nie ER Ë , © * ‘ je ji Lu MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES DE L’INSTITUT DE FRANCE. TOME XX. a à + # ” d re #à : Eve DA 4 8. à 'uet ve : 1 - J | ke | FALT : CRUE ETAT TM TA née À: Ve 0 13 Re ï L AT . ‘ | it } ke d ? 008 on ll x Là 1 r1 ts Lucia à de Es ut. pe LUE , "1 { » 7 E | . Le ÀZ AMETT EN ' , | + ue, 1 TM | : 0 f 0 i . * . 4 f L , « | Ï t A var L ' ’ : - : À ‘ MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES DE L'INSTITUT DE FRANCE. TOME XX. PARIS, DE L'IMPRIMERIE DE FIRMIN DIDOT FRÈRES, IMPRIMEURS DE L'INSTITUT, RUE JACOB, N° 56. 1849. 15 nr SE EE | PE SEE ni -- Le é- rA Le * dt ALATIUS SARA LA AAA AAA MA SA AAA LA LEA SAV LVARAE LL VAS ELA SLA LA LA AA LAURE LA VA VAR LE VU AAA AAA ALL AUS AAA AAA LA Lu TABLE DES ARTICLES CONTENUS DANS LE VINGTIÈME VOLUME DE LA NOUVELLE COLLECTION DES MÉMOIRES DE L ACADÉMIE DES SCIENCES. Pages. Brocrapuie de Marte-Jean-Antone-Nicoras Cartrar De Conporcer, secrétaire perpétuel de l'ancienne Académie des sciences; par MP RA GONE cette tuele FA MEE PHÉÉ RoHS DER Re i à Cxii] ELocr misroriQue d'Auserr-Augerr Du-Pemir-Taouars, par M. Ezou- RENS, Secrétaire perpétuel... ........ ete opel Davos à .. 1 à XXX| Mémoire sur divers points d’Astronomie ancienne, et en particulier sur la Période sothiaque, comprenant 1460 années juliennes , de 1e 02 CN DO ei ee A era ete ST AT ENS Bic See PAM OM ETS UNE débute I Mémoire sur les couleurs développées dans des fluides homogènes l6 vi TABLE DES MATIÈRES CONTENUES DANS CE VOLUME. par la lumière polarisée, présenté à l'Académie, le 30 mars 1818; par M. Aucusrin FRESNEL................................. Mémoire sur la réflexion de la lumière, présenté à l'Académie , le 15 novembre 1819; par M. Aueusrin FRESNEL ............... Mémoire sur les phénomènes rotatoires opérés dans le cristal de roche; par M-BIrom 1"... 200.0 -L CREER UC 0e OBSERVATIONS et EXPÉRIENCES sur la circulation chez les Mollus- ques; par M. Mine Enwarps...... sonnette Arch lree Nouvezzes Osservarions sur la constitution de l'appareil de la circula- tion chez les Mollusques ; par MM. Mine Enwarps et VALENCIENNES. ORGANOGRAPHIE et PHYSIOLOGIE VÉGÉTALE , Mémoire sur la composi- tion et la structure de plusieurs organismes des plantes; par MNTMIRBEr et PAYEN:.: ccm elinieenet ma U CLS ConsipéraTIoNs sur la reproduction, par les procédés de M. Nipce DE Sair-Vicror, des images gravées, dessinées ou imprimées; PaniIN EME ICREVREUZ, CP CEE CE Fees eo eete (ee Mémoire sur l’analogie de composition et sur quelques points de l'organisation des Échinodermes ; par M. Duvernoy........... FIN DE LA TABLE DU VINGTIÈME VOLUME, Pages. 163 19ÿ 221 579 ANS SNS AS VAS SR RS MR LA SR REVUE LE LUE LUS LE LE LAA LE LA LA LE LE LE RE LE LRU 3 LAN LE LUE De LEUR LS LS EEE VB LE AE LU LALS LE VE LES SES LEMR LENS BIOGRAPHIE DE MARIE-JEAN-ANTOINE-NICOLAS CARITAT DE CONDORCET, SECRÉTAIRE PERPÉTUEL DE L’ANCIENNE ACADÉMIE DES SCIENCES, Par M. ARAGO. (Lue à la séance publique du 28 décembre 1841.) Introduction. Dans les dernières années de sa vie, Georges Cuvier dai- gnait dérober de courts moments à d’immortelles recherches, pour rédiger quelques notes destinées à ses futurs biogra- phes. Une de ces notes est ainsi conçue : « J’ai tant fait d’é- « loges, qu’il n’y a rien de présomptueux à croire qu’on « fera le mien. » Cette remarque de l’illustre naturaliste m’a rappelé que le dernier secrétaire de l’ancienne Académie des sciences, que l’auteur de cinquante-quatre biographies d’académiciens , également remarquables par la finesse et la TIXX : A i] BIOGRAPHIE profondeur, n'a pas encore reçu ici le juste tribut qui lui est dû à tant de titres. La dette remonte à près d’un demi- siècle; cela même était une raison puissante de s'acquitter sans plus de retard. Nos éloges, comme nos mémoires, doi- vent avoir la vérité pour base et pour objet; la vérité, en ce qui touche les hommes publics, est difficile à trouver, diffi- cile à saisir, surtout quand leur vie s’est passée au milieu des orages de la politique. Je fais donc un appel sincère aux - rares contemporains de Condorcet que la mort n’a pas en- core moissonnés. Si, malgré tous mes soins, je me suis quel- quefois égaré, je recevrai les rectifications (bien entendu les rectifications motivées) avec une profonde reconnais- sance. Vous avez peut-être remarqué que j'ai intitulé mon tra- vail Biographie, et non pas, comme d’habitude, Éloge his- torique. C’est, en effet, une biographie minutieuse, détaillée que j'ai l'honneur de vous soumettre. Sans examiner, en thèse générale, ce que la direction des idées, les besoins de la science pourront exiger de vos secrétaires dans un avenir plus ou moins éloigné, j’expliquerai comment, dans cette cir- constance spéciale, l'ancienne forme ne m'aurait pas conduit au but que je voulais, que je devais atteindre à tout prix. Condorcet n’a pas été un académicien ordinaire, voué aux seuls travaux de cabinet; un philosophe spéculatif, un ci- toyen sans entrailles; les coteries littéraires, économi- ques, politiques, se sont emparées depuis longtemps de sa vie, de ses actes publics et privés, de ses ouvrages. Per- sonne n'a eu plus à souffrir de la légèreté, de la jalou- sie et du fanatisme, ces trois redoutables fléaux des ré- putations. En traçant un portrait que je me suis efforcé DE CONDORCET. ii] de rendre ressemblant, je ne pouvais avoir la prétention d’être cru sur parole. Si pour chaque trait caractéristique je m'étais borné à réunir, à conserver soigneusement pour moi seul; tout'ce qui ‘établissait la vérité de mes im- pressions, je n'aurais pas fait assez : il fallait mettre le pu- blic à même de prononcer en connaissance de cause entre la plupart de mes prédécesseurs'et moi; il fallait donc com- battre, visière levée, les vues fausses, mensongères, passion- nées de ceux qui, d’après ma conviction intime, n’ont rien saisi de vrai et d’exact dans la grande, dans la majestueuse figure de Condorcet. Si j'ose concevoir quelque espérance d’avoir trouvé la vérité, là où de ‘plus habiles étaient tombés dans l'erreur, c'est que j'ai pu consulter de nombreuses pièces inédites. La fille, si distinguée, de notre ancien secrétaire ; son mari, l'illustre général O'Connor, ont mis leurs riches archives à ma disposition, avec une bonté, un abandon, une libéra- lité dont je ne saurais assez les remercier. Beaucoup de manuscrits complets ou inachevés de Condorcet; ses lettres à Turgot; les réponses de l’intendant de Limoges, du con- trôleur général des finances et du ministre disgracié; cin- quante-deux lettres inédites de Voltaire; la correspondance de Lagrange avec le secrétaire de l’Académie des sciences et avec d’Alembert; des lettres du grand Frédéric, de Franklin, de mademoiselle de l’Espinasse, de Borda, de Monge, etc., tels sont les trésors que j'ai recus de l’hono- rable famille de Condorcet. Voilà ce qui m'a conduit à des idées nettes et précises sur le rôle de notre confrère dans le mouvement politique, social et intellectuel de la seconde moitié du XVIII: siècle. iv _ BIOGRAPHIE J'ai quelque soupçon de n'avoir pas su éviter un écueil qu'ont engendré les bontés de M. et de madame O'Connor. En parcourant les pièces qu'ils m'avaient confiées, mon esprit se reportait involontairement sur les mille accidents qui pourraient anéantir de si précieuses pages. De là est né, dans cette biographie, un luxe de citations inaccoutumé, excessif; de là, des développements étendus sur des points qui auraient pu n'être qu'indiqués. Ces inconvénients, Je les ai aperçus; mais ils ont perdu de leur importance devant la pensée que j'arrachais peut-être à l'oubli, des faits, dés appréciations, des jugements littéraires d’une grande valeur ; ils m'ont paru, surtout, plus que compensés, par l'avantage que je trouvais à faire parler à ma place plusieurs person- nages éminents du siècle dernier. Un mot, encore, sur la longueur peu ordinaire qu'aura cette lecture, et j'aborde mon sujet. Je ne me fais pas illusion sur l'intérêt que j'aurais à mé- nager davantage la bienveillante attention de mes auditeurs. Tout me disait de beaucoup retrancher, même après lés nombreuses coupures que les exigences d’une lecture pu- blique m'avaient impérieusement commandées; mais j'ai considéré que ma mission a quelque chose d’inusité, de plus solennel que de coutume : je vais, à vrai dire, procéder à la réhabilitation d’un confrère, sous le rapport scientifique, littéraire, philosophique et politique. Tout calcul d'amour- propre qui m'écarterait de ce but, serait évidemment indigne de vous et de moi. DE CONDORCET. : V Enfance et jeunesse de Condorcet. Ses études, son carac- tère, ses travaux mathématiques. Marie-Jean-Antoine-Nicolas CariTar de Condorcet, ancien secrétaire perpétuel de l’Académie des sciences, naquit le 17 septembre 1743, en Picardie, dans la petite ville de Ri- bemont, qui déjà avait donné à l’Académie l'ingénieur Blon- del, à jamais célèbre par la construction de la porte Saint- Denis. Le père de Condorcet, M. Caritat , capitaine de cavalerie, originaire du Dauphiné, était le frère cadet du prélat qu’on vit successivement, à partir de 1741, évêque de Gap, d'Auxerre et de Lisieux. Il avait aussi d’étroites liaisons de parenté avec le cardinal de Bernis et le fameux archevêque de Vienne, M. d’Yse de Saléon, celui-là même qui, encore évêque de Rhodès, fit tant parler de lui pendant le concile d'Embrun, à cause de son très-vif attachement pour les jésuites. Condorcet atteignait à peine sa quatrième année, quand il perdit son père. La veuve du capitaine Caritat, M": de Gaudry, était d'une dévotion très-ardente. Elle imagina qu’un moyen infaillible de soustraire son fils unique aux premiers dangers de l'enfance , serait de le vouer à la Vierge et au blanc. Condorcet porta durant huit années le cos- tume de jeune fille. Cette circonstance bizarre, en lui inter- disant certains exercices du corps, nuisit beaucoup au dé- veloppement de sa force physique ; elle l’'empêcha aussi de suivre les cours publics, où des écoliers n’eussent pas man- qué de prendre le camarade en jupes pour point de mire habituel de leurs espiégleries. \] ® BIOGRAPHIE Quand la onzième année fut venue, l'évêque de Lisieux confia son jeune neveu aux soins d’un des membres de la société célèbre autour de laquelle commençait déjà à gronder l'orage. Sans vouloir empiéter sur l'ordre des temps et des'idées, qu'on me permette 1ci une réflexion : M“ Caritat de Condorcet, dans son amour maternel poussé jusqu’à l’exaltation, assujettit l'enfance du futur secrétaire de l'Académie à des pratiques qui, sur plus d’un point, tou- chaient à la superstition. Le jeune Condorcet, dès qu'il ou- vrit les yeux, se vit entouré d’une famille composée des plus hauts dignitaires de l'Église et d'hommes d'épée parmi les- quels les idées nobiliaires régnaient sans partage; ses pre- miers guides, ses premiers instituteurs furent des jésuites. Quel fut le fruit d’un concours de circonstances si peu or- dinaires? En matière politique, le détachement le plus complet de toute idée de prérogative héréditaire; én ma- tière religieuse, le scepticisme poussé jusqu’à ses dernières limites. Cette remarque , ajoutée à tant d'autres que l’histoire nous fournirait au besoin , ne devrait-elle pas calmer un peu l’ar- deur avec laquelle les partis politiques et religieux, mettant toujours en oubli les droits des familles, se disputent tour à tour le monopole de l'instruction publique ? Le monopole n'aurait un côté vraiment dangereux, que dans un pays où Ja pensée serait enchaînée : avec la liberté de la presse, la rai- son, quoi qu'on puisse faire, doit finir par avoir raison. Au mois d'aoûtr756, Condorcet âgéalors de treize ans, rem- portait le prix de seconde dans l'établissement que les jésuites DE. CONDORCET. vi] avaient formé à Reims, En 1758, il commençait, à Paris, ses études mathématiques, au collége de Navarre. Ses succès furent brillants etrapides, car au bout de dix mois il soutint avec tant de distinction une thèse d'analyse très-difficile, que Clairaut, d'Alembert et Fontaine, qui l’interrogeaient, le sa- luèrent comme un de leurs, futurs confrères à l’Académie. Un pareil horoscope émanant de personnages si éminents, décida de l'avenir du jeune mathématicien. Malgré tout ce qu'il prévoyait de résistances de la part de sa famille, il réso- lut de se consacrer à la culture des sciences , et vint s'établir à Paris chez son ancien maître, M. Giraud de Kéroudou. En sortant du collége, Condorcet était déjà un penseur profond. Je trouve dans une lettre de1775, adressée à Tur- got et intitulée Ma profession de foi, qu'à l’âge de dix-sept ans le jeune écolier avait porté ses réflexions sur les idées morales de justice, de vertu, et cherché (en laissant de côté des considérations d'un autre ordre) comment notre propre intérêt nous prescrit d’être justes et vertueux. Je développe- rai la solution pour la rendre intelligible, mais sans assurer qu'elle était inconnue lorsque Condorcet s'y arrêta. Je ne scraindrais pas d’être au contraire affirmatif, s’il fallait se prononcer sur la nouveauté de la résolution extrême dont elle devint l’origine. Un être sensible souffre du mal qu'éprouve un autre être _ sensible, Il est impossible que, dans la société, un acte in- juste ou criminel, ne blesse pas quelqu'un. L'auteur d’un pa- reil acte a donc la conscience d’avoir fait souffrir un de ses semblables. Si la sensibilité dont la nature l’a doué est restée intacte, il doit donc souffrir lui-même. Ne pas émousser sa sensibilité naturelle doit être , au point vii] BIOGRAPHIE de vue de l'intérêt, le moyen de fortifier en soi les idées de vertu et de justice. Cette conséquence découlait rigoureusement des prémisses. Elle conduisit le jeune Condorcet à renoncer entièrement à la chasse, pour laquelle il avait une vive passion , et même à ne pas tuer des insectes , à moins, cependant, qu'ils ne lui fissent beaucoup de mal. Il est bien peu de matières sur lesquelles, même dans sa première jeunesse, Condorcet se soit abandonné à des opi- nions vagues et non étudiées; je dirais volontiers à des opi- nions de premier mouvement. Aussi règne-t-il une grande harmonie entre les diverses périodes de la carrière labo- rieuse et agitée que nous devons parcourir. Vous venez de le voir, au sortir de l'enfance, notre confrère placçait la dou- ceur envers les animaux au nombre des moyens les plus efficaces de conserver sa sensibilité naturelle, suivant lui principale source de toute vertu. Cette idée l’a toujours do- miné. Encore l’avant-veille de sa mort, dans l’admirable opuscule intitulé Ævis d’un proscrit à sa fille, Condorcet écrivait ces recommandations touchantes : « MA CHÈRE FILLE, Conserve dans toute sa pureté, dans toute sa force, le « sentiment qui nous fait partager la douleur de tout être « sensible. Qu'il ne se borne pas aux souffrances des hom- « mes; que ton humanité s’étende même sur les animaux. « Ne rends point malheureux ceux qui t'appartiendront ; « ne dédaigne pas de t'occuper de leur bien-être; ne sois DE CONDORCET. ix « pas insensible à leur naïve et sincère reconnaissance; ne « cause à aucun des douleurs inutiles....... Le défaut de « prévoyance dans les animaux est la seule excuse de cette « loi barbare qui les condamne à se servir mutuellement de « nourriture. » Je devais saisir la première occasion qui s’offrait à moi, de vous montrer Condorcet obéissant résolument à de nobles idées. Tel nous le voyons ici en morale, tel nous le trouverons plus tard en politique. En applaudissant dès à présent à cette rare constance, je n’entends pas insi- nuer, Dieu m'en garde, que les nombreux changements de bannière auxquels nous avons assisté, que même les plus subits, n'étaient pas consciencieux. Je sais seulement que, par une déplorable fatalité, le public les a vus presque constamment marcher de compagnie avec des faveurs de toute nature, en sorte que des esprits soupçonneux, ont eu un prétexte pour parler de cause et d’effet. Le premier fruit des méditations auxquelles Condorcet se livra chez M. Giraud de Kéroudou, fut un ouvrage in- titulé Essai sur le calcul intégral. L'auteur n'avait pas en- core vingt-deux ans quand il le présenta à l’Académie. Permettez que je fasse précéder de quelques réflexions gé- nérales ce que j'ai à dire de ce traité et des autres travaux mathématiques de Condorcet. On citerait à peine, dans le vaste domaine des sciences, huit à dix découvertes importantes qui, pour arriver à ma- turité, n'aient pas exigé les efforts successifs de plusieurs générations de savants. Malheureusement, par un amour- propre mal entendu, les derniers. inventeurs mettent rare- FE B X BIOGRAPHIE ment les historiens de la science dans la confidence de leurs emprunts; ils aiment mieux étonner qu'instruire; ils ne voient pas assez combien le rôle de débiteur loyal est doux, en regard de celui qui peut soulever des soupcons de mau- vaise foi. Ici se place une distinction essentielle : Dans les sciences d'observation, toutes les assises dont se compose l'édifice final sont plus ou moins apparentes. Les livres , les collections académiques disent quand et par qui ces assises ont été posées. Le public peut compter les éche- lons qu'a dû suivre celui à qui était réservé le bonheur d'atteindre le sommet. Chacun a sa légitime quote-part de gloire dans l’œuvre des siècles. Il n’en est pas tout à fait de même des mathématiques pures. La filiation des méthodes échappe souvent aux yeux les plus exercés; on y rencontre, à chaque pas, des choses sans liaison apparente avec ce qui précède. Certains géo- mètres planent majestueusement dans les hautes. régions de l’espace, sans qu'il soit aisé de dire qui leur a frayé le chemin. Ajoutons que ce chemin était ordinairement établi sur un échafaudage dont personne n’a pris soin quand l’œu- vre a été accomplie. En rechercher les débris épars est un labeur pénible, ingrat, sans gloire et par cette triple raison très-rarement entrepris. Les savants qui cultivent les mathématiques pures sans arriver aux premiers rangs, doivent se résigner à tous ces désavantages. Je n’ai pas encore cité le plus grave : il ré- sulte, suivant moi, de la nécessité qu’éprouve l'historien des mathématiques, de se dépouiller entièrement des lumières de son siècle, quand il est appelé à juger les travaux des DE CONDORCET. x] siècles antérieurs. Voilà, au fond, pourquoi Condorcet n’a pas encore pris son véritable rang parmi les géomètres. Voilà surtout ce qui m'aurait fait reculer devant l'obligation de caractériser nettement, et en quelques lignes, les nom- breux travaux mathématiques de notre ancien secrétaire. Heureusement, ainsi que vous le savez, j'ai dans les mains des pièces inédites de Lagrange, de d’Alembert où les mé- moires de Condorcet étaient appréciés au moment même de leur publication. Ce sont ces appréciations que je mention- nerai. Condorcet se trouvera ainsi jugé par les hommes les plus compétents, et, ce qui en fait de mathématiques n'est pas une moindre garantie, par des contemporains. Le premier ouvrage de Condorcet, son Calcul intégral, fut examiné par une commission académique, en mai 1765. Le rapport, rédigé par d’Alembert, se terminait ainsi : « L'ouvrage annonce les plus grands talents, et les plus « dignes d’être excités par l'approbation de l’Académie, » Les esprits légers, superficiels, qui, sans avoir jamais jeté les yeux sur le travail de Condorcet, en parlent avec un ri- sible dédain, pensent, sans doute, que le rapporteur de l’Académie le traita avec une coupable indulgence. Il faudra, je les en avertis , qu'ils étendent la supposition à Lagrange, car ce grand géomètre écrivait à d’Alembert, à la date du 6 juillet 1765 : « Le Calcul intégral de Condorcet m'a « paru bien digne des éloges dont vous l'avez honoré. » Mettons, d’ailleurs, les autorités de côté ; il n’en restera pas moins évident que cet ouvrage renferme les premières tentatives sérieuses , approfondies qu’on ait faites sur les conditions d’intégrabilité des équations différentielles ordi- naires de tous les ordres, soit relativement à l'intégrale B. Xi] à BIOGRAPHIE d’un ordre immédiatement inférieur, soit même relative- ment à l'intégrale définitive. N'est-ce pas là aussi qu’on trouve les germes de plusieurs importants travaux exécutés depuis sur les équations aux différences finies ? Le volume de l’Académie des sciences de 1772 renferme le mémoire dans lequel l'esprit inventif de Condorcet s’est manifesté avec le plus d'éclat. Les détracteurs aveugles ou systématiques du mérite mathématique de notre ancien se- crétaire seront soumis encore ici à une bien rude épreuve, car je vais rapporter le jugement de Lagrange sur cette production : « Le mémoire est rempli d'idées sublimes et fécondes qui «auraient pu fournir la matière de plusieurs ouvrages. …. « Le dernier article m'a singulièrement plu par son élégance «et par son utilité … Les séries récurrentes avaient déjà « été si souvent traitées, qu'on eût dit cette matière épui- « sée. Cependant, voilà une nouvelle application de ces sé- «ries, plus importante, à mon avis, qu'aucune de celles « qu'on en a déjà faites. Elle nous ouvre, pour ainsi dire, «un nouveau champ pour la perfection du Calcul inté- « gral. » Sans sortir du cadre des mathématiques pures, je trouve- rais encore dans les collections académiques de Paris, de Berlin, de Bologne, de Pétersbourg, des travaux portant toujours sur les questions les plus difficiles de la science, et qui déposeraient également du talent distingué de notre ancien secrétaire; mais je dois me hâter de signaler quel- ques applications de l'analyse, qui ne lui font pas moins d'honneur. J'avertis que, pour épuiser tout d'un coup ce sujet, je ne m'astreins pas à l’ordre des dates. DE CONDORCET. xii] Quand on a réfléchi sur les difficultés de tout genre que les astronomes ont dù vaincre pour déterminer avec pré- cision les orbites des planètes; quand on a remarqué, de plus, que, les planètes étant constamment observables , il a été possible de faire concourir à cette recherche des posi- tions prises à l'apogée, au périgée et dans tous les points intermédiaires, on n’ose seulement pas concevoir l’espé- rance de jamais tracer dans l’espace la course de la plupart des comètes. Ces astres chevelus, après s'être montrés seule- ment quelques jours, vont , en effet , se perdre pendant des siècles dans l’immensité. ‘Un calcul analytique très-simple dissipe bientôt ces dou- tes. Il montre que, théoriquement parlant, trois observa- tions sont plus que suffisantes pour déterminer l'orbite cométaire, supposée parabolique; mais les éléments de cette orbite se trouvent tellement enlacés dans les équations, qu'il paraissait très-diffcile de les en faire jaillir, sans des calculs d’une longueur rebutante: Le problème, envisagé de ce point de vue, n’était pas con- venablement résolu, même après queNewton, Fontaine, Euler, en eurent fait le sujet de leurs recherches les plus assidues. Quand l’Académie de Berlin le proposa comme sujet de prix, les astronomes, au lieu d'employer les calculs de ces grands géomètres, seservaient encore de méthodes graphiques dans lesquelles figuraient des paraboles de carton de divers paramètres. Le but de l’Académie était clairement exprimé : elle voulait des procédés à la fois directs et faciles. Le prix devait être donné en 1774; il fut remis. En 1778, Condorcet le partagea avec M. Tempelhoff. « Votre belle pièce, écri- XIV BIOGRAPHIE « vait Lagrange à notre confrère (le 8 juin 1778), aurait eu « le prix tout entier, si elle avait contenu l'application de « votre théorie à quelque comète particulière. Cette condi- « tion était dans le programme.» La condition y était ef- fectivement, mais Condorcet avait une répugnance extrême pour les calculs, comme il le disait lui-même, « qui exigent « beaucoup d'attention sans la captiver.» Chacun a déjà compris que j'ai voulu désigner les calculs numériques. Dans le glorieux contingent de découvertes mathématiques dont le monde est redevable à la France, figure une bran- che de calcul , encore très-mal appréciée , malgré les services qu’elle a déjà rendus, malgré tous ceux qu'elle promet en- core : c’est le calcul des probabilités. Je n'hésite pas à placer la découverte du calcul des pro- babilités parmi les titres scientifiques de notre pays, non- obstant les tentatives qu’on paraît vouloir faire pour l'en dépouiller. Ériger en inventeurs de ce caleul les auteurs de quelques remarques numériques ; sans exactitude, sur les diverses manières d'amener une certaine somme de points dans le jet simultané de trois dés, serait une prétention sans base réelle ; des préjugés nationaux invétérés pourraient à peine l’excuser. Malherbe, à soixante-treize ans, voulait se battre contre le jeune meurtrier de son fils. « Vous êtes trop vieux, lui « disait-on. — Ne voyez-vous pas, répondit le poëte, que la « partie est tout entière à mon avantage : je ne hasarde « qu'un denier contre une pistole. » Cette repartie était plus fortement imprégnée des principes du futur calcul que les remarques dont on a voulu s’étayer en faveur d’un pays DE CONDORCET. xv voisin. Cependant, quelqu'un s’avisa-t-il jamais de dire : Enfin Malherbe vint, et ouvrit de nouvelles voies aux ma- thématiques ? Les vrais, les incontestables inventeurs du calcul des probabilités , sont Pascal et Fermat. Dans le nombre d’éminents services que ce calcul a déjà rendus à l'humanité, il faut citer en première ligne l’aboli- tion de la loterie et de plusieurs autres jeux, qui, eux aussi, étaient de déplorables piéges tendus à la cupidité, à la crédu- lité et à l'ignorance. Grâce aux principes évidents et simples sur lesquels la nouvelle analyse se fonde, il n’est pas au- jourd’hui de replis qui puissent déguiser la fraude dans les combinaisons financières. Les escomptes, les annuités, les tontines, les assurances de toute nature, n’ont plus rien d’obscur, de mystérieux. Sur ce terrain, les applications des probabilités ont été admises sans trop de résistance. Mais lorsque Condorcet, à la suite de quelques essais de Nicolas Bernoulli, fit incur- sion , à l’aide du nouveau calcul , dans le domaine de la ju- risprudence et des sciences morales ou politiques , un soulè- vement presque général dut l'avertir que sa prise de pos- session n'aurait pas lieu sans un combat animé. A vrai dire, le combat dure encore. Pour le faire cesser, il'faudrait, d’une part, que les géomètres consentissent à exposer les principes des probabilités en termes clairs, précis, dégagés autant que possible d'expressions techniques ; il faudrait, d'autre part, et ceci est bien plus difficile, amener la masse du public à reconnaître que l'appréciation de certaines ma- tières très-complexes ne saurait être du domaine d’un pre- mier apercu ; qu’on ne doit pas s'attendre à parler pertinem- ment de chiffres sans avoir au moins approfondi les principes XV] BIOGRAPHIE de la numération; enfin, qu'il existe des vérités, des con- nexions légitimes, en dehors de celles dont on a puisé les rudiments dans des impressions de jeunesse ou dans la lec- ture des ouvrages classiques. Pour comprendre que les tri- bunaux civils et criminels doivent être constitués de manière qu’un innocent coure très-peu, de risques d’être condamné ; pour comprendre aussi que les chances d'une condamnation injuste seront d'autant moindres que le jugement devra être rendu à une plus grande majorité, il suffit des sentiments d'humanité les plus ordinaires et des simples lumières na- turelles. Le problème devient plus compliqué, s’il s'agit de concilier la juste garantie qu'il faut assurer aux innocents, avec le besoin qu’éprouve la société de ne pas laisser échap- per trop de coupables ; alors la simple raison ne conduit plus qu'à des résultats vagues; le calcul seul peut leur donner de la précision. Répétons-le, il ya, dans les décisions judiciaires, certaines faces, certains points de vüe du ressort du caleul. En portant dans ce dédale le flambeau de l'analyse mathématique, Con- dorcet n’a pas seulement fait preuve de hardiesse : il a de plus ouvert une route entièrement nouvelle. En la parcou- rant d'un pas ferme, mais avec précaution, les géomètres doivent découvrir dans l’organisation sociale, judiciaire et politique des sociétés modernes, des anomalies qu'on n’a pas même soupconnées jusqu'ici. Il est de toute évidence que, dans ses incursions sur le domaine de la jurisprudence, le calcul des probabilités a uni- quement pour objet de comparer numériquement les décisions obtenues à telle ou telle majorité; de trouver les valeurs relatives de tel ou tel nombre de témoignages ; je puis donc DE CONDORCET. XVi] signaler avec sévérité à la conscience publique les passages que la Harpe, dans sa Philosophie du XVIIF siècle, a consacrés à ces applications des mathématiques. On y verra, j'ose le dire, avec stupéfaction, le rhéteur accuser notre con- frère de vouloir toujours se passer de témoins, et même de preuves écrites; de prétendre les remplacer avantageuse- ment par des formules analytiques. Au lieu de lui renvoyer les expressions si peu académiques : c'est un emploi souve- rainement ridicule de la science ; c'est une conquête extra- vagante de la philosophie révolutionnaire ; cela démontre qu'on peut délirer en mathématiques , chacun s'affligera de voir qu'un homme d’un talent réel soit tombé dans de si incroyables erreurs. Ce sera, au reste, une nouvelle preuve qu'il n’est permis à personne, pas même aux académiciens , de parler impunément de ce qu’ils n’ont pas étudié. Je l’avouerai, les écrits mathématiques de Condorcet man- quent de cette clarté élégante qui distingue à un si haut degré les mémoires d’'Euler et de Lagrange. D’Alembert, qui, lui-même, sous ce rapport, n’était pas entièrement irré- prochable, avait vivement engagé notre ancien secrétairé, mais sans grand succès, à songer un peu plus à ses lecteurs. En mars 1772 il écrivait à Lagrange : « Je voudrais bien «que notre ami Condorcet, qui a de la sagacité, du génie, « eût une autre manière de faire; apparemment, il est dans « la nature de son esprit de travailler dans ce genre. » Une pareille excuse a plus de fondement qu’on ne serait peut-être disposé à le croire. Euler, d’Alembert, Lagrange, avec un égal génie mathématique, avaient, en effet, des ma- nières de travailler entièrement différentes. Euler calculait sans aucun effort apparent, comme les jp. 4 c xvii] BIOGRAPHIE hommes respirent, comme les aigles planent dans les airs. Dans une lettre que j'ai sous les yeux, datée de 1769, d'Alembert se dévoilait à Lagrange en ces termes : « Il n'est « pas trop dans ma nature de m'occuper de la même chose « fort longtemps de suite. Je la laisse et je la reprends, «autant de fois qu'il me vient en fantaisie, sans me re- « buter, et pour l’ordinaire cette opiniâtreté éparpillée me « réussit. » Une troisième manière du génie me semble bien caracté- risée par ce passage que je copie dans une note manuscrite de l’auteur de la Mécanique analytique’: « Mes occupations se réduisent à cultiver la géométrie, «tranquillement , et dans le silence. Comme je ne suis pas « pressé et que je travaille plutôt pour mon plaisir que par « devoir, je ressemble aux grands seigneurs qui bâtissent : Je « fais, défais et refais, jusqu’à ce que je sois passablement «content de mes résultats, ce qui néanmoins arrive très-ra- « rement. » Il était bon, peut-être, de montrer que la variété, que l'individualité existent dans les recherches mathématiques comme en toute autre chose; que les voies les plus diverses peuvent également conduire un homme supérieur à trou- ver, dans les attractions mutuelles des corps célestes, la cause du changement d’obliquité de l’écliptique, la cause de Ja précession des équinoxes, et celle des mouvements de libra- tion de la lune. On s’est demandé, avec un sentiment de surprise bien naturel, comment Condorcet renonca si facilement aux suc- cès que la carrière scientifique lui promettait, pour se jeter dans les discussions d'un intérêt souvent très-problématique DE CONDORCET. XIX de l'économie sociale, et dans l'arène ardente de la politique! Si ce fut une faute, bien d’autres, hélas! s’en sont aussi ren- dus coupables. En voici, au surplus, l’explication : Convaincu de bonne heure que l'espèce humaine est indé- finiment perfectible, Condorcet (je copie) « regardait le «soin de hâter ses progrès, comme une des plus douces « occupations , comme un des premiers devoirs de l’homme «qui a fortifié sa raison par l'étude et par la médita- « tion. » Condorcet exprimait la même pensée en d’autres termes; lorsqu'après la destitution de Turgot il écrivait à Voltaire : « Nous avons fait un bien beau rêve, mais il a été trop court. « Je vais me remettre à la géométrie. C’est bien froid de ne « plus travailler que pour la gloriole, quand'on s’est flatté « quelque temps de travailler pour le bien publie.» J'oserai ne pas admettre cette distinction. La gloriole dont parle Condorcet, va tout aussi directement au bénéfice de l'humanité que les recherches philosophiques, économiques, auxquelles notre confrère avait pris tant de goût dans la société de Turgot. Le bien qu’on fait par les sciences a même des racines plus profondes, plus étendues que celui qui nous vient de toute autre source. Il n’est pas sujet à ces fluctuations, à ces caprices soudains, à ces mou- vements rétrogrades qui portent si souvent la perturbation dans la société. C'est devant le flambeau des sciences que se sont dissipés cent préjugés anciens et abrutissants, mala- dies mortelles du monde moral et intellectuel. Si, entraîné jusqu'au paradoxe par une très-légitime douleur, Condorcet a voulu insinuer que les découvertes scientifiques n'ont ja- mais une influence directe et immédiate sur les événements & XX BIOGRAPHIE du monde politique, je combattrai aussi cette thèse, sans même avoir besoin d'évoquer les noms retentissants de bous- sole, de poudre à canon, de machine à vapeur. Je prendrai un fait entre mille, pour montrer l'immense rôle qu'ont sou- vent joué les plus modestes inventions. C'était dans l’année 1746. Le prétendant avait débarqué en Écosse, et la France lui envoyait de puissants secours. Le convoi français et l’escadre anglaise se croisent pendant une nuit très-obscure. Les vigies les plus exercées sont muettes; elles ne voient, ne signalent absolument rien; mais en quit- tant Londres, l'amiral Knowles , malheureusement pour la France et pour son allié, s'était muni d’une lunette de cons- truction récente et fort simple, connue depuis sous le nom de lunette de nuit ; d’une lunette dans laquelle artiste avait complétement sacrifié le grossissement à la clarté. Ce nouvel instrument lui dessine vers l'horizon les silhouettes de nom- breux navires; il les poursuit, les atteint, les enlève : l'hum- ble lunette de nuit vient de décider à jamais de la destinée des Stuarts. Je ne sais, mais n'aurons-nous pas donné une explication assez naturelle de la tristesse qu'éprouvait Condorcet en re- venant aux mathématiques, si nous remarquons que les géo- mètres les plus illustres eux-mêmes se montraient alors dé- couragés. [ls se croyaient arrivés aux dernières limites de ces sciences. Jugez-en par ce passage que je copie dans une lettre de Lagrange à d’Alembert : « Il me semble que la mine cest déjà trop profonde, et qu'à moins qu’on ne découvre de « nouveaux filons, il faudra tôt ou tard l’abandonner. La « chimie et Ja physique offrent maintenant des richesses «plus brillantes et d’une exploitation plus facile. Aussi le DE CONDORCET. XX] « goût du siècle paraît-il entièrement tourné de ce côté-là. « Il n’est pas impossible que les places de géométrie, dans les «académies, deviennent un jour ce que sont actuellement «les chaires d’arabe dans les universités. » } Nomination de Condorcet à l’Académie des sciences. Son voyage à Ferney. Ses relations avec Voltaire. J'apprends, par une lettre de d’Alembert à Lagrange, que Condorcet aurait pu entrer à l’Académie en 1768, à l’âge de vingt-cinq ans; ses parents ne le voulurent point. Faire des sciences son occupation officielle, son occupation prin- cipale, c'était à leurs yeux déroger. Condorcet fut reçu en 1769. Sa famille s'était rendue, plutôt par lassitude que par conviction, car six ans après, Condorcet, déjà secrétaire perpétuel de l’Académie, écri- vait à Turgot : « Soyez favorable à M. Thouvenel; c’est «le seul de mes parents qui me pardonne de ne pas être « capitaine de cavalerie. » Je dois ranger, parmi les premiers travaux académiques de Condorcet, un mémoire-inédit sur la meilleure organisation . des sociétés savantes. Ce travail était destiné au gouvernement espagnol. Dominé par le besoin de calmer les susceptibilités de la cour de Madrid, l’auteur a rétréci outre mesure cer- taines faces de la question; mais on y trouve des vues géné- _rales, fruit d’une expérience éclairée , et quelques anecdotes curieuses qui donnent la clef, jusqu'ici ignorée, de diverses prescriptions de nos anciens règlements académiques. Il aurait fallu méconnaître entièrement l'Espagne du XVIII siècle pour songer à y établir une académie où les xXxi] BIOGRAPHIE Moœdina Celli, les d'Ossuna, etc., considérés uniquement comme partie de la grandessa , n'auraient pas trouvé leur place. Condorcet faisait cette concession : il créait des mem- bres honoraires, mais en stipulant une égalité de droits, de prérogatives, qui pouvait, suivant notre confrère, « relever les «académiciens aux yeux du publie, et peut-être à leurs pro- «pres yeux, ear les savants eux-mêmes ne sont pas toujours «philosophes. Enfin, disait Condorcet, pour que ce mélange «de gens de qualité qui aiment les sciences, et de savants «voués à leurs progrès, soit agréable aux uns et aux autres, «il doit rappeler ce mot de Louis XIV : Savez-vous pourquoi « Racine et M. de Cavoye, que vous voyez là-bas, se trouvent «si bien ensemble? Racine avec Cavoye se croit homme «de cour; Cavoye avec Racine se croit homme d'es- « prit. » Peut-être me saurez-vous quelque gré si je divulgue ici, d'après le manuscrit de Condorcet, l’origine d'un article de: la première charte de notre compagnie, article relatif aussi à la nomination des grands seigneurs. « Lorsqu'on introduisit, » dit notre confrère, « des hono- «raires dans l'Académie des sciences, Fontenelle, voulant «éviter qu'ils ne dégoütassent les vrais savants par des hau- «teurs, par l'abus du crédit, imagina, comme une sorte de «compensation, de faire mettre dans les règlements que la «classe des honoraires serait la seule où les moines pour- «raient être admis. » Dans l'espoir de décider les autorités espagnoles à ne ja- mais se régler, pour les choix, sur les principes religieux des candidats, Condorcet leur posait cette question :« Croyez-vous _« qu'une académie composée de l’athée Aristote, du brahme DE CONDORCET. xxii] « Pythagore, du musulman Alhasen, du catholique Descartes, « du janséniste Pascal, de l’ultramontain Cassini, du calviniste « Huygens, de l’anglican Bacon, de l’arien Newton, du déiste « Leibnitz, n'en eût point valu une autre ? Pensez-vous qu'en . «pareille compagnie on ne se serait pas entendu parfaitement «en géométrie, en physique, et que personne s’y füt amusé à « parler d’autre chose ? » Condorcet ne songeait pas à Madrid seulement en deman- dant, pour le directeur de l’Académie, une grande autorité et de larges prérogatives. Il voulait, ce sont ses propres ex- pressions, « délivrer les savants de l’affront le plus propre à «les dégoüter : celui d’être protégés par des subalternes. » C'est là, en effet, une plaie de tous les temps et de tous les pays. Si le mémoire de Condorcet voit jamais le jour, peut-être trouvera-t-on qu'il s'est prononcé d’une manière trop absolue contre l'admission des étrangers parmi les membres résidents des académies. En pareil cas, l’histoire dira, à la décharge de notre confrère, qu'au moment où il écrivait, le gouverne- ment francais prodiguait ses faveurs à des étrangers médio- cres, et négligeait des hommes supérieurs nés dans le pays. Elle montrera, par exemple, un Italien, Boscowich, pourvu d’une immense pension par les mêmes ministres qui refu- saient à d’Alembert, malgré son génie et l'autorité des rè- glements, la réversibilité de 1200 livres de rente provenant de la succession de Clairaut. On verra, enfin, chose incroya- ble, ce même personnage que Lagrange et d’Alembert traitaient avec le plus grand dédain dans des lettres que j'ai sous les yeux, vouloir entrer à l’Académie sans attendre une vacance, et être sur le point de réussir, grâce à l’admi- XXIV BIOGRAPHIE ration niaise qu'on a constamment professée dans cette ca- pitale, pour tout homme dont le nom a une terminaison étrangère. Jusqu'en 1770, Condorcet avait paru vouloir se borner exclusivement aux études mathématiques et économiques. A partir de cette année, il se jeta aussi dans le tourbillon littéraire. Personne n’hésitera sur la cause de cette résolu- tion, quand on aura remarqué qu'elle suivit de très-près, par la date, le voyage que d’Alembert et Condorcet firent à Ferney. À son retour, le jeune académicien de vingt-sept ans écri- vait à Turgot, intendant du Limousin: « J'ai trouvé Voltaire « si plein d'activité et d'esprit qu'on serait tenté de le croire immortel, si un peu d’injustice envers Rousseau, et trop « de sensibilité au sujet des sottises de Fréron, ne faisaient « apercevoir qu'il est homme... » A l’occasion de quelques articles du Dictionnaire philosophique, alors inédit, articles dont l'importance ou l'originalité pouvaient être l’objet d’un doute, Condorcet disait dans une autre lettre : « Voltaire « travaille moins pour sa gloire que pour sa cause. I] ne faut « pas le juger comme philosophe, mais comme apôtre. » Certains travaux de Voltaire pouvaient-ils être appréciés avec plus de mesure, de goût, de délicatesse ? Le malheureux Gilbert disait dans sa célèbre épître : Saint-Lambert, noble auteur dont la muse pédante Fait des vers fort vantés par Voltaire qu'il vante. Le poëte avait circouscrit son accusation; cent prosateurs se DE CONDORCET. XXV chargèrent de la généraliser. Voltaire devint une sorte de Da- laï-Lama du monde intellectuel. Ses amis furent des courtisans dépourvus de dignité, dévoués aveuglément aux caprices du maître, et quêtant par des éloges outrés, par des complai- sances sans bornes, une de ces lettres datées de Ferney, qui semblaient dans le monde un gage certain d’immortalité. En ce qui touche Condorcet, il suffira de quelques guillemets pour renverser tout cet échafaudage d’accusations flétrissantes. Madame Necker reçut en 1776 des vers très-louangeurs de Voltaire. Son mari, successeur de Turgot au con- trôle général des finances, avait aussi dans ces vers une large part d’éloges. Tout cela était assurément sans con- séquence; mais le rigorisme de Condorcet s’en émut; il crut y voir un acte de faiblesse, dont la réputation du célè- bre philosophe devait souffrir ; son inquiétude, son déplaisir débordèrent alors en termes d’une incroyable amertume: « Jesuis fâché de ces vers. Vous ne savez pas assez quel « est le poids de votre nom... Vous ressemblez aux gens qui « vont applaudir Arlequin quand il y a relâche à Zaïre... « Je ne connais votre pièce que par oui-dire ; mais ceux qui « l'ont lue m’assurent qu'à propos de M. et M" L'Enveloppe « (M. et M" Necker) vous parlez de Caton. Cela me rappelle « un jeune étranger qui me disait : J'ai vu trois grands « hommes en France; M. de Voltaire, M. d' Alembert et « M. l'abbé de Voisenon. » Un seul exemple d'indépendance, de loyale franchise, ne suffirait pas; qu'on me permette d’autres citations. Voltaire voulait faire jouer à Paris la tragédie qu'il avait composée dans son extrême vieillesse : Zrène. Condorcet, crai- gnant un échec, résistait aux instances pressantes qui lui arri- TAXE D XXV] BIOGRAPHIE vaient de Ferney, en s'appuyant sur des critiques judicieuses et fermes, tempérées par des paroles respectueuses à travers lesquelles on découvre toujours le disciple s'adressant à son maître. Voici, par exemple, ce que je lis dans une lettre de la fin de 1777: « Songez, Monsieur, songez que vous nous « avez accoutumés à la perfection dans les mouvements, dans « les caractères, comme Racine nous avait accoutumés à la « perfection dans le style. Si nous sommes sévères, c'est « votre faute. » Condorcet était un profond géomètre. Il appartenait à cette classe d'hommes d’études qui, sur la foi de quelques una, n’assistent à la représentation des plus belles tragédies de Corneille, de Racine, que pour s’écrier à chaque scène : Qu'est-ce que cela prouve? Voltaire devait donc tenir peu de compte des remarques d’un eritique si incompétent. Écoutez, et jugez: « Ferney, le 12 janvier 1778. « Mon philosophe universel, vos lumières m'étonnent, et « votre amitié m'est de jouren jour plus chère, Je suis affligé « et honteux d’avoir été d’un autre avis que vous, sur la der- « nière tentative d’un vieillard de quatre-vingt-quatre ans. « J'avais cru, sur la foi de quelques pleurs que j'ai vu répan- « dre à des personnes qui savent lire et se passionner sans « chercher la passion, que si mon esquisse était avec le « temps bien peinteet bien coloriée, elle pourrait produire « à Paris un effet heureux. Je me suis malheureusement « trompé. Je conviens d’une grande partie des vérités que « vous avez la bonté de me dire, et je m'en dis bien d’autres DE CONDORCET. XX Vi] « à moi-même. Je travaillais à faire un tableau de ce croquis, « lorsque vos critiques, dictées par l’amitié et par la raison, « sont venues augmenter mes doutes. On ne fait rien de « bien dans les arts d'imagination et de goût, sans le se- « cours d’un ami éclairé. » Je sens que j'insiste peut-être trop sur un point de la vie de Condorcet qui déjà doit vous paraître suffisamment éclairci. Cependant, j’éprouve l’invincible besoin de faire unetroisième et dernière citation : c'est que, dans ce nouveau cas, la franchise de Condorcet s’éleva à la hauteur d’une - belle et noble action. Voltaire et Montesquieu ne s'étaient point aimés. Montes- quieu l'avait même trop laissé paraître: Voltaire s’irrite de quelques brochures qu’on publie à ce sujet et rédige à Fer- ney, contre l'Esprit des Lois, des articles qu'il adresse à ses amis de Paris, en leur demandant de les publier. Condorcet ne cède point aux instances, quelque impérieuses qu’elles soient, de l’illustre vieillard. « Ne voyez-vous pas, lui mande- « til, qu'on rapprocherait ce que vous dites aujourd'hui de « Montesquieu , des éloges que vous lui avez donnés autre- « fois? Ses admirateurs, blessés de la manière dont vous « relevez quelques citations erronées, iraient chercher dans « vos ouvrages des inadvertances semblables, et il serait « impossible qu'on n’en découvrit pas. César; racontant ses « propres campagnes dans les Commentaires, a bien com- « mis lui-même des inexactitudes. ,.:: Vous me pardonne- « rez, jé l'espère, de ne pas adopter un avis auquel vous « paraissez tenir beaucoup: Mon attachement me commande « de vous dire ce qui sera avantageux, et non cé qui pour- D. XXVII] BIOGRAPHIE « rait vous plaire. Si je vous aimais moins, je n'aurais pas « Je courage de vous contredire. Je sais les torts de Mon- « tesquieu ; il est digne de vous de les oublier. » Ce langage loyal et noble redressera bien de fausses idées. Qui maintenant oserait dire que les philosophes du XVIIL siècle s'étaient faits, en quelque sorte, les hommes liges de Voltaire ? La courte réponse de l’illustre vieillard aux remontrances de Condorcet, ne sera pas un document moins précieux dans l’histoire de notre littérature. Je ne commettrai pas la faute de la laisser enfouie dans mon porte- feuille ; la voici: « Îl n'y a pas un mot à répondre à ce qu'un vrai philo- « sophe m'a écrit le 20 juin. Je l'en remercie très-sincère- « ment. On voit toujours mal les choses quand on les voit « de trop loin. Il ne faut jamais rougir d'aller à l’école, eût- « on l’âge de Matussalem.... Je vous renouvelle ma recon- « naissance. » Condorcet successeur de Grandjean de Fouchy comme secrétaire de l’Académie des sciences. Appréciation de ses Éloges des académiciens. Fontenelle avait jeté tant d'éclat sur les fonctions de se- crétaire de l’Académie des sciences , qu’à sa mort personne ne voulut lui succéder. Après bien des sollicitations, Mairan consentit à occuper provisoirement cette place, pour laisser à la compagnie savante le temps de faire un choix dont elle n'eût pas après coupà se repentir. On comprit enfin quele seul moyen d'éviter toute comparaison écrasante, serait de donner DE CONDORCET. XXIX au neveu de Corneille un successeur résigné à ne pas l’imiter, et qui püt désarmer la critique par son extrême modestie. C'est dans ces circonstances qu’en 1743 Grandjean de Fou- chy devint l'organe officiel de l’ancienne Académie. Fouchy remplissait ces fonctions depuis plus de trente années, lorsque Condorcet entra dans la compagnie savante. Les infirmités du secrétaire perpétuel, son âge, lui faisaient désirer d’avoir un collaborateur, et il jeta les yeux sur son plus jeune confrère. C'était créer une sorte de survivance. Cela révolta la portion de l’Académie qui s’associait ordi- nairement aux inspirations de Buffon. Les amis de d’Alem- bert ne montrèrent pas moins d’ardeur en sens inverse. Il est rare que des principes abstraits passionnent les hommes à cedegré; aussi, pour tout le monde, la question bien posée était celle-ci : Le successeur de Fontenelle s’ap- pellera-t-il Bailly ou Condorcet ? Entre de tels concurrents la lutte ne pouvait manquer d’être noble et loyale, en ce qui dépendait seulement d’eux. Condorcet, toute sa vie profondément modeste, crut qu’il avait à donner la mesure de son expérience , de son habi- leté dans l’art d'écrire, et se mit à composer des éloges aca- démiques. Les règlements de 1699 imposaient au secrétaire perpétuel l’obligation de payer un tribut de regrets à la mémoire des académiciens que la mort moissonnait. Telle est l’origine de tant de biographies souvent éloquentes, toujours ingénieuses, que Fontenelle a laissées et qui se rapportent toutes à l'in- tervalle compris entre la dernière année du XVI[: siècle et XXX BIOGRAPHIE 1740. L'homme amoureux de sa tranquillité fait ce que le devoir lui prescrit, et jamais davantage. C’est dire que Fonte- nelle se garda bien de remonter, dañs les annales de la compa- gnie, au delà du moment de son entrée en fonctions. L’admi- rable collection qu'il nous a laissée présentait ainsi une lacune de trente-trois ans. Les académiciens décédés entre 1666 et 1699 n'avaient point eu de biographies. C’est dans ce tiers de siècle que Condorcet trouva les sujets de ce qu’il appelait ses exercices, et parmi eux, des savants tels que Huygens, Ro- berval, Picard , Mariotte, Perrault, Roëmer, etc. Ces premiers éloges sont écrits avec une connaïssance parfaite des matières traitées par les académiciens, et d’un style simple, clair, précis. Condorcet disait en les adressant à Turgot : « Si j'avais pu y mettre un peu de clinquant, « ils seraient plus à la mode; maïs la nature m'a refusé le « talent de rassembler des mots, l’un de l’autre étonnés, « hurlant d'effroi de se voir accouplés. Jé m’humilie dévant « ceux qu'elle a mieux traités que moi. » Condorcet se trompait en montrant tant de défiance pour un travail qui lui donna dans l'Académie une impo- sante majorité, et dont Voltaire, d’Alembért et Lagrange ne parlaient jamais qu'avec une grande estime. Le 9 avril 1773, d’Alembert écrivait à Lagrange : « Con- « dorcet méritait bien la survivance de la place de secré- « taire, par les excellents éloges, qu’il vient de publier, des « académiciens morts depuis 1699... Ils ont eu ici un suc- « cès unanime, » « Cet ouvrage, disait Voltaire à la date du 1° mars 1774, « est un monument bien précieux. Vous paraissez partout « le maître de ceux dont vous parlez, mais un maître = DE CONDORCET. XXX] « doux et modeste. C’est un roi qui fait l’histoire de ses « sujets. » 5 | Un pareil suffrage assignait aux premiers essais de Con- dorcet, sous le double rapport du fond et de la forme: un rang d’où Ja malveillance a vainement tenté de les faire descendre. Condorcet était à peine entré en relation avec M. de Fou- chy, qu'ilen reçut la mission d'écrire plusieurs éloges , entre autres celui du géomètre Fontaine, mort le 21 août 1771. Des difficultés imprévues vinrent aussitôt l’assaillir. Lorsque Condorcet traçait les biographies des premiers membres de l'Académie des sciences, un siècle avait mis toutes choses à leur véritable place : personnes, travaux et découvertes ; alors, il ne s'agissait guère, pour l'écrivain, que de promul- guer, en termes plus ou moins heureux, les arrêts irrévoca- bles et déjà connus de la postérité. Dorénavant il allait se trouver aux prises avec les exigences presque toujours aveugles des familles, avec des susceptibi- lités contemporaines, quelquefois amies, habituellement ri- vales; enfin, avec des opinions basées sur des préjugés et des haines personnelles, autant dire avec ce qu'il ya dans le monde intellectuel de plus difficile à déraciner. Je soupçonne que Condorcet s'exagéra outre mesure les embarras, assurément réels, dont je viens de donner l’a- perçu, Je suis, du moins, certain que la composition de son premier éloge d’un académicien contemporain fut extré- mement laborieuse. Dans la correspondance avec Turgot, je le vois déjà très-occupé de Fontaine vers le milieu de 1 772. Au commencement de septembre, il adressait à l’illustre in- tendant une première copie de son travail. Le même éloge XXXI] BIOGRAPHIE retouché, remanié, reprenait un an plus tard, en septembre 1773, le chemin de Limoges. Ce fut, on doit en convenir, pour un écrit de vingt-cinq pages in-8, bien du temps, de l'hésitation, du scrupule. Du moins, la maxime de Boileau n'avait pas été cette fois infructueuse. D’Alembert, écrivant à Lagrange, appelait l'éloge de Fontaine un chef-d'œuvre. Voltaire disait dans une lettre du 24 décembre 1773 : « Vous m'avez fait passer, « Monsieur, une demi-heure bien agréable... Vous avez em- « belli la sécheresse du sujet, par une morale noble et pro- « fonde... qui enchantera tous les honnêtes gens... Si vous « avez besoin de votre copie, je vous la renverrai en vous « demandant la permission d’en faire une pour moi. » Voltaire demandant, pour son usage personnel, la permis- sion de copier l’éloge de Fontaine ! connaît-on un hommage au-dessus de celui-là ? A l'éloge de Fontaine suctéda celui non moins piquant, non moins ingénieux, non moins philosophique de la Con- damine. L'Académie et le public le reçurent avec des ap- plaudissements unanimes. Enfin, avec les seules exceptions des années 1775 et 1776, pendant lesquelles l’Académie n’éprouva aucune perte , le secrétaire eut à pourvoir annuellement, jusqu’en 1788, à trois, à quatre, et même à huit compositions analogues. Le style de ces derniers éloges de Condorcet est grave et noble, On n'y aperçoit aucune trace de manière, de re- cherche; aucun désir de faire effet par l'expression; de couvrir sous la pompe, sous la bizarrerie du langage, la faiblesse, la fausseté de la pensée. Notre confrère résista avec d'autant plus d'assurance à DE CONDORCET. XXXIi] l'invasion du mauvais goût, à la confusion des genres , aux tendances dithyrambiques dont une certaine école commen- cait à faire l'essai, que Voltaire l’encourageait, qu'il lui écri- vait de Ferney, à la date du 18 juillet 1774: « C’est sans « doute un malheur d’être né dans un siècle dégoûté; mais, « que voulez-vous : le public est à table depuis quatre-vingts « ans; il boit de mauvaise eau-de-vie sur la fin du repas. » C’est aujourd’hui chose assez généralement convenue, et propagée par oui-dire, que Condorcet manque, dans ses éloges, de force, de chaleur, d'élégance, de sensibilité. J'oserai ne pas être de cet avis, sans même trop m'effrayer de mon isolement. Que répondraient , en effet, ceux qui parlent de manque de force, si je leur citais ce portrait des académiciens, heureusement très-peu nombreux, dont les noms se sont trouvés mélés à des brigues sourdes : « De pareilles brigues ont toujours été l'ouvrage de ces « hommes que poursuit le sentiment de leur impuissance ; « qui cherchent à faire du bruit, parce qu'ils ne peuvent « mériter la gloire ; qui, n'ayant aucun droit à la réputation, « voudraient détruire toute réputation méritée, et fatiguent, « par de petites méchancetés ; l’homme de génie qui les ac- «< cable du poids de sa renommée. » J'oserai renvoyer les critiques qui ont reproché à Condorcet de manquer de sensibilité, aux passages suivants de l'éloge inédit des pères Jacquier et le Seur : -. . . . « Leur amitié n’était pas de ces amitiés vulgaires « que fait naître la conformité des goûts et des intérêts. La « leur devait son origine à un attrait naturel et irrésistible. « Dans ces amitiés profondes et délicieuses, chacun souffre T. XX. E XXXIV BIOGRAPHIE toutes les souffrances de son ami, et sent tous ses plaisirs. On n'éprouve pas un sentiment, on n'a pas une pensée où son ami ne soit mêlé; et si on s'aperçoit qu’on n’est pas un avec lui, c’est uniquement par la préférence qu'on lui donne sur soi-même. Cet ami n’est pas un homme que l’on aime, que l’on préfère aux autres hommes; c'est un être à part et à qui rien ne ressemble : ce ne sont ni ses qualités, ni ses vertus qu’on aime en lui, puisqu’un autre aurait pu les avoir et qu'on ne l'aurait pas aimé de même; c’est lui qu’on aime, et parce que c'est lui. Ceux qui n’ont point goûté ce sentiment peuvent seuls nier qu'il existe; il faut les.plaindre. . 4... 0000 arte . . . . . «Dès l'instant où ils se furent rencontrés à Rome, tout fut commun entre eux : peines, plaisirs, tra- vaux, la gloire même, celui de tous les biens peut-être qu'il est plus rare que deux hommes aient partagé de bonne foi. Cependant, chacun d’eux publia à part quelques mor- ceaux, mais peu importants, et qui, selon le jugement de celui à qui ils appartenaient, n'auraient pas mérité de pa- raître avec le nom de son ami. Ils voulurent qu'il y eût dans les places qu'ils occupaient une égalité parfaite; si l’un des deux obtenait une distinction , il ne songeait plus qu'a procurer à son ami une distinction égale. Un jour, dans un besoin d'argent, le père le Seur s’adressa à un autre qu’à son ami. Le père Jacquier lui en fit des reproches : Je savais que vous n'en. aviez pas, lui dit le père le Seur, et vous en auriez emprunté pour moi à la même personne. . . . . . . . . . . . . . « Le père Jacquier eut le malheur de survivre DE CONDORCET. XXXVW «a son ami. Le père le Seur succomba à ses infirmités «en 1770. Deux jours avant de mourir, il paraissait avoir « perdu toute connaissance. « Me reconnaissez-vous ? » lui « dit le père Jacquier, peu d’instants avant sa mort. « Oui, « répondit le mourant ; vous êtes celui avec qui je viens de « résoudre une équation très-difficile. » Ainsi au milieu de « la destruction de ses organes, il n'avait pas oublié quels « furent les objets de ;ses études, et il se rappelait un ami « avec qui tout lui avait été commun. « Le père Jacquier fut arraché des bras de son ami mourant, « par des amis qui, pour me servir des expressions du père « Jacquier lui-même, re voulaient pas avoir à les regretter « tous deux. « Il a repris une chaire que sa santé l’avait obligé de quit- « ter. Moins occupé de prolonger des jours que l'amitié ne « console plus, il veut du moins les remplir par des travaux « utiles, et suspendre le sentiment d’une douleur dont rien « ne peut le guérir. Il sait qu’il ne faut pas ajouter le poids « du temps à celui du malheur, et que, pour les âmes qui « souffrent, le loisir est la plus cruelle des tortures. » L’appréciation que Condorcet a donnée des mérites divers de la Condamine pourrait, si je ne me ‘trompe, être placée sans désavantage, à côté de l'éloquente allocution que Buffon adressait à l’illustre voyageur, le jour de sa réception à l'Académie française. Elle soutiendrait aussi le parallèle avec tout ce que l’éloge dumême académicien, prononcé par l'abbé Delille , son successeur, renferme de plus élégant. Les compositions biographiques de Condorcet brillent par ee qui devait naturellement en faire l’essence. L'histoire de E XXXV] BIOGRAPHIE l'esprit humain y est envisagée de très-haut. Dans le choix des détails, l’auteur a constamment en vue l'instruction et l'utilité, plus encore que l'agrément. Sans trahir la vérité dont les prérogatives doivent primer tout autre intérêt, toute autre considération, Condorcet est sans cesse dominé par cette pensée , que la dignité du savant se confond, à un certain degré, avec celle de la science; que les applaudissements accordés à la peinture spirituelle de tel ou tel ridicule, sont de pauvres dédommagements du tort, pour léger qu'il soit, qu'on a pu faire à la plus modeste branche des connais- sances humaines. On a trop attendu de Monsieur plus que Fontenelle, comme Voltaire appelait notre confrère sur l’adresse de plusieurs lettres inédites que j'ai dans les mains, en espérant trouver dans ses éloges des chapitres complétement rédigés d’une future histoire des sciences. Condorcet ne commit pas la faute de présenter à son auditoire des aliments trop savou- reux , des aliments qui n'auraient pas été acceptés. Notre ancien secrétaire se distingue, surtout, par la plus éclatante impartialité , par les pensées philosophiques et d'un intérêt général qu’il jette à pleines mains au milieu des plus simples circonstances biographiques; par son abnéga- tion constante de tout ressentiment personnel, de tout esprit de coterie, de toute pensée d’amour-propre. Condorcet ca- ractérisait aussi bien ses propres ouvrages que ceux de Franklin , quand il disait de ces derniers : « On y cherche- « rait vainement une ligne qu’on puisse Le soupçonner d’avoir «écrite pour sa gloire. » La longue carrière de Franklin elle-même n'offre certai- nement pas un trait de modestie plus franc, plus net, plus DE CONDORCET. XXX VI] explicite que celui qui est contenu dans ce passage de l'éloge de Fontaine : « J'ai cru un moment, disait ce géomètre, « qu’un jeune homme avec qui on m'avait mis en relation « valait mieux que moi ; j'en étais jaloux, mais il m'a rassuré « depuis. » Le jeune homme en question, ajoute Condorcet, est l’au- teur de cet éloge. La secte toujours si nombreuse et si active des envieux que la concorde importune, reçut un jour, par la bouche de Fontenelle, une leçon de bon sens, de sagesse dont mal- heureusement elle a peu profité. La première édition du Siècle de Louis XIV venait de paraître. C'était une trop belle occasion d'irriter deux grands hommes l’un contre l’autre, pour qu’on négligeât d’en profiter. « Comment suis-je donc « traité dans cet ouvrage ? demanda Fontenelle. — Voltaire ; « répondit-on , commence par déclarer que vous êtes le seul « personnage vivant pour lequel il se soit écarté de la loi « qu'il s'était faite de ne parler que des morts. — Je n'en « veux pas savoir davantage, repartit le secrétaire de l’Aca- « démie. Quelque chose que Voltaire ait pu ajouter, je dois « être content. » Malgré quelques légères critiques, l’immortel auteur de l'histoire naturelle, Buffon, n’aurait-il pas de même été content, s’il eût pu entendre ces magnifiques appréciations de son éloquence, sorties de la plume de Condorcet! « Des traits qui semblent échapper à Buffon, caractérisent « la sensibilité et la fierté de son âme; mais elle paraît tou- « jours dominée par une raison supérieure; on croit, pour « ainsi dire, converser avec une pure intelligence, qui n’au- « rait de la sensibilité humaine que ce qu’il en faut pour se XXX VII] BIOGRAPHIE « faire entendre de nous et intéresser notre faiblesse. ... « La postérité placera les ouvrages du grand naturaliste à « côté des dialogues du disciple de Socrate et des entretiens «du philosophe de Tuseulum.. . « M. de Buffon, plus varié, plus brillant, prodigue, « d'images que les deux grands naturalistes dé la Grèce et « de Rome, joint la facilité à l'énergie, les grâces à la ma- «jesté. Sa philosophie, avec un caractère moins prononcé, «est plus vraie et moins affligeante. Aristote semble n’avoir «écrit que pour les savants, Pline pour les philosophes, « M. de Buffon pour tous les hommes éclairés. » Après cette citation, je le demande, ferai-je tort à Con- dorcet si j'avoue que Buffon ne lui témoigna jamais aucune bienveillance; qu'il fut le protecteur le plus actif de ses con- currents pour la place de secrétaire perpétuel de l'Académie des sciences, et pour celle de membre de l’Académie fran- caise ; que l’idée vivement soutenue auprès des ministres de Louis XVI, d'une censure académique qui eût sans cesse en- travé dans sa marche l'historien de vos travaux, appartenait à Buffon; que d’Alembert enfin, lorsqu'il mandait à La- grange, en date du 15 avril 1775 : « Nous essuyons à l'Aca- « démie des sciences, M. Condorcet et moi, des tracasseries « qui nous dégoûtent de toute étude sérieuse, » désignait catégoriquement l’illustre naturaliste. Ces divisions déplo- rables, sur lesquelles je n’entends, au surplus, émettre aucune opinion, nous ont été révélées par la correspon- dance de la Harpe et une foule de pièces inédites; mais on en chercherait vainement des traces , et cette remarque a bien son prix, dans les éloges du loyal secrétaire de l’an- cienne Académie. DE CONDORCET. XXXIX Fontenelle a laissé quelques lacunes dans ses éloges des académiciens. morts de 1699 à 1740: Est-ce à dessein ? On serait tenté de le croire en remarquant parmi les noms oubliés ceux du duc d’Escalonne, du fameux Law et du père Gouye. Je ne léguerai pas, en ce qui concerne Condorcet, un pareil doute à nos successeurs. S'il ne fit point l'éloge du duc de la Vrillière, c’est qu’à ses yeux, le titre d’honoraire de l’Aca- démie n'avait pas eu le privilége de rendre honorable le ministre qui, toute sa vie, s'était fait un jeu cruel et scanda- leux des lettres de cachet. Des amis timides. calculaient-ils avec inquiétude le danger d’irriter M. de Maurepas, pre- mier ministre et beau-frère de M. de la Vrillière, Condorcet répondait :«Aimeriez-vous mieux que je fusse persécuté pour « une sottise que pour une chose juste et morale ? Songez-y « bien, d’ailleurs : on me pardonnera plus facilement mon « silence que mes paroles, car je suis bien résolu à ne point « trahir la vérité. » ‘L'homme qui agit ainsi, Messieurs, court le risque de troubler sa vie, mais il honore les sciences et les lettres. É loge de Michel de l'Hôpital. Lettre d'un théologien à l’au- teur du Dictionnaire des trois siècles. Lettre d'un laboureur de Picardie à M. Necker, prohibitif. Réflexions sur le com- merce des blés. Nouvelle édition des Pensées de Pascal. Entrée de. Condorcet à l'Académie française. Nous avons suivi pas à pas, jusqu'ici, le géomètre, le se- crétaire perpétuel de l’Académie des sciences. Maintenant nous verrons notre confrère se jeter dans la polémique ar- dente des partis littéraires et philosophiques. Plusieurs fois xl BIOGRAPHIE il y paraîtra sans se nommer, pour ne pas augmenter, disait- il, les ennemis de sa cause de tous les ennemis de sa per- sonne. Condorcet était déjà secrétaire en titre de notre compa- gnie, lorsque l'Académie française mit au concours l'éloge de Michel de l'Hôpital. Entraîné par la beauté, par la gran- deur du sujet, notre confrère se jeta étourdiment dans la lice, comme aurait pu le faire un jeune homme sans antécé- dents connus, sans réputation acquise. Il n’obtint pas le prix. On accorda la préférence à la pièce, aujourd'hui com- plétement oubliée, de l'abbé Rémi. Il m'a été donné de retrouver quelques-unes des causes qui amenèrent cet échec. Peut-être méritent-elles de nous arrêter un instant. Que désirait l’Académie francaise en proposant l'éloge de l'Hôpital pour sujet de prix ? Un apercu sur les œuvres lit- téraires de l’illustre chancelier, une appréciation générale de ses actes politiques et administratifs; un hommage à sa mé- moire, écrit d’un style noble et soutenu. Aujourd'hui, ce genre de composition est peu goûté du public; aussi on se hasarderait presque à qualifier de discours à effet, d’ampli- fication, ce que voulait la célèbre assemblée. Ce n'est pas ainsi que Condorcet envisagera le thème qu'on lui présente. Dans son esprit, l'utilité prime tout autre genre de mérite. La vie de l'Hôpital lui semble pouvoir être offerte en exemple « à ceux qui, se trouvant placés dans des « circonstances difficiles, auraient à choisir entre leur repos « et le bonheur public. » Il n'hésite plus, c’est la vie de l'Hôpital qu'il écrira. La vie de l'Hôpital î mais c'est l’histoire d’un siècle af- DE CONDORCET. xi] freux, d'une longue suite de concussions éhontées, de désor- dres, d'événements barbares, d’actes cruels d’intolérance, de fanatisme. Le cadre devient immense ; il ne dépasse, toute- fois, ni les forces, ni le savoir, ni le zèle de l'écrivain. Dans son bel ouvrage, Condorcet nous montre d’abord l'Hôpital en Italie, chez le connétable de Bourbon, au parle- ment et au concile de Bologne. On le voit ensuite à la tête des finances. Plus tard, c’est le chancelier, le ministre, l'homme d'État, dont les actes se déroulent devant le lec- teur. Une vie si pleine, si glorieuse, ne pouvait être convena- blement appréciée dans un écrit de soixante minutes de lec- ture, comme le demandait l’Académie. Aussi, Condorcet ne tint aucun compte de la prescription : son éloge avait trois fois plus d’étendue que ne le voulait le programme. La mise hors de concours était donc pour notre confrère un événe- ment prévu. Je ne pense pas que nous devions nous montrer aussi faciles au sujet des critiques que l'ouvrage fit naître dans l’aréopage littéraire, et dont l’auteur du Lycée a con- servé divers échantillons. Suivant la Harpe, le style de l'éloge de l'Hôpital manque de nombre. Le reproche me paraîtrait plus grave si on avait dit, si surtout on avait pu dire : Le style manque de trait, de nerf et de correction ; les idées n’ont ni nouveauté ni profondeur. Il est vrai qu'en ce cas la réfutation eût été très-facile, et qu’elle se serait réduite à de courtes citations ; à celles-ci, par exemple : « S: Bertrandi (garde des sceaux d'Henri IT) a échappé à « l’exécration des siècles suivants, c'est que, toujours vil au « sein de la puissance ; toujours subalterne, même en occu- T. XX. F xlij BIOGRAPHIE « pant les premières places, il fut trop petit pour attirer les « regards. « Tous les citoyens pleuraient la ruine de leur patrie ; « l'Hôpital seul espérait encore. Jamais l'espérance n’aban- « donne les grandes passions. L’amour du bien public était «chez le chancelier une passion véritable; il en avait tous «les caractères, même les illusions. L'Hôpital jugeait les « obstacles, mais il sentait ses forces. » Le style a de l’obscurité! C’est , ce me semble, un devoir rigoureux de formuler de pareilles critiques avec une incon- testable clarté; or, je ne sais ce que la Harpe entend par des « phrases qui se redoublent les unes dans les autres. » Je le comprends parfaitement, au contraire, lorsqu'il nous dit : « Le ton (de Condorcet) est souvent au-dessous d’une « narration noble. Il parle d’échalas carrés, de büches et « de petits pâtés dans l'éloge d'un chancelier : Bossuet en « aurait été un peu étonné. » Nous devons nous persuader ici, par esprit de corps, que la remarque de la Harpe n’exerça pas d'influence sur la dé- cision de l’Académie. Savez-vous, en effet, où figurent les termes que vous venez d'entendre; ces termes dont le critique se montre si indigné, que, par voie de contraste, ils reportent ses idées sur l’éloquence majestueuse de l'aigle de Meaux ? C’est dans une citation, Messieurs, dans une note où Con- dorcet signale avec raison les étranges, disons mieux, les dé- plorables règlements que le système prohibitif inspira jadis à l'esprit, cependant, si droit, si élevé, de Michel de l'Hôpital. Oui, Messieurs, le fait est vrai : le vertueux chancelier dé- fendit de crier des petits patés dans les rues , et cela, il faut bien l'avouer, car ses expressions n’admettent pas d’équivo- DE CONDORCET. xl} que, pour ne pas exposer les pâtissiers à l'oësiveté, et le pu- blic à des indigestions. Qu'on en rie aujourd’hui, qu’on s'en étonne tant qu'on voudra, les bäches et les échalas carrés n'en étaient pas moins proscrits. Les lois de l’époque allaient jusqu'à déterminer la forme des hauts-de-chausse et des vertugadins. De telles citations montrent clairement à quel point les hommes de génie eux-mêmes subissent l'influence de leur siècle; mais je ne saurais, en vérité, à quelle influence Condorcet aurait obéi, s’il eût substitué des périphrases aux expressions techniques que l'Hôpital, de sa main de poëte, consigna dans les lois; s’il avait essayé du style descriptif à propos de vertugadins, d’échalas et de petits pâtés. Voltaire, en tous cas, était loin de s’associer aux deman- des, aux désirs de la Harpe et de ses confrères; car, le 3 oc- tobre 1777, il mandait à M. de Vaines : « Je viens de lire « avec une extrême satisfaction, le l'Hôpital de M. de Con- « dorcet : tout ce qu'il fait est marqué au coin d’un homme « supérieur. » Je trouve ces paroles, non moins significatives, dans une lettre inédite de Franklin : « J'ai lu avec le plus grand plaisir « votre excellent éloge de l'Hôpital. Je savais déjà que vous « étiez un grand mathématicien; maintenant, je vous consi- « dère comme un des premiers hommes d’État de l’Europe. » Même dans cette enceinte, de pareils suffrages ont la va- leur d’une décision académique. « La Lettre d’un théologien à l’auteur du Dictionnaire des « trois siècles, est un des écrits les plus piquants qu'on ait « publiés depuis quelques années. Cette brochure, sans nom « d'auteur, a été attribuée, généralement, à l'illustre pa- F. xliv BIOGRAPHIE « triarche de Ferney. Jamais il n’a été trouvé plus gai dans « sa critique et plus malignement bonhomme. » C’est en ces termes qu'une correspondance devenue de- puis publique et célèbre, annonçait, en 1774, l'apparition de l’opuscule anonyme de Condorcet. Voltaire, à qui le secret n'avait pas été divulgué, écrivait à notre confrère, le 20 août 1774 : « Il y a dans la Lettre « d'un théologien des plaisanteries et des morceaux d'élo- « quence dignes de Pascal. » Le patriarche prouvait ensuite sans peine que, malgré le bruit public, l'abbé de Voise- non ne pouvait être l’auteur d’une pièce si remarquable. Quant à lui, Voltaire, il espérait échapper au soupçon, car la lettre supposait des connaissances mathématiques pro- fondes, et, ajoutait-il : « Depuis les injustices que j'essuyai « sur les éléments de Newton, j'ai renoncé, il y a quarante « ans, à ce genre d’études. » Les hardiesses de la Lettre d’un théologien causèrent à Voltaire de très-vives inquiétudes. Il s’en expliquait avec tout le monde. Je ne veux pas, disait-il, à quatre-vingt-trois ans mourir ailleurs que dans mon lit. En écrivant à M. d’Argental (17 août 1974), il caractérisait ainsi l’auteur de l’opuscule: « On ne peut être, ni plus éloquent, ni plus maladroit. Cet « ouvrage, aussi dangereux qu'admirable, armera sans doute « les ennemis de la philosophie... Je ne veux ni de la gloire : d’avoir fait la Lettre d’un théologien, ni du châtiment qui « la suivra... Je suis fâché qu’on ait gâté une si bonne cause, üt étant l'équivalent grec du nom donné à Sirius chez les Égyp- (x) Censorin, De die natali, cap. XVIIT et XXI, ad finem. (2) Clément d'Alexandrie, Stromates, lb. 1, pag. 40r. D'ASTRONOMIE ANCIENNE. 13 tiens(1). Enfin, pour en compléter la définition, ils lui assi- gnent, comme limites terminales, les époques auxquelles le Lo héliaque de cette étoile, en Égypte, se trouvait coïncider avec le premier jour du mois thot, dans l’année vague de 365 jours (2). Par abréviation , j'appellerai ces jours de coïn- cidence des thots héliaques. I importe de remarquer que la condition déterminatrice qu’on en donnait ainsi , est in- suffisante pour fixer leurs époques absolues. IT aurait fallu , en outre, définir le parallèle terrestre auquel on entendait ap- _ pliquer la période ; car la diversité de dates chronologiques qui résulte de cette circonstance n'est pas petite, même pour l'étendue de l'Égypte, puisqu'elle y produit une diffé- rence de six jours sur la réalisation astronomique du phé- nomène dans une même année de 365!. De sorte que si le thot se trouvait physiquement héliaque , à une certaine époque, pour la basse Égypte, quand l’année de 365 jours était en usage , il ne devenait tel à Syène que vingt-quatre ans plus tard (3). Mais les écrivains qui ont mentionné le cycle so- (1) Horapollo, Hieroglyphica, \ib. I, S 3. (2) Gensorin, loco citato. (3) Ceci résulte des calculs mêmes de Ptolémée, Dans son traité De l'apparition des fixes (éd. de M. Ideler, Mémoires de Berlin, 1816), il marque le lever héliaque de Sirius au 22 épiphi fixe, 16 juillet julien, sous le parallèle de Syène, latitude 23° 51'; et au 28 épiphi fixe, 22 juillet, sous le parallèle de la basse Égypte, latitude 30° 22", un peu au sud d’A- lexandrie. D’après cela, supposez le lever héliaque de Sirius ayant lieu le 1® jour de thot vague, sous ce dernier parallèle ; il aura eu lieu à Syène six jours auparavant, c'est-à-dire, le 30 mésori vague de l’année précédente. Donc, puisque sa date vague retarde d’un jour en quatre ans pour un même parallèle, il s'écoulera vingt-quatre ans jusqu’à ce qu'il s'opère à Syène le 1° jour de thot qui suit. 14 SUR DIVERS POINTS thiaque n'y ont pas ajouté cette spécification, qui serait cependant indispensable pour toute application chronogra- phique ou religieuse qu’on en voudrait faire, Ainsi nous sommes obligés de chercher des indices d'une désignation plus précise dans les dates absolues qu'ils ont assignées aux limites de ses évolutions. Le plus ancien auteur qui en parle est Censorin , dans les chapitres XVII et XXI de son livre De die natali, lequel, comme il nous l’apprend lui-même, a été écrit dans l’an- née 980° de l’ère de Nabonassar, année dont le premier thot a coincidé, ainsi qu'il le dit, avec le huitième jour avant les calendes de juillet, ou le 25 juin julien (r). Il énonce encore cette même date en années juliennes et en années d'olym- piades, dont Petau a montré l’exacte concordance avee la désignation précédente, de sorte qu'il n’y a aucun doute sur ce point (2). Censorin dit ensuite que cette année 986 est la 100° du grand cycle caniculaire égyptien, ce qui en reporte l’origine ou le renouvellement à l’année de Nabonassar 886 ou 887, selon que l’on veut interpréter cette rétrogradation comme devant exprimer des années accomplies ou commen- cées. La différence n’est d'aucune importance pour la fixa- tion d’un phénomène aussi vague. La seule particularité essentielle à remarquer, c’est que , d’après les tables de con- cordance, le premier jour du thot vague de ces deux années- là a coincidé avec le 0 juillet julien. J'adopterai, avec Bain- (1) Censorin, cap. XXI, ad finem. (2) Petau, Rationarium temporum, pars secunda, pag. 201; Parisiis, 1652, éd. in-18. > D'ASTRONOMIE ANCIENNE. 15 brigde et Dodwell, l’année 886. Cela met le thot héliaque de Censorin au 20 juillet 138 de notre ère, par conséquent les thots héliaques antérieurs, à des époques séparées de celle-là par des intervalles constants comprenant 1460 années juliennes complètes ; ce qui les reporte au même 20 juillet des années — 1323, — 2783, dates chronologiques, si le cycle doit être étendu jusque-là dans ses applications. Censorin ne pose pas cette alternative. Il ne mentionne que la durée de la période, sa spécialité pour l'Égypte, etie fait de son der- nier accomplissement. Il ne désigne pas non plus le parallèle de l'Égypte, pour lequel on l’a établie. Les dates fixes aux- quelles il la limite n'auraient pu cependant avoir d’applica- tion effective que pour ce parallèle unique. Il faut done le chercher d’après ces dates. J'ai fait ce calcul, comme on pou- vait le faire alors, avec les éléments astronomiques et géogra- phiques adoptés par Ptolémée, en me servant de ses tables du soleil. Jai trouvé ainsi que, selon ses données, Sirius avait dû se lever héliaquement sur l'horizon de Memphis le premier jour du mois thot, en l'an 886 de Nabonassar ; l'arc d’abaissement du soleil étant alors de 10° 34', ce qui tombe dans les limites de grandeur que Ptolémée adopte pour condition de visibilité du phénomène. Ainsi, l’é- noncé de Censorin s'applique spécialement à ce parallèle, non à un autre (1). On arriverait à la même conséquence par nos tables modernes, comme l'ont prouvé plusieurs érudits versés dans les calculs astronomiques. Mais l'emploi des mé- thodes qui étaient connues à l’époque où ce résultat dut être (1) Voyez à la fin du mémoire la note première, où ce calcul est exposé. 10 SUR DIVERS POINTS appliqué, a l'avantage de montrer comment on aurait pu alors l'obtenir théoriquement à la même date que Cen- sorin lui assigne, et avec une spécification de localité qu'il a onuse. Or, il se découvre ici une circonstance chronologique qui semblerait contredire le soupcon émis plus haut, que les limites du eyele auraient pu avoir été ajustées pour s'adapter à l'avénement d’Antonin. En effet, la première année de cet empereur, selon le canon des rois, est la 885° de Nabonassar, et non pas la 886°. Pourquoi donc aurait-onfixé l'origine ou le renouvellement de la période à cette deuxième année plu- tôt qu'à la première même, si l'on voulait présenter cette coincidence comme un auspice favorable du nouveau règne? L'application à cette première année aurait été également facile et justifiable ; car, parle même calculthéorique, comme par le fait, le thot vague aurait été encore physiquement héliaque à Memphis cette 885° année, et même dans la pré- cédente , aussi bien que dans la 886° et la 887°, puisqu'il reste numériquement tel dans toute une période quadriennale. Mais le choix s'explique par les règles de chronographie égyp- tienne, suivant lesquelles le canon est établi. D'après le témoignage de l’histoire, Hadrien , le prédécesseur d’Anto- nin I‘, est mort le vi des ides de juillet , c’est-à-dire, le 10 juil- let de l’année 138 de notre ère (1). L'année égyptienne cou- rante était alors la 885° de Nabonassar; et elle finissait le 19 juillet suivant. Hadrien n'ayant pas terminé cette année, on dut, selon l'usage égyptien, l’attribuer tout entière à son (2) Petau, Rationarium temporum, pars prima, pag. 210; éd. 1652. D'ASTRONOMIE ANCIENNE. 17 successeur. Elle fut donc comptée , dans le canon, comme la première d'Antonin, quoiqu'il n’en eût réellement occupé , à titre d'empereur, que les neuf derniers jours. Mais cette rétrocession conventionnelle et chronographique ne marquait pas l’époque réelle du commencement de son gouvernement, et de la rénovation des temps qu'on en espérait, ou dont on voulait le flatter. Il convenait donc beaucoup mieux d’adap- ter cet auspice à son commencement réel, c’est-à-dire à l’an- née 886, la deuxième que le canon lui attribuait. Et l’on aurait pu encore l'adapter au thot de la suivante, la 887° de Nabonassar, si les prêtres avaient eu besoin de ce délai pour inventer l'application, ou pour faire un calcul aussi simple. Car, d'imaginer qu’on aurait fixé ce thot héliaque à Mem° phis par l'observation, avec tant d’à-propos, et tant de con- formité aux hypothèses théoriques alors admises , quand on pouvait le déterminer si aisément par un calcul direct, cela ne viendra à l'esprit d'aucune personne qui connaîtra la dif- ficulté de saisir à la vue une pareille concordance , et d’en assigner ainsi l'époque, à plusieurs années près. Un passage des Stromates de Clément d'Alexandrie res- treint clairement l'emploi, même la conception du cycle so- thiaque, à la plus prochaine de ses évolutions antécédentes que nous venons d'établir numériquement tout à l'heure. Il y est dit que l’Exode est antérieur de 245 ans à Ja période so- thiaque (1). Or, en rassemblant les intervalles chronologiques employés par cet auteur, ce qui n’exige pas qu'on en justifie la validité, Bainbrigde prouve que l’origine ainsi désignée RE TT AE (1) Clément d'Alexandrie, Stromates, lib. 1, pag. 4or. T. XX. 0 15 SUR DIVERS POINTS concourt avec l'an 1323 avant l'ère chrétienne (1). Une fois reconnu que Clément parle du même système de cycle que Censorin, la restriction n'offre pas de doute. Il ne pouvait pas vouloir placer l’Exode 245 ans avant l’année — 2785. Cette limitation est confirmée par un fragment du second Théon, qui la spécifie plus décidémentencore, en y ajoutant une indication d'origine extrêmement curieuse (2). Théon veut donner une règle numérique pour trouver la date du lever héliaque de Sirius, sous le parallèle d'Alexandrie, dans une année égyptienne quelconque , antérieure ou postérieure à la fixation du thot. Afin d'embrasser ces deux cas dans une même période de dérivation continue, il part d'une époque ancienne, qu'il appelle l'ère de Ménophrès, à laquelle le lever héliaque de l'étoile aurait coincidé avec le premier jour du thot vague. Il ne dit pas sous quel parallèle de l'Égypte cette concordance s’est opérée. Il en donne seulement la date absolue, que je rapporterai tout à l'heure. Alors, retardant le phénomène d’un jour pour quatre années vagues révolues , il l'amène, après quatre ans, au > de thot, après huit ans au 3, et ainsi progressivement, jusqu’à la tétraétéride qui atteint ou comprend l’année désignée. C'est, comme on voit, un calcul très-simple de rétrogradation quadriennale. Mais l’auteur grec le complique par des détails additionnels (x) Bainbrigde, Canicularia, pag. 36. (2) J'ai publié le texte de ce fragment, avec une traduction faite par M. Hase, dansmes Recherches sur plusieurs points de l'astronomie égyptienne, Paris, 1823, pag. 303. Je reproduis ces deux documents dans la note 2 qui fait suite à ce mémoire, et je les discute de nouveau plus exactement que dans cette première publication. D'ASTRONOMIE ANCIENNE. 19 que je passe sous silence, les expliquant dans une note, à la suite de mon mémoire, mieux que je ne l’avais fait antérieu- rement. Il me suffira de dire que ces additions ont pour but de faciliter la répartition des jours de retard dans l’année vague, et de transporter le résultat au parallèle d'Alexandrie, en l’y faisant concorder avec les indications de Ptolémée. Te, ce qui nous importe, c’est de connaître l’époque qu’il assigne à cet ancien thot héliaque. Or, il dit que de là, jusqu'à la fin de l'ère d’Auguste , il s’est écoulé 1605 ans, qu'il faut consi- dérer comme vagues, et non pas comme alexandrines, ainsi que Larcher et moi-même l’avions autrefois supposé (1). Car, par un examen attentif de son calcul, on voit qu’il les com- bine par différence avec celles du canon des rois, qui sont toutes vagues. Reportant donc cet intervalle dans la période julienne, en arrière du thot vague où finit l’ère d’Auguste, on trouve, comme je le montre ici en note, que le thot héliaque de son Ménophrès coïncide avec le 19 juillet de l’année julienne, 1321 avant notre ère, date chronologique (2). (1) Larcher, Traduction d’Hérodote, tom. II, 1802, pag. 556 et sui- vantes. — Recherches sur plusieurs points de l'astronomie égyptienre ( loco citato ). — Recherches sur l’année vague egyptienne; Mémoires de l'Aca- démie des sciences, tom. XIII, pag. 567. (2) Pour établir cette concordance, je décompose les 1605 années vagues de l'intervalle total en 1461+-144; et je remarque que 1461 années pa- reilles équivalent à 1460 années juliennes de 365) =; somme qui, étant ajoutée à une date julienne, ou en étant retranchée, ne change pas la dé- nomination du jour julien, parce qu’elle contient un nombre entier de tétraétérides complètes, qui est 365. Cela posé, je procède comme il suit : L'ère d'Auguste finit à midi du 1° jour du thot de l'année de Nabo- sd 20 SUR DIVERS POINTS Cette année commence une période quadriennale de rétro- gradation du thot, selon nos tables de concordance. Ainsi, dans toute la tétraétéride précédente il saute au 20 juillet, où le portent aussi les additions ultérieures de Théon. Cette date fixe est donc, comme celle de Censorin, propre au pa- rallèle de Memphis. Il n’est pas inutile de remarquer que, dans cette computa- tion numérique , Théon opère précisément comme il le fait au commencement deses tables manuelles, quand il veut trans- porter une date alexandrine fixe dans l’année égyptienne vague. Il prend alors, pour origine, une époque où le thot vague a coincidé avec le thot fixe; ce qu'il dit avoir eu lieu à la 5° année d’Auguste, la 724° de Nabonassar ; puis il calcule, par tétraétérides, les nombres de jours dont ces deux thots se sont progressivement séparés. De même ici, pour ELEC Ne CPE RS SO CE PE ME 0 CRM ne AN A dits e Retranchez 144 années vagues révolues. . . . . . . . 144 Vous aurez: Époque postérieure de 1461 années vagues ou de 1460 juliennes, au thot de Ménophrès : de Nabonassar, la. . . 888 D'après les tables de concordance; le 1° thot de cette 888° année coin- cide avec le 19 juillet de l’année 140 de notre ère, laquelle est identique avec pt Re NU) ie ITR CAP RRERRE CNe DP DUDS de la période julienne de Scaliger, — 4713+ 140. Otez de ce nom- bre 1460 années juliennes, équivalentes à 1461 vagues. . . . 1460 ce qui ne change pas le jour julien; vous aurez le thot de Méno- phrès dans la période julienne, 19 juillet, année. . . . . . 3393. L'année antérieure à l'ère chrétienne, correspondante à celle-là, est la 4714°— 3393° ou 1321°, date chronologique avec la même date de jour, 19 juillet. D'ASTRONOMIE ANCIENNE. 21 le lever héliaque de Sirius, il se donne une coïncidence avec le thot vague, antérieure à toutes les époques auxquelles il veut transporter le phénomène , et il évalue son déplacement progressif par le même procédé. L'emploi d’une telle coïnci- dence pourrait donc n'être qu'un artifice arithmétique ; ou bien encore, si l'application politique du cycle sothiaque avait été imaginée à une époque tardive comme celle d’An- tonin , on aurait Pu , tout aussi aisément, déduire cette an- cienne origine des déterminations d’Hipparque ou de Ptolé- mée, en remontant vers elle par un calcul inverse. Le nom de Ménophrès, que Théon lui donne, n’est pas un garant certain de vétusté, car on aurait pu l’y attacher à l'époque de son application, pour la rendre plus respectable. Aucun roi égyptien n’est connu sous cette désignation , qui semble- rait plutôt générale qu'individuelle, et plutôt fictive qu’his- torique. Larcher a voulu l’attribuer à Sésostris , à cause de la grande célébrité de ce conquérant; mais l’époque de son règne est sans doute fortantérieure à — 1323 ;etsi l’on y avait attaché une ère historique, dont la mémoire se serait trans- mise aussi longtemps par dates continues, comment ne la trouverait-on mentionnée qu'une seule fois, tardivement, dans une règle de calcul d’un mathématicien? J'oserai sug- gérer, non sans hésitation, que ce mot Ménophrès pourrait bien ici désigner tout autre chose qu’un homme; car c’est précisément l'équivalent grec du mot MANNOF RÉ, en hiéro- Km glyphes Feb mu » Qui était le nom phonétique de la ville de Memphis, à laquelle les dates fixes des 19 et 20 juillet reportent le parallèle d'établissement de la période. On peut constater cette identité sur les divers exemples du nom de 22 SUR DIVERS POINTS Memphis, exprimé en écriture sacerdotale , que Champollion rapporte d’après les monuments, dans sa Grammaire égyp- tienne, page 153, et dansson Dictionnaire égyptien, page 266. Alors l'expression ère de Ménophrès signifierait simplement l'ère sacrée de Memphis, laquelle commencerait à l’époque où le lever héliaque de Sirius a coïncidé avec le premier jour de thot, sous le parallèle de cette ville, 1605 ans vagues avant la fin de l'ère d’Auguste, comme le dit Théon. Sans insister sur l’étrangeté de cette rencontre, si l’on veut admettre l'existence du cycle sothiaque en Égypte comme ancienne institution traditionnelle , les deux derniers témoi- snages que je viens de rapporter, celui de Clément et de Théon, en restreignent l'emploi chronologique ou astrono- nique aux temps postérieurs à l'année — 1325. [ls s'opposent formellement à toute hypothèse qui en reporterait l’adop- tion, ou même la conception, au commencement d’une pé- riode précédente remontant jusqu'à l'année — 2783 , comme le veut Fréret. Je confirmerai cette conséquence par un ar- gument aussi simple que décisif. Le cycle sothiaque de 1460 ans juliens est lié, par sa période d'évolution et parses dates terminales, à l’année vague de 365 jours qui nous est parve- nue. Îl ne peut s’y prolonger en arrière qu’autant qu’elle se prolonge elle-même, sans discontinuité et sans altération. Or, cette forme d'année, telle que l’histoire et l'astronomie nous l'ont transmise, n’a pu être établie, ou définitivement constituée, qu'à l’époque de — 1780, postérieure de dix siècles à celle de —2783. Le même cycle de thots héliaques ne peut donc pas s'appliquer avec continuité à deux énumé- rations de temps ainsi disjointes. Je fonde cette assertion sur une concordance extraordi- D'ASTRONOMIE ANCIENNE. 23 naire, à la fois physique et astronomique, que l’année égyp- tienne définitive se trouve avoir avec les positions absolues du soleil, de la lune, et avec la série annuelle des cultures de l'Égypte, en l’année julienne — 1780 (1). Cela a été un résul- tat, non-seulement de sa forme, c’est-à-dire du nombre de jours qu’elle renferme, mais encore des conditions d’ajuste- ment qui ont dù lui être données alors dans les périodes solaires et lunaires, pour établir ou fixer cet accord si étrange; conditions auxquelles on remonte en suivant le fil des dates historiques et astronomiques qu’elle a servi depuis à expri- mer. Cette concordance n’a d’analogie dans aucun autre calendrier, fixe ou vague; et, pour l’année égyptienne mème, elle ne s’est réalisée qu'une seule fois dans la série des siècles, à l'époque précise que je viens de spécifier. Les éléments astronomiques qu’elle réunit et qu'elle met en accord avec la notation écrite du temps, ainsi qu'avec l’état physique de l'Égypte à ce moment même, sont si divers, comme si rapide- ment variables, qu’il serait presque impossible, même au- jourd’hui, d’en former une association aussi exacte en mou- vements vrais, par une prévision calculée à quelques années de distance. Mais il n’a fallu que des yeux, et une observation attentive du ciel, pour la saisir et la fixer à perpétuité dans le calendrier, par l'addition des cinq épagomènes, lorsqu'elle se fut réalisée dans l’année de 360 jours antécédente, comme cela est arrivé en l’année julienne — 1780. C’est là, comme on va le voir, le moyen le plus simple, et presque le seul supposable, par lequel on ait pu y adapter, aussi exac- L (1) Journal des savants, août 1843, pag. 48. 2/ SUR DIVERS POINTS tement, l'année de 365 jours qui nous est parvenue. De sorte qu'il y a toute probabilité qu'elle a été, non pas seulement modifiée, mais établie pour la première fois, à cette époque méme. Pour sentir la force de cet argument, il faut se rappeler la notation de l’année vague égyptienne, que Champollion a si heureusement interprétée. Elle se compose de trois tétramé- nies, contenant chacune quatre mois de 30 jours, en somme 360, que complètent cinq épagomènes, placés à la suite des douze mois. Les signes généraux des tétraménies, et les signes particuliers des mois, correspondent à la succession annuelle et aux phases consécutives de la végétation, des récoltes, de l'inondation, telles qu’elles ont lieu en Égypte, depuis un temps immémorial. De sorte que les cinq épagomènes, placés à la suite des douze mois, sous le nom commun de jours cé- lestes, semblent n'être que le complément du système de notation primitivement appliqué à l'année de 360 jours. La durée de ces deux sortes d'années étant moindre que celle d'une année solaire, elles sont toutes deux vagues ; ee qui fait que la notation ne peut coïncider avec les phases de l’année naturelle qu'à certaines époques spéciales, dépen- dantes des périodes de leur évolution. Heureusement la nota- tion des mois, qui leur est commune, permet de découvrir ces époques, en opérant le raccordement qu’elles supposent. En effet, la dernière tétraménie portant le caractère de l'inondation, elle ne peut concorder exactement et compléte- ment avec ce phénomène solaire, que si le premier jour du mois pâchon, qui la commence, coïncide avec le solstice d'été, origine constante et universellement reconnue de la crue du Nil. Donc, en considérant d’abord l’année vague de 365 FRE - . . dore D'ASTRONOMIE ANCIENNE. 25 jours, qui est seule arrivée jusqu’à nous, avec des applica- tions astronomiques et historiques, il suffira d'identifier avec le ciel, ou avec l’histoire, une observation ou un fait ainsi daté, pour pouvoir la reconduire, par rétrogradation, dans l'année solaire, et y distinguer les époques où elle a offert le caractère de concordance numérique, tout à l’heure signalé. Cette identification a été depuis longtemps faite par les astro- nomes et les chronologistes, d’après les observations de l'Almageste, qui sont rapportées en dates vagues de l’année égyptienne courante, comme Plotémée le dit expressé- ment (1). On en conclut, avec une entière certitude, que le premier jour du mois thot, le premier des douze, a coïncidé avec le 26 février de l’année julienne antérieure à l’ère chré- tienne — 747, en comptant à la manière des chronologistes. C’est l’époque que Ptolémée appelle l'ère Nabonassar, et qu'il a prise pour origine de tous ses calculs. Sur ce fait, on a construit des tables qui donnent la concordance des années juliennes et vagues, pour une étendue quelconque de temps. Or, nos tables astronomiques modernes sont aussi établies en dates juliennes, qui partent également de l'ère chrétienne. On peut donc y transporter un jour égyptien quelconque, (1) On peut d’abord conclure ce fait de ses calculs mêmes, puisqu'il y emploie partout des dates historiques, exprimées ou réduites en dates égyptiennes usuelles, par la concordance du canon des rois, usité à Alexandrie. Mais il le marque expressément en beaucoup d’endroits, et en particulier à la fin du troisièmelivre, où il dit qu'il prend son premier jour du thot de Nabonassar, conformément à l’usage égyptien, xuv Atyurriouc. Il n'a fait à cet usage d'autre modification que de commencer le jour à midi, P: 228. 46 SUR DIVERS POINTS précurseurs de ce phénomène, dans les positions successives de l’astre qui le réglait. C'est aussi vers ces anciennes époques que se réalisa pour eux la concordance du lever héliaque de Sirius avec le solstice d'été, dont le souvenir fut constamment conservé par la tradition; et l'observation des levers hélia- ques suppose celle des levers du soleil , que l'étoile doit pré- céder immédiatement à l'horizon oriental. Enfin, le dépla- cement progressif des points de l'horizon où cet astre se lève et se couche, offre le signal le plus évident, le plus saisissable de ses inégales hauteurs, que les Égyptiens avaient tant d’in- térêt à constater. Ces simples notions, suggérées par le besoin et par les circonstances physiques du pays, dont leur nota- tion des douze mois atteste une observation si attentive, étant jointes à la pratique de la règle et du niveau , sans lesquels ils n'auraient pu exécuter des constructions aussi gigantesques que les pyramides, suffirent dès lors, non-seulement pour tracer des lignes méridiennes, mais encore pour déterminer, à un ou deux jours près, les époques annuelles des équi- noxes , des solstices, et pour reconnaître la période annuelle de 365! +, après laquelle ces phénomènes se reproduisaient. En effet, concevons l’assise inférieure de la grande py- ramide d'abord établie seulement dans sa partie centrale, avec sa surface bien dressée, comme les Égyptiens savaient le faire, et nivelée exactement. A un jour quelconque de l'année, remarquez le point de l'horizon oriental où le soleil se lève; et, à cet instant, alignez une règle sur le premier bord de son disque qui commence à paraître; puis tracez, sur la surface plane, une droite qui en marque la direction. Cela était facile: car, du tertre où l’on a élevé les pyramides, l'horizon se montre de toutes parts libre, et circulairement D'ASTRONOMIE ANCIENNE. 47 terminé. Faites la même chose le soir du même jour, quand le soleil se couche, en prenant, cette fois, pour point de mire, son dernier bord. La ligne intermédiaire entre les deux droites ainsi tracées sera la méridienne, avec une complète rigueur, si vous avez opéré à l’époque des solstices ; avec une erreur de quelques minutes dans tout autre temps (1). Vous l’obtiendrez même, sans compas, en portant des longueurs égales sur les deux branches de l’angle, et bissec- tant la corde interceptée. C’est le procédé qu’indique Proclus. Mais l'observation des points orient et occident d’un même jour, sur un horizon libre, est bien plus exacte que celle de l'égalité des ombres, toujours mal terminées. Maintenant vou- lez-vous connaître le jour de l’équinoxe vernal ? Tracez avec l’équerre une perpendiculaire à votre méridienne, dont vous aurez pu constater l’invariable constance par les opérations de différents jours, puis portez le matin votre règle sur ce nouvel alignement. Depuis le solstice d'hiver jusqu'à la veille de cet équinoxe, le soleil se lèvera au midi de la règle : le lendemain, il se lèvera au nord. L'équinoxe sera intermé- diaire entre ces deux instants, et vous en obtiendrez ainsi l’époque, à moins d’un jour près. La même observation, réitérée le soir, vous la donnera encore dans les mêmes li- mites. Le phénomène se reproduira en sens inverse, quand arrivera l’équinoxe automnal. Le point orient du matin, et celui du soir, passeront du nord au sud de la perpendicu- = ————_—_————…— ——.— ————————————————————— (1) On corrigerait cette erreur en réitérant l'observation du matin au jour suivant, et menant une droite intermédiaire entre les directions des deux levers consécutifs, droite que l’on comparerait à l'observation du soir. 48 SUR DIVERS POINTS laire. L'opération est bien simple : il suffit de regarder. L'époque intermédiaire entre l’équinoxe vernal et l’'équinoxe automnal suivant, sera celle du solstice d'été, qui coïncidera avec le plus grand écart du lever et du coucher du côté du nord, mais qui sera marquée ainsi bien plus exactement que par cet écart, parce qu'il reste sensiblement le même pendant plusieurs jours. Vous l’obtiendrez de cette manière, à moins de deux jours près. Le solstice d'hiver sera pa- reillement intermédiaire entre l’équinoxe automnal et l'é- quinoxe vernal suivant. Vous en obtiendrez l'époque dans les mêmes limites. Enfin; voulez-vous connaître la durée de la révolution tropique ? Observez le retour du lever ou du coucher du soleil à un même équinoxe, ou plus généra- lement à un même point de l'horizon. Pour cela, ayant aligné votre règle sur le premier bord orient de son disque, tracez la direction de cet alignement , et voyez après com- bien de jours le lever s’y reproduit. Deux retours consécutifs ainsi observés vous donneront d’abord la partie principale, 365 jours. Puis la fraction complémentaire = se manifestera 1 par l'erreur même des retours comparés à cette première période ; leur retard progressif s’élevant à un mois entier de 50 jours, après 120 révolutions; de sorte qu'il sera im- possible d'en méconnaître l'existence, et très-facile d’en apprécier ainsi la valeur. Tous ces résultats n’exigent au- cune science, aucune spéculation théorique, pas même la connaissance du cercle oblique parcouru par l’astre dans le ciel. Cependant ils suffiront à tous les besoins d’une société primitive , et ils seront aussi exacts que ceux dont les Chinois se sont contentés pendant plus de deux mille ans. Si vous voulez admettre que la connaissance du fil à plomb D'ASTRONOMIE ANCIENNE. » 49 aura suggéré l’idée d'élever un style vertical sur le plan ho- rizontal fixe qui nous a servi tout à l'heure, les époques des équinoxes, des solstices, et la durée de la période solaire, se manifesteront d’elles-mêmes d’une manière encore plus sim- ple, par les directions des ombres du matin et du soir. En effet, vous en conclurez d’abord la direction de la méri- dienne et de sa perpendiculaire, par bissection, comme pré- cédemment. Puis, le passage des ombres du nord au sud de cette dernière ligne , et leur retour périodique à une même direction horizontale, vous donneront tous les autresrésultats. Ce procédé , pour tracer une méridienne, est indiqué dans l’ancien texte chinois intitulé Tcheou-pei ; et l’on y prescrit de l’employer aux époques des solstices (r). Il est également rapporté dans les livres sanscrits comme moyen de trouver la durée de l’année par le retour des ombres du matin ou du soir à une même direction horizontale, dans les temps voisins des équinoxes, où le changement des points de lever et de coucher du soleil est le plus rapide (2) : tant ces idées sont simples et se présentent naturellement. On obtiendrait encore les mêmes résultats au moyen de gnomons verticaux à style oblique, pouvant être dirigés à la main, et dont on tournerait la face vers les points de l’ho- rizon où le soleil se lève et se couche dans un même jour. Quoique ce procédé soit à peine plus complexe que les pré- cédents, et qu'il ne suppose non plus aucune science théo- (x) Traduction et examen du Tcheou-pei, par E. Biot. Journal asiatique de 1841, tom. XI, pag. 624. (2) Davis, Recherches sur le cycle indien de 60 ans. Mémoires de la So- ciété de Calcutta, tom. III, pag. 211. TA 7 5o SUR DIVERS POINTS rique, je n’ai pas voulu le faire intervenir dans ces premières déterminations. Mais je dois cependant le mentionner ; car, ainsi qu'on va le voir, ilest fort à présumer que les Égyptiens ont très-anciennement possédé de pareils instruments, qui étaient spécialement destinés à un tel usage. Le fait, en lui- même, n'aurait rien qui doive surprendre. Leurs monuments nous attestent qu'ils ont su, à des époques très-reculées, mesurer des intervalles égaux de temps. La division de la ré- volution diurne, en douze heures de jour etdouze heures de nuit, est un élément de leurs plus anciens rites. Ces deux séries étaient symbolisées par vingt-quatre divinités spéciales en relation avec le soleil pour les heures de jour, avec les étoiles pour les heures de nuit. On les voit ainsi figurées sur deux sarcophages antiquesque possède le musée du Louvre : l'un , celui du pharaon Ramsès Meiamoun; l'autre, celui de l'hiérogrammate memphite Zaho, fils de Rompé-nofris (1). Cela suppose done, soit des gnomons solaires et des clep- sydres à écoulements constants, soit tout au moins ces der- niers appliqués à la mesure des mouvements diurnes du soleil et des étoiles. Mais quiconque a le sentiment pratique de pareilles méthodes, conçoit tout de suite qu’elles con- duisent nécessairement à reconnaître la variable durée des jours et des nuits en différentes saisons ; leur égalité à cer- taines époques, celles des équinoxes; leurs différences ex- trêmes dans d’autres, celles des solstices; la relation cons- tante de ces époques avec les points de lever et de coucher (1) Champollion, Mémoire sur les signes employés par les anciens Egyptiens à la notation des divisions du temps, article Heures. F D'ASTRONOMIE ANCIENNE. 62! du soleil , avec ses diverses hauteurs méridiennes, avec les groupes d'étoiles qui le précèdent immédiatement le matin avant qu'il se lève, ou qui lesuivent immédiatement le soir après qu'il se couche ; par suite, la notion de sa route oblique, et la connaissance des groupes stellaires qui , sur cette route, marquent les points équinoxiaux et solsticiaux. Maintenant, chez un peuple qui symbolisait tout, même les abstractions, quoi de plus naturel que de désigner ces points particuliers du ciel par des figures emblématiques, et de les repro- duire associées comme symboles religieux où astrologiques dans les décorations des tombes royales, de même qu'on y représentait les phases de la vie des rois en rapport avec le mouvement diurne du soleil, dont ils étaient l’image (1)? Je ne veux point trop presser ces conséquences. Mon seul but ici est de montrer l'importance qu’elles donneraient à la con- naissance des procédés que les Égyptiens employaient pour mesurer le temps. Par malheur, on s'est peu occupé de les _ découvrir : les voyageurs de l'expédition francaise, parce qu'ils supposaient l’ancienne Égypte trop savante pour qu'on eüt besoin d’y rechercher des choses aussi simples ; et ceux qui leur ont succédé, parce qu'ils étaient généralement trop étrangers à l’astronomie pour les apercevoir, ou en sentir l'utilité. Nous sommes donc réduits à en chercher quelques traces dans les écrits des Grecs, toujours si pauvres en docu- ments scientifiques étrangers à leurs doctrines. Ptolémée mentionne une seule foisles clepsydres comme employées pour (x) Champollion, Description du tombeau royal de Ramsès, fils et suc- cesseur de Meiamoun; treizième lettre écrite d'Égypte, pag. 225, 2° éd. + j: 52 SUR DIVERS POINTS mesurer le diamètre du soleil par la durée de son lever au temps des équinoxes; mais il se borne à blâmer cette pratique sans la décrire, lui préférant la mesure directe du diamètre par la dioptre d'Hipparque, dont l'emploi n'a pas été meil- leur dans ses mains. Au reste, il donne bien plus lieu de s'é- tonner par le silence qu'il garde sur ses procédés propres, ne disant nulle part comment il mesure les parties du temps dans les observations qu'il a faites lui-même , quoiqu'il y rap- porte jusqu'à des fractions d'heures évaluées pendant la nuit. Géminus, dans son /ntroduction aux phénomènes célestes , atteste que les Égyptiens de son temps avaient des cadrans solaires qui leur annonçaient les époques des solstices. Il ne dit pas de quelle nature étaient ces cadrans ; s'ils étaient à style oblique ou à style droit, marquant les heures par l’om- bre de sa pointe, comme les gnomons grecs. En outre, son assertion n’a elle-même qu'une valeur contemporaine. Tou- tefois, par le sens qu'il lui donne et l’usage qu'il en fait, on voit bien qu'il veut parler d'une pratique usuelle depuis longtemps établie (1). Cette indication d’antiquité est confir- mée par le témoignage d’un écrivain à la vérité encore plus moderne, mais qui rattache ce genre d'instruments et d’ob- servations à un office religieux . Clément d'Alexandrie nous apprend que, dans les cérémonies publiques du culte égyptien, l'hiérogrammate chargé de l'astronomie (égocxéroc) portait à la main une horloge (6poXéywv), comme marque de ses fonc- (1) Voici le passage de Géminus, cap. VI, des mois : Kai af rüv pooytwv uraypupal éxômhouc moubor ès xur GAnUetav yLVoUÉvUs rpomds, xal HUoTE map’ Aîyurrious èv mapurmonoet yyevouévus. Le dernier membre de la phrase indique bien une pratique ancienne. 0] D'ASTRONOMIE ANCIENNE. 53 tions sacerdotales (1). Clément ne dit point de quelle nature était cette horloge; mais le nom qu'il lui donne caractérise un cadran solaire, car Ptolémée appelle les clepsydres ÿdpouérots (2). Or, Champollion a découvert dans le Musée de Turio un instrument , ou plutôt un snsigne de ce genre, évi- demment destiné à des observations solaires, et qui apparte- nait précisément à un hiérogrammate, dont il porte le nom sculpté sur le contour de sa base, en caractères hiéroglyphi- ques très-soigneusement exécutés. J'avais publié ce curieux monument dans mon Mémoire sur l’année vague égyptienne, d'après un dessin très-exact, de grandeur naturelle, que l'as- tronome royal de Turin, M. Plana, a bien voulu en faire prendre pour moi (3); mais je n'avais pas alors suffisamment signalé ses particularités caractéristiques, qui le distinguent essentiellement de tous les gnomons grecs ; et, pour les rendre plus appréciables, j'en ai fait construire une copie fidèle, seulement plus grande que l'original, pour l'adapter à des observations réelles. Je la mets sous les yeux de l'Académie. L'instrument se compose d’un parallélipipède vertical, dont la (x) Clément d'Alexandrie, Stromates, hb. VI, pag. 957, in-folio. - (2) 4lmageste, lv. V, chap. XIV, au commencement. (3) On a reproduit ce dessin dans la planche première jointe à ce mémoire. Pour rendre l'usage de l'instrument sensible, on a restitué le prolongement de la règle qui était brisée, et l'on y a figuré aussi le style oblique qui avait été enlevé, en lui donnant une inclinaison d'environ 46° sur la face verticale qui devait recevoir son ombre. Cette inclinaison est celle que M. Plana avait mesurée, d'après la direction du trou oblique percé dans la face supérieure, près de la raie horizontale de cette face ver- ticale , à l'endroit où le style devait s’insérer. 5/ SUR DIVERS POINTS base se prolongeait d’un côté en une règle rectangulaire, au- jourd’hui brisée , que j'ai fait restituer; ce qui montre qu'il était destiné à être placé sur un plan horizontal. La face laté- rale du parallélipipède , qui est opposée à la règle, porte l’image en pied de Phré le dieu Soleil ; et sur la face de retour, du côté qu'il regarde, sont tracées deux lignes parallèles d'une extrème finesse , destinées à recevoir ou plutôt à com- prendre l'ombre d’un style oblique à cette face (1). Ce style n'existe plus; mais son orifice oblique d'introduction se voit sur la base supérieure du parallélipipède ; et en y insérant unetige métallique, M. Plana a trouvé qu'il était incliné d'environ 46° sur la face où il projetait son ombre. Or, il y a là plusieurs caractères qui n'existent dans aucun gnomon grec: d’abord l'obliquité du style sur le plan d'ombre; puis la restriction du tracé à une direction d’ombre unique et verticale, projetée dans un plan perpendiculaire à la longueur de la règle; enfin la fixation rigoureuse de cette direction, non par coïn- cidence sur une simple ligne tracée d'avance, comme dans tous les instruments de gnomonique grecs ou modernes, mais par l'insertion de l'ombre du style dans l’étroit espace com- pris entre les deux parallèles verticales, de manière à s’écarter également de l’une et de l’autre, toutes deux étant également distantes de l'axe du trou dans lequel le style est inséré. Cette dernière circonstance surtout décèle un sentiment, ou, 1) Dans le monument origimal, qui est en basalte noir, parfaitement poli, ces deux lignes, selon ce que m'a dit Champollion, consistent en deux rides parallèles d’une extrème finesse, ménagées en saillie sur la face qui devait recevoir l'ombre. L'excessive difficulté de les exécuter ainsi, montre bien l'importance intentionnelle qu'on y attachait. Rats A he VER D'ASTRONOMIE ANCIENNE. 55 si l'on veut, un instinct de précision qu'aucun observateur ne saurait méconnaître. Nous savons tous en effet, par ex- périence, que la bissection d'un petit espace rectangulaire ou circulaire s’apprécie avec beaucoup plus de justesse qu'une superposition de lignes. Mais je ne crois pas qu'on ait l'exem- ple d'une attention aussi délicate dans aucun autre instrument ancien. Celui-ci étant présenté au soleil levant, puis au soleil couchant, aurait donc suffi, comme je l’ai dit plus haut, pour tracer par bissection des lignes méridiennes, déterminer les époques des équinoxes, des solstices, trouver la durée de l'année ; et d’après les particularités de sa construction, sur- tout d'après la spécification si remarquable de sa ligne d'ombre, on ne saurait lui concevoir d’autre usage. Or, le lieu où il a été trouvé, les caractères qu'il porte, les fonc- tions du personnage auquel il appartenait, enfin son origi- nalité même , attestent qu'il était bien spécialement égyptien. En résumé : les retours du soleil aux mêmes points de l'horizon, quand il se lève ou qu'il se couche, dans un pays découvert comme l'Égypte, offrent le moyen le plus simple, et qui a du se présenter le plus naturellement, pour déter- - miner la durée approchée de l’année solaire. Mais ce procédé s'éloignant de nos méthodes modernes, on y a peu songé ; et l'on a supposé généralement que cette évaluation primitive avait dû être obtenue par des inductions réellement beau- coup plus difficiles et plus incertaines. Telles sont, par exem- ple, celles que l’on tirerait des levers héliaques, dont les intervalles ont été surtout signalés, par beaucoup de personnes érudites, comme ayant dü indiquer aux anciens Égyptiens la durée de l’année solaire. Cependant, avec un peu de pratique de l’astronomie , on aurait aisément reconnu que des phé- 56 SUR DIVERS POINTS nomènes aussi vagues ont pu seulement être employés comme pronostics astrologiques, ou pour des annonces populaires de certaines époques de l’année, mais non pas comme des déterminatifs absolus de temps, ainsi qu'il l'aurait fallu si l'on avait voulu en conclure la durée de l’année solaire, avec laquelle ils n’ont d’ailleurs qu'un rapport fortuit et indirect. Cela paraîtra dans une entière évidence lorsque je montrerai à quelles computations il aurait fallu se livrer pour déter- miner l'époque absolue d’un lever héliaque de Sirius, de manière à en faire la limite d’une période chronologique. Mais auparavant je signalerai une particularité singulière qui a été spéciale pour l'Égypte, exclusivement à tout autre pays. C’est que la période annuelle de 365 jours, même celle de 3651 +, y ont été rendues sensibles à tous les yeux par des indications bien plus évidentes et bien plus précises que les levers héliaques , dès que la grande pyramide de Memphis a été bâtie: et il n’a pas fallu d’autres instruments pour obtenir cesrésultats, s'ils n'étaient pas déjà connus antérieurement par les procédés qui ont servi pour orienter cette grande cons- truction. Ce fait, qu'on n’a pas assez remarqué, confirmera, par un frappant exemple, tout ce que je viens de dire. Je n’ai pas besoin d'examiner quelle a pu être la destina- tion intentionnelle des pyramides de Memphis, ni quels motifs on a pu avoir de les ériger. [Il me suffit que les plus grandes existent depuis les anciens temps des premières dy- nasties égyptiennes, ce qu'apparemment on ne niera point. Les recherches récentes du colonel Wyse ont prouvé, con- formément aux indications de l’histoire, que leurs pans laté- raux étaient recouverts d'un parement en pierres lisses constituant quatre surfaces extérieurement planes, desquelles D'ASTRONOMIE ANCIENNE. JE 7 deux sont presque rigoureusement perpendiculaires au plan du méridien, et les deux autres au vertical d’est-ouest. ['in- clinaison des faces sur le plan des bases a été trouvée sensi- blement égale pour ces trois pyramides, comme pour toutes les autres de la même localité ; et, d’après les mesures qu'on en a prises, elle surpasserait de très-peu 52°. Cette évaluation pourrait toutefois comporter une légère incertitude, l'angle qu'elle indique étant celui que présentent aujourd'hui les faces dépouillées de leur parement, et dégradées par la vé- tusté ; mais cela n’aura aucune influence sur les résultats que je veux établir. La plus grande pyramide, que je me bornerai à prendre pour exemple, est construite sur un tertre naturel, d’où la vue s'étend de toutes parts, sans obstacle; en sorte que l’horizon que l’on découvre paraît cireulairement ter- miné, presque comme il le serait sur la mer. D’après les observations de Nouet, la hauteur du pôle y est presque exactement de 30°. Je lui attribuerai cette valeur. Je dis maintenant, qu'avec ou sans la prévision de ceux qui ont érigé cette énorme masse, elle a, depuis qu’elle existe, fait l'office d’un immense gnomon, qui, par l'apparition et la disparition de la lumière solaire sur ses diverses faces, a marqué annuellement les équinoxes avec une erreur moindre qu’un jour, et les solstices avec une erreur moindre qu’un jour trois quarts. En sorte que, par ces indications qu'il suf- firait de regarder, on a pu, sans aucune science, connaître les époques de ces phénomènes, et en déduire la durée de l'année solaire plus aisément , plus exactement, que par tout autre appareil de dimension moindre qu’on aurait construit exprès pour ce but. Il ne faut que suivre par la pensée la succession des apparences qui se manifestaient ainsi an- DU 8 58 SUR DIVERS POINTS nuellement, pour en voir résulter toutes ces conséquences. Considérons d’abord spécialement les périodes d'illumina- tion de la face australe et de la face boréale, qui sont toutes deux perpendiculaires au plan du méridien. Depuis le solstice d'hiver jusqu'à la veille de l'équinoxe vernal, le soleil, à son lever, éclaire la face australe, et laisse la boréale dans l'obscurité. L'ombre de la masse, à cet instant, se pro- jette au-nord de la ligne est-ouest. Le lendemain du mème équinoxe, l'effet est inverse. Le soleil levant éclaire la face boréale, et laisse l’ australe obscure. L'ombre de la masse, à cet instant, se projette vers le sud. L'époque exacte de cet équinoxe est done comprise entre les deux jours où l’on voit ce changement s’opérer. Le soleil couchant la marque aussi, par des caractères pareils, entre ces mêmes jours, sauf les petites différences de temps que le changement de la décli- naison du soleil en douze heures et les accidents de la réfrac- tion atmosphérique y pouvaient produire ; comme dans les observations faites vingt siècles plus tard, avec les armilles d'Alexandrie. L'équinoxe automnal amène des alternatives semblables, dans un ordre contraire. La première illumination du matin, et la dernière du soir, passent de la face boréale à la face australe; et l'ombre de la masse, à ces mêmes instants, passe du sud au nord. L'époque de ce second équinoxe se conelut donc, ou plutôt se voit de la même manière, et entre des limites pareilles d'erreur. Rien n’est plus facile que de saisir ces mutations par des observations du matin et du soir, faites un peu avant ces deux instants de l’année. Mais, en outre, les temps où elles vont s'opérer sont annoncés d'avance par un phénomène D'ASTRONOMIE ANCIENNE. 