à ._. MEMOIRES L’'ACADÉMIE ROYALE DES SCIENCES DE L'INSTITUT DE FRANCE. AR LE LR LE LR LARLET LR EVER RE RER ANNÉE 1818. BARRES LES LS LASER VE LUE LEUR LUE UUL ISLE LAS DE L'IMPRIMERIE DE FIRMIN DIDOT, PÈRE ET FILS, IMPRIMEURS DU ROI ET DE L'INSTITUT; RUE JACOB, N° 24. MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE DES SCIENCES DE L'INSTITUT DE FRANCE. EE ANNÉE 1818. DR TS EE EE EE TOME III. À PARIS, Caez FIRMIN DIDOT, PÈRE ET FILS, Imprimeurs pu Ror ET DE L'INSTITUT, LiBRAIRES POUR LES MATHÉMATIQUES, L'ARCHITECTURE ET LA MARINE, rue Jacob, n° 24. M. DCCC. XX. Va Fra RE 2 TABLE DES MÉMOIRES CONTENUS DANS CE VOLUME, Qui est le troisième de la Collection des Mémoires de l’ Académie des Sciences, depuis l'ordonnance du 21 mars 1816. ‘ Mämorne sur le flux et le reflux de la mer; par M. Z marquis AÉPONIACE STE eee ere ee ee elec Page Mémoire sur les inondations souterraines auxquelles sont exposés périodiquement plusieurs quartiers de Paris; par M. Girard, Description d’une aggrégation de pierres observées dans la Ca: roline du nord, États-Unis d'Amérique, et connue dans le pays sous la dénomination de mur naturel (natural wall), par M. de Beauvois; avec une planche. ............. 280 Mémoire sur l'intégration de quelques équations linéaires aux différences partielles, et particulièrement de l’équation géné- rale du mouvement des fluides élastiques ; par M. Poisson. . .…. Mémoire sur les lois générales de la double réfraction et de la polarisation , dans les corps régulièrement cristallisés, par M. Biot ; avec six planches. ........ 2176 LOIS LODEL D Mémoire sur la combinaison de l’oxigène avec l'eau, et sur les propriétés extraordinaires que possède l'eau oxigénée; par M. Thenard. ........ RTE Des aan Lee DRE AU Pre Meet Addition au Mémoire sur la figure de la terre, inséré dans le vo- lume précédent, par M. Ze marquis de Laplace. ........... 91 109 121 7 385 HISTOIRE DE L'ACADÉMIE. Analyse des travaux de l’Académie royale des Sciences pendant l'année 1818 : Partie Mathématique, par M. le chevalier Delambre , Secré- taire-perpéluel en enres rech Lee IDASE Partie Physique, par M. le baron Cuve, Soovétaire - per- pétuel. ... later a iete le tale) fe eVusaholarclele taie de nee tele le aus IR Cie e Notice sur la vie et les travaux de M, Périer, par M. le chevalier Detambre, Secrétaire-perpétuel.......................... Notices sur les voyages entrepris pour mesurer la courbure de la terre et la variation de la pesanteur terrestre, sur l'arc du mé- ridien compris entre les îles Pythiuses et les îles Shetland; AM one Ro onto atanonbs ide dc Rapport fait à l'Académie royale des Sciences sur un ouvrage de M. J'icat, ingénieur des pont-et-chaussées, intitulé : Recherches expérimentales sur leschaux de construction , etc. Commissaires, MM. de Prony, Gay-Lussac, et Girard, rapporteur... ...... eamaammasane clxxix lix Ixxüj clxxix HISTOIRE DE L'ACADÉMIE ROYALE DES SCIENCES DE L'INSTITUT DE FRANCE. ANALYSE Des Travaux de l'Académie royale des Sciences, | pendant l'année 1518. PARTIE MATHÉMATIQUE, Par M. 1e Cu DELAMBRE, SECRÉTAIRE-PERPÉTUEL. M. le marquis de Laplace a lu à l’Académie plusieurs Mé- moires importants, qui sont des développements extrême- ment curieux des théories qu'il a démontrées dans sa Méca- nique céleste. L'auteur en a lui-même donné des extraits dans la Connaissance des Temps; mais ces extraits, rédigés pour des géomètres et des astronomes, offrent encore une multitude de formules que nous devons nous interdire dans cette Analyse, et pour lesquelles, suivant l'usage constant, nous renverrons aux Mémoires. Nous nous bornerons donc ici à rapporter les théorèmes les plus clairs et les consé- 1818. Histoire. | A i] HISTOIRE DE L'ACADÉMIE; quences les plus importantes. Le premier Mémoire a pour titre : De la Rotation de la Terre. Depuis le temps d'Hipparque jusqu'à nous, la durée du jour n’a pas changé d'un centième de seconde. L’axe de la rotation de la terre est aussi invariable à sa surface, que la vitesse de rotation; il répond toujours aux mêmes points de la terre : les observations les plus exactes ne font apercevoir aucun changement dans Îles latitudes géographiques. Il y a cent ans, Cassini s’efforçait de démontrer cette vérité, dont il n’osait pourtant répondre absolument : il affirmait simple- ment, que s'il existait quelque variation dans la hauteur du pôle, elle devait être extrèmement petite. Aujourd’hui on peut donner comme une chose certaine, que la terre se meut uniformément autour d'un axe invariable. On sait que tous les corps solides ont trois axes principaux rectangulaires autour desquels ils peuvent tourner uniformé- ment, l'axe de rotation demeurant en repos. Cctte propriété remarquable est-elle commune aux corps qui, comme la terre, sont recouverts d'un fluide? tes actions du soleil et de la lune influent sur la figure de la mer qui, par-là, varie sans cesse. Parmi les forces d'où naissent les phénomènes du flux et du re- flux, il en est de variables; mais ces. dernières étant incompara- blement moindres que la force centrifuge, la variation qu'elles produisent dans la figure permanente de la terre, est insen- sible. Une petite agitation dans un océan de mercure, quirem- placerait nos mers, suffirait pour le répandre sur les conti- nents terrestres. Cette infériorité qu'on a reconnue dans la densité de la mer, est une suite de la fluidité primitive de la terre, car alors les couches les plus denses ont dû se porter vers le centre: les considérations théoriques se réunissent avec - PARTIE MATHÉMATIQUE. ii] les expériences du pendule pour indiquer, avec une grande probabilité, qu'en vertu d’une chaleur excessive, toutes les parties de la terre ont été primitivement fluides. « Les lois de la mécanique et de la pesanteur universelle « suffisent donc pour donner à la mer un état ferme d'équili- « bre, qui n’est que très-peu altéré par les attractions célestes. « Sa pesanteur, qui la ramène eans cesse vers cet état, et sa « densité moindre que celle de la terre, conséquences néces- « saires de ces lois, sont les véritables causes qui la main- «tiennent dans ces limites et l’'empèchent de se répandre « sur les continents, condition nécessaire à la conservation « des êtres organisés. La nécessité de cette condition pour- « rait paraître une raison suffisante de son existence; mais «on doit bannir de la philosophie naturelle ce genre d’ex- « plications qui en arrêteraient infailliblement les progrès. « Il faut rattacher autant qu'il est possible les phénomènes « aux lois de la nature, et savoir s'arrêter quand ce but ne « peut pas être atteint; se rappelant toujours que la vraie « marche de la philosophie consiste à remonter, par la voie « de l'induction et du calcul, des phénomènes aux lois et des « lois aux forces. ». De ces recherches l’auteur passe à la considération du mou- vement du système formé de la terre et de la lune. Il fait voir, qu'abstraction faite de l’action du soleil, le nœud ascen- dant de l'orbite lunaire sur le plan invariable de ce système, coïncide toujours avec le nœud descendant de l'équateur terrestre, et que ces nœuds ont un mouvement rétrograde uniforme, les plans de l'orbe lunaire et de l'équateur con- servant, sur le plan invariable, des inclinaisons constantes. L'action du soleil modifie les résultats précédents: elle im- A2 iv HISTOIRE DE L'ACADÉMIE, prime aux nœuds de l’orbe lunaire et du plan du maximum des aires, des mouvements tels que ces deux plans se réu- nissent toujours à l'équateur; le plan du maximum des aires partageant l'angle formé par l'équateur et l'orbe lunaire en deux angles dont les sinus sont en raison constante. Le mou- vement rétrograde des nœuds de la lune, combiné avec l’ac- tion de cet astre sur le sphérvïde Lerrestre, donne naissance à la nutation; et la réaction de ce sphéroïde sur la lune, pro- . duit les deux inégalités lunaires dépendantes de l’aplatisse- ment de la terre. Ces inégalités, comparées par MM. Burg et Burckhardt à des milliers d'observations, s'accordent à donner -— pour l'aplatissement de la terre; ce qui diffère peu de l’aplatissement :— ou + , qui résulte des mesures des de- grés terrestres. « Mais si l'on considère, d’une part, les irré- « gularités que présentent ces mesures, et de l’autre part « l'accord des deux inégalités lunaires et le nombre immense « d'observations qui ont servi à déterminer leurs coëfficients , «on jugera que ces inégalités offrent les moyens les plus « précis de connaître la vraie figure de la terre. » Ici commencent les calculs analytiques par lesquels on prouve qu'il existe dans un sphéroïde quelconque recouvert d’un fluide , un axe autour duquel le système du sphéroïde et du fluide peut tourner uniformément, l'axe de rotation étant invariable; que dans les mouvements respectifs de l'équateur terrestre et de l'orbe lunaire, ces deux plans conservent une intersection commune et des inclinaisons constantes sur le plan invariable, et que cette intersection a un mouvement séculaire rétrograde et uniforme; enfin que l'inégalité connue sous le nom de rutation, produit, par la réaction du sphéroïde terrestre sur la lune, yne inégalité PARTIE MATHÉMATIQUE. Y correspondante dans l’inclinaison de l’orbe lunaire à l’éclip- tique. Le second Mémoire a pour titre: Sur l'influence de la grande inégalité de Jupiter et de Saturne dans le mouvement des corps du systéme solaire. Cette grande inégalité, dont la période est de neuf siècles, s'élève à un tiers de degré pour Jupiter, et x quatre cin- quièmes de degré pour Saturne; par l’action de ces deux grands corps, elle se répand sur tout le système solaire. Heureusement, les coëfficients des inégalités produites par cette cause dans les éléments des planètes sont insensibles : elles ne sont que d’une seconde centésimale environ pour Mars et Uranus; de six dixièmes de seconde pour la terre, et d’une seconde centésimale pour la lune. L'effet est plus sensible pour les satellites de Jupiter. Les coëfficients en se- condes centésimales sont : 1 pour le premier, 12",8 pour le second, 18',8 pour le troisième, et 44",3 pour le quatrième. Heureusement encore, le mouvement de ces satellites est si rapide, que si ces quatre coëfficients sont, comme les précédents, des fractions de degré et non de temps, on peut dire encore que ces inégalités se perdent dans les incertitudes des observations. Elles n’al- tèrent en rien le rapport remarquable qui existe entre les mouvements des trois premiers satellites. 34 , . £ d j Le troisième Mémoire est intitulé: Sur la loi de la pesanteur, en supposant le sphéroïde terrestre homogène et de méme densité que la mer. Dans l'hypothèse de l'homogénéité du sphéroïde terrestre, s v) HISTOIRE DE L'ACADÉMIE, l'analyse conduit à une expression trèes-simple de la pesan- teur à la surface de la mer, et qui offre cela de remarquable, savoir: que si la mer est de même densité que le sphéroïde, la pesanteur à sa surface est indépendante de sa figure. Pour un point quelconque, situé, soit à la surface de la mer, soit à celle d'un continent ou d’une île, la pesanteur est égale à une constante, plus le produit du quarré du sinus de la latitude par cinq quarts du rapport de la force centrifuge à la pesanteur à l'équateur, moins le produit de la pesanteur à l'équateur par la moitié de la hauteur du point au-dessus du niveau de la mer, hauteur que l'on peut déterminer par le baromètre ; le rayon moyen de la terre est pris pour unité. Cette loi ne s’accordant pas avec les expériences du pen- dule, faites dans les deux hémispheres; l'hypothèse de l’ho- mogénéité est donc exclue par ces expériences, qui prouvent, de plus, 1° Que la densité des couches du sphéroïde terrestre croît de la surface au centre; 2° Que ces couches sont, à-très-peu-pres, régulierement disposées autour du centre de gravité de la terre; 3° Que la surface de ce sphéroïde, dont la mer recouvre une partie, à une figure peu différente de celle qu’elle pren- drait en vertu des lois de l'équilibre, si elle devenait fluide; 4° Que la profondeur de la mer est une petite fraction de la différence des deux axes de la terre; 5° Que les irrégularités de la terre et les causes qui trou- blent sa surface ont peu de profondeur; 6° Enfin que la terre entière a été primitivement fluide. « Ces résultats de l'analyse et de Fexpérience semblent de- PARTIE MATHÉMATIQUE. Vi « voir être placés dans le petit nombre des vérités que nous. « offre la géologie. » Les deux Mémoires suivants, de M. Poisson, roulent de même sur deux points fondamentaux du système du monde, qui ne peuvent être éclaireis qne par la plus savante analyse ; l'un a pour objet la précession des équinoxes, Vautre a libra- tion de la lune. « La théorie de la variation des constantes arbitraires, dans « les questions de mécanique, a l’avantage remarquable de « faire dépendre de la même analyse, et de comprendre dans « les mêmes formules, les solutions des deux problèmes prin- « cipaux de l'astronomie physique, savoir : la détermination « du mouvement d’une planète autour de son centre de gra- « vité, et celle du mouvement de ce centre autour du soleil. « Dans un premier Mémoire sur cette théorie, en en faisant «lapplication au mouvement de rotation de la terre, j'ai € trouvé pour exprimer les différentielles des deux éléments «qui déterminent la position de. l'équateur, des formules «exactement semblables à :celles qui se rapportent aux lon- « gitudes des nœuds et aux inclinaisons des orbites plané- « taires. L'usage de ces formules pour déterminer les dé- « placements séculaires de l'équateur, peut être beaucoup « simplifié, en observant que la terre étant recouverte par un « fluide en équilibre à sa surface, la fonction dépendante des « forces perturbatrices que ces formules renferment, est don- « née immédiatement en série convergente par la théorie « connue de l'attraction des sphéroïdes : or, en combinant “ cette série avec les expressions déduites de la variation des. vii] HISTOIRE DE L'ACADÉMIF, « constantes , il en résultera.. .. la solution la plus simple et | « la plus directe du problème de la précession. » Ce phénomène singulier, découvert par Hipparque, mieux déterminé par les Arabes, et confirmé depuis par les obser- vations de tous les astronomes modernes, était resté sans ex- plieation jusqu’à Newton Le mécanisme en avait été indiqué par Copernic, et cette partie était la plus neuve et la plus ingénieuse de son livre fameux des Révolutions célestes. TI avait, sans nécessité, compliqué son explication de considé- rations étrangères et tout-à-fait inutiles, dont elle fut débar- rassée par Kepler. La cause physique restait inconnue. L’ima- gination hardie de Kepler fut arrêtée par une difficulté qui véritablement était alors insurmontable. Newton démontra que, dans le système de la pesanteur universelle , la terre de- vait être aplatie , et que de cet aplatissement résultait l'ex- plication si long-temps desirée. Tous les plus grands géo- mètres du siècle dernier reprirent et perfectionnèrent le calcul de Newton. M. Poisson vient de le réduire à ses moin- dres termes. Mais, malgré toutes ces simplifications, il s'en faut encore de beaucoup que la démonstration ne soit élé- mentaire; elle dépendra toujours d'une analyse profonde. On a pu rendre le phénomène sensible à la vue par une ma- chine très-ingénieuse, qui ne peut en aucune manière en don- ner la mesure. L'analyse elle-même ne la fait connaître qu’ap- proximativement ; et long-temps encore on n’aura que les observations astronomiques pour déterminer avec une exac- titude suflisante le mouvement de la précession. PARTIE MATHÉMATHIQUE. ix Sur la libration de la lune ; par M. Poisson. « Suivant les lois de ce phénomène, découvertes par D.Cas- «sini, et confirmées par la belle analyse de M. Lagrange, « la june tourne sur elle-même dans le même temps qu'elle « achève sa révolution moyenne autour de la terre; son équa- « teur conserve une inclinaison constante sur l’écliptique, et « le nœud descendant de cet équateur coïncide avec le nœud « moyen ascendant de l'orbite lunaire. M. de Laplace a prouvé « que ces résultats ne sont troublés, ni par l'équation sécu- « laire du moyen mouvement de la lune, ni par les dépla- « cements séculaires de l’écliptique : on peut aussi s'assurer « qu'ils ne sont pas non plus modifiés par l'équation sécu- « laire qui affecte le moyen mouvement du nœud de la lune; mais ils ne conviennent qu’à la vitesse moyenne de rota- « tion et à un état moyen de l'équateur lunaire, et la théorie A « montre que cette vitesse, l'inclinaison de l'équateur, et la « distance de son nœud à celui de l'orbite, sont assujètties « à des inégalités périodiques dont les maxima dépendent « des rapports qu'ont entre eux les moments d'inertie de la « lune, M. Lagrange a donné l'expression des principales « inégalités de la vitesse de rotation; pour que la théorie ne « laissât rien à desirer sur ce sujet, il ne restait donc plus qu'à « déterminer les inégalités de l'inclinaison et du nœud : c'est « ce que je me suis proposé de faire, en reprenant en entier « la solution de ce problème , et en poussant l’approximation « jusqu'aux termes dû second ordre par rapport aux élé- ments de l'orbite lunaire, lesquels termes renferment les À A inégalités dont il est question. Je me bornerai à donner les « formules auxquelles je suis parvenu, et je supprimerai les 1818. Histoire. B X HISTOIRE DE L'ACADÉMIE, « détails des calculs qui m'y ont conduit , et qui ne sont qu'un « développement de l'analyse de M. Lagrange. » Ces dernieres lignes ne signifient pas qu’on ne trouvera aucune formule dans le Mémoire; elles sont, au contraire, indispensables pour faire connaître les changements que les expressions ont subis par l'introduction des termes du se- cond ordre. L'auteur considère successivement les diverses inégalités de [a longitude du nœud ; la seconde est connue, elle est environ un cinquante-cinquièeme de l'inclinaison moyenne : il prouve que la première est moindre qu’un vingt- septième de cette même inclinaison. Deux inégalités sem- blables se retrouvent dans la distance du nœud de l'équateur à celui de l'orbite. Par la seconde, les deux nœuds s’écar- teront l’un de l’autre de plus d’un degré : le maximum de la première ne passera pas deux degrés. M. Bouvard a trouvé que la distance de ces nœuds est de 2°; Mayer en avait trouvé quatre, mais dans un sens contraire. La différence entre ces deux résultats peut s’attribuer en par- tie aux erreurs de l'observation, et en partie aux inégalités qui font varier cette distance. L'auteur cherche ensuite l'influence que peuvent avoir ces diverses inégalités sur les longitudes et les latitudes des taches de la lune, vues du centre de ce satellite. Il en donne l’ex- pression analytique , qu'il faudrait comparer aux observa- tions, pour en conclure les différences entre les moments d'inertie du sphéroïde lunaire , ainsi que les deux constantes relatives à la tache observée. C'est une comparaison dont M. Nicollet s’est chargé, et dont il se propose de publier les résultats aussitôt qu'il en aura obtenu de satisfaisants. PARTIE MATHÉMATIQUE. x] Sur l'application de l'algèbre à la théorie des nombres ; par MT. Poinsor. { Voyez les Mémorres.) Mémoire sur l'intégration d'une classe particulière d'équations différentielles , ex Mémotre sur l'intégra- tion des equations aux differences partielles , du . premier ordre à un nombre quelconque de variables ; par M. Caucr. Nore rédigée par l’auteur sur le dernier de ces deux Mémoires. 27 Janvier 1818. Jusqu'à présent il n’est aucun traité de calcul intégral où l'on ait donné les moyens d'intégrer complétement les équa- tions aux différences partielles du premier ordre, quel que soit le nombre des variables indépendantes. M'étant occupé il y a plusieurs mois de cet objet, je fus assez heureux pour -obtenir une méthode générale propre à remplir le but de- siré. Mais, après avoir terminé mon travail, j'ai appris que M. Pfaff, géomètre allemand, était parvenu , de son côté, aux intégrales des équations ci-dessus mentionnées. Comme il s’agit ici d’une des questions les plus importantes du calcul intégral, et que la méthode de M. Pfaff est différente de la mienne, j'ai pensé qu'une analyse abrégée de cette dernière pourrait intéresser les géomètres. En conséquence, je l'ex- pose ici, en profitant, pour simplifier l'exposition , de quel- ques remarques faites par M. Coriolis , ingénieur des ponts- et-chaussées, et de quelques autres qui me sont depuis peu venues à l'esprit. Ainsi simplifiée, la méthode dont j'ai fait | B2 xi] HISTOIRE DE L'ACADÉMIE, usage fournit, à ce qu'il me semble, la solution la plus simple que l’on puisse donner de la question proposée. On en jugera par les considérations suivantes. Supposons, pour fixer les idées, que l'équation aux diffe- rences partielles proposée, renferme, avec les trois variables indépendantes x, y, z, une fonction inconnue w de ces trois variables, et les dérivées partielles p, 4, r de la fonction w, par rapport à ces mêmes variables. Pour que la valeur de & soit complétement déterminée, il ne suffira pas de savoir qu’elle doit vérifier l'équation don- née aux differences partielles. Il sera, de plus, nécessaire d'ajouter une condition; par exemple, d’assujettir la fonc- tion w à recevoir, pour une valeur donnée, x, de la variable x, une certaine valeur, fonction des variables y et z. La fonction de y et de z, dont il est ici question, pouvant être choisie à volonté, est la seule fonction arbitraire que doive renfermer l'intégrale générale de l'équation aux différences partielles. Il est d’ailleurs facile, à l’aide des principes déja connus, de ramener l'intégration de cette équation aux différences par- tielles, à l'intégration de cinq équations différentielles entre les six quantités XL; > Ts U, Q 7, considérées comme fonctions d’une seule variable; et toute la difficulté se réduit à savoir ce que l’on doit faire des cinq con- stantes arbitraires introduites par l'intégration de ces cinq équations différentielles. Or, la méthode que je propose con- siste à éviter l'introduction de ces constantes, ou plutôt à remplacer les constantes arbitraires par des valeurs particu- lieres, attribuées aux inconnues ŸY; Zu, q, r, et à intégrer PARTIE MATHÉMATIQUE. Xii] les cinq équations différentielles, de manière que pour 4—%, on ait Y—Yos 2—2Z0 U—=Ug, 4 —=Qo; T0; Yo» 20 désignant deux nouvelles variables, #, une fonction arbitraire de ces mêmes variables, semblable à la fonction arbitraire de y et de z, qui représente la valeur de w pour 4=—%, et 4o; lo les deux dérivées partielles de x, relatives à y, et à 2. Si, entre les cinq-équations intégrales ainsi obtenues, on élimine g et r,il ne restera plus que trois formules, dont le système sera propre à représen‘er l'intégrale générale de l'équation aux différences partielles. Ces trois formules renfermeront les quantités variables x, y, z, u; la quantité constante x, les deux nouvelles variables 7, &, et la fonction arbitraire de ces nouvelles variables représentée par #, , ainsi que ses dérivées du premier ordre relatives à y, et à x. Ce n’est qu'après avoir fixé la fonction arbitraire dont il s’agit, qu'on pourra, en éliminant les nouvelles variables y,, z0, obtenir l'équation finie qui détermine x en fonction de x, y, z. Rien n'empèche de conserver dans le calcul, avec les quan- tités variables x, y, 2, u, q, r, la quantité p; si l'on observe d'ailleurs qu’on peut échanger entre elles, relativement aux rôles qu'elles jouent, les variables indépendantes x, y, z, on obtiendra , par l'intégration générale d’une équation aux dif- férences partielles à trois variables indépendantes, et même à un nombre quelconque de variables , la règle qui suit : Substituez, par les moyens ordinaires, à l'équation aux différences partielles donnée, autant d'équations différen- telles du premier ordre (moins une) qu’elle renferme de quantités variables, y compris les variations indépendantes, la fonction inconnue et ses dérivées partielles. Les variables indépendantes seront traitées symétriquement dans les équa- XIV HISTOIRE DE L'ACADÉMIE, tions différentielles dont l’une pourra être remplacée par l’e- quation aux différences partielles données. Cela posé, intégrez les équations différentielles dont il s'agit, par rapport à toutes les variables qu’elles renferment, à partir de certaines limites que vous considérerez comme de nouvelles variables, assujetties aux mêmes relations que les premières. Regardez ensuite, dans les équations inté- grales obtenues, l’une des nouvelles variables indépendantes, comme réduite à une quantité constante, et les autres comme devant être éliminées. Vous aurez un système de formules propres à représenter l'intégrale générale de l'équation aux différences partielles données. Ces formules ne renferment qu'une seule fonction arbitraire avec ses divisions partielles du premier ordre, savoir la nouvelle variable qui correspond à la fraction inconnue, et que l’on doit considérer comme une fonction arbitraire de celles dés nouvelles variables qui doivent être éliminées. Mémotre sur les vibrations des surfaces élastiques ; par M. Fourter. (Voyez les MÉMOIRES.) MÉMOIRES LUS A L'ACADEMIE, ET QUI NE NOUS ONT PAS ENCORE ÉTÉ COMMUNIQUÉS. Note sur le perfectionnement du colorigrade; par M. Bior. Sur l'utilité des lois de la polarisation de la lumière, pour reconnaître l'état de cristallisation et de combinaison dans les cas où le systéme cristallin n'est pas immédiatement observable ; par M. Bio. PARTIE MATHÉMATIQUE. XV. OUVRAGES IMPRIMÉS. An Exercices de calcul intégral, construction des tables elliptiques ; suite du tome LIT. M. Legendre poursuit sa vaste et utile entreprise. La déter- mination des fonctions E et F, selou les diverses valeurs de l'amplitude et du module, est encore l’objet qu'il s’est pro- posé dans la continuation de ces recherches. « On peut y « parvenir, soit par le moyen d'une table particulière dres- «sée pour chaque valeur donnée de l'angle du module; « soit par le moyen d'un système de tables, qui seraient « construites en faisant varier, par des intervalles égaux et « suffisamment petits, l'amplitude et l'angle du module. » L'auteur discute les avantages et les difficultés de chacun de ces deux systèmes. Le dernier suppose une entreprise dont l'exécution ne peut être que fort éloignée. Pour en aplanir au moins les difficultés, les tables VIII et IX offrent aux calcu- lateurs un travail préparatoire, qui déja peut suppléer en partie aux tables plus étendues qui restent à desirer; mais, comme elles ne procèdent que de degré en degré, tant pour l'amplitude que pour l'angle du module, leur interpolation sera nécessairement plus difficile ou moins exacte que si ces intervalles étaient plus petits. Pour éviter les doubles interpolations, il faudrait nécessai- rement revenir au premier moyen; mais le calcul de la table qu'il suppose est si long, qu'il faudrait avoir un grand nombre de fonctions à calculer sur le même module, pour se livrer à un travail préliminaire aussi considérable : pour atteindre plus facilement le même but, l’auteur montre qu’un tableau formé XV) HISTOIRE DE L'ACADÉMIE, de quelques lignes seulement, d’après un module donné, peut servir à calculer jusqu'à dix décimales , ou plus, les fonctions E et F correspondantes à une valeur quelconque de l’ampli- tude $; et qu'il suffit pour cela d'ajouter au calcul ordinaire de l'interpolation, celui de quelques formules trigonométri- ques très-faciles. La méthode se simplifierait sensiblement si l'on se bornait à sept décimales; mais on la trouve exposée avec détail, et appliquée à des exemples, avec tous les soins nécessaires, pour que l'exactitude des résultats puisse être ga- rantie jusqu à la quatorzième décimale. Cette précision ne sera peut-être jamais nécessaire : elle est la limite du degré d’exac- titude auquel on peut parvenir par les tables connues. La table des logarithmes des nombres, moyennant quelques ar- tifices de calcul, pourrait donner jusqu’à 20 ou 22 décimales; mais au-delà de ce nombre, il faut revenir aux calculs arith- métiques ordinaires, par lesquels seuls on peut obtenir un degré d’exactitude indéfini. Telle est en substance l'introduction mise par l'auteur en tête d’un ouvrage dont il nous est impossible de donner une idée plus nette et plus complète. Le lecteur le trouvera riche en formules, en développements pleins d'adresse , et en tables subsidiaires, calculées scrupuleusement, les unes jusqu’à dix et les autres jusqu'a quatorze décimales, avec les différences jusqu'au 3° ou 4° ordre. Histoire de l'astronomie du moyen âge. Vol. in-4°, de 700 pages, avec 17 planches. Par M. DELAMBRE. L'auteur appelle moyen âge de l'astronomie l'intervalle écoulé depuis l'époque à laquelle les Grecs ayant cessé d’é- PARTIE MATHÉMATIQUE. Xvi] crire, ont été remplacés par les Arabes, les Persans et les Tartares, jusqu'à celle où Copernic, en rendant à la terre le mouvement que l’on avait attribué faussement au soleil , a mérité d'être appelé le premier fondateur de l'astronomie moderne. Les Arabes ont conservé religieusement les théories des Grecs; ils n’ont rien changé ni à la forme des instru- ments, ni à la maniere de s’en servir; mais ils en ont eu de plus grands et de mieux divisés; leurs observateurs ont été plus nombreux ; et dès les temps d'Almamoun on voit déja des améliorations sensibles dans les éléments de la théorie du so- leil, dans l'obliquité de l'écliptique et la précession des équi- noxes. L'introduction des sinus et sinus verses par Alba- tegmus, celle des tangentes par Aboul-Wéfa; celle des arcs subsidiaires pour simplifier une formule complexe, par Ebn- Jounis, ont changé entièrement la face du calcul astrono- mique. Les Arabes ont marqué avec plus de précision le temps des phénomènes. Albategnius avait tiré de l'analemme une règle en deux parties, pour trouver la hauteur d’un astre par la hauteur du pôle, la déclinaison et l'angle horaire. C’est la formule fondamentale de la trigonométrie moderne. Le même auteur a modifié cette formule en substituant les sinus verses aux cosinus, pour trouver l'heure par la hauteur d’un astre dont on connaît la déclinaison et l'ascension droite. Il paraît cependant que les Arabes ont fait peu d'usage de cette seconde règle, et que, le plus souvent, ils ont trouvé suffi- sant de déterminer l'heure à la manière d'Hipparque, au moyen de l'astrolabe, ou planisphère, qui leur servait à ob- server la hauteur et les dispensait du calcul trigonométrique. On a vu dans l'astronomie ancienne, que Hipparque avait imaginé cet instrument pour trouver l'heure, la nuit, au 1818. Histoire. C xvii] HISTOIRE DE L'ACADÉMIE, moyen d'une étoile; à plus forte raison savait-il la détermi- ner le jour par le soleil. En adoptant l'astronomie des Grecs, les Arabes ne se sont pas montrés moins soigneux à recueillir les réveries astrolo- giques des Chaldéens : ils y appliquèrent leur trigonomeétrie, imaginèrent de nouveaux systèmes pour la division du ciel en douze maisons. Ces méthodes, perfectionnées par Régio- montanus, et sur-tout par Magini, ont été traduites en for- mules modernes; on les verra toutes appliquées au calcul de la même géniture : on pourra juger de leurs différences et des incertitudes qu'elles devaient ajouter à des prédictions dont les principes fondamentaux étaient d’ailleurs une foule de suppositions purement arbitraires, fruits de la crédulité ou plutôt du charlatanisme. La gnomonique , qui n’est plus aujourd'hui qu’une appli- cation curieuse de l'astronomie , en constituait alors une partie intégrante, par la commodité qu'offraient de bons cadrans so- laires pour donner les heures civiles et pour régler les clep- sydres. Sans rien changer à la théorie des Grecs, les Arabes, en étudiant l’analemme de Ptolomée, ont su en tirer des so- lutions plus faciles et plus variées; ils ont inventé nombre de cadrans soit fixes, soit portatifs : Aboul-Hhasan a tiré des sections coniques des règles curieuses pour tracer les arcs des signes d’une manière indépendante des lignes horaires. Ses méthodes n'avaient pourtant ni la simplicité ni la géné- ralité qu'il était possible de donner à ses pratiques inutile- ment compliquées. Il n'avait pas vu que, pour tous les ca- drans qu’on peut décrire sur un plan, le paramètre dé la section est toujours le même, puisqu'il est égal à deux fois la cotangente de la déclinaison du soleil, et qu’il ne dépend PARTIE MATHÉMATIQUE. xix ni de la section conique, ni de la hauteur du pôle sur le plan. Personne encore n'avait aperçu ce théorème; personne n’a- vait songé à disposer l'équation générale des sections coni- ques d’une manière adaptée spécialement à la gnomonique. On donne cette équation, qui ne dépend que de la hauteur du pôle, de la déclinaison du soleil, et enfin de la hauteur du gnomon, qu'il convient de prendre pour unité. De cette même formule on verra découler une méthode graphique extrêmement simple pour décrire les arcs des signes, dont le calcul trigonométrique est toujours beaucoup plus long, et exige en outre l'angle horaire du plan. Aboul-Hhasan a fait le premier cette remarque curieuse, que tout plan peut être considéré comme l'horizon d’un lieu dont il est facile de déterminer la longitude et la latitude géographique; le premier, il a donné la projection du pôle sur le plan, et par conséquent un point commun à toutes les lignes horaires équinoxiales; le premier il a parlé de substituer ces heures toujours égales aux heures antiques et temporaires, dont les Arabes faisaient exclusivement usage , à limitation des Chal- déens et des Grecs. La gnomonique, en passant en Europe, a éprouvé d’autres changements : au style droit on substitua un axe dont l'ombre tout entière va successivement couvrir toutes les lignes ho- -raires ; on imagina pour les arcs des signes des constructions graphiques qui, mises en formules, se sont trouvées iden- tiques aux méthodes modernes. Mais les Européens ne dé- montrent rien , non plus que les Arabes; leurs ouvrages sont souvent inintelligibles ; pour se démontrer leurs pratiques obscures, leur historien a senti la nécessité de mettre en une soixantaine de formules trigonométriques tout ce qui C2 xx HISTOIRE DE L'ACADÉMIE, constitue cette partie de la science astronomique; il y trouve les démonstrations que Clavius n'avait pu deviner; il en tire en outre des moyens nouveaux pour tracer, soit graphique- ment, soit par le calcul, les arcs des signes, la méridienne du temps moyen, et toutes les lignes horaires des cadrans sans centre, soit babyloniens, soit italiques, soit français. Les Persans et les Tartares ont montré le même respect pour les théories grecques. Ils ont adopté la trigonométrie arabe, ils ont amélioré les mouvements du soleil; nous de- vons même à ces derniers un catalogue d'étoiles tout nou- veau, celui d'Ulugh-beig. Les premiers astronomes euro- péens ne se sont pas montrés imitateurs moins serviles : Alphonse a fait calculer de nouvelles tables , qui ont été em- ployées deux cents ans. Regiomontanus a plusieurs fois dé- claré n'en faire aucun cas; mais il n'eut ni le temps, ni les moyens d'en composer de meilleures : il s'est beaucoup oc- cupé de trigonométrie, mais sans aller aussi loin qu'Aboul- Wéfa, ou qu'Ebn-Jounis ; il n'a pas senti l'utilité des tan- gentes, dont il avait trouvé les formules dans Albategnius. Notre système trigonométrique a été complete pour la pre- miere fois par Viète, qui, le premier, fit paraître une table où les tangentes et les sécantes étaient réunies aux sinus, et qui depuis a donné les quatre formules analytiques qui suf- fisent à tous les cas des triangles sphériques obliquangles. On lui doit des formules curieuses et très-utiles pour les tangentes, les sécantes, et même pour les sinus; il a créé la théorie qu'il a nommée des sections angulaires; enfin de ses théorèmes souvent obscurs on aurait pu tirer l'expres- sion des différences premières et secondes des sinus, et des moyens plus expéditifs et plus sûrs que ceux qu'il indique PARTIE MATHÉMATIQUE. XX] pour la construction des tables trigonométriques. Nous n’a- vons pu qu'indiquer brièvement les sujets qu'on trouve dé- veloppés dans cette astronomie du moyen âge, qui renferme de plus l'analyse de tous les ouvrages un peu remarquables qui ont paru dans cet intervalle de plus de six cents ans, qui nous conduit à Copernic. Ce restaurateur de l’astrono- nomie, Tycho, Kepler et Galilée, fourniront une matière abondante pour le premier volume de l’A4stronomie moderne, dont l'impression est commencée. Nous avons dit, dans l'Histoire de 1817, les obligations que nous avons à M. Sédillot pour ce qui concerne les Arabes et les Tartares. Mémoire sur la topographie et le relief du sol de Paris ; par M. Girarp. Les trois îles que forme la Seine, et les quartiers qui s'é- tendent au nord et au sud, étaient autrefois des prairies que la Seine inondait toutes les fois qu’elle venait à croître au- delà de son volume ordinaire. Le gravier qu’elle charriait et la vase qu’elle tenait suspendue se déposaient sur la surface des prés. Chaque année une nouvelle couche de ces dépôts en élevait le sol, en même temps que des dépôts de même nature exhaussaient le fond du fleuve. À mesure que la vallée se peupla, le besoin de se garantir des inondations força les habitants d'accélérer le travail de la nature, en rapportant de nouvelles terres ; ou à élever sur lés bords du fleuve des digues ou des quais qui les missent à l'abri des déborde- ments; et le lit de la Seine s'étant constamment élevé, il fallut périodiquement exhausser les quais, et recharger le XXi] _ HISTOIRE DE L'ACADÉMIE, sol des différents quartiers. Les décombres qu'on portait hors de l'enceinte habitée formérent, avec le temps, les buttes des Moulins et de Notre-Dame de Bonne-Nouvelle, les monticules de la rue Hyacinthe, de la rue Taranne, et le labyrinthe du Jardin des plantes. La population s'étant accrue, on aplanit convenablement la surface de ces dé- pôts de décombres, et l’on y traça de nouvelles rues. Les boulevards du nord, restes d'anciens remparts, forment une enceinte plus élevée que le sol de la ville et des fau- bourgs adjacents. Il s'agissait de déterminer le relief actuel des différents quartiers. Dès 1742, Buache avait formé le projet d'un plan hydrographique de Paris. L'inondation de 1740 avait déja fourni les premières données d’un nivellement général des quartiers qui avaient été couverts par les eaux. Il leva en- suite plusieurs profils du terrain, en traversant la ville en différents sens. Ce travail est le seul qui ait été rendu pu- blic. Pour recommencer ce travail sur une plus grande échelle, on débuta par tracer sur le grand plan de Verni- quet les hauteurs des différents points de la surface, rappor- tées à un plan, horizontal élevé de 76 mètres environ au- dessus des basses eaux de la Seine. Après avoir soigneuse- ment vérifié ces premières cotes, on y a successivement in- tercalé de nouvelles cotes de plus en plus rapprochées. De cette manière, on s’est procuré le niveau aux intersections de chaque rue, et ensuite d'espace en espace entre deux intersections consécutives. On a joint par des lignes droites tous les points qui ont été trouvés à la même hauteur; ce qui a donné une suite de polygones irréguliers , dont le tracé indique les intersections de la surface du sol par des plans PARTIE MATHÉMATIQUE. XXIi] horizontaux élevés d’un mètre au-dessus les uns des autres. Ces espèces de courbes indiquent ainsi les limites des terrains qui seraient inondés, si l’on supposait que les eaux de ia Seine vinssent à s'élever successivement de mètre en mètre au-dessus de leur niveau. Mémoire sur la Marine et les Ponts-et-Chausseées de France et d'Angleterre , contenant deux relations de voyages faits par l'auteur dans les ports d'Angle- terre, d'Ecosse et d'Irlande ; par M. C. Durin, de l'Académie des sciences. | Ce recueil est plus riche de beaucoup que son titre ne l'annonce. La relation des deux voyages ne contient encore que la partie historique et la partie descriptive; elle fait de- sirer et promet un ouvrage plus étendu, qui contiendra de plus la partie théorique. Elle est suivie de la notice des constructions de la rade de Plymouth, et d’une description du canal Calédonien, faite pour intéresser toutes les classes de lecteurs ; du au d’un grand ouvrage, déja fort avancé, sur | he RS navale des seizième et dix-neuvième siècles; des expériences sur la flexibilité et l’elasticité des -bois ; d’un Mémoire très-détaillé et plein de vues utiles sur le réta- blissement de l’Académie de marine ; d’un autre Mémoire sur l’état actuel du musée maritime établi dans l'arsenal de Toulon, et sur les ouvrages du Puget conservés dans ce même arsenal ; enfin de la description des machines à l'usage de la marine, construites à Rochefort, d'apres les projets de M. Het Le tout est accompagné des rapports faits à l'Académie des sciences, à l’Académie des arts, et par MM. les XXIV HISTOIRE DE L'ACADÉMIE, officiers de marine de Toulon, aux époques où l'auteur a soumis ces divers ouvrages à leur examen. L'Histoire de l'Institut a fait connaître ceux de ces rapports qui ont été lus aux deux Académies ; nous nous bornerons à transcrire la conclusion de MM. les officiers de marine. « La Commis- sion pense que le plan général de l'auteur est bien établi pour produire un ouvrage bon, utile et intéressant, digne des encouragements du gouvernement d’une grande nation (il est question du tableau de l'architecture navale); et elle ose espérer que S. Exc. le ministre de la marine ne refusera pas au jeune auteur les nobles et dignes encouragements dont les principaux viennent d'être indiqués.» On disait plus haut, qu'il était à desirer que M. Dupin fût mis à portée « de parcourir les principaux ports de la France et de l’étran- ger; de juger tout avec l'impartialité qui le caractérise, de rassembler d'importants mémoires, pour les mettre en œuvre avec cette constance inébranlable que montre l’auteur dans la poursuite de ses utiles entreprises.» Ce vœu de la Commission avait été émis en 1814 : le recueil que nous annonçons prouve qu'il est heureusement et en grande partie réalisé. Essai historique sur les services et les travaux scienti- Jiques de Gaspard Monge; par M. C. Durin, élève de Monge et membre de l'Institut de France. « Disons hardiment que de tels hommes font honneur à la société... Honorons-les pendant leur vie; et, quand la mort nous les enlève, accordons sans hésiter à leurs mânes le tribut de nos éloges, de nos regrets et de notre vénéra- PARTIE MATHÉMATIQUE. XXV tion... Si nous osons entreprendre cette tâche, ce n’est pas pour donner un juste mais stérile éloge à d’illustres concep- tions et aux fatigues d’une vie consacrée à les réaliser par des institutions utiles à la patrie; c'est pour conserver, c’est pour propager les idées d’un esprit supérieur, c’est pour consolider l'empire des vérités qui lui sont dues. » « G. Monge naquit à Beaune en 1746. ...... Ses progrès méritèrent qu'on le chargeät de professer, au collégé de Lyon, la physique qu'il venait d'y apprendre l’année précé- dente.... Étant venu à Beaune, au temps des vacances, il entreprit de lever le plan de cette ville. Il n'avait pas d’in- struments pour cetté opération, il en composa. Il fit hom- mage de son travail à l'administration de sa ville natale, qui récompensa le jeune auteur aussi généreusement que pou- vaient le permettre les moyens bornés de la richesse com- munale. Un lieutenant-colonel du génie militaire, qui se trouvait alors à Beaune, obtint que Monge fût attaché comme dessinateur et comme élève à l'école d'appareilleurs et de conducteurs des travaux des fortifications... . Comme il des- sinait avec une rare perfection, on considérait uniquement son talent manuel. Il sentait déja sa force, et ne pouvait sans indignation songer à l'estime exclusive qu'on accordait à ses dispositions mécaniques. «J'étais mille fois tenté, « disait-il long-temps après, de déchirer mes dessins, par « dépit du cas qu’on en faisait, comme si je n’eusse pas été «bon à produire autre chose.» Le directeur de l’école le chargea des calculs pratiques d’un cas particulier de défile- ment, opération qui sert à combiner le relief et le tracé des fortifications avec le moins de frais possible, et de manière que le défenseur s’y trouve à l'abri des coups de l’assaillant. 1818. Histoire. D XXV] HISTOIRE DE L'ACADÉMIE, Monge abandonna la route suivie jusqu'alors, et découvrit la première méthode géométrique et générale qu’on ait don- née pour cette importante opération... En appliquant suc- cessivement son talent mathématique à diverses questions d'un genre analogue, et généralisant toujours ses moyens de concevoir et d'opérer, il parvint enfin à former un corps de doctrine; ce fut sa Géométrie descriptive.. .. Pendant plus de vingt ans, il lui fut impossible de faire enseigner au corps de Mézières l'application de sa géométrie aux tracés de la charpente. 11 fut plus heureux pour l'application à la coupe des pierres; il suivit avec soin les méthodes employées à cette étude, et les perfectionna en les simplifiant par sa géo- métrie.... « Ses travaux scientifiques’le firent nommer répétiteur de mathématique et de physique, pour suppléer Nollet et Bossut; ensuite il fut nommé professeur titulaire : alors il tourna ses vues vers l'étude d’une foule de phénomènes de la nature ; il fit de nombreuses expériences sur l'électricité ; il expliqua les phénomènes qui se rapportent à la capillarité, fut le créateur d’un système ingénieux de météorologie ; il opéra la composition de l'eau ; il arriva à cette grande dé- couverte sans avoir eu connaissance des recherches un peu antérieures de Lavoisier, Laplace et Cavendish. Il ne se con- tentait pas d'expliquer aux élèves, dans les salles d’études , les théories de la science et leurs applications ; il aimait à conduire ses disciples par-tout où les phénomènes de la na- ture et les travaux de l’art pouvaient rendre sensibles et in- téressantes ces applications. Il communiquait à ses disciples son ardeur et son enthousiasme, et changeait en plaisirs passionnés des observations et des recherches qui, dans PARTIE MATHÉMATIQUE. XXVi] l'enceinte d’une salle et par des considérations abstraites, n'eussent paru qu'une pénible étude. » « En 1980, afin d'attirer Monge à Paris, on l'adjoignit à Bossut, professeur du cours d’hydrodynamique institué par Turgot. Pour concilier les devoirs des deux places qu’il rem- plissait, il passait six mois de l’année à Mézières et six mois à Paris. La même année il fut recu à l’Académie des sciences; et à la mort de Bezout , en 1783, il fut choisi pour remplacer ce célèbre examinateur de la marine. Plus d’une fois le mar- quis de Castries invita Monge à récrire le Cours élémentaire de mathématiques pour les élèves de la marine; mais tou- jours Monge s'en défendit. « Bezout a laissé, disait-il, une «veuve qui n'a d'autre fortune que les écrits de son mari, «et je ne veux point arracher le pain à l'épouse d’un homme « qui a rendu des services importants à la science et à la «patrie. » Le seul écrit élémentaire que Monge publia fut son Traité de statique; et, à quelques passages près, où l'évidence supplée à ce qu'on pourrait desirer d’une plus grande rigueur, la statique de Monge est un modèle de lo- gique, de clarté et de simplicité. » î « À une époque où les malheurs publics appelaient dans les rangs supérieurs tous les talents utiles et courageux au secours de Ja patrie menacée d’une invasion, Monge fut créé ministre de la marine. Il fit tout pour conserver à la France les hommes recommandables par leur mérite ou leur bra- voure ; il descendit jusqu’à la prière pour obtenir de Borda la continuation de ses services, et il eut le bonheur de réussir. Il fut un des hommes les plus actifs dans les tra- vaux de la science pour le salut de l’état. On lui dut la construction des nouvelles machines à broyer qu’on établit D2 XX VII] HISTOIRE DE L'ACADÉMIE, dans la poudrière de Grenelle, et des foreries établies sur des bateaux de la Seine. 11 passait les jours à donner l'in- -struction et le mouvement aux ateliers, et les nuits à ré- diger son Traité de l’art de fabriquer les canons, ouvrage destiné à servir de manuel aux directeurs d'usines et aux artistes. » « Ce fut dans son cours à l’école normale, qu'il fit pa- raître pour la premiere fois ses Lecons de géométrie des- criptive, dont il ne lui avait pas été permis plus tôt de ré- véler les secrets. Un autre établissement qui précéda l’école normale dans l'ordre des conceptions, mais qui, mûri plus long-temps par ses auteurs , la suivit de près dans l’ordre de l'exécution, vint réaliser une partie des espérances qu’on avait vainement conçues à la fondation de la première école encyclopédique qu'on eût ouverte en France. Monge y ap- porta les résultats de la longue expérience de Mézières; il y joignit ses vues profondes et neuves; il créa le plan des études, indiqua leur filiation , et proposa les moyens scien- tifiques d'exécution. Sur quatre cents élèves appelés dès l’ori- gine à l’école polytechnique, les cinquante plus instruits furent réunis dans une école préparatoire : ce fut Monge qui les forma presque seul ; restant le jour entier au milieu d'eux, leur donnant tour-à-tour des lecons de géométrie et d'analyse ;... les exhortant, les encourageant, les enflam- mant par cette ardeur , cette bienveillance, cette impétuosité de génie, qui le faisaient, en faveur de ses élèves, déployer les vérités de la science avec une force et un charme irrésis- übles. Le soir, quand les travaux étaient finis, Monge en commençait d’un autre ordre ; il écrivait les feuilles d’ana- lyse qui devaient servir de texte à ses leçons prochaines, et PARTIE MATHÉMATIQUE. XXIX le lendemain. il se trouvait avec ses élèves au premier mo- ment de leur réunion. La bonté de Monge n'était en lui ni le calcul du sage, ni même l'effet de l'éducation : c'était une bienveillance naïve qu'il devait à son heureuse organi- sation. Il était né pour aimer et pour admirer. Il fut excessif dans son admiration comme dans son amour : par-là peut- être il ne resta pas toujours dans les limites où l'aurait ar- rêté l’impassible et froide raison. . .. Comme il était le père des élèves au sein de l’école, tel il était, au sein des camps, le père du soldat. » « En parcourant l'Italie pour recueillir les statues et les tableaux cédés à la France, Monge avait été frappé du contraste singulier que présentent les monuments des Grecs et ceux des Égyptiens transportés aux bords du Tibre, sous Auguste et ses sûüccesseurs. Les caractères comparés des mo- numents antiques, devaient être le sujet fréquent des entre- tiens du vainqueur de l'Italie et du commissaire qui recueil- lait, pour la patrie, les plus beaux fruits de la victoire, Monge concevait l’idée de reculer le domaine de l’histoire par-delà les âges fabuleux de la Grèce; d'apprendre, avec la certitude du géomètre, ce qu'étaient les travaux des an- ciens sages de l'Orient; de retrouver, par la contemplation de leurs monuments, ce qu'ont été... les procédés de leurs _arts, les usages de leur vie publique, l'ordre et la majesté de Le fêtes et de leurs cérémonies. » « Monge, chargé par le général en chef d'apporter au di- directoire le traité de Campo-Formio, fut, peu de temps après, au premier rang des savants qui composèrent la com- mission des sciences et des arts qui devait accompagner l’ex- pédition d'Égypte. Il fut le premier nommé président de XXX HISTOIRE DE L'ACADÉMIE, l'Institut d'Égypte formé sur le modèle de l’Institut de France. Deux fois il visita les pyramides ; il vit l'obélisque et les grandes murailles d'Héliopolis ; il étudia les débris d’anti- quités épars autour du Caire et d'Alexandrie. Ce fut dans une marche pénible, dans l’intérieur du désert, qu'il trouva la cause de cet étonnant phénomène connu sous le nom de mirage. Au temps de la révolte du Caire, il n'y avait dans la ville que quelques détachements de troupes; le palais de l'Institut n’était gardé que par les savants : on avait pro- posé de se faire jour les armes à la main jusqu'au quartier- général; mais Monge et Berthollet, songeant que le palais contenait les livres, les manuscrits, les plans et les antiqui- tés, fruits de l'expédition, soutinrent que la conservation de ce précieux dépôt était le premier devoir des savants; et ils se déciderent à mourir, s’il le fallait, en défendant ce trésor, » « Monge présida la commission des sciences et des arts d'Égypte ; il contribua puissamment par ses conseils à la sage conception du plan, à la coordonnance, à la proportion des parties principales, enfin aux moyens de perfectionner les arts d'exécution. » « Monge avait une manière inimitable d'exposer les vé- rités les plus abstraites, et de les rendre sensibles par le langage d'action. .. . Cependant ce n’est qu’en combattant la nature, qu'il avait pu devenir un excellent professeur : il par- lait difficilement et presque en bégayant; il avait dans le discours une prosodie vicieuse qui lui faisait allonger à faux certaines syllabes et précipiter les autres avec rapidité. Sa physionomie, habituellement calme, présentait l’aspect de la méditation ; mais lorsqu'il parlait, on croyait tout-à-coup PARTIE MATHÉMATIQUE. XXX] voir un autre homme ; un feu nouveau brillait tout-à-coup dans ses yeux, ses traits s’animaient, et sa figure devenait inspirée... . ASE « Monge, affaibli par les années, était encore la victime . d’une imagination qui, suivant les temps adverses ou pro- pices, l'emportait au-delà des justes craintes, comme au- delà des justes espérances. . .. Ses derniers moments ont été sans dernières pensées, sans derniers épanchements, sans derniers adieux : il s’est éteint dans le silence , sans angois- ses, Sans terreur et sans espérances. ... La régularité du service n'a pas permis qu'une jeunesse généreuse vint, à l'heure de ses funérailles, déposer la palme de la reconnais- sance et des regrets sur la tombe de leur premier bienfai- teur; mais, dès l'aurore qui suivit le jour des derniers de- voirs, les élèves s’acheminèrent en silence vers le lieu de la sépulture, et y déposèrent un rameau de chêne auquel ils suspendirent une couronne de laurier. Vingt-trois anciens éleves de l’école polytechnique, tous résidants de la ville de Douai, se réunirent spontanément, et décidèrent d'écrire en commun à M. Berthollet, pour le prier de diriger l'érection d'un monument, qui serait. élevé aux frais des anciens élèves de l’école polytechnique , en l'honneur de Gaspard Monge. M. Bertrand, notaire, rue Coquillière, n° 46, à Paris, s'est chargé de recevoir les souscriptions. Les anciens élèves qui ont cultivé spécialement l'architecture, sont invités à con- courir pour le monument de Monge, et à faire passer leurs plans , accompagnés d’un devis estimatif, au même M. Ber- trand. » Cette notice est terminée par la liste des élèves qui ont déja souscrit. La seconde partie contient le catalogue et XXXi] HISTOIRE DE L'ACADÉMIE, l'analyse raisonnée des écrits de Monge, tant de ceux qu'il a publiés séparément , que des mémoires qu'il a insérés dans les recueils de l'Académie ou de l'École polytechnique, et dans plusieurs autres collections. Tous ces ouvrages sont généralement connus et appréciés ; nous avons dû extraire de préférence des renseignements plus fugitifs, qui, fai- sant mieux connaître l'ame de M. Monge, expliqueront l’at- tachement de ses anciens élèves et les regrets de ses anciens confrères. “ _ Des Marais-Pontins ; par M. pe Proxy. Paris, 1818. Déja dans la séance publique du 9 janvier 1815, l'auteur avait lu un Mémoire où il donnait une idée générale du grand problème du desséchement et de l’assainissement des Marais-Pontins. Ce Mémoire reparaît ici à la tête de l’ou- vrage, dont il forme le discours préliminaire; et il y est ac- compagné de notes intéressantes qui n'ont pu entrer dans le texte. Dés l'an 44a de Rome, époque de la construction de la voie Appia, le sol Pontin était en état de marais. Environ cent cinquante ans après, Cornélius Cethegus en entreprit le desséchement. Ces travaux furent ensuite négligés jus- qu'à la dictature de Jules-César, dont les vastes projets furent interrompus par sa mort. Néron, Trajan et leurs succes- seurs s’occupèrent beaucoup de la voie Appia et fort peu des Marais-Pontins. Théodoric en confia le desséchement à Dé- cius. Léon X et Sixte-Quint firent exécuter des travaux dignes d’être cités; mais rien ne se peut comparer aux tra- vaux exécutés de 1777 à 1796, sous le pontificat de Pie VI, PARTIE MATHÉMATIQUE. Exxi] qui y dépensa 9 millions de francs. Malheureusement, les projets étaient établis sur des vues systématiques, très-spé- cieuses et très -séduisantes, bonnes à beaucoup d’égards, mais qui, trop généralisées, ont eu de funestes conséquences ; en sorte que ces travaux, considérés sous le point de vue hydraulique, n’offrent que de grandes ébauches, dans les- quelles même on avait entièrement néglué des parties d’une baute importance, qu'alors on jugeait inutiles. On trouvera dans l'ouvrage que nous annonçons des détails historiques et critiques , très-circonstanciés sur tous ces objets. On s'est assuré, par des sondes, que la mer a baigné le pied des montagnes qui limitent les côtés oriental et septen- trional des Marais-Pontins. L'ensemble des phénomènes qui ont concouru à la formation de ces marais, présente à l'es- prit, d'une part, des fleuves et des torrents tombant dans le golfe antique que couvraient les îles de Circé, Zanoni et Ponza; d’un autre côté, la mer formant deux bandes de dunes, dont la plus récente a fini par fermer la communica- tion de la mer avec le golfe intérieur. La méthode des Col- mates, qui consiste à employer des courants d’eau chargée de limon, pour exhausser le terrain par des dépôts et des attérissements successifs, n'offre ici qu'une ressource secon- daire d’un effet très-lent. Malgré son insuffisance, il sera bon de continuer les essais commencés en ce genre; et M. de Prony en propose encore l'usage pour la bonification de plusieurs terrains auxquels il la croit immédiatement appli- cable; mais elle ne doit être considérée que comme un moyen subsidiaire. Le moyen principal ne peut être qu'un bon sys- tème de canaux d'écoulement. Pour établir ce système, il fallait se procurer un plan exact du terrain, de ses déclivi- 1818. Histoire. E XXXIV HISTOIRE DE L'ACADÉMIE, vités, de ses rivières, de ses torrents, de la quantité de pluie qu'il recoit annuellement, et de celle qu'il rend par l'évapo- ration. Ce travail était loin d’être complet; M. de Prony a commencé par y ajouter ce qu'il laissait encore à desirer : au moyen de trois signaux placés, à des distances connues, sur une même ligne droite, il a déterminé de la manière la plus expéditive tous les points desquels il pouvait observer ses trois signaux. Il a réduit ce problème curieux en for- mules générales et commodes. Au fond, ce problème n'est qu'un cas tres-particulier du problème général par lequel Hipparque déterminait les excentricités et les distances du soleil et de la lune. Snellius a fait le premier descendre des cieux ce problème, qu'il a transformé en question de simple géodésie. Le problème d'Hipparque à été mis par nous en formules générales qui comprennent le cas envisage par M. de Prony. Nous avons été curieux de comparer les deux méthodes; nous les avons trouvées également exactes et également expéditives. C'est ainsi qu'en réunissant aux différentes pieces qui lui ont été communiquées les résultats de ses opérations géodé- siques et des observations qu'il a faites pendant son sejour dans les Marais-Pontins, et ceux dés nivellements, des sondes et autres travaux exécutés à sa prière par l'habile in- génieur M. Scaccia, l’auteur a pu se procurer, pour ses pro- jets de desséchement, un système de données et de maté- riaux beaucoup plus complets que ceux d’après lesquels on avait établi les projets précédents. Les progrès récents de la’science des eaux courantes lui fournissaient encore des moyens que n'avaient pas eus ses prédécesseurs. Par l'assem- blage de tous ces moyens , il a pu former ün plan qui.pourra PARTIE MATHÉMATIQUE. XXXY satisfaire aux diverses conditions que comporte ce célebre problème. L'ouvrage est divisé en quatre sections. La première com- prend la description et la mesure du bassin Pontin; la se- conde, l’état où se trouvaient les Marais avant les travaux ordonnés par Pie VI. Dans la troisième, on trouve la des- cription de leur état actuel , et l'analyse des différents projets formés avant 1811. Enfin la quatrième renferme les vues par- ticulieres de l’auteur, et ses projets pour la bonification ul- térieure des Marais-Pontins. Dans toutes on voit une foule de tableaux curieux et instructifs, dans lesquels on a rassem- ble tous les résultats des observations et des calculs. On sent qu'il nous est impossible d'en faire aucune analyse. Nous y prendrons seulement la valeur de l’ancien pied romain, dé- duit de la distance des bornes milliaires 42 et 46, les seules qui n'eussent pas été renversées et déplacées sur la voie Ap- pia. Cette valeur est de 0",294246, ou de 10"10",044 de l’ancien pied de Paris. Dans la quatrieme section, qui est la plus céndie, et qui est plus spécialement po a ia des théories hydrau- liques , on remarquera les conséquences fàcheuses des défri- chements ; des détails curieux sur l'état actuel du P6, qui, par les attérissements qu'il forme à son embouchure, gagne sur la mer 7o mètres par an, au lieu de 25 qu'il gagnait an- nuellement sur la mer entre les douzième ét dix-septième siècles; sur les attérissements du Tibre; enfin sur les effets contraires produits par les eaux de la mer sur la côte qui s'étend d’Anzo à Astura. « Les Italiens sont peut-être les premiers qui aient donné en Europe l'exemple de modérer par des chütes les pentes et les vitesses des grands courants, É E2 XXXV] HISTOIRE DE L'ACADÉMIE, et d'en soutenir les eaux; mais jamais ils n’ont employé les écluses qu'à ces usages : la gloire de s’en servir pour établir la communication entre deux grands bassins , était réservée à la France. Le canal de Briare, qui joint la Loire à la Seine, et qui a été terminé en 1642, est le premier exem- ple de l'union de deux fleuves par un canal traversant le plateau posé par la nature entre leurs deux bassins. Cet exemple a été suivi avec le plus grand succès par les au- teurs du canal du Languedoc, commencé en 1668 et ter- miné en 168r. Ainsi l’école hydraulique française a la gloire exclusive d’avoir inventé les canaux à point de partage, et d’avoir donné, pour première application de cette in- vention , deux monuments comptés à juste titre parmi les plus beaux de ce genre, et dont la nouveauté n'a pas été assez remarquée ou sentie par ceux qui s'occupent de l’his- toire de l'art. » Le reste de l'ouvrage offre l'application détaillée des prin- cipes et des formules consignées par l'auteur dans ses /?e- cherches physico-mathematiques sur les eaux courantes. Ces principes et ces méthodes établis sur les meilleures expé- riences que l’auteur a pu recueillir, ont déja été employés utilement dans plusieurs circonstances, et notamment dans les travaux d’un grand desséchement, celui des marais de Bourgoin dirigé par M. Roland. Le résumé général de cet immense travail offre cette con- séquence importante : la possibilité de renfermer dans des canaux réguliers toutes les eaux qui inondent ce sol infor- tuné, et de leur donner une issue libre et facile à la mer. Le desséchement complet étant supposé opéré par les me- sures indiquées, l'entretien du sol en parfaite culture ne se- PARTIE MATHÉMATIQUE. XXXVI; rait ni difficile, ni dispendieux; mais il devrait être suivi avec une vigilance extrême. On ne peut aujourd’hui prévoir avec beaucoup de certi- tude ce qui résultera de tant de recherches pour l’assainis- sement et la prospérité de la Campagne de Roine : l’auteur a fait tout ce qui dépendait de lui; et son travail offrira, du moins, aux jeunes ingénieurs , un exemple utile de la com- binaison de la théorie avec l'expérience pour composer le projet d’un grand desséchement. RAPPORTS ADOPTÉS PAR L'ACADÉMIE. Euclide grec, latin et français, de M. PeyrarD; com- missatres, MM. de Laplace, Legendre, Prony, et Delambre, rapporteur. . Ce troisième et dernier volume contient les livres XI, XII et XIII des éléments, le livre des données, et enfin les deux - livres supplémentaires sur les corps réguliers, qui ne sont pas véritablement d’Euclide, et qu’on attribue généralement à Hypsicle d'Alexandrie. L'éditeur croit devoir se disculper d'avoir reproduit ces deux livres , dont il ne témoigne pas faire beaucoup de cas; mais, outre qu'il nous paraît assez justifié par l'exemple de tant d’autres éditeurs, dont l’un même a cru devoir ajouter un nouveau supplément à ceux d'Hypsicle, nous pouvons dire que ces livres sont une suite nécessaire du XIII livre d'Euclide, qui s'était contenté d’effleurer la théorie des corps réguliers. En effet, Euclide s'était borné à déterminer les arêtes de ces corps, sans dire un seul mot ni des inclinaisons mutuelles de leurs faces, ni XXXVII] HISTOIRE DE L'ACADÉMIE, de la distance de ces faces à leurs pôles, ou au centre de la sphère, non plus que des surfaces ou des solidités des cinq corps. | Ce n’est pas qu'Hypsicle ait réellément épuisé la matière; il se borne à donner les surfaces du dodécaèdre et de l'ico- saèdre ; il en détermine le rapport, qui est en même temps celui de leurs solidités, puisque les faces de ces deux corps sont à égales distances du centre de la sphère; remarque qu'il aurait pu étendre à l'hexaëdre et à l’octaèdre, ainsi que l'a fait un de ses continuateurs. R Un article plus complet est celui des inclinaisons. Pour les déterminer, Hypsicle expose d’abord les procédés géné- raux de son célèbre maître Isidore. Ce géomètre avait cru inutile d'y ajouter les démonstrations, tant la chose lui pa- raissait évidente. En la démontrant, on croirait d’abord qu'Hypsicle a voulu l’obscurcir; mais, suivant toute appa- rence, Isidore, quand il imagina ses constructions, avait sous les yeux les figures en relief de tous les corps réguliers. Avec ce secours, que M. Peyrard s'est aussi procuré, on n’a besoin que de ses yeux pour apercevoir la parfaite exacti- tude de ces pratiques : alors on parvient à comprendre faci- lement les figures tracées par Hypsicle, et les démonstra- üons s'éclaircissent. M. Peyrard reproche à ces démonstra- üons leur peu de rigueur et d'élégance. Nous convenons qu'elles sont beaucoup trop longues; mais la faute en doit être rejetée sur Euclide, qui s'est avisé, l'on ne sait trop pour- quoi , d'établir que l'inclinaison est l'angle aigu que forment deux faces contiguës. Dans la réalité, l'inclinaison n’est un angle aigu que dans le tétraèdre ; elle est un angle droit dans l’hexaèdre; elle est un angle obtus dans les trois der- PARTIE MATHÉMATIQUE. XXXIX niers : en sorte que l'angle aigu ne se trouve nullement dans l'hexaèdre, et que, dans les trois autres corps, il est l'angle entre une face et le prolongement de la face voisine. Or la moitié des démonstrations d'Hypsicle est employée à déter- miner l’espèce de l'angle, tandis que les constructions d'Isi- dore donnent toujours l'angle véritable, soit aigu, soit obtus, et qu'il est impossible de jamais s’y tromper. On pourrait ajouter que ces démonstrations, quoique dif- férentes pour chacun des cinq corps, dépendent cependant d’une considération unique, qui les éclaircirait, même indé- pendamment de la figure en relief. Le principe consiste à imaginer, dans chaque solide, une ligne qui serve de base commune à deux triangles isoscèles, dont les côtés sont con- nus. Dans un de ces triangles, l'angle au sommet est tou- jours connu; dans l’autre, il est l’inclinaison que l'on cherche: il en résulte une relation fort simple entre les cosinus des deux angles ; et si l’on applique à ces triangles une des règles de notre trigonométrie moderne , on en tire aussitôt une équation identique à celle que fournit directement la trigo- nométrie sphérique. Maïs cette règle moderne était absolument ignorée d'Eu- clide, d'Isidore et d'Hypsicle, qui, dans la solution très-dé- feétueuse qu'il nous à donnée ailleurs d’un problème résolu à-peu-près dans le même temps’ par Hipparque, nous a laissé une preuve palpable de son ignorance éomplete en l'une et l'autre trigonômétrie, C'est une-chosé'assez remarquable, que cette théorie des corps réguliers, si embarrassée ét si imparfaitc chez les Grecs et leurs continuateurs, dépende tout entière d'un triangle sphérique rectangle, tracé à la surface de la sphère à laquelle xl HISTOIRE DE L'ACADÉMIE, on veut inscrire à-la-fois tous les corps. Les angles de ce triangle sont toujours donnés; et les formules qui en ré- sultent pour les trois côtés, fournissent les expressions les plus simples des arêtes, des distances polaires de tous ces plans , de leurs inclinaisons mutuelles, de leurs distances au centre de la sphère, enfin des moyens pour évaluer avec une égale facilité les surfaces soit partielles, soit totales, et les solidités des cinq corps, le tout en parties du rayon de la sphère pris pour unité. « Outre la quantité précise et numérique des inclinaisons, inaccessible à la géométrie d'Euclide, le même triangle four- nit encore la relation la plus simple pour déterminer la na- ture et le nombre des corps réguliers inscriptibles à la même sphère; en sorte qu'un seul triangle, une formule unique suffit à tout. C'est ce que l’un de nous démontrera dans l'Histoire de l'astronomie moderne à l’article de Kepler, qui avait voulu démontrer, par les cinq corps, qu'il ne pouvait exister d’autres planètes que celles qui étaient connues de temps immémorial. » « Une autre remarque non moins curieuse et non moins neuve, c'est que les expressions trigonométriques générales (les plus expéditives qu'on puisse imaginer pour le calcul logarithmique) se transforment avec une facilité singulière en ces expressions irrationnelles que les Grecs appelaient majeure, mineure et apotome. En effet, tous les angles pri- mitifs sont de 30, 36, 45, 54, 60 et 90°, dont les lignes trigonométriques ont des valeurs irrationnelles, qui con- duisent tout aussitôt aux constructions d'Euclide et d'Isi- dore. Il en résulte que les inconnues de chaque problème peuvent s'exprimer à volonté par les sinus, les cosinus et PARTIE MATHÉMATIQUE. xl; les tangentes, soit de l’arc lui-même, soit de sa moitié; qu’on a toujours six expressions différentes pour chaque chose ; que, parmi tant d'expressions, on peut toujours choisir les plus commodes, et que le calcul s’abrége encore par cette considération, qu'il n'y a presque pas une de ces quantités qui ne se retrouve dans un autre corps, de manière que pour les quinze inconnues du problème général, on n'a jamais à faire que quatre calculs en tout. C’est ainsi qu'après avoir complété et simplifié les constructions d'Euclide pour les cinq arêtes, nous avons pu réunir, en des triangles recti- lignes isosceles, qui ont pour base commune le diamètre de la sphère, des constructions plus faciles et plus uniformes que celles d’Isidore. » « Nous croyons donc pouvoir nous écarter de l'opinion du traducteur, et regarder les deux livres d'Hypsicle comme un reste curieux de l'ancienne géométrie, en ce qu'ils ren- ferment des notions qui ne se rencontrent pas ailleurs. L'important est d’avoir des théorèmes vrais et des construc- tions irréprochables. Quant aux démonstrations, elles ont leur importance, sans doute; mais si l’on en est peu satis- fait, il n’est pas bien difficile d’en trouver’ d’autres. D'ail- leurs, nous avons dit quel est le principal défaut de celles d'Hypsicle; c'est que dans toutes la première moitié est par- faitement inutile. » «Il est vrai que la démonstration de la deuxième propo- sition du second livre était absolument inintelligible ; mais il est permis de croire que la faute en est aux copistes. M. Peyrard en a donné une nouvelle, qui pourrait bien être celle de l'auteur. {1 y a aussi une démonstration d'Eu- clide que tous les commentateurs s'étaient accordés à re- 1818. Histoire. F xlij HISTOIRE DE L'ACADÉMIE, garder comme altérée, ou tout-à-fait insuffisante. Il s'agit d'une des propositions les plus importantes du livre des don- nées. Elle peut se réduire à une équation du 4° degré, qui se résout à la maniere de celles du second. M. Peyrard en donne d’abord le calcul algébrique; puis, traduisant en style moderne la démonstration grecque, il en fait mieux sentir la marche rigoureuse et la légitimité. » « De toutes les propositions qu'offre ce dernier volume, il n’en est aucune qui ait donné à l'éditeur autant de peine que la 17° du XI livre des éléments. Dans tous les manu- scrits et les éditions quelconques, la figure était tellement incomplète, qu'il était impossible d'y appliquer la plupart des raisonnements d'Euclide. Au moyen de quelques lignes ajoutées, le traducteur a rendu la démonstration exacte de tous points. » « Dans tout le reste, c'est, comme dans les volumes pré- cédents, la fidélité la plus grande dans la traduction; ce sont les mêmes soins pour épurer le texte, et pour en re- cueillir les variantes, qui forment ici quatre- vingt-quatre pages. L'éditeur avait avancé que la belle édition d'Oxford n'était pas plus correcte que l'édition de Bâle, dont elle avait reproduit toutes les fautes, même les plus palpables, aux- quelles elle en avait ajouté d’autres en nombre assez consi- dérable, dont la première était exempte. Cette assertion avait étonné et devait trouver des incrédules ; mais on ne voit pas ce qu'on pourrait objecter aux huit pages où M. Pey- rard a placé le tableau comparatif des deux éditions. «M. Peyrard vient de terminer heureusement un travail « long et pénible. Nous proposerons à l'Académie d’étendre «au 3° volume l'approbation qu’elle a bien voulu accorder PARTIE MATHÉMATIQUE. xl] «aux deux autres ; dans l'espoir que cette approbation mé- « ritée pourra faciliter à l’auteur la publication de son 4pol- « lonius, dont le manuscrit est terminé depuis long-temps. » Nous nous faisons un plaisir d'annoncer que cette nouvelle édition est commencée, et que nous en avons déja vu plu- sieurs feuilles. Traité de Géométrie descriptive ; par M. VALLÉE, ingé- nieur des ponts-et-chaussées. Commissaires, MM. de Prony, Fourier, et Arago, rapporteur. « Les lecons de Géométrie descriptive du savant illustre (M. Monge), premier auteur de cette doctrine, renferment une exposition des principes de la science, qui sera toujours citée comme un modele parfait de clarté. On regrette toute- fois que cet ouvrage ne soit pas plus étendu, car les artistes qui n’ont pas fait une étude spéciale des mathématiques, ne peuvent se rendre les méthodes de projection familières, qu'en variant les données des questions, et en s’exerçant sur un grand nombre d'exemples. M. Hachette avait rempli en partie cette lacune par un supplément auquel l'Académie a donné son approbation. C'est en marchant sur les traces de ces deux savants, que M. Vallée a rédigé son Traité, qu'il a divisé en six livres formant plus de 500 pages in-4°....... « Les commissaires, qui ont porté leur attention principale- ment sur les parties les plus difficiles, se plaisent à recon- naître qu'elles sont rédigées avec beaucoup de méthode et de clarté. Les cinquante-neuf planches qui accompagnent le texte sont parfaitement dessinées. Chaque épure offre, dans les plus petits détails, toutes les constructions qu’il faut exé- F2 xliv HISTOIRE DE L'ACADÉMIE, cuter pour arriver à la solution du problème; et néanmoins on n'y remarque aucune confusion. En un mot, cet ouvrage nous a paru digne, sous tous les rapports, de l'approbation de l’Académie. Il est à desirer que cet habile ingénieur puisse trouver, dans les encouragements du gouvernement, les moyens de livrer son ouvrage à l'impression, et qu'il achève ceux dont il s’est déja occupé, et qui doivent conte- nir les applications de la géométrie descriptive à l’art du charpentier et à celui du tailleur;de pierres. » (1) Traité de Geodesie ; par M. Puissanr. Seconde edition. « La première édition de cet ouvrage ayant été prompte- ment épuisée, l’auteur, en préparant la seconde, a su l’en- richir d’additions importantes... .» La base du Systéme mé- trique, la Mécanique céleste, et les Mémoires de M. Legendre, sont des mines fecondes où il a souvent puisé. Mais on au- rait tort de supposer que, même alors, il s’est réduit au rôle de simple copiste ; les démonstrations nouvelles et élé- gantes qu'il donne des formules déja connues , l'enchaïînement qu'il a su établir entre des théories, qui souvent n'avaient été présentées que séparément , et par différents géomètres, montrent qu'avant de prendre la plume, M. Puissant avait fait l'étude la plus approfondie des méthodes de la haute géodésie. Les commissaires pensent que le nouvel ouvrage de cet habile ingénieur est digne à tous égards de l’approba- tion de l'Académie. (x) L'ouvrage vient de paraître. PARTIE MATHÉMATIQUE. xlv Modèle d'une machine propre à élever les eaux par l'ac- tion combinée du poids de l'atmosphère sur la surface du reservoir inférieur et le refoulement de cette eau dans un tuyau ascendant, implanté sur une espèce de réservoir intermédiaire, rempli en vertu du vide que le méme mécanisme y opère ; par MM. Lacroix et Peurvay. Commissaires, MM. de Prony, Charles, et Girard, rapporteur. Les commissaires expliquent d’abord comment on a sup- pléé aux pistons, aux clapets et aux soupapes ordinaires. De la description qu'ils donnent ensuite de toutes les par- ties de la machine, et des moyens qui la mettent en jeu, ils concluent qu’elle se réduit à une espèce de roue garnie d’un certain nombre d'ailes susceptibles de s'ouvrir pour former successivement autant de cloisons dans le coursier circulaire qu'elles parcourent. L'idée de cette espèce de pompe leur paraît avoir beaucoup d’analogie avec une idée que Conté avait mise à exécution douze ans avant son dé- part pour l'Égypte. Il leur paraît même que la machine de Conté était un peu plus simple; ce qui n'empêche pas que le nouveau modèle ne prouve des artistes habiles et intelli- gents. Si l’idée n’est pas aussi nouvelle qu’ils en paraissent persuadé, il n’en est pas moins vrai de dire, que leur pompe aspirante et foulante peut, dans certains cas, être substi- tuée avec avantage aux pompes ordinaires, et que les auteurs . ont donné une preuve de talents qui méritent d'être encou- ragés. Ils ajoutent qu'on trouve dans la Description des ma- chines de Servière, celle d'un appareil exécuté dans la maison xlv] HISTOIRE DE L'ACADÉMIE, de M. Lenoir, faubourg Saint-Antoine, dans lequel il est aisé de reconnaître une analogie sensible avec les machines de Conté et de MM. Lacroix et Peulvay. Notice relative aux chemins de fer ; par M. GarLors. Commissaires , MM. de Prony, et Girard, rap- porteur. On avait pratiqué, depuis long-temps, pour l'exploitation des mines, en quelques contrées de l'Allemagne, des che- mins ou charrières formées de pièces de bois longitudinales, sur lesquelles on faisait cheminer, dans les galeries, des chariots appropriés à cette espèce de roulage. Depuis, on a imaginé, en Angleterre, de substituer à ces pièces de bois des chemins ou charrieres en fonte de fer: M. Gallois s’est proposé de les décrire avec plus de détails qu’on ne l’a fait jusqu’à présent, et d'en apprécier les avantages comparative- ment aux chemins ordinaires ou aux canaux navigables. C'est sur-tout dans les environs de Newcastle que les che- mins de fer ont été singulieérement multipliés. Suivant l’au- teur, une superficie de vingt-huit lieues quarrées en pré- sente, à ciel ouvert, un développement de soixante-quinze lieues, tandis que l'intérieur des mines de houille en offre un développement tout aussi considérable. Cinq ou six cha- riots, quelquefois entièrement construits en fer, étant atta- chés à la file les uns des autres, sans autre moteur que leur propre poids, descendent sur ces chemins. Au moyen d’une poulie ou d’un treuil de renvoi, un certain nombre de cha- riots qui descendent, en font remonter un certain nombre d'autres, pour se décharger ou prendre charge au sommet du plan incliné qu’ils parcourent. . PARTIE MATHÉMATIQUE. xlvi} L'objet le plus important que M. Gallois paraît avoir en vue consiste à faire connaître les avantages que peuvent avoir, sur les routes ordinaires et les canaux de naviga- tion, les chemins en fer, tels que l'Angleterre en présente une multitude d'exemples. ... On est naturellement porté à croire, qu'à moins de se trouver dans des circonstances tout-à-fait particulières , il y aura toujours une grande éco- nomie de force motrice dans les transports par eau, par cela seul que le poids tout entier de la masse à transporter est soutenu par le fluide, tandis que le plan incliné sur lequel roule un chariot, ne soutient qu’une partie de son poids... Au reste, il est hors de doute que diverses localités où il se- rait de toute impossibilité d'ouvrir un canal, peuvent se prêter à l'établissement des chemins de bois ou de fer. Ré- pandre les procédés de leur construction , c’est indiquer à notre industrie de nouveaux moyens de s'exercer. Mais préa- lablement, il faut rendre moins dispendieuse la fabrication de la fonte de fer. ... Cet important objet a fixé particulière- ment l'attention de M. Gallois. Sa Notice sur les chemins de fer est un des résultats les plus utiles des recherches aux- quelles il s’est-livré pendant son séjour en Angleterre; nous pensons que l’Académie doit en encourager la publication. Méthodes pour tailler les habits; l'une par M. Bec, tailleur à Paris; l'autre par M. CHomerEAU, tailleur à Brie-Comte-Robert. Commissaires, MM. de Prony, et Molard, rapporteur. Voici la conclusion du rapport. « Il est possible que MM. Beck et Chomereau se soient xlvii] HISTOIRE DE L'ACADÉMIE, rencontrés sur quelques points avec ceux qui ont traité la même matière avant eux; mais on ne doit pas moins leur savoir gré de leurs efforts pour assujettir l’art du tailleur à des règles qui tendent à rendre compatibies la perfection et l'économie. Nous pensons que l’Académie doit des éloges à leur zèle et à leurs talents. » Mémoire sur une Question generale de Mécanique ; par M. Biner. Commissaires, MM. de Laplace, Poisson, et Fourier, rapporteur. « L'auteur considère principalement le rapport des forces avec les aires décrites par les rayons vecteurs, autour d’un centre fixe. ... Il nomme vitesse aréolaire la fluxion de l'aire tracée par le rayon vecteur, pour la distinguer de la vitesse linéaire qui anime actuellement le mobile dans sa trajec- toire.... Il nomme force vive aréolaire la somme des pro- duits des masses par les quarrés de ces forees aréolaires , et détermine les relations mathématiques de ces quantités. . Si l’on représente par une droite donnée de grandeur et de position la force qui agit sur un point mobile, et que sur cette ligne comme base on forme un triangle dont le sommet soit le centre fixe, cette figure représentera la force de rota- tion ; le plan du triangle est celui dans lequel elle exerce son action. Si le mobile passe du lieu qu'il occupe dans un autre infiniment voisin, son rayon vecteur décrira une aire infini- ment petite, dont le plan peut différer de celui de la force de rotation. Si sur ce dernier plan on projette l'aire décrite, la projection représentera l'effet virtuel de la force de rota- tion, estimé dans le plan même de cette force. Cela posé, PARTIE MATHÉMATIQUE. xlix on peut énoncer comme il suit le résultat principal auquel l'auteur est parvenu. » « Si l'on multiplie la quantité de chaque force de rota- tion par son effet virtuel, et si l’on ajoute tous les produits semblables, la somme représentera l'accroissement instan- tané de la force vive totale, relativement aux aires décrites, ou la somme des produits de chaque masse par le quarré de la vitesse avec laquelle l'aire augmente. En déterminant ainsi l'élément de la force vive totale pour chacun des instants qui se succèdent , et en ajoutant ces éléments, l'intégrale ex- primera l'accroissement que reçoit la force vive pendant un temps donné. » « Cette proposition est entièrement semblable à celle qui concerne les forces vives linéaires. .... La même analyse qui fait connaître ce que ces propositions ont de com- mun, montre aussi en quoi elles different. . .. Kepler, à qui l'on doit la découverte du mouvement elliptique, re- connut aussi, par la comparaison assidue des observations, que le rayon vecteur de la planete décrit des aires propor- tionnelles aux temps; Newton s’éleva ensuite de la connais- sance des lois mathématiques données par les observations, à celle de la cause physique des phénomènes. Il vit que cette égalité des aires suppose nécessairement que la force qui retient la planète dans son orbite est dirigée vers le soleil. Chacune des lois de Kepler devint ainsi un théorème de dynamique. D’Arcy, Bernouilli et Euler reconnurent que si l'on projette les aires sur un plan quelconque, la somme de ces aires, mesurées dans un même sens, augmente propor- tionnellement au temps écoulé. » 1018. Histoire, G l HISTOIRE DE L'ACADÉMIE, Ici les commissaires rappellent briévement le théorème de Newton sur la conservation du centre de gravité; celui de M. de Laplace concernant le plan du maximum des aires, les recherches d'Euler sur la mesure et la composi- tion des moments. « Les propositions relatives à cette com- position , et plusieurs théorèmes nouveaux sur le même sujet, sont exposés de la maniere la plus claire et la plus élégante dans le Traité et les Mémoires que M. Poinsot a publiés sur la statique. Tous ces résultats s'y trouvent dé- duits d’une seule méthode qui lui est propre, et qui a l’avan- tage de les rendre tres-sensibles, et de prouver immédiate- ment que les forces de rotations se décomposent, se distri- buent et se détruisent suivant des règles sauront sem- blables à celles qui conviennent aux forces de translation. Il faut ajouter à cette énumération l'exposé des propriétés relatives aux aires, que Lagrange a donné dans sa Mécanique analytique. » « La méthode de M. Binet consiste à déduire des équations différentielles du mouvement, les expressions relatives aux aires produites et à leurs fluxions du premier et du second ordre, en prouvant que les expressions se combinent entre elles de la mème maniere que celles des arcs décrits par les mobiles et celles des vitesses linéaires. On peut considérer cette analogie entre les aires et les trajectoires sous un autre point de vue : en effet, si, dans l'équation générale qui ex- prime que la somme des aires projetées croît proportionnel” lement aux temps, on suppose que le centre des rayons vec- teurs est infiniment éloigné de l’origine des coordonnées, on voit immédiatement que la vitesse avec laquelle la somme PARTIE MATHÉMATIQUE. I; des aires augmente, est la vitesse avec laquelle le centre de gravité du système s'éloigne d'un plan fixe. Et l’on déduit ainsi le théorême sur le mouvement du centre de gravité, de celui de la conservation des aires. Il en est de même des équations qui expriment les trois parties de la force vive de rotation. » « Une dernière partie du Mémoire présente un rappro- chement ingénieux de plusieurs théorèmes généraux de la mécanique. Pour faire voir que les propositions dérivent d’une source commune, l'auteur ajoute entre elles les équa- tions différentielles des mouvements, multipliées par des coëéfficients qui peuvent contenir les variables et leurs dif- férentielles du premier ordre. Il se propose de déterminer ces coëfficients, en sorte que l’on obtienne des expressions intégrables. On arrive par ce moyen à un résultat général qui fournit le théorême relatif au mouvement du centre de gravité ,-celui des aires, celui des forces vives, enfin celui que l’auteur a démontré. » «Lesrecherches qui tendent à perfectionner la mécanique générale intéressent à-la-fois les arts industriels et l'étude de la nature. C’est d’après ces motifs, que la commission a jugé le travail de M. Binet digne de l'approbation de l’Aca- démie, soit pour le choix du sujet, soit pour la manière dont ce sujet est traité. Elle propose l'impression de ce Mémoire dans le recueil destiné aux savants étrangers. » li] HISTOIRE DE L'ACADÉMIE, Moyen nouveau de commettre les cordages ; proposé par M. Dusoux, maitre cordier de la marine mar- chande, à Bordeaux. Commissaires, MM. Girard, Molard, Sané, et Dupin, rapporteur. Commettre un cordage, c'est mettre ensemble et unir par la torsion les éléments de ce cordage, qu'on appelle torons, et qui sont eux-mêmes formés d'autres torons com- mis ensemble, ou par de simples fils tordus uniformément. Duhamel - Dumonceau a fait däns nos arsenaux de nom- breuses expériences pour apprécier les méthodes indiquées nee Jui par le tâtonnement et conservées par la routine ; ce qu'on pourrait lui reprocher serait d’avoir employé des appareils grossiers qui ne lui permettaient pas d'atteindre un degré suffisant de précision. Depuis quelques années on a construit , sur les plans de M. Hubert, des dynamomètres , qui servent à déterminer la force des chanvres ; les torsions qu'ils peuvent produire ne dépassent pas 2000 kilogrammes : il faudrait qu’on püt en faire qui produisissent des torsions de 100000 kilogrammes, tels à-peu-près que ceux qui ont été construits en Angleterre pour éprouver la force des câbles de fer et des cables de chanvre. En France, M. Ma- restier est le premier qui ait résolu le problème de filer le chauvre et de commettre des fils d'une longueur indéfinie dans un espace limité. M. Chanot résolut ensuite le même problème, et, par un hasard remarquable, sa solution se trouva la même que celle de M. Marestier , dans toute la partie importante du mécanisme. M. Hubert est parvenu à peigner les chanvres par un moyen à-la-fois expéditif et ré- PARTIE MATHÉMATIQUE. li] guler; à les filer avec un rouet léger, sans que l’ouvrier ni le rouet changent de position. Enfin M. le colonel Lair vient de perfectionner le commettage des câbles ‘en rendant par- faitement régulière la force de retenue qu'il faut opérer pour empècher les torons du cäble de tortiller trop vite et sans être parvenus au degré de raccourcissement le plus avantageux. M. Duboul, arrivé déja à un talent d'exécution fort remar- quable, se présente aujourd’hui comme auteur de plusieurs moyens d'ajouter à la force des cordages. I1 donne généra- lement un moindre raccourcissement à ses cordages ; pro- portionnellement, il tord davantage les simples torons, et fait ensuite d'autant moins considérable le premier et sur- tout le second commettage. Les commissaires discutent les inconvénients et les avantages de ces innovations : ils pensent que les proportions nouvelles présentées par M. Duboul, méritent un mür examen, et qu'elles doivent être appréciées par une suite d'expériences comparatives bien faites. Les deux machines qué M. Duboul propose pour le commettage, n'offrent, à la vérité, rien de nouveau sous le point de vue mécanique; elles n’en sont pas moins utiles dans l'applica- ton qu'il en fait à la fabrication des cordages. La conclusion du rapport est , que la persévérance avec laquelle M. Duboul s'occupe du perfectionnement de son art, et les sacrifices qu'il fait pour atteindre ce but, méritent de justes éloges ; que ses deux machines, fort peu dispendieuses , peuvent convenir , dans beaucoup de cas, aux travaux de nos ateliers. Enfin les proportions de torsions présentées par M. Duboul offrent des avantages théoriques assez grands pour être ten- tées et examinées avec tout le soinset le zèle que pourront y mettre des ingénieurs amis des progrès de nos arts. iv HISTOIRE DE L'ACADÉMIE, Lampe de MM. Gacneau et Bruner. Commissatres , MM. Gay - Lussac, Thénard, et Charles, rappor- teur. « L'emploi des lampes à double courant d’air est devenu si universel, qu'il forme par lui-même une branche de fa- brique très-étendue, et qui s'accroît sans cesse. Chaque jour on imagine des formes et des compositions nouvelles. . Parmi ces divers systèmes de lampes , dont plusieurs rem- plissent tres-bien leur destination, il en est une sur-tout qui depuis vingt ans s'est maintenue constamment supé- rieure aux autres par l'éclat de sa lumière et la régularité de son action. C’est la lampe de Carcel.... Mais, quelque par- faite que soit cette lampe, la cherté de sa main-d'œuvre, la délicatesse de sa construction , la difficulté plus grande en- core de sa restauration faisait desirer que des artistes intel- D ligents apportassent à cette lampe quelques modifications qui, en lui conservant tous ses avantages, simplifiassent son mécanisme, rendissent son exécution et sur-tout sa res- tauration plus facile. Telle est la lampe de MM. Gagneau et Brunet. Mise en concurrence: avec l’une des meilleures du système de Carcel, pendant trois nuits consécutives , ellea conservé l'égalité pendant dix heures. La nouvelle lampe peut même aller jusqu'a douze heures; mais ce terme, qui est celui de la marche du ressort, est à-peu-près superflu , puisqu'au bout de dix heures la mêche est charbonnée. . :. La durée de la mèche est subordonnée à la qualité de la fibre plus ou moins capillaire du coton dont elle est tissue ; + mais cette durée dépend encore plus de la bonté de l'huile, PARTIE MATHÉMATIQUE. lv et dans les expériences on a toujours employé la meilleure. « Par une application inverse qu'ils viennent de faire de la pompe connue depuis cent ans sous le nom de pompê des prétres, les auteurs ont pu remplacer la pompe de Carcel par deux diaphragmes de taffetas ciré; le frottement devenu presque nul leur a permis de supprimer deux roues, de di- minuer la force du ressort moteur, et d’élever néanmoins l'huile à une plus grande hauteur. L'introduction d'un ré- servoir d'air rend cette élévation constante et continue, tandis que, dans là lampe dé Carcel, elle est intermittente comme les coups de piston, La faculté de donner à la base de la lampe et à sa colonne une forme plus svelte et plus légère, est encore un perfectionnement très -agréable: Un autre avantage c’est la facilité de la restauration , en cas que les diaphragmes aient besoin/d’être renouvelés. Mais une différence précieuse, et qui sera favorablement accueillie du public, c’est la diminution du prix.... De tout ceci nous croyons devoir conclure que leur lampe mérite l'appro- bation de l’Académie. » Mémoire sur les roues à élever l'eau ; par M. Navier. Commissaires MM. de Prony, Fourier, et Dupin, rapporteur. à | M. Navier se propose de déterminer le rapport entre la force motrice et l'effet produit dans les machines de rota- tion, employées pour élever l’eau. Le principe de la conservation des forces vives donne une relation mathématique entre les quatre espèces de fcrces Jui restent à considérer dans: le problème, quand on né- lvj HISTOIRE DE L'ACADÉMIE, glige le frottement et la cohésion de l'eau, qui sont peu de chose. Ce principe, découvert par Huyghens, fut élevé par Jean Bernouilli au nombre des lois fondaméntales de la dy- namique; Daniel en fit d’heureuses applications, et Borda s'en servit avec beaucoup de succès pour le calcul de plu- sieurs machines dont l'eau était le moteur. Dans celles que considère M. Navier, c’est l'eau qui est au contraire élevée par un moteur étranger quelconque. On doit à Borda la pre- miere évaluation exacte des forces vives perdues; mais il ne l'a donnée que dans des cas particuliers. C'est à M. Carnot que l’on doit la loi générale qu'il a renfermée dans le théo- rême suivant. « Dans tout système de corps en mouvement, qui passe d'une situation à une autre, la somme des quan- tités d'action qui ont été dans cet intervalle imprimées par toutes les forces, est toujours numériquement égale à la moitié de la somme des forces vives, acquises dans cet intervalle par les divers corps du système, plus la moitié des forces vives perdues par l'effet des changements brusques de vitesse, s'il y a eu de tels changements. » Les roues à élever l’eau se divisent en trois classes, selon que l'axe de rotation est horizontal, vertical, ou incliné. Dans la roue à godets, il y a force vive, acquise par l'eau à l'instant où elle est puisée, et force perdue à l'instant où elle est déversée. De la loi ci-dessus on tire le rapport de la force motrice, à l'effet de la machine; et par une simple différenciation, on obtient la vitesse qui donne le rapport le plus avantageux. Dans la roue à tympan il n’y a pas de force perdue; cette roue est plus avantageuse que la précédente. M. Navier entre dans de grands détails sur la pompe spi- PARTIE MATHÉMATIQUE. Ivij rale, formée par un tuyau de grosseur constante ou va- riable, plié en hélice sur un cône dont l'axe est horizontal. Cette machine ingénieuse a l'avantage très-précieux de don- ner un effet utile d'autant plus grand, qu'il s’agit d'élever l'eau à une plus grande hauteur. Le calcul de M. Navier dé- termine à quelle hauteur cet avantage commence à être bien sensible. Si l'on fixe à un axe vertical un siphon inchné de ma- nière à monter en sens contraire du mouvement de rota- tion, le bout inférieur étant plongé dans l’eau, l'eau s’élevera par l'effet de la rotation. L'auteur calcule l'effet d’une m2- chine formée de deux paraboloïdes tournant ensemble sur le même axe vertical, et réunis l’un à l’autre par des cloisons inclinées. Les vis d’Archimède composent la classe dont l'axe est incliné. Daniel Bernouilli s’est occupé de leur théorie ; mais il ne l'a pas épuisée, ainsi que le fait M. Navier. Pour le cas où un tuyau de diamètre constant, plié en spirale sur un cylindre dont l'axe est incliné, se remplit alternativement d’eau et d'air, il démontre d’une manière simple et élégante que la surface de l’eau doit être un paraboloïde, ayant pour un de ses diamètres l’axe du cylindre, et pour plan tangent, à l'extrémité de diamètre, la surface de l’eau tranquille. Pour la vis ordinaire, formée par les révolutions d’une face gauche, à pente constante dans un cylindre circulaire, après avoir cherché les quantités d’eau contenues dans chaque tour de la vis ; il dresse des tables pour abréger les calculs nécessaires, suivant que les vis sont plus ou moins contour- nées, et leur axes plus ou moins inclinés. « Le travail très -étendu dont nous venons de rendre 1818. listoire. H Ivii] HISTOIRE DE L'ACADÉMIE. compte, disent les commissaires , nous paraît être du nombre de ceux que l’Académie doit le plus encourager par ses suf- frages. Ete ndre par une marche uniforme les moyens théo- riques d’ap précier les effets des machines, c'est resserrer de plus en plus le cercle de l'empirisme; c'est fournir aux ar- tistes des moyens généraux de se rendre compte des avan- tages et des désavantages qu'ils doivent espérer ou craindre de leurs inventions. » L'Académie a arrêté, en conséquence, que le Mémoire e M. Navier serait imprimé dans le volume des savants étrangers. Rae sas NOTICE SUR LA VIE ET LES TRAVAUX DE M. PÉRIER, Par M. ze CH DELAMBRE, SECRÉTAIRE-PERPÉTUEL; Lue dans la séance publique de l'Académie royale des Sciences , le 22 mars 1819. Lx nom de M. Périer est celebre ; ses ouvrages sont dissé- minés sur toute la face de la France. Sa réputation s’est établie sans que jamais il ait eu le loisir, ni peut-être l’idée d'y songer. Il a peu écrit, et presque rien imprimé. Son frère, le digne compagnon de ses travaux, M. Périer Des- garennes , a montré une indifférence plus grande encore pour la renommée. Nous l’avions consulté, pour obtenir de lui les renseignements qui nous manquaient, et qui auraient pu donner à cette Notice plus d'intérêt et de variété; nous attendons encore une réponse. Réduits à consulter les re- gistres de l’Académie et les dépôts du secrétariat, nous n'’a- vons été secourus d’ailleurs que par le discours improvisé sur la tombe de M. Périer par l’un de ses confrères le plus à portée de le connaître et de l'apprécier; par les divers écrits de M. Girard sur les eaux de Paris, enfin par un Mé- moire que ce savant a bien voulu nous communiquer sur les H 2 1x NOTICE SUR LA VIE ET LES TRAVAUX divers établissements dont on est redevable à l’activité infa- tigable des deux frères. Jacques - Constantin Périer était né à Paris le 2 no- vembre 1742, de Joseph-Constantin Périer, receveur-gé- néral des domaines et bois de la généralité d'Alençon, (et d'Annre-Charlotte Poupardin). Il eut un autre frere, mort à l'âge de vingt-cinq ans, dans le département des Landes, où il s'occupait de travaux importants pour les arts. Ainsi MM. Périer avaient tous trois les mêmes goûts. Ils s'étaient formés eux-mêmes, ou presque sans aucun maître. Leurs premiers ouvrages furent des machines électriques et pneu- matiques, et divers autres instruments de physique expéri- rimentale. La premiere invention un peu remarquable de Constantin Périer fut une pompe centrifuge, dont l'effet étonna l'abbé Nollet. Plusieurs machines hydrauliques ou à vapeur, quoiqu'elles ne fussent encore que des essais, an- nonçaient déja ce que Périer devait être un jour. Le duc d'Orléans et le duc de Chartres, devant lesquels les deux frères furent admis à faire diverses expériences, surent les distinguer , ne cessèrent jamais de les protéger, et leur confèrent l'exécution d'une quantité de modèles , objets d'arts et de métiers, qu'ils destinaient à orner une galerie. Cette collection intéressante a été admirée de tous + ceux qui l’ont vue au conservatoire des arts et métiers. Les deux frères donnant insensiblement plus d'extension à leurs idées, formèrent le vaste projet de fournir d'eau tous les quartiers de Paris, au moyen des machines à va- peur. Par un rapport écrit tout entier de la main de Borda (signé en outre par d'Arcy, Bezout, le Roi et Bossut), nous voyons DE M. PÉRIER. Ix} que dans les premiers mois de 1776, M. Périer, âgé alors ‘ de trente-trois ans, avait présenté au ministre Malesherbes, qui l’avait renvoyé à l'Académie des sciences, un projet pour distribuer l'eau de la Seine à Paris. Les machines hydrau- liques qu’on y voyait alors, ne fournissant pas, à beaucoup près, une quantité d’eau suffisante pour les besoins; on s’oc- cupait depuis plusieurs années des moyens d'y suppléer. Parmi les projets présentés, celui de Desparcieux avait prin- cipalement fixé l'attention du public. Le gouvernement avait paru y prendre de l'intérêt, et s'il n’en avait pas entrepris l'exécution, on avait tout lieu de croire qu'il n'avait été re- tenu que par la crainte d’une dépense trop considérable. Les autres manieres de remplir le même objet se rédui- saient à faire usage, soit de machines mues par des chevaux, soit de nouvelles machines hydrauliques, soit enfin de pompes à vapeur. Les premières sont d’une trop grande dé- pense ; les secondes auraïent augmenté les embarras déja trop grands de la navigation; il ne restait qu’à employer les pompes à feu, ainsi que le proposait M. Périer. Son idée générale était de construire plusieurs machines pour distribuer l’eau de la Seine dans Paris, et de les établir dans les lieux qui lui seraient indiqués comme les plus con- venables. Chaque bâtiment devait contenir deux machines semblables, qui pourraient suppléer l’une à l’autre en cas d'accident; l'eau serait élevée d’abord dans un réservoir provisionnel, qui devait couvrir tout le bâtiment, et qu'on aurait soin d'entretenir toujours plein, afin d'en tirer de prompts secours contre les incendies. De ce réservoir de- vaient partir différentes conduites pour porter l'eau dans tous les quartiers, ‘et même dans toutes les rues. Chaque Ixij NOTICE SUR LA VIE ET LES TRAVAUX particulier en tirerait la portion pour laquelle il aurait sous- crit, au moyen d’un tuyau adapté à la conduite qui passe- rait devant sa maison; et elle lui serait distribuée deux ou trois fois par semaine, par des fontainiers chargés de ce soin. Tel était le plan général de M. Périer. Ce n'était point au gouvernement qu'il proposait cette dépense; il s'engageait à faire à ses frais tout l'établissement des machines, et même celui de la distribution de l’eau, moyennant un prix qui se- rait payé par les particuliers , propationnellement à la quan- tité d’eau qui leur serait fournie d'après leurs demandes. Les commissaires faisaient remarquer d'abord à l’Acadé- mie que ce projet n'avait rien de nouveau, rien qui ne fût déja exécuté ailleurs depuis long-temps. En effet, une partie de la ville de Londres était des-lors fournie d’eau par deux machines à vapeur, et cette eau était distribuée précisément de la même manière que le proposait M. Périer. Ils ajoutaient que, par-là même, le projet n’en devait inspirer que plus de confiance, et que si, d’un côté, il ne laissait, pour ainsi dire, à l’auteur que Ze mérite de limitation et celui d'une bonne exécution; d'un autre côté, le public ne courrait au- cun risque en l’adoptant. « M. Périer avait déja construit pour le jardin de Mon- ceaux une pompe à vapeur dont le mécanisme offrait des nou- veautés ingénieuses; mais cette partie des arts industriels, a dit M. de Prony, n’en était pas moins chez nous dans l’en- fance , à une époque où le célèbre mécanicien Watt en avait changé la face en Angleterre, par les plus brillantes inven- tions. » « Avant lui on n’employait la vapeur que pour obtenir un vide instantané, et c'était le poids de l'atmosphère qui pro- DE M. PÉRIER. Ixii} duisait l'effet utile de la machine. Watt a supprimé ce der- nier agent dans son mécanisme; l'effet entier est dù au ressort de la vapeur, et c’est là ce qui caractérise particuliè- rement la révolution opérée par ce grand artiste dans la construction des machines à feu, dont il a dü d’ailleurs chan- ger ou perfectionner toutes les pièces de détail. » Deux machines de ce genre étaient établies déja aux mines de charbon de Montrelais pres d’Ingrande-sur-Loire. Nous n'avons pu savoir quel fut l'ingénieur qui les avait con-. struites. Les commissaires avaient eu l’occasion d’en suivre la marche et les effets; et d'après un examen de plusieurs années , ils parlent du produit de ces machines, de leur dé- pense, et des accidents auxquels elles sont sujettes, en rap- portant toujours le résultat de leurs calculs au projet de M. Périer. L'auteur demandait un privilége exclusif pendant quinze ans, et l’exemption de tous droits sur le charbon de terre qui devait servir d’aliment à ses machines. ( Les commis- saires trouvaient ces prétentions fort raisonnables.) Il s’engageait à donner l’eau de la Seine aux particuliers, à raison de 10 liv. de rente annuelle, pour chaque muid d’eau qu’il fournirait par jour, et de 200 liv. une fois payées pour l'établissement des conduites. Cette condition était très-avantageuse au public, puisque ce prix n’était que la seizième partie de ce que l’eau se payait aux porteurs. Mais les commissaires craignaient que cette même condition ne se trouvät onéreuse à l'entrepreneur, et lui conseillaient de fixer un prix un peu plus élevé qu'il ne le demandait, afin que l'exécution du projet füt plus sûre et plus durable. Il paraît que M. Périer sentit lui-même la sagesse de cet Ixiv NOTICE SUR LA VIE ET LES TRAVAUX avis, car on sait que le prix de l'abonnement fut considéra- blement augmenté; ce qui provint sans doute de ce que, dans l’origine, on s'était fort exagéré la quantité probable des souscriptions particulières. La conclusion des commissaires était que M. Périer, dont les talents étaient déja connus par des machines de son in- vention et par beaucoup d'autres travaux, leur paraissait d'ailleurs très-propre à conduire une entreprise de cette es- pèce, qui demande des connaissances de plus d'un genre, une grande pratique des arts, et beaucoup de ressources dans l'esprit. Et par une addition, qui probablement était le résultat de la discussion dans le sein de l'Académie , les commissaires terminaient en disant : «Que le projet de Deparcieux. pa- raissait plus propreencore à remplir les besoins d’une grande ville, tant par la durée des ouvrages, que par la quantité d’eau que devait amener le canal projeté. » La fortune de MM. Périer, quoique assez considérable, ne suffisait pas, à beaucoup près, pour une entreprise aussi vaste; il fallait trouver une compagnie de capitalistes. M. Pé- rier l’aîné, dont le caractère était à-la-fois insinuant et entre- prenant, se chargeà de toutes les démarches; elles réussirent en peu de temps. Dès le 27 août 17978, la compagnie était formée; une première mise de fonds de 1440 mille livres fut partagée en 1200 actions; on s'était réservé la faculté d'en émettre de nouvelles, à mesure que l'entreprise acquerrait plus d'extension. MM. Périer , auteurs du projet et proprié- taires du privilége, étaient placés à latête de tous les travaux, avec le titre d’administrateurs perpétuels. L'acte d’associa- tion leur assurait d'ailleurs d'assez grands avantages; on DE M. PÉRIER. lxv résolut d'envoyer les deux frères en Angleterre pour y traiter de deux machines à vapeurs. Ils se disposaient à partir, lors- qu'on apprit qu'un ministre avait traité avec un Anglais pour le privilége de ces machines; il fallut obtenir son désistement qui coûta à la compagnie une somme de 4o ou 5o mille liv. M. Périer fit cinq voyages en Angleterre (son frère n’en fit qu'un seul). ILvisita quantité d'établissements où il puisa des connaissances précieuses. Rentré en France, il y fut bientôt suivi des pièces principales des deux machines que l'on voit encore à Chaillot. Il fit fabriquer dans ses propres ateliers les pièces accessoires qu'il lui parut inutile de tirer de l’'é- tranger. Au commencement de 1783, M. Périer présenta à l’Aca- démie deux Mémoires. Le premier contenait la descrip- tion de la pompe à feu qui venait d'être établie à Chaillot, pour élever les eaux de la Seine, dans plusieurs réservoirs, à 110 pieds de hauteur au-dessus des basses-eaux. Cette ma- chine était construite d'après les principes de M. Watt. Le second Mémoire contenait la description d’une seconde pompe, établie de même à Chaillot, et qui élevait l’eau dans un réservoir haut de 15 pieds, d’où en retombant elle fai- sait tourner plusieurs roues à godets destinées à mettre en jeu une machine à percer des tuyaux; des soufflets, des mar- teaux de forges, enfin toutes les parties d’un grand ate- lier (r). Dans la seconde machine, en prenant dans les construc- tions de M. Watt ce qui devait contribuer le plus à aug- * (x) Le rapport est tout entier de la main de Coulomb ; les autres commis- saires étaient Leroy, Bossut et Cousin. (19 mars 1783.) 1818. Æistotre. I Ixvi NOTICE SUR LA VIE ET LES TRAVAUX menter l'effet, M. Périer avait cherché à diminuer la de- pense, à simplifier l'exécution, à faciliter les réparations et l'entretien. ; + Pour connaître à tous les imstants la situation de sa pompe, l'auteur y avait adapté deux siphons remplis de mercure; lun, communiquant par une de ses branches avec le tuyau de vapeur, indiquait la force d'expansion ; l'autre, commu- niquant avec le condensateur, indiquait jusqu'a quel degré le vide s'y était opéré. Un moyen tres-simple et tres-ingé- nieux servait à remplir presque en entier le réservoir d'un air condensé, .qui était nécessaire pour donner plus d’uni- formité au mouvement de la conduite. Une autre idée éga- lement ingénieuse , et qui peut être d'un bon usage dans les grandes machines en mouvement, était d’avoir disposé les différentes parties du balancier, dont le poids est à-peu-près de 30,000 livres, de manière qu'il fit des vibrations à-peu- près isochrones à celles des coups de piston. Par ce moyen, les forces destinées à produire l'effet, ne sont presque pas altérées par l’inertie du balancier. Les commissaires demandaient l'insertion des deux Mé- moires au reeueil des savants étrangers; ils n’y ont cepen- dant jamais paru. 11 n’en est même fait aucune mention dans l’histoire imprimée de l'Académie, où le nom de M. Pé- rier ne se trouve nulle part, pas même dans les tables où les noms des académiciens de toutes les époques sont rangés par ordre alphabétique. 11 ne serait pas mentionné davan- tage dans l’histoire de l'Institut, si l'on n’y trouvait, tom. V, un Mémoire de quelques pages sur l'application de la ma- chine à vapeur à l'extraction du charbon ou des autres pro- duits des mines. DE M. PÉRIER. Ixvi On avait reconnu qu'il y avait beaucoup d'économie à épuiser les eaux des mines avec des machines à vapeur ; l'auteur en conclut qu'on doit trouver le même avantage à monter le charbon par le même moyen. Il ne se propose pas de décrire une machine connue depuis long-temps; il se borne à indiquer les changements qu'il a fallu apporter à la forme ordinaire pour adapter la machine à ce nouvel em- ploi. Le balancier s'y trouve remplacé par deux roues d'en- grenage, qui conduisent la tringle du piston suivant une di- rection perpendiculaire. Ce changement réduit le volume de la machine, la rend plus transportable, plus facile à dé- monter et remonter, lorsqu'on abandonne un puits d'extrac- tion, pour la placer sur un autre. Cette machine était destinée pour l'exploitation des minces de Litry, département du Calvados. Elle était alors montée dans les ateliers de Chaillot pour en faire l’expérience; nous en verrons plus loin la réussite. Les recueils de l’Académie ne nous fournissant aucun autre renseignement, nous avions d'abord consulté la Con- naissance des temps, pour savoir à quelle époque le nom de M. Périer avait été inscrit sur la liste des académiciens. Mais nous avons depuis retrouvé une lettre de M. Amelot à M. de Saron, président de l’Académie , du 30 mars 1783, onze jours après le rapport fait à l'Académie sur la pompe de Chaillot. ; Après la confirmation donnée par le roi à deux choix faits suivant les formes ordinaires, Le ministre ajoute que S. M. a également jugé à propos de nommer M. Périer à une place d'adjoint surnuméraire dans la méme classe, c'est-à- dire dans la section de mécanique. 12 Ixvii] NOTICE SUR LA VIE ET LES TRAVAUX En 1784, l'abbé Rochon étant devenu pensionnaire par la mort de Bezout, Coulomb le remplaca dans la section comme associé; M. Périer devint l’un des deux adjoints sans nomi- nation nouvelle; et son titre de surnuméraire fut seulement supprimé. Peu de temps après, par une nouvelle distribu- tion des places dans l’Académie, le titre d’adjoint fut changé en celui d’associé ordinaire, et M. Périer conserva ce dernier titre jusqu’à la suppression en 1795. A la formation de l’'In- stitut, il fut nommé, le 9 décembre 1795, membre de la sec- tion de mécanique. La grande entreprise des eaux de Paris n’absorbait ni tout le temps, ni toutes les ressources de MM. Périer. On leur vit exécuter les machines de Bagatelle, de Neuilly, du Rainey, et cent autres de mème espèce ; ils furent chargés de former le laminoir, les rouleaux et autres machines pour l'établisse- ment de Romilly; ils terminèrent celui de l’Indret et celui du Creusot commencé par un Anglais. Ils surent varier la construction de leurs machines, sui- vant les divers usages auxquels on les destinait. Les unes devaient servir à l'ornement des jardins, les autres à des la- minoirs; à la fabrique soit des boutons, soit du tabac; à l'épuisement des eaux, à donner le mouvement aux moulins, aux filatures de laine et de coton; à l'extraction des mine- rais, au forage des canons. Leurs ateliers étaient parvenus au plus haut point de fa- veur lorsque la révolution éclata; MM. Périer en furent les premières victimes, puisque, dès 1788, la compagnie des eaux, qui commençait à prospérer, se trouva renversée par une compagnie nouvelle. Une troupe de soldats suisses en- vahit à main armée leurs ateliers, d'où ils se virent contraints DE M. PÉRIER. Ixix de sortir avec leurs ouvriers. Pendant toute la durée du procès qui fut la suite de cet acte arbitraire, MM. Périer continuèrent de payer tous.ceux d’entre ces ouvriers qui purent prouver qu'ils n'étaient pas employés. Réintégrés au bout de six semaines par un arrêt du parlement, ils restèrent privés d'une pension de 20000 liv. qui Içar avait été assurée par la première compagnie. Vers le même temps, un hiver rigoureux ayant suspendu l’action de tous les moulins, Paris conçut les alarmes les plus fondées sur ses subsistances. MM. Périer exécutèrent, avec une promptitude et une perfection singulière, trois cents moulins et autant de bluteries, qui présentaient d’ailleurs un avantage bien précieux dans la circonstance, celui d’em- ployer une multitude de bras. Pour empêcher que de pareilles alarmes pussent jamais renaître, MM. Périer créèrent les moulins de l’île des Cygnes. Deux superbes machines à double effet et de rotation faisaient mouvoir douze moulins dont les meules avaient 6 #: 2" de diamètre. Quelques intérèts privés, quelques inconvénients parti- culiers, tels que les frais de combustible, qui empêchaient de considérer un tel établissement autrement que comme une ressource extraordinaire dans un besoin extrème, firent négliger peu-àa-peu cette usine superbe, dont il reste à peine quelques légers vestiges. Quand on voulut donner des canons à chacune des sec- tions de la garde nationale, MM. Périer se chargèrent de cette entreprise toute nouvelle pour eux. Ils coulèrent et fo- rérent toutes les pièces demandées. Bientôt de nombreuses armées leur donnérent de nouvelles occasions de déployer À Ixx NOTICE SURILAMVIE ETILES TRAVAUX leurs talents et leur industrie. On concut le projet de re- monter la marine; il: lui fallait une artillerie particulière : douze cents bouches à feu de différents calibres sortirent en différents temps de leurs fonderies. Ils ne pouvaient suflire à des besoins toujours croissants ; on wit se former un grand nombre d'ateliers qui tous adoptèrent les: procédés employés dans ceux de MM. Périer. Tant de travaux, une activité si soutenue, auraient dû leur procurer une fortune immense et bien légitime; mais qu'on se rappelle le discrédit des assignats, et les formes de liquidation établies par les divers gouvernements qui se sont succédé si rapidement, et l'on côncevra que le résultat dé- finitif de tant d'entreprises ait été la ruine presque complète des courageux entrepreneurs. Les manufactures qui se mul- tiplièrent bientôt leur offrirent quelques faibles dédomma- gements. M. Périer était resté seul propriétaire de l'établissement de Chaillot, qui, à sa retraite, fut acquis par M. Scipion Périer. L'établissement n'a point changé de nom; c'est un premier avantage, et d’ailleurs le nouveau possesseur ne né- glige rien pour en soutenir la réputation. Un décret, qui finit par n'avoir aucune exécution, avait institué des prix pour toutes les choses grandes et belles qui auraient pris naissance dans les dix années précédentes ; les rapports du jury et des différentes classes de l’Institut subsistent du moins, et l'on y trouve des témoignages écla- tants rendus aux titres avec lesquels M. Périer s'était pré- senté au concours. € Sa machine pour monter le charbon et les minéraux, disent les commissaires , présentait des difficultés dans sa DE M. PÉRIER. Ps Ixx| composition. Il fallait la rendre tellement docile, que le conducteur püt à volonté changer le mouvement pour mon- ter et descendre alternativement les tonnes, et l'arrêter tout- ä-fait pour donner aux ouvriers le temps de les vider. Le grand nombre de ces machines qui furent exécutées atteste leur utilité et leur succès. La seule compagnie qui exploite les mines de charbon auprès de Valenciennes, en possède vingt-une. Elles ont rendu à l’agriculture, au commerce et aux armées tous les chevaux qu'elles remplacent dans ce travail. Cette machine a été appliquée avéc le même succès aux filatures de coton de MM Bawens et Rossel à Gand; à Liége, à la fonderie de canons , ces mêmes machines menent vingt foreries. Elles ont été employées aux travaux du canal de Saint-Quentin, à lécluse de Condé, au bassin de Cherbourg; enfin c'est un moteur universel, dont on peut porter la puis- sance à celle de vingt chevaux travaillant tous à-la-fois. » « M. Périer exécuta plusieurs presses hydrauliques, qu'il a le premier importées en France. L'une d’elles est en acti- vité dans la manufacture de M. Ternaux à Louviers. Une autre est destinée à la fabrique de la brique et de la tuile; elle presse à sec et avec une telie force, que, presque au même moment, on peut mettre au four ces briques, qui en sortent plus compactes et mieux faites que par les procédés ordinaires. Une troisième est destinée à frapper la monnaie. Enfin, ajoutent les commissaires, les machines de M. Périer méritaient une mention d'autant plus honorable, qu'elles venaient à la suite d’une quantité d’autres, que depuis qua- rante ans 1l n'a cessé de répandre, avec une sorte de profu- sion, dans les arts et les manufactures, en sorte que c’est l'occasion de répéter ce que le jury disait dans une autre cir- Ixxij NOTICE SUR LA VIE ET LES TRAVAUX DE M. PÉRIER. constance : que s’Ÿ y avait un prix d'utilité publique , or pourrait présenter avec confiance M. Périer, comme celui à qui les arts mécaniques et l'industrie nationale ont les plus nombreuses obligations. « Une aussi grande impulsion, a dit M. de Prony, doit placer M. Périer au rang des meilleurs citoyens et des bienfaiteurs de son pays. » Long-temps M. Périer fut assidu à nos séances; nommé de droit commissaire, toutes les fois qu'il s'agissait de juger quelque invention nouvelle en mécanique, ses rapports, dont il s'occupait toujours sans délai, étaient rédigés avec autant de netteté que d’impartialité. L'âge, les infirmités, les ma- ladies augmentées peut-être encore par des chagrins, cortége trop ordinaire de la vieillesse, ont rendu plus rare en ces derniers temps sa présence paxmi nous; mais elle n’a cessé tout-à-fait que quand ses forces l'eurent entièrement aban- donné. Nous l'avons perdu le 16 août 1818, à l’âge de soixante- quinze ans neuf mois et quelques jours. Il a été remplacé dans la section de mécanique par M. Du- pin, le 28 septembre suivant. AAA SAS LAS LAS EE NOTICES Sur les voyages entrepris pour mesurer la courbure de la terre et la variation de la pesanteur terrestre, sur l'arc du méridien compris entre les iles Pythiuses et les iles Shetland. Nous avions formé le dessein d'insérer dans cette histoire la notice lue par M. Biot, au commencement de 1818, à la séance publique des quatre Académies, sur les mesures du pendule faites par lui en Écosse et aux îles Shetland. Cela nous a rappelé une autre notice lue par le même académi- cien, dans notre séance publique de 1810, et dans laquelle il rendait compte des travaux exécutés par M. Arago et lui en Espagne. Comme ces deux écrits complètent l'exposé des opérations entreprises pour continuer et étendre la méri- dienne francaise, nous les insérons l’une et l’autre ici. Norice sur les opérations faites en Espagne pour prolonger la méridienne de France jusqu'aux îles Pythiuses, lue à la séance publique de la classe des sciences physiques et mathématiques pour l'année 1810; Par M. Bror. La détermination de la figure de la terre et la mesure de sa grandeur ont beaucoup occupé les géomètres et les astro- 1818. Hastotre. K Ixxiv NOTICES SUR LES VOYAGES ENTREPRIS nomes. C’est une belle application des sciences exactes que d’avoir su déterminer les dimensions de ce globe que nous habitons, et d’avoir fait de sa grandeur mème le type inva- riable d’une mesure universelle, dont les subdivisions servent pour arpenter nos champs, et les multiples pour évaluer les espaces célestes. Il est vrai que ce beau résultat des sciences n’a été obtenu que par de Jongs travaux : il y a bien loin des opérations minutieusement exactes de l'astronomie moderne, aux pre- micres tentatives que fit Ératosthène pour évaluer la gran- deur de la terre, d'apres la longueur des ombres de Gnomon observées à Syene et à Alexandrie. On est aujourd'hui assuré de ne pas se tromper de 6oo mè- tres (300 toises) sur la grandeur absolue du rayon moyen de la terre, qui surpasse 6,000,000 de mètres. Cela peut pa- raître inconcevable aux personnes qui ne connaissent pas les procédés dont nous faisons usage; mais rien ne semble plus simple lorsqu'on les a examinés. Sans entrer ici dans des détails techniques, il est cependant facile de sentir au moins la possibilité d’une pareille exactitude. Il suffit, pour cela, de remarquer que la surface de la terre n’est réellement pas aussi irrégulière qu'elle le paraît au premier coup d'œil; les montagnes dont elle est hérissée, les vallées qui la sillonnent, ne sont, comparativement à sa masse, que des rides presque imperceptibles. Les petites aspérités qui se rencontrent sur la peau d’une orange sont relativement beaucoup plus con- sidérables. Si l’on fait d'ailleurs attention que les continents terrestres sont entourés de tous côtés par la mer qui s’y in- sinue par un grand nombre d'ouvertures; que leurs bords ne sont nulle part fort élevés au-dessus du niveau des eaux POUR MESURER LA COURBURE DE LA TERRE. Ixxv qui les baiïgnent ; que tous les fleuves dont ces continents sont entrecoupés se rendent aussi à la mer par des pentes assez faibles, puisqu'ils sont généralement navigables, on verra, dans cet équilibre, l'effet d’un nivellement général de la surface terrestre; on concevra que sa courbure doit suivre la courbure régulière de l'Océan, et par conséquent l'on sentira que la mesure d’une pareille convexité peut avoir toute la rigueur d’une opération mathématique. Il ne reste donc plus qu'à faire connaître les procédés que l'on emploie pour effectuer cette mesure. Vous avez vu quel- quefois sur les bords de la mer un navire s'éloigner du ri- vage : d’abord on l’aperçoit tout entier; mais peu-à-peu, à mesure qu'il s'éloigne, il semble s’enfoncer dans l'horizon ; on perd d’abord de vue le corps du bâtiment, puis ses basses voiles, puis le haut de ses mâts, et enfin il disparaît entiè- rement. C’est l'effet de la convexité de la terre qui s’inter- pose entre le vaisseau et vous. En même temps les gens du bord voient un spectacle semblable : pour eux, c’est le ri- vage qui, dans le lointain, s’abaisse, disparaît; puis ce sont les maisons, puis les tours, puis les montagnes, jusqu’à ce qu'enfin ils se voient entourés de tous côtés par l'horizon de la mer. Cet abaissement progressif qu'ils observent en s’é- loignant du rivage, nous l’observons également dans les signaux célestes, lorsque nous voyageons sur la terre du nord au sud ou du sud au nord : le pôle et les étoiles qui l'environnent s’abaissent sur l'horizon, à mesure que nous allons vers le sud; il s'élève, au contraire, si nous revenons. Toutes les étoiles participent à ces changements d’élévation dont notre déplacement seul est cause. En mesurant avec K2 Ixxv] NOTICES SUR LES VOYAGES ENTREPRIS soin leur hauteur au-dessus de l'horizon de chaque lieu, nous pouvons connaître l'arc céleste qui correspond à l'arc terrestre que nous avons parcouru; en mesurant aussi la lon- gueur itinéraire de cet arc, nous pouvons comparer ces deux valeurs, et conclure de leur comparaison la grandeur du contour entier de la terre. L'observation de la hauteur des astres sur l'horizon se fait avec des instruments d'une précision extrême, au moyen desquels on peut évaluer les plus petites fractions. On répète les observations jusqu’à plusieurs milliers de fois dans cha- cun des points extrêmes de l’arc que l’on mesure, et l’on prend le milieu entre tous ces résultats, afin que les petites erreurs des observations partielles se détruisent par leur compensa- tion. Quant à la longueur itinéraire de l’arc, on la mesure comme on arpente un champ, comme on lève un plan; c'est- à-dire, en toisant d'abord une première longueur qui sert de base à tout le travail, puis établissant sur cette base une suite de triangles qui s'enchaïnent les uns aux autres , jus- qu'à ce qu'on soit parvenu à l’autre station La mesure d'un arc du méridien ne differe des opérations dont je viens de parler, que par une extrème recherche de précision et d’exac- ütude. C'est ainsi qu’en 1670, Picard, membre de l’Académie des Sciences, joignit les parallèles de Malvoisine et d'Amiens ; car la première mesure exacte de la figure de la terre a été faite en France. Plusieurs travaux de ce genre ont été aussi exécutés en France par MM. Cassini, famille célèbre dans - l'astronomie par une longue suite de mérites. Enfin, c'est ainsi que Bouguer, Godin, la Condamine, Clairault, le Mon- nier, Maupertuis et la Caille, tous nos compatriotes , sont POUR MESURER LA COURBURE DE LA TERRE. Ixxvi] allés chercher les éléments de la même mesure, sous les feux de l’équateur, parmi les glaces des pôles, et jusque dans l'hé- misphère austral de la terre. Malgré tant d'efforts, malgré tant d'entreprises, on pou- vait faire mieux encore ; non pas avec les moyens dont s’é- taient servis ces habiles astronomes : ils avaient fait tout ce qui était possible dans les circonstances où ils se sont trou- vés. Mais les instruments d'astronomie étaient bien éloignés alors de la perfection qu'ils ont maintenant acquise, perfec- tion telle qu'on peut la regarder comme la limite des efforts de l'industrie humaine, et comme le terme de la précision que l'on peut atteindre par des évaluations mécaniques; sur- tout depuis qu’un autre français, Borda, membre de cette compagnie, eut trouvé le secret d’atténuer indéfiniment les erreurs des observations partielles, en les faisant suivre et suc- céder les unes aux autres, sur le limbe circulaire de l’instru- ment auquel il a donné le nom de cercle répétiteur. C'est avec la réunion de tous ces procédés perfectionnés, avec tous les secours de la physique, sur-tout avec les lu- mières d’une théorie profonde , que MM. Méchain et Delam- bre ont entrepris une nouvelle mesure de la terre, d’après l'observation de l'arc terrestre compris entre Dunkerque et Barcelone, Cette opération, la plus grande de ce genre, et la plus parfaite que l’on eût encore exécutée, a été achevée par eux et par eux seuls : on sait avec quel succès. Mais leurs destinées ont été diverses. L'un a eu le bonheur de voir ce grand ouvrage terminé et rendu public; il jouit maintenant parmi nous de l'estime due à ses nombreux et importants travaux. L'autre est mort au fond de l'Espagne, victime des Ixxvii] NOTIGES SUR LES VOYAGES ENTREPRIS fatigues excessives auxquelles il n'avait jamais voulu donner de relâche, et qu'il n'a pu supporter. La prolongation de la méridienne en Espagne, que Mé- chain avait entreprise et qu'il voulait pousser jusqu'aux îles Baléares, faisait répondre le milieu de Farc sur le parallele de 45°, intermédiaire entre l'équateur et le pôle. Par l'effet de cette circonstance, le calcul du quart du méridien ter- restre n’exigeait point la connaissance de l’aplatissement de la terre. En même temps les petites erreurs des observations, se trouvant réparties sur un plus grand arc, devenaient moins sensibles dans le résultat définitif, et par conséquent celui-ci acquérait une plus grande certitude. Ces motifs fai- saient vivement regretter l'interruption de ce travail. Le bu- reau des longitudes voulut bien confier à M. Arago et à moi le soin de le terminer. Le gouvernement espagnol nous ad- joignit deux commissaires, MM. Chaix et Rodriguez; le pre- mier , astronome déja connu par plusieurs travaux utiles ; le second, plus jeune, sans fortune, venu d’Espagne en France par le seul desir d'étudier l'astronomie et les hautes mathé- matiques, à l'observatoire et au collége de France, s'était depuis long-temps acquis notre estime et notre amitié. L’em- pereur ordonna l'expédition , et accorda libéralement tous les fonds nécessaires pour l'exécuter. L'Espagne nous donna un vaisseau, l'Angleterre un sauf-conduit. L'opération que nous allions reprendre était suspendue depuis trois ans. Pour profiter du travail de Méchain, il fal- lait retrouver ses stations, rassembler les instruments qu'il avait laissés en Espagne, et qui étaient déposés dans les vil- lages où il avait séjourné. Il fallait réunir le plus qu'il serait possible de données positives sur la configuration du pays POUR MESURER LA COURBURE DE LA TERRE. Îxxix où nous allions établir nos triangles. Nous devons exprimer ici notre reconnaissance au fils et à la veuve de Méchain, qui voulurent bien nous confier le journal particulier de cet astronome. Nous devons également beaucoup à notre ami M. le Chevallier , l'un des conservateurs de la bibliothèque du Panthéon, qui s'estempressé de nous donner, sur le même sujet, tous les renseignements dont il était possesseur. Ani- mé par le seul desir de voir un pays célèbre, en contribuant à une entreprise utile, M. le Chevallier avait accompagné Méchain dans son premier voyage, et avait partagé avec lui tout ce qu'un séjour habituel sur des montagnes désertes entraîne de fatigues et de privations. En arrivant en Espagne, notre premier soin fut de visiter toute la chaîne de montagnes sur laquelle nous devions nous établir. Une difficulté, sur-tout, nous occupait et méritait toute notre attention. Pour lier l’île d'Yvice à la côte d’Es- pagne, il fallait former un triangle dont le sommet fût dans l'île, et la base sur le continent. Or, d’après la distance d'Yvice à la côte d'Espagne, il était clair que ce triangle n’au- rait pas moins de 142,000 mètres, environ trehte-cinq lieues de base, et qu'un de ses côtés aurait plus de 160,000 mètres, environ quarante et une lieues de longueur (1); à de si grandes distances, des signaux de jour auraient été complè- A O9 Le L(S Ep a) UNNEX ques (1) Il s'agit ici de lieues de 2000 toises. La valeur des lieues étant tout-à-fait arbitraire , je n'ai employé cette dénomination vague que pour rendre sensible à l'esprit la grandeur de nos triangles , par des évaluations encore habituelles pour beaucoup de personnes, mais que sans doute, avec le temps > On finira par abandonner pour les évaluations métriques qui ont sur les autres l'avantage d’avoir toujours, et par-tout, la même signification. Ixxx NOTICES SUR LES VOYAGES ENTREPRIS tement invisibles. On devait y suppléer par des lampes à courant d'air, derrière lesquelles on plaçait de grands mi- roirs de métal poli, pour réfléchir la lumière, et toutes les observations devaient se faire de nuit. Mais, malgré tant de précautions , la chose était-elle possible, et la clarté de quelques lampes pourrait-elle percer à travers une si grande profondeur d'air? Voilà ce qui n'était nullement certain, et ce dont nous n'avions malheureusement que trop de raisons de douter. Quelque effrayants que fussent ces obstacles, nous ne perdimes point courage : nous résolûmes d'établir nos sta- tions sur les montagnes les plus hautes, d’où les feux pou- vaient le plus aisément être aperçus; d’y rester obstinément plusieurs mois, s’il le fallait, et d'attendre tout du hasard, d’une nuit favorable, d’un temps calme, d’un ciel parfaite- ment serein. Pour exécuter ce plan avec süreté et promptitude, nous nous partageämes les préparatifs. M. Arago alla établir notre cabane et nos cercles sur la montagne du Desierto de las Palmas, que Méchain avait choisie pour l’un des sommets du grand triangle. On appelle ainsi cette montagne, parce qu'il y croît en abondance une petite espèce de palmier à feuilles en éventail, que les botanistes nomment le chamæ- rops humilis. Pour moi, je passai dans l'ile d'Yvice avec M. Rodriguez. Nous parcourümes toutes les montagnes qu'elle présente au nord , et d'où la côte d'Espagne peut être aperçue par un temps serein. Méchain en avait choisi une dont la position se prêtait au double projet qu'il avait formé de faire arriver la chaîne des triangles dans Yvice, par Mayorque ou par la côte de Valence; mais maintenant que POUR MESURER LA COURBURE DE LA TERRE. [XXX] l'on s'était décidément arrêté à ce dernier projet, on pou- vait trouver sur la côte d'Y vice d’autres montagnes plus favo- rablement situées pour cette destination particulière. Nous en distinguämes une appelée Campvey, qui réunissait les avantages d’être plus au nord que toutes les autres, d'être aussi plus élevée, plus isolée, et dont le sommet chauve, tout formé d’un calcaire blanchâtre, devait être sur-tout facile à reconnaître de loin. Du haut de cette montagne, on voyait aussi la petite île de Formentera, dans le sud, à vingt- cinq minutes de distance. En liant cette île à nos triangles, on prolongeait l'arc de toute cette quantité. Nous y allâmes, Rodriguez et moi, afin de reconnaître par nous-mêmes la possibilité de cette jonction, et aussi pour déterminer le point de la côte d'Espagne sur lequel on pourrait établir le sommet dé ce dernier triangle. Ce plan arrêté, nous fixâmes notre der- nière station dans la partie la plus montueuse de l'île, et nous louâmes, pour cet objet, la maison d’un pauvre paysan, bien étonné de voir des étrangers venir de si loin chercher une pareille habitation. De retour dans Yvice, on porta les réverbères sur le sommet de Campvey; on y dressa une tente et une petite cabane en planches, que Méchain avait fait construire à Barcelone, et qui pouvait se monter et se démonter à volonté. Nous avions trois de ces cabanes pour les trois sommets du grand triangle, où nous deviens séjour- ner long-temps; faible abri contre les coups de vent et les tempêtes auxquels nous avons été si souvent exposés sur nos montagnes. Le temps, couvert et nuageux, ne laissant pas voir la côte de Valence, nous dirigeämes de notre mieux les miroirs des lampes avec une boussole, d’après la position que les cartes donnaient au Desierto. de las Palmas, où 1818. Histoire. L Ixxxi] NOTICES SUR LES VOYAGES ENTREPRIS M. Arago était déja placé. M. Rodriguez resta dans l'ile avee quatre matelots, pour veiller à l'entretien des réverbères, et à ce qu'ils fussent exactement allumés toutes les nuits. Ce n'est qu'apres avoir vu ces lieux sauvages, que l'on pent ap- précier tout ce qu'il faut de zèle et de dévouement pour se résoudre à passer ainsi un hiver entier dans une pareille so- litude, n'ayant pour compagnons que des matelots, pour nourriture que les aliments les plus grossiers, pour piome- nade que des débris de rocs, pour perspective que la vue uni- forme et monotone de la mer. Et, ce qui achevait de reudre cette situation pénible, M. Rodriguez n'avait pas mème la satisfaction de savoir si nous apercevions ses signaux: il de- vait ignorer pendant plusieurs mois s'il nous était utile, ou si ses soins, ses veilles et sa persévérance étaient perdus. Ce ne sont pas là les seules preuves de constance que les deux commissaires espagnols, MM. Chaix et Rodriguez, nous ont données : leur conduite, dans toute la durée de l'opération, a établi entre eux et nous une liaison d'estime et d'amitié inaltérables, dont ils ont fidèlement maintenu les droits dans lés circonstances les plus périlleuses. Que n'en a:t-il été de même des autres personnes qui ont pris part à nos travaux! M. Arago n'aurait pas eu à souffrir les ennuis et les peines d'une longue captivité. Après avoir établi à Campvey M. Rodriguez, je repassai ‘en Espagne. Pour avoir voulu trop tôt y revenir, peu s'en fallut que je n’y revinsse jamais. La tempête nous jeta sur une petite île sablonneuse et abandonnée que l’on appelle l'Espalmador. 