra, p. 245.
( 360 )
ne semblent faire partie d'aucune corporation ; si l'on en
trouve, il faut admettre qu'ils sont la propriété du collège ou de
l'État : tels étaient ceux qui travaillaient enchaînés dans les
boulangeries, dans les manufactures et dans les mines i. Il faut
y ajouter les condamnés ou « esclaves de la peine - ».
Quand les corporations devinrent héréditaires, il n'y eut
plus de limite d'âge pour les enfants ou les héritiers des corpo-
raîi. Sur les listes figurait le nom du père, suivi du nombre
de ses enfants : cum filiis III, ou liabens filios lll, ou sine fîliis,
ou cum suis 3. Le nom du membre défunt était remplacé par
les mots heredes {illius] ^. Cependant les enfants ne devenaient
membres effectifs qu'à leur majorité ; jusque-là, eux et leurs
biens étaient libres ; en effet, le remplaçant que le corpus pis-
torum devait leur donner, devait être idoneus 3. 11 en était
autrement des membres nouveaux : ils ne devaient pas être
d'un âge trop avancé, du moins pour être reçus dans les manu-
factures publiques 6. Les filles des corporati entraient égale-
ment dans les collèges : ceux-ci contenaient donc des femmes '.
Une loi du Code Théodosien parle des femmes de naviculaires :
elles doivent remplir leurs obligations dans la ville où elles
sont nées, non dans celle du mari. Il s'agit sans doute de
* C. Th., 10, 20, 1. 2 (3o8) : mnncipium gynaeci. L. 9 (380) : textrini
nostri mancipia. L. 7 (372) : aliquem ex familiis gynaeci. Voyez supni,
pp. 246, n. 1.
2 Voyez supra, p. 333.
5 IX "^2998. XIV 3649. Dessau, A. d. L, 1882, p. 134. Huelsen. BiUL
rom., 1891, p. 352.
^ VI 9920. \ oyez supra, p. 302, n. i.
» C. Th., 14, 3, 1. 5 (364). Voyez supra, pp. 280 et 329.
« Voyez page précédente, note 2. Du i-este, la règle de Callistrate, que
rapporte le Digeste, était sans doute strictement appliquée au IV^ siècle :
nec ah omni aetate allegi possunt, ut divo Pio placuit, qui reprobavit
inbecillae vel prolixae admodum aetatis homines (DiG., oO, 6, 6 i5}, {5 12).
Voyez supra, p. 50, n. 1'.
" XIV 3649 : etpmllas II. Nov. Sev., t. 2 (465) : Si qui vel qua ex corpo-
ribiLs publias , vel ex corporatis Urbis Romae, etc.
(361 )
temnies dont le père était naviculaire : les obliger ou leur per-
mettre de s'acquitter de leur devoir ailleurs que leur père ne
l'avait fait, c'eût été bouleverser le service '. Il est également
question de boulangères, et du reste le mari communiquait
souvent sa charge à sa femme -. Au 11^ siècle, les femmes
étaient exclues -^ : ce changement est une suite de l'affectation
perpétuelle des biens au collège et de l'hérédité des charges.
Jusqu'à quel point le service des femmes était-il personnel ?
Faute de détails, nous devons laisser sans réponse cette ques-
tion si intéressante du travail des femmes clans les collèges
romains.
Quant au nombre des membres, plus d'entraves : le danger
était ailleurs, et il fallait plutôt faire des efforts pour remplir
les vides. La règle : non Ucct amplius quani unitm collegium
licitum habere, que le Digeste rapporte à propos des collegia
tenuiorum ^, était sans nul doute appliquée aux collèges indus-
triels, mais pour une autre raison que jadis ^. On ne craignait
plus les coalitions; mais, puisque chacun se devait à son col-
lège avec tous ses biens, il était impossible d'en servir deux à
la fois 6. De là, la défense d'admettre des personnes enchaînées
ailleurs "^ ; de là, les obstacles mis au mariage d'une corporata
avec un membre d'une autre corporation 8. Nous parlerons plus
loin des formalités de l'admission et du recrutement des mem-
bres nouveaux.
» C. Th., 13, 5, 1. 12. Voyez supra, p. 290, n. 2 et 7.
2 Voyez supra, pp. 306-310. C. Th., 14, 3, 1. 2 : pisloris filia. L. 14. 21.
"^ Voyez cependant le Dig., 48, 2, 13 (Marcien) : mulierem propter publi-
cam utilitatem ad annonain pertinoitem.
* Dig., 47, 22, 1, .M.
•' Voyez le premier volume, pp. 353-334, et Matthiass, pp. 36-37.
•■• C. Th., 14, 3, 1. 2(3oo) : lU, aliis necessitatibus absoluli, eam tanlum-
modo lunctio72em liberae menlis nisibu.^i e.vsequantur. Il s'agit des patroni
pistoribus consLiluli, que Constance défend d'enrôler parmi les caudicarii;
la même raison existait pour tous les corporuli.
'• Voyez supra, pp. 323. 331.
^ Voyez supra, p. 309. -
( 362 )
Adjumist ration.
Tous les corporati étaient inscrits sur un album, que l'auto-
rité contrôlait et faisait parfois afficher i. Les matricules,
remises en double au gouvernement, indiquaient les noms et
l'origine des corpoi'ati, les noms de leur femme et de leurs
enfants, enfin leur fortune '^. Les membres y sont toujours
divisés, mais il n'est plus question de décuries ni de centuries.
Sous Théodose, le corpus tabernariorum, à Rome, est divisé en
pedaturae, portant divers noms, tels que : [pediatura) }î]ercuri,
ped{atura) Calbuli, pediatura) Aureliani -i Pour les navicu-
laires, il y avait une liste par coetiis ^, c'est-à-dire par corpora-
tion provinciale.
Il semble pourtant que l'organisation collégiale soit restée
démocratique, quoique partout dans l'Empire le despotisme
et la centralisation dominent. L'assemblée générale rendait
toujours ses décrets pour gérer les affaires de la corporation.
Si elle n'était pas souveraine, elle ne connaissait du moins pas
d'autre maître que l'État; ses chefs ne faisaient qu'exécuter ses
décisions. Il est vrai que dans tout ce qui intéressait l'Etat de
près ou de loin, elle devait suivre les règles tracées par lui.
Nous ne connaissons guère que des décrets relatifs au service,
et nous pouvons les ranger sous ces chefs : répartition des
charges; conservation des membres et des biens; élection des
chefs; recrutement et sortie; police de la corporation.
' Voyez supra, pp. 344-345.
2 C. Th., 13, 5, i. 14, § 2 (371) : Eorundem navicidariorum ex fide iiobis
nomina, loca, substantiae nuntientur, hrevibm duplici ratione conscriptis,
quoi videlicet de veteribus quoique sint et quales recenti associetate delecti.
L. 12 (369) : in qidbus foris antiqua eas iscil. feininarum personas) disposi-
tione constet adscriptas. Cfr. G. Th., 6, 30, 1. 16 : matricules des ofpciales.
14, 3, 1. 20 (398) : adscripti ordini pistorio.
•' VI 9920. Cfr. De Rossi, B. d. i., 1855, p. 51.
* G. Th., 13, 5, 1. 32 : navarchorum coeiiis circiter provincias Orientis.
( 363 )
La corporation était collectivement responsable du service.
Le corpus udviculariorumy par exemple, devait répondre tout
entier du transport des denrées {commune onus) ^. Le transport
lui-même, nous Tavons vu, incombait aux membres et aux
détenteurs de res naviculariae en proportion de leurs biens -.
Chacun avait son tour, et le vovîii^e, aller et retour, ne pouvait
durer plus de deux ans '^. C'était sans nul doute rassemblée de
chaque coetus ou concilium. qui réglait la répartition. Vers 334,
les naviculaires les plus puissants du concilium Africanum
avaient voulu se soustraire eux-mêmes aux charges et attribuer
à leurs collègues moins riches et moins influents (lenuiores) les
courses les plus longues et les plus nombreuses. Ces derniers
réclamèrent et le préfet du prétoire intervint pour imposer un
ordre fixe et immuable. Constantin confirma cette mesure 4.
De plus, en cas d'infidélité d'un naviculaire, toute la corpora-
tion est responsable. Supposons qu'une cargaison se perde; le
propriétaire du navire allègue un naufrage, mais l'enquête du
préfet du prétoire prouve qu'il y a fraude, ou que c'est la faute
du naviculaire. Alors toute la section, c'est-à-dire tous les
naviculaires de la même province, d'Espagne, d'Afrique ou
d'Egypte, sont tenus à restitution -j. Evidemment, c'est encore
le concilium qui fait la répartition, de même que la curie et le
corpus negoliatorum distribuaient les charges municipales et
le chrysargyre entre leurs membres.
Les charcutiers, qui fournissaient les « espèces porcines » à
leurs risques et périls ^, assignaient eux-mêmes à chacun sa
' C. Th., 13, 5, 1. 3 (319).
- Pour les naviculaires, voyez supra, p. ^Tl. Pour les détenteurs, voyez
supra, p. 280.
^ C. Th., 43, 5, I. 6. 21. 26. Voyez supra, \k 56.
^ C. Th., 13, 5, 1. 6 (334) : par vicissiticdiiies rite servatas — labor
omnibus par et jus lus adjunctus sit.
•• C. Th., 13, o, 1. 32 (409; : haec dispendii lacuna in omnc naviculario-
rum concilium, pro rata scilicel contingentis muneris , deferatur. Cfr.
GoTHOFR., ad h. l. et Paratitlon ad 13, 9, de naufragiis,
•' G. Th., 14, 4, 1. 3 (363) : itu ut periculo suariorum porcinae species
affatim praebeatur.
( 364 )
part du service et, le cas échéant, sa part de responsabilité.
En cas de déconfiture d'un fabricant d'armes, toute la cor-
poration est déclarée responsable par ïhéodose II, en 438; elle
doit, dit ce prince, choisir des hommes sûrs et surveiller les
affaires de chacun. Pour la dédommager, le même empereur
décide qu'elle héritera de ses membres morts ah intestat sans
héritiers légitimes i.
Sans doute, la responsabilité n'allait pas partout jusque-là ;
mais partout la corporation veillait à la distribution du ser-
vice.
Elle pouvait et devait aussi revendiquer les membres et les
biens, qu'elle était en danger de perdre, et elle devait le taire
sans attendre une enquête officielle. Nous avons dit quelle
voie elle devait suivre. C'était dans l'assemblée générale que
l'on décrétait qu'il y avait lieu d'adresser une plainte à Tauto-
rité -. Ce n'était pas seulement une faculté, mais une obli-
gation. En 369, Valentinien I^"" force le corpus ccntonanorum à
dénoncer les centonaires qui entreraient dans la curie et
menace la corporation d'un châtiment si elle ne dépose tout
de suite une plainte ••. C'était dans l'assemblée que se discu-
taient tous les intérêts du collège : on y votait les suppliques
envoyées à l'empereur pour obtenir la stricte observation des
privilèges, ou pour demander des privilèges nouveaux ^. On y
lisait la réponse que le prince daignait adresser à la corpora-
tion, ainsi que les constitutions par lesquelles il accordait de
nouveaux avantaçjes ou confirmait les anciens 3. On v décrétait
• Nov. Theod. II, t. 6, 55§ ^2 et 3 = C. J. , XI, 9 (10), o. VI, &2. ^ (438^.
- C. Th.. 13, 6. 1. i i3'ii6 : deerelum navkulariorum. Elle éluit parfois
chargée de l'enquête.
3 C. Th.. 14,8,1. 2(369^
* C. Th.. 13. o, I. 16, § 1 (380'. U, 4, 1. 6 (389) : proponunt.
'" C. Th.. 13, 5, 1. 7 (334) : Imp. Comtantinus Aiugustus) yaviciilariis
Orientù^. L. 16 (380» : Corpori yaviculariornm. L. 3è et 37 (4121 : Xavi-
culariis per Africam. 13, 6, 1. 1 326} : Ivip. Constantiiius A. ad d^vretum
yaviculariornm. 13, 9, 1. 3 (380) : Imppp. Gradaiius Valentiniayius et
Theodomis AAA. yaviculariis Afris salutem. L. 6 (412). 14, 4, 1. 6 (389).
( 36o )
aussi des statues aux patrons, aux bienfaiteurs, aux hauts fonc-
tionnaires, aux hommes influents <.
L'assemblée nommait les chefs, même ceux qui ne diri
geaient que le service palvoni), admettait les membres nou-
veaux, et se prononçait sur la sortie ou sur l'exclusion, le cas
échéant; mais elle n'avait plus toute sa liberté. Les chefs ou
patrons sont élus par le collège -, mais le choix est surveillé
par l'autorité, et il semble qu'il doive même être approuvé par
elle '^. A leur sortie, ces patrons, qui administraient les biens
de l'Etat, les greniers publics, par exemple, rendent compte au
préfet de l'annone '*. Quant aux chefs chargés de la gestion des
intérêts purement corporatifs, ils étaient sans doute respon-
sables devant l'assemblée, comme jadis.
Le collège portait sur son album les acquéreurs de biens
aifectés à son service, les enfants et les héritiers ôescorpnrati;
l'Etat lui permettait parfois d'enrôler des vacantes. Pour les
entrées volontaires, c'était l'assemblée qui décidait (alledio) 3.
Mais elle n'était pas souveraine. Il est certain que le gouver-
nement pouvait imposer un candidat; cependant, d'ordinaire
il laissait le collège procéder à l'admission, et alors celui-ci
devait subir les conséquences de sa décision ^>. Dans tous les
cas, le choix du collège était soumis à l'approbation de l'auto-
rité, qui l'annulait, si certaines règles n'avaient pas été obser-
vées. Ces règles concernaient la condition sociale, l'âge, la
profession; il était surtout défendu d'admettre des personnes
engagées ailleurs ". Pour les j'abrkemcs principalement, il y
avait des règles minutieuses, et dès 41:2 tous les aspirants-
' VI 1690-1693. 1739. 1740. 1759. XIV 131.
- (',. Th., U, 4, 1. 9 : totius coiuensu corporis eligatur.
^ (î. Th., 14, 3, 1. 2 : pativnos pistoribus coiistitntosiel non : a pùlonbiis,.
' C. Th., 14, 4, 1. 9. 14, 23, 1. unica.
•' (lEBHARDT, p. 52. Vovcz supru, pj). 324-325.
* Par exemple, en cas de décontituie d'un fabriccnsLs : Nov. Theod. II,
lit. 6, § 2 (438j : constricti noniinationibus suis.
' Voyez supra, pp. 325. 331.
( 366 )
armuriers durent prouver au gouverneur de la province, ou,
en son absence, au defemor civitatis, qu'ils n'étaient pas issus
d'une famille de curiales. On examinait leur âge, leur profes-
sion, leur capacité physique K
Le collège pourvoyait aussi au remplacement dans plusieurs
cas. Si un boulanger s'appauvrit, le collège désigne un rem-
plaçant, sans doute parmi les vacui ojjlcio -. Il est encore libre
dans le choix d'un tuteur pour ses membres mineurs, mais il
le faisait à ses risques et périls •^. Il lui était défendu de laisser
rentrer les membres exclus pour déconfiture ^.
Quant à la sortie, on avait mis plus d'entraves encore à l'au-
tonomie du collège, aussi bien qu'à la liberté individuelle.
D'ordinaire, l'assemblée générale ne peut autoriser la sortie,
l'intérêt public s'y opposant. En 36o, V^alentinien l«'' dit expres-
sément au préfet de la ville d'y veiller pour le collège des bou-
langers : Me cm, qui semel pistorum corpori fuerït deputatus,
abscedendi qualibet ralione copia facultasque tribuatui\ etiam.si
absohdionem ejus pistorum omnium favor et assensus et consen-
sus convenisse videatur s.
Dans un cas particulier cependant, les naviculaires purent
laisser sortir soixante des leurs, mais ce fut pour les livrer aux
chauffeurs de bains, au lieu de se charger tous d'une partie
' C. Th., 10, 22, 1. 6 =- C. J., XI, 9 (10), 4 (412) : Si quis consortium
fabricensium crediderit eligendum. C. Th., 7, 2, 1. 2. C. J., XI, 7 (8), 10.
iNov. JusT., 85, 3. Voyez supra, p. 364, n. 1. — Dans la 1. 6 (10, 22), les
mots : his, quorum interest, convocatis, désignent les curiales de la ville,
et non les fabricenses. — Nov. Val. III., tit. 6, § 3 : velut creatores deceden-
tiiLiii (438). — C. JuLLiAN, Dict. de Daremberg, s. v. fabrica, p. 961.
^ C. Th., 14, 3, 1. 1 : in locum ejus alio surrogando.
3 C. Th., 44, 3, 1. 5 (364) : pericido totius corporis surrogari convenu.
Le tuteur devient boulanger pouf toujours. Dans son choix, le collège
doit naturellement observer les lois relatives à la tutelle.
* C. Th., 14, 3, 1. 45.
6 C. Th., 44, 3, 1. 8 (365\ texte de Godefroy. De même Honorius
défendit à ce collège de laisser un boulanger épouser une étrangère :
etiamsi huic facto omnium pistorum accédât assensus : 14, 3, 1. 24 (403).
(367 )
de ce service. L'assemblée générale les désigna : qiios com-
munis deledus assenùt, mais sa décision dut être ratifiée par le
préfet de la ville, qui devait s'assurer que les membres désignés
étaient assez riches {iilonci). Si l'un d'eux venait à s'appauvrir, le
corpus navicularionim devait le remplacer : oportebit idonmm
surroijan i.
Enfin les collèges avaient la police sur leurs membres ; en
effet, dans certains cas, ils étaient responsables des délits que
ceux-ci commettaient. Une loi de 404 menace d'une amende de
cinquante livres d'or toute corporation de Constantinople dont
un membre prendrait part à une réunion illicite -.
Les corporations de l'annone avaient des chefs appelés
» C. Th.. 13, 5. 1. 13 (369). Symmach., Relat., U {Ep. X, 58). Dans Syni-
maque, on voit clairement que ces soixante naviculaires deviennent
mancipes thermarum, et ne sont pas seulement chargés du transport du
bois, tout en restant naviculaires.
Une lettre de Grégoire le Grand est intéressante pour l'admission de
membres volontaires dans les collèges des villes à la fin du Vl^ siècle. U
s'agit des saponarii de Naples : Qiiod Jo/iannes vir clarissimus palatimis
. . . eos promittere sibi compellat, ut, si quis arti eorum sociari voluerii,
quidijuid commodi de introitura ejiis accesserit, ipsi proficiat. Cet officier
du j)alais mettait donc la main sur le droit d'entrée qu'on payait. Dans la
même lettre, il est question de charges nouvelles que le même Jean veut
leur imposer illégalement : qtiod multis cos frustra a/fligat incommodis,
atqne nova plnrima eorum corpori praejudicialiter nitatur impendere. Les
membres juraient d'observer certaines conventions relatives à leur art :
adiciens quoque pactum inter se de quibusdam rationabilibus artis siiae
capitulis juxta priscam consuetudinem omnium consensu interposita esse
poena confectum atque id sacramento interveniente firmatum; quelques
membres com})tant sur l'appui de Jean, refusaient de s'y conformer. Les
saponarii envoyèrent un des leurs à Grégoire le Grand, qui écrivit à
l'évêque de Naples d'agir sur Jean pour faire cesser ces vexations.
Gregor., Epist., IX, H3 {Mon. Germ. Iiist.) = X, 26 (Migne).
2 G. Th., 16, 4, 1. 5, § 1 (40^) : ut unumquodque corpus pro lus, qui de
sua numéro conventus celebrare illicitos delegentur, ad quinquaginta pondo
auri solutionem multae nomine adstringatur. Voyez supra, p. 358, n. 2,
fin. Cfr. 14, 8, 1. 2 (supra, p. 364, n. 3j.
( 368 )
patroni i. On les trouve chez les pistores, les suarii, les caudi-
carii et les mensorcs.
Les boulangers en avaient deux pour chaque boulangerie;
l'un des deux était placé à la tête de la boutique (unus prior e
patronis) et la dirigeait pendant cinq ans. A sa sortie, il était
remplacé par le second, qui avait acquis l'expérience des
affaires, en voyant son collègue à l'œuvre pendant ces cinq
années -. Il prenait sans doute livraison du blé ou l'achetait à
bas prix; il surveillait la fabrication et la distribution ou la
vente du pain 3. n veillait à l'entretien du matériel : ânes,
esclaves, moulins; il administrait la partie des fuudi dotales
attribuée à son officine. C'était aux patrons qu'on remettait
les condamnés à la pistrine, ainsi que les membres enrôlés
tous les cinq ans en Afrique ^. A sa sortie, le premier patron
remettait la boulangerie à son successeur : cette remise se
faisait selon des formalités prescrites et après reddition des
comptes s.
Les charcutiers avaient également plusieurs patrons dont l'un
présidait : prior corporis ^. Ils en avaient probablement trois,
car Honorius parle de tt\'S hujus corporis principales ''. Nous
savons seulement que, depuis 452, ces trois patrons ont le droit
de décider chaque année si la perception de la viande se fera
par les charcutiers seuls ou par l'office du préfet de l'annone
' GoTHOFR., ad 14, 3, 1. 7. Gebhardt, pp. 38-39.
2 C. Th., 14, 3, 1.7(364).
3 On attribue parfois ces fonctions à un manceps; mais les mandpes
n'étaient autres que les pistores (Voyez supra, p. 83).
* C. Th., 9, 40, 1. 5. 14, 3, 1. 12 et 17.
3 G. Th., 14, 3, 1. 7 : tradat atque consignet. Voyez encore : de Rossi,
Inscr, christ., n. 972, en l'an 520 : Hic requiescit in pace Laurentius,
patruniis (sic) [pistorum de?] regione secunda.
c ,Nov. Valent. III, tit. 35, § 5 (452) : Baonio priori corporis. Pour
augmenter son autorité, ce prince lui donne, ainsi qu'à ses successeurs,
le cingnlum militiae.
7 G. Th., 14, 4, 1. 10 (419).
( 369 )
aidé de cinq charcutiers; ils choisissent aussi ces cinq com-
missaires '. Cela prouve qu'ils surveillaient le service.
Les caudicarii et les mesureurs avaient, les uns et les autres,
plus de trois patroni ; en effet, en 417, Honorius accorde aux
Iri's primi palroiii corpurum siiKjulorum le privilège de n'être
justiciables que du préfet de la ville -. Ces deux corporations
avaient la garde des magasins du porl {coudita Portuensia) '^ ;
leurs patrons s'appelaient aussi patroni liorreontm Purluen-
siiim -K Ils étaient responsables de l'administration de ces
greniers, surveillaient l'entrée et la sortie du blé C. Th., 14, 15, 1. 1 (364).
' C. Th., 14, 23, 1. unica i40()y : De pal rouis horrronnn Porliicnsium.
^ Ibid. : erogaiio.
'• C. Th., 14, 15, 1. 1 (400) : juxta prisciDii niorcni niensorcs et eaudicarii
. . . pistoribus venundare coganlur.
' C. Th., 14, 23, 1. iinica (400) : fidelis et idoneus.
8 C. L L., VI 1759.
•' C. Th., 14, 15, 1. 1 364.
"J C. Th., 14, 4, 1. 9 : pes.si)iiue qualitutis.
Tome L, vol. il. 24
( 370 )
Porlus I », Honorius décréta que le collège des boulangers,
élirait, parmi ses propres patronï, un patroniis Jwrreorum, dont
les fonctions dureraient cinq ans au lieu d'un ; c'était une espèce
de contrôleur adjoint aux patrons des mesureurs et des bate-
liers. Pour empêcher les vols et les fraudes, il envoyait secrè-
tement aux boulangers de Rome un échantillon du blé qu'il
expédiait. 11 n'était pas rééligible '■^.
Il est probable que presque tous les collèges avaient alors
des chefs appelés patroui. Dans un collège inconnu de l'an-
none, en 2o6 3, dans le corpus piscatonim et urinatorum sous
Elagabale ^, dans le corpus mcujnariorum, au commencement
du IV« siècle -j, dans le corpus coriariorum maijnariorum et
solatariorum sous Dioclétien et Constantin ^>, dans le corpus
suariorum et confectuariorum, vers le milieu du IV^ siècle ",
dans le corpus pastillariorum en 435 s, dans le collège des
dendrophores d'Ostie 9 et dans le corpus stuppatorum de la
• C. Th., 14, 4, 1. 9 : ad exdudendas patronorum caudkariorum
fraudes et Portuensium mensonun j'urla, unus epatronis totius consensu
corporis eligatur, qui per quinquennium custodiam Portuensium suscipiat
conditorum, clandestinum ad collegas digma missurus, etc.
- Ibid. Nous avons suivi Gebhardt (pp. 19 et 23, note) contre Godefroy
(V, p. 20j. Il peut d'autant mieux s'agir du corpus pistorum que cette loi
faisait suite à la dernière loi sur les pis tores (1-4, 3, 1. 22).
Les boulangers et les codicarii avaient parfois des patrons communs:
Constance le défend en 3oo (C. Th., U, 3. 1. 2).
5 VI 868 : curaim) agentibus {tribus) patronis , dont l'un est aussi quin-
(piennalis.
^ VI 1872. Statue à un patronus et qq. {tertium). Il y a deux patroni
présents à la dédicace avec deux quinq. et trois curatores.
s VI 1696 : viris p{erfectissimis] piatronis?) corp{oris)mag{nariorum).
Hexzex lit : p{rae'p{ositis).
^ VI 1117 : curante Thessio Seriuido p[afrono?) c{orporis) corariorum.
'' VI 1690. A un patron, auctoribus patronis ponendum censuit,
en 340.
« VI 9765, en 43o.
•' XIV 281. Sur l'album, il y a deux patr(oni) p{er)p[etui) et un patr(pnus)
mêlés aux q{uin)q. et aux q{uin)q. p{er)p[etui .
( 371 )
même ville 1, enfin dans le corpus siiburrarionun de Pisaurum
sous Marc Aurèle -, nous trouvons des patroni qui semblent
être des chefs du collège plutôt que des protecteurs.
Les patrons, dont nous nous occupons ici, étaient choisis
parmi les membres et par le collège •'; mais c'est au gouverne-
ment, non à la corporation, qu'ils rendaient compte de la
gestion des intérêts publics ^. C'était lui qui les punissait ou
les récompensait. Le patronuH pistonim qui avait dirigé une
boulangerie pendant cinq ans, devenait libre ^. En 445, dans
toutes les corporations de Rome, celui qui avait parcouru toute
l'échelle des honneurs dans son collège, pouvait également
s'affranchir de tout lien envers sa corporation pour entrer dans
une milice ou dans le clergé •>. Le patron, nommé annuelle-
ment, depuis 417, par les boulangers pour diriger les maga-
sins du port, obtenait de droit le titre de comte du troisième
ordre, s'il n'avait rien laissé à désirer; sinon ses biens étaient
confisqués et il devait recommencer au bas de l'échelle, c'est-à-
dire redevenait simple boulanger ". Les trois premiers patrons
des suarii, des codicarii et des pistores turent soustraits par la
même loi à la juridiction du préfet de l'annone; ils dépendirent
directement du préfet de la ville. Les trois premiers patrons
des charcutiers eurent, depuis 419, droit à la dignité de
comités tertii ordinis ^.
' XIV 44. Son fils est corpiorattus).
- XIV 102 : cum{}u) agentibus trois personnes, dont un paironus et
deux q{uin)tj{ucmiales).
Dans la plupart de ces inscriptions, les patrons remplissent les fonctions
dévolues ailleurs à des fonctionnaires du collège.
5 C. Th., U, 3, 1.2 et 14, 27, 1.-1.
■* C. Th., 14, 4, 1. 9. 14, 23, 1. unica.
^ C. Th., 1-4. 3,1. 7(367j.
•' Nov. Val. III, tit. 15, >; 1 (445; : tjiii noi cxpleto ordinc cocpti ofjicii,
priusqiKun ad primuni hiter silos locum emeritus pervenerit.
' C. Th., -U, 4, 1. 9 (417; : ad pistrini prima nuuiia revocctur.
« Ibid., 1. 10 (419). Nov. Val. III, tit. 35, i^ 5 (452) : Baonio priori cor-
poris cuiii dignitate legc concessa etiam cingnliiin inilitiae robnnus
adjiDigi ... Quod circa successores rolinnus cuslodiri.
( 372 )
Il résulte de ce qui précède que les patrons étaient préposés
à la direction du service, et qu'ils avaient sous eux toute une
hiérarchie de fonctionnaires pour les aider •. Il est probable
que pour l'administration de leurs intérêts privés, les collèges
avaient toujours leurs anciens dignitaires : magistri, ([umjuen-
jiales, curalores et quaeslores, et leurs serviteurs : vialorcs, scri-
baCy etc. -. Une inscription de 256 est assez curieuse sous ce
rapport : il s'agit d'une dédicace faite par trois patrons, trois
quinquennales, dont Tun est aussi patron, trois questeurs ou
trésoriers, et un scriba corporalorum '-'>. Dans les inscriptions
postérieures, que nous avons citées ci-dessus, nous voyons
également ces fonctionnaires à coté des patrons.
Fimutres.
Nous ne parlerons ici que des propriétés collectives des
^collèges; elles consistaient en biens mobiliers et en immeubles.
Nous commencerons par les boulangers, dont le patrimoine
commun était fort considérable ^. Ils avaient des propriétés,
appelées dotation (rfoi) ^, parce qu'elles leur avaient été données
• Ordo coepti officii. Prima munia.
- Voyez ces fonctionnaires chez les pistores (VI 100-2, en 1-44', les cau-
dicarii\\\ 102^2, en 166;, les me7isores (VI 85, en 198;.
^ VI 868. Le bas-relief i)roiive qu'il s'agit de corporati de l'annone.
— Kemarque. Les suimnates Alexandrinae et Carpatliiae dassis ne sem-
blent être que les naviculaires les plus riches. C. Th., 13, 5, 1. 32 (409)
= C. J., XI, 1 (2), 4. — A la tète de chaque fabrica (fabrique d'armes),
il y a un primiceriiis fabricae, choisi parmi les armuriers, tout comme le
patronus pistriyii ; en effet, en 390, Théodose l'affranchit de toute charge
après deux ans de service, et lui donne le rang deprotector. C. Th., 10,
22. 1. 3 (390).
^ C. Th., 14, 3, 1. 7. 13. 19. 21. >'ov. Val. III, lit. 33 (451). Cfr. DmKSEiN,
II, 127. Marquardt, Priv., Il-, p. 418. Vie privée, II, p. 40. Gebhardt,
p. 42.
^ L. 13 : (jHae dod.s no)nen — eti(U)i hidw retentaiit. Voyez supra,
pp. 296-297.
( 373 )
par l'Etat. Le revenu de ces hiens constituait pour eux une sorte
d'indemnité '. Ils leur avaient été donnés anciennement, dit
Honorius, en 396 "^ ; ils ont été attribués dès Torigine à la cor-
poration, dit Valenlinien ^^ en 369 '^K Uuand, et de qui les
avaient-ils reçus? Peut-être de ïrajan, qui réorganisa le collège;
peut-être aussi du prince qui décréta les distributions de
pain ''. En quoi consistait celte dotation? C'étaient en grande
partie des terres {fundi dotales) ■> fort étendues et situées dans
diverses parties du monde, selon Cassiodore C\ c'est-iVdire en
Europe et en Afrique. Le préfet de l'annone devait veiller à
leur conservation "7, mais elles étaient administrées par les
directeurs des boulangeries [patroni)^. Outre ces terres, la dota-
tion comprenait les boulangeries {pisthna, ofliciiuie)'^', c'étaient,
dit Socrate, d'antiques et immenses édifices {o\y.o'. TzauLuisvÉQs',;),
disséminés dans les quatorze régions de Rome. Vers 312 ou
334, on en trouve deux cent cinquante-six ou deux cent cin-
quante-huit; il y en avait quinze à vingt-quatre par région lO.
A Constantinople, il y avait, sous Théodose II, vingt ou vingt
et une jnslrhid publica et cent vingt pistrina privata 1 1 ; dans les
' L. 19 : qiiae eoriun corpori solatin ccrta praehehanl.
2 L. 19 : solatia antiquitus constituta.
5 L. 13 : in originem adscripta corpori.
* Voyez supra, pp. 79 et 82.
^ L. T. Cfr. 1. 19 : fundi sive praedia, quaa pistoruni corpori ohnoxia
sunt. Nov. Val. III, til. 33 : praedia pistoria.
6 Yar., VI, 18 : dignitati quoquc tuae pistoruni jura [amulata sunt,
quae per diversas mundi partes posscssionc latissinia tcndebantur. En
Afrique : Nov. Val. III, lit. 33.
7 Cassiod.. /. /.
8 C. Th , 1-4, 3, 1.7(364).
'J C. Th., 14,3, 1. 7. 14, 17, 1. 3. Cassiod., Var., VI, 18. Sor.R.\T.. //. E.,
V, 18. Slidas : \\ç>-oTMltw>. Voyez supra, p. 83, n. 1-3.
•0 PiiELLEH, Région., pp. 30. 31. 112. Marquardt, /. /. Jordan, Topogr.,
II, 69. Gebhardt, p. 23. Selon la Notilia : 236. selon le Curiosum : 2o8.
Cfr. De Rossi, Inscr. christ., n. 49o, en 401 : pi.'.
Voilà ce que nous savons des biens corporatifs, affectés au
service. Sans doute, pour leurs intérêts privés, les collèges
avaient toujours leur caisse commune, alimentée par les
sources indiquées plus haut 4.
§ 3. Contrôle supéneur.
En exposant le roie ofîiciel de chaque corporation et la
condition des collèges en général, nous avons pris soin de dire
de quelle administration et de quels fonctionnaires chacune
dépendait. Aussi pouvons-nous nous borner ici à résumer,
pour présenter un tableau d'ensemble.
Remarquons d'abord que, le pouvoir administratif et le
pouvoir judiciaire se trouvant toujours dans les mêmes mains,
l'empereur et les fonctionnaires supérieurs, chargés de régler
et de surveiller le service, étaient aussi juges dans tous les
procès civils où figuraient des corporati, et dans toutes les
affaires criminelles où ils étaient impliqués.
* Bureau de la Malle, Èco)i. polit, des Rotu., I, pp. 391-396.
- Voyez le premier volume, p. 4o4.
•■ C. Th., 10, 3, 1. 5 (400). 15, i, 1. 41 (401).
' Arca ro}n)iiunis. Dig., 3, 4, 1. 47, 22, l. Voyez le premier volume,
pp. 449-479.
( 379 )
La source du pouvoir législatif et judiciaire, c'était l'empe-
reur: il est le juge et l'administrateur souverain. Ici, comme en
toutes matières, il exerce la juridiction suprême, soit comme
juge à la fois en premier et en dernier ressort, soit comme
juge d'appel. Comme administrateur, ce n'est pas de loin qu'il
dirige ces rouages innombrables. Il ne se contente pas d'établir
les lois générales que doivent appliquer ses fonctionnaires. Il
règle souvent les moindres détails de l'organisation intérieure
des collèges et de leur service. Les questions les plus minu-
tieuses lui sont soumises à tout moment par ses subordonnés '.
Il accorde, augmente, confirme ou retire les privilèges -;
il décrète ou ratifie les mesures nécessaires pour recruter,
compléter et maintenir tous ces corps indispensables ''•. Seul, il
accorde les exemptions demandées. De là, ces nombreuses
constitutions impériales sur le service, sur les obligations
personnelles, sur les biens, sur l'hérédité, le rappel, la sécu-
rité des corporati. C'est lui qui lusionne deux ou plusieurs col-
lèges, qui désigne parfois les chefs, qui règle leur nomination
et leurs devoirs; il se fait adresser la liste des membres '*. Sou-
vent il écrit aux collèges directement, de sa propre initiative, ou
j)Our répondre à leurs suppliques ^, mais généralement, c'est à
ses fonctionnaires ^ qu'il s'adresse pour leur tracer des règles
* Symm., Relat., 44 {EpisL, X. 58).
- Symm., Relat., U Episl., X, !27). C. Th., 14, ^2 et passini. Voyez
ijîf'ra, chap. IV.
3 C. Th., 13, 5, 1. 22 (393) : ad nos rcferre, 14, 4, 1. 1 (334) : nos super
his consuli. Cfr. 13, o, 1. o (326). Symm., Relat., 44. Voyez supra, pp. 311
et suivantes.
* C. Th., 13, o, 1. 14, 5< 2 : nobis — uuntientur.
« C. Th., 13, 5, 1. 7. 16. 36. 37. 13, 6, 1. 1. 13, 9. 1 3. Voyez supra,
p. 364, n. 5. Hadrien écrit à deux boulangers ({ui l'avaient consulté sur
les privilèges des pis tores. Fuagm. Vat., 233.
6 Le biographe d'Alexandre Sévère rapporte que ce prince donna aux.
corporations de Rome des defensores tirés de leur sein, et fixa la juridic-
tion dont chacun dépendait ( jussit, qui ad quos judices perlineret). Voyez
le premier volume, p. 418, el supra, j). 2,>i. Cesjuiiices, diti'erents suivant
( 380 )
nouvelles, ou pour les rappeler à l'observation des anciennes.
Pour les corporations de Rome, et, depuis Constantin, pour
celles de Constantinople, son principal représentant fut de
bonne heure le préfet de la ville, pris parmi les sénateurs con-
sulaires. « C'est à toi, lui écrit Sévère, que j'ai confié la garde
de ma capitale '. » Tous les habitants, et particulièrement
toutes les corporations, sont sous sa haute surveillance : Omnia
corporatorum gênera, quae in Constantinopolitana civitate ver-
santiir, univcrsosque cives atque populares, praefecturae urbamw
régi moderamine cognoscas -. Juge ordinaire en première-
instance, il a la juridiction civile et criminelle jusqu'au cen-
tième mille hors de Rome, sauf appel au prince. Dans tous
leurs procès, dit formellement Honorius en 408, les charcutiers
ne sont justiciables que du préfet de la ville '\ et en 423, il
s'exprime tout aussi catégoriquement pour tous les corpordti
l'rbis Jloniae ''. C'est lui qui punit les infractions aux lois sur
l'association '>, et la participation des corporati aux réunions
illicites G.
Au point de vue administratif, le préfet de la ville contrôle
les collèges, ne peuvent être que les fonctionnaires dont chacun dépend
directement. Cfr. C. J., 111. 13, 7 (502), Anastase au préfet du prétoire :
Periniquum et temerarium esse perspici mus, eos, qui professiones aliquas
seu negotiationes exercera noscuntur, judicum, adquos earundem profes-
sionum seu negotiationum cura pertinet, juridictionem et praeceptionem
declinare conari.
• DiG., 1, 12, l, § 4 : Cum fulei tiiae urbem nostram conniiseinmus.
Cfr. Senec, Epist., 83, 14 : tutela urbis, et plus tard, Symm., Relut., 17 :
nieis humeris rerum omnium pondéra sustinentur. Ibid., 23. 25. Cassiod.,
Var., VI, 4.
2 C. Th., 1, 10, 1. 4 = C. J., I, 28, 4 (391). Cfr. C J.. XI, 16 (17), 2. De
là les statues que les collèges lui élèvent; voyez le premier volume,
p. 509.
•^ C.J., XI, 16(17), 2^408).
* C. Th., 1,6, 1. 11 (423). Pour les argentarii en particulier : Dig., 1. 12. 2
•'^ Dig., 1, 12, 1, 14. Voyez le premier volume, p. 138.
^ C. Th., 16, 4. 1. 5, H (404) : conventus celebrare illicitos.
le service imposé aux corporations qui approvisionnent le
marché i, ou qui tiennent de près ou de loin aux distributions
publiques et à la vente à bas prix -2. Le soin de faire observer
lous les règlements lui incombe : il décide par lui-même tous
les cas que l'empereur ne s'est pas réservés expressément, ou sur
lesquels il ne juge pas nécessaire de le consulter '>. Il ré[)rime
les fraudes incessantes commises par les collèges dans leur
service '»; il exclut des privilèges les membres qui ne s'en
acquittent pas exactement, et, à cet eliét, il fait parfois atlichcr
les noms des délinquants •>. 11 sévit contre ceux qui volent ou
molestent les corporati <», et il veille au maintien de leurs privi-
lèges '. Pour ce contrôle quotidien, il devait vtvv. assisté par un
otilce très nombreux, et au IV« siècle, il a un vicaire ''^. Tous
les jours, sa a Sublime Eminence » et son oftice devaient « être
au guet •' w; tous les jours, il y avait des décisions à prendre
sur l'obligation des personnes, l'hérédité de la charge, l'aliéna-
lion, l'administration et l'emploi légal des biens, sur le rappel
des récalcitrants et des fugitifs, sur le mariage des vorporutïow
des corporatae, sur la tutelle et le remplacement des mineurs,
sur le recrutement ou l'enrôlement forcé, sur l'entrée et la
< DiG., 1, 12, 1, M 'Siipra, p. 89, n. o).
- Dès Antonin le Pieux, il sui-veille les distributions de blé. VI 3001 :
qui comimeatiim) perc{epit) sub Lollio i'rbiro pr[aefecto) u(rbi). Mommse.n,
St. R., IP, p. 1019.
^ Ces consultations sont lré([uentes. Voyez Symm., Relut., 14. "29. 44, etc.
i Naviculaires : C Th., 13. 5, 1. 38. [Taberjuarii : C. I. L , VI 1766. Voyez
mpra, p. 109. Vols dans les greniers publics : C. Th., 14, 3, 1. 16. Edit
sur les molendinarii en 488 : VIlTil. Fraudes des caudicarii et mensores :
C. Th., 14, 13, 1. 1. Usure des banquiers {nummularii) : DiG., 1, 12, 1, 9 :
/// nummularii probe se agant. Jus corporalis injuriae : C. Th., 14, 4, 1. 9.
•> Voyez supra, p. 109. Cfr. Gatti et Huelsen, dans le Rull. cum., 1891,
j)p. 342-338 : fragments de plusieurs atîiches.
« G. Th., 13, 3, 1. 9. 29 (naviculaires).
' Toutes les lois du C. Th., 14, 2, sur ces juivilcges, sont adressées h
des préfets de la ville.
« C. Th., 12, i, 1. 162. 14, 6, 1. 3.
'' G. Th., 14, 3, 1. 8 : in .'^peculis.
sortie, sur la jouissanoo ou l'abus îles [U'iviltYo^^. î>iii' It» payo-
monl ilu salaire, sur le eoutrôle des palioni, eutin sur tt>us les
détails (les divers serviees. Le préfet de la ville tliri^e les
eiu|uétes sur les personnes et les biens atVeetés au eollè^e, sur
raeeoniplissenient de toutes les eliarges '. Deux iuseriptions
nous ont eonservé les édits publit\^ par Tureius Apronianus
on otv>, sur la vente du bétail -.
Dans sa tàclu^ si ilitlieilt», il est aide d'abord par le préfet de
l'annont^ \
Ce fonetionnaire, pris ilans Tordre éipiestre, fut longtemps
indépendant. Aux premiers sièeles de rKnipire, tandis ipie le
préfet de la ville s'oeeupail tles niarehés, le préfet de Tannone
* Coiistitiitioiis adnsscc,^ an /'rt'/cV de la ville :
1" Sur les personnes et les biens : C. Th.. 13. o, I. I. II. i;». (k 1. lV 14,
i\ l. i. l-i, 3, 1. 1'. 3. -i. (). 8. 11. 13 iS. II. i, l. :.. T. S. Il, 8, 1. "i. l i. \l
1. I. Nov. Val. lll, lit. 15. ^28.
'> Sur le mariaiie : 0. Yn , II, 3. 1. iî.
3^' Sur la tutelle des pislorcs mineurs : (1. Th., l i, 3, l. 3.
.4^' Sur le reerutement : 14, lt>, l. un. 13, 5, l. 13. Il, 3, l. 0. 10. 18.
. 14, 4, l. 1-3.
14, 3, 1. 18. 14, 4,\ (î. 14, 0, 1. l. 4. 14, ^l'-l, 1 un. Cfr. S\mm., lidat.,
14. 4i).
6o Sur les pat )v ni. C Th., 14,3, l. 7.
T*» Sur le service. Perception, pesage, etc., du lard : C. Th., 14, 4, l. 4-i.
— Arrivée des denrées : ('.. Th., 13, v*), l. 38. Cfr. A.mm. Mauc, 19, 10.
SinoN. Aroi.L., Kpi.'it., 1, 10. — Vente ilu ble par les eodicaires et nu^su-
reurs : C. Th., 14, lo, l. l. - T.reniers du Porlius -. C. Th., 13, 1. l. 14.
Chaux : C. Th.. 14, (î, l. 4. — Tiix du lard : {)n\.. 1, 14. 1, 11. Presse
des bateaux du Tibre : 14, 41, 1. un. >ov. Vai.. lll, tit. 48 i450) — Protec-
tion des naviculaires : C. Th.. 13, 3, l. 9. 49. — Il surveille du reste toutes
les corporations, pas seulement celles de l'annone : corarii (VI 1084),
niaijuarii iVI IGW), ïuanripcs (\\ 1744). mirirularii [\\ 1740', piatorcs
(M 1(>04. 1730 ,stnuii{\\ 1(W. m:\), sum-plotw^ Ostioiscs el Vorliwnscs
(\\ 1741).
- VI 1770. 1771. Voyez ,'4-W.
' Voyez llHisr.HFKi.u, .[tuioiia, pp. 47 et sui\. VV/'/c. p[>. 148-139,
surtout p. 137.
( ?X\ )
(lirit,'r';iit seul tout nt qui conœrnait la vontc par l'État et les
(iislributioiis jiuljliques, excepté rjue, jusque vers l'époque (Je
Sepliine Sévère, les distributions elles-mêmes étaient présidées
par des praefccli frumenli (laiidi e.i S'enalufi) C(omullo). Ses pou-
voirs s'étendaient alors à t(jul IKinpire, et il surveillait, tant à
Home que dans les provinces, toutes les corporations qui tra-
vaillaient pour l'annone publifjue. i'artout il a sous ses ordres
de noinbreux fonctionnaires et employés. A Home et à Ostie,
nous le voyons directement en rapport avec les collèges des
baleliei's du Tibre, dr;s mesureurs, des boulangers, des cbar-
cutiers K
.Dans les provinces, c'est a lui ou à ses subordonnés, tels qu«;
Ut promraior Auguslornm ad annonam provinciae .\arboneims
et lj(jurine, et Vadjulor praejedi minonae ad oleum Afrum et
UisiHinnm rcceriHendum, que les naviculaires d'Arles, les bate-
liers de Séville, les marchands d'huile fie la Hétique et les
négociants en blé et en huile d'Afrique élèvent des statues -.
Mais vers hî règne de Septime Sévère, sa couipétence fut
restreinte à liome, et elle alla sans cesse en diminuant. Au
IV'- siècle, il est subordonné au préfet de la ville. Alors, il
dirige, sous celui-ci, le service des approvisionnements à Home
et à O.^lie, et il i'aidi; dans la surveillance des collèges de l'an-
none. Les limites entre leurs attributions respectives sont assez
mal définies et plus d'une fois leurs otiices vinrent à se
dispulei- '•'>. On les voit aussi agir de concert pour visiter les
denrées à leur arrivée '^, pour coiilrûler leur conservation et
' VI M%ii. en 144 : jii.slorr.s. — XIV -i;jJ. VI 10-2:2 [lodicarii naricidani)
= XIV iOO, fMi 166. Fr.AGMKNT. Vat., §.i; 233 '230 (Privilèges (\es pis tores et
svarii). Du;,, 27, 1. 26 (mensores friimentarii . C. I. (ir., .W73 (navicidarii).
XIV 154 : corpus mesorum jniment adjutonun et acceptorum Ost., vers
210. XIV 172 : corpus iiiensvr. (riun. (ht., ei» 184. Cfi-. Th. Mommsen.
St.-Ii., 112, p. 098.
•i XII 672. II 1180. VI I62:>''. 1620, du 11^ siècle.
^ C. Th.. 1.6, 1. o. 11, 14, 1. 1. 13, 5, l. 2. C. J., I, 2», 1.
^ C. Th., 13, 5, 1. 38. 13, '.». I. o. Voyez supra, p. o7, ii. 3.
( 384 )
leur emploi •. Le préfet de l'annone surveillait surtout la comp-
tabilité, et le service des collèges qui gardaient, préparaient et
distribuaient les divers canons -, et le préfet de la ville devait
le consulter sur tout ce qui s'y rapportait '"'•. L'empereur lui
adresse souvent directement des constitutions sur !a vente et la
distribution des denrées, sur le service et les biens des corpo-
rati de l'annone, sur leurs charges et leurs privilèges K iMais
en tout cela, il est l'inférieur du praefectus urbi, et le prince
réserve formellement les décisions à ce dernier. Son impor-
tance diminua de plus en plus, et, sous Cassiodore, il semble
n'avoir plus guère que la surveillance des boulangeries ^.
Sa juridiction était surtout civile et embrassait toutes les
contestations, tous les procès relatifs à l'annone 6, Nous avons
un curieux exemple d'un préfet de l'annone qui tranche une
longue querelle entre mesureurs et codicaires '^. C'est à lui que
< C. Tu., il, U, 1. 1. 12. 6, 1. 24. Et pour le recrutement des boulan-
gers : C. TH.,y, 40, 1. 5.
2 c. Th., 14, 15, 1. 2. 14, 17, 1. 2. 3. 14, 24, 1. 1.
5 C. Th., Il, 14, 1. 1 : oinma participe praefectura annonaria disponas,
en 364.
■* Sur la vente ou la distribution : 14, 24, 1. un. Sur \e panis gradilis :
14, 17, 1. 3 et 6. — Sur les personnes et les biens : C. Th., 13, 5, 1. 2. 13.
(3, 1. 1. 5. 14, 3, 1. 1. 3. 12. 14. 15 (exclusion des faillis). 21 (mariage des
boulangers). — Sur les privilèges : C. Th., 13, 5, 1. 3. Fragm. Vat.,
!5§ 233-235. DiG.. 27, 1, 46. — Sur le service : C. Th., 13, 5, 1. 38. 14, 15.
1. 2. 4. Le Praef. Ann. eut toujours des subordonnés, tels que le ùibunu.s
fori siiarii, le tribunus fori vinarii, le curator horreorum Galba-
norum, etc.
^ Cassiod., Var., VI, 18 : lui .siquidcm studii est, ut sacratissimae
Urbi praeparetur annona, ubique redundet panis copia et tam magnus
populus tamquam una mensa satietur. Pcr offïcinas pistorum cibosque
[clibanosque, Hirschfeld, Annona, p. 46, n. 63) discurris, pensum et
munditiam panis exigis ... Dignitati quoque tuae pistorum jura famulata
sunt, quae per diversas mundi partes possessione latissima tendebantur.
Hirschfeld, /. /., pp. 45 et suiv. Verwalt., pp. 137-138.
^ DiG., 48, 12, 3, 1. 48, 2, 13. 14, 1, 1, 18. 14. 5, 8.
' C. I. L., VI 1579. Voyez supra, p|). 61 n. 1. 72, n. 6.
( 38o )
s'adressent les fils de naviculaires pour se faire déclarer
majeurs ^. Il exerce aussi une juridiction criminelle '^. Il punit
les fraudes des corporati y, et exclut les boulangers qui font
faillite ^. En 417, Honorius lui enlève \ejns corporalis injiihae
sur les trois premiers paîroni singulorum corporum pour les
réserver au préfet de la ville 5 ; il avait donc ce droit sur les
auires membres. Il eut même le _/î/5 qladn depuis Constantin
jusque vers le milieu du IV^ siècle 6. Du reste, il y avait tou-
jours appel de ses décisions au praefectus urbi, à qui étaient
même réservés les cas graves ".
A Constantinople, la préfecture de l'annone n'existait proba-
blement pas 8.
Quand les pouvoirs du préfet de l'annone furent restreints ù
Rome, la surveillance du transport fut confiée au préfet du
prétoire, et au IV® siècle, à chacun des quatre préfets du pré-
toire, dans sa préfecture 9. De là leur autorité sur le corpus navi-
culariorumy dont les navires parcouraient toutes les mers 'O.