5g résultant du degré d’inclinaison qui a été donné aux faces sur je plan de leur base. Depuis le solstice d'hiver, jusqu'au vingt et unième jour environ avant l’équinoxe vernal, le soleil, dans sa course diurne, n’éclaire que la face australe : la boréale reste constamment obscure. Vers le vingtième jour avant l’équinoxe, un trait de lumière solaire vient tout à coup illuminer cette face, au moment de midi. C’est le sommet supérieur du disque qui la dépasse : notez cet instant. Depuis lors, le soleil continuant à décrire un cercle plus élevé, cette face s’illumine chaque jour plus tôt, et pour plus longtemps. Enfin, le jour de l’équinoxe vernal, ou le lende- main au plus tard, elle est éclairée dès le matin même, et ne rentre plus dans l’ombre jusqu’à l’autre équinoxe. Mais, après celui-ci, le soleil l’abandonne de nouveau pendant une partie du jour, par les mêmes périodes de décroissement. Enfin, vers le vingtième jour au delà de cet équinoxe, elle n'est plus illuminée qu’un seul instant par le sommet supé- rieur du disque au moment de midi. Si vous négligez la petite différence de durée du printemps et de l’été, ou de l’automne et de l’hiver, comme l’ont fait les Chinois, et comme 6nt dû le faire tous les anciens peuples qui ne se servaient que de leurs yeux, sans théorie, le solstice d’été sera intermédiaire entre les deux équinoxes vernal et austral, ou mieux encore entre les deux époques d’illumination instantanée de la face boréale, par un même sommet de l’astre. Le solstice d'hiver sera pareillement intermédiaire entre l’équinoxe automnal et l’équinoxe vernal suivant, ou entre les époques d’illumina- tion instantanée qui y correspondent. L'erreur de ces éva- luations sera moindre que 1 i. Les instants auxquels le soleil arrive à ces phases extrêmes seront marqués ainsi beau- 8. 6o SUR DIVERS POINTS coup plus exactement qu'ils ne le seraient par les longueurs des ombres méridiennes que projetterait un style vertical à pointe eflilée, comme étaient les gnomons grecs. Cet avan- tage résulte de ce que l’inclinaison des faces sur le plan des bases, conduit la face boréale un peu au-dessous du plan de l'équateur céleste, de manière à lui faire présager l’équinoxe vers les temps de l’année où le changement diurne de la banteur méridienne est le plus rapide, en l’éloignant du sommet de l’are que le soleil déerit au solstice d'été. Car si la face avait été dirigée au sommet solsticial même, ou sous quelque inclinaison voisine de celle-là, la lenteur du mouve- ment en déclinaison près de cette limite, aurait rendu les époques d'illumination instantanée trop incertaines pour étre d'aucun usage ; au lieu que l'inclinaison étant peu différente de l’équatoriale, ces époques fournissent des indices de temps absolu beaucoup plus précis; ce que je remarque d’ailleurs comme un simple fait, sans prétendre qu’on y eût attaché un sentiment de prévision. Les faces orientale et occidentale présentent aussi chaque jour des phases d'illumination et d’obscurité, dont les limites de transition sont soudaines. Mais la phase d’illumination est toujours la plus longue; de sorte que, chaque jour, ces deux faces sont éclairées simultanément pendant quelques heures autour de midi. La moindre durée de ce phénomène à lieu au solstice d'hiver; la plus grande, au solstice d’été. Quand il coincide avec les phases d’éclairement simultané des faces boréale et australe, toute la pyramide est éclairée à la fois, et ne projette point d'ombre hors de sa base. Cela arrive ainsi depuis le vingtième jour avant l’équinoxe vernal, jus- qu'au vingtième après l'équinoxe automnal; mais, pour un FM | PAL Le. SU SEE ef Pas D'ASTRONOMIE ANCIENNE. 61 seul instant à ces deux limites, pendant cinq heures et demie au solstice d'été. Je rejette les détails de cette gnomonique en note (1). Mais je signale ici le fait général, parce que le manque d'ombre à certaines époques de l’année, et à cer- taines heures du jour, a été fort remarqué, et célébré, par beaucoup d'auteurs anciens, qui toutefois l'ont caractérisé inexactement. Or, on ne pouvait avoir reconnu ce fait qu'en suivant le progrès annuel de l’éclairement des diverses faces de la pyramide; et, une fois que l'attention s’y portait, ilest comme impossible que, pendant des milliers d'années, des prêtres observateurs qui résidaient sur les lieux, et qui par état suivaient les phases du soleil, n’y aient pas décou- vert d’autres rapports si évidents avec la marche de cet astre; quoiqu'ils aient pu n'en mentionner aux étrangers que cette particularité la plus frappante, et la plus propre à exci- ter leur admiration (2). (1) Voyez, à la fin du mémoire, la note 3. (2) Dans le texte annexé aux planches n°26 du Panthéon égyptien, Cham- pollion dit que, parmi les objets retirés des catacombes d'Égypte, on trouve souvent de petites pyramides votives, dont les quatre faces sont recouvertes de sculptures toujours relatives au culte du soleil, considéré sous les diverses formes divines représentatives de ses phases principales. J'ai constaté lexactitude de cette assertion sur plusieurs pyramides de ce genre qui exis- tent au musée du Louvre ; et l’on trouvera à la suite de ce mémoire, dans la note 4, les considérations que cet examen m'a suggérées. Je me borne ici à faire remarquer que l'application ainsi constamment opérée des diver- ses phases de l’astre, aux diverses faces de ces petites pyramides, semble n'avoir pu dériver que de l'observation des relations phénoménales analo- gues , qui se produisaient réellement, pendant toute la durée des siècles, sur les faces correspondantes des pyramides véritables. 62 SUR DIVERS POINTS Nous venons de suivre les phénomènes d’illumination diurnes qui s’opèrent sur les faces des pyramides dans une même année. Leur seule succession ainsi observée donne immédiatement, par le retour de ses phases, la portion prin- cipale de la période solaire, 365 jours. Le quart de jour additionnel se manifeste bientôt par le retard progressif des mêmes phases sur cette première évaluation. Ce retard n’é- tant que d’un jour en quatre révolutions solaires, peut bien n'être pas encore apercu, ou du moins mesuré, après un si court intervalle de temps. Mais il s'élève à 10 jours après 40 ans, et à un mois entier de 30 jours après 120 ans; de sorte qu'il devient impossible de le méconnaître, surtout ici, où l’illu- mination instantanée de la face boréale offre un signal pério- dique si évident et si exact. Cette forme d’induction, toute naturelle qu'elle est, je ne la prête pas aux anciens. C'est ainsi qu'ils ont découvert les fractions simples qui complè- tent toutes les périodes auxquelles ils s’efforçcaient de rame- ner les mouvements célestes, dans la persuasion où ils étaient de leur uniformité. Je n'ai fait que transporter ici, mot à mot, le raisonnement dont se sert Géminus pour montrer, aux Grecs de son temps, comment les fêtes d’Isis, qui étaient fixées à un certain jour du calendrier égyptien, devançaient continuellement les phases solaires de cette même frac- tion : de jour. Seulement, pour ne pas prêter aux anciens Égyptiens des déterminations que l’on püt supposer trop pré- cises, j'ai fort élargi les amplitudes d'erreur que les obser- vations de ces phases pouvaient comporter. Les effets périodiques d'ombre et de lumière que je viens de décrire se sont réalisés sur les faces des pyramides de Memphis depuis qu'elles existent. Ils s'y réalisent encore de D'ASTRONOMIE ANCIENNE. 63 nos jours, suivant les mêmes lois. Ils n’ont pas été compléte- ment remarqués, ou du moins décrits, par les voyageurs qui ont visité ces monuments; ce qu'explique assez le peu de durée de leur séjour, et la nature des idées, très-éloignées de celles-là, qui les occupaient. Mais peut-on croire qu'ils aient également échappé à l'attention continue des prêtres de Memphis, que toute l'antiquité nous dit avoir été voués pendant des siècles à l'étude du ciel et à l'observation des phases solaires, lorsque la détermination de ces phases ré- sultait ainsi, avec tant de sim plicité, d’exactitude etd ‘évidence, des phénomènes qui s’offraient tous les jours à leurs yeux dans d'aussi grandes proportions ? Il faudrait pour cela leur supposer une stupidité ou une indifférence tout opposées à ce que les historiens nous en racontent. Néanmoins je ne prétends pas affirmer qu'ils n’eussent point, antérieurement aux pyramides, obtenu déjà les notions des équinoxes, des solstices, ainsi que de la période solaire, par quelqu'un des procédés qu’ils ont dû employer pour effectuer l'orientation si exacte de ces monuments. Et, me bornant à présenter ce qui précède, comme un simple exemple de la facilité qu'on a eue, en Égypte, pour obtenir ces premières déterminations par des moyens pareils ou analogues, j'irai au-devant de deux conséquences inexactes qu’on pourrait vouloir en déduire. La première se présente sous une forme dubitative. Le même système d'observations qui aurait fait connaître si aisément le quart de jour, n'aurait-il pas dùü donner aussi aux anciens Égyptiens la fraction soustractive de ce quart, qui complète la véritable durée de l’année solaire? Cependant nous voyons qu'Hipparque ne l’a connue que par ses propres recherches, et très-imparfaitement. La notion de 64 SUR DIVERS POINTS ce résultat ne l'avait done pas précédé. Je le crois aussi. Mais l'opposition qu'on voudrait établir sur ce rapproche- ment n’a rien de réel, parce qu’elle suppose une nécessité de connexion qui n'existe pas. La fraction complémentaire dont il s’agit est excessivement petite. La réduction qu'elle appor- tait à la période de 365 -, lors de ces anciennes époques, ne produisait qu'un écart de 7,6 en mille ans. Pour chercher à la découvrir, il aurait fallu d’abord en sentir le besoin, qui ne peut pas être suggéré par la nécessité pratique, mais par un désir de perfectionnement théorique, auquel les peuples primitifs sont étrangers. C’est ainsi que les anciens Chinois ont employé pendant plus de deux mille ans la période de 3651 :, en se bornant à corriger par occasion son er- reur absolue, sans chercher à obtenir une évaluation plus exacte et plus durable. En outre, si les Égyptiens de ces mêmes temps avaient eu l’idée de découvrir cette petite fraction, et s'ils eussent voulu l’évaluer avec quelque certi- tude par des observations qui comportaient au moins une erreur d’un jour, comme celles que nous pouvons leur sup- poser, il aurait fallu qu'ils les eussent suivies avec continuité pendant au moins mille ou quinze cents ans, de manière à pouvoir faire le compte exact des jours de retard, compris entre les deux époques extrêmes qu’ils auraient comparées. Or, cette rigoureuse transmission de dates absolues pendant un temps si long, non-seulement n’est pas prouvée pour l’an- cienne Égypte, mais elle est encore très-peu supposable, parmi les révolutions que ce pays a subies ; surtout les dates égyptiennes ne se comptant pas, comme les nôtres, à partir d’une ère fixe, indépendante des événements politiques, mais reprenant d’une ère nouvelle à l'avénement de chaque | LA ‘ | | | | Ê D'ASTRONOMIE ANCIENNE. 65 souverain. Les éléments de perturbation que ces rénovations introduisent dans la chronologie, s'aperçoivent aisément; ils remplissent l'histoire ancienne. L’empèchement absolu qu'ils peuvent trop aisément apporter aux calculs astronomiques sera mis tout à l'heure dans une évidence manifeste. La seconde conséquence que je veux prévenir exigerait la même condition de continuité que celle-là, et dans une _ application plus générale. Si les Égyptiens avaient observé . très-anciennement des équinoxes et des solstices, dont ils … d'un ou de deux jours, comme nous venons de voir qu'ils ÿ pouvaient très-aisément le faire, pourquoi n’en trouve-t-on … aucune mention quelconque dans l’ouvrage de Ptolémée; de …— Ptolémée, qui avait tant d'intérêt à rechercher ces anciennes …— déterminations, à les prendre pour données distantes de ses théories, et qui, résidant lui-même en Égypte, n'aurait pu … ignorer l'existence de pareils documents ? S'il n’en a rien dit, . s'il a été contraint de recourir à des observations chaldéennes - ou grecques, sans mentionner un seul résultat égyptien, n’est- ce pas qu'il n’y en avait aucun qui püt lui servir? Et n’en doit-on pas conclure que toute la science astronomique dont … Se vantaient les prêtres d'Égypte se réduisait à des notions _ purement spéculatives, dépourvues de déterminations exactes? Cette induction , que je m'attache à présenter ici dans toute sa force, a été, je crois, énoncée primitivement par Delam- _ bre. Elle a été embrassée avec ardeur par un savant hellé- niste, qui paraît avoir entrepris d’ôter à l’ancienne Égypte L toute présomption d’équinoxes et de solstices, observés anté- _rieurement aux Grecs. Je ne dissimulerai pas qu’autrefois elle … m'avait semblé pareillement très-forte, sinon décisive. Mais Lo XX 9 66 SUR DIVERS POINTS une pratique plus habituelle des calculs par lesquels on rat- tache à notre temps les anciennes déterminations astronomi- ques, pour en pouvoir faire usage, m'a montré qu'elle n’a nullement ce caractère de certitude. Car le silence de Ptolé- mée, sur les anciennes observations égyptiennes, pourrait avoir une tout autre cause que leur non-existence ; j'ajoute, une cause beaucoup plus naturelle et plus vraisemblable, consistant dans le défaut de continuité des dates transmises, qui lui aurait rendu impossible de s’en servir. Remarquez, en effet, que ce silence s'étend à une grande classe de phénomènes astronomiques qui ont dû être inévita- blement vus, observés et notés par les Égyptiens : je veux parler des éclipses. Elles n’ont pu manquer d’être remarquées par eux, qui avaient des cérémonies relatives aux phases lunaires, des emblèmes religieux pour désigner le renouvel- lement de la lune, une divinité spéciale pour y présider, et dont l'attention continuelle à suivre les mouvements de cet astre peut seule faire concevoir la concordance ineroyable- ment précise que nous trouvons établie entre ses positions absolues et celles du soleil, dans leur calendrier usuel, à l’épo- que de — 1780. Il est presque superflu de rapporter, comme preuve matérielle d’un fait d'une si grande évidence, ce que dit Sénèque au chap. VI des Questions naturelles : que, posté- rieurement à Eudoxe, l’astronome Conon avait rassemblé, dans un ouvrage spécial , les observations d’éclipses de soleil, conservées par les Égyptiens. Conon postea diligens , et ipse inquisitor, defectiones quidem solis servatas ab Ægyptüs col- legit. À quoi il ajoute : Nullam autem mentionem fecit come- tarum , non prætermissurus, si quid explorati apud illos comperisset. La conclusion est inexacte, parce que Conon Fi D'ASTRONOMIE ANCIENNE. 67 _ avait pu ne rechercher que les éclipses de soleil, pour tâcher d'y découvrir les éléments de quelque période qui servit à les - prédire. Mais elle prouve que Conon était allé lui-même 4 RE cillir ces observations en Égypte, et que Sénèque avait vu le livre où il les avait rassemblées. Il ne saurait y avoir de témoignage plus formel. Or, si les Égyptiens consignaient dans leurs registres des phénomènes pareils, dont les retours 7 leur étaient impossibles à prévoir, puisqu'ils ont pu seule- . ment être calculés par les théories modernes, à cause des va- iétés d'aspect que les parallaxes y introduisent, ils devaient ème, puisqu'elles reviennent presque exactement après lix-huit années solaires , plus dix ou onze jours (1). Pourquoi . qu'un très-petit nombre qui fussent dans les conditions con- .venables pour établir ses théories. Car, parmi toutes celles que les Égyptiens avaient vues, il devait nécessairement s’en t rouver qui offraient des circonstances pareilles, et même ontem poraines à celles-là ! Elles en auraient fourni une véri- ation très-importante. Bien plus, leur emploi lui aurait été (x) Plus précisément dans l'intervalle de la période chaldaïque 6585: I] présque impossible que celle-ci ait été inconnue aux prêtres égyptiens, l'après les rapports qui ont dû exister de très-bonne heure entre eux et prêtres chaldéens, spécialement chargés des observations astronomi- s à Babylone; ceux-ci même, au rapport de Diodore, n’ayant fait que imiter : HALOUUÉVOUS Tup NOTE fepeis, xat oucuxodc, ëtt de Gorpoloyouc. Dio- dore, Hist., Ub. [, cap. XXVIIL. ; 68 SUR DIVERS POINTS infiniment préférable, l'exemptant de l'incertitude causée par la réduction du méridien de Babylone au méridien d'Alexandrie, qu'il ne pouvait que très-imparfaitement connaître; tellement qu'il en a donné, dans sa Géographie et dans l’Almageste, des évaluations différentes, dont la moins inexacte est en erreur de plus d’un degré et demi. On ne peut pas dire non plus que les éclipses égyptiennes auraient été notées trop inexactement ; car, dans les chaldéennes, sur lesquelles Ptolémée se fonde, on n’a que l'indication de l'heure, au plus de la demi-heure, à laquelle le phénomène a commencé. Or, il est impossible qu'une éclipse vue soit re- latée d’une manière moins précise, surtout chez un peuple où la mesure du temps était établie pour le jour et pour la nuit. Si, malgré tant de motifs de préférence, Ptolémée n’a pas employé une seule ancienne éclipse égyptienne, c'est, sans aucun doute, qu'il ne pouvait pas s’en servir. Et la seule cause suffisante que l’on puisse astronomiquement concevoir à cette impossibilité, c'est le manque de dates continues pour les rattacher à son époque, puisqu'une incertitude d’énu- mération d'un seul jour les lui rendait absolument inutiles, quoiqu’elles ne le fussent pas aujourd'hui pour nous, si nous les connaissions même avec une indétermination bien plus étendue. S'il a été arrêté ainsi dans la réduction des éclipses qui lui auraient été si nécessaires, il a dü l’être de même dans l'emploi de toutes les autres observations qui auraient été faites anciennement par les Égyptiens ; et son silence à cet égard, non-seulement ne prouve pas, mais n'indique nulle- ment qu'ils n'en eussent point faites. En logique, deux solu- tions démontrées possibles excluent l'affirmation ; et il est encore moins permis d'affirmer la moins vraisemblable. D'ASTRONOMIE ANCIENNE. 69 Pour faire sentir l’excessive facilité avec laquelle cette inter- ruption de dates astronomiques peut s’introduire chez les . peuples dont les ères changent avec chaque souverain, et …— l'obstacle irrémédiable qu’elle apporte à l'emploi des obser- vationsentre lesquelles elle s’interpose, je prendrai comme exemple un calendrier encore aujourd'hui en vigueur, et qui . a été soumis à cet usage pendant une longue suite de siècles : c'est celui des Chinois. En le comparant, sous ce rapport, au calendrier de l'Égypte, on verra s'y opérer incessamment, . dans les dates, des interruptions pareilles, amenées par des - causes qui ont dû être semblables, et dont l'influence n’a - pu être qu’en partie surmontée , à l’aide d’une collection de . documents historiques la plus complète du monde. Si l’on - considère que la négation hypothétique que je combats est mortelle à l'étude de l’ancienne Egypte, parce qu’elle frappe à l’avance de réprobation, et taxe presque de folie, les recher- - ches qui pourraient être les plus efficaces pour rétablir quelques jalons assurés dans sa chronologie perdue, on ne trouvera pas ce parallèle inutile, ou déplacé. Depuis les plus anciens temps de l’histoire chinoise, deux _ mille ans au moins avant l'ère chrétienne, la Chine a eu un . calendrier civil, fondé sur la connexion de l’année solaire, … avec une année lunaire, réglée sur le cycle de dix-neuf ans. - On n’y voit aucune mention de levers héliaques. Le com- . mencement officiel de chaque année est fixé au solstice d'hiver vrai. Pendant beaucoup de siècles, l’époque de ce + phénomène se déterminait en observant les plus grandes - ombres méridiennes d’un gnomon vertical. Une fois qu’elle . était fixée ainsi, on la transportait aux années suivantes par … la période de 365i :, intercalée tous les quatre ans, jusqu’à ce 79 SUR DIVERS POINTS que l'écart de sa date devint sensible ; auquel cas on la déter- minait de nouveau par l'observation, et l’on y reportait l'origine du calendrier annuel. Aujourd’hui on caleule l’épo- que du solstice d'hiver vrai, par les tables européennes, des- quelles on déduit aussi les phases vraies des lunes. Mais cet usage s’est seulement introduit depuis que la confection de l’Almanach impérial a été confiée aux missionnaires chré- tiens. De tout temps, la série des années s’estcomptée à partir de l'avénement de chaque souverain; et leur énumération recommence à son successeur, comme autrefois en Égypte. Mais il y a cette différence, qu’en Chine l’année commencée est attribuée tout entière au prince qui l’a ouverte; au lieu qu'en Égypte l'année de l'avénement appartenait tout entière au prince qui succédait. Ceci, déjà, devait introduire occa- siounellement, dans les dates des observations égyptiennes, des énoncés d'années en apparence distinctes, quoique réelle- ment identiques, que l’on ne pouvait appliquer sans erreur, et raccorder en série continue, qu'en connaissant la date précise de la mort de chaque souverain, dans l’année qu'il avait commencée. Ptolémée aurait donc eu nécessairement à faire ce travail de concordance pour chaque Pharaon, s’il avait voulu employer d'anciennes observations égyptiennes. Mais il n'aurait pu l'effectuer que sur des tableaux chrono- logiques , où ces détails auraient été rapportés. La règle chi- noise n'a pas cet inconvénient. Pour rendre sensible la nécessité de la restitution critique que je viens de signaler, j'en citerai un curieux exemple pris dans Ptoiémée lui-même. Au commencement du livre XI de l’'Almageste, il relate une opposition de Jupiter, qu'il dit avoir observée à cinq heures après minuit, entre le 20 et le 1 D'ASTRONOMIE ANCIENNE. 71 du mois d’athyr de la première année d’Antonin. Toutefois, lorsqu'il fit cette observation, il dut la marquer sur ses re- gistres, à la même date de jour et d'heure, dans la vingt- deuxième année d’Adrien. Car ce prince vivait alors, et l’on était dans la vingt-deuxième année courante de son règne. Mais il mourut le 26 mésori suivant, neuf jours avant l’expi- . ration de cette même année égyptienne. Par conséquent, on dut la lui ôter suivant la règle chronographique, pour l’at- - tribuer à son successeur Antonin, comme le fait Ptolémée. : nouvel énoncé de date, qu'il emploie dans son caleul, fut nc le résultat d’une rectification postérieure à cet événe- naples. si la nouvelle de son décès n js pas encore connue à Alexandrie dans les premiers jours de l’année narquée à l'an 23 d'Adrien. et aurait été a ensuite à a deuxième d'Antonin par correction; tandis que, faite à s, il y en a eu, à la Chine, d’autres d’une nature encore plus ceidentée. Depuis l’an 180 avant l’ère chrétienne, chaque 72 SUR DIVERS POINTS arbitrairement de nouvelles ères, désignées par des noms tirés de son caprice, ou des événements mémorables qui sur- venaient. Cela s'appelle les nien hao. Heureusement, les an- nales chinoises ont conservé la liste exacte de ces mutations ; de sorte qu’on peut toujours rapporter au commencement de chaque règne chacune des années ainsi désignées. Les empereurs ont, de plus, en différents temps, changé le rang ordinal de numération des lunes de l’année , et ils ont fait varier aussi le commencement du jour civil; mais, heu- reusement encore, ces mutations ont été mentionnées par l’histoire , et les énoncés divers qui en résultent peuvent tou- jours être rattachés à une série continue de temps. Enfin, pour surcroît de perturbation , les princes feuda- taires du siége impérial ont eu aussi leurs calendriers indivi- duels, avec des ères propres; lesquelles dépendaient, pour les années, de leur avénement au pouvoir, et des mutations or- données par leur caprice ; pour l'énoncé des lunes, des règle- ments qu'ils jugeaient à propos d'instituer. Cette diversité s’est étendue aux conquérants successifs qui se sont mutuellement enlevé le trône. Ils ont voulu avoir leurs calendriers parti- culiers, du moment où leur pouvoir, quoique disputé en- core, avait acquis quelque extension. C'était un acte de souveraineté. Toutefois, ces calendriers avaient une même contexture. Ils ne différaient entre eux que dans les époques absolues, parce que c’étaient toujours des Chinois qui les réglaient. Ces races guerrières, qui envabhissaient la Chine, tenaient à honneur de s'approprier ainsi les formes du céleste empire, centre de la sagesse et de la civilisation. Pour l'Égypte, la persistance du calendrier sacré est également attestée par l'identité des désignations graphiques d’années, de mois D'ASTRONOMIE ANCIENNE. 73 et de jours, sculptées sur les monuments de toutes les époques. Mais la numération ordinale des années a dû y suivre de même les accidents politiques ; c’est-à-dire qu'on a dû les compter simultanément, à partir d’ères diverses , lorsque des souverains différents exerçaient en même temps leur pouvoir sur des portions distinctes de l'Égypte , comme cela est souvent arrivé; ou encore lorsque plusieurs princes econnus se la partageaient, comme au temps des Douze, au- | è desquels s'est élevé PLU si toutefois cette que dé douze nomes, qui aurait eu des conséquences ivalentes. Mais, à la Chine, il y a eu, dans tous les temps, es historiens contemporains qui ont pris soin de rattacher . ces événements partiels au faisceau de l’histoire nationale. C'est ce qu'a fait, par exemple, Confucius dans son ouvrage intitulé /e Tchun Tsieou, qui contient les annales particulières de douze princes du royaume de Lou, nominalement feuda- ires de l’empire, pour chacun desquels il a indiqué leurs es propres, les règlements spéciaux de leur calendrier, et s rapports de concordance avec le calendrier impérial ; le tout accompagné d'observations d’éclipses de soleil, dési- nées par des caractères de jours et de lunes; de sorte que S 242 années que cette chronique embrasse peuvent au- urd'hui être fixées astronomiquement. Un travail pareil, es tes des anciens temps à une évaluation continue et oncordante, tant pour les faits historiques que pour les servations célestes. Mais peut-on assurer, ou même pré- 112000 10 74 SUR DIVERS POINTS sumer, que ces registres auraient été toujours exactement tenus, et conservés complets, pendant toutes les révolutions auxquelles ce pays a été en proie ? La seule institution chronologique continue qui ait existé à la Chine consiste en un cycle révolutif de 6o jours, désignés par des caractères spéciaux. C’est l’analogue des 360 noms attachés aux jours de l’année égyptienne primi- tive, et ensuite aux 5 épagomènes de l'année définitive qui lui a succédé. Mais on concevra aisément que ces pé- riodes sont trop courtes, et ont des révolutions trop ra- pides, pour désigner des intervalles de temps dans lesquels on puisse placer les faits avec sureté, d’après les rensei- gnements généraux de l’histoire. Néanmoins, le cycle chi- nois des jours peut encore donner des limites de temps probables, et même occasionnellement certaines, quand ses indications se trouvent jointes à un énoncé ordinal de lunes pris dans un calendrier connu. Les 365 jours égyp- tiens ne pourraient fournir seuls une assignation équi- valente que pour les événements, ou les observations, dont la date historique serait déjà fixée à moins d'une année près. Mais ils deviendraient pareillement des indices d’épo- ques absolues, si l'énoncé du jour se trouvait associé à quelque cycle continu de lunes; ce qu'on n’a jamais cherché à discerner sur les monuments. Vers le temps où la dynastie des Hans réunit toute la Chine en un seul empire, et peut-être quelques siècles aupara- vant, les Chinois adoptèrent, pour leurs annales, un eyele continu de 60 années, chacune de 365i- -, assujetties à l'intercalation quadriennale, désignées par les mêmes ca- ractères déjà usités pour le cycle des jours, et marchant D'ASTRONOMIE ANCIENNE. 75 concurremment avec lui. La constance de durée attribuée aux années de ce eycle,a eu d’abord le grand avantage . de rendre les énoncés des intervalles de temps indépen- dants des évaluations plus ou moins exactes de l'année s0- _laire ; mais, en oùtre, l'association des deux cycles ayant ine période révolutive qui embrasse 80 années juliennes, l29220 jours, lesquels se trouvent ainsi désignés par e double désignation. Et lorsqu'on y joint le rang or- 1 des lunes, la confrontation des trois indices en fournit ane vérification mutuelle, par laquelle on découvre les er- urs qui ont pu être commises en les transcrivant. L'usage ‘cycle des années remonte, avec certitude, jusqu’à l'an 206 nt l'ère chrétienne. Depuis cette époque, jusqu'aux ps actuels, les dates historiques des événements et s observations, relatées dans les textes chinois, sont cer- aines pour l'an, le mois et le jour. Alors, étant continues läns tout cet intervalle, on les confirme en remontant, par s tables solaires et lunaires modernes, aux époques où les L 4 hénomènes décrits dans les livres ont dû se réaliser; de pareil, la continuité des dates d'observations rapportées par Ptolémée à l’ère de Nabonassar. L'emploi du double ele chinois est d’ailleurs purement chronologique, et dis- t du calendrier civil, qui se règle toujours sur les mou- ients vrais, plus ou moins bien évalués. La certitude de 10. 76 SUR DIVERS POINTS / Au delà de l’année — 206 , la chronologie chinoise ne peut plus se régler astronomiquement que par des observations éparses d’éclipses, pour lesquelles les documents historiques fournissent des indications ordinales de lunes, ou des carac- tères pris dans le cycle des jours, ou ces deux spécifications réunies ; de manière que le phénomène désigné ne puisse se reproduire, avec les mêmes conditions, qu'après des inter- valles de temps qui dépassent les erreurs possibles des com- putations historiques. On fixerait, par le même moyen, des dates absolues d’époques dans la chronologie égyptienne, si l’on y découvrait des indications d’éclipses associées à un nom vague du jour, ou à une désignation de mois; ou encore, un simple nom de jour attaché à une phase solaire suffisam- ment définie par des caractères, soit physiques, soit religieux. Muis ces calculs rétrogrades ne peuvent s'effectuer qu'avec nos tables modernes. Ils étaient impraticables aux astro- nomes anciens, fussent-ils Hipparque ou Ptolémée. Cela peut expliquer, sinon justifier, l'oubli dans lequel ils ont laissé périr toutes les observations et les méthodes antérieures, dont ils ne voyaient point l'usage pour eux-mêmes. Comme mon but, dans ce parallèle entre l'Égypte et la Chine , est de nous faire connaître l'inconnu par le connu, je remarquerai que l'espérance de retrouver des indications d’e- clipses ou de phases solaires, sur les anciens monuments égyp- tiens, ne suppose nullement qu'on les y aurait notées par une intention abstraite, soit chronologique, soit astronomique. Lorsque Confucius a rapporté des éclipses de soleil dans le Tchun-Tsieou, il ne savait pas les calculer. Probablement même il ne prévoyait pas l'utilité qu’elles pourraient avoir un jour pour donner des dates certaines. Il les relate par fidé- D'ASTRONOMIE ANCIENNE. 73 i lité historique d’abord; puis surtout, comme indices du mau- vais gouvernement des princes, que ces phénomènes rares et imprévus étaient supposés caractériser. Son préjugé nous sert aujourd’hui à son insu. Des motifs du même genre ne peu- . vent-ils pas avoir suffi pour faire relater des phénomènes pa- reils chez un peuple rempli d'idées astrologiques comme les k. Égyptiens ? Et ce soupçon si naturel ne doit-il pas nous faire rechercher avec le plus grand soin les traces qu’ils pourraient 1 . en avoir marquées sur leurs monuments ? Mais on ne l’a ja- 3 . mais tenté, soit parce qu'on ne sentait pas assez l'utilité de _ pareilles ions , Soit parce qu'on ne les supposait pou- voir être suggérées que par des idées théoriques, soit enfin par l'habitude trop exclusive de rechercher uniquement l’ex- pression des notions anciennes dans des textes écrits. Mais | cette limitation n’est pas applicable à une antiquité toute fi- - gurée, comme celle de l'Égypte. À ee compte, Champollion _n’aurait jamais découvert le sens physique de la notation fi- urée des mois égyptiens ; car, chose remarquable, aucun crivain ancien ne l’a mentionnée, quoique personne ne veuille u ne puisse aujourd’hui révoquer en doute la signification Tout le monde sait que le plus terrible coup porté à l’an- ienne histoire et à la chronologie chinoise , fut l'incendie des res, ordonné en l’an 213 avant l’ère chrétienne, par l’em- , pereur Tsin-Chi-Hoang. La chaîne qui joignait le présent au _ passé fut brusquement rompue par cette mesure poRque = . dont les effets ne furent jamais complétement réparés. Il est 4 bien difficile de croire que l Égypte n'ait pas éprouvé des É pertes du même genre, quoique partielles, parmi tant d’in- vasions qu'elle a subies, de guerres étrangères ou intestines 70 SUR DIVERS POINTS qui l'ont ravagée ! Lorsque les pasteurs l’envahirent presque tout entière et détruisirent Thèbes; lorsque Memphis, de- venue plus tard l’asile des livres sacrés , fut tant de fois atta-. quée et défendue, prise et reprise, les temples où on les con- servait ne furent-ils jamais saccagés ? Les excès de ce genre, commis seulement par les Perses pendant les deux siècles que dura leur domination contestée, les ravages des temples, la profanation des choses sacrées, sont une des séries d'événe- ments les plus formellement attestés par l'histoire. Hérodote le dit (1); Plutarque en fait foi (2); Strabon l’atteste dans les termes les plus forts (3); Diodore le répète en vingt endroits (1) Hérodote, lib. IL, Zrvasion de l'Égypte par Cambyse, du para- graphe I à XXXIX. Cet auteur ne dit point, comme on l'a prétendu ré- cemment, que les excès de Cambyse contre les prêtres et la religion égyp- tienne fussent les actes intermittents d’une folie furieuse; mais il conclut qu'il devait être un insensé et un furieux, puisqu'il s’attaquait ainsi aux lois et à la religion, XXX VIII. Il confirme donc la réalité de ces excès par cette conclusion même. On a fait valoir comme une preuve de la to- lérance de Cambyse envers les croyances égyptiennes, qu'il ait consulté l'oracle de Buto. C'est, en effet, ce que dit Hérodote dans ce même li- vre LXIV. Mais il l'avait fait pour connaître le lieu où il devait terminer ses jours, sans doute afin de prolonger leur durée en l’évitant. Et ce n'est È pas le seul tyran à qui la peur ait fait consulter, pour son propre salut, les superstitions d'une religion qu'il avait persécutée. (2) Plutarque, De Iside et Osiride , p. 400 , édit. de Reiske. (3) Strabon, liv. XVII, $ 27. J'emprunte la traduction de ce passage à l'édition de Leipsick, 1811, in-8°, Il s’agit de la ville de Bubaste. Vunc, dit l'historien, aunc omnino urbs deserta est : habet autem pervetustum tem- plum, ægyptio more constructum, quod multis manifestis indiciis Cam- bysis insaniam , ac sacrilegia , demonstrat ; qui templa , partim igni, par- tim ferro devastavit, mutilans, exscindens , comburens. D. D'ASTRONOMIE ANCIENNE. 59 de son ouvrage. Cette œuvre de destruction, commencée par Cambyse, momentanément suspendue sous quelques-uns de ses successeurs, fut poursuivie et achevée avec une nouvelle . fureur par Artaxerxès Ochus. Ce tyran, le plus cruel, dit Plu- _ farque, qui ait jamais existé, pilla à fond les temples, les dé- … pouilla de leurs richesses, enleva les livres sacrés, non pas à emphis seulement, mais dans toute l'Égypte (1). À la vérité, } son favori Bagoas rendit peu après aux prêtres ces antiques ocuments, pour une somme d’argent considérable. Mais ju'on se figure ce que dut être une pareille restitution, à la aite d’un pillage de soldats de ce temps ! Nous en pouvons ger par ce qui est arrivé d’analogue de nos jours, dans notre Europe civilisée et dans notre pays même. Des archives étran- ères avaient été enlevées avec autant d'ordre que si c'eus- sent été des trésors; elles ont été restituées avec une intention É (1) Diodore, Hist., lib. XVL,S dr. Voici la traduction de ce passage, que emprunte à l'édition donnée par Wesseling : Zrterim Memphi subsistens expeditos progressus vidit, dis- > PTO Conservando imperio, sese objicere non audebat. Sed > pe regni abjecta , et convasatis plerisque thesauris , in Æ thiopiam exsulatum abibat. {rtaxerxes laque totam Ægyptum OCcupat; oppidorum maxime nobilium nia destruit, Jfanisque exspoliatis, ingentem vim auri argentique coa- pat. Commentarios denique ex templis antiquis secum asportat (rüv dpyutwv évaoupés ). Quos tamen Bagoas, aliquanto post, grandi pecuniæ U Uma; sacerdotibus concessit. Les nombreux passages de Diodore sur les commis par les Perses envers la religion égyptienne, se résument s le suivant liv. XVII, $ 49, où il dit que ce fut la cause qui déter- mina les Égÿptiens à recevoir volontiers la domination d'Alexandre, Nam q wod Persæ multa nefarie in sacra commaiserant, et violenter imperitarant , mo lubente Macedones recepere. 80 SUR DIVERS POINTS sincère d’intégrité: pourtant des documents précieux ont dis- paru ! Faites la différence des circonstances et des résultats ! Mais, pour nous, la conséquence du fait n’est pas la même. Aujourd'hui, un document écrit, appartenant aux temps modernes, n’a, dans l’histoire, qu'une valeur locale, limitée à la place qu’il occupe. Supposez-le inédit et unique : sa sup- pression occasionnera une lacune ; mais elle ne rompra point . la continuité des dates entre ce qui précède et ce qui suit. Cela tient à ce que nous avons une ère fixe, à partir de laquelle nous datons les événements , et assignons à chacun sa place temporaire absolue, indépendamment des autres. Anéantissez par la pensée tous les documents historiques et astronomi- ques des cinquante dernières années du xvin' siècle, ce sera sans doute une perte immense. Toutefois, la chaîne de l’énu- mération des temps s'étant continuée sans rupture dans cet intervalle, nous pourrons encore rattacher à notre époque les faits et les observations antérieurs, les y rattacher jour pour jour, et les employer dans nos computations d’aujour- d’hui. Une dynastie tombe, une autre la remplace ; 1831 suc- cède à 1830 : la notation du temps ne dépend pas de cet ac- cident politique. Les registres des observatoires n’en seront pas affectés, ils ne le mentionneront point; et l’on n'aura pas à en tenir compte pour coordonner les événements qui s’y trouveront exprimés. Il en était autrement chez les anciens peuples, dont les ères se renouvelaient à chaque souverain. Supprimez la connexion exacte d’un seul règne avec le pré- cédent ou le suivant ; suspendez seulement le renouvellement de l’ère pendant un interrègne dont la durée ne sera pas ri- goureusement assignée : il en résultera une rupture complète entre le passé et l’avenir. Les observations astronomiques an- | À Qu | | l VA p | 4 | | D'ASTRONOMIE ANCIENNE. 8r térieures, s’il en existait, n'auront plus de dates certaines ; elles ne pourront plus être employées comme éléments de théories. Qu’aurait-il servi à Ptolémée de trouver dans une ancienne chronique, ou de voir sur un tableau seulpté, que l’équinoxe vernal aurait été fixé au 1° Pächon vague, dans telle année de Ramsès Meiamoun , s’il n'avait pas pu lier cette année-là, par une computation exacte de jours, au temps d’Antonin ? La mention de ce fait lui aurait été compléte- ment inutile. Mais il serait pour nous aujourd’hui d’une impor- tance extrême, même quand on n'aurait indiqué sur le mo- nument que la coïncidence du phénomène astronomique avec tel jour désigné de l’année vague, sans spécifier l’année du prince. Car, avec le secours de nos tables astronomiques ac- tuelles, cette simple concordance suffirait pour nous donner une date absolue de temps. Je reprends mon parallèle. Tsin-Chi-Hoang ne survécut que deux ans à son ordre de destruction. Mais ces deux an- nées, et huit autres de convulsions intérieures, qui suivirent jusqu'à l’expiration de sa dynastie, consommèrent presque entièrement la perte de l’ancienne histoire chinoise , des con- naissances astronomiques et des anciennes observations, C’est l'équivalent, ou l’analogue, des destructions qui durent être opérées en Égypte par les mvasions des pasteurs.et des Perses, du moins telles que les historiens les racontent. Aussitôt que la dynastie des Hans, qui succéda , fut arrivée au pou- voir , elle s’efforça, autant qu’eile le put, d’atténuer ce mal irréparable. Des historiens et des astronomes, aussi habiles que ce premier moment de restauration intellectuelle pou- vait en produire, furent chargés de rechercher dans tout l'empire les débris du passé, et d’en reconstruire l’édifice. T. XX. 11 82 SUR DIVERS POINTS Toutes les dynasties suivantes, tant indigènes qu'étrangères, se firent un honneur de continuer , de compléter cette œuvre nationale. De là sont sortis, depuis dix-huit siècles, un nombre immense de documents traditionnels, de travaux chronologiques, et d'ouvrages de critique, relatifs aux anciens temps. Mais si, par tant d'efforts, on est parvenu à y rétablir une liaison certaine pour l’ordre de succession des princes, jusqu’à des époques très-reculées, personne n'’oserait dire qu'elle le soit toujours pour l’année, encore moins pour le jour de leur avénement. Les seuls jalons assurés qu’on ait pu jeter par intervalle sur cet espace, résultent de quelques observations d'éclipses que l’on a trouvées accompagnées d'un nom ordinal de lunes, ou d’un caractère pris dans le eyele des Jours, outre l'indication de l’année du prince. Encore l’as- tronomie perfectionnée des temps modernes a-t-elle pu seule effectuer ces computations rétrogrades ; et, pour toutes les époques intermédiaires, aucune observation retrouvée, qui n'aurait pas ces caractères indicateurs, ne pourrait plus être calculée , même aujourd’hui; à moins que l'élément astrono- mique qu'elle concerne n’eüt des variations si lentes, que sa valeur düt à peine changer dans les intervalles d’indétermi- nation que les computations chronologiques comportent. C'est ainsi qu’on a pu employer quelques résultats de Teheou- Kong pour vérifier les variations de l’obliquité de l’éclip- tique et de la précession, indiquées par nos théories modernes, quoique la date absolue de ce prince astronome soit à peine assignable à soixante ans près. Mais ces applications scienti- liques ne resserrent pas les incertitudes de la chronologie, devenues irrémédiables par la discontinuité des anneaux qui la composent. FA Le æ ro D'ASTRONOMIE ANCIENNE. 83 Voilà tout ce qu’on a pu faire pour la Chine. Voyons quels ont été, pour l’ancienne Égypte, les travaux d’érudition et de critique analogues à ceux-là. Très-peu sont arrivés jusqu’à nous; mais nous pouvons du moins apprécier leur caractère général par ce qui nous en est parvenu, ou par les mentions occasionnelles qu’on en a faites. Ce ne sont plus, comme à la Chine, des œuvres de critique collective , suivies pendant des siècles par des écrivains nationaux, pour restaurer l’histoire exacte de leur pays. Ce sont d’abord des récits de voyages faits par des Grecs qui ont visité l'Égypte, et qui en décrivent Vétat physique, les lois, les mœurs, les traditions, tels qu’ils les ont oui raconter : puis, comme chronographie spéciale, l'ouvrage unique d’un prêtre égyptien, composé tardivement par l’ordre d’un souverain grec, pour lequel l'Égypte était un héritage de conquête, non pas une patrie adoptée. De tels documents ne nous laissent voir l’ancienne Égypte qu’à tra- vers le prisme des idées ou des exigences étrangères. Sans doute on jugerait mal le travail de Manéthon par les frag- ments incohérents et incomplets que nous en ont transmis les écrivains postérieurs, qui les dénaturaient pour les accom- moder à leurs systèmes. Si l’on fait abstraction de la partie fabuleuse, où les règnes des dieux et des héros sont cepen- dant relatés en années comme les règnes réels, on reconnaît plus évidemment tous les jours que l’'énumération de ceux-ci est généralement conforme aux séries des cartouches royaux, que nous pouvons aujourd'hui retrouver et interpréter. Mais ces monuments, répartis sur les diverses parties de l'Égypte, attestent seulement l'existence absolue et l’ordre des princes dans les mêmes familles, sans marquer leurs intervalles, non plus que les époques simultanées ou successives de leur do- 11. 84 SUR DIVERS POINTS mination. Manéthon ne fait pas non plus cette distinction importante dans les fragments qui nous restent de lui. Toute- fois, parmi les trente dynasties qu’il énumère, plusieurs ont dû être, au moins partiellement, contemporaines, ne füt-ce que celles des pasteurs, et des rois indigènes qui leur résistaient. Ces détails n'auraient pu se conclure que d'anciens registres sacerdotaux, où ils auraient été consignés. À la vérité, Champollion a découvert, dans les papyrus du musée de Turin, des débris d’une chronologie pareille, commençant aussi aux règnes des dieux, et descendant jusqu’à la treizième ou la quatorzième dynastie, avec des intervalles de temps exprimés en années, mois et jours. Mais, quand même on ajouterait une foi entière à de semblables documents, malgré les fables qu’on y voit associées, peut-on croire qu’au temps de Manéthon ils existassent complets, continus, sans lacunes, jusqu'à Ptolémée Philadelphe, après tant de révolutions que l'Égypte avait subies et que j'ai plus haut rappelées ? IT est bien plus vraisemblable que Manéthon s’est principalement fondé sur les monuments royaux pour établir l'ordre de suc- cession des princes, et qu’il a espacé de son mieux leurs in- tervalles, tant d’après les restes de registres sacerdotaux qu'il a puretrouver, que par des approximations chronographiques, comme on l’a fait chez tous les peuples pour la portion la plus reculée et la plus incertaine de leur histoire. Il y a loin de là à une chronologie rigoureusement datée, à laquelle on puisse rattacher des observations astronomiques, ce qui est le point spécial de la question que je traite; et encore, un tel raccordement ne peut être effectué qu'en appliquant les ob- servations de chaque époque, conformément aux conven- tions chronographiques admises dans la répartition des temps D'ASTRONOMIE ANCIENNE. 85 de chaque prince auquel les registres les attribuent. Cela exige un second travail de concordance tout aussi difficile que le premier, et qui ne peut en être indépendant, puisqu'il doit reposer sur les mêmes principes. Ptolémée est parvenu à faire ou à se procurer un travail de ce genre, pour la série des souverains babyloniens, perses et grecs, depuis l’épo- que de Nabonassar, 747 ans avant l'ère chrétienne; et il y a rattaché, par des concordances de jours non interrompues, les dates de toutes les observations chaldéennes ou grecques dont il a fait usage. C’est ce qu'on appelle le Canon des rois. Mais, quoique la continuité des éléments numériques dont ce document se compose ait dû être très-difficile à établir, il y avait bien moins d'obstacles à vaincre pour l’opérer, qu’on n'en aurait eu à faire un travail analogue pour les dynasties égyptiennes , parce que la chaîne qu’il fallait reconstruire se composait d’anneaux moins disjoints et mieux conservés. En effet, Bérose avait traduit en grec les livres d'histoire et d’as- tronomie des Chaldéens. Les observations astronomiques, - toutes faites en un même lieu, à Babylone, étaient rattachées par des dates aux années de leurs rois, avec mention des —. courts intervalles d’interrègne. Lorsque cette ville passa sous la domination des Perses , au temps de Cyrus, non-seulement les anciens registres ne furent pas détruits, mais les colléges des prêtres observateurs y furent maintenus en exercice, puisque Ptolémée à employé trois éclipses qui furent ob- servées par eux postérieurement, une sous Cambyse, et deux sous Darius [*. Il a donc pu, non-seulement consulter l’ou- vrage de Bérose, mais, au besoin, en vérifier les détails dans les sources originales, ou dans d’autres recueils. Car les seules éclipses chaldéennes qu’il relate étant toujours dans les con- 86 SUR DIVERS POINTS ditions qui lui étaient spécialement nécessaires pour établir tel ou tel élément de ses théories, il est impossible qu’il ne les ait pas extraites d’un grand nombre d’autres dont il ne parle point, mais qui, devant être datées de même que celles- là, ont pu lui servir pour constater la continuité des inter- valles temporaires auxquels on les avait affectées. L'exis- tence de ces documents auxiliaires, qu'il ne nous à pas transmis, est attestée implicitement par lui-même dans le chapitre X de son IV° livre, où il dit que les trois éclipses chaldéennes employées par Hipparque, ont été choisies entre celles qui avaient été rapportées de Babylone en Grece. Qu'il se soit fondé aussi sur l'ouvrage de Bérose, cela se voit par les fragments de cet écrivain qui sont rapportés dans Eusèbe ; car les noms des rois chaldéens qui s'y trouvent mentionnés, depuis Nabopolassar, le père du Nabuchodonosor de la Bible , jusqu'à Cyrus, sont précisément les mêmes que dans Pto- lémée, avec les mêmes intervalles de temps (1). La série ainsi établie depuis Nabonassar, où commençait la partie histori- que de Bérose, était done simple et sans divergences. Une : fois arrivé, par cette voie, aux souvérains perses, contem- porains des annales grecques, la continuité des dates deve- nait moins difficile à effectuer avec sûreté. Il fallait seulement démêler, dans les histoires écrites, les empiétements des ères propres aux divers princes qui avaient exercé le pouvoir sue- cessivement ou en compétition, avec des alternatives de succès et de revers, comme au temps d'Épiphane et de Phi- lométor. Puis, après avoir fait à chacun sa part convention- (1) Eusèbe, Chronique, lib. 1, cap. XI, p. 30, édit. de Zohrab. D'ASTRONOMIE ANCIENNE. 87 uelle de temps, il fallait rattacher les observations astrono- miques de leur époque et des suivantes à cette convention, sans erreur d’un jour. Voilà l'immense travail d’érudition, de calcul et de critique qu'il a fallu effectuer, pour construire ce monument chronologique, unique dans l’histoire de l'Oc- cident, que l’on appelle le Canon des rois ; travail qui a dû être commencé par Hipparque, puisqu'il a employé aussi des , Reine chaldéennes et que Ptolémée a conduit jusqu’au Bons k Bsnode ; où il l’emploie sans cesse. La main de ces deux grands hommes y est tellement marquée, qu’on a pu - à peine, et non déjà sans incertitude, le prolonger jusqu'à Dioclétien, depuis lequel il n'offre plus aucune süreté, tou- jours par les empiétements des ères simultanées propres aux 45e de leurs der par la diversité des lieux où elles aient établi le siége de leur puissance, et très-probable- ment par la disparition, au moins partielle, des documents Fr Po” pour les rallier en une seule série continue, on 58 SUR DIVERS POINTS nous ne devrions dire qu'apparemment les Chaldéens n'ont observé que des éclipses de lune, parce que Ptolémée ne mentionne d'eux aucune éclipse de soleil. Car, selon son usage trop général, il lui a suffi, pour ne rien dire de ces dernières, que les difficultés de calcul, occasionnées par les parallaxes, lempêchassent de s’en servir. Par la même raison, de ce que la plus ancienne éclipse chaldéenne qu’il emploie remonte seulement à la première année de Mardocempal, la vingt-septième de la série qu'il fait commencer à Nabonassar, nous n'en devons pas conclure qu'il n'y en eût point d’anté- rieures à cette époque dans les registres des Chaldéens, ni traiter de fable la collection d'observations bien plus an- ciennes que l’on dit avoir été envoyée à Aristote par Alexan- dre. Car, pour que Ptolémée ne les ait pas mentionnées, il suffit qu'il n'ait pas pu les rejoindre à Nabonassar par des intervalles de temps certains, c’est-à-dire qu'il n'ait pas pu faire remonter son canon chronologique au delà de ce prince. Or, précisément Eusèbe et le Syncelle rapportent, d’après Bérose, que c’est seulement à partir de Nabonassar qu'on a pu rattacher les règnes des rois chaldéens en une série continue de temps (1). Ici se présente une question qui va tout à l'heure avoir son application pour l'Égypte. On peut demander pourquoi Ptolémée n'a pas employé un seul équinoxe ni un seul sols- tice observés par les Chaldéens, quoique le système général d'observations qui se faisaient à Babylone n'ait pu manquer os (x) Eusèbe, Chronique, cap. I, p. 5, édit. de Zohrab. Le Syncelle, Ckro- nographie, t. 1, p. 390, édit. Dindort. D'ASTRONOMIE ANCIENNE. 89 _de s'étendre à ces phénomènes, puisque c’est nécessairement au mouvement du soleil que se rapportent les disparitions et les réapparitions des planètes, dont les prêtres chaldéens fai- saient un si grand usage pour leurs prédictions astrologiques ? La réponse est encore très-facile : Ptolémée n’aurait eu aucun - intérêt à se servir de ces observations. En effet, dans son cha- k pitre sur la longueur de l’année, il rapporte un passage … d'Hipparque où ce grand observateur confesse que les sols- _ tices observés par lui et par Archimède pourraient bien être en erreur d’un quart de jour. Ses observations d’équi- noxes devaient être beaucoup plus exactes, ou du moins elles devaient être estimées telles par Ptolémée. Attribuons-leur, - par exagération , cette même limite d'incertitude présu- + mable. Ptolémée compare ces équinoxes à ceux qu'il dit avoir observés lui-même 285 ans après. Maintenant, ad- _ mettons que les Chaldéens auraient pu dass ces - phénomènes avec une incertitude d’un jour, ce qui est la - même limite, très- PAblE , que j'ai supposée chez les Dopriens. Pour gun un ous chaldéen, ainsi défini, servation 15 te il aurait fallu qu'il fût quatre fois plus distant, c’est-à-dire qu'il remontät à 1140 ans avant Antonin, deux siècles et demi au delà de l'époque où Ptolémée a pu étendre le canon des rois. [l a donc eu toute aison de dire, non pas qu'on n’eüt point fait anciennement e telles observations, ce ne sont pas ses paroles, mais qu'il se (x) Ptolémée Almageste, lib. ILE, cap. II, De la grandeur de l’année. LU XX. 12 90 SUR DIVERS POINTS pour construire nos tables du soleil, nous employons des équinoxes observés par Bradley, il y a seulement un siècle, préférablement à ceux de Ptolémée ou d'Hipparque, dont nous ne tenons aucun compte, parce que leur ancienneté de 2000 ans ne compense pas leur défaut relatif de préci- sion. Ptolémée n'aurait pu employer utilement un équinoxe égyptien , que s’il lui eût été antérieur dans les mêmes limites de temps que nous venons de fixer pour les observations chaldéennes ; et alors il lui aurait été encore plus difficile, sinon impossible, de le rattacher au temps d’Antonin par dates continues. Sans doute, dans notre esprit de critique moderne, ce motif d’inutilité actuelle n'aurait pas dù suffire, pour laisser ignorer à la postérité jusqu'à l'existence de ces premiers essais, par lesquels l'astronomie observatrice a commencé, soit en Chaldée, soit en Égypte. Mais cela était tout à fait conforme aux habitudes grecques. L'ouvrage de Ptolémée est rempli de ces réticences déplorables. Son plan est pure- ment systématique, non historique. Il s'y renferme avec une invariable abstraction. Il nous faut donc deviner le passé qu'il nous tait, par sa connexion nécessaire avec ce qu'il rapporte, et ne pas inférer de son silence que ce passé n'existât point. [l ne cite pas une seule éclipse de soleil. Est-ce à dire qu'on n’en avait jamais vu ni observé ? Quand il rappelle la période luni-solaire de 6585::, qui accordait toutes les particularités des mouvements de la lune et du soleil, avec une précision qu'Hipparque a eu seulement à compléter , il la donne comme un fait ancien- nement reconnu, sans même en indiquer l'origine. Mais notre expérience nous apprend, sans qu'il nous le dise, qu'un D'ASTRONOMIE ANCIENNE. gi “ nombre aussi complexe, aussi précis, et qui accorde des élé- ments si divers, n’a pu être obtenu sans théorie mathéma- tique que par des observations continûment suivies, pen- dant beaucoup de siècles, sur les mouvements des deux astres ; et que sa détermination a exigé la connaissance des plans distincts dans lesquels ils se meuvent , la mesure de leurs révolutions périodiques , et la découverte du mouve- . ment des nœuds de l’orbe lunaire. Parce que Ptolémée n’ex- _ plique point ces particularités, il n’en est pas moins certain “qu'elles ont été indispensables pour trouver le nombre qu'il énonce, et qu’ainsi elles ont été connues longtemps avant lui. Le même argument s'applique aux équinoxes, aux solstices . et aux éclipses, qui ont pu étre observés en Égypte. Le silence - de Ptolémée sur ces divers points n'autorise nullement à dire - que les Égyptiens n'auraient pas fait des observations si … simples, et qui leur étaient si particulièrement nécessaires À contrairement au témoignage unanime des auteurs anciens, … qui représentent leurs prêtres comme voués par spécialité à . l'étude du ciel; et j'ajouterai aussi, contrairement à la - croyance de tant de personnages célèbres de l'antiquité, la plupart géomètres ou astronomes , qui ont entrepris le | voyage d'Égypte exprès pour y aller puiser ce genre de con- À naissances. Il faut tirer des considérations précédentes , et _ mêmedu simple bon sens, la conséquence inverse: c’est-à-dire u'on avait fait sans doute autrefois, en Égypte, de pareilles . observations dont Ptolémée n'a rien dit, parce qu'elles lui | ont été inutiles, mais qui deviendraient très-utiles pour nous . aujourd'hui, si nous pouvions en retrouver les traces, parce … que nous saurions en tirer des éléments de dates absolues, … que nous placerions comme autant de jalons assurés dans les 12. 92 SUR DIVERS POINTS longs intervalles de la chronologie égyptienne, ainsi qu'on l’a fait pour la chronologie chinoise. De tels éléments peu- vent s’obtenir, non-seulement d'après des indications d'é- clipses qui seraient relatées dans des papyrus, où marquées sur les monuments; mais même par la simple concordance de phases solaires, figurées concurremment avec des dates vagues de jour, comme J'ai cherché à le faire pour l’époque de Ramsès Meiamoun. Qu'on ne rejette donc plus dans le domaine des fables, et des idées fantastiques, les signes figu- ratifs de constellations solsticiales et équinoxiales que l’on a cru retrouver dans les tombeaux des anciens rois égyptiens. Car, d'abord, j'ai montré combien il était facile et naturel de fixer ces principales phases solaires par l'observation. Puis leur représentation, et leur consécration par des figures, étaient tout à fait conformes au symbolisme de la religion égyptienne. Enfin , celles que nous trouvons toujours ainsi associées ensemble, avec des caractères stellaires indu- bitables, dans des tombeaux de Pharaons, ce sont précisé- ment les mêmes que nous voyons, plus tard, employées chez les Grecs pour désigner ces mêmes phases solaires, sans que nous ayons aucun indice qui puisse nous apprendre s'ils les ont imaginées, ou s'ils les ont empruntées aux Égyptiens. Sans doute, ce ne sont là jusqu'à présent que des analogies, qu'il faut suivre comme un soupçon, plutôt qu'admettre comme des vérités établies. Mais il n’y a aucun motif, aucune autorité, pour les supposer impossibles ou invraisemblables. La négation serait beaucoup plus hypothétique que l’affirma- tion. Quant à la difficulté que les Égyptiens auraient eue à ob- server très-anciennement les phases solaires, je crois l'avoir suffisamment réfutée. Mais le contraire pourrait encore s’in- D'ASTRONOMIE ANCIENNE. 93 - férer, pour eux, du témoignage de Ptolémée lui-même. En effet, dans le chapitre VIT du XII livre de l’Almageste, qui traite des disparitions et des réapparitions des planètes, — lorsqu'elles s'engagent dans les rayons du soleil ou qu'elles s'en dégagent, il dit expressément qu'il va établir le calcul de ces phénomènes pour le climat où le plus long jour est de 4" =, parce que c’est sous ce parallèle, ou sous des parallèles distants, que les observations les plus nombreuses et les us exactes (rAsioru x déémiorar) en ont été faites, savoir, oute-t-il, e2 Chaldée, en Grèce et en Égypte. Or, aucun û “ations à des notions de l’écliptique et du zodiaque, qui sem- nt y être inévitablement liées. Mais je ne veux, ni n’entends , attribuer ou refuser aux anciens Égyptiens de pareilles no- ons, parce que cette alternative est inutile à décider, pour iettre en usage les simples indications astronomiques que rs monuments pourraient nous fournir, et sur lesquelles je e suis surtout proposé d'attirer l'attention que l’on a voulu éloigner. Si je l’ai fait avec tant de détail et d’insistance, t parce que cette voie, que j'ai cherché à ouvrir, me pa- aît être presque la seule par laquelle on puisse arriver à re- er quelques anneaux de l’antique chronologie égyptienne, n cherchant sur les monuments autre chose que cette con- elle répétition de formules honorifiques, ou d'offrandes ieuses, que l’on s’est borné à y voir. 94 SUR DIVERS POINTS TROISIEME PARTIE. Je viens de montrer que les Égyptiens ont pu, dès la plus haute antiquité, déterminer des époques absolues d’équi- noxes et de solstices, entre des limites d'erreur d’un, ou au plus, de deux jours, non-seulement par des procédés d’une simplicité que l'on pourrait justement appeler primi- tive, mais par l'aspect même de ce grand gnomon des pyra- mides , dont les indications se sont reproduites constamment pendant tant de siècles, avec une telle évidence qu’on saurait à peine concevoir qu'ils ne les eussent pas aperçues. J'ai montré aussi comment le même mode d'observation, je dirais volontiers de contemplation, a dû leur donner directement la période solaire de 365%. La connaissance de ces résultats a pu précéder de beaucoup l'adoption des 365 jours, dans leur calendrier définitif. Car le déplacement de la période primitive de 360 jours, dans les phases solaires, étant une fois accepté, et chacun des jours qui la composaient étant consacré par un symbole religieux, comme leur antique no- tation l’atteste, elle était tout aussi bonne, pour leur usage, que celle de 365. L'introduction de celle-ci n'a eu pour eux d'autre avantage que de ramener plus commodément la res- titution des lunes, après des intervalles réguliers de 25 an- nées nouvelles. Il est donc naturel qu'on l'ait faite pour ce but, à une époque, celle de — 1780, où la notation consacrée D'ASTRONOMIE ANCIENNE. 9 _a concordé si extraordinairement avec les phases solaires, _ avec l’état physique de l'Égypte, et avec la distribution des 4 Junes la mieux adaptée aux usages civils, ainsi qu'aux rap- À Rports religieux. Dans ce système d'idées, bon de l’an- _ née de 365, intercalée, ou non intercalée aurait été non pas seulement inutile, mais inadmissible, parce qu'elle eût été essentiellement contraire à l'esprit de la religion. En effet, c évant être alors supposée la mesure exacte de la révolution u soleil, elle aurait fixé invariablement, et attaché à une ième phase solaire, les noms divins des jours, ainsi que les rémonies qui s’y rapportaient; au lieu que le principe re- ieux, antérieurement établi, exigeait que ces noms et ces rémonies se transportassent progressivement dans toutes ins que Jamblique reproche à l’année alexandrine, devenue e. J'ai prouvé en outre que les anciennes déterminations d'équinoxes et de solstices qui auraient été faites par les yptiens, ont dù être inutiles à Ptolémée, parce qu’en rai- rattacher à son temps par des dates continues de jours. si, dans cette restitution rétrospective des faits astrono- ques et historiques relatifs aux Égyptiens, ceux qui dé- ndent de l’observation ont été réalisables pratiquement ec la plus grande facilité; et ceux qui supposent une dis- tinuité dans les documents résultent, par une nécessité esque inévitable, de l’état politique du pays, du mode de ation des temps, et des témoignages de l’histoire. Tout se ient et s’enchaine naturellement. Voyons à présent ce que 96 SUR DIVERS POINTS les levers héliaques de Sirius, tant célébrés chez les Égyp- tiens, et même symbolisés sur leurs monuments, ont dû ajouter à cet ensemble; comment ils ont dû s'y associer; s'ils ont pu être employés comme indices d’époques absolues ; et si l'ancienneté de la période sothiaque, qui, selon Fréret et tant d’autres personnes érudites, leur attribuerait la con- tinuité de ce caractère d’époques pendant quinze ou même vingt-huit siècles, est ou n’est pas compatible avec les résul- tats précédents. C’est ce que nous allons décider, non par des aperçus vagues, mais par l'examen des conditions réelles , et pratiques, d’après lesquelles ces apparitions peuvent être saisies et fixées. Il faut d’abord distinguer deux choses que l’on confond presque toujours, quoique ladifficulté de les obtenir soit bien différente. La première , c'est la période annuelle du phéno- mène , ou la détermination du nombre de jours qui ramenait le lever héliaque sur l'horizon d'un même lieu. La seconde est la fixation absolue du jour où le lever s’opérait dans une année désignée. Pour apprécier la nature distincte de ces deux éléments, il faut savoir comment l’un et l’autre peuvent se conclure d'observations faites à la vue simple. Le plus facile à obtenir est la période. Sa durée mathéma- tique comprend 365i:. On l'évalue progressivement par des approximations successives, en comptant le nombre moyen de jours après lequel le phénomène se reproduit évidemment. L'appréciation de ce nombre est d’abord très-vague, parce que chaque réapparition ne peut pas être fixée d’une manière précise comme une éclipse, ou comme l’illumination instan- tanée de la face boréale des pyramides. On ne peut la saisir, même avec beaucoup d'attention, qu'entre des limites d'in- D'ASTRONOMIE ANCIENNE. 97 certitude de plusieurs jours. Néanmoins, quelques années d'observation font d’abord voir que la période des retours surpasse 360 jours complets. Admettant provisoirement . cette évaluation, sa brièveté relative se manifeste par les …— observations ultérieures. En effet, le retour réel du phéno- “ mène retardera continuellement sur son retour ainsi calculé. … Si l'on pouvait le saisir avec rigueur , ce retard serait de 21 3 jours après quatre levers consécutifs, conséquemment de 210 ours après que le phénomène se serait reproduit quarante ois. Un fait si frappant ne peut se méconnaître. Supposez, … en somme, six Jours d'erreur sur l'appréciation absolue des “donnera pour évaluation plus approchée de la période 365: + =. Après 80 apparitions, en admettant toujours les nêmes limites possibles d'erreur, on trouvera 3657 + ;; rès 120, 365i5 + +, et ainsi de suite. Alors, en voyant tou- la jugera négligeable, comme les anciens ont toujours t dans l’appréciation de leurs périodes astronomiques, l'on adoptera finalement, pour celle-ci, 365i + juste. Mais ne pourra arriver à cette certitude qu'après au moins un ècle et demi ou deux siècles d'observations spéciales, con- uées ainsi avec une attention persévérante, sans inter- ption de dates, dans un même lieu. Encore, pour les res- tuité de vue constante. Car si l’on admettait des inégalités MAXX 13 98 SUR DIVERS POINTS de perception, telles qüe la vue humaine en comporte dans des individus différents, l'erreur relative des limites extrè- - mes pourrait devenir beaucoup plus grande que je ne l'ai supposée, et alors il faudrait beaucoup plus de temps pour l’éteindre. Voila le seul procédé pratique qu'ou ait pu employer, pour connaître, dans le moindre temps possible, que les levers héliaques de Sirius revenaient, sur l'horizon d’un même lieu de l'Égypte, après 36512. On ne saurait le simplifier ni l’abré- ger. Si l’on a opéré avec moins de méthode, ce qui est bien probable, il aura fallu une série d'observations bien plus longue, pour constater, dans les retours d’un phénomène aussi vague, la fraction de jour. En tout cas, on voit que cette détermination est absolument indépendante de la durée de l’année solaire, avec laquelle la période des levers hé- liaques n'a qu'un rapport fortuit, lorsqu'on les considère sans théorie, comme l'ont fait nécessairement les anciens Égyptiens. L'intervalle de temps qui les ramène a done pu ètre reconnu, indifféremment, avant ou après qu'on eut cons- Ê les phases solaires. Il est néanmoins très-présumable que la période de ces phases a été trouvée d’abord, parce qu'elle est bien plus facile à déterminer par l’observation. Il serait fort possible que ces deux résultats numériques eussent été taté que le même nombre de jours, 365+, ramenait aussi pratiquement constatés par les Égyptiens, bien avant l’épo- que où ils abandonnèrent l’année de 360 jours, que leur an- tique notation retrace, pour adopter celle de 365. La sup- position trop souvent faite, qu'on n’a pu trouver la fraction additionnelle + qu'après cette adoption , et que l’année vague … de 365 jours est une preuve d’ignorance, tient au préjugé « ; D'ASTRONOMIE ANCIENNE. 99 _ d'habitude, selon lequel on se figure généralement que la | période de 365; :, dont nous nous servons, est un progrès, - un perfectionnement considérable de celle de 365; tandis ‘4 qu'elle est en réalité beaucoup moins commode pour la com- _putation des temps. Et l'avantage que nous lui trouvons de … fixer les phases solaires à un même jour du calendrier, aurait . particulièrement répugné aux Égyptiens par son opposition “ nf _ près nos usages et nos origines. Nous sommes avant tout Sirius, antérieurement à l’adjonction des épagomènes, semble démontrée par la relation que les Egyptiens avaient établie “entre le premier mois de leur année vague, et la déesse Isis ayant pour attribut cette étoile, avec laquelle elle est dési- gnée sous le nom d’/sis Thot sur leurs plus anciens monu- ments. L'association des deux idées s’offrait en effet très-na- urellement, lorsque l’année de 360 jours était en usage. Car était facile d’apercevoir que le premier jour de thot y evenait héliaque après de courtes alternatives, compre- nt seulement 69 ou 70 de ces années, ce qui donnait im- diatement 365: + Pour la période du phénomène, comme je A tout à l'heure expliqué. Rien n'était done plus naturel et Is conforme au symbolisme égyptien, que de signaler ces cordances fréquentes et remarquables par une consécra- religieuse, exprimée figurativement. Mais l'idée de e association aurait dû naître et se réaliser bien plus icilement après l’adjonction des épagomènes. Car, dans née de 365 jours, le thot n’est redevenu héliaque qu’à des 13. 100 SUR DIVERS POINTS époques distantes entre elles de 1461 années vagues, dont la date numérique répond aux deux seules années juliennes 1322 et 2782 avant l'ère chrétienne, si l’on ne veut pas re- monter plus haut que cette dernière limite. Or, d’après ce que je crois avoir établi plus haut, l’époque de 1322 étant seule postérieure aux épagomènes, ce serait à elle que l’ap- plication religieuse aurait pu être faite dans cette forme d'année, soit par l'observation actuelle de la concordance qui s’y réalisait, soit par prévision à quelques siècles de distance. Mais cette date unique est aussi beaucoup trop tardive, com- parativement à l'établissement complet du culte égyptien, pour que l’on puisse présunier qu'une telle application aurait été introduite alors. La fréquence des thots héliaques, dans l'année primitive de 360 jours, rend seule naturelle et sup- posable l'idée de la représentation symbolique par laquelle on les avait consacrés. Ce motif, déjà très-puissant, sera tout à l'heure fortifié par une autre particularité, encore plus spéciale et plus décisive. J'arrive maintenant à la fixation de l’époque absolue du lever héliaque, considéré comme déterminatif de temps. Ce problème est pratiquement beaucoup plus difficile que la : recherche de la période du phénomène. Bornons-nous ici à le résoudre, pour l'Égypte, dans sa relation avec l’année de 365 jours, à laquelle le cycle sothiaque est attaché. Il s'a- gira de déterminer à la vue simple, sans théorie, l’époque à laquelle le lever héliaque de Sirius aura coïncidé avec un jour de dénomination assignée, par exemple, avec le pre- mier jour du mois thot. Mais d’abord, il faudra convenir du lieu auquel on entend appliquer la coïncidence. Car, dans cette forme d'année, l'époque mathématique d’un même D'ASTRONOMIE ANCIENNE. 1OI lever annuel variant de six ou sept jours pour les différents parallèles qui embrassent l'Égypte, il y aura, sur son appli- cation ultérieure, une indétermination totale de 24 ou 28 ans, tendu l'établir, puisqu'il faudra rapporter la fin de la pé- hi riode à ce même parallèle, afin de ne pas commettre une pareille erreur. L'indication est à la vérité facile; seulement il faudra qu’elle soit fidèlement transmise par l’histoire. Sup- posons cette condition remplie, et que le lieu désigné soit, par exemple, Memphis. Pour déterminer avec quelque préci- Sion l’époque de la coïncidence demandée, il ne faudra pas attendre qu’elle se réalise. Car l’observation immédiate étant peine sûre à trois jours près, si l'on se bornait à noter - l'année où le lever paraît se faire au jour assigné, par exemple au premier du mois thot, pour un certain observateur, pourrait y avoir une de adte de douze ans sur l’époque Doc; c’est-à “dire ue Lu douze années consécutives, ouze ans près? Le seul moyen de l'obtenir plus exactement, oyen, je l'avoue, assez subtil, c'est de se préparer à saisir la ce demandée, longtemps à l'avance, et dela conclure ar le concours d’un grand nombre d'observations. Sup- osons, par exemple, une suite de levers héliaques de Sirius , ervés sans interruption en un même lieu, pendant cent années vagues de 365 jours, dans les limites d'incertitude in- dividuelle que je viens de spécifier. Qu’on me permette même 102 SUR DIVERS POINTS de prendre 121 années, pour que le nombre total soit impair, ce qui rendra le raisonnement plus facile. Considérons celle qui est au milieu de cet intervalle, et concevons qu'alors le lever héliaque ait dü s’opérer, mathématiquement, pour une vue moyenne, le dixième jour d’un certain mois vague, par exemple le dixième de mésori. Celui de la 6o° année précédente aura eu lieu mathématiquement quinze jours plus tôt, et celui de la 60° suivante quinze jours plus tard, puisque la date vague du phénomène varie d’un jour en quatre années de 565, pour une même portée de vue, et dans un même lieu. La somme de ces deux dates extrêmes donnerait donc encore, par leur compensation réciproque, le dixième de mésori, comme l’année intermédiaire, si les observations étaient pareillement rigoureuses; et toutes celles qui sont également distantes de celles-là, étant combinées aussi par couples, reproduiraient cette même date moyenne, dans la même supposition. Maintenant revenons aux réalités. Aucune de nos observations n'est rigoureusement exacte; mais, à moins d’un accident, d'autant moins probable qu'elles seront plus nombreuses, leurs erreurs ne seront pas toutes de même grandeur et de même sens. Dans quelques-unes, le lever aura été suspecté plus tôt que ne le suppose la limite mathé- matique calculée pour une vue moyenne. Dans d’autres, au contraire , il aura été aperçu trop tard , selon la sagacité re- lative et l’acuité de vue des observateurs! répartis sur lin- tervalle entier des 121 années. Aucune des combinaisons partielles ne donnera donc la vraie date, le dix de mé- sori. Mais elles s’en écarteront diversement; et, selon toutes les probabilités, leurs erreurs partielles s’affaibliront mu- tuellement , par opposition, dans leur somme totale; ce qui D'ASTRONOMIE ANCIENNE. 103 donnera une indication, sinon certainement plus exacte, du moins plus digne de confiance qu'aucune des déterminations isolées. On pourra donc trouver ainsi, en moyenne, sinon le dix de mésori, peut-être le neuf ou le onze. Alors on augmen- tera cette date d’un jour après quatre années vagues au delà de l’année intermédiaire, de deux jours après huit années, et ainsi de suite, jusqu’à ce qu'elle rejoigne le premier jour du nois thot. L'année ultérieure, où cette concordance cal- ‘ulée arrivera, sera celle dont le thot devra être censé hélia- que ; et il le sera, en effet, entre les limites d'incertitude que porte la moyenne arithmétique des observations combi- ées, c'est-à-dire avec une erreur possible de quatre ans, en S ou en moins, sur l'époque absolue de la concordance, dans les conditions de combinaison que nous avons admises. Si l'on veut prendre cette année-là comme ère, et l'appeler, par exemple, l’ère de Ménophrès, elle deviendra l'origine une période qui s’accomplira en 1461 années vagues de 65 jours, après lesquelles le thot se retrouvera héliaque T Computation, scilicet edicto, comme Cicéron disait en rlant du lever de Ja Lyre, fixé par le calendrier de César. Mais les calculateurs, ou les astronomes, qui existeront alors, qui voudront assigner la limite finale de cette période, ne ourront le faire que de deux manières : d'abord, par un n ple calcul arithmétique, si toutesles années écoulées depuis e ont été continüment énumérées jusqu'à leur temps, sorte qu'ils en connaissent la somme exacte; secondement, observation, pourvu qu'ils puissent se placer dans les mes conditions de lieu, de visibilité, de perception et de mbinaison systématique, qui auront servi à déterminer la £oïncidence primitive. Cette exactitude de transmission chro- 104 SUR DIVERS POINTS nologique , ou cette identité de circonstances physiques, leur seront indispensables. Car, dans le premier cas, si la conti- nuité de l’'énumération des années leur manque, ils ne sauront pas où il faut placer l’accomplissement final des 1461 années vagues ; et dans le second , s'ils emploient un mode d'obser- vation ou de combinaison différent du primitif, ils placeront cet accomplissement à plusieurs années de distance, au delà ou en decà des 1461. Le même défaut de correspondance terminale existera presque infailliblement, s'ils déterminent la dernière limite de la période par un calcul théorique, fondé sur des conditions conventionnelles de visibilité et d'abaissement du soleil, que n'auront pas employées les pre- miers observateurs, comme Théon et tous les astronomes ont pu le faire après Ptolémée. Ou, inversement, si la première date a été chronologiquement transmise avec continuité, l'époque finale qui s'en déduira s’écartera presque inévita- blement de la théorique par une différence de plusieurs an- nées. Telle est l'incertitude nécessaire, je pourrais dire l'im- possibilité d'application, chronologique où astronomique, d'une période dont l’origine et la fin seraient marquées par ua phénomène aussi vague que les levers héliaques de Sirius. Si l'on veut supposer qu'à une époque quelconque , les prêtres d'Égypte ont effectivement déterminé la date absolue d'un de ces levers dans l’année de 365 jours, et qu'ils ont fixé la réalisation de cette concordance entre des limites d'incertitude de quatre ou de huit années, ce qui répond à un ou deux jours d'erreur sur la date annuelle, ils n’ont pu Y parvenir qu'au moyen d’un système d'observations suivies avec continuité pendant plusieurs siècles, et combinées par une méthode de concours, pareille ou analogue à celle que D'ASTRONOMIE ANCIENNE. 105 je viens d'exposer. Mais une si grande recherche de préci- sion n'est jamais entrée dans les idées des peuples primitifs, __ bornés aux approximations pratiques , suffisantes pour les …._ besoins du moment. La méthode de concours qu'une telle dé- _termination exige pour éteindre les incertitudes des observa- . tions partielles, ne peut être suggérée que par les exigences à théoriques. Cette méthode est même toute moderne , car on .nen voit aucune trace, même dans Ptolémée. Si les prêtres ég y püens avaient été assez habiles pour la concevoir et la pra- quer, il n’y a aucune détermination astronomique, faite avec yeux, dont il ne fallût les croire capables. Ce serait exa- rer beaucoup trop le degré de science et d'esprit mathé- atique qu’on peut raisonnablement leur attribuer. Mais il a été autrement, si l’on suppose la notion des thots hé- aques établie quand leur année usuelle n'avait que 360 jours; car, non-seulement cette concordance se reproduisait alors beaucoup plus souvent, mais en outre elle était infiniment plus aisée à reconnaître, puisqu'on ne pouvait pas se tromper d'une seule année pareille sur chaque époque où elle s’opé- ait. En effet, admettons, comme précédemment, que le phé- omène soit saisissable dans une limite de trois jours. Son ngement de date, d’une année à une autre, étant alors de » 11 dépassait de beaucoup l'incertitude d’une observation lée. Ainsi, son passage par le 1° de thot se voyait dans née même où il s’opérait, puisqu'il devançait le 1% thot de 5i< dans l’année précédente, et retardait d'autant sur le : thot de l’année qui suivait. On pouvait done immédia- ent signaler l'année de concordance, sans prévision, sans cul, par le seul secours actuel des yeux. Rien n’était alors naturel que de signaler des retours si évidents, et d’une XX. 14 106 SUR DIVERS POINTS application si fréquente. Au lieu que, pour les fixer avec la même certitude dans les années de 365 jours, où leur varia- tion est 21 fois plus lente, il n'aurait fallu pas moins que toutes les combinaisons physiques et scientifiques exposées plus haut. Cela suffirait, je pense, indépendamment de toute autre induction , pour montrer que l'association symbolique d'Isis Thot avec Sirius a dù être établie quand l’année égyp- tienne se composait de 360 jours. L’opportunité occasion- nelle, et la facilité de l'application, n’ont eu lieu qu'alors. C'est alors également qu'elle était commune à tout le pays. En effet, la date vague du lever, changeant alors annuelle- ment de 51: pour un même lieu, l’année reconnue héliaque , à Thèbes ou à Memphis, l'était aussi dans toute l'étendue de l'Égypte alors habitée (1). Après que l’année de 365 jours fut adoptée, les époques des thots héliaques devinrent beaucoup plus rares et plus distantes. Cela put aussitôt se prévoir, sans aucun calcul, par la lenteur du déplacement des levers dans cette nouvelle forme d'année. Lorsqu'il devint évident que ce phénomène (x) Selon les hypothèses de Ptolémée, lorsque le lever heéliaque de Sirius avait lieu mathématiquement, un certain jour, à Syène, il s'opérait six jours plus tard dans la basse Égypte, un peu au sud d’Alexandrie. Met- tons cinq jours de différence entre Syène et la partie méridionale du Delta, habitée dans les anciens temps. Alors, l’année étant de trois cent soixante jours, quand le lever héliaque s'opérait pour cette limite boréale de l'Égypte le premier jour de thot, il s’opérait à Syène le 26 mésori; et le thot devenait mathématiquement héliaque l'année suivante. Ainsi, lorsqu'il était tel dans la région moyenne, à Thèbes ou à Memphis, on pouvait le con- sidérer comme tel aux deux extrémités, puisque la différence des époquesne changeait point l’année où la concordance avait lieu le plus sensiblement. D'ASTRONOMIE ANCIENNE. 107 retardait progressivement dans la série des mois, de manière à devoir rejoindre un jour le 1° thot, les prêtres égyptiens durent naturellement mettre beaucoup d'intérêt à saisir la première de ces concordances nouvelles, quand elle se réali- serait; et ils eurent tout le temps nécessaire pour s'y prépa- k; ver. En effet, lorsque leur calendrier vague reçut sa forme n note (1). La distance du thot qui suivait était donc de 14jours, en tenant compte des épagomènes ; de sortequ'il ne Drantles années Rae 1325, — 1321. Ce nouveau con- cours, si longtemps attendu , put donc être alors signalé, soit . approximativement par l’observation actuelle, soit plus exac- tement entre des limites d'incertitude d’une ou deux an- nées, si les LE s'étaient préparés d'avance à le saisir avec lice degré de précision par le concours d’observations faites antérieurement, pour ce but, pendant un ou deux siècles , omme je l'ai tout à l'heure expliqué. On trouvera sans doute difficile qu’ils eussent acquis déjà tant d’habileté théo- ique, et un sentiment si abstrait de précision. Je le crois si; mais la juste conclusion à tirer de ce doute serait qu’en emarquant l’époque, longtemps attendue, qui ramenait, pour première fois, le lever héliaque de Sirius au premier jour de ir année définitive, comme ils ont dü le faire, puisque ce etour était lié à leurs rites religieux dans l’ancienne forme du 1) Voyez à la fin du mémoire, la note 5. 14. 108 SUR DIVERS POINTS calendrier, ils n’ont probablement pas prétendu la fixer avec la rigueur mathématique admise par beaucoup d'érudits non astronomes, et que supposerait la règle de Théon, si l'on acceptait comme telle lorigine chronologique qu'il lui donne. Ce soupçon, d’ailleurs si naturel, est confirme par l’ac- cord même, l'accord exact, que la date finale, déduite de cette règle, se trouve avoir avec le résultat théorique conclu des hypothèses de Ptolémée. Car il serait comme impossible qu'une date initiale, réellement établie par observation, y fût si parfaitement conforme ; au lieu que cela devient une néces- sité numérique, si cette date dérive, par un calcul rétro- grade, de la date finale calculée théoriquement. À considérer seulementlephénomèneen lui-même,avecsonindétermination excessive, et la lenteur de son déplacement dans l’année de 365 jours, on ne saurait admettre que les Égyptiens, qui l’observaient pratiquement, auraient pu avoir l'idée de le prendre pour origine d'une computation chronographique , eux qui prétendaient compter les règnes de leurs rois en ans, mois et jours; lorsque tant d’autres procédés que j'ai dé- crits, et la seule contemplation des pyramides, leur fournis- saient des moyens infiniment plus simples pour fixer des époques absolues de temps, avec une incertitude moindre qu'un jour, s'ils en avaient conçu le dessein ou senti la néces- sité. Si donc il est vrai qu'Eudoxe, à son retour d'Égypte, proposa aux Grecs, comme Pline le rapporte, une période quadriennale intercalée, ayant son origine au lever héliaque de Sirius, on doit, pour ne pas lui faire tort, supposer qu'il la présentait, non pour mesure du temps, mais dans une vue d'application astrologique ou météorologique, adaptée aux usages populaires; ce qui est confirmé par les propriétés qu'il D'ASTRONOMIE ANCIENNE. 109 Jui attribuait de ramener, dans le même ordre, la succession des vents et des autres accidents atmosphériques, ventorum tempestatumque vices. En effet, quel emploi chronologique aurait-on pu faire d’une période quadriennale, dont le com- — mencement et la fin étaient à peine assignables à trois ou uatre jours près ? Ou comment se figurer qu’un géomètre , . tel qu'était Eudoxe, lui aurait attribué un pareil emploi ? is 1l peut très-bien l'avoir reçue des Égyptiens, avec son “application hypothétique aux accidents de l’atmosphère ou “aux spéculations astrologiques ; car le lever héliaque de Sirius est présenté sous ce point de vue de son influence do- inatrice, par tous les astrologues postérieurs. Je placeraï ici deux remarques, qui naissent immédiatement “intervertir ou méconnaître les filiations d'idées les plus natu- -relles. On a dit souvent que les retours des levers héliaques de Sirius ont dû suggérer aux anciens Égyptiens la période solaire infiniment plus facile à déterminer directement, et que son j rapport numérique avec les retours des levers héliaques est purement accidentel. Maintenant je vais plus loin, et je dis e la connaissance des deux périodes a dù apprendre aux yptiens, bien avant le temps d'Hipparque, que la véritable “durée de l’année solaire est moindre que 3657, sans qu'ils ussent toutefois apprécier exactement de combien elle en “différait. En effet, quand deux phénomènes physiques ont -une même période, ils s'accordent constamment dans leurs retours ; et si l'on voit qu'ils s’écartent progressivement l’un l'autre, l'inégalité de leurs périodes individuelles se mani- 110 SUR DIVERS POINTS feste par cet écart même. Or, une antique tradition, qui a toujours subsisté chez les Égyptiens, constatait que le lever héliaque de Sirius avait coïncidé autrefois avec le commen- cement de la crue du Nil, invariablement fixé par la nature au solstice d'été; ce qu'ils n'avaient pu manquer de recon- naître par la constance annuelle d’un phénomène si impor- tant pour eux. Déjà, en — 1780, l'accroissement du fleuve devançait notablement l'apparition de l'étoile, puisque le lever héliaque de Sirius était postérieur de 11 jours au sols- tice d'été; et il n’a fait depuis que s’en écarter davantage dans le même sens, puisque le retard s'élevait à 23 jours, en — 275, sous les Ptolémées. Le progrès de ce déplacement ne pouvait donc pas être méconnu. Alors les levers de l'étoile étant toujours revenus plus tard que le solstice pendant tout ce long intervalle de temps, la période de 3651, qui les ra- menait, était évidemment plus longue que la période solaire. Ptolémée n'indique pas ce rapprochement si simple. I se borne à admettre, d’après Hipparque, que la durée de l’année solaire est un peu moindre que 365}, sans qu'on puisse assigner la valeur exacte de la différence; et il la porte approximativement à -— de jour, comme Hipparque l'avait conclue des solstices d’Aristarque , comparés à ceux qu'il avait lui-même observés. Un équinoxe, ou un solstice, qui aurait été déterminé très-anciennement par les Égyp- tiens à un ou deux jours près, comme cela leur était déjà facile lors de l'érection des pyramides, aurait donné une évaluation beaucoup plus certaine de cet élément , si l’épo- que de l'observation avait pu être rattachée au temps de Ptolémée par une énumération continue d'années et de jours. Mais nous avons vu combien il est peu probable D'ASTRONOMIE ANCIENNE. IIT qu'une telle continuité ait pu être prolongée si tard. Cela se confirme encore, en renversant l'argument, par l'incertitude même de Ptolémée ou d'Hipparque sur la valeur de la diffé- rence dont il s’agit. Car, si les Égyptiens avaient eu la trans- Mission continue d'anciennes observations de solstices et d'équinoxes qui leur étaient si faciles, l'erreur de la période ; solaire de 365i ;, et la mesure de cette erreur, se seraient luropéens lorsque nous avons senti le besoin de la réforme srégorienne ; ce que Ptolémée n'aurait pas ignoré. Et plus on voudrait faire remonter haut, en Égypte , l'adoption is continument les phases solaires, en leur appliquant lin- tervalle inexact de 3651 =, plus ce raisonnement aurait de , l'erreur de cette FAI dépassant bientôt les D ecsir des levers héliaques de Sirius sur le solstice, - comme une preuve matérielle de la brièveté relative de nnée solaire, comparativement à la période de 3651=. Lais peut-être ne supposait-il pas la tradition de cette der- 112 SUR DIVERS POINTS contre encore aujourd'hui dans certains esprits, et il est fondé sur les mêmes causes. Je reviens à Théon: et, lui concédant, par supposition, son ère de Ménophrès, correspondante au 19 ou 20 juillet — 1322, qu'elle soit ainsi appelée du nom d’une ville, ou d’un nom d'homme, j'examine comment il en conclut l’époque annuelle du lever héliaque, dans une année vague quelconque, posté- rieure à celle-là. Il le fait en rattachant l’année assignée à la première de l'ère, par une énumération continue, qui s'étend jusqu'à la fin de l'ère d'Auguste; puis, placant d’abord le lever au premier jour de thot, à cette ancienne origine, il augmente progressivement sa date d’un jour pour quatre ans vagues, jusqu'à ce qu'il arrive à l’année qu'il veut atteindre. Cela le conduit finalement à la même date de jour que donne- rait le calcul direct, établi sur les hypothèses de Ptolémée pour le parallèle de Memphis; résultat qu’il transporte ensuite à tout autre parallèle, en y faisant les corrections nécessai- res (1). Déjà ceci présente un accord fort suspect entre ces hypothèses et les circonstances physiques de la détermination primitive, si l’on voulait la supposer déduite de l'observation. Mais ce qui doit paraître non moins surprenant, et aussi diffi- cile à croire, c'est qu'il fût possible, au temps de Théon, d'établir pour l'Égypte la continuité d’une numération pa- reille, en ans, mois et jours, depuis 574 ans vagues au delà de l'ère de Nabonassar, époque où son Ménophrès remonte; et qu'en outre un canon chronologique aussi étendu, qui aurait été inconnu à Ptolémée, eût été construit uniquement pour (1) Voyez à la fin du mémoire, la note 2. D’ASTRONOMIE ANCIENNE. 113 Rp la succession des levers héliaques de Sirius, sans qu'on y eût rattaché aucun autre fait OnCnIQUE ou his- torique. On ne peut voir là, raisonnablement, qu'un procédé _decalcul arithmétique, Mae à celui que ce même Théon em- , ploie dans les tables manuelles, pour transporter une date lexandrine fixe, dans l’année vague de 365 jours. Mais ici Pemploi en est d'autant plus singulier, qu'il était parfaitement tile ; car Théon pouvait tout simplement dire, comme Puce, que le lever héliaque de Sirius, à Men plie reste … attaché à une même date de jour, le 26 ue , dans l’année alexandrine , fixée Depuis la cinquième année d’Auguste ; et qu'à partir de cette époque, il rétrograde d’un jour tous les quatre ans dans les années égyptiennes vagues, antérieures à . la fixation. Cela eût donné les mêmes résultats que sa règle, ans qu'il y eüt aucune nécessité d'introduire son Ménophres, “application aurait été beaucoup plus simple; et cet énoncé se présentait avec évidence, après les calculs de Ptolémée. Il y a donc lieu de suspecter que la formule de dérivation, em- ployée par Théon, tenait à quelque pratique adoptée plus ou moins récemment en Égypte pour exprimer le déplacement du lever héliaque de Sirius, dans l’année égyptienne vague. Or, une occasion très-naturelle de rattacher fictivement ce 1énomène à son ancienne concordance avec le thot vague, offrit lorsque l’accomplissement de cette période se trouva incider avec l’avénement du premier Antonin. Suivons les nséquences de cette idée, déjà émise par Dodwell dans ses hssertationes Dot Porphyre et Solin s'accordent à dire que les prêtres égyptiens de leur temps attachaient au ver héliaque de Sirius une application astrologique et re- ligieuse. Ils le considéraient comme ayant présidé à la nais- DIX 5. 114 SUR DIVERS POINTS sance du monde. La concordance de ce phénomène avec le premier jour de l'année vague, consacrée dans le symbolisme de la religion, constituait, selon eux, des époques de rénova- tion universelle, dont la période, embrassant 1461 années vagues, formait une grande année divine propre à l'Égypte, 5 @eoÿ énavro, comme dit Censorin. Une de ces époques, longtemps attendue, se réalisait au temps d'Antonin, et elle s’offrait avec l'opportunité la plus favorable pour l'appliquer, comme un hommage, à son avénement. En effet, d'après les calculs modernes, le thot commença de se montrer héliaque à Alexandrie vers l’an 125 de l’ère chrétienne, l’an X° d’'A- drien. Mais Alexandrie, ville récente, fondée par un conqué- rant étranger, ne se rattachait pas aux souvenirs religieux de l’ancienne Égypte. D'ailleurs, cette époque tombait en plein cours du règne; et lorsque la concordance s'établit pour l'intérieur de l'Égypte, quelques années plus tard, il n'y aurait rien eu d’agréable, pour Adrien vieillissant, à lui rappeler ce pays où il avait perdu son favori Antinoüs. Mais, suivant les calculs qu'on pouvait aisément faire alors, le premier jour de thot devint mathématiquement héliaque à Memphis vers le 20 juillet de l'an 138, justement dix jours après l'accession d’Antonin à l'empire. Les prêtres pouvaient aisément le savoir, soit par la théorie des levers simultanés d'Hipparque, soit par leurs rapports avec le grand astro- nome d'Alexandrie, sans s'embarrasser de fixer ce phénomène par l'observation, qui aurait bien pu ne pas leur donner une date si exactement concordante avec leurs intérêts. Ils eurent donc toute liberté de le placer, suivant leur convenance, au commencement effectif du nouveau règne, c’est-à-dire, au premier thot de la deuxième année égyptienne d’Antonin, et de présenter cette époque comme l’accomplissement, ou D’ASTRONOMIE ANCIENNE. 115 le renouvellement, du grand cycle qui présageait au monde de nouvelles destinées. Enfin, pour remonter de là à la con- cordance antérieure qui devait lui servir d’origine, ils n’eu- rent qu'à faire reculer la date finale de 1461 années vagues, ' ‘en rétrogradant d'un jour pour quatre années, et placer à | cette origine leur Ménophrès; soit qu'ils aient voulu attribuer . cette désignation à un ancien roi égyptien, ou senlement ex- mer ainsi que cette ère était propre à la ville sacrée de mphis, dont le mot Ménophrès reproduit en grec le nom L onétique sacerdotal. Voilà l'histoire la plus simple et la s vraisemblable de cette fameuse période sothiaque, tant lébrée par les astrologues, qui fut aussi employée à quel- ‘ques indications vagues d'époques par des écrivains posté- rieurs, trop peu préservés des mêmes préjugés pour aperce- oir son véritable caractère, et que des érudits modernes de 11. ls n'apercevaient pas assez l'incertitude pratique. Ce n'est, selon toute vraisemblance, que l'expression d'une ancienne reuse, dont Deibe numérique a été déduite, au eu A denotre ère, des théories astronomiques, par un calcul trograde, pour lui donner l'apparence d’une détermination iennement obtenue. Je vois dans le dernier cahier du urnal des Savants, pour décembre 1844, que M. Letronne arrivé à une conclusion analogue par des considéra- ions qu'il n'a pas développées, mais qui doivent probable- ‘ment s’accorder en certains points avec celles que j'ai expo- es ici, et en différer dans d’autres. Si j'ai entrepris de traiter He 116 SUR DIVERS POINTS cette question de critique, c'est moins pour l'importance de la période sothiaque elle-même, dont l'antiquité m'avait semblé depuis longtemps suspecte (1), que pour établir net- tement, et complétement, les idées que la pratique de l’as- tronomie m'a suggérées sur la nature des connaissances as- tronomiques que l’on peut attribuer avec vraisemblance aux anciens Égyptiens ; puis aussi, pour montrer comment on peut espérer de retrouver, dans leurs antiques monuments, des indices d’où l’on déduirait des dates absolues. Je ne me dissimule pas les oppositions et les doutes que ce mode nou- veau et inusité de détermination pourra exciter chez les per- sonnes dont l’érudition est habituée à reconstituer la chro- nologie ancienne par les seules données exprimées dans des textes écrits. Mais l'antiquité figurée des Égyptiens m'a paru pouvoir se prêter à d’autres considérations; et, du moins, je suis assuré que les concordances numériques auxquelles je propose d’avoir recours, lorsqu'on en voudra chercher les éléments, sont conformes aux règles pratiques , ainsi que théoriques, de l'astronomie la plus exacte. Je suis persuadé qu'un jour viendra où l’on reconnaitra que cette voie est la plus féconde, peut-être la seule qui nous reste, pour rétablir quelques jalons assurés dans l’ancienne chronologie égyp- tienne; et cette espérance m'a déterminé à la signaler, malgré les défiances que sa nouveauté pourra faire naître. Puissé-je l'avoir montrée assez tôt pour que l'invasion barbare de l'in- dustrie moderne, dans l'antique Égypte, n'ait pas encore achevé de détruire tous les monuments sur lesquels on pour- rait retrouver de si précieuses indications! (1) Recherches sur l'année vague des Égyptiens, Mémoires de l'Académie des sciences, t. XIIL, p. 61 et suivantes D'ASTRONOMIE ANCIENNE. 101 our épargner au lecteur la peine de chercher les formules qu'exige la olution de ce problème, je lui en présenterai d’abord ici l’ensemble et le e d'application. . Ptolémée donne la position de l'étoile en longitude et latitude, pour la 1°° née égyptienne d'Antonin, la 885° de Nabonassar. Il faut d’abord réduire premier de ces éléments à l’époque pour laquelle on veut faire le calcul , en y appliquant la précession constante de 36” par année, qui est celle qu'il “adopte. Soit / la longitude ainsi obtenue. Ptolémée suppose les latitudes des » toiles constantes. Je désigne celle qu'il assigne à Sirius par À. La première chose à faire, c'est de convertir ces éléments en ascension droite a, et en éclinaison d, avec la valeur © — 23°.51'.20" qu'il attribue à l’obliquité de cliptique, d’après Hipparque. On obtiendra directement a et d par les for- iles suivantes : sin d — sin & cos À sin / + cos w sin à, — tang À sin © + sin / cos © QG = ——_— 2 —— cos l on devra trouver, pour vérification du calcul numérique, cos } cos / CON cos d ns ces expressions, les longitudes / sont comptées d’occident en orient; de o° à 360° sans interruption. Les latitudes X sont considérées comme ves au nord de l'équateur, comme négatives au sud. 11 faut donc 118 SUR DIVERS POINTS les valeurs de sin d, tang a, cos a, que les formules donnent, doivent être interprétées de la même manière. C'est-à-dire que les ascensions droites a se comptent d'occident en orient, et de 0° à 360° ; les déclinaisons d, positi- vement au nord de l'équateur, négativement au sud. En observant ces règles, on n’aura jamais d'incertitude sur l'évaluation de ces quantités. Quand on les aura obtenues, la solution du problème s'achèvera par les figures 1 et 2. Dans ces figures, MVN représente le cercle de l'horizon, MZN le méri- dien , Z le zénith , P le pôle élevé. MN est la ligne méridienne, et O le centre de la sphère céleste, décrite autour de l'œil de l'observateur. Ainsi, l'angle PON est la hauteur du pôle, ou la latitude géographique du lieu pour lequel on veut faire le calcul. Je la désignerai par 4, E est l'équinoxe vernal, EQ le cercle de l'équateur, EL le cercle de l’écliptique , s'éten- dant de ce point vers Q et L, dans le sens des ascensions droites et des longitudes. S est l'étoile paraissant à l'horizon oriental, et représentée dans la fig. 1 comme étant au sud de l'équateur, dans la fig. 2 comme étant au nord. L'alternative est décidée par le signe de d. S' est le centre du soleil, situé au-dessous de l'horizon, dans l'arc de dépression vertical VS’, tel que l'étoile puisse être perceptible en S à l'horizon même. Ptolémée fait cet arc VS’ d'environ 11° pour Sirius. Le problème consiste à chercher quel doit être l'arc de longitude ES’ pour cette condition d'abaissement du points’, lorsque l'étoile S est à l'horizon. Car ES’ étant connu, il ne restera qu'à chercher l'époque de l'année à laquelle le soleil atteint cette longitude, ce qui se trouvera par les tables du mouvement de cet astre ; et cette époque sera celle du lever héliaque de l'étoile S, dans l'hypothèse de visibilité adoptée. Le caleul est le même dans les deux figures, sauf une seule différence de signe que j'indiquerai tout à l'heure. En conséquence, je prendrai pour type de raisonnement la fig. 1, qui s'applique à la position australe de Sirius, que nous voulons spécialement considérer. Du pôle P menez à l'étoile le cercle de déclinaison PAS, qui sera perpen- diculaire à l'équateur en A. Les déterminations précédentes ont fait con- naître l'arc EA , ascension droite de l'étoile, etsa déclinaison AS. La première est exprimée par a, la seconde par — d. En outre, EAQ étant l'équateur, l'angle dièdre EQM est l’inclinaison de ce plan sur l'horizon, vers le midi, ou sa hauteur sur l'horizon du lieu, laquelle est le complément de la hauteur du pôle. Ainsi, l'angle EQM ou AQS a pour valeur go° — A. Cela D'ASTRONOMIE ANCIENNE. | 119 1 reconnu, considérez le triangle sphérique A$Q. Il est rectangle en A. De plus, on y connaît l'arc AS, qui est ici — d, puisque la figure représente . l'astre S comme étant au sud de l'équateur. Enfin, on y connaît aussi l'angle _ en Q, qui est go° — k. On peut donc, avec ces données, calculer l'arc AQ r la formule exposée dans la Géometrie de Legendre, pour le 4° cas des gles sphériques rectangles; et l'on en déduira : tang SA tang A AUS % lors, en remplacant ee lignes he par leurs valeurs tout à l'heure sin AQ — sin AQ — — tang d'tang . rsqu'on appliquera cette formule à un astre situé physiquement au sud l'équateur, comme le suppose la fig. 1 qui nous sert de type, d devra y être employé, dans le calcul numérique, avec sa valeur négative. Cela donnera alors AQ positif, comme, en effet, il doit l'être d'après cette fi- e. Mais si l’astre est situé au nord de l'équateur, il faudra employer la eur de d comme positive. Cela donnera alors AQ négatif, par consé- quent soustractif de EA, comme le représente la fig. 2. LL arc ER étant connu pre cette Riez on F EE PU à ‘elle à l'horizon oriental. Si l'on avait opéré sur la fig. 2, qui convient aux étoiles boréales , on it eu de même toutes les données nécessaires pour calculer l'arc AQ. ais cet arc obtenu, il faudrait le retrancher de l'ascension droite EA ou a, * avoir l'arc EQ de l'équateur, dont l'extrémité se lève avec l'étoile. mment pour valeur 90° + À. Enfin, on connaît l'angle en E, qui est iquité de l’écliptique que nous avons appelée ©. La résolution du triangle L rentrera dans le 4° cas des triangles sphériques obliquangles, et l'on en 120 SUR DIVERS POINTS déduira : Mn A sin & __ coso sin © tang # tang EL tang EQ sinEQtangEQL tang EQ snEQ ? cos ELQ — cos EQ sin w sin EQL — cos w cos EQL = cos EQ sin © cos À + cos © sin 4. Quand on aura trouvé ainsi l'arc EL et l’angle ELQ , on fera sagement d'en vérifier les valeurs numériques, en appliquant au triangle ELQ la con- | dition de proportionnalité des sinus des angles sphériques aux sinus des côtés opposés, ce qui donnera sin EQ sin EQL sin EQ cos sin ELQ sin ELQ Cette expression, qui emploie comme donnée l’arc EQ, et l'angle ELQ sin EL — obtenu par la deuxième formule, devra fournir la même valeur de l'arc EL que la première, si l’on a opéré exactement. L'angle ELQ est égal à son opposé S'LV. Considérez le triangle S'LV : l'angle en V est droit, puisque l'arc SVS’ est supposé vertical. Si, de plus, on se donne l'arc de dépression VS’, que l’on suppose être juste assez grand pour permettre d'apercevoir l'étoile en S, on pourra, d'après ces données, calculer l’hypoténuse LS’, par la proportionnalité générale des sinus des angles sphériques aux sinus des côtés opposés. Cela donnera : sin VS’ Connaissant LS’, on l'ajoutera à l'arc EL déjà calculé , et l'on aura : ES' — EL + LS". ES’ est la longitude que doit avoir le soleil à l’époque du lever héliaque de l'étoile S. Il ne restera plus qu’à chercher, par les tables des mouvements du soleil, sin LS’ — à quel temps de l’année il atteint cette longitude. Supposez, au contraire, qu'on se donne l’époque du phénomène dans l'année solaire , et qu'on demande si l'étoile se lève alors héliaquement. Par l’époque, on connaîtra la longitude ES’ du soleil: retranchant EL, déjà calculé, on aura la valeur de LS’ pour ce temps-là. Alors on renver- sera l'équation qui tout à l'heure nous donnait LS’, et l’on en tirera : sin VS'— sin LS’ sin ELQ. VS’ sera l’abaissement actuel du soleil sous l'horizon du lieu , lorsque D'ASTRONOMIE ANCIENNE. 121 la valeur obtenue pour VS’ est moindre que celle qui est nécessaire pour que l'étoile devienne perceptible à l'horizon, il faudra attendre que l'ac- | croïissement progressif de la longitude ait augmenté l’abaissement du soleil au moment où elle se lève ; et le lever héliaque n’aura pas encore eu lieu. au contraire VS’ surpasse cette limite, l'étoile aura été visible à l'hori- _zon quelques jours auparavant, quand il était moindre ; et, en conséquence, PREMIÈRE APPLICATION. alcul des conditions héliaques de Sirius à Memphis, au premier jour de Thot - de l’an 886° de Nabonassar, le 2° d'Antonin, 20 juillet 438 de l’ère chré- tienne, à 4 heures du matin , d’après les données de Ptolémée. ÿ . Le catalogue de Ptolémée donne les longitudes etles latitudes des étoiles “au 1 jour de thot de la 1" année d’Antonin ( 4{/mageste, lib. VII, cap. ns IV, ad finem). J'ajoute donc 36” à la longitude qu'il assigne à Sirius dans ce catalogue; et j'ai ainsi, pour l'époque que nous voulons consi- dérer : Longitude de Sirius / — 77°.40'.36"; latitude......... A— — 39°.10'. 0” (australe). … De là, avec l’obliquité 6 — 23°.51. 20" qu'il adopte, je tire, par les ules exposées plus haut, l’ascension droite. a — 804.160" 12345; la déclinaison.... d— — 1°.44.27" (australe). D Je prends ensuite, dans sa géographie, la latitude géographique qu'il as- à Memphis. Cette latitude, égale à la hauteur du pôle, donne : : 1 R==E9% 1500: Il n'est pas inutile de remarquer que tous les manuscrits s'accordent pour Jes valeurs attribuées ici à /et à À ; comme aussi le catalogue des positions NX 16 122 SUR DIVERS, POINTS géographiques qui se trouve dans le commentaire de Théon reproduit la même valeur de À pour Memphis. En appliquant à ces données les formules expliquées ci-dessus, et rai- sonnant sur la figure 1°, qui convient aux étoiles australes, je trouve d'a- bord la valeur de l’arc AQ égale à 9°. 18". 7”. Alors, en l’ajoutant à l’as- cension droite a, j'en déduis les résultats suivants : Ascension droite du point orient de l’équateur qui se lève avec Sirius, ... EQ—890.24".9" Longitude du point orient de l’écliptique qui se lève aussi avec Sirius... . EL = 90° +-120.32".21 Inclinaison de l'écliptique sur l'horizon de Memphis à ce point oriental... ELQ— 62°.42.3". Je cherche maintenant la longitude vraie du soleil à ce même jour de thot, à 4 heures du matin, c’est-à-dire à 16 heures, parce. que Ptolémée commence le jour à midi. J'effectue ce calcul avec ses tables du soleil, par les méthodes qu'il expose, lib. LIL, cap. V (ad finem). L'époque de ces tables est le 1‘ thot de l’an 1° de Nabonassar, à midi. Il faut donc d’abord prendre le mouvement moyen pour 885 ans vagues complets, plus 16 heures, et y appliquer l'équation de l'orbite, ou la prostraphérèse corres- pondante à l’anomalie moyenne ainsi obtenue. Voici le détail des opéra- tions : Mouvement moyen pour 810 ans vagues, ,,....,.... 163°. 4.12".15" TAeI= ee CES EL sus 342.29. 42.25 TN Ent e ee see AN TU D EAU E DANS ME Erin de | 220 OAI 359.45. 24 .45 0.39. 25 .3r Somme... efeee mes 2080020 10445208 D'où retranchant 4 cire....... 1440° On a le mouvement moyen de l'an 1° de Nabonassar, .... …. mt 145°.29. 34".26" Valeur de l'anomalie moyenne à l'époque des Tables, ...., BE 0 265 .15 Somme. ...., FO 410°.44. 34" De là retranchant 1 circonférence, il reste l'anomalie moyenne. A— 50°.44'. 340 J'ajoute la longitude de l'apogée que Ptolémée suppose fixe... 65°.30' La somme est la longitude moyenne à l'instant proposé... .…. 2167.14 ,34" ÿ Prostraphérèse pour l'anomalie À calculée par ses tables (soustr.). —1°.47. 34" Ce qui donne la longitude vraie à l'instant proposé, ,.....,... L— 11427. © D'ASTRONOMIE ANCIENNE. 123 Alors, pour savoir si ce thot de l’an 2° d'Antonin est héliaque, je fais le calcul suivant sur la fig. 1 : Longitude vraie du soleil ce même jour de thot à 4h du matin ou 16",.,., ES — 90°+240.27". o! - Longit: du point Lde l'écliptique qui se lève avec Sirius, à ce mémeinstant, EL — go°+120.32',21" . Différence, orivaleur dell'arc LS RE sers es das dleeutre ee RUES" 110.54.39" us avons trouvé ci-dessus la valeur de l'angle ELQ, ou de son opposé, … VLS— 62°.42'. 3" . Ayec ces deux dernières données, je calcule l'angle de dépression corres- dant du soleil par la formule, sin VS'— sin LS’ sin VLS', e St . ai = 4 heures du matin, ou 16 heures à Memphis : 1 MSP—=\xo17 347200. hot de l'an 2° d’Antonin a été héliaque à Memphis, selon ses hypo- hèses. En répétant le même calcul pour le 1‘ Thot de l’année précédente PE tonin, je trouve A VS’ — 10°.46/.54" ; ; lonc, augmentation de VS/ pour 1 année de rétrogradation + 12’. 49". . Raisonnant donc par proportionnalité pour les années immédiatement antérieures et postérieures, on aura : Date Julienne correspondante. l'an 844 de Nabonassar, la dernière d’Adrien, .. . VS'—10°,59.43" 20 juillet de l'année 136. -...... Ja premiére d'Antonin... VWS—10°.46.54" 20 juillet, .. ..... 137. Van 886,.,....,,,.., la deuxième d'Antonin, .. VS—10°.34. 5” 20 juillet, . ur l'an 887..............la troisième d’Antonin... VS—10°,21'16" ojuillet......,... 139. Le Aucune de ces valeurs ne sort des limites d’environ 11°, adoptées par Pto- e pour l'arc de visibilité de Sirius. Ainsi, ces quatre thots ont été siquement héliaques à Memphis, selon ses hypothèses ; et les prêtres ient pu prendre un quelconque d’entre eux pour la limite terminale de ériode sothiaque qu'ils voulaient établir. Mais, d’après la marche que vent ici les valeurs de dépression VS’, on voit que le choix était limité S quatre années, du moins dans les conditions de calcul que Ptolémée 4 16. 124 SUR DIVERS POINTS avait admises. Car, antérieurement à l'an 884, au 1° jour de Thot, à 4 heures du matin, l’abaissement du soleil sous l'horizon de Memphis , au moment du lever de l'étoile, aurait excédé la limite de r1°, où l'étoile commence à être perceptible par hypothèse. Ainsi l’on aurait pu la voir avant le 1" de thot. Au contraire, après l'an 887, au 1° de thot, à la même heure, l'arc d'abaissement du soleil aurait été trop petit pour que l’on pût l’apercevoir à son lever dansles mêmes suppositions; de sorte qu'il aurait fallu attendre que le soleil eût prolongé sa marche en longitude pour qu'elle devint théo- riquement perceptible. Nous allons maintenant chercher quelle amplitude d'erreur Ptolémée aurait trouvée à la période de 365'+, s’il avait voulu essayer de déterminer par ses tables du soleil, et sa précession de 36”, la date annuelle du lever héliaque de Sirius, pour une époque antérieure de 1461 années vagues à la 2° d'Antonin. DEUXIÈME APPLICATION. Calcul des conditions héliaques de Sirius à Memphis, au premier jour de thot antérieur de 4464 années vagues à la 2° d’Antonin, 20 juillet — 1525 chro- nologique, à 4 heures du matin, d’après les données de Ptolémée. L'époque que nous voulons ici considérer est antérieure de 1460 ans vagues à la 1° année d’Antonin, pour laquelle Ptolémée a construit son catalogue d'étoiles. Ainsi, pour avoir la longitude de Sirius à cette époque ancienne, il faut, de la longitude 77°.40'.0", qu'il assigne à cette étoile, re- trancher la précession pour 1460 années vagues, c’est-à-dire 14°,6 ou 14°.36 .0",puisqu'ilsuppose la précession d’un degré, pour cent deces mêmes années. Il faut, en outre, conserver la même latitude, puisqu'il suppose cet élément invariable. On aura donc, selon lui, à l’époque ici considérée : Longitude de Sirius...... / — GRATOS aDtude een eece eee A— NO) TD IO australes Li D'ASTRONOMIE ANCIENNE. 125 ‘à - … De là, avec l’obliquité © — 23° . 51’. 20" qu'il suppose constante , je _tire, par les formules exposées plus haut lu ‘ . J 02 12 EU l'ascension droite.. a = 68°.24'.49", | FR j | la déclinaison. .... d — — 17°.20'. 30" (australe). Re … Ges ‘Te sont PRES comme en pourra jee en LISE comparant br est trop forte de 3°. 36. 22" ni déclinaison trop A !.4". Mais on verra que ces de sont en partie com- L'étoile étant australe, je raisonne sur la figure 1". Les formules que jus avons établies me donnent d’abord l'arc AQ — 10°. 18'.58". Je oute à l'ascension droite &, et j'obtiens les résultats suivants : cension droite du point orient de l'équateur qui se lève avec Sirius. ,,..... . EQ—780.43.47" itude du point orient de l’écliptique qui se lève anssi avec Sirius. ...,... ÆEL—93°. 