11 n'y avait pour habitants qu'une pauvre fa- mille de pêcheurs, et le vieux gardien d'une tour defendue par quatre soldats malades, que l’on relevait tous les mois. POUR MESURER LA COURBURE DE LA TERRE. Ixxxii} Jamais on ne vit de plus profonde inistre; mais, dans cette misère même, il y avait encore de la vanité : le gardien de la tour méprisait beaucoup les pauvres pêcheurs. Deux sommets de notre grand triangle étaient déterminés ; il fallait fixer le troisième. Celui que Méchain avait indi- qué, était la colline du cap Oullera, qui n’a que 500 mètres ( 100 toises ) d’élévation , et du haut de laquelle il n’était pas même sûr alors que l'on découvrit l'île d'Yvice, quoique nous en ayons reconnu depuis la possibilité. À une journée de là, dans l’ouest, il ÿ avait une autre montagne, appelée le Mongo, trois fois plus haute, singulièrement remarquable par son sommet arrondi, par ses arêtes taillées à pic, et sur- tout par la manière dont elle s’avance dans la mer, à l’extré- mité du cap Saint-Antoine. D'Yviza, on apercevait le Mongo par un témps serein, même étant dans une chaloupe au ni- veau de la mer : à plus forte raison , devait-on le découvrir du haut des montagnes. Déterminé par ces circonstances fa- vorables, je n’hésitai point à y établir une station. Il n’y avait pas de chemin pour arriver au sommet : on en creusa un dans le roc même; mais ensuite, lorsque l’on connut mieux la montagne, on en trouva un autre un,peu plus commode dans le fond d’un ravin creusé par les pluies et par les ébouléments des neiges. Ce fut à travers ce ravin, à peine praticable pour des hommes, que l’on monta, non sans peine, les caisses des réverbères, les miroirs, une tente et les planches de la cabane; mais ces faibles abris étant incapables de résister aux terribles coups de vent auxquels cette montagne est exposée, à cause de sa hauteur et de son isolement dans la mer, on fut obligé de construire une petite maison en pierres sèches dans une anfractuosité du rocher. Lo Ixxxiv NOTICES SUR LES VOYAGES ENTREPRIS Là, des matelots s’établirent et passèrent la moitié de F'hi- ver, au milieu des ouragans et des neiges, allumant nos signaux toutes les nuits, jusqu'à l'époque où nous vinmes nous-mêmes les remplacer avec nos cercles, et porter en ce point le centre de nos observations. D'autres matelots étaient chargés de leur apporter des vivres, et jusqu'a de l'eau, qui manquait sur ce sommet isolé : car c’est ainsi, avec de pauvres matelots et des paysans espagnols volontairement engagés à notre service, et dévoués à notre entreprise, que nous avons exécuté toute l'opération. Ce moyen était le seul praticable, à moins de se jeter dans des dépenses excessives ; et, pour ces pauvres gens eux-mêmes, C'était l'attachement que nous avions réussi à leur inspirer, et l’espèce de gloire qu'ils mettaient à vaincre tous les obstacles, bien plus que l'attrait d'un modique salaire, qui pouvait les engager à quitter leur paisible chaumicre pour la misérable vie que nous menions avec eux. Mais ces résultats ordinaires d’un long séjour et d’une grande connaissance du pays, nous avions eu le bonheur de les obtenir des notre arrivée, graces à l'extrême bienveillance des autorités espagnoles, et à celle de quelques Français depuis long-temps domiciliés en Es- pagne. Nous devons nommer ici MM. Morand, consul de France à Denia; Lanusse, consul à Valence, et Lapètre, né- gociant de Cullera : ce sont eux qui nous ont donné les se- cours de tout genre qui nous étaient nécessaires, et qui nous ont procuré tous les renseignements dont nous avions be- soin : eux-mêmes s'étaient chargés de veiller et de fournir à l'entretien de nos stations ; et lorsque, par l'effet du re- tard des courriers, nos opérations auraient pu se trouver suspendues, ils nous ont souvent avancé des sommes consi- POUR MESURER LA COURBURE DE LA TERRE. Ixxxv dérables. Hélas! ils se sont trouvés depuis plongés dans de bien grands malheurs! Les deux premiers, abandonnant leur maison, leur famille et une fortune honorablement ac- quise, sont venus se refugier en France. Le troisième, le plus excellent des hommes, a été massacré par des furieux, aux- quels il n’avait jamais fait que du bien; mais du moins notre amitié sera fidèle à sa mémoire, et nous n’oublierons jamais l'attachement qu’il eut pour nous. Dès que je fus de retour en Espagne, je courus retrouver M. Arago sur le sommet du Desierto de las Palmas. J'espé- rais qu'il aurait déja vu et observé plusieurs fois nos signaux ; mais cette espérance était vaine, et nous devions attendre long-temps encore avant de les apercevoir. Cette épreuve était d'autant plus fâcheuse, que les nuits avaient été trèes-claires, et que l’on avait vu plusieurs fois, au coucher du soleil, les montagnes d’Yvice s'élever dans le lointain, au-dessus de l'horizon de la mer, distinctes et bien terminées. Si l’on n'avait pas vu les feux, il y avait bien sujet de croire qu'ils n'étaient pas visibles , et qu’on ne les décou- vrirait jamais davantage. Pour surcroît de malheur, un de nos cercles que nous avions emporté de Paris, s'était trouvé brisé quand on avait voulu le déballer sur la montagne. Il ne nous en restait plus qu’un seul, construit par M. Lenoir: c'était le plus grand , à la vérité, et le meilleur pour obser- ver à de grandes distances; mais, en-supposant que nous pussions observer les feux d’Yvice, si ce dernier cercle ve- nait aussi à se briser en le transportant sur d'autres mon- tagnes, tout était fini, et l'opération était perdue. Ainsi, les circonstances les plus défavorables se réunissaient contré nous. IxxxXVJ NOTICES SUR LES VOYAGES ENREPRIS Nous demeurâmes dans cette incertitude depuis le milieu du mois d'octobre jusqu'au milieu de décembre, restant obstinément sur notre montagne, veillant toutes les nuits ; n'ayant le jour d'autre société que quelques aigles qui ve- naient planer autour de notre habitation, ou de pauvres chartreux d’un couvent situé à deux cents toises au-dessous de notre hermitage, qui s'échappaient quelquefois dans leurs promenades pour venir causer un instant avec nous. Déja nous avions vu passer l'époque à laquelle nous aurions dû nous rendre dans Yviza pour faire les observations de lati- tude. Il était déja décidé que cette opération , que l’on avait espéré terminer dans un hiver, durerait au moins deux an- nées, si pourtant elle était possible. Combien de fois, assis au pied de notre cabane, les yeux fixés sur la mer, n'avons-nous pas réfléchi sur notre situa- tion , et rassemblé les chances qui pouvaient nous être favo- rables ou contraires! Combien de fois, en voyant les nuages s'élever du fond des vallées, et monter en rampant sur le flanc des rochers jusqu’à la cime où nous étions, n’avons- nous pas recherché dans leurs oscillations les présages heu- reux où malheureux d’un ciel couvert ou serein ! On a dit, avec vérité, que l'aspect des lieux prend une couleur agréable ou sombre, selon les sentiments dont l’ame est agitée. Nous l'éprouvions bien fortement alors. De la porte de notre ca- bane nous avions une des plus belles vues du monde: à notre gauche, mais fort au-dessous de nous, le cap Oropeza éle- vait dans les airs ses aiguilles qui servent de signaux aux Ba- vigateurs ; derrière nous, en se prolongeant dans l'ouest, s'étendaient les chaînes de montagnes noirâtres, qui, comme un rideau, abritent le royaume de Valence du côté du nord, POUR MESURER LA COURBURE DE LATCRRE. ÎIXXXVi] et conservent à cet heureux climat la douce température dont il jouit. Sur notre droite, à l’autre extrémité du golfe, le Mongo sortait du sein de la mer, semblable à une île éloignée; tandis qu'à nos pieds, dans une enceinte de plus de trente lieues, on voyait, le long de la mer, ces belles et fertiles plaines de Valence, vaste jardin entrecoupé de mille ruisseaux, et tout couvert d'oliviers, d’orangers, de citron- niers, dont la verdure éternelle formait le plus doux contraste avec les sommets blancs des montagnes neigées. Plusieurs villes et de nombreux villages embellissaient encore et va- riaient cette perspective, par leurs formes diverses ou par les souvenirs qu'ils rappelaient. À quelques lieues de notre désert, nous voyions Castillon de la Plana, où Méchain est mort, et où est son tombeau. Plus loin, l’ancienne Sa- gonte, aujourd’hui Murviedro, dont les habitants se brû- lérent autrefois, avec leurs familles, pour ne pas tomber en esclavage, et dont la colline, théâtre et témoin muet des révolutions des âges, porte à sa base des restes de monu- ments romains, sur sa pente des ruines de fortifications arabes , et sur sa cime des hermitages chrétiens. Plus loin en- core, on découvrait les tours de la brillante ville de Va- lence, heureux séjour du peuple le plus insouciant et le plus frivole. Mais ces beautés, que notre imagination nous re- trace aujourd'hui avec tant de charmes, n'avaient alors pour nous aucun attrait. Tout remplis de la seule idée qui nous occupait, nous ne songions, nous ne pouvions songer qu à nos travaux, et aux invincibles obstacles qui, nous arritint au commencement de notre entreprise, nous Ôtaient les moyens et jusqu'à l'espoir de la terminer. Tantôt nous pen- sions que les miroirs avaient été mal dirigés, ou que quelque Ixxxvli] NOTICES SUR LES VOYAGES ENTREPRIS coup de vent avait emporté la cabane et l'avait jetée dans la mer; car nous avions déja perdu plusieurs tentes par de semblables accidents, et nous n'avions pu en préserver notre pauvre cabane qu'en passant, par-dessus, des câbles et la liant au rocher. Quelquefois l'approche d’une belle nuit nous remplissait d'espoir ; mais cet espoir était toujours trompé. ù Enfin, après deux mois de séjour et de tentatives, nous imaginämes un moyen simple et décisif pour lever toutes nos incertitudes, et pour découvrir sûrement nos signaux, Si toutefois il était possible qu'on les aperçüt. Nous plaçämes le plan de notre cercle dans une situation horizontale; puis, au coucher du soleil, un soir que le ciel était parfaitement serein, et que le beau temps et l'absence de la lune pro- mettaient une nuit profondément obscure, nous prome- nâmes lentement l’une de nos lunettes le long de l'horizon de la mer, jusqu'à ce qu’elle rencontrât les montagnes d'Yvice qui s’élevaient au-dessus de cet horizon à d’inégales hauteurs. Apres les avoir long-temps examinées, nous choi- sîmes la plus haute, la plus au nord, celle dont le sommet nous paraissait le plus découvert, celle, en un mot, dont l'aspect et. la forme ressemblaient davantage à ce que j'avais remarqué dans la montagne de Campvey. Certains que c’é- tait là le lieu précis où étaient placés nos feux, nous fixämes la lunette dans cette position, et nous attendions avec une vive impatience que la nuit, devenue tout-à-fait sombre, nous permit de les distinguer. Cette fois notre espérance fut satisfaite : nous aperçcûmes dans le champ de la lunette un point lumineux , très-petit, presque imperceptible, sem- blable à une étoile de cinquième .ou sixième grandeur, mais POUR MESURER LA COURBURE DE LA TERRE. ÎXXXIX qui se distinguait d’une étoile par son immobilité. C'était donc à cela que se réduisait la vive et brillante lumière de nos lampes : pouvions-nous être surpris de ne lavoir pas distinguée ‘dans nos lunettes, en les promenant au hasard sur le ciel pendant la nuit; et au contraire n'eût-il pas été surprenant que nous éussions pu les remarquer ? Ce n'était donc pas une impossibilité physique qui avait arrêté nos observations ; c'était une difficulté désormais connue et fa- cile à surmonter, en traçant sur notre cercle des indices qui pussent nous faire retrouver justement cette direction, au milieu de l'obscurité la plus profonde. C'est ce que nous fimes en dirigeant la seconde lunette de notre cercle sur un autre signal de feu placé seulement à dix lieues de di- stance, et qui était visible presque toutes les nuits à cause de sa proximité. En lisant sur le cercle l'angle compris entre les deux lunettes , cet angle, une fois connu, permettait de diriger exactement l’une d'elles sur le signal d’Yvice dès que l'autre l'était sur le signal voisin. Je ne saurais exprimer l'émotion que nous éprouvämes, lorsqu’apres tant de peines et tant de doutes, nous eùmes enfin la certitude de réussir. En vain voulümes-nous commencer une série d'observations, cela nous fut impossible : nous faisions mille fautes, nous nous trompions sans cesse; et bientôt de légères vapeurs, s'élevant du sein de la mer, voilèrent la faible clarté de nos feux. Mais cela ne nous inquiétait guère : la réussite était désormais certaine, et n’exigeait plus que de la constance. Ce fut alors que je montrai à M. Arago une lettre de Mé- chain que l’on m'avait confiée, et dans laquelle il exprimait les doutes qu’il avait conçus contre la possibilité de l’opéra- tion, «dont le succès (ce sont ses propres termes) lui pa- 1818. Histoire. M xC NOTICES SUR LES VOYAGES ENTREPRIS raissait plus qu'incertain ; et, ajoutait-il, même en suppo- sant ce succès possible , l'éloignement du terme où il pourrait être effectué est si grand qu'il m'accable, me tue, et que je n’en puis supporter l’idée. Cette malheureuse commission, dont le succès est si éloigné, beaucoup plus qu'incertain, sera plus que probablement ma perte.» Ces doutes d’un si bon observateur , je les connaissais en entrant en Espagne; mais ils étaient trop propres à nous décourager tous, pour que je voulusse en faire part à mes compagnons avant l’évé- nement. Si l’on pouvait penser que nous avons exagéré en quelque chose les difficultés de l’entreprise, ces craintes d’un observateur si exercé et si patient suffiraient pour nous jus- tifier. Depuis cette heureuse époque, notre opération ne nous parut plus qu'un travail ordinaire, et les observations conti- nuërent sans interruption. Nous eûmes pourtant encore quelques obstacles à vaincre. Souvent latempêteemportait nos tentes, déplaçait nos stations. M. Arago, avec une constance infatigable , allait aussitôt les rétablir, et replaçait les signaux, ne se donnant, pour cela, de repos ni jour ni nuit. Étant tombé malade de la fièvre, je fus obligé, pendant douze jours, de quitter la montagne pour aller me rétablir à Tarragone. Durant cet intervalle, M. Arago resta seul chargé des obser- vations, les continua sans relâche ; et bientôt un des com- missaires espagnols, M. Chaïix, vint nous joindre au désert et partager notre habitation. Nous quittämes cette première station à la fin de janvier, après y être restés trois mois et demi, et nous revimes avec quelque plaisir la ville de Va- lence. Nous nous transportämes de même aux autres som- mets du grand triangle, observant à chacun d'eux tous les POUR MESURER LA COURBURE DE LA TERRE. XC] angles dont il était le centre. Comme nous desirions nous procurer toutes les vérifications possibles de cette grande mesure, M. Arago alla établir une nouvelle station sur une chaine de hautes montagnes que l’on appelle la Favaretta ; mais nous fûmes obligés d'y renoncer , à cause de l’abon- dance des neiges qui couvraient presque tout-à-fait les tentes, et aussi parce que les brigands, maîtres de ces montagnes, exigeaient que l'on fit un traité avec eux pour avoir le droit d'y séjourner. Heureusement nous obtinmes la même vérifi- cation d’une autre manière ; et la base du grand triangle, cal- culée ainsi par trois combinaisons absolument indépendantes les‘ unes des autres, s’accorda pour donner des valeurs qui ne différaient que de deux mètres sur cent quarante mille, en- viron une toise sur trente-cinq lieues. Au mois d'avril 1807 s tous les triangles des îles étaient terminés. Je revins à Paris pour faire construire un autre cercle qui remplacât celui que nous avions perdu, ét qui püt servir l'hiver suivant pour les opérations de latitude. Pendant ce témps ; M. Arago, assisté des deux commissaires espagnols, continuait les opérations géodésiques sur le continent, et rattachait nos triangles à ceux que Méchain avait déja observés en Catalogne. Cette Jonction , qui se fit pendant l'été, au milieu des chaleurs les plus dévorantes, fut extrêmement pénible. Exposés à toutes les ardeurs du soleil ; aux pluies, aux orages si fréquents et si terribles dans ce climat sur les hautes montagnes, ils eurent beaucoup à souffrir ; plus d'une fois la foudre glissa sur la toile humide qui les couvrait. Maïs rien ne put leur faire abandonner leur entreprise; et avant la fin de l’au- tomne toute la chaîne des triangles était terminée. Je revins alors en Espagne avec le nouveau cercle qui de- M2 xci] NOTICES SUR LES VOYAGES ENTREPRIS vait servir aux observations de latitude ; il avait été construit par M. Fortin. Dans mon premier voyage, j'avais été à por- tée de faire quelques expériences curieuses sur les poissons qui vivent dans des eaux profondes. Les petites îles d'Yvice et de Formentera n'étant, pour ainsi dire, que des rochers isolés au milieu de la mer, offraient une occasron singulie- rement favorable pour observer et déterminer les espèces de ces animaux qui appartiennent particulièrement à la Médi- terranée. Ces motifs engagèrent le ministre de l’intérieur à joindre un naturaliste à l'expédition ; et, sur la demande des professeurs du muséum d'histoire naturelle, il désigna, en cette qualité, notre ami M. François de Laroche, jeune médecin très-versé dans ce genre d'étude, et connu de l'Institut par plusieurs mémoires intéressants. Lorsque nous eùmes rejoint nos compagnons à Valence, nous allämes tous ensemble passer l’hiver dans notre observatoire de l'ile de Formentera. Nous y primes plusieurs milliers de hauteurs de l'étoile polaire, et de 6 de la petite ourse, pour détermi- ner la latitude. Nous observämes aussi beaucoup de passages du soleil et des étoiles à la lunette méridienne. En même temps nous mesurions la longueur du pendule à secondes pour connaître l'intensité de la pesanteur , à cette extrémité australe de notre arc; et nous observions l’azimuth du der- nier côté de la chaîne des triangles, c’est-à-dire l'angle que ce côté forme avec la ligne méridienne, résultat nécessaire pour orienter notre opération. D'autres auraient pu se trouver malheureux dans notre situation : ils auraient pu regretter quelques agréments de la vie, que nous étions loin d’avoir dans cette île isolée et sauvage; Mais pour nous, qui n'avions pas encore oublié POUR MESURER LA COURBURE DE LA TERRE. xcii] l'hiver de l’année précédente, nos sentiments étaient bien dif- férents. Nous avions alors le vivre et le couvert; nous avions sur-tout la certitude de réussir, et le plaisir de voir tous les jours notre travail s’avancer. Cette position, qui eût été en- nuyeuse pour d’autres, n’était pas pour nous sans douceur. Le dimanche était notre jour de fête. Ce jour-là, le bon curé de la partie de l'ile que nous habitions venait diner avec nous, sinformait du progres de nos observations ; et cet ex- cellent homme, beaucoup plus instruit que ne l’est ordinai- rement la classe inférieure du clergé en Espagne , prenait à tout ce que nous faisions un véritable intérêt. Souvent aussi des habitants venaient solliciter la permission de voir nos in- struments ; et lorsqu'on les avait introduits, en petit nombre, dans la chambre où nous les tenions renfermés , ils témoi- gnaient, en les voyant, tout l’étonnement de vrais sauvages. Quelquefois ils venaient en troupe le soir, l’alcade à la tête, danser dans notre cabane, avec mille cris et mille postures bizarres; les hommes sautant, ou plutôt trépignant, d'une manière moitié européane, moitié africaine, tandis que les femmes ayant-leurs cheveux serrés en longues queues pen- dantes, ordinairement postiches, tournaient et pirouettaient , pieds nuds, sans quitter la terre, comme des poupées à res- sorts. Le tout était accompagné d’une musique analogue, formée d’une espèce de fifre, d’un tambourin, et du cliquetis d'une grande lame d'épée que l'alcade frappait en mesure avec un morceau de fer. Lorsqu'on venait à passer, de ces amusements sauvages, dans la chambre silencieuse où se faisaient les observations, ce contraste de la civilisation et de la barbarie, des connaissances les plus sublimes et de la plus profonde ignorance, avait je ne sais quoi de grand et XCIV NOTICES SUR LES VOYAGES ENTREPRIS de pénible qui affectait l'ame d'une manière que je ne sau- rais exprimer. Lorsque nous eûmes fait deux mille observations de l’é- toile polaire, lorsque nous eûmes achevé les expériences du pendule, je quittai Formentera pour revenir en Espagne, rapportant avec moi ces résultats. M. Arago resta dans l'ile avec MM. Chaïx et Rodriguez pour observer le passage su- périeur de 6 de la petite ourse, et en même temps il ajouta aux passages de la polaire six cents observations nouvelles, qui, jointes aux précédentes, donnent à la latitude de ce point toute la certitude que l’on peut desirer. Mais le prin- cipal objet du séjour de M. Arago était l'exécution d’une autre entreprise que nous avions méditée ensemble. En voyant, de notre station de Campvey, l’île de Mayorque à lorient sur notre droite, et la côte d'Espagne à l'occident sur notre gauche, nous avions reconnu la possibilité de les joindre ensemble par un are de parallèle qui nous aurait donné la mesure de trois degrés de longitude. Cet arc, situé à l’extrémité australe de la méridienne, déterminait plus complètement la courbure de cette partie du sphéroïde ter- restre, en la mesurant dans deux directions perpendicu- laires. Il devait faire connaître si les parallèles terrestres sont elliptiques comme les méridiens , on s'ils sont cireu- laires, et par conséquent si la terre est, ou n’est pas, un sphéroïde de révolution. Pour résoudre ces questions impor- tantes , M. Arago avait entrepris ét commencé la mesure des triangles qui devaient lier Mayorque à la côte d'Espagne, en s'appuyant sur Yvice et Formentera. Ne voulant pas interrompre ces observations , je laissai à M: Arago le sauf-conduit anglais, le bâtiment espagnol; et je LR ee POUR MESURER LA COURBURE DE LA TERRE. XCXV m'embarquai, pour revenir en Espagne, sur un petit che- beck algérien que je trouvai par hasard en reläche à Yvice. Je fus pris en route par des pirates de Raguse , qui avaient momentanément arboré pavillon anglais, Après avoir bien visité notre petite embarcation , ils nous déclarerent de bonne prise, et voulurent nous emmener à Oran; mais, en m'autorisant du sauf-couduit anglais dont ils avaient con- naissance, et que toutefois je n'avais point; en leur mon- trant mes instruments qui attestaient ma destination ; sur- tout en leur abandonnant quelques onces d'or que j'avais sur moi; comme d'ailleurs une si chétive proie était pour eux plus embarrassante qu'avantageuse, je me tirai de leurs mains , moi et mes compagnons; et je dois convenir que, pour des pirates , ils en ont usé fort honnêtement. J'en fus quitte pour une courte quarantaine qu'il me fallut faire à Denia dans un vieux château ruiné, autrefois la résidence des ducs de Médina-Cœæli dans le temps de leur puissance, mais où, de cette ancienne grandeur, il ne restait plus d’autre trace qu'une vieille statue de guerrier couchée sur l'herbe, qui me servait de pupitre pour écrire à mes amis. Lorsque les observations eurent été remises au bureau des longitudes, une commission fut chargée de les examiner et de les calculer. Le résultat de ce travail, comparé aux obser- vations de M. Delambre à Dunkerque, donna une valeur du mètre presque exactement égale à celle que les lois françaises . ont fixée, d’après les premières déterminations. La diffé- rence est au-dessous d’un dix-millième de ligne : elle ne produirait que 4 dixièmes de mètre, environ 176 lignes, sur la longueur totale de l'arc terrestre compris entre les paral- lèles de Dunkerque et de Formentera. Une si petite erreur XCV] NOTICES SUR LES VOYAGES ENTREPRIS a réellement de quoi surprendre; elle aurait pu être qua- rante ou cinquante fois plus considérable, qu'il n’en serait jamais résulté aucun inconvénient sensible dans les opéra- tions les plus délicates des arts. Cet accord prouve que le mètre, déduit de la grandeur de la terre, est désormais bien connu; et que les autres opérations de ce genre que l'on pourra faire par la suite, si toutefois on en exécute ja- mais d'aussi considérables, ne pourront y apporter aucun changement. Les expériences que nous avions faites à Formentera sur la longueur du pendule à secondes, expériences que nous avons répétées, M. Mathieu et moi, à Paris, à Bordeaux, à Figeac, à Clermont et à Dunkerque, ont fait connaître l'intensité de la pesanteur et ses variations sur les diverses parties de notre méridienne. Ces mesures ont donné pour l’aplatissement de la terre une valeur extrêmement peu différente de celle qui se déduit de la mesure des degrés de latitude, et l'on sait par la théorie que cette différence tient à la nature des pro- cédés. Nos expériences, faites avec des appareils que Borda a imaginés , mais que nous avons rendus plus portatifs et plus simples, donnent pour la longueur du pendule à Paris la même valeur que celle qu'il assigne; et leur extrême ac- cord, soit entre elles, soit avec celles de cet illustre physi- cien, en atteste la précision. Ce résultat étant exprimé en parties du mètre, il suffirait de le connaître pour retrouver le mètre, base de toutes nos mesures, si tous les étalons qui fixent sa valeur exacte ve- naient à se perdre par la suite des temps. En effet, si l'on se rappelait seulement le nombre qui exprime la longueur du pendule à Paris, par exemple, il suffirait d'observer POUR MESURER LA COURBURE DE LA TERRE. XCVI} exactement cette longueur par l’expérience; et, en la compa- rant au nombre qui la représente, le mètre serait aussitôt retrouvé. Par-là on connaîtrait aussi toutes les mesures de capacité qui dérivent du mètre suivant des proportions très- simples et exactement décimales. Ensuite , en pesant avec des balances très-exactes le poids d’un centimètre cube d'eau pure, prise à la température où sa densité est le plus grande possible, c’est-à-dire vers quatre degrés du thermomètre centésimal, on retrouverait pareillement le gramme, et par conséquent toutes les mesures de poids. Voilà les avantages que l’on a eus en prenant pour base du système métrique des données fixées par la nature et liées entre elles suivant l'ordre décimal; ce sont des avantages que n'avaient point les mesures arbitraires dont les anciens se sont servis, dans l'impossibilité où ils étaient d'en déterminer de plus exactes. Aussi, les étalons de ces mesures s'étant perdus par l'effet des révolutions des peuples , leur valeur précise s’est perdue également pour toujours; et les expériences auxquelles elles ont été employées ne peuvent plus servir que de sujet aux recherches des érudits. j Les observations d'histoire naturelle que M. De Laroche avait recueillies dans son voyage ayant été pareillement ren- dues publiques, ont confirmé la plupart des faits que j'avais remarqués dans mon premier voyage, et leur ont ajouté plu- sieurs circonstances nouvelles. Les recherches de ce jeune naturaliste ont aussi donné une connaissance plus exacte et plus complete des poissons de la Méditerranée, PrneIpaler ment de ceux qui vivent dans des eaux prefon dés, Ses expé- riences et les miennes conduisent également à cette consé- quence singulière, c’est que la vessie natatoire des poissons 1818. Hastoire. N XCVii) NOTICES SUR LES VOYAGES ENTREPRIS contient d'autant plus de gaz oxigène, qu'ils habitent à des profondeurs plus considérables, quoique l'air contenu dans l'eau de la mer, à 600 mètres {1800 pieds) de profondeur, soit égal, peut-être même un peu inférieur en pureté à celui qui en imprègne la surface, comme je m'en suis assuré par des expériences directes. Nous avons également remarqué que lorsqu'on retire des poissons du fond de ces abymes, l'air contenu dans leur vessie natatoire u’étant plus comprimé par l'énorme colonne d’eau qui pesait sur eux, se dilate tel- lement, qu'il déchire la vessie, renverse leur estomac, et les étouffe avant qu'ils aient atteint la surface des eaux. Enfin, notre opération aura peut-être dans l'avenir des conséquences plus étendues. Si jamais la civilisation euro- péenne parvient à s'établir sur les côtes d'Afrique, rien ne sera plus facile que de traverser la Méditerranée par quelques triangles, en prolongeant notre chaîne dans l’ouest jusqu’à la hauteur du cap de Gate; après quoi, remontant la côte d'Afrique jusqu'à la ville d'Alger, qui se trouve sous le mé- ridien de Paris, on pourra mesurer la latitude , et porter l'extrémité australe de notre méridienne, sur le sommet du mont Atlas. Tandis que nous suivions paisiblement en France la série des travaux et des calculs qui devaient compléter l'opération et en faire counaître le résultat définitif, M. Arago avait été beaucoup moins heureux. Tant qu'il n'avait eu à vaincre que les obstacles de la nature, les progrès de son entreprise avaient répondu à sa constance et à son habileté. Déja il avait terminé les triangles qui devaient lier Yvice à Mayorque, et faire connaître l'arc de parallele terrestre compris entre ces deux stations, Il s'était transporté à Mayorque avec M. Rodri- POUR MESURER LA COURBURE DE LA TERRE. XCIX guez , et aussitôt ilavait été s'établir sur lesommet d’une haute montagne, nommée le Puch de Galatzo. Déja il avait observé les signaux d'Yvice, et un assez grand nombre de passages d'étoiles à la lunette méridienne, pour déterminer la diffé- rence des longitudes. Quelques jours encore, et le résultat de ces observations était invariablement fixé. Mais, tout-à- coup, le bruit se répand parmi le peuple que ces instruments, ces feux, ces signaux, ont pour objet d'appeler l'ennemi, de le diriger vers l'ile, et de lui montrer le chemin. Ce n'est plus qu’un cri de trahison et de mort. On veut aller à Ga- latzo en armes. Heureusement M. Arago avait été averti: vêtu en paysan mayorquain, il part pour Palma, emportant avec Ini ses observations, qui renfermaient déja les éléments nécessaires pour le calcul de deux degrés de longitude. Ar rivé à Palma, sans être aperçu, il se rend à bord de notre vaisseau, y reste deux jours caché, et cependant dépèche un bâtiment et des soldats à la cabane pour sauver et rame- ner les instruments, que les paysans engagés à son service avaient fidèlement gardés. Mais bientôt lui-même est en proie à de nouvelles alarmes : le vaisseau où il s'était retiré n'est plus un asyle inviolable : soit trahison, soit faiblesse, l'officier espagnol qui le commandait, et qui jusques alors s'était montré notre ami, n’osa, malgré ses promesses ; ni pro- téger M. Arago, ni le conduire en France. Le capitaine-gé- néral ne put parvenir à le sauver qu’en l’enfermant dans la citadelle. C’est là qu'il resta plusieurs mois prisonnier, ayant non-seulement à regretter sa liberté, mais à craindre sou- vent pour sa vie. Une fois des moines fanatiques tenterent de corrompre les soldats de garde , et les engagerent à se défaire de lui. Cependant notre bon et digne ami, M. Ro- N2 C NOTICES SUR LES VOYAGES ENTREPRIS driguez, ne l’abandonnait pas dans son infortune : incapable de manquer à l'amitié et à l'honneur, il allait par-tout priant, pressant , fatiguant la junte par de continueiles dé- marches, demandant hautement la liberté de son collègue, et représentant l'injustice de sa détention; enfin il obtint sa délivrance. On permit à M. Arago de-passer à Alger sur une petite barque. Il y fut conduit par un de nos matelots mayorquains, nommé Damian, l’un des plus expérimentés marins de l'Espagne, et qui nous avait toujours témoigné un attachement sans bornes et un dévouement absolu. Arrivé dans cette ville, M. Arago est accueilli par le consul de France, M. Dubois-Thainville, qui le comble de bontés ; bientôt il s'embarque sur une petite frégate de commerce algérienne, pour revenir en France. Apres la navigation la plus heureuse, il arrive en vue de Marseille; il se croyait déja dans le port, lorsqu'un corsaire espagnol, voyant ce navire entrer dans un port français, l'attaque, le prend et l’'emmène à Rosas. M. Arago pouvait échapper encore : il était porté sur le rôle des passagers comme négociant allemand; mais, par le hasard le plus funeste, un des matelots qui avaient été autrefois sur notre bord , se trouvait sur celui du corsaire : une exclamation lui échappe; M. Arago est reconnu et plongé avec tous ses compagnons dans la plus affreuse captivité. Je ne dirai point ce qu'il eut à souffrir. Bientôt le dey d'Alger fut informé de l’insulte faite à son pavillon. 1l en demanda une réparation éclatante , exigea que le bâtiment, l'équipage, les marchandises et tous les passagers fussent rendus; menaçant, en cas de refus, de déclarer la guerre. Il fallut bien céder à ces vives réclamations. M. Arago se rembarque. Le bâtiment fait voile pour Marseille, On est de POUR MESURER LA COURBURE DE LA TERRE. cj nouveau à la vue du port, lorsqu'une affreuse tempête du nord-ouest repousse le vaisseau avec une force irrésistible, le.chasse et dé jette sur les côtes de Sardaigne. C'était un autre péril : les Sardes et les Algériens sont en guerre ; abor- der , c’est retomber dans une nouvelle captivité. Malgré une voie d’eau considérable, on se décide à se réfugier sur les côtes d'Afrique; et le bâtiment, prêt à couler bas, aborde en- fin dans le petit port de Bougie, à trois journées d’Alger. Là on apprend que le dey, qui les avait si fortement pro- téges ‘contre les Espagnols, a été tué dans une émeute. Un autre dey est à sa place. On visite soigneusement le navire entrant. Le poids des caisses qui renfermaient les instru- ments astronomiques excite de violents soupçons. Que peu- vent-elles contenir de si pesant , si ce n'est de l’or ? Pourquoi prendrait-on tant de précautions afin d'empêcher de les ouvrir, si elles renfermaient autre chose que des sequins ? Ne pouvant obtenir qu'on les lui rende, et ne se fiant point aux incertitudes d’une négociation barbaresque , M. Arago s'habille en turc; et, associé à quelques autres personnes, sous la conduite d’un saint du pays , que l’on appelle un ma- rabou , il se rend par terre à Alger, à travers les montagnes. Je laisse à penser avec quels périls. Le consul, bien étonné de le revoir dans cet équipage , l’accueïlle avec la même bien- véillance que la premiere fois. Les instruments sont officiel- lement réclamés. Les Algériens, convaincus qu'ils ne sont pas d'or, mais de cuivre, ne leur trouvent plus aucune va- leur.et les rendent. Mais les occasions de retour étaient de- venues rares et difficiles; il fallut rester à Alger pendant six mois. Enfin le consul lui-même, appelé à Paris par l'empe- reur, sembarque avec sa famille, et M. Arago s'embarque ci] NOTICES SUR LES VOYAGES ENTREPRIS avec lui, sur un bâtiment de guerre au service de la régence. Arrivés en vue de Marseille, ils sont encore rencontrés une troisième fois, par une division anglaise, infiniment supé- rieure, qui leur ordonne de se rendre à Minorque. Tous obéissent à la force ; tous, excepté le bâtiment où M. Arago était embarqué : le capitaine, plus hardi que les autres, pro- fite d'un coup de vent favorable, tend ses voiles et entre à Marseille. C'était là que tant de traverses devaient finir. M. Arago, de retour, a reçu le prix de ses travaux : il occupe aujour- d'hui à l’Institut, dans la section d'astronomie, une place qu'il a bien méritée. Le récit de ses aventures prouve, qu'en servant les sciences, on peut aussi rencontrer des entreprises hasardeuses et des périls honorables. Apprriox. Depuis l'époque où cette Notice fut lue, deux des personnes attachées à l'expédition d'Espagne ont cessé d'exister. M. Chaix, dont la santé s'était fort affaiblie par les fatigues qu'il avait partagées avec Méchain et avec nous, est mort dans la petite ville de San-Felipe , où il s'était re- tiré. Notre compatriote De Laroche est mort aussi , à Paris, victime des soins qu'il donnait dans un hôpital à des malades attaqués du typhus. Il avait continué à se distinguer par des travaux très-remarquables , par des dé- couvertes extrêmement curieuses sur les propriétés de la chaleur rayon- nante , et par un mémoire sur les chaleurs spécifiques des gaz, qu'il avait fait en commun avec le jeune M. Perard, et que l'Institut avait couronné. Il promettait plus encore, aux yeux de ceux qui connaissaient sa sagacité et sa persévérance. Sa mort rapide et prématurée a été une perte doulou- reuse pour les sciences et pour l'amitié, POUR MESURER LA COURBURE DE LA TERRE. cii} Norice sur les opérations entreprises en Angleterre et en Écosse, pour prolonger la méridienne d'Espagne et de France jusqu'aux iles Shetland ; lue à la séance pu- blique annuelle des quatre Académies, le 24 avril 1818. Par M. B1ox. Lorsque, sur une des tours de Florence, Galilée, il y a deux siècles, expliquait à un petit nombre de personnes, dans des entretiens presque mystérieux, ses découvertes nouvelles sur les lois de la pesanteur, le mouvement de la terre et la figure des planètes, aurait-il jamais pu prévoir que ces vérités, alors méconnues et persécutées, seraient, après un si court intervalle, considérées comme tellement importantes, et si généralement admirées, que les gouver- nements de l'Europe feraient entreprendre de grandes opé- rations et de lointains voyages pour le seul but de les éten- dre, d'en constater toutes les particularités; et que, par l'effet d’une propagation inespérée de toutes les connais- sances, les résultats de ces travaux pourraient être offerts à l'intérêt public, dans des assemblées nombreuses, composées des classes les plus éminentes de la société! Tel est pourtant limmense changement qui s'est opéré dans le sort des sciences depuis cette époque. Quand Galilée et Bacon pa- rurent, après tant d'esprits sublimes que l'antiquité avait produits, ils trouvèrent la carrière des sciences encore vierge; car on ne saurait donner le nom de science à l'inutile amas de spéculations hypothétiques qui composait avant eux la phi- losophie naturelle. On avait voulu jusques alors deviner plu- iv NOTICES SUR LES VOYAGES ENTREPRIS tôt qu'étudier la nature : l'art de l'interroger et de lui faire révéler ses mystères n'était pas connu; ils le découvrirent: ils montrèrent que l'esprit humain est trop faible et trop incer- tain pour s'avancer seul dans ce dédale de vérités; qu'il a besoin de s'arrêter sur des phénomènes rapprochés les uns des autres, comme l'enfant se repose sur les appuis qu'il rencontre lorsqu'il essaie ses premiers pas; et que, dans les circonstances multipliées où la nature lui offre à franchir de trop grands intervalles , il faut que, par des expériences in- dustrieusement imaginées , il fasse naître sur sa route de nou- veaux phénomènes qui assurent sa marche et l'empêchent de s'égarer. Telle a été la fécondité de cette méthode, qu'en moins de deux siècles, des découvertes sans nombre, des découvertes certaines, durables, ont éclaté dans toutes les: parties des sciences, se sont communiquées rapidement aux arts, à l'industrie qu'elles ont enrichie d'applications mer- veilleuses, et ont accru le trésor des connaissances humaines mille fois au-delà de ce qu'avait fait toute l'antiquité. Mais, ainsi étendues, les sciences excèdent les facultés d’un seul homme. Leur sphère immense ne peut plus être embrassée que par un grand corps littéraire qui, dans son ensemble , comme dans un vaste sensorium , réunisse toutes les concep- tions, toutes les vues , toutes les pensées ; qui, ne connaissant ni les infirmités humaines, ni la décadence des sens et de la vieillesse, toujours jeune, toujours actif, scrute incessam- ment les propriétés intimes des choses naturelles , découvre les forces qui y sont cachées, et les offre enfin à la société tout élaborées et préparées pour les applications. Dans ce centre où toutes les opinions s'agitent et se combattent, nulle autorité ne peut prévaloir, si ce n’est celle de la raison ‘ POUR MESURER LA COURBURE DE LA TERRE. CY et de la nature. La voix d’un Platon même ne saurait plus ÿ faire écouter les rêves brillants de son imagination ; et le génie d’un Descartes, contraint de rester fidèle à la méthode d'observation et de doute qu'il avait lui-même créée, n'y produirait que des vérités sans mélange d'erreurs. Mais Platon et Descartes, avec toute leur gloire, ne seraient encore que des éléments passagers de ce grand organe des sciences. Sa force survivrait à leur génie, et poursuivrait dans l'avenir le développement de leurs pensées. Telle est aujourd'hui la noble destination des sociétés savantes. La simultanéité et la durée que leur institution donne à des efforts mortels $ complètent la puissance de la méthode expérimentale. Elles seules pouvaient désormais assurer la continuité du progrès des connaissances humaines ; seules elles pouvaient déve- lopper les grandes théories, et faire obtenir des résultats qui, par leur difliculté, par la diversité, la persévérance et l'étendue des travaux qu'ils exigent, n’auraiént jamais été accessibles pour des individus. La détermination de la grandeur et de la figure de la terre, la mesure de la pesanteur à sa surface, la liaison de ce phé- nomène avec la constitution intérieure du globe, avec la dis- position de ses couches et les lois de leurs densités, sont au . nombre de ces questions de longue durée que des sociétés. savantes seules pouvaient se proposer d'attaquer et de ré- soudre. Elles ont été, depuis un siecle et demi, un des ob- jets constants des travaux de l’Académie des Sciences. La Première mesure exacte d’un degré du méridien terrestre fut faite en France par Picard, dans l’année 1670. Elle servit à Newton,pour établir la loi de. la pesanteur universelle, dont. l'emploi d'une mesure fautive de la terre l'avait d’abord écarté. 1818. Histoire. O CY] NOTICES SUR LES VOYAGES ENTREPRIS Deux ans après, Richer, autre Français, envoyé par l'Aca- démie à Cayenne pour des recherches astronomiques, dé- couvrit que son horloge, qui battait à Paris les secondes, allait plus lentement à mesure qu'il s'approchait de l'équa- teur, et s'accélerait de nouveau par les mêmes degrés en re- venant vers le nord, de manière à reprendre exactement sa marche primitive au point de départ. Or, d'apres les dé- couvertes de Huyghens, la vitesse des oscillations d'un même pendule augmente ou diminue avec l'intensité de la pe- santeur qui le fait mouvoir. L'observation de Richer prou- vait donc que cette intensité était différente à diverses lati- tudes, et qu'elle croissait en allant de l'équateur au pôle. Newton, dans son iinmortel ouvrage des Principes de la Philosophie naturelle, Via tous ces résultats à la loi de l'at- traction. Îl montra que la variation observée dans la pesan- teur décelait un aplatissement de la terre à ses pôles, cir- constance qui se remarque aussi dans la forme de Jupiter, de Saturne, et des autres planètes qui tournent sur un axe, Il concut que cette forme aplatie était une conséquence de l'attraction même des parties de chaque planète, combinée avec la force centrifuge produite par son mouvement de ro- tation. Mais, pour que l’arrangement déterminé par ces deux genres de forces eût pu ainsi s'effectuer, il fallait que ces grands corps eussent été primitivement fluides; il les prit donc dans cet état, et il montra comment on pouvait calculer l'aplatissement d'une planète d’après l'intensité de la pesan- teur à sa surface, et la vitesse de sa rotation, en supposant sa masse homogène. Cette théorie, appliquée à la terre, don- nait une variation de la pesanteur peu differente de celle que Richer avait observée, mais cependant un peu plus POUR MESURER LA COURBURE DE LA TERRE. cvi] faible ; ce qui indique que la terre est composée de couches dont la densité va eroissant de la surface au centre, comme Clairault l'a depuis démontré. Les calculs de Newton furent pendant quelque temps les seules inductions que l’on eût pour croire la terre aplatie à ses pôles. L'arc du méridien mesuré par Picard avait bien suffi pour donner la longueur du rayon de la terre à l’en- droit où il avait été observé; mais cet arc était beaucoup trop petit pour que l’on y püût seulement entrevoir l'effet de l'aplatissement. On espéra tirer plus de lumières de la me- sure de l'arc entier qui traverse la France depuis Perpignan jusqu’à Dunkerque; mesure qui devait servir, pour ainsi dire, d’axe à la carte générale de la France, dont Colbert avait confié l'exécution à l'Académie. Mais, dans l’état en- core imparfait où se trouvaient alors les instruments et les méthodes astronomiques, cet arc lui-même était trop court pour que l'influence de l’aplatissement püt s'y faire sentir avec certitude ; et les petites variations qui en résultent dans les longueurs des degrés consécutifs, pouvaient très- aisément se perdre dans les erreurs des observations. Ce fut aussi ce qui arriva. Les différences que les degrés pré- sentérent se trouvèrent, par l'effet de ces erreurs, dans un sens tel qu'il en serait résulté un alongement aux pôles, au lieu d'un aplatissement. L'Académie ne se rebuta point : elle sentit que la question ne pouvait être nettement deci- dée qu'en mesurant deux arcs du méridien dans les régions de la terre où l'aplatissement doit produire entre les de- grés des différences plus sensibles, c’est-à-dire près de l'é- d'ateur et près du pôle. Elle trouva parmi ses membres des hommes assez dévoués pour entreprendre ces pénibles - O2 Cvii] NOTICES SUR LES VOYAGES ENTREPRIS voyages. Dans l'année 17935, Bouguer, Godin, la Conda- mine, passérent en Amérique, où ils se reunirent à des commissaires espagnols. Quelques mois après, Clairault, Maupertuis, le Monnier partirent pour le nord. Les résul- tats de ces expéditions mirent hors de doute l'aplatissement de la terre; mais sa mesure absolue resta encore douteuse. Le degré du Pérou, comparé à ceux de France, donnait un aplatissement plus faible que si la terre était homogène; l’opé- ration de Laponie le donnait plus fort. Dans cette incerti- tude, les longueurs du pendule que l’on avait eu soin de mesurer, s'accordaient avec l'aplatissement conclu de l’opé- ration de l'équateur ; mais l'exactitude de ces mesures , sur- tout dans l'opération de Laponie, n'était pas telle qu’elles pussent trancher la difficulté. La faute n’en était à personne; ‘on ne pouvait pas faire mieux alors. Les choses en restèrent à ce point pendant cinquante ans. Bouguer, la Condamine, Clairault, Maupertuis, moururent. Mais , apres cet intervalle, les instruments d'astronomie étant devenus beaucoup plus parfaits, et les méthodes d’ob- servation plus générales et plus précises, on put espérer de lever les incertitudes que les opérations précédentes avaient laissées sur l'aplatissement de la terre. L'Académie, héritière de ces grands travaux, résolut de les reprendre avec tous les moyens qui pouvaient en assurer le succès. Elle leur donna plus d'importance encore en proposant de prendre la grandeur même de la terre ainsi déterminée, pour l'élément fondamental d'un système de mesures géné- ral, uniforme, dont toutes les parties seraient liées entre elles par des rapports simples et en harmonie avec notre mode de numération. Aujourd'hui , comme alors , elle espère POUR MESURER LA COURBURE DE LA TERRE. CiX qu'un pareil système, fondé sur des éléments naturels, in- variables, indépendants des préjugés individuels des peuples, leur deviendra dans l'avenir commun à tous, comme le sont déja les chiffres indiens, la division du temps, et le calendrier. C'était un vœu manifesté depuis long-temps par les meilleurs et les plus éclairés de nos rois. La proposition de le réaliser fut, pour ainsi dire, le dernier soupir de l'Académie ; et l'acte qui en décida l’exécution fut un des derniers qui précéderent la funeste époque de nos grandes convulsions politiques. Toutes les institutions conservatrices de la civilisation et des lumieres périrent; l’Académie périt avec elles. Mais de vrais savants ne se font pas répéter l’au- torisation de faire ce qu'ils croient utile. Au milieu du dés- ordre et des fureurs excités par l'anarchie populaire, MM. De- lambre et Méchain, munis d'instruments nouveaux que Borda leur avait créés, commencèrent et continuèrent, sou- vent au péril de leur vie, la mesure de la terre ia plus éten- due, la plus exacte que l’on eût jamais entreprise. Ils l’ache- vérent aussi bien, quoique non pas aussi aisément qu'ils - lauraient fait au sein de la paix la plus profonde. La me- sure du pendule ne fut point oubliée. Borda , qui avait tant fait pour perfectionner toutes les autres parties des obser- vations , inventa, pour cette expérience, une méthode dont l'exactitude surpassait tout ce qu’on avait imaginé jusques alors, et n’a pas été surpassée depuis. Lorsque ces opérations furent terminées, on songea que Jarc du méridien pouvait être continué de plusieurs degrés au sud à travers la Catalogne, et qu'il pouvait même proba- blement se prolonger jusqu'aux îles Baléares, au moyen d'un immense triangle dont Les côtés, s'étendant sur la mer, Ccx NOTICES SUR LES VOYAGES ENTREPRIS joindraient ces îles à la côte de Valence. Méchain se dé- voua pour cette opération : je dis qu'il se dévoua, car il alla mourir de la fièvre dans une petite ville du royaume de Valence, après avoir reconnu toute la chaîne et mesuré les premiers triangles. Nous fümes chargés, M. Arago et moi, d'achever ce travail conjointement avec des commis- saires du roi d'Espagne, Charles IV. Nous eùmes le bonheur de réussir; mais on se rappelle que M. Arago ne revint en France qu’à travers de grands périls et après une dangereuse captivité. Nos résultats, en confirmant ceux de l'arc de France, leur donnèrent une certitude nouvelle. Nous me- surâmes aussi, dans notre station extrême, la longueur du pendule à secondes par le procédé de Borda. Nous répé- tâmes la même opération, M. Mathieu et moi, sur divers points de l'arc compris entre Perpignan et Dunkerque. Ces expériences donnèrent pour l’aplatissement de la terre une valeur presque exactement égale à celle que M. Delambre avait déja obtenue en comparant l'arc de France et d'Es- pagne au degré de l'équateur, calculé avec de nouveaux soins , au degré de Laponie qu'un habile astronome suédois, M. Svanberg, avait corrigé par de nouvelles observations; enfin à un arc de plusieurs degrés, que le major Lambton avait mesuré avec une grande exactitude dans les possessions anglaises de l'Inde. Vérifié par tant de combinaisons indépendantes les unes des autres, notre arc de France et d'Espagne acquérait plus de droits à devenir un type fondamental de mesures. Une occasion se présenta de lui donner plus d'importance encore. Depuis la rebellion de 1745, le gouvernement an- glais avait senti l'utilité de lever une carte détaillée des trois POUR MESURER LA COURBURE DE LA TERRE. Cxj royaumes, qui püt également servir à diriger les améliora- tions du pays, en temps de paix, et sa defense en temps de guerre. Pour le dire en passant, c’est aussi la guerre qui, depuis vingt ans, a donné aux opérations géodésiques la grande extension et l’extrème perfection qu'elles ont ac- quises dans tous les états de l'Europe; et ce petit avantage vaut d'autant plus la peine qu'on le remarque, qu'il est payé assez cher. Quoi qu'il en soit, la triangulation anglaise com- mencée par le général Roy, et continuée après. lui par le colonel Mudge , se prolongeait déja depuis le sud de l'An- gleterre jusqu'au-nord de l'Écosse, et offrait, sur cette éten- due, plusieurs degrés du méridien terrestre, mesurés avec d'excellents instruments. Il était bien à souhaiter que cet arc püt se joindre à l'arc de France. Mais la position géo- graphique de l'Angleterre le plaçant un peu à l'occident du nôtre, on pouvait craindre que, si tous les méridiens terrestres ne sont pas exactement semblables, la différence de longitude n’altérât les résultats qu'on aurait pu tirer de cette jonction. Toutefois cet inconvénient n’était pas à re- douter pour les mesures du pendule, qui sont beaucoup moins troublées que les degrés par les petites irrégularités de la figure de la terre. Le bureau des longitudes souhaita que les mêmes appareils qui avaient servi, pour ces me- sures, en Espagne et en France, fussent portés sur toute l'étendue de l'arc anglais. Soubaiter une chose utile aux sciences, c'était avoir d'avance l'assentiment des savants d'Angleterre et l'approbation du gouvernement de ce pays éclairé. Ni l’un ni l’autre ne nous manquerent. Le respec- table sir Joseph Banks et son digne ami le chevalier Blagden uous assurèrent de toutes les facilités imaginables. Le mi- exi] NOTICES SUR LES VOYAGES ENTREPRIS nistre de l'intérieur, M. Tainé, près de qui toute chose utile, ou honorable, n'a que la possibilité pour limite, trouva dans les ressources de sa bienveillance les moyens de four- nir à cette entreprise, et le bureau des longitudes voulut bien m'en confier l'exécution. .Je partis de Paris au commencement du mois de mai de l'année dernière, emportant avec moi les appareils qui avaient servi sur les autres points de la méridienne, un cercle répétiteur de M. Fortin, une horloge astronomique et des chronomètres de M. Bréguet, enfin tout ce qui etait néces- saire pour les observations. Des ordres du gouvernement anglais, obtenus par l'intervention tutélaire de: sir Joseph Banks, attendaient cet envoi à Douvres. Il me fut remis tout entier sous le sceau de la douane, sans droits, sans visite, absolument comme si je n'eusse pas changé de pays. Les mêmes soins en protegerent le transport jusqu’à Londres, où il fut déposé chez sir Joseph Banks. Que ne puis-je peindre ce que je sentis en voyant pour la premiere fois ce vénérable compagnon de Cook! Illustre par de longs voyages; remarquable par une étendue d'esprit et par une élévation de sentiments qui le font s'intéresser également aux progres de toutes les connaissances humaines; posses- seur d'un rang élevé, d'une grande fortune, d’une considé- ration universelle, sir Joseph a fait de tous ces avantages le patrimoine des savants de toutes les nations. Si simple, si facile dans sa bienveillance, qu’elle semble presque, pour celui qui l'éprouve, l'effet d’un droit naturellement acquis ; et en même temps si bon, qu'il vous laisse tout le plaisir, toute l’individualité de la reconnaisance. Noble exemple d’un protectorat dont toute l'autorité est fondée sur l'estime, POUR MESURER LA COURBURE DE LA TERRE. cxiif l'attachement, le respect, la confiance libre et volontaire ; dont les titres consistent uniquement dans une bonne vo- lonté inépuisable et dans le souvenir des services rendus; et dont la possession longue et non contestée fait supposer de rares vertus et une exquise délicatesse, quand on songe que tout ce pouvoir doit se former, se maintenir et s'exercer parmi des égaux. Sous ces auspices honorables, tout devint facile. Le colo- nel Mudge, qui avait montré les intentions les plus favo- rables pour notre entreprise , la seconda par tous les moyens dont il disposait. Nous partimes pour Edimbourg ensem- ble, et nous fixâmes notre première station dans le fort de Leith. Là, je reçus de lui tous les secours dont l’obligeance la plus sincère et la plus active pouvait suggérer l'utilité. Mais, ce que j'appréciai bientôt comme un service plus grand et plus essentiel encore que tous les autres, ce fut de m'avoir fait obtenir la bienveillance du colonel Elphinstone, commandant des ingénieurs militaires. Je suis si fort redevable à eet offi- cier, que je ne pourrai jamais dire assez tout ce qu'il fit pour moi; et l'amitié durable qui m’attacha bientôt à lui peut seule lui témoigner ma reconnaissance. Par ses ordres, et sous sa surveillance la plus immédiate , toutes les dispositions furent faites pour me mettre en état d'observer le mieux et le plus tôt possible. Il me fallait un emplacement où la vue fût libre, et qui fût abrité, pour établir mon cercle; on me fit construire, sur la terrasse du fort, un observatoire por- tatif, dont toutes les parties, se démontant à volonté, me permettaient d'observer de tous les côtés de l’horizon. Il fallait que les appareils du pendule fussent fixés avec soli- dité : des pierres du poids de 6o quintaux furent scellées 1818. Histoire. P ex1v NOTICES SUR LES VOYAGES ENTREPRIS dans d’épaisses murailles avec des liens de fer. Tout ce qui pouvait m'être utile me fut prodigué; et, si mes observa- tions étaient mauvaises , je n'avais point d'excuse, c'était en- tiérement ma faute. Malheureusement, la santé du colonel Mudge, affaiblie par ses précédents travaux , ne lui permit pas de jouir avec moi de ces préparatifs autant que nous l'aurions souhaité tous les deux. Mais il fut suppléé en cela par un de ses fils, le capitaine Richard Mudge, jeune offi- licier plein de zele, avec lequel je fis complètement toutes mes observations. Le soin que je mettais à ce devoir ne m'empêéchait pas de jeter un coup d'œil à la dérobée sur tout ce qu'il y a de beau et de bon dans cette Écosse, sé- jour de la morale et des lumières. Mais, prévoyant que de tels objets pourraient bien me rendre un peu trop arides des détails minutieux de poids, de longueurs et de mesures, j'avais résolu de ne m'en occuper qu'à mon retour; et, heu- reusement pour les expériences, j'ai tenu fidèlement la pa- role que je leur avais donnée. Lorsqu'elles furent finies, nous devions aller les répéter aux Orcades, derniere limite de l'arc anglais; mais le co- lonel Mudge, songeant toujours à ce qui pouvait rendre ses opérations plus complètes, reconnut qu'il était possible de lier les Orcades aux îles Shetland par des triangles dont les sommets s'appuieraient sur les îles, ou plutôt sur les rochers intermédiaires de Faira et de Foula. Ce plan éten- dait le nouvel arc de deux degrés vers le nord ; c'était assez pour nous décider. Mais, relativement au système général des opérations d'Angleterre et de France, il avait encore un avantage d’une bien autre importance ; c'était de rame- ner la ligne d'opérations anglaise de deux degrés vers l’est, presque sur le méridien de Formentera, notre dernière sta- POUR MESURER LA COURBURE DE-LA TERRE. CxV tion australe dans la Méditerranée. Par cet heureux chan- gement, l'opération anglaise devient le prolongement de la nôtre, et les deux ensemble forment un arc presque égal au quart de la distance du pôle à l'équateur. Si l'on peut espérer qu'un jour les diverses nations de l'Europe s'ac- cordent à choisir, dans la nature, la base d’un système commun de mesures, n'est-ce pas là l'élément le plus beau, le plus sûr qu’elles puissent adopter? Et ce grand arc qui, partant des îles Baléares, traverse l'Espagne, la France, l'Angleterre, l'Écosse, et s'arrête aux rochers de la Thulé antique, étant combiné avec l’aplatissement de la terre qui se déduit des mesures du pendule ou de la théorie de la lune, ne donnera-t-il pas, pour l’unité fondamentale, ou ‘LE MÈTRE, la détermination la plus complète, et si on ose le dire, la plus européenne que l’on puisse jamais espérer? Dès que ce grand projet fut reconnu possible, il absorba toutes nos pensées : la santé affaiblie du colonel Mudge ne permit pas qu'il le réalisât lui-même ; il en confia l’exé- cution à un des officiers qui servaient sous ses ordres. Il me laissa son fils, dont l'assistance m'avait été si utile et me le devint davantage encore. Mes appareils , l'observatoire por- tatif, les grosses pierres, leurs liens de fer, tout fut em- barqué avec les instruments de l'opération anglaise, sur le brick de guerre l’Investigator, commandé par le capitaine George Thomas, dont l’active habileté n’a sans doute pas besoin de mes éloges, mais dont la complaisance inépui- sable exige toute ma reconnaissance. Cet officier voulut bien me prendre sur son bord à Aberdeen, où, dans un bien court séjour, j'avais éprouvé l'hospitalité la plus honorable; et le 9 juillet nous fimes voile pour les îles Shetland. Nous Pa / CxY] NOTICES SUR LES VOYAGES ENTREPRIS restâämes long temps en mer, retenus par des calmes ou par des vents contraires, regrettant de tout notre cœur la perte de tant de belles nuits que nous aurions pu si bien em- ployer pour nos observations. Le sixième jour, nous lais- saines au loin sur notre gauche les Orcades et leurs mon- tagnes rougeàtres, que ne dépassa point l'audace romaine ; nous découvrimes l'île de Faira, qui vit se briser sur ses rochers le vaisseau amiral de l'invincible flotte de Philippe. Enfin les pics de Shetland nous apparurent dans leurs nuages ; et le 18 juillet nous primes terre, non loin de la pointe australe de ces îles, où les marées de l'Atlantique, heurtant celles qui viennent de la mer de Norwège, causent un soulèvement continuel et une éternelle tempête. L'aspect désolé du sol ne démentait pas ces approches. Ce n'étaient plus ces îles fortunées de l'Espagne, ces riantes contrées, ce jardin de Valence, où les orangers, les citronniers en fleur, répandent leurs parfums autour du tombeau d’un Scipion, ou sur les ruines augustes de l’ancienne Sagonte. Ici, en abordant sur des rocs mutilés par les flots, l'œil n'aperçoit qu'une terre humide, déserte, couverte de pierres et de mousse ; dés montagnes décharnées que ruine l'inclé- mence du ciel; pas un arbre, pas un buisson dont la vue adoucisse cet aspect sauvage ; çà et là quelques huttes _éparses, dont les toits recouverts d'herbe laissent échapper dans le brouillard l’épaisse famée dont elles sont remplies. En songeant à la tristesse de ce séjour, où nous allions rester exilés pendant plusieurs mois, nous nous dirigeàmes, non sans peine, à travers des plaines et des collines sans chemins, vers le petit assemblage de maisons de pierre qui forme la capitale, appelée Lerwick. Là , nous pûmes com- mencer à sentir que les vertus sociales d’un pays ne doivent POUR MESURER LA COURBURE DE LA TERRE. CXvi] pas se mesurer sur ses apparences de pauvreté ou de ri- chesse. Il est impossible d'imaginer une hospitalité plus franche, plus cordiale que celle qui nous accueillit. Des per- sonnes qui ne connaissaient nos noms que depuis un in- stant, s'empressaient de nous conduire par-tout : informées de l’objet de notre voyage, elles nous donnaient d’elles- mêmes tous les renseignements qui pouvaient nous être utiles ; elles les recueillaient pour nous, et nous les trans- mettaient avec le même intérêt que s’il se fût agi d’une af- faire qui leur eût été personnelle. Nous recûmes sur-tout beaucoup d'avis essentiels du docteur Edmonston , médecin instruit, qui a publié une trés-bonne description des îles Shetland , et qui se souvenait avec plaisir d’avoir suivi à Paris les cours de notre confrère, M. Duméril. Il nous donna des lettres pour un de ses frères qui résidait dans la petite île d'Unst, la plus boréale de tout cet archipel. Car, quoique nous eussions pensé, en partant d'Écosse, que nous nous établirions à Lerwick; quoique le fort Charlotte, qui pro- tége cette ville, présentât pour nous et nos appareils, un emplacement tres-favorable , cependant nous étions fort sé- duits par cette petite île d'Unst, qui nous offrait une der- nière station plus boréale que Lerwick, d'environ un demi- degré, et aussi un peu plus orientale, par conséquent plus rapprochée du méridien de Formentera. Il est vrai qu'elle ne nous promettait pas un séjour bien commode ; mais on conçoit qu'en partant, nous ne nous étions pas attendus aux jouissances du luxe : nous fimes donc le choix qui con- venait le mieux à nos opérations. Nos nouveaux amis de Lerwick nous indiquèrent le pilote le plus expérimenté de ces îles, et nous partimes je 20 juillet au soir pour notre dernière destination. La science de notre guide ne nous fut cxvii] NOTICES SUR LES VOYAGES ENTREPRIS pas inutile : un brouillard épais vint nous envelopper, Le vent, toujours favorable, fraichit ; et notre vaisseau, plongé dans une obscurité profonde, vola avec la rapidité d'une flèche, entre des écueils si nombreux, et par de si étroits passages, qu'a moins d'être conduit dans ce dédale par une pratique tellement juste et rapide qu’elle devint pour ainsi dire un sens, il aurait dû se briser mille fois. Arrivés à Unst, nous parcourümes avidement l'ile. Elle n'offrait que des cabanes de pêcheurs, et çà et là quelques maisons de propriétaires, trop petites pour recevoir les grands instru- ments anglais. Heureusement, la commission anglaise avait des tentes : on songea d’abord à les établir sur la montagne la plus haute et la plus boréale de l'ile; mais la difficulté de porter jusques-là les grands instruments, ce qu'il aurait fallu exécuter à bras d'hommes, fit renoncer à ce projet. On pré- féra une petite île appelée Balta, située à l'entrée de la prin- cipale baie d'Unst, et qui, la fermant, pour ainsi dire, du côté de la mer, en forme un excellent port, où le brick pouvait en toute sûreté mettre à l'ancre et débarquer nos instruments. Je me rangeai d'abord de cet avis; mais, en examinant de plus près la nouvelle station, en considérant à quels coups de vent furieux elle était exposée, l'humidité extrème qui y régnait, l'éloignement de toute habitation, et les difficultés multipliées qui se présentaient pour y for- mer un établissement aussi solide que l'exigeaient les expé- riences du pendule, je craignis, en y persistant, de com- promettre le succès de mes opérations. En conséquence, nous nous décidämes, le capitaine Mudge et moi, à retour- ner dans l'île d'Unst, et à demander l'hospitalité, pour nous et nos appareils, dans la seule maison qui füt en vue. Heu- reusement, c'était celle de ce M. Edmonston. dont le frère POUR MESURER LA COURBURE DE LA TERRE. CxIX nous avait si bien accueillis à Lerwick. Nous trouvâmes ici, la même bonté. Une grande bergerie, vacante à cause de l'été, et dont les épaisses murailles étaient faites pour ré- sister à toutes les tempêtes , reçut les appareils du pendule. L'observatoire portatif, ainsi que le cercle répétiteur, furent établis dans le jardin même de M. Edmonston. Ce ne fut pas sans de grandes peines que l'on parvint à débarquer les grosses pierres, et à les traîner jusqu’au lieu de leur desti- pation. Il fallut pour cela tous les efforts de l'équipage du brick, animés par l'obligeante persévérance des officiers. Enfin, le 2 août, nous fûmes en état de commencer les ob- servations astronomiques, et le 10, nous fimes la première expérience du pendule. Le 17,nous avions déja huit de ces expériences et 270 observations de latitude. Le succès de l'opération était assuré : elle ne demandait plus que du temps et de la persévérance. Malheureusement, le capi- taine Mudge commença à ressentir, d’une manière fâcheuse, l'influence de ce séjour. Quoiqu'il me cachât soigneusement ce qu'il éprouvait, et qu'il ne diminuât rien de son zele, je m'aperçus de l’altération de sa santé; et les vents ayant amené dans notre île un vaisseau baleinier qui revenait du: Spitzberg, je le déterminai à en profiter pour retourner dans un climat moins sévère. Il partit à regret, en me lais- sant, de la part de son père, toutes les autorisations, et même tous les secours dont je pouvais avoir besoin. Ce fut alors que, resté seul, je pus apprécier combien il était heu- reux pour moi d'être venu habiter chez M. Edmonston. La bienveillance de cet excellent homme semblait croître avec la difficulté de ma position. Je ne pouvais observer seul, au cercle répétiteur, dont la manœuvre exige deux personnes, ane qui suit l'astre, l’autre qui note les indications du ni- CXX, NOTICES SUR LES VOYAGES ENTREPRIS veau. M. Edmonston, qui s'intéressait à mes travaux autant que moi-même, me suggéra l'idée d'employer, pour cette dernière partie de l'observation, un jeune charpentier, qui nous avait déja donné des preuves de son intelligence et de son adresse en remontant notre observatoire; et qui, d’ail- leurs, comme tous les paysans d'Écosse et même de ces îles, savait fort bien lire, écrire et compter. Je suivis cet avis; et, ayant réduit la tâche de mon nouvel assistant à ce qu’elle pou- vait être de plus simple, j'essayai de lui en donner quelques lecons peu de jours avant le départ du capitaine Mudge. Il réussit tres-vite, et peut-être mieux qu'un aide plus savant n'aurait pu le faire; car il observait et marquait mon niveau avec toute la fidélité d’une mécanique; et, pour rien au monde, non pas même pour seconder mon impatience à observer, il n'aurait admis mes résultats comme bons, avant qu'ils fussent strictement dans les conditions que je lui avais pre- scrites, c'est-à-dire avant que la bulle du niveau füt par- venue à une parfaite immobilité. Toutefois, comme il faut bien se réserver quelques vérifications quand on veut faire d'un charpentier un astronome, j'avais, entre les nombres qu'il écrivait, certaines relations qu'il ne soupçonnait pas, et qui m'auraient indiqué ses erreurs s'il en avait commis. Cela arriva quelquefois dans les commencements ; et il était toujours fort surpris que je pusse ainsi reconnaître et re- dresser une faute que lui-même n'avait pas aperçue en la faisant, et que moi, je n'avais pas vu faire. Mais, au bout de quelques jours, ma science occulte n’eut plus aucune occasion de se montrer. Avec cette assistance utile et sûre, je parvins à réunir, en deux mois, trente-huit séries du pendule, chacune de cinq ou six heures; quatorze cents ob- servations de latitude en cinquante-cinq séries, prises tant POUR MESURER LA COURBURE DE LA TERRE. CXX] au sud qu’au nord du zénith, et environ douze cents obser- vations de hauteurs absolues du soleil et des étoiles pour régler la marche de mon horloge. D’après cela, on conçoit que je ne faisais guère autre chose qu'observer ; et en effet, je nai calculé sur les lieux que trois ou quatre observations à de grands intervalles les uns des autres, pour m'assurer de leur marche générale et me guider dans leur continua- tion, remettant les calculs définitifs à mon retour : j'ai sans doute bien fait d’en user ainsi, car, quoique j'y aie donné depuis beaucoup de temps, ils ne sont pas encore entiè- rement terminés. Toutefois , l'accord des observations déja réduites annonce l’exactitude que l’on peut en attendre; et les résultats qui s’en déduisent, étant combinés avec ceux de Formentera et de l'arc de France, donnent, pour l’apla- tissement de la terre, exactement la même valeur qui se conclut de la théorie de la lune, et de la mesure des de- grés, comparés à de grandes distances. Ce parfait accord entre des déterminations si diverses, montre à-la-fois la certitude du résultat et la sûreté des méthodes que la science emploie pour l'obtenir. On a pu voir, par cette notice, que ce n’est pas sans peine qu’elle est parvenue à ce point de précision; et l'on n’en sera pas étonné , quand on saura que la variation de longueur du pendule, par laquelle l’aplatis- sement se mesure, n’est en tout, depuis l'équateur jusqu’au pôle, que de quatre millimètres, c’est-à-dire moins de deux lignes , et depuis Formentera jusqu'à Unst, d’un millimètre et demi, ou moins de trois quarts de ligne. Ce sont pour- tant ces trois quarts de ligne qui, appréciés comme on peut aujourd'hui le faire, décèlent, mesurent même avec une très- grande exactitude l’aplatissement de tout le sphéroïde 1818. Histoire. Q CXXI] NOTICES SUR LES VOYAGES ENTREPRIS terrestre, et nous prouvent que, malgré les petits accidents de composition et d’arrangement que nous présente cette première et mince écorce sur laquelle nous nous agitons, l'intérieur de la masse de notre planète est composé de couches parfaitement régulières, assujetties aux lois de su- perposition , de densité et de forme que leur assigne un état primitif de fluidité. L'avantage d’avoir complètement exécuté mes opérations, quelque grand qu'il dût me paraître, ne fut ni le seul, ni le plus précieux que je trouvai dans la famille qui m'avait si obligeamment accueilli. Si je fusse resté sur les rochers de Balta, j'aurais sans doute quitté ces îles avec tous les pré- jugés d'un étranger. Je n'aurais vu que Ja tristesse de leur séjour, la pauvreté de leur sol, l'inclémence de leur ciel. J'aurais ignoré qu’elles renfermaient des êtres sensibles, bienveillants, vertueux, éclairés, comme ceux que j'ai eu le bonheur d'y connaître (1); ou, si j'avais pu soupconner leur existence, que quelque service affectueux, quelque at- tention délicate m'aurait sans doute révélée, je n'aurais pas conçu quel charme pouvait les retenir dans cette contrée brumeuse, pierreuse, sans chemin, sans un arbre sur les montagnes ou dans les plaines pour reposer la vue; royaume de la pluie, du vent et des tempêtes, où l'atmosphère, con- stamment imprégnée d’une froideur humide, n'apporte quelque adoucissement à l’âpreté des hivers, que sous la triste condition de n'avoir point d'été. Ce qui les y attache, c'est la paix, la profonde paix, l'inaltérable paix dont ils (1) Si je ne puis rappeler ici toutes les.personnes qui m'ont comblé de prévenances, du moins je Joindrai aux noms de M. Edmonston ceux de M. Mouat d'Unst, et Leisk de Lunna. POUR MESURER LA COURBURE DE LA TERRE. CXXii] jouissent , et dont ils savourent toutes les douceurs. Depuis vingt-cinq ans que l'Europe se dévore elle-même, on n’a pas entendu dans Unst, à peine dans Lerwick, le bruit d'un tambour ; depuis vingt-cinq ans la porte de la maison que j'habitais était restée ouverte la nuit comme le jour. Dans tout cet intervalle, ni conscription ni presse ne sont venues troubler ni affliger les pauvres, mais tranquilles habitants de cette petite ile. Les nombreux rescifs qui l’environnent, et qui ne la rendent accessible que par des temps favorables, lui servent de flotte pour la défendre des attaques des cor- saires en temps de guerre; et qu'est-ce que des corsaires y viendraient chercher! Ici on ne reçoit les nouvelles d'Eu- rope que comme on lit l'histoire du précéden@siècle ; elles ne rappellent aucun malheur personnel ; elles ne réveillent aucune animosité : aussi elles n'ont plus cet intérêt, ou, pour mieux dire, cette fureur du moment que produit l'exal- tation insensée de toutes les passions, et l’on philosophe avec tranquillité sur des événements qui semblent se rap- porter à un autre monde. S'il y avait seulement des arbres et du soleil, nul séjour ne serait aussi doux; mais s'il y avait des arbres et du soleil, tout le monde voudrait y ve- nir, et la paix n’y serait plus. Ce calme, cette sécurité habituelle, donnent aux rela- tions sociales un charme ailleurs inconnu. Tout ici, dans la classe propriétaire, est parent, ou allié, ou ami, et les amitiés sont comme des alliances. Mais aussi, comme en ce monde il faut que le mal accompagne toujours le bien, cette douceur même de vivre en grande famille est quelque- fois chèrement achetée ; elle leur fait sentir, avec une peine extrême, la mort de ce petit nombre d'individus sur lesquels Q2. CxxIV NOTICES SUR LES VOYAGES ENTREPRIS ils ont concentré leurs affections : un pareil événement, et il faut bien qu'il arrive, est aussi un malheur de famille, et en a toute l’'amertume. Ils éprouvent presque une douleur égale quand leurs frères, ou quelqu'un de leurs amis, part pour aller chercher fortune ailleurs; ce qui n’est cependant que trop ordinaire, l’île, et toutes les îles ensemble, ne fournissant pas assez d'emploi pour toute la classe élevée de la population. Ce départ est senti, par ceux qui restent, comme une mort; et c’est presque une mort eu effet pour eux, puisqu'il est trop vraisemblable qu'ils ne reverront ja- mais ceux qui s'éloignent. On quitte bien les îles Shetland pour venir s'établir dans un pays meilleur; mais on y re- vient rarement. Les amitiés même que leur bonté leur fait contracter avec les étrangers qu'ils obligent, deviennent, pour leurs pauvres cœurs, des sujets de regrets et de tris- tesse, que la voix lointaine de la reconnaissance ne peut qu'imparfaitement adoucir. La nécessité de s'expatrier tient, chez les Shetlandais des classes élevées, au peu d'extension du commerce et de l'agriculture, occasionné par le manque de capitaux et le défaut d'exportation des produits du sol. Une petite por- tion seulement des terres de chaque propriétaire est culti- vée; le reste sert de pâturage à des troupeaux de moutons et de chevaux à demi-sauvages , qui errent toute l’année sur les collines et dans les plaines, sans garde et sans abri. Le peuple défriche autour de sa hutte la portion de terre stric- tement nécessaire à sa subsistance , et en paie la rente sur les profits périlleux, mais attrayants, de la pêche. Tous la font, et avec une hardiesse qui n’a pas d'exemple. Six hom- mes, bons rameurs, et sûrs les uns des autres, s'associent pour occuper une même barque, un canot léger, entière- POUR MESURER LA COURBURE DE LA TERRE. CXXV ment découvert ; ils prennent avec eux une petite provision d'eau et de gâteaux d'avoine, une boussole, et, dans ce frêle esquif, ils s’en vont hors de la vue des îles et de toute terre, à une distance de quinze ou vingt lieues : là ils tendent leurs lignes, et passent un jour et une nuit à pêcher. Si le temps est beau et la pêche favorable, ils peuvent gagner chacun dix ou douze francs dans un pareil voyage; si le ciel se couvre et que la mer gronde, ils luttent, dans leur nacelle découverte, contre sa fureur , jusqu’à ce qu'ils aient sauvé leurs lignes, dont la perte serait leur ruine et celle de leur famille; puis ils rament et voguent, dans la direc- tion de la terre, au milieu de vagues hautes comme des mai- sons. Le plus expérimenté, assis à l'arrière, tient le gou- vernail; et, jugeant la direction de chaque lame, élude son choc direct, qui suffirait pour les engloutir. En même temps, il commande les mouvements de la voile; il la fait baisser chaque fois que la barque est montée sur le dos d'une vague, afin de modérer sa descente , et hausser chaque fois qu’elle est descendue au fond, afin que le vent la fasse voler sur le dos de la vague suivante. Quelquefois, enve- loppés d’une obscurité profonde , les malheureux ne voient pas la montagne d’eau qu'ils fuient; ils n’ont, pour juger son approche, que le bruit de son mugissement. Cepen- dant les femmes et les enfants sont sur la côte, implorant le ciel, épiant l'apparition de la barque qui porte leurs seules espérances, croyant parfois la voir soulevée ou en- gloutie dans le roulis des ondes; s’apprêétant à assister leurs maris ou leurs pères, s'ils arrivent assez près pour qu'on puisse les secourir, et quelquefois appelant à grands cris ceux qui ne les entendront plus. Mais leur destinée n’est pas toujours si funeste. À force d’adresse, de fatigue, de sang- CXXV] NOTICES SUR LES VOYAGES ENTREPRIS froid et de courage, le canot sort vainqueur de cette lutte terrible; le son bien connu de sa conque se fait entendre; il arrive : alors les embrassements succèdent aux larmes, et la joie de se revoir s'accroît par le récit de l’affreux péril au- quel on vient d'échapper. Toutefois, pour ces pauvres gens, l’âpreté même de leur patrie a des charmes. Ils aiment ces vieux rochers, dont les formes hardies et l'aspect , si souvent observé, leur mar- quent l’étroit passage que leur barque doit suivre, lorsqu’au retour d'une pèche heureuse, et ramenée par un vent favo- rable, elle rentre dans la baie protectrice, saluée par les cris des oiseaux de mer. Ils aiment ces cavernes profondes, où ils ont souvent lancé leur nacelle au milieu des vagues, pour aller surprendre les phoques endormis. Moi-même, tranquille sous leur conduite, j'ai contemplé, avec admi- ration, ces hauts escarpements des roches primitives, cette vieille charpente du globe, dout les couches, penchées vers la mer et minées à leur base par la fureur des flots, sem- blent menacer d’ensevelir sous leurs ruines la frêle barque qui bondit à leurs pieds. A notre approche, des nuées d’oi- seaux de mer sortaient par milliers de leurs retraites, sur- pris de se voir troubler par des humains, et faisaient re- tentir ces lieux solitaires de leurs cris confus; les uns s’é- lançant dans les airs, d’autres se plongeant dans les vagues et ressortant presque aussitôt avec la proie qu'ils y avaient saisie ; tandis que des cétacées et des phoques élevaient çà et là leurs têtes noirâtres au-dessus des ondes transparentes comme le cristal : par-tout la vie semblait abandonner une terre froide et humide, pour se réfugier, plus variée et plus active, dans l’airtet dans les eaux. Mais, aussitôt que le soir étend son voile sur ces sauvages retraites, tout rentre dans POUR MESURER LA COURBUREÉ DE LA TERRE. ÉXXVI) la paix, dans lé silencé: Quelquéfois un légér vent du sud adoucit la froideur de l'air, et permét aux ästres de la nuit d'éclairer dé l'éclat le’ plus pur cette stène tranquille | dont aucun bruit n’interrompt plus la paix profonde, si ce n’est, par intervalle , le murmure lointain des vagues moürantes, ou le cri doux et plaintif d’une mouetté rasant rapidement la surface dés flots. Après deux mois de séjour, je quittai ces îles, emportant des souvenirs pour toute ma vie. Un coup de vent de l'équi- noxe me ramena à Edimbourg en cinquante heures. Ce pas- sage brusque de la solitude au bruit du monde, de la sim- plicité patriarchale aux raffinements de la civilisation et du luxe, n'est pas sans attrait. Le colonel Elphinstone, par le plus obligeant accueil, me prouva que l'amitié n’était pas toute re- tirée aux îles Shetland. J'étais triste et souffrant de tant de fatigues, M. Elphinstone me recut dans sa maison , et m'y garda comme un parent, comme un ami. Ce fut alors que, entiè- rement désoccupé de mes observations, je pus contempler à loisir tout ce que l’état social le plus avancé offré, dans ce pays, en institutions et en hommes ; spectacle à-la-fois consolant et triste pour quiconque a passé sa vie au milieu des troubles du continent. Je vis un peuple pauvre, maïs laborieux ; libre, mais respectueusement soumis aux lois ; moral et religieux sans âpreté, tolérant sans indifférence. Je vis des paysans apprendre à lire dans des livrés où se trouvent des essais d’Addisson et de Pope. Je vis les ou- vrages de Johnson, de Chesterfield, et des plus agréables moralistes anglais, offerts en délassement à la classe moyenne du peuple : dans des coches d'eau, comme ail- leurs, on y mettrait des jeux de cartes et de dés. Je vis des fermiers de village se réunir en clubs pour délibérer sur CXXVII] : NOTICES SUR LES VOYAGES ENTREPRIS des intérêts de politique ou d'agriculture , et s'associer pour acheter des livres utiles, au nombre desquels ils mettaient l'Encyclopédie britannique, que l'on sait être rédigée, à Edimbourg, par des savants et des philosophes du pre- mier ordre. Je vis enfin des classes supérieures de la so- ciété, assorties à ce haut degré de civilisation, et réelle- ment dignes d'y occuper la première place par leurs lu- mieres et par la noblesse de leurs sentiments ; je les vis ex- citant, dirigeant toutes les entreprises d'utilité publique, communiquant sans ‘cesse avec le peuple, et ne se confon- dant jamais avec lui; s’attachant à développer son intelli- gence pour l'éclairer sur ses devoirs et sur ses intérêts véri- tables; sachant le soulager dans ses besoins, sans lui ôter les vertus et l'indépendance que donne le soin d'y pourvoir; attirant ainsi par-tout ses regards sans exciter son envie; et, pour prix de tant d'efforts, la paix, l'union, l'estime réci- proque, la confiance mutuelle , et même une affection tres- vive, fondée d'une part sur l'habitude de la bonté et la douceur des relations intimes, et de l’autre sur la reconnais- sance et le respect. En quittant l'Ecosse, je visitai les contrées les plus in- dustrieuses de l'industrieuse Angleterre. J'observai alors un autre spectaele : je vis les forces de la nature, em- ployées sous toutes les formes imaginables au service de l'homme, et celui-ci, réservé comme une mécanique plus chère et d’une construction plus délicate, pour les seules opérations intermittentes ou accidentelles que sa raison di- vine le rend plus propre à exécuter. Et, soit que les consi- dérations de morale sociale , qui m'avaient tant frappé, eussent laissé des traces trop profondes dans mon ame; soit qu'un grand système manufacturier doive plutôt être POUR MESURER LA COURBURE DE LA TERRE. CXXIX apprécié dans ses résultats nationaux que dans son in- fluence locale et particulière , j'admirai cet immense déve- loppement des manufactures plus que je ne le souhaitai pour ma patrie. Après avoir salué Oxford et Cambridge, ces antiques et tranquilles séjours des lettres et des scien- ces, je vins rejoindre M. Arago à Londres, et m'associer encore avec lui pour la mesure du pendule à sécondes, non plus toutefois dans une petite île presque déserte, mais dans le magnifique observatoire de Greenwich. M. de Hum- boldt, qui l'avait accompagné, prit part à cette opération, et voulut bien, pendant qu'elle dura , oublier la multitude de ses autres talents pour n'être qu'un excellent observa- teur. L’astronome royal, M. Pond, se plut à nous offrir toutes les facilités imaginables, avec cet empressement gé- néreux que les hommes vraiment dévoués aux sciences ont toujours, mais peuvent seuls avoir pour tout ce qui contri- bue à leurs progrès. Après avoir joui du plaisir d'observer le ciel et d'étudier un des plus grands phénomènes de la nature avec de beaux instruments, déja consacrés, pour ainsi dire, par tant d'observations, et dans un lieu renommé par tant de découvertes astronomiques, je revis enfin ma patrie avec ce bonheur du retour qu'éprouvent si vivement les cœurs français, et dont le charme était rendu plus doux encore par le sentiment intérieur de satisfaction et de re- connaissance dont je lui rapportais l'hommage. Cest, en effet, c'est dans un voyage entrepris pour l'avancement des sciences, qu'un Francais peut apprendre à honorer davan- tage, à mieux chérir sa noble patrie. Placé hors du cercle des passions politiques, n'étant point attiré par l'intérêt ou l'ambition; sans rang, sans richesses qui le soutiennent, il 1918 Histoire. En CXXX NOTICES SUR LES VOYAGES ENTREPRIS n’a pour lui que les titres que sa patrie s’est acquis à la so- lide gloire, à celle qui fait du bien aux hommes. Il est porté par le souvenir de tant de services qu’elle a rendus à la civilisation du monde, par l'admiration universelle qu'ont excitée tant de chefs-d'œuvre dont elle a rempli les lettres, les sciences et les arts. Semblable à Minerve, cette patrie l'accompagne sur le sol étranger; elle parle pour lui, l'in- troduit, le protége, lui ouvre les cœurs, et réclame en sa faveur une hospitalité qu’elle-mème a tant de fois et toujours si noblement accordée. Aussi lorsque, après avoir atteint le but de ses travaux, il raconte à ses compatriotes tout ce qu'il reçut d'accueil, de secours, de bienveillance, d'amitié même, chez une nation justement célebre, il éprouve une jouissance d'autant plus pure à manifester l'expression de sa reconnaissance, que toutes ces faveurs sont encore, à ses yeux, de nouveaux dons de sa patrie. (1) (x) Ce que j'ai dit dans cette Notice sur les vertus sociales de l'Écosse et des îles Shetland , présente ces contrées sous un aspect si différent de nos habitudes continentales, que je ne serais pas surpris qu'en France, en Augleterre même, beaucoup de personnes supposassent qu'il y a quelque exagération dans cette peinture, et que j'ai involontairement cédé à la prédilection qu'un étranger prend toujours pour un pays nouveau où il est reçu avec bienveillance. Je puis cependant assurer que je n'ai été que vrai. On me croira peut-être encore pour l'Écosse; mais, pour les îles Shetland, où tronverai-je des témoins? Quoiqu'elles soient peu distantes, la difficulté de la navigation, l'inclémence du climat et le défaut de commerce en éloignent les voyageurs ; et ceux que, par intervalles , la nécessité y amène, se hâtent de partir dès que leurs affaires sont termi- nées. Peut-être un séjour de deux mois, dans une position libre et désin- téressée , ma-t-il permis de voir ces îles plus intimement que ne Tont fait la plupart des Écossais qui les avoisinent, Aussi s'en fait-on de bien POUR MESURER LA COURBUREDE LA TERRE. CXXX] ÿ ADDITION. » Drpuis l'époque où la Notice précédente a été lue, on a conti- nué les opérations qui restaient encore à faire, soit pour achever la triangulation de l'Écosse, et y joindre les Orcades et les îles Shetland; soit pour rattacher d’une manière sûre et définitive l'arc anglais à l'arc de France. Ce dernier objet a été rempli par des observations simultanées de latitude faites à Dunkerque avec le secteur zénithal et le cercle répétiteur, et pour lesquelles nous nous sommes réunis, M. Arago et moi, avec les observateurs an- glais, MM. Mudge, Colby et Gardner. Le résultat de ce concours a été que la latitude déterminée par le cercle répétiteur, en ob- servant successivement au nord et au sud du zénith, s'accorde parfaitement avec celle que l'on obtient à l’aide du secteur; et, pour Dunkerque, l’une et l’autre méthode se sont aussi accordées avec la latitude que M. Delambre avait assignée à cette extré- EEE TT rare fausses idées à Édimbourg même. Mais, en général, c'est un plaisir que l'on peut se procurer d’un bout de l'Europe à l'autre, que d'entendre chacun médire de ses voisins du nord. En Italie, on regarde la France comme un climat rude et sévère; voyez ce qu’en dit Alferi. Ici, nous trouvons notre pays fort beau ; mais l'Angleterre nous semble le séjour des brouillards. A Londres, on ne se plaint nullement du climat; mais on parle de l'Écosse comme d’une contrée presque privée du soleil. Les Écossais trouvent cette opinion fort ridicule ; mais ils ont en grande pitié les pauvres Shetlandais. Ceux-ci, à leur tour, prétendent quils ont beaucoup moins froid qu'en Ecosse, mais qu'on est bien malheureux en Islande et aux îles Feroé. Je suis persuadé que les Islandais même ont encore quelque dédain pour le Spitzherg. La vérité est que , dans tous les climats du monde , l'homme peut vivre avec une somme de bonheur à- peu-près égale, s'il y porte avec lui les vertus sociales et les ressources du commerce et de la civilisation. R2 CXXXI) - NOTICES SUR LES VOYAGES, etc. mité boréale de notre arc, qui devient désormais la limite australe le l’arc anglais. Les deux arcs célestes étant ainsi rattachés l’un à l’autre, il reste encore à lier la triangulation anglaise avec la nôtre par quelques triangles établis sur les côtes opposées d'Angleterre et de France : car, bien que cette jonction ait été faite autrefois, le perfection nement des instruments peut faire espérer de lui donner aujour- d'hui plus d’exactitude. Une difficulté s’est élevée sur la possibilité d'employer à cette opération les signaux de nuit qui nous ont si bien servi en Espagne. On a craint, avec raison, que leur lumière n’égarât les vaisseaux qui les prendraient pour des phares. Pour éviter ces inconvenients , j'ai proposé d'employer ces signaux pen- dant le jour, où ils seraient visibles dans nos lunettes, comme le sont les étoiles, sans être vus des navigateurs. Je ne doute pas que ce moyen ne réussisse pafaitement, si on veut l'employer. Enfin, quand toutes les opérations relatives au grand arc d'Eu- rope seront terminées, on pourra les compléter d'une maniere proportionnée à leur grandeur, en mesurant un arc du méridien terrestre, et la longueur du pendule près de l'équateur, sur le prolongement de l'arc européen ; ce qui peut aisément se faire dans les établissements anglais de la côte de Guinée. J'ai soumis cette idée à l'illustre président de la Société royale, le chevalier Banks : c'est en faire hommage à la personne qui, par sa position et son influence, peut le plus aisément en déterminer l'exécution. A RAR RS AAA RAR RAPPORT Fait à l_Academie royale des sciences sur un ouvrage de M. Vicat, ingénieur des ponts-et-chaussees, intitulé : Recherches expérimentales sur les chaux de construction, etc. Extrait des registres de l’Académie, et imprimé par son ordre. ] M. Vicat , ingénieur des ponts-et-chaussées, dans le dépar- tement du Lot, a présenté à l’Académie un mémoire inti- tulé : Recherches expérimentales sur les chaux de construc- tion, les bétons, et les mortiers ordinaires ; nous avons été chargés de l’examiner et d’en rendre compte, MM. de Prony, Gay-Lussac, et moi. L'objet de ce travail est de la plus haute importance, puisque la solidité des édifices de toute nature, et particulie- rement des constructions hydrauliques, dépend du degré de dureté que peuvent acquérir les mortiers ou ciments em- ployés pour lier entre eux les matériaux de ces édifices : aussi, depuis long-temps, les architectes et les ingénieurs les plus ha- biles se sont-ils occupés, avec plus ou moins de soin, de recher- cher la meilleure composition de ces mortiers; ils ont donné des règles pratiques à cet égard, et ces règles, soumises de- puis environ un demi-siècle à l'examen des chimistes et des physiciens, ont recu des explications diverses, et des modi- fications que l'expérience et la théorie ont successivement indiquées. CXXXIV RAPPORT C'est tout-à-la-fois comme constructeur et comme chimiste que M. Vicat a entrepris de traiter cette matière : la position dans laquelle il se trouve, en lui faisant sentir de quelle uti- lité pouvaient être les recherches qu'il entreprenait, lui a permis de donner à son travail un grand développement : les nombreuses expériences dont il se compose, et les vues nouvelles qu'il présente, ne pouvaient manquer d’exciter l'intérêt de vos commissaires; mais, avant d’en rendre compte, et pour mettre l'Académie à portée de reconnaître ce qui ap- partient à l’auteur, et d'apprécier par-là le mérite de ses re- cherches, il convient d'exposer le plus succinctement pos- sible les travaux de ceux qui l'ont précédé, et de fixer l'état de la question au moment où il a été conduit à s’en occuper. Soumettre une pierre d’une certaine nature à l'action du feu ; la rendre ainsi susceptible de former avec l’eau une sorte de pâte ; composer de cette pâte et d’une quantité détermi- née de sable ou d’autres matières pulvérulentes, un mélange susceptible de s’endurcir par le temps à l'égal des pierres naturelles, auxquelles il est destiné à servir de liaison, sont autant d'opérations qui supposent nécessairement le peuple chez lequel on les mit pour la premiere fois en pratique, déja parvenu à un état avancé de civilisation. Cependant les blocs de pierre de taille qui forment les assises horizontales des pyramides d'Égypte , C'est-à-dire des plus anciens mo- numents connus, sont déja liés entre eux par un ciment com- posé de chaux, de sable, et de fragments de briques, tandis que les constructions qui furent désignées par les anciens sous e nom de constructions Cyclopéennes, et qui appartiennent aux premiers âges de la Grèce, sont, comme on sait, formées de prismes horizontaux à bases irrégulières, posés les uns SUR LES CHAUX DE CONSTRUCTION. CXXXV sur les autres sans aucun ciment intermédiaire. C’est à la perfection avec laquelle leurs faces latérales sont dressées , et à l'exactitude de leur juxta-position, qu'il faut attribuer la belle conservation des murs antiques où on les retrouve en- core aujourd'hui. Or, en Grèce et dans la partie de l'Italie où les Grecs vinrent s'établir, les murs Cyclopéens servent de soubassement à des constructions évidemment postérieures qui ont leurs matériaux unis par des ciments calcaires : ce fut denc à une époque moins reculée que celle de la construc- tion des murs Cyclopéens (1), que l'usage de ces mortiers fut apporté de l'Orient dans les régions de l'Europe les plus an- ciennement civilisées. . La recherche de cette époque ne serait peut-être pas sans utilité pour ceux qui entreprendraient de tracer la marche, et d'indiquer les progrès de la civilisation des peuples; mais sa détermination précise est étrangère à notre sujet. Nous dirons seulement que si, comme on l’assure, il n'entre point de mortier dans la maçonnerie de la grande cloaque que Tar- quin-l’Ancien fit construire à Rome environ six cents ans avant notre ère, ce fut dans l'intervalle des trois cents années qui suivirent, que l'usage des ciments calcaires s'y introdui- sit : ils entrent en effet dans la maçonnerie de la vote Ap- ptenne , et ils étaient indispensables pour celle de l’aquéduc destiné à amener l'Æqua Claudia sur le mont Aventin. Or ces deux grands monuments d'utilité publique, les premiers de ce genre que l’on ait érigés, sont précisément de la même date, et ont eu l’un et l'autre pour fondateur le censeur Ap- pius Claudius , qui exerçait sa magistrature’an de Rome 441. LR Re UPS PO NE ARR ES ONE LP MEN EEE 122 (1) Voyez les Mémoires de M. Petit-Radel. CXXXV| RAPPORT Ainsi l'usage de la chaux pour la préparation des mortiers était nécessairement connu en Italie trois cent treize ans avant l'ère chrétienne. Tous ceux qui ont écrit sur l'architecture ont attribué à Vitruve d’avoir indiqué le premier les proportions suivant lesquelles le sable et la chaux doivent être mélés pour la fa- brication du mortier. C’est une erreur commune à tous ces auteurs : deux cents ans avant Vitruve, Porcius Caton, le plus ancien de tous les écrivains romains dont les ouvrages nous soient parvenus, avait dit, dans son Traité de Re rustica (x), non-seulement qu'on devait composer le mortier de deux mesures de sable et d’une mesure de chaux, mais encore il avait spécifié les caractères extérieurs de la pierre calcaire que l'on croyait de la meilleure qualité, et ceux auxquels on jugeait que la cuisson en était achevée. Il avait décrit la forme et les dimensions des fours à chaux, et fait connaître les conditions auxquelles on devait stipuler les marchés que l'on contractait avec les chaufourniers ; ce qui suppose un usage déja tres-étendu de la matière qu'ils préparaient. Vitruve, à la vérité, entre dans de plus grands détails; il distingue différentes espèces de sable (2), et regarde comme le plus convenable à la fabrication du mortier, le sable fos- sile le plus âpre au toucher, sans aucun mélange de terre, et qui, jeté sur une étoffe blanche, n'y laisse point de tache après qu'on l’a secoué; vient ensuite le sable de rivière, puis enfin celui de mer, qu'il place au dernier rang, attendu, dit-il, que le mortier qui en est composé sèche difficilement. (1) Marcus Porcius Cato de Re rusticä, cap. 19; thid. cap 38; ibid. cap. 16. Caton écrivait environ deux siècles avant J.-C. (2) Vütruvi de Architecturä, Gb. IL, cap. 4. SUR LES CHAUX DE CONSTRUCTION. CXXXVi] Quant aux proportions de chaux et de sable, il les fait va- rier suivant l'espèce de celui-ci. Ainsi il prescrit de mélerune partie dechaux éteinteavectrois parties de sable fossile, ou deux parties seulement de sable de rivière ou de mer(r), en observant que l'on rend le mor- tier fait avec ces deux dernières espèces de sable beaucoup meilleur par l'addition d’une partie de tuileaux concassés. Cet auteur est aussi le premier auquel on doive la connais- sance des propriétés de la pouzzolane, qu’il appelle poudre . de Pouzzoles (pulvis puteolanus) (2). I] dit qu'on la trouve aux environs de Bayes et du mont Vésuve, et que, mêlée avec la chaux et les pierres, elle donne à la maçonnerie ainsi com- posée la faculté de s’endurcir merveilleusement , non -seule- ment dans les édifices ordinaires, mais même au fond de la mer. 1] prescrit ailleurs (3), pour la fondation des môles que l'on place à l'entrée des ports, l'emploi d'un mortier composé d'une partie de chaux et de deux parties de pouzzolane. C’est aussi dans cette proportion, qu'il indique de mélanger la chaux et la brique pilée, pour composer la forme de mortier sur laquelle le pavé des maisons et des terrasses devait être assis (4) : car il paraît que dès-lors la pouzzolane était exclu- sivement réservée pour les constructions hydrauliques. Les divers passages de Vitruve , dont nous venons de rappeler la substance, semblent laisser incertaine la ques- tion de savoir dans quel état se trouvait la chaux lors de son emploi: était-elle éteinte d'avance et réduite en pâte ? ou bien était - elle employée au sortir du four, à l'état de RE RAR TEE À FPMO CPR RTS ES NES (x) Wütruv. de Architect. ,\. I, c.5. (2) Tbid. lib. If, cap. 6. (3) Ibid. lib. V, Cap. 12. (4) kid. Gb. VII, cap. r. 1818. Histoire. S EXXXVII] RAPPORT chaux vive? L’attention que met cet auteur à recommander de ne se servir, pour faire du stuc ou des enduits, que de chaux éteinte depuis long-temps (1), fonderait à croire que, pour les mortiers ordinaires, la chaux était éteinte pen- dant l'acte même de leur fabrication. Vitruve justifie, au sur- plus, par une raison trèes-plausible, la pratique qu'il recom- mande, de ne faire usage, pour les stucs et les enduits, que d’une chaux ancienne, devenue grasse et gluante : c’est, dit- il, parce qu'il reste toujours dans la chaux qui est employée à la sortie du fourneau, de petites portions de pierre moins calcinées , lesquelles , venant à s’éteindre après la fabrication du stuc, éclatent à sa surface, et en détruisent le poli (2). Il prescrit encore d’enduire les parties basses d’un édifice, et celles qui sont constamment exposées à l'humidité, non pas de mortier fait de chaux et de sable, mais de mortier, de chaux éteinte, et de ciment de brique (3). Pline, qui a rassemblé dans son précieux recueil les pro- cédés de presque tous les arts de l'antiquité, a répété, sur la composition des mortiers et l'emploi de la pouzzolane, tout ce que Vitruve en avait dit (4); on n'y trouve, de plus, que les plaintes qu'il fait contre l’avarice des constructeurs, qui, employant des ciments sans liaison, parce qu'ils en dérobaient la chaux, préparaient d'avance la ruine des édi- fices de Rome (5). L'intervalle qui s’est écoulé entre le siècle de Pline et celui (1) Witruvii, de Architecturä, Ub. VII, cap. 2. (2) Zbid. ib. VIT, cap. 2. (3) Ibid. ibid. cap. 4. (4) Naturalis historiæ, Hb. XXXVI, cap. 23. bd. Gb. XXXV, cap. 13. (5) Ruinarum urbis ea maximè causa, quod furto calcis, sine ferrumine su0 cœmenta componuntur. ( Nat. hist. ib. XXX VI, cap. 23.) SUR LES CHAUX DE CONSTRUCTION. CXXXIX de la renaissance des arts en Europe, disparaît, en quelque sorte, dans l’histoire de l'architecture. Cette histoire n’est écrite que par les monuments mêmes de cette époque. Si le goût particulier des peuples du Nord modifia l’ancienne forme | des édifices, il est très-vraisemblable qu'ils ne changèrent rien aux procédés de l’art de bâtir que la tradition avait con- servés dans les pays qu’ils subjuguèrent : aussi voit-on dans le quinzième et le seizième siècle Léon -Batiste Alberti (r), Palladio, Scamozzi en Italie, et Philibert de Lorme en France, répéter, sur la fabrication du mortier, les prescriptions de Vitruve et de Pline. Le temps n'était point encore venu de perfectionner les anciens procédés par des expériences et des théories nouvelles. Ce fut dans les parties septentrionales de l'Europe , où l'âpreté du climat soumet les constructions hydrauliques à des chances de destruction plus nombreuses, que l’on son- gea d'abord à substituer des matières indigènes à la pouzzo- lane d'Italie, qui ne pouvait y parvenir qu'à grands frais. 11 y avait déja long-temps que les Hollandais l'avaient rempla- cée par le trass d'Andernach, qui, comme on sait, n'est autre chose qu'un tuf volcanique des bords du Rhin (2), réduit en poudre, lorsque, vers le milieu du dernier siècle, la difficulté d'obtenir cette substance à des prix modérés, et celle encore plus grande d'aller chercher la véritable pouzzo- lane jusqu’au pied du Vésuve, fit imaginer à un ingénieur sué- RE EP PER PMR VV PEN AL ONPN DICO (x) Leonis Batistæ Alberti de Re ædificatoriä | Gb. II. (2) Ce tuf volcanique se trouve daus la petite vallée de Brohlbach , qui débouche dans le Rhin près du village de Brohl , département de Rhin-et- Moselle. (Mémoire sur les richesses minérales de ce département, par M. Calmelet, Journal des mines tom, XXV, pag. 363.) L S2 olx RAPPORT dois de remplacer par un produit artificiel ces deux produc- tions volcaniques (1). Instruit probablement par l'analyse chimique, et guidé par l'analogie, il calcina une espèce de schiste compacte qui se trouve abondamment auprès de Wesneborg, et, l'ayant pul- vérisé, il en composa, avec une certaine proportion de chaux, un mortier dont le bon emploi dans les constructions hydrau- liques qu'il dirigeait, justifia pleinement ses conjectures. Cependant toute espèce de chaux est-elle également propre à la fabrication des mortiers hydrauliques, c'est-à-dire qui sont susceptibles de prendre corps et de s’endurcir sous l’eau ? Ce fut encore en Suede que l’on s’occupa, pour la première fois, de résoudre cette question. On y connaissait dans le vil- lage de Léna, situé en Uplande, une pierre à chaux qui don- nait cette propriété aux mortiers dans la confection desquels on la faisait entrer. Le célebre Bergman l'ayant analysée, reconnut qu'elle contenait une petite quantité d’oxide de manganèse; et ce fut à la présence de cette substance dans la chaux de Léna, qu'il attribua la propriété caractéristique des mortiers qui en étaient composés. (2) Quelque temps avant que les essais de Bergman leussent conduit à cette conclusion, J. Smeaton, un des plus habiles ingénieurs dont l'Angleterre puisse se glorifier, avait été (1) M. Baggé de Gothembourg. Voyez les Recherches sur la pouzzolane, par M. Faujas de Saint-Fond , pag. 47-54. (2) Hæc præstantia (calcis Lenæ in Uplandiä) potius magnesio quam inhærenti ferro adscribenda videtur, quum lapides calcarei magnesio spo- liati, martialis tamen circiter æquali dosi contaminati ac Lenenses , nihilo- minus debiliorem porrigunt calcem. (Torberni Bergman opuscula, tom. IE, pag. 220.) SUR LES CHAUX DE CONSTRUCTION. cxl] chargé de reconstruire le phare d’'Edystone, situé sur un ro- cher à l'entrée de la Manche, à quatorze milles de la rade de Plymouth. Il savait, par une longue expérience, que la pre- mière condition à remplir pour assurer la solidité de cet édi- fice, consistait à n’y employer. que des.ciments de la meil- leure qualité. Il faut lire dans les recherches expérimentales jointes à la description qu'il a publiée de ses hardis tra- vaux (1), le détail de tous les soins qu'il prit pour recon- naître les substances les plus convenables à la fabrication des ciments , et les meilleures proportions de leurs mélanges. L'usage ordinaire de ses devanciers était de composer leur mortier hydraulique de deux parties en volume de chaux éteinte, et d’une partie de trass de Hollande. Il reconnut que des boules faites de ce mortier avaient en effet la pro- priété de s’endurcir sous l'eau, mais que cette propriété se manifestait bien plus constamment lorsque le trass et la chaux étaient mélangés en parties égales. Il reconnut encore, qu’en quelques proportions que l’on combinät le sable ordinaire et la chaux, jamais on ne parvenait à en composer des mortiers qui résistassent à cette épreuve; et cela avait lieu, soit que la chaux provint de craie friable, soit qu’elle provint de marbre compacte. Mais, entre ces deux pierres calcaires qui, par leurs carac- tères extérieurs, semblent former les deux termes extrêmes de la série dans laquelle sont comprises toutes les substances de cet ordre, il fallait s'assurer s’il n’en existait pas quel- (x) Narrative of the building, and a description of the Edystone-light- house, with stone, etc. Un extrait de cet ouvrage a été inséré dans le second recueil de divers mémoires de la Bibliothèque des ponts-et-chaussées , par M. Lesage. exlij RAPPORT qu'une plus propre qu'aucune autre à la confection des mor- tiers hydrauliques : tel fut l’objet de la première recherche de Smeaton. Il avait entendu dire qu’on tirait d’Aberthaw , dans le comté de Clamorghan, une chaux qui avait la propriété de s'endurcir sous l'eau. Il se procura des échantillons de cette pierre; 1l les calcina lui-même, et remarqua que de bleuâtres qu'ils étaient, ils passaient à la couleur fauve par la calcination. Les mortiers qu’il en composa avec le trass s’endurcirent très-promptement sous l’eau, et leur dureté s'accrut à mesure qu'ils y resterent plus long-temps. Il s'agissait de savoir à quoi tenait cette propriété; mais Smeaton n'avait que peu ou point de connaissances chimi- ques. Un de ses amis auquel il eut recours lui enseigna à faire l'analyse des pierres à chaux qu’il voudrait éprouver. Il en réduisait en poudre grossière environ le poids d’une guinée; versant ensuite sur cette poudre de l'acide nitrique, il trouva que si elle était dissoute en entier , comme cela arrivait à la craie pure et au marbre, la chaux faite avec cette pierre ne jouissait point de la propriété cherchée; tandis qu’au con- traire, si après la dissolution il restait un sédiment au fond du vase, la pierre était propre à faire de la chaux hydrau- lique; et c'était ce qui avait lieu pour la chaux d’Aberthaw. Quant à la nature de ce sédiment , la seule différence de pe- santeur spécifique des matières qui le composaient, fit re- connaître qu’il était formé d’une certaine quantité de sable siliceux et d’une portion de glaise bleuâtre, qui, après avoir été séchée, se trouvait à-peu-près le huitième du poids total de la pierre. Ainsi la chaux d’Aberthaw contenait, après la calcination , une certaine quantité de sable quartzeux et d’ar- gile : c'est à la présence de ces substances que Smeaton SUR LES CHAUX DE CONSTRUCFION. cxlii} attribue sa propriété de prendre corps et de durcir dans l'eau (1). Nous avons cru devoir rapporter cette analyse, toute gros- sière qu'elle est, parce qu’elle peut être faite par-tout, et que par-tout l’on peut avoir besoin d’une chaux propre à for- mer un bon mortier hydraulique. Smeaton crut remarquer, au surplus, que, pour jouir éminemment de cette propriété, il ne suffisait pas que la pierre contint une certaine quantité de quartz et d'argile, il fallait encore qu'elle acquit la couleur fauve par sa calcination. Nous voici conduits naturellement à faire entre les pierres à chaux une distinction que les anciens n’avaient point faite, Quelques-unes de ces piexres, susceptibles de se dissoudre en entier dans les acides, augmentent du double ou du triple de leur volume, lorsque après leur calcination on en forme une pâte avec l'eau; quelques autres, que les acides ne dissolvent qu’en partie, donnent une chaux dont le vo- lume n’augmente que peu ou point à l'extinction : ce sont les chaux grasses et les chaux maigres, suivant leurs désigna- tions vulgaires ; et comme une quantité donnée de pâte de chaux doit, conformément aux règles pratiques de la fabrica- tion du mortier, être mélée avec le sable dans une proportion constante, on conçoit comment il est plus avantageux pour les constructeurs d'employer de la chaux grasse que de la chaux maigre, et comment, par cela même, l'usage de la pre- mière a dù se répandre généralement, tandis que la seconde a dû être rejetée comme étant de qualité inférieure. —————————— ane (r) Deuxième recueil de divers mémoires extraits de la Bibliothèque de l'école des ponts-et-chaussées, par M. Lesage, pag. 91 et suiv. €xliv RAPPORT Après avoir assigné, par ses propres essais, les caractères de la chaux hydraulique, il restait à Smeaton à rechercher s'il n'était pas possible de substituer au trass de Hollande, généralement usité en Angleterre, mais que l’on y achète à un assez haut prix, des substances moins chères et d’un aussi bon emploi. Les circonstances mirent à sa disposition un chargement de pouzzolane de Civita-Vecchia, dont il obtint des résultats très- satisfaisants. Le hasard lui procura aussi une pierre roulée qui avait l'apparence du grès, et qui, ré- duite en poudre après sa calcination , formait avec la chaux maigre un excellent mortier ; mais il ne trouva nulle part les bancs de cette substance, sur laquelle nous reviendrons plus tard, et il n’en fit aucun usage (1). Les bornes de ce rapport ne nous permettent pas d’expo- ser ici les résultats de toutes les observations de Smeaton ; il en est une cependant que nous ne pouvons passer sous si- lence : c'est que la chaux maigre étant mélangée avec le sable ordinaire seul, peut former un mortier hydraulique presque d'aussi bonne qualité que celui que l'on composerait de chaux grasse et de pouzzolane. Cette observation conduisit Smeaton à faire entrer le sable pur dans ses mortiers. Il trouva qu'on en composait un excellent, en corroyant ensemble deux par- ties en volume de chaux maigre éteinte, une de trass ou de pouzzolane, et trois de sable pur; ce qui donne environ trois mesures et demie de mortier hydraulique. Néanmoins, soit par conviction, soit par condescendance pour les pré- jugés des constructeurs , ce qui est très-vraisemblable, il s'en (r) Deuxième recueil de divers mémoires extraits de la Bibliothèque de l’école des ponts-et-chaussées, par M. Lesage, pag. 102, SUR LES CHAUX DE CONSTRUCTION. cxlv tint, dans ses oùvrages du phare d'Edystone , à l'emploi d’un mortier composé de deux parties de chaux et de deux par- ties de pouzzolane d'Italie. (1) . Ce n’était pas seulement en Suède et en Angleterre, que l'attention s'était fixée sur la meilleure composition des ci- ments calcaires ; on commençait: aussi vers le même temps à s’en occuper en France. Mais, comme il n'y fut point question d’abord de mortiers hydrauliques, on fut di- rigé, dans les tentatives auxquelles on se livra, par des consi- dérations différentes de celles dont nous venons de rendre compte. On avait été frappé depuis long-temps de la dureté que présentent les mortiers retirés des anciennes constructions romaines ; on crut devoir en rechercher la cause dans les procédés qu'ils employaient, et retrouver ces procédés dans un passage dé Pline qué l'on détourna de son véritable sens, et auquel-on donna une fausse interprétation: (2) "’Le‘sieur Loriot, mécanicien et pensionnaire du roi, crut être Parvenu à en expliquer le véritable sens. 11 publia, en 1775, un mémoire (3) dont l’objet était de prouver que l’an- cien procédé du mortier romain se réduisait à ajouter au mortier ordinaire de sable et de chaux éteinte un quart de chaux vive réduite en poudre très-fine. Ces expériences furent répétées par plusieurs personnes, et notamment à Dijon par RES a PERS ON FAR (1) Deuxième recueil de divers mémoires extraits de la Bibliothèque de l'école des Ponts-et-chaussées, par M. Lesage, pag. 102-104. / (2) ! Ce Passage est celui déja cité : Ruinarum urbis ea maximè causa quod, furto calcis, sine ferrumine suo cæmenta componuntur. (3) Journal de Physique, tom. III, pag 231. 1818. Histoire. T clxv) RAPPORT M. Guyton de Morveau , qui, dans une instruction spéciale, proposa de calciner la chaux une seconde fois, avant de la mêler au mortier, pour prévenir les accidents qui pouvaient résulter, pour les ouvriers, de sa pulvérisation. Il attestait en même temps l'excellence de ce procédé par les résultats avantageux qu'il en avait lui-même obtenus. (1) Nous avons dit que le passage de Pline sur lequel on ap- puyait l'authenticité de la découverte, se prêtait à plusieurs, interprétations ; on ne tarda pas à lui trouver un autre sens que celui qu'on lui avait d’abord supposé. Deux ans après la publication du procédé de Loriot, pa- rurent en effet les recherches de M. de la, Faye sur la prépa- ration que les Romains donnaient à la chaux, et sur la com- position de leurs mortiers (2). L'auteur prétendit qu’il fallait uniquement en attribuer la dureté à la manière d’éteindre la chaux, qu'il annonçait avoir retrouvée : elle consistait, selon lui, à immerger un panier d’osier rempli de chaux vive ré- duite en morceaux de la grosseur d'un œuf; à tenir cette ma- tière ainsi submergée jusqu'à ce que l’eau commençât à bouil- lonner au-dessus. On devait alors la retirer, la laisser égoutter quelques instants dans le panier, et la verser ensuite dans des tonneaux où elle s’'échauffait et se réduisait en poudre après un certain temps. C’est dans cet état qu’il prescrivait d'en faire usage. Que ce procédé soit ou non:celui des Ro- mains, il est constant, d'après le témoignage de Guyton, qui (x) Journal de physique, tom. IV, pag. 418. Ibid. tom. VI, pag: 351. (2) Recherches sur la préparation que les Romains donnaient à la chaux. (Paris, 1777.) Mémoire pour servir de suite aux Recherches précé- dentes. (Paris, 1778.) n SUR LES CHAUX DE CONSTRUCTION. cxlvi} annonce en avoir fait l'épreuve pour la construction d’un aquéduc souterrain, que l’on peut, dans certaines circôni- stances, en obténir des résultats satisfaisants. (x) En rappelant le passage de Vitruve sur la composition des iortiers, nous n’avons pas cru devoir exposer l'explication qu’il donne de l’endurcissement de ées préparations. Ce phé- nomène est d'un ordre auquel la phÿsique des anciens ne pouvait s'élever ; nous h’avons été mis sur la voie d'y parve- nir,'que par les découvertes des chimistes modernes. Les expériences de Joseph Black, professeur de chimie à Edimbourg, venaient d'appreñdre qu’il existait dans la pierre calcaire une quantité considérable d'une substance acriforme, qu'on a appelée depuis gaz acide carbonique, laquelle en était enlevée par l'acte de la calcination; un des principaux effets de'cette opération étant d’ailleurs de détruire la con- sistance primitive de la pierre qu’on ÿ avait soumise, et de la rendre soluble dans l'eau. à * Un autre professeur de chimie en Angleterre, le docteur Hyggins entreprit, au commencement de 1775, derechercher si l'éendurcissement des mortiers ne provenait pas de ce que la chaux en pâte employée dans leur fabrication se combi- naît plus ou moins rapidement avec le gaz acide carbonique de l'atmosphère , et revenait ainsi à l’état de pierre calcaire ordinaire. C’est en ce point de doctrine que consiste la théo- rie développée par le docteur Hyggins dans un traité spé- cial (2) publié à Londres en 1780. Ce travail, l'un des plus (1) Annales de chimie, tom. XXXWVII. (2) Experiments and observations made with the view of improving the art ofcomposing and applying calcareous ciments, evc.; by Bry. Hyggins, d.m, (London, 1780.) T2 cxlvii] RAPPORT étendus auquel cette matière ait donné lieu, contient une nombreuse série d'expériences. L'auteur, après avoir fait voir que la chaux est d'autant meilleure qu'elle a perdu plus complétement par la calcina- tion le gaz acide carbonique qui la constitue dans la carrière à l’état de pierre calcaire, s'attache à prouver, par des ob- servations très-curieuses, que la chaux vive exposée à l'air libre tend à s'emparer tres-promptement du gaz acide car- bonique répandu dans l'atmosphère, et qu'après avoir été altérée par cette nouvelle combinaison , elle ne convient plus à la fabrication de mortiers d’aussi bonne qualité qu'aupara- vant; il prescrit, par cette raison, d'employer la chaux le plus tôt possible après sa sortie du four, et le mortier aussi- tôt après sa fabrication (1). Il remarqua que des mortiers qui se desséchaient trop vite n’acquéraient aucune consistance. Observant ensuite que les molécules de sable quartzeux que l'on fait entrer dans leur composition, sont les parties les plus dures de ces préparations, il pense qu'elles doivent acquérir d'autant plus de solidité, que les petites lames de chaux interposées entre:les grains de sable ont moins d’épais- seur; il cite, à ce sujet, des faits d'où il résulte qu’un mortier composé de sept parties de sable, et seulement d’une partie de chaux éteinte, a pris consistance plus promptement que celui dans lequel la chaux, était entrée en plus grande pro- portion (2). A l'appui de ces observations , le docteur Hyÿg- gins affirme avoir reconnu; par l'analyse de ciments tirés (1) Æxperiments and observations made with the view of improving the art, etc., sect: V, pag. »9 et suiv. (2) Ibid, sect. VII, pag. br. SUR LES CHAUX DÉ CONSTRUCTION. cxlix d'édifices antiques , que les anciens avaient adopté cette pro- portion de un à sept dans la fabrication de leurs mortiers de chaux et sable. (1) Il conclut, de diverses expériences qu'il cite, qu’en se combinant avec la proportion d'acide carbonique nécessaire pour lui donner le degré de dureté qu’elle est susceptible d'acquérir, la chaux des mortiers augmente des trois cin- quièmes de son poids. (2) Quelque curieux que paraissent les résultats des expé- riences de Hyggins sur l'endurcissement de la chaux des mor- tiers , les résultats de celles qu'il fit sur les sables qui entrent dans leur composition, ne Le sont pas moins. Il les distingua en trois classes, par la grosseur de leurs grains ; il reconnut que, plus elle est considérable, plus les vides interposés sont spacieux. Il observa que le sable abreuvé d’eau occupe un volume d'environ un septième moins considérable que celui qu'il occupait avant d’être mouillé (3), effet qui, dépendant tout-à-la-fois de la grosseur et-de la figure des molécules de sable , s'explique naturellement par la capillarité des inter- valles qui les séparent. Il reconnut aussi, que si l’on mélan- geait parties égales de sable grossier et de sable fin, il'se manifestait une diminution de volume dans ce mélange, c’est- à-dire, par exemple, que neuf parties de sable grossier et neuf parties de sable fin étant mêlées ensemble, ne formeraient pas un volume de dix-huit, mais seulement de seize parties et un huitième. Enfin, appliquant l'observation de ces faits à la fabrication du mortier, il trouva que le meilleur était (1) Experiments andobservations made with the view, etc. , sect. X, p.6a. (2) Jbid., sect. XI, pag. 69. (3) Jbid., sect. XII, pag. 18, cl RAPPORT composé de quatre parties de gros sable, de trois parties de sable fin, et d'un peu plus d'une partie de chaux. (1) Nous ne suivrons point le docteur Hyggins dans les détails qu'il donne de ses essais, pour reconnaître l'influence de différentes substances incorporées dans le mortier calcaire, telles que l'argile crue, le plâtre en poudre , quelques oxides métalliques, le soufre, les cendres de bois ou de charbon de terre, les cendres d'os pulvérisés, etc. : il nous suffira de dire qu’il termime son mémoire par l'indication d’un mortier particulier, pour l'emploi duquel il avait obtenu une patente, Son procédé consiste à laver d'abord dans une eau courante le sable dont on doit se servir ; il faut ensuite le faire passer dans deux cribles dont les mailles ont différentes grandeurs, afin de pouvoir séparer ce qu’il appelle le gros sable etle sable fin ; les faire sécher au soleil, et les mélanger ensuite dans la proportion de cinquante-six parties en poids du premier contre quarante-deux parties du second. Il prescrit d'en for- mer sur un plancher un monceau que l’on arrose avec de l’eau tenant en dissolution une demi-once de chaux par pinte, jusqu'à ce que, par l'écoulement de l’eau surabondante à celle que retiennent entre eux les grains de sable, on s’aper- çoive que l’action capillaire cesse de s'exercer. On ajoute à ce mélange de sable quatorze parties en poids de chaux éteinte par aspersion, et autant de cendres d'os calcinés à blanc ; on corroie ce mortier à la manière ordinaire. Le doc- teur Hyggins recommande de le mettre en œuvre aussitôt après qu'il est fabriqué, et l'indique comme essentiellement (1) Experiments and observations made with the view of improving the art of composing , etc., sect, XII, pag. 93. SUR LES CHAUX DE CONSTRUCTION. cl; \propre à former des enduits homogènes et prompts à s’en- durcir. (1) Nous nous sommes arrêtés quelques instans sur l’ouvrage du docteur Hyggins, parce qu’il entre dans l’objet de ce rap- port de faire remarquer les faits qu'il contient, et que nous aurons occasion de revenir sur la théorie qui y est présen- tée ; nous devons dire cependant que si le chimiste anglais l'a adoptée le premier, en 1775, dans les leçons qu'il donnait, il ne l'a publiée qu’en 1/80; ce qui laisse à M. Achard de Ber- lin la priorité de publication d’une théorie analogue. On lit, en effet, dans le Journal de physique du mois de janvier 1778, une lettre de ce chimiste, où l’on trouve la description d’un appareil à l’aide duquel il obtint de la com- binaison de l'acide carbonique avec la chaux dissoute dans l'eau, et par une évaporation lente de cette dissolution, des cristaux très-durs de carbonate de chaux (2). Ce fait induisit M. Faujas de Saint-Fond à attribuer l’endurcissement des mortiers calcaires à la combinaison, par l'intermède de l'eau, de la chaux éteinte avec l'acide carbonique que la calcina- tion n’en a pas entièrement enlevé. L'écrit de M. Faujas où nous avons trouvé cette idée con- signée, est de 1778. Il a pour objet spécial de prouver que les pouzzolanes du Vivarais et des autres contrées volcani- ques de la France, peuvent être substituées à la pouzzolane (x) ÆExperiments and observations made with the view of improving the art of composing , etc. sect. XXIIL, pag. 184 et suiv. (2) Copie d'une lettre de M. Achard, chimiste de l'académie de Ber- lin, etc, contenant la découverte qu'il, a faite sur la. formation des cristaux et des pierres-précieuses: (Journal, de; physique, janvier 1778; pag. 12.) cli] RAPPORT d'Italie. Des expériences sur ces matières furent entreprises à Toulon, avec une sorte d'appareil, en 1777. M. Faujas rap- porte le procès-verbal de l'immersion qui y fut faite de trois caisses de béton composé de douze parties de pouzzolane du Vivarais, de six parties de gros sable, de neuf parties de chaux vive, et de seize parties de pierrailles; les commis- saires annoncent, dans ce procès-verbal, que ce béton, im- médiatement après sa fabrication, se rapprochait parfaite- tement de celui composé avec des pouzzolanes de Naples ; mais, comme on ne trouve, ni dans l'ouvrage que nous ve- nons de citer, ni dans celui qui fut publié en 1782 pour lui servir de supplément (1), le procès-verbal de l’état de dureté ou de mollesse auquel ces bétons étaient parvenus lorsqu'ils furent retirés de la mer, les expériences que nous venons de rappeler ne fournissent aucune conclusion dont on puisse s'appuyer pour oucontre l'emploi des pouzzolanes que M. Fau- jas recommandait. Ce savant n’en a pas moins le mérite d’avoir attiré l’atten- tion publique sur la possibilité de remplacer en France la pouzzolane d'Italie par d’autres substances d’an prix moins élevé. Ses tentatives offraient alors d'autant plus d'intérêt, que les travaux de nos ports, qui prirent alors une grande activité, exigeaient plus spécialement l'emploi de mortiers hydrauliques. Il paraît qu'à l’occasion de ceux de Cherbourg, M. Guyton de Morveau adressa à M. Cessart, inspecteur-général des ponts-et-chaussées , qui les dirigeait, un échantillon de ba- (1) Mémoire sur la manière de reconnaître les différentes espèces de pouzzolane, et de les employer dans les constructions; par M. Fraue 2 de Saint-Fond. (Paris, 1780. ) SUR LES CHAUX DE CONSTRUCTION. cli] salte provenant d'un volcan éteint du département de Saône- et-Loire (r). Cette substance, après avoir été calcinée, ré- duite en poudre et substituée à la pouzzolane d'Italie dans la fabrication du béton, donne, suivant le témoignage de cet in- génieur , un mortier d’une consistance à-peu-près égale, après quelques mois d'immersion. Personne n'était plus convaincu que M. Guyton, des avan- tages que la chimie pouvait fournir à l'art de bâtir; c'est, du moins, ce qu'il est permis de conclure de l’empressement avec lequel il a saisi toutes les occasions d'appliquer cette science au perfectionnement des mortiers. Aussitôt qu'il eut connu l'analyse de la chaux de Léna, dont Bergman lui avait envoyé des échantillons, il soumit aux mêmes essais, en 1783, six espèces de chaux maigres de l’ancienne province de Bour- gogne. Deux de ces pierres, celle de Brion, dans le départe- ment de Saône-et-Loire, et celle de Morex, dans le pays de Gex, prirent, à la calcination, la couleur brune qui y décèle la présence du manganèse , et soutinrent la compa- raison de celle de Léna dans les expériences auxquelles elles furent soumises (2). Ce fut à la suite de ce travail, que Guy- ton imagina de suppléer à ces pierres, dans les lieux où elles manquent, en mêlant ensemble quatre parties d'argile grise, six parties d'oxide noir de manganèse, à quatre-vingt-dix parties de bonne pierre à chaux réduite en poudre. Quatre ans après la publication de ces expériences de Guy- (x) Mémoire sur les mortiers, la chaux maigre, le béton et la pouzzo- lane; par M. Guyton. ( Annales de chimie, tom. XXXVII.) (2) Mémoire sur la chaux maigre de Brion en Bourgogne, etc. ( Second semestre des Mémoires de l'Académie de Dijon pour 1783, pag. 70.) 1818. /istotre. cliv RAPPORT ton sur les chaux maigres, parut, en 1787, un mémoire de M. Chaptal, ayant pour objet de faire connaître les avantages qu'on peut retirer des terres ocreuses, et notamment d'ex- poser les moyens d’en former des pouzzolanes artificielles (+). La troisième partie de ce mémoire contient le récit d’expé- riences d’où il résulte que l’on peut convertir en pouzzolanes, par la seule calcination, dans un fourneau approprié, 1° les terres ou ocres vierges connus généralement dans le Langue- doc sous le nom de terres bolaires ; 2° les terres bolaires jaunes, qui passent au rouge par la calcination; 3° les schistes noi- râtres. M. Chaptal indique différents procédés de calcination, suivant qu'on alimente le feu du fourneau avec du charbon deterre ou du bois. On essaya deux à trois mille quintaux de ces ocres; et l'exposé des expériences comparatives qui en furent faites, avec la pouzzolane d'Italie et celle provenant desanciens volcans du Vivarais, terminent cet important travail. Les premières furent commencées aux mois de mai et de juin 1785. Des mélanges formés d'une mesure de pouzzolane, de deux mesures de chaux éteinte, et d’une mesure de re- coupes de pierre, furent immergés pendant trois mois dans un bassin. Le béton composé avec la pouzzolane artificielle acquit en peu de temps un degré de consistance presque égal à celui du béton composé avec la pouzzolane d'Italie (2). Il suffisait de cette première expérience, pour prévoir que l’on pourrait ti- rer parti de ces terres calcaires dans les constructions hydrau- (1) Observations sur quelques avantages qu’on peut retirer des terres ocreuses , avec les moyens de les convertir en brun rouge, et d'en former des pouzzolanes , etc. ; par M. Chaptal. ( Paris, 1787.) (2) Observations sur quelques avantages , etc. , pag. 17 et suiv. SUR LES CHAUX DE CONSTRUCTION. clv liques. Il en fut remis, en conséquence , aux commissaires des travaux publics de la province de Languedoc, pour en faire, au port de Cette, des essais comparatifs avec les pouzzolanes d'Italie et du Vivarais. Six caisses de béton composé d'une partie et demie de chaux éteinte , d’une partie et demie de pierrailles, et de deux parties de pouzzolane d'Italie et du Vivarais, furent mises à la mer avec précaution le 25 avril 1786, et observées de huit jours en huit jours jusqu’au 25 octobre de la même année, époque à laquelle on reconnut, suivant le procès-verbal qu’on avait dressé de ces observations heb- domadaires, que les pouzzolanes artificielles fabriquées dans la province, équivalaient, par la dureté du béton qu'on en avait composé, à celles tirées de l'étranger; avantage que semblaient ne pas présenter les pouzzolanes naturelles du Vivarais. (2) M. Chaptal recommande, en terminant son mémoire, d'em- ployer la chaux fraîchement éteinte par le procédé de la Faye; mais il n’y est pas dit de quelle nature était la chaux dont on fit usage. On y voit seulement, par l'analyse des diverses substances qui avaient été mises à des épreuves compara- tives, que la nature et les proportions de leurs parties consti- tuantes rapprochent les terres ocreuses du Languedoc beau- coup plus des pouzzolanes actuelles de l'Italie, que ne s’en rapprochent celles provenant de nos anciens volcans. Pendant que M. Chaptal s'occupait à Montpellier de trou- ver, dans l'emploi des matières naturelles à notre sol, le moyen de nous affranchir du tribut payé à l'étranger pour les pouzzolanes employées jusques alors dans la fabrication des (x) Observations sur quelques avantages, etc., pag. 29. Vo clvj RAPPORT mortiers hydrauliques, M. Rondelet, architecte de l'église Sainte-Geneviève, faisait à Paris des expériences nombreuses sur les mortiers employés à l'air dans les travaux d’architec- ture civile (1) : il n’est point de notre sujet d'entrer dans le détail de toutes ses expériences ; nous dirons seulement qu'il en résulte-en général que le mortier de sable fossile est meil- leur que celui de sable de rivière fait dans les mêmes pro- portions; que la massivation ou battage du mortier, quand il est employé en enduit, lui fait toujours acquérir une plus grande dureté. Enfin, ayant soumis à l'épreuve d’une ma- chine de pression des briques de différentes préparations composées de chaux mêlée avec du sable, du tuileau concassé, et des pouzzolanes d'Italie, du Vivarais et d'Écosse, M. Ron- delet reconnut que tous ces mortiers offraient différents degrés de résistance à leur écrasement. Il trouva aussi que, dans un intervalle de quinze ans, c’est-à-dire depuis 1787 jusqu'en 1802, tous avaient acquis de la dureté, mais sui- vant des lois différentes; de sorte, par exemple, que la du- reté du mortier de pouzzolane de Naples avait augmenté d'un tiers, tandis que celle du mortier de pouzzolane d'Écosse n'avait augmenté que d’un cent-quatre-vingtième. Îl est à re- marquer, au surplus, que ce dernier est celui de tous dont la consistance , immédiatement après sa confection , avait été trouvée la plus considérable. Ainsi, en 1787, sa résistance à l'écrasement était, à la résistance du mortier ordinaire de chaux et de sable, dans le rapport de 396 à 255, et en 1802, dans le rapport de 398 à 286. (1) Traité théorique et pratique de l'art de bâtir, par J. Rondelet. (Tom. I“; première livraison, 1803.) SUR LES CHAUX DE CONSTRUCTION. clvi] M. Rondelet entreprit encore de déterminer la cohérence du mortier de chaux et de sable fin, avec des pierres de dif- férentes espèces et des briques et tuileaux (1). Il reconnut que, six mois après avoir scellé l'une à l’autre avec du mortier, des surfaces dont chacune était un quarré de 6 centimètres de côté environ, il fallait employer, pour détacher deux pierres de liais, un effort de 31 kilogrammes ; tandis que, pour détacher deux tuiles de Bourgogne, il fallait en em- ployer un de 69 : l’adhérence du mortier avec les diverses pierres de taille tirées des carrières de Paris, et même avec la meulière, étaient entre ces deux limites. (2) Guyton fit en 1800, sur les mortiers, la chaux maigre, les bétons et les pouzzolanes, de nouvelles recherches qui sont insérées dans le 37° volume des Annales de chimie. L'analyse de la chaux maigre de Metz, rapportée dans ce Mémoire, indiqua qu’elle contenait trois et demi pour cent d'oxide de manganèse. Guyton, qui d’abord avait embrassé l'opinion de Bergman sur l'influence de cet oxide, était alors disposé à croire qu'une quantité notable de silice et d'alumine était nécessaire à la production du phénomène caractéristique de la chaux maigre; il cite même, à ce sujet, l'opinion de Saussure qui, dès 1786, avait avancé que la pierre calcaire de Chamouni pouvait être convertie en chaux de cette espèce, quoiqu'elle ne contienne point d’oxide de manganèse. (3) (1) Traité théorique et pratique de l’art de bâtir, ete., pag. 306 et suiv. (2) Zbid., pag. 310 et 317. (3) Voyage dans les Alpes, par M. Saussure, in-4°, tom. IT, pag. 140 ei suiv, clvii} RAPPORT Ce fut àa-peu-prés à la même époque qu'un Anglais fit con- naître sur la côte de Boulogne une espèce de caillou roulé, lequel, après sa calcination dans un four à chaux ordinaire, étant réduit en poudre fine, et gâché avec de l’eau , à la ma- niere du plâtre, manifeste la propriété de faire corps très- promptement, et de s’endurcir sous l’eau, sans avoir besoin d’être mélangé avec aucune autre matière. Un rapport fait à la Société d'agriculture de Boulogne le 1° floréal an X, et inséré dans le 12° volume du Journal des mines, indique avec beaucoup de détails les procédés à suivre pour la cuis- son de cette pierre, pour sa trituration et pour son emploi ; elle y est désignée sous le nom de plätre-ciment, et sa pro- priété de prendre corps sous l’eau est attribuée, suivant l'opinion de Bergman, à la présence du manganèse. Cepen- dant M. Drapier, élève des mines, n'y reconnut point cette substance, mais il trouva qu'elle contenait sept pour cent d’oxide de fer; et, comme la chaux y existe en beaucoup plus grande proportion que les autres substances, il en conclut que le plätre-ciment, qui probablement est la même matière que Smeaton avait trouvée à l’état de caillou roulé, sans avoir pu en découvrir le gite, doit se ranger naturellement parmi les pierres calcaires propres à former de la chaux maigre. On doit à M. Gratien Le Père, ingénieur des ponts-et- chaussées, employé au port de Cherbourg en l'an XIT, une suite assez nombreuse d'expériences entreprises comme celles de M. l'ingénieur suédois Baggé, dans la vue de substituer à la pouzzolane d'Italie les produits de la calcination de cer- taines espèces de schistes (1). Parmi ceux que M. Gratien Le (1) Recuerl des rapports et observations sur les expériences faites à Cher- SUR LES CHAUX DE CONSTRUCTION. chx Pere mit à l'épreuve, le schiste d'Haineville lui procura les résultats les plus satisfaisants ; il en forma, avec la chaux maigre de Grasville et des blocailles de granit, un béton qui, plongé dans l'eau de mer pendant plusieurs mois, y acquérait une dureté presque égale à celle du béton composé de pouzzolane d'Italie. Mais, ce qui est remarquable, c'est que cet endurcissement des bétons composés de schistes cal- cinés, ne se manifestait pas lorsque l’on employait de la chaux grasse dans leur confection. L'analyse du schiste d’Haineville faite par M. Collet-Des- cotils, indique qu'il contient à-peu-près la même quantité de silice et de chaux que la pouzzolane d'Italie; mais l’alu- mine de celle-ci est remplacée dans le schiste par cinquante- sept centièmes d'oxide de fer : il contient aussi quatre cen- tièmes de manganèse. M. Gratien Le Père a ajouté à son mémoire un tableau des analyses comparatives de deux espèces de pouzzolanes d'Ita- lie, des pouzzolanes grises et rouges du Vivarais, des terres ocreuses du Languedoc, des schistes de Cherbourg et d'Haine- ville, du trass d'Andernach, de la cendrée ou ciment d’Am- sterdam, enfin de la pierre de Boulogne (1). En jetant les yeux sur ce tableau, on reconnaît que toutes ces substances contiennent, en différentes proportions, de la silice et de lalumine; que l'on trouve, en outre, dans quelques-unes, de l’oxide de fer, dans quelques autres de l’oxide de manga- RENE D EP NUL CET M At Le PARLES PRE bourg pour remplacer la pouzzolane dans les constructions hydrauliques ; par M. Gratien Le Père, ingénieur des ponts-et-chaussées. (2° édition; Paris 1503.) (1) Recueil des rapports et observations , etc, , pag. 26, cix RAPPORT nèse; enfin que le plâtre-ciment de Boulogne, faisant une sorte d'exception à cette série de substances , contient une quantité de chaux qui n'est pas moindre que les trois ein- quièmes de son poids. La publicité que M. Gratien Le Père donna à sesexpérienees, et le rapport avantageux qui en fut fait à la Société d’encou- ragement pour l'industrie nationale, déterminèrent M. le di- recteur-général des ponts-et-chaussées à les faire répéter par cet ingénieur sous les yeux d’une commission dont M. Guyton était le président (1). Le procès-verbal des résultats de ces nouvelles épreuves, que l’on suivit à Paris et au Hävre, de- puis l'automne de 1806 jusqu’au printemps de 1807, prou- vent qu'après trois mois d'immersion, les bétons faits de chaux de Grasville et de schistes calcinés des environs de Cherbourg, avaient acquis a-tres-peu-pres autant de dureté que ceux fabriqués avec la pouzzolane d'Italie ou le trass de Hollande; et que si la comparaison qui en fut faite présen- tait quelque différence, il fallait l’attribuer au mode de cal- cination que l’on avait adopté, et que des expériences répé- tées auraient appris à perfectionner. Quelque jugement que l’on ait porté, dans le temps, des expériences de M. Gratien Le Père, on ne peut trop louer le zèle et la persévérance avec lesquels il s’y livra. Elles eu- rent encore l'avantage d’exciter l'attention et de provoquer de nouveaux essais : dès le mois d'août 1806, on fit à Rouen l'épreuve de bétons composés de chaux maigre de la côte Sainte-Catherine , et de terres ocreuses calcinées suivant les (x) Deuxième Recueil de divers Mémoires sur les pouzzolanes naturelles et artificielles ; par M, Gratien Le Père. ( Paris, 1807.) SUR LES CHAUX DE CONSTRUCTION. clx] procédés de M. Chaptal; on y fit entrer douze parties de ces terres, six parties de sable quartzeux, neuf parties de chaux maigre, et seize parties de moëllon dur et de silex concassé. Ils furent immergés dans la Seine le 15 septembre 1807. On ne les en retira que le 14 août suivant, et ils furent trouvés presque aussi durs que des bétons de pouzzolanes d'Italie que l'on avait soumis à la même épreuve. (1) M. Sage lut à l'Institut, le 17 octobre 1808, un Mémoire sur les-mortiers et ciments. Il eut pour objet de faire con- naître, par une suite d'expériences, le degré de consistance qu'acquièrent avec la chaux différentes matières tirées des trois règnes. Parmi les faits qu'il rapporte, celui qui paraît le plus digne d’être remarqué est l’endurcissement d’un mélange de deux parties de chaux éteinte, et de trois parties de craie réduite en poudre à tel point que ce mélange devient susceptible de recevoir le poli. (2) - Nous ne devons point passer sous silence un Mémoire sur l’origine et la nature des mortiers, publié en 1808 par M. Dau- din, ingénieur en chef des ponts-et-chaussées , deux ans après la publication des recherches de M. Chaptal sur les terres ocreuses. Cet ingénieur, qui était alors employé au canal du Midi, s’occupa, sur les pouzzolanes naturelles ou factices, d’un premier travail auquel son dernier Mémoire se rattache; celui-ci contient l'exposé des faits principaux que nous avons cru devoir rappeler; l’auteur s’y plaint de l'usage, malheu- reusement trop général, d'abandonner la fabrication des (1) Deuxième Recueil de divers Mémoires, etc., pag. 46 et suiv. (2) Des mortiers ou ciments, par M. Sage. (1809, pag. 20.) 