C'est à eux qu'est adressée la moitié des constitutions du titre
de naviculariis ii. On y voit qu'ils devaient surtout empêcher
les gouverneurs et autres fonctionnaires supérieurs ou subal-
ternes de molester les naviculaires, de leur imposer des
corvées, de réquisitionner leurs navires pendant le transport
' C. Th., 2, 17, I,§ 2(321).
2 Gassiod., VI, 18.
•• Sen., de brev. vitae, 19. C. Th., 13, .5. 1. 38.
* C. Th., 14, 3, 1. 15.
•• C. Th., 14, 4, 1. 9.
•■■ HiRSCHFELD, Annona^ p. 50.
• MoMMSEN, St-R., 112, p. 999, n. 3.
"* Cependant voyez Gebhardt. p. 21, n. 2. Nous suivons l'avis de
HiuscHFELD, Annoiia, p. 86. Bœcking, Not. Dign., I, pp. 174. 177.
' Cassiod., 1. 1. : Triticas quidem copias pracfcctura pracloriana pro-
curai. Sym.m., Ep., X, 48 = Relat., 35.
»" C. Th . 13, 5, 1. 5 : per orbem t erratum.
" C. Th., 13, 5, 1. i. 5. 6. 14. 15. 17. 19. 21-23. 26. 28. 31-35. 13, 6, 1. 8.
10. 13,9,1. 1.4.
Tome L, vol. 11. 25
( 386 )
ou à l'arrivée et de les dépouiller des privilèges i ; ils devaient
surveiller la répartition des charges, la construction des
navires -, le recrutement des membres, la conservation des res
obnoxiae, l'exécution régulière du service des transports; ils
devaient empêcher l'abus des privilèges, et les fraudes des
naviculaires qui faisaient le commerce avec les denrées de
l'État ou se les appropriaient en prétextant un naufrage, par-
fois avec la complicité des bureaux des préfets de la ville
et de l'annone 'à. A Rome et à Oslie, les naviculaires étaient
sous l'autorité des préfets de l'annone ^ et de la ville ^.
D'autre part, le praefedus praetorio Italiae devait s'occuper
des suarii et des jnstores : des premiers, parce qu'ils perce-
vaient le lard en Italie; des autres, parce qu'ils avaient des
terres en Afrique et qu'ils tiraient des recrues de cette pro-
vince G. Il surveillait même la nomination des patroni horreo-
rum Portiienskim ^.
Les praefecli praetorio étaient aidés dans chaque diocèse
par un vicaire, et dans chaque province par un gouverneur;
vicaires 8 et gouverneurs 'J les suppléent souvent dans la sur-
veillance des corporations de l'annone. A Carthage et à
Alexandrie, il y avait même un préfet de l'annone spécial qui
1 C. Th., 13, 8, 1. un.
2 Ils réquisitionnent des navires : C. Th., 13. 7, 1. 1. 2.
5 C. Th., 13, 9, 1. 1.4. Cfr. 13, 5, 1. 38 : dissimiilationi et corruptelac
urbain vel annonarii officii. Krakauer, pp. 5^3-23.
* C. Th., 13, 5, 1. 2. 3. 36. 38. 13, 6, 1. 1. 5. 14, 15, 1. 2.
8 Voyez supra, p. 382.
6 Suarii : C. Th., 14, 4, 1. 1. 9. 10. Nov. Valent. III, lit. 35. Pis tores :
14, 3, 1. 17. 19. 20. 22. Nov. Valent. III, tit. 33.
7 C. Th., 14, 23, 1. un.
8 C. Th., 13, 5, 1. 36. 13, 6, 1. 3. 4. 14, 3, 1. 17.
'•* C. Th., U, 1, 1. 24. 13, 5, 1. 10. 16. 25. 30. 32. 36. 37. 13, 6, 1. 7. 13,
9, 1. 1. 14, 3, 1. 12. 17. 14, 4, 1. 3. 14, 25, 1. un. Nov. Val. III, tit. 35, §4. Pour
le gouverneur d'Égj'pte ou praefccius Aucjustalis, voyez : C. Th., 13, 5,
1. 18. 20. 14, 27, 1. i. Corrector Lucaniae et Brutliorum : C. Th., 9, 40,
1. 6. 7 (condamnés aux pistrina).
( 387 )
dirigeait la livraison du blé d'Afrique et d'Egypte et avait
juridiction sur les naviculaires ^.
Tels étaient les principaux fonctionnaires qui exerçaient le
contrôle sur les corporations de l'annone, en même temps que
le préfet de la ville. Pour les autres collèges de Rome, le
praefeclus iirhi était aussi assisté de divers fonctionnaires : nous
voyons un curalor operum publicorum en rapport avec le coUe-
giumfabrum lignariorum, vers 301 -; le préfet des vigiles diri-
geait les collcgiali ou pompiers; les ciiratores riparum et alvci
Tiberis et cloacarum surveillaient sans doute le collegium pisca-
torum et urinaturum tolhis alvei Tiberis, et ainsi de suite. Nous
n'insistons pas, parce que les détails précis nous manquent.
Passons aux corporations des villes, aux collegia urbium sin-
gularum. Sans doute, aux premiers siècles, l'autorité supé-
rieure, après avoir accordé l'autorisation, laissait aux magistrats
de la cité la surveillance directe de ses corporations; ce soin
appartenait ii la curie, et particulièrement aux édiles. A Putcoli,
nous voyons la curie voter un décret sur la forme d'une inscrip-
tion des dendrophores 3. Nous sommes tenté de prendre aussi
pour un vérificateur imposé par la cité, ce repunctor ou dispen-
sator collegiorum que nous trouvons à Dertone ^ et i\ Milan •> : il
' C. Th., 11, 1, 1. 13. 11, 7, 1. 8. 11, 30, 1. 4. 13, 5, 1. 12. 38. 13, 9, 1. 2.
Cfr. HiRSCHFELD, Anuona, p. 87. A Alexandrie : C. Th., 12, G, 1. 3 :
praefeclus annonae Alexandriae. A Carlluige : Not. Dign., Occ, II, 4.
(Seeck) : praefectus annonae Africae, dépendant du praefeclus praetoru
per Italias.
2 C. /. L., VI 1673.
5 C. I. L., X 1786, en 196.
* V 7372 : [dis]pensalor co[U...] Derl(onensium). Mommsen dit : ... pcn-
sator sine clubio non esl dispensalor condicionis servilis, sed simili::
repunclori colleijiorum Mediolanensiiim. Voyez le premier volume, p. 419.
^ V 5847 : palron{us) el repuncl{or) coll egii) aerar(ii) col{oniae) Miedw-
lanensis)^ à Alilan. XI 1230, à Placentia : repunclori splendid{issimoniJu
collegiorum fabrum et cent. c{oloniae) A. A. F. M(ediolanensis).
On trouve encore, VI 360 : decurialium gerulorum dispensalor, en KKi.
VI 8826 : un esclave de Trajan, dispensalor. Est-il dispensalor du collegium
Liberi Patris, etc.?
( 388 )
devait sans doute contrôler la comptabilité et l'emploi du subside
que ces villes accordaient aux eollegin fnbrum et cenlonariorum,
peut-être aussi les appareils et engins qu'elles mettaient à leur
disposition pour éteindre les incendies i. Nous en connaissons
deux de Milan qui sont duumviri j{ure) d{icimdo), et dont l'un
est aussi curator reip{nblicae) Parmensium . Au V* siècle encore,
c'est sous les ordres des curiales que les collegiati accomplissent
leurs corvées, et leurs chefs doivent empêcher la fuite des colle-
giati"^. Avec le temps, l'Etat empiéta de plus en plus sur la
liberté des villes en toutes matières : finances, police, justice,
travaux publics, partout il intervient pour imposerses fonction-
naires ou accorder son autorisation. Maué a cherché à prouver
qu'il fit de même pour les collèges des cités. Voici quelle est la
thèse de Maué. De bonne heure, l'empereur crut que le gouver-
neur de province ne suffisait pas pour surveiller ces corps bien
disciplinés qu'il redoutait encore, surtout quand le service
public leur donnait une grande importance dans la ville. Ce
furent particulièrement les corporations de [abri, decentonaires
et de dendrophores, organisées militairement pour l'extinction
des incendies, qu'il crut devoir mettre sous un contrôle direct
et permanent. A cet effet, il aurait désigné, au l^' et au II« siècle,
un fonctionnaire spécial appelé praefeclus fabnnn 3, qu'il ne
' C. I. L., V, p. 635 (MoMMSEN). Hirschfeld, Gall. Stiid., III, p. 19 (255),
îi. 2. Maué, Der Praef. fabr., p. 66.
■^ Nov. Major., tit. 7, § 3 (458); voyez supra, p. 208 C. Th., 12, 19,
1. 3 (400) : Primates sane ordinum defensoresque cîvitatum poenae denuntia-
lione constringimiis, nepassini vagari curiae vel collegii defugas in publica
liamna patiantur . Parmi les magistrats municipaux préposés aux collèges,
il faut peut-être citer encore le praef ectus vigilum et armorum de Ni mes ;
en effet, clans cette ville, on ne trouve pas de vigiles, mais bien des [abri,
et le préfet des vigiles les commandait peut-être. Cfr. Herzog, Gall. Narb.,
p. 223. Gagnât, Demunicip. militiis, pp. 86-90. Hirschfeld, Gall. Stud.,
III, p. 5 (241). C'est ce que conteste Maué, Der praef. fabr., pp. 100-101,
et note 31. Ce praefectus était probablement nommé par l'empereur.
"' Maué, Der praefectus fabrum, Halle, 1887. La thèse de Maué n'a pas
trouvé un accueil favorable. Voyez les comptes rendus de Gagnât, Jung,
( 389 )
faut ronfondiv ni aver le pmefeclus coUcijii fabrum, charité de
la direction technique et du commandement militaire ', ni
avec \e praefeclus fabrum, qui était probablement à l'origine le
chef de la brigade (Fouvriers attachée aux légions, et qui fut.
sous l'Empire, un officier de confiance d'un chef d'armée,
consul, préteur, empereur ou gouverneur, chargé de missions
confidentielles, sans attributions fixes. Celui qui nous occupe
ici serait un fonctionnaire impérial, nommé par le prince et
dépendant de lui '^, chargé de la police, de la surveillance poli-
tique des collegia fabrum, rentonariorum, demlrophororum. Ses
pouvoirs sont restreints à une ville déterminée, comme fin-
dique souvent son nom :praefectus fabrum Tenjeste, Caere^, etc.
Il aurait eu juridiction sur les membres de ces corporations,
partout si nombreuses et si bien organisées, qu'il devait
empêcher de nuire à l'ordre public. Maué suppose même
que, par exception, il les commandait aussi dans l'accomplis-
sement de leur service, à la place d'un praefectus collegii ^.
L'empereur choisissait d'ordinaire, pour ce poste de confiance,
d'anciens officiers, des fonctionnaires impériaux ou d'anciens
magistrats de la cité, sur le dévouement desquels il pouvait
compter. Fonction extraordinaire, cette préfecture est tou-
jours placée en dehors du airsus honorum; sa durée dépend de
la volonté du prince. Elle subsista tant que les collèges ne
furent pas complètement transformés en institutions officielles,
et on ne la trouve plus après Alexandre Sévère.
ScHMiDT, cités dans notre premier volume, p. "24. 0. Geppert, WocIwji-
schr. f. kl. Philologie, 1888, pp. 1098-1101. Réponse de Maué : Philologm,
1889, p. 763. Deutsche Lileraturxeituug, 1888. Sur le praefectus fabrum,
voyez C. JuLLiAN, Dict. de Daiie.mberg, s. v. fabri. Liebena.m, dans le Du.
epigr de De Ruggiero, s. v. fabri.
• Les deux litres se trouvent côte à côte. C. I. L.,\ 545. 546 : praefa-
tus fabrum Romae et Tergeste, avec la note de Mommsen. XIV ii98 :
praefecto fabr., praef. fabr. ti[gn]. Osliensimu. N'oyez supra, [)p. 35'2-35r.
' Malé, Op. cit., pp. 83-119.
■' Maué. Op. cit., pp. 86-87.
* Mauk. Op. cit., y. 78.
( 390 )
Cette thèse de Maué a été vivement attaquée et ne repose pas
sur des arguments satisfaisants. Ce qui frappe surtout dans les
inscriptions, c'est que \o pracfectus /flf?nf m n'est jamais en rap-
port avec un collège; puis il faudrait s'étonner s'il y avait eu
deux fonctions différentes portant un seul et môme nom.
A la tin du IV^ siècle, nous trouvons dans les villes un fonc-
lionnaire impérial appelé defensor civitalis, qui finit par
devenir un magistrat municipal élu par les habitants de la cité.
11 avait une mission de contrôle sur les corporations, et nous
■e voyons chargé de surveiller le recrutement des fabricenses
on l'absence du gouverneur, et d'empêcher la fuite des corpo-
rali 1.
Nous ne connaissons pas d'autre fonctionnaire de ce genre.
Au-dessus d'eux se trouvait le gouverneur de la province; c'est
à lui que revient la haute surveillance des collèges municipaux.
Sous Trajan, nous voyons que le gouverneur doit constam-
ment avoir l'œil sur les associations de tout genre '-î. Il en fut
toujours ainsi. A Anxanum, c'est un redor provinciae qui
ordonne d'atlicher en public les [nomin]a tam decnrionum quam
collegin[tonim collegionim o]mnium 3. Les [colle]gia urbis Vena-
[{ranae) élèvent une statue au rector Samniticus et le qualifient
d'ex amincit or aequissimus 4. En 315, ce sont les gouverneurs
qui sont chargés de fusionner les collèges des J'abri, des cento-
naires et des dendrophores dans toutes les villes 5. Deux con-
stitutions sur i'annone de Carthagc et sur les corporations de
cette ville sont adressées au proconsulaire d'Afrique c. Le gou-
' C. Th., 10, 22, 1. 6 (412). 12, 19, 1. 3 ,400). Voyez supra, p. 366.
"^ Plin., ad. Traj., 33 : nec erit difficile custodire tam paiicos. Ibid.,
34. 92. 93. 96. 97. Voyez le premier volume, p. 127.
^ IX 2998.
^ X 4865. Cfr. XI 377 : à un jiirid{icus) per Flamin{iam et) Umbri[am]^
parles colleg{ia) fabr., cent., dendr. urb{imn) juridicatus ejus, ob eximiam
moderationem^ etc., à Ariminum.
>-C. Th., 14,8,1. 1 (315).
• C. Th., 11, 1, 1. 24 (395 . 14, 25, 1. un. (315).
{ 391 )
verneur de l'Egypte, ou praefectus Augustnlis, surveille les navi-
culaires d'Egypte ^ et les collèges d'Alexandrie 2. Ces hauts
fonctionnaires sont chargés de rappeler les collefjiati fugitifs et
de les ramener dans leurs villes ^. Dans certaines provinces, ils
doivent parfois s'occuper des collèges de Rome, qui vont y cher-
cher les denrées ou qui y possèdent des biens ^; ceux d'Afrique
doivent envoyer les recrues des boulangers tous les cinq ans 5.
Quand les corporati de Rome s'enfuient dans toutes les parties
de l'Empire, les gouverneurs doivent les faire revenir 6; ils
doivent aussi prêter main-forte aux deux comtes des Largesses
pour arrêter les ouvriers des manufactures et des mines '^.
Mais à cette époque, ils sont eux-mêmes subordonnés aux
vicaires des diocèses et aux préfets du prétoire; c'est à ceux-ci
que l'empereur s'adresse d'ordinaire, en leur enjoignant de
transmettre ses ordres aux gouverneurs 8.
' C. Th , 13, 5, 1. 18. 20.
5 C. Th., U, 27, 1. i (396).
5 C. Th., 12, 1, 1. 162 (399). 14, 7, 1. 1 (397).
* Au proconsul Africae, sur les naviculaires : C. Th., 13, o, 1. 10. 30.
13, 6, 1. 7; sur les pistores : 14, 3, 1. 12. — Au Cornes Hispaniarum, sur
les naviculaires : 13, 5, 1. 8.
•• G. Th., 14, 3,1. 17.
•• C. Th., 14, 2,1.4(412».
' G. Th., 10. 19, 1. 5.
^ Constitutions adressées aux Praefecti Praetorio : Rappel des fugitifs :
G. Th., 12, 19, ]. 1-3 (400). 14, 7, 1. 2 (412). — Fusion des fabrij cent.,
dendr. : C. Th., 14, 8, 1. 1 (315). — Corporati d'Alexandrie exemptés du
curage du Nil : C. Th., 14, 27, 1. 1 (436). — Défense d'entrer dans le
clergé : Nov. Val. III, tit. 34, § 3 (452 >. — Défense de changer de domicile :
Nov. Major., tit. 7, § 3 (458). — Punition des receleurs de collegiati :
G. Th., 12, 1, 1. 146 (395). Nov. Major., tit. 7, § 4 (458). — Exclusion des
corporati qui ont épousé une esclave : Nov. Sev., tit. 2, § 1 (465 . —
Jouissance des édifices publics : G. Th., 10, 3, 1. 5 f400). — Prosecutio
animalnnn imposée aux collegiati : G. Th., U, 10, 1. 1 (369). — Recrute-
ment : C. Th., 12, 1, 1. 179 (415; : vacantes. 16, 2, 1. 39 (408) : clercs
indignes. — Giioix des parabolani d'Alexandrie : G. Th., 16, 2, 1. 42, § 1
(416). Etc. — Grégoire le Grand fait intervenir l'évèque de Naples auprès
dupraefectus {praetorio?) pour faire respecter les droits du corpus sapona-
riorum. Epist., X, 26 (Migne). IX, 113 [Mon. Germ. hist.).
( 392 )
Restent les collèges attachés aux diverses branches de Tad-
ministration centrale : fabriques d'armes, manufactures, mines
et carrières, etc. Nous avons dit, au chapitre premier, de quels
fonctionnaires ils dépendent. Ajoutons qu'ici encore les préfets
du prétoire, les vicaires et gouverneurs interviennent dans
certains cas, particulièrement quand il s'agit d'empêcher les
membres de ces collèges d'atîranchir leurs personnes, leurs
enfants, leurs biens, de les ramener à leur service, de punir
les receleurs, d'assurer la fourniture des matières premières
par les possessores, et la livraison du canon exigé des corpo-
rali K
1 C. Th., 10, 19, 1. 0. 7. 9. 10. 11. 43. 10, '20, l. -2. 4. 6. 10. 12. 10, Tl.
1. 2. 6.
•
^^VJ
CHAPITUE IV
PRIVILÈGES ET AUTRES AVANTAGES ACCORDÉS
AUX CORPORATIONS OFFICIELLES.
INTKODUCTION. — § 1. PIUVILÈGES I O) DU l^"" AU IIl« SIÈCLE; b) AU 1V«
ET AU V-e SIÈCLE. — § 2. AUTRES AVANTAGES ! SALAIRE; EPIMETBON ;
MONOPOLE ; ETC. — § 3. HONNEURS.
»
Malgré toutes les restrictions à la liberté, malgré toutes les
charges dont ils ne pouvaient pas s'affranchir, les corporati et
les collegiati doivent être rangés dans la classe des hommes
libres. Nous avons montré que, même dans les boulangeries,
dans les manufactures, dans les mines et les carrières, les
véritables membres des corporations jouissaient de la liberté ;
ils ne ressemblaient pas aux colons ou serfs, qui formaient une
classe intermédiaire entre les hommes libres et les esclaves. Si
l'on trouve des esclaves dans les boulangeries et ailleurs, il
faut admettre qu'ils sont au service du collège sans en faire
partie ^.
Les corporati avaient, sauf les restrictions connues, tous les
droits civils et politiques, tous les droits personnels et réels du
citoyen. Ils avaient leur patrimoine, qu'ils possédaient /;/'Ù7i/(;
jure et qu'ils administraient en général librement, puisqu'ils
pouvaient faire personnellement faillite '^. Ils pouvaient aliéner
leurs biens de leur vivant, par vente ou par donation, et ils en
* Voyez supra, pp. 245-246.
2 Voyez stipra, p. 281, n. 4. 290, n. l.
(394 )
disposaient par testament '. Ils pouvaient acquérir eux-mêmes
par tous les moyens du droit civil. Ils contractaient un mariage
légitime, malgré les entraves diverses mises ù leur choix ; leurs
femmes avaient une dot; les conjoints pouvaient hériter l'un
de l'autre; leurs enfants avaient des tuteurs, et ils pouvaient
eux-mêmes être chargés d'une tutelle. Ils étaient sous la juri-
diction du magistrat civil ordinaire. L'empereur daigne sou-
vent leur écrire directement, comme il écrit au sénat et au
peuple. On leur défend seulement de soustraire leurs biens au
service, de choisir pour eux ou pour leurs enfants une autre
vocation, de changer de domicile. C'était la condition de pres-
que tous les habitants libres de l'Empire, et les curiales n'étaient
pas mieux traités qu'eux. Les sénateurs mêmes ne disposaient
pas librement de leurs biens et ne pouvaient quitter à leur gré
la capitale!
Si la nécessité du service avait amené les empereurs à
diminuer la liberté des corporatiy elle les avait engagés aussi à
leur accorder de nombreuses immunités et toutes sortes d'avan-
tages, si bien que, sous d'autres rapports, ils comptaient
parmi les citoyens privilégiés de l'Empire.
Ces avantages sont de nature fort diverse. Ce sont : 1° des
privilèges consistant surtout en immunités des charges publi-
ques; 2" des indemnités ou salaires en argent ou en nature,
epimetra, monopoles, jouissance de lieux et édifices publics,
dotations, etc.; 3*^ des honneurs; 4° enfin la personnification
civile plus ou moins étendue accordée aux collèges. Nous allons
les examiner successivement.
§ 1. Privilèges.
Il faut d'abord se faire une idée exacte des privilèges. Les
premiers ne furent que des encouragements accordés aux com-
' Nous avons vu {supra, p. 375) qu'on finit par le défendre aux pistores .
C. Th., 14, 3, 1. 13 (369).
( 395 )
merçants et aux artisans utiles -d l'Etat ou fi la ville. A mesure
que les collèges prirent place clans Tadministralion et que se dé-
veloppa cette idée qu'ils remplissaient un service public, les pri-
vilèges revêtirent un autre caractère. Accomplissant seuls, par
l'exercice de leur métier ou par leur commerce, une véritable
charge publique, dont les autres citoyens étaient exempts, les
collèges parurent avoir le droit d'être dispensés, eux aussi, de
certaines charges. Cette idée se lit jour de bonne heure. Mérita
placidt, dit Callislrate en parlant des naviculaires et des négo-
ciants, lit qui pcregre muneribus et quidem publicis ciim peri-
culo et labore fiiugantiir, a (lome^itiris vejcationibus et siimptibus
liberentxir : ciim non sit alienum dicere etiam lias reipublicae
causa, diim annonae urbis serviunt , abesse ^. On avait dérogé, à
leur désavantage, i^ la règle de l'égale répartition des charges :
on trouva juste d'y déroger aussi en leur faveur. Au IV® siècle,
les privilèges avaient encore la même signification. A tout
moment le service des corporati est qualitlé de functio, niunus
publicum, omis jniblicum''^, et les immunités sont considérées
comme une compensation destinée à faciliter ce service. Ce
n'était pas leur intérêt, mais l'intérêt public qu'on voulait
favoriser; on voulait mettre les corporati des deux capitales
surtout en état de supporter les charges si lourdes que néces-
sitait l'administration de ces deux villes : îSoverat Iwriim corpo-
rum mini.slerio tantae urbis ancra sustineri '^. Combien de fois
' DiG., 50, 6, 6 (5), § 3. Voyez supra, pp. 49. 256 et 250, n. 1. Cfr. Dig.,
/. /., § 12 : idcirco instiluta .mut, ut necessariam openun publicis utilita-
tibus exhibèrent.
^ Functio, functio navicularia : C. Th., 6, 2, 1. 19. 13, 5, 1. 3. 14. 18.
28. 35. 36. 13, 6, 1. 3. 4. 8, 4, 1. 11. 12, 1, 1. 134. Munus : C. Th., 13, 5,
1. 3. 5. 19. 27. 15, 14, 1. 4. ~ Pour les pistores, on dit immus : C. Th., 13,
5, I. 2. 14, 3, 1. 6. 18. 0/Jicium : C. Th., 14, 3, 1. 3. Debituni o/ficiiim :
G. Th., 14, 3, 1. 21. Functio : C. Th., 14, 3, l. 12. Nécessitas : C. Th.. 14,
3, 1. 3. 5. 14. — Pour les suarii, mumis publicum : C. Th., 14, 4, 1. 8, § 2.
— Pour les calcis coctores, onus publicum : C. Th., 14, 6, 1. 2. — Nov.
Sev., lit. 2 : corpora publicis obsequiis deputata. Cfr. supra, p. 272.
•' SvMM., Rel., 14. Epist., X, 27. Voyez supra, p. 26, n. 1.
éU'wletn Ivs f»ri%il«-^
éerrnelle « ». « ^lar ron
vénrralil..i ,,N ^^^^^^
niainlien lies |.. ^. , ,f,. •
(listribucions publique^H -\ i
Ci'iU' ville. 5i elles aillent ru
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* C. Th.. 14.' i .
* NïWll., l. l
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Cfr. I. 4 : .
VAl.£FrT. Ill.ut ,i5 ,g^^
corttn-r.f
( -m }
«h^ son règne, ne les rétablisse, les ronfirme ou les augmente.
Le grand nombre de ces constitutions prouve la peine que les
collèges avaient de faire respecter leurs privilèges; en effet, c'est
souvent sur les plaintes des intéressés que les princes inter-
viennent 1. Et cependant la compensation qu'ils donnaient
était mince alors, malgré leur nombre toujours croissant :
(c II est manifeste, dit encore Symmaque, que les Romains
paient cher leur antique privilège et que c'est au prix d'une
perpétuelle servitude qu'ils ont acheté une immunité nominale!
iAquet privilegium velus magno inpcndio constare Romanis ; jxuji
obsetjuio immunitatis nomen emcrunt ». "^
Comme 1(^ privilèges ne diffèrent pas seulement avec le
temps, mais aussi avec les collèges, nous croyons utile de dis-
tinguer ici encore deux époques, et de considérer chaque cor-
poration à part.
Privilèges du /«*• au Ill« siècle.
A cette époque -^ il ne reste pas de traces de privilèges
accordés à la fois à tous les collèges utiles indistinctement.
Nous savons seulement que depuis Caracalla tous les collèges
de l'annone eurent l'exemption de la tutelle ^.
Les plus favorisés, ce furent dès lors les naviculaires ou
' G. Th., 13, 5, 1. 16. 36. 37 {navic). U, % 1. 2 et 3 {wrporati U. H.).
U, 4, 1. 6 [suarii).
- Symm., /. /.
•'• Les privilèges accordés par des constitutions impériales étaient pré-
cieusement conservés dans des scrinia. Ces cassettes sont figurées sur
deux sculptures antiques reproduites par Mommsen, dans la Zeitschrift fur
Rechtsgescli., Rom. Ablh., XII, 1892, pp. 147-149; elhîs portent cette
inscription : Constitutiones, corpons munimenta. C. I. L., VI 29814.
-29815. — Sur les privilèges, voyez : DiG., 27, 1, 17, § 2. 3. 6. 27, 1, 26. 41,
§ 3. 46. 50, 4, 5. 50, 5, 3. 9. 10. 50, 6, t. 6 (5), §§ 3-13. Fragm. Vat., §§ 175.
233-237. Gaius, I, 34. Et les auteurs que nous allons citer.
* Fragm. Vat., 236 (Supra, p. 90, n. 3).
( 398 )
armateurs. Avant même de faire des contrats avec les arma-
teurs, les empereurs accordèrent des encouragements à tous
ceux qui concouraient aux approvisionnements de Rome. Plus
tard, ceux d'entre eux qui se firent entrepreneurs des trans-
ports publics n'eurent pas de faveurs spéciales. Ce que nous
allons dire se rapporte donc à tous les armateurs qui desser-
vaient l'annone, qu'ils fussent membres d'un collège ou non.
C'était une vieille habitude de récompenser par des privi-
lèges ceux qui aidaient l'annone dans des circonstances diffi-
ciles. En l'an 21o, trois compagnies se chargèrent d'approvi-
sionner l'armée des deux Scipions en Espagne; on les exempta
du service militaire pendant la durée de ce service public et
toute la cargaison de leurs navires fut assurée par le trésor
contre les ennemis et contre la tempête i. Ce fut un cas pas-
sager. Les premières immunités permanentes furent accordées
par Claude. La famine régnait à Rome; une sédition avait
éclaté et fait courir de grands dangers à l'empereur lui-même.
Claude, effraye, prit des mesures pour éviter à l'avenir de
pareils désagréments. Il encouragea la construction des vais-
seaux de commerce : par un édit, il promit divers avantages aux
propriétaires d'un navire d'une capacité de 10,000 boisseaux, qui
auraient transporté pendant six ans du blé à Rome; il accorda
le droit de cité aux Latins, l'exemption de la loi Papia Poppaea
aux citoyens et le jus trium liberorum aux femmes '^. Comme on
voit, ces faveurs étaient réservées aux citoyens et aux Latins;
c'étaient eux que Claude voulait encourager à concourir aux
approvisionnements de Rome. D'ailleurs, le cas échéant, on
* Liv., 23, 48^9.
2 SuET., Claud., 18-19 : Nihil non excogitavit ad invehendos etiam tem-
pore liiberno commeatus. Nani et negotiatoribus certa lucra proposuil,
suscepto in se damno, si cui qiiid per tempestates accidisset, et naves mer-
caturae causa fabricantibus magna commoda constituit pro conditione
cujusque : civi vacationem legis Papiae Poppaeae, Latino jus Quiritium,
feyninis jus III liberorum; quae constituta hodieque servanlur. Dessau dit
à lort qu'il s'agit des (abri navales Porluenses {C. I. L., XIV, p. 8).
( m )
pouvait requérir les navires des provinciaux i. L'édit de Claude
était encore en vigueur au temps de Gaius et d'Ulpien, c'est-j'i-
dire dans la seconde moitié du II« siècle et au commencement
du IIl« 2.
A l'époque d'Hadrien, tous les armateurs jouissaient déjà de
privilèges plus étendus; un rescrit de ce prince rappela que
les navires employés aux approvisionnements de Rome procu-
raient seuls l'immunité [immunilatcm naviiim maritimarum 3),
et cette immunité, c'était l'exemption des charges munici-
pales '*. Depuis Trajan, tous les empereurs s'en occupèrent : à
l'époque de Callislrate, sous Seplimc Sévère et Caracalla, cette
immunité avait été réglée définitivement ^^ et le Digeste rap-
porte les mesures prises successivement G.
Il en résulte que l'immunité accordée aux naviculaires '',
c'est-à-dire à ceux qui mettaient leurs navires au service de
l'annone ^, était des plus larges. On l'appelle simplement
* Pigeonneau, De conv., pp. 4749.
2 Gaius, Inst., I, 32«^. Ulpian., Fragm., III, 6. Gaius dit : Item ediclo
[divi] Claudii Lalini jus Quiritium conseciintur , si navem marinam aedi-
ficaverint, quae non minus quam decem milia modiorum \fnimcn]ti captât,
eaque navis uel quae in ejiis locum substituta [sit, sex] annis (rumentum
Romamportaverit.
3 DiG., 50, 6, 6 (5j, § 5 : Divus Uadrianus rescripsil immunitateni
navium maritimarum dumtaxat habere, qui annonae urbis serviunt
(Callistratus).
* Sur les charges municipales, voyez supra, pp. 216-218.
^ Ibid., §4: Immunitali, quae naviculariis praestalur, certa forma data
est : quam immunitatem ipsi dumtaxat liabent, non etiam liberis aut
Liber tis eorum praestatur : idque principalibus constitutionibus declaratur
(Callistratus).
c DiG., 50, 2, 9, § 1. 50, 4, 5 50, 5, 3. 50, 5, 9, § 1. 50, 6, 1. 50, 6, 6 (5),
§§ 3-13.
" DiG., 50, G, 6 (5), § 4 : immunitati quae ?iaviculariis praestatur. § 0 :
privilegio naviculariis indulto. § 13 : iminunitas naviculariorum.
8 DiG., 50, 0, 6 (5), § 5 : immunitas navium maritimarum. § 3 : qui
annonae urbis serviunt. § 6 : navem tamen vel naves {si) non kabeat. 50, 5.
3 : muneris publici vacatio praestatur ob navem. Cfr. supra, pp. 48 et
ci-dessus, n. 2.
( 400 )
immunitas, ou muneris jmblici vacatio, immunitas a muneribxis
cmlibus ou municipalibiLS ou jmblicis ^, et ces charges munici-
pales étaient ou personnelles ou patrimoniales. Javolenus nous
dit que l'exemption des charges publiques n'entraînait pas celle
des magistratures 2; mais il est certain que l'immunité des navi-
oulaires comprenait la dispense des honneurs et de la curie,
aussi bien que celle des charges patrimoniales 3. Paul rapporte,
en effet, que, suivant un décret de Sévère, il n'était pas douteux
que les naviculaires ne pussent se soustraire au décurionat ^.
Callistrate dit que les naviculaires qui consentent à devenir
décurions doivent assumer les charges qui en découlent; ils
pouvaient donc refuser d'entrer dans la curie ^. Il dit encore
qu'on les exemptait des « vexations et des dépenses domes-
tiques », parce qu'ils étaient « absents pour le service
public » (j; enfin, il fait observer que l'affiliation à un collège
ne dispense pas des « honneurs » obtenus auparavant; donc
elle dispensait de les accepter après '^. Enfin, le privilège des
* DiG., 50, 4, 5 (ScAEVOLA) : muneris publici vacatio. De même : 50, 5, 3
(Scaevola). Immunit alem a munerihus civilibus (Dic, 50, 6, 1), ou muni-
cipalibus (DiG., 50, 6, 6 (5), § 7), ou publicis (DiG., ibicl., §§ 3. 8. 13);
mimera civitatium (§ 12;; mimera [^ 9j; AsoToopytaç (§ 6).
2 DiG., 50, 4, 12 : Cui muneris publici vacatio datur, non remitlitur
ei, ne magistratus fiât, quia id ad honorem magis quam ad munera
pertinet, etc.
5 Ce n'est pas un honneur qu'on leur fait; comme pour les fermiers des
impôts, l'exemption leur est accordée, ne extenuentur facultates eorimi
(DiG.,50, 6, 6(5), § 10).
^ DiG., 50, 2, 9, § 1 : Severus Aiigustus dixit : — Non esse dubitandiun ,
quin navicularii non debent decuriones creari.
''' DiG., 50, 6, 6 (5), § 13 : Eos, qui in corporibus allecti sunt, guae
immimilatem praebent naviculariorum, si fionorem deciirionatus adgno-
verint, compellendos subire publica munera accepi : idque etiam confirma'
tum videtur rescripto divi Pertinacis.
f' DiG., Ibid., § 3. Voyez supra, p. 49, n. 4.
' DiG., Ibid., § 7 : Hoc circa vacationes dicendum est, lU, si ante quis ad
munera municipaUa vocatus sit, quam ncgotiari inciperet, vel antequam
in collegium adsumeretur quod immunitatem pariât, — compellatur ad
honorem gerendum.
{ 401 )
naviculaires est mis sur le même pied que celui des négo-
ciants • ; or, Paul dit expressément que ce privilège comprend
la dispense des honneurs '^.
Si les privilèges se multipliaient et s'étendaient, les exigences
croissaient aussi. Il fallait posséder un navire de 50,000 bois-
seaux ou cinq d'au moins 10,000, naviguant depuis cinq ans;
il fallait, de plus, consacrer à ce service la majeure partie de
sa fortune et augmenter le capital engagé à mesure qu'on s'en-
richissait; il fallait enfin être personnellement armateur ou
duminiis navis 3.
Ces privilèges étaient temporaires : on les perdait, si l'on
cessait de servir l'annone '*, ou si Ton n'augmentait pas le capital
engagé à mesure qu'on devenait plus riche j. Ils étaient per-
sonnels : ils ne s'appliquaient pas aux affranchis ni aux
enfants et ils ne passaient pas aux héritiers ^. On n'était pas
, furent aussi de bonne heure encouragés.
Suétone rapporte qu'Auguste, en prenant des mesures pour
assurer l'annone, fit en sorte de ménager les intérêts des
cultivateurs et des marchands aussi bien que ceux du
peuple G.
En l'an 19, Tibère abaissa le prix du blé, sur les plaintes de
la plèbe ; mais il eut soin de rembourser aux marchands la
différence entre l'ancien prix et le maximum lixé par lui, soit
deux sesterces par modius, c'est-à-dire 40 centimes par déca-
« DiG., oO, 6, G (5), îî 7.
2 DiG., 50, 6, 1, pr. 50, 6, 6 (5), §§ 6 et 9. Voyez supra, p. 46.
5 DiG., 27, 1, 17, § 2 (Callistratus) : Eos, qui incorporibus sunt veluti
fabrorum, immunitalcm habere dicimus etiam circa tutelarum exterorum
hominum administrationcm, nisi si facultates eorum adauctae fuerint, ut
ad cetera quoque munera publica suscipienda compellantur : idque princi-
palibus constitutionibus cavetur. § 3 : Non omnia tamen corpora vel colle-
(fia vacationem tutelarum habent, quamvis muneribus municipalibus
obstricta non sint, nisi nominatim id privilegium eis indultum sit. § 6 :
Domini navium non videntur habere inter privilégia, ut a tutelis vacant,
idque divus Trajanus rescripsit. Cfr. Fragm. Vat., 235 [infra, p. 404, n. 3j.
^ DiG., 50, 5, 9, § 1. Voyez supra, p. 401, n. 2.
^ DiG., 50, 4, 5. Voyez supra, p. 401, n. 3.
*^ SuET., Auy., 42 : aratorum ac negotiantium.
( im )
litre '. Lors de la sédition (|ui éclata sous Claude, ce prince,
pour assurer les arrivai^es en hiver, établit une sorte d'assurance
contre les tempêtes : il prit sur lui les d(jniniages causés aux
marchands par la mauvaise saison -. Néron fixa aussi un maxi-
mum'! ; pour faciliter les approvisionnements d(; Home et de
l'Italie, il dispensa de rimp(U dirci-t Krn.sus) et du Iribnlum
les navires des provinciaux qui faisaient le trafic des blés 'K
Trajan fit plus : il semble (pj'il supprima toute indiction
extraordinaire et tout achat fait au nom de l'État; quand le
canon était insutiisant, il s'adressait aux négociants privés •>.
Sous les Antonins, ceux-ci possédaient, comme les naviculaires,
l'exemption des honores et munera dans leurs municipes, s'ils
desservaientRome,etconsacraientà ce commerce la plus grande
partie de leur fortune ''. Au commencement du 111^ sièch',
Alexandre Sévère (2:22-23o) fait de nouveaux eflbrts pour
attirer les négociants en grains à Rome; il leur accorde les
plus larges immunités ~.
Uuant aux marchands d'huile, Scévola rapporte qu'ils obte-
naient également la racatio niiinciis publiri , après cinq ans de
* Tac, Ann.j !2, 87 : aaeviliam annonae incusante plèbe, statuil fru-
rnenlo pretiinn, quod emptor penderet, binosque niimmoa se additiirinn
in singulos negoliatoribus modios.
- SUET., Claiid., 18-19 : voyez supra, p. 398, n. ^.
^ Tac, Aun., lo, 39 : pretiumque [lumenti minulum usijue ad ternos
nummos.
■' Tac, A)in., 13, ol : Tewperala apud traitsmarinas provincias fru-
inenti subvecUo; et ne censibus negotiaiorinn naves adscriberentur tribu-
lunKjue pro itlis penderent, constitutum. Les citoyens ne payaient pas le
censiis.
'•' Plin., Paneg., '29. \o\ez supra, p. 44.
c DiG., 30, 5, 9, § 1. Voyez supra, p. 101, n. ^2. Dk.., .^0. 6, 6 (o), § 3.
Voyez supra, p. 49, n. 4. DiG., Ibid., $;§ 7 et 8.
" Lami'R , Al. Sev., 22 : Commeatum populi Romani sir adjuvit ut,
cum jrumenta Heliogabalus evertisset, hic empta de propria peeuma loco
suo reponerel. 11 s'agit de réserves accumulées dans les ma^Msins. ^ego-
tiatoribus, ut Homatn volentes concurrerent, maximum immunitatem
dédit. Ibid., 32: aurum negotiatorium et eoronarium Romae remisit.
( 404 )
commerce, s'ils y consacraient une a grande » partie de leur
fortune '. Les boulangers reçurent probablement leurs pre-
miers privilèges de Trajan, qui réorganisa leur corporation. Ce
prince mit une sorte de prime sur le métier, en décidant que les
Latins qui auraient une boulangerie depuis trois ans à Rome et
feraient cuire au moins trois cents boisseaux par jour, obtien-
draient ]e jus Quiritium -. De plus, il accorda Texemption de la
tutelle aux membres du collège (qui in collegio pistorum suiU);
mais ils devaient exercer eux-mêmes le métier et posséder une
boulangerie; moudre et faire cuire par jour au moins cent bois-
seaux de blé [centcnariuiu pislriuum); enfin, figurer sur la liste
dressée par l'administration [numerus). 11 fallait un certificat du
préfet de l'annone constatant qu'on remplissait ces conditions-^».
' DiG., 50, 4, D. Voyez supra, p. 401, n. 3.
- Gaius, I, 34. Voyez supra, p. 81, n. 1.
^ FiiAGM. Vat., 233 (Ulpianus) : Qui in collegiu pistorurn mut, a tutelis
excusantur, si modo per semet ipsos pistrinuw e.xerceant, sed non alios
puto excusandos, quam qui intra numerum comtiluti centenarium pistri-
mnn secundum litteras divi Trajani ad Sulpiciinn Similem exerceant. Quae
omnia litteris praefecti annonae signijicanda sunt. 234 (Ulpianus) : Sed
Ostiemes pisiores non excusantur , ut Filumeniano imperator noster
(Caracâlla) cum pâtre rescripsit. Ct'r. Gaius, I, 34 {supra, p. 81). Similis
fut préfet de l'annone sous Hadrien (Cass. Dio, 69, 19. Hist. Aug., Hadr.,
19. HiRSCHFELD, Amionu, p. 30. Borghesi, III, 127). Sur centenarimn
pistriuum, voyez supra, p. 81. Lacour-Gayet, Antonin le Pieux, p. 70,
croit à tort que le nombre des boulangers était fixé à cent. — Fragm.
Vat., 235 (Ulpianus) : Urbici pistores a collegarum quoque filiorum tutelis
excusantur, quamvis neque decuriales, neque qui in ceteris corporihus sunt,
excusantur. Et ita [divi] Hadriani rescripto ad CL Julianum praefectum
annonae signifwatur ; quam cpistolam quodani rescripto ad \ernam et
Montamun pistores imperator noster (Caracâlla) cum pâtre interpretatus
est et ad pistores per tinere, cum eo negotio {collegio?) frumentuni agent ibus
{i. e. coementibus) daretur a collegarum filiorum tutelis vacatio. Plus etiam
imperator noster induisit, ut a tutelis, quas susceperant, antequam pis-
tores essent, excusarentur. Sed hoc ah ipso créa tis pis tor ibus praestitit; ita
et Marco Diocae{?) pracfecto annonae rescripsit. ^31 (Paulus) : Urbici autem
pistores a collegarum quoque filiorum tutelis excusantur. — Dig., 27, 1,
a
( 40o )
Au commencement du III'' si»''cle, la situation n'était pas
changée, comme l'atteste Paul. Depuis Hadrien, les boulangers
sont même dispensés de la tutelle des enfants de leurs collègues,
et Ton entend pai' collègue un membre de la même corpora-
tion, et non un artisan du même métier, le père de ce dernier
eût-il fait partie d'une autre corporation '. Les membres des
autres collèges n'avaient pas cet avantage '-^. Caracalla permit
même aux nouve/dux pistores de se soustraire aux tutelles, dont
ils auraient été chargés avant d'embrasser cette profession :
c'était un moyen de les attirer. Ces privilèges étaient du reste
l'apanage exclusif des boulangers de Rome [nrbici pistorcs-,
ainsi, les pistores (htienses ne pouvaient y prétendre •'.
Marc Aurèle et Commode, par un rescrit au préfet de l'an-
none, accordèrent aux mesureurs L'exemption de la tutelle ''.
Paul nous apprend que ceux de Rome étaient aussi exemptés
des charges patrimoniales, mais non ceux des provinces -k
Caracalla accorda le premier Ve.vcusatio tutelae aux charcu-
tiers de Rome [suani], à condition de consacrer à l'annone les
46 (Paulus) : Qui in collegio pisLorum sicnl, a tutelis cxcusanlur , si mo(h>
per semet pisti'initn} exerceant : sed non alius puto excusandos quam ijui
inlra nnmerum sunl. Vrbid autem pistores a collegarum quoque filioruni
lulelis cxcusautar.
^ Fragm. Vat., 173 (L'LPiAxrsj : Collegas eo[s liaberi non opurlel, (jui
licet eandon artem] exerœanl, ijuani pater [factitabaf, tiunoi ejiisdt'ni
colleyii )ion siint, in] quo pater piipillariun ex[ercebat].
'^ DiG., 27, i, 41, § 3 (Hermogenianus) : Quicorporis, item coUegii jurr
excusantur, a collegarum filiorum tiitela non excnsantur, exreptis liis,
quibus hoc specialiter tributum est. Cfr. Fragm. Vat., 235. 237.
•■^ Fragm. Vat., 234 (Ulpianus) : Sed Ostienscs pistores non excusa mur,
ut Filumoiiano imperator noster (Caracalla) cum paire rescripsit.
^ DiG., 27, 1, 26 (Pavlus) : Mcnsores frumentarius fiabere jus excusa-
lionis apparet ex rescripto diivrum Marri et (lommodi, quod rcscripscruul
praef'ecto annonae.
2 DiG.. oO. 5, 10 (Paui>us) : Ab fus oneribus, quae possessionilnus vel patri-
monio indicuntur, nulla privilégia praestant vacationem. S 1 : Corpus
mensurarum {mensorum?) frumenti juxta anno)iatn urbis fiabent vacatic-
netn : in provinc.iis non idem (item?).
( 406 )
deux tiers de leur patrimoine. Ils devaient avoir un certiticat
du pracfechis aunonae. Ulpien, qui rapporte ce rescrit, con-
state que la même immunité était alors octroyée à tous ceux
qui desservaient Tannone '.
Enfin, à l'époque de Callistrate, toutes les corporations
d'utilité publique jouissaient de certaines immunités peu con-
nues, mais dont les principales étaient l'exemption des charges
municipales et de la tutelle Ce jurisconsulte cite en particu-
lier les corpora fabrorum et s'exprime d'une façon tout à fait
générale : Qiiibusdam collegiis vel corporibus, quibus jus coeundi
lege pennissum est, immiinitas tribiiitur, scilicet Us collegiis vel
corporibus, in quibus artificii sui causa unusquisque assumitur,
ut fabrorum corpus est, et si qua eandemrationem originis liabent,
id est idcirco instiluta sunt, ut necessariam operam publias utili-
tatibus exhibèrent -.
Remarquons que Callistrate ne parle pas seulement des cor-
porations de Fannone , mais de tous les collèges d'utilité
publique, et il s'agit sans doute des collèges municipaux aussi
bien que des autres. Le corpus fabrorum, qu'il cite, existait dans
presque toutes les villes, et nous savons que ses membres
étaient dispensés de la tutelle à l'époque de Callistrate '\ Mal-
heureusement, nous n'avons guère de détails sur les corporati
des villes h cette époque. Nous apprenons seulement, par une
inscription, que les dendrophores de Brixia jouissaient d'une
immunité, qui n'est pas spécifiée K
1 Fragm. Vat., 230 [Supra, p. 90, ii. 3). 237 (Paulus) : Sed et si qui in
foro suario negotiantur, si duabus partibus patrimonii annonam juvent, a
tutelis liabent excusationem.
2 DiG., oO, 6, 6 (5), ^- 12. Voyez supra, p. 253.
5 DiG., 27, 1, 17, § 2. Voyez supra, p. 402, n. 3. — Sous Élagabale, la
navigatio scapfiarum est assurée au corpus piscatorum et urinatorum
totius alvei Tiberis (VI 1872). Voyez supra, p. 77.
^ V 4341. Le collège honore un juridicus region{is) tran[spad{anae)],
quodejus iiulustyia immunitas collegi nostrisil confirma[ta\. Voyez le pre-
mier volume, p. 439, n. 3.
, iOT
Avant (le passeï- au IV^ siècle, insistons suitc f)()int que tous
, les princes n'accordèrent pas beaucoup de
privilèges nouveaux. Leurs constitutions, qui se succèdent
d'année en année, ne font guère que confirmer les anciens, et
souvent ils font allusion aux décisions de leurs prédécesseurs,
ils rappellent les « antiques constitutions », les décisions
a innombrables » prises avant eux sur la même matière ''. Il
< Fragm. Vat., -233. 236. Dig., oO, 6, 6 (5 , i^J; 6. 8. 9.
' Fragm. Vat., ':233 : quae omnia lilteris praefecti annoiiae signijicanda
sunt. § 236 : habent excusationem allatis [a praefecto] urbis testinionialilms
negotiationis. On voit ici que les suarii devaient s'adi'esser à la praefec-
lura urbis.
5 Voyez surtout : Kuhn, I, pp. 7o sqq. Dirksen, pp. lOo-ltO. Hoidoy.
pp. 504-512. Bouchard, p. 319. Gebhardt, pp. 75-85.
■^ G. Th., 13, 5, 1. 16 (Gratien, en 380) : innumerabiliuni sa?ietionn)u —
priscae eonstitutiones. 14, 2, 1. 1 Valentinien V^\ en 364' : priscarunt
- iOt) )
«'st (loue i^'(*n(''ralenî<'nl impossible d'iiidirjuor 1rs auteurs des
privilèges f|ue nous allons cnuïnt'Ter. D'autre part, malgré
l'extension des immunités de tout»; nature, les collèges ne sont
pas encore également favorisés; c'est ainsi que les suarii ne
furent exemptés des mioicra sordida cl exlraordinaria que par
Oratien ', alors (jue les navieulaires en étaient dispensés depuis
longtemps -. Uuand Valenlinien l^"" et llonorius confirment
d'une façon gént-raie \v<, privUrfjïa torponitorum urbis liomae,
en 364 et en. 397, ils veulent (jue chaque (,'or[)oration conserve
les siens '■>.
Il y avait cependant certains (privilèges communs à tous les
collèges de la ville de Home '«. C'étaient :
l*» L'exemption de la tuielle iexcmalio Intelae) '■>;
±' Celle des munera sordida et e.rlraurdinaria •»;
3<^ La col lai io equorum ~ ;
4*' La milice armée. Sous la république, c'était un honneur
de défendre la patrie, les armes à la main; aujourd'hui,
l'exemption du service militaire est un privilège accordé à tous
les citoyens de llome, et particulièrement aux corporati, qui
n'étaient astreints qu'à la garde et à la réparation des murs et
des portes! Et Valentinien III rappelle cette immunité au
moment oîi Censéric et les Vandales étaient en Sicile 8. Immu-
leyiDii caiilio, vel aniecedcnliiun principiun huiiuuiilas. 14. 6, 1. ^ (364j :
prisca atqiie inveleruta comuetudine. Immunités confii*mées : 13, o, 1. 10.
14. 2o. 14, -i, 1. 1. 3. 14, 3, 1. 18. 14. 4, 1. 6.
' C. Th., 14, 4, 1. 6.
'^ C. Th., 13, 5, 1. 5. 17.
3 C. Th., 14, % 1. 1. 3.
*' C. Th., 14, ^1 : De privilegiis corponilornni nrhis Romac, et le Para-
titlon (le GoTHOFK.
2 P'RA(iM. Vat,. !236 : vinmuiitatem, quue data est hi,s, (jui annonam
populi Romani juva)tt (L'i.pienj. Voyez supra, p. 90, ii. 3
« C. Th., 14, 2, 1. 2(391) : yulli sit liberum, nulli permissmn, ut novutti
aliquid urbis incolae in urbe sustineant. C. J., XI, 14 (lo , 1, pr.