6.16" ison de l’écliptique sur l'horizon de Memphis, à ce point oriental, , .. ... . ELQ — 58°.25.47" res du matin, où, + 16 heures, Ptolémée commençant le jour à ï, Pour cela , il faut d’abord transporter cette date au delà de l’ère de L] (1) J'ai d’abord calculé, par les formules de la Mécanique céleste, les valeurs exactes de la précession * je leur ai appliqué la méthode directe de CHAN que j'ai exposée dans mon Astronomie, et que e Modnite dans mes Recherches sur plusieurs points de l’astronomie égyptienne, note IV, page trouvé ainsi pour le 1° janvier —1323, date chronologique, les résultats suivants : (scersion droite vraie de Sirius a—64°.48.27". Déclinaison d— — 18°.53.34 (australe). üction de ces éléments au 20 juillet de la même aunée n'y apporterait pas de changements bles pour la comparaison que nous voulons établir. 126 SUR DIVERS POINTS Nabonassar , qui est l'époque des tables dont il s'agit, pour savoir combien elle en est distante. Or rien n’est plus facile. En effet, le 1° Thot de l'an 2° d’Antonin ouvre la 886° année de Nabonassar. Ainsi : Depuis l'ère jusqu’à ce thot, il ÿ a un nombre révolu d'années vagues égalà........... 885 Retranchez ce nombre de l'intervalle total des deux thots en aunées complètes... ...,... 1461 Vous aurez pour différence. ........... 576 —— Cette différence exprime le nombre d'années complètes dont le Thot que nous voulons considérer est antérieur au thot de Nabonassar ; et puis- que nous voulons faire notre calcul pour 16 heures plus tard, il faudra di- minuer cet intervalle de 16 heures en revenant vers nous. Voici maintenant la réalisation de ces résultats par les tables du soleil, de Ptolémée : —219°.57.39".23" Ho 39".25".31" Mouvement moyen de rétrogradation pour 576 ans vagues.,.,......... Ajoutez, en revenant vers nous, le mouvement moyen pour 16 heures, ,,.. La somme sera le mouvement moyen depuis le 1° thet de l'an —576 à 4b . mt—=—219°.18.14" 265 .15. 0 du matin jusqu’à l'ère. ........,,..,.eu..ssmssesoseuuse Anomalie moyenne à l’époque des Tables A— 45°.56.46'(r) Anomalie moyenne à l'époque proposée, ........ dec ts nes Ajoutez la longitude de l'apogée que Ptolémée suppose fixe............. 65.30 La somme est la longitude moyenne à l’époque proposée... ............ : 111°.26 .46 Prostraphérèse calculée pour l'anomalie A (soustractive). .…. —1 .39 .14 Longitude vraie du soleil au ** thot de l'an —576 de Nabonassar, 4h du DL ES CN LE OR RAD AN AT OÙ A LRO L— 109%47.320 Cette longitude est trop forte de 6°. 5.9", comme on le voit en la com- (1) On peut vérifier ce résultat en prenant pour époque l'anomalie moyenne que nous avons trouvée plus haut pour le premier jour de thot de lg deuxième anuée d’Antonin, à &" du matin, et en retran- chant le mouvement moyen pour une rétrogradation de 1461 ans vagues. En effet, on aura ainsi : Anomalie moyenne au 1°° jour de thot de Ja 2° année d'Antonin, à 4? du matin... , 50°.44!.34".26" © Mouvement moyen de rétrogradatiou pour 1461 années vagues complètes ( a sous- MU )pe io on OPA MT MES Se Donne une da de —49.47.48".18" Donc anomalie moyenne au r®° jour de thot de l’an de Nabonassar —576, à 4h du nent sous cnlommnds es dus deu eo MP eee ecran 450,56".46" somme nous la trouvons par le calcul direct, D'ASTRONOMIE ANCIENNE. 127 rant à la valeur calculée par nos tables actuelles pour la même époque, eur que je rapporte ici en note (1). Mais nous avons vu que l'ascension oite a, qui se conclut des données de Ptolémée, est aussi trop forte, ce i e communique par dérivation aux valeurs des arcs EQ , EL de notre re 1°. Or, les conditions de visibilité de l'étoile dépendent de l'excès de gitude L ou ES’ du soleil sur l'arc EL. Donc, les erreurs de ces deux ntités étant ici de même sens, elles se compensent en partie mutuelle- prenant donc les valeurs précédentes, nous avons, suivant Ptolémée : ES'— 109°.47'.32" EL y3°, 6.16 ude vraie du soleil à l’époque proposée......,....,........ Hoover avons déjà trouvé ci-dessus la valeur de l'angle ELQ ou de son opposé VLS':VLS— 58°,25".47" Avec ces données, nous calculerons l’arc d’abaissement actuel du soleil, moment du lever de l'étoile, par la formule : À sin VS’ — sin LS’ sin VLS'; liquelle nous donnera : VS' — 16°. 41°. 16”. \ Cet arc, comparé à la valeur type 11°, est trop grand pour que l'étoile déduis ces différences du lieu du soleil, que M. Largeteau a calculé pour ce même jour avec tables de Delambre rectifiées. Il a trouvé ainsi : pit ude vraie du soleil le 20 juillet —1323 des chronologistes à oh temps de Paris compté de minuit. .... ARR LSe SAS SA RIT ErA LS ARR ESA ER EUR 10337 .30" A Mouvement horaire. ...... CCE e EE 2,25".24 Ajoutant donc cette quantité à la longitude trouvée pour le minuit de Paris, on aura: L Longitude du soleil le 20 juillet —1323 chronologique à 4h du matin, temps de EE LUE ELA IREUNL. EAP ME TILTE 103°.42.23" Ce qui établit la différence que j'ai indiquée avec le résultat de Ptolémée. 128 SUR DIVERS POINTS ne devienne perceptible que ce jour-là même. Elle a dû l’être antérieure- ment, quand le soleil avait une longitude un peu moindre au moment où l'étoile se levait. En effet, en conservant les mêmes conditions relative- ment à ce lever, j'ai calculé, toujours par les tables de Ptolémée, quelle avait dû être la longitude vraie du soleil quatre jours plustôt, c’est-à-dire le 2° jour épagomène précédent , à la même heure. J'ai trouvé ainsi, pour ce jour-là : NS ro Sirius était donc héliaque ce jour-là à Memphis, selon les tables de Ptolémée. Si l’on veut voir la marche du phénomène dans les jours voisins, iln y a quà prendre l'excès de la valeur précédente de VS’ sur celle-ci; et, Ja divisant par 4, on aura la variation de cet élément pour un jour de re- tard ou d'avance. Ce résultat, étant appliqué par addition ou soustraction à ces mêmes valeurs, donnera le tableau qui suit : Valeurs de VS’. 1 Année —577 de Nabonassar. .. premier épagomène, à 4h du matin... .. Q°.57.23" dentnième at detente 10.47. 3 ÉTOISIEME Se ee nee ne cesse UE 11,36 .43 HHACMIEMEE Le eee encres 12.26.22 HnquieMe CEE EREERC Eee -oet 13.16. 2 Année —5:6 de Nahonassar. . ... premier thot, à 4° du matin........... 14. 5.42 On voit par ce tableau que, selon les hypothèses de Ptolémée, le thot de l'an — 576 de Nabonassar n’aurait pas été exactement héliaque à Mem- phis; c'est-à-dire que Sirius ne se serait pas levé héliaquement sur l'horizon de cette ville ce jour-là même, 20 juillet — 1323 des chronologistes. Ce phénomène se serait opéré les 1°, 2°, 3° et 4° épagomènes précédents , c'est-à-dire les 15, 16, 17 et 18 juillet de cette même année julienne; de sorte que le thot ne serait devenu héliaque à Memphis, selon ces hypo- thèses, que 20 ans après l’époque que nous avons considérée, c’est-à-dire en l'an julien — 1303 chronologique. Néanmoins, si Ptolémée avait eu connais sance d'une ancienne tradition, d’après laquelle le Thot aurait été héliaque à Memphis 1640 vagues avant la 1° année d'Antonin, et qu'il eût essayé d'y comparer ses hypothèses, comme nous venons de le faire, la différence de quatre jours qu'il y aurait trouvée lui aurait dû paraître tellement petite, comparativement à un si long intervalle, qu'il l’aurait sans doute considé- rée comme une confirmation très-importante des données dont il avait fait D'ASTRONOMIE ANCIENNE. 129 usage, et il n'aurait pas manqué de mentionner un tel résultat. S'il ne l’a . pas fait, c'est que l'énoncé de Théon n’est qu'un artifice numérique pour _ faciliter son calcul de rétrogradation, et non pas un fait réel que Ptolémée _ n'aurait pas dû ignorer. Nous pouvons être plus justement surpris qu'il n'ait pas attaché un caractère de certitude à cette autre tradition , presque ubitablement existante en Égypte, que la période des levers héliaques e Sirius était exactement de 365) 3- Mais peut-être a-til pensé que l'ob- rvation du phénomène était trop vague pour établir avec süreté la durée tte période. Et, en effet, une pareille détermination ne pourrait avoir x yeux d'un astronome les caractères d’une mesure que si elle était éta- e par une série de levers observés continüment pendant beaucoup de s; condition à laquelle la tradition égyptienne satisfaisait peut-être, ns que Ptolémée en füt assuré ou convaincu. NOTE DEUXIÈME. SUR UNE RÈGLE DONNÉE PAR THÉON D’ALEXANDRIE , + ” 2 - POUR TROUVER LE JOUR DE L'ANNÉE ÉGYPTIENNE VAGUE OU FIXE, AUQUEL { S'OPÈRE LE LEVER HÉLIAQUE DE SIRIUS. _ Cette règle se trouve consignée au folio 154 du manuscrit 2390 de la bliothèque royale, qui contient le commentaire sur la composition ma- hématique de Ptolémée, les tables manuelles, et divers opuscules du se- Théon. Il est donc à présumer qu'elle est dece géomètre, ou au moins son école. D'après Larcher, dans sa traduction d'Hérodote, elle est ntiquement reproduite dans un manuscrit du Vatican; de sorte que son 1enticité n’est pas douteuse, J'en avais déjà rapporté le texte, avec Ja duction faite par mon savan t confrère M. Hase, dans mon ouvrage Re T =! 4 - . : . intitulé Recherches sur plusieurs poïnts de l’astronomre égyptienne, publié XX 0 130 SUR DIVERS POINTS en 1823. Mais je ne l'avais pas alors analysée assez exactement, parce qu'on n'avait pas encore de traduction imprimée des tables manuelles, où l'on pût voir la marche que Théon a coutume de suivre dans les pro- blèmes de ce genre. En conséquence , je reproduis d’abord ici ces docu- ments , pour les soumettre à une discussion plus rigoureuse, et plus con- forme à l'esprit de l’auteur grec. Uept r%6 roù Kuvôs érurohie ÉToderyux. \ m 3 on 03 nl e Ent voù p Etouc AtoxNnruavod mept vas voù Kuvos émiroNc Omodeiywaroc Evexey Xau6i- RUES" / 4 - > + = s vousy tà démo Mevoppeuc Eu r%e Anéewc Adyoiorou. ‘Oyuod à œuvuyoueva Er œye. ols 3 es SOS EN ra es en 3% eu EE émumpocrebobuev tr dm0 vhs dpyñs Atoxhnriævod ëtn p, yivovra épLob tn ae. robrwv ha A , # À A =. Gavouev +0 réraprov pépoc, 6 èoe uxc. voüroic mpoobévres (fuépac ?) e, yivovrat u\x. And roûtwV 4YENGVTES TÜS TO (à ù 6, Roumdv xa. rù Xel fuépus Txô pelovtes rèç vote teronernpiôuc, oÙcus p6, Aomov xx. tv helmovra fuépuc Tx0. ’ J- LY2 € St ruûras dmohucov dro OO, didovres, Exdotw nv, fuépuc À, Os ebpioxeclar Thv émiroN iv Ent 5d Auodmriavod émet x0. Ouolus oler Ext éroudfrore Xpovou. TRADUCTION PAR M. HASE. RÈGLE POUR LE LEVER HÉLIAQUE DU CHIEN. « Par exemple, si nous voulons obtenir l'époque du lever héliaque du «Chien pour la centième année de Dioclétien, nous comptons d'abord les «années écoulées depuis Menophrès jusqu'à la fin d'Auguste : elles don- «nent pour somme 1605; et, leur ajoutant depuis le commencement de Dio- «clétien 100 années, on en aura, en tout, 1705. De ce total nous prenons «le quart, qui est 426 ; à quoi ajoutant 5 jours, nous avons 431. De là, « nous ôtons ce qu'il y avait alors de tétraétérides écoulées (1), c'est-à-dire (1) Ce sont les périodes quadriennales intercalées de l’année alexandrine, qui se sont écoulées de- puis sa fixation, que Théon admet avoir eu lieu en l'an 724 de Nabonassar, jusqu’à la 100° de Dio- clétien correspondante à l'an 1132 de ce même système d'années. La différence de ces deux nombres donne, en effet, 408 années vagues, contenant 102 tétraétérides, pendant lesquelles lethot alexandrin est D’ASTRONOMIE ANCIENNE. 131 «102, en laissant 21 (années) (1). Le reste est 329 jours. Répartissez ce «nombre, à compter de thot, en prenant 30 jours pour chaque mois, « vous trouvez le lever du Chien au 29 épiphi de l’année dioclétienne. _ «Opérez de même pour toute autre époque donnée. » _ Théon opère ici précisément comme il le fait au commencement de ses tables manuelles, quand il veut transporter une date alexandrine fixe ns l’année égyptienne vague. Il prend alors, pour origine de son calcul, une époque où le thot vague à coincidé avec le thot fixe; ce qu'il dit r eu lieu à la 5° année vague d’Auguste, laquelle, d'après le canon des rois, concorde avec la 724° de Nabonassar. Puis il calcule progressive- ent le nombre de jours dont les deux thots se sont séparés depuis cette ncidence primitive. De même, dans le problème actuel, où il veut d'abord trouver la date actuelle du lever héliaque dans l’année vague, il part d’une époque où ce lever est supposé avoir coïncidé avec le premier our du mois thot: c’est ce qu'il appelle l'ère de Ménophrès; et il la dit parée de la fin de l'ère d’Auguste, ou de la 1032° de Nabonassar, par un ntervalle de 1605 ans, qu'il faut supposer être des années vagues de 365 jours ; car on va voir qu'il les emploie comme telles dans tout son calcul : ordance primitive jusqu’à l’époque quelconque qu’il veut considérer ostérieurement ; et ajoutant ce retard, exprimé en jours, à la date primor- iale premier thot, il obtient la date du phénomène dans l’année vague à uelle il veut s'arrêter. C’est la première partie de son opération. Pour démontrer ce principe numérique de la règle de Théon, je l’ap- l : ue à l'exemple qu'il a choisi lui-même. n demande la date égyptienne du lever héliaque pour la 100° année ague de Dioclétien. La première année de l'ère de Dioclétien est le ntercalation ; de sorte quele lever héliaque qui suit la même période quadriennale y resté attaché à une même date pendant tout cet intervalle detemps. r), Ce sont les 21 années qui se sont éconléés depuis la réforme julienne jusqu’à la fixation du thot ndrin, Il les supprime dans le calcul des tétraétérides fixes, parce que, pendant ces 21 premières es juliennes, le thot égyptien était demeuré vague, Ru 132 SUR DIVERS POINTS terme où finit l'ère d'Auguste; c'est la 1032°de Nabonassar. Voici donc la manière d'opérer: Intervalle écoulé depuis l'ère de Ménophrès jusqu’à la fn de l'ére d’Auguste, ou au commencementde Dioclétien..,... 1605 années vagues entières. Ajoutez 100 années vagues de Diowlétien. ........... tee te 100 Vous aurez pour somme l'intervalle compris eutre l'ère de Mé- nophrès et la 100° année de Dioclétien................. 1705 Or, la date égyptienne du lever héliaque retarde d'un jour après quatre années vagues accomplies. Prenez done le quart de cette somine d’années, et le retard total en jours, compté de- puis le 1° thot, sera + 1705, ou Ce résultat est propre au parallèle terrestre sous lequel la coïncidence du lever héliaque avec le thot primitif a été observée ou supposée. Pour le transporter à une autre latitude, il faut y ajouter, ou en soustraire, le nombre de jours dont l'époque annuelle du lever héliaque, sous le paral- lèle que l’on veut considérer, est plus tardive ou plus prompte que sous celui de Ménophrès. C'est ce que Théon parait d'abord faire, en ajoutant 5 jours aux 426 trouvés directement ; et l’on verra tout à l'heure que cette addition a pour effet d'approprier son résultat définitif à la latitude d'Alexandrie. En ce moment, je me borne à suivre son calcul. Il obtient donc ainsi 431 jours pour le retard total au dela du premier thot, en né- gligeant la fraction Æ Cela porte la date du lever au 432° jour compté de ce thot, conséquemment au 67° jour par delà l’année considérée, ce qui le rejette dans la suivante. Alors c’est le lever précédent qui a dû s’opérer dans cette année même; et comme le phénomène a pour période annuelle 365/:, on peut l'y placer à la même date, c’est-à-dire au 67° jour, en né- gligeant la différence de } de jour dans cette rétrogradation. Mais Théon échappe à cet inconvénient, parce que, dans l'application qu'il fait de sa règle à l’année alexandrine fixe, le retard total qu'il a besoin d'évaluer se trouve toujours finalement moindre que 365 jours , ou une année vague entière ; de sorte que le lever dont il obtient la date est toujours compris dans l’année qu’il a considérée. On peut remarquer que Théon, dans son énoncé, prescrit de répartir le retard final, non pas au dela du premier de thot, mais à compter de ce jour même, ce qui semble une inexactitude. Toutefois ce n'est probablement qu'un artifice qu'il emploie pour simpli- D'ASTRONOMIE ANCIENNE. 133 fier cette répartition, la compensation que ce procédé nécessite pouvant se trouver comprise dans les cinq jours qu'il surajoute au résultat immé- diat qui s’en déduit. . Nous n'avons encore effectué que la première moitié de son calcul; _ pour la seconde, il s'appuie sur le fait déjà rapporté dans ses tables ma- es, qu’à la 5° année d’Auguste, la 724° de Nabonassar, le thot andrin fixe a coïncidé avec le thot vague; de sorte que la date du lever t alors la même dans ces deux sortes d’années. Mais, depuis cette que de concours, le lever a continué de retarder, dans l’année vague, n jour en quatre ans; au lieu qu'il est resté fixe dans l’année alexan- cordance des deux thots jusqu’à la 100° année de Dioclétien , c'est-à-dire dant un nombre d’années vagues égal à 1032 + 100 — 724 ou 408. Ce uis Ménophrès jusqu’à l’année de coïncidence des deux thots, ou la ° de Nabonassar, pour le parallèle auquel l'application de la règle a é transportée. Théon prescrit de répartir ce reste à compter du premier t énclusivement, ce qui le conduit au 29 épiphi. C’est en effet la date le la théorie de Ptolémée assigne au lever héliaque de Sirius, sous le pa- llèle d'Alexandrie, dans l’année égyptienne devenue fixe. Mais, si Théon ait réparti le retard calculé au dela du premier de thot, comme il aurait le faire, il aurait été conduit au 30 épiphi ; ou bien il n'aurait eu que me il se l'était proposé. Pour le disculper de cette erreur de réparti- peu présumable, il faut donc concevoir que, ayant jugé plus com- 1 » de LA Te e c de de commencer l’énumération du retard au premier de thot, il aura ire pour rendre le résultat applicable à Alexandrie, | Nous examinerons tout à l'heure à quel parallèle terrestre l'établissement 134 SUR DIVERS POINTS cation de la règle au parallèle primitif, quel qu'il puisse être, Alors le nombre des jours de retard, depuis l'ère de Ménophrès jusqu'à la roo° an- née de Dioclétien, sera 426 jours moins 102, ou 324 jours, lesquels étant répartis au dela du premier de thot, comme on doit le faire, conduiront au 325° jour de l’année devenue fixe, c'est-à-dire au 25° du mois épiphi. Il est évident que cette manière de calculer conduira toujours à la même date, pour toutes les années alexandrines fixes postérieures à l’année de concordance , du moins en faisant abstraction des cinq jours que Théon a surajoutés. Car il faudra encore, dans tous les cas, retrancher du retard total le retard partiel évalué depuis la fixation du thot jusqu'à l’époque considérée. On obtiendrait donc encore un résultat pareil,si l’on effectuait le calcul pour l’année de la concordance même. En effet, on aurait alors: De Ménophrès à la fin d'Auguste, 1605 ans : retard du lever dans cetintervalle, + 1605 ou... 4oriz De la concordance des deux thots jusqu'a la fin d'Auguste, c’est-à-dire depuis la 524° année de Nabonassar jusqu’à la 1052°, intervalle 308 ans : retard, + 308, ou............... 77 Différence ou retard du lever en jours, depuis Ménophrès jusqu’à l'année de concordance.. 324 + Ceci, étant réparti au dela du premier de thot, conduit au 325° jour de l’année, ou au 25 épiphi, comme précédemment, en négligeant toujours la fraction +. Dans cet exemple, l'intervalle compris entre l’ère de Méno- phrès et l’époque de concordance des deux thots, fixe et vague, est évi- demment 1605-308 , ou 1297 années vagues complètes. La date trouvée le 25 épiphi, plus +, précède seulement d’un jour, ou même de + de jour, celle du 26 épiphi, que l’on trouve directement par la théorie de Ptolémée quand on l'applique au parallèle de Memphis , avec la latitude qu'il assigne à cette ville, et avec le même arc de dépression du soleil qu'il a adopté pour le lever héliaque de Sirius. Pour comparer cette date, 25 épiphi fixe, avec le 20 juillet fixe assigné par Censorin, comme l’époque annuelle du lever de Sirius sur laquelle se. règle le cycle dont il parle, il faut la convertir en date julienne, d’après le rang de l’année de Nabonassar à laquelle elle appartient. Nous avons vu que c'est la 724°. Or les tables de concordance montrent que le premier thot de cette année-là est compris dans l'année 4689 de la période julienne, laquelle est bissextile, et identique avec la 25° avant l'ère chrétienne, se- lon le mode de computation des chronologistes, En adoptant le premier D'ASTRONOMIE ANCIENNE. 135 oncé, pour n'avoir à considérer que des nombres positifs, le calcul de 242e 324 + jours, SA aps D ET . 566°1 illet fixe, assignée par Censorin. Mais le phénomène n'étant pas rigou- ment assignable dans cette limite d'écart, on ne peut pas attribuer ec sûreté cette inégalité d'indication à une différence de parallèle. Et, en cl . , 2 , : et, on va voir qu'elle résulte seulement de ce que Théon place le jour r établir ce fait, je forme le tableau suivant, qui présente la marche essive des retards des levers pendant une révolution complète du mène, disposée conformément au mode de calcul appliqué par 136 SUR DIVERS POINTS RANG ORDINAL NOMBRE ; DES ANNÉES des années va- gues comptées depuis lépo-| °° © que de la pre- comedence mière coïnci-[PrImIUvE Jus- vagues écou- lées depuis la RETARD DU LEVER au delà du pre- mier thot pri- mitif, après ce uombre d’an- nées révolues, DATE ABSOLUE du lever, ap- partenant à l'année consi- dérée, l’énu- mération étant dence du lever [4u au premier PE Hébaere avec|dethot del'an-| exprimé en le prem. jour née considé-|jours et frac- du mois thot rée, tions de jour. faite à partir du premier de thot de cette même année, Origine. rer thot. si ele sj= alu »iù »j- COTE 1 3 =} 4 3 4 m Généralement, Arrivée au dern. épa- gom, de la 1457° ann, Dernier épagomène. Dernier épagomèue. Dernier épagomène. FE + #ls #lv a Arrivée au prem. thot, de la 1462€ année. Premier thot, Premier thot. Premier ihot. Le calcul de Théon place le commencement de Ménophès à l'origine de cette période. 1l fait coïncider sa première année avec la première des quatre où le lever se maintient numériquement au premier de thot. Alors l’année de concordance du thot vague et du thot fixe se trouve être D'ASTRONOMIE ANCIENNE. 137 la 1298° de la série, et l’on a pour cette époque : n—1—1297, U—1)= 8247 14 (r—1) = 325 7 4° 4°? i porte le lever héliaque de cette année-là au 25 épiphi, comme nous ès à la 4° année de la première période quadriennale de notre tableau, & il “54 la liberté de Di puisque le PE reste De rte rangs dans la série. Au lieu d' être la 1298°, elle aurait été la 13o1°. urait donc eu, pour ce cas : L L; Eu Lo la différence des parallèles, ce qui est encore conforme évaluations. Maintenant, puisque Théon arrive aussi à ce même ut que, de ces cinq, un soit ajouté pour compenser l'erreur que produi- l'énumération des jours de retard à partir du premier thot, un autre reporter l'origine des années au commencement de la période qua- male dans laquelle le thot demeure héliaque, afin de rendre le calcul facile ; après quoi, les trois de surplus restent pour l'excès de la lati- d'Alexandrie, sur celle du parallèle auquel le calcul du lever est censé XX 18 138 SUR DIVERS POINTS dans la quatrième colonne, que la date du lever ainsi calculées'y trouvera ré- pondre au dernier épagomène. Mais, supposez qu'on commence la répartition des années à partir de la troisième ligne du tableau, ce quisera également per- mis. Alors l’année proposée deviendra la 1462° de la série; et le lever hé- liaque qui lui appartient arrivera le 366° jour à compter de son premier thot. Il coïncidera done avec le premier de thot de l’année suivante, la- quelle sera la 886° de Nabonassar, ou la deuxième d'Antonin, exactement comme Censorin le dit. On arriverait encore au même résultat si l'on cal- culait le retard des levers, pour cette même première année d’Antonin, par la règle de Théon, en la considérant avec lui comme la r459° de la série, et distribuant les jours de retard, 364 ?, à compter du premier thot inclusi- vement, ainsi qu'il le fait encore; pourvu qu'ensuite, à son exemple, on ajoute un jour pour compenser l'erreur de ce mode d’énumération, et un autre jour en sus pour ramener la distribution des années à avoir son origine au dernier terme de la première période quadriennale. Cela ne laissera plus que les trois jours ultérieurement nécessaires pour transporter la date du phénomène, de Memphis à Alexandrie. On voit donc, par cette discussion, que les résultats du calcul de Théon, correctement analysés, ne diffèrent pas des indications de Censorin ; et qu'ils conviennent à un même cycle de 1467 années vagues, dont l'époque d’accomplissement à la 2° année d'Antonin est celle-là même que la théorie de Ptolémée assigne pour la coïncidence du lever héliaque de Sirius, sous le parallèle de Memphis, avec le thot vague de ce temps. De sorte que, pour déduire de là l’époque de son accomplis- sement antérieur, appelée par Théon l'ère de Ménophrès, c'est-à-dire, comme on peut le croire, l’ère sacrée de Memphis, il n’a fallu qu’effectuer un calcul de rétrogradation numérique, procédant par périodes quadrien- nales de 365 jours intercalées, comme notre tableau les présente. Ainsi, bien loin de trouver, dans ce procédé de calcul, l'indice d’une ancienne dé- termination, qui aurait été rattachée aux temps postérieurs par une chrono- graphie datée et continue, il y faut voir la preuve matérielle du fait con- traire. Car il serait comme impossible qu'une détermination fondée sur des observations réelles eût conduit juste à un thot héliaque postérieur, si exactement conforme aux résultats des hypothèses et des calculs de Ptolé- mée, appliqués au même parallèle terrestre, celui de Memphis, et à la même année, la 2° d’Antonin. D'ASTRONOMIE ANCIENNE. 139 | Î | | Ë | | | | NOTE TROISIÈME. SUR LES PHASES D'ILLUMINATION DES PYRAMIDES DE MEMPHIS. Je considère d'abord la face boréale de la grande pyramide. Elle est re- entée en projection horizontale dans la fig. 3, et en perspective dans la , par le triangle ABD. AB est l’arête de sa base, dirigée suivant la d’est-ouest. DGest son apothème, dirigée du sommet D au milieu Cde base AB, et perpendiculaire à celle-ci, à cause de l'égalité des côtés , DB. La droite MON, menée par le point C dans le plan de l'horizon pendiculairement à AB, est la ligne méridienne. Si, par cette ligne, et qui passe par le milieu de la base AB, et qui est normal à la face ABD. w le même point C, je mène la droite indéfinie CP dirigée au pôle cé- te élevé sur l'horizon du lieu. Elle sera aussi dans le plan du même mé- ridien, que je suppose être celui de la figure. Alors l’angle PCN sera la uteur H du pôle , que je suppose égale à 30°; et l’angle DCM sera l'incli- ison 1 de la face sur le plan de sa base, inclinaison que je fais égale à 2° en nombres ronds. Nous aurons plus tard besoin de l'obliquité de l'é- ptque sur l'équateur: je la prendrai égale à 24°, ce qui était à peu près valeur dans ces anciens temps. u point C, fig. 4, dans le plan duméridien, qui est aussi celuidelafigure, mène la droite indéfinie CQ perpendiculaire à CP. Elle représentera la trace de l'équateur sur ce plan. Je prolonge aussi indéfiniment la droite CD vers D'. D'après les conventions précédentes, l'angle D'CM, plus l'angle PCN, font en somme 52° + 30° ou 82°. En retranchant cette somme de 180’, n a l'angle D'CP, qui sera de 98°. Ce sera la distance polaire de l'apothème DC; je la désignerai désormais par A’. Comme l'angle QCP est de 90°, par construction, on voit que l'apothième CD, prolongée en D', passe au-des- 18. 140 SUR DIVERS POINTS sous du plan de l'équateur, et qu'elle lui est inférieure d’une quantité angulaire D'CQ,égale à 8°. Maintenant, je fais abstraction du diamètre apparent du soleil ; et, consi- dérant cet astre comme un simple point, je suppose qu'à un instant quel- conque, un rayon solaire Cs vienne raser la face de la pyramide, dans sa moitié orientale, en formant avec Fapothème l’angle DCs, que je désigne par ©. Je prends ce cas pour type des raisonnements ; mais le même calcul s’applhiquera à celui où la direction de Cs serait occidentale, en faisant ( négatif dans les formules , au lieu de le supposer positif. L'angle sCP sera, pour cet instant, la distance angulaire actuelle du centre du soleil au pôle P ; je la désigne par A. Alors, ayant prolongé Gs indéfiniment, je dé- cris autour du centre C une sphère d'un rayon arbitraire, qui coupe les rayons visuels CP, CD, Cs, dans leurs prolongements indéfinis aux points P, D', S; et, joignant ces points par des arcs de grands cercles , je désigne ceux-ci par les angles qui y correspondent respectivement. L’arc PI) sera ainsi égal à A’, PS à A, D'S ào;et ces trois arcs formeront, sur la sphère idéale, un triangle sphérique PD'S, lequel sera rectangle en D’. L'angle dièdre D'PS , formé par le plan SCP avec le méridien, sera l'angle horaire correspondant à la direction du rayon solaire CS. Je désigne cet angle par P, en le supposant oriental comme®, conformément à notre construction. Mais lorsque o deviendra occidental et négatif, P devra suivre son changement de signe , ce qui le rendra de même négatif et occidental. Les relations analytiques des trois arcs A, À ,9, entre eux et avec l'angle horaire P, sont données par le 2° cas des triangles sphériques rectangles, traité dans la Géométrie de Legendre; et elles s'expriment par les deux for- mules suivantes, où le rayon de la sphère est pris pour unité : (x) cos À — cos® cos À, (2) tang P — Se; et lorsqu'on élimine + entre elles, on en tire cette troisième (a) : ___ sin (A + A) sin (A— A") Fe 0 en Ne et (3) tang? P Dans ces équations, A’ est une quantité connue et constante. Si l'on se (a) Pour faire aisément cette élimination, je prends dans l'égnation (1) la valeur de cos g; et la D'ASTRONOMIE ANCIENNE. 141 - central que l’on suppose tangent à la face, elles feront connaître la distance polaire À qui lui donne cette direction , et l'angle horaire P dans lequel elle … s'opère. La réalité ou la non réalité des valeurs ainsi obtenues apprendra condition de tangence demandée est possible, ou impossible, pour la va- attribuée à l'angle ®. On aura donc ainsi toutes les circonstances du nomène considéré. À la vérité, on ne déterminera ainsi que l’état d'’illu- ou le dernierbord de son disque, qui doivent précéder cet état oului suc- r. Mais, pourarriver à ces derniers détails, il faudrait tenircompte du demi- ètre du soleil, évalué dans la direction suivant laquelle il arrive sur la ce qui compliquerait beaucoup les formules; et les changements qui en teraient dans l'application des angles A et P, modifieraientseulement les poques absolues de l'illumination, non sa marche générale, qui est ici la e chose intéressante à considérer. Je continuerai donc à suivre les con- uences des formules relativement à l'illumination centrale, excepté r un seul cas, où l'influence du diamètre est spécialement importante à our ne pas appliquer aveuglément nos formules, il sera utile de nous éparer par la considération des circonstances géométriques générales notre construction met déjà en évidence.Nous avons reconnu quenotre angle D'PS a son côté PD', ou A’, égal à 98°; de sorte qu'il surpasse un le droit. Or, dans un triangle sphérique rectangle ainsi constitué, l'hy- énuse PS ou A est d’abord égale à À’ quand le côté 9, ou l'angle P, sont ; et, à partir de cette valeur, elle va toujours en diminuant, jusqu'à ce tüant dans l'équation (2) j'en tire sino linéairement. Jobtiens ainsi : cos À 3 5 sm A! cos A cos A! ? FAP ne 7 cos A cos p— on a toujours … cos2psin 2? — 1. bstituant dans celle-ci pour cos ® et sin leurs expressions précédentes, ilen résulte cos? A cos? A/ (1 tang? P sin? A) — 1; dégageant tang? P,on a: , (cos2 Al— cos? A) sin(A+A) sin (A—A') LUS EE S 7 sin? A! cos? A sin? A'cos? A 142, SUR DIVERS POINTS que ces deux angles deviennent simultanément égaux à 90°. C'est aussi ce que montre notre formule (1). En effet A surpassant 90°, cos À” est néga- üf. En outre, tant que ® est compris entre 0° et 90°, son cosinus est positif, Donc,pour toutes ces valeurs de 9, le produit qui exprime cos A est pareiïl- lement négatif, c’est-à-dire que l'angle A’ surpasse un droit, Mais sa valeur négative décroît à mesure que ® augmente ; c’est-à-dire que A se rapproche de plus en plus de l’angle droit, et lui devient égal quand © atteint 90°, ce qui rend cos © et cos À nuls simultanément. Ces résultats étant appliqués à notre figure 4, se traduisent par les conséquences suivantes: L'illuminationtangentielle de la face boréale ABD, par le centre du soleil, ne peut avoir lieu pour aucune distance polaire de cet astre qui surpasse 98°. Elle ne commence donc à s’opérer qu'au moment de l'année où À attemt cette valeur, c’est-à-dire lorsque la déclinaison du soleil est de 8° australe. L'illumination se fait alors par le sommet D dela face, suivant la direction CD ; et l'angle P est alors nul comme l’angleo; c'est-à-dire que cela a lieu au moment de midi. À partir de cette époque, À devenant moindre, corres- pond à des valeurs de o et de P plus grandes ; ce qui signifie que la face com- mence à être illuminée tangentiellement par un rayon CS plus écarté deson apothème, et pourune valeur plusgrande de l'angle horaire P. Elle l’est donc alors avant midi, et aussi après, à un même intervalle, puisque tang P est donné par une expression du second degré qui, lorsqu'elle fournit des va- leurs réelles , en donne deux égales et de signes contraires. Lorsque 4 atteint 90°, son cosinus devient nul ainsi que cos À ; et tang P devient infini, po- sitif ou négatif, ce qui montre que À et P sont tous deux droits. Alors l'il- lumination s'opère, suivant l’arête AB de la base, dans l'horizon même. La distance polaire À étant go’, le soleil est dans l'équateur, c'est-à-dire que cela a lieu aux époques des deux équinoxes; et enfin P étant 90°, il est six heures du matin. Tout cela est conforme à ce que j'ai dit dans le texte du mémoire. Si l'on fait croître 9 au delà de 90°, les valeurs de son cosinus deviennent négatives, et croissent d'autant plus dans ce sens qu'on l’augmente da- vantage, jusqu'à atteindre finalement la limite — 1, lorsqu'on supposerait ® égal à 180. Dans cette seconde période de variation, cos À devient positif et va toujours en augmentant. Cela signifie que l'angle A, curres- pondant aux valeurs supposées de 4, est moindre que 90°, et devient de plus D'ASTRONOMIE ANCIENNE. 143 n plus petit à mesure que o augmente. De pareilles valeurs de A seréaliseront chaque année, quand le soleil sera au nord de l'équateur, entre les époques . des équinoxes et celle du solstice d'été. Mais, dans ce nombre, celles-là ules quirépondront à des déclinaisons boréales moindres que 8°, satisferont x analytiquement aux conditions de tangence supposées par notre problème. En effet, la plus grande valeurnégative de cos ®, qui est — 1, donne cos A égal — cos A”, conséquemment À égal au supplément de A, qui est 180° — 98° 82°. Et si l'on voulait supposer À moindre que cette limite, dans notre uation (1), la valeur négative de cos ®, qui en résulterait, dépasserait—1, ce rendrait l'angle © imaginaire.Or le soleil atteint annuellement,au nord de quateur, des valeurs de À beaucoup moindres que 82°; puisqu’en suppo- n l’obliquité de l’écliptique de 24°, comme nous le faisons, À devient, au Istice d'été, 90° — 24°, ou 66°. Ces résultats analytiques s'interprètent sément lorsqu'on les traduit en géométrie. Nous avons reconnu qu’en ant l'angle © égal à 90°, l’illumination tangentielle à la face ADB de Ja yramide s'opère, Lis le soleil est à l'horizon, sur le Herr de soleil étant de 8°, c'est-à-dire égale à l’australe, qui réalise l’illumina- n instantanée de la même face au moment de midi. Pour les déclinai- ns boréales plus grandes que 8°, il n’y a plus d’illumination tangentielle, de l’axe du pôle, reste tout entier au nord du plan de la face ABD, pro- ngé indéfiniment. Ainsi, en revenant aux réalités, entre les époques des inoxes et celle du solstice d'été, la portion ABD de ce plan, qui consti- e la face boréale de la pyramide, est illuminée tout le long du jour, et ne atre dans l'ombre qu'après le coucher du soleil. a seule particularité de ces phénomènes qui soit essentielle à calculer ériquement, est donc l'époque de l’année où le rayon solaire, dirigé .s ivant l'apothème DC, vient tout à coup illuminer, pour un instant, la e entière au moment de midi. Le sel étant A au ER dre est 144 SUR DIVERS POINTS australe du centre de l’astre sera égale à 8”, plus le demi-diamètre, plus la réfraction pour 52° de hauteur. Je négligerai celle-ci, qui ne s'élève pas à une minute de degré; et prenant le demi-diamètre égal à 16’ en nombres ronds, il faudra chercher l'époque de l’année où la déclinaison australe du centre égale à 8216’. Car alors le bord supérieur du soleil viendra il- luminer la face au moment de midi. * Pour cela, je construis la figure 5, où Q'Q représente le grand cercle de l'équateur, EYE celui de l’écliptique, et Y l’un des nœuds où ces cercles se coupent : nœud que je supposerai, pour fixer les idées, être celui où s'opère l’équinoxe vernal, les résultats étant pareils pour l’autre, par raison de symétrie. Soit S le centre du soleil, SA la déclinaison assignée que je désigne par d, en la figurant comme boréale, pour pouvoir l’employer ana- lytiquement avec le signe positif, par raison de simplicité. Nommons enfin o l'angle dièdre SYA des deux cercles, ou l’obliquité de l’écliptique, que nous prenons ici égale à 24°. Soit / la longitude YS dusoleil, correspondante à la déclinaison d. Le triangle sphérique YSA étant rectangle en À par construction, la longitude l se calculera par le 4° cas des triangles sphéri- ques rectangles de Legendre, et l’on aura ainsi : sin d, sin / — ; sin & alors, en mettant pour 4 et pour w leurs valeurs ci-dessus définies, on trouvera V0 42058 Cette valeur de / doit être portée er avant de Y, vers E', pour être appliquée aux circonstances physiques de notre problème. Pour conclure de là l'intervalle de temps qui sépare le soleil de l'équinoxe, je me bornerai à faire le calcul avec le mouvement moyen de cet astre. Sa valeur, pour un jour, est 0°,59°,8",33 ou 1°— 0/,51 "67. En multipliant cette quantité par 21, On trouve pour produit : mouvement moyen du soleilen iongitude pendant 27 jours, 20°. 41".54,93. Gette valeur est presque identique à celle qui nous est donnée. Ainsi, en négligeant la petite différence de 10” que nous y trouvons, nous voyons que lillumination instantanée de la face boréale de la pyramide, au mo- ment de midi, aura lieu le 21° jour avant l'équinoxe vernal , et le 21° apres l’équinoxe automnal. Car alors le centre du soleil se trouvera avoir une D'ASTRONOMIE ANCIENNE. 145 | déclinaison australe de 8°,16', en ne tenant compte que de son mouvement moyen. Entre ces deux époques, et celles des équinoxes, la face ABD sera éclairée de plus en plus tôt, et pour plus longtemps. Aux jours des équi- … noxes, elle le sera depuis le lever du soleil jusqu’à son coucher. Enfin, entre . ces jours et le solstice d'été, elle sera de même illuminée pendant tout le temps que le soleil sera sur l'horizon , et ne rentrera jamais dans l'ombre. e sont les résultats que j'ai annoncés dans le texte du mémoire. Phénomènes d'illumination opérés sur la face australe. Fig. 3 et 6. Je considère maintenant les phénomènes d’illumination de la face aus- e. Elle est représentée, en projection horizontale, dans la fig. 3, par le ngle A'DB'; et, en perspective, par les mêmes lettres, dans la figure 6. plan de cette dernière est censé contenir le méridien qui passe par le eu C de sa base, et qui est normal au plan de la face, comme dans figure 4, propre à la face boréale. Ces deux figures sont exactement ana- esl'une à l’autre ; et, pour rendre cette correspondance plus sensible, je ésignerai les points et les lignes homologues par les mêmes lettres, dans e reste de la construction. La seule différence, c'est que, ici, l'inclinaison la face sur le plan de sa base la rapproche du pôle P, au lieu de l'en igner. Par suite de cette disposition, l'angle D'CP, compris dans le plan méridien, entre le prolongement de l’apothème et l'axe du pôle, est égal 22° — 30° ou 22°; et comme le soleil, dans ses déclinaisons les plus bo- les, ne s'approche jamais aussi près du pôle, puisque sa moindre tance polaire est 90° — 24° ou 66°, d'après la valeur de l'obliquité que us avons admise, il en résulte qu'il illuminera toujours la face au mo- Cs, CP sur leurs prolongements aux points D’, S, P. Je; joins ceux-ci des arcs de grands cercles , et je forme le triangle D'SP, rectangle en comme celui de la figure 4, dont il ne diffère que par les proportions e ses parties. En conséquence, les mêmes formules algébriques s'y appli- ueront généralement; et l'on aura de même, pour conditions de l'illumi- tion tangentielle sur cette nouvelle face, les trois équations suivantes ; NO AX, 19 146 SUR DIVERS POINTS (1) cos A cos cos A, (2) tang P — RE sin (A +- A') sin (A — A") sin’ À’ cos’ À où il faudra seulement donner à A sa valeur actuelle 22°. (3) tang® P— 2 Pour développer les conséquences de ces formules, il faut, comme nous l'avons fait pour la face boréale, donner à l'angle indéterminé toutes les valeurs positives ou négatives qu'il peut prendre depuis o—0 jusqu'à g—+ 180", et chercher les valeurs de A qui en résultent. Lors- qu'elles se trouveront comprises parmi celles que le mouvement annuel du soleil réalise, l'illumination tangentielle aura lieu pour l'époque de l'année où elles existent, et à l'heure marquée par l'angle horaire P, qui s'en dé- duira. Mais, lorsque la distance polaire A, que les valeurs attribuées à l'angle © exigent, ne sera pas réalisable, il n'y aura pas d'illumination tangentielle, même idéale, sur la face considérée. Faisons d'abordonul, ce qui suppose le rayon solaire dirigé suivant l'apothème CD au moment de midi. L'équation donnera alors A—A'— 22°. Or le soleil ne s'approche jamais aussi près du pôle, puisqu’en supposant l'obliquité de l’écliptique égale à 24°, comme nous l'avons fait, sa plus petite distance polaire annuelle, qui a lieu au solstice d'été, est 90°—24° ou 66°.Ainsi, la face que nous considérons ne sera jamais illuminée tangen- tiellement au moment de midi; et le soleil se trouvera toujours élevé au- dessus d'elle à cette heure-là, de sorte qu’elle se trouvera toujours entie- rement éclairée alors, comme nous l'avions déjà reconnu par les seules considérations géométriques. La même impossibilité existera évidemment pour toutes les valeurs plus grandes de © qui ne donneront pas des valeurs de A réalisables. Le phénomène ne commencera donc à être possible que pour celle qui don- nera à À la moindre de ses valeurs effectives, c’est-à-dire 66°. On peut la conclure de cette condition même, en faisant A égal à 66° dansl’équation(r), et ÿ mettant aussi pour À’ sa valeur actuelle 22°, puis cherchant la valeur de l'angle 6 qui complète l'égalité ainsi spécifiée. On a alors cos 66° cos 22° ? L’angle horaire P, qui correspond à cette valeur de ® et de À, se calcule cos ® — et l'onentire p—68°.58'.50". : D'ASTRONOMIE ANCIENNE. 147 ensuite par l'équation (2), ou directement par l'équation (3); et l'on trouve, en lui donnant son double signe, P==E 1797-3879, | ou, en divisant cette expression par 15 pour la convertir en temps, PE 4547-03" D'après ces résultats, le jour du solstice d'été, le soleil commence à ons de déterminer jusqu’à la valeur 90°, son cosinus diminue graduel- nent en restant positif ; et la valeur de À qui y correspond dans l’équa- on (3) est toujours réalisable physiquement. L’angle horaire P est aussi stamment réel, et plus grand que nous ne venons de l'obtenir. Lorsque devient égal à 90°, ce qui suppose le rayon solaire dirigé, suivant la trace B’ de la face, dans l'horizon même, cos @ est nul; et, par suite aussi, A; d’où R À — 90°, valeur que le soleil réalise quand il se trouve ans 14 plan de l'équateur, au temps des équinoxes. La valeur correspon- te detang P devient infinie, ce qui donne l’ angle horaire P égal à Ægo°, six heures de temps solaire, de part et d'autre du méridien. Ainsi, à haque équinoxe, la face commence à être illuminée dès le matin au lever u soleil, et reste éclairée jusqu'à son coucher. Cet énoncé suppose toute- fois que la valeur de À qui le réalise a lieu le matin même, et reste telle jus- 'au soir; ce qui n’a jamais lieu à la rigueur, à cause de la variation diurne la déclinaison. C’est pourquoi, dans le texte, j'ai pris pour limite de ilumination matinale la veille de l’é équinoxe et le lendemain de ce jour. Si l'on fait croître ? au delà de go’, son cosinus devient négatif et mente progressivement de valeur. Alors la direction du rayon solaire gentiel est supposée dans le prolongement idéal de la face, au-dessous e l'horizon réel. Les valeurs de cos À qui y correspondent deviennent Ors pareïllement négatives, ce qui donne des valeurs de À plus grandes . que 90°. Mais la plus grande de celles-ci, que le soleil réalise annuellement, 19. 148 SUR DIVERS POINTS a lieu au solstice d'hiver; et, d’après la valeur que nous attribuons à l’obli- quité de l'écliptique, elle est égale à 90° + 24° ou 114°, ce qui est le supplément de 66°. La plus grande valeur que l'on puisse donner à l'angle indéterminé ©, pour arriver à des applications réelles, est donc celle qui satisfera à l'équation (1) pour cette limite de À, en y attribuant toujours à A’ sa grandeur constante 22°, Ainsi on la tirera de la condition cos 114° cos 66° CO ? COS 222 cos 22°? ce qui donnera : @— 180°— 68°.58',.50"—111°.1".10"; et ensuite, par les équations (2) ou (3), on trouvera : BP 18079720 108— 100. 218478 ou, en temps solaire, Dr 0547.33 0-27 Mais le rayon solaire qui raserait le prolongement inférieur de la face A'B'D, suivant la direction assignée par cette valeur de ©, se trouverait au-dessous de l'horizon physique, et l’dn ne pourrait pas saisir l'instant où il la touche- rait. Cette conséquence s'applique à toutes les suppositions que l’on ferait pour ® depuis 90° jusqu'à la limite précédente. Ainsi, dans toutl'intervalle de temps compris entre les équinoxes et le solstice d'hiver, la face australe de la pyramide sera éclairée tout le long du jour, depuis le lever du soleil jusqu'à son coucher. C’est ce que j'ai dit dans le texte du mémoire. Phénomènes d’illumination opérés sur les faces orientale et occidentale. Pour calculer ces phénomènes avec le moins de complication possible, j'ai besoin d'une construction auxiliaire que j’établis dans la figure 9. A'A est la trace horizontale de la face orientale A'DA, fig. 3; trace qui coïncide avec la ligne méridienne MN. Cette face elle-même est figurée, en perspective, dans la fig. 7, par le triangle A'DA, qu'il faut con- cevoir s'élevant de 52° au-dessus du plan de l'horizon, à l'occident du méridien élevé sur A'A, Par le milieu C de sa base, je mène, dans ce méridien, l'axe polaire CP, qui s'élève à la hauteur de 30° au-dessus de l'horizon. Puis, par le même point C, je mène les droites indéfinies CZ, CDD, la première suivant la verticale, la seconde suivant l'apo- x D'ASTRONOMIE ANCIENNE. ‘149 thème CD. Alors je décris autour de C une sphère d'un rayon arbitraire, qui coupe les rayons visuels CP, CZ, CD' en P, Z, D'; et, joignant ces trois points d'intersection par des arcs de grands cercles, j'obtiens le triangle … sphérique PD'7, qui est évidemment rectangle en Z, par construction. Dans | 2 EN on connaît premièrement le côté D'Z, qui est le complément de clinaison I de la face sur le plan de sa base. Cette inclinaison, qui était de donne D’Z sear à 38°. SAN emenRt on a le côté ae He. de la le dièdre en D’ que je nomme V; l'angle dièdre en P que je nomme P’ 6; j EE q é ; juel est aussi l'angle horaire occidental, dans lequel est contenu l’apo- 3 q P me CD ; enfin le côté PD', distance polaire de cette même apothème, e Je désigne par A’. Ce calcul rentre dans le 2° cas des triangles rec- HE $ So gles de Legendre; et, en mettant dans ses formules les valeurs angulaires ignées aux deux côtés connus, on obtient les résultats suivants : cos A — sin I sin H, A'— 66°.47'.46", I ind. 0 0 1 HE ni GueE cost: V 17012000, GE a M ob NE Jo ap Fan VS tang P Mas atostl ; P'=— 42°. 3'.1g' occidental, ou, en divisant ce dernier angle par 15, pour le convertir en temps solaire : P'— 2°.48".13, après midi. . Je passe maintenant à la figure 8, qui est pareïllement relative à la face “orientale. Elle se compose d'abord des éléments de la figure 7. Elle con- üent les mêmes lignes et les mêmes arcs, désignés par les mêmes lettres. our y introduire la condition d'illumination tangentielle , je suppose que celle-ci soit réalisée par un rayon solaire central Cs, dirigé du centre C dans © le plan de la face; et je désigne généralement l'angle DGs par la lettre ®, à elle j'attribuerai le signe positif quand élle se dirigera au nord de pothème comme dans la figure 8, et le signe négatif quand elle passera au sud de cette ligne comme dans la figure 9, laquelle est identique à la igure 8, sauf cette modification. Revenant donc à celle-ci, je prolonge ndéfiniment le rayon solaire Cs ; et autour du point C, avec le rayon déjà bitraire employé dans la figure 7, je décris la même sphère, qui va couper Cs 150 SUR DIVERS POINTS sur son prolongement en S, et les autres droites CD, CP, CZ, aux points D’, P, Z, identiques à ceux de la figure 7. Joignant d’abord ceux-ci par des arcs de grands cercles, je reproduis le triangle rectangle PD'Z de la figure 7, avec ses mêmes éléments constitutifs. Puis, joignant de même le nouveau point d'intersection S avec D’ etP, je forme un second triangle PD'S, lequel se trouve à l'occident du plan horaire PCD' dans la figure 8, et à l'o- rient de ce même plan dans la figure 9. Le côté PD' de ce triangle lui est commun avec le triangle D'PZ; il est égal à A”, dont nous avons déjà calculé la valeur. En outre, l'angle SD’Z est droit par construction ; et l'angle PD'Z est V, que nous avons aussi calculé. Conséquemment l'angle SD'P du nou- veau triangle est 90°—V dans la figure 8, et 90° + V dans la figure 9. Sa valeur nous sera donc connue pour chacun de ces cas. Enfin, puisque le rayon solaire CS est supposé dans le plan de la face A'DA , PCS est le plan horaire qui contient le centre du soleil au moment où le phénomène de tangence a lieu; et l'arc PS, ou A, est la distance polaire de l'astre, à ce même instant. On aura donc sa valeur pour chaqueépoque de l'année que l'on voudra considérer. Si on se la donne, on connaîtra dans le triangle PSD' trois choses, savoir: les deux côtés PD' ou A’, PS ou À, et l'angle PD'S qui est 90 —V dans la figure 8, 90° + V dans la figure 9. On pourra donc résoudre ce triangle, et trouver l'angle dièdre SPD' que je désigne par IT, ainsi que l’arc SD’ ou © qui détermine la direction du rayou solaire, au moment où il se trouve dans le plan de la face ABD, comme on l'avait demandé. Lorsque l'application aura lieu pour la figure 8, c'est-à-dire lorsque g sera positif dans nos formules, l'angle dièdre II, étant ajoute à P', donnera pour somme l'angle dièdre SPZ, que le plan horaire actuel du soleil forme avec le méridien local au moment où le phénomène a lieu. Cet angle étant divisé par 15 pour le convertir en temps solaire, indiquera l'heure du phénomène, laquelle, dans de telles circonstances, sera toujours post- méridienne pour la face que nous considérons. Après cet instant, le mouvement diurne fera descendre le soleil au delà du plan de la face, et elle rentrera dans l'ombre pour le reste de la journée. Il est d’ailleurs évident qu'elle est éclairée dès le lever du soleil dans tous les temps de l'année, puisque ce lever s'opère toujours à l’orient de la trace AA’. Ainsi l'instant de chaque jour où elle rentre dans l'ombre est le seul élément D'ASTRONOMIE ANCIENNE. ao essentiel à calculer ; et nous venons de voir comme on peut l'obtenir. Lorsque l'application aura lieu pour la figure 9, c'est-à-dire lorsque ? _ sera négatif dans nos formules, l’angle horaire SPZ, qui amène le centre _ du soleil dans le plan de la face, sera égal à P'—II. Le calcul numérique us fera voir que, dans toutes les positions annuelles du soleil, II est | moindre que P';en sorte que P'—JI est positif, même au solstice d hiver. ngle horaire SPZ est donc foujours occidental pour la face orientale > nous considérons, quel que soit le signe de », et quelle que soit la saison l’année que l’on considère. Sa valeur convertie en temps solaire don- l'heure, toujours post-méridienne , à laquelle le soleil abandonne e face après l'avoir éclairée depuis son lever. DA, s'élève, vers l’orient du zénith, exactement comme celle-ci s'élève s l'occident du même point. Elles sont toutes deux disposées symétri- 5 autour 22 plan du DEEE élevé sur l’arête de leur . Les en'est que le plan horaire de cet astre formera, avec le plan du be local , des angles de sens opposés. Ainsi, pour chaque valeur donnée de la distance polaire A, le phénomène s'opérera à des heures équidistantes de midi. Elles seront post-méridiennes pour la face orientale A'DA, et anté- méridiennes pour son opposée occidentale B'DB. Ce sera, sur la première, ne époque de disparition, à laquelle succédera l'obscurité durant tout le este du jour; et ce sera pour la seconde une époque de première illumi- ation, après laquelle le soleil continuera de l’éclairer jusqu’à son coucher. 11 nous suffira donc d’effectuer ces déterminations relativement à la face ntale A'DA ; car nous en déduirons aussitôt leurs analogues pour son e d’être illuminée à un certain jour, et la même heure anté-méri- enne après laquelle l'occidentale commence à l'être, la somme de ces res, c'est-à-dire le double de l’une d'elles, exprimera l'intervalle de ps pendant lequel, ce jour-là , les deux faces sont éclairées à la fois. J'établis donc le calcul pour la face orientale, et je prends la figure 8 mme type de raisonnement. Les formules que nous obtiendrons , d’après s'appliqueront d'elles-mèmes à la figure 9, en rendant o négatif, au lieu 152 SUR DIVERS POINTS de positif que nous allons le supposer. Considérant donc, dans la fig. 8, le triangle sphérique SPD", l'angle en D’, que je désigne généralement par À, y sera compris entre les côtés o et A’, Aïnsi, d’après le 3° cas des triangles sphériques obliquangles de Legendre, le côté À, opposé à l'angle A, sera donné par la formule suivante : (1) cos À — sin © sin À’ cos À + cos @ cos À’. Lorsque les arcs © et À, qui se correspondent, seront ainsi déterminés d'après la valeur assignée arbitrairement à l'un d'eux, on obtiendra l'angle dièdre I, par la relation de proportionnalité des sinus, qui don- nera : sin À sin © ——_——— sin À IL faut maintenant remplacer À par sa valeur spéciale, qui nous est con- (2) sin I — nue. Dans la figure 8 que nous prenons pour type, cette valeur est g0°—V, ce qui change cos A en sin V, et sin A en cos V. On a ainsi pour ce cas: 1) cos À — sin ® sin À’ sin V +- cos @ cos À’, / # ? : cos V sin ® @) moe Si l’on opérait sur la figure 9, À devrait être fait égal à 90° + V, ce qui donnerait pour cos A la valeur — sin V, et pour sin A la valeur cos V, comme précédemment. Les formules (1) et (2) obtenues par cette substi- tution seraient donc identiques aux deux que nous venons de former, sauf que le terme de la première, qui contient sin &, se trouverait avoir acquis le signe négatif, et qu'en outre il faudrait soustraire l'angle II de la valeur de P' au lieu de l'y ajouter, ce qui reviendrait encore à intervertir le signe de sin ® dans l'expression de sin II. On voit donc par là que les for- mules (1) et (2), établies en prenant la figure 8 comme type, s’appliqueront d’elles-mêmes à la figure 9, pourvu que, dans le calcul numérique, on y fasse o négatif, de positif qu'il était auparavant. J'opérerai ainsi dans ce qui va suivre, en considérant toujours la face orientale A'DA. Lorsquel'on se donne ®, et que l’on cherche A et IT, nos deux formules les déterminent directe- ment. Par exemple, si j’on suppose @ nul, ce qui ramène le rayon solaire CS sur l’apothème CD, elles donnent A — A et II — 0, ce qui réduit le triangle à son côté PD, comme cela devait évidemment arriver. La solu- D'ASTRONOMIE ANCIENNE. 153 -cos y, elle donne tango immédiatement. L’équation (2) détermine ite sin Il par la valeur trouvée de ®, en faisant sin A — 1. On à onc, pour ce cas spécial : 1 ne ET on tang A'? sin I] —cos V sin ©. signe négatif de tang o montre que l'illumination tangentielle s'opère ors , le rayon solaire CS étant au sud de l’apothème CD, ce qui, par suite, c qu'à remplacer les angles V et A’ par leurs valeurs qui nous sont ues, pour obtenir 9 et II en nombres. -On trouve ainsi, à l'époque UH—=— 0h,310,53s P— 2h.48m,13, après midi. —240.27.49" H——717°.58,21", ou en temps us avons déja trouvé, en temps.............. Ronedonoe des nc, heure de disparition du soleil sur la face orientale: au temps Des TE ha OO PSE ECC OS cos 2h,16m,20s après midi. suite : heure d'apparition du soleil sur la face occidentale à _ la même époque... PRET RER A In S 8 5 ee à 2b,16.20s avant midi. r les autres temps de l’année, si l’on veut trouver ©, étant donné A, il iut renverser l'équation (1), sous sa seconde forme, afin de dégager sin o. et effet je transporte le terme cos® cos À’ dans le premier membre, puis ve les deux nouveaux membres au carré. Cela y introduit un terme le cos pen sin 9, tirée de l'équation primitive (1). Après avoir ordonné termes du résultat relativement à sin? , on trouve: Le QE + sin* A" sin* V) sin’ — 2 cos À sin A’ sin V sin @— cos’ A — cos’ A; Ja résolvant, on en déduit, après quelques réductions faciles : L 4 cos À sin A’sin V—[cos’A'(cos’A’— cos’A)+-cos?A'sin’A'sim°V}?, ? = — ——— — ————_—_—_—_û—__—_—_Ù_—— cos À'+ sin’À' sin’ V XX: 20 154 SUR DIVERS POINTS Il ne faut prendre que le signe négatif du radical, comme je le fais ici, parce que c'est le seul qui convienne à la question géométrique que nous avons en vue. En effet, la valeur de sin © doit, par construction , devenir nulle quand A est supposé égal à A', ce qui aplatit infiniment le triangle PD'S, et le réduit à son côté sphérique PD/. Or le signe négatif du radical reproduit seul cette condition d'identité. En supposant, comme nous le faisons , l’obliquité de l’écliptique égale à 24°,ona : au solstice d’été N= 0024667 au solstice d'hiver A — 90° + 24° = 114. Ce second angle est le supplément du premier, ce qui rend son cosinus égal et de signe contraire ; de sorte que la partie radicale de sin @ est commune aux deux cas. En substituant successivement ces valeurs dans l'équation précédente, on en déduit celles de 4, d'où l’on tire celle de If; et l'on a ainsi les résultats suivants pour la face orientale quenous considérons : VALEUR et signe deIT REMARQUES. en temps. VALEUR VALEUR etsigne de gen arc. |etsignedeÏlen arc, | Au solst. d'été... 50° 27" ' où 1m 145|TI add. à P':somme 2h 49275 Au solst. d'hiv. . — 16° 55 26" | 1ù 5m 2s |TIsoust.de P':résidur"45mrts | Les mêmes nombres se transporteront à la face occidentale, où ils s'appli- queront à des conditions d'apparition du soleil, sur cette face, aux époques considérées. Alors, en réunissant ces résultats à ceux que nous avons déjà trouvés pour les époques des équinoxes, on aurale tableau suivant, qui montre la marche des phases d'illumination de ces faces pendant une année solaire. J'applique le signe + aux angles horaires qui se réalisent sur la face orientale après midi, et le signe — à ceux qui s’opèrent sur la face occidentale avant midr. D'ASTRONOMIE ANCIENNE. 155 ANGLES HORAIRES de disparition ou d'apparition du soleil sur les faces orientale et occidentale de la pyra- mide, ces angles étant considérés comme positifs après midi et négatifs auparavant. DURÉE de l'illumination sioul- tanée des faces orien- tale et occidentale, dans un même jour. EN ARC. EN TEMPS, es EE Te A + 420 or 46" + 2h 4gm 255 5h 38m 545 Lure 5 + 34° 4° 58" + 2h 16m 90° 4h 32m Los h Solstice d'hiver. ...... + 250 47 53° Æ 1h 43m ros 3h 26m 943 ji lon combine ces résultats avec ceux qui sont relatifs aux faces boréales ons que j'ai résumées dans le texte du mémoire. Pour les embrasser tous ins une même conception, il n'y a qu'à se figurer les quatre faces de la amide prolongées indéfiniment vers le ciel, de manière à former une mide creuse, inverse de la véritable. Lorsque le soleil se trouvera dans espace, les quatre faces de la pyramide solide seront éclairées simultané- ent, et ne porteront point d'ombre sur leur base commune. C’est là ce phénomène d'absence d'ombre, si remarqué dans l'antiquité, comme un ca- ctère presque divin de ces monuments. ences extrêmement curieuses. Mais, pour les obtenir, il faudrait que les 20, 156 SUR DIVERS POINTS scènes religieuses, tracées sur leurs diverses faces , fussent décrites et consi- dérées sous le point de vue des relations de position qu’on leur a données, non moins que pour l'indication individuelle des objets qu’elles repré- sentent. Champollion n’a traité ce sujet qu'accidentellement; et, dans le passage que j'ai rapporté, les relations dont je parle ne sont pas exposées avec assez d'ordre pour qu'on puisse s’en former une idée précise. M. Lenor- mant avait depuis longtemps senti l'importance d'un pareil travail, et sa grande connaissance de l'archéologie égyptienne doit faire regretter vive- ment qu'il n'ait pas pu jusqu'ici s’en occuper. On ne me supposera pas la … prétention d'entreprendre une tâche à laquelle je serais si inhabile. Mais, en rassemblant ici le peu de notions que l’on a déjà recueillies sur ces pyramides, j'ai pensé qu’avec les conseils de mon excellent confrère , je pourrais utilement indiquer aux archéologues quelques considérations gra- phiques, qu’il me semble indispensable de faire concourir à leur étude, pour en rendre les résultats aussi fructueux qu'ils peuvent le devenir. Suivant le témoignage de Champollion , que l'on peut vérifier dans tous les musées, les sculptures tracées sur les diverses faces de ces pyramides funéraires, présentent toujours le dieu Soleil, sous ses trois formes sym- boliques, Phre, Atmou et Fhore, soit séparées, soit réunies dans une même barque symbolique, appelée par les antiquaires la bari céleste, comme figurant le support des personnages divins qui représentent les astres dans leur course révolutive, tant au-dessus qu'au-dessous de l'ho- rizon. Une prière, toujours la même, est écrite en caractères hiérogly- phiques, et adressée à ces divinités au nom des personnages défunts, à l'intention desquels le monument est construit. D'après des textes que Champollion cite, le soleil, sous la forme Pre, à tête d'épervier, paraît présider à la partie orientale du ciel, et, sous la forme 4tmou, à la région occidentale, L'application de la forme Thore, spécialisée par un scarabée, emblème de la génération du monde, semble avoir une acception plus générale, quoique non pas jusqu'à présent aussi évidemment définie. Or, comme me l'a fait remarquer M. Lenormant, dans les idées astrono- mico-mythologiques des anciens, il y a une assimilation constante entre la course diurne du soleil et sa course annuelle. Toujours le semestre d'été est assimilé au temps que le soleil passe au-dessus de l'horizon, pendant le D'ASTRONOMIE ANCIENNE. F7 jour; et le semestre d'hiver, à son séjour dans l’hémisphère inférieur du ciel, pendant la nuit. Par une extension psychologique, la première de ces pério- des s’assimile encore àla phase de la vie humaine sur la terre; la seconde, _àla phase de la mort temporaire, et au séjour des âmes dans les enfers, ou VAmenti égyptien. Enfin, par une dernière application, spéciale pour _ l'Égypte , mais devenue commune à tout le monde ancien, les idées de la récolte des grains et des fruits s’associaient au retour du soleil de sa plus … haute station dans le solstice d'été, vers sa station la plus basse au solstice ver. Aussi le nom du dieu Atmou est-il, en partie, exprimé, dans les hiéroglyphes, par un caractère représentant l'espèce de râteau ou de herse ï est encore aujourd’hui employé en Égypte pour le dépiquage des grains. En effet, en Égypte, la récolte et la rentrée des grains est toujours néces- Sairement achevée et accomplie au solstice d'été, puisque c’est toujours Le que le Nil commence à croître et que linondation se prépare. Un autre emblème qui se voit habituellement reproduit sur les faces des EE funéraires, c’est celui que Champollion traduit par /a monta- - gne solaire. I] s'emploie dans une acception quelquefois simple, quelque- ois double, et il est toujours figuré ainsi : . D’après lestextes rapportés dans la Grammaire égyptienne, pages 311, 328, 362, 424 et …— 503, Champollion le considère comme représentant le soleil surgissant au- ( . dessus de l'horizon oriental , à son lever, ou se plongeant dans l’horizon 1 occidental, à son coucher. Cette interprétation semble indubitable; et, comme me l’a dit M. Lenormant, le caractère dont il s’agit ne fait que ‘eproduire les apparences constantes que l'astre présente, en Égypte, à ces . deux instants. Mais, d’ après les assimilations d'idées indiquées tout à l'heure, À ilpourrait bien aussi avoir occasionnellement d’autres significations ana- ème se voit A accompagné de rayons qui en qe. et quel- _ quefois sans rayons; comme aussi, surmonté du sceptre divin appelé Pat, | ou sans ce sceptre, sur des faces différentes. D’après la fixité des notions | attachées par les Égyptiens à leurs formes symboliques, il est à croire . que cette diversité de détails répondait à une diversité de significations. 158 SUR DIVERS POINTS Enfin, sur certaines faces de ces pyramides, on voit encore des cynocé- phales adorant la montagne solaire, sans rayons ou avec des rayons, et avec ou sans le Pat. Dans d’autres cas, sur une des faces, ils sont figurés adorart la montagne solaire avec ses rayons; et sur l'opposée ils adorent le soleil rayonnant, sans le signe montagne. Probablement ces dispositions différentes ne sont pas sans motif; et il serait essentiel qu'elles fussent dé- crites, avec les relations de position qu'ont entre elles les faces où elles sont tracées. Tous les détails que je viens de mentionner se voient sur les faces des pyramides funéraires qui sont au Musée égyptien du Louvre. Je ne me ha- sarderai point àles spécifier avec plus de précision, manquant de dessinateurs pour les reproduire, et des connaissances archéologiques nécessaires pour les interpréter. Seulement, M. Dubois, le conservateur de cette collection, m'ayant donnéla possibilité de les étudier avec soin, je rapporterai ici deux particularités que j'y airemarquées : la première, c'est qu'elles ne seterminent pas en pointe, mais par une petite plate-forme parallèle à leur base, comme oncroit aujourd'hui être assuré que cela avait lieu pour les pyramides véri- tables. La seconde , c'est qu'ayant mesuré les longueurs des arêtes de leurs bases et de leurs faces, j'ai trouvé que ces plans formaient, l’un avec l’autre, un angle beaucoup plus grand que dans les pyramides de Memphis. Il était de 62° 33"pourune des petites pyramides où je l’ai ainsi calculé, et de 64° bg" pour une autre. Quoique l’état de détérioration des arêtes d’où ces valeurs sont déduites, ne permette pas de les supposer rigoureuses , elles excèdent trop l'angle analogue des pyramides de Memphis, qui est d'environ 52°, pour que l’on puisse supposer que l'on ait voulu se rapprocher de celles-ci, par une imitation intentionnelle de leurs dimensions. Mais les emblèmes divins tracés sur leurs diverses faces, n'en peuvent pas moins y avoir recu des po- sitions relatives, correspondantes aux points del’horizon auxquels ils étaient censés se rapporter. Et l'étude comparée d’un grand nombre de ces monu- ments pourrait très-probablement mettre ces rapports en évidence. ‘4 D'ASTRONOMIE ANCIENNE. 159 NOTE CINQUIÈME. DÉTERMINATION DE L'INTERVALLE DE TEMPS QUI S' EST ÉCOULÉ DEPUIS L'ANNÉE ÉGYPTIENNE DE COÏNCIDENCE LUNISOLAIRE, JUSQU'AU PREMIER RETOUR DU THOT HÉLIAQUE, DANS L'ANNÉE VAGUE DE 365 JOURS. L'année égyptienne dans laquelle la coïncidence lunisolaire est établie, s'étend depuis le 11 novembre de l’année julienne bissextile — 1981, date chronologique, jusqu’au 1 1 novembre de l’année commune suivante—1780. … intervalle qui comprend 365 jours. Dans chacune de ces années , le lever r& éliaque de Sirius à Memphis est censé s'être opéré, selon le calcul, au pie jour julien fixe, le 20 juillet. . L'identité de ces deux 11 novembre julien avec les deux premiers jours du mois de thot vague, s'établit par les tables de concordance. Alors, en Dolacant, dans chacune des années juliennes considérées, ce 11 novembre, ainsi que le 20 juillet précédent, à leur rang ordinal, on aura, par diffé- rence, l'intervalle du lever héliaque au thot qui le suit. Je forme ainsi le tableau de ces résultats, pour la période quadriennale qui s'étend depuis «l'année bissextile —1781, date chronologique, jusqu’à l'année commune, Al — 1778 inclusivement. | He : h ; ANNÉES JULIENNES DATE QUANTIÈME QUANTIÈME NOMBRE 1 1 vs étendu 1% jour delordinal du 1® jour de jours dont le | pour jee thot vague, dans] dethot dans l’an-|ordinal du 20 juil-| ,, juillet précède| N Elo ï HS cette même année| née julienne. let précédent. le 1°* de thotquih B'T i julienne. le suit. k à GE 1781 biss. 11 novemb. Jour 316€ Jour 202° 114 L — 1580 com. 11 novemb. Jour 3:5° Jour 201° 114 A — 17799 com. 11 novemb. Jour 315° Jour 201° 114 F — 1778 com, 11 novemb. . Jour 315° Jour 2o1° 114 (à 160 SUR DIVERS POINTS Pour tirer de ce tableau la date égyptienne du lever héliaque, dans l'année de coïncidence lunisolaire, j'énumère continüment les jours qui la com- posent depuis le 1° de thot qui la commence, jusqu'au 1° de thot de l’année qui suit. Ce second thot se trouve ainsi être le 366° jour de la série. Alors s'établit le calcul suivant : Quautième ordinal da 1° jour de thot, qui suit l'année égyptienne où s'opère la coïnci- denceluni-s0lire. eee rarement jour 366€ Nombre de jours dont le lever héliaque précède ce thot 114 Différence, ou quantième ordinal du lever héliaque dans l'année égyptienne de coïnci- TRE ÉD QE Ge Got en be BAd An Dee de nr Et a Pi oo ou à jour 252€ Gela met donc la date de ce lever au 12° jour de pachon vague, comme Je l'ai dit dans le texte. Si l’on suppose que le 20 juillet de l’année — 1781, à 4" du matin, à Memphis, la longitude du soleil est exactement celle qui commence la période quadriennale des levers héliaques, en laissant ce phénomène fixe à un même jour vague pendant cette tétraétéride, comme le fait Théon, les 114 jours dont sa date devra s’avancer, pour passer du 12° pachon au 1% thot suivant, exigeront 456 années vagues V, lesquelles, traduites en juliennes J, vaudront 456 J —:. 456; ou 4563 — 114). Si l'on ajoute cet intervalle à la date primitive, 20 juillet — 1781, en observant que la position de la bissextile n’est pas changée par cette opération, puisque le nombre 456 contient 114 tétraétérides exactes, on aura les résultats suivants : Date du lever héliaque de Sirius à Memphis, dans l’année julienne bissextile —1781, 20 juillet, on...,........................ —1981 jour 316° Temps qui doit s’écouler delà, jusqu’au thot héliaque suivant. ..... 2 4561— 114) Somme, ou date Julienne du nouveau thot héliaque..,.......... . —1325n jour 202€,ou le 20 juil. Cette date, 20 juillet, nous reporte donc à un lever héliaque ; et, en outre, elle coïncide avec le thot vague de l’année égytienne qui commence dans l’année julienne — 1325, comme on le peut voir par les tables de concordance. Le thot, ainsi rejoint par notre calcul, se trouve donc hélia- que, comme nous le désirions. Chacune des trois années communes qui suivent la bissextile —1781, conduiront à un résultat pareil, c'est-à-dire à un thot concordant avec le D'ASTRONOMIE ANCIENNE. 161 juillet julien, conséquemment héliaque. Par exemple, prenez la deuxième , ou date julienne du nouveauthot héliaque, ...,.,..... —1324 jour vote, ou le 20 juillet. L période quadriennale primitive, dont nous faisons partir notre calcul rétrogradation, nous conduit ainsi à la tétraétéride qui comprend les es juliennes — 1325", —1324, —1323, — 1320;, 148 le jo est, en effet, censé ane PS son) le XX: 21 i LP PIE Seiences Tome L = PI.IIE Seiences , Tome E Z © 1 Fig.6. =" Nord N DÉVELOPPÉES À DANS DES FLUIDES HOMOGÈNES PAR LA LUMIÈRE POLARISÉE, Présenté à l’Académie, le 30 mars 1818, Par M. Aucusrix FRESNEL. : (IMPRIMÉ PAR ORDRE DE L’ACADÉMIE.) . Biot a remarqué le premier que plusieurs fluides ho mogènes jouissent de la propriété de colorer la lumière larisée, et de faire renaître l’image extraordinaire, comme substances cristallisées. Cette belle découverte a démon- que l’action polarisante des corps pouvait s'exercer in- ndamment de l’arrangement des particules, et en con- ce de leur seule constitution. L'analogie me faisait soupçonner depuis longtemps que ces phénomènes de polarisation devaient être accompagnés 21. 16/4 DES COULEURS DÉVELOPPÉES DANS DES FLUIDES HOMOGÈNES de la double réfraction dans les fluides comme dans les cris- taux. La coloration de la lumière s'explique d’ailleurs d’une manière si satisfaisante dans la théorie des ondulations par le concours de deux systèmes d'ondes, qu'il était très-naturel de supposer leur existence, même dans des fluides homo- gènes , en voyant ces fluides développer des couleurs. Néan- moins aucune hypothèse n’avait plus besoin d'être confirmée par une expérience directe. La théorie des interférences indique plusieurs moyens très-simples de reconnaitre les plus légères différences dans la marche de deux systèmes d’ondes sorties d’une source commune. On peut employer à eet effet le phé- nomène des anneaux colorés, par exemple, ou celui des franges produites par le concours de deux faisceaux lu- mineux. J'ai d’abord suivi le premier procédé. Ayant serré deux prismes l’un contre l’autre, de manière à former des anneaux colorés, j'ai fait tomber sur les surfaces en contact la lumière d’une lampe, sous l'incidence de la polarisation complète. Les rayons ainsi réfléchis traversaient un tube de 1",715 de longueur, rempli d'essence de térébenthine. Je me servais d’une lorgnette de spectacle pour bien distinguer les an- neaux , à cause de l'éloignement des prismes. Avec la lunette seule, je n’apercevais pas plus d’anneaux au travers de l'huile de térébenthine qu'avant l'interposition de ce liquide; mais en plaçant un rhomboïde de chaux car- bonatée dans l’intérieur de la lunette, de manière à produire deux images séparées , je voyais dans chacune d'elles un bien plus grand nombre d'anneaux : ils s’étendaient à des épais- seurs de la lame d’air où je n'avais pas pu en découvrir au- 4 PAR LA LUMIÈRE POLARISÉE. 165 avant (1). Or, on ne peut expliquer l'apparition de ces ouveaux anneaux qu'en supposant une diminution dans _ l'intervalle des deux systèmes d’ondes concourant à leur { : : À A production; ou, ce qui revient au même, en supposant xune partie du système d'ondes réfléchi à la première sur- e de la lame d’air, a parcouru le tube un peu plus lente- si il faut admettre que l’essence de térébenthine , comme cristaux, ralentit la Tee de la Dee none Li aux anneaux ne sont formés que par la moitié au plus de lumière qui arrive à l'œil; en sorte qu'ils doivent ètre coup plus faibles que les autres. de cette expérience, que les circonstances qui font re les nouveaux anneaux étant précisément celles qui loppent des couleurs dans l'essence de térébenthine, il possible que la simplification de la lumière soit la cause M. Arago avait fait depuis longtemps une expérience absolument pa- sur des plaques de cristal de roche taillées perpendiculairement à n produit le même phénomène avec des lames de cristal de roche ou ont seulement un ou deux millimètres d'épaisseur, les nouveaux an- se trouvent parfaitement séparés de ceux qui entourent le point de act, et mettent en évidence la double réfraction du cristal. Cette pro- 5 lames HET El être également appliquée à la mesure 166 DES COULEURS DÉVELOPPÉES DANS DES FLUIDES HOMOGÈNES de l'augmentation du nombre d’auneaux apparents. Mais d’abord je répondrai que ces couleurs étaient très-faibles à cause de la grande longueur du tube, et que même, dans certaines positions du rhomboïde de spath calcaire, elles devenaient insensibles ; les deux images ne paraissant plus avoir alors que la couleur propre du liquide. On verra d’ail- leurs que plusieurs autres phénomènes confirment l’hypo- thèse d'une double réfraction dans l'essence de térében- thine. Ayant porté le même tübe dans une chambre obscure, je l'ai dirigé vers un point lumineux , devant lequel j'avais mis une pile de glaces pour polariser la lumière incidente, J'ai placé à l’autre extrémité du tube, sous l’angle de la pola- risation complète, deux glaces non étamées très-légèrement inclinées entre elles, de manière à produire des franges d’une largeur suffisante. Alors, en observant avec une loupe la lumière ainsi réfléchie, j'ai reconnu l'existence de trois systèmes de franges qui se touchaient et se mêlaient un peu les uns aux autres, parce que le tube n’était pas assez long. Le système du milieu, qui provenait de la superposition des franges produites par le concours des rayons qui avaient éprouvé la même réfraction, était beaucoup plus intense que les deux autres, résultant du concours des rayons de réfractions opposées. La lumière n’était pas assez vive pour que je pusse bien distinguer dans ceux-ci la position des bandes obscures du premier ordre; mais il m'a semblé, au- tant que je pouvais en juger, que la distance du centre de chacun des systèmes de droite et de gauche au centre de celui du milieu était de sept largeurs de franges. Il résulte d’une autre expérience plus précise rapportée à la fin de ce PAR LA LUMIÈRE POLARISÉE. 167 * … mémoire, que les faibles couleurs produites par ce tube ap- | 9 partiennent au sixième ordre. Si l'existence de la double réfraction dans l’essence de térébenthine établit une grande analogie entre le phénomène … de sa coloration et celui que présentent les lames minces . cristallisées parallèles à l'axe, ils diffèrent cependant essen- + tiellement sous plusieurs rapports. Dans les lames cristalli- ées, la rotation du rhomboïde de spath calcaire ne fait varier que l'intensité de la teinte sans changer sa nature ; dans l’es- nce de térébenthine , au contraire, le même mouvement du la nature ni à la vivacité des couleurs ; tandis qu’en faisant urner la lame cristallisée dans son plan, l’on augmente ou n affaiblit les couleurs jusqu’à les amener au blanc parfait. - La modification singulière que la double réflexion com- “plète, dans un azimut de 45°, imprime à la lumière polarisée, et qui lui donne les apparences d’une entière dépolarisation , 6 lorsqu'on l'analyse avec un rhomboïde de spath calcaire , ne ui Ôte point cependant, comme on le sait, la propriété de rer les lames cristallisées. Ces teintes ont même autant vivacité que celles produites par la lumière polarisée ordi- üre, et sont seulement d’une autre nature. Or, voici encore différence caractéristique entre l’action des lames cris- isées et celle de l'essence de térébenthine. La lumière nsi modifiée ne se colore plus dans ce liquide, et paraît, à e épreuve, aussi complétement dépolarisée que lorsqu'on fait passer immédiatement au travers d’un rhomboïde de chaux carbonatée. 168 DES COULEURS DÉVELOPPÉES DANS DES FLUIDES HOMOGÈNES A l'extrémité d’un tube de 0",50 de longueur, rempli d’es- sence de térébenthine, j'ai placé un parallélipipède de verre, däns lequel les rayons incidents, préalablement polarisés, éprouvaient deux réflexions complètes suivant un plan in- cliné de 45° sur celui de la polarisation primitive. En regar- dant alors par l’autre extrémité de ce tube avec un rhomboïde de spath calcaire, je n’apercevais plus aucune trace de colo- ration, lorsque les rayons avaient été réfléchis sous une incidence convenable dans le parallélipipède de verre; tandis que la lumière polarisée, qui n'avait pas éprouvé cette modi- fication, développait dans le même tube des couleurs de la plus grande vivacité. Le cristal de roche taiilé perpendicu- lairement à l'axe produit, dans cette circonstance, le même effet que l'essence de térébenthine, La lumière polarisée modifiée par la double réflexion complète ne se colorant plus dans ce fluide, l’analogie indique qu'elle ne doit plus produire qu'un seul système de franges avec l'appareil que j'ai décrit plus haut, et c’est aussi ce que l'expérience confirme. Il est naturel de conclure de ces deux expériences que la lumière ainsi modifiée n’éprouve plus qu'une seule réfrac- tion dans l’essence de térébenthine. Pour vérifier cette con- séquence et m'assurer qu’en effet la lumière en sortant du tube ne contenait plus alors qu’un seul système de franges, je lui ai fait traverser une lame mince cristallisée, et j'ai vu qu'elle développait les mêmes couleurs que lorsqu'elle n'avait pas traversé l’huile de térébenthine, ou du moins « que ces teintes en différaient fort peu, et que cette légère différence tenait à la couleur propre du liquide, comme on PAR LA LUMIÈRE POLARISÉE. 169 le reconnaît en faisant passer la lumière incidente au travers de ce fluide avant sa polarisation primitive. Mais voici une autre expérience assez remarquable qui démontre encore mieux peut-être que, dans le cas dont il s'agit, l'huile de térébenthine rend la lumière telle qu’elle la reçoit. Lorsque des rayons polarisés ont éprouvé la double _ réflexion complète dans un azimut de 45° par rapport au verre, ils reprennent toutes les apparences et les propriétés hide la polarisation parfaite ; c’est un phénomène qui s’expli- . que aisément par la théorie exposée dans mon dernier mé- …. moire. Or, le même phénomène a encore lieu en plaçant … entre les deux parallélipipèdes un tube rempli d'essence de - Quand, au lieu de placer le parallélipipède de verre à l’ex- . trémité antérieure du tube, on le met du côté de l’œil, la lu- … mière polarisée, qui, après avoir traversé l'essence, est réfléchie … deux fois dans ce parallélipipède, offre les caractères d’un . faisceau lumineux qui aurait traversé une lame mince paral- lèle à l'axe. Car, en faisant tourner le rhomboïde de spath . calcaire, on ne fait plus alors varier la nature, mais seulement l'intensité des teintes, qui passent au blanc parfait dans deux positions rectangulaires de sa section principale, lorsqu'elle est inclinée de 45° sur le plan de la double réflexion. Les teintes parviennent, au contraire, à leur plus haut degré de - vivacité, lorsque la section principale du rhomboïde est pa- rallèle ou perpendiculaire à ce plan. Quant à leur nature, 114.0,0 22 170 DES COULEURS DÉVELOPPÉES DANS DES FLUIDES HOMOGÈNES elle dépend de la position du parallélipipède de verre, et est précisément celle des couleurs qu’on obtiendrait directement sans son interposition , en dirigeant la section principale du rhomboïde de spath calcaire dans le même azimut. En modifiant ainsi, par la double réflexion complète, la lumière polarisée qui a traversé l'huile de térébenthine, on peut combiner les effets de ce liquide avec ceux d’une lame cristallisée parallèle à l'axe, comme on combine entre eux les effets produits par deux lames de cette espèce. Mais pour que l'addition ou la soustraction des teintes s’exécutent d’une manière tout à fait semblable, pour obtenir, par exemple, la disparition totale d’une des images avec une lame d’une épaisseur convenable, il faut que le plan de la double ré- flexion soit tourné dans un certain azimut dépendant de la longueur du tube; cet azimut, dans le cas particulier de la compensation parfaite, est celui qui donne la même teinte que la lame cristallisée. Lorsque l'axe de la lame est à gauche du plan de double réflexion, les teintes s'ajoutent ; quand il est à droite, elles se retranchent. Ce serait l'inverse avec un fluide tel que l'essence de citron, dont l’action polarisante s'exerce en sens contraire de celle de l'huile de térébenthine. Dans le dernier mémoire que j'ai eu l'honneur de présenter à l'Académie, j'ai décrit un appareil au moyen duquel on peut, avec une lame cristallisée parallèle à l'axe, imiter les phénomènes de coloration que présentent l’essence de téré- benthine et les plaques de cristal de roche taillées perpendi- culairement à leur axe. Il consiste en deux parallélipipèdes de verre disposés rectangulairement, entre lesquels on place la lame cristallisée, de façon que le faisceau lumineux polarisé éprouve la double réflexion complète en sortant de la lame - à PAR LA LUMIÈRE POLARISÉE. 171 comme avant d’yentrer, mais suivant un plan perpendiculaire L : au premier, ces deux plans étant inclinés l’un et l’autre de 45° sur l’axe du cristal. Ce système de la lame cristallisée et des deux parallélipipèdes de verre ainsi combinés, jouit de lasingulière propriété, qu’on peut le faire tourner sur lui- même entre les deux plans de polarisation extrêmes, comme une plaque de cristal de roche perpendiculaire à l’axe, sans . changer la nature ni l’intensité des couleurs; tandis qu’en . faisant varier un de ces deux plans par rapport à l’autre, on obtient toutes les teintes diverses que présentent, dans le fait éprouver à la lumière incidente la double réflexion com- … plète suivant un plan incliné de 45° sur celui de la polarisa- …—… tion primitive, elle ne se colore plus en traversant cet appa- —… reil, dans quelque azimut qu'il soit tourné ; et lorsqu'elle … éprouve cette modification en sortant de l'appareil , au lieu e la recevoir avant d'y entrer, elle prend encore, comme “avec l'essence de térébenthine en pareil cas, les mêmes appa- ences que si elle était reçue dans le rhomboïde de spath cal- - caire , immédiatement après sa sortie de la lame cristallisée. Enfin, lorsque la lumière incidente, après avoir été com- ( plétement dépolarisée par deux réflexions consécutives avant - d'entrer dans cet appareil, est encore à sa sortie réfléchie — deux fois complétement dans un parallélipipède de verre, elle > trouve ramenée à l’état de polarisation parfaite, comme si on supprimait l’appareil, ou qu’on lui substituät un tube rempli d'essence de térébenthine. Il paraîtrait donc, d’après - cette série de faits nombreux et variés, que cet appareil jouit _ de toutes les propriétés optiques de l'huile de térébenthine. 22: 172 DES COULEURS DÉVELOPPÉES DANS DES FLUIDES HOMOGÈNES C’est aussi ce que j'avais pensé d’abord ; mais un examen plus attentif m'a fait reconnaître qu'il existait une différence no- table entre ces deux espèces de phénomènes. Ayant placé un parallélipipède de verre à l'extrémité d’un tube de 0",50, rempli d'essence de térébenthine, de façon que les rayons qui l'avaient traversé éprouvassent la double ré- flexion complète parallèlement au plan primitif de polarisa- tion, j'ai fait disparaître l’image extraordinaire, qui était d’un rouge violâtre, par l’interposition d’une lame de chaux sul- fatée, d’une épaisseur de o"",12 environ, qui donnait à peu près la même teinte dans l’image extraordinaire, c’est-à-dire le rouge extrème du second ordre, ou le pourpre du troisième. Or, en calculant sur cette donnée la rotation apparente du plan de polarisation des rayons rouges dans l'essence de téré- benthine, d’après la théorie de l'appareil dont je viens de parler, je trouvais un angle plus que double de celui que M. Biot avait déterminé par des mesures directes, et qu'il avait eu la bonté de me communiquer. Pour découvrir à quoi pouvait tenir une aussi grande différence, j'ai voulu observer la série des couleurs produites par l’éssence de té- rébenthine, depuis zéro jusqu’à cinquante centimètres de longueur. Après avoir placé le tube dans une position verti- cale, et fixé la section principale du rhomboïde de spath cal- caire dans le plan primitif de polarisation, j'ai fait écouler graduellement le liquide qu'il contenait; et j'ai été très- étonné de voir l’image extraordinaire passer par un blanc légèrement coloré, et enfin arriver au noir sans offrir le rouge du premier ordre. Il est assez différent du rouge du second ordre pour qu’il soit facile de les distinguer; et, par la seule inspection des | h PAR LA LUMIÈRE POLARISÉE. 173 | teintes,on peut reconnaître que celui qui répond à cinquante - centimètres d'essence de térébenthine, n’est pas du premier . ordre. D'ailleurs, ce qui détermine encore mieux son rang, . c'est l'épaisseur de la lame cristallisée qui faisait disparaître . l'image extraordinaire. On objectera peut-être que cette dis- parition n'ayant lieu qu’à l’aide du parallélipipède de verre, …ilest possible que la double réflexion altère la teinte produite l'essence de térébenthine, et la fasse descendre dans rdre des anneaux. Mais d’abord, en regardant à la fois les ages directes et les images réfléchies, on peut s'assurer que * couleur est absolument la même ; en second lieu, l’expé- ace et la théorie démontrent que la double réflexion, sous as les rayons de la même manière, et que si elle change en néral l'intervalle qui sépare deux systèmes d’ondes pola- és en sens contraires , ce changement, pour chaque espèce rayons, est proportionnel à la longueur de leurs vibrations; sorte qu’il ne peut faire monter ni descendre la teinte, t le rang dépend uniquement du rapport de la partie nstante de l’intervalle aux longueurs des différentes ondes ineuses. Ainsi , il reste constant que l’image extraordi- ire passe du noir au rouge du second ordre, sans passer ar le rouge du premier. ette marche des couleurs, si bizarre en apparence, et si posée à celle qu’on observe dans les anneaux réfléchis, ut s'expliquer d’une manière fort simple, en admettant que a double réfraction dans l'essence de térébenthine n’est pas la même pour les rayons de diverses natures, et qu’elle est is forte pour ceux dont les vibrations sont plus courtes. sait que la double réfraction des rayons violets dans le 17/4 DES COULEURS DÉVELOPPÉES DANS DES FLUIDES HOMOGÈNES spath calcaire est plus prononcée que celle des rayons rouges; il est probable qu'il en est de même dans les autres cristaux; mais ces différences sont très-légères par rapport à la diffé- rence de vitesse entre le rayon ordinaire et le rayon extraor- dinaire. C’est pourquoi nous avons supposé, jusqu'à présent, que l'intervalle qui sépare les deux systèmes d’ondes, était sensiblement le même pour les rayons de diverses couleurs. Mais lorsque la double réfraction devient extrèmement faible, comme dans l'essence de térébenthine, où les vitesses des rayons ordinaires et extraordinaires diffèrent à peine d'un millionième, il est très-possible que la dispersion de la double réfraction (s’il m'est permis de m'exprimer ainsi) soit une partie considérable dela double réfraction elle-même. Il ré- sulterait, de quelques mesures approximatives rapportées dans la suite de ce mémoire, que la double réfraction des rayons violets extrêmes devrait être une fois et demie environ celle des rayons rouges extrêmes. Cette hypothèse ne me paraît point improbable ni même contraire à l’analogie, qu'on ne doit pas rigoureusement étendre jusqu’à la limite; et en l’adoptant, on peut se rendre compte de cette anomalie sin- gulière dont je viens de parler, qui, sans cela, me paraîtrait inexplicable. On conçoit aisément que l’intervalle entre les deux systèmes d'ondes n'étant plus le même pour tous les rayons, comme dans le phénomène des anneaux colorés, ou celui que pré- sentent les lames minces cristallisées, mais changeant avec la longueur des vibrations lumineuses, la marche des couleurs peut être toute différente, puisque cet intervalle est d’autant plus grand que les vibrations sont plus courtes, ce qui fait varier doublement le rapport entre sa longueur et celle des PAR LA LUMIÈRE POLARISÉE. 175 ondes lumineuses. Voilà comment on arrive au rouge du se- cond ordre, lorsque l'intervalle entre les deux systèmes _ d'ondes rouges n’a pas encore dépassé celui qui donnerait le rouge du premier ordre, s’il était le même dans les rayons de _ diverses couleurs. e par les fluides homogènes, la théorie que j'ai exposée 1s le mémoire précédent, pour expliquer les couleurs pro- aites par une lame cristallisée comprise entre deux parallé- pèdes de verre perpendiculaires entre eux. Il est naturel de penser, d'après les rapports intimes qui existent entre ces x classes de phénomènes, qu'ils résultent des mêmes mo- fications générales imprimées aux rayons lumineux, et que différence qu'ils présentent dans la marche des couleurs ent uniquement à ce que la double réfraction n’est pas la ême pour les rayons divers dans les particules fluides, tandis elle est sensiblement constante, au contraire, dans la lame tallisée. Il est évident qu'il faut chercher, dans la constitution in- duelle de ces particules, la cause des phénomènes de co- ion auxquels elles donnent naissance, puisqu'ils sont épendants de leur arrangement, et qu’en même temps ils endent tellement de leur forme, que, selon la nature du ide, la lumière tourne de gauche à droite, ou de droite à che, pour me servir de l'expression de M. Biot. Je suppo- donc qu'elles sont constituées de manière à imprimer x rayons lumineux qui les traversent, les modifications i s éprouvent dans l'appareil dont je viens de parler; c'est- ire que la lumière, à son entrée dans chaque particule et sortie, reçoit la même modification que celle qui lui est 176 DES COULEURS DÉVELOPPÉES DANS DES FLUIDES HOMOGÈNES imprimée par la double réflexion complète, et qu’elle éprouve en outre dans son intérieur la double réfraction. Je vais d’abord démontrer qu’il résulte de cette hypothèse … que les rayons qui ont été réfractés ordinairement ou ex- traordinairement dans une particule ainsi constituée, éprou- vent toujours la même réfraction dans les particules sem- blables qu’ils traversent successivement, quels que soient les | azimuts de leurs axes. Fig. . T, Soit OO (fig. 1) la section principale de la première par= ticule, RR' et TT", les deux plans qui répondent à ceux de, double réflexion dans l'appareil, et que j'appellerai plan. d'entrée et plan de sortie : ils sont, par hypothèse, perpen=, diculaires entre eux, et inclinés de 45° sur la section princi- pale. Soit O,O! la section principale de la seconde particule traversée par le faisceau lumineux R/R,, et T,T, les deux plans suivant lesquels il éprouve, à son entrée et à sa sortie, la modification dont on vient de parler. Elle consiste, comme on l’a vu dans le mémoire précédent, en ce que chaque fais= PAR LA LUMIÈRE POLARISÉE. 177 ceau lumineux se divise en deux systèmes d’ondes polarisés, l’un parallèlement, l’autre perpendiculairement au plan, le premier se trouvant en arrière d’un quart d’ondulation par rapport au second. Vie. O.T. O.R. _ En effet, comme je l’ai observé dans le mémoire précédent, - lorsqu'un système d'ondes se décompose ainsi en deux autres, les vitesses des molécules éthérées, dans leurs oscillations, ne sont pas proportionnelles aux carrés des cosinus et sinus de l'angle OCT, mais simplement au sinus et au cosinus; en sorte que ce n'est pas la somme des vitesses qui est constante, mais somme des carrés des vitesses. C’est une conséquence du ncipe de la conservation des forces vives dans les vibra- ns des corps élastiques. D Par l’action du plan d’entrée R,R, de la seconde particule, chacun de ces faisceaux lumineux se divisera en deux autres tèmes d'ondes, ce qui en produira quatre. Si l’on repré- ente par p l’angle OCO, que la section principale de la se- de leurs vibrations seront : 1188/0.4 23 178 DES COULEURS DÉVELOPPÉES DANS DES FLUIDES HOMOGÈNES V/=:sinp.0. À V/2.c0s p.0, ; V/2.c05p.0: N V/2.sin p.0. 2 à 2 Tr 2 Fa 2 UNIART OS TT O.R.R,. O.R.T:. Par le fait de la double réfraction de cette particule, chacun de ces faisceaux se divisera ensuite en deux autres, polarisés parallèlement et perpendiculairement au plan O,0;’. Les in- tensités des systèmes d'ondes réfractés ordinairement dans la seconde particule, seront représentées par les expressions suivantes : LE L 1 R: ES A top D ds Se see —;sinp.0. OMPRFO ODA: 07 O.R.R,.0.. OR EAU Ajoutant les expressions qui ont la même caractéristique, et faisant attention que : à la caractéristique équivaut au signe moins, ona:— sin p. O et cos p. O,. Or, la résultante de ces deux systèmes d'ondes, différant d'un quart d’ondu- lation, est L/O7. sin p+ O°.cos p où O. Ainsi les ondes pro- venant de la réfraction ordinaire de la première particule, subissent en entier la réfraction ordinaire dans la seconde, parce que, dans l’une et dans l’autre, la section principale est tournée du même côté par rapport au plan d’entrée. On peut encore vérifier ce principe en calculant l'intensité de la lumière polarisée, suivant le plan EE, perpendiculaire à la section principale O,0}'. On trouve, pour les quatre fais- ceaux constituants : En p.0: ST OS + “sin p.O, += cosp.0, : 2 = 2 2 = O.T.R,.E, OFRAETE? ñ nie —,cospeO: , —;sinp.0 [4 O.R.R,.E, OUR MEN PAR LA LUMIÈRE POLARISÉE. 179 On voit que les expressions ayant la même caractéristique, _ sont égales et de signes contraires, en sorte que ces quatre systèmes d’ondes se détruisent mutuellement. Ainsi, aucun des rayons ordinaires, sortis de la première particule, ne peut éprouver la réfraction extraordinaire dans la seconde. Si l’on retourne celle-ci de manière que le plan de sortie devienne plan d'entrée, il est évident qu'il se trouvera placé du même ; côté relativement à la section principale, et, par conséquent, les rayons y seront encore réfractés de la même manière. —. Jlest à remarquer que les calculs que nous venons de faire …— ét le résultat auquel ils nous ont conduit, sont indépendants … des rapports d'intensité des doubles réfractions exercées par | ces particules, et que nous avons supposé seulement qu’elles … étaient constituées de la même façon, c’est-à-dire que leurs axes étaient tournés du même côté par rapport à leur plan - d'entrée. Ainsi, quelles que soient d’ailleurs les inclinaisons, a ou même la nature Le diverses particules traversées succes- _ tinueront à subir la même espèce de réfraction dans toute + l'étendue du fluide. L'hypothèse que nous avons adoptée j peut donc expliquer (ce qui, au premier abord, paraissait … tion exercée par des particules aussi irrégulièrement arran- gées, ne développe que deux systèmes d'ondes lumineuses Es le fluide. ; Quand il est homogène, les effets produits par toutes les rticules s'ajoutent, et l'intervalle entre les deux systèmes _ d'ondes doit augmenter en proportion de la longueur du … trajet. Quand le fluide est composé de deux espèces diffé- 23. 180 DES COULEURS DÉVELOPPÉES DANS DES FLUIDES HOMOGÈNES rentes de particules, mais dont les axes sont tournés de la même manière, par rapport à leurs plans d'entrée, leurs effets s'ajoutent, si dans les unes et les autres c’est la même réfrac- tion qui est la plus rapide; et ils se retranchent, au contraire, si les réfractions les plus rapides sont de natures opposées. C'est l'inverse lorsque les particules ont leurs axes tournés en sens contraires relativement à leurs plans d’entree. On voit aussi que le mélange d'un nombre quelconque de fluides de natures diverses, dont les particules seraient ainsi constituées, doit produire sur la lumière le même effet qu’elle éprouverait si elle traversait successivement ces différents fluides. Ainsi le problème, dans ce cas général, peut toujours être ramené au cas particulier d’un fluide homogène. Dans le mémoire précédent, en exposant la théorie de l’ap- pareil que je prends ici pour modèle de la constitution des particules, j'ai démontré que l'intensité et la position des différents systèmes d'ondes qu'il produit, réunis dans un plan de polarisation quelconque, sont indépendantes de l’azi- mut dans lequel cet appareil est dirigé, et ne dépendent que de l’inclinaison réciproque des deux plans de polarisa- tion extrêmes. On peut donc supposer toutes les particules du fluide tournées de façon que leurs sections principales soient parallèles entre elles : alors, si l’on considère une de ces particules comprise entre deux autres, on voit que son plan d'entrée est perpendiculaire au plan de sortie de celle qui la précède, et fait disparaître ainsi la différence d’un quart d’ondulation produite par celui-ci. De même son plan de sortie est perpendiculaire au plan d'entrée de la particule suivante, qui détruit, par conséquent, la modification que celui-là avait imprimée à la lumière, On peut donc supprimer, PAR LA LUMIÈRE POLARISÉE. 181 ar la pensée tous les plans d'entrée et de sortie intermé- ires, en conservant seulement le plan d’entrée de la pre- mière particule et le plan de sortie de la dernière. Il est évi- it alors que la formule que j'ai calculée pour l'appareil applique au fluide. Si donc on représente par o et e les nombres des ondulations ordinaires et extraordinaires dans le fluide, et par à l’angle que le plan primitif de polarisation it avec la section principale du rhomboïde de spath calcaire, i sert à développer les couleurs, on aura, pour l'expression rale de l'intensité des vibrations lumineuses dans l’image naire : 40m = cos(2i— 2#(e—0)) ñ ou, F. cos(i—m(e—0o)), tant l'intensité du faisceau incident; et, pour l’image ex- ordinaire, F. sin (2—r(e— 0)). ne cristallisée, comprise entre les deux parallélipipèdes de re, était à droite du premier plan de double réflexion ; elles pliquent en conséquence aux fluides dont les particules eur section principale à droite de leur plan d'entrée. Dans as inverse, les formules deviennent : F. cos (à + r(e—0)), r l’image ordinaire, et F. sin (2+r(e— o)), pour l'i- raître la même espèce de rayons de l'image extraordi- 'e, était proportionnel au chemin parcouru dans le fluide. 182 DES COULEURS DÉVELOPPÉES DANS DES FLUIDES HOMOGÈNES ir(e—o)=0; oui +r(e—0o), les signes supérieurs répondant au cas où les particules ont leur section principale à droite de leur plan d'entrée, et les signes inférieurs au cas contraire. Or, e et o sont proportionnels au chemin parcouru dans le fluide; par conséquent, l’angle z doit aussi lui être proportionnel. Si l’on suppose e > 0, la première valeur de z sera positive et la seconde négative. Les angles ayant été comptés de sauche à droite dans les calculs, on doit conclure de ces valeurs de : que, dans le premier cas, la lumière tournera de | gauche à droite, et, dans le second, de droite à gauche, selon l'expression de M. Biot, qui est le plus simple énoncé des apparences du phénomène. Si l’on suppose, au contraire, e € 0, la lumière tournera de gauche à droite, lorsque la section principale des particules sera à gauche de leur plan d'entrée; et de droite à gauche lorsque ce plan sera à gauche de la section principale. Il est clair, d’après cela, que, lorsque la lumière polarisée » traverse successivement deux fluides qui font tourner la lu- mière en sens contraires, les effets produits par l’un sur chaque espèce de rayons se retranchent des effets produits par l’autre; en sorte que, dans une lumière homogène, on fera toujours disparaître complétement l’image extraordi- naire, en raccourcissant ou rallongeant convenablement un 1 des tubes. Mais il pourrait se faire que, dans la lumière blanche, » cette compensation fût impossible, si, par exemple, les varia- } tions de la double réfraction des rayons divers ne suivaient … pas la même loi dans les deux fluides, parce qu'’alors les. rapports de longueurs, qui produiraient la compensation. PAR LA LUMIÈRE POLARISÉE. 183 xacte pour une espèce de rayons, ne la produiraient pas our une autre. . Pour compléter la théorie que je viens d'exposer, il me e à expliquer deux phénomènes décrits au commence- de ce mémoire. Lorsque la lumière polarisée a recu, ns un azimut de 45°, la modification que lui imprime la ble réflexion complète avant de traverser l'huile de téré- hine, elle n'y développe plus de couleurs; et quand elle léprouve cette modification qu'après être sortie du tube, teintes des deux images demeurent constantes pendant la ion du rhomboïde de spath calcaire avec lequel on les rve, et ne varient que d'intensité seulement, en allant qu'au blanc parfait, comme celles des lames cristallisées irallèles à l'axe. raison du premier phénomène est bien simple : la lu- e n'éprouve plus alors dans le liquide qu’une seule es- de réfraction. En effet, nous avons vu que les rayons olarisés parallèlement ou perpendiculairement à la section cipale d’une particule, après avoir éprouvé en en sortant modification dont il s’agit, ne pouvaient plus subir qu’une e espèce de réfraction dans la particule suivante. La lu- e polarisée, ainsi modifiée, ne peut donc être réfractée d’une seule manière dans l'essence de térébenthine, et ne produire, en conséquence, qu’un seul système d’ondes. 184 DES COULEURS DÉVELOPPÉES DANS DES FLUIDES HOMOGÈNES Fig. 2. N' Je vais m'occuper maintenant du cas où la lumière ne reçoit » cette modification qu’à sa sortie du tube. Soit PP (fig. 2) le w plan primitif de polarisation. Nous avons vu que l’action des particules sur les vibrations lumineuses était toujours la même, dans quelque azimut que leurs axes fussent tournés. Nous pouvons, en conséquence, supposer toutes les sections principales inelinées de 45° sur le plan de la polarisation pri- mitive, de façon que leurs plans d'entrée ou de sortie coïn=. cident avec ce plan. Je supposerai, par exemple, que ce sont les plans d'entrée. Ayant ainsi tourné toutes les sections prin= cipales dans la même direction, on peut supprimer tous les plans d'entrée et de sortie, excepté le premier et le dernier. Le premier coïncide avec PP’, par hypothèse, et le dernier, représenté dans la figure par NN’, lui est perpendiculaire, Soit RR’ le plan suivant lequel la lumière est réfléchie deux, fois dans le parallélipipède de verre, après avoir traversé l'es sence de térébenthine; soit enfin SS’ la section principale du rhomboïde de spath calcaire avec lequel on développe les PAR LA LUMIÈRE POLARISÉE. 185 couleurs. Je représente l'angle PCR Par 7; et l'angle PCS “par ï. Le plan d’entrée, coïncidant avec celui de la polarisation primitive, ne ibihe pas la lumière. Par la double réfraction des particules, elle se trouve divisée en deux systèmes d'ondes, … polarisés, l’un suivant la section principale OO", l’autre sui- vitesse des molécules éthérées dans les vibrations du fais- ceau incident, leurs vitesses, dans les ondes ordinaires et ex- ee n 3 et Vs P P.0. .E'. o et e représentent toujours les nombres d’ondulations or- . dinaires et extraordinaires, exécutées dans l'essence de téré- _ benthine par l'espèce de rayons que l’on considère. Par . l'action du plan de sortie NN’, chacun de ces faisceaux se di- . visera en deux autres; ce qui donnera en tout les quatre fais- _ ceaux suivants : I I I -F = AE — F.. DE THE 5h BONE SR OP APS ANS PET EP. La double réflexion dans le parallélipipède de verre divise ‘ensuite chacun de ces quatre faisceaux en deux autres, pola- risés , l’un suivant le plan de réflexion RR', l’autre suivant le plan perpendiculaire TT’. Enfin, par l’action du rhomboïde spath calcaire, chacun de ces huit faisceaux se trouve di- sé en deux autres, polarisés parallèlement et perpendicu- rement à sa section principale SS”- Il suffit de considérer ceux qui concourent à la formation d’une des images, l’image 142.6, 24 1 — F,,: 2 CRE 186 DES COULEURS DÉVELOPPÉES DANS DES FLUIDES HOMOGÈNES ordinaire, par exemple. Leurs intensités sont représentées par les expressions suivantes : P-O:N-R-S: PONS" P.0.P.R.S. PDP RESE P.E.N'.R.S. PIEEN.TESE P'ECPRS. PYEP TS". an ; = cs : +; sin r. cos(é r).Fo+1 + = cos r.sin(?—r). F4: + = cos r.cos(i—r).F +! — < sin r,sin(i—r).F, LE k : —;sin r.cos(i —r).F, 4! I te. L — ; cos r.sin(i—r).Fe+z + 2 cos r.cos(i—r).F.4t —_ =: sin r.sin(é— r).F. Ajoutant les expressions qui ont la même caractéristique, et observant que + à la caractéristique équivaut au signe moins, ces huit faisceaux se réduisent à quatre : _ : sin r(cos(à —r) + sin(i—r) )F, 1 : #7. ; + 3 cos r(cos(ë—r) + sin(é—r))Fs + : me : . +; sin r(cos(i —r) — sin(i—r) }F. I : mt SU += cos r(cos(i—r) — sin(i—r))F. + : A l'inspection de ces formules, on voit d’abord que l'image passe au blanc lorsque à — r = 45°, parce qu'’alors les deux derniers faisceaux s'évanouissant , l'intensité de la lumière devient indépendante de la différence entre c et o, et par PAR LA LUMIÈRE POLARISÉE. 187 … conséquent est la même pour toute espèce de rayons. La couleur de l’image atteint, au contraire , son plus haut degré _ de vivacité, lorsque i—r est égal à zéro ou à go°, c’est-à- dire, lorsque la section principale du rhomboïde de spath calcaire est parallèle ou perpendiculaire au plan de la double _ réflexion; en effet, les expressions dont la caractéristique fonction de e deviennent alors égales à celles dont la aractéristique contient o. Il est aisé de voir aussi que la rotation du rhomboïde, c’est- ire, les variations de : ne doivent pas altérer la nature e la teinte. En effet, considérons la résultante des deux remiers systèmes d'ondes : les variations de à n’affectant que e facteur commun cos (i—7r) + sin (i—r), ne peuvent pas changer la position de cette onde, mais seulement son inten- sité. Par la même raison, ces variations ne changent pas non plus la position de l'onde résultant du concours des deux tres faisceaux. Ainsi l'intervalle entre ces deux résultantes, qui seul détermine la nature de la teinte, n'éprouve aucun changement pendant la rotation du rhomboide. - Il n’en est pas de même des variations de r; comme elles de AE : : à affectent inégalement les deux premiers faisceaux , dont l’un position de leur résultante, Elles changent aussi la posi- de l’autre résultante, et en sens contraire , à cause de opposition de signe entre le premier et le troisième fais- au. Mais ceci devient plus évident encore en calculant la ‘ésultante totale de ces quatre systèmes d'ondes. On trouve our l'expression générale de l'intensité de ses vibrations : +2 (cos?(é 7) — sin®(ë—r)) cos(2r — 2m(e—0)), 24. 188 DES COULEURS DÉVELOPPÉES DANS DES FLUIDES HOMOGÈNES F L CE = cos a(à == ÿ;) cos(2r— 2T(e — o))- Il est clair, d’après cette formule, que les variations de n'affectent que l'intensité de la teinte (1), tandis que celles de r changent sa nature. Quand rest égal à 45°, par exemple, cos (2r—92r(e—0)) devient cos 2 r (5— (e—0)), et la couleur de l’image est celle qui répond à un changement d'un quart d'ondulation dans l'intervalle e—0 compris entre les ou, deux systèmes d'ondes. Quand r est égal à zéro, au contraire, la teinte répond exactement à l'intervalle e— 0; c'est celle qu'on pourrait appeler la teinte fondamentale. La formule devient alors I I = o Fy/: + — cos 2i.cos 27e -— 0)» 2 ‘2 c'est précisément l'expression générale de l'intensité des rayons lumineux dans l'image ordinaire, pour le cas parti- culier d’une lame cristallisée dont l'axe est placé dans un azimut de 45°, par rapport au plan primitif de polarisation. Si la double réfraction exercée par l'essence de térébenthine sur les différentes espèces de rayons était sensiblement : constante , comme dans les cristaux, il en résulterait qu'on (1) Le maximum d'intensité de la teinte répond à i—7r, comme on l'avait déjà reconnu par la seule inspection des faisceaux constituants. La formule devient alors | Fy/: a : cos(2r— oT(e — o)) : ON EE cos(r — T(e — o)). Ainsi la teinte est précisément celle qu'on observait avant l'interposition du parallélipipède de verre, dans la même position du rhomboïde de spath calcaire. PAR LA LUMIÈRE POLARISÉE. 18ÿ sée d’une épaisseur convenable, en tournant le parallélipi- e de facon que le plan de double réflexion füt parallèle vibrations lumineuses. On conçoit même que la loi de variations pourrait être telle, que toute compensation our concevoir nettement les conditions nécessaires de je compensation , au lieu de rapporter à une même unité e longueur les intervalles compris entre les deux systèmes londes dans l'essence de térébenthine et dans la lame cris- ombres correspondants de la lame cristallisée, la compen- n exacte est possible; car il résulte de cette hypothèse les nombres de la lame cristallisée sont égaux aux nom- ppose à la compensation exacte. Mais d’après la formule * F. AE + = cos 2(—7r) cos(2r — 27(e— 0)) ” 190 DES COULEURS DÉVELOPPÉES DANS DES FLUIDES HOMOGÈNES donne à r, d'introduire la fraction que lon veut dans la parenthèse 2r— 27 (e—o), et de faire disparaître cette dernière discordance. C’est donc cette dernière fraction qui détermine l’azimut dans lequel il faut tourner le plan de double réflexion pour obtenir la disparition complète d’une des images. D'après quelques expériences de ce genre, auxquelles je « n'ai pas encore pu donner toute la précision dont elles sont susceptibles, il m'a semblé que la condition que je viens d’énoncer était sensiblement satisfaite dans l’essence de térés « benthine ; car j'ai observé des disparitions complètes d’une … des images, du moins autant que j'en ai pu juger. La première expérience que j'aie faite est celle dont j'ai déjà parlé au commencement de ce mémoire. Ayant rempli d'huile de térébenthine un tube de 0",50 de longueur, j'ai … fixé à son extrémité postérieure un parallélipipède de verre dans lequel les rayons émergents éprouvaient la double M réflexion complète suivant un plan parallèle à celui de lan polarisation primitive : alors, en plaçant entre ce paralléli- pipède et le rhomboïde de spath calcaire une lame de sulfate de chaux de 6"",12 environ d'épaisseur, et en inclinant son axe à droite de 45° par rapport au plan de double réflexion, « je faisais disparaître l’image extraordinaire qui était d'un rouge violtre ou pourpre du troisième ordre. Une lame de 4 sulfate de chaux de o"",12 d'épaisseur ne répond pas tout à fait à cette teinte dans la table de Newton; mais comme. il fallait incliner un peu cette lame perpendiculairement à son axe pour obtenir la disparition complète, j'ai estimé que le tube de 0",50 devait être compensé par une lame de sul- J fate de chaux répondant au nombre 21 dans la première. ? PAR LA LUMIÈRE POLARISÉE. 191 olonne de la table de Newton. Si l’on calcule la rotation couleurs que présente l'essence de térébenthine depuis usqu'à une longueur de 0",50, on a vu qu'il devait y ons qu'ils éprouvent en traversant un centimètre d’es- de térébenthine, savoir : Rayons orangés. . . 2°,99 Rayons jaunes . . . 3°,36 Rayons verts . .. 3°,90 Rayons bleus: . . . 4°,48 Rayons indigos. . . 4°,96 Rayons violets . . . 5°,49 sur un parallélipipède de verre, je lai placée à l’extré- d’un appareil rempli d'essence de térébenthine, dont je herché quelle était celle qui produisait la compensation us exacte, et dans quel azimut il fallait placer le plan uble réflexion du parallélipipède pour faire disparaître plétement une des images. J'ai trouvé pour cette lon- :2",03; et, pour l'azimut, 35° environ à gauche du plan 192 DES COULEURS DÉVELOPPÉES DANS DES FLUIDES HOMOGÈNES de polarisation; c'était l’image ordinaire qui disparaissait. Il en résulte que, pour avoir la rotation produite par ce tube, il faut d’abord retrancher 90° — 35°, ou 55°, de la … rotation qui serait produite par la lame de 0"",46, et qui est de 1145°,8 pour les rayons rouges moyens. Il faut, en. outre, en soustraire un nombre entier de demi-circonféren- ces, dépendant aussi de la différence de marche des teintes » produites par la lame et par l'essence de térébenthine. Mon appareil ne me permettant pas de les suivre depuis 0,50. jusqu’à 2",03, j'ai calculé ce nombre d’après l'expérience w précédente, certain de ne pas me tromper d’une demi-cir-. conférence; et j'ai vu ainsi qu'il fallait retrancher trois demi- circonférences ou 540°. La rotation des rayons rouges pro-. duite par un trajet de 2,03 dans l'essence de térébenthine est donc de 550°,8 ; divisant cette quantité par 203, on à pour la rotation des rayons rouges dans un centimètre ,. »,71 (1). Ge résultat s'accorde fort bien avec celui que, M. Biot a obtenu par la mesure même des angles, si du moins. ce sont des rayons rouges 7170yens qui dominaient dans la, lumière dont il s’est servi. E En faisant le même calcul relativement aux autres rayons,* on trouve les angles suivants : Rayons orangés. . . 3°,07 Rayons jaunes . . . 3°,42 Rayons verts . . . 3°,9r Rayons bleus . . . 4°,44 4 Rayons indigos. . . 4°,87 à Rayons violets . . . 5°,35 PAR LA LUMIÈRE POLARISÉE. 193 Ces résultats diffèrent sensiblement de ceux déduits de l'expérience précédente; et les bases du calcul sont en effet … assez différentes; car si, par une proportion, en partant des . données de la seconde observation, on cherche quelle lon- % eur d'essence de térébenthine doit être exactement com- sée par une lame de sulfate de chaux répondant au mbre 21 de la première colonne de la table de Newton, n trouve 0,548 au lieu de 0",50. Malgré les difficultés qui résultaient de la plus grande ngueur de l’appareil dans la seconde expérience, et qui Jouvaient être des causes d'erreur, je suis porté à croire que résultats qui en découlent sont plus exacts que les pre- iers, non-seulement parce que les mesures et les observa- ons ont été faites sur des quantités plus grandes, mais core parce que j'avais réfléchi davantage aux précautions prendre pour approcher de l'exactitude. Néanmoins je ne regarde pas non plus ces derniers résultats comme fort acts, parce que l’appareil n’était pas disposé d’une ma- ère assez commode pour faire avec précision des obser- vations aussi délicates (1). Avant d’avoir l'honneur de les es et extraordinaires ne diffèrent dans leur vitesse que de Re à , 1.073.000 es rayons violets ordinaires et extraordinaires de fais Led Rs en sorte 1.170.000 ue la double réfraction des rayons rouges est à la double réfraction des ayons violets comme 1 est à 1,34. …(x) Il m'a semblé que les teintes produites par les 2,03 d'essence de ébenthine étaient un peu moins faibles que celles de la lame de 0,46. traversant 2,60 de cette huile essentielle, la lumière polarisée présen- tencore une coloration appréciable ; ce qui paraîtrait établir une petite érence entre les phénomènes et l'hypothèse d’une compensation parfaite l'interposition d’une lame de sulfate de chaux. 