1818. Histoire. clxi] RAPPORT mortiers à la routine d'ouvriers insouciants. Ces plaintes, et les vues qu'il propose pour remédier à l'abus qui les pro- voque, sont d'un ingénieur expérimenté. (1) Nous ne parlerons ni des procédés indiqués pour la fabri- cation des mortiers par différents auteurs d'ouvrages d’archi- tecture, qui n’ont pas fait eux-mêmes d'expériences, ni des méthodes particulières données par quelques autres comme des recettes empiriques; ce serait nous écarter du but de ce rapport. Mais il entre dans son objet de revenir sur un point impor- tant relatif à la chaux maigre. Nous avons dit que le peu d'avantage que présente son emploi aux entrepreneurs de bâtiments dans les construc- tions civiles , en avait jusqu'à-présent restreint l'usage à de très-petites constructions hydrauliques, regardées en quelque sorte comme des objets de pure curiosité. Ainsi les chau- fourniers n’ont apporté aucun intérêt à préparer une matière qui ne leur eût fourni qu'une chaux d'un débit incertain. La seule chaux maigre que l'on connaisse à Paris et dans les départements voisins, est fabriquée avec la pierre de Se- nonches, bourg situé dans le département d'Eure-et-Loir, entre Dreux et Verneuil. M. Vitalis, professeur de chimie à Rouen, en fit l'analyse à l'occasion des expériences dont nous avons rendu compte (2). Il s'agissait de la comparer avec celle provenant de la côte de Sainte-Catherine. Cette analyse prouva que ces deux espèces de chaux avaient les mêmes parties constituantes, mais que le manganèse ne s’y rencon- (1) Réflexions sur lorigine et la nature des mortiers, par M. Daudin, ingénieur en chef des ponts-et-chaussées. ( Au Mans, 1808.) (2) Deuxieme Recueil des Mémoires de M. Gratien Le Père, pag. 49. SUR LES CHAUX DE CONSTRUCTION. clxu] trait point ; ce qui infirme l'opinion de Bergman etdeGuyton, et vient appuyer ce que Saussure avait avancé à l'occasion de la chaux maigre de Chamouni. Cet examen chimique de la chaux de Senonches fut confirmé en 1813 par Collet - Des- cotils, chimiste habile, trop tôt enlevé à ses amis et aux sciences. La courte notice qu'il en a publiée dans le Jour- nal des mines, est extrêmement importante (1). Il yremarque que l’analyse d'une chaux grasse des environs de Nemours ne présente que de la chaux pure et de l’acide carbonique, tandis que la pierre calcaire de Senonches fournit, indépen- damment de ces deux substances, un quart de silice extrème- ment fine , avec une très-petite proportion de magnésie, d’alu- mine et de fer. « Cette silice, dit-il, qui n’est point attaquée « lorsqu'on dissout dans les acides la pierre calcaire de Se- « nonches, se dissout presque en entier lorsque l'on soumet « à leur action la chaux fabriquée avec cette mème pierre. La « silice doit se trouver, par conséquent, dans la chaux de « Senonches, à un état qui la rend propre à éprouver l'ac- «tion des agents chimiques; et il est très-probable qu'elle «contracte, par l’addition de l’eau, une union qui doit être « moins attaquable que la chaux seule par l’action de l’atmo- «sphère ou de l’eau. La forte proportion de silice explique « d’ailleurs pourquoi la chaux maigre foisonne moins que la « chaux grasse. » « D'après ce qui vient d’être exposé, continue Descotils, «il paraît très-vraisemblable que la condition essentielle « pour qu’une pierre calcaire fournisse de bonne chaux mai- (x) Sur la chaux maigre, par M. Collet Descotils, ingénieur en chef des mines. (Journal des mines, tom. XXXIV, pag. 308.) X 2 clxiv RAPPORT «gre, est qu'elle contienne une grande quantité de matiere « siliceuse disséminée en particules très-fines : car il semble « peu probable que les tres-faibles proportions d’alumine, « de magnésie, et d’oxide de fer, qui peuvent s’y trouver, «aient une influence très-notable sur ses propriétés. » Nous terminons ici la tâche que nous nous étions impo- sée de rappeler à l'Académie les travaux de tous ceux qui, sous un point de vue quelconque, se sont occupés du même objet que celui du Mémoire dont il nous reste à rendre compte. En résumant ce que nous avons dit, on voit que toutes les recherches faites jusqu'à-présent sur les mortiers hydrauliques, portent, ou sur l'espèce de chaux que l'on doit employer dans leur fabrication, et la manière d'y sup- pléer, ou sur la substitution de quelques matières indigènes aux pouzzolanes étrangeres ; ou bien enfin sur les causes de l'endurcissement plus ou moins rapide de ces préparations, soit à l'air libre, soit pendant leur immersion sous les eaux. M. Vicat s'est proposé de resoudre ces diverses questions ; l'Académiè va juger jusqu'à quel point il s’est approché du but qu'il s'était proposé d'atteindre. Le travail de cet ingénieur est divisé en trois sections : la première, qui traite de /a chaux, comprend elle-même plu- sieurs chapitres dans lesquels l'auteur s'occupe successive- ment des différentes espèces de chaux de construction, des pierres qui la fournissent, de l’action que le feu exerce sur elles , des procédés divers d’éteindre la chaux vive, et des phénomènes qui en résultent; enfin de la combinaison de l’eau avec la chaux, et de l'influence de ce liquide et de l'air atmosphérique sur ces hydrates. Nous allons entrer dans quelques détails sur les divers objets que nous venons d’in- diquer. SUR LES CHAUX DE CONSTRUCTION. clxv L'auteur distingue d’abord les deux espèces de chaux dont nous avons déja parlé; celle appelée chaux grasse, et celle qui, connue sous le nom de chaux maigre, a la propriété de prendre corps sous l’eau , et d’être par là essentiellement propre aux constructions hydrauliques. La premiere, submergée sous un volume d’eau surabon- dant, en absorbe, pour s’éteindre, de deux fois et demie à trois fois et demie son poids; la seconde, placée dans la même circonstance, n'absorbe guère, pour son extinction, que la moitié moins d’eau. La chaux maigre, réduite en bouillie liquide, et immergée ensuite, rejette une partie de l’eau qu’elle contient : elle en absorbe, au contraire, une nouvelle quantité, si, au lieu d’être réduite en bouillie liquide, on l'a amenée, par l’extinc- tion, à l’état de pâte ferme. « Il existe donc, dit l'auteur, «entre ces deux extrêmes, un degré moyen de consistance « pâteuse dans lequel il n’y a ni rejet, ni absorption d’eau : «ainsi les principes qui constituent les chaux maigres ou ky- « drauliques, tendent à s'unir chimiquement par l’intermède « d’une quantité déterminée d’eau qui passe à l’état solide; «elles n’ont pas besoin, par conséquent, pour durcir, du « contact de l'air, et de la dessication qui en est la suite. « Les chaux communes ou grasses, saisissant, au contraire, « dans les mêmes circonstances, beaucoup plus d’eau qu’elles «n'en peuvent solidifier, et n'ayant point la faculté de rejeter « celle qui leur est superflue, restent constamment à l'état de « pâte molle , non-seulement sous l’eau, mais encore dans les « bassins imperméables où on les a tenues couvertes de terre « ou de sable, » clxv] KAPPORT L'auteur, après l'indication de ces caractères essentiels, ob- serve que les qualités de la chaux changent non - seulement d'un canton à l’autre, mais encore dans la même carriere; il rappelle les opinions de Bergman et de Guyton sur l'influence du manganèse; celle de Saussure sur l'influence de la silice et de l’alumine ; enfin celle de Descotils sur l'influence de la silice seulement, pour donner à la chaux la qualité de chaux maigre. Il observe que si la pierre de Senonches contient un quart de silice, celle de Metz, qui lui est supérieure en qua- lité, n’en contient guere qu'un vingtième; d'où il conclut qu'il reste encore quelque incertitude sur les meilleures pro- portions de la silice et de l’alumine dans la formation de la chaux maigre. Il annonce, au surplus, s'être assuré, par des essais multipliés, que la présence des oxides de fer et de man- ganèse n’est point indispensable. Puisque l'on connaît les substances que les chaux maigres présentent à l'analyse, ne serait-il pas possible d'en former artificiellement? L'auteur s’est d'abord propose cette question importante; et, n'étant point satisfait des procédés qui avaient été indiqués par Guyton , comme nous l'avons dit plus haut, il s'est dirigé par les indications de Saussure dans la synthèse qui l’a conduit à la solution qu’il cherchait. Il a laissé se réduire à l'air en poudre fine la chaux ordinaire qu'il se proposait de modifier; cette poudrea été ensuite pétrie, à l’aide d’un peu d’eau avec de l'argile grise ou brune, ou même de la terre à brique ; on a formé de ce mélange pâteux des boules que l'on a sou- mises à une seconde calcination. C’est ce produit qui, étant employé comme la chaux naturelle, jouit éminemment de la propriété de composer des ciments hydrauliques. Ici M. Vicat s'attache à montrer, et il est aisé de le concevoir, qu'un mé- SUR LES CHAUX DE CONSTRUCTION. clxvij lange de chaux grasse et d'argile, cuites séparément, ne jouissent point de cette propriété; elle est due uniquement à une modification que l'action du feu fait éprouver à ces substances dans leur contact pendant leur calcination com- mune. L'opinion de l’auteur s'accorde en cela avec celle de Collet Descotils ; mais celui-ci n'avait étendu cette théorie qu'à l'ac- tion mutuelle de la chaux et de la silice. M. Vicat l'étend encore à l’action de la chaux mélangée de silice et d’alumine. Il à découvert de plus, par l'analyse comparée des pierres à chaux maigre de Montélimart, département de la Drôme, et de Calviac, département de la Dordogne, que la première, dans laquelle la silice se trouve à l’état de molécules impalpables, devenait, par lacalcination , éminemment hydraulique;tandis que la seconde, où la silice se trouve à l’état de sablon grenu, n'acquiert point la propriété de prendre corps dans l’eau. Il décrit ensuite les divers changements de couleur que les pierres calcaires éprouvent pendant leur cuisson, les carac- tères auxquels on reconnaît que cette cuisson est parvenue au degré convenable; et il observe qu'en dépassant ce degré dans la chaux grasse ordinaire, on peut l’amener à un certain point de surcalcination tel que, si on la réduit en poudre fine , et qu'on er forme une pâte:ductile en l'arrosant avec de l'eau, cette pâte, étant immergée, aura/la propriété de s'endurcir; fait extrêmement remarquable, mais qui a:besoin d'être vérifié par de nouvelles expériences. Des phénomènes de la caleination M. Vicat passe à ceux de l'extinction de la chaux, et en décrit les différents procédés ; - celui communément usité consiste, comme on sait, à mettre les morceaux de chaux vive dans un bassin creusé sur le soi, clxvii] | RAPPORT et à les couvrir d'une quantité d'eau surabondante, de ma- nière à en former, par la trituration avec le rabot, une espèce de fluide laiteux. Les chaux grasses peuvent acquérir ainsi un 5 . . . \ volume plus que triple, tandis que celui de certaines chaux maigres n'augmente que d'un cinquième. Le second procédé est celui que M: de la Faye annonça en 1777 comme le secret des mortiers romains. Il consiste à plonger la chaux vive pendant quelques secondes dans l’eau, d’où on la retire avant qu'elle commence à fuser; elle répand des vapeurs brülantes, et se réduit en une poudre qui, suscep- tible de se conserver long-temps à l'abri de l'humidité, ne s’échauffe plus quand on la détrempe. Unkilogramme de chaux grasse éteinte ainsi par immersion , ne retient communément que cent quatre-vingts grammes d’eau , tandis que les chaux maigres peuvent en retenir jusqu'à trois cent cinquante sram- mes : les phénomènes se présentent, cotnme on voit, en sens inverse de ceux que manifestent ces deux espèces de chaux quand on les éteint à la maniere ordinaire. Enfin le troisieme procédé d'extinction de la chaux se ré- duit à la laisser fuser librement par l'action lente et conti- nue de l'atmosphère. 11 s’en dégage un léger degré de cha- leur, sans vapeurs visibles. Si l'on réduit en pâte d’égale consistance un kilogramme des deux espèces de chaux éteintes à l'air, on trouve que la chaux grasse exige environ un kilo- gramme et demi d'eau, tandis que la chaux maigre n’en exige que sept cents grammes environ. Un tableau com- paratif des résultats obtenus par ces trois procédés d’extinc- tion d'un poids donné de chaux grasse et de chaux maigre, prouve que l’on peut en former des pâtes d’égale consistance, en employant des quantités d’eau bien différentes ; ce que SUR LES CHAUX DE CONSTRUCTION. clxix M. Vicat explique par les différents degrés de ténuité aux- quels les molécules calcaires sont amenées suivant le pro- cédé d'extinction qu'on a suivi. Passant ensuite à l'examen des hydrates de chaux, il rap- porte qu'ayant formé de leurs pâtes, obtenues ainsi qu'on vient de le dire, de petits prismes quadrangulaires, ils ont été exposés à la chaleur solaire de l'été; leur surface s’est couverte d’une légère croûte de carbonate de chaux, dont on les a dépouillés, après quoi on les a soumis à l'épreuve d’une machine de rupture; et l'on a trouvé que leur dureté, pour ceux de chaux grasse, décroissait successivement , se- lon qu’elle avait été éteinte par le procédé ordinaire, ou spontanément à l'air libre, ou par immersion; dans les hyÿ- drates de chaux maigre, au contraire, la dureté décroissait suivant que l'extinction de cette chaux avait eu lieu par les procédés ordinaires, ou par immersion, ou spontanément. Quoique les duretés des hydrates obtenues par les deux der- niers procédés d'extinction se présentent en sens inversé dans les hydrates de chaux grasse et de chaux maigre, Vun et l’autre ont cela de commun que l'extinction ordinaire de la chaux dont ils sont formés les rend susceptibles du maxi- mum de dureté qu'ils puissent atteindre, c'est-à-dire que le procédé qui divise le mieux la chaux est aussi celui-qui donne aux hydrates la plus grande résistance; résultat conforme, d’ailleurs, à ce principe de chimie, que l'union des parties conshituantes d'un composé est d'autant plus intime que ses parties sont plus tenues. Quant à l'altération que les hydrates de chaux éprouvent à l'air libre en s'emparant de l'acide carbonique répandu dans l'atmosphère, M. Vicat s’est assuré que la croûte de ces 1818. Histoire. Y clxx RAPPORT préparations qui passait, par cette combinaison, à l'état de carbonate, n'était guère, au bout d'un an, que de six milli- mètres pour la chaux maigre, et à peine de trois pour la chaux grasse. L'intérieur de ces corps reste à l’état d'hydrate. Il y a seulement cette différence, que ceux de chaux grasse peuvent acquérir à l'air un degré de consistance qui les rend susceptibles de poli, tandis que ceux de chaux maigre de- meurent friables. Le contraire arrive lorsqu'on les immerge: les premiers se dissolvent, tandis que les seconds s’endur- cissent. La seconde section du Mémoire de M. Vicat a pour objet les bétons ou mortiers hydrauliques : il y traite successive- ment des pouzzolanes, et de leur degré de cuisson quand elles sont un produit de l’art; de l'influence des proportions de la chaux sur les autres matières dont les bétons sont com- posés ; de celle qu’elle exerce suivant les procédés de son ex- tinction; de l’action de l’eau sur la surface des bétons qui y est exposée; enfin de l'influence du temps sur le degré de consistance qu'ils peuvent acquérir. L'auteur comprend sous la dénomination commune de pouzzolanes toutes les matieres qui, formées, dans diffé- rentes proportions, de silice, d’alumine, d’oxide de fer, et quelquefois de petites quantités de chaux, de magnésie et d'oxide de manganèse, ont été soumises à un feu de calcina- tion. En considérant ces matières comme des combinaisons d’oxides métalliques, qui s'y trouvent au moins au nombre de quatre, il observe que, par le nombre effrayant d'essais qu'il faudrait entreprendre, il n’y a pas d'apparence que l'on parvienne jamais à déterminer les meilleures proportions dans lesquelles ces oxides doivent être combinés pour don- SUR LES CHAUX DE CONSTRUCTION. clxx] ner le meilleur composé; mais qu'heureusement, en se ren- fermant dans les bornes que la pratique a posées, il reste encore un vaste champ d'expériences à parcourir. Après avoir broyé, à l’aide de pilons, les pouzzolanes qu'il a mises à l'épreuve, il en a formé, avec la chaux, des pâtes au même degré de consistance que l'argile des potiers à l'in- stant où ils la mettent en œuvre. Les échantillons sur les- quels il a opéré, et qui se sont trouvés quelquefois sous ses yeux au nombre de plusieurs centaines, ont été mis dans des gobelets de verre de dix centimètres de hauteur et de sept à huit de diamètre. Ils ont été immergés sous une eau pure. On les a soumis à deux observations principales : l'une, du temps nécessaire pour les faire parvenir de leur état de mollesse primitif, à un degré de consistance déterminé; l'autre, de leurs duretés relatives à différentes époques. Nous croyons superflu de nous arrêter à décrire les moyens qu’il a employés pour ces observations , dont plusieurs tableaux présentent les résultats; nous dirons seulement que ces moyens se réduisent à faire entrer dans ces bétons la pointe d'une tige d'acier fondu posée sur leur surface, en laissant tomber sur cette tige un poids constant d’une hauteur déter- minée, et à mesurer la profondeur de son enfoncement. Ces notions préliminaires posées, il rapporte des expériences des- quelles il résulte que l'argile ferrugineuse, les cendres de houille, le schiste bleu et le basalte doivent éprouver des degrés de cuisson différents, pour donner avec la chaux grasse les meilleurs bétons que l’on puisse en composer; il rap- pelle ensuite que la chaux grasse et la chaux maigre doivent y entrer dans des proportions différentes, en observant que la détermination de ces proportions dépend de la nature des Ÿ.2 elxxi] RAPPORT matieres que l’on emploie; matières dont la variété presque infinie Ôte tout espoir de prescrire sur cet objet des règles générales suffisamment fondées. L'expérience l'a cependant conduit à conclure, contre l'opinion commune, que, pour tous les bétons à chaux grasse, et même à chaux moyenne, il vaut mieux pécher par défaut de chaux que par excès. Le tableau des expériences à l'aide desquelles il est parvenu à cette conclusion, prouve que l’on peut, par des propor- tions convenables des matières que l'on emploie, décupler la résistance des bétons; ce qui mérite bien, dit-il, qu'on y fasse attention. Les effets de l'extinction de la chaux, suivant le procédé qu'on a suivi et la théorie de ces effets, paraissent sur-tout avoir fixé la sienne. Il démontre, par de nombreuses obser- vations dont plusieurs tableaux présentent le détail, que l'ex- tinction par immersion et l'extinction spontanée l'empor- tent sur l'extinction ordinaire pour les chaux communes très- grasses et pour les chaux moyennes, de telle sorte néan- moins, qu'à mesure que le gras de la chaux diminue, les résistances propres à chacun de ces procédés d'extinction di- minuent aussi : d'où il suit qu'il y a telle espèce de chaux pour laquelle le procédé d'extinction est indifférent ; passé ce terme, les différences entre les résistances provenant des di- vers procédés d'extinction, de positives qu'elles étaient d’a- bord, deviennent négatives. Cette dernière partie de l'échelle appartient aux chaux éminemment hydrauliques. M. Vicat admet, pour expliquer ces phénomènes, 1° qu'il s'opère une espèce de compression dans la masse du béton, par l'augmentation de volume que la chaux continue d’ac- quérir quand l'extinction ne l’a pas portée du premier coup SUR LES CHAUX DE CONSTRUCTION. clxxü au dernier terme de division dont elle est susceptible; 2° que les éléments qui composent le béton exercent réciproque- ment les uns sur les autres une action chimique. Il pense qu'il y a des cas où il faut sacrifier à l'intensité de la combi- naison ce qu'on pourrait obtenir de la compressien , et d'autres cas où il faut suivre une marche contraire ; le choix du parti à prendre est subordonné à l'énergie des matières que l’on emploie. Un des faits les plus remarquables que l'auteur ait observés, c'est qu'une longue exposition à l'air, sous un hangar fermé aux vents et à la pluie, donne aux chaux très- grasses, éteintes spontanément, des propriétés hydrauliques très-prononcées. Le chapitre de la seconde section dans lequel l'auteur re- cherche l'influence réciproque de la chaux et de la pouzzo- lane, n'offre pas des faits moins curieux. « On ne peut con- «tester, dit-il, que parmi toutes les manières de combiner «en diverses proportions les cinq ou six oxides qui consti- «tuent les bétons, il n’en soit une qui donne le composé le « plus solide. Cela posé, plus les combinaisons fortuites des « pouzzolanes et des chaux de construction s’approchent de « ces proportions inconnues, plus aussi les bétons qui en ré- «sultent offrent de dureté : or il peut arriver que la chaux « contienne déja , et dans l'état convenable, une grande partie « des oxides nécessaires, ou qu’elle n’en contienne que très- «peu, ou même point du tout. On conçoit que, dans le « premier cas, la présence d’une bonne pouzzolane peutame- «ner une superfluité plus nuisible qu'utile; tandis que, dans «le second, elle produira tout l'effet desirable. L'influence « des proportions s'explique aussi de la même manière. « Le raisonnement et l'expérience indiquent donc, d'un clxxiv RAPPORT « «commun accord, que si l'on range sur une même ligne, «par ordre d'énergie, toutes les chaux connues, il faudra « placer les pouzzolanes sur une ligne parallèle, et dans un «ordre inverse, pour que les termes qui se correspondent «sur cette échelle donnent ensemble les meilleurs résultats « possibles. Ainsi les chaux hydrauliques de première qua- « lité seraient en présence des sables éminemment quartzeux ; «et les chaux communes très-grasses, vis-à-vis des pouzzolanes « d’une grande énergie. » M. Vicat explique par-là certaines expériences qui sem- blent faire prévaloir quelques pouzzolanes sur d’autres dans un lieu, tandis qu'ailleurs celles que l'on avait trouvées de moindre qualité reprennent l'avantage; cela tient aux es- pèces différentes de chaux avec lesquelles on les combine. Après avoir prouvé par des exemples la généralité de cette règle, l’auteur rend compte des expériences dans lesquelles il a suivi les progrès de la détérioration de mauvais ciments hydrauliques par l'action continue de l’eau. Il tire des faits qu'il a observés l'explication des affouillements qui peuvent, dans certains cas , entraîner la destruction d'ouvrages fondés dans l’eau sur des métis de béton. Un chapitre intitulé, De l'influence du temps, termine la seconde section du Mémoire. L'auteur y expose les observa- tions qu'il a faites pendant trois ans consécutifs sur les pro- grès de l'endurcissement d’un très-grand nombre d’échan- tillons de mortiers hydrauliques. Il en résulte que les bétons à chaux grasse ou commune font plus de progres vers leur solidification, de la seconde à la troisième année, que de la première à la seconde; ce qui prouve la marche accélérée du phénomène. Elle l’est également encore, mais d’une manière SUR LES CHAUX DE CONSTRUCTION. -clxxv moins sensible, dans les bétons à chaux moyenne, tandis que, pour ceux à chaux maigre éminemment kydraulique, les pro- grès de l’'endurcissement sont déja retardés aux mêmes épo- ques. Ainsi , quelles que soient les pouzzolanes mises en œuvre, les bétons à chaux maigre acquierent toujours leur maximum | de dureté plus tôt que les bétons à chaux grasse. La troisième et dernière section est consacrée aux mertiers ordinaires, ou mortiers blancs. L'auteur y examine succes- sivement les fonctions du sable siliceux qui entre dans leur composition ; l'influence de la grosseur de leurs grains, de la dessication naturelle retardée ou accélérée; des divers pro- cédés d'extinction de Ja chaux, de ses proportions avec le sable, de la manipulation de leur mélange. Il examine aussi l'action des intempéries et celle du temps; ce qui le conduit naturellement à comparer entre eux des mortiers de diffé- rents âges, antiques et modernes. Après une exposition suc- cincte des diverses théories à l'aide desquelles on a essayé d'expliquer l’endurcissement de ces préparations , il. observe avec raison que les expériences sur lesquelles sont fondées ces diverses explications n'ayant point été faites ordinaire- ment dans des circonstances semblables, ne sont point com- parables entre elles. IL fait remarquer comme une consé- quence d’un grand nombre d'observations dont il présente le tableau, d’abord que les chaux qui forment, par le seul concours de l'eau , les corps les plus solides, sont celles d’où résultent, au contraire, les mortiers les plus faibles; en second lieu, que dans la fabrication du mortier le sable quartzeux est utile à quelques espèces de chaux, nuisible à d’autres , et indifférent à quelques-unes , selon, dit-il, que ces chaux ont la propriété d'exercer sur les molécules de clxxv] RAPPORT quartz une action chimique supérieure, inférieure, ou égale à celle qu'elles exercent sur leurs propres parties. Les chaux hydrauliques, qui ne sontemployées ordinairement que dans la composition des bétons, peuvent, au surplus, être em- ployées avec le même avantage dans les constructions à l'air: car l’action du feu, déterminant la proportion de silice et d’alumine , mêlées à la matière purement calcaire, à passer à un nouvel état, donne au composé qui en résulte la faculté d'agir chimiquement, par l'intermède de l’eau, sur de nou- velles substances siliceuses, à l’état de sable : ainsi unemodifi- cation préalable par la voie sèche de la chaux, de la silice et de l’alumine, dispose la chaux à se combiner ensuite, par la voie humide, avec une certaine quantité de ces mêmes ma- tières; phénomène singulièrement remarquable, par lequel les chaux hydrauliques sont essentiellement caractérisées. C’est par cette raison que, d'après les expériences de l’au- teur , il convient d'employer du sable fin pour composer avec ces chaux les meilleurs mortiers que l’on puisse en for- mer; tandis qu'avec les chaux grasses ordinaires, c'est au contraire du gros sable que l’on compose les meilleurs mor- tiers. D’autres expériences plus concluantes que celles que l'on connaissait, ont prouvé à M. Vicat que la dessication des mortiers à l'air libre devait s’opérer lentement, et qu'on arrêtait les progrès de leur solidification quand on les faisait passer subitement d’un lieu frais et humide dans un autre chaud et sec. Nous ne suivrons point l'auteur dans les détails où ilest entré, pour déterminer l'influence des procédés d'extinction des deux espèces de chaux sur la qualité des mortiers blancs; il nous suffira de dire qu'elle se manifeste précisément dans le même ordre que sur les bétons. Quant SUR LES CHAUX DE CONSTRUCTION. clxxvi] aux proportions de la chaux et du sable , elles sont subor- données non-seulement aux procédés d'extinction que l'on a suivis, mais ausÿi à la place que le mortier doit occuper dans un édifice. Cependant, quelle me soit cette place à l'air libre, lorsque le mortier est composé dans certaines propor- tions indiquées par l’auteur , l'expérience lui a prouvé que l'endurcissement n’en était point retardé par les intempéries, et qu'il pouvait résister aux variations de la température, à quelque degré qu’elle descendit. L'ouvrage est terminé par un parallele curieux entre les résistances relatives de divers mortiers antiques; il prouve que leur dureté n’est pas l'ouvrage du temps seul , et qu’elle doit être attribuée sur-tout à l'excellence des matières que le hasard plaça dans les maïns de ceux qui les fabriquerent. Quelques exemples cités démontrent que si quelques anciens édifices ont résisté jusqu'à-présent aux outrages du temps par la bonne composition de leurs mortiers, les mortiers ne doivent leur conservation, dans quelques autres, qu'à la bonne disposition et à l'excellente qualité des matériaux avec lesquels on les a mis en œuvre. En achevant ce rapport, nous ajouterons que M. Vicat a profité du séjour qu'il vient de faire à Paris pour répéter, sur les matières qu’on y emploie, des expériences analogues à celles qu’il a faites dans le département du Lot. Ces expé- riences, dont les produits sônt sous les yeux de l’Académie, ont prouvé que les chaux hydrauliques, qu'on peut former ici de toutes pièces, d’après ses procédés, l'emportent en qualité, pour la composition des bétons, sur les chaux maigres naturelles de Metz et de Senonches , les meilleures que l'on y connaisse et qu’on ait pu leur comparer. 1818. Histoire. y 4 cixxvii] RAPPORT SUR LES CHAUX DE CONSTRUCTION. L'importance du Mémoire de M. Vicat nous fait espérer que le compte qui vient d'en être rendu ne paraîtra pas s’é- tendre au-delà des bornes que nous devions nous prescrire. Cet ouvrage a fixé l'attention de vos commissaires, et par les faits nouveaux qu'il contient, et par la méthode et la clarté avec laquelle ils sont exposés. Les explications qui en sont données s'appuient sur les saines théories, et prouvent que l'auteur, quoique résidant dans un département éloigné de la capitale, s’est tenu constamment au courant des progres des sciences dont il se montre très-capable de faire d’utiles applications. On ne peut manquer de concourir soi-même à leur avancement, quand, avec un esprit investigateur comme celui dont M. Vicat paraît doué, on entreprend d'éclairer de leurs lumières la pratique de l’art qu'on exerce. Les ingé- nieurs placés dans des circonstances semblables sur les dif- férents points du royaume , lui devront de la reconnaissance, et par les résultats du travail qu'il leur offre, et par l'exemple qu'il leur donne. Nous pensons que, sous tous les rapports, son ouvrage mérite d'être approuvé par l’Académie, et d’être inséré dans le recueil des savants étrangers. Fait à l’Académie royale des sciences, le 16 février 1818. DE PRONY ; GAY-LUSSAC. GIRARD, rapporteur. a HISTOIRE L'ACADÉMIE ROYALE DES SCIENCES DE L'INSTITUT DE FRANCE. ANALYSE Des Travaux de l Académie royale des Sciences, pendant l'année 1818. PARTIE PHYSIQUE, Par M. Le Cu” CU VIER, SECRÉTAIRE-PERPÉTUEL. CHIMIE. Eiehime s’est enrichie cette année de deux nouvelles sub- starices doublement intéressantes, en ce que l’une est à-la- fois métallique et alcaline, c'est-à-dire que son oxide est un nouvel alcali fixe; et en ce que l’autre est métallique et aci- difiable, et en même temps plus analogue au soufre qu'à aucune autre matière. On doit la première à M. Arfvedson, jeune chimiste sué- dois, élève de M. Berzélius. Il l'a découverte dans une pierre La clxxx HISTOIRE DE L'ACADÉMIE, nommée pétalite, où il n’en a trouvé que de 3 à 5 centiemes; mais il en a reconnu ensuite jusqu'à 8 centièmes dans une autre pierre appelée triphane. " Cette substance donne, avec la plupart des acides, des sels tres-fusibles; son carbonate en fusion attaque le platine presque aussi fortement que les nitrates des autres alcalis, et se dissout difficilement; son muriate est très-déliquescent ; son sulfate cristallise sans eau de saturation. La capacité de cet alcali, pour saturer les acides, est plus grande que celle d'aucun autre, et il entre en plus grande quantité dans les sels qu'il forme avec eux. L'auteur de la découverte a donné à sa nouvelle substance le nom de Zthionw, pour rappeler qu'elle a été découverte dans une pierre, tandis que les deux autres alcalis fixes ont été d’abord tirés des végétaux. La seconde substance a été découverte par M. Berzélius lui-même, dans une fabrique d'acide sulfurique de Fahlun en Suede. Il se dépose au fond de la chambre où l’on brüle du soufre retiré des pyrites, une masse rougeûtre, qui n'est elle-même en grande partie que du soufre, mais qui donne en brülant une odeur âcre de raifort. Cette odeur étant l’un des caractères d'un métal découvert depuis quelques années par M. Klaproth , et nommé #e/lure, on pouvait croire qu’elle était due au mélange de ce métal avec le soufre. Cependant M. Berzélius et M. Gahn, qui examinèrent d’abord cette ma- tière rouge, ne purent en retirer de tellure. Le premier en emporta à Stockholm pour l'examiner de plus près, et il y trouva une substance très-volatile, tres-aisément réductible, et ne se laissant point précipiter par les alcalis. Sa couleur est grise, avec un grand éclat; elle est dure, friable , et sa PARTIE PHYSIQUE. clxxx] cassure ressemble à celle du soufre. Sa pesanteur spécifique est de 3. 6. Elle donne une poudre rouge par la trituration, se ramollit à la température de l’eau bouillante, se fond un peu au-dessus , et reste quelque temps, à mesure qu'elle se refroidit, molle, paîtrissable et filante, comme de la cire d'Espagne. A un peu plus de chaleur encore, elle bout é® se sublime en un gaz jaunûtre, et se fixe en forme de fleurs d’un beau rouge, qui cependant ne sont point oxidées. Dans: l'air elle s'évapore en fumée rouge, ou brûle avec une flamme bleue, et en donnant une si forte odeur de raifort, qu'un cinquantième de grain suffirait pour empester le plus vaste appartement. M. Berzélius a donné à cette substance le nom de sélé- riunr, d'après le nom grec de la lune, et pour rappeler le rapport qu'elle a avec le tellure ; rapport qui pourrait, au reste, ne tenir qu'a la présence même du sélénium dans les tellures examinés jusqu'à-présent. Les nouvelles de ces découvertes ayant été annoncées à l'Académie par M. Gillet-Laumont, et bientôt après par une lettre de M. Berzélius lui-même adressée à M. Berthollet, M. Vauquelin s’occupa aussitôt de vérifier ce qui concernait l'alcali; et ses observations ajoutèrent quelques détails à celles qu'avait données M. Arfvedson. Quoique M. Vauquelin n'ait eu qu'une petite quantité de pétalite à sa disposition, il y a trouvé jusqu'à 7 p. ? de lithion. M. Berzélius à suivi avec tout le soin qu’elle méritait sa belle découverte du sélénium. Il a soumis sa substance à la plupart des agents de la chimie, et reconnu comment ils se comportent avec elle; et, étant venu à Paris cette année, il z donné lui-même son travail avec le plus grand détail, dans cixxxi} HISTOIRE DE L'ACADÉMIE, les Annales de chimie. Sous tous les rapports, il montre dans le sélénium une sorte d'intermédiaire entre les sub- stances combustibles et les substances métalliques. Il en fait sur-tout une comparaison, d'une part, avec le soufre et le tellurium, de l’autre avec le chlore, le fluor et l'iode; substances que beaucoup de chimistes ont voulu placer, dans ces derniers temps, dans la même classe que le soufre, parce qu’elles donneraient, comme le soufre, des acides en se combinant avec l'hydrogène. On peut se rap- peler ce que nous avons dit à ce sujet dans nos Analyses de 1813 et de 1814, en rendant compte de la nouvelle Théorie de M. le chevalier Davy, sur les acides qu'il croit formés sans es oxigèene. M. Berzélius , trouvant que les combinaisons, soit du soufre, soit du tellurium, soit du sélénium, avec les mé- taux et les substances combustibles, ont entre elles une grande analogie; et trouvant, d’un autre côté, que les com- binaisons de l'iode et du chlore avec les mêmes matières sont aussi tres - analogues entre elles et avec celles des acides oxigénés, mais ne ressemblent point du tout aux pré- cédentes, ce savant chimiste.en conclut que ce sont deux ordres bien distincts de substances ; et il laisse entrevoir, par-là, qu'il ne regarde pas encore comme démontrée la théorie de M. Davy. : Ce sélénium est singulièrement peu abondant ; 500 livres de soufre brûlé à la fabrique de Fablun n’en donnent qu'un- üers de gramme. Combien doit-il être, en proportion, moins considérable encore dans la pyrite, d'où ce soufre est ex- trait! M. Berzélius l’a trouvé depuis formant environ le quart d'un minerai d'argent et de cuivre extrêmement rare, que PARTIE PHYSIQUE. clxxxii] l'on avait regardé, à cause de son odeur, comme un minerai de tellure, et que l’on tirait autrefois d’une mine mainte- nant abandonnée , de la province de Smolande en Suède. Il en a trouvé aussi quelques parcelles combinées avec du cuivre sans argent. 4 Plus on réfléchit sur ces éléments chimiques, qui seraient ainsi jetés comme au hasard, par la nature, en petites! par- celles de si peu d’effet dans l'univers, que l’art le plus déli- cat, la science la plus profonde, suffisent à peine pour les mettre au jour, plus on est porté à croire qu'une science plus profonde encore leur arrachera bientôt leur qualité d’é- léments. M. Gay-Lussac a fait, en 1811, sur le principe colorant du bleu de Prusse, ou ce que l'on nomme depuis quelque temps l'acide brussique, des recherches qui ont fait recon- naître à cette substance, dans son état de pureté, des pro- priétés fort remarquables , et jusques alors entièrement ignorées; telles, entre autres, que la petitesse de l’inter- valle qui sépare pour elle le point de la congélation et celui de l'évaporation , et son épouvantable influence sur l’éco- nomie animale. Ce savant chimiste, continuant ses recher- ches sur cet important sujet, a découvert, en 1814, que ce principe est un hydracide, c’est-à-dire un de ces corps sem- blables aux acides, quant à leur action extérieure, mais où l'on ne peut démontrer la présence de l’oxigène, et qui pa- raissent résulter de la combinaison de l'hydrogène avec un radical. L’acide prussique est même le premier hydracide dont on connaisse le radical, quant à ses éléments, et M. Gay- Lussac a trouvé qu'il se compose de carbone et d'azote em clxxxiv HISTOIRE DE L'ACADÉMIE, proportions peu différentes. Il a nommé ce radical cyano- gène, et l'acide qu'il fournit, kydrocyanique, à cause de sa propriété de teindre l’oxide de fer en bleu. Nous avons an- noncé toutes ces découvertes dans nos Analyses de 1811 et de 1814. M. Vauquelin a travaillé de nouveau sur cette matière , en suivant, comme il le dit avec sa modestie ordinaire, la route que M. Gay-Lussac lui avait frayée; mais cette route avait des embranchements qui ne pouvaient échapper à un homme tel que M. Vauquelin. Le cyanogène gazeux se dissout dans environ quatre fois et demie son volume d’eau, et lui donne une odeur et une saveur très-piquante, mais sans la colorer. Après quelques jours, cette dissolution se teint en jaune, puis en brun ; dé- pose une matière brune, prend l'odeur d'acide hydrocya- nique, et développe de l'ammoniaque quand on y met de la potasse. Cependant elle ne peut encore donner de bleu de Prusse. Des expériences ultérieures montrent qu'elle contient de l'hydrocyanate et du carbonate d’ammoniaque, et de l’am- moniaque combinée avec un troisième acide que M. Vau- quelin nomme cyanique, sans avoir absolument déterminé la composition de son radical. Il y a donc décomposition de l’eau : son hydrogène s’unit à une partie du cyanogène pour former de l'acide hydrocya- nique; une autre partie s’unit à de l'azote du cyanogène pour former l'ammoniaque; l’'oxigèene de cette même eau avec une partie du carbone du cyanogène forme de l'acide carbonique. Le troisième acide résulte de quelque combi- naison du même genre ; et il reste cependant encore du carbone et de l'azote, que cet oxigene ne suffit pas pour PARTIE PHYSIQUE: clxxxv convertir en acide, et qui donnent la matière brune du dépôt. Les oxides alcalins produisent des effets semblables, mais bien plus rapidement. Une multitude d’autres applications du cyanogène aux oxides, aux métaux , aux substances combustibles, ont donné’ à M. Vauquelin des résultats non moins curieux. La question la plus intéressante qu'elles pouvaient résoudre, était de savoir si le bleu de Prusse est un cyanure ou un hydrocyanate, c’est-à-dire une combinaison de l'oxide de fer avec le cyanogène, ou bien avec son hydracide. M. Vau- quelin ayant constaté que l'eau imprégnée de cyanogène peut dissoudre le fer sans le changer en bleu de Prusse , et sans qu'il y ait dégagement d'hydrogène, mais en laissant du bleu de Prusse dans [a portion non dissoute, et que l'a- cide hydrocyanique convertit le fer ou son oxide en bleu sans le secours ni des alcalis, ni des acides : il en conclut, contre l'opinion de M. Gay-Lussac, que le bleu de Prusse est une hydrocyarate, et que, lorsqu'on expose du fer à l’eau imprégnée de. vanogène , il s’y forme à-la-fois de l'acide cyanique qui dissout une partie du fer, et de l'acide hydro- cyanique qui en convertit une autre en bleu. Il établit même une règle générale, laquelle serait que les métaux qui, comme le fer , ‘peuvent décomposer l’eau à la température ordinaire, forment des hydrocyanates; et que ceux qui n'ont pas cette faculté, comme l'argent et le mer- cure; ne forment que des cyanures. Tout le monde sait que la plupart des acides résultent des combinaisons de l'oxigene avec certaines substances aux- 1818. Æistotre. Aa cixxxv] HISTOIRE DE LAGADÉMIE, quelles on a donné le nom de radicaux, el que, suivant qu'il entre dans la combinaison une quantité plus ou moins grande d'oxigène , l'acide formé est différent en propriétés, et prend des noms auxquels les chimistes modernes ont donné une certaine régularité , en indiquant le degré d'oxigénation par le moyen de la terminaison. C'est ainsi que l'azote produit, par des additions succes- sives d’oxigène, le gaz nitreux, l'acide nitreux , l'acide mi- trique ; et nous avons parlé. dans notre Analvse de 1816, de combinaisons encore différentes dans leurs proportions, dé- couvertes par MM. Gay-Lussac et Dulong. M. Thénard vient de faire des expériences d’où il résulte que plusieurs acides peuvent admettre des proportions d'oxigène bien supérieures à celle que l'on regardait jus- qu'à-présent comme constituant leur état le plus oxigéné. En dissolvant avec précaution de la baryte suroxidée par de l'acide nitrique, et en la précipitant par l'acide sulfurique, son excès d’oxigène reste uni au premier acide, qui devient ainsi de l'acide nitrique oxigéné. Par des moyens que M Thé- nard indique, on peut le concentrer assez pour qu'il donne, par la chaleur, onze fois son volume d'oxigène; et, d’après les calculs de ce savant chimiste, il serait une combinaison d’un volume d'azote contre trois volumes d'oxigène. L’acide hydrochlorique s’oxigène par le même procédé, et prend alors des propriétés singulières. Appliqué à l'oxide d'argent, il forme de l'eau et un chlorure, et son oxigène devenant libre, produit une effervescence aussi vive, que si l’on ver- sait un acide sur un carbonate alcalin. L’acide sulfurique, le fluorique, peuvent être oxigénés de même, et on peut suroxigéner encore tous ces acides une n PARTIE: PHYSIQUE. clxxxvi] ou plusieurs fois. Il en est auxquels M. Thénard a ajouté de cette manière, jusqu'à sept et même jusqu'à quinze doses sucvessives d'oxigène. Il a contraint ainsi de l'acide hydro- chlorique à en absorber jusqu’à trente fois son volume. Rien n'égale alors l'effervescence qu'y occasionne le contact: de Voxide d'argent. Par le moyen de ces acides ainsi surchar- gés d’oxigène, et par des procédés analogues ; lon peut aussi suroxigéner des terres et des oxides métalliques. M.Thénard a même suroxigéné l’eau; en versant peu-à-peu de l’eau de baryte dans de l'acide sulfurique oxigéné , l'acide sulfurique s'unit à la baryte, se précipite avec elle, et laisse à l'eau son exces d'oxigene. Ainsi oxigénée, l'eau dans le vide se con- gele ou s'évapore sans perdre son. oxigène ; il s’y concentre, au contraire , au point qu’elle en a absorbé jusqu'à quarante ou cinquante fois son volume ;: mais l'ébullition le lui en- lève ;‘le charbon ; l'argent, l’oxide d'argent, et ceux de plu- sieurs autres métaux, le font jaillir avec une vive efferves- vence; et; ce qui est singulier, un passage si rapide à l'état de gaz d'une quantité:considérable de matière, loin de pro- duire du froid , -échauffe la liqueur à un degré très-sensible. M. Thénard soupçonne qu'il ya quelque chose d’électrique dans ce phénomène. On sait aujourd’hui, par les célebres expériences galva- niques de M. le chevalier Davy, que les alcalis fixes ne sont autre chose que des oxides :de métaux excessivement cem- bustibles ; et par celles de MM. Thénard et Gay-Lussac, que lon peut les ramener à l’état métallique au moyen du car- bone et d'une très-haute température. Nous avons parlé de ces grandes découvertes dans notre Analyse de 1808. M. Vauquelin , ayant réduit dernièrement de l'antimoine Aa:2 clxxxvii] ‘HISTOIRE DE L'ACADÉMIE, par des flux alcalins, s'est aperçu que ce métal, mis dans l'eau, donnait une grande quantité de gaz hydrogène, et que l’eau devenait alcaline. D’autres métaux, réduits de la même manière , lui ont offert le même phénomène. Il en a conclu qu'une partie de l’aleali qu'il avait employé, s'était, pendant l'opération, combinée à l’antimoine sous forme mé- tallique, et décomposait l'eau pour revenir à l'état d'oxide ; mais il a été obligé d'en conclure aussi que la présence d’un métal est favorable à la réduction de l’alcali : car, autrement, l'alcali n'aurait pu prendre la forme métallique par une cha- leur si faible. Nous avons parlé, l'année dernière, des expériences de MM. Chevillot et Édouard, sur cette singulière combinaison d'oxide de manganèse.et de potasse ; que l’on a nommée ca- méléon minéral, à cause de sa facilité à prendre successive- ment des couleurs diverses. Ces jeunes chimistes ont donné suite à leur travail; ils ont reconnu que la soude, la baryte.et la strontiane peuvent donner, comme la potasse , différentes sortes de caméléons , en s'unissant à l'oxide de manganèse, et en absorbant de l’'oxigène; mais, s'attachant principalement à l'espèce de ca- méléon de potasse, dans lequel l’alcali est parfaitement neu- tralisé, celle qui est d’une belle couleur rouge ; ils ont ob- servé que les corps très-combustibles agissent sur elle avec beaucoup d'énergie ; qu'ils la décomposent , et s'enflamment souvent avec une forte détonation ; le phosphore en produit même une par le simple choc. D'un autre côté, ce caméléon rouge, exposé au feu, se décompose, et donne de l’oxigène, de l’oxide noir de manganèse, et du caméléon vert dans lequel la potasse domine. = <. D ET PARTIE PHYSIQUE. clxxxix Tls concluent de ces faits, que l'intervention de l’oxigène, dans la formation du caméléon, a pour résultat d'oxider davantage le manganèse, et de le convertir en un véritable acide, en sorte que le caméléon serait un manganésiate de potasse; le caméléon rouge, en particulier, en serait un manganésiate parfaitement neutre, et le vert, un mangané- siate avec excès d’alcali. Cependant ils n’ont pu parvenir à isoler cet acide dont ils admettent l'existence; mais ils ont fait des expériences nombreuses qui leur paraissent confir- mér leur opinion énoncée dès l’année dernière, que le ca- méléon vert ne diffère du rouge que par plus d’alcali. Soit que l'on verse des acides sur du caméléon vert, ou de l'alcali sur du rouge, on le fait passer également d’une couleur à l’autre ; mais l’ébullition et l'agitation peuvent aussi dégager l'excès de potasse du caméléon vert, et le changer en rouge. Plusieurs acides versés en excès décom- posent tout le caméléon, en s’emparant de la potasse, en dégageant de l’oxigène, et en précipitant le manganèse à l'état d’oxide noir. Le sucre, les gommes et d’autres sub- stances capables d'enlever l’oxigène , décomposent également le caméléon, et l'exposition à l'air produit un effet sem- blable; ce que les auteurs attribuent aux corpuscules étran- gers qui flottent dans l'atmosphère, et qui, en tombant dans la dissolution, lui enlèvent aussi une partie de l’oxigène qui lui est essentiel. Le cobalt et le nickel sont deux demi-métaux qu'il est tres-difficile d'obtenir purs, et sur-tout de séparer entière- ment l’un de l'autre; cependant cette préparation est néces- saire pour une détermination exacte de leurs propriétés. exc HISTOIRE DE L'ACADÉMIE, M. Laugier , ayant suivi les méthodes le plus récemment publiées pour parvenir à cet objet, a trouvé encore dans le nickel des traces non équivoques de cobalt. Pour s’en débarrasser, il dissout le mélange dans l’'ammoniaque , et précipite par l'acide oxalique ; il redissout l’oxalate de nickel et de cobalt obtenu par cette opération dans l'ammoniaque concentré, et expose la dissolution à l'air. A mesure que l’ammoniaque s’exhale, il se dépose de l'oxalate de Nickel mêlé d'ammoniaque. Par des cristallisations répétées, on dépouille le liquide de tout son nickel; il n’y reste qu'une combinaison d'oxalate de cobalt et d’ammoniaque, que l'on réduit aisément. Le peu de cobalt qui est demeuré dans le précipité de nickel s'en sépare par quelques dissolutions suc- cessives dans l’'ammoniaque : ainsi la même opération donne les deux métaux à l’état de purete. Le sucre de lait, traité par l'acide nitrique, donne un acide dont Schéele fit la découverte, et qui depuis a été nommé acide mucique, parce qu'il se produit également par l’action de l'acide nitrique sur les gommes et les mucilages. Quand on expose cet acide à la chaleur, il se sublime une matière saline, brune, très-odorante, brûlant avec flamme sur les charbons , et dissoluble dans l’eau et l’alcohol. Tromsdorf, qui a fait un examen particulier de cette matière sublimée, crut y trouver de l'acide succinique, du pyrotartarique, de l'acétique, et diverses autres substances ; mais M. Houtou- Labillardière s'étant apercu, à la lecture du travail de Troms- dorf, qu'il attribuait à son acide succinique des caractères fort différents de ceux que cet acide offre réellement, a cru devoir reprendre ces recherches. ' OUR RS PARTIE PHYSIQUE. CXC] Il a lu à l'Académie un Mémoire où il prouve que ce prétendu acide succinique est un acide nouveau, auquel il donne le nom de pyro -mucique. Quand on l’a débarrassé de l'huile et de l'acide acétique qui s'y mêlent, il cristallise aisément, est blanc, inôdore, d'une saveur acide, assez forte , fond à 130 degrés centigrades; se volatilise au-delà de cette température, n'attire point l'humidité, se dissout dans l’eau bouillante en plus grande abondance que dans l'eau froide, et, en le résolvant en ses parties consti- tuantes , on en obtient environ neuf volumes de vapeur de carbone, trois d'hydrogène et deux d’oxigène. M. Houtou- Labillardiére décrit avec soin les combinaisons de cet acide avec diverses bases salifiables, et tous les phénomènes qu'il rapporte viennent à l'appui de l’assertion de ce jeune et ha- bile chimiste. M. Chevreul a fait de nouvelles et importantes additions à ses recherches sur les corps gras, dont nous avons déja plusieurs fois entretenu nos lecteurs. Après avoir reconnu que la matière du calcul biliaire, qu'il nomme choleste- rine, ne forme point de savon avec les alcalis, ce qui la distingue essentiellement des graisses, il avait cru s’aper- cevoir que le sperma-céti, auquel il a donné le nom de cé- tine, se réduisait, par l’action des alcalis, en un acide ana- logue à l’un des deux que ces mêmes alcalis produisent dans les graisses, savoir à celui qu'il a appelé margarique , mais que cet acide du sperma-céti avait une capacité de satu- ration beaucoup moindre. Il avait donc jugé nécessaire de donner à cet acide un nom particulier, ‘et l'avait appelé cé- ñique. Des expériences plus suivies l’ont convaincu que ce cxCi] HISTOIRE DE L'ACADÉMIE, n'est autre chose que de l'acide margarique, dont les pro- priétés sont masquées par un reste de substance grasse non acide. Mais de l'huile de dauphin, traitée par la methode de M. Chevreul, c’est-à-dire convertie en savon par les alcalis, lui a réellement donné, outre les deux acides que fournissent toutes les graisses, un acide d’une troisième sorte, qu'il nomme delphinique ; ce que ne fait pas l'huile de poisson ordinaire du commerce. Il est à remarquer que l’oxigène ne peut se démontrer dans ces nouveaux acides ternaires, tirés des graisses, et qu'ils sont, à l'égard des acides végétaux ordinaires, tels que l'acétique, l’oxalique, etc., ce que sont, dans le règne minéral, les hydracides de M. Davy à l'égard des acides minéraux anciennement connus, le nitrique, le sul- furique, etc. La cochenille, cet insecte singulier, qui, par la matière colorante qu'il fournit, est devenu un article si important de commerce, n'avait point été encore étudiée par les chi- mistes avec l'attention dont elle est digne. MM. Pelletier et Caventon en ont fait l'objet de leurs expériences. Ils ont reconnu que la matière colorante, si remarquable, qui en fait la partie principale, y est mêlée à une matière animale particulière, à une graisse semblable à la graisse ordinaire et à différents sels. Après avoir enlevé la graisse par l'éther, et traité le résidu par l’alcohol bouillant, ils laissent refroidir ou lentement évaporer l’alcohol, et obtiennent ainsi la ma- tière colorante, mêlée seulement encore d’un peu de graisse et de substance animale, qu'on en sépare en dissolvant en- core par l'alcohol à froid qui laisse la matière animale, et PARTIE PHYSIQUE. cxcii] en mélant à la dissolution de l’éther qui en précipite la ma- tière colorante dans un grand état de pureté. Chacun sait qu'elle, est du plus beau rouge, et les chimistes dont nous parlons lui donnent le nom de carmine. Elle se fond à 5o?, se boursouffle ensuite, et se décompose sans donner d’am- moniaque; elle est très-soluble dans l’eau, peu dans l'alcohol, et point dans l'éther, sans l’intermède de la graisse. Les acides la font passer successivement du cramoisi au rouge vif et au jaune; les alcalis, au contraire, et en général tous les protoxides la font tourner au violet; l’alumine l'enlève à l’eau. | ( Ces expériences expliquent plusieurs des procédés de l’art du teinturier et de celui du’ fabricant de couleurs, et parti- culièrement ce qui se passe dans la teinture en écarlate, et dans la fabrication du carmin et de la laque. La laque n’est formée que de carmine et d'alumine; elle a la couleur naturelle de la carmine, qui est le cramoisi. Le carmin est un composé triple de matiere animale, de carmine et d'acide qui en rehausse la teinte; c'est l'action de l'acide muriatique qui convertit le cramoisi de la coche- mille en belle couleur d’écarlate. METÉOROLOGIE. Les causes les plus apparentes des phénomènes atmo- sphériques, la densité de l'air, son humidité, sa chaleur et son électricité, sembleraient devoir principalement dé- pendre de l’action du soleil; mais l'irrégularité de leurs: effets dans nos climats prouve assez qu’elles éprouvent en- core d’autres influences , et qu'elles se compliquent avec des 1818. Histoire. Bo CXCIV HISTOIRE DE L'ACADÉMIE, causes encore inconnues; et c'est ce qui fait que jusqu'à nos jours la météorologie semble être de toutes les branches de la physique celle qui s’est le moins rapprochée de ce degré de certitude qui pourrait la faire considérer comme une science positive. M. de Humboldt fait remarquer que si l’on peut espérer d'en jamais déterminer les lois, c'est en l'étudiant dans les climats où ces phénomènes offrent le plus de simplicité et de régularité; et c'est incontestablement la zone torride qui doit, à ce titre, fixer le choix de l'observateur. Déja c’est entre les tropiques qu'il a été possible de recon- naître les lois des petites variations horaires du baromètre; c'est dans la zone torride que la sécheresse et les pluies, que la direction des vents dans chaque saison, sont soumis à des règles invariables. M. de Humboldt a porté son attention sur le rapport de la déclinaison du soleil, avec le commencement des pluies dans la partie nord de la zone. A mesure que le soleil s’ap- proche du parallele d'un lieu, les brises du nord y sont remplacées par des calmes ou des vents du sud-est. La trans- parence de l'air diminue ; l’inégale réfringence de ses couches fait scintiller les étoiles à 20° au-dessus de l'horizon. Bientôt les vapeurs s'amassent en nuages; l'électricité positive ne se manifeste plus constamment dans le bas de l'atmosphère; le tonnerre se fait entendre, des ondées se succèdent pendant le, jour, le calme de la nuit n’est interrompu que par des vents impétueux du sud-est. M. de Humboldt explique ces faits par le plus ou moins d'inégalité qui se trouve entre cette partie de la zone torride et la zone tempérée voisine. Lorsque le soleil est au midi de D “PARTIE PHYSIQUE. cxCY l'équateur, c'est l'hiver de l'hémisphère boréal. L'air de la zone tempérée est le plus différent qu'il soit possible de celui de la zone torride. IL s’y écoule sans cesse en brise fraiche et uniforme, qui reporte l'air chaud et humide dans le haut de l'atmosphère, d'où il retourne vers cette mème zone tempérée, y rétablit l'équilibre, ÿ dépose l'humidité : aussi la chaleur moyenne est-elle toujours moindre de 5 à 6° dans le temps de sécheresse que dans le temps des pluies; mais les vents de sud-est n’agissent point comme ceux du nord, parce qu'ils viennent d’un hémisphère beau- coup plus aquatique, et sur lequel le courant d’air supérieur ne se disperse pas de la même manière que dans l'hémisphère boréal. . M. Moreau de Jonnès a communiqué quelques détails extraits de sa correspondance, sur le coup de vent qui a causé tant de dégâts aux Antilles le 21 septembre dernier; il a été précédé d'un calme plat; le vent est passé par le nord au nord-ouest , et c’est de ce point qu'il a soufflé avec violence. M. de Jonnès remarque, à ce sujet, que, l'année précédente , le coup de vent du 20 octobre venait du sud- est, et qu'il existe entre ces deux points un espace de go° au sud et au nord, d'où il ne souffle jamais de courant d'air. L’agitation de l'air a été suivie d’un raz de marée violent, qui a entraîné des navires ; mais on n’a observé aucun mou- vement extraordinaire dans le baromètre. Une remarque assez triste, c’est que l'effet communément attribué à ces Ouragans, d’assainir l'air des pays qu'ils dévastent, ne s'est pas vérifié dans cette occasion, et que la fievre jaune n'a pas cessé d'exercer ses ravages. Bb2 CXCV) HISTOIRE DE L'ACADÉMIE, Le même observateur a donné aussi une notice des trem- blements de terre éprouvés aux Antilles cette année, et qui ont eu cela de remarquable, qu'ils ont affecté une sorte de périodicité. Il y en a eu huit depuis le mois de décembre jusqu'au mois de mai; un chaque mois, excepté en avril, où il y en a eu deux, et tous entre neuf et onze heures du soir. MINÉRALOGIE ET GÉOLOGIE. M. Beudant continue à enrichir la cristallographie de re- cherches aussi neuves qu’intéressantes. Nous avons vu, l’an- née dernière, comment, dans ses expériences, un principe salin, d’une certaine espèce, imprime quelquefois sa forme cristalline à un mélange dont il ne fait pas, à beaucoup près, la plus grande partie. IL s’est occupé , cette année, d’une question qui n’im- porte pas moins à la science des cristaux ; c’est celle des causes qui déterminent un sel dont les molécules primitives et le noyau ont une forme constante, à revêtir, par l’accu- mulation de ces molécules selon des lois diverses, des formes secondaires si variées, que leur nombre étonne quelquefois l'imagination. Ayant remarque que les formes secondaires d'une même substance, sont le plus souvent les mêmes dans les mêmes gisements, et dans les lieux où elles se retrouvent associées de la même manière à d’autres minéraux , il a jugé que ces formes secondaires doivent être déterminées par les circon- stances au milieu desquelles se fait la cristallisation. On savait depuis long-temps , par les expériences de Romé PARTIE PHYSIQUE. cxCvi] de Lille, et par celles de Fourcroy et de M. Vauquelin, que la présence de l’urée détermine le sel marin à prendre la forme secondaire octaëdre, tandis que, dans l’eau pure, il cristallise en eubes semblables à ses molécules consti- tuantes. Elle produit un effet inverse sur le muriate d’am- moniaque , qui cristallise en octaëdre’ dans l’eau pure ; elle le fait cristalliser en cube. Un peu plus ou un peu moins de base dans l’alun lui im- prime des formes secondaires cubiques ou octaëdriques ; et ce sont si bien des formes secondaires, qu’un cristal octaëdre d’alun plongé dans une solution plus riche en base, s’y en- veloppe de couches qui lui donneront, en définitif, la forme d'un cube. Partant de ces premiers faits, M. Beudant a traité la question en grand, et a soumis la cristallisation des sels à l'épreuve de toutes les circonstances qu’il a crues capables d’influer sur elle; savoir : 1° les circonstances extérieures et générales , telles que la chaleur, le poids de l'atmosphère, le plus ou moins de rapidité de l’évaporation, le volume de la solution, la forme du vase, etc. 2° Les mélanges mécaniques qui troublent la solution en s’y trouvant, soit en simple suspension, soit en précipité sans cohérence, soit sous forme de dépôt gélatineux. 3° Ce qu'il bob les mélanges chimiques existants dans les mêmes solutions ; 4° Enfin les variations entre les proportions des principes constituants de la substance cristallisée. Les circonstances du premier genre n’exércent point d’ac- ton, si ce n’est sur la grandeur et la netteté des cristaux. Il en est de même des petites quantités de matière qui peuvent ExXCViII] HISTOIRE DE L'ACADÉMIE, rester en suspension permanente dans un liquide. Mais on ne peut pas en dire autant des précipités et des mélanges chimiques. Les cristaux qui se forment au milieu d'un précipité sans cohérence, d'une bouillie déposée au fond du liquide, entraînent toujours une partie plus ou moins considerable des molécules de ce dépôt, et perdent alors ordinairement toutes les petites facettes additionnelles qui auraient pu modifier leur forme dominante. Cette forme arrive à plus de simplicité lorsqu'elle aurait dù ètre compliquée; mais les substances qui auraient, sans cela, donné des cristaux simples , continuent de les donner , et ne reçoivent point de modification. Dans un dépôt gélatineux , les cristaux sont rarement groupés, mais presque toujours isolés, d’une netteté et d'une régularité remarquables; et ils n'éprouvent d'autres variations que celle qui résulte de l'intervention chimique de la substance du dépôt. Les variations sont assez nombreuses dans les cristaux qui se forment dans un mélange chimique, c'est-à-dire dans une solution d’une autre substance, même lorsque cette substance ne peut s'unir avec eux. Les phénomènes rap- portés plus haut s'y répètent de diverses façons : du sel marin qui cristallise dans une solution de borax, prend des tron- catures aux angles solides de ses cubes; l’alun dans l'acide muriatique prend une forme que M. Beudant n’a jamais obtenue autrement. Si la dissolution peut s'unir en une portion quelconque au cristal d'une autre substance qui s'y forme, et que néan- moins ce cristal détermine, par sa plus grande énergie, la PE ET PARTIE PHYSIQUE. CXCIX forme de la molécule constituante, ainsi que nous l'avons vu l’année dernière pour le cas du sulfate de fer, la matière de la solution exerce aussi à son tour quelque imfluence sur là forme secondaire , et cette influence consiste le plus souvent à la simplifier, en faisant disparaître les surfaces additionnelles. Ainsi, 3o ou 4o centièmes de sulfate de cuivre se sou- mettent encore à la cristallisation rhomboëdrique du sulfate, de fer, maïs en réduisant ce sulfate au pur rhomboïde, sans aucune troncature ni sur les angles, ni sur lés arêtes. Un peu d’acétate de cuivre ramène à cette forme un sul- fate de fer, quelque disposé qu'il soit à se compliquer de surfaces additionnelles. _ D'autres mélanges simplifient un peu moins : ainsi le sul- fate d’alumine ramène celui de fer à un rhomboëdre tron- qué aux angles latéraux, ou à ce que M. Haüy nomme va- riété unitaire; et même quand on trouve dans le commerce de la couperose de cette variété, ce qui est assez commun, on peut être sûr, selon M. Beudant, qu’elle contient de lalumine: Enfin les proportions de la base à l’acide, ou, dans les sels doubles, des deux bases entre elles, produisent aussi des effets très-sensibles sur la forme secondaire, sans altérer le moins du monde la forme primitive. C'est ce que nous avons vu plus haut pour l'alun, et ce que M. Beudant a constaté sur plusieurs autres sels. L'auteur de ces recherches en fait des applications ingé- nieuses aux phénomènes de diverses substances minérales cristallisées, sur lesquelles nous ne pouvons pas faire d’ex- périences Lee dans l’état actuel de la science; et il y fait cc HISTOIRE DE L'ACADÉMIE,; remarquer de grandes analogies : les cristaux mélangés de substances étrangères sont en général plus simples; on en voit même dans l'espèce de l’axinite, ou schorl violet du Dauphiné, dont une extrémité, mélangée de chlorite, est réduite à la forme primitive, tandis que l'autre, plus pure, est variée de plusieurs facettes produites par divers décrois- sements. On trouve assez abondamment, dans un ravin du Mont- d'Or en Auvergne, des fragments d’une brèche, que sa dureté et ses autres qualités extérieures faisaient regarder comme siliceuse, et à laquelle les minéralogistes n'avaient donné d'attention qu’à cause de quelques parcelles de soufre qui se voient quelquefois dans ses petites cavités. M. Cordier, l'ayant soumise à des épreuves variées, s'aperçut qu'elle donnait, par la chaleur, une quantité no- table d'acide sulfurique; et, d’après cette indication impor- tante, il procéda à une analyse complète, d'où il résulte que cette pierre contient environ 928 centièmes de silice, 27 d'acide sulfurique, 31 d’alumine, 6 de potasse, et un peu d’eau et de fer. C’est, à peu de chose près, la compo- sition de la pierre célebré de /a Tolfa, qui donne l’alun de Rome. Et en effet, en traitant la brèche du Mont-d'Or sui- vant les procédés en usage à la Tolfa, c’est-à-dire en la con- cassant, la torréfiant et l’exposant à l'air humide, on en a obtenu de 10 à 20 pour cent d'un alun très-pur; elle en donne même sans la torréfier, et par la simple exposition dans un lieu humide. D'après des recherches faites sur les lieux par M. Ra- mond , il est probable qu'avec un peu de soin l'on découvri- PARTIE PHYSIQUE. cc] rait, dans la partie moyenne du Mont-d'Or, les couches dont les fragments épars dans le ravin se sont détachés, et que l'on pourrait y ouvrir des carrières dont l'exploitation ne serait pas sans avantage. M. Cordier regarde ces sortes de pierres comme une es- pèce minéralogique dont l'essence consisterait dans la pré- sence de l'acide, de l’alumine et de la potasse. La silice y est moins essentielle, car il existe à Montrone en Toscane des carrieres d’une pierre qui n'en contient point, mais qui a tous les autres principes constituants, et donne les mêmes produits que celle de la Tolfa. Les variétés de cette espèce, où il entre de la silice, se distinguent aisé- ment par la gelée qu'elles forment quand on les traite succes- sivement par la potasse caustique et l'acide hydrochlorique étendu d’eau. 13 ph M: Cordier ÿ rapporte plusieurs pierres volcaniques, désignées vaguement jusqu'ici, par les géologistes, sous la . dénomination générale de laves altérées. " . Des paysans du département du Lot, conduits par l’appât de prétendus trésors que l’on disait avoir été enfouis autre- fois par les Anglais, dans certaines cavernes des environs de Breugue, ont pénétré dans ces cavités, et, ayant creusé et élargi quelques crevasses qui se trouvaient dans leur pro- fondeur, ont découvert un dépôt d’ossements, dont les uns appartenaient à des chevaux; les autres à des rhinocéros, de la même espèce dont il y a en si grande quantité des ossements fossiles en Sibérie, en Allemagne et en Angleterre; les troisièmes, à une espèce de cerf inconnue aujourd'hui 1818. Histoire. Ce cci] HISTOIRE DE L'ACADÉMIE, sur le globe, et dont les bois ont quelque rapport éloigné avec ceux d’un jeune renne. Guettard avait trouvé ‘un grand nombre de ces mêmes bois aux environs d'Étampes. Ces témoins importants des révolutions de notre conti- nent ont été recueillis par M. Delpont, procureur du Roi à Figeac, et présentés à l'Académie par M. Cuvier. Ils sont déposés au cabinet du roi. M. Palisot de Beauvois a entretenu l’Académie d’un phé- nomène géologique assez singulier, qu’il a observé dans le comté de Rowan, province de la Caroline du nord. Au mi- lieu d'une colline d’un sable très-fin, entremélé de petites pierres de quartz et de nombreuses parcelles de mica ar- genté, se trouve une veine de pierres disposées si réguliè- rement, que les habitants; qui l'ont remarquée depuis long- temps, lui donnent le nom de mur naturel, et que des naturalistes ont même prétendu , depuis quelque temps, que c'était un véritable mur qui pouvait avoir été construit, à des époques reculées, par quelque peuple aujourd'hui in- connu. Les pierres ont généralement quatre arêtes, sont amincies à l'une de leurs extrémités, et ont une petite entaille au-dessous du sommet. Elles sont rangées horizonta- lement. L'espèce de mur qu’elles forment a environ 18 pouces d'épaisseur; sa hauteur, à l'endroit où il est à découvert, est de 6 à 9 pieds; mais on l'a suivi en creusant jusqu'à F2 et 18 pieds dans le sol, et on a déja reconnu qu'il s'étend à plus de 300 pieds en longueur. Une sorte de ciment argilleux remplit les intervalles des pierres, et les enduit à l'extérieur, PARTIE PHYSIQUE. coii] et chacune d'elles est revêtue d'une couche de terre ocracée et sablonneuse. M. de Beauvois en a rapporté quelques-unes qui, éxami- nées par les minéralogistes de l'Académie, ont offert la plu- part des caractères des basaltes; mais , comme il n’a encore été observé dans les États-Unis aucune trace ni de basaltes , ni de volcans; et comme le terrain environnant est générale- ment primitif; il serait possible que ce prétendu mur ne fût qu'une couche de trapp, roche amphibolique très-semblable à certains basaltes. Nous avons parlé, en 1816, du travail entrepris par M. Mo- reau de Jonnès, pour déterminer la nature géologique des Antilles, des idées générales qu'il s’en fait, et des descrip- tions particulières relatives, à la Martinique et à la Guade- loupe , qu'il a présentées à l’Académie. Il a continué la ré- daction de ce travail, et a lu un mémoire sur le J’auclain, lun des monts les plus remarquables de la Martinique , non qu'il soit le plus élevé, mais parce que c’est celui qui sert de point de reconnaissance et qui annonce cette île aux navi- gateurs. Il n’a point la forme d’un cône creusé à son sommet, mais celle d’un prisme couché, ou d'une immense arête ba- saltique, et M. de Jonnes le regarde comme une partie de l'orle et du bord d’un très-grand cratère, dont il croit avoir reconnu tout le pourtour. Le fond de ce cratère est aujour- d’hui une vallée aussi fertile que bien cultivée. Le même auteur a donné une description geolosique de la Guadeloupe. Îl a reconnu que l’île occidentale où il y a une solfatare en activité, et dont la surface est d'environ Cc2 cciv HISTOIRE DE L'ACADÉMIE, 67 lieues quarrées, doit son origine à des éruptions parties de quatre grands foyers volcaniques sous-marins , et que l'île orientale, connue sous le nom de grande terre, est formée d’une base volcanique, recouverte par une grande stratifi- cation de calcaire coquillier. A la Martinique les quartiers situés à l'orient sont également recouverts par des lits de calcaire marin soit coquillier , soit coralin. La seconde partie de la Richesse minérale de M. Héron de Villefosse, qui avait été présentée, en manuscrit, à l'Acadé- mie en 1816, a paru imprimée cette année avec l’atlas. Cet ouvrage a justifié le jugement qu’en avait porté la com- pagnie, et est devenu le guide indispensable de tous ceux qui s’occupent de l'administration des mines et de leur ex- ploitation. BOTANIQUE. Le plus anciennement connu et le plus utile des palmiers, est sans contredit le dattier, l'une des principales richesses de la Barbarie et de l'Égypte, et qui se cultive aussi avec avantage dans plusieurs contrées de l'Europe méridionale. M. Delisle, qui en a observé la culture avec soin pendant qu'il était attaché à l'expédition d'Égypte, l'a décrite avec détail dans un Mémoire qu'il a présenté à l’Académie. Cet arbre vient de graines, de drageons, et même de bouture. L'opération de la bouture, qui consiste à replanter le som- met après l'avoir séparé de son tronc, avait déja été men- tionnée par Théophraste et par Pline ; et M. Délisle a en- tendu des Arabes lui assurer qu’on la pratique encore. On sait que le dattier a les sexes séparés sur des individus diffé- rents ; les drageons de chaque arbre produisent des individus PARTIE PHYSIQUE. CCv du même sexe. Les habitants, pour tirer le plus de parti possible de leur terrain, ont soin de ne replanter que le petit nombre de mâles nécessaires pour la fécondation arti- ficielle des femelles; et lorsque des causes quelconques em- pêchent que l’on ne place en temps convenable les régimes de ces dattiers mâles, à portée de répandre leur poussière fécondante sur les fleurs femelles, les fruits ne mürissent point et la récolte est perdue. Une espèce de palmier beaucoup moins connue que le dattier, est celle du ripa, qui croît spontanément dans l’ar- chipel des Indes, le long des bords de la mer, et dont Rum- phius et M. Thumberg ont donné des descriptions incom- plètes ; on en mange les jeunes amandes confites. Son régime, coupé avant son développement, donne une liqueur douce, qui, .en fermentant, devient spiritueuse et agréable à boire. On fait, avec ses feuilles, des paniers, des nattes et d’autres menus ouvrages. M. Houtou-Labillardiere en a observé et décrit avec soin la fructification, et rectifié sur plusieurs points les idées que l’on s’en faisait. La fleur femelle a trois stigmates, et le jeune fruit trois ovules ; l'embryon est placé à la base de la graine, ses chatons mâles, à fleurs sessiles, ses anthères por- tées sur un seul filet, quoique non ramifié, ses fleurs fe- melles, dépourvues de calice, et ses fruits agglomérés, lui donnent des rapports sensibles avec les pandanus. Mais ses spathes, les calices à six divisions de ses fleurs mâles, ses feuilles pennées le rapprochent encore davantage des vrais palmiers. Les anciens parlent beaucoup d’un arbre de l'Égypte au- cCv] HISTOIRE DE L'ACADÉMYIE, quel ils donnent le nom de persea, qui ressemblait à un poirier, mais dont les feuilles duraient toute l’année , dont le fruit à noyau était tres-doux et très-sain, et dont le bois dur et noir avait une grande valeur. On trouve encore, dans les auteurs arabes du moyen âge, des descriptions d'un arbre qu'ils appellent /eback, et qui offre tous les ca- ractères attribués par les anciens à leur persea ; mais aujour- d'hui cet arbre est devenu si rare, au moins dans la basse igypte, que les botanistes ne l'ont pas reconnu avec certi- tude : les uns, comme Lécluse, et Linnæus d’après lui, ont donné le nom de persea à une espèce de laurier; opinion d'autant moins admissible que ce laurier vient d'Amérique. D'autres, comme Schréber, ont cru le retrouver dans le se- bestier (cordia mixa), dont le fruit visqueux est tout diffé- rent. M. Delisle a été plus heureux : ayant observé dans un jardin du Caire un individu de l'arbre appelé par Linnæus æimenia ægyptiaca, il lui trouva la plupart des caractères dn persea : une hauteur de dix-huit à vingt pieds, des branches épineuses, des feuilles ovales persistantes, longues d'un pouce à dix-huit lignes, traits qui ont pu donner lieu à la comparaison avec le poirier ; un fruit de la forme d’une datte, doux lorsqu'il est mür, contenant un noyau un peu ligneux, etc. Parvenu dans la haute Égypte, M. Delisle en rencontra deux autres, et il apprit, par les habitants des contrées supérieures, que l'espèce est commune en Nubiëé et en Abyssinie, et très-estimée dans le Darfour ; cependant il n’a pu savoir si le cœur du bois est noir, comme le disent les anciens de leur persea. Cet arbre se nomme aujourd'hui, en Nubie, eg. M. De- lisle lui trouve des différences assez marquées pour le sé- PARTIE PHYSIQUE. ccvi] parer des autres ximenia, et il en fait un genre sous le nom de balanites. Parmi les végétaux d’où découle un suc d'apparence lai- teuse, l’un des plus remarquables est celui que les colons espagnols ont nommé l'arbre de la vache, parce que son lait, loin d'avoir, comme celui des euphorbes et de la plu- part des autres plantes laiteuses, des qualités acres et mal- faisantes, fournit au contraire une boisson saine et agréable. M. de Humboldt a lu à l’Académie une description de cet arbre; et des expériences sur le suc qu'il fournit. Ce célèbre voyageur n'ayant pu le voir en fleurs, n’en détermine pas le genre; mais d'après son fruit il paraît appartenir à la fa- mille des sapotilliers : son port est élevé, ses feuilles lon- gues de huit à dix pouces, alternes, coriaces, oblongues, pointues , marquées de nervures latérales et parallèles. Quand on y fait des incisions, il en découle un lait gluant, d’une odeur de baume très-agréable, dont les nègres man- gent beaucoup en y trempant du pain de maïs ou de manioc, et qui les engraisse sensiblement. A l'air, il s’y forme à la surface des pellicules qui prennent , en se desséchant, quelque chose de l’élasticité du caoutchouc, et il se sépare un caillot qui s’aigrit avec le temps, et auquel le peuple donne le nom de fromage. M. de Humboldt s’est livré, à ce sujet, à des considé- rations générales sur les différentsdaits végétaux, dont les qualités malfaisantes dépendent de certains principes véné- neux qui s'y trouvent assez abondants pour se manifester par leurs effets, tels que la morphine dans l’opium ; mais dans les familles même les plus délétères , il existe des es ccvii] HISTOIRE DE L'ACADÉMIE, pèces dont le suc n’est pas malfaisant , telles que l'exphorbia balsamifera des Canaries, l'asclepias lactifera de Ceylan. MM. de Humboldt et Bonpland ont continué la publica- tion de leur grand ouvrage de botanique, intitulé : Mova genera et species plantarum æquinoctialium (x). Le troisième volume, qui sera achevé en quelques mois, et le quatrième, qui est déja imprimé, mais non encore publié, compléte- ront la série des plantes à corolle monopétale. Ces quatre vo- lumes renferment plus de 3000 espèces nouvelles réparties en 623 genres, dont près de 100 nouveaux. M. Kunth, cor- respondant de l’Académie, auquel la publication de cet ou- vrage est confiée, a décrit, dans la famille des composées, près de 600 espèces rangées d'après une méthode qui lui est propre. Des notes ajoutées par M. de Humboldt offrent les hauteurs auxquelles croissent les plantes des Cordillicres , et des considérations sur la distribution des formes végétales sur le globe. Il reste encore deux volumes à publier, consa- crés aux familles des plantes à corolle polypétale. Mais, comme le plan adopté pour les nova genera et spe- cies ne permet pas de donner les figures de toutes les plantes rapportées par les voyageurs, M. Kunth a commencé de donner, dans un ouvrage particulier, sous le titre des Mimoses et autres plantes du nouveau continent de la fa- mule des légumineuses, le choix des espèces les plus belles. (1) Nova genera et species plantarum quas in peregrinatione ad pla- gam æquinoctialem Orbis novi collegerunt, descripserunt et partim ad- umbraverunt Am. Bonpland et Al.. de Humboldt. Ex schedis autographis A. Bonplandii in ordinem digessit G. S. Kunth. PARTIE PHYSIQUE. ccix Les dessins , exécutés avec tout le luxe auquel se prête l'iconographie française, seront accompagnés d’un travail général sur les légumineuses. Les dessins appartenant au premier cahier de cette monographie, ont été présentés à l'Académie. S Pour assigner à chaque genre sa place dans l’ordre na- turel, M. Kunth a été obligé d’attacher particulièrement toutes les familles des plantes, d'examiner l'immense nombre de genres et d'espèces conservées dans les herbiers , et de compulser tous les différents auteurs qui ont traité les mêmes objets avant lui. C’est à la suite de ces recherches, qu’il nous a donné, dans des mémoires particuliers, des observations générales sur les familles des graminées, des cypéracées, des pipéracées , des aroïdées, et encore derniérement la revision de la famille des bignoniacées. Ces travaux ont pour objet, ou d'indiquer les groupes ou sous-divisions qu'on peut éta- blir dans ces familles, ou de circonscrire avec plus de préci- sion les caractères de leurs genres. En même temps, le savant auteur de la Monographie des jungermannia, M. Hooker continue à Londres la publi- cation des plantes cryptogames que M. de Humboldt lui a confiée. Il a réuni ces plantes à celles qui ont été rappor- tées par M. Menzies, L'ouvrage de M. Hooker porte le titre de Musci exotrct. M. de Beauvois continue toujours avec la mème persévé- rance la publication des plantes recueillies dans ses voyages ; et il a fait paraître : cette année la dix-septieme livraison de sa Flore d'Oware et de Benin, dont nous avons déja plu- sieurs fois entretenu nos lecteurs. 1818. Histoire, DZ ccx HISTOIRE DE L ACADÉMIE, ZOOLOGIE. M. le comte de Lacépède ayant eu en communication des peintures très-soignées rapportées du Japon par feu M. Tit- sing, représentant une multitude d'objets d'histoire natu- relle, dont ceux qui nous étaient connus sont rendus avec une grande exactitude, a cru pouvoir regarder ces peintures comme des documents suffisamment authentiques, même pour établir des espèces que l'on ne connaît point par d'autres voies. En conséquence, il en a extrait la descrip- tion de plusieurs espèces de cétacées qui n’ont point encore été observées par les naturalistes européens. Elles consistent en deux baleines proprement dites, c'est-à-dire sans na- geoire dorsale; quatre balénoptères, ou baleines pourvues d'une nageoire sur le dos; un physétère, ou cachalot muni de nageoire dorsale , et un dauphin. L'auteur donne avec détail les caractères distinctifs de ces huit animaux, qui forment une addition considérable à la liste des cétacées connus, laquelle, dans le dernier ouvrage de M. de Lacépède sur cette classe, ne s'élevait encore qu'à trente-quatre. M. Cuvier a présenté une tête d'orang-outang d'âge moyen, qui lui a été récemment envoyée de Calcutta par M. Wallich, directeur du jardin de la compagnie des Indes. Il a fait remarquer que les têtes d’orangs-outangs décrites jusqu’à-présent étaient toutes prises d'individus fort jeunes et qui n’avaient point encore changé leurs dents de lait : celle qu'il a mise sous les yeux de l'Académie étant plus avancée, PARTIE PHYSIQUE. cex] a déjà le museau plus saillant et le front plus reculé; on y voit des commencements de crêtes temporales et occipitales qui la font ressembler beaucoup à celle du grand singe connu sous le nom de Pongo de Wurmb. Cette dernière tête ayant d’ailleurs toutes les connexions d'os, les formes, les propor- tions et les positions de fentes et de trous qui sont caracté- ristiques pour les orangs-outangs , il ne serait pas impossible que le grand singe de Wurmb ne fût qu'un orang-outang ordinaire adulte. Dans tous les cas, c’est une véritable es- pèce d'orang, et c'est mal-à-propos que M. Cuvier lui- même, déterminé par la petitesse relative de son crâne, l’a- vait laissé auprès des mandrilles et des autres singes à long museau. M. Cuvier a en outre fait voir la figure d’un tapir origi- naire de Sumatra , qui existe vivant dans la ménagerie du gouverneur-genéral des Indes anglaises, le marquis de Ha- stings, et qui diffère du tapir d'Amérique par la couleur blanchâtre d’une partie de son dos, tandis que le reste du corps est d’un brun noir. 1l résulte d’un mémoire qui ac- compagnait ce dessein, et qui avait été envoyé à M. Cuvier par M. Diard, jeune naturaliste occupé dans les Indes de re- cherches scientifiques, que cette espece de quadrupède habite non-seulement l'ile de Sumatra , mais encore une partie de l'Inde au-delà du Gange. Jusqu’à-présent on avait cru le genre des tapirs propre à l'Amérique. M. Moreau de Jonnès, correspondant de l’Académie, qui a le projet de décrire particulièrement les différents reptiles des Antilles, et qui avait commencé ce travail l’année der- nière par une histoire fort étendue de la fameuse vipère jaune DA 2 CCxI} HISTOIRE DE L'ACADÉMIE, ou fer-de-lance de la Martinique, a présenté cette année ur Mémoire sur l'espèce de gecko appelé dans cette île-mabouïa des murailles, et qui n’est autre chose que le gecko à queue épineuse de Daudin. Cet animal, d’un aspect hideux, et à qui ses ongles donnent la faculté de se cramponner assez pour marcher sous des plafonds, habite l'intérieur des mai- sons, où il poursuit principalement les blattes ; 1l inspire de l'horreur aux habitants, qui lui attribuent des disposi- tions malfaisantes, et lui ont donné ce nom de mabouïa, parce que c'était celui que le mauvais principe portait chez les Caraïbes. C’est le même animal dont Acrélius avait dit qu'il lance une salive noire et vénéneuse, et qui a été indi- qué, mais très-mal décrit, par plusieurs naturalistes, sous le nom de sputateur. On indie dans les Antilles mabouia des bananes une autre espèce de gecko qui arrive à une plus grande taille, et qui est le gecko isse de Daudin, dont la queue, quand elle a été arrachée, renaît souvent beaucoup plus grosse qu’elle n’était auparavant (1). Ces notions sont d'autant plus intéressantes, que des na- turalistes avaient transféré par erreur le nom de mabouia à une espèce de scinque. | Le même observateur a donné un autre Mémoire sur la couleuvre à laquelle son agilité a fait donner le nom de courresse (coluber cursor, gm.). C’est un animal timide et in- (x) Le gecko à queue épineuse, le gecko porphyré et le sputateur sont le même animal, selon M. Moreau de Jonnès; ils appartiennent à la fa- mille des gecko hémidactyles. \ Le gecko lisse et le gecko à queue renflée sont aussi le:même et appar- tiennent aux thécadactyles.” PARTIE PHYSIQUE. : . cCxii] nocent, qui détruit dans les jardins beaucoup de limaçons, et que les habitants protégent soigneusement, parce qu'ils le croient l'ennemi acharné de la vipère fer-de-lance ; mais c'est une erreur cccasionnée, selon M. de Jonnès, parcequ'on la confondue avec une aiñde espèce de Ho qui n'existe plus aujourd’hui à rique. Les grands ouvrages de say publiés par les académi- ciens ont été continués avec zèle; il a paru un volume des Animaux sans vertèbres de M. Delamarre, et des livraisons des Observations zoologiques de M. de Humboldt- et des In- sectes d'Afrique de M. de PARA | | ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. > Gb) 74 Nous avons to compte avec: den de détail, dans otre Analyse de lannée dernière, des importantes re- cherches En lesquelles M'le chevalier Geofftoy Saint-Hilaire - a cherche à ramener les’ pièces ‘osseuses de Tappareil! bran- chial: des poissons; à! celles’ qui remplissent des’ fonctions amalogues dans le: squelette des’ trois autres ‘classes ‘d’anï- maux vertébrés. Ce savant naturalisteia présenté cétte année à l'Académie plusieurs nouveaux Mémoires sur le ‘même sujet, et il a publié le tout'entun volume , sous le titre de Philosophie anatomique, ou des organes respiratoires , sous le rapport de lai détermination et de l'identitéde: leurs, ns osseuses ; avec dix plänchesien taillé-douce.?° "71 | Le travail de M. Geoffroy peut être RUE sous trois aspects distincts: :1lembrabse!: :® 05 .: ont 19 T’énumération et la description de‘toutes les pièces CCXIV HISTOIRE DE L'ACADÉMIE, osseuses composant chacun des organes qui contribuent à la respiration, dans les poissons, et de celles de quelques-unes des autres.classes, lorsqu'il était nécessaire au plan de l’auteur de les décrire de nouveau; 2° Les rapports admis par l’auteur, entre les pièces que jusqu'à-présent l’on avait crues exclusivement propres aux poissons, et celles qu'il regarde comme leur étant analogues dans les autres vertébrés ; 3° Les considérations auxquelles il s'élève d’après ces rap- ports nouvellement aperçus, touchant la nature et la desti- nation des organes dont les pièces font partie. Ainsi M. Geoffroy énumere et décrit avec soin toutes les petites pièces qui entrent dans la grande ceinture bran- chiostége ; celles qui forment les arcs osseux sur lésquels les branchies sont suspendues; celles qui supportent ces arcs; celles qui leur sont annexées sous le nom:d'os pharyngiens ; celles ;qui.les recouvrent, sous le,nom d’opercules, ete. Il fait connaitre de combien de piècés se compose le.sternum dans les diverses classes devertébrés,et comment cés pièces y sont arranigées. Il donne aussi des détails neufs et curieux sur- la composition des divers os'hÿoïdes, et sur les points d'ossification qui se montrent dans les cartilages des divers larynx, ainsi que sur la ressemblance du larynx supérieur des oiseaux avec celui des mammifères. { Cette partie de. son travail, qui. consiste en faits cer- tains, en grande partie nouveaux ,..et tous \nettement ex- posés, demeurera toujours une acquisition précieuse pour la science, La seconde partie, qui établit les rapports des pièces dont nous venons de parler, avec celle des classes supérieures, est PARTIE PHYSIQUE. cexv déja susceptible de plus de difficulté, ainsi qu'on à pu l'entre- voir dans notre dernière Analyse. Selon M. Geoffroy, les pièces qui forment l’opercule branchial répondent au cadre du tympan et aux osselets de louïe; les pièces qui portent la membrane branchiostége résultent d’un entrelacement, d’une intercalation des parties du sternum , entre celle de l'os hyoïde ; d’un renversement du corps de cet os hyoïde, qui porte en avant et transforme en os lingual ses formes thyroïdiennes , lesquelles, dans les mammifères , se dirigeaient en arrière pour s'unir au car- tilage thyroïde ; enfin d’un déplacement du sternum, qui, du lieu qu'il occupait dans les trois premieres classes, der- rière les clavicules ou les os coracoïdes, le transporte en - ayant de ces mêmes os et sous la gorge. Les pièces latérales qui unissent les arcs des branchies à la chaîne commune qui . les porte, répondent, toujours selon M. Geoffroy, aux points d'ossification" du cartilage thyroïde, et aux cartilages arythé- noïdes; les os pharyngiens inférieurs, à ceux du cartilage cricoïde; les supérieurs, à une lame qui se serait détachée de l'os sphénoïde, ou à la partie cartilagineuse de la trompe d’Eustache ; les arcs branchiaux à ceux des bronches: les petites pièces qui les‘hérissent ; aux anneaux de la trachée. Nous avons déja annoncé ces rapports dans notre précédente Analyse, et nous ne pouvons aujourd'hui que renvoyer à l'exposition détaillée que M. Geoffroy en donne; on y trou- vera tous les motifs qui peuvent faire assigner à chacun d'eux le degré de probabilité dont il est susceptible. Quant au troisième ordre des idées de M. Geoffroy, celles qui concernent les fonctions véritablement essentielles des organes, on peut dire que ces idées sont en partie nées des CCXV] HISTOIRE DE L'ACADÉMIE, recherches dont nous venons de parler, et qu’en partie elles ont été conçues pour en appuyer les résultats. Ainsi M. Geoffroy , une fois convaincu que ïes pièces si développées qui composent l'opercule branchial des pois- sons, et qui, dans cette classe, ne paraissent pas servir à l'ouïe, ne sont que le marteau, l’enclume , et les autres os- selets de’ l'oreille des mammiferes, sur une plus grande échelle, a dû être conduit à douter que ces osselets fussent des organes de l’ouie, même dans les animaux où on les a toujours regardés comme tels, et à les considérer seulement comme une sorte de superflu resté rudimentaire (ce sont ses termes) dans les animaux à poumon, et indicateur d'une organisation rigoureusement nécessaire et amplement déve- loppée dans les poissons. De même, ayant cru retrouver dans l'appareil osseux des branchies qui ne produisent aucune voix, toutes les pièces du larynx, il a dù être disposé à croire que ce n'est pas sur de solides et véritables considérations que l'on a présenté le larynx comme destiné à la voix, comme l'organe principal de la voix; et il aime mieux l'appeler la première couronne du tuyau introductif de l'air dans le poumon , le lieu des vou- loirs de l'organe respiratoire, et la réunion de ses plus zélés serviteurs. Cependaut il est de notre devoir de faire remarquer que, sur, ce dernier sujet, M. Geoffroy n’est pas aussi opposé à l'opinion reçue, que les efforts qu'il fait pour soutenir la sienne pourraient porter à le croire : car il ne conteste pas que, dans les animaux à poumon, le larynx ne serve à la voix ; et il établit même une théorie nouvelle pour expliquer comment cet organe remplit cette fonction. Il en est de même PARTIE PHYSIQUE. oo de la partie de son travail où M. Geoffroy combat l'existence d'un larynx inférieur dans les oiseaux. Ce n’est pas qu'il nie que les oiseaux n'aient, au bas de leur trachée, des dispo- sitions organiques qui produisent des sons; il veut dire seu- lement que ces dispositions ne consistent pas en pièces sem- blables à celles du larynx supérieur; ce que personne en effet n’a jamais prétendu. La théorie particulière à M. Geoffroy , sur la voix et sur le son, n'est pas dans une dépendance nécessaire de ses re- cherches anatomiques, et tient à des idées de physique gé- nérale qu'il s’est faites depuis long-temps, mais qu'il n’a point assez développées dans cette occasion pour que nous puissions en rendre compte. Nous dirons seulement qu'il regarde le cartilage thyroïde commeun corps sonore servant de table d'harmonie à l'instrument vocal, et que c’est au rap- prochement et à l'éloignement de ce cartilage et de l'hyoïde, qu'il attribue les variations de tons. Ce volume est terminé par un Mémoire sur les os de l'épaule. L'auteur avait depuis long-temps fait connaître les rapports de ces os dans les poissons, avec les os analogues des oiseaux ; et même c’est par-là qu’il a été conduit à toutes les recherches d’ostéologie comparée , dont nous avons ‘en- tretenu plus d’une fois nos lecteurs. Il a repris cette matière sous un point de vue plus général, et regarde ces os comme arrivés, dans les poissons, à leur maximum de développe- ment et d'importance, y. servant de bouclier au cœur, de soutien au diaphragme, et comme de chambranle à l'oper- cule branchial. Au reste, nous répéterons ici l'invitation que nous avons déja faite aux naturalistes, de consulter un ouvrage rex ph 1818. Histoire. Ee Li) ccxvii] HISTOIRE DE L'ACADÉMIE, de faits intéressants et nouveaux, et où l’on trouvera une grande instruction, même sur les points où l’on ne croira pas pouvoir adopter toutes les opinions de l’auteur. M. Edwards a continué les expériences curieuses qu'il avait commencées l’année dernière sur la respiration des gre- nouilles; déja il s'était assuré que la présence de l'air est utile pour prolonger la vie de ces animaux, lorsque la cir- culation et la respiration pulmonaire ont cessé; que l’eau les fait périr plus promptement qu’une enveloppe solide, et d'autant plus promptement qu’elle est moins aérée; et il s’est occupé plus particulièrement cette année de l'influence de l'air contenu dans l’eau, et de celle de la température à laquelle on élève ce liquide. IL a constaté que l’action délétèré de l’eau diminue avec la température. Les grenouilles ont vécu deux fois plus long-temps dans de l’eau à 10 degrés, que dans de l'eau à 15°, et trois fois plus dans de l’eaü à 6: au contraire, leur vie s’abrége de près de moitié à 22°, de plus des trois quarts à 32; et elles périssent instantanément quand on les plonge dans de l’eau à 42°. Le froid de l’âtmo- sphère avant l'opération est encore une circonstance favo- rable au prolongement de la vie dans l'eau froide. La quaritité de l'air contenu dans l'eau, le volume de l'eau employée, le renouvellement plus fréquent de cette eau, sont des circon- stances qui y contribuent aussi, chacune dans des propor- tions et des limites que M. Edwards détermine par dés expé- riences nombreuses, et faites avec toutes les précautions d’une physique exacte. Entre o et 10 dégrés, les grenouilles peuvent vivre plu- sieurs mois, dans une quantité de dix litres d’eau aérée, PARTIE PHYSIQUE. CCxIx que l'on renouvelle une fois par jour : l'action que l'air de cette eau exerce sur leur peau suffit à leur existence, sans qu'elles aient besoin de mettre en jeu leurs POUMARE; mais à 10° et au-dessus, elles ne peuvent continuer à vivre qu'en venant respirer l'air à la surface. Si on les retient sous l’eau, à 12 ou 14°, par exemple, quelque soin que l'on prenne de la renouveler, elles périssent en un ou deux jours; de l'eau courante peut leur faire supporter quelquefois, sous l'eau, une température plus élevée; quelques-unes la soutiennent jusqu'à 22°. Indépendamment de leur intérêt pour la théorie générale de l'action de l'air sur le sang, ces expériences expliquent plusieurs traits singuliers de l'économie de ces animaux, et sur-tout la différence extraordinaire de leur genre de vie en hiver et en été, MÉDECINE €T CHIRURGIE. La membrane pupillaire est un voile celluleux et vascu- laire qui ferme la prunelle dans le fétus , et qui se déchire et disparaît, d'ordinaire ; vers l'époque de la naissance. M. Portal a présenté quelques observations sur ce voile, qu'il croit occasionner , en quelques cas, des cécités de nais- sance, lorsqu'il ne se déchire pas, cécités qu'on pourrait guérir par une opération facile. M. Portal pense que l'en- * fant naissant est dépourvu d'ouiïe et d'odorat aussi-bien que de vue, parce que les narines et la cavité de son tympan sont remplies de mucosités, dont il faut qu’il se débarrasse pour jouir de ces organes. Il arrive aussi quelquefois des Ee2 CCXX HISTOIRE DE L'ACADÉHMIE, surdités de naissance , parce que la cavité du tympan ne s'est pas dégorgée. M. Portal, dont nous avons analysé l’année dernière le travail sur les grossissements du cœur sans dilatation de ses cavités, en a lu un cette añnée sur les anévrismes de cet organe. Il y établit qu'ils sont très-communs; qu'ils consistent toujours en une ampliation plus ou moins grande d’une ou de plusieurs de ses quatre cavités, soit que leurs parois soient amincies, soit qu'elles aient acquis plus d'épaisseur , ce qui arrive souvent; que, dans tous les cas, c'est le sang qui produit ce surcroît d'ampliation, seul où concurrem- ment à d'autres causes, dans une ou plusieurs des cavités du cœur, en distendant leurs parois toujours trop faibles relativement à son impulsion , soit parce que le sang est généralement en trop grande quantité dans tout le système de sa circulation; soit parce que, trouvant des obstacles pour sortir du cœur, il y est retenu en trop grande quan- tité, d’où il résulte qu'il distend toujours ses parois ; que les contractions des parois du cœur, bien loin d'être plus fortes lorsque ces parois sont plus épaisses, sont au contraire plus faibles, si elles sont désorganisées par quelque vice, comme elles le sont presque toujours alors; et que sil arrivait que, le cœur étant sain , ses parois eussent un peu plus d'épaisseur que dans l'état naturel, elles se contrac- teraient alors, sans doute, avec plus de force, mais aussi qu’elles seraient dans une disposition contraire à cellé où elles se trouvent quand l’anévrisme se forme. Alors, poussant le sang avec trop de violence dans les artères pulmo- naires et dans l'aorte, elles pourraient y produire des ané- hot A be ot dote us PARTIE PHYSIQUE. CCXX] vrismes, mais jamais dans la cavité du cœur, d'où ce sang proviendrait. M. Portal conclut de ces observations, en faveur des opi- nions de plusieurs illustres médecins, que les anévrismes sont toujours passifs par rapport à la force des parois du cœur, absolue ou relative à l’action du ne contre ces mêmes parois; que les signes indicatifs des anévrismes, exposés par ces savants médecins, sont les pes certains, et que leur pra- tique, relativement à la saignée, est la mieux er et la plus efficace. M. le baron Percy a communiqué à l’Académie des re- cherches historiques curieuses sur le mnéricisme, sorte d'in- disposition assez dégoütante, et qui consiste à faire révenir à la bouche les aliments à demi digérés, pour, les, avaler une seconde fois. C’est une espèce de rumiriation , qui afait avancer bien des opinions extravagantes aux médecins qui en ont parlé. M. Percy réduit toutes ces. opinions à leur juste valeur. ol 1 htro ! Diverses maladies. de la AE en altérant les Aorts du vide avec le plein dans cette cavité, ou-en réduisant en tout ou en partie la faculté qu’a le poumon de se dilater ou de se contracter, produisent des changemerits dans le son que rendent les parois de la poitrine! lorsqu'on des; frappé; changements qui donnent, en certains cas,.dessindications paies sur des ‘eauses: auxquelles ils sont-dus.? 13 521.67 : - C'est de là qu'est né l’art de reconnaître les affections FA % poitrine par la percussion, dont Auenbrügger, médecin de Vienne, a publié un traité qui a été traduit et.étendu : par M. Corvisart, Mais on peut faire encore sur l'état de la CCXXi] HISTOIRE DE L'ACADÉMIE, poitrine des observations plus délicates, soit en approchant l'oreille, soit en employant divers instruments : ces observa- tions constituent l'art d'explorer les maladies du thorax au moyen de l’auscultation. M. Laennec, médecin de Paris, a présenté à l’Académie un Mémoire sur ce sujet, où il expose une méthode qui lui est propre. Tantôt il emploie un cylindre plein, tantôt un tube à parois épaisses, tantôt un tube évasé en forme d'entonnoir; il applique une extrémité de ces instruments aux divers points du thorax, et approche son oreille de l'autre extrémité. Le tube à parois épaisses, ou cylindre percé dans son axe d’un canal étroit, appliqué à la poitrine d’un individu qui parle ou qui chante, ne fait entendre, si l'individu se porte bien, qu'une sorte de frémissement plus où moins marqué; mais s'il existe un ulcère dans le poumon , il arrive un phénomène très-singulier : la voix du malade cesse de se faire entendre par l'oreille restée libre ; elle parvient tout entière à l'observateur par le canal pratiqué dans le cylindre. Des commissaires de l'Académie ont vérifié cette expérience sur plusieurs phthysiques. Le même phénomène a lieu quand on applique l'instrument sur la trachée ou sur le larynx d’un homme sain. M. Laennec, qui donne à cet effet des alté- rations pulmonaires le nom de pectoriloquie, en distingue les variétés, et fait connaître les indications qui en résultent par rapport aux ulcères du poumon, à leur grandeur, à leur état de vacuité ou de plénitude, et à la consistance de la matière qu'ils renferment. Cet instrument fait aussi entendre d’une maniere distincte PARTIE PHYSIQUE. CCxxii] les mouvements de la respiration et les battements du cœur, en sorte que l’on juge facilement de leur plus ou moins de régularité; ce qui ne peut manquer de donner aussi des indi- cations utiles pour les vices de ces deux fonctions. L'emploi dé l'or en médecine, long-temps vanté par les alchimistes , semblait oublié dans les derniers temps, lorsque M. Chrétien, célèbre médecin de Montpellier, an- nonça qu'il avait reconnu à ce métal, même dans son état de pureté, des propriétés médicamenteuses très - efficaces , et qu'il en avait tiré grand parti contre des affections scro- phuleuses et syphilitiques. Il a adressé à l’Académie un travail volumineux qui contient l’histoire des principales maladies qu'il a traitées, et le détail des précautions avec lesquelles il a fait usage de ce nouveau remède. Les commis- saires de la compagnie ont fait, à leur tour, et d’après les méthodes indiquées, des expériences nombreuses, pour être en état d’en apprécier les vertus. Au moyen de frictions d'or où de muriate triple d'or et de soude, faites sur la langue, ils sont parvenus à cicatriser des ulcères scrophu- leux, à résoudre des engorgements syphilitiques, à détruire en partie des exostoses, à arrêter dés caries, à mettre fin à des douleurs ostéocopes insupportables, à dissiper d’an: ciennes 6phtalmies, des maux de gorge opiniâtres, des dartres et d’autres éruptions qui avaient résisté à tous les autres remèdes. Mais il leur est souvent arrivé aussi d'être beaucoup moins heureux; et leur défaut de succès n’a pas consisté seulement à laisser le mal dans son état primitif; il s’est plusieurs fois exaspéré par l'action du remède : des tumeurs CCXXIV HISTOIRE DE L'ACADÉMIE, indolentes se sont enflammées; de la fièvre, de la colique, des inflammations alarmantes de l'estomac se sont. manifes- tées ; un gonflement du périoste, peer sans douleur, a dégénéré en cancer. Il est donc tres-certain que l'or est bien éloigné d’être un agent aussi impuissant qu’ on le prétendait ; mais il est cer- tain aussi que son emploi a besoin d’être guidé d'après des règles et des précautions relatives aux circonstances où se trouvent les sujets sur lesquels on veut en faire usage; regles et précautions qu'une longue expérience et une suite nom- breuse d'observations bien appréciées pourront seules pro- curer à l'art de guérir. Feu M. Ravrio, fabricant de bronzes, qui avait acquis de la célébrité par la perfection où il avait porté ce genre d’ou- vrage, légua il y a deux ans une somme à l'Académie, pour être décernée à celui qui découvrirait les moyens de préserver les doreurs sur bronze des funestes effets de la vapeur de mercure qui les fait presque tous périr de bonne heure après des souffrances cruelles. Ce prix a été remporté par M. Darcet, qui non- Vie a donné la solution complète du problème de M. Ravrio, mais qui a inséré dans son Mémoire tant de vues utiles pour rendre plus faciles, plus efficaces et moins mal-saines les di- verses opérations dont se compose l'art du doreur, que son ouvrage est devenu un traité complet de cet art, aujourd'hui si important pour la France. Le moyen imaginé par M. Darcet, consiste en un four- neau de rappel dont un tuyau monte dans la cheminée du doreur ; il y produit un tel courant ascensionnel de l'air, PARTIE PHYSIQUE, CÉXxV js ’aueune parcelle de mercure ne matique d'en être entraf- née ; ét mêmè, en adaptant à la cheminée un autre tüyau qui se recourbe sur un vase rempli d'eau, on recueille uti- lement la plus grande partie de ce mercure vaporisé. Un autre Changement important fait par M. Darcet, est d'avoir substitué le nitrate de mercure à l'acide nitrique, pour l'opération du décapage qui nuisaït aussi beaucoup à la poitrine des ouvriers. ; lorsqu'elle se faisait avec l'acide pur. Les procédés que M. Darcet avait depuis long-temps intro- duits à la Monnaie, se sont répandus dans plusieurs ateliers de doreurs, et M. le préfet de police ne permet plus à aucun doreur de s'établir ni de transporter son atelier sans le dis- Frs de manière à les employer. Les ventouses sont des instruments en forme de cloche, que l'on applique à la peau en y faisant le vide, soit par la chaleur, soit par un piston; le poids de l'atmosphère agit sur toute la surface du corps , excepté à l'endroit sur lequel est la ventouse, ce qui produit naturellement à cet endroit üné élévation de la peau et un gonflement de ses vaisseaux sanguins et lyÿmphatiques, qui les rend rouges et violets, ct qui y excite un sentiment très-vif de chaleur. Des scarifica: tions pratiquées soit avant soit après l'application de la ven: touse, font écouler une partie du sang et de la lÿmphe qui Sy étaient accamulés. Les parties adjacentes et plus profondes sé trouvent débarrassées du liquide qui les éngorgeait, et reviènnent sur elles-mêmes par une contraction, suite natu- rellé dé la dilatation extérieure. Ce “moyen curätif, dont les anciens faisaiérit beaucoup 1818. Histoire LS Je CCXXV] HISTOIRE DE L'ACADÉMIE, d'emploi, et qui est encore en grand usage en Allemagne et dans quelques autres pays, est un peu négligé en France. M. Gondret, dont nous avons rapporté des observations remarquables sur l'emploi du feu en médecine, s’est aussi oc- cupé des ventouses. Il fait observer que l'effet qu’elles pro- duisent est souvent bien supérieur à ce que l’on pourrait attendre de la petite quantité de liquides dont elles procarent l'extraction. Des sangsues , en tirant plus de sang, n’ont sou- vent pas le même succès à beaucoup près; et d’ailleurs les ventouses sèches produisent , en bien des cas, autant d'effet que des ventouses scarifiées. Ce remède s’est montré salu- taire dans beaucoup de congestions locales, avec irritation et douleur fixe, et en général dans les phlegmasies ou in- flammations partielles, soit aiguës soit chroniques. Appliqué convenablement, il a calmé les symptômes d’une dentition orageuse ; il a fait disparaître des palpitations du al et arrêté des hémorragies utérines. Lane des opérations les plus surprenantes et les plus hono- rables de la chirurgie, est sans contredit celle que M. Riche- rand a exécutée, en enlevant une partie des côtes et de la plévre. Le malade était lui-même un homme de l'art, qui n'ignorait pas le danger du remède auquel il recourait, mais qui savait aussi que son mal était incurable autrement. 1l était attaqué d’un cancer à la face interne des côtes et à la plevre, qui reproduisait sans cesse d'énormes fongosités, que le fer et le feu avaient attaquées inutilement. Il fallut mettre les côtes à nu, en scier deux, les détacher de la plèvre, et enlever toute la partie cancéreuse de cette derniere membrane. À peine y eut-on fait une ouverture, que l'air, s’engouffrant dans la poitrine, donna lieu, dans la première journée!, à des an- PARTIE PHYSIQUE: CCXXVi] goissesiet à des suffocations inquiétantes ; le chirurgien put toucher ét voir le cœur au travers du péricarde transparent comme une glace, et s'assurer de l'insensibilité absolue de l'un et de l’autre. Des sérosités abondantes découlèrent de la plaie tant qu'elle resta ouverte; mais elle se rétrécit peu-à- peu ‘au moyen de l’adhérence du poumon avec le péricarde et des granulations charnues qui survinrent; enfin le malade alla si bien, que, le vingt-septième el après l’opération, il ne put résister au desir de se rendre à l'École de médecine pour voir les fragments de côtes qu’on lui rayé enlevés, et que trois où quatre jours plus tard il retourna à son Ass. cile pour y reprendre ses occupations ordinaires. Le succès obtenu par M. Richerand est d'autant plus im- portant, qu’il autorisera peut-être, en d’autres circonstances, à des entreprises que, dans les idées reçues, l’on aurait crues impossibles : on craindra moins de pénétrer dans l’intérieur de la poitrine. M. Richerand espère même, qu'en ouvrant le péricarde et en y faisant des injections Ébateéhlés | on parviendrait à guérir une maladie toujours mortelle jusqu'à-présent, l'hy- dropisie de cette cavité. La cataracte est une cécité qui provient de ce que le cristal- lin de l'œil a perdu sa transparence ; et depuis la plus hante antiquité, on a connu l’art de la guérir, soit en Fine le cristallin vicié, par une ouverture que l on fait à la cornée, soit en déplaçant cette lentille au moyen d'une aiguille qui pénètre dans l'œil, et en laissant ainsi une libre entrée aux rayons de lumière au travers de la pupille. Ona long-temps disputé sur les avantages de chacune de ces méthodes, et l’une ou l' autre Ff2 GCXX VII] HISTOIRE DE L'ACADÉMIE, a été alternativement plus en usage : encore aujourd'hui, les oculistes sont partagés sur leur mérite, et préferent l'une ou l'autre, selon l’idée qu'ils s’en font, et l'habitude qu'ils en ont prise. Ce qui en avait prévenu quelques-uns contre l'opéra- tion par déplacement pu abaissement, c'était l'incertitude de ce que devenait le:cristallän., ét la, erainte qu'il ne reprit sa, place et n'obstruât de nouveau lapupille. Mais onsaitaujour- d'hni, par les expériences de M. Scarpa, qu'il ne tarde point: à être dissous ou absorbé dans les humeurs de Kris ‘et quil n'en -reste. bientôt aucune trace. io M.Roux a lu à l'Académie un Mémoire sur ces deux: mé-, thodes, et sur leurs avantages mutuels : il préfere l'extrac- tion ;, mais il convient qu'elle n’est point applicable. dans tous les.cas, et c’est alors seulement qu'il voudrait que l'on pratiquât l’abaissement. | ÉCONOMIE RURALE. M. Yvart, invité l’année dernière, par le ministre de l'in- térieur, à aider de ses conseils le propriétaire d’une.terre en, Auvergne, dans une grande entreprise agricole, faite sur les, débris d'anciens volcans, s’est empressé de se rendre sur ce domaine intéressant , et il a saisi cette occasion. pourétudier le système d'économie rurale adopté dans les, environs. du Mont-d'Or et du Puy-de-Dôme. Il a entretenu l'Académie de plusieurs objets qui SES attiré son attention dans ce voyage, tels que la pratique des, défrichements, les inconvénients de l’écobuage, l'importance, des prairies naturelles et artificielles, la nécessité de détruire} le préjugé qui existe encore sur plusieurs points, à l'égard des PARTIE PHYSIQUE: CCXXIX dernières; la culture des céréales sur les coteaux à pente ra- pide, celle de quelques plantes économiques, propres à amé- liorer le sort des habitants des pays montueux ; l'éducation, l'entretien et.les produits des bestiaux ; les moyens de rem- placer: dans plusieurs cas, pour leur usage, le sel commun par les eaux minérales acidules ; la recherche, la préparation et l'emploi des engrais et des amendements; la nécessité des plantations, les précautions à prendre pour assurer leur suc- cès, les avantages et l'établissement. des irrigations. «.Le-dernier de.ces objets ayant parû à M; Yvart mériter d'être-traité avec plus d'étendue, d’après les nombreux ren- seignements-que lui avaient fournis ses divers voyages dans presque toute la France, en Italie, en Suisse. et en Angle- terre, ili s'est attaché à démontrer, dans un autre travail qu'il a également soumis, à, l'Académie, toute l'importance de: ce genre d'amélioration. pour notre éconamie rurale, et combien. il nous reste-encore à faire pour en tirer tout | parti possible. Ÿ Le ministre fait imprimer en ce moment l'ensemble des recherches. et des observations de ce savant cultivateur, afin de les communiquer aux administrations: et aux sociétés d'agriculture. Ainsi les propriétaires ruraux vont bientôt en jouir, et y puiseront sans doute plus d’une idée utile à l'amé- lioration de leurs domaines. : { des sd M. Yyart a aussi communiqué plusieurs détails intéres- sants sur la statistique agricole de l'Angleterre, en rendant compte à l’Académie d’un ouvrage que lui avait adressé l'auteur, M. Farey, sur le comté de Derby. CCXXX HISTOIRE DE L' ACADÉMIE. STATISTIQUE. M. Moreau de Jonnès a donné un Mémoire sur la popula- tion des Antilles, où il apprécie les causes et la mesure de l'augmentation ou de la diminution annuelle de chacuné des classes qui la composent. D'après des données officielles, il estime que la mortalité est de 4 sur 100 parmi les créoles blancs et parmi les créoles de couleur affranchis, et de 3 seulement parmi les créoles noirs esclaves ; mais c'est tout une autre proportion pour les arrivants. Il meurt 21 hommes sur 100 dans les troupes an- glaises, et-33 dans les françaises; ce que l’auteur attribue au régime mieux entendu des premières. Les noirs enrégimentés en Afrique par les Anglais, et transportés aux Antilles, ne perdent que dans la proportion de 3: pour 100. Mais les esclaves apportés par la traite, perdent jusqu'à 17; ce qui, comme on voit, n'approche pas encore de la mortalité des Européens. La reproduction pour les blancs est de 3 pour 100, et, pour les gens de couleur libres, de 4; ce qui tient aux nom- breuses cohabitations des blancs avec des négresses et des mulâtresses; mais, parmi les esclaves, il ne naît à la Marti- nique que 2 enfants sur 100 personnes. Cette classe diminue- rait donc annuellement de 1 sur 100. La diminution serait du double à la Grenade, selon Colqhoun. L'Académie a jugé ce Mémoire digne du prix nouvellement fondé par un anonyme, pour l’encouragement de la stati- stique. ES A VAR LA ESA LS RL LUI ER AR RER LA RR LAS LA SORA S LUE VER LL SET LUE URL ELLE AE LAS AAE MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE DES SCIENCES DE L'INSTITUT DE FRANCE. MEMOIRE SUR LE FLUX ET LE REFLUX DE LA MER: Par M. DE LAPLACE. Cr phénomène mérite particulièrement l'attention des ob- servateurs, en ce qu'il est le résultat de l’action des astres, le plus pres de nous, et le plus sensible; et que les nom- breuses variétés qu'il présente, sont très-propres à vérifier la loi de la pesanteur universelle. Sur l'invitation de l’Aca- démie des sciences, on fit, au commencement du dernier siècle, dans le port de Brest, une suite d'observations qui furent continuées pendant six années consécutives, et dont la plus gffinde partie a été publiée par Lalande, dans le qua- trième volume de son Astronomie. La situation de ce port est très-favorable à ce genre d'observations : il communique avec la mer, par un canal fort vaste, au re duquel le 1818. 1 2 MÉMOIRE port a été construit. Les irrégularités de la mer parviennent ainsi, dans ce port, très-affaiblies ; à peu-peu-près comme les oscillations que le mouvement irrégulier d’un vaisseau pro- duit dans le baromètre, sont atténuées par un étranglement fait au tube de cet instrument. D'ailleurs, les marées étant considérables à Brest, les variations accidentelles n’en sont qu'une faible partie : aussi l'on remarque dans les observa- tions de ces marées, pour peu qu'on les multiplie, une grande régularité que ne doit point altérer la petite rivière qui vient se perdre dans la rade immense de ce port. Frappé de cette régularité, je priai le gouvernement d'ordonner que l’on fît à Brest une nouvelle suite d'observations des marées, pen- dant une période entière du mouvement des nœuds de l'orbe lunaire. C’est ce que l’on a bien voulu entreprendre. Ces nou- velles observations datent du 1° juin de l'année 1806, et depuis cette époque, elles ont été continuées sans interrup- tion jusqu'a ce jour. Elles laissent encore à desirer : elles ne se rapportent ni au même endroit du port, ni à la même échelle. Les observations des cinq premières années ont été faites au lieu du port que l’on nomme /a mäture; les autres l'ont été près du bassin; mais le peu de distance de ces deux endroits n'a dû produire que de tres-légères différences ; et j'ai reconnu par les observations , que ces différences sont insensibles. Cependant il vaudrait mieux faire les observa- tions dans le même point et avec la même échelle. Il est temps enfin d'observer ce genre de phénomènes avec autant de soin que les phénomènes astronomiques. + J'ai considéré, dans ces nouvelles observations, celles de l'année 1807 et des sept années suivantes. J'ai choisi dans chaque Le à et dans chaque solstice, les trois syzigies et SUR LE FLUX ET LE REFLUX DE LA MER. 3 les trois quadratures les pri voisines de l’équinoxe et du solstice. Dans les syzigies, j'ai pris l'excès de la haute mer du soir sur les basses mers du matin, du jour qui précède la syzigie, du jour même de la syzigie, et des quatre jours qui la suivent; parce que la plus haute mer arrive vers le mi-. lieu de cet intervalle. J'ai fait une somme des excès corres- pondants à chaque jour, en doublant les excès relatifs à la syzigie intermédiaire, ou la plus voisine de l'équinoxe ou du solstice. Par ce procédé, les effets des variations des dis- tances du soleil et de la lune à la terre, se trouvent détruits ; car si la lune était, par exemple, vers son périgée, dans la syzigie intermédiaire , elle était vers son apogée, dans les deux syzigies extrêmes. Les sommes d'excès qu'on obtient ainsi sont donc, à-fort-peu-près, indépendantes des varia- tions du mouvement et de la distance des astres. Elles le sont encore des inégalités des marées, différentes de l'inégalité dont le période est d'environ un demi-jour, et qui, dans nos ports , est beaucoup plus grande que les autres : car en con- sidérant à-la-fois les observations des deux équinoxes et des deux solstices , les effets de la petite inégalité dont la pé- riode est à-peu-pres d’un jour, se détruisent mutuellement; les sommes dont il s'agit sont donc uniquement dues à la grande inégalité. Les vents doivent avoir sur elles peu d’in- fluence, car s'ils élèvent la haute mer, ils doivent égalemént soulever la basse mer. J'ai déterminé la loi de ces sommes pour chaque année, en observant que leur variation est à- fort-peu-près proportionnelle au vu de leur distance en temps, au maximum ; ce qui m'a donné l'intervalle dont ce maximum suit la moyenne des marées syzigies, et le coëf- ficient du quarré du temps. Le peu de différence que pré- Fe 4 MÉMOIRE sentent, à l'égard de ce coëfficient, les résultats des obser- vations de chaque année, prouve la régularité de ces obser- vations. J'ai considéré de la même manière les marées quadratures, en prenant les excès de la haute mer du matin, sur la basse mer du soir, du jour même de la quadrature, et des trois jours qui la suivent. L’accroissement des marées, à partir du minimum, étant beaucoup plus rapide que leur diminution, à partir du maximum; j'ai dû restreindre à un plus petit intervalle, la loi de variation proportionnelle au quarré du temps. Re Dans tous ces résultats, l'influence de la déclinaison des astres sur les hauteurs des marées, et sur la loi de leur va- riation dans les syzigies et dans les quadratures, se montre avec évidence. En considérant par la même méthode, neuf syzigies équinoxiales vers le périgée de la lune, et neuf syzi- gies équinoxiales vers son apogée; l'influence des change- ments de la distance lunaire, sur la hauteur et sur la loi de variation des marées, se manifeste avec la même évidence. C'est ainsi qu'en combinant les observations de manière à dégager l'élément que l’on veut connaître, de tout ce qui lui est étranger; on parvient à déméler les lois des phénomènes, confondues dans les recueils d'observations. Les résultats des observations étant toujours susceptibles d'erreurs , il est nécessaire de connaître la probabilité que ces erreurs sont contenues dans des limites données. On sent, il est vrai, que la probabilité restant la même, ces li- mites sont d'autant plus rapprochées, que les observations sont plus nombreuses et plus concordantes entre elles. Mais cet aperçu général ne suffit pas pour assurer l'exactitude des SUR LE FLUX ET LE REFLUX DE LA MER. 5 résultats des observations, et l'existence des causes régulières qu’elles paraissent indiquer : quelquefois même, il a fait re- chercher la cause de phénomènes qui n'étaient que des acci- dents du hasard. Le calcul des probabilités peut seul faire apprécier ces objets; ce qui rend son usage de la plus haute importance dans les sciences physiques et morales. Les re- cherches précédentes m'offraient une occasion trop favorable d'appliquer à l’un des plus grands phénomènes de la nature, les nouvelles formules auxquelles je suis parvenu dans ma Théorie analytique des probabilités, pour ne pas la saisir. J'expose donc ici l’application que j'en ai faite aux lois de la variation des hauteurs et des intervalles des marées syzigies et quadratures, et à l'influence qu'exercent, à leur égard, les déclinaisons des astres. On verra que ces lois sont détermi- nées par les observations, avec une précision très-remarqua- ble; ce qui explique l'accord des résultats des observations modernes, avec ceux des observations faites, il y a plus d’un siècle, dans le port de Brest, et que j'ai discutées dans le qua- _ trième livre de la Mécanique céleste. On sentira l'utilité de cette application du calcul des probabilités, si l’on considère que plusieurs savants, et spécialement Lalande, pour n'avoir pas soumis à ce calcul l'ensemble des observations, et pour s'être attachés à quelques observations partielles où les ma- rées, vers les solstices, s'étaient fort élevées par le concours de causes accidentelles, ont révoqué en doute l'influence des - déclinaisons dés astres dans ces phénomènes ; influence indi- * quée à-la-fois par les hauteurs des marées, et par les lois de leur variation , avec une probabilité bien supérieure à celle de la plupart des choses sur lesquelles on ne se permet aucun doute. 6 MÉMOIRE . Je compare ensuite tous ces résultats à la théorie de [a pesanteur universelle. Celle que j'ai donnée dans le livre cité, est fondée sur le principe suivant de dynamique, qui peut être utile dans tous les cas où les circonstances sont trop compli- quées pour être soumises au calcul. L'état d'un systéme de corps, dans lequel les conditions primitives du mouvement ont disparu par les résistances qu'il éprouve, est périodique comme les forces qui l'animent. En réunissant ce principe à celui de la coëxistence des oscillations tres- petites, je suis parvenu à une expression de la hauteur des marées, dont les arbitraires comprennent l'effet des circonstances locales du port. Pour cela, j'ai réduit en séries de sinus et de cosinus d’'angles croissants proportionnellement au temps, l'expression génératrice des forces lunaires et solaires, sur l'Océan. Chaque terme de la série peut être considéré comme représentant l'action d’un astre particulier qui se meut uniformément et à une distance constante, dans le plan de l'équateur. De là naissent plusieurs espèces de flux par- tels dont les périodes sont à-peu-près d'un demi-jour, d’un jour, d’une demi-année, d’une année, enfin de dix-huit ans et demi, durée du mouvement périodique des nœuds de l'orbe lunaire. En suivant cette idée que j'ai exposée dans le n° 19 du liv. IV de la Mécanique céleste, jesparviens ici à des formules plus exactes encore que celles dont j'ai fait usage dans le livre cité. J'ai comparé ces nouvelles formules aux nouvelles obser- vations faites dans le port de Brest, et j'ai trouvé entre elles un parfait accord. Il était curieux de voir si les constantes arbitraires déterminées par cette comparaison, se retrouvent les mêmes que celles qui résultent des observations faites, il SUR LE FLUX ET LE REFLUX DE LA MER. 7 y a plus d’un siècle; ou si elles ont éprouvé des altérations par les changemens que les opérations de la nature et de l’art ont pu produire dans ce long intervalle, au fond de la mer, dans le port et sur les côtes adjacentes. Il résulte de cet examen , que les hauteurs actuelles des marées surpassent d'un trente-quatrième environ, les hauteurs déterminées par les observations anciennes. Mais ces observations n'ayant point été faites au même lieu que les observations moder- nes; cette considération jointe à l'incertitude de la gradua- tion de l’ancienne échelle, ne permet pas de prononcer sur ce point qui doit fixer, à l'avenir, l'attention des observa- teurs. Du reste, les observations anciennes et modernes pré- sentent l'accord le plus satisfaisant, soit entre elles, soit avec la théorie de la pesanteur, par rapport aux variations des hauteurs des marées, dépendantes des déclinaisons et des distances des astres à la terre, et par rapport aux lois de . leur accroissement et de leur diminution, à mesure qu’elles s’éloignent de leur minimum et de leur maximum. Je n'avais point considéré, dans la Mécanique céleste, ces lois, relati- vement aux variations des distances de la lune à la terre. Ici je les considère , et je trouve le même accord entre l’obser- vation et la théorie. Le retard des plus grandes et des plus petites inarées sur les instants des syzigies et des quadratures, a été observé par les anciens; comme on le voit dans Pline-le-naturaliste. Daniel Bernoulli, dans sa pièce sur le flux et le reflux de la mer, couronnée en 1740 par l'Académie des sciences, attribue ce retard à l'inertie des eaux, et peut-être encore, ajoute-t-il, au temps que l'action de la lune emploie à se transmettre à la terre. Mais j'ai prouvé, dans le quatrième livre de sa Méca- Sa MÉMOIRE nique céleste, qu’en ayant égard à l’inertie des eaux , les plus grandes marées coincideraient avec les syzigies, si la mer re- couvrait réguliérement la terre entière. Quant au temps de la transmission de l’action de la lune, j'ai reconnu par l’en- semble des phénomènes célestes, que l'attraction de la ma- tiere se transmet avec une vitesse incomparablement supé- rieure à la vitesse même de la lumière. Il faut donc chercher une autre cause du retard dont il s’agit. J'ai fait voir, dans le livre cité, que ce phénomène dépend de la rapidité du mouvement de l'astre dans son orbite, com- binée avec les circonstances locales du port. Nous aurons une idée juste de l'influence de ces causes, en imaginant un vaste canal communiquant avec la mer, et s’avançant dans les terres sous le méridien de son embouchure. Si l'on sup- pose le soleil et la lune, mus dans le plan de l’équateur, et qu'à l'embouchure, la pleine mer arrivant à l'instant même du passage de l’astre au méridien, emploie un demi-jour à parvenir à l'extrémité du canal; il est visible qu’à ce der- nier point, tous les phénomènes qui ont lieu à l'embou- chure, se reproduisent après un demi-jour. Ainsi les raxima et les minima des marées n'auront lieu qu'un demi-jour après la syzigie et la quadrature. Si le flux lunaire, à raison de sa grandeur, mettait un trentieme de jour moins que le flux solaire à parcourir le canal : le maximum, à l'extrémité du canal, arrivant lorsque les deux flux partiels solaire et lunaire coincident, il correspondrait au cas où la lune tra- verse le méridien, un trentième de jour après le soleil; ce qui suit d’un jour àa-peu-près la syzigie. En l’ajoutant au demi-jour que la marée solaire est supposée employer à parcourir le canal, on aurait un jour et demi pour le temps SUR LE FLÜX ET LE RÉFLUX DE LA MER. ( dont le maximum de la marée suivrait la syzigie à son ex- trémité. Concevons maintenant que le port soit au point de jonc- tion te deux canaux dont les embouchures soient très-peu distantes entre elles. Supposons que la marée solaire emploie un quart de jour à parcourir le premier canal , et un jour et demi à parcourir le second. Il est clair que la basse mer so- laire du premier canal correspond alors à la haute mer du se- cond ; etsi, à l'extrémité commune des deux canaux , les deux marées sont d'égale grandeur , la mer y sera stationnaire à ne considérer que l’action du soleil ; mais le jour lunaire surpassant le jour solaire, de 0i,035, la basse mer lunaire du prémier canal ne correspondra point à la haute mer lunaire du second canal; les deux flux partiels lunaires ne se dé- truiront point mutuellement, et leur différence pourra être augmentée par leurs mouvements propres dans les canaux; il y aura donc un flux lunaire sensible à leurs extrémités. Le rapport de l'action solaire à l’action lunaire, qui dans le port de Brest est à-très-peu-près un tiers, sera donc nulle à cette extrémité. On voit par là, que les circonstances locales peuvent influer considérablement sur le rapport des actions des deux astres sur la mer. J'ai donné, dans le livre cité de la Mécanique céleste, une méthode pour détermi- ner par les observations , l'accroissement que le rapport de l'action de la lune à celle du soleil, reçoit des circonstances locales. En comparant les marées équinoxiales et solsticiales observées à Brest, dans les syzigies et dans les quadratures, je fus conduit par cette méthode , à un accroissement d’un dixième dans ce rapport; mais je remarquai qu'un élément aussi délicat devait être déterminé par un plus grand nom- 1818. - 2 10 MÉMOIRE bre d'observations. L'ensemble des observations modernes m'a procuré cet avantage. Ces observations deux fois plus nombreuses que les anciennes , confirment l'accroissement dont il s’agit et le portent à un neuvième ; en sorte que son existence est très-vraisemblable. En appliquant à cet objet les formules de probabilité, je trouve que la probabilité de cet : 2561 > accroissement est = par les seules observations modernes. Ainsi la réunion de ces observations avec les anciennes ne doit laisser aucun doute à cet égard. Pour conclure des phé- nomènes des marées, le vrai rapport des actions du soleil et de la lune; il faut corriger de cet accroissement , l'action Le 69? celle de la terre étant prise pour unité; d'ou il est facile de conclure les valeurs des phénomènes astronomiques qui dé- pendent de cette masse. Mais en considérant la petitesse des quantités qui m'ont servi à déterminer l'accroissement de l'action lunaire , et en réfléchissant que ces quantités sont du même ordre que les petites erreurs dont l'application du principe de la coëxistence des ondulations très-petites , aux phénomènes des marées, est susceptible; je n'ose garantir l'exactitude de cette valeur de la masse lunaire, et j'incline à penser que les phénomènes astronomiques sont plus pro- pres à la fixer. lunaire. Alors on a environ, pour la masse de la lune, J'ai déterminé pareillement les heures et les intervalles des marées dans les syzigies et dans les quadratures vers les équinoxes et les solstices , et dans l'apogée et le périgée de la lune. L'influence des déclinaisons et des distances des astres est indiquée par ces observations avec une extrême probabi- lité dont je détermine la valeur: j'ai retrouvé les mêmes ré- SUR LE FLUX ET LE REFLUX DE LA MER. 11 sultats que m'avait donnés la discussion des observations anciennes , et le même accord de ces résultats avec la théorie. Les intervalles des marées peuvent servir à déterminer le rapport des actions de la lune et du soleil sur la mer. On conçoit, en effet, que plus l’action lunaire l'emporte sur l'action solaire , plus l'intervalle journalier des marées se rapproche du jour lunaire. Le retard observé des marées syzigies, donne à-fort-peu-près le même rapport que le re- tard des marées quadratures ; le milieu de ces rapports est 3, 14782. Les hauteurs des marées donnent pour ce rapport, 2, 88347. La différence, quoique assez petite, ne me paraît pas devoir être attribuée aux seules erreurs des observations; et je pense qu’une partie de cette différence vient de l'erreur de l'hypothèse de la coëxistence des oscillations, qui ne peut plusètre considérée comme très approchée, quand les ondula- tions, comme celles de la mer à Brest, sont considérables. L'in- tervalle moyen des marées est exactement la durée moyenne du jour lunaire, en sorte, que dans nos ports, il ÿ a autant de marées que de passages de la lune au méridien. On peut donc considérer le flux et le reflux de la mer, comme un phé- nomène lunaire, modifié par l'action solaire qui rend les intervalles des flux consécutifs , alternativement plus grands et plus petits que la durée d'un demi-jour lunaire, et les hauteurs des marées, alternativement plus petites et plus grandes que les hauteurs dues à l’action seule de la lune. 2, 12 !. J'ai considéré les syzigies équinoxiales suivantes : Des hauteurs des marées. MÉMOIRE 1807. 9mars; 23mars; S8avril; 2septembre; 16septembre; 1808. 12 27 » 10 » 4 » 20 » 1809: Na ie 31 mars 9 » 23 » 1810, 5 21 » 4avril 13 » 28 » 1811. 10 » 24 8 » 2 » 17 Û 1812: 101312; 28 » II 5 » 20 5 1813. 2.» 179 » Eve 10 » 24 » 1814. 6 » =21 » 4 » 13 » 29 » 1 octobre. 7 AS 9 » 12 » 2 » 5 » 10 » F3 te J'ai pris dans les syzigies, l'excès de la haute mer du soir sur la basse mer du matin , relatif au jour qui précède la sy- zigie au jour même de la syzigie et aux quatre jours qui la suivent. J'ai fait pour chaque année une somme des excès relatifs à chacun de ces jours , en doublant les résultats cor- respondants à la syzigie la plus voisine de l'équinoxe, et qui est la moyenne des trois syzigies considérées dans chaque équinoxe. J'ai obtenu ainsi les résultats suivants exprimés en metres. 1907: 44°,425; 1808..... 44, 740; 1809..... 44, 495; HOTON ES - 46, 366; LOFT 44, 205; TOT2 IREM 43, 210; 1813200 45, 317; 18 r 4270 44, 219; 497,020; 49, 155; 48, 530; 49, 910; 49; 030; 43, 448; 49, 071; 48, 651; Si l'on nomme /, f' 51,460; 51, 116; 5o, 910; 5r, 686; 51, 290; D, 1)1a; br, 043; bo, 553; 50",720; 51, 00; 51, 149; bo, 371; Dr, 110; 51, 530; 50, 797; bo, 707; 48",830; 48, 495; 49, 305; 48, 069; 48, 865; 49, 526; 49; 957; 48, 791; 44",070. 43, 910. 44, 910 42, 890 43, 825 45, 56x. 43, 264. 44, 708. F", S, S',f', les sommes des | ù : 1 SUR LE FLUX ET LE REFLUX DE LA MER. 13 hauteurs relatives à chacun des six jours, et que l'on repré- sente la loi de ces sommes par Ce +Ue+ ct", | é étant le temps écoulé depuis la haute marée du soir du jour qui précède la syzigie, l'intervalle de deux marées con- sécutives du soir étant pris pour unité; on aura les six équations de condition suivantes , : Cf; CHOC + Cf"; AE RS CE NES en gt+3t + =f"; ÈS AC EU > BD OC EU —A". Si l'on multiplie chacune de ces équations , respectivement par le coëfficient de, et que l’on fasse la somme de ces pro- duits ; si l’on fait des sommes semblables relativement aux coëfficiens de {! et de t/!, ces trois sommes formeront les équations suivantes 979-C+ 225 +55. L'=f + 4f"+0of"+16f"+25f"'; 22b.0+ 55.C'+15 C'=f'+2f" +3 + AE; 55415. GL fe PES AS ASE Ces équations donnent 112 ? gi SON SPP) EPST 57, 14 MÉMOIRE MT PAL AU Da ML ire 6 Fat Fais Maintenant on a , le mètre étant pris pour unité, 1990977; | F'=3091,815; f'=—=409,570; . f'—407,385; TS 30ù 638 TPE 6066: On trouve ainsi —— 8,9446; C=44r14; C'=— 356,828. ? = 2 ! " me €? J C £ L'expression t{°+CEt+{", ou dt. (rte) , des valeurs de f, f', etc., devient ainsi 411", 220—8",9446 . (é—2,46596):. Exprimons par £' la distance d’une haute marée du soir, à l'instant de la syzigie, £' étant supposé positif pour les marées qui suivent la sysigie; et représentons par «—6.t"° cette haute marée. La basse marée qui la précède sera, d'a- près la loi de la pesanteur universelle, —4+6. (a) ; l'exces de la haute mer sur la basse mer sera donc 6 ! 1° Le ns LE (e —3) “ Ainsi, en désignant par z le nombre des syzigies employées pour former les valeurs de f, f', etc., l'expression générale de ces valeurs sera 6 as 4 SUR LE FLUX ET LE REFLUX DE LA MER. 15 = Dia ie (#1 É (a) Désignons par # la valeur moyenne des quantités dont les syzigies ont précédé, dans les observations précédentes, les instants des hautes marées du soir des jours mêmes des sy- zigies; On aura Lt: +%. On a vu, dans le quatrième livre de la Mécanique céleste, qu'il faut diminuer #', d'une quantité constante que nous nommerons & ; la formule (a) devient ainsi 216 64 Cette formule doit coïncider avec celle-ci Dia—— 9216. CPE TE dE Su ce \ ee ALES ; (b) on a donc ATEUE ET ce qui donne u=—< + Ÿ En substituant les valeurs précédentes de &' et de {, on a u—1,34096 + k. Dans les syzigies précédentes, le retard journalier des marées a été 0Ï,026736, en sorte que l'intervalle pris pour unité est 1/,026736; on a ainsi, en parties du jour, 1,34096 — 1;,37682. 16 MÉMOIRE La valeur moyenne X, dont les syzigies ont précédé les ma- rées du soir, est oi,10417; on a ainsi u— 1;,48099. Cette valeur diffère peu de la valeur 1ri,50724 à laquelle je suis parvenu dans le n° 24 du liv. IV de la Mécanique céleste. La comparaison des expressions (a) et (b), donne 216—8,9446; oia— 411,359. Le nombre : des syzigies employées, est ici égal à 64, en comptant pour deux, les syzigies intermédiaires dont on a doublé les résultats. II. Pour que l’on puisse apprécier la régularité des résul- tats des observations des marées dans le port de Brest , je vais déterminer la loi de probabilité des erreurs dont la va- leur précédente de 276 est susceptible; et pour cela, je vais conclure cette valeur correspondante aux observations de chaque année. En désignant par f, f', f"', etc., les hauteurs précédentes relatives à chaque année, j'exprimerai, comme ci-dessus, la loi de ces hauteurs par la fonction &£° + t'e+ €". En déterminant ensuite la valeur de € par la méthode pré- cédente, on aura celle de 226; mais, comme le nombre des syzigies employées dans chaque année, n’est qu'un huitième du nombre des syzigies employées dans les huit années, il faut, pour comparer cette valeur de 276 à la précédente, la multiplier par huit. Je trouve ainsi : SUR LE FLUX ET LE REFLUX DE LA MER. 17 216 1807.......k. 9",15643 DÉCO EN de 8, 93343 LCL Bande 8, 43286 rATO REA NANE 8, 56071 VAT NN QNE PR 9, 62071 CD ADN 9; 46958 St (6 PME 9, 06900 TORAN UE LS 8, 26386 Le peu de différence de ces valeurs à leur moyenne 8,9446, montre la régularité des marées dans le port de Brest. Sui- vant la théorie que j'ai exposée dans le second livre de ma Théorie analytique des probabilités, si l’on nomme : la somme des quarrés des écarts de chacune de ces valeurs, de la moyenne, et » le nombre des années; la probabilité d’une erreur 4’ dans cette moyenne, sera proportionnelle à l’expo- nentielle € étant le nombre dont le logarithme hyperbolique est l’u- nité. Cette proportionnalité est d'autant plus exacte, que 7 est un plus grand nombre. Mais ici, ce nombre est égal à huit. Le nombre total des observations employées est beau- coup plus grand, et égal à 288 : car le nombre des syzigies employées dans chaque année, est six, et chaque syzigie a donné six observations. Ainsi l'erreur #!, de {, étant une fonction linéaire des erreurs de chaque observation; la pro- _ babilité de cette erreur sera, par le n° 20 de l'ouvrage cité, 27. ‘où pourra déterminer 4 par le même numéro, au moyen des . 1818. 3 proportionnelle à une exponentielle de la forme c 18 MÉMOIRE quarrés des erreurs de chaque observation. Mais on obtien- dra sa valeur d'une manière beaucoup plus simple, et suffi- samment exacte, par le procédé suivant. : Nommons a, a"), al), etc., les valeurs de £ relatives à chacune des huit années, et désignons par & la moyenne de ces valeurs, ou la valeur de {; w'! étant l'erreur de cette va- leur, celle de la valeur & sera b— a+ u': en supposant donc que l'erreur 7» des valeurs de a, al}, etc., soit propor- tionnelle à l'exponentielle LaerT ; la probabilité de l'erreur b—a + u' sera proportionnelle à NAT BE r\2 # k.(b-a+u') $ Elle sera donc égale à 71€ (b-a+u')* du'.V/r.C —k.