' SY.MM., Relat., [AiEpist., X, "27). On y voit que ces privilèges n'étaient
pas toujours observt;s. Cfr. Goihofk. ad C. Th., 14. 2, 1. 2.
« Nov. Val. IH, tit. :;, §§ 2 et 3 ,44^) .
( 410 )
nité dérisoire, du reste, car on fut obligé d'interdire aux cor-
porati l'accès de l'armée, parce qu'ils préférèrent la milice à
leur service.
o" Les étrangers qui venaient à Rome, même les étudiants,
ne pouvaient y faire qu'un court séjour ; sinon, ils étaient ren-
voyés dans leur ville natale. Par une faveur spéciale, les étu-
diants enrôlés dans n'importe quelle corporation ne pouvaient
être inquiétés i.
6° Comme habitants de Rome ou de Constantinople, les
corporati étaient sous la juridiction du préfet de la ville -.
Dans les provinces, comme dans la capitale, aucun autre
magistrat ne pouvait juger leurs procès civils, ni les frapper
d'une amende, ni leur faire infliger une peine corporelle par
ses appariteurs. Ce n'était pas un privilège des corporati, mais
de tous les citoyens des deux capitales. Cependant les corpo-
rati de la ville très sacrée étaient particulièrement protégés
contre l'arbitraire; en effet, le gouverneur et le praefectîis urhi
qui laissaient violer ce droit, étaient menacés de la destitution;
les appariteurs qui exécutaient la sentence étaient adjugés pour
toujours à l'office du praefectus vigilum 3.
Voici maintenant les privilèges de chaque corporation.
C'étaient toujours les naviculaires qui avaient les immunités
et les faveurs les plus considérables ^K D'après une loi de Con-
stantin, en 326, tous les naviculaires de la terre sont pour tou-
* C. Th., 14, 9, 1. 1 (370; : his diuitaxat exceptis, qui corporatorum siuit
oneribus adjuncti.
2 Voyez supra, p. 380.
3 C. Th., 1, 6, 1. 11 (453). 1, 10, 1. 4 (391) = C. J., I, 28, 4. G. J., XI, 16
(17), 2 {suarii, en -408).
* Voyez GoTHOFR.. vol. V, p. 65, et son commentaire des lois qui vont
être citées. Sur les trente-huit Gonstitutions du titre des Naviculaires
(13, 5), il y en a treize qui parlent de leurs privilèges. Gonstantin : 1. 4
(324). 5 (326). 7 (334). 8 (336). 16. Gonstance : 1. 9 (357). Julien : 1. 16.
Valentinien I^r : 1. 10 (364). Valens : 1. 14 (371). Gratien : 1. 16 (380);
cfr. 13, 6, 1. 3. Valentinien II : 1. 17 (386). Théodose le Grand : 1. 23 (393).
llonorius : 1. 24 (395). 1. 25 (395). 1. 30 (400). 1. 31 (404). 1. 36 (412).
( ill )
jours dispensés ab onunbus (nu'ribus et mii)ieribus '. Ailleurs on
entre dans les détails.
1. Mimera civilia. \a\ plupart des naviculaires étaient
citoyens ou incolae d'une ville de province; comme tels, ils
auraient dû remplir toutes les fonctions municipales, si oné-
reuses alors, et se soumettre à toutes les charges personnelles
et patrimoniales que les habitants des villes devaient subir au
profit de l'Etat ou de la cité. Comme les propriétaires de
navires aux premiers siècles, les naviculaires du IV*^ étaient
exemptés de tous les mimera civilia, mimicipalia ou publica,
tant des honneurs que des charges personnelles ou patrimo-
niales 2. Ainsi, ils n'avaient pas à craindre le décurionat «^
tandis que leurs collèges trouvaient des recrues parmi les
curiales K
2. Exciisatio tutelae. La tutelle était regardée comme un
7nunus publicum. En 334, les naviculaires de l'Orient furent
* C. Th., 13, 5, 1. 5 (326). 1. 17 (386). — Les privilège.^ sont accordés à
tous les naviculaires de l'Empire (1. 5) ou en particulier à un collège : aux
Hispani (1. 4. 8), aux Africain (1. 10. 14. 16 24. 30. 36', aux Ale.vandrini
{l. 7), aux Orientales (1. 7. 14). Les privilégia Aj'ricana (1. 14, § 3) et ceux
d'Alexandrie (1. 'J) servent de modèles pour les naviculaires d'Orient, et
l'on peut admettre que les privilèges, quoique séparément octroyés ou
confirmés, sont les mêmes pour tous. — La loi 30 (du G. Th., 13, 5) fut
rendue le IS juin 400, après la révolte de Gildon, pendant laquelle les
privilèges des naviculaires d'Afrique avaient été méconnus. Le proconsul
d'Afrique était alors Gabinus Barbarus Pompeianus, et c'est à lui que la
loi est adressée. C'est probablement à cette occasion qu'un ^.r tiransvectu-
rarius) et nav[icularius) de Neapolis (Nebel) lui éleva une statue : C. /. L.,
VIII 969. WiLMANNS, ibid. Tissot. Fastes de la province d'Afrique,
pp. 278-279. Gfr. C. L L., VIII 970.
2 C. Th., 13, 5, l. 7. Constantin aux naviculaires d'Orient : llaec vobis
privilégia credidinuis deferenda, ut naviridarii omnes a civilibus muneri-
bus et oneribus et obsequiis habeantiir immunes, et ne lionores qiiidon
rivicos, ex quibus aliquod incommodum sentiant, subire cogantur.
3 C. Th., 13, 5, 1. 16, § 1 (380) : Nec timcatis vos civilatum municipibiis
innecti. Ex nulle itaque nexu, nulla causa, nulla persona decuriomim vos
obsequia contingent.
' C. Th., /. /.
[ -il-2 )
exemptés par Constantin de la tutelle dative comme de la
tutelle légitime •. Kn 400, Honorius décida qu'ils devaient se
charger de la tutelle des entants mineurs de leur corporation -.
3. Impôt foncier. Les naviculaires de TOrient en étaient
exempts jusqu'à concurrence d'une limite tixée. L'impôt fon-
cier se payait en argent ou en nature. Les propriétaires
devaient fournir les denrées nécessaires à l'annone, ainsi
que les habits et les chevaux pour l'armée; en etiet, Vequo-
rum collalio et la restis mililaris taisaient partie des contri-
butions ordinaires, ce qui n'empêchait pas d'en demander
d'extraordinaires en cas de nécessité ^^. Tous les corporaîi
urbis Romae étaient dispensés de la fourniture des habitai
et des chevaux militaires ^; les naviculaires des provinces y
étaient tenus, du moins en Orient^'»; quant i\ la pracstatio
nunoïniria, c'est-à-dire la fourniture des denrées, ils en étaient
partiellement exempts. La loi est obscure; selon Godefroy,
ils a\inent cinquante jnija, ou unités imposables, exemptés-
par transport de 10,000 boisseaux ^'. En 41 i, Honorius et
* 0. Th.. 13. 5, 1. 7 834».
- C. Th., o, 31, l. 1 (4œ) = C. J.. V. O-J. :>; : E.vnisatkmem naviculu/iis
luttiiw .^ivc ciirae liactenus ip.^is tribui)niL^, ut in hujusnuxii off'wiis mino-
ribiwi i^ui Uintum corporis obligentur.
3 B01CH.\RD. p. 311.
■* Voyez supra, p. 409, n. 7.
2 C. Th., 13, o, 1. U, pr. Valentinien parlant des naviculaires d'Orient,
en 371 : e.vcusaiulis vùielicet pro dcnum ïniilium modiorum luitione (juîti-
quagenis miniero jugis in anmmaria pracstatione duntaxat, ita ut r^w/cv
atque equi ceteraeque canonicac sptYies ab imîictione eadem non neg[en]tur.
Cela ressort aussi de la loi lo. Ce privilège devait compenser les frais
de i-éparation des navires : repara tionem dei)iceps per singulos amios
ii^dem naviculariis ex eoneessa jugonuu immunitate euraturis (I. U, § l).
c GoTHOFR.. ad 1. 14. Pigeonneau. Annone, p. ti30. Gebhardt, p. 81.
Pigeonneau calcule que le tonnage de tous les navires africains reprc-
sentaii environ six millions de boisseaux; le corps des naviculaires
représentait donc 600 X 50 jnga, ou 30.000 unités imposables, c'est-à-dire
le cinquième de la Byzacène et de l'.A trique proconsulaire, en 4'2'2 ^C. Th..
11. 1, 1. 10. :Î8. 1. 13\
f 4l^î I
1 [léoflose roiiiironl ;jii\ ii;j\ jruhtii.'^ fl'Atriquf tous Ihs arrié-
ivs I.
i. Munera sordula et eilraordinarni . .sur la (ji<4)ri«-lé foncière
élai<;nt assises ôgalemont les innombrables charges sordides et
extraordinaires. Outre rinnnunit<.' gf*nérale fie ees charges
accordée aux armateurs -, Constantin défendit à plusieurs
reprises d'imposer à leurs navires des services extraordinaires,
c'<'St-à-dire autres que le transport de l'annone, soit dans les
ports de départ, soit au l'orlus, soit dans les îles, ports, rivages,
stations oi^i ils passaient-'. Deux lois ne parlent que des navires
qui transportent l'annone '*, mais les deux autres ne font pas de
distinction •'. Il semble que, sous ce rapport, on ait varié.
o. Inijmts spéciaux. Il y avait des impôts spéciaux pour cer-
taines classes; or, parmi les naviculaires, il y avait des per-
sonnes de tous les rangs. La loi les exemptait généralement de
ces charges; Constantin le dit formellement : yavkularioH
imtnes per orhem terrai um per omiie aevunt ah omnibus oneribus
et muneribus, cujuscwujue fueriut loci vel diquitalis, securos
racuos immunesque esse praedpimus, sire decuriones sint, sive
plebei, seu potioris alterius dignitntls, ut a collatiouibus et
omnibus oblationibus liberati inte(jris patrimoniis munus exer-
ceant ^K C'était pour les sénateurs l'exemption de la rollatiu
(flebaiis, de Vaurum oblatitium et de Voblatio votorum. Les
décurions qui devenaient naviculaires échappaient aux lourdes
' C. Th.. 11. 28, 1. 8 41 i : Saviridariis inlra Africain — ilerum omnia
/ l'iùjua indidgemns.
'- C. Th., 13, o, 1. o (3-26). 17 (386. Voyez infra, a la n. 6.
•' C. Th., 13, "j, I. 4 (324) : nec (navem) iilli extraordinario oneri servire.
L. .0 (326) : !Saves eorum — ad aliud munus ipsis invitis leneri non œnve-
nit. L. 8(336) : yavicularios Hispaniarmn neque ad exlraordinaria teneri
officia. L. 9 (357) : 7iec aliijuod (jcnus incommodi. Celle deinièrc loi est de
i^ïonstance.
-' L. 4 : navi.s — , quae omis duntaxal fiscale fraiisiexeril. L. U : yavi-
cidarios ... delegatas species annonarias transferentes.
'■' L. 5 et 8. La loi o dit incmc : /pidnfarcunque shu.
*' l. T) (326). Cfr. 1. 17 (386>.
( 414 )
charges spécialement imposées à la curie, par exemple à
Vaiirum coronariiim. Honorius changea cette loi dans l'intérêt
(les cités; il décida que les décurions qui acquéraient des
praedia navicularia resteraient dans la curie et ne seraient sou-
mis à la (( fonction naviculaire » que pour ces biens i. En outre,
tous les naviculaires appartenaient à la classe des négociants
et faisaient le commerce pour leur compte; mais ils ne payaient
pas la lustralis collatio, ou chrysargyre -, impôt exigé de tous
les iiegotiatores tous les cinq ans, et tellement excessif que,
pour l'acquitter, les pères étaient souvent forcés de livrer leurs
enfants à l'esclavage ou à l'infamie.
6. Impôts indirects : portorium. En 380, Gratien •> confirme la
dispense des frais de douane {portorium) : les naviculaires pou-
vaient faire entrer en franchise, non seulement les denrées du
fisc, mais encore leurs propres marchandises, et cela malgré les
fraudes auxquelles cette immunité donnait lieu ; en effet, beau-
coup de négociants faisaient transporter leurs marchandises
sur les vaisseaux des naviculaires et échappaient ainsi à la
douane. Gratien dut leur défendre de se prêter à cette super-
cherie ''. Théodose et Honorius renouvelèrent cette exemption
en 393, 39o et 409 -> ; ils ajoutent : mm sibi rem gerere proba-
Imntur. La loi que Tribonien admit dans le Code est de Valen-
linien l^"", en 36o ; ce prince dit également : ciun sibi rem gerere
probabuntur *». H suit de là que les négociants des provinces
n'avaient pas conservé la faveur octroyée déjà par Néron "7.
7. Vacatio legisJuliae et Papiae Poppaeae. En 320, Constantin
< C. Th., 1^2, 1, 1. 149 (395). Cfr. DiG., 50, 6, 6 (o), § 43. Voyez supra,
pp. 399400.
'^ C. Th., 13, 5, 1. 16, § "1 (380) : (juod ad neyotiationis commodiun spectat.
3 C. Th., /. /. Gagnât, Impôts indirects chez les Rom., p. 124.
* C. Th., /. /. Cfr. 13, 8, 1. 1 (395) : défense aux particuliers de charger
leurs marchandises sur les navires portant les denrées du fisc.
••' C. Th., 13, o, 1. 23 24. 32.
" C. J.,1V,61, 6 = C. Th., 13,5,1.24.
" Voyez supra, p. 403, ii. 4.
( iK'i )
avait déjà aboli les peines flont celle loi tVappail le célibat et
les époux sans enfants; il n'avait maintenu (jue la défense faites
aux époux de recueillir i)ar testament plus d'un dixième du
patrimoine du conjoint '. En 3.']i, il supprima même cette
restriction en faveur des naviculaires -. Kii ilO, Théodose II
accorda la même faveur à tous les citoyens '■'. Le but de Con-
stantin avait été de préserver les biens des naviculaires d'une
trop grande division.
8. Juridiction ordinaire garantie. En 33i, par la même loi,
Constantin garantit aux naviculaires de l'Orient qu'ils ne
seraient jamais distraits, pour les affaires civiles, de leurs juges
ordinaires, qui étaient le préfet de la ville à Home et le gou-
verneur dans les provinces '*. C'était une règle que le deman-
deur plaidât dans le ressort du défendeur; mais le juge
suprême était l'empereur, et souvent les plaideurs en appelaient
à lui : il jugeait alors en première et dernière instance, ou il
donnait un juge délégué {judex delcgatiis). Les gouverneurs et
tous les autres magistrats ayant juridiction pouvaient aussi
déléguer un juge. C'est ce que Constantin défendit pour les
naviculaires : toute action civile devait leur être intentée devant
les tribunaux réguliers de leur ressort, et leur cause ne pou-
vait être évoquée devant un juge extraordinaire. Un rescrit
impérial obtenu par la partie adverse était même sans valeur.
C'était leur épargner des voyages coûteux et des tracas mul-
tiples •>.
9. Equestris dignitas. Constantin octroya aux naviculaires la
dignité équestre; Julien et Gratien la leur confirmèrent ^K Elle
* C.Th., 8, 16, 1. un. (320j.
2 C. Th., 13,0, 1.7(334).
5 C. Th., 8,17, 1. 2(/.10;.
* Ou bien 1(; praef. annonae, à Home, el lo pracf. praelorio ou son
vicarius dans les provinces. Voyez siipra, pp. 38ii el suiv.
G C. Th., 13, 0, 1. 7. GoTHOFR., ad li. l. Gebhaudt, pp. 8i-8o.
« Ibid., 1 16 (380). La loi est adressée cor port Navicidariormn. Godefroy
j»ropose d'ajouter Afroriun, coinme dans la loi 3 du C. Th., 13, 9, (jui est
de la même année.
( 416 )
leur valait plusieurs avantages, notamment une protection effi-
cace contre toute corporalis injuria, et par conséquent contre
la question : privilège précieux à cette époque où l'usage de la
torture était général • et où les juges irrités se laissaient aller
à tous les excès et à toutes les cruautés -. Dans les enquêtes
sur les naufrages, les matelots subissaient la torture; le ma(jis-
ter navis en était exempt -".
10. Diverses mesures de prolcrlion. Les empereurs veillaient
à ce que tous ces privilèges fussent respectés. Ils les renou-
velaient souvent, en menaçant les coupables d'amendes et de
peines plus graves. Les litîorum custodes, les vectigalium prae-
posid, les exadores, les décurions, les rationales, les gouver-
ne,urs, les agentes in rébus exigeaient souvent d'eux des services
extraordinaires, ou ils violaient autrement leurs privilèges.
Dans ce cas, ils étaient menacés de la confiscation et même de
la mort 4-. Honorius, moins sévère, ne les menace que d'une
amende, mais plus tard il décide que leurs biens seront con-
fisqués au profit de la corporation. Cette peine sera appliquée
tant aux gouverneurs qu'à leurs appariteurs '\ En confirmant
aux naviculaires la dignité équestre, Gratien menace du dernier
supplice, et le gouverneur qui leur infligerait une injure cor-
porelle, et ses officiales qui ne feraient pas tous leurs efforts
pour l'en détourner *>.
Les empereurs protégeaient aussi les naviculaires contre
les vols, les exactions, les violences et toutes les vexations de
leurs supérieurs. Au départ, pendant le trajet, au retour, ils
devaient jouir d'une entière sécurité ". Une amende de
1 C. Th., 6. 36. 1. I.
- C. Th., 13, 5, 1. 16 : jiidice.-< prava forsiUDi indignât ione siiœensoss .
■■' C. Th., 13, 9. 1. 2. '
^ C. Th., 13, 5, 1. o. 8. 9. 17.
^ L. 30(400). 36 Ml 2).
« L. 16 (380).
^ Gerhardt, p. il.
( 417 )
10 livresd'or était inHigée à ceux qui les inquiétaient '. En cas
de vol, si le préfet de la ville parvenait à reprendre les objets
volés, il devait les restituer à la corporation, et le voleur devait
en outre verser le quadruple dans la caisse commune '^. Les
exactions étaient aussi sévèrement punies. Les naviculaires
avaient à les redouter de la part des ayenles in rébus •!, des
gouverneurs, des vicaires, du praefectus annonae lui-même, et
de leurs offiiiales. On leur extorquait une partie de leurs émo-
luments ou de leurs biens, et on les forçait de faire des dons à
des protégés K II arrivait aussi que les naviculaires, pour se
concilier les fonctionnaires supérieurs, se croyaient obligés de
leur offrir des présents. Cette corruption volontaire ou obligée
fut défendue par Honorius en 412, sous peine d'une amende
de 10 livres d'or pour les naviculaires et les magis«rats précités;
en outre, ceux qui acceptaient de pareils dons étaient condam-
nés à payer \e quadruple au fisc -k
Des mesures semblables étaient prises pour protéger les
boulangers, les charcutiers et sans doute les autres corporati
contre les vexations des employés de l'administration '\
Les autres collèges de Tannone avaient aussi leurs privilèges
particuliers. Valentinien II fait allusion aux privilèges accordés
aux boulangers {mancipibus) ". Si les constitutions qui en
parlent sont moins nombreuses, cela peut venir de ce que les
^ L. 0 (3o7) : venientes ac remeantes omni securitnte poliri. Cfr. 1. 4. 8.
— Défense de charger des marchandises privées sur leur? navires [sar-
cina privata) : C. Th., 13, 8, 1. 1 (393). Ulpien parle déjà de mesures de
ce genre. DiG., 48, 12, 2 : eadem legr. {Julia) continetur ne quis navem
nautamve retineat, aut dolo )nalo faciat, quo magis detineatur, et poena
vujinti aureorum statuitur.
2 L. 29 (400).
^ C. Th., 6, 29,1. 11 (414).
* C. Th., 13, 5, 1. 38.
•■' L. 36 (Honorius, en 412, aux naviculaires d'Afrique). L. 37 (412).
c C. Th.. 14, 3. 1. 22 {pistores, en 417). C. /. L., VI 1770. 1771 {suayii).
' C. Th., 14. 3, 1. 18 (386j : Vt concessa decuhalibus privilégia îwbnnn.-^
ahrogari, ita lege super mancipibus data nihil jubemus ininiinui.
Tome L, vol. II. 27
( 418 )
corporati de Rome étaient moins exposés à les perdre que les
navicuiaires, qui, répandus par tout l'Empire, trouvaient par-
tout des fonctionnaires prêts à les molester. C'est pour un
autre motif qu'il n'y avait pas lieu de rappeler à tout moment
leur exemption de la curie : tous ces corporati étaient domi-
ciliés dans la capitale.
Il est certain qu'ils avaient conservé au moins les privilèges
que nous avons énumérés plus haut d'après le Digeste.
Voici ceux que nous trouvons encore mentionnés.
Les charcutiers semblent mieux partagés que les boulangers,
dont le Code Théodosien ne rapporte pas une seule immunité
spéciale. Gratien octroya pour la première fois aux suaru
l'exemption des charges sordides. Valentinien II la confirma
en 389 i. En 452, Valentinien ill parle d'immunités plus éten-
dues : « Il convient, dit-il, de ne les appeler à aucune autre
charge; vaquant à leur service, qu'ils soient dispensés des
autres -. » Honorius mit tous les charcutiers à l'abri de la corpo-
ralis injuria •>, et Valentinien III déclare également qu'ils ne
doivent subir de la part des appariteurs ni injure corporelh^
ni exaction ^. Dans les autres collèges, les trois premiers
patrons seuls avaient ce privilège; encore le préfet de la vilK;
pouvait-il sévir contre eux -•.
' C. Th., 14, i, 1. 6 (389) : Porcinarii urbis aeteniae — id se dirai',
memoriae Graliani beneficio menasse propommt , ne sordidis unqiiam
muneribus subjacerent. C. J., XI, 16il7), i.
- Nov. Valent. III, lit. 35, § 6 (452) : Qiios ad milliun aliitd praeterea
omis convenit devocari, nisi ut Inde officio vacantes, a ceteris habeantiir
immunes.
^ C. Th., 14, 4, 1. 10, § '1 (419) : Sulla tamen eos corporis injuriae formido
percellat.
* Nov. Val. III, lit. 35, § 7 (452) : Suarios ipsos mdlius apparilionis
neque injuriae, neqiie dispendiis subjacere, manentibus circa eos, quat!
superiora scita sanxerunt.
5 C. Th., 14, 4, 1. 9 (417) : lllud etiam decerninms, ne in singidos très
primos palronos corpornm singuloriDn vir clarissiimis praef. annonae jus
habeat corporalis injuriae; nam sufjicit in delinquenteni illustris urba^ii
censura judicii.
I
( il y )
Enfin, rappelons une faveur des charcutiers qui jette un«î
vive lumière sur la situation générale de TEmpire. Même dans
les régions urbicaires, la sécurité était si faible, les vols, les
rapines, les brigandages étaient si nombreux, que Valentinien II
avait interdit Tusage des chevaux. Par exception, il permit aux
suarii de s'en servir dans les courses qu'ils devaient faire pour
percevoir les « espèces porcines »; mais d'abord il les avait
rendus responsables de tous les méfaits qui seraient commis.
Plus tard, il les déchargea de cette responsabilité i.
Parmi les autres collèges, nous ne trouvons spécialement
mentionnés que les raids coctores, les vedurarii et les fabri-
censes. Les chaufourniers et les charretiers avaient leurs privi-
lèges particuliers, que Valentinien I«' confirma en 3(54, sans
les citer "-. En 440, Valentinien III affranchit leurs terres de la
tironiim collalio, et de l'impôt de sept solidi ([u'il venait d'exiger
j)ar 1,000 arpents '^.
En 400, Honorius, sur le conseil du magister oIJiciorum, dis-
pense les fabricenses des logements militaires (metatus) K
Pour les autres manufactures, pour les mines et les carrières,
on ne parle pas de privilèges; au contraire, les pêcheurs de
pourpre sont formellement cités parmi ceux qui doivent payer
le chrysargyre -^
< (;. Th., 0. 30, 1. 3 (3Go).
- C. Th., 14, 0. 1. H (364) : Oralio nostra ininiiDuUitt'niconnn^ quoscnctio
calci.s manet, et vecturariorum est evidenter ample.m. Quaecunque igittir
extraor dinar iorum prisca alque inveterata consuetudine hujusinodi .sortie
homines antea sunt adepti, nunc quoque ad leniendnm opits onus?^, quod
sustinent, publia muneris con.sequantiir .
5 Nov. Val. III, lit. o, § 4 (410) : lllud quoque pro tuendo statu vene-
randae urbis deccrnimus, ut a coUatione tironum et ab exsolvendis septem
solidis per millenas (?) niiper indictis caespes — calcariiLs et l'eetnrariii.'i
habeatur immunis, ut prompt ius devolioncni solitae functio)ns agnascat.
* C. Th., 7, 8, I. 8 (400', au Magister officioruni : Secuti suggestionem
tuam, a fabricensiuni donnbus omnem )n(>lestiain hiispilu)n praecipimu<
nmoveri. Etc.
- C. Th., 13, l, !.0i37-i).
( 420 )
Il en est à peu près de même des corporations des villes. Ces
pauvres collegiati, artisans et commerçants, semblent, à pre-
mière vue, astreints à toutes les charges de leur condition,
comme les curiales. En effet, si Valentinien P»" exempte du
chrysargyre les artisans qui n'ont que leurs bras pour vivre,
c'est à cause de leur pauvreté i. Les fossoyeurs {copiatae) sont
également exemptés du même impôt et des munera sorilida,
d'abord sans restriction, puis seulement quand ils exercent un
petit commerce pour gagner de quoi vivre et se vêtir 2. A Ale-
xandrie, les corporati, comme les autres habitants, devaient
curer le Nil, et c'est en 436 seulement qu'ils sont dispensés de
cette charge par Valentinien lll 3. On nous parle encore d'édi-
fices publics dont les collegiati ont la jouissance ^, et c'est tout.
Malgré ce silence du Code Théodosien au sujet des colle-
yiali "j, nous croyons que, même au IV^ siècle, ils jouissaient
au moins de l'immunité des charges municipales, réservées
aux curiales, sauf le concours qu'ils devaient prêter à ces
derniers. Sinon le Digeste ne rapporterait pas les deux pas-
sages où Callistrate déclare formellement que les collèges d'ar-
tisans institués dans l'intérêt public, tels que le corpus fabi'orum,
jouissaient de l'immunité •>. Ensuite beaucoup de ces collegiati
durent être favorisés par la constitution de Constantin en 337,
qui accorda l'exemption de toutes les charges [universis imine-
ribus vacare) à trente-cinq sortes d'artisans et d'artistes, répan-
1 C. Th., 13, 1, 1. 40 (374) : Eos etiam, qui manu victum rimantur aut
tolérant, figulos videlicet aut fabros, aliénas esse a praestationis moles tia
(lecernimus. Sur figuli et [abri, voyez supra, p. 470, n. 4.
2 C. Th., 43, 4, 1. 4 (357). 46, 2,1. 4o, § 'i (360).
3 C. Th., 44, 27, 1. 2 (436). Voyez supra, p. 465, n. 5.
* C. Th., 40, 3, 1.5 et 45, 4,1.^41.
'" L'accès de l'armée leur est interdit (G. Th., 7, 20, 1. 12, § 3, en 400),
parce qu'ils sont enchainés à leur service {irretiti). Toutefois ils doivent
concourir à la réparation des murs de la ville. C. Th., 45, 4, 1. 34 (396).
49 (412). C. J., VIII, 12 (14), 42 (396).
c lUG., 27, 4, 47, § 2 (tutela). 50, 6, 6 '5), § 42 {immunitas). Voyez
i^upra, pp. 402, n. 3, et 406.
( 4-21 )
dus, dit-il, dans toutes les villes de l'Empire i. Sans doute,
Constantin n'accorde pas ce privilège à des collèges, mais à
des artisans individuellement, et il n'était pas guidé ici par
cette considération qu'ils étaient déjà astreints ù une charge
publique. II voulait seulement leur donner le loisir de se per-
fectionner dans leur art ou dans leur métier et leur inspirer le
désir d'y instruire leurs enfants. Mais cela n'empêchait pas les
collèges de ces arts ou métiers de profiter de ce privilège indi-
viduel.
Quoi qu'il en soit, nous voyons ici que les princes donnaient
aussi des immunités aux artisans libres; ils en accordaient
également à ce que nous appelons les professions libérales :
aux professeurs, grammairiens, rhéteurs, philosophes, méde-
cins, architectes, géomètres, peintres, etc. Nous n'avons pas à
insister sur ce point, mais nous ferons remarquer cependant
que les princes crurent devoir favoriser le travail privé comme
le travail public, parce que l'un et l'autre étaient menacés de
mourir, faute de bras.
En résumé, les corporations avaient, au IV« siècle, leurs pri-
vilèges spéciaux, de même que beaucoup d'autres classes de la
population. On voit par là, dit très bien Bouchard -, que « l'or-
ganisation fiscale de l'Empire romain était loin de reposer sur
le principe de l'égalité devant l'impôt. Les classes des privi-
légiés étaient nombreuses et importantes. Cependant on peut
remarquer, dans les dispositions qui régissent une partie de
ces exemptions, comme un plan d'ensemble destiné à équili-
brer, dans une certaine mesure, les charges de toute espèce
qui pèsent sur les habitants.
» Si les navicularii sont déchargés de l'impôt foncier sur
leurs terres incultes, et des mimera exlraordinariu et sordida.
* C. Th., 13, 4, 1. 2 (337) = C. J., X, 04 (66), I. Voyez supra, p. 173, n. 1.
Il nomme les pelletiers (peliiones)', or, à Ostie, nous trouvons précisémeni
un coyyus pellionum (XIV 10. 277). — Cfr. Diti., 50, 6, 7 (Gj, où il s'agit (it>
métiers militaires.
- BOLCH.\RD, p. S^'i.
( 42-2 )
('est qu ils sont assujotlis à rohiigation onéreuse de faire avec
leurs navires les transports do l'Etat. Si les sénateurs sont
afirancliis des charges extraordinaires et sordides, c'est qu'ils
supportent, comme membres du Sénat, une imposition spé-
ciale fort lourde. L'exemption accordée aux vétérans forme une
sorte de pension militaire, comme celle dont jouissent cer-
tains fonctionnaires publics, constitue une partie de leurs
émoluments. Dans un pays où les services publics s'exécu-
taient en général au moyen du concours direct et personnel
des citoyens, il ne faut pas juger l'égalité devant l'impôt au
même point de vue que dans nos pays, où le service direct est
une exception. La concession faite sur les charges foncières
était bientôt reprise en obligations personnelles. Ces réserves
faites, on doit reconnaître que l'équilibre cherché n'était
pas obtenu. Les curiales succombaient sous un aussi lourd
fardeau. »
Nous avons vu qu'il en était de même des corporali et des
foUegiati.
{^ 2. Avant âges divers.
Les collèges obtenaient d'autres avantages, que nous allons
énumérer.
Au commencement, c'était le contrat conclu avec l'État qui
fixait la somme due par ce dernier aux naviculaires pour le
transport. Cette indemnité leur était payée dans les provinces,
par l'administration de l'annone, contre remise des quittances
(apochae) reçues à Rome après déchargement et livraison des
denrées. Sous Antonin le Pieux, c'était un adjutor praefecti
aimonae qui payait ce salaire, appelé vecturae, aux naviculaires
qui transportaient le blé {solamina) et l'huile d'Afrique et d'Es-
pagne. Une inscription mentionne, en etïet, un certain Sexius
Julius Possessor, adjutor Ulpii Saturnini pra'f{ecti} annon{ae)
ad oleum Afrum et Hispanum recensendiim, item solamina trans-
( 423 )
ferenda, item vecturas naviculariis exsolvendas , pro-
curalor) Aiuj.ustorum, se. Antonini et Verh ad rij)am fiaclis K
Plus tard, quand il n'y eut plus de contrats temporaires, la
somme fut fixée d'une manière permanente, et il en reste
encore des traces quand le service est devenu obligatoire.
Lorsque Constantin institua les naviculaires d'Orient pour
les besoins de la nouvelle capitaje, il leur accorda un solidus
(lo francs 85 centimes) "2 par mille boisseaux qu'ils transpor-
taient -^. Les autres naviculaires recevaient sans doute le même
salaire, car leurs privilèges servirent de modèle à ceux de
l'Orient. En outre, il était d'usage que les percepteurs des
i m pots en nature reçussent un epimelron pour le déchet
[diametron] que subissaient toujours ces objets en route;
en 369, ils recevaient un centième des fruits secs, un vingtième
du vin et du lard ^. Il en fut de même des naviculaires. Ceux
d'Orient recevaient, « à l'exemple de la flotte alexandrine, qua-
tre pour cent du blé'> » ; les naviculaires d'Afrique ne recevaient
qu'un pour cent •', parce que la distance était moins grande.
' II 1180, sous Marc Aurèle et Verus.
2 Cfr. Wex, Métrologie gr. et rom., i>p. 136-139. Le moitius vaut
^,75 litres. Ibid., p. 34.
s C. Th., 13, 5, 1. 7 ^334) : et ad exemptiun Alexundrini stoli quatcrnas
VI frumento centesimas conseqmntur ac praeterea per singula milia
singidos solidos.
* C. Th., 12,6,1. 15.
^ C. Th., 13, 5, 1. 7. Voyez supra, ii. 3.
« C. Th., 13, 5, 1. 36 (412) : de ceyitesinus suis. L. 38 (414) : centesi-
marum. 13, 9, 1. 3, 2 : duarum semicentesimarum . L. 5 : de diametris.
Cfr. 14, 26, 1. 1 (412). Justinien (Edict., XIII, 8) ordonne que les navicu-
laires d'Egypte recevront 80,000 solidi, pour le transport de 8 millions de
itwdii, soit 1 solidus pour 100 boisseaux. C'est dix fois plus qu'en 334.
F'iGEONNEAU {Aiuione, pp. 234-235) croit que les corps de naviculaires
rivaient disparu, que l'Étal réquisitionnait, en août et en septembre, les
navires des particuliers et leur payait le fret complet. Cependant Justinien
maintient les lois du IV^ siècle. C. J., XI, 1 (2). 2 (3j et 5 ((>). Nous pensons
que l'institution subsista jusqu'à la conquête de l'Egypte par les Arabes,
iiu Vile siècle. Justinien indique le motif des largesses faites aux navicu-
{ 424 )
Enfin, on les aidait parfois à construire de nouveaux navires,
en leur faisant fournir le bois par les provinciaux ; c'est ce
que Valentinien I^"" décide en 371 pour les naviculaires de
l'Orient i.
Les boulangers avaient reçu une dotation dont nous avons
parlé plus haut 2.
Le dommage que les charcutiers subissaient nécessairement
pendant le transport des porcs •^, était compensé de deux
façons. D abord les suaru et les ordines qui suariam recognos-
cunt recevaient ensemble 25,000 amphores de vin, dont les deux
tiers, soit 16,666, revenaient aux charcutiers. Cette mesure fut
prise par le préfet de l'annone Apronianus, en 364, et approu-
vée en 367 par Valentinien *'*. Le vin était fourni par les pro-
priétaires qui devaient livrer le lard, mais à Varca vinaria ^.
Les possessores du Bruttium et de la Lucanie, vu la distance et
la difficulté de transporter le vin, pouvaient fournir soixante-
dix livres de lard à la place d'une amphore de vin, et ils four-
nissaient ce lard à l-'arca vinaria 6.
De même que les susceptores ", les charcutiers recevaient en
outre, comme epimetron, un vingtième ou cinq pour cent du
laires : Proplerea oiiïn lam largam liberalitateui fecimus, ut niliil omnino
nec ex dilatione nec ex defectu solennis friimenti transmissionis confice-
retiiriEdict., XIII, 8).
* C. Th., 13, 5, 1. 14, 3 (371). II n'est pas question de la fourniture gra-
tuite de matériaux aux naviculaires d'Afrique, comme le croit PiGEor»r-
>EAU, Annone, p. 229. — Voyez .nipra, p. 473.
2 Voyez .supra, i)p. 373-376.
3 Cassiod., Var., XI, 39 : sed quanto dispendio videbatur constare, addu-
cere tam multis itineribus, quae darentur ad pondus.
^ C. I. L , VI 1771 : ex titulo canonico. C. Th., 14, 4, 1. 4, § 1 : pour
compenser le dommage, quod inter susceptionem et erogationem neces-
sario evenit. Voyez Gebhardt, pp. 35-37.
s C. Th., 14, 4. 1. 4, § l : perceptione. C. I. L., VI 1771 : ex titulo
canonico.
6 C. Th., 1.1. CI. L., VI 1771.
7 C. Th., 1-2, G, 1. 15.
( 425 )
lard t. C'étaient encore les contribuables (jui fournissaient
cet qnmetron en plus. S'ils donnaient de l'argent à la place du
lard {adaeratio), ils étaient naturellement exemptés de Vepime-
tron, vu que les charcutiers ne subissaient aucune perte sur
le numéraire.
En 452, Valentinien 11 1 parle de sommes fort élevées aux-
quelles les suarii et les boarii auraient droit, comme « émolu-
ments »; mais le passage est obscur -.
Les chaufourniers [calcis coctores) avaient le monopole de la
chaux nécessaire à l'Etat. Constance décida que pour trois char-
rettes de chaux ils obtiendraient une amphore de vin. Les
voituriers [vedurarn) recevaient une amphore par 2,900 livres
de chaux qu'ils amenaient à Rome. Ce vin devait être fourni à
Yarca vinaria par les terres mêmes sur lesquelles pesait la four-
niture delà chaux. En 359, Constance ï\l donner aux charretiers
trois cents bœufs par les quatre régions voisines de Kome; ce
ne fut sans doute qu'un secours passager 3. De même les voi-
turiers du fisc, appelés hastagarii, reçurent un jour du gou-
vernement des bêtes de somme pour les aidera faire la remonte;
l'État fournit une bête sur dix 4. En 365, Valentinien I^' et Valens
décidèrent que les chaufourniers et les charretiers recevraient
< C. Th., 14, 4, 1. 4. § 4. Apronianus lait allusion a cet epimclron quand
il dit : proprium quod appellatur (C. I. L., VI 1771j.
' Nov. Val. III. lit. 3o (4o!2). au pracf'ectiui praetorio Italiae. ^ 1. l\itro-
nis corporis siiariorum — hoc benefinum dehere praestari, ut — de vicinis
provinciis, id est de Lucania sex millia quadringentorum, Samnio quinque
millia quadringentorum , Campania MDCCCCL soHdorum débita émolu-
ment a oporteat decerni. §2. De boariorum etiam vel pecuariorum praesta-
tione nongentos quinquaginta ,solido.s c.vactos sibi mwerint profuturos —
quoniam certa emolunienta percipiuul.
5 C. Th., 14, 6, 1. 1 (359) : Ex 0)nn{bu.s praediis, quae jatn dudum
praestationi calcis coeperunt obnoxia attineri, coctoribus calcis per ternas
velies singulae amphorae vini praebeantur , vccturariis vero amphora per
bina millia et nongenta pondo calcis. Quin etiam vobunus, jwn personas,
sed ipsos fundos titulo liujus praes(alio)iis adstringi.
* C. Th., 10, 20, l.4(8(3oï).
( 42() )
un ,solidus par charrette; les trois quarts de cette somme
étaient à charge des possessorcs astreints à la fourniture de la
chaux, et un quart était pris dans Varca vinaria *.
Les colledarn, qui mettaient en circulation la monnaie d'or,
recevaient également un subside [slalutum pretium) de Yarca
vinaria ; il consistait dans une quantité de vin ou une somme
déterminée pour chaque soîidus d'or qu'ils vendaient à prix fixe
contre du cuivre -.
Les chauffeurs de bains (mancipes Ihennarum) furent d'abord
locataires des magasins [salinae] où la loi forçait les marchands
de déposer tout le sel vendu à Kome. Pour améliorer leur sort,
on leur accorda l'exploitation de ces « salines w à titre gratuit :
ils touchaient donc les redevances ou droits de magasinage
payés par les marchands. De là, leur autre nom de locataires
des salines [mancipes saîinarum)] de là, il est dit de ces salines
qu'elles étaient au service des bains du peuple romain •^.
* C. Th., 14, 6, 1. 3 (36oj : Jubeinus ut calcis coctoribus vectoribusque
pe)- singulas vehes singuli solidi praebeantur, ex quibiis très partes inférant
possessores, quarta ex ejus vint prelio S7unatiir, quod consuevit ex arca
vinaria ministrari.
2 Symm., ReL, 29 {Episi., X, 42) : Collectariorum corpus, quibus arca
vinaria statutum pretium subministrat. Etc. Mommsen. Gesch. des rom.
Miinzwesens, pp. 845-846. Contra : Hoibert, /)//. rfe Daremberg, .v. r.
collectarii. Voyez supra, p. 231.
5 Voyez supra, pp. 125-126 — Syalm., Epis t., IX, 103, et X, 58
(=: Rel., 44) : mancipes salinarum. C. Th., 11, 20, 1. 3 (400) : salinis etiam
omnibus praeter mancipum, quae populi Romani lavacris inserviunt. 14,
5, 1. 1. C. JusT., IV, 61, 11. Idem (Impp. Arcadius et Honorius A. A.)
Lampadio P. P. (lisez : P. U.) : Si quis sine persona mancipum, idest sali-
narum conductorum, sales emerit vendereve tentaverit, sive propria audacia
sive nostro munitiis oraculo, sales ipsi una cum eorum pretio mancipibus
addicantur. C'est-à-dire : le sel vendu sans passer par les magasins
[salinae) loués aux mancipes, sera vendu au profit de ceux-ci. Cohn,
jtp. 162 sq., a, le premier, expliqué ce texte. Cfr. Naquet, Impôts indirects,
pp. 142-144. Gagnât, Impôts indirects, p. 241. — Gebhardt, p. 37,
explique autrement les rapports des mancipes ihermarum avec les
salinae.
( i^^-? )
Ils étaient aussi dispensés do Tinipût pour ces magasins '.
En 304, Valentinien I^-" et Valens décidèrent que toutes les
marchandises des particuliers, amenées au port de Rome,
seraient déchargées par la corporation des porte-sac [saccarii),
même si ces particuliers avaient leurs propres esclaves. Le
préfet de la ville devait tixer leur salaire, suivant le temps. Ce
monopole n'avait d^uUre but que de fortifier cette corporation
et d'y attirer des membres nouveaux -.
On a soutenu que les vinarii avaient un monopole semblable
pour la vente du vin à Rome; mais on ne peut alléguer aucune
preuve •'•.
< C. Th.. 11, t>0, 1. 3 i400) : salinis cliam omnibus praeter mancipum,
qimc populi fiomani lavacris hiserviunt.
2 C. Th., 1-4, ±2, ]. un. (3Gij. au Pr. U. : Omnia, (luaccunque advexrint
privati ad portiim iirbis aeternae, per ipsos saccarios vel eos, qui se huic
corpori permiscej'e desiderant, magnificentia tuajubeat comporiari, et prn
temporum varietate mercedes, considéra ta jus ta aeslimatione, taxari, ita
ut, si claruerit, aliquem privatum per suos adventicias species comportare,
quinta pars ejus speciei fïsco lucrativa vindicetur.
5 Krakauer, pp. 50-51. Voyez supra, pp. 96-100. Les manufactures de
l'État exerçaient le monopole de la fabrication des armes, des étolfes
précieuses, de la pourpre, mais au profit de l'État. Voyez supra, pp. 232-
243. La tendance au monopole est naturelle ; à Constantinople, les collèges
Unirent par y prétendre, et certains princes le leur accordèrent dès le
\^ siècle. En 483, Zenon annula ces décisions et défendit, sous peine de
confiscation et d'exil : 1« le monopole des denrées et autres objets d'un
usage quotidien ; 2'' l'entente d'accaparement {ut species divcrsorum cor-
porum negotiatio)iis non minoris, quam inter sestatuerint, venumdentur);
3o le refus de faire un ouvrage commandé d'abord par un autre. Quant
aux autres professions, leurs chefs {ceterarum professionum primates)
encourront une amende de 50 livres d'or pour les mêmes infractions ;
l'oftice du préfet de la ville (pii fermera les yeux {in prohibilis monvpoliis
et interdictis corporiun pactionibus), sera puni d'une amende de 40 livres
d'or. C. J., IV, 59, 1 (2;. — Sous Léon le Sage, le monopole fleurit de
nouveau à Constantinople. Nicole, Le livre du Préfet (voyez le jtremier
volume, pp. 26 et 194-196}. — Certaines industries, comme la teinture de
la pourpre, se perdirent avec les corporations qui en avaient le mono-
l>ole. Cfr. J.-B. Say, Cours d'Écon. polit., p. 259, Bruxelles.
( 4-28 )
Notons enfin qu'à Rome les artisans et commerçants attachés
au service public avaient droit aux distributions de blé et de
congiaires, et à des places aux spectacles. Nous possédons des
fragments de trois édits affichés au IV»" siècle par les préfets de
la ville, avec la liste des personnes qui ont été privées de ces
avantages, parce qu'elles avaient déserté leur service : voilà du
moins ce qu'on peut conclure d'une manière assez certaine de
ces inscriptions mutilées i.
Tels sont les détails qui nous restent; on peut se faire par
là une idée des avantages matériels destinés à payer le service
des collèges. Au IV® siècle, ce n'était pas un salaire propre-
ment dit; ces avantages devaient la plupart du temps compen-
ser seulement les pertes essuyées et aider les corpovati à sub-
venir à leurs dépenses. C'était la fortune des membres qui
devait couvrir la plus grande partie des frais, et, dans beaucoup
de collèges, même tous les frais. Aussi Constantin exagère-t-il
singulièrement quand il dit que les naviculaires de l'Orient
n'auront presque rien à dépenser de leurs revenus -. On ne
leur accordait pas une rémunération, mais un dédommage-
ment, qualifié fort justement par Honorius de solatia ^, et qui
devait, comme les privilèges, les aider à remplir leur service.
Quant aux corvées des coUegiati municipaux, Choisy pense
qu'elles n'étaient pas gratuites. « La servitude imposée à ces
* Nous en avons parle supra, p. 109. Gatti les a réunies toutes dans le
Bull, corn., 1891, pp. 342-349. Voyez le commentaire de Huelsen, ibid.,
pp. 349-3o8, et Hibschfeld, cité supra, p. 109, n. 4. Les fragments pro-
viennent de plusieurs édits : il reste une partie de la suscription de trois
édits. Dans l'un, les personnes sont appelées : [tabe)-]na}ii ; dans un
autre : aère i[ncisi]: dans plusieurs, la profession est indiquée après
chaque nom. L'un des édits est du préfet Tarracius Bassus. — Sur le blé
distribué aux tibicines et aux aeneatores, voyez le premier volume, p. 519.
2 C. Th., 13, 5. 1. 7 (334) : ut nihil paene de suis facvllatibus expendentes
cura sua fréquentent maritimos commeatus.
^ C. Th., 14, 3, 1. 19 (396) : praediis, quae eonim corpori solatia certa
pi-aebebant. 13, o, 1. 32 (409) : solatiis pro mercedula praestitU. Cfi*. 6.
30, 1. 23 (422) : débita solatia. Cfr. Heima^nn, Le.ûkon, s. v. solatium.
( 429 )
collèges no réside pas dans l'obligation de livrer gratuitement
leur travail à TÉtat (ou au niunicipe), mais seulement dans
l'obligation de le livrer; c'est une atteinte portée à la liberté
personnelle, rien de plus. Ils devaient naturellement se con-
tenter du salaire fixé par l'Etat ou les curiales i. « En l'absence
de tout témoignage, on ne saurait se prononcer.
§ 3. Ihunieurs.
Nous avons vu qu'en général il était défendu aux corporati
d'aspirer à des honneurs incompatibles avec leur condition,
c'est-à-dire qui leur auraient valu la dispense de leurs charges.
S'ils y étaient admis, ils ne jouissaient pas des privilèges de
leur dignité.
Cependant, pour les encourager, on leur accorda certaines
distinctions. Ainsi tous les naviculaires reçurent de Constantin
la dignité équestre qui les protégeait contre la question '-i. Dans
d'autres collèges, les chefs seuls, après leur sortie de charge,
obtenaient certains honneurs; tels étaient les trois premiers
patrons des charcutiers 3, le patron des mensores qui avait la
garde des greniers du port '% et le primicerius jabricac •». Valen-
tinien III octroya l'honneur de la milice ducénaire aux cinq
5//anr choisis par leurs collègues pour percevoir le lard avec le
concours de l'oftice prétorien '•. Les princes disent expressé-
ment que leur dessein était d'encourager ces chefs à remplir
consciencieusement leur devoir. S'ils étaient infidèles, ils
encouraient un châtiment.
• Choisv, Uart de bâtir chez les Rujiiains, p. 192.
'^ Voyez supra, p. 415.
^ Voyez supra, j). 368.
* Voyez supra, p. 3(i9.
•'• C. Th., 10, 22, 1. 3 (390).
<^^ Nov. Val. IIL tit. 35, ^ 3 (/*52i.
( 430 )
L'exercice de tout art vulgaire ou métier au profit de la ville
ou de rÉtat, aussi bien que la direction des travaux publics ou
la gestion d'atfaires publiques, pouvait élever au rang de comte
du premier ordre; Honorius assurait cet honneur aux artisans,
à moins, dit-il, qu'ils ne préfèrent continuer à jouir des profits
de leur milice et se soustraire aux obligations qu'entraînait
cette haute dignité L
Les privilèges, avantages et honneurs qui précèdent, étaient
accordés aux membres individuellement, sauf la dotation des
boulangers. Il nous reste à considérer les faveurs accordées à
la corporation, envisagée comme corps indivisible, dans le
domaine du droit privé, c'est-à-dire de la personnification
civile. Mais ici nous ne parlerons pas seulement des collèges
officiels; nous remonterons à l'origine et nous montrerons
comment l'idée de la personnification civile prit naissance, et
fut appliquée peu à peu aux collèges romains. La matière nous
semble assez importante pour y consacrer un chapitre spécial.
^ C. Th., 6, 20, 1. un. (413) : Hi, guos aiit vulgaris artis cujuslibet obsi'-
quiiim, aut operis publici cura îemporalis injiincta — adeo commendahf,
ut comitivae primi ordinis diqnitate douent itr, sciant, etc.
(^/;
CHAPITIU: V
SITUATION LEGALE DES BIENS DES COLLÈGES
ET PERSONNIFICATION CIVILE.
^ 1. DOTATION DE L'hTAT. — .^ "2. CONSECRATIO El DEDICATIO. —
.^ o. propriété commune. — ^4. pehsonmucation civile :
Généralités; droits réels et droits d'ohli(;ation: acquisition
POUR CAUSE DE MORT; ACTIONS; CONCLUSION.
Une corporation ne peut guère subsister sans biens; autre-
ment, il lui est difticile de vivre et d'atteindre son but. Aussi,
nous avons vu que les collèges romains, particulièrement les
collèges professionnels, avaient un patrimoine composé de
capitaux souvent considérables et d'immeubles qui pouvaient
avoir une grande valeur. Dès le commencement, ils ont au
moins une caisse destinée à subvenir aux dépenses du culte et
des funérailles. Les sectateurs de Bacchus, qui formèrent des
collèges d'abord tolérés, avaient une arcu communis ou jtecuuia
comminiis *. Il en était de même des juifs à l'époque de César -.
Au dernier siècle de la république, le collège des fabricants
d'anneaux reçoit de son président une sépulture ^, et d'autres
corporations, telles que les cordiers, les scieurs de pierres, les
joueurs de flûte et les citharistes, nous ont laissé des inscrip-
tions de la même époque, qui proviennent de leurs monu-
• Voyez le premier volume, \). io. n. -2
- Voyez le premier volume, p. 113, n. :j.
^ VI 9144 = I ilOT : hnun sepulch7\i) maijnum ?),
( 432 )
ments funéraires ^ Les collèges sacerdotaux, les sodalités
sacrées, chargées d'un culte par TÉtat, les Vestales, les pagani
elles montani - avaient des terres et des esclaves, ou au moins
une caisse commune. Sous l'Empire, les preuves abondent :
nous voyons très souvent les collèges posséder des biens de
toute nature et augmenter peu à peu leur patrimoine cor-
poratif.