180.0 25 194 DES COULEURS DÉVELOPPÉES DANS DES FLUIDES, ETC. présenter à l’Académie, j'aurais désiré répéter l'expérience avec un appareil mieux disposé, et vérifier ces angles par des mesures directes de la rotation dans la lumière homogène ; mais d’autres recherches m'obligent d'abandonner celles-ci , du moins pour quelque temps. J'ai fait voir comment on pouvait distinguer les différents phénomènes que présente l'essence de térébenthine, en sup- posant que chacune de ses particules jouit de la double réfraction, et fait éprouver aux rayons lumineux, à leur entrée et à leur sortie, la même modification que leur imprime la double réflexion complète dans l’intérieur des corps trans- parents. La définition de ces modifications dans l’état actuel de la théorie est assez compliquée. Il est possible cependant qu'au fond l'hypothèse soit plus simple qu'elle ne le paraît. I est certain du moins que les phénomènes ne peuvent pas être présentés plus simplement que par la formule générale: F. cos (ë + r(e— 0) ), à laquelle cette hypothèse m'a conduit. Il me paraît très-probable ,en conséquence, que cette formule est effectivement l'expression de la résultante de tous les mouvements divers des ondes lumineuses dans l'essence de térébenthine. Mais il est possible que ces mouvements élé- mentaires ne s’exécutent pas précisément comme je l'ai supposé. Quoi qu'il en soit, la théorie que je viens d'exposer a l’avantage de rattacher la coloration des fluides homogènes dans la lumière polarisée aux mêmes principes que celle des lames cristallisées ; elle indique les points de contact de ces phénomènes, dont les apparences sont si différentes; et sous ce rapport elle peut être , ce me semble, de quelque utilité pour la science. MÉMOIRE SUR RÉFLEXION DE LA LUMIÈRE, Présenté à l’Académie, le 15 novembre 1819, Par M. Aucusrin FRESNEL. (IMPRIMÉ PAR ORDRE DE L'ACADÉMIE.) … La théorie des ondulations donne une idée nette et précise de ce qui constitue le poli spéculaire, comme je l'ai observé dans le premier mémoire que j'ai eu l'honneur de soumettre ‘Académie. Il résulte, du principe desinterférences, que la face d'un miroir doit réfléchir régulièrement la lumière ous toutes les incidences, lorsque ses aspérités sont très- ites relativement à la longueur d’une ondulation lumineuse. ais, comme les ondes lumineuses qui produisent la sensa- des diverses couleurs ont des longueurs différentes, il de cette définition du poli qu’elles ne doivent pas exiger ites le même degré de petitesse dans les aspérités de la u urface pour être régulièrement réfléchies ; et que, relative- 25. 196 DE LA RÉFLEXION gues, une surface peut être encore un peu polie, lorsqu'elle ne l’est plus du tout pour les ondes violettes. Il serait sans doute bien difficile, dans le travail d’un mi- roir, d'arrêter le poli à ce degré intermédiaire où il permet- trait, sous l'incidence perpendiculaire , une réflexion régulière assez sensible des rayons rouges, en dispersant entièrement les rayons de l’autre extrémité du spectre. Mais il est un moyen bien simple de vérifier cette conséquence remarquable de la théorie avec un miroir seulement douci; c’est de l’in- cliner graduellement sur les rayons incidents. On sait que, sous des incidences très-obliques, des surfaces qui ne sont pas polies , mais seulement dressées, peuvent présenter des images régulières et brillantes des objets. La raison en est que l’obliquité diminue les différences de chemins parcourus par les rayons réfléchis sur les petites éminences ou les par- ties rentrantes des aspérités de la surface; et l’on conçoit aisément que, sous certaines inclinaisons, ces différences de chemins parcourus peuvent être déjà assez petites par rap- port à la longueur d’une ondulation rouge, pour permettre un commencement de réflexion régulière des rayons rouges, tandis qu’elles sont encore trop grandes, par rapport aux rayons violets, pour qu'ils se réfléchissent régulièrement en quantité sensible. On obtient de cette manière , en faisant varier l’obliquité des rayons incidents, les mêmes effets qu’on obtiendrait sous l'incidence perpendiculaire en changeant progressivement le degré de poli de la surface; et l’on voit sous une certaine inclinaison l’image régulièrement réfléchie d'un objet blanc prendre une teinte fauve rougeâtre assez prononcée , ainsi que M. Arago et d’autres physiciens peut- être l'avaient déjà remarqué. DE LA LUMIÈRE. 197 J'ai analysé le phénomène dans la chambre obscure en d'acier simplement doucis; et j'ai vu disparaître successi- vement le violet, l’indigo, le bleu et une partie du vert, en diminuant l'obliquité des miroirs; tandis que le rouge ex- trèême, beaucoup plus obseur que le bleu et cette portion du vert dans les rayons incidents, continuait cependant à don- ner une image aussi distincte que celle qui résultait de la flexion des rayons jaunes et orangés. Je n'ai pas pu parve- à faire disparaître entièrement le vert situé près du jaune ectre solaire. Mais on en sera peu surpris si l’on réfléchit que ondulations vertes ne diffèrent des ondulations rouges rte, est bien près de produire aussi la discordance com- - plète entre les rayons rouges. - On voit ainsi l'expérience confirmer le principe d'Huy- s et celui des interférences dans toutes les conséquences e l’on en peut déduire, sans faire entrer en considération lesquels on n’a encore aucunes notions positives. Ces ils principes nous indiquent les lois de la diffraction, où les corps qui l’occasionnent ne jouent d’autre rôle que d’in- cepter ou retarder une portion des ondes lumineuses. Ils iffisent aussi à l’explication des lois de la réfraction et de là réflexion , soit que la surface réfléchissante ait reçu un poli parfait ou grossier, soit qu’elle ait une étendue indéfinie ou très-limitée, du moins quant à ce qui concerne la marche rayons ; car le rapport d'intensité entre le rayon incident 198 DE LA RÉFLEXION et le rayon réfléchi sous différentes obliquités n’a pas encore été déterminé par la théorie des ondulations. Il est clair que ce rapport doit dépendre du pouvoir réfringent du milieu à la surface duquel la réflexion s'opère ; mais on ignore encore la forme de la fonction qui exprime cette relation. Pour résoudre ce problème difficile, il faudrait connaître d’abord toutes les causes de la réfraction, ou, ce qui revient au même, du raccourcissement des ondes lumineuses dans le milieu réfringent. Tout ce qu'on sait, c’est que chaque es- pèce d'ondes doit avoir évidemment la même longueur dans le même milieu, quelle que soit la direction suivant laquelle elles le traversent, si ce milieu est homogène et n’affecte pas, comme les substances cristallisées, un arrangement régulier dans ses particules. Cette constance de la longueur d’ondula- tion dans le même milieu suffit pour expliquer la seule loi connue de la réfraction, le rapport constant du sinus d'in- cidence au sinus de réfraction. Mais quelle est la cause du raccourcissement des ondes lumineuses dans les corps denses? Est-ce seulement une plus grande densité de l’éther qu'ils contiennent, celle de leurs propres particules, ou ces deux causes à la fois? Je n'ai pas été longtemps à douter de la justesse dela pre- mière hypothèse, que j'avais adoptée d’abord, paree qu’elle est plus facile à suivre dans ses conséquences. En songeant combien la force répulsive des molécules éthérées est consi- dérable relativement à leur masse, j'ai pensé qu'il était peu probable que l'attraction des corps pondérables püt aug- menter d’une manière sensible la densité de ce fluide; car il faut bien supposer que les particules de ces corps possèdent aussi un pouvoir répulsif, qui, d’après l’analogie, doit s’exer- DE LA LUMIÈRE. 199 cer plus énergiquement sur les molécules de l’éther, éminem- ment répulsives , que sur les molécules pondérables, où cette _ répulsion est contre-balancée par une attraction puissante. . D'ailleurs , en admettant même cette plus grande densité de … Véther dans les milieux réfringents, elle ne suffirait pas pour - expliquer la dispersion du spectre solaire et la double réfrac- F tion, où la nature et l’arrangement des molécules pondérables “ont une influence qu’on ne peut méconnaître. Mais, dira-t-on, n'est-il pas possible qu’elles jouent un le essentiel dans ces phénomènes secondaires, tandis que la grande densité de l'éther serait la cause principale de la action, et par conséquent de la réflexion ? C’est précisé- ment la question que je m'étais faite depuis longtemps, et je crois avoir résolue d’une manière négative par les ex- ences que je viens de terminer. Ces deux manières différentes d’envisager la réflexion con- ent à des conséquences semblables dans plusieurs cas, exemple relativement aux anneaux colorés. + On sait qu’une lame mince comprise entre deux milieux d’un avoir réfringent supérieur, telle qu’une lame d’air ou d’eau mprise entre deux verres, présente une tache noire au int de contact de ces deux milieux, c’est-à-dire, dans l’en- oit où son épaisseur est nulle. Les anneaux réfléchis résul- de l’interférence des deux systèmes d'ondes réfléchies à première et à la seconde surface de la lame mince, il sem- it, au premier apercu, qu'ils doivent se trouver d’ac- reourus y est nulle, et qu'en conséquence le centre des neaux devrait être occupé par une tache blanche au lieu ne tache noire. Mais un examen plus attentif de la ques- 200 DE LA RÉFLEXION tion fait voir que ce doit être au contraire un point de dis- cordance complète , quelle que soit celle qu'on adopte des deux hypothèses sur la manière dont s'opère la réflexion. En effet, si l’on admet que la réflexion résulte d’une plus grande densité du fluide contenu dans le milieu plus réfrin- gent, les rayons devront être considérés comme réfléchis à la surface même qui sépare les deux milieux contigus, et par conséquent la différence des chemins parcourus par ceux réfléchis à la première et à la seconde surface de la lame mince sera exactement nulle là où son épaisseur est nulle. Mais il résulte dela même manière d'envisager la réflexion, que l'expression dela vitesse d’oscillation des molécules éthé- rées, dans les ondes réfléchies à la surface de séparation de deux milieux, diffère de signe selon que le second milieu est plus réfringent ou moins réfringent que le premier. C’est ce que M. Young avait découvert par des considérations méca- niques très-simples, et que M. Poisson a démontré depuis, d'une manière plus rigoureuse, par une analyse savante dans un beau mémoire sur le mouvement des fluides élas- tiques. Ainsi, en considérant, pour fixer les idées, le cas ordinaire d’une lame d'air comprise entre deux verres, on voit donc, qu'abstraction faite des chemins parcourus, les rayons réfléchis à la première et à la seconde surface de la lame d’air doivent différer de signe dans leur vitesse oscillatoire , puisque les premiers sont réfléchis dans un milieu plus dense àla surface d’un milieu plusrare, et les autres dans un milieu plus rare à la surface d’un milieu plus dense. Or, l'opposition de signe indique des mouvements oscillatoires opposés ; elle explique « donc cette différence d’une demi-ondulation indépendante DE LA LUMIÈRE. : 201 des chemins parcourus que présente l'expérience, et qui ainsi loin d'être une objection contre la théorie, en est pré- _ cisément une confirmation. _ Cette même théorie a encore l'avantage d'annoncer d’a- ance le cas où la tache centrale doit devenir blanche; c’est rèmes, le point de contact redevient noir, comme ere il t plus Éfble: cela est évident d’après le principe que nous nons d’énoncer. … M. Young a vérifié par l'expérience ces conséquences qu’il ivait déduites de la théorie, en introduisant de l'huile de assafras entre deux prismes légèrement convexes et pressés squ'au contact. Lorsque ces deux prismes sont de verre rdinaire, qui est mains réfringent que l'huile de sassafras, la tache mule est noire; et lorsqu'un des prismes étant de re ordinaire , l’autre est de flint-glass, milieu plus réfrin- gent que l’huile de sassafras, cette tache est toujours blan- e, soit que le prisme de flint-glass soit par-dessus ou r-dessous. J’ignore comment le système de l'émission pour- t rendre raison de ces phénomènes remarquables, dont xplication est si satisfaisante dans la théorie des ondula- ns. Nous venons de voir qu'ils s'accordent avec notre première othèse, d’après laquelle la réflexion résulterait unique- nt d’une plus grande densité de l’éther des milieux réfrin- nts. [ls se concilient aussi bien avec celle qui attribue la réflexion totale à la réunion des réflexions élémentaires sur à S particules mêmes des corps. T. XX. 6 3093 DE LA RÉFLEXION On concoit aisément, dans cette seconde hypothèse, pour- quoi la réflexion sur les molécules propres des corps ne peut avoir lieu d’une manière sensible que dans le voisinage de leur surface, lorsque les intervalles qui séparent ces molécules sont très-petits relativement à la longueur d’une onde lumi- neuse. Car si l’on divise par la pensée l’intérieur du corps en couches très-minces, d’une épaisseur telle que les rayons réfléchis par les particules d’une couche quelconque se trou- vent en discordance complète avec ceux que réfléchissent les deux couches entre lesquelles elle est comprise, on voit que les réflexions élémentaires que les particules de chaque cou- che tendent à produire, sont détruites par la moitié des rayons de la couche antérieure et de la couche suivante, ex- cepté à la surface du milieu, où la couche extrème ne perd ainsi que la moitié de l'intensité des rayons réfléchis. Il est évident que le point de départ de la résultante de toutes les ondes élémentaires réfléchies par ses particules doit être au milieu , lorsqu'elle a assez de transparence pour que les rayons qui la pénètrent à différentes profondeurs conservent sensi- blement la même intensité. Or, d’après l'épaisseur que nous avons supposée à chaque couche, les rayons réfléchis au mi- lieu doivent différer d'un quart d’ondulation des rayons partis de ses limites. Ainsi, la résultante des ondes élémen- taires réfléchies par la couche extrême, parcourt un quart d'ondulation de plus que les rayons réfléchis à la surface même du corps. Nous avons supposé implicitement que le corps réfléchis- sant était dans le vide. Mais quand il est en contact avec un autre corps, les rayons réfléchis sur ses molécules dans le voisinage de sa surface, déjà réduits à moitié de leur inten- DE LA LUMIÈRE. 203 sité par la couche inférieure, sont encore affaiblis par la cou- che supérieure appartenant au corps en contact, et sont même entièrement détruits si le second milieu réfléchit autant ou plus de lumière que le premier. Dans le premier cas, il n’y E' a plus de lumière réfléchie ; dans l’autre, ce sont les molécules du second milieu qui réfléchissent la seule lumière sensible ; t c'est, en conséquence, du centre de la couche supérieure à surface même. —. Cela posé, lorsque la lame mince est comprise entre deux lieux d’un pouvoir réfléchissant supérieur, c’est hors de ouru par les rayons élémentaires réfléchis à la surface supé- rieure, et que le chemin parcouru par la résultante de la es deux ondes résultantes doit être plus grand d’une demi- dulation que si elles étaient parties des surfaces mêmes de | lame mince ; ainsi, au point de contact des deux milieux trêmes, où l'épaisseur de la lame intermédiaire est nulle, s deux ondes résultantes doivent se trouver en discordance mplète, et en conséquence produire une tache noire. Lorsque le pouvoir réfléchissant de la lame mince est in- ermédiaire entre ceux des deux milieux extrêmes, l’une des deux réflexions a lieu en dedans de cette lame, tandis que 26. 20/ DE LA RÉFLEXION l'autre s'opère en dehors. Il s'ensuit que la différence d’un quart d’ondulation, entre les deux résultantes, et les rayons réfléchis aux surfaces mêmes de la lame mince, se trouve alors dans le même sens pour les deux surfaces; et qu'ainsi, l'aspect du phénomène doit être le même que si ces résultantes par- taient des surfaces de la lame mince; elles doivent donc être parfaitement d'accord au point où son épaisseur est nulle, et y former une tache blanche. Enfin, lorsque la lame mince a un pouvoir réfléchissant plus grand que les deux milieux qu’elle sépare, les deux ré- flexions s’opèrent l’une et l’autre en dedans de la lame, et les différences d’un quart d'ondulation dont nous venons de parler, ayant lieu en sens contraires, s'ajoutent et changent ainsi d’une demi-ondulation l'intervalle qui sépare les deux systèmes d'ondes; d’où résulte une tache noire au point de contact, conformément à l'expérience. Les deux hypothèses sur la réflexion s'accordent ainsi dans les conséquences que nous venons d’en déduire relativement aux anneaux réfléchis. Appliquons-les maintenant aux an- neaux transmis. Les anneaux transmis résultent nécessairement de l’exis- tence des anneaux réfléchis, et doivent en être complémen- taires dans les milieux parfaitement diaphanes, par la seule raison du principe de la conservation des forces vives. Car la lumière incidente, étant supposée d’une intensité uniforme, la somme des intensités des lumières réfléchie et transmise à chaque point de la lame mince, doit être constante, Ainsi, les anneaux noirs, dans la lumière transmise, doivent répon- dre aux anneaux brillants de la lumière réfléchie. Par consé- quent, dans le cas d’une lame d’air comprise entre deux DE LA LUMIÈRE. 205 res, par exemple, le point où ils se touchent qui paraît oir, vu par réflexion, doit paraître brillant par trans- ssion. De Arago s’est assuré, par une expérience ingénieuse, que anneaux transmis, quoique ue plus faibles en ap- parence que les anneaux réfléchis, à cause de la grande antité de lumière blanche re laquelle ils sont en elque sorte noyés, les neutralisent cependant complé- ent, lorsqu'on les projette dessus, et qu’en conséquence en sont réellement complémentaires. Cette observation aissait une objection contre l'hypothèse de M. Young, attribuait la formation des anneaux transmis à l’interfé- e des rayons directs avec ceux qui ne sortent de la lame air qu'après y avoir été réfléchis deux fois. Mais il a dé- ntré, par un calcul fort simple, que son hypothèse s’accor- très-bien au contraire avec l'observation de M. Arago. si, puisque ces deux systèmes d'ondes doivent produire s anneaux d’une intensité précisément égale à celle que ésente l’ expérience, il faut que l'hypothèse qu'on adoptera la réflexion, quelle qu'elle soit, puisse se concilier avec te manière d'envisager la génération des anneaux trans- L'hypothèse suivant laquelle on considère la réflexion me s'opérant à la surface même de séparation des deux heux en contact, en raison de Ja seule différence de leurs ités, s’accorde parfaitement avec cette génération des aux transmis. En effet, supposons, par exemple, que la he mince soit comprise entre deux milieux d’un pouvoir ringent supérieur; on sait qu'en pareil cas le centre des neaux réfléchis est noir, et celui des anneaux transmis est 206 DE LA RÉFLEXION blanc : or, c'est précisément ce qui résulte de l'hypothèse adoptée. Car, d'après cette manière de concevoir la réflexion, la vitesse d'oscillation est de même signe pour les rayons ré- fléchis en dedans de la lame mince, que pour les rayons transmis, en la rapportant à la direction de leur marche; ainsi les rayons réfléchis, ramenés à la direction des rayons transmis par une seconde réflexion, n’en diffèrent donc qu’en raison de la différence des chemins parcourus, qui est égale au double de l'épaisseur de la lame mince sous l'incidence perpendiculaire. Au point de contact des deux milieux extrè- À mes, où cette épaisseur est nulle, les rayons, deux fois réflé- chis, sont donc en accord parfait avec les rayons transmis directement, et, par conséquent, la tache centrale doit être blanche. Lorsque les deux milieux extrèmes sont au contraire d’un pouvoir réfringent plus faible que celui de la lame mince qu'ils comprennent, la vitesse d’oscillation des ondes lumi- neuses, considérée dans le sens de leur marche, change de si- gne, il est vrai, à chaque réflexion; mais après deux réflexions, elle reprend le même signe que dans les rayons transmis im- médiatement; leur accord doit donc être encore parfait, là où la différence des chemins parcourus est nulle, c’est-à-dire, au point de contact. Enfin, quand la lame mince est d’un pouvoir réfringent supérieur à l’un des deux milieux extrêmes et inférieur à. l’autre, les rayons deux fois réfléchis, ne changeant de signe qu'une fois dans leurs mouvements vibratoires, diffèrent d'une demi-ondulation des rayons directement transmis, in- dépendamment des chemins parcourus ; en sorte que la tache DE LA LUMIÈRE. 207 … centrale doit paraître noire, vue par transmission, conformé- … ment à l'expérience. point, en faisant attention que les particules du corps, nlées par les ondulations lumineuses, doivent sans doute réflexion. Or, pour que ces deux sortes de vibrations Kécutent à la fois dans les mêmes particules de la manière lplus indépendante, il faut que les unes.ne commencent irs oscillations qu'un quart d’ondulation après les autres. he présente, néanmoins, qu'avec beaucoup de défiance ces s sur une question aussi délicate; et je ne regarde point ication que je viens de hasarder comme une démons- n rigoureuse de la différence d’un quart d’ondulation re les rayons transmis et les rayons réfléchis, mais seule- tcomme une manière de la concevoir. D’ailleurs, ce retard quart d'ondulation dans la marche des rayons réfléchis e nécessairement du principe de la conservation des s vives appliqué à l'hypothèse que nous considérons, que, sans ce changement opéré par la réflexion, les an- IX transmis seraient absolument semblables aux anneaux 208 DE LA RÉFLEXION réfléchis, au lieu d'en être complémentaires. Cette différence d’un quart d’ondulation est donc une conséquence nécessaire de notre seconde hypothèse sur la réflexion. Cela posé, nous avons vu que la résultante de toutes les 4 ondes élémentaires réfléchies dans le voisinage de la surface se trouvait en arrière d'un quart d'ondulation par rapport 1 aux rayons partis de la surface même; et, puisque, par le seul L acte de la réflexion, les ondes réfléchies doivent se trouver re-« tardées d’un quart d’ondulation , il en résulte une différence totale d'une demi-ondulation entre les rayons incidents et les « rayons réfléchis, indépendamment de la différence des che= mius parcourus comptés à partir de la surface pour les rayons M réfléchis. Nous supposons ici que le corps réfléchissant est dans le vide: s’il était en contact avec un autre milieu d’un“ moindre pouvoir réfléchissant, ce serait encore la même chose ; mais si le milieu supérieur était au contraire plus ré- fringent, la résultante des ondes élémentaires se trouvant alors en avance d’un quart d’ondulation par rapport aux. rayons réfléchis à la surface même, le retard d’un quart d'on-. dulation qu’elle éprouve dans l'acte de la réflexion serait ainsi compensé. On tire des conséquences absolument oppo- sées de la première hypothèse, suivant laquelle la réflexion, « résultant uniquement de la différence de densité de l’éther dans les deux milieux , s’opérerait à la surface même de sé- mis, puisque ceux-ci sont nécessairement complémentaires des premiers, d’après le principe de la conservation des forces vives, ces deux hypothèses, dis-je, en nous conduisant à des conséquences contradictoires sur les différences de vibration DE LA LUMIÈRE. 209 _ entre les rayons réfléchis et les rayons transmis, nous offrent le moyen de décider par l'expérience laquelle des deux il _ faut rejeter. _ Pour cela, j'ai choisi le cas le plus commode, celui où la que de verre. Alors, d’après la première hypothèse, les vons réfléchis doivent s’accorder dans leurs vibrations avec Do directs, en Ne Hope ramenés à la même ie ande centrale, qui répond aux points où les chemins par- rus sont égaux, doit être blanche, d'après la première pothèse, et noire selon la seconde. Pour établir cette interférence, j'ai reçu sur deux miroirs everre noir, les rayons directs, et ceux qui avaient déjà subi ne première réflexion sur une autre plaque de verre par- tement transparente et noircie par derrière; cette réflexion ir deux miroirs pareils des rayons incidents et des rayons à réfléchis, en leur imprimant la même modification, ne Sun un yerre blanc, comme je m'en suis assuré en faisant interférer des ons réfléchis sur une glace de verre noir, avec des rayons réfléchis sur ” miroir de verre blanc. Il n’en est plus de même en substituant un oir métallique au verre noir; les franges cessent alors d’être symétriques rapport à la bande brillante du milieu. T. XX. PA 210 DE LA RÉFLEXION Les deux miroirs de verre noir, destinés à ramener les 4 deux faisceaux lumineux à des directions à peu près paral- lèles, étaient aussi disposés de façon que les chemins par- courus, répondant à la partie commune des deux champs lumineux, fussent sensiblement égaux; ce que j’obtenais au moyen d'une épure tracée sur un carton de la manière indi- quée par la figure 1 : F G est la plaque de verre transparent sur laquelle les rayons incidents éprouvent la première ré- flexion, AB et DE les deux miroirs noirs qui réfléchissent, le premier, les rayons venus directement du point lumineux, le second, ceux déjà réfléchis par la plaque de verre FG: Pour que les rayons incidents soient ramenés à des directions | parallèles, il faut que les deux miroirs FG et DE fassent avec à le miroir AB, des angles égaux à la moitié de l'angle NCB, que les rayons directs font avec ce même miroir AB; et pour | que les chemins parcourus par les rayons LKIH et NCM soient égaux , il suffit que les plans des miroirs FG et DE. prolongés rencontrent au même point C la surface du mi- roir AB. C'est d’après cette règle que toutes mes épures ont été tracées ; mais comme on ne peut parvenir par un simple dessin au degré de précision nécessaire pour des expériences 4 DE LA LUMIÈRE. 211 _ aussi délicates, où une différence de quelques millièmes de millimètre dans les chemins parcourus suffit pour faire dis- paraître les franges, je faisais varier lentement la position —. dumiroir DE à l’aide d’une vis de rappel, qui l’avançait ou … lereculait parallèlement à lui-même dans une direction per- ‘pendiculaire à sa surface; et, par un tâtonnement très-court, e parvenais aisément à obtenir l'apparition des franges. Tr ai 15 ceñe ire sous Lee infnaons très- dr 5, 27: + 90°, 35°, 4o°, et j'ai toujours vu le milieu Fe ma franges occupé par une bande noire, conformément aux onséquences de la seconde hypothèse sur la réflexion. Pour rendre la chose bien évidente, il faut rapprocher eaucoup entre elles les deux images du point lumineux, de nanière à donner aux franges le plus de largeur possible, in que l'effet prismatique de la loupe dont on se sert pour les observer, ne puisse pas occasionner de méprise sur le ng de nie et sur la symétrie de leurs teintes (1). Alors franges présentent des couleurs disposées symétriquement (x) Il est une autre précaution à prendre pour parvenir à faire naître des anges ; et, faute d'y avoir songé d'abord, j'ai cru pendant quelques jours les deux faisceaux lumineux ne s’influencaient plus lorsque les rayons Die de l'incidence HérA Enr e Cela tenait tout téigblement a minuais l’obliquité des rayons incidents; en sorte que ne rayons PGDR QOR, que je faisais interférer , étaient émanés du point lumineux sous irections trop différentes. Or ÿ j'ai fait voir dans mon premier mémoire ee De 7 quete ce n’est que Di des angulaires assez 2e 212 DE LA RÉFLEXION de part et d’autre de la bande noire centrale, qui est parfai- tement incolore dans le milieu de sa largeur ; en sorte qu'on ne peut pas douter que ce ne soit un point de discordance complète pour toutes les espèces de rayons, et que les deux systèmes d'ondes, qui interfèrent, ne diffèrent en consé- quence que d’une demi-ondulation. Les rayons, deux fois ré- fléchis sur le verre, diffèrent done d’une demi-ondulation de. ceux qui n'ont été réfléchis qu'une seule fois, ou, ce qui re- vient au même, les rayons, réfléchis une seule fois, diffèrent d’une demi-ondulation des rayons directs ou transmis, indé- pendamment des chemins parcourus, comptés à partir de la surface même de la glace. Ainsi l'expérience confirme, dans ses conséquences, l'hypothèse d’après laquelle la réflexion s’opérerait sur les particules mêmes des corps transparents. Ces réflexions intérieures sur les particules propres des corps étaient déjà indiquées par d’autres phénomènes. Les couleurs, que la polarisation développe dans la lumière qui a éprouvé plusieurs réflexions sur des miroirs métalliques, démontrent, d’après le principe des interférences, qu’une partie des rayons réfléchis a pénétré dans l’intérieur même du métal jusqu'à une petite distance de sa surface. Car la lu- mière, ainsi modifiée, se comporte dans les lames cristallisées qu'on lui fait traverser, exactement comme si elle était com- posée de deux systèmes d'ondes, polarisés, l’un parallèlement, et l’autre perpendiculairement au plan d'incidence, et sé- parés par un intervalle plus ou moins grand, selon l’angle d'incidence et le nombre des réflexions successives. Les corps les plus transparents ne réfléchissent pas seule- ment la lumière dans la couche très-mince qui touche à leur surface, mais encore de tous les autres points de leurs parties DE LA LUMIÈRE. 213 ntérieares ; et cette lumière devient toujours sensible, quand le milieu réfléchissant a assez de profondeur. L'atmosphère nous en présente un exemple frappant. abondance de la lumière solaire, qu’elle renvoie de toutes % arts à nos yeux, mème dans les jours où l’air est le plus pur, peut se concevoir, comme l’a observé M. Arago, qu’en sup- ant que ce sont les particules mêmes de l’air qui réflé- ssent cette lumière, et que la faiblesse de ces réflexions tielles est compensée par leur multitude. nces confirmées par l'expérience. En effet, les réflexions émentaires résultant du choc des ondes lumineuses contre particules propres des corps, ne peuvent se détruire com- étement dans leur intérieur qu'autant que les intervalles ui les séparent sont infiniment petits, relativement à la gueur d’une ondulation; parce qu'alors on peut toujours ouver, derrière chaque particule, une autre particule située une distance telle, que les rayons qu'elle tend à réfléchir èrent exactement d’une demi-ondulation de ceux qui se- ent réfléchis par la première. Mais, dès que les intervalles ui séparent les molécules du milieu ne sont pas absolument uls par rapport à la longueur d’une ondulation , il n’y a plus ruction complète des réflexions élémentaires dans l’inté- ïeur du milieu, et elles finissent par devenir sensibles, lors- ‘elles s'ajoutent sur une grande profondeur (1). (1) Gette manière d'envisager la réflexion laisse entrevoir la possibilité d'expliquer les couleurs propres des corps d’une manière plus satisfaisante “que celle indiquée par Newton, qui ne paraît pas applicable à des liquides 214 DE LA RÉFLEXION Cette théorie de la réflexion, beaucoup plus générale et plus féconde en conséquences que l’autre hypothèse, qui ne peut s'appliquer qu'au cas particulier d’une transparence parfaite, a encore l'avantage de détruire, par ses fondements, l'objection qui a été faite contre le système des ondulations, relativement au phénomène de la dispersion des rayons colorés qui accompagne la réfraction. L'analyse démontre que les ondulations de diverses longueurs doivent se propager avec la même vitesse dans un fluide élastique homogène; en sorte que si le ralentissement de la lumière dans le verre, par exemple, ne dépendait que de la plus grande densité de l’éther qu'il contient, les différentes espèces d'ondes lu- mineuses, qui doivent se propager avec une égale vitesse dans le vide, c'est-à-dire, dans l'éther seul, éprouveraient un ralentissement égal dans le verre, et se réfracteraient en conséquence de la même manière; car le rapport du sinus d'incidence au sinus de réfraction dépend uniquement de celui qui existe entre les vitesses de la lumière dans les deux milieux. Mais, d’après l'expérience que j'ai rapportée, il est très-probable que l’éther contenu dans le verre n’est pas sensiblement plus dense que celui qui l'environne; en sorte que le raccourcissement des ondes lumineuses qui pénètrent le verre est principalement dû à ses propres molécules, dont on ne peut pas d’ailleurs, et par une raison bien simple, ré- colorés parfaitement limpides, dont les particules sont sans doute beau- coup plus petites que la longueur d’un accès même dans le verre , et aux- quelles il faudrait en conséquence supposer des densités invraisemblables, et beaucoup plus grandes que celles qu'elles devraient avoir, d’après la même théorie, dans d’autres composés incolores d’urfe diaphanéité parfaite. DE LA LUMIÈRE. 215 la dispersion, puisqu'elle varie avec la nature ou l’arrange- ment de ces molécules, suivant des rapports tout à fait dif- esse selon le sens dans lequel on tourne le cristal qu'on | fait traverser, quoique la densité de l’éther qu’il renferme ste toujours la même. le citerai encore, à cette occasion, une loi que je viens de écouvrir dans les phénomènes de double réfraction que présente le verre courbé, et qui fait voir jusqu’à quel point On sait que quand on courbe le verre, il acquiert des opriétés analogues à celles des lames minces cristallisées. omme ces cristaux, il fait reparaître l’image extraordinaire | la colorant, ainsi que M. Brewster l’a remarqué depuis gtemps. L'analogie indique que ces teintes , parfaitement iblables à celles des lames minces cristallisées, doivent ulter aussi de l'interférence de deux systèmes d'ondes reuses, qui parcourent le verre courbé avec des vitesses égales ; et c’est aussi ce que confirme l'expérience. our mesurer les vitesses de ces deux systèmes d'ondes, j'ai employé le procédé délicat que fournit la diffraction. Après ir courbé un parallélipipède de verre à l’aide d’un étau lequel une de ses extrémités était engagée, et d’une e pression qui appuyait sur l’autre extrémité, j'ai fait 216 DE LA RÉFLEXION passer au travers de ce parallélipipède deux faisceaux lumi- neux émanés d’un même point radieux et introduits par deux fentes pratiquées dans un écran qui interceptait le reste de la lumière; elles n'avaient guère que 0"",15 de largeur, et étaient assez rapprochées l’une de l’autre pour que les deux faisceaux pussent interférer en raison de la dilatation qu’elles leur faisaient éprouver. Ces fentes répondaient à des points également éloignés de la ligne milieu, où les particules du verre n’éprouvent ni rapprochement ni écartement sensibles par l'effet de la flexion; ainsi les particules du verre se trou- vaient aussi rapprochées dans le plan qui répondait à l’une des fentes, qu'elles s'étaient écartées dans celui qui passait par l’autre ; en sorte que la différence de marche entre les deux faisceaux lumineux devait être le double de celle d’un de ces systèmes d'ondes avec les rayons qui auraient suivi le plan milieu, dans lequel le verre n’est point modifié par la flexion, comme on pourrait d’ailleurs le vérifier par une expérience directe, en plaçant une des fentes vis-à-vis ce plan milieu. Les franges produites par l’interférence de ces deux fais- ceaux lumineux ne présentaient plus les teintes vives et pures des anneaux colorés, comme avant la flexion du verre; mais elles offraient un mélange de ces teintes semblable à celui qui résulte de la superposition de deux groupes de franges dont les centres ne coïncident pas. En analysant la lumière avec un rhomboïde de spath calcaire, lorsque sa section principale était parallèle ou perpendiculaire à la ligne de courbure du verre, les franges de chaque image présentaient exactement les teintes des anneaux colorés ; mais la bande brillante centrale n’occupait pas la même po- DE LA LUMIERE, 217 _sition par rapport au fil du micromètre dans l'image ordi- naire et dans l’image extraordinaire ; ce qui démontre que la différence de marche entre les deux faisceaux polarisés pa- rallèlement à la ligne de courbure n’est pas la même que la différence de marche des deux faisceaux polarisés dans le plan normal. | pu mesurant le déplacement des sr dans Jinaee E 10 aux LA fates courbées, il était précisément double - de celui que présentaient les franges produites par les rayons polarisés suivant le plan normal. Le raisonnement et toutes les analogies indiquent pour xe de double réfraction du verre courbé précisément la Ù ligne de courbure (1), du moins quand la flexion est assez … légère pour que les molécules du verre n ‘éprouvent de rap- (x) En effet, concevons le parallélipipède de verre divisé en tranches Dr minces tee aux faces courbées ; le rapprochement ou l’écar- tement de ses particules augmente ou Abe avec la position des tran- - ches, qui forment comme un assemblage de cristaux jouissant de la double - réfraction à des degrés différents. Mais chaque tranche étant supposée très- nince, le rapprochement ou l’écartement de ses molécules ne varie pas ensiblement dans l’étendue de son épaisseur ; ainsi les molécules du verre prouvant de déplacement sensible , par hypothèse, que suivant la direc- on des fibres longitudinales, l’arrangement des molécules dans Je plan nor- ialest tout à fait le même dans tous les sens autour de ces fibres, qui sont s n conséquence les seules lignes qu ‘on puisse considérer comme les axes e DE UT Elles EE DES en HER. la HS le verre suivant cette direction, devrait toujours le parcourir avec une égale . vilesse, quel que fût l’azimut de son plan de polarisation. XX. 28 218 DE LA RÉFLEXION prochement ou d’écartement sensible que dans cette direc- tion. Cette hypothèse se trouve d’ailleurs confirmée. par les expériences que j'ai faites sur la manière dont les teintes que la polarisation développe dans le verre courbé montent ou descendent dans l’ordre des anneaux, selon le sens suivant lequel on incline le verre. J'admets donc que l’axe de double réfraction est la tan- gente à la courbe résultant de la flexion; alors j'appellerai rayons ordinaires ceux qui ont été polarisés parallèlement aux faces courbées , et rayons extraordinaires ceux qui ont été polarisés dans un plan perpendiculaire. Ainsr, d’après cette manière d'envisager les choses, le changement de vitesse de la lumière qui résulte du rapprochement ou de l’écarte- ment des molécules du parallélipipède de verre est deux fois plus considérable dans les rayons qui ont éprouvé la réfrac- tion ordinaire, que dans ceux qui ont été réfractés extraordi- nairement ; résultat bien remarquable, puisqu'ici la double réfraction est du même ordre que le changement de réfrac- tion qui résulte de la dilatation ou de la condensation du milieu. J'ai essayé de déterminer la dilatation et la condensation absolue du parallélipipède de verre dans les points traver- sés par les faisceaux lumineux que je faisais interférer ; mais je n'ai pas encore fait des observations assez nombreuses et assez précises pour déterminer la relation qui existe entre ces modifications et les variations qui en résultent dans la marche de la lumière. J'ai cependant reconnu que ces varia- tions sont beaucoup moindres que celles que l’on conclurait de l’augmentation ou de la diminution de densité du milieu dans le système de l’émission, en supposant que l'attraction DE LA LUMIÈRE. 219 exercée par le milieu sur les molécules lumineuses est pro- portionnelle à sa densité, ou dans le système des ondulations, en assimilant ce milieu à un fluide élastique homogène, dont la densité éprouverait les mêmes variations que la plaque de verre, son élasticité restant constante. Avec ces hypothèses, les deux théories conduisent à la même formule : je l'ai ap- pliquée à plusieurs observations, dont une me paraît mériter quelque confiance, à raison du soin que J'y avais apporté. Or, le calcul m'a conduit, pour la variation que doit éprouver la vitesse de la lumière, à un résultat à très-peu près double de celui que m'avait donné cette expérience pour les rayons qui éprouvent les variations les plus sensibles dans leur mar- che, c’est-à-dire, les rayons ordinaires. En admettant toujours que l’axe de double réfraction du verre courbé est dans la direction même de la courbure, J'ai trouvé, par le croisement de la plaque de verre avec des la- mes cristallisées, que la moitié située du côté de la convexité, ou la partie dilatée suivant l'axe, était du genre des cristaux attractifs, et la partie où les molécules du verre sont rappro- chées dans le sens de l'axe, du genre des cristaux répulsifs, pour me servir des expressions usitées dans le système de l'émission; ou, en d’autres termes, et en envisageant la chose —… sous le point de vue de la théorie des ondulations, que lors- que la double réfraction est occasionnée par une dilatation suivant l’axe, c’est le rayon ordinaire qui marche plus vite que le rayon extraordinaire, et lorsqu'elle provient d’une con- densation suivant l'axe, c’est au contraire le rayon extraor- — dinaire qui devance le rayon ordinaire; ce qu’on pouvait Es déjà conclure des expériences de diffraction que je viens de IE : rapporter. ë 2 28. 220 DE LA RÉFLEXION DE LA LUMIÈRE. M. Brewster avait déjà remarqué depuis longtemps cette analogie entre les deux moitiés d’une plaque de verre cour- bée et les cristaux attractifs et répulsifs. Mais je ne sache pas qu'il ait indiqué la direction de l'axe. Quoi qu'il en soit, il est très-probable qu'il l’aura supposé aussi parallèle à la ligne de courbure, car c’est l'hypothèse la plus naturelle (1). Le mauvais temps et des occupations pressantes m'ont obligé d'abandonner momentanément mes recherches ‘sur la double réfraction du verre courbé. Je me propose de les re- prendre dans des circonstances plus favorables, et de déter- miner, par des observations exactes, les rapprochements ou écartements des particules du verre qui répondent à chaque degré de différence de vitesse entre les rayons ordinaires et extraordinaires. Des expériences de ce genre, dans lesquelles on peut faire varier à volonté, et mesurer les modifications apportées dans l’arrangement des particules du milieu réfrin- gent, jetteront peut-être quelque jour sur les causes méca- niques de la double réfraction. (1) P.8. Depuis la rédaction de ce mémoire, je me suis assuré que M. Brewster avait déterminé la direction de l’axe de double réfraction dans le verre courbé, en inclinant les rayons incidents suivant des plans paral- lèles ou perpendiculaires à cet axe, et qu'il avait reconnu qu'il était paral- lèle au sens de la condensation ou de la dilatation du verre. RAR AMEN IMAT ARE RR LR RUN LRU US LÉLELE LE DORE LE LA LURER LLELR LE LR LE US LA LA LR UR SUR LE LUE LUN LE VERRE LR LEVELE LEUR LUS # MÉMOIRE SUR . ES PHÉNOMÈNES ROTATOIRES OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE, Par M. BIOT. INTRODUCTION. \yant eu besoin récemment de rappeler devant l’Académie lois expérimentales qui régissent les mouvements rota- es des plans de polarisation de la lumière dans le quartz stallisé , j'ai pensé que ce retour à des résultats déjà dis- ts de tant d'années m'imposait l'obligation de revoir une nière fois les éléments physiques sur lesquels je les ai éta- pour examiner s'ils nécessiteraient, dans leurs détails elles ils pussent être employés avec süreté. J'avais, pour te révision, l’occasion la plus favorable. M. Soleil a mis 222 DES PHÉNOMÈNES ROTATOIRES obligeamment à ma disposition, un très-grand nombre de plaques de cristal de roche, d’épaisseurs diverses, parfaite- ment régulières , et taillées perpendiculairement à leur axe, avec une rigueur qu'aucun autre artiste n'avait si générale- ment obtenue avant lui. En les étudiant avec la précision que l’on obtient aujourd’hui dans la mesure des pouvoirs rota- toires , j'ai pu soumettre toute cette classe de phénomènes à des épreuves délicates, qui n'auraient pas été praticables au- trefois. J'ai été fort heureux de voir que mes anciennes dé- terminations n'étaient pas aussi imparfaites que j'aurais pu le craindre; qu’elles avaient même, à peu près , tout le degré d'exactitude qu'il est permis d'espérer, tant qu’on ne sera pas parvenu à les obtenir directement par des expériences faites sur des rayons de lumière simple, d’une réfrangibilité stric- tement définie. Je vais rapporter successivement les détails essentiels de ce nouvel examen, en les présentant dans l'ordre logique suivant lequel ils s'enchaînent. Le sujet est déjà si ancien, qu'il aura pour beaucoup de personnes le caractère de la nouveauté. Le phénomène complexe, dont l'analyse fait l’objet de tou- tes ces recherches, a été découvert par M. Arago en 1811. Malus nous avait fait connaître, en 1810, les modifications remarquables que la réflexion spéculaire, opérée sous une certaine incidence, imprime aux faisceaux incolores de lu- mière naturelle ; modifications qui les rendent susceptibles d'être ensuite partiellement réfléchis, ou totalement transmis, par les surfaces diaphanes qui les recoivent sous la même incidence, et suivant certaines sections diamétrales de leur ligne de parcours. Il nomma ce phénomène, la polarisation de la lumière , considérant les faisceaux ainsi modifiés comme OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 223 offrant de véritables pans, ou faces latérales , par lesquels _ilsétaient diversement impressionnables. C'était la conclusion d que Newton avait déjà tirée si hardiment et si logiquement | … desconditions de position relatives dans lesquelles desrayons _ de lumière naturelle, subdivisés par la double réfraction — dans un premier rhomboïde de spath d'Islande, sont ensuite . subdivisés ou non subdivisés par un rhomboïde subséquent. alus rattacha cet effet de la double réfraction à celui de la «réflexion spéculaire, sous l'incidence polarisante, en prou- it que les rayons modifiés par cette réflexion se compor- ent, en traversant les rhomboïdes, comme s'ils eussent été … modifiés par la double réfraction, et inversement. Ces deux découvertes de Malus, qu’une mort prématurée l’empêeha “de suivre , ont été le principe et le point de départ de tous - les travaux qui ont été faits depuis dans cette branche de optique, devenue si féconde, à laquelle est resté le nom qu'il lui avait donné. usque-là , dans ces expériences de Malus , les faisceaux de lumière blanche, modifiés par l’un ou l’autre procédé, con- servaient leur blancheur (1). L'action polarisante qui les im- Pressionnait s’exerçait donc, ou semblait s'exercer également Sur tous les rayons de réfrangibilités diverses dontils étaient £ composés. Mais, en transmettant des faisceaux blanes pola- L (:) Du moins, en faisant abstraction des faibles effets de la dispersion prismatique, exercée par la réfraction extraordinaire qui, même sous l’in- cidence perpendiculaire, écarte de la normale la portion du faisceau qui la t. Mais ce sont là des phénomènes d’un autre ordre ; et tous les rayons dispersés ainsi par la réfraction extraordinaire sont polarisés dans un même sens. 22/ DES PHÉNOMÈNES ROTATOIRES risés par réflexion à travers des lames minces de mica de Sibérie, M. Arago découvrit que cette identité d'effets n'exis- tait plus. Le faisceau ainsi transmis se voyait encore blane, si on le recevait directement dans l'œil. Mais un prisme biré- fringent le subdivisait en deux portions colorées de teintes complémentaires, qui variaient avec l'épaisseur de la lame, avec l'incidence sous laquelle le faisceau polarisé la traver- sait, et avec les positions qu’on lui donnait à elle-même dans son propre plan, l'incidence restant constante. M. Arago conclut de là que, dans de telles circonstances, les lames de mica présentées au faisceau polarisé ôtaient aux rayons de réfrangibilités diverses la simultanéité de polarisation que la réflexion spéculaire leur avait donnée. Il observa des effets de coloration analogues avec des lames minces de chaux sul- fatée , et il en tira la même conséquence. M. Arago chercha ensuite si la minceur des lames était une condition nécessaire de ces apparences; il reconnut qu’il n'en était pas ainsi. [l trouva une plaque de cristal de roche ayant plus de six millimètres d'épaisseur, qui , placée dans les mêmes circonstances que les lames minces de mica et de chaux sulfatée, produisait aussi des images colorées , quand la lumière blanche polarisée, qui la traversait, était ana- lysée par un prisme biréfringent. Mais, dans l'analogie géné- rale de ce phénomène avec les précédents, il se manifes- tait des différences de détail, que M. Arago reconnut et spécifia. Lorsque les lames minces de mica et de chaux sulfatée étaient traversées perpendiculairement par le faisceau pola- risé, les couleurs des images variaient si l’on tournait ces lames dans leur propre plan, le prisme analyseur restant OPÉRES DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 295 fixe. Un mouvement pareil imprimé à la plaque de cristal de roche, dans les mêmes conditions d'incidence et de fixité du prisme, ne produisait dans ces images aucune variation 4 de couleur. Cela résultait de ce que la plaque se trouvait _ avoir été taillée perpendiculairement à l'axe du cristal ; et M. Arago en fit la remarque. Mais lorsqu'on tournait le prisme alyseur, de manière à donner successivement à sa section ncipale diverses directions autour du faisceau transmis, en conservant la perpendicularité d'incidence, les teintes des . deux images changeaient continuellement, suivant un mode régulier de succession, qui amenait progressivement dans D diverses. De là, M. Arago conclut avec justesse , comme ca- ctère spécial du cas actuel, que ces rayons qui, avant de traverser la plaque de cristal, étaient tous polarisés dans un même sens, devaient se trouver polarisés dans des sens di- _ vers après r avoir traversée. Le progrès de changement des . teintes pendant la rotation du prisme analyseur, tel qu'il l’a décrit, est conforme à ce que nous savons maintenant être propre à une épaisseur d'environ six millimètres et demi ou sept millimètres. Mais le sens du mouvement du prisme . n'ayant pas été spécifié, on ne peut plus reconnaître aujour- . d'hui, par ces seules indications, si la plaque observée dé- - tournait les plans de polarisation vers la droite, ou vers la gauche de l'observateur. Continuant ä suivre la même série d'idées, M. Arago chercha siles corps naturellement cristallisés ont seuls la propriété de polariser ainsi, dans des sens divers, les rayons lumineux d'inégale réfrangibilité qui ont été préalablement polarisés . en un sens unique. Il reconnut que cette propriété ne leur XXE Ù 29 226 DES PHÉNOMÈNES ROTATOIRES appartient pas exclusivement. Comme exemple de ce fait, il mentionne une plaque de flint-glass ayant environ huit mil- limètres d'épaisseur, qui, dans certaines plages de sa masse, troublait simultanément la polarisation primitive imprimée aux faisceaux de lumière blanche qui la traversaient , tandis qu'en d’autres parties elle agissait inégalement sur les rayons d’inégale réfrangibilité, puisqu'elle donnait des images co- lorées , comme les lames minces de mica, de chaux sulfatée, et comme la plaque de cristal de roche, quand le faisceau transmis était analysé par un prisme biréfringent. Le mémoire, où M. Arago a consigné ces découvertes, fut lu à la classe des sciences mathématiques et physiques de l'Institut le 11 août 1811, six mois avant la mort de Malus. Il est inséré sous cette date, dans la collection des Mémoires de cette compagnie pour la même année, page 93. J'en ai extrait ici les seules particularités qui se rapportent, comme antécédents , au sujet que je traite aujourd’hui (1). Mes premières recherches sur les propriétés rotatoires du cristal de roche sont de deux années postérieures au mémoire de M. Arago. Elles furent communiquées à la classe des sciences mathématiques et physiques de l’Institut le 31 mai 1813; et elles sont insérées sous cette date à la page 218 du volume de cette compagnie pour 1812, lequel ne parut qu’en (x) Le volume de la collection académique, où se trouve le mémoire de M. Arago, n'a paru qu'en 1812. Mais des extraits fidèles, et à peu près tex- tuels, de ce travail ont été imprimés, presque immédiatement après sa pré- sentation , dans le Moniteur du 31 août 1811, page 932, ainsi que dans le Bulletin de la Société philomathique, aux numéros d'octobre et de novembre de cette même année. OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 227 | 1814. Je me bornerai aussi à en extraire les seuls résultats qui ni m'ont servi plus tard pour analyser physiquement cette sé- f rie de phénomènes. Afin d’avoir des éléments précis d'expériences, j'ai choisi un certain nombre d’aiguilles hexaédriques aussi pures que j'ai pu me les procurer, et j'ai fait extraire de chacune d’elles plusieurs plaques perpendiculaires à l'axe, dont je mesurai FA les épaisseurs au sphéromètre. J'ai ensuite étudié les effets - optiques de ces plaques, en y transmettant, sous l'incidence _ perpendiculaire, un faisceau mince de la lumière blanche û . desnuées, dont tous les éléments étaient polarisés en un même | sens par la 1eHesIon spéculaire. J'analysais ce faisceau, après sa transmission , à l’aide d’un prisme biréfringent achroma- tisé, mû uliement autour de sa direction par une ali- … dade dont l'index parcourait le contour d’un cercle divisé en . demi-degrés. J'ai d'abord pris une de ces plaques, dont l'épaisseur était 13", 416; et j'ai observé dans toutes ses phases la succession des couleurs que présentaient les deux images réfractées, 4 lorsqu'on tournait la section principale du prisme biréfrin- - gent, depuis la direction de la polarisation primitive jusqu’à ‘une circonférence entière; puis je lai fait progressivement … amincir de manière à l’amener graduellement à douze états - d'épaisseurs moindres, que j'ai toutes mesurées au sphéro- _ mètre, et dont la plus petite était o"", {oo. J'ai répété sur he de celles-ci les mêmes observations que sur la pre- - mière. Alors les résultats étant réduits en tableaux , il devint - manifeste que dans toutes ces plaques, dérivées du même guillé, les teintes de l’image extraordinaire suivaient un - même ordre de succession, qui offrait un rapport continu 29. 228 DES PHÉNOMENES ROTATOIRES avec les variations de laréfrangibilité, lorsque l’on considérait le mouvement du prisme comme opéré de la droite vers la gauche de l'observateur. Je spécifiai cette relation par le caractère que j'ai toujours employé depuis. Je retrouvai ce même ordre de succession, ramenant les mêmes séries de teintes par le même mouvement du prisme dans plusieurs autres plaques extraites d’aiguilles différentes, où elles se re- _ produisaient exactement identiques aux mêmes épaisseurs. La comparaison de ces résultats me fit apercevoir l'exis- tence d’un minimum d'intensité de l’image extraordinaire, lequel se montrait dans un are de déviation proportionnel aux épaisseurs, lorsque celles-ci n'excédaient pas 4"". C’étaient les premières phases de cette teinte que j'ai appelée depuis la teinte de passage, et qui se reproduit à des épaisseurs bien plus grandes, avec ce même caractère de proportionna- lité dans les déviations où elle se montre. Mais ce fut seule- ment vingt ans plus tard, en 1832, que je parvins à lui re- connaître cette généralité d'application. En répétant les mêmes observations sur des plaques tirées d’autres aiguilles, avec les mêmes soins et les mêmes moyens de mesure, j'en trouvai où la nature, ainsi que la succession des teintes, quoique toujours identiques aux précédentes, pour des épaisseurs égales, y correspondaient à un mouve- ment du prisme de sens inverse , c’est-à-dire, dirigé de la gauche vers la droite de l'observateur. Je désignai cette op- position par le caractère inverse du précédent. La constance de la série des teintes dans ces deux classes de plaques , et la reproduction du minimum d'intensité de l’image extraordinaire, dans un même arc de déviation pro- portionnel aux épaisseurs, prouvaient que les plans de polari- OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 229 _ sation des divers rayons simples subissaient, dans toutes, un . même mouvement de déviation continu, progressif, de sens . constant dans une même aiguille, mais ayant , dans les deux . classes, des sens opposés. On pouyait donc inférer de là, | comme conséquence très-vraisemblable, que si un faisceau imineux , préalablement polarisé en un sens unique, éprou- ait successivement ces deux modes d'action dans des plaques épaisseur exactement égale, les déplacements imprimés au nm de polarisation de chaque rayon simple devaient se compenser mutuellement ; de sorte que tous ces plans se -trouveraient finalement ramenés à leur direction primitive mmune. Mais si les plaques combinées étaient d'épaisseur “inégale, les déviations résultantes devaient correspondre, our la grandeur comme pour le sens, à l’excédant d’épais- r. Je confirmai ces deux prévisions par des épreuves variées i s'y trouvèrent exactement concordantes. La découverte faite presque simultanément, par le docteur Brewster et par r J. Herschell, de la coexistence occasionnelle des deux ro- “tations dans des plages différentes d’une même plaque, est postérieure de plus de six années aux observations que je ë iens de rappeler , comme ces physiciens se sont toujours lu à le reconnaître (*) _ Ces expériences constataient que le plan de polarisation chaque rayon simple se déplaçait angulairement, dans À outes les épaisseurs d’une même aiguille, par un mouvement (*) Le beau travail du docteur Brewster sur l’améthyste, où la coexistence des deux rotations est établie, porte la date de novembre 1819. Celui de 230 DES PHÉNOMÈNES ROTATOIRES continu et uniforme, dont la vitesse propre croissait avec la réfrangibilité. Pour aller plus loin, il aurait fallu mesurer directement ces vitesses. Je crus pouvoir y suppléer par des conditions tirées des changements de couleur que les images réfractées parcourent dans une même plaque, à mesure que l'on tourne le prisme analyseur. Mais ce phénomène était trop complexe pour fournir des données suffisamment sûres. Aussi, comme je l'ai déjà remarqué ailleurs, pour avoir aban- donné un moment l'expérience , ce seul guide qui pût empê- cher de s’égarer dans des recherches d’une espèce si nou- velle , je me trompai alors sur la loi de rotation que j'imaginai, et je me trompai encore, en croyant que les rayons lumineux soumis à ce genre d'action étaient ensuite réfractés par les corps cristallisés, autrement que les rayons qui ont été pola- risés par les procédés ordinaires : ils le sont absolument de la même manière, Les particularités de coloration qui m'a- vaient semblé nécessiter cette différence, bien loin d'être des anomalies, deviennent des conséquences calculables de cette identité, lorsque l’on connaît les véritables lois des rotations. Je ne rectifiai cette erreur que cinq ans plus tard. Dans l'intervalle, j'avais reconnu que des effets rotatoires analogues à ceux-là s’opéraient dans certains milieux liquides , où ils ne pouvaient être produits que par les particules mêmes, comme par autant de cristaux excessivement petits, agissant en succession. Je sentis que, le phénomène décelant dans de telles circonstances une propriété moléculaire des corps, il fallait débarrasser ses lois physiques de toute hypothèse, en déterminant, par l'expérience, les vitesses de rotation indi- viduelles du plan de polarisation des différents rayons sim- OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 231 ples , dans le cristal de roche, où, d’après l'identité des phé- . nomènes de coloration, elles paraissaient suivre les mêmes rapports que dans les liquides auxquels on avait jusque- là reconnu le pouvoir rotatoire. Ce fut l'objet d’un mé- ire que je présentai à l’Académie le 2 septembre 1818, qui est imprimé dans le tome II de sa collection. C'est ce ne travail que je viens de revoir, en vérifiant ses éléments rincipaux par des expériences nouvelles, dont je vais rendre npte à l’Académie. Le Pour premier moyen d'observation, j'employai alors un de es verres rouges colorés par le protoxyde de cuivre , qui, ins être rigoureusement monochromatiques, transmettent endant avec continuité une portion spécialement rouge spectre ; de sorte que la plage moyenne et la plus intense Jeur transmission doit répondre à un certain rayon rouge d'une réfrangibilité constante. Je mesurai Jes arcs de dévia- on de ce rayon à travers huit plaques ayant des actions de divers, et dont les épaisseurs, évaluées par le sphéro- re, procédaient de 1%, 184 à 7°", 910. En réduisant tous résultats à l'épaisseur de 1 millimètre par le rapport de oportionnalité, j'obtins l’arc moyen de déviation de mon Jon rouge à travers cette unité d'épaisseur, lequel se trouva e 18°, 414. Le sens d'action des plaques ne me sembla pas ir d'influence appréciable, e viens d’éprouver cette ancienne évaluation sur les ues parfaitement pures et perpendiculaires à l'axe de Soleil , en déterminant aussi leurs épaisseurs par le sphé- » et me servant du même verre rouge que j'avais con- vé. Pour les plus épaisses, où la fixation du minimum tensité de l’image extraordinaire est Ja moins facile et la 232 DES PHÉNOMÈNES ROTATOIRES moins certaine, j'ai trouvé sur 108° de déviation, tantôt 1° de plus que ne l'indiquait le calcul, tantôt 1° de moins. A des épaisseurs plus restreintes, où l’observation est plus sûre, des déviations de 71° se sont accordées exactement dans des séries composées de 20 déterminations partielles, dont les écarts extrêmes restaient compris entre 70°et 72°. D'après cela, je ne me croirais pas assuré de pouvoir changer l’ancienne évaluation pour une meilleure ; et je pense que l’on peut pro- visoirement la conserver. Maintenant il fallait placer ce rayon rouge dans le spectre, et le définir par la longueur d'accès qui y correspond. Je le fis par une expérience approximative, en examinant, dans l'obscurité, la portion que mon verre interceptait dans le spectre total formé par la flamme d’une lampe, et tàächant d'y marquer la place que le maximum de la transmission oc- cupait sur la plage rouge directe. Je pus ainsi rapporter ap- « % ce qui la réduit dans l'air à 6,18432. ! Quoique cette estimation ne pût comporter qu’une faible \ erreur, je désirais depuis longtemps la reprendre par les pro- cédés précis que fournissent aujourd’hui les raies du spectre: L'occasion m'en a été obligeamment fournie par un jeune, physicien, M. Foucault, qui, en commun avec M. Fizeau ; s'occupe présentement de recherches délicates sur les actions chimiques des rayons lumineux, pour lesquelles la fixation de … ces raies est constamment nécessaire. Le spectre de Fraun- hoffer étant projeté dans la chambre obscure par un hélios= OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 233 tat qui le maintenait immobile, on a placé le verre rouge _ devant la fente étroite par Panel la lumière était admise. Puis la portion transmise étant recue sur un écran blanc, M. Foucault a tracé au crayon les limites qui la ee ea 4 marquant les raies B et C, qui Un distinctes. Le B. Alors, tirant des ARR de Fraunhoffer les lon- ieurs des ondulations propres à ces deux raies, et prenant È Le Jeur différence pour les soustraire à l’ondulation De d’ondulation propre à mon verre rouge. Le quart de cette ngueur m'a donné la longueur d'accès correspondant, qui, éduite en millionièmes de pouce anglais, comme l’a fait ewton, s'est trouvée presque identique à celle que mon ncienne estimation m'avait donnée. Je rapporte en note (1) 1) Dans toute l’étendue du spectre, les longueurs des accès décroissent continüment , à mesure que la réfrangibilité augmente. Ainsi, entre des ons de réfrangibilités très-voisines, les différences de ces longueurs vent être, à très-peu près, en rapport inverse des espaces qui séparent mêmes rayons sur un même spectre. Or, d’après les nombres que l’on ouvera consignés dans la note de la page 236, les longueurs d'accès, ex- fimées en millionièmes de pouce anglais, sont : Ta D A RO TIR PR En QN d 6,770175 MS airaie Cut. 2e. sr... 6,461100 . Différence pour l'intervalle BC............. DÉCORER 0,309075 Donc À de l'intervalle BC................ trs 0,274733 cr d'accès de la raie C........... ++... 6,461100 … Différence ou accès pour le verre rouge.........., 6,186367 Valeur adoptée dans mon mémoire de 1818....... 6,184320 XX 30 234 DES PHÉNOMÈNES ROTATOIRES les détails de ce petit calcul. Sur ce point encore je n'ai au- cune correction à faire dont je puisse répondre. ——————_——_————…—— La différence de ces évaluations est tout à fait négligeable : l'effet en serait inappréciable même dans l’arc de déviation du violet extrême, à 20 millimètres d'épaisseur ; car elle ne changerait cet arc que de 0°,682. En regardant directement les raies du spectre à travers deux verres rouges pareils superposés, MM. Foucault et Fizeau ont reconnu que le maximum d'illumination du champ transmis se trouve à une très-petite distance de la raie C, en s’éloignant de B; et ils m'ont fuit vérifier ce résul- tat après eux. Les déviations observées à travers un tel système dans des plaques de cristal de roche devraient donc être rapportées à une longueur d'accès un peu moindre que celui de la raie C, en se rapprochant du rouge extrême de Newton. Ces longueurs sont exprimées à leur rang dans la note de la page 236. J'ai voulu vérifier cette appréciation par une expérience directe. Pour cela j'ai pris une plaque exerçant la rotation vers la gauche, et dont l'épaisseur mesurée au sphéromètre était 7"",5077. D'après cela, si on l’eût observée à travers un seul verre rouge , le minimum d'intensité de l'image extraordinaire E aurait dû se trouver dans l'arc de déviation —1380,245, en comptant 18°,414 pour un millimètre. Or, en l'observant à travers les deux verres rouges superposés, j'ai trouvé le minimum de E dans l'arc de déviation — 130°,9, par une moyenne entre dix déterminations très: peu différentes les unes des autres. Maintenant, si l’on rapportait le rouge transmis par les deux verres à la raie C même, la déviation calculée par la raison inverse du carré des accès aurait dû être — 126°,73; et si on la rap- portait au rouge extrême du spectre de Newton, sa valeur, calculée de même, serait—131°,05. Le premier résultat est moindre que la déviation observée, et le second est un peu plus grand. Aïnsi, l'accès véritable qui correspon- dait au maximum réel de lumière rouge transmise était moindre que celui de la raie C, et un peu plus grand que celui du rouge extrême de Newton, lequel s'écarte de la raie C, du côté des rayons les plus réfrangibles. Cela s'accorde très-bien avec la position du maximum d'illumination observé parmi les raies du spectre, à travers les deux verres rouges superposés. | OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE, 235 _ Je placerai ici une remarque qui nous deviendra ultérieu- _ rement fort essentielle. Lorsque Newton eut dispersé par le prisme tous les rayons de diverses réfrangibilités, qui com- posent un trait de lumière solaire , il partagea le spectre visible en sept portions, qu'il jugea chacune sensiblement | . monochromatique pour l'œil. Mais il n’a pas donné d'indice # physique, qui marquât matériellement les limites de ces sub- divisions, et qui en définit les extrémités, de sorte qu’on puisse es identifier aujourd'hui sur nos spectres par ce caractère : heureusement :l assigne les longueurs d'accès qui y corres- «pondent , et les exprime en millionièmes de pouce anglais. » d’une autre part, les expériences de Fraunhoffer don- nent les longueurs des ondulations pour les sept raies prin- ipales qu’on observe dans toute l'étendue du spectre. Elles nt exprimées en parties du pouce français. Convertissez s valeurs en millionièmes de pouce anglais, et prenez-en le quart, vous aurez les longueurs des accès newtoniens qui Ÿ répondent aux sept raies de Fraunhoffer. En y comparant es accès des subdivisions newtoniennes, vous connaîtrez la place de ces subdivisions parmi les raies, et vous pourrez ainsi reporter le spectre de Newton sur celui de F raunhoffer. Cette identification , que je rapporte ici en note, le montre ur peu plus court, comme on devait s’y attendre (r). Ce que wWton appelle le rouge extrême coincide presque avec la isième raie du rouge désigné par C. Ainsi, en admettant, des deux parts, l'exactitude des éléments de comparaison qui 4 … (x) Tableau général des longueurs d'accès dans l'air, exprimées en mil- ki onièmes de pouce anglais, tant pour les limites des sept nuances mono- 30. 236 DES PHÉNOMÈNES ROTATOIRES paraissent en effet également incontestables , toute la portion rouge la moins réfrangible du spectre solaire lui a échappé. chromatiques de Newton que pour les sept raies principales de Fraunhoffer, dont les résultats sont désignés par Fr. AMPLITUDES SPECTRE | SPECTRE | d'accès com- de de j Fraunboffer.| Newton. Newton, Raiïe B dans le rouge Fr Raie C dans le rouge Fr Rouge extrême de Newton Limite du rouge et de l’orangé Raie D dans l’orangé Fr Limite de l’orangé et du jaune Limite du jaune et du vert Raie E dans le vert Er...:..-......:... L Limite de l'indigo et du violet Raie G vers la fin de l'indigo Fr Violet extrème de Newton Raie H dans le violet Fr Si l'on veut avoir ces longueurs d'accès exprimées en parties du milli- mètre, il faudra ajouter à chacun de leurs logarithmes tabulaires le loga- OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 237 t-ce par l’imperfection de ses prismes, ou par l’interposi- du ciel trop sombre de l'Angleterre? Ce dernier point térait d'être examiné. Vers l’autre bout du spectre, ce 1e constant 5,4048320, et prendre le nombre correspondant à la ame ainsi formée. On en déduirait les longueurs des ondulations, imées aussi en parties du millimètre, en multipliant chaque résultat . Le logarithme constant ajouté est celui du millionième de pouce lais exprimé en millimètres. es longueurs des accès newtoniens rapportées dans le tableau précédent ent, dans leurs deux dernières décimales, quelques unités de différence celles que l’on trouve mentionnées à la page 109 du tome IV de mon rès les rapports rigoureux des nombres qui, selon Newton, lient les tres accès à celui-là. Au lieu que, dans mon Traité de physique, je les ai ulées avec les expressions de ces rapports, approchées seulement jus- là la quatrième décimale, ainsi que Newton les a employées lui-même s la construction qu’il donne au commencement de la seconde partie ‘livre II de l'Optique, ne croyant pas sans doute pouvoir répondre des érences que produiraient les décimales ultérieures. Toutefois j'ai pensé il serait préférable de conserver ici les rapports exacts, tels que Newton es a théoriquement établis. Selon ses énoncés, les longueurs des accès, espondantes aux huit divisions chromatiques de son spectre, en partant ouge extrême, sont entre elles comme les racines cubiques des carrés ombres APT NOMENTE dont | [ is à égal nombres 1, —9 9 = > 1 5 — es couples, pris à éga MONO ME PTOUE le 5e" istance des extrêmes, donnent toujours pour produit constant —. En e, selon ses expériences, la longueur d'accès correspondante à la li- de l'orangé et du jaune, étant exprimée en millionièmes du pouce ‘ Mer , 1000 : FRE , est, dans l’air, égale à FE De là on déduit tous les nombres 238 DES PHÉNOMÈNES ROTATOIRES que Newton appelle le violet extrème, n’atteint pas tout à fait la raie H, la dernière de celles que Fraunhoffer a défi- nies , et que nous découvrons très-aisément. Quant aux por- tions du spectre de Fraunhoffer qui s'étendent hors des sept raies principales , et qui sont si faibles que l’œil ne peut les apercevoir qu'en lui cachant toutes les parties intermédiaires, il est très-concevable que Newton ne les ait pas vues, ou n'ait pas jugé nécessaire de les spécifier, comme étant insensibles dans les applications. Mais la portion du rouge la moins ré- frangible, comprise entre les raies C B, qui excède son spectre , ne peut être négligée, du moins par nous. Or, elle n’a pas été comprise dans la règle pratique qu’il a donnée pour calculer les teintes apparentes qui résultent pour l'œil de l'association d’un nombre assigné de rayons simples, pris dans la lumière blanche composée de la totalité du spectre. Conséquemment, lorsque les teintes calculées par sa règle contiendront très-peu de rayons rouges ; ou, lorsque l'effet optique de ces rayons y sera fortement dominé par un en- semble des autres propre à impressionner vivement l'œil, de manière à composer une teinte franche très-distincte du rouge; ou enfin, lorsque ce sera le rouge lui-même qui y dominera spécialement et lui donnera son caractère, l'effet produit sur l'œil pourra être tel que Newton l’a concu, et tel aussi par l'expérience que sa règle le donne. Mais il en devra ètre autrement, si la teinte calculée est d'une apparence in- décise, pâlie par une imitation abondante de blane, résultant du mélange d’un grand nombre de rayons pris dans toutes les parties du spectre. Car alors, si la portion du rouge le moins réfrangible, omise par Newton, doit entrer partielle- ment ou en totalité dans la teinte qu’on observe, elle devra OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 23g aître plus rouge que ne l'indique le calcul. Ces écarts de règle, s'ils se présentent uniquement dans de telles cir- le justesse des combinaisons expérimentales sur lesquelles vton l’a établie, et dont malheureusement il ne nous a fait connaître les détails. Ce cas d'exception vient préci- ent de s'offrir à moi, dans les nouvelles applications que aites de la règle de Newton aux couleurs données par plaques de cristal de roche. 11 a lieu, selon le calcul, nme par l'expérience , dans les épaisseurs intermédiaires re dix et douze millimètres. Je ne le trouve bien marqué là. Il m'avait échappé dans mes anciennes observations, ant pas eu alors de plaque dont l'épaisseur tombät entre limites. La concordance parfaite qui se soutenait entre teintes calculées et observées, à toutes les épaisseurs is grandes ou moindres que j'avais expérimentées, ne wait pas fait suspecter cette interruption. Mais on a, par les nouvelles épreuves que je rapporterai, qu’elle st parfaitement certaine; et la circonstance, où elle se mani- le ainsi avec tant d'évidence, est précisément telle, que la rtion de rouge extrême, omise par Newton , se porte pres- tout entière dans l’image ordinaire, lorsque la section cipale du prisme analyseur coïncide avec le plan de pola- ation primitif ; ce qui est la position fixe que j'avais choi- pour comparer les teintes observées des images aux carac- es chromatiques que la règle de Newton leur assigne ès leur composition. Mais une fois ce désaccord cons- et sa cause reconnue, il m’a été facile de le reproduire aucoup d’autres épaisseurs différentes de celles-là, en eant la section principale du prisme analyseur, de ma- 240 DES PHÉNOMÈNES ROTATOIRES nière à faire prédominer, dans l'une ou l’autre des deux ima- ges, les mêmes portions extrêmes du spectre que Newton a omises. C’est ce que l’on verra dans la suite du présent mé- moire, sur lequel je ne veux pas anticiper, devant d’abord terminer l'exposé historique des recherches qui ont été né- cessaires pour mesurer, au moins approximativement, les éléments simples du phénomène, et en recomposer un en- semble calculable, que l’on püt lui comparer. Après avoir déterminé expérimentalement, comme je. viens de le dire, la vitesse rotatoire du rayon moyen trans- « mis par le verre rouge, et avoir défini ce rayon par sa lon- gueur d'accès, il fallait obtenir les deux éléments analogues pour d’autres rayons appartenant à des portions différentes du spectre, et répartis sur son étendue en assez de points. pour que l’on püût espérer de découvrir, entre leurs vitesses Ë de circulation, quelque relation numérique continue, qui fût, « sinon rigoureuse, du moins suffisamment approchée. Pour cela, les verres colorés ne pouvaient plus servir, parce qu'ils transmettent trop de rayons de différente nature. On ne pouvait donc employer que des rayons pris dans les diffé= rentes parties d’un spectre fixé par un héliostat. Mais l'analyse M du spectre était bien moins exacte il y a vingt-sept ans, qu'elle ne l'est devenue depuis par les découvertes de Fraunhoffer: M En outre, la polarisation complète de ses différents rayons présente des difficultés que j'ai signalées, qu'on rencontrerait … encore aujourd’hui ; et notre confrère M. Pouillet, qui, jeune. alors, m'assistait dans ces expériences, peut se rappeler ce qu'elles ont exigé de soins, pour n'être encore qu'imparfaites. Ayant ainsi obtenu , de mon mieux , dans une même plaque les ares de déviation de différents rayons, que je pouvais au OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 241 - moins très-approximativement placer dans le spectre newto- mien, et définir par leurs longueurs correspondantes d’accès , je rassemblai ces résultats, et je cherchai à les lier ensemble. . Les vitesses de rotation se montraient croissantes avec la ré- frangibilité. C’est le contraire pour les accès. J'essayai si elles uivraient le rapport inverse de leurs longueurs; il les fai- varier trop lentement. Le rapport inverse des carrés les reproduisit beaucoup mieux, entre des limites d'erreurs dont les expériences ne pouvaient répondre. Le rapport inverse es cubes rendait leurs variations beaucoup trop rapides. Je rrêtai donc à la phase intermédiaire, non comme abso- ient sûre, mais comme étant celle qu'il fallait éprouver de nouvelles vérifications , en cherchant si elle reprodui- les teintes complexes des images données par la double fraction, dans toutes les amplitudes d’épaisseur où on les observe sensiblement colorées. En effet, la détermination de ces teintes, pour chaque tion donnée du prisme analyseur, n’est plus qu’une affaire écalcul, si l’on adopteles éléments d'expériences que je viens rapporter. Prenons, comme exemple, une plaque dont aisseur soit 1 millimètre. On connaît l'arc de déviation couru dans cette épaisseur par le rayon moyen transmis ravers le verre rouge, et dont la longueur d’accès a été ignée. De là on peut conclure les arcs de déviation propres rayons extrèmes du spectre newtonien, ainsi qu'aux ites des divisions monochromatiques intermédiaires , en faisant réciproques aux carrés des longueurs d’accès qui y respondent, et que Newton nous a données. On aura si la distribution angulaire, tant absolue que relative, des t plans de polarisation qui embrassent les sept nuances L'XX. 31 242 DES PHÉNOMÈNES ROTATOIRES monochromatiques, dans le faisceau blanc sorti de la plaque épaisse d’un millimètre; et l'on en déduira proportionnelle- ment les ares de déviation de ces mêmes plans, lorsque le faisceau aura traversé toute autre épaisseur assignée. On pourra alors construire des figures coloriées qui montreront la dispersion générale de tous les plans de ‘polarisation du spectre, quand le faisceau blanc, primitivement polarisé en un seul sens , sortira des différentes plaques que l'on voudra soumettre à l'observation. C'est ce que j'ai fait pour treize pe 4 plaques dont les épaisseurs étaient mesurées au sphéromètre,: dans mon mémoire de 1818 ,en me bornant, comme je viens de le dire, aux limites extrêmes du spectre assignées par Newton, que l’on ne savait pas alors devoir être étendues plus loin. | Maintenant, concevons que l’on observe toutes ces plaques … dans une même position assignée du prisme analyseur, par exemple , lorsque sa section principale coïncide avec la di- » rection de la polarisation primitive; puis, considérant une portion infiniment petite du spectre dont l’are de déviation. moyen soit æ, cherchons quelles proportions de cet élément devront entrer dans l’image ordinaire et dans l’image extra- ordinaire. C’est un problème que Malus nous a appris à ré=. soudre. D'après ses inductions, que toutes les expériences subséquentes ont confirmées, l’image extraordinaire sera. égale à la quantité totale z: de lumière contenue dans cet élément, multipliée par le carré du sinus de l’angle æ; et l'image ordinaire se composera de la même quantité z, mul-… tipliée par le carré du cosinus du même angle. Mais comme ces deux portions sont complémentaires l’une de l’autre, elles doivent contenir en somme la quantité de lumière to- OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 243 tale à polarisée dans l'arc æ. Il suffit donc d'évaluer la pre- . mière, pour en conclure la seconde par complément. . … Voilà le calcul pour un élément infiniment petit du spectre. eu Maintenant, par une approximation qui se trouve être tou- jours suffisante, on peut considérer les plans de polarisation e même portion homochromatique, comme répartis uni- ément entre les limites qui la comprennent, limites déjà édemment déterminées pour chacune d'elles. Alors la mation de toutes les quantités de lumière de cette nuance entrent dans l’une et l’autre image, s'obtient par un pro- ème de calcul intégral facile à résoudre. Nommons a, 4’, les es de déviation qui la limitent dans l’ordre croissant des rangibilités , et I la quantité totale de lumière monochro- tique qu’elle renferme. Les proportions de cette même ière, qui composeront l’image ordinaire et l’image extra- dinaire, dans la position ici'assignée au prisme analyseur, ont les expressions suivantes, que j'ai données dans mon oire : age ordinaire dé F,—==1{r 1 + Image extraordinaire 4 F—=1[1 — "ET cos (a'+ a)]. -R représente le rayon du cercle plié en arc. Si l’on exprime es ares a, a , en degrés et fractions décimales de degrés sexa- maux , la valeur connue de R est 57°, 29578, et son loga- ithme, évalué à sept décimales exactes, est 1,7581226. On ut donc calculer les valeurs du coefficient de I pour les sept sions monochromatiques du spectre newtonien , en attri- tsuccessivement aux ares a, a’, les valeurs qui les limitent 31. res (é si cos (a'+ a)|. 24/4 DES PHÉNOMÈNES ROTATOIRES à la sortie de la plaque que l’on veut considérer; et rien n'empêche d'évaluer par la même expression les quantités de lumière fournies aux deux images, par les portions externes que Newton n’a pas vues, si l’on suppose qu’elles y entrent avec des intensités assez fortes pour influer sensiblement sur le caractère des teintes observées. Jusqu'ici l'application numérique ne peut comporter de doute que dans l'emploi qu'on y fait du carré des accès, pour calculer les ares de déviation a, a’, qui limitent chaque divi- sion monochromatique ; car l’arc de déviation absolue, ob- k servé à travers le verre rouge, et le mode de répartition d’un même rayon entre les deux images, sont des éléments don-. nés par l'expérience. Mais l'achèvement du problème va exi- ger en outre l'emploi de la règle de Newton, qui n'est pas établie par des expériences qu’il nous ait transmises , et que … malheureusement personne encore n’a entrepris de vérifier directement, quaique ce soit une des plus belles recherches qui puissent occuper aujourd'hui un physicien exercé. L'in- troduction de cette règle dans la question traitée ici, en four- nira donc seulement une nouvelle épreuve indirecte, ajoutée à d’autres du même genre qui déjà la justifient. Mais elle s’y trouvera en outre associée à la loi des déviations réciproque au carré des accès, dont l'établissement expérimental ne peut être considéré que comme approximatif. De sorte que l’ac- cord des résultats avec les observations, si l’on trouve qu'il … existe, donnera seulement une vérification conjointe , mais » non pas individuelle, de la règle et de la loi. Newton représente la somme des rayons de la lumière. blanche par un nombre, qu'il répartit entre ses sept divisions . monochromatiques du spectre, suivant certaines proportions … 1 ‘ a Br 1% OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 245 qu'il a assignées, et qu'il présente comme liées numé- - riquement aux longueurs des accès propres aux rayons b simples qui limitent ces nuances. Il ne nous a pas indi- - qué la série d'idées qui l'a conduit à adopter cette relation, té. Bien plus, après tant d’études faites sur Newton, cette ation entre les longueurs des accès n'a été apercçue qu’en 824 par un de mes plus intelligents élèves, M. Blanc, sous > nom duquel je l'ai publiée dans la troisième ion de » on Précis de Physique, tome IT, ES 434. Étant généra- “lisée analytiquement , elle lie les accès dans toute l'étendue ‘du spectre par une expression exponentielle , d’où l’on dé- d ait numériquement tous les arcs attribués par Newton aux sept nuances monochromatiques dans la construction cireu- laire par laquelle il les compose ; de sorte que cette minu- tieuse concordance rend comme indubitable que Newton a connu la relation analytique dont il s’agit, et qu'il en a fait usage ; mais c’est encore un de ces secrets qu'il s'était malheureusement réservés. Par la richesse et l'exactitude gulière des déductions que sa règle fournit, on peut croire elle se rattache aux propriétés les plus intimes de la lu- ère, considérée dans son action sur nos organes; mais ce pu sujet d’études physiques et mathématiques n’a encore é suivi par personne. Admettant donc ce résultat des travaux de Newton comme -un précepte à employer et à éprouver, il assigne les nombres _proportionnels de rayons qui composent les sept divisions 4 2/6 DES PHÉNOMÈNES ROTATOIRES monochromatiques de la lumière blanche, et que j'ai tout à l'heure désignés par I dans les formules. Si l’on suppose que l’on opère sur un trait de lumière ainsi constitué, dans lequel les portions extrêmes du spectre vues par Fraunhoffer n’en- trent qu’en quantités négligeables, il faudra remplacer I par ces valeurs, et l’on aura les nombres absolus F,, F, de rayons lumineux que chaque division homochromatique du spectre newtonien fournit aux deux images ordinaire , extraordi- naire , O, E. Quand on a ces intensités ainsi exprimées, il vous donne une règle pour les rassembler, et pour en conclure la nuance monochromatique dont se rapproche le plus pour l'œil la teinte résultante, en assignant en outre les proportions de lumière de cette nuance, et de lumière tout à fait blanche, qui, réunies, produiraient dans l'œil la sensation d’une teinte pareille. J'ai réduit cette règle en formule dans mon Traité de Physique, tome IT, page 451. Alors la combinaison des intensités F,, F, obtenues tout à l'heure, n’est plus qu'une affaire de caleul. Je l'ai effectuée ainsi, dans mon mémoire de 1818, pour les treize plaques de cristal de roche d’épaisseurs diverses depuis o"", 400 jusqu'à 13"",416, que j'avais sou- mises aux observations, en employant pour lumière incidente celle qu'envoient les nuages blancs de l'atmosphère. Les deux teintes résultantes, désignées par le calcul, se sont toujours trouvées conformes à l'expérience. Or, je ne pouvais pas me faire illusion à moi-même dans cette appréciation. Car les résultats de calcul que J'ai rapportés textuellement dans mon mémoire ont été ainsi comparés , non pas à des observations nouvelles, mais aux anciennes observations de ces mêmes plaques, déjà publiées dans mon mémoire de 1813, précisé- OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 247 ment pour cette position du prisme analyseur , à une époque de Newton. … Gette fois, je représentai les résultats du caleul par deux oures qui désignent, pour la position supposée du prisme ringent , les teintes des deux images ordinaire, extraor- daire, à toutes les épaisseurs auxquelles on les voit sensi- ement colorées. Je ne trouve rien à changer aujourd’hui à indications, si ce n’est une petite faute accidentelle de cal- numérique que j'indique ici en note (*), et la discordance locale de la règle de Newton pour les épaisseurs intermédiaires re 10 millimètres et 12 millimètres, que je n'avais pas alors erçue, n'ayant pas eu de plaque dont l'épaisseur tombät atre ces limites. Les expériences de vérification que je viens de faire, sont nsignées dans le mémoire qui fait suite à cette introduction. ; je me bornerai à dire qu’elles ont été effectuées direc- ment sur un grand nombre de plaques, toutes soigneuse- 1 | 149) Cette faute porte sur les points de l’une et l’autre courbe qui appar- nent à l'épaisseur de 15 millimètres, et qui ont été seulement construits près le calcul, parce que je n'avais pas de plaque de cette épaisseur. avait employé dans la construction les valeurs suivantes : e extraordinaire : QUES 75 8 CE: "; A —0,12435. Pour l’image ordinaire : U'— 161° 17 1°; A —0,13788- l ndis que les vraies valeurs sont : léataoidiasire: :U—334° 27 25"; A—0,15097. Pour l'image ordinaire : U — 154° 27 25°; A —0,155:7 i ela rapproche un peu plus l’image extraordinaire du rouge pourpre, et age ordinaire d'un vert pâle, voisin de la limite du vert et du jaune. ndications sont d'accord avec l'observation qui donne à cette épaisseur ouge, O vert jaunâtre pâle, très-peu coloré. 248 DES PHÉNOMENES ROTATOIRES ment mesurées au sphéromètre, et tantôt étudiées isolément, tantôt superposées en systèmes multiples, pour constater l'exacte continuité du mouvement des plans de polarisation en passant de l’une à l’autre. J'ai ensuite reproduit et ras- semblé tous ces résultats, en une seule série continue, qui em- brasse l'étendue totale des épaisseurs où la colorisation des images est sensible. J'y ai employé un de ces appareils à épais- seur variable que construit fort habilement M. Soleil. Ce sont deux prismes égaux de cristal de roche, exerçant un pouvoir rotatoire de mème nature , et ayant leurs surfaces externes perpendiculaires à leur axe individuel. Is glissent au-devant l'un de l’autre dans leur monture commune par un mouve- ment de vis, comme cela se pratique dans les pièces usitées en mécanique, pour obtenir des variations continues d'épaisseur. Au commencement de leur course, où les deux prismes se recouvrent par leurs extrémités les plus minces, la somme de leurs actions est exactement compensée par une plaque à faces parallèles , perpendiculaire à l’axe , etexerçant un pou- voir rotatoire de nature contraire. L'effet résultant est alors le même que si l'épaisseur totale était nulle, et c’est là le point zéro de l’appareïl. Un autre point est fixé de même expéri- mentalement par une seconde compensation, lorsque les pris- mes se recouvrent par leurs parties les plus épaisses ; et l’am- plitude de course comprise entre ces deux termes est divisée également par une échelle graduée, qui indique les variations d'épaisseur en centièmes de millimètre. C'est dans la fixation de ces limites, par compensation , que consiste surtout ce que l’appareil offre d’ingénieux , et ce qui exige le plus d’ha- bileté dans sa confection. Je ne me suis confié à celui que m'a- vait prêté M. Soleil, qu'après avoir vérifié sa graduation en OPÉRES DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 249 plusieurs points par des pence de compensation analo- Rates, faites avec des plaques dont j'avais moi-même mesuré les épaisseurs au sphéromètre:; et je l'ai trouvée fort exacte dans toute son amplitude, ses plus Dion écarts équivalant à de si petits intervalles d’épaisseurs, qu’on ne saurait en répondre _ dans de pareilles constructions. Le maximum de l’action ré- É ltante ne représentait qu’une épaisseur de 11 millimètres. is je l'ai étendue beaucoup plus loin , et je l'ai portée jus- d'à 27 millimètres, en interposant FA le trajet du rayon . des plaques additionnelles de même nature, dont les é épais- eurs m'étaient connues , et que je plaçais, ainsi que l'appareil -même, dans les conditions rigoureuses de perpendicula- é d'incidence qui sont indispensables pour son usage. J'ai pu alors vérifier avec continuité, dans tout cet inter- valle, les deux figures qui chppment la succession des teintes des deux images; figures que j'avais autrefois construites par nts dans mon mémoire de 1818, d’après mes expériences itérieures, en complétant les intermédiaires par les indica- ut par un tracé continu. Je n'ai pas cru inutile de les repro- -duire dans le présent mémoire, à cause de leur fes meer es, et se pliaient à leurs plus capricieuses inflexions, tant our la nature des teintes que pour le degré de leur colora- on, et pour l'accroissement progressif des quantités rela- ives de lumière qu’elles contiennent. Tout physicien qui udra répéter cette épreuve sentira que la règle de Newton Œ XX. 32 250 DES PHÉNOMÈNES ROTATOIRES doit avoir des bases bien réelles pour offrir un pareil accord, et que la relation du carré des accès qui entre avec elle comme élément dans ces calculs, ne peut pas non plus s’écarter beau- coup dela vérité. Pour cela, il suffit de considérer combien la distribution des plans de polarisation des divers rayons sim- ples éprouve de changements dans l'intervalle de 10 milli- mètres d'épaisseur. D'abord , aux épaisseurs très-petites, ils sont tous très-peu écartés du sens de polarisation primitif qui leur était commun , et ils sont aussi très-peu séparés les uns des autres. Mais cet écart et cette séparation augmentent pro- gressivement , et celle-ci surtout s'accroît avec beaucoup de rapidité à mesure que les plaques deviennent plus épaisses. Ainsi, quand le faisceau blanc , d'abord polarisé en un sens unique , a traversé une épaisseur de 10 millimètres , le plan de polarisation qui appartient au rouge extrème de Newton a tourné de 175°; et le plan de polarisation qui appartient à son violet extrême , a tourné de 441°. De sorte que l’ensemble des plans intermédiaires composant l'étendue totale du spec- tre qui a été visible pour lui, se trouve alors réparti sur une amplitude angulaire de 266, ou presque les trois quarts d’une circonférence. Les sommes de rayons diversement ré- frangibles que la double réfraction du prisme analyseur fait passer dans l’une ou l’autre image , depuis les plus petites épaisseurs jusqu'à cette limite, composent sans doute des mélanges beaucoup plus variés, et beaucoup plus complexes, que ceux que Newton a dû former artificiellement pour éta- blir sa règle; et l’on peut être à bon droit surpris qu’elle s'y adapte si fidèlement. Entre 10 et 12 millimètres d'épaisseur, la règle de Newton s'écarte des observations par une discordance d'autant plus ® OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 251 singulière qu'elle n'existe plus, ou n’est plus sensible , à des épaisseurs notablement plus grandes. Comme exemple spé- - cial, je prends l'épaisseur 11"”,047, où elle est le mieux mar- | Ra et pour laquelle, aussi, j'ai comparé avec le plus de soin les teintes des images O, E données par DE pÉtE à elles que nur assigne le calcul . d LE - la règle. J’ opérais culaire sur une glace noire. Guide cette lumière puisse, rigueur, ne pas être supposée purement blanche, à cause mélange qu’elle éprouve avec la teinte dominante de bleu, artenant à la couche de l'atmosphère interposée, on doit moins admettre qu’elle approche extrêmement d’une heur parfaite, au jugement de l’œil ; et les légères varia- ons que l'éclat plus ou moins vif du soleil y occasionne, en que perceptibles, dans la chambre obscure, sur les ces isolées des images O, E, ne le sont nullement à l'œil dans le trait total de lumière composé de leur somme. , en mettant la section principale du prisme analyseur en coïncidence avec le plan de polarisation primitif, et effec- tuant le calcul pour l'épaisseur assignée 11"",047, en tenant ement compte des quantités des diverses lumières com- ises dans les divisions du spectre newtonien, la règle in- que, pour l'image ordinaire O, un indigo très-pâle confi- t au bleu, et pour l’image extraordinaire E, un orangé -pâle tirant vers le jaune ; tandis que, par l'expérience, la nte de O qu'on observe est un rouge bleuâtre rose, et la inte de E est un vert d’eau d’une nuance indécise, à peine oré. La seule cause présumable que l’on puisse concevoir cet écart exceptionnel , c'est que, à l'épaisseur précise ici nsidérée , les deux extrémités rouge et violette du spectre 32. 252 DES PHÉNOMÈNES ROTATOIRES que Newton n'a pas vues, ou auxquelles il n’a pas eu égard, ont leurs plans de polarisation distribués de manière à en- trer en proportion dominante dans l’image ordinaire O. Ceci a surtout lieu pour la division terminale rouge qui passe presque en totalité dans cette image. On peut constater la réalité de ce fait, en réfractant simultanément les deux images O,E, par un prisme très-dispersif, et comparant les deux spectres ainsi formés; car le rouge de E se voit alors très- notablement plus court que celui de O, et l'extrémité de ce rouge, la moins réfrangible, y manque en totalité. On peut donc présumer qu’en se joignant dans O à la proportion du violet terminal qui s'y trouve aussi relativement plus abon- dante, elle fait passer au rouge bleuâtre la pâle nuance indigo que la règle de Newton assigne, d’après la seule combinaison des autres parties du spectre. Alors la nuance verdâtre à peine perceptible de E peut être produite par l'addition des 4 éléments complémentaires provenant de ces divisions ex- trèmes, ou par le seul contraste du rouge de l’image O , qui est vue simultanément. Mais je ne saurais dire comment il faudrait modifier la règle de Newton pour y introduire ces additions qui semblent devenues aujourd'hui nécessaires. Vers 12 millimètres d'épaisseur la discordance cesse, soit parce que les teintes des deux images redeviennent plus franches, soit parce que les plans de polarisation des divisions extrêmes, qui excèdent le spectre de Newton, se trouvent ré- partis de manière à faire entrer leurs lumières, en proportions moins inégales, dans les deux images O, E. L'accord de la règle et de l'expérience se soutient dès lors, sans disconti- nuité, avec une approximation très-satisfaisante , au juge- ment de l'œil, jusqu’à l'épaisseur de 18 et 20 millimètres; après OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 253 oi, l'excessive dispersion des plans de polarisation rend la coloration des images de plus en plus faible et difficile à juger - exactement. L'application numérique de la règle de Newton à de tels cas aurait été inévitablement trop douteuse, pour que j'aie supposé utile de l’effectuer. Je me suis borné à suivre périmentalement la succession des teintes jusqu’à l’épais- r de 27"°,5, où elles deviennent presque insensibles ; et décrit de mon mieux leurs caractères , afin que les physi- ns qui voudront étendre la règle de Newton aux divisions trêmes du spectre, par les lois de rotation que j'ai assignées ax divers plansde polarisation, ou par d’autres plus éxactes, rouvent les données expérimentales de ce travailtoutes prépa- rées. Les deux figures que j'avais insérées dans mon mémoire 1818,et que je reproduis dans celui-ci souslesn® 2et 3, étant Insi vérifiées et complétées, fourniront déjà une approxi- tion presque toujours suffisante, dans les épaisseurs qu’elles -embrassent. Si l’on y joint les effets de compensation qui se produisent entre les plaques de pouvoir contraire, il n'y aucune question de physique relative à la rotation des plans polarisation, dans un système donné de plaques de cristal de roche, qui ne se résolve presque à la simple vue. C’est ce ‘on a pu reconnaître par les applications directes que j'ai l’occasion d’en faire aux questions de ce genre qui se sont résentées récemment devant l’Académie, et dont j'ai inséré s solutions dans les Comptes rendus. Toutefois, l’influence sensible des portions extrêmes du ectre que Newton a omises dans sa règle, ne permettant s d’y trouver un type de comparaison qui püt servir pour confirmer assez généralement les valeurs que j'avais attri- aées aux vitesses de rotation absolues des divers rayons a # ù 254 DES PHENOMÈNES ROTATOIRES simples, j'ai cherché s'il serait possible, au moins pour cer- tains cas, d'établir directement , etindépendamment de cette règle, les caractères chromatiques des teintes résultantes, d'après la composition que ces vitesses assignent aux images dans des positions données du prisme analyseur, pour com- parer ensuite ces résultats aux teintes réelles qui s’observent dans les circonstances supposées. C’est à quoi j'ai réussi dans deux cas très-étendus, sans avoir besoin d'introduire aucune hypothèse sur les intensités relatives d'illumination, pro- pres aux diverses divisions chromatiques du spectre, comme … Newton l'avait fait pour établir sa règle de la composition | des teintes. Le premier de ces cas est celui où tous les rayons simples compris entre les raies extrêmes B, H de Fraunhoffer, ont leurs plans de polarisation dispersés dans une amplitude an- gulaire totale qui n'excède pas un quadrant. D’après mes évaluations, cette condition a lieu, dans le cristal de roche, pour toutes les plaques perpendiculaires à l'axe dont l'épais- seur ne dépasse point, ou plutôt n'atteint pas tout à fait 3 nullimètres. Alors , supposant la section principale du prisme analyseur dirigée dans le plan de polarisation pri- mitif, je parviens, par un procédé de discussion direct, à définir complétement , pour les deux images, le caractère chromatique dominant des teintes résultantes , et la marche de leurs mutations progressives, avec une délicatesse d’ap- préciation qui atteint leurs moindres particularités, et je montre que l'expérience suit minutieusement ces indications du calcul dans tous leurs détails. Le second cas que j'ai pu encore atteindre sans recourir à la règle de Newton, c'est celui où la section principale du “4 OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 255 prisme analyseur est dirigée de manière à produire dans image extraordinaire cette teinte violet bleuâtre, que sa ra- _ pide transition du bleu au rouge, quandon tourne le prisme, _ m'afait appeler la teinte de passage, et dont l'apparition est ue si délicatement saisissable par ce caractère , qu’elle place avec avantage l’emploi de la lumière simple, dans xpériences courantes faites avec des plaques de cristal de che, ou de toute autre substance dont le pouvoir rotatoire erse les plans de polarisation sensiblement, selon la même Jai pu suivre cette teinte par une discussion directe, jus- une épaisseur de 8 millimètres de cristal de roche per- diculaire à l'axe; limite à laquelle, d’après mes évalua- ns, la totalité du spectre compris entre les raies extrêmes H de Fraunhoffer, a ses plans de polarisation répartis sur ne amplitude angulaire de 25/4°. Cela comprend toutes les hases dans lesquelles le caractère de transition de cette e est pratiquement applicable. En me fondant sur les esses de rotation absolues et relatives que j'avais attri- üées aux plans de polarisation des divers rayons simples, pu , dans tout cet intervalle d'épaisseur, établir directe- nt le caractère chromatique dominant de la teinte, sa con- xion avec celles qui la précèdent ou la suivent immédiate- nt dans le mouvement du prisme analyseur, la constance que complète de sa nuance, et sa dégradation progressive le rouge, à mesure que l'épaisseur s’accroît. Tous ces ltats, minutieusement conformes à l'expérience, déri- t rigoureusement , et sans exception , de la loi physique j'ai attribuée aux vitesses de rotation dans le cristal de e ; ils ne peuvent subsister, tels qu'ils sont, qu'avec elles ; sorte qu'ils en donnent une confirmation positive entre 256 DES PHÉNOMENES ROTATOIRES les limites de précision que ce genre d'observation atteint. Lorsque l’on sera parvenu à mesurer les vitesses de rota- tion des rayons simples, dans toute l'étendue du spectre visible, avec plus de rigueur que je n’ai pu le faire, le mode de discussion direct que je viens de signaler sera encore utile pour les vérifier par leur application, dans les deux cas très- étendus auxquels il s'adapte ; et les nombres qu'on en déduira étant comparés à ceux que je donne, serviront pour les con- firmer ou les corriger. Dans la même vue d'amélioration et de progrès ultérieurs, j'ai annexé à mon mémoire les détails d’un grand nombre d'observations nouvelles, faites dans tou- tes les positions angulaires du prisme analyseur, sur des plaques de cristal de roche exactement perpendiculaires à l'axe, ayant des épaisseurs très-variées, soigneusement mesu- rées au sphéromètre, et dont j'ai constaté les effets optiques avec toute l'attention dont j'ai été capable. Je les ai accom- pagnés de figures coloriées qui représentent les positions relatives des plans de polorisation propres aux diverses di- visions chromatiques du spectre, comme je l'avais fait dans mon mémoire de 1818. Mais cette représentation est ici éten- due à toutes les portions du spectre comprises entre les raies extrêmes B, H de Fraunhoffer. J'ai rapporté aussi les formules que j'avais établies autrefois pour calculer les élé= ments chromatiques des images dans toutes les positions quelconques du prisme analyseur, d’après les valeurs assi- gnées aux vitesses angulaires de rotation , afin qu’on ne soit pas obligé d'aller reprendre ces détails dans les publications antérieures où ils sont épars. De cette manière, les physiciens qui voudraient analyser de nouveau ces curieux phénomènes, trouveront, dans le présent mémoire, tous les matériaux OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 257 -_ d'une étude complète; et les géomètres qui voudraient les … soumettre à des théories mathématiques, déduites des hy- pothèses que l’on peut former sur la nature de la lumière, y trouveront des ‘éléments d'application tout préparés. J'ai . täché de faire en sorte qu’ils fussent suffisamment multipliés pour ce but, mais surtout qu'ils fussent fidèles. … Je n’ai pas négligé non plus d'employer le procédé ingé- mieux que MM. Fizeau et Foucault ont imaginé, et proposé lans le Compte rendu du 24 novembre 1845, pour vérifier, à posteriori, les valeurs assignées aux vitesses de rotation … des différents rayons simples. Ce procédé peut s’énoncer — mathématiquement de la manière suivante : Étant donnée … dont le pouvoir rotatoire est censé connu; exposez-là nor- malement en faisceau blanc, préalablement polarisé en un seul lyseur dans une certaine direction angulaire, calculez, d’après es vitesses de rotation assignées aux plans de polarisation “des divers rayons simples, quels sont, dans ces circonstan- ces, les éléments chromatiques qui doivent manquer dans June et l’autre image. Cela fait, placez, après l’analyseur, an prisme à réfraction simple, très-dispersif; et voyez si ‘les spectres des deux images, ainsi développés, présentent, dans leur longueur totale, des intermittences prévues. Pour apter ce procédé d’expérimentation aux dispositions de | l'appareil dont je fais usage, j'ai fixé le prisme dispersif sur “alidade de l’analyseur par un bras métallique tournant, “qui permettait de l’amener dans le trajet des rayons, ou de Ven écarter à volonté; puis, j'ai interposé antérieurement, “dans ce même trajet, une fente métallique étroite que je EUXX. 33 258 DES PHÉNOMÈNES ROTATOIRES dirigeais parallèlement à l’alidade, pour obtenir, par cette limitation, des spectres dont les éléments chromatiques de réfrangibilités voisines n’empiétassent point trop les uns sur les autres. En opérant ainsi, dans les conditions les plus diverses, tant d'épaisseur des plaques que de position angu- laire de l'analyseur, j'ai toujours trouvé les intermittences réalisées dans chaque spectre, comme le voulait le calcul , tant pour leur place que pour leur nombre. C’est donc une vérification matérielle des valeurs que j'avais attribuées aux vitesses de rotation. Toutefois, malgré la partialité favorable que cet accord doit naturellement m'inspirer pour le pro- cédé dont il s’agit, je n'ose pas trop m'en prévaloir, parce que, telle que j'ai pu l'adapter à mon appareil, l'épreuve pourrait bien paraître plus séduisante que rigoureuse à des expérimentateurs scrupuleux. En effet, chaque élément chromatique, qui, selon le calcul, doit manquer mathéma- tiquement dans l'une ou l’autre image, n’y disparaît pas physiquement seul. La disparition s'étend, pour l'œil, aux éléments homochromatiques voisins, dont la direction de polarisation propre diffère trop peu de celle-là, pour que le carré du sinus ou du cosinus de cet écart les amène en proportion perceptible dans la même image. Or, l’indéter- mination qui naît de cette circonstance est assez grande, quand on opère, comme je l'ai fait, avec la lumière des nuées transmise à travers des plaques, ou des systèmes de plaques, dont l’épaisseur ne peut jamais être que fort res- treinte. Car, par la réunion de ces deux circonstances, les bandes noires, qui se forment dans chaque division homo- chromatique des spectres, ont toujours inévitablement une notable largeur. Alors, dans les limites d'épaisseur où ce î OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 2bg genre d'épreuve peut être réalisé, sans avoir à craindre d'autres causes d’erreur, il faudrait que les valeurs attribuées aux vitesses de rotation fussent bien défectueuses, pour que les intermittences ne se montrassent point dans les divisions … chromatiques où le calcul les place. On pourrait sspérer 4 . plus de précision en opérant sur un trait de lumière solaire —… polarisée , dont la vivacité rétrécirait l'amplitude que cha- que intermittence embrasse pour l'œil, à épaisseur égale ; —… mais on y rencontrerait peut-être d'autres difficultés prati- | Lust et, ne l'ayant pas essayé, je n'oserais exprimer une — opinion sur ce point. Quant à l'augmentation hypothétique des épaisseurs qui produirait le même effet, en rendant les “ intermittences plus nombreuses et. leurs amplitudes plus » fines, elle est bornée par des impossibilités physiques dans “le cas actuel. Toutefois l'expérience, telle qu’on la réalise avec la lumière des nuées, à travers de médiocres épais- 4 seurs , est déjà très-belle ; et l'apparition des intermittences, “aux points précis de chaque spectre où le calcul les indique, ffrira un spectacle très-intéressant dans les cours publics, “ces spectres étant alors formés avec la lumière solaire, et reçus en projection sur des tableaux blancs très-éloignés. “On doit donc savoir beacoup de gré aux deux jeunes auteurs Mémoire, une règle arithmétique fort simple , par laquelle prévoit tout de suite le nombre total des intermittences “qui doivent se former nécessairement , ou facultativement , dans l’nne et l’autre image, à travers toute plaque d’épais- … seur assignée, pour chaque position que l’on veut donner ha la section principale du prisme analyseur autour du fais- SH} 260 DES PHÉNOMÈNES ROTATOIRES ment, par sauts brusques, à mesure que l'épaisseur aug- mente ; et il est assez singulier que, dans une même plaque, quelque épaisse qu'on la suppose, ceux qui appartiennent à l’un ou à l’autre des deux spectres ne peuvent jamais différer entre eux de plus d'une unité. En même temps qu'ils augmentent ainsi avec l'épaisseur, la raie noire, que chaque intermittence présente à l'œil, devient plus fine, parce que les éléments chromatiques de réfrangibilités voi- sines ayant leurs plans de polarisation propres plus séparés les uns des autres, ils échappent plus promptement aux conditions physiques d’une disparition commune. Mais le progrès idéal de ce rétrécissement est bientôt borné, dans les applications, par la lenteur avec laquelle le nombre des intermittences s'accroît. Car, pour l’étendre au delà de li- mites assez restreintes, il faudrait supposer des épaisseurs trop grandes pour se prêter à des observations précises, où même pour être réalisables pratiquement. Ces diverses par- ticularités, ainsi que le nombre absolu des intermittences qui peuvent se former dans chaque plaque, et les places où elles doivent se voir pour chaque position donnée du prisme analyseur, seront annoncées manifestement aux yeux, indé- pendamment de l'expérience, mais toujours en concordance avec elle, si l'on se sert de cercles coloriés, représentant, sur leur contour, la répartition acuelle des plans de polari- sation propres à tous les éléments chromatiques de la lu- mière transmise à travers chaque plaque. Car, en fixant, au centre de ces cercles, des croix tournantes à branches rec- tangulaires , dont deux , diamétralement opposées , représen- teront la section principale du prisme analyseur, et les deux autres, la section perpendiculaire, ces branches mar- rimes OPÉRÉS DANS LE CRISTAL LE ROCHE. 261 - queront, sur le contour colorié, les rayons lumineux qui _ doivent manquer mathématiquement dans l’une ou l’autre image, selon la position du prisme, tout comme le ferait - le calcul, quoique non pas, sans doute, si exactement. Et cette simple construction graphique pourra même ne pas re inutile au physicien expérimentateur, en lui désignant 5 directions du prisme analyseur, qui sont propres à mettre en évidence les phénomènes les plus délicats ou les plus ins- ictifs que la distribution des plans de polarisation, à leur rtie de chaque plaque, peut spécialement présenter. En résumé, les nouvelles épreuves que je viens d’énumérer, t que je rapporte dans le travail qu'on va lire, me parais- ent établir que les plans de polarisation des différents yons simples sont dispersés par le pouvoir rotatoire du cristal de roche, proportionnellement aux épaisseurs, et en raison er réciproque aux carrés des longueurs de leurs accès, comme je l'avais autrefois admis. Elles mon- ent aussi que la règle donnée par Newton, pour calculer s teintes résultantes d’un mélange assigné de rayons sim- es, représente, avec une approximation très-réelle, les aintenant reprendre ces premières déterminations par les procédés précis d'expérience que l’on possède aujourd'hui, opérant sur des rayons de lumière simple, strictement dé- is par les raies du spectre. On verra d’abord si la relation s carrés des accès doit être considérée seulement comme “approximative, et rectifiée dans ses détails; ou si elle peut 262 DES PHÉNOMEÈNES ROTATOIRES être admise comme suffisamment rigoureuse. Quand ce point sera établi, les teintes des deux images , observées à travers des plaques de cristal de roche d’épaisseurs connues, fourni- ront des mélanges de rayons simples , en toutes sortes de pro- portions rigoureusement certaines. On pourra done alors recommencer, avec bien plus de variété, comme de süreté, les épreuves que Newton à dù faire pour établir sa règle de la composition des teintes résultantes , en perfectionner l’ap- plication, et peut-être remonter au principe secret qui lui a servi de guide pour la former. Ce sont de beaux travaux qui s'offrent aux physiciens à venir; et toutes mes espérances seront remplies, si les essais que j'ai tentés laborieusement dans cette voie de recherches, leur fournissent des points de départ suffisamment nets et assurés. OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 263 rmules exprimant les intensités relatives des images dans lesquelles un faisceau … de lumière polarisée, qui a traversé une plaque douée de pouvoir rotatoire , t subdivisé par un prisme biréfringent, formé d’an cristal à un seul axe, Jequel recoit perpendiculairement les rayons transmis. Lorsqu'un faisceau de lumière blanche, préalablement arisé en un sens unique, est transmis perpendiculaire- t à travers des plaques solides ou liquides à faces paral- es, douées du pouvoir rotatoire , si on le reçoit immédia- nent dans l'œil après son émergence, on le voit blanc quand plaque est diaphane, ou généralement coloré d’une seule nte formée par l’ensemble des rayons lumineux que la que n’a point absorbés. Mais si on l’observe à travers un isme biréfringent achromatisé, qui le reçoive pareillement l'incidence perpendiculaire , la double réfraction le sé- re généralement en deux faisceaux, colorés de teintes di- verses , dont la somme compose la lumière transmise. Pour aque plaque ainsi étudiée, ces teintes varient avec l'angle la section principale du prisme analyseur forme avec le de polarisation primitif; et pour des plaques différentes, ervées dans une même position du prisme analyseur, s varient encore, indépendamment de l'absorption, selon grandeurs des déviations angulaires que chaque épaisseur | milieu traversé imprime aux plans de polarisation des ers rayons simples. Lorsque le mode de dispersion de ces ans a été déterminé par l’expérience, et se trouve ainsi assi- able dans une plaque donnée, on peut, d’après les lois 26/4 DES PHÉNOMEÈNES ROTATOIRES connues de la double réfraction, calculer rigoureusement la composition des deux faisceaux colorés qui s’observent dans chaque position définie du prisme analyseur. Alors, en leur appliquant la règle de Newton pour déterminer la nature apparente des teintes , résultantes d’un mélange donné de rayons simples, on peut calculer celles des deux faisceaux par ce procédé, et voir si le résultat est conforme à l’expé- rience. Je vais rassembler ici les formules nécessaires pour ces deux genres d'applications, et j'en rendrai l’usage sen- sible par des exemples pris dans les phénomènes rotatoires du quartz cristallisé. Je n’entrerai pas dans le détail des dé- monstrations sur lesquelles ces formules reposent , mais j'in- diquerai les passages , soit des traités spéciaux , soit des mé- moires académiques où on les a établies. 