(b-a+u')?. du'.Vr.C d l'intégrale du dénominateur étant prise depuis #'=— , jusqu'à u'—< ; ce qui donne|/# pour cette intégrale, + étant la demi-circonférence dont le rayon est l'unité. En effet, la somme de ces probabilités relatives à toutes les valeurs possibles de z' doit être l’unité. La probabilité de l'erreur b—a+u', est donc proportionnelle à —k (b-a+u') x. C Pareillement, b— at +4, est l'erreur de la valeur a, et la probabilité de cette erreur est proportionnelle à —k.(b-at pu") 2 VX, € SUR LE FLUX ET LE REFLUX DE LA MER. 19 et M de suite. La probabilité des érreurs simultanées, ba +u!, b—a+u!, etc., sera donc proportionnelle au pro- duit des probabilités de ces erreurs, produit égal à ë —k.((6—a+u) +(6—a0)+u) 4er.) k:.c ? ou à n —k((2—a) +(0—a0)+etc. )—n#u"? k:.c ; c La probabilité de 4 sera proportionnelle à l'intégrale de cette fonction multipliée par du, et intégrée depuis u'——, jusqu'à u' infini; en désignant donc par :, la somme des quarrés (b—a),(b—a)", etc., cette probabilité sera pro- portionnelle à La valeur de 4 qu’il faut choisir n’est pas, comme plusieurs géomètres le pensent, celle qui rend la fonction précédente, un maximum : elle est, comme je l'ai fait voir dans le n° 23 de ma Théorie analytique des probabilités, la moyenne des produits dé chaque valeur de # par sa probabilité ; cette va- leur est donc n+: 224 Finn 2j ER Pu| CLE les intégrales étant prises depuis —o, jusqu'à infini. L'in- tégrale du numérateur est n+1 PES ke n—1 TES ; — Mn T: EE fat, € 2€ 3: 20 MÉMOIRE et elle se réduit à son second terme. La valeur de FT n +1 2€ par ce qui précède, proportionnelle à |, faut choisir est donc : ainsi la probabilité de w' étant, —#knu!? , elle sera proportionnelle à —N.n +1 DR TU AT Re ue : € 2€ et par conséquent elle sera D PRE VASE 7 2€ 2e 5 Vr En prenant l'intégrale du numérateur dans des limites don- nées, on aura la probabilité que la valeur de a' sera com- prise dans ces limites. Dans le cas présent, on a 2—8, et e—1,6672. La probabilité d’une erreur 4! est done proportionnelle à —21,5931.u!? AOC / dur + Le coëfficient de —z'*, ou du quarré de l’er- reur, pris en moins, est ce que je nomme poids du résultat; parce que les mêmes erreurs devenant moins probables, lors- que ce poids augmente, le résultat pèse plus, si je puis ainsi dire, vers la vérité. Si l'on désigne par P ce coëfficient, et si l'on fait u'.L/P—+, la probabilité que l'erreur ' sera com- prise dans les limites + sera égale à T v’P af at.e ti ; WF? l'intégrale étant prise depuis # nul jusqu'à é—T. En formant SUR LE FLUX ET LE REFLUX DE LA MER. 21 donc une table des valeurs de cette formule, correspon- dantes aux diverses valeurs de T; on aura la probabilité que l'erreur du résultat sera comprise dans des limites don- nées. M. Kramp a formé une table des valeurs de l'intégrale Jur.s 7, prise depuis é—T jusqu’à f infini; il est facile d'en déduire celle dont je viens de parler. Je trouve ainsi 8 1°, / ? = _ pour la probabilité que l'erreur est comprise dans EU ne TT ORNS 6 Re: les limites +o”,5; et SR MPeUX la probabilité que cette er- reur est comprise dans les limites +0°,25. On déterminera facilement la probabilité des erreurs dont la valeur précédente de 224 est susceptible, en observant que cette valeur est très-peu différente de la somme des hauteurs des marées f, f', etc., divisée par six, et à laquelle on ajoute le sixième du produit de 226, par la somme des quarrés des fractions DA NS SA AUX FE po car le 2 2 2 2 2 2 maximum des marées, tombant à-peu-près au milieu de l'intervalle qui sépare les marées extrêmes, il est clair qu'en ajoutant à chacune des valeurs de /, /”, etc., le produit de 216 par le quarré de la fraction qui lui correspond , on aura six valeurs de 224; le sixième de la somme de ces six valeurs sera donc la valeur moyenne de 224. Cette valeur moyenne est ainsi le sixième de la somme des valeurs de f, f”, etc., plus le produit de 226 par ee De-là il est aisé de conclure que l'on aura la valeur très-approchée de 214, relative à chaque année, en multipliant par 1 +35 la somme des six hauteurs des marées qui lui sont relatives, et en ajoutant à 29 MÉMOIRE cette somme, le produit de È par la valeur précédente de 216, qui correspond à cette année. On trouve, de cette maniere, Da TOO MASTER ER 411",406. toto 0e AIO 410, 763. TOO EN Ce 410, 323. TSFOPPINE AL 410, 692. TOR Tee ee ee AT A0 TÉL eee M 4400. de) 3 ee Te 412, 383. TOLÆA: Alan 407, 607. La moyenne de ces valeurs est 4r1",209. La valeur de 2e est ici 50,1994 ; ce qui donne le poids P égal à 1,4344; en sorte que les erreurs également probables des valeurs de 276 et de 2z;, sont dans le rapport de 1 à 3,58. TITI. J'ai considéré de la même maniere les syzigies solsti- ciales suivantes : 1807. 6 juin; 2ojuim; juillet; 15 décembre; 29 décembre. 1808. 13janvier; Sjuin; 24juin; juillet; 3 décembre; 17 décembre. 1809. 1 5 LAtE > 27 » IT » 7 » 21 1810. 5 » 2 » 17 » ES 10 » 26 1811. 9 » 6 » 20 » 6 » 15 » 29 1812. 14 » 9 » 24 » 8 .» 4 » 18 1813. AUS 0 14 » 28 » 13 » 7 5 22 1814. CRE au Le 17 » 2 » II » 26 , 1815. 10 janvier. J'ai fait, comme ci-dessus, les sommes des excès des hautes marées du soir, sur les basses marées du matin, du jour qui SUR LE FLUX ET LE REFLUX DE LA MER. 23 précède la syzigie, du jour même de la syzigie, et des quatre jours qui la suivent, en doublant les résultats relatifs à la syzigie intermédiaire dans chaque solstice. J'ai obtenu ainsi les résultats suivants : 1807..... 41",030; 43,040; 1808..... 41, 365; 44, 260; 1809... .. 39, 762; 43, 180; SION 2: 41, 957; 45, 245; LOLr- 40, 695; 44, 163; 1812-41: 42, 059; 44, 690; TOR: 0, 41, 736; 44, 164; 1OE4.. : 40, 068; 43, 937; 44,745 ; 46, 075; 45, 620; 46, 574; 45, 559; 45, 927; 45, 822; 45, 782; 45,550; 45, 920; 46, 020;- 46, 676; 46, 111; 45, G42: 44, 860; 45, 276; 437,830; 44, 877; 44, 875; 44, 969; 45, 140; 43, 725; 43, 357; 43, 964; L'ensemble de ces hauteurs donne, en mètres, f—=328.672;. f'—=352,681; f'—366,104; F'—=366,065; f"—354,737; f—332,153. On trouve ainsi C——5,92730; t'—30,3086; t'—3928,630: 41,843. 42, 405. 41, 820. 49, 998. 43, 282. 40, 910. 39; 771: A1, 124, et l'expression générale Ge? +C't+C" des valeurs de f, f”, etc., devient ce qui donne 216—5,92730; 21a— 367,468. On a, comme dans le numéro précédent 367,375 — 5,92730.(t— 2,55670b )"; 24 MÉMOIRE ce qui donne ; u—1.,4517+À. Dans les syzigies des solstices, le retard journalier des ma- rées est 0/,028076; en sorte que l'intervalle pris pour unité, est ici 1/,028076. On a ainsi, en parties du jour, 1,4317—= 147193. Dans les syzigies précédentes, on a k—0/,14166; ce qui donne u—= 16136. Cette valeur de & surpasse un peu celle du numéro précé- dent, donnée par les syzigies équinoxiales. La différence des valeurs de £ indique, avec une extrème probabilité, l'influence des déclinaisons des astres sur cette valeur. Pour le faire voir, déterminons la probabilité des erreurs de € Les valeurs de {, multipliées par huit, sont pour chacune des huit années, 216 1807. re8miee 481214. LS OB ES Ne Liu 5, 46672. ISDO NL ee 6, G7o7r. HOMO EE lt ee 6, 92014. TOR Se Et. 5, 15686. ME ED DA 5, 69228. TOTALE 6, 10200. TOTAL 6, 59614. Le peu de différence de ces valeurs à la moyenne 5,927 est une nouvelle preuve de la régularité des marées dans le port de Brest. La somme des quarrés des différences de cha- cune de ces valeurs à la moyenne, est ici 4,1206. On trouve SUR LE FLUX ET LE REFLUX DE LA MER. 25 ainsi, par les formules du numéro précédent, la probabilité que l'erreur de la valeur moyenne est u', proportionnelle à —_8,7366.u'° C 2? ou le poids P de la valeur moyenne 5,927, égal à 8,7366; d’où l’on conclut la probabilité que l'erreur est comprise dans les limites Æ 1”, égale à 34524 345254 La probabilité qu'elle est comprise dans les limites + , est égale à Sn 26,32 27,32 Si l’on forme, d'après la méthode du numéro précédent, les valeurs de 274, d'année en année, on aura / 2t& 1807........, 360,"752. 18081 mL in. 369, 147. 1809......... 367, 325. TOO Die 375, 41. TORE. ete 368, 308. Le) CODE 367, 207. ISTd.. ee 364, o78. TBxASS AS AR 366, 106. La moyenne de ces valeurs est 367,354. La valeur de 2e est ici 230,322; ce qui donne le poids P égal à 0,31275 : ainsi les erreurs également probables dans les valeurs de 276 et de 254, sont ici dans le rapport de 1 à 5,2854. Dans les syzigies équinoxiales , la valeur moyenne de 256 1818. ; A 56 MÉMOIRE est, par ce qui précède, égale à 8,9446. Elle surpasse la précédente, de 3,073. Il est donc extrêmement probable que cette différence n’est point l'effet du hasard. Pour avoir cette probabilité, nous observerons que la probabilité d'une erreur 4' dans la valeur de 256 relative aux équinoxes, est proportionnelle à ec 205gprin là) et que la probabilité d’une erreur w' dans cette valeur relative aux solstices, est pa: 0 C4 . 4 1" ur AÉEuEE probabilité des erreurs simultanées u' et 4 2 \ . F Lez T2 2 1,2 est donc proportionnelle à l'exponentielle c By TUE en faisant P=5i,599151P1—=87966, Si l'on fait w"—u'—t, l'exponentielle précédente prendra cette forme P'e ik PP'i.r° P+-P' On aura une quantité proportionnelle à la probabilité de #, en multipliant cette exponentielle par du' et prenant l'in- tégrale depuis u'—— , jusqu'à w'— . Cette probabilité est donc proportionnelle à = PP! PP Le poids de la différence 3,01793, des valeurs moyennes de PP À i sie j psp qui devient 1ci 6,22985. On trouve ainsi la probabilité qüe l'erreur £ est hors des limites +3,0173, égale à une fraction dont le numérateur est l’'u- nité, et dont le dénominateur surpasse 4 suivi de vingt- 2:16 est donc SUR LE FLUX ET LE REFLUX DE LA MER. 27 einq Zéros. On ne peut donc pas douter que la différence observée entre les valeurs de 24€, relatives aux solstices et aux équinoxes, ne soit l'effet d’une cause spéciale qui dimi- nue cette valeur dans les solstices. La même cause est indiquée avec une probabilité plus grande encore par la différence des valeurs de 224, relatives aux équinoxes et aux solstices, différence égale à 43",855. Le poids de cette différence, par ce qui précède, est Pr: il devient, en substituant les valeurs de P et de P! relatives aux valeurs de 27%, 0,25675; d'où il suit que les erreurs également probables des différences relatives aux valeurs de 216, et de 274, sont entre elles comme tr à 4,9231. La diffé- rence observée 3m,or73 des valeurs de 276 répond ainsi à 15 mètres environ de différence entre les valeurs de 254, différence beaucoup moindre que la différence 43,855. La cause dont il s’agit est donc à-la-fois indiquée par les hau- teurs des marées dans les équinoxes et dans les solstices, et par les lois de leur variation, avec une extrême probabilité qui ne laisse aucun doute. On peut observer ici, que le poids précédent de la différence 43,855 , des valeurs moyennes de 21a, relatives aux syzigies des équinoxes et des solstices, est aussi le poids de leur somme, 778",563, comme il est fa- cile de le voir. On aura d’une manière plus approchée le ‘poids de la différence 43",855, en formant, pour chaque année, la différence des valeurs correspondantes de 274, re- latives aux équinoxes et aux solstices. Voici le tableau de cette différence : OO: ere oise cre te 50,654. RBOB Fat ee 41, 616. 1809.......... 42, 498 28 . MÉMOIRE xBTON EE 35, 281 GIE HO HAE 44, 185 DOC EU LE 46, 796 14: A ALAN I ES 48, 305 TOLA ele 41, 5or La moyenne de ces valeurs est 43",855. En formant la somme des quarrés des différences de cette moyenne à chacune de ces valeurs, on aura 2:— 361,390; ce qui donne le poids P de cette moyenne, égal à 0,22403. Il est un peu moindre que celui que nous venons de trouver; ce qui tient à ce que le nombre d'années, que nous avons considéré, n'est pas fort grand. En adoptant ce poids, on trouve que la probabilité d’une erreur égale à +3" ,9054, est inférieure à —;— 223,6 IV. J'ai considéré d’une manière à-peu-près semblable les quadratures équinoxiales suivantes : 1807. 1mars; 17mars; 3omars; septembre; 24septembre; 8octobre. 1808. 5 » 19 » 4avril; 13 » 26 » 12 » 1809. 8 » 24 » 7 » I : 16 » 1 » 1810. 13 » 28 » II » 6 » 20 » 5- » 1€) à OL TEL 17 » 31 mars; 9 » DEEE x 9 >» 1812 6 » 19 » 4avril; 13 » 27 » Ÿ 1e ba 1813. 9 » 25 » Tin 2 » 17 » 2 2 » 1814. 14 » 28 » 12 » 7 à 21 » 6 1» J'ai pris l'excès de la haute mer du matin, sur la basse mer du soir, relatif au jour même de la quadrature, et aux trois jours qui la suivent. Je n'ai pas considéré six jours, SUR LE FLUX ET LE REFLUX DE LA MER. 29 comme je l'ai fait relativement aux syzigies; parce que la variation des marées quadratures étant plus rapide que celle des marées syzigies, la loi de variation, proportionnelle au quarré du temps, ne pourrait pas sans erreur sensible com- prendre un intervalle de six jours. J'ai fait, pour chaque année, une somme des excès relatifs à chacun des quatre jours, en doublant les résultats relatifs à la quadrature intermédiaire des quadratures considérées dans chaque équi- noxe. J'ai obtenu ainsi les résultats suivants : 1807..... 25%,130; 20",100; 20",180; 26,106. 1808..... 26, 770; 20, 950; 20, 935; 26, 304. 1809..... 26, 130; 21, 400; 21, 130; 25, 280. 1810...,. 24, 432; 20, 584; 21, 715; 26, 858. 1811... 26, 055; 21, 440; 21, 1303 26, 185. 1812..... 26, 896; 21, oo; 20, 625; 26, 117. 1813..... 25, 437; 20, 341; 20, 682; 25, 917. CIC CPR 23, 808; 19, 707; 19, 930; 25, 944. Si l’on nomme f, f', f', f", les sommes des hauteurs rela- tives à chacun des quatre jours, et que l'on représente la loi de ces sommes par Ge +C'Eé+t"; t étant le temps écoulé depuis la haute marée du matin du jour de la quadrature, l'intervalle de deux marées quadra- tures du matin étant pris pour unité; on aura les quatre équations de condition suivantes : Cf; A if BL LS 4C+ C4 Cf"; 9C+3T' +=". 30 MÉMOIRE Si l'on multiplie chacune de ces équations, respectivement par leurs coëflicients de {, et que l'on fasse une somme de leurs produits; si l’on fait les sommes semblables, relative- ment aux coëfficients de {/ et de {’; ces trois sommes for-. meront les équations suivantes 98.6 + 36.0 + 14.0—=$f'+4f'+9f"; 36.t+14.0+6.€—f +2f'+3f"; TRUE TRE ET LE T LE NE Ces équations donnent ei Me © M 4 ’ QE GPS) PS AP)» FU ARE Not "WE 4 2 Maintenant on a f—=204"658; "166,022; ff 166" Bar; S"—207",71T ; ce qui donne t—20",008; t'——59",06086; ('—204",7649. L'expression {+ (!'£#+{", devient ainsi 161",162 + 20",005.(#—1,47635). (a) Nommons t' la distance d'une haute marée du matin, à l'instant de la quadrature, et représentons par «4+6.4?, cette haute marée. La basse mer qui la suit sera —a—6 (et +5). SUR LE FLUX ET LE REFLUX DE LA MER. 31 l'excès de la haute sur la basse mer sera donc 26 HU LENS 1 2u + 52 +26.(6 +3) (a!) Nommons 4’ la valeur moyenne des quantités dont les qua- dratures ont suivi les hautes marées du matin; et désignons, comme ci-dessus, par w la quantité dont le maximum et le minimum des marées suivent respectivement la syzigie et la quadrature; on aura Lt —k —u. La formule (&') devient, en la multipliant par le nombre À de quadratures re. 2ta + ne ais. (ex —U + 3) : Cette formule sera l'expression des valeurs de f, f', etc. En la comparant à la formule (a), on aura k'+ U—R= 147635 ; ce qui donne à u—1,60135—7". L'intervalle pris pour unité, est ici 1056223. En multi- pliant donc 1,60135 par RE ue, on aura 1/,6914. D'ail- leurs, la valeur de k' relative aux didräuRs précédentes est 0i,1937. On aura donc ainsi u— 1,,4977 ; c qui diffère peu de la valeur 1i,5378, donnée par l’en- semble des syzigies. On a ensuite 216— 20,00; 2ix— 160",850. 32 MÉMOIRE Déterminons présentement la probabilité de la valeur de {ou de 226 : ces valeurs, relatives à chacune des huit années, et multipliées par huit, sont 216 AO TER PINS er à 21%,912; 1 0fe E SET TU NO 22, 378; TOOL CE ar 17, 760 ; LOTO de Se et 17, 982; DO LT Nas 19, 340; UE 60 NO oE 19, 776; TOM n ls pure re 20, 662; FOLA EC 20, 230. La somme des quarrés des différences de ces valeurs à la moyenne 20,009 , est 19,3770; il est facile d’en conclure que le poids P de cette moyenne est 1,85787. le mètre étant pris pour unité d'erreur. On trouve ainsi la probabilité que l’er- reur de cette valeur moyenne est comprise dans les limites 17,55 18,5 prise dans les limites + 2”, est + 1° égale à : la probabilité que cette erreur est com- 8382 8383 On aura à-tres-peu-près la valeur de 274, en diminuant les valeurs de f, f', f', f'', respectivement du produit de 20,00 Il ss des fracti : PRET »009, par les quarrés des fractions —=, —:, :, :; ce qui donne 27: égal au quart de la somme de ces quatre va- Bar ee .. 5 leurs , diminuée du produit de 20,005 par Rren à 161°,173. De-là il est aisé de conclure que l’on aura la valeur fort appro- chée de 227 relative à chaque année, en faisant une somme des quatre valeurs de f, f', f", f',; correspondantes à l’an- , EN 5 née, en doublant cette somme, et en lui ajoutant 3 de la 1807. 13juin; 28juin; r2 juillet; 6 décemb. ; pepe 1808. 1809. 1810. 1817. 1812. 1813. 1814. 181. SUR LE FLUX ET LE REFLUX DE LA MER. , 33 ‘valeur de 266, AE à la même année. On formera ainsi le tableau suivant : On trouve ici 21æ 2007 ire 155®,642 1900 161; 946 18091... 165, 680 1810..... 4... 164, 700. Ve ALP ENALETA 165, 445. TO states 163, D46. FRS MER MEL 158, 925 et V BR Eee 153, 490 2e—303,812: le poids P de l'erreur de la valeur moyenne 161,173, est donc 0,23699 ; d'où il suit que les erreurs également probables des valeurs moyennes de 2:6, et de 274, sont dans le rapport de 1 à 2,60. V. J'ai considéré les quadratures solsticiales suivantes : bjanv.{ 2 » 9 » 5 » 12 » 10 » I » 13 » 6 » 2 » 9 » Ba 11juin; : 24 » 2 janv. 15] 20 23 29 16 21 ES I juillet; 10 » » AETE > 30 » 9 » » » 12 » » » I » ù II » » 5 » I » 1ojuillet; 4décemb.; 19 décemb. 24 29 19 22 25 14 30 décemb. J'ai pris, comme dans les quadratures précédentes , l'excès de la haute mer du matin sur la basse mer du soir, relati- 1818. 5 34 MÉMOIRE ‘vement au jour même de la syzigie, et aux trois jours qui la suivent. J'ai fait, pour chaque année, une somme des excès relatifs à chacun de ces jours , en doublant les résultats relatifs à la quadrature interniédiaire entre les quadratures considérées dans chaque solstice. J'ai obtenu ainsi les résul- tats suivants : 2807. 0 28,700; 26",495; 25 310; 277,190. TOO8 + 28,000 20700 Men 340 ETS ATOS 1809..:.. 28, 985; 26, 872; 2, 154; 26, 708. 18101-06020: 077548120,02175 0 00 CDD; 0128, 201 TOLL-.-. 20 9105 0 20, 408; 120, 1000 1128 00e 1012..... 28, 108; 95, 818; 9h, 820; ‘27, vire 1813.2-- 006, DS); 024,000 #26, 285; 028, 7600: 1814 5007, 20650 424; 431501 25; .44651L04:28, 1882 L'ensemble de ces hauteurs donne, en metres, f=227",560; f'=—200%,980; f'—20b",064; J”—222",106. D'où l’on tire 6—9",203; C'——29",3198; L'—227",4592. L'expression C£° + t'#+- {” devient ainsi 204",0917 + 9°,203.(#—1,929 ); ce qui donne 256—9",203; 21u—203m,948. On aura ensuite, comme dans le numéro précédent, k'+u—1,5976 + g' L'intervalle pris pour unité est ici 1/,04796; et la valeur de SUR LE FLUX ET LE REFLUX DE LA MER. 35 . è role d £ \ k! relative à ces marées quadratures , est 0/,20972; d’où l'on tire, pour Ja quantité w dont le minimum de la marée suit les quadratures solsticiales, u—1,5907. Les marées quadratures équinoxiales ont donné pour uw, 1,4977. Les marées syzigies équinoxiales ont donné 1i,4810; les marées syzigies solsticiales ont donné 1,6136. La moyenne de ces valeurs est u— 1,498. { L'ensemble des syzigies anciennes m'a donné, dans le. qua- trième livre de la Mécanique céleste, — 156445 ; la différence est insensible. Déterminons la probabilité de la valeur de { ou de 216. Ces valeurs relatives à chacune des huit années, et multi- pliées par huit, sont 216 ‘ 1807...,.-... . 8,100. . 1808... 9, 840 180g.:..--.... 7, 914 OO era (à 10, 412 site 0 MAICIPOIACITR 9, 740 TOR Ne lister 8, 362 TAPER IRIS 8, 2b2 MTS TA ere 11, 404. La somme des quarrés des différences de ces valeurs, à la moyenne 9,203,.est 12,6813. On trouve ainsi le poids P de la valeur moyenne, égal à 2,83882 ; d'où il.est aisé de con- pe JD. 30: :; MÉMOIRE clure la RropaBIRe qe l'erreur de cette valeur est comprise re La probabilité que cette 83 erreur est comprise dans les limites + 1°,5, est 2. 2840 On aura, à-tres-peu-pres, les valeurs de 214 par la mé- thode du numéro HEC J'ai formé ainsi le tableau suivant : Da 100 cet 205,195. TOOD ere 202, 040. ÉCOUTER 206, 226. TOLO 0 cac 208, 889 HA OS Ia UE 207, 393. relie) HA 204, 461. LOTO ee Lies 202, D13. TOLA eee 196, 657. La valeur moyenne est 204,171 : on 2 ici 2 :— 223,406; d'où l’on conclut le poids P de l'erreur moyenne, égal à 0,32228. Ainsi les erreurs également probables des valeurs de 276, et de 224, sont entre elles comme 1 à 2,9670. La différence moyenne des valeurs de 274, relative aux quadratures des solstices et des équinoxes ,est 42°,998. On trouvera, par ce qui précède, le poids P de cette différence, égal à 0,13656. C’est aussi le poids de la somme 365,345 de ces valeurs. De-là il suit que la probabilité d’une erreur né- gative, égale ou supérieure à + 2,5983, est / 1 11,4564 Maintenant, si l'on compare ces valeurs de 27%, leur diffé- rence montre avec évidence l'influence des déclinaisons des SUR LE FLUX ET LE REFLUX DE LA MER. . 35 astres sur ces marées. Cette influence est pareïllement indi: quée avec une extrême prealtlses par les valeurs de 256. Celle _ est relative aux marées quadratures équinoxiales s'élève à 20",005; tandis que la valeur relative aux marées quadratures solsticiales n’est que de 9",203. D’après la pro- babilité des erreurs de ces valeurs, déterminée ci-dessus, on voit qu'une erreur de neuf mètres dans chacune d’elles est invraisemblable , et qu'il est pe conséquent impossible de les faire coincider. Les valeurs de 274 et de 276, relatives aux marées syzigies et quadratures dans les équinoxes et dans les solstices, sont les résultats des observations, les plus propres à vérifier la théorie de ces phénomènes, fondée sur la loi de la pesan- teur universelle. Mais, avant que de les comparer à cette théorie, je vais les comparer avec les résultats semblables que j'ai dédüits, dans le quatrième livre de la Mécanique cé- leste, des observations faites à Brest un siècle auparavant. VIT. Les résultats de ces observations anciennes sont re- latifs à vingt-quatre syzigies et à vingt-quatre quadratures , tandis que ceux des observations modernes se rapportent à soixante-quatre syzigies et à soixante-quatre quadratures. Il faut donc. Pour comparer aux résultats anciens les résultats roue diminuer ceux-ci dans le rare de 3 à 8. On aura ainsi : ; OBSERVATIONS MODERNES, OBSERVATIONS ANCIENNES: - Syzigies équinoxiales. j 48.a—154,260.. ...... SE RE SA NUE INR PNA r50 290 48161 3234 mie, LADA EL ATLAS NES 3%,1623, 38 MÉMOIRE OBSERVATIONS MODERNES. OBSERVATIONS ANCIENNES. Syzigies solsticiales. À AB, Ta 7 Obn ee ce EN Tne Lena Edo Mo 132",371. 4070 — MMS MATE Nes eee ele LR re 1",9451. Ve ‘ Quadratures équinoxiales. À AS: 007,190 20e ADAM SEC AE 0 00000. 48.6—" 7",5019...............,............. 7":495. Quadratures solsticiales. ASE 70m 100 OUAIS SRE CO SON es 7b%,517. ABÈO = DD ADETE NE eee ee Lerrte el IMSTe ei TERT 3",4100. On voit, par l'inspection de ce tableau, que les résultats des observations modernes s'accordent avec ceux des obser- vations anciennes , aussi bien qu'on peut le desirer ; vu sur-tout la petite différence que doivent y produire les décli- naisons de la lune, plus grandes aux époques des anciennes observations, qu'aux époques des observations modernes. On voit encore que les valeurs de 274 indiqueraient des ma- rées plus fortes maintenant qu'au commencement du dernier siècle, d'environ un trente-quatrième ; si l'on était bien cer- tain de l’exactitude de la graduation de l'échelle qui a servi aux observations anciennes. VIII. Comparons maintenant les résultats des observa- tions, avec ceux de la théorie de la pesanteur universelle. J'ai donné, dans le quatrième livre de la Mécanique céleste, les formules nécessaires à cette comparaison ; mais je vais ici reprendre cet objet par une nouvelle analyse. Ma théorie : des marées, exposée dans le livre cité , repose sur ce prin- cipe, savoir, que l’état d’un système de corps, dans lequel SUR LE FLUX ET LE’REFLUX DE LA ME. 39 les conditions HAVE du mouvement ont disparu par les résistances qu'il éprouve ; est périodique comme les forces qui l'animent. Ce principe, combiné avec celui de la coëxis- tence des oscillations tres-petites, explique d’une manière singulièrement heureuse, tous les phénomènes des marées, indépendants des circonstances locales. Les forces produc- trices de ces phénomènes, relatives à l’action d’un astre L, sont, comme on le voit dans le n° 16 du liv. IV de la Méca- nique céleste, exprimées par les différences partielles de la fonction STE «ue + = Gite be Ar A ren (nt+o—Y)) ; (a) en désignant par L la masse de l'astre; par r sa distance au centre de la terre; par + sa déclinaison; par 4 son ascen- sion droite comptée de l'intersection de son orbite avec l'é- quateur, et par $ sa distance angulaire à cette intersection : nt+ est l'angle horaire de cette intersection , et 6 est la latitude du port. Soit : l'inclinaison de l'orbite à l'équateur, on aura, par les formules de la trigonométrie sphérique, Sin. V— SÛN. € . SÛR. @3 cos. ®. sin. —COS. :.51n.p; COS. V. COS.) —COS. y; 1 , T . cos? v—-+ (1+c05.°e)+ —" sin.*e.COs. 29; 2 2 . / COS ? D.SUR. 2% COS. €. SU. 29; 6 I . I cos.*v. cos. 24: sün.?e + + (1 + cos. *e). COS. 2 p. La formule (a) devient ainsi : 31e + —: 5277.10 .COs. 0. DAT : 4o ii SU XUMÉMOIRE 4 “cos. Bin. "et 2. sin. ) —*+ COS.* VU, sin." e+--- sin.°0. 42 fees sin w: se (1+cos € ? Nour ner : — «sin. (cos —=. sin.°0) : cos.2@ 2 a [sin.e.cos.e.sin. (nt+w) — sin. €. (2) «sin. (nt+w—20) sin, 6, (=): sin. (nt+ 0 + 20) ; AT ; ï jt cos“. 7° 008. (2nt4206—29) + sin. À. 3°: c08. (2nt+04+29) 3 Le 59072200; 0 s 4r° TRE 2 +=. sin.°e.cos. (2nt+20) 2 Si, comme nous l'avons fait, on ne considère dans les 6b- servations des marées, que l'excès d’une haute mér , sur l’une des deux basses mers voisines ; si, de plus, on prend'ces'ex- ces en nombre égal dans les syzigies et dans les quadratures des équinoxes du printemps et d'automne, et des solstices d'hyver et d'été; enfin, si, comme nous l'avons fait encore, pour détruire l'effet des variations de la parallaxe lunaire, on considère les trois syzigies ou. les trois quadratures les plus voisines de l'équinoxe ou du solstice, en doublant les observations relatives à la syzigie intermédiaire ; les résultats de l'observation ne dépendront que des inégalités relatives aux angles 271420, 2nt+26—29, 2n{t+20+ 20; iné- galités dont la période est d'environ un demi-jour , et dont les deux premières sont, dans nos ports, beaucoup plus grandes que toutes les autres inégalités des marées. 527.‘ Le est un coëfficient toujours très-petit dans les observations que nous avons considérées, et au milieu desquelles l’inclinaison de SUR BE FLUX ET LE REFLUX DE LA MER. 4x l'orbe lunaire à l'équateur, est parvenue à son ir um; On peut donc négliger le terme que ce coëfficient multiplie; et alors les flux partiels dont les périodes sont d'environ un demi-jour, dépendent des termes 3 L . sin.” si el re 0.cos.* Ù L' L Dans toutes ces équations, les valeurs 713 et = sont rela- tives aux moyennes distances de la lune et du soleil à la terre. Le système + (1) + (2) des ne précédentes, donne 778"1708—120,426277.1,022486.2 A". bte 117,893323. 2A.Ë US) Le système des équations + (3) +(4), donne 364",798=120,460155 .0,9775 14.2A". 75 —1 17:936626 ER 25 (6) De ces deux équations, on tire DA 74788; 2A.5—1",64658. ma 52 MÉMOIRE Le système des équations + (1)—(2), donne 43",891 —6,666885. 1,022486 ans +9,371611.2A 2 (A—B) A — 6,666885. 1,022486. 24 D). A! 937161 1.2 ‘As; le système des équations + (4)—(3) donne 43",098—6,534329.0,977514.2 A". +0,334342.2 A4 —6,534329.0,977514. JE 8) A —0,334342.2 ÉD. AS. ; L' L PA En substituant pour 2A'.+; et 2A. -3 leurs valeurs précé- dentes, l'équation (7) donne 3,9054—32,3653. ee LED + à b4GTE. = Léna (9) et l'équation (8) donne 2,5983— 30,3266. ÉD + 15,3697. 2. (to) Si l’on suppose A'—(1+x).B, xB sera l'accroissement de A" dù à la rapidité du mouvement de l'astre L' dans son or- : A'—B bite; alors on a Di ER A 1+7 erreur sensible, cet accroissement proportionnel à la vitesse angulaire mr»! de l'astre dans son orbite, et dans ce cas, - On peut supposer ici sans A—B=7 æ; ce qui donne A—B mx m —_—— — ——=—. A MI ME Nu? en négligeant le quarré de la petite fraction — On peut (7) (8) SUR LE FLUX ET LE REFLUX DE LA MER. 53 même supposer, sans erreur sensible, vu la petitesse de x, LAN D TE AT EE 20 de plus | + PRES == 00748. En ajoutant donc les équations (9) et (10), on aura | 401110; ce qui donne L ñ À 2B.-5—4",27279; L m 2B.=3—1",63289; et par conséquent On voit, par les équations (9) et (10), qu'une valeur positive de æ, peu différente de =, est à-la-fois indiquée par les ob- 9 | servations des marées syzigies et des marées quadratures. On aura d’une manière approchée la probabilité de l’exis- tence d’une valeur positive de x, en observant que si elle n'existait pas, l’erreur de la différence 43,891, des valeurs de 252, relatives aux syzigies des équinoxes et des solstices, serait 3,9054, ou au-dessus; et par le n° 3, sa probabilité est on L'erreur de la différence 43,098 des valeurs de 274 2 relatives aux quadratures des solstices et des équinoxes, se- rait 2,b983, ou au-dessus; et par le n° 5, sa probabilité est 54 MÉMOIRE __"_. La probabilité de l'existence simultanée de ces er- 11,464 É reurs est le produit des deux probabilités précédentes; elle est donc 7 , en sorte que la probabilité d’une valeur 562 2561 s1É1 Re . positive de +, est Ge Les observations anciennes des marées syzigies m'ont donné pour x, 0,10657. (Mécanique céleste, Liv. IV, n° 27.) Les observations anciennes des marées quadratures n'ont donné pour x, o,1061; ce qui diffère tres-peu de la valeur précédente de +, qui me semble préférable, à cause du plus grand nombre d'observations que nous venons d'employer. L'existence d'une valeur de x positive étant done à-la-fois prouvée par les observations anciennes et modernes, il me semble impossible de la révoquer en doute. Les observations anciennes m'ont donné L' 2AL 2A"3—4",6740; ss 1700 Ces valeurs différent peu des précédentes, 4",74788 et 1,64658. La somme des valeurs de 48.4 est 416,196 par les observations anciennes, et 430,825 par les observations modernes ; il faut donc, pour comparer les valeurs anciennes L' AL AL et modernes de 2 A3 et de En multiplier les valeurs 416,156 430,825 ? 4",5968, et 1",5905; mais les valeurs modernes étant fon- dées sur un plus grand nombre d'observations, elles doivent être préférées. modernes par la fraction ét alors elles deviennent L' L FLE ; Le rapport de +5 à -; est un élément important de LE SUR LE FLUX ET LE REFEUX DE LA MER. 55 , Ë TNT I x l'astronomie. Le rapport précédent donnes , pour le rap- port de la masse de la lune à celle de la terre ; il donne en- core, en secondes décimales, le coëfficient de la nutation, égal à 29',940; ce qui correspond à 9',70 en secondes sexa- gésimales. Newton a déterminé le rapport des actions du soleil et de la lune sur la mer, dans la proposition 37 du troisième livre des Principes mathématiques de la Philosophie na- turelle. Il suppose, d'apres. les observations de Sturmius, qu'aux jours des équinoxes, la marée, à Bristol , est de quinze pieds dans les quadratures, et de vingt-cinq pieds dans les syzigies ; et il en conclut que, dans les moyennes distances du soleil et de la lune à la terre, les actions de ces astres sur la mer sont dans le rapport de 1 à 4,4815. Pour déterminer ce rapport, Newton observe que le maximum des marées syzigies et le minimum des marées quadratures n’ont pas lieu les jours mêmes de ces phases, mais environ quarante- trois heures sexagésimales après leur arrivée. A ce moment, la lune s’est éloignée sensiblement du soleil ; ce qui, selon ce grand géomètre, doit affaiblir l’action solaire dans le rapport du cosinus du double de cette distance à l'unité. Mais cela n'est pas exact; et l’on a vu précédemment qu'il faut, pour avoir le maximum ou le minimum des marées, supposer cette distance nulle, comme au moment de la phase, et employer les déclinaisons des astres qui ont lieu à ce moment. C'est ce que Newton avait fait dans la première édition de son ou- vrage. Il a pensé, dans les deux éditions suivantes, qu'il obtiendrait plus d’exactitude en considérant les actions des astres à l'instant même de la marée. Ce n’est pas le seul 56: MÉMOIRE exemple des erreurs que l’on commet en cherchant à s'ap- procher de la vérité. VII. Considérons maintenant le coëfficient de 24€, Ce coëf- ficient, par ce qui précède, est dans les syzigies des équi- noxes, m'+ m za. (a+g g' SE m' (or re —m) 21 a+-a' AA se n—m (rt on peut faire disparaître le terme » 2a'.(m'—m)— mb (a—m).(a+a'+ 0") 424 rs —m)—2mbt. (a—m).(a+a'+40") ’ (æ) , en ob- servant que le retard journalier des marées syzigies est, à- (m'—m)— mb fort-peu-près ; CEE à en Q+a +)? comme on le verra dans - la suite. D'où il suit que, si l’on prend pour unité de temps, comme nous l'avons fait ci-dessus, l'intervalle de deux ma- rées sÿzigies d’un jour à l’autre, et si l'on désigne par v le mouvement synodique de la lune dans cet intervalle, la for- mule de la hauteur des marées deviendra pour le nombre # d'intervalles, à partir du maximum , 2 à’, CT [ f a+a+b PRE m +) m'—m ea. (y) Voyons maintenant comment on peut y faire entrer les ine- galités du mouvement lunaire. Si l’on développe, dans une série d’angles croissants proportionnellement au temps, la fonction L' 1 11 EDR 2: — 3: (cos. :'.cos.(ant+ 26—20") + -- sin." el. cos. (ant+ 20)) 7: 2 2 L "a + Du cos. 3° cos. (2n6+ 20—29) 1 L'OPULEUES : + a sn."e.cos. (2nt4+20 )} a * SUR LE FLUX ET LE REFLUX DE LA MER. 57 en désignant cette série par Bcos.(2nt+20)+b". cos. (ont+26—2mt)+ b"cos. (2nÉ+920—2m't) + 0” cos. (ant+20—2m"t) + etc.; chacun de ces termes produira un reflux partiel, dont la somme sera de la forme B.cos.(ant=2;) +a.cos.(ant—2m t— 21) + a’, cos. (snt—2m't—92v) +a”.cos. (ant—2m"t—91")+ etc. - Le plus grand flux possible à lieu lorsque tous les cosinus deviennent égaux à l'unité. Supposons qu'à partir de cet état, on ait nÉ—y—=ST +p; né—mi—)\—=ir+ng; né—m'i—y—1r+g'; etc. En réduisant en série l'expression précédente de la hauteur des marées, elle deviendra b+a+a! +a +etc.—2bp—2aq—92a!q'""—etc. La supposition d'une grande marée donne la différentielle de cette fonction, nulle; et par conséquent, Bp=—aq—a'q'—a"q"—etc., à cause de dp—=dq=dg'—etc.; toutes ces différentielles étant à-très-peu-près égales à 74. Maintenant les équations ] ù nE—y—=sr+p RÉ MEN ir +, 1818. 8 58 MÉMOIRE donnent (am) = MmsT (2—m ce g—P° Etes ds). — À + —— En faisant 2—s—5s", et déterminant y et de manière que —$ Pete = y soit nul, on aura, à-très-peu-près, MmsT AT SG à cause de la petitesse de m, relativement à ». On aura pa- reillement [xs m'sT PEIE eics et alors on aura ST (am+a'm'+a"m'"+etc. sx a Pr Pate ta tL'éc 0 nd? en exprimant par p' la quantité am<+a!m "+ete. b+at+a' +- etc. L'expression de la hauteur de la mer devient ainsi b+a+a'+etc.—2 (2): (op°+ a.(p'—m) + a'.(p'—m')+ ete. ): Considérons le terme } 04 2 2-3 cos.t—e!. cos. (2nt+20—29") de l'expression des forces perturbatrices. Soit X. sé. (lt—3"), une des inégalités de, qui devienne nulle constamment au moment des syzigies. En n'ayant égard qu’à cette inégalité, et négligeant le quarré de 2, le terme précédent devient SUR LE FLUX ET LE REFLUX DE LA MER. 59 cos. (2nt+2w—2m"'t) U L 2-73: COS.( = «À + h.cos. (ant+20—2m'tlt+3) |; —h.cos. (ant+20—2m't-lt—3) ce qui produit, dans l'expression de la hauteur de la mer, trois termes de la forme a. cos. (ant—2m!t—2\) +a!h'. cos. (ant—2m't—lt—21) —a'h'.cos:(ant—2m'é+lt—2x"). (oi) Ilen résulte, par ce qui précède, dans l'expression du maxi- mum de la marée, les trois termes a'+a'h'—a'h. het h" seraient égaux à k, si l'act:on des astres n’était point ac- crue par la rapidité de leur mouvement. Mais on a vu pré- cédemment que cette augmentation que nous avons dé- . » I . 34 Q , signée par æ, est - environ pour la lune; d’où ilsuit que l’on 9 » a à-fort-peu-près, en supposant, comme nous l'avons fait, l'accroissement proportionnel au mouvement de l’astre dans son orbite, u a'h=a'h+zx.a'h. a 27m : A a'k"=a'h—x.a!h. —, 2178 et qu’ainsi les trois termes a'+a'h—a'h se réduisent à fs a'+xah.— mr Le second terme de cette quantité peut être négligé sans er- reur sensible, relativement à l'argument de la variation. 8. 60 MÉMOIRE Les trois termes précédents produisent encore, dans l’ex- pression de la hauteur de la marée, la quantité 0 ! 1\2 lp! ! VAE, 7 : pes a'.(p RCE m 1) | ! Q — a". h". (p'—m'+ sh elle se réduit, à-très-peu-pres, à ? —2.(#). (a (PEER) a'h. ((p'—m")" 0) Ce dernier terme peut être négligé sans erreur sensible. D’ail- leurs, l'est l'accroissement de la vitesse angulaire de la lune, en vertu de l'argument 2.sen. ({é—5') Il suffit donc, pour avoir égard à cet argument, de prendre pour m', la vitesse angulaire de la lune, au moment de la syzigie. La valeur de.p' est am-+a'm'+a"m"+etc.. DEA Eu' ET a Er tetc er les trois termes (7) introduisent dans le numérateur de cette expression, les suivants, a'm'+a'h!. (m'+ : ) AE ee 1) = en substituant pour a! 2! et a" h", leurs valeurs précédentes, et négligeant +, ces trois termes se réduisent à &'m'+ a'hl; ce qui revient encore à prendre dans p', au lieu de #', la vitesse angulaire de la lune. De-là il suit que l'on aura égard à toutes les inégalités du mouvement 4’ de la lune dans son orbite, en supposant, * SUR LE FLUX ET LE REFLUX DE LA MER. 6x dans la formule (y), que v est le mouvement angulaire de cet astre pendant l'intervalle #. Considérons maintenant l'influence des variations de 7’, k A Lan Li MT —: cos. (lt— i et supposons que -;: cos. (/t—3") soit une des inégalités I Q . 4 de -;, ou de la parallaxe lunaire : il en résultera dans la fonction 1 L I ; are HE 01 one 2.3" COS." — e.Cos. (2nt+20—29"), les trois termes cos. (2nt+2w—2m't) ! a. cos4= el. {+2h.cos.(ant+20—2m't—lt+5) œ 2 + — 0”,497. Ainsi l'accroissement de l’action lunaire est encore indiqué par la comparaison des observations apogées et périgées lu- naires. Les observations anciennes que j'ai discutées dans le n° 28 du liv. IV de la Mécanique céleste, m’avaient paru indiquer le contraire. Mais j'avais pris pour 4x la somme 70 MÉMOIRE des marées des deux jours qui suivent la syzigie; et l’on voit, par ce qui précède, que cette somme est sensiblement plus petite que 4t«, dans les observations périgées où la dimi- nution des hauteurs des marées, à partir du maximum, est très-rapide et beaucoup plus grande que dans les observa- tions apogées. Il faut donc augmenter la différence 39",6667, des* marées syzigies apogées et périgées, donnée dans le n° cité; et, d'après les résultats précédents, cette augmen- tation est 1”,220. Alors on a, par le n° cité, = … 25",819—0",304 ; ce qui donne, pour x, une valeur positive; et ce qui indi- que, par conséquent , un accroissement dans l’action lunaire, dù aux circonstances locales. Mais toutes ces observations apo- gées et périgées sont trop peu nombreuses pour déterminer la valeur de x : il vaut beaucoup mieux employer, pour cet objet, les observations des équinoxes et des solstices. Peut- être aussi n'est-il pas tres-exact de supposer, comme nous le faisons, que l'accroissement de l’action d'un astre, dù aux circonstances locales, est proportionnel au mouvement de l'astre dans son orbite. Nous allons maintenant comparer à la théorie, la loi de diminution des marées, à mesure qu’elles s’éloignent de leur maximum dans l'apogée et dans le périgée de la lune. Con- sidérons d’abord l’apogée. Cette diminution est composée de deux parties ; la première est égale, par ce qui précède, à a'.(a+-b' en ARE v étant le mouvement réel de la lune dans l'intervalle d'une & SUR LE FLUX ET LE REFLUX DE LA MER. 71 marée syzigie à la marée correspondante du jour suivant. DES: L' I On aura a! en multipliant 2 A! =, . cos 1. «', par douze, et P 13 , r 2 1 par le cube du rapport du demi-diamètre lunaire dans les douze marées syzigies apogées précédentes, à son demi-diamètre moyen; et l'on peut prendre pour cos. Le!, le rapport de 2 : 7 ap'; p'et g' étant donnés par le n° 7. Il faut em- ployer pour » le mouvement de la lune dans cette syzigie apogée, pendant l'intervalle # qui est ici 1i,0227331, et qui devient 1i,0305744 dans les syzigies périgées. La seconde partie est due à la variation de la distance lu- naire, à partir de l'apogée, en ayant égard aux inégalités de l'équation du centre, de l'érection et de la variation. Cela posé, on trouve —0",8711, pour le coëfficient de #°. Un * Calcul semblable donne —2",9635 pour ce coëfficient dans les observations périgées. Les observations nous ont donné —0"96496 et —2",52748. La différence tient aux ér- reurs des observations et des approximations, et sur-tout à ce que, dans les observations précédentes, la lune n'était point exactement, soit à son périgée, soit à son apogée, Comme nous l'avons supposé dans le calcul. XI. Je vais présenter ici quelques réflexions sur l’accrois- sement de l’action respective des astres par les circonstances locales. Supposons que le port soit sitüé à la jonction de deux canaux qui lui transmettent le flux qui a lieu à leur em- bouchure. Soit A. cos. (2nt—9mt—0)) l'expression du flux transmis par le premier canal, et B.cos. (2nt—2mt—92v) le flux transmis par le second; le flux total dans le port sera exprimé par 72 MÉMOIRE C.cos. (an t—2mt—2Q), en faisant C=V/A ER +2AB.co (2X'—2)); Les Fos re 2) s » Les constantes À, B, x et} dépendent de l'intensité du flux aux embouchures des canaux, de la longueur et de la figure de ces canaux. Cependant, toutes choses égales d’ailleurs, À etB, et par conséquent C, sont proportionnels à la masse L de l’astre attirant : car, en doublant cette masse, on ne fait que réunir les deux flux partiels que produit chacune de ses moitiés. x et x relatifs à chacun de ces flux ont éga- lement lieu pour le flux total ; ils ne varient donc d'un astre à un autre, qu'à raison de la différence des mouvements propres de ces astres. Ces mouvements étant supposés fort petits par rapport au mouvement de rotation de la terre, il est naturel de faire x—(7—m)T ;—(n—m).T',TetT' étant les temps que les flux respectifs emploient à se trans- mettre des embouchures, au port; et de supposer, comme nous l'avons fait, l'accroissement de l’action de l’astre, dû aux circonstances locales, proportionnel à 7. Mais on voit que cela n’est pas rigoureux , en admettant même le prin- cipe de la coexistence des oscillations très-petites, principe qui, vu la grandeur des oscillations de la mer dans le port de Brest, ne leur est pas exactement applicable. Mais il ré- sulte de la précision avec laquelle les formules précédentes représentent les observations , que ces causes d'erreur sont peu considérables. - - ———— \ $GR LE FLUX ET LE REFLUX DE LA MER. 73 Des heures et des intervalles des marees. * XII. Pour déterminer les heures et les intervalles des ma- rées, j'ai considéré dans les syzigies que j'ai employées pré- cédemment pour leurs hauteurs, les heures des basses mers du matin ét des hautes mers du soir, des premiers et se- conds jours qui suivent ceux des syzigies, en doublant tou- jours les résultats relatifs à la syzigie la plus voisine de l'équi- noxe ou du solstice. J'ai fait une somme des heures relatives à chaque année; et en la divisant par huit, nombre des sy- zigies correspondantes, j'ai obtenu les résultats suivants. Les heures observées ont été comptées en temps vrai; mais il est facile de s'assurer que l'équation du temps disparaît des heures suivantes conclues de l’ensemble des syzigies. Syzigies des équinoxes. HEURE ACCROISSEMENT ANNÉES. | ourremier souR M PHRCRE PREMIER JOUR. | ACCROISSEMENT. après la syzigie. ‘au second jour. BASSE MER. HAUTE MÉR. 1807. 0i,41988; 0),027214......... 0i,67795; oi,026693. 1808. 0i,42769; 0i,025608......... oi,68442; 0i,023785. 1809. 0i,42418; 0i,025304......... 0i,67943; 0i,024523. 1810. 0i,43116; 0i,026997......... oi,68837; oi,02578r. 1811. 0i,42448; 0i,025347......... 0i,68125; oi,025000. 1812. oi,42873; oi,027691......... 0,68533; 0i,027604. 1813. oi,43611; oi,028559......... 0i,69262; 0i,0273 44. 1814. oi,428099 ; 0),027170......... oi,68551 ; 0i,026476. Moyennes de ces valeurs. 0i,42765 ; 0i,026736......... oi,68438; oi,o25g01. 1818. 10 74 ANNÉES. 1807. 1808. 1809. 1810. 1811. 1812. 1813. 1814. DU FREMIER JOUR MÉMOIRE Syzigies des solstices. HEURE ACCROISSEMENT DE L'HEURE après la syzigie. au second jour. BASSE MER. PREMIER JOUR. | ACCROISSEMENT. HAUTE MER. 0i,43255 ; oi,026953......... oï,68841; 0i,026736. 0i,42444; 01028942 ie ee aise o0i,68294 ; 0i,028212. 0i,42044 ; 0i,026693. ....... 0i,67769; 0i,02808 2. 0i,42930; 0i,028082, ....... oi,68646; oi,025694. 0i,42036; 0!,027908. ....... oi,67791 ; 0i,028038. 0i,42778; oi,028906. ....... 0,68620; oi,027604. 0,42813; 0,028819. ....... 0i,68498; 0i,028472. ‘0i,42153; 0i,028906. ....... oi,67830; 0i,028906. Moyennes de ces valeurs. à 0i,42556; 0i,028076. .…...... 0i,68286; oi,027718. QUADRATURES. J'ai considéré pareillement, dans les quadratures que j'ai employées pour les hauteurs, les heures des hautes mers du matin et des basses mers du soir, du premier et du second jour qui suivent la quadrature, en doublant encore les résul- tats relatifs à la quadrature la plus voisine de l'équinoxe ou du solstice : j'ai fait une somme des heures relatives à chaque année; et, en la divisant par le nombre des quadratures cor- respondantes, j'ai obtenu les résultats suivants : SUR LE FLUX ET LE REFLUX DE LA MER. Quadratures des équinoxes. HEURE ANNÉES. DU PREMIER JOUR après la quadrature. HAUTE MER. 1807. oi,3889; 0i,061675. ....... 0i,64948; 1808. oi,39891 ; 0i,056250. ....... oi,66441 ; 1809. 0i,39097; oj,055035. ....... oi,65417; 1810. 0i,40278; 0i,057118. ....... 0i,66563 ; 18r1. 0i,39058; oi,054080. ....... 0i,65655 ; 1812. oi,38941; oi,053038. ....... 0i,65148; 1813, 0i,40439; 0i,052439. ....... 0i,66658 ; 1814. 0i,39792; 0i,060156. ....... 0i,65981; .. Moyennes de ces valeurs. oi,30511; 0i,056223. ....... oi,65851; Quadratures des solstices. ; HEURE ACCROISSEMENT ANNÉES. | pu PREMIER JOUR DE L'HEURE après la quadrature. au second jour. . HAUTE MER. 1807. 0!,40469; 0!,0)02T. ....... 0:,66806 ; 1808. oi,40004 ; 0i,047129. ....... 0i,66693 ; 1800. 0/,39470; 0i,045269. ....... 0i,65816; 1810. oi,40360; 0i,048437. ....... oi,66641 ; 1811. oi,40147; 0i,044097. ....... oi,66220; 18712. 0i,40312; 0i,049633. ....... 0i,66545 ; 1813. 0i,41398; 0i,047483. ....... 0i,67596; 1814. 0!,41059; 0i,051042: ....... 0i,67352; Moyennes de ces valeurs. 0i,40402 ; 0i,047960. ....... 0,66709 ; ACCROISSEMRNT DE L'HEURE au second jour. PREMIER JOUR. |[ACCROISSEMENT. BASSE MER. 0i,063021. oi,054123. oi,057248. oi,057639. oi,053689. 0i,054774. 0i,053212. 0i,0637 15. 0i,057178. PREMIER JOUR. | ACCROISSEMENT. BASSE MER. 0i,048611. 0i,044924. 0i,04513g. 0i,047396: - oi,046137. oi,050347. 0i,047396. 0,049132. 0i,047385. 10. 76 MÉMOIRE XIIL. L'ensemble des observations syzigies donne, en pre- nant un milieu entre les retards journaliers des hautes et basses mers, 00271075 pour le retard journalier moyen. Les observations anciennes m'ont donné dans le liv. IV de la Mécanique céleste, 0/,027052, pour ce retard ; ce qui s’ac- corde aussi bien qu'on peut le desirer. Les observations précédentes donnent o0',42660, pour l'heure de la basse mer du matin du jour qui suit la syzigie. L'heure de la basse mer du matin du jour de la syzigie est donc 0i,39949. Dans ces observations, la syzigie a précédé la haute mer du soir, de 0/,1229; elle a donc suivi la basse mer du matin, de 0;,1339. De-là il est facile de conclure que si la syzigie arrivait au moment de la basse mer du matin, l'heure de cette basse mer ferait oi,40312. Il résulte da n° 35 du liv. IV de la Mécanique céleste, que, par les observa- tions anciennes , cette heure est 0,39826. La différence 486" me paraît tenir à ce que la méridienne dont on fit usage dans ces observations, n'était point exacte. Elle était d’a- bord en erreur de 17. On corrigea cette erreur ; mais il ÿ a lieu de croire qu’on en laissa subsister une partie; ce qui va être confirmé par les observations des quadratures. L'ensemble des observations précédentes donne 0',0521865 pour le retard journalier des marées quadratures. Les ob- servations anciennes m'ayaient donné, pour ce retard, 0/,052067; ce qui s'accorde à-très-peu-près. Les observa- tions précédentes donnent 0/,66280 pour l’heure de la basse mer du jour qui suit la quadrature; ce qui donne 0/,61061 pour l'heure de la basse mer du soir du jour de la quadrature,. La haute mer du matin de ce jour a précédé, par le n°6, la quadrature, de o',20171; ct elle a précédé la basse mer du SUR LE FLUX ET LE REFLUX DE LA MER. 7 soir, de o,25+-.0,0521865. La quadrature a donc pré- cédé la basse mer du soir, de 0i,06134. De-là il est facile de conclure que l’heure de cette basse mer serait 0 60741, si elle coïncidait avec la quadrature. Dans les observations anciennes, cette même heure était 060226. La différence est 415”, au lieu de 486", que donnent les observations anciennes. Il n’est donc pas douteux que la différence entre les heures des observations modernes et des observations anciennes tient à l'inexactitude de la méridienne dont on fit usage dans les observations anciennes : car, dans les obser- vations modernes, le temps a été déterminé avec soin par des observations astronomiques. L'effet des déclinaisons des astres sur les retards journa- liers des marées est sensible dans la comparaison de ces re- tards vers les équinoxes et vers les solstices. En prenant un milieu entre les retards des hautes et des basses mers, le retard moyen a été oi,026318 dans les syzigies précédentes des équinoxes , et 0i,027897, dans les syzigies des solstices. Les observations anciennes m'avaient donné 0,025503 ; 0',028600. Pour déterminer la probabilité avec laquelle l'influence des déclinaisons est indiquée par les observations modernes, j'ai considéré les retards des hautes et des basses mers, dans les syzigies équinoxiales de chaque année, et je les ai com- parées au retard moyen 0026318. J'ai pris le qanre de chaque différence; ce qui m'a donné seize quarrés dont la somme est ce que nous avons désigné par : dans le n° 2. La probabilité d’une erreur x du résultat moyen est, par le nu- méro cité, proportionnelle à —n.(r+4-1 ne PER er [a 2€ 78 MÉMOIRE n est ici égal à seize. En supposant que x exprime un nombre de minutes décimales ou de millièmes du jour, j'ai trouvé que l'exponentielle précédente devient Mort 5,2403.u j En considérant de la même manière les retards observés dans les syzigies des solstices, j'ai trouvé la probabilité d’une erreur 4’ du retard moyen 0i,027897, proportionnelle à ce D97814u À, de-là j'ai conclu, par la méthode du n° 3, la probabilité que la valeur de w' surpassera w de la différence 1/,579, des deux retards 27,897 et 26',318, égale à la fraction MIT d'où il suit que l'influence des déclinaisons est indiquée par cette différence, avec une probabilité de 25497 contre l'unité. Cette probabilité, déja fort grande, le devient beaucoup plus par la comparaison des observations des marées des quadratures. En faisant sur les retards de ces marées dans les équinoxes, le même calcul que je viens de présenter sur les retards des marées des syzigies, j'ai trouvé la probabilité d'une erreur de 4” de minutes dans le retard moyen, pro- portionnelle à ce 267910.4" 5 et, relativement aux marées quadratures des solstices, j'ai trouvé la probabilité d’une erreur de #” de minutes, pro- portionnelle à ra ç 7 9593.u SUR LE FLUX ET LE REFLUX DE LA MER. 79 Le retard moyen des marées quadratures équinoxiales est 56/,700; et celui des marées quadratures solsticiales , est 471,673. Leur différence est 9027. J'en conclus qu'il y a plus de 8.10" à parier contre un, que cette différence est l'effet des déclinaisons des astres. Les observations syzigies précédentes donnent 068362 pour l'heure moyenne de la haute mer du soir du jour de la syzigie. Elles donnent 0i,,2660 pour l'heure moyenne de la basse mer du même jour ; en sorte que l'excès de la première sur la seconde est 025700. Cet excès doit être égal à un quart de jour, plus un quart du retard journalier des marées SyZi- gies ; retard qui, par ce qui précède , est 0!,0271075. L'excès dont il s’agit doit donc être 020678; ce qui ne diffère que de 22” de l'excès observé. Pareillement, les observations qua- dratures précédentes donnent 066280 pour l'heure moyenne des basses mers du soir du jour de la quadrature, et 0/,39956 pour l'heure moyenne des hautes mers du même jour. Cet excès doit être oi,25 plus le quart de 0i,0521865, retard moyen journalier des marées quadratures. Il doit donc être 0i,26305 ; ce qui ne diffère que de 19" du retard observé. Les différences 22" et 19" sont dans les limites des erreurs des observations. Leur petitesse prouve que la mer emploie le même temps à monter qu'à descendre. Les observations anciennes m'avaient paru indiquer le temps de l'ascension un peu plus petit qué celui de la descente ; mais il paraît que cela tient aux erreurs des observations anciennes. L'heure moyenne de la haute mer du soir qui suit la sy- zigie, a été, dans les observations précédentes, 0i.68362. En lui ajoutant un demi- jour plus un demi-retard journa- lier des marées syzigies, retard égal à 00271675, on aura 80 MÉMOIRE 0,19717 pour l'heure de la haute mer du matin du secona jour qui suit la syzigie. La haute mer du soir du jour de la syzigie a suivi, dans ces observations, la syzigie de 01229; la haute mer du matin du second jour après la sy- zigie, a donc suivi la syzigie de 0i,1229 + 5. 1,0271075, ou de 1,66356. En nommant w, l'intervalle dont le maximum des hautes mers suit la syzigie, on aura l'instant de ce maxi- mum;, en ajoutant à l'heure de la haute mer du matin du second jour après la syzigie, la quantité (u— 166356). 0/,0271075. Cette heure est donc (u— 1i,66356 ). 0,027 1075 + 0i,19717. L'heure de la basse mer du jour qui suit la quadrature a été, dans les observations précédentes, 0i,66280. En lui ajoutant 0,5 + =-0;,0521865, on aura 0/,18889 pour l'heure de la basse mer du matin du second jour apres la quadra- ture. La haute mer du matin du jour de la quadrature a précédé de oi,20171 la quadrature dans les observations pré- cédentes ; elle a donc suivi la basse mer du soir de oi,06134,. En lui ajoutant 0,5 +%.0,0521865, on aura 163962 pour le temps dont la quadrature a précédé la basse mer du ma- tin du second jour après la quadrature. Pour avoir l'heure de cette basse mer, lorsqu'elle correspond au maximum des basses mers quadratures, il faut lui ajouter (u— 1i,63962 y oi,0521865 ; on a donc cette heure égale à (u—1i,63962 )- 0i,0521865 + oi, 18880. SUR LE FLUX ET LE REFLUX DE LA MER. 81 À cette heure, la marée solaire est à son maximum, comme dans le maximum des hautes mers syzigies : les deux heures du maximum des basses mers quadratures, et du maximum des hautes mers syzigies doivent donc être égales; ce qui donne (u— 1i,66356 *0,0271075 + 0i,19717 = (u—1i,63062 ) -0,0b21865 + oi 8889 ; d'où l’on tire u—1i,94466. Les hauteurs des marées nous ont donné, dans le n° 7, u—1;,5458. La différence me paraît trop considérable pour être attribuée aux seules erreurs des observations; elle in- dique une anticipation dans l'heure des marées quadratures, relativement à celle des marées syzigies. En supposant cette anticipation de 10'; les deux valeurs de w, déduites des heures et des hauteurs des marées, seraient, à-fort-peu-près, les mêmes. Les marées anciennes m’avaient donné cette an- ticipation, égale à 8'- dans le n° 39 du liv. IV de la Mé- canique céleste. Je l'attribuais aux légers écarts de la suppo- sition, que les deux flux partiels solaire et lunaire se super- posent l’un à l’autre, comme ils se disposeraient séparément sur la surface du niveau de la mer. Je ne vois encore main- tenant aucune autre cause de cette anticipation. XIV. Je vais maintenant comparer les résultats précédents, à la théorie. Pour cela, je reprends l'expression de la hau- teur des marées, que j'ai donnée dans le n° 8: 1818. TI 82 MÉMOIRE A. à. cos. Le. FES on De + - =B. 3. Sin e.Cos. (2nt—27) ! L + A" cons. se cos. ne + - =B. = sin? <'. cos. (a2nt—27') Dans les plus hautes marées syzigies ou quadratures des équinoxes ou des solstices, les cosinus de cette expression sont à-peu-près égaux à Er. Je suppose que T soit le temps de la plus haute marée syzigie équinoxiale, et que 1i“+T+Q soit le temps de la plus haute marée du jour suivant, en sorte que Q soit le retard journalier de la marée syzigie équi- noxiale. La différentielle de la fonction (o) prise par rap- port au temps #, étant nulle au moment de la hante mer; si l'on différencie cette fonction, en y faisant d’abord t=T, et ensuite é—1""+T+Q; si l'on observe ensuite que (2—m).1"%=27, 2r étant la circonférence dont le rayon est l'unité, on aura, par l'ensemble des marées, (tam). (m'—m).a—nmbt). pionr LE (r—m) 'E a+(n—m')".a+n"0 ? a, a' et b' étant ce que nous avons désigné par ces lettres dans le n°8, et se rapportant à l'ensemble des marées sy- zigies équinoxiales. Nous avons donné dans le n° 9, le moyen de les obtenir numériquement. Pour réduire plus facilement en nombres Ja formule précédente, je lui donne cette forme très-approchée, ==mN\ al | m'—m LENS (2a!-oia) Q—= n #4) "are "a n—m 2ia |‘ FI î (#) SUR LE FLUX ET LE REFLUX DE LA MER. 83 On a dans les syzigies, Q—292",313; et en ayant égard à la variation, 27 0,033863. LA Dans les syzigies des équinoxes, 2ta—/411",350; ce qui donne Q—0i,024924. Les observations nous ont donné Q—0i,026318. Mais cette dernière valeur de Q est exprimée en temps vrai, ét, dans les équinoxes, le jour moyen surpasse le jour vrai, de 0000218; ce qui réduit la valeur observée de Q à 0026100. La différence 0i,001176 est dans les limites des erreurs, soit des observations, soit des suppositions sur les- quelles le calcul est fondé. Dans les syzigies des solstices, 4! est négatif, et l’on a 2iu—307",468 ; ce qui donne Q—0i,028063. Les observations donnent, en temps vrai, Q—0i,027897 ; mais, dans les solstices, le jour vrai surpasse le jour moyer d'environ 0i,000238: ce qui donne 0;,028135 pour cette va- leur de Q réduite en temps moyen. L’excès de la valeur cal- culée n'est que 0,000072; ce qui est insensible. HIT 84 MÉMOIRE Dans les quadratures, LEE m a a'==259"5080 ; dans les quadratures des équinoxes 21a— 100",890; ce qui donne Q—0i,062300. Les observations réduites en temps moyen, donnent Q—0i,056/462. La différence 0',005838 est dans les limites des erreurs des observations et des suppositions du calcul; ce que l’on verra si l'on considère que, par le n° r2, le poids de Q, ou le coëfficient du quarré de ses erreurs possibles, pris négative- ment dans l'exponentielle qui représente leur probabilité, est tres-petit. Dans les quadratures des solstices, 214—202",048 ; ce qui donne . + Q—0i,0/88 12. Les observations réduites au temps moyen donnent Q—oi,04791r. La différence 0,000904, est dans les limites des erreurs des observations. XV. Considérons maintenant les variations des inter- valles des marées, dues aux variations de la parallaxe lu- naire. Pour cela, j'ai pris les heures des basses mers du matin et des hautes mers du soir, des jours des syzigies pé- SUR LE FLUX ET LE REFLUX DE LA MER. 8 rigées du n° 10, et je les ai retranchées des heures corres- pondantes des troisièmes jours qui suivent ces syzigies. J'ai fait une somme de toutes ces différences, et je l'ai divisée par 72 : car il y a douze syzigies, et chaque syzigie produit trois retards journaliers relatifs aux basses mers ,'et trois semblables retards relatifs aux hautes mers. J'ai trouvé ainsi 0i,0305744 pour les retards journaliers des marées syzigies périgées. Un calcul semblable fait sur les marées syzigies apôgées du même numéro, m'a donné 0/,0227331, pour le retard journalier correspondant des mêmes marées. On voit donc que ce retard augmente et diminue avec la parallaxe lunaire. Le demi-diamètre moyen apparent de la lune était 3094",65 dans les syzigies périgées, et 2734",57 dans les sy- Zigies apogées. Ainsi l'accroissement du retard journalier dû à une minute d’accroissement dans le demi-diamètre lunaire apparent a été 217",76. Les observations anciennes m’avaient donné 258" pour cet accroissement; mais elles se rappor- taient à des syzigies , tant équinoxiales que solsticiales. 11 faut donc, pour ramener l'accroissement observé 217,76, à l'accroissement moyen, le diviser par le quarré du cosinus de l’inclinaison de l'orbe lunaire à l'équateur dans les obser- vations précédentes ; ce qui donne 231”,77 pour cet accrois- sement. En le fixant par un milieu à 245", on sera fort près de la vérité, Je trouve dans les syzigies apogées précédentes, a'—45",658. | En ayant égard aux arguments de la variation, de l’évection, et à l'équation du centre, je trouve = m'—m — 0,029569. T1— mm - 86 y MÉMOIRE On a, de plus, 2 a —=65",982. La formule (f) donne ainsi Q —0i,020590. Les observations donnent | . Q—o0i,02273r. La différence 2,143 est dans les limites des erreurs, soit des observations, soit des suppositions employées dans le calcul. Dans les syzigies périgées précédentes, je trouve a'—66",405 ; nm — 0,039493; on a, de plus, 21a— 88" 497. La formule (f) donne ainsi Q—0i,029983. Les observations donnent Q— 0i,0305744. La différence est presque insensible. XVI. L'expression de Q, donnée dans le n° 11, peut servir à déterminer le rapport des actions de la lune et du soleil sur la mer, soit par les retards journaliers des marées syzigies, soit par ceux des marées quadratures. Elle donne, à très-peu-près, Q. a : mr n— mm m2 mm, m.b' (m'—m) Ce À | n—m oem n—m SUR LE FLUX ET LE REFLUX DE LA MER. 87 Si l’on nomme Q' ce que devient Q dans les syzigies solsti- ciales, cette équation subsistera en y changeant Q en Q' et en y faisant b' négatif; ce qui donne n— Im A — 1m Q!. (a+ DIE par (m'—m) LR? 2mb' mm } mb! L (m'—m) ——. a+ — 7 ri, ( FRERE n— 1m n— mm A — 1m Le réunissant ces deux équations, et négligeant le terme x (Q—Q), à raison de la petitesse de »,64' et Q'—Q, on aura (Q+Q).(a+a 200), a1) —(Q—Q) # . LUE, APR Rae 2) SANS Co n— In n— mm Nommons R la fraction L 2 A0 73 ou le rapport des actions lunaires et solaires sur l'Océan dans les syzigies ; l'équation précédente donnera par le n° 8, A'—B Fan en négligeant les termes de l’ordre (Q'—Q)./’. (@+Q'). (T4 mr at) ) —(Q'—Q).(1—0) +9). R) =. (rpg). à d’où l'on tire 88 MÉMOIRE (Q+ Q'). (P+9) (Q'—Q). (P—9) ; (am) (m'—m ) j (pag ): n— m He 10) —(Q+Q"). (Lee) EE) +(Q'—0Q). [EE n—1m R— Pour réduire cette valeur de R à la moyenne distance de la lune à la terre, il faut, par le n° 8, la diviser par 1,022486. On a, par le numéro précédent, en temps moyen, Q—oi,026100; Q'— 0i,028135. De plus, en ayant égard à l'argument de la variation m'—m —0,03/45239. N— Im En employant les valeurs précédentes de p, g, p' et g', on trouve pour la valeur de R, dans les moyennes distances du soleil et de la lune, RS 197708: On pourra encore déterminer la valeur de R, par les inter- valles des marées quadratures, en observant que la formule q ; q (z) s'étend à ces marées, pourvu que l'on change les signes du dénominateur, et p, q, p'et g',enp,, q,, p,, etg,. On | a alors (P, +39, (p,—9) k (Q+Q). 240 + (Q—0Q"). PL 7 (on Green P—7 2 (O0 Re Cm) (1-0 6 Ur TR n— 1m SUR LE FLUX ET LE RETLUX DE LA MER. 89 ici l'on a, par le numéro précédent, Q— oi,05646:2 ; Q'— oi,047911. En ayant égard à l'argument de la variation, on a UE 00331808. De plus, pour réduire la valeur de R, à la moyenne distance de la lune à la terre, il faut diviser la valeur que donne la formule précédente, par 0,977514. On trouve ainsi, par les intervalles des marées quadratures, . R—3,11826. Cette valeur diffère peu de la précédente. Leur milieu donne R— 3,14782. Les hauteurs des marées donnent, par le n° 7, k R—2,88347; la moyenne de ces trois valeurs di hi R—3,05970 ; ce qui coïncide à-fort-peu-près avec la valeur 3, que j'ai trouvée pour R dans le quatrième volume de la Mécanique céleste. L'ensemble des hauteurs des marées syzigies et quadra- tures nous a donné, dans le n° 7, AE Cp ME TS dE MIO: En adoptant la valeur moyenne de R donnée par les inter- 1818. 12 90 MÉMOIRE SUR LE FLUX ET LEREFLUX DE LA MER. valles des marées, on a L GA 2ÂA.-3—1",b083r. Le second membre de l'équation (5) du n° 7 serait par-là di- minué de 16" environ, et le second membre de l'équation (6) serait augmenté de la même quantité. Il faudrait supposer une erreur de 16" dans chacun des premiers membres de ces équations, qui sont donnés par les observations. Cette erreur est peu vraisemblable, et il me paraît naturel‘d'en rejeter au moins une partie, sur l'hypothèse de la coëxistence des oscillations très-petites, hypothèse qui cesse d’avoir lieu quand les oscillations sont considérables. REMARQUE. Dans les applications que je viens de faire du calcul des probabilités aux phénomènes des marées, j'ai déterminé la constante que la loi inconnue des erreurs des observations partielles introduit dans ce calcul, par les dif- férences du résultat moyen aux résultats semblables donnés par les obser2 vations de chaque année. Le petit nombre des années que j'ai considérées, rend incertaine la valeur de cette constante. On l’obtiendrait plus exacte- ment, en déterminant les résultats semblables, par l'ensemble des obser- vations des.deux syzigies correspondantes vers chaque équinoxe, ou vers chaque solstice; ce qui donnerait trois résultats pour chaque année, et par conséquent vingt-quatre résultats pour les huit années. Il faudrait, de plus, corriger les résultats, de l'effet du mouvement des nœuds de l'orbe lunaire, effet donné par les formules précédentes de la théorie. Mais mon objet a été moins d'avoir exactement la probabilité des résultats, que de constater qu'ils indiquent avec une extrême probabilité, l'influence des dé- clinaisons des astres : les formules de probabilité auxquelles je suis par- venu, remplissent parfaitement cet objet. Ù LR tt tt tte tt tata MÉMOIRE Sur les inondations souterraines auxquelles sont exposés périodiquement plusieurs quartiers de Paris ; n.… Lu à l'Académie royale des Sciences, le 15 juin 1818, Par M. GIRARD. : Lx s’est manifesté, depuis quelques mois, dans les quartiers septentrionaux de Paris, une crue d'eàu souterraine qui à produit l'inondation d’un assez grand nombre de caves , et qui s’est répandue sur la superficie de quelques marais situés au - dessous de l'hôpital Saint-Louis, entre le faubourg du Temple. et le faubourg Saint - Martin. Les opérations auxquelles j'ai eu occasion dé me livrer pour établir un système général! de distribution d'eaux pu- bliques, m'ayant conduit à recueillir sur le relief des divers quartiers de Paris des détails importants, sans la connais- sance desquels il est impossible d’assigner la véritable cause de l'accident dont il s’agit, j'ai pensé qu'il serait utile de donner quelque publicité à ces détails, et d'ajouter ainsi quelque chose à ce que M.Buache a publié dans nos anciens 12. 92 SUR LES INONDATIONS SOUTERRAINES Mémoires (1) sur la topographie et la constitution physique du sol de cette capitale. La ville de Paris est couverte au nord par les hauteurs de Charonne, de Mesnil-montant, de Belleville, de Mont- martre et du Roule; ces éminences contiguëés forment une espèce d'enceinte presque demi-circulaire que la Seine tra- verse diamétralement. Le terrain compris dans cet espace est un attérissement dans l'étendue duquel la ville s’est ac- crue par degrés, à partir des bords de la rivière jusqu’au pied des collines dont il vient d’être fait mention. Antérieurement aux premiers établissements qui se firent sur la rive septentrionale de la Seine, ses bords, exhaussés par des dépôts périodiques d’alluvions , présentaient, ainsi qu'on l’observe par-tout ailleurs dans des localités sem- blables , une sorte de bourrelet plus élevé que le reste de la plaine; les décombres qui s’accumulèrent dans l'enceinte de la capitale, à mesure qu’elle s’étendit, éleverent de plus en plus’ cette digue, et il se forma naturellement entre elle, et les collines de Charonne , de Belleville, de Montmartre et du Roule, un bas-fond assez prononcé, parallèle à la direc- tion de ces collines. Ce bas-fond recevait les eaux pluviales qui tombaient dans la vallée, et celles qui descendaient des monticules dont elle était entourée. Ces eaux rassemblées entretenaient un ruis- seau qui coulait de l’est au sud-ouest, à partir du coteau de Mesnil-montant jusqu’au pied de la butte de Chaillot , au- delà de l'emplacement actuel de la Savonnerie. La direction de ce ruisseau est indiquée sur un plan que j'ai publié en (1) Mémoires de l'Académie des scieñces. An 1741 et 1742. DE PLUSIEURS QUARTIERS DE PARIS. 95 1812, et qui est destiné à représenter les enceintes succes- sives de Paris , ainsi que le relief du terram sur lequel cette ville est bâtie. (1) \ Nous avons dit que les bords de la Seine s'étant exhaussés de plus en plus, par l'effet naturel des alluvions et des dépôts de décombres, le sol de la ville se trouvait incliné vers le nord. On conserva cette pente générale à la plupart de ses rues, lorsqu'elles furent pavées pour la première fois. Les eaux pluviales qu’elles’ recevaient furent conduites hors de l'enceinte fortifiée par des arceaux que l’on pratiqua à tra- vers ses murs; elles s'écoulaient ensuite au moyen de rigoles qui débouchaient dans le ruisseau de Mesnil -montant , lequel étant ainsi devenu le réceptacle naturel de ces eaux, recut le nom de 2rand égout découvert, par opposition avec quelques-uns de ceux que l’on avait pratiqués dans la ville et que l’on avait recouverts de voûtes. Ce grand égout était encore , au commencement du siècle dernier, un simple fossé creûsé en pleine terre dans les marais des faubourgs du Temple, Saint-Martin ; Saint- Denis, Montmartre et Saint-Honoré : on le voit indiqué sur les anciens plans de Paris, depuis le plus ancien de tous; qui appartenait à l'abbaye Saint-Victor, et que l’on fait re- monter au règne de Charles IX, jusqu’à celui connu sous le nom de plan Turgot, parce qu'il fut dressé sous la prévôté de ce magistrat, de 1734 à 1739. Ces plans montrent que lon traversait cet égout découvert, ou fossé, au moyen de (x) Recherches sur les eaux publiques de Paris, les distributions qui en ont été faites, et les divers projets qui ont été proposés pour en aug- menter le velume. (Paris, 1812.) 94 SUR LES INONDATIONS SOUTERRAINES « ponts de maconnerie qui avaient été construits dans toutes les grandes rues des faubourgs. Tant que les choses subsisterent en cet état, le fossé Jen il s’agit, creusé de près de deux mètres au-dessous du sol des marais, ne recevait pas seulement les égouts de la ville qui y débouchaient en différents points en coulant du midi au nord ; mais il recevait encore les eaux pluviales qui s'y rendaient des hauteurs de Belleville, de, Montmartre, etc., en coulant du nord au midi; ainsi tous les marais qu'il par- courait , quoique inférieurs au sol de Paris , se trouvaient naturellement desséchés, quelle que füt la fréquence des pluies , soit par infiltrations à travers les berges en terre de cet égout, soit au moyen de saignées superficielles que l'on y faisait aboutir au besoin. Les quartiers du Louvre , de Saint-Honoré et de la butte Saint-Roch, ayant été couverts de nouveaux hôtels pendant la régence, l’on reconnut la nécessité de reculer les limites de la ville; et il parut convenable de les porter au-delà du rempart entre la rue d'Anjou de la Ville-l'Évêque , et le fau- bourg Montmartre : on accorda quelques priviléges à ceux quivoudraient s’y établir; mais le voisinage du grand égout en aurait éloigné les habitants que l'on voulait y attirer, si on l'avait laissé dans l’état où il se trouvait. On ordonna en conséquence, en 1721, de le recreuser dans toute sa lon- sueur , et de le revêtir de murs; mais ces dispositions res- térent sans exécution jusqu'en 1737, époque à laquelle la ville entreprit ces ouvrages, qui furent terminés en 1740. (1) (1) Le grand égout suit les rues des Fossés-du-Temple, Neuve-Saint- Nicolas, Neuve-Saint-Jean, des Petites-Ecuries, Richer, de Provence, DE PLUSIEURS QUARTIERS DE PARIS. 9 Il ne suffisait pas d’avoir redressé le grand égout, d'en avoir pavé le fond, et d'en avoir revêtu les parois de ma- connerie, afin de procurer un écoulement facile aux eaux bourbeuses qu’il recevait ; il convenait encore de le nettoyer par des lavages fréquents : c'est à ce dessein que l’on établit à son origine, vis-à-vis la rue des Filles-du-Calvaire, un vaste réservoir qui pouvait contenir environ vingt-deux mille muids d’eau; outre le produit entier des sources de Belleville que l’on y avait conduites. Il recevait encore les eaux que l'on tirait de deux puits creusés dans“la même enceinte, et temps à autre on lâchait ces eaux dans le grand égout par des bondes pratiquées convenablement au fond de ce réservoir. Ces lavages fréquemment répétés produisirent d'heureux résultats dont les mémoires du temps font men- tion. Bientôt on put s'établir sur les bords de cet ancien cloaque, sans avoir à craindre aucune exhalaison dangereuse. Les quartiers du faubourg Montmartre, de la chaussée d’An- tin, de la Ville-l'Évèque, et du faubourg Saint-Honoré, se peuplérent; enfin le terrain devint si précieux dans ces diffé- rents quartiers, que les propriétaires riverains du grand égout demanderentiet obtimrent la permission de le couvrir d’une voûte construite à leurs frais. Mais, comme après l'exé- cution de cette voûte les inconvénients attachés à la sta- gnation des immondices cessèrent d’être apparents, on se persuada qu'ils n'existaient plus ; et l’on cessa d'employer au Saint-Nicolas ; il traverse ensuite des propriétés particulières dans le quartier de la Ville-l’Evêque; de là il suit la rue d’Angoulème , traverse l'avenue de Neuilly, et vient se jeter dans la Seine, sous le quai de Billy à Chaïllot. 96 SUR LES INONDATIONS SOUTERRAINES lavage du grand égout les eaux qui avaient été rassemblées, à cet effet, dans le réservoir établi à son origine. * Nous avons rappelé cet établissement dû sur-tout à la prévoyance de M. Turgot; parce que c’est aux améliorations que la salubrité publique en retira, qu'on .doit attribuer la nouvelle extension que prit la ville de Paris, vers la fin du siècle dernier, dans les terrains de la Grange-Batelière, des Porcherons, de la Ville-l Évèque et du Roule; extension par saite de laquelle les anciens. marais de ces quartiers se sont transformés en jardins d'agrément, dont la plupart ont été exhaussés par des terres rapportées, pour les mettre à-peu- près de niveau avec les rues adjacentes, car ces rues forment toutes, comme on sait, des chaussées plus ou moins élevées au-dessus du sol naturel de la plaine. Ce que nous venons de rapporter des divers changements faits au grand égout, suffit pour rendre facile à concevoir ce qui dut arriver, et ce qui arriva en effet, lorsqu'à une simple tranchée creusée jusques alors en pleine terre et dans laquelle s'étaient rendues les eaux pluviales qui descen- daient des hauteurs voisines de Paris, on eut substitué un aquéduc voüté, en saillie de plusieurs mètres au-dessus du terrain. Ces eaux, lorsqu'elles tombaient abondamment, devaient être arrêtées par cette espèce de digue, et demeu- rer stagnantes sur le sol pendant un temps plus ou moins long, jusqu'à ce qu’elles se perdissent par une infiltration lente, ou qu’elles se dissipassent par l’évaporation. Les rues nouvelles dont ces marais furent entrecoupés, ajoutèrent, par leur élévation au-dessus du terrain, de nou- veaux obstacles au libre écoulement des eaux pluviales, et divisèrent ces marais en plusieurs compartiments qui DE PLUSIEURS QUARTIERS DE PARIS. 97 auraient été exposés à des submersions périodiques, s'ils n'eussent point été exhaussés par les décharges publiques qui y ont été transportées à mesure que Paris s’est étendu de ce côté; cet accroissement a été si rapide, qu'à l'excep- tion des marais du faubourg Saint-Martin, et de quelques- uns que l'on voit encore le long de la rue de la Pépinière, tout l’espace compris entre la Villette et la butte Montmartre, d'un côté, et les anciens boulevards de l’autre, est aujour: d’hui remblayé. Mais ces remblais n’ont influé ni sur les intempéries des saisons, ni sur la nature du terrain primitif. Il est arrivé seulement que là où ils ont été faits, les eaux de pluies ex- traordinaires qui descendent des monticules voisins, au lieu de se montrer à découvert à leur pied, sont venues plus lentement, en suivant les couches imperméables qui les ar- rêtent, exhausser la nappe souterraine par laquelle les puits sont entretenus, et submerger le fond de la plupart des caves, qui sont creusées au-dessous du niveau de cette nappe; et il convient d'observer ici que cet effet doit se ma- nifester non-seulement au nord du grand égout, mais encore dans les quartiers situés entre cet égout et la Seine, attendu que la terre cultivable des marais le long desquels cet égout se prolonge, ne repose point sur des couches de la même nature qui soient perméables au même degré. Dans les marais de Popincourt, par exemple, dans ceux du quartier Montmartre, de la chaussée d’Antin et du fau- bourg Saint-Honoré, on trouve au-dessous de la terre végé- tale, un banc de sable ou de gravier semblable à celui de la Seine; ce banc, dont l'épaisseur est en quelques endroits de plusieurs mètres, s'appuie sur une couche de glaise imper- 1818. 13 98 SUR LES INONDATIONS SOUTERRAINES méable, ou quelquefois immédiatement sur une couche de marne tres-compacte, prolongement incliné de celle qui sert de base aux masses de plâtre de Belleville et de Montmartre. C'est entre ce banc de gravier et ces couches de glaise ou de marne, que s'établit le niveau de la nappe ordinaire des puits; nappe que les eaux pluviales ne peuvent atteindre qu'après avoir traversé d'abord la couche superficielle de terre végétale, et ensuite les bancs plus ou moins épais de sable ou de gravier que cette terre végétale recouvre. Dars quelques autres parties de marais, et notamment entre les rues des faubourgs du Temple et Saint-Martin, des deux côtés de la rue Grange-aux-Belles, on ne trouve point de bancs de sable sous la terre cultivable, et quoiqu'’elle n'ait que cinquante à soixante centimètres d'épaisseur , elle re- pose immédiatement sur un tuf marneux, tout-à-fait impéné- trable à l'eau, de sorte que les eaux sourcillent presque à la surface du sol, pour peu que les pluies aient été abondantes, et qu'elles soient retenues dans cet espace. La fondation du grand égout n'a donc point été établie sur un terrain homogène dans toute sa longueur : ici cette fondation pénètre un massif de marne; là, et c’est presque par-tout, le dallage de cet égout est établi, comme celui des aquéducs et des galeries de l'intérieur de Paris, sur le banc de sable ou de gravier à travers lequel les eaux sourcillent: il résulte de cette disposition, que les eaux pluviales qui descendent du nord de cette ville dans la vallée de la Seine, peuvent en quelques endroits filtrer à travers ces couches sablonneuses, non-seulement au-dessous des remblais dont la terre végétale a été recouverte dans l'emplacement des nouveaux quartiers, mais encore passer au-dessous des fon- dations du grand égout, en traversant le banc de gravier DE PLUSIEURS QUARTIERS DE PARIS. 99 sur lequel il est fondé, et venir entre cet égout et la Seine inonder des caves qui, jusques à l'établissement de cet ouvrage, tel qu’il existe aujourd'hui, semblaient avoir été à l'abri d’un pareil accident. Voilà les phénomènes naturels dont une connaissance attentive de la topographie de Paris fournirait l'explication, quand même on n’y aurait point été déja conduit par l'ob- servation de plusieurs faits ; or il est digne de remarque que l'occasion de recueillir des observations à ce sujet se présenta dès 1740, c’est-à-dire l’année même où l’on acheva de revêtir le grand égout de murs de maçonnerie. Les dé- sastres occasionnés par l'inondation extraordinaire de cette année, ont laissé de longs souvenirs. M. Buache de l’Aca- démie des sciences, et M. Bonami de l'Académie des inscrip- tions, nous ont transmis les détails de ces désastres (1); ils remarquent tous les deux qu'après l'inondation superficielle des quartiers voisins de la rivière, deux inondations souter- raines se manifestèrent successivement dans les caves voi- sines des quais , et dans des caves qui en étaient fort éloi- gnées. La première de ces inondations fut occasionnée par les eaux de la rivière, qui s'infiltrèrent à travers les ter- rains qui la bordent à des distances inégales, selon le plus ou moins de perméabilité de ces terrains. On s’en aperçut dans les quartiers Saint-Honoré, Saint-Denis, Saint-Martin, et du Marais, dès la fin de 1740, quinze jours après que la rivière eut commencé à s’enfler. Les caves se vidèrent na- turellement à mesure qu’elle baissa; mais quand elle fut des- (x) Mémoires de l'Académie des sciences, pour 1741; Mémoires de l'Académie des inscriptions, tom. xvir, pag. 675. 4 13. 100 SUR LES INONDATIONS SOUTERRAINES cendue à sa hauteur ordinaire, c’est-à-dire vers le commen- cement d'avril, il y eut une seconde inondation souterraine qui se manifesta d’abord dans les caves les plus éloignées de la rivière. Cette marche des eaux, inverse de celle qui avait suivi la premiere inondation souterraine, fit conclure à MM. Buache et Bonami, que la seconde submersion des caves était due aux pluies qui avaient précédemmeut abreuvé la terre, et qui en s’écoulant à la Seine, leur réceptacle na- turel, remplissaient les diverses cavités qu’elles trouvaient sur leur chemin; fait d'autant moins étonnant, suivant le témoignage de M. Bonami, qu'à la même époque les caves du château de Mesnil-montant se trouvèrent également rem- plies d'eau , quoique situées sur une haute sommité, par rap- port au niveau de Paris. * L'inondation des caves de Paris observée en 1740 se re- produisit avec des circonstances bien plus graves en 1788. Aux mois d'avril et de mai, elles se trouverent tellement remplies d'eau en plusieurs quartiers, que tous les habi- tants s'en plaignirent aux diverses autorités du temps. Les mémoires que l’on présenta au prévôt des marchands, au ministre du département de Paris, au premier président du parlement, furent renvoyés au bureau de la ville(1), qui chargea ses architectes, ainsi que les inspecteurs des bâti- ments et des fontaines, d'éclairer son opinion sur les causes de cette calamité et sur les moyens d'y porter remède. M. Perronet, premier ingénieur des ponts-et-chaussées, et (1) Ces réclamations, et toutes les pièces qui y sont relatives, se re- trouvent aujourd'hui, avec les papiers de l'ancien greffe de l'hôtel-de- ville, déposées aux archives du royaume, et à celles de la préfecture de police, DE PLUSIEURS QUARTIERS DE PARIS. 101 membre de l’Académie des sciences, fut aussi consulté à ce sujet par le prévôt des marchands. Le rapport de ce pre- mier ingénieur, en date du 28 avril 1788, est appuyé d'un procès-verbal constatant que l’inondation souterraine dont on se plaignait s'était étendue, de part et d'autre, du grand égout dans les quartiers de Popincourt, du Marais, du, Temple, Saint-Martin, Saint-Denis, Saint-Honoré, et de la chaussée d'Antin, etc. (1) 2 Le bureau de la ville, après avoir reçu les divers rensei- gnements qu'il avait provoqués, publia, le 13 juin de la même année, une ordonnance relative à cette inondation, et qui rappelle avec beaucoup de détails les causes diverses auxquelles elle était alors attribuée. (2) Plusieurs de ceux dont elle avait excité les réclamations, s'appuyant sur une sorte de rumeur publique, prétendaient qu'elle étai: due à des filtrations d’eau provenant des grands réservoirs de la pompe à feu de Chaillot, lesquels avaient été établis, comme on sait, depuis peu d’années , au sommet (1) Ce procès-verbal, en date du 27 avril 1788, est dressé par M. le Sage , inspecteur de l'école des ponts-et-chaussées ; et par MM. Re- gnard et Feraudy, qui étaient alors élèves de cette école. 11 porte que la submersion des caves s’étendait dans les rues de Mesnil-montant, des Gravilliers, Jean-Robert, Saint-Martin, de la Chaussée-d'Antin, Neuve- des-Mathurins, Boudreau ,. Thiroux, de Provence , Chantereine, Tait- bout, d'Artois, Saint-Georges, Saint-Lazare et Coquenard. (2) Cette ordonnance du bureau de la ville: indique que l'inondation souterraine s’étendait dans les quartiers de la chaussée-d'Antin, du fau- bourg Montmartre, du faubourg Poissonnière, des faubourgs Saint-Denis et Saint-Martin , et dans les rues adjacentes ; dans les rues de Nazareth, du Temple; et des Fossés-du-Temple, dans les rues de Richelieu et Montor-: gueil. Elle indique encore que le niveau de l’eau dans les caves inondées était à-très-peu-près le même que celui des puits voisins. 102 SUR LES INONDATIONS SOUTERRAINES d'une colline élevée de quarante mètres environ au-dessus des basses eaux de la Seine. Ils prétendaient que ces filtra- tions avaient lieu obliquement à travers des terres sablon- neuses, et qu'elles se répandaient dans les caves des maisons de Paris. D’autres attribuaient la submersion de ces caves à des ruptures de conduites posées dans les rues. Enfin, et beaucoup de personnes se réunissaient à cet avis, on pensait que cette inondation des cäves provenait des eaux des mon- ticules et des plateaux élevés dont Paris est couvert du côté du uord. On savait depuis long-temps que les bassins de Chaillot étaient parfaitement étanches, et l’on se fut bientôt assuré que les caves étaient inondées, dans un grand nombre de rues sous le pavé desquelles il n’y avait jamais eu de con- duites posées (1); ces deux causes de l'inondation se trou- vant, par ces motifs, écartées de la recherche qu'on avait à faire, il ne restait à examiner que l'opinion de ceux qui attribuaient cet accident à quatorze mois de pluies consécu- tives, dont le produit, après avoir pénétré jusqu’à la couche imperméable de glaise ou de marne sur laquelle reposent les couches superficielles des montagnes de Mesnil-montant, de Belleville et de Montmartre, filtrait lentement sur la surface (1) « Dans les rues Grange-aux-Belles, de Lancry, Beaurepaire, du « Bout-du-Monde, Neuve-Saint-Jean , des Marais, Neuve-Saint-Laurent, « du Vert-Bois, Neuve-Saint-Martin, du Pont-aux-Biches, de la Croix, « des Fontaines, Frépillon, Jean-Robert, aux Ours, de la grande Truan- « derie, Grange- Batelière, Saint-Sauveur, de l'Égout - Saint-Martin, « la Pologne, le marché Saint-Martin, il n’y a pas une seule conduite « des tuyaux de Chaillot, et cependant il y a de l'eau dans les caves - de ces rues. » ( Ordonnance du bureau de la ville, du 13 juin 1788, pag. 10.) DE PLUSIEURS QUARTIERS DE PARIS. 103 de cette couche imperméable, suivant les inclinaisons va- riées delle présente , et remplissait successivement les caves qui se trouvaient creusées au-dessous du plan de cette nappe. M. Perronet, en adoptant cette opinion dans le rapport qui vient d’être cité, en donne pour motif non pas tant l'abon- dance des pluies, que leur continuité et l'humidité de l’atmo- sphère qui en fut la suite. Il observe, au surplus, que ce n'était pas seulement à l’intérieur de Paris que ces submer- sions souterraines s'étaient mamifestées ; qu'on en était égale- ment incommodé dans des campagnes voisines, et notam- ment près de Champigny, à Draveil, et à Montfermeil, où l'on trouvait l'eau à six pouces seulement au-dessous de la surface du terrain. . Pour a pprécier convenablement le degré de confiance que mérite cette explication, il nous reste à comparer à l’année moyenne les deux années qui précédèrent immédiatement 1788, en les considérant sous le rapport de la hauteur d’eau de ae qui tomba pendant leur durée, et sur-tout sous le rapport de la continuité avec laquelle cette intempérie se manifesta. Or, suivant l'annuaire du bureau des longitudes, la hau- teur d’eau qui tombe année moyenne à Paris est de 53 cen- timètres (1). Il résulte aussi d'observations faites sur dix années consécutives. , que le nombre moyen annuel des jours de pluie est de cent quarante-deux. (2) LU LR AA OR RP EL es à Vi. mL 0 RSI (1) Annuaire du bureau des longitudes, pour l'année 18r6. (2) Voici le tableau des jours de pluie pendant chacune des dix der- nières années ; 104 SUR LES INONDATIONS SOUTERRAINES D'un autre côté, remontant à 1786, je trouve dans le ta- bleau météorologique dressé pour cette année, par M: Cas- sini, que la hauteur d’eau tombée fut de 64 centimètres, et qu'il y eut cent cinquante-six jours de pluie. (1) Je trouve également qu'en 1787, la hauteur d’eau tombée fut de 6o centimetres, et le nombre de jours de pluie de cent soixante-huit. (2) Ainsi il demeure constant que pendant les deux années qui précédèrent l'inondation des caves de 1788, la quantité de pluie qui tomba à Paris fut, àstres-peu-près, d'un cinquième 2 D ant LL Ve Re PER à 132 jours. FOOD ere OR LL ioic IE 140 LRTO NET Mae false eraerthe ee 131 NS SOON CN 143 ROEAUR slaseea)er nes 133 LL HA NS Er PE TO cr 151 TL Peer Ta re RES e US ‘ 122 MO MDE oe ed etre tee 1Ât NO ES oh DE DATE UE 167 LOT ete einer ere 158 Total des jours de pluie pendant dix ans. 1418 (1) Nous comptons ensemble les jours de pluie et les jours de neige. Le nombre des jours de pluie fut de.... 134 Celui des jours de neige fut de.......... 29 La hauteur d’eau tombée fut de 23r° 5lis — 0".6336. (Mémoires de l’Académie des sciences , pour l’année 1786, pag. 331.) (2) Le nombre des jours de pluie fut de....:...... 159 Celui des jours de neige fut de.......... 9 l'ont 168 La hauteur d'eau tombée fut de 22° —0=595r. (Mémoires de l Académie des sciences pour l’année 1787, pag. 18.) DE PLUSIEURS QUARTIERS DE PARIS. 105 plus forte que celle qui y tombe année commune, et que le nombre des jours de pluie surpassa d’un septième ce nom- bre de jours observé dans les années ordinaires. Cette surabondance d'eaux pluviales en 1786 et 1787, et les obstacles que diverses constructions, dont nous avons parlé, opposaient au pied des sommités de Belleville, de Montmartre et du Roule, à leur écoulement libre sur la surface du sol, foûrnissaient, comme on voit, une explica- tion simple de l'écoulement souterrain qu’elles avaient été obligées de prendre; et il ne paraît pas qu'il ait été fait, dans le temps, aucune objection plausible contre cette ex- plication. _ Malheureusement, l'expérience d’une génération est pres- que toujours perdue pour la génération suivante; et, comme il s'est écoulé trente ans depuis l’inondation souterraine de 1768, il n’est point étonnant que ce qui arrive aujourd'hui soit regardé comme,une calamité d’une espèce nouvelle. (1) - Si l'on se rappelle, d’ailleurs, que la submersion des caves en 1788 fut attribuée, par un grand nombre de personnes, aux filtrations qui avaient lieu à travers le fond et les parois des réservoirs de la pompe à feu établis depuis quelques années sur la montagne de Chaillot, on ne sera point étonné que l’inondation souterraine qui s’est manifestée dernière- (x) Les caves des quartiers septentrionaux de Paris furent cependant inondées en 1802. M. Bralle attribue cette submersion souterraine aux eaux qui descendent des buttes de Mesnil-montant, de Belleville et de Montmartre, dans les quartiers du Temple, de Saint-Lazare et de la chaussée d'Antin. (Voyez Ze Précis des faits et observations relatifs a l'inondation de 1802, imprimé en 1803, par ordre de monsieur le préfet de police. ) J 1818. 14 106 SUR LES INONDATIONS SOUTERRAINES ment, soit attribuée aux filtrations du bassin de la Villette. L'étendue de ce bassin, la masse d’eau qu'il contient frap- pent assez les yeux pour que le public, dont le jugement se fonde quelquefois sur des apercus superficiels, ne cherche point ailleurs la cause des accidents dont il s’agit. Mais, outre que les inondations souterraines ne sont qu'accidentelles et temporaires (1), tandis que le réservoir de la Villette est constamment entretenu plein d'eau à la même hauteur, et qu'on ne peut raisonnablement attribuer des effets momen- tanés à une cause permanente, n'est-il pas évident que le retour des mêmes circonstances a pu ramener, cette année, sur les mêmes lieux, les mêmes accidents qu'elles y occa- sionnerent en 1788. Or, si l’on consulte l'histoire météorologique des années (r) Les marais situés le long de la rue Grange-anx-Belles, entre les fau- bourses du Temple et Saint-Martin, ont été inondés en 1817, depuis le mois de mars jusqu’à la fin de juin. Leur inondation a commencé cette année avant le mois de février ; entre les deux submersions, ils ont été mis en culture, comme dans les temps ordinaires. | Les plus anciens habitants de ce quartier se rappellent les submersions de ces marais en 1788 et 1802, époques antérieures l'une et l'autre à l’éta- blissement du bassin de la Villette, où les eaux n'ont été mises pour la première fois que le 2 décembre 1808. Ce qui a contribué sur-tout à la stagnation des eaux dans ces marais, c’est que leur sol est plus bas que celui d'aucun quartier de la ville, et qu'ils reçoivent nécessairement les eaux pluviales des buttes de Montfau- con et de la Villette, ainsi qu'on peut s'en assurer en jetant les yeux sur un plan de nivellement général de Paris. Pour faire écouler ces eaux stagnantes , il n'a fallu qu'ouvrir deux tranchées à travers la rue des Ma- rais, et pratiquer deux percements dans le mur septentrional du grand égout; c'est-à-dire donner à ces eaux le moyen de s'écouler dans cet égout, comme elles s'y écoulaient avant qu'il eût été revêtu de murs de maconnerie, en suivant la pente naturelle du terrain. TS RP NE OS EE DE PLUSIEURS QUARTIERS DE PARIS. 107 1816 et 1817, on verra que nous nous trouvons aujour- d'hui placés, à la suite de ces années, précisément comme on se trouva placé, en 1788, à la suite de deux années ex- traordinairement pluvieuses. En effet la hauteur annuelle d’eau de pluie ft en pa et :787, de 62 centimètres; Elle a été de 61 centimètres en 1816 et 1817. (1) Le nombre total des jours de pluie, en 1786, et 1787, fut de 324 ; : Il à été de 325 pendant les deux dernières années. Ainsi, quant à la hauteur d’eau tombée, et à la continuité des pluies, on remarque une parité absolue de circonstances entre les deux De: d'années que nous venons de citer; de sorte que, d’après l'expérience du passé, on doit être bien moins étonné de Ja dernière inondation souterraine, qu’on ne devrait l'être si elle n’avait pas eu lieu. J'ajouterai pour compléter la parité, et la rendre plus sensible, qu'aujour- d'hui comme en 1788 les inondations souterraines se mon- trent dans les mêmes endroits aux environs de Paris, et= notamment au village de Montfermeil, qui est situé à plus de 5o mètres au-dessous de la plaine de Bondy, sur la som- mité des collines qui séparent le bassin de la Seine de celui de la Marne. (2) Si l'on considère que les inondations souterraines qui font (x) Voyez les tableaux. météorologiques rapportés dans les cahiers du Journal de physique, pour les années 1816 et 1817. -(2) Jertiens de notre confrère M. Bosc, que, dans la commune de Rosny, dont le territoire est de beaucoup supérieur à la plaine de la Vil- lette, les caves ont aussi été submergées dernièrement, et que l'eau se trouve presque à la surface de la terre. E . 14. 108 SUR LES INONDATIONS SOUTERRAINES, etc. l'objet de ce mémoire ont eu lieu à trente ans d'intervalle, et qu’elles ont été le résultat nécessaire de circonstances ab- solument semblables, on en conclura que cet accident doit être assez rare : car il ne dépend pas seulement de l’abon- dance des pluies, mais il dépend encore de leur continuité, Il faut, pour qu'il se manifeste, que la terre soit profon- dément imbibée, et que l’évaporation à sa surface ait été moindre qu’elle n’est ordinairement. Il semble donc que le retour de submersions semblables ne pourrait être prévu quelque temps d'avance, qu’autant qu'on ajouterait aux ob- servations que lon recueille sur la quantité de pluie qui tombe annuellement, des observations analogues sur la hau- teur de l’évaporation journalière à la surface du sol. La quantité d'eau de pluie qui échappe à l'évaporation est en effet la seule-qui puisse servir à l'entretien des nappes sou- terraines, et produire ainsi des submersions accidentelles. Ce qui est certain, d'apres les observations que nous venons de rapporter, c’est que, par l'effet des obstacles qu'on a suc- cessivement opposés au libre écoulement des eaux pluviales dans les quartiers septentrionaux de Paris, et sur-tout par l'élévation Ges murs du grand égout au-dessus du sol de la vallée, toutes les fois que la hauteur d’eau tombée dans l’espace de deux années consécutives se sera élevée au-dessus de 120 centimètres, et que le nombre de jours de pluie aura été, dans le même intervalle, de plus de 320, les quar- tiers de Paris situés sur la rive droite de la Seine seront menacés, pour l’année suivante, d’une inondation souter- raine, SARA SAR RAT LRU tete tot tete tt tt DESCRIPTION D'une aggrégation de pierres observee dans la Caroline du Nord , Etats-Unis d' Amerique, et connue dans le pays sous la dénomination de mur naturel (na- tural wall). Par M. pe BEAUVOIS. Lu à l'Académie royale des Sciences , le 6 avril 1818. Lx territoire des États-Unis d'Amérique renferme, comme on sait, soit à l'extérieur, soit dans son sein, un grand nombre de productions paturelles plus curieuses et plus intéressantes les unes que les autres. Il suffit de consulter les ouvrages des nombreux voyageurs et des savants qui ont exploré cette riche et fertile contrée, pour se convaincre de cette vérité. Outre la description des nombreux végétaux et animaux propres au sol et au climat de cette partie du nouveau continent, on y trouve celle de cascades , chutes d’eau, d’un pont naturel, de précipices, de cavernes dans lesquelles reposent depuis un temps plus ou moins long des ossements d'animaux dont “les individus vivants, du moins quelques-uns, ne sont pas encore connus, et d’une infinité d’autres objets curieux qui dünnent à penser aux naturalistes. Mais tous les faits curieux que peut offrir ce vaste pays n’ont pas encore été découverts, 110 DESCRIPTION D'UNE AGGRÉGATION DE PIERRES plusieurs même déja connus ont été incomplètement ob- servés et étudiés. On ne saurait donc trop les signaler aux connaisseurs et aux savants, afin d'obtenir des renseigne- ments plus circonstanciés, plus exacts, et propres à fixer l'opinion et lever les doutes qu'un premier apercu a pu faire naître. Telle est entre autres une aggrégation régulière et symétrique de roches uniformes dans un lieu isolé de la Caroline du Nord et dont l’origine ainsi que la nature ont donné lieu à des opinions très-diverses. A l’époque où j'eus occasion de visiter cette curiosité, elle n’était connue que des habitants voisins du lieu de son gisement, elle l’est même encore très-peu aujourd'hui du reste des États-Unis ét du monde savant. C’est de ce phénomène que je vais avoir l'honneur d'entretenir l’Académie. En l’année 1796, au retour d'un voyage, parmi deux na- tions indiennes (les Creeks et les Chérokées), après avoir repassé les Apalaches , je suivis dans sa longueur une partie du haut pays de la Caroline du Nord, pour me,rendre en Virginie et de là dans la Pensylvanie. Arrivé à Salisbury, chef- lieu du comté de Rowan, district de Salisbury, à quelque distance de la riviere Catabaw, que j'avais été obligé de traverser deux fois, je m'arrêtai chez M. W*" Sharp, ancien avocat, homme qui me parut instruit, et même plus qu'à cette époque on avait coutume d'en rencontrer dans des cantons aussi éloignés des bords de la mer. Dans l’énumé- ration que M. Sharp me fit des diverses curiosités du pays qu'il avait choisi pour sa retraite, il me cita entre autres celle que les habitants du pays nomment mur naturel et situé à 25 ou 30 milles de son habitation: La description qu’il m'en fit, l'espèce d'enthousiasme qu’il mit dans son ton | OBSERVÉE DANS LA CAROLINE DU NORD. III et dans ses expressions, m'inspirerent le plus vif desir de visiter ce phénomène. Je reçus de lui les renseignements nécessaires; il me donna même des lettres de recommanda- tion pour les propriétaires des habitations que je devais ren- : contrer sur ma route. Je saisirai cette occasion de rappeler un fait déja connu, maïs qui ne saurait être trop répété. Par- tout dans les États-Unis d'Amérique on reçoit l'hospitalité . la plus franche et la plus amicale. Dans les lieux écartés des bords de la mer on ne rencontre pas d’auberge ; mais de distance en distance on trouve des habitations 6ù sont ad- mis, moyennant une rétribution assez légère, les voyageurs et les étrangers. Les propriétaires de ces habitations sont, pour l'ordinaire, des.colonels, des majors, des capitaines de la milice nationale, et dont les plus anciens, à l’époque de mes voyages, avaient servi glorieusement dans la guerre de l'indépendance. d ; Muni des renseignements et des lettres de M. Sharp, je pris congéide lui et m'acheminai vers le mur naturel. Mais soit que mon itinéraire eût été mal tracé, soit plutôt que je me sois écarté de la vraie route, je m'égarai parmi des che- mins mal percés au milieu des bois, tortueux et de difficile accès. Je n’arrivai que le lendemain chez M. Parson auquel j'étais adressé. Il était absent, mais sa femme le suppléa en me procuraut ün guide pour me conduire directement au lieu de ma destination. Avant de décrire la curiosité qui fait l’objet de ce mémoire, il me paraît convenable de donner un apercu de la localité, et de faire remarquer que les pierres de ce prétendu mur ont tout-à- fait l'apparence de basaltes, si elles n’en sont pas de véritables, et qu'aucun des nombreux voyageurs qui ont par- 112 DESCRIPTION D'UNE AGGRÉGATION DE PIERRES couru, à différentes époques, le territoire des États-Unis d'Amérique, n’a rencontré le plus léger indice, ni la plus petite trace d’un volcan. Le terrain entre la mer et les montagnes des Apalaches est dans une assez grande profondeur très-bas, uni, extré- mement marécageux et mal-sain. 11 ÿ croît des graminées, des cyperées, des joncs en abondance, et généralement toutes les plantes qu'on rencontre ordinairement sur un semblable . sol. Un de ces marécages, voisin de la ville de Wilmenton, capitale de l'état, est renommé par la présence d’une plante, appelée par les botanistes Dionœa muscipula, ou attrape- mouche. Elle y est abondante, et paraît s’y trouver exclusi- vement. Je ne sache pas du moins qu'on l'ait rencontrée ail- leurs, et moi-même je l'ai vainement cherchée dans les en- droits bourbeux et marécageux de la Géorgie, de la Caroline du Sud et de la Virginie. La Dionæa muscipula, qualifiée par Linné de miraculum naturæ, a été surnommée attrape- mouche, à cause de la singularité de ses feuilles bordées de longs cils ou poils; à l'approche d’un corps étranger, elles se contractent, se plient et se serrent de manière que, lors- lorsqu'un insecte vient s’y reposer, il est saisi à l'instant, sans pouvoir se dégager, et trouve la mort et son tombeau dans le lieu même où il espérait recueillir un suc pour la conservation du peu de jours qui lui restaient à vivre. On conçoit aisément que, dans un pareil sol, on ne doit rencontrer que très-peu ou point de pierres. Mais à mesure qu'on approche des montagnes, le terrain prend un autre aspect. Jedidiah Morse et Joseph Scott parlent d’un banc de pierres à chaux (je me sers de leur expression) à la distance de 5o ou 60 milles de la mer. Ce hanc court parallèlement OBSERVÉE DANS LA CAROLINE DU NORD. 119 à la mer, et se prolonge jusque dans la Caroline du Sud, dans la même direction. Ensuite le pays abonde en mines de fer dont plusieurs sont exploitées. Enfin le district de Salis- bury, et principalement le comté de Rowan, où gît l’'amas de pierres en question, devient plus inégal, montueux et en- tiérement sablonneux. L’amas de pierres, ou mur naturel , est placé dans un mon- ticule, au pied duquel coule un petit ruisseau , entretenu constamment par les eaux qui suintent dé ce monticule et des terres avoisinantes; dans les temps ordinaires il ny a pas plus de 2 à 3 pouces d’eau, il ne devient très-gros que dans le temps des pluies abondantes. Ce mur naturel a une direction nord et sud; il paraît avoir une de ses extrémités, qui était déja dégradée à l'époque où je le visitai, sur le re- vers du monticule. Les pierres dont il est formé ne sont point égales en longueur ni en épaisseur. On en trouve depuis 0,1083 jusqu'à 0,3248 "1 (environ 4 à 12 pouces) de long; mais la forme est à-peu-près égale dans toutes. Cette forme est alongée, a quatre angles ou arêtes, amincies à l'une des extrémités, et une petite entaille au-dessous du sommet ; ainsi qu'on peut s'en assurer sur les deux échantillons qui sont sous les yeux de l’Académie avec le dessin que j'ai pris, sur leslieux, de l’ensemble. Les pierres sont rangées horizontalement. La masse à une épaisseur de 4 à 4 décim. : (18 à 20 pouces anglais) ; à l'endroit dégradé elle se trouvait découverte à la hauteur d'environ 2 mètres (6 pieds) et recouverte par la superficie d'environ moitié. Cette superficie , ainsi que le Sol de chaque côté du mur est un sable très-fin, entremêlé de petites pierres de quartz plus grosses, et de nombreuses petites parcelles de mica argenté. D’après les renseignements 1818. 15 114 DESCRIPTION D'UNE AGGRÉGATION DE PIERRES que j'ai pris sur les lieux, il paraît que le sol est le même à plusieurs milles de distance. Chacune de ces pierres est re- vêtue d’une couche de terre sablonneuse, jaune, ocracée et adhérente; l'intervalle qui les sépare est occupé par une substance grasse, assez semblable, quand elle est fraîche, au ciment des vitriers. Mais ce ciment est mélangé de taches irrégulières, noires et ferrugineuses. La même substance re- couvre les deux côtés du mur, comme si on l'en avait crépi. Mais ce qu'il y a de remarquable, ce ciment du côté ouest est comme marbré et chargé des mêmes taches noires qui manquent entierement au côté opposé. On ne peut se le dissi- muler, toutes ces circonstances donnent à cet amas de pierres l'apparence d’un mur construit par la main et l'industrie des hommes. Mais d'autres motifs qui me paraissent plus puis- sants , et que les bornes de ce mémoire ne me permettent pas de discuter, me semblent suffisantes pour faire rejeter cette opinion. Tel était l'état et la situation de ce phénomène curieux à l’époque de 1796. Depuis ce temps il a été visité par plusieurs naturalistes, entre autres par MM. Zéchariah Lewis, MKorkle, Hall et Newman. Les travaux qu’ils ont faits, leurs recherches et leurs observations se trouvent consignés dans le quatrième vol. du Recueil médical de New-York pour l’année 1801, et rédigé par MM. Samuel Mitchil et Edward Miller; ce dernier y a joint ses propres réflexions, dont nous ferons mention. D'après ces travaux et ces recherches, le mur, que l'on ne désigne plus sous le nom de mur naturel, mais sous celui de mur souterrain, a été sondé. On l’a suivi dans une longueur d'environ 100 mètres (300 pieds anglais). Le sol a été creusé à la profondeur de 4 mètres (12-14 pieds, même mesure), OBSERVÉE DANS LA CAROLINE DU NORD. 115 sans pouvoir aller plus avant à cause des eaux. Les autres détails sont à-peu-près les mêmes que ceux dont il a été fait mention plus haut. Mais les observations de MM. M'Korkle, Hall et Newman ne sont pas toujours d'accord avec les miennes. Suivant eux, par exemple, ces roches ne sont point uniformes ; les unes sont quarrées, d’autres approchent de la forme d’un parallélogramme, d’un triangle , ou rhomboïdales. Celles-ci ont la même figure et la même dimension dans toute leur longueur, celles-là sont plus étroites et amincies à une extrémité. Parmi ces roches, au nombre de plus de 100, que j'ai examinées, j'en ai effectivement rencontré de plus pe- tites que les autres; mais toutes m'ont paru égales quant à la forme, et semblables à celle que l'Académie a sous les yeux, c’est-à-dire quadrangulaires, à surfaces inégales, toujours amincies plus ou moins à l’une des extrémités; et ce qu'il ÿ a de remarquable, et paraît avoir échappé à MM. MKorkle, Hall et Newman, on voit constamment dans cette dernière partie une entaille plus ou moins prononcée. . Cet amas de pierres symétriqüement arrangées, d'une grosseur et d’une longueur à-peu- près égales, ayant comme une espèce de ciment interposé, est, sans contredit, un phé- nomène aussi curieux qu'il est difficile à expliquer. On ne doit donc pas s'étonner qu'il ait donné matière à réflexion et fait naître des opinions diverses, tant sur son origine et - sa formation, que sur la nature des roches dont il est com- posé (1). Quelques-uns veulent que ce mur soit de formation _très-ancienne et produit par la main et l'industrie des hommes: (1) Voyez le quatrième volume du Recueil médical de New-York , pag. 227 et suiv. Lai 2 116 DESCRIPTION D'UNE AGGRÉGATION DE PIERRES c'était, suivant eux, un mur de défense, élevé par une nation antédiluvienne éclairée, dans un temps où les fleches et les arcs étaient les seules armes usitées dans les guerres; ils pen- sent que s’il se trouve aujourd'hui comblé et recouvert par le sol, c’est que, depuis l’époque de sa construction, la sur- face du terrain a éprouvé de grands changements, occasion- nés par les pluies répétées et abondantes, et même, ce qui serait possible, par le déluge général. On n'est pas plus d'accord sur la nature des roches qui composent ce mur, que sur sa formation. Elles ont été exa- minées par des chimistes dans les États-Unis. Ils ont reconnu dans ces roches tous les caractères du basalte. Les personnes qui veulent que ce mur soit artificiel, contredisent cette opi- nion, qui contrarierait entièrement leur système. Dans cet état de choses, et cette partie de l'histoire natu- relle étant étrangère, en quelque sorte, à mes occupations ordinaires, j'ai cru devoir les faire examiner de nouveau. Elles ont été soumises à l'examen de MM. Sage, Brongniart, Brochant-de-Villiers et Gilet-Laumont. Ces savants sont d'accord pour trouver dans ces pierres, comme les chimistes des États-Unis, tous les caractères du basalte. Mais comment de tels amas de pierres , (car on voit dans le Recueil médical cité ci-dessus , qu'à la distance de 6 ou 8 milles du premier mur, il en a été découvert un autre pareil de 4 pieds de long, sur quatre ou cinq de hauteur , mais dont l'épaisseur égale- ment uniforme, est beaucoup moindre, et seulement de 7 pouces ; ) mais comment, disons-nous, des amas de basaltes peuvent-ils se rencontrer sur des points isolés, dans une con- trée où l’on ne trouve aucun vestige de volcan ? Ce fait, très-curieux en lui-même, et qui, comme le dit J { | OBSERVÉE DANS LA CAROLINE DU NORD. 117% M. Miller, doit donner lieu à de grandes recherches, et à de profondes discussions dans les siècles à venir, offre, par les circonstances qui l’accompagnent, de nouvelles raisons de douter, tant sur les causes de son origine, que sur la nature des roches. Il peut également servir d'autorité aux diverses opinions déja manifestées, et qui ont été si savamment présentées par M. Cuvier dans ses éloges comparatifs de MM. Werner et Desmarets. Il ne nous appartient pas de prendre part à la diversité des opinions des Vulcaniens et des Neptuniens, quelque favorable que puisse paraître au sys- tème de ces derniers le fait en question. Maïs nous croyons pouvoir émettre notre opinion sur l'origine de cette aggré- gation de roches. Il nous paraît improbable et impossible, quelle quesoit la régularité dans leursymétrie, queces pierres, ainsi amoncelées, soient le produit des mains et de l'industrie «des hommes. Nous disons même que nous le croyons évi- demment naturel. Il n’en est pas de même de la nature de -ces mêmes roches, sur laquelle il ne nous appartient pas de prononcer; nous nous bornerons donc à rester dans le doute avec M. Brochant-de-Villiers dont il me reste à présenter l'opinion. \ « Les échantillons prismatiques, dit ce savant, trouvés à « Salisbury, en un amas rectangulaire de quelques pieds « d'épaisseur, empâté dans un grès, ont dans leur intérieur, « et en partie dans leur décomposition extérieure, beaucoup « du caractere du basalte. C’est la même couleur, la même « cassure, et à Ja coupe les mêmes points éclatants. La forme « prismatique, quoique bien peu volumineuse, sert encore «à appuyer ce rapprochement, et l'essai au chalumeau a « donné les mêmes résultats que plusieurs basaltes de FAu- 118 DESCRIPTION D'UNE AGGREGATION DE PIERRES « vergne. On en-a obtenu un émail noir sur les bords du « fragment, sans mélange de points blancs. On doit ajouter « que cette substance attire l'aiguille aimantée. « Mais on sait en général combien les minéralogistes ont « eu de discussions sur les basaltes ; combien ils ont été et « sont encore partagés sur la maniere de juger différentes «roches de ce genre, que les uns appellent basaltes , tandis « que d’autres leur refusent ce nom. Cette différence d’opi- « nions provient de ce que des roches, tout-à-fait semblables «aux basaltes, qui ont évidemment une origine moderne, « existent dans des terrains anciens ; et comme cette origine « des vrais balsates est attribuée aujourd'hui, presque géné- « ralement, à l’action des feux volcaniques, on sent que la « décision que l’on porte , en assimilant une substance aux « basaltes, entraine avec elle l'idée de cette origine volca- « nique. ; « Parmi les questions de ce genre, celles sur lesquelles il « n'existe plus aucun doute, n'ont pu être résolues que par « l'observation de toutes les circonstances accompagnantes , et. « il doit en être de même de celles-ci. « Or les indications géologiques que l’on a sur cette roche « de Salisbury, sont beaucoup trop restreintes pour qu'on « puisse prononcer affirmativement, et on est d’autant plus « forcé de se maintenir dans le doute, que les minéralogistes « américains , déja assez nombreux, ont parcouru toutes leurs « provinces, et ont annoncé qu'ils n’y avaient découvert nulle & part le moindre indice de véritable basalte. « Il serait bien extraordinaire, que le basalte s'y monträt « uniquement sur un point isolé. Sans doute ce point pour- « rait être un fragment écarté d’une formation plus considé- OBSERVÉE DANS LA CAROLINE DU NORD. 119 « rable; mais il serait bien extraordinaire qu’on n’eût pas « retrouvé ailleurs la moindre trace de cette formation. « Ce doute est encore confirmé par la nature du sol de « Salisbury , qui est compris dans une longue bande de -« terrain primitif; et on sait que ce genre de terrain ren- « ferme fréquemment des roches amphiboliques, dont plu- « sieurs variétés, comme en Suède, ont une grande ressem- « blance avec le basalte. « On doit donc reconnaître que cette roche a beaucoup de « rapports avec le basalte; mais il paraît impossible, quant- « à-présent, de prononcer qu'elle est réellement un basalte. » D'après l'avis d’un minéralogiste aussi savant que M. Bro- chant-de-Villiers, nous devons avec lui rester dans le doute sur la vraie nature de cette roche; mais l’aggrégation en forme de mur, et qui s'étend à une assez grande distance, à la même hauteur et dans la même épaisseur, est un fait curieux, qu'il nous a paru intéressant de faire connaître. D'autant plus que cette nouvelle publicité pourra stimuler le zele des minéralogistes des États-Unis , et engager les savants de cette partie du monde à prendre de nouveaux renseigne- ments, et à faire d'ultérieures observations, propres à nous éclairer sur ce phénomène, et à lever tous les doutes dont il reste encore enveloppé. AREAS RAR LAS RAR LAS dj CE. EE nat + PRO 21 ARS ORNE 11 ans k Ei hée 4 Ur DL AT TEE AU à r (je % : de , Ki re ( ‘ “e * À a ; ï i * Te 1818. Memotre l'alesrot de Beauvois LL, unique . Sud Fr y Nord / L Ken (CA CANZ ure_2tC ndargrte ) ne guarle LA HR a pole f G DYSAAES Un 7 ural 771 fall pires ee alilurry 6 GE dit GIE : Lstitut Année 1818. Memoire L'alisrot de Beauvois LL. unique Sud F ; : = ord ; , 3 73 PAT 22777 PA Larres cu muliutt dame ut ndagtte de quart dl salle LE LOUP « ET 0 ?. ANS d/Y /2 Pal 4 far lo «SCulilanms À latiral 74 hall jrrés ’ falilurry Carelene da Pond. ) RAR RARE LR RAR LR A A RUES ULB AL LD LL ALLER LUE AUS LULU URLS MÉMOIRE Sur l'intégration de quelques équations linéaires aux différences partielles , et particulièrement de Le- quation generale du mouvement des fluides élas- tiques ; Par M. POISSON. Lu à l’Académie le 19 juillet 1819. / Les géomètres sont parvenus à intégrer les équations aux différences partielles du premier ordre, quels que soient leur forme et le nombre des variables indépendantes ; ils ont du moins ramené cette intégration à celle d’un système d'équations différentielles du premier ordre, en même nom- bre que ces variables; et par-là, ils ont prouvé que les équa- tions aux différences partielles de cet ordre, n'ont pas d’autres difficultés que celles des équations différentielles ordinaires. Îl n’en est plus de même lorsqu'on passe aux ordres supérieurs ; les équations aux différences par- üelles ont alors des difficultés qui leur sont propres, et qui ne dépendent pas de l’imperfection des méthodes. On sait, en effet, que dès le second ordre, et, à _plus forte raison, dans les ordres plus élevés, le plus grand nombre de ces 1818. 16 122 SUR LES ÉQUATIONS équations n’est point intégrable sous forme finie, en em- ployant les seules variables qu'elles contiennent. Pour ob- tenir leurs intégrales sous cette forme, on a imaginé de chercher à les exprimer par des intégrales définies, relatives à des variables auxiliaires qui ne sont pas celles de la ques- tion ; et ce nouveau champ, ouvert aux recherches des géo- mètres, a fourni le moyen, sinon de compléter, du moins d'étendre les procédés d'intégration. Euler avait déja indiqué l'usage des intégrales définies, pour intégrer, sous forme finie, les équations différentielles ordinaires qui résistent aux méthodes connues, telles que, par exemple, l'équation de Riccati dans les cas de non inté- grabilité proprement dite. M. Laplace a pensé le premier à étendre ce procédé aux équations linéaires aux différences partielles; et il a intégré, de cette manière, l'équation du second ordre, à deux variables indépendantes, dans le cas où tous les coëfficients sont constants , et dans un autre cas particulier. Les expressions qu'il a trouvées ne contien- nent que des intégrales simples ; mais les quantités qui mul- tiplient les fonctions arbitraires sous le signe intégral, ne sont pas données explicitement : elles dépendent d’équa- tions différentielles ordinaires, qui ne peuvent elles-mêmes s'intégrer que par des intégrales définies; en sorte que ces expressions contiennent réellement des intégrales définies doubles, ainsi qu'on peut le voir dans l'ouvrage de M. La- croix, où sont exposées les différentes méthodes d’intégra- tion employées jusqu'ici. Depuis l'époque où M. Laplace a publié ces résultats (*), (*) Mémoires de l'Académie , année 1979. ét tbe Drm til "2 M AUX DIFFÉRENCES PARTIELLES. | 123 lui-même et d’autres géomètres se sont occupés de ce nou- veau mode d'intégration : on a intégré, par ce moyen, plu- sieurs équations remarquables; et l’on a montré, sur-tout, l'usage de cette forme d’intégrales dans la résolution des problèmes qui conduisent à des équations aux différences partielles. Mais les différents procédés qu'on a suivis, pa- raissent peu susceptibles d’être généralisés ; aussi n’existe-t-1l jusqu’à-présent aucune méthode qui soit applicable à des classes nombreuses de ces équations, et qui puisse servir à les intégrer par le moyen des intégrales définies, toutes les fois qu'elles ne sont pas intéÿrables sans leur secours : le mémoire de M. Brisson, inséré dans le quatorzièeme cahier du Journal de l'École polytechnique, renferme ce qu'on a écrit de plus général sur cette matiere. A défaut de methodes générales, dont nous manquerons peut-être encore long-temps, il m'a semble que ce qu'il y avait de mieux à faire, c'était de chercher à intégrer isolé- ment les équations aux différences partielles les plus im- portantes par la nature des questions de mécanique et de physique qui y conduisent. C'est là l'objet que je me suis proposé dans ce nouveau mémoire. L’équation dont je me suis principalement occupé est celle d'où dépendent les petits mouvements des fluides élastiques , lorsqu'on suppose constantes la densité naturelle du fluide et sa température. Elle est, comme on sait, du second ordre, linéaire et à quatre variables indépendantes, qui sont le temps et les trois coordonnées des molécules fluides. Quand on fait abstraction de deux de ces coordonnées, et que l’on considère le mouvement suivant une seule dimension du fluide, elle se réduit à l'équation des cordes vibrantes, que 16. 124 SUR LES ÉQUATIONS d’Alembert a intégrée le premier, à l’origine même du calcul aux différences partielles. Euler en a ensuite trouvé l’inté- grale , pour le cas où le mouvement des molécules ne dépend que du temps et de leurs distances à un point fixe; en sorte que le mouvement soit le même, et se propage symétrique- ment dans tous les sens autour de ce point. Mais, en con- servant à cette équation toute la généralité qu’elle comporte, on n'avait point encore obtenu son intégrale complète; et les essais que l’on a tentés pour la découvrir ont conduit à des résultats si compliqués, qu'il serait impossible d’en faire aucun usage (*). Cependant l'intégrale à laquelle je suis par- venu dans ce mémoire , est d'une forme très-simple : elle ne contient que des intégrales définies doubles ; et les deux fonctions arbitraires s'y déterminent immédiatement d’après l'état initial du fluide; ce qui sera d’un grand avantage dans les applications qu'on en pourra faire. Le procédé qui m'y a conduit est aussi très-simple : il est fondé sur un théorème relatif à certaines intégrales définies, et sur les analogies connues des puissances et des différences, que j'ai em- ployées dans tout ce mémoire, pour trouver, d’une manière plus rapide , les sommes des séries par lesquelles j'ai d’abord exprimé les intégrales des équations que j'ai considérées. - Cette intégrale générale se change dans les intégrales de d'Alembert et d'Euler, lorsqu'on fait les suppositions qui s'y rapportent. Par un changement de variables, qui consiste à substituer les coordonnées polaires des molécules fluides à leurs coordonnées droites, elle prend une forme qui la rend (*) Voyez le tome II des anciens Mémoires de Turin, pag. 120, et le tome 1° des Mémoires présentés à la première classe de l'Institut, p. 379. AUX DIFFÉRENCES PARTIELLES. 125 propre à déterminer le mouvement du fluide, lorsqu'il part d'un centre donné : elle montre clairement alors que, quel que soit l'ébranlement primitif, le mouvement se propage avec la même vitesse dans tous les sens , quoique les vitesses propres des molécules ne soient pas les mêmes suivant toutes les directions ; proposition que j'avais déja démontrée, mais d’une manière moins simple et moins directe, dans mon mé- moire sur la Théorie du son. En géneral, cette nouvelle in- tégrale pourra servir à résoudre, par rapport au mouvement des fluides élastiques, des problèmes qui n'avaient point encore été résolus, ou qui ne l'avaient été que dans des cas particuliers. Je me propose de faire de ces applications l’ob- jet spécial d’un autre mémoire. Les autres équations aux différences partielles que j'ai con- sidérées dans celui-ci, sont moins importantes que l’équa- tion générale du mouvement des fluides ; d’ailleurs les inté- grales de la plupart d’entre elles étaient déja connues ; mais les procédés que j'ai employés, diffèrent de ceux dont on avait fait usage; et la forme des intégrales que j'ai obtenues n'est pas non plus toujours la même que celle des intégrales connues. En effet, lorsqu'on exprime l'intégrale d'une équa- tion aux différences partielles, par le moyen des intégrales définies, sa forme n’est pas unique et déterminée; elle dé- pend » au contraire, pour une même équation , du procédé d'intégration qu'on a suivi; et souvent l'on n’a aucun moyen direct de transformer ses diverses expressions les unes dans les autres, ni de s'assurer qu’on est parvenu , dans chaque cas , à la forme la plus simple qui soit possible. Ce qu'il faut sur-tout rechercher dans ces sortes d’intégrales, c’est qu’elles se prêtent facilement à la détermination des fonctions arbi- 126 SUR LES ÉQUATIONS traires qu'elles renferment. Toutes celles que l’on trouvera dans mon mémoire, jouissent de cét avantage; en sorte que, non-seulement elles satisfont de la manière la plus générale aux équations dont elles sont les intégrales complètes, mais on doit aussi les regarder comme étant les solutions défini- tives des problèmes qui ont conduit à ces équations. Equation generale du mouvement des fluides. (1) Nous démontrerons d’abord un théorème relatif à la réduction des intégrales doubles, remarquable en lui-même, et qui nous sera tres-utile dans la suite de ce mémoire. Les intégrales auxquelles ce théorème se rapporte, sont comprises sous la forme : ; JF Fc. u+h. sin.u sin.v+4k sin. u cos.v) sin.u du dv—P, et doivent être prises depuis 4—0 jusqu'à u—#, et depuis v—0 jusqu'à v—2+r, r désignant le rapport de la circonfé- rence au diamètre : g, À et À sont des quantités constantes ; la caractéristique f indique une fonction quelconque. Si l'on fait g=—=p cos.u', hk=psin.u' sin.v', k=psin.u' cos. v', la quantité P deviendra P—ff/ [? (cos.u' cos.u+-cos.(v—v") sin.u' sin.u ) ] sin. u du dv. Or, pour savoir ce que cette quantité représente, concevons une sphère décrite d’un rayon pris pour unité; par le centre, menons arbitrairement un plan fixe, et dans ce plan, un axe fixe; supposons que &_ soit l'angle compris entre cet axe et AUX DIFFÉRENCES PARTIELLES. 127 un rayon quelconque de la sphère, et » l'angle dièdre, com- pris entre le plan de ces deux droites et le plan fixe ; appe- lons o l’élément de la surface sphérique, qui répond à l’ex- trémité de ce rayon : nous aurons do—=sin.u du dv; et l'intégrale double, d'après ses limites, s’étendra à tous les points de cette surface. Supposons encore que les constantes u'" et v' soient les valeurs de z et v, qui répondent à un rayon déterminé de la sphère ; soit & l'angle compris entre cette droite et le rayon quelconque, correspondant aux angles u et v; la formule fondamentale de la trigonométrie sphé- rique donnera COS. Ü— cos. u' cos. u + cos. (v'—v) sin. u! sin. u; et l’on aura ensuite Pfff (pcos.s) do. Ainsi cette quantité P représente la somme de tous les élé- ments de la surface sphérique, multipliés chacun par une fonction donnée du cosinus de l'angle compris entre son rayon et un rayon déterminé de position. Cela posé, si l’on désigne par à l'angle dièdre compris entre le plan de ces deux rayons et un plan fixe, mené arbi- trairement par le rayon déterminé, on pourra employer les deux angles 4 et 9 au lieu de v et u, à la détermination du rayon variable, et exprimer l'élément dv de la surface au moyen de leurs différentielles ; on aura alors do— sin. dû dy, et, par conséquent, 128 SUR LES ÉQUATIONS P— / [7 (pcos.6) sin.0 d0 dy. Pour étendre l'intégrale à la surface entière de la sphère, il faudra la prendre depuis 6—o jusqu'à 6—+, et depuis ÿ—0 jusqu'a ÿ—2r; l'intégration relative à 4 s'effectue immédiatement; et en remettant pour P ce que cette lettre représente, nous aurcns { J(g cos.u+h sin.u sin.v+k sin.u cos.v) sin.u du dv =2r ff (p cos.) sin.8 dô; (1) d'où il résulte que l'intégrale double que nous considérons, se réduit, quelle que soit la fonction f, à une intégrale simple, et que sa valeur ne sera fonction que de la quan- tité p, laquelle est égale à V2 +% +. (2). En prenant pour la fonction f une puissance quel- conque M, On aura À ff gcos.u + sin.u sin. v + ksin.u cos. v)" sin.u du dv 2T m+- 1 MHuN,. —(n+i)p (? le?) de et si l'on désigne par ? un nombre entier positif, et qu'on fasse successivement m—2n +1, m—2n, il en résultera ff(ecos. u+ h sin.u sin.v+ksin.u cos.v) 2 sin.u du do—0, nu Sù in. 2 SET ER ff(gcos. u+ hsin.u sin. v+ksin.u cos. v) sin.u du dv—= ti Les éléments de la première de ces deux intégrales doubles sont deux à deux égaux et de signes contraires ; l'intégrale SUR LES ÉQUATIONS 129 doit donc être nulle, comme nous la trouvons. Quant à la seconde équation (2), on peut aussi la vérifier en develop- pant la puissance 22 du trinome contenu entre les paren- thèses , et effectuant ensuite les intégrations. En partant des équations (2), on pourra démontrer l'é- quation (1), mais pour le cas seulement où la fonction Ya indique une fonction rationnelle et entière (*), ou, du moins, une fonction qui soit réductible en série convergente, or- donnée suivant les puissances positives'et entières de la va- rfable. La démonstration que nous venons de donner de cette formule, est à-la-fois plus simple et plus générale. Observons encore que, par des différentiations relatives aux quantités g, À, Æ, on déduira de l'équation (1) une in- inité d’autres formules de la même nature. Ainsi, en diffé- renciant une première fois par rapport à l’une de ces trois quantités, et mettant une fonction F à la place du coëfficient différentiel de f, on aura JJF (g cos.u + À sin.u sin.v + K sin. u cos.v) cos.u sin.u du dv "TE [F(pcos.s) cos.6 sin.6 do, JE (gCos.u + À sin.u sin.v + k sin. u Cos.v) sin." w sin.v du dv k 4 ee fr (P cos.6) cos. 6 sin.6 db, >» JF (gcos.u + À sin.u sin.v + k sin. u cos. v) sin.’ u cos.v du dv 2Tk =" fr (p cos.6) cos. 6 sin.0 dé: VOOR En gd oh ei (*) Exercices de calcul intégral, 5° partie, pag. 273. 1818. 17 130 SUR LES ÉQUATIONS d’où l’on conclut, quelle que soit la fonction F, ff> (gcos.u+-hsin.u rer sin.u cos. v) (hcos.u-g sin.u sin. v) sin.u du dv—0, f) F(gcos.ü+-hsin.u sin. v+-k sin.u cos.v) (kcos.u-g sin.u cos.v) sin.u du do, ÎfF (gcos.u+-h sin.u sin. v+-k sin.u cos. v) (k sin.v—h cos. v) sin.°u du d v—0. Nous ne nous arrêterons pas davantage à développer les conséquences de l'équation (1), qui sont étrangères à l’objet de ce mémoire. (3) es a maintenant d'intégrer l'équation CA VE a (= Tate == ? (3) AE dans laquelle & est une constante donnée. C’est, comme on sait, de la fonction ®, déterminée par cette équation, que dépendent les lois du mouvement des fluides élastiques, lorsqu'on néglige les termes de seconde dimension, par rapport aux vitesses et aux condensations de leurs molé- cules, et qu'on suppose la densité naturelle et la tempéra- ture du fluide, constantes dans toute son étendue. Afin d'exprimer commodément son intégrale complète, en série ordonnée suivant les puissances de {, nous emploie- rons cette notation abrégée : q étant une fonction quelconque de +, y, z, nous ferons d'ôüg , d'5g d'5q__,, d x° dy° Me 0 de d5q d5q °0°q dire F dy dz° & D 0 £ AUX DIFFÉRENCES PARTIELLES. 131 de sorte qu'on ‘ait généralement à"g—3.3"": De cette manière, l'intégrale complète de l'équation (3) sera évi- Aenents as t° 3 FRESEN AA U+ sd U +etc, 2 a°t 3 . 1 spin a V+etc.; a°1+1° HIV+S U et V étant deux fonctions arbitraires de x, y, z. Pour obtenir cette intégrale sous forme finie, il s’agit donc d’ex- primer, par le moyen des intégrales définies, les sommes - des deux séries qui composent la valeur de +; mais on peut remarquer que la première se déduit de la seconde, en diffé- rentiant celle-ci par rapport à #, et en y remplaçant V par U; ainsi, en faisant CM 1 CHA 1.2.3.4. Eh ME as 65 3 V+etc., il nous suffira de chercher l'expression de cette quantité T en intégrales définies. (4) D’après les analogies connues entre les puissances et les différences, on a SV (++), pourvu que, dans le développement du second membre, on regarde les puissances de g, k, k, comme des signes d’opé- rations qui indiquent des différentielles relatives à x, y, z, divisées respectivement par dx, dy, dz; c'est-à-dire que, dans ce développement, un terme quelconque, tel que ë Ag h'E V, 17. 132 SUR LES ÉQUATIONS dans lequel le coëfficient À est indépendant de g, , k, devra être remplacé par diti+i V dax’ dy” dzi" Par ce moyen, la quantité T deviendra PL at p° at. p° CRE Apr ) T=( 1.2. Sad Hi 5 TIRER PAT 7 L'eRUDE en faisant, comme plus haut, g°+ X°+ k°—p°. Si l'on fait aussi, pour abréger, g cos.u + h sin.u sin. v + À sin.u cos.v—«, les équations (2) deviendront NE sin.u du dv—0, PP LATSE MRATpr DIE sin.u du dv= ie ; au moyen dé quoi l’on pourra écrire la valeur de T sous . cette forme : Pl Se a 4,4 = ff( rar ere se ss + etc.) Vésin. udud», ou, ce qui est la même chose, = ff" Vé sin.u du dv; ÂT. e désignant la base des logarithmes népériens. Or, si l'on a V=—f(x, y, z), et qu'on représente par x", y', z', trois quantités quelconques, on aura, en vertu des mêmes analogies qu'on vient de citer, 87 67" 642 V=f(a+a!, y +7, 242); AUX DIFFÉRENCES PARTIELLES. 133 donc, en remettant pour « sa valeur, nous aurons £ ec" V—f(x+atcos.u, y+at sin.u sin.v, z+atsin.u cos. v), et, par conséquent , L== =) f(æ+atcos.u, y+at sin:u sin.v, = z+at sin.u cos.v) Et sin.u du dy. En faisant de même U—F (x, y, z), et désignant par T! la somme de la première série contenue dans la valeur de 9, On aura T' 2 [fe (æ+at cos.u, ‘y+at Sin. U SÜ. V, z+at sin.u cos.v) € sin.u du d®; LE donc, en comprenant le diviseur 4r dans lés fonctions ar- bitraires f et F, il en résultera, pour l'intégrale complète de l'équation (3), e= [ff (x + atcos.r, Y+ at sin.u sin.v, z+at sin.u Cos.v) t sin.u du dv d. $ $ A JLE (t+at cos.u, y+at sin.u sin.v, ©: 4+at sin. u cos.v) t sin.u du dv; les limites des intégrales définies étant toujours #—0, u=—x, et v—0, V—27r. fe Cette forme d’'intégrale est aussi simple qu'on puisse le desirer , eu égard au nombre des variables de l'équation à laquelle elle répond : elle a, en outre, l'avantage que les deux fonctions arbitraires f et F s'y déterminent immédia- ? A . . d . tement, d’après les valeurs initiales de o et + car, en fai- 134 SUR LES ÉQUATIONS sant é—0, On a simplement d p— 4x F(x, y; 2), hr f(&, y, 2). (5) Nous pouvons mettre l'intégrale de l'équation (3) sous une forme plus symétrique, par rapport aux trois va- riables x, y, z, en l'écrivant ainsi : e=ffr(x+at cos Us J+at cos.u/, z+at cos.u") tdo d. k +2 [fe (æ+at cos.u, y+at cos.u', z+at cos.u") t do. Pour effectuer les intégrations, on prendra indifférem- ment l'un de ces trois systèmes de valeurs : cos.u!—5sin.u Sin.V, COsS.U'—=sin.u cos. v, do—sin.u du dv; cos.u — sin.u' sin.v, cos.u'—sin.u! cos.v', do—sin.u' du! dv'; cos. u —sin.u" sin.v', cos.u'—sin.u" cos.v", do—sin.u" du” dv"; et dans le premier cas, on intégrera depuis 4—0 et v—0, jusqu'à u—r etv—2#; dans le second, depuis #'=—o et v'—0, jusqu'à u'=# et v'—2r; enfin dans le troisième, depuis u"—0 et v'—0, jusqu'à &"—7 etv —27. Sous cette forme, on peut vérifier, sans développer la valeur de 9 sui- vant les puissances de +, qu'elle satisfait à l'équation (3). En effet, supposons d'abord que cette valeur de 4 ne con- tienne que la partie dépendante de la fonction f; en diffé- renciant par rapport à {, on aura : = fffdu +a ff teos. u do d ù °d n + a ff tcosu du + a ff rcos.u do; JJ dr JJ dz —— — AUX DIFFÉRENCES PARTIELLES. 135 ” différenciant de même une seconde fois, il vient 2 sa ff SZ cos.u de + sa [ [TZ BREL bar de +e [[72 CP PTE ‘udo+@ [f72 2 4 cos: u ‘dura: [[7Z —Z 1005: u" de é cos.u cos.u! do + aa [ [7e gs tcos. u Cos.u" do y dx dz +24 EE d? [A +aa f TL _ à cos.u! cos.u do. y dz Or, si l'on prend de—sin.u du dv, et qu'on intègre par parties relativement à w, on aura d 5 df . (15) NS 2 L'PET ORNE Ter: ER CIMERTE u+at PL sin u du dx dx d> à : : [ —at on sin. u sin.v du—at AU cos. u sin.” u COs.v du : dx dy dx dz aux deux limites 4—0 et u—r, le premier terme de cette valeur est nul ; en le supprimant et prenant l'intégrale ur AS on aura donc CS Re à 2f Momneerne cost cos du æ dx de —atff5Z COS. u Cos.u" du. On trouvera de même à [[ Scos. u die Sin. U! dw— —atff5 F cos.u! cos.u do —atf[ 5% 2 [[S£cos. u" dv =at [[7 AA. A at = COS. u" cos. 4e cos.u'cos.u" du, alé 7, <05. uw" cos.u' du; 136 SUR LES ÉQUATIONS d?9 se ue de quoi la valeur précédente de re réduit Pr at [£a +a° ff TE do +at PT do: on a en même Dre dy d°® 2 dé Das ed Le [T7 dut 21Er- do; l'équation a est donc satisfaite, quelle que soit la fonction Sf; par la première partie de la valeur de e. En général, si l’on satisfait à cette équation par une va- leur quelconque $—T, il est évident, d’après sa forme, qu'on y satisfera également en prenant =: d’où l’on peut conclure que la seconde partie de la valeur de 4 se trouve vérifiée ‘en même temps que la première ; par consé- quent sa valeur entière est bien, en effet, l'intégrale com- plète de l'équation (3). (6) On sait intégrer cette équation sous forme finie, sans le secours des intégrales définies, dans deux cas particuliers : lorsque + n'est fonction que de # et de l’une des trois va- riables x, y, z, de x, par exemple; et lorsqu’eh faisant Lx +7 +2 =—7, cette quantité © n'est fonction que de r et de £. Nous allons faire voir que, dans ces deux cas, l'inté- grale générale coïncide avec les intégrales connues. Dans le premier cas, l'équation (3) seréduità , Hoi es th U0r et son intégrale devient QE fr (æ +at cos.u) t sin.u du dv d. , #S J) F (æ+at cos.u) t sin.u du dv; AUX DIFFÉRENCES PARTIELLES. 137 l'intégration relative à v s'effectue immédiatement, en sorte . qu'on a e=ar ff f(x +at cos.u) tsin.u du +arz [ÎF (x+atcos.u) t sin.u du; de plus, si l’on fait fx dx—df,x, Fxdx—dF,x, on aura, en intégrant par rapport à w, depuis 4—o jusqu'à uU—T, Jftœ+at cos.) Ésin. U du— f, (æ—at) —°f, (æ+at), JE (x + at cos.u) tsin.u du=®T, (æ—at) —ŸF, (æ+at); et par conséquent = (fan, (e+at) + F(a—ai—F,(x+at); ou bien, en réunissant les termes semblables, o—fonct. (x—at) + Fonct. (x+at); ce qui est effectivement l'intégrale connue de l'équation (4). Lorsque + n’est fonction que de£ et der, l'équation (3) devient TOME ALAIN TAN Gates ) si on la multiplie par r, elle prend la forme : ET QD dEripU dé A4 dr® ? et en la comparant à l'équation (4), on voit que son inté- grale doit être re—fonct. (r—at)+ Fonct.(r+at). 1818. 18 138 SUR LES ÉQUATIONS Or, si l'on fait, dans ce cas, f(x, y, z)—=fr, F(x, y, z) —F7r, et, pour abréger, (x+at cos.u) + (y+ at sin.u sin.v) + (z+at sin.u cos.v) —r +2at(xcos.u +7 sin.u Sin. v + 2 Sin. Uu COS. v) + a° t'—=p", les fonctions arbitraires, contenues sous les signes d'inté- gration dans l'intégrale générale, seront fr et Fb, et cette intégrale deviendra e= f[.Fe.t sin.u du do+% [ÎF et sin.u du dv. En vertu de l'équation (1), nous aurons {get sin.u du dv—27 | fe". tsin.0 de, en faisant r+oatreos.b+a tp", et intégrant depuis 6—o jusqu'à 6—7. Si l’on différencie cette valeur de #'* par rapport à 6, on aura —2at rsin.6 dô—25" d;"; par conséquent, l'équation précédente deviendra ff e.t sin.u du do [re e' do'; donc, en faisant 6! fo' do —d.ft', et observant qu’on a pe —r+at,p—r—at, aux deux limites 8—0,6=7#+, on en conclura fffe-tsin.u du du=® 62 (r+at)—f, (rat) )- Je’substitue la fonction F à f; et en différenciant par rap- port à £, il vient 7, ff Fe.tsin.u du dv = ((r+at)F(r+at) + (r—at) F(r—a)). AUX DIFFÉRENCES PARTIELLES. 139 L'expression complète de 4 sera donc p=— (fitr+a t)—°f (r—at)+(r+at)F(r+at) + (r—at)F (rat) ) expression qui se réduit à la forme : p—= (fonct. (r—at) + Fonct. (r+at)) À et qui coincide avec l'intégrale connue. (7) Dans le cas général, l'intégrale de l'équation (3) peut être présentée sous une autre forme , qui sera souvent utile dans les applications, sur-tout lorsqu'il s'agira, comme dans PP Ù , la théorie du son, dè déterminer le mouvement d'un fluide dont l’ébranlement primitif a été circonscrit dans une éten- due limitée. Pour cela, soit ZT COS. 0, y—r sin.b sin.Ÿ, z—r sin.û Cos.Ÿ; les angles 4 et 4 seront réels, et nous aurons DIV ri. Désignons par », 8" et Ÿ', ce que deviennent r, 8 et Y, lorsqu'on change x, y,z, en x+at COS.U, Y+ at SIN. U SN. , z+at sin.u cos.v; en sorte qu'on ait ; x+atcos.u—pcos.b", Y +at sin.u sin. v— p sin.W' sin. 4", z+ at sin.u eos.v—$ sin.W! cos.ÿ", et en même temps er" +2atr (cos. u cos. 0'+-sin.u sin.4' cos. C0) +aé. 18. 