Quelle était la situation légale de ces biens que les collèges
professionnels avaient à leur disposition ? Par quels moyens
juridiques les acquéraient-ils? — Avant de parler de la person-
nification qui leur fut accordée dans une certaine mesure,
nous ferons connaître divers moyens qui s'offraient à eux pour
se procurer la jouissance de certains biens ^.
1. Dotation de l'Etat.
Le premier de ces moyens, c'était une dotation faite par
l'État. Les collèges sacerdotaux, chargés du culte public, rece-
vaient de l'État les terres et les esclaves nécessaires au service
qui leur était confié ; mais ces terres ne cessaient pas de faire
partie du domaine public et ces esclaves restaient seim piiblici.
Chacun de ces collèges avait sa caisse propre [arca pontificum,
virgimim Vestalium, etc.), mais cette caisse ne lui appartenait
pas : elle faisait partie du trésor public, quoiqu'elle en fût
séparée de fait, qu'elle eût ses revenus propres et son adminis-
tration distincte. L'État leur payait aussi des subventions et
* VI 9856. 9888 (- 1 1108). 3877. 3877^ Bidl. corn., 1888, p. 408. Voyez
le premier volume, pp. 87-88. 267. 282, n. 4.
2 Bull, corn., 1887, p. lo6 : de peqimia montanorum montis Oppi. VI
3823 : paagics Montaims. Voyez le premier volume, p. 40. Pour les pagi et
vici rustiques, voyez MommsEiN, St.-R., III, 1, p. 119.
^ Voyez notre article colleginm, clans le Diz. epigr. de De Ruggiero.
( -i33 ,)
comblait le déficit, le cas échéant '. Les sodalités sacrées ne
jouirent pas de cette faveur : elles devaient subvenir elles-
mêmes aux frais du culte qui leur avait été confié -. Les col-
lèges que les pérégrins établis sur le territoire romain formaient
pour célébrer un culte national, et les particuliers associés pour
le culte d'un dieu romain ou étranger devaient également sup-
porter les dépenses occasionnées par leurs sacrifices et leurs
fêtes '^. 11 en était de même de tous les collèges professionnels,
religieux ou funéraires, qui avaient un caractère privé : leur
culte était un culte privé et l'Etat ne s'en occupait pas. Quand
les collèges industriels entrèrent au service public, l'Etat fui
intéressé à ce qu'ils eussent des revenus suffisants pour s'ac-
quitter convenablement de leurs devoirs, et il ne faudrait pas
s'étonner s'il avait fait à plusieurs des dotations semblables à
celles qu'il fit aux collèges sacerdotaux. La chose est même
certaine pour un collège, celui des boulangers de Rome, qui
reçut la jouissance des boulangeries pourvues de leur matériel
et en outre des terres appelées fiuidi dotales. Nous avons vu
que ces terres étaient affermées et que le revenu était consacré
au service du corpus pistorum ^ A cette époque, les collèges
officiels, comme tous les collèges autorisés, étaient des per-
sonnes civiles, et Ton peut se demander si ces biens appar-
tenaient à la corporation des boulangers, ou si cette corpo-
ration, comme les collèges sacerdotaux, en avait seulement
la jouissance, la propriété restant à l'Etat. Quoi qu'il en soit,
' DiRKSEN, 11, i)[). 114-110. MoMMSKN. Decoll., pp. 38-39. Sl.-li., II, [*-.
pp. 61-69. De Ruggiero, Dix. epUjr., I. pp. 161-163. C'est l'opinion géné-
rale; elle est combattue par Karlowa (I, p. 278. II, p. 60), qui soutient
que ces collèges étaient des personnes civiles ayant la iiropriété de leur
raisse et de leurs immeubles.
- Voyez le premier volume, p. 37.
'• Voyez le premier volume, [). 4.j1, n. o. (!lr. Marqlardt, Staatsverw.,
1112, pp. m-iU, Le culte, I, pp. 161-173.
' \ o\e/. sîipra , pp. 373-376.
ÏOME L, VOL. II. 28
( 434 )
nous avons vu que l'Etat surveillait de près l'administration de
ces fnudi dotales ^
§ 2. Consecratio et dedicatio.
En second lieu, certains biens des corporations vouées au
culte d'une divinité pouvaient appartenir au dieu lui-même.
En dédiant et en consacrant à la divinité une chose quelconque,
temple, autel, statue, champ ou somme d'argent, on la rendait
divini juris : elle devenait sacrée, propriété du dieu 2, et elle
était soustraite au patrimoine des particuliers 3. Pour produire
cet effet, il fallait une consécration régulière, faite par les pon-
tifes, sur le sol romain, en vertu d'une loi ou d'un sénatuscon-
sulte 4. Cet acte correspondait, dans le droit sacré, à la man-
• Voyex supra, p. 375. — Pour favoriser un collège municipal, on
adressait parfois un legs à la ville, à charge de servir une rente au collège.
C'est ce que Meconius fait en faveur du cor'pus Augitstalium de Petelia,
"tout en laissant aussi Une vigne à ce collège (vineam, quam Aiigustalibtts
tegavi). Cela se passe sous Antonin le Pieux, alors que le droit de recueil-
lir des legs ne fut accordé aux collèges que sous Marc Aurèle. C. /. L.,
X il4. WiLM., 696. Nothie, 1894, pp.^20-21. Voyez infra, p. 463.
2 Trebatius, cité par Macrob., Sat., 3, 3, 2 : Sacrum est, quidquid est,
quod deorum habetur.
3 DiG., 1,8, 6, 3 (Marcianus) : Sacrae res et religiosae et sanctae in
nullius bonis sunt. 1, 8, 1, pr. (Gaius) : quod autem divini juris est, id
nullius in bonis est.
* Festus. p. 321 : Gallus Aeliiis ait sacrum esse, quodcumque modo
{more?) atque instituto civitatis consecratum sit, sive aedis, sive ara, sive
signum, sive locus, sive pecunia, sive qiiid aliud, quod dis dedicatum atque
consecratum sit : quod autem privât i suac religionis causa aliquid earum
rerum deo dedicent, id pontifices Romanos non existimare sacrum. Gaius.
Inst., 2, 5 : Sed sacrum quidem solum tantum existimatur auctoritate
populi Romani fieri ; consecratur enim lege de ea re lala aut senatus con-
sulto facto. DiG., 1, 8, 6, 3 (Marcianus) : Sacrae autem res su7it hae, quae
publiée consecratae sunt, non private : si quis ergo privatum sibi sacrum
ccmstituerit, sacrum non est, sed profanum.
( 43o )
cipalion du droit privé; c'est par lui (jU(ui transférait aux
dieux publics la propriété des temples publics, avec tout le
mobilier nécessaire au culte, avec les bois sacrés qui les entou-
raient, entin avec les offrandes qui les ornaient •. Tous ces
objets étaient ainsi misa la disposition des collèges de prêtres
chargés du culte public. Les collèges privés pouvaient-ils, de
cette façon, se procurer la jouissance d'un temple et de tous les
objets nécessaires à leur culte? Observons d'abord que la con-
sécration, quand elle était faite par un particulier, sur sa pro-
priété et sans autorisation publique, ou quand elle était faite sur
le sol provincial, c'est-à-dire d'une cité pérégrine, ne sutiisait
pas pour enlever à Tobjet consacré son caractère profane : il ne
devenait pas propriété du dieu, il restait humani jiiris et ne
sortait pas du patrimoine du particulier '■i. Cependant, dans la
pratique, on le regardait comme sacré, dit Gains 3, et c'était atti-
rer sur soi la colère divine que de le soustraire à sa destination.
Donc, en droit, ni le collège ni le dieu ne pouvaient acquérir
la propriété : l'objet, temple, champ, autel, statue, demeurait
propriété du particulier qui était propriétaire avant la con-
sécration. Julia Monime avait consacré à Silvain une sc/toln et
le domaine qui l'entourait; elle en a si bien conservé la
propriété, qu'elle la transfère par mancipation à un collège de
Silvain, qui avait alors la personnification par le fait même
qu'il avait été autorisé : Locu[m], sive is ager est, qui est via
Appia inter miliarium secundum et {tertium), euntibus ab lloma
e parte dexteriori, in agro Curtiano Talarchiano in praedi{i^s
' M.^RQUARDT. S/.-V., II12, pp. t4>i60. De RlGGlRKO. 0/'. rit., I.
pp. 143-145. 139.
2 Voyez page précédente, note 4.
"^ Gaius. Inst., 2. 7 : .S^(/ in prorinciali solo pi ace t pleri.sqiic, solnni reli-
giosxun non fieri ... ; utirjue tamoi [eju.smodi lociw^, licet non .s//] rdigiosus,
pro r[eligi]oso [habt'tnr], quia etiam ipiod in provinriis non dr auctoritate
popitli Romani consecratum est, [ctsi] proprie sacrum non est, tamen pro
sacro habetur. Cfr. De Ruggiero, I, pj». 143-143. Marquardt (pp. 147, n. 3.
132-133) dit a tort que ce? clioses deviennent religiome.
( 436 )
Juliaes Monimes et sociorum, locu[m\ in quo aedificala est schola
sub ponticu) consecrata Silvano et collegio ejus sodaliciio), man-
cipio acceperunt immunes et curator et pleps un'wersa collegi
ejus (le Jnlia Monime et soci{i)s ejus sestertio nummo uno dona-
tionis causa, tutore C(aio) Mem{m)io Orione Juliaes Monimes, et
ad eum locum itum actum aditum ambitum sacrificia facere, vesci,
epulari ita liceat, quandiu is collegius steterit. Quodsi aliter
factum fuerit, quod ad colleyium pertinet Silvani, is locus sacra-
tus restituetur... sine ulla controversia i. Un affranchi de Domi-
tien, appelé Lucius Domitius Phaon, agit de même : il avait
consacré à Silvain quatre fonds de terre qu'il possédait en
Lucanie, et sur lesquels il avait élevé un sanctuaire à ce dieu
en l'honneur de Domitien, puis il en avait fait don à un colle-
gium Silvani -. Toutefois, si le particulier restait propriétaire,
il pouvait laisser à un collège la libre disposition des objets
consacrés. Ce collège devait alors se contenter d'en avoir
l'usage, de même que beaucoup avaient la jouissance d'un
temple public pour leurs réunions 3.
Les inscriptions nous font connaître un grand nombre
d'objets consacrés par des particuliers au profit des corpo-
« VI 10231. Voyez plus loin.
2 X 444 : Silvajîo sacrum, vota suscepto pro .sainte Do niitian[i] Aug[usti)
uiostri). L. Domitius Phaon ad cidtiim tutelamqiie et sacrificia in omne
tempus posteru[m\ iis, qui in collegio Silvani hodie essent quique postea
subissent, fundos (quattuor) suos ciim suis vUlis pnibusqiie attribnit, san-
xitqtie liti ex reditu eorum fundorum . . . Suit une liste de quatre fêtes,
notamment la dedicatio Silvani, que le collège doit célébrer avec les
revenus. Phaon espère qu'on se conformera à ce désir, cum pro sainte
opt7i,m[i] principis . . . fimdi consecrat[il sint . . . Praeterea locus, sive ea
pars ag[7^]i silvaequ[e] est, in vivayio, quae cippis positis circa Silvannm
determinata est, Silvano cedet, et via aditns ad Silvanu[)n] per fundum
Qlu'laesicianum omnibus patebit. Signis qnoque et ex fundo Galliciano et
aqua sacrifici causa et de vivario promiscne licebit uti. Haec sic dari fieri
praestari sine dolo malo jussit permisitque L. Domitius Phaon, cujus
omlnlis locns fuit.
5 Voyez le premier volume, pp. 210-211.
{ 437 I
rations privées, religieuses, funéraires ou professionnelles. Les
dédicaces s'expriment comme si Ton voulait transférer la pro-
priété à la fois au dieu et au collège voué à ce dieu : c'est sans
doute une imitation des dédicaces publi([ues où le transfert
avait réellement lieu. Voici un exemple : Suavetlia Amaryll{is),
Suavettius Alexan{(ler), curatores, loc{um) colle(jio)et yi/mphis)
(l{e)(l{icariuit) *. Ailleurs on dit que l'objet a été dédié à un
dieu pour le collège ou ('// V honneur du collège :
Minervae Aug[ustai'), .Mumerius) Aufustius llomuncio colleyio
f(d)r{um) d[onuni) (Uedït).
Deae \emesi, illi e.r voto a solo temphnn ex suo fecerunt col-
leyio ulrklariorum -.
Her{cidi) iuvict{o) ille ob lwn{orem) col{legiijuventiitis) d{onum)
(liedit) 3.
D'après une troisième formule, on a donné au collège la
statue ou le temple d'un dieu : T{itus) Annius Luculliis signuin
Martis dendrophor[is) (Miensium d[onum) d\edit) dedicavit ^.
Enfin on dit simplement que la statue a été dédiée : Jovem
Pantheum Augiustuni) cum aede et letrastylo illi, cundores
juvenum Laurensium, dyonum) d{ederunt)->.
Il est évident que tous ces objets consacrés aux dieux sont
mis à la disposition des collèges 6. La consécration leur don-
' VI 10330. sous Vesprtsien: il s'agit d'un collège funéraire. Même for-
nuile : III ol96. VI 404. 455. 636. 717. 37-28. 10231. X 444 (voyez supra,
p. 436. n. 2). Cfr. 1 589 : Jovei Capitoliiio et poplo Rnmano.
'- II 4498. m 1547. Même formule : Il 2818 imtores). III 882. 4565.
V 801. VI 552. 630. 692. 3678. VII 1069. VIII 2601. 2602. XII 187. XIV 25.
3.540.
3 III 4272, à Brigelio Mènn^ formule : III 449H. 4778. Ai.lmkr, M. de L.,
H 175
' XIV 33. en 143 Même formule : III 4792. V 865-866 XVI 10251.
X 6666. XII 187. 3043. XIV 32-37. 53. 67. 69-71. Diia.mbach, 1299 Etc.
•' II 2008, à Nescania, vers le milieu du !!• siècle. Même formule :
m 8675. VI 642. XIV 2. Etc.
'• Les objets (.le même nature consacres par les collèges eux-mêmes,
tantcju'ils n'eurent pas la personnitication civile, étaient sans doute regar-
. Mais en vertu de cette loi, qu'ils ont librement
votée ou acceptée {pactionem sibi ferre), les membres eux-
mêmes considèrent leurs biens communs comme la propriété
-
(]\uennalis) aram sodaUbus suis Serrensibus donum posuit et locuin
scholae ipse acquesivit^^. — Locifm], sive ager est, — mancipio
acceperunt immiuies et curator et plebs universa coUegi 3. — Hoc
monnmentum {sive sepul]chrum donatiouis causa acceperunt Dio-
nysan[i]'K Mais on ne peut s'attendre à trouver dans de pareils
textes une précision de termes suffisante pour étayer un raison-
nement.
terre, werdcn sie als selbsUindige \ennogenssubjekte durch das Grnndyc-
setz- des romischen Volkcs anerkannt ; demi das darf man dock als in der
Anerkennung ihrer Autonomie mitenthalten ansehen. Les XII Tables
n'accordent que l'autonomie. Ce que nous avons dit des statuts au pre-
mier volume, pp. 33o-336. ne peut s'nppliquer qu'aux collciïes autorisés
de l'Empire.
1 Voyez infm. aux legs.
M'I839.
■■' V: 10231. Voyez supra, pi». 433436.
* VI 7006. Cfr. VI 1947. 10296. X 414 : iis, qui in collegio Silvani hodie
e.ssent quique postea subissent. Ces derniers mots prouvent que c'est une
façon de désigner le collège, qui est indépendant du changement des
membres. — Rappelons les sociétés formées pour bâtir un monument
funéraire: ce n'étaient pas des collèges. Voyez le premier volume, p. 2o9.
( 441
{i i. I^crsaniiificatiini civile K
La dotation de l'Etat, accordée fort rarement et destinée à
un service public, la consécration, qui ne s'appliquait qu'aux
objets du culte, et la propriété commune, entourée de mille
inconvénients, ne suffisaient pas pour assurer l'existence des
collèges professionnels. Quand leur utilité fut reconnue, quand
ils formèrent dans l'État et dans la cité des corps publics et
HUtorisés [corponv, on leur reconnut, comme à l'État romain
et aux villes romaines, une personnalité propre, capable de
droits et d'actes juridiques dans une certaine mesure. Toutes
les corporations autorisées, quelle que fût leur nature, eurent,
en un mot, la personnification civile, à l'imitation des cités. Le
jus privntum^ qui ne connaissait d'autres sujets de droit que
les personnes, regarda le collège comme un être abstrait,
distinct de ses membres, et il traita cet être abstrait comme
une personne capable de droits et d'actes juridiques -, aussi
bien qu'une personne physique 'sinaularis persona), sinon
dans la même mesure. Par opposition aux membres considérés
individuellement {sinyuli , la personne civile est conçue comme
une unité, appelée umversitas''\ C'est improprement qu'on lui
> DiRKSEN, 11. pp. 110141. Savignv. 11, pp. -281-360. Mommsen, De coll.,
PI». 36-40. 85. 117 127. Gierke. III. pp. 88-106. 129-181. Karlowa. II,
pp. 59-63. Permce, Labeo, I, pp. "289-310. Liebenam. pp. 233-235. Walt-
zi.vG, dans De Ruggiero, Diz. epigr., s. v. Collegiiun. Voyez aussi tous les
irailés de Pandccte.'; ou de Droit romain, et les thèses françaises de doc-
torat en droit, ainsi que celle de J. vo.v Lykowski.
- DiG., 46, 1, 22 (Flore.ntimsi : hereditas personne vice funyilur, sicut
nnuiicipium et decuria et societas. Jlst., Inst., 2, 14, 2 : hereditas per-
sonae vicem siLstinet. Dig., 4, 2. 9. l (Ulpianls) : sive singularis sit per-
sona, quae nietum intulit, irl popidus nicnria vcl collcgiuni vel rorpus.
'* Dig., 3. 4. 7. 1 (Llpianusj : Si qnid universitati debelur, singiiiis
non debetur : nei- qnod débet universitas. singuli dcbent. iSv. 3, 4, 2 :
Itic enim (actor) pro republiia vel universitate intenrnit, non pro sin-
l -i4-2 )
applique un nom qui désigne une collection d'individus, tel que
miinicipcs ou collegïati * ; car elle est distincte aussi bien de la
collectivité des membres que des membres pris un à un. Elle
subsiste si tous les membres changent; et même si le collège se
réduisait à un seul individu, elle ne se confondrait pas avec ce
dernier -. Le patrimoine corporatif, un et indivisible, appar-
tient à la personne morale et n'est pas propriété commune
[i^ingulorum pro parte) •^; c'est encore improprement qu'on dit:
arca communis, arca nostra ^, res ou pecunia communis ->. Aussi
les atî'ranchis de la personne civile peuvent intenter un procès
gulis. Marcien, parlant des biens des cités (Dig., 1, 8, 6, 1), dit : Uni-
versitatis ,^h)i(, )io)i singulorum . . . Ideoque nec servus communis
civitatis singulorum ;)ro parte intellegitur , sed universitatis, et ideo
tam contra civem qiiam pro eo posse servum civitatis torqiieri divi fratres
rescripserunt. Ideo et libei'tus civitatis non habet necesse veniam edicti
petei-e, si vocet i)i jtu^ aliqitem ex civibus.
^ Dans les textes, on voit clairement que municipes désigne la personne
civile. Voici un exemple du Digeste (48, 18, 1,7): Servum municipum posse
in caput civium torqueri saepissime resoiptum est, quia non sit illonun
servus, sed reipublicae. Idemque in ceteris servis corporum dicendum est ;
nec enim plurium servus videtur, sed corporis iUlpîanls). Cfr. Dig., 3, 4,
"1. Le legs fait aux citoyens (civibus) est regardé comme fait à la cité
(Paplmanus, Dig., 34, o, '2). Dans les inscriptions surtout on trouve ce
langage impropre; voyez supra, p. 440, n. 4. Gierke. 111, p. 151.
- Dig., 3, 4, 7, ^ (Llpianus) : In decurionibus vel aliis universitatibus
nihil refert , utrum omnes idem maneant an pars maneat, vel omnes
immutati sint. Sed si universitas ad unum redit, magis admit titur posse
eum convenire et conveniri, cum jus omnium in unum recciderit et stet
nomen universitatis. Alfenus compare la personne civile au corps
humain qui reste le même, quoique toutes les cellules se renouvellent
(Dig., 3, 1, 76). Cfr. C. I. L., X lo79 : qui in cultu corporis Heliopolita-
norum sunl eruntvc. X 444 : qui in collegio Silvani hodie essent quique
postea subissent. II 2102 : collegas su[cc]edentes deincepsqiue) successores.
VI 10231 : quandiu is coUegius steterit. Sur VI ^405, voyez aux legs (infra).
^ Dig., 1, 8, 6, 1 (\). 441, n. 3). C'est par exception qu on reçoit sa part
t'u se retirant dans un cas donné (DiG., 47, 22, 1, 2).
^ Mitth. des Inst., 1890. p. 287. Gradenwitz, /. /., XII, p. 143.
•■• Voyez le pivmier volume, p. 449.
I 443 ,
aux membres, parce (|ue ceux-ci ne sont pas leurs patrons, et
ses esclaves peuvent être mis à la (juestion contre un membre ' .
Ses créances et ses oblij^ations n'ont rien de commun avec
celles des membres -. Entre elle et l'un des membres peuvent
exister les mêmes rapports juridiques qu'entre deux étrangers-^.
Il s'entend que les personnes civiles ne [)euvent avoir que
des droits patrimoniaux, et qu'elles n'eurent même jamais la
plénitude des droits [)atrimoniaux que peut avoir une; personne
physique. Leur capacité fut limitée par leur propre niitun-,
parle foi inalisnie ei certains princijjes du droit romain. Etre
abstrait, sans réalité matérielle, la personne civile n'a ni corps
ni volonté; elle ne peut paraître elle-même en justice ni dans
un acte juridique; enfin, elle est rangée parmi les personnes
incertaines persunae î//c/'/7(/ey, c'est-à-dire celles dont on ne peut
se faire une idée précise comme d'une personne physique
déterminée. Tout cela lui créait des obstacles juridiques qu'il
fallut écarter. On ne les écarta que peu à peu pour les collèges, a
mesure qu'on se rendit coinple de leur utilité, et il en est même
qu'on laissa subsister, il résulte de l.i rjue la personnification
civile ne suppose pas un ensemble de droits accordés d'un
coup et en une fois : elle s'étendit peu à peu pour les collèges
en même temps que pour les villes, bien rjue les collèges
soient moins favorisés, et nous pouvons la suivre dans son
développement. Il ne faut donc pas demander quand elle fut
octroyée aux collèges professionnels, mais il faut en chercher
les premières traces et déterminer les flroits qui leur furent
accordés successivement.
En avaient-ils déjà une partie sous la républicjueï On ne
saurait l'affirmer, et nous sommes disposé a croire qu'il n'en
est rien. Les collèges ont une caisse, parfois un immeuble, tel
«ju'un lieu de sépulture; mais la caisse pouvait être considérée
< Voyez supra, p. 441. n. 3, ei U'I, n. 1. bu.., 1, 8, 0. 1. 1, i. 10. ;. ;s
\6, 1, 7 et 8.
- Voyez supra, p. 441. n. 3. Dig., 3, 4, 7, I. ;^, 1, 1, 15.
• DiG., 3, 4, 9 (procès). 36, 1, 1, 15 (droits d'obligation).
( 444 )
par la loi comme propriété commune ' , «H les immeubles étaient
mis à leur disposition par un généreux particulier 2, de même
que l'Etat permettait à certains collèges de se réunir dans un
temple ^. Sans doute, par le pacte conclu entre eux {pactionem
sihi ferre), les membres s'engageaient à ne faire de la fortune
corporative qu'un usage conforme au but commun ; mais ce
pacte n'avait de valeur que pour eux, car il ne liait pas les tiers,
et envers ses membres le collège n'avait d'autre moyen d'action
que l'exclusion ou la privation des droits. Jusqu'il l'époque de
Cicéron et de Clodius, l'État ne s'occupa du reste pas des
collèges, et il faudrait s'étonner si le droit privé avait levé, en
leur faveur, avant cette époque, les obstacles que rencontrait
la personnification civile. Ni sous les actions de la loi, ni sous
le système formulaire, il n'était possible à un être abstrait
d'agir en justice '^. Les mêmes empêchements existaient pour
la possession et pour l'acquisition de la propriété. Les scrupules
que les jurisconsultes expriment encore sous l'Empire, comme
nous allons voir, montrent qu'on ne les avait écartés que
récemment. Les collèges devaient donc se contenter du droit
commun, et c'est ce qui explique peut-être en partie pour-
quoi ils végétèrent si longtemps, tandis que sous l'Empire le
régime corporatif prit une extension extraordinaire.
La le,v Julia de l'an 7 avant notre ère, qui régla définitive-
ment le droit d'association au point de vue politique, fut sans
doute aussi le point de départ d'un régime nouveau dans le
domaine du droit privé. Tout collège, c'est-à-dire toute asso-
ciation constituée en vue d'un but permanent et sans durée
limitée à la vie ou à la participation de ses membres {collegium),
fut obligé de demander l'autorisation de l'Empereur ou du
Sénat. Une fois pourvu de celte autorisation et reconnu par
l'État, le collège devient une institution publique, un corps
' Pecunia communis avait peut-être alois ce sens.
' Voyez le premier volume, pp. -471472.
2 Voyez le premier volume, p. 211.
* MoMMSEN, De coll., i>p. 36-37.
i4o )
public [corpus]^. Or, tout corps public, quel que soit son nom,
collège, société de publicains, ou autre, reçoit avec rexisteiice,
la personnification civile, de même qu'une colonie ou un
municipe la recevait par sa fondation même. Telle fut du
moins la situation au second siècle, ù l'époque de (iaius, et si
elle ne remonte pas à Tan 7 avant notre ère, elle fut certaine-
ment une conséquence de la U\i Julia. L'autorisation et la
concession de la personne civile n'étaient pas deux actes
distincts : l'une impliquait l'autre-. Au contraire, les collèges
non autorisés n'étaient ni un corpus ni une personne civile;
ils n'étaient reconnus ni du droit public, ni du droit privé;
l'un les défendait ou ne leur accordait qu'une tolérance provi-
soire, l'autre ne voyait pas en eux des nniversitates, et leur
refusait tout droit. Après avoir rappelé que toute corporation
a besoin de l'autorisation de l'Empereur ou du Sénat, Gaius
définit ainsi les droits qui découlent naturellement {proprium
est) de cette autorisation :
Neque societas neque collegium ntque hujusmodi corpus pas-
sim omnibus habere {haberi?) -^ conceditiir : nam et legibus et
' Voyez le premier volume, pp. 119-120, el supra, \)\k 139-lil. Quand
Paul dit (DiG., 34, 5, 1) : corpus, cui licet coire — corpus, cui non ticet
icoire), il n'emploie pas corpus dans le sens toclinique, mais dans un sens
iïénéral indiqué plus haut, p. 139.
2 L'une est employée pour l'autre. La permission ou la défense d'avoir
une caisse commune est mise pour l'autonsalioii ou l'interdiction du
collège. Voyez le premier volume, p. 43, n. 2 (défense des Bacchanales),
p. 113 (juifs), et C. I. L., V 4428 : {sejc)vir{i) Augiustales) soci, quibus ex
permiss{u) divi Pu arc(uu habere permiss{um est\ à Brixia; voyez le
premier volume, p. 125. et Schneider, De sevirum .{ug. muueribus,
pp. 57-01.
5 Le texte parait corrompu : le sens doit être : Il n'est pas concédé à tous
de former un corpus [corpus habere; cfr. \)\us loin pennissuni est corpus
habere) sous le nom de société, de collège ou sous un nom de ce genre. —
Selon nous, corpus habere et habere res cotnmuucs sont deux conséquences
de coire licet ou jîis coeundi lege peiinissuni est (DiG., 34, 5, 4. 50, 6, 6 (5),
12; voyez le premier volume, pp. 115-140). XIV 2112, 1, 1. il : Quib[7is coire
co]nveni7'e collegiumq{ue) habere liceat. C'est le litre d'un chapitre du
i 440 )
scnatus cousiUtis et piincipalibus comtilutionibus ea res coerceiur .
Voilà le principe de rautorisalion exigée; voici des exemples :
Paucis admodum in causis • concessa siuU hujusmodi corpora :
ut eccc vectigalhim pnblicorum sociis permissum est corpus
habere... Item collegia Romae certa sunt, quorum corpus
senatus consultis atque constitutionibus principalibus conflrma-
tum est. Il cite les boulangers et les armateurs. Voici main-
tenant les conséquences de cette autorisation : Quibus autem
permissum est corpus habere, eollegii, societatis sive cujusquc
alterius eorum nomine, proprium est ad exemplum reipu-
biicae habere res communes, arcam communem et actorem sive
syndicum, per quem tamquam in republica, quod commu-
niter aqi fierique oporteat, agatur fiat '^.
Il suit d'abord de ce texte que la personnification est propre
aux collèges autorisés, comme nous venons de le dire. Il en
résulte aussi que cette personnification est une imitation de
celles des villes {ad exemplum reipublicae). Nous avons vu que
les collèges formaient dans les cités de petites a républiques »,
dont l'organisation était modelée sur celle des cités 3. Le droit
sénatiisconsulle permettant en bloc les collèges funéraires, et collegium
habere signifie la même chose que coire. — C. I. L., III, p. 924 : ne putet
se collegium {h)ahere, dans l'édit de dissolution du collegium Jovis Cerneni;
cela veut dire : qu'on ne croie pas qu'on a encore un collège qui prendra
soin des funérailles, si l'on meurt.
1 Voyez le premier volume, j». 129.
2DiG.. 3, 4, 1.
'" Res piiblica collegii, en parlant des biens des collèges, est fréquent, et
ce mot est presque synonyme de arca collegii. Voyez le premier volume,
p. 449, n. 4et7. VI 1682 : reipublicae corporis corariorum (supra, p. 100).
VI 9626 : pênes r{em) p{ublicam) s[upra) s(criptam) remanere vola; il s'agit
d'une somme léguée aux mensores. III 7485 : nautae universi Danuvi ea:
r{e)p(ublica) sua. XIV 2299 : i7icomp[arabili] fide rempubl[icam ger^ens
corporlis] [scaerncorum latinorum). VI 9254 : ark{a) reip(ublicae) collegii
centonariorum. Orelli, 4412 : ut ex reditu ei parentent cum rep{iiblica\
collegiii) dendroph{ororum). De même respublica désigne les biens d'une
ville, par exemple dans le titre de curator reipublicae (Mommsen, St.-R.,
Il', p. 1035, n. 7). XIV 2793 : {sestertium decem) miilia) n{ummum.) reipu-
bl(icaé) Gabinorum intulit.
( 447 )
privé les traita comiiH' les villes, mais avec moins de faveur,
comme nous verrons, et il ne faut pas oublier que tout ce qui
s'applique aux villes ne s'applique pas à eux. Gaius reconnaît
aux unes et aux autres les droits fondamentaux que voici :
1" d'avoir une caisse [arca) et un patrimoine immobilier {res)y
distincts de la fortune particulière de chacun des membres ^ ;
2" d'avoir un uctor ou un syndic pour agir en leur nom,
parce qu'eux-mêmes, êtres abstraits, ne peuvent agir. Le droit
d'avoir un patrimoine corporatif comprend le droit de l'acqué-
rir, de l'augmenter et de le défendre dans les limites tracées
par les règles du jus privatum. (les règles durent être successi-
vement modifiées pour écarter les obstacles qu'elles opposaient
à des personnes civiles. La capacité des collèges, suivant pas à
pas celle des villes, alla s'étendant sans cesse. Nous allons
examiner un à un les droits obtenus par les corporations, et,
sans nous perdre dans des raisonnements que ne comporte
pas cette étude historique, nous insisterons sur le profit que
les corporations en tirèrent.
Droits réels et droits cCohliqation.
Parmi les divers modes d'acquérir la propriété, la manci-
pation, la tradition et l'usucapion devinrent accessibles aux
(!ollèges.
Pour ces deux dernières, il fallait être capable de « posséder ».
Par eux-mêmes, les collèges ne pouvaient acquérir la posses-
sion, n'ayant ni corps ni volonté -; avec le temps, il fut admis
qu'ils le pouvaient par l'entremise d'un esclave ou d'un man-
^ Sur arca et res, \oyez le premier volume, pp. 449-450.
' L'incapacité de vouloir est exprimée parles mois : universi consentire
non possunt (Dic, 4i, 2, 1, 22). consentire non pvssunt (Dig.. 38, 3, i, 1)
(le Paul et d'tlpien. Giekke. III. }>p. 156-1.^)7.
( 448 ^
dataire libre '. iMais il fallait d'abord acquérir l'esclave : celait
un cercle vicieux dont certains jurisconsultes du premier siècle
croyaient même impossible de sortir. A l'époque de Paul etd'L'l-
pien, ce n'était plus qu'un scrupule théorique; en fait, on avait
reconnu aux corporations, comme aux villes, la propriété des
esclaves qu'elles avaient à leur service, et celle de leur pécule
avec tous ses accroissements. Paul et Ulpien déclarèrent, en
conséquence, que les municipes et les collèges pouvaient pos-
séder par l'intermédiaire de leurs esclaves '^. 11 avait fallu
déroger à la règle qui exigeait Vanimus habendi; le maître de
l'esclave a la volonté de posséder le pécule avec ses accroisse-
ments, tandis que le collège ne peut l'avoir, étant dépourvu
de volonté, il fallut une dérogation pareille pour permettre
aux corporations d'acquérir la possession par un mandataire
libre. Le mandataire doit recevoir communication de la volon-
té : par une fiction nouvelle, on admit que la volonté de la
majorité, de l'assemblée générale, remplacerait celle de la per-
sonne civile, de Vuniversitas ^.
Devenues capables de posséder, 1(,'S corporations purent
acquérir la propriété des res nec mancipi par la tradition ou
^ DiG., 41, % 1, 22 (Paulus) : Municipes per se nifiil possidere possunt,
quia univey^si consentire non possunt. . . Sed yerva filius ait, per serviun
quae peculiariter adquisierint et possidere et nsncapere posse : sed quidam
contra putant, quoniam ipsos servos non possideant. 2 (Ulpianus) : Sed
hoc jure iitimur, ut et possidere et usucapere municipes possint idque eis
et per servum et per liberam personam adquiratur. DiG.. 10, 4, 7, 3
(Ulpianus) : Item municipes ad cxhibendum conveniri possunt , quia facvl-
tas est restituendi : nam et possidere et usucapere eos posse constat. Idem
et in collegiis ceterisque corporibus dicendum erit.
2 Esclaves et affranchis des collèges : voyez le premier volume, pp. 416.
455. VI 671 : ser(vus) actor d'un collège funéraire. Voyez De Ruggiero,
Diz. ep., s. V. actor, \\. 70. Cfr. Plin., Epist., 7, 18, 2. Sur les servi actores
des villes, voyez Mommsen. St.-R., 1-, p. 181. P. p. 185. Trad. Giraud, I,
p. 214. Hermès, XII, 1877, p. H7. De PiUggiero, /. I., pp. 69.
5 DiG., 50, 17, 160, I (Ulpianus) : Refertur ad universos quod publiée fil
per majorent partem. Cfr. 50, 19, 1 (Scaevot.aK
( 4i9 )
par l'usucapion ^. Pour les autres choses, il fallait la niancipa-
tion, qui pouvait se faire par un esclave -, mais non par un
mandataire libre '^.
Ce n'est pas à titre onéreux que les collèges faisaient le plus
d'acquisitions; leur fortune mobilière et immobilière se for-
mait surtout par des libéralités qui prenaient Tune de ces deux
formes juridiques : la donation entre vifs et le legs. La plupart
des donations consistaient en sommes d'argent, et se faisaient
de la main à la main, donc par tradition. I^e bienfaiteur ver-
sait la somme dans la caisse du collège : « Le cinquième jour
avant les kalendes de mai, écrit Fadius aux fabri subacdiani de
Narbonne, j'irai verser dans votre caisse 10,000 sesterces ^. » Les
inscriptions fournissent de très nombreux exemples de ces
dons et elles disent généralement : arcae (ledit, arcae inlulit,
ou simplement : dedil, donavit, vivus dédit. Nous avons vu que
toutes ces donations sont ordinairement faites sub modo, à
charge de célébrer un anniversaire de naissance ou des hon-
neurs funèbres, quelquefois avec des clauses pénales ou avec
des clauses de résolution ou de substitution : Ob memoriam
patris sui dec{iiriae septimae) coUeiji fabï\nm) m{umcipi)
li(avennatis sestertios) m{ille) n[ummos) liberalitate donavit sub
hac coudicione,ut quodannis rosas ad monumcntum ci spargantet
ibi epidentury dumtaxat in idus Julias. Quod si neglexerint,
lune ad dec{uriam octavam) ejnsd{em) coUeg\i) pertinere debebii
< DiG., 10,4. 7, 3 et 4 1,2, 1,22 (supra, pagepnréclente, n. 1). 50, 12.3, 1 :
Si (juis quam ex pollicitatione tradiderat rein luunicipibus vindicare
velit. . .
- L'lpian., Fragm., 19, 18: Adguiritur aiitein iiobis eliatn per cas per-
sonas, quas in potestate, manu mancipiove habemus. llaqiie si quid eae
mancipio puta acceperint, aut traditum eis sit, vel stipulatae fuerint, ad
ttos pertinet.
' Gaius (///.s7., 2, 95) n'excepte que la possessio. G. J., IV, 27, 1. 11
<'da,il donc d'un esclave public dans Tacite, Ann., 2, 30, et dans Pllne,
Epist., 7, 8, 2.
■• XII 4393 : impensae (= airae) vestrat' inférant. Voyc/. le premier
volume, pp. 435-436.
Tome L, vol. II. 29
{ 450 )
condicione sujyra scripta '. Quantité d'objets mobiliers, destinés
à l'ornement du local ou du temple ou à l'usage des confrères,
tels que des statues, des autels, des horloges, des vases à
mesurer les rations, des tables, des cratères et ainsi de suite,
étaient donnes de la même façon -. Pom' les fonds de terre
provinciaux, la tradition était également employée. Pour les
terres italiques qui étaient res maucipi, il fallait la mancipation,
celle qu'on appelle mancipatio ninnmo uno donationis causa ••.
Les donations d'immeubles en Italie sont fréquentes : ce sont
des fonds de terre, des jardins, un temple, un emplacement,
une sépulture, etc. ^. Pourtant les inscriptions ne parlent géné-
ralement pas de mancipation : on ne la trouve mentionnée
que trois fois. A Brixia, Valeria Ursa mancipe aux fabri la
moitié d'un champ et aux droguistes un autre champ, à charge
de célébrer certaines fêtes : Quae coU[egio) fabror{um) agellu[m)
Aeseianum suum mancipavit se viva ex demid{ia) port{ione) sua
ita, ut ex reditu ejusde{m) agelli q{uot)a{nnis)... celehrent{ur).
Item quae [e]t coll{egio) farmac{opolarum) publicor{um) agel-
lu{m]... iveianum suum mancipavit se viva, ut ex reditu -">... A
Rome, Julia Monime mancipe à un collège de Silvain un
champ où elle a construit une schola consacrée à ce dieu 6. Il
est à remarquer qu'on ne parle pas de l'esclave du collège qui a
dû intervenir; bien plus, dans la donation de Julia Monime
on dit que la mancipation est faite aux immunes (membres
d'honneur), aux curatores (chefs) et à \aiplebs du collège. Mais
* XI 132. Sommes données : voyez nos Indices. Substitution : V 5134.
IX 1618. XI 132. 4391. Ephem. ep., VIII 210. Résolution : V 5134.
2 Voyez le premier volume, pp. 229-230. 290. 471-478.
5 VI 2211 : MoMMSEN, De coll., p. 123. Karlowa, II, p. 377.
* Fundi, ager, praedia : X 444. 1880. VI 10234. Horti : VI 461. V 2176.
Aedes : X 6483. Sacrarium : VI 461. Solum, locus, area : VI 839. IX 2654.
5568. X 5647. Loca sepidturae : X 5386. Etc.
s V 4489.
* VI 10231. \o\ez supra,, p. 435. Le troisième exemple se trouve au
premier volume, VI 10302.
( 4o1 )
les inscriptions ne parlent pas un langage juridiquement
exact, et il n'y avait pas lieu de dire quelles formalités on
avait suivies pour faire la mancipation; il importait seulement
d'indiquer le bénéficiaire, c'est-à-dire le collège {collegio,
V 4489), désigné ici par ses trois éléments constituants.
Mommsen va plus loin : il pense qu'il ne s'agit pas d'une manci-
patio et que nous avons affaire à une simple formule toujours
employée dans les donations à cette époque, même s'il n'y
avait pdismnncipatio.
En acquérant un fonds de terre, les collèges acquéraient les
servitudes établies en sa faveur, comme ils devaient en subir
les servitudes passives. Julia Monime assure au collège de
Silvain les servitudes nécessaires pour jouir du champ qu'elle
lui a donné. L. Domitius Phaon fait de même quand il donne
{attribiiit) quatre fonds de terre à un autre collège de Silvain,
en Lucanie •. Il lui accorde aussi le droit de prendre le bois
et l'eau nécessaires aux sacrifices dans un champ voisin qui
lui appartenait. — L'usufruit fut fixé à cent ans pour les villes "^ ;
autrement la nue propriété serait devenue inutile, une per-
sonne civile ne mourant pas. — Il ne faut sans doute pas
confondre avec l'usage (usiis) le droit qu'un collège reçoit de
se servir d'un local ; ce droit dépendait de la volonté du pro-
priétaire. Les ivoiriers et les ébénistes romains avaient reçu
de Julius Aelianus le droit de se réunir dans une sctwla {jus
scholae tetrastyli dedil) ''>. Une inscription d'Anagnia dit formel-
lement qu'un collège n'avait reçu qu'à titre précaire l'usage
d'un local pour tenir ses banquets 4. L. Caesennius Kufus
< VI 10231 [supra, p. 435). X 444 [supra, p. 436, n. 1). Cfi-. X 1579 :
atque ita i[i)s accessus jusque esta per januas itineraque ejus agri ; il s'agit
du corpus Heliopolitanorum. VI 10259 : et ambitum sui juris habct ; il
s'agit du sepulcrum du collegium PlujUelianorum.
^ DiG., 7, 1, 56. 33, 2, 8.
3 Mitth. des Inst., 1890, p. 288. Voyez le premier volume, p. 218, n. 5.
*■ X 5904 : locum — precario, [in quo cultores] vesce[rentnr impe-
travit].
{ib-2)
donne aux mltores Dianae et Antinoi de Lanuvium a l'usage »
de 15,000 sesterces, c'est-à-dire 800 sesterces par an i.
Les collèges disposaient à leur gré de leur patrimoine et
n'avaient pas besoin d'autorisation pour en aliéner une partie;
c'était l'assemblée générale qui décidait. Le collège était, le
cas échéant, représenté par un mandataire libre; car les
esclaves, ne possédant rien, ne pouvaient rien aliéner. Nous
voyons plus d'une fois un collège concéder par décret un em-
placement pour une statue ou pour un tombeau : Loco dato
(lecreîo coîlegii -. Collegium jumentariorum huic ci}ypo locum
dédit 3.
Sous le Bas-Empire, le patrimoine atî'ecté au service public
d'un collège devint inaliénable '^
Les collèges, comme personnes civiles, pouvaient aussi con-
tracter des obligations actives ou passives, devenir débiteurs
ou créanciers ^\ On les voit conclure des contrats de vente ou
de louage, s'engager par stipulation. En 220, un collège de
Brigetio achète une schola 6. D'autres vendent une tombe dans
leur lieu de sépulture, une place dans leur colombaire ". Nous
avons vu qu'ils louaient souvent des lieux publics, des édifices
pour lesquels ils devaient payer un loyer 8. Les boulangers
affermaient les terres que l'État leur avait données pour les
indemniser de leurs charges; comme les fermages ne rentraient
pas, Honorius nomma un commissaire pour les louer par des
' X 2112, I, 1. 3-4 : pollicitus est se [conl]atuni7n eisex liberalitate sua
isestertium quindecim) 7n{ilhnii) n(iunmum) iisum.
5 V .5272. 3287. 5446. 5447. 5773. .5888. XII 1815. Aij.meh. Musée de
Lyon, II, 177. De Boissier, p. 391.
•' XI 4749 = Mur., o2o. 2.
^ Voyez supra, pp. 372-377.
•'^ DiG., 3. 4, 7, 1 (lLPiA>TSj : Si qiiid umversitali debetur, singulu non
debetur, nec giiod débet universitas, singuli debent.
6 m 11042.
■ X 1746. VI 7459.
» VI 266 'voyez infra, j). 472;. C. Th., 10. 3, 1. 5. 15, 1. 1. 41: voyez
supra, pp. 378 et 480.
( 453 )
contrats emphytéotiques '. II est certain que les boulangers
touchaient ces fermages, mais on ne sait si les terres étaient
louées en leur nom ou au nom du gouvernement 2.
La principale des obligations verbales était la stipulation.
Elle exigeait la présence des contractants, mais on pouvait se
faire représenter par une personne soumise à sa puissance. Les
collèges pouvaient donc stipuler par leurs esclaves •^. Une
inscription nous fournit un exemple d'une stipulation, accom-
pagnée d'une clause pénale, où un collège figure comme pro-
inissor ; malheureusement elle est fragmentaire '^. Il en ressort
pourtant que le collège s'engage à réparer le dommage que
pourrait causer un de ses esclaves, à vendre celui-ci le cas
échéant, et qu'il assume la même responsabilité pour le succes-
seur. Ce qui étonne encore dans ce fragment, c'est que le populu^
coUefjii s'oblige directement. Il faut admettre encore une fois
que le langage épigraphique est inexact ou que c'est une simple
formule s.
Parmi les pactes, le plus important pour nous est la dona-
tion faite pollicendo. La simple promesse de donner (pollici-
îatio), sans stipulation ni tradition, ne constituait pas un pacte
obligatoire; il dépendait du bon vouloir de celui qui la faisait,
de l'exécuter ou non. Il y eut deux exceptions à cette règle en
faveur des villes et des dieux, mais pas en faveur des collèges 6.
Une inscription de Narbonne, déjà citée, nous fournit un curieux
exemple de pollicitatio ; c'est la lettre de Q. Fadius Musa aux
fnbi'i subacdiaui. Il promet de verser dans leur caisse
< C. Th., 14, 3. 1. 19 (396): voyez supra, p. 37:i.
' Voyez supra, p. -433.
•' DiG.. 3, 4, 10. io, 3. 3. Ulpian.. Fragm., 19, 18. Voyez supra, pp. 448-
449.
^ VI 10^296.
•■' VI 10296 : StipuUitiis est T. Flavius Àugiusti) [kibirtus) . . . spopondit
L. Titius Pamphil]us et populos. Cfr. Mommse.n, Ik coll., p. 1-23. Von
Lykovvsk[, pp. 30-31.
^' DiG.,,^, Iti, l.iî I. :2. 3, pr.
( 454 )
10,000 sesterces, pour fêter chaque année le jour de sa nais-
sance. Après diverses prescriptions, il ajoute : « Vous garderez
cette lettre pour tenir lieu d'un titre régulier i. » Cela signitie
qu'il ne veut pas donner une forme légale à sa promesse, et
que les confrères doivent se contenter de sa lettre, f^es pro-
messes de ce genre faites à des collèges sont fréquentes dans
les inscriptions -.
Ulpien suppose le cas où un collège se rendrait coupable de
violence, contraindrait, par exemple, à un acte, sans doute par
ses représentants réguliers : la victime, dit-il, pourrait lui
intenter une action quod melus causa ''\ Ici la personne civile
est censée commettre un délit. Il y a d'autres cas où les collèges
avaient à répondre de délits commis par leurs esclaves '^ leurs
chefs, leurs administrateurs ou leurs membres. Ainsi, le corpus
pistorum est responsable des vols conmiis dans les greniers
publics o. Les collèges de Rome encouraient une amende de
50 livres, si l'un de leurs membres prenait part à des réunions
illicites *'. La corporation des naviculaires est responsable des
fraudes commises par ses membres qui prétextaient un
naufrage et vendaient à leur profit le blé de l'Etat '. Le collège
des centonaires est puni d'une amende, s'il n'empêche pas ses
' XII 4393 : Epistidam pro perfecto instrtimento retinehitis (eu Tan 149).
V^oyez le premier volume, pp. 435-436.
2 V 1978, lettre à un collège : [con]fero vohis HS XX mil. n. VI 10234,
l. 14 : cenatn, quam Ofilius Hermès qq. omnibus annis dandam praesenti-
biis promisit. VI !024î2, en 136. 9422 : se vivum quod promiserat — pavi-
mentum. XI 6191 : Ofia C. f. Priscilla, HS VI m. n. coll{egio) ({abrum),
quae Ofius Hermès avus ejiis ad exornandam sc/iotam pollicitus erat, dédit.
XIV 2112, I, 1. 3-4 : pollicitus est se [conl]aturum HS XV m. n. usum,
en 136.
^ DiG., 4, 2, 9, 1 : Sive singularis sit persona, quae melum intulit, vcl
populus, vel curia, vel coUegium, vel corpus, finie edicto locus erit.
* VI 10296 {supra, p. 453).
* Voyez supra, p. 84, n. 4.
* C. Th., 16, 4, 1. 5. § 1 {supra, j.p. 358, n. 2 et 367, n. 2).
^ Voyez supra, p. 276.
( 45o )
membres d entrer dans une curie '. Eu 438, TlKMxIose II rend
[oui \e corpus fabriccnsium solidaire de la t'aillile d'un armu-
rier '-i. Mais, dans tous ces cas, il s'agit de mesures adminis-
tratives et non de règles du jus prïvalum : ce n'est pas la per-
sonne juridique qui est en cause, mais un corps administratif,
et TEtat ne fait ici que prendre des mesures de police pour
améliorer un service public.
Acquisition à cause de mort.
Les personnes civiles, n'ayant pas de parents, ne pouvaient
hériter ab intestat, si ce n'est de leurs affranchis; en efiet, le
patron recueillait l'héritage de son affranchi, mort sans testa-
ment et sans héritiers siens. Nous avons déjà vu que les collèges
avaient des esclaves 3, mais longtemps ils n'eurent pas le droit
de les affranchir '*. Sous Trajan, une loi accorda ce droit aux
municipes et un sénatusconsulte rendu en 129, sous Hadrien,
retendit aux villes provinciales ^. Ce fut Marc Aurèle qui
octroya la même faculté à tous les collèges autorisés; l'affran-
chissement se faisait sans doute par un mandataire. Depuis cette
« C. Th., U, 8, 1. 2. Voyez supra, j). 364.
- Nov. Theod. II, til. 6, § 2 (438) : Denique quod ah uno committitur,
totius delinquitur periculo numeri. Ils n'ont qu'à se montrer circonspects
dans le choix des membres nouveaux, dit-il. — En 458, Majorien défend
aux gouverneurs d'infliger une punition générale aux curies pour la faute
d'un curiale (Nov. Major., tit. 7, § 11).
'" Voyez supra, p. 448, et le premier volume, j). 455.
' Varron parle déjà de libcrtini a municipio manuuiissi [De 1. 1., 8, 83);
mais jusqu'à Trajan, ces affranchis n'avaient qu'une liberté de lait, et
depuis la lex Junia, la Latinitas. Les Latini Juniani n'avaient |)as la
tcstamenti factio, et leurs biens faisaient retour à l'ancien maître comme
le pécule de l'esclave. Il en fut de même des libcrti cvlU'gionun jusqu'à
Mai-c Aurèle.
5 C. J., VII, 9, 5 et 3. G. DE LA Berge, Règne de Trajan, \). 135. Lkmon-
MKK, De la condition privée des affranchis, pp. 88-90.