2. Nommons e l’épaisseur de la plaque solide ou liquide, douée de pouvoir rotatoire, que l'on présente perpendicu- lairement à un faisceau de lumière blanche, préalablement polarisé en un sens unique. Pour plus de simplicité, je sup- poserai d'abord cette plaque sans couleur propre, en sorte que sa faculté absorbante soit insensible, ou s'exerce en même proportion sur tous les rayons simples , de manière à ne pas altérer la blancheur primitive du faisceau transmis. Parmi les éléments de réfrangibilités diverses dont ce fais- ceau est composé, isolons, par la pensée, un des groupes dont la nuance puisse être considérée comme sensiblement uniforme au jugement de l'œil, dans ses appréciations les plus délicates. Ce sera, si l’on veut, une des divisions newto- niennes du spectre visible; par exemple, celle qui comprend tout le rouge, depuis le rouge extrême jusqu’à la limite du rouge et de l’orangé. Les premiers de ces rayons, les moins OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 265 . réfrangibles, subiront dans la plaque une modification qui, | sans changer leur direction rectiligne d’une quantité appré- . ciable , leur Ôtera leur sens de polarisation primitif, et les fera sortir polarisés dans un autre plan, formant, avec le _ premier, un certain angle a. Les seconds, plus réfrangibles, biront dans leur sens de polarisation une autre déviation ngulaire a', qui sera généralement plus grande que la précé- nte, mais qui, selon certaines circonstances physiques ; ourra aussi se trouver occasionnellement plus faible. Dans » quartz cristallisé, et dans beaucoup d’autres substances utes liquides, les déviations a, a se montrent toujours roissantes avec la réfrangibilité, en raison sensiblement ré- roque des carrés des longueurs des accès newtomiens iopres à chaque espèce de rayons. Quel que soit ce mode de stribution, tous les degrés de la nuance considérée , sensi- ment uniforme au jugement de l'œil, et que j’appellerai, ur cette raison, komochromatique, auront, après leur mergence, tous leurs plans de polarisation répartis entre limites de déviation angulaire &, a’. - 3. Maintenant, si l’on vient à réfracter cet ensemble de ons par un prisme biréfringent achromatisé , il s'y par- era généralement entre les deux réfractions, suivant les habituelles de ce genre de phénomènes. Pour rendre le al de ce partage aussi simple que possible, je suppose e le prisme soit formé d’un cristal à un seul axe : que ce it, par exemple , un rhomboïde de spath d'Islande, dont face destinée à être placée du côté de l'œil ait été rendue lement très-peu oblique à l’autre, dans le sens de la petite iagonale, et achromatisée postérieurement par un prisme le crown-glass d'un angle convenable , comme je l’ai expli- XX. 34 266 DES PHÉNOMÈNES ROTATOIRES qué dans les instructions que j'ai publiées sur ce sujet. Alors, la section principale du prisme biréfringent sera celle du rhomboïde même. Quand on le présentera à un faisceau lu- mineux, sous l'incidence perpendiculaire, les deux faisceaux produits par les deux réfractions, l’ordinaire et l’extraordi- naire, resteront dirigés dans le plan de cette section, le pre- mier continuant sa route primitive d'incidence , le second légèrement dévié, de manière à pouvoir en être distingué fa- cilement. Ces dispositions étant admises , si la section prinei- pale du prisme est dirigée dans l'angle de déviation « autour du plan de polarisation primitif, cet angle étant compté dans le même sens que les arcs de déviation @, a', j'ai dé- montré dans mon mémoire de 1818, page 64 , que les inten- sités F,, F, des deux images réfractées, ordinaire, extra- ordinaire, provenant de chaque division homochromatique considérée, ont les expressions suivantes : F,—==1{{1+ © cos (a'+ a — 2a)] cn FC jf res ess Re EE 2 (a — a) R représente ici ce qu'on appelle l'arc égal au rayon, c'est- à-dire le rayon plié en are, et exprimé dans les mêmes unités de graduation que les ares 4, a’, dont la différence en- tre en dénominateur. Si l’on emploie ces arcs énoncés en de- grés et fractions décimales de degrés de la graduation sexagé- simale, la valeur correspondante de R sera 57°,29578, et son logarithme tabulaire log R—1,7581226. En outre, I repré- sente la quantité totale de lumière sensiblement homochro- matique qui compose la nuance considérée , et dont les plans de polarisation sont supposés uniformément répartis sur OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 267 l'arc a — a. Si la plaque douée de pouvoir rotatoire absor- bait spécialement une certaine portion de cette lumière totale ait inégalement, ou par intermittences, sur les éléments vers compris dans la division homochromatique dont a et désignent les limites terminales de déviation , il faudrait emplacer ces arcs par les valeurs spéciales de ils auraient, our chaque subdivision de cette nuance, après sa sortie de | plaque considérée. Lorsque les intensités des éléments , Fe, auront été ainsi évaluées par les expressions précé- lentes, pour toutes les divisions homochromatiques du spec- tre transmis à travers la plaque considérée, leur somme for- _mera les images ordinaire, bo dise es que je désigne par O, E. Il ne restera AS qu’à savoir composer ensemble ces L'ON de manière à en conclure la teinte résultante de chaque image. C’est à quoi l'on peut parvenir au moyen d'une règle donnée par Newton, et que je vais expli- -quer (*). (1) L'uniformité de répartition que je suppose ici aux divers plans de Don qui nt une même nuance honochromatque, FEES 34. 268 DES PHÉNOMÈNES ROTATOIRES plus faible, c'est-à-dire, à mesure qu'on les observe à travers de plus petites épaisseurs dans la même substance. Cette dernière circonstance a générale- ment lieu dans les phénomènes de coloration produits par les pouvoirs rotatoires, puisqu'ils ne sont observables, dans chaque substance, qu'à des épaisseurs assez restreintes pour que la rotation n'ait pas dispersé les plans de polarisation des rayons simples sur un trop grand are, au point de faire disparaître les teintes, par le mélange presque complet de tous les rayons, dans les deux images réfractées par le prisme analyseur. Or, dans ces amplitudes bornées de rotation, lorsque nous concevons le spectre total partagé en sept divisions, chacune sensiblement homochromatique pour l'œil, auxquelles nous assignons individuellement l'étendue angulaire com- prise entre les ares de déviation de ses rayons extrêmes, nous avons réelle- ment égard à l’inégale dispersion des plans de polarisation, en passant d’une nuance à une autre, Alors la supposition d’une distribution uniforme de ces plans, dans l'amplitude angulaire de déviation qu'une même nuance embrasse, n’est plus qu'une approximation commode, de laquelle il ne peut résulter aucune erreur sensible pour l'œil, dans le calcul des teintes suffisamment marquées pour être éprouvées par l'observation. Si l’on vou- lait atteindre une plus grande rigueur mathématique, on pourrait l'obtenir en mulüpliant davantage les divisions établies par Newton dans le spectre, et assignant les longueurs d’accès correspondantes à ces nouvelles limites , que l’on tirerait, par exemple, des raies de Fraunhoffer, tant de celles qu’il a considérées que d'autres intermédiaires, dont on déterminerait les longueurs d'accès par des observations analogues aux siennes. Ayant ces longueurs, on assujettirait les rayons simples qu’elles définissent aux lois continues de rotation propres à la substance considérée; par exemple, en faisant, dans le cristal de roche, leurs déviations individuelles a, a° pro- portionnelles à l'épaisseur de chaque plaque, et réciproques aux carrés des longueurs de leurs accès. Alors les valeurs de K, et de F, étant calculées par les formules (1) pour ces deux limites, donneraient les portions de la lumière comprise entre elles, qui entrent dans l’une et l’autre image, pour la position de la section principale du prisme analyseur qui est désignée par l'arc «. Ou bien encore, on pourrait s’exempter de chercher la relation générale des accès avec les arcs de déviation, si l’on mesurait directement OPÉRES DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 209 ces arcs à travers l'unité d'épaisseur, pour chacune des lumières simples ropres aux raies que l'on aurait choisies dans l’étendue totale du spectre, _comme indices de divisions homochromatiques. Car, en faisant croître ces wes proportionnellement aux épaisseurs, on aurait leurs valeurs actuelles 1, d ; qui limitent chacune des divisions dont il s’agit; et les formules (1) nneraient ensuite les proportions F,, F,, suivant lesquelles l'espèce spé- le de lumière qui s'y trouve comprise, se partage entre les deux images lonnées par le prisme analyseur. l’on voulait calculer théoriquement la nature des teintés composées, su ltantes des proportions de lumières simples exprimées par les valeurs le F, et de F, pour toutes les divisions homochromatiques ainsi formées, y aurait un travail ultérieur à faire. Car, à la vérité, en considérant abord celles qui seraient comprises dans l'étendue du spectre newtonien, ourrait placer les rayons simples qui les limitent sur le contour de la conférence newtonienne, d'après les longueurs d'accès qui leur sont pres, en se fondant sur la loi générale de division de cette circonfé- nce, que j'ai exposée, d'après M. Blanc, dans la troisième édition de mon écis de Physique, tome II, page 434; après quoi, conformément à la e donnée par Newton, on calculerait la position du centre de gravité de compris dans chaque division; et, y plaçant idéalement la quantité ale de lumière F,, ou F,, qui s’y trouve répartie, on aurait à prendre le ntre de gravité commun du système total formé par l’ensemble de leurs valeurs. Mais d’abord il faudrait pour cela pouvoir assigner une valeur nu- érique d'intensité à la lumière totale contenue dans chacune de ces divi- ns nouvelles du spectre, comme Newton l'a fait pour les sept qu'il a acune d sr En outre, il resterait à savoir comment on devrait placer r la 7 newtonienne de rayons Re aux HOIQUE extrêmes drait examiner s'il ne serait pas nécessaire de modifier sa construction, pouvoir les y admettre. Ces recherches attendent le zèle et les efforts hysiciens futurs. 270 DES PHÉNOMENES ROTATOIRES IL. ñ Exposé de la règle donnée par Newton, pour calculer la teinte résultante d'un mélange donné de lumières simples. 4. Concevons deux lumières de même nuance, c’est-à-dire qui produisent dans l'œil la sensation d’une même couleur; ce qui peut avoir lieu, dans un grand nombre de cas, pour des mélanges très-différents de rayons simples. Concevons qu’é- tant transmises par des diaphragmes égaux , elles illuminent isolément des disques circulaires distincts, et de même éten- due , sur un même papier blanc qui réfléchit également les rayons simples de toutes les réfrangibilités. Lorsque l'œil regardera simultanément ces disques sans recevoir aucune lumière étrangère, il pourra, selon les cas , les juger inéga- lement ou également lumineux. Alors, si, pour les amener à cette égalité, il faut éloigner diversement les deux sources lumineuses, leurs radiations arrivant toujours au papier sous les mêmes incidences, on pourra dire que leurs inten- sités propres sont directement proportionnelles aux carrés de ces distances, ce qui donnera un moyen de les comparer, et d’en obtenir des mesures relatives. Mais on ne peut pas comparer ainsi immédiatement des lumières de nuances dis- semblables, parce que la diversité des impressions qu'elles produisent dans l'œil influe sur le jugement qu'il porte de leur éclat. Toutefois, on peut encore établir entre les inten- sités une comparaison indirecte par équivalence, en cher- chant quelles proportions de chaque lumière peuvent se remplacer mutuellement dans des mélanges artificiels, pour OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 271 À _ produire sur l'œil une même sensation. C’est ce que Newton ca fait pour les diverses lumières simples contenues dans les sept divisions sensiblement homochromatiques, par lesquelles - il a partagé le spectre solaire qui a été visible pour lui; et, n désignant l'intensité totale de la lumière blanche par le nombre 658:, il a trouvé que les intensités propres de ses pt divisions homochromatiques étaient exprimées , dans 5 rapports d'équivalence, par les nombres suivants, que désigne généralement par la lettre z affectée d’un indice iré du nom de chaque couleur, comme on le voit dans le DÉSIGNATION des: divisions homochromatiques LEURS INTENSITÉS RESPECTIVES. du spectre solaire. 272 DES PHÉNOMÈNES ROTATOIRES Cela donne les relations d'équivalence : 7) —10 DT 0 b— by —0; et la somme de ces sept valeurs, composant le nombre total des rayons de la lumière blanche, est alors Hi ++ + +i+i, = 658 3 Toutefois, on ne doit pas considérer ces nombres comme absolus, mais comme devant être combinés dans leur asso- cation ultérieure, selon une règle que Newton donne, et que je vais expliquer. : 5. Il l’expose dans la IL partie du livre I de l’Optique, sixième proposition, problème 11. Il n’a pas rapporté les détails des expériences qu'il a dû faire pour l’établir. 1] dit seulement qu'on peut la vérifier, en concentrant, au foyer d'une lentille convergente, tous les rayons du spectre solaire réfracté par un prisme, de manière à les rassembler dans un petit espace circulaire que l’on reçoit sur un carton blane dans la chambre obscure. Après quoi on intercepte telle ou telle portion connue des divisions homochromatiques dont la lumière concourt sur ce disque, et l’on examine la teinte ré- sultante de la réunion des seuls rayons que l’on a admis à y concourir. Sans doute Newton a du faire beaucoup d'autres épreuves analogues à celle-là, mais il ne les a pas spécifiées. I n'a pas dit non plus ce qui l'a conduit à établir entre les intensités relatives des sept divisions, considérées dans leurs facultés d'illumination équivalentes, ces rapports réguliers qu'il leur a donnés , et qui sont intimement liés aux longueurs des accès. Tous ces secrets de son génie sont ensevelis dans M sa tombe, On peut toutefois présumer que la constitution de la lumière qu’il appelle blanche , et à laquelle il applique ces OPÉRES DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 293 pports, est considérée par lui comme quelque peu diffé- nte de la lumière solaire directe. Car dans un passage de | l'Optique, où il a besoin d'une appréciation très-délicate, il dit que la lumière solaire a une nuance dominante de jaune, ière blanche des nuées (*). C’est aussi celle que j'ai em- oyée dans toutes mes expériences sur les teintes des deux ges qu'on observe à travers les plaques de cristal deroche. e sorte que l’on se conforme aux intentions les plus précises de Newton, lorsqu’en les calculant par sa règle, on applique, lumière totale qui les compose, les rapports d'intensité u'il assigne aux sept divisions prismatiques de la lumière blanche, et dont je viens de donner le tableau. 6. 5 sa prescription, que nous ne pouvons plus que sui- vre, pour combiner les éléments chromatiques exprimés par valeurs précédentes de :, ou par des fractions données de s valeurs, il faut d’abord décrire un cercle dont la circon- férence représente le nombre 658, et attribuer, à chaque ïance homochromatique, des arcs de cette circonférence portionnels à la valeur de ; qui lui est propre. Cela donne ode de subdivision représenté ici figure [®, et dans lequel a totalité de chaque nuance occupe les arcs suivants : ) Gette remarque se trouve dans la var proposition de la n° partie du IL de l'Optique, à la fin du problème ur. 274 DES PHÉNOMÈNES ROTATOIRES POSITIONS des points de bis- AMPLITUDES section, comptées coutinüment de- puis le commen- totalité de chaque nuance cement du rouge extrême, de 0° à 360°, des arcs occupés par la homochromatique. Rouge extrême Rouge moyen Rouge : 60° 45 34! Limite du rouge et de l’orangé. . \ Orangé moyen | Orange : 34 10 38 Limite de l’orangé et du jaune. Jaune moyen se Jaune : 54 41 Limite du jaune et du vert Vert moyen... Vert : 60 45 Limite du vert et du bleu Bleu moyen Bleu : 54 47 Limite du bleu et de l'indigo.… Indigo moyen Indigo : 34 10 Limite de l’indigo et du violet... Violet moyen Violet : 60 45 Violet extrème et sur ce rayon marquez le centre de gravité de l'arc ; ce qui vous donnera les points r, 0, j, v, b, à, u. Puissupposez quel’on OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 276 1omochromatique duspectre, représentées par autant de frac- ns correspondantes des nombres 4,, à, D du by Us Lys QUE us avons tout à l'heure calculés. Ces diverses quantités nt ainsi numériquement évaluées, il faudra les considérer omme autant de poids placés aux centres de gravité res- ectifs des arcs auxquels elles appartiennent, et chercher le centre de gravité du système total. Si ce centre se trouve omber au centre même du cercle chromatique, la teinte omposée équivaudra pour l'œil à une blancheur parfaite. ela arrivera , par exemple, si les éléments numériques de la einte étaient Le quantités totales 4, &, à, &, 4, à, à, elles- mes associées sans réduction , ou en une même proportion de toutes. Dans d’autres cas, Le centre de gravité du système tombera hors du centre du end à une distance A, dirigée ers un certain point de la circonférence. Alors la rien: à quelle ce point appartiendra, désignera la nuance des cou- rs du spectre à laquelle s’assimile le mieux pour l'œil la nte composée, et la sensation produite par cette teinte sera mparable à celle que l’on obtiendrait, si l’on mélait de la mière simple désignée du spectre avec de la lumière blan- ie dans la proportion de A à 1 —4, la distance A étant ex- imée en parties du rayon du cercle chromatique pris pour té de longueur. 8. Telle est la règle donnée par Newton. Je l'ai réduite n formule dans mon Traité de Physique; tome III, page 450. e désigne la position du centre de gravité du système par ux coordonnées rectangulaires X, Y, comptées à partir du DE du cercle chromatique : la première sur le diamètre 315 270 DES PHÉNOMÈNES ROTATOIRES seconde positivement vers l’orangé , négativement vers l'in- digo. Ces deux coordonnées sont exprimées en parties du rayon du cercle chromatique pris pour unité. Alors, soient r, 0,7, v, b, 1, u, les quantités absolues de chaque lumière homochromatique qui composent la teinte cherchée, ces quantités étant des fractions données des intensités totales CA PR PAC PME PET CU qui composent la lumière blanche, les coordonnées X et Y auront les expressions suivantes que j'extrais de mon Traité de Physique, en écrivant au-dessus des coefficients numériques leurs logarithmes tabulaires, dont on a sans cesse besoin O: 2,9153r19 2,710958 2,9794558 NE (r+u).0,822833+ (045). 0,207398-—{ j-+-b). 0 513994 —v. 0,953796 HE are 6833732 7,9104852 Vie Hate 0 ,482362+(0—i). o 0,963 164-+(7—6). 0,813739 TH-0+j+4-0+-b+4i4-u X et Y étant calculés , on en déduira la distance À du cen- tre de gravité du système au centre du cercle chromatique, ainsi que l'angle U, formé par cette distance avec l’axe des x positifs. Car on aura évidemment : UADIED A — = sn’ d 7 cosU Y tang U= ÿ; A —= La valeur de A devant toujours être positive, sin U devra être de même signe que Y; et cos U de même signe que X. (*) Les nombres rapportés ici sont les mêmes que j'ai insérés dans mon Traité de Physique, sauf la correction occasionnelle de quelques unités sur la dernière décimale, provenant d’une nouvelle révision : la différence n’au- rait, sur aucun résultat d'observation, une influence appréciable, Je n'ai pas besoin de justifier l’adjonction que j'ai faite à ces nombres de leurs logarithmes, car toutes les applications que j'exposerai ne peuvent se faire qu'avec leur secours. en so LR pre os SRE S OPÉRES DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 275 _ Cela indiquera le quadrant auquel il faudra faire aboutir arc U conclu de tang U par la première équation. Cet arc ‘étant compté continüment de o° à 360°, indiquera la division - spéciale du cercle chromatique vers laquelle la distance À se dirige. Les valeurs de’A conclues des deux dernières équa- tions devront se trouver égales entre Het ce qui servira à meront les no a de lumière simple et de lumière anche, dont le mélange produirait dans l’œil une sensation ue représentant par le nombre 658: l'intensité de l'image anche à laquelle on est censé la comparer. … 9. Concevons qu'on ait appliqué ces formules aux éléments a quantité totale de lumière est représentée par 658: , et que lon ait obtenu les éléments U, A déla teinte résultante. Puis ait un calcul pareil sur ces éléments, dont la somme totale “que je désigne par N' serait 658; — N ; et l’on obtiendrait les nouvelles valeurs U’, 4’, qui caractérisent la teinte résultante . cherchée. Mais on peut se dispenser de ce second caleul, DAC DES PHÉNOMÈNES ROTATOIRES et conclure immédiatement U” ainsi que A', par la seule con- dition que les deux images réunies reproduisent le faisceau blanc total, qui est partagé entre les deux images. En effet, cela exige que les sommes partielles de rayons N, N' étant respectivement placées à leurs centres de gravité propres, c'est-à-dire aux extrémités des distances A, A', se fassent équilibre autour du centre du cercle chromatique, de sorte que le centre de gravité de leur ensemble tombe en ce point. Or, pour que ce résultat statique ait lieu, il faut d’abord que les deux poids N, N' soient opposés l’un à l’autre des deux côtés du centre sur un même diamètre; et en outre que leurs moments statiques autour de ce centre, représentés par les produits N À, N' 4", soient égaux. On devra donc avoir : ' MAN, U= 180°+ U, A) en faisant ! . I N — 658 ; — N. Ces équations feront ainsi connaître les valeurs de U' et de À propres à l’image complémentaire, lorsque l'on aura caleulé U, A et N pour la première image. 10. Les expressions de X et de Y, données plus haut, sont susceptibles d’une vérification qui en atteste l'exactitude nu- mérique. Désignons par les lettres I, L,, L, 1,, I, I,, les quantités absolues de lumière qui composent les sept divi- sions homochromatiques du cercle newtonien, et dont l'en- semble est censé former le blanc parfait. Concevons qu'on prenne de chacune d’elles une même proportion c, et qu'on en fasse le mélange : il devra encore en résulter du blanc; et en conséquence cette supposition étant introduite dans … les expressions de X et Y, doit les réduire l’une et l’autre à … zéro. Or, c'est en effet ce qui a lieu. OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 279 Pour le faire voir, il faut d’abord , conformément à la règle . newtonienne, évaluer les éléments assemblés en quantités - de rayons équivalents ; ce qui se fera en donnant aux diverses - quantités I les valeurs respectives assignées par Newton dans Je tableau de la page 271. Les expressions numériques à in- troduire dans les formules seront ainsi : 1000 ,, 1000 js 1000 © 1000 16 De 9 10 t des autres facteurs numériques qui lui sont associés. déjà cette substitution rendra individuellement nuls les T—uU—=O, O—i—0, ]J—b—0o. Quant au numérateur de X , ces mêmes conditions d'égalité ransformeront en 2 2 1 4 < 0,822833 + 26" 207398 — —.0,51399/ — 5: 0:953796. - Or, en effectuant le calcul numérique de chacun de ces nera pareillement X—o. Les deux coordonnées X, Y int ainsi nulles toutes deux, l'extrémité de la distance 4, appartient à la teinte résultante, tombera au centremême cerclechromatique, ce qui caractérisera cette teinte comme 280 DES PHÉNOMÈNES ROTATOIRES HIT. Calcul des arcs de rotation décrits par les plans de polarisation des différents rayons simpies à travers un millimètre de cristal de roche. 11. D'après les évaluations approximatives que j'airappor- tées plus haut, lalongueur d'accès des rayons.transmis par mon verre rouge, étant exprimée en millionièmes de pouce anglais, serait, dans le vide, 6,18614; et à travers une épaisseur de 1 millimètre de cristal de roche, le plan de polarisation de ces rayons décrirait un arc égal à 18°, 414. Or, selon le tableau inséré à la page 109 du tome IV de mon Traité de Physique, la longueur des accès du rouge extrême de Newton, exprimée aussi en millionièmes de pouce anglais, est, dans le vide, 6,34628. Admettant donc que les arcs de rotation propres aux différents rayons simples sont réciproques aux carrés des longueurs de leurs accès, celui du rouge extrème newto- nien, que je désigne par a,, s’obtiendra, pour la même épais- seur, par le calcul suivant (”) : (*) La valeur de l'accès du rouge extrême, que j'ai extraite ici de mon Traité de Physique, a été, comme toutes les autres , calculée, ainsi que le faisait Newton, en évaluant seulement avec quatre décimales les racines cubiques des carrés des nombres qui règlent les rapports des accès entre eux. Mais comme c'était parmi ces nombres approximatifs que j'avais classé mon verre rouge, j'ai cru devoir m'en servir encore pour évaluer l'arc de rotation du rouge qu’il transmet. Au reste, la différence produirait un effet M OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 281 pme Log 6,18614 — 0,7914197 Log 6,34628 — 0,8025193 Log (rapport inverse) — 1,9889004 #4 Log (carré) — 1,9778008 “AN Log 18°,414 — 1,265148r # Log a, — 1,2429489 ; a, — 17°,4964 . Maintenant, selon l'énoncé de Newton, la longueur d’ac- … cès propre à ce rouge extrême étant désignée par 1, les lon- eurs des accès propres aux huit divisions homochroma- tiques du spectre, dans le même milieu, sont respectivement A «primées par les racines cubiques des carrés des nombres LE SONORE AE PRE de Bo Gt El Gi (3 BMOI, 26-11 a mochromatique que termine la division considérée. Ainsi ra, sera l'arc décrit par la fin du rouge ou le commencement el'orangé ; a’, sera l'arc décrit par la fin de l'orangé ou le ommencement du rouge, et ainsi des autres. Admettant donc que ces arcs doivent être réciproques aux carrés des gueurs des accès respectifs, leurs valeurs s’obtiendront it 6,34593, au lieu de 6,34528 que l’on a employé; et la valeur de a, en résulterait deviendrait 17°,4983, au lieu de 17°,4964, que nous avons trouvé ici. Elle donnerait donc une rotation plus forte seulement de 0°,19 travers une épaisseur de 100 millimètres, où les phénomènes de colo- tion ont depuis longtemps disparu. Des différences si petites échappent aux observations réelles, et la seule classification du verre rouge dans le spectre comporte sans doute des incertitudes plus grandes. E-XX. : 36 282 Logarithmes des carrés des arcs. .c- a 2 Logarithmes inverses… Logarithmes des arcs de déviation. ...... sions. DES PHÉNOMÈNES ROTATOIRES | à 3 _Q0 ER fs) =ottBslos(g) =notiiylle() = 165061] BR PAPE LD ee 3\° > log() — 1,8976950 log(à) — 1,8416374 log(=) = 1,7901226 CTAUE 5 D \2 EE Logarithmes des accès. log(5): — 1,9658983 lo(%) 3 — 1,9472120 log( 2)" = 1,9167075 | 1,9317966 1,8944250 0,0682034 0,1055750 1,2429489 1,2429489 log a',—1,3111523| loga,—1,3485239| loga,;=— 14095339 a',— 20°,4716 De —122%9118 a’; — 25°,6764 | Û = 4 J'ai calculé de la même manière les arcs de rotation milli- métrique des rayons simples correspondants aux sept raies du spectre de Fraunhoffer, en partant des longueurs de leurs accès respectifs rapportés plus haut, page 236, et les compa- rant à la longueur d’accès du verre rouge, comme je l’ai fait ici pour obtenir a. Ces résultats rassemblés ont donné le OPÉRES DANS LE CRISTAL DE ROCHE. log as —1,5387471| log a',— 1,5761189 log a’, — 1,6443223 a'y— 34°,5738 a';= 37°,6807 a, —= 44°,0882 tableau suivant des arcs de rotation dans une épaisseur d’un nullimètre, auquel j'ai annexé les logarithmes de ces arcs, dont on a sans cesse besoin pour les transporter aux diverses épaisseurs que l’on veut considérer, et que l’on devra aussi exprimer en parties du millimètre pris pour unité de lon- gueur. 36. 28/4 Arcs de rotation des différents rayons simples à travers un millimètre de cristal Raie B dans le rouge Fr......|a, — 1553740 Raie C dans le rouge Fr...... a. — 16,8800 a, = 20,9835 iRaie E dans le vert Fr........la, — 26,2936 | Raie F dans le comm! du bleu Fr.|a, — 31,0153 SPECTRE DE FRAUNHOFFER. } Rouge extrême de Newton,...|............. | Limite du rouge et de l'orangé.|............. nn Lunite du vert et du bleu....|.--.:........ Limite du bleu et de l'indigo. .|-...... ee Limite de l'indigo et du violet.|............. Raie G vers la fin de l'indigo Fr. |a, —39,5128 Violet extrême de Newton. ...|............. Raie H dans le violet Fr...... a —=47,1478 DES PHÉNOMÈNES ROTATOIRES log a, — 1,1867873 log a. — 1,2273733 ; a, — 1754964 Sa Etanduauseeto es a, = 20,4716 log a, — 1,3218781 log a, — 1,4915761 MOT Pt A Ad a — 34,5738 LR SACTONRRS a, — 37,6807 log a, — 1,5967381 log a,— 1,6734619 de roche, perpendiculaire à ixe SPECTRE DE NEWTON. 1 di Hi: loga,—1,31110: log a, — 1,3485239 log a; — 1,409538 log a, — 1,4777 log a, — 1,938747 log a; — 1,576 m8 log a, — 1,644392 d OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 285 Les ares de rotation attribués dans ce tableau aux rayons simples qui limitent les divisions du spectre de Newton, pré- sentent, dans leurs deux dernières décimales , quelques lé- gères différences avec les valeurs que j'avais assignées aux mêmes arcs dans mon mémoire de 1818. Cela vient de ce que , ici, tous ces arcs sont déduits du premier a, , d’après les valeurs exactes des rapports numériques établis par New- ton entre les accès ; au lieu que, dans mon mémoire de 1818, ils avaient été déduits de ces rapports évaluésseulement jusqu'à la quatrième décimale de leurs valeurs, ainsi que Newton l'avait pratiqué dans les applications qu'il en avait faites. Ces petites différences ne produiraient aucun effet dont on püt tenir compte dans des expériences de rotation ; mais il m'a paru préférable d'employer ici les déductions rigoureuses, afin de présenter un type exact des valeurs auxquelles con- duit la relation inverse du carré des longueurs des accès, tels que Newton les a conçus. 12. En adoptant ces résultats, et faisant croître les ares de rotation proportionnellement aux épaisseurs des plaques , On pourra assigner numériquement les positions tant abso- lues que relatives des plans de polarisation de tous les rayons simples qui, étant préalablement polarisés dans un même sens Connu, ont traversé perpendiculairement une plaque de cristal de roche perpendiculaire à l'axe, dont l'épaisseur sera donnée. On pourra donc construire des figures coloriées, qui rendront la disposition finale de ces plans sensible aux yeux. Telles sont celles qui accompagnent ce mémoire. J'ai extrait la plupart d’entre elles de mon mémoire de 1818, en y ajou- tant l'indication des plans de polarisation compris dans les divisionsterminales rougeet violette quelimitent les raies B, H. 286 DES PHÉNOMÈNES ROTATOIRES du spectre de Fraunhoffer. Mais pour que l'on püt distin- guer évidemment ces portions additionnelles, on les a mises à leurs places angulaires, la première en dedans, la dernière en dehors des bandes circulaires occupées par les divisions newtoniennes. En outre, lorsque le progrès des épaisseurs a étendu l’ensemble de celles-ci au delà d’une circonférence, on a continué les portions excédantes, en les rejetant sur un ou plusieurs cercles extérieurs, pour empêcher qu'elles recou- vrissent les précédentes. Toutefois, les quantités de lumières comprises dans les sept divisions du spectre newtonien, sont les seules que l’on ait dû employer pour calculer les teintes des images par la règle de Newton. Car ce sont les seules que sa construction embrasse comme éléments de la lumière blan- che, soit qu'il les prenne approximativement réunies dans un trait de lumière solaire, ainsi qu'il le fait presque tou- jours ; soit que, pour plus d’exactitude, il tire leur ensemble de la réflexion des nuées. Afin de préparer la comparaison , suivie de l'expérience, avec les indications de cette règle ainsi restreinte, on a calculé, pour une série d’épaisseurs progressivement croissantes, les valeurs de U, A, U’, 1’, qu'elle assigne comme éléments caractéristiques des teintes des deux images, quand la section principale du prisme analyseur coincide avec le plan de polarisation primitif; et l’on a ras- semblé ces résultats dans une construction graphique en les liant par un tracé continu. Tel est l’objet des figures 2 et 5 que j'ai extraites de mon mémoire de 1818, en y corrigeant seulement quelques fautes de détail. La comparaison de cette construction avec l'expérience sera ici le sujet d’études beau- coup plus complètes que celles que j'avais pu faire alors. Mais, pour assurer les conséquences de cette nouvelle révision , je OPÉRES DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 287 s la faire précéder par une discussion physique, où l’em- de la règle de Newton sera numériquement éclairei par emples que je choisirai de manière à montrer les cir- ices dans lesquelles ses indications peuvent être sensi- d'accord avec les teintes observées, et celles où elle écarte évidemment. 288 DES PHÉNOMENES ROTATOIRES .ù A Discussion générale des formules qui donnent les éléments composants des deux images ordinaire, extraordinaire, pour une position quelconque du prisme analyseur ; avec leur restriction au cas où la section principale de ce prisme coïncide avec le plan de polarisation primitif. 13. Ces formules , déjà rapportées page 261, sont : (x) Fi I[r + RE cos(a' + a — 22) |» Il: — RD cos(d + a — 22) |. Dans leur application la plus générale, a, a', désignent les arcs de déviation propres aux plans de polarisation qui limi- tent chaque nuance homochromatique, lorsque la lumière qui la compose a perdu son sens de polarisation primitif, en traversant la plaque que l’on veut considérer; soit que cette nuance embrasse une des sept divisions du spectre newto- nien, soit qu'on l'ait restreinte à quelque subdivision d'une amplitude moindre, pour lui donner un homochromatisme plus parfait. l'exprime la quantité totale de lumière comprise dans cette subdivision à sa sortie de la plaque; et F,, EF re- présentent les proportions suivant lesquelles elle se partage entre les deux images ordinaire , extraordinaire, lorsque la section principale du prisme analyseur forme, avec le plan de polarisation primitif, l’angle désigné par #, lequel est compté en partant de ce plan vers la droite de l’observateur , de- puis o° jusqu’à 360°. J’exprimerai l'arc a'— a, qui se trouve OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 289 hors des signes trigonométriques, en degrés etfractions dé- cimales de degrés sexagésimaux. Alors R, qui représente le rayon du cercle plié en arc, aura pour expression 57°,29578, dont le logarithme tabulaire est 1,7581226. R sin(a— a (@— a) Il n’atteint cette valeur limite que dans le cas mathématique où l'arc «'— a est supposé infiniment petit. À mesure que l'arc a'— a augmente Pour une même nuance homochroma- tique, c’est-à-dire, à mesure que l'épaisseur croissante écarte davantage les plans de polarisation extrêmes qui la com- prennent, la valeur de ce rapport devient une fraction de plus en plus petite. Enfin, comme son numérateur a pour limite maximum R, tandis que son dénominateur croît tou- jours, proportionnellement à l'épaisseur de la plaque; si l'on suppose celle-ci infinie, le rapport devient nul , et il reste: F=-1, Fil 2 2 14. Le rapport est toujours moindre que + I. Ainsi, dans ce cas extrême, la lumière qui compose la nuance considérée se partage, avec une parfaite égalité, entre les deux images, quelle que soit la position du prisme analy- seur. Alors la condition de l'épaisseur infinie, produisant la même égalité de répartition mathématique pour chacune des divisions homochromatiques du spectre, les images ré- sultantes de leur ensemble devront, dans toutes les positions du prisme, devenir toutes deux blanches comme la lumière incidente, et contenir chacune la moitié de son intensité totale. Cet acheminement progressif vers l'exacte égalité de répartition tient à une circonstance analytique évidente. Lorsque les plans de polarisation qui appartiennent à une T. XX. 37 290 DÉS PHÉNOMÈNES ROTATOIRES même nuance homochromatique sont uniformément répar- tis sur une ou plusieurs demi-circonférences, plus un certain excès d'arc, la portion de lumière comprise dans cet excès est seule partagée inégalement entre les deux images, tout le reste l’étant également. Car le facteur sin (a'— a) devient nul pour ce reste, ce qui anéantit la portion variable de F, et de F, qui s'y rapporte; done, si la portion excédante peut être considérée comme infiniment petite, comparativement à celle qui occupe une ou plusieurs demi-circonférences com- plètes, elle devient négligeable, et l'égalité de partage ma- thématique a lieu. D'après cela, on conçoit que le même effet s’opérera sen- siblement pour l'œil, bien avant le terme mathématique d’une épaisseur infinie, lorsquelerapport LC , Sans être (a — a) rigoureusement nul, sera seulement assez affaibli pour que le produit de ? [ par une si petite fraction ne forme plus qu'une quantité de lumière imperceptible à la sensation phy- sique. Donc, à la limite d'épaisseur bien plus rapprochée où un tel affaiblissement aura lieu, le partage de chaque nuance homochromatique étant devenu sensiblement égal, les deux images résultantes F,, F,, devront commencer à paraître blanches, et d'une intensité égale dans toutes les positions du prisme analyseur. C’est ce que l'expérience confirme; et lorsqu'on opère sur la lumière des nuées réfléchie par une glace, cela a déjà lieu pour des plaques qui ont seulement quarante ou cinquante millimètres d'épaisseur. On peut même présumer qu'alors le sentiment de la coloration des images est éteint par la portion de lumière blanche qui se forme à des épaisseurs bien moindres que celles où l’inten- OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 291 sité propre de chaque nuance homochromatique cesserait de paraître variable dans les diverses positions du prisme ana- lyseur, si on l’observait isolément. 15. L'autre cas limite, relatif à des épaisseurs infiniment petites, fournit aussi des applications approximatives qu'il est essentiel de spécifier. Proche de cette limite, c’est-à-dire, dans les épaisseurs qui sont physiquement fort petites, le R sin(a— a) (a — a) nité, même en l’évaluant pour des divisions chromatiques, rapport devient une fraction peu inférieure à l’u- dont l'amplitude angulaire a — & n’est pas très-restreinte. Faisons donc généralement pour de tels cas : sin(a — à) CET) Quand on substituera cette expression transformée dans les valeurs de F, etde F,, les deux termes=1!1+cos(a«'+a— 22)! de la première, étant réunis en un seul, formeront cos’ {= (a +a)—c| ; etles deux termes £1{ 1—cos(a + a—2)| de la seconde se réuniront en I sin*}:(a'+ &) — x}. On aura donc en somme = I — 0. F, = I cos’[ (a' + a)— à | —: lo COS(a' + 4 — 24), F — I sin’ ÈG jù a)—« | 22 : Lo cos(a' + a — 2%). D’après cela, lorsque « sera une fraction assez petite pour que le produit + Is exprime une portion de la lumière to- tale I qui soit inappréciable à la sensation de l’observateur, on pourra négliger le dernier terme de ées expressions, et se borner à évaluer F,, F, par leurs premiers termes. Les intensités des deux images ainsi calculées se trouveront alors 37. 292 DES PHÉNOMÈNES ROTATOIRES sensiblement les mêmes qu'on les obtiendrait, si toute la lumière qui compose chaque nuance homochromatique con- sidérée était polarisée dans l’arc de déviation moyen +(a'+a); et leur évaluation, lorsqu'elle pourra être restreinte à ces expressions approximatives, en deviendra beaucoup plus simple. 16. Les circonstances qui permettent de s’y borner s’ob- tiennent par l'affaiblissement individuel des deux éléments I et a —a, c'est-à-dire par le peu d'intensité de la quantité de lumière contenue dans la division homochromatique que l'on considère , et par la limitation de l'amplitude angulaire sur laquelle ses plans de polarisation se trouvent répartis. Ces deux conditions pourraient toujours être remplies , même pour des épaisseurs quelconques, en restreignant con- venablement les divisions du spectre auxquelles on applique isolément le calcul. Mais leur trop grande multiplicité ferait disparaître les avantages de cette simplification. En consé- quence, je me bornerai à chercher, jusqu’à quelles limites d'épaisseur de cristal de roche, on peut employer, sans erreur sensible, ces expressions approchées, en les appliquant aux divisions du spectre newtonien, et attribuant aux intensi- tés I les médiocres valeurs qu’elles ont lorsqu'on opère sur la lumière des nuées polarisées par réflexion sur une glace noire. À cet effet , je calcule les valeurs numériques du fac- teur w, relativement à diverses épaisseurs de cristal pour la division violette , laquelle y a ses plans de polarisation plus dispersés que toutes les autres, et j'obtiens ainsi les résultats compris dans le tableau suivant : + % % OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 293 VALEUR VALEUR é ee Son supplément VALEURS R sin (a! — a) (a —a) conclue. de l'arc a — a, à cette épaisseur, à l'unité, RE ë ù pour la division violette ou valeurs de 0. du facteur w. ÉPAISSEUR de la plaque de cristal de roche considérée e. du spectre newtonien. 6°4075 — 6°24' 27" | 0,997917 | 0,002083 | o,oo1041 | 12,8150 — 12 48 54 | 0,991685 | 0,008315 | 0,004157 19,2225 — 19 13 21 | 0,981345 | 0,018655 | 0,009327 25,6300 — 25 37 48 | 0,966982 | 0,033018 | 0,016309 28,83375— 28 5o 15 | 0,958322 | 0,041678 | 0,020839 32,0375 — 32 2 15 | 0,948699 | 0,051301 | 0,025650 | La limite d'épaisseur jusqu’à laquelle on pourra négliger ici le produit 10 cos(a' +a—2%), dépendra de l’inten- sité I de la lumière sur laquelle on opère. Si elle est telle que—- de cette lumière soit sans effet sensible sur l'œil , on pourra, sans crainte d'erreur, employer l’approximation jus- qu'à 3 millimètres, puisque, à cette épaisseur. même , :v n’atteint pas tout à fait cette valeur pour la division violette du spectre, dont les plans de polarisation sont le plus dis- persés; et il y sera bien plus faible encore pour toutes les autres divisions homochromatiques, dont les plans de pola- risation sont répartis sur des amplitudes beaucoup moin- dres. J'userai donc de cette faculté dans les premières appli- cations que je vais considérer; car les épaisseurs que j'aurai occasion d'y employer seront toutes moindres que 3 milli- 294 DES PHÉNOMÈNES ROTATOIRES mètres ; et les phénomènes de coloration que j'y discuterai sont ceux que l’on observe avec la lumière des nuées pola- risée par réflexion sur une glace noire; auquel cas des frac- tions de l'ordre que nous venons d'évaluer sont tout à fait imperceptibles pour l'œil, dans le violet que cette lumière con- tient. Leur influence sur les teintes résultantes est mème encore insaisissable à des épaisseurs notablement plus grandes que celles-là. En effet, dans mon travail sur la polarisation circu- laire, inséré au tome XIII des Mémoires de l’Académie, j'avais constaté, par l'expérience, que, jusqu'à des épaisseurs de 4 mil- limètres et 5 millimètres de cristal de roche, on pouvait caleu- ler les teintes des images par la règle de Newton, en négligeant le terme qui se trouve ici avoir pour facteur ‘+, sans que les teintes ainsi obtenues différassent sensiblement de celles que donnent les expressions complètes de F, et de F,. On voit maintenant la raison physique de ce fait. Car le terme dé- pendant de % doit sans doute avoir beaucoup moins d’in- fluence sur le caractère de la coloration des teintes résul- tantes, qu'il n’en a dans l'expression des quantités totales de lumières homochromatiques dont chaque image est com- posée. 17. Admettons, pour un moment, que les observations doi- vent être restreintes à ces limites d'épaisseur, entre lesquelles le terme affecté du facteur « peut être considéré comme nul, ou négligeable, sans inconvénient. Les expressions de F, et de F,, propres à chaque nuance homochromatique , pren- dront alors ces formes simplifiées : (a) El cos’[: (a + a) — «| ; F,=Isin[ (a + a) —4]. Il suffira évidemment de calculer l'une d'elles pour avoir OPERÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 295 l’autre par complément, comme dans tous les autres cas. En outre, pour chaque position du prisme analyseur, désignée par l'arc «, cette évaluation dépendra seulement de l'arc moyen :(a + a) propre à chaque division homochroma- tique que l'on voudra considérer. Adoptons les sept du spec- tre de Newton, en les complétant par les intervalles de leurs limites extrêmes aux raies B et H de Fraunhoffer. Le tableau suivant exprimera, pour une épaisseur de 1 millimètre de cristal de roche, l'ensemble de tous ces ares moyens que je _ désigne par la lettre 9, affectée d'indices qui spécifient la di- sion homochromatique à laquelles ils appartiennent. Je dis- tingue par le signe les deux que nous y ajoutons, en dehors du ectre newtonien. J'y joins les amplitudes individuelles de ces divisions, que je désigne par la lettre ?', affectée d'indices .… semblables. On obtiendra ensuite les valeurs de ces ares pour . toute épaisseur, plus grande ou moindre, en multipliant les … nombres rapportés dans le tableau, par cette épaisseur , ex- . primée aussi en parties du millimètre. 290 DES PHÉNOMENES ROTATOIRES Arcs de rotation moyens de toutes les divisions homochromatiques, comprises entre les raies B et H de Fraunhoffer, à travers une épaisseur de 1"" de cristal de roche perpendiculaire à l’axe, avec les amplitudes de ces divisons pour la même épaisseur. DÉSIGNATION DES DIVISIONS, Terminale rouge... Terminale violette... ARCS 421 de rotation moyens, en degrés TABULAIRES. DES DIVISIONS. TABULAIRES. sexagésimaux. [l | l "| { | eu = 16,43520|log p, — 1,2157700|p, — 2°1224|log p,— o,326827a] | Rouge..|e, — 18 1,2783877|p, — 2,9752|log p. — 0,4735162] | Orangé..|p, = 21,39145 e,= 1,3302402|p! — 1,8397|log p, — 0 264747o| | Spectre Jaune... le, — 23,99385|log p, — 1,3801000|0, — 3,3651|log p; — 0 »5 26998 0 | à Verteeclo— 2785950 log p, — 1,4449733|0, — 4,3662|log p, = 0 6401036 (OEPIONED NET Dr 32,30820 log p, — 1,5093128|p, — 4,5312|log p, = 0 65621: 92] | | Indigo... |o, — 36,12725|log p; — 1,5578349|p; — 3,1069|log pi = 0, 49232 73 | Violet... |p 1,6115582 fs 6,407 a. = o à 18. Je vais appliquer d’abord les formules (2) au cas où la section principale du prisme analyseur coïncide avec le plan de polarisation primitif. Alors, il faut faire « nul; et en dé- signant par e l'épaisseur de la plaque considérée , exprimée en parties du millimètre, on a généralement, pour une divi- sion homochromatique quelconque, (5) F,=lIcosee, F.—Isin’pe. Il ne restera plus qu’à mettre dans ces expressions les valeurs simultanées de e et de ; propres à l'épaisseur , et à la divi- em, * OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 297 _ sion homochromatique, pour lesquelles on voudra les obte- nir numériquement, en parties de la quantité totale [ de lu- mière que cette division contient. 19. Je considère spécialement F,. Nous avons reconnu, $ 16, que l’on peut faire usage de son expression ainsi abrégée, pour toutes les épaisseurs e de cristal de roche qui n’excèdent pas 3 millimètres, même en l’appliquant à des divisions angu- - laires aussi étendues que celles du spectre newtonien. En _ nous renfermant dans ces limites, prenons l'épaisseur e assez 4 petite pour que le sinus de l’arc Le puisse être supposé pro- -_ portionnel à cet arc, sans qu'il en résulte d'erreur appré- ciable pour l’œil, dans l'évaluation de F,. Nous aurons pour _ tous les cas pareils + on p'e” FI. R représente toujours ici le rayon du cercle plié en arc, - etexprimé en mêmes parties de la graduation du cercle que à À Varc &. Ayant exprimé les valeurs de » en degrés sexagésimaux, nous devrons prendre, comme précédemment, R=—57",29578 … etlogR—1,7581226. _ 20. Il faut maintenant examiner jusqu’à quelle limite d’é- _paisseur cette nouvelle abréviation pourra être employée … sans erreur sensible. A cet effet, je forme le tableau suivant, . qui offre la comparaison numérique des valeurs de sin’ pe \ 202 4 L £ et de _. pour diverses valeurs progressivement croissantes _ de l'arc se. é T. XX. 38 298 DES PHÉNOMÈNES ROTATOIRES VALEURS RE EXCÈS correspondantes de Lee pe? = sin 2pe. Re" sur la premiere. VALEURS correspondantes de de la seconde évaluation supposées de l'arc pe. 0,0301537 0,0304617 0,0003080 0,0669873 0,0685389 0,0015516 0,11609778 0,1218470 0,0048692 0,1786040 0,1903860 0,0117800 D'après les nombres contenus dans la dernière colonne, on voit que, même en prenant l’are £e égal à 25°, l'évaluation approchée ne donnerait qu’une erreur équivalente à moins de —=- de la lumière totale contenue dans la division homo- chromatique à laquelle cet arc appartiendrait. Supposons qu'il dût appartenir à la division violette de Newton, et cher- chons l'épaisseur e, qui lui donnerait cette valeur limite de 25°. Nous l’obtiendrons en divisant 25 par la valeur de l'arc p, pour un millimètre, que nous avons trouvée être 40°,88445, dans le tableau de la page 296. Le quotient donne e— Or Grt5! Conséquemment , Si nous calculons F, par son expression approchée _ pour des épaisseurs qui n’excè- dent pas 0"%,6, l'erreur qui en résultera sur l'appréciation de la portion de la division violette quientre dans F,, sera au plus égale, ou inférieure, à —— de la totalité de cette lumière que contient le faisceau transmis ; et l’erreur analogue sera graduellement moindre, à cette même épaisseur, pour toutes les autres nuances homochromatiques moins réfrangibles que OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 299 celle-là, puisque l’arc $e qui leur appartiendra aura une am- plitude moindre. Quant à la division terminale qui s'étend depuis le violet extrème de Newton jusqu’à la raie H, l'erreur de l’approximation pour la même limite d'épaisseur, quoi- qu'un peu plus forte, serait encore seulement les + de la 1000 lumière qui s'y trouve comprise, comme on peut le constater par la valeur de :, donnée dans le même tableau, Mais l’in- tensité propre de cette lumière est tellement faible, qu’une pareille fraction en serait toujours négligeable dans les expé- riences que je me propose de considérer. Admettant donc que des erreurs aussi restreintes n’auront qu’une influence insen- sible dans les circonstances où l’on observe les teintes des images résultantes, toutes les considérations physiques que nous établirons en calculantles valeurs de F, par l'expression , Ip°e AE : TE approchée _ seront légitimement applicables aux épais- seurs de cristal de roche qui n’excéderont pas 0"",6; et elles le seront plus sûrement encore à toutes les épaisseurs moin- dres que cette limite auxquelles il nous sera possible d’éten- dre les observations (*). (*) Lorsqu'on borne l'évaluation des éléments de F, aux termes dépen- dants du carré de l'épaisseur e, comme nous le faisons ici, on peut aisé- ment comprendre dans son expression les termes de cet ordre, qui provien- nent de l’amplitude des divisions homochromatiques. Pour apprécier leur influence , je reprends l'expression exacte des éléments de F,, qui, dans la situation attribuée ici au prisme analyseur , est généralement 1 R sin p'e E—=I|:1 ph le cos 2pe |. 2 p'e Je remplace cos 2pe par son équivalent 1—2 sin *pe, ce qui donne rtf fine, Rnre ns] 7 Pepe 38. 300 DES PHÉNOMÈNES ROTATOIRES 21. Ceci reconnu, je vais évaluer numériquement ces va- leurs de F, pour les neuf divisions homochromatiques spéci- Maintenant, si l'on développe sin p'e en série, suivant les puissances du petit arc f'e, on a : re g'e Déen MR DCE : TR —- = ue g R 6 R° 120 R° ê d'où l’on tire : ! 12,2 14 4 sinp'e x pe 1 p'e Em — le, EG pe 6 R° 120 R‘ x Pour l'évaluation approchée à laquelle nous nous bornons, il faudra négliger, dans le second membre, tous les termes qui contiennent des R sin p'e ne puissances de e supérieures à e’; et l’on voit que le rapport HF Ai diffère de l'unité que par une quantité de cet ordre. Or, dans ces mêmes 2 2 j45 . . . 3 “ e Z CHE LOS limites d’approximation, sin ge est exprimé par _. . Etant aimsi déjà HER : c R sin p'e eT, lui-même de l’ordre e, il faudra remplacer EMI RSS par l'unité dans le facteur qui le multiplie. Alors, en substituant dans l'expression exacte ces valeurs restreintes, on a finalement 22 L 120? D) te + — Es 3 ER: rare ce qui équivaut à D'après les grandeurs relatives assignées, dans le tableau de la page 296, aux arcs gp", qui appartiennent à une même division homochromatique, le U L : x : : : rapport — Fe sera toujours une tres-petite fraction. Sa plus grande 12 KP valeur a lieu pour les divisions rouge, verte et violette du spectre newto- nien , auxquelles elle est commune. Et pour celles-là même elle s'élève seulement à 0,0020478. L'influence de ce terme ne ferait donc qu’accroître, 2,2 I p’e dans une proportion pareille, la quantité de lumière pe due chaque dr éd a NS td OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 301 fiées dans le tableau de la page 296. Je conserverai d’abord 2 au facteur commun F sa forme littérale; puis je compléte- rai l'évaluation, en effectuant la division par R?. J'obtiens ainsi les résultats suivants, où la nature de chaque division homochromatique, successivement considérée, est désignée par les indices supérieurs (r'), (r), Fes (u), (u”). _ Division terminale rouge, .... FOIS . 270,116 —l;e".0,082282 Rouge: "TT, 360,392 — L.e’.0,109782 Jaune... FU —I, R° ë TRE Orangé..…. F°—I LE. 457,594 = Le’.0,139391 = 595,705 —L;e’.0,175370 e 4 Spectre de Newton.{ Vert..... F()—I, 776,152 — Le .0,236429 TES HE ARE, =. 1043,820— Le. 0,317966 Indigo... FÔ—I, à 1305,180 — L;e°.0,397580 | Violet. 180 F1, -.1671,540 — L,e’.0,509180 | Division terminale violette... Fu) — I, £ “A 2081,001 —1,e°.0,633909. division fournit à l'image totale, quand on l’évalue sans en tenir compte ; | et comme toutes ces quantités sont des fractions de 1, l'effet d'une telle modification n’y serait pas sensible. C’est pourquoi je me suis dispensé d'avoir égard à ce terme, dans les évaluations numériques rapportées plus é loin. Je me bornerai à faire remarquer qu’étant lui-même proportionnel … àe!, il laisse toujours ce facteur commun à tous les éléments de l'image; | ce qui maintient l'exactitude des trois propositions établies en le négligeant. 302 DES PHÉNOMÈNES ROTATOIRES 22. La seule inspection de ce tableau suffit pour établir di- rectement les trois propositions suivantes : 1° La quantité totale de lumière contenue dans l’image ré- sultante E, d’abord insensible aux épaisseurs extrêmement petites, croît proportionnellement au carré de ces épais- seurs. ñ 2° Tant que l'épaisseur e reste comprise dans les limites de petitesse où les expressions ici rapportées sont applicables, la teinte de l’image résultante E à une nuance constante. 3° Lorsque la lumière totale transmise à travers la plaque est blanche, cette teinte est un bleu pâle, très-mêlé de blanc. 23. La première proposition résulte de la présence du facteur e dans l'expression de chaque portion des lumières homochromatiques qui entrent dans E. Elles sont toutes nulles en même temps que e, et croissent proportion- nellement à e’. En outre, tant par la petitesse convenue de e’, toujours moindre que 0,36, que par le caractère fractionnaire des facteurs numériques qui lui sont asso- ciés, l’image résultante E aura toujours une intensité très- faible, comparativement à la quantité totale de lumière transmise à travers la plaque considérée; et cette inten- sité croîtra rapidement avec l'épaisseur. Par inverse, l’image résultante ordinaire O, qui est toujours complémentaire de E, suivra des phases d'intensité continuellement décrois- santes, mais proportionnellement beaucoup moins rapides. Tout cela est exactement conforme à l'expérience. 24. Cet accroissement progressif de l'intensité de l’image E peut s'établir théoriquement fort au delà des limites d’épais- seur auxquelles les expériences précédentes sont restreintes. Pour cela, considérant tout le spectre visible compris entre OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 303 les raies extrêmes B, H de Fraunhoffer, je le suppose. par- tagé en divisions homochromatiques assez nombreuses, et in- dividuellement assez restreintes, pour que, dans tous les de- grés d'épaisseur auxquels je me propose d'appliquer le calcul, on puisse évaluer, par le simple rapport du carré du sinus, les quantités respectives de lumière propre que chacune d'elles fournit à l'image E. Cette supposition est toujours réalisable, pourvu que l’on multiplie suffisamment les divi- sions du spectre. En l’admettant, et faisant toujours coincider la section principale du prisme analyseur avec le plan de po- Jlarisation primitif, les divers éléments chromatiques qui com- posent l’image E auront généralement leurs intensités indi- viduelles représentées par des expressions de cette forme : F.—: sin’pe. Je désigne les intensités de ces nouvelles subdivisions par la lettre z, pour les distinguer de celles qui appartiennent aux divisions plus étendues du spectre newtonien, auxquelles on ne pourra les supposer égales que lorsque l'épaisseur e n’excé- dera pas 3 millimètres. Lorsqu'on voudra obtenir les valeurs particulières de F., on remplacera l'arc se par la déviation moyenne actuellement propre à la subdivision chromatique que l’on voudra considérer, et l’on aura ainsi la fraction de sa lumière totale z, qui entre dans l’image extraordinaire E. Or, il est visible que chacun des facteurs sin’se croîtra progressivement avec l'arc se, tant que cet arc n'aura pas atteint 90°. Ainsi, jusque-là, la lumière de la division chro- matique à laquelle il appartient entrera dans l’image E en quantité continuellement croissante. Dans le système de ro- tations que nous considérons ici, les grandeurs respectives 304 DES PHÉNOMÈNES ROTATOIRES des arcs & augmentant avec la réfrangibilité, ce cas limite arrivera, pour la division terminale violette, avant toutes les autres ; et, d’après le tableau de la page 296, il aura lieu, rela- tivement à elle, quand l'épaisseur e sera d'environ 2 milli- mètres, ou, rigoureusement, 1"",9729. Conséquemment, depuis l'épaisseur e— o jusqu'à cette limite, tous les éléments chromatiques de l'image extraordinaire E croîtront pro- gressivement en intensité, sans aucune exception. Mais l'accroissement total de l'image E se continuera en- core, en somme, fort au delà de ce terme. Car lorsqu'un arc a dépassé 90°, le carré de son sinus diminue d’abord avec beaucoup de lenteur; et la diminution qui en résultera dans la quantité de lumière de la division terminale violette qui entre dans E, se trouvera encore, pendant longtemps , plus que compensée par la continuité d’accroissement de toutes les autres, fournies par les divisions moins réfrangibles. Sup- posons, par exemple, e—2"",5. Alors, d’après le tableau de la page 296, l'arce,.e, relatif à la division violette terminale, de- viendra 90° + 24°27'; et tous les éléments chromatiques de E, provenant des autres divisions, seront encore dans les pé- riodes croissantes de leurs intensités, à l'exception de la division violette immédiatement précédente, où cette inten- sité sera devenue stationnaire dans son maximum. Mais le carré du sinus de ,,e sera encore égal à 0,83069 ; de sorte que la quantité de lumière violette terminale qui aura aban- donné E sera fort petite, tandis que celles qui proviennent de toutes les autres auront continué de s’accroître. Il est donc manifeste que l'intensité totale de l’image E se trouvera alors plus grande qu’elle ne l'était à l'épaisseur de 2 milli- mètres. C'est en effet ce que l'observation confirme avec . Le ei NE © OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 305 évidence, comme on le verra par les expériences que je rap- porterai. Cela est d'autant plus aisé à constater, que, jusque- là, la teinte résultante de l’image E éprouve peu de chan- gements, n'offrant à l'œil qu'un bleu pâle de plus en plus abondant en lumière blanche. On peut même présumer que l'accroissement total de l'intensité de l'image E se continue encore à des épaisseurs notablement plus grandes que celle que j'ai prise ici en dernier lieu comme exemple. Mais les modifications sensibles qui surviennent alors dans sa colora- tion, établissent les conditions de remplacement entre des quantités de lumière ayant des qualités colorifiques très- diverses, ce qui ne permet plus de comparer ses intensités successives avec autant de sûreté et d’évidence. 25. J'arrive à la seconde des propositions énoncées plus haut. Pour en concevoir la vérité, il faut considérer que, entre les limites d’intensités où la coloration des images ré- sultantes O, E, peut être perçue, c’est-à-dire , lorsque la quantité totale des diverses lumières qui s’y trouvent ras- semblées n’est pas trop faible pour que l’œil puisse discerner le caractère de sa nuance, et n’est pas non plus si considé- rable qu’elle l'éblouisse par son éclat, la nuance observée dépend seulement du rapport qu'ont entre elles les diverses portions de lumière simple qui composent l’image totale. De sorte que si les intensités propres de tous ces éléments aug- mentent ou diminuent dans un même rapport, leur nature restant constante, la nuance que leur ensemble présente. à l'œil est toujours la même. Cette identité aura donc lieu ici pour tous les états de l’image E, qui pourront résulter des expressions des intensités individuelles bornées aux termes LEXX. 39 306 DES PHÉNOMÈNES ROTATOIRES e Ù 3 FLRELE de l’ordre =, puisque, dans les limites d'épaisseur où elles R: ? sont applicables, tous les éléments chromatiques de cette image varieront simultanément d’intensités dans un même rapport, dépendant du seul facteur variable e’ qui leur est commun. Mais la même condition de constance n'aura pas lieu pour l’image résultante ordinaire O, dont les éléments chromatiques, évalués pour les mêmes limites d'épaisseur, auront leurs intensités individuelles exprimées généralement par i |. Il pourra donc arriver que, dans le chan- gement progressif des épaisseurs , entre les limites ici fixées, l'œil y constate des changements de nuance dont les corres- pondants ne seraient pas perceptibles dans l'image E. L’ex- périence confirme encore minutieusement ces indications, comme on le verra dans la série des observations de ce genre que je rapporterai ; et nousirons même dans un moment jus- qu'à découvrir, par les expressions analytiques précédentes, de quelle nature devront être ces premières traces de colo- ration de l’image O , aussi bien que de E, qui en est com- plémentaire. 26. Lorsque l'épaisseur e est assez accrue pour que les in- tensités individuelles des éléments chromatiques qui entrent dans l’image E ne puissent plus être évaluées avec une suffi- € EL. leurs rapports deviennent variables. Ainsi, la constance de teinte que cette image présentait d’abord doit se trouver progres- sante exactitude par les seuls termes de l’ordre sivement altérée. C’est ce que l'expérience confirme; mais elle montre aussi que cette mutation s'opère par des phases très- lentes. Pour en voir la raison mathématique, concevons, OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 307 comme précédemment, que l’on ait partagé tout le spectre visible en divisions chromatiques assez multipliées pour que les quantités de lumière propre que chacune d'elles fournit à l'image E puissent être évaluées par le simple rapport du carré du sinus de leur arc de déviation moyen. Alors les intensités propres de ces éléments auront leurs expressions de la forme = sin’pe. Ne supposons plus l'arc se extrêmement petit ; mais limitons-le seulement à être moindre que le rayon R du cercle plié en arc. Alors son sinus pourra =. développé en une série con- vergente , qui sera : PE cDr ue, 0 dilige R 6 RO En Reel Et de là, en élevant les deux membres au carré, on tirera : sin pe — è pren RD Pet pie 2 pes RE ne me ANR ECC. Tant que l’arc LE n'excède pas 25°, nous avons vu que le pre- pe F de sine, avec une erreur moindre que 0,012. Si l’on réitère une pareille épreuve en employant les deux premiers termes, on trouvera qu'ils reproduisent sine, avec une erreur encore moindre, même lorsque l'arc £e atteint 45°. Bornons-le à cette limite d'amplitude. D’après le tableau de la page 296, elle aura lieu pour la division terminale violette, lorsque l'épaisseur e sera tant soit peu moindre que 1 millimètre ; et les deux pre- miers termes de la série suffiront aussi alors, à plus forte raison , pour toutes les autres divisions chromatiques moins réfrangibles que celle-là. Les intensités des éléments chroma- 39. mier terme de cette série donne, à lui seul, la valeur 308 DES PHEÉNOMÈNES ROTATOIRES tiques de l’image E, évaluées par cette nouvelle expression approximative, auront donc la forme suivante : h pes niDeEr Eh F. R° | SRE ] ge” . R° , qui 1: s'il existait seul, laisserait à l’image E une teinte constante. Mais cette constance sera maintenant altérée par la présence 3 R° ? plicateur de :; et le degré de l’altération dépendra de la valeur numérique de ce terme pour chaque division chroma- tique du spectre. Par exemple, si l’on suppose l'arc * égal à Elles contiendront ainsi encore le facteur commun du terme — qui reste associé à l'unité dans le multi- 45°, on le trouvera égal à 0,205617, et il atteindra cette va- leur pour la division terminale violette du spectre newtonien complété, lorsqu'on supposera e égal à 1 millimètre. Mais alors ce même terme se réduira à 0,16972 pour la division violette précédente, et il s’affaiblira ainsi de plus en plus pour toutes les autres moins réfrangibles. Conséquemment, depuis l'é- e R° à E une teinte sensiblement la même qu'aux épaisseurs moin- dres, jusqu’à l'épaisseur actuelle 1 millimètre, la teinte de l'image E variera progressivement par des phases très-lentes, paisseur 0"",6 , où les termes en — suffisentencore, et donnent qui la modifieront dans ses éléments les plus réfrangibles plus que dans les autres. Pour savoir dans quel sens cette mutation s’opérera , il n'y a qu’à considérer l'expression exacte des éléments de E par le carré du sinus de £e, sans la développer. On voit alors que leur intensité individuelle croîtra continüment pour toutes les divisions chromatiques, jusqu'à ce que l’arc se, propre à cha- OPÉRES DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 509 cune d’elles, devienne égal à 90°; ce qui arrivera pour la divi- sion terminale violette, avant toutes les autres, vers 2 milli- mètres d'épaisseur. La mutation totale qui s’opérera dans la teinte de l’image résultante E, dépendra des variations ainsi continuellement produites dans les rapports des inten- sités de ses éléments. C’est ce que nous aurons tout à l’heure l'occasion d'examiner plus en détail. 27. Reprenons maintenant le cas des épaisseurs res- treintes , où les intensités des éléments chromatiques de E peuvent se calculer avec une approximation suffisante par e * Re? devra être alors la nature de la teinte constante que cette les seuls termes en puis, cherchons à découvrir quelle image présentera , en supposant toujours que la lumière to- _ tale transmise à travers la plaque est blanche. Ceci est le su- jet de la troisième proposition énoncée plus haut. Pour y parvenir, je prends les expressions de tous les élé- ments chromatiques de E, trouvées dans la page 307, pour les divisions du spectre newtonien, que la petitesse suppo- sée de l'épaisseur e permet ici d'employer. Puis, formant la somme de tous ces éléments, je décompose leurs intensités individuelles en deux parties, dont la première ait pour fac- teur le coefficient numérique de F!”, le plus petit de tous. . Cela donne à cette somme la forme suivante (*) : (*) Au premier coup d'œil, on pourrait penser quil conviendrait de ne pas comprendre dans cet ensemble les quantités de lumière rouge et violette contenues dans les divisions terminales du spectre de Fraunhoffer, que j'ai désignées ici par les indices 7’ et u/, parce qu'elles pourraient bien ne pas exister, ou être insensibles, dans la lumière blanche venue des nuées. 310 DES PHÉNOMÈNES ROTATOIRES Ÿ [ HE RRERS I nt +1, #1 “Je. 0,082282 + [1,.01027500 +1, .0,0571094-1,.0,0930884-1,.0,154147 +1, .0,235086 +-1,.0,315298 4-1, .0,626908 +1). 25567] L'ensemble des éléments contenus dans la première ligne forme évidemment un blanc parfait, dont l'intensité sera très-faible entre les limites d’épaisseurs restreintes auxquelles cette expression est bornée. La coloration ne pourra donc provenir que de l'assemblage de ceux dont la seconde ligne exprime les proportions inégales prises dans l'intensité totale de chacun d’eux. Pour apprécier plus aisément l’effet de leur ensemble, je les décompose encore individuellement en deux parties, dont la première ait pour facteur 0,027500, résidu du coefficient numérique de [,; et alors tout le système à considérer s'écrit ainsi : Lutte LH, 1, +141, +1, ]e 01082282 + [ DHL HI LH HIHI, +1, fe -0:027500 +[ 1,-0:029609 -1,.0,065588 +1, -0,126647 -1,-0,208186 4 1,.0.287:98 4-1,.0,399608 1. 1 La première ligne exprimera du blanc comme précédem- à ment. L’ensemble des quantités réunies dans la deuxième ligne ne différera du blanc qu’en ce qu'il y manquera, sous À la parenthèse, le coefficient [,., propre à la division rouge terminale qui excède le spectre de Newton. Mais ce rouge est très-sombre; et dans les expériences faites avec la lumière des nuées réfléchie par une glace noire, comme sont celles Mais, outre que leur présence y est très-probable, puisque cette lumière n'est autre que celle du soleil, disséminée par une multitude de réflexions sur les globules de vapeur, l'indétermination attribue ici aux lettres 1,,, L,, qui représentent les intensités respectives de ces portions extrêmes, appro- prie le raisonnement à toutes les valeurs que l'on voudrait leur supposer dans la lumière blanche totale sur laquelle on opère. OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 311 auxquelles je me propose de comparer ces formules, son existence ne devient manifeste que dans les cas particuliers d'épaisseur, où son arc de déviation lui donne une influence spéciale , soit sur l’une, soit sur l’autre image. On peut donc légitimement admettre ici que l'absence de ce terme, parmi ceux de la seconde ligne, n’altérera pas sensiblement la blan- cheur que leur ensemble exprimerait s’il s'y trouvait associé, ou tout au plus que cette absence pourra les faire incliner vers un blanc à peine bleuâtre. Il reste donc à considérer les termes contenus dans la troi- sième ligne. Or, quoique la sensation complexe produite par leur ensemble ne puisse pas être appréciée par un calcul ri- goureux , il est manifeste que les éléments les moins réfran- gibles ne pourront pas y dominer, à cause de la faiblesse re- lative des coefficients numériques qui les affectent. Et, d’une autre part, les plus réfrangibles de ces éléments, c’est-à-dire les violets, n’y auront pas non plus une influence exclusive, puisque leur effet propre se combinera avec celui des éléments précédents. On peut donc prévoir qu'un tel ensemble pro- duira la sensation dominante d’un bleu imparfait ; et cet aperçu est conforme au jugement unanime de peintres très- _ habiles auxquels je l’ai soumis. Alors ce bleu, se trouvant associé aux quantités de lumière blanche exprimées par les deux lignes précédentes, devra produire sur l’œil l'effet d’un bleu blanchâtre ou d’un blanc bleuâtre, dont la coloration apparente sera encore rendue indécise par la faiblesse de l'intensité totale de l’image, provenant de la petitesse de tous ses coefficients numériques et de la fraction e’ qui les affecte comme facteur commun. Tout cela est exactement conforme à l'observation. Car, dans cet état naissant des images E, 312 DES PHÉNOMENES ROTATOIRES elle n'y fait apercevoir en somme qu'une lueur d'un bleu päle à peine coloré, dont l'intensité augmente rapidement avec l'épaisseur de la plaque, sans qu'on puisse discerner dans sa nuance de variations sensibles. 28. La nature des teintes résultantes de l'image E peut s'apprécier par les expressions en sinus pour des épaisseurs notablement plus fortes que celles auxquelles s'appliquent les évaluations approchées dont nous venons de faire usage. Pour cela, il faut les décomposer analytiquement d’une ma- nière analogue. Par exemple, je considère d’abord les deux divisions rouges, qui appartiennent aux rayons dont les vi- tesses de rotation £ sont les moindres de toutes ; et je suppose seulement l'épaisseur e assez restreinte pour que l’expres- sion en sinus puisse embrasser avec suffisamment d’exactitude les divisions newtoniennes. Les quantités respectives de lu- mière provenant de ces deux divisions, qui entreront dans l'image E, auront les expressions suivantes : Ft La seconde peut être mise sous cette forme : —)1;/sin°e;e;; F9 = I, sin’p.e: FO = T,[sin’pe + sine — sin’p,e] = Lsin’s.e + Lsin|(s.— p,)e} sin{(p, + pe] Je fais subir à toutesles suivantesune décomposition pareille, qui isole, dans chacune d'elles, une portion multipliée par sin’se. Puis, je rassemble tous les éléments chromatiques de l'image E, ainsi transformés. Cela donne en somme : OPERÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 313 [++ L+l+L +1 +L+L +1 ]Jsinee + I sin{(e, —9.)elsin{(e. + p.)e} + L sin{(o, —p.)e}sin{(e, + p-)e| + I; sin{(p, —g)e}sin|(e + p-)e +L sin{(e —p.)eisin{(p + p,)6} + I, sin{(p, —p.)e|sin|(o; + p-)e} + L sim{(e — p,)e sin {(p: + p-)e) + L sin!{(e, —p,)e}sin{(e, + p.)e| + Lesin{(pu— ,)e} sin {(ou + p-)2} 29. Examinons maintenant la nature de la teinte qui devra résulter de cet ensemble. La première ligne est la somme de tous les éléments I, multipliés par un même facteur positif, toujours moindre que l'unité. Elle formera donc à elle seule un blanc parfait, auquel s’associeront tous les termes sui- vants, qui contiennent chacun deux facteurs variables avec l'épaisseur. Le premier de ces facteurs sera toujours indivi- duellement positif, dans le système de rotations que nous considérons, parce que les arcs & y croissent continüment avec la réfrangibilité; et je rendrai les seconds également positifs, en limitant ici la discussion aux cas où l’are (pb, +p,)e, le plus grand de ceux qui s’y trouvent sous le signe sinus, n'excède pas 180°. Cela limitera l'épaisseur e à un peu moins de 3 millimètres, ou plus exactement 2"",90 (*). Or, jusque- là, le caractère dominant de la teinte résultante peut être prévu par le genre de considération que nous avons tout à l'heure appliqué aux très-petites épaisseurs. (*) Sa valeur rigoureuse est 2°" ,90074. Je l'ai employée telle dans les évaluations calculées. Mais, pour abréger les énoncés où je la rapporte, je l'y ai bornée à sa partie principale 2"”,90. XX. 4o 314 DES PHÉNOMÈNES ROTATOIRES Pour cela, il suffira évidemment de discuter l'effet propre des termes variables qui, dans ces circonstances, ne font que s'ajouter au blanc de la première ligne. Restreignons-les d’abord au cas où l'arc (9,+2,) e, le plus grand de ses ana- logues, n'excède pas 90°; ce qui limite l’épaisseur e à 1"",45. Jusqu'alors tous les sinus qui les composent comme facteurs sont dans des périodes d’accroissement individuel. Aïnsi, jusque-là, toutes les quantités de lumières simples, expri- mées par ces différents termes, seront des fractions de chaque division chromatique, dont les valeurs individuelles croîtront continüment avec l'épaisseur, d'autant plus que la réfrangi- bilité sera plus grande , mais en restant toujours très-faibles pour les divisions les moins réfrangibles. Car même lors- que e— 1"",45, ce qui rend l'arc (bp, +0.) e égal à go’, le coefficient de I, devient 0,673346, tandis que celui de I, n’est encore que 0,00367; et tous ceux des autres termes inter- médiaires auront des valeurs intermédiaires entre celles-là. Pour cette même épaisseur, la proportion de blanc de la première ligne, indiquée par son coefficient propre sin”p,.e, est 0,163329, c’est-à-dire, qu'elle est presque + de la quantité totale de lumière transmise à travers la plaque considérée. Si l’on applique à cet ensemble d'éléments chromatiques le rai- sonnement que nous avons tout à l'heure employé pour des épaisseurs moindres, on en conclura avec une égale évidence que la teinte résultante de l’image E doit encore être ici un bleu faible mêlé de blane, ou un blanc bleuâtre, ce qui est conforme à l'observation. 30. Mais cette teinte se soutientencore presque identique pour l'œil à des épaisseurs plus grandes. Car la simultanéité d'accroissement progressif des éléments chromatiques, qui la OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 315 détermine, ne s'arrête pas à celle que nous venons de consi- dérer. Le coefficient del,, continue encore à croître après que l'arc (py +9) e a atteint 90°; et, pour connaitre la borne de son accroissement, il faut l’envisager dans l’ensemble de ses deux facteurs. On y parvient très-aisément en lui rendant sa première forme | Sin’p,€ — sin’p,e. Alors, en faisant varier l'épaisseur e sous les signes de sinus , on a, pour condition du maximum de cette diffé- rence : O — pe SIN pe — p, Sin’ pue. Et, en résolvant cette égalité par des essais numériques , on trouve qu'elle est très-approximativement satisfaite par l’é- paisseur e — 1°",777. Alors le coefficient de I,., propre à la division terminale violette, devient 0,737782. Celui de 1,, propre à la division rouge de Newton, devient 0,070327 ; et sin *.€, qui mesure la proportion de blanc parfait associée aux autres sommes d'éléments colorifiques , est 0,238085. Cette quantité de lumière blanche s'élève ainsi presque au quart, ou plus exactement aux -* du faisceau total transmis à _travers la plaque considérée. La teinte résultante de l’image E devra donc être encore un bleu plus blanchâtre et plus abondant en lumière que précédemment, et c’est aussi ce que l'observation confirme. 31. La même apparence, accompagnée d’un accroissement . progressif de blancheur, se continuera encore un peu au delà de l'épaisseur que nous venons de considérer. Car, après que le coefficient de I,, aura atteint son maximum , il décroîtra d’abord très-lentement, tandis que tous les autres continue- ront d'augmenter. Par exemple, à l'épaisseur de 2 millimètres, 4o. 316 DES PHÉNOMÈNES ROTATOIRES ce coefficient aura encore pour valeur 0,705299, ce qui ne produira, dans la quantité de lumière violette terminale, qu'une diminution à peine sensible, ou même tout à fait in- sensible, à cause de sa faiblesse propre; au lieu que la valeur de sin’,,e, qui mesure la proportion de blanc associée aux éléments colorifiques de l’image E, sera devenue 0,294565, ou presque égale à = du faisceau total transmis à travers la plaque. Or, en effet, l'accroissement de blancheur del’imageE, à ces degrés d'épaisseur, est très-manifeste, sans que l’on aperçoive un changement perceptible pour l'œil dans le caractère bleuâtre qui y domine. 32. Mais ce caractère commencera à se modifier quand on atteindra l'épaisseur 2"",90 qui rend nul le coefficientde I, et l’altération deviendra progressivement de plus en plus sen- sible à des épaisseurs plus grandes ; car, à cette limite 2""o, où la portion de violet terminale qui s'ajoutait au blanc de notre première ligne devient nulle, toutes ses analogues, ap- partenant aux divisions moins réfrangibles, ont marché vers leur maximum d’accroissement. Les unes, depuis le rouge jusqu'au jaune inclusivement , n’ont pas encore atteint cette phase; les autres , à commencer par le vert, l'ont dépassée. De là résulte une teinte composée, dans laquelle le jaune et le bleu, réunis au vert du spectre, produisent une apparence dominante de vert. En mème temps, la proportion de blanc exprimée par notre première ligne s'élève à 0,546605, ou plus de -© de toute la lumière transmise à travers la plaque. Un tel mélange doit donc imprimer à l'œil la sensation d’un blanc non plus bleuâtre, mais verdâtre, et à peine coloré. C’est en effet ce que l'observation donne pour cette épaisseur. 33. Afin que l’on puisse bien apprécier la justesse de ces OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. JL prévisions, je joins ici un tableau analogue à celui de la page 301, dans lequel toutes les quantités de lumière prove- nant des diverses divisions chromatiques dont l’image E se compose, sont calculées par l’expression en sinus pour les deux épaisseurs 1"",777 et 2"",90074, que nous venons de considérer spécialement. J'en ai déduit, par complément, les quantités correspondantes qui composentl’image ordinaire O, dont nous discuterons aussi dans un moment les caractères ; et J'ai joint à ces indications les valeurs des arcs de rotation moyens de chaque division chromatique aux deux épaisseurs __ considérées. ÉLÉMENTS CHROMATIQUES ÉLÉMENTS CHROMATIQUES des deux images pour l'épaisseur e— 122,777. des deux images pour l’épaissenr e— 2"",g0074. | EE — En À | Ares de rotation a Image Ares de rotation RE Image ordinaire x Image ordinaire TR moyens extraordinaire moyens extraordinaire Image L-0,761915|L,.0,238085| 47° 40’ 27" |L.0,4533051L,.0,546605) Rouge. L.0,691588|L,.0,308412| 55 4 34 |L.0,325742 L..0,672258 | Orangé. L.0,620749|L.0,379251| 62 3 4 |L.0,219664 L.0,780336 Jaune L.0,541192|L.0,458808| 69 35 59 |L.0,121506|L,.0,878494 Mert.-. L.0,421673|L,.0,57832;| 80 48 47 |L.0,025490 L.0,974510) Bleu... L.0,290089|[,.0,709911| 93 43 3 |L.0,004204 L,.0,99796 Indigo. 53 |L.0,189453|1,.0,810547|104 47 44 |L.0,065214|f.0,934786 Violet. ) |L.0,088911|1,.0,911089|118 35 42 L..0,229073|L,.0,770927 terminale violette. L..0,024133|1,.0,975867|132 19 33 |L.0,453395[L..0,546605 318 DES PHÉNOMEÈNES ROTATOIRES 34. Nous pouvons maintenant réaliser sur ces nombres les opérations que nous avons simulées sur l'expression analy- tique générale. Commencant donc par l'épaisseur 1"",777, je rassemble pour elle tous les éléments de l’image extraordi- naire E, en décomposant chacun en deux parties, dont l’une ait le même coefficientnumérique que 1,, l’excédant restant à part. J'obtiens ainsi: [ LL HUILE EEE hi, +1, Jo,238085 à a [ 1,-0,070527 -1,.0,141166-1,.0,220723 4-1, .0,540242 4-1,.0,471826 4-1,.0,572462 -1,.0,67300% +1, -0,787782 ]M : C'est la même décomposition que nous avons effectuée sur la formule analytique, et elle justifie toutes nos prévisions. Mais on peut en appliquer une nouvelle aux nombres de la deuxième ligne, en isolant de chacun la portion qui est affec- tée d'un coefficient numérique égal à celui de I,,, comme nous l'avons fait page 310, sur l’expression en €”. Alors tout le système que nous aurons à considérer s'écrira comme il. suit : Le HIHI, HI, 1, 1, 1, Hi, +1, Je,238085 + LR Je,07032; 1 Le [ 1,-0,070839 4- l -0,150396 4-1,.0,269915 + 1,.0,401499 +- 1,.0,502135 4-1, .0,602677 E; Did -0,667455 | j Appliquons à ces nombres le mode de raisonnement de la page 310. La première ligne exprime un blanc parfait. La deuxième exprime un blane auquel il ne manque que la pe- tite portion terminale de rouge sombre qui excède le spectre newtonien. Ce sera donc tout au plus un blanc à peine bleuätre, si toutefois sa coloration est discernable , ce qui est fort douteux. Maintenant, dans la troisième ligne, ce sont les éléments les plus réfrangibles qui abondent en pro- portion croissante avec la réfrangibilité. Leur ensemble ne OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 519 pourra donc former encore qu'une nuance dominante de bleu, laquelle, associée au blanc des deux premières lignes, don- nera encore à l'œil la sensation d’un blanc bleuâtre plus pâle et plus abondant en lumière que celui de la page 310, à cause de la quantité beaucoup plus considérable de lumière blanche qui s’y trouve mêlée. Tout cela est exactement con- forme à l’observation pour cet ordre d'épaisseur, comme on … le verra par la suite; et cela est aussi minutieusement repro- duit par la règle de Newton, quand on l’applique à tout l’ensemble des éléments colorifiques que nous considérons ici. Elle indique même que la faible nuance de bleu résultant qui colore ici l’image E, sera moins franche et tendant un peu plus au verdätre que dans les épaisseurs moindres, comme le doit faire en effet prévoir la proportion un peu plus grande de rayons verts qui se trouve ici dans notre troisième ligne, comparativement à celle de la page 310. Mais la diffé- rence est inappréciable à l’œil, à cause de la grande quan- tité de lumière blanche qui en éteint la sensation. 35. Je passe maintenant à l'épaisseur 2"",90074 ; et pre- nant dans le tableau de la page 317 les éléments numériques propres à l’image extraordinaire E, j'applique d’abord à . leur ensemble le même mode de décomposition que nous - avons effectué sur la formule analytique, ce qui les groupe comme il suit: HILL HI HET HL+LA ]o,546605 | 1,.0,125653 +1, .0,233731 -1,.0,331889-4-1,.0,627905-1,.0,44g19r -+1,.0,388181 + 1,.0,224322 1 Je décompose maintenant la deuxième ligne, de manière à isoler, dans chaque terme, la portion de son coefficient nu- . mérique qui est égale à celui de I,. Cela donne à tout le sys- tème la forme suivante: 320 DES PHÉNOMÈNES ROTATOIRES RP en un on an Je:546605 HD MELLE ELELEL Jo,125653 + [ 1,-0,108068 + 1;:0,206256 5 1,-0,302252 +-1,.0,323538 Æ1..0,262528 4-1 .0,098669 À Maintenant, la première ligne exprime un blanc parfait. La deuxième exprime une fraction commune de tous les élé- ments chromatiques qui composent le spectre de Newton, auxquels il manque seulement les deux divisions terminales extrèmes de Fraunhoffer. Leur ensemble composera donc encore un blanc sans coloration appréciable. Enfin, dans la troisième ligne, les portions présentes d’orangé et de jaune, se réunissant à celles de l’indigo et du bleu, formeront, pour l'œil, un vert qui se joindra à la portion de vert prismatique mesurée par le coefficient deI,. Ainsi, en résultat , la nuance dominante verte de cette dernière ligne se trouvera associée dans l’ensemble de l’image à une quantité de blanc qui com- prendra plus des deux tiers de toute la lumière transmise à travers la plaque. La teinte de cette image devra donc être un blanc verdâtre d’une coloration très-faible. C’est précisé- ment ce que l’observation donne; et le passage de l’image extraordinaire E, du blanc bleuâtre au blanc verdûtre, s'opère à l'épaisseur même de 2"",9 ou 3 millimètres, en succédant à un blanc intermédiaire presque complet pour l'œil. Un accord si juste, dans une particularité de transition aussi dé- licate, me semble donner une confirmation très-satisfaisante des valeurs assignées aux arcs de rotation des différents rayons simples, dans le tableau de la page 296. 36. Les teintes de l’image ordinaire, propres aux limites d'épaisseur que nous venons de considérer, peuvent se pré- voir par un mode de discussion semblable, dont les consé- quences ne sont pas moins conformes à l'expérience. Je prends OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 321 d'abord le cas où l'épaisseur e est assez petite pour que les éléments de l'image extraordinaire E puissent être éva- lués avec une exactitude suffisante par les expressions ap- proximatives jee F. Lee Alors , les éléments de l’image ordinaire O étant compleé- mentaires de ceux-là, seront représentés avec le même degré d'approximation par l'expression générale F—I|: — ee |: Les coefficients numériques de I seront ainsi d'autant plus faibles pour une même épaisseur, que l'arc ? sera plus consi- dérable. Conséquemment, le plus petit de tous appartiendra à la divisionterminale violette, pour laquelle ; devient o,. D’a- près cette remarque, je mets les expressions de tous les élé- ments de F, sous la forme générale és Be pal 1 me] je 6e] F=I[i— mt R2 =] + Rz | Alors, prenant dans le tableau de la page 301 les diverses valeurs numériques des éléments de E, en fonction de &, je les réunis dans les deux lignes suivantes, qui contiennent la _ somme de tous les éléments chromatiques de l’image ordi- _ naireO. [r PRÉ EL HN HE HE, ][ 1 —e2.0,633909 | MoSP1G2; 4 1,.0,Fatrag 1, .0,694518 1,.0,458539-+ 1, .0,Sg7é8o++1,.0,315963-- I. 0,236320 1,0, 124720 |e° Maintenant, dans chaque terme de la deuxième ligne, j'isole la partie de son coefficient numérique qui est égale à0,124729, coefficient numérique de I, ; et, après cette seconde décompo- 1188.04 4x 322 DES PHÉNOMÈNES ROTATOIRES sition, tout l'ensembledes éléments chromatiques de l’imageO se présente comme il suit : LL HI LL Hi, ][x—e.0,633900 ] e BRL EL HE A EE EL Je.0,r24729 + [1.026808 +1,.0,399396 +1, .0,369780-1,.0,3338 10 4-1, .0,27375 ++ 1,.0,191214 4-1,.0,111600 Je La première ligne représente un blanc parfait. La deuxième ligne représente un blanc auquel manque le violet sombre « contenu dans la division terminale de Fraunhoffer. Si l’ab- sence de ce violet extrême est perceptible à l'œil, ce qui est fort peu à croire, l'ensemble résultant des autres éléments pourra tout au plusincliner vers un blanc jaunätre. La coloration du système total dépendra donc presque uniquement des élé- ments chromatiques rassemblés dans la dernière ligne. Or, le violet y manque en totalité. L’indigo et le bleu y sont en proportions relatives très-faibles; les éléments dominants sont les moins réfrangibles, et leur abondance relative augmente à mesure que la réfrangibilité diminue. La teinte résultante d'un tel ensembl edevra donc évidemment se rapprocher de cette partie du spectre où la réfrangibilité est la moindre. Mais l’expérience habituelle des coloristes montre que le rouge mêlé au jaune produit pour l’œil des tons orangés, qu'une faible addition de vert et de bleu ne fait que rendre plus indécis et plus sombres. Ce devra donc être là l'effet ré- sultant de la troisième ligne. Ainsi, étant associée aux deux autres , la coloration qu'elle produira , si elle est sensible, devra être un orangé jaunâtre. En outre, on ne pourra pas l’apercevoir aux plus petites épaisseurs , à cause de la pro- portion presque totale de blanc qui s’y mêlera. A la vérité, cette quantité de blanc additionnelle diminuera par degrés, en raison directe de e*, à mesure que les plaques observées OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 323 deviendront plus épaisses; mais peut-être à l'épaisseur o"".6, où ces formules approximatives sont limitées, ne sera-t-il pas encore assez affaibli pour que la coloration produite par la troi- sième ligne soit sensible. Je n’ai pu commencer à l’apercevoir avec certitude qu'à l'épaisseur 0o"",8, en opérant avec la lu- mière des nuées réfléchie par une glace noire dans la chambre obscure; et alors la teinte naissante de l’image ordinaire O était perceptiblement jaunâtre , conformément à notre calcul. 37. On obtient des résultats plus marqués à des épaisseurs plus grandes, telles que celles pour lesquelles les nombres du tableau de la page 317 sont calculés. Je considère d’abord la première, où l’on a e— 1%%,777. Alors, extrayant du tableau les éléments chromatiques de l’image ordinaire qui s'y rap- porte, je détache de chacun d’eux une partie proportion- nelle au coefficient 0,024133 de L,,, ce qui groupe l’ensemble : de ces éléments comme il suit: MH Hi Hit, a, Joontiss | 12.0,737982 +-1..0,667425+- 1, -0,596616 4 1..0.517059 4-1, .0,397540 +- 1,:0,265956 4 L,.0,165320 +-1,.0,064778 de Alors je décompose encore tous les termes de la deuxième ligne, de manière à extraire de chacun d’eux une quantité proportionnelle au coefficient 0,064778 de I,. L'ensemble du système ainsi groupé se présente comme il suit : Loti, Hi HAL Jo,026135 HI HIHI + Hi, 064778 + [1,.0,67300% 4-1, .0,602647 HL:0,5318381..0,452281 -1,.0,332762-1,.0,201178 4 1.0,100542 ]. La première ligne exprime un blanc parfait. La deuxième exprime un blanc auquel il ne manque que la division ter- minale violette de Fraunhoffer. Sa coloration, si elle est perceptible, ne pourra que l’incliner à peine vers un blanc 41. 324 DES PHÉNOMÈNES ROTATOIRES jaunâtre. La troisième ligne décidera donc seule la teinte de l’image. Or tout le violet y manque; l’indigo et le bleu y entrent en proportion très-faible, tandis que les autres éléments moins réfrangibles y concourent suivant des pro- portions croissantes, à mesure que la réfrangibilité diminue. Cette troisième ligne formera donc à elle seule un jaune orangé, et mème relativement plus orangé que celui qui était formé par la ligne de même rang aux épaisseurs très- petites, parce que les éléments les moins réfrangibles domi- nent ici dans des proportions relatives plus fortes. En outre, cette teinte orangée de l’image ressortira ici beaucoup plus évidemment, parce qu’elle est associée à une proportion de blanc qui ne s'élève pas à — de toute la lumière transmise à travers la plaque, Tout cela est rigoureusement conforme à l'expérience; car, pour cette épaisseur 1"",777 ou 1°",8, elle donne l'image ordinaire O d’un jaune orangé très-beau , et l’image extraordinaire E d’un blanc légèrement bleuûtre. 38. Je considère maintenant l'épaisseur 2"",9007/, qui est la seconde du tableau de la page 317, et je rassemble en- core pour ce cas les éléments de l’image ordinaire O , qui s'y trouvent consignés; mais on ne peut plus les grouper de la même manière pour les décomposer en sommes posi- tives, parce que la seule partie de leurs coefficients numé- riques qui soit commune à tous, est 0,00/204, laquelle forme le coefficient de T,. La proportion de blanc parfait que l’on peut isoler de l’ensemble est donc limitée à ce coefficient ; et, en la séparant du reste , le système total se groupe comme il suit : OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 325 LH HIHI HIHI HA, Jos00:204 M/-o449191 +-1,.0,323538 1 .0,215460 F-02780 4 1,.0,021286 4 1,.0,061010 -1,.0,224369 +1, Toi il n’y a plus de décomposition ultérieure possible. La première ligne seule forme encore un blanc parfait ; mais la quantité absolue n’est qu’une excessivement petite fraction de la lumière totale transmise à travers la plaque. Dans la deuxième ligne, d'où dépend la coloration de l'image ré- le vert, entrent en proportions extrêmement faibles; mais le violet et le rouge abondent associés à des proportions notables de jaune et d'orangé. On peut donc encore prévoir, par un sentiment assez sûr, qu’un tel ensemble devra pro- duire sur l’œil la sensation mixte d’un rouge orangé ; et c'est en effet ce que l'expérience donne quand l'épaisseur des plaques atteint cette limite précise de 2°",9 ou 3 millimètres, que nous avions supposée dans notre calcul. Toutefois, l’in- tervention des éléments les plus réfrangibles du spectre, revenant ici s'associer aux moins réfrangibles, commence à rendre plus incertaine l'appréciation immédiate de leur effet - simultané, par les seules considérations d'expérience habi- tuelle dont nous avions pu faire jusqu'à présent usage. La difficulté s'accroît aux épaisseurs plus grandes, où cette . mixtion des parties du spectre les plus éloignées en réfran- gibilité devient plus abondante, plus générale » et aussi plus … variée dans ses proportions. Il faut alors pouvoir s'appuyer . sur des expériences directes, pour savoir comment les im- - pressions produites par diverses quantités relatives de lumières - simples de nature donnée, s’associent et se modifient mu- _tuellement dans la sensation complexe qui résulte de Jeur . ensemble. C’est ce que Newton a fait, et c’est de là qu'il .-0,449197 | sultante, le bleu manque absolument, et l'indigo, ainsi que 326 DES PHÉNOMÈNES ROTATOIRES a tiré sa règle de la composition des teintes. Nous devrons donc y recourir pour suivre le progrès des couleurs des images à des épaisseurs plus grandes que celles que nous venons de considérer. Mais ayant pu les déterminer jusque- là par des raisonnements sûrs et directs, d’après le seul em- ploi des valeurs que nous avons attribuées aux arcs de rotation, l'application de la règle de Newton aux mêmes cas fournira une vérification légitime de cette règle elle- mème , puisque les proportions des diverses lumières sim- ples qu'on y introduira auront été déjà trouvées en concor- dance constante et parfaite avec la succession des teintes observées, OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 327 V. Applications numériques de la règle de Newton à la détermination des teintes des images ordinaire et extraordinaire qui s’observent à travers les plaques de cristal de roche perpendiculaires à l’axe, lorsque l’on y transmet un faisceau perp q y blanc, préalablement polarisé en un sens unique, la section principale du »P P que, P P prisme analyseur coïncidant avec le plan de polarisation primitif. _ 39. Je commence par considérer les épaisseurs très- petites, pour lesquelles les proportions de lumières simples . qui entrent dans l’image extraordinaire, sont exprimées avec . une exactitude suffisante par les termes de l’ordre &. Pour … leur appliquer la règle, il faut reprendre dans la première - colonne du tableau de la page 301, les expressions de F,,, - relatives aux diverses divisions du spectre newtonien, et .- y remplacer les lettres I par les valeurs respectives que New- - ton leur assigne , valeurs qui sont numériquement expri- . mées dans le tableau de la page 271, où elles sont désignées - par les lettres & On aura ainsi, selon sa règle, les nom- - bres de rayons de chaque division homochromatique qui doivent entrer dans l’image résultante, en désignant par - blanc d’où ils sont extraits. Ces substitutions effectuées . donnent aux éléments chromatiques de l’image F, les expres- _ sions suivantes : 328 DES PHÉNOMÈNES ROTATOIRES Nombre des rayons . . . . . rouges = 40043,5 2 = oranges =: 28599,6 — jaunes Î = 57570,5 — verts = 86239, 1 = bleus b— 25 .104382,0 Hits : Ca : — indigo TTTÉ 81593,7 — violets "=. 185726,7 Somme ou nombre total des rayons SET contenus dans E |; D ue Complément ou nombre total des rayons contenus dans O. . . +. . . FE Gha Tr nEe | N'— 6687 — 0.584135 1. . L rs . Sr: Ca : J'ai conservé en évidence le facteur littéral © , qui est com- mun à tous les éléments chromatiques de l’image E, ainsi qu'à leur somme N. Or, par cela même qu'il leur est com- mun, il disparaîtra dans le calcul des coordonnées X et Y, qui caractérisent la teinte de cette image, puisque leurs ex- pressions, telles qu’on les voit page 276, ne dépendent que des rapports de ces quantités. Ainsi, tant que l’épaisseur e sera assez restreinte pour que les éléments chromatiques de l'image E puissent être évalués par l’approximation admise dans le tableau de la page 3or, la teinte de cette image, cal- culée par la règle de Newton, sera constante, et elle contien- dra une quantité totale de lumière proportionnelle au carré de l'épaisseur e. Ceci est conforme aux deux premières pro- positions que nous avons directement établies. OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 329 Go. Il ne reste plus qu’à déterminer la nature de la couleur prismatique à laquelle cetteteinte doit étrerapportée. Pour cela il faut calculer les valeurs numériques des coordonnées X et Y par les formules de la page 276, puis en conclure celles de U et de A qui y correspondent. On trouve ainsi d’abord, a e en supprimant le facteur commun — KR? Le signe positif de X indique que le point extrême de 4 a son abscisse positive, et le signe négatif de Y indique que son or- donnée est négative. D’après ces caractères , le rayon vec- teur A se dirige dans le dernier quadrant du cercle chro- matique, en comptant les arcs de ce cercle en allant du commencement du rouge vers les couleurs plus réfrangibles, depuis o° jusqu'à 360. Achevant donc le calcul de l'angle U et de la distance A, d’après leurs expressions en fonction de X et de Y, on trouve = 2852532", A—=0,283063, 1—A—0,716937. Si l’on porte l’arc U sur le contour du cercle chromatique décrit fig. [°, et que l’on cherche où il se termine parmi les divisions de ce cercle, dont nous avons donné le tableau pag. 274, on voit qu'il dirige le rayon vecteur A presque exac- tement au milieu de l’indigo; et, en y associant les valeurs de À et 1 — A, cet indigo serait semblable pour l'œil à celui que l’on formerait si l’on mélait 28 parties d’indigo prisma- tique avec 72 parties de blanc, ce qui formerait un blanc bleuâtre ou un bleu blanchâtre. Tel serait donc, selon la règle newtonienne, le caractère constant de la teinte de l’image E d'après la combinaison de ses éléments prismatiques, calcu: XX: 42 330 DES PHÉNOMÈNES ROTATOIRES lés pour toutes les limites d'épaisseur auxquelles l’approxi- mation ici employée est applicable. En outre, son intensité : : Sa F € . serait toujours très-faible, en raison du facteur > qu! entre comme coefficient dans l'expression genérale du nombre N de rayons dont l'image est composée. Par exemple, si l’on suppose e— 0"%,{00, on trouvera N — 27,822 ; c'est-à-dire que, sur la somme totale des rayons constituant le faisceau blanc dont l’image F, est extraite, somme représentée ici par 658 :, elle en contiendrait seulement 28 , et beaucoup moins encore à des épaisseurs moindres, proportionnellement au carré de e”. Toutes ces indications de la règle s'accordent avec l'expérience, aussi exactement qu'il est possible d’en juger; car, de décider si la teinte observée s’assimile réel- lement à un indigo ou à un bleu prismatique, c'est ce que l'œil est incapable de faire pour des images d’une intensité aussi faible et aussi mêlées de blanc. 4x1. Considérons maintenant l’image O, qui est complé- mentaire de E. D’après ce caractère, les formules établies page 278 assignent à ses coordonnées indicatrices la forme suivante : DB D AE à r —AÀ F1 LES 6583 —N Examinons d’abord l'expression de U”, qui caractérise la nature de la teinte. En y remplaçant U par sa valeur trou- vée plus haut, et supprimant dans le résultat une circonfé- rence entière, elle devient U'—= 105° 25° 32”. Si l’on place cet arc sur le contour du cercle chromatique, OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 331 et que l’on cherche où il se termine parmi les divisions défi- nies dans le tableau de la page 274, on voit qu'il dirige le rayon vecteur A' dans le jaune, presque sur le point intermé- diaire entre le jaune moyen et la fin de l’orangé. Telle sera donc la teinte de F, selon la règle newtonienne, et l'expé- rience est très-conforme à cette indication, quand l’épais- seur e s’est assez accrue pour que la coloration de l’image O devienne perceptible à l'œil. Cela ne commence à avoir lieu . que lorsque cette épaisseur atteint o"",5 ou 0"",6, c’est-à- dire, vers la limite à laquelle nous avons borné ces premières évaluations ; jusque-là, on ne peut la distinguer avec certi- tude d’un blanc parfait. Or, cette excessive faiblesse de la coloration de O, dans les épaisseurs aussi restreintes, est encore une particularité parfaitement indiquée par l’expres- sion de A’, donnée ici en fonction de A et de N. Pour le faire voir, Je reprends l'expression de N trouvée plus haut, et, effectuant la division par R’, que nous avions laissé jusqu'ici sous sa forme littérale, elle devient N=6,.:197:99875. En substituant cette valeur dans 4, je divise les deux termes du facteur de A dans le second membre, par 658 :, afin de le ramener à sa forme la plus simple ; j'obtiens ainsi e°.0,270285 BE 1—e°.0,270285 On voit déjà que 4' est de l’ordre & A. Or, la substitution du carré des arcs au carré des sinus, qui sert ici de fonde- ment à tous nos calculs, n’est exacte que dans les quantités de l’ordre e. On y néglige les termes dépendants de e‘ et des puissances supérieures de e. Il faut donc restreindre l'ex- 42. 332 DES PHÉNOMÈNES ROTATOIRES pression actuelle de A dans les mêmes limites, c’est-à-dire y négliger le terme qui a pour coefficient e* au dénomina- teur, où il est associé à l’unité, L'expression de 4’ ainsi ré- duite sera donc: ‘ A'=4e6,0,270285 ; et en y mettant pour A sa valeur 0,283063, trouvée plus haut, elle devient enfin: A —e,0,076508. Cette expression donnera toujours à A une valeur très- faible , et bien plus faible que A, tant à cause de la petitesse de son facteur numérique , qu’en raison du multiplicateur e qui lui est associé, et qui, dans les applications , devra être inférieur ou au plus égal à 0,36. Ainsi, selon ce calcul, aux épaisseurs très-petites , la teinte jaune de O sera, dans son espèce, comparativement bien plus pâle encore que le bleu de F., par la proportion beaucoup plus considérable de blanc qui s'y mélera. Cela est exactement conforme à l’ex- périence. 42. Pour avoir une appréciation précise de ces effets, donnons successivement à l'épaisseur e les valeurs 0°”,4; 0"*,5 ; 0"°,6, dont la dernière atteint l'extrême limite à la- quelle nous ayons jugé convenable d'étendre la substitution de l'arc au sinus; nous obtiendrons ainsi les résultats suivants : OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 335 COMPOSITION DE LA TEINTE résultante de l’image O VALEURS DE | VALEURS DE 21 1 D =] an 2] 2 æ mn # exprimée approximativement. 0,987799 1 partie de jaune prismatique mélée à 99 de blanc. | | 0,980873 2 parties de jaune prismatique mélées à 98 de blanc. | 0,972457 3 parties de jaune prismatique mélées à 97 de blanc. | C'est seulement à la plus grande épaisseur 0"",6 que l’on commence à soupconner dans O la présence dominante du jaune. Il y devient progressivement bien plus sensible vers les épaisseurs" plus grandes ; mais alors les calculs doivent se faire avec les carrés des sinus des arcs, ou, mieux encore, avec les formules rigoureuses SAT CA" ; ; F.=;1|: ne pe cos(a +o)| “Br ___Rsin(a'— a) ; h F—1|: REF cos(a' + a)] En effectuant ces calculs pour les épaisseurs que nous avons étudiées plus haut spécialement, on trouvera les indi- cations de la règle de Newton minutieusement conformes aux conclusions que nous avons tirées de la discussion di- recte, et qui sont aussi constatées par l'expérience avec une parfaite fidélité. La règle se. trouve donc immédiatement vérifiée par cet accord dans les limites d'épaisseur dont il s’agit. On peut se convaincre de ce fait par la seule inspection des figures 2 et 3, qui ont été construites d’après les résul- tats numériques qu’elle a donnés. Tous les éléments de 334 DES PHÉNOMENES ROTATOIRES cette construction sont rassemblés dans un tableau annexé à mon Mémoire de 1818, page 69 ; on pourra , au besoin, les y consulter. En les employant ici à la construction des fig. > et 3, Jy ai seulement corrigé quelques légères fautes de calcul numérique, que j'ai indiquées dans l'introduction au présent Mémoire. 43. La seule difficulté pratique que ces applications puis- sent présenter consiste dans le soin qu'il faut prendre pour déterminer exactement le signe positif ou négatif qu'il faut donner à cos (a + a’), lorsque l'accroissement de l'épaisseur fait sortir cet arc du premier quadrant pour une ou plusieurs des divisions homochromatiques du spectre newtonien. Quoique cette détermination soit toujours facile pour les personnes habituées aux calculs trigonométriques, on peut se dispenser de l'attention qu’elle exige, au moyen de la trans- formation suivante, qui évite toute chance d'erreur. Je considère seulement F,, puisque F, s'en déduit comme complément de FE. Plaçons la section principale du prisme analyseur dans l'arc de déviation quelconque «, compté à partir du plan de polarisation primitif, dans le même sens que les ares a, a’; l'expression exacte et générale de F, est alors : R sin(a'— a) @—4) Je remplace cos (a' + a—24) par son expression équivalente R sin(a —a) Rsin(a — a) @—a) T°? a | Nommons e l'épaisseur de la plaque considérée : cette épais- : seur étant exprimée en parties du millimètre, +(a'+ a) est Fill cos| a + à — a) |- 1-12 sin”|=(@ + @) — «|. Il en résulte : F—°1|1— sin*] = (a+ @)— « \ à ! 2 x : ê L 3 : > 4 ‘ A ns. 1 En 2 ETS A SL ET, EE ST ES RE Saut À mination de la teinte de l'image extraordinaire E formée par la somme de ses éléments chromatiques compris dans le spectre newtonien, tels que les présente le tableau précédent, caleulé pour l'épaisseur 11,047 à es INDIGO. 2 A—0,155080 | 1 — À CLETEL a le formerait en mélaot 15 gé prismatique avec 8j + parties de blanc te | 4 jiag 1— 4 =0,8068:6 de blanc qu'on le formerait en mélout parties d'udigo prismatique avec Ho 4 d Acailémie des sciences, L XX, p 3 AR cer d'ours ‘ résurau À, — Galeul complet de DIVISIONS CHROMATIQUES Valeurs de g'e ÉLes mêmes en graduation sexagésimale. ihmes de sin g'e Logarithmes de g ÉLogarithmes de l'épaisseur e = 11"",047. « à un cadran simple. TERMINALE ROUGE r 0,32€ 1,0432444 ; la section princi nouce r 0,4735162 1,0432444 du prisme à OnANGÉ ii 9! 110432 444 c le plau de polarisation primitif b i u 0,4023273 | o,5066886 13 1,0432444 0,6401036 1,0432444 0,6562132 son tous les éléments chromatique qui composent les images ordinaire, extraordinaire O, E, vues à travers une plaque de cristal de roche, perpendiculaire à l'axe, d'une epaisseut ualyseur corncidant 4 TERMINALE FIOLETTE me 0,4856647 1,0432444 1,3700716 23,410 23.26.46! 1,5997591 1,7581226 1, 5167606 ee 1390790014 20°, 328 20°,19/.23" 1,5407217 1,7581226 1 15702424 1,7812060 1,7981226 1,6833480 1,8499330 1,7511877 1,7581226 78846863 17081226 | 17581226 1,528gog1 33°,79 17581226 1,1578815 1,3700716 1,4926744 1,5167606 1,2988437 13079914 1,5393292 1,5702424 1,6307802 ï, Bas 1,6833480 n FRET 1,9878ror 93972322 0,027678 19759138 946049 0,05395r 1,2783 1,04: 19908523 0979157 0,020843 1,302 402 1,0432444 1,9690868 0,981294 0,068706 1,3801000 10432444 14449733 18499330 T947432 | 9432513 | 19737086 | 1,8832922 0,885907 0,877508 0941258 0764350 0,114003 0122492 0,058742 0,235650 1,5578349 1,0432444 T 1,5093128 1,0432444 1,0432444 1 10432444 1,6115582 15034157 1,528g09r 1,9745066 0,942989 0,057o11 1,6591362 10432444 2,4590194 181°,560 1807 2,3216321 209";711 180 2,9734846 236, it 2,4882177 2,6010793 307°,704 3 399°,098 360! 360° 2,7023806 5o3°,g4a 360° 24349483 29,711 29.42 1,6951551 39,098 39°.5/.53" 91657 91°.39'.4" 29998196 52.14.10" 18979245 143",94 143°.56".31" 17698237 T8098060 1,9878101 1,3903 co2 1.9709138 18403110 19908523 19907676 1,9690868 17958490 | 3,46356:0 Tip47hära | 19432513 | 1,9737086 | 1,8832922 1,9396474 1,9745066 i,8377067 v0007at 0013839 1,3662240 0,232394 0,026975 1,8311633 0677896 0,010f21 1,9658544 0,924388 0,034353 17432812 | 34068130 | 51,5732846 | 1,8829314 0,553708 0,002552 0,374358 | 0,763715 0,057our 0,061246 0,029371 0,117825 15141540 0,36704 0,08505 1L.0,014560 -0,088317 10,91 168$ 1,.0,058741 1,.0,041259 F:0,61070p !.0,38g291 l:.0,063798 1.0,936202 L.:0,881540 L,.0,118460 -0,40370) 0596297 Académie des sciences, L AX, pe 315 OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE, 335 é arc de déviation moyen qu'y subit la division homochro- matique pour laquelle on veut faire le calcul, et a —a est amplitude totale sur laquelle les plans de polarisation se vent répartis. Conséquemment, si l’on se reporte aux dénominations adoptées dans le tableau de la page 296, (a + a)sera $e; et a'— a sera f'e pour la division dont il s’a- Ces nouvelles expressions étant substituées dans F., on a : F=1| 1 — pre) + Loaie sin” (pe — 2)] : 1 2 g'e g'e ns les applications habituelles; car d'abord sin*( pe— « ) a toujours positif, comme étant un carré. Quant à sin p'e, ssera 180°. Or, pour la division violette même, où ÿ'a la aleur la plus grande, cela n’arrivera qu'à des épaisseurs cédant 28 millimètres, limite à laquelle les teintes des nages deviennent trop indécises pour qu'on puisse y appli- quer la règle de Newton avec quelque sûreté; enfin, si l’on 1lait aller jusque-là , le signe de sin s'e ne serait nullement ifficile à reconnaître d’après la valeur de l'arc pe. Par ces otifs, la formule précédente me paraît la plus simple et la s commode que l’on puisse employer dans tous les cas. ‘44. Pour donner un exemple de ce caleul qui puisse servir de type général, je vais l’effectuer en prenant l'épaisseur e, e à 11"*,0/47, et supposant « nul, ce qui place la section icipale du prisme analyseur en coïncidence avec le plan polarisation primitif. Je choisis cette épaisseur, parce que st celle d'un des systèmes dont je rapporterai plus loin bservation détaillée ; et, en outre, c’est aussi un des cas eptionnels où la règle de Newton est manifestement en 336 DES PHÉNOMÈNES ROTATOIRES désaccord avec l'expérience; de sorte qu'il y a un intérêt spécial à rechercher la cause de cette particularité. Tous les détails du calcul numérique qui s'y rapporte sont présen- tés par ordre dans le tableau suivant, avec le petit nombre d'explications nécessaires pour les suivre, les bien compren- dre, et en effectuer de pareils sans difficulté. 45. Ce tableau se compose de deux parties distinctes. Dans la première, on calcule d’abord les arcs de rotation s'e, pe, propres à chaque division chromatique du spectre newto- nien et à leurs annexes, pour l'énaisseur assignée; et l’on en déduit les proportions de leurs diverses lumières, qui en- trent dans l’une ou l’autre image. Ce calcul ne suppose que les lois de déviation des différents rayons simples, et la raison suivant laquelle chaque filet, polarisé en un certain sens, se répartit entre les deux images, dans la position attribuée au prisme analyseur. E Dans la seconde partie du tableau, on extrait de ce pre- mier calcul les seules portions de lumière qui sont com- prises dans le spectre de Newton, et on les combine suivant sa règle, pour en conclure la teinte résultante de chaque image. Je vais discuter successivement les résultats indivi- duels de ces deux opérations. 46. Le mode de répartition des diverses divisions chroma- tiques entre les deux images O, E, qui est donné par le pre- mier calcul, peut se vérifier, non pas avec rigueur, mais avec un certain degré d’approximation, en réfractant simultané- ment ces images par un prisme très-dispersif, et comparant les lumières de réfrangibilités diverses qui abondent ou qui manquent dans les deux spectres ainsi formés. Pour mieux distinguer les parties de ces spectres , il faut insérer dans le RE eee LEE OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 337 trajet du faisceau incident un diaphragme ouvert au centre, suivant une fente étroite que l’on dirige dans le plan de po- larisation primitif (*). Alors, conformément à notre calcul, (*) Cette méthode d’analyser la composition des images O, E, en les ré- fractant à travers un prisme très-dispersif, a été imaginée par MM. Fizeau et Foucault, qui l'ont proposée pour un but plus général, dans le tome XXI de l’Académie des sciences, pages 1155-1158. Je l’emploie ici, d’après eux, comme offrant un genre de vérification qui, bien que très-vague quand on l’applique aux phénomènes rotatoires, n’est cependant pas sans utilité. Pour confirmer ce que j'ai dit, dans l’Introduction, sur les causes de son incertitude dans de pareilles circonstances, prenons, comme exemple, le cas même que nous considérons ici dans le texte, celui où l'épaisseur de la plaque étudiée est 11"",047. D’après notre tableau (A), les plans de polarisation des rayons jaunes y sont dispersés, à leur émergence, dans une amplitude totale p'e, qui embrasse 37° 10° 26”, et le milieu de cette amplitude, qui appartient au plan de polarisation des rayons jaunes moyens, est placé dans l'arc absolu de déviation p,e, lequel se trouve égal à 265°,06, ou 270° — 5°, en négligeant la petite fraction additionnelle. D’a- près cela, pour éteindre, le plus possible, la lumière jaune dans l’image ordinaire O, il ne faudrait pas placer la section principale du prisme ana- lyseur sur la direction 4 —0; mais il faudrait l'amener sur la direction œ—— b°, ce qui la mettrait juste à 90° de distance du milieu de l'arc sur le- quel tout le jaune est réparti. Mais, comme la proportion de lumière jaune qui entre dans l'image O est ici à très-peu près proportionnelle au carré du cosinus de l’angle formé par la section principale du prisme avec l'arc de déviation du jaune moyen, son intensité reste insensible pour l'œil, dans une assez grande amplitude de déviation autour de cette portion spéciale du prisme analyseur : ce qui empêche de tirer, de sa disparition apparente, un indice de direction suffisamment précis pour l’employer à vérifier la loi des rotations. On rendrait le genre d’épreuve plus délicat, si l'on pouvait accroître à volonté l'épaisseur des plaques, parce que les plans de polari- sation de réfrangibilité voisine se trouvant plus séparés les uns des autres 1 XERT 3 338 DES PHÉNOMÈNES ROTATOIRES l'image ordinaire O présente dans son spectre un rouge abondant et long, un peu d’orangé, une absence sensible- ment totale de jaune, et une zone violette faible, plus sen- sible dans sa partie finale la plus réfrangible que dans son commencement. L'image extraordinaire E, au contraire, présente un rouge court, et seulement visible dans la portion qui confine à l’orangé; puis une intermittence sensiblement totale dans le bleu à la fin du vert, suivie d’un violet nota- blement plus abondant que dans O. 47. Maintenant, de tous ces éléments ainsi dispersés, la règle de Newton extrait seulement les divisions intermédiai- res entre les deux extrêmes qu’elle combine ensemble exclu- sivement, pour en conclure les teintes résultantes des deux images; et elle les donne ainsi toutes deux très-päles, comme étant mélées d’une proportion considérable de blanc. Ad- à mesure que l'épaisseur devient plus grande, ils échappent plus promp- tement aux conditions d’une disparition commune : ce qui rend l'amplitude de chaque intermittence moindre, à mesure que leur nombre total aug- mente dans l'étendue d’un même spectre. Mais on verra plus loin que ce nombre est toujours fort restreint, par les conditions physiques qui limitent l'épaisseur des plaques sur lesquelles on peut effectuer ces observations. On pourrait espérer, à la vérité, de diminuer notablement l'amplitude des in- termittences à égale épaisseur, en opérant sur une lumière d’une très-grande intensité, comme la lumière solaire fixée par un héliostat. Mais, en sup- posant qu'on püt la polariser avec assez de rigueur pour des mesures pré- cises, en lui conservant sa vivacité, il serait bien plus sûr d'étudier immé- diatement les lois des rotations sur ses éléments mêmes, après les avoir simultanément réfractés par un prisme très-dispersif, afin d'en former un spectre que l'on polariserait par portions définies par les raies de Fraun- hoffer, comme M. Regnault l’a depuis longtemps proposé. Le. OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 339 mettons pour un moment que ce calcul indique avec une approximation suffisamment exacte l'effet qui devrait être produit sur l'œil par la somme des éléments employés. L'in- tervention additionnelle des deux divisions terminales omises devra nécessairement modifier ce résultat dans l’observa- tion, surtout pour l’image ordinaire O, où la lumière con- tenue dans ces divisions se porte en proportion dominante; et elle devra faire incliner la teinte de cette image vers un rouge bleuâtre, comme en effet on l’observe; mais la modi- fication ainsi opérée ne peut être prévue par ce raisonne- ment que dans un aperçu très-vague; car la règle de Newton étant censée comprendre tous les éléments de la lumière blanche, définis par les longueurs qu'il a assignées à leur accès, et les divisions qui les embrassent étant seules réparties sur le contour total de son cercle chromatique, on ne peut plus combiner avec ces éléments , dans un même calcul, des portions additionnelles de lumière qui leur seraient étran- gères, quoiqu'elles dussent aussi entrer dans la composition du blanc parfait. De là il résulte que la règle de Newton pourra tout au plus donner des indications sensiblement exactes, quand les portions de lumière contenues dans les divisions terminales, qu'il a omises, deviendront négligeables pour l'œil, ou ne se sépareront pas assez de leurs voisines pour qu'il soit nécessaire de les en distinguer. Mais, à parler ri- goureusement, on voit qu'il faut reprendre ce travail de Newton, en ayant égard à toute la lumière réellement visi- ble du spectre, afin d'en déduire une règle analogue à la sienne , qui comprenne les extrêmes, qu'il a omis. 43. 340 DES PHÉNOMÈNES ROTATOIRES VI. De la teinte de passage. Exposé de ses caractères physiques ; et de son usage pour suppléer à l'emploi du verre rouge entre des limites restreintes de déviation. 48. Lorsque les plaques douées de pouvoir rotatoire sont limitées à des épaisseurs telles, que les plans de polarisation appartenant à toutes les divisions du spectre sont répartis dans une amplitude angulaire qui n'excède pas 90°, si l’on dirige successivement la section principale du prisme analy- seur sur les diverses directions comprises dans cette ampli- tude , les teintes des images extraordinaires E, qui s’obser- vent aux diverses épaisseurs quand la lumière totale transmise est blanche, présentent des relations spéciales, qui peuvent directement se prévoir d’après le mode général de l’action de ce prisme; et alors la loi de rotation que suivent les rayons de réfrangibilités diversesse décèle dans ces phénomènes avec une évidence manifeste, sans recourir à la règle de Newton pour la composition des couleurs. C’est ce que je vais ex- poser. 