140 SUR LES ÉQUATIONS , Les angles 6! et" seront aussi réels, ainsi que w et vw; en dé- signant donc par # un certain angle réel, on pourra tou- jours supposer cos.u cos. 4'+ sin.u sin. 6" cos. (v—%")—cos.u : on aura alors PTIT 2 AV rCOS RE AE); d’où il résulte que la valeur de & sera toujours comprise entre r+at etr—at. Cela posé, représentons par f(r, 0, 4), F (r,6,4), les valeurs des fonctions f et F qui répondent à 4—0; les fonc- tions qui entrent sous les signes d'intégration dans la valeur de &, deviendront (5, 0', 4'), F (7,6, 4’), pour une valeur quelconque de la variable #, et l'intégrale de l'équation (3) prendra la forme : = ff (e, ', y") sin. u du dv PILE (e,0', y’) sèn.u du dv. Dans la théorie du son, les fonctions initiales f(r, 4, 4) et F(r,6,4) seront nulles, quels que soient les angles et6, pour toute valeur de 7 plus grande que le rayon de l'ébranlement primitif; si donc on désigne ce rayon par &, on aura aussi A CAOEUS ECOMRN CAEN SET quelles que soient les variables(! et L', pour toute valeur de e plus grande que z: d’où l’on conclut que la quantité 9, d’où dépendent les vitesses des molécules fluides , ne cessera d’être nulle que quand la plus petite valeur de, ou r—at, sera AUX DIFFÉRENCES PARTIELLES. 141 devenue égale à 4; ce qui suffit pour montrer que le'son se propagera avec la vitesse 4, dans toutes les directions autour de l’ébranlement primitif, quelle que soit la nature de cet ébranlement. Nous développerons dans un autre mé- moire les conséquences qui résultent de l'expression de la quantité +, relativement aux lois générales du mouvement des fluides élastiques. (8) Si l'on suppose la fonction + indépendante de la va- riable +, l'équation (3) se réduit à do ,/d'® CIE dy° d? +55), (5) et son intégrale devient e=fff0+ at sin.u sin. v, z2+ at sin.u Cos.v) tsin.u du dv +5 ffFOr+at sin.u Sin.v, z+ at sin.u Cos.v) Ésin.u du dv. Cette équation (à) est celle d’où dépendent les petites vibra- tions des surfaces tendues. M. Parseval en avait déja donné l'intégrale, mais sous une forme beaucoup moins simple que la précédente. (*) Dans le mouvement des fluides incompressibles, la fonc- tion + dépend de l’équation d? TT ++ To, (6) qui se déduit de la précédente, en y changeant # en x, et (*) Traité des différences et des séries de M. Lacroix, 1° édition, pag. d15. 142 SUR LES ÉQUATIONS faisant a—4/—5. Son intégrale complète sera donc e= ff + sin.u sin. vV/—x, z+xsin.u cos.v V/—5) x sin.u du dv d. 3 ù EL HER +7 fÎF (y +æ sin. u sin.v V/—x, z+ & sin.u cos.v V/—x) x sin.u du dv; mais à cause des imaginaires qui sont contenues sous les fonctions f et F, cette intégrale sera peu utile pour la réso- lution des problèmes, sur-tout lorsque, par la nature de la question, ces fonctions arbitraires devront être discontinues. Il vaudra mieux alors exprimer la valeur de 4 en séries infi- nies d'exponentielles, de sinus ou de cosinus, ainsi que je l'ai fait dans mon mémoire sur la Théorie des ondes. L’équation (6) se présente aussi dans les recherches re- latives aux attractions des sphéroïdes , pourvu toutefois que le point attiré ne fasse point partie du sphéroïde attirant ; car s'il est une des molécules de ce corps, j'ai fait voir ail- leurs (*) que cette équation devait être remplacée par celle-ci: dans laquelle A est, en général, une fonction donnée de æ, Y, 3. On verra plus bas, dans un cas analogue (n° 16), comment on peut toujours déterminer une valeur particu- lière de + qui satisfasse à une équation de cette forme : au moyen de cette valeur, on fera disparaître le second membre de cette équation, et on la ramènera à la précédente, dont nous connaissons déja l'intégrale complète; mais nous ne RE A A DA PP en, ee EN RAA Ne ne à 4 re SIENS (*) Bulletin de la Société philomatique , décembre 1813. 1 AUX DIFFÉRENCES PARTIELLES. 143 pensons pas que ces intégrations puissent être d'aucune uti- lité dans le calcul de l'attraction des sphéroïdes, ni dans les questions qui en dépendent. Equations relatives à la distribution de la chaleur dans les corps solides. (9) Les lois des températures dans un corps solide, ho- mogène et de figure quelconque, dépendent de l'équation do dp. d°® d’o Te (ou te + TA 2 (7) . dans laquelle le coëfficient & est une constante positive. D'a- près la remarque que j'ai faite, il y a déja long-temps (*), cette équation, quoiqu'elle soit du second ordre, est du nombre de celles qui ne comportent qu'une seule fonction arbitraire dans leur intégrale complète. En développant la valeur de 4 suivant les puissances de £, on aura, pour cette Q Ve intégrale, as #5 #9 BU+- HU so 0H 'U+ etc. ; o=U + at SU+ TE Ur 1.2 1 U étant une fonction arbitraire de x, y; z, et la caractéris- tique 5 ayant ici la même signification que plus haut (ne 3). En vertu des analogies entre les puissances et les différences que nous avons déja employées, nous pourrons écrire cette valeur de », sous la forme : ge=(i+at(g+k+r)+ (ge +m+ry ‘ 1.2 a°t5 3 + (g°+#+#)+ etc.) U, 1.2.3 RP RAR el Vers Pr os (*) Journal de l'École polytechnique, 13° cahier, pag. 107. 14/4 SUR LES ÉQUATIONS pourvu qûe les puissances de g, k, k, soient, comme pré- cédemment (n° 4), des signes d'opérations qui marquent des différentielles relatives à x, y, z, divisées respectivement par dx, dy, dz. ‘ Cette derniere expression de % est la même chose que G'OSOIait Rite —e" "8 e e | DFE ë e étant la base des logarithmes népériens. Or, d'après une formule connue, on a at k° I — 2RYVat 7 ! e == le (2 Y> . , 7 . . I 1 les intégrales étant prises depuis a«=—",6—=—", =—;, Q ’1 I I I d jusqu à «+=, 6—+-,y—+": on aura donc Le] Oo o LR ET AT ja 5H er fffe a 6-7 e2(e2+46+ y) EU du de dy; 2 V7 et comme, en vertu des analogies dont nous faisons usage, on a généralement h6+Xk at _ a = e2(82+h6+ y) CAE 2)=f(x+2aV/at,ÿ+26V/at, 2+2YV/at), il en résulte qu'en prenant U=rVrf(x,7,2), nous au- rons, pour l'intégrale complète de l'équation (7) sous forme finie , = ff Tera ay + 26V/at,z+2yV/at) da d6 dy. AUX DIFFÉRENCES PARTIELLES. 145 La fonction arbitraire f se détermine immédiatement, au moyen de la valeur initiale de la quantité +; car, en faisant {—0,0ona ef (x, Y; z) D een) da dé dy; et à cause que fe dfe ae fear, il en résulte =rV f(x, y, 2). (ro) Nous donnerons à l'intégrale que nous venons de trouver une forme différente et plus appropriée à certaines questions, en faisant, u—S COS.U, 65 Sin.U Sin. V, y—S Sin. U COS. V. D'apres les règles connues sur la transformation des inté- grales multiples, nous aurons du dé dy=s" sin.u ds du dv; la valeur de + deviendra —s. == —— . e=fffe f (a+osV/a COS.U, Y + 25V/ at Sin. U SIN. V, Z+ 25V//at sin.u COS. v) s’ sin.u ds du dv; et les intégrales relatives aux nouvelles variables s, w et v, devront être prises depuis s—0, v—0,u—0, jusqu'à —° ; U—7r, v—27r. En effet, si nous considérons «, 6, y, comme les trois coordonnées rectangulaires d'un point quelconque de l’espace, s, u, v seront les trois coordonnées polaires du même point; et comme l'intégrale triple, relative aux pre- 1818. . 19 140 SUR LES ÉQUATIONS mières variables , devait s'étendre à tous les points de l’es- pace, il faudra qu'il en soit de même à l'égard de l'intégrale relative à s, 4, v; ce qui exige que cette intégrale triple soit prise entre les limites que nous avons assignées. (tr) Si l'on fait x°+7*+2=—7", et si l'on suppose que la fonction , ne dépende que der et f, l'équation (7) se changera en celle-ci : pe (8) et la valeur précédente de + deviendra e=ffle res sin. u ds du dv; en supposant qu'on ait, dans ce cas particulier, f(x, y, 2) —fr, et faisant, pour abréger, (æ+2sV/atcos.u) + (y +25V/atsin.u sin v)° + (2+25V/at sin. u cos.v) — 7° + 4sV/at (æcos.u + y sin.u sin. v + z sin. uw COS. v) +/4at S—p". D'après le théorème contenu dans l'équation (1), nous aurons ff e-sin.u du do=ar ffe'.sin.( d8, si nous faisons 1° + 4rsV/at cos.8 + MALTA QT On tire de là p'dp" sin.4 dO = 7 7 AUX DIFFÉRNCES PARTIELLES. 147 si donc on suppose f?'. e' dp'—d.F$"'; on aura fre" sin. à dà=——"="Fe"+ const. Les deux limites de cette intégrale relative à 4, doivent êtré 8—0o et ô—r; pour ces valeurs de 6, on a p"—r+25V/at, p"—r—25}/at; d'où l'on conclut [/fe.sin. ududo=2s [fr sin. À di (# (r+251V/aé} —F# (r—2s1/ai) ) ; ce qui change la valeur de + en celle-ci : = fe (Fra a) —F(r—as))s ds I En intégrant par parties, depuis s—o jusqu'à s—=, et observant que d.Fr—fr.r dr, cette valeur, multipliée par r, devient rer fe [e—2s172f(r—2s1/2) + (r+251/at) f(r + 2s1/at) | ds; et si l'on convient de prendre l'intégrale depuis s—— * jus- : (e] ’x I , x qu'à s—+-; que lon mette, en outre, fr à la place de rrfr, on aura enfin on ts re=fe F(r+25V/at) ds, pour l'intégrale complète de l'équation (3). Lorsqu'on suppose la quantité + indépendante de y et de z, 19. 148 SUR LES ÉQUATIONS l'équation (7) se réduit à dr are Dee ae NO) et l'integrale générale devient e—)) ET f(x+2aV/at) da; mais on a [fe e Ÿ d& dy =x+; et si l'on comprend ce facteur constant, dans la fonction f, on aura simplement p=fe * (+20 V/at) du; ce qui coïncide avec l'intégrale de l'équation (8), en met- tant «, æ et 9, à la place des, r et ro. M. Laplace a ‘donné, le premier , sous forme finie, cette intégrale de l'équation (9), de laquelle il était facile de conclure, par analogie, l'intégrale de l'équation (7), qu’on a trouvée plus haut (n° 9). Equation des surfaces élastiques vibrantes. (12) Dans mon mémoire sur les surfaces élastiques, j'ai prouvé que les petites vibrations des plaques sonores, ho- mogènes et d'une épaisseur constante, dépendent de cette équation du quatrième ordre : [4 to (gs dés diz SR (10) dt° CIE) ax dy T dr! TN b° étant une constante positive. En développant la valeur de z suivant les puissances de £, et prenant ensuite la somme de cette série par un procédé semblable à celui du n°9, on | <= ER AUX DIFFÉRENCES PARTIELLES. 149 obtiendrait directement l'intégrale sous forme finie de cette nouvelle équation; mais il sera plus simple de la déduire de celle de l'équation (7), de la manière suivante. En supposant la quantité indépendante de z, l'équa- tion (7) se réduit à a (= et son intégrale devient effet + eva, y L26V/ai) da d6. Te Si pue différentie, par rapport à #, la valeur précédente de © 4, il vient CA d°? d’oN | GIE Fe dx° dt que dy’ Tr): et si l'on substitue cette même valeur de =. dans le second membre de cette équation, on a do _dtp ,d'e Ta a (7 232 dy À dy Or, en comparant ce résultat à l'équation (10), on voit que l'on satisfera à cette équ i——\b"; et pre- nant ensuite z—9; pour obtenir de cette manière l'inté- grale complète de l'équation (10), nous ferons donc suc- eessivement: a—b V/—1, a——by/—x, dans l'expression de ®; nous changerons la fonction arbitraire qu'elle contient, en même temps que le signe deL/—x ; puis nous prendrons pour z la somme des deux valeurs de 9; ce qui donne do (fete F(a+ 2aV DEV, pee) ae dé + fe TE, à + 26e) da dé 150 SUR LES ÉQUATIONS f et F étant les deux fonctions arbitraires que comporte l'intégrale complète de l'équation (10), d'après la forme de cette équation. Il est aisé de faire disparaitre les imaginaires qui entrent dans cette expression de z; il suffit, pour cela, de mettre à la place de x et 6, = et = dans la premiere inté- œ 6 IE et ZE VV V—vV= outre les exponentielles imaginaires, en sinus et cosinus d’arcs réels, il vient ë=f f sin. (a°+6°) f(x +2al/5r, Y+26V/br) da dé + ff cos. (a°+6)F (x+o2al/6t, 7+26V/0t) da dé; grale, et dans la seconde; changeant en feet F sont des fonctions arbitraires qui ne sont pas les mêmes que les précédentes ; mais les limites des intégrales n’ont pas changé, et sont toujours a=+* ; GET On donnera encore une autre forme à cette expression de z, en faisant T+2al/br=p, Y+26V/H—=q; ce qui la change en celle-ci : NES , —p) + (y—9)° = EN PAC q) sin. ét dp dq : ; PR Anpie Sat fe (P; g) cos. (Ep . ) dp dq. J'avais déja donné, sous ces différentes formes , l'intégrale de l’équation (10); M. Fourrier a aussi integré cette équa- à tion, par d'autres moyens, dans un mémoire sur les vibra AUX DIFFÉRENCES PARTIELLES. 15; tions des surfaces élastiques, qui n’a point encore été im- primé. (*) (13) Les limites de l'intégrale relative à p et g devraient EAU I I : - aussi être p— +=, g—=Æ"; mais à cause que les fonctions arbitraires f et F peuvent être discontinues, et qu’elles ne contiennent pas d’autres variables que P et q, il est évident que ces limites sont illusoires ; car on peut supposer ces fonc- tions, nulles dans une étendue quelconque des valeurs dep et g ; ce qui revient à prendre les intégrales dans des limites qu'on est libre de choisir arbitrairement. Il en résulte même que chaque élément de ces intégrales doubles doit satisfaire isolément à l’équation (10), en sorte que cette équation sera satisfaite en prenant 2° sin. (ts, ) on) + © cos. _ ) A) ; ou la somme d’un nombre quelconque de termes semblables ; c, c', p et q étant regardées comme des constantes arbi- traires. C'est, en effet, ce qu'il est aisé dé vérifier par la substitution directe de cette valeur particulière de z dans l'équation (10). La même remarque s’appliquerait à l'intégrale de l’équa- tion (7), si l’on y faisait T+2aV/at—=p, SELEV ag, 2+ 2er; ce qui changerait la fonction arbitraire, contenue sous les ? signes d'intégration, en SP; 9; r): les limites des inté- NE RE NE cp ce Re. Met (*) Voyez sur ce point le Bulletin de la Société philomatique, août et septembre 1818. 152 SUR LES ÉQUATIONS ’ gralés relatives à p, q, r, cesseraient d’être déterminées ; et généralement il en est ainsi, toutes les fois que les fonctions arbitraires ne renferment que les senles variables auxiliaires par rapport auxquelles on doit intégrer. (14) Dans les applications qu'on pourra faire de l'inté- grale complète de l'équation (10), les deux fonctions arbi- traires qu'elle contient, devront être déterminées, en gé- dz : néral, d’après les valeurs initiales de z et; mais, avant de di? faire £— 0 dans l'expression de © , il est nécessaire de lui faire subir la transformation suivante. Si l’on différentie, par rapport à £, la premiere expres- : 2 FEAOOGE sion trouvée pour z, et qu'on fasse PE ee on a CET _— (fe —0? MERE Penvæe 0e. adadé fe à PfCe+ a y+26/ 77) Édadé ); en supprimant, pour abréger, la partie relative à la fonction F, qui est de la même forme, et se traitera de la même ma- nière que celle-ci. J'intègre par parties; et à cause des li- mites «+=, 6—+>, il vient Oo o — 4° LES en A PRISE fe S'(r+oaV be, +261 87) ada— ave fe sf (t+aaV Dev, Y+26V/01V x) day Jef a+ears, Y+26V/0V x) 6d6— av fe (a+, +267) dû, étre out il AUX DIFFÉRENCES PARTIELLES. 153 df' d en supposant EF, = Fa Soit encore, pour abréger, Sie RL 7) om 7) ŒEF(x,r d'F(x,y) À ÉTEND à ÉTEND 6 (x, y); -en ayant égard à-la-fois aux deux fonctions feet F, nous aurons mi Île "Te (a+oaV 7, +261 F7) da dé D [fe TT à (a+ aa T7, 7 +267) du dé pour l'expression de = dont il faudra faire usage. (15) Maintenant supposons qu’on ait 2=ÿ (ny) EX (7) quand # " 0 ; il en résultera NEC N+Fn) [fee da dé, Mn) Er (e (æ,7)—8(&,7))/|] AT dde En observant que ffe—* A d6—+, la premiere .de ces deux équations donne AODESIONETION! et si l’on fait RO (Se) —F (x, 7) )=2; la seconde devient Pen ml (CAAE (tt) 1818. 20 154 SUR LES ÉQUATIONS Admettons, pour un moment, que la fonction Y soit nulle ; on satisfera à cette dernière équation en prenant Z—o; et alors on aura SRr)=rF(2r)= SE 4% (7) Au moyen de ces valeurs des fonctions f et F, l’expression générale de la quantité z devient 2 (fe Tyran, Y+26V/577 =) dadé + fe tea He, +207) da dé); ou bien, en faisant disparaitre les imaginaires, comme dans le n° 12, elle se réduit à 2e ff sin. (a° +6 )y(x+2al/0é, Y+26V/6t) da dé. Cette valeur particulière de z satisfait à l'équation (10), ee d 5 et aux conditions z—% (x,Y), F=0; quand #—0; si l'on y met la fonction # à la place de ÿ, qu'on la multiplie par dt, et qu'on en prenne l'intégrale par rapport à #, de ma- nière qu'elle s'évanouisse quand {—0, on aura une autre valeur particulière de z, qui, d'apres la forme de l'équation (10), satisfera encore à cette équation, et qui donnera :—0, dz L LL Re ri =Y (x, 7), quand 4—o; réunissant donc ces deux valeurs particulières de 3, nous aurons sa valeur complète, savoir : TOI = RE 2 ff sin. (a +6 )p(x+aal 0, y+26V/be) da dé 1 LJf] sin. (a° +6) Y(x+2al/Dr, y+26V/0t) da dé dt. Si l'on change, comme précédemment (n° 12), les va- es AR pes drone AUX DIFFÉRENCES PARTIELLES. 155 riables et € dans les variables Pp et g, cette valeur de z prendra la forme : Fe. f y (pq) sin. (EDEN ) dp dq + ff Y (p; q) sin. (en on) “a dp da. Ici il faudra que les intégrales relatives à p et q soient prises depuis p=—;; q=—; , jusqu'à P=+:, q=+:, non pas pour que la valeur de z satisfasse à l'équation (10), mais pour qu'elle remplisse les conditions z— (x, y); ee Y(x, Ÿ) quand E—=0. . ‘ (16) La manière dont nous venons de déterminer la partie de z qui répond à la fonction Y, est la plus simple; mais elle n’est pas la plus directe; et elle pourrait laisser quelque doute sur la généralité du résultat auquel nous sommes par- venus. Pour qu'il n’en reste aucun, il faut que la valeur de la quantité Z soit tirée de l'intégrale complète de l'équation (11): en faisant abstraction de la fonction 4, on aura ensuite Z PAC Dee M CN D ST mt etil s'agira de savoir ce que devient l'expression de z, rela- tivement à ces valeurs des fonctions f'et F. Or, pour intégrer l'équation (11), il faut d’abord con- naître une valeur particulière de Z qui satisfasse à cette équa- tion : nous prendrons, pour cette valeur, 2=2 f[[ff% 9 (EP OEDN ag dh dp dg; I les intégrales étant prises depuis g—0, À=0, P——5: 20. 156 SUR LES ÉQUATIONS il en. ré- s En: 1 DRE. I Ta 1 PET JEUNE Te Jusqua 8—° ; LE PRÉ DES sultera EN: 2e CENTS =/f) Y(p,q )cos.g (x—p) cos.h (y—q) dg dh De et, d'après un théorème connu sur la transformation des fonctions (*), le second membre de cette équation coïncide avec celuï de l'équation (1 r); par conséquent, la valeur par- ticulière de Z que nous avons choisie, satisfait effectivement à cette équation. Cela étant, nous aurons la valeur la plus. générale de cette quantité, ou l'intégrale complète de l'équa- tion (11), en ajoutant à cette valeur particulière une quan- tité de la forme : nm (a+yv =) +0 (ax); I et IL désignant des fonctions arbitraires. . x : ee Il suit de là, que la connaissance des valeurs de z et qui répondent à #—0, ne suffit pas à la détermination com- plète dés fonctions f'et F; mais il n’en résulte aucune indé- termnation dans l'expression générale de z; car on peut prouver que les fonctions arbitraires I et 1’, qui entreront dans les valeurs de f'et F, se détruisent toujours dans l'in- tégrale complète de l'équation (10). En effet, relativement à la fonction IH; par exemple, nous aurons Ja, y)=—F(z, Dr. (+77 — 1); (*) Mémoires de l'Académie, année 1816, pag. 87. > PE RCE RS ENT LT ÿ De” cos.g (t+2aV/ Dry —1—p) da—V/rcos.g (x—p)e AUX DIFFÉRENCES PARTIELLES. et. par suite [nl QT 3 . 2 — fer ten Il (a+ 20/5 + YY x +26V/— iv) da dé — ffe taf I (x pacs pee +7 x 261717) da dé . or, en échangeant entre elles les léttres + et 6 dans la se- conde intégrale, ce qui est permis, on voit que ces deux intégrales sont identiquement les mêmes; par conséquent, la partie dé la valeur de z, qui répond à la fonction 1, est égale à zéro. Il:en serait de même à-l'égard de la fon ction d'; ainsi, en substituant les valeurs de f'et F dans l’expres- sion de z, il suffira dé tenir compte du terme de Z qui ren- ferme la fonction Y. (17) Cette substitution donne, pour résultat immédiat, une valeur de z composée de deux intégrales sextuples, qui différent l’une de l’autre par le signe de Lx, et qui se rap- portent aux variables 4, 6, g, k, p et q ; mais nous allons voir que leur somme se réduit à une intégrale triple, tive à p et 4, .et à la variable £. connues... Un È : c Je cos.h(y+26V/brv=5—q) dé=V/r? cos. h(y—q)e 2 rela- D'abord, les limites étant +”, on a, par les formules % “bg 7 —bhiV = Je fais le produit de ces deux quantités ; j'y change ensuite 158 SUR LES ÉQUATIONS le signe de 1, ce qui donne un second résultat que je retranche du premier ; il vient —92rV/— 1 cos.g (x—p) cos.h (y—q) sin. (g°+h?) be; au moyen de quoi, la partie de la valeur de z, que nous vou- lons déterminer, devient —% ff Y Cp, 9) T ap dg, en faisant, pour abréger, ù de dh T— —f f cos. g(æ—p) cos.h(y—q) sin.(g*+hk)bt. Hate “;: Si l'on différentie cette quantité par rapport à {, on aura TD f [e0s.g (2—p) cos.h (y—g) cos. (8° + 4°) bt.dg dh —fc0s.8(x—p )cos.g” bt.dg. [cos.h (y—q}cos.h* bt.dh id f cos. g (æ—p)sin.g° bt.dg. [ cos. h (y—q) sin.k°bt.dh. Or, ces intégrations relatives à g et » peuvent s'effectuer par les méthodes connues : les limites étant zéro et l'infini, on à évidemment ù feos.g (æ—p)cos.g* bt.dg=} cos. (g° bi+g (æ—p)) dg, pourvu que l’on prenne la seconde intégrale depuis g=—; , jusqu'a g—+ 25 celle-ci est la même chose que cos. (g° be EDS dg=cos. EL cos.g* bt.dg + sin. in. EP sin. g° bt.dg; el, & mA Ÿ LA dm ec tt "tal RS cs _ AUX DIFFÉRENCES PARTIELLES. 199 donc, à cause de f c0s.° be. dg= [ sing’ bt.de=V —, On aura fees. g (x—p) cos.g" bt. dg=: CA (cos. A + Sin: er Ÿe et l’on trouvera de même Jos (æ—p) sin.g* bé. dg—> V to PT us ER on RE. Les intégrales lines à À auront des valeurs semblables ; en les substituant avec celles des intégrales relatives à g', dans la valeur précédente de _ , il vient LE (ep) +4) , AU 4 0e et, par conséquent , ( zp} +(y—4). PE Te . T=7 sin. Tr en l'intégrale étant prise de manière qu’elle s’évanouisse quand t—0, parce qu'on doit avoir alors T—o. Nous aurons donc enfin 2p(y—gŸ d = [fre nan. EI U LE. LE ap dq: résultat qui coïncide avec celui du n° 1. (18) Si la quantité z est indépendante de l'une des deux variables x ou y, dey, par el , l'équation (10) se réduit à d?z 2 . TA LE 0j. (12) son intégrale complète devient alors = ff+ (æ+2aV/5t) sin. (a«°+6°) da dé + ITR (æ+2aV/Dt) sin. (a°+ 6°) dt da dé; 100 AUX DIFFÉRENCES PARTIELLES. les intégrations relatives à 6 PERS s'effectuer ,-et 1l en ré- sulte V6) (sn. a° + cos. x°) da : += ie (æ+2a1/6i) ce 2°+cos.a°) dtda. 2% . En observant que sin. 4° + cos. «°— sin. Ce == 2) et faisant æ+ 24V/bt—=p, On a aussi = [ap sin. (+1) "+ += ff on. (£ rl +7) 2 D = dpi. l'intégrale relative à # doit s’évanouir quand 4—0, et les intégrales qui se rapportent à p doivent être prises depuis P=—; , jusqu'à P=+> , afin de représenter l’état initial, J dz Se ï ou les valeurs zx et Ti Y*, qui répondent à {—0. Ce cas particulier est celui des simples /ames élastiques, dont Euler a déterminé les vibrations, mais d’après une in- tégrale particulière de l'équation (12). Equation lineaire du second ordre, à deux variables indépendantes, et à coëfficients constants. (19) La forme la sn, générale de cette équation est d?z A + robe OE Ho ne = +Fz—0; nous la prenons pour Fu parce que différentes ques- tions de physique ou de mécanique, conduisent à des équa- tions qui y sont comprises comme cas particuliers. FIRE RITES dati le ne et dt AUX DIFTÉRENCES PARTIELLES. 161 Changeons la variable æ' en une autre variable É, qui soit telle que l’on ait psg a d'Emma: m étant une constante indéterminée. Notre équation de- - viendra en faisant, pour abréger, A'—A +2Bm+ Cm’; B'—A+Bm, D'=D+Em; de sorte qu'en prenant À + Bm—o, elle se réduira à Age + GE PRIS te + Fo, Soit, de plus, MA : FOrBHpO 149" selle os il ” : ’ # # étant une nouvelle variable, e la base des logarithmes né périens, et p et q deux RE indéterminées. Si l’on! de Fu supprime le facteur e? e1 qui se trouvera commun à tous les termes de l'équation, qe la Us dé! cètte valeur de z, on aura CODEN ES LR de du et les valeurs de P, Q,R, seront P=z2A'p+D! Q—=20C3g +E, —A!p+Cg+D'p+E44rF. 1818. | 21 102 | SUR LES EQUATIONS Si aucun des deux coëéfficients A' et C n’est égal à zéro. , on pourra déterminer p ety, en faisant P—0o et Q—o; et alors l'équation que nous considérons sera réduite à la forme d° TT — a+ be. (13) Si, au contraire, l'un de ces coëfficients est nul; qu'on ait, par exemple, A'=—o, on ne pourra plus poser l'équation P—o; mais on pourra toujours déterminer p et q, en fai- sant Q—0o et R—o; ce qui réduira l'équation proposée à cette autre forme : Ainsi, l'équation générale du second ordre peut toujours être ramenée à l’une ou l’autre de ces deux formes particu- lières : nous avons intégré précédemment la dernière équa- tion; il ne nous reste donc plas qu'à considérer l'équation (Re dans laquelle a et b sont des coëfficients constants qui peuvent être positifs ou négatifs. : (20) Pour exprimer commodément son intégrale en série ondonnée, suivant les puissances de #, nous, ferons usagé de cette notation abrégée : X étant une fonction quelconque de æ, nous poeserons ltX EURBX IX, dire et nous dépengions pari X,9°X, etc., ce que dévient à X, lorsqu'on y remplace X par 5x, d° x, eté.; en sorte qu'on ait généralement LASER 5 RONENX D. nt oi, es Éd AUX DIFFÉRENCES PARTIELLES. 163 Cela posé, l'intégrale complète de l'équation (13) sera 2 buse t° 3 | PTIT ETAT ENT 340 Mrs pr fæ + etc: Ne) 45 ; î + Er RTE WE F x + etc. ; fx et Fx étant les deux fonctions arbitraires qu'elle doit renfermer. La premiere partie de cette valeur de + se déduit de la se- conde, en la différentiant par rapport à £, et y remplaçant la fonction F par f'; si donc nous ji T=tFe+ For d' Ex + etc., _ 4. ab il nous suffira de chercher l'expression de T sous forme finie. Or, d'après les analogies connues des puissances et des différences, on a généralement S"Fx=(ak” ce BY°Fr, pourvu que, dans le développement du second membre de cette équation, les puissances de Æ soient des signes d'opé- rations qui indiquent des différentielles de F x, divisées par dx; de cette manière, on aura T= (+ (ar +) + . et en vertu des équations (2) du n° 2 .. si l’on fait, pour abré- quai Û » P r ger, À V/a cos.u +V/6 sin.u sin.v—Y, cette valeur de pourra s’écrire ainsi : 3 = ffQG+er+ Re de + ete. )£Fa sin.u du dv; AT, (ak + 0) +etc.) £Fæ; | 164 SUR LES ÉQUATIONS les intégrales étant prises depuis u—0 et v—o, jusqu'à 27, Cette dernière expression est la même DE Me” Ex sin.u du dv; 4T mais, d’après les analogies citées, on a U= Th EUNVE— chose que ext V/a cos. u Fxz—EF (x + tV/a cos. u); donc, à cause de éY 4Vsinusin. v ktV/acos.u e = 6 € — ; la valeur de T deviendra be ff A et "E(x+1tVfacos.u) sin.u du dv. Il résulte dé là, qu'en comprenant le diviseur 4+ dans. les fonctions arbitraires f et F, l'intégrale complete de l’équa- tion (13) sous‘forme finie, sera SEE s re fe a tra cos.u) t sën.u du dv d. ÉV/bsin.u sin.v : IE f(æ+tV/a cos.u) tsin.u du dv. Les deux fonctions f et F se détermineront immédiatement, \ Reset d e d’après les valeurs initiales de 4 et 5; car, en faisant {—0, on à g—4r fx, 2 ire di ch UE b FL 2 À D Si l’on fait 34", — = b', on pourra écrire l'équation (13) de cette autre manikre : d° g: à PL d° (9 AR VAE EN AUTRE AUX DIFFÉRENCES PARTIELLES. | 165 et alors son intégrale complète aura la forme : e=ffe° RAA 2 (t+axV/a cos.u) æsin.u du dv + le: LE: PEU fl (ta a cos.u) x sinu.du dv; ZT les limites des intégrales étant toujours les mêmes que pré- cédemment , et. f’ et F' désignant les deux fonctions arbi- traires. Ces fonctions se détermineront , dans ce cas, au d Er ; moyen des valeurs de + et + qui répondent à æ—0 ; car, pour cette valeur de x, on aura d si b—4rf't, D hr FE. (21) Si l’on veut vérifier si la valeur de 4 satisfait à l’équa- tion (13), on suivra la même marche que dans le n° 5: on considérera seulement la partie de cette-valeur qui dépend de la fonction F, et on l'écrira sous cette forme : e=ffe' V8 cos.u F (&+4a A) LA C Pour effectuer les intégrations, on prendra à volonté l’un ou l’autre de ces deux systèmes de valeurs : cos.u'—sin.u sin.v,; dw—sin.u du dv; cos. u —sin.u! sin.v',. do—sin.u! du! dv'} et l’on intégrera, dans le premier cas, depuis u—0o , v—0, jusqu'à #—7r, v—2r; et, dans lejsecond , depuis, 4'—o, v'=o, jusqu'à u'=—7r, v'—2r : les résultats de ces deux modes d'intégrations seront les mêmes, quelle que soit la fonction F. En différentiant deux fois de suite par rapport à £, "106 SUR LES ÉQUATIONS il vient . tV/6cos.u d°F RE € at [fe Ta C0.” a do es t 720 j $ TA Éreqe 7 COS. u COS. ! do + k JF ave ff AMP cos. u do +befferrese F cos.’ u! do tV/3 cos.u' +217 [fe PCR Role L'intégration par parties donne 4 tV/56cos.u' R ; ! 4V/b cos.u' : j 2 fe F cos.u' sin.u du —e FE sn.°u Z P'EV/Geos.u : LG, +45 fe GRR Fsin°u' du ” tV/cos.u dF : —n/à fe LAS —— sin. *U'.COS: “a sin.v du'; . dx le premier terme de cette expression s'évanouit aux deux limites u'=0 et u!=#; en prenant donc do—sin.u" du! dv’, et observant que sénu' sin. v'=cos.u, il en résultera a [fe GE FES Fcos.u' do=utffe" UE. Fsen. u'do aa [fer à . COS. U COS.U' Hé d’où l’on conclut ensuite PR or ffe Ge Su ee cos. u du dt° — t AAA + éV/ab iffe ht de Ta COS. U cos.u'.de “| AUX DIFFÉRENCES PARTIELLES. 167 oz [fer LE cos. de \ : SA be fe" eat u' F8 Nous aurons de même, en intégrant de nouveau par parties, ——COS.U SU. U du—e LME ouf et V6 sin. u Sin. v dE V6 sin.u sin. v dE 2 dx dx tV/6 sin.usin, v dF £ a Age — sin." U COS.U sin: Ÿ du dx t dE +H7a fe 4/5 sin. HUE ‘sine dois A supprimant donc le premier terme de cette expression, qui : observant que sin. u. sin.v—cos.u', et prenant do—sin.u du dv, nous en conclurons 2V/a ÎT: ÉV/F cos. è “cos. ado [fe BCE qu LU COS.U ÉVécos.u d'F : + at [fe RICE = sin. w do ; dx a) : ce qui réduit la sus précédente de © TE à celle-ci: ra ae a Je Pot du +bt [fe tV/6 cos.u' nya À nd Or, cette valeur est en même temps celle de la quantité es ‘+ bo; il s'ensuit donc que l'équation (18) est satisfaite, du moins par la partie de la valeur dé 4, ‘qui‘dépend de la fonction F. Il est inutile de soumettre à un calcul sémblable la partie dépendante de la fonction f, par la raison que si l’on satis-. do 168 5 SUR LES ÉQUATIONS fait à une équation linéaire à coëéfficients constants, par une valeur quelconque o=—T, on y satisfait aussi en prenant =; ainsi l'intégrale complète que nous avons trouvée pour l’équation (13), satisfait effectivement à cette équation; ce qu'il s'agissait de vérifier. , (22) Il est remarquable qu’on soit obligé, pour cette véri- fication, d'effectuer une partie de l'intégration sur les va- riables w' et v', et une autre pañtie sur les variables z et v: Ce changement de variables, dont nous avons déja fait usage dans le n° 5, peut encore être utile dans d’autres occasions. Il est fondé sur une proposition dont l'énoncé le plus simple et le plus général est celui-ci : soit T—COSU, Y—SIN.U SIN, 2— Sin. u COS. V, et f(x, y, z) une fonction quelconque de ces trois quan- tités; l'intégrale double ff (x, 7, z) sin.u du dv, prise depuis u—o et v—o, jusqu'à u—+r et —2r, conservera toujours la même valeur, quelque permutation qu'on fasse entre les trois quantités x, y, z; c’est-à-dire, qu'entre ces limites d'intégrations, on aura toujours ff, Y3 =) sinu du av= ffrta, 2, Y) sn. du dv =[ff6 x, y) sin.u du dv, etc. Cette proposition serait évidente , si la fonction F était symé- trique par rapport aux trois variables; on peut aussi la véri- fier, en supposant cette fonction développable suivant les puissances entières et positives de ces variables; mais, pour la démontrer d’une manière immédiate et générale, il faut AUX DIFFÉRENCES PARTIELLES. r6Q recourir à une construction géométrique, comme nous l'a- vons déja fait dans un cas semblable (n° r). | Concevons donc une sphère décrite d’un rayon pris pour unité; par le centre de cette sphère, menons arbitrairement trois axes rectangulaires ; nous pourrons supposer que x, y, z, sont les cosinus des angles qu’un rayon de cette sphère fait avec les trois axes : w et v seront les coordonnées polaires qui déterminent la direction de ce rayon ; sin.u du dv sera l'élément de la surface sphérique qui répond à son extré- mité; et enfin l'intégrale double # (£ JS (æ, y, 3) sin.u du dv s'étendra à tous les points de cette surface. Or, nous pou- vons changes les coordonnées et #, en deux autres coor- données z' et v', et prendre celles-ci de manière que les trois cosinus æ, Y, z, Soient Z—COs.u'; Y—SiN.U SiN.V, Æ—SNU COS. ; l'élément de la surface sera alors sn.u' du'dv'; et, pour étendre l'intégrale à la surface entière, il faudra la prendre depuis 4'—0o et v'—0, jusqu'à w'—r et v'—27#. Le ré- sultat de ces intégrations relatives à ' et v', sera alors le même que celui qu’on obtient en intégrant par rapport a x et v; en sorte que l'on aura | k IX cos.u, sin.u sin.v, cos.u cos.v) sin.u du dv fr (sin.u! cos. v', sin.u' sin.v', cos.u') sin .w du! dv! ; ce qui revient à dire que l'on peut permuter entre elles les deux quantités x.et z sous la fonction f, sans changer la va- leur de l'intégrale J J UGS ” sin.u du dv, pourvu qu’elle 1818. 22 170 SUR LES ÉQUATIONS soit prise entre les limites données. Il en sera de même évi- demment, par rapport aux autres permutations qu’on peut faire subir aux trois quantités x, y, z. Remarques génerales sur les équations linéaires à coëfficients constants. . (23) Les procédés d'intégration que nous venons d’em- ployer, peuvent s'étendre à un grand nombre d’autres équa- tions linéaires à coëéfficients constants; mais nous pensons qu'il suffit d’avoir considéré celles de ces équations qui se rapportent aux différentes questions de mécanique ou de physique, dont les géomètres se sont occupés jüsqu’ici; nous n'ajouterons donc pas d’autres exemples aux précédents, et nous terminerons ce Mémoire par quelques remarques sur la forme des intégrales de ce genre d'équations aux diffe- rences partielles. Considérons une équation de cette espèce, d’un sordre quelconque et contenant aussi un nombre quelconque de variables indépendantes; désignons ces variables par #, +, F, etc,, et par o la variable principale. Supposons que cette équation ne renferme aucun terme indépendant de + ou de. ses différences partielles ; on y pourra toujours satisfaire en prenant - = A tp+Hgx+ hy+etc. À,p, g, h, ete., étant des constantes indéterminées , et e la base des logarithmes népériens. Si on substitue cette valeur dans l'équation proposée, la constante À restera arbitraire; une soule des autres constantes, p par exemple, sera déterminée AÜX DIFFÉRENGES PARTIELLES. 171 en fonction de #, À, etc.; en sorte que, y compris le coëfli- cient A , éette valeur des renfermeraun nombre de constantes arbitraires égal à celui des variables indépendantes. L'équa- tion qui déterminera p sera d’un degré égal à l'indice de la plus haute différence partielle, relative à £, qui soit contenue dans l'équation proposée; en désignant ses racines par p, PP. valeur de $; on pourra aussi changer arbitrairement les quan- tités À, g, h, etc., et prendre pour $ la somme des valeurs particulières qui résulteront de ces changements; ce qui donnera ERA Ait , etc., on pourra les employer successivement dans la AS add M7. a tee CC les caractéristiques > indiquant des sommes qui s'étendent à toutes les valeurs , réelles ou imaginaires, de A, g, k, etc. Non-seulement cette expression satisfera à l'équation propo- -sée; mais elle en sera l'intégrale complète, développée en série d’exponentielles; et ce qu'il y a de particulier à cette forme d'intégrale en série, c’est qu'elle ne renferme explicitement - aucune fonction arbitraire, et que chacun des termes de la sé- rie satisfait isolément à l'équation aux différences partielles. Il est permis de supposer que les quantités g, , etc., changent par degrés infiniment pétits, d’un terme à l’autre de chaque série; si l’on prend en même temps, pour le coëf- ficient À, une fonction arbitraire de ces quantités, l'expres- sion de % deviendra e=fe'? Re ee h, etc.) dg dh etc. | 4) + fe Ra or 2 (g, k, etc.) dg dh etc. + etc. 22, 172 SUR LES ÉQUATIONS Les limites de ces intégrales resteront indéterminées ; en sorte qu’elles ne sont pas des intégrales définies. La substitution de la caractéristique cf à la caractéristique >, n’a pas changé de nature, la valeur de 4 : cette derniere expression est toujours une série d’exponentielles multipliées par des coëfficients ar- bitraires, dônt chaque terme satisfait isolément à l'équation aux différences partielles proposée; et les fonctions f, f”, etc., étant arbitraires, et pouvant être discontinues, ces deux ex- pressions (a) et (b) sont équivalentes l’une à l'autre. (24) On ne doit point oublier que ce ne sont pas.des ex- ” pressions de la vature de l'équation (2), que les géomètres ont en vue, lorsqu'ils cherchent les intégrales des équations aux différences partielles sous forme finie, sans quoi il fau- drait dire que toutes les équations à coëfficients constants, et un grand nombre d’autres équations linéaires , sont.inté- grées depuis longtemps: Cependant il y a deux observations importantes à faire sur ce sujet. 1° Les Pins équivalentes (a) et (&) pee sou- vent servir à résoudre les problèmes qui conduisent à des équations aux différences partiellés; et comme elles satis- font à ces équations de la manière la plus générale (*), on ne peut pas craindre, en en faisant usage ; de restreindre aucu- nement la généralité des selutions. C’est, en effet, la marche que nous avons suivie, M. Cauchy et moi, relativement à la théorie des ondes, et M. Fourrier, dans son Mémoire sur la distribution de la chaleur dans les corps solides. (*) Voyez sur ce point la note imprimée dans le Bulletin de la Société phylomatique, novembre 1817. | ! | j x AUX DIFFÉRENCES PARTIELLES. 173 Il arrive même quelquefois que ces expressions sont plus appropriées à la solution de certains problèmes, que ne le seraient les intégrales sous forme finie. Ainsi, par exemple, dans la théorie des ondes, lorsqu'on ne considère la .propa- gation du mouvement que dans'un seul sens horizontal, l’é- quation du mouvement du fluide se réduit à d? dx° dei. Fe 2 son intégrale, proprement dite, est “ g=ffr rs) + (arr); mais 1l serait difficile de-la:faire servir à déterminer les lois de cette propagation; et lon est obligé, pour cet objet, de recourir à l'expression de + développée en série d’exponen- tielles réelles. ou imaginaires. Il existe des théorèmes au moyen desquels on peut introduire ; dans les expressions de cette nature, des fonctions arbitraires qui représentent l'état initial du fluide, ou généralement, du système de points matériels que l'on considère; la difficulté de la question con- siste ensuite à discuter les formules qui en résultent, et à y découvrir toutes: les lois: du phénomène: dont on s'occupe. La théorie des ondes offre, ce me semble, jusqu’à présent, l'exemple le plus complet d’une semblable discussion. 2° Dans différents cas particuliers, ces expressions (az) ou (b), conduisent, par des transformations convenables, aux intégrales sous forme finie. Cette remarque a déja été faite par plusieurs géomètres; et c'est aussi sur un moyen sem- blable , qu’est fondée la méthode de Lagrange pour intégrer les équations linéaires aux différences finies et partielles. L - , 174 SUN LES ÉQUATIONS Nous allons faire voir qu'au moyen du théorême que nous avons démontré au commencement de ce Mémoire (n° 1), l'équation du mouvement des fluides, qui en est l'objet prin - cipal, peut aisément s'intégrer par ce procédé. (25) Reprenons donc l'équation d'où 2 CASE d'® +7) APT RN TE + F7 Son intégrale générale , ue en série d’exponen- tielles, sera t h pe ] kz NA. P+-Ex + TOURS AT atp + gx +hy + ur les quantités A, À’,£, », k, sont indépendantes des variables t, &,Y, 2; on ap=V/g +A +8, et les caractéristiques > iudiquent des sommes qui s'étendent à toutes les valeurs pos- sibles de A, A',g, h,k, réelles ou imaginaires. En changeant les coëfficients À et A', en d’autres B et B', nous pourrons écrire cette valeur de +, sous la forme: v==YB (e*tP_ 074?) es +Ar + k£z + SB' (er er tr) DÉFAUT or, si nous faisons, pour abréger, £&COS.u + h sin.u sin.v + ksin.u cos. V— x, : RES at et que nous prenions, dans l’équation(r}du n° 1°, fa«=e" ”, nous aurons ff" sin.u du don (ele P), atp AUX DIFFÉRENCES PARTIELLES. DE GE DES d'où nous concluons at 1 ar } at eT Per 2. [fe #{sin.u du do, t at Pine AURUUE a ff EE 4 sin.u du dv: ; 2% dt ; ct par conséquent. Aer sta, t sin.u du dv. Er Ke A ee t sin.u du dv; lés intégrales étant prises depuis 4—=0, v— 0, jusqu'a UT, V— 7. p Posons maintenant ze hy. k2 : © 3Bpef e Te fn Vs z); 27% Dre dt LA Ë NARER = 3B' Edre (1e 2__p (x, Ÿ z); dé.sorte que f et F soient deux fonctions arbitraires et in- dépendantes l'une de l’autre; nous en conclurons PET: Le u\ 0 A !Y 1 mn BpenNt Te OU 7 NCAA) 2: ! ! ! ee CN AN NE et =F(x+zx, y+y', 242), quelles que soient les quantités x’, y! 2! : en prenant donc æl=at cos.u, y'—=at sin.u sin.v, 7'—at sin.u cos.v, et remettant pour « ce que cette lettre représente, nous 170 SUR LES ÉQUATIONS AUX DIFFÉRENCES PARTIELLES. aurons les deux sommes > qui entrent dans la valeur de +, exprimées au rover de ces fonctions jet F; et en substi- tuant leurs expressions dans celle de +, elle deviendra défi- nitivement D— ff (æ+ at cos.u, Y+at sin.u Sin. v, z+at sin.u cos.v ) t sin.u du dv + Zi JF (a+at COS.U, Y + Al Sin.U SiN.V, ; 2 + at sin.u cos. v) t sin.u du dv; résultat identique avec celui que nous avons trouvé précé- demment, en suivant une marche différente. Si, au lieu de quatre variables indépendantes #, x, y, Z; l'équation (c) en contenait un plus grand nombre, et qu elle füt toujours de la même forme : da? Es 2 d°® EC. 7 À (++), Er dt on pourrait encore l'intégrer par la méthode précédente ; mais la valeur de 4 serait exprimée par des intégrales qua- druples, dans le cas de cinq ou de six variables, sextuples , dans le cas de sept ou de huit, et ainsi de suite. RS RER A AR AR AE LL LR RUE RAR LR LR LA AR LES UE LAVE VU DLLD LE LUS LULU VITALE UVE MÉMOIRE Sur les lois générales de la double réfraction et de la polarisation ; dans les corps régulièrement cristallises ; Lu à l'Académie royale des Sciences, le 29 mars 1819. Par M. BIOT. PREMIÈRE PARTIE. Depuis l’époque mémorable pour les sciences, où Malus, en trouvant la polarisation de la lumière, ouvrit cette mine féconde de phénomènes que la mort ferma trop tôt sur lui, les physiciens de tous les pays de l’Europe ont rivalisé d’acti- vité et de zèle pour mettre au jour les trésors que la nature y avait cachés. Par un heureux effet de ce concours, un pe- tit nombre d’années a suffi pour faire reconnaître, dans la lumière, une multitude de propriétés nouvelles dépendantes les unes des autres, et dérivant de cette propriété primitive; pour fixer des lois expérimentales qui les expriment avec exactitude; enfin pour en tirer déja des applications, qui, à la vérité, ne manquent jamais d’être la conséquence défini- tive des découvertes des sciences, mais qui, cependant, pou- yaient ne pas être sitôt attendues. Cette nombreuse série de nouveaux faits, ayant spécialement appelé l'intérêt et l’atten- 1818. - 23 170 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION tion des physiciens sur les propriétés générales de la lumière, on s’est attaché à approfondir plusieurs d’entre elles qui n’a- vaient pas été jusqu'alors suffisamment examinées, soit que l'on n’en concût pas aussi bien l'importance, soit que l'on ne possédât pas tous les moyens nécessaires pour mettre en évidence leurs particularités les plus.minutieuses, et quel- quefois les plus caractéristiques. De sorte que l'on peut dire, à la gloire de notre compatriote, que, si sa découverte a avancé la physique de la lumière par les phénomènes nouveaux qu'elle y a fait connaître, elle ne lui a pas été moins utile par l'espèce de révolution qu'elle y a généralement excitée. L'esprit mathématique qui dirige aujourd’hui toutes les recherches des sciences physiques, n’a pas peu contribué à accélérer ces nouveaux progrès, en portant leurs auteurs à définir avec précision les phénomènes, à les lier les uns aux autres par des déductions numériques, enfin à les réduire au- tant que possible en lois expérimentales. Telle est en effet la marche la plus simple, la seule même qui puisse assurer nos pas dans l’étude de la nature. Toute la philosophie na- turelle, dit Newton, consiste en trois choses : trouver et déterminer d’abord les phénomènes, puis leurs lois, puis enfin les forces qui les produisent , et qui, étant une fois con- nues, réduisent tous leurs détails à n'être que des consé- quences déterminables par le calcul. Relativement aux phénomènes de la double réfraction et de la polarisation de la lumière, nous paraissons n’en être encore qu'aux deux premières périodes, je veux dire à la découverte des faits et à la détermination expérimentale de leurs lois : à la vérité, des idées tres-utiles, parce qu'elles sont très-fécondes, ont été mises en avant, pour rattacher, DANS LES-.CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALLISES. 170 au moins dans quelques parties, les nouveaux résultats à la constitution même de la lumiere, considérée soit dans le système de l'émission, soit dans celui des ondulations, ce qui est un pas important vers la troisième période, c'est-à-dire vers la connaissance des forces mêmes; mais, d’un côté, n'ayant sur la matérialité du principe de la lumiere que des inductions, à la vérité puissantes et nombreuses, nous devons nous résoudre difficilement à définir, sous ce point de vue, toutes les particularités compliquées de phénomènes qui semblent dépendre de mouvements imprimés aux par- ticules lumineuses autour de leurs centres de gravité; et, d’un autre côté, l'impossibilité où l'on est encore de sou- mettre le système des ondulations à un calcul général dans l'état actuel de l'analyse, rend également difficile et précaire la détérmination des lois de condensation et de vitesse qu'il faudrait attribuer aux ondes lumineuses, pour produire, tant dans leur trajet à travers les corps, que dans leur action sur l'organe, les phénomènes que nous observons. Dans cette succession rapide de travaux, on conçoit que chaque filon de la nouvelle mine n’a pas été d’abord com- plétement exploité. Dans la plupart on n’a commencé par apercevoir qu'une face des phénomènes qu'ils renfermaient, et l’on s’est trompé en fondant sur cet apercu des conjec- tures trop générales. Souvent aussi l'importance de cer- tains faits ou de certaines considérations théoriques n'a pas d’abord été saisie tout entière. Ces oscillations de nos jugements semblent presque inévitablement attachées à la na- ture de notre esprit et à la mamère dont il s'approche de la vérité. Toujours borné à un point de vue très-resserré, quand il apercoit de nouveaux phénomènes , il ne peut en « 23. 180 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION embrasser d’abord qu'un petit nombre, qu’il ne saisit encore que par quelques points. Mais le temps, en amenant devant ses yeux de nouveaux faits, qui sont le développement des premiers, l’éclaire sur leur importance véritable; lui fait connaître ce qu'ils ont de particulier ou de général; et c'est ainsi que l'édifice de la science s’éleve sur les travaux succes- sifs et sur les erreurs mème des individus. Cette marche inévitable, et qui s’observe encore, quoique d'une manière moins sensible, dansles derniers pasdessciences même les plus parfaites, exige, dans celles qui sont tout-à- fait nouvelles, que chacun examine avec indulgence les ten- tatives de ceux qui l'ont précédé. Au lieu de relever amère- ment ce qui a pu se glisser d’incertain dans leurs résultats, ou de trop général dans leurs conséquences, il faut plutôt y chercher ce qui s'y trouve de bon, de durable, et en extraire avec fidélité ce qui reste dans la science plus perfectionnée, soit en faits, soit en lois, soit en aperçus même. Outre qu'il y aurait peu de gloire à prétendre affaiblir le mérite de ces premiers travaux, en montrant quil fut incomplet ou in- exact en certaines parties , il y aurait aussi peu de prudence; car, dans le développement rapide d’une science aussi récem- ment créée, et sur laquelle le calcul a.encore si peu de prise, les résultats qui semblent les plus complets ne sont bientôt que des particularités; et les vues que l’on suppose les plus générales, n’ont cet avantage que pour un moment. Ces réflexions nous ont été suggérées par un mémoire du docteur Brewster, qui ne nous a pas paru rédigé dans ces principes d'indulgence réciproque (1). Quoique ce mémoire (1) On the laws of polarisation, etc. Philosophical transactions, 1818, Pas: 199: DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALLISÉS. 18! soit intitulé des Lois de la polarisation et de la double réfrac- tion, dans les corps régulièrement cristallisés, ne contient rien de nouveau quant aux lois de la polarisation même; mais, quant à la double réfraction, et aux phénomènes de colora- üuon qui en sont la conséquence dans certaines circonstances que M. Arago a le premier découvertes, le docteur Brewster en a suivi les effets avee un rare bonheur et une persévérance infatigable-dans un très-grand nombre de corps cristallisés. Il est même parvenu à représenter ces phénomènes par une loi, ou plutôt par une construction géométrique, qui, bien qu'empyrique dans ses éléments , et enveloppée , dans la forme sous laquelle il la présente, d’une complication inutile qui empêche d'en apereevoir l'expression simple, donne cepen- dant une approximation réelle, et suffisante pour décrire les phénomènes de couleurs dans le très-grand nombre des cas que l’auteur a considérés. Mais, au lieu de montrer fran- chement:ce que ces recherches empruntaient aux recherches précédentes, et ce qu'elles y ajoutaient de réellement nou- veau, à quoi sans doute tous les physiciens se serarent em- pressés d’applaudir, l’auteur semble être parti de ses résultats comme d’un type définitif pour juger trop défavorablement, à ce qu'il me semble, les travaux de ses prédécesseurs; soit qu'il trouve dans leurs imperfections, alors inévitables, des motifs suffisants à ses yeux pour les rejeter tout-à-fait de la science; soit qu’en les admettant pour exacts, il les présente comme des aperçus heureux qui avaient besoin de recevoir de ses expériences une nouvelle démonstration. Le mérite réel du docteur Brewster, mérite auquel je ne crois pas qu'on me reproche d’être resté insensible, m'a paru exiger que, pour l'histoire de la science, on remit les choses sous leur 182 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION véritable point de vue; et je me suis laissé aller d'autant plus aisément à discuter ici celles de ses assertions qui m'ont paru susceptibles de critique, qu’elles portent précisément sur des recherches que j'aurais été obligé de rappeler, pour préparer l'exposition du nouveau travail que je desire sou- mettre en ce moment à l'Académie. Après avoir rendu justice aux vues ingénieuses d’après lesquelles le docteur Young signala le premier à l'atten- tion des physiciens la loi d'Huyghens sur la double réfraction; après avoir cité honorablement les expériences si précises par lesquelles M. Wollaston, et ensuite Malus, prouvèrent l'exactitude de cette loi, le docteur Brewster rappelle les re- cherches théoriques de M. Laplace sur la même matière. Mais il est loin de les présenter d’une manière exacte. Il sup- pose (p.200) que M. Laplace a expliqué l'aberration du rayon extraordinaire par une force répulsive émanée de l'axe du cristal, et que la différence du quarré des vitesses des deux rayons, proportionelle au quarré du sinus de l'angle formé par l’axe avec le rayon extraordinaire, représente l’action du cristal sur chacun d'eux. Or la théorie de M. Laplace ne renferme aucune supposition pareille sur la nature des forces ; elie les envisage seulement comme devant être attractives et répulsives, et comme n'ayant d'action sensible qu'à de très- petites distances. La première considération, fondée sur l'analogie des autres phénomènes déja calculés dans le sys- tème de l'émission de la lumière, permet de leur appliquer en général le principe de la moindre action ; la seconde per- met de négliger dans l'intégrale totale donnée par ce prin- cipe, la portion infiniment petite de la route du rayon qui devient curviligne près de la surface du cristal; cette dernière DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALLISES. 183 circonstance est même ce qui rend ici le principe de la moin- dre action applicable, indépendamment de la loi que les forces suivent; parce qu'elle borne le calcul de l'intégrale aux portions rectilignes de la route du rayon dans lesquelles les actions des forces deviennent constantes , quelle que soit leur loi. La seule chose que M. Laplace ait besoin d'emprunter à l'expérience, c'est la loi de la vitesse de la lumière dans le cristal. Celle-ci étant donnée, le principe de la moindre action assigne aussitôt la loi de réfraction que chacun des rayons doit suivre ; ou , réciproquement, si la loi de réfraction est donnée, il fait connaître les vitesses. On voit donc que la rectification des idées émises sur ce point par le docteur Brewster, est d’une importance capitale; car leur effet, invo- lontaire sans doute, serait de présenter comme une hypothèse ce qui est une simple application des lois de la mécanique, application qui a l'avantage précieux de donner au résultat expérimental d'Huyghens le caractère d’une loi rigoureuse ; et qui, étant modifié dans ses détails selon les circonstances, peut, ainsi que je le montrerai dans la suite de ce Mémoire, être étendu à tous les cristaux jusqu’à présent étudiés. Considérant, au reste, cette théorie comme une nouvelle preuve du génie de son auteur, le docteur Brewster se de- mande si la loi d'Huyghens sur laquelle elle repose, est géné- rale ou particulière au spath d'Islande; et il n’a pas de peine à montrer que ce dernier cas est au moins le plus vraisem- blable : « A cela, ajoute-t-il (p.201), on pourra répondre que « Malus a examiné avec le plus grand soin les propriétés du « quartz, de l’aragonite et de la baryte sulfatée; qu'il a dé- « montré l'identité de leur action avec celle du spath d’Is- € lande; et qu’ainsi l'extension de la loi d'Huyghens à tous les 184 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION « autres cristaux ne peut plus être regardée comme douteuse : « cette réponse aurait un très-grand poids , Si l'identité dant « il s'agit était établie d’une maniere satisfaisante; mais les « expériences de Malus sont décidément erronées; car, des « trois cristaux dont il est supposé avoir établi l'identité « d'action avec le spath d'Islande, il n’y en a pas moins de « deux qui ont plus d’un axe de double réfraction. « Ici (c'est toujours le docteur Brewster qui parle), il se « présente une difficulté d'une espèce inattendue. Car, si les « expériences de Malus sur ces cristaux sont rejetées comme « incorrectes, quelle confiance pouvons-nous avoir .dans ses « observations sur le spath d'Islande, lesquelles cependant « forment la base sur laquelle on fonde la vérité de la loi « d'Huyghens ? Si le nitre et l’aragonite, qui ont l’un et l’autre « une double réfraction énergique, avaient été mis dans les e mains d'Huyghens, de Wollaston, de Malus , ou de tout au- « tre physicien quelque adroit qu'il püt être, il est évident « que leurs mesures se seraient accordées avec la théorie des « ondulations sphéroïdales. Laplace aurait rattaché cette « théorie aux principes de la mécanique, et elle aurait été _« universellement reçue comme une loi physique rigoureuse & Cependant, après tout ce développement de génie mathé- « matique et physique, le résultat final de toutes ces recher- « ches eût été une erreur. Car on peut montrer par des expé- « riences décisives, que le nitre et l’aragonite ont deux axes de « double réfraction, et que l'aberration du rayon extraordi- « naire ne peut pas y être expliquée par un seul ellipsoïde. « Ainsi donc, d'apres les réflexions précédentes, il paraît « prouvé, non-seulement que la loi d'Huyghens n’est pas « démontrée commé loi générale de la double réfraction, DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALLISES. 185 « mais qu'elle n’est pas démontrée comme expression indi- « viduelle des phénomènes du spath d'Islande.» Le mode de raisonnement employé dans ce passage, et la conclusion qui le termine, sont si remarquables , que j'ai eru devoir le rapporter textuellement. On voit qu'il ne va pas à moins qu’à renverser cette partie des lois de la double réfraction qui semblait la première et la plus solidement établie. Heureusement le docteur Brewster arrive plus tard à reconnaître ces lois par lui-même; mais il est, je crois, fa- cile de montrer qu’elles ne couraient aucun risque , et même que les secours dont il a voulu les appuyer sont beaucoup moins solides que les expériences qui les établissaient. Remarquons d’abord qu'on n’a pas attendu jusques à ce moment pour concevoir la possibilité de lois de réfraction différentes de celle d'Huyghens. Cette possibilité avait été signalée dés les premières recherches, et l'on en avait même donné des exemples. M. Laplace, dans son Mémoire, consi- dère spécialement le cas d’un seul axe; mais il indique expres- sément celui où il en existérait plusieurs, de sorte que la vitesse extraordinaire devint une fonction des angles formés par ces axes avec le rayon réfracté extraordinairement. M. Am- père a déduit de ces principes la construction géométrique qu'il faudrait substituer à celle d'Huyghens quand on con- naîtrait la loi des vitesses. Enfin j'ai moi-même, il y a déja six ans, reconnu l'influence de deux axes dans les bizarreries apparentes que les lames minces de certains micas avaient offertes à M. Arago, et j'avais donné une expression analy- tique qui les représentait : et, quoique cette expression ne fût pas rapportée aux lignes que je sais maintenant être les véritables axes, cependant, comme elle différait des formules 1818. 2/ 186 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION que m'avaient données les cristaux soumis à la loi d'Huyghens, il devenait bien évident que cette loi n'était pas applicable à tous les- cristaux. A la vérité, lorsque Malus chercha à vérifier la loi d'Huyghens, l'exactitude surprenante qu'il lui trouva l'avait naturellement porté à la considérer comme générale ; il se borna donc à déterminer, pour quelques cris- taux , les deux constantes dont elle dépendait; et le hasard ayant dirigé ses épreuves, soit sur le cristal de roche, qui n’a qu'un axe, soit sur l'aragonite et la baryte sulfatée, qui ont deux axes, mais peu inclinés l’un à l’autre, ou peu énergi- ques, la différence de leur double réfraction se trouva insen- sible dans les coupes particulières qu'il avait besoin d’y prati- quer, etainsi cette différence lui échappa. Mais elle lui échappa parce qu'il n’y appliqua point généralement sa méthode, et non par une imperfection de la méthode même. Il est si vrai que ses épreuves furent limitées, que ce fut cette limitation seule qui l'empêcha de découvrir la distinction que j'ai depuis reconnue entre les deux espèces de double réfraction, l'at- tractive et la répulsive; car, après avoir observé la répulsive dans le spath d'Islande, il observa réellement l'attractive dans le cristal de roche; mais, ne soupçonnant pas que la loi püût y être différente, il prit l'image ordinaire pour l'image ex- traordinaire, méprise qui n'était possible que dans le sens unique où il observait pour déterminer la constante de chaque réfraction , et qu'il aurait certainement. reconnue s'il eût répété l'observation dans tout autre sens. Quant à l'aragonite, il l'étudia davantage, mais toujours suivant des coupes parallèlles ou perpendiculaires aux arêtes, des air guilles suivant lesquelles cette substance se présente ordinai- rement : or, les deux axes de double réfraction dans l'ara- DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALLISÉS. 187 gonite, n'étant inclinés que de 9° 9' sur l'axe des aiguilles, d'après les déterminations mêmes du docteur Brewster, il en résulte que lorsqu'on observe la double réfraction sui- vant la direction de cette ligne, comme Malus commençait par le faire, on doit l'y trouver tres-faible où même insen- sible, de même que si les deux axes étaient réunis en un seul, sur cette direction; et, lorsqu'on l'observe dans le sens perpendiculaire, en calculant la marche des rayons d’après la loi rigoureuse qui les régit dans cette circonstance, loi qué je ferai connaître dans la suite de ce Mémoire, je trouve que, pour toutes les directions que le rayon réfracté peut prendre autour de l’axe des aiguilles d’aragonite , la séparation des axes de cette substance ne peut produire, au plus, qu'une variation de £ dans la valeur du petit terme qui exprime la diminution du quarré de la vitesse; et je trouve encore qu’en observant, comme Malus essaya aussi de le faire; le doublement des images sous l'incidence perpendiculaire, à travers une plaque dont les faces étaient parallèles à l'axe des aiguilles d’aragonité, il n'aurait pu observer qu'une séparation de # dé millimètre en supposant à la plaque 56 millimètres d'épaisseur. Or il a certainement emploÿé des plaques d’une épaisseur beaucoup moindre, puisqu'on est loin d'en pouvoir obtenir de pures de cette dimension : ainsi il a dû supposer l’écart des images nul dans cette ex- périence, cé qui était encore un résultat conforme à la loi d'Huyghens. La même limitation et lé même sens d'essais appliqués à la baryté sulfatée, lui dissimula de même l'in- fluence des deux axes de cette substance, quoiqu'ils y soient plus inclinés l’un à l’autré, parce que l'intensité beaucoup moindre de la double réfraction y masquaïit plus aisément 24. 108 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION l'influence de leur écart; mais ces résultats, quoique im- parfaits, ne fournissent aucune induction contre sa méthode même, puisque leur imperfection vient de ne l'avoir pas complètement appliquée : par conséquent on n’en peut tirer aucun motif légitime pour jeter le moindre doute sur les expériences de Malus relativement au spath d'Islande, bien loin d’y trouver contre elles une preuve décisive, comme l’a avancé le docteur Brewster. Ces expériences, si précises, et variées dans tant de sens divers, resteront donc, avec celles de M. Wollaston et d'Huyghens lui-même, comme la verifi- cation la plus sûre et la plus complete de la loi de la double réfraction que Huyghens a établie. Voyons maintenant quels moyens le docteur Brewster pro- pose pour suppléer aux imperfections qu'il imagine dans ces expériences : il n’en est, suivant lui, que deux de possibles : « L'un, dit-il (p.202), serait de découvrir des méthodes « pour amplifier et, mesurer avec une grande exactitude la « déviation du rayon extraordinaire, quand la lumière tra- « verse le cristal suivant une direction peu inclinée à son « axe; l’autre moyen, qui est plus praticable et plus exact, « consiste à examiner les apparences que présente la lumière « polarisée, lorsqu'elle est transmise suivant les axes appa- « rents ou réels de double réfraction. » Malgré l'alternative établie dans le passage, j'aurai bien- tôt occasion de montrer que l'on peut imaginer encore d’au- tres méthodes très-différentes de ces indications, et même tres-dissemblables entre elles, pour mesurer avec la plus grande exactitude la déviation du rayon extraordinaire. non- seulement pres de l'axe, mais dans toutes les directions pos- sibles à travers la substance des cristaux. DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALLISÉS. 189 En ce moment, je me bornerai à examiner le degré de précision que l'on peut atteindre par le mode d'observation des couleurs que le docteur Brewster propose; mais, pour se former à cet égard une idée précise, il faut rappeler ici l'origine et la nature même du phénomène sur lequel cette méthode est fondée. M. Arago, le premier, découvrit en 1811, qu'unrayon blanc primitivement polarisé, se résout en deux faisceaux colorés de teintes complémentaires, lorsqu'on lui fait traverser des lames minces de mica, de chaux sulfatée , de cristal de roche, et qu’on le divise ensuite par un prisme doué de la double ré- fraction. Un an après, en étudiant la nature de ces couleurs et mesurant les épaisseurs äuxquelles chacune d'elles est pro- duite, sous une même incidence et pour une même direction des lames, je reconnus qu'elles étaient identiques avec celles des anneaux colorés, qui s'observent, soit par réflexion, soit par transmission, dans les lames tres-minces, de toutes les substances, et dont Newton a fait une analyse si détaillée et si profonde. Les mêmes couleurs, dans les deux classes de phénomènes, se trouvèrent répondre à des épaisseurs pro- portiounelles, quoique d’une dimension absolue très-diffé- rente. Le docteur Young, en appliquant à ces résultats son ingénieuse idée des interférences, parvint à lier ensemble les deux séries par un rapport théorique. Jusqu’alors mes re- cherches avaient été bornées à l'incidence perpendiculaire, qui, dans tous les phénomènes de lumière, présente toujours les lois les plus simples. En les étendant aux incidences obliques, je trouvai que, dans chaque cristal à un seul axe, l'apparition de chaque couleur était généralement déterminée par deux éléments, dont l’un était la longueur du trajet de 190 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION la lumière dans le cristal, et l'autre le quarré du sinus de l'angle formé par l'axe du cristal avec le rayon réfracté extraor- dinairement. Le produit de ces deux éléments, comparé à la table d'épaisseur de Newton, exprimait toujours l’ordre et les valeurs relatives des teintes pour un même cristal , avec une approximation presque parfaite ; et, pour différents cristaux , les valeurs absolues variaient proportionnellement au coëffi- cient constant qui multiplie le quarré du sinus, dans l’expres- sion du quarré de la vitesse du rayon extraordinaire. Le doc- teur Young a rattaché pareillement ces résultats à sa théorie des interférences, d’une manière qui en rend la raison sensible; la longueur du trajet et l'accroissement de la vitesse sont, dans cette théorie, les deux éléments qui déterminent la teinte, parce que c’est leur produit qui mesure le nombre d'ondula- tions gagnées ou perdues par un des rayons comparativement à l’autre. Au reste, en considérant cette loi comme simplement expérimentale, j'en constatai l'exactitude sur des plaques de cristal de roche et de spath d'Islande taillées dans des sens très-divers, et sur certaines espèces de micas qui n’ont qu'un axe perpendiculaire à leurs lames. Elle me parut convenir aussi aux lames de chaux sulfatée quand on n’y fait pas en- trer les rayons sous des incidences trèes-obliques; mais, en plaçant ces lames dans des circonstances où l’obliquité des rayons par rapport à leurs surfaces devenait très-grande, je reconnus qu'il s'y développait alors de nouvelles séries de teintes, d’une progression différente, dont je donnai des ta- bles fondées sur l'expérience même, et que, par conjecture, je supposais pouvoir tenir à quelque particularité dépendante de la constitution lamelleuse de cette substance. On doit à M. Brewster d’avoir découvert que cette marche singulière DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALLISÉS. 198 des teintes est due à l'influence de deux axes qui existent dans le plan des lames de chaux sulfatée; et il en a donné dans son mémoire une table fondée sur ce principe, laquelle est remarquablement d'accord avec celle que J'avais con- struite sur l'observation. Mais, parce que je n'ai pas songé, dans cette circonstance, à la possibilité de deux axes, et parce qu’en essayant quelques autres cristaux , seulement dans deux sens rectangulaires, je suis tombé dans la même erreur, le docteur Brewster emploie contre moi (p. 203, 204, 235, 236) la même forme de raisonnement dont il a fait usage plus haut contre Malus; c'est-à-dire, qu'il accuse la méthode dont je me suis senvi, au lieu d’accuser l'application incomplète que j'en avais faite : de plus, d'après un passage de mon Traité de physique, où je n'ai voulu évidemment parler que des cristaux à un axe, le docteur Brewster infere que j'ai consi- déré la loi relative à ces cristaux comme générale et appli- cable à toutes les substances (1). Or, je puis aisément prouver le contraire ; car les premières formules que l’on ait eues LLC M ERESNETOIT ENS BREST EPSAN FORCE PERIOREE ER ES (x) Cette assertion du docteur Brewster se trouve au commencement de la pag. 204 de son mémoire. Il cite en note mon Traité de physique, tom. IV, pag. 377. Or, dans cette page je ne vois que la ligne 10, et daris cette ligne les trois mots tout autre cristal qui puissent offrir une ombre d'apparence à sa conclusion, Mais, comme, dans toute cette discussion, le cas d'un seul axe est celui, que j'examine, puisque le titre mème du chapitre porte : des Teintes que produisent les plaques parallèles a l'axe, il est évident que ce sont les cristaux à un seul axe que j'ai en vue; et la preuve, c’est qu’à la fin du chapitre, pag. 387, ligne 28, j'exclus le mica de ces lois, par la raison qu'il a deux axes. ( Voyez aussi mon mé moire sur les: cristaux attractifs et! répulsifs, Mémoires de l'Instituét, 1813-1814-1815, où je dis formellement la même chose: ) 192 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION pour représenter, dans quelques cas, la bizarre succession des teintes produites par un cristal à deux axes, le mica de Sibérie, ont été données par moi, dans mon Traité de phy- sique ; et ces formules sont tres-différentes de la loi de Huyghens. Elles prouvent donc matériellement, que je ne regardais pas cette loi comme applicable à tous les corps, quoique j'aie pu me tromper en supposant, d’après un exa- men trop peu attentif, qu’elle s’appliquait à plusieurs d’entre eux auxquels elle ne convient réellement pas. Les phénomènes de couleur que présentent les cristaux à un seul axe, étant ramenés par les lois précédentes à dépen- dre des mêmes éléments qui déterminent leur double réfrac- tion, on conçoit que ceux-ci peuvent, à l’aide de cette liaison, se conclure de l'observation des teintes. Une seule plaque d'un cristal qui n’a qu'un axe, suffit ainsi pour déterminer completement, l'intensité de la double réfraction qu'ilexerce, sa nature attractive ou répulsive, et Finclinaison de l'axe sur le plan de la plaque. On peut voir dans mon Traité de phy- sique des exemples de pareilles déterminations. D’après cela on peut être surpris que M. Brewster dise dans son mémoire (p-218), qu'il a coupé plus de quinze plaques dans un grand morceau! de zircone, sans pouvoir découvrir son axe. Chas cune de ces lames suffisait pour le déterminer, Un des éléments des cristaux à un seul axe, c'est, comme je viens de le dire, la nature de la double réfraction qu'ils exercent. Si l’on prend une plaque de spath d’ Islande taillée perpendiculairement à à l’axe, et qu’on la fasse traverser par un rayon lumineux dirigé suivant cet axe même, on ob- serve que ce rayon ne se double pas; mais, pour peu qu'on sorte de l'incidence perpendiculaire, il se double, et le fais- DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALLISES. 193 ceau qui subit la réfraction extraordinaire se trouve rejeté plus loin de l'axe que le faisceau qui éprouve l’autre réfrac- tion. Le même effet s’observe également dans toutes les di- rections d'incidence autour de l'axe; l'écart des deux rayons a toujours lieu dans le même sens, et sa quantité angulaire, qui augmente avec l'incidence, est uniquement déterminée par l’inclinaison des rayons sur l'axe du cristal. Maintenant, substituez à la plaque de spath d'Islande une plaque de cristal de roche taillée de même, la symétrie des phénomènes autour de l’axe subsistera encore, mais le sens de l'écart des rayons sera opposé; c’est-à-dire que le rayon extraordinaire sera amené plus près de l'axe du cristal que le rayon ordinaire. La même opposition se soutient pour toutes les directions que l'on peut donner aux rayons à travers ces deux cristaux, de même que pour tous les sens des coupes que l’on peut y pra- tiquer; et tous les cristaux à un seul axe, jusqu’à-présent ob- servés, offrent l’un ou l’autre de ces modes d'actions : en con- séquence, lorsque je présentai, il y a quatre ans, ce phéno- mène à l'académie, j'appelai double réfraction attractive celle qui rapproche de l'axe le rayon extraordinaire, et double re- fraction répulsie celle qui l'en éloigne. Il me sembla que ces dénominations exprimaient seulement le fait, et l'expri- maient de la manière la plus immédiate. Le docteur Brewster n'est pas de cet avis, et il y substitue la distinction de cris- taux positifs et cristaux négatifs. Je doute que ce changement soit adopté par les physiciens. L’indication du sens suivant lequel l'écart des rayons doit s’opérer, est extrèmement utile dans les applications, pour prévoir la direction relative de ces rayons, et diriger ainsi l'emploi des formules; or cette di- rection est naturellement rappelée à l'esprit par la dénomi- 1818. 25 194 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION nation que j'ai adoptée, et on peut l'en déduire effectivement pour chaque cas, d’après la seule inspection de la position de l'axe dans le point où la réfraction s'opère. On peut même, et cette considération est souvent utile, peindre à la pensée la séparation progressive et croissante des rayons, à mesure que leur direction s’écarte de l'axe dans chacune de ces classes de cristaux, en disant que les phénomènes se passent, comme s'il émanait de l'axe une force attractive dans les uns et ré- pulsive dans les autres; ce qui ne signifie pas toutefois qu'une pareille force existe et s'exerce immédiatement. Le docteur Brewster dit, dans son mémoire, que cette dis- tinction des cristaux à double réfraction attractive et à double réfraction répulsive , est entierement hypothétique (p. 204 et218); la raison qu'il en donne, c’est que les phénomènes de la double réfraction, que j'ai appelée attractive, peuvent être représentés par les actions répulsives émanées de deux axes, et que la double réfraction répulsive peut être repré- sentée de même par des actions émanées de deux axes attrac- tifs (p.218) : il est vrai qu'en imaginant de pareilles droites, qu'il appelle des axes; en imaginant qu'il en émane de cer- taines forces, dont l'influence sur les teintes est proportion- nelle au quarré du sinus de l'angle que les rayons forment avec elles; en imaginant un mode de composition de ces forces tout-à-fait particulier et arbitraire, le docteur Brewster par- vient à retrouver, par cette combinaison d'hypothèses, les phénomènes que la loi de Huyghens donne immédiatement pour les cristaux à un axe (1). Mais, précisément parce qu'il (1) Por. l'énoncé du principe du docteur Brewster, p. 237 de son mé- moire, et son application aux cristaux à un axe, p. 247 et 248, où l'auteur retrouve ainsi, pour la variation des teintes, la même formule qui résulte de la loi de Huyghens. DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALLISÉS. 199 retrouve ces mêmes phénomènes, toute la composition d'ac- tions qu'il a imaginée est inutile. Car, en la réduisant en calcul, elle ne fait que reproduire identiquement la loi de Huyghens sans y rien ajouter. C’est un mode d'expression compliqué substitué à un résultat simple, et non une géné- ralisation réelle; de même qu'on ne généralise pas l'équation d'une parabole ou d’une ellipse, quand on rapporte ces courbes à un système de coordonnées quelconques, au lieu de les rapporter à leurs axes, qui en présentent l'expression la plus abrégée; et enfin, de ce que l'énoncé simple et précis d’un fait physique, tel que les deux modes de double réfrac- tion, dont j'ai découvert l'existence, ne convient pas avec les nouvelles dénominations arbitraires d’axes introduites par le docteur Brewster dans sa construction compliquée, on m'est pas, je crois, pour cela en droit d’en conclure, logi- quement, que c'est l'énoncé simple qui est hypothétique, et le compliqué qui est le véritable. Tous les phénomènes de double réfraction et de polarisa- tion que les cristaux à un seul axe produisent , sont symé- triques autour d’une ligne droite unique. C’est cette ligne que j'ai nommée leur axe , selon l'usage adopté par Malus et suivi par tous les autres physiciens. Les effets de cette symétrie sur la lumière polarisée, peuvent être aperçus d’un seul coup- d'œil dans l'expérience suivante: on taille une plaque dont les faces soient perpendiculaires à l'axe du cristal. On la fait traverser perpendiculairement par un large faisceau de lu- mière polarisée en un seul sens, et l’on analyse la lumière transmise en plaçant devant l'œil une lame de tourmaline , ou un prisme doué de la double réfraction. Alors les rayons qui viennent se réunir dans votre œil, ayant traversé la ; 25. 196 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION plaque suivant des directions inégalement inclinées à l'axe, mais symétriques autour de lui, les courbes d’égale teinte se trouvent être des cercles concentriques séparés par une croix noire en quatre segments égaux. Les premiers anneaux de ce genre ont été vus par M. Arago dans le cristal de roche. Le docteur Brewster en a observé d'analogues dans la topaze, et M. Wollaston dans le spath d'Islande. Le hasard me les ayant aussi présentés après eux, j'ai cherché à déduire leurs diametres de la loi générale que j'avais précédemment trou- vée pour les teintes à toute distance de l'axe; et les mesures effectives se sont parfaitement accordées avec le calcul, comme on peut le voir dans mon Traité de physique , où J'ai rapporté ces expériences. J'y ai montré également la cause de la croix noire, et des autres particularités du phénomène, d’après les règles ordinaires de la polarisation mobile. Dans les cristaux qui ont deux axes de double réfraction, il se forme de pareils anneaux suivant deux directions dif- férentes , qui sont les directions mêmes des axes ; et ils y sont produits par une loi tout-à-fait semblable, conime je le prouverai dans la suite de ce mémoire. Ces anneaux peu- vent devenir circulaires sous certaines conditions détermi- nées , mais ils offrent le plus souvent des configurations - très-bizarres : le docteur Brewster les a étudiés dans un fort grand nombre de substances ; et il a donné dans son mémoire une règle empyrique, à la vérité , mais très-fidèle pour pré- voir toutes les variétés de leurs figures (1). Alors, en les (1) Cette règle détermine seulement la configuration des anneaux : elle n'indique rien et ne peut rien indiquer relativement au nombre et à la di- rection des lignes noires qui les traversent, puisque l'existence et la forme ee —— DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALLISÉS. 197 supposant déterminés par les mêmes éléments que dans les cristaux à un seul axe, c'est-à-dire par la longueur du trajet, et l'accroissement du quarré de la vitesse extraordinaire, il a conclu de leur expression empirique celle de la vitesse elle- même. Tel est le fondement de la méthode qu'il propose pour déterminer la loi de la double réfraction dans toutes les substances. Cette méthode est, en effet, excellente pour reconnaître si un cristal donné , possède un ou plusieurs axes pourvu toutefois que le hasard vous fasse tomber sur les directions dans lesquelles les anneaux se montrent. Alors vous aper- cevez d’un seul coup- d'œil l'ensemble des phénomènes que le cristal produit. Mais cette indication ne suffit pas pour déterminer , encore moins pour mesurer avec quelque ri- gueur , la loi que la réfraction extraordinaire suit à toute distance de l'axe. En effet, comme ce n’est jamais que très- près des axes que l’on peut observer les anneaux , la double réfraction qui les produit est alors nécessairement d’une faiblesse extrême ; de sorte que c’est seulement dans cet état de faiblesse qu’on se réduit à la juger et à la conclure de leurs dimensions. Or cette nécessité peut donner lieu à de très- grandes erreurs ; car les plus petites irrégularités dans la constitution intérieure du cristal, ou dans l'épaisseur des plaques employées, que dis-je ? la seule influence d’une pres- sion mécanique, ou de toute autre cause aussi faible, suf- fisent pour déformer totalement les anneaux et en changer de ces lignes dépendent de la loi de la polarisation dans les cristaux à deux axes; loi que je donnerai dans la suite de ce Mémoire, et dont il n’est point question dans celui de M. Brewster. 198 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION complètement la nature. Dans le cristal de roche, par exem- ple; on découvre, dans le sens de l'axe, des phénomènes particuliers de polarisation qui, s'ils sont produits par une force de double réfraction, en supposent une au moins mille ou douze cents fois plus faible que celle du cristal de roche même. Cependant, par les directions que cette cause si faible donne à la polarisation , elle empèche totalement les premiers anneaux de se former; et, pour exprimer ceci, en général , d’une manière mathématique, si l'expression du quarré de la vitesse extraordinaire contenait diverses fonc- tions des angles formés par les axes avec le rayon réfracté, ou si quelque cause étrangère à la double réfraction se trou- vait combinée accidentellement avec elle, de maniere à mo- difier ainsi l'expression de la vitesse, il se pourrait que les termes de cette expression les plus sensibles dans les grands angles, ne se trouvassent plus l'être dans les petits, et qu'ils s'y trouvassent masqués par les autres, de manière à devenir tout-à-fait inappréciables. Ce seraient donc alors ces autres termes seuls, ou presque seuls, qui détermineraient la forme des anneaux que l’on observerait autour des axes du cristal, quoique la cause qui les produit püt être si faible qu’elle ne fût pas capable d’altérer sensiblement les dévia- tions des rayons observées à quelque distance de l'axe (1). Enfin l'observation des anneaux ne peut pas mettre en évi- dence les deux sens de déviation que le rayon extraordinaire éprouve , non-seulement par rapport aux axes , mais par rapport à son plan d'incidence primitif, dont on sait qu'en (x) Le beril offre un exemple frappant à l'appui de ces considerations, comme on le verra plus loin. DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALLISÉS. 199 général la double réfraction l’écarte ; ce qui est même un des effets les plus caractéristiques de ce genre d'action , et par conséquent, un des plus propres à en vérifier les lois. D'après ces motifs , il me semble que l’observation des an- neaux, peut bien offrir en général une confirmation utile et satisfaisante de ces lois lorsqu'elles sont déja connues , mais qu'elle est incapable d'en donner une mesure précise et une démonstration rigoureuse. J'ai imaginé un procédé, qui me paraît réunir ces avan- tages; et, après en avoir fait des applications nombreuses qui m'ont convaincu de sa justesse , j'ai l'honneur de le soumettre à l’Académie. La pièce principale de mon appareil consiste en deux règles d'ivoire AX, AZ (fig. 1), divisées en parties égales et disposées à angles droits. La premiere AX, se pose sur une table à-peu-près horizontale, alors l’autre AZ devient verti- cale. Une colonne HA, dont les bases supéricures et infé- rieures sont parallèles et formées par deux glaces planes, se promène sur la division AX, et peut être ainsi amenée à diverses distances connues de la division AZ. Cette disposition suffit lorsque la réfraction extraordinaire que l’on veut observer, s'opère dans le même plan que la ré- fraction ordinaire , ce qui a lieu, comme on sait, dans cer- taines circonstances. Comme ce cas est le plus simple , et suffit pour faire comprendre la méthode , je l’expliquerai d’abord. Si la substance que l’on veut observer avait une réfraction très-énergique, on pourrait, comme l'a fait Malus, se bor- ner à en former des plaques parallèles, sur lesquelles on opérerait comme nous allons le dire. Mais ce cas étant infi- 200 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION niment rare, je supposerai en général que l’on taille le cristal en prisme, et même, pour rendre la réfraction plus sensible, je donne ordinairement à ce prisme un grand angle BCD, un angle droit, par exemple, ce qui a l'avantage particulier de simplifier les calculs. A la vérité, la lumière ne peut pas traverser immédiatement les deux faces d'un pareil prisme quand il est placé dans un milieu aussi peu réfringent que l'air, parce que les rayons entrés par la premiere face BC se réfléchissent intérieurement quand ils arrivent à la seconde; c'est pourquoi je fixe à cette seconde face, représentée par CD dans la figure, un prisme ou un parallélipipède de verre CDGF dont l'angle réfringent D est à-peu-près égal à l'angle C du prisme de cristal, de sorte que la face antérieure CB du cristal, et la face postérieure DG du verre sont à-peu-prèes paralleles. La jonction des deux prismes s'opère en les chauf- fant, et faisant fondre entre leurs surfaces quelques petits grains bien purs de mastic en larmes, qui s'étendent par la pression en une couche très-mince, et fort transparente. Cette couche, après le refroidissement, suffit pour faire adhérer fortement les deux surfaces, et pour déterminer le passage de la lumière de l’une à l’autre, de sorte que la vision devient possible à travers le double prisme. Alors on pose celui-ci sur la base supérieure de la colonne HX, en l'y appliquant par sa face BC; ce qui exige que la face CF du verre soit dans le prolongement de BC, ou s'élève un peu au-dessus; et, pour que le cristal reste fixé au devant de la division AZ dans la section qu'on juge convenable, on met d'avance sur le bord de la glace quelques petites gouttes d'huile de téré- benthine épaissie, qui suffisent pour l'y faire adhérer : cela fait, on place l'œil en V, derrière la face postérieure du verre, DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALLISÉS. 201 et l'on regarde à travers le double prisme la division verti- cale AZ. Elle paraît double, en vertu des deux réfractions que le cristal fait éprouver à chacun des rayons qui en émanent : de sorte qu’à proprement parler, on voit une division ordi- naire , et une extraordinaire, qui se superposent sur une di- rection commune, du moins quand la déviation latérale est nulle, comme nous le supposons d’abord. Mais, en outre, l'inégalité des deux réfractions, jointe à celle de la distance, fait que les traits homologues des deux réfractions ne s’é- cartent pas par-tout également les uns des autres. Si, en certaines parties, l'écart est d’un demi-intervalle des traits, un peu plus loin il est d’un intervalle entier, et en ce point-là les deux divisions coincident, les traits coïncidents toutefois n'étant pas homologues. Plus loin, la coïncidence cessé, les traits des deux divisions s’écartent de nouveau; mais à quelque distance de là, leur écart ayant augmenté d’un intervalle en- tier, ils se rejoignent, et, de nouveau, les deux divisions coïncident. Si, par exemple, le n° 451 de la division extraor- dinaire que je désignerai par 451°, coïncidait, dans le pre- mier cas, avec 45o de la division ordinaire, que j'appellerai 452, de sorte que l'écart des deux divisions füt d’une partie, ce sera, je suppose, 5o2° qui coïncidera avec 5oo° à la seconde coïncidence; et ainsi l'écart, sous cette incidence, sera de deux parties : il deviendra de trois, si les numéros des divi- sions eoïncidentes different de trois unités, et ainsi du reste. Maintenant, pour en suivre les conséquences, reprenons un de ces cas, le second, par exemple : puisqueles traits oz et 500° coïncident, étant vus à travers le double prisme, cela prouve que le rayon extraordinaire émané du trait 502°, ar- rive à l’œil en V, suivant la même direction que le rayon ordi: 1818. 20 202 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION naire émané de la division 500"; et, comme l'écart de ces deux rayons n’a pas pu être produit ou modifié par le prisme de verre, puisque ce prisme exerce sur eux une seule et même espèce de réfraction à cause qu'il n’est pas cristallisé, il s’en- suit que si les deux rayons 5o2° et 00° coïncident en arrivant à l'œil, ils ont aussi coïncidé en traversant le verre, et par conséquent ils coïncidaient déja à leur émergence du cristal : c'est cette condition qui fournit un moyen très-précis pour vé- rifier la loi que suit, dans le cristal, le rayon extraordinaire. En effet, on peut d’abord déterminer la direction d'incidence de chacun de ces deux rayons. Car si l'on considere OI, par exemple, on sait qu'il part du point O, dont la position est connue sur la division verticale, et que, de là, il arrive au point d'incidence [ dont la position est pareillement dé- terminée sur la colonne, par sa hauteur et sa distance à la division verticale; on a des données analogues pour le rayon incident Ez, qui subit la réfraction extraordinaire, soit que l'on suppose son point d'incidence le même que pour OT, soit qu'on évalue la petite différence de ces points par le calcul , en ayañt égard à l'épaisseur du prisme de cristal, comme je le dirai plus tard. Maintenant, si l’on suit, à tra- vers le cristal, le rayon OT qui subit la réfraction ordinaire, ce que l’on peut faire d’après la loi de Descartes, on peut le conduire ainsi jusqu'à son émergence à la seconde surface en ['. Alors il n’y a qu’à calculer le rayon extraordinaire qui rentrerait dans le cristal par cette surface en dérivant du même rayon extérieur l' I"; et, reconduisant ce rayon à tra= vers le prisme jusqu’à la première surface, par la loi de réfrac- tion extraordinaire que l’on suppose, il devra, en ressortant par cette surface, aller coïncider dans son émergence avec le FRET DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALLISÉS. 203 rayon incident Ec. Il n’est pas inutile de remarquer que cette condition , et l'observation même, sont tout-à-fait indépen- dantes de la forceréfringente plus ou moins grande du prisme de verre. Ce prisme ne sert absolument qu'à recevoir les rayons réfractés dans le cristal, et à rendre leur émergence possible. Dans cet exemple j'ai supposé la coupe du prisme telle que la réfraction extraordinaire s’opérât dans le plan d'incidence comme la réfraction ordinaire. C’est là le cas le plus simple, et de beaucoup le plus commode, pour déterminer les élé- ments de la double réfraction dans chaque cristal, lorsque la loi de cette réfraction est supposée connue. Mais, pour vé- rifier la loi elle-même, ou pour mettre en évidence quelqu’une de ses conséquences particulières, on peut vouloir observer aussi dans des plans obliques à la coupe du prisme : alors J'adapte à la division verticale l'appareil additionnel repré- senté /g.2. A'C' est une lame métallique divisée en milli- mètres et terminée en C’ par un plan circulaire P'P"P", divisé en demi-degrés : RR est une autre lame divisée aussi en millimetres, et mobile autour du centre C', de la division circulaire : sur cette lame, et dans le sens de sa longueur, est tracée une ligne droite fixe RR qui passe par le centre C. Quand on veut observer des déviations latérales, on applique horizontalement la branche A C' sur la division verticale AZ du grand appareil, et on l'y fixe par une pince qui la main- tient dans une direction perpendiculaire à cette division, comme le représente la fig. 2; puis, regardant obliquement la règle RR à travers le prisme cristallisé, et par un point d'incidence déterminé sur ce prisme, au moyen d'un trait ou de quelque autre petit signal, on tourne lentement la règle autour de son centre, jusqu’à ce que son axe RR se trouve “26. 204 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION précisément suivre la direction de la double réfraction à l'en- droit que l'on considère; ce qui arrive lorsque cet axe, vu à travers le prisme, ne paraît plus doublé , son image extraor- dinaire en ce point-là se projetant sur son image ordinaire. Quand on a atteint cette position, on y laisse la règle, et l’on remarque celles de ses divisions dont l’écartement est tel qu'elles coïncident les unes sur les autres. Je suppose que cela ait lieu le plus parfaitement possible en E/O’. Alors les numéros des traits E'O’ donneront leur distance au centre C' du cercle; la division circulaire mesurera l’inclinaison de leur axe RR sur J’axe horizontal CA; et la division tracée sur cet axe donnera la distance du centre C’ à la division verticale AZ. D'après cela, la position des deux points E'O" sera connue par rapport à la division verticale; et leur écart le sera par la coïncidence observée sur RR. On aura donc tous les éléments de la double réfraction qui se produit, dans la position du prisme, et dans la direction des rayons que l'on a choisie pour l'expérience; et l’on pourra comparer ces résultats à la théorie. En décrivant cette opération , il ne faut pas oublier de lixer avec soin la position du point d'incidence sur la surface antérieure du cristal : car cette position est un des éléments indispensables du calcul, puisqu'elle détermine la direction d'incidence du rayon. On peut, comme je l'ai dit, se servir d'un trait tracé sur le prisme même, ou d'un fil de soie tendu sur sa surface, ou y coller une petite bande de papier qui limite les rayons dont on observe l'incidence simultanée. On emploie des moyens analogues pour fixer les hauteurs des points d'incidence, quand on observe les coïncidences sur la division verticale même, sans déviation latérale ; mais LL. => DANS'LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALLISÉS. 209 alors la bande de papier qui sert de limite, doit être dirigée horizontalement. On peut aussi observer des coïncidences sur la division horizontale AX, qui sert de base à la colonne HZ: Alors les points d'incidence sur la première surface du prisme de cristal se limitent par les mêmes procédés. Enfin il faut autant qu'il est possible rendre les bords de ce prisme tranchants ou peu épais , afin que les corrections relatives à son épaisseur soient éktrèmement petites ; ou même insensibles. En effet, elles seraient tout-à-fait nulles si l’on observait par le bord même, puisque alors les’ deux rayons réfractés n'auraient qu'un trajet infiniment petit à faire dans le cristal, pour arriver à la seconde surface où ils se réunissent et émergent simultanément: Par le même mo- tif, 1l ne faut pas, dans-les expériences, placer la colonne HA très-pres de la division verticale sur laquelle les coïncidences s’observent, ou employer de trop petites colonnes, si l’on ob- serve sur la division horizontale, parce que les corrections d'épaisseur, tres-peu sensibles à une médiocre distance, le deviennent davantage lorsque la distance est tres-petite. A ces précautions il faut joindre celle de faire les faces des prismes bien planes, ce qui influe beaucoup sur la net- teté de la vision. Il faut aussi mesurer les angles de leurs faces par la réflexion de la lumière, au moyen du goniomètre de M. Wollaston, de Malus, ou de tout autre instrument pareil. Il faut enfin connaître avec précision le sens de ces faces, relativement aux plans qui contiennent l'axe ou les axes du cristal. C’est à quoi l’on parvient sans aucune difficulté en clivant quelques lames de la substance cristallisée ; et déter- minant d'abord, par observation, les sens suivant lesquels 206 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION leur interposition ne trouble point la polarisation imprimée a des rayons lumineux. On croise ensuite ces lames avec d’autres plaques cristallisées, et le développement des cou- leurs fait connaître la direction et le sens des actions que le cristal exerce. Les avantages de la méthode que je viens d'exposer tiennent à deux choses : d'abord à ce que la précision de la mesure porte sur l'écart même des deux rayons, et non pas sur l'inci- dence absolue dans laquelle, en effet, une petite erreur n'est presque jamais d'aucune importance; en second lieu, à ce que les alternatives de superposition et de séparation des traits remplissent , pour ainsi dire, l'office de verniers qui font juger avec une extrème exactitude le point où chaque coïncidence est la plus parfaite. La précision augmente encore par la facilité que l’on a d’éloigner plus ou moins la colonne Hh de la division verticale; ce qui permet de varier l'étendue des coïncidences par la distance, et de fixer ainsi la distance pré- cise où chacune d'elles a lieu le plus exactement. D'après ce que nous avons dit plus haut, la marche du rayon qui subit la réfraction ordinaire est l'élément duquel on part pour calculer la marche de l’autre rayon. Il faut donc déterminer d’abord la constante de cette réfraction. On le peut sur l'appareil même : il suffit, pour cela, de tailler dans le prisme de cristal une face assez peu inclinée aux autres pour pouvoir observer directement la réfraction à tra- vers l'angle qu'elles forment ( fig. 3). Alors, posant cet angle sur la colonne HA par une de ses faces, et plaçant l'œil der- rière l’autre, en V, par exemple, on observe par réfraction l'image ordinaire d'un trait O d’une des divisions, et l’on regarde à quel trait R répond le prolongement du rayon DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALLISÉS. 20% émergent l'V qui arrive à l'œil. Les positions des traits O,R, étant ainsi connues avec la hauteur du point d'incidence et l'angle réfringent du prisme ; on peut calculer le rapport de réfraction par les formules que j'ai données dans mon Traité de physique, tom. III, pag. 200. Il faut seulement bien s'assurer que la réfraction que l'on observe est l'ordinaire. C'est à quoi l’on peut parvenir, soit en constatant la con- stance du rapport qu’elle suit’ sous diverses incidences, et pour des sens de coupes quelconques, ou d’après la position que le rayon ainsi réfracté affecte par rapport à l’autre, en vertu de la loi de la réfraction extraordinaire supposée con- nue; ou enfin d’après la loi de la polarisation à laquelle le rayon ordinaire est soumis, et que l’on peut vérifier en re- gardant, à travers une plaque de tourmaline, la division ré- fractée. L'observation précédente de la réfraction laisse sub- sister la dispersion; mais si le prisme n’est pas très-ouvert, et si l'on ne se place pas très-loin de la division que l'on observe, cela n’empêchera pas que les traits réfractés ne puissent en- core se distinguer avec une netteté suffisante. Au reste, on évite ces inconvénients en plaçant au devant de l'œil un verre coloré qui ne laisse passer qu'une seule espèce de lumière sim- ple, par exemple une seule espèce de rouge. Seulement il faut alors ramener les résultats par le calcul à ce qu'ils auraient été, si l’on eùt observé la réfraction des‘rayons moyens. J'ai appliqué cette méthode à des cristaux à un axe et à plusieurs axes; je commencerai par les premiers, parce qu'ils sont les plus simples. Parmi eux j'ai d’abord choisi pour sujet d'observation le cristal de roche, parce que sa double réfraction est attrac- tive; car la double réfraction répulsive me paraît suffisam- 208 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION ment vérifiée par les expériences de Malus sur le spath d’Is- lande : on sait qu'il l'a trouvée parfaitement concordante avec la loi d'Huyghens, et par conséquent avec la loi des vitesses donnée par M. Laplace. Mais j'ai fait voir plus haut que ses observations sur le cristal de roche, qui exerce la double réfraction attractive, avaient été infiniment plus li- mitées. La seule preuve que l’on eùt de la conformité de cette réfraction avec la loi d'Huyghens, en modifiant toute- fois l'ellipsoide qui la représente, c’étaient les phénomènes de couleurs que j'ai donné le moyen de développer, à toute distance de l’axe, par le croisement des plaques cristallisées. Or, quoique cette méthode offre en elle-même plusieurs ve- rifications qui attestent sa certitude; quoique le principe des interférences, qui paraît de jour en jour se confirmer davan- tage, en montre la liaison avec la variation des vitesses, ce- pendant on pouvait dire que ces procédés étaient encore irop récents pour servir à vérifier autre chose que leurs propres résultats; et l’on pouvait desirer d’éprouver la double réfraction attractive par une épreuve aussi directe et aussi évidente que l’autre, c'est-à-dire par la déviation même des rayons. Il était donc naturel d'appliquer au cristal de roche mes nouveaux procédés : cela avait même l'avantage de les soumettre eux-mêmes à une épreuve qui pouvait paraître assez délicate, à cause du peu de force de la double réfrac- tion dans cette substance, et par conséquent du peu d'écart ae l'on est habitué à lui voir produire. Mais cette difficulté n'existé plus quand on parvient à faire passer les rayons à tra- vers des prismes rectangulaires : car alors leur écartaugmente assez pour que j'aie pu l’observer de 25 millimètres à des distances de six décimètres, et cela dans des sens de coupe qui DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALLISÉS. 205 n'offraient pas le maximum de la doubleréfraction , et dans des circonstances où, par le mode d'observation, un dixième de millimètre était une quantité très -appréciable. On sait que, dans la loi de Huyghens, chacune des deux ré- fractions dépend d’une seule constante, qui se détermine par des observations de réfraction faites dans un plan per- pendiculaire à l'axe du cristal. Alors les deux réfractions suivent la loi de Descartes ; c’est-à-dire que le sinus d’inci- dence est au sinus de réfraction en raison constante. Il n'y a de différence que dans le coëfficient de cette proportion- nalité. Pour réaliser cette épreuve, j'ai fait tailler un prisme rectangulaire de cristal de roche, dont l'arête était paral- lèle à l'axe des aiguilles, qui est aussi celui de la double ré- fraction ; et j'ai observé les déviations des rayons dans un sens perpendiculaire à l’arête de ce prisme. Par une singu- lière conséquence de la théorie, il arrive que, dans ce sens de coupe, et lorsque l'angle réfringent est droit, l’observa- tion des coïncidences donne immédiatement , et presque sans calcul, la valeur du coëfficient qui exprime l'accroissement du quarré de la vitesse; ce qui est un avantage singulière- ment précieux, puisque ce coëfficient est la seule indétermi- née dont la connaissance soit nécessaire pour calculer la marche des rayons dans tous les autres sens quelconques, et qu'on l’obtient ainsi immédiatement. En faisant cette expérience, et la répétant sous des inci- dences diverses avec le même prisme, on trouve que toutes s'accordent à donner au coëfficient la même valeur. On trouve une égale constance en employant des prismes non rectan- gulaires , pourvu que leur arête soit toujours bien parallèle à l'axe des aiguilles : le sens dans lequel on taille leurs faces au- 1818. . 27 210 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION tour de cet axe, n'apporte aucun changement aux résultats, Ainsi les deux réfractions suivent lune et l’autre, dans ce sens de coupe, le rapport constant des sinus, et celle qui est extraordinaire a la même énergie tout autour de l'axe. Ce mode et cette symétrie d’action sont les‘deux premiers carac- teres dela loi de Huyghens : seulement ici l'observation montre que la vitesse extraordinaire, considérée dans le système de l'émission, surpasse la vitesse ordinaire; le contraire a lieu dans le spath d'Islande et dans tous les cristaux que j'ai ap- pelés répulsifs. Connaissant par ces observations la différence du quarré des deux vitesses perpendiculairement à l'axe, J'ai ajouté cette différence au quarré de la vitesse ordinaire conclue du rapport constant de son sinus que j'avais préalablement dé- terminé ; j'ai obtenu ainsi l'expression du quarré de la vitesse extraordinaire perpendiculairement à l'axe, et j'en ai conclu cette vitesse même, qui est l'élément général de la double réfraction dans tous les autres sens. Alors, pour achever de vérifier si la loi de Huyghens était exactement observée, j'ai taillé des prismes dans d’autres sens et dans des sens fort divers, de maniere que le plan d'incidence se trouvât dans la section principale, ou hors de cette section; J'ai aussi observé les. séparations des rayons produites par la réflexion intérieure, lorsque l’inclinaison devient assez grande pour que les rayons se réfléchissent to- talement. Toutes ces expériences se trouveront rapportées textuellement dans la suite de ce Mémoire. On verra que toutes s'accordent de la manière la plus minutieuse avec les résultats calculés d’après la loi de Huyghens : d’où l'on peut conclure avec assurance que cette loi, déja si exactement réa- { | Î | | | | DANS LES CORPS RÉGULIEREMENT CRISTALLISÉS. 2Yt lisée dans le spath d'Islande, ne l’est pas avec moins d’exac- titude dans le cristal de roche; avec cette seule différence, que, dans la première de ces substances, l'ellipsoide, dans la construction de Huyghens , est aplati à ses pôles ; au lieu que, dans la seconde, il est alongé. J'ai dit plus haut que, lorsque les rayons polarisés tra- versent le cristal de roche dans le sens de son axe, ou très- près de cet axe, ils éprouvent des changements de polarisa- tion pareils à ceux que j'ai reconnus depuis dans plusieurs li- quides et dans les vapeurs même. Et, ce qui est bien singu- lier, le sens dans lequel ces changements s’opèrent , n’est pas le même pour toutes les aiguilles de cristal de roche ; de sorte que l’on retrouve entre elles, sous ce rapport, la même oppo- sition qui existe entre des liquides différents, par exemple, entre l’huile essentielle de citron et celle de térébenthine. D’après une expérience ingénieuse de M. Fresnel, si ces phé- nomènes sont produits par une double réfraction, jelle doit _être excessivement faible. Aussi m’ai-je pu en reconnaître au- cune trace sensible dans mes expériences; et les aiguilles qui agissaient dans un sens, comme celles qui agissaient dans l’autre, m'ont paru également soumises à la loi de Huyghens. Il est vrai qu’à quelque distance de l’axe, l’action principale due à la double réfraction masque ces petits accidents, qui ne peuvent être aperçus que lorsqu'elle devient excessivement faible; mais j'ai à dessein mesuré, aussi exactement que je l'ai pu, les anneaux formés autour de l’axe dans des plaques de cristal de roche dont les rotations étaient opposées; et, quoique les diamètres des anneaux fussent considérables , puisque ce- lui du sixième ordre était d’un demi-mètre , et que j'aie mis un grand soin à les mesurer, ils se sont trouvés de dimensions 27: 212 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION exactement égales avec des plaques d’épaisseurs égales, quel que füt le sens de leur rotation. Cependant le déplacement des plans de polarisation était tel que, dans une des expé- riences, le premier anneau avait complètement disparu, et, dans une autre, cette disparition s’étendait jusqu'aux trois premiers; mais tous ceux qui se montraient plus loin ne paraissaient avoir subi aucune modification dans leur gran- deur. Au reste, je compte reprendre ces observations par un procédé beaucoup plus exact , et qui peut-être rendra sen- sibles ces influences, si toutefois elles peuvent le devenir. On sait que MM. Arago et Fresnel ont découvert, pour la mesure des réfractions, un procédé d’une extrême exacti- tude, fondé sur les phénomènes de la diffraction de la lu- miere. Ce procédé, appliqué à des lames cristallisées douées de la double réfraction, rend sensibles les plus petites diffé- rences de vitesse des rayons qui les ont traversées dans des sens connus; ou, lorsque la marche des rayons est supposée connue théoriquement ainsi que les vitesses, elle détermine le sens et la quantité du déplacement qui doit en résulter dans les bandes diffractées que l’on observe; deux choses qui peuvent se constater et se mesurer avec la plus parfaite pré- cision. Ce procédé est donc extrêmement propre à vérifier les lois de la double réfraction dans toutes les substances, soit à un axe, soit à deux axes, et MM. Arago et Fresnel : avaient depuis long-temps le dessein d'en faire cette appli- cation; mais quelques dispositions particulieres à introduire dans les détails d'expériences, les ont empêchés jusqu'ici de se livrer à ce travail. Cependant ils ont bien voulu, à ma sol- licitation, faire, avec leurs appareils, un simple essai sur une lime de cristal de roche parallèle à l'axe, que je leur ai re- DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALLISÉS. 213 mise; ils ont mesuré le déplacement des bandes diffractées produit par cette lame , d’abord sous l'incidence perpendi- culaire, et ensuite sous une incidence extérieure de 20°, ce qui produisait un angle de réfraction de 12° 46' par rapport à l'axe du cristal : or le rapport des déplacements, produit par ces deux incidences différentes, s'est trouvé à Z pres le même qu'indiquait la loi de Huyghens; et, en outre, la vitess eex- traordinaire, perpendiculairement à l'axe, étant conclue de la même réfraction ordinaire que j'avais employée dans mes calculs, s’est trouvée seulement différente de -= de celle que j'avais trouvée. D'où l’on voit d’abord que l'application de la loi de Huyghens au cristal de roche n’est pas douteuse; et en- suite que la diffraction , ainsi employée par MM. Arago et Fresnel, fournit, pour déterminer la loi de la double réfrac- tion dans toutes les substances , une seconde méthode tres- exacte , quoique également différente de celles que le docteur Brewster supposait les seules possibles. Avant d'entreprendre l'observation de la double réfraction dans les cristaux à deux axes, où elle est naturellement plus compliquée, j'ai voulu éprouver la méthode des coïncidences sur cristal à un axe dont la double réfraction füt la plus faible possible , et j'ai choisi le beril pour exemple; mais il m'a pré- senté des phénomènes auxquels je ne m'étais pas attendu. Le beril se trouve communément en aiguilles hexaëdres de diverses couleurs ; les plus ordinaires sont de couleur ver- dâtre, mais on en a aussi de jaunes et même de tout-à-fait blanches. L’axe de double réfraction est, comme dans le cris- tal de roche, parallèle à l'axe des aiguilles; aussi, lorsqu'on taille une plaque de beril perpendiculaire à cet axe, et qu'on la place entre deux plaques de tourmaline croisées à angles 2 14 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION droits, si l’on regarde la lumière des nuées à travers ce sys- tème , on découvre, tout autour del’axe, des anneaux colorés, concentriques , produits par l'accroissement progressif de la double réfraction qui en émane; mais, soit qu'il existe tou- jours dans les berils de petites irrégularités de structure, soit que leur axe ne soit pas rigoureusement unique, ce que je n'ai pas encore eu la possibilité de décider définitivement, on observe, sur-tout dans les premiers anneaux, des altéra- tions de forme sensibles ; et, de plus, la croix noire, qui ca- ractérise les cristaux à un seul axe, semble communément éprouver quelques modifications à son centre, quand on tourne l'aiguille autour de son axe; ce qui pourrait égale- ment dépendre de quelques petites irrégularités dans la structure, ou même d'une simple compression extérieure qui aurait agi sur les aiguilles pendant leur formation (1). Quoi qu'il en soit, ces anomalies paraissent n’avoir d’in- fluence prédominante que dans l'extrême faiblesse de la force principale, c’est-à-dire tout près de l'axe; et leur effet s’af- faiblit bientôt jusqu'à devenir insensible, quand les angles des rayons réfractés avec l’axe sont devenus assez grands pour développer un peu davantage l'énergie de la double ré- (x) D'après ces phénomènes, j'ai été surpris de voir que le beril est pré- cisément le cristal que le docteur Brewster a choisi comme exemple pour énoncer les caractères de la configuration des anneaux dans les cristaux à un seul axe ( pag.210). Aurait-il été assez heureux pour trouver des berils dont les anneaux fussent exempts des particularités que je viens d'in- diquer ; ou les aurait-il négligées comme étant sans importance ? En tout cas, pour les échantillons qui les offrent, ia question reste entière ; et ilest évident que l'on ne peut pas décider qu'ils suivent la loi de Huyghens, “après la seule observation des anneaux, DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALLISES. 21!» fraction. Alors la loi de Huyghens m’a paru s’observer exac- tement, soit que l’on fit réfracter les rayons perpendicu- lairement à l'axe pour déterminer les plus grandes et les moindres valeurs des deux vitesses, soit qu’on les fit entrer par une face parallèle à l’axe et sortir par une face perpen- diculaire. Je n’ai point encore eu le temps de compléter ces épreuves par l'observation des déviations latérales ; mais elles suffisaient pour mon but actuel, qui était de montrer que, dans les cristaux même dont la double réfraction est la plus faible ; la méthode des coïncidences suffit pour la mesurer. Or, en répétant ces observations d’abord sur un beril de couleur jaune et ensuite sur un beril de couleur verdâtre, j'ai été très-surpris de voir que les intensités de la double ré- fraction y étaient fort différentes. Le coëéfficient qui exprime l'accroissement du quarré de la vitesse étant exprimé par 173 dans le beril jaune, il l'était par 153 dans le beril vert, et il ne peut pas y avoir sur chacun de ces nombres plus de 3 ou 4 unités d'erreur. La même différence se soutient dans tous les autres sens, quoique chacun des deux berils en par- ticulier paraisse suivre la loi de Huyghens. Voilà donc deux cristaux dont l'espèce minéralogique est réputée la même, et dont cependant la structure intérieure est différente ; car les phénomènes de la double réfraction se rapportant à des lignes fixes menées dans le cristal, suivant des sens déter- minés et relatifs aux formes primitives, il paraît évident qu'elle est liée à la structure. Ces berils auraient-ils des com- positions chimiques différentes avec des angles pareils, ou des angles un peu différents; ou encore auraient-ils été com- primés pendant leur formation, ou enfin auraient-ils deux axes très-voisins l’un de l’autre ? c’est ce que je n’ai pas encore 216 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION eu le temps de décider, et ce qui est assez difficile, à cause du poli imparfait et des irrégularités qu’offrent toujours les faces naturelles qui les terminent. Mais ces difficultés ne se présen- teront pas au même degré dans d’autres substances : il serait bien curieux , par exemple , d'étudier ainsi comparativement les cristaux de chaux carbonatée magnésienne et dechaux car- bonatée ferrifere dans lesquels M. Wollaston à dit avoir re- connu des angles sensiblement différents de ceux de la chaux carbonatée pure; peut-être trouverait-on des différences cor- respondantes dans les intensités de leur double réfraction. J'aurais vivement souhaité de pouvoir tenter cette épreuve; mais je n'ai pas pu jusqu'ici me procurer des cristaux trans- parents de ces substances, quoique je sache qu'il en existe : je sollicite à cet égard les secours des minéralogistes , s'ils veulent bien accorder quelque intérêt à ces détermina- tions. Je me propose d'effectuer les mêmes épreuves sur tous les cristaux à un seul axe que je pourrai obtenir : dès-à- présent celles que j'ai rappelées suffisent pour montrer que la loi de Huyghens s'applique à ces cristaux avec toute l’exac- titude que comportent les méthodes d'observation actuelles. Il en résulte que cette loi simple représente tous les phéno- mènes qu'ils produisent sans qu'il soit besoin de recourir à la considération de plusieurs axes que le docteur Brewster a essayé de lui substituer; et l'on peut faire sentir tout l'avantage qu’elle conserve par une seule remarque : c’est que, si la construction compliquée du docteur Brewster eût été seule connue, il eût été très-utile d'en déduire la loi de Huyghens, et de montrer que toutes les indéterminations d'axes que le docteur Brewster suppose, se réduisent en DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALLISÉS. 217 définitif, par le calcul, à un seul axe unique, dirigé d'une manière invariable dans chaque cristal. C'est là précisément ce que.je ferai dans la suite de ce Mémoire, pour les cristaux à deux axes auxquels le docteur Brewster a aussi étendu sa construction. Je prouverai par la théorie et par l'expérience, que toutes les directions arbi- traires d’axes qu'il y a imaginées, peuvent se réduire à deux uniques , de directions invariablement déterminées dans chaque cristal; et que toute la différence entre eux et les cristaux à un seul axe, c’est que dans ceux-ci, l’accroisse- ment du quarré de la vitesse, est proportionnel au quarré du sinus de l'angle formé par l'axe avec le rayon réfracté extra- ordinairement, tandis que, dans les cristaux à deux axes, ce quarré se change, dans le produit des deux sinus, que le rayon forme avec les deux axes; et cette analogie si simple, qui rassemble les deux systèmes de structure sous un même - point de vue, nous donnera en même temps toutes les lois de la polarisation dans les cristaux à deux axes, lois que le docteur Brewster n’a pas considérées dans son mémoire. Mais, avant d'exposer les principes mathématiques qui m'ont fait découvrir directement ces rapports, il faut donner une idée précise des considérations que le docteur Brewster a appliquées aux cristaux à deux axes, et rappeler les résul- tats qu'il en a déduits. Ce résumé, en satisfaisant aux règles de la justice, aura en outre l'avantage de faire sentir la dif- férence des deux méthodes. Nous avons vu que, dans les cristaux à un seul axe, les teintes produites par la polarisation, dépendent de deux éléments, dont l’un est la longueur du trajet de la lumière dans le cristal, et l’autre est l'angle formé par l'axe avec le 1818, 28 218 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION rayon réfracté. De quelque manière qu'on envisage ce phéno- mène des teintes, l'influence du chemin parcouru doit se faire sentir dans les cristaux à deux axes, comme dans les autres; on peut donc se débarrasser de cet élément, en sup- posant tous les résultats observés, ou ramenés, à une épaisseur commune. C’est ce qu'a fait d’abord le docteur Brewster. Pour comprendre ensuite comment il a égard à l’influence de l’autre élément, l'inclinaison du rayon sur les axes, il faut savoir que le docteur Brewster n’attache pas au mot axe la même idée que nous. Il n'entend pas par-là seulement la ligne droite ou les lignes droites suivant lesquelles la double réfraction du cris- tal est nulle. Ce qu’il appelle généralement axes, ce sont des lignes droites arbitraires, menées à volonté dans un cristal, et auxquelles il entreprend de rapporter les phénomènes. Ce sont de vrais axes de coordonnées angulaires qui peu- vent être simples ou multiples, et inclinés entre eux à angle droit ou sous tout autre angle quelconque. Pour plus de simplicité, supposons d’abord qu'il se borne à établir deux axes de ce genre rectangulaires entre eux, et qu'il cherche leur influence sur un rayon réfracté dont la direction est donnée; alors (pag. 237), par un point quelconque de ce rayon, il mène une ligne parallèle à chacun des deux axes ; si chacun d’eux existait seul, les valeurs numériques des teintes seraient, comme dans les cristaux à un seul axe, propor- tionnelles au quarré du sinus de l’angle formé par la direc- tion de cet axe avec le rayon réfracté; ce quarré sera donc encore, selon lui, l'expression de la force individuelle exer- cée par chacun des deux axes. Il faut maintenant savoir composer ces forces. Or, d’après l'application qu'on en avait déja faite au mica de Sibérie, on savait qu'elles s’ajou- ass DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALLISÉS. 219 tent, ou semblent s'ajouter, lorsqu'elles s’exercent dans un même plan, et qu'elles se retranchent, ou semblent se re- trancher les unes des autres, lorsqu'elles agissent dans des plans rectangulaires. Le docteur Brewster a cherché, j'ima- gine d'une manière empyrique, un mode de composition général qui satisfit à ces deux conditions extrêmes, et qui se pliât à quelqu'une des conditions intermédiaires déduites de la configuration des anneaux dans les cristaux à deux axes; ee qui l’a enfin conduit à la règle suivante (p.239) : la teinte produite par l'action combinée de deux axes, est égale à la dia- gonale d'un parallélogramme, dont les côtés représentent les valeurs numériques des teintes qui seraient produites par chaque axe en particulier, et dans lequel l'angle compris entre ces côtés est double de celui que forment les deux plans menés par le rayon réfracté et par les deux axes. Cette regle une fois connue, le docteur Brewster s’en sert pour composer les influences d’un nombre quelconque d’axes, et trouver leur action totale; ou, réciproquement, pour décomposer l'effet d’un seul axe en un nombre donné d'effets partiels. L'objet d’une loi expérientale étant de rassembler et de concentrer les phénomènes, elle doit être admise dès qu’elle atteint ce but, quelle que soit la nature des idées spéculatives qui ont servi à l’établir : mais le succes qu’elle peut avoir, ne doit pas aveugler sur son origine. Or, après avoir donné l’ex- position de sa règle pour composer les influences des axes, et avoir indiqué, sinon montré, la route qui l'y a conduit; le doc- teur Brewster ajoute (pag. 240), qu’elle n'est évidemment point déduite de données empiriques, mais qu’elle est rigou- reusement naturelle, comme étant fondée sur le méme prin- cipe qui règle la composition de toutes les forces mécaniques. 28. 220 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION Nous croyons que les géomètres seront d’un autre avis. L'idée de forces réellement émanées d’axes rectilignes, avec une in- tensité proportionnelle au quarré du sinus, est une hypo- thèse. Le mode de composition de ces forces, adopté par le docteur Brewster, est aussi une hypothèse, puisque, dans les règles de la mécanique, on construit le parallélogramme des forces sur leur direction même, et non pas sur un angle double de leur inclinaison; enfin toutes ces suppositions de forces, déja hypothétiques dans leur essence, deviennent moins vraisemblables encore, quand on les fait émaner d’axes arbitraires, comme le permet la règle que nous examinons. Il est donc prouvé par ces divers motifs, qu’elle est simplement empirique; et qu'ainsi, sans chercher à lui attribuer un autre mérite, il faut la juger en la comparant aux faits. Or, ici on lui trouvera des avantages très-réels, et que personne, avant le docteur Brewster, n'avait obtenus. « Si, dit-il, on calcule d'après cette lorles teintes pour un cristal quelconque, dans lequel on puisse saisir leur en- À « semble d’un seul coup-d’œil, d'apres l'inspection des an- « neaux qui se forment autour des axes résultants, il n’y aura « qu'à dessiner ces anneaux sur un papier, en réduisant les « résultats conformément aux diverses épaisseurs que traver- « versent les rayons qui arrivent à l'œil sous des directions « diverses, et l’on aura une représentation fidele des an- « neaux, laquelle exprimera de la maniere la plus exacte, « toutes les inversions de leurs teintes, montrera leurs points « d'inflexions, et se pliera à l’innombrable variété de formes « qu'ils prennent, selon les diverses circonstances où ils sont « formés. » Il est à regretter que le docteur Brewster n'ait pas rap- DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALLISÉS. 292€ porté dans son mémoire, quelques mesures effectives d’an- neaux, d’après lesquelles on aurait pu encore mieux appré- cier l'extrême justesse qu’il attribue à saconstruction. La seule vérification numérique qu'on y trouve, et elle est réellement très-remarquable, c’est l'application qu'il en à faite aux ex- périences publiées dans mon Traité de physique, sur les lames de chaux sulfatée, et à d’autres analogues, faites par lui- même. Ne connaissant pas alors la cause de la bizarrerie des phénomènes que ces lames présentent, quand les rayons y pénètrent d’une manière très-oblique, j'avais simplement ob- servé leurs teintes avec fidélité, et je les avais réduites en tables pour différents sens d’inclinaison. Le docteur Brewster ayant depuis découvert que la chaux sulfatée a deux axes d'anneaux contenus dans le plan de ses lames, et inclinés l'un à l’autre de 60°, il a appliqué sa règle à ces lames en prenant, pour axes arbitraires de forces, la normale au plan des lames et la ligne intermédiaire entre les deux directions suivant lesquelles se forment les anneaux. Il a ainsi formé, par le calcul, une table qui s'accorde très-bien avec l’expé- rience. Je remarquerai , toutefois, qu’en réduisant les ré- sultats des observations au cas d’une épaisseur constante , comme l’a fait le docteur Brewster, on est obligé de les di- viser par la sécante des angles de réfraction : or cette divi- sion, en les affaiblissant, réduit jusqu’à le rendre insensible, l'écart qui paraît exister entre la simple loi des épaisseurs, et les teintes réellement observées ; de même qu'on jugerait mal les lois des anneaux colorés ordinaires, sous les diverses incidences, si on les ramenait par une réduction pareille à la perpendicularité. Ceci fait encore plus regretter que le docteur Brewster n'ait pas également rapporté, pour quelque 222 LOIS DE LA DOUBLE RÉFR ACTION ET DE LA POLARISATION autre cristal, et pour d’autres sens de coupe, des résultats immédiats de mesures, que l'on aurait pu ensuite calculer avec toutes les modifications quelconques, sans altérer leur type primitif. J'ai dit plus haut que, dans les cristaux à un seul axe, le terme proportionnel au quarré du sinus dans l'expression des teintes est précisément le même qui mesure l'accroisse- ment du quarré de la vitesse du rayon extraordinaire. En ap- pliquant cette analogie aux cristaux à deux axes, le docteur Brewster a conclu l'expression de la vitesse extraordinaire, d'après la loi empirique qui lui a servi à représenter les an- neaux ; il est arrivé ainsi à une formule qui contient comme indéterminées les forces individuelles émanées des deux axes, et qui, renfermant de plus comme élément ‘essentiel l'angle double , introduit empiriquement dans la composition de ces forces, se trouve, par cela même, embarrassée de ma- nière qu'on n’en saurait éliminer cet angle, pour la réduire à ses éléments propres, sans tomber dans une excessive com- plication de calcul. Cette difficulté est vraisemblablement la cause qui a em- pêché le docteur Brewster de soumettre la loi de vitesse don- née par sa formule , à des vérifications rigoureuses et multi- pliées, en étudiant par des mesures précises la loi de réfrac- tion qui en résultait. A la vérité, il a tenté cette épreuve, mais d’une manière, qui, à notre avis, était loin de la préci- sion qui pouvait la rendre décisive. « Cette recherche, dit le « docteur Brewster à la fin de son Mémoire, présente des « difficultés peu ordinaires. Le manque d’un minéral à deux «axes qui pût, ainsi que le spath d'Islande, être taillé en « grands morceaux et coupé avec facilité dans tous les sens, DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALLISÉS. 223 « la nécessité qu’il eût deux axes résultants considérablement «inclinés l’un à l’autre pour obtenir une séparation mesu- « rable des images en différents points entre les axes, rendi- «rent pendant long-temps mes recherches infructueuses. « Enfin la découverte de cristaux qui possédaient à quelques « degrés les plus importantes de ces propriétés, m'a mis « en état de reprendre et de compléter ces recherches. » On conçoit que les conditions assignées ici par le docteur Brewster pour la possibilité des expériences, ont dû se rap- porter aux moyens qu'ilavait pour observer la double réfrac- tion; et l'on a vu précédemment qu'elles ne sont point né- cessaires en elles-mêmes, puisque, à l'aide de la méthode des coïncidences que j'ai plus haut décrite, on peut mesurer tres-exactement la double réfraction dans toutes sortes de cristaux , quelque faible qu'elle y puisse être, et quelle que soit l'inclinaison de leurs axes. Ainsi l'énoncé même de ces conditions donne une‘in#"cation précise des procédés d’ob- servation que le docteur Brewster possédait alors, et montre qu'ils n'ont pu avoir aucun rapport avec ceux qui ont été ima- ginés par MM. Arago et Fresnel, ou par moi-même. Au reste, le docteur Brewster a décrit lui-même son mode d'expérience. « Après avoir, dit-il, reconnu les directions « suivant lesquelles la polarisation devient nulle dans un « cristal à deux axes (l’espece du cristal n’est pas indiquée), « J'ai formé avec ce cristal un prisme d'un angle réfringent « considérable, dont une des faces füt, autant que possible, « perpendiculaire à l’une de ces directions. J'ai ensuite placé « ce prisme sur un goniomètre; et, ayañt marqué la position « dans laquelle le point où la polarisation était nulle, autre- « ment le centre des anneaux, se trouvait coïincider avec 224 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION « l'image polarisée d'une chandelle, j'ai substitué l'image di- « recte de la chandelle, et j'ai observé que cette image était « simple, de sorte que la force de double refraction , aussi- «bien que la force polarisante, s'était complètement éva- « nouie. En tournant le goniomètre de part et d'autre de « cette position, la déviation du rayon extraordinaire deve- « nait sensible et augmentait graduellement; et, en conti- « nuant d'observer cette déviation dans le plan qui passait par les axes résultants, je trouvai qu’elle augmentait jus- « qu'au point intermédiaire entre ces axes où elle devenait stationnaire, après quoi elle diminuait progressivement « vers l’autre axe où elle devenait de nouveau simple. Je « mesurai ensuite la déviation du rayon extraordinaire pour « divers points compris dans ce plan, dans la section qui « lui était perpendiculaire, et aussi hors de ces deux direc- « tions; et j'ai trouvé que la force de double réfraction va- « riait dans la même raison que,la, force polarisante, et que « tous les phénomènes, quel que füt le nombre des axes qui « les produisit, pouvaient se calculer par la même loi géné- « rale, déja établie plus haut pour les phénomènes de la po- « larisation. » À À J'ai rapporté textuellement ce passage pour n'affaiblir en rien les résultats qui appartiennent au docteur Brewster. Du reste , il ne donne aucune détermination numérique quelconque : il n'indique pas même sur quel cristal il a opéré; ni comment il a »esuré la déviation du rayon extraordi- naire; ni si c'est de la déviation absolue ou relative qu'il entend parler. La maniere même dont il s'exprime ne pré- sente pas un sens d'une interprétation facile. J'ignore, par exemple, comment le docteur Brewster a pu s'assurer rumé- DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALLISÉS. 29 riquement que la force de double réfraction suivait la même loi que la force de polarisatior:; car jusqu'ici personne n'a pu mettre à nu ces forcés, ni en introduire la considération au- trement que comme un moyen abrégé d'exprimer la marche -générale des phénomènes , et alors on ne saurait se faire une idée nette de ce que peut être leur mesure. Si, par-là, le docteur Brewster a voulu désigner simplement l'écart des deux rayons réfractés, on doit regretter qu'il n’ait donné aucune indica- tion sur la valeur absolue de cet écart, ni sur sa direction par rapport aux axes; au reste, dans l'absence de ces indications, il est évident, par la nature même de son procédé, qu'il n’a pas observé suivant des coupes variées, puisqu'il ne parle que d’un seul prisme taillé dans une direction très-particuliere; eten outre, dans ce prisme, il n’a pu observer lesdéviations des rayons que d’une manière très-imparfaite, puisque le point, ou plutôt l'objet lumineux qui lui servait de mire, était la flamme d’une chandelle, laquelle a nécessairement un dia- mètre si considérable, qu'il exclut toute idée d’une grande exactitude, d'autant plus que la dispersion des couleurs, occa- sionnée par le passage des rayons à travers le prisme, devait altérer encore les deux images ,'et rendre plus difficile, si- non impossible, la mesure précise de leur écart. Le docteur Brewster, qui rejette si décidément, comme incorrectes, les expériences de Malus sur le spath d'Islande, quoiqu'elles aient été faites avec tant de soins, sur des divisions finement tracées , ne doit pas nous trouver injustes, si nous ne pou- vons regarder comme définitives des observations faites par des procédés incomparablement moins exacts, décrites en termes généraux, et dont on ne rapporte aucun détail précis, aucun résultat numérique qui puisse les faire apprécier. 1818. 29 296 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION Mais laissons cette sorte de récrimination qui n'avance point la science. Après avoir rétabli, dans la série des décou- vertes successives, l’ordre qui nous a paru le plus conforme à la vérité, ne voyons plus dans le nouveau travail du docteur Brewster que ce qu'il ajoute à ces richesses. Félicitons-le d’a- voir trouvé une loi expérimentale qui embrasse un grand nombre de phénomènes dont jusqu'ici personne n'avait su exprimer les rapports; et, si nous croyons que ses résultats laissent encore à desirer , efforcons-nous, en reconnaissant leur mérite, de les soumettre à d’autres lois plus parfaites, ou d’en présenter des expressions plus simples, et plus rigou- reuses : tel est le but que j'espère avoir atteint. , Je considère d'abord, qu’en appliquant à la marche de la lumitre dans un cristal quelconque le principe de la moindre action comme l'a fait M. Laplace , il ne reste qu'à découvrir la loi de la vitesse; car, lorsqu'elle sera donnée, l'applica- tion seule du principe déterminera la marche des rayons. Maintenant, pour découvrir cette loi des vitesses, je re- marque qu’en général, dans les cristaux réguliers, jusqu'à présent connus, il existe deux directions, et non davantage, suivant lesquelles l'écart des deux rayons réfractés est nul. Cela est conforme aux expériences mêmes du docteur Brewster, et ‘avais aussi constaté ce fait sans les connaître. La chose est d'ailleurs évidente par cela seul que les phénomènes de cou- leurs, qui accompagnent par-tout ailleurs la réfraction double, sont nuls dans les directions dont il s’agit. Ges deux direc- tions sont ce que j'appelle les axes du cristal; et ce point de vue embrasse aussi les cristaux à un seul axe, en les consi- dérant comme ayant deux axes réunis en un seul, c’est-à- dire séparés par un angle nul. DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALLISÉS. 397 La double réfraction étant nulle dans le sens des axes, il s'ensuit que, si l’on introduit dans le cristal un rayon , Soit naturel, soit polarisé, sous une inclinaison telle que la ré- fraction ordinaire lui fasse suivre un des axes, la réfraction extraordinaire, si elle existe encore dans cette circonstance, imprimera aussi la même direction à la portion du rayon qu'elle sollicite; de sorte que sa vitesse, si elle est réelle, de- vra être alors égale à celle que produit la réfraction ordi- Paire : or, ce qui prouve qu'elle est réelle, même dans cette circonstance , c’est qu'elle se montre tout entière dans une _circonstance physique où les causes qui la produisent, quelles qu'elles puissent être, sont infiniment peu différentes. En effet, si l’on écarte le moins du monde le rayon incident de la direction qui le fait se réfracter suivant un des axes, il se forme en général deux rayons réfractés, l’un ordinaire , l'autre extraordinaire, qui s’écartent infiniment peu l’un de l'autre ; et même, si l'on emploie un rayon polarisé, on trouve des directions d'incidence telles que le rayon extraordinaire est le seul qui se forme. La vitesse extraordinaire est donc alors bien réelle, et elle diffère infiniment peu de la vitesse ordi- naire, puisque l'écart des deux rayons réfractés est infiniment petit. Ainsi, d’après la loi de continuité, elle doit exister en- core quand toute la réfraction s'opère suivant un des axes : d’où il suit qu’alors les deux vitesses, ordinaire et extraordi- aire, sont égales entre elles. Maintenant, pour les cristaux à un seul axe, M. Laplace a trouvé que le quarré de la vitesse extraordinaire est égal au quarré de la vitesse ordinaire, plus un terme proportion- nel au _quarré du sinus de l'angle, formé par l'axe unique avec le rayon réfracté extraordinairement. L'analogie porte \ f 29. 228 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION donc à penser que, dans le cas général de deux axes, la diffé- rence des quarrés des vitesses sera encore exprimée par une fonction du mème genre, c'est-à-dire du second degré par rapport aux deux axes du cristal : or la fonction la plus gé- nérale de cet ordre est composée de trois termes, dont deux sont les quarrés des sinus des angles formés par le rayon ré- fracté avec chacun des deux axes, et le troisième est le pro- duit de ces mêmes sinus ; mais les termes qui contiennent les sinus isolés doivent disparaître d'eux-mêmes, en vertu des coëfficients qui les affectent, puisque la double réfraction de- vient nulle suivant chacun des axes, ce qui rend alors les” vitesses égales ; il ne peut donc rester que le troisième terme, qui contient le produit des sinus; c’est-à-dire que, dans les cristaux à deux axes, le quarré de la vitesse extraordinaire sera égal au quarre de la vitesse ordinaire, plus un terme proportionnel au produit des sinus des angles formés par cha- cun des deux axes avec le rayon réfracté extraordinairement. Si l'angle des deux axes est supposé nul, ces deux axes se réu- nissent, les deux angles qu'ils forment avec le rayon réfracté deviennent égaux , et le terme additif au quarré de la vitesse ordinaire devient le quarré de leur sinus; c’est précisément la loi de Huyghens. Dans cette manière de voir, les cristaux à un seul axe ne sont qu'un cas de racines égales. Pour déterminer complètement la marche des rayons ré- sultante de cette nouvelle loi de vitesse, concevons trois axes de coordonnées rectangulaires IX, 1Y, 1Z (fig. 4), ÿant pour origine commune le point d'incidence I. Suppo- sons que les deux premières de ces coordonnées, désignées par +, y, soient prises dans la face même du cristal par la- quelle les rayons lumineux pénètrent, de sorte que la trai- DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALLISÉS. 229 sième, z, soit normale à cette face. Menons, à partir du point d'incidence, quatre droites, ST, IR, FA, IB, diversement in- clinées sur ces coordonnées, et dont les directions repré- sentent le rayon incident, le rayon réfracté extraordinaire, et les deux axes du cristal. Fixons les positions des rayons au moyen de deux coordonnées angulaires 6, x, 8',, r:, dont l’une, 6, 0',, exprime l'angle qu'ils forment avec la normale extérieure 1Z, ou leur distance zénithale; et l’autre, r,7,;, ex prime l’angle que leur projection sur le plan des xy forme avec la ligne des x, ou leur azimuth. Rapportons les deux axès du cristal à des coordonnées analogues, qui soient, pour le premier, à et a', et pour le second, 1" et &”. Alors si nous désignons, pour abréger, par u' u” les angles formés par le rayon réfracté avec chacun de ces deux axes, nous aurons cos. u'—sin.x" sind’, cos. (r,—a!)+ cos.1' cos. 6", COS. W'— sin.}" sin. 0’, cos. (r',—a")+ cos.x" cos.W", | ee) Ces données étant établies, soit v, la vitesse extraordinaire du rayon réfracté; ,v la vitesse ordinaire, laquelle est la même dans toutes les directions possibles; enfin # une con- stante positive ou négative, qui caractérisera l'espèce et l'in- tensité de la double réfraction que le cristal exerce, on:aura généralement De D LAVSRU SM.U . à (3) Il ne reste plus qu'à combiner cette loi avec les conditions résultantes du principe de la moindre action. Ces conditions, telles que M. Laplace les a établies dans les Mémoires de l'Institut pour 1809, sont exprimées par les deux équations suivantes : 230 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION 24 — sin.d cos. (r',—r) =, sin. 0", + (%) cos." | >. () L LEE ! dv, sin.6 sin.0", sin.(x,—T7)— FAT auxquelles on peut substituer ces deux autres qui s’en dé- duisent, et où les inconnues sont séparées, , dv he ' dy, \ cos.T . . Fe) . ’ ! :) j n Ke — sin.6 Sin.r—V, sun. 0), SR. Tr , + É) cos.b, sin.T, + = ) FA du (0) sin. w, d — sin.À cos. r—%, sin. 0’, COS.r/, + (5) cost COS.T ,— É ni sin.W', or, d'apres les expressions de w,, w' et u", données tout- a-l'heure, on a 1 dv, k sin.N cos.u' sin. u" sin. (m',—a') sin. 0", a) 7 29, sin.u' sin.u" + sin. À" cos.u" sin.*u' sin. (r',—a" —sin.N\ cos. W', cos. u' sin.” u" cos. (x',—a') dv, Na R LA — sin.}" cos.f', cos.u" sin” u' cos. (x',—a") (ge: 20, sin. sh sin." sin.u" | + cos.X sin.0', cos. u' sin. u" (4) +- cos." sin. (", cos. u" sin.*u' On pourra donc substituer ces valeurs dans les équa- tions (3), afin d'en éliminer les coëfficients différentiels de #’, et de r,. On pourra également en chasser w', u" et v”,, au moyen des équations (1) et (2). Alors il ne restera plus que deux relations entre 0, +, 0',,#,, c'est-à-dire entre les coordonnées angulaires du rayon incident, et celles du rayon réfracté extraordinaire qui en dérive. On connaîtra donc ainsi la marche de ce dernier rayon , en fonction de sa direction primitive d'incidence, et on pourra la comparer aux observations. | | | | | | ! | DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALLISÉS. 