( 456 )
époque, on trouve fréquemment des affranchis de collèges; ils
tiraient leur nom de celui de la corporation, comme les affran-
chis des villes empruntaient le leur aux cités i. Ulpien dit for-
mellement que les collèges pouvaient réclamer l'héritage d'un
affranchi : Divus Marciis omnibus collegiis, quibus coeundi jus
est, manumittendi potestatein dédit : quare hi quoque legitimam
liereditatem liberli vindicabunt '^. Les collèges purent aussi
demander dès lors la bonorum possessio intestati de leurs affran-
chis qui n'avaient pas d'héritiers légitimes 3. Quelques juris-
consultes avaient douté de ce droit, parce que, disaient-ils, les
personnes civiles n'ont pas de volonté ; mais si l'on devait soi-
même faire Yaditio/iereditatis, on pouvait réclamer la bonorum
possessio par un tiers *. Aussi Ulpien n'hésite-t-il pas à dire
([ue les collèges et toutes les personnes civiles peuvent la
demander par l'entremise de leur actor ou par un mandataire
quelconque; bien plus, à défaut de réclamation, le préteur
pouvait la leur adjuger d'office.
Comme il n'y avait aucun lien entre la personne juridique
et ses membres, elle ne pouvait hériter de ceux-ci ab intestat,
sinon en vertu d'un privilège. Sous le Bas-Empire, on employa
' Voyez le premier volume, pp. 45o-4o6. DiG., 38, 3 : De tibertis univcr-
sitatum.
2 DiG.,40, 3, let!2.
'" DiG., 37, 1, 3, 4 (Ulpianus) : A municipibits et societatibus et decuriis
et corporibits bonorum possessio adgnosci potest. Proinde sive actor eorum
nomine admittat sive quis atius, recte compelet bonorum possessio : sed et
si nemo petat vel adgnoverit bonorum possessionem nomine municipii,
liabebit municipium bonorum possessionem praetoris edicto. Il ne peut
s'agir que de l'héritage d'un affranchi, les collèges ne pouvant être
institués par un autre. Gfr. DiG., 38, 3, 1 (Ui-pianus) : Municipibus plé-
num jus in bonis liber torum libertarum defertur, hoc est id jus quod eiiam
patrono. Sed an omnino petere possint bonorum possessionem, dubitatur :
movet enim, quod consentire non possunt, sed per alium possunf petit a
bonorum possessionem ipsi adquirere.
* DiG., 37, i, 3, 7 : Adquirere quis bonorum possessionem potesl vel per
semet ipsum vel per alium. Gfr. §§ 4 et 38, 3, i (note précédente).
( 4o7 )
tous les moyens pour conserver les biens des membres î\ la
corporation, parce (ju'ils étaient affectés i\ un service public.
Généralement l'héritier d'un corporatxus, quel qu'il fût, entrait
dans le collège avec l'héritage : ainsi le collège ne perdait rien.
Quand les héritiers manquaient, les biens, devenus vacants,
devaient passer au tisc et la corporation en était privée. Les
empereurs, pour venir en aide à certains collèges, les appelèrent
à la succession ab intestat de leurs membres, en l'absence de
tout autre héritier légitime et à la place du tisc. Cette faveur fut
accordée aux curiales en 319 ^, aux légions et vexillationes en
347 -, aux employés des gouverneurs de province [cohortales]
en 3i9 •"', aux navicuiaires en 3o4 '^ aux églises et monastères
en 434 ^, aux armuriers de l'État en 438 ^, aux bateliers du
Tibre [navicularii amnici) en 450. Ces corps n'avaient peut-être
pas tous la personnification : cela paraît au moins douteux pour
les légions. Dans ce cas, l'héritage devait être partagé entre les
membres; mais quand il s'agit de corporations, telles que les
navicuiaires, les armuriers, les bateliers, les églises et les
* C. Th., o, % 1. 1 (319j : bona ejus ciiriae suae commodis cédant, id est
ordinis utilitati proficiaJît . . . C. J., VI, 6^2, 4 (429) : Intestatoriun curia-
limn bona, si sine herede moriantur, ordinibus patriae eoriun addici
praecipimiis.
« C. Th., 5, 4, 1. 1 = C. J., VI, 62, 2 (347) : ad vexiUationem, in qua
militaverit.
5 C. J., VI, 62, 3 (349) : ad celer os cohortales ejmdeni provinciae {succes-
sionem ejus) pertinerejiibenius.
* C. J., yi, 62, i (354) : fiereditatem ejus ad corpus naviculariorum, ex
quo fatali sorte subtractus est, deferri praecipimiis.
'•' C. Th., 0, 3. 1. I = C. J., I, 3, 20, § 1 (434) : sacrosanctae ecctesiae vel
inonasterio, cui fuerat destinatus.
c Nov. Theod. II. lit. (3, § 3 ^ C. J., VI, 62, o (438, : ejus bona ad eos perli-
nere, qui velut creatores decedentium attinentur. Ils ont été admis par le
rollège qui est solidairement responsable, même de la faillite de ses
membres, et Théodose trouve juste que le collège hérite d'eux dans le
cas indi(iué : Hoc enim pa-tocontingit ut — fabricenses coltegarum suoruui
sulatiis perfruantur, qui damnis ac detrimentis tenentur obnoxii.
1 4o8 )
inoiiaslères,il nous paraît certain que c'étaient elles, et non les
membres, qui recueillaient la succession ».
jNous arrivons à l'hérédité testamentaire. Le droit d'hériter
par testament n'élait fait que pour les personnes physiques :
elles seules continuaient la personne du testateur. De sa nature,
l'hérédité testamentaire n'était donc pas faite pour les personnes
civiles. Il y avait aussi des obstacles formels qui les auraient
empêchées d'en jouir. La personne instituée devait accepter
l'héritage par une déclaration solennelle ou, au moins, par un
acte quelconque, manifestant sa volonté d'être héritier. La
représentation était interdite -, et une personne civile, unité
abstraite, n'a pas de volonté et ne peut agir elle-même •>.
Bien plus, elle ne pouvait pas même être instituée, parce qu'elle
était considérée comme une personne incertaine (persona
incerta, incertum corpus) 4, c'est-à-dire une personne dont le
testateur ne peut se faire une idée précise; en effet, toute per-
sonne incertaine était incapable d'être instituée, soit à titre d'hé-
ritier, soit à titre de légataire s. De là, la règle d'Ulpien : « Un
' M. Vauïhier (pp. 50-S2) est d'un autre avis. Voyez supra, p. 377.
2 DiG., 29, 2. 90(Paulus! : Respondit per curatorem liereditufem adquiri
non posse.
^ DiG., 38, 3, 1, { : quod consentira non possunt voyez page 4o6, n. 3).
•41, 2, 1, 22 : quia nniversi consentire non possunt [supra, p. 448, n. 4).
Ulpian., Fragni., 22, 5 : Jieque cernere universi (voyez infra, p. 4o9, n. I).
* Ulpian., 1. 1 : quoniam incertum corpus est.
•' Leflfs : Gaius, Inst., 2, 238 : Incertae personne legatuni inutililer rclin-
quitur : incerta autem videtur persona, quam per incertam opinioneni
animo suo testator subjicit, velut si ita legatuni sit : qui primas ad funus
iiieum venerit, ei hères meus X milia dalo. Ulpian., 24, 18 : incertae per-
sonne legari non potest, etc. Just., Inst., II, 20, 25 : Incertis vero personis
neque legntn neque fideicommissa olim 7'elinqîii concessum erat, etc.
Ulpiex et JusTiNiEN expliquent ensuite la persona incerta comme Gaius.
Cfr. C. I. L., VI 9405 : reliquas decem ollas dis), qui in fine decuria allecti
crunt, singulas do lego coll. f'abr. tign., de l'orne). — Hérédité : Ulpian..
Fragm., 22. 4 : Incerta persona hères institui non potest, velut lior modo :
quisquis ])rimus ad funus meuin venerit, lieres eslo: quoniam rerium
consilium débet esse te.->laulis.
( 459 )
iimnicipe ne peut êliv institué héritier, pinre que eVst un
c( corps incertain » qui ne peut faire la déclaration solen-
nelle [cretio] ni faire acte d'héritier (pro herede (ierere)y comme
unité universi) abstraite '. » Cette règle s'appliquait à toutes les
personnes civiles, notamment aux collèges; en 290, Dioclétien
et Maximien déclarent qu'il n'est pas douteux qu'un collège ne
peut pas recueillir une succession, à moins qu'il n'ait obtenu
un privilège, et le Code Justinien reproduit cette loi -.
Il y avait donc un doui3le obstacle formel, qu'on ne pouvait
écarter pour tous les collèges que par une disposition expresse,
comme on le fit pour quelques-uns. Pourquoi le laissa-t-on
subsister? Craignait-on d'ouvrir aux personnes civiles un
moyen trop facile de s'enrichir aux dépens des héritiers légi-
times? Non. On ne trouve nulle part, chez les Romains, la
préoccupation de protéger les familles contre la ((mainmorte».
Peut-être une trop grande accumulation de richesses paraissait-
elle dangereuse, non pour les particuliers, mais pour l'Etat;
au commencement du moins, l'Empire avait peur des corpo-
l'ations trop puissantes, qui pouvaient fomenter des troubles.
(Cependant ce souci disparut aussi. On trouvait sans doute que
les personnes civiles n'avaient pas besoin de ce nouveau
privilège, que les droits d'acquérir entre vifs sutiisaient pour
leur permettre de se procurer les biens nécessaires, et qu'il
était inutile de changer en leur faveur le droit d'hérédité.
Quoi qu'il en soit, il ne fut jamais dérogé à ce droit pour
toutes les corporations autorisées, mais on accorda des privi-
^ LiJMAN., 2*2, 5 : yec }nunicipiinii, nec jnuuicipcs hercdcs insiitui pos-
,siLnt, quoniam incerlum corpus e.st, et neqiie cerncre mnvcrsi, neque pm
lierede yei'ere possimt, ut heredes fiant : scnatus cousulto lumen concessum
est, ut a libertis suis heredes institut possint. Sed fidei('0)n)nissa fiereditas
nmnicipihus restitui potest ; denique hoc senatus consulto prospectum est.
1»LIN., Epis t., 5, 7 : Nec heredem institui, nec praecipere passe rempubli-
cam constat. Karlowa, II, pp. 860-861, croit qu'il faut excepter les muni-
cipes et les colonies romaines.
- C. J., VI, 2-4, 8 (290j : Collegium, si nullo sprciali prii'ileqio suhni.iinn
sit, hereditatem capere non passe, dubiutn nun est.
( 460 )
lèges partiels; on favorisa les plus inoffensives et les plus
utiles, et, pour quelques-unes, on finit même par lever tous
les obstacles.
En premier lieu, on sait que l'affranchi qui n'avait pas
d'héritiers siens et qui testait, devait laisser la moitié de ses
biens au patron. L'affranchi d'une ville ou d'un collège ne
pouvait donc faire un testament valable, puisqu'il ne pouvait
ni omettre ni instituer son patron, qui était incapable. Ulpien
nous apprend qu'un sénatusconsulte permit aux villes d'être
instituées par leurs affranchis '. Le même droit fut probable-
ment accordé aux collèges par le Sénat, quand il leur donna
le droit d'affranchir et le droit de patronat, à l'imitation des
villes; nous avons vu que cela arriva sous Marc Aurèle '^.
Quelques collèges obtinrent un privilège spécial plus étendu,
celui de recueillir tous les héritages : cela ressort d*une loi de
Dioclétien et de Maximien (en 290) déjà citée, mais ces collèges
sont inconnus •^.
Parfois ce privilège était accordé au moyen d'un détour.
Sous l'Empire, des sénatusconsultes et des constitutions impé-
riales avaient donné à certains dieux étrangers le droit d'être
institués. Les dieux romains n'en avaient pas besoin, parce
que l'État pourvoyait à leur culte. Ce privilège des dieux
étrangers profitait à leurs temples et aux collèges qui les
desservaient, mais aucun collège professionnel n'était dans ce
cas 'k
' UlpiAiN., Fragm., ±2, o (supra, p. 459, n. 1). Cfr. DiG., 38, 3, 1,1:
(jua ratione alio senalus consuUo heredibm eis [municipihus) institntis n
liberlo adquirere kercditatem permissum est,
' Voyez supra, p. 456.
5 C. J., VI, 24, 8. Voyez supra, p. 459, n. ±
* Ulpian., 22, 6 : Deos heredes instituere non possumus praeter eos,
quos scnatus consultis constitutionibusve principmn instituere concessum
est, sicut Jovem Tarpeiiim, etc. Tous les autres dieux qu'il cite sont
étrangers. Cfr. Karlowa, II,. p. 862. Mommsen, St.-R., II, p. 60. Ces dieux
avaient reçu le jus trium liberoruni et par là le droit d'être institués
(Dio Cassius, 55, 2 .
( -i
cT'jXXdytf xal irpcx; xov àpiôfxôv tûv TrpoffioTrtov aùxô SiaipoOvxat. Etc.
^ Gaius, Inst., II, 287 : Cumqiie — olim incertae personae vel postumo
alieno per fideiconiwissiun reliivjui poterat, qnamvis jieijue hères institut
( 462 )
faveur des cités sous le même empereur i ; il est peu probable
que la règle qu'on venait d'établir fut modifiée pour d'autres
personnes civiles, puisqu'on ne le dit pas formellement.
Les inscriptions nous fournissent plusieurs exemples de
collèges qui recueillent des successions universelles. A Brixia,
le colleijium fabrum érige des monuments à plusieurs person-
nages qui lui ont laissé toute leur fortune 2. A Misène, les
confrères d'un pilote de la tlotte élèvent à celui-ci un monu-
ment funéraire sur lequel ds se déclarent ses héritiers •'.
Plusieurs textes législatifs ne sont pas moins catégoriques: il
en ressort clairement que certains collèges pouvaient être insti-
tués^. Il faut admettre que, dans tous ces exemples, nous avons
affaire à l'un des cas exceptionnels que nous venons d'énu-
mérer : il s'agit de la succession d'un atiVanchi du collège ou
d'une corporation dotée d'un privilège spécial, ou encore d'un
fidéicommis universel. Quand Ulpien dit que les municipes ou
les collèges peuvent demander la bonorum possessio ^^ il veut
parler également soit de l'héritage d'un affranchi mort ab intes-
neqiie legari ei posset, senatus considto, quod auctore divo Hadriano
faclum est, idem in fîdeicommissis, quod in legatis hereditalibusque
constitutiun est.
« Ulpian., Fragm., 22, 5 umpra, p. -ioO, n. 1). Cfr. DiG., 36, i, 26 et 27.
36, 4, 12. 38, 3, 1, 1. Cela fut fait par un sénatusconsulte Apronien.
2 V 4122 : Colliegium) fabror{um), à trois personnes, qui facilitâtes suas
coll(egio) reliqiuerunt). 4391 : Colleg[ium) fabr[um) Sp{urio) Atilio Ceriali,
qui rem suam coll{egio) reliq{uit). 4433 : Coll. fabr. M{arco) Juventio Magio,
qui facultat{es) suas colleg(io) reliq{uit).
5 X 3483 : ordo proretarum heredes collegae sanclissimo b{ene)m{erenti)
[(ecerunt).
* DiG., 36, 1, 1, 15 : Si autent collegium vel corpus sit, quod rogatum
est restituere decreto eorum cui, qui sunt in collegio vel corpore, in singulis
inspecta eorum persona valere : nec enim ipse sibi_ videtur quis horum
restittœre. 36, 1, 6, 4 : Item si municipes hereditatem suspectam dicant
heredes instituti, dicendum erit cogi eos udgnoscere hereditatem et resti-
tuere : idemque erit et in collegio dicendum. Municipes institués : Dig., 31,
66, 7. 28, 6, 30.
s Voyez .supra, p. 456, n. 3.
( m )
lut sans liériliers siens •, soit de l'un des eus exeeptionnels
où le droit civil admettait ces personnes juridiques à l'héré-
dité '-i.
En matière de legs, les personnes civiles ne rencontraient
pas d'obstacle formel ; en eftet, le legs est acquis de plein
droit ; aucun acte, aucune manifestation de volonté n'est exigé
du légataire. Mais un legs ne pouvait élre adressé qu'à des
personnes capables d'être instituées, et les collèges, personnes
incertaines, ne pouvaient pas plus recueillir un legs qu'un
héritage ■!. Cependant on se montra plus large ici qu'en matière
d'hérédité. Le droit d'être institué légataires fut donné aux
villes par Nerva, et Hadrien confirma ce privilège *. Enfin,
sous Marc Aurèle, un sénatusconsulte accorda la même faveur
aux collèges autorisés : (Àtm senatus tcmpuribus divi Marci per-
miserit collegiis legare, nulla dubitatio est, qiiod, si corpori eut
licet coire legatum sil, debealur : cui autem non licel si legetiu\
non valebil, Jiisi singulis legetur : fii enim non quasi colle-
gixim, sed quasi certi honiines admittentur ad legatum 3. On
trouve pourtant quelques exemples de legs faits à des collèges
* Voyez ibid. C'est la bonorum possessio intestati.
* Bonorum pos^'^es.no .secundum tabulas, dans tous les cas où le collège
avait pu être institué; contra tabulas, si l'atiVanchi ne lui avait pas réservé
la moitié de ses biens.
5 Gaius. Inst., 2, 238 isupra, p. 4')8, n. 5). 287 (supra, p. 461, n. a).
Llpian., Fragrn., 24, 18 (supra, p. 4')8, n. 5). Paul., Sent., 3, 13. Just.,
Inst., 2. 20, 2o.
* L'lpian., 24, 28 : Civitatibus omnibus, quaesub imperio populi Romani
sunt, legari potest; idque a divo Nerva introductum, postea a senatu
auctore Hadriano diligentius constitutum est. Cfr. Gaius, [nst., 2, 19o.
DiG., 30, 117 et 122. Plus tard, la faveur fut étendue aux i'/ci(DiG., 30,
73, 1). Dans une inscription antérieure à Nerva, un legs est fait à des
vicani individuellement : vilianis Segusinis posterisqueeorum testament(o)
legavit (Or.-H., 7261). IX 1618 : paganis.
5 DiG., 34, 5, 20 (Paulus). Cfr. C J., I, 9, 1 (213) : Quod Cornelia
Salvia universitati Judaeorum, qui in Antiochiensium civitate œnstituti
sunt, legavit, peli non potest. Cette constitution de (Jaracaila prouve que
les juifs ne formaient plus un co]lèfi;e autorisé.
( 404 )
avant le règne de Marc Aurèle. En voici un de Turin :
Divo Trajan[o). C{aius) Quintius Abascantus tesliamento) leg{avit)
medicis Taurin{is) ciiltor{ibus) Asclepi et Ihjgiae '. Cette sta-
tuette du (livus Trajanus fut probablement léguée peu après le
règne de ce prince, et nous avons déjà fait remarquer que,
suivant la règle énoncée par Paul, elle est léguée aux méde-
cins, non à leur collège. Pourtant en l'an 107, une somme de
1,000 sesterces est léguée par un affranchi impérial au collège
des dendrophores romains - : ou bien la rédaction est fautive,
ou bien il s'agit d'un fidéicommis, car jusque Hadrien il fut
possible d'éluder par ce moyen la défense faite aux personnes
civiles de recevoir des legs.
Depuis Marc Aurèle, les collèges professionnels profitèrent
largement du privilège que le Sénat leur avait accordé : les legs
devinrent leur plus abondante source de revenus avec les
donations entre vifs. Les inscriptions nous en ont conservé de
nombreux exemples, et le Digeste en fournit un également :
Collegio fabrorum fundum cum silvis, quae ei cedere soient^ uti
optimiis maximusque esset, legavit •». Parfois ce sont des im-
meubles, le plus souvent c'est une somme d'argent que le tes-
* V 6970. Voici encore un legs fait singulis : Decuriac [decinme) colleg[ii\
fabrum tignuariorum pariefem dextrum inlroitus ollas XXXU donavit
eis qui infra inscripli sunt singulis singulas. (Suivent vingt noms des
membres de la 40^ décurie.) Reliquas ollas X qui in hac decuria allecti
erint singulas do lego {VI 9405). Pour ces derniers mots, voyez Gaius,
Inst., 2, 238 : sub certa vero démons tratione incertae personae recte
legatur, velut, etc.
2 Or., 4412 : qui reliquil collegio suo dendroph[orum sestertium) m[ille)
niummvw), en l'an 107. Sous Hadrien, un affranchi impérial lègue [ex
testamento d. d.) une statuette de ce prince au collig[ium) Aelianorum
sanctissimum Minervae Salu[t{arLs)], VI 978. Sur un album d'un collège
d'Oslie (XIV 246;, on lit : A. Egrilius Faustus testamento religuit [sester-
tium quatuor) m{ilia) n{iimmum); cet album fut fait en 140, mais la ligne
qui parle de ce legs fut ajoutée apn'S 172, car elle suit le nom du quin-
quennalis de cette année.
5 DiG., 32, 93, 4 (ScAEVOLA).
( 46o )
tateur lègue à un collège, à charge de célébrer annuellement
par des fêtes funèbres l'anniversaire de sa naissance ou celui
d'une personne désignée. Le paragraphe du testament est
reproduit ou résumé sur le monument funèbre du bienfaiteur.
A Brixia, on lit sur la tombe de deux époux : qui Idjaverunt
coll{c(jiis) f(ibr[um] et cent{onar\orum sestcrtium) )t{ummiun duo)
m(ilia), et {Iiwc ampliu{s) tabernas ciim cenac[ulis] colliegio) cen-
tonarioriuu, quae siint in vico llerciulio), [ut indt' fiant] profu-
siones in perpetwum) per oficiales (iollegii) centionariorum K A
Sassina, sur la tombe d'une femme, on avait gravé une partie
de son testament : Caput ex testamento Cetraniae Severinae.
0)llegi{ijs dendrophoromm, j'abrum, centonnrioruni munic{ipii\
Sa.m{natis sesterlium) sena milia n{ummnm) dari volo, /ideiqiue)
restrae collegiali committo, utiex reditu [sestertium quatevn[orum)
imilium) n{ummum) omnibus annis pridie) idus Jun{ias) die
natalis met oleum singulis vobis dividatur et ex reditu {sesler-
liunii binum m{ilium) n{ummum) Mânes meos colatis. Hoc ut ita
faciatis, fidei uestrae committo '^. Les exemples de ce genre '-'>
sont très fréquents; les legs sont presque toujours faits sub
;/ior/o, à charge d'honneurs funèbres, soit par un confrère ^, soit
' \ 4488.
- BoRMANN, Inscr. Sa5.s., 24.
'• Sommes léguées à des collèges professionnels, presque toujours aux
[abri, aux centonaires ou aux dendrophores : III 3893. 5196. V 4015.
■^016. 4488. 513o. 6363. VI 1923. VIII 3284. 14613. XI 1436. 4749. 3047.
XI[ 731. XIV 246. Lebâs, 1687^ Wagener, Rev. de llnstr. publ. en liely.,
1868, p. 1. C. I. Gr. 3028. Or., 4412. Bormann, /. /. Immeubles : V 4488.
L\ 3378 : juvenluti testiamento reliquit a[gri plus) )n[inus jugera
<■ entum . Statuettes, etc. : III 3196. V 6970. VI 978. Revenus d'une mai-
son, Pais. 181. — Monument funéraire légué subsidiairement : VI 7438.
Partielle, etc., légué subsidiairement au collegium medicorum : IX 1618.
— Formules : dari volo, Bormann, /. /.; legavit, V 4488. 3133. XI 30 i7.
Vin l.i613: reliquit ; VI 1923. XI 4749; xax£/£t'].a, Lebas, 1687^ testa-
mento legavit ou reliquit : III 3893. V 6363. 6970. XII 731. XIV 246. VIII
o284; dédit leyavitque, V 4013: dédit, V 4016; •/■.aT£otoy.£v, Wagener, /. / ;
xa6'.£pto7£, C. I. Gr., 3028.
' Collegio suo : VI 1923. XI 30i7. Pais, 181.
Tome L, vof. il. 30
( 466 )
par un étranger. Ils sont accompagnés de sanctions pénales '
ou (le clauses de substitution '^, au cas où le légataire ne se
conformerait pas à la volonté du testateur. Cetronia, comme
nous avons vu, n'a pas recours à ce moyen : elle se repose sur
la foi du collège. Les corporations qui reçoivent le plus de legs
sont celles desfabri, des centonaires et des dendrophores.
Le droit de recueillir des fidéicommis fut enlevé aux col-
lèges par Hadrien. Quand Marc Aurèle leur accorda la faculté
de recevoir des legs, ils purent aussi recevoir des fidéicommis
particuliers: fideicommissa darï possunt his, quibus legaîipotesl,
dit lllpien 3. Scévola fait allusion à un fidéicommis établi en
faveur d'un rollegimn cujusdam templi '*, et une inscription
nous fournit un exemple remarquable d'un fideicommissum
liherationis. Au décès de chacun de ses membres, le collège des
mesureurs de blé, à Rome, devait payer aux héritiers une
prime funéraire à charge de rendre les derniers devoirs au
défunt. C. Turius Lollianus affranchit le collège de cette dette :
il lègue la prime à des confrères et les prie de lui rendre
annuellement certains honneurs funèbres, qu'il énumère s.
« Amende au tisc : VI 1925.
'^ V 4488. XI 1436. Lebas, i6?>l^. C. I. Gr., 3028.
^ Ulpian., Fragm., 25, 6.
* DiG., 32, 38, 6 : A te, Petroni, peto, uti ea duo milia solidorum reddas
collegio cujusdam templi. Cfr. 34, 2, 38, 2.
5 VI 9626. On reproduit une partie de son testament : Quitquit ex cor-
pore mensorum machinariorum funeratici nomine sequctur, reli(]U'u)m
pênes r{em) p{ublicam) s{upra) s{criptam) remanere volo, ex cujus iisuris
pefo a vobis, coUegae, ul suscipere dignemini, tit diebus sol[l]emnibus
sacrificium mihi faciatis . . . Si facta non fuerint, tune fisco stationi.s
(uinonae duplum funeraticium dare debebitis. Ils doivent consacrer à ces
honneurs funèbres 42 '/a sesterces par an. A 10 "'o, cela fait un capital de
425 sesterces.
467 )
Actions.
Ainsi Ton était arrivé peu à peu à reconnaître des droits fort
importants aux corporations. Mais à quoi leur auraient servi
ces droits, si elles n'avaient pas eu la faculté de les défendre
ou de les poursuivre en justice, le cas échéant? 0.r, à l'origine,
il était impossible aux collèges d'agir en justice. Sous les leyis
acliones, nul ne pouvait plaider par mandataire, sauf de rares
exceptions qui ne s'appliquaient pas aux collèges. Dans le sys-
tème formulaire, introduit peu avant Tépoque de Cicéron, il
était permis de se faire représenter soit par un cognitor, soit
pBT un procurator. Mais il fallait constituer le premier devant
le magistrat en prononçant des paroles solennelles. Quant au
second, il n'aurait pu intenter l'action de mandat ou de gestion
d'affaires à une personne civile incapable; la partie adverse
pouvait d'ailleurs le refuser, en déclarant insuitisante la caution
offerte '.
Il y avait là des difficultés qui ne pouvaient être levées que
par des privilèges spéciaux. Elles furent levées, nous ne savons
((uand, pour toutes les corporations autorisées; en effet, nous
avons vu que Gai us compte parmi les caractères propres des
collèges reconnus le droit d'avoir un actor ou syndic, chargé,
( (Hiime dans une cité, d'agir au nom du collège-. Gaius ne parle
pas seulement de la représentation en justice, mais de tous les
actes de la vie juridique. Nous avons dit que dans beaucoup de
ces actes, les collèges pouvaient se faire représenter par un de
leurs esclaves qui prenait le nom iVudor {sercus (tctor). II y
avait diverses sortes de mandataires libres; ils portaient le
nom général de procuratores '\ Les statuts de collèges (jue
' MoMMSEN, De coll., pp. 36-37.
2 Voyez le texte, supra, p. 446.
•' DiG., 3, 3, 1 : Procurator est qui aliéna negotia inandatu dotnini
administrât. 1. Procurator autem vel omnium rerum vel unius rei r.v.vr
potest constitutus. C. J., X, 31 (32), 30 : proniratores reipuhlirae. \'o\>v
le premier volume, ft. 424. •
( 408 )
nous avons conservés n'en parlent pas : il était d'usage sans
doute de confier cette mission aux chefs, magistri ' ou cura-
teurs, qui étaient toujours chargés de l'administration des biens
corporatifs "^. On les appelle aussi actores 3, s'il s'agit de repré-
senter le collège dans un procès. Il n'était pas permis aux per-
sonnes civiles de choisir d'avance un actoi' pour tous les procès
qu'elles pouvaient avoir à soutenir; il fallait le désigner chaque
fois. Mais, dit Paul, c'était devenu l'habitude de confier cette
charge au syndic '*. Le syndic ^ paraît donc avoir été un repré-
sentant permanent. Le defensor, au contraire, était choisi ad
rertam causam agendam vel defendendam ^\ Il faut dire que
cette distinction n'est pas toujours observée dans l'emploi de
ces trois mots. Le dernier s'applique, d'ailleurs, aussi à l'étran-
ger (extranens) qui poursuivait les droits du collège, quand
celui-ci négligeait de le faire ".
Quant aux actions intentées par les collèges, il semble que
ceux-ci ne pouvaient pas recourir à la justice pour con-
traindre leurs membres à s'acquitter de leurs devoirs. Ils
n'avaient pas d'autre moyen contre les récalcitrants que la pri-
vation des droits ou l'exclusion. La lex cultorum Dianae et
Antinoi dit qu'on ne s'occupera pas des funérailles de celui qui
ne sera pas en règle avec la caisse depuis six mois au moins :
Item placidt, ut quisquis mensib{iis) contin[uis se]x ? non paria-
veril et ei humanitus aceiderit, ejus ratio funeris non habebitur,
* DiG., 4f6, 8, 9 : actor civitatis nec ipse cavet, nec magister universitatis.
■•î Voyez le premier volume, pp. 393-394 et 409-410.
•^ DiG., % 4, 10, § 4. 3, 4, 1, § 1. ± 37, i, 3, § 4.
i DiG., 3, 4, 6, § L
••• DiG., 3, 4, 1, § 1. 2. 6, § 1. 43, 24, 5, § 10, C. J., I, 3, 17 = C. Th., 16,
2, 1. 42 (416) : défense aux parabolani d'Alexandrie de paraitre en justice,
nisi forte singidi oh causas proprias et nécessitâtes judicem adierint,
aliqiiem lite puisantes velab alio ipsi pulsati, vel in communi totius cor-
poris causa syndico ordinato.
"^ DiG., 12, 2, 34, § 1 : defensor municipii vel cujusvis corporis. 49, 4, 1,
§ 13. 50, 4, 18, § 13. 50, o, 10, § 4. Voyez le premier volume, p. 418.
- Dic, 3, 4, 1, § 3. 12^ 2, 9, § 6 et 34, § 3. Cfr. 37, 1, 3, § 4.
( ili9 )
eliamsi tes]l(imcntum factum hnbiierit '. Lf^ cultores Joris llelio-
politaiii, mairhands syriens de Pouzzoles, avaient un champ
(jui était la propriété du collège, et ceux-là seuls en avaient
l'usage (}ui observaient les statuts : qui )iihîl adversus lecem et
ronvendouem ejus corporis facere perscvrraveriut -. Si un trop
grand nombre de membres se montraient négligents, le col-
lège était réduit à se dissoudre, comme le (o!le(/ium Jovis
Cerncui -^
A regard de leurs membres, les collèges n'avaient donc pas
d'autre recours que les statuts; à l'égard des tiers, il en était
autrement. Les collèges pouvaient avoir des débiteurs : Si quid
univcrsitali debetur, singulis non ilcbctur : nec (juod débet univer-
sitiis, tiiiigiili debent '^ En cas d'hérédité recueillie en commun,
ce qui devait être rare, il est vrai, ils avaient Vuctio fumiliae
herciscundae, comme les municipes s. Les legs et fidéicommis
pouvaient aussi donner lieu à contestation. Pour obtenir le
paiement des amendes inscrites sur les tombeaux en faveur
d'un collège, ce qui était assez fréquent, celui-ci avait sans
doute la sepulcbn violati actio et la multae petitio, le cas échéant 6,
On peut se demander jusqu'à quel point la lex colleiiii pouvait
engager les tiers. Elle est votée par le collège et pour lui : His
sodalibus^jwtestatem fdcit lex, paclionem, quam velint sibi ferre,
dum ne quid ex publica leçje corrumpant '. Les confrères s'obli-
geaient eux-mêmes à la respecter, et le collège de Lanuviuni
adresse aux aspirants l'exhortation suivante : 7'// qui uovos in
lioc coUeijio intrure vote[s, p]rius lenem perleye et sir intra, ne
postmodum querarls aut lieredi tuv controver[si]am relinquus^^:
' XIV 211ÎÎ, I, l. :2-2-23. Les derniers mots sont destinés ;i prévenir les
réclamations de riiéritier, qui recevait la prime.
- X 1379. Voyez le premier volume, p. 336.
'• C. I. L., m, p. 9î1d. Voyez le premiei- volume, \<. 338.
* DiG., 3, 4, 7, il 1.
• Di(.., 3. 4, 9.
•' Voyez le premier volume, p. 4. Quand un membre du collège de Lanu-
vium mourait à vingt milles au moins de cette ville, et que le
* VI 10298, 1. li-i-2
2 VI 10298, 1. 14-25.
* Voyez les ouvrages cités au premier volume, p. 371, n. 1, et p. ,ri3.
* DiG., 47, 22, 1, §2 (Marcianls).
•'^ XIV 2112, 1, 1. 24. C'est à cela que font allusion les mots déjà cités :
aut lieredi tuo controversiam relinquas (1. 19), et : etiamsi testamentum
factum hahuerit (1. 23). C. 7. L., III, p. 925 : tcstantur, ut, si qui defunctm
fuerit, ne puteî se collegium (h)ahere aut ab eis aliquem petitionem
fnneris [h)ahHurum . Voyez le premier volume, |)p. 268-272, 274.
( iTl )
collège ne pouvait être informé à temps, celui qui prenait soin
des funérailles avait aussi le droit de réclamer la prime funé-
raire, à condition de garantir le collège contre les réclamations
d'un autre : su[tis(Ialo ampli]us uemiiicm jn'lilurum •. Le créan-
cier, au contraire, ne peut rien exiger; le patron ou le maître
d'un membre esclave n'a aucun droit non plus : Seque patrono
neque patronae, nequc do[mino\ neque dominae, neque rreditori ej'
hoc collegio petitio esto, nisi si (luis testaments hères noniùiallus]
erit -. Si le maître ou le créancier sont institués par le défunt,
ils reçoivent la prime, suivant les statuts, et doivent pourvoir
aux funérailles. S'ils n'ont pas été institués, ils n'ont aucun
droit. Pour le maître, cela s'explique : en permettant à son
esclave d'entrer dans le collège, il a lui-même pris l'engage-
ment d'observer les statuts 3. Mais pour le créancier la prime
est aussi insaisissable, parce qu'elle doit servir aux funérailles.
C'était contraire à la loi civile, qui donnait au créancier le droit
de mettre la main sur les créances du débiteur, et il faut croire
que le sénatusconsulte qui avait permis en bloc les collèges
funéraires, avait formellement rendu insaisissable la prime
destinée à l'enterrement '*,
Nous avons vu que les bienfaiteurs des corporations tixaient
parfois une amende à payer, si elles ne élisaient pas de la rente
établie en leur faveur, l'usage prescrit; sans doute, le bénéfi-
ciaire de l'amende, ordinairement le fisc, pouvait prendre le
collège k partie, le cas échéant <"\ D'autres ordonnaient que le
capital donné ou légué serait restitué à leurs héritiers légitimes
ou remis à un autre collège; dans ce cas, ces héritiers ou
autres intéressés avaient une action •>.
• XIV 2112, 1, 1. 30-33. Voyez le premier voliuiu', p. -271.
^ \IV 211-2, II, 1. 1-2.
'' Voyez le premier volume, p. 272.
' VoN Lykowski, pp. 35-36.
• VI 1925 : aut si non factiim (uerit ante tenninal{ia), inferel aerario
pyopuli) R{omani' decem m(ilia) n(ummum)', il s'agit des dendropliores
romains.
" VI 10297, en l'an 135.
( 472 )
Ulpien parle encore d'une action quod metiis causa intentée
à des collèges i, et d'une action intentée à des municipes dont
les administrateurs seraient coupables de dol '-i. Le même juris-
consulte examine le cas d'une corporation instituée héritière
fiduciaire : elle doit restituer le fidéicommis, même si le tidéi-
commissaire est un de ses membres, attendu qu'elle est tout
à fait distincte de ceux-ci '^.
Nous terminerons par faire connaître le long procès que
soutint un collège de foulons de Rome, au III* siècle. La cause
du litige, c'était le paiement de redevances, réclamées aux
foulons pour un lieu public dont ils^avaient la jouissance. Ce
lieu public était probablement une fontaine appartenant à un
aqueduc, où les foulons puisaient l'eau, et le terrain environ-
nant. Le collège avait consacré ce lieu public à ses divinités et
en avait fait un locus sacer. Le demandeur était le fisc ou
Vaerarium, représenté par un fonctionnaire impérial, tel que
le curalor aqiiarum ou le curator operum et locorum publicvrum.
Le procès commença en 226 et dura jusqu'en 244. Il y eut trois
sentences. Le premier juge, le préfet des vigiles, Florianus,
imposa aux foulons l'obligation de prouver qu'ils avaient été
dispensés des redevances par une décision impériale. Le
collège ou plutôt son représentant déclare d'abord qu'il peut
prouver l'existence de l'immunité depuis l'avènementd'Auguste ;
il s'appuie donc sur la coutume, et pour le démontrer, il
demande une descente de lieux : le préfet verra que, depuis
Auguste, ce lieu est un loms sacer plutôt qu'un locus puhlicus.
Florianus fit droit à leur demande et constata, en effet, que le
lieu contesté était consacré aux dieux : cela lui suffit pour
donner gain de cause aux foulons. Mais plus tard, la partie
adverse s'adressa au préfet des vigiles Modestinus, l'élève
d'I Ipien, qui confirma le premier jugement : le demandeur
n'avait pas apporté d'éléments nouveaux au procès. Enlin,
* DiG., 4, 2, 9, § 1. Voyez le texte supra, p. 454, n. 3.
2 DiG,4, 3, 15, §4.
3 DiG., 36, 1, 1, § 15. Voyez le texte supra, p. 462, n. 4.
( 473 )
celui-ci revint ;"» la charge une troisième t'ois, toujours devant
le préfet des vigiles, qui était alors Faltonius Kestitutianus.
Le troisième juge constate que Florianus s'était acquitté
consciencieusement de sa mission, qu'il avait inspecté les
lieux, examiné toutes les preuves et rendu un jugement dont
il n'y a pas eu appel, que Modestinus a confirmé cet arrêt, et il
le confirme à son tour en l'an 244. Les sentences interlocutoires
des trois juges furent gravées sur des cippes que les foulons
firent placer aux limites du lieu contesté, et deux de ces cippes
ont été retrouvés i. On ne sait pas au juste pounjuoi le préfet
des vigiles est juge dans ce procès -.
En résumé, jamais le droit romain ne déclara formellement
les collèges incapables; mais, au début, il leur manquait les
conditions essentielles pour posséder des droits et pour les
exercer. Le sujet faisait défaut, parce qu'à l'origine on ne
voyait qu'une collection de personnes dont chacune avait des
droits individuels. Le remède qu'on imagina, ce fut la fiction
juridique d'une personne existant en dehors des membres, à
qui l'on reconnut des droits. Mais cela ne suffisait pas, parce
que les règles du droit romain n'étaient faites que pour les
personnes physiques. Par elle-même 3, la personne civile, être
abstrait et sans volonté, était incapable. Deux moyens per-
mirent de sortir de cette impasse : l'acquisition par les esclaves
et la faculté de se faire représenter par un mandataire. Mais il
fallut encore faire plier certaines règles : pour les esclaves, il
fallut en reconnaître la propriété aux collèges, et admettre
< VI 266. 267. 268.
2 Voyez : Rudorff, dans Zeitschr. fur g. Rechtswiss., XV, 1850, pp. 254-
263. Rômische Rechtsgesch., Il, ^ 59. Mommsen, dans la même Zeihckrifl,
XV, 1850, pp. 326-3-45. St.-R., II, 22. p. 1012, n. 1. C. I. L., VI, p. 51, et
dans Bruns, Fontes juris. Bremer, Rlieiri. Muséum, XXI, 1866, pp. 149.
Karlowa, I, p. 559, n. 3 et 816-818. Liebenam, pp. 239-243. E. Jacor.
dans Daremberg et Saglio, s. v. fulkniica, p. 1351.
3 Du... 41, 2, I. 22 -.persese.
( 474 )
riiez eux la volonté de posséder le pécule; pour les manda-
taires libres, comme pour les esclaves, il fallut prêter aux
personnes civiles une volonté qu'elles n'avaient pas. Dès lors,
elles purent, en principe, acquérir tous les droits qu'une
personne physique pouvait acquérir par ses esclaves ou ses
mandataires. Il restait néanmoins certains droits incompatibles
avec leur nature particulière d'êtres abstraits et de personnes
réputées « incertaines » ; tel était le droit de recueillir un
héritage ou un legs : ici, on ne leur accorda qu'un privilège
partiel. Quant aux modes d'acquisition où la représentation
était interdite, ils restèrent toujours inaccessibles aux collèges.
il résulte de ce chapitre (ju'au point de vue historique,
comme au point de vue théorique, ce ne furent ni les cor-
porations industrielles, ni les autres collèges privés qui firent
naître et développèrent l'idée de la personnification civile. Ici,
comme toujours, les villes servirent de modèles. Mais aussitôt
que l'Etat régla et restreignit le droit d'association, les collèges
trouvèrent au moins un avantage dans cette restriction; ils furent
regardés comme des êtres juridiques et, pour eux comme
pour les villes, les bénéfices attachés à la personnification
civile furent étendus de plus en plus. Sans aucun doute,
cette garantie indispensable de permanence et de stabilité
contribua dans une large mesure au magnifique essor que prit
le régime corporatif au 11^ et au III® siècle; plus tard, elle
allégea un peu les lourdes charges qui pesaient sur les collèges
otîiciels.
Remarquons que l'État romain se montrait bien plus large
que nous. Aujourd'hui, la seule idée de la personnification
octroyée à des associations privées, même à celles dont Tutilité
n'est pas contestée, eff'raie beaucoup d'esprits. L'État l'accorde
:'i contre-cœur et avec parcimonie, et toujours il y met des
limites étroites et se réserve un contrôle constant. Il exige
l'enregistrement des statuts, ce qui équivaut à l'autorisation
exigée à Rome. De plus, il impose d'ordinaire l'envoi pério-
1 47;; )
(lique d'un état de la situation tînancière, et il ne permet
d'acquérir que jusqu'à concurrence d'une somme fixée, au
delà de laquelle il faut une permission nouvelle. Parfois même
il limite le droit de posséder à l'immeuble professionnel et
aux cotisations. A Rome, sauf en matière d'hérédité, oij il y
avait des obstacles théoriques qu'on jugea inutile d'écarter, les
collèges reconnus pouvaient acquérir sans autre contrôle que
la justice et sans autres limites que la générosité de leurs
bienfaiteurs; les dons et les legs venaient augmenter leur avoir
social sans exciter la jalouse inquiétude de l'Etat. Du moins,
il ne reste, ni pour les villes ni pour les collèges, la moindre
trace. d'une mesure fixant des bornes au droit de propriété,
même à l'époque où le contrôle administratif devint si sévère.
Jamais on ne semble avoir craint une trop grande accumula-
lion de richesses, ne répondant pas à une utilité profession-
nelle.
L'Empire eut-il lieu de s'en repentir? Nous ne le croyons
pas. Nulle part il n'est question d'abus résultant de la trop
grande richesse d'une corporation quelconque. La personnifi-
cation n'eut que d'heureux résultats : toutes ces libéralités
alimentaient des caisses d'utilité publique, et permettaient aux
confrères de travailler efiicacement à leur but, qui intéressait
autant l'État qu'eux-mêmes.
CONCLUSIONS GENERALES.
« Rome est célèbre pour avoir créé l'ordre politique par ses
lois et son administration ; mais elle a produit aussi, dans
l'ordre social, une très grande chose qui n'est pas assez connue :
l'esprit d'association, les devoirs et les intérêts mis en com-
mun, les corporations de travailleurs i. » Nous avons essayé
de reconstituer l'histoire de ces corporations, et, avant de ter-
miner cette longue étude, nous allons résumer les faits que
nous avons exposés et tirer les conclusions qui en découlent
naturellement. Quels furent les résultats du régime corporatif,
d'abord pour la classe ouvrière, et puis pour l'État? Jusqu'où
s'étendit et où s'arrêta leur intluence bienfaisante ou funeste?
Voilà les questions que nous devons poser avant de finir.
Le groupement professionnel est si naturel que, depuis son
origine jusqu'à la chute de l'Empire, Rome eut des corpora-
tions ouvrières. Pendant de longs siècles, leurs annales nous
sont presque inconnues, ce qui prouve que leur influence ne
dut pas être considérable, ou du moins qu'elle se restreignit à
l'existence privée de leurs membres. Quels que fussent les ser-
vices qu'elles rendirent à une classe déshéritée, dans le
domaine des besoins religieux et sociaux, elles furent impuis-
santes à la relever; elles furent incapables aussi de développer
une industrie que l'esclavage déshonorait et ruinait par sa con-
currence, que le caractère propre et les préjugés du peuple
romain condamnaient à rester stationnaire.
Au dernier siècle de la république, quand les corporations
d'artisans commencèrent, sinon à revendiquer des droits
^ E. Desjardins, Géographie de la Gaule, III, p. 445.
( m )
nouveaux dans l'Etat et une place plus honorable dans la
société, du moins à se montrer dans les rues, au Forum et au
Champ de Mars, elles parurent dangereuses pour l'ordre
public, et la classe ouvrière perdit la complète liberté d'as-
sociation dont elle avait joui jusqu'alors.
Mais la tendance des travailleurs à se grouper par métiers
était devenue invincible; du reste, grâce à un prince aussi
habile que sage, ils n'eurent pas trop à se plaindre. Pour s'as-
socier, ils devaient demander l'autorisation, mais on se montra
large et on leur laissa une liberté assez grande : cette liberté,
appliquée désormais sur un théâtre plus vaste, ne tarda pas à
couvrir l'Empire tout entier de collèges aussi utiles â l'Etat
qu'aux particuliers. Dès cette époque, nous pouvons nous
rendre un compte plus exact de leur histoire, de leur nature
et de leur influence. Créées généralement par les particuliers,
quelquefois par l'Etat ou sur la demande des villes et des
gouverneurs, les corporations professionnelles avaient un
double but : l'intérêt des associés et l'intérêt pubbc. A ce
double point de vue, elles exercèrent une grande influence, et
cette influence ne fut que salutaire tant qu'elles conservèrent
une complète autonomie intérieure, et qu'un funeste régime
politique n'obligea pas le gouvernement aux abois à transfor-
mer le régime économique et à ruiner cette classe importante
(le la population, comme toutes les autres. Les collèges eurent
donc une époque de prospérité, qui dura plus de deux siècles.
Considérées comme associations privées, les corporations
industrielles, formées d'artisans, d'artistes, de commerçants,
de travailleurs de toute espèce, ne flrent que du bien â leurs
membres. Leur influence salutaire s'étendait à l'homme tout
entier; elles aidaient à satisfaire, dans une certaine mesure, les
multiples besoins, les intérêts divers des classes laborieuses.
Leurs bienfaits embrassaient l'artisan, le citoyen, enfin tout
l'être humain avec ses aspirations de toute nature.
L'association permettait à Vartisan de protéger plus eflicace-
ment les intérêts de sa profession. Elle le tirait de l'isolement;
elle seule était capal)le de lui donner une certaine force au
( 478 )
milieu de cette société basée sur le privilège, qui méprisait le
travail à l'égal de l'esclavage, et ravalait le travailleur au niveau
de l'esclave. Sans doute, les collèges n'étaient pas des associa-
tions de travail, des sociétés commerciales ou coopératives;
mais, quelle que soit la pénurie de nos renseignements, nous
pouvons artirmer que leurs membres profitèrent plus d'une
fois de la force qu'ils tiraient de l'union pour défendre les
intérêts collectifs du métier, pour protéger les confrères lésés,
pour adresser leurs plaintes aux magistrats ou à l'empereur.
La solidarité professionnelle et la communauté des intérêts
furent sans doute l'une des causes qui multiplièrent les corpo-
rations. L'influence que celles-ci purent avoir sur l'industrie
elle-même et sur ses progrès nous échappe.
Unis, les citoyens pauvres se trouvèrent plus considérés au
milieu de leurs concitoyens riches et puissants; l'association
les relevait dans la cité, et s'ils ne songèrent pas à améliorer,
à modifier leur condition politique et sociale, ils purent
aspirer parfois à exercer une légitime influence sur l'élection
des magistrats et sur les affaires municipales, tant que les cités
furent libres et indépendantes.
Enûn.c est Y homme privé surtout, avec ses multiples besoins,
qui eut à se féliciter du régime corporatif. C'était principale-
ment l'instinct de sociabilité qui faisait naître les collèges. Les
besoins religieux, particulièrement celui de funérailles honora-
bles, y trouvèrent une satisfaction assurée. Les besoins moraux
et sociaux y trouvèrent aussi leur compte : l'ouvrier, le petit
marchand, en dehors de son foyer, qui était souvent misérable,
l'esclave même, en dehors de la maison du patron, où il était
souvent maltraité, connaissait une grande famille, où il était
reçu comme un frère, où il n'avait d'autre supérieur que celui
qu'il avait aidé à désigner, où il pouvait aspirer à commander
un jour lui-même, où il prenait part au culte commun, où
l'attendaient toutes sortes de distractions et de plaisirs. C'est la
qu'il s'asseyait avec ses confrères à une même table, pour fêter
les dieux et honorer les morts; c'est là qu'il allait chercher des
sporlules en vivres ou en argent, qui pouvaient servir d'appoint
dans son ménage; c'est là qu'il avait des amis, qu'il pouvmt
trouver des appuis ; c'est là qu'il oubliait parfois, pour un jour,
les misères de la vie. Sans doute, s'il tombait malade, si un
accident le clouait sur son lit, il ne semble pas qu'il eut !<•
droit de demander des secours. On n'a pu prouver l'existence
de caisses de prévoyance, de fonds destinés à l'assistance.
L'épargne était aussi inconnue aux corporations. Leurs bien-
faits n'allèrent pas jusque-là, ou ce fut une rare exception.
Mais telles qu'elles étaient, elles rendaient d'immenses services.
Sans former des associations de bienfaisance, sans garantir
contre la misère, elles contribuaient du moins à rendre la vie
plus agréable, à alléger le fardeau de l'existence; elles don-
naient une légitime satisfaction à l'amour-propre des petits et
des humbles qui, se voyant plus considérés et plus forts,
devaient se sentir plus heureux.
Par leur but privé, on ne peut le nier, les collèges d'artisans
présentaient déjà une grande utilité sociale. Toute la société
negagne-t-eile pas à voir tant d'intérêts assurés? D'autre part, on
peut dire qu'elle n'y trouva guère d'inconvénient. Sans doute,
l'autorité publique eut parfois à réprimer une trop grande
turbulence, mais ce danger disparut quand l'Etat eut à sa tête
un maître capable de faire respecter sa volonté. Qui sait si la
bienveillance du pouvoir envers les humbles ne fut pas plus
etticace encore que la répression, pour lui attirer la reconnais-
sance des classes populaires, et pour les attacher à l'Empire?
Au point de vue économique, il semble que les collèges
libres ne donnèrent jamais lieu aux plaintes que soulevaient
nos corporations de l'ancien régime. Jamais ils ne furent un
danger pour la liberté du travail; jamais ils ne furent un
obstacle au progrès industriel, parce qu'ils n'imposaient pas
d'apprentissage, parce qu'on pouvait exercer le métier en
dehors d'eux et parce qu'ils étaient ouverts à qui voulait entrer.