49. Afin de rendre les considérations plus faciles, je sup- pose d'abord le spectre partagé en divisions chromatiques infiniment petites, contenant chacune une quantité z de lu- mière propre; et je désigne généralement par & l’arc de dé- viation moyen dans lequel toute cette lumière se trouve polarisée , après avoir traversé une épaisseur de 1"; en sorte que l’arc analogue devienne se pour l'épaisseur e. Ceci con- venu, puisqu'il y a rotation, quelle qu’en soit la loi, lors- OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 341 qu'un faisceau blanc, primitivement polarisé en un sens unique, aura traversé l'épaisseur e de la substance active, tous les rayons simples dont il se compose auront leurs plans de polarisation déviés de quantités inégales, qui les amèneront sur des directions diverses, com prises entre cer- taines limites angulaires extrêmes, que je désigne par be, pe, en les rangeant par ordre de grandeur. Quelles que puissent être les réfrangibilités et les caractères colorifiques des élé- ments lumineux, C,, C,, qui répondent à ces deux limites, il est évident que, si l’on amène la section principale du prisme sur la direction angulaire 4,e, l’image extraordinaire E ne contiendra point l'élément C, ; tandis que tout autre élé- ment, qui aura son plan de polarisation sur la direction ce, y entrera pour la proportion £ sin*(o—,,)e. Ainsi l'élément C,, qui est polarisé suivant la direction extrême €; ÿ entrera en plus grande proportion que tous les autres. Maintenant. si la section principale du prisme est amenée dans un arc de déviation «, plus grand que pe et moindre que pe, l’élé- ment C, commencera à entrer dans l’image E pour la pro- portion :, sin°{«—p,e} ; mais tous les autres y entreront pour des proportions ; sin’ {9e— 4}, qui seront moindres que pré- cédemment, le coefficient de z étant devenu plus faible pour chacun d'eux. La section principale du prisme continuant ainsi à s'approcher toujours de la direction extrême pe , Cha- que élément simple disparaîtra successivement de l’image E, tandis que tous les autres y entreront proportionnellement au carré du sinus de leur écart actuel. Entin, quand l'arc de dé- viation « du prisme sera devenu égal à 4e, ce sera l'élément extrême C, qui disparaîtra de E; mais tous les autres y entre- ront pour des proportions plus grandes qu'ils ne le faisaient à 342 DES PHÉNOMÈNES ROTATOIRES des déviations du prisme immédiatement moindres. Lesteintes de l’image extraordinaire E parcourront donc ainsi une série de nuances, où chacun des éléments colorifiques du spectre manquera et dominera tour à tour, en se succédant les uns aux autres par des phases continues d’accroissement et de décroissement de leur intensité propre. Or, puisque ces alter- natives de minimum et de maximum d'intensité, que chaque élément lumineux fournit à l’image totale E, s’opèrent quand la section principale du prisme analyseur coïncide avec la di- rection de polarisation de cet élément, ou s’en trouve la plus écartée, leur succession, dans l'amplitude d'écart assignée ici aux plans de polarisation extrêmes, doit être éminemment propre à faire reconnaître la loi de rotation progressive, sui- vant laquelle ces plans sont dispersés par la substance active à travers laquelle on les observe. Sans doute la loi des rota- tions est encore empreinte dans les teintes des images qui se forment à des épaisseurs plus grandes, où les plans de polarisation se trouvent dispersés dans des amplitudes quel- conques; mais la limite de 90° est nécessaire pour que les carrés des sinus qui règlent la proportion d'intensité four- nie par chaque élément lumineux du spectre, suivent une progression continue d’accroissement ou de diminution , quand la section principale du prisme analyseur parcourt l'arc de dispersion qui les embrasse tous. C’est pour cela que je me suis restreint d'abord à cette condition. 50. Les phénomènes ainsi opérés offrent des indications encore plus significatives, quand on les compare à des états de dispersion divers, compris dans la restriction précédente d'amplitude, en faisant croître l'arc de déviation du prisme proportionnellement aux épaisseurs , comme les ares de dé- OPÉRES DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 343 viation des rayons. Pour donner à x ce caractère, je le remplace par (-)e, (e) désignant la valeur quelconque de Ja déviation * pour une épaisseur de 1%, dans la condition de Proportionnalité supposée. Alors, si l'on conçoit toujours le spectre partagé en subdivisions chromatiques infiniment nombreuses , dont l'intensité Propre et variable soit ;, cha- cun des éléments lumineux qui entrera dans l'image extraor- dinaire E, l'épaisseur étant €; aura pour expression géné- rale F—; sin” {p—(p)| e> Si la section principale du prisme analyseur devait coïncider avec la direction de la polarisation primitive, (e) serait nul, et l’on retomberait sur l'expression de F., que nous avons formée d’abord, Pour ce cas spécial, page 303. Prenons F, sous cette nouvelle forme. La grandeur de l'arc qui s'y trouve compris sous le signe sinus dépend de Ja différence be — (p)e, c'est-à-dire de l'écart angulaire que l’on donne à la section Principale du prisme analyseur autour _ du plan de polarisation actuel de chaque élément lumineux. . Admettons que l'épaisseur e et l'arc variable (p) soient l’un … ct l’autre assez restreints Pour que, dans l'évaluation de _ tous les éléments F., le carré de l'arc le—(e)e] puisse, sans À qu'il en résulte une erreur appréciable à l'œil, être supposé » proportionnel au carré de son sinus ; nous examinerons plus . tard quelle limite d'épaisseur cette Supposition nécessite, On aura alors , dans tous les cas pareils : | Fi TO he. R désignant le rayon du cercle plié en arc. 544 DES PHÉNOMEÈNES ROTATOIRES 51. Pour analyser les résultats de cette expression, choisis- sons une certaine épaisseur (e), dont la petitesse satisfasse aux conditions de restrictions qu’elle suppose; puis attribuons à l'arc (4) une certaine valeur fixe, qui déterminera la position que nous voulons donner au prisme analyseur, et qui soit telle qué la différence ? — (4 ), calculée pour tous les éléments lumineux du spectre, complète, par sa petitesse, l'accomplis- sement de ces mêmes restrictions. Alors l'expression de F, ne contiendra plus de variables que l'intensité z et l’are de dévia- tion millimétrique :, propres à chaque élément lumineux auquel on voudra l'appliquer. Quand cette évaluation aura été faite pour tous les éléments qui composent le spectre, la somme des valeurs de F, se composera, pour l'œil, en une certaine teinte, qui sera celle de l’image extraordinaire E pour les valeurs simultanées de (e) et de (ç) que l'on aura adoptées. Maintenant supposez qu'on laisse (+) constant, mais que l’on prenne une autre épaisseur e, pour laquelle le pro- duit {p—(#)} e', appliqué à tous les éléments du spectre, reste encore dans les limites de petitesse nécessaires à la suffisance physique de l’approximation. Les valeurs deF,, calculées avec ces nouvelles données, exprimeront des in- tensités absolues autres que les précédentes; mais elles se- ront toutes, entre elles, dans un même rapport que précé- demment, puisque le nouveau facteur e’ leur sera commun, comme l’ancien (e) l'était aux premiers. La teinte de l’image E, qui résultera de leur ensemble, sera donc la même ; elle n'aura varié que dans son intensité, c'est-à-dire, dans la quantité totale de lumière qui la compose, laquelle sera devenue plus grande ou moindre, proportionnellement aux . carrés des épaisseurs. La nature de cette teinte changera, si OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 345 l'on donne à (4) une autre valeur, celle de e restant la méme, c’est-à-dire, si l’on transporte la section principale du prisme analyseur sur quelque autre direction, relativement au Sys- tème des plans de polarisation dispersés. Mais, pourvu que ce transport ne sorte pas des limites d'amplitude entre lesquel- les l'expression approchée de F est applicable, la nouvelle teinte donnée à l’image E, par cette nouvelle valeur de (e), sera encore d’une nature constante dans toutes les épaisseurs que l’approximation embrassera; et elle n'y variera non plus que dans la quantité de lumière qui la composera, laquelle sera proportionnelle au carré de ces épaisseurs. 52. Ces résultats ont lieu dans toutes les lois de rotation, quel que soit l’ordre suivant lequel elles dispersent les plans de polarisation des rayons de réfrangibilités diverses, pourvu que l'arc de déviation de ces plans, propre à chaque rayon simple, croisse proportionnellement à l'épaisseur de la subs- tance active qu'ils traversent ; ce qui est une propriété géné- rale de ce genre de phénomènes, quand le milieu ainsi tra- versé reste constant dans sa composition chimique et dans sa température. Aussi la constance de la teinte E, correspon- dante à une même valeur de (+), s’observe-t-elle toujours avec la plus entière évidence, depuis les plus petites épaisseurs de chaque substance active, jusqu'à un certain terme où l'approximation cesse d'être applicable, pourvu que le mou- vement de transport donné au prisme analyseur n'excède pas non plus les bornes d'amplitude qu’elle*exige. Quand on sort de ces limites d'épaisseur, la teinte de l’image E com- mence à ne plus se montrer la même pour une même valeur de (+), c’est-à-dire, pour des arcs de déviation du prisme proportionnels aux épaisseurs considérées ; et cette muta- REX 44 346 | DES PHÉNOMÈNES ROTATOIRES tion, qui est progressive, fait connaître que l'on est sorti des restrictions exigées. 53. La constance de ja teinte E, qui s’observe à travers les très-petites épaisseurs de cristal de roche, quand la sec- tion principale du prisme analyseur coïneide avec la direc- tion de la polarisation primitive, n'est qu'une application particulière de ces résultats généraux. C’est le cas de (4) nul. La teinte blanc bleuûtre, ou bleu blanchätre, que présente alors l'image extraordinaire E, résulte de ce que, dans ce genre de plaques, les déviations croissant avec la réfrangibi- lité, les éléments lumineux les plus réfrangibles entrent en proportion dominante dans cette image, lorsque le prisme est ainsi placé; mais si on le tourne graduellement, dans le sens de la rotation exercée par la plaque, ce bleu se fonce d’abord, parce que les rayons les moins réfrangibles, ayant leurs plans de polarisation plus déviés que les autres, s’affai- blissent proportionnellement davantage dans l’image extra- ordinaire, à mesure que la section principale du prisme se rapproche de l’ensemble de ces plans. Si l’on continue à tour- ner le prisme dans le même sens, ce bleu foncé passe à l’in- digo, puis se change en violet, lorsque les carrés des sinus de {5 —(b)le, relatifs aux rayons moins réfrangibles, sont tous devenus comparativement assez petits pour que les éléments violets, fournissant presque seuls une valeur de ce carré, encore sensible, se trouvent dominer dans l’image E. Mais, en prolongeant le mouvement du prisme, ce violet s'affaiblit aussi, à mesure que la section principale se rap- proche de son plan de polarisation propre; et il finit par disparaître à son tour, en devenant insensible, un peu avant qu'elle ait atteint ce plan. Alors si la plaque est très-mince, et GR SE CN RÉ RE ESEErS es OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 347 que l’on opère sur une lumière peu intense, la section prin- cipale du prisme pourra n'avoir pas encore assez dépassé les déviations des rayons les moins réfrangibles, pour qu'ils four- nissent à l’image Eune quantité de lumière appréciable à l'œil, ce qui la fera paraître nulle en totalité ; mais, à un écart un peu plus grand, ou, pour le même écart, avec des épaisseurs un peu plus fortes , ces rayons commenceront à rentrer dans E en quantité sensible, leur retour s'y manifestant d’abord par une nuance rouge, qui succédera au violet précédent. Il y aura donc généralement, dans ce passage du violet au rouge, une position du prisme pour laquelle l’image E sera moins abondante en lumière, ou, à parler exactement, paraîtra plus sombre que dans toute autre; et ce minimum d’illumi- nation, très-discernable jusqu'à des épaisseurs de plusieurs millimètres, s'y montre, à de très-petites variations près, lorsque la valeur de (?) est égale à 24°, ce qui amène la sec- tion principale du prisme sur la direction de polarisation des rayons jaunes moyens (*). J'avais constaté ce résultat dès mes —————…—…——…——— (*) Les faibles variations que j'indique ici sont les conséquences inévi- tables de toutes les petites causes: d’erreur qui influent sur les résultats observés. On a d'abord à craindre un léger défaut dans la coupe de la plaque, qui ne serait pas toujours rigoureusement perpendiculaire à son axe, et aussi quelque petite déviation dans la perpendicularité d'incidence que l’on veut lui donner. Il est en outre presque impossible qu’elle ne soit pas tantssoit peu prismatique; et le moindre défaut dans ces trois conditions aurait des effets si sensibles, que ce n’est déjà qu'avec les plus grands soins ‘qu'on peut suffisamment les atténuer. A cela il faut ajouter les petites erreurs que l'on peut commettre dans l'appréciation du point zéro de l’in- dex d’où l’on compte les déviations, et dans l'observation par laquelle on les détermine. Enfin, la mesure même de l’épaisseur, quoique faite au 44. 348 DES PHÉNOMÈNES ROTATOIRES premières expériences de 1813, lorsque je ne connaissais pas encore les vitesses de rotation propres aux divers rayons du sphéromètre, comporte encore quelque inexactitude d'appréciation. La plupart de ces inconvénients sont beaucoup moins à craindre quand on observe les déviations à travers des colonnes liquides ; mais, avec des plaques solides , telles que celles de cristal de roche, ils ne peuvent jamais être complétement évités. Toutefois , pour montrer combien l'appréciation physique du minimum d'intensité de l’image E comporte de justesse, même pour ces plaques, lorsqu'elles sont très-minces, je rapporterai un exemple où elle m'a décelé une erreur que j'avais commise dans la mesure de l'épaisseur, ou plutôt dans le calcul numérique par lequel je l’avais évaluée : il est relatif à une plaque dont j'ai fait usage dans le tome XXI des Comptes rendus, page 467 ; elle y est désignée sous le n° 3 dans le tableau inséré en tête de cette page. Son épaisseur y est marquée comme étant 0"”,592, et l’on y a joint la déviation à l'œil nu + 13°, à travers le verre rouge + 9°,55. Ces indica- tions ne sont pas concordantes; car l'épaisseur 0"",592 étant multipliée par 24, donne, pour la première de ces déviations, 14°,21, et les + de celle-ci sont pour la seconde 9°,69. Les déviations observées étaient donc toutes deux plus faibles que ne les indiquait le calcul : elles l'étaient même probablement un peu plus encore que ne le présentent les nombres ici con- signés; car, m'étant aperçu de la discordance, je recommencai la mesure des deux déviations, et je dus être naturellement porté à vouloir les rap- procher des évaluations que je savais être conformes aux règles générales. Je ne poussai pas alors plus loin l’examen de cette anomalie, qui était sans importance pour l'application que je voulais faire. Mais aujourd'hui ayant repris la même plaque, pour le but spécial d'y observer le minimum d’in- tensité de E, il me devint manifeste que j'avais commis quelque erreur; car l'incidence étant rigoureusement perpendiculaire, et le zéro de l'appareil parfaitement réglé, je trouvais indubitablement ce minimum dans un arc de déviation un peu moindre que 12°, où il présentait un violet bleuâtre, presque nul en intensité; tandis que, dans l'arc de 14°, l'image E prenait une teinte rouge jaunâtre très-décidée et bien plus abondante, la- OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 349 spectre, et par conséquent sans savoir qu'il appartint spé- cialement à ceux-là. On aurait dû cependant le prévoir, d’a- près la supériorité de leur faculté illuminante : car ici, comme dans les anneaux de Newton, le minimum d'intensité appa- rente de l'image E devait naturellement coïncider avec leur absence ; mais je n’ai apercu cette relation que beaucoup plus tard. Elle se manifeste par le passage presque soudain de E du violet au rouge, ou plutôt du bleu violacé au rouge jau- nâtre, à des épaisseurs notablement plus fortes que celles où quelle, par ce double caractère, attestait que le point de transition du minimum était dépassé. Ainsi averti, je compris qu'il devait s’être glissé une faute dans l'évaluation de l’épaisseur. Or, en effet, en recourant à mon registre, sur lequel les détails de la mesure étaient consignés, je trouvai qu'en convertissant les parties du sphéromètre en parties du millimètre, avais fait une faute de report, et qu'il fallait écrire 0"",49238, au lieu de 0"",59238, que j'avais supposé par méprise. Alors tout fut éclairci. En effet, cette nouvelle valeur 0"",49238 étant multipliée par 24°, déviation du jaune moyen à travers une épaisseur de 1°”, donne, pour la déviation actuelle de ce jaune, par conséquent du minimum d'intensité de E, 11°,817: ce qui est d'accord avec l'observation attentivement réitérée, laquelle le montre à un peu moins de 12°; et les 4 de ce nombre font la déviation à travers le verre rouge 9°,06, un peu plus faible que celle que j'avais admise, par une disposition d’exagération très-naturelle. Ces deux résultats se trouvent donc maintenant concorder avec les évaluations générales. Le premier est toutefois de beaucoup le plus facile à obtenir avec sûreté par l'observation, à cause de l’excessive délicatesse que la fixation directe du minimum d'intensité de E offre à ces petites épaisseurs, où il est presque évanouissant. Je n’ai pas cru inutile d'entrer dans ces détails, parce que, en rectifiant une erreur que j'avais commise, ils m'offraient l’occasion de montrer le degré de sûreté que ces observations peuvent atteindre, quand elles sont faites avec tous les soins qu’on y doit apporter. 350 DES PHÉNOMÈNES ROTATOIRES l'on peut apprécier dans l'image un minimum certain d'in- tensité. Ce caractère de transition, que j'ai confirmé par un grand nombre d'expériences, est si délicat, comme si précis, qu'on peut l’employer jusqu'à des épaisseurs de six ou sept millimètres, pour obtenir des déviations proportionnelles à ces épaisseurs, presque aussi exactement que si l’on obser- vait à travers le verre rouge, ce qui est infiniment plus com- mode. Alors ces déviations étant propres aux rayons jaunes moyens, on les introduit comme telles dans les évaluations du pouvoir rotatoire; ou bien on les convertit en dévia- tions propres au verre rouge, en les multipliant par le fac- teur constant #. Ce mode de détermination n’est évidemment applicable qu'aux milieux actifs, qui deviennent les plans de polarisation sensiblement, suivant la même loi que le cristal de roche, c’est-à-dire, exactement ou à très-peu près en raison réciproque du carré des accès des éléments lumineux. Mais cette loi se trouve être si approximativement commune à la très-grande majorité des substances douées du pouvoir rota- toire , que le procédé d'observation qui la suppose peut être employé dans le plus grand nombre des cas. D'ailleurs, l'ex- périence même montre tout de suite s’il est légitimement applicable; car il suffit d'examiner si, aux diverses épais- seurs du milieu que l’on veut étudier, les teintes des images O, E sont les mêmes que dans le cristal de roche, et se for- ment suivant les mêmes lois. Quand cela a lieu, les rotations simultanées de tous les rayons peuvent être compensées par l'interposition d’une plaque de cristal de roche d’une épais- seur convenable, ayant un pouvoir rotatoire de sens con- traire, ce qui ramène à la fois tous les rayons transmis à la direction de polarisation primitive qui leur était commune, RER LA Et D EE Er e OPÉRES DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 351 On peut effectuer aisément cette épreuve au moyen du com- pensateur de cristal de roche de M. Soleil; et ses indications sonttoujours suffisantes pour les expériences habituelles, où l'on n’a pas précisément pour but de déterminer les lois des rotations avec la dernière rigueur dans le milieu que l'on étudie ; mais alors on peut très-bien, sans son secours, cons- tater la similitude sensiblement exacte de ces lois à celles du * cristal de roche, d’après l'identité apparente de nature et de succession des teintes des images O, E; ou, mieux encore, en mesurant à travers une certaine épaisseur l’are de dévia- tion du prisme, qui fait passer l’image E du bleu violacé au rouge jaunâtre; puis, voyant si cet arc est les ? de celui qui, dans les observations faites avec le verre rouge sur la même épaisseur , amène cette image, devenue simple, à son mini- mum absolu d'intensité. En effet, dans le cristal de roche, nous avons trouvé que l’arc de déviation, qui s’observe à tra- vers le verre rouge, est 18°,414, pour une épaisseur de 1°. Or, les © de ce nombre donnent 24°,017, ce qui, d’après le tableau de la page 296, reproduit l'arc de déviation des rayons jaunes moyens pour la même épaisseur, entre des limites de différence dont l'observation ne saurait répondre. Ce rap- port subsistera donc, à toute autre épaisseur, entre les dévia- tions propres aux mêmes réfrangibilités. Ainsi, on devra le retrouver pour elles dans tous les milieux actifs, où les ro- tations suivront les mêmes lois que dans le cristal de roche, avec d’autres intensités absolues quelconques. 54. Ces phénomènes de transition et de coloration propres aux images O, E, qui se forment dans tous les cas pareils, lorsque la section principale du prisme analyseur coïncide avec le plan de polarisation actuel des rayons jaunes moyens. ’ 352 DES PHÉNOMÈNES ROTATOIRES sont si caractéristiques de la loi des rotations, et si utiles par leur usage , que je crois essentiel d’en discuter spéciale- ment les détails et les phases par le calcul. Je le ferai d’abord pour les épaisseurs moindres que 1°", en me servant de la formule approximative, que j'approprierai aux grandes di- visions du spectre newtonien et à ses annexes. J'effectuerai ensuite le calcul pour la limite même de 1°" par la formule exacte; puis j'appliquerai aussi cette formule à diverses pha- ses d’épaisseurs plus grandes, qui embrasseront toutes celles où le caractère de transition de l'image E peut être employé avec une sûreté suffisante , comme indice de la déviation ac- tuelle des rayons jaunes moyens. Pour cela, je reprends l’expression exacte de F, en b etp', que nous avons formée page 335; j'y remplace seulement x par (b)e, pour fixer la position du prisme analyseur con- formément à la notation que nous avons tout à l'heure in- troduite, et en lui conservant son application aux grandes divisions chromatiques du spectre newtonien, j'ai pour cha- cune de ces divisions, dont I désigne la quantité de lumière propre : fr R sin p'e eee Rsinpe . , rte Ie—(@ ei |: Je suppose d'abord que l'épaisseur e, et l'arc os — (4), sont maintenus, l’un et l’autre, dans les limites de petitesse con- venables pour qu'on puisse remplacer, sans erreur appré- : sie lp — (pre mr. ciable, sin°|ç9—(e)e} par ——ÿ}—. D'après ce que nous avons reconnu dans la page 298, cette condition sera rem- plie si l'arc {p—()|e n'excède pas 25°. Maintenant, si nous voulons faire (s)—p , la plus grande valeur de » — (4), qui sera OPÉRES DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 353 ps —p;, Se trouvera, par le tableau de la page 296, égale à 21°,624. Conséquemment l’approximation pourra s’employer à toutes les épaisseurs e moindres que 1°”, et même à celle qui atteindrait cette limite. Ce fait se verra, tout à l'heure, matériellement confirmé. Avec ces restrictions, l'arc L'e, propre à chacune des divi- sions newtoniennes, devient assez petit pour que son sinus puisse être développé en série convergente, comme il suit : Ag D A CPR A , SRE ER —S p Too "CC; et de là on tire sinp'e 1 pe rio R——— 1—5 + — ——...etc. g'e 1 6 ‘wo R EE La plus grande valeur de !' est relative à la division violette. Or, si l’on suppose e égal à 1,le terme en, *devient—0,002084; et, en sy bornant, l'évaluation approchée qu’on obtient ne diffère de la rigoureuse que par une unité sur la sixième dé- cimale de ce nombre. C'est ce qu’on peut voir en prenant celle-ci dans le tableau de la page 293. Il suffira donc d’arré- ter la série à ce terme; et alors on devra le négliger tout à fait dans la dernière partie de la formule, où il affecterait, comme multiplicateur, une quantité, qui est déjà supposée très- petite, du même ordre. On aura ainsi, dans cette condition d’approximation : FE 1|e" + (—() fe expression qui maintenant se trouvera applicable à toutes les divisions du spectre newtonien. 55. Cette préparation faite, je donne à () la valeur = 23°,99385, qui, d’après le tableau dela page 296, exprime EOXX: 45 354 DES PHÉNOMÈNES ROTATOIRES la déviation millimétrique des rayons jaunes moyens ; puis, prenant dans ce même tableau les valeurs simultanées de 4 et de &’ qui appartiennent à chacune des divisions du spectre, je calcule successivement les valeurs qui en résultent pour le coefficient de e* dans l'expression de F,, sans omettre la division jaune, pour laquelle ce coefficient se réduit à son terme en £”. J'obtiens ainsi l'ensemble contenu dans le tableau suivant : ÉLÉMENTS CHROMATIQUES DE L'IMAGE EXTRAORDINAIRE E, . L : . x qui s'observent à travers les plaques de cristal de roche perpendiculaires à l'axe, dont l'épaisseur e est égale ou inférieure à 1", lorsque la section principale du prisme analyseur est dirigée dans l'arc de déviation actuel des rayons jaunes moyens, FO) — I,e*0,0175187 F9 — I,e°0,0078702 FO — L,e°0,0021489 F9 — Ie’0,0002875 Spectre de Newton. | F9 —ÎTe0,0052745 F9 — I,e°0,0215789 Indigo. F — Le’0,0450906 Violet F® — Le’0,0879472 Division terminale violette. .....,......| F“—T,e0,1426778 56. Je préparerai la discussion de ces éléments par deux remarques essentielles. La première, c’est que leur applica- tion à toutes les épaisseurs moindres que 1°" sera. très-suffi- samment exacte; Car, en comparant leurs valeurs aux éva- luations rigoureuses que je rapporterai tout à l'heure pour LA Le OPÉRES DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 355 cette limite même, les différences qu'on y découvre sont si petites , que l’œil ne pourrait pas les apprécier, en opérant sur la lumière des nuées polarisée par réflexion sur une glace noire, comme je le suppose toujours. La seconde remarque, c'est que, dans l'appréciation de la teinte résultante E, produite par l’ensemble de tous ces éléments, les quantités de lumière propre fournies par les deux divisions rouges, quoique numériquement exprimées par des fractions très- petites de leur intensité totale, ne peuvent pas être négligées, parce que la vivacité de leur faculté illuminante leur donne une influence au moins égale, simon supérieure à celle des quantités de lumière provenant des divisions les plus réfran- gibles , quoique ces dernières soient exprimées par des frac- tions beaucoup plus fortes de l'intensité totale de ces divi- sions. Cela deviendra tout à l'heure manifeste d’après l’ex- périence même. 57. Considérant donc les expressions de tous ces éléments chromatiques dans leur entière généralité, on reconnait d’abord manifestement que la partie moyenne du spectre, comprenant les rayons oranges, jaunes et verts, sera de beaucoup la moins abondante dans l’image totale, et que la petitesse relative de ses proportions devra l'y réndre insen- sible ou à peine sensible, comparativement aux divisions extrémes. Or, d’après la pratique universelle des coloristes. qui est confirmée en ce point par les expériences de Newton sur les mélanges des couleurs simples, les quantités de lu- mière rouge et bleue de ces divisions, étant réunies, formeront pour l’œil un violet, lequel, joint aux fractions propres du violet prismatique, devra donner à l’image E une nuance spé- cialement violette. C’est ce qui est exactement confirmé par 45. 356 DES PHÉNOMÈNES ROTATOIRES l'observation pour toutes les petites épaisseurs auxquelles notre approximation actuelle s'applique. On ne peut aper- cevoir, entre ces images, que ‘des dissemblances d'intensité, celles-ci croissant rapidement avec les valeurs de e, ainsi que notre formule l'indique. La présence du violet artificiel, qui se forme par le mélange du rouge avec le bleu et l'indigo dans cette image, se démontre en la décomposant par le prisme. Car, par exemple, à l'épaisseur 0°",492, ce rouge fourni par la lumière des nuées est parfaitement dis- cernable pour l'œil plongé dans l'obscurité. Cependant, à cette épaisseur , le coefficient numérique de [, est réduit à 0,004210, et celui de I, est réduit à 0,001897 ; de sorte que ce sont de si petites fractions des deux divisions rouges que l'on apprécie dans le faisceau réfléchi et restreint par des diaphragmes, dont l’ouverture, dans mon appareil, est seu- lement de 8". Pour définir plus précisément ces conditions de visibilité, j'ai encore limité le diaphragme antérieur par l'interposition d’une fente métallique ayant seulement 1°" de diamètre : alors le faisceau polarisé était un rectangle ayant 1"" de base et 8"" de hauteur. Je l'ai transmis à tra- vers une plaque dont l'épaisseur était 1°°,118, ce qui , à rai- son de 24° pour 1", donnait 26°,832 pour l'arc de dévia- tion des rayons jaunes moyens. J'ai donc amené sur cette direction la section principale du prisme analyseur, puis j'ai décomposé simultanément les deux images par un autre prisme à réfraction simple, très-dispersif. Le spectre de E s'est montré tel que nos formules l'indiquent. Le rouge, le violet et le bleu y étaient surtoutsensibles, le vert beaucoup moins , quoique perceptible encore; mais il y avait, à la place OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 357 du jaune , une intermittence complète qui s’étendait sensible- ment à l’orangé. 58. La teinte de l’image ordinaire O, qui accompagne E, se conclut de celle-ci, par la condition que tous ses éléments sont complémentaires de leurs analogues pour chacune des _ divisions chromatiques auxquelles ils appartiennent ; et l’on rend la nature de cette teinte également manifeste, en lui appliquant un artifice de décomposition pareil à celui dont nous avons fait usage dans la page 321. Pour cela, je consi- dère que tous les éléments de F. ont une expression de cette forme : F—lIce, ce qui donne F,=l}1 — ce}. e est un coefficient numérique différent pour chacun d'eux, et dont la plus grande valeur appartient à la division vio- lette terminale. Donc, si nous représentons ce dernier par ©, l'expression de chaque élément F, pourra s'écrire de la . manière suivante : EF —tli—ce+(c—ce)=1l|i—ce) + I(c, — ce. Le coefficient 1 — c,.e* sera évidemment positif, puisque notre approximation suppose e généralement moindre que 1; et le facteur (c,,—c)e’ sera aussi positif, puisque c,, surpasse toutes les autres valeurs particulières de c. En effectuant les soustractions qu’exige la formation de ce second facteur , la somme des éléments chromatiques qui composent l'image ordinaire O sera telle qu'il suit : HIHI HI LL HI, ] | 0,1251597 +1,:0,13480764-1,.0,1405289 4-1. 0,1423903 +-1,.0,18740334-1,.0,12109894-1,.0,0975872 +1, 0,0547306 |e* 1—e?,0,1426778 | 358 DES PHÉNOMEÈNES ROTATOIRES ou encore [1 HLHL HI HL EL HILL +1, | {r—e%.0,1426778 | +[141 nee nn MLD 15 0,0547306 +[1, 0,0704291 -1,.0,0800770 +17 -0,0857983 4-1; -0,0876597 + 1,.0,0826727 4 I, .0,0663683 +- 1. zo,0628566 2 La première ligne formera un blanc parfait très-abondant, à cause de la petitesse du terme en e’, qui se soustrait de l’unité dans le facteur variable. La seconde composera aussi une petite quantité de blanc, auquel il ne manquera que la proportion correspondante de la division terminale violette, laquelle, n'ayant par elle-même qu’une faculté illuminante très-faible, ne pourra pas y produire un défaut sensible de blancheur par son absence. La coloration de O ne pourra donc provenir que des termes de la troisième ligne. Or, celle- ci contenant encore presque toutes les sortes d'éléments prismatiques , on peut, par un artifice pareil à celui dont nous venons de faire usage, la décomposer en systèmes par- tiels d’influences colorifiques très-inégales, parmi lesquels il deviendra plus facile de discerner celui qui devra spéciale- ment dominer dans leur ensemble. Pour cela, je l’écris sous la forme suivante : [1,4 LL HI HS HA, ]o,0428566 e° HILL HT Joo236rrret 1,.0,0040608 1-1 .0,0137087 4-1 .0,0194300 H-1..0,0212914 1 .0,0163044 |e° Had Pie) 0 El v La première de ces nouvelles lignes exprime un blanc d’où l’on a seulement ôté les rayons violets : ce sera donc un blanc tant soit peu jaunâtre. La deuxième exprime encore un blanc d’où l’on a ôté le violet et l’indigo : ce sera done un blanc un peu plus jaunâtre que le premier, Maintenant, dans la troisième ligne il n’y a plus ni violet, ni indigo, ni bleu ; le able des intervalles angulsires compris dans les plaques de cristal de roche perpeudieulaires, à l'axe, eutre le plan de polarisation des rayons jaunes moyens/et les plans de polarisation des OS autres divisions chromatiques du spectre aux épaisseurs de 1, 2, 4, 6, 8 millimètres. ARS je ii le EPAISSEUR ÉPAISSEUR ÉPAISSEUR ÉPAISSEUR i DÉSIGNATION DÉS DIVISIONS CHROMATIQUES- SI Gun, gum la À; e e x Ur | Division terminale rouge, . 60.28. « S rouge.. t orange. aune, I |! = Spectre de Newton { vert. l bleu indigo. violet,. Division terminale violette, Valeurs de gf ou ole Académie des sciences, 1. XX, p. 399, Hassan D DÉSIGNATION des DIVISIONS CHROMATIQUES. Division terminale rouge... rouge... orange. . jaune. .. dpectre de Newton | vert... , bleu, ... Indigo... violet. Diision terminale violette, . _ Jableau des élements clhiromatie ques qui composeut l'image ordinaire O , et l'image extraordinaire E, aux épaisseurs de 1, 2, 4, 6, 8 millimètres, lorsque li section principale du prisie analyseur est dirigée suivant l'are de déviation correspondant du jaune moyen ÉLÉMENTS CHROMATIQUES DES DEUX IMAGES. Epaisseur e Image ordivaire [Image extraordiuairel 0 E 1:.0,982609 | [,.0,017391 L .0,992166 | [, .0,007834 1,.0,997859 | [L,.o,002141 1, .0,000287 L; .0,999739 L .0,005273 1, .0,994727 L.0,978581 | L, +0,021419 L:.0,955604 | L, .0,044396 1,.0,914718 | I,.0,085282 L:.0,864037 | L..0,135963 ELEMENTS CHROMATIQUES DES DEUX IMAGES Epaisseur e = 2 lnage ordivaire |finage extraordinaire 0 FE r-0,931582 .0,068418 -0,968875 -0,031120 -0,091439 -0,008561 -0,998851 -0,001149 :0,979105 -0,020895 .0,916372 .0,083628 -0,820448 -0,169552 .0,689263 -0,310747 ..0,540105 ..0,409890 ELEMENTS CHROMATIQUES DES DEUX IMAGES Epaisseur e = 4"". Image ordiuaire [Image extraordinaire o k -0,745547 -0,254433 .0,879839 .0,120165 .0,9660075 .0,033925 -0,99540g -0,004991 .0,918734 -0,081260 -0,695947 | le -0,304053 .0,438965 .0,261035 .0,157380 .0,842620 :.0,902498 :.0,007902 ÉLÈME > CHROMATIQUES DES DEUX IMAGES, Épaisseur 6 — Gr“ Image ordiuaire ::0,498908 -0,745094 -0,924814 -0,989715 .0,825603 .0,418284 .0,094681 1,.0,072533 1,.0,410350 lwage extraordinaire E :.0,506092 -0,254906 -0,075186 -0,010285 -0:174307 ,-0,981716 -0,905319 .0,927467 :.0,289650 ELEMENTS CHROMATIQUES | | DES DEUX IMAGES | Épaisseur e = 8m, | linage ordinaire |Imageextraordinaire L:.0,246688 .0,753312 1,.0,588031 -0,411969 | 1, .0,869579 | [,.0,13o421 1, .0,981806 -0,018194 -0,709898 | I, .0,29o0102 .0,181123 , .0,818877 -0,030201 | 1 .0,969790 .0,601898 | [,.0,498102 -0,970500 | [,.0,029500 Académie des sciences, L XX, p OPÉRES DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 359 ortionnellement au carré de ces épaisseurs. Mais elle pourra bien n'être appréciable pour l'œil dans aucune de ses phases … successives, tant à cause de sa faiblesse propre qu’à cause de a grande quantité de lumière blanche qui s’y mêle, et qu'ex- priment les deux premières lignes que nous avions d’abord 1 éparées. Tout cela est exactement conforme à l'expérience; car, en opérant sur la lumière blanche des nuées, polarisée par réflexion sur une glace noire, la coloration, de l’image O ne devient perceptible , même par soupçon, que vers l’épais- seur de 2"*, ce qui dépasse les limites de notre approxima- tion actuelle; et sa nuance est en effet un jaune verdâtre quand on commence à pouvoir l’apprécier. “ 59: Cherchons maintenant à prévoir les variations ulté- rieures qui devront se produire dans les teintes des deux açant toujours la section principale du prisme analyseur l'arc de déviation actuel (4e des rayons jaunes moyens. Cela exige que l’on donne à (4), dans notre formule exacte de, a page 352, la valeur constante 23°,99385, ou approximative- 360 DES PHÉNOMÈNES ROTATOIRES ment 24°, qui exprime l’arc de déviation du plan de polari- sation de ces rayons à travers l'épaisseur de 1°". Pour saisir l’ensemble et la succession des effets qui devront se manifes- ter dans cette position spéciale du prisme analyseur, il suffit de jeter les yeux sur le tableau B ici annexé; car tous les élé- ments chromatiques de l’image extraordinaire E, et ceux de l'ordinaire O, qui en est complémentaire, ont été calculés ainsi pour les épaisseurs de 1, 2, 4, 6 et 8 millimètres. Afin d'en rendre la discussion plus claire, on y a joint, dans le tableau C, les valeurs des ares $—+,, qui expriment, pour ces mêmes épaisseurs, les angles compris entre le plan de po- larisation actuel des rayons jaunes moyens, et les plans de polarisation moyens des autres divisions chromatiques du spectre neWwtonien , complété par les deux divisions termi- nales rouge et violette, limitées aux raies B et H de Fraun- hoffer. Enfin, on y a rapporté aussi les ares de rotation ke ou (#)e des rayons jaunes moyens, pour rendre manifeste le mouvement du spectre total. 60. Considérons d’abord la composition de l’image E re- lative à l'épaisseur de 1°”. Les diverses quantités de lumière qui la composent sont, pour chaque division chromatique, exprimées par des fractions presque numériquement égales à celles qui forment les coefficients correspondants de e° dans les expressions approchées de la page 354 ; et les différences de ces deux évaluations ne seraient appréciables à l'œil pour aucune des parties du spectre. Cela signifie que notre ex- pression approchée ne s’écarterait pas encore sensiblement de la vérité, si on l’étendait jusqu’à l'épaisseur e= 1°". De là on peut tout de suite conclure que la teinte de l'image E, calculée pour cette dernière épaisseur, d’après l'évaluation St rer OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 361 exacte de ses éléments par la formule rigoureuse, ne diffé- rera pas sensiblement de celle que nous avons reconnue lui À être propre à toutes les épaisseurs moindres. Elle aura donc 4 pour caractère dominant une nuance spécialement violette , comme nous l'avons alors constaté, et comme l'expérience le confirme. 61. Maintenant, pour apprécier les changements qu’elle devra éprouver aux épaisseurs plus grandes, je divise les va- leurs des éléments chromatiques, propres à celle-ci, par le carré de chaque épaisseur, que je restitue en facteur com- mun à leur ensemble, de sorte qu'il se retrouve le même qu'auparavant. Alors tous les éléments qui composent l'i- mage E aux cinq épaisseurs considérées, étant rassemblés sous cette nouvelle forme, présentent le tableau suivant, que je désigne par la lettre D. TABLEAU D. — SOMME DES ÉLÉMENTS CHROMATIQUES qui composent l'image extraordinaire E, lorsque la section principale du prisme analyseur est mise en coïncidence avec le plan de polarisation actuel des rayons jaunes moyens. ,1-0,017397 —+1,:0,007834 1, -0,002141 + I;-0,000287 + 1,-0,005273+1,.0,021419 + 1,-0,044396 + L- 0,085282 + 1,-0,135965 | 0,017105-I .0,00778 11: 0,002140 + [:-0,000287 + 1,-0,005224 + I, .0,020907 + 1,.0,042388 + Le .0,077687+- 1 ,-0,1 14974] D :4 L 11,,-0,015903-T .0,007530 + 1, 0,002120-f-1.0,000287 1, -0,005079 I, .0,0r90034-T..0,035065 4T,. 0,052664 L,:0:062051 ] fl,-0,014058-+1,. 0,007081+- I .0,002089+ 1;:0,00028541,. 0,004844 +-1,.0,016159+-1,.0,025148+-1, -0,025763 +1. 0,016379] Fro,o11770-f-1,.0,006437--T 0,002038--1..0,000284 I, -0,004533 4-1, .0,012795--[..0,015153-T .0,007783 1,7: 0,000467 ] Je compare d’abord la première ligne de ce tableau à Le PNR 46 362 DES PHÉNOMÈNES ROTATOIRES la seconde, ou plutôt à la portion de celle-ci qui est com- prise entre les parenthèses. Car le facteur 4, qui est com- mun à tous ses termes, modifiant leurs valeurs absolues sans changer leurs rapports, n'influe point sur la nature de la teinte formée par leur ensemble, mais seulement sur la quan- tité totale de lumière qui s’y trouve rassemblée. Considérant donc, dans les deux lignes, les coefficients numériques qui affectent les valeurs homologues de 1, nous voyons qu'ils sont tous presque pareils, quoique, généralement, ceux de la deuxième soient un peu plus petits. Toutefois, la différence est à peine sensible pour les divisions du spectre comprises depuis le rouge extrème jusqu’à l'indigo ; et elle ne commence à être un peu plus évidente que dans les deux dernières di- visions violettes, dont la faculté illuminante propre est la plus faible. Nous verrons tout à l'heure la raison de ce résultat numérique ; admettons-le pour le moment comme un fait. Les rapports d'intensité des éléments chromatiques qui composent la teinte de l’image E, à l'épaisseur de 2"", se trouvant ainsi à peine modifiés par cette commune atténua- tion , l'effet total produit sur l'œil par leur ensemble devra ètre sensiblement le même qu'à l'épaisseur de 1°", à l’inten- sité près, qui sera plus grande, à cause du facteur com- mun 4, qui accroît les quantités absolues de lumière propres à tous ces éléments. La teinte de l’image E, à cette épaisseur, devra donc être encore, selon le calcul, un violet composé, et sensiblement le même genre de violet qu'à l'épaisseur de 1°", si ce n’est que l’image totale sera beaucoup plus lumineuse. Tout cela est minutieusement conforme à l’ob- servation ; car, à ces deux degrés d'épaisseur, la nuance vio- lette de E n'offre aucune différence appréciable à l'œil ; elle OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 363 est seulement bien plus abondante en lumière dans le second cas que dans le premier. 62. L'affaiblissement relatif que présentent ici les coeffi- cients numériques de la deuxième ligne, compris entre les parenthèses, s'accroît progressivement dans les lignes sui- vantes, où le facteur commun, qu’on en a séparé, est de même proportionnel au carré des épaisseurs. Cela tient sur- tout au mode de variation du terme sin°{s — ()|e, qui entre dans l’expression des intensités de tous les éléments chroma- tiques de E, et qui, pour la plupart, y a une influence principale. Si l'arc {9 — (4)}e restait toujours très-petit pour chaque valeur fixe de ?, à laquelle on applique cette expres- sion , le carré de son sinus se maintiendrait à très-peu près proportionnel au carré de l'épaisseur e; ce qui ayant lieu pareillement pour le terme 1 — nr ? à depetites valeurs, tous les éléments chromatiques de E res- teraient sensiblement dans ce même rapport, et compose- raient une image d’une nuance constante. Mais, en jetant les yeux sur le tableau C, on voit que les arcs {b—(L)}e s’écar- tent bientôt de cette condition de petitesse à mesure que l'épaisseur s'accroît , et leur agrandissement absolu est rela- tivement plus considérable pour les divisions les plus réfran- gibles. Or, les carrés de leurs sinus ne croissent pas à beau- coup près dans ce même rapport; car leur progrès se ralentit à mesure que l'arc {s—(L)le se rapproche de go"; et ils di- minuent, au lieu d'augmenter, quand il a dépassé ce terme. Done, si l’on divise par les carrés des épaisseurs les valeurs successives des éléments de E, ainsi calculés, comme je l'ai fait dans le tableau D, on doit trouver que les quotients ho- 6. quand e est restreint 364 DES PHÉNOMENES ROTATOIRES mologues décroissent progressivement à mesure que l’épais- seur augmente. Et, en outre, ce décroissement doit être relativement plus rapide pour les éléments chromatiques les plus réfrangibles, les ares {e—(L)le s'approchant d’autant plus vite de 90°, que la réfrangibilité est plus grande. Tel est aussi l'effet général que présententles cinqlignes de ce tableau. 63. D'après cela, on peut aisément prévoir les change- ments de nuance que l’image E devra subir aux diverses épais- seurs qu'on y a considérées. Car d’abord les coefficients nu- mériques , propres aux éléments rouges, orangés, jaunes et verts, conservent entre eux, dans chacune des cinq lignes, des rapports presque constants. Mais le progrès de l’affai- blissement est déjà sensible pour les rayons bleus; il l’est davantage pour les indigos, et plus encore pour les violets, qui, dans la dernière ligne surtout, n’ont plus, entre les parenthèses, que des coefficients dont les valeurs sont à peine sensibles. Ainsi, dans les quatre premières phases d'épaisseur, la teinte résultante de l’image E sera bien toujours un violet, tant à cause de la présence simultanée des rayons rouges et bleus qui s’y trouveront mêlés à peu près dans les mêmes rapports, qu'à cause des portions de violet prismatique qui y seront associées ; mais ces derniers s’y trou- vant de plus en plus affaiblis à mesure que l'épaisseur aug- mente, l'influence des éléments moins réfrangibles y de- viendra relativement plus forte, et le violet résultant devra paraître progressivement plus rouge, en même temps que plus abondant en lumière. Enfin, dans la dernière ligne, à l'épaisseur de 8"", la proportion relative du violet prisma- tique étant presque anéantie, le rouge dominera encore da- vantage. Alors le grand nombre des rayons violets qui man- OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 365 quera dans l’ensemble, compensant en partie l’accroissement des moins réfrangibles, l'augmentation de l'intensité totale de l’image sera ralentie par leur absence, de manière à être beaucoup moins marquée qu’elle ne l'avait été jusque-là. L'observation confirme minutieusement toutes ces consé- quences. Lorsqu'on amène la section principale du prisme analyseur dans l'arc de déviation actuel, (+)e ou be, pro- pre aux raÿons jaunes moyens, comme notre calcul le suppose , la nuance violette, ou plutôt violet bleuâtre, de l'i- mage Ene présente aucune variation distinctement apprécia- ble, même à l'épaisseur de 6"", quoique la quantité totale de lumière qu’elle renferme se soit jusque-là graduellement accrue avec beaucoup de rapidité. C’est seulement vers l’é- paisseur de 8" que l’on commence à soupçonner, dans ce violet, une nuance plus rouge, avec une intensité dont on ne peut plus apprécier sûrement la constance ou la conti- nuation d’agrandissement. 64. Par une application inverse de ces résultats, la teinte spéciale et presque constante de l’image E, entre ces limites d'épaisseur, servira d'indice pour amener la section princi- pale du prisme analyseur dans le plan de polarisation actuel des rayons jaunes moyens, avec autant ou presque autant de certitude que si l'on observait les déviations de la lumière simple, propre à ces rayons mêmes. Or, en se reportant à la formule analytique , qui exprime les intensités des éléments chromatiques de l’image E pour cette position du prisme, on voit que les valeurs de ces intensités, et par suite la teinte résultante de leur ensemble, n’éprouveraient aucun change- ment, si les arcs &', 9, (e), qui représentent les déplacements des plans de polarisation à travers l'épaisseur de 1°", étaient 366 DES PHÉNOMÈNES ROTATOIRES simultanément multipliés par un facteur commun c, qui les = 1 9 = A . changerait en L'e, pc, (e)c, pourvu que l'épaisseur e fut modi- “7 : “ a à e fiée suivant le rapport inverse, ce qui la changerait en =. D'a- près cela, toutes les substances douées de pouvoir rotatoire, qui, à travers une épaisseur donnée, disperseront les plans de polarisation de tous les rayons simples , suivant les mêmes rapports que le cristal de roche, avec la seule différence d'une énergie absolue plus grande ou moindre, devront pro- duire des phénomènes exactement pareils à ceux que nous venons d'analyser. Ainsi , lorsque l'épaisseur de ces milieux sera telle que l’arc de rotation absolu des rayons jaunes moyens n'excède pas 192°, ce qui est la limite à laquelle nous l'avons borné ici pour les plaques de cristal de roche, si l’on amène la section principale du prisme analyseur dans le plan de polarisation actuel de ces rayons, l’image extraor- dinaire E s’y montrera identiquement avec la même nuance violette que dans ces plaques, avec le même progrès d’in- tensité, et la même tendance à se rougir à mesure que l’é- paisseur augmentera , depuis les plus petites valeurs des dé- viations jusqu'à la plus grande de celles où nous les avons restreintes. Dans toute cette série de phases, les déviations du prisme qui la feront apparaître seront proportionnelles aux épaisseurs, comme si elles appartenaient à une lumière simple ; et, pour chaque épaisseur, elles seront les © de celle que l’on observerait à travers le verre rouge. Enfin, pour chaque milieu agissant ainsi , l'intensité du pouvoir rotatoire actuel sera à celle du cristal de roche dans le rapport des épaisseurs où l’image E apparaît, avec ces caractères spécifi- ques, à un même arc de déviation absolu. OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 367 65. Cette apparition n’est pas seulement signalée par la nuance de violet bleuâtre que prend alors l'image E; elle l'est aussi, et peut-être même avec plus de délicatesse, par les nuances dominantes de bleu ou de rouge qui se sucecè- dent dans cette image, lorsque la section principale du pris- me analyseur n'a pas encore atteint le plan de polarisation actuel des rayons jaunes moyens, ou lorsqu'il l’a dépassé : c'est là ce qui m'a fait nommer cette teinte la teinte de passage; car elle est spécifiée ainsi par ses annexes, entre des ampli- tudes d’indétermination très-restreintes , lorsqu'on ne cher- che pas à la suivre au delà des bornes de déviation extrêmes que nous lui avons ici assignées. On l'emploiera donc alors très-ccommodément pour des déterminations courantes, aux- quelles la prudence prescrit d'en affecter l’usage, celui du verre rouge étant toujours préférable pour des expériences de recherche, parce qu'il est indépendant des lois particu- lières que peuvent suivre les déviations des rayons simples. 66. Examinons maintenant quelle devra être, dans ces mêmes positions du prisme analyseur, la teinte propre de l'image ordinaire O, complémentaire de E. Elle est facile à prévoir d’après ce caractère ; car E étant un violet bleuâtre, qui tend progressivement à se rougir, O devra être un jaune verdâtre , tendant progressivement à se verdir. Cette oppo- sition nécessaire se reconnaît avec évidence, en jetant les yeux sur le cercle chromatique de Newton; car la manière dont il y a réparti les sept divisions chromatiques du spec- . tre étant, comme il le dit lui-même, l'expression générale des résultats que lui ont fournis ses expériences sur le mé- lange des lumières simples, on peut, avec une entière certi- tude, la consulter pour ces simples cas d'opposition. Toute- | em 5 © Pa 2 nètres e.| 368 DES PHÉNOMÈNES ROTATOIRES fois, il ne sera pas inutile de montrer comment on arrive directement aux mêmes conséquences, par la discussion des nombres qui expriment les intensités de tous les éléments chromatiques dont l’image O se compose, et qui sont réunis dans le tableau B, pour les diverses épaisseurs auxquelles - nous avons appliqué la formule rigoureuse. A cet effet, il suffit de les subdiviser en systèmes partiels, dont les facul- tés colorifiques propres soient distinctement appréciables, | comme nous l'avons fait pour l'expression analytique rela- tive aux plus petites épaisseurs. 65.,4 l'applique d’abord ce procédé aux images O , données par les épaisseurs 1", 2°", 4", parce que le même mode de décomposition peut y être adopté. Je forme ainsi le tableau suivant, dans lequel, par abréviation, j'emploie la lettre B, pour désigner la somme de toutes les quantités de lumières simples qui composent le faisceau blanc total transmis à tra- vers la plaque considérée. | | | | | | SOMME DES ÉLÉMENTS CHROMATIQUES QUI COMPOSENT L'IMAGE ORDINAIRE O, lorsque la section principale du prisme analyseur est mise en coïncidence avec le plan de polarisation des rayons jaunes moyens i B.0,864037+ | B—L,, } 0,050681+ | B—T —1,, | 0,040886+ | B—I—1 —1, } 0,022977+ [Le -0,004228+ . -0,01378541,.0 »1947841, .0,021358 B.0,540150+{ B—1,, | 0,149: 58+| B—I,—1,, 10,14 11854 | B—T—1 —1,, | 0,085824+4 DL -0,003828+1,.0,013151+1,.0,018792+" 0,02064 fl B.0,007502 +} B—1,:} 0,14987 8+} B—1, 1} “| 0,28 15 585+ | BI 1,1, 9; ms -0,003100+1,.0,01 143041, .0 2016088341 .0,018716 Ici, comme dans le cas des épaisseurs très-petites, le pre- mier terme de chaque ligne exprime un blane parfait, dont Ja quantité va en diminuant, à mesure que l'épaisseur aug- mente. Les trois termes suivants expriment des blancs plus ne OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 369 ou moins faiblement jaunâtres, dont la quantité va au con- traire en croissant avec l'épaisseur. L'ensemble des cinq der- niers termes, compris entre les parenthèses carrées, ex prime, dans les cinq lignes, un jaune légèrement verdâtre, dont la quantité augmente à peu près comme le carré de l'é épaisseur. Ceux-ci donnent évidemment à l’ensemble de chaque image son caractère de coloration, qui sera un jaune pâle verdâtre, plus marqué dans la deuxième ligne que dans la première, et plus marqué encore dans la troisième que dans la deuxième. Tout cela est très-conforme à l'observation; seulement la nuance violette de l’image E étant perçue simultanément avec l'image O, il est présumable qu’elle fortifie, par son con- traste, la faible sensation de verditre que l’ensemble des élé- ments de celle-ci est apte à produire par lui-même. Les deux derniers cas d'épaisseur , 6"" et 8", nécessitent un autre mode de décomposition, à cause du retour d’accrois- sement des rayons violets qui s’y opère. Celui qui m'a paru le plus propre à manifester la teinte dominante de l’image O, est le suivant: : COMPOSITION DE L’'IMAGE ORDINAIRE O. ———————————_—. — B.0,072533 + [B—1I, } 0,022148 4 | B—1;—1I, | - 0:315669 + | B—I;—1 —1,\! 1 0,007934 CE [épaisseur + 1,-0,075624 +-1,.0,326810 +- I,-0,506530 +- 1;-0,57 1431 +-1,.0,4073r0 8 B-0,030201 +- | B —1;}0,150922 +; B— 11, —1,}.0,065655 + H1,:0,341343 4-1 .0,62289r + 1-0,7351 181 .0,463210 Ce nouveau mode de décomposition décèle encore avec évi- TA UXX 47 370 DES PHÉNOMÈNES ROTATOIRES dencela nature de la teinte des images résultantes. Pour l’épais- seur de 6", les termes de la première ligne indiquent une très- petite quantité de blanc parfait, associé à diverses quantités de blanc privé de ses éléments les plus réfrangibles, et de- venu ainsi un blanc jaunâtre. Dans la seconde ligne, les élé- ments qui dominent sont l’orangé, le jaune et le vert. Ce système devra donc produire, dans son ensemble, l’impres- sion d’un jaune verdâtre, plus marqué qu'à 4"*, parce que la proportion de blanc jaunâtre y est moindre. À 8"", ce blanc jaunâtre de la première ligne est devenu encore moins abondant , et le dernier des termes qui l’expriment l’y mon- tre seulement d’un jaune peut-être un peu plus frane, à cause de l'absence du rouge terminal I; qui s'en est séparé. L'absence de ce rouge dans la deuxième ligne, à cette même épaisseur, y donne aussi plus de prédominance aux éléments orangés, jaunes et verts. La teinte résultante doit donc encore être ici un jaune verdâtre, d'une nuance seulement un peu plus marquée que le précédent. L'expérience confirme toutes ces prévisions. À ces deux épaisseurs de 6"* et de 8"*, la teinte de l’image O est un jaune verdâtre très-beau et très-coloré, où la sensation du vert est probablement fortifiée par le con- traste de l’image E, devenue d’un violet rougeätre, qui est percu simultanément. 68. Ayant ainsi complétement défini la composition et la nature des images O, E, pour la position supposée ici au prisme analyseur, en employant, comme seules données, celles qui se déduisent des vitesses de rotation que j'ai attri- buées aux plans de polarisation des différents rayons simples, je vais discuter la succession des teintes que la règle de New- ton assignerait à ces images, en les composant des seules quantités de lumières diverses comprises dans l'étendue du af bo ste Li TRU TO NT) M ME UE UE M ME PETITION RL TI TI ITA \ey juil QT t nuls Co] dar YA LEBOUE SEVEN" HéAVOTEAMAMARREMUNIUUNI MAT MO AIO "| 2 TO à rl mers ench aviser YA À AOVWAM M MIOSANOANMD ARAA ‘ TAFRRE . 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Extraordinaire E .29 - 28 o 16,0113 |Violet, tirant vers l'indigo; tel qu on le formerait en mêlant|Violet bleuâtre sombre, mais très- | 70 parties de ce violet bleuätre prismatique avec 30 par-| décidé, et foncé dans sa colo- ties de blanc. Image d'une coloration très-décidée, mais! ration. | très-peu abondante en lumière. Ordinaire... O| 131.26 0,01749 642,3220 |Jaune, tirant sur le vert; tel qu'on le formerait en mélant/Blanc très-abondant en lumière, | 17 parties de ce jaune verdâtre prismatique avec 982 par-| mais d'une coloration tout à fait ties de blanc. Image d'une coloration excessivement faible,| insensible. mais très-abondante en lumière. | Etnroninitte EU: 5 6 Indigo touchant à la limite du violet; tel qu'on le formerait| Violet vif, peut-être un peu moins | en mêlant 56 parties de cet indigo violacé prismatique| bleuâtre que le précédent, et avec 44 parties de blanc. Image fortement colorée, etabon-| très-abondant en lumière. | dante en lumiere. \Ordinaire. O| 118°.28°.57",6 0,61052a Jaune déviant un peu du jaune moyen vers l'orange; tell Jaune verdâtre ou vert jaunâtre | qu'on le formerait en mêlant 39 parties de ce jaune pris-| très-beau, très-coloré, et fort | matique avec 61 parties de blanc. Image d'une bonne! abondant en lumière. | teinte jaune, et trés-abondante en lumière | Extraordinaire E| 281°.8',35/,3 5 Indigo confinant à l'indigo moyen, tel qu'on le formerait en| Violet vif, peut-être un peu plus | mêlant 43 parties de cet indigo prismatique avec 57 par-| blanchâtre que le précédent, ties de blanc. Image d'une teinte indigo très-franche, el} mais sensiblement de même très-abondante en lumiere. teinte, et comme lui très- | abondant en lumière. Ordinaire, O! 101, 8.35", 0,32907 0,67093 Jaune déviant trés-notablement du jaune moyen vers l'orangé;| Jaune verdâtre ou vert jaunâtre tel qu'on le formerait en mêlant 33 parties de ce jaune sensiblement pareil au pee orange prismatique avec 67 parties de blanc. Image d'une] dent; comme lui très-coloré et bonne teinte jaune, et abondante eu lumière. très-abondant en lumière, Académie des sciences, t. XX, p. 471 OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 71 spectre newtonien. Pour ne pas multiplier inutilement ces calculs, je les ai bornés aux épaisseurs de 1", 6m", 8m, et j'en ai rassemblé les résultats dans le tableau E ci-joint. _ Les indices analytiques qui caractérisent la teinte domi- nante de chaque image , ainsi que la proportion de lumière qu'elle contient, ont été déterminés par les méthodes dé- _crites dans la section II du présent mémoire, où Ja règle de . Newton a été exposée; et l'interprétation de ces indices a été | faite comme je lai expliqué alors. Les deux dernières co- - lonnes du tableau présentent la comparaison des résultats … théoriques ainsi obtenus, à ceux que donne l'expérience. Si . Von examine d’abord les teintes de l'image extraordinaire E, aux trois épaisseurs considérées, on voit que, pour la plus petite d’entre elles, la règle donne cette teinte violette bleuä- tre très-sombre, ce qui se trouve conforme à l'observation 3 mais, aux épaisseurs plus grandes, la règle fait marcher _ cette teinte progressivement vers le bleu, tandis que l’ob- . servation la fait voir toujours d’un violet vif, qui semblerait . plutôt incliner graduellement vers le rouge. Les teintes de . l’image ordinaire O offrent, entre le calcul et l'expérience, une opposition de marche correspondante à celle-là. Car . d’abord à l'épaisseur la plus petite il y a accord, la règle ind iquant un jaune à peine coloré, contenant # de toute la umière transmise à travers Ja plaque, et l'observation don- ant un blanc presque total, sans coloration sensible; mais, aux épaisseurs plus grandes, la règle indique pour O un Jaune qui se rapproche progressivement de l’orangé, tandis . que l’observation donne un jaune verdâtre très-décidé, dont la nuance se maintient sensiblement constante. Ces discor- . dances entre la règle et l’observation se montrent , dans leur 47. 372 DES PHÉNOMÈNES ROTATOIRES sens comme dans leur progrès, manifestement conformes à ce que pouvait faire prévoir l'omission , dans cette règle, du violet et du rouge terminal de Fraunhoffer, surtout du rouge, qui est de beaucoup le plus abondant des deux, et le plus vif, dans la lumière blanche venue des nuées, sur laquelle j'ai effectué les expériences que j'ai consignées ici. Car d’abord , ainsi que nous l'avons reconnu déjà, la règle s’écarte très-peu, et même pas sensiblement, de l'observation aux petites épaisseurs, où les plans de polarisation étant encore peu dispersés, l'effet isolé de ce rouge terminal ne se montre pas notablement distinct; mais, à des épaisseurs plus grandes, son plan de polarisation restant en arrière de tous les autres , parce que sa vitesse angulaire de rotation est relativement moindre, son action propre acquiert une influence marquée, surtout si la section principale du pris- me analyseur se trouve placée de manière à faire entrer ce rouge en proportion dominante dans l’une des deux images, ou presque en totalité dans l’une d’elles exclusivement à l’au- tre, surtout si la coloration produite par l'ensemble des autres rayons est faible. Le premier de ces cas se trouve réalisé aux épaisseurs que le tableau B embrasse , lorsque l’on place la section principale du prisme analyseur dans le plan de polarisation actuel des rayons jaunes moyens , comme on l’y a supposé. Le second cas s’est présenté à nous à l'épais- seur de 11°",047, la section principale du prisme analyseur étant mise en coïncidence avec le plan de polarisation pri- mitif, ce qui nous a donné les éléments constitutifs du ta- bleau A. Dans les deux circonstances, la règle de Newton s’est écartée de l’expérience, dans le sens même que l’on pouvait prévoir, d’après l’omission du rouge terminal que son spectre n’embrasse point. OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 4 © La] es ; VII. Nouvelles expériences sur la rotation des plans de polarisation dans les plaques de quartz cristallisé, perpendiculaires à l'axe. Ces nouvelles expériences ont été faites sur vingt et une plaques taillées bien perpendiculairement à leur axe de cris- tallisation. Leurs épaisseurs ont toutes été mesurées avec un ancien sphéromètre de Fortin, qui accuse les millièmes de millimètre. Je les ai désignées par les lettres de l'alphabet à mesure qu’elles se sont présentées à moi, et je conserverai cette manière de les distinguer dans ce qui va suivre. En voici le tableau par ordre, divisé en deux séries correspon- dantes aux deux sens du pouvoir rotatoire. Toutes ont éte mises obligeamment à ma disposition par M. Soleil , à l'ex- ception de Z qui m'avait servi anciennement. 374 DES PHÉNOMÈNES ROTATOIRES PLAQUES PLAQUES opérant la rotation opérant la rotation vers la droite vers la gauche de l’observateur. de l'observateur. K | | | « Epaisseur Épaisseur en millimètres. en millimètres. Désignation. Désignation, 5,81 o ri à 6,967 1,184 3,767 7,208 5810 7878 6 Nuancée d'irrégularités 73007 verts les angles. 1,488 0,492 1,787 2,141 3,169 3,794 0,131 A CG D H K 7 ON EH t&% n 25 EE 0,090 0,0655 0,0452 1,118 Dans toutes les expériences auxquelles j'ai employé ces plaques , soit individuellement , soit en succession, elles ont été exposées perpendiculairement à un faisceau blanc de la OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 375 lumière des nuées polarisé en un sens unique par la réflexion spéculaire, aussi exactement que possible , et reçu à travers d'étroits diaphragmes dans un cabinet obscur, où il parve- nait seul à l’œil de l'observateur. Ces conditions sont in- dispensables pour assurer la régularité des résultats. J'ai toujours pris les plus grands soins pour que l'incidence fût exactement perpendiculaire. Car, pour peu que l’on s’écarte de cette position, les phénomènes rotatoires sont modifiés par le pouvoir polarisant émané de l’axe du cristal, ce qui dénature leurs lois propres. Le défaut de parallélisme des surfaces est aussi fort à craindre, tant par ce motif que par l'inégalité d’épaisseur qui en résulterait dans l'étendue du champ que les diaphragmes embrassent. S'il n’a pas été tout à fait nul dans les plaques de M. Soleil, il était du moins assez faible pour que l’uniformité des teintes observées ne füt pas troublée d’une manière appréciable dans le petit dis- que circulaire où les images étaient restreintes. En étudiant, à travers chacune de ces plaques, les teintes des deux images qui se forment lorsque la section principale du prisme analyseur est mise en coïncidence avec le plan de polarisation primitif, on les trouve toutes conformes aux indications générales des figures 2 et 3, rapportées plus haut. Je ne mentionne pas ici les preuves détaillées de cette con- cordance, parce qu’elles se trouveront naturellement con- signées dans les tableaux des expériences que nous aurons plus loin occasion de faire pour un autre but. Je me bornerai seulement ici à faire remarquer qu'aucune de ces plaques ne tombe entre les épaisseurs de 10 et 12 millimètres, où j'ai annoncé que la règle de Newton se trouve surtout en désac- cord avec l'observation, quand on veut en déduire les teintes 376 DES PHÉNOMENES ROTATOIRES des images pour la position du prisme analyseur à laquelle s'appliquent les figures 2 et 3. Les plaques À et B, de pouvoir contraire, se compensent exactement lorsqu'on les expose en succession, sous l’inci- dence perpendiculaire au faisceau polarisé, M. Soleil les avait amenées à leur égalité d'épaisseur par cette condition de com- pensation même , en les faisant agir superposées sur son ap- pareil à deux rotations, et constatant qu'elles ne troublaient . pas l'identité de ses deux teintes. Aussi ne laissent-elles aucun résidu sensible dévié de la polarisation primitive dans le faisceau blanc transmis à l'œil dans l'obscurité. Cette exacte restitution de la polarisation primitive pour les rayons de toutes les réfrangibilités, à travers deux pla- ques d'épaisseur égale et de pouvoir contraire, était un ré- sultat déja établi par mes anciennes expériences. J'ai voulu savoir si la compensation s’opérerait encore avec la même rigueur et la même généralité, quand on opposerait des sys- tèmes complexes de plaques superposées à des plaques sim- ples, où à d’autres systèmes complexes. Cela était nécessaire à essayer, pour découvrir si, dans l'introduction successive du faisceau lumineux à travers de pareilles plaques, il n’y aurait pas quelque constante très-petite, soit à ajouter, soit à soustraire. En effet, il est très-vraisemblable que, dans la double réfraction, la bissection des rayons ne.commence à s'opérer qu'a une très-petite profondeur dans l'intérieur du corps cristallise , lorsque la trajectoire produite par la réfrac- tion moléculaire a pris sa direction définitive et rectiligne. L'effet du pouvoir rotatoire, qui dans le cristal de roche n’est point moléculaire, pourrait donc aussi ne commencer à se manifester qu'à une très-petite profondeur, que la succession OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 375; multipliée des incidences et des émergences dans les systèmes multiples, aurait été propre à manifester comparativement. Mais on va voir que les expériences n’ont décelé aucune diffé- rence que l’on puisse attribuer à cette multiplicité. D’après cela , si la rotation des plans de polarisation dans l’intérieur des plaques de cristal de roche ne commence à être opérée qu’à une certaine profondeur par les couches dont la super- position la produit, cette profondeur est tellement petite, qu'elle échappe à toute appréciation. Dans ces épreuves de compensation, les plaques ont toujours été présentées au fais- ceau lumineux sous des incidences rigoureusement perpendi- culaires , et la section principale du prisme analyseur était mise en coïncidence exacte avec le plan de polarisation pri- mitif. Première expérience. J'ai formé le système binaire N+P, exerçant la rotation vers la droite, et composé comme il suit : Système total : N + P + 6,961 té J'ai opposé à ce système la plaque unique F, exerçant la rotation vers la gauche, etayant pour épaisseur 6”,961 ie La compensation a été parfaite, sans aucune trace apprécia- ble de résidu. Il ne se manifestait donc aucune différence que l’on pût saisir entre les actions rotatoires exercées sur le faisceau lumineux, dans son trajet à travers cette épaisseur continue ou disjointe. 2° Expérience. J'aiforméle système quaternaire H+K+L+N T. XX. 48 378 DES PHÉNOMÈNES ROTATOIRES exerçant la rotation vers la droite, et composé comme il suit : H— 1,488 1 K 0,492 = 1 787 N—.5;169 Système total H + K + L + N, épaisseur — + 6,936 “ Je lui oppose la plaque F, épaisseur — + 6,967 4 Excès d'épaisseur en faveur de la rotation vers la gauche... 0,025 PA La compensation n’est pas rigoureusement parfaite. Elle laisse, dans l’image extraordinaire E, un petit résidu percepti- ble; de couleur blanc jaunâtre , lequel s’anéantit presque com- plétement lorsqu'on tourne le prisme analyseur vers la gauche dans l’arc de déviation apparent — 1° ; et comme lezéro réel est à + 1°, cela semblerait indiquer une déviation résultante — 2. Toutefois je remarque que, même dans cet azimuth ap- parent — 1°, l'image E ne s’évanouit pas complétement ; elle conserve un petit résidu blanc jaunâtre qui persiste. Ce résidu s’affaiblit beaucoup quand on limite le diamètre du faisceau transmis, en le restreignant par un diaphragme plus étroit. Mais alors il se trouve avoir son minimum absolu dans l’azi- muth +1, qui coincide avec le sens de la polarisation primitive. Le caractère variable et accidenté de ces résultats montre qu'ils ne peuvent pas être dus à un effet régulier de dé- viation. Mais, au degré d’excessive faiblesse. avec. lequel OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 379 ils se montrent, on aperçoit aisément plusieurs causes qui seraient capables de les produire : d’abord, quelque petite irrégularité de constitution interne dans les plaques assem- blées ; puis, les petites inclinaisons prismatiques de leurs faces, qu'on ne, peut presque jamais faire rigoureusement parallèles, ce qui produirait des inégalités d'épaisseur du même ordre dans la section circulaire que traverse le fais- ceau lumineux circonscrit par les diaphragmes; peut-être enfin les effets de dépolarisation, opérés aux huit sur- faces des plaques assemblées, et que doit y éprouver la portion de la lumière qui échappe à la transmission com- plète. 3° Expérience. Je forme le système ternaire B+Q +R exerçant la déviation vers la gauche, et composé comme - il suit : B — — 5,810 à Q—— 5,767 R—— 7,508 Système total, B + Q + R—— 17,085 ‘+ é Je:lui oppose la plaque Y — + 17,103 “ Excédant d'épaisseur dans le sens ec + o,018 rh ren To LA La compensation est sensiblement parfaite. L'image ex- traordinaire E ne conserve qu'un résidu à peine percepti- ble, lequel s’évanouit complétement quand on restreint les diaphragmes qui circonscrivent le faisceau transmis. 4° Expérience. Je forme le système C+N exerçant la rotation vers la droite, et le système B + F+ L exerçant la 48. 380 DES PHÉNOMENES ROTATOIRES rotation vers la gauche, lun et l’autre composés comme il suit : C—=+ 7,878 B—— 50 N—+ 3,169 E==°16;06x CHEN = in 047 7 B+F=— 12,771 ral ID F4 L = 10,985 4 L—+ 1,786 pe ci le système] Excès d'épaisseur dans le sens is ess cts : des 0,062 °° B+F+L—— 10,985 4 L'image extraordinaire E qui résulte de cette opposi- tion présente un très-faible résidu , de teinte inégale, mêlé de bleuâtre et de rougeâtre par places, et obscur au centre. On le rend nul pour la plus grande partie en tournant la section principale du prisme dans l’azimuth apparent +2; et comme le zéro vrai est à +1°, cela accuse un excès de déviation vers la droite égal à +1°. Ce résultat est d'accord, pour le sens, avec l’excédant d'épaisseur. Il lui est tant soit peu inférieur pour la quantité, Car, en comptant 2/° de déviation à l'œil nu pour 1°”, l'excès +0,""062 équivaut à + 1°,488. Mais, outre que la fraction de degré qui fait la différence est difficilement appréciable avec sûreté à ce degré de petitesse, la cause régulière qui la produirait est ici mêlée, comme dans les expériences précédentes, avec toutes les causes irrégulières qui concourent à en dénaturer les effets. Ces épreuves me paraissent suffire pour montrer que si les plans de polarisation ne commencent leurs déplacements rotatoires dans les plaques de cristal deroche perpendiculaires à l'axe, qu'après que les rayons y ont pénétré à une certaine OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 381 profondeur, cette profondeur est inappréciable aux obser- vations les plus précises. De sorte que l’on peut calculer les arcs de déviation par somme ou par différence, pour les plaques disjointes, comme si elles formaient une épais- seur continue (*). (*) Je saisis cette occasion pour corriger une erreur d’énoncé qui existe dans mon Mémoire de 1813, pages 263 et 264, précisément à l’en- droit où j'expose ma première expérience de compensation. Elle s’effec- tuait entre des plaques qui avaient 6 millimètres d'épaisseur. Or, il est dit, page 262, que la section principale étant placée dans l’azimuth o°, en coin- cidence avec le plan de polarisation primitif, elles donnaient l'image or- dinaire O rouge vif, et l'image extraordinaire E vert très-beau. C’est le contraire qui a lieu pour l'épaisseur de 6 millimètres. Il faut donc inter- vertir ces indications ; et, par suite, 1l faut faire la même inversion dans les titres donnés aux colonnes des tableaux, où l’on a rapporté la série des teintes qui se développent dans les diverses positions du prisme. Cette rectification étant faite, les teintes indiquées dans les deux colonnes des tableaux se trouvent en tout point concordantes à celles que l’on sait aujourd'hui appartenir, dans de pareilles plaques, aux arcs de déviation qui y sont désignés. Par exemple, à 6 millimètres d'épaisseur, la teinte de passage violet bleuâtre de l’image extraordinaire E doit se trouver dans l'azimuth 24°.6 ou 144°: Par conséquent, cette même teinte doit se mon- trer dans l'image ordinaire O à l’azimuth complémentaire 1 44°—90° ou 54°. Or, en effet , dans les colonnes interverties, on trouve à 50° de déviation O bleu gris de lin, E jaune légèrement verdâtre. Ainsi, il aurait fallu tourner de 4° de plus pour changer le bleu de O en violet bleuâtre, et avoir, par complément, E jaune verdâtre, conformément aux lois géné- rales reconnues depuis dans ce phénomène. La même inversion dénoncé se trouve dans mon Traité de Physique, tome IV, pages 52r et 522, où je rapporte la même expérience et les mêmes tableaux, que j'avais extraits de mon Mémoire. Il faut donc y faire les mêmes rectifications, c’est-à-dire substituer, dans les titres des tableaux, le mot extraordinaire au mot 382 DES PHÉNOMENES ROTATOIRES J'arrive maintenant aux expériences que j'ai faites pour constater l'interruption que la règle de Newton présente entre les épaisseurs de 10°" et 12". Je commence par la première de ces deux limites, où la règle concourt encore sensiblement avec l'observation ; et, pour fixer tous les détails des apparences qui se réalisent dans ce cas ainsi que dans les suivants, je rapporterai en tableaux les séries de teintes que parcourent les deux images, ordinaire, extraordinaire O,E,à mesure que l'on tourne la section principale du prisme analyseur sur un certain nombre de directions an- gulaires prises dans le premier quadrant. De là on pourra, si l'on veut, déduire la succession de ces teintes pour tous les arcs analogues des trois quadrants suivants, puisque leur développement s’échange, et redevient le même en passant d’une image à l’autre, lorsqu'on transporte la sec- tion principale du prisme de l'arc quelconque x à l'arc go°+æ. Ce mode de description est le même que j'avais employé dans mon Mémoire de 1813. 1° Limite. Je forme le système C+M exerçant la rota- tion vers la droite, et composé comme il suit : CESSE 7,878 M=+ 2,141 Système C + M....— + 10,019 ré Je fixe ce système bien perpendiculairement au faisceau po- ordinaire , et inversement. Ces inadvertances pouvaient aisément échapper à une époque où les lois générales de succession de ces teintes n'étaient pas encore connues, OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 383 larisé transmis, après avoir reconnu le point de la division où la section principale du cercle analyseur coïncide avec la direction de la polarisation primitive, ce que je fais égale- ment dans chacune des expériences. suivantes. Alors je tourne l'index dans le sens de la rotation, en comptant les arcs de déviation à partir de cette position de coïinci- dence, et je note, sur deux colonnes désignées par O,E, _ les teintes que présentent les deux images ana ee _ dans les différents arcs, mesurés aussi en degrés sexagési- _ maux. DES PHÉNOMÈNES ROTATOIRES ÉLÉMENTS DE L'EXPÉRIENCE. mm Epaisseur +-10,019 Sens du mouvement du prisme Ciel couvert et sombre ; pluie... Arc de déviation , compté à partir du plan de polarisation primitif. +54 10 20 34 43 47 57 58 60 62 66 72 TEINTE de l'image ordinaire 0. Rouge, ayant un soupcon : d’orangé. Rouge pourpre, plus jau- h uâtre. Rouge orangé. Orangé rougeätre, Jaune orangé presque blane, un peu rougeàtre. Jaune pâle. Jaune très-pâle, un peu ver- dâtre. Vert jaunâtre très-pâle. Vert jaunâtre très-pâle. Vert jaunâtre pâle. Vert pâle. Vert plus vif, encore pâle. Vert bon, un peu bleuâtre. Vert plus vif. Vert un peu bleuâtre, : Vert un peu bleuâtre. À Vert plus bleuâtre. Vert bleuâtre ou bleu ver- dâtre. Bleu verdâtre, Bleu très-bon. Bleu blanchâtre un peu vio- lacé ; intensité affaiblie. Bleu violacé pâle, et peu abondant en lumière. | Bleu violacé très-pâle, pres- que blanc. Bleu violacé, soupcon de rougeâtre. Violet pâle, un peu rou- geâtre. | Rouge pâle. Rouge plus vif. Rouge un peu mordoré, À Rouge plus décidé, ü Rouge, ayant un soupçon d'orangé. J'ai espacé les observations de manière à marquer les chan- gements des teintes lorsqu'ils devenaient sensibles. Ainsi je les ai fort écartées entre o° et +20°, parce que le changement de O s’y faisait progressivement , et continüment, du rouge pourpre vers l’orangé, tandis que le vert de E ne faisait que se bleuir. Mais j'ai rapproché les arcs d'observations depuis 57° jusqu'à 66", parce que, dans cet intervalle, la teinte LA # “ OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 385 de E éprouvait une transition rapide du bleu au rouge, en passant par un violet bleuâtre intermédiaire peu intense en lumière et très-peu coloré, qui répondait à la teinte de passage, comme je le prouverai dans un moment. J'adopterai un ordre de distribution pareil dans toutes les observations qui vont suivre, écartant leurs indications les unes des autres quand les variations des teintes O, E sont lentes et progres- sives, et les serrant au contraire davantage quand leurs chan- gements sont plus rapides, et plus essentiels à constater. Au moyen de ce tableau, l’on peut connaître quelles seront les teintes O, E dans une position quelconque du prisme analyseur répondant à l’arc de déviation x. En effet, si cet arc tombe dans le premier quadrant de droite, le ta- bleau donnera immédiatement les teintes O, E qui y cor- respondent. S'il dépasse 90°, il aura l’une des trois formes suivantes , à côté desquelles j'inscris la règle qui donne les teintes O , E pour chacune d’elles. VALEURS, : Teintes O , E, correspondantes aux valeurs de uw. de l’arc donné x. A P Échangez les teintes du premier quadrant, correspondantes à la déviation w. Mèêmes teintes que dans le premier quadrant pour la déviation u. Échangez les teintes du premier quadrant, correspondantes à la déviation u. Par exemple : on demande quelles devraient être les teintes O, E, si l’on détournait le prisme de 6° à gauche du plan de polarisation primitif? Dans un tel cas, l’arc de dé- T. XX. 49 386 DES PHÉNOMÈNES ROTATOIRES viation, compté toujours dans le sens ri depuis o° jusqu'a la circonférence entière, sera 35/4° ou 270°+8/°. u sera donc 84°. Alors, en consultant le tableau du premier quadrant, et échangeant les teintes qui y sont marquées pour la dévia- tion 84°, on aura, dans l’azimuth 354° ou —6°, O rouge décidé, E vert vif. On peut également se proposer le problème inverse : c’est-à-dire, trouver les ares de déviation où certaines teintes observées dans le premier quadrant se reproduiront dans les autres, soit pour l’une, soit pour l’autre image. On ob- tient ces arcs par le même principe de succession. Par exemple, on a ici, dans le premier quadrant, O jaune presque blanc , E bleu très-bon, lorsque l'arc de déviation est +43. On demande de combien de degrés il faudra tourner le prisme vers la gauche pour que cette même teinte bleue se transporte à l’image ordinaire O, dans le quatrième quadrant? A cet effet , il n’y a qu’à transporter progressive- ment la déviation primitive +43° dans les quadrants sui- vants, avec des additions successives de 90°, et l’on aura : Deviation résultante. Deuxième quadrant... + 43°+ 90°— + 133" Teintes échangées. Troisième quadrant... + 43° + 180°— + 223° Mèmes teintes aux mêmes images: Quatrième quadrant... + 43°+ 270°— + 313° Teintes échangées. Ainsi, dans l'arc de déviation +315° ou -—/47°, à gauche de la polarisation primitive, on aura : O bleu très-bon,; E jaune ‘päle presque blanc, identiquement comme dans l'arc de déviation +43°, sauf l'échange des teintes entre les deux images. OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 387 Ces transports des teintes autour de la direction de la polarisation primitive sont très-utiles pour faire apprécier exactement les nuances des deux images qui s’observent sur la direction de cette polarisation même, nuances que nos figures générales 2 et 3 désignent telles que les in- dique la règle de Newton, et dont le caractère absolu est souvent difficile à juger isolément. Ici, par exemple, on voit que l’image O se maintient rouge dans une grande :am- plitude de déviation à droite et à gauche du plan de po- larisation primitif. Cela est déjà évident pour le quadrant de droite. Quant au quadrant de gauche, si l’on y transporte dans O le rouge pâle qui a lieu dans E à +66°, on trouve qu'il s’y reproduit dans l'arc de déviation +66°+270° 336 ou —2/?, c'est-à-dire, lorsque le prisme sera dé- tourné de 24° à gauche de l'observateur. D’après cela, le rouge de O, qui se produit sur la direction de la polarisa- tion primitive même, est un terme intermédiaire entre le rouge succédant au bleu vers la gauche, et le rouge tirant à l'orangé vers la droite; de sorte qu’il devra paraître plus ou moins bleuâtre, ou plus ou moins orangé, selon les quan- tités relatives de ces deux couleurs extrêmes, qui pourront dominer dans la lumière incidente sans altérer sensiblement sa blancheur. Or, en.effet, quand le ciel.est serein et illu- miné parle soleil, je trouve que le rouge de O, qui se forme sur la direction de la polarisation primitive, est un pourpre tirant au rouge violacé , tel que l’indique la règle de Newton, et tel que le marquent nos figures. Mais, par des temps cou- verts et pluvieux, où le bleu céleste doit être moins abon- dant.dans la lumière incidente, le ton de O, dans la même direction primitive, prend évidemment Je caractère d’un 9. 388 DES PHÉNOMÈNES ROTATOIRES rouge orangé. Je ne m'attache pas ici à caractériser le vert de E qui est complémentaire de ce rouge, parce que le ton propre des verts est très-difficile à juger, lorsqu'on essaye de décider s'ils se rapprochent plus ou moins du bleu ou du jaune; d'autant que l'impression qu'il produit ici sur l’œil est modifiée par le contraste du rouge de O, en présence duquel on le voit. Dans le tableau extrait de mon Mémoire de 1818, que j'ai cité plus haut, page 334, on trouve les désignations de ces deux teintes O, E, calculées d’après la règle de Newton pour l'épaisseur 10"",124, à peine différente de celle du système C+M , dont je viens de décrire les effets. Et les résultats de ce calcul sont construits dans nos figures géné- rales 2 et 3. Ils s'accordent avec les deux teintes observées dans le caractère dominant de rouge et de vert qu'ils leur assignent. Mais peut-être font-ils incliner le rouge de O vers le pourpre violacé, plus que ne l'indique l'expérience. Toutefois on ne saurait affirmer que cette faible modification de la nuance observée ne résulte pas d’un effet de contraste, ou de la présence du rouge extrême que Newton a omis, et qui entre déjà presque tout entier dans l’image ordinaire, lorsque la section principale du prisme analyseur coïncide avec la polarisation primitive, comme nous le supposons. Cette dernière circonstance est rendue manifeste par celle de nos figares coloriées qui représente la distribution des plans de polarisation du spectre newtonien pour l'épaisseur 10°°,124°. Parcourons maintenant la série des images que le système C+M a présentées dans les diverses positions que l’on a don- nées au prisme analyseur hors du plan de polarisation pri- mitif, et cherchons à y reconnaître, dans l’image extraor- ns di = mt, ei SEE DE OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 389 dinaire E, cette teinte de passage du bleu au rouge qui, dans toutes les plaques d’épaisseurs moindres, coïncide si ap- proximativement avec l'arc de déviation des rayons jaunes moyens. Pour nous aider à la découvrir, rappelons-nous que l'arc de rotation propre à ces rayons à travers une épais- seur de 1°”, est, d’après la longueur de leurs accès, 23°,9938, ou à très-peu près 24°. J'emploierai désormais ce nombre simple, ne pouvant répondre de la différence dans aucune observation. Alors, à travers l'épaisseur actuelle, 10"",019, il sera proportionnellement 240°,456. Conséquemment, l'image extraordinaire E, où ces rayons moyens manquent, devra se trouver, dans le premier quadrant, sur l'arc sup- plémentaire 60°,456, ou un peu plus de 60°. Or, c’est précisément à cet arc que l’image E commence à quitter la nuance bleue violacée presque blanche qu’elle avait à des déviations moindres, pour acquérir un soupçon de rouge distinct. De sorte qu’en se guidant sur ce caractère de pas- sage qu’elle conserve, on retrouverait l’arc de déviation des rayons Jaunes moyens presque aussi exactement que si on les eût observés isolés de tous les autres. L'expérience seule peut établir la persistance d’une coïncidence si délicate pour des épaisseurs pareilles ; car la règle de Newton ne serait probablement pas assez sûre pour fixer exactement une teinte aussi approchante de la blancheur que l’est celle de l’image E, dans le passage que nous considérons. Le mélange complexe des rayons qui la composent alors peut se concevoir en considérant la figure coloriée qui est relative à l'épaisseur 10°*,124, et y supposant la section princi- pale du prisme analyseur dirigée au ‘milieu du jaune. On doit même présumer que le caleul de la teinte E, fait pour ce 390 DES PHÉNOMENES ROTATOIRES cas, s'écarterait notablement de la réalité, à cause de la pré- sence du rouge terminal, que Newton n’a pas fait entrer dans sa règle, et qui précisément se trouverait ici abonder dans l'image E, dont il troublerait l'équilibre. En effet, l'arc de rotation du rouge extrême de Newton étant 17°,4964 pour 1"® d'épaisseur , sa rotation dans l'épaisseur 10"",019 sera proportionnéllement 175°,296,.et la différence de cet are à celui du jaune moyen 240°,456 est 65°,160. Pour un tel écart la relation du carré du sinus faitentrer dans l’image extraordi- naire E les ©2 de la lumière polarisée suivant cette direction. Or, la portion extrême du rouge que Newton n’a pas vue, ayant une rotation moindre, donnera un écart angulaire plus grand encore, de sorte qu'elle entrera en très-grande partie dans l'image E, pour la position du prisme analyseur que nous considérons. Ainsi elle modifiera notablement la teinte calculée de cette image, en la chargeant de rouge, comme nous avons déjà reconnu que cela avait lieu aux épaisseurs de 6% et de 8"". Ceci n’est que la continuation des effets que nous avons discutés alors, en analysant l’ensemble de tous les éléments chromatiques qui entrent dans les deux images O,E, quand la section principale du prisme analy- seur estainsi dirigée. Nous allons les voir se prolonger aux épaisseurs plus grandes, en suivant pas à pas le progrès des écarts que la règle de Newton y présente, lorsque la sec- ton principale du prisme analyseur coïncide avec le plan de polarisation primitif. , Conservant, comme ci-dessus le système C+M, épais- seur +10"%,019 1 j'interpose additionnéllement la plaque K , épaisseur 0492 4: Je forme ainsi le système ternaire OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 391 C+M+K, dont l'épaisseur totale est +10"",511 A Alors l'observation donne les résultats suivants : ÉLÉMENTS DE L'EXPÉRIENCE. Sens.du mouvement du prisme Ciel partiellement décou- vert; le soleil brille presque constammment, Arc de déviation, compté à partir du plan de polarisation primitif. TEINTE de l’image ordinaire 0. Rouge vif. Rouge orangé. Orangé rougeitre. Jaune très-pâle,un peu rou- geâtre. Jaune très-pâle. Jaune très-pâle, Jaune päle presque blanc, un peu verdâtre, Jaune pâle un peu verdätre, ouvert jaunâtre pâle. Vert jaunitre. Vert jaunûtre. Vert pâle. Vert bleuâtre pâle, ou bleu / verdâtre pâle, / Vert bon un peu bleuître. Î / Vert bleuitre. À Rouge vif. TEINTE de l'image extravrdiuaire E. mm | : Vert bleuâtre. # Bleu verdâtre Bleu très-bon , un peu ver- | dâtre. Bleu. Bleu plus blanchâtre, inten- | sité moindre, | Bleu blanchâtre pâle, uu| peu violacé, | Bleu très-pâle, presque blanc, un peu violacé. Violet bleuâtre, soupcon de rougeâtre par le soleil. Rouge bleuâtre pâle. Rouge bleuâtre plus vif. Rouge meilleur. Rouge meilleur. Rouge vif. Ici, comme dans l'expérience précédente, le rouge que présente l’image O dans la direction du planide polarisation primitif est intermédiaire entre le rouge bleuâtre qui succède au bleu dans le quadrant de gauche, et le rouge orangé qui se voit dans le quadrant de droite. Mais ce rouge bleuâtre de gauche est ici plus rapprochéiduiplan de polarisation primitif; 3a2 DES PHÉNOMÈNES ROTATOIRES car il se forme dans l'arc de déviation +72°—090° ou —18°, au lieu que dans l'expérience précédente il se formait à peu près semblable dans l'arc de déviation — 24°. En conséquence le rouge de O, correspondant à l’arc de déviation o°, a ici un caractère moins distinctement orangé que dans le cas précédent. Du reste, les teintes des deux images se succèdent dans un ordre semblable à mesure que l'on tourne le prisme analyseur , et elles se reproduisent à peu près pareilles pour des déviations seulement plus grandes de quelques degrés ; cela tient au peu d’accroissement d'épaisseur du nouveau système. Mais, comme cela arrive toujours dans les expé- riences de ce genre, la similitude n’a lieu le plus com- plétement que dans la phase de transition où l'image E passe du bleu äu rouge; c’est aussi ce que l'on remarque en comparant ce tableau au précédent. En outre, conformé- ment à la loi générale de ces phénomènes, le point de transition se trouve ici dans un arc plus éloigné du plan de polarisation primitif. En effet, la plaque K ajoutée au système C+M ayant pour épaisseur 0"",492, elle accroît l'arc de rotation des rayons jaunes moyens d’une quantité égale à 24°. 0,492, ou 11°,808; et comme il était déjà de 240°,456 pour le système C+M seul, sa valeur actuelle doit être 252°,26/. Cela le limite, dans le premier quadrant de droite, à l'arc supplémentaire 72°,264, ou environ 72°. Or, nous voyons qu’en effet le passage du bleu au rouge s'opère pour E vers cette déviation. Mais déjà E s’y voit sensible- ment rouge, ce qui sera une circonstance à joindre au ca- ractère progressif de la teinte de passage, pour qu'à ces grandes épaisseurs, de même qu'aux plus petites , elle coïin- OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 393 cide avec l'arc de déviation propre aux rayons jaunes moyens. Pour rendre plus manifeste l'influence de la plaque addi- tionnelle K, je la glisse sur son support de manière à pou- voir voir simultanément le système C+M et le système C+K+M. Alors je prends quelques points de comparaison, comme il suit: TEINTES DE L'IMAGE EXTRAORDINAIRE E. D Système C + M+K. TEINTES DE L'IMAGE ORDINAIRE O. — Système CH M. |Système C+M + K.] Système C + M. fe DE DEVIATION, Bleu verdâtre ou|Bleu verdâtre ou vert bleuä- vert bleuâtre. tre un peu plus pâle. Bleu bon. Bleu bon, différence insen- sible, 0° Rouge. Rouge, différence in- sensible. 34 [Jaune orangé. Orange plus rougeät"® 57 |Jaune verdâtre. Jaune orangé. Violet rougeitre. | Bleu. 67 |Vert jaunâtre, Jaune pâle. Rouge vif. Violet bleuâtre. 76 |Vert pâle. Jaune verdâtre. Rouge vif. Rouge bleuâtre. À de plus grandes déviations, les teintes redeviennent sen- siblement pareilles pour l'œil, dans les deux systèmes. Il faut remarquer, qu'étant vues ainsi ensemble, l’effet de contraste qu'elles produisent dans l'œil peut les faire juger un peu différentes de ce qu’elles paraîtraient étant vues isolément. À ce nouveau degré d'épaisseur, 10,511, la teinte dé- cidément rouge que présente l’image O, lorsque la section principale du prisme analyseur coincide avec la direction de la polarisation primitive, s’écarte déjà complétement de la règle de Newton. Car, selon nos figures générales 2 et 3, qui, pour de telles phases d'épaisseur, sont tracées d’après PXX bo 394 DES PHÉNOMÈNES ROTATOIRES cette règle, l'image O devrait avoir le caractère d'un violet confinant à l’indigo , très-mêlé de blanc. Or, dans l’observa- tion , le rouge y domine trop évidemment pour coïneider avec cette indication. De même, selon le calcul, da teinte E, complémentaire de ce violet, devrait être un jaune pâle, d’après son opposition diamétrale dans la construction neW- tonienne ; tandis qu’en réalité on la voit vert bleuâtre, comme complément du rouge qu'on observe dans O. Continuant à accroître graduellement l'épaisseur, je forme le système C+N, exerçant aussi la déviation vers la droite, et composé comme il suit : C = + 7:878 N = + 3,169 Système résultant... C + N— 11,047 “ Ce cas d'épaisseur est précisément celui que j'ai choisi plus haut comme exemple d'application numérique de la règle de Newton, et pour lequel les résultats du calcul présentent des conditions d'incertitude toutes spéciales. La coordonnée X, qui est un des éléments déterminatifs de la teinte E, y de- vient nulle ou presque nulle, et incertaine pour son signe comme pour sa valeur. En même temps l’autre coordonnée y prend une valeur absolue très-faible. C’est aussi un des points de nos figures générales 2 et 3, qui a été construit d’après les seules indications calculées. On y voit que, selon ces indications, dans la direction de coïncidence avec le plan de polarisation primitif, attribuée ici au prisme analy- seur , la teinte de l’image ordinaire O devrait être un indigo confinant au bleu, et celle de l’image extraordinaire E un orangé confinant au jaune, toutes deux très-mélées de blanc. OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 395 Or, les teintes qui s’observent sont très-différentes de celles- là, quoiqu'elles se rejoignent continüment avec celles ‘que nous avons déjà obtenues dans les épaisseurs un peu plus petites, et avec celles que nous obtiendrons aux épaisseurs un peu plus grandes pour cette même position du prisme analyseur. Voici le tableau des observations, que j'ai étendu exprès à de grands écarts à droite et à gauche du plan de polarisation primitif, afin que l’ordre de mutation des teintes y devint plus manifeste. bo. Ares de déviation, comptés a partir du plan de polarisation primitif. ÉLÉMENTS DE L'EXPÉRIENCE. 11,047 ù JE Épaisseur Sens du mouvement du prisme : Vers la gauche... Li — 11 DES PHÉNOMÈNES ROTATOIRES Bleu presque blanc ou blanc bleuûtre. Blanc violacé, soupçon de rougeâtre. Rouge bleuâtre ou rose très- peu coloré, Rouge bleuâtre rose, plus coloré. Rouge plus vif. Rouge déja un peu orange. Rouge chaud, plus orangé. Orangé rougeâtre. Orangé encore rougeâtre. Orangé plus franc. Jaune un peu orangé. Jaune pâle. Jaune pâle déja un peu ver- dâtre. Jaune pâle un peu verdâtre. Vertjaunâtre presque blanc, Î Vert d’eau pâle. TEINTE de l’image ordinaire 0. Bleu très-bon. Bleu blanchâtre. TEINTE de l'image extraordinaire E. Orangé chaud ou un peu rougeâtre. Jaune pâle blanchâtre. Jaune pâle ur peu verdâtre. Jaune verdâtre pâle. Vert jaunâtrepresqueblanc. | Vert d’eau pâle. { H Vert plus vif, ? Vert bleuître. Bleu verdâtre. Bleu un peu verdâtre. Bleu très-bon. Bleu très-franc, Blen un peu plus pâle, et moins abond! en lumière. Bleu blanchâtre. Blanc un peu violacé, pres- que blanc. Blanc violacé, soupçon de rougeàtre, * Rouge rose ou bleuâtre. “Rouge chaudun peu orangé. [ei j'ai commencé l'expérience en donnant au prisme un mouvement vers la gauche, afin que l'on püt voir immédia- tement le progrès des teintes qui amènent finalement celles PR ES Er ne CE TS LE Lu ee OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 397 qui se produisent sur la direction même de la polarisation primitive, sans qu’on ait besoin de les retrouver par la condi- tion des échanges qui s'opèrent dans les directions distantes entre elles de 90°. On voit, par la continuation de la série, que ces échanges s'opèrent ainsi très-exactement. Mais toutes les indications rapportées dans le tableau ont été individuelle- ment observées. En comparant cette série à la précédente, rapportée dans la page 391, et qui a été faite à une épaisseur un peu moindre, on reconnaît que l'image rouge O qui se forme sur la direction de la polarisation primitive est encore intermédiaire entre un rouge bleuâtre qui pré- cède dans le quadrant de gauche, et un rouge orangé subséquent dans le quadrant de droite; mais ce rouge bleuâtre de gauche est encore ici plus rapproché de la pola- risation primitive que dans l'expérience faite à l'épaisseur 10%%,511. Cette image rouge O, et sa complémentaire E vert d’eau pâle, qui se montrent sur la direction de la pola- risation primitive, discordent toutes deux avec les indications qui se déduisent de la règle de Newton pour l'épaisseur 112,047. Car, selon le calcul que nous avons effectué page 335, et conformément à la construction qu'on en avait faite dans les figures générales 2 et 3, cette règle donne pour O un indigo pâle très-mêlé de blanc, confinant au bleu, et pour E un orangé pâle, pareillement mêlé de blanc confinant au jaune. Mais le calcul détaillé que nous avons fait alors, pour ce cas d'épaisseur montre que les éléments des deux teintes déterminées ainsi par la règle de Newton doivent être rendus très-incomplets, par l’omission des deux divisions termi- nales, rouge et violette, qu’il n’a pas vues, ou auxquelles il 398 DES PHÉNOMÈNES ROTATOIRES n'a pas eu égard. Car, en jetant les yeux sur la figure coloriée que nous avons construite pour ce cas , ou en consultant les valeurs des arcs de rotation que nous a donnés le calcul, on voit que la division terminale rouge a ses plans de pola- risation très-voisins de 180° ; de sorte qu'elle entre presque tout entière dans l’image ordinaire, quand la section prin- cipale du prisme analyseur coïncide avec le plan de polari- sation primitif. Et la division terminale violette entre aussi alors deux fois plus abondamment dans cette même image que dans l'extraordinaire. Il est donc très-concevable que ces divisions négligées dans la règle de Newton aient une influence marquée sur des teintes aussi päles que les formeraient ici, selon cette règle, les autres éléments du spectre. Mais une fois que le progrès des épaisseurs les a ainsi dispersées au point de les séparer notablement des autres, on doit s'attendre que la règle de Newton ne devra plus s’accorder, même approximativement, avec l'expérience, que dans des cas spé- claux; par exemple, lorsque les deux divisions omises se répartiront à peu près en mème proportion entre les deux images, ou lorsque les autres éléments du spectre forme- ront à eux seuls des teintes assez décidées pour n’en être pas modifiées sensiblement. « Cherchons maintenant l'arc de rotation propre aux rayons jaunes moyens pour l'épaisseur de notre plaque e= 11,047. Cet arc étant de 24° pour une épaisseur de 1°, il sera ici, proportionnellement, 24°,11,047 ou 265°1 28. Otant delà 180°, la déviation correspondantedansle premier quadrantde droite sera 85°,128. Or, la teinte E, observée sur cette direction, est un rouge rose ou bleuâtre qui succède aux teintes bleues de E ,et forme le passage de ce bleu devenu très-päle au rouge OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 39g vif qui suit immédiatement. En conséquence, si l'on veut suivre jusqu'à cet ordre d'épaisseur la teinte E qui coïncide avec l'arc de rotation des rayons jaunes moyens , il faudra, comme dans les ex périences précédentes, ajouter, à son caractère général de passage du bleu au rouge, la _ condition de la marquer dans la position du prisme, où le rouge de l'image E, qui succède au bleu , Commence à faire son apparition. Continuant à suivre le progrès des épaisseurs, je forme _ le systèmeC+P, exerçant la déviation vers la droite , et com- … posé comme il suit : im fl C=— + 7,878 DE 3,794 Système résultant … C+P— +: 1,672 rs Ce système a été expérimenté comme les précédents, et _ voici le tableau des observations : 00 TS ÉLÉMENTS DE L'EXPÉRIENCE. Épaisseur Sens du mouvement du prisme ; Vers la gauche Vers la droite Ciel assez beau; le soleil transperce vaguement les nuages, DES PHÉNOMÈNES ROTATOIRES Are de déviation, compté à partir du plan de polarisation primitif. A 7 TEINTE de l’image ordinaire 0. Bleu très-beau, un peu ver- dûtre, Bleu bon, un peu blan- châtre. Bleu pâle, blanchâtre. Bleu blanchâtre ou blanc. bleuâtre. É rose, Blanc avec nn soupcon de rouge violacé, Blanc rougeâtre d'un rouge bleuâtre. Rouge pourpre rose. Rouge pourpre vif. Orangé rougeâtre. Orangé chand, mais moins rougeâtre. Jaune chaud, un peu orangé, Jaune paille. Jaune pâle, très-peu coloré, è Blanc avec un soupçon de jaune. Blanc avec un soupcon de jaune, Blanc avec un soupcon de verdâtre, Blanc avec un soupçon de : / 1 H Î Î Î # TEINTE de l’image extraordinaire E. Orangé chaud, un peu rou- geûtre. Jaune vif, un peu orangé. Janne paille, Jaune pâle, très-peu coloré. Blanc avec un soupcon de jaune. Blanc avec un soupçon de jaune, Blanc avec un soupcon de verdâtre. Vert d'eau très-pâle. Vert bleuâtre. Bleu bon, Bleu bon. Bleu bon, un peu blan- châtre. Bleu pâle, blanchâtre. \ \ Bleu blanchâtre ou blanc bleuâtre, Blanc avec un soupçon de rose. Blanc avec un soupcon de violacé, Blanc rougeâtre, d’un rouge bleuâtre. Ici, les teintes O, E qui s’observent dans l'arc o°, quand la section principale du prisme analyseur coïncide avec la direc- tion de la polarisation primitive, commencent à se raccorder avec les indications de la règle de Newton. En effet, en OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. foi consultant les figures générales 2 et 3, que nous avons cons- truites par points d’après cette règle, on voit que, pour l'épaisseur actuelle, la condition de continuité assigne à l'image ordinaire O une teinte bleue, et par complément à l'extraordinaire une teinte orangée, toutes deux très-mêlées de blanc. Mais ni l’une ni l’autre courbe ne les indiquent aussi excessivement approchantes du blanc que l’observa- tion les montre. Toutefois, dans l’état de päleur qu'elles s'accordent à leur attribuer, on conçoit aisément que l’inter- vention des rayons omis par Newton aux deux extrémités _ duspectre, puisse suffire pour les rapprocher dela blancheur, jusqu’à y rendre à peine sensible un reste de coloration. Si nous cherchons ici le lieu de la teinte E qui répond à l’are derotation des rayons jaunes moyens, à raison de 2/° pour une épaisseur de1””, noustrouverons proportionnellement cet arc égal à 280°,128 pour l'épaisseur actuelle 1 1"",672. Retranchant de là 180°, pour avoir le lieu correspondant de l’image E dans la demi-circonférence de droite, elle y paraîtra dans l’arc de déviation 100°,128. Nous voyons en effet, d’après notre ta- bleau, que c’est là.que s'opère le passage de E du bleu au rouge. Mais, ainsi que cela est déjà arrivé dans les expériences précé- dentes, la nuance rouge est déjà sensible à cette épaisseur, lors- que la section principale du prisme analyseur coïncide avec le plan de polarisation des rayons jaunes moyens. Elle doit même le devenir ici davantage, parce que, d’après les valeurs des arcs ee rapportées dans le tableau de la page 296, ce plan, à l’épais- seur actuelle, forme un angle presque droit avec le plan de po- larisation moyen du rouge terminal ; ce qui amène presque tout ce rouge dans l’image extraordinaire, lorsque l’on place la sec- tion principale du prisme analyseur dans l'arc p;e. J'ai étendu 110.4 Bt 4o2 DES PHENOMÈNES ROTATOIRES le tableau des déviations hors des limites du premier quadrant du cercle, afin que l’on püt y trouver, sans calcul, l'indication des teintes dont on avait le plus d'intérêt à discuter la nature propre ou la succession. Mais on aurait pu les conclure de celles qui sont comprises dans le premier quadrant seul, en ap- pliquant à celle-ci les règles de transport expliquées page 385. Conservant , comme ci-dessus, le système C+P, épaisseur EN: 07 W; J'interpose additionnellement la plaque K, épaisseur 0,492. Je forme ainsi le système ternaire C+P+K, dont l'épaisseur totale est +12"°,164 d': alors l’observa- tion donne les résultats suivants : Are de , déviation , TEINTE TEINTE ELEMENTS compté à partir du de l'image ordinaire de l’image extraordinaire DE I/EXPERIENCE. plan de polarisation . E: primitif. lÉpaisseur 4 5 Bleu de ciel assez beau À Jaune un peu orangé clair. £ mais blanchätre. î (Sens du inouvement { Blanc bleuâtre, presque É { Jaune pâle. du prisme : blanc. % a Vers la droite 4 Blauc, soupe. de rougeûtre, À À Blanc, soupçon de verdâtre. Ciel assez beau; le soleil Blanc rougeûtre rose, 4 d Blanc légèrement verdâtre. brille par intervalles. Î Rose pâle bleuâtre. Vert pâle jaunâtre, Rouge oraugé vif, ; Vert bleuâtre pâle. Rouge plus orangé, brillaut. È Bleu bon, mais légèrement H verdâtre. Orangé très-beau. j : Bleu très-bon. Jaune orangé. É : Bleu beau, mais plus clair, Jaune orangé plus clair. 4 k Bleu plus blanchâtre. î Jaune un peu orangé clair.f Bleu de ciel assez beau, mais blanchâtre, tan —. Pere + e RS RS à IST SN PE CP TEE RÉ er it agé ho ct mnt pains erre, LRU -e< nur, OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 403 Ici les teintes des deux images qu’on observe dans l'arc 0° se retrouvent en concordance sensible avec les indications de la règle de Newton, quant au caractère dominant de bleu et de jaune qu'elle leur attribue et qui les distingue. On peuts'en convaincre en les comparant aux indications données par cette règle, dans les figures 2 et 3, pour une épaisseur à peine différente, dont les résultats peuvent être appliqués à celle-ci par continuité. Si nous cherchons ici le lieu de la teinte E qui répond à l'arc de rotation des rayons Jaunes moyens, à raison de 24° pour une épaisseur de 1", nous trouverons proportionnellement cet arc égal à 294°,336 pour l'épaisseur actuelle 127,264. Retranchant de là 180° pour avoir le lieu correspondant de l'image E dans la demi-circonférence de droite, elle y paraîtra dansl’arc de déviation 1 14°,336. Conséquemment elle se pro- duira dans l’image O, avec le même caractère et par les mêmes phases de, succession, sur l'arc de déviation complémen- taire 24°,336. En effet, d'après notre tableau, c’est là que s'opère le passage de O du bleu au rouge ; et la nuance rouge bleuâtre , ou rose, y est déjà sensible, comme nous l'avons remarqué dans les séries qui ont précédé celle-ci. Pour passer à une épaisseur un peu plus grande, j'enlève a plaque K ; et,conservant le système C+P, j'y ajoute la pla- que L, ce qui forme le Système résultant C+P+L exerçant la déviation vers la droite, et composé comme il suit : GC+P=—= + 11,672 4—=+ 1,787 Système résultant... C + P + 4 — + 13,459 1. re 404 DES PHÉNOMÈNES ROTATOIRES Alors l'observation a donné les résultats suivants : ÉLÉMENTS DE L'EXPÉRIENCE. Épaisseur Sens du mouvement du prisme : Vers la droite Ciel assez beau; le soleil brille par intervalles. TEINTE de l’image ordinaire ©. Blea beau, un peu verdâtre., Bleu plus franc, mais blan- È châtre. Bleu plus blanchâtre. Bleu de ciel päle. Bleu presque Llane, ou blanc à peine bleuûtre. Blanc sensiblement, avec un soupcon de violacé, Blanc rosâtre ou rose blan- châtre. Rose päle, Rouge plus vif, mais encore pâle. Rouge chaud, un peu orang. Rouge plus vif et plus orangé. Rouge encore plus orangé, ? Rouge orangé. orangé rougeâtre. î x Bleu bon. TEINTE de l'image extraordinaire E. Rouge orangé, Jaune orangé. Jaune päle. Jaune très-pâle, presque! blanc. Jaune très-päle, avec un! soupçon de verdâtre. Vert pâle, presque blanc. Vert pâle, presque blanc, ou blanc à peine verdâtre. Vert plus vif, mais encore pâle. | Bleu blanchätre. Bleu meilleur. “Bleu bon, un peu verdâtre.| Les deux teintes O, E qui s’observent dans l'arc de dévia- tion o°, lorsque la section principale du prisme analyseur coïncide avec le plan de polarisation primitif, s'accordent encore ici avec les indications de la règle de Newton quant au caractère dominant de bleu verdätre et de rouge orangé qui leur est propre. Peut-être, le rouge mélé d’orangé que donne l'observation est-il un peu moins franc que ne l'indiquerait OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 4o5 le calcul. Mais, indépendamment de l'effet des portions ex- trêmes du spectre dont la règle ne tient pas compte, des teintes formées par des mélanges de rayons aussi complexes que ceux que nous étudions ici ne peuvent vraisemblablement plus être assimilées à aucune nuance du spectre primitif, avec une approximation d'identité où l'œil ne trouve pas de dif- férence sensible. De même qu’en exposant sa construction, Newton nous prévient que les teintes composées qui confi- neront à la limite commune du rouge extrême et du violet extrême, offriront à l’œil un violet pourpre plus brillantque le simple, il doit y avoir, surtout dans les mélanges complexes, des corrections analogues à faire aux assimilations immé- diates que sa règle indiquerait. Si nous cherchons le lieu de la teinte E qui coïncide avec l'arc de rotation des rayons jaunes moyens, nous aurons ici pour cet arc 24°. 13,459 ou 323°,016. La teinte E, qui y corres- pond dans la demi-circonférence de droite, se montrera par conséquent dans l’are 143°,016. Cela amène la même teinte, avec les mêmes phases de variation pour O, dans l’arc complé- mentaire du premier quadrant 53°,016. En effet, à ce degré de déviation, notre tableau nous montre que l’image O a passé du bleu précédent très-distant au rose päle, qui devra aussi caractériser la teinte de passage de l'image Æ, pour cette épaisseur. Il n’y aurait évidemment aucune utilité pratique à vouloir la définir pour des épaisseurs plus grandes. Ici même, la transition de nuances qui y conduit est déjà trop lente pour fournir un caractère de fixation suffisamment sûr, auquel on puisse reconnaître la déviation précise qui y correspond. Aussi n’ai-je jamais conseillé de l’employer pour suppléer au 406 DES PHÉNOMÈNES ROTATOIRES verre rouge, dans les observations courantes, qu'à des épais- seurs beaucoup moindres, où la rapidité de son passage la fait distinguer bien plus nettement. Toutefois je prolongerai encore ici ce genre d'épreuves à deux phases d'épaisseur plus grandes que les précédentes, pour continuer à y éprouver les indications de la règle de Newton avec l'expérience, quand la section principale du prisme analyseur coïncide avee le plan de polarisation primitif, et pour suivre jusque dans ses dernières nuances les caractères de la teinte complexe que prend l’image extraordinaire sur l'arc de déviation des rayons jaunes moyens. J'emploie d’abord à cette étude la plaque simple Y, dont l'épaisseur est 17°",103 ré Elle donne les résultats con- signés dans le tableau suivant : ÉLÉMENTS DE L'EXPÉRIENCE. MSens du mouvement du prisme : Vers la droite OPÉRES DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 407 Arc de déviation, compté à partir du plan de polarisation primitif, TEINTE de l’image ordinaire 0. Orangé rougeâtre, ou plu-} tôt rouge un peu orangé. : Blanc à peine jaunâtre. É Blanc à peine jaunâtre. Blanc sensiblement. Blanc, soupçon de verdâtre, Blanc un peu verdûtre. Blanc plus verdâtre. Vert d’eau très-päle, pres- que blanc. Bleu verdâtre, Bleu verdâtre , bon. Bleu pâle, mais meilleur. Bleu bon, encore un peu ? verdâtre. Î TEINTE de l'image extraordinaire E: | , {Bleu un peu verdâtre, £ Î Blanc bleuâtre. Blanc sensiblement, à peine bleuâtre ou rougeûtre. Blanc, soupcon de rou- geâtre. Blanc un peu rougeitre. Blanc un peu rougeître. Blanc plus rougeitre, ou rouge blanchâtre. Rouge pâle, un peu jau- nâtre. Rouge jaunâtre, Oraugé rougeitre. * Orangé rougcâtre ou rouge orangé. : Rouge orangé ou orangé rougeâtre, Ici les deux teintes O,E, qui s’observent dans l’are de dé- viation 0°, s'accordent très-bien, dans leur nuance dominante, avec les indications de la règle de Newton. Cela peut se voir en consultant, pour cette épaisseur, nos figures 2 et 3. Car les deux courbes qu’on y a tracées présentent justement des points qui ont été calculés d’après cette règle, pour une épaisseur à peine différente. L’arc de rotation décrit par le plan de polarisation des rayons jaunes moyens, s'obtiendra en multipliant 24° par 17,103. Il sera ainsi égal à 410°,472. 408 DES PHÉNOMENES ROTATOIRES Retranchant donc de là une circonférence complète ou 360°, le reste 50°,472 exprimera l'arc de déviation dans lequel il faut placer la section principale du prisme analyseur pour qu'elle coïncide avec ce plan, et qu'elle donne à l'image E cette teinte intermédiaire succédant au bleu, et précédant le rouge, que nous avons appelée la teinte de passage. Elle la lui donne en effet dans cet are même, avec ce caractère de transition au rouge naissant que nous lui avons vu constam- ment conserver. Mais la grande dispersion des plans de polarisation la rend trop indécise, et rend ce passage trop peu précis, pour qu'elle puisse servir comme déterminatif de position, comme dans les épaisseurs moindres, auxquelles nous avons restreint son usage. Enfin, comme dernier sujet d'expériences, je forme le système ternaire composé des plaques ci-après désignées : V—= + 17103 47 N— 3,169 = 1,118 Système total... Y4+N+X— + 21,390 47 Je dirai dans un moment par quel motif j'ai choisi cette combinaison d’épaisseurs ; mais je commence par rapporter le tableau des teintes que les deux images ont ‘présentées dans les diverses positions du prisme analyseur. OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 4og 3 TEINTE TEINTE ÉLÉMENTS de l'image ordinaire de l'image extraordinaire DE L'EXPÉRIENCE. polarisation 0. E. primitif, Épaisseur.…. ae #7 Blanc légèrement bleuâtre| Rouge pâle ou blanc rou- ou verdâtre. geûtre. Sens du mouvement Blanc légèrement bleuâtre.|Rouge päle blanchitre. du prisme : Vers la gauche Bleu verdâtre pâle. Jaune rougeitre ou rouge jaunûtre. Blanc à peine blenâtre ou|Jauue un peu rongeitre, verdâtre. pile, presque blanc. Blane, avec un soupcon de|Blanc, avec un soupçon de rougeâtre. bleuitre. Blanc , avec un soupçon de|Blanc, avec un soupçon de | rougeâtre. bleuitre. Blanc à peine rougeâtre. |Blanc légèrement bleuâtre ou verditre, Blanc rougeâtre ou jaunâtre.| Bleu, soupcon de verdätre. | Rouge jaunâtre pâle. Bleu verdâtre pâle. Rouge jaunâtre. Bleu verdätre, meilleur que \ le précédent. Jaune rougeâtre ou rouge| Bleu verditre päle. jaunâtre päle, presque blanc. À cette grande épaisseur, les deux images sont toujours peu colorées, et leurs teintes sont généralement indécises. Le plan de polarisation des rayons jaunes moyens a décrit un arc de rotation total égal à +24°. 21,390, ou +513°,36. Retranchant de là 360°, le reste + 153°,36 exprime son écart actuel à partir du plan de polarisation primitif. Donc si la teinte de passage conserve encore ici un caractère discernable, on la verra dans l'image E en amenant l'index du prisme analyseur sur cette direction vers la droite, ou sur la direction supplémentaire —26°64 vers la gauche, ce qui place la section principale du ; T. XX. 55 i r 10 DES PHÉNOMÈNES ROTATOIRES prisme dans une même situation angulaire, et produit les mêmes images. Aussi la teinte de Ese trouve-t-elle alors être un blanc rougeâtre qui succède au bleu verdâtre, et précède le rouge jaunâtre dans le sens de la rotation. Et cette même teinte reparaît dans l’image O avec des caractères pareils, à la déviation complémentaire —26°,64 +90° ou +63°,36, comme en effet notre tableau le montre. Mais ce caractère de transition est la seule particularité qu'on y puisse constater, et elle devient beaucoup trop indécise pour fournir un in- dice ‘déterminatif de déviation. J'ai effectué, pour ces deux derniers systèmes, les épreu- ves de décomposition prismatique que MM. Fizeau et Fou- cault avaient indiquées, et dont j'ai déjà parlé à la page 257. Je vais expliquer ici le procédé qui m'a paru le plus com- mode pour les réaliser dans mon appareil, et pour les y observer dans les ares de déviation où leurs particularités pouvaient offrir le plus d'intérêt. Prenant done comme exemple ces deux systèmes, dont les épaisseurs respectives sont +710 get +21 390 7 , je calcule d’abord, pour chacun d'eux, les ares de déviations de tous les plans de polarisation qui limi- tent les diverses divisions homochromatiques , depuis la raie B du rouge, jusqu’à la raie H du violet. Cela se fait au moyen des nombres rapportés dans le tableau de la page 284. Em- ployant alors la lettre À, affectée d'indices pareils, pour représenter les arcs a de ce tableau multipliés par chaque épaisseur, j'obtiens leurs valeurs agrandies, dans les deux systèmes, telles qu'on les voit ici rassemblées. OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. fai ARCS DE ROTATION PROPRES AUX PLANS DE POLARISATION QUI LIMITENT LES DIVERSES DIVISIONS HOMOCHROMATIQUES A LEUR SORTIE DES SYSTÈMES CONSIDÉRÉS. DÉSIGNATION DES RAYONS SIMPLES Plaque Y. Système Y ÆN + X. auxquels appartiennent s = L ae 4 Épaisseur +- 17,103 Épaisseur + 21,390 LES ARCS DE ROTATION CALCULÉS. Commencement du rouge finale, = 262041 7 en 328850 7 raie B de Fraunhoffer Rouge extrême de Newton... |A, — 241 — 374,248 | Limite du rouge et de l’orangé. | A’ — 350,174 437,888 Limite de l’orangé et du jaune. | A — 381,589 — 477,238 Limite du jaune et du vert A; — 439,143 1 549,218 Limite du vert et du bleu.....