23r Au lieu d'effectuer cette élimination en général, ce qui conduirait à des résultats fort compliqués, il vaut mieux laisser les équations précédentes dans létat de séparation où nous venons de les obtenir, et ne commencer à éliminer entre elles qu'après y avoir introduit les simplifications dont elles peuvent être susceptibles dans chaque cas particulier. L'expression générale de »/ marque que la vitesse extraor- dinaire sera comprise entre deux limites, ,v etl/2 +4 La première aura lieu quand l’un des angles u'u" sera nul ou égal à 180°; c'est-à-dire lorsque le rayon réfracté suivra l'un des deux axes. La seconde limite aura lieu quand les angles u' u" seront tous deux droits; c'est-à-dire quand le rayon réfracté sera perpendiculaire aux deux axes. Cette derniere vitesse sera la plus grande de toutes celles que le rayon peut prendre si # est positif Elle sera la plus petite si k est néga- tif. Cette propriété établit entre les cristaux à deux axes la même division que j'ai reconnue entre les cristaux à un seul axe, et je la désignerai par les mêmes dénominations. Une autre conséquence importante de ces formules, c’est que la marche des rayons réfractés extraordinairement reste la même, soit que l’on considère les axes du cristal comme dirigés suivant les deux lignes IA, IB, par exemple; ou sui- vant la direction de l’une d'elles et le prolongement de l’autre, par exemple suivant IA et 1B" (fig. 5). En effet, cette nou- velle supposition ne fait que changer la distance zénithale à”, comptée de la normale extérieure, en 180—2"; l'azimuth a” en4a 80° + a"; enfin l'angle 4” dans son supplément 180—4": or ces nouvelles valeurs introduites dans les expressions ‘ - d dv ” 2 : de (ont En. , n y apportent aucune altération ; et, par 232 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION conséquent , elles ne changent rien mon plus à la marche des rayons réfractés déterminés par les équations (3). Ainsi la direction absolue des deux axes du cristal est le seul élé- ment essentiel des résultats. Si les deux axes du cristal se réunissent en un seul, &” de- vient égal à a', x à \, uw" à u'; et l'accroissement du quarré de la vitesse devient proportionnel au quarré du sinus de l'angle formé par l'axe unique du cristal avec le rayon ré- fracté extraordinaire: Alors les formules se réduisent iden- tiquement à celles que M. Laplace a obtenues pour les cristaux à un seul axe, lesquelles sont, comme on sait, con- formes à la loi de Huyghens. Lorsque je fus conduit à cette nouvelle loi des vitesses , remarquable par son analogie et sa simplicité, je m'empressai de la comparer aux formules que j'avais données dans mon Traité de physique, pour représenter les alternatives des couleurs dans le mica de Sibérie qui a deux axes : elle se trouva coïncider avec elles identiquement, dans les plans par- ticuliers d'incidences où mes expériences avaient été faites ; mais, de plus, étant développée, elle me donna ce que les expériences n'avaient pas pu m'apprendre, je veux dire la forme elliptique des anneaux ainsi produits, sous des inci- dences obliques , les rapports de leurs axes, les lois de leurs teintes , et généralement tous les phénomenes de couleurs qui mavaient embarrassé jusques alors, et que le docteur Brewster était parvenu le premier à représenter. Cet accord me montrant que la loi si simple où j'avais été conduit était la loi de la nature, je cherchai à déduire des mêmes analogies le mode de polarisation pour le cas de deux axes. Cette considération me l'indiqua aussitôt avec évi- DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALLISÉS. 233 dence. Dans les cristaux à un seul axe, d’après les observa- tions de Malus, le rayon ordinaire est polarisé dans le sens de l'axe même, c'est-à-dire suivant le plan qui passe par ce rayon et par l'axe. Le rayon extraordinaire, au contraire, _ est polarisé à angle droit sur le plan mené de même par l'axe et par sa direction. Maintenant, lorsqu'il y a deux axes, menez par chacun d'eux un plan qui contienne le rayon or- dinaire; ce rayon est polarisé dans un sens exactement in- termédiaire entre ces deux plans, et le rayon extraordinaire l’est dans un sens perpendiculaire, en répétant pour lui une Construction analogue. Dans toutes les observations que j'ai faites sur la double réfraction de la topaze, le sens de polarisation des faisceaux tant ofdinaires qu'extraordinaires s'est toujours trouvé parfaitement conforme à cette loi. Lors- que les deux axes se réunissent en un seul , elle redonne évi- demment la construction de Malus. Ce sont là les lois de la polarisation que j'ai appelée fixe : quand le trajet des rayons est assez court, ou assez peu in- cliné sur les axes, pour qu’il se produise des couleurs , l'ex- périence fait voir que la polarisation apparente a lieu dans un azimuth double de celui que déterminent ces constructions. La même chose à lieu dans les cristaux à un seul axe, comme je l'ai depuis long-temps montré, Si la lumière est une matiere émise , ce phénomène indique des oscillations exécutées par les molécules lumineuses autour de leur centre de gravité, et qui durent jusqu’à ce que la force de polarisation ait acquis une énergie suflisante, Si la lumière est produite par les ondu- lations d'un éther très- élastique, il indique des modifica- tions propres à ces ondulations. Quoi qu'il en puisse être, au moyen des lois précédentes 1816. 30 » 234 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION de la polarisation et de la double réfraction, on peut pré- voir avec autant de facilité que d’exactitude toutes les particularités d’intensités et de teintes que présentent les plaques des cristaux à deux axes; on peut prédire les direc- tions suivant lesquelles ces couleurs doivent s’affaiblir ou même disparaître entièrement, soit qu'il se forme une croix noire complète comme dans le spath d'Islande et les autres cristaux à un seul axe, soit que les anneaux doivent être traversés par une seule ligne noire comme dans le mica, la topaze, le sucre et les autres cristaux à deux axes. La for- mation de ces lignes, leur constance ou leur variation, leur immobilité ou leur mouvement à mesure que l’on tourne la plaque cristallisée sur elle-même, l'angle même des axes et leur position , tous ces éléments sont des conséquences néces- saires et calculables de la loi de polarisation intérieure que l'analogie nous a indiquée. L'étendue de ces applications m'oblige à les réserver pour un autre mémoire ; mais je les indique d'avance comme devant offrir autant de confirma- tions frappantes des lois de polarisation et de double réfrac- tion énoncées plus haut. Quelque satisfaisantes que fussent déja les vérifications de ce genre qui se présentaient, pour ainsi dire, d’elles-mèmes dans les expériences antérieures, la plus décisive sans doute aurait manqué, si je n'avais pas éprouvé directement, par l'observation, la marche même des deux réfractions, telle que le calcul la conclut de la loi de la vitesse; c’est ce que J'ai fait au moyen de l'appareil que j'ai décrit plus haut. J'ai pris un prisme de topaze blanche ; et, en le clivant pa- rallèlement à ses bases, j'en ai tiré une plaque dont les deux faces ont été polies avec soin, de manière à conserver le plus exactement possible leur direction et leur parallélisme natu- # DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALLISÉS. 235 rel. La topaze, comme le mica de Sibérie, de Zinwald, et plu- sieurs autres, a deux axes de double réfraction, situés dans un plan perpendiculaire à ses lames, et également inclinés sur leur surface, comme on peut s’en apercevoir aisément par les phénomènes de couleurs qui sont la conséquence de ‘cetarrangement. Ayant reconnu la position du plan qui con- tenait ces axes, au moyen des caractères que j'ai expliqués dans mes recherches précédentes, et particulièrement dans mon Mémoire sur le mica, j'ai taillé dans la plaque de topaze deux faces latérales perpendiculaires à ses lames, l’une sui- vant le plan qui contenait les axes, l’autre dans une direc- tion rectangulaire; alors, en mesurant la double réfraction à travers les différents angles droits par lesquels la plaque s'est trouvée terminée, j'ai pu suivre la marche du rayon par rapport aux axes dans des sens très-divers, et par conséquent mettre complètement en évidence l'influence des angles qu'il formait avec eux. En,comparant ces résultats aux formules que j'avais disposées d’après la théorie, j'ai pu en conclure, sans autre secours, l'angle des deux axes, que j'ai trouvé conforme à ce que les expériences de polarisation indiquent ; et J'ai aussi déterminé les coëfficients des deux réfractions tant ordinaire qu’extraordinaire. Avec ces valeurs, j'ai calculé les écarts des deux rayons pour toutes les directions et toutes les incidences que j'avais observées : ils se sont trouvés par- faitement conformes à la théorie; et quelques-uns d’entre eux n'étaient pas moindres de 25 millimètres. . Désirant m'assurer que les éléments auxquels j'avais été conduit n'étaient pas particuliers à cette plaque, mais étaient généralement applicables au système cristallin de la topaze blanche, j'en ai taillé de même un autre prisme d’une beauté Hi 30. 2306 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION et d’une pureté remarquables, que j'ai dù à la complaisance inépuisable de M. le comte de Bournon. J'ai taillé dans ce cristal les mêmes sections que dans l'autre, et aussi des sec- tions différentes, par conséquent obliques aux axes; puis j'ai observé les doubles réfractions dans tous ces sens divers. Toujours les résultats observés se sont accordés parfaitement avec le calcul. Il en a été de même pour une autre topaze également limpide, qui m'avait été donnée par M. Wol- laston. Enfin j'ai appliqué les mêmes épreuves à la topaze jaune du Brésil, à la chaux sulfatée anhydre et à l’euclase. Les phénomènes produits par ces substances si diverses se sont parfaitement accordés avec la théorie. _ Une confirmation non moins satisfaisante, quoique d’une autre espèce, peut se tirer de l'accord qui existe entre les variations théoriques des vitesses et les phénomènes de cou- leurs que la polarisation développe: En prenant, par exem- ple, dans mon Traité de physique, la table des couleurs pro- duites par les lames de chaux sulfatée, sous des obliquités diverses, table uniquement construite sur l'expérience, on peut, en la comparant aux formules que donne la théorie, découvrir, par les nombres mêmes, que ces lames ont deux axes situés dans leur plan, suivant telle et telle direction, que ces axes sont inclinés entre eux d'un telangle, qu'ils exercent l'espèce de polarisation que j'ai appelée attractive, et qu'ils l'exercent avec telle intensité; toutes choses qui, étant ensuite éprouvées par desexpériences directes, s'y trouvent rigoureu- sement conformes dans leurs plus petits détails. On peut faire la même chose pour les nombreuses espèces de mica à deux axes que j'ai décrites, et pour tous les cristaux sur lesquels on a publié jusqu'à-présent des expériences de polarisation. DANS LES CORPS RÉGULIEREMENT CRISTALLISÉS. 297 On ne peut guère douter; d'après cela, que les lois si simples de la polarisation et de la double réfraction que j'ai plus haut expliquées, et qui ont servi de base à ces formules, ne soient réellement celles que la nature suit dans les cris- taux à deux axes, et en général dans tous les cristaux jus- qu'a présent étudiés, puisque les mêmes lois s'appliquent aussi aux cristaux à un axe, en considérant leurs deux axes comme réunis en un seul, ou séparés par un angle nul. L'accord que le docteur Brewster dit avoir trouvé entre les configurations des anneaux polarisés et la loi empirique qu'il a donnée dans son mémoire, m'a fait chercher si cette loi ne pourrait pas être dégagée de la complication sous laquelle elle s'était présentée à lui, pour être ramenée à la forme simple que je viens d’assigner. J'ai borné cette épreuve au cas où l’on emploierait seulement la supposition de deux axes arbitraires, parce que le docteur Brewster y ramène tous les autres. Alors, en suivant pas à pas sa construction, et en développant les expressions analytiques avec quelque adresse, on voit, après des transformations assez longues, toute leur complication s'évanouir et se réduire enfin au simple produit des sinus des angles formés par les deux axes réels du cristal avec le rayon réfracté-extraordinaire, comme la considération théorique des vitesses nous l’avait donné directement. Ainsi tout le développement que le docteur Brewster a donné à sa con- struction, par l'emploi indéfini des divers systèmes d’axes arbitraires qu'il substitue à Son gré les uns aux autres, n’est réellement qu'une transformation de coordonnées ; et les influences idéales qu'il attribue à chacun de ces axes, aussi- bien que le mode empirique par lequel il les compose, ne font en définitif que reproduire, par une combinaison d’hy- 238 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION pothèses, la loi unique du produit des sinus qui s’observe dans chaque cristal autour des deux axes réels, par rapport auxquels les expressions de tous les phénomènes de pola- risation et de double réfraction deviennent symétriques et simples. «Il y'a toutefois, relativement au choix des axes arbitraires employés par le docteur Brewster, certaines limitations pre- scrites par l’analyse, et qu'il n’a point indiquées : ce sont des relations de position qu'ils doivent avoir avec les véritables axes, sans quoi ils ne pourraient pas satisfaire aux phéno- mènes, mème avec les propriétés qu'on leur attribue. Par exemple, par une exception assurément singulière, les deux axes réels d’un cristal ne peuvent jamais être employés comme axes dans la construction du docteur Brewster. On sait que Huyghens a représenté la double réfraction du spath d'Islande, au moyen d'un ellipsoïde de révolution dont les rayons sont inverses des vitesses de la lumière, et dont l'axe de révolution coïncide avec l'axe du cristal. La même construction peut être étendue à tous les cristaux à un seul axe, comme je l'ai fait voir il y a long-temps , en ayant soin de faire l'ellipsoïde allongé à ses pôles pour les cristaux attractifs, et aplati pour les cristaux répulsifs. Dans le cas général où l’on considère deux axes, le sphéroïde n’est plus du second ordre et devient du quatrième; mais, de même que pour les cristaux à un seul axe, il s’aplatit ou se renfle en certaines parties, selon que le cristal est répulsif ou at- tractif, c'est-à-dire selon que la vitesse du rayon extraordi- naire est retardée ou accélérée par son action. Cette distinc- tion, que J'avais reconnue d'abord dans les cristaux à un seul axe, se trouve ainsi généralisée. \ DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALLISÉS. 239 Les lois auxquelles nous venons de parvenir me paraissent compléter la théorie de la double réfraction pour les cristaux réguliers jusqu’à -présent connus, car aucun. d'eux jusqu'ici u’a présenté plus de deux axes. Ayant reconnu la nature et la constance de ces lois, ayant vérifié leur liaison avec les phénomènes apparents de la polarisation, nous avons dans l'application de ces résultats un moyen nouveau pour exa- miner la structure intime des corps naturels, et pour ajouter à la mesure déja si instructive de leurs formes extérieures, une sorte de clivage mathématique, qui peut nous donner des notions précises sur la régularité et la nature de leur sys- tème cristallin intérieur. Déja la seule considération des ef- fets produits par les cristaux sur la lumière polarisée, four- nissait des procédés empiriques, mais sûrs, pour caractériser leur structure, comme on peut le voir par le travail que j'ai publié dans les Mémoires de l'Institut pour 1814, sur les nom- breuses substances réunies jusques alors par les minéralo- gistes sous le nom générique de znica; mais ces caractères acquièrent plus d'importance lorsque l'observation, en les liant aux déviations mêmes que les rayons éprouvent, assure leur universalité, leur constance, en même temps qu’elle con- firme les résultats qu'on en a déja déduits. SECONDE PARTIE. Comparaison de la théorie précédente avec les obser- vations. Je vais maintenant entrer dans le détail des observations et des mesures qui prouvent la réalité des lois que j'ai plus 2/0 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION haut énoncées. Mais je me bornerai, dans ce premier exposé, à des expériences sur les déviations des rayons, et je réser- verai pour un autre mémoire celles qui concernent les an- neaux colorés, produits par la double réfraction combinée avec le mode de polarisation que les rayons éprouvent. Ire CLASSE. Cristaux à un seul axe. Commençons par les cristaux à un seul axe, qui offrent le cas le plus simple. Alors la loi des déviations est celle que Huyghens a découverte pour le spath d'Islande; traduite en analyse, elle donne les formules suivantes, qui déterminent complètement la marche des rayons extraordinaires, pour toutes les circonstances possibles : es Rupee a° sin. @ sin. ne, SLT. 1 — = ———— ee f LA — a sin” 0 (Asin.® m+b"cos°r) (1) t nee a° Bb? sin.@ cos.— +B an£, OUR AREE---E-Ç- FAT 8%: AL A — a sin."0 (Asin.*m + &cos.°5) A? À et B étant des quantités données par les équations Aa" sin." + b® cos.°à B—(b°—a*) sin.x cos.x. Ces formules ont été déduites par Malus de la construc- tion géométrique indiquée par Huyghens (*). M. Laplace a ensuite montré qu’elles résultent théoriquement du principe (*) J'ai rapporté cette déduction dans mon Traité de physique, tom. IT, pag. 338 et suiv. DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALLISÉS. 241 de la moindre action combinée avec la loi de vitesse suivante: D e =) sin." u ae 8° a° rats dans laquelle z représente l’angle que l'axe du cristal forme avec le rayon réfracté extraordinairement; c’est en effet ce que donnent nos équations générales de la pag. 230, quand on y suppose a'—a"—0o, et \—%\—1, ce qui réunit les deux axes en un seul; & et b sont deux constantes propres à chaque cristal, et la seconde, b, est précisément l'inverse du rapport de réfraction du rayon ordinaire. Quant aux autres détails de ces formules, les angles 8, x, b’,, r', sont les coordonnées angulaires des rayons, tant inci- dents que réfractés. Les angles 4,0’, se comptent autour de la normale à la surface d'incidence, à partir de la portion de cette normale, qui est extérieure au cristal, et depuis o° jus- qu'à 180°. Les angles #,r', se comptent à partir d’une ligne droite prise dans la face d'incidence, et qui est la préjection de l'axe du cristal sur cette face; pour l'obtenir, il faut mener par l'axe du cristal, un plan perpendiculaire à la face; ce plan se nomme la section principale du cristal, et sa trace sur la face d'incidence est l’origine des angles r,7',, que l'on compte ensuite à partir d’une des extrémités de cette ligne, toujours dans un même sens, depuis o° jusqu'à 360°. à est l'angle formé par l'axe du cristal'avec la normale extérieure, et il doit être compté en allant de cette normale vers le côté où commencent les angles +: pour fixer les idées, supposons que la face d'incidence XX' YY’ ( fig. 6) soit placée hori- zontalement, alors sa normale IZ, à partir de laquelle les angles 64°, se comptent, sera verticale. Tournons maintenant 1818. 31 242 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION cette surface sur son propre plan, jusqu'a ce que la trace XX' de la section principale soit dirigée du nord au sud, et comptons les angles zr', à partir de l'extrémité nord de cette trace en allant du nord vers l’est : alors ces angles seront des azimuths : maintenant, si nous considérons les lignes IX, IY,1Z, comme trois axes de coordonnées rectangulaires, menés autour du point d'incidence I, nous pourrons définir les rayons, soit par les angles 8 et r, soit par les valeurs simultanées des coordonnées x, y, 3, appartenantes à un de leurs points. Car si le rayon est, par exemple, [M, et que lon prenne arbitrairement sur sa direction un point M, placé à une distance IM ou 7 de l’origine, on aura généra- lement æ—r sin.6 COS.r; Y=—rsin.h sin.r; 27 Cos.0. Nous avons supposé ici le rayon IM venant du dehors, et, par conséquent, incident sur la surface du cristal. La même notation s'appliquera également aux rayons réfractés, soit ordinaires, soit extraordinaires, en accentuant seulement les lettres qui désignent leurs angles. Mais, afin de‘distinguer, par la notation même l'espèce de réfraction qu'ils subissent, nous emploierons communément, pour les rayons extraordinaires, les lettres #',, r’,, affectées d’un indice inférieur , placé à droite et indiquant le nombre » de pareilles réfractions que le rayon a subies; et, pour un rayon ordinaire, nous emploie- rons les lettres ,0’, ,r', affectées d'un indice inférieur placé à gauche, pour indiquer le nombre des réfractions ordinaires qu'il a éprouvées. Enfin, pour les rayons incidents ou émer- gents, nous emploierons une notation analogue, avec la seule différence que nous supprimerons l'accent supérieur. ar DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALLISÉS. 243 Comme les rayons réfractés existent en dedans du cristal, leurs coordonnées #',, ,4', toujours comptées de la normale extérieure, deviendront nécessairement plus grandes qu'un angle droit, et devront se compter du côté de la normale, où l'on a placé les azimuths +',, ,r’. Lorsque les valeurs de 6’, et ,6! ainsi évaluées, se trouveront moindres que 180’; les rayons réfractés qu’elles déterminent tomberont aussi de ce même côté de la normale; alors leurs tangentes seront négatives; mais quand 4, et ,0' surpasseront 180°, les rayons dépasseront la normale inférieure et iront tomber du côté opposé. Alors leurs tangentes seront positives. l'angle à formé par l'axe du cristal avec la normale exté- rieure, doit être aussi compté du côté de cette normale, où l’azimuth = est nul, parce qu’en établissant les formules, on a supposé l'axe placé dans l’azimuth + —o ; alors, s’il est réel- lement situé de ce même côté de la normale (comme la /g. 6 le représente), la valeur de x, qui est réellement le 8! de l'axe , sera comprise entre go° et 180°; mais si l'axe se dirige du côté opposé de la normale (comme dans la fig. 7), x devien- dra plus grand que 180°, et moindre que 270°. Dans tous les cas, il faut le compter suivant le même sens, en passant par l’azimuth r—o. Avec ces seules précautions , les formules générales (1) s'ap- pliqueront d’elles-mêmes à toutes les coupes du cristal, à toutes les positions de l’axe , et à toutes les directions pos- sibles d'incidence et de réfraction. Le seul jeu des signes algébriques indiquera toujours la marche des rayons avec une parfaite fidélité; les formules renferment mème, comme cas particulier, les effets de la réfraction ordinaire; car, en y supposant b—a, elles donnent r',—r et sn. 0',==6 sin. 0; ce ane 24/4 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION qui est précisément la loi de Descartes. En effet, quand on rend & égal à b, on fait disparaître le terme variable de l’ex- pression de la vitesse, qui devient alors constante, comme dans I j- Venons maintenant à l'application de ces formules , et à leur la réfraction ordinaire, et égale à comparaison avec l'expérience :'on peut d’abord la consi- dérer comme faite sur le spath d'Islande, par les nombreuses et exactes recherches de Huyghens, de Wollaston et de Malus. Mais ce cristal est jusqu'ici le seul sur lequel on en ait fait l'épreuve complète. Or, il est de ceux qui exercent la dou- ble réfraction répulsive : essayons donc d'abord si la même loi s'applique aussi aux cristaux dont la double réfraction est attractive; le cristal de roche nous servira d'exemple. Observations sur le cristal de roche. DÉTERMINATION DE L'AXE. Si l'on taille une aiguille hexaëdre de cristal de roche, par un plan perpendiculaire à ses arêtes, tout rayon introduit perpendiculairement à cette face traverse le cristal, paral- lelement aux arêtes de l'aiguille, sans se diviser, et 1l sort simple, par quelque face qu'il sorte. L’axe du cristal est donc parallele à ces arêtes. RÉFRACTION DES RAYONS PAR DES PRISMES DONT LES ARÈTES SONT PARALLÈLES À L'AXE. L'observation la plus facile apres la précédente, consiste à tailler un prisme dont le tranchant soit parallele à l'axe du cristal, et à rendre le plan d'incidence perpendiculaire à cet axe. En effet, dans cette disposition, le rayon réfracté extraordinaire reste dans le même plan que l'ordinaire, par \ DANS LES CORPS RÉGULIEREMENT CRISTALLISÉS. 245 conséquent dans le prolongement du plan d'incidence; et les mêmes conditions se retrouvent encore à la surface de sortie. En outre, dans ce cas, la marche du rayon extraordinaire est, comme celle de l'ordinaire, soumise à la loi de Descartes sur la proportionnalité des sinus. En effet, lorsque la face d'incidence contient l'axe du cris- tal, l'angle x formé par cet axe, avec la normale à la face, est droit : ainsi x—90°. Si, de plus, le plan d'incidence est perpendiculaire à l'axe, 7 —90°. Ces valeurs, introduites dans les formules générales, (1) donnent d’abord B—0o, A—a: et ensuite : a sin. 8 L'1— a sin. 0 ? tang.Ÿ, Sin.r ,— tang'. W', COS.m, — 0: / La seconde équation donne cos. r,—0, ou tang.V',—0. Cette derniere supposition ne saurait avoir lieu en général, et ne saurait sur-tout s’accorder avec la première équation. Il faut donc prendre l’autre racine cos. r',—0, qui donne r,—=90°, ou r',— 270"; c'est-à-dire que l’azimuth du rayon réfracté extraordinaire est le mème que celui du rayon inci- dent, ou est situé sur son prolongement. Par conséquent, ce rayon reste dans le plan d'incidence. En prenant la seconde racine, NOUS aurons Sn. r,——1; et, par suite, a sin. 0 tan. Ÿ' EE D —— CR V1— a" sin.20 ? qui peut se mettre sous la forme s27.6',—a sin.0 : c'est-à-dire que le sinus d'incidence est au sinus de réfraction en raison constante, comme pour le rayon ordinaire : seulement la a nr , TES . I raison de ce rapport est différente, et égale ce , au lieu de>- 2/6 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION Le mode d'observation que j'ai employé consiste, comme je l'ai dit, à aggrandir la double réfraction, en l'observant à travers des prismes d’un grand angle dont on compense, en grande partie, la dispersion, en leur opposant un prisme de verre d’un angle à-peu-pres égal (/g. 8). Apres avoir collé ensemble ces deux prismes avec du mastic en larmes, on présente le prisme de cristal directement aux objets lu- mineux, et l’on place l'œil en V, de l’autre côté du double prisme, au-delà du verre : puis on mesure l’écartement des deux traits dont les images réfractées, étant vues de cette manière, coincident; c'est-à-dire que l'on compare l’un à l’autre deux rayons incidents OI, Et, dont l’un est réfracté ordinairement, l’autre extraordinairement dans le prisme de cristal, et dont la différence d'incidence compense la dif- férence de réfraction; de sorte qu'ils sortent ensemble sui- vant la même droite I, V, et arrivent ensemble en V à l'œil de l'observateur. Or, du moment où ces deux rayons ont pénétré sensible- ment dans le prisme de verre postérieur, ils y suivent un même rapport de réfraction; donc, puisqu'ils sortent en- semble du verre en L., il faut qu'ils coincident dans leur di- rection à travers sa substance, c'est-à-dire que leur entrée dans le verre se fait sous le même angle, et au même point. Cela posé, appelons » le rapport constant des sinus pour la réfraction ordinaire, rapport que nous avons dit plus A 2 CNE-LU PES à baut être égal à 55 désignons par ®, ps p;s Pas Pan 959 les angles que le rayon, qui subit cette réfraction, forme suc- cessivement avec les diverses surfaces des deux prismes. Appelons de même »', le rapport constant des sinus, qui DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALLISÉS. 247 convient à la réfraction extraordinaire; rapport que nous avons dit, plus haut, être égal à 2; soient ÿ, ÿ,3 Yas Vas Vas Vs les angles qui s’y rapportent. Enfin, appelons c, ce, les angles réfringents des deux prismes, et désignons par m le rapport constant de réfrac- tion, pour le prisme de verre postérieur, lorsque les rayons y pénètrent en sortant de l'air. Cela posé, la marche du rayon ordinaire sera assujettie aux conditions suivantes : | COS. g—n COS, p,—C+w, Cos. ps" cos. (2 P3—C; +9 COS. p;—mM COS. Di De même, pour le rayon extraordinaire, on aura Cos.$—n" COs.4, ,—C+4,: cos. = 005.4. WC; +%, cos. V;—m cos. di; \ et, par le mode d'observation dont nous faisons usage, on doit avoir Ph = p—ÿs Si on élimine 4, et +, entre les trois premières équations, relatives à la réfraction ordinaire, on en tire, entre @ et o:, la relation suivante n° Sin C—COs.p—2m cos. C COS. COS. p3 + ° COS." 6. On a de même, pour la réfraction extraordinaire, n'? sin c—cos.ÿ—2m cos.c COS.Y CoS.4; + m° cos.” Y;. Puisque le mode d'observation mis en usage, donne toujours © 7 . 2 . ? Ÿ3—9;, si l’on retranche ces deux équations l’une de l’autre, 248 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION le dernier terme disparaît, et il reste (n'—n°) sin? c—cos." ÿ—cos. g— 2m cos.c cos.p; (cos. ÿ —cos. +); ou, en remplaçant m cos. ®* par sa valeur n cos.+°, et trans- formant les différences en produits, (R'?—n) sn° c —sin. (p—4) sin. (4) — 4n cos. c cos.®, sin.£(p—b) sin. = (p4+-b). Lorsque l'angle c du prisme de cristal est droit, le der- nier terme du second membre disparaît de lui-même, et il reste; n—n— sin. (p—4) sin. (+4). Ainsi l'on en peut tirer la valeur du coëéfficient 7!°— »:, presque sans calcul, lorsque l’on connaît les angles + et 4 que les deux rayons forment avec la première surface du prisme à leur incidence. Et l'on peut remarquer ici, comme un grand avantage de notre méthode d'observation, quelle donne immédiatement 9—% par l’'écartement observé des deux images , sans le faire dépendre de l'exactitude absolue des angles + et 4. Je vais maintenant appliquer ces formules à des observa- tions de coïncidences, faites avec différents prismes de cristal de roche taillés comme elles le supposent, c’est-à-dire, paral- lelement à l'axe des aiguilles. Première expérience. L’angle c du prisme de cristal était 90°.1'.0"; l'angle c, du prisme de verre, 90°.10'.30", l’un et l’autre mesurés par la réflexion de la lumiere. Ces deux I! prismes étant assemblés, on pose le premier par une de ses faces sur le sommet du support H, (/ig. 9), et, plaçant DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALLISÉS. 249 l'œil en V derrière le prisme de verre, on observe les coin- cidences des traits de la division horizontale AX, comme il a été expliqué pag. 205. Voici les éléments des résultats : toutes les longueurs sont exprimées en millimètres. ÉCART HAUTEUR| VALEUR [VALEUR [des traits) YALEUR VALEUR VALEUR du dont ner de HO de HE |lesimages| de l'angle 4 |- de l'angle 4 | de 7 2 — n° b . : coincident , IH. observée. observée. Ge conclue, conclue, conclue. observée. — So bonm 5 3mm Zum 45° 0000! 43° 19° 54" 0,0291014 63 67 4 38.26.14 | 36.43.58" | 0,0287530 72 77 5 34.46.40 | 32.59.50 | 0,028763r 100 82 87 5 50.38.54 | 48.58.36 | 0,0287613 iron. [108 6 | 44.25.58 | 42.47 50 | 0,0285086 116 113 7 40.45.50 | 39. 6.40 | 0,0283932 126 134 8 38.26.14 | 36.43.58 | 0,0287530 Moyenne en rejetant la première.............. 0,0286553 La valeur de n!°—7° étant positive, 2! surpasse z, ce qui 7. montre que le cristal employé exerce la double réfraction at- tractive. Dans ces observations, les deux rayons OT, E;, qui coincident en I, dans leur émergence, entrent dans le cristal par des points différents 1,7, comme le représente la figure. Il faut donc, à la rigueur, avoir égard à cette différence, lorsque l'on calcule les angles d'incidence $ et y relatifs à chacun de ces rayons. Par exemple, si l'on a observé les coïn- cidences des traits, lors de leur disparition près du support 1818. 32 250 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION opaque, c’est-à-dire par des rayons OT, Er, qui rasent le bord supérieur À de ce support, on pourra admettre que le rayon ordinaire OT pénètre le cristal au point I même, de sorte que, pour ce rayon, la tangente de l'angle d'inei- dence OIB ou +, comptée de la surface BC du cristal, est ; HA 1 h égale à of mais alors la tangente de l'angle analogue 4, . . H 2 à 1 pour le rayon extraordinaire, sera HE de sorte qu'à la rigueur, il faudrait connaître la distance 12 des deux points d'incidence, pour la calculer. Or, cette distance est d'autant moindre que l’on emploie de plus petits prismes, et que l'on observe les coïncidences plus près du bord tranchant C de leur angle réfringent. On peut même, à l’aide de cette dernière précaution, rendre l'écart des deux points d'incidence tout-à-fait insensible; car il n’est occasionné que par la longueur du trajet que les deux rayons font dans le cristal avant de se réunir au point d’é- mergence [,. Conséquemment, si ce trajet est très-petit, l'écart des points I et: sera incomparablement plus petit encore, et pourra être tout-à-fait négligé dans les calculs : de sorte que la tangente de l'angle ÿ pourra aussi être supposée r , HZ F APE R n7 égale à, et immédiatement calculée par les éléments, que l'on observe sur la division même. J'ai toujours opéré de cette manière dans les précédentes observations. Néanmoins, comme la correction relative à l'intervalle 12 pourrait de- venir nécessaire à employer, ou au moins à apprécier dans certaines circonstances, il est bon d'en indiquer ici le calcul. Seulement nous le limiterons au cas où le prisme de cristal a peu d'épaisseur dans les parties que les rayons traversent, DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALLISÉS. 251 de sorte que l'écart des points d'incidence Iz soit très-petit, comparativement à la distance des traits dont on ob- “serve la coïncidence : cette disposition, convenable pour rendre les corrections très-petites, est toujours facile à adopter. Nommons donc x la distance CI du bord du prisme au point d'incidence I, par lequel entre le rayon ordinaire; et soit x' la distance analogue C: pour l’autre rayon, en sorte que x'—x soit la valeur de l'intervalle Iz qu'il s’agit de dé- terminer. Cela posé, en conservant pour les angles d'inci- dence et de réfraction OIB, CIL' DI'I, les dénominations adoptées pag. 246, nous aurons d’abord COS. pu = = COS. Pr p—C+HP, Supposons maintenant que le rayon ordinaire II,, sorte du cristal en I,, et y rentre avec la réfraction extraordinaire: il engendrera le rayon extraordinaire [,z2; or, puisqu'ici les deux réfractions suivent également la loi de Descartes, si l'on nomme +, l'angle DI,z analogue à ?,, on aura L(2 COS.b,—— C05.,; 4, =C+0,: Si l'on nomme ensuite À la distance CI, du bord du prisme au point commun d'émergence des deux rayons, on aura par l’un et par l’autre : __æsin@p, PRE EZAUR | sing 7 sin. à, 2 Delà on tirera la différence x!'—x, ou l'intervalle qui existe sur la première surface du cristal, entre les points d'incidence I et : des deux rayons. 32. 252 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION En effet, on a d’abord, en éliminant k, IS SE. Qree SE UA DETTE d'où l’on tire, (sin. ®, sin.Ÿ, — sin.®, sin.W.). ! —L—=X = c a sin. V: Sin. 7 en mettant dans cette dernière expression, au lieu de 4, et +., leurs valeurs c + 4,, et c +0,, elle se réduit à : æ.sin. ce sin. (®, —, Dans toutes les expériences que l’on peut le plus ordinai- rement faire, les angles + et 4 sont très-peu différents l’un de l'autre, ainsi que les angles , et 4,, de sorte que leur diffé- rence #,—%, est extrêmement petite. Cela a toujours été ainsi dans mes expériences, et l’on peut en voir la preuve dans celles que j'ai déja rapportées. Alors, si l’on a soin de prendre æ également très-petit, c'est-à-dire d'observer extrêmement près du bord tranchant du prisme, la différence æ'—x sera excessivement petite, par rapport à æ même. On pourra donc, ou la négliger, ou la calculer avec les valeurs des angles ,, Ÿ,, résultant de la première approximation, dans laquelle on supposait x'—x nul. En effet, cette supposition permettant de calculer immédiatemant % et ÿ avec les éléments que l'ob- servation donne, on en peut déduire une première valeur de n'*— n°; et, comme x est connu préalablement, par des observations sur la réfraction ordinaire, on en peut conclure n': or, dans les dispositions que nous avons supposées à l'expérience, cette valeur sera suffisamment exacte pour cal- culer l'intervalle 17 des deux points d'incidence, d’où l'on DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTA LLISÉS: 253 conclura ensuite la vraie valeur de l'angle 4, et par suite celle de 7°°—n°, comme précédemment. Supposons, par exemple, que, dans la dernière des expé- riences rapportées pag. 240, le point d'incidence I ait été pris à 5 millimètres du bord tranchant du prisme de cristal, dont l'angle était droit. Alors on aura æ—5; et l’on trouve que x'— x serait égale à o"",115. Par conséquent, la distance HE du point de départ du rayon extraordinaire au pied du support, devrait être diminuée de cette quantité; ce qui la réduirait de 134" à 133" 885. Par suite, la valeur de tang. 4 serait T33BeS ce qui donne 4 = 36.45/.23"; et cette valeur ainsi corrigée, étant combinée avec la valeur de +, qui reste la même, donnerait #°—n* égal à 0,028358, au lieu de 0,028753; ce qui fait à-peu-près quatre unités de différence sur la quatrième décimale. Mais la supposition de æ—5 est extrêmement exagérée, car j'ai eu grand soin : d'observer par le tout petit bord du prisme : de sorte que la correction réelle doit être aussi beaucoup plus petite que le calcul précédent ne la donne. Pour la diminuer encore davantage, et la rendre presque insensible, j'ai fini par joindre à cette précaution celle d'observer sur des supports beau- coup plus hauts, et à des distances beaucoup plus grandes des divisions; ce qui me-donnait en outre l'avantage d’ob- server des écarts beaucoup plus grands. Toutefois ces chan- gements n’ont eu lieu qu'après une seconde expérience que je vais rapporter. 25/4 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION Seconde expérience. Angle du prisme de cristal de roche, 0 A ’ ñ LA # 58°. 5' (fig. 10). C'est le mème morceau que précédemment ; mais on observe par d’autres faces différemment inclinées. ÉCART HAUTEUR | VALEUR | VALEUR |des traits) YALEUR VALEUR Vite n du dont PAL de HE |lesimages| de l'angle + | de l'angle y | de LET L' support 1H. councident, ,* observée. observée. 0E conclue couclue. conclue. observée. a — borm|| 4o7% | Arr amm | br°20' 25" | 50°38'54" | 0,0283933 64 66 - 2 37.59.54 37. 8.48 | 0,0294584 79 82 3 32.19.50 | 31.22.23 | 0,0292667 100 79 81 2 51.41.30 | 50.59.32 | 0,0287955 109 112 3 42.32. 3 | 41.45.37 | 0,0288476 190 134  37.34. 7 | 36.43.58 | 0,0286714 Ici l'on peut remarquer que les trois premières observa- tions faites avec un support de bo"", s'accordent moins bien entre elles que les autres qui sont faites avec une hauteur double. En effet, tous les genres d'erreurs, que l'observation ou les corrections d'épaisseur peuvent intro- duire, doivent devenir d'autant plus sensibles , que la dis- tance des traits observés est moindre. Ce motif, autant que l'accord même des dernières observations , doit leur faire don- ner la préférence. Aussi leur moyenne donne-t- elle pour n'°—n,la valeur o, 0287715, c'est-à-dire presque exactement la même que l'observation par d’autres faces nous avait don- née. Toutefois, malgré le peu de différence de ces résultats , le premier semble encore plus probable, parce que la valeur DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTA LLISÉS. 255 de l'angle réfringent c y était plus grande; et, qu'étant presque droit, la précision de sa mesure avait beaucoup moins d'influence sur le résultat, comme on le sentira aisé- ment à l'inspection seule de la formule par laquelle nous calculons »'!°—n*. Au reste, il faut considérer que c'étaient là mes premiers essais dans ce genre d'observations, et l'on en verra plus loin de beaucoup plus exactes; mais j'ai voulu rapporter aussi les précédentes, non-seulement parce que je crois que le résultat en est juste, mais encore pour montrer les plus grandes limites d'erreurs que la méthode des coïnci- dences puisse donner. Tel qu'il est, l'accord de ces résultats donne lieu à une conséquence théorique importante. Les deux systèmes d’ob- servations , ayant été faits dans des sens divers autour de l’axe de la même aiguille, la constance de n° n° prouve la con- stance de 7! autour de cet axe : c'est-à-dire que la réfraction extraordinaire y est assujettie à un rapport constant de sinus, et toujours au même rapport, de quelque côté que les rayons y Soient introduits. Cette constance et cette symétrie d'action sont un des caracteres distinetifs des cristaux à un seul axe, dans la loi de Huyghens : ainsi, en cela, le cristal de roche y satisfait parfaitement. Voici une autre épreuve fondée sur le même principe : soit BCD (/ég. 11) un prisme de cristal de roche équilatéral, dont les arêtes.soient parallèles à l’axe des aiguilles. Collez à l'une des surfaces de ce prisme, un prisme de crown D'B'C' aussi équilatéral, dont la dispersion corrigera en grande partie la sienne; puis, plaçant l'œil en V, et regardant les traits d’une division très-fine, par des rayons réfléchis deux fois en I, et I,, comme le représente la figure, vous verrez 256 Lois DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION les traits simples, du moins si le double prisme est assez éloigné de la division pour que les corrections dépendantes de son épaisseur soient insensibles; et cela aura lieu pour toutes les incidences sous lesquelles on peut faire arriver ainsi des rayons SI, quoique ces rayons, en traversant le prisme de cristal, se divisent certainement dans son inté- rieur, par l'effet de la double réfraction. Ce phénomène tient à la symétrie des réfractions que les rayons extraordinaires éprouvent dans Îe prisme de cristal, à leur incidence et à leur émergence en I et I., et cette symé- trie elle-même tient à deux causes : 1° à ce que la réflexion intérieure en T,, étant symétrique autour de l'axe du cristal, l'angle de réflexion extraordinaire est égal à l'angle d'inci- dence; 2° à l'égalité des angles réfringents D et C qui rend l'émergence en I, semblable à l'incidence en I. I est évident que la première condition ne peut être obtenue pour toutes sortes de positions, que lorsque le cristal n’a qu'un seul axe parallèle aux arètes du prisme. Dans ce cas, attribuons aux angles successifs les dénomi- nations déja employées pag. 247, et désignons par 7» le rapport de réfraction pour les rayons qui passent de l'air dans le prisme de verre. Si nous suivons un rayon incident SI dans son trajet à travers le double prisme, en considérant d'abord le faisceau extraordinaire qu'il donne, nous aurons cos. ÿ, = c0s.4 Ÿ,—, COS. ÿy=—=7" COS. Ÿ; Yy—Ÿ3 cos. sn 0C0s.Y, de-là, par éliminations successives, on tire 4;,—4 ; c'est-à- dire que l'angle d'incidence en I est égal à l'angle d'émer- gence en I,. Ce résultat ne dépendant point de la valeur par- ticulière de »!, mais seulement de sa constance, aura lieu de 6 DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALLISES. 259 même pour le faisceau ordinaire, dérivé du même rayon inci- dent SI. Ainsi, en re résentant pars; son an le d'émergence 1 ; ? RS nice, ‘on aura encore 1 5 F Ps —Y ; d'où 9: — 1; ; , Al e 4 L Cest-a-dire que les deux rayons émergents seront parallèles. Si donc le double prisme est assez peu épais pour que ces Tayons sortent par des points extrémement voisins l’un de l'autre, l'œil, les recevant ensemble sur une direction pa- reille, les jugera émanés d'un même point, et par conséquent il n’apercevra qu'une seule image de chaque trait. Cette coïncidence n’a plus lieu quand les deux faces du prisme de cristal dans lesquelles les deux réfractions s’opèrent, ne sont pas également inclinées sur la face où s'opère la réflexion. Mais, même en conservant cette égalité, la simpli- cité des images ne s’obtiendrait pas si le cristal avait deux axes; parce qu'alors l'action du prisme n'étant plus symé- irique autour d’une seule ligne, la symétrie de Ja réfraction et de la réflexion.en I, I. I, ne pourrait pas S'y conserver généralement. C’est ce que j'ai en effet vérifié dans un prisme isoscèle de topaze, taillé parallèlement à l'axe des aiguilles de ce minéral. Troisième expérience. Pour compléter ces observations, et avoir une mesure définitive de n'—7r pour le cristal de roche, j'ai fait tailler un autre prisme très-pur de cette sub- stance, et je l'ai soumis aux mêmes expériences, en prenant, pour les rendre correctes, toutes les précautions que les précédentes m'avaient suggérées. J'y ai mesuré d’abord le rapport de réfraction ordinaire. Pour cela, je me suis servi d’un de ses angles, qui avait été trouvé de 31°. 54!, à l'aide du gomiomètre à réflexion. J'ai 1918. 33 )8 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION placé le prisme sur mon support au devant de la division ver- ticale de mon appareil, comme le représente la fig. 12; j'ai ob- servé les numéros des traits qui, vus par réfraction, coïnci- daient avec d’autres traits vus directement; et j'en ai déduit les déviations éprouvées par ces rayons, pour une incidence . donnée, ce qui détermine le rapport de réfraction par la for- mule que j'ai donnée, pag. 209 du tome IIT de mon Traité de physique : voici les éléments de ces résultats. DISTANCE HAUTEUR] HAUTEUR|HAUTEUR du point du da trait d'incidence |trait observé] correspon- du rayon O I produite de HI par dant compté de la surface! par la réfraction réfraction ordinaire du prisme INCIDENCE DÉVIATION RAPPORT à la division vertitale A H oi. réfraction | par vision OIA où +; OIR ou À, 7, ou ordinaire directe AN. NI. A ©. AR. conclue. conclue. conclu. a 265"® | 366%" | 359 238 91°30' 49" | 24°16' 4" | x, 55696 265 ) 358 | 72.36.33 | 19. 7.12 1, 53719 407 ê > 72: 9: 15.49.37 1, 24904 L’angle d'incidence se conclut des distances IN, NO; la première s’observe immédiatement, et est égale à AH; la seconde est l'excès te sur AN : ces éléments étant con- NO ? sur l’horizontale IN, sera 90° —%; on aura de même l'inclinai- son Rr# du rayon direct R7 sur l'horizontale menée par son point d'incidence, au moyen de NI, NR, ét de l'intervalle Iz compris, sur la surface d'incidence, entre les points d'inci- dence des deux rayons. Mais si le prisme est très-mince, ou sil est suffisamment éloigné de la division verticale, les points N APE QRE nus, on a fang.ç—- ; et l'angle OIN, inclinaison du rayon DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALLISÉS. 259 1 et peuvent être confondus ensemble; alors l'inclinaisoh du rayon sur l'horizontale, aura pour tangente trigonomé- trique RE - Cette inclinaison, ajoutée à 90° —, si elle tombe du côté a de l'horizontale, comme dans la /g. 12, ou retranchée dans le cas contraire, donne la déviation OKR ou A, au moyen de laquelle on obtient z. Malus, par une expérience réellement faite sur la réfrac- tion ordinaire du cristal de roche, quoiqu'il la supposât faite sur l'extraordinaire, a trouvé 7 égal à 1,548435, ce qui dif- fere extrêmement peu de notre moyenne. Si l'on voulait adopter la combinaison de cette expérience avec les miennes, en faisant valoir celles-ci proportionnellement à leurnombre, on aurait 2—1,54803. L'accord de ces resultats entre eux, quoiqu'ils soient déduits d'observations si diverses, démontre évidemment la constance du rapport de réfraction ordinaire dans le cristal de roche parfaitement pur. Ces éléments étant déterminés, j'ai observé la duplication des images par la méthode des coincidences, en faisant passer les rayons à travers deux autres faces du même prisme qui faisaient entre elles un angle de 90°.1/.0 d’après le gomiomètre à réilexion. Cet angle étant compensé par un prisme de crown rectangulaire, comme je l'ai expliqué plus haut, j'ai fixé le prisme sur la colonne de mon appareil, de ‘manière que la face d'incidence antérieure fût exactement parallèle à la division verticale, ce que j'obtenais en appro- ‘chant la colonne, jusqu'à ce que la surface du prisme vint s'appliquer contre la division : cette disposition est repré- sentée fig. 13. J'avais d’ailleurs soin d'observer tout près du bord tranchant du prisme , afin que la correction d'épaisseur 33. 200 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION devint absolument insensible. Enfin la hauteur du point d'in- eidence I au-dessus de la division horizontale, c’est-à-dire HE ou AN, était limitée, comme je l'ai expliqué pag. 204; et sa valeur était de 371"" : voici le tableau des autres éléments observés, avec les résultats qui s’en déduisent. DISTANCE PRE VALEUR | VALEUR | des traits dont de AO de AE les images 3 coincident, observée observée. OE de la surface d'incidence à la division verticale AH ou NI observée. 299" 6rm 248 7 VALEUR VALEUR de l’angle 4 | de l'angle conclue. conclue. 55° 31! 40" 270 .6.24 .56. VALEUR de »/°— 7° conclue. 0,0286361 0,0289181 0,0285151 0,0285743 0,0287842 0,0284268 0,0288763 0,0285284 0,0282896 0,0283095 0,0288406 0,0287762 0,0282100 0,0282987 0,0287283 0,0285320 0,0284681 DANS LES CORPS KÉGULIÈREMENT CRISTALLISÉS. 261 En réunissant ces expériences à celles que nous avons rap- portées plus haut, on voit que la valeur de l'incidence exté- rieure à, comptée de la surface réfringente, a varié, pour le rayon extraordinaire, depuis 31°. 22/.33", jusqu’à 55°. 38/. 26; et, à cause de la diversité des angles des prismes employés, l'incidence intérieure ÿ. du même rayon sur la seconde surface, a pris aussi différentes valeurs. Néanmoins la dif- férence n'?— n° des quarrés des vitesses s’est toujours trou- vée sensiblement la même. Donc, puisque la vitesse ordi- naire 7 est constante, ainsi que toutes les observations l'indiquent, l'extraordinaire n' est aussi constante dans le sens de réfraction que nous considérons; ce qui est la pre- mière condition de la loi de Huyghens. Nous avons eu plus haut, par six expériences, n'°—n°— 0,0286554. En faisant voter chacune de ces déterminations propor- tionnellement aux nombres d'expériences dont elle résulte, nous aurons, pour moyenne définitive, n!?—n°—0,0285962 Or, la valeur 1,547897, trouvée plus haut pour , étant élevée au quarré, done ar: ir og nie n° = 2,3959844 PAR CODISEMUEME. 1 à ue den oe de n'°—92,/42/45806 AUS PAT SUR UD eo ne ME n'—1,557106. Comme ces résultats sont le fondement de tous les calculs que l’on peut faire sur la double réfraction du cristal de ro- che, je les réunirai avec leurs logarithmes dans le tableau suivant : 262 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION Éléments des deux réfractions dans le cristal de roche, pour la partie moyenne du spectre. Rapport de ré- fraction ordi- naire. .... ici n—1,947897; log. n—0,1897420 Rapport de ré- fraction extra- ordinaire. ... n'—1,557106; log.n'—0,1923183 Rapportdesvîtes- CÉOMSR ONE PU =—1,005950; log. (=)=0,0025763 Différ* des quar- ES rés des vitesses, n'—n =0,028596; log. (n!?—n?) —2,4563076 Demi-somme des quarrés des vi- Lesses state L(n' 74 )=2,410283; log.=(n'?+r°?)—0,3820680 Malus, dans son mémoire sur la double réfraction, cou- ronné par la classe des sciences, donne aussi les valeurs de » et n' pour le cristal de roche, d’après des observations qu'il avait faites avec un prisme de cette substance, taillé parallèlement à l'axe. Comme on ignorait alors la distinction que j'ai depuis découverte entre les deux sortes de double réfraction, l'attractive et la répulsive, il supposa que, dans le cristal de roche, comme dans le spath d'Islande, l'image extraordinaire devait être la moins déviée des deux, au lieu qu'elle y est réellement la plus déviée; par une conséquence nécessaire, cette erreur lui a fait attribuer à 2/ la valeur qui convenait à n, et réciproquement. Mais, même’ en rétablis- sant l’ordre véritable de ces éléments, le résultat de ses ob- servations donne encore pour 7 "°—n° une valeur trop forte . I , . environ de =, car elle se trouve égale à 0,030261 , au lieu de DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALLISÉS. 20% 0 ,028596 que nous venons d'obtenir. Toutes les expériences que l’on peut faire sur la double réfraction et la polarisation du cristal de roche limpide, confirment cette remarque. L’er- reur tient vraisemblablement à ce que Malus ne mesurait pas d'une manière immédiate la différence 7'*—n° des quarrés des vitesses, qui nous est directement donnée par la méthode des coincidences, mais la déduisait des valeurs absolues de » et 7!, données par la mesure directe des deux réfractions. : Or, il est facile de voir que, dans cette méthode, la disper- sion inévitable des deux images offre un grand obstacle à ce que les déterminations aïnsi obtenues soient exactèément com- parables, ce qui peut occasionner de grandes erreurs dans la petite différence 72°" —n°. Les coëfficients des deux réfractions étant maintenant dé- terminés, il faut les introduire dans les formules données par la loi de Huyghens, et éprouver ces formules sur des déviations observées dans d’autres sens. Tel est l’objet des expériences suivantes. Refraction des rayons par des prismes dont la pre- mière face est parallèle à l'axe et la seconde lui est oblique. Quatrième expérience. J'aï pris une aiguille de roche HCDH' ( fig. 14), dans laquelle HC représente la direction de l'axe. C'était la même qui constituait le prisme dont j'ai rapporté tout-à-l’heure les réfractions latérales. Vers une des extré- mités de cette aiguille, on a taillé une face CD’, dont l'in- clinaison sur l'axe HC ou DH, étant mesurée par le gonio- mètre à réflexion, s'est trouvée de 37°. 15/. C'était une des 264 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION faces naturelles de la pyramide terminale; et ainsi son inter- section avec la face CH était perpendiculaire à l'axe. Yai compensé ce prisme par un prisme de crown CDF, d'un angle à-peu-près égal, et j'ai fixé le tout sur la colonne de mon appareil, de manière que la face antérieure HC füt pa- rallele à la division verticale; puis, plaçant l'œil en V, j'ai observé les divisions O,E, dont les rayons amenés par des réfractions diverses , coincidaient suivant une même direction dans leur émergence. Le seul cas que je considérerai , parce que le calcul en est le plus simple, est celui dans lequel le rayon extraordinaire Ez 1’ pénétrait le prisme perpendicu- lairement à la face HC, et par conséquent aussi perpendi- culairement à l’axe du cristal. Pour que cette condition fût remplie, il suffisait de prendre les points E et z à égale hau- teur, au-dessus de la division horizontale de l'appareil. Alors la direction du rayon étant symétrique par rapport aux deux côtés :C, :H de l'axe, la réfraction extraordinaire ne fait qu'accélérer sa vitesse sans le dévier. 11 continue ainsi sa route en ligne droite jusqu'à la seconde surface CD du prisme, où son incidence intérieure se fait dans la section principale mème de cette face. D'après cela, conformément au mode de notation que nous avons adopté, cette inci- dence, comptée de la normale extérieure [' N’, devra être représentée par (',; et, si nous voulons compter les azi- muths sur cette face, à partir de la ligne I'D, l'azimuth du rayon incident intérieur +, sera égal à 180°; ce qui donne sin. r!,—0; cos.r',——1. Alors les coordonnées analogues pour le rayon émergent devront être représentées par 4, etr., lesquelles devront dériver des précédentes. Or, leur relation avec celles-ci se découvre tout de suite en remontant aux De DANS LES CORPS RÉGULIEREMENT CRISTALLISÉS. 205 équations différentielles auxquelles le mouvement du rayon réfracté extraordinaire est assujetti : car la perpendicularité de ce rayon sur l’axe pendant son trajet dans le cristal, fait que les angles v', uw" deviennent droits dans les formules générales de la pag. 230; ce qui rend (5e) nul, ainsi que 2 a dv’, aF, forme simple ) , et alors les équations (2) et (3) se réduisent à cette Div + k=n'°; —sin.0, sin.r,—, Sin.0", Sin. ; — sin.0,Cos.r,—=, sin.0', COS. —',: la première indique que la vitesse du rayon réfracté est égale à la constante »'. Si l'on fait cette substitution dans les deux dernières, et qu'on y mette aussi, pour l’azimuth intérieur #',, les valeurs que nous sommes convenus de lui assigner, elles donnent MS — 00 COS m2; | stn.0.=7! sine 8: c'est-à-dire que le rayon émergent reste dans le prolonge- ment du plan d'incidence intérieur; qu'il se dirige du côté de la normale opposée au rayon incident, et qu’enfin l'émer- gence s'opère suivant la loi de Descartes, en prenant »' pour le rapport de réfraction. La démonstration précédente étant uniquement déduite de la perpendicularité du rayon réfracté sur l'axe, est indépendante de la direction donnée'à la face d’émergence par rapport à la face d'incidence. Ainsi, pourvu que le rayon ait été perpendiculaire à l'axe dans l'intérieur du cristal, son émergence se fera suivant la loi de Descartes. par quelque face qu'il sorte. La remarque faite par Huyghens 1816. à 34 206 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION sur les réfractions dans des plans perpendiculaires à l’axe, n'offre qu'un cas particulier de cette propriété. Pour appliquer ceci à notre expérience, appelons c l’angle réfringent de notre prisme, qui est désigné par HCD dans la fig. 14. Alors l’angle d'incidence intérieur #',, qui doit être compté à partir de la normale extérieure I’ N”, sera EI'N, et aura pour valeur 90° + 90°—c,; où 180°—c; de sorte que, si l'émergence se faisait dans l’air, comme l'incidence inté- rieure, on aurait sën.6,—n'sin.c. Mais l'émergence ayant lieu dans le prisme de crown postérieur, dont nous désigne- rons le rapport de réfraction par 2, on aura réellement 5 ne : : sin.0,—"sin.c. Or si, conformément à nos notations , on . désigne par ,4’ l'angle intérieur d'incidence IT N’, formé par le rayon ordinaire OIT' qui coincide avec Ezl' dans son émergence, l'angle d’émergence 0, sera commun à ces deux F 2 Le rayons ; de sorte qu'on aura également sin. 0,—— Sin. ,0'; et, par conséquent, en éliminant "», < n' SR... d—— sin. C- Maintenant, si à l'angle IT'N” ou ,0', on ajoute ICl' ou c, , ; a somme c+,0’ sera l'angle NIL/, formé par le rayon ré- Il +,4! I : : fracté ordinaire 11’ avec la normale extérieure IN à la pre- miere face du prisme : de-là , avec la loi de Descartes, voustirerez l'angle extérieur d'incidence OIN ou ,6 par la formule sin. 0 —n sin. (c+,4). L'observation ne donne pas immédiatement cet angle, mais l'écart OE des deux traits d’où les rayons partent; or, cet écart se compose, 1° de ON ou z étang. 0, en nommant DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALLISÉS. 267 la distance de la face antérieure CH à la division verticale ; 2° de I: ou e tang. Il! en nommant e l'épaisseur cl" du prisme. Or, l’angle I1'# est supplément de N11', par consé- quent égal à 180°—(c+,6') : ainsi —etang.(c+,0') sera la seconde partie de l'écart observé; et la valeur totale de celui-ci sera : —e tang. (c+,6') + 3 éang. 0. Il ne reste plus qu’à introduire dans cette formule les données numériques relatives à notre observation. J'ai dit plus haut que l'angle c était égal à 37° 15°. Avec cette valeuret celles de » et n' précédemment déterminées, on trouve 1D—-I4a29%20; ce +,0=—170.441.25; "001,24: des et enfin, pour l'écart OE, e.0,0045330 + z.0,00701676. Dans notre expérience l'épaisseur du prisme était exactement : de 5 millimètres à l'endroit où passait le rayon ET; mettant donc pour e, 5°", l'écart calculé devient 0"",0226650 + z.0,00701676. Il ne reste plus qu’à substituer dans cette formule les valeurs successives de la distance z où l’on a observé les diverses coïncidences. Le résultat de ce calcul se trouve dans l’avant- dernière colonne du tableau suivant, qui offre la comparaison du calcul avec l'observation. 34. NUMÉROS DISTANCES VALEUR|IVALEUR] ÉCART DFS TRAITS dAE dont les images coincident : + 0m — | du calcul. EXGÈS des à la division verticale, observées, | de À O incidences. HA ou x. observée. | observée. £ Sr are =: observé. calculé. ne | —— a I 277 n'existe pas encore. 4 140, exacte... ns is - 17",005 ae 0°°,005 155 > passée. / 270, n'existe pas. 287, exacte 036 0; 036 298, passée. 405 y n'existe pas. 430, CES PERRET NETA + 0, 450 > - passée. 55 1, n'existe pas, 572, 583 > passée. 693 > n'existe pas. 71 6 > ‘xacte 730 , passée. 830, n'existe pas. 860 y (xacte 878 3 ‘passée. Par la manière dont j'ai rapporté les observations, on voit que, pour obtenir des limites certaines d'erreur, j'avais soin de marquer, avant et après chaque coïncidence, deux posi- tions de la colonne, dans lesquelles les traits étaient évidem- ment séparés. Chaque position indiquée comme répondant exactement à une coïncidence est conclue d’une moyenne entre plusieurs essais. Les résultats calculés different, comme on voit, excessivement peu de ce que donne l'observation: ce- pendant ils sont tous un peu plus forts, ce qui vient pro- bablement de ce que la face antérieure HC du prisme ne se sera pas trouvée rigoureusement parallele à l’axe du cristal, condition en effet presque impossible à obtenir rigoureu- Lt DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALLISÉS. 269 Û sement. Or, toute déviation de cette direction rendant l'incidence oblique à l'axe du cristal, doit diminuer l'écart des images réfractées. Les valeurs assignées par. Malus aux coëfficients des deux réfractions donneraient des erreurs dé- cuples des précédentes ; et qui, sur la dernière coïncidence, iraient jusqu'a près d’un demi-millimètre. Refraction des rayons par des prismes dont la première face est perpendiculaire à l'axe, et dont la seconde lui est parallèle. Cinquième experience. Voici maintenant une expérience dans laquelle les rayons sont entrés par une face perpendi- culaire à l'axe, et sont sortis par une face qui lui était parallèle, en restant toujours dans un même plan. Le prisme était rectangulaire et placé sur le support, comme le représente la fég. 15 : la face BC, perpendiculaire à l'axe, était horizontale; et conséquemment l’autre face CD, parallele à l'axe , était verticale. OT, Ez sont les deux rayons qui, après avoir traversé le prisme en vertu d’une réfraction différente, se réunissent dans leur émergence en Î', et tra- versant ensemble le prisme de verre postérieur , arrivent en- semble à l'œil en V. Conséquemment ces deux rayons sont séparés dans l’intérieur du cristal, et leurs points d'incidence I, ë, sont différents; mais, en observant tout près du bord tranchant C du prisme cristallisé, cette séparation devient insensible et son effet négligeable. C’est ce que je supposerai d'abord dans le calcul que nous allons faire. Je montrerai ensuite comment on pourrait tenir compte de la séparation des points d'incidence. 270 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION : Maintenant, pour découvrir la condition qui lie ensemble les deux rayons incidents Ez, OT, dans la loi de Huyghens, considérons d’abord le premier, et nommons 6, son angle d'incidence E/H compté de la normale extérieure. La face d'incidence étant perpendiculaire à l'axe du cristal, on a 1—180, dans les équations générales de la page 240. Cette valeur de x donne sn. }—0, cos. \=—1; par conséquent, B—o et A—#*. Alors, en marquant d’un indice inférieur les coordonnées d'incidence du rayon qui subit la réfraction extraordinaire, les deux équations citées deviennent 6 ee a° sin.0, sin.T, An ER ne 5 DV/1— a sin } s À a° sin. A, cos.r, an£. COST a (2 KR UD ra sino d’où l’on tire tang.r,—=tang.T;; ÿ par conséquent, 4 u Ti") OÙ r,—180+7+r,. Ces deux valeurs de +’, mettent le rayon réfracté dans le pro- longement du plan d'incidence, comme le rayon ordinaire, Nous adopterons la seconde qui le fait passer de l’autre côté de la normale, comme :il faut que cela soit pour qu'il aille rencontrer l’autre face du prisme. Nous aurons alors . . e Sim Sin r,; COS.T ,——COS.",; et les deux équations précédentes s’accorderont en une seule, qui sera a* sin., (1) tang!. (—— BL Er — PA : DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALLISÉS. : 278 Conduisons maintenant ce rayon à la seconde face du prisme, en l'. Ici l’axe du cristal est dans le plan de la face d'émer- gence. On a donc = 90°, par conséquent si. \—1, cos.\ = 0, et par suite B—o, A—a'; alors les deux équations géné- rales, étant convenablement accentuées, deviennent £ A ue à a sin. 0, sin. T, an, SIN. Tr ,—= = c ue 7 Mi (a sn rs, +6 cos. °®,) sin? 4, : " / & sin.@, cos.r, POIL IUT EIRE ———— o 7 ai (a sin", +0: cos 7.) sin." 6, s d’où l’on tire sG tang. rm ang. +. . Dans mes expériences l'émergence du rayon ['I" s'observait suivant le plan même de la section principale; ainsi, en comp- tant les azimuths à partir du côté de la normale où l’'émer- gence s'opère, on avait pour ce rayon r,—0, ce qui donne tang.r',—=0,par conséquent r',—0 ou r',—190°: cette der- _ nière valeur est évidemment celle qu’il faut admettre; alors la première des équations ci-dessus est idéntiquement satis- faite; et la seconde donne te, B2 sin. 8, 0 RNA nn Mais il est facile de voir qu’en vertu de la rectangularité du prisme en C, on a entre les angles #”,, 6',, comptés l’un et l'autre à partir des normales extérieures, la relation d,—290—Û", par conséquent, tang. (re mn me ACTE 3 272 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION ce qui, étant substitué dans l'équation (2), donne L &? sin. 0, (3) tang. MT Ta Te TA En multipliant cette équation par l'équation (1), membre à membre, tang. W, disparaît, et il reste ab sin.4, sin. 0, (4 ne Ve sin 0, V1 —6" sin 0, C’est la relation entre le rayon incident extraordinaire et le rayon émergent qui en dérive. Or, dans notre mode d’obser- vation, l'émergence 8, est aussi commune au rayon ordi- naire OT, dont on observe la coincidence avec l’autre; ainsi, en nommant ,4 l'incidence de ce rayon sur la première face BC du prisme, et faisant b=a dans l'équation précé- dente, elle devra être encore satisfaite; ce qui donnera &? sin. 8 sin.6, i RE ( ) LV/1—2 sin° À V/1— sin 0, par conséquent, en égalant les seconds membres, on a b sin. a sin., LV 1—0 sin 0 Te V1 a sin 6, ’ d'où, par la disparition des radicaux, on tire ! (6) sin. RE À sin. 8, ou sin.0,—" sin. 4, a na : 4 en remplaçant les constantes à et à par leurs valeurs =, = Ce résultat peut être comparé directement à l'observation : en effet, pour chaque coïncidence observée sur la division DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALIAISÉS. 273 horizontale, on connaît les distances des traits O,E, au pied du support, c'est-à-dire, HO et HE. La hauteur du support est connue, et l'incidence des rayons est supposée se faire sur son bord; de sorte que l'intervalle I est négligeable : on peut donc calculer d’abord l'angle OIN ou #4, en prenant sa D: : An Ie »? . , tangente égale à zx De-là on déduira 6, par l'équation (6), ensuite {ang.0,; et enfin IH tag. 8, donnera la distance HE, que l’on pourra comparer à l'observation. Si l'on ne voulait pas faire passer les rayons par le bord du Support même, mais en un autre point de la surface BC du prisme, on collerait à cet endroit une petite bande de papier dont le bord limiterait les incidences, et l’on comp- terait les distances OH, EH à partir de ce bord, ce qui serait facile en mesurant sa distance au bord du support qui ser- vait précédemment de point de départ. On pourrait aussi mesurer les coïncidences sur la division verticale, comme le représente la fig. 16; alors on connaîtrait la hauteur HI du point d'incidence, et sa distance IN à la division. L'observation des traits O,E, dont les images coincident, donnerait les distances N O, NE; on pourrait » NO donc encore calculer l'angle 8 par sa tangente e ; et le reste s'acheverait comme précédemment, . Maintenant, si l’on veut avoir égard à la séparation des points d'incidence I et z (fig. 15), nommons x la distance du point d'incidence I au tranchant de l'angle du prisme; nommons de même x' la distance analogue du point :; et- désignant par = la distance commune CI !, où les deux rayons vont se rejoindre sur la seconde surface du prisme; On aura 1818. : 35 274 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION évidemment — T — z' . 7 tang. K 7 tang.W',? par conséquent, Fa a tang.', Li tang. 0'* Or, en faisant 4—b dans l'équation (3), pour l'appliquer au rayon ordinaire, elle donne 1 b.sin.0, tang. À Er VAE net : Alors, en comparant ce résultat à l'équation (3), on en tire ou, en mettant pour & et à leurs valeurs, I n' I tang.W, n° tang.'' Maintenant, cette relation étant introduite dans l'équation entre x' et x, les angles #',, ,6', disparaissent , et il reste d'où l’on tire 1 (n'—n) x STE ; nm 2 n'—n Dans le cristal de roche, —-- est, à-tres-peu-près, na I 0 109 ‘ ainsi, premièrement, Cz est moindre que CI, comme le représente la figure; secondement, l'intervalle 17 des-deux . . . Le . I . points d'incidence sera Tr c'est-à-dire 565 de la distance du point d'incidence ordinaire au tranchant de l'angle du Ç DANS LES CORPS, RÉGULIÈREMENT CRISTALLISÉS. 27 prisme cristallisé. Si cette quantité est sensible, on calculera les directions de chaque rayon, en partant du point d'inci- dence qui lui est propre. Voici maintenant des applications de ces formules : les coïncidences sont mesurées sur la division horizontale : on * a toujours observé assez près du tranchant du prisme pour | rendre insensible la correction d'épaisseur : VALEUR | HAUTEUR VALEUR VALEUR MAR correspondante VALEUR de HE, EXC£S 3 angle du deHO, de HE, de 1 É gl LE de l'angle 6, , ; déduite : support LH- observée. observée. ê à déduite de l'observation. 3 de la théorie. calculée. du calcul. | ————— ———…—…— —_—_—— —_——_— 42° 36' 5o" | 42° 55! 42" 93,02 52.25.53 | 52.52.36 139,11 56.39. o | 57.10.18 155,07 39. 5. 8 | 39.21.47 321,14 43. 9. o | 43.28.13 371,13 38.13.43 | 38.29.51 310,99 41.45. 6 | 42. 3. 352,76 46.25.43 | 46.47. 416,20 (x) Le prisme est toujours le même; mais il a été déplacé et replace sur le support. 35; 276 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION Voici d’autres mesures de coïncidences prises sur la division verticale: DISTANCE | du point PR Le VALEUR | VAEEUR VALEUR ra VALEUR k te à la division | de NO, de NE, de l'angle 16, cree an dNE, verticale conclue de l'angle 6, , AHouIN, observée. observée. de l'observation. |déduite de lathéorie: calculée. | ] du calcul. EXCÈS observée. 49.52! x" dr,Ba 4 éios 54.59. 5 u ‘ 947,12 — 0,28 101,10 + 0o,10(1) 101,12 +0,12 101,18 |. +0,18 155,97 +0,03 141,179 | +o,17 100,22 + 0,22 151,20 | “+0,20 151,36 +-0,36 316,30 + 0,30 130,8 240,94 245,86 (:) Le prime a été déplacé et replacé sur son support. {2) Les observations sont faites avec un autre prisme. Les trois dernières observations sont faites avec un autre prisme que les premieres. Elles donnent des écarts moindres, parce que le premier prisme, ayant été tiré d’une aiguille peu épaisse, n'avait qu'une trés-petite base, dont il fallait bien DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALLISÉS. 277 laisser une partie exposée aux rayons incidents; de sorte qu'il ne se fixait sur le support que par une tres-petite surface, que l'on ne pouvait conséquemment pas diriger aussi exac- tement qu'on l'aurait voulu. Il est évident que les erreurs de cette direction alterent les incidences; et celles-ci à leur tour étant altérées, modifient les angles que les rayons réfractés forment avec l'axe du cristal. Si ces angles étaient peu diffé- rents de o°, ou de go°, leurs variations auraient peu d’in- fluence sur la réfraction extraordinaire; mais, dans les obser- vations précédentes, ils se trouvent presque au milieu de ces deux limites, ce qui fait que les erreurs qu'on y peut commettre, influent beaucoup sur l'écart des rayons, et par conséquent:sur les coïincidences observées. Réfraction des rayons dans, des plans obliques à la section principale. J'ai pris le prisme compensé à arêtes parallèles à l'axe déja employé pag. 248 : je l'ai fixé sur:son support / comme dans ces premières observations; maisau lieu d'observer les coïn- cidences dans le plau de la section principale , je les ai obser- vées sur des directions obliques, et dans le sens de l'écart même que la double réfraction donnait aux rayons. J'ai employé pour cela l'appareil additionnel, à division circu- laire, expliqué pag. 208. J'ai eu soin de faire passer les rayons assez près du tranchant du prisme pour que leur incidence sur sa première surface pût être supposée se faire sensible- ment en un même point; et j'ai marqué fort exactement ce point sur la surface même. La disposition de l'expérience est représentée dans la jig. 17; OI est lemayon ordinaire, EI le 276 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION rayon extraordinaire, qui émergent ensemble suivant une di- rection [”V oblique au plan de la section principale. Pour que cela puisse être, il faut que les deux points O,E, soient eux- mêmes hors de la section principale, et que leurs positions respectives aient entre elles certains rapports. Pour determi- ner ces positions, je rapporte chacun de ces points, O, par exemple, à trois coordonnées rectangulaires, z, æ, y. La pre- mière, IN ou z, est horizontale, perpendiculaire aux arêtes du prisme, et mesure la distance de la face d'incidénce aux di- visions croisées. La seconde, NP ou x, est aussi horizontale, mais elle est située dans le plan de la division transversale; en- fin la troisième, PO ou y, est perpendiculaire aux deux autres, et parallële à la division verticale AY. Ces trois coordonnées, partant du point d'incidence, suffisent pour déterminer la direction de tout rayon qui passe par ce point. Pour les tirer de l'observation des coïncidences obliques, je remarque que cette observation détermine la position des points O,E (fig. 18), au moyen des distances A'C', C'O,C'E, et de l'angle A'C'R'. De-là on peut aisément déduire NP, PO, ou ,#,,7; coordonnées du point O qui se voit par réfraction ordinaire, et NQ, QE, ou x,,Y,, coordonnées du point E qui se voit par l’autre réfraction. En effet, si l'on nomme H la distance commune NA', qui peut s’observer immédiate- ment sur la division verticale A Y ; que l’on désigne AC’ par D,C'O par ,9, C'E par à,, et enfin l'angle A'C'K par x, on aura évidemment : | .æ= D +.,5 cos. « J =H +, sin. z, =D +3, 0cos.z V=H +), sin. a. La troisième coordonnée z est commune aux deux points DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALLISÉS. 279 E,O, et mesure la distance horizontale de la surface anté- rieure du prisme à la division verticale. Ilfautremarquer que le point N. d'où les coordonnées ,x et x,.se comptent, est.censé situé sur le prolongement dela coordonnée horizontale z,.me- née par le point d'incidence I; de sorte que c’est proprement la projection de ce point sur la division verticale AY. Consé- quemment, le point À', origine de la division transversale, doit être pris sur la verticale merée du point N; et c’est delà que les distances horizontales D doivent ètre comptées danses formules précéden'es. La détermination des points N et A'sera facile quand on aura fixé la position du point d'incidence 1 sur la surface antérieure du prisme, puisque , en faisant mou- voir la colonne, cette surface peut toujours être rapprochée de la division verticale jusqu’au contact; ce qui permet d'y rapporter immédiatement la position dupoint d'incidence I. Concevons maintenant des coïncidences obliques, obser- vées comme nous venons de le dire, et voyons comment on peut en comparer les indications à à la théorie. Pour cela il faut suivre par le calcul, à travers le prisme de cristal, la marche des deux rayons réfractés ordinaire Rae." qui coïncident dans leur émergence. C'est ce que nous allons faire. en les rapportant aux mêmes, systèmes de coordonnées que nous venons d'établir; mais, afin de ne pas trop compli- quer ces considérations, nous nous bornerons au cas où le prisme est rectan Ce 4 Soit I (Jig. 19) le point d'incidence du rayon D ti. naire , sur la face antérieure du prisme que je supposerai dans le plan du papier. Menons par ce point les trois axes de coor- données rectangulaires [X,1Y,1Z; le premier IX, situé dans le plan de la face, parallèlement à l'arête Cc du prisme, 280 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION laquelle se trouve être ici l'axe même du cristal ; lesecond 1Y, aussi dans le plan de la face, mais perpendiculaire à lamême arète; le troisième enfin , perpendiculaire aux deux autres, et mesurant la distance du point I, d'incidence aux divisions croisées, sur lesquelles les coïncidences se mesurent. Main- tenant, soit EI le rayon incident qui se réfracte extraordinai- rement dans le prisme, et supposons que IE" soit la projection de ce rayon sur la face d'incidence. Alors l'angle EIZ sera son incidence comptée de la normale extérieure, et l'angle XIE’ sera son azimuth compté de l'axe du cristal. Le pre- mier de ces angles devra donc être désigné par 8,; le second par r,, d'après la notation que nous avons adoptée. Alors, si l'on prend sur le rayon EI, un point arbitraire M à la distance r, de l’origine, les coordonnées æ,, y,, 2, de ce point auront les valeurs suivantes : Z,=—=r, sin.8, COS. 7, YF, Sin. 0, Sin. x, 2, = 716050; 4 dont le système déterminera complètement la direction du rayon incident ET. : Ce rayon, en pénétrant dans le prisme, s'y réfracte extraor- dinairement suivant 11’. Sa nouvelle direction peut se rap- porter aux mêmes axes; et en désignant par #',, r',, r”, les coordonnées d'un de ses points pris à la distance arbitraire r', de l’crigine I, on aura de même N'ASENPR SES AT ! MTS SU Os COST (2) y=7r", sin.', cos. *', ) sl|—= # jcosib!, ; DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALLISES. 281 Dans ces formules, comme dans les précédentes, l'an- gle #', doit toujours être compté, de même que ,6, à partir de la normale extérieure 1Z, et l’azimuth +',-à partir de l'axe IX dans le même sensquer.. Alors le seul jeu des signes algébriques indiquera la position relative du rayon réfracté autour des axes de coordonnées IX, IY, 17. Conduisons maintenant le rayon réfracté Il’ jusqu'à ce qu'il perce la seconde surface du prisme, où il émerge, soit dans l'air, soit dans le verre, suivant la direction L'R. Pour déterminer cette nouvelle direction, menons encore, à partir du point d'émergence, trois nouveaux axes de coordonnées rectangulaires L'X', L'Y', 1'Z'; le premier, L'X', dans le plan de la face d'émergence, et parallèle à l’arète Cc du prisme, par conséquent aussi à l'axe du cristal; le second, T'Y’, également dans le plan de la face, mais perpendiculaire à l’arête Cc; le troisième, enfin, l'Z', perpendiculaire aux deux premiers. Supposons alors que l'R' soit la projection du rayon émergent L'R sur le plan de la face, l'angle R'T'X' sera son azimuth compté de l'axe du cristal, azimuth que : nous désignerons par #,; et nous appellerons de même 6, l'angle R 1'Z', qu'il forme avec la normale extérieure 1'Z". Alors, en prenant sur la direction l’R une longueur arbi- traire r, aboutissant à un point quelconque, les coordonnées &, V2, de ce point auront les expressions suivantes æ,—Tr, Sin.Ô, COS.r, (3) V7, Sin. À, COS. r, Z1=—=72COS. 0%. Le rayon réfracté Il’ peut aussi être rapporté, de la même v x . manière, à ces nouveaux axes , d'après les angles qu’il forme 1818. 36 + 282 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION avec eux, et que nous désignerons par r', et 4',; alors, en appelant x',, yÿ',, z',, les nouvelles coordonnées angulaires d'un point quelconque de ce rayon, pris à la distance r', du point l' d'émergence, on aura pareiïllement x',—71", sin.W', cos.r, (4) = Ti SU. ph Sur. r', z',— 7, cos.6',. Il faut maintenant lier ces coordonnées aux précédentes 5 pour cela désignons par [ x’,], [y',], [z',] les longueurs ab- solues des trois coordonnées du point I! dans le premier système, abstraction faite de leur signe, c'est-à-dire, en les supposant toutes trois prises positivement. Cela posé, con- sidérons, dans l’espace, un point quelconque ayant pour coordonnées æ, y, z, dans le premier système, dont l'origine est I, et x, y, 2, dans le second sysème, dont l'origine est 1, on aura évidemment a= [2] +7; ml 20] 5 —2= |] +7 Supposons maintenant, que le point choisi pour cette comparaison soit précisément le point I, c'est-à-dire, l’ori- gine même du premier système : alors ses coordonnées #, y, z, seront nulles; et de plus, il faudra faire 7’, égal à 7”, dans les coordonnées x',, y’,, z,, de ce point : observant enfin de rendre les valeurs de [x',], [y',],[2',], positives, on aura ces trois conditions : sin. 0", COs.r ,——sin.W', Cos.r, sin. 4", sin.r,——Ccos.l", ! . 0 . n — COS.0 ,——sin.0 , Sn.T,. DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALLISÉS. 283 Divisant la seconde sucessivement par la première et par la troisième, puis celle-ci, par la première, on en tire , 1 tans. Tee B: Ta tang.W', cos.', ? : I ee — CATLO SO SU Tode — —— p — ———— 5 GIP “2? tang.W', sin. 7, ( ) I ATEN Re Dim: tang.’, cos. m", L’exactitude de ces relations, quant à l'égalité des quan- tités et à leurs signes, peut être immédiatememt vérifiée sur la figure même que nous avons construite pour les établir ; mais il est facile de s'assurer qu’elles scnt indépendantes . de cette figure, et qu’elles conviennent à toutes les posi- tions relatives, que les origines II" de nos deux systèmes peuvent avoir, l’une par rapport à l’autre, pourvu que les angles qui déterminent ces rapports de situation, soient comptés comme nous l'avons supposé. Toutefois, ce ne sont encore là que des relations de position, nécessitées par la forme du prisme. Il faut maintenant introduire les con- ditions de direction, résultantes du mode de réfraction que le rayon éprouve. Pour cela, considérons d’abord la première face : elle contient l’axe du cristal, ce qui rend 1—90° dans nos formules générales de la page 240. Alors, cos. x étant nul, B devient aussi nul, et A se réduit à 0’ : et les deux équa- tions générales donnent J a sin., sin.®, $ DEL SO PSE D ee —— (0) L/1—sin.°8, (a sin tr, + cos ",) b= sin.0, cos. 7, AV/1—sin "0, (a sinr,L6° cos") 2 tang. 8’, COS. , — d’où l'on tire, en les divisant l’une par l’autre, 36, 28/4 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION a? (ang. ,—= 7 Éang,.m Comme la seconde face du prisme contient aussi l'axe du cristal, on aura de même a sin.0, sin." Lang. 0, sn. r,— EE (7) V1 sin"8, (a sin°r, + 0° cos") &° sin. cos.r, = - à aV/ 1—sin°8, (a sin® +, +0? cos.m, ) tang:. 0’, COS. r,— 2 et par suite, tang.r', re tang. 7, Maintenant, si l'on substitue les expressions données par (6) et (7) dans la première et la dernière des équations (5), elles donnent les deux suivantes : La sèn 0, (a° sin x, + cos.r,). RE PL PA MEEg Le CPS anE Crete er 3 ? sin.W, cos.T, a tan£.r, —= (6) L/1=sin06, (a°sin°r, 0 cos, ) sin. 4,\cos.T, atang.r, = Dans la méthode des coïncidences, on observe les raÿons qui, après avoir subi dans le cristal des réfractions de na- ture diverse, en sortent suivant une même direction. D’après cela, si l'on nomme ,# et ,0 les coordonnées d'incidence du - rayon ordinaire qui accompagne l'extraordinaire que nous venons de considérer, les coordonnées d'émergence 7., 6,, seront les mêmes pour ces deux rayons à leur sortie du prisme, et conséquemment on pourra aussi bien calculer ces angles d'après l’un que d'apres l’autre : pour cela, faisons ab dans les formules (8), et mettons ,4 et ,r à la place de 4, et de r,. Alors ces formules se trouveront pliées au cas de la réfraction ordinaire, et donneront : DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALIISÉS. 285 AM 1—D° sin. 0 &n., Êcos., À btang.r, Va 0 sine 6, ; (9) FPE RES VAN ET RE USE Ce) PA PE sn. 0, cos." Au,moyen de ces deux équations, on peut déterminer les coordonnées d'émergeuce 7, et 6, en fonction de ,r et de #; puis, en substituant, leurs valeurs dans les, équations (5) on tirera de! celles-ci +, et6,, c’est-à-dire, les coordon- nées d'incidence du rayon EI qui ,;après s'être réfracté ex- traordinairement dans le cristal , coïncide dans son émergence avec le rayon OT réfracté ordinairement. Le résultat de cette élimination dorine : sin.® 0, C05.° 7, — sin.” À SAT D a bi sin” ,8 cos, + a D sin*,0. (0) sin 0, Sn r,—= PS : ; on trouve aussi cette autre relation : sin. 0, COS +, — sin." ,0 COS.” ,4: sin. 0, COS.r,, OU “, exprime lé cositius dé l'angle que le rayon incident extraordinaire forme avec l'axe des æ, qui est ici l'aréte des deux faces réfringentes et l'axe même du prisme cristallisé. La Re des équations (ro) montre donc que cet angle est le même pour les deux rayons ordi- naire extraordinaire qui émergent ensemble par la seconde face. Ainsi, en supposant que cés deux rayons aient le même point d'incidence sur la première faceyce qui sera sensible- mént vrai si l’on observe très-prèes du tranchant du prisme, les points E, O, dont ils émanñent, seront situés sur une Même ‘surfice ‘conique, à: base circulaire, décrite autour de l'axe des x avec l'angle donné; et; comme‘ils sont d’ailleurs: l'un et l'autre pris sur larègle divisée qui est placée. dans 280 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION le plan des x, il s’en suit qu'ils se trouveront tous deux sur une hyperbole dont le premier axe est parallele à l'axe du cône, c'est-à-dire à l'axe des x, et dont le centre est le point N, projection du point commun d'incidence I, sur la division verticale AY (fig.20). Nommons € l'angle donné des rayons’ incidents avec l'axe desx, angle dont le cosinus est 527.0, cos.., où 527. ,0 cos. ,#; ét soit toujours z, la distance du point d'in- cidence au plan des y; l'axe imaginaire de l’hyperbole aura 22, pour valeur 2z,, et l’axe reel -; de sorte que l’on pourra fans. 6 aisément la décrire sur le plan des x7. Maintenant, si l'on regarde cette hyperbole à travers le double prisme, chacun des points qui la composent for- mera son image ordinaire et son image extraordinaire en d’autres points de son périmètre : car sn. 0, cos. +, étant égal à sn. 6 cos. ,r et à sèn. 6, cos. +, , il s'ensuit que le rayon émer- gent et les deux rayons incidents font partie de la même sur- face conique. Ainsi l'hyperbole, vue de cette manière, ne sera pas doublée par la double réfraction, pourvu toutefois qu'elle soit placée par rapport au prisme, comme le calcul l'indique; et pourvu aussi que l’on observe assez pres du tranchant de l'angle réfringent pour négliger les corrections d'épaisseur, et pouvoir considérer tous les rayons émanés du périmètre de la courbe, comme ayant leur incidence au même point. L’angle 6, formé par les rayons avec, l'axe des x, étant arbitraire, on peut, en lui donnant diverses valeurs, obte- nirautant d'hyperboles différentes, ayant toutes le mème cen- tre et les mêmes direction d’axes, avec des paramètres diffé- rents pour la même:distance du prisme: Concevons une série de ces hyperboles tracées sur un carton blanc (Jig.21), et ce DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALLISÉS. 287 carton appliqué sur le plan des divisions verticales AY, de maniere que l'axe réel des hyperboles soit horizontal et leur centre sur la projection N du point d'incidence. Alors, ten plaçant l'œil derrière le prisme, on verra qu’en effet les hyper- boles ne sont pas doublées, quoique leurs asymptotes le soient, aussi-bien que toutes les autres lignes droites ou courbes arbi- trairement tracées dans leur plan. Cette expérience que j'ai faite peut être considérée comme une vérification très-délicate de la loi de double réfraction sur laquelle elle est calculée. Mais, pour que toutes les hyperboles ainsi tracées avec une même valeur de z, puissent être vues à la fois simples dans une même position de l'œil, il faut que l'on puisse négliger les déplacements d'images, produits par l'épaisseur du prisme de verre, qui compense le prisme cristallisé; ce qui arrive lorsque la distance de ce prisme au carton est suffisante. Si cela n’a pas lieu, il faut déplacer un peu l'œil, en passant d’une hyperbole à une autre, afin de compenser par ce déplace- ment la correction d'épaisseur propre à chacune d'elles, selon l’obliquité des rayons qui doivent en émaner. Ou bien encore on peut laisser l'œil fixe et déplacer un peu le carton, - jusqu’à ce que l'hyperbole que l’on considère ne semble pas doublée ; car la direction des axes et leur grandeur étant exactement établies par la construction même que nous avons prescrite, la seule condition qui reste à remplir est que le centre de chaque hyperbole soit placé sur la pro- jection du point particulier d'incidence par lequel le cône de rayons qui en émane arrive à l'œil. Outre cette vérification géométrique de la théorie, les for- mules (10) en offrent encore une infinité de vérifications numériques en permettant de calculer, pour chaque coïn- 288 Lois DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION cidence , la position d'un des traits qui coïncident, celle de : J'autre trait étant donnée. Pour les disposer à cette appli- cation, il faut d'abord y remplacer les constantes & et à par I I £ . fa / leurs valeurs 15 3,» que nous avons déterminées précédem- ment : après cette substitution, on peut leur donner la forme suivante : sin. 8, COs.r, —= Sin. ,0 COS. ,7 F3 TEE (ri) sin. 0, Sin. r, — ET SE sin. ,0 + sin.? 0 5ë7. Te Supposons que l’on se donne la position du point O, du- quel émane le rayon qui subit la réfraction ordinaire. Alors on connaîtra les coordonnées rectangulaires ,x ,y,z de ce point, et l’on en pourra déduire ses coordonnées angulaires par les formules \T—,2 ang. 0 COS; ,Ÿ —2ztang. P Sin. 7x; avec celles-ci et nos deux formules (11), on calculera sin. 4, cos. r, et sin. 4, sin. r,, par conséquent 7, et 6,, c'est- à-dire les coordonnées angulaires du point E, duquel émane le rayon qui subit la réfraction extraordinaire. Mais on connaît aussi le z, de ce point, qui est la distance du prisme à la division verticale, et par conséquent le même que,z; on pourra donc calculer directement les deux autres coordon- nées x, y, du point E, par les formules æ,—2,lang.4, COS. 7, V2, ang. 4, sin. 7 De là on pourra enfin déduire la distante OE des deux traits dont les images coïncident, laquelle sera : Veil rirf, DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALLISÉS. 289 Et l’on entirera aussi l’inclinaison de cette distance sur la ligne horizontale, laquelle: aura pour tangente — Pi Z . Cette incli- naison indiquera le sens suivant icquel la ae réfraction s'exerce dans l’azimuth d'incidence où la coincidence est ob- servée. On pourrait par l'élimination obtenir l'expression de la distance OE et de l'angle A'C'R', en fonction immédiate des coordonnées du point O. Mais l’on arriverait ainsi à une formule assez compliquée, que l’on ne pourrait pas cher- cher à simplifier par la réduction en série, sans la limiter: car les angles ,6 et ,r pouvant avoir toutes les valeurs possibles, il n’y a sous les radicaux aucune quantité qui soit assez invariablement petite, par rapport aux autres, pour que l’on puisse ordonner les développements suivant ses puissances; et ainsi je me bornerai à indiquer ici la mar- che directe, sauf à recourir aux approximations pour les cas particuliers qui en seront susceptibles, Voici des expériences faites par les méthodes des coïnci- dences obliques, pour vérifier ces formules : les éléments immédiats des observations sont désignés d’après les déno- minations employées dans les /ég. 17 et 18. La lettre D, placée à droite de la dernière colonne, indique les cas où la divi- sion circulaire était placée à droite de l'observateur, et la lettre G indique ceux où elle était placée à gauche. Cette distinction est très-nécessaire. En effet, il est presque impos- sible de tailler les faces du prisme dans un sens rigoureu- sement parallèle à l'axe du cristal. Or un petit écart de cette direction n'influerait pas sensiblement sur des déviations qui seraient observées perpendiculairement à l’arête Ce du 1818. 37 « 290 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION prisme, ou plus exactement dans le plan d'incidence quirend les déviations latérales nulles ; parce qu’alors la perpendicula- rité approchée du rayon sur l'axe du cristal, rend le sinus de son inclinaison presque constant. Mais cette constance cesse dans les observations latérales : alors, pour peu que l’une des faces du prisme, l’antérieure, par exemple, soit oblique à l'axe du cristal, il arrive que, dans les coïncidences obser- vées d’un côté, par exemple à gauche, le rayon réfracté ex- traordinaire se trouve un peu plus rapproché de cet axe qu’il ne devrait l'être; et que, dans les coïncidences observées de l'autre côté, conséqtfémment à droite, il s’en trouve un peu trop éloigné. De là il résulte que l'écart des deux rayons, ordi- naire, extraordinaire, est, dans le premier cas, un peu trop faible, dans le second cas, un peu trop fort; de manière que leurs erreurs se compensent en partie, lorsque l’on combine deux à deux les observations; et cette compensation devient presque totale si les erreurs partielles dépendantes de lobli- quité de l’axe sont individuellement tres-petites. Tel est le cas des expériences que nous allons rapporter. Une autre remarque essentielle, c'est que la détermination du sens de A l'écart des deux rayons par la formule 219" ne peut être Tr qu'approchée, à cause de l'extrême petitesse des quantités Vis %,—,x, qui expriment les différences des coordon- nées des points d’où partent les rayons qui coincident dans leur émergence ; de sorte qu'on peut facilement tolérer une erreur de un ou deux degrés, dans la valeur absolue de l’angle dont la tangente est déterminée par le rapport de ces quantités. Ces considérations préliminaires étant établies, je passe à l'exposé des résultats immédiats de l'observation : à ; DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALLISÉS: 291 HAUTEUR DISTANCE | DISTANCE DISTANCES | HAUTEUR du centre C! | du centre C' | INCLINAISON de DISTANCE à de la surface CONALRT EE de l'axe RR , ss a Li 1] de la division l'axe horizontal |de l'origine A tcdlatse sur l'horizontale A' C! s circulaire M u e : P) au point de départ|au point de départ AC", d'incidence point d'incidence du prisme au - dessus à la de ls division | *u-dessus D'or TE division verticale|horizontale AX, rep circulaire , horizontale AX,| A'C!. A A. du du rayon on direction. rayon ordinaire | extraordinaire de la coincidence u ! sur larègl RR [snrlarèleRR, A'C'R! c'O. 1Z OUZ,. IH. 65m 65° 45" 6o 69.40. 70 67.30. 68. En appliquant à ces données les formules de la pag. 277, on en déduira d’abord les coordonnées , soit rectilignes, soit angulaires, du point O, d’où le rayon ordmaire émane. Ensuite, en introduisant ces résultats dans la formule (11), fondée sur la théorie, on en déduira les coordonnées ana- logues du point E, duquel doit partir le rayon extraordi- naire qui coincide avec le premier dans son émergence. Voici le tableau de ces résultats : STE 166,697 154,849 160,788 155,990 152,041 159,036 221,792 227;997 237,069 230,997 205,133 212,655 202,781 211,921 COORDONNÉES rectilignes du point O, déduites de l'observation. DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA Ne COORDONNÉES rectilignes COORDONNÉES COORDONNÉES angulaires angulaires du point O, du point E, du point E, déduites de l'observation. déduites de la théorie. déduites de la théorie. mm mu 202,264 51°25!53" 52° 56'54"| 172,484 | 216,531 | 209 199,261 52. 8.57 | 50.22. 7 51.53.20 | 160,028 | 213,030 | 209 207,672 52:%5.:5 | 51.29.20 166,430 | 222,103 | 209 196,824 5r-36. 07 [R50-13 56 51.44.33 | 161,165 | 210,480 | 209 205,323 53.28.49] 45.23.38 46.54.40 | 156,291 | 219,427 | 252 211,698 53. 5. 5 | 46.25. o 47.55.49 | 163,635 | 226,220 | 252 247,723 1 52.44. O | 220,337 | 265,601 | 267 261,378 236,416 | 280,309 | 26: 238,883 244,949 | 250,952 | 272 261,378 248,388 | 280,436 | 277,i 267,925 211,486 | 286,289 | 300 281,129 219:924 | 300,494 | 288 273,887 208,209 | 292,953 | 354 292,084 217,856 | 312,926 | 344 Maintenant, avec ces coordonnées, nous pouvons conclure l'écart des deux points OE, exprimé parL/(z,-,æ) +(7,=,7) et la direction de cet écart, indiquée par son inclinaison sur l’axe A'C' de la division horizontale; laquelle a, pour Dit ral tangente trigonométrique, —— Voici le tableau de ces résultats comparés à l'observation : DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALLISÉS. 293 ÉGART EXCÈS EXCÈS MOYEN DIRECTION du calcul de l'écart OE, du calcul A OE, sur les ubservations valeur de l'angle EO A", sur les observations combinées a A ——, partielles. des deux côtés. observé. calculé, des poiuts de départ observé. calculé. a mm mm 15,000 15,395 L ; n! 66° 9'57" D. 69.23.10 15,000 14,911 15,000 15,484 = .30. 68.38. 15,000 14,603 À .30. 69.14. ‘15,000 14,730 : -30. 73.13. 15,000 15,248 5 .30. 72- 20,000 19407 20,000 20,719 20,000 19,523 20,000 20,832 20,000 19,432 20,000 20,684 20,000 19,823 pDOuanuvebaupepte 20,000 20,749 L'erreur moyenne de l'écart calculé est insensible dans les trois premiers couples; dans les quatre autres, elle est de 0"",r47 sur 20°”, c’est-à-dire 6 de la valeur totale ob- servée. L'erreur des directions est généralement de 1 ou 2° en plus. Il est probable qu’elle est due, en très-grande partie, à un petit défaut de parallélisme, entre la première face du prisme et la division verticale. D'ailleurs cette erreur ne ré- pond qu’à deux ou trois centièmes de millimètres sur l'écart OE des deux rayons. Enfin il faut considérer, qu’à cause de la grandeur même 294 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION de l'écart OE, il varie très-rapidement avec Incidence; ce qui rend une petite erreur d'observation plus facile, en même temps que cela augmente l'influence de tous les petits défauts qui peuvent exister dans la disposition de l'appareil. Les résultats précédents ayant ainsi présenté tout le degré d’exactitude dont ce genre d'observations est susceptible, j'ai cherché à lui substituer quelque autre genre d'épreuves. Je possédais un tres-grand morceau de cristal de roche de Mada- gascar, qui m'avait été donné par M. Rochon, et qui avait déja été coupé par lui, de manière qu'une de ses faces BC B'C' (fig. 22) contint dans son plan l'axe &a' du cristal même. J'ai taillé dans ce morceau une autre face BCB"C", perpendicu- aire à la première, et qui la coupait suivant la droite BC inclinée de 45° sur l’axe AA'; puis, prenant ces deux faces pour guides, j'ai achevé de donner au morceau la forme d’un parallélipipède rectangle, comme le représente la figure. Alors , considérant les deux premières faces comme un prisme rectangulaire, j'ai collé à la seconde un parallélipi- pède de crown, comme on le voit ( fig. 23); et, plaçant la base B'C' B"C" du cristal sur la colonne de mon appareil, de manière que la face antérieure BC B'C' fût parallèle à la di- vision verticale, j'ai observé, par la méthode des coïncidences, les déviations des rayons OI, EI, qui, après avoir subi dans le prisme cristallisé des réfractions différentes, émergeaient ensemble et arrivaient ensemble à l'œil en V. Par ces dispositions, les rayons ordinaires OT, émanés de la division verticale, entraient dans le prisme suivant un plan d'incidence vertical, perpendiculaire à l'arête BC du prisme; et par conséquent ils traversaient sa substance et en sor- faient, en restant toujours dans ce même plan. Or la trace DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALLISÉS. 299 IH de ce plan sur la face d'incidence ( fig. 23) était inclinée de 45° à l'axe aa’. Ainsi l’azimuth d'incidence du rayon or dinaire OI représentée par ,r dans nos formules, était ici de 459, et par conséquent l'incidence de ce rayon se faisait dans une direction très-différente de la section principale. Mais, avant de calculer les conséquences de ces dispositions, il faut expliquer par quels moyens j'ai pu m’assurer d’avoir donné aux faces la direction qu’elles supposent, et de l'avoir donnée avec assez d’exactitude pour pouvoir l'introduire comme telle dans le calcul. D'abord, pour m’assurer que l'axe aa! était contenu dans le plan de la face antérieure, j'ai pré- senté la base B'C' BC" du parallélipipède, perpendiculaire- ment à un rayon polarisé;-et, analysant ce rayon après sa transmission par la face opposée BC B"C", j'ai vu qu'il conser- vait sa polarisation primitive lorsque l’arête BC était parallèle au sens de cette polarisation, et qu'il la perdait quand ce paral- lélisme n'avait plus lieu. Ensuite, pour mesurer l'inclinaison de l’axe a a sur le plan des bases du parallélipipède, j'ai fait enlever parallèlement à ces bases une tranche dont l’épais- seur était de 1350 parties de mon sphéromètre, ou 3°” ,049. J'ai transmis perpendiculairement, à travers cette lame, un rayon blanc polarisé en un seul sens; et, plaçant derrière elle des lames naturelles de chaux sulfatée, dont la section principale était croisée rectangulairement avec la sienne, J'ai déterminé l'épaisseur de ces lames qui était nécessaire pour détruire complètement les changements de polarisation pro- duits par la première, et ramener le rayon à son sens de polarisation primitif. Cette épaisseur s’est trouvée égale à 667 parties du sphéromètre, c’est-à-dire presque exactement la moitié de ce qu'elle aurait dû être, si la plaque de cris- 296 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION tal de roche eût été parallèle à l’axe; car j'ai depuis long- temps fait voir que le cristal de roche parallèle à l'axe, et les lames naturelles de chaux sulfatée bien pure, se com- pensent à égalité d'épaisseur, sous l'incidence perpendicu- laire. De-là on doit conclure que l'axe de la plaque de cristal de roche est oblique à sa surface, et forme avecelle un angle L : 66 CETTE : dont le quarré du sinus est 7, ou -; d'où il suit que cet : 1350 2 angle est précisément égal à 45° (*). Reprenons maintenant les conditions initiales d'incidence et de réfraction que nous avons établies plus haut pour le rayon OT qui suit la réfraction ordinaire, et cherchons à calculer la marche du rayon ET qui, amené par la réfraction extraordinaire, coïncide avec lui en sortant du prisme vers l'œil : pour cela, je rapporterai la marche des rayons à deux systèmes successifs de coordonnées rectangulaires x, .y, z, æ,; Y,5 2, dirigées par rapport aux arêtes du prisme rectan- gulaire précisément comme celles de l'expérience précédente (fig. 19); seulement dans le cas actuel, représenté ( /g.24), l'axe aa’ du cristal n'étant plus parallele à la coordonnée x de la premiere face, mais faisant avec elle un angle de 45°, les azimuths +,, r,, des rayons incidents et réfractés ne par- tiront plus de la ligne IX, mais de la nouvelle position aa’ de l'axe, Ainsi, pour rapporter ces rayons aux coordonnées xæyz,il faudra introduire une nouvelle coordonnée angu- (*) Cette méthode est celle que j'ai exposée dans les Mémoires de l'In- stitut ponr 1812, l parte, p. 189, et que j'ai depuis reproduite dans mon Traité de physique, tom. IV, pag. 469. Elle suffit pour déterminer la di- rection de l'axe dans toute plaque tirée d'un cristal à un seul axe, quel que soit le sens suivant lequel cette plaque soit taillée, DANS LES CORPS REGULIÈREMENT CRISTAILISÉS. 297 laire v, comptée de la ligne IX elle-même. Mais, d'après la direction assignée à l'axe, v sera toujours égal à 45° ++,, de sorte qu'on pourra toujours la remplacer, si l'on veut, par cette valeur; quant à la seconde surface, la ligne I'X', à partir de laquelle on compte les »,, coïncidera avec la pro- jection de l’axe &a' sur cette face, et par conséquent on de- vra compter encore, à partir de cette ligne, les azimuths 7’, etr, relatifs aux rayons émergents. Cela posé, en conservant les autres dénominations de coor- données angulaires et rectangulaires dont nous avons précé- demment fait usage, si nous considérons un rayon incident ET dont les coordonnées d'incidence soient 7,, #,, 0,, et qui doive ensuite subir, à travers le prisme, la réfraction extraor- dinaire, nous aurons pour le progrès de ce rayon, les séries d'équations suivantes, analogues à celles de la pag. 280. X,==P, Sin. À, COS.V, Y:=r;sin. 0, sin. v,}, (5 Z; ==, €0S.Û, dans lesquelles v,—=45° +7. Nous aurons ensuite, pour le rayon réfracté qui en dérive, L { 2 L L T,—=r,sSun0, COS, Y'.=r", sin.0', sin. v', }: (2) z,— 7", Cos.W', ici Pangle v', sera égal à 45°+ x',,#', étant l'azimuth du rayon réfracté extraordinaire compté à partir de Faxe aa’, et dé- terminé d’après la loi de la réfraction. Enfin, pour le rayon 1818. 38 298 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION émergent à la seconde surface du prisme, on aura Z,—=F, Sin. 8, COS.r, V.=T, sin. h, sin. } + (3) ZE 7INCOS 6 En outre, par le seul fait de la rectangularité du prisme, il y aura, entre les nouvelles coordonnées angulaires, des ré- fractions absolument pareilles aux équations (5) de la pag. 285; lesquelles seront ! I ONE fans: me tang. W', cos. v", E dure ï d PNEU DANUR NT TEE Q Aérn ; rte Ÿ x I tan. V' = — — 59 ——-— ; CE tang.W, cos. ou, en mettant pour v', sa valeur 45°+7+',, tano: 1 Des LORS ce PEL t LA ANAL tang.W', | cos. m',—sin,r", | Nb 13 PATES SUR ER (5) tang.W', | COS. T!, Sé2.T!, | 1H lang, 1 1—tang.m, tang.V,cos., I faut maintenant introduire les conditions de réfraction relatives aux deux faces du prisme. D'abord, pour la pre- miere, comme elle contient l'axe aa’ du cristal, on aura, La s 2 0. . dans les formules générales de la page 240, 1—90"; ce qui donne A—a*; B—0; et, par suite, DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALLISÉS. 299 " a sin. 0, sin.x, fang.0', Sin. =" = — LV 1— sin. 0, (a° sin. 7, + 0° cos. T,) bd? sin. À, cos.», AV 1=sin." 4, (a? sin mt, +6? cos°r,) 5 (6) tang. #', COs.r', — d'où l’on tire tang.. 7, = tang.Ti Maintenant, pour la seconde face du prisme, l'axe za’ forme avec elle un angle de 45°; et comme, dans la figure que nous avons faite, cet axe se trouve du côté de la normale où 7, est nul, la valeur de l'angle x compté dans ce sens sera 90°+ 45°; ce qui donne sin.} —Cos. 45°; cos.\——sin. 45°. Ces valeurs étant introduites dans les formules générales de la page 240, il en résulte d’abord A—° (b°+a) B—— * (D —a"); Après quoi, ces mêmes formules donneront fang. 4’, sin.r', et tang.6,' cos.r, en fonction des coordonnées d'émergence 8, et r.. Mais ces expréssions se simplifient beaucoup, quand on y introduit l'azimuth d'émergence dans lequel les coïn- cidences s’observent; car cet azimuth étant perpendiculaire à l’arête du prisme, il en résulte que +, doit être égal à go’, et son cosinus égal à zéro, aussi-bien pour le rayon émer- gent ordinaire que pour l'extraordinaire; puisqu'ils émergent ensemble dans l'observation des coincidences. Cette con- dition étant introduite dans les formules générales avec les valeurs précédentes dé A et de B, il en résulte : 38. 300 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION EAN AT a° sin. 8, Va (ang SR TE ia on À D: tang.0', COS.r,—=— re} tel 2 2 P+c Cette dernière relation étant combinée avec la dernière des équations (5) il en résulte 1+-tang.m', __ b+a » ; Mes RO éme tt BEL GN par conséquent, éang. m7; valeur qui, étant substituée à la place de tang. r', dans les équations (6) relatives à la première face du prisme, donne ar conséquent, : r,—=4à et v,—45° +7r,—00"; P L 9 " c'est-à-dire que, lorsque le plan d'émergence du rayon extraordinaire est pris perpendiculaire à l’arête du prisme, comme nous l'avons supposé dans ce qui précède, il faut que l'incidence de ce rayon sur la première face du prisme se fasse aussi dans le même plan. Par conséquent, si l'on ob- serve assez près du tranchant du prisme, pour que les cor- rections d'épaisseur soient insensibles, les coïncide ncesainsi observées devront se faire exactément sur l'axe des divisions verticales , sans aucune déviation quelconque ; non qu’en ef- fet le rayon extraordinairement réfracté reste toujours dans Le plan d'incidence, puisque l'angle +", n’est pas droit comme ,, ni égal à 270°; mais, parce que la déviation latérale que le rayon subit dans la réfraction à la première face du prisme, se trouve exactement compensée par celle qu'il reçoit en sens contraire, en sortant par la seconde face. Ce résultat rémar- quable, et qui tient essentiellement à la loi suivant laquelle DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALLISÉS. Jo 1 les déviations latérales s’opèrent dans des plans obliques à la section principale, offrait un sujet de vérification important pour la théorie : or, j'ai trouvé qu’en effet il avait lieu avec la dernière rigueur, lorsque les autres conditions adoptées dans nos calculs étaient exactement observées. Alors, en observant tout près du tranchant du prisme, les deux images ordinaire, extraordinaire , de la division verticale, paraissaient l’une et l’autre transportées sur cette division même, et leurs coïn- cidences s'observaient dans le plan vertical d'incidence qui la contenait. L'azimuth d'incidence des deux rayons incidents ordinaire. extraordinaire étant commun , il ne reste plus qu’à trouver le relation de leurs angles d’iñcidence ,6,0,, d’après la condition que l’angle d'émergence 0, leur soit commun aussi. Pour cela ; il faut d’abord introduire dans les équations (6) relatives à la face d'incidence, la condition 7,—/45v. Puis , prenant les valeurs de éang.', sin. r', et tang.0', cos.x", qui en résultent, il faut les substituer dans la seconde des équations (5), qui donne la valeur de tang.0',sin.#', ; enfin, égalant cette valeur à celle que donne la première des équations (7), il en résulte une relation entre l'incidence 0, du rayon extraordinaire et son émergence 0,; cette relation est a sin.A, \QELE (a +8) sin 6, 3 RE V/1— a? sin? 6, sin. 6, V72(a?+8) © — d'où, en élevant les deux membres au quarré, on tire Û I È O—1——a sin." b, —> (a+ b*) sn. 07. (8) Mais l'émergence 6, peut aussi se conclure de l'incidence ,6 appartenant au rayon ordinaire, puisque les deux rayons 302 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION sortent ensemble ; et pour l'obtenir il suffit de supposer a —b dans l'équation précédente, qui donne alors \ On bu 0 Dsin 200, (9) éliminant donc 0, entre celle-ci et la précédente, il reste o—B°— a+ a*b°\sin.",0 —= b(a° + b*)sin." 0, : (ro) 2 C’est la relation cherchée entre les incidences 6, 8,, des deux rayons ordinaire extraordinaire qui émergent ensemble : si l'on substitue à la place des constantes à et à leurs valeurs I I ,» a . 2 ni et qu'on dégage sin.0,, elle donne SN 0, = ——_———————_r Vin n° + sn ,8: (11) c'est l'expression que j'ai comparée aux observations. Pour cela, ayant placé le prisme comme je l'ai explique plus haut, et comme la /ig. 23 le représente, j'ai observé le rang des traits O, E qui coïncidaient après la transmission, ce qui m'a donné AO et AE. Je connaissais la hauteur HT du point d'incidence qui pouvait être censé commun aux deux rayons, car j'observais par le tranchant même du prisme cris- tallisé ; j'ai donc pu déduire de là les distances NO, NE qui sont les coordonnées y,, ,y; et de plus, l'observation de la division horizontale me donnait immédiatement HA ou IN, qui est le z commun aux deux points O et E. Avec ces données, j'ai calculé l'angle d'incidence ordinaire NIO ou ,6 dont la tan- gente est . ; J'ai déduit de celui-ci 6, ou l'angle NIE par la formule (11) fondée sur la théorie; et, formant enfin le pro- / DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALLISÉS. 303 duit 3, {ang 0, ou y,, j'ai comparé immédiatement sa valeur à la valeur ‘observée de NE. J'ai aussi observé des coincidences sur la division hori- zontale : alors on emprunte de l'observation les coordonnées HO' ou ,z et HI qui représente à-la-fois ,y et y.. Avec les deux premieres on calcule 6, comme tout-à-l’heure, puis on déduit 6, de la formule (11), et enfin divisant y, par fang:.0,, on a z, que l'on compare à l'observation : tel est l'objet du tableau suivant. COORDONNÉES INCIDENCES] ÉCART VERTICAL : \ DES POINTS DE DÉPART du rayon ordinaire Se EXCES comptées Êg des rayons les images coincident. pu À de la normale fai ordinaires. extraordinaires. OEouO'E, extérieure, CALCUL. TT, 10 observé. calculé. mm Divis. vertic, 40° 47' 30"| 157" 14,95 38.44.18 | 20 |19,88 32.29. 1 25 |25,01 Divis. horiz. 48.12.50 | 20 | 19,73 On voit combien les erreurs sont petites, comparativement aux écarts observés des images : la dernière, la plus forte de toutes, n’en est que les -£.. Si maintenant l’on songe que ces résultats dépendent de la direction exacte des faces du prisme par rapport à l'axe du cristal; de leur angle entre elles, et de leur inclinaison sur cet axe; de la position du prisme au-devant des divisions, observées ; enfin de la jus- tesse même des observations, qui ne peut jamais être par- 304 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION faite, on sentira que d'aussi légères différences sont bien diffi- ciles à éviter; et alors on regardera, je crois, l'épreuve précé- dente comme une vérification décisive de la loi de Huyghens dans lecristal deroche, pour les incidences obliques à la section principale, et pour les déviations latérales qui en dérivent. Les observations même de Malus sur le spath d'Islande, qui possède une double réfraction si énergique, n’offrent pas, pour ce genre de déviation, des écartements d'images à beaucoup près aussi considérables que ceux que je viens de rapporter. Réflexion intérieure des rayons à la seconde surface du cristal de roche. Lorsque les se ds lumineux, après avoir pénétré dans un cristal, arrivent à sa seconde surface, et y subissent une réflexion intérieure, soit totale, soit partielle, l'influence de la double réfraction se fait sentir sur la direction des rayons réfléchis; et l'on peut, comme l'a fait M. Laplace, calculer la marche de ces rayons par le principe de la moindre action, en leur appliquant les mêmes lois qui règlent les vitesses de tout autre rayon, soit ordinaire, soit extraordinaire , qui sé meut dans l'intérieur du cristal. L'observation de ces phénomènes est donc encore une épreuve propre à vérifier l'application de la loi de Huyghens, et elle est même néces- saire pour en constater la généralité. Ces motifs m'ont déterminé à l'ajouter à toutes celles que j'avais déja faites. Pour cela, j'ai employé le même paralléli- pipède rectangulaire du cristal de roche dont j'ai décrit le sens de coupe, pag. 294, et dont nous avons, toutà-l'heure, calculé la réfraction extraordinaire. Je l'ai posé sur le support pe DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALLISÉS. 305 de mon appareil par une de ses plus longues faces , comme on le voit fig. 25, où il est représenté de profil. Alors la face BCDE qui se présente à l'œil, contenait dans son plan l'axe du cristal, dont la direction désignée par £a, 1,a, , t,a,, formait avec les autres faces un angle de 45°. Le parallélipipède étant ainsi posé et fixé sur le support, les traits de la division verticale AY se voyaient par réflexion intérieure sur sa base CD comme sur un miroir, et l’on pouvait aisément en observer le doublement et les coïncidences , en plaçant l’œil derrière le cristal en V. Or, comme, dans cette observation , l'incidence des rayons OI, Er, leur trajet à travers le cristal, et leur émergence commune à la surface postérieure, se faisaient toujours dans la section principale de chaque face réfringente ou réfléchissante , il s'ensuit que chacune de ces opérations ne devait occasionner aucune déviation latérale, et qu'ainsi, la marche des rayons et leurs coïncidences de- vaient toujours se faire dans les plans de ces sections prin- cipales, lesquelles ne formaient qu'un seul et même plan parallèle à la face latérale BC DE. Cette condition , indiquée par la théorie, s’est trouvée parfaitement satisfaite dans lés observations. Il est aussi arrivé que le sens de polarisation imprimé par la première réfraction à chacun des faisceaux, a rendu ensuite leur réflexion et leur émergence simple pour chacun d’eux , conformément aux lois de polarisation données par Malus pour les cristaux à un seul axe. Maintenant, afin de donner aux écarts observés des rayons une ioutde qui les rendit propre à être comparés avec la théorie, il fallait d’abord déterminer avec précision la posi- tion dés points d'incidence ordinaire, extraordinaire, Sur la surface antérieure du cristal : c'est ce ‘que j ai fait en eol- 1818. 39 306 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION lant horizontalement sur cette surface une petite bande de papier horizontale, dont les bords bien rectilignes me ser- vaient à limiter l'incidence des rayons par lesquels chaque coïncidence était produite, en observant qu'ils rasassent ses bords. Ensuite, avec ces incidences connues et la longueur CD du cristal qui était de 82 millimetres, je calculais la dis- tance verticale Iz des points d'incidence ordinaire, extraor- dinaire, correspondants à une émergence commune, distance qui, à cause de la longueur du cristal, ne pouvait nulle- ment être négligée. J'ai observé aussi des coincidences près du bord inférieur D du parallélipipède, c'est-à-dire, par des rayons qui rasaient ce bord, et qui entraient et sortaient du cristal parallèles ou presque parallèles à la face infé- rieure CD. On trouvera plus bas les résultats de ces deux genres d'observation qui, outre la valeur de l'écart absolu qu'ils donnent, présentent encore plusieurs particularités également conformes à la théorie. Etablissons maintenant les formules par lesquelles les coïncidences doivent être calculées: Pour cela, supposons, comme nous l'avons fait toujours, un rayon incident Ez qui, tombant sur la première surface du cristal , donne naissance à un rayon réfracté extraordinaire. Suivons ce rayon à tra- vers le cristal jusqu’à sa réflexion intérieure sur la face CD; conduisons-le de nouveau jusqu’à la surface postérieure du cristal en [,; et enfin, calculons quelle devra être l'incidence antérieure du rayon OI qui, après avoir subi dans l’intérieur du cristal la réfraction et la réflexion ordinaires, coïnci- dera avec Ez dans son émergence en I. Considérons d’abord la réfraction extraordinaire à la pre- mière surface; l’axe za du cristal fait avec cette face un = tang.V',— DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALLISÉS. 307 angle de 45°. D'après cela, si nous commençons à compter les azimuths + à partir de la droite :B, c’est-à-dire du côté de la ” normale où l'axe se trouve, dans la ffg. 25, il faudra prendre A— 90° + 45°, d'où sin.1=—cos. 459; cos. =—sin./5 : ces valeurs, substituées dans les formules générales de la pag. 240, donnent d'abord A—°(b+a°) B——" (b'—a"). Comme il faut assigner une direction déterminée aux rayons incidents, pour pouvoir les construire, plaçons-les comme les représente la fig. 25. C'était en effet la disposition qu'ils avaient dans mes expériences. Alors, comme tout se passe dans le plan de la section principale de la face, on aura x, —0 pour le rayon incident E:; et r,' —180° pour le rayon ré- fracté qui en résulte. Ces valeurs étant introduites dans les deux formules générales de la pag. 240, l4 première se trouve satisfaite d'elle-même; et, en mettant pour À et B leurs va- leurs dans la seconde, elle donne 2 a° b? sin.N, (b— a) Conduisons maintenant le rayon ainsi réfracté £z,, jus- qu'à la surface inférieure CD, et là, comparons son angle d'incidence intérieure £,», ou 9," avec l'angle de réfraction in ou 8,'; on aura évidemment 1 Ant. = TES PA HPLRET I 9 ,—9270—0",; d'où RG EE Il faut maintenant appliquer nos formules générales à cette seconde face. Pour cela comptons encore les azimuths, à partir du côté de la normale où se dirige l'axe du cristal : 39. 308 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION ce sera ici, à compter dez,D. Alors, pour le rayon intérieur té, la valeur de son azimuth, ou +',, sera 180°; et pour le rayon fictif z, v, qui en résulterait par émergence, l'azimuth correspondant, ou +,, serait égal à zéro. Ainsi, en nommant 4, l'angle d'émergence de ce rayon, nos formules générales donneraient A an a? b? sin.” 0, 1B NOR A AA an Nous donnerons tout-à-l'heure à B et à A les valeurs par- ticuliéres qui leur conviennent : pour le moment, laissons-les sous cette forme générale; maintenant, pour trouver la di- rection du rayon réfléchi extraordinaire qui provient de £e,, il faut concevoir, du côté de la normale opposé à é, v,, un autre rayon extérieur ?,v,, éloigné aussi de cette normale du même angle 0,, et chercher le rayon réfracté extraordi- naire [, 1, qui en dériverait. Alors, pour ce nouveau rayon fictif, l’'azimath d'émergence +, serait égal à 180°; etr, serait nul pour le rayon réfracté extraordinaire qui en dérive, puis- que celui-ci doit aller percer la surface postérieure DE du cristal. Nommant donc #', l'angle de réfraction extraordinaire de ce dernier rayon, compté toujours à partir de la normale extérieure £, 7,, nos formules générales donneront ; ù ,' — a? br sin.8, B TO ——— —— —" _—— —« HÉD:ESS AV/A a à sin. 8, 4 ici les valeurs de B et de A sont identiquement les mêmes qu'eltes étaient tout-à-l’heure, puisque l'angle x, seule va- riable qu’elles renferment , se rapporte toujours à la même face du cristal, et se compte à partir de la même normale z,7,. On peut donc combiner cette équation avec la précédente pour DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALLISES.. 309 éliminer 6, entre-elles. Pour cela, il suffira de les ajouter ensemble, et il viendra ! ! 2 B Lang. ; —tangs. 0 AA Maintenant l'axe cz, &, du cristal fait avec la face AB un angle de 45. L’angle x, compté comme les 8, à partir de la normale extérieure z,7,, et du côté z, D de cette normale où r, est nul, sera donc 90°+ 45; par conséquent, sr. À sera égal à + s27. 45°, et cos. x à — cos. 45. Ainsi on aura en- core, comme pour la première face, WE A=° (b+a) B——" (b°—a); ce qui, étant substitué dans l'équation précédente, donne enfin [2 (b°— a°) s (2) tang. W,— tang. W,—= APE c'est la relation générale qui doit exister entre l'angle d’in- cidence intérieure #', et l'angle de réflexion intérieure 8, du rayon extraordinaire, sur la surface CD du cristal. * Suivons maintenant le rayon refléchi z, #, jusqu'a sa ren- contre avec la surface postérieure DE ; alors, si nous nom- mons 0’, son angle d'incidence sur cette face, toujours à partir de la normale extérieure I, N,, on aura, comme à la première face, nr & 1,5 CHARTES: TON PL 4 270"—6,; d'où QE een Maintenant, à partir du point d’émergence [,, menons dans l'intérieur du cristal la ligne IL, &, parallèle à l'axe du cristal, et représentant ainsi sa direction en ce point. Puis 310 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION comptons les azimuths +',, r,, à partir de la ligne I, D, du même côté de la normale où se trouve l’axe : alors, comme il est incliné de 45° sur cette face, à s'y trouvera encore égal à 90° + 45°; et l'on aura, comme tout-à-l'heure, 557.1 égal à sin. 45°, et cos. à —cos.45; ce qui donnera encore A—=(b°+a") —=—;°(b—a!). En outre, les azimuths +',, r,, étant comptés sur la face d'émergence à partir de la ligne I, D, l’azimuth r', sera nul pour le rayon réfracté z,2,, et r, sera 180 pour le rayon émergent I, V. D'après cela, en nommant 6, l'angle extérieur d'émergence, nos formules générales donneront — 2 ab? sin. À, (&—a*) tan Le A | A ICI AE (+) Crea) Ent, P+ (3) Les équations successives que nous venons d'établir, et que nous avons désignées par (1) (2) (3), déterminent com-" plètement la marche du rayon extraordinaire dérivé de Ez. Pour avoir maintenant la marche du rayon ordinaire qui l'accompagne dans son émergence, et dont nous désignerons l'incidence par ,6, il faut seulement faire a—b dans les formules , et employer l'angle d'émergence 8, comme commun aux deux rayons diversement réfractés. On trouveainsi0;—.6, c'est-à-dire que l'angle d'émergence, compté de la dernière normale , est égal à l'angle d'incidence compté de la pre- mière ; résultat évident d’après le parallélisme des faces an- térieure et postérieure du cristal. Substituant donc ,8 au lieu de 9, dans les précédentes for- . aa he = J I mules ; puis, éliminant {ang 0’, au moyen de sa valeur à DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALIISÉS. OI I 2 Q et tang. 4’, au moyen de sa valeur: TEA LE les équations (1), (2), (3), se changent dans les suivantes, que nous désigne- rons par les mêmes indices. pr ï — 2 a D sin.U, (&— a) Ÿ ? ONDES TA Ai rang F+& ? (x) ns. V, (+a 726 + a°)— a b* sin” 0, 2 (&—&) . tang.8;—tang td, =; é (2) 1 - — 2 ab? sin. À (B— a) = = (3) tang. 0, (84e) 17 (B+a)—# "sine À + Il s’agit maintenant d'éliminer 6.' et 6,’ entre ces trois équa- tions, afin d’en déduire 6, en fonction de 8 : pour le faire de la manière la’ plus simple, j'introduis deux variables auxi- liaires w, et », telles qu'on ait : a b : : . UD, = —————©" Sin. 0, SUTL. Er ES Sun. ,0; - 4 I(E+æ) = (+ æ) ? (4) ce qui donne PO EEE Q a b $in.0, : 8" A (+ a)— œb sin 0, } = LR a b sin. 8 : 8°: eu 07e (& a) —aE% sin? À Et en substituant ces transformations dans nos trois équa- tions précédentes, elles prennent cette forme très-simple j I As y Le — à anal be NBUI TE) (1) É LS a tang.W, — tang.Ÿ, —=— E 7 (2) LORIE 2ab £ CE 3 tang.W, — B+a SL RENE TETE (@) 312 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION Maintenant divisez tous les termes de la seconde équation par le produit tang.6,' tang:.6,' et substituez-y pour ces deux tangentes , leurs valeurs tirées de la premiere et de la troi- sième, Vebren ban proposée se trouvera faite, et il vien- dra pour équation résultante FE -tang.v, + 2% à atE Se) g. Fe ONE. 0 HS ES sb) (ant SE REX a) EX P+ D? +4 LL 0 mn Er) (use à fete NES Tous les termes de cette équation peuvent être divisés par 2 . . . . ’ 54e ° st, deplus, on effectue les produits indiqués dans le second membre, et qu'on y passe le terme constant du pre- mier, qui se trouvera ainsi réduit à +(b'—a*), on trouvera ab (rang. «V—tang.v,) = — (o°—a) ni (E—x) 2ab(b—x 2 lére-ce (&+e) (rang .v—tang. v.) e R- tang. ,v tang.v. | br = 2 2 ; D Or, TE est égal à a de sorte que ce temme peut se réunir à celui qui contient {ang. ,v.tang.v réunissant de même les termes affectés par la différence de ces deux tangentes, et divisant toute l'équation par @b, il reste (D) (tang.,v—tang.v,) Hit (1 + ang. v, tang. ,v) DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALLISÉS. 313 Le coëficient constant du premier membre étant réduit au même dénominateur (b°+ 4°), prend Pour numérateur fab (p a) ; alors le dénominateur commun (°+@) disparaît des deux membres de l'équation : divisant de plus par le facteur variable du second membre, il vient définiti- vement 4ab(b—a) tang. PE (b) Cette relation extrémement simple montre que l'angle %—% est constant dans toutes les expériences, et permet de le calculer avec la plus grande précision : pour cela il I Le +ec S Ê faut remplacer les constantes & et à par les rapports =, >, ce qui donne 4nn'(n'—n°) ang. ee tar ne : En substituant à ces rapports leurs valeurs numériques pour le cristal de roche ; On trouve | Vi—:0—0°.40".47',2; Par conséquent, ViV + 0°.40'.47",2. Maintenant ,v est donné par la seconde des équations (4) en fonction de l'incidence © du rayon ordinaire : ainsi, en ajoutant à sa valeur la différence constante que nous venons d'obtenir, on aura v,. De-là, on déduira 6, par la première des équations (4); ainsi » Quand on aura observé la distance ;r ou IN de la face d'incidence à la division verticale, sur laquelle les coïncidences se mesurent, distance que nous avons dé- signée en général Par z, où ,z, on pourra calculer le produit 1818. ] 40 314 LOISDE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION 2, tang.#,, lequel exprimera la hauteur 2E, c’est-à-dire l’or- donnée y, du trait E, dont l'image extraordinaire coïncide dans son émergence avec l’image ordinaire du trait O. Pour effectuer ces calculs numériquement, il faut remplacera et b par . ; =; } dans les équations (4) qui prennent alors la forme suivante: < sin. 0, n sin. 0 f VS — YA TVA +) MAN) Il ne reste plus qu’à déterminer la distance 12 des deux points d'incidence desrayonssur la première surface du cristal, afin de l'ajouter à la différence z, tang.0,—z tang. 4, qui ex- primerait la valeur de l'écart OE, si la longueur CD ou e du parallélipipède de cristal était infiniment petite. Pour le faire de la manière la plus simple, nommons ,4, h, les hauteurs AT, Az des deux points d'incidence ordinaire extraordinaire, au-dessus de la base CD du cristal; et désignons par , la hauteur DI, du point d'émergence commun des deux rayons à la seconde surface DE. Cela posé, en continuant à désigner, par des indices inférieurs, les angles qui appartiennent au rayon ordinaire, le calcul des segments, dans lequel chaque rayon divise la base, donnera ces deux équations : h, tang.W',+ h,tang.W',——e ,htang., V+h,tang.,V —=—e La première se rapporte au rayon extraordinaire : on peut en éliminer tang.6',, en mettant pour cette quantité sa va- 2 (b—a) 2(n—n) P+a n} En Te telle que la donne la condition de la réflexion extraordinaire; de même, dans la seconde qui se rapporte au rayon ordinaire, on peut, d’après la loi de réflexion qui lui est propre, remplacer 9" par ,4', à cause de l'égalité des angles d'incidence et de ré- leur tang. 0', — , Où éang. 0, — DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALLISÉS. 315 flexion. Ces deux équations, ainsi gransfonmees, se changent dans les suivantes : | A Gran à Mu: 2 Rae ton ent RE ns ’ A , VER I , Or, d’après ce qu'on a vu tin DFA AS est égal à tang.0',, et de même —— égale £ang. ,0'; substituant ces valeurs , et éetane nr “as équations l’une de l'autre, elles donnent le système des deux suivantes : h,—=—,h—e tang. N n° “nee Dh eltang d.tang. 0) 4 CO Bree | n'+n ou enfin h,—=—,h—e tang. __ esin.(8—,60") 2(n'°—n°) Ho (6) k—h=- gr API DATE LE ml h, tang.N’, la première donnera À, , c’est-à-dire l’ordonnée DIT, du point commun d'émergence, quand on connaîtra l’ordonnée CI du point d'incidence du rayon ordinaire sur la première surface du cristal , ainsi que l'angle de réfraction ,0' de cerayon. Avec ces données et l'angle de réfraction 6, durayon extraordinaire, la seconde équation fera connaître ,—,h, c’est-à-dire l’inter- valle I: des deux points d'incidence; lesangles #/ et#',, éléments de ces calculs, s’obtiendront par les formules suivantes : PAL Te | ; onn' pe en, sin. ,0 — - sin. L RENE gi :0 UL ,0 tang.4 ,—= HAE . (Ang. V, + "Er qui expriment les lois suivant lesquelles s'opère la première 40. # 316 LOIS DE-LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION réfraction , tant ordinaire qu'extraordinaire , et dans lesquelles les angles ,6,4,, ,4', 6',, doivent toujours être comptés à partir de lanormaleextérieure, à la face d'incidence du cristal; quand tous ces calculs seront effectués ; l'ordonnée NE du trait E sera égale à },—,h+ 2, tang.0.. Maintenant, pour appliquer ces formules, il ne reste qu'a déduire de l'observation les données dont elles font usage. A cet effet, supposons le cristal placé sur sa colonne, comme nous l'avons représenté, fig. 25. L'observation indique im- médiatement les numéros des traits O, E, de la division ver- ticale, dont les images, vues par réflexion intérieure, coïn- cident. On connaît donc ainsi leurs hauteurs AO, AE, au-dessus de la division horizontale sur laquelle la colonne repose : on en retranche AN ou HI, hauteur du point d'in- cidence I au-dessus de la même division, et l’on a les distances NO, NE, qui sont exprimées dans nos formules par ,y et h,—,h+7,. On connaît aussi la distance commune NT ou AH, que nous avonsappelée ,z; on peut donc calculer l'angle d'incidence ordinaire ,8 par sa tangente27; et, en y joignant l'épaisseur e du cristal, ainsi que la hauteur ,2 du point d'in- cidence 1, au-dessus de sa base, deux choses qui se me- surent immédiatement, et dont les valeurs sont constantes dans toutes les expériences, on aura toutes les données com- prises dans nos formules, et l’on pourra en déduire l'écart OE des deux traits dont les images coïncident, afin de le comparer à l'observation. C'est ainsi qu'ont été obtenus les résultats renfermés dans le tableau suivant. L'épaisseur e ou CD du cristal était de 82", et la hauteur ,2 du point d’in- cidence ordinaire était de 19°",9. ‘ DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALLISES. 317 DISTANCE ÉCART des VALEUR GINCIDENCE | INCGIDENCE YALEUR® IN |yaLEur DUREE & NE du rayon du rayon |deux points dæ NE EXCÈS a division ei LE ' d'incidence SEE ordinaire extraordinaire à ou ou 1: pu ,Z NOon,y ce di) 8, surLa surface k— h+7, observée ET déduite déduite du cristal, | jouée CALCUL. observée. en k—,h calculé. observée. de l'observation. de la théorie. pr la théorie. millimètres. rm 56,945 82mm 54m 5qmm | 33°2:! 58/8 | 34°33'12/6 185 go 95 25.56.32.0 | 27. 4.18.5 95,036 120 126 32.58.10.0 | 34. 8.53.0 125,957 ; 143 150 37-42.11.0 38.56.10.7 149,940 : 240 100 106 22.37.11.5 | 23.43.49.3 105,989 135 142 29.21.27.9 | 30.30.39.5 141,913 | 162 170 34. 2. 9.7 | 35.12.46.2 169,852 210 220 41.11. 9.4 | 42.27.53. 220,110 On voit que la correction d'épaisseur due à l’écart des deux points d'incidence sur la surface antérieure du cristal, a une valeur très-sensible, qu'il aurait éte impossible de négliger dans des observations aussi exactes. J'ai observé aussi d’autres coincidences, en prenant pour limite la base inférieure du cristal, et sous des incidences aussi rapprochées que possible de la perpendiculaire : les résultats, calculés de la même manière, sont réunis dans le tableau suivant : 318 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION CE ë ÉCAR DISTANCE | vaprôR | VALEUR | INCIDENCE | INCIDENCE à T | vazeur es IN de &NE du rayon du rayon deux points de NE EXCES à La division ordinaire extraordinaire | “incidence NO où Ii De pu verticale Ai] 6, sur la surface k #e Le) - y. ” ï — A 700% ur Past, déduite déduite TES PEER LL CUT: À du cristal J observée. | observée. | de l'observation. de la théorie. calculée, observée. calculée. mm — 0,0135 — 0,0156 mm 0,4865 0,4865 0,4865 — 0,0213 2 134 2 5 0.51.18.35 | 1.54.38.67 0,4865 — 0,0440 185 4 8 1:14.19.08 | 2.17.30.47 0,4865 — 0,1016 240 10 15 2.23. 9. 4 | 3.26.31. 6 0,4865 — 0,0777 0,4365 0,0194 La première expérience a été faite, en posant la face an- térieure du cristal sur une division de demi-millimetres et de quarts de millimètre, tracée par M. Fortin sur une petite lame d'argent, et en regardant les-traits de cette division par ré- flexion intérieure sur la face CD, sous une incidence aussi approchée que possible de la perpendiculaire. J'ai vu ainsique les traits réfléchis des demies et des quarts coïncidaient parfai- tement les uns sur les autres, et j'en ai conclu que l'écart des images était, pour ce cas, précisément un demi-millimètre. C'est à-peu-prèes -# de millimètre de plus que ne donne le calcul fondé sur la seule connaissance de l'épaisseur du cristal, de la direction de son axe, et du parallélisme de ses faces opposées. L'erreur du résultat paraîtra bien petite, si l'on fait attention aux incertitudes presque inévitables des deux dernières données. Mais si l'on voulait partir de ce DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALLISÉS. 319 premier résultat, comme d’une constante une fois déter- miuée, ce qui donnerait alors, pour toutes les autres, la correction d'épaisseur 0,5 plus forte de -< de millimètre que celle qui se déduit du calcul, on voit que les erreurs des autres observations seraient, pour la plupart, fort atténuées et presque anéanties. Au reste, il est impossible, malgré tous les soins imaginables, d'éviter ces dernières incertitudes, dans des observations qui dépendent d'appareils nécessairement sujets à leurs propres erreurs. Tout ce que l'on peut desirer, c'est de varier les épreuves qu'ils permettent de faire, et de voir siles erreurs se multiplient et s'agrandissent, ou si elles oscillent dans des limites suffisamment resserrées. Quand on observe la coïncidence pour le cas du contact, en posant la face antérieure du cristal sur la division même, comme dans notre premièreexpérience, il se présente un phé- nomène digne de remarque, c’est que l'écart des traits observé dans le cristal par transmission directe, est sensiblement le même que lorsqu'on les regarde par réflexion. C’est encore une conséquence de la loi de Huyghens. En effet l'équation (2) de la page 309 nous a montré que, d’après le sens de coupe de notre cristal, les angles d'incidence et de réflexion inté- rieure 6,,0', sont tels, que la différence de leurs tangentes 7 / 1 (n'°—n°) / est une quantité constante, égale à ET 0 ; par consé- quent très-petite dans l'espèce decristal que nous considérons. Il suit de là que lorsque les angles t',,4', deviennent tres-peu différents de 90°, comme cela arrive quand l'incidence an- térieure comptée de la normale devient très-petite, la diffé- rence constante de leurs tangentes ne fait plus qu'une diffé- rence insensible entre eux; c'est-à-dire que, plus la réflexion 320 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION devient oblique, plus les angles d'incidence et de réflexion in- térieure approchent de l'égalité, comme dans la réflexion ordi- naire; et ils y arrivent même rigoureusement à la limite où la réflexion se fait presque parallèlement à la surface, parce qu’a- lors les tangentes de 6’, et’, deviennent toutes deux infinies. Or, du moment où cette égalité a lieu, si non exactement, au moins d’une maniere tres-approchée, la réflexion intérieure renvoie les rayons sans altérer sensiblement leur inclinaison sur l'axe du cristal, et sans changer sensiblement la longueur de leur trajet. Ils se trouvent ainsi, sous ce double rapport, précisément dans les mêmes conditions que les rayons trans- mis directement sous une incidence antérieure à-peu- près perpendiculaire; ils doivent donc offrir aussi le même écart, comme l'observation nous le fait voir. Une autre remarque que notre dernier tableau présente encore, c'est que les incidences des rayons dans les expé- riences qu'il renferme ayant toujours été presque perpen- diculaires sur la première face du cristal, et par conséquent presque identiques entre elles, les deux rayons ordinaire, extraordinaire, qui coincidaient à leur émergence, se croi- saient en entrant dans le cristal, sous un angle à-peu-pres constant et égal à 1°.3". 19",4, c'est-à-dire, a-peu-près le mème que dans notre premiere expérience. C’est en effet ce que l’on peut vérifier sur notre tableau même, en pre- nant les différences 0,—,6 pour les diverses observations. Mais, comme le rayon ordinaire avait un point d'incidence différent de l'ordinaire, et plus élevé d'un demi-millimètre, il s'ensuit que sa direction prolongée dans l'intérieur (/ig. 26) allait couper le prolongement de celui-ci, à une certaine profondeur [GC qui peut se calculer d’après ces données, et DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALLISÉS. 321 on 4865 $ tang. (1°.3'. 19",4 )? tenant, dans toutes les observations, le point c n’a presque fait que s'éloigner à diverses distances, par l'effet du mouve- ment donné à Ja colonne qui portait le cristal, sans que l'écart angulaire des rayons changeät : ainsi, pour avoir les positions successives de ce point et ses distances à la division verticale, il suffit d’ajouter la distance primitive 26"",407 aux distances observées de la face antérieure du cristal à cette même division, lesquelles sont marquées dans nos expériences; on aura aussi ce tableau comparatif des distances de DISTANCES Leurs ECARTS | Leurs DES TRAITS dont les images observées. successives. coïncident. successives, qui est égale à ce qui fait 26"",407. Main- cN DIFFÉRENCES DIFFÉRENCES 26,407 0,4865 85 135 53,407 1,0000 | ; 6000 +07;407 2,0000 | 1, 0000 160,407 3,0000 |, ,0000 211,407 Â,0000 1,0000 266,407 5,0000 1,0000 322,407 6,0000 On voit que l'écart des traits a augmenté proportionnel- lement à la distance du point c, à la division verticale; l'intervalle des distances d’une coïncidence x celle qui la suit, est, par une moyenne de 53"”,8 presque exactement, comme le donnerait le calcul, en partant de l'écart 0"*,4865 pour 1818, 4x 322 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION la distance 26"",407; car cette proportion donnerait 54,28, valeur différente, à-peu-pres, de + de celle qu'a four- nie lobservation. Je suis porté à croire que cette petite différence et celles du tableau précédent, viennent en grande partie, d’un petit défaut de parallélisme, entré lés deux faces antérieures et postérieures du cristal. Car, en l’éloignant à 180" de la division verticale, le trait dé cetté division, qui était à la hauteur de sa base inférieure CD, cessa d’être visible par transmission ordinaire, de sorte que je dus ob- server la coïncidence sur un autre trait plus élevé de 4°” ; et, dans la dernière observation, quand la distance IN de- vint 296"”, quatorze traits au-dessus de la base CD avaient disparu; il est donc vraisemblable que les deux faces an- térieures et postérieures formaient entre elles un très-petit angle réfringent, dont le tranchant était tourné en bas. La grande épaisseur du cristal eût rendu difficile d'amener ces deux faces à un parallélisme rigoureux; et une pareille re- cherche d’exactitude eût été sans objet, c'est pourquoi je n'ai pas cherché à l'obtenir. Les résultats précédents m'ont paru suffire pour prouver d'une manière non douteuse, que la loi dé Huyghens déja vérifiée par Malus dans le spath d'Islande, qui est un cristal à un seul axe et à double réfrac- tion répulsive , existe pareillement dans le cristal de roche, qui est aussi un cristal à un seul axe, mais à double réfrac- tion attractive. Ce qui complète l'application et la vérité de cette Loi : DANS LES CORPS RÉGULIEREMENT CRISTALLISES. 