Nulle part on ne les voit demander ni monopole, ni fixation
de salaires, ni limitation du nombre des apprentis, ni aucune
autre restriction à la liberté. On leur fera plutôt le reproche de
n'avoir eu aucune institution propre à faire progresser h*
( 480 )
métier; mais ce n'était pas là leur but, et s'ils n'avaient pas
certains avantages économiques de nos corporations du moyen
Age, ils n'avaient, en revanche,* aucun des inconvénients des
corporations de l'ancien régime.
Depuis Auguste, les collèges romains cessèrent d'être des
associations purement privées. Pour obtenir l'autorisation, ils
devaient avoir une utilité sociale. Chez beaucoup, cette utilité
résultait simplement de la nécessité de leur métier dans une
société bien organisée : en les autorisant, l'Etat croyait favo-
riser le développement du métier, qui était regardé comme
une sorte de fonction publique. Bien des collèges furent
d'abord autorisés, puis maintenus, enfin rendus obligatoires
pour cette seule raison. Mais d'autres furent plus directement
utiles à l'État et aux villes : c'était à eux qu'on s'adressait,
plutôt qu'à l'initiative privée, pour assurer une foule de
services publics. Au lieu de demander aux citoyens de l'argent,
comme les États modernes, et de payer aux frais du trésor tous
les auxiliaires dont il avait besoin, l'État romain demanda le
travail aux citoyens. Il fit entrer dans son administration et
dans celle des villes une foule de corporations qui les desser-
virent librement d'abord, en échange de privilèges individuels
ou même en vertu de contrats particuliers et temporaires
ensuite. On ne leurôta donc rien de leur liberté, on ne viola pas
un de leurs droits; car leur travail était bien rémunéré. Aussi
continuèrent-elles à fleurir, tout en se changeant peu à peu, par
un consentement réciproque, en véritables rouages adminis-
tratifs, en institutions financières plutôt qu'industrielles. Avec
le temps, ce caractère nouveau devait entraîner pour elles,
comme pour tous les corps administratifs du même genre,
une décadence irrémédiable.
Au Bas-Empire, elles sont forcées, par l'État et par les villes,
d'exécuter le service dont elles s'étaient volontairement char-
gées. Ce service est devenu obligatoire et héréditaire. Les
corporati et collegiati appartiennentau pouvoir avec leurs biens.
De plus, l'État qui se donne la mission, non seulement de
maintenir l'ordre, la paix et la justice, mais qui, en vraie
( 481 )
« ménagère » de l'Empire, doit pourvoir à tous les besoins
publics et privés, en arrive fatalement à rendre obligatoire
même le travail privé. L'artisan et le commerçant doivent
s'adonner à leur métier et à leur commerce, de même que le
colon doit cultiver la terre. C'est du moins le cas dans les deux
capitales, sinon ailleurs.
L'Empire est donc transformé en un vaste atelier, oi:i, sous
le contrôle d'une foule de fonctionnaires, on travaille pour le
prince et pour les besoins de l'État et des particuliers. La
plupart des industries sont, en définitive, dirigées par l'État,
qui répartit fort inégalement les produits. Les membres des
corporations ne sont pas des citoyens libres, travaillant à leur
gré pour nourrir leurs familles : ce sont des serviteurs de
l'Etat qui touchent un traitement, comme des fonctionnaires,
mais un traitement insuffisant. Maître de la terre et du travail,
l'empereur a fini par appliquer à la lettre la théorie de Platon,
qui dit : « En ma qualité de législateur, je ne vous considère pas,
ni vous ni vos biens, comme appartenant à vous-mêmes, mais
comme appartenant à toute votre famille passée et à venir; ou,
pour mieux dire, je regarde toute votre famille avec ses biens
comme la propriété de l'État. » {y6'j.oi, XI, G; p. 923 A.) C'était
une véritable organisation du travail par l'État, entre les mains
(le qui se trouvaient en grande partie la production et la distri-
bution des richesses.
Tel était le régime social, fruit d'une mauvaise constitution
politique et d'un système économique vicieux. L'Empire
otfrait un spectacle digne des méditations de l'économiste et
de l'historien. 11 devait périr par ce régime qui ne répondait
jias plus à l'intérêt bien entendu de l'État qu'à celui des par-
ticuliers. Pour le citoyen, comme pour l'État, au point de vue
politique, comme au point de vue économique et adminis-
tratif, les conséquences furent désastreuses.
Dans les collèges du Bas-Empire, comme dans tous ces corps
où les citoyens étaient parqués, il ne peut être question de
droits individuels, ni de liberté individuelle. 11 n'y a que
des devoirs; les privilèges ne sont plus des avantages : ils n ont
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. rnOr ri'^ ttu tn«| ! Ltt rr-
ai
ipprè.
ton
r Ronr
|>»odnr» H
-fîiim » . Il lit aussi : fuerint, erani heiae-
riaeque brevi fient (epist. 34), se tondant sur la tin de la lettre 93.
IV 190, 1. 4 d'en bas. Il s'agit de Caracalla; cfr. p. 306.
P. Vy^, n. 1. Sxiv Vtr:apyo:i -rp'-iô^, praefectHS fabnnn , voyez : Liebknam,
dans E. DE RuGGiERO, Diz. epigr,, s. v. fabri, p. 14.
JV ^7, n. 2. Lisez : Amboglanna.
IV "210, 1. 3. L'inscription des tlùtistes (M ^40) se trouve sur la }»rcniiôre
pierre d'un éditiee bàli par eux.
P. ilO, n. 4. Lisez : VI 10i34.
V. -Jll. u.îî. Lisez: \1V :>iie.
IV lil, 1. 1. Sur ce sarrarium, voyez F.Cimo.nt. Tedtes relatifs à Mithra,
pp. 4l8-4'2i.
P. ->20. Scholae militaires. Cfr. Von Domazf.wski, Die Religion des rom.
//tvrty. ;Westd. Zeitschr., 189o, pj). 78-95.
I' ->J3. n. 1. S^'hoUi des viatore^ quaestorii ab aerano, cfr. Hi ei.se> . Mittfi.
des Inst., 1893, p. ->ii.
P. ±2o, n. 0. Lisez : XI 970.
IV -2-JT, n. 10. Lisez : VI 1936. XI 3810.
P. -2t>6, n. 3. Cfi-. vol. II, p. tkj, n. 10.
P. :277, n. 1. Lisez : XI 6136.
P. i80, n. 3. Lisez : XII 586»^'*.
P. ^^, I. \± Lisez : VI 9888 = I 1108.
P. ^H, n. 3. Lisez : VI 96-26.
P. :306. Au Tj:o3tuLo;, comparez le medictis factionis \\l 10046). Or:-, epigr.,
s. V. factio, p. 24.
P. 308. Sur les collèges militaires, voyez von Domazewski, 1. 1., pp. 80 et
siiiv.. et notre art. Collegiiim dans le Diz. epigr., pp. 349. 367. 388.
P. 34-2, n. 3. Lisez : VI iîo84. — III 3569 = 10519. III 44%* = 11097 =
Ephem. ep. II 898. Et à la tin : XI 1436. Sur III 11097. voyez le
ll«? vol., p. 206, en note.
P. 35-2, n. 10. 1. 8 et 9 : XI 5749 et XI 5737 = Cimont. Textes relatifs à
Mitfira, 157.
P. 363, n. 4. Lisez : 3869 (au lieu de : 58T8v
P. :^7, n. ô. Lisez : VI 3678.
( i«T
P. -iiM), ri. I. Voyo/ supra, p 379, n. 4.
IV iiW, n. ;) III .-kj.VJ :- 11H<)(J. K. Ladkk |.ro|.os«' de lire : [Uk^)] publier
co[ncesso] décréta dc[ruriomim], de sorte qu'il s'agit des décurions de
la ville. Arch. ep. Miith., 18, 1895, j». 46.
V ;W1 II. 7. Lisez: XIV 2030.
I'. i()4, n. ± Cfr. les addenda à hi p. :i«o, n. W.
V. »70, 1. 6 Lisez : .^|>orlules (et non : spectacle.s).
V. :m, n. 3. Lisez : VI 9223.
P. 5()4. .V Isra VII I0:i , il s'ai,Mt .1.' Caii.kcai.i.k
I* r>2l. I Mi. Lisez: VI 29091.
V(H.I \ll II
P. .M), 1. 9. Lisez : en l'an 146. L 13 : sous .Marc .\urèlf' »'t Verus de inAtne
à la page 44). L. 17, supprimez les mots : et 147.
r. 39, n. 2. Lisez : Svm.m., Kp., III, oo.
P 74, 1. 15. Lisez : un demi-siècle.
P. 85, n. 4. Lisez, à la fin : XVI, 40-41.
P. 9o, n. 3. Supprimez les citations du Cod. I.nst., où il s'açril de Rome;
de même à la |). 82, n. 3, fin.
P. 97. Il faut peut-<'tre lire : Supernales, Aruninen.ses et Infernates.
P. 98. Remplacez les notes 2 et 3 par cette note unique : C. Th.. 14, 6,
I. 3. C. /. L., VI 1771. Symm . Ep., \\ 150. Rclat., 29. 34. 4;.
De Rl'ggieho, Diz. epigr., I, p. 632.
P. 101. Sur le commerce et l'industrie privés, voyez encore : C. Th., 8,
4, 1. 28 et 30. C. J., 12, 58 (57;, 12, § 3 >436) : sed edam ninctos, qui
diversarum rei'um negotiatoribus delinentur. .
P. 109, n. 2-6. Gatti a réuni tous les fragments de listes dans le Huit.
corn., 1891, pp. 342 et suivantes.
P. 125, n. 5 et plus loin, à plusieurs reprises, il faut liie : Symm., Kpist.,
IX 105 au lieu de : 100).
P. 128, n. 2, vers la fin, lisez : XVl, 46.
P. 136, n. 2. Lisez : Cassiod., Yur., VII, 10.
( 488 )
I*. 15:2. Sur les haslifoi, voyiez l'arl. do R. Gagnât dans le Dict. de ItAitKM-
BERG et SA(iLIO.
I*. 153, n" 53. Lisez : Anazarbus.
V. 164, n. 4. Lisez : G. Th., 14, 27, 1. 2 au lieu de : /. un.].
P. 189, n. 1. Lisez : IX 1596. N. 4, ajoutez : Amer. Journ. of Arclt., I.
p. 140 : £ôo6tj cpop-Tjyo"?; . , . _3à6pa Ta à^r,? -réoraapa, à Smyrne.
I'. 190, n. 4. Lisez : XII 1282.
I'. 199, n. 7. Lisez : voyez infra, p. 201, n. 10.
P. 214, n. 3. Lisez : EpisL, 33-34.
P. 223, n. 2. Lisez : G. Th., 14, 7, 1. 3.
P. 232, n. 6. Au lieu de G. J. XI, 7, 13, lisez : G. J. XI, 7 ',8:, 2. 3. 5. 6. 10.
13. 14. Gfr. Gagnât, dans le Dict. de Daremberg et Saglio. s. v.
yijnaeciariL
P. 241, n. 1 . Gfr. Mommsen, dans son Index de Gassiodore, s. v. arniifactor.
P. 252, n. 4. Lisez : Aurelius Victor, Epit., XIV, 5.
P. 257, n. 1. Lisez : Formula.
P. 366, n. 1., Lisez : Nov. Theod. 11 (au lieu de : Val. III).
P. 377, 1. 2 d'en bas. Lisez : Garacalla (au lieu de : Marc Aurèle).
P. 422, I. 6 d'en bas. Lisez : Marc Aurèle (au lieu de : Antonin le Pieuxi.
{^^)
T\^
lABLES
Avis important. - D;ins I indication des pages, les dizaines et les centaines ne
sont pas répétées; ainsi : 123. 4. 35. 6 = 423. 424. V^'y. VMS. Les chiffres gras
indiquent les pages où un texte est reproduit ou celles où le sujet est spécialement
traité. Le deuxième volume est désigné par le chiffre II. Dans le répertoire
alphabétique, les petits chiffres précédés d'une virgule renvoient aux notes.
LISTE DES TEXTES CITES.
Actus Apostolorum.
-28 — II 5i.
Ambrosius, 3ligiie. P. L., 16
De obitu Val. cons. :
§58(1189), M., p. 1437-11 344.
Epistolae :
2, 20, 6 (853), M., p. 1037 - II 139.
61. 213.
De ofticiis :
3,7(119-121), M., pp. 168-169 —
II 102. 42. 3. 257. 332.
Ammianus Marcellinus.
14, 2, 10 - II 73.
19, 10 - II 382.
27, 3, 2 — II 318.
28, 1, 27 — II 109.
28, 4, 28 - II 135.
29,3,4 -II 241. 2.
31,6,2 —11241.
31, 6. 6 — II 23H. 82. 339.
Appianus. Bc
lia c'iv
1, 100.
104-91.
Appuleius. M(
'tain.
1,7
- II 59.
7,1
-518.
11, 16
- 247.
11,28
- 205.
11, 30
- 43. 252.
Aristides. Oraliones.
p. 220, 10 - 11 103.
Arnobius.
5,7 — 247.
Asconius, edd. Kiessl. el Soh.
In Pisonianain :
pp. 6-7 -91. "2. 4.5. 102. 3 6
p. 8 - Diî. 337.
In Miloniaiiam :
p. 34 - 49.
p. 35, 1. 27 - 177.
( 490 )
In Cornelianam :
p. 66 —49.91.
p. 67 - 49. 88. 9i. 3. 105. 6
II 118.
Athenaeas.
VI. p. 224c — II 110.
Augustinus.
Sermo355 —II 27 o. 90.
Psalm. 75, 8 — 424.
Decons. ev. 1,61 — II 137.
Aurelius Victor.
Epitome :
1 — II 36.
li, 6 — 53. II 121. 221.02.
De Caesaribus :
13, 5 — 188. II 79. 252. 3.
35 — II 23.
41, 19 — 1188.
Basilica.
S. 2, 101.60,32— 157.
Gaesar.
h. c. 2, 43 — Il 73.
3, 42 - II 65.
Cassiodorus, Variae.
1 32-33 — II 137.
m 10 —II 61.
VI 4 — Il 380.
VI 7 — II 230. 57.
VI 18 — II 20. 82. 5. 91. 253.
346. 75.5. 84.5.
VII 10 — II 136.
Vins —493.
VII 16 - II 116.
VII 17 — II 346.
VIH8 —H 241.
XI 39 —II 90. 1.346.424.
XII 24 —II 40.
Gato.
r. r., 10,5. 14,2 — 67.
Ghronicon Paschale.
DiND., p. 711-11219.
Gensorinus.
(le d. n. 12, 2 — 200. 39.
Gicero.
Brutus :
45.166 — 37.48.
Pro Caelio :
11,26 — 37.
In Catilinam :
4,8,17-175.6.
In Corn., dans Asconius
p. 66 — 49. 91.
De domo :
5, 13 — 95. 176.
20, 63 - 97. 175.
21, 54 — 95. 7. 177.
22,58 -96.
23,61 —96.
28, 73 — 179.
28,74 -41. 101.7.
30, 79 — 97.
33,89 —175.
51,131 —97.
Pro Flacco :
8, 17. 18 — 176.
Pro lege Manilia :
5, 4 - II 105.
Pro Milone :
3 et 71 — 177.
{ 491
Pro Murcna :
^23,
47-
141.
34,
70-
167.
InP
isonein :
4,
8 -
93. 4. 100. ± 3.
4,
9 -
93. o. 123. 337.
•^,
11-
95.
10,
23-
- 95.
48,
41-
-179.
Philippicae :
1,
7,16
-96.
Pro Planeio :
15,
36-
-49.112
1.^,
37-
-49.
19,
47-
-49.
Post redit, ad Quir.
5, 13 — 95. 6.
Post redit, in senatii
13,
33
- 95. 6.
Pro Sestio :
8,
18-
-177.
12,
27-
- 178.
14,
32-
-178.
15,
34
- 95. 7.
17,
38
- 178.
23,
52
- 175.
24,
53
-97.
25,
55
- 93. 5. 105,
27,
59
- 178.
■i4,
95
-96.
Pro Sulla :
2
7 —
48.
In Vatinium :
3,
8-
179.
Pro Vat. fragm. 3 — 49.
In Vermm :
2,1,47,123- 141.
2, 2, 55, 137-11 105.
2,3. 14,36 -1127.
2, 5, 5H, 149 - II 105.
2, 5, 69, 153 — II 105.
Scliol. pro le^. Mail.
Or., p. 438 - II 105.
Sehol. i)ro Planeio :
Ou., p. 253- 112.
Ad .Atlicuiii :
3, 15, 4 - 95. 6.
4, 1 — II 27.
Ad QuiiUum fr. :
2,3,5 —49. 97.112.
2, 5, 2 — 35. 84.
3, 1,5, 15-49.50.
Acadeuiicoruni :
fragm. 10 — II 76.
De tinibus :
2. 26, 8i —II 58.
2, 31, 103 - 327.
De legibus :
2, 15, 37 — 43. 80.
2. 22, 55 — 257.
2, 24, 60 - 66.
3, 10, 24— 141.
De ot^iciis :
1, 17, 55 —257.
1,42, 150-85.
2, 14, 27 — 62.
De republioa :
2, 23, 40 — 163.
De senectule :
13, 45 — 36. 326.
( 492 )
Q. Cicero.
lU' polil. roii-s. :
i,3 - 166.
5, 16 — 37. 48.
5, 19 — 40.50. 167.
8,30 — 41.87. 101. 7. 166.
8.32— 1-23. 167.
Glaudianus.
In Eiitrop. :
1,402-409 — 1139.
B«>11. Gild. :
52 — II 37.
De lande Stiliconis. :
2, 393-396 - II 39.
Codex Justinianus, éd. Krie-
gelii •.
r^ de sacr. ecclesiis.
1.1 — II 461.
1. 4 — II 130.
1. 9 - Il 130. 1. 232.
1.23 - 321.11461.
1,5 de episcopis.
1.17. C. Th., 16,2. 1.42.
1. 20, § 1. C. Th., 0, 3, 1. 1.
1.35(34) - 321.11461.
1.46(45) — 321.11461.
1. 53 (52) — Il 336.
1,4 de episc. aud.
1. 34, 4 — II 336.
1,9 de Judaeis.
1. 1 — II 463.
1,11 de paganis.
1. 4 — 329. C. Th.. \il 10, 1. 17
1,24 de statuis.
1.4 — 453. II 142.60. 1.91.
1.27 de off. praef. praet.
1.2,8 - 11244.
1.28 de otV. praef. urbi.
1. 1. C. Th., 1, 6, 1. 5.
1.4 — 1,10,1.4.
2, 14 (15) ne liceat polent.
1. 1 — 141.
5, 15 de jurisdictione, etc.
1. 7 — II 580.
4, 2 si eertiim pelatui-.
1. 16 — II 232.
4, 27 per quas personas.
1. 1 — II 449.
4, 40 quae res venire.
1.3 - II 57.
4, 59 de monopoliis.
1. 1 (2) — II 427.
4, 61 de vecligalibus.
1.6 — II106.'c.Th.,13.5, 1.24.
1. 11 — II 125. 227. 426.
4, 63 de commerciis.
l. 5 — II 128. 142.
5, 62 de excusât.
1.24 — 11412. C. Th., 3. 31. 1. I.
6, I de fugitivis servis.
1.5 — il 217.
1.8 — II 242. 6.
6, 2 de fur lis.
1. 5. Nov. Theod. 11, t. 6, ij o.
6, 24 de heredibus iiistit.
1. 8 — II 459. m.
1.12 — II 461
6, 50 de jure delib.
1. 16. C. Th., 12, 1, 1. 149.
6, 48 de incertis personis.
1. 1 — II 461.
Les numéros de lédition Kklkgeiî .sont entre parenthèses.
( i93 )
G, 62 (le hereditalibus decurio-
luim, navieulai-iorum, coliorta-
liuin, miliUim et fabricensium.
1. 1 — 469. II 377. 457.
1.2. C. Th., 0, 4, 1. 1.
I. 3 — 11457.
1. 4 — I14S7.
Lo-469. II 364. 77. 457. Cfr.
Nov. Theod. II, 6.
7, î) de servis reip. man.
1.2 —II 455.
1.3 -II 455.
7, 24 de se. Claudiano loU.
1.1 — II 308.
îî, 12 (11) de operib. publ.
1. 12. C. Th., 15, 1,1.34 — II 420.
î>, 47 de poenis.
1. 19. G. Th., 9, 40, 1. 9.
fO, 31 (32) de decurionibus.
1. 30 — II 467.
U), 47 (48) de excus. mun.
i. 7 — II 233.
1. 12. C. Th., 11, 16, 1. 15.
!0. 64 (66) de excusai, artif.
1. l —II 122. C. Th., 13,4,1.2.
10. 69 (71) de tabulariis.
1. i — II 323.
10, 70 (72) de susceptoribus.
l. 11. C. Th., 12,6,1.26.
11, 1 (2) ne naviculariis seu na-
iiarchis juiblicas species trans-
[)ortantibus — II 423.
1.3(1). C Th., 13,5, 1.9.
1. 4 (2) — — 1. 26.
1.5(3) - - 1.29.
1.6(4) - - 1.32.
1. 7 (5) - — 1. 33.
1.8(6) — — 1.34.
H, 2 (3) de piaediis el oinnibu.^
lebus iiavicuiariorum — II 272
423.
1. 1. C. Th., 13,6, 1. 5 — II 289.
1. 2 — _ 1. 7 - II 289.
1.3 - - 1.8 -II 289.
Il 3 (4) de navib. non excusandis
1. 1. C. Th., 13, 7, 1. 2.
1. 2. Nov. Theod. 11, 8, M.
11 4(5) ne quid oneri piiblico.
1. 1. C. Th., 13, 9, 1. 1.
n, 5 (6) de nauliai^nis. — LI 423
1.2. C. Th., 13,9,1. I.
1.3 - - 1.3.
1. 4 — - 1. 4.
1.5 - - 1.6.
1. 6 - 13, 5, 1. 32.
U, 6 (7) de metallariis.
1. l.C. Th.,10, 19,1. 3.
1.2 - - 1.4.
1. 3 - - 1. 10.
1.4 — 1, 32, 1, 5.
1. 5 — 10, 19, 1. 12.
l. 6 — — 1. 14.
1. 7 — — 1. 15.
Il, 7 (8) dé imirilegulis, etc.
1. l.C. Th., 10, 20,Yl,
1.2 - 1,32,1.1.
1. 3 - 10. 20. 1. 3.
1.4 - - 1.4.
1.5 - - 1.7.
1.6 — - 1.9.
1. 7 — — 1. 10
1.8 — — 1. 11.
1. 9 — — 1. 1-2.
1. 10 — - 1. 13.
1. 11 — - 1. 14.
1. 12 - - 1. 15.
1. 13 - - 1. 16.
1. 15 _ - 1. 17.
1. 16 — Il 359. 66.
494 )
il, 8 (9) de vest. lioloveris. C.
Th., 10, 21.
Il, 9 (10) de fabricensibus.
1. l C. Th., 10, e>2 1. 2.
1.2 - - 1.3.
1.3 - -LA.
1.4 — — 1.6.
1. 5 Nov. Theod. II, 6.
1. 6 — II 242. 0.
I. 7 — II 245.
II, 13 (14) de deciiriis U. R.
1. 1 C. Th., 14, 1, I. 3.
I. 2 — — 1. 4.
II, 14 (lo) de privilegiis corpo-
ratorum U. R.
I. i. C. Th., 14, 2, 1. 2-4.
II, 15 (16) de pistoribus. C. Th.,
14, 3.
I. 1 — Il 68. 83. 315.
II, 16 (l7)desuariis,etc.C. Th..
14,4.
l.l.C. Th., 14,4,1.6-1195.418.
I. 2 - II 25. 380. 410.
II, 17 (18) de collegiatis et char-
topratis et niimmulariis.
I. 1 C. Th., 1, 2, 1. 9.
II, 22 (23) de canone frum. Û. R.
1. 1. C. Th., 14, 15, 1. 2.
1. 2 — — 1. 3.
I. 3 — — 1. 5.
II, 25 (24) de frum. urbis C. P.
1. 1. C. Th., 14, 16, 1. 2.
1. 2 — - 1. 3.
il, 26 (27) de nantis tiberinis.
1. un. C. Th., 13,21,1. 1.
11,27 ('^8) de frum.Alexandrino.
l.l.C. Th., 14,26,1. 1.
1.2 — —1.2.
il, 28 (29) de Alex, primatibus.
1.1. C. Th., 14, 27, 1. 2.
Il, 42 (43) de aquaeductu.
1. 16, § 1 — II 127. 344.
il, 47 (48) de agricolis.
1. 20, pr. et § 2 — II 12.
1. 23, pr. — II 12.
I. 23, § 2. — II 12, 143.
il, 49 (SO) in quibus causis.
1.2 — II 12.
II, 34 (oo) ne rusticani.
I. 1 — II 166.
II, o9 (60) de fundis limitr.
1. 2. 3 — II244. C.Th.,7, 15.1.2
Nov. Theod. II, 22, 1 et 4.
12, 32 (31) de equestri dign.
1. un. C. Th.,3, 36, 1. 1.
12, 58 (o7) de cohortalibus.
1. 3. C. Th., 8, 4, 1. 11.
Codex Theodosianus (edit.
Haenel).
1, 6 de oft\ praef. urb.
1.5 -II 383.
1. 11 — 11141. 2.380.410.
I, lOdeoff. Gom. S. L.
1.4 — 138. 11101.42.380.410.
I, 16 de off. rectoris prov.
1. 2 — 11 300.
I, 32 de proc. gynaecei.
1.3 — II 230. 3.5. 8.
1, 5 — II 239.
2, 17 de his qui veniani.
1.1, §2 — II 385.
3, 31 de excusatione tutorum.
1. 1 — 11412.
4, 9 de his qui a domino — II 309.
(495)
5,2 de bonis decurioiuirn.
1. 1 — II 4o7.
5, 3 de bonis clericoruni.
1. 1 - II 457.
6, 4 de bonis militum.
1. 1 —11467.
5, iO de inquilinis etcolonis.
1. 1 - II 327.
6, 2 de senatoribus.
1. 43 - II 289.
1. 17 — II 289.
1. 19 — II 39o.
6, 20 de comitibus ord. prim.
1. un. — II 173. 430.
6, 29 de curiosis.
1. 11 — II 38. 417.
6, 30 de palatinis.
I. 1 —II 321. 32.
1. 16 — 11141.60.3.4. 210.317.
21. o. 62.
1. 17 — 11 160.301. 17. 21. o.
1. 23 — II 428.
6, 5 G de equestri dignitate.
1. un. — II 142. 416.'
6, 57 de perfeclissimatus dign.
1. un. - II 82. 315.
7, 2 quid piobare debcant ad
quamcunque militiam venientes.
1. 2 — II 366.
7. 4 de erog. militarisannonae.
1.32 — II 68.
7, G de militari veste.
1. 5 — II 233.
7, 8 de metatis.
1. 8 — 11241. 2.82. 4lî>.
7, 14 de burgariis.
1. un. - II 233. 44.
7, lîî de lenis liniitaneis.
1. 1 et 2 — II 244.
7, 20 d<' veteranis.
I. 10 —II 241.
1. 12, § 2 — II 130.
1. 12. §3 — 11 160. 1. 20Î). 10.
301. 17. 420.
7, 21 de testimoniali, etc.
1.3 — II 141. 60. 1. 210. 72. 30;.
IG. 82.
7, 22 de filiis milit. app. et vel.
1 1 — II 333.
8, 2 de tabulariis.
1.5 — 11217.
8, 4 de cohortalibus.
1. 11—11243.71. 89.328. 95.
1.25 — II 337.
8, 5 de cursu j)ublico. — II 220.
1. 17 — II 244.
1. 31 — II 244.
1. 58 — II 244.
8, 7 de diversis olliciis.
1. 9 — II 83.
1. 16 — 1183.
1. 19 — II 83.
1.21 — II 171.
I. 22-1123. 83.95. 136. 7. 71.
325.
8, 8 de exsccutoribus.
1. 4 — II 334.
0, 7 ad leg. Juliam de adull.
1. l — II 110.
9, IG de maleficis, etc.
LU- Il 137.
9, 21 de falsa nioneta — II 229.
9, 22 si quis solidi cireuhim.
1.1 — 11231.2.
9, 30 quibus equorum usiis
1.3-1192.419.
( 496)
î), 40 de poenis.
1.2-
238. in. 3U.
1.3-
- II 82. 333
.4.
1.5-
- II 82. 333.
68.
82. 4.
1. 6-
- Il 82. 333.
86.
1.7-
Il 82. 318.
33.
6.86.
1.9-
II 82. 331
. ^.
82.
9, 4^
de his qui
ad ecclesias.
1.3-
II 313.
10, 5
de locatione fundorum.
1. 3 —
II 160. 1.2
.4.
210.378.91
420
52.
10, 7 de caesarianis.
1.2 — 11282.328. 32.
iO, 19 de metallis et metallariis
— II 233. 334.
1.1 —II 235.
1.2 —II 235.
1.5 —II 338. 9. 41. 91.
1.6 —11338.44.92.
1.7 — II 238. 45. 304. 38. 9. 45.
92.
1.9 -II 392.
1. 10 — 11235.392.
1. 11 — 11235.392.
1. 13 — II 392.
1. 14 — 11235.
I. 15 — II238. ai.6. 93. 4. 304.
i\. 30. 38-40. 2.
10. '20 de murilcgulis, etc. — II
233.
lubr.— II243.
1. 1 —11229.45.71. 300. d5.
1.2 —11232.338.43.92.
1.3 —II 232. 46.309.
1. 4 - II 243. 4. 392. 425.
1.5 —11246.309.
1.6 — II 232. 338. 0. 43. 92
1. 7 -11232.8.43.360.
1. 8 — 11232.8.43.
1. 0 - 11232.8. 43. 360.
1. 10 — il 229. 46. 309. 92.
1. 11 - II 243. 4. 5. 300.
1. 12 — 11282.392.
1. 14 — 11 245. 82. 95. 4. 304.
15. 6. 23.
1. 15-11309.
1. 16-11229.32.45.82.98.304.
1. 17 — 11309.
10. "21 de vcstibus — II 233.
10. 2^2 de fabriceiisibiis — Il
240. 2.
1. 1 — II 242. 82.
1.2 -II 241. 360. 92.
1. 3 - II 242. 312. 429.
1. 4-11 127. 242. 5. 336. 8. 9.
41.3.4.
1.5-11243.82.338.40.3.
1. 6 — II 325. 6. 32. 66. 90. 2.
H, I de annona et tributis.
1.6 —II 98.
1. 13 — 11387.
1.24 — 11160. 1.4. 5.386.90.
il, "-i tribu ta, etc.
1. 2|)r. — II98.
1.2 —1125.100.
1.3 —98.9.100.
11. 5 sine censu, etc.
1. 2 - II 287.
U, 4 ne collatio, etc.
1.1— II 59.
I. 2 — 11 59.
II, 7 de exactionibus.
I. 8 - II 387.
H, 9 de distrahendis pignoiibu.s.
1.7 — II 243.
II, 10 ne opcrae, etc.
1. 1 — 11160.5.6.9.172.218.72.
391.
1. 2 — 11 Ifiiî. 6. 9. 172. 218.
( 497
H , 14 de conduis in pnbl. horreis.
rubr. — 11 68.
l.un.- 1164. 9. 383. 84.
H, iG de exlraord. sive sord.
mun. — II 16.
1.1 — Il 83.
l. 15 — IH2/i. 212. 3.41.80.
1. 16-11213.
1. 18 — 11124. 241.
H, 20 de collatione donata-
rum, etc.
I. 3 — II 83. 123. 6. 426. 7.
1.6 — II 241.
II, 28 de indulg. debitorum.
1. 2 - Il 263. '
1.8 —1138.41.413.
1.9 —11235.
I. 13 — 11412.
II, 30 de appellationibus, etc.
1. 4 — 11387.
12, I de decurionibus.
1.37 -11116.251.41.2.5.326.
1. 62 —11117.8.27.60.70.317.
26.
1. 66 — Il 333.
1. 74 — Il 312.
1.81 — Il 241. 5.326.
1.94 — Il 141.
1. 104— 11312.
1. 108— Il 333.
1. 115- Il 312.
1. 119— II 312.
1. 121— Il 312.
1.130-11312.
1. 131 — Il 219.
1. 134— 11326. 95.
1.143 — Il 344.
1. 144— Il 344.
1. 146- il 160. 210. 338. 40.3.
91.
TOiME L, VOL. II.
1. 149-11 38. 54. 290. 302.26.
414.
1.156-11 160.63. 210.316.82.
1. 160-11312.
1. 162— Il 112. 60.210.317.26.
38.9. 43.44.81.91.
1. 170— Il 337.
1. 179— 11141.60.1.7.73.210.
330. 91.
12, 2 de praebendo salario.
1. un. — Il 141.
12, 6 do susreptoiibus.
1.3 —11387.
1. 13- 11231. 2.
1. 15- 1194.423.4.
1.24— 11384.
1.26— 1125. 98. 9.
1.29 — 11139.
12, 7 de pondoratoribiis.
1. 2 — 11231.2.
12, 11 de curaloribus kal.
1. 2 — Il 22.89.
12, 10 do mancipibus.
lubr. —1183. 126.
1. un. - 11126.42.4.319.24.50.
2. 82.
12, ii) de liis i\m condicionem
propriam rorujuerunt — Il 311.
1. 1-3 - II 323. 38. 91.
1. 1 —Il 160. 1. 200. 10. 307.
26. 39.40. 1. 2.
1. 2 — Il 141. 60. 3. 210. 67.
520. 40.
1. 3 — Il 160. 7. 209. 10. 21.
339. 44. 5»8. 90.
13, I de luslrali collatione.
1. 1 — Il 130. 420.
1.8 — Il 102.
1.9 — II 101. 71. 419.
32
(498)
J. 10 — II 413.7. 70. 420.
1.16 — moi.
1. 17 — II 139. 213.
13, 4 de excusât, artilicum.
1. 2 — II 53. 125. 72. 242. 311.
421.
1
5, 6
de naviculariis — II 34.
372.
1
1 -
-1174.271.9.300.5.82
1
2 -
-II271.3.92.302.5. 9. 20
31. 74. 83. 4. 6. 95.
1
3 -
- II 272-5. 88-90. 3. 4. 316
9. 63. 84. 6. 95.
1
4 -
- Il 57. 272. 385. 96. 410. 1
3.7.
6 -
-Il 273.89.325.8.79. 85
95. 6. 409. 10. 1. 3. 6
1.
6 -
-1138. 56. 274. 6. 8. 9. 36
3.85.
I.
7 -
- II 37. 8. 40. 55. 273. 6. 8
SOI. 64. 79. 410. 1. 2
3. 5. 23. 8.
I.
8 -
- Il 38. 55. 274. 8. 9. 391
410. 1. 3. 6. 7.
1
9 -
-1136.8.54.381.2.410.3
6.7.
1.
10-
- II 38. 55. 126. 386. 91
409. 10.
1
11-
- II 36. 315. 23. 82.
1.
12-
II 38. 290. 362. 87.
I.
13-
II 36. 76. 126. 278. 9. 95
328. 67. 82.
J.
14-
- Il 37. 8. 40. 139. 272. 4
5. 7. 89. 99. 302. 5. 12
22. 3.7. «.50. 61. 2. 79
85.95.409.10.1.2.24
].
15-
- II 316. 85. 412.
1.
16-
1138.57. 106. 325.8.32
64. 79. 86. 97. 408. 10
1. 2. 4. 5. 6.
1.
17-
11325.8.85.409.10.1.6.
1. 18 — Il 37.139.277. 386.91.5.
19 — 11 294.9.302.4.5.25.85.
95.
20 — 11 37. 273.89.93. 4. 304.
16. 86. 91.
21 — Il 38. 56. 7. 363. 85.
22 — II 274. 89. 304. 21-4. 79.
85.
23 — 1157. 106.385.410.4.
24—1138.57.410. 1.4.
25 — Il 38. 326. 86. 409. 10.
26 — 1156. 7. 279.
27 — II 56. 272. 5. 86. 8. 90. 4. 5.
28 — II 275. 385. 95.
29— 1136.376.81. 2.417.
30 — 11 38. 55. 386. 91.6.10.
1.6.
31 — 11 385. 410.
32 — 11 37. 40. 54.324.62. 5.
72. 85. 6. 414. 28.
33 — 1154. 7.279.385.
34 — 11 57. 160 1. 4. 210. I.
385.
35 — 1155. 270. 4. 94.300. 2.
5. 22. 3. 4. 85. 95.
36—1138.319.35.64.79.86,
95.7.410. 1. 6.7.23.
37 — 11 38.278.9.364.79.86.
97. 417.
38 — II 36. 8. 57. 279. 381-7.
417. 23.
15, 6 de praediis navicuiariorum
— Il 34.286.323.
1. 1 — II 190. 272. 86. 8. 9. 94.
5.320.1.64.79.84.6.
1.2 —II 36. 272. 3. 86. 91.4.
376. 82.
1.3 -1138.274.89.94.319.21.
86. 95. 410.
1.4 — II 38.272.3.88. 90.1.4.
323. 86. 95.
499
1. 5 — Il ^21'2. 88. 9. 00. 4. 320.
84.6.
1.6 —Il 38. 212. 86. 8. i»0. 4.
3^20. 1.3.
1.7 —1138. 272.3.4.86.8.90.
4.386. 9J.
1.8 —11272.86. 8.90.3.4.385.
1.9 —Il 272.86.94.
1. 10—1138.272.86.94.342.85.
15 7 de navibus non excusandis.
Il 331.
1. 1 — 11331.86.
1.2-1134.330.1.86.
15, 8 ne quid oneri publico impo-
natur.
1. un. — Il 54. 386. 414. 7.
13, 9 de naulragiis — Il 57. 276.
1. 1 — Il 385. 6.'
1. 2 — II 38. 55. 387. 416.
1.3 — 1138.56.7.328.30.64.79.
415. 23.
1. 4 — Il 57. 385. 6.
1. 5 •—1157. 383. 423.
1. 6 — II 38. 364.
14.1 de decuriis urbis Uoniae.
1. 3 — II 270.
1.4- 55.
14.2 de privilegiis corporatorum
urbis Romae.
rubr. — II141. 2.379.81.409.
1. 1 —II 142.5.382.96.408.9.
1. 2 — II 142. 332. 82. 97. 409.
1. 3 —II 141. 2 382.96.7.409.
1. 4 — Il 141. 2. 337.8. 0.41.
82.91.
14,5 de pistoribus de calaboh'n-
sibus — II 78.
1. 1 - II 272. 80. 6. 94. 5. 6.
366. 84.
1. 2 —1172.280. 333.61.5. 70.
1.82.96.
1. 3 —II 272. 3. 4. 80. 6. 91. 2. 4.
6. 302. 5. 23. 82. 4. 95.
1. 4 — II 273. î)«. 315. 82.
1. 5 —11272.80.304.5. 2U.(J0.
6.82.
1. 6 — II 519. 82.
1. 7 -II 83. 280. 512. 68. 71.
2. 3. 4. 5. 82.
1. 8 - II 280. 300. HG 81. 2.
1. 9 —II 61. 272. 7. 329. 82.
1. 10 —II 61. 272. 91. 4. 317. 29.
82.
1. 11 - 11 313. 42. 82.
1. 12 — II 278. 80. 327. 9. 34. 68.
84. 6. 91. 5.
1. 13 — II 272. 3. 6. 97. .302. 72.
3. S. 82. 94.
1. 14 — II 272. 3. 80. 95. 304. 6.
34.61.84.95.
1184.281.95. 366.84.5.
II 84. 276. 381. 95.
II 327. 9.34. 68.86.91.
II 83. 272. 80. 317. 9. 23.
82. 95. 409. 17.
II 372. 3. 5. 86. 428. 53.
II 319. 56. 62. 86.
II 136. 7. 274. 300. 6. 7.
9. 29. 34. 61. 66. 72. ;.
84. 95.
1. 22 -11280.334.86.417.
1^,4 de suariis, pecuariis et sus-
ceptoribus vini ceterisque eor-
poratis.
rubr. — II 98. 143.
1. 1 - II 91. 272. 3. 4. 88. 92.
98. 309. 15. 22. 3. 4.
79. 86.
1. 2 —1191.2. 4 382.
1. 3 —1191. 2. 3. 4. 363. 82. (i.
1.
15
1.
16
1.
17
1.
18
1.
19
1.
20
1.
21
( 500
1. 4 - 1191-96.8.277.382.424.
0.
1. 5 —II 91. 4. 272. 86. 92. 4.
304. 23. 4. 30. 82.
1. 6 — II 90. 1. 4. 281. 322. 64.
82. 96. 7. 409. 18.
q. 7 -1191.4.273.4.92.4.301.
2. 4. 5. 22. 3. 5. 82.
1. 8 — II 91. 4. 102. 42. 272. 3.
4. 7. 86. 94. 7. 304. 6.
13. 5. 6. 9. 23.76. 82.
95.6.
1. 9 -1159.64.72.312.33.65.
9.70.1.81.5.6.418.
J. 10 —1191.2.4.5.274.301.4.
18. 9. 22. 5. 4. 37. 68.
71. 86. 418.
14, S de mancipibus Ihermarum
urbis et siibvectione lignorum.
— II 125.
1. un. — II 126. 426.
14. G de calcis coctoribus U. R.
et Const.
1.1- II 115. 6. 382. 425.
1.2 — II 116. 270. 382. 95. 6. 419.
1. 3 — II 98. 115. 6. 381. 426.
1. 4 — II 115. 6. 382.
1. 5 — II 116.
14.7 de collegiatis.
1.1 — 11160.^1. 283. 304. 7. 10.
23. 38.9.40. 1.91.
1.2 — 86. 160. 210.520. 37.91.
1. 3 — 249. II 138. 160. 1. 3.70.
223. 304. 10. 38. 43.
14.8 de centonariis et dendr.
1.1 — 242. II 112. 23. 60.1. 70.
200. 324. 90. 1.
1.2 -II 112. 60. 317. 21.64. 7.
82. 455.
14.9 de studiis liberalibus.
1.1— II 142. 273.332.82.410.
14,10 de liabitu, quo uti oporlet
intra urbem — II 221.
14.15 de canone friim. U. R.
1. 1 — II 24. 64. 9. 72. 84. 5. 270.
7.369.81.2.
1. 2 — II 56. 7. 9. 384. 6.
1. 3 — II 22. 88.
1. 4 — II 24. 84. 5. 374. 84.
1. 5 — II 270.
14.16 de frumento U. CP. = II 37.
1. 1 — II 24. 85. 106.
1. 2 — II 82. 3. 4. 409.
1. 4 — II 24. 82. 3. 5.
14.17 de annonis civicis et pane
gradili — II 20.
1.2 — 1121.86. 384.
1. 3 — II 82. 6. 373. 84.
1. 4 — II 82. 6.
1.5 — 347.1121.85. 6. 9.
1.6 — 347. II 86. 278. 80. 334. 84.
1. 7 — 347.
1. 9 — II 82.
1. 10 — II 82.
1. 15 — II 23.
14,19 de pretio panis Ostiensis.
1. un. — II 24. 59. 62. 72. 106.
14.21 de nantis tiberinis.
1. un. — II 72. 330. 82.
14.22 de saccariis portus Romae.
1. un. — 193. II 62. 525. 82. 427.
14.23 de patronis horr. Porl.
1. un. - II 59. 69. 365. 9. 71.86.
14.24 de mensis oleariis.
1. un. — II 22. 88. 9. 384.
14.25 de frumento Karth.
1. un. — II 386. 90.
14.26 de frum. Alexandrino.
1. 1 — 1137.56.423.
1. 2 — II 219.
oOl )
14.*27 de alexandrinae plehis |)ri-
matibus.
!. l —11371.86. 91.
L2 — II 160. 1.4. S 420.
15.1 de operibus publiois.
1.12-II59. 68. 9. 84. 382.
1. 34 — II 420.
1. 41 — II 160. 210. 378. 420. 52.
1.49 — II 420.
1. 50 - II 117.
J. 52 -II 117.
15.2 de aquaeduclu.
1. 39 — II 210.
15.5 de spectaculis.
1. 1 — II 300.
1. 2 — II 139.
1.3 — II 137. 71.
1.5-139.
15.6 de majuma.
1. 2 — II 139.
15.7 de scenicis.— 11300. 14.
1.1 —11137. 314.
1. 2 — If 137. 71. 306. 14.
1.3 —11136. 7.9. 171.
1.4 — II 136. 7. 306. 13.
1. 5 — Il 136.
1. 6 — Il 171.
1.7 — II 137.
1. 8 — Il 137. 314.
1. 9 —Il 136. 7.71.306. 14.
1. 10 — 11 171.
1. 11 — 11 171.
1. 12 — 11 136.7.313.
I. 13—11 135. 6. 7. 8. 71. 306.
19. 23.
1. 15 — 11313.
1.21 — 11 171.
9.10 de equis ourulibus.
J. 1 — Il 68.
1.2 — Il 171.
15,15 de usu sellanim.
1. un. — Il 110.
15,14 (le infirmandisliis.quae, etc.
1.4 — 11289.318. 27.8.95.
16,2 de episcopis.
1.4 —11461.
1. 15 — 11 130. 213. 420.
1.39 -II 160. 1.209. 11.333. 6.
91.
1.42 — 11160. 1.4.211.391.420.
68.
16,4 de his qui super religione
contendunt.
1.5, 1 — 11 141.2.232.358.67.
80. 454.
16,10 de paganis, etc.
1. 17-329.'lI139(C.J., 1,11.4).
1.19 — 139.223.
1.20 — 248. II 123. 38.9. 70.
1.22 — II 131.
Golumella.
1 pr. 20—11 27.
Commodianus.
Instructiones :
1, 17,6 —Il 138.
1,19,7 —II 138.
2, 33, 8 — 278.
2,33, 12-319.
Conciliorum tomus IV — 1 1
138. 61. 222.
Guriosum Urbis — II 68. 85.
98.
Cyprianus.
Kpist. 39, 5 — 403.
67, 6 — 319. 29.
( 502
Decem Tabulae.
Bruns », p. 35 — 6Q.
Digesta, éd. Mommsen.
I,î5 de statu hominum.
0, -2 — 11 307.
19 —II 307.
24 —II 307.
1.8 de divisione rerum.
6, i— 286. II 434.9. 42.3.
6.3 — 11 434.
6,4-1! 438.
1,1) de senatoribus.
1 — II 139.
1,12 de oÛ'. praef. urbi.
1.4 —11380.
1.9 -II1J4. 381.
1, 11 — II 24. 89.381. 2.
1, 14 — 11 139.
2 — II 114. 380.
I,1S de off. praef. vig.
1 — Il 129.
3.3 — 11351.
2.4 de in jus vocando.
10, 4 — 443. 55. 68.
2,14 de pactis.
38 — 335.
3.2 de bis qui notantur.
11,3 — 269.
3.3 de procuratoribus.
1 — II 467.
3.4 quod cujuscumque universi-
atis noraine vel contra eam
agatur.
1 ^ —92.118. 9.22. 3.5.7.9.
55. 339. 57. II 34. 172.
378. 44S. 6.
1 pr. — II36. 79. 224.52.
1, 1 — Il 439. 68.
1.2 —II 468.
1.3 —II 468.
2 — Il 441. 2. m
6.1 -II 468.
7, 1 —II 441. 3.52.69.
7, 2 — 338. 40. II 442.
9 — II 469.
10 — II 453.
4.2 quod metus causa.
9, 1— II 140. 441.54. 72.
4.3 de sutïragio.
15, 1 — II 472.
4,6 ex quibus eau sis.
10 — II 217.
4,9 nautae, caupones, etc
1.3 — 1135.
1.4 — 1176.
7, 5 — II 45.
o,l de judiciis.
76 — II 442.
7.1 de usufructu.
56 — 11451.
9.2 ad legem Aquiliam.
27, 33 — 249.
10,4 ad exhibendum.
7.3 — 455.11141.448 9.
11,7 de religiosis.
12, 2 — 27l'.
12, 4 — 269.
12,2 de jurejurando.
9, 6 — II 468.
34, 1 — II 468.
34, 3 — II 468.
14,1 de exercitoria act
1,1 —II 279.
1, 18 — II 384.
( 503 )
14,2 de lege Rodia.
4, pr. — II IL 6.
14.5 quod cum eo, qui.
8 - II 384.
17,2 pro socio.
10 — 11 23o.
18.1 de contrahenda empl.
40,3- II o9.
19.2 locaîi.
13, 1 - II 3o.
20,4 qui potiores.
51,1 — 1156.
27.1 de excusationibus.
17, 2 — II 397. 402.6.7. 20.
17, 3— II 397. 402.
17,6— II 35. 397. 402.
26 — 1164. 383.97. 40S.
41, 3 — 11397. 40o.
46 —1180.1.384.97.404.
28.6 de vulgari subst.
30—11462.^
29.2 de adquir. hered.
25, 1 — 55. 455.
90 — II 4.58.
30 de legatis et tid.
73, 1 — II 463.
117 —11463.
122 —II 463.
ôl de legatis et fid.
66, 7 — H 462.
32 de legatis et fid.
38, 6 - 46. 2. 466.
93,4—11 170. 464.
94.3 — 11117.
33,2 deusu.
8 — 11451.
33.7 de instructo.
12,18— Il 203. 351.
54. 0 de rebus dubiis.
1 - Il 445.
2 — II 442.
20 — 130. 3. 41 439. 63.
36.1 ad se. Trebell.
1, 15 - II 443. 62. 72
6, 4 — II 462.
26 — Il 462.
27 - II 462.
36.4 ut in possess. leg.
12 — Il 462.
37.1 de bon. possess.
3, 4 — 55. II. 456. 68.
3, 7 — Il 456.
38,3 de libertis universitatum.
1,1 — 11447.56.8. 60.2.
40.5 de manumissionib.
1 — 455. 68. 2. 456.
2 — 11 456.
41.2 de adquir. poss.
1,22-455. 11447.8.9. 58. 73.
2 - Il 448.
43.9 de loco publ. fruendo.
2 — 493.
43,24 quod vi aut clam.
5, 10 — II 468.
45.3 de stipulatione.
3 — II 453.
46,1 de fidejussoribus.
22 — 55. 11441.
46.8 ratam rem haberi.
9—11 468.
47,3 de tigno juncto.
1 — II m!
47.11 de extraord. cri m.
2 - 132. 8.
47.12 de sepulchro violato —
468. Il 469.
( 504 )
47,22
— II
1-4 -
1
1, pr. -
1,§1
2
3
3,pr.
3,§1
3, §2
4
de collegiis et corporibus
160.4. ''
— 165.
— 127. 33. 4. 0.
— 46. 9. 136. 43. 46.
— 120.131.49.353.11361.
— 147.9.33. II 442. 70.
— 137.
— 132. 6. 265. II 439.
— 127.
— 122. 42. 339.
— 46. 142. 8. 356.
— 37.79.84.334.5.11469.
48,2 de accusationibus.
13 — 11290.361 84.
48,4 ad ieg. Jul. majest.
1,1 — 137.
48,12 de lege Julia de ann.
2 — H 417.
3, 1 - II 384.
48.18 de quaestionibus.
1,7—455.11442.3.
1,8 — 11443.
48.19 de poenis.
28,2 — 139.41.
28^ 3 — 48.
49,4 quando appellandum.
1,13 — 11468.
49,18 de veteranis.
4, 1 — II 331.
S0,2 de decurionibus.
1 — n 269.
2, 8 — II 269.
9,1 — 11399.400.
S0,4 de numerib. et bon.
1 —11216.331.
2 — Il 216.
5 — II 87. 256. 397. 9. 400.
1.2.4.
12 — II 400.
14.5 —II 269.
14.6 —II 269.
18, 13 — II 468.
50.5 de vacat. et excus. muner.
3 —1129.34. 48.8.290.397.
9. 400. 1.
9, 1 — II 106. 397. 9. 401. 2. 3.
10, 1 — II 64. 397. 40i>.
10, 4 — II 468.