| A! — 513,818. ,— 642,611 Limite du bleu et de l'indigo.. | A; — 591,316 — 939,534 z © E = A [A a A a sa E o à L1 Le] Limite de l'indigo et du violet. | A, — 644,453 4 805,990 Violet extrême de Newton A’ — 754,040 943,046 Fin du violet terminal raie H are = 806,370 Fraunhoffer. .......... SN es A, 1008,493 Si l’on se donne l’arc de déviation « dans lequel on veut pla- cer la section principale du prisme analyseur, on peut déjà, d’après ces nombres, définir les rayons qui doivent manquer totalement dans l’une ou l’autreimage. Alors ces rayons de- vront répondre à des intermittences, ou (qu’on me passe le mot) à des trous noirs, sur les spectres qu’on obtiendra, en ob- 52. 412 DES PHÉNOMÈNES ROTATOIRES servant à la fois les deux images, à travers un prisme très-dis- persif, dont l’arête sera rendue parallèle à la section principale de l’analyseur, afin que ces spectres s'étendent, en correspon- dance,surdeslignes distinctes perpendiculaires àcettesection. En effet, ayant formé les différences A —4+ pour chacun des nombres de notre tableau, il n’y a qu’à chercher les points du spectre total, pour lesquels ces différences se trouvent passer par 0° 180° ou 360°. Ce seront les lieux des trous qui devront exister dans le spectre de l’image extraordinaire E; on dé- terminera pareillement les points pour lesquels la différence A—4 passe par Ægo° ou H+270°. Ce seront les lieux des trous qui devront exister dans lespectredel’imageordinaire O. L’un et l’autre résultat sera spécial pour la position assignée au prisme analyseur par la valeur de 4. Mais l'application de ce calcul sera singulièrement facilitée et rendue plus instructive, en s'aidant de cercles coloriés, sur le contour desquels on aura marqué la distribution an- gulaire des plans de polarisation qui limitent les diverses divisions chromatiques, ce qui n’est proprement que cons- truire les valeurs des arcs À, à partir d’un diamètre repré- sentant la direction du plan de polarisation primitif. C’est ce qu'on a fait ici pour les systèmes Y et Y+N+X, de même que dans les autres figures rapportées antérieure- ment, d’après mon Mémoire de 1818. Ayant donc construit toutes ces figures sur une échelle de mème grandeur, faites découper, dans une feuille de métal, une sorte d'étoile à quatre rayons exactement rectangulaires, à pointe effilée, et ayant une longueur égale au demi-diamètre de vos cercles coloriés. Puis, au centre C de l'étoile, faites souder un pivot avec lequel vous percerez ces cercles à leur centre, et qui se ‘ . ñ / : PARTS à 46 at à nr intranet antennes nee 0 please ELA NTI | 1p 15 ; * fi Vh SUITE ’ È ' L'ANT | 17 234 ’ : " ,.. … 'ranes, Re LS 2 lot 4 ef era up asog : | Ês LEA L ie y « Ré ARE aies nr de ee needs mt — = Fete von men à mn di TETE ETES CE ET Poe | 206br070m ë | : LUS NT) à PPT VIN TTL ET TEE DÉCABRE TPE UE CT TA E7 aul 1.4 1 situs }enéblatdutss (06 datrohious J$%86)upi'ohntme 2114 sous enalxtardn fat E \ 5h deyunebrmiorit 34 1» up ubruc FRA ue-guturx L znebloto bo Î MU 4 bio 16 sabot sbratg ul LA ou enélitate lis à. he à | A Î [| L,L£ 313 sr BODAIONt 54 Be 5374 ALL 418104 . 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NOMBRE D'INTERMITTENCES qui peuvent exister simullanément DANS LES SPECTRES DISPERSES DE L'UNE OÙ DE L'AUTRE IMAGE mm" LE PLLS PETIT © dans l’une et 0 dans l’autre. dans l’une et o dans l'autre . dans l’une et 1 dans l'autre dans l’une et 1 dans l'autre . dans l’une et 2 dans l’autre . dans l'une et 2 dans l'autre . dans l'une et 3 dans l'autre . dans l'une et 3 dans l'autre . —— LE PLUS GRAND 1 dans l’une et o dans l'autre . 1 dans l’une et 1 dans l’autre dans l'autre 2 dans l'une et 2 dans l'une et 2 dans l'autre 3 dans l’une et 2 dans l’autre 3 dans l'une et 3 dans l’autre 4 dans l'une et 3 dans l'autre 4 dans l'une et 4 dans l'autre LIMITES D'ÉPAISSEUR auxquelles ces divers nombres d’intermitleuces peuvent s'obs:rver, 1 DÉSIGNANT L'ÉPAISSEUR pour lüquelle l'amplitude de dispersion serait un quadrant exuet moindre que e, plus grande que e, et moindre que plus grande que 2e, et moindre que plus grande que 3e, et moindre que plus grande que 4e, et moindre que 5 plus grande que 3e, et moindre que plus grande que 6e, et moindre que ÿ plus grande que 7e, et moindre que Académie des sciences, À XX, p OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 413 fixera par un bouton derrière leur plan. Enfin, sur deux des branches opposées de l'étoile, tracez la lettre S pour désigner la section principale du cercle analyseur, comme je l'ai _ figuréici: Alors, en faisant tourner l'étoile concentriquement, les parties du contour colorié où pointeront les branches SS seront celles où devront se montrer les trous du spectre de l’image extraordinaire E, dans la position assignée à la section principale ; etles parties sur lesquelles pointeront Îles deux branches rectangulaires seront celles où devront pa- raître les trous de l’image ordinaire O, pour cette même position. Afin de les voir nettement, je restreins le faisceau polarisé, en y interposant normalement un diaphragme percé _ à son centre d’une fente étroite, et qui tourne dans son propre plan, de manière qu’on puisse toujours aligner la fente sur A direction actuelle de la section principale du prisme ana- lyseur. Le prisme dispersif qui sert ensuite pour réfracter … séparément les deux images est amené derrière celui-là par … un bras tournant qui l’attache à l’alidade du cercle divisé, - et permet de lui donner deux mouvements de rotation rec- tangulaires, par le secours desquels on le place dans le trajet … du faisceau transmis, ou on l’en retire, selon que l’on veut, ou 414 DES PHÉNOMÈNES ROTATOIRES que l'on ne veut pas s’en servir. Le nombre des trous qui peuvent apparaître isolément ou simultanément, dans les spec- tres perçus à travers une même plaque, est toujours compris entre des limites dépendantes du nombre de quadrants, sur lesquels la totalité des plans de polarisation se trouve répar- tie. Cela résulte de ce que les points du contour colorié où les pointes de l'étoile peuvent aboutir, sont nécessairement séparés par un ou plusieurs quadrants complets. On peut aisément, d’après cette condition, prévoir la possibilité de leur existence et de leur multiplicité, plus ou moins nom- breuse. Le tableau placé ici, en regard de la page 413, montre les premiers termes de leur succession ainsi définie, et l'on pourra l’étendre aussi loin que l'on voudra par les mémes considérations. En se guidant sur les quatre premières lignes de ce tableau, on peut calculer tout de suite les deux nombres extrêmes d'intermittences, c’est-à-dire, le plus petitetle plus grand que l'on puisse observer à travers une plaque d'épaisseur donnée, sans avoir besoin de passer par les termes intermédiaires de la série. Pour cela, il suffit de remarquer qu'une amplitude de dispersion égale à 1 circonférence complète donne néces- sairement 2 intermittences dans chaque image, quelle que soit la position de la section principale du prisme analy- seur ; et si l'amplitude est égale à un nombre quelconque » de circonférences , le nombre des intermittences nécessaires de chaque image est évidemment 22. C'est pourquoi je n'ai pas mentionné dans le tableau ces cas de circonférences rigoureu- sement complètes, qui ne se réaliseront jamais sans fraction; et, par le même motif, je n’ai pas spécifié non plus, dans la dernière colonne du tableau, les limites d'épaisseur qui se ET 1 1 | | | | , OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 415 trouveraient y correspondre. Ces cas exceptés, soit P l’épais- seur de la plaque proposée, que je suppose exprimée en parties du millimètre; et admettons que le faisceau polarisé, sur lequel on opère, contient toutes les espèces de rayons lumineux compris entre les raies B, H de Fraunhoffer. Alors, d’après le tableau de la page 284, l'amplitude totale de dis- persion des plans de polarisation, pour une épaisseur 1 mil- limètre, est 31°,7738. En multipliant ce nombre par P, le produit exprimera l'amplitude actuelle X, propre à la plaque considérée. Cela fait, on divisera X par 360° ou C, pour en extraire le nombre x de circonférences complètes qu'il pourra contenir, lequel sera donné par la partie entière du quotient; et, en représentant le reste par R, l'amplitude X sera ainsi décomposée en 7C +R. Alors l'arc R étant moindre qu'une circonférence complète, se trouvera nécessairement compris dans une des quatre premières lignes de notre ta- bleau. On prendra, sur cette ligne, les nombres d’intermit- tences écrits dans la troisième et la quatrième colonne; puis on ajoutera à chacun 2n. La somme exprimera le plus petit et le plus grand nombre d’intermittences que l’on puisse observer, isolément ou simultanément, dans l’une ou l’autre image, à travers l'épaisseur donnée P. On arrivera aux mêmes résultats, et par un calcul encore plus simple, en se fondant sur les indications contenues dans la dernière colonne de notre tableau. L'épaisseur e,, dont les multiples entiers y servent de terme de transition, pour passer de chaque ligne à la ligne suivante, a été obtenue en divisant 90° par 31°,7738. C'est donc l'épaisseur à travers laquelle l'amplitude totale de dispersion du spectre, compris entre les raies B, H de Fraunhoffer, est égale à un quadrant exact. 416 DES PHÉNOMENES ROTATOIRES Cela posé, l'épaisseur P étant donnée, on retranchera deson logarithme celui de e, ; et, repassant aux nombres, on aura P sous la forme Ke,, où K sera généralement composé d’uni- tés entières, suivies de décimales. Alors on extraira du nombre K les multiples de 4 qui peuvent y être contenus, ce qui le mettra sous la forme 4n+r. Chaque unité de n répondra à une circonférence complète, donnant lieu à deux intermittences nécessaires; de sorte que le nombre total de celles-ci sera 27. Alors le reste 7, répondant à la portion d'épaisseur re,, qui complète P, se trouvera nécessairement compris dans une des quatre premières lignes de la der- nière colonne. On ajoutera donc 27 aux nombres écrits dans cette ligne, et l’on aura le nombre total d’intermittences qui peuvent s’observer à travers la plaque dont l'épaisseur est P. Prenons comme exemple la plaque Y, et le système Y+N+X, dont les épaisseurs respectives sont 17"",103 et 21,390. En les transformant en multiples de e,, par l’ap- plication des logarithmes, comme je viens de le dire, on trouve : Plaque Y —6,03808e, — 4e,+2,03808e, Système Y+N+X—7,55157e, = 4e, +3,55157e, Pour l’une comme pour l’autre, le multiple entier 7, est 1, ce qui donne deux intermittences nécessaires. Quant aux restes re, , celui de Y répond à la troisième ligne de la der- nière colonne du tableau, et celui de Y+N+X à la qua- trième. Ajoutant donc deux unités aux nombres d’intermit- tences inscrits dans ces lignes, on aura en résultat: OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 415 NOMBRE TOTAL D'INTERMITTENCES qui peuvent exister simultanément dans les spectres dispersés de l’une et l’autre image. A LE PLUS PETIT. LE PLUS GRAND. rom Plaque Y = 17,103|3 dans l’une et 3 dans l’autre.|4 dans l’une et 3 dans l’autre. Système Y HN + X — 21,390|4 dans l’une et 3 dans l’autre.|[4 dans l’une et 4 dans l’autre. Ces nombres sont conformes à ceux que présentent la septième et la huitième ligne du tableau , que l’on a étendu exprès jusqu'aux multiples de e, , qui embrassent les deux épaisseurs considérées, afin d'offrir cette vérification maté- rielle de la règle. Si, dans l'application de l’une ou de l’autre méthode, le reste R, ou re,, se trouvait exactement nul, ce qui est un cas idéal, le nombre total des intermittences, pour l’une comme pour l’autre image, serait invariable et égal à 2», n désignant le multiple entier de C ou de 4e, , que contien- drait l'amplitude ou l'épaisseur proposée. La même règle donnera les limites analogues relatives à chacune des divisions homochromatiques que l’on voudrait considérer à part. Il suffit de l'appliquer à l'amplitude X, sur laquelle les plans de polarisation qui la limitent se trou- vent actuellement répartis. Par exemple, si l'on forme les différences des valeurs consécutives de A dans la colonne du tableau de la page 411 qui est relative à la plaque Y, elles exprimeront ces amplitudes pour toutes les divisions homo- chromatiques dans l'épaisseur 17,103 qui lui est propre. RARE 53 418 DES PHÉNOMÈNES ROTATOIRES Or une seule, celle de la division violette du spectre newto- nien, embrasse plus d’un, et moins de deux, quadrants, étant égale à 109°,587 ; toutes les autres sont moindres qu'un qua- drant complet. Celle-là sera donc, et sera seule, dans la condition exprimée par la seconde ligne du tableau inséré à la page 413. C’està-dire qu’on pourra disposer la section prin- cipale du prisme analyseur de manière à y produire simul- tanément une intermittence dans chaque image; et l’on y parviendra en amenant cette section principale vers le com- mencement ou la fin de l’arc A’, — A';, à toute distance de ses extrémités qui n'excédera pas 19°,5870. Mais toutes les autres divisions du spectre , ayant leurs plans de polarisation propres répartis sur moins d’un quadrant, seront dans le cas de la première ligne de notre tableau. Conséquemment, de quelque manière qu’on dispose le prisme analyseur, on pourra seulement y obtenir une intermittence dans l’une ou dans l’autre image; jamais dans les deux à la fois. Considérons, sous le même point de vue, les nombres de la page 411, qui sont propres au système Y+N+X, dont l'épaisseur est 21°°,390 ; et cherchons quelles divisions chro- matiques pourront y admettre simultanément une intermit- tence dans l’une et l’autre image. Nous trouverons que cette possibilité aura lieu pour les seules divisions verte, bleue et violette du spectre newtonien. En effet, leurs amplitudes de dispersion seront respectivement : A',— A°=93,393; A—A',— 96,923; A’,—A'— 137,056. Ces ares étant plus grands qu'un quadrant, et moindres que deux , rentrent dans la condition exprimée par la se- conde ligne de notre tableau. Ainsi, ils comportent indivi- OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 419 duellement les nombres d’intermittences qui y sont inscrits. Ce même système offre, pour l'observation, une particu- larité remarquable, dont la prévision est rendue sensible par la figure coloriée qui s’y rapporte. Lorsque la section princi- pale du prisme analyseur est rendue coïncidente avec le plan de polarisation primitif, on voit qu'elle traverse la di- vision terminale rouge qui précède le rouge newtonien. I doit donc se produire alors une intermittence dans ce rouge, et c’est en effet ce qu’on observe. Mais on voit aussi, par la figure, que le commencement de ce même rouge, qui confine à la raie B, a ses plans de polarisation notablement écartés de cette direction. D'après cela, on peut présumer que cet écart sera assez grand pour que les éléments les moins ré- frangibles entrent en proportion perceptible dans l’image ex- traordinaire qui se produit lorsque le prisme analyseur est ainsi dirigé. C'est en effet ce qui arrive encore; car l'inter- mittence dont il s’agit se voit très-distinctement bornée de ce côté par un petit filet d’un rouge sombre, qui appartient nécessairement au rouge dont il s’agit. En général, l'expérience m'a toujours paru conforme aux prévisions déduites des nombres, tant pour ces deux der- niers systèmes que pour les systèmes plus minces. Les inter- mittences qu’on y observait se sont toujours trouvées placées comme l'indiquait le calcul, d’après la position donnée à la section principale du prisme analyseur, parmi les plans de polarisation dispersés. Ces épreuves, dans leur latitude d'in- détermination inévitable, vérifient donc les valeurs que j'ai attribuées aux rotations, tant absolues que relatives, des plans de polarisation propres aux divers rayons simples. Mais les confirmations qu’elles en donnent sont nécessairement 53. 420 DES PHÉNOMÈNES ROTATOIRES bornées par les conditions de visibilité que j'ai expliquées dans la page 259. J'ai dit alors qu'on ne pourrait pas espérer d'obtenir par ce genre de phénomènes des vérifications plus sûres, en cher- chant à multiplier beaucoup les intermittences, pour les res- serrer individuellement dans des amplitudes moindres, dont la finesse offrirait des indices précis de direction. En effet, pour obtenir ce résultat, il faudrait donner aux plaques observées des épaisseurs si grandes, que l’on devrait justement alors redouter les graves erreurs qui pourraient être pro- duites par le défaut d’exacte continuité du cristal, et par l'influence qu'aurait le moindre défaut dans le parallélisme de leurs surfaces , dans leur rectangularité sur l’axe, ou dans leur perpendicularité aux rayons incidents qu'on y trans- mettrait. Comme exemple de pareils cas, supposons seule- ment que l’on voulüt obtenir deux intermittences constantes dans la division rouge du spectrenewtonien, quelle que fàt la position du prisme analyseur; cela exigera que les plans de polarisation propres à cette division soient répartis dans une amplitude angulaire qui embrasse 360°. Or, d’après le tableau de la page 284, à travers l’épaisseur de 1°”, cette am- plitude est 2°,9752. Si l’on veut qu'elle s’élève à 360°, il fau- dra, par proportion, que l'épaisseur devienne égale à <= où 121°°,000 ; et si l’on veut agrandir davantage les couples des intermittences dans la même division, il faudra faire croître l'épaisseur proportionnellement à ce nombre. Or déjà, l'évaluation à laquelle deux seulement nous conduisent, tombe dans les diverses conditions d'incertitude que je viens de signaler. Et pourtant cette épaisseur, déjà si considérable, ne don- OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 41 nera encore, dans l'étendue totale des spectres, que des nom- bres d’intermittences assez restreints. En effet , si on la trans- forme en multiples de e,, par la seconde règle que j'ai donnée, on trouve : 121°°,000 — 42,7181e, — {oe,+2,7181e,. Le multiple de 4e’ étant 10, indique 20 intermittences constantes. Le reste qui s’y ajoute rentre dans les conditions de la troisième ligne de notre tableau. Ajoutant done 20 unités aux nombres qui y sont inscrits, on aura pour l'é- paisseur assignée 121,000 : Le plus petit nombre d’intermittences simultanément observables............. 21 dans l’une des images, et 21 dans l’autre. Le plus grand...,.,.....,.....,,... 22 dans l’une et 21 dans l’autre. Indépendamment des incertitudes attachées à une épais- seur déjà si grande, une pareille énumération ne pourrait pas se faire avec assez de sûreté dans mon appareil, surtout pour les portions les plus réfrangibles des deux spectres. Mais en prenant beaucoup de précaution pour assurer le pa- rallélisme des surfaces et la perpendicularité des incidences, peut-être, si l’on avait un canon de cristal de roche bien pur de cette longueur, deviendrait-elle exécutable sur des spectres formés par une lumière très-intense, et projetés sur des ta- bleaux blancs très-éloignés. Pour rassembler dans une série continue toutes les phases de coloration que l’on peut observer à travers les pla- ques de cristal de roche perpendiculaires à l’axe, quand la section principale du prisme analyseur coïncide avec le plan de polarisation primitif, j'ai employé un compensateur à épaisseur variable, construit par M. Soleil, en agrandissant l'amplitude de son action par l'addition successive de pla- 422 DES PHÉNOMÈNES ROTATOIRES ques agissant dans le même sens, dont les épaisseurs étaient mesurées au sphéromètre , de manière à étendre les “observations jusqu'aux dernières limites où les couleurs des images qui se forment dans cette portion du prisme analy- seur peuvent suffisamment s’apprécier. Les résultats ainsi ob- tenus sont réunis dans le tableau placé en regard de cette page; et l’on pourra en comparer les indications à celles de nos figures 2 et 3, qui ont été construites d’après la règle de Newton, pour cette même position spéciale du prisme ana- lyseur. J'ai marqué par un astérisque * les termes de la série à chacun desquels il a fallu fortifier l’action de l’appareil par l'interposition d’une plaque additionnelle, pour l’étendre à des épaisseurs qu’il n’aurait pas pu atteindre sans cet arti- fice; ce que je n'ai fait qu’en prenant soin de vérifier expé- rimentalement l’exacte identité des images obtenues avec et sans la nouvelle plaque, dans le voisinage du terme où le gement s'opérait. suibpul otiprrol san eiiben faq pts diète ses eomphilq-nal vais dress FU ARE ; dupe ist ditiunieg donnent 26 men en AAIAAUPAO BOAT A0 AEMNTI ñ f Rte: HU ", ü ee = ee cé nt 0 eo dot Hodgfut be. : RAT PL + ARR COCOCOF ENT EE PERRET EEE CES RER a CET PCT TELE . té op nes Mons us tante PUEQ0IE Pa AVR dE aLhoust 2 ossèdah Farg atrogguodi Robe église me nn - ot ér à “bg eh Fred | de". rihouti 997 00 20 orgunsl Mon bleue n- "re Dirt pauimt 9! pà vb trs 4 causa 0080 avis ,91hS avion Métis die 2e maubtl aatjrersp art él ire enr rŸ he! ASE nef sopreny qutécntd init er ge ee. Vandett tits awwek ! 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Dors és te à spéndiaunt suis de uni + 28.1, © eff 100 SIA DENTE Sete Dino tro, surtt sm d quasi “oipebreg self 4 errau Rapmeldimsqui age rer 61 Are came vue mot ta nennathrenr : “| Ho ne pipe vi ind CIO NL (IE FESCTT mai à à se lait sermtduehs nËE cp tra re | ee au ge emdage rive j La Genge, cosleur Éebehalie. 42)". 7" then afin, réneus crie ha a bn tiutesé Lies Et ALTER f ds i fe * f | ‘ ps DE she es his À . ne) APE SE 4 [XX momie 20h és 14 ; j F.— Tableau présentant toute la succession des teintes des images ordinaire, extraordinaire O, E, qui s'observent à travers les pl ers les p l'yncrat . aques de cristal de roche perpend FR idiculaires à l'axe, lorsque ec! incl a du prisme analyseur coïncide avec le plan de polarisation priir queyla section printcipals P nitif isseurs idre les E : = +. z = H - : En - £ £| TeINTE DE L'IMAGE ORDINAIRE TEINTE DE L'IMAGE EXTRAORDINAIRE DE TEINTE DE L'IMAGE ORDINAIRE | urs des EP | REMARQUES SL £ DE L NAIRE L'EINTE DE L'IMAGE EXTRAORDINAIRE "il 0. | 2 à E | ] analy- HE à CR 0. E REMARQUES WE EE EE nsi ob- = evo er ne Re de et 10,0* | Rouge vif non violacé RE E d le cette Eden ne .… | Bleu blanchâtre, intensité très-faible,…... | 10,7 Rouge vif res an PA % , ; j 7 || CA CPL CN NP EE Ÿ trosstes sensiblement _. .… | Bleu blanchätre plus abondant... 5 OO AE x AC | LE EE ARE lon | Blanc sensil HhnbdT oo ice ro Orne tnt à 2 ee elles de Blanc sensiblement. ess . | Bleu blanchätre, 5, eee seuccecseccee le “a he on DL ÉE CPE ON QE OU CCE CESSER CRE | .. K ouge rose bon, pe: âtre?, 4 RE règle de | lance, soupçon de jaunätre.…… .. ..... | Dieu blanchâtre, id... cesse sesseisessee 1125 re CRE tee LS NS ÉReMNTAIS CEE | $ CA. »2 os us pale, inte ce L, y pr, | soupçon de jaunätre ne De bhadire ne 5 pus pâle, teinte plus indécise..…. | Vert d'eau pâle, teinte indécise. » “ | Dlane, soupçon de j LCR ETE CEE EEE 11,50 |Rose blcuitre presque blanc y à LOTERIE SET QE es | RL . A NT ee Danton cette gaie comp 00 [PE ne : ert un peu jaunätre presque blanc règle de Newton rewe. de concarder av ç donnee le Teste See nes \ : avec un sc ci rose. | Jaune voi Q î # m Un Blanc, soupçon de jaunâtre. .............. | Blou blanchtre, id. . entre Ben Les ee mal | 07 DRE Ai EEE ou de rose. | Juune verdâtre distinct : V'espésientes /1'écarilcommence VE xropérer : ñ .. des deux images suivent minutieusement 67 re ou bleu bla; e! Ê près l'épalueur de jomm 1 me a mt 3 = 7 : achâtre, presque blanc. | Jaune jiaille assez bon. é d POMRUIE È IL, et Ai on ñ percep Doc € progressise que la règle de Newton || 1 1,7 : 3 $ j parimom) cotrs rime! s 1,75 | Blanc bleuâtre ou bleu blanchôtre, peut-être un A CALE EE ARR Dr 7 QE Le Loan À og | Banc perceptiblement jaunitre.…..... | Bleu blanchätre, id, ..................,... Dleurmunsns et qu at indiqné par ls He ENT 4 pourquoi on y a rapurvché les obervations | P 10 | Blane perceptiblement jaunätre. + | Bleu plus blanchâtre et plus abondant bes trarées figures 2 et 3. L'image E, d'a TO ct NP Re Jaune paille peu coloré... Il cese d'être semslble vers 1imm,s, et slors & il | | LE d'un bleu pâle, et trés-faible en lumière » e , mais décidé, .. DO IDACNc ions des figures à 61 UREE A te ue a ir open Jauue pâle mais dévidé, tendant un peu au rom. fh? AIEatoNs es Heures 3 el 8 raevtennent HAITI ESC UN ce par augmenter continuellen à d avec l'expérience, comme où peul et arti- 23 Laon Lien plus mardaées es 2e eee Djou plesblicditre se me muence, Mais en même temps qu'elle|| 430 | jileu verditre :« | Orangé ou orangé rougeûtre, .......,,,. observées ici depuis 13m0,5 jusqu'à 14m, r'expé- jui | Jauue plus marqué ct plus foncé Bleu plus blancliätre ou blaue bleuâtre…..., vers l'épaisseur de uw, cette colo [| 125 | Vert uu peu bleuâtre .... ee ELA tre u £ À P À 5 [aune plus marqué et plus foncé... ..... | Bleu plus blanchâtre ou blanc moins bleuätre. vient presque insensible en pauant|| 140 | Vert franc Mu tee es Sn ess : Navedtet À 36 Lauoe commencant à s'oranger.…........... | Diou plus blanchätre ou blanc moins bleuütre Bleudirek un blone vendatreja palne|| 14159 | Vertes eee ne nee STORE) ï cl Jaune contiauant à s'oranger .....« Dlane moios bleuâtre à blanc parfait, Les variations de|] 5 : | SE 0 20e gene | s | | g ner oi ee Se SEA SRB RE Rat 15,0 | Vert pile jaunitre, presque blanc É | e où Île D 8 Lrsunc orangé décidé... Blauc moius bleuûtre.. , secs. e S neo TE | Vert DRE que es : A ne | | sons. loool aies complémentaires ok Û presque Ppcne 5e ta + Er | DD; |aune orsogé plus foncé.…................. | Blanc moius bleuâtre... ...... ten te la h 5 EE DRE 2e | D | sa aoouDES ant toute la |lumièr 15,55 |Jauuc trés-päle presque blanc iauo el | Fe : Fa ASE la d “re : auc violacé presque blanc. so | Jaune orangé plus foncé... siscuese | Blane moins bleuître se, ellese colore progressivement en jautie | lsecersesses eee cet 16,0 | Jaune paille meilleur que le précè Bleu bl Ms | Jaune orangé trés-bon..…........,......... | Blanc très-peu bleuitre. LCA EN CA IEEE CCI EU 5e es Blenchater elles que précédent. | | crpanraes + rouge, a mesure que son intensité s'affaibtit -.... | Bleu verdâtre assez bou... Ml > |suuc plus orangé ou orangé jauoñtre.....…. | Blanc à peine bleuâtre, | 53 |Orangé brillant dl SE a Bleu, bonne couleur... Dans cet Intervalle d'épalstur, les telntes D: 8 Re ... Blanc à peine bleuitre. Rouge trés-chaud, boone couleur. ......,.... | Vert franc boune couleur LyleT MES bien | la! past dl PA Draugé chaud et . ane oc à Lo 7 RS son que > augé chaud et vi : ne Blanc à peine bleuâtre, FÈcA Rouge oraugé ou orangé rougeûtre, bonne eou- D D lon nemet ones Po tn jee ose : \ de colaratlon. Mals les intermittencés de leur | G ss... eur, .. .. -. snuresssesses ert bonue vouleur vivacité ne suivent pas les Inflexions indiqués a8 | Orangé sensiblement rougeätre. . Blanc à pe cuâtre, à pei 5" te Re Des Lo rougeitre Fee Blanc à peine Fais an are 18,3* | Rouge jauuâtre ou jauue rougeatre, plus pâle par les courbes tracées d'après cette règle Do rouge orangé. srsnrta ere Blanc soupçon de verdâtre, à peine « PS 2 : dans Les figures à e | AUS Je: pe peine coloré, . que le précédentes ee es. | IV bléndtre, rente tniéchhe..: «. SD et | WW | = 18 anses... ||Vert.pale blanchäire "4-0... 19,0 |Rusetres-pâlejauuitre ou jaune rougeitre pres- | DUGO POUPEE, series... | Vert pâle blauchä é Bio $ A Ÿ [l blaoch: RUE se que blanc, teinte iudécise.......,...,,,.., | Bleu blanchatre trés-päle, ., ,. DORE M OLAGÉ severe emns see … | Vert pâle presque blanc... datne RSS | NET Er ne 2 à pâle presq! HO ass sanersmsses ee Blanc a peine rositre, teinte difficile à apprécier, | Blauc à peine verdâtre vu jaunûtre , teinte très- o16t DIQUS | el ; le maximom de Dons tout cet intervalle d'épais il eur, les iudécise pureté de Q est vers cette limite 3. Jauue pâle, peut-être un peu verdâtre heintes des denx images continuent de suivre A = DR RE ER MR ROSE AC Vis Pres RSS dE P' OO) RAT Enr FN Re A 20,0 | Dlanc à peine bleuitre, très-diffcile à apprécier. | Blanc à peine jaunâtre, trés-difhcile à juger... | | ADO 0 un RS OT o done home c F i indéci: à APE ee eue canines aux ee | _2045 | Dlauc bleuitre ou verditre trèvindécis,…. .. | Jaune pâle un peu rougeitre..........,..... | Ce der troll d'épalenr et pas 45 | Bleu trèsbeau,...,,.,,,.. Jauoc brillant es | HER 5 eo dep duc c ant... Moctères queleurasigaentles fguresset3,A || 210 | Blanc verditre meilleur que le précédent... | Orangé un peu rougeitre..…..............., |rr Haas Ier MA TeEs RER EEE po plus pâle où moins franc... | Jaune plus orangé ou orangé; couleur trés-vive. |'épaiseur de 3mm,35, le plan de polarisation || 21,5 | Vert bleuâtre, coloration trés-marquée..….. |Janue rougeitre ou rouge jaunitre OS AL ER 5 | Bleu un peu verditre, bon, mais peu vif... | Orangé trés-chaud ............ des rayous Jaunes moyens a tourné dego* ce || 5 9 |Hlane verdâtre, colorati di Lee À ge jaunñtre,.…...... iieites à apprécler, d'autant que leur faible RE larme SA ne en resatereet ve) At amène ln tente de passige viole Bieaitre s nc verdätre, coloratiou moindre... . | Jaune rougeâtre ou rouge jaunâtre. coloration les fait varier sensiblement de APR 5e ge orangé chaud... dans l'image O, comme sui obserrtion 22,5 | Vert d'eau pâle ou blanc verdätre.….…....... | Jaune rougeitre ou rouge jaunätre. .. ,... ..., | nwmnce, lonque je soleil brille ou ne brille} Me | Ver pile un peu ao PRE Rouge mordoré vif....,....,,....:........ [l'y montre alors, À l'épaisseur double, c'est. || 23,0 | Vert d'eau très-päle. éoresecees..,… | Jauue rougeätre très-pâle.., ....... ele Mr me A - eee Ë : Ë es a 4 e Ç 8 L sit encore quelques légers changements! 4 jaune verditre… | Rouge pourpre, peut-être un peu violacé.… …. Ma-tire de 7=,, ce même plan à tourné de|| 33,5 | Hjaue à peine bleuâtre ou verdätre ,........, | Blaue à peine jaunâtre, ; ; AR At Pa ne D | Jaune verditre,.….....,.,..., ANR Ce Los Bu? degrés, ce qui amène la teinte ile pas- à È 2 « Que couteurs dans les deux Images ; quand on | Do |Jince paille foucé, un pes ile .. ÈS sertererereneneriresseee Déc dons E, avecaon caractère presque cont- 24,0 |Blanc presque imperceptiblement bleuâtre où fait tourner la section principale du prisme) Abe ; .... | Bleu un peu violacé, peut-être indigo violacé.… une de nusnee, ce qui est encore conforme VAR". messe ec. | Blaue presque imperceptiblemeut jaunûtre. analyseur de ov à 36°. Mais ces variations Fe rescssee.s. | Bleu un peu verdtre.........,.....:...... |aux indications de notre tablenu 275" | Blanc perce publement after dereeptblon ent biel te ee eee D Re nn ne PEN ECEST 5 |Orau it il j L LL 7 gé plus rougeâtre ou rouge orangé Bleu un peu verditre très-bi les angles où elles #opérent puissent être f Ponts bon. : 99 |Rovge un peu orange, conteur trésbelle……… | Vert tiraut au bleu, couleur trés-belle | RES RER ER | 95 | Rouge claud non Ka É i . siolacé A nr aaiees . | Vert vif. decetonutaren ses ana nes | Académie des sciences, L XX, pr. 422 OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. VIII. —.… Expériences de compensation, faites en combinant des plaques simples de cristal de roche , perpendiculaires à l’axe, avec des appareils à deux rotations ayant diverses épaisseurs. . Les expériences que je vais rapporter font suite à un mé- moire sur l’analyse des appareils à deux rotations de M. So- Jeil, qui est inséré au tome XXI des Comptes rendus de l 4- cadémie des sciences, p. 452; et je devrai supposer qu'on l’a sous les yeux. Parmi le nombre infini de ces appareils que lon peut construire, en faisant varier l'épaisseur commune des plaques qui les composent par leur association, j'avais signalé comme méritant une considération spéciale ceux où cette épaisseur est telle, que la teinte de passage propre aux deux plaques composantes se forme dans des ares de dé- viation ayant pour valeurs + go°; + 180°; + 270°, ou en général un nombre quelconque complet de quadrants du cercle. En effet, ceux-là, et ceux-là seuls, jouissent de cette . propriété, que si, dans le faisceau polarisé qui les a tra- … versés, on interpose une plaque simple d'épaisseur quelcon- . que, douée de pouvoir rotatoire, dont l’action propre se com- . binera par addition avec une moitié de l'appareil, et par - soustraction avec l’autre, les teintes de passage propres aux Fe deux systèmes résultants se formeront toujours dans des ares . de déviation différant entre eux de 180°; de sorte qu'elles _s'obtiendront simultanément, dans une même position an- . gulaire du prisme analyseur. D après les vitesses de rotation 424 DES PHÉNOMÈNES ROTATOIRES que j'ai attribuées aux divers rayons simples dans le cristal de roche perpendiculaire à l'axe, la condition qui vient d’être assignée se trouve remplie lorsque l'appareil à double plaque a pour épaisseur 3°",75096, ou un multiple entier quelconque de cette quantité, parce qu'elleexprime l'intervalle dans lequel le plan de polarisation des rayons jaunes moyens décrit un arc de rotation égal à un quadrant complet. Or ce plan est tou- Jours celui dans lequel il faut amener la section principale du prisme analyseur, pour obtenir dans l’image extraordinaire E cette teinte violet bleuâtre succédant au bleu, et précé- dant le rouge, que nous avons nommée la teinte de passage. Les expériences qui vont suivre, et que j'avais annon- cées dans l’article cité des Comptes rendus, ont été faites pour manifester les relations de ces appareils entre eux, en transformant successivement chacune de leurs moitiés dans une moitié analogue de l'appareil antécédent ou subséquent, par l'addition de plaques simples procédant suivant les mêmes périodes d'épaisseur. J'ai principalement appliqué cette épreuve aux deux appareils que j'ai désignés par les lettres B et C dans mon Mémoire inséré aux Comptes rendus. Leurs épaisseurs étaient : pour le plus mince, B,3"",745 ; pour le plus épais, C,7"",363; l’un représentant ainsi très-approximativement le premier terme de la série équidistante qui les renferme, l’autre un peu moins approxi- mativement le second. Mais le petit complément d'épais- seur 0"",137, qui manque à celui-ci, n’aura aucune importance dans les épreuves auxquelles je les emploierai. Admettant donc, par supposition, qu'ils eussent l’un et l’autre les épais- seurs mathématiquement requises pour représenter ces deux premiers termes, ou, ce qui est physiquement vrai, ad- Et 2 A | OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 425 mettant que les différences qui les en écartent sont assez fai- bles pour n’avoir que des influences négligeablessur la nuance des teintes composées qu'on y pourra observer, les deux pla- ques de B donneront simultanément leur teinte de passage quand la section principale du prisme analyseur sera placée dans l'arc de déviation + 90°. Alors les images, ordinaire O, extraordinaire E, de chaque plaque composante D ou G, se- ront disposées comme le représente ici la figure 1", en adop- tant la notation que j'ai employée dans mon Mémoire in- séré aux Comptes rendus. Pour l'appareil C, au contraire, cette simultanéité des teintes de passage s’obtiendra en pla- cant la section principale du prisme dans l’arc de dévia- tion 18° ou 360°; ce qui produira la disposition d'images représentée figure 2. T. XX. 54 426 DES RHÉNOMÈNES ROFATOIRES : Er 8 | Hi a 180° s Dans les deux figures, la droite SS représente la di- rection actuelle de la section principale; et les points marqués 0°, 180° indiquent la direction de la polarisation primitive supposée constante. Le plan de jonction des deux plaques de l'appareil que l’on étudie est rendu coiïn- cidant avec cette direction, et le centre de la pupille est placé dans ce plan. Alors l’œil, amené tout contre le prisme analyseur, perçoit simultanément les images tant ordinaires qu'extraordinaires données par les deux plaques, lesquelles, restreintes par les diaphragmes, se présentent comme des demi-cercles ayant un diamètre commun parallèle à la ligne de jonction, La plaque qui exerce la rotation vers la droite, et que je désigne par D, est supposée, dans les figures, placée à droite de l'observateur ; l’autre, quiexerce la rotation vers la gauche, et que je désigne par G; est placée à sa gauche. OPERÉS DANS LE-ÉRISTAL DE ROCHE. 4$$ Le faisceau transmis étant restreint par des diaphragmes cir- culaires pour exélufe lés raÿôhs ébliqués &ux pliques , les demi-images D, , D, sont données par la plaque D ; les autres G,, G., par la plaqué G; et lés indices, , désignent l’éspèce dé réfrattion érdinairé où eXtraorditraire qui produit éhd- tune d'elles. Dans les dispositions iñitiales figuréés ici, D,, G, sont de même intensité et de même teinte entre elles, tommé aussi D,, G,; de sorte que chaque disque est illuminé et coloré uniformément. Cette identité existe dans tous ces appareils pour les deux positions rectangulaires supposées ici au prisme analyseur, lorsqu'ils sonticonstruits exactement ; et les teintes communes que présentent alors les deux demi- images dépendent de leur épaisseur. Mais ici, en vertu des épaisseurs spéciales données aux appareils B et C, lorsque la section principale SS du prisme analyseur est placée pour le premier conformément à la figure 1, et pour le second conformément à la figure 2, les images D,, G, offrent la teinte de Passage violet bléuâtre propre à chacun d’eux ; et les images D,, G, offrent la nuance commune de jaune ver- dâtre qui en est complémentaire. Ces explications prélimi- naires feront aisément comprendre les épreuves que je vais successivement leur appliquer (*). (*) Dans le Mémoire inséré aux Comptes rendus, j'ai employé les mêmes figures 1 ét 5, en leur appliquant le même système de notation. Mais lorsque j'ai inséré la figure 2 à la page 471, on ÿ a, par inadvertance, laissé subsister les lettres S S; sur la direction 9g0—270° ; au lieu que ces lettres, qui, dans la figure r, indiquent la position actuelle de la section principale du prisme andlyseur, auraient dû être repottées alors sur la direction o°—180°, qui est celle du plan de polarisation primitif. Heureuse- 54. 428 DES PHÉNOMÈNES ROTATOIRES EXPÉRIENCES SUR L'APPAREIL B , ÉPAISSEUR 3"”,745. J'observe d’abord cet appareil seul, dans sa condition ini- tiale représentée ici figure 1. La section principale du prisme analyseur est rendue perpendiculaire au plan de polarisation primitif. ° Dans cette disposition l’on a: D,, G,, violet bleuitre , teinte de passage commune aux deux plaques. D,, G,, jaune pâle verdâtre, commune aux deux plaques. ment cette disposition est exprimée dans le texte, et elle est indiquée aussi par la situation des images; de sorte qu'on ne peut la méconnaître. Néan- moins, jai cru devoir donner ici cet avertissement, pour épargner au lecteur toute occasion d’ambiguité, s’il voulait recourir à cette ancienne rédaction; et je l'ai évitée, dans le présent Mémoire, en reportant les lettres SS à leur vraie place, sur la figure 2. OPÉRÉS DANS:LE CRISTAL DE ROCHE. 429 PREMIÈRE MODIFICATION: 1) J'ajoute la plaque épais- P > €F seur 3,767 le signe négatif que je lui donne s’accor- | dant avec le sens de la flèche courbe, pour indiquer que cette | plaque exerce la rotation vers la gauche de l'observateur. On a alors pour images résultantes : D, sensiblement noir, peut-être reste-t-il un bleu très-sombre; Gr violet bleuître, teinte de passage. D, ; jaune trés-päle; { G,; jaune pile verdûtre, 2) Je ramène la section principale du prisme analyseur dans le plan de polarisation primitif, l'index étant sur o°. Cela produit la disposition représentée ici fig. 2 : S ’ . \ 4 | | Par cette transposition, les images O, E s'échangent entre elles pour chacun des deux systèmes, et l’on a D} jaune très-päle; G,s jaune päle verditre. D,, sensiblement noir, conservant peut-être un bleu très-sombre ; Gsviolet bleuâtre, teinte de passage. 450 DES PHÉNOMÈNES ROTATOIRES D, semble un peu plus blanc, moins verdâtre , et un peu plus abondant en lumière que G,. Mais la différence des deux teintes, vues ainsi en contiguité, est extrêmement faible et presque indiscernable. Expricarion. Dans la dernière position donnée ici au prisme analyseur, le système de droite est formé par la combinaison des plaques D + Q, dans laquelle on à pour épaisseurs : D d Q=— 3767 4 Cela donne donc le système résultant de droite D+Q— — 0,622 Si les mesures des épaisseurs pouvaient être supposées ma- thématiquement exactes, et les surfaces des plaques rigou- reusement parallèles entre elles, ainsi que perpendiculaires à leurs axes respectifs , un tel système, vu isolément, dans la position actuelle du prisme analyseur, devrait donner une image extraordinaire E ou D, d’un bleu violacé à peine per- ceptible ; et une image ordinaire O ou D, sensiblement blan- che, sans coloration appréciable , comme le montre notre tableau (F), page 422. Mais la présence des deux images données par le système de gauche modifie la sensation per- cue par l'œil, et communique à D, l'apparence de nuance jaune qui le fait voir à peine différent de G. Dans ces mêmes circonstances, le système de gauche est formé par la somme des plaques G+Q, où l’on a pour épaisseur gs 21 3745 4 Q—— 3,767 Ce qui donne le système résultant de gauche. . G + Q = — 7s51a NS OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 431 Cette épaisseur totale est à très-peu près celle qui imprime au plan de polarisation des rayons jaunes moyens une dé- viation de 180°. Ainsi, dans la position que la figure 2 attri- bue au prisme analyseur, un tel système, vu isolément, doit donner E ou G, violet bleuâtre, teinte de passage; et, par complément, O ou G, jaune verdâtre pâle. C'est aussi ce qu'on observe; et ces deux nuances, bien décidées, dominent par contraste celles bien plus faibles des deux autres images qui sont vues en leur présence. Cette expérience faite, j'enlève la plaque Q, et je ramène la section principale du prisme analyseur dans la direction rectangulaire à la polarisation primitive. Je retrouve ainsi la disposition initiale d'images représentée figure 1, avec les caractères propres à l’action isolée de l'appareil. DEUXIÈME MODIFICATION. 1) J'ajoute la plaque Pa + 3,790 3 le signe positif et le sens de la flèche courbe marquent qu’elle exerce la rotation vers la droite. Alors, en se rappor- tant toujours à la figure 1, on a: D,; violet bleuâtre, teinte de passage; G,, sensiblement noir ou bleu violacé très-sombre. D, jaune verditre pâle ; G,, jaune très-päle, plus blanchâtre et moins verdätre que D . 2) Je ramène la section principale du prisme analyseur dans le plan de polarisation primitif, l'index étant sur 0°. Cela reproduit la disposition d'images représentée ici fig. 2. DES PHÉNOMÈNES ROTATOIRES _ [ee (Le S Par cette transposition, les images O, E, s’échangent entre elles pour chaque système partiel , et l’on a : D, jaune verditre pâle ; G,s jaune très-päle, plus blanchätre et moins verdâtre que D, . D, violet bleuâtre, teinte de passage ; G sensiblement noir ou bleu violacé très-sombre. Expricariow. Dans la dernière position donnée ici au prisme analyseur, le système de droite est formé par la somme des plaques D + P, où l’on a: DEEE 7 PA P — + 37054" Donc, système résultant de droite. . . . D + P — PTS 6 Cette épaisseur totale est encore à très-peu près celle qui imprime au plan de polarisation des rayons jaunes moyens une déviation de 180°. Ainsi, dans la position que la figure 2 4 OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 433 attribue au prisme analyseur, un tel système, vu isolément, doit donner E ou D, violet bleuâtre, teinte de passage , et par complément O ou D, jaune verdâtre päle: c'est en effet ce qui a lieu. Dans ces mêmes circonstances, le système de gauche est formé par la combinaison des plaques G + P, où l’on a : G=— 3,745 P— + 3,795 4° 24 Donc, système résultant de gauche. . . G+ P— + 0,050 Dans la position attribuée au prisme analyseur, un tel système, vu isolément, devrait donner E ou G, bleu violacé très-sombre, presque nul, et O ou G, sensiblement blanc, ou imperceptiblement coloré de jaune. C’est aussi à très-peu près ce qu’on observe. Mais les images très-colorées D,, D., qui sont vues simultanément avec les deux autres, influent sur la sensa- tion, et communiquent à G,une apparence de nuance sensible- ment jaunâtre, qui serait imperceptible hors de leur présence. Cette expérience faite , j'enlève la plaque P, et je ramène la section principale du prisme analyseur dans la direction rectangulaire au plan de polarisation primitif. Je retrouve ainsi la disposition initiale d'images représentée figure 1, avec les caractères propres à l’action isolée de l'appareil. TROISIÈME MODIFICATION. 1) J'ajoute la plaque R , épais- seur — 7,508 exerçant la rotation vers la gauche. Alors, en se rapportant toujours à la figure 1, on a: D,, jaune verdâtre pâle; G,; jaune verdûtre pâle, mais un peu moins lumi- neux et un peu moins jaunâtre que D. D, violet très-bleuâtre sombre, teinte de passage; G,, rose pâle, plus abondant et bien plus rou- geître que D, Fe +4 55 134 DES PHÉNOMÈNES ROTATOIRES 2) Je ramène la section principale du prisme analyseur dans le plan de polarisation primitif, l'index étant sur o°. Cela reproduit la disposition d'images représentée ici fig. 2. Par cette transposition, les images O, E, s’échangent entre elles pour chaque système partiel, et l’on a: D;, violet bleuätre très-sombre, teinte de pas- G,,rose päle, plus abondant et bien plus rou- sage; geitre que D. D, jaune verdûtre püle ; G,, jaune verdûtre pile, mais relativement un peu moins lumineux et un peu moins jaunätre que D,. ExpcicaTiow. Dans la dernière position donnée ici au prisme analyseur, le système de droite est formé par la combinaison des plaques D +R , où l’on a : DS fo RE 508 Donc, système résultant de droite. . .. D+R—— 3,763 OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 435 Cette épaisseur résultante est à très-peu près celle qui im- prime au plan de polarisation des rayons jaunes moyens une déviation égale à — go°. Donc, ici, la section principale du prisme analyseur se trouvant perpendiculaire à cette direc- tion, la teinte de passage se transporte de E dans O, et réci- proquement. Ainsi, l’on doit avoir O ou D, violet bleuâtre sombre, ce qui est la teinte de passage propre à cette épais- seur ; etE ou D, jaune pâle verdätre, qui en est le complément. C’est en effet ce qu’on observe. Dans ces mêmes circonstances, le système de gauche est formé par la combinaison des plaques G+R, où l'on a: nm. % G—— 3,745 % 4 Fe R——= 7,208 LS Donc, système résultant de gauche . .. G+R—— 1 AE) Yk Cette épaisseur totale est à très-peu près celle qui imprime au plan de polarisation des rayons jaunes moyens une dé- viation égale à —270°, ou trois quadrants. Donc, ici, la sec- tion principale du prisme analyseur étant rendue perpendi- culaire à cette direction, la teinte de passage de E doit se transporter dans O, et réciproquement, avec les caractères de nuance que notre tableau (F), page 422, indique pour une épaisseur pareille, si l’on observait ces images isolées. On doit donc, dans cette supposition d'isolement, avoir O ou G, rose pâle bleuâtre, et par complément E ou G, blanc verdâtre pâle. C’est aussi ce qu'on observe pour O. Mais, quant à E ou G., le jaune verdâtre de D, y modifie la sen- sation absolue du vert, et le fait paraître un peu plus jaunâtre qu'on ne le verrait à l’état d'isolement. Qt O7 436 DES PHÉNOMENES ROTATOIRES Ces épreuves étant faites, je laisse la plaque additiou- nelle R dans son même emploi d’interposition ; mais je rends de nouveau la section principale du prisme analyseur perpen- diculaire au plan de polarisation primitif, en replaçant l'index sur+ 90°. Cela nous ramène à la figure 1. a où mm mm | Alors les deux systèmes de droite et de gauche reprodui- sent individuellement leurs images, comme dans le premier cas que nous avions considéré; et ainsi l’on a : D,, jaune verdûtre pâle ; G,; jaune verdätre päle, mais un peu moins lumineux et un peu moins jaunâtre que D, D,, violet bleuâtre sombre, teinte de passage; G,, rose päle bleuître, plus abondant et plus rougei- tre que D. D’après l’analyse faite précédemment, D, est la teinte de passage du système de droite, dont l'épaisseur résultante est D + R=——3"",763 ; et G, est la teinte de passage du système de gauche, dont l'épaisseur résultante est — 11"",253. Ceci établi, je ramène l’index de quelques degrés vers le nine ot ts OPÉRES DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 435 plan de polarisation primitif. Je rends ainsi la déviation du prisme analyseur un peu plus grande que — 90° pour le sys- tème de droite, et un peu plus grande que—270° pour le sys- tème de gauche. Les arcs de déviation des teintes de passage propres à chaque système étant alors tous deux dépassés, les images D, , G., qui leur appartiennent, deviennent l’une et l’autre plus rouges qu'auparavant. Mais D,,appartenant au système le plus mince, est d’un rouge plus vineux et plus bleuâtre que G., parce que la mutation s'opérant sur des nuances différentes de la teinte de passage, la modifie iné- galement. Pour opérer les effets inverses , je ramène d’abord l’index du prisme analyseur sur + 90°, puis je lui fais dépasser ce point de quelques degrés. Par là, je rends la déviation de la section principale un peu moindre que —90° pour le système de droite, et un peu moindre que — 270° pour le système de gauche. Alors les arcs de déviation propres à la teintede passage de chaque système n'étant pas encore atteints, les images D,, G, passent l’une et l’autre au bleu. Mais D,, qui ap- partient au système le plus mince , se montre d’un bleu beau- coup plus beau et plus foncé que G,, qui devient seulement d’un bleu blanchätre presque blanc, comme se rapportant à une phase de la teinte de passage correspondante à une plus grande épaisseur. Tous ces résultats sont conformes à ce que nous avons antérieurement reconnu, sur le caractère constant de transition du bleu au rouge propre à la teinte de passage, et sur les mutations qui s’opèrent aux diverses épaisseurs, tant dans sa nuance, que dans celles des teintes qui la précèdent ou lui succèdent, lorsque l’on fait tour- ner le prisme analyseur dans le sens de la rotation exercée. 138 DES PHÉNOMÈNES ROTATOIRES EXPÉRIENCES SUR L'APPAREIL C, ÉPAISSEUR MOYENNE 7"",354. L'épaisseur de cet appareil est tant soit peu moindre qu'il ne le faudrait pour que l’image extraordinaire E atteigne la teinte de passage dans un arc de déviation exactement égal à 180°. Cette condition exigerait qu’elle füt plus forte de 0"*,146. Mais comme, à cet ordre d'épaisseur, la teinte de E n’éprouve que des mutations très-faibles autour de son point de passage précis, je négligerai cette petite différence dans les énoncés pour en abréger l'expression; et je consi- dérerai les effets de l'appareil dans cet arc de déviation même, en plaçant l'index du prisme analyseur sur o°, position équi- valente à 180° pour toutes les apparences optiques. Les deux plaques composantes D, G présentaient une très-légère iné- galité d'épaisseur, qui pouvait provenir d’une configuration tant soit peu prismatique de leur ensemble. Car, en les mesu- rant aux points milieux de leurs surfaces, le sphéromètre donnait: D=5%:363 GE 945 d'où l’on conclut pour l'épaisseur moyenne 7"”,354, comme je l'ai annoncé. Cette petite différence ne produisait toute- fois aucune dissimilitude appréciable entre les teintes appa- rentes des images O,E, dans la position attribuée ici au prisme analyseur, à cause de la lenteur de leurs mutations à des épaisseurs absolues aussi grandes. Ce résultat s'accorde avec beaucoup d’autres pour montrer, qu’afin de donner aux appareils à deux rotations la plus grande sensibilité qu'ils puissent atteindre, il faut restreindre leur épaisseur au terme OPÉRÉS DANS LE CRISTAL DE ROCHE. 439 précédent de la série qui les embrasse, c'est-à-dire à 3°°,75, si l’on adopte les valeurs que j'ai assignées aux rotations des rayons simples dans le cristal de roche(1). D'après cette re- marque, dans les expériences qui vont suivre j'attribuerai aux plaques D, G de celui-ci leurs valeurs individuelles , quand je les combinerai avec d’autres par somme ou par différence. Adoptant ici le même mode d’exploration que j'ai suivi dans les expériences précédentes, j'observe d’abord l’appa- reil C seul, en plaçant la section principale du prisme ana- lyseur dans le plan de polarisation primitif, et l’index sur o*. Cela donne la disposition d'images représentée ici figure 1. ï : 5 n : ! ! : : : 3 : : : : ! ! ! 1} ; \ 1 : 1 ; : : ’ [0e CA (*) Voyez mon Mémoire sur les propriétés optiques des appareils à deux rotations, Comptes rendus de l’Academie des Sciences, tome XXI, page 453. 44o DES PHÉNOMENES ROTATOIRES On a alors : D, , G,, jaune pâle verdâtre, teinte commune aux deux plaques. D,, G., violet rougeitre, teinte de passage, commune aux deux plaques. PREMIÈRE MODIFICATION. (1 J'ajoute la plaque épaisseur I » €P ee) 767 Ve Les images modifiées prennent les caractères suivants : D,, violet bleuâtre vineux, presque la teinte G,, rose bleuitre päle, presque la teinte de passage du de passage du système D + Q; système G +4-Q. D,, jaune pile verdûtre; G,, jaune verdûtre, un peu plus verdätre que D, Expzicariox. Ici l'action résultante du système de droite correspond à l'épaisseur -- 7°",363 — 3"*,767 ou + 3"",596; et l’action résultante du système de gauche répond à l’épais- seur — 7,345 — 3"",767 où — r11"",112. Ces valeurs sont toutes deux un peu moindres que + 3°°,75 et — 11°",25, qui, d’après les vitesses de rotation que j'ai adoptées , donneraient les teintes de passage de E dans les arcs de déviation + go° et— 270°, et conséquemment les transporteraient aux ima- ges O, pour la position assignée ici au prisme analyseur. Or, c'est réellement ce qui a lieu, sauf les faibles mutations de nuance que la petite infériorité d'épaisseur entraîne. Car les déviations + go° et — 270° étant l’une et l’autre un peu plus grandes que celles qu'il faudrait employer pour obtenir les teintes de passage E des deux systèmes résultants, elles de- vraient donner aux images E une nuance tant soit peu plus rouge, laquelle, dans la position donnée ici au prisme ana- lvseur, doit se transporter aux images O, comme on l’observe effectivement ; et les résultats sont conformes à ceux du ta- bleau (F), page 42, pour les mêmes épaisseurs. DEUXIÈME MODIFICATION. (2 Laissant toujours l'index du OPÉRES DANS LE CRISTAL DE ROCHE, At prisme sur o°, j'enlève la plaque Q, et je lui substitue la plaque P épaisseur + 3°",795. J’obtiens alors : D,, rose bleuitre päle, très-mélé de blanc. G,, violet vineux, beaucoup plus coloré que D,. D,, jaune verdûtre ; Lo jaune verdâtre, plus päle et moins verdâtre que D, ExpricarTion. Ici l’action résultante du système de droite correspond à l'épaisseur 7"",363 + 3°",595 ou + 11"",158; et l’action résultante du système de gauche répond à l'épais- seur — 7°",345 +3°",795 ou — 3°",55, Les teintes de passage de l'image E, propres à ces épaisseurs, doivents’obtenir, pour la première, dans un arc de déviation un peu moindre que + 270, et pour la deuxième dans un arc de déviation un peu moindre que — 90° : conséquemment, à ces deux déviations trop grandes, les teintes observées seront tant soit peu plus rouges que les teintes de passage ; et, dans la position don- née ici au prisme analyseur, elles se transporteront avec ce même caractère aux images O. C’est en effet ce qui a lieu; mais la différence entre la teinte O et la teinte de passage est presque inappréciable , surtout pour le système de droite, qui répond à une plus grande épaisseur que celui de gauche. TROISIÈME MODIFICATION. 3) Laissant toujours l’index du prisme analyseur sur o”, j'enlève la plaque P, et je lui subs- titue la plaque R, épaisseur —7"",508. J'obtiens alors: D, blanc, perceptiblement jaunätre ; G,, bleu verdâtre ou vert bleuître. D,, presque noir, avec un soupcon de violet bleuâtre ou de G,, rose pâle, bleu violacé, à peine perceptible. Expricarion. L'action résultante du système de droite ré- pond à l’épaisseur + 7°",363 — 7"",508 ou —0"",145. Réduite à ce degré de minceur, elle doit, dans la position assignée ici au prisme analyseur, donner l’image E ou D, d’un bleu violacé très-sombre qui s’évanouit presque, étant vu en en présence FT: XX: 56 442 DES PHÉNOMÈNES ROTATOIRES, ETC. des teintes colorées du système de gauche. Donc, par com- plément, elle doit donner pour l’image O ou D, un blane qui serait imperceptiblement jaunâtre s’il était vu seul , mais qui devient sensiblement jaunâtre sous l'influence contrastante des teintes G,, G.. C’est aussi ce que l'expérience réalise. L'action résultante du système de gauche répond à l’épais- seur — 7,345 — 7%",508 ou — 14"",853. Cette valeur est à peine différente de 15°" qui, d'après nos nombres, donne- rait la teinte de passage de l’image E dans l’are de dévia- tion 360° ou 0°, c'est-à-dire, dans la position actuelle du prisme analyseur. Tel est en effet aussi le résultat qu'on ob- serve , sauf la modification produite sur la sensation par la présence simultanée du blanc perceptiblement jaunâtre de D,. Et cela est aussi conforme aux indications du tableau (F), page 202, pour la même épaisseur résultante, sauf l'influence que nous venons de signaler. Des considérations exactement pareilles feront prévoir les teintes des images résultantes O, E, que l’on pourrait obtenir en combinant des plaques d’épaisseurs quelconques avec des appareils à deux rotations; et l'application en est si facile après les exemples qui précèdent , que je crois inutile de les multiplier davantage. Image Oræ&® U:N\. Fig. Ah PI re ir COM- anc qui lais qui stante lise, l'épais- Ir est à donne- dévia- elle du ‘on ob- par la e deD,. >au (F), fluence voir les obtenir vec des i facile e de les C7 0, se RU 1 A \ NU Nico Mémoire d« À. M! Biot LH A es valeurs UU'!A A on A6! Le] & L Nico LA AA $ w sl Fa Û Lpaisse - Le mt rh tt RÉ Fig. 19. Epaisseur 21, 390 . Rotation 2 droite”. Institut, Année PARA RA TARN RAA LA LES AAA ET LAL RAA RL AL AA LE L SARL ALES SALARIAL EMLAR LI LL SARA RL AR LR OBSERVATIONS ET EXPÉRIENCES SUR LA CIRCULATION CHEZ LES MOLLUSQUES. Par M. MILNE EDWARDS. Lu dans la séance du 3 février 1845. Dans un travail que j'ai eu l'honneur de communiquer à l’Académie en 1839 (1), j'ai fait voir que, chez les Mollusques inférieurs connus sous les noms d’Æscidies composées et d’'Ascidies sociales, une portion considérable du cercle cir- culatoire parcouru par le sang est composée de vaisseaux tu- buleux comparables aux artères et aux veines des animaux supérieurs, mais que, dans une autre partie de ce cercle, il n'en est pas de même ; que là il n'existe plus ni artères ni veines, le liquide nourricier est épanché entre les organes, (x) Observations sur les Ascidies composées des côtes de la Manche, (Memoires de l’Académie des Sciences, t. XVIIL.) 56. 444 DE LA CIRCULATION en baigne directement la surface, et pénètre dans la profon- deur des tissus par une sorte d'infiltration. Effectivement, dans l’abdomen de ces Mollusques , le sang, au lieu d’être renfermé comme d'ordinaire dans un système clos de canaux à parois propres, circule dans les espaces que les viscères laissent entre eux , et remplit la grande cavité destinée à lo- ger ces organes. Ce singulier mode de circulation rappelle jusqu’à un cer- tain point ce que M. Audouin et moi avions constaté chez les Crustacés, il y a bientôt vingt ans, mais s'accorde si mal avec les idées généralement reçues touchant la structure du système sanguin chez les Mollusques ordinaires , que j'aurais douté de l’exactitude de mes résultats si l'observation des faits avait été moins facile. Mais, en examinant ces animaux lorsqu'ils sont encore pleins de vie et lorsque la transparence naturelle de leurs tissus n’a pas été altérée par les moyens de conservation auxquels on est obligé d’avoir recours dans les musées, on voit le courant sanguin (reconnaissable aux glo- bules charriés par le liquide) passer de la portion vasculaire du cercle circulatoire dans la cavité abdominale, parcourir celle-ci en divers sens et s'engager mème dans les prolonge- ments en forme de doigts de gants dont la partie inférieure du sac péritonéal est souvent garnie. Si l’on se contente de l'étude de la vie faite sur le cadavre , on peut méconnaître cette disposition remarquable; mais, pour quiconque a sous les yeux une Claveline vivante et sait voir, le doute me semble impossible. D'ailleurs , si j'avais conservé à cet égard quelque incertitude, elle aurait cessé lorsque j'ai eu l’occasion d’ob- server à l'état vivant certains Mollusques appartenant à une famille différente, mais à la même classe, les Salpa, qui, à CHEZ LES MOI.LUSQUÉS. 445 certaines époques de l’année, abondent sur divers points de la Méditerranée , aux environs de Nice, par exemple. Au premier abord, cet état d’imperfection de l'appareil circulatoire dans la classe des Tuniciers ou Mollusques acé- phales sans coquilles, de Cuvier, me paraissait devoir être un caractère propre à ce groupe, et constituer un nouvel exemple de ces dégradations des grands appareils physiolo- giques, qui s’observent si fréquemment dans les rangs infé- rieurs de chacune des principales séries naturelles du règne animal , sans qu'elles entraînent avec elles la disparition du type fondamental propre à la série ainsi modifiée ; mais, en me rappelant une observation déjà ancienne de Cuvier, j'ai pensé que cette circulation semi-vasculaire, semi-lacuneuse, pourrait bien ne pas être un fait isolé dans la physiologie des Mollusques. Effectivement, dans son beau Mémoire sur l’A- plysie (1), Cuvier nous apprend que, chez ce Gastéropode, les canaux destinés à porter le sang veineux aux branchies ont pour parois des faisceaux musculaires seulement, et que les espaces compris entre ces faisceaux établissent une communi- cation directe entre les veines caves ou artères branchiales, comme on voudra les appeler, et la cavité abdominale; que, par leur extrémité antérieure, ces gros vaisseaux se confon- dent même avec la cavité générale du corps, et que les liqui- des contenus dans celle-ci pénètrent aisément dans le système circulatoire, et réciproquement. « Cette communication, dit Cuvier (2), est si peu d’accord (1) Voyez Mémoires pour servir à l’histoire et à l'anatomie des Mollus- ques. Paris, 1817; et Annales du Muséum, tome II. (2) Op. cit., pag. 13: 446 DE LA CIRCULATION « avec ce que nous connaissons dans les animaux vertébrés, « que j'ai voulu longtemps en douter, et même après l'avoir « fait connaître à l'Institut, il y a quelques années, je n’osai « pas d’abord faire imprimer mon Mémoire, tant je craignais « de m'être trompé; enfin, je suis obligé de céder à l'évidence; et, dans ce moment , où je peux disposer d'autant d’Aply- «sies qu'il me plaît, je viens de m'assurer par toutes les voies « possibles : A « 1° Qu'il n’y a point d'autre vaisseau pour porter le sang aux branchies que ces deux grands conduits musculaires et percés que je viens de décrire ; PS « 20 Que toutes les veines du corps aboutissent médiate- « ment ou immédiatement dans ces deux grands conduits. « Or, comme leur communication avec la cavité abdomu- « nale est évidente et palpable, qu’on les appelle veines caves, « ou cavités analogues au ventricule droit, ou enfin artères « branchiales, car on voit qu'ils remplissent les fonctions de « ces trois organes , il résulte toujours que les fluides épan- « chés dans la cavité abdominale peuvent se mêler directement « dans la masse du sang et être portés aux branchies, et que « les veines font l'office des vaisseaux absorbants. « Cette vaste communication (ajoute encore Cuvier) est sans « doute un premier acheminement à celle bien plus vaste en- « core que la nature a établie dans les insectes où il n’y a pas même de vaisseaux particuliers pour le fluide nourricier. » Le rapport entre la découverte faite par Cuvier, en dissé- quant l’Aplysie, et les résultats auxquels j'étais arrivé en étu- diant au microscope les Biphores et les Ascidies, est si mani- feste, que je ne pouvais le méconnaître ; et d’ailleurs l'Aplysie n'est pas le seul Mollusque chez lequel des communications CHEZ LES MOLLUSQUES. A4; libres avaient été constatées entre les vaisseaux sanguins et la cavité abdominale. Ainsi MM. Owen (1) et Valenciennes (2) ont trouvé chez le Nautile un nombre considérable de grands orifices qui, de la veine cave, débouchent directement dans cette cavité, et M. Delle Chiaje a observé chez le Poulpe , le Pecten et plusieurs autres Mollusques, une disposition parti- culière du système circulatoire qui me paraissait se lier éga- lement à une structure analogue à celle dont il vient d’être question, bien que cet anatomiste habile l'ait interprétéautre- ment (3). D’après ces considérations, j'ai été conduit à penser que le système vasculaire des Mollusques en général n'était probablement pas aussi complet qu'on le croit communément, et qu’il serait intéressant d'examiner si le caractère particu- lier que m'avait offert le mode de circulation chez les Tuni- ciers ne se retrouverait pas, d’une manière plus ou moins marquée, dans tout le grand embranchement des Malaco- zoaires. Cette question est une de celles dont je me suis occupé pendant mon séjour sur les côtes de la Sicile; et, pour la ré- soudre, j'ai eu recours à des expériences physiologiques aussi bien qu’à des observations anatomiques. L'Académie connaît les résultats auxquels ces recherches m'ont conduit. Effectivement, dans un écrit dont j'ai eu (1) Voyez Memoir on the Pearly Nautilus, by Richard Owen; in-4°. London, 1832; traduit en français dans les Annales des Sciences natu- relles, première série, tome XXVIIL, 1833 ( page 120). (2) Nouvelles recherches sur le Nautile flambé. (Archives du Muséum, tome II, p. 277.) (3) Animali invertebrati, tom. I et IL. 148 DE LA CIRCULATION l'honneur de déposer un exemplaire sur le bureau, dans la séance du 25 novembre dernier, j'ai annoncé que « chez les « Mollusques, même les plus parfaits, le système des vais- « seaux à l’aide desquels le sang circule dans l'économie est « plus ou moins incomplet ; de sorte que, dans certains points « du cercle circulatoire, ce liquide s’épanche dansles grandes « cavités du corps, ou dans les lacunes dont la substance des « tissus est creusée (1). » J'ai ajouté aussi que, sous ce rapport, (1) Un fait intéressant, constaté en 1822 par M. Gaspard, aurait contribué aussi à me confirmer dans cette opinion, s'il n'avait échappé à mon attention, ainsi qu'à celle de tous les physiologistes qui ont écrit sur ce sujet depuis vingt ans. En effet, dans un appendice à son Mé- moire sur l’hibernation des Colimacons, inséré dans le deuxième volume du Journal de Physiologie, par M. Magendie , M. Gaspard signale l’exis- tence d'un épanchement sanguin dans la cavité viscérale de ces Mol- lusques. Il est à regretter qu'il n'ait pas donné suite à cette observa- tion , et qu'il n'ait pas cherché à découvrir les relations qui pouvaient exister entre cet epanchement et le phénomène de la circulation ; au lieu de rester stérile , elle aurait alors conduit M. Gaspard à des résultats dont il ne peut réclamer aujourd’hui la propriété. Je m'empresse aussi de réparer une autre omission involontaire dont J'ai été coupable en rédigeant ce Mémoire. Je ne connaissais pas alors l'existence d'un travail sur la Limace rouge, par M. Pouchet, imprimé à Rouen en 1842, et contenant des observations sur la perspiration du sang des capillaires dans la cavité abdominale de ce Mollusque, et l'absorp- tion subséquente de ce liquide par les extrémités des veines. Mais je dois faire remarquer, en même temps, que la manière dont M. Pouchet se rend compte de la présence du sang dans la cavité viscérale, et de la rentrée de ce liquide dans le torrent de la circulation, est entièrement différente de l'opinion dont je vais démontrer ici l’exactitude. Pour ce physiologiste, le fait en question est un phénomène d’exhalation et d’ab- sorption ; et rien, dans son Mémoire, ne m'autorise à penser qu'il ait CHEZ LES MOLLUSQUES. 449 la structure de ces animaux se rapproche extrêmement du mode d'organisation que j'avais précédemment constaté chez les Crustacés, où le système veineux général manque tout entier, et se trouve remplacé, quant à ses fonctions, par les espaces irréguliers que les diversorganes laissent entre eux (1). Je comprends facilement la surprise que quelques anato- mistes ont pu éprouver en lisant le passage que Je viens de citer , et même les doutes qui ont pu s'élever dans leur esprit sur l'exactitude de mes observations, car on se forme d’ordi- naire une idée bien différente du système circulatoire des Mollusques. Effectivement, dans les ouvrages les plus récents sur ces matières, on dit que cet appareil est un système de vaisseaux clos dans lequel le sang de tout le corps est en- fermé (2), et dans d’autres livres qui, pour avoir précédé de . reconnu , dans la Limace, la circulation semi-lacuneuse dont j'avais, quel- ques années avant, constaté l'existence chez les Tuniciers. (Voyez les Comptes rendus des séances de l'Académie, 10 février 1845.) En indiquant les faits à l'appui de mon opinion, j'aurais pu citer éga- lement les observations de M. de Quatrefages, sur les Éolides: car ce z00- logiste distingué avait déjà reconnu l’absence d'une portion du cercle vasculaire chez ces Mollusques ; mais l'exactitude de ce résultat ayant été attaquée par un autre naturaliste, et la question en litige entre ces deux auteurs étant pendante devant l'Académie , j'ai cru devoir m'abstenir d’en parler. Aujourd’hui on sait que les observations de M. Quatrefages , rela- tives à ce point important de la physiologie des Mollusques, ont été plei- nement confirmées par M. Nordmann. (Additions faites au moment de Vimpression de ce Mémoire ; décembre 1846.) (1) Rapport adressé à M. le Ministre de l'instruction publique, sur les résultats d’une mission scientifique en Sicile, le 10 novembre 1844, et in- séré au Moniteur le 27 du même mois. (2) Voyez Duvernoy, 4dditions aux Lecons d’ Anatomie comparée de XX. 57 450 DE LA CIRCULATION plusieurs années les Traités auxquels je viens de faire allusion, n'en sont pas moins considérés, à juste titre, comme faisant toujours autorité dans la science , on décrit les veines comme étant constamment pourvues d’une tunique propre, et comme venant de toutes les parties du corps se réunir en branches, puis en troncs de plus en plus gros, pour pénétrer ensuite dans l’organe respiratoire ; on rappelle, il est vrai, les orifices signalés par Cuvier dans les veines de l’Aplysie, mais on af- firme néanmoins que, chez tous les Malacozoaires, l'appareil de la circulation est complet (1). J'ai aussi pendant longtemps partagé cette erreur commune (2); mais aujourd'hui je crois pouvoir démontrer : 1° Que l'appareil vasculaire n'est complet chez aucun Mollusque ; 2° Que, dans une portion plus ou moins considérable du cercle circulatoire, les veines manquent toujours et sont rem- placées par des lacunes ou par les grandes cavités du corps; 3° Que souvent les veines manquent complétement, et qu'alors le sang, distribué dans toutes les parties de l’écono- mie ,au moyen des artères, ne revient vers la surface respi- ratoire que par les interstices dont je viens de parler. Cuvier, 1. VI, p.359 (Paris, 1839).— Owen, Lectures on the Comparative Anatomy and Physiology of the invertebrate animals, p.13. (London, 1843.) (1) Guvier, Règne animal, tome I, p. 50, et tome III (deuxième édit., 1829 et 1830). — Meckel, Anatomie comparée, tome VI, chap. 7. — Blainville, article Morrusques du Dictionnaire des Sciences naturelles, tome XXXII, p. 109 ( Paris, 1824); et Manuel de Mulacologie, p. 130 (Paris, 1825). (2) Voy. mes Éléments de Zoologie, tome 1, p. 50 (deuxième édit., Paris, 1840 ). CHEZ LES MOLLUSQUES. A51 A l’appui de ces propositions, je ne rapporterai pas tous les faits de détail qui ont contribué peu à peu à former mon opinion; il me suffira, je crois, de citer un petit nombre d'expériences qui me paraissent être décisives, et qui sont d’ailleurs si faciles à répéter, que tous les anatomistes pour- ront vérifier l'exactitude de mes observations. J'ai dit que, chez les Mollusques, le système veineux man- que en totalité ou en partie, et que la cavité viscérale tient lieu d’une portion du cercle circulatoire. Pour s’en assurer , il suffit d'injecter un peu de lait dans l'abdomen d’un Coli- maçon vivant. Ce liquide, dont notre savant collègue M. Duméril s'était déjà servi avec succès pour l'injection du système gastro- vasculaire des Méduses , a l'avantage de n'irriter que peu les tissus avec lesquels il arrive en contact, et d’être, en général, assez facile à reconnaître par son opacité et sa teinte parti- culière. Quand on l’injecte dans la cavité abdominale du Coli- maçon , il sy mêle au sang veineux arrivant des diverses parties du corps, pénètre avec ce liquide dans les vaisseaux afférents du poumon, passe dans les veines pulmonaires, et s'introduit enfin dans le cœur, qui bientôt le chasse dans les artères chaque fois que son ventricule se contracte. Afin de rendre plus palpable cette communication libre entre la cavité abdominale et la position vasculaire de l’ap- pareil circulatoire , il est bon d'employer dé préférence au lait une dissolution de gélatine colorée par un précipité abondant de chromate de plomb, car cette matière pénètre aussi très-facilement de la cavité abdominale dans les vais- seaux du poumon, et de ceux-ci jusque dans le cœur ; sa couleur jaune crue tranche sur les teintes rompues des divers 57e 452 DE LA CIRCULATION tissus, et la solidification de la gélatine ainsi injectée rend permanentes les traces de son passage. Pour bien assurer la réussite de cette expérience, il faut aussi empêcher l'animal de se contracter avec violence, comme cela arrive d'ordinaire dès qu’un liquide étranger pénètre dans son abdomen, et ce résultat s'obtient en déterminant par submersion une as- phyxie incomplète; en effet, le corps du Mollusque est alors étendu comme lorsqu'il rampe sur le sol, mais reste flasque et ne donne que peu de signes d’irritabilité. J'ai l'honneur de placer sous les yeux de l'Académie quel- ques-unes des préparations obtenues par ce procédé (1). L'in- jection a toujours été faite en poussant doucement le liquide coloré dans la grande cavité viscérale du corps par une petite ouverture pratiquée sur le dos ou à la base de l’un des tenta- cules céphaliques du Colimaçon ; les bords de la plaie ont été comprimés de facon à oblitérer l'orifice des petits vais- seaux divisés par l'instrument tranchant; et dans les autres parties de l'économie on n'a ouvert ni artères, ni veines; ce- pendant les nombreux vaisseaux qui portent le sang de tous les organes dans l'appareil respiratoire, et qui forment à la voûte de la cavité pulmonaire un magnifique réseau, sont remplis de chromate de plomb, et l'injection , après avoir pé- nétré de la sorte dans le système de la petite circulation et l'avoir traversé tout entier, est arrivé dans l'oreillette du cœur. Pour s'en assurer, il suffit de l'observation à l'œil nu; mais c'est seulement en s’aidant d’une loupe, qu’on pourra voir comment le passage s’est effectué. Ces préparations mon- trent aussi que les liquides épanchés dans la cavité abdomi- (1) Voyez planche 3. / CHEZ LES MOLLUSQUES. 453 nale pénètrent immédiatement dans les canaux veineux des- tinés à porter le sang du foie, des ovaires et des autres orga- nes vers l'appareil de la respiration , ainsi que dans les lacu- nes intermusculaires, qui, dans le pied, tiennent lieu de veines. En un mot, elles font voir que toutes les veines du corps communiquent librement avec la cavité viscérale; que, dans bien des parties de l’économie , de simples lacunes tien- nent lieu de veines, et que ce sont aussi des lacunes micros- copiques creusées dans la substance des tissus qui remplissent les fonctions des vaisseaux capillaires des animaux supé- rieurs, et qui font communiquer les dernières ramifications des artères avec les racines du système veineux. Je décrirai bientôt, avec tous les détails nécessaires , la disposition ana- tomique de cet appareil circulatoire semi-vasculaire, semi- interstitiaire. Dans ce moment, je ne pourrais le faire sans m'éloigner trop de l’objet principal de cet écrit, et je me hâte de revenir à la partie physiologique de la question. Les expériences dont je viens de faire mention prouvent que les liquides contenus dans la cavité abdominale du Li- maçon, et même les particules solides tenues en suspension dans ces liquides, pénètrent. instantanément, et sans la moindre difficulté, dans les vaisseaux sanguins ; mais elles ne suffisent pas encore pour montrer que la cavité viscérale constitue , ainsi que je l'ai dit , une portion du cercle cireu- latoire parcouru par le fluide nourricier. Effectivement, on m'objecterait peut-être que le passage, même très-rapide, d’un liquide de la cavité abdominale dans les veines, pourrait résulter d’un phénomène d'absorption, et que rien ne mon- tre encore la libre communication en sens contraire que je suppose exister. 454 DE LA CIRCULATION Pour lever cette difficulté, j'ai eu recours à une expérience analogue par ses résultats à celle dont je viens de parler, mais exécutée d’une manière différente : au lieu d’injecter les canaux veineux par l'intermédiaire de la cavité abdominale, j'ai poussé directement dans un de ces canaux veineux le li- quide tenant en suspension la poussière jaune ou bleue, et j'ai vu ce mélange s'épancher de suite dans la cavité viscé- rale, puis arriver aux poumons, comme d'ordinaire. Enfin, comme dernière épreuve , j'ai soumis à l'examen microscopique le sang puisé directement dans le ventricule du cœur, ainsi que le liquide épanché dans la cavité abdomi- nale d’un Colimacon vivant, et je n'ai pu apercevoir aucune différence entre ces deux fluides; l’un et l’autre charriaient des globules en apparence identiques, et paraissaient avoir la même densité, J'en ai conclu que c’est du sang qui se trouve dans la cavité viscérale aussi bien que dans les cavités du cœur. Ainsi, chez le Limacon, le liquide nourricier distribué dans toutes les parties de l’économie par les tubes rameux dont se compose le système artériel revient, soit par des vei- nes , soit par des lacunes seulement, vers la cavité viscérale, s’épanche dans cette cavité, baigne le tube digestif, et péne- tre ensuite dans d’autres canaux destinés à le mettre en con- tact avec l’air et à le porter jusque dans le cœur aortique (1). Il en est de même pour tous les Mollusques gastéropodes chez lesquels j'ai examiné, par des moyens analogues, la ma- nière dont le sang circule, et si je cite de préférence le Lima- (1) Voyez les planches 3 et 4. CHEZ LES MOLLUSQUES. 455 con, c’est seulement parce que cet animal est si commun dans nos campagnes, et même sur nos marchés, que quicon- que voudra répéter mes expériences pourra le faire sans re- tard. Ce n’est même pas sur ce Mollusque que j'ai d’abord constaté les faits dont je viens d’avoir l'honneur d'entretenir l'Académie; c’est sur le grand Triton de la Méditerranée que J'ai fait mes premières expériences , et je dépose sur le bureau une figure que j'ai dessinée à Milazzo, et qui montre non- seulement une portion considérable du système veineux, rem- pli par du bleu de Prusse injecté dans la cavité abdominale, mais aussi les grands orifices béants par lesquels ces vais- seaux débouchent dans cette méme cavité. Pendant mon séjour sur les côtes de la Sicile, j'ai égale- ment étudié l'appareil circulatoire de l’Aplysie, Mollusque chez lequel la communication entre le système sanguin et la cavité abdominale avait été si bien constatée par Cuvier, mais avait été considérée par cet anatomiste célèbre comme une anomalie des plus singulières (r). Quelques doutes sur l’exac- titude de ces observations avaient été émis par Meckel (2) et par Carus (5); mais M. Delle Chiaje (4), dont tous les zoo- logistes connaissent et apprécient les grands travaux, a mon- (1) « Sa structure, dit Cuvier, en parlant de la veine cave ou artère « branchiale, est même peut-être le fait le plus extraordinaire que la phy- = siologie des Mollusques m'ait encore offert. » Op. cit., pag. 13. (2) Meckel, Anatomie comparce ; trad. de Schuster, tome IX, p. 174. (3) Anatomie comparée; trad. de Jourdan, tome II, p. 309. (4) Memorie sugli animali senza vertebre del regno di Napoli, tom. 1, p: 63; Descrizione e notomia degli animali invertebrati della Sicilia ci- teriore, tom. II, p. 73. 1456 DE LA CIRCULATION tré que Cuvier ne s'était pas trompé, et il a fait voir que le sinus eriblé décrit par celui-ci communique avec un système lacuneux sous-cutané. Cependant l'appareil vasculaire de l’Aplysie ne me semblait pas être suffisamment connu, car M. Delle Chiaje lui-même déclare que la circulation veineuse chez ce Mollusque est encore pour lui un phénomène inex- plicable (1). En injectant sur des Aplysies vivantes des liquides co- lorés dans diverses parties du cercle circulatoire, je me suis bientôt convaincu de l'entière exactitude des faits avancés par Cuvier; j'ai vu, comme M. Delle Chiaje l'avait vu avant moi, que ce n’est point par l'intermédiaire de vaisseaux que le sang arrive aux branchies ; c’est une grande lacune semi- circulaire comprise entre les faisceaux musculaires, les brides celluleuses et les téguments du manteau qui remplit ici les fonctions d’une veine cave ; et, par ses extrémités antérieures, cette lacune communique librement avec la cavité viscé- rale (2). Le sang veineux y arrive en partie par d’autres lacu- nes sous-cutanées, situées le long de ce canal dépourvu de parois propres; mais la plus grande partie du liquide nour- ricier y pénètre par les orifices terminaux dont je viens de parler, et provient par conséquent de la cavité abdominale. J'ai vu, de plus, que cette grande chambre viscérale n'est point tapissée par une membrane péritonéale continue, mais par une tunique celluleuse, criblée d'une multitude de trous (1) « La circulazione venosa della Aplysie e stata finora un problema, «ed encora per me d’impossibile soluzione. » Descrizione e Notomia, tom. IL, p. 71. Naples, 1841. (2) Planche 6, fig. 3. CHEZ LES MOLLUSQUES. 453 irréguliers, ou plutôt par une couche membraniforme , com- posée de brides celluleuses , entre-croisées en deux sens, et’ placées sur plusieurs plans, de facon à laisser entre elles des lacunes en communication les unes avec les autres (1). Ces trous irréguliers, dont les parois de la cavité abdominale sont per- cées, communiquent à leur tour avec un vaste système de la- cunes formées par l’entre-croisement des rubans musculaires du pied et du manteau ; enfin ces espaces intermusculaires se continuent sans interruption avec le réseau lacuneux sous- cutané découvert par M. Delle Chiaje ; et c'est ce vaste en- semble de lacunes qui tient lieu de veines, vaisseaux dont les Aplysies sont complétement dépourvues. En effet, le sang distribué aux organes par un système de tubes artériels très- développé se répand dans toutes ces lacunes, et parvient de la sorte dans la cavité abdominale, qui fait ici l'office d’un vaste réservoir, et transmet le liquide nourricier à l'appareil respiratoire , qui , à son tour , l'envoie au cœur , chargé de le chasser dans les artères. Pour s’en convaincre, il suffit de pousser un liquide coloré dans le canal afférent de la branchie, car on voit de suite l'injection pénétrer dans toutes ces lacunes, soit direc- tement, soit par l'intermédiaire de la cavité abdominale, et en injectant le liquide dans les espaces intermusculaires d’une partie quelconque du corps, on peut le faire avancer en sens inverse , et le faire parvenir jusque dans les vaisseaux de la branchie. En variant de diverses manières ces expériences, faites (1) Planche 7. Rex 58 458 DE LA CIRCULATION toutes sur des animaux vivants, et en disséquant avec une grande attention les différentes parties de l'appareil cireula- toires de l’Aplysie, j'ai vu ce résultat se confirmer toujours, et j'ai compris aussi pourquoi la circulation veineuse était restée, dans l'opinion de M. Delle Chiaje , une question inso- luble. Effectivement, je me suis assuré que l'appareil aquifere décrit par ce savant, et considéré par lui et par quelques autres anatomistes comme un complément de l'organe respiratoire, n'est autre chose qu'une portion du vaste système lacunaire qui, dans le corps de lAplysie, tient lieu de veines (1). fl n'existe pas, ainsi que le soupçonne l'habile anatomiste de Naples, des orifices destinés à l'établissement d’une commu- nication directe entre ces lacunes ou la cavité abdominale et l'extérieur ; et si de l’eau s'y introduit quelquefois en quan- tité considérable, c’est seulement par l'effet d’un phénomène d’endosmose. La turgescence qu’on observe souvent chez les Aplysies est une conséquence de l'absorption veineuse, et non pas de l'introduction directe de l’eau du dehors, à l'aide de canaux débouchant à la surface du corps. Les injections du système lacunaire, et même la simple insuflation de ces cavi- (1x} Un observateur distingué, M. Van Beneden, professeur à FUmi- versité de Louvain, paraît être arrivé, de son côté, à une opinion ana- logue; car, dans une lettre qu'il adressa à l’Académie, en 1835, on lit le passage suivant : « Après des recherches minutieuses sur les organes « de la circulation dans les Aplysies, je crois avoir reconnu une véritable « fusion du système nerveux avec le systeme aquifère de M. Delle Chiaje. » (Comptes rendus, séance du 20 octobre 1835.) Malheureusement M. Van Beneden n'est pas entré dans d'autres détails à ce sujet. (7oy. le Compte rendu de la séance du 24 fevrier 1845.) CHEZ LES MOLLUSQUES. 459 tés veineuses , prouvent suffisamment qu’il n’y a pas d’orifices semblables; et, d'un autre côté, si l’on tient compte des ex- périences de notre savant collègue M. Magendie, relatives aux lois de l'absorption veineuse chez les animaux supérieurs, on peut facilement se rendre compte de l'introduction rapide d’une quantité considérable d’eau dans l'intérieur du corps, par la seule force endosmotique , lorsque l’affaiblissement de l’irritabilité musculaire détermine une diminution corres- pondante dans la pression à laquelle les liquides de l’écono- mie se trouvent d'ordinaire soumis. Or, c'est précisément dans des circonstances de nature à produire ce relâchement dans les parois des cavités sanguines, que la turgescence du Mollusque se déclare. J'ajouterai aussi que j'ai observé des phénomènes tout à fait analogues chez les Limaçons; et ces Mollusques étant destinés à vivre toujours à l'air, il serait difficile de croire que la nature les aurait pourvus d’un appa- reil aquifère dont les fonctions ne pourraient commencer que dans le cas très-rare où l’animal se noie. Je n'hésite donc pas à dire que c’est une portion du sys- tème veineux interstitiaire de l’Aplysie qui a été décrite par M. Delle Chiaje comme étant un appareil aquifère compa- rable, jusqu’à un certain point, aux trachées aérifères des insectes. En faisant des recherches analogues sur le grand Triton de la Méditerranée, j'ai acquis la conviction que ce sont aussi des canaux veineux que cet anatomiste a pris pour un système aquifère chez ce Mollusque (1); et si, comme je (x) Descrizione di un nuovo apparato di canali aquosi scoperto negli animali invertebrati marini delle Due-Sicilie. ( Mermorie sulla storia e no- 58. 460 DE LA CIRCULATION le pense ,il en est de même pour les autres Gastéropodes, il n'y aurait plus de difficulté pour faire concorder les nom- breuses et intéressantes observations de M. Delle Chiaje, sur l'appareil circulatoire de ces animaux, avec les résultats que je viens de faire connaître. Effectivement, cet anatomiste a vu que, dans un nombre considérable de Mollusques gasté- ropodes , les veines sont remplacées, dans certaines parties du corps, par un réseau de simples lacunes, et viennent dé- boucher dans un grand réservoir qu’il considère comme un sinus veineux; or, ce sinus n'est autre chose que la cavité abdominale elle-même ou un prolongement de cette cavité au milieu des faisceaux musculaires du manteau, et c’est égale- ment avec elle que communiquent les prétendues trachées aquifères. Ainsi la circulation semi-vasculaire, semi-lacuneuse, que j'avais signalée chez les Tuniciers , et que je viens de consta- ter chez le Colimacon, le Triton, l'Haliotide, ete., est proba- blement commune à tous les Mollusques Mes: Là, de même que chez les Crustacés , la portion veineuse de l’ap- pareil vasculaire manquerait toujours plus ou moins com- plétement , et le sang épanché dans les interstices que les di- vers organes laissent entre eux se rassemblerait dans la cavité abdominale avant que de se rendre à l'appareil respiratoire. Il en est encore de mème dans la classe des Mollusques acéphales. Les expériences que j'ai faites sur le grand Jam- tomia degli animali senza vertebre del regno di Napoli, tom. II, p. 259.) — Instituzioni di Anatomia e Fisiologia comparativa, tom. 1, p. 299. Naples, 1832. CHEZ LES MOLLUSQUES. 461 bonneau de la Méditerranée ou Pinne marine, sur la Mactre et sur l'Huître commune, le montrent suffisamment ; seule- ment , dans ces animaux , les viscères ne flottant pas dans la chambre abdominale, mais s'entremélant d’une manière in- time aux muscles du pied et aux brides sous-cutanées de la portion correspondante des téguments communs, ce sont de petites lacunes qui tiennent lieu du grand réservoir veineux représenté par la cavité viscérale des Gastéropodes. Du reste, ces espaces interviscéraux communiquent librement avec les méats qui, dans le pied de la Mactre, résultent de l’entre- croisement des bandes charnues , et, en poussant une injec- tion colorée dans ces lacunes intermusculaires, on peut faire passer le liquide coloré jusque dans les vaisseaux des bran- chies et dans les canaux veineux du manteau. Mais dans le manteau, de même que dans le pied, il ne paraît pas y avoir de veines proprement dites, ou , en d’autres mots , des tubes à parois propres servant à porter le sang des tissus que ce liquide a nourris, vers le cœur ou vers l'organe spécial de la respiration. C'est un système de simples lacunes qui fait les fonctions du réseau formé par les vaisseaux capillaires chez les animaux supérieurs, et ces lacunes, presque micros- copiques, débouchent dans d’autres méats qui, par leur dis- position, ressemblent beaucoup à des veines proprement di- tes, mais sont dépourvus de parois indépendantes des parties voisines. Je reviendrai dans une autre occasion sur l’histoire anatomique et physiologique de ce système veineux lacu- naire du manteau des Mollusques acéphales, et, en ce mo- ment, J'ajouterai seulement que l’on y arrive facilement en injectant l'animal par les artères aussi bien que par les in- terstices de la cavité abdominale. 462 DE LA CIRCULATION Ilest aussi à noter que M. Delle Chiaje a vu ce réseau lacuneux dans le Pecten , et en a donné une très-belle figure ; mais j'ignore s'il considère ces méats comme appartenant au système veineux ou à son système aquifère , car le texte expli- catif de la planche relative à ce Mollusque n’a pas encore été publié (1). Ainsi, chez les Acéphales lamellibranches, de même que chez les Acéphales sans coquilles ou Tuniciers, et chez les Gastéropodes, l’appareil vasculaire est incomplet, et une portion plus ou moins considérable du système veineux est (1) Voyez Descrizione e notomia degli animali invertebrati della Sicilia citeriore , tom. TILL, tab. 95. (Au premier abord, on pourrait croire qu'il s'est glissé quelque erreur dans Ja citation que je viens de faire, car chacun des cinq volumes de ce nouvel ouvrage de M. Delle Chiaje porte sur le titre la date de 1841 ; mais cela paraît tenir à ce que l’auteur com- mence l'impression de ses ouvrages par le titre, tandis qu'en France on a l'habitude de terminer par ce feuillet, qui alors sert à constater le mil- lésime de la publication. En effet, la santé de M. Delle Chiaje ne lui ayant pas permis de poursuivre l'impression de son livre avec toute son activité accoutumée , le troisième et le cinquième volume étaient inachevés lors de mon passage à Naples, en juillet 1844 , et le sont probablement encore à l'heure qu'il est. Le troisième volume s'arrête à la page 44, pour re- prendre à la page 69, et s'interrompt de nouveau page 140. Quant au cinquième volume , il s'arrêtait à la page 68. Il est aussi à noter que, parmi les planches destinées à former l'atlas de cet ouvrage intéressant , il y en a plusieurs qui ne sont encore qu'esquissées, bien que les cuivres portent le millésime de 1841, ou quelque autre date plus ou moins re- culée. Cette circonstance serait à noter, si dans la suite on s’occupait de l'historique des découvertes faites depuis vingt ans sur l'organisation des animaux sans vertèbres; découvertes dont un grand nombre appartiennent incontestablement à M. Delle Chiaje. ) CHEZ LES MOLLUSQUES. 463 représentée par de simples lacunes , dans lesquelles le sang est épanché entre les organes. Au premier abord, on pourrait croire que les Mollus- ques supérieurs dont se compose la classe des Céphalopodes font exception à cette règle, et possèdent un appareil vascu- laire complet, c’est-à-dire un système circulatoire dont toutes les parties sont constituées par des tubes à parois propres. En effet, Cuvier, dans son grand travail sur l'anatomie du Poulpe, a fait connaître un système vasculaire veineux , aussi bien qu'un système artériel, et ces veines sont bien des tubes à parois propres, comme le sont les veines des ani- maux supérieurs. Monro (1)et Hunter (2) ont décrit les veines du Calmar et de la Seiche, et M. Delle Chiaje a représenté ces vaisseaux avec beaucoup plus d’exactitude qu'on ne l'avait fait jusqu'alors ; enfin, on connaît aussi les principales veines du Nautile, et, par conséquent, on peut, en généralisant ces faits particuliers, dire que, dans la classe des Céphalopo- des, il existe toujours un système veineux vasculaire très-dé- veloppé. MM. Owen et Valenciennes ont, il est vrai, constaté l'existence d’un nombre considérable de grands orifices à l'aide desquels la cavité de la veine principale du Nautile communique librement avec la cavité péritonéale; mais on pourrait ne voir dans cette disposition que les derniers ves- tiges du mode d'organisation que j'ai trouvé chez tous les Mollusques inférieurs, et on pourrait penser que le cercle (1) The structure and Physiology of. Fishes explained and compared. -Edmburgh, 1785. (2) Voyez Descriptive and illustrated catalogue of the Hunterian Mu- seum, published by M. R. Owen, vol. IL. 464 DE LA CIRCULATION circulatoire des Céphalopodes est formé tout entier par des tubes , lors même que ces vaisseaux à parois membraneuses seraient perforés dans quelques points, de facon à ne pas emprisonner complétement le sang dans leur intérieur, du moins après la mort de l’animal, car quelques anatomistes ont supposé que, pendant la vie, ces pertuis ne sont pas béants. Mais il n'en est pas ainsi, et je puis facilement prouver quechezles Céphalopodes, de mème que chezles autres Mol- lusques, la cavité viscérale sert d’intermédiaire entre diverses parties de l'appareil vasculaire, et constitue réellement une portion du cercle circulatoire parcouru par le sang. En effet, le sinus veineux découvert récemment par M. Delle Chiaje dans le Poulpe, n’est autre chose , ainsi que je le démontrerai facilement, que la cavité viscérale de cet animal (1), et je me suis assuré de la manière la plus positive : 1° Que des injections, mème très-grossières, poussées dans la cavité où flottent l'estomac, le jabot, l'œsophage, (1) Il ne faut pas confondre la cavité viscérale du Poulpe avec la chambre branchiale, n1 avec les grandes poches membraneuses qui lo- gent les troncs veineux dont les paroïs sont garnies des corps spongieux décrits par Cuvier. Ces poches, qui occupent presque toute la portion postérieure du corps, communiquent directement avec la chambre res- piratoire par deux orifices, et recouvrent dans leur intérieur l'eau dont cette chambre est remplie. Mais il n'y a aucune communication entre ces poches et la grande cavité viscérale qui s'étend depuis la bouche jusqu’en arrière de l'estomac. L'intestin n’est pas libre comme l’est l’œsophage ou l'estomac, et c’est l'adhérence de sa surface avec la paroi interne de la tunique viscérale commune qui empêche le sang veineux de le baigner, comme cela a lieu chez les Gastéropodes. . CHEZ LES MOLLUSQUES. 465 l'artère aorte, les glandes salivaires et la masse charnue de la bouche, après avoir baigné la surface de tous ces organes, pénètrent dans les veines des autres parties du corps, tra- versent les cœurs pulmonaires et vont remplir les vaisseaux capillaires des branchies ; 2° Que les veines profondes des bras, les veines des yeux et celles des parties charnues voisines débouchent dans cette cavité viscérale, soit directement, soit par l'intermédiaire d'une grande lacune ou sinus situé au fond de chaque or- bite, et que le sang veineux , pour se rendre des veines dont il vient d’être question dans les cœurs pulmonaires, traverse toujours la cavité viscérale; 3° Que cette dernière cavité communique aussi directe- ment avec la partie postérieure de la grande veine cave par deux vaisseaux d’un calibre considérable (1). Dans un autre Mémoire, je présenterai une description détaillée de ces diverses parties de l'appareil circulatoire du Poulpe ; aujourd'hui je me bornerai à placer sous les yeux de l’Académie quelques dessins représentant le système veineux injecté par l'intermédiaire de la grande cavité viscérale, qui, elle-même, est distendue par le liquide coloré dont les veines sont remplies. Dans le Calmar commun (2), il existe aussi une portion du système circulatoire qui, au lieu d’être formée par des vaisseaux , se compose uniquement de lacunes et d’une cavité servant en même temps de chambre viscérale et de sinus vei- neux ; seulement cette cavité est beaucoup moins vaste que (1) Planche 1. (2) Planches 2 et 3. OC 59 466 DE LA CIRCULATION chez le Poulpe et ne dépasse guère la partie céphalique du corps. Cette modification s'explique du reste très-facilement; car, ici, l'estomac et l’œsophage, au lieu d’être suspendus dans une cavité abdominale, comme chez le Poulpe, adhèrent intimement à la tunique viscérale commune, de façon que la cavité elle-même est oblitérée dans toute sa portion posté- rieure, et ne persiste que là où elle loge l'extrémité antérieure de l’æœsophage et la masse buccale, et là elle remplit, comme d'ordinaire, les fonctions d’un sinus veineux. Aussi suffit-1l d'injecter un liquide coloré dans la cavité viscérale, réduite ainsi à sa portion céphalique, pour remplir aussitôt les veines de toutes les parties du corps. Les préparations dé- posées sur le bureau et représentées dans les planches 2 et 3 ont été faites de la sorte; l'injection bleue poussée dans la cavité contenant la portion antérieure du eanal digestif a passé de la grande veine cave dans les veines du manteau, des viscères et des bras, a rempli les cœurs pulmonaires, et est arrivée jusque dans les branchies. Les faits dont je viens d'entretenir l’Académie me sem- blent être assez nombreux et assez variés pour autoriser les conclusions que j'ai rappelées au commencement de ce Mé- moire. Le Poulpe et le Calmar, parmi les Céphalopodes; le Co- limaçon, le Triton, l'Haliotide et l’Aplysie, dans la classe des Gastéropodes; la Mactre, la Pinne et l'Huître, dans la grande division des Acéphales ; enfin les Biphores et les As- cidies sociales et composées, dans le groupe des Tuniciers, m'ont offert, tous, un appareil circulatoire plus ou moins incomplet, dans lequel les veines manquent en totalité ou en partie, et sont remplacées , là où elles manquent, par la ca- CHEZ LES MOLLUSQUES. A / vité viscérale elle-même, et par d’autres espaces libres que les organes intérieurs ou les matériaux constitutifs des tissus laissent entre eux. D'un autre côté, il n'est aucun Mollusque qui m’ait offert un système clos de vaisseaux sanguins, et les observations recueillies avant que l'attention des zoologistes ne fût éveillée sur ce point ne fournissent aucun argument solide en faveur de l'existence d’un appareil vasculaire com- plet dans une espèce quelconque appartenant à ce grand em- branchement du règne animal. La disposition du système circulatoire que j'ai rencontrée partout où j'ai eu l'occasion de l’étudier , ne peut donc être, à mes yeux, un mode d'or- ganisation exceptionnel chez les Mollusques, et il me semble, au contraire, légitime de conclure que chez tous les animaux conformés d’après le même plan général que le Poulpe, le Calmar, le Limacçon , le Triton , l’Aplysie, l'Haliotide , l'Hui- tre, la Mactre, la Pinne, les Biphores et les Ascidies , cette fonction doit offrir d’une manière plus ou moins marquée le même caractère. Nous voyons, il est vrai, le système des ca- vités destinées à contenir et à distribuer le fluide nourricier se perfectionner progressivement et se revêtir de parois tu- bulaires dans une portion de plus en plus considérable du cercle circulatoire, à mesure que l’on s'élève des Molluscoi- des les plus inférieurs jusqu'aux Céphalopodes. En effet, chez les Bryozoaires , qui sont les représentants les plus dégradés du type des Malacozoaires, il n’existe aucune trace ni de cœur, ni d’artères, ni de veines, et, ainsi que je m'en suis as- suré maintes fois, le liquide qui tient lieu de sang est con- tenu dans la grande cavité viscérale au milieu de laquelle flottent les organes de la digestion. Chez les Molluscoides tuniciers , il existe déjà un cœur et un système de tubes san- 59. 168 DE LA CIRCULATION guifères dans la portion branchiale de l'économie ; mais il n'y a niartères ni veines dans la portion viscérale ou abdominale du corps. Chez l'Huitre, la Mactre etl’Aplysie, le système ar- tériel se complète, mais il ne paraît y avoir nulle part, si ce n'est dans les branchies, un lacis de véritables vaisseaux pour remplir les fonctions de réseau capillaire, et il n'y a pas en- core de veines proprement dites pour ramener le sang des divers organes vers l'appareil de la respiration. Chez le Triton et le Colimacon, nous avons reconnu un degré de plus dans le perfectionnement du système cireulatoire, car les veines commencent à se constituer sous la forme de tubes membraneux dans certaines parties de l'économie, bien qu’elles manquent encore, et sont remplacées par de simples lacunes dans le système musculaire et dans l’espace compris entre les principaux viseères et l'organe respiratoire. Chez le Poulpe, la portion vasculaire du système veineux se déve- loppe davantage ; enfin, chez le Calmar, il n’v a de grandes lacunes faisant office de veines qu’autour de la portion anté- rieure du tube digestif ;et, dans tout le reste du cercle circu- latoire, le sang est renfermé dans des tubes dont les parois sont indépendantes des organes voisins. D'après cette progression, on concevrait facilement la possibilité d’un degré de plus dans le développement vascu- laire, perfectionnement qui amènerait d’une manière com- plète la transformation de toutes les lacunes sanguifères en tubes fermés , et qui rendrait sous ce rapport le système cir- culatoire d’un Mollusque semblable à l'appareil vasculaire des animaux vertébrés. Mais il y a tout lieu de croire que cela n'a jamais lieu, car le Poulpe et le Calmar sont les représen- tants les plus élevés du type propre à l’embranchement des CHEZ LES MOLLUSQUES. 469 Malacozoaires ; et puisque chez ces Mollusques , les plus par- faits de tous, la cavité viscérale tient encore lieu d’une por- tion du système veineux , il n’est pas probable qu’un appareil vasculaire complet se rencontrera ailleurs. Du reste, lors même qu'il en serait ainsi, cela ne changerait que peu la por- tée des faits dont il vient d'être question, car le mode de cir- culation semi-lacuneuse sur lequel j'ai appelé l'attention de l’Académie n’en demeurerait pas moins un des caractères do- minants dans le type malacologique. Il serait inutile, ce me semble, d’insister ici sur l'influence qu'une pareille organisation doit exercer sur le mécanisme de quelques autres fonctions, telles que l'absorption, soit générale, soit chyleuse, et les mouvements érectiles ; car il suffit de savoir que le sang baigne directement la surface externe d'une portion plus ou moins considérable du canal digestif, pour comprendre aussitôt comment les matières alimentaires liquéfiées par l’action des sucs gastriques ou in- testinaux , peuvent se mêler rapidement au fluide nourricier sans qu’il y ait ni veines ni vaisseaux chylifères pour les y conduire. Il suffit aussi d’un instant de réflexion sur le rôle qu'un liquide répandu dans un vaste système de lacunes ex- tensibles et contractiles peut jouer dans le mécanisme des mouvements de l'animal, pour voir également que cette dis- position anatomique doit être la cause des phénomènes d’é- rection que nous offrent souvent le pied des Acéphales ou les tentacules des Gastéropodes. Je ne m'arrèterai donc pas sur ces considérations ; mais il serait bon peut-être d'exami- ner jusqu'à quel point les faits fournis par l'étude de la cir- culation chez les Mollusques peuvent venir en aide à la phy- siologie des animaux supérieurs, relativement à la question 470 DE LA CIRCULATION CHEZ LES MOLLUSQUES. de la nature intime et du mode de formation des vaisseaux sanguins en général. Aujourd'hui je ne pourrais aborder une discussion de ce genre sans abuser de l'attention que l’Aca- démie a bien voulu me prêter, mais j'y reviendrai lorsque j'aurai fait connaître mes nouvelles recherches sur la cireu- lation chez les Crustacés. CE EE EE TE EUR EXPLICATION DES PLANCHES. PLANCHE I. APPAREIL CIRCULATOIRE DU POULPE A LONGS BRAS (Octopus Macropus). Les tentacules ont été enleves et le corps de l’animal ouvert latéralement ; enfin, la branchie droite a été rejetée de ce côté pour mettre à découvert la communication de la cavité viscérale avec les grosses veines. L’injection du système veineux tout entier a été faite directement par cette cavité, et celle du systeme artériel par l’un des canaux branchiocardiaques. a, a le manteau fendu et rejeté de côté. a',a portion de la peau du manteau séparée de la couche muscu- laire pour montrer les veines nombreuses qui y rampent. a" la chambre respiratoire du côté gauche restée intacte ; la cloi- son médiane qui sépare cette cavité de la chambre bran- chiale du côté droit, et qui s'étend du manteau à la face inférieure de l’abdomen , se voit en J. b grande cavité viscérale ouverte pour montrer les glandes sali- vaires , l'æœsophage et l’aorte qui y sont logés, et y sont baignés par le sang veineux. c fond de la portion moyenne de ce grand sinus veineux renfer- mant le gésier. d portion postérieure du même sinus renfermant l'estomac spiral. e canal veineux inférieur venant du fond du grand sinus, formé par la cavité viscérale, et recevant ses branches veineuses des organes de la génération, de l'intestin, du foie, etc. Re —. m ñn 7 DE LA CIRCULATION canal veineux supérieur venant de la portion moyenne du sinus abdominal, et se réunissant au précédent pour consti- tuer de chaque côté du corps un tronc transversal qui s’a- nastomose avec la grande veine céphalique pour donner naissance aux veines Caves. corps spongieux adhérant au tronc veineux commun dont il vient d'être question. grande veine céphalique qui suit la face inférieure de l'ab- domen. veines des teñtacules se réunissant pour constituer la veine céphalique. veines cutanées des tentacules. veines cutanées du manteau. veines de l’entonnoir allant déboucher dans la grande veine céphalique. veines anales dont les branches viennent de la portion terminale de l'intestin et de la cloison médiane de la chambre bran- chiale, veine palliale inférieure, qui naît sur la portion inférieure du manteau , et passe dans l'épaisseur de la cloison médiane pour aller déboucher dans la grande veine céphalique. l’une des veines caves, garnie de ses corps spongieux, et allant déboucher dans le cœur brauchial correspondant. l’une des veines latérales du manteau coupée vers le point où elle sort de la couche musculaire pour contourner la base de la branchie et aller déboucher dans la veine cave. cœur branchial du côté droit renversé en dessous. vaisseau afférent à la branchie, ou artère branchiale, qui naît de ce cœur, et qui distribue le sang veineux aux feuillets branchiaux. vaisseau branchial efférent ou branchio-cardiaque. * oreillette droite du cœur formée par une dilatation contractile de la portion terminale du canal branchio-cardiaque. ventricule aortique. ESS sl (e; CHEZ LES MOLLUSQUES. t origine de la grande artère aorte ou aorte antérieure. {’ portion supérieure de la même artère, logée dans le grand sinus veineux. u artère génitale profonde. æ branches de l'artère aortique postérieure allant à l'anus. branche de la même artère se distribuant au manteau. F2 y artère nourricière de la branchie et du cœur veineux. z artère dorsale se distribuant à la portion supérieure et anté- rieure du manteau. A portion terminale de l'intestin. B portion inférieure de l'intestin. C œsophage. D, D glandes salivaires postérieures. E testicule. F conduit excréteur de la poche à encre. G foie. H entonnoir ouvert. J cloison médiane de la chambre branchiale. K portion de la paroi inférieure de l'abdomen et du pilier charnu postérieur de la chambre branchiale. L œil. M membrane tégumentaire de l'abdomen, formant la paroi in- terne de la chambre respiratoire. PLANCHE II. APPAREIL CIRCULATOIRE DU CALMAR. L'animal est vu en dessous; le manteau est fendu longitudinalement; le sac peritonéal est également ouvert pour mettre à nu les veines, et les deux veines caves sont séparées pour montrer le cœur. a grand sinus veineux de la tête, dont une portion a été mise à découvert par l'ablation des téguments et des muscles voi- sins. TLXX. 60 DE LA CIRCULATION b portion antérieure de la même cavité entourant la bouche. e, e, ce veines des bras allant déboucher dans ce sinus. d sinus ophthalmique. d' veine de l'iris allant déboucher dans le sinus ophthalmique. g grande veine céphalique naissant du sinus céphalique. ” 2 h veines caves garnies de corps spongieux. veines de l’entonnoir. i veines hépatiques. J' veines génitales. k, k veines du manteau. l, l veines des nageoires, se dilatant beaueoup avant de se joindre aux veines caves. m, m cœurs pulmonaires. n canal afférent à la branchie. o vaisseau branchial efférent ou branchio-cardiaque. p cœur aortique. l q g artères du manteau naissant de l'aorte postérieure. " artères de la nageoire. ; il r artère aorte, A tête. A’ bouche. F foie. G gésier. H estomac en cul-de-sac. I testicule. K canal efférent. L rectum. | M sac à encre. O branchies. P manteau. P' paroi interne dela chambre branchiale. P'’ feuillet péritonéal de cette paroi. Q entonnoir. CHEZ LES MOLLUSQUES. , PLANCHE Ill. APPAREIL CIRCULATOIRE DU CALMAR. Fig. 1. Le corps de l’animal a été ouvert latéralement, les bords du manteau écartes, et l'abdomen fendu pour mettre à nu les viscères. a grand sinus veineux formé par la cavité qui loge la masse buccale, les glandes salivaires antérieures, etc. Pour mettre cette cavité à découvert, on a enlevé les téguments et les muscles de la face supérieure de la tête. b paroi antérieure de cette cavité, formant un anneau entre la lèvre et la base des bras. c,c,c veines des bras allant déboucher directement dans le sinus céphalique. : d sinus ophthalmique occupant toute la partie postérieure de l'œil, et renfermant dans son intérieur la glande choroi- dienne , le ganglion optique, etc. e sinus crânier logeant le cerveau, et communiquant avec le sinus céphalique antérieur par un canal étroit où se trouve l'æœsophage. f veines des glandes salivaires et de la portion antérieure du foie allant s’ouvrir dans le sinus crânier. g portion postérieure de la grande veine céphalique. k corps spongieux garnissant les divisions de ce vaisseau, ou veines caves qui se rendent aux cœurs pulmonaires. ä veines hépatiques rampant sur la face antérieure du foie, dont l’un des lobes postérieurs a été relevé et rejeté de côté pour montrer les parties situées au-dessous. j veines gastriques. J' branche de la veine gastrique venant du testicule. Æ veines palliales. #’ branche de cette veine naissant dans l'épaisseur de la tige de la branchie. be. 476 z g* A B C D glandes salivaires. E F H [l ÿ DE LA CIRCULATION l, l veines des nageoires. l’ section de l’une de ces veines, au point où elle traverse les parois dorsales de la cavité du manteau. 7” branches de la même veine naissant entre les fibres muscu- laires de la nageoire. m, »m cœurs pulmonaires logés dans leurs poches péricardiques (p). ñn vaisseau afférent de la branchie droite ou artère branchiale. vaisseau efférent de la branchie se rendant au cœur aortique. artère aorte postérieure. artères de la nageoire, artère gastrique. s artère aorte antérieure. t artère œsophagienne. u artères palliales supérieures. artères cervicales. artère ophthalmique. tête. manteau. cavité de la coquille. æsophage. foie. gésier. estomac en cul-de-sac, testicule. réservoir spermatique. K conduit déférent, Q entonnoir. - Fig. 2. Section transversale de la branchie. a, a lobes branchiaux dont les bords externes sont libres. b tige de la branchie. b' membrane qui fixe cette tige à la paroi externe de la chambre respiratoire formée par le manteau. CHEZ LES MOLLUSQUES. 77 c plexus veineux occupant l'intérieur de cette tige. d, d vaisseaux qui naissent du conduit afférent (e), et qui distri- buent le sang veineux aux feuillets branchiaux. f,.f vaisseaux qui recoivent le sang artériel de ces feuillets , et le versent dans le canal efférent, ou vaisseau branchio-car- diaque g. PLANCHE IV. APPAREIL CIRCULATOIRE DU COLIMACON. Fig. 1. Dans cette préparation, le système veineux a été injecte en bleu par la cavité abdominale au-devant de l’un des tentacules, et la chambre pulmonaire fendue dans toute sa longueur ; la portion du cercle cireula- toire qui renferme le sang arteriel est injectée en rouge. a plancher de la chambre pulmonaire, soulevé par l'injection dont la cavité abdominale est remplie. b canal veineux longeant l'intestin. c canal veineux se rendant du bord antérieur du manteau à la cavité abdominale. d système de lacunes veineuses occupant le bord du manteau. e vaisseaux afférents du réseau pulmonaire. f vaisseau efférent du poumon, ou veine pulmonaire servant à porter le sang artériel au cœur. g oreillette. hk ventricule. Fig. 2. Dans cette préparation , l'injection du systeme veineux a été faite comme dans la précédente, mais la cavite abdominale « ete ensuite ou- verte dans toute sa longueur. a la cavité abdominale. b pertuis par lesquels le sang passe de la cavité abdominale dans le système lacunaire de la portion du bord du manteau qui entoure l'ouverture pulmonaire. C. d e mm DE LA CIRCULATION portion terminale du canal veineux servant d'intermédiaire entre ces lacunes et les vaisseaux du poumon. portion suivante du même canal, rejetée en haut. pertuis par lesquels le sang passe de la: cavité abdominale dans l'extrémité postérieure du canal veineux latéral qui se voit en place dans la figure 1 de la planche suivante (en e). réseau pulmonaire. vaisseau efférent du système pulmonaire, ou veine pulmonaire. vaisseaux qui naissent de la glande urinaire , et débouchant par un tronc commun dans la veine pulmonaire, près du cœur. oreillette. ventricule. origine de l'aorte. artère génitale. branche de l'artère intestinale dont les divisions se ramifient sur la glande urinaire, le rectum, les lobes antérieurs du foie et la glande génitale accessoire (ou testicule, Cuvier). branche gastrique de l'artère précédente. artère abdominale. artère aorte. voûte de la chambre pulmonaire. bord du manteau. portion droite du même rebord. rectum. conduit excréteur de l'appareil urinaire. glande urinaire. estomac, foie. ovaire (Cuvier), ou plutôt glande ovospermagène. première portion du canal génital commun (oviducte, Cuvier!. glande accessoire de l'oviducte (testicule, Cuvier). portion terminale de l’oviducte, portant l'artère génitale. appareil copulateur. glandes multifides, _— NI ce CHEZ LES MOLLUSQUES. PLANCHE V. Fig. 1. Un colimacon dont les artères et les veines ont été injectées, vu du côte droit. a l'oreillette. b la veine pulmonaire ou vaisseau efférent de l'appareil respira- toire. « vaisseaux afférents du poumon. d, d canal veineux du tortillon. e point dans lequel ce canal communique librement, soit avec la cavité abdominale, soit avec le canal veineux susintestinal J, dont les branches se distribuent au réseau pulmonaire. g veine sous-intestinale. À poumon. B pied. CG pneumostome. D appareil urinaire. E masse viscérale formée prineipalement par le foie et la glande ovospermagène. Fig. 2. Système artériel du colimacon. Le corps de l'animal, vu en dessus, a été fendu dans toute sa longueur, et la plupart des viscères ont été rejetés un peu à droite. a l'oreillette. b le ventricule. c origine de l'aorte. c' tronc de Faorte. d artère abdominale, se distribuant au foie, à l'intestin et aux organes génitaux. d' artère intestinale. e, e artères musculaires. f artères salivaires. 480 DE LA CIRCULATION artère peédieuse. 