323 Vérification Fa la loi de la double réfraction dans les .cristaux à.deux axes. La plupart des expériences que j'ai faites jusqu’à-présent sur les cristaux à deux axes, ont été effectuées avec des mor- ceaux taillés ‘et disposés de manière, que les deux axes, menés par le point d'incidence , fussent également inclinés sur la face par laquelle les rayons pénétraient le cristal, et aussi également imclinés, quoique avec un autre angle, sur la face par laquelle les rayons sortaient. Cette disposition avait pour objet de simplifier l'application des formules. Dans ce cas, le plan mené par les deux axes coupe la face suivant une droite également inclinée sur leurs directions. C'est ce que montre la fig. 27, dans laquelle les droites TA, IB, représentent les deux axes; YX'X la face FH a et x! IX l'intersection dont il s’agit. Si l’on prolonge l'axe IB de l'autre côté du point d'incidence vers B”, ce prolon- gement, toujours compris dans le plan BIA, s’élevera au- tant au-dessus de la face, que l'axe TA s’abaisse au-dessous. Ainsi l'intersection X'IX' ces l'angle B'IA en deux par- ties égales. Cela posé, lorsque nous voudrons employer des coor- données rectangulaires x y z, nous prendrons la première x sur la ligne IX, la seconde y suivant une ligne I Y située aussi dans le plan de la face et perpendiculaire à IX ; enfin, la troisième 1Z, ou z, perpendiculaire à la face XIY et aux deux autres coordonnées. Lorsque nous voudrons employer des coordonnées angu- laires 8 et x analogues à des distances zénithales et à de azimuths, nous compterons les premières6 à partir de la nor- 44. a 82/4 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION male extérieure, comme nous l'avons fait toujours, et nous compterons les azimuths + dans le plan de la face, à partir de l'intersection IX; par ce moyen si a' et a" représenteñt, comme dans la pag: 229, les azimuths XI A', XIB' des deux axes, projetés l’un et l’autre sur le plan de la face, la symé- trie de leur inclinaison autour de la ligne. X' IX donnera tou- jours , a —190"—4/ QUES KE x’ et étant les distances zénithales des deux axes autour de la normale 1Z. En introduisant ces relations dans les formules générales de la page 229, elles prennent les formes suivantes : cos.u'— sin.\ sin.b', cos. (r',—a") + cos.w cos.8’, (5) ; ; / L cos. u"—— sin. \ sin.W', cos. (r',+ a) + cos.\! cos.” RUE DS k sin. x cos.u' sin u"Wsin. (m',—a') sin W, dm, 2,sin.u'sin.u" |—cos.u" sin u' sin.(r',+a') — sin. N cos.(', cos.u! sin?u" cos. (r',—a') (4) dv, A + sin. cos.W', cos.u" sin u'cos.(r'+ a') d4", 29, sinusin.u" | + cos.\ sin.0', cos.u! sin°u" .À' sin. .u" sin u" + cos.}' sin.W', cos.u à quoi il faut toujours joindre l'expression de la vitesse 2 D —=,v" + k sin.u! sin.u", (2) et les équations tirées du principe de la moindre action -— sin. 0 COs. (x',—7)—", sin. 6", + (Se) + COS. 8, À + () À EURE sin.6 sin.4', sin. Gore | À ces conditions géométriques, dépendantes de la coupe » DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALLISÉS. 325 du cristal, j'en ajouterai d’autres dépendantes du mode d'ob- servation même, et qui ont toujours eu pour objet de sim- plifier , autant qu'il était possible, des épreuves déja par elles- mêmes si compliquées. Par exemple, dans plusieurs de mes expériences, J'ai disposé le cristal de manière que la pro- jection du rayon réfracté sur une face d'incidence, ou sur une face d’émergence, fût dirigée suivant la ligne IY per- pendiculaire à IX. Par ce moyen, le rayon réfracté se trou- vait également incliné sur les deux axes du cristal, ce qui devait simplifier la résultante de leurs actions. Et il est éga- lement évident que, d’après la symétrie de cette disposition, l'incidence extérieure du rayon, ou son émergence, devait se faire dans le même plan que son incidence intérieure. C'est en effet ce qu'indiquent les formules de la page précédente; car, en y supposant r,—90, ce qui est l'énoncé de la dis- position précédente, on trouve d’abord cos.u"—cos.u', quel dv que soit 9',, par conséquent u' "= u', et par suite PEUR en vertu de cette valeur, la seconde des équations (3) donne sin. (r',—r)—0, d'où Pr r,=—=#+ ou bien r,'—180° +7, c'est-à-dire que le rayon intérieur et le rayon extérieur, qui dérivent l’un de l’autre, sont dans un même plan normal à la face du cristal. En don la dernière racine, la première des équations (3) se réduit à la forme suivante : :—0. Or, sin. 0—= 7, sin.’ pue : cos. À’, 7. se et, en introduisant les mêmes suppositions dans les autres éléments analytiques de la question , on trouve : x COS. L'— cos. uw” =, v°+ksin "ul sin. 0 —= 326 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA‘POLARISATION dv, kKcos.u' dv Si l’on met dans les deux dernières, au lieu de cos. u', sa va- leur, et qu’on substitue les résultats dans la première, on trouve, après quelques réduttions, (2 + k—Xsin°\ sin a!) sin.8', —kK sin. N cos. \' sin. a! cos.W', V2 + A —# (cos. cos.W', + sin. N sin. a’ sin.W',Ÿ formule dont les indications peuvent être immédiatement ? comparées à l'expérience. Jusqu'ici nous avons supposé le plan de réfraction ou d'incidence intérieure dirigé suivant la ligne I Y , de manière que l'azimuth r,'du rayon extraordinaire füt égal à 90°. Mais j'ai fait aussi des observations dans lesquelles la réfraction ou l'incidence intérieure de ce rayon s’opérait suivant la li- gne IX elle-même, ce qui rendait son azimuth r,' égal à zéro. Cela à eu lieu dans deux cas différents, pour chacun desquels il est nécessaire de préparer séparément les for- mules. Dans le premier, représenté fig. 28, la face réfringente contenait les deux axes du cristal; les distances zénithales x x de ces axes, comptée de la normale [Z, étaient donc l'une et l’autre des angles droits. De plus, la ligne IX fai- sait avec chacun d’eux des angles égaux à la moitié de l'inclinaison mutuelle, que je désignerai par 2a : ainsi, en comptant les azimuths à partir de cette ligne, on avait pour coordonnées angulaires des deux axes, N=—00! -a'—=a \—=90° a'—360—a ; cos. w' — cos. x! cos. 6’, + sin.\ sin. a! sin. 0, (cos. Xsin.0',—sin. sin. a! cos. v'.). (A) DANS LES CORPS RÉGULIEREMENT CRISTALLISÉS. 32" et puisque la réfraction s'opérait suivant le plan des +7, on avait, pour le rayon véfracté extraordinaire, r', égal à zéro. Eu: substituant ces éléments dans les formules générales des pag. 229 et 230, elles deviennent cos.u"—=sin.t, cos.a; u—=u; v%'—,v'+#k sin." cos.°a dr j dv, k sin.®'_ cos. P'. cos.” a ——0" »x,— DO NT à SM Re agi 180 + FLE D ; r', étant égal à 180 ++, la réfraction et l'émergence des rayons se fait dans le plan d'incidence mème. Alors la pre- mière équation (3) se réduit à la forme simple 4”, ‘sin. 0—=, sin.W, +7 et, en substituant dans le second membre les valeurs précé- dentes. elle donne, toute réduction faite, (,2°+ k sin? a) sin.W", (B) sin. 0 — re M V2 + AR sine, cos a . Le second cas dans lequel j'ai observé 7,' étant nul, est représenté /ig. 29. Les deux axes IA, IB du cristal étaient situés dans un même plan normal à la face réfringente, et qui est ici le plan des x z. De plus, ils étaient également inclinés sur cette face, de sorte que la ligne IX, suivant la- quelle elle était coupée par leur plan, formait encore avec eux des angles AIX, BIX' égaux entre eux et à la moitié du sup- plément de leur inclinaison mutuelle, que nous représen- terons, comme tout-à-l’heure, par 2 a. Enfin les observations étaient toujours dirigées de manière que le plan de réfrac- tion ou d'incidence intérieure fût le plan même des æz. 328 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION Ainsi, en comptant toujours les azimuths sur le plan des +y à partir de la ligne IX, 7’, était nul pour le rayon réfracté extraordinaire, et quant aux coordonnées des axes du cristal, on avait 0 Vie =Y db"). Nn00 2 EIRE ces valeurs et celles de +, étant substituées dans les équa- tions générales des pag. 229 et 230, elles donnent cos.u'——cos.(#',+a) cos.u"——cos. (4',—a), d'où w'—180—(0,+a) u"—180—(4,—«a), et par suite, sin. u'— sin. (8°,+4@) sin. u"=— sin. (0,—a@). Avec ces éléments, on trouve d'abord : j ksin.', cos.', = = r,—=180° +7 = ———— . d&", v, Ainsi la réfraction se fait dans le plan d'incidence. Avec ce résultat, la condition de la moindre action donne sin. 0 — v, sin. 0', + dE cos. 4’, : A (<)) or, l'expression du quarré de la vitesse devient V'=,v* + À sin. (4, + a) sin. (4',—a), ou VE FA (sin D s7ne a) Ê Substituant cette valeur dans l'équation (3), on trouve (;.w+Æcos®a)sin.W, (C) sin. 0 = LV +k sine a—ksinW, : DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALLISÉS. 329 Cette formule, et les deux précédentes (A) (B), constituent trois modes de réfraction différents, que j'ai développés et mésurés dans la topaze blanche, au moyen des expériences que je vais rapporter. ‘ La topaze.est un minéral qui se présente quelquefois dans un étatide limpidité parfaite, mais qui, d’autres fois, est co- loré en bleu ou en jaune. Dans ce dernier cas, on peut le faire passer au rouge en le chauffant fortement. Les échan- tillons régulièrement cristailisés offrent, dans un sens, un clivage facile, d'autant plus brillant et plus net, qu'ils sont plus limpides; dans les topazes parfaitement limpides, on peut ainsi, bien qu’elles soient très-dures, séparer des lames parallèles extrémement minces. Ce sens de clivage étant le seul mécaniquement possible, la forme primitive ne peut se conclure que de l'observation des faces secondaires; ce qui laisse plus de liberté, et en même temps plus d'incertitude sur sa détermination; M. Hauy l'a successivement supposée un prisme droit à base rhombe, et un octaëdre rectangulaire. Ces suppositions qui pouvaient, par des décroissements, être déduites l’une de l’autre, changent seulement le solide générateur que l’on emploie pour reproduire les formes secondaires par apposition. Quoi qu'il en soit, la facilité du clivage dans un sens unique, offre un caractère fort utile pour former, dans un morceau quelconque de topaze, des faces dont la position est toujours certainement et rigou- reusement la même, par rapport à la molécule intégrante, quelle qu’elle soit. Je nommerai, par la suite, faces de clivage celles que l’on;obtient de cette maniëre, et que j'ai toujours commencé par mettre enévidence dans tous les morceaux que j'ai employés. É 1818. 42 330 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION Ayant ainsi reconnu ce sens de coupe, je forme, aux deux extrémités opposées du cristal, deux faces pareilles , que j'ob- tiens l’une et l’autre par clivage: conservant d'abord l’une d'elles intacte, je l’'emploie comme régulateur pour faire polir l’autre, sans altérer sa direction; je me guide ensuite sur celle-ci, pour | polir la première, sans altérer son parallélisme. J'obtiens ainsi une plaque d'épaisseur égale, que je fixe au centre d'un anneau divisé, appartenant à l'appareil général de pola- risation décrit dans mon Traité de physique, et dans mes précédents mémoires. À l’aide de cet appareil, je présente perpendiculairement la plaque à un rayon polarisé, que j'analyse ensuite, au moyen d'un prisme de spath d'Islande achromatique, dont la section principale a été préalablement placée de manière que le rayon s’y réfractät tout entier or- dinairement. Cette condition cesse, en général, d’être rem- plie, lorsque la topaze est interposée; mais je la tourne sur son anneau, sans changer l’incidence , jusqu’à ce que le rayon transmis se réfracte de nouveau tout entier, en un seul sens, dans le double prisme; je trace alors sur une des faces de la plaque, une ligne droite, parallèle au plan de la polari- . sation primitive, ou, du moins, aussi exactement parallèle qu'un tracé graphique peut le donner. Cela fait, je tourne de nouveau la plaque dans son anneau, jusqu'à ce que je trouve une seconde position où la même condition de réfrac- tion simple soit encore remplie; et, quand j'y suis arrivé, je trace de nouveau, sur la face de clivage, une ligne parallele à la direction de polarisation du rayon incident. On trouve toujours deux positions de la topaze qui jouissent de cette propriété, et les deux traces qui en résultent sur sa surface de clivage, sont rectangulaires. DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALLISÉS. 33r Maintenant, si l’on tourne la topaze sur son plan jusqu'à ce que l'une de ces deux traces arrive à 45° de la direction de la polarisation primitive, et qu'on l'incline ensuite sur le rayon polarisé de manière que le plan d'incidence soit di- rigé suivant la trace même que l’on a choisie, on trouve que les deux sections ainsi déterminées produisent des effets bien différents sur le rayon transmis. Car, lorsqu'il a suivi l’une d’entre elles, il se divise toujours en deux faisceaux en arrivant au prisme cristallisé, tandis que, lorsqu'on in- cline l’autre trace, on trouve deux positions opposées, et également inclinées des deux côtés de la normale, dans les- quelles la plaque n’enlève plus au rayon sa polarisation pri- mitive; ce qui, d'après la liaison constante du pouvoir de polarisation avec celui de la réfraction double, indique que : cette derniere est nulle aussi dans ces deux sens, et qu'ainsi le passage du rayon se fait alors suivant les directions des axes du cristal. C’est en effet ce que confirme l'expérience, lors- que l’on introduit des rayons, non plus par des faces paral- lèles, mais même par des faces obliques, de manière qu'ils se réfractent suivant l'une des deux directions ainsi déter- minées. Cette épreuve achève donc, au besoin, pour con- stater la position des axes, et permet de la reconnaître exac- tement. On trouve ainsi que, dans la topaze , les deux axes sont situés dans un plan perpendiculaire à la face de clivage, et qu'ils sont tous deux également inclinés sur elle. D'où il suit que la normale, à cette face, divise en deux parties égales leur inclinaison mutuelle, qui, d’après mes expériences, se trouve être de 63°. 14" dans la topaze limpide. La section qui contient les deux axes étant reconnue par ces caractères, et sa direction tracée sur la surface de cli- 42, 332 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION vage, je taille dans le cristal deux faces latérales qui lui soient paralleles; et menant aussi deux plans normaux parallèles à l'autre trace, j'obtiens deux dernieres faces perpendicu- laires aux premières. Le cristal se trouve ainsi coupé en un parallélipipède rectangle, ayant deux de ses faces CC don- nées par le clivage, deux autres faces SS parallèles au plan des deux axes, enfin les deux dernières PP perpendiculaires aux autres. Les faces contiguës de ce parallélipipede forment alors autant de prismes rectangulaires, à travers lesquels on peut faire réfracter des rayons, en appliquant à leur seconde surface des parallélipipèdes de verre, collés par du mastic en larmes, qui force les rayons à se transmettre. La séparation éprouvée par ces rayons peut être mesurée par la méthode des coïncidences; et en la comparant aux formules théoriques établies pour la position connue des axes, par rapport aux faces réfringentes, on peut vérifier si elle y satis- fait. C’est ainsi que j'ai opéré dans les diverses épreuves dont je vais rendre compte. La disposition générale de ces expériences est représentée fig. 30 et 23; elle est la mème que celle que j'ai décrite plus haut pour le cristal de roche : les rayons incidents ET, OT, entrent par-dessous la topaze, se réfractent dans le prisme rectangulaire C, et en sortent ensemble par la seconde surface. Après quoi, sans se désunir, ils traversent le parallélipipède de crownglass collé à cette surface; de là ils ressortent dans l'air et arrivent ensemble à l'œil de l'observateur. Il ne reste plus qu’à fixer, pour chaque cas, la direction des faces d’émer- gence et d'incidence par rapport aux axes du cristal. Le premier système d'expériences que j'ai faites se rapporte à la fig. 30. Les rayons entraient par une face PI, perpendicu- EEE si nt - de ! BANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALLISÉS: 333 laires aux faces de clivage et au plan des deux axes; ils sor- taient par une face CS parallèle à ce plan : cela posé, soit (fig. 31) PPPP la face d'incidence, ét I le point par lequel pénètre le rayon ET, qui doit être réfracté éxtraordinairement: CCCC est la face donnée par le clivage; SSSS lx face paral- lèle au plan des deux axes. La face d'incidence P P P P est per- pendiculaire à l’une et à l’autre. Conséquemment, si, par le point d'incidence I, on conçoit un plan parallele à la faceSS;, ce plan coupera la face d'incidence suivant une ligne X'IX normale à la face de clivage CC. De plus, il contiendra les deux axes IA, 1B de la topaze, lesquels seront également inclinés sur la ligne X’IX. Enfin le plan d'incidence EIZ sera perpendiculaire à cette ligne. Ce cas de réfraction est un de ceux que comprend notre première formule, que nous avons désignée par (A). La ligne IX, également inclinée aux deux. axes, est celle à partir de laquelle on compte dans la face d'incidence les azimuths +7! des rayons incidents et ré- fractés. Le premier est égal à 270°, comme notre formule le suppose; le second sera donc égal à 90, c'est-à-dire que la réfraction devra s’opérer daus le prolongement du plan d’in- cidence sans déviation latérale. L’azimuth a’ de l'axe TA est égal à zéro; celui de l'autre axe IB est égal à 180°. Enfin la distance zénithale x" de chacun deces axes à partir de la nor- male extérieure 12, est égale à 90° + a, en désignant par a l'angle AIX ou BIX'; dont le double 24 exprime l'inclinaison mutuelle AIB' des deux axes, que je compte dans ce sens, parce que c'est celui où elle offre un angle aigu: Il ne reste donc qu'à introduire ces valeurs dans'la formule générale (A). Mais, comme nous aurons besoïiti par la suite de distinguer l'angle d'incidence du rayon EI d'avec celui du rayon Olqui 334 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION subit la réfraction ordinaire, je marquerai le premier par un indice inférieur placé à sa droite, et le second par un indice inférieur placé à sa gauche, comme nous l'avons fait précé- demment pour le cristal de roche. Nous aurons ainsi dans le cas actuel (;v?+ X) sén., LV, 2° +4 EÆsin:a cos°W; : Nous avons vu que le quarré de la vitesse extraordinaire est représenté en général par 2° + ksin.u'sin.u", ,v étant la vitesse ordinaire, et w' u' les angles formés par chacun des deux axes avec le rayon réfracté extraordinairement. Il résulte de cette expression que les deux limites de la vi- tesse extraordinaire seront ,vetl/»°+## : la premiére a lieu quand l'un des angles w'u" est nul, ou égal à 18o°, c'est-a-dire quand le rayon réfracté suit un des axes du cristal; la seconde limite s'obtient quand les angles &' w” sont tous deux droits, c'est-à-dire quand le rayon réfracté est perpendiculaire au plan qui contient les deux axes. D’après cela, nous pouvons appliquer ici la notation que nous avons employée pour désigner les deux vitesses ex- trèmes, et qui consiste à représenter l'ordinaire par », l'extraordinaire par n'; alors Æ sera n'°°—n°; et l'expression précédente de sën.6,, deviendra Sun UE n'?sin.0!, (1) SO a LV n'— (nn) sin" a cos, Retournons maintenant à la /g. 31. Après sa réfraction dans la premiere face du prisme, le rayon va rencontrer la seconde, qui forme avec elle un angle droit. Conformément à notre notation ordinaire, appelous 6", l'angle d'incidence DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALLISÉS . 335 intérieur du rayon sur cette surface, et 4, son angle d’émér- gence, l’un et l’autre étant toujours compté à partir de la normale extérieure à cette seconde face. La rectangularité des deux faces du prisme donnera évidemment du ar0 6}; d’où sin: 0’, ——cos. 0", . cos. 0',—— sin. 4’. (2) Soit maintenant I, le point d'incidence intérieur du rayon sur la face d'émergenceSS. D’après la coupe de notre parallé- lipipède, cette face est perpendiculaire à la face de clivage CC. Si donc on mène dans son plan, par le point d’inci- dence, une ligne droite X’, I, X,, parallèle à leur intersection commune, cette droite sera perpendiculaire à la face du cli- vage, et aussi perpendiculaire au plan d'incidence intérieur IT, Z, , dans lequel se trouve le rayon réfracté. Mais ,en outre, la, face d'émergence SS est parallèle au plan des deux axes du cristal. Conséquemment si, par le point d'incidence, on mène dans cette face deux droites, I, A,, L.B,, égale- ment inclinées sur la ligne X’, I, X,, et formant chacune un angle a avec elle, ce seront les’ deux axes du cristal qui partent du point d'émergence l'. La marche du rayon émer- gent se trouvera donc encore comprise dans notre formule générale (A); ia ligneI, X,, également inclinée aux deux axes, sera celle à partir de laquelle se comptent les azimuths x +! des rayons incidents et réfractés. Le second de ces azimuths sera égal à 90°, comme la formule le suppose; par consé- quent, le second sera 270°. De plus, les deux axes étant contenus dans le plan de la face, leurs distances zénithales x \'comptées à partir de la normale extérieure, seront toutes deux de 90° ; et enfin l’azimuth a de l'axe LA sera égal à la 336 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION moitié de l'inclinaison mutuelle À, I, B', des deux axes, c’est- à-dire à a, d’après notre notation précédente. En substituant ces valeurs dans notre formule, et marquant les angles d'in- cidence et d'émergence par les indices caractéristiques de la seconde face, elle donne 5 Î DV'+k—K sin a | sin.N', LV 2° + k—k sine a sin° 0", f SURA0S— ou, en mettant au lieu de ,» et Æ, leurs valeurs » et nn, . {n'— (2'°—n°) sin a | sin.0', CHR EE — (3) nr (n n°),sine a sin 0", Ainsi, pour trouver la relation qui lie le premier angle d'incidence 0, avec l'angle d’émergence 0,, il faut éliminer g' et #', entre les trois équations (1), (2), (3). La chose est d'abord bien facile pour #,, puisque sa va- leur est immédiatement donnée par l'équation (2); en la substituant dans (3), il vient ! jn'®— (n°72?) sin? a |} cos.0", SR, 0, 5 | (3) Wn'°—\{(n' 7) sine a cos, de sorte qu'il ne reste plus que l’angle #', à éliminer. Pour cela, il suffit de remarquer que le radical est maintenant le même dans les équations (1) et (3) : car alors, en les divisant l’une par l'autre, on en tire Pe DEPOT CREUSE) in? in. À sont {re (n'?=n°)sin. ai) sin. b,. 8-4 EE sèn. 0, Maintenant si, d'après cette expression, lon forme celles de sin W,, cos. 0',, et qu'on les substitue dans l'équation (1), à DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALLISÉS. 337 après en avoir élevé au quarré tous les membres, on trouve, après toutes réductions faites , 1 NES (n—(n°-n:)sinta) sin." 8, PS — n° (a°®—(n°—n)sinta) Il reste maintenant à exprimer que l'émergence 6, est aussi commune au rayon ordinaire, dont l'incidence est 6. Pour cela, il n'y a qu'à considérer que la relation obtenue pour une des deux réfractions s’appliquera également à l’autre, pourvu qu'on ÿ modifie les éléments par lesquels leurs lois différent. Cela se fera en rendant d’abord l'angle a nul, ce qui change le cristal en un cristal à un seul axe; puis en y supposant »/—n, ce qui transforme la réfraction extraordi- naire en ordinaire. Ces changements faits, on peut substi- tuer l'incidence ordinaire 8 à 6,, en conservant la même valeur de 6,. Alors on trouve sin." 0, + sin 0—n"; ce qui est en effet la relation entre les angles d'incidence et d’émergence ordinaires dans un prisme dont l'angle est droit, comme on le peut vérifier par les équations de la page 247. Chassant donc 6, de l'équation (4), au moyen de cette rela- tion, il reste ‘ ! : 2 | (a — (n°7) sin a) sin 0, —n°sin.® ,6=n"° (n°—n") cos"a, (5) qui exprime la relation demandée. Au moyen de cette relation, si l'on se donne l'incidence ,0 1 du rayon ordinaire qui concourt à une coïncidence, on pourra calculer l'incidence #, du rayon extraordinaire qui 1818. - 43 338 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION coïncide avec lui dans son émergence; mais, pour cela, il faut connaître les valeurs particulières des constantes 7, n! et a, dans le cristal que l’on considère. La constante » est le rapport de réfraction ordinaire. On peut la déterminer par des observations de déviation ab- solue faites sur le rayon ordinaire, suivant des sens de coupes quelconques. Les deux autres constantes 7! et a, ex- primant des éléments de la double réfraction , exigent des observations faites sur le rayon extraordinaire, suivant des directions connues relativement aux axes du cristal. Si l'on suppose 7 obtenue préalablement par des mesures directes, l'équation (5) donnera :entre ces deux éléments une relation à laquelle chaque coïncidence devra satisfaire ; et ainsi deux coïncidences observées sous des inclinaisons diverses, suffi- raient pour les déterminer. Mais l'exactitude du résultat deviendra beaucoup plus grande, si, à la diversité des inclinaisons , qu'on ne peut communément faire varier que dans des limites assez étroi- tes, on substitue celle des coupes mêmes, en combinant en- semble des coïncidences observées suivant différents sens, pour chacun desquels on aura déterminé la relation analy- tique donnée par la théorie. Par exemple, dans le cas du parallélipipede dont nous avons fait tout-à-l'heure usage (Jig. 31) : il se présente un second genre d'observation qui convient parfaitement à cette idée; c’est de faire entrer les rayons par la face de clivage CCCC, suivant une direction perpendiculaire au plan des deux axes, et de les faire sortir, comme tout-à-l'heure, par la face SSSS parallèle à ce plan. C'est ce que représente la fig. 32. Dans cette dis- position, toute la marche du rayon s'opère encore suivant DANS LES CORPS RÉGULIEREMENT CRISTALLISÉS. 339 un seul et même plan parallèle à la face PPPP , par consé- . quent perpendiculaire à celui de la première réfraction que nous avons tout-à-l'heure calculée, puisque celui-ci était pa- rallèle à la face de clivage. Or, si l’on répète sur les points d'incidence et d'émergence II,, de la fig. 32, les mêmes con- structions que nous avons alors faites, c’est-a-dire si l'on - trace sur chaque face les lignes X;,IX, XI, X,, perpendi- culaires au rayon incident ou réfracté , et qu'on mène aussi les lignes TA, IB, LA,, LB,, suivant la direction des deux axes du cristal pour chacune d'elles, on verra aisément que * ce second mode de réfraction est absolument le même que le premier, avec cette seule différence que les deux directrices X'IX, X,LX,, y sont situées à angle droit avec les pre- mières, d'où il suit que les angles « qu'elles forment avec chacun des deux axes, sont les compléments de ce qu'ils étaient d’abord. La relation définitive des angles d'incidence des rayons qui émergent ensemble, sera donc la même aussi, à cette seule inversion près; c’est-à-dire qu’en les désignant par les lettres ,+,+,, pour les distinguer des deux premiers, il suffira ensuite de changer, dans la formule (5), 24 en 180°— 24; ou a en 90—a; après quoi l’on aura ; (r— (R°— n°) cos) sin, —n°sin,r—=n°(n—n\sin "a; (6) ceci donne donc une nouvelle relation entre «a et n/, dont les résultats pourront être combinés avec l'équation (5), lors- que la constante 7 de la réfraction ordinaire aura été préa- lablement déterminée, et que l’on se sera donné ,7 et r,, d’après une observation de coïncidence. La résolution rigoureuse des équations (5) et (6) serait assez compliquée; mais elle n’est point nécessaire : car on peut, 43. 340 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION à l’aide d'une approximation fort simple, en tirer les valeurs de a et de »! avec toute l’exactitude que les observations les plus précises peuvent exiger. Pour cela, je rassemble les termes affectés seulement de 0,0,, ;r,r,, qui doivent être considérés comme connus; et, mettant BR le sinus et le cosinus de l'angle a en évi- dence , je donne à nos deux équations cette forme, sin. (8, + ,8) sin. (0,0) — LE) sine» asin/0,—=(n°—n)cos a sène. (5, + 7) sûr. (x, + 7) — Le) cos a sin-r,=(n°—n)sin"a , qui peut se changer dans la suivante sin. (0, + ,6)5272.(8,—,0) + CZ) (n®-n')sin/a=n'zn, sin. (r, + ,r)sèn.(r,=,r) — (ie Fe :) (n'°-n°)sin a = es Gen"). Maintenant, pour une premiere approximation, j'emploie ñ au lieu de 7, pour calculer les termes où 7° entre comme diviseur. Cela revient évidemment à négliger d’abord le quarré de 7'°— n° qui, en effet, est une extrêmement petite fraction. Alors les deux équations ne contiennent plus que les deux inconnues n'°—n, (n°—n) sin’a, et chacune d'elles au premier degré seulement; de sorte que l'élimination se fait avec la plus grande facilité. La valeur de 7'?—n* étant ainsi connue, si on y ajoute n°, on obtient »'*; alors on peut em- ployer cette valeur comme plus approchée que » pour rem- placer 7°? dans les dénominateurs des équations (5) et (6). Après quoi on procède de nouveau à l'élimination entre elles. Les nouvelles valeurs de n»°°—n° et (n'°—n*°) sin a, obte- DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALLISÉS. 341 nues parcette seconde approximation, différentextrèmement peu des premières, mais pourtant sont plus exactes. Une troi- sième approximation n’y apporterait plus que des change- ments si faibles, qu'ils seraient insensibles aux observations les plus précises, et ainsi il serait inutile d'y procéder. Mais, pour affaiblir autant qu'il est possible les erreurs inévitables des observations , il convient de ne pas employer seulement une coïncidence de chaque espèce. Il faut plutôt former chacune des équations (5), (6), par la moyenne de plu- sieurs entre lesquelles on éliminera. J'ai même ajouté à cette précaution celle de répéter chaque système d'observation par les deux couples de faces opposées qui peuvent y servir dans le parallélipipède de topaze ; afin de compenser autant qu'il était possible les erreurs que l'artiste avait pu commettre sur leur parfaite perpendicularité, et celle que j'aurais pu moi- même faire sur le sens des coupes que je lui indiquais. Seu- lement, je n'ai pas cru devoir prendre cette précaution pour les observations dans lesquelles le rayon passe par les faces de clivage, dont la direction, par rapport aux axes du cristal, est toujours certaine. Mon intention n’est pas de présenter ce système d'obser- vation et de coupe comme le seul ; ou même comme le plus commode que l’on puisse employer pour déterminer les élé- ments de la double réfraction dans un cristal à deux axes. On verra bientôt, au contraire, qu'en se guidant sur a loi générale des vitesses qui existe dans ces cristaux, on peut y trouver des sens de coupes qui donnent immédiatement , soit l'angle des axes, soit la différence des deux vitesses. Mais le mode d'observation indiqué ici , n’exigeant point d’in- cidence déterminée, m'a paru plus général, et conséquem- 342 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION ment plus convenable pour montrer la réalité de la loi. Parle même motif, je n'ai pas voulu déterminer la position des axes par des expériences de polarisation; il m'a paru plus conve- nable que tous les éléments de l’action du cristal fussent dé- duits des seules mesures de déviation par la loi des vitesses. D'ailleurs, les causes d'incertitude que j'ai indiquées pag. 197, rendraient ici la détermination des axes-par la polarisation trop peu sûre et trop peu précise pour qu'on düt l’introduire dans nos calculs. La premiere application que j'ai faite de cette méthode a eu lieu sur ‘une topaze d’un blanc légèrement Éleuâtre; ayant un clivage assez nèt, mais pourtant un peu fendillée dans son intérieur. Après y avoir taillé divers systèmes de faces rect- angulairés dans les directions ci-dessus indiquées , j'y ai déterminé d’abord la constante 7 de la réfraction ordinaire, par des mesures de déviation absolues, comme je l'ai ex- pliqué pour le cristal de roche, pag. 258; et, en me bornant à la moyenne de trois expériences qui différaient peu entre elles , j'ai trouvé 7—1,63045; ce qui donne »°—2,65837. J'ai ensuite choisi parmi les faces celle qui était perpen- diculaire aux faces de clivage, et qui contenait le plan des deux axes ; c'est celle que nous avons généralement désignée par SSSS. J'y ai luté le parallélipipède de crown, qui devait déterminer la lumière à traverser les angles réfringents: du cristal; et, fixant le tout sur mon appareil à divisions rectan- gulaires, j'ai observé plusieurs coïncidences dont les élé- ments sont expôsés dans les tableaux suivants. / € SÉRIE (fig. 30). Les rayons entrent par une face PI perpendiculaire aux faces de clivage et au plan qui contient DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALLISÉS. 343 les deux axes ; leur direction d'incidence est perpendiculaire à ce plan : ils sortent par la face T'S qui contient les deux axes. Après avoir observé quelques coïncidences en prenant PI pour face d'incidence, j'ai pris la face P'P', qui était cen- sée lui être parallele, dans la vue de détruire, par cette alter- native, les petites erreurs qui pouvaient éxister sur le sens de coupe de ces deux faces, erreurs qui semblaient décelées par une déviation latérale très-petite, mais pourtant sensible. Lé COORDONNÉES COORDONNÉES INCIDENCGE INCIDENCE DU POINT DB DÉPART DU POINT DE DÉPART INDICATION E du rayon durayon du rayon ordinaire du Tr: iuai sl de y rayon extraordiuaire ordinaire extraordinaire observées. observées. V LA FACE OIH ou O'IH|EIHouEIH conclue conclue Div. vertic. 21340: 60° 45! 51"| 62°25' 5" 230 48.59.27 | 50.26.25 254 57.47.32 | 59.26.10 373 53.36. o | 55. 7.18 504 54.50 26 | 56.23.20 45.30.30 | 46.54.59 | Div. horiz. 58.49.48 | 60.33.17 46.47. o | 48.15.59 49.56.45 | 51.29.57 57. 3.57 | 58.43.43 52:14.13 | 53.46.52 53.47.50 | 55.21.59 44.17.37 | 45.45.40 Div. vertic. 124 Div. horiz. 344 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION II° Série ( fig. 33). Les rayons entrent par une face de clivage CC, perpendiculairement au plan qui contient les deux axes, et ils sortent par la face l'S, parallele à ce plan, comme dans la série précédente. GOORDONNÉES INDIGATION | y POINT DE DÉPART de du rayon ordinaire observées. observées. LA FACE COORDONNÉES DU POINT DE DÉPART du rayon extraordinaire INC ordinaire du rayon IDENCE INCIDENCE du rayon extraordinaire OIHouO'IH | ElHouEIH | CON AA SES C0 qe nmele conclue conclue d'incidence. IN on HO': | NO ou IH: | IN ou HE': | NE ou IH: 17 7 it Tr CC. 187 | 165m 48°34 35" | 4926! 57" |Div.verties 198 155 51.56.43 | 52.51.11 405 285 54.52. o | 55.49.23 608 360 59.22.12 | 60.25.40 357 390 42.28.14 | 43.15.35 | Div.horiz! Maintenant, pour former le système des équations de condition (5) et (6), qui devaient déterminer la valeur de n°—n et l'angle a égal à la demi-inclinaison des axes, j'ai employé les observations 3, 4, 5, 10,11, 12, de la première série, et les observations 2, 3, 4, de la seconde. J'ai formé i résultait de chacune de ces ob- l'équation de condition servations , et, prenant la moyenne de celles qui étaient re- latives à chaque série, j'ai obtenu les deux suivantes : ['eSÉriE. 0,02562738 —0, 6944095 =") II SÉRIE. 0,01565080 —0,6920750 0) en) ri sin a—(n"—n")cos"a, cos a—(n *— n°) sin° a jé PR n—2,60837; n'°—n—0,032827045; (n'°—n')sin. DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALLISÉS. 345 et, par deux LRO successives dont j'ai expliqué plus haut la marche, j'en ai déduit les valeurs suivantes, auxquelles je joins celles de n° données plus haut : d'où l’on tire n°—2,691197; (a°—n°) cos.’ a—0,0231233 ; a—32°.56!.7 La valeur de a étant doublée, donne 65°.52!. 14" pour l'incli- naïison mutuelle des deux axes de notre topaze. M. Brewster, en partant de l'observation des anneaux que la polarisation développe autour de ces axes, indique pour leur inclinaison 65°. Mais des expériences que je rapporterai plus loin, mon- trent que les topazes jaunes du Brésil ont une inclinaison d’axes fort différente de ces valeurs; et d'après cela il se pourrait que cette inclinaison ne fût pas non plus tout-à-fait la même dans celles qui, ainsi que la précédente, offrent des traces sensibles de coloration. La valeur de #'°—n° étant positive, »' est plus grand que », et la vitesse extraordinaire ?, se trouve constamment plus grande que la vitesse ordinaire ,v. De là résulte cette conséquente : si l'on coupe dans le cristal une face perpen- diculaire à la ligne qui divise l'angle des axes en deux parties égales ; et si, ayant pris sur cette face un azimuth d'incidence perpendiculaire au plan des deux axes, on introduit sui- vant cette direction dans le cristal un rayon naturel qui se partage en deux faisceaux par l'effet de la double réfraction, le faisceau extraordinaire se rapprochera toujours du plan des deux axes plus que le faisceau ordinaire, comme sl était attiré vers ce plan. L'effet contraire aurait lieu si n°*—n° 1818. 44 —0,00970372, " 346 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION était une quantité négative ; alors le faisceau extraordinaire s'écarterait du plan des deux axes plus que le faisceau ordi- naire, de,même que s’il en était repoussé, On peut aisément déduire ces résultats de l'équation générale, pag. 326, en la particularisant pour le sens de coupe que je viens de spéci- fier. Lorsque l'inclinaison mutuelle des deux axes devient nulle, la face d'incidence devient perpendiculaire à l'axe unique, et le rapprochement ou l'éloignement du rayon extraordinaire se fait autour de la normale à cette face, tou- jours sous la même condition de la vitesse, c’est-à-dire selon que »!.est plus grand ou plus, petit que 7. C’est le carac- tère que j'ai depuis long-temps indiqué dans les cristaux à un seul axe, et qui me les a fait diviser en deux classes, sous les dénominations de cristaux à double réfraction at- tractive, et cristaux à double réfraction répulsive: On voit, d’après ce qui précède, que cette distinction peut être égale- ment appliquée aux cristaux à deux axes, en généralisant son énoncé comme nous venons de le faire; et non-seule- ment elle sera utile, comme établissant entre eux une diffé- rence physique fondée sur leur nature; mais encore on pourra, dans un grand nombre de circonstances, s'en servir avec avantage pour prévoir d’une manière générale la po- sition relative des deux faisceaux réfractés qui dérivent d’un même, rayon incident. Il me reste maintenant à montrer jusqu'a quel point les écarts observés entre les faisceaux qui émergent ensemble, sont conformes à la théorie. Pour cela, j'ai adopté les valeurs de 7, n' et a, que nous avons tout-à-l’heure déterminées; et, prenant pour données les angles ,6, ,r, qui expriment les incidences observées du rayon ordinaire dans les expériences, j'ai calculé, par les formules (5) et (6), les valeurs, de 4, -et } 4 Œuou l DANS LES CORPS RÉGULIEREMENT CRISTALLISÉS. 343 de r,, c’est-à-dire les incidences du rayon extraordinaire . . ’ ñ , Lu r . } r qui devaient y répondre d'après la théorie. Avec ces ré- sultats et la distance connue du point d'incidence à la divi- sion soit verticale, soit horizontale, sur laquelle chaque coïncidence avait été observée , j'ai obtenu la valeur de l'ordonnée y, ou z,, qui devait se mesurer sur cette division: car , dans le cas dés coïncidences verticales, où z, était donné, y, était égal à z, éang. 0,; et dans les horizontales, Be = Jrpuu Lan leurs étant retranchées des ordonnées ,y ou ,2 appartenantes au point de départ du rayon ordinaire, m'ont fait connaître l'écartOE, ou O'E'assigné à chaquecoïncidence par la théorie; et je l’aicomparé à l'écart observé. Ceci,comme on le voit, sup- pose que le point d'incidence I était commun aux deux rayons incidents OT, EI, ou O'T, E'T; ou, du moins, que s’il y a deux points d'incidence distincts, leur écart est si petit, qu'il peut être négligé comme insensible. J'ai toujours eu soin qu'il en füt ainsi : car j'ai toujours observé le plus près possible du bord tranchant du prisme cristallisé. Au reste, si l’on était forcé de faire autrement, il suffirait de mesurer l’épais- seur du cristal à l'endroit où les rayons le traversent, et l'on en déduirait la correction que l'intervalle des points d’inci- dence exige, de même que nous l'avons fait pour les cristaux où l’on connaissait y,, la valeur de z, était Ces va- ns à un seul axe. JF SÉRIE (ftp. 30). Les rayons entrent par une face PI où P'P', perpendiculaire aux bases naturelles et au plan des deax axes; ils sortent par une face L'S parallele à ce plan; où à rapporté alternativement les résultats des observations faites sur l’une et l’autre face d'incidence, afin de compenser 44. 348 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION ainsi les erreurs qui pouvaient provenir des défauts d'exac- titude de leur direction, par rapport aux axes du cristal. ÉCART ÉCART EXCES EXCÈS MOYEN DÉSIGNATION| INCIDENCE Des poznTSs | pes rornTs | Des RÉSULTATS DES COUPLES FF DU RAYON ORDINAIRE de départ de départ partiels correspondants LA FACE ES dESFAYOES des rayons calculés calculés a OEouO'E':| OE ou O'E/: pour pour d'incidence. £ observé. calculé, chaque face. les deux faces. 60° 45'51" PSP; 58.49.48 PP 48.59.2 P£P! 46.47. mm + 0,04 |Div.vertic. = —— mr ” 4 Le =— 0,12 P'P' 49.56.45 PP 57.47.32 — 0,04 P'P' 57: 3.57 PP 53.36. o +- 0,00 P'P!’ 52.14.13 $ | PP 54.50.26 +o,ir p'Pp' 53.47.50 ; PP 45.30.30 — 0,07 |Div.horiz. Pp'P’ 44.17.37 | Somme des écarts observés. 170 Somme des erreurs. ...— 0,08 On voit que les erreurs des résultats partiels sont presque uniquement dues à un petit défaut d'exactitude dans le sens suivant lequel on a taillé les faces : car elles deviennent in- sensibles dans les résultats accouplés où elles sont détruites DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALLISÉS. 349 par le retournement. Alors la théorie se trouve parfaitement satisfaite. | IIS Sére (fig. 33). Les rayons entrent par une face de clivage CT, perpendiculairement au plan qui contient les deux axes : ils sortent par la face L'S parallèle à ce plan P 3 comme dans la série précédente. DÉSIGNATION| INCIDENCE ÉCART ÉCART EXCÈS des points | des points de départ de départ 3 des rayons des rayons “erté lOEonO'E':|OEouO'E"': d'incidence. T observé. calculé. calculé, du rayon de des résultats ordinaire LA FACE partiels 48° 34! 35" pm — O:14 Div.vertic. 51.56.43 5 à — 0,05 54.52. o 10 — 0,02 59.22.12 15 + 0,17 42.28.14 10 + 0,00 | Div. horiz. Somme des écarts observés. 45 des erreurs.— 0,04 On voit qu'ici les erreurs des résultats partiels sont beau- coup moindres que dans la série précédente, et qu’elles sont indifféremment positives ou négatives, de manière à se com- penser mutuellement dans leur ensemble. Cela tient sans sans doute à ce qu'ici la direction d'une des deux faces , et de celle sur laquelle une petite inexactitude eût été la plus influente, était donnée par un clivage naturel. La théorie se trouve donc encore parfaitement satisfaite dans ce second 350 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION sens de réfraction, et l'on peut y remarquer avec évidence l'influence de la séparation des deux axes et de leur incli- naison mutuelle : car ce sont ces circonstances qui rendent les écarts des deux faisceaux observés dans cette seconde série, différents de ceux que nous avons obtenus dans la premiere ; au lieu qu'ils auraient été de même étendue si l'angle a eût été de 45°, parce que son sinus se fût alors trouvé égal à son cosinus. Quoique les expériences précédentes fussent peut-être assez concordantes avec la loi des sinus pour être regardées comme en donnant une confirmation suffisante, cependant, comme j'avais précédemment trouvé des variations très-sensibles entre les éléments de la double réfraction dans des bérils qui ne différaient, au moins à l'extérieur, que par leur colora- tion, j'ai désiré reprendre les mêmes expériences avec un échantillon de topaze qui füt exempt même de cette légère teinte bleuâtre qui, ainsi que je lai dit tout-à-l'heure, existait dans celui-ci. Pour cela, j'ai eu recours à la généreuse inter- vention de M. le comte de Bournon, de qui le zèle sans bornes pour l'avancement de la minéralogie, joint à une inépuisable complaisance envers ceux qui la cultivent, accomplissent si dignement la destination que la collection royale qu'il dirige reçoit des intentions d’un prince éclairé. M. le comte de Bour- non, accordant à mes recherches un intérêt qui me pénètre de reconnaisance, m'a donné les moyens de les compléter en me remettant un tres-beau morceau d’une topaze blanche, extrêmement limpide et pure, sur lequel j'ai pu répéter les mêmes observations. Je vais rapporter ici les résultats de cette nouvelle épreuve dans la même forme que j'ai précé- demment employée. Î| DÉSIGNATION de LA FACE d'inciden PP DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALLISÉS. 357 °° SÉRIE ( fig. 30). Les rayons entrent par une face PI, pa- rallèle aux bases naturelles et au plan qui contient les deux axes. Leur direction d'incidence est perpendiculaire à ce plan. Ils sortent par une face L'S qui lui est parallele. On n’a ob- servé les incidences que sur la seule face PP ; de sorte que les erreurs qui peuvent provenir d'un petit défaut de direction dans la coupe, ne sont point compensées. COORDONNÉES COORDONNÉES INCIDENCE | INGIDENCE DU POINT DE DÉPART| DU POINT DE DÉPART du rayon | du rayon du rayon ordinaire du rayon extraordinaire ordinaire extraordinaire observées. observées. OTHouO'IH:|ElHouE'IH: A, IN où HO’ | NO ou 1H | IN ou HE’| NE ou iH conclue conclue cel (A 12 17 © z 127,5 80,6 127,5 59°20' 4" |Div.vertic. 225,5 160,6 225,5 56. 5.16 225,5 200,6 225,5 49.47.40 255,5 160,6 255, 59.27.38 255,5 215,6 255,5 51.18.46 255,5 245,6 255,5 47.33.50 371,5 185,6 371,5 65.20. 4 371,5 190,6 371,5 64.42. 3 371,5 270,6 371,5 55.28.16 497,5 295,6 497,5 62.48.26 497,5 355,6 497, 55.59.5r 504,5 295,6 5o4, 61.21.11 Be | d3n 6 Su4, 57.58.16 | 392,0 390,6 412,0 46.31.39 |Div. horiz. INDICATION 352 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION II° Série (fig. 33). Les rayons entrent par une face de clivage CT; leur direction d'incidence est perpendiculaire au plan qui contient les deux axes. Ils sortent par la face L'S parallèle à ce plan. COORDONNÉES COORDONNÉES DU POINT DE DÉPART DU POINTDE DÉPART de du rayon ordinaire du rayon extraordinaire observée. observées. LA FACE d'incidence, 44.32.57 Pour ne rien laisser à l'arbitraire dans la détermination des éléments de cette topaze, qui, par sa pureté et par le soin qu'on avait mis dans la coupe de ses faces, me paraissait de- Div. horiz. INCIDENCE | INCIDENCE du rayon du rayon ordinaire extraordinaire OIHonO'IH:|EIHouE IH: conclue calculée 40" | 64° 8’ 6"|Div:vertic. 5 .bo. 60.52.39 .b2. 56.50. 8 POS 51.24.27 7 rie 49.45.36 ITS 48.57.94 20. 43.11.20 .47. 64.58.17 DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALLISÉS. 353 - voir fournir des observations très-exactes, j'ai mesuré aussi directement sa réfraction ordinaire avec mon appareil même, comme je l'ai expliqué pour le cristal de roche, pag. 258. La topaze était posée sur la colonne, comme on le voit fig. 34. L'angle réfringent 1CI', préalablement mesuré par la ré- flexion de la lumière, avait été trouvé de 4b°.47'. L'épaisseur de la base BB' était de 8°"; et comme l'angle B était droit, il en résulte que la distance BC de cet angle au point C où se rencontrent les deux faces du prisme, était 7"”,784. L'in- cidence I des rayons sur la face antérieure, était limitée par une bande de papier appliquée sur cette surface, à une hau- teur BI, laquelle était précisément de 10°"; et les distances IN, 1H, de ce point aux deux divisions verticales et horizon- tales de l'appareil, se mesuraient immédiatement. Cela fait, plaçant l'œil en V derrière le prisme, presque sur le prolon- gement de sa face latérale IB B'T', de manière à voir du même œil l’image directe et l’image réfractée de la division verticale AY, j'observais à quel trait D de cette division répondait par vision directe le rayon émergent I'V émané d'un trait R connu; ou, pour parler plus exactement, je choisissais parmi les traits R, vus ainsi à travers le prisme, celui qui me parais- sait répondre exactement à un trait D vu par vision directe ; et même, comme il y avait toujours plusieurs de ces coïinei- dences possibles, je tenais note de chacune d’elles. Alors la hauteur HI ou AN du point d'incidence étant retranchée de AR, on a la hauteur NR du point de départ du rayon inci- dent, au-dessus de l'horizontale IN, hauteur que je désignerai par y; et, en la divisant par IN ou z, le rapport donne la tangente de l'angle d'incidence RIN, que je désignerai 1818. 45 354 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION par 8. Maintenant, pour obtenir la déviation du rayon réfracté, en ayant égard à l'épaisseur du prisme, je calcule d’abord la marche de ce rayon , en prenant pour index de réfraction une valeur seulement approchée, par exemple, n— 1,63, qui convenait à notre premiere topaze. Cela donne la position du point d'émergence l', relativement à la première surface, c'est- àa-dire sa distance l'£ à cette surface, et sa hauteur :B au- dessus de la base BB’. La première quantité ajoutée a IN ouz, donne la distance du point d’'émergence I! à la division ver- ticale ou z,; et la seconde, ajoutée à BH, donne sa hauteur Hi ou AN', au-dessus de la division horizontale; d’où, re- tranchant la valeur de AD, qui est observée, on a la distance N'D ou y,. Alors on peut calculer l'angle N'l'D, dépression du rayon émergent, au moyen de sa tangente 7 . Mainte- eE nant si, par le point I, on concoit une droite I D’ parallèle à l'D, cette droite sera évidemment la direction qu'aurait suivie le rayon incident RI, si le tranchant C du prisme eût été placé en I même. Ainsi la dépression NID' ou N'I'D' étant ajoutée à l'angle d'incidence 8, ou en étant retranchée, selon son signe, donnera la déviation RID', ou A, telle qu'on l'aurait observée si le prisme eût été infiniment mince. Cette déviation étant connue, ainsi que l'incidence 8 et l'angle ré- fringent C du prisme, on peut calculer le rapport de réfrac- tion par les formules que j'ai données dans mon Traité de physique, tom. III, p. 200. Voici maintenant les éléments de six observations faites de cette manière, avec les valeurs du rapport de réfraction ordi- aire qui s’en déduisent. Afin d’affaiblir la dispersion qui au- rait rendu l'image des traits tout-à-fait indistincte à une mé- diocre distance, je les observais à travers une plaque colorée DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALLISÉS. 355 d’un orangé-rougeâtre, qui ne laissait passer que des rayons peu différents de l’orangé; et, pour éviter en même temps une autre source de confusion, qui est le doublement des traits causé par la double réfraction, j'avais choisi pour plaque colo- rée une lame de tourmaline parallèle à l'axe, que je tournais de manière à ce qu’elle ne transmit que l’image ordinaire, tou- jours facile à distinguer de l’autre par sa situation relative, et par le sens de sa polarisation. É STANCGE | HAUTEUR | HAUTEUR | HAUTEUR DÉPRESSION | DÉVIATION êe be 2 Re ANGLE 4 4 RAPPORT| ÉCARTS a face i na rayon émergent fe point point R point D | d'incidence ALT 200 rayon de des térieure |d'incidencel : RI de l'horizontale Ai, réfraction, | ,4 ñ à prisme FRA duquel émane| auquel tend N DR Looint TR réfection ? | résultats partiels a division | de la division J pegoe le rayon conclu d'émergence, CRETE pps CRD erticale horizontale réfracté émergent 8 Couclue conclue is IN. HL. AR. AD. . N'I' Don: . de la moyenne. CE ram 192,0 £ormm 52omm + 0°33/ 42" 1,61067 | + 0,00049 192,0 401 510 + 3. 5.71 1,6086g9 | — 0,00149 193,5 407 540 — 3.37.11 1,61307 | + 0,0028g 217,3 &or 530 + 11.44.52 1,60860 | — 0,00158 225,5 4oz 530 + 2.53.26 1,60940 | — 0,00078 225,5 401 540 + 0.43.24 1,6106% | +- 0,00046 Valeur moyenne du rapport de réfraction ordinaire »—1,61018 “ La petitesse des écarts contenus dans la derniere colonne, prouve l'exactitude de la méthode employée. Avec ces éléments, j'ai pu former les équations de condi- tion indiquées par les formules (5) et (6). Pour cela, j'ai em- ployé les six dernières observations de la première série , dans lesquelles l'écart observé est de 20"”, et les six avant- 45. 366 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION dernières de la seconde série, dans lesquelles l'écart observé est de 10°”; puis, prenant la moyenne des équations partielles qui en résultaient pour chaque série, j'ai obtenu les deux équations suivantes : I" SÉRIE. o ,02558226—0,716163 2") 27 in °a=(n°—n) cos." a, Rasa ) IT Série. -0,01548545 —0,758539 cos” a=(n°—n if 1 a. Pour tirer maintenant de ces deux équations les valeurs de a et de n'°—n', je suis parti de la valeur de » trouvée par l'expérience, laquelle donne r°—2,592682; et, lui ajoutant la valeur de 7!/°—7° que j'avais trouvée pour la premiére to- paze, c'est-à-dire 0,032827, j'ai formé une première valeur ap- prochée de n'°, qui était 2,625509. J'ai employé cette valeur pour dénominateur des termes déja multipliés par (2'*—n°), et la petitesse de ce coëfficient rendait cette approximation très-exacte. Alors, n'ayant plus que les deux inconnues n—n et(n'—n) sin’ a, je les ai tirées des deux équa- tions, et j'ai trouvé ainsi n'°—n—=0,03197230 (n*°—n°) sin." a—0,008780875 ; lesquelles, étant jointes à celle de 7°, qui est 2,592682, donnent n'°—=2,624654 (n'°—n’) cos." a—0,023185422 a—31°.37. 1 On voit par-là que, dans cette topaze, le coëfficient 7!?—»", qui mesure l'accroissement du quarré de la vitesse, a presque exactement la même valeur que dans la première topaze, dont j'ai rapporté plus haut les observations; mais l’incli- naison mutuelle des deux axes y est sensiblement moindre, car elle est égale à 63°. 14.2"; tandis que, dans l’autre to- DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALLISÉS. 357 paze, elle était de 65°.52/. 14"; et, d’après la manière dont - on verra que les observations sont représentées, on ne peut guère concevoir de doute sur la réalité de cette différence. Tout me persuade qu'il en existe de beaucoup plus grandes encore entre les topazes parfaitement blanches, comme celle dont nous venons de faire usage, et les topazes également limpides, mais colorées, dont les teintes intenses décelent la présence de principes chimiques étrangers, combinés avec leur substance. On en verra tout-à-lheure un exemple frap- pant dans la topaze jaune du Brésil. Ceci, au reste, est abso- lument analogue aux variations que j'ai reconnues entre les intensités des doubles réfractions, et entre les angles des axes de diverses espèces de mica dont la composition est diffé- rente, (Mémoires de l’Institut pour 1816, pag. 275.) Toutefois, comme les éléments auxquels nous venons d’être conduits, semblent devoir convenir spécialement à la topaze dans son état le plus parfait de pureté et de simpli- cité, je les rassemblerai ici en un même tableau. Eléments de la double réfraction pour la lumière orangee dans la topaze limpide. Report de réfrac- ordinaire , n—1,61018; log.n—0,2068746 tion pour la lu- ae Eh : extraordinaire, n'—1,62008 ; log.n'—0,2095360 mière orangée. .. | 1 = = —1,006147; log. (= 0,0026614 » Accroissement du quarré de la vitesse. .... ......s.s nl? —o,0319723; log, (n'°—n*)—2,5047740 Demi - inclinaison des deux FES NOTES IR DR 23197. ui Pour appliquer ces éléments aux deux séries d'observations rapportées plus haut, je suis parti, pour chacune d'elles, 358 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION de l'incidence du rayon ordinaire, comme d’une donnée, et j'ai calculé, d’après la théorie, l'écart du rayon extraordi- naire, qui devait coincider avec lui après son émergence. Les résultats comparés à ceux de l'expérience sont l’objet des deux tableaux suivants. DÉSIGNATION| INCIDENCE ÉCART ÉCART EXCES de du rayon des points | des points AAA LA FÂCE 2 de départ | de départ SR ES L ordinaire à d'iucidence. Le des rayons les rayons partiels Ar SG OE'ouO'E:|OEouO'E : 1% SÉRIE. 10. observé, calculé. calculés. mia mm PP 57° 42! 2" 5um | 5,052 | + 0,052 | Div. vertic. 54.32.30 Ë 9 9,086 | + 0,086 48.20.40 10 10,040 | + 0,040 57.50.52 10 10,123 | + 0,123 49.50.28 II 11,022 | + 0,022 46. 7.54 12 12,038 | + 0,038 63.27.12 | 15 14,990 | — 0,010 | 62.50.23 15 15,099 | + 0,099 53.55.50 15 15,057 | + 0,07 | 61. 0.53 20 19,880 | — 0,120 | 54.26.38 20 20,029 | + 0,029 | 59.37.59 | 20 | 20,027 | + 0,027 | 56.22. 4 20 20,088 | + 0,088 | 61.49. 0 25 24,815 | — 0,185 [| 49. 6. 9 20 20,064 | +- 0,064 | Div. horiz. | Somme Somme des écarts observés.227 [deserreurs.+ 0,410 On voit que les erreurs sont toujours fort petites, et leur | somme n’est que :; de la somme totale des écarts observés. {| DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALLISÉS. 359 Ce petit reste d'erreur peut légitimement être attribué aux imperfections inévitables de l'appareil, aux erreurs de la coupe des faces, enfin à ce qu'il est impossible d'observer rigoureu- sement par le tranchant même des prismes ; ce qui exige une petite correction d'épaisseur que nous ayons négligée. Voici, sous la même forme, les résultats des calculs de la seconde série d'observations. DÉSIGNATION| INCIDENCE ÉCART ÉCART EXCÈS de du rayon des points | des points de départ de départ des rayons des rayons chirée OE ou O'E':|OE ou O'E/: 2 SÉRIE. aTe observé. calculé, calculés. des résultats LA FACE d'incidence. ordinaire partiels Div. vertic. Div. horiz. Somme Somme des écarts observés. 110 deserreurs.+ 0,385 560 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION On voit que les erreurs sont également fort petites, et que leur sens varie irrégulièrement : leur somme + 0"°,385 est + de la somme totale des écarts observés. Mais l'accord paraîtra encore plus satisfaisant par cette circonstance, que la pre- miere observation et la septième, qui donnent les erreurs les plus fortes, dont la somme est +0"",379, sont précisément les deux extrêmes d’une même coïncidence de cinq traits, observée dans une même position du prisme sur les diverses parties de la division verticale; coïncidence qui se soutenait dans tout cet intervalle par la compensation qui s'opérait entre les changements angulaires de la réfraction sous di- verses incidences, et ceux que produisait le changement de la distance dans l'écart linéaire des traits observés. Il est tout simple que l'erreur soit le plus grande possible dans les termes extrêmes d’une pareille série ; et, en les excluant, les erreurs des autres observations se compenseraient presque exactement. Quelque satisfaisantes que les épreuves précédentes pussent paraître, j'ai voulu encore en tenter une sur un sens de coupe tel qu'une des faces du prisme fût oblique aux axes; et cela m'a donné lieu de vérifier une analogie remarquable que la théorie indique entre les cristaux à deux axes et ceux qui n'en ont qu'un seul. On sait que, dans ceux-ci, la réfraction extraordinaire suit la loi de Descartes , lorsqu'elle s'opère dans un plan perpen- diculaire à l'axe du cristal. Alors le rayon réfracté extraordi- naire est toujours perpendiculaire à cet axe. Or, c’est précisé- ment cette perpendicularité qui fait que l'émergence s'opère suivant la loi du sinus, car, en l'introduisant directement dans les formules générales de la pag. 230, on trouve que la DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALLISÉS. 361 proportionnalité des sinus en résulte, non-seulement quand le plan où la réfraction s'opère est perpendiculaire à l'axe du cristal , mais généralement pour toutes les directions possibles des faces d'incidence et d'émergence , pourvu que le rayon qui subit la réfraction ou l'émergence extraordinaire, soit per- pendiculaire à l'axe dans l'intérieur du cristal. J'ai démontré précédemment ce résultat en traitant de la double réfrac- tion du cristal de roche, pag. 265. Mais si l’on veut examiner les considérations analytiques dont j'ai fait alors usage, on verra qu'elles s'appuient uniquement sur la rectangularité des angles »', n”, que le rayon extraordinairement réfracté forme avec les axes du cristal Soit réunis, soit séparés. Ainsi, lorsque cette condition sera satisfaite, les mêmes résultats analytiques auront lieu encore; c'est-à-dire que si, dans un cristal à deux axes, on conçoit un rayon intérieur qui soit perpendiculaire à-la-fois à ces deux lignes , par conséquent au plan qui les contient, ce rayon, en sortant du cristal par une face quelconque, suivra la loi de réfraction de Descartes, en prenant pour rapport de réfraction la vitesse intérieure “extraordinaire; et réciproquement, si on l'introduit du de- hors, de manière qu'après avoir subi la réfraction extraordi- naire , il devienne perpendiculaire au plan des deux axes, sa réfraction s'opérera encore suivant la même loi. Pour vérifier ce résultat, j'ai fait les deux expériences sui- vantes , que je décrirai successivement. J'ai pris le prisme rectangulaire de topaze limpide, dont j'ai rapporté tout-à-l’heure les observations, et j'y ai fait tailler une nouvelle face, qui était, comme les précédentes, perpendiculaire aux faces de clivage, mais qui , au lieu d'être 1818. 46 362 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION rectangulaire avec les autres coupes, formait un angle de 45°. 47! avec celle qui contenait le plan des deux axes. Celle-ci est désignée par SS dans la fig. 35, et la nouvelle face l'est par FF; l'angle compris entre elles avait été mesuré par la réflexion de la lumière. J'ai collé à cet angle un prisme de crown qui compensait en par tie sa dispersion ; puis j'ai placé la face PP du morc eau de topaze sur la colonne de mon appareil, ce qui rendait la face SS parallele à la division verticale; et ayant marqué sur SS une limite d'incidence ?, ai déterminé sur la division verticale le point E qui se trou- vait à égale hauteur. Alors, plaçant l'œil en V derrière le double prisme, j'ai observé, comme dans la page 265, le trait O, qui, amené par la réfract ion ordinaire, coïncidait dans son émergence avec le trait E, vu par réfraction extraor- dinaire. Par cette disposition, le rayon extraordinaire Er, tombant perpendiculairement sur la face SS, traversait la to- paze perpendiculairement aux deux axes. L'observation était donc la même que dans le cas du pris me de cristal de roche de la page 265, et le calcul en est le même aussi; avec cette seule différence, qu'il faut appliquer à l’angle réfringent du prisme les valeurs de », n!', qui conviennent à la topaze limpide, et que j'ai données plus haut. On trouve ainsi que l'angle d'incidence intérieur [l'2 du rayon ordinaire, est de 21'.47"; ce qui donne, pour son incidence extérieure en] sur la première surface, 35'.4",5, dont la tangente est 0,0102034. Alors, en nommant toujours z la distance de la surface d'incidence SS à la division verticale sur laquelle se mesurent les coïncidences, et désignant par e l'épaisseur du prisme à l'endroit où le rayon Il’ le traverse, épaisseur qui, dans mon expérience, était d'environ 10°", la formule de la NN OT DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALLISÉS. 363 page 267 donne, pour l'expression de l'écart OE, la formule e.0,0063366 + 0,0102034. z. Voici maintenant la comparaison des résultats de cette formule avec les écarts réellement observés. DISTANCE | ÉCART ÉCART de la surface antérieure EXCÈS des points des points de départ de départ À du prisme DES RÉSULTATS F PES des deux rayons: | des deux rayons: à la division verticale OE OE calculés. | observée : z observé. calculé. On voit que les erreurs exprimées dans la dernière co- lonne sont d’une petitesse excessive ; cependant ces observa- tions étaient faites long-temps avant que j'eusse déterminé les éléments de la double réfraction pour cette topaze, et elles n’ont point concouru à les former. Au reste, en pre- nant les diverses précautions que j'ai indiquées, ce genre d'observation est susceptible de beaucoup d’exactitude, parce que, en variant la distance du prisme avant et après celle qui donne chaque coïncidence, on peut déterminer des 4 46. 364 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION limites qui la comprennent, et resserrer ensuite ces limites de manière à affaiblir beaucoup les erreurs. La nouvelle face que j'avais taillée dans la topaze pour l'expérience précédente, était oblique aux axes, mais perpen- diculaire aux faces de clivage; ce qui la rendait également inclinée sur les directions des deux axes. J'ai voulu détruire cette symétrie, et vérifier le résultat indépendamment d'elle, puisque le calcul de la page 265 fait voir qu'il dépend uni- quement de ce que le rayon extraordinaire est, dans l'inté- rieur du cristal, perpendiculaire aux deux axes. Or, cette condition sera toujours remplie, lorsque l’on fera, comme tout-à-l’heure, la face antérieure du prisme parallele au plan des deux axes, et qu’on observera un rayon extraordinaire qui l'aura traversée perpendiculairement. Ainsi, la direction de la face postérieure est tout-à-fait arbitraire; et, quelle qu’elle puisse être, le rayon extraordinaire devra suivre la loi de Descartes dans son émergence. Pour vérifier ce résultat de la théorie, j'ai choisi une to- paze différente de la précédente, mais d’une limpidité aussi parfaite, et dont je suis redevable à la bienveillance de l'il- lustre physicien M. Wollaston. Les bases naturelles de l’oc- taëdre primitif, désignées par C (fig. 36), ayant été mises en évidence par un clivage bien net, j'y ai déterminé avec soin la direction des axes par les caractères tirés de la polarisation de Ja lumiere; puis, perpendiculairement à ces bases, j'ai fait tailler deux faces, dont l'une, SS, contenait le plan des deux axes; et l'autre, PP, était perpendiculaire à ce plam. Enfin, obliquement à ces deux faces, j'en ai fait tailler une troisième, OO, inelinée de G2°.9'.36" sur la face SS, et qui coupait les faces de clivage C, suivant une ligne inclinée d’en- viron 49° sur les traces SS , CC des deux premières sections. DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALLISÉS. ‘465 Cette troisième face était évidemment oblique sur les axes, et placée d'une manière non symétrique par rapport à eux. Cela posé, voulant observer la réfraction à travers cette face et la premieres, j'y ai collé un prisme de crown, d’un angle à-peu- près égal, mais dirigé en sens opposé, afin de compenser ; au moins en partie, la dispersion produite par le prisme de to- paze. Puis j'ai placé le tout sur.la colonne de mon appareil, de manière que la face antérieure SS fût, comme dans l’ex- périence précédente, parallèle à la division verticale, ce que j'obtenais en l’appliquant contre elle; et en outre je tournais le cristal jusqu'à ce que l'intersection commune SO des deux faces O,S, devint horizontale ( f£g. 37). Ces dispositions faites, j'ai marqué sur la face antérieure S une limite I d'incidence; et, ayant déterminé sur la division verticale le trait E que je trouvais situé à la même hauteur, j'ai regardé ce trait par ré- fraction à travers le double prisme en plaçant l'œil en V. Cela posé, l’arête commune des deux faces O,S, étant horizontale, le prisme réfringent formé par ces deux faces devait exercer sa réfraction ordinaire dans le sers vertical sur la division AY; et c'est en effet ce qui avait lieu. Mais, en outre, il en était de même dans la réfraction extraordi- naire pour le point E et les points environnants : car cette partie de la division étant vue à travers le double prisme, donnait deux images parfaitement superposées dans le sens vertical. Ainsi l'émergence extraordinaire se faisait comme l'ordinaire dans le prolongement du plan vertical d'incidence intérieure; ce qui est la première condition indiquée par la théorie. Ceci bien constaté, j'ai cherché à déterminer, comme dans l'expérience précédente, le trait O ( fig. 37), qui, étant vu par réfraction ordinaire à travers le double prisme, don- 366 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION nait une image coïncidente avec l’image du trait E, vue par réfraction extraordinaire. Pour cela, j'ai placé successive- ment le prisme à des distances de la division verticale, telles que l'écart devint successivement égal à une ou plu- sieurs divisions de l'échelle, de sorte que je pusse l'apprécier exactement par les coïncidences ; et j'ai comparé ces écarts à ceux que la théorie indiquait pour les mêmes distances , pré- cisément comme nous l'avons fait dans l'expérience déja rap- portée. Enfin, comme la nouvelle topaze dont je me servais était aussi parfaitement pure et limpide que la premitre, j'ai employé les mèmes éléments numériques pour calculer ses effets. Alors l'angle réfringent du prisme OS ayant été trouvé de 62°. 9/.36" par la réflexion de la lumière, on en tire l’angle d'incidence intérieure IT’ N° du rayon ordinaire égal à 117°.9/.59", et, par suite, l'angle IT'z de o°. 40!. 28”. C’est l'angle de réfraction du rayon ordinaire sur la première face SS. Sa tangente 0,0117718 étant multipliée par l’épais- seur z l' ou e du prisme à l'endroit où le rayon le traverse, donne la correction d'épaisseur Iz, ou l'intervalle des points d'incidence des deux rayons OI, E:; et son sinus étant mul- tiplié par le rapport de réfraction ordinaire », qui convient à la topaze, donne l'angle d'incidence extérieure du rayon ordinaire OT, lequel se trouve ainsi de 1°.5.9",7. Enfin la tangente de cet angle 0,0189520 étant multipliée par la distance z du prisme à la division verticale, donne l’abaisse- ment du trait O au-dessous de l'horizontale même par le point I; et l’écart des deux traits OE sur cette division se trouve ainsi représenté par la formule e.0,0117718 + z,0,0189920. Dans mes expériences, j'ai cherché à faire passer les rayons ,] DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALLISÉS. 367 ‘aussi près que possible du bord tranchant du prisme, afin de rendre aussi petite que possible la correction d'épaisseur. Toutefois, il ne me paraît guère possible que cette distance ait été moindre d'un millimètre; ce qui donne à- peu - près deux millimètres pour l'épaisseur du prisme à l'endroit où passaient les rayons ; j'adopterai cette évaluation , qui donne pour correction d'épaisseur, 0"",023543. Alors, en mettant pour z les diverses valeurs des distances auxquelles j'ai ob- servé les coïncidences successives, j'ai formé le tableau sui- vant, où les résultats sont comparés à l'observation : DISTANCE | ÉCART ÉCART de la surface | des points | des points SEE de départ de départ du prisme EXCÈS DES RÉSULTATS 2 LR. des deux rayons: |des deux rayons: à la division verticale OE OE calculés. observée : z observé. calcule. ne) mm mm 5,000 5,008 6,000 5,993 7000 7017 8,000 7983 9,000 | 8,969 10,000 10,011 15,000 | 15,014 On voit que ces écarts sont excessivement petits , et qu'ils sont à-peu-près indifférents dans leur signe. Leur somme totale est 0"”,005 sur 60"" observés, ce qui fait =. Un pa- reil accord prouve évidemment la réalité de la loi indiquée par la théorie. 368 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION Application des. mémes formules à la lopaze jaune du Bresil. La topaze jaune du Bresil n’est point distinguée par les minéralogistes de la topaze limpide; ils regardent sa colo- ration comme accidentelle. Toutefois, les cristaux de cette sorte different de ceux de la topaze limpide par plusieurs caractères physiques; sur-tout ils offrent un clivage plus difficile et beaucoup moins net, parallèlement aux faces de l'octaëdre adopté par M. Hauy. L'examen d'un tres-grand nombre d'aiguilles, de la variété cylindroïde la plus com- mune et la plus facile à se procurer, m'avait depuis long- temps fait soupçonner que les éléments de la double réfrac- tion dans ces topazes jaunes étaient fort différents de ceux qui appartiennent à la topaze limpide. Mais je n'osais avoir une entiere confiance dans cette observation, parce que les modifications éprouvées par la lumière polarisée en traver- sant les lames tirées de ces aiguilles par le clivage, montrent qu'elles sont presque toutes irrégulièrement cristallisées , et composées de prismes qui ne sont pas assemblés par les faces correspondantes. M. le comte de Souza, de qui la généreuse disposition à favoriser les recherches des sciences est connue par tant d’autres exemples, a bien voulu me fournir lesmoyens de constater ce fait, en me donnant plusieurs beaux mor- ceaux de topaze jaune d’une grosseur considérable, rapportés autrefois du Bresil même par son père, alors vice-roi de ce pays. Un de ces cristaux m’ayant présenté un dichroïsme très-marqué, je m'y suis attaché de préférence ; car ce phé- nomène, lorsqu'il existe, indique que la matière colorante DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALLISÉS. 369 est régulièrement groupée autour de chaque particule du cristal; d'où il semble naturel d'inférer qu'elle à été égale- ment soumise à la force de cristallisation. Quoi qu'il en soit, après avoir clivé cette topaze avec tout le soin possible, j'en ai tiré un parallélipipède rectangulaire taillé précisément comme ceux que j'avais formés avec la topaze limpide; et je l'ai soumis à un système d'expériences précisément pareil, que je vais rapporter sans autre explication, dans le même ordre que j'ai précédemment adopté. Détermination du rapport de réfraction ordinaire avec un prisme dont l'angle réfringent était de 45°. 10! (fig. 34). DISTANCE HAUTEUR DÉVIATION : de reel ANGLE, | ÉCÉVATION Et RAPPORT| ÉCARTS t NT du du 4 DU POINT DU RAYON RAYON de des HS d'incidence} PornNr R| #orxr D | D'INCIDENCE | enr ' antérieure 1 & à per RÉFRACTION Û VE - dessus duquel auquel RIN, au-dessus LA FACE RÉSULTATS SR FPS one |Mstréfactions | à r : e l'horizontale È PARTIELS émane tend ordinaire , au dessus à la division FA conclu IN Il 1 conclu, À verticale [ja division | 1° TayOn | le rayon conclue, autour 7e. conclue , $- 4. IN horizontale] réfracté | émergeng 6. N. HI ou AN, AR, AD, a CS de la moyenne. mm mm r 25 355 453 | 24°56! 38! |%10°32/21"| 35°28! 59"| 1,63390 |-L-0,0013y 345 42 | 27.59.36 | 6.26.4r | 34.26.17 | 1,63488 | o,00235 185 445 30.42.46 2801311133 -3294c 1,63172 |—0,00081 , 335 432 30.52.47 2.39. 3932E 1,63221 |—0,00032 315 4:6 36. 9.47 .25. 32.44. 1,62997 |—0,00256 Valeur moyenne du rapport de réfraction ordinaire »—1,63253 Cette détermination prise, j'ai collé un parallélipipèede rectangulaire de crown à celle. des faces du parallélipipède cristallisé qui contenait le plan des deux axes; et j'ai ob- 1818. « 47 370 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION servé successivement les coincidences à travers cette face et les faces rectangulaires , comme le montrent les tableaux suivants : SÉRIE (fig. 30). Les rayons entrent par une face PI, perpendiculaire aux faces de clivage et au plan des deux axes. Leur direction d'incidence est perpendiculaire à ce plan. Ils sortent par la face SI’ qui lui est parallèle. DÉSIGNATION COORDONNÉES COORDONNÉES JINCIDENCE |INCIDENCE DU POINT DE DÉPART | DU POINT DE DÉPART 0 du rayon du rayon y du du RAYON ONDINAIRE, RAYON EXTRAORDINAIRE, ordinaire observées. bservé BAR OIH ou O'IH | EIH ou E'IH TT D IN ou HO' | NO ou IH | IN ou HE’ | NE ou ïiH extraordinaire conclue conclue dé la face d'incidence. 6. 0,- 12= 19 —, run run 299 181,5 5 58° 23'53"| 59° 49! 41" fPivisien 295 191,5 à É 57. 0.37 25.08 295 201,9 55.39.54 211,9 À 54.21.41 251,5 | 49-33. 4 286,0 5 { 45.53.15 281,5 > 57.58.18 291,5 57.13.57 336,5 5 60.37.59 346,5 59.54.39 356,5 36 D9: 21.05 366,5 ) 58.29.49 391,9 45.41.29 DÉSIGNATION DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALLISÉS. 371 .* I Série (fe. 33). Les rayons entrent par une face de. clivage CI. Leur direction est perpendiculaire au plan qui contient les deux axes : ils sortent par la face SI parallèle à ce plan. COORDONNÉES COORDONNÉES [INCIDENCE INCIDENCE DU POINT DE DÉPART |DU POINTDE DÉPART du rayon du rayon du du x Y RAYON ORDINAIRE, RAYON EXTRAORDINAIRE, ordinaire extraordinaire OIH ou O'IH | EIH ou E'IH observées, observées. TT, IN ou HE' | NE ou IH conclue. conclue. de 1a fuce d'incidence. iT « a —— Division O N 59° 2'10" 57.59.40 YO 50.28. La seule inspection de ces tableaux montre que, pour les mêmes incidences et les mêmes distances aux divisions ob- 47. 372 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION servées, notre topaze jaune exerce une double réfraction beaucoup moindre que ne faisait la topaze limpide. A l’aide de ces résultats, j'ai formé les équations de condi- tions (5) et (6) de la page 3/40. Pour cela, j'ai employé les observations 1, 2, 7, 8, 10, 11, de la premiere série, et 6,7,8,10,11,12, 13, de la seconde, lesquelles étant ajou- tées, ont donné pour moyennes les deux suivantes : ) (b) 0,02172991 ne sin a—(n°—n*) cos.” @, (6) 0 ,00998614—0,7482349 7) LD) cos® a—(n°—n") sin." a. Pour effectuer la première approximation, j'ai calculé les diviseurs 7/* avec la valeur 7!—1,639945 , qui m'avait été indiquée par d’autres expériences ; et, comme elle s’est trouvée excessivement peu différente de la véritable, il a été inutile de recourir à une seconde approximation. J'ai obtenu ainsi les éléments suivants pour la double réfraction de notre topaze jaune : ; RappBi de A te ÉRRRAEE n—1,65253; log. 0 extraordin", n'—1,64o11; log.n'—0,2148735 Accroissement du quarré de la pitesse RE ARene n'?—n? —0,02481363; Log. (n'?—n°)—2,3946904 AXES: APN PERRET NEA a—24°:30!. 41. On voit que ces éléments different considérablement de ceux qui conviennent à la topaze limpide. La difference des quarrés des vitesses est réduite aux trois quarts de la valeur qu'elle avait d'abord; l'inclinaison mutuelle des deux axes est diminuée dans la même proportion. J'ajoute que-_cette DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALLISÉS. 373 valeur de l'inclinaison est parfaitement confirmée par les expériences de la polarisation. Il reste maintenant à voir jusqu’à quel degré d’exactitude ces éléments représentent { x ee les observations : tel est l'objet des tableaux suivants, qui ont été calculés comme ceux de la topaze limpide. DÉSIGNATION INCIDENCE| ÉCA RT DE LA FACE du des D'INCIDENCE. rayon ordinaire, des rayons =—— observée. conjugués 1% SÉRIE. 0. observé. 58° 23' 53" oO. 107" ÉCART des points de départ points de départ des rayons conjugués OE ou O'E',|OE ou O'F!, calculé. , ranr 9,883 20,053 20,028 20,026 20,012 EXCÈES des RÉSULTATS caleulés. mm 0,117 Division vertic. 0,082 0,002 0,168 0,064 0,013 + | 0,082 0,127 0,102 0,058 0,028 0,026 ivision 0012 pe +++ ++ La somme totale des erreurs est + 0,""351 ; celle des écarts observés est 193"%. Ainsi l’erreur moyenne est + 550 de l'observation. 374 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION DÉSIGNATION|INCIDENCE| ÉCART | ÉCART EXCÈS ; DE LA FACE du des des , 54 : oints de départ points de départ des »'iINCIDENCE. | rayon ordinaire, P PE Sue des rayons des rayons % = observée. conjugués conjugués RÉSULTATS 2 SÉRIE a OE ou O'E', OE ou O'E!, 1T calculés. observé. | calculé. go" | 3,056 ra 3,039 2,956 3,010 3,072 5,or4 4.955 4,941 4,985 10,114 10,049 9,985 9:930 10,098 Division horiz. La somme totale des erreurs est + 0"”,237 ; celle des écarts observés est 85". Ainsi l'erreur moyenne est 4-2 de l'observation. Pour compléter ces résultats, j'ai répété sur cette topaze la même observation que j'ai décrite pour la topaze lim- pide, pag. 36r, et dont la disposition est représentée fig. 35. J'ai fait entrer les ravons lumineux perpendiculairement à la face SS, qui contenait les deux axes, et je les ai fait sortir par une face FF également perpendiculaire aux faces de cli- Lu ECS Ron DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALLISÉS. 375 vage, mais inclinée sur SS de //°.3o'. Cette inclinaison a été mesurée par la réflexion-de la lumière. Enfin l'épaisseur du prisme était de 9°" dans la partie où se faisait le trajet des rayons. En appliquant à ces éléments la méthode de calcul employée pag. 362, laquelle est la même dont j'ai plus haut fait usage pour le cristal de roche, pag. 267, on trouve pour l'écart observé OE la formule suivante : €.0,0046281 + 0,0075359.z; et, en y mettant pour e sa valeur 9°", elle donne la com- Paraison suivante du calcul avec l'observation. | DISTANCE | ÉCART | EcART de LA SURFACE EXCÈS DES POINTS|DES POINTS DE DÉPART DE DÉPART des des des DECx nAxoNs|5Eux RAro”sIRÉSULTATS antérieure DU PRISME à la division verticale, OE, OE, 4 : À calculés. observée. observé. calculé. 1,024 |+-0,024 2,059 0,059 3,064 0,064 4,084 0,084 5,074 0,074 On doit faire ici sur le sens des erreurs la même remarque que dans la page 363 ; mais, en outre, la coloration de cristal et son épaisseur rendaient ici l'observation singulièrement difficile. Toutefois l'accord général des résultats avec la théorie suffit pour montrer la régularité d'action de cette topaze, 376 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION et pour prouver que sa constitution intérieure différait essen- tiellement des deux autres topazes éssayées plus haut. Application des mêmes formules à la double réfraction de la chaux sulfatee anhydre. x La chaux sulfatée anhydre est un minéral divisible par des coupes nettes, suivant trois sens rectangulaires. Toutefois l'inégale facilité de ces trois clivages et leur éclat divers montrent qu'ils n'appartiennent pas à un cube; et en effet la substance exerce tres-énergiquement la réfraction double. M. Haüy lui assigne pour forme primitive un prisme droit à base rectangle, dans lequel les diagonales de la base font entre elles des angles de 79°. 56! et 100°.8". Pa cristaux 5€ laissent facilement cliver par des plans menés suivant ces dia- gonales, perpendiculairement aux bases. La collection du cabinet particulier du roi, aussi riche dans ce genre que dans tous les autres, possédant un grand nombre de ces cristaux parfaitement limpides, M. le comte de Bournon a bien voulu en mettre quelques-uns à ma dis- position ; et je me suis empressé de les étudier : car l'inégalité des côtés de la forme indiquant l'existence de deux axes, et en même temps la double réfraction étant tres-énergique, il en résultait l’occasion d’une épreuve très-importante pour la thcorie. En examinant d’abord les effets que des lames minces ob- tenues par le clivage exercaient sur la lumiere polarisée, je me suis assuré que le minéral avait en effet deux axes de double réfraction situés dans une des faces de clivage na- turel , laquelle m'a paru être la base mième de la forme pri- DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALLISÉS. 377 mitive. Laligne qui divise l'angle aigu des axes en deux parties égales est parallèle à un des côtés de cette forme. Ces condi- tions reconnues, comme je ne voulais, pour le moment, rien ürer de plus de la polarisation de la lumière, j'ai fait tailler divers prismes dont les faces avaient des directions connues Par raBport aux axes. Les clivages rectangulaires parallèles aux côtés de la forme primitive offraient pour cela un grand secours. Mais le peu de volume des cristaux bien limpides fait qu’on ne Peut jamais, en les polissant, conserver rigou- reusement leur réctangularité ; et la grande énergie de la . double réfraction rend le plus petit écart de direction into- lérable. On est donc inévitablement obligé de mesurer exac- tement tous les angles par la réflexion de la lumiere après letravail, pour les em ployer avec leur véritable valeur. Alors, n'étant plus tout-à-fait droits ils n’offrent plus autant desim pli- cité pour la détermination des éléments de la double réfraction. C'est pourquoi J'ai tiré cette détermination d'un autre sens de coupe. J'ai fait tailler un prisme triangulaire CSF (fig. 35), dont les arêtes étaient parallèles à la ligne qui divise l'angle aigu des axes en deux parties égales. Les faces SF, SS’, d’abord obtenues par le clivage, ayant été polies, j'ai mesuré les angles S, F, C, par la réflexion de la lumière, et j'ai trouvé l'angle F de 41°.20'.30', l'angle C de 47°.41'.10", et l'angle S de 91°. De plus, en comparant par le même procédé les faces SF 35’, avec une petite face de clivage PP que j'avais mise à pu après le travail du prisme, j'ai trouvé que leur intersection commune était bien parallèle à la commune section des faces primitives ; de sorte que l’arête S du prisme, qui est supposée perpendi- culaire au plan de la figure, divisait effectivement l'angle aigu des axes du cristal en deux parties égales. J'ai reconnu ensuite 1818. 48 378 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION que la face SS' formait un angle de 1° avec le plan de ces axes, d'où il résultait que la face SF était exactement perpendicu- laire à ce mème plan. ù Ces déterminations prises, j'ai collé à mon prisme de cristal un prisme de crown doni les angles étaient à-peu-près égaux aux siens; puis j'ai placé la face PP sur le support de mon appareil, de manière que la face antérieure SS' devint exac- tement parallèle à la division verticale AY, et j'ai observé l'écart des traits OE dont les images coincidaient dans leur émergence, en ayant soin que le rayon extraordinaire ET fût perpendiculaire à la face antérieure SS’. Cette condition ren- dait insensible la petite inclinaison de cette face sur le plan des axes, et permettait de calculer la marche du rayon, comme s'il eût été rigoureusement perpendiculaire à ce plan. Or, dans ce cas, si l’on nomme c l'angle réfringent du prisme, et 4’ l'angle d'incidence intérieur du rayon ordinaire IL! sur la seconde face, nous ayons vu que l'on a , À ? re NS A SU 0 — UDC; Tr nn n' et n étant les coëfficients des deux réfractions. Mainte- nant z est connu par les observations de la réfraction ordi- naire; et, en suivant le rayon ordinaire EI dans le prisme, on peut calculer 6! d’après l'observation même des coïnci- dences. Il ne reste donc plus d’inconnue que »' dans cette équation, et par conséquent on peut l'en déduire. Pour le faire avec exactitude, je lui donne la forme suivante : on sin. + (@—c) cos. = (#' +0) sin. C. Ho — . De-là jecommence par déduire #/— 7; et,en y ajoutant, job- tiens »/, c'est-à-dire le coëfficient de laréfractionextraordinaire. Cette observation faite, J'ai changé la position de mon DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALLISÉS. 379 prisme de cristal; et, cette fois, j'ai placé la face SS' sur mon appareil ( fg.38) de manière que la face SF se trouvât exacte- ment parallèle à la division verticale AY. Alors j'ai observé, comme précédemment, les traits OF qui, vus à travers l'angle SFF"’, coïncidaient dans leur émergence, en thoisissant le trait E, de manière que le rayon extraordinaire EI fût perpen- diculaire à la face d'incidence SF. Alors ce rayon entrait dans le cristal parallèlement au plan des axes, et perpendiculaire- ment à la ligne moyenne qui divise leur inclinaison mutuelle en deux parties égales ; de sorte qu'en représentant toujours Par 24 cette inclinaison, il forme avec chacun d'eux un angle égal à 90—4. Le rayon étant ainsi symétriquement dirigé par rapport aux deux axes, ne se dévie ni vers l’un ni vers l’autre. Il traverse le cristal avec une vitesse dont le quarré est DR + (n° —n).cos. a. Et quand il arrive à la seconde surface du prisme, la même disposition symétrique de cette face autour des axes fait que son émergence s'opère dans le même plan que son incidence intérieure, et suivant les proportions des sinus indiquées par les vitesses au-dedans et au-dehors; c’est-à-dire qu’en nom- mant 6, l'angle d’émergence, et c l'angle réfringent du prisme, on a Sin. 0,—%, sin. c. Ce résultat, fondé sur la nature de ce genre d'action, est facile à conclure de nos formules générales. Or si l’on nomme, comme précédemment, .4! l'angle d'incidence intérieure du rayon ordinaire qui coïncide avec le précédent dans son émer- gence, 577.0, sera égal à » sin. ,&'; substituant donc cette va- leur et celle de v,, On aura, après avoir élevé au quarré , n° sin." 0 — (n°+ (n° — n°) cos/a) sin” C. 48. 380 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION Or, n et n! sont connus par ce qui précède. On connaît aussi l'angle c du prisme, et l'on peut tirer 6’ de l'observation même des coïncidences, en conduisant le rayon ordinaire par la loi de Descartes à travers le prisme. Alors il ne reste plus que cos.” a d'inconnu, et en le dégageant on a n° sin. (0'+c) sin. (0'—c) COS.” a — EE PP L c'est ainsi que j'ai déterminé l'inclinaison des deux axes. Tous les éléments de l’action du cristal sur la lumiere étant ainsi connus, j'ai repris le même prisme cristallisé CFS; mais, cette fois, j'ai observé les coïncidences à travers le grand angle S, après avoir collé à la face SS' un parallélipi- pède de crown qui déterminât l'émergence des rayons (fig. 39). Alors ceux-ci entraient par la face SF perpendiculaire aux axes, et sortaient par la face SS', qui, s’écartant de 91° de la premiere, formait avec le plan des axes un angle de 1°. De plus, la ligne moyenne entre les axes étant parallèle aux arêtes du prisme, se trouvait horizontale; et ainsi le rayon extraordinaire, en traversant le cristal, lui était perpendicu- laire. D'après ces dispositions symétriques, les formules de la page 326 sont parfaitement applicables aux réfractions sur les deux faces de l'angle S'SF : si l'on nomme, conformé- ment à nos notations, X la distance zénithale d’un des axes comptée à partir de la normale extérieure , et a! son azimuth compté de la ligne moyenne, on aura, pour la face d’inci- dence SF, x'—90°, a'—0; et, pour la face d'émergence SS’ inclinée de 1° sur le plan des axes, il viendra COS ON — SUN Ne SU D; tang. a'= cos. 1°. tang.a. Il ne reste plus qu'à introduire ces valeurs dans la formule générale de la pag. 326. Pour cela j'ai d’abord emprunté de DISTANCE LA FACE DU PRISME) DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALLISÉS. 381 l'observation l'incidence#, du rayon extraordinaire sur la face SF; et j'en ai déduit l'angle de réfraction extraordinaire 4, par la formule citée. De-la, conduisant le rayon à la seconde surface SS du prisme, dont l'angle réfringent étaitde91", j'en ai conclu l'incidence intérieure #', sur cette face; puis, par la même for- mule, j'ai calculé le sinus d'émergence sin. 6,, ou plutôt son égal, n sin. 6’, puisque l'émergence 6, appartient aussi au rayon ordinaire. Ramenant alors ce rayon vers la première surface SF du prisme, j'ai calculé sa réfraction 8’ sur cette face, et, en lui appliquant la loi de Descartes, j'en ai conclu son incidence extérieure ,0 ; d’où j'ai tiré tang. 0 qui, multipliée par la dis- tancez de la division verticale, m’a donné la position du trait d’où le rayon ordinaire devait émaner. J'ai ainsi connu l'écart théorique des deux traits qui devaient former la coïncidence, et je lai comparé à l'observation. Voici maintenant le détail _des expériences ; je commence par la mesure de la réfraction: ordinaire, observée à travers l'angle F de 41°.20'.80”. DÉPRESSION DU RAYON ÉMERGENT DÉVIATION de ANGLE RAYON de d É d'incidence| Porn R | rorwT D | D'INCIDENCE au-dessous . Fa antérieure at ï de l'horizontale por RÉFRACTION uqne! auquel R I N ÿ. ÿ p.. 4 y au-dessus 1 F RE la réfraction ordinaire , « FRE émane tend 1 à £ à la division dE conclu par le point du prisme, conclu, le rayon | le rayon d'émergence , conclue, autour réfracté émergent 6. conclué , n verticale [la division IN. horizontale H1. AR. ; N'I'D ou à. mm Ka RAPPORT| ÉCARTS RÉSULTATS PARTIELS À. k de la moyenne. 157,3 27°4551/|— 21° 5133] 26°40! 18'!| 1,57890 | o,00170 195,0 | 34.17.46 |— 8 10.16 | 26. 7.30 | 1,59313 | —0,00407 195,0 23. 3.24 |+4.23.55| 29.27 19 | 1,57872 | 4-0,00152 197,9 27.32.34 |—0.52.13 | 26.40.21 1,57948 | + 0,00028 296,5 5 27.17.41 |—0.34.47 | 26.42.54 | 1,59778 | 0,00058 Valeur moyenne du rapport de réfraction ordinaire n—1,577203 382 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION Expériences pour la détermination de n'. L'angle réfringent SCF du prisme est 47°.41'.10". Les coëncidences observées par le tranchant méme donnent mm mm 300 Écarts OE.. ro 15 20 25. Distances... 200 Toutes ces expériences s'accordent à donner la tangente de l'incidence ,6 égal à _ d'où l’on tire ,8 —49°.30!.1".88, en le comptant de la normale intérieure. On a, de plus, c—#47°.41". 10". De-là on tirer! — n7—0,04467194, et par suite 2'—1,621899 ; n!*—n°—0,1/429090. Ce dernier élément est cinq fois aussi fort que celui que nous avons trouvé pour le cristal de roche. Son signe positif montre que la chaux sul- fatée anhydre exerce la double réfraction attractive. Expériences pour la détermination de l'angle des axes. L'angle réfringent SF C du prisme est 41° 20'.30". Les coïincidences observées donnent Distances. ." 2027" © 44zi Ub87 My3bent ÉcartsO E... 10 15 20 25: Les trois dernières, employées comme plus exactes, don- nent, pour la vaieur moyenne de ,6, 1°.56".57". De-là on tire 0 —42°.34'.40".5, en le comptant de la normale in- térieure. Et, achevant le calcul par la formule de la page 380, on trouve enfin : a—22°.20". 41"; par conséquent l’irclinaison des axes : 24 —/4/4". 41". 22". Le docteur Brewster, dans son mémoire, assigne à cette inclinaison une valeur de 28°.7' (pag. 230). Si son résultat est exact, il faut qu'il ait observé une substance différente de la chaux sulfatée anhydre; ou que celle-ci présente, dans l'angle de ses axes, des variations dépendantes de sa compo- DANS LES CORPS RÉGULIÈREMENT CRISTALLISÉS. 383 sition accidentelle; ce que mes expériences sur les diverses variétés de mica, le béril et les topazes rendent tres-vraisem- blable. Voici maintenant l'application de ces éléments au calcul des déviations opérées par le grand angle de 91° ( fig. 39). Ces dé- viations étaient énormes ; et la dispersion de l’image extraor- dinaire était fort sensible, malgré l'opposition du prisme de crown par lequel la dispersion ordinaire était compensée : ORDONNÉES DISTANCE] PES TRAITS ORDONNÉE ÉCART de dont les images INCIDENCE coancident DU POINT DES DEUX TRAITS LA FACE 4 A dans leur émergence, de départ 0E d'incidence Diservées: 44 , e à la divisi. RS, FR É à la division lire, verticale IN, DU RAYON DU RAYON BARON ée: extraordinaire ordinaire ordinaire NO * observée : , Er 1 calculés. conclue déduite de l'observation:| de la théorie: 10: calculée. mm 54°34'44''T 120,907 .35.57,8| 48.44.17 180,953 .30. 0,5| 48.39.21 220,676 -28.24,7| 53. 7.22 215,307 -40.17 49-43.54 275,735 La somme des écarts observés est 265" ; celle des erreursest 1,422; elle est donc = de l'observation. Maintenant, si l’on veut considérer que ces expériences ne sont point entrées dans la détermination des éléments de l’action du cristal, et qu’elles-sont nécessairement influencées par toutes les erreurs que peuvent occasionner les évaluations des incidences, les imperfections du sens des coupes , et la dispersien très-sen- sible de l'image extraordinaire, on jugera, je crois, que cette “preuve confirme suffisamment la solidité de la théorie. 38/4 LOIS DE LA DOUBLE RÉFRACTION ET DE LA POLARISATION L’euclase soumise aux mêmes expériences a aussi parfaite- ment satisfait à la loi des sinus. J'ai trouvé dans ce minéral le rapport de réfraction ordinaire 7—1,642912; l'extraordi- naire n'—1,063004 ; le maximum de différence des quarrés des vitesses, n!/°—n!°—0,0064223. Les deux axes sont situés dans le plan de la face qui s'obtient par le clivage le plus facile ; ils font entre eux un angle de 59°.4'.12". La ligne qui divise les angles en deux parties égales est parallèle à la direction du clivage oblique découvert par M. de Bournon; et elle forme avec les arêtes des prismes un angle d'environ 130°. ADDITION. Je suis heureux de pouvoir terminer ce Mémoire en annonçant une découverte remarquable faite récemment par M. Herschell fils ; c'est que, dans les cristaux qui ont deux axes de double réfraction , la position de ces axes et lear inclinaison sont en général différentes pour les rayons inégalement réfrangibles. Cette différence est fort petite pour le plus grand nombre d’entre eux; mais, dans quelques-uns, elle devient très-considérable, de sorte qu’on doit désormais en tenir compte en général comme d'un élément essentiel de la double réfraction. M. Herschell a reconuu que , quelle que soit la dispersion des axes, ils sont tous constamment compris dans un même plan ; et en étudiant, par des moyens très-précis, la configuration des anneaux qui en résultent avec la lumière polarisée, il a trouvé qu'elle était exactement conforme aux règles de la polarisation alternative et à la loi des sinus que je lui avais communiquée antérieurement. Le travail de M. Herschell renferme encore plusieurs autres résultats importants sur les propriétés de la lumière po- larisée; mais je dois me borper ici à mentionner les précédents comme offrant, dans le fait jusqu'ici non soupconné de la dispersion des axes, une épreuve inattendue de la loi des vitesses que j'ai donnée dans ce Mémoire, et en même temps une particularité physique qui complète la théorie de la double réfraction. ( Note ajoutée pendant l'impression du Mémoire. } ERRATA. Pag. 182, ligne 9 en remontant : et; lisez: ou. Pag. 204, ligne 13 : AX; lisez: AZ. Pag. 258, ligne 5 en remontant : Rrr, lisez : Rin; Rr, lisez : Ar. P. e . NO. di NI ag. 273, ligne 8 en remontant : NL? LEZ: Ro: Pag. 309, ligne 4 : AB; lisez : CD. Pag. 314, ligne 13: AI, At; disez : CI, Cr. Pag. 332, ligne x1 en remontant : 23; lisez: 33 Pag. 335, ligne 11 en remontant : parallèle; lisez : perpendiculaire, Pag. 335, ligne 4 en remontant : second; lisez : premier. Pag 320, ligne 5,en remontant : ordinaire; lisez : extraordinaire, QE SNS ESS = = = = A _ = | | < | . | 3 | Fig - 2 ” k £14 É Ex à D AT LE =: x ef : & p!! | p l | sr Ne 1 | e ! 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ER ADR VAR RAS AR RAR RAR SAR BAR LAS LR LR RAR LATE UE LUS LUE LUE DE LVL AIR UE LULUIAUTER LAS l4 : MEMOIRE Æ Sur la combinaison de l'oxigène avec l'eau , et sur les proprietés extraordinaires que possède l'eau oxigenée ; Par M. THÉNARD. Lu à l'Académie royale des Sciences. 1. J'ar déja fait conaître, dans les Annales de chimie et de physique, tom. 8, 9, ro et 11, les principaux phénomènes dont je vais parler; mais comme je n’en ai, pour ainsi dire, annoncé que l'existence, je crois qu'il est nécessaire de les exposer avec tout le soin possible, et d'y joindre les nouvelles observations que j'ai faites : tel est l’objet de ce Mémoire. Le sujet que je ae + tout neuf; car , par eau oxigénée, je n’entends point gner la dissolution du gaz oxigène dans l’eau ; je désigne, provisoirement, par cette expression, une toute autre combinaison, dont, jusqu'à-présent l’on n’a point observé d’analogue, en la considérant du moins sous le rapport des propriétés qui la caractérisent. Je suivrai la marche qui me paraît la plus simple : je décri- rai d’abord la préparation de l'eau oxigénée; je m'occuperai en second lieu de son analyse; après quoi, je traiterai de ses propriétés et de celles des nouveaux produits qu'elle forme 1818. 49 386 SUR LA COMBINAISON dans son contact avec certains corps : je terminerai le Mé- moire par quelqués conjectures sur l'explication la plus probable: des phénotnènes exposés. Deux jeunes chimistes, dont l’un est déja bien connu, m'ont secondé avec beaucoup de zèle; ce sont MM. Labil- lardière, préparateur de mon cours de chimie au collége de France, et auteur de plusieurs Mémoires intéressants, et M. Grouvelle, qui, petit-fils et neveu des D'Arcet, s’effor- cera de marcher sur leurs traces. De la preparation de l'eau oxigenee. 2. C’est en dissolvant le deutoxide de Barium dans l'acide hydrochlorique, versant dans la dissolution une certaine quantité d'acide sulfurique, répétant ensuite nombre de fois ces deux opérations sur la mème liqueur, puis y ajoutant du sulfate d'argent et enfin de la baryte , et séparant successi- vement . tous les précipités par le filtre, que l’on parvient à charger l'eau de beaucoup d’oxigène. L’acide hydrochlo- rique dissout promptement le deutoxide, et de-là résulte, sélon toute apparence, de l'hydrochlorate de baryte et de l'eau faiblement oxigénée. L’acide sulfurique précipite la base de l'hydrochlorate ét rend libre l'acide hydrochlorique. Celui- ci peut alors agir sur une nouvelle quantité de deutoxide, comme nous venons de dire, de sorte qu'en précipitant de nouveau la baryte par l'acide sulfurique, rien ne s'oppose à ce que l'opération ne soit répétée une troisième, une qua- trième fois , etc, etc, etc, et qu'on obtienne par conséquent de l’eau chargée d'acide hydrochlorique et de plus ou moins d'oxigène. La manière d'agir du sulfate d'argent est évidente ; DE LOXIGÈNE AVEC L'EAU. 387 il a pour objet de séparer l'acide hydrochlorique et de le rem- placer par de l'acide sulfurique. Celle de la baryte ne l'est pas moins; cette base s'empare de tout l'acide sulfurique et le sépare de la liqueur. L'on voit donc que, si l'opération était faite avec des matières pures, et employées en proportion convenable, on n'aurait en dernier résultat que de l'eau p'us ou moins oxigénée. Mais il est difficile, pour ne pas dire impossible, de se procurer du deutoxide de Barium parfaitement pur : de-là la nécessité de prendre beaucoup de précautions , sans lesquelles on ne réussirait qu'imparfai- tement. Pour n’en omettre aucune, je vais décrire le procédé dans le plus grand détail. 3. L'on doit commencer par se procurer du nitrate de baryte, exempt de toutes matières étrangères: le plus sûr moyen d’y parvenir, est de dissoudre le nitrate dans l’eau, d’y ajouter un petit excès d’eau de baryte, de filtrer la liqueur et de la faire cristalliser dans des vases de platine, d'argent, ou de porcelaine. Ce procédé de purification offre même un avantage, c'est de pouvoir traiter le sulfure de baryte par l'eau et l'acide nitrique, dans une chaudière de fonte, et d'obtenir promptement le nitrate impur. À cet effet , l’on verse un petit excès d'acide sur le sulfure, en brûlant à la manière ordinaire le gaz hydrogène sulfuré qui se dégage, on porte la liqueur à l'ébullition , on la filtre et on l’évapore jus- qu'à siccité dans la chaudière même. Le nitrate ainsi obtenu est chargé d’oxide de fer ; mais cela ne fait rien, puisque la baryte le précipite tout entier. 4. Lorsqu'on s'est procuré du nitrate bien pur, il faut le décomposer par la chaleur, pour en extraire la baryte. Cette décomposition ne doit point être faite dans une cornue 49: 388 SUR LA COMBINAISON de grès, parce que celle-ci contient trop d’oxide de manga- nèse : l'on doit se servir d’une cornue de porcelaine bien blan- che. L'opération peut avoir lieu sur deux kilogrammes à deux kilogrammes et demi de nitrate à-la-fois; elle dure en- viron trois heures, ou plutôt n’est terminée que quand à une haute température il ne se dégage plus d’oxigène; ce qu’il est facile de reconnaître en introduisant une allumette dans le col de la cornue. La baryte qui en provient est à la vérité unie à une quantité assez forte desilice et d'alumine ; mais du moins il ne s'ytrouve que des traces d’oxide de manganèse, et c'est un point essentiel ; car cet oxide possède, comme on le verra par la suite, la propriété de chasser avec une grande énergie l’oxigène de l'eau oxigénée. 5. La baryte réduite promptement, au moyen d’un cou- teau, en morceaux de la grosseur de l'extrémité du pouce, est placée ensuite dans un tube de verre luté. Ce tube peut être assez long et d’un diamètre assez large pour contenir un kilogramme de matière; on l'entoure de feu , de manière à le faire rougir légèrement, et l’on y fait arriver un courant de gaz oxigène, que l’on fait passer au travers de fragments de chaux vive, afin de le dessécher. Quelque rapide que soit le courant, le gaz est complètement absorbé, si bien que, quand il se dégage par le petit tube, qui doit faire suite à celui qui contient la base, l'on peut en conclure, que le deutoxide de Barium est fait : il est bon pourtant de sou- tenir encore le courant pendant douze à quinze minutes. Le tube étant en grande partie refroidi, on en retire le deu- toxide et on le conserve dans un flacon bouché. Son caractère distinctif est de se déliter par quelques gouttes d’eau, sans s’échauffer. Sa couleur est le blanc-gris; » “ , “ DE L'OXIGÈNE AVEC L'EAU. 389 quelquefois aussi il présente de petites taches vertes qui an- noncent la présence d’un peu de manganèse. J'ai fait bien des tentatives pour me mettre à l'abri de ce grave inconvénient, et Je n'ai pas réussi. Il est vrai que tous les morceaux, à beaucoup près, ne sont pas dans ce cas. Dans une opération bien conduite, l'on n’en trouve que quelques-uns; ce qui tend à prouver que la portion de manganèse, qui produit ces taches, provient plutôt du tube de verre que de la cornue. Quoi qu'il en soit, je pense qu'on ne les évitera ‘complètement qu’en préparant la baryte et le deutoxide dans des vases de platine. Ë Observons, de plus, et cette remarque est importante pour le succès de l'opération, que quand on extrait l’oxigène, que l'on veut combiner avec la baryte, de l'oxide de manganèse, il faut faire en sorte que celui-ci ne contienne point de car- bonate; s'il en contenait, il faudrait, avant de s’en servir, le pulvériser, le mettre en contact avec un excès d'acide muriatique, le bien laver et le sécher. Il serait même utile de faire passer l’oxigène à travers une dissolution de potasse caustique et même de fragments de pierre à cautère, pour ac- quérir la certitude qu'il n'arrive point d'acide carbonique jusqu’à la baryte. Ces précautions ne paraîtront point super- flues , en observant que cet acide s’unirait à la base et s’op- poserait à la formation du deutoxide. 6. On prend, d’une part, une certaine quantité d’eau , par exemple, 2 décilitres, à laquelle on ajoute assez d’acide hydrochlorique pur et famant, pour dissoudre environ 15 grammes de baryte : la liqueur acide est versée dans un verre à pied, et le verre entouré de glace, que l’on renou- il velle à mesure qu’elle fond. D'une autre part, l'on prend 390 SUR LA COMBINAISON 12 grammes de deutoxide; on les humecte à peine , et on les broie successivement dans un mortier d'agate ou de verre. À mesure qu'ils sont réduits en pâte fine, on les en- lève avec un couteaude buis, et on les verse dans la liqueur : bientôt ils s'y dissolvent sans effervescence , sur-tout par l'agitation. Lorsque la dissolution est opérée, tout en la remuant avec une baguette de verre, l’on y fait tomber de l'acide sulfurique pur et concentré, goutte à goutte, jusqu’à ce qu'il y en ait un léger excès, lequel se manifeste par la propriété qu'a le sulfate de baryte qui se forme tout à coup, de se déposer facilement en flocons. Alors on dissout, comme la première fois, une nouvelle quantité de deutoxide dans la liqueur, et de nouveau on en précipite la baryte par l'acide sulfurique. Le deutoxide est toujours facile à distinguer du sulfate. Il est important de mettre assez d'acide sulfurique pour précipiter toute la baryte, et de ne pas en mettre trop : si lon n'en mettait pas assez, la liqueur filtrerait trouble et lentement; si l'on en mettait trop, la filtration se ferait aussi très-mal. En atteignant le point convenable que nous venons d'indiquer, la filtration se fait avec la plus grande facilité. Lorsqu'elle est faite, il faut verser sur le filtre une petite quantité d’eau distillée que l’on réunit à la liqueur primitive : de cette maniere, celle-ci ne change pas sensiblement de volume; puis, pour ne rien perdre, il est nécessaire d’éten- dre le filtre égoutté sur un plan de verre, d'enlever la ma- tière, de la délayer dans une nouvelle quantité d'eau toujours très-petite, et de filtrer le tout. Les eaux que l'on obtiendra ainsi seront peu chargées : l'on s’en servira pour laver les filtres suivants. : DE L’'OXIGÈNE AVEC L'EAU. 3ot Cette opération étant terminée, l’on en fait une toute semblable, c'est-à-dire que l’on dissout du deutoxide de Barium dans la liqueur, qu'on y ajoute de l'acide sulfurique pour én précipiter la baryte, etc., et que l’on ne filtre qu’a- près avoir fait deux dissolutions et deux précipitations. C’est sur le nouveau filtre que l’on verse les eaux de lavage de l'opération précédente : après quoi l'on en obtient de nou- velles avec la matière de ce filtre égoutté, ou plutôt on le comprime dans un double linge d’un tissu bien serré. La seconde opération est suivie d’une troisième, la troi- sième d’une quatrième , et ainsi de suite, jusqu'à ce que la liqueur soit assez chargée d'oxigène. En employant la quantité d'acide hydrochlorique indiquée, l'on peut traiter environ 90 à 100 grammes de deutoxide de Barium : il en résulte une liqueur chargée de vingt-cinq à trente fois son volume d’oxigène. Si l’on voulait l'oxigéner davantage, il faudrait y ajouter de l’acide hydrochlorique. Plusieurs fois je suis parvenu, ‘par ce moyen , à charger la liqueur de 125 volumes d'oxigène : seulement je l’acidifiais assez tout de suite, pour pouvoir y dissoudre trente gram- mes de deutoxide, én ayant soin d’ailleurs de maintenir l'acidité à tel point qu'à la suite de l'opération je pouvais encore dissoudre une vingtaine de grammes de deutoxide sans l'intermède de l'acide sulfurique; maïs j'ai reconnu que, quand la liqueur renfermait à-peu-près cinquante volumes d'oxigène , elle laissaït dégager assez de gaz, du jour au len- demain , pour qu’il n’y eût point d'avantage à continuer de l'oxigéner par le deutoxide. | 7. Lorsque la liqueur est oxigénée au point que l'on désire, on la sursature du deutoxide en la tenant toujours 392 SUR LA COMBINAISON dans la glace. Bientôt il s'en sépare d'abondants flocons de silice et d'alumine , ordinairement colorés en jaune par un peu d’oxide de fer et d'oxide de manganèse. Le tout doit être promptement jeté sur une toile; on y enveloppe la matière et on finit par l'y comprimer fortement. Cette opération ne peut être bien faite qu'à deux ; il faut l'exécuter en peu de tempss car, quoiqu'il n'y ait que peu d'oxide de manga- nèse , il suffit pour produire un dégagement assez considé- rable d'oxigene. 8. Comme , dans la liqueur filtrée à travers la toile, il serait possible qu'il restât encore un peu de silice, d'oxide de fer, d'oxide de manganèse, et qu'il est nécessaire de précipi- ter toutes ces matières, on reprend la liqueur et on y ajoute, en l'agitant, toujours entourée de glace, de l'eau de baryte goutte à goutte. Si, la baryte étant en excès légèrement sensible au papier de curcuma, il ne se produit point de précipité, c'est une preuve que tout l’oxide de fer et tout l'oxide de manganèse sont séparés. S'ils ne l'avaient point été complètement dans l'opération précédente, ils le seraient dans celle-ci. A peine le seraient-ils, qu'il faudrait tout de suite verser la liqueur sur plusieurs filtres (deux ou trois): l’oxide de man- ganèse en dégage tant de gaz, qu'on ne saurait l'isoler trop vite. Quelquefois même l’on est obligé d'employer des filtres doubles , parceque le gaz soulevant les fibres du papier, déchire ceux qui sont simples. Quelquefois aussi, pour éviter les pertes, il faut remettre sur un autre filtre les petites portions de liqueur qui restent sur les filtres primitivement employés. D'ailleurs tous les filtres doivent être comprimés dans une toile pour les égoutter. Ceux qui contiennent des DE L'OXIGÈNE AVEC L'EAU. 393 quantités notables d’oxide de manganèse , s'échauffent. au point de brüler la main. 9. La liqueur ne contenant plus que de l'acide hydro- chlorique, de la baryte, de l’eau et de l’oxigène, est remise dans le même vase, et maintenue à zéro, comme à l'ordi- naire, par de la glace. L'on en précipite d’abord toute la ba- ryte par un petit excès d'acide sulfurique; puis, après lavoir filtrée et entourée de nouveau de glace, l'on y verse peu-à- peu, en l'agitant, du sulfate d'argent pur, que l’on se pro- cure au moyen de l’oxide d'argent et de l'acide sulfurique. Il est indispensable que ce sel ne contienne point d'oxide libre. Il est décomposé par l'acide hydrocblorique; et de cette décomposition résulte de l’eau, du chlorure d'argent, qui se précipite, et de l'acide sulfurique, qui remplace l'acide hydrochlorique. Quand la quantité de sulfate d'argent est assez grande pour que la décomposition de l'acide hydro- chlorique soit complète, la liqueur devient limpide tout-à- coup : jusque-là , elle reste trouble. S'il faut qu'il n’y reste point d'acide hydrochlorique, il est nécessaire aussi qu'elle ne contienne point un excès de sulfate d'argent : on l'éprou- vera done successivement par le nitrate d'argent et par l'acide muriatique : ces épreuves se font en mettant un peu de ces réactifs dans des tubes , et y ajoutantune goutte de la liqueur. Des que la liqueur est bien préparée, on la jette sur un filtre qu'on laisse égoutter et que l’on comprime dans une toile. Le liquide provenant de la compression est versé sur un nouveau filtre, parce qu'il est un peu trouble. Peut-être trouvera-t-on extraordinaire qu'au lieu de traiter la liqueur par le sulfate d'argent, on ne la traite pas tout de suite par l’oxide d'argent : c’est qu’en se servant de cet oxide, 1818. 5o 394 SUR LA COMBINAISON il est impossible d'obtenir de l’eau oxigénée. En effet, que l’on mette peu-à-peu de l’oxide d'argent dans la liqueur , et qu'on l'emploie même de maniere que l'acide hydrochlorique soit completement détruit, sans que pour cela il y ait excès d'oxide, lon verra que, chaque fois que l’on ajoutera une portion de celui-ci, il se produira une efferverscence très- sensible , et qu’en dernier résultat la liqueur filtrée ne retien- dra pas d'oxigène. 10. Les opérations précédentes ont eu pour objet d’ob- tenir une liqueur composée d'eau, d'oxigène, et d'acide sulfurique. Il faut actuellement en séparer cet acide : à cet effet, on la verse dans un mortier de verre entouré de glace, et l'on y ajoute peu-à-peu de la baryte éteinte , bien délitée et réduite en poudre fine, ou plutôt de la baryÿte cristallisée, desséchée par l'acide sulfurique dans le vide et bien broyée; on la broie de nouveau dans le mortier de verre; et lorsqu'on juge qu’elle est unie à l’acide, on en ajoute une autre partie, etc. Enfin, lorsque la liqueur fait à peine virer au rouge le papier de tournesol, on la filtre; on comprime le filtre dans une toile; puis, après avoir réuni les deux liqueurs, on les agite, et l’on en achève en même temps la saturation par de l’eau de baryte. Il faut mème verser un très-petit excès d’eau de baryte, pour achever de séparer des traces de fer et sur-tout de man- ganèse que la liqueur pourrait encore contenir; bien en- tendu que la filtration devra être faite aussitôt après, en prenant les précautions précédemment indiquées. L’excès de baryte sera ensuite précipité par quelques gouttes d’acide sulfurique faible, et l’on s’arrangera de manière que la li- queur contienne plutôt un peu d'acide qu'un peu de base : DE L'OXIGÈNE AVEC L'EAU. 395 celle-ci tend à dégager l’oxigène, tandis que l'acide rend la combinaison plus stable. 11. Enfin l’on mettra dans un verre à pied bien propre la liqueur très-claire, qui devra être regardée comme de l'eau oxigénée étendue d'eau pure; le verre sera placé dans une large capsule aux deux tiers pleine d'acide sulfurique concentré : l'appareil sera introduit sous la cloche pneuma- tique, et l’on fera le vide. L'eau pure, ayant beaucoup plus de tension que l’eau oxigénée, se vaporisera bien plus rapi- dement; de telle sorte, par exemple, qu'au bout de deux jours, la liqueur contiendra peut-être deux cent cinquante fois son volume d’oxigène. Les observations suivantes ne doivent point être négligées. Il faut agiter l'acide de temps en temps. Il arrive quelquefois que, sur la fin de l'évaporation, la liqueur laisse dégager un peu de gaz ; ce dégagement, qui fait monter le mercure dans l’éprouvette, est dû sans doute à des traces de matière étrangère qui reste dans la liqueur : on l’arrête par l’addition de deux à trois gouttes d'acide sul- furique extrêmement faible. Quelquefois aussi la liqueur laisse déposer quelques flo- cons blanchâtres de silice; il est bon de les séparer ; la dé- cantation au moyen d'une pipette très-pointue, réussit bien : on perd à peine de la liqueur. Tant que la liqueur n’est pas très-concentrée, l'évapora- tion a lieu tranquillement; mais lorsque l’eau oxigénée ne contient presque plus d’eau, il se produit souvent des bulles qui ne crèvent que difficilement. Au premier coup-d’œil, on croirait qu'il se dégage beaucoup de gaz oxigène : en exa- minant J'éprouvette, on verra qu’il n'en est rien. À peine bo. 3090 SUR LA COMBINAISON montera-t-elle sensiblement dans l'espace de vingt-quatre heures; et encore cette ascension proviendra d’une petite quantité de gaz dégagé de l'acide sulfurique et appartenant à une portion d’eau oxigénée vaporisée. On reconnait que la liqueur est concentrée le plus pos- sible, lorsqu'elle donne 475 fois son volume de gaz, sous la pression de om.76 et à la température de 14°. A cette épo- que, en effet, elle ne se concentre plus, quel que soit le temps quon la tienne dans le vide. L'épreuve s'en fait promptement en prenant une très-petite pipette dont la tige est marquée d’un trait de lime et étranglée en-ce point, la remplissant de liqueur jusqu'au trait, étendant de douze volumes d’eau cette liqueur qui, dans mes expériences, était toujours de 5 centièmes de centilitre, et décomposant par l'oxide de manganèse une quantité déterminée de cette même liqueur ainsi étendue. Cette dernière expérience consiste à prendre un tube de verre fermé à la lampe par un bout, long de 40 à 45 centimètres, large de 15 à 18 millimètres; à le remplir de meréure à 12 millimètres près ; à le renverser, à y introduire la portion de liqueur étendue sur laquelle l’ana- lyse doit être faite , en seservant, pour cela , d’une pipette plus grande que la première, et dont la capacité bien connue sera d'environ 11 centiemes de centilitre ; à remplir ensuite exactement le tube avec de l’eau qui servira à laver la: pi- - pêtte même, ou bien en partie avec du mercure; à boucher le tube avec un obturateur enduit de suif, à le retourner, et à y faire passer un peu d'oxide de manganèse délayé dans l'eau. T'oxigene se dégagera à l'instant. Il ne s'agira plus en- suite que de fermer le tube avec la main, de l’agiter en di- vers sens, pour multiplier les points de contact entre la liqueur et l'oxide, et de mesurer le gaz. Nous ne devons DE L'OXIGÈNE AVEC L'EAU. 397 point rechercher ici comment l’oxide de manganese peut dégager l’oxigene de l’eau oxigénée; qu'il suffise de savoir qu'il le dégage tout entier , sans en absorber, et sans aban- donner une partie du sien. 12. L'acide hydrochlorique n’est pas le seul acide capable d’agir sur le deutoxide de Barium, de manière à former un sel de baryte et de l'eau oxigénée. Tous les acides qui peu- vent dissoudre la baryte possèdent encore cette propriété ; mais, comme il n’en est aucun qui attaque le deutoxide de Barium si bien que l'acide hydrochlorique , et que presque tous seraient tres-difficiles à séparer completement de l’eau oxigénée , il s'ensuit que l'acide hydrochlorique doit être employé de préférence. Outre le deutoxide de Barium, il est aussi d’autres oxides qui, mis en contact avec les acides, produisent de l’eau oxi- génée : tels sont les peroxides de potassium, de sodium , de strontium, de calcium, et quelques autres encore. Toute- fois , il est impossible de s’en servir, non-seulement parce qu'on ne saurait les séparer complètement de la liqueur oxi- génée, mais encore parce que leur préparation présente de grandes difficultés. Ainsi, jusqu'à -présent, le procédé qui vient d’être décrit est le seul qui permette de se procurer une quantité très- notable d’eau oxigénée. 13. L'eau oxigénée, pour être conservée le plus long-temps possible , doit être versée dans un long tube de verre fermé à l’une de ses extrémités; on le bouche par l’autre avec du - liége, et on l'entoure de glace. Pourvu qu'on mette les vases à la cave, dans l'été, et qu’on les recouvre d’une cloche, la quantité de glace fondue en un jour est tres-petite. 398 SUR LA COMBINAISON De l'analyse de l'eau oxigenee. 14. Lorsqu'on soumet l'eau oxigénée à l’action de la chaleur, elle se décompose et se transforme en eau et en gaz oxigene pur : de-là le moyen d'en faire l'analyse. Il ne faudrait pas la tenter sur de l'eau saturée d’oxigène. Le dé- gagement du gaz serait si brusque et si considérable, pour peu qu'on employät de liquide, que l'expérience ne serait pas sans danger. Tous les obstacles disparaissent, au contraire. en étendant l’eau oxigénée d’une certaine quantité d’eau dis- tillée. Voici comment l'opération fut faite. 19. Je pris une petite ampoule bien sèche, à deux pointes, et je la pesai avec une bonne balance; j'y introduisis de l'eau oxigénée pure, en faisant plonger dans celle-ci l’une des pointes de l’ampoule, et aspirant lentement l'air par l’autre. Cela étant fait, je fermai, à la flamme d’une allu- mette, l'extrémité de la pointe inférieure, et je pesai de nouveau l’ampoule : la différence des deux poids me donna exactement celui de l'eau oxigénée. 16. De l’eau distillée ayant été versée dans un verre, jy brisai l'extrémité de la pointe inférieure de l’ampoule; l’eau oxigénée ne tarda point à s’écouler. Dès-lors je lavai, par aspiration, l’ampoule elle-même, d’abord avec l'eau du verre, puis avec d'autre eau ; ensuite je versai le tout dans un flacon dont le poids m'était connu. Je lavai le verre à plusieurs reprises; je réunis les eaux de lavage à la liqueur, et, pesant le flacon qui était en partie plein, j'en conclus le poids de celle-ci, en retranchant du poids du flacon presque plein celui du flacon vide. Retranchant, après cela, le poids DE L'OXIGÈNE AVEC L'EAU. 3y9 de l’eau oxigénée du poids total de la liqueur, j'eus celui de l'eau unie à l'eau oxigénée. 17. Après avoir pesé dans une ampoule à deux pointes une certaine quantité de l’eau oxigénée étendue d'eau, en m'y prenant comme je viens de l'indiquer pour l’eau oxi- gène pure, je fis passer l’'ampoule, dont les deux pointes étaient fermées hermétiquement, dans un tube de verre ren- versé, bouché à son extrémité supérieure et plein de mercure. La longueur de ce tube était d'environ 48 centimetres, et son diametre intérieur de 2 centimètres. Au moyen d'une longue baguette de verre qui resta dans le tube, je brisai l'ampoule, et tout de suite je chauffai peu-à-peu la liqueur en l’entourant de charbons maintenus à une certaine di- stance dans ure galerie circulaire de fil de fer, qu'un man- che, formé de fil de fer lui-même , permettait d'élever ou d'abaisser à volonté. Tout l’oxigène reprit promptement l'état gazeux. Tantôt j'élevais le grillage au-dessus du tube, pour permettre à la vapeur aqueuse de se condenser; et tantôt, au contraire, je l’abaissais pour porter la liqueur à l'ébullition. Je ne cessai de la chauffer qu’à l'époque où non -seulement elle ne laissa plus dégager de gaz, mais encore où je l’eus fait bouillir à plusieurs reprises. Dans quelques expériences ( car celle que je viens de décrire a été répétée plusieurs fois), je fis même passer dans le tube, après le refroidissement de la liqueur, un peu d’oxide noir de manganèse délayé dans l’eau, afin de m’assurer si tout l'oxigène était dégagé. Jamais la moindre bulle ne s’est ma- nifestée, d’où il est évident que la chaleur seule suffit pour opérer l’entier dégagement de l’oxigène. Il fallait enfin me- surér lé gaz obtenu; c’est ce que je fis à la manière ordi- .4vo SUR LA COMBINAISON naire ; J'allai même souvent plus loin , je l’essayai par l’h y dro gene, et je le trouvai constamment pur, à + centieme près. 18. L'analyse de l'eau oxigénée me semblait si impor- tante, que je crus devoir la faire par un autre procédé que -celui que je viens de décrire. Sachant que l’oxide noir de manganèse possédait la propriété de dégager l'oxigène de cette eau sans en absorber et sans en abandonner la plus petite portion, je m'en servis, au lieu de chaleur, pour opérer ce dégagement. Je fis donc l'expérience de la même manière : seulement, lorsque l'ampotde fut brisée, j'introduisis succes- sivement, au haut du tube, quelques gouttes de dissolution de potasse caustique faible, et un peu d’oxide de manganèse délayé dans l’eau; quelque temps après, je fermai le tube avec la main, je l'agitai en divers sens pour multiplier les points de contact entre la liqueur et l’oxide, et je mesurai le gaz. L’addition de la potasse n’a pour objet que de satu- rer la tres-petite quantité d’acide que peut contenir la liqueur oxigénée acide, qui, s’il restaitlibre, dégagerait un peu d'oxi- gene de l’oxide de manganèse lui-même (49 et 50). Je vais actuellement rapporter les résultats auxquels je suis parvenu, avec les données de chaque expérience. Analyse d'une eau oxigenee, dont la densité était de 1,415. PREMIÈRE EXPÉRIENCE. Poids de l’'ampoule de verre, en partie pleine d’eau oxi- pence: AE CHRETIENS di Re RE ROSEAR LAS AftO nt Poids de la même ampoule vide et sèche..... © ,421 Donc, poids de l’eau oxigénée. ....,....:.. 1) 190 | DE LOXIGÈNE AVEC L'EAU. 4ot Poids du fläcon en partie plein de l’eau oxigénée précé- dente, et de l’eau qui a servi à étendre celle-ci. 1235003. Poids du flacon vide et sec... ....... + 100 ,5929. ART. 2. Donc, poids de l’eau oxigénée et de l'eau... 225%" 074. ) 107 Mais le poids de l’eau oxigénée est de ...... 2x ,190. = + Par conséquent, celui de l’eau ajoutée est de.. 20 5924. s Bit. ip Poids de l’ampoule de verre, en partie pleine d’eau oxi- génée étendue d’eau distillée........... PR SA net 7 0 Poids de la même ampoule, vide et sèche.. 0 1307. Donc, poids de l'eau oxigénée étendue d’eau LL r I: SE ENT PTNET RE ESRRAONT ENT MNN CIRE L. ,014. Gaz dégagé, par la chaleur, des 1°°*,814 d’eau oxigénée étendue d’eau distillée ; pression , 76 centimètres ; tempéra- ture centigrade,, 13235... :....- ERA FT MTS Donc, gaz oxigène contenu à la pression et à la température précédentes, dans les 295°%,074 d'eau oxigénée étendue d’eau distillée, et par conséquent dans 1,150 d'eau oxigénée pure. 36°", 506. L ÉRRERE ERRT Or, 36,506 de gaz oxigène, sous la pression de 76 cen- timètres et à la température de 13°), pèsent. 05,498. Par conséquent, les 1°*,150 d’eau oxigénée pure sont formés de 0,660 d’eau et de 0,490 d'oxigène. ; Mais, dans of”,660 d’eau, il y a 0**,582 d'oxigène, en supposant que le poids de l'oxigene soit à celui de l'hydro- gène comme 88,29 est à 11,71. Ainsi l’eau oxigénée qu'on 1818. 5r 402 SUR LA COMBINAISON vient d'examiner contiendrait 0°**,582 d’'oxigène naturel, et 0%*,490 d'oxigène combiné. SECONDE EXPÉRIENCE. Cette expérience a été faite sur la même liqueur éten- due d’eau que la précédente, mais en se servant d'oxide de manganèse pour dégager l’oxigene. Poids de l’eau oxigénée étendue d'eau. ..... 1°**,014. Gaz dégagé par l'oxide de manganèse de cette quantité d'eau, sous la pression de 76 centimètres et à la tempéra- o centil. 1 10 0 TERRE PCR AE ee Vas DR Ne 2 Donc, gaz oxigène contenu dans les 22#*,074 du mélange d'eau oxigénée et d’eau distillée, et par conséquent dans gram. ° 1véné centil. "100 d'éaOxISERÉE Dunes :. : 2x: des de 0): SO TOD: Dans la première expérience, on a retiré de la même quantité d'eau oxigénée.................... 36,506. Par conséquent, il n’y a qu'une différence de 0,284, ou — 129 * Analyse d'une eau oxigénée dont la densité se trouvait comprise entre 1,415 et 1,452. 18 bis. L'analyse de cette eau a été faite de même que les précédentes, en employant seulement l'oxide de manganèse. En conséquence, je n’entrerai dans aucun détail sur les opérations que lon a été obligé de faire pour arriver à des résultats exacts. Je ne rapporterai que les nombres qu'il est indispensable de connaître. Poids de l’eau oxigénée pure. ............. o°°”,947. Poids de l’eau ajoutée à l’eau oxigénée. ..... 23 ,564. DE L'OXIGÈNE AVEC L'EAU. où Poids du mélangede ces deuxquantitésd'eau.. 24,511. Poids de la portion de mélange, mise en contact ‘avec l'oxide/de manganèse. vente dise Vi 2ro. Gaz oxigène dégagé de cette portion du mélange par l'oxide de manganèse, sous la pression de 0",7647; et à la température de 14° centigrades. . . ...... RUN NES te 50 Donc, gaz oxigené qui pourrait être dégagé de tout le mélange, et par conséquent des 0°**,947 d'eau oxigénée pure , à la température de 14° centigrades, et sous la pres: SIC D TO A » œurciae n sdelele eo eetae Sem essaie 31°%*,308. Poids de 31°**,398 d'oxigène, sous la pression de 0",7647, et à la température de 14° centigr............ 0°,424. Par conséquent, les 0‘”",947 d'eau oxigénée pure doivent oxigène.. … 0"”,424. être regardés commé composés de eau pure. © ,523, Mais 0°°",523 d’eau pure contiennent 0,462 d’oxigëne, dans la supposition où le poids de l'oxigène de l'eau est à celui de l'hydrogène comme 88,29 à 11,71. L'oxigène ajouté serait donc à l'oxigenie constituant de l'eau :: 424 : 462, ou :: 2r à 23 environ. Analyse d'une eau oxigénée dont la densité était de 1,452. 19. Cette eau est la plus dense, et, par conséquent, la plus chargée d’oxigène que j'aie pu obtenir. En effet, lors- qu'elle pesait 1,432, je la tins encore sous la machine pneu- matique pendant deux jours ; et au bout de ce temps, elle avait la même densité, quoique son volume füt diminué d’une manière très - sensible. J'en fis l'analyse et par la 5r. 4o4 É SUR LA COMBINAISON chaleur et par l'oxide de manganèse, comme je l'ai dit pré- cédemment. PREMIÈRE EXPÉRIENCE. Poids de l'eau oxigénée pure.............. o"",804. Poids de l’eau ajoutée à l’eau oxigénée...... 19 337. Poids du mélange de ces deux quantités d'eau. 20 ,201. Poids de la portion du ASE soumise à lagalssesee ee ue AS NE M TN RP A 2 Gaz oxigène dégagé de cette portion du mélange par la chaleur, sous la pression de o m7625 , et à la température di centierades, A1. en Le AA IL 3 10 Donc, gaz oxigene qui pourrait être dégagé de | tout le mélange, et par conséquent des 0%°",864 d’eau oxigénée pure, à la température de 14° centigrades , et sous la pression de 0",7625.... 29 ,63. Poids de 29“"*,63 d'oxigène, sous la pression de 0",7625, et à la température de 14° centigrades. . ....... 01,398. Par conséquent, les 0%”"864 d’eau oxigénée pure doivent être regardés. comme composés oxigène..., O0. ,398. EAN a: 6 a 5 AS ca net ME 6 Mais 0°",/466 d’eau pure contiennent 0®®,411 d’oxigène, en admettant que dans l’eau le poids de l’oxigène soit à celui de l'hydrogene comme 88,29 à 11,71. D'où il suit que dans cette eau oxigénée, la quantité d’oxi- gène ajouté serait à la quantité d’oxigène constituant de l’eau, à-peu-près comme, 4o à 41, c'est-à-dire que ces quantités se- raient, pour ainsi dire, égales. DE L'OXIGÈNE AVEC L'EAU. 4o5 SECONDE EXPÉRIENCE. L'expérience a été faite sur une portion du mélange d’eau oxigénée et d’eau de l’expérience première. Poids de la portion du ui soumise à l'ana- FR LAURE ET ES AO CHE PAPAS Ho rs EE" oxigene dégagé de cette SoHéén du mélange, par l'oxide de manganèse, sous la pression de 0",7625, et à la température de 14°........... DURE MNT ge Donc le gaz oxigene qui pourrait être dégagé de tout le mélange, et par conséquent des o°"",86/ d’eau oxigénée pure de l'expérience précédente, à la température de 14°, et sous la pression de 0°,7625............... UNIT Oo EL o Mt Résultat qui s'accorde avec celui de la précédente expé- rience, à moins de -. Ayant répété ces deux expériences, j'ai obtenu des résul- tats semblables, et un peu plus rapprochés. Je regarde donc ces résultats comme bons. J'ai admis dans les expériences précédentes que l’eau était formée de 88, 29 d'oxigène et de 11,71 d'hydrogène; mais comme MM. Berzelius et Dulong viennent de démontrer qu’elle contenait un peu plus d’oxigène , et que le véritable rapport entre ses deux principes était celui de 88,90 à 11,10, il en résultera un peu pu de différence que je ne l'ai dit, entre la quantité de l’oxigène de l’eau et celle d'oxigène dont elle peut se charger. 19 bis. Quoi qu'il en soit, il me semble que, d'après ces analyses et sur-tout celle de l'eau oxigénée, dont la densité est de 1,452, l’on peut conclure que l’eau la plus oxigénée est 400 SUR LA COMBINAISON un peroxide d'hydrogène, qui contient, relativement à la même quantité d'hydrogène , deux fois autant d'oxigene que l'eau ordinaire; et que toutes les fois que l’eau oxigénée ne contient pas cette quantité d’oxigène , elle peut être regardée comme un mélange d’eau pure et de peroxide d'hydrogène. Il serait possible cependant qu'il y eût un degré d'oxigénation inférieure : ce qui tendrait à le faire soupçonner, c'est que je n'ai pu obtenir le peroxide d'hydrogène, sans quelques traces d'acide sulfurique, etc., et que j'ai observé que les acides qui rendaient en général la combinaison plus stable devenaient sur-tout nécessaires , lorsque l’eau était oxigénée à- peu-près à moitié. Mais, d'une autre part, il faut remarquer que la quantité d'acide ajouté est extrêmement faible, et qu'il n’agit peut-être qu’en neutralisant l’action répulsive de quel- ques parcelles terreuses qui restaient dans la liqueur. De nouvelles expériences décideront facilement cette question. Propriétés physiques du peroxide d'hydrogène. 20. Le peroxide d'hydrogène est liquide et incolore comme l’eau. Il est sans odeur ou en a une si faible, qu’elle est insensible pour presque tout le monde. Mis en contact avec les papiers de tournesol et de curcuma, il en détruit peu- à-peu la couleur et les rend blancs. Il attaque l'épiderme très-promptement, quelquefois même tout-à-coup, le blan- chit et cause des picotements dont la durée varie en raison des individus et de l'épaisseur de la couche de liqueur : si cette couche était trop épaisse, ou si elle était renouvelée, la peau elle-même serait attaquée et détruite. Appliqué sur la langue, il la blanchit et la picote aussi, épaissit la salive, DE L'OXIGÈNE AVEC L'EAU. 407 et produit une sensation difficile à exprimer, mais qui se rapproche de celle de certaines dissolutions métalliques. Sa tension est tres-faible, bien plus faible que celle de l'eau : voila pourquoi l'eau oxigénée à la température ordinaire se concentre dans le vide par l'intermède d’un corps absorbant, tel que l'acide sulfurique : telle est encore la raison pour laquelle l'évaporation dans ce cas se ralentit de plus en plus, de telle sorte qu'à la fin elle est extrêmement lente ; elle a toujours lieu cependant, car toute la liqueur finit par disparaître, et peut même disparaître sans production de gaz, ce qui prouve que le peroxide d'hydrogène entre en vapeur sans éprouver de décomposition. Si l’on était curieux de constater cette dernière propriété, on y parvien- drait en plaçant de l’eau oxigénée dans une petite cornue tubulée, fermant la tubulure, adaptant le col de la cornue à un récipient que l’on entourerait de glace, et disposant l’appa- reil de manière à pouvoir y faire le vide à volonté : mieux vaudrait encore, et c'est ce que j'ai fait, souffler un appareil à la lampe, afin de remplacer, autant que possible, les bouchons par des soudures. J'ai essayé, mais vainement, de solidifier le peroxide d'hydrogène. Exposé à un froid de 30° pendant trois quarts d'heure, il est toujours resté liquide: aussi, lorsqu'on a de l'eau qui ne contient que trente à quarante fois son volume d’oxigene et qu'on la soumet à une température de 10° sous zéro , la partie qui reste liquide est-elle bien plus oxigénée que celle qui se congele. Il est même probable que si celle- ci contient de l’oxigène, ce gaz appartient à une certaine quantité d’eau interposée. J'avais cru d’abord que je pourrais employer ce procédé pour concentrer l’eau oxigénée, sur-tout 408 SUR LA COMBINAISON en ayant soin de briser la glace et de la comprimer for- tement dans un linge : c'était une erreur; la glace même après la compression retient trop d’oxigène pour être abandonnée. 6 L'une des propriétés physiques du peroxide d'hydrogène que je tenais le plus à bien connaître , c'était sa densité ; comme je n'avais que peu de liqueur, je me servis pour cela d’une pipette dont la tige était marquée d'un trait et étranglée en ce point. Après avoir pesé cette pipette bien sèche et un petit vase bien sec lui-même, avee beaucoup de soin, je remplis la pipette de peroxide jusqu'au trait;. je mis ensuite la pipette dans le vase, et je fis une nouvelle pesée; puis je retirai le peroxide, je lavai les vases, les fis sécher, remplis la pipette d'eau jusqu’au trait déja indiqué, et pesai le tout de nouveau. Au moyen de ces données, j'avais tout ce qu'il fallait pour connaître la densité du per- oxide d'hydrogène : je l'ai trouvée de 1,452. Voici les nombres d’où je l’ai conclue. Poids des vases et du peroxide d'hydrogène.. 93""*,127. Poids des vases et de l’eau distillée.......... 91 ,399. Poids des vases vides etsecs............ + NOT 002. Donc, poids du peroxide. .............. 44800068 Donc, poids d’un même volume d’eau distillée. 3 ,833. ce qui donne le résultat indiqué. En répétant l'expérience, je suis tombé sur le même nombre à un demi-millième près. L'on voit, d'après cela, que le peroxide d'hydrogène est bien plus dense que l’eau. Pour s’en convaincre, il n'est même pas nécessaire d’en prendre la densité; il suffit de le verser DE L'OXIGÈNE AVEC L'EAU. 409 dans l’eau : en effet, quoiqu'il soit très-soluble, il coule à > Quoiqu'il y ; ; travers, comme une sorte de sirop. j De l'action de la plupart des Corps sur le peroxide d'hydrogène. 2r. Parmi les différents corps, les uns sont sans action sur le peroxide d'hydrogène; d’autres le rendent plus stable; d’au- tres le décomposent en s'appropriant une partie de son oxigène; mais, ce qui est bien digne de remarque, c’est qu'il en est un assez grand nombre qui opèrent la décompo- sition du peroxide à la température ordinaire, sans $unir ni à l’eau, ni au gaz oxigène, qui en résultent ; quelquefois même, cette décomposition se fait en donnant lieu à une sorte de détonation , tant le dégagement du gaz est subit; et alors la température, loin de s'abaisser, comme on au- rait pu le croire, puisque l’oxigène passe de l’état liquide à l'état gazeux, s'élève au point qu’il y a production de lu- mière, c'est-à-dire au moins de 550 à Goo: Quelquefois aussi le corps , tout en décomposant le peroxide, se décom- pose lui-même. Tel est, par exemple, l’oxide d'argent : à peine est-il en contact avec le peroxide même très-étendu d'eau, qu'il en dégage tout l'oxigène, et qu'il se réduit. Mais n’anticipons point sur l'exposé des phénomènes ; sui- | vons-les avec ordre; et quand nous les aurons décrits, nous verrons s’il est possible d'en assigner la cause. g Action des [luides tmponderables. 22. La chaleur décompose promptement le peroxide d'hydrogène ; la décomposition devient d'autant moins 1818. 52 410 SUR LA COMBINAISON facile, qu’elle est plus avancée. L'eau, à mesure qu’elle se trouve mise en liberté, se combine sans doute avec la por- tion de peroxide non décomposé, et le rend plus stable. On en jugera par les expériences suivantes. Que l'on mette du peroxide d'hydrogène dans un petit tube de verre; qu'on l’expose, en plongeant le tube dans l'eau, à une chaleur progressive de 10 à-100°, et l'on verra que la décomposition sera très-sensible à 20°. Elle se ferait avec un bouillonnement des plus considérables, si le per- oxide était soumis de suite à 100°, et l'épreuve serait dange- reuse à tenter dans un yase à col étroit et sur un demi- gramme de liquide. Néanmoins, en jetant celui-ci sur une plaque incandescente, il ne détone pas. Que l’on répète cette expérience après avoir étendu d’eau le peroxide, de manière que la liqueur ne contienne que sept à huit fois son volume d’oxigène, le dégagement du gaz ne sera pas sensible, même à 5o°; il le deviendra bientôt après, augmentera de plus en plus, et ne tardera point à diminuer et à cesser. Dès-lors la liqueur ne sera plus oxi- génée, et, par conséquent, ne produira plus d'effervescence avec l’oxide de manganèse. Exposé à la lumière diffuse, le peroxide d'hydrogène se comporte, toutes circonstances égales d’ailleurs, de même que dans l'obscurité. Dans les deux cas, il laisse dégager quelques petites bulles de temps à autre, et finit, au bout de quelques mois, à la température ordinaire, par être dés- oxigéné en grande partie. Cette désoxigénation, qui dépend probablement de plusieurs causes, me semble être produite Sur-tout par quelques parcelles de matière que retient le DE L'OXIGÈNE AVEC L'EAU. Art peroxide. Pour le conserver autant que possible, il faut l'entourer de glace, comme il a été dit (pag. 397). Traversé par la lumière directe, le peroxide n’éprouve d'altération qu'au bout dé quelque temps. Quand on soumet le peroxide à l’action de la pile, comme on y soumet l’eau ordinairément, il en résulte des effets analogues à ceux que l’on observe avec ce dernier liquide : seulement, le dégagement du gaz oxigene est beaucoup plus considérable. Je dois ébserver toutefois que je n'ai point recueilli les gaz pour les examiner. Action des métaux à la température ordinaire. 