50.6 de jure immunitatis.
1 — II 397. 9. 400. 1.2.
6(5) —II 34.
6, 3 — II 46. 7. 9. 106. 8. 256.
79. 395. 9. 400. 1. 3.
6,4 —II 49.399. 401.
6, 5 — II 45. 8. 599.
6, 6 - II 46. 8. 9. 104. 6. 256.
79. 399. 400. 1. 2. 8.
6, 7 — II 49. 104. 268. 400. 2.
3.
6,8 —II 104.256.400.1.3.8.
6, 9 - II 46. 256. 400. 2. 8.
6, 10 — Il 400.
6, 12 — 52. 122. 7. 88. 337. 45. 8.
56.1150. 117.8.21.40.
70. 94. 204 14. 53. 6.
350. 60. 95. 400. 6. 7.
20. 45.
6, 13 — II 49. 268. 399. 400. 14.
7 (6) — II 125. 72. 239. 421.
80,12 de pollicitationibus.
1,1 —II 453.
2 — II 453.
3 pr. — Il 453.
3,1 —II 449.
30,16 de verborum signif.
62 —II 117.
85 —337.
235 — 11117.93.
( 605 )
80,17 (le diversis regiilis
160,1-
- II 448.
Dio Gassius.
37,
57-
-49.
38,
13-
- 93. 5.
39,
24-
-347.
45
6 -
-36.
52,
36-
-44. 110.6.34.
53
2 -
-110.
54
2 -
-51. II 13.
54
6 -
-110.12.
55
2 -
- 11 460.
55
8 -
-103.
59
28-
-II 61.
60,6 -
- 121. 479.
60
11-
- Il 74.
69
19-
- II 404.
74
4 -
-495. Il 186.
^
Diodorus.
5,
26-
- II 180.
Dionysius Hal.
2,
28-
- 67. 85.
3,
44-
- II 58. 69. 74.
4,
14-
- 103. 9.
4,
15-
-102.
^,
17-
-164.
4,
24-
-347.
4,
43-
-79.
7,
59-
-164.
9,
25-
- 67. 85.
Edictum Justiniani
7
— Il 232.
9
— Il 232.
13
,4 et 5 -1157.
13
,4-8
12. 22 — 11 37.
13
,6
- II 56.
13
,8
-11423.
Édit de Léon le Sage.
Ed. Nicole — 26. 194. 5. Il 347.
427.
Edictum Theoderici.
c. 64-11160. 1 336.46.
Eumenius.
Grat. aclio Constantino Auuj. :
8,8-11138.61.87.
Eusebius.
Hist. ecclesiastica :
2,2 -316.
2, 18 — 121.
7,21 -11220.
Festus, éd. Mleller.
p. 20 aeneatores -
- 163.
p. 32 biistum -
- 292.
p. 86 factio
-49.
p. 148 Maiis Idibus -
-35.
pp. 148-149 Min. Quinq -
-200.
p. 210 Piscatorii ludi -
- 66. 237
p. 238 idem
-66.237
p. 290 Sempr. horrea -
- 1165.
p. 296 sodales
-37.330
p. 321 sacer Mons —
Il 434.
p. 326 thymelici -
-35.
p. 333 scribas -
-82.
Florus.
1, 6, 3 — 63.
Fragmenta Vaticana.
137 — II 3:i.
175 — II 397.
233 -1170.81.281
350.83
4.97.404.8.
( 506 )
234 —Il 80.383.4.97.
5.
'l'db -1179.81.379.83. 4. 97.
402. 4. 5.
233-235— II 82.
236 —1190.397.406.8.9.
237 — II 397. 404. 5. 7.
Frontinus.
de aquis.
98 —1113.
100 — IHl.
116 — 1113.
123 — 184.
Gaius.
1,
32-=
- il 399.
1,
34
— Il 79. 81. 397.
404
I,
83-86
-91.160.11309
4
-286.11438.
2
5
- II 434.
%
6
- II 438.
%
7
— Il 43S.
%
95
- II 449.
%
195
— 11 463.
%
238
- II 458. 63. 4.
2
287
— Il 461. 3.
Gellius.
2, 24, 2 — 36. 244.
10, 25, 5—11 73.
15, 19 — 67.
16,3,9 —II 215.
18, 2, 11 — 244.
Geographi latini minores.
éd. Riese.
p. 119, 11 — 1191.8.
Gregorius Magnus, M. G. H.
Epistolae :
5,29 —Il 301.
9,113 — 11 170.347.367.91.
Gregorius Nazianz.
Carmen de vita sua :
1,12-13 — 11358.
Hesychius.
s. V. àyaÔT) 'z\iyr\ — II 138.
s. V. TrXif^poifjLa — II 75.
Hieronymus.
Epistola 29—11 130.
Historiae Augustae scrip-
tores.
Vila Hadriani :
19-11404.
Vita Alex. Severi :
18 — II 22.
22—1122. 106. 403.
32 — Il 403.
33 — 418. 1196. 101.10.2. 254.
379.
39 — 1166.
Vita Aureliani :
34 — 11 187.
35— 1120. 3. 5. 80. 6. 100.
38 — 180.11228.
45 — 1111.36.
47 — 11 20. 34. 70. 270.
48 — 11 22. 3. 5. 89. 100.
Vita Commodi :
17 — II 38. 62-53.
50:
Vita Gallieni :
8 — 11138 86.
Vita Sept. Severi :
17 — 135.
Horatias.
Sat..l,2, 1 —51.
1. 8, ÎO - 258.
Isidorus.
Orig., 10, 245 - 330.
Johannes Episc. Ephes
Hist. fr.. p. 249 - II 358.
Josephus.
Antiq. Judaeorum :
13,3,5 —121.
14, 10.8-83.110.3.7.-23.
451.
18. 4 - 121.
19,5.3 — 121.
Julianus.
Epist. 49-321.
Jnlias Obsequens.
68(118) — 36.
Justiniani Institutiones.
2,1,9 —11438.
2, 14,2 —II 441.
2,20,25-11458.63.
2.20,27 — 11461.
Lactantius.
de morte pers. 7 — II 221. 62.
divinae insuiuliones :
1, 18.21 —199.
1,21,26-240.
5,11 -2i2.
Leontios, éd. .Mii;ne (V. Gr..
93).
Vita Joh. Eleeni. :
15 - II 34. 170. ,358.
Lex Rom. Burgondionum.
— Il ;;i7.
Lex Rom. Raetica — II 347.
Lex Rom. Visigothorum —
11 347
Libanius, éd. Reiske.
Orationes :
1,182 —II 216. 9.
2, 515, 17 - II 216.
2, 527, 9 — II 166. 216. 8.
2, 530, 16 — II 219.
2, 586, 9 - II 219.
Livius.
1,43, 7 — 163.
1,56 -67.
2, 21 - 35.
2,27,5 —35.
5.50,4 —36.
7, 32 - 49.
8, 20, 4 - 69. 166.
8, 20 - 77.
9, 30 — 200. 39.
10, 21 — 77.
10, 21, 3 - 69.
21,63 -a5. 1145.
22. 25 - 85.
508 )
23, 4849 - II 398.
34,7,2 -101.
34. 7 - i02.
39,8-19 —43.
39, 15 - 80.
39, 48 - 43.
40, 51 — 167.
44, 10, 3 - II 76.
Lucanus.
7, 399-401 — 176.
Lucianus.
TiXoitov, o, 13 — II 54.
vera hist., 2, 37. 38 — II 75.
Lydus.
de magistratibus :
1,50 —II 129.
2, 10 — II 241.
3, 7 — II 83.
3,40-41^11241.
de mensibus :
4, 41 — 244.
4, 52, 13 — 203.
4, 59 - 240.
6, 30 — II 83.
Macrobius.
Saturnalia :
1,6,32 —34.
1,12,19-203.
1,16 —231.
3, 3, 2 — II 434.
Matthaeus.
23, 8 - 319.
Minucius Félix.
3 —319.
8 —135.
9 -330.
31 — 319.
Nonius Marcellus :
p. 163, 26 palangae — II 09,
p. 474, 27 urinantur — II 76.
p. 534, 32 (13, 8) lembus — Il 73.
p. 535, 20 (13, 12) lenunculus —
II 69.
Notit. Dignitat. (0. Seeck).
Occidentis :
%'
41
- II 387.
^,
9
- II 98.
4,
10
- II 95.
9,
16-39. 43. -
-II 241.
11,
38-44
- II 229.
11,
45-63 -
- 11 233.
11,
74-77
- II 242.
11,
78-85. 99 -
- II 243.
12,
28. 29 -
- II 243. 4.
13, 38-44 -
- II 230.
42,
14
Orientis :
- II 33.
11,
45
- II 242.
13,
11
- II 235.
13,
16. 20 -
- II 233.
13,
18
- II 229.
13
19
- II 230. 43
13,
18-39. 44 -
- II 241.
13,
33
- II 243.
14
5
- II 243.
40
36
- II 33.
Notitia Urbis. — II 68. 85. 98.
( 509 )
Notitia Urbis Const.
2, 25 — II 12». 42.
11, 46 — II 128.
16, 40-41 — II 85. 373.
16, 46 — II 128.
Novellae Theodosii II, éd.
Haenel.
Tit. 6 de bonis fabricensium. —
241. 5.82.96.377.
pr. — II 241. 2.
§ 1 — II 243. 300. 4.
§ 2 - II 243. 364. 5. 455.
§ 3 — 469. II 364. 457.
Til. 4 ne duciani vel limitanei. —
II 244.
Tit. 8 de navibus non exciisandis.
— II 72. 320. 51.
Novellae Valentiniani III.
Tit. 5. De pantapolis. — II 332.
pr. — II 110.
§ 1 — II 110. 42.
§ 2 — II 142. 4. 409.
§ 3 — II 409.
§ 4 — II 4iy.
Tit.l4.Depretiosolidi.— II231.2.
Tit. 15.DecorporatisurbisRomae,
qui ad militiam vel ad cleri-
catum transierunt, revocan-
dis. — 11143.312.3.6.82.96.
rubr. — Il 142.
§1 —II 371.
Tit. 28. De naviculariis amnicis.
— II 274. 318. 30. 82.
pr. — II 396.
§1 —469. II 278. 301.4. 19. 20.
38. 41. 7G.
§2 — 1171.2. 330.
Tit. 33. De praediis pi.storibus
Afris deputandis. — II 372. 3.
6.86.
Tit. 34. De episcopali judicio.
§3-11141.60.1.3.313.91.
§4 — 11141.91.210.
§ 6 — II 209.
Tit.
35. De .^uariis, boariis et
pecuariis.
pr.
- II 396.
§1-
- II 91. 5. 324. 425.
§2-
-II 91. 5. 324.423.
§3-
-1191.4.5.324.37.09.429.
§4
- II 91. 4. 5. 324. 86.
§5-
-1195.368. 71.
§6-
- II 95. 396. 418.
§7-
-1195. 4!8.
§8-
- II 95. 300. 4. 38. 42. 3.
§9-
- II 369.
Novellae Majoriani.
Tit.
7.Decunalibus,etc. — II210
pr.
— II 215. 340.
§1
- II 210.
§2
-11169.210. 1.335.
§3
— II 160. 1. 4. 208. 10. i
335.8.40. 4.88.91.
§4
— 11160.4.9.210.335.91.
§5
- II 160. 4. 9. 210. 335.
§6
- II 160. 210.
§T
- II160. 4. 210.304. 11.3.
§8
- Il 160. 4. 210. 344.
Hl
— 11455.
Novellae Severi.
Tit. 2. De corporalis. -Il 141.2.
160. 1. yi. 209. 307. 38. 42.
60.91.5.
t
mamamm
s- — naM-
t» s.
- - lié
x ^,
îSrt. ^
nie^
Smi ^^Êk . Jf^
r- — i'^afc-
511 )
Plinius.
Naturalis historia :
2, 93
-36.
3, 5, 66
-100.
3,54
- II 103.
7, 59, 211
-67.
10, 43, 60
- II 83.
15,2
-11,211.
18, 28, 107
- 67. II 78.
33, 1, 5, U -
-66.
34, 1, 1
63. II, 122
35, 11, 40, 143 -
-202.
35, 17, 197 -
- 84. 183.
35, 45, 3
-67.
35, 46, 159 -
-63.
36, 2.
II 45.
Plinius Minor.
Epistolae :
5,6, 12 — 1171.
5, 7 — II 45^
E).
6, 30 — 295.
7, 18, 2 — II 448
9.
8, 16 — 270.
9, 30 — 319.
Epistolae ad Trajanum :
33 — 121.7.33.4.59.88.337.
45. 50. II 203. 14. 390.
34 —49. 120.4.7. 33-35. 5Î).
II 203. 14. 390.
40-41 — II 217.
92-93 — 128.34. 46. SO. II 203.
52. 390.
96-97-124.7.34.5.39. II 203.
390.
113 — II 269.
Panegyricus :
29 - II 27. 44. 106. 403.
54— 119. 27.337. 11204.52.
Plutarchus.
.Nuiiia, 17 — 62. 195. 369.
II 113.7.22.
Caesar, 55 — II 2-4. 88.
Pompeius, 70-71 — II 27.
Quaest. rom. 56. — 68. 2(X).
Porcius Latro.
Declam. in Cal., 19 — 79.
Procopus.
Hist. arcana :
24—11244.
26 — II 220.
Bellum gild. :
1, 26 — II 69.
Prudentius.
adv. Symm. :
2,943 — II 36.
2,950 - II 85.
Sallustius.
Catilina :
27. 36 - 108.
24. 30. 44. 50. 56 - 176.
Jugurtlia :
31 — 135.
73 — 87. 168. 76.
Ilistoiiae :
4 — II 69.
Salvianus.
De gub. Dei :
5, 4, 18 — II 264.
( 512
Seneca.
de beneficiis :
(j, 14, 3 - II 104.
de brevitate vilae :
13,4 - II 69.
19 — II 385.
cons. ad Helviam :
17 - 171.
de ira :
3,15 — 269.
epistulae :
77,1 -1137.54.
83, 14 — II 380.
88, 18 - 53.
Servius ad Aen.
H, 201 — 292.
il, 326 - II 75.
12, 139 - 202.
Sidonius Apollinaris.
Ep. 1,10 — 1138. 382.
S ocrâtes.
Hist. eccl. :
2, 13 — II 22. 37.
5, 15 — II 229. 33. 358.
5, 18 — II 83. 373. 4.
G, 15 - Il 37.
8, 17 — II 37.
9,6 —1159.
Sozomenus.
Hist. eccl. :
8, 17 — II 338.
Strabo
3
5,3,
p. 156c — II 108.
5, 3, 5, p. 232 — II 74.
10, 5, 3 - 190.
13, 4, 10, p. 628 — 174.
Suetonius.
divus Julius, 42
- 105. 13. 337.
Aug., 4
— II 79.
30
— 100.
31
- 103.
32
— 49. 105. 110
5. 23. 34.
42
— II 25. 402.
98
— II 37. 52. 54
Tib., 34. 36
- 121.
Claud., 18-19
— II 105. 398
403.
25
— 121.
38
- 121. II 76.
Nero, 16
- 121.
Vesp., 11
- II 309.
Domit., 4
-37.
Suidas.
àpTOTCwXstov —
II 83. 373.
TraXaxTvo'. —
II 23.
Symmachus, éd. 0. Seeck.
Epistolae :
3, 55 — II 39. 68.
4, 18 — II 22.
9, 103 - II125. 6. 41.2. 426.
9,105(96)~II125. 42. 3. 321. 7.
9, 150(121.131) — II 98.
Relationes (ep. 1. x>:
6 (19. 26] — II 135.
9 (21. 28) — II 38. 103. 35.
{ 513
14(27. 34) — 1121 G. 61. 82. 8.
90. 1. 5. 100. 2. 10. 2. 9. 25.
9.42. 3. 68. 231. 45.67. 70.
379.81.2.95.6.7.409.
17(30. 37j— Il 380.
25(38. 45)— Il 380.
22(35. 42; — 1198.
23(36. 43) — Il 84.380.
27 (40. 47) — 11 132.9.
29(42. 49) — Il 98. 381. 2.426.
34(47. 54)— Il 98.
35(48. 55) — Il 22. 38. 88. 2G5.
385.
37f50. 57) — 11 38.
40(53. 60] — 11 116.26.
44(58.65) - Il 38. 55. 98. 125. 6.
42.318.321.3.4.8.30.2.67.
79. 81. 2. 426.
48 (62. 69) - 11 38.
Laudes in Valent, sen. :
2, 52 - 36.
Tacitus.
Annales :
1, 15 - 168.
1,73 —501.
2, 30 —11449.
2, 85 - 121.
2,87 —11104.403.
12,53 — 11 309.
12, 55 — Il 105.
13, 51-11 107.403.
13, 52 — 11 104.
14, 15 — 48. 11 73.
14, 17 — 123. 7. 32. 9. 59. 337
15,39— 104. 403.
Tome L, vol. II.
Tertullianus.
Apoloi^elicus liber :
6 — 110.
13 — 280.
30-39-51. 134.5.46.314-29.
Adv. Marcionem :
4,9—11 110.275.
Adv. Val. :
1 -
-319.
Ad Scapulam :
3-
- 288.
De fuga in pers. :
13
- II 110.
De jejunio :
13
- 139.
15,
4 - 122.
17
- 403.
De praescript. :
30
-358.
Ulpianus.
3,
j -1148.399.
11,
11 - Il 309.
19,
18— 11449.53.
22,
4 -11458.
22,
5—11 458. 9. 60. 2
22.
6—11 460.
24,
18—11 458. 63.
24,
28-11 i63.
33
ol4 )
Valerius Maximus.
2,0,4 —200.39.
3,7, 11— î-20.
9, 15, 1 — 4U.
Varro.
(le lingua latina, éd. Mueller :
6, 17 — 200.
8,83-11 455.
de re rustica :
2pr. p —Il 27.
2,11 —67.
3, 2, 16 — 325.
de vita pop. Romani :
3 - II 69.
Vegetius.
1
2
,8 — 11 127.
5 — 500.11
Vergilius.
344.
127. 344.
Georg., 1,20-
-250.
Vitruvius.
6
pr., §7-6-
Zosimus.
'.
1
4
6
61 - Il 23.
10 — 1155.
5—11 59.
^If)
RÉPERTOIRE ALPHARÉTIQUE
A.
Abaciis 290.
aceeptores 3oO. Il 63.
actions II 467.
actor 39o. 416. oo. II 448, 2. 56. 67.
actor civitatis 468, 1.
actores de foro suario 20o. 2. Il 89.
actuarii equorum II 137.
— thymelae II 136.
acquéreurs des biens des corj)orati
II 3'i3.
addicere (corpori) II 329.
àoîXcpoî loi.
àoîXcpoTTjc; 151.
adjiitor magistri 404.
— praefecti annonae olO, i.
Il 30. 8.44. 52. 88.383.422.
adlecti scaenici 350.
adlectio 525. Il 365.
adlectus 355. 63. 4. 81, i. 2. 408,
5. 54. 2.
adlegere 355. 525. II 350.
adpertinens corporis 355, 5.
Adraslia 485.
adrogare 355.
adsciscere 356.
adsumere 356, 1.
aedis 224. 97.
— Mercurii 35, 1.
— Minervae 82, 3. 202.
aedicula 215, i. 24. 9. 90.
aedilis 396. 410, r.. 7.
aedilitas 417.
aeditimus 417. 524.
aedituus 417.
L. Aelius Helvius Dionysrs 509.
aeneati(?) 519.
aeneatores 163, 3. 519. Il 145.
— coll. I Seq. 201,3.
aerar(ii collegium) 358, e. 454.
aerarii a piilvinar. 276.
— fabri. v. fabri aerarii.
aère conlato 304. 432. 64.511.
— incisi II 428, «.
Aesculapins 206.
Aesculapii et Hygiae (collegium'.
210-30. 3-6.'6I.2. 94. 9. 305.
24. 5. 50. 5. 72, .. 387,4.94.
400. 1.3. 7. 10. 63.85.521.
Sa\e\31ï.
Sa schola 21O30.
aetonia 226.
( 516
affectation des biens II 285-98.
— des personnes U'im-SOi.
affranchis des coUèijes, v. liberti.
— da7is les coll. II 329.
âgeexigéUl. Il 50, i. 350. 9, 2. 60.
agelli 297.
ai^er 463, 5.
ai^ilatores II 137.
àyopavofJLo; 192, \.
agricolae 170, 2.
album collegii 307. 48. 56, 2. 62.
4. 7. 85. 411. 2. 27. 31. II 109.
Voyez numerus.
album decuriomim 366. 426.
Alexandre Sévère 154. 508. Il 20.
2.67.82.96. 101.6. 10. 254.
70. 357. 80. 9. 403.
.4 lexandrie 180. 1 1 2 19, 4. 391 . 420.
aliénation des biens II 452.
allectores 356.
allectus, V. adlectus.
amatores regionis macelli 197.
217, o.
ambubaiarum coll. 51, 2. II 134, 3.
ambuiativa II 354.
amendes fixées par la lex 327. 78.
465.
amendes infligées par le président
396.
amendes sépulcrales 467. Il 469.
— testamentaires AQ{,1,
amici 273, -. 323, 3. 30.
— subaediani 266. Voyez fabri
subaediani.
Amisîis [ses éranes) 128. 46. 313.
Voy. Plin., Ep. ad Traj. 92-93.
anabolicarii II 35.
Anastase II 131.
ancillae II 307. 35.
annona publica II 19-100; dans les
villes II 219.
Annona sancta 206.
Antioche II 216. 8.
Antonin le Pieux 125. 6. 7, <. 9.
31.235.496. 503. II 30. 7. 44.
8. 80. 121. 252. 350.
Antoniniani (sodales) 36.
anularium (conleg.) 87. 267. 84.
300. mil. 431.8.
anularium 310. 1.
Anxanum II 209. 344.90.
Apollinares 38.
Apollo 204. 477.
apothecarii II 68.
apparatores annales 55, i.
apparatorium 291.
appari tores magistratuum 55. 267.
442. II 264. 316.
apparitores dans les coll. prof. 341.
— et praecones aedilium
283. 9.
apfparitorum coll.) 55, i.
apparitor (collegii) 417.
applicare (corpori) II 329.
Aproxianus, V. TURCIUS.
aquae (eonl.) 87. 186, 1. 349. 94.
6. 404. II 113. 470.
Sa lex 371. II 470.
aquarii, à Rome II 120. 7; ailleurs
276. II 145. 221.
aquarii (servi) II 13.
aquatores 197. 284. 349, 0. II 145.
arca collegii 143. 261. 85. 301. 3.
449.0 378. 447.
arca communis 449. II 431. 42.
— decuriae 362. 449. 50, i.
— olearia II 89.
— publica 449.
— reipublicae collegii 449.
— Titiana 363, 4. 408, 3. 10. II
202.
arca vinaria II 98. 9. 231. 424. 5. 6.
Arcadius II 135. 70. 220. 82. 307.
Arcarii {à Lyon) II 32.
i
( .^17
arcai'iiis ^13. 7.
archiatri II I3"i.
archives 41o, s. Voyez scrinia,
OtXTJ[JLa.
arcus (argentariorum) 49().
argentarii, bijoutiers !205. Il 111.
— banquiers 11 114. 23-2.
— armuriers II 241.
àpY'jpatJLO'^oî II 231.
àpyupoxoTroi II 146.
àpY'jpoTTpaTa': 302, o. Il 232.
arenarii 209. 343. Il 134. o. 79.
arkarum divaruni Faustinarum
(l'Oll.) 394, 4.
armamentaria (clecuria) 405.
armaturae 204, 3. 21, i.
aromatarii 204, 3. 363. Il 111.
artifex artis tessalariae II 114.
artifices Dionysiaci o3, s. Il 133.
arlificum dies 199.
artificum (immunilas) Il 172. Voy.
Privilèges.
artisans libres II 101. 72. 421. 87.
àpToxoTcot 191. 2. Il 146.
àpT^iepsûç 390. Il 133.
àpycovTj; 417.
Arvales 34.
asinarii277. Il 146.
assemblées profanes, v. coiiventiis.
assemblées religieuses 231.
athlelae o3, 3. 218, -2. 415, s.
Attis 244. 5. 6. 477.
auctoritate maoistrorum 373, lô.
augures 34; des villes 37-8.
Augurii 151.
;\ugustales (dendr.) 501.
— (sodales) 36.
— (seviri) 38. 9. 223, i.
67. 410. Il 181.3. 5. 434, i;
rolléges 39. 125. 267. Voyez
seviri.
Alt.ustk 36. 8. 58. 91. 114-2^2. 48.
90.200.35.328.501.2.1125.
7. 36. 67. 105. 13. 7. 27. 260.
402. 72.
Augusti (cultoi-es) 501. Voy. Lau-
l'inienses.
Augustodunum II 187.
Augustus (épithéte) 184, :;. 5, i.
500.
'X'jKt-.ol'. de yu)na 62. 88.
auiariarum (coll.) II 146. 207, h.
25.
AuRÉLiKN 180. 508. II 20. 3. 34.
70. 2. 80. 2. 90. 6. 7. 187.
228. 9. 70.
auriticum (conl.) 62. 6. 87. II 111.
— ((.-oll.) II 147.
auritices univei'si 169. II 146.
aurigaell 137. 71. 221. 300. 7.
aurigatoies II 134.
auteLs dans la schola 222.
— aux dieux 476. 85.
autonomie 334. 5. 6. 11 358. 9.
Avenlinenses pagani^ 35, 5.40, *. 1.
AviF.LU s Flaccus 127, 3. 36.
Bachanalia 43, i. 7, -2. 79. 80. 9.
ballatores Cybelae 44, c. 245. 11
138.
l.ajuli 1161. 88.
bancs de La sehola 222.
bannières 11 186. Vov. vexiilarii.
{ 518
banqueta et sportules 152. 210, i.
32. 304-6. 23. 80. 92. 400-3.
10. 33. 61. 2.70. 1.82-S.521.
II 185. But 325. Nombre 152.
237. 325. Occasions 323. 4.
Local 210. Organisation 392.
3. 420. Part de chacun 304-6.
400-3. Voy. Cena, magister
cenarum,ordo cenarum, spor-
tulae.
banquets funèbres 298.
- publics 324. II 185.
baphia II 235.
barbares II 337.
barbaiicarii II 241.
basiUca223 380. .s.
— Hilanana2l6. 223. 5.
bastagarii II 243. 71. 300. 425.
Pa'-psfç 63. 296. 457. II 146.
Benedicti 151.
Bénévent II 209. 337.
Berytenses 204, -i. Voy. Heliopo-
tani.
biarcus II 242.
Biens des collèges off. II. 376-7.
bisellariiis 399 431.47.92.
Bithynie 123. 4. 6. 8. 36. 40. 80.
11192.203.14.51. Voy. iVm>
médie et Plin., Ep. ad Traj.
boarii II 89-96. 277. 89. 300. 425.
Bonae Mentis (magistri) 38.
bonorum possessio II 456. 62.
brattiarii 328, i. II 112.
brephotrophia 321.
Brixia 237.
burgarii II 141. 244.
.SupUlç II 146.
bustiim 292.
But économique iSi-9o: politique
162-81; religieux 195-255;
funéraire 256-300.
Byxance 195. II 447. Voy. Léon le
Sage.
C.
Caesarienses (conl.) 354.
calearienses II 116.
calcis coctores II 99. 116. 281.
326. 46. 419. 25.
caligarii II 112.
caliiati361.6. 82. II351.
Caligula 121. 2, 1. 502. II 37.
L. Calpurnius Piso 94.
canabae II 177.
— des negot. vini à Lyon
218.11180.'
candidatus 389. 90.
— (magister) 385, s.
cannophorae 348.
cannophori 44. 223, i. 31. 44. 67.
96.348.445.57.
cannophori Ostienses 223, i. 520.
canon metallicus II 238.
canopus 223, 5.
cantabrarii 248, c. II 122. 38. 70.
221.
capacité physique II 366.
Capitolinorum (conl.) 35. 6. 41.
74. 82. 101. 253.
Capitolinus (pagus) 36.
caprina. Galla. (conl.) 90. 519.
( 519
capulatores 197. 413. II 112. 46.
Caracalla 190. -438, i. 9o. 6. 506.
7. II 44. 9. 112. 377. 97. 40o.
cara cognatio 235. 94.
carpentarii II 244.
Cartilage im^,^. 390.
Castores 477,
castrense (coll.) 282.
catabolenses II 61. 277 81. 317.
29.
caudicariae naves II 69.
caudicarii 193. 4. 418. 37. 9. II
69-72.84. 276.333.69.70.1.
caupones 169. 71. 198. II 100. 10.
46.
causa 120, 2. 9.
caiitio (magistri) 338. 94.
Cemenelum II 186.
cena 304, u 18, 5. 25, 0. 93.
cenarum (ordo) 237. 325. 93.
Voy. banquets.
censor 363. 77.
centenariiim pistrinum II 404.
centones II 195. 205. 351, 6.
centonarii 126. 9. 87. 205. 6. 7. 9.
36.62,3.6. 76.81. 4. 95. 6.
352. 3. 9. m. 407. 57. 60. 87.
II 326. 53. 4. 8. 64. 454.
à Rome 88. 230. 6. 82. 359. II
112.
en Italie et dans les prov. II
146-148.
à BrLvia II 465.
à Corne II 178, 4.
à Lyon 187. 352. 3 II 188.
pompiers 129. II 205.
extension II 146. 7. 196. 7.
scholae 218-30 passim.
. cent, et dendr. 266. Voy. tabri
et dendr.
autorisés à Hispalis 126. 350, i.
au IVe siècle II 364.
centuria {sens) 360-2.
centuriae collegiorum 97, ». 358.
9. II 351. '
centuria Cornelia 360, ."..
centuries de Servius 163. II 250.
Voy. Servius.
centuria (= coll.) 358, :;.
centurio 361. II 351.
cercles d'amusement 51.
certamina 484.
CÉSAR43. 58. 91. 112. 3. 4. 6. II
88. 117.431.
charge patrimoniale II 271-8.
charge personnelle II 278-83.
charité 300-20.
chasse aux fugitifs II 340-7.
chrétiens 47. 133. 4.9.46.50. 1.
313-20. 8.
chrétiens (monetarii) 229, ».
christianisme II 313. 4. 5. 58.
CicÉRON 90-111. 166. 7. 75-9.
ciconiae nixae II 98.
Cisalpini H 154.
cisiarii 344. 6.
cisiariei Praenestinei 89. 422.
cisiarii Tuburtini 198. 204, r II
148.
citriarii218. 23, i.34.5.6.371,2.
11112.451. Voy. eborarii.
classement des coll. de yuma 72.
classis Africana II 38. 53.
classis Alexandrina II 37, i. 52.
Claude 121. 244. 502. II 37. 42.
58. 105. 7. 398. 403.
Claudiales (sodales) 30.
Claudiani (sodales) 280. 487.
clergé use. 211. 313. 36.
dibanarïi 169.11 148.
clients 67.
P. Clodius 72. 90-11 1 : .sv.s collc,ie.<
95,2. 6. 7. 177.
Skx. Ci.onius 95.
( 520 )
(inb.s électoraux 107.
coci II 148.
cooi Aug. n. 215, 2.
codicarii. Voy. caudicarii.
coetiis (navic.) II 362. 3.
cogère 369, u. 91.
cognitor lî 467.
cohortaiesll HO. 264.457.
cohortes (horreoriim) 266. II 67.
coire 337. 69, i.
coire licet {sens) II 44o, 0.
cui licet coire 133, 1.
cui non licet coire 133. 40.
coitio 122, 5. 135. 9, 2. 317.
colitores hujus loci 44, 10. 417, 2.
colegiarii 355, 3.
collatio equorum II 409. 12.
— glebalis II 413.
collega 330. 55, 7..
collegia omnia 1 1 198.
— tria 126. 9. 130. II 198.
— tria principalia II 198.
collegiati (sens) 355. II 139.
— {fossoyeurs) II 130-2.
— (pompiers) II 128-30.
— singularum urbium II
160-74. 81. 91. 208-23. 82.
300. 16,7.36. 8.41.3.4.87.
420. 8.
collegium {emploi du mot) 33. 7.
41. 2. 339. II 139; à l'époque
de Cicéron 104. 5. 8. 9. 10.
collegius 339, n.
colligeus 339, 5.
«•ollecium 339, 3.
coUignium 339, n.
collèges abolis en 64 a. C. 98.
— domestiques 148, 2. 215.
6'<.73. 7.
collèges d'esclaves impériaux 233.
363, 3.
collèges de famille 151.
collèges funéraires iQ. 141-53. 260-
5. 301. 23. 442.
disparition 148. 54. II 131.
Voy. cultores, tenuiores.
collegia illicita 316-8.
collèges grecs et asiatiques 57. Il
159.
collèges militaires 55. 6. 131. 42.
220. 67. 308-13. 415. 50.
collèges municipaux II 175.
— depompiersWè^iS.yoy,
fabri.
collèges professionnels portant le
nom d'un dieu 198. 8. 266.
collèges bâtissant un temple 484-6.
— ayant une sépulture'iSiS.
— enterrant un confrère 276.
— chargés d'entretenir un
tombeau 296.
collèges religieux, v. cultores.
collegia sacerdotum 33. 4.
— salutaria. v. salutare.
— sodalicia 49, 3.
— (quattuor summa) 34.
collegium templi 46. Il 466.
collegia tenuiorum 46. 313. 6, i.
47. 56. Voy. coll. funéraires.
collegia urbium singularum, v.
collegiati.
Voyez : Alexandre Sévère, Au-
gustales, Bithynie, Byzance,
Lyon, Numa, Ponipéi.
colonae II 307. 27. 35.
coloni II 260. 327.
columbaria 257.
comes commercii II 234.
— metallorum II 237.
— rei privatae II 243.
— sacr. largitionum II 237.
43.
comestores 323.
comité administratif 319.
( 521 )
comités tertii ordinis II 371.
commagisler 338. 88.
commo'da 278, s. 380, i. 489.
Commode 503. Il 37. 8. 52 65.
134. 239. 405.
commune II 133. 40.
— omis II 363.
compitalia, compitum 40. 99. 100.
compitales (Lares) 40.
compitalicia (coll. ?) 41, i. 98-100.
V. ludi.
compitalicius (collegius) 100, i.
concilium 11 363.
conchylioleguli II 234.
Concordia 363, t.
— collegii 328, i.
Concordiae (convictores) 211, i.
condamnés incorporés II 333 6.
Condeates 1132.
condicio II 272.
condicionales II 141. 303.
conductores salinarum, v. salinae.
confectores aeris 11 236.
confectuarii II 94. 370.
confirmare (corpus) 119, i.
conlegium (orthographe) 87, c.
339, 3.
consacranius 198, i. 330, 4.
consecratio et dedicatio II 434-8.
consistere, consistentes 215, 1-3.
8, 3. 520. II 30. 145. 76-83.
Constance ii IM30. 338. 57. 425.
Constant 508.
Constantin le Grand 241. 496. 9.
508. 1123. 5. 37. 71. 82. 92.
131.72.200.31.8.61.76.88.
92. 5. 7. 300. 3. 10. 5. 8. 23.
4.8.31.3.44. 70.80.5.410
2.3.5.20.3.8.9.61.
Constantinople II 367. 80.
constitutiones corporis munimen-
ta 415, 8.
constilutiojis impériales 122-7.
constitutor collegii 337, <;. 482, -j.
contrats avec l'État II 255. 6.
contrôle supérieur II 378.
conluboniium 204, -» et 3. 340. Il
140.
contulerunt ad funus 280.
conveniie 225, i.
convenlio (collegii», v. lex.
conventus {assemblée) 149. 52.
225, i. 31. 327. 68. 70. 91.
Il 362-6.
conventus civium Rom. 54, 1. Il
177, i.
conventus illiciti II 358, -i. 67, i.
454, 7.
conveterani II 205, i.
convibium veteraiiorum 199, 1.
323.
convictores 51, 3. 211. i. 323.
convictus 323, -2.
convivae marmorari 323.
convivia 319, i.
convivium {local) 323, -2.
cooptatio patroni 428.
copiatae II 130.2. 420.
copotores 323.
coquies atriensis 89. 215, 2. 346, ;..
corarii63. 191. 218. 438. Il 112.
377.
corarii magnarii II 370.
Corneliorum (coll.) 49, i. 91, 1. 2.
107.
cornicinum (centuria) 163.
- 'conl..201.
cornicines {Lambèse) 275. 309. 10.
450. 87.
coronarii88. 282. Il 113.
corj)oratus 353. 5. ^i\.
— emploi du mot II 139.
41. 63.
corporati chassés de Rome II 102.
l 522
coipoiati U. R. M 141. i>. 312. 3.
41.454.
corporati civ. Alexandrinae II
164, A. 5.
corporati Carthaginis II 164, i.
— negotiatores 11 102. 68.
— qui pecimiam... 350.
— urbium singularum II
161-4. 81. Voy. collegiati.
corpus (emploi du mot) 33. 340.
Il 14. 139.63.
corpus habere II 445, s.
corrector Tusciae II 319.
cortèges publics 11 186.
— des coll. 239-40; des flû-
tistes 201.
cotisations, v. slips, aère conlato.
crescenles 354, 2.
culinarii 169. 11 148.
culte des coll. 195-225. Il 357;
dépenses 482. 3; culte privé 75.
culte des morts 293.
cultes étrangers 116, 3. 121.
cultor [le mot) 262. 6.
cultores {artisans) 266.
— cenlonari 262, 5.
— collegi 262.
— deorum 37. 47. 260-5.
390. Voy. coll. [un. et ten-
uiores.
cultores fabrorum 262, 3
— Geni Britti Cordi 273.
— statuarum illius 264.
— lempli 46.
— veterani 262, 3.
cultor Verbi 213.
cultrices 349, e.
Voy. les noms des différents
dieux.
cum filiis, cum suis 11 360.
cupari 170, 2. 276. Il 148. 78, 5.
cupiunl 171.
cura, curatela 406. 9.
curain agere 391. 439, r,.
curator 356. 64. 406. 21 . 1 1 372. 468.
curatores arcae 363, i. 408, 5. 10,
i. 13. Il 202.
curatores arcae Titianae, v. arca.
curator aquarum II 472.
— designalus 377. 5. 408.
— frumenli 11 220.
— instrumenti 411. Il 204.
352.
curatores ludorum II 221.
— lusus juvenalis 48.
— navium II 72. 3.
curator operum publ. 440, r>. 509.
II 387. 472.
curator perpetuus 413.
— praesidii?ll 352, 6.
— quinquennalis 411.
— reipublicae 409. 41.
— tempuli 417, 2.
curatores riparum Tiberis II 387.
curator viae Praenestinae H 355.
curatura 409.
curia [local) 215. 23. 88, s.
curiales, curia II 208-28. 64. 9.
303. 13. 6. 7. 25. 6. 35. 455,
2. 7.
curia Jovis (Simittlius) 278. 371
(lex). 97, 2. 414.
cursores 209.
cursorum et Numid. (coll.) 287.
cursores Caesaris 264.
cursus honorum dans les coll.
383-4.
cursus publicus II 244.
custodiariorum (corpus) 206.
( 523
D.
Datus ab imp. Hadriano (quin-
qucnnalis) 378. Il 356.
débiteurs des coll. Il 469.
decani II 130-2.
decem labiilae 66. 70. 9. 84. 334.
Decius508. Il 115.
decoctores II 294. 6. 364. 6. 455.
décréta collegioruiii 183. 362-7.
373. 7. 427.
décréta decurionum 379-83.
— — et popiili 382.
— honoratoruin 379.
déo'ets honorifiques 492.
decretum publicum 336, t.
— (^le.x:)370, t.
decuria Apollinaris 360.
decuriae collegiorum 283. 351. 5,
5.9-62.
decuriae apparitorum 54-5. 7, i.
Il 316. 456, 3.
decuriam émit 356, s. 450.
deciiriati {politiques) 50. 94. 107.
12.
decurialis 345, 2. 360. 1.
décuries de Clodius 97, 1.
decuriol85. 359, 2 61.
decuriones 379; honneurs rendus
362.
decuriones a cos. 378, 2. II 356.
decuriones et familia 382.
décurions d'Antioche II 218.
decurionum quinquennales 43, 3.
decurionatus gratuitus 381, 4.
dédicace {banquets de> 324.
— de l'album 432, 2; de la
schola 225.
dédicaces doubles {mode des) 497.
dedicalio Silvani 233. Voy. natalis.
défense d'entrer dans plusieurs
collèges. Voy. licot.
defensor (collcirii) 418. 39. II 379,
.-.. 468.
defensor civitalis 418, 2. 11 321. 44.
66. 90.
defunctus (in magislorio) 403, 3.
délits des collèges II 454.
dendrophori 44. 115. 29. 209. 31.
6. 75.6.81. 4.8. 96. 328, 1.
43.6. 50. 406. 7. 38. 57. II 148.
9. 70. 95. 205-7.
leur nature 240-253. II 195. 6.
35ff. 7.
leur extension II 148. 9. 196. 7.
leurs scholae 218-230 ;;a.ç.'?/^H.
leurs i)raefecti II 353.
pompiers 129. II 195. 205. Voy.
fabri.
dendrophori Koinani 118. 216. 95.
344.457.521. II 464. 71,.;.
à 0^//(^ 216. 28. 11123.437.
en Italie et dans les provinces U
148. 70.
à AntinumAU. II 186.
// Bri.ria 190. 438. 3. II 406.
à Comum 275.
à Cumes 125.
à Lyon II 188.
// Puteoli II 190.
dendrophori Augustales 252, 5.
dendroforus decrotarius 247, 3.
356.
dendrophorus muniticus 247, 3.
Dei (cultores) 47.
deoruin fcoileiriM). \ . Ciiliort^s.
II
( 524 )
dépopulation II 263-4.
designatus 385. 408.
détenteurs de res navic. II 290.
Diana 204. 477. 85.
Dianae et Antinoi (coll.) 143. 52.
211.33.61.78.325.36.7.99.
405. 16. 20. 50. 2. 9, 1. 87. II
452.
Salex 143. 268-72. 368. 71.89.
11468-71.
dies artificiini 199.
dies festus mercalorum 35, i ; ver-
namm 233.
dies imperi 235.
(dies) natal is Augusti 236.
— collegi232. 521.
— dei232.
— d'undéfunt^9A.l,U^65.
— d'un empereur 235. 6. 521.
— d'un patron 236. 434-7.
— templi232.
dies rosae 294. 7.
— solemnes 231. 94.
— violae 294. 7.
dieitx orientaux 205.
dieux protecteurs des coll. 196-210.
diifusor II 87. 149.
DiocLÉTiEN 508. II 9. 169. 261. 71.
370. 459. 60.
Dionysiaci, v. artifices.
Dionysiarii II 440.
discentes 170, s. 85. 309.
disparition des coll. Il 345-8.
dispensator 419. II 387.
dissignatores 276. II 135. 49.
dissolution 338.
divi 499.
Divi FRATRES 156. 354. II 30. 8. 44.
6. 7. 9. 423. 70. Voy. Marc
AuRÈLE et Verus.
divisores 50.
doctores 185, 6.
dolabra II 351, 6.
dolabrarius 342, 5. 58, .;. II 204. 5,
i. 351.
domaines funéraires 291.
domestica (coll.), v. coll. domes-
tiques.
domicile 349. II 344.
domini navium II 28. 35-7. 42. 6.
402
DoMiTiEN 37. 127, 1. 48, 2. 236. Il
■ 204. 51.
domus 223. 5.
— Augustae (cuit.) 208. 501.
— Augustae ( in honorem )
225, 2!
domus divina 498, 1.
— mea 297.
— Sergiae 215, 2.
domu (qui sunt in) 215, 2. 64.
donations II 449.
dormientes 51. 170.
dos II 372. Voy. fundi.
dotation derÈtatllAd«/2i??rl30. 206. 361. 80. 431.
II 190.
à Aquilée 360.
// Barcino II 437.
à Brixia 407. II 450. 62.
à Casimun 125.
(i Comum 393, •>.
à Faleris 398.
à Lyon 414.
àNicomédie 124.33.Voy. Plin.,
ep. ad Traj., 33. 34.
à Os lie 377.
à Parentiiim 187.
à Ravenne 462. II 449.
à Salone 198. II 357.
à Sarmizegetusa 487.
à Sentimun 429.
à Verona 411.
fabrum ou fabrorum (collegia) :
à Vulsinii 427.
daiis diverses villes 458-9.
nature des fabri II 193.
autorisation reçue 125. 9.
but 331, ô.
but funéraire 266. 76. 7. 80. 1.
3. 4. 95. 6.
but religieux 198, 1. 203. 6. 7, 1 '
et 7. 9. 11. 24. 33. 1
dons reçus 458. 9. 62. '
fabri pompiers 129. 346, 1. II
203-4.
autres services II 195. 221.
scholae des fabri 218-30 passim. j
praefec'tus collegii fabrum II '
353-5.
Mm de 64 a. C. 72.88.91, 1. 2.
164,5.
fabri d'Étrurie 67, 10.
fabrorum corpus 345. 11 464.
fabrorum corpora (privilèges) II
402. 6. 20.
fabrum Veneris (coll.) 198 266.
fabri fratres 329.
fabri, ouvriers ??u7z7a/r^5 II 239-40.
( 527 )
fabri et centonaiii 173. i. ^281. 96.
7.328, !. 45.8. ol. 8. 9. 60.
444,0.58. II 19'.). 201.
fabri et cent, de BrUia II 200. 465.
— (/t'iV/7a//351.63.410.
9. II 201.
fabri et cent. Regienses 225.
— de Salo72e 467.
fabri, cent., dendr. {rapports en-
tre eux) II 197-202. 465. 6.
fabri, cent., dendr. 126. 241-2.81.
458. II 176, 1. 07. 8. 9.
fabri, cent., navic. dendr. II 198,2.
fabri aerarii 63, 2. 163. Il 122. 250.
fabri argentarii 276. 354, 2. Il 151.
fabri ferrarii 207, v,. 24, 2. 359. Il
122.51,2.
fabri navales 275. 6. 96. 458. II 193.
à Ostie 125. 351.65. Il 77. 151.
251, i. 355-6.
à Arles 275.
fabri solearii baxiarii 223, 1. 359.
520. Il 113.
fabri siibaediani 406. il 151. 70.
à Mrbonne 236. 434 7. II 449.
53.
fabri tignarii : leur nature H 193;
leurs collèges :
à Rome 117. 63. 90. 282. 3. 300.
51. 9. 60. 3, o. 79. 86, o. 7, 1
et 2. 415. 37. 40. .3. II 117-22.
260.
à Alba Fucens 344.
à Arles ^11 A.
à Feurs II 179, 1.
à Lima 307. 42. 6. 59. 79, 2. 445.
à Lyon '^M. 342. Il 179.
(ïOstiedDd.Gi. 7, 1.
à Prcneste 378.
à Telcsia 125.
à Tolentinuni 236. 458.
à Vienna 437.
Iai)ri tign. de Nu}na 62. 5. 6.
fabri lign. : autorisation 12,5;
extension II 151-2; leur ser-
vice Il 221.
leur culte 206. 62, o (cuitores
fabrorum).
but funéraire Ti^. 6. 282-4.
leurs scholae 223, i.
praefeclus collegii II 353-5.
fabrica II 372-3.
— sagittaria II 240.
fabricenses 468. II 240-3. 82. 96.
303, 2. 12. 25. 6. 35. 8. 43.
65-6. 77. 419. 55. 7.
fabricp(nsium)coll. 275.' II 240.
faciunt 171. 3.
faclio 49. 134.
factus (magister) 385, ;..
faenarii II 113.
falancarii II 99. Voy. paiangarii.
Falerio II 188.
Falesce qui in Sardinia sunt89.
familia (^ corpus) II 234, t..
— aquariorum 11 13.
— ludi niagni II 134.
— nionetafis 209. Il 228.
— publica 264. 5.
— Ti. Caesaris (metallarii) II
236.
familiae serviles 358.
familiaricum 223, o.
fanum 38.
farmacopolae publici 296. 460.
II 152. 450.
fasti collegioruni 356, u. 462-4.
87.97^.9.
femmes dans les coll. 348. II 360.
— rfd5CorporatiII 290, 2et7,
360.
femmes qui épousent des corporati
II 3U6-9.
Feronenses, voy. a((uatores.
( 528
fêtes funèbres 293.
— impériales 235. 484.
— religieuses 231-40.
Fetiales 34.
lictores88, 91, i.
fidéicommis II 461. 6.
Fides 477.
tidicines romani 55. 200. 359. 61.
figuli63,2. 5. II 113.
filiae (collegii) 448.
— des corporati II 36.
tilius 348.
fils des corporati II 360.
/î«a?2C^ 393-449. 512. II 372-8.
fiscalité W^'l.
flamen 327, i. 40, 4. 90.
Flaviales (sodales) 36.
focarii 209. H 152. 79.
fonctionnaires des coll. 383.
— impériaux honorés
509.
fonctionnaires impériaux patrons
441.
fonctionnaires municipaux hono-
rés 510.
fondation d'un coll. 337. II 248-
54.
fondations {rentes) au profit d'un
coll. 456. 62.
fondations d'anniversaires de deuil
295-7. Il 465.
fondations du dies natalis 236
434-7.
fontani, voy. fullones à Rome.
forenses 170, s. II 152.
Fors Fortima 207. 485.
Fortima 477. 9, i. 85. 9.
Fortuna Primifijenia 207. 485.
foriunae? magnariorum 438, s. 50.
forum Segusiav. Il 179, i.
fossores II 131.
frais du culte 482-3.
frater, coll. prof. 329; coll. de
Mithra 329. 522; chrétiens
151. 229. Voy. aÔeÀcpoc;.
fraternitas 47. 151.
frediani II 122.38. 221.
frequens numerus 369.
fructuarii 283, ri. 7. Il 111.
frumentum publicum 519. Il 428;
dans les villes de province
Il 219.
fuite des corporati II 265. 336-40.
fullones, à Rome 84. 183. 202.
fontani à Rome 190. 202. 5-6.
23, i. 386,0.454.11 113; leur
procès II 472-3.
fullones à Pompei 170. 217, e.
— à Falerio 398.
— à Spolète 89. 346.
— à Aquilée 202.
— da ns diverses villes 1 1 152.
functioll 272.84. 9.
functus sacomari 220, i.
fundi297. 11450.1.
fundi dotales II 119. 368. 72-5.
433. 52.
funérailles (frais) 487-8.
funérailles publiques [coll. dans
M II 186-7.
funerare 280, 3.
funeraticium [prime) 268. 72. 4.
8-80. 93. 303. 11. 487.525.
funeraticia (stips) 452.
funus imaginarium 272.
furunculi 51. 170.
529 )
G.
CalaUie i04, 6. II 178, i.
-alli ^244.
(lALMEN II 186.
i;allinarii 170. 6. Il 152.
Géniales (sociales) 273.
Geni Brilti Cordi tcull.) 273.
(icni fori vinari (coll.; l'J8.
C.onius 227.
— collegii 208-10. 477.
— commerci 209.
— decuriae 362.
— imperatoris 486. 500.
— patron! 486.
— scholae 210.
içens Julia 36.
gentes 75.
gentiles Artoriani Jotores 202, i.
11153.
vr-'-COVcÇ 79, -2.
genuina lun<'lio II 303.
Yôpouaîa 383.
geruli II 61, :;.
gladiateurs II 134. 7.
gladiateurs de Commode II 134.
yva'iîT; il 152. 5; à FlavwpolLs
522.
gouveineurs II 344. 90- 1.
gradus coliegi 305, i. 58, i. 400.
521.
greniers du Poilus, voy. liorrea.
Gratien II 100. 6. 231. 05. 300.
9.14 0.321 5.7.30.409. 14.
5. 6. 8.
gratis adlectus357. 451.
grèves 127, .-.. 191. 2; des tibicines
201.
gynaeciarii II 232-4. 82. 98. 303, i.
9. 38. 43.
Hahere (collegiumi 369, s. 91.
lladrianales (sodales) 36.
Uadrien 55, 5. 148. 90. 235. 378.
495.6. 8.503. Il 42. 112.21.
88. 2o2.356.99. 405. 55.61.
63.
haryspex 307. 90.
hastiferi 204, 5. 9. Il 152.79,1.
Heliogabale II 22. 370.
Heliopolitani 44. 5, 3. 197. 204.
336.71,6. Il 178. 469.
llerculanii 38.
llerculanii Augustales 39.
Tome L, vol. II.
Hereulani magistri 103, 4.
Hercules 204,^;. 477. 86.
Herculis (cul tores) 211.
Herculis et Dianae (coll. 1 354.
heredes illius il 360.
hérédité du service 462, e. 9. II
266.83.301-11.60.
hérédité ab intestat 468. Il 377.
455. 6. 7.
hérédité testamentaire il 458-463.
héritiers des corj)Orali II 301-2.
60.
hétéries 124. 33. 80. Voy. haipta,
34
( 530 )
hippocomi II 241.
hislriones 82, 5. 202. II. Voy.
poetae.
Hludcna 20i, 6.
holitores II 155.
lionestissimum corpus II 190.
honneurs aux bienfaiteurs de la
ville II 187; au.v iiiagistn
399; aux empereurs '^201. 493.
508; cléerétés par l'assemblée
377. Il 187; honneurs funèbres
rendus par un coll. 294-9.
349.
honneurs reçus par les corporali
11429.
honores indebiti II 315.
honor aedilitalis 417.
— magistei'ii 397.
— praefecturae II 353.
iioiiores quaestorii 453, 4.
honoribiis omnibus functus 307.
383-4.
honorali 357, i. G5, ->. 6. 82.
lionore accepto, usus, contonlus
433,3.65.511. 2.
Honoris et Virtutis (conl.) 148, -2.
HoNOiuus 248. Il 95. 9. 123. 30.
7.8.63. 210. M. 22.3.82 6.
92. 4. 300. 6. 7. 9. 13. 6. 7.
24. 5. 6. 30.2. 7.8.40.1.2.
3. 4. 68. 9. 70. 1. 3. 5. 6. 80.
5.409. 12. 4. 6. 7. 8. 9. 28.
30. 52.
liorrea à Rome II 65; au l*ortus 11
58. 69. 369; dans les pror. 11
28.
horrearii 206, n. 24, 2. Il 65. 6.
boni 215, 1 97.
I.
kloneus II 278. 82. 329. 30. 67. 78.
iduaria (collegia) 369, i.
cspà cpuXi^, V. eptoupyot et axuxaç.
Upcu? 232. 390.
IcpioTaTOV a'jvsôptov II 188, 7.
illiciti conventus, v. conventus.
illicitum (coll.) 13240. 339.
imago 290.
imagines 435.
imagmum domus Aug. cultores
148, 2. 501.
•.;ji.aT£ud|j.£vo'. 188, 1. 11 152.
immeubles donnés 459-60. 3
immunis 357, 5. 61. 6. 96, i. 490-2.
immunes recepti 357, 5. 451.
immunilas II 48-49.
immunitas artificum II 172.
— (navicular.) 190.
— (dendroph.) 438, 0. II
406.
immunitatem pariât (coUegium,
quod) II 49. 268. 407.
impôt foncier {dispense) II 412.
impôt spéciaux (dispense) II 413.
inauguration de la schola 324.
incendies 124. 9. II 203-7.Voy. fabri.
incolae II 183. 5, 5. 332.
Infernales II 71.
infraforanum (coll.) 217, 5.
ingenuiis 377, s.
initialive publique et privée II 2i9-
54.
( 531
inslitucie 337, h.
insulae 438, i- II 377.
interrex 403. 4.
intestat, voy. kcrédilc
intiare 356. i.
inundatores 276.
invasions II 337.
Idoax/^oi 518.
irenaichi II 207.
Isiari 90. 170 216.
Isislie, 3. 22, J.205.
Isidis (coll.) 43.4. 90. IIO.
39. 356.
it('iii((ue 345, .-..
iteratio 361, k. 07.86. 408,4.
r/6uo7:oj/ai II 110, :.
-10
14.
J.
Jaiiicolensis (pagus) 40, i.
judex 379, o. 96^ 419.
judicis datio 396. Il 470.
/îa/;s 43. 83. 90. 110. i. 13. 7. 21.
31. 328. 451, ...
Julien II 92. 166. 218. 29. 415.
Julii 34.
Sex. Julils Possessok II 422.
jumentarii 209. 79. 86. 344. 458.
11152. 227,.,
junior 348.
i\. JuMUS Flavianus 509.
Juno 477. 86.
Jupiter 0. M. 207. 477. 86.
— aeternus 207, «
— CM. Tavianus 204, g.
Jovis (curia) 414.
— Arkani (cuit.) 217, s.
— Cerneni (coll.) 149. 261-2.
72, 5. 4. 338. 94, .;. 405. 54. II
237. 469.
Jovis Conî|)ai,^ei (conl.) 42, i.
— Doiicheni (coll.) 44. 207. ».
423.
Jovis Heliopolitani (cull ), v. llelio-
politani.
juridicus per Flaminiam 510.
juridicatus II 176, i.
jus coeundi 122, ô. 455, i.
jus corporalis injuriae II 385. 418.
jus manumiltendi 455. II 455.
jus scholae 218, :>. II 451.
JusTLMEN II 37 232. 308. 34. 461.
Voy. Edictum Justiniani, dan,<
la liste des textes cités.
juvenes, juventus 47-8. 138. 46, i.
85, 1. 406. 10, o. 7. 23. 4. 9.
37.58. m.\\m\ Leur culte:
206 7. 10. 390. Leur but
funéraire : 267. 80, 4. 4. 96.
Leijs recueillis : II 465, .-i. V.
neonicorpus), ludi, lusus.
K.
Kaipoôa7ri. 43.
linteones II 153. 2.32-4.
lintiones 112.33
Xivjcioi II 153.
liticinum? (coll.) 91, i.
liticinuin cornicinuin (coll.) 163.
Il 250.
locus(/o^rt/i 223.
locus sejmlturae, voy. sépulture.
lotores 198. 202. 346, ;. Il 153
louage II 452.
lucerna quotidiana 290. 488.
ludi 103.4. 20. 381, 4.89, i. 97. 5.
454, 1.
ludorum causa 120. 238.
ludi Apollinares 35, 2.
— Capitolini 36, i.
— compitalicii 40. 92, i. 3. .i.
4,-2.
ludi juvenales 48. Voy. juvenes.
— piscatorii 109, 2. 238. 53.
— tibicinuni 238.
— Veneris Genetricis 36. i.
ludus magnus II 134.
Lugoves 204, 0.
Lugudunum, voy. Lyon.
Lupeici 34. 5, 2.
lupinarii II 110.
lustra collegiorum 363. 77. 86. 7.
99.
lustralis coUatio II 414. 9.
lusus juvenalis 48.
lyntearii II 153.
lyntrarii II 30. 76.
Lyon {ses coll.) Il 31. 179-86.
Vov. licite coeuntia.
( 53i )
M
Macedonius II 31 '.V
inagarum '216. -i.
inagister (le mot) 388.
magisterium ofticiuin II 354, :■>.
iiiagistri eollegiorum 3o. 2. 6, 1 et
7.
18^
318. 27.
Ô80-405.
magistri présidant au culte 232.
98. 389.
leurs fonctions civiles 3906.
leurs libéralités 396-7.
leur choix 398; exerçant un
autre métier 344.
honneurs accordés 399.
avantages 400-3.
wrfie rf<3 charge 404.
inagister candidatus 38o, .;.
— deceinannalis 388.
— designatus 385.
— factus 385, o.
— et hortator 391.
— offieioruin 404. 23. II
352, 1.
magister perpétuas 387.
— primiis 385, -.
— quinquennalis 363. 86.
— vices agens 404.
— Bonae Mentis 38.
— cenai'iim 393. 420. 2. 54.
82.
mag. eollegiorum au temps de
' Clodiulm, 1.3. 102,2.6-9.
mag. coll. compitaliciorum 99.
' 103-4.
mag. fani 38, fi.
— Herculanii 103, :
— Jovei Compagei 42, 1.
— Larum 38.
mag. fani montanorum 40, i.
— navisII35, 1. 275. 9.
— pagi 40, i. 1. 2.
— sacrorum 43, 2.
— vicorum 41. 92. 3. 4. 9.
101-4.
magnum (coll.) 215, i. 64. 394, i.
^416.25.
magnum tribunorum divae Aug.
'(coll.) 282 425, 1.
magnarii 191. 438. Il 108. 370. 7.
major 348.
majores (coUegii) 406, 2.
Majorien II 208. 10. 1. 2. 8. 304.
13. 35. 40. 6
Malacitani II 108.
mancipatio II 447-51.
— nummo uno H 450.
mancipatus (= tunctio pistoria)ll
83.
mancipes II 154. 227, «.
— (= pistores) II 83. 227.
— (negotiatorum II 213.
— piscatus 204.
— salinariim ou therma-
rumll 125.6.227.42.81.95.
319. 24. 8. 30. 1. m. 426
mancipia dans les coll. II 234. 46.
mandata 122. 7.
mandataire II 456.
Manlia, Manlienses 223, :;.
mansio 223, ■;.
manticulai'ii II 154.
manufactures II 281. 2.
Marc Aurèle 455 68. 503. Il 30.
65. 73. 252 371.405.22.55.
6.60.3.4.6. Voy.divi Irai res.
Marcellae (familia) 282. 411.
( 33o )
)}ian-hands tyriens de Puleoli, v.
Tûpio'., Heliopolitani.
mariage des corporati II ^24^2, h.
309. 42. Gl.
iiianiiorarii 277. Il 122. 54.
ntan/ue au fer rouge II 245. 'MA.
.Mars 204. 477 86.
martelage 356, -2 8. 2.
Marieuses 38. 199. 217, :i. 458.
Martiales 38, o. 199.
Martini 38.
Marlis cultores 199. 204. :..
mater collei^ni 329. 65. 98. 430.
46-8. 524.
Mater magna 244-50. 486.
Matris deum (cuit.) 36, .-..
Matris magnae (sodalitates) 82.
matronae (collegii) 448.
aayaipoTzoïoi II 154.
Ma\imien508. Il 459.60.
medici 198 20i. 21, 1. 36 77.
307.458 60.11 132.54.465,.-,.
niedici Taiirini 198. Il 440. 64.
)neinbres de deux coll. 351. Voy.
licet.
)iiembres étrangers au inctierSii.
Voy. métier,
membres étrangers à la ville II
178-80.
))iembres honoraires 357.
Hicmbra aeternae urbis 11 143.
Mkmmius Vitrasius Orfiïus 509.
Il 227
inensa 290.
mensa olearia II 22. 88.
mensores adjutores I 63.
— aedificioruin II 122.
— frunientarii II 00. 84.
369.
mensores fnimentarii Cereris Aug.
198.
mensores niacliinarii fruin. |miI)1.
118.274.7.94.300. 458. 87.
1164. 251.466.
mensores d'Ostieet du Portus 194.
8. 206. 10, (. Il 63
mensores an IV^ siècle II 27().
333.69.70. 1.405.
mcrcatores en général 203, 7. Il
108.
mercatoruni (conl.j à Rome 35.
41. 2. 74. 82. 6. 101. 203,7.
33. 53. 11274. 50
mcreatoics à Capouc ill, 1. 89, i.
— frumenlarii II 63. 87.
103-7.
mercatores olearii II 87. 402-3.
— pequarii 89. IF 155.
Meicurius 203. 486
Meicuriales, ii Home. Voy. mer-
catorum (eonl.)
Mercuriales, ailleurs 35. 8. 86.
199. 277. 81. Il 250.
Mercuriales Augustales 39.
Mercurii (aedis 35, 1.
— (cultores collegi) 262.
— vestiariorum (coll.) 198.
metallarii II 235-9. 81. 6. 93. 303, 2.
8. 15.34.8.9.41.3.4.
metallica loca II 286.
metallis (familia Ti. Caesaris quae
est in) Il 236.
Q Metei.lus Celer 94.
métier : connaissance exigée II
359-60; membres étrangers
au métier 188. 341-5; mem-
bres exclus 345; membres pri-
vés des immunités II 50, ».
350; métier exercé effective-
ment Il 214; deux métiers
dans un coll. 344.
metroon d'Ostie 217.
milites cali^ati, voy. caligati.
( 536 )
militia 11 242. 5. 300.
— arraata II 317. 409.
— palatina II 316.
militum (coll.), voy. coUei^ium.
mimae 283. Il 134. 5.
mimaiii II lo4.
mimi II 133. 7. 134. 221.
— parasiti ApoUinis 35, i.
Minerva 75. 6. 199-203. 477-86.
Minervae (aedis) 82, 3.
— (coll.) 37.
Minervium (coll.) 203.
ministeria iirbis II 143.
— urbiumII209. 13.
ministri collegiomm 38. •;. 42.
102. 9. 346. 6S. 422.
ministri Lariini 422, .-,.
— vicorum 102.
rainuscula corpora II 144. 332.
Mithrae (coll. ou cuit.) 44-7. 139.
207, 2. 446. 322. 4.
molendinarii 11 83.
monastères 11 457.
monetarii 180. 207. II 228-30. 82.
98. 300. 3, i. 9.
monetariorum bellum) II 228.
monopole 193. II 423. 7.
monopole des saccarii 193.
Montanus (pagus) 40, 4.
montani, montes 40-2 69. 84. 98.
100. 1.7. 11433.
monumenli (socii) 238. 9. 93.
monuments funcr. 288-91. 481. S.
moyens de sortir d'un coll. Il 311-
20.
mulierum (coll.) 349, c
muliones 169. 277. 83. Il 146. 54.
244.
mulomedici 11 244.
multae dictio 396. II 470.
— petitio II 469.
munera, dajis les coll. 433, ;.. 4.
64.
munera II 13-6. 43.
munus publicum II 17. 43. 9.
munera civilia II 213. 84. 411.
— civilalum II 213.
— decurionum II 215.
— municipalia II 215.
— sordida et extraord. Il
212. 409. 13. 20.
municipes II 215.
murileguli II 234. 82. 93. 8. 303. i.
N.
Naucleri, vaJxATipoi II 37-40. 9, s.
40, 5. 6-7.
naucleri, chrétiens II 358, -2.
natalis (dies), v. dies.
nativitas II 284.
nautarum iCoU.) 204, i. 6, 5. 9. 23.
96. 459. II -2 9-3 4. I.Î4. 98,
2. 220.
nautae Ararici II 31
— Rhodanici il 31.
— Tiberini II 330.
navarchi II 40.
navicularii 129. 253. 468. 11 3 4-o8 .
253. 74. 3. 7. 9. 86. 8. 9. 90.
1.3.7 9.303,2. 13.6.8. 22.
4-8. 30. 1. 5-7.
537 >
Culte II 3:i8. 9.
Privili'(je.s 1 1 397-4IJ-2. -i 1 (>7 . :>4 7 .
Recrutement 3-2« fil. 3. 6. 7.
42^2. 3.
naviculyrii auinici II i>0 70. 270.
376 457.
navirulariiArolatenses 383. 4-41.7.
Il 39, 3.
riavicularii .Arclicenses '29.>6. Il
29. 178.
naviciilarii lii^aiarii 219. Il oo. 12o.
— rnariniil29.39,3. 154.
— Niliaci II 34 270.
— Tarrifinfnses 219.
navigantes II 73.
riavigatio scapharum 438. 2.
iiaviiiiarii II 73, :.
nécessitas II 272. 301.
nécropoles 287 .
negotiantes 418. Il 30. 101 54.
negotiantes cellarum 203, ».
— lori vinaiii II 97.
— Malacitani II 108.
— vasculari 190. Il 110.
negotiantur (qui) Il 177, t.
negotiatorum (corpus) Il 101. 213.
negotiatore? artis vesliaiiae II loo.
— ci vit Mattiac 223, 1.
— frumf'Htarii 224. Il
103-7. 402-3.
negotiatores olearii, v. olearii.
— pecuariifcampi)ll89.
— salsari legum. Il 154.
— vestiariae 224, 2. Il
154.
negotiatore.s vini II 115.
— vinaiii ab urbe II 97.
negotiatores vinaiii (à Lyon 218.
407. Il 155. 80.
Nemausus (deusj 204. *.. 5, 1, 478.
nemesiaci i: 122. 38. 70. 221. II
248,0.
.Nemesis 207.
néon (vî'ojv) corpus 48. 119. 1. 25.
6. 31. Voy Juvenes.
Neptunalia 234. 462.
Neptunus 20i. 477 8. 86.
NÉR0.N48. 121. Il 105 403.
Nerva II 463.
nexus sanguinis II 301.
Nicomédie((oll. de). Voy. Dithifitie.
L. Ni.NNius 95
nitiones ^socii) 2(J3, 7.
nombre des membres 350. Il 20(>-7.
361.
nombre des maiîislri 388.
— des curalores 408.
nomina collegi 364, 2.
noms des coll. tirés du nom de la
ville W 175. 6.
notarius 415 23.
novemdiale, voy. sacrificiuiii.
vj/.Toj-pâ-TjVO'. Il 207.
NUMA (coll. de> 62-78. 182. 95. 20(J.
14. 50. Il 117. 248.
numerus collegii, n. noster 358. 61 .
— ' liste officielle dressée par
le gouv.) Il 46-9. 81. 268. i.
3.50, 1 62. 404. 7. 8
numéro collegii (ex) 355, 3.
numerum liabere 369, 3 et «.
Numini? dominor. (coll.) 215.
nummularii II 114. 230-2.
nungenlus ad subfragia 374. i23.
Nymphae 486.
( 538 )
Objets reçus ^2^29. 30. 90. 471-8. II
430.65,.-,.
obligations il 283.
obnoxietas 11 301.
obnoxius condicioni 11 273-80.
303.
obsequium II. 72. 301.
OcTAVii 282.
offectores 170. Il loo.
ofliciales II 223. 60. 4. 316, t.
offîeiales des coll. 404. 23. Il 352.
orticii (ordo) Il 312.
officina II 374, 2.
ottieium404. II 352.
— (magisleriiim) Il 352, .-,.
— pubiiciimII209.
— tesserarioriim II 352.
or/.Y);j.a (archives) 415, «,
oixTjx/ip'.a 188, 1. 308.
oIxoc;521.
0'./COÔO[JLOl 183, l.
0'.XO'J[JL£VtXOÇ 523.
olGarii441. Il 87. 383. 403. 4.
oleum 326, 2. 92.
olitores II 155.
ollae 381. 412.
omnia collegia II 198.
omis 11 272.
operae rfe5 collegiati II 209. 11, *.
opificia 168, 1.
opifices 69. 1. 85, 1. 7, 3. 108. 76.
opilicuin vulgus 69, 1. 77. 056.
opifice.s lapidarii 277.
opifiees et tabernarii 176.
Oppii (iiiontani inontis) 40, i.
optio dam un coll. 361. Il 351.
optiones de Lambèse 196. 227.
309-11. 36. 487.
optiones valetudinarii 309. 450.
orchestopale II 155.
ordo 340. 58. 82. I! 140.
abordine382, 7.420, 1.
ex ordine albi 420.
ordo cenarum 237. 325. 93.
— decurionum 379. 82. Il 118.
— corporatomm , qui pecu-
niam 46, 1.
ordoofficii 11 312.
— potestatium 382, 0,
— quinquennalium 374, i.
— suarius il 92. 3.
ordines qui suariam faciunt II 93.
organisation militaire II 351.
— du travail \\\^\-i.
originales II 303.
originarii II 303.
origo II 177.284. 301.
orphanotrophia 321.
Osiris 89.
Ostia {ses coll.) Il 58-64. 175-6.
oliosi II 172. 329.
I
Paetio 335. 1 1 469.
paganaiia 40.
pagani 40. 2. 69. 84. 90. 101. 7.
' 11433.
o89 1
[la^us 8?).
— // Home, 36. iO. ^2. 100. 1.
— à Capoiie, 41.
— Avenlinensis 101.
— Capitolinus 36. 101.
— Montaniis 40, i.
palaniîarii 283. 9. 468. Il 60, i. 91).
|)alatini II 21.
Pabmirc II 219, i.
panis tiscalis, i^radilis, Ostiensis
H 21. 4. 84. 6. 369.
pantapolae II 110. 332.
pantomimns II 136. 221.
parabolani II 168.211. 468,:..
[•aiasiti 35, 2.
— Apolliiiis II 133. 4, 3.
parens 447.
|)arentalia 293. 7.
pariare452, 7. 11468.
passage d'un coll. à un autre II
317. 2o. 31.61.
pastillarii II 111. 3^:8, 2. 70.
i)astophori 43, 3. 4. 82. 9. 252, 5.
518.
pater colleçfii 329. 430. 46. 524.
— dans un coll. relig. 446-8.
522. 4.
paler patrum 524.
— sacrorum 524.
patrimonia de5 corporati II 271-8.
286-98.
pati-imoiiia des collèges II 376-7.
patrocinium 431, 2.
patrona 348. 430.
patronalis lionor 429.
patronatiis 431.
patronus collegii 189-90. 3. 365.
425-46. 11184.357.
patronus civitatis et ooUegiorum
430, .;. Il I8i.
patronus decuriae 362.
— perpctuus 446, 1.
|)atroims priinus 446, 1.
patronis aucloribus 439, 3.
palroiii {r/tefs des coll.) Il 312. 33.
65.8-71.429.
pationi liorrooruin 1169. 369. 70.
— .'^uariormu II 94.
pausarii Isidis 205 67. 521.
paviineiilarii 87, .;. 209. Il 122.
pccuarii II 89-96. 277. 300.
pecunia coiumunis 43. i. 449, .t.
Il 431-42.
jiecunia |)ublioa 4i9, 7.
pedatura II 362.
peintures île Pompei 239-40. 521.
Pela-ii 290, -2.
pclli'ones 125. 209. 19. il 113.
pcponarii II 210.
prrc£[riMi 209.
— dans un coll. 349. 7. II
332.
perefifrini corporati II 332.
perei=îrinorum (coll.) Il 155
permissu curalorum 410.
— decurionuin 381 .
perpetuus 492.
personae incertae II 443 58. 61 3.
personnification civile 1.30, i. 6, 1.
40. II 224. 5. 377.441-75.
pcrtinens ad coll. 3.55, 3.
petitio funeris 268. 2. 271. 2, 3.
336.470-1.
plirelriurn 223, ;..
Pietatis (conl.) 148, i.
pilicrepi 51. 170. 1, i.
piscatores et urinatores totius
alvciTiberis 118.93.209.36.
7. 305. 25.59.84, 1. 5, i. 87.
407. 31 8.59.523. Il 110.
piscatores ailleurs 109, t. 203, 0.
4,2. Il 155.
})iscatorcs et propolae 203, o. Il
110, .;.
540
piscicapi 170. 1. II 155.
Piscinenses lanii 88.
pistores à RomeQl. 3. 91, i. 129
53. 69. 2;0. -440. II 60, i. 78
86. 25-2. 6. 73. 4. 6. 9. 80
6 91. 2. 5-8. 300. 3,2.6. 9
13.5. 7. 8.27.8.9.31.3.4
46. 61. 6. 8. 9. 70-6. 404. 5
17-8. 24. 33. 52. 4.
pistores chrétiens II 358, 2.
— mao^narii il 227
— mineurs II 329. 66.
— siliginarii II 80.
— urbiei II 405.
— Ostienses 344. 1180. 405.
— ailleurs 129. 203. Il 155.
70. 220.
— publicae annonae II 220
pistrina II 83, 1-0. 5. 373.
Pius(Divus) 125 Voy. Anïomn le
Pieux.
plus in eollegio 331.
places au théâtre II 189. 428.
place des coll. dans la cité 1 1 183-9:^.
placuit 370.
TrXaxouv-oTioio'' Il 152.
plebei 365. 6
plebs 365. 6. 79, 2. 82. 5
pleromarii II 75.
Pline le Jeune 123 4. 6. 133. 6.
8. 40. Voy. ses lettres.
plumarii277."ll 113.
TiXuvîj!; Il 159, 1.
poetarum (coll.) 82. 6 8. 202. 11.
520. II 133.
police sur les membres 1 1 367 .
pollicitatio II 453.
pomari universi 169. Il 155.
Pompéi {ses collèges) 123. 34. 6. 8,
5.40.69-70.80. II 192.
pompiers, v. fabri, cenlonarii,
dendrophori.
pontificum (coll.) 34. 7. 8.
populus (collegii) 358. 66. iOl, i.
II 453.
porcinarii II 91.
porticus 291.
porloriiim II 414
Portas II 58.
7rop'^upo(;iàcpo'. 237, 2. 96. 307. Il
155.
noa£i.ocjoviaaxat 204, 2. 499, 1.
possessores dans les coll. Il 248.
78.
possessores Aquenses 275, 2. 7.
81.
possessores inquilini negotiaiilcs
198.
7:pay|j.a"reud[jL£voi II 177, i.
praedia (résidence d'un coll.) 215.
1.97.
praefectura II 353.
praefectus (le mot) Il 355.
praefectus annonae 440. 509. Il
81. 382-5. 407-8. A Ostie II
355. A Cartilage et à Alexan-
drie \l 386.
praefectus Augustalis II 391.
— classium II 33.
— collegii423. II33. 352-
5.
praefectus fabrum II 239. 388-90.
— fabrum tign. Ost. II
355.
praefectus praetorio II 385-6.
— urbi 138. 440. 509. II
355. 80-2. 407. 8. 10.
praefectus vigilum II 387. 472-3.
— vigilum et armorum II
203-4.
praegustatores 264. 424.
praepositus fabricae II 242.
praesidium 438.
praesentes 299. 326, 2. 401, 1.
( 541 )
jn aelor 423.
l)recario M 451.
prestations 454. 03.
primates ordinum II 344.
primicerius fabrican II -24i. 312.
429.
principales 361. 80. 423. Il 351.
(38.
|uincipalia (coll.) Il 198.
I»rincipes coll.) 1C7.
|)rior corporis II 368.
privati II 330.
privation des droits 378, i.
privilégia urbis R. Il i42, 7.
privilèges des coll. Il 393-422.
— personnels et tempo-
raires Il 49. 256. 407.
privilèges attachés au métier 345.
II 172. 214. 350.
PROBUS 508.
piobare 376, t. 92, 1.
jn-ocès II 468.
— des fontani II 472-3.
procès-verbal 380, s.
procurator (collegii) 424.
— (mandataire) Il 467.
procurator ad arifioiiaiii 441. 510.
II 3i>. 107. 383.
procurator molallorum II 238. 9
— |»ortus utriusque 510
Tipoeopta 307, r.. 83.
profession des membres, voy. mé-
tier.
professioriarii II 08
profes.sores 204. Il 132. 54.
promagister 404.
— j. (I. 396.
pronaos 226.
propolae 203, •;. II 155.
7rpo7r'jÀ£"î-:a'. Il 149.
proretae II 462.
prosecuiio animalium II 169. 72.
218.
Tipoorâ-T,; 185, i.
protection des naviculaires II 416.
protection du patron 437.
psaltum (synhodus) 88. 267. 83.
59.407. Il 134. 431.
ptochotiojjhia 321.
publicani II 224. 5.
puteus 290
Uuadriga fori vinarii 220, 1.
quaestor (coll.j 301. 95. 413.
372.
(juaestores et caplatores 223, i.
• (uaglator 396. 424.
XV Ciris. f. 34.247. 11356.
(jui consistant II 176.
qui negotiantur II 177, i
Quinctiales 34.
([uinquatrus 37. 199.
quinquennalicii 366.
quinquennalis 356. 64. 5. 85-405.
Il 372. Voy. magister.
quinquennalis perpetuus 387.401.
— perpetuus datus 378.
Il 356.
quinquennaliuin (urdo, 387, *,
quinquennalitas 386.
quinquevir 405.
542
R.
Kadere ex albo 358, -i. 78, i.
ratiarii II 31. 2. 178, 3.
lationeni reddere 338. 38, i. 75, 5.
6, 7. 405.
receleurs de colleG;iaii II 410. 343.
lecipere 356.
récompenses 377.
recrutement des eollegiali II 324-
36.
reclor collegii 184, 2. 406.
— i)rovhiciae 1 1 209. 390.
— Samniticus II 390.
recumbenlibus 304, i.
relalio, referre 374, 1.
religion au IV^ siècle II 337.
religiosi 224. 46. 7, 1.
rentes perpétuelles 189-90. 236.
457-62.
reparator collegiorum II 167.
répartition du service II 274-6.
363.
repunctor4l9. II 204 387.
res collegii 391, i. 450.
— coin m uni s 450.
— naviculariae II 288. 9.
— pisloriae 11 291. 6.
— pistrinis obnoxiae 11 291.
— obnoxiae H 272. 87.
— publica collegii 357. 449. II
377.446,5.
rescrits II 318.
responsabilité collective 11 363. 4.
restiones 88. 267.85. Il 113. 431.
retiarii 89.
réunions religieuses 231.
revendication des membre.s et de.s
biens II 364.
ripenses il 244.
rogant 171.
rosalia 294. 7.
rosaries 88, 2.
vSaccarii, à Rome 282. 11 61; au
Portus II 59. 281. 427; à
Pompéi 170; ailleurs II 155.
saccarii salarii 209. Il 226.
sacellum 38.
sacerdos collegii 47, 2. 232. 72, i.
390.
sacerdos conlegiorum omnium
34, 1. 518.
sacerdos des associations bachi-
ques 43, 2.
sacerdos Matris deum 247.
— juvenum 48.
sacerdotes Dianae 253, 2.
— publie! 34. Ii432. 3.
sacomarii 220, \.
sacra pro populo 34. 9.
— popularia 40.
saci'arium 215, i. 23, :;.
— des dendr. Ost. 217.
sacral! 246. 330, *. 446, 2. 524.
sacrifices 23 1 . 389, 4. 451, s. 82. 521 .
( H>\
s;igarii 187. 98. :>()[. il IIH. .'m.
— u Vonipci 170.
— theatri Mareolli IIW. ^J()8, i.
aa/txocpdpo'. H loo.
A«/ai?-ê li 43. -4. 4-2^2-11.
salarii II 227.
Salii 34.
salinaiii 11 220.
salinarum eonduclorcs II 226-7.
salinatores II 226.
salutare (coll.) 47. 21;;, i. (îl. i.
6. 303. Il 67.
Salutaris (Hcicules) Il 07.
sanctissiiimin (coll.) 21o, i. 01, i.
6.
saniîuinis (rioxus) Il 301.
saponarii II 170. 3i7. 58, -i. 67, i.
scabillarii 125. 283. 350. 9, Il 13i.
50. 221.
scaenici 209. 10 77. 85. 350. 94, i,
Il 155. 221.
scaenici et scaenicae II 135-7. 71.
300. 5. 7. 13. 4.
.^caenici grecs, voy. arti lices Dio-
nysiaci.
scaenici latini 11 133. 50.
scalarii 358, o. Il 205.351,3.
scamnarium 309. 405. 50. 2,
scapharii sur le Tibre II 70.
— Hispalenses il 30 179.
82. 383.
schola {sens), local 221-3: collège
222, 1.
schola Augusla501.
— du coll. Aesculapii cl Hijg.
213.
schola des coll. domeslica 215, -i.
— des coll. fuyxér. 211-5. Il
450.
— des coll. industriels 217-
30.
I schola des coll. milttuircs 219-
20. 309.
.schola des coll. d'Osiic 219-20.
— (/c.v coll. religieux 215.
— (les dendr. d'Oslie 2 1 6. 520.
— des Isiaci 210.
— labroiiiin 221. i.
— mcdicoruin 223. 520.
— dcao Minorvae Aug. 203.
— ollanini 221. i.
— du coll. de Serapis 216.
— speculalorum 225, •.»
— tetraslyli 218, .;. 21, i.
— vexillaiiorum 290. 459. Il
352.
schola Xantha 55, i. 218-9. 520.
scholae des coll. 184. 5. 90. 210-
30. 90. 309. 12. 3. 4(X). 27. 8.
31.71.3.0.9.95.520. Il 178.
240. V6[.± Leur forme 221.
scola tubicinum 202.
scholares II 21.
scholastici II 150.
scriba coliegii 307. 95. 415. Il 372.
scribae librarii 219. 23, i. 7.
scribae histrionesque, voy. poe-
tae.
scrinia 415, s.
secours mutuels 300. 2.
sectores mateiiarum 206. Il 1.5(j.
— serrarii 88. 207. 85. (i.
11122.431.
Sedatus 204. c
sedes 223, o.
scllularii 69, i. 100.
aciJLvdTaToc; 383. II 190, 7.
scnalus consultum do Bachau.ili-
bus43, 1.80.3.
senatus consultum de l'an 6i 74.
80.90 114. 9. II 251.
senatus consultum de l'an Hd 9i. i.
1H.2.
( 544
seiiatus consulta sur le droit
d'assoc. 122-7.
senalus consultum sur les coll.
fim. 143-9.
senatus consultum quo illicita col-
legia arcentur 119, 5. 35, 3.
qiiibus senatus c. c. c. permisit
116-8.
(luibus senatus coire permisit 118-
20.
qiiibus ex s. c. coire licet 125-7.
30. 40. 300. 65. Il 'iU. Absence
de cette formule : 130.
ex s. c. creati qui sunt dendro-
phori 247. II 356.
senior 348.
Vil viri epulones 34.
Skptime Sévère 56. 130. 1. 2. 8.
156.309.438,4.95.6.503.5.
6.7. Il 22. 5. 37. 45. 9. 88.
9. 106. 12. 8. 23. 88. 90. 253.
4. 377. 83. 99. 400.
septimontium 40.
sépultures des collèges 281-93. 474-
6.81.
sepulchri violati actio 468. II 469.
sequella coUegii 366. 452.
séquestres 50.
Serapis 216.
Sergia Paullina 264.
seribibi51. 170.323,2.
serment du magister 405.
serment d^in coll. 376.
serrarii Augg. II 236.
Serrenses (sodales) 214. 440.
servi dans un coll. 103. 4. 41. 270.
346.
servi collegiorum 55, 2. 455. 11
448. 55.
servi publici 264. II 12. 217.
servire II 267.
servitudes <19i. 'dd6. H 451.
Servius Tl'llius 63 163-5. 239.
Il 230.
sesquiplicarius 365. 402. 16. 89.
Servilius Vatia 113.
servus actor, voy. actor.
Sévère 307. 42. 6.
seviri Augustales, voy. Augustalcs.
— sociU25.31.296.
Voy. Augustales.
sicari 51, 2. 170, r..
sigilla 402.
signiferi 248, 0. il 122. 38. 70.
221.
Silvanus206. 7.478. 86.
— dendrophorus251.lll23.
— Salutaris 215, i.
Silvani (collegium), à Rome : 213.
25. 91. Il 435-6. 40. 50; en
Lucanie 148, 2. 52. 232, 3. 3.
6.61. 94. 325. 86,1. 460. il
436, 2; à Philippi 228. 61. 2.
72, i. 3. 4. 417. 21.64; ail-
leurs : 213. 73, 5.
Silvani (cultores collegi) 262, s.
Silvani Aureliani (coll.) Il 134, 7.
sintoniaci il 156.
(Txuxac 174. II 156. Voy. cpuXiQ.
(TXu-o6upff£T; II 146.
ffxuTo8£<|iai 63.
axuxoTO[Jiot 63. II 156.
sociae mimae 348.
societas 339
socii ( — collegiati) 340, g.
— Augustales 125.31.296.
— dissignatores 276.
— monumenti 148, 2. 258.
sodales 37, 2. 330. 55, 3.
— à Pompéi 170.
— aerarii 276.
— Augustales 36.
— Claudiales 36.
— Claudiani 280.
oio )
sociales fratres l.'ll.
- Titii 3-4.
sodalicium {le mot) 33. 7, •». 42.
340. il 140.
sodallcia (collei,da) 134 4!2. 80.
— politiques 49-50. 107.
sodalitas [le mot) 33. 4. 7 4^2. 340.
Il 140, '2.
sodalitates saorae 34. 0. 7. 4G, i.
li 433.
sodalitates magnae iMatris 3(5. 74.
— électorales ^S-i)O^M, i.
107. 67, 2.
Sol Inviclus 44. tiOo, 'i.
solamina II 38, 3 422.
solarium 213. 22, i. 3, o. \)[.
solarium {redevance) 454. Il 472.
solatia 11 375. 428.
sommes données à des coll., 402,
soror 329. 523.
sortie II 366.
aTraTTjoXauxaî II 156.
speclarii H 113
spira 45, i. 215, i. 24.
s|)lendidissinmm corpus II 190.
sporlula 304, s. Il 185. Voy. ba)i-
quets.
sportula du pi a 469, i.
statio, aTa-rtiov 215, i. 23, .;. 451, .;.
84.521.
statuarum (cultores) 264.
STATiLn282. 487.
statues lies dieux 476-8. 85-6.
statues dans la scliola 228, 2.
rc£u.uaTa 185, i.
slips menstrua 45. 142-3. 263.
451-3.
slipulatio 11 453.
slreiiuae 234.
struc tores II 122
studium {= coll.) 185. 340. 406.
stuppatores 202. 351. II 113. 370
suarii 11 89-96. 9. 277. 81 . 6. 92. 7.
300. 3, i. 6. 15. 22. 4. 5. 46.
63.8. 70. I. .i05. 18-9. 21-40.
subacdiani 277. 81. 3. 343. ■•»4. Il
122. 51.70.
subrulores 198. 266. 11 122
suhsvles 454. II 188. 378.
subsolariuni 291.
subslituere 356, r,.
suburrarii H 73. 37U.
suftectus 403.
sutiVagia 374, 2. 7, 1-0.
a'jijL[3itoa'.; 323, i. 40.
summa honoraria 315. 62. 75. 96
412. 53. 4.
summates classis II 372, 5.
auvÉop'.ov 307, ;.. 528. II 188, 7.
(TuvEpYaa-a 340. 417. 11 l^H), 7.
(T'jvî'pY'.ov 340. 83.
aûvoooc;53,.-,. 127, .-;. 340. Il 133.
7'jvT£yvt'a 340.
superuas II 97.
cx'jTT-'.vaÀo'. 284.
susceplores {collecteurs^ II 27. 22*.
suseeptoies Ostienses II 62.
susceptores vini II 98.
suscipere 356, 1.
tj'JrzTt'xoL 63. 340.
sutorps 204. II 113. 56.
— de Sunui 63.
symphoniaci 62. 116-8 120.282.
symitosion 323, -i.
Syncratii212 89.
syndicus 395. II 468
rj7-:ri'j.a 499, i.
Tome
VOL. il
35
540
Tabellarii Caes. n. SI.'), 2. 64.
tabernaclarii 417.
tabernae 297.
tabernarii 108. 76. 218. II 100, i.
9. 10. 56. 7. 362. 81, -i.
428, 1.
labernaiii < cabarctiers) II 110.
labulae (decem), voy. decem.
tabula palronatus 371. 427. 9.
labularius 55, 2. 203. 415.
■:a[jLÎa<; 413.
Tarquin le Slperbe 67. 10. 8. 79.
taurobolia231.46. 498. II 188.
-£y.-ov£; tie yuma 61. 88.
lectores (arliticesj 284. II 156.
lemplum divorum 401.
lenipla collegiorum 224. 5. 479.
84.
temples publics mis à la disposition
d^coILIiO. 1.336.
lempli (coUegium) 46. II 466, i.
tenuiores dans /<'.<» coll. II 276. 363.
407.
lenuiores [sens du mot) 141, 0.
leniiiores, v. Amisus.
lenuioruni (collegia) 46. 133. 41.
54. 260.5. 347.57. Voy. coll.
funéraires.
^Tjptj-opî; Il 156.
lessellaria (ars)II 114.
lessera palronatus 427, i. 9.
tesseraria lignaria 343, t. 9, 1.
tesserarii II 352.
tetrastylum 221, 4. 6, -i. 337.
T£/VTj 340.
-.t/^n-.T.i 53, .-.. Voy. artifices,
tectores II 233.
théâtres {placer duns les) II 189.
428.
Theodoric II 82. 336. 46. Voy.
Cassiodore.
iHEODOSEle- 248. II 22. 109.23.35.
70. 220. 65. 77. 99. 325. 38.
62. 3. 414.
Théodose le Jeune 433. II 84. 165.
282.7.93.6.8.300.8.15.20.
64. 73. 4. 7. 415. 55.
Thijatire II 188.
thymelici II 136.
Tibère 36. 50. 121. 3. 7. 36. 40.
59.68.70.502.1130.105.92.
236. 402.
libicines romani 55. 62. 5. 8. 72.
88.112, 1.63.92,1.200.1.9.
10. 1.8. 38.9.67.82.519. II
250.431.
tinctores 63. 4. 91, i.
tirones 311, i. 450.
Titii (sodales) 34.
titulo usus 511.
Titus 502. II 107.
togati a foro 220, i.
tonsores 67, :,. 170. II 156.
TRA.1AN 49, 3. 123-4. 8. 33. 6. 46.
53. 9. 60. 313. 495. 500. 3. II
21. 44. 58 79. 80. 105. 92.
203 51.2.69.81.355 73.90
9. 402. 3. 4. 55. 64. Voy.
Bithijnic.
Transalpin! II 154.
transvecturarius II 38, 2
xpaTztl'.-zoi'. II 156.
travau.v d'utilité publique II 188.
trejectus marmorarioi'um II 76.
trejeclus logatensium II 76.
tria collegia 126, 6. 9. 444, c. H
198. '
tria collegia principalia 130. 444.0
( y>ii )
tribunatus 424,
tribunic'ius i'iio, j.
Iribunoniin divao Aug. (coll.) -282.
425, 1.
tribuniis 406, i. 2.t.
— fabruni naval. Port. 11
355.
tiichila 214. IK).
tricliiinria 226, i. 0.
iriclinium 2'26. 90. 318. .-..
Iriclinium (coll.) 323, 2.
iriplieariu? 402. 380. 90.
triumvir 405.
-po'i'!|j.o; 306.
trutina 290.
lubicinos 163. 202.
TuRcii's Aphgni.knis II 92. 3.
382. 424.
tutela monumr.'nli 297.
— slatuae i3T.
tutclao excusatio II 397. 405. 9.
Tjp'.o'. à Putroli 45. .-,. 235. 451,
SI.
u.
unctore? 277. II 114.
unçtiipntarii 170. II 156.
uiiiversitas II 441. 5. 8.
Urae Fonlis (cultoros^ 231.
urbani H 156.
iirinatores, vo\ . i)iscatores.
ursarii 198, .-. 204, 2. 7. 2. II 1.S6.
ustrina 290. 2.
usufruit II 451.
usurpare (coll. iil.) 136. 7.
usus II 451.
utricularii 209. 24 95. 343. 459.
II 157. 437.
V.
Vacantes II 329. 65.
vacui II 329.
Valens II 271. 7. 99. 321, ... 38.
41. 425. 7.
Valentinien I*''- II 21. 59. 61. 92.
3. 102. 15.26.69. 70. 1.2. 3.
218 20. 73.4. 5.86.8.91.5.
6. 300 6.8. 12. 3. 4. 8. 321.
5. 7.9.33.8.41.2.64.6.73.
4. 6. 409. 14 9. 20. 4. 5. 7.
Vai.entimen II. II 126 281. 92.
.30i. 9. 17.417.9.
Vai.enti.nikn m. II 91. 4.5. 109.
232.78.312.3.7.30.2.7.346.
71.6. 409.18.9. 20.5. 5 9.
Valérie. N 151.
vascularii 360.
vectores II 99. 1 16.
veclurae II 38, .-.. 43. 4. 422.
vecturarii II 116. 281. 419. 25.
Velabrensiuni (coll.) 41, \. 202,
Venafriim II 39n.
venatorcs 134, j. 9S. 204. 4. 7.
H 134. 57.
Venerii 38, .;. 170.
Veneris (coll.) 198, 1. 266.
Vonerls Gonclricis (coll.) 3(>.
vcntr II 452.
vciUc dr sqml turcs 288. 468.
Venus 266.
( ms )
Verbi (cultoh 47. '2{3. 62, .i.
veruarum dics t'esuis 233.
Verus 496. 303. II 30. 71. -237.
Voy. divi fratres.
Vespasien 23'k 503.
Vesta 203.
vestiarii 198. 275, -j. 7. II 157.
vestiarius ceiitonarius II 196,-^.
veterani56. 132. 204. 9, 1.67.77.
85. 96. 342. 459. II 141. 77.
205.
veterani centonarii II 205, i.
— (ciiltores) 262, :;.
vexillarius 425 II 187. 352.
Ypxillariorum (scliola) 425,-2. Voy.
schola.
vcxiilifpr 425.
viatores collegioruin 416. II 372.
vialorcs quaeslorii 223, i. 30 83.
— III virum223. t.
viatorum (coll.^ 55, i.
viatinim (cnU. fun.) 487. 8.
— (mil. milit.}MO.
vicaiii II 185. .-,.
vicatim 71, i. 103 4.
vicinia 100
vieilli tas 40. 100. 1
viclimarioium (coll.' 35, •-.. 190.
Victoria 20i. 5. 478. 86.
Victoriae .Viii?. (coll.) 266.
vicus 40-2. 99. 100. 3. 11 178.
vigiles II 204. 355.
vieillards dans les coll. II 350.
villes lihrv.s 128.
vinarii, voy. negotiatores vini.
vinarii // Rome II 96-9. 427.
violaries SS. ■>.
vitutiarii II 122. 38.70.221.
Volkaniis 478.
Voi.rsii 282.
oopxT^yoi 520. II 155.
opaTp'.aaxa-' 79, -2.
Cj,jÀt; (Upâ) 174. II 149. 90. 7. Voy
iQ'.o'joyoi et ax.'J-;
yaXxs"?; de Siima 63 : ailleurs II
157.
■/aÀxoxÛTTO'. II 157.
yop-riY-'a 219, i.
yp'j7oyoo'.62. 87. II 146.
X.
xenodochia 321,
îua-rtXTj î'jvooo^, vov. athletac
z.
ZÉN0NIM27.
zothera290. .381.
(i^J)
TABLK DRS MATIKRES
TOMi: i.
INTRODliCTION.
Sources et travaux modernos, )>. 8
CHAPITRK PRÉLIMINAIUK.
Il {. Les diverses corporations romaines, p. 33. — § i. Extension de
l'organisation corjMjralive parmi U^s iien? de même profession et
division du sujet, p. oO.
PKEMIÈRE PARTIE.
Le droit d" association à Rome.
CH.APlTRfc: PRKMIER.
Im roijautc el la république.
§ 1. Naissance et caractère des premières corporations industrielles k
Rome, p. 62. — § 2. Le droit d'association sous la république
jusqu'à l'an 690 (>i, p. 78- — § 3. Développement des collèges
industriels sous la république, p. 86. — § 4. Mesures restrictives du
dernier siècle de la république ou le sénatusconsulte de 690 64, la
If.v Clodia et la U\r Juliu de César, p. 91.
TOiMK L, VOL. U. 35.
( 550 )
CHAPITRE II.
L'Evipire,
Introduction, p. 114. — § I. La lex Julia d'Auguste; sa portée; durée de
cette législation, p. Mo. — § 2. Application de la l ex Julia à l'Italie
et aux provinces, p. 123. — § 3. Rigueur de cette législation au I" et
au IJe siècle, p. 128. — § 4. Contrôle de l'État sur les collèges. Col-
lèges illicites, p. 132. — § 5. Collcgia tenuiorum ou coUegia funera-
ticia, p. 141. — § 6. Cliangement de politique envers les collèges
industriels, p. 153. — Appendice : Textes du Digeste, des Basi-
liques, de Tacite et de Pline le Jeune, p. 1.^)5.
DEUXIÈME PARTIE.
Les collèges professionnels considérés comme associations
privées
CHAPITRE PREMIER.
But privé des collèges professionnels.
Introduction, p. 161. — § 1. Les collèges dans la vie publique, i>. 162. —
§ 2. But économique ou professionnel, p. 181. — § 3. Caractère
religieux, p. 195. — § 4. But funéraire, p. 265. — § 5. Les collèges et
la charité, p. 300. — § 6. La vie familiale dans les collèges, p. 322.
— Conclusion, p. 332.
CHAPITRE IL
Organisation des collèges professionnels en vue du but privé.
I 1. Autonomie intérieure des collèges; fondation et dissolution; noms
divers, p. 334. — § 2. Composition des collèges; conditions et for-
malités de l'admission, p. 351. — § 3. Hiérarchie et divisions;
( n:>\ )
conlurics, décuries; album, fusli, rrc spéciiilo; plrbs rollcyu, p. '.itil
— § 4. Assemblée gfinérale; liw collegii, dccrcla coUcginrum , p. 368.
— § .S. Comité administratif des décurioiis, p. 379. — t^ 6. Fonction-
naires des collèges, p. 383; magiïHer, ijuiniincîiîuilis, \>. :Wr, autres
noms du président, p. 405; curator, p. 40G; quncstur, p. 413; .vcn^a,
p. 415; viator, p. 416; autres fonctionnaires et serviteurs, p. 416. —
8 7. Patronus, patrona, p. 426; palcr, )natcr, p. 446. — § 8. Finances
des collèges : arca collegii, p. 449; budget des recettes, p. 450;
lecettes ordinaires, p. 450; recettes extraoniinaires, p. 463; budget
des dépenses, p. 479; statues et autres honneurs décernés pai- les
collèges aux empereurs et à d'autres personnages, p. 493 — Con-
clusion, p. 512.
Addenda et Corrigenda, p. 516.
TOMK II.
TROISIÈME PARTIE.
Les collèges professionnels considérés comme institutions
officielles.
Introduction, p. 3.
CHAPITllK PRFMIKH.
Rôle des collèges dans rudfninistradnn.
§ 1. Causes qui amènent l'État et les villes à prendre des collèges à leur
service, p. 6. — §2. Rôle de chaque collège dans l'administration,
p. 18.
Pke.mière section. Home et Constanlinople, |). 19. — 1. Annotia piiblica
ou civica, p. 19. — II. Commerce et industrie privés, p. 101. —
III. Travaux publics, p. 115. — IV. Police et autres services publics,
p. 127. — V. Religion et fêtes, p. 132. — VI. Observations générales,
p. 139.
(550)
lHAPITRK II.
L'Empire.
Introdurtiq p. lii — § I. La /« J pifXe; «i i 1^
co\[c Idslalion, p. Ur» — § 2. n dch - ^ i .:,•
et auvfovinccs» p. Ii3. — |3. Kipucur de rcltc Ic^gislation au l« el
au II' êcle, p. IÎ8. — I 4. ConUùIe de Tf-ial sur les colites. i'jo\-
li'gps ibitcs, p. 13i. — f .*>. Collecta lenuiorum ou eotleçia funera-
ttcia, \àki. — I 6. Oianfpmcnl «le !»«• v^n les coll«|{e!(
indusii», p. 153. — Appcndirt» : Tr\ ' jiesie, des Basi-
liques, ) Taeite et de IMine le Jeune, p. I.*i&.
' hKIXIKME PAKTIK
Les coli< >s profr^sionn^'lK ron*ii(1^reii • uunir it-fki»!
divers, p. 34. — | i. Coin|->j
maliir •! l'admission.
i. 3tl
1
CHAPITRE IV.
Privilèges et aut)i\. p. 30i; Pnvii("'i,^os du I'-^ au
III^ siècle, p. 397: Privilcgos du IV-' au V*- sièclo. p. 108. — H 2. Avan-
lacjcs divers, p. 422. — § 3. Honneurs, p. 4-29.
CHAPITRE V.
Situatio}! légale des biens des collèges et personnification civile.
Introduction, p. 431. — ^ 1. Dotation de l'État, p. 432. — tj 2. Consecratio
et dedicatio, p. 43i.. — vj 3. Propri(Mc commune, p. 439. — § 4. Person-
nification civile, p. 441: Généralités, p. 441; Droit réels et droits
d'obligation, p. 447: Acquisition pour cause de mort, p. 455;
Actions, p. 467. — Conclusion, p. 473.
CONCFASIOiNS GÉNÉRALES, p. 476.
Supplément aux Addenda et Corrigcnda du jtremier volume, p. 48.');
Addenda et Corrigenda du second volume, p. 487.
Liste des textes cités, p. 489. — Répertoire alphahétique. p. 515.
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12044 '093' 292 316