23. Les métaux tendent en général à décomposer le per- oxide d'hydrogène, et à le ramener à l’état de protoxide ou d’eau; je n’en connais que quatre qui ne possèdent point d'une manière sensible cette propriété, le fer, l’étain, l’an- timoine, et le tellure. Les plus oxigénables s’oxident et pro- duisent en même temps un dégagement d’oxigène ; les autres, au contraire, conservent leur état métallique, de sorte que tout l'oxigène avec lequel l’eau se combine pour devenir peroxide, est mis en liberté. Une ténuité extrême dans la matiere métallique est une condition indispensable pour une prompte décomposition. Tel métal, qui en poudre très-fine dégagera rapidement l'oxi- gène du peroxide, n’en opérera que très-lentement le dé- gagement s’il est en poudre grossière, et à plus forte raison en masse. Les mêmes phénomènes auraient lieu, quand bien même le peroxide serait étendu d’eau ; seulement ils seraient moins 52, 412 SUR LA COMBINAISON prononcés et dureraient plus long-temps : c'est ce que l'on va voir dans l'examen que nous allons faire de l'action des métaux sur le peroxide pur et affaibli. L'on a toujours procédé aux expériences de la même ma- nière. La liqueur a été mise d’abord , avec une pipette, dans un petit tube de verre fermé par un bout; apres quoi le métal a été introduit dans le verre avec une carte. La quantité de peroxide employée dans chaque essai n'é- tait, au plus, que de quelques gouttes; celle de peroxide étendu d’eau était un peu plus grande. On regardait l’ac- tion comme terminée, lorsqu'il ne se dégageait plus de gaz: on s’assurait alors, par l'addition d’un peu d’oxide de man- ganèse, si la liqueur était complètement désoxigénée. Tous les métaux ont été éprouvés de cette manière , ex- cepté l’urane, le titane, le cerium, le barium, le strontium , le calcium, le lithium, et les métaux des terres, sur lesquels on n'a fait aucun essai. « Des métaux qui décomposent le peroxide d'hydrogène, et qui en dégagent l'oxigène sans s'altérer. Argent très-divisé (provenant de la décomposition récente du nitrate d'argent par le cuivre), et peroæide pur. — Action subite, violente ; dégagement de calorique si grand, que le tube de verre devient brülant; l'argent conserve son état métallique, et tout l'oxigene se dégage à l'instant. Argent fin divisé, et liqueur ne contenant que neuf fois son volume d'oxigène. — Effervescence subite, vive, point de chaleur sensible ; l'argent ne s’oxide pas ; l’action se termine assez promptement; tout l’oxigene se dégage. | DE LOXIGÈNE AVEC L EAU. 413 Le tube ne s'échauffe qu'autant que la liqueur contient au moins trente fois son volume d’oxigene. Argent précipité de la dissolution de nitrate d'argent par de cuivre, mais dont les parties étaient devenues moins ténues par la dessiccation. — Action beaucoup moins forte sur le peroxide qu'avec l'argent très-divisé des deux expériences qui précèdent. Argent limé. — Action beaucoup moins forte encore que celle dont nous venons de parler. Argent en masse. — Action faible, relativement à celle de l'argent divisé. Platine en poudre fine (extrait de l'hydrochlorate-ammo- niaco de platine, calciné avec le sel marin), ef peroxide pur. — Mêmes phénomènes qu'avec argent ; peut-être l’action est- elle encore un peu plus forte. Je n’en conclurai pas, pour cela, que le platine par lui-même agit plus sur le peroxide que l’ar- gent; car, pour que cette conséquence fût juste, il faudrait être certain que la ténuité des parties métalliques, qui a tant d'influence sur l’action, fût la même. Platine en poudre fine, et liqueur ne contenant que neuf CE 2 Ls Al A Lé ù ? fois son volume d’oxigène. — Mèmes phénomènes qu'avec argent. Platine lime et platine en masse. — Même action sur le peroxide qu'avec argent limé et argent en masse. Or très-divisé (provenant de l'hydrochlorate d'or, réduit par le sulfate de fer), et peroxide pur ou étendu d’eau. — Mêmes phénomènes qu'avec argent et platine, pourvu que la Kiqueur ne soit pas sensiblement acide. ( Voyez ce qui est dit à ce sujet, 36.) 414 SUR LA COMBINAISON Or limé et or en masse. — Mème action sur le peroxide qu'avec argent limé et argént en masse. Osmium en poussière noire, et peroxide pur. — Action plus violente qu'avec les métaux précédents ; ce qui peut dé- pendre de ce que le métal était plusdivisé : du reste, mêmes phénomènes. Mêmes phénomènes aussi, peut-être à l'intensité près, entre l'osmium et le peroxide étendu d’eau, qu'entre celui- ci et le platine, l'argent, Palladium en poudre (provenant de la calcination de l'hydrochlorate-ammoniaco de palladium (*\}, et peroæide pur. — Action prompte, très-vive, moins vive cependant que celle du platine, de l'argent, de l'or et de l'osmium ; grand dégagement de calorique. Tout l'oxigene est dégagé presque aussitôt que l’action se manifeste; le métal ne paraît pas s’oxider. Si le peroxide était sensiblement acide, il agi- rait beaucoup moins promptement. (Voyez ce qui est dit à ce sujet, 36 et 37.) Palladium en poudre, et liqueur ne contenant que neuf volumes d'oxigène. — Mèmes phénomènes qu'avec argent, si ce n'est que le dégagement d'oxigène est un peu moins rapide. Rhodium en poudre ( provenant de la calcination de l'hy- drochlorate-ammoniaco de rhodium (*)), et Perorde pur ou étendu d'eau. — L'action de ce métal est à-peu-pres la même que celle du palladium. Iridium en poudre (provenant de la calcination de l'hydro- (*) Cet hydrochlorate m'avait été donné par M. Barruel, chef du labo- ratoire de l'Ecole-de-Médecine. DE L'OXIGÈNE AVEC L'EAU. 415 chlorate-ammoniaco d’iridium (*)), et peroxide pur ou étendu d'eau. — L'action de ce métal est à-peu-près la même aussi que celle du palladium ; seulement il paraît que la présence d'un peu d'acide ne la ralentit pas autant. Plomb réduit en limaille fine, et peroxide pur. — Action lente d’abord , mais qui peu-à-peu augmente, et finit, dans l'espace de quelques minutes, par devenir très-forte en don- nant lieu à beauconp de chaleur. Tout l’oxigène se dégage. Je ne crois pas que le plomb s'oxide. Plomb réduit en limaille fine, et liqueur ne contenant que neuf volumes d'oxigène.— Action faible d’abord. Peu-à-peu elle devient plus sensible;alorsles bulles d'oxigène sesuccèdent assez rapidement, et soulèvent les parcelles métalliques. Ne se formerait-il pas un peu d’oxide, qui, comme on le verra par la suite, décompose facilement l’eau oxigénée? Ce qu'il y a de cértain, c'est qu'au bout d’une heure il ne reste plus d'oxigène dans la liqueur. Bismuth bien pulvérisé, et peroxide pur. — Mèmes phéno- mènes qu'avec le plomb. Bismuth bien pulvérisé, ‘et liqueur ne contenant que neuf volumes d'oxigène. — K'action est bien lente; il ne se dé- gage des bulles que de temps à autre. Toutefois, au bout de douze heures, la liqueur n'était plus oxigénée. Le métal ne m'a pas paru s'oxider. Mercure, et peroxide pur. — Mèmes phénomènes qu'avec le plomb et le bismuth, pourvu que la liqueur ne soit point acide; lorsqu'elle contient un peu d'acide sulfurique, il se (*) Ainsi que les deux précédents , cet hydrochlorate m'avait été donné par M. Barruel. 416 SUR LA COMBINAISON forme, en outre, une substance rouge ou briquetée, qui est peut-être un sous-sulfate. Mercure, et liqueur ne contenant que neuf volumes d'oxi- gène. — Dégagement très-sensible de gaz, sur-tout quand la liqueur est plutôt alcaline qu’acide; le mercure ne s’oxide pas; une goutte d'un acide tres-faible suffit pour arrêter le dégagement. Cobalt réduit en poudre fine (provenant d’un globule qui, pendant la réduction, s'était vaporisé (*) ), et peroxide pur. — Effervescence tres:sensible, qui se soutient pendant assez long-temps, et qui se termine sans que l'action devienne vio- lente, et sans qu'il se produise sensiblement de chaleur; dégagement de tout l’oxigene en vingt heures, quand la liqueur n'est pas acide; dégagement d'une portion seule- ment, quand le peroxide contient un peu d'acide sulfurique libre, et formation alors d’une petite quantité de sulfate de cobalt qui rend la liqueur rose. Cobalt réduit en poudre, et liqueur ne contenant que neuf volumes d'oxigène. — Kffervescence assez forte pour soule- ver en peu de temps toutes les petites particules de métal ; dégagement de tout l'oxigène en vingt heures, pourvu que la liqueur ne contienne pas la moindre trace d'acide. Nickel réduit en poudre avec une lime fine (provenant d'un globule bien fondu (*)), et peroxide pur. — Effervescence tres-sensible ; dégagement de tout l'oxigene en vingt heures ; le métal ne s'oxide pas. (*) Ce métal m'avait été donné par M. Laupgier, et avait été extrait de l'oxalate pur. / DE L'OXIGÈNE AVEC L'EAU. 417 Nickel réduit en poudre, et liqueur ne contenant que neuf volumes d’oxigène. — Mèmes phénomènes qu'avec cobalt. Cadmium limé très-fin (*), et peroxidée pur. — Mèmes phé- nomènes qu'avec cobalt, si ce n’est que l'action de celui-ci est un peu plus Die et que la liqueur dans tous les cas reste incolore. Cadmium limé très-fin, et liqueur ne contenant que neuf. foïs son volume d'oxigène. —- Effervescence très-sensible, for- mation d’oxide blanc qui rend la liqueur laiteuse; au bout de vingt heures, plus de dégagement de gaz; cepéndant la liqueur était encore oxigénée , mais aussi le métal HPODÈRRE entiérement’oxidé. Il y a donc une différence ts PAR entre l'action dü cadmium sur la liqueur concentrée, et celle qu'il exerce sur la liqueur étendue d’eau, puisqu'il conserve son “état métal- lique dans l’une, et qu'il s’oxide dans l’autre.” Cuivre en poudre (précipité du sulfate de cuivre par le fer), et peroxide pur. Action Sensible, maïs très-lenté; ce n’est qu’au bout de ‘plusieurs jours que ‘tout l'oxigène est dégage. Cuivre en Ris et liqueur ne contenant que neuf vo- lumés d’ LE — Effervescence très-lente d’abord ; elle a augmenté peu-à-peu au point de soulever tout le cuivre; au bout de quinze heures, la liqueur était complètement dés oxigénée. Observons que s'il y a eu cette différence entre l'action de la liqueur concentrée et la liqueur affaiblie , c'est que celle-ci contenait peut-être un peu d'alcali, tandis que l'autre contenait des traces d'acide. (*) Ge cadmium m'avait été remis par M. Gay-Lussac, qui le tenait de M. Stromeyer. 1818. 53 418 SUR LA COMBINAISON Des métaux qui décomposent le peroxide d'hydrogène en absorbant une partie de son oxigène et déga- geant l'autre. ÆArsenic en poudre, et peroxide pur. — Action subite des plus violentes; flamme produite par la combustion de l'ar- senic qui , en s'acidifiant, empêche que tout l’oxigène ne soit dégagé ou absorbé, du moins instantanément ; par consé- quenttres-grand À agi sl de salorique Lorsque la liqueur est en excès, tout l’arsenic passe à l’état acide et se dissout. Arsenic en poudre , et liqueur ne contenant que neuf fois son volume d'oxigène. — Point d’effervescence ; la liqueur devient acide sur-le-champ : cet acide rendant le peroxide plus stable, il en résulte qu'elle reste long-temps plus; ou moins oxigénée. Molybdène réduit en) poudre, et peroxide pur. — Per très-violente; combustion du métal avec lumière ; grand dé- gagement de calorique; production d’un acide très-soluble, dont la saveur est assez forte, et qui colore l'eau en june Tout le molybdene disparaît quand le peroxide est en excès. . Molybdene réduit en poudre, et liqueur ne contenant que neuf volumes d'oxigène. — Effervescence subite assez vive, production d'acide; absorption ou dégagement de tout l'oxi- gène; au bout de quinze heures, la liqueur était d’un bleu superbe. Sélénium en poudre (*), et peroxide pur. — Action subite et très-violente; grand dégagement de chaleur sans lumière ; (*) Ce métal m'avait été donné par M. Berzélius. w DE L'OXIGÈNE AVEC L'EAU. 419 acidification complète du sélénium qui, par ce moyen, se dissout tout-à-coup. - Sélénium, et liqueur ne contenant que neuf fois son vo- lume d'oxigène. — Point de chaleur; à peine voit-on, de temps à autre, quelques bulles se dégager; mais la liqueur s’acidifie en quelques minutes. Tungstène en poudre (*), et peroxide pur. — Action faible d'abord, mais qui va en augmentant, de manière à devenir violente, et à donner lieu , par conséquent, à un grand dé- gagement de calorique. Au bout de quinze heures, il ny avait plus dans le tube qu’une matiere laiteuse, demi-trans- parente, d'un vert un peu jaunâtre, qui sans doute était un mélange d'acide tungstique jaune et d’oxide bleu. Du reste, cette matière ne laissait pas dégager la plus petite quantités d'oxigène par l’oxide de manganèse. Tungstène en poudre, et liqueur ne contenant que neuf volumes d'oxigène, — Dégagement très-sensible d’oxigène : au bout de quinze heures, il n’en restait plus dans la li- queur. | Chrôme réduit en poudre (*), et peroxide pur. — Effer- vescence sensible , mais faible; la liqueur est devenue pur- purine en quelques minutes : au bout de quinze heures, elle était verdâtre et n’était plus oxigénée. af Chrôme réduit ‘en poudre, et liqueur ne contenant que neuf volumes d'oxigène. — Effervescence très-faible ; Ji- queur verdâtre au bout de quinze heures, et encore un peu oxigénée. (*) Ce métal m'avait été donné par M. Vauquelin. 99 420 SUR LA COMBINAISON Potassium ; et peroxide pur. — Action subite et violente, combustion vive, dégagement d'oxigène et formation d'al- cali : l'expérience ne doit être faite que dans un verre à pied, car quelquefois il y a explosion. Sodium, et peroxide pur. — Mèmes phénomènes qu'avec potassium. Manganèse , et peroxide pur. — Le métal, sous forme de petits globules, produit une vive effervescence et désoxigène promptement la liqueur : ne pourrait-on pas penser qu'il s'oxide d’abord, et que c'est l'oxide qui chasse l’oxigène ? Cependant les globules, au nombre de deux, ne semblaient point altérés. En poudre, il agit bien plus fortement encore ; son action devient bientôt violente; il en résulte, en même temps qu'un dégagement d'oxigène, un grand dégagement de calorique. Manganèse, et liqueur ne contenant que neuf fois son volume d'oxigène. — Effervescence subite, vive; point de chaleur ; désoxigénation complète de la liqueur en peu de temps. Zinc limé très-fin, et peroxide pur. — Action faible ; il se dégage un peu de gaz; en même temps que le métal s’oxide sensiblement: ce n’est que bien long-temps après le contact que la liqueur est désoxigénée. Zinc limé très-fin, et liqueur ne contenant que neuf vo- lumes d'oxigène. — Dégagement sensible de gaz oxigène, en même temps qu'il se forme de l'oxide de zinc: il a fallu plus de quinze heures pour désoxigéner complètement la liqueur. DE L'OXIGÈNE AVEC L'EAU. 421 Des métaux qui sont sans action sur le peroxide d'hy- drogène concentre ou etendu d'eau. Quatre sont dans ce cas : le fer, l’étain, l'antimoine, le tel- lure ; à la vérité, ils dégagent d’abord quelques bulles, mais bientôt le dégagement s'arrête. Le fer dont je me suis servi provenait de fil tres-doux ; l'étain, de la liqueur fumante de Libavius ; l’antimoine, du beurre d’antimoine; et le tellure m'avait été donné par M. Vauquelin. Action des combustibles simples, solides et non métal- liques, sur le peroxide d'hydrogène. 24. Soufre, et peroxide pur ou étendu d'eau. — Ce corps paraît être sans action sur le peroxide; il n’en dégage point de gaz et il ne s’acidifie pas : la liqueur n’éprouve pas plus d’altération que si elle était conservée seule dans un tube de verre. Phosphore en poudre, et peroxide pur. — Point d’effer- vescence sensible ; au bout de douze heures, en essayant la liqueur ; on trouva qu'elle était acide, et que l’oxide de manganèse en dégageait instantanément une grande quantité d'oxigène. Phosphore en poudre, et liqueur ne contenant que neuf fois son volume d'oxigène. — Le phosphore étant intreduit dans le tube, on a rempli celui - ci de liqueur ; puis on l’a bouché et luté avec du mastic, de telle maniere qu'il n'y res- tait pas d'air : il ne s'est pas dégagé la plus petite bulle de gaz; au bout de vingt-quatre heures, la liqueur était acide, 422 SUR LA COMBINAISON mais encore très-chargée d'oxigene ; ce n’est qu’au bout de cinq à six jours qu'elle a été completement désoxigénée. Le phosphore décompose donc le peroxide en s’acidifiant lentement. : lode , et peroxide pur. — Dégagement très-sensible de gaz; formation lente d'acide iodique ; désoxigénation complète de la liqueur, mais seulement au bout de vingt-quatre heures. lode , et liqueur ne contenant que neuf fois son volume d'oxigène. — Action insensible; à peine l'iode se recouvre-t:il de petites bulles ; il ne se forme point d'acide iodique : aussi, après six jours, la liqueur faisait - elle avec l'oxide de manganèse une effervescence presque aussi vive que si elle eût été conservée seule dans un tube de verre. Charbon de bois en poudre fine, et peroxide pur. — Action subite et tres-vive; production de chaleur assez grande; dégagement de tout l’oxigène sans qu'il se forme d'acide carbonique. Charbon de bois en poudre fine, et liqueur ne contenant que neuf fois son volume d'oxigène. — Kffervescence assez : vive sans chaleur; tout l’oxigène se dégage encore sans qu'il _se produise d'acide carbonique : en effet, que l'on fasse passer une certaine quantité de liqueur dans un tube renversé, plein de mercure; qu'on y introduise ensuite du charbon bien pulvérisé, et l'on verra d'une part que ie gaz qui se dégagera promptement de la liqueur ne sera que de l'oxigène, et de l’autre qu'elle se désoxigénera en trés-peu de temps (*). (*) Le charbon de bois calciné ou non calciné , avant de s'en servir, $. DE L'OXIGÈNE AVEC L'EAU. 423 Charbon très-compacte, provenant d'une huile qui, dans la production du gaz hydrogène carboné pour l'éclairage, tombait. goutte à goutte sur des plaques de fonte incandes- centes.—- Ce charbon , bien réduit en poudre, agit tout aussi bien que le ‘précédent : quand il n’est pas bien pulvérisé, son action est presque nulle. Noir de fumée. — Point d'action, sans doute parce que la liqueur ne le mouille pas. Action du peroxide d'hydrogène sur les sulfures mé- talliques à la temperature ordinaire. 25. La plupart des sulfures métalliques que j'ai essayés ont une action très - marquée sur le peroxide d'hydrogène: assez souvent même cette action est violente, et accom- pagnée de beaucoup de chaleur, lorsque la liqueur est concentrée. D'ailleurs, qu'elle soit étendue d’eau ou concen- trée, il en résulte Presque toujours un sulfate, et un déga- gement. plus ou moins sensible d’oxigène. Toutes les expériences peuvent être faites comme celles qui ont été décrites (23). PS TE TT agit également bien sur la liqueur, pourvu qu'il soit réduit en poudre fine. Cependant il n’est pas toujours dans le même état. Le charbon cal- ciné est très-bon conducteur du fluide électrique , tandis que la majeure partie du charbon, ordinaire bien fait, bien préparé, ne possède point la propriété de le conduire, sans doute parce qu'il retient une assez grande quantité d'hydrogène et d'oxigène. L'on voit done qu'il ne faudrait pas se servir indistinctement de toute espèce de charbon Pour garnir, comme on le fait quelquefois, le pied des Paratonnerres; il pourrait en résulter des accidents : le mieux est de n'employer que de la braise, 424 SUR LA COMBINAISON Sulfure jaune d'arsenic réduit en poudre (orpiment) } et peroxide pur.— Action subite et violente, dégagement de gaz, chaleur forte, lumière, formation d'acide arsenique et d'un peu d'acide sulfurique , désoxigénation instantanée et complète de la liqueur. Sulfure jaune d'arsenic en poudre ,; et liqueur ne con- tenant que douze fois son volume d'oxigène: — Point d'effer- vescence, point de lumière, point de chaleur, mais produc- tion d'acide arsenique sur-tout, qui s'oppose à la désoxi- génation complète de la liqueur : du moins, au bout de quinze heures, l’oxide de manganèse en dégageait de l'oxigène, tandis qu'en prenant la précaution de saturer l'acide de temps en temps, la désoxigénation est achevée en quelques heures. Sulfure de molybdène naturel, réduit en poudre, et pero: æide pur. — Mèmes phénomènes qu'avec le sulfure d’arsenic. Sulfure de molybdène en poudre, et: liqueur contenant douze fois son volume d'oxigène. — Dégagement assez vif d'oxigene, qui se soutient pendant long-temps; formation d'un acide de molybdene et d'acide sulfurique; point de lumière, point de clialeur ; une goutte de potasse, au bout de quinze heures , a rendu bleuâtre la liqueur qui était un peu jaune-verdâtre. Sulfure de cuivre très-divisé (fait avec le sulfate de cuivre et l'hydrogène sulfuré), et peroxide pur.— Action subite et violente, accompagnée de beaucoup de chaleur sans lumière ; dégagement de gaz oxigène; disparition du sulfure ; forma- tion dé sulfate; désoxigénation instantanée et complète de la liqueur. DE L'OXIGÈNE AVEC L'EAU. 425 Sulfure de cuivre très-divisé, et liqueur ne contenant que douze fois son volume d'oxigène. — Dégagement de quelques bulles d’abord ; formation, en huit à dix minutes, de sul- fate, qui colore la liqueur, et qui rend l’effervescence plus sensible. Sulfure d'antimoine du commerce, reduit en poudre fine, et peroxide pur. — Action vive et violente; grand déga- gement de chaleur et de gaz; transformation du sulfuré en une poudre blanche, qui donnait à l’eau la propriété de rou- gir le tournesol : c'était probablement un sulfate. Du reste, désoxigénation complète. Sulfure d'antimoine en poudre , et liqueur ne contenant que douze fois son volume d’oxigène. — Point d’effervescence sensible, mais production d’acide sulfurique , qui rougissait fortement le papier, et s'opposait au dégagement de tout l'oxigène :. peut-être s'est-il formé aussi un peu d'oxide d’antimoine, Sulfure de plomb très-divisé (provenant de la décomposi- tion de l’acétate de plomb par l'hydrogène sulfuré), ef per- oxide pur. — Action subite et tres-vive, grand dégagement de chaleur et de gaz; formation de sulfate de plomb; désoxigé- nation complète de la liqueur. Sulfure de plomb très-divisé, et liqueur ne contenant que douze fois son volume d'oxigène. — Effervescence vive; trans- formation du sulfure en sulfate; désoxigénation complète de la liqueur en tres-peu de temps. Galène à grandes facettes, réduite en poudre très-fine. — Son action est a-peu-prèes la même que celle du sulfure pré- cédent. 1818. Eee “ 426 SUR LA COMBINAISON Pyrite de fer réduite en poudre fine, et peroxide pur ou étendu d'eau.— Mèmes phénomènes à-peu-près qu'avec sul- fure de plomb. Sulfure de platine très-divisé (provenant de la décompo- sition de l'hydrochlorate de platine par l'hydrogène sulfuré), et peroxide pur.— Action très-vive, grand dégagement de gaz oxigène et de chaleur; point de traces d'acide sulfu- rique. Sulfure de platine, et peroxide étendu d'eau. — Kfferves- cence vive; désoxigénation complète de la liqueur en peu de temps, sans qu'il se forme d'acide sulfurique. Sulfure de platine fait avec muriate-ammoniaco de platine et soufre dans une cornue de verre. — Mème résultat qu'avec le sulfure précédent. Sulfure de bismuth, artificiel, réduit en poudre fine, et per- oxide pur. — Point de dégagement de gaz; action lente, Le sulfure ne se transforme que peu-à-peu en sulfate d’un blanc jaunâtre ; ce sulfate donne à l’eau la propriété de rougir fortement le tournesol. Sulfure de bismuth en poudre fine, et liqueur ne contenant que douze fois son volume d'oxigène. — Action lente; quel- ques bulles de temps à autre ; formation d'acide sulfurique qui s’est opposé à la désoxigénation complète de la liqueur : peut-être s'est-il formé aussi un peu d'oxide de bismuth. Deutosulfure d'étain (provenant de l'or mussif lavé), et peroxide pur. — Point de dégagement de gaz ; formation lente d'acide sulfurique, lequel empêche que la liqueur ne soit complètement décomposée. Deutosulfure d'étain, et liqueur contenant douze fois son ea DE L'OXIGÈNE AVEC L'EAU. 427 volume d'oxigène. — Mème résultat qu'avec la liqueur con- centrée. Protosulfure d'étain en poudre, et peroxide pur ou étendu d'eau. Action presque insensible ; il se forme cependant un peu d'acide sulfurique. Sulfure d'or (provenant de la décomposition de l'hydro- chlorate d’or par l'hydrogène sulfuré), et peroxide pur ou étendu d'eau.— Action bien faible. Le sulfure commence par dégager un peu de gaz; une très-petite portion de soufre s’acidifie ensuite, et dès-lors la décomposition s'arrête com- pletement. Sulfure d'argent très-divisé (provenant de la décomposi- tion du nitrate d'argent par l'hydrogène sulfuré), et peroxide Pur ou étendu d'eau.— Point d'action, même dans l’espace de trente heures, quoique l'argent, radical du sulfure, en ait une très-grande sur la liqueur. Cinnabre pulvérisé. — Pas plus d'action sur le peroxide que le sulfure d'argent ; au bout de trente heures, la liqueur était tout aussi oxigénée que si elle eût été conservée dans un tube de verre. Action du peroxide sur quelques combustibles composés, autres que les sulfures métalliques. 26. Phosphure de cuivre (obtenu en faisant passer du phosphore en vapeur sur du cuivre incandescent), et per- oxide pur ou étendu d'eau. — Formation lente et très-lente de phosphate sans qu’il se dégage de gaz, si ce n’est quelques bulles au commencement de l'expérience. La liqueur s'est 54. 428 SUR LA COMBINAISON trouvée presque entièrement désoxigénée au bout de trente heures. Phosphure de soufre. — Si ce phosphure agit sur le per- oxide, ce n’est que dans l’espace d’un temps considérable. Carbure de soufre. — Il en est de ce carbure comme du phosphure qui précède. Zodure rouge de mercure (obtenu en mêlant ensemble de l'hydriodate de baryte et du sublimé corrosif), ef peroxide pur ou étendu d'eau. — À peine quelques bulles de gaz. Au bout de quinze heures, la liqueur ne rougissait pas le tour- nesol, et paraissait être à-peu-pres aussi oxigénée qu'une autre portion conservée pour contre-épreuve dans un tube de verre : ainsi point d'action, ou action très-faible. Chlorure de soufre. — En plongeant un tube imprégné de ce chlorure dans le peroxide pur, il y a eu effervescence, production de chaleur, et formation d'acide sulfurique. Hydrure de soufre, et peroxide pur. — Point d’efferves- cence, point de dissolution; mais, au bout de vingt-quatre heures, le soufre de l'hydrure était séparé : il s'était formé de l’eau , sans doute par l'union de l'hydrogène de l'hydrure avec l’oxigene du peroxide. On verra (4o) que l’eau oxigénée possède aussi la pro- priété de décomposer l'hydrogène sulfuré. Chlorures métalliques. (Voyez l'action des sels sur le per- oxide; 54.) Je n'ai point recherché l’action des alliages sur le peroxide d'hydrogène ; il serait curieux de voir si quelques-uns ne posséderaient point la propriété de décomposer plus rapi- SUR L'OXIGÈNE AVEC L'EAU. 429 dement ce peroxide que les métaux même qui les consti- tueraient. Action des oxides métalliques sur le peroxide d’hydro- gène, à la température ordinaire. 27. Les oxides métalliques tendent en général à ra- mener le peroxide d'hydrogène à l'état de protoxide ou d'eau. Quelques-uns produisent cet effet en s'oxidant davan- tage ; d’autres sans s’altérer,; et en dégageant sous forme de gaz toute la quantité d’oxigène que l’eau absorbe pour passer à l’état de peroxide; d’autres, enfin, tout en rendant gazeux cette quantité d’oxigene, se réduisent eux-mêmes : très-peu sont sans action. Ê La force décomposante des oxides varie beaucoup. Plu- sieurs chassent l’oxigène si subitement de la liqueur, qu'il en résulte une sorte d’explosion, et alors il y a production d'une grande chaleur et mème de lumiere. Il en est, au contraire, dont l'action est lente, qui n'occasionnent qu'une légère effervescence, et jamais de chaleur sensible. Toutes les expériences peuvent être faites comme celles qui. ont pour objet l’action des métaux sur le peroxide. On peut encore les faire avec le peroxide étendu d’eau, dans un tube renversé et plein de mercure, en y introduisant succes- sivement la liqueur et l’oxide. Des oxides qui peuvent absorber l'oxigène du peroxide, et le ramener à l'état de protoxide ou d’eau. 28. Ces oxides sont la baryte, la strontiane, la chaux, l’'oxide de zinc, le protoxide et le deutoxide de cuivre, 430 ‘SUR LA COMBINAISON l'oxide de nickel ; les protoxides de manganèse, de fer, d’étain, de cobalt; l’oxide d’arsenic, et probablement plu- sieurs autres. Mais il est nécessaire que l’oxide métallique soit en gelée ou en dissolution : autrement l’oxigene se dé- gagerait, ou resterait en combinaison. Il est évident, d'ail- leurs, que, à mesure que le nouvel oxide se produira, il sera possible qu'il chasse une portion d'oxigène de la liqueur, de sorte qu’alors l’action deviendra complexe. Baryte. — Lorsqu'on verse de l’eau de baryte dans le per- oxide pur ou étendu , il se précipite à l'instant une foule de paillettes brillantes, qui ne sont autre chose qu'un hydrate de deutoxide de barium, comme on le verra (67); mais si, au lieu d’eau de baryte, l’on se servait de baryte réduite en poudre, et de peroxide d'hydrogène concentré ou peu étendu, il en résulterait un violent dégagement de gaz oxi- gene et beaucoup de chaleur. Cette chaleur peut provenir de l'absorption de l'eau du peroxide d'hydrogène par la ba- ryte, et de la décomposition instantanée de ce peroxide. Quant au dégagement d’oxigène, on peut l’attribuer à l’élé- vation de température produite par l'absorption d’eau, et au deutoxide de barium dont il se forme une petite quan- tité. Toutefois l'hydrate de baryte possède lui-même la pro- priété de dégager loxigène du peroxide d'hydrogène. Strontiane. — La strontiane offre, avec le peroxide d'hy- drogène, absolument les mêmes phénomènes que la baryte. (Voyez l'hydrate de deutoxide; 63.) Chaux.— Cette base produit aussi, avec le peroxide d’hy- drogène, des phénomènes analogues à ceux que nous ve- nons d'observer avec les deux bases précédentes : ils n’en DE L'OXIGÈNE AVEC L'EAU. 431 $ différent même qu’en ce que, pour obtenir en paillettes cristallines l’hydrate de deutoxide de calcium , il faut verser l'eau de chaux peu-à-peu (66). Hydrate bleu de deutoxide de cuivre. — Cet hydrate, mis en contact avec le peroxide d'hydrogène, passe tout de suite à l'état d’un nouvel oxide qui est d’un jaune d’ocre, et qui fait dégager assez rapidement l'oxigène de la liqueur oxigénée non encore décomposée. Lorsque le peroxide est concentré, l’ac- tion est vive; il y a dégagement de chaleur, et il s’en faut beaucoup que tout l’oxide de cuivre se suroxide. Pour que la suroxidation ait lieu, il faut non-seulement que le per- oxide d'hydrogène soit étendu d’eau, mais encore satisfaire à diverses conditions qui seront exposées plus tard (68). Deutoxide de cuivre calciné. — Sous cet état, le deutoxide de cuivre ne possède plus la propriété de se suroxider; il produit, avec le peroxide d'hydrogène, une effervescence très-sensible due à un dégagement d'oxigène. Ce dégagement est même assez fort avec le peroxide concentré. Hydrate d'oxide de zinc. — De même que celui de cuivre, cet hydrate se suroxide dans son contact avec le peroxide d'hydrogène, mais de telle manière, qu'il ne se dégage que bien peu d'oxigène. (ayez le nouvel oxide de zinc; 70.) Fleurs de zinc, ou oxide blanc de zinc calciné. — Plus de suroxidation sous cet état ; l’oxide donne lieu tout au plus à un dégagement de gaz extrèniement faible. Hydrate de nickel. — Voici encore un hydrate qui, dans son contact avec la liqueur oxigénée, donne lieu probable- ment à un nouvel oxide, et qui, en même temps, produit un faible dégagement d’oxigène. ( F’oyez ce nouvel oxide; 71.) 432 SUR LA COMBINAISON Oxide de nickel calciné. — La dessication fait perdre à cet oxide, comme à ceux de cuivre et de zinc, la propriété de se suroxigéner : mis en contact avec le peroxide d'hydro- gène, il en dégage l’oxigène, de manière à y produire une effervescence très-marquée. Protoxides de manganèse, de fer, d'étain, de cobalt. — Ces protoxides, à l’état d'hydrate, donnent lieu, par leur contact avec l’eau oxigénée, à des peroxides semblables à ceux que nous connaissons : que l'on verse en effet de l'eau oxigénée sur ces hydrates récemment précipités de leur dis- solution dans les acides par la potasse, et l’on verra qu'ils s'oxideront tout-à-coup. Les peroxides de manganèse et de cobalt agiront ensuite sur la liqueur non décomposée, en faisant passer rapide- ment son oxigene à l’état de gaz; celui de fer ne produira qu'une effervescence qui ne sera pas très-forte, et celui d’é- tain n’en produira pas de sensible. Deutoxide d'arsenic. — Quant à celui-ci, il s'acidifiera. Des oxides qui dégagent l'oxigène du peroxide d'hydro- gène sans se suroxtder et sans se désoxider. 29. Je connais un assez grand nombre d’oxides qui pos- sèdent cette propriété : j'en parlerai, autant que possible, dans l’ordre de leur plus grande action décomposante. Peroxide de manganèse naturel, réduit en poudre fine, et peroxide d'hydrogène le plus concentré. — Action subite et très-violente ; dégagement de chaleur si grand, que le tube de verre devient brülant; désoxigénation complète cet imnstantanee. DE L'OXIGÈNE AVEC L'EAU. 433 Le même, et liqueur ne contenant que neuf volumes d'oxi- gene. — Effervescencé subite et très-vive; tout l'oxigène se dégagé en très-peu de temps. Peroxide de manganèse très-divisé (obtenu en ajoutant de l'eau oxigénée à une dissolution. de manganése, et décom- posant ensuite la dissolution par la potasse). — L'action de cet oxide est encore plus grande que celle de l'oxide naturel; et même l'expérience peut être faite avec le peroxide con- centré, de telle manière qu'il en résulte une sorte d’explo- sion (60). Peroxide de cobalt en poudre; et peroxide d'hydrogène. -— Mêmes phénomènes à-peu-près qu'avec peroxide de man- ganèse naturel. Massicot en poudre, et peroxide le plus concentré. — Action violente, grand dégagement de chaleur : désoxigénation com- plète et presque instantanée de la liqueur. Massicot, et liqueur ne contenant que neuf fois son vo- lume d'oxigène. — Kffervescence vive, dégagement de tout l'oxigène en quelques minutes. Miniurmn et tritoxide de plomb. — Ces deux oxides agissent très-fortement aussi sur le peroxide d'hydrogène : l’action du tritoxide est même des plus violentes; mais, comme ils passent en même temps à l’état de protoxide, du moins avec la liqueur concentrée, il n’en sera question que dans le cha- pitre suivant. à Hydrate de tritoxide de fer , èt peroxide d'hydrogène le Plus concentré. — Action qui devient bientôt très-forte ; grand dégagement de chaleur, et désoxigénation complète de la li- queur en très-peu de temps. 1018. 55 434 SUR LA COMBINAISON Hydrate de tritoxide de fer, et liqueur ne contenant que neuf. fois son volume d'oxigène. — L’effervescence est subite, mais n'est pas vive : aussi la désoxigénation ne se fait-elle complètement que dans l’espace de plusieurs heures. Tritoxide de fer en poudre. — Sous cet état, le tritoxide de fer n'exerce qu'une action assez faible sur le peroxide d'hydrogène concentré ou étendu d’eau : au bout de quinze heures, la désoxigénation n’est point encore terminée. Deutoxide de fer (provenant de la décomposition de l’eau par Je fer incandescent). — Action tres-faible sur le peroxide concentré ou étendu. Quinze heures sont loin de suffire pour la désoxigénation complete de la liqueur; au bout de ce temps, elle est presque aussi chargée d’oxigène que d’a- bord. Oxide de nickel en poudre noire, deutoxide de cuivre en poudre brune, oxide de bismuth en poudre jaunâtre. — L'ac- tion de ces différents oxides sur la liqueur concentrée n’est point très-forte ; mais elle est assez grande pour en dégager tout l'oxigène dans l’espace de quelques heures. Ces mêmes oxides finissent aussi par chasser tout l’oxigène de la liqueur affaiblie; seulement, lorsque cette liqueur ne coutient que neuf volumes d’oxigène, il faut près de quinze heures pour que la désoxigénation soit complète. Oxide de Tantale ou acide colombique. — Cet oxide, qui m'avait été donné par M. Vauquelin, avait une action bien marquée sur le peroxide d'hydrogène concentré : il finissait par en dégager tout l’oxigène ; mais il n’en avait aucune, ou il en avait à peine sur le peroxide étendu de manière à ne contenir que neuf fois son volume d’oxigène : ne serait-ce DE L'OXIGÈNE AVEC L'EAU. 435 pas parce qu'il se serait dissous en petite quantité dans la liqueur , et qu'il en aurait rendu la composition plus q ; q po E stable ? Potasse, soude. — Action assez forte de la part de ces deux alcalis, même en dissolution, sur le peroxide d'hydro- gene concentré; dégagement de gaz oxigène assez rapide, et bientôt désoxigénation complète. Lorsque le peroxide est étendu d’eau, la décomposition se fait moins promptement ; toutefois tout oxigène finit par se dégager. Magnésie en gelée comprimée, et peroxide d'hydrogène très-concentré. — Dégagement très-sensible de gaz oxigène qui s'arrête peu-à-peu avant que la désoxigénation soit totale. Magnesie en gelée comprimée, et liqueur ne contenant que neuf fois son volume d'oxigène. — Effervescence assez vive qui s'arrête aussi peu-à-peu avant que la désoxigénation soit entière. Il semble cependant qu'il se dégage proportionnel- lement plus d'oxigène, quand la liqueur est étendue que ‘quand elle est concentrée. Magnésie en poudre. — Action plus faible qu’en gelée. Hydrate de deutoxide de barium, de strontium, de cal- cium. — Peu d'action. Oxide d'Urane (provenant du sulfate d'Urane décomposé par la potasse). — Peu d'action encore. Enfin oxide de Titane en poudre, oxide de zinc sublimé, deutoxide de cérium.— Effervescence tres-faible; au bout de trente heures, la liqueur est à peine désoxigénée. (ex [ex 436 SUR LA COMBINAISON Des oxides qui dévazent l'oxigène du peroxide d'hydro- 1 »hare) (e] : ène, en laissant dégager le leur en tout ou en 2 £ ©" partie. 30. Ces oxides sont ceux d'argent, de mercure, de deut- oxide et de tritoxidé de plomb, d'or, de platine, et pro- bablement d'Iridium, de Palladium et de Rhodium. Oxide d'argent. — C'est celui de tous les oxides qui me paraît avoir le plus d'action sur le peroxide d'hydrogene : il en dégage tout-à-coup l’oxigene; et ce dégagement est si rapide, qu'il peut en résulter une explosion, quand le per- oxide est concentré. De plus, la chaleur produite est telle, que l’on aperçoit des points lumineux en faisant l'expérience dans l'obscurité. Il n'est pas extraordinaire, d’après cela, que l’oxide d'argent soit réduit. L’essai doit être fait dans un verre (60). La réaction est encore très-grande, lors même que le per- oxide d'hydrogène est étendu d’eau. En effet, oxide d'argent fait une effervescence très-sensible et subite dans de l'eau qui ne contient que la cinquantième partie de son volume d’oxi- gène : aussi, en faisant passer dans un tube de verre ren- versé et plein de mercure, d'abord, de l'eau qui renferme douze fois son volume d'oxigene, puis de l'oxide d'argent, le mercure est-il repoussé de manière que lœil n’en suit qu'avec difficulté labaissement. Dans ce cas, il n’y a pas production de chaleur sensible, et cependant il y a réduc- tion de l'oxide d'argent. Cet oxide se réduirait même avee la liqueur la plus étendue. Qu'on n’aille pas en conclure, pour cela, que le dégagement d’oxigène de l’oxide métal- DE L'OXIGÈNE AVEC L'EAU. 47 _lique ne soit point un effet de la température : il se pourrait faire qu'au moment de l’action de l’oxide d'argent sur le peroxide d'hydrogène, les molécules qui agiraient les unes sur les autres fussent tres-échauffées, et que leur nombre étant très-petit, relativement à la liqueur, elles ne pussent point élever d'un demi- -degré la température de celle-ci. Tritoxide de plomb en poudre. — L'action de cet oxide sur le peroxide d'hydrogène est à-peu-près aussi grande que celle de l'oxide d'argent; et les résultats de part et d'autre sont les mêmes, si ce n’est que le tritoxide de plomb ne se réduit pas, et qu’il passe seulement à l’état de protoxide jaune avec la liqueur concentrée. Eprouve-t-1l la même désoxigé- nation avec la liqueur étendue ? Je conserve quelques doutes à cet égard. Minium et peroxide d'hydrogène. — Mëèmes phénomènes qu'avec tritoxide, à cela près que l'action, étant moins vive, a lieu sans dégagement de lumière dans l'obscurité et avec un moindre cie de chaleur. Hydrate de deutoxide de mercure, et peroxide d'hydrogène. — L’hydrate, qui était délayé dans l’eau, a d'abord été mis sur du Dipierieseph , puis on a fait l'essai à la manière or- dinaire : à l'instant, l’oxide qui était jaune est devenu rouge, l'effervescence a eu lieu, et bientôt elle a été violente; alors grand dégagement de chaleur , réduction subite de l’oxide mercuriel, désoxigénation complète de la liqueur. Hydrate de deutoxide de mercure, et liqueur ne contenant que neuf volumes d'oxigène. — Effervescence très-modérée, point de chaleur sensible; réduction de l’oxide en vingt- 438 SUR LA COMBINAISON quatre heures ; désoxigénation complète dans cet espace de temps, pourvu que l'oxide de mercure soit en excès. Précipité perse, réduit en poudre très-fine. — Cet oxide en poudre était d’un jaune d’ocre verdâtre. Mis en contact avec le peroxide d'hydrogène concentré, il est devenu rouge comme l'hydrate, et a agi comme lui, seulement moins promptement ; toutefois l'action a fini par être violente , le dégagement de chaleur par être très-grand, et l'oxide par se réduire. 4 Son action sur la liqueur étendue est faible. Oxide d'or en poudre sèche et brune (*), et peroxide très- concentré. — Action subite, violente; grand dégagement de chaleur, réduction de l'or, désoxigénation complète de la liqueur. Oxide d'or, et liqueur ne contenant que neuf volumes d'oxigène. — Effervescence subite, vive; point de chaleur ; l'or se réduit, et la liqueur se désoxigene en peu de temps. Oxide de platine en poudre (obtenu en faisant bouillir le muriate de platine avec la soude). — Même action sur le peroxide d'hydrogène concentré ou étendu, que l'oxide d'or. (*) Get oxide avait été obtenu en faisant bouillir un excès d'eau de baryte avec le muriate d'or, versant un peu d'acide acétique sur le pré- pité lavé qui était d’un brun-verdâtre, et lavant de nouveau le résidu à “au bouillante. L’acide acétique sépare un peu de baryte et d'acide mu- atique du précipité, et le rend d'un brun-foncé ürant sur le violet; mais, dans cet état même, il n’est point parfaitement pur, il retient encore des traces d'acide hydro -chlorique et de baryte que l'acide nitrique peut en séparer. DE L'OXIGÈNE AVEC L'EAU. 439 Oxides d'iridium , de palladium , de rhodium.— W en se- rait probablement de ces oxides purs comme des précédents: sans doute que leur action sur le peroxide d'hydrogène concentré serait violente, et qu'ils se réduiraient; tel est même le résultat que j'ai obtenu avec un oxide d'iridium, mais de la pureté duquel je n'étais pas certain. Oxide d'osmium (provenant de la calcination, dans une cornue de verre, d’un mélange d’osmium et de chlorate de potasse), et peroxide d'hydrogène très-concentré. — Point d’ac- üon sensible; mais à peine ajoute-t-on une très-petite quan- tité de potasse, qu'il en réulte une grande effervescence, un grand dégagement de chaleur, et que la liqueur, de claire et d'incolore, devient brun-foncé. Y a-t-il, dans ce cas, ré- duction de l’oxide d’osmium? Le peroxide étendu d’eau se comporte, à l'intensité d’ac- tion près, de la même manière avec l’oxide d’osmium. Des oxides qui sont sans action, du moins bien sensible ä sur le peroxide d'hydrogène. 31. Les oxides que je connais pour être sans action bien sensible sur le peroxide d'hydrogène, sont l’alumine, la si- lice, l'oxide de chrôme, le deutoxide d’étain, le protoxide et le deutoxide d’antimoine. Il faut y joindre l'acide tungstique. Plusieurs autres oxides sont sans doute encore dans ce cas; mais, n'ayant point eu l’occasion de les essayer, je ne puis en rien dire d’une manière particulière. 449 SUR DA GOMBINAISON De l'action de quelques bases salifiables, qui ne sont point de nature métallique , sur le peroxide d'hy- drogène {rogène. 32. Je n'ai encore pu essayer que l'ammoniaque et la morphine. L'ammoniaque exerce une action bien marquée sur le per- oxide d'hydrogène. Ayant mis cet alcali en dissolution très- concentrée, en contact avec le peroxide d'hydrogène lui- méme tres-concentré, il en est résulté tout-à-coup un dégagement de gaz oxigene, qui d’abord était assez fort, mais qui n'a point tardé à se ralentir. Au bout de vingt heures, la liqueur évaporée n’a laissé qu'un faible résidu terreux : projeté sur les charbons incandescents, ce résidu n'en rendait pas la combustion plus active; d’où l’on peut conelure que, quand. bien même. l'ammoniaque serait dé- composée , il ne se formerait pas d'acide nitrique. L'azote qu'elle contient se dégagerait sans doute. Comme je n'ai point recueilli les gaz; que j'ai reconnu seulement, en plon- geant une allumette dans le tube, qu'ils rallumaient les corps en ignition, je ne puis rien dire de positif sur la question de savoir si l’ammoniaque éprouve quelque altération; toute- fois je ne le pense pas; car, lorsqu'on ne met avec le per- oxide concentré qu'une tres-petite quantité d'alcali, la liqueur est encore alcaline plusieurs jours après. L'action de la morphine sur le peroxide d'hydrogene est très-faible. À peine si le dégagement de gaz est sensible; il s'arrête bientôt. La liqueur se colore en brun-marron; au DE L'OXIGÈNE AVEC L'EAU. 44x bout de vingt heures, elle produit encore, avec l'oxide d’ar- gent, une tres-vive effervescence et beaucoup de chaleur. La morphine est-elle décomposée? Je n'ai point fait assez d'expériences pour m'en assurer : j'avais principalement pour but de rechercher , si elle exerçait une action répulsive sur l’oxigène de l'eau oxigénée. De l'action des acides sur le peroxide d'hydrogène. 33. Si les métaux et les oxides métalliques tendent en gé- néral à dégager l’oxigène du peroxide d'hydrogène, il n'en est pas de même des acides : ceux-ci tendent, au contraire, à lui donner plus de stabilité ; quelques-uns seulement ne peuvent produire cet effet, parce qu'ils sont trop faibles, ou parce qu'ils changent de nature en absorbant l’oxigène du peroxide. 3 34. Que l’on prenne de l’eau oxigénée, contenant, par exemple, six fois son volume d'oxigène; qu'on la chauffe au point d'en dégager beaucoup de gaz, et qu'on y ajoute un peu d'un acide, tel que l'acide phosphorique, fluorique, sulfurique, hydrochlorique, arsenique, oxalique, etc., ou tout autre acide fort, qu'elle ne serait point capable d'altérer; et à l'instant même le dégagement de gaz cessera : il ces- serait, également, quand bien même l'on prendrait le soin d'élever d'avance l'acide à la même température que la li- queur : la saturation de l'acide le fera reparaître de suite. 35. Que l'on mette dans deux fioles de l'eau oxigénée qui contiendra deux à trois fois son volume d’oxigène; que l'on verse dans l’une d'elles un peu d'acide phosphorique, ou d'acide oxalique, ou d'acide fluorique, etc., et qu'ensuite 1818. 56 442 SUR LA COMBINAISON on les fasse chauffer toutes deux , et l’on verra qu'aussitôt que la température sera portée à 100°, tout l’oxigène de l’eau oxigénée sera dégagé, tandis que, au bout d’une demi-heure d’ébullition, l'autre sera encore très-oxigénée, ou du moins capable de produire une forte effervescence avec l'oxide d'argent. 36. Lorsqu'on met de l'or tres-divisé (provenant de la décomposition du muriate d’or par le sulfate de fer) dans une eau oxigénée contenant dix, vingt, trente fois, ou plus, son volume d’oxigene , il en résulte une très-vive effer- vescence; mais, en ajoutant une goutte d'acide sulfurique très-étendu, l’effervescence s'arrête à l'instant même : elle se reproduit tout de suite, en saturant l'acide par de la po- tasse, pour disparaître et se reproduire encore par l'addition successive des mêmes agents. L'action de l'acide est telle, enfin, que, pour peu que le peroxide d'hydrogène très -concentré en contienne, il peut être mis impunément en contact avec l'or le plus divisé ; et cependant ce métal agit avec violence sur le peroxide saturé. 37. Plusieurs autres corps produisent, dans leur contact avec le peroxide d'hydrogène, des phénomènes analogues aux précédents; seulement, pour prévenir ou arrêter l’ef- fervescence , il faut une plus grande quantité d'acide. Je ci- terai le platine, le palladium, le rhodium, et je pourrais y joindre tous les métaux dont l’action sur le peroxide d'hydro- gene n'est pas tres-grande. Aussi, lorsqu'on ajoute au per- oxide d'hydrogène concentré, qui contient toujours un peu d'acide, une petite quantité d’alcali, devient -il capable d'agir violemment sur des métaux qui, sans cela, ne DEULOXIGÈNE AVEC L'EAU. 443 auraient décomposé que lentement. Et qu'on ne croie pas que la décomposition rapide soit un effet direct de l'alcali : car, en mêlant à la même quantité de peroxide la même quantité d'alcali, l'effervescence ne sera que faible. 37 bis. Pour obtenir le peroxide d'hydrogène le plusconcen- tré, 1] faut y ajouter quelques gouttes d'acide sulfurique très- étendu. En effet, lorsque la liqueur donne pres de deux cent cirquante fois son volume de gaz oxigène, elle commence à laisser dégager des bulles qui font monter le baromètre de l'éprouvette : vainement on essaierait d'en porter la concen- tration plus loin; mais, en l'acidifiant seulement de telle maniere qu'elle fasse virer le papier de tournesol au violet rougeatre , elle continue de se concentrer sans éprouver d’altération. 38. Ces différentes expériences prouvent, ce me semble, ce que nous avons avancé; savoir, que les acides rendent en général le peroxide plus stable. Cependant les deux der- nières sont moins démonstratives que les autres, parce qu'on peut en expliquer les résultats autrement : 1° ne peut-on pas supposer que l'acide n’agit daus la concentration du per- oxide, qu’en neutralisant l’action répulsive de quelques ma- tières que celui-ci retient toujours? 20 ne peut-on point ad- mettre aussi que si l'acide ne S'opposait à la décomposition du peroxide par l'or, qu'en rendant la composition de cet oxide plus stable, il devrait produire plus facilement cet effet sur les métaux dont l’action décomposante est bien moindre? Or, c'est ce qui n'est pas. Quelle différence, par exemple, n'y a-t-il pas entre l’action de l'or et celle du bis- muth sur le peroxide saturé et concentré? Le premier agit 96 444 SUR LA COMBINAISON avec violence, et le second ne produit qu’une faible effer- vescence ; et pourtant la quantité d'acide qui rendra le premier sans action, n’arrêtera pas celle du second. 39. Puisque les acides donnent plus de stabilité à l’eau oxigénée, c’est sans doute en se combinant avec le peroxide d'hydrogène. Du moins, dans l'état actuel de la chimie, la composition de ce peroxide rend toute autre hypothèse in- vraisemblable. A la vérité, cette opinion n’est pas celle que j'avais adoptée d’abord; j'avais pensé que l’oxigène se com- binait avec les acides , et qu'il en résultait un grand nombre de nouveaux acides oxigénés. Les expériences sur lesquelles je me fondais paraissaient démonstratives; il ne sera pas inutile de les rapporter. Je venais de découvrir qu'en traitant le deutoxide de ba- rium par l'acide muriatique , et qu'en précipitant la disso- lution par une quantité convenable d'acide sulfurique, on obtenait une liqueur qui était formée d’eau, d’acide muria- tique, et de tout l'oxigene nécessaire pour suroxider la baryte. Or, en saturant l'acide par l’oxide d'argent, tout l'oxigène se dégageait à l'instant, tandis qu'en employant un sel d'argent au lieu d’oxide d'argent, il ne se dégageait pas la plus petite bulle de gaz. Ne devait-on pas en conclure que si l'oxigene ne se dégageait pas, dans le cas où l’on employait le sel d'argent, c'était en raison de l'acide de ce sel? Je dirai plus : la conséquence était forcée alors. Mais, aussitôt que j'eus découvert que l’oxigène pouvait s'unir à l'eau sans l’intermède des acides ; que certains corps, l’oxide d'argent sur-tout, possédaient la propriété de dégager l'oxi- gene de l’eau oxigénée, et que les sels d'argent, tels que le DE L'OXIGÈNE AVEC L'EAU. 445 sulfate, le phosphate, etc., n'avaient aucune action sur elle, je compris et je reconnus bientôt que ce qui m'avait paru être des acides 'oxigénés, n’était que de l’eau oxigénée et aci- difiée. 40. Après avoir nommé les principaux acides qui rendent le peroxide d'hydrogène plus stable, occupons-nous de ceux qui ne sauraient lui donner de stabilité, soit parce qu’ils sont trop faibles, soit parce qu'ils en absorbent l’oxigene. Nous citerons, parmi les premiers, l'acide carbonique et l'acide borique ; et parmi les seconds, l'acide sulfureux, l'acide hydriodique, et l'acide hydro-sulfurique, où l'hydrogène sulfuré. À peine l'acide sulfureux est-il en contact avec le peroxide d'hydrogène, même étendu de beaucoup d’eau, que son odeur disparaît, et qu'il passe à l’état d'acide sulfurique. Peut- être qu'en rendant l'acide prédominant, l’on obtiendrait le nouvel acide que MM. Gay-Lussac et Welter ont découvert. Le peroxide d'hydrogène concentré ou étendu décompose tout de suite l'acide hÿeriodique, et de là résulte de l’eau et un précipité d’iode. Le peroxide décompose aussi l'hydrogène sulfuré, mais peu-à-peu. Ayant versé dans de l’eau contenant onze fois son volume d’oxigène, une dissolution d'hydrogène sulfuré, la réaction n'a commencé à se manifester qu'au bout d’un quart d'heure; alors la liqueur est devenue laiteuse : le len- demain; il y avait un petit dépôt de soufre, et l'odeur de l'hydrogène sulfuré n’était plus sensible; il s'était formé de l'acide sulfurique, mais si peu, quoiqu'il y eût excès d’eau oxigenée, que celle-ci ne se troublait point, pour ainsi dire, par le nitrate de baryte. 446 SUR LA COMBINAISON L’acide hydrochlorique, soit à froid, soit à chaud, n’est point décomposé par l’eau oxigénée : par conséquent, un mélange d'eau oxigénée et de cet acide ne donne point de chlore. Lorsqu'on le chauffe, on n’en retire d'autre gaz que de l'oxigèene. Je ne connais qu’un seul moyen d'opérer la décomposition de l'acide hydrochlorique par l’eau oxigénée : c'est de verser de l'acide sulfurique concentré en assez grande quantité, dans un mélange d’eau oxigénée et d’acide muria- tique saturé de deutoxide de barium. La forte chaleur produite instantanément, et peut-être aussi la présence de l'acide sulfurique, détermine un dégagement de chlore très-sen- sible. Il semble que le même effet devrait être produit, quand bien même on n’ajouterait pas de deutoxide de ba- rium; mais, comme je n'ai pas fait l'essai, je ne puis rien assurer à cet égard. J'ai eu l'occasion, au contraire, de ré- péter souvent l’autre dans la préparation de l’eau oxigénée. ; Des propriétés que possède l'eau oxigenee après son melange avec les acides. 4x. Je suppose que la liqueur qui résulte de ce mélange renferme à-peu-près cinq à six fois son volume d’oxigène, et que la quantité de celui-ci soit à celle de l'acide, dans un rapport deux à trois fois plus grand que celui des quan- tités d’oxigène et d'acide dans les sels neutres. Je dis à-peu- près, car les phénomènes seraient encore analogues dans le cas où les proportions d’eau, d'oxigène et d'acide ne seraïent point celles que nous venons d'indiquer. IL est facile d'obtenir avec les acides nitrique et hydro- chlorique une liqueur où ce rapport entre les quantités DE L'OXIGÈNE AVEC L'EAU. 447 d'oxigène et d'acide existe. En effet, comme le deutoxide de barium contient deux fois autant d’oxigène que le prot- oxide ou la baryte , il est évident qu'en saturant l'acide nitrique ou hydrochlorique de deutoxide, et précipitant la dissolution par l'acide sulfurique, comme nous l'avons dit précédemment (6), la liqueur contiendra ‘précisément la quantité d’oxigène et d'acide nitrique ou muriatique néces- saire pour former un sel neutre avec un métal. Si donc l’on saturé une seconde fois la liqueur acide de deutoxide de barium, et qu’on en précipite, comme la première fois, la baryte par l'acide sulfurique, la quantité d’oxigène sera double ; une troisième opération la triplera. A la vérité, la plupart des autres acides ne se prêtent point à ce genre de Préparation, parce quil n’en est presque aucun qui forme des sels neutres solubles avec la baryte, et qu'ils n’attaquent point facilement le deutoxide de barium ; mais on peut les mêler directement avec l’eau oxigénée , Où bien obtenir une liqueur convenable en versant un sel d'argent contenant l’un de ces acides dans un mélange d’eau oxigénée et d'acide hy- -drochlorique. C'est ainsi que, dans la préparation de l’eau oxigénée, l'acide sulfurique a été substitué à l'acide hÿdrochlorique (9). On s’y prendrait d’une manière semblable pour tout autre acide. J'ai essayé cette substitution avec tous les acides mi- néraux, excepté ceux que l’eau oxigénée peut altérer ; je Pai essayée également sur presque tous les acides végétaux : l’a- cide carbonique est le seul avec lequel je n’ai point réussi, parce qu'en versant du carbonate d'argent dans de l’eau oxigénée, chargée ou non chargée d'acide muriatique, tout l'oxigène se dégage comme: avec l’oxide d'argent (9); l'eau 448 SUR LA COMBINAISON oxigénée, au contraire, n’est point altérée par les autres sels d'argent; leurs acides, plus forts que l'acide carbonique, et intimement unis à l’oxide d'argent, s'opposent à ce que celui-ci puisse rompre la combinaison de l’oxigène et de l'eau. Dans tout ce qui suit, je désignerai chaque liqueur oxi- génée par le nom de l'acide qu’elle contiendra. Je dirai donc, liqueur oxigénée nitrique, liqueur oxigénée hydrochlorique ; et par conséquent, je les comprendrai toutes sous le nom de liqueurs oxigénées acides. 42. Les liqueurs oxigénées acides attaquent, à la tempé- rature ordinaire, un grand nombre de métaux, et forment avec eux des sels qui quelquefois réagissent ensuite sur l'excès de liqueur oxigénée (51). Presque toujours alors l'oxigène provient non de l'acide ou de l'eau, mais du per- oxide d'hydrogène. Si donc læ quantité d’oxigène était, à celle de l'acide, dans la liqueur, comme dans le sel qui se forme, il serait possible que le métal se dissolvit sans effer- vescence, ou disparüt comme le sucre dans l’eau : c’est ce que j'ai observé plusieurs fois. 43. Ce n’est que long-temps après le contact, que la li- queur oxigénée muriatique dissout l’or en feuilles ; encore ne se charge-t-elle que d’une trèes-petite quantité d’or. Les autres liqueurs oxigénées ne m'ont point paru avoir d'action sur ce métal ; cependant, avant de prononcer, il serait peut- être nécessaire de répéter les expériences. 44. La liqueur. oxigénée muriatique a beaucoup plus d'ac- tion sur l'argent que sur l'or ; elle Le rend assez promptement violet, quand il est en feuilles, et laisse dégager en même DE L'OXIGÈNE AVEC L'EAU. 449 temps du gaz oxigène : or, comme, d’une part, l'acide dis- paraît, et que, de l'autre, la substance violette est un chlo- rure d'argent, il s'ensuit que l'acide est décomposé, que son hydrogène s’unit à une portion de l'oxigène du per- oxide d'hydrogène, et que le chlore, se combinant avec l’ar- gent, forme un chlorure qui, étant violet, possède la pro- priété de décomposer sensiblement l’eau oxigénée. Les résultats seraient un peu différents, si dans la liqueur la quantité d’oxigène était à celle de l'acide comme dans les sels neutres; ou, ce qui est la même chose, si l'hydrogène de l'acide et l'oxigène étaient dans les proportions des prin- cipes constituants de l’eau. Tout l'acide ne disparaîtrait pas, et l'oxigène dégagé serait en petite quantité; résultat qui paraîtra tout simple, en ne perdant point de vue l’action dé- composante du chlorure violet d'argent, celle de l'argent, et en observant que puisque cette action est capable de déga- ger un peu d'oxigène, il ne reste plus assez de celui-ci pour absorber tout l'hydrogène de l'acide. 45. Le mercure, dans son contact avec la liqueur oxigé- née muriatique, forme aussi peu-à-peu, comme l'argent, de - l'eau et un chlorure. Ce chlorure correspond au premier degré d’oxidation du métal, et est par conséquent insoluble; au moment de sa formation, il ne se dégage pas de gaz, parce que le chlorure et le mercure n’exercent qu'une faible action répulsive sur l’oxigène. 46. De l'oxide d’or, extrait du muriate d’or par la baryte, et contenant un peu de cette base qui lui donnait une teinte verdâtre (30), fut mis en gelée dans la liqueur oxigénée muriatique : à l'instant une vive effervescence eut lieu; elle 1819. 97 450 SUR LA COMBINAISON était due à l’oxigène ; l'oxide d’or devint pourpre, et quelque temps apres il était complètement réduit. Les liqueurs oxigénées sulfurique, nitrique et phospho- rique, font passer d'abord l'oxide d'or au pourpre comme la précédente, en produisant une forte effervescence; mais loxide, au lieu de prendre ensuite l'aspect de l'or précipité par le sulfate de fer, devient brun foncé. Dans cet état, tou- tefois , je le crois réduit. 47. Lorsque l'on verse de la liqueur oxigénée nitrique sur de l'hydrate d’oxide d'argent, l’effervescence qui a lieu tout-à-coup est plus vive encore que les précédentes : une partie de Foxide se dissout; l'autre se réduit d’abord, de- vient blanchâtre, et se dissout ensuite elle-même, pourvu que l'acide soit en quantité convenable. Le temps qui s'é- coule entre la réduction et la dissolution, permet de séparer avec la plus grande facilité l'argent réduit. La dissolution étant faite, si l'on y ajonte de la potasse peu-à-peu, il se produit une nouvelle effervescence et un précipité d’un violet noir foncé; du moins, telle est toujours la couleur du premier dépôt. Ce dépôt est insoluble dans l'ammoniaque , et est, selon toute apparence, un protoxide d'argent. Pour peu que l'on réfléchisse, on verra comment se produisent ces phénomènes : l’eau oxigénée de la liqueur et l’oxide d’ar- gent, par leur action réciproque, donnent lieu à la vive effervescence que l’on observe, et à la réduction de l'argent. Celui-ci, dont une portion reste en dissolution, parce que le nitrate d'argent n’est point altéré, même par le peroxide d'hydrogène concentré (53), se dissout à la maniere ordi- naire dans l'acide nitrique ; mais, comme la liqueur reste en- eore plus on moins oxigénée, cet oxigène reprend l’état de gaz DE L'OXIGÈNE AVEC L'EAU. 45x au moment où l'on précipite l’oxide d'argent par la potasse; l'oxide, dans cette réaction, ne se désoxigene qu'en partie, et de-là le dépôt noir qui nous paraît être un protoxide. De même que la liqueur oxigénée nitrique, les liqueurs oxigénées sulfurique et phosphorique opèrent la réduction partielle de l'oxide d'argent : il se dégage beaucoup de gaz oxigène ; mais l'argent, au lieu de se dissoudre, conserve son état métallique, du moins pendant long-temps. 48. Il n'en est pas ainsi de la liqueur oxigénée muria- tique : soit qu'on emploie un excès d'hydrate d’oxide d'ar- gent, soit qu'on n'emploie que la quantité qu’il en faut pour décomposer l'acide, et qu’on ait même le soin de l'ajouter peu-à-peu, il en résulte de l'eau, du chlorure d'argent vio- let, et le dégagement total de l’oxigène. Ce dégagement, au contraire, ne serait que partiel, si, versant d’abord dans la liqueur oxigénée un acide capable de s'unir à l'oxide d’ar- gent, par exemple de l'acide sulfurique, ou de l'acide ni- trique , ou de l'acide phosphorique, etc., on y ajoutait ensuite cet oxide par petites portions, au bout d’un tube, jusqu'à ce que tout l'acide muriatique fût décomposé. Et ce résultat serait tout simple, car les circonstances seraient presque les mêmes que celles où se trouve un mélange de sulfate, ou de nitrate, ou de phosphate d'argent , et d’eau oxigénée et chargée d'acide muriatique : aussi se forme-t-il dans ces deux derniers cas, non pas du chlorure violet, comme dans les deux premiers, mais du chlorure blanc. Les caractères qui distinguent ces deux chlorures sont très- marqués : le chlorure blanc est entièrement soluble dans l'ammoniaque , et n’exerce aucune action répulsive sur l’oxi- gène de l’eau oxigénée; tandis que l’autre a la propriété 57. 452 SUR LA COMBINAISON d'en dégager ce gaz, et de laisser, comme M. Gay-Lussac la observé le premier, un ‘résidu d'argent métallique, lorsqu'on le met en contact avec l’ammoniaque. Ce résidu n'autorise-t-il pas à croire que ce chlorure est un sous- chlorure, ou, si l’on veut, un protochlorure, qui corres- pondrait à un premier degré d'oxidation, et qui, par le contact de l’alcali volatil, se transformerait en argent et en deutochlorure (1). * 49. L'acide nitrique, faible ou concentré, est sans action sur le peroxide de manganèse et sur le peroxide de plomb. Mais il en est tout autrement de l'acide nitrique , mêlé à l'eau oxigénée ; il les dissout avec la plus grande facilité. La dissolution est accompagnée d’un grand dégagement. de gaz oxigène, et ne retient de ce gaz qu'autant qu'on n'em- ploie point les oxides en excès. Dans le cas où.cet excès a lieu, la liqueur précipite par la potasse, comme les dissolu- tions ordinaires de manganèse et de plomb ; dans le cas contraire, l'oxigene, au moment de la précipitation, ve- nant à s'unir avec les oxides , rend noir celui de manganèse, et couleur de brique celui de plomb. L'on voit done, d’après cela, que les peroxides de manganèse et de plomb ne se dis- solvent qu'en abandonnant une partie de leur oxigène, et que cette désoxigénation provient, d’une part, de la ten- dance qu'a l'acide à s'unir avec l’oxide ramené à un moindre (x) L'on sait que le chlorure blanc devient promptement violet quand on l'expose au soleil. Je crois que le chlore s'en dégage directement; du moins jai senti plusieurs fois l'odeur de ce corps en agitant le chlorure quelque temps après son exposition à la lumière. La liqueur ne s'est jamais acidifiée; jamais elle n'a laissé dévager d'oxigène, et jamais elle n'a été capable de détruire la couleur du tournesol. SUR L'OXIGÈNE AVEC EEAU. 453 degré d’oxidation, et;: d'autre part, dela. force répulsive qu’exerce l'eau oxigénée sur l’oxigène même de l’oxide. L'une de ces forces ne suffirait pas pour opérer la désoxigénation; reunies, elles l'opèrent tres-bien: je puis encore en citer une expérience convaincante. Que l’on mette en contact, dans un tube plein de mercure, de l’eau oxigénée, chargée d'acide muriatique, et de l'oxide noir de manganèse pur, en s'y prenant comme nous l'avons dit pag. 396, et, qu'après avoir fait l'expérience, on la répète en saturant la liqueur par de la potasse avant l'introduction du manganèse, et l’on verra ques dans le premier cas, il se dégagera bien plus de gaz oxigène que dans le second. Les mêmes résultats auraient lieu avec le peroxide de plomb. 5o. Les liqueurs oxigénées sulfurique et muriatique s€ comportent, avec le peroxide de HADenee et de plomb, ab- solument comme la liqueur oxigénée nitrique dont nous venons de parler. Ainsi, quoique l'acide muriatique forme avéc l’oxide de manganèse un muriate , de l’eau, et donne lieu à un dégagement de chlore, ce même sde! mêlé à l'eau oxigénée, dissout le Ans en laissant dégager seu- tement de l'oxigène; et ce qu'il y a de remarquable, c'est qu'il le dissout bien plus facilement par l intermède de l’eau oxigénée, Es ts il est pur. De bon d'un assez grand PRE de sels sur le) per- oxide d'hydrogène concentre'-et sur de l'eau: oxt- gérée ; Contenant onze fois son volume d'oxigène. L } br. Les sels, neutres se rapprochent plutôt des oxides que des acides par leur manière d'être avec le peroxide d'hydro- 454 SUR LA COMBINAISON gene. En effet, aucun n'ajoute à sa stabilité. Un assez grand nombre en dégage l'oxigène; quelques-uns seulement ab- sorbent celui-ci. L'action des autres est insensible. Tous peuvent être éprouvés comme les oxides eux-mêmes dans de petits tubes de verre fermés par un bout. Action des sulfates. 52. J'ai essayé onze sulfates. Sept n’altèrent en aucune maniere le peroxide d'hydrogène concentré ou étendu d’eau; savoir : les sulfates de potasse, de soude, de chaux, de ba- ryte, de strontiane, l’alun et le turbith. Les quatre autres en dégagent l’oxigène : ce sont les sulfates de zinc, de man- ganèse, de cuivre et de fer. Sulfate de manganèse en poudre. — Effervescence assez forte avec le peroxide concentré ou étendu ; désoxigénation complète au bout de vingt heures. Sulfate de zinc en poudre. — Action moins sensible que la précédente : aussi, après vingt heures de contact, la dés- oxigénation de la liqueur étendue d’eau n’était-elle pas com- plète. Sulfate de cuivre en poudre. — Action moins sensible en- core qu'avec le sulfate de zinc : elle s'arrête promptement; au bout de vingt heures, la liqueur fait une vive efferves- cence avec l'oxide d'argent, et l'on y remarque un dépôt olivätre. Ce dépôt n'est-il pas formé de tritoxide ? Sulfate de fer du commerce, en poudre, et peroxide con- centré. — Action subite et violente, grand dégagement de chaleur; désoxigénation complète ; coloration du sel en , rouge. Il est probable que le fer passe à l’état de tritoxide. DE L'OXIGÈNE AVEC L'EAU. 455 Sulfate de fer, et peroxide étendu d'eau. = Vive effer- vescence; point de chaleur; la liqueur devient d'un jaune- rouge, et conserve d'abord sa transparence ; mais peu-à-peu elle se trouble ; il s'y fait un dépôt ocreux considérable, et elle se désoxigène complètement. Action des nitrates. 53. Les nitrates, que j'ai mis en contact avec le peroxide d'hydrogène, sont ceux de potasse, de soude, de baryte, de Strontiane, de plomb, de bismuth, d'argent, de manganèse, de cuivre, de mercure protoxidé. De ces dix sels, il n’y a que les quatre derniers dont l’action sur le peroxide d’hy- drogène soit sensible. Nitrate de manganèse cristallisé, et peroxide concentré. — Effervescence sensible , mais faible ; au bout de vingt heures, la désoxigénation n’était pas complète. Nitrate de manganèse, et peroxide étendu. — Dégagement de gaz à peine sensible; cependant, vingt heures après, la liqueur était presque désoxigénée. Nitrate de cuivre cristallisé, et peroxide concentré ou étendu. — Mèmes phénomènes, à peu de chose près, qu'avec nitrate de manganèse; seulement le nitrate, de bleu, devient tout de suite olive, sur-tout avec le peroxide concentré ; quelque temps après, il se forme un dépôt olivâtre, qui est probablement un tritoxide. Protonitrate de mercure cristallisé, et peroxide concentré. — Point d’effervescence; au bout de vingt heures, dépôt jaunâtre, qui semblait être un sous-deutonitrate: désoxigé- nation presque complète. 456 SUR LA COMBINAISON Protonitrate de mercure, et peroxide étendu d'eau. — Point de dégagement de gaz : au bout de vingt heures, la liqueur faisait encore une vive effervescence avec l’oxide d'argent ; par conséquent, action nulle, ou presque nulle. Nitrate d'argent neutre et cristallisé dans le vide.— Point d'action sur le peroxide étendu; dégagement de gaz avec peroxide concentré, et désoxigénation presque complète en vingt heures. De l'action de quelques chlorures et de quelques hydro- chlorates sur le peroxide d'hydrogène. 54. Le nombre des chlorures et des hydrochlorates qui ont été essayés, est de dix. Trois ont été sans action sur le peroxide; le chlorure de zine, le sublimé corrosif, et la liqueur fumante de Libarius. Les sept autres, dont les noms suivent, en ont produit la décomposition plus ou moins complètement, sans qu'il se formät des chlorates. Chlorure de potassium en poudre, et peroxide concentré. — Effervescence subite, assez forte; désoxigénation complète au bout de quinze heures. Chlorure de potassium , et peroxide étendu d'eau. — Mème résultat qu'avec peroxide concentré, pourvu que le chlorure soit en assez grande quantité pour saturer l’eau : s’il était en quantité bien moindre, il y aurait encore une effervescence, mais qui bientôt s'arrêterait. Chlorure de sodium , et peroxide. — Comme avec chlorure de potassium. Chlorure de barium, et peroxide. — Dégagement de gaz, mais faible : aussi la désoxigénation n'est-elle complète DE L'OXIGÈNE AVEC L'EAU. 457 qu'au bout de vingt heures, avec le peroxide concentré, et ne se fait-elle-pas complètement, même en plusieurs jours, avec le peroxide étendu d’eau. Chlorure de calcium. — Ce chlorure, employé en suffi- sante quantité pour saturer la liqueur oxigénée, en dégage peu-à-peu tout le gaz. Beurre d'antimoine et peroxide concentré. — Action vio- lente, grand dégagement de chaleur et de gaz; désoxigéna- tion subite et complète de la liqueur qui devient jaune, Beurre d'antimoine, et peroxide d'hydrogène étendu d'eau. — Précipitation d’oxide blanc d’antimoine , point d’efferves- cence; et cependant, vingt heures après, l’oxide de manga- nèse ne produisait dans la liqueur qu’une faible efferves- cence: L'oxide d’antimoine n’aurait-il pas été porté à un degré d’oxidation plus avancé? Hydrochlorate de manganèse, rose, cristallisé, et peroxide concentré ou étendu d'eau. — Effervescence assez forte; vingt heurés après le contact, la liqueur était completement dés- oxigénée. | Sel ammoniac cristallisé, et peroxide d'hydrogène con- centré ou étendu d'eau. — Kffervescence assez marquée d'abord, mais qui s'arrête peu-à-peu, long-temps avant la désoxigénation complete de la liqueur. L’hydrochlorate n'éprouve aucune décomposition. De l'action de quelques sels, pris parmi les genres car- bonate, phosphate, chlorate, borate, hydriodate , hydrosulfate, sur le peroxide d'hydrogène. 55. Souscarbonate de soude cristallisé, et peroxide étendu 1819. 58 458 SUR LA COMBINAISON d'eau. — Dégagement de gaz oxigène très-marqué ; vingt heures après le contact, la liqueur était complètement dés- oxigénée. Carbonate saturé de potasse, cristallisé, et peroxide étendu d'eau. — Même résultat qu'avec souscarbonate de soude ; seulement, action moins prononcée. Phosphate de soude cristallisé. — Sans action sur la liqueur étendue. Chlorate de potasse. — Sans action aussi sur la liqueur étendue d’eau. Hydriodate de baryte cristallisé, et peroxide concentré. — Action subite, chaleur sensible : il se forme, je crois, de l'eau et de l'iodate de baryte; ce qu'il y a de sür, du moins, c'est qu'il ne se dépose pas d’iode. Hydrosulfate de potasse légèrement sulfuré, et peroxide concentré. — Action extrêmement vive, grand dégagement de chaleur et de gaz; précipitation de soufre, même en plon- geant le tube imprégné seulement d'hydrosulfate dans la li- queur. Il se forme de l’eau et une petite quantité de sulfate. Mèmes résultats avec la liqueur étendue d’eau, à cela pres que l’action est moindre. Kermès , et peroxide d'hydrogène concentré. — Action des plus vives, grand dégagement de chaleur et de gaz; forma- tion d’eau et de sulfate d'antimoine. Le kermès est également décomposé par le peroxide d’hy- drogène étendu d’eau; mais l’action n’est point instantaïrée. Volcan artificiel de Lemery , ou hydrosulfate de fer tres- divisé. — Mèmes phénomènes qu'avec kermès. DE L'OXIGÈNE AVEC L'EAU. LL ex © De l'action des matières végetales sur le peroxide d'hydrogène. 55. Les matières végétales que j'ai mises en contact avec le peroxide d'hydrogène , sont les suivantes : les acides oxa- lique , acétique, tartarique, citrique, l'oxalate neutre et l'oxalate acide de potasse, l’acétate de potasse, le sucre candi, l'amidon, la gomme arabique, la fibre ligneuse, la mannite, l’huile d'olive, la sandaraque, le camphre, l'al- cool, le tournesol, lindigo. Parmi ces matières, il n’en est aucune qui fasse efferves- cence avec le peroxide d'hydrogène concentré ou étendu d’eau , et qui en dégage l'oxigène, si ce n’est le tournesol, en raison de l’alcali qu'il contient. Les acides oxalique, acétique , tartarique, citrique , loin d'en dégager ce gaz, le rendent plus stable; c'est ce qui a été démontré pour les acides en général (33). Mais il faut ajouter ici que, quand l'acide est de nature végétale, il ar- rive quelquefois qu’en faisant bouillir la liqueur , au lieu d’oxigène pur, on obtient un mélange d’oxigene et d'acide carbonique; d’où il est probable qu'il se forme en même temps de l'eau. Voilà ce que nous offre sur-tout l'acide tarta- rique. L'acide oxalique, au contraire, ne produit pas sensible- ment de gaz carbonique, du moins dans le cas où la liqueur ne contient que six à sept fois son volume d’oxigène. L'oxalate de potasse, l’acétate de potasse, le sucre, la gomme, l’amidon, la fibre ligneuse, la mannite, l'huile d'olive, la sandaraque, le camphre, l'alcool, l'indigo, pa- 58. 460 SUR LA COMBINAISON raissent être d'abord sans action sur le peroxide même très- concentré : car ils n'y produisent pas d’effervescence, et, plusieurs jours après, la liqueur se trouve encore très-oxi- génée. Cependant, ayant mis du sucre et de l’amidon en contact avec le peroxide tres-concentré, dans des tubes fermés par un bout, et surmontes à l’autre d'un tres-petit tube recourbé, propre à recueillir les gaz, j'ai vu qu'au bout de plusieurs jours il se dégageait un mélange dé gaz oxigène et de gaz carbonique , et que ce dégagement, très- faible à la vérité, se soutenait pendant tres-long-temps. Le sucre s'est dissous de suite; quant à l'amidon, il s’est mis d'abord en gelée, et ne s’est dissous que deux jours après. Ces deux substances, dans cette réaction, sont évidemment décomposées. J'aurais bien desiré connaître les propriétés de celles qui restent en dissolution dans la liqueur; mais j'ai opéré sur trop peu de matière pour le savoir. Probable- ment que la plupart des matières végétales offriraient des phénomènes analogues. Le tournesol en pain produit, avec le peroxide concentré , une effervescence tres-sensible , due sans doute à l’alcali que contient cette matiere ; la liqueur se colore en rouge au bout de quelques heures , et la couleur se trouve détruite au bout d’un jour. Rien de semblable n’arrive avec le peroxide étendu. De Laction des matières animales sur le peroxide d'hydrogène. 58. Nous venons de voir que les matières végétales, du moins celles que nous avons essayées , ne faisaient aucune effervescence avec le peroxide d'hydrogène : il en est de DE L'OXIGÈNE AVEC L'EAU. AGr même de presque toutes les matières animales isolées ; la fibrine est peut-être la seule qui fasse exception. Mais il en est tout autrement des organes ou des tissus organiques des animaux : tous operent la décomposition du peroxide à la manière de la plupart des métaux et des oxides métalliques, sans rien céder de leurs principes, sans absorber la plus petite quantité d'oxigène, sans éprouver par conséquent la moindre altération apparente, quand le peroxide n’est pas très-concentré. Ainsi, pendant la réaction , point d’azote dé- gagé , point d’eau ni de gaz carbonique formés ; l’oxigene de la liqueur est mis successivement en liberté. Rien de plus facile d’ailleurs à constater que ces importants résultats qui, selon moi, ne sauraient trop fixer l'attention des chimistes et des physiologistes. Que l’on prenne de l’eau oxigénée contenant, par exem- ple, huit volumes d’oxigène, et dont on aura fait l'analyse par le procédé décrit (pag. 396); que l'on répète l'expérience analytique sur la même quantité d’eau , et qu’au lieu d’intro- duire de l'oxide de manganèse dans le tube renversé, plein de l’eau oxigénée et de mercure, l’on y fasse passer un peu de fibrine en longs filaments, récemment extraite du sang ; l’on remarquera que la fibrine se couvrira de bulles à l’in- stant; ces bulles se succéderont rapidement; le niveau du mercure baissera à vue d'œil, et bientôt l’effervescence ces- sera. Mesurant alors le gaz, l'on en trouvera autant que dans l'expérience faite avec l'oxide de manganèse, et ce gaz sera du gaz oxigène pur. Les tissus des reins, des poumons, de la rate, du foie, etc., pourraient être substitués à la fibrine; les résultats seraient encore les mêmes : c’est ce que l’on pourra facilement voir en lisant les tableaux suivants. 462 SUR LA COMBINAISON Substances ou parties animales qui exercent le plus d'action 1] 22 Al > 6 sur le peroxide d'hydrogène, et qui dégagent assez promp- tement tout l'oxigène d’une eau qui en contient sept à huit fois son volume; chacune de ces substances formant à- 1 7? . peu-près la moitié du volume de la liqueur. Fibrine en longs filaments, récemment extraits du sang. Fibrine en petits filaments, récemment extraits du caillot. Fibrine sèche. Tissu du foie, en tranches minces bien lavées. Tissu de la rate, id. Tissu du poumon, id. Tissu des testicules , id. Tissu du cœur, id. Tissu graisseux , bien lavé. Tissu caverneux, cd. Choroïde, ZA Iris, id. Matière cérébrale. Substances ou parties animales dont l'action sur le peroxide d'hydrogène est moins grande que celle des précédentes, mais assez forte encore pour dégager en quelques heures tout l'oxigène d'une eau qui en contiendrait sept à huit fois son volume; chacune de ces substances ou parties formant à-peu-près la moitié du volume de la liqueur. Tissu bien lavé de la peau. Id. . des tendons. Id. des veines. Id. des arteres. DE L'OXIGÈNE AVEC L'EAU. 463 Tissu bien lavé de la matrice. Id. de l'ovaire. Id. de la glande thyroïde. Id. de l’uretere. 1d. des mamelles. Id. du canal thoracique. Id. fibreux. Id. absorbant. Id. ligamenteux. Id. séreux. 14. nerveux organique. 1d. nerveux animal. Moëlle. Substances ou parties animales dont l’action sur le peroxide d'hydrogène est très-faible, et ne peut dégager que dans l'espace de quelques jours tout l'oxigène d'une eau qui en contient sept à huit fois son volume ; chacune de ces sub- stances ou parties formant à-peu-près la moitié du volume de la liqueur. - Chair musculaire en tranche mince, bien lavée (*). Fibro-cartilage des côtes, id. Fibro-cartilage intervertébral, id. Rétine. Ongles. (*) ILest probable que la chair n’agit faiblement que parce qu’elle n'offre pas un grand nombre de points de contact. 464 SUR LA COMBINAISON Substances ou parties animales dont l'action sur le peroxide d'hydrogène est loin d'étre assez grande pour désoxigéner complètement en plusieurs jours une eau qui contiendrait sept à huit fois son volume d'oxigene ; chacune de ces sub- stances ou parties formant à-peu-pres la moitié du volume de la liqueur. Matière caseuse. Cartilage. Os. Cheveux. ( Leur action est extrêmement faible, à peine sensible; seulement ils se couvrent de bulles de temps à autre.) Substances animales qui ne produisent pas la plus légère effervescence dans une eau contenant sept à huit fois son volume d'oxigène, et qui sont d'ailleurs sans action sur elle, du moins dans l'espace de quelques jours. Albumine liquide. Albumine coagulée. Colle de poisson. Gelée de colle. Urée. É Acide urique. Substances ou parties animales qui décomposent «vec chaleur le peroxide d'hydrogène concentré. Je citerai seulement la fibrine et les tissus du foie, des reins et de la rate, parce que ce sont les seules substances que j'ai essayées; mais il est probable que toutes celles qu DE L'OXIGÈNE AVEC L'EAU. 465 sont nommées dans le premier tableau, possèdent égale- ment la propriété de dégager l'oxigène du peroxide d'hydro- gène concentré, en donnant lieu à de la chaleur. Peut-être même que cette propriété appartient encore, à plusieurs autres. Les substances animales n’éprouvent-elles pas alors une altération provenant sur-tout de l'élévation de la tem- pérature? je ne le sais pas ; ce qu'il y a de certain, c’est que la quantité d'oxigène dégagée en peu de temps est considé- rable. Substances ou parties animales qui ne produisent aucune effervescence avec le peroxide d'hydrogène concentré, et qui sont sans action sur lui, du moins dans l'espace de quelques jours. Probablement que toutes les substances qui n'agissent pas sur le peroxide étendu, sont aussi sans action sur le per- oxide concentré : toutefois, je n’ai fait d'essai suivi à cet égard que sur l’urée pure et cristallisée, et sur les cheveux. L'urée est restée en contact avec le peroxide concentré, pendant plus de six jours, sans éprouver d’altération et sans donner lieu à aucun dégagement de gaz. Les cheveux se sont ramollis peu-à-peu, et se sont dis- sous en vingt-quatre heures; au bout de trois jours, la li- queur paraissait être tout aussi oxigénée qu'auparavant. I est vrai que, dans ces deux essais, la liqueur contenait quelques atômes d'acide. 29. Il résulte évidemment des différentes expériences qui précèdent , 1° que tous les organes ou tissus organiques des animaux, ont, comme nous l’ayons annoncé au commen- 1818. 59 466 SUR LA COMBINAISON cement de ce chapitre, la propriété de dégager l’oxigène de l'eau oxigénée, sans éprouver d’altération apparente; 2° que, parmi les substances animales suivantes, la fibrine, la ma- tière caséeuse , l’albumine , la gélatine, l’urée, l’acide uri- que, il n'y a que la fibrine qui soit douée de cette propriété d'une manière remarquable; 3° que la matière caséeuse la possède peut-être aussi; et que l’albumine, la gélatine, l'u- rée, l'acide urique ne la possèdent nullement. Mais puisque la fibrine, les tissus du poumon, de la rate, des reins, etc., ont, comme le platine, l’or, l'argent, etc., la propriété de dégager l’oxigène de l’eau oxigénée, il est très-probable que ces effets sont dus à une même force. Se- rait-il déraisonnable de penser, d’après cela, que c'est par une force analogue qu'ont lieu toutes les sécrétions animales et végétales? Je ne l’imagine pas : l'on concevrait ainsi com- ment un organe, sans rien absorber, sans rien céder, peut constamment agir sur un liquide, et le transformer en des produits nouveaux. Des substances qui font explosion avec le peroxide d'hydrogène. Go. Certains corps sont capables de faire explosion avec le peroxide d'hydrogene; ce sont ceux qui en dégagent l'oxi- gene subitement. L'on en peut compter six, au moins; sa- voir : l’oxide d'argent, le peroxide de plomb, le peroxide de manganèse, le ML EREN l'osmium et l'argent. Cependant, pour que Pétpéreiée réussisse, il faut satisfaire à deux conditions : la première est d'employer ces corps en poudré sèche et très-divisée ; et la seconde, de laisser torrber des- sus, la liqueur goutte à goutte. (e74 DE L'OXIGÈNE AVEC L'EAU. 467 L'oride d'argent, extrait du nitrate, est le meilleur que l'on puisse employer : on devra le sécher rapidement, et le conserver dans un flacon bien bouché, pour qu'il n'attre point l'acide carbonique. ‘ Le tritoxide de > plomb, obtenu en traitant le minium à par l'acide nitrique, remplit toutes les conditions. L’oxide de manganèse naturel ne convient point; on ne peut le réduire en poudre assez fine : il faut se servir d’oxide artificiel que l’on prépare en ajoutant à une dissolution de sulfate de manganèse un mélange d’eau oxigénée et d'acide muriatique ou nitrique, etc., versant ensuite de la potasse caustique dans la pt lavant le précipité à grande eau, le faisant sécher à une douce chaleur, et le broyant avec soin. L'osmium doit être préparé à la manière ordinaire. L'argent qui provient de la réduction de l’oxide d'argent par l’eau oxigénée, est le plus divisé possible, et mérite par conséquent la préférence. Le platine, que l'on obtient en calcinant un mélange de muriate-ammoniaco de platine , et lavant le résidu, ne réussit bien qu'’autant que l'on emploie deux fois autant de sel marin que de muriate-ammoniaco, et qu'on a soin de bien mêler les deux sels ensemble. Celui avec lequel j'ai réussi d’abord avait été préparé en calcinant simplement, dans un creuset de terre, parties égales de muriate-ammoniaco de platine et de fleur de soufre bien broyés : le soufre avait été brûlé tout entier , sans doute, par l’oxigène de l'air. Lorsque ces différents oxides et ces différents métaux ont été préparés comme nous venons de dire, et qu'on veut 5o. 408 SUR LA COMBINAISON les essayer, on met.dans un verre une petite couche de l'un de ces corps, et l'on fait tomber, dessus, une goutte un peu forte du peroxide tres-concentré. A cet effet, l’on prend un tube effilé, l'on y fait monter par aspiration le peroxide jusqu’à une certaine hauteur; puis, fermant l'extrémité su- périeure avec le doigt, l’on porte le tube au-dessus du verre; levant alors le doigt, et portant la tête en arrière pour ne courir aucun risque, la goutte tombe, et la petite explo- sion a lieu. Si la goutte touchait la paroi du verre avant l'oxide, il n’y aurait point d’explosion ; il n’y aurait qu'un fort sifflement accompagné de beaucoup de chaleur. L’ex- plosion ne se ferait pas non plus, ou du moins se ferait plus difficilement, si, au lieu de verser le peroxide d'hydro- gène sur le corps qui doit le décomposer, c'était le corps que l’on projetät sur le peroxide d'hydrogène. Enfin, il est de fait qu’en employant les oxides à l’état d’hydrate, l’action est moins violente. D'ailleurs , il y a ordinairement déga- gement de lumière sensible dans l'obscurité, au moment de l'explosion. Nul doute que celle-ci ne füt tres-forte, si les quantités de matière étaient de quelques grammes. De la quantité de peroxide d'hydrogène qui peut étre decomposé par les corps capables de mettre l'oxi- gène de ce peroxide en liberte. 61. Le platine, l'or, l'argent, le palladium, le rhodium, l'iridium, l’osmium, possèdent la propriété de décomposer une quantité infinie de peroxide d'hydrogène : du moins , ayant pris successivement un décigramme de ces métaux, et les ayant mis en contact plusieurs fois de suite, chacun, DE L'OXIGÈNE AVEC L'EAU. 469 avec deux décigrammes de peroxide concentré, j'ai vu qu’ils ne perdaient rien de leur force décomposante ; l'épreuve pour plusieurs a été répétée jusqu’à vingt-cinq fois ; et tou- jours avec un égal succès. Les oxides de manganèse, de cobalt, de plomb, et le char- bon, me paraissent doués de la même propriété. Je n’ai point fait d'expériences semblables, ni sur le plomb, ni sur le bismuth, ni sur aucun autre corps, avec le peroxide concentré; mais j'en ai fait sur tous ceux qui précèdent, et sur un grand nombre d’autres, avec le peroxide étendu d’eau. Je vais rapporter d'abord d'une maniere générale les résul- tats que j'ai obtenus; je citerai ensuite quelques exemples. Le platine, l'or, l'argent , les oxides de manganèse , de co- balt, de plomb, m'ont paru avoir sur le peroxide étendu d'eau, lorsqu'il n'était point acide, la même durée d'action que sur le peroxide concentré : en effet, sur quelques déci- grammes de ces métaux ou oxides métalliques, j'ai versé plusieurs grammes de peroxide d'hydrogène; j'ai renouvelé la liqueur plus de trente fois, sa décomposition a toujours été complète, et la force décomposante n'était point altérée. Il n’en a point été de même avec le bismuth, le cuivre, le nickel, le cobalt, les oxides secs de bismuth, de zinc, de nickel, le deutoxide de cuivre desséché ; l'hydrate de tritoxide de fer ,etc., etc. , etc. L'action décomposante , quelle qu'en fût la cause, perdait évidemment de sa force peu-à-peu, si bien qu'au bout de quelques jours il y avait à peine dégagement de quelques bulles de gaz ; et cependant les corps étaient in- tacts ou tels qu'on les avait employés d’abord. Les matières animales ont donné lieu à des observations analogues. Plusieurs de ces matières, telles que la fibrine 470 SUR LA COMBINAISON extraite récemment du sang, les tissus du poumon, du foie, des reins, etc., ont dégagé pendant bien long-temps, et presque toujours avec la même force, l’oxigène de l’eau oxi- génée; mais d’autres, telles que les ongles, le fibro-cartilage des côtes, et même les tendons, la peau, ont bientôt cessé d'agir presque entièrement, sans qu'il fût possible d’aperce- voir d’altération sensible. L’affaiblissement de l’action n’est point dù à ce que le per- oxide devient de plus en plus rare, à mesure qu'il se dégage du gaz oxigène. Cette cause’n’est tout au plus qu'accessoire : car, lorsqu'une matière n'agit plus, ou agit à peine sur une cau encore oxigénée, l’on n’a qu'à mettre celle-ci en contact avec une nouvelle quantité de cette mêmematière, pour rendre l'effervescence tres-sensible.. Il faut donc conclure de là, ou que la matière parelle- même perd insensiblement sa force d’ agir, ou qu'elle ne la perd que parce qu’elle se combine avec certains corps que retient toujours la liqueur, par exemple, avec un peu de silice. Des nouveaux oxides que l'on peut obtenir avec le per- oxide d'hydrogène. 62. Ces oxides, Eyèe le deutoxide de barium, que l’on peut aussi se procurer par l'union directe de.la baryte avec loxigènes sont au nombre de cinq; savoir : un deutoxide de strontium ,; un deutoxide de calcium, un deutoxide de zinc, un tritoxide de cuivre, et un oxide de nickel. Ils sont tous caractérisés par la propriété de pouvoir se dissoudre sans effervescence à la température ordinaire, dans les acides muriatique, nitrique, etc., et de laisser dégager tout l'oxi- DE L'OXIGÈNE AVEC L'EAU. 47t gène qui les constitue peroxides, lorsqu'on chauffe la disso- lution, et qu’on la porte à l'ébullition : sans doute qu’alors 7. FAT D le peroxide, ramené à un degré inférieur d'oxidation, s'unit à l'acide, que l’oxigène s’unit à l'eau, et que c’est l’eau oxi- 2e , , génée qui se trouve décomposée au moment où l’on élève: la température. Nous allons examiner ces oxides successive- ment. Du deutoxide de strontium. 63. Le meilleur moyen d'obtenir le deutoxide de stron- üum est de prendre de l’eau oxigénée acide qui contienne dix à douze fois son volume d’oxigène, et que l'on se pro- cure en traitant le peroxide de barium par l'acide muria- tique, et la dissolution par l'acide sulfurique (6); lon y verse peu-à-peu un excès d’eau de strontiane , éttout-à-coup l'on voit se précipiter une foule de petites lames blanches, brillantes et satinées : c'est: le-deutoxide à l'état d’hydrate. Comme il se dépose avec la plus grande facilité, et qu'il est à peine soluble dans l'eau, il faut le laver par décantation , deux fois au moins, en se servant à cét effet d’une longue éprou- vette à pied ; après quoi on le jette sur.un filtre et on le lave de nouveau, mais sur le filtre même, et Jusqu'à ce que les eaux de lavage ne troublent plus le nitrate acide d'argent, Pour le sécher, on le laisse étendu sur le filtre ; on comprime celui-ci entre plusieurs doubles de papier, et on le met sous la machine pneumatique, etc. Si l’on voulait opérer la dessicca- tion de l’oxide par la chaleur, on le décomposerait en presque totalité ; dans le vide, il s’en décompose même une quan- tité sensible, quoique la température soit toujours tres-basse, Ajoutons ici une observation importante : l'on peut employer 72 SUR LA COMBINAISON “une liqueur oxigénée acide, qui contienne encore une petite quantité d'oxide de fer ou d’oxide de manganèse, pourvu qu'on la filtre aussitôt que l'acide est sursaturé par la stron- tiane ; tout l'oxide de fer et tout l’oxide de manganèse se précipitent, et dès-lors, en continuant l’opération, l’on ob- tient un deutoxide de strontium pur. Le deutoxide de strontium est blanc, brillant, satiné, ino- dore, presque insipide; il rougit sensiblement le papier de curcuma. Je ne connais point sa densité. Vu en suspension dans la liqueur, au moment de sa formation, il a tout-à-fait l'aspect de la nacre, sur-tout lorsqu'on le met en mouve- ment; et cet aspect devient des plus agréables’à l'œil, lors- qu'en même temps l'oxide, qui se présente sous la forme de paillettes nombreuses, est éclairé par la lumière solaire. : Soumis à l’action du feu, le deutoxide de strontium se décompose et se transforme en gaz oxigène et en protoxide. La chaleur de la lampe cet bien plus que suffisante pour pro- duire cette décomposition. Projeté sur les charbons incandescents, il en augmente la combustion ; comme le font certains nitrates qui n’entrent en fusion que difficilement. Probablement qu'il se compor- terait de même avec beaucoup d’autres corps combustibles. Lorsqu'il est sec, il ne s’altere pas à la température ordi- naire ; mais, lorsqu'il est humide, il se décompose peu-2-peu : aussi voit-on se dégager de temps en temps des bulles d’oxi- gene de celui que l’on conserve sous l’eau. Si l'eau froide finit par décomposer le deutoxide de stron- tium , il doit en être de même, à plus forte raison , de l’eau chaude. En effet, que l'on fasse chauffer de l'eau avec ce deutoxide, et bientôt il en résaltera un dégagement assez DE L'OXIGÈNE AVEC L'EAU. 473 rapide de gaz. La liqueur deviendra fortement alcaline; par le refroidissement, il s'en déposera de la strontiane sous forme de cristaux. 4 Les acides nitrique, hydrochlorique, acétique, etc., at- taquent tout-à-coup le deutoxide de strontium : les produits sont une certaine quantité d’eau oxigénée et de sels de stron- tiane. Le peroxide de manganèse, l’oxide d'argent, favorisent le dégagement de l'oxigène du peroxide à l’état d'hydrate, au point que l’effervescence est très-sensible. 64. Je n'ai point examiné l’action du deutoxide de stron- tium sur d’autres corps ; j'ai préféré d’en déterminer la pro- portion des principes. Cette analyse exige beaucoup de soins pour être exacte. Il ne faut point la tenter sur le deut- oxide desséché, car il se décompose en partie, pendant qu'on en opère la dessiccation. Il fant la faire de la manière suivante : l'on prendra du peroxide de strontium à l'état d'hy- drate, bien lavé et encore en suspension dans un peu d’eau _de lavage. On le dissoudra dans de l'acide muriatique faible ; celui-ci devra être ajouté peu-à-peu , et de telle manière qu'il n'y ait point dégagement de gaz, et que la dissolution soit complète et neutre. Prenant alors une pipette étranglée en quelque point dans la tige, on la remplira de dissolution jusqu’à ce point, et l'on introduira cette dissolution dans un tube presque plein de mercure. On lavera la pipette avec de l’eau que l’on versera aussi dans le tube; puis, achevant de remplir le tube, soit avec de l’eau , soit avec du mercure, on le bouchera avec un petit obturateur couvert d'un peu de suif set on le retournera sens-dessus-dessous: enfin l’on 1818. 6o 474 SUR LA COMBINAISON y fera passer de l’oxide de manganèse délayé dans l'eau. A peine le contact aura-t-il lieu , que tout l'oxigène qui con- stituait le peroxide se dégagera; de sorte que, pour l'ob- tenir, il suffira de mesurer le gaz, après avoir toutefois rén- versé et agité le tube à plusieurs reprises. Une observation fort importante à faire, c’est que la dissolution du deut- oxide de strontium ne doit point être acide; si elle l'était, la quantité d'oxigène dégagé serait trop grande; elle contien- drait un peu de gaz appartenant à l’oxide de manganèse lui-même (49). Cette opération étant faite, on remplit à plusieurs re- prises, comme nous venons de le dire, la pipette de la dis- solution de deutoxide de strontium; on réunit la liqueur tout entiere, y compris les eaux de lavage, dans un creuset de platine pesé d'avance avec son couvercle; on y ajoute un petit excès d’acide sulfurique, qui s'unit à la strontiane et met l'acide muriatique en liberté , et l’on entoure le creuset de charbons incandescents , afin de dessécher peu-a-peu le sulfate de strontiane sans produire de soubresauts ; on le chauffe ensuite jusqu’au rouge, on ie pèse de nouveau, et, retranchant du nouveau poids le premier, on en conclut celui du sulfate, et par conséquent de la strontiane. J'ai répété cette expérience analytique cinq fois, tantôt en mesurant les liqueurs, et tantôt en les pesant; j'ai tou- jours vu que la quantité d’oxigène dégagée était tres-sensi- blement le double de ce qu’en contient la strontiane. 65. Avant de suivre la méthode que je viens de décrire, l'en avais employé une autre qui consistait à faire secher lhydrate sous la machine pneumatique, à l'introduire en- DE L'OXIGÈNE AVEC L'EAU. 495 suite dans une petite cornue soufflée à la lampe, et à le chauffer pour en dégager l'oxigène : la cornue était pesée trois fois, vide, après y avoir mis le deutoxide, et après la calcination. Tout l'air des vases était recueilli; mais, à la fin de l'expérience, il y rentrait autant de gaz qu'il en était sorti d'air. Enfin la strontiane qui restait dans la cornue était unie à l'acide sulfurique, afin de s'assurer qu'elle ne con- tenait point d’eau, ou de déterminer combien elle en conte- nait. Cette manière d'opérer devait donner, ce semble, des résultats exacts; cependant j'ai toujours trouvé moins d’oxi- gène par cette méthode que par l'autre : c'est qu'il paraît que, pendant Ja dessiccation, l’eau de l'hydrate réagit sur la strontiane et chasse une portion d’oxigène du deutoxide. L'on ne préviendrait point ce dégagement, quand bien même on laverait tout de suite l’hydrate à l'alcohol. Du deutoxide de calcium. 66. L'histoire du deutoxide de calcium est absolument analogue à celle du deutoxide de strontium. Même prépa- ration. Mêmes propriétés physiques, si ce n’est qu'on peut obtenir le premier en lames brillantes, nacrées d’une part, et en poudre de l'autre : sous la première forme, en ajoutant l’eau de chaux peu-à-peu dans l’eau oxigénée acide; sous la seconde, en ajoutant beaucoup de cette base à-la-fois. Même action sur le feu, sur l’eau, sur le charbon, sur les aci- des, etc. Même décomposition lente, lorsqu'il est à l'état d’hydrate , et qu'on l'abandonne à lui-même. Même mé- thode enfin pour en déterminer la proportion des principes. Je n'ai analysé que le deutoxide cristallisé : il contenait deux fois autant d’oxigène que la chaux. Je pense que celui 6o. 456 SUR LA COMBINAISON qui est en poudre est dans le même cas : il faudrait pour- tant le soumettre à l'analyse, car il serait possible qu'il fàt formé de chaux et d’oxigèene dans une autre proportion que le précédent. Du deutoxide de barium. 67. La préparation du deutoxide de barium ayant été décrite avec un grand soin dans un des précédents arti- cles (5), nous ajouterons seulement qu'on peut aussi obtenir ce deutoxide par un procédé analogue à celui que l’on est forcé d'employer pour se procurer les deutoxides de stron- tium et de calcium. En effet, lorsqu'on verse de l’eau de baryte concentrée dans de l'eau oxigénée pure ou acide, contenant dix à douze fois son volume d’oxigène, il se forme une si grande quantité de paillettes nacrées d’hydrate de deutoxide de barium, que la liqueur se prend en masse. Cet hydrate, de même que celui de deutoxide de cal- cium, à des propriétés analogues à l'hydrate de deutoxide de strontium. J'observerai cependant qu'il a plus de saveur alcaline; qu'il rougit davantage le papier de cureuma; qu'il est moins insoluble dans l’eau, et qu'il est plus facilement décomposable par elle à chaud : du reste, impossible de le sécher sous la machine pneumatique sans qu'il s'en dégage du gaz oxigène. k Quant au deutoxide pur résultant de l’action du gaz oxi- gene sur la baryte, il est, comme nous l’avons déja dit, à peine sapide, d’un gris blanc : l’eau froide le délite sans l'échauffer ; l'eau bouillante le décompose en chassant une portion de son oxigène. À une haute température, il paraît qu'il se dés- oxigène , et qu'il passe à l'état de protoxide ou de baryte. Son DE L'OXIGÈNE AVEC L'EAU. 477 action sur les divers corps combustibles est bien connue. J'ajouterai à ce qu'on sait déja de celle qu'il exerce sur les acides, ce qui suit: Vainement l’on mettrait le deutoxide délité en contact avec l'acide sulfurique étendu d’eau, dans l'espérance d'obtenir du sulfate de baryte et de l’eau oxigé- née; ce ne.serait que dans l'espace! de beaucoup de temps que tout le deutoxide serait complètement attaqué , et que tout l’oxigène reprendrait à mesure l’état gazeux. Ayant mis environ 10 grammes de deutoxide bien délité dans une éprouvette pleine de mercure, et y ayant ensuite ajouté un grand excès d'acide sulfurique étendu, j'ai vu qu'au bout d'un mois l’action n'était pas terminée, et que l’oxigène se dégageait continuellement sous forme de petites bulles, sur- tout au moment où l’on venait agiter la masse du liquide. Je dirai aussi, au sujet de l’action des acides sur le deut- oxide de barium, que l'acide nitrique attaque ce deutoxide bien moins facilement que ne le fait l'acide muriatique; que toutefois il est possible de se procurer promptement une eau oxigénée chargée d'acide nitrique; qu'il suffit, pour _cela, d'ajouter de temps à autre de l'acide nitrique à la li- queur oxigénée acide, d'y ajouter ensuite du deutoxide de barium, et de laisser reposer un instant la liqueur : il s’en sépare beaucoup de cristaux de nitrate de baryte; et lors- qu'on trouve que la liqueur est assez chargée, on n’a plus qu’à la dépouiller d'oxide de fer, d’oxide de manganèse, de silice et d’alumine, par les procédés indiqués (7 et 8), et d'y verser ensuite assez d'acide sulfurique pour en précipiter la baryte. pie Loi du deutoxide de bite a été faite avec les mêmes soins et de la même manière que celles des deut- 158 SUR LA COMBINAISON oxides de calcium et de strontium ; comme eux, il contient le double de l'oxigène du protoxide. J'ai aussi essayé de l'analyser en le chauffant avec du gaz hydrogène sec; mais la quantité d'hydrogène absorbé n’a jamais été tout -à-fait jusqu'au double de celle du gaz oxigene uni à la baryte, sans doute parce qu'il est toujours resté, au centre de la matière, une portion de peroxide sur laquelle l'hydrogène ne pouvait point avoir d'action. On sait que, quoique l’ab- sorption ait lieu tres-rapidement et avec dégagement de lu- mire, qu'ilse fasse beaucoup d'eau, iln’apparaît aucune trace d'humidité dans la cloche; que le tout se trouve transformé en hydrate de baryte tres-fusible : aussi la proportion des prin- cipes de cet hydrate s’accorde-elle bien avec celle du deut- oxide que nous venons de donner. Du tritoxide de cuivre. 68. L'on peut obtenir le tritoxide de cuivre en versant de l’eau oxigénée chargée d'acide nitrique dans une disso- lution faible de nitrate de cuivre, et y ajoutant ensuite peu- à-peu une dissolution faible elle-même de potasse ou de soude caustique. Il faut que l'eau oxigénée soit en grand excès, que les liqueurs soient à la température de zéro, qu'on les agite bien au moment de leur mélange, et que la quaritité d’alcali soit tout au plus suffisante pour décomposer tout le nitrate cuivreux. En satisfaisant à ‘toutes ces condi- tions , il se formera un précipité gélatineux d'un brun jaune ; ce sera le tritoxide de cuivre : on le lavera tout de suite par décantation, ou sur un filtre avec de l’eau bien froide ; puis, si l’on veut le conserver, on le fera sécher promptement sous DE L'OXIGÈNE AVEC L'ÉAU. 479 la machine pneumatique, après l'avoir comprimé entre des feuilles de papier joseph. L'on peut encore préparer ce tritoxide, et ce procédé est peut-être plus sûr que le premier, en mettant en contact de l'hydrate de deutoxide de cuivre avec dé l’eau oxigénée, contenant sept à huit fois seulement son volume d'oxigène. Si l'hydrate, au moment où on l’'emploiera, commençait à perdre de sa nuance bleue, l'expérience ne réussirait qu'in- complètement : pour éviter cet inconvénient, je ne connais, qu'un moyen, c'est d'étendre la dissolution de cuivre, d'en amener la température à zéro, d'y verser une dissolution faible de potasse à cette même température, de'laver l'hy- drate avec de l’eau également à zéro, et de faire tout de suite le tritoxide. A mesure que l'on versera l’eau oxigénée sur l'hydrate, il changera de couleur; il deviendra vert d'abord, puis vert-Jaunâtre, puis enfin d’un brun-jaune-foncé : bien entendu qu'il faudra agiter le tout, ct mettre un grand exces d’eau oxigénée; il sera même nécessaire de refroidir celle-ci avant de l’employer, et dérrefroidir en même temps les vases. On remarquera qu’au moment du contact il n'y aura pas d’effervescence, mais que, bientôt après, lorsque l’hydrate sera devenu d’un brun-jaune-foncé, il s’en fera une qui sérait capable de devenir assez vive. On la préviendra en grande partie, en étendant la liqueur d’eau très-froide : cette pré- caution est indispensable, car le tritoxide, en chassant l’oxi- gène de l'excès d'eau oxigénée, se décomposerait lui-même par suite de la température à laquelle se trouveraient élevées sans doute les molécules. D'ailleurs on lavera et l'on fera, si l'on veut, sécher le tritoxide, comme nous l'avons indiqué plus haut. 480 SUR LA COMBINAISON Le tritoxide de cuivre est sans odeur, sans saveur; il n'al- tere point le tournesol. Pur, il est, comme nous l'avons dit, d’un brun-jaune-foncé; mais, mêlé avec l’oxide bleu de cuivre, il donne lieu à une couleur olive. Une température peu élevée , moindre que celle de l'eau bouillante, suffit pour le déconpietn: alors il laisse dégager de l’oxigène, et passe à l'état de deutoxide. Lorsqu'il est sous forme d'hydrate, il se décompose même spontanément, du jour au lendemain, pourvu qu'on l’entretienne humide, Son action sur les char- bons incandescents est assez. forte; il en augmente la com- : bustion tout-à-coup. Probablement qu'il agirait beaucoup aussi sur un grand nombre d'autres combustibles ; par exemple, il détonnerait sans doute avec le phosphore par une faible percussion. Il est tout-à-fait insoluble dans l'eau. Les acides sulfurique, nitrique, muriatique, le dissolvent tout-à-coup, et de là résultent des sels de deutoxide de cuivre et de l’eau oxigénée. À peine est-il en contact, sous forme d'hydrate, avec une dissolution un peu concentrée de potasse ou de soude, qu'il commence à se désoxigéner ; les bulles finissent par se succéder assez rapidement, de sorte qu'il se décompose presque complètement dans l’es- pace de quelques heures : l'alcali agit donc, dans ce cas, sur l’oxigene du tritoxide, de même que sur l’oxigène de l'eau oxigénée, 69. J'ai fait un grand nombre de tentatives pour analyser le tritoxide de cuivre; et cependant je ne suis point par- venu à des résultats tout-à-fait satisfaisants. Je n'ai point employé le procédé que j'ai décrit pour l'analyse des per- oxides de strontium, calcium et barium, parce que l'excès DE L'OXIGÈNE AVEC L'EAU. AB d'acide que l’on est forcé d'ajouter pour dissoudre le nou- vel oxide , rendrait l'opération plus difficile à pratiquer. J'ai mieux aimé introduire le tritoxide dans une petite fiole, la remplir d’eau distillée et non aérée presque jusqu'au col, y verser assez d'acide nitrique ou muriatique pour opérer la dissolution de l’oxide métallique, adapter au col de la fiole un tube recourbé, porter peu-à-peu la liqueur à l’ébullition , la faire bouillir de manière à en dégager tout l'oxigène et tout l'air, recueillir les gaz, les mesurer, les analyser, et conclure de cette analyse la quantité d’oxigene cherchée. En m'y prenant ainsi, j'ai retiré, à un douzième près en moins, du tritoxide de cuivre , autant d’oxigène que le deut- oxide en contient. Si l’on considère que ce tritoxide se dé- compose facilement, il deviendra très-probable, ce semble, qu'il-en contient réellement le double. Du deutoxide de 7ine. 70. Le deutoxide de zinc peut se préparer comme le trit- oxide de cuivre : une remarque importante, c'est que, quand on le fait directement avec le protoxide, il faut né- cessairement employer celui-ci à l’état de gelée ; sans cela il ne se suroxiderait pas. * Pur, le deutoxide est blanc ; la plus petite quantité de fer le rend jaune : d’ailleurs ses propriétés sont analogues à celles du tritoxide de cuivre. Ainsi il est insipide, inodore, sans action sur le tournesol, décomposable spontanément, à plus forte raison au degré de chaleur de l’eau bouillante. Les acides sul- furique, nitrique, muriatique, le dissolyent en donnant lieu à des sels de protoxide de zinc et à de l'eau oxigénée. J'ai toujours trouvé que la quantité d'oxigène qu'on pou- 1818. 6x 482 SUR LA COMBINAISON vait en extraire, était un peu plus de la moitié de celle que contient le protoxide. Je suis porté à croire, d'après cela, que l'oxide sur lequel j'ai opéré n'était pas entièrement sur- oxide : une nouvelle analyse devient indispensable. A À i s D'un nouvel oxide de nickel. 71. Je u'ai point, à beaucoup près, autant examiné cet oxide que les précédents. Tout ce que je puis assurer, c’est qu'ayant ajouté de l’eau oxigénée à du nitrate de nickel, et ayant ensuite versé peu-à-peu de la potasse dans la dissolu- tion , j'ai obtenu un précipité d’un blanc vert-sale , qui avait des propriétés sémblables à celles qui caractérisent les oxides de cuivre et de zinc dont il vient d'être question. Par exem- ple, mis en contact avec les acides sulfurique , nitrique et muriatique , il s'y dissolvait; et pour peu qu'on chauffit la liqueur , il s’en dégageait du gaz oxigène. Cependant, comme je n'ai point analysé cet oxide, son existence ne me paraît pas aussi bien démontrée que celle des autres : il se pourrait que le dégagement du gaz oxigène, que j'attribue à une sur- axidation du nickel, provint de quelques matières étrangères contenues dans le nitrate dont je me suis servi. Des différents oxides qui, dans leur contact avec di- vers acides, et sur-tout avec l'acide muriatique , peuvent produire de l'eau oxigenee. 72. Ces oxides sont au nombre de huit; savoir : les deut- oxides de barium, de strontium, de calcium, de zine, le tritoxide de cuivre, et les peroxides de nickel, de potassium et de sodium. Nous n'avons rien à ajouter à ce que nous ; DE LOXIGÈNE AVEC L'EA6. 483 avons dit sur les six premiers; mais il faut que nous prou- vions que les deux derniers possèdent, comme les autres, la propriété de produire de l’eau oxigénée. Que l’on brûle du potassium sur le platine, dans un excès de gaz oxigène; que l’on plonge ensuite le petit vase métal- lique dans de l’eau légèrement chargée d'acide sulfurique, nitrique, muriatique ,etc., et qu'on l'y agite jusqu'à l'entière dissolution de l’oxide, l’on obtiendra une liqueur qui, sa- turée et portée à l’ébullition , laissera dégager plus ou moins de gaz oxigène. Si l’on n’acidulait pas l’eau, tout l'oxigène reprendrait l’état de gaz au moment même de l'immersion de l'oxide; la potasse, jointe à la chaleur développée là où l’action dissolvante aurait lieu , produirait infailliblement cet effet. Que l’on répète cette expérience avec le sodium, et l'on obtiendra un résultat semblable, pourvu que l’on ait le soin, après la vive combustion qu'éprouve le métal, de chauffer l'oxide avec la lampe à esprit-de-vin au milieu de l'excès de az oxigène, pendant sept à huit minutes. Cette précaution est tout-à-fait indispensable pour porter le sodium à l'état de peroxide, parce qu'il ne passe d’abord, en raison de la haute température, qu'au degré d'oxidation qui constitue la soude. Je suis persuadé que, s’il était possible de suroxigéner la : lithine, le peroxide qui en résulterait se comporterait avec les acides d’une manière analogue aux autres peroxides alca- lins. La grande solubilité de cette base dans l’eau l'em- pêche d’absorber l’oxigène de l'eau oxigénée , et lui donne, au contraire, la propriété de le dégager. Mais peut-être se combinerait-elle directement avec ce gaz à une tempéra- Gr. 484 SUR LA COMBINAISON ture élevée : elle a tant d'analogie avec la potasse et la soude, que je suis porté à le croire. J'ai tenté l'expérience sur un -peu de lithine que je tenais de la bienveillance de M. Arfwed- ‘son, à qui la belle découverte de ce nouvel alcali est due : malheureusement , la petite cornue dont je me servais a cassé, et, par suite, la matière s'est trouvée altérée au point que je n'ai pu recommencer l'opération. Il était important de faire beaucoup de recherches sur la question de savoir s'il n'y avait pas d’autres oxides capables de former de l’eau oxigénée. En supposant qu'il y en eût, ils devaient se rencontrer parmi les peroxides, qui sont trop oxigénés pour s'unir aux acides. C'est pourquoi j'ai essayé successivement les peroxides de manganèse, de plomb et de cobalt. Ces oxides ont été mis en contact, à la température ordinaire, avec l'acide sulfurique, avec l'acide nitrique et l'acide muriatique, à différents degrés de concentration. Dans aucun cas l’eau ne s’est oxigénéce, et toujours avec l’acide mu- riatique il y a eu dégagement de chlore. Il est bien remar- quable que l'acide muriatique soit décomposé dans ces cir- constances, et qu'il ne le soit pas par les peroxides alcalins et les peroxides de zinc et de cuivre. Dira-t-on que c'est parce que, dans les peroxides de manganèse, de plomb et de co- balt, l'oxigene est tres-condensé? mais il l’est plus encore dans ceux de potassium, de sodium, de barium. Dira-t-on le contraire ? mais il est moins condensé dans les peroxides de zinc et de cuivre. DE L'OXIGÈNE AVEC L'EAU. 485 De la cause à laquelle peut étre due la décomposition du peroxide d'hydrogène par les metaux, etc. 73. Après avoir exposé tous les phénomènes que présente l'eau oxigénée ou le peroxide d'hydrogène dans son contact avec la plupart des corps, il faudrait en rechercher la cause. Malheureusement, nous ne pouvons former jusqu'à présent que des conjectures à cet égard. Puisque le platine, l'or, l'argent, l’oxide demanganèse , etc., n'éprouvent aucune altération en décomposant le peroxide d'hydrogène; qu'ils ne s’approprient aucun de ses éléments ; que le peroxide abandonne tout de suite la moitié de son oxigène, et qu'il est ramené à l’état d’eau , l’action est toute différente de ce qu’elle paraît être dans la production des phénomènes chimiques. En effet, lorsqu'un corps en décom- pose un autre, c'est en se subsuicuant à l’un des principes de celui-ci; c'est en donnant lieu à un nouveau composé. Mais ici rien de semblable : le corps décomposant ne prend —la.place d'aucun des corps qu'il rend libre; il ne s'engage dans aucune combinaison nouvelle; il agit, en quelque sorte, comme par répulsion. De semblables résultats ne peuvent s'expliquer par l’affinité, du moins telle qu’on la conçoit or- dinairement ; ils ne peuvent être produits que par une cause physique. Or, on ne peut les attribuer ni au calorique, ni à la lumière, ni, selon toute apparence, au fluide magné- - tique : l’on est donc conduit à les attribuer au fluide élec- trique. Il était nécessaire, d'apres cela, de s'assurer si, au mo- ment de la décomposition du peroxide d'hydrogène, il n’y 480 SUR LA COMBINAISON avait pas une certaine quantité de fluide positif ou de fluide négatif qui devenait libre : c'est ce qui a été fait avec beau- coup de soins en employant l'électromètre à feuilles d'or, surmonté d'un condensateur ; une seule fois les feuilles se sont écartées d'une manière sensible; mais, comme en ré- pétant l'expérience à plusieurs reprises, les mêmes signes ne se sont point manifestés, on les a attribués à une cause étran- gère. On a cherché aussi à savoir si le peroxide d'hydrogène éprouverait quelque altération, en le mettant en communi- cation avec un des pôles d’une pile composée de 350 paires; et l'on a vu qu'il s'y conservait parfaitement intact, ou plu- tôt que la faible effervescence que l’on observait n'était due qu’à l'action de la plaque sur laquelle il était placé. Enfin on l'a soumis au courant de la pile ; il en est résulté des effets analogues à ceux que l’on observe avec l’eau , si ce n'est que le dégagement du gaz oxigène était beaucoup plus considé- rable. En reconnaissant l'électricité pout cause primitive, il est possible de concevoir son action de plusieurs manières. L'une d'elles consisterait à supposer que, dans le peroxide d'hydro- gène, l'eau ou l'hydrogène serait électrisé positivement, et l'oxigene négativement ; la combinaison n'aurait lieu que sous cette influence électrique. Lorsqu'on mettrait certains corps en contact avec le peroxide d'hydrogène, ces corps réuniraient les deux fluides ; et de-là, de l’eau, de l’oxigène et de la chaleur. Celle-ci proviendrait de la combinaison su- bite du fluide positif avec le fluide négatif, et'serait quelque- fois assez grande pour réduire quelques oxides, en que ceux d'argent, de mercure, d’or, etc. Quelle que soit, au reste, la cause des phénomènes que DE L'OXIGÈNE AVEC L'EAU. 487 nous avons rapportés dans.ce Mémoire, ‘etisa manière d'agir, n'est-il pas très-probable que c’est la même qui en produit beaucoup d'autres. Par exemple, ne peut-on pas lui attri- buer la détonation de l'ammoniure d'argent , du chlorure et de l'iodure d'azote? ne joue:t-elle:pas un rôle dans! celle de toutes les poudres fulminantes? ne: serait-ce pas elle qui donnerait au gaz ammoniaque la propriété d'être décomposé plus ou moins facilement par les métaux ? n'aurait -elle pas une grande influence sur la ‘transformation du sucre en alcohol et en acide carbonique: par quelques :centièmes dé ferment, dans l'acte de la fermentation? Ce qu'il y a de cer- tain, du moins, c’est qu'elle ouvre aux chimistes une car: rière nouvelle , destinée peut-être à s'agrandir considérable- ment. Il faut faire de nouvelles recherches pour la dévoiler plus qu'élle:ne l’est encore, et en même temps pour'trouver un procédé à l’aide duquel on-puisse se procurer plus com- modément le peroxide d'hydrogène: : ADDITIONS. L'® J'ai dit (pag. 389) que le seul moyen d’avoir de la baryte exempte d’oxide de manganèse, d’oxide de fer, de silice et d'alumine, serait de calciner le nitrate de baryte dans des vases de platine; mais il est probable que ces vases présenteraient d’autres inconvénients : ils seraient légere- ment attaqués par le nitrate, au moment de sa décomposi- tion; en sorte que la baryte contiendrait, en combinaison intime, un peu d'oxide de platine qui pourrait être très- nuisible à la préparation de l'eau oxigénée. Cependant, avant 488 SUR LA COMBINAISON de renoncer à l'emploi de ces vases, il conviendrait d'en faire l'essai. IL.° Lorsqu'on met de l'acide sulfurique étendu d’eau en contact avec le peroxide de barium, la réaction semble être presque nulle ; seulement il se dégage des bulles d’oxi- gène de temps à autre, sur-tout par l'agitation du mélange; ce dégagement se soutient pendant des mois entiers, etc. (voy. la page 477:) J'en ai conclu que, dans ce cas, il ne se produisait point d’eau oxigénée ; mais peut-être qu'il s’en forme une petite quantité, et que le faible dégagement qu’on observe ne provient que de cette eau oxigénée , décomposée par le deutoxide non encore attaqué. IIL® Il serait possible que la rosée de l’eau précipitée des gaz par le froid, contint du deutoxide d'hydrogène, et que l'on püt s’en servir pour préparer ce deutoxide. Cet essai mérite d’être fait, sur-tout en plaçant, autant que possible, les matières sous l'influence électrique. RSA AE LES SAR San RAA AA SE LU A AR URE VER LUE LULU LL LULUE LAS LUE LE LEE LULU LULEUIE LEE ADDITION AU MÉMOIRE SUR LA FIGURE DE LA TERRE, . Inséré dans le volume précédent ; Par M. De LAPLACE. Less expériences multipliées du pendule ont fait voir que l'ac- croissement de la pesanteur suit une marche fort régulière, et à-très-Peu-près proportionnelle au quarré du sinus de la latitude. Cette force étant la résultante des attractions de toutes les molécules terrestres, ses observations comparées à la théorie de l'attraction des sphéroïdes, offrent le seul moyen qui puisse nous faire pénétrer dans la constitution intérieure dé la terre; et, sous ce rapport, elles sont très- importantes pour l’avancement de la géologie. J'ai publié sur cet objet, dans le volume précédent, un théorème fondé sur une propriété remarquable de l'attraction que les corps placés à la surface d’une sphère, exercent sur un point situé près de cette surface. Si l’on imagine un fluide très-rare, et qui, en s’élevant à une petite hauteur, enveloppe la terre entière et ses mon- tagnes, ce fluide prendra un état d'équilibre; et j'ai fait voir, dans le volume cité, que les points de sa surface ex- 1818. G2, Âgo ADDITION AU MÉMOIRE térieure seront tous également élevés au-dessus de la mer. Les points intérieurs des continents , autant abaissés que ceux de la surface de la mer, au-dessous de la surface exté- rieure du fluide supposé, forment par leur continuité ce que je nomme riveau prolongé de la mer. La hauteur d'un point des continents au-dessus de ce niveau, sera déterminée par la différence de pression du fluide, à ce point et au niveau de la mer, différence que les observations du baromètre fe- ront connaître : car notre atmosphère, supposée réduite par-tout à sa densité moyenne, devient le fluide que nous venons d'imaginer. Cela posé, «concevons que la terre soit un sphéroïde ho- mogèene d'une forme quelconque, et recouvert en partie par la mer. Si l'on prend pour unité la longueur du pendule à secondes à l'équateur; et si à la longueur de ce pendule, ob- servée à un point quelconque de la surface du. sphéroïde terrestre, on ajoute la moiué de la hauteur de ce point au- dessus du niveau de l'Océan, hauteur que donne l’observa- tion barométrique; l'accroissement de cette longueur ainsi corrigée, sera égal au produit du quarré du sinus de la lati- tude, par cinq quarts du rapport de la force centrifuge à la pesanteur à l'équateur, ou par 43 dix-millièmes. » Ce théorême est vrai à-tres-peu-pres, quelles que soient la deusité de la mer, et la manière dont elle recouvre en partie la terre, dans le cas même où la surface des conti- nents serait discontinue, et formée de plusieurs surfaces tangentes les unes aux autres : il s'étend aux plateaux élevés, un peu vastes, pourvu qu'ils soient de mème densité que le sphéroïde terrestre. Enfin il n'est point sensiblement altéré par l'attraction des montagnes éloignées. Il me paraît mériter SUR LA FIGURE DE LA TERRE, 491 d'autant plus l'attention des analystes, que, dans tous ces cas où il donne une expression si simple de la pesanteur, il est impossible de déterminer la figure de la mer. Les expériences du pendule faités dans les deux hémi- sphères, s'accordent à donner au quarré du sinus de la lati- tude, un coëfficient qui surpasse 43 dix-millièmes , et à-peu- près égal à 54 dix-millièmes ; il est donc bien prouvé par ces expériences, que la terre n’est point homogène dans son in- térieur , et que les densités de ses couches croissent de la surface au centre. Mais la terre, hétérogène dans le sens mathématique, serait homogène dans le sens chimique, si l'accroissement de la densité de ses couches n'était dû qu'à l'accroissement de la pression qu'elles éprouvent, à mesure qu'elles sont plus près du centre. On conçoit, en effet, que le poids im- mense des touches supérieures peut augmenter considéra- blement leur densité, dans le cas même où elles ne seraient pas fluides : car on sait que les corps solides se compriment par leur propre poids. La loi des densités résultantes de ces compressions étant inconnue; nous ne pouvons pas savoir jusqu’à quel point la densité des couches terrestres peut ainsi s’accroître. La densité d’un gaz quelconque est proportionnelle à sa compression, lorsque sa température reste. la même. Cette loi, trouvée juste dans les limites de densité des gaz où l'on a pu l’éprouver, ne peut évidemment convenir aux liquides et aux solides dont la densité est très-grande relativement à celle des gaz, lorsque la pression est très: petite ou nulle. Fest naturel de penser que ces corps résistent d'autant plus à la compression, qu’ils sont plus comprimés ; en sorte 62. 492 SUR LA FIGURE DE LA TERRE. que le rapport de la différentielle de la pression à celle de la densité, au lieu d'être constant, comme dans les gaz, croît avec la densité : la fonction la plus simple qui puisse repré- senter ce rapport, est la première puissance de la densité, multipliée par une constante. C’est celle que j'ai adoptée, parce qu’elle réunit à l'avantage dé représenter de la ma- nière la plus simple ce que nous savons sur la compression des liquides et des solides, celui de se prêter facilement au calcul, dans la recherche de la figure de la terre. Jusqu'ici les géomètres n’ont point fait entrer dans cette recherche, l'effet résultant de la compression des couches. M. Young vient d'appeler leur attention sur cet objet, par la remarque ingénieuse, que l'on peut expliquer de cette manière l'ac- croissement de densité des couches du sphéroïde terrestre. J'ai pensé que l’on verrait avec intérêt l'analyse suivante, de laquelle il résulte qu'il est possihle de satisfaire ainsi à tous les phénomènes connus, dépendants de la loi de den- sité de ces couches. Ces phénomènes sont : les variations des degrés des méridiens et de la pesanteur; la précession des équinoxes; la nutation de l'axe terrestre; les inégalités que l’aplatissement de la terre produit dans le mouvement de la lune; enfin le rapport de la moyenne densité de la terre à celle de l'eau, rapport que Cavendish a fixé, par une belle expérience, à à =. En partant de la loi précédente sur la com- pression des liquides et des solides, je trouve que st la terre était entièrement formée d’eau , son aplatissement serait :; le coëfficient du quarré du sinus de la latitude, dans l'ex- pression de la longueur du pendule à secondes, serait 59 dix- millièmes ; et la densité moyenne de la terre serait neuf fois celle de l'eau. Tous ces résultats s'écartent des observa- SUR LA FIGURE DE LA TERRE. 493 tions au-delà des limites des erreurs dont elles sont suscep- tibles. Si l'on suppose la terre formée d’une substance homogène dans le sens chimique, dont la densité soit 2; de celle de l'eau commune, et qui, comprimée par une colonne verti- cale de sa propre substance, égale à la millionième partie du demi-axe terrestre, augmente en densité, de 5,5345 mil- lionièmes de sa densité primitive; on satisfait à tous les phénomènes que je viens de citer. L'existence d'une telle substance est très-admissible, et il ÿ en a vraisemblablement de pareilles à la surface de la terre. Au reste, je suis loin d'affirmer que ce cas soit celui de la nature; il est même probable, vu la grande variété des substances qui sont à la surface de la terre, que, dans l'intérieur de cette planète, il en existe semblablement un grand nombre qui n'ont pu être disposées régulièrement autour de son centre de gravité, que dans un état primitif de fluidité due à une chaleur excessive. Mais l'hypothèse d’une substance unique, dont les couches ne varient en densité que par la compression qu'elles éprou- vent, n'offrant rien d'impossible , elle m’a paru digne de l'at- tention des géomètres. Je suppose la température uniforme dans toute l'étendue du sphéroïde terrestre; mais il est possible que la chaleur soit plus grande vers le centre , et cela serait ainsi dans le cas où la terre, douée primitivement d'une grande chaleur, se re- froidirait continuellement. L'ignorance où nous sommes de la constitution intérieure de cette planète, ne nous permet pas deéscalculer la loi de ce refroidissement et la diminution qui en résulte dans la température moyenne des climats; 494 ADDITION AU MÉMOIRE mais nous pouvons établir d'une manière certaine , que cette diminution est insensible depuis deux mille ans. Imaginons dans un espace d’une température constante, une sphère douée d'un mouvement de rotation; concevons ensuite qu'après un long temps la température de l'espace diminue d'un degré; la sphère finira par prendre ce nouveau degré de température : sa masse:m'en sera point altérée ; mais ses dimensions diminueront d'une quantité que je sup- pose être un cent-milliëme, ee qui a lieu à-peu-pres pour le verre. En vertu du principe des aires, la somme des aires que chaque molécule de la sphère décrit autour de son axe de rotation, sera, dans un temps donné, la même qu'aupa- ravant. Il est facile d'en conclure que la vitesse angulaire de rotation sera augmentée d’un cinquante-millième. Ainsi, en supposant que la durée de la rotation soit d'un jour on de cent mille secondes décimales, elle sera dimiuuée de deux secondes par la diminution d'un degré dans la température de l’espace. Si l'on étend cette conséquence à la terre, et si l’on considère que la durée du jour n’a pas varié, depuis Hipparque, d’un centième de seconde, comme je l'ai fait voir par la comparaison des observations avec la théorie de l'équation séculaire de la lune; on jugera que, depuis cette époque, la variation de la chaleur intérieure de la terre est insensible. A la vérité, la dilatation, la chaleur spécifique, la perméabilité plus ou moins grande à la chaleur et la den- sité des diverses couches du sphéroïde terrestre, toutes choses inconnues, peuvent mettre une différence sensible entre les résultats relatifs à la terre, et ceux de la sphère que nous venons de considérer, suivant lesquels une dimi- nution d’un centième de seconde dans la durée du jour ré- SUR LA FIGURE DE LA TERRE. 495 pond à une diminution d’un deux-céntième de degré dans la température. Mais cette différence ne peut jamais élever d'un deux-centième de degré à un dixième, la perte de la chaleur terrestre, correspondante à la diminution d’un cen- tième de seconde dans la durée du jour. On voit même que la diminution d’un centième de degré près de la surface ‘suppose une diminution plus grande dans la température des couches inférieures : car on sait qu’à la longue la tem- pérature de toutes les couches diminue suivant la même progression géométrique; en sorte que la diminution d’un degré près de la surface répond à des diminutions plus grandes dans les couches plus voisines du centre. Les dimen- sions de la terre et son moment d'inertie diminuent donc plus que dans le cas de la sphère que nous avons imaginée. Il suit de là, que si, dans la suite des temps, l'on ob- serve quelques changemente dans Îa hautour moyenne du thermomètre placé au fond des caves de l'Observatoire ; il faudra l’attribuer, non à une variation dans la température moyenne de la terre, mais à un changement dans le climat de Paris, dont la température peut varier par beaucoup de causes accidentelles. Il est remarquable que la découverte de la vraie cause de l'équation séculaire de la lune nous fasse connaître en même temps l'invariabilité de la durée du jour, et celle de la température de la terre, depuis l'époque des plus anciennes observations. Je reprends l'équation (1) du n° 29 du troisième livre de la Mécanique céleste : en la différenciant, et ne comparant que les termes constants de ses deux membres, on aura d .d AU ____4rT.da, fa’ da; (d Ca 496 ADDITION AU MÉMOIRE II est ici la pression à la surface d’une couche de niveau du sphéroïde terrestre dont le rayon est &; b est la densité de cette couche, et + est le rapport de la circonférence au dia- mètre. L'intégrale doit être prise depuis a—o. Maintenant, si l’on suppose d11—2/; dy, k étant une constante, on aura ko —k (e) : (e) étant la densité à la surface où II est nul; l'équation précédente donnera donc Li — E. ea’ da, f. . t 220 S 12186 t É en faisant 7 TA) upposons p —«Ap, OI aura PRE: \ a dp—ad$ — +; l'équation précédente devient ainsi ad p' (AE 2 ! F LE à =" fa .da E En différenciant, on aura d 4 op" £ _. + 7° po: L'intégrale de cette équation est —AÀ.sin. an + B.cos. an ; À et B étant deux constantes arbitraires. On aura donc As ren B e——: Sn. AN + -—: COS. an. a «a La densité n'étant point infinie au centre où & est nul, on a B—0; par conséquent, SUR LA FIGURE DELA TERRE. 497 Telle est donc la loi de densité des couches du sphéroïde terrestre; relative à la loi supposée entre la pression et la densité. À la surface de la terre, où nous supposerons - AT yon a . nm —=—A.sin. an.(1— )- da ang. n En faisant donc à cette surface de a à p x On aura — LL nl EF Le tang. n (a) Si l'on nomme D la moyenne densité de la terre, on aura fe a du D: fa: da; D. Or, l'équation donne à la surface on a donc =, © = étant le rapport de la densité moyenne de la terre, à la densité de la couche à sa surface. Cette équation, com- binée avec l'équation (a), donnera q et, lorsque l’une de ces deux quantités sera connue. Mais il existe deux autres éléments que les observations 1818. 63 498 *:ADDITION AU MÉMOIRE font connaître, et qui, dépendant comme g et D de la loi de densité des couches du sphéroïde terrestre, sont liés aux quantités précédentes. L’un de ces éléments est l’ellipticité du sphéroïde. Si l'on nomme lellipticité de la couche du sphéroïde dont le rayon est a, et'la densité 4; on a, par le n° 30 du livre cité, ddh 6h 2p4a a dh+h da dei Re 1 ( da Si l’on met cette équation sous la forme d°.(k.foa°da) Sfr. a da = ha’ dp da°? a° ra ? de da? O— et si, au lieu de . — Fe) on substitue sa valeur =. fe a° da, nt on aura GR (OR nES Spa pe n. fe. bn Il est facile de voir que l’on satisfait à cette équation, en h.fs'a da=Bs. ( dp } AR d À B étant une arbitraire, et en observant que = =— 7° 4. Cette expression donne, en substituant pour &' sa valeur Le =B.( ee n° _n'tang. an ue tang:an — na faisant ; 3B.dp'. n’'a.da? 0 A.sin. an, expression qui devient nulle au centre. On voit par le n° 30 du livre cité, que cette expression de = est la seule admis- SUR LA(FIGURE, DELA TERRE. 49g Sible dans la question présente : par le même numéro, l'el- lipticité, de la terre.ést à la surface, où 41, a9.k. fe" a da ee PE, 2h. fp'ada—?a* h+% fa hd ; les intégrales étant prises depuis & nul. z? est le rapport de la force centrifuge à la pesanteur à l'équateur. É Jei6 hn° ; 1 Substituant au lieü de Adp, — “fe a da; et, au lieu Po de. |! a da, sa valeur précédente. on aura ? > P ’ ë Me Si 5 Cat 2 3 ! p P $ Jak de=—n.8. fe. (e FR tn) da. On aura facilement cette intégrale, en observant que l'on à généralement $ À 7 do! fevides? faitir 7 et en intégrant par parties. On trouvera ainsi à la surface de la terre, où a = 1, l'ellipticité égale à 5 3q Tr +) 2 Ar PRE 7 g Je dois observer ici que M. Legendre a déja déterminé l'aplatissement de la terre, dans le cas où la densité e des Lt de A . ” . couches est exprimée Par =: sin.an. ( Mémotres de l Aca- démie des Sciences, année 1789.) En combinant les phénomènes de la précession et de la nutation, avec les inégalités lunaires dépendantes de l'apla- 63. 5oo ADDITION AU MÉMOIRE tissément de la terre, etavec'les observations des degrés des méridiens et de la pesanteur, je suis parvenu, dans le tome IT des Nouveaux Mémoires de l’Académie des Sciences . à cette équation fr-d.a 0,00153 Ji e.d.æ sr 0,001736 £ Cette équation suppose le rapport de la masse de la lune, divisée par le cube de sa moyenne distance à la terre, à la masse du soleil, divisée par le cube de sa moyenne dis- tance, égal à 2,57. Mais si ce rapport était 3,59 .4-—1, z étant une indéterminée, on aurait Jr.d.a5 2.0,00153 fhed.als 0,001736 x Or,ona feat da __ Tes Een fr.æ da g NIREP on aura donc 6 is 1 + =———7.0,52880. g 12 On a ainsi les quatre équations suivantes : pr. Loupe ee M2 TER / Re tang. n°? ‘ 3 die + ; 0,0086. (r LE ellipticité de la terre = © ; 6 < 1 2 20 —{} .0,52880. q n SUR LA FIGURE DE LA TERRE. bot Si l'on suppose Ro r; r étant le rapport de la circon- 6 férence au diamètre, on aura q = 5,5345 ; D Fe 2,42925 ; « HA 2 ellipticité — 306,6 ? Η 0,919; le rapport de la densité du centre, à celle de la surface, 5 9 7 sera 37, ou 5,296; et la nutation en secondes sexagésimales sera 9’,32. L’ellipticité précédente satisfait à l’ensemble des observations des degrés, de la pesanteur et des inégalités lunaires dépendantes de l’aplatissement de la terre. La nu- tation 9,30 est à-fort-peu-près celle qui résulte des obser- vations de la hauteur et de l’ascension droite de l'étoile polaire. En supposant , conformément à l'expérience de Ca- vendish, le rapport de la moyenne densité de la terre à celle de l’eau égal à 5,5, la densité de la couche de la sur- face sera 2,27, celle de l’eau étant prise pour unité. Si la terre était entierement formée d’eau; en supposant, conformément aux expériences de Canton, qu’à la tempé- rature de 16° centigrades , elle augmente en densité, de 44 millionièmes, sous la pression d’une colonne d’eau de dix mètres, on a fi 200%; d'où lontire , ñr —= 3,02970 ; 502 ADDITION AU MÉMOIRE SUR LA FIGURE DELA TERRE. D n == 9:0479 FU . ee W I ellipticité — Fo 54: le coëfficient du quarré du sinus de la latitude, dans l’ex- pression de la longueur du pendule à secondes, la longueur à l'équateur étant prise pour unité, est égal à 0,00587; enfin la nutation est en secondes sexagésimales 8”,6. Tous ces ré- sultats s’éloignent des observations, au-delà des limites des erreurs dont elles sont susceptibles. E—— — DE L'IMPRIMERIE DE FIRMIN DIDOT, PÈRE ET FILS, IMPRIMEURS DU ROI ET DE L'INSTITUT ; RUE JACOB, N° 24. TEA 4, ë d k y ÿ it s'al RH IEE Hu 4 COM ANA ur sir