5 artère du plancher pulmonaire. : artère génitale antérieure. A bulbe charnu de la bouche. B premier estomac. B' glandes salivaires. C second estomac. D intestin coupé dans le point où il va se recourber sous le cœur en contournant l'aorte. suite de l'intestin. rectum. foie. oviducte. vésicule copulatrice (vessie à long col , Cuvier.) appendices multifides. génital. poche du dard. D’ E F G glandes génitales. H I J K vestibule K' L canal éjaculateur. M appendice vermiforme du pénis. N pénis. N' muscle rétracteur du pénis. O Ganglions cérébroïdes. P poumon. Q, Q muscles rétracteurs des tentacules. PLANCHE VI. Fis. 1. Portion de la voute pulmonaire du colimacon , grossi pour montrer la disposition des sinus lacuneux qui conduisent le sang veineux aux vaisseaux du poumon. Dans cette préparation, l'injection a été faite par la cavité abdominale. a section de l'intestin rectum. CHEZ LES MOLLUSQUES. 181 b conduit excréteur de l'appareil urinaire. c tronc veineux qui longe le bord inférieur de l'intestin. d orifices qui versent le sang de cette veine dans les lacunes qui entourent l'intestin (e), lesquelles donnent naissance aux vaisseaux afférents du poumon f f. £g, g vaisseaux efférents du poumon. Fig. >. Appareil circulatoire de l’aplysie. Le système veineux a été injecté par l’extrémité antérieure de la cavite abdominale , et le système arteriel par la branchie ; puis les lobes du man- teau ont été écartés et la coquille enlevée pour montrer l’appareil secreteur du pourpre. a le cœur. a’ troncs veineux du sac de la coquille. b canal veineux recevant le sang du vaisseau précédent, com- muniquant librement avec la cavité abdominale par sa partie antérieure, et se rendant à la branchie. c ‘canal lacuneux recevant d'autres veines de la glande du pour- pre et allant déboucher dans la cavité abdominale au-devant du cœur, à droite. d artère du sac coquillier. e lobe anal. J,.f artères des lobes du manteau. g artère qui se distribue aux bords du sillon génital. Fig. 3. Portion du mème, grossi et ouvert en dessus. a oreillette du cœur. b ventricule. c artère aorte. d artères de l'estomac. e artère qui naît de l'aorte et se rend à l'organe du pourpre. f grand sinus veineux formé par la cavité abdominale: T. XX. 61 482 Te DE LA CIRCULATION canal veineux venant dé l'organe du pourpre, et allant dé- boucher dans la cavité abdominale au-devant du cœur , du côté droit: Ce canal se voit en c dans la figure précédente. h ouverture par laquelle la cavité abdominale communique avec le grand conduit afférent de la branchie , au-devant de la masse hépatique. ë ce conduit ouvert dans toute sa longueur, et montrant à son extrémité postérieure une grande ouverture par laquelle il communique avec la portion postérieure de la cavité abdo- minale. l’un des vaisséaux veineux de l'organe du pourpre. vaisseau afférent, ou canal veineux de la branchie. = vaisseaux efférents de la branchie. m tissu lacuneux de l'organe du pourpre en communication avec ce dernier vaisseau , et contenant du sang artériel ; au centre de l'organe du pourpre; on voit la cavité dont cet appareil sécréteur est creusé. n fenêtre branchiocardiaque. o orifice génital. p anus. 4» 4» q; q section des lobes du manteau. PLANCHE VII. APPAREIL CIRCULATOIRE DE L'APLYSIE. L'animal a été ouvert dans toute sa longueur, pour montrer le grand sinus veineux formé par la cavite abdominale , et les lacunes qui y aboutis- sent de toutes parts. Ces lacunes, ainsi que le vaisseau afférent ou artère branchiale, ont été injectées en bleu par la cavité abdominale, tandis que le système artériel a été injecte en rouge par la veine branchiale ou vais- seau branchio-cardiaque. a l'oreillette. b le ventricule du cœur. CHEZ LES MOLLUSQUES. 483 c la crête garnissant la crosse de l'aorte. d tronc de l'aorte. e artère intestinale, fournissant les artères hépatiques. f artère gastrique. £, £ artères pédieuses. k, k artères des lobes du manteau. i artères céphaliques. j artères pharyngiennes. k artère génitale, artère de la glande en grappe, etc. L, L, L, l lacunes veineuses du manteau. m, m lacunes veineuses du pied. x orifice par lequel la portion postérieure de la cavité abdominale communique directement avec le canal afférent de la branchie. o ce canal. p canal efférent ou branchio-cardiaque. A bulbe pharyngien. B œsophage. C l’un des muscles rétracteurs du pharynx. D premier estomac. E second estomac. F intestin. G foie. H glande ovospermagène (ovaire , Cuv.) I oviducte. j glande génitale accessoire (testicule , Cuvier.) K bouche. L organe en grappe. M organe copulateur. N orifice de cet organe. O ganglions cérébroïdes. P branchie. Q portion du manteau. sn 00 0 ——— GI. > UP il TE D . (UX: ORNE) PNTET I i dv era sh) Geo » 118 sadique MENT nn V'Umaile Dre ira of atdhil els agite à joe: tie aft RE D du cplisdee vrdtap rt 4 ‘ ' D Es A RE nanarea dr 1} AUS Lu 6 y - au se simel gel sh | DUT ES IEETAEETS z | AE 0 tient À arm sninal \ ss vf rein lé, Ariés. 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Jusques en ces derniers temps, les zoologistes pensaient que la circulation du sang s'opère, chez les Mollusques, dans un système vasculaire complet, le liquide nourricier, après avoir été distribué dans toutes les parties de l’économie à laide des artères, revenant à l'organe respiratoire, puis au cœur, par l'intermédiaire de tubes à parois membraneuses , semblables aux veines des animaux vertébrés. Mais l’Acadé- mie se rappelle peut-être que des observations publiées ré- cemment par l’un de nous (1) tendent à établir que cette opi- (x) Vory. le Moniteur du 27 novembre 1844, et le Compte rendu de la séance du 3 février dernier. 1486 DE LA CIRCULATION nion est erronée , et que chez les Mollusques, ainsi que chez les Crustacés, une portion considérable du cercle cireula- toire est constituée uniquement par les lacunes ou espaces de formes irrégulières que les divers organes laissent entre eux. Il a été constaté, en effet, que chez un certain nombre de Mollusques appartenant à la classe des Céphalopodes et à celle des Gastéropodes, ainsi.que chez divers Acéphales et Tuni- ciers, les canaux qui remplissent les fonctions de veines dé- bouchent en totalité ou en partie dans la grande cavité ab- dominale, de sorte que chez ces animaux le sang baigne directement les principaux viscères, et qu’en injectant dans l'abdomen un liquide quelconque, on injecte aussitôt le reste du système veineux. Mais on pouvait douter encore de la gé- néralité de cet état imparfait de l'appareil de la circulation dans le vaste embranchement des Mollusques; et pour établir solidement ce résultat, il fallait étudier la marche du sang dans un plus grand nombre de types variés. Désirant, l’un et l’autre, former notre opinion à ce sujet, nous nous sommes réunis pour exécuter en commun une sé- rie d'expériences et de dissections. Nos recherches ont porté d'abord sur des Mollusques que nos correspondants nous en- voyaient à l’état vivant de divers points du littoral; mais bientôt nous avons pu étendre davantage le champ de nos investigations , Car nous nous sommes assurés que ces animaux se laissent parfaitement bien injecter après qu'ils ont séjourné pendant fort longtemps dans des liquides conservateurs con- venablement préparés , et l’un de nous (1), chargé de l’ensei- (1) M. Valenciennes. CHEZ LES MOLLUSQUES. 487 gnement de la Malacologie au Muséum , s'étant appliqué de- puis plusieurs années à former une collection des animaux dont on se contentait jadis d'étudier la coquille seulement, et étant arrivé ainsi à des résultats très-considérables, il nous a été facile de varier beaucoup nos observations, et de les multiplier autant que cela nous a paru nécessaire. Les préparations que nous avons faites ainsi sont au nom- bre de plus de cinquante , et nous avons l'honneur de placer une vingtaine de ces pièces sous les yeux de l’Académie. La plupart d'entre elles sont d’un assez grand volume pour être faciles à examiner sans le secours de la loupe, et les résultats qu'elles fournissent sont tellement nets et palpables, qu'il nous semble inutile d'entrer dans beaucoup de détails rela- tivement aux conclusions qu’il faudra en tirer. Sur le Poulpe et le Calmar, nous avons constaté de nouveau les faits déjà signalés par l’un de nous, et pour injecter le premier de ces mollusques , nous nous sommes servis tantôt de gélatine, tantôt du mélange de suif et de cire que l’on em- ploie à des usages analogues, dans les amphithéâtres d’anato- mie humaine, pour l'injection des plus gros vaisseaux; en poussant ces substances dans la cavité péritonéale, nous les avons vues passer directement dans les veines et arriver aux cœurs pulmonaires. En opérant de la même manière sur d’autres Céphalopodes appartenant aux genres Éledon, Argonaute, Seiche et Sé- piole, nous avons obtenu le même résultat. Dans ces expé- riences , l'injection a toujours été faite par l'extrémité anté- rieure de la grande cavité viscérale, c’est-à-dire, dans l’espace compris entre la masse charnue de la bouche et la base des tentacules ; le liquide coloré a rempli aussitôt le reste de la 188 DE LA CIRCULATION chambre viscérale, et a pénétré dans les divers canaux vei- neux qui sont en communication directe avec cette cavité; de ces canaux l'injection est arrivée dans les cœurs pulmo- naires, et, dans la plupart des cas, elle est parvenue jusque dans les branchies. Les préparations déposées sur le bureau ont été faites de la sorte, et sur quelques-unes d'elles nous avons mis à nu les grands canaux par lesquels la cavité viscé- rale ou péritonéale, comme on voudra l'appeler, se continue directement avec les grosses veines destinées à porter le sang aux deux cœurs pulmonaires. Ces communications sont sur- tout faciles à voir dans nos préparations de l’Argonaute et de l’Éledon. Ainsi, ce n’est plus dans deux genres de Céphalopodes seulement que l'appareil de la circulation présente ce carac- tère remarquable de dégradation; à cet égard, les Seiches, les Sépioles, les Éledons et les Argonautes ne diffèrent pas des Poulpes et des Calmars, et, en rapprochant ces faits nouveaux des résultats obtenus plus anciennement par M. Owen et par l’un de nous en étudiant l'anatomie du Nau- tile, on peut dire aujourd'hui, sans réserves aucunes, que, dans la classe la plus élevée de l’'embranchement des Mollus- ques, le sang ne se meut pas dans un système de vaisseaux fermés ; que, chez les Céphalopodes, la portion veineuse du cercle circulatoire est toujours incomplète, et que, chez tous ces animaux, le fluide nourricier épanché dans la cavité vis- cérale baigne directement une portion plus ou moins consi- dérable de la surface péritonéale du canal digestif. Dans la classe des Gastéropodes, nous avons pu multi- plier davantage nos recherches. Après avoir répété sur les Colimacons et les Aplysies les expériences déjà faites par l’un CHEZ LES MOLLUSQUES. 489 de nous, et en avoir obtenu des résultats analogues à ceux que nous ont fournis les Céphalopodes, nous avons injecté de la même manière le Buccin ondé (Buccinum undatum , Lam.), dont nous avions recu un grand nombre d'individus vivants , grâce à l’obligeance de M. Bouchard-Chantereaux , médecin à Boulogne-sur-Mer; le liquide coloré, introduit dans la cavité abdominale de ce Mollusque, s’est répandu aussitôt dans le système lacunaire du pied et des organes ex- térieurs de la génération, a pénétré dans les veines du man- teau et a rempli un système de vaisseaux qui prend naissance dans l'organe urinaire, mais qui recoit la plus grande par- tie du sang venant du foie, des ovaires ou du testicule et des téguments du tortillon, et qui, ainsi que l’un de nous l'avait déjà constaté chez le grand Triton de la Méditerranée ( Tri- ton nodiferum , Lam.), constitue un appareil analogue au système de la veine porte rénale chez les reptiles et les pois- sons. Chez le Buccin, de même que chez le Triton, il est facile de s'assurer que le passage du liquide nourricier de l'intérieur des vaisseaux sanguins dans la grande cavité vis- cérale, et de cette cavité dans les canaux afférents aux or- ganes de la respiration , n’est pas un phénomène d’exhalation et d'absorption ; ce n’est point par les capillaires que la com- munication s'établit entre le système veineux et cette cavité, mais par des canaux qui ont souvent un diamètre de un ou deux millimètres, et qui s’'abouchent directement avec elle. Les préparations déposées sur le bureau montrent ces communications directes , et font voir aussi combien est développé dans certaines parties du corps, dans la glande urinaire par exemple, le système veineux dont les principaux troncs s'ouvrent directement dans la cavité abdominale. T. XX. 62 490 DE LA CIRCULATION Dans les genres Dolabelle et Notarche, nous avons trouvé l'appareil circulatoire tout aussi incomplet que chez les Aply- sies. Les veines paraissent manquer entièrement , et les fonc- tions de ces vaisseaux sont remplies par un vaste système de lacunes répandues dans toutes les parties du corps, et en communication avec la cavité viscérale qui , à son tour, com- munique directement avec les canaux par lesquels le sang arrive dans les organes de la respiration. Dans une de nos préparations de l’appareil circulatoire chez les Dolabelles , Le grand conduit afférent à la branchie a été ouvert ainsi que l'abdomen , et cette pièce fait voir combien est large l'orifice par lequel ce conduit prend naissance dans la cavité viscérale. En disséquant ces parties, nous avons eu soin d'examiner s’il n'existerait pas quelques valvules destinées à clore momen- tanément les ouvertures par lesquelles la cavité de l'abdomen communique avec le canal veineux de la branchie, et il nous a été facile de voir qu'aucune disposition de ce genre n'existe, de sorte que le passage est toujours ouvert. La communication libre entre les vaisseaux branchiaux et la cavité destinée à loger les viscères, ainsi que la continuité de cette dernière cavité avec le système lacunaire du pied, des lèvres, du manteau, etc., sont également démontrées par les injections que nous avons faites sur un grand nombre de Mollusques gastéropodes appartenant aux genres Pleuro- branche, Doris, Polycère, Tritonie, Scyllée, Oscabrion, Oscabrine (1), et en injectant également dans la cavité ab- (1) Genre nouveau, voisin des Oscabrions et des Oscabrelles de La- marck. CHEZ LES MOLLUSQUES. 491 dominale des Patelles, des Ombrelles, des Ampullaires, des Turbos, nous avons vu le liquide coloré pénétrer immédia- tement dans d’autres parties du système veineux. Nous ajou- terons que, dans l’'Onchidie, l'injection passe également de la cavité viscérale dans le lacis vasculaire du poumon. Quant aux Éolides et aux genres voisins de ces Nudibran- ches, nous nous abstenons d’en parler pour le moment, car il existe, comme on le sait, des divergences d'opinions rela- tivement à la manière dont la circulation s'effectue chez ces animaux. M. de Quatrefages avait annoncé que les Éoliens sont dépourvus de veines, et que le sang, pour revenir des diverses parties du corps vers le cœur, traverse des lacunes et la cavité abdominale elle-même ; M. Souleyet, au con- traire, assure que, chez ces Gastéropodes, l'appareil de la circulation est complet, et qu'il est même facile d'isoler les veines qui se portent des organes intérieurs vers les bran- chies. Une Commission, dont nous faisons partie, aura à se prononcer sur cette question , et , ne voulant pas nous séparer de nos collègues dans l’appréciation des faits dont l’Académie nous a renvoyé l’examen, on comprendra les motifs de notre réserve actuelle. Laissant donc de côté tout ce qui est relatif aux Éolides ; nous ne tirerons ici de nos propres recherches aucune con- clusion absolue relativement à la disposition générale de l'appareil circulatoire dans la classe des Gastéropodes, et nous nous bornerons à dire que, si l’on peut juger de l’orga- nisation de ce groupe naturel d’après la structure anatomique de vingt genres différents pris au hasard dans les différents ordres des Pulmonés, des Nudibranches, des Tectibranches, des Pectinibranches, des Scutibranches et des Cyclobran- G2. 492 DE LA CIRCULATION ches, il faudra admettre que chez les Gastéropodes, de même que chez les Céphalopodes, l'appareil vasculaire est incom- plet, les veines manquent plus ou moins entièrement , et les canaux ou les lacunes destinés à porter le sang des diverses parties du corps vers les organes de la respiration, commu- niquent librement, en totalité ou en partie , avec la grande cavité au milieu de laquelle flottent le tube digestif et les principaux ganglions du système nerveux. Les préparations que nous avons l'honneur de placer sous les yeux de l’Académie montrent ces communications entre la cavité abdominale et le système sanguin dans les genres Onchidie, Doris, Polycère, Tritonie, Scyllée, Aplysie, Do- labelle, Notarche, Ampullaire, Buccin, Patelle, Oscabrion et Oscabrine. D'après cette masse de faits, il nous a paru inutile de chercher aujourd’hui, dans la classe des Acéphales à coquilles, de nombreux exemples de cette dégradation de l'appareil circulatoire que l’un de nous avait déjà constaté chez la Pinne marine, la Mactre et l'Huiître, ni de multiplier davantage les observations faites précédemment sur la circulation semi- vasculaire et semi-cavitaire chez les Acéphales sans coquilles ou Tuniciers. Nous ajouterons, cependant, que tous les Acéphales dont nous avons examiné le système veineux nous ont offert ce mode d'organisation, et nous citerons comme exemples nouveaux les Bucardes, les Vénus et les Solens. Mais il est, dans l’'embranchement des Mollusques, une quatrième classe, celle des Ptéropodes, qui jusqu'ici n'avait pas été étudiée sous ce point de vue, et, pour compléter la série de nos observations, 1l devenait intéressant de soumettre CHEZ LES MOLLUSQUES. 493 quelques-uns de ces animaux à des expériences analogues à celles dont nous venons d'entretenir l'Académie. Le défaut d'animaux suffisamment frais, ainsi que la petitesse de la plupart des Ptéropodes, ont été d’abord de grands obsta- cles; mais nous sommes parvenus à injecter deux Pneumo- dermes, et, chez ces deux animaux , nous avons vu le liquide coloré passer de la cavité viscérale dans les vaisseaux des branchies qui sont réunis en étoile à l'extrémité postérieure du corps. Ainsi, quelle que soit la classe et quel que soit le genre ou l'espèce sur laquelle nous avons étudié le mode de circula- tion dans le grand embranchement des Mollusques , toujours le résultat a été le même. Partout nous avons trouvé l’appa- reil vasculaire plus ou moins incomplet; partout nous avons vu une portion plus ou moins considérable du système vei- neux, constituée par des lacunes seulement, et partout aussi nous avons constaté l’existence de communications libres et directes entre ce système et la grande cavité viscérale. Au- jourd’hui que ce résultat est bien établi, on retrouvera peut- être dans les archives de la science beaucoup d'observations qui auraient pu mettre les zoologistes sur la voie de la vérité ; mais la signification de ces faits n'avait pas été saisie, et pour en donner des preuves, il suffit de rappeler la manière nette et positive dont les naturalistes les plus éminents se sont prononcés sur ce point. Guvier, par exemple , dont l'autorité est, aux yeux de chacun de nous, la plus grande que l’on puisse citer lorsqu'il s’agit d'anatomie comparée ; Cuvier, qui avait découvert la disposition si remarquable des canaux af- férents à la branchie dans l’Aplysie, disait formellement que « la classe entière des Mollusques jouit d’une cireulation aussi 494 DE LA CIRCULATION « complète qu'aucun animal vertébré (1). » Il supposait que les orifices , dont il avait constaté l'existence dans les gros canaux veineux des Aplysies , étaient des bouches seulement absorbantes, et cette opinion a été partagée par les auteurs qui, plus récemment, ont écrit sur le même sujet (2). C’est aussi par des phénomènes d’exhalation où de perspiration et d'absorption ordinaire qu’on a cherché à expliquer la présence du sang dans la cavité abdominale de la Limace et le passage du liquide de cette grande lacune dans les vais- seaux du poumon. Mais nos préparations prouvent que la areulation, chez les Mollusques, ne se fait pas de la sorte. Ce n’est point par les radicules ou dernières divisions capil- laires des veines que la cavité abdominale communique avec le reste du cercle circulatoire, ainsi que le pensait un zoolo- giste dont les observations ont été communiquées dernière- ment à l'Académie (3). Ce sont, au contraire, les troncs vei- (1) Leçons d’Anatomie comparée, première édition , tome IV, p. 406, et seconde édition, tome VI, p. 386. (2) « Nous rappellerons encore ici ces parties centrales de l'arbre dé- « purateur qui, dans l'Aplysie, sont percées d'ouvertures très-sensibles « dans la portion qui traverse la cavité viscérale, ouvertures qui per- « mettent l'absorption par le tronc ou la souche de l'arbre nutritif. Cepen- « dant on peut dire que , dans ce type, le système vasculaire sanguin est « complet, que les deux arbres nutritif et dépurateur sont liés par un « réseau capillaire, et que Ze fluide ne s’épanche point dans les lacunes ; « il reste enfermé , et circule dans l'ensemble de ses réservoirs, qui for- « ment encore ici un système de vaisseaux clos.» (Duvernoy, Additions aux Lecons d’ Anatomie comparée, par Cuvier, tome VI, p. 538. Paris, 1839.) (3) « La physiologie des Limaces rouges offre une particularité physio- CHEZ LES MOLLUSQUES. 495 neux ou les grosses lacunes servant aux mêmes usages , qui débouchent directement dans la cavité viscérale. Ainsi, dans le Buccin ondé , animal dont le corps tout entier n’est guère plus gros qu'un œuf de poule, on voit des canaux veineux dont le diamètre est de plus de 1 millimètre se terminer brusquement par un orifice béant dès qu'ils arrivent dans cette cavité; et chez le Poulpe, l’'Argonaute et les autres Mol- lusques les plus élevés en organisation, on voit que les com- munications entre la cavité péritonéale et les grandes veines caves chargées de porter le sang aux cœurs pulmonaires, sont établies au moyen de canaux dont les dimensions ont souvent jusqu'à 1 centimètre de diamètre. Il est, du reste, toujours facile de se convaincre que le passage du sang de la cavité viscérale dans le système vasculaire n’est pas un phénomène de filtration analogue à l'absorption par imbibi- tion chez les animaux vertébrés, car ce ne sont pas seulement les fluides qui pénètrent ainsi dans les vaisseaux ; le suif te- nant en suspension des poudres grossières passe avec la mème facilité, et dans plusieurs expériences c’est avec du plâtre gàché que ces injections ont été faites. Ainsi tout concourt à montrer l'existence d’une circulation semi-vasculaire , semi-lacunaire, chez les Mollusques aussi « logique extrêmement curieuse , et que je ne sache pas que l'on ait en- « core signalée. Le sang, après avoir franchi les capillaires qui terminent « les artères, est, au moins en grande partie, perspiré par eux, et s’épan- « che dans la cavité viscérale; puis ensuite ce fluide se trouve absorbé par « les extrémités des veines, et il rentre de nouveau dans le système vas- « culaire. » ( Poucuer, Recherches sur les Mollusques, page 13. Rouen, 1842.) 196 DE LA CIRCULATION CHEZ LES MOLLUSQUES. bien que chez les Crustacés et les Arachnides, et si l’on vou- lait exprimer, par une formule générale, tous les faits de cet ordre déjà constatés, on pourrait dire que, chez tous les ani- maux à sang blanc, les liquides nourriciers ne sont pas renfermés dans un appareil vasculaire clos, mais circulent plus ou moins rapidement dans un système de cavités cons- titué en totalité ou en partie par les lacunes que les divers organes laissent entre eux. ïi l’on vou. aits de cet us les ani. sont pas circulent vites cons- les divers | Ha (] TS Le] D A =] Ê cs | Edwards del Mémoues d « C x x PRES … ” 7 ‘ { . SSREE EIRE EEE EEE PELEIBELET LETSAELILE LEVELS LOUE LS LR LAS EUE SEE LENS LÉLE LR LE À ELLES LS LRLS OLA VALUE ARR ne ORGANOGRAPHIE ET PHYSIOLOGIE VÉGÉTALE, MÉMOIRE SUR LA COMPOSITION ET LA STRUCTURE DE PLUSIEURS ORGANISMES DES PLANTES (1), Par MM. DE MIRBEL er PAYEN. Lu dans la séance du 3 février 1845. La première partie de notre mémoire traite de la compo- sition élémentaire des végétaux, et démontre, par des ana- lyses chimiques , que plus les organismes des plantes sont jeunes et aptes à se développer, plus est considérable la (x) Le mémoire que nous présentons à l’Académie est rédigé depuis plus de trois ans; mais les gravures des dessins faits à l’aide du microscope n'ont été terminées que dans ces derniers temps, et ils sont indispensa- bles pour la plus grande intelligence du texte. C’est ce qui explique le long retard de la publication de ce travail. Un extrait a paru en 1845 dans les comptes rendus. TxX 63 498 ORGANOGRAPHIE quantité de substances azotées qui pénètrent dans leurs cel- lules et les vivifient. La seconde partie fera connaître la structure interne des feuilles bisannuelles, et donnera de curieux renseignements touchant l’épiderme, les glandes oléifères, la formation et la structure particulière de quelques organes microsco- piques. En étudiant, dans ce premier mémoire, les modifications des organismes soumis à notre examen, on acquerra bientôt la preuve qu'il existe en effet des relations entre les agents doués d’une certaine composition chimique et les diverses phases des développements. Toutefois, il importait de savoir si la loi était générale ou si elle admettait des exceptions. Pour répondre à cette question, il fallait multiplier les coupes des divers organes, de telle sorte qu'il n’existât, pour ainsi dire, point d'intervalle entre eux ; et tels ont été les résultats obtenus, que l’on a dû conclure que s’il y avait des exceptions elles devaient être bien rares. Mais là ne s’est point borné notre travail : il nous importait, en outre, de déter- miner, à l’aide des moyens dont la chimie dispose, la quantité de substances azotées, si faibles ou si fortes qu'elles fussent, dans les parties des plantes où de nouveaux tissus apparais- sent. On conçoit que, pour atteindre ce but, un appareil spécial était indispensable. Quelques dispositions nouvelles et des précautions particulières eurent pour résultat de rendre les analyses plus faciles et surtout plus exactes, Nous allons donner ici une description aussi fidèle que possible de l'appareil dont nous avons constamment fait usage, afin que si quelques chimistes doutaient de la justesse de nos expé- riences, ils pussent facilement les répéter, et se convaincre ET PHYSIOLOGIE VÉGÉTALE. 499 que nous n'avons rien avancé qui ne füt de la plus parfaite exactitude. Quant à la méthode elle-même , fondée par MM. Thénard et Gay-Lussac, perfectionnée par M. Gay-Lussac, puis par M. Dumas, elle repose sur la combustion de la matière or- ganique au moyen du bi-oxyde de cuivre, et sur l'emploi de l'acide carbonique pour éliminer l’air. La planche F*, fig. 1, 2,3 et 4, montre l’ensemble et les principaux détails de l'appareil : des lettres semblables indi- quent les mêmes objets dans ces quatre figures. Le fourneau AB se compose d’une sorte de caisse en tôle munie d'un faux fond percé de trous allongés; ce dia- phragme horizontal sépare du foyer le cendrier ouvert d'un bout, en D’ seulement; on peut modérer le tirage en fermant plus ou moins cette ouverture. Sur ce deuxième fond s'appuie parallèlement une lame en tôle; des trous sont pratiqués dans cette lame, entre les montants verticaux d, d, d, fixés sur elle; ces montants échan- crés sont destinés à supporter le tube ; l'intervalle de 10 cen- timètres entre eux facilite l’arrangement des charbons : il pourrait même être encore agrandi, car une légère flexion du tube pendant l'analyse est plutôt utile que défavorable pour détruire les fausses voies dans l’intérieur. Deux james en tôle EE ( fig. 2), inclinées et appuyées sur les deux bords de la caisse, butent contre la lame, et forment les parois longitudinales du foyer d, d', d"; celui-ci est rétréci de cette façon, et entouré d’une couche d’air qui ralentit la déperdition de la chaleur. Le tube, fermé d’un bout qui doit être chauffé sur ce foyer, est long de 1 mètre à 1° 15; il a 1 centimètre environ de dia- 63. 500 ORGANOGRAPHIE mètre intérieur, et doit être chargé : 1° de bi-carbonate de soude g, L, en poudre grossière, tassée, qui occupe 14 cen- timètres de longueur ; 2° de bi-oxyde de cuivre gros et fin , r, 12 centimètres ; 3° du mélange de la substance qu'on veut analyser, avec du bi-oxyde, en quantité suffisante pour oc- cuper dans le tube une longueur à, j, de 12 centimètres; 4° de bi-oxyde 7, À, occupant une longueur de 15 centimètres ; 5° de raclure de cuivre métallique £, [(r), 10 centimètres ; 6° de bi-oxyde /, m, 8 centimètres (2); 7° de cuivre métallique, environ 15 centimètres », n; et remplissant d’ailleurs ce qui reste de place dans le tube », n', 8 à 10 centimètres, jusqu'à environ 7 centimètres du bout, avec du bi-oxyde de cuivre (3). Le tube est d’ailleurs enveloppé, comme à l'ordinaire, de # en »', avec une lame mince de laiton tournée en hélice et fixée par trois ligatures de fil de laiton; un tube plus étroit (for- mant une sorte de T), p, q, r, s’y adapte au moyen d’un bon bouchon qu'il traverse et qui entre à frottement dans le tube chargé g...p; ses branches horizontales et verticales sont (x) Les raclures ont été préalablement calcinées, puis réduites à l'état métallique en les chauffant au rouge dans un courant de gaz hydrogène sec; on les foule à plusieurs reprises avec une baguette en verre plein, afin que dans chacune des parties indiquées elles soient bien tassées. (2) Gette couche bi-oxyde interposée dont nous avons cru devoir intro- duire l'emploi, décompose des traces de gaz carburé, régularise la filtra- tion des gaz, évite les fausses voies, en sorte qu’elle empêche aussi la for- mation du bi-oxyde d'azote. (3) Cette dernière couche de bi-oxyde est utile pour brûler des traces d'hydrogène provenant de parcelles de fer contenues parfois dans la tour- nure de cuivre : on comprend en effet que l'hydrogène, s’il n’était ainsi brülé, serait compté comme azote et rendrait l'analyse fautive. 4 ET PHYSIOLOGIE VÉGÉTALE. 5oi mises en communication avec une petite pompe aspirante V, à l’aide d’un tube coudé », »', v”', rendu flexible par trois joints de caoutchouc, et terminé par un manchon épais en caoutchouc s, #, qui y reste attaché par la ligature t; une deuxième ligature s, faite sur ce dernier, opère la commu- nication avec la pompe; la branche verticale du tube g 7, longue de 76 centimètres, est engagée dans la rainure de la cuve à mercure par son extrémité inférieure recourbée. Une disposition spéciale, substituée aux anciens procédés de réunion avec la pompe (qu'on interposait entre le tube chargé et la branche verticale), rend les opérations plus sûres et le montage plus facile : elle consiste à placer dans le manchon épais et assez large, en caoutchouc, un bout de cy- lindre plein en verre, long de 3 centimètres , et aux extré- mités duquel on a fait une ou deux brèches. Ce cylindre n'empêche pas l'air et le gaz acide carbonique de passer lorsque la pompe aspire; mais dès qu’on veut intercepter la communication, il suffit de faire une ligature qui presse le manchon sur le cylindre plein. Les figures 3 et 4 montrent les détails de cet ajustement par deux coupes amplifiées : dans la figure 3, le cylindre est vu libre, les gaz peuvent passer entre lui et le manchon; la figure 4 indique l'interruption du passage opérée à l’aide d’une ligature o qui serre le caoutchouc contre le cylindre plein au milieu de sa longueur (1). (1) On a depuis remplacé ce manchon par un robinet fixé au T, à l'aide d’une ligature sur un bout de tube en caoutchouc; on remplace aussi le tube en verre coudé à trois joints de caoutchouc, par un tube en caout- 502 ORGANOGRAPHIE Une précaution tout aussi importante que celles qui pré- cèdent, consiste à réduire en poudre très-fine la substance qu'on veut analyser, soit afin de pouvoir, avant de la peser, éliminer dans le vide toute l’eau hygroscopique, soit afin que dans le tube à combustion toutes ses parties se trouvent assez entourées de bi-oxyde pour être complétement brülées : il est d’ailleurs convenable d'employer du bi-oxyde assez for- tement chauffé et mêlé d'oxyde grossier, pour que ce mé- lange soit traversé sans peine par les gaz. Lorsqu'on s’est procuré les appareils et agents que nous venons de décrire, voici comment on opère : Le tube g. . .p, fermé d'un bout, est tenu verticalement; après l'avoir rincé à plusieurs reprises avec de l'oxyde chaud, on y verse le bi- carbonate en poudre grossière ; on ajoute la première couche d'oxyde, puis le mélange d'oxyde et de la substance orga- nique ; on introduit, à plusieurs reprises, la deuxième couche d'oxyde pour rincer le mortier et les traces du passage du mélange dans le tube; on verse alors la première quantité de cuivre pur, réduit, et on le tasse avec une baguette en verre plein; on interpose la couche d'oxyde, puis on remplit en trois ou quatre fois le tube, jusqu'à 7 centimètres du bout, avec la dernière portion de cuivre métallique, tassé après chaque addition, et avec la dernière quantité de bi-oxyde de cuivre. Le tube est alors complétement chargé; on l'entoure avec chouc maintenu par un fil de cuivre intérieur en hélice et garni extérieu- rement d'un tissu en soie. Ce tube, très-flexible, est plus facile à poser et permet de varier les distances entre le fourneau et la pompe. ET PHYSIOLOGIE VÉGÉTALE. 503 la bande de laiton qui s’y applique de Len »', contournée en hélice et bien serrée. Cette enveloppe est maintenue par les trois ligatures en fil de laiton aux points z, #, n. On adapte, avec son bouchon, le tube étroit P:9;r,et l’on place horizontalement sur le fourneau le tube gp Chargé ; la portion gk sortant du fourneau est soutenue par une petite grille à supports À, A’. La communication est alors établie ; par la ligature s, avec la pompe V; onfait mouvoir la tige t; l'air est aspiré ; en sorte que la pression extérieure fait mon- ter le mercure de la cuve M dans le tube vertical jusqu'à une hauteur de 60 à 70 centimètres ; on ferme le robinet x, et l’on s'assure que la colonne de mercure, après quelques oscillations, se maintient; ce qui prouve que ni le bouchon, ni les ligatures, ne laissent de fuite possible. Les écrans 4, ' et,n, étant alors mis en place, on rapproche du bout fermé g, entre g, À, quelques charbons incandescents; l’acide carbonique dégagé du bi-carbonate chasse devant lui l'air dilaté et sort par l'extrémité du tube recourbé dans le mer- cure. On réitère le vide à trois reprises; on laisse dégager des bulles d’acide carbonique pendant 15 à 20 minutes ; et après s'être assuré que cet acide gazéiforme est entièrement absorbé par de la potasse en solution contenue dans une éprouvette, on pratique au milieu du manchon 5, t, une ligature serrée (ou bien on ferme le robinet qui aurait remplacé le man- chon), puis on pose, sur l’orifice du tube recourbé, une clochec, remplie de mercure au-dessus duquel ou fait passer un décilitre environ de solution de potasse caustique à 12° ou 15°, Le tube à combustion est alors chauffé au rouge ce- rise très-graduellement, de x’ en , au moyen de charbons 504 ORGANOGRAPHIE incandescents que l’on ajoute successivement, de façon que la substance mêlée à l'oxyde de z en 7 se brûle, et que ses gaz et vapeurs traversant l’oxyde chauffé au rouge ne puissent manquer d'oxygène pour achever leur combustion. Les com- posés oxygénés se dépouillent de tout leur oxygène en tra- versant la raclure de cuivre métallique. On chauffe ensuite peu à peu, à l’aide de quelques charbons , la portion du tube L, g, contenant le bi-carbonate, dont à peu près la moi- tié, après le premier dégagement, était restée intacte : il se fait un nouveau dégagement de gaz acide carbonique qui balaye les gaz et vapeurs interposés dans tous les interstices, et les fait arriver avec lui dans la cloche. En définitive, tout le carbone de la substance passant à l’état d'acide carbonique, que la potasse en c', e, absorbe; tout l'hydrogène brülé formant de la vapeur d’eau qui se condense dans la même cloche, l'azote seul s’y maintient gazeux , malgré l'agitation qu’on fait éprouver à la solution de potasse. Il ne reste plus qu’à mesurer, en le faisant passer sous l'eau, dans une cloche graduée, le gaz azote obtenu; puis, de son volume observé, retranchant ce qui est dû à la dilatation par la température et la vapeur d’eau, tenant compte de la pression barométrique, on en déduit aisément le volume qu'aurait le gaz à la glace fondante, et par con- séquent son poids, puisque à cette température 1 litre, sous la pression de 760 millimètres de mercure, pèse 1259 milli- grammes. Enfin, le poids de l'azote, rapporté au poids très- exactement pris de la substance analysée, permet d’en dé- duire, par une simple proportion , le nombre équivalent d'azote en centièmes et fractions de centièmes. ET PHYSIOLOGIE VÉGÉTALE. 50 Voici les principaux objets que nous avons choisis pour les soumettre à ce mode d'analyse élémentaire qui permet de déterminer les proportions pondérales d’azote : 1° Jeunes racines, sur les différentes parties desquelles nous avons constaté l'influence de l’âge, relativement sur- tout aux proportions des substances azotées ou quaternaires. Nous avons comparé sous ces rapports les produits de cul- tures différentes dans des sols arides ou fortement fumés. 2° Tige d’un Chène en pleine végétation, planté depuis vingt-cinq ans, par conséquent assez âgé pour offrir sur une seule section , perpendiculaire à l'axe, un certain nom- bre de couches concentriques d’âges différents, dans le bois de cœur, l’aubier et les couches corticales. 3 Branches plus ou moins développées, que nous avons également étudiées , soit par zones concentriques , soit sui- vant des pousses successives , qui offraient des développe- ments à plusieurs degrés. 4 Épidermes pris à des âges différents, et en distinguant la composition de la cuticule de celle des couches épider- miques sous-jacentes. 5° Feuilles cueillies à certains intervalles de la végétation, ou séparées en plusieurs parties, afin de reconnaître encore les influences de l’âge sur la composition élémentaire. 6° Organes de la fructification. 7° Organismes fractionnés suivant la même méthode, et pris parmi les végétaux cryptogames. Nous avons réuni dans un tableau synoptique les nom- Pres des analyses, et les résultats indiquant les proportions d’eau, de substances minérales et d’azote dans la matière, soit à l'état normal, soit desséchée, et dans la matière orga- FF XX. 64 506 ORGANOGRAPHIE nique ; enfin, la proportion de substance azotée , compara- tivement avec le poids total de la matière organisée. En consultant ce tableau , on verra que partout la même conclu- sion s’est reproduite ; que même des différences notables de composition élémentaire , et toujours dans le même sens, se sont manifestées entre des pousses successives semblables , quoique le développement des unes n’eût précédé que de vingt à trente jours le développement des autres. Renvoyant à ce tableau pour tous les détails analytiques et quelques observations particulières, nous croyons devoir nous borner ici à présenter quelques remarques sur les rela- tions qu'on en peut déduire entre le degré d'avancement de la structure de chacun des organismes et la composition chimique , au point de vue indiqué (1). RACINES DE MARRONNIERS. Nous avons opéré sur des plants de marronniers d’un an, et nous avons pris les racines dans toute leur longueur. La portion périphérique de ces racines , atteinte d’une désagre- (x) Nous avons conclu, du poids de l'azote, la quantité de substance azotée équivalente, en admettant 16 centièmes d'azote dans la composition moyenne des principes immédiats quaternaires. Nous aurions voulu tenir compte, dans nos résultats, de quelques principes immédiats azotés, étran- gers à l’organisation même, et spéciaux à certaines parties des plantes ; mais, outre que leur influence est très-légère, dans les organes récem- ment développés , elle eût été réellement nulle dans les plus jeunes orga- nismes; or, ce sont précisément ceux qui ont toujours offert les plus fortes proportions des substances quaternaires ou azotées. ET PHYSIOLOGIE VÉGÉTALE. bo gation notable , fut séparée, pesée humide, séchée et analy- sée; elle donna pour 100 de matière organisée 4,083 d'azote, représentant 25,51 de substance quaternaire. La portion sous-jacente , traitée de même, donna 5,791 d'azote, équiva- lant à 36,19 de substance azotée. La partie ligneuse , dépouillée de deux couches corticales, traitée dans les mêmes conditions, donna 3,856 d'azote, re- présentant 24,1 de substance azotée. En comparant les résultats des analyses, on voit que la partie vivante de l'écorce, la plus jeune, et dans laquelle réside évidemment la plus grande énergie vitale, contient beaucoup plus de substance azotée que les deux autres. Si l'on compare entre elles les deux parties saines, on remarque, en outre, que les matières minérales sont plus abondantes aussi dans l'écorce vivante. C’est un fait général dont on se rend facilement compte en se rappelant que la cellulose, qui épaissit les tissus et les substancès ligneuses qui les incrustent, n’admettent qu’en très-faibles proportions, à l'état d'interposition, mais non dans leur constitution in- time, les matières minérales, ni les corps azotés ; qu’ainsi ces deux dernières substances, relativement, diminuent à mesuré que les cellules, les fibres ligneuses et les vaisseaux s’épaississent, que les tissus végétaux, par conséquent, se consolident. Nous avons observé des relations analogues entre les par- ties composantes semblables des racines des marronniers d’un an, pris dans les cultures du bois de Boulogne; on comprend que les proportions d’eau et de matières azotées aient été moindres dans chacune de leurs parties, le sol 64. 508 ORGANOGRAPHIE étant plus sableux, plus aride et moins fumé dans ce lieu qu'au Jardin des Plantes. CHÈNE. Nous avons pu nous procurer un tronc d'arbre convena- ble pour nos recherches, en choisissant un chêne d’une belle venue, et ayant vingt-cinq ans de plantation, parmi ceux que l’on commençait à abattre au bois de Boulogne, pour tracer les lignes des fortifications de Paris ; l’adminis- tration supérieure et le garde général nous ayant d’ailleurs laissé toute latitude à cet égard. Parmi les huit analyses des différentes parties d’une même section, à 1 mètre au-dessus du collet de la racine, deux résultats auraient pu faire croire à une anomalie, s’ils n’eus- sent été dus , l’un à l'intervention de la moelle durcie, l’autre à l'élimination d’une partie du tanin des écorces désagré- gées et soumises à l’action des eaux pluviales (Voy. les notes du tableau synoptique). On remarquera d’ailleurs la concordance qui existe entre la composition trouvée et la vitalité ou l’âge relatif des par- ties analysées. Ainsi l’on trouve, en réduisant les données analytiques aux proportions des substances azotées que : 100 (matière organique pure) de l'écorce bien vivante en contiennent... 10,79 100 ( idem ) de la couche d’aubier d’un an........... 10,30 100 ( idem ) du cœur entre l’aubier et l’axe de l'arbre... 9,40 100 ( idem ) du cœur, 2° et 3° couche près de l'axe... 6,75 Afin de reconnaître si l’épaississement et l’incrustation des tissus moins vivants étaient réellement cause de la diminu- ET PHYSIOLOGIE VÉGÉTALE. 509 tion des substances azotées, nous avons enlevé, par un simple lavage à l’eau , une portion des matières contenues dans ces organismes, mais non agrégées. Le liquide fut éva- poré et desséché. D’une autre part, le tissu, lavé ainsi, fut mieux épuisé à l’aide d’une eau ammoniacale, puis desséché ; il représentait alors la partie solidifiée résistante dans la structure du bois. Voici les résultats de l'analyse de ces deux échantillons : r00 (matière organique pure) du fluide desséché offrirent. . . . . . 28,25 de substance azotée. 100 id. de la partie solide du tissu.en renfermaient seulement. . .. 1,98 id. Ainsi, la substance contenant le mélange fluide ou peu agrégé, appelé cambium, dans lequel, suivant nous, rési- dent les substances organisatrices , présenta ici quatorze fois plus de matières azotées ou quaternaires, que la partie so- lide du tissu, portion qui nous semble en effet sécrétée et non sécrétante. SUREAU. Les branches de sureau employées ont été prises dans le jardin de l’un de nous, à Grenelle; le terrain y était moins fumé que celui du Jardin des Plantes, mais plus fertile que le sol du bois de Boulogne. Sur l'étendue des trois entre-nœuds d’une jeune pousse de l’année où le bois commençait à se former, nous avons souris à des analyses comparées trois couches concentriques représentant 1° L'écorce verte qui donna pour 100 de sa matière organique. . 4,756 d'azote — 29,72 de sub. azot. 2° La moelle verdâtre, gorgée de suc; elle donna p. 10odem.org. 4,601 id. —28,795 id. 3° Le bois récemment formé qui, pour 100 de m. org., donna 1,199 id. == 9,47 id. 510 ORGANOGRAPHIE Nous traitämes comparativement encore le bois d'un entre- nœuds au-dessous de la même branche, et plus âgé seule- ment de quelques jours; il produisit, pour 100 de matière organique : 1,157 d'azote, représentant 7,23 de substance azotée. Ici se manifestent toujours les mêmes relations : l'écorce verte, siége d’une active vitalité, est aussi la plus riche en substances azotées ; vient en deuxième lieu la moelle à cel- lules très-minces, et remplies du fluide organisateur et ali- mentaire destiné à passer dans d’autres tissus pour conti- nuer ses fonctions; puis, au troisième rang, la portion ligneuse qui déjà contient des fibres épaissies incrustées, et par conséquent moins de substance molle ou fluide; aussi offrit-elle une proportion quatre fois moindre de substance azotée. Enfin , l’analyse du bois âgé de quelques jours de plus montre que son inerustation est déjà sensiblement plus avancée. On sait que les sucs diminuent dans la moelle à mesure que la végétation s’avance, et que leurs principes sont dirigés vers les parties qui se développent; il nous importait donc de voir si le tissu, lorsque sa vitalité s'est graduellement affaiblie, retient moins de substance quaternaire (azotée). Nous avons analysé, pour vérifier cette hypothèse, la moelle extraite d’une branche de deux ans. Elle laissa dégager pour 100 de matière organique 1,155 d'azote — 7,21 de substance azotée. Une autre moelle d’une branche de ro ans, donna 0,357 id. —3,23 id. Si l’on compare ces résultats entre eux et avec l'analyse de la matière extraite de la plus jeune pousse, on voit que celle- ci contient quatre fois plus de substance azotée que la ET PHYSIOLOGIE VÉGÉTALE. 511 deuxième, et treize fois davantage que la troisième. Ainsi . dans ces exemples encore, les relations entre l’âge des tissus et la composition chimique se sont conservées ; les parties fluides où molles qui ont quitté le tissu où la végétation est stationnaire, pour se porter là où elle est active, sont encore accompagnées de substances azotées en forte proportion. ÉPIDERMES. Plusieurs particularités relatives à la composition chimique et aux propriétés des couches externes et de la cuticule épidermique des végétaux, ont été décrites dans ces derniers temps. En reprenant ce travail » NOUS nous sommes proposé d'examiner, au point de vue de nos recherches actuelles, la composition de certains épidermes formés de cellules minces que l'ivde, en les colorant d’une teinte Jaune orangée intense, indiquait être injectées de matière azotée comme la cuticule; de comparer les résultats analytiques relatifs à ces deux or- ganismes, soit entre eux, soit avec la composition des couches épidermiques épaisses séparées de leur cuticule; de vérifier l'influence de l’âge sur les parties internes et externes réunies de l’épiderme des Cactus; enfin, de comparer ces divers ré- sultats avec ceux de l'analyse des couches corticales vertes, jeunes et à cellules très-minces , renfermant des granulations de substances molles colorables en jaune par l’iode, et con- stituant le parenchyme sous l'épiderme du Cereus Peru- Vianus. Le tableau synoptique contenant les détails de ces ana- lyses, montre que l’épiderme des tubercules de la Pomme de terre (formé de plusieurs couches de cellules minces injec- 512 ORGANOGRAPHIE tées) se rapproche, par sa composition chimique, de la cuti- cule mince, injectée, des Cactus; dans tous les deux la pro- portion de substance azotée s'élève de 15,2 à 17,2 pour 100. Quant aux couches épidermiques sous-jacentes des Cactus, elles sont formées de cellules à‘ parois très-épaissies et non injectées ; aussi leur composition est-elle très-différente; elle ne présenta pour 100 de matière organique que 1,46 à 1,95 de substance azotée, c’est-à-dire, de sept à huit fois moins que la cuticule des mêmes épidermes. Cette particularité de la composition de la cuticule épi- dermique nous conduisit bientôt à des observations organo- graphiques curieuses sur son mode d’accroissement, que nous exposerons plus loin. La comparaison que nous avons établie entre des épi- dermes entiers enlevés à des pousses du Cereus Peruvianus d’âges différents, donna des résultats non moins remarqua- bles : L'épiderme pris sur une pousse de deux ans contenait, pour 100 parties, 5,66 de substance azotée; l’épiderme en- levé sur une pousse d’une année en renfermait 12,86, c'est-à- dire , au delà de deux fois plus. lei encore l'influence de l’âge se montra dans le même sens. Enfin l'analyse de la partie corticale verte d’un Cereus Peruvianus âgé de deux ans et dépouillé de son épiderme a présenté, pour 100 de matière organique sèche et pure, 36,5 de substance azotée, résultat en harmonie avec l’énergie vitale de ces parties, la faible épaisseur des cellules et l’a- bondance des granules verts, riches en substances quater- naires que ces cellules renferment. ET PHYSIOLOGIE VÉGÉTALE. 513 FEUILLES. Le tableau synoptique contient les détails de huit analyses faites sur les feuilles de différents Müriers. On y pourra remarquer que la composition des trois der- nières feuilles formées au bout des branches du Mürier Mo- retti a présenté, pour 100 de matière organique, 6,861 d'azote — 42,88 de sub. azot. En prenant 8 feuilles au lieu de 3, on obtient pour 100 6,630 id. —%41,43 id. C'est-à-dire 1 : de moins en substance azotée dans cette dernière analyse, qui portait sur des feuilles du même arbre, mais dont 5 sur 8 étaient un peu plus âgées. Les huit dernières feuilles des rameaux prises sur un Mû- rier blanc, à Grenelle, et analysées comparativement le 15 juin et le 10 octobre, ayant en somme la même durée de développement, ont présenté sensiblement la même compo- sition : les unes contenaient effectivement, pour 100 de ma- tière organique, 34,36 de substance azotée, et les autres 34,08. On voit que, dans les mêmes conditions de culture et de terrain, le Mürier Moretti est sensiblement plus riche en substance azotée que le Mürier multicaule, et suivant le rap- port de 41 à 58. En opérant séparément, d’un côté sur les pétioles et ner- vures médianes, de l’autre sur le limbe des feuilles, nous pensions pouvoir apprécier des différences qui se sont en effet manifestées clairement. Les pétioles et nervures des feuilles de multicaule donnèrent 4,792 d'azote — 29,95 de subst. azotée. Tandis que les limbes des mêmes feuilles produisirent. . . . 6,141 id. —38,38 id. C'est-à-dire, environ un tiers en sus. TX X: 65 514 ORGANOGRAPHIE Ainsi, les tissus plus anciennement formés dont les parois sont généralement plus épaisses, qui servent surtout au passage des liquides nourriciers, contiennent moins de subs- tance quaternaire et beaucoup plus d’eau (suivant les rap- ports de 87 à 78) que les tissus à cellules minces, plus ré- cemment développés, et contenant en abondance les corps colorables en vert auxquels on attribue, depuis longtemps et avec raison, des propriétés vitales énergiques. On trouvera les mêmes différences, plus tranchées encore, en comparant entre elles les compositions des parties ana- logues dans les feuilles d’un Mürier noir. En effet , les pétioles et nervures ont donné 84,55 d'eau; leur mat. org. cont. 17,5 de sub. azotée. Fandis que les limbes des mèmes feuill. donn. 72,2 d’eau, leur m. org.cont. 26,68 id. Comparativement avec les précédents, ces derniers conte- naient donc environ 14 pour 100 de moins en eau, et leur matière organique, pure et sèche, renfermait au delà de 50 pour 100 de plus de substances quaternaires ou azotées. Nous ne pouvions manquer de remarquer encore la diffé- rence notable qui existe entre la composition des feuilles de deux müriers venus à Grenelle dans un même terrain; les unes offrant une structure plus résistante, un tissu à parois plus épaisses, contiennent moins de substances azotées que les autres, dans les rapports suivants : Les feuilles du Morusalba ont donné pour roo de mat. org. 5,498 d'az. , représ. 34,36 de sub. azot. Les feuilles du Morus nigra ne donnerent pour 100 que. . . 4,270 id. 24,68 id. C'est-à-dire une proportion moindre d'environ 30 centièmes. ET PHYSIOLOGIE VÉGÉTALE. 515 LYCOPERDON PRATENSE. Nous savions que divers champignons à développement rapide sont abondants en substances azotées, que le cham- ; s - 7 _ pignon de couches, par exemple, renferme pour 100 jusqu’à 61,16 de ces substances quaternaires; nous avons voulu re- chercher si, dans les végétaux de cette famille, l'influence de l’âge des différentes parties se ferait encore sentir. Dans cette vue, nous avons analysé séparément la portion interne (spores) et l'enveloppe qui composent le Lycoperdon pratense. Ce champignon contenait 61,36 d’eau et 38,64 de matière desséchée ; celle-ci se composait de 4,548 de tissu envelop- pant, et 2,234 de sporules. L'enveloppe donna pour 100 de mat. org. 3,322 d'azote représentant 20,76 de subst. azotée. Les spores produisirent pour 100. . .. . 6,244 id, 38,89 id, Ainsi, le tissu dont la végétation est accomplie contient près de moitié moins de substance azotée que les spores dé- veloppées plus récemment, et dans lesquelles l'énergie vitale est évidemment plus grande : circonstances qui toutes deux s'accordent avec la composition chimique et la loi générale que nous nous proposions de vérifier. Les tableaux synoptiques ci-contre offrent les détails et quelques autres résultats de ces analyses. 65. ORGANOGRAPHIE TABLEAUX DES ANALYSES ÉLÉMENTAIRES EN VUE ë : a] Z = Æ : NOMS PERS 4 D A 3 Asus PE RE C4 D! (SM TE" © = 2 rs] CA DES SUBSTANCES. À «E NC £ Æ a na © = = ss) © in ete —_—_—_—_—_—____—— | © —— ; ‘ er. cc. o m. Partie corticale vivante de Marronnier., 0. 683 3x 19.8 0, 765 68,66 9. 30 Racines Marronuier, parties désagrégées.. ..... | 0,746 20,50 18.1 0,764 78.25 24.30 Racines Marronnier, partie ligneuse dépouillée des couches \corticales 2h72. 1.280 LISE 1,228 40, 50 18.6 0.751 67.04 2.40 Racines Marronnier , partie corticale vivante. . |... .,....,|.. it nsc rebesres OR LO M. Racines Marronnier, partie corticale désagrégée.|.......,.,|.. ls tattoo 228) MTE6B 1 02 Racines Marronnier, partie ligneuse...........|,........|l... .. FA OOo coeo) MECOL Or D | 200, ESS GanhmiGhene RENE Rep e rc tt 0. 297 11 20, 4 0.7682 |.....,...| 5.20 Écorce Chëne (r), partie corticale morte........ 0, 525 7.50 20, 5 0,797 23,21 9, 40 Écorce Chéne » partie vivante”... 0. 475 6.25 20. 0,7652 | 42.99 12,20 Cœur de Chène, 1" couche, avec sa moelle (2).| 1,033 15,5 19. 0, 756 38, 15 0. 40 Aubier Chéne, dernière couche d'un an........ 0, 477 6,75 20. 0.7685 | 4r.18 0,74 Bois de Chêne , cœur entre centre et aubier..... 1,000 13 18. 0,760 36.94 0, 20 Bois de Chêne , moins la moelle, moins la re cou- che, cœur des 2€ et 32 couches. ............. 0,677 6,25 19. 0,7685 | 38,15 0.74 VE CE QU 2 TNA Ame” RAR 0, 365 1 19,0 0,958 Lésme-s et 0:10 ÉCOTCEISUTEAU SE » = see nee ee mena ets 0.304 arto | 21,33 | 0.7625 | 99.68 | 12,33 Moslle Sureau........:,.2:. NRC El 0,412 14. 50 22 0,7612 | 87.88 13,20 (x) La portion désagrégée de l'écorce du Chène contient un peu plus de matière azotée que l'écorce partie en grand excès, est mis eu liberté par la désagrégation du tissu, qu’alors une portion se porte sur reste soluble, et est entraîné par les eaux pluviales : ainsi, d’une part, la conservation de la substance azotée, (2) Le résultat de cette analyse prouverait que la moelle du chêne renferme de plus grandes proportions tion, car la dureté considérable, le peu de volume et la forte adhérence de cette partie médullaire, ne ET PHYSIOLOGIE VÉGÉTALE. . "SYNOPTIQUES h “DU DOSAGE DE L'AZOTE DANS LES ORGANISMES VÉGÉTAUX. 51 fl AZOTE é POUR 100 DE LA MATIÈRE | à l'état normal à l'état sec, à l'état pur OBSERVATIONS. 1.646 | 5.253 | 5.597 moon sn osoneene ses sonencopoono sonne tanceneoosssnesose ce 0,694 | 3.19r | 4.083 (Marronnier d'un an, provenant du Jardin du Roi..,.,........... 1.141 SIC LEO, léoieees MÉRITE ONE RO oo ee condo no 2 COCOON CCE ÉCCEEETE Marronnier provenant du bois de Boulogne. CCCECECES ÉCECELEES PEEEEETE _ DECO PEDEELEE .......1 4.285 | 4.520 |Extrait par des lavages à l'eau pure....,.,,.,..................... Mx.250 | 1.628 | 1.796 |Arbre de 25 ans du bois de Boulogne. .....,,,................... Lo. 86 1.516 | 1,726 Idem dns renom ane sorseeensesesssee--ceasssenss see À x. 067 1.717 1,723 DÉEIÉS DEURE Here ARC OR EE DEC EEE CP toner DER | ON PES DONS RP Re Re 1.507 1,505 Idem 1... poules ae ne sue e 0e so corocnerensenene vos tresse 1.073 1.087 TlEm Ve re lose mans mumsenses sers ne sandaasense ces 0,317 0,3173 |Exempt de cambium, (Lavé : 1° à l’eau : perte p. 100 8.88)....... c 2° à l'ammoniaque, id. 6.65 15.53 4.170 4.756 Écorce verte des trois entre-nœuds ci-dessous, . ..... Horaoba to dou 3.994 4.601 [Trois entre-nœuds de la partie d’une jeune pousse, où le bois com- menveimisel{ormer.. 2%. cesse mu esse. SUBSTANCE AZOTÉE, p. 100 de mat, organisée, D © n & # à D PS m © 28,25 11.22 10.79 10,70 10, 30 9.40 6.75 1,98 29.72 28,75 vivante; on en comprendra facilement le double motif : c’est que le tanin que contient cette dernière | | | | | | la substance azotée et la préserve des altérations spontanées, tandis que l’excès de tanin normal ou altéré de l’autre la disparition du tanin qui ne renferme pas d’azote, concourent à expliquer le résultat obtenu. “de substance azotée que les couches ligneuses. On ne pourrait guère arriver à le démontrer que par induc- permettent pas de l'isoler exempte de fibres ligneuses. 518 ORGANOGRAPHIE NOMS employée, DES SUBSTANCES. DE LA SUBSTANCE GAZ OBTENU, TEMPÉRATURE PRESSION. CENDRE Bois de Sureau Bois de Sureau EN MER sidi ont NORD SPA 0.103 7.37 17.5 0. 7485 | 76.86 &. | OVAIRES. De relaie atpis sicsleteielais see = aise) le 0,318 10, 25 17. 0,764 89. 28 5,60 Branche 4. eur ereecrlapec-tehismenreontehRlssee ses O1 ETEEONON CPFEPCON DEEE ,.| 70.26 Branches... 11841 deeclscer eee den Snas ao cire lseeel-le-sacsmetl see TION DEEE Branche..:....-. Moose DO EPLÉBEGÉS À EPP OONON DSC essesesslesses- 777 TE Épiderme de pommes de terre............. .| 0.443 8.12 21. 07618 0e eee a TER Épiderme de Cactus Peruvianus.............. 0. 222 5 18, 6:60 55.22.20 1002 60. Épiderme.… ... Ce TRE EME PRE ENT EP .| 0.209 3,95 18, 0.739 |........1. 300 ET PHYSIOLOGIE VÉGÉTALE. AZOTE POUR 100 DE LA MATIÈRE | à l’état normal. | | | | | 0.492 Î 0,480 10. 769 0.210 2,326 1,241 L | 1.892 .| 0.369 D l D... à l’état sec. à l'état pur. OBSERVATIONS. 2.012 2, 086 Provenant de la branche ci-dessus. .............. . Idem , idem , comprenant un entre-nœud inférieur de plus, ....,.. Blanche, extraite d’une branche de 2 ans,. ....... Hs Sé nr odonbao Grise, extraite d’ane branche de to ans, ........ DEAN EE 0 0 Partie interne d'une Vesse-de-loup. Lycoperdon bovista pratense...... Partie externe du même champignon. .............,,.........,.. Les deux parties ensemble ont perdu dans l’étuve à 60° d’abord 55,44 pour 100 d’eau. Séparées ensuite et séchées dans le vide à 100 degrés, le complément de l'eau a été calculé comme ci-dessous. . Poids à l’état sec : État normal — 17.55 » sec.., — 7-82 réduit à l’étuve — composé { Fr moPPe" 5°175 Re spores... . 2.645 9-73 — 55.44 pour 100 d’eau. nr: Séché dans le vide : enveloppe. = 4.548 7.820 La réduction = spores....— 2.234 6.782 : 28 : i à __{25.92 enveloppe. 19.55 : 6,782 : : 100 : ae Ce sèches =; Face ot 100,00 (Palma-christi) extrait de boutons clos prêts à s’ouvrir.............. (Palma-christi ) ovules gélatiniformes, un peu avant la formation de l’a- mande, extraits de boutons elos., ........... Conte 00conmongne . [Branche de Palma-christi, 2° entre-nœud, a 11° de distance du collet de la racine. Idem , idem , 4 premiers entre-nœuds de l'extrémité supérieure. Idem , idem, 2° entre-nœud, à 54° de l’extrémité supérieure. Patraque jaune....................... DE rte SI TEE" Cuticule épidermique, tige 2 ans, mis 48 heures dans une solution aqueuse, saturée d’iode, puis 48 heures dans un mélange de x vol. d'acide sulfurique et de 1 vol. d'eau distillée, lavé, raclé, lavé à l'eau , saturé par le bi-carbonate de soude, lavé à l’eau et séché Cuticule séparée de l’épiderme d'un Cactus Peruvianus de 2 ans, Subs- tance extraite après 12 heures seulement de macération dans l'acide sulfurique à : vol. d'eau, plus 1 vol, d'acide sulfurique de l'opération précédente ; non saturée par le bi-carbonate de soude, lavée à l’eau jusqu’à épuisement. .., ei ess semeanence roues sense 15, 19 13.03 520 ORGANOGRAPHIE E] Ê Hi e e] é 5 NOMS ES Æ 2 < ai AË> = = = D = 5 22 5 sé FA Z a DE o [= Éé ps) = DES SUBSTANGES. RE = = =“ 6] à > = a 2 Ne LE —————.".—— .—…—……—…— (es | —— Épideme he tre as mr le 0.445 7.26 | ro. 0,7615 |... re. || 8:80 Épidérmen eue ce cnenue cesCEUC it 0. 523 3.62 | 19. 0, 773 12, Épiderme 1,12 20 0, 7497 18, | Épidenmes:, 0e Rémte etes ebtte 0.378 0,895 | 16.75 | 0.764 |........ 13,60, | Cactus, partie corticale, ,.,..,.......,...... 0. 461 19,07 15,50 | 0.763 |........ 16,80 Feuilles; Môrier:blauc,.......--:--.00.20 0.617 26 16.5 76,37 | 70.68 | ro.2 Id, Môrier More eee eee secs cote 1. 180 62 19. 76.3 84.44 11,6 Id, Mürier multicaule.................. 0.498 22,25 17.5 76.5 77-99 15 Td;, VMôrier Morettis.,.. eee bete a 644 31 18.5 76.3 77.67 15,8 Id., Mürier multicaule.................. 688 23,25 19.5 76.85 | 86.82 18 Ta}, AIME DIAnp. Abe ces da se ee ue 365 15 15,5 76.3 71,34 11.4 TA; Mrier noir 20 -aisMe nt aietue ble 383 13.75 13,0 76.3 72.2 15,5 Id, OUMATIER NO Less ss ee HO douce 1.671.25 | 37 18. 76.4 84.55 11,9 Les analyses que nous venons d'exposer ne permettent pas de douter que plus les divers tissus végétaux sont jeunes, plus ils contiennent de matière azotée, et plus leur puissance de développement est grande, quoique dans certains mo- ments leur croissance s'arrête ou devienne très-lente. Mais à mesure que les divers organismes vieillissent, la substance azotée se retire, et elle est remplacée par de la cellulose pure ou entremélée de substances ligneuses, qui n’admettent point Are rude HE à EE 8] ET) PHYSIOLOGIE VÉGÉTALE. bai AZOTE POUR 100 DE LA MATIÈRE. SULSTANGE AZOTÉE p. 100 de mat, organisée, OBSERVATIONS. 2.059 |Cuticule et épiderme réunis d'uu jeune Cactus Peruvianus, tige de 0.906 -234 |Partie interne séparée de la cuticule (comme il est indiqué, P. 519, 2° analyse) du même Cactus de 2 ans. .3:3 |Partie interne séparée de la cuticule (commeil est indiqué, p. 519, 11e analyse), Cactus de 2 ans Partie corticale sans épiderme ni partie ligneuse du Cactus Peruvianus de 2 ans De Grenelle, 8 feuilles, bout du rameau, moins pétioles, et 2/3 nervures médianes Du Jardin des Plantes, 3 jeunes feuilles, moins les pétioles et 2/3 nervures Du Jardin des Plantes, 8 feuilles 8 feuilles du bout Nervures 2/3 de leur longueur vers et compris le gros bout et pétioles. 29. 95 De Grenelle, 8 feuilles, moins pétioles et 2/3 nervures médianes De Grenelle, 8 feuilles, moins les pétioles et les 2/3 nervures médianes.| 26,68 Pétioles et 2/3 des nervures médianes, ...... ES PEN to 0e var 17,50 d’azote dans leur composition intime. Alors la cellulose, sé- crétée dans les cavités des tissus, épaissit leurs parois et les solidifie. Ce qui prouve que les choses se passent ainsi, se put tirer du bourgeon et de ses développements. Admettons que le bourgeon , eu égard à son volume, soit né depuis peu de temps : il contient une quantité notable de substance azotée dans sa partie supérieure, attendu que cette partie est la plus jeune; tandis que la partie inférieure de LEXX, 66 522 ORGANOGRAPHIE ce même bourgeon , étant plus âgée, a perdu une partie des matières azotées, lesquelles ont fait place à la cellulose et aux principes ligneux ; d'où il résulte que cette partie inférieure s’est épaissie, s'est allongée, et a soulevé la partie supérieure. Ceci nous apprend comment il se fait que les mérithalles des tiges et des branches se développent successivement à partir de la base jusqu'au sommet. Reste à savoir ce que devient l'azote dont les proportions ont diminué. Retournerait-il dans le sol ou dans l'atmosphère d’où il est venu? Ou bien les composés, qui le comptent parmi leurs éléments, iraient- ils porter secours à d’autres organismes naissants? Cette dernière conjecture est la plus probable. Elle s'appuie sur des observations qui résultent de l’analyse chimique, et elle appelle notre attention sur une distinction importante entre des matières confondues dans un même fluide, mais dont les unes, à composition ternaire, se condensent pour donner naissance à de petites utricules, dont la paroi est d’une ex- trêème minceur, ou pour épaissir et fortifier les parois d’utri- cules plus développées. Pour faire apprécier à sa juste valeur ce qui précède, nous pensons que l'examen approfondi d’un fait particulier ne paraîtra pas déplacé ici. Voici ce fait : nous avons, il y a quelques années, choisi sur un Marronnier d'Inde (Æsculus Hippocastanum) un jeune bourgeon bien constitué, lequel commençait à se développer, non par son sommet, mais par sa base. Cette base s’allongeait, s'épaississait et donnait nais. sance à un mérithalle. Quand ce mérithalle eut atteint neuf cehtimètres de long, nous jugeämes à propos de le partager par la pensée en trois parties égales, mesurant chacune trois centimètres , ce qui fut facile en fichant la pointe de deux ET PHYSIOLOGIE VÉGÉTALE. 523 camions dans l'écorce du mérithalle, l’un à trois centimètres au-dessus de sa base, l’autre à trois centimètres au-dessous de la base du mérithalle supérieur. Nous disons du méri- thalle supérieur, car tandis que le premier mérithalle se dé- veloppait, un second prenait naissance entre lui et le bour- geon, et d’autres devaient de même se former plus tard. Mais revenons à notre premier mérithalle. Nous le cou- pâmes longitudinalement en deux parties égales, et, comme nous devions nous y attendre, nous ne tardâmes pas à recon- naître que l’épaississement avait pour cause la formation des couches utriculaires, superposées les unes aux autres, les- quelles offraient d'autant moins de consistance qu'elles se rapprochaient davantage de la base du mérithalle supérieur, qui était en voie de se développer, comme avait fait le pré- cédent. Mais, dira-t-on, d’où provient cet affaiblissement graduel des nouvelles couches utriculaires? A cette question, l’analyse chimique répond par des faits irrécusables. Plus les tissus sont Jeunes, moins ils contiennent de substance ligneuse et de cellulose. Il s'ensuit donc que, dans un mérithalle donné, les tissus inférieurs qui sont évidemment les plus anciens, passent les premiers à l’état ligneux , tandis que les tissus supérieurs qui sont de formation toute récente, et qui se dirigent incessamment vers le sommet du mérithalle et vers la base des feuilles, n’ont pas encore eu le temps de se trans- former en bois. De Lahire, savant académicien du XVII* siècle, imagina que les couches ligneuses des dicotylées partaient de la base du bourgeon et descendaient jusqu’au collet des racines. Cette manière de voir n'était justifiée par aucun fait positif, ce qui n’empêcha pas que plus tard le savant Du Petit- 66. 524 ORGANOGRAPHIE Thouars adopta la doctrine de Lahire, mais s’efforca vaine- ment de la faire prévaloir. Il avait remarqué que, quand on greffe un bourgeon sur un arbre, il arrivait quelquefois que la base du bourgeon donnait naissance à des filets qui se dirigeaient vers la terre, et comme il ne les voyait pas des- cendre au delà de quelques centimètres, son ardente imagi- nation lui suggéra la pensée que ces fibres se produisaient et s'accroïssaient par une force organisatrice qui, comme lé- lectricité et la lumière, semble ne point connaitre de distance. Nous reproduisons ici les propres paroles de Du Petit- Thouars. Toutefois, nous aurions peine à croire qu'aujour- d’hui aucun phytologiste se contentät de cette explication. Il est de toute évidence que les filets, nés de la base d’un bourgeon , sont de véritables radicelles. Il suffit quelquefois d’asseoir le bourgeon sur une terre légère et un peu humide, pour qu'il s’enracine , et donne naissance à une plante de son espèce. Voici un fait non moins digne d'attention. Nous choisis- sons une feuille saine tenant à l'arbre, et à l’aide d’une aiguille et d’un fil nous faisons une ligature autour de l’une des nervures les plus saillantes, et peu de temps après nous apercevons qu'il s’est formé un épaississement notable au- dessus de la ligature. Mais à quelle cause attribuer cet épais- sissement, si ce n’est à la tendance de la matière nutritive à se porter vers la base du végétal? Nous en avons la preuve dans les arbres dicotylés. Une forte ligature opérée sur des tiges ou des branches ne tarde pas à faire naître d’épais bourrelets. Que si, au contraire, nous laissons croître l'arbre en toute liberté, la matière organisatrice, une partie du cambium en un mot, se déposera entre l'écorce et le bois, à A 20 RSR ARCS EME ET D 2 ro M ne Te Re ET PHYSIOLOGIE VÉGÉTALE. 525 partir des jeunes sommités de l’arbre jusqu'au collet de sa racine, et c’est à ce point d'arrêt que commencera la lignifi- cation. Celle-ci prendra une marche ascendante et s'étendra de proche en proche jusqu'aux derniers rameaux. Ce sera en grand la répétition de ce que nous avons vu en miniature, dans le mérithalle du Marronnier d'Inde. Jusqu'à ce moment nous n'avons rien dit de ce qui touche directement aux arbres monocotylés. Entre ceux-ci et les dicotylés la différence est grande. Ces derniers prennent à juste titre le premier rang. Leur organisation interne se fait remarquer tout d’abord , soit par la belle ordonnance des parties, soit par la solidité de l’ensemble. L'organisation interne des arbres monocotylés est fort différente. Au pre- mier coup d'œil, il semble que chez eux il n’y ait que désor- dre et confusion; mais si l’on étudie sérieusement l’œuvre de la nature, on est amené à reconnaître qu’elle n'a rien fait qui ne soit digne de notre attention. Un puissant bourgeon, qui étale ses grandes et belles feuilles à la surface du sol, commence le stipe du Dattier. Ce bourgeon vieillit; les feuilles le plus bas placées se déta- chent, et dans le même temps de nouvelles feuilles commen- cent à poindre à la partie supérieure de l’axe du stipe. Ces feuilles à leur tour grandissent, vieillissent et tombent. D’au- tres leur succèdent en tout semblables aux précédentes. Cet état de choses se prolonge aussi longtemps que dure la végé- tation de l'arbre, qui n’est, pour bien dire, qu’un bourgeon continu, et qui, par conséquent, n’a point de mérithalle. Il est à remarquer qu’à leur base toutes les feuilles du Dattier se touchent, se pressent, et que, lorsqu'elles viennent à se détacher, chacune d'elles laisse sur le stipe un épais tronçon 526 ORGANOGRAPHIE dont la surface dessine un losange, et tous les tronçons ajus- tés les uns à la suite des autres forment sur le stipe une bande en relief, laquelle décrit une hélice souvent interrom- pue par la chute des tronçons. Ce n’est pas certainement par des coupes longitudinales et transversales qu’il nous est possible de prendre une con- naissance approfondie de la disposition, de la marche et des fonctions des filets qui parcourent le stipe. Toutefois, nous devons reconnaître que, dans certains cas, tels que ceux que nous allons citer, une coupe verticale peut très-bien éclairer l'observateur. Soit pour exemple le stipe du Dattier, A l’aide d'un instrument tranchant, nous le fendons dans toute sa longueur en deux parties égales, et par cette opération nous mettons au grand jour un faisceau de filets qui s’allongent de bas en haut dans la partie centrale de l'arbre. Il est évi- dent qu'ici le secours de l'anatomie est tout à fait inutile. Elle ne nous a pas servi davantage pour constater que les filets, généralement parlant, naissent de la superficie interne du stipe. Mais ces mêmes filets ne tardent pas à s'enfoncer dans les amas de tissu utriculaire, et c’est alors que l’obser- vateur doit avoir recours à l'anatomie pour enlever ces tissus et mettre à nu les filets sans les offenser , quelles que soient d’ailleurs les diverses routes qu’ils prennent. Avec de la patience, un peu d'adresse, un scalpel, on obtient ce résultat. Parmi les innombrables filets que nous avons sous les yeux , nous en distinguons un qui nous semble d’une cons- titution plus robuste que les autres, et que nous avons ailleurs et pour cause nommé filet précurseur. Né de la pé- riphérie interne, ce filet se dirige d’abord vers le centre de l'arbre en décrivant une courbe ascendante, et peu après il ET PHYSIOLOGIE VÉGÉTALE. 087 prend place dans le faisceau de la région centrale. Puis, arrivé à une certaine hauteur, il se sépare du faisceau et se glisse horizontalement à travers le tissu utriculaire vers la périphérie interne, laquelle est située plus ou moins à l’op- posite du premier point de départ du filet précurseur. Ce- lui-ci va s'attacher à la base d’une feuille naissante, et, chose remarquable, tous les petits filets jusqu'alors dispersés se rassemblent, se pressent autour de lui, comme par une sorte d’instinct, et tous ensemble vont aussi porter secours à la jeune feuille. Que l’on se garde de croire que le fait que nous venons d'exposer, soit unique dans le stipe du Dattier. Bien s’en faut qu'il en soit ainsi, car il se reproduit aussi souvent qu'une feuille apparaît ; et comme les feuilles naissent de tous côtés et se disposent sur le stipe suivant un ordre symétrique, il s'ensuit nécessairement qu'il s'opère un croisement général des filets précurseurs dans toute la longueur de l’arbre. Quant aux filets, considérés isolément, nous remarque- rons qu'ils ont une grande affinité avec les couches ligneu- ses des dicotylés, sinon par la forme, du moins par la con- sistance. Comme dans les dicotylés, ces filets se changent en bois à partir de la base de l'arbre, et la lignification va s’af- faiblissant de plus en plus, à mesure que les filets s’allongent, pour aller s'attacher aux feuilles. Il y a loin de cette doctrine à celle de Lahire et de Du Petit-Thouars. En résumé, si la formation des tissus et des filets avait lieu en descendant du haut jusqu’au pied des arbres, il est évident que leurs sommités les plus élevées seraient plus âgées que les parties inférieures. Les premières renferme- raient en plus fortes proportions la cellulose et la matière 528 ORGANOGRAPHIE ligneuse , d'où il résulterait qu’elles contiendraient relative- ment moins de matiere azotée. Or, c'est le contraire qui tour jours a lieu ; nous l’avons prouvé par des faits nombreux dans notre premier mémoire. Ainsi, l'analyse chimique s’ac- corde en tous points avec l'anatomie et l'observation atten- tive, pour repousser cette erreur de l'imagination de nos devanciers. Après avoir déduit, de notre première série d'expériences. les conséquences que nous venons d'exposer, nous avons entrepris de nouvelles études, dans lesquelles l'emploi des réactifs pouvait éclairer les observations anatomiques, et montrer d’autres effets du développement de l'organisme végétal. En voyant les substances ternaires (formées d'hydrogène, d'oxygène et de carbone) consolider les tissus et accuser leur âge, il nous sembla que ces substances devaient appor- ter des changements, dignes d'intérêt, à la structure des parties dont la vitalité se prolonge au delà des limites ordi- naires. Nous avons d’abord examiné à ce point de vue les feuilles qui résistent à la chute automnale : parmi les moyens de consolidation que leur fournissent les matériaux non azotés en s’y accumulant, nous avons découvert en effet des organes nouveaux, assez remarquables. Ce sont des fibres de cellu- lose incrustée, étendant leurs ramifications d’une face à l’autre du limbe : sortes de renforts qui maintiennent l’écartement entre les épidermes, et semblent garantir le parenchyme contre la pression des couches épidermiques épaissies. Ail- leurs , de nombreuses cloisons, formées de cellules à fortes parois et traversant de même tout le parenchyme de la feuille, ET PHYSIOLOGIE VÉGÉTALE, b2q produisent encore une consolidation générale et soutiennent lés faisceaux vasculaires des nervules. On remarquera des dispositions de ce genre, et en outre un bourrelet marginal de cellules épaisses et injectées, dans les coupes des feuilles des Camelias , de l'Olea fragrans, du Thea, viridis, du Magnolia grandiflora, du Nerium oleander, du Houx, des Orangers, du Buis, etc. Nous avons vérifié sur les feuilles du Laurier rose et tracé, sous le microscope, la disposition singulière des stomates, au fond de cavités spéciales dont l'entrée, irrégulièrement cir- culaire, est abritée par de nombreux poils recourbés. Une abondante sécrétion de globules amylacés s’est of- ferte à nos regards dans les cellules du parenchyme parmi les feuilles bien développées du Thé et des Camelias. Sur tous les points où l’épaississement des cellules et des fibres simples ou rameuses a lieu rapidement dans les feuil- les, on remarque des canalicules en grand nombre, traver- sant les parois et mettant en communication la cavité cen- .trale, graduellement rétrécie, de ces fibres, avec les tissus ambiants ou leurs méats. Ces canalicules perforent aussi les cellules, injectées et épaissies par les principes immédiats du bois (lignose, lignin, lignine, ligniniréose), dans les divers noyaux et les pepins de raisin. Nous avons observé des dispositions analogues dans les fibres lancéolées, libres ou réunies en faisceaux, des écorces de Cinchona (1) 1) Ces fibres corticales, à double pointe et très-petites, se répandent > E P ) 1 en poussière durant la pulvérisation du quinquina jaune ; elles occasion- IE 67 530 ORGANOGRAPHIE Les noyaux de Celtis ônt présenté une particularité remar- quable dans leur composition : les épaisses parois de leurs cellules sont formées de cellulose caverneuse, dont toutes les petites cavités sont remplies de carbonate calcaire ; ce sel, très-compacte, donne une grande dureté à tout l'ensemble du noyau. Dans beaucoup de feuilles , et surtout dans les feuilles du Hêtre, nous avons observé et reproduit par des figures la disposition des cristaux d’oxalate de chaux en séries linéai- res parallèles aux nervures et nervules. Les formes élégantes des glandes oléifères et les plis sy- métriques de la cuticule épidermique autour d'elles comme autour des stomates, nous engagerent à dessiner plusieurs plans et coupes des feuilles du Lilas. Nous nous sommes efforcés de représenter, à l’aide d’un fort grossissement, le mécanisme du développement de la cuticule épidermique, en montrant les granules qui, successi- vement interposés , lui donnent plus d’étendue et d’épais- seur. , Nous avons consacré plusieurs des seize planches, ci-après décrites, à montrer les détails de ces structures diverses et les progrès de leurs développements. Les changements de formes et de couleur sous l'influence des réactifs ont été indiqués lorsqu'ils pouvaient mieux caractériser les diffé- rentes parties de l'organisme, faire distinguer les uns des autres la cuticule, les cellules sous-jacentes, la cellulose pure, nent, en s'implantant sur la peau, les démangeaisons vives dont se plai- gnent les ouvriers. ET PHYSIOLOGIE VÉGÉTALE. 531 la cellulose injectée de matière ligneuse , les corpuscules azo- tés, les gouttelettes oléagineuses. Enfin, nous sommes par- venus à montrer ainsi, à côté de leurs formes extérieures, les dédoublements des parties et la structure intime de plu- sieurs Champignons microscopiques. ER Bab ; = à Le At e “à .: be re TOR LT PO Li} Ce AT A ” SAN) AC ANMAOIdA 2m enuoÉ eg Amour) NS NÎKK V277 \ \ va AMAAS AC NIVA AG STJION S\ONIIANVH) 0 QUO IO IE FT NUNTY) PE72 he pau 2e ACTES É 72 > GS e0 0606 & S® Z Peut se MAGNOLIA GRANDIFLORA. Cavn le MÉDIANE D'UNE FEUILLE DE aubtle. À. Pousqontier aire Mbbelek Lyen dirt NERVURE DR TLLE LLDILOELE LALARSSEISEARER LES SN LRILENNDIDATRERDLRBEÈTLE ARI LATEST VELAALDAGII LES LR CONSIDÉRATIONS SUR LA REPRODUCTION, PAR LES PROCÉDÉS DE M. NIEPCE DE SAINT - VICTOR, DES IMAGES GRAVÉES, DESSINÉES OU IMPRIMÉES, Par M. E. CHEVREUL. Lues dans la séance du 25 octobre 1847, INTRODUCTION. ». Si la nouveauté et l’imprévu suffisaient pour donner à des expériences tout l'intérêt qui peut satisfaire une pure curiosité, je n'aurais rien à ajouter à l'exposé qu'on vient d'entendre des travaux de M. Niepee de Saint-Victor, tel qu'il l’a rédigé et déposé à l'Académie ; mais par l'originalité des résultats, par les conséquences qu'ils ont déjà et celles qu'ils auront encore tôt ou tard , ces travaux m'ont paru se prêter à des considérations que ne jugeront pas superflues les personnes qui s'efforcent de lier les faits nouveaux avec 534 DE LA REPRODUCTION DES IMAGES ceux que l’on connaissait déjà, afin d'établir la contiguité des efforts par lesquels s'étend incessamment le champ de la science , comme si une-seule intelligence le cultivait. 2. Il s'en faut beaucoup que les chimistes et les physiciens aient donné une égale attention aux différentes sortes d’ac- tions moléculaires que la matière présente à l'observation. 3. Les actions en vertu desquelles se font les combinaisons définies ont occupé les chimistes, pour ainsi dire, à l’exclu- sion des physiciens, soit qu'il s'agisse des composés résultant des affinités les plus énergiques en vertu desquelles des corps comme l'oxygène, le chlore, etc., s'unissent au potas- sium, au sodium , etc., ou des composés résultant de la neutralisation mutuelle des acides et des alcalis; soit qu'il s'agisse des composés ternaires ou quaternaires définis, dans lesquels on expulse un de leurs éléments, l'hydrogène, par exemple, par un autre corps, tel que l'oxygène, le chlore, etc. Les chimistes n’ont pas borné leur étude aux phénomènes passagers de ces actions ; ils l'ont étendue encore aux pro- priétés de leurs produits. A. Les actions moléculaires en vertu desquelles se font les composés indéfinis, tels que la plupart des alliages métalli- ques , la solution de corps solides ou de fluides élastiques dans les liquides neutres, et des composés solides produits d’une cémentation , comme l'acier , ont fixé à la fois l’atten- cion des chimistes et celle de plusieurs physiciens, parce qu’il semble en effet que, dans les composés indéfinis, l’affai- blissement de l’action moléculaire rapproche les phénomènes de ceux qui sont du domaine de la physique. 5. Les actions moléculaires par lesquelles des corps dissous dans des liquides se fixent à des solides, sans que la forme de x GRAVÉES, DESSINÉES OÙ IMPRIMÉES. 535 ceux-ci en paraisse changée , comme cela arrive aux étoffes teintes dans des bains colorés, n’ont guère été examinés jusqu'’iei que par le petit nombre des chimistes qui se sont livrés à l'étude de la théorie de la teinture. Je cite particu- lièrement ces composés pour exemple des combinaisons chi- miques que je rapporte à l'affinité capillaire, parce que c’est essentiellement par les molécules de sa surface qu'un solide entre sans désagrégation de ses molécules en combinaison avec un corps. 6. Quant aux actions moléculaires en vertu desquelles l’eau donne aux tissus des animaux les propriétés nécessaires à remplir le rôle que l’organisation leur a imposé dans les phénomènes de la vie, et à divers corps pulvérulents inorga- niques la propriété de constituer des pâtes tenaces et ductiles, elles ont été l’objet d’études plus rares encore que les pré- cédentes. 7- Enfin, des chimistes aussi bien que des physiciens se sont occupés de l'examen des actions que certains solides, particulièrement ceux qui sont poreux ou réduits en poudre impalpable, exercent par leur surface sur des fluides élasti- ques; leur attention s’est particulièrement fixée sur les phé- nomènes manifestés pendant l’action plutôt que sur les pro- priétés permanentes acquises par les corps qui y ont pris part ; résultat tout simple quand on considère qu'aux yeux de beaucoup de chimistes, l’affinité de laquelle on fait dé- pendre les combinaisons définies n'existe pas dans les cas dont nous parlons. 8. En définitive, nous voyons comment, à une certaine limite des actions moléculaires , le chimiste et le physicien interviennent dans l'étude de phénomènes qui, au dire de 536 DE LA REPRODUCTION DES IMAGES plusieurs, seraient affranchis de l’affinité proprement dite, et rentreraient d’après cela dans la classe des actions pure- ment physiques. Quoi qu'il en soit de cette opinion, les produits de ces actions n’ont point un caractère de perma- nence dans leurs propriétés, ou une constitution susceptible d'être déterminée d’une manière tellement précise, qu’on puisse les comparer aux composés chimiques proprement dits, à ceux même dont les proportions des éléments sont indéfinies. 9- J'ai cru devoir rappeler cet état de la science, dans l’es- pérance d’en faire comprendre les rapports avec les recher- ches de M. Niepce de Saint-Victor ; car dans les expériences qu'il a décrites, l'influence de l'affinité est incontestable. Il se forme des composés définis, des composés analogues à ceux qui sont produits en teinture lorsque des étoffes se combinent à des acides, à des bases, à des sels, à des prin- cipes colorants, sans changement de leur état solide; en outre, des vapeurs se fixent à des solides en vertu d’une force attractive suffisante pour vaincre une partie de leur tension seulement, de sorte que, dans le vide ou dans un espace qui est au-dessous d’une certaine limite de saturation de cette mème vapeur, les solides qu'on y place laissent exhaler la totalité, où du moins une portion de celle qu'ils avaient fixée d'abord. 10. Pour plus de clarté, je ferai trois catégories des ex pé- riences de M. Niepce de Saint-Victor. Dans la première, je comprendrai celles qui concernent la reproduction, au moyen de l'iode, d’une gravure, d’un dessin, d'un imprimé, etc., sur un papier collé en cuve avec de l'amidon et du résinate d’alumine , ou sur un enduit d’amidon à à à dé SE CS RS oh nd tn GRAVÉES, DESSINÉES OU IMPRIMÉES. 647 cuit et adhérent à une surface unie de verre ou de porcelaine. Dans la seconde, je comprendrai les expériences dont l’objet est la reproduction d’une gravure, d’un dessin, d’un imprimé, ete., sur une surface métallique polie, au moyen de divers fluides élastiques. Dans la troisième, je parlerai de la reproduction des ima- ges du foyer d’une chambre obscure, au moyen d'un composé d'argent appliqué sur un enduit d’albumine au lieu de l'être sur du papier. QE PREMIÈRE CATÉGORIE D'EXPÉRIENCES. Reproduction, au moyen de l’iode, d’une gravure, d’un dessin, d’un impri- mé, etc., sur un papier collé en cuve avec de l’amidon et du résinate d’alumine, ou sur un enduit d’amidon cuit et adhérent à une surface unie de verre ou de porcelaine. 11. Lorsqu'on expose à la vapeur d'iode un papier bien sec sur lequel se trouve une image quelconque , gravée, dessinée ou imprimée, la vapeur se fixe aux parties noires du papier, de préférence aux parties blanches : cependant, il s'en fixe un peu sur ces dernières; aussi s’y manifeste-t-il une teinte jaune lorsque l'exposition à la vapeur a été prolongée comme il convient à la réussite de la reproduction de l’image sur papier. Si l'on applique l’image convenablement iodée sur un pa- pier qui contient de l’amidon et mouillé d’eau aiguisée d'acide RAIXX. 68 538 DE LA REPRODUCTION DES IMAGES sulfurique pur , ou , ce qui est bien préférable, sur un enduit uni d’amidon cuit fixé au verre ou à la porcelaine, et égale- ment mouillé d’eau acidulée , l'iode quitte la matière de l'image pour constituer avec l’amidon le composé bleu ou bleu violet connu de tout le monde. Les premières épreuves doivent toujours être rejetées, parce que les blancs sont colorés par la petite quantité de vapeur d’iode qui s’est fixée aux parties blanches de image originale; on ne peut voir sans étonnement la fidélité avec laquelle les traits les plus délicats du modèle se retrouvent dans les épreuves que l’on obtient ensuite. 12. Au point de vue scientifique , l'étude de cette repro- duction est très-intéressante. En effet, lorsque le modèle se trouve exposé à la vapeur d’iode, celle-ci se porte sur les noirs de préférence aux blancs: mais cela ne veut pas dire que ce soit à l’exclusion des blancs ; car en prolongeant l’ex- position, ceux-ci se colorent en orangé jaune-brun par de la vapeur d'iode qui s’y condense. Qu'est-ce qu'il ya done de vrai dans les expériences de M. Niepce ? 1° C'est que les noirs absorbent la vapeur d’iode plus vite que les blancs, et en proportion plus considérable ; dès lors, en n'exposant une gravure à la vapeur d'iode qu’un temps insuffisant à la coloration des blancs, les noirs iodés seuls peuvent reproduire leur image. 2° C'est que si une gravure a été exposée à la vapeur d’iode assez longtemps pour que les blancs se soient iodés, en la tenant ensuite à l'air libre un temps convenable , l’iode aban- donne les blancs, tandis qu'il en reste assez dans les noirs pour que ceux-ci reproduisent leur image. 13. Tous ces effets se manifestent en prenant les corps à ont os hi. LABEL. > GRAVÉES, DESSINÉES OU IMPRIMÉES. 539 une même température, en les mettant en présence à la lu- mière diffuse ou dans l'obscurité, au milieu de l’air ou dans le vide. 14. Conclusion. Il y a une force attractive dans la matière des noirs capable de surmonter la force répulsive de la vapeur d’iode. Cette force existe dans la matière blanche du papier, mais à un degré plus faible. Elle est identique à celle qui opère la condensation des fluides élastiques à la surface des corps. Si on la confond avec l’affinité, son action est des plus faibles dans les phénomènes dont nous parlons [(4) et (7)]. 15. La force attractive en vertu de laquelle les noirs fixent la vapeur d'iode se manifeste encore lorsqu'on plonge une gravure dans l’eau d’iode pendant 4 minutes : celui-ci quitte son dissolvant pour s'unir à la matière des noirs, et la gravure passée dans l’eau pure reproduit ensuite son image sur en- duit d’amidon , comme si elle eût été préalablement exposée à la vapeur de l’iode. 16. Ces expériences sont du plus grand intérêt pour la théorie de la teinture, car une gravure est, par rapport à l’iode dissous dans l’eau que ses noirs attirent plus fortement que ne le font les blancs, ce qu’une toile de coton, sur la- quelle on a appliqué la matière d’un dessin mordancé d’alu- mine, de peroxyde d’étain, de peroxyde de fer, etc., au moyen d’une planche ou d’un rouleau gravé, est par rapport aux principes colorants de la cochenille , de la garance, de la gaude , etc., dissous dans un bain de teinture, que fixent les parties mordancées. Si l'opération ne se prolonge pas, si les principes colorants ne sont point en excès, les parties de la 68. 540 DE LA REPRODUCTION DES IMAGES toile non mordancées pourront ne point se colorer , ainsi que les blancs de la gravure peuvent ne pas prendre d’iode. Mais dans le cas contraire, les blancs perdront leurs principes colorants par l'exposition aux agents atmosphériques ou par un bain léger de chlore, comme les blancs d'une gravure iodée perdront leur iode par l’exposition à l'air ou par un simple lavage à l’eau. 17. Les noirs d'une gravure fixant l’iode à l’état de vapeur aussi bien que l’iode en solution dans l’eau, établissent un nouveau rapport entre le phénomène de la condensation d'un fluide élastique par un solide, et le phénomène de la fixation par un solide d’un corps dissous dans un liquide. 18. Enfin l’iode fixé aux noirs les abandonne, du moins en partie, pour se fixer sur l’amidon humecté formant enduit sur papier, sur plaque de verre, ou encore sur plaque de porcelaine, et il reproduit l’image des noirs en iodure d’a- midon d’un bleu violet, connu de tous ceux qui s'occupent de chimie. Si l'amidon humide a une supériorité d’affinité pour l’iode sur la matière des noirs, le cuivre à son tour en a une plus grande que l’amidon pour le même corps. Rien de plus inté- ressant que les deux expériences suivantes de M. Niepce de Saint-Victor, qui le prouvent : Première expérience. On applique une gravure iodée sur un enduit d’amidon humide adhérent à une plaque de cuivre; l'inde quitte les noirs, passe au travers de l’amidon , se porte sur le métal, s’y unit et y dessine l'image. Deuxième expérience. Une image d’iodure d'amidon bleu- violet sur verre est mouillée, puis appliquée sur une plaque de cuivre. L'image colorée s’évanouit peu à peu, pour se re- She. mnt 2 os." sn mn CRE GRAVÉES, DESSINÉES OU IMPRIMÉES. 541 produire sur la plaque de cuivre en iodure de ce métal. 19. Certes, au point de vue de la mécanique chimique, il est peu de phénomènes aussi remarquables que cette succes- sion de fixations et de déplacements de l'iode relativement à une série de corps doués chacun à son égard d’une force attractive différente ; ainsi, la matière noire d’une gravure V'attirant plus que ne le fait le papier blanc , rappelle à la fois l'action des corps poreux sur les vapeurs et celle des étoffes mordancées sur des principes colorants dissous dans l’eau ; l'amidon humide, enlevant l’iode à la matière noire des gra- vures , forme un iodure bleu dont la composition paraît bien définie ; enfin, le cuivre, enlevant à son tour l’iode à l’amidon, constitue sans doute encore avec lui un composé défini, et, fait digne d'attention, dans tous ses déplacements, l'iode constitue toujours l'image produite par la matière noire qui l'a absorbé en premier lieu ! 0. La vapeur d’iode se fixe aux noirs produits sur papier blanc avec de l'encre grasse, de l’encre aqueuse non gommée, de la plombagine, du charbon de fusain, de préférence aux blancs; elle se comporte d'une manière analogue à l'égard du bois d’ébène relativement au bois blanc, de la soie noire relativement à la soie blanche, enfin des parties noires des plumes blanches et noires de pie et de vanneau relativement aux parties blanches de ces mêmes plumes. 21. Avant de passer outre, je crois utile d'ajouter quelques faits propres à démontrer que c’est bien à une force attrac- tive qu'il faut attribuer la cause de la condensation de la va- peur sur les matières noires dont je viens de parler; qu'en conséquence, on ne pourrait admettre que la vapeur d'iode s'arrêterait aux noirs comme sur un obturateur, tan- 542 DE LA REPRODUCTION DES IMAGES dis qu'elle filtrerait sans obstacle au travers des blancs. (a) Si on applique une gravure iodée entre deux plaques de cuivre pendant 8 ou 10 minutes, l'image apparaît sur chacune des plaques. La plaque qui touchait le recto de la gravure présente l’image en sens inverse de celle du modèle, tandis que la plaque qui touchait le verso présente l’image en sens direct. Si les noirs étaient imperméables à la vapeur diode, s'ils faisaient fonction d’obturateur à son égard , il n’y aurait pas eu d'image reproduite sur cette dernière plaque. (b) M. Niepce a parfaitement constaté encore que cette re- production de l’image a lieu au delà du contact apparent, fait important pour la théorie des images de Moser. (c) On colle le verso d’une gravure sur plaque de verre; on expose la gravure à la vapeur d’iode. Il est évident qu’il n'y a plus de filtration possible par les blancs du papier. Eh bien, la gravure imprime son image sur l’enduit d’amidon. (d) Une gravure pénétrée d’un corps gras, exposée à l’iode, reproduit toujours son image; seulement, celle-ci est plus faible que si la gravure n’eût pas été imprégnée de corps oras. (e) Une différence de porosité entre des parties noires et des parties blanches ne peut expliquer la condensation de l’iode sur les unes de préférence aux autres. En effet, si une règle d’ébène juxtaposée à une règle de bois blanc poreux reproduit son image sur une plaque de métal , à l’exclusion de celle de la seconde, une règle du même bois blanc, teinte en noir avec la teinture de chapelier, juxtaposée à une règle de bois bien compacte, reproduit son image, tandis que celle-ci ne la reproduit pas. Il est donc évident, par cette double expérience, qu'une GRAVÉES, DESSINÉES OU IMPRIMÉES. 243 différence de porosité ne suffit pas pour expliquer la diffé- rence d'aptitude à se pénétrer de vapeur d’iode que possèdent deux bois, dont l’un est noir et l’autre est blanc. 22. Je ferai observer maintenant que les images produites par le procédé de M. Niepce, au moyen de l’iodure d’amidon, n’ont pas la stabilité d’une image produite avec une encre ou un crayon dont le charbon est la base. Cette remarque ne diminue en rien le mérite du travail de M. Niepce , car il est de toute évidence que, s’il n'existe pas aujourd’hui de moyen de faire une image stable sur papier par son procédé, la pos- sibilité d'en trouver un est incontestable, et des essais com- mencés par l’auteur donnent l'espoir que les obstacles ne sont pas insurmontables. 23. La couleur de l'iodure peut être modifiée suivant que amidon a été plus ou moins cuit; et la couleur bleue-violette de l’iodure ordinaire peut, au moyen de l’ammoniaque , se changer en couleur bistre ou marron. 24. Si une gravure est soumise à l’action de la vapeur de mercure, de la vapeur du soufre ; si elle est imprégnée d’a- zotate d'argent, d’azotate de mercure, de sulfate de zinc, de sulfate de cuivre; si elle est passée à l’eau de gomme, à l’eau de gélatine, à l’eau d’albumine, elle perd la propriété de s’ioder. Mais M. Niepce peut la lui restituer par des moyens très-simples, particulièrement en recourant à l’ammoniaque dans certains cas. M. Niepce reproduit les caractères du recto ou du verso, à volonté, d’une feuille imprimée des deux côtés Il à reproduit l’image d’un tableau en exposant celui-ci à la vapeur d’iode, sauf certaines couleurs qui ne prennent pas l’iode, ou qui le fixent de manière à ne pas s’en séparer ; 544 DE LA REPRODUCTION DES IMAGES tels sont l'oxyde de cuivre, le minium, la céruse , l’orpin , le cinabre , l’outremer. [reproduit aussi les gravures coloriéesnon gommées, dans la coloration desquelles on n’a pas employéles matières précitées. 25. Il a fait un grand nombre d'observations intéressantes sur la propriété qu'a l’iode de s'attacher aux reliefs, aux poin- tes, aux arêtes, que les corps solides peuvent présenter. C'est en vertu de cette propriété qu'il a reproduit sur mé- tal l’image des timbres secs, et même, dans plusieurs cas, sur papier amidonné. 26. L’affinité élective en vertu de laquelle ün corps simple ou composé chasse un corps qui est son analogue d’une de ses combinaisons pour en prendre la place, se retrouvant dans les aptitudes diverses d’une même vapeur à se combiner avec des corps divers, ou des vapeurs diverses à se combiner avec un même corps, on peut dès lors, concevoir que si l'iode se combine ou se condense de préférence sur la ma- tière noire d’une gravure, d’un dessin, d’une impression, plutôt que sur le papier blanc, il pourra y avoir telle autre vapeur qui présentera le résultat contraire. De sorte que si cette vapeur, après s'être fixée sur le blanc du papier, s’en dégageait ensuite pendant qu'on la presserait contre une surface dont la matière constituerait avec elle un composé coloré, il est évident que l’image qu'on obtiendrait alors présenterait les ombres et les clairs répartis inversement de ce qu'ils sont dans l’image originale. 27. M. Niepce à vu qu'en plongeant dans une solution d'hypochlorite de chaux des lettres noires imprimées à l’en- cre grasse sur papier blanc pendant cinq minutes, on obtient, après les avoir exprimées entre deux papiers-brouillard, cer a oéé dl ADS dd à GRAVÉES, DESSINÉES OU IMPRIMÉES. 545 contre un papier de tournesol imprégné d’eau pure, des let- tres bleues sur un fond blanc. Il est donc incontestable que le corps décolorant a pénétré le blanc du papier, et qu’en- suite il a réagi sur la matière bleue de ce dernier, tandis qu’il ne semble pas s'être fixé aux noirs; ou s’il s’y est fixé, une affinité plus forte que celle du papier blanc l'y a retenu. Quoi qu'il en soit, l'effet est inverse de celui que produit l’iode. 28. Puisqu’une vapeur exposée au contact des parties hé- térogènes d’un même objet peut se condenser en beaucoup plus grande quantité sur les unes que sur les autres, si elle ne se condense pas sur les premières, à l'exclusion absolue des secondes, on conçoit l diversité d’un grand nombre d'effets susceptibles d’être produits par cette même cause; et je fais surtout allusion à des effets ressentis par des corps vivants, en vertu des propriétés de la matière que j'appelle organo- leptiques. J'induis donc de là la possibilité des effets suivants : 1° Différents corps étant exposés à une même matière odorante, les uns ne l’absorbent pas, tandis que les autres l'absorbent: Ceux-ci pourront donc devenir odorants dans des circonstances où les premiers ne le seront pas. 2° Un corps doué de la propriété d’absorber une vapeur vésicatoire, est distribué d’une manière symétrique à la sur- face d’un autre corps dénué de cette propriété. Si on expose les deux corps à cette vapeur et qu’on les applique ensuite sur la peau d’un animal, les ampoules qui naîtront par cette * application seront l'image de la manière dont le premier corps était distribué à la surface du second. 3° Des poisons, des virus, des miasmes à l’état de vapeur sont en contact avec des corps susceptibles de les absorber et de les céder ensuite aux organes d’un animal; dès lors il arri- j 0.0 69 546 DE LA REPRODUCTION DES IMAGES vera qu'ils seront les véhicules de ces poisons, de ces virus, de ces miasmes, tandis que d’autres corps qui auront été exposés en même temps que les premiers à cette même vapeur sans pouvoir l’absorber n'auront aucune action sur les animaux. 4° Dans les trois cas précédents, j'ai supposé les effets produits par des vapeurs qui, absorbées d’abord par un corps à l'exclusion d’un autre, s’en séparent ensuite ; mais très-probablement il y a des corps qui, après avoir absorbé une vapeur, ne la laisseraient pas dégager dans des cireons- tances où d’autres corps, doués aussi de la faculté de l’ab- sorber, mais n'ayant pas pour elle une affinité aussi forte, la laisseraient dégager. Conséquemment; on pourrait se trom- per si l’on concluait toujours de ce qu’un corps, après son contact avec une vapeur, ne produit aucun effet susceptible de dénoter la présence de cette vapeur condensée, qu'il n'existe pas d’affinité mutuelle entre les deux corps. $ II. DEUXIÈME CATÉGORIE D'EXPÉRIENCES. Reproduction, sur une surface métallique polie , d’une gravure, d’un dessin, d’un imprimé, ete., au moyen de divers fluides élastiques. 29. Pour celui qui ignorerait les résultats des expériences de la première catégorie, il serait difficile de se rendre compte des effets produits par les expériences de la seconde, et dès lors serait extrême la surprise qu'ils causeraient. Mais si les expériences dont je viens de parler diminuent cette surprise, RÉ — À GRAVÉES, DESSINÉES OU IMPRIMÉES. 547 il y a au moins compensation, en considérant que le lien dont elles servent à celles qui vont nous occuper, satis- fait au besoin qu'éprouve tout esprit élevé de coordonner les connaissances précises récemment acquises avec celles qu'il possédait déjà. Mais avant tout, parlons des expériences de la deuxième catégorie, afin d’insister sur les effets dont il s’agit d'expliquer les causes. 30. (&) On expose pendant cinq minutes à la vapeur d’iode, développée à la température de 20°, le papier sec sur lequel se trouve l’image qu'on veut reproduire. La vapeur, comme nous l'avons vu dans les expériences de la première catégorie, se fixe sur les noirs. (2) Le papier ainsi iodé est appliqué pendant cinq minu- tes contre une plaque de cuivre sèche, récemment polie et préalablement nettoyée à l’eau aiguisée d'acide azotique d’a- bord, et à l’eau pure ensuite. L'iode quitte, en partie du moins, le papier pour le métal. Dès lors, en découvrant la plaque, le dessin apparaît, lorsqu'on la regarde dans un certain sens. Les clairs sont produits par la surface même du métal, et les ombres le sont par une couche de cuivre iodé qui est mate et de couleur de rouille. (c) On fait chauffer de 50° à 60°, dans une capsule, de l'am- moniaque fluor; après la dissipation de la vapeur vésicu- laire, on expose à la vapeur élastique et invisible la plaque de cuivre (b) qu'on vient de séparer du papier qui l’a iodée. Deux ou trois minutes suffisent pour accomplir l'effet de la vapeur. Voici ce que la plaque présente à l'observateur. Les clairs où le métal était à nu sont devenus mats, de brillants qu’ils étaient, et d’un gris clair fort différent de la couleur du cuivre; les ombres du cuivre iodé ont pris plus 69. 548 DE LA REPRODUCTION DES IMAGES d'intensité, de manière que le contraste entre les clairs et les ombres est bien plus prononcé qu'il n’était avant le contact de la vapeur d’ammoniaque; aussi, sous toutes les inciden- ces où l’on regarde l’image, les clairs et les ombres conservent invariablement leurs places respectives. Mais j'ai hâte de dire que le dessin a perdu de sa finesse; les traits ont été transformés en un véritable pointillé, semblable à celui de certaines miniatures en camaieu qui n'ont pas été finies. (d) On passe sur la plaque du tripoli, au moyen d’un flo- con de coton humecté d’eau pure, dans le sens primitif du poli, et alors les traits du dessin reparaïissent, mais sous l’in- cidence la plus favorable à la vision distincte de l’image, les clairs sont produits, non par la surface du cuivre pur, mais par la surface du métal qui a été modifiée par l’ammoniaque, c'est-à-dire qu’en vertu de cette modification elle est deve- nue mate et d’un gris blanchâtre; quant aux ombres, elles sont produites par le cuivre qui a été iodé dans l’origine. En définitive > ; L- , É les clairs sont le cuivre pur ; | a ,Avantl’exposition au contact de l'ammoniaque. PRE les ombres, le cuivre iodé, les clairs sont le cuivre touché par l’ammoniaque ; b, Après l'exposition à l’ammoniaque, ...,. .. {les ombres, le cuivre primitivement iodé, et ensuite ammoniaqué. [les clairs sont le cuivre touché par l’ammoniaque; ammoniaqué, comme en b' lorsque l'image est vue de la manière la plus distincte ; mais il y a cette F ombres, le cuivre primitivement iodé, et ensuite différence, qu’en c’ le cuivre préalablement iodé a c', Après le passage au tripoli... .., RS LE he 203 4 - acquis l'éclat métallique, de sorte qu’il ne fait les ombres que dans la position où la lumière réfléchie spéculairement n'arrive pas au spectateur, Nous verrous plus bas la conséquence de cet état de | choses (61). Tel est le procédé de M. Niepce. GRAVÉES, DESSINÉES OU IMPRIMÉES. 549 31. Si on passait la plaque qui vient d’être soumise à l’'ammoniaque dans de l’eau très-légèrement aiguisée d’acide azotique, Les clairs seraient toujours le cuivre qui n’a pas été iodé. Les ombres, le cuivre qui a été iodé. Si on passait au tripoli la plaque qui a été soumise à l’eau aiguisée d'acide azotique, les effets seraient encore les mêmes; mais les ombres paraîtraient moins intenses, parce que la modification produite par l’'ammoniaque aurait été affaiblie. Avec de l'eau trop fortement acidulée l’image s’affaiblirait beaucoup; car l’acide, à une densité de 1,34, fait disparai- tre l’image. 32. Remarque. Lorsqu'un papier iodé a été appliqué en- core humide sur la plaque de cuivre, et que les clairs de l'image étaient pénétrés d’une certaine quantité d’iode, les parties de la surface de la plaque correspondant aux clairs prennent de l’iode comme les parties correspondant aux om- bres, quoique beaucoup moins. Il arrive dès lors que les clairs de la plaque, au lieu du gris blanchätre qu'ils auraient présenté dans le cas où le papier iodé eût été appliqué parfaitement sec, ont une couleur d’un gris jaunâtre. Après avoir passé l’image au tripoli, l'influence de l'iode dans les clairs se fait encore sentir; ils sont moins brillants, plus mats ou plus gris que ne l’est le cuivre non iodé, poli après avoir été exposé à l’ammoniaque. Explication des effets précédents. 33. Il y a cinq ans, si on m’eût communiqué les expérien- -r 230 DE LA REPRODUCTION DES IMAGES ces de M. Niepce, en m'engageant à en expliquer les effets, alors que je ne m'étais point encore occupé de la théorie des phénomènes optiques que présentent les étoffes de soie, j'aurais certainement refusé d'entreprendre une pareille re- cherche, dans la conviction où j'aurais été d’y consacrer un trop long temps. Mais ayant connu ces expériences, lorsque mes études antérieures n'avaient suffisamment préparé à les examiner, j'ai pu me livrer au travail que je vais présenter, avec des détails minutieux sans doute, mais que justifie- ront, j'espère, la nouveauté du sujet et l'exactitude de mes explications. 34. Je commencerai par rappeler quelques faits de la ré- flexion de la lumière par des surfaces métalliques planes plus ou moins bien polies, parce qu’ils serviront de base aux explications que je donnerai des effets observés dans la deuxième catégorie des expériences de M. Niepce. On prend deux plaques de cuivre identiques, plus longues que larges, non que les dimensions aient de l'influence sur les effets dont je veux parler; mais la différence des deux dimensions rend la description de ces effets plus claire, lors- qu'on les observe comparativement. Les plaques sont posées sur un plan horizontal éclairé par la lumière diffuse du jour, de manière que le spectateur puisse les voir sous un angle compris entre 20° et 40°, soit face au jour, soit en lui tournant le dos. Ces plaques sont placées de manière que la longueur de l’une d'elles p se trouve comprise dans le plan vertical de la lumière inci- dente, tandis que la longueur de l’autre plaque p' est per- pendiculaire à ce mème plan. Maintenant en regardant p, et ensuite p successivement, face au jour d’abord, et en sens GRAVÉES, DESSINÉES OÙ IMPRIMÉES. 551 contraire ensuite, on a les quatre circonstances 1, 2, 3 et 4, dans lesquelles j'ai placé chaque échantillon d’une étoffe pour en définir les effets optiques, tels que je les ai étudiés. (Voyez THÉORIE DES EFFETS OPTIQUES DES ÉTOFFES DE SOIE, page 18.) Je vais examiner les effets de deux plaques identiques pour les quatre cas suivants : Premier cas. Les deux plaques ont été polies, dans le sens de la longueur, avec une matière assez grossière pour qu’elles présentent des raies parallèles et des sillons fins et également profonds. Deuxième cas. Les deux plaques ont été polies, dans le sens de la longueur, avec une matière assez fine, comme le tripoli, pour qu'elles ne paraissent pas rayées, quoiqu'elles le soient réellement. Troisième cas. Les deux plaques ont été également rayées, dans le sens de la longueur et dans le sens de la largeur, d’une manière sensible. Quatrième cas. Les deux plaques ont un poli parfait. PREMIER CAS. Plaques rayées sensiblement dans le sens longitudiral. (Fig. 1.) Côté de la lumière. A fg.r. 8 i Tres-brillante à cause de la lumiere réfléchie 1, Circonstance de B en A. £ x = spéculairement. Vue 2, Circonstance de A en B, | Obscure. (Maximum d’obscurité.) 3. Circonstance de B en À, | Moins brillante qu'en première circonstance, | Plus brillante qu’en troisième circonstance, Si | les sillons étaient profonds, elle pourrait 4. Circonstance de À en B, être plus brillante qu'en première circons- tance, 552 DE LA REPRODUCTION DES IMAGES DEUXIEME CAS. Plaques rayées excessivement finement dans le sens longitudinal. Résultats semblables à ceux du premier cas. TROISIÈME CAs. Plaques sensiblement et également rayées dans le sens de la lon- gueur et dans le sens de la largeur. (Fig. 2.) r. Circoustance de B en A, | Moins brillante que dans le premier cas, Vue Moins brillante que dans la première circons- 2. Circonstance de À en B. tance, mais moins obscure que dans le pre- mier cas, # Circonstance de B en A. | Identique a premiére circonstance. Vue 4. Circonstance de À en B. | Identique à deuxième circonstance. QUATRIEME CAS. Plaques ayant un poli parfait. Les résultats correspondent à ceux du troisième cas. Ainsi il y a identité d'effet dans la première et la troisième circons- tance comme dans la deuxième et la quatrième; mais il y a cette différence, dans le quatrième cas, qu’il y a le maximum de clarté et le maximum d’obscurité qu'il est possible d’obser- ver lors de la réflexion de la lumière par des surfaces planes. 35. Deux conséquences se déduisent des observations pré- cédentes. La premiere, c'est que, pour toutes les plaques métalliques destinées à recevoir des images délicates, le poli est une con- dition indispensable; mais, dans le cas où il n’est pas parfait, il faut que la surface ait été polie dans un même sens. Les expériences dont cette conséquence est le résultat, GRAVÉES, DESSINÉES OU IMPRIMÉES. 553 expliquent donc parfaitement la raison de polir les plaques daguerriennes dans un même sens. La seconde, c'est que, pour s'assurer si une surface métal- lique sur laquelle on n’aperçoit pas de raies a un poli par- fait , il faut l’observer le dos tourné à la lumière, afin de voir si elle conservera dans deux positions rectangulaires le même degré d’obscurité. 36. La première recherche a été de reconnaître d’une ma- nière précise la différence existant entre la surface d’une pla- que de cuivre polie dans le sens longitudinal avec le tripoli, et 1° La surface de ce mème cuivre, modifiée par le contact de l’iode ; 2° La surface de ce mème cuivre modifiée par le contact de l’ammoniaque ; 3° La surface de ce même cuivre modifiée par le contact successif de l’iode et de l’ammoniaque. Pour cela, on a appli- qué sur trois plaques de cuivre un papier épais découpé en forme de trèfle; dès lors, après les opérations auxquelles chacune des plaques à été soumise, on a pu, sur la même plaque, constater les effets qu’on se proposait de définir ; 4° Deux surfaces de ce même cuivre, modifiée, l’une par l’iode et l’ammoniaque, appliqués successivement, et l’autre modifiée seulement par l’ammoniaque. Pour cela, on a appli- qué deux trèfles en papier épais, l’un près de l’autre, sur une plaque de cuivre; la plaque a été passée à la vapeur d’iode. On a ôté un des trèfles, et on a passé à la vapeur d’ammonia- que. Par là, on a pu comparer ensemble les modifications produites d’abord par l’iode et par l’ammoniaque appliqués successivement, et ensuite par l’ammoniaque seulement, avec le cuivre non modifié. TX 70 554 DE LA REPRODUCTION DES IMAGES Plaque exposée à l’iode et trèfle réservé (n° 1). Fig. 3. 37. L’iode en vapeur se combine au cuivre. La combimai- son la plus convenable pour le succès de l'opération de M. Niepce, doit être, suivant lui, mate et couleur de rouille. Mais en la conservant au milieu de l’air, et surtout au con- tact du soleil, la couleur se fonce en passant au bleu des res- sorts de montre; et il semblerait, sous l'influence solaire, qu'il se dégagerait de l’iode, car j'ai senti l'odeur de ce corps en flairant une plaque iodée qui venait d’être frappée par le soleil. En même temps que cet effet a lieu sous l'influence de la lumière , le cuivre des clairs se ternit en passant à l’état de protoxyde (1). sus Trèfl brill e lai i ; 1. Circonstance de B en A, RER Le Fond moins clair, luisant. Vue Trèfle noir, 2. Circonstance de À en B, 4 Fond clair, absolument mat. Trèfle clair, mais moins brillant qu'en première. 3. Circonstance de B en À. {Fond moins clair et moins brillant qu'en pre- mière, Vue Trèfle moins obscur qu’en deuxième, luisant 4. Circonstance de A en B, Méss plus clair qu'en deuxième, un peu moivs mat. (x) Note. Expérience. Dessin sur une plaque dont la moitié est couverte d'un papier noir. Après quatre mois, la partie couverte présente une image parfaitement distincte, quoique sensiblement altérée, et la partie découverte une image effacée; on n'apercoit que quelques traits jaunes provenant de l’altération du cuivre iodé. En passant la plaque au tripoli et à l’eau pure, la partie préservée de la lumière présente une légère image, tandis que tout est confus dans l'au- tre partie. TS PR REC SE ns mb" té, 7 À GRAVÉES, DESSINÉES OU IMPRIMÉES. 555 Il est évident que l’image du trèfle tranche sur le fond par la différence qui existe entre une surface spéculaire et une surface mate, et qu'il y a toujours moins d'opposition, entre le fond vu dans la première circonstance et le fond vu dans la deuxième, qu'il n'y en a entre le trèfle vu dans la première circonstance et le trèfle vu dans la seconde. Ajoutons que la couleur du cuivre iodé tranche encore sur la couleur du cui- vre par moins de rouge. Il y a donc plusieurs causes de la production de l’image par la réserve. 38. Observation microscopique. Lorsqu'on examine au mi- croscope, sur la platine tournante de George Oberhauser, la plaque numéro 1 de manière qu'elle soit vivement éclairée par le soleil dans la partie iodée et dans la partie où le cuivre est pur, Le cuivre iodé présente des dessins extrêmement fins, cir- culaires en général; les uns sont bleus et violets, les autres oranges et jaunes, ces derniers dominant ; le fond du cuivre iodé est jaunâtre. Le cuivre pur présente des sillons rectilignes parallèles, couleur de cuivre, avec quelques traits circulaires et irisés. De sorte que la différence est extrême quand on observe simultanément ces deux effets. Seulement en faisant tourner la platine, on constate parfaitement les effets optiques des sillons parallèles du cuivre pur par un maximum de clarté ou d'ombre, suivant la position où on les voit; la structure comme grenue du cuivre iodé ne présente rien de semblable. Plaque exposée à l’'ammoniaque et trèfle réservé (n° 2). 39. Le cuivre, exposé au contact de la vapeur d’ammonia- que fluor, perd de sa couleur et son brillant métallique. Que 70. 556 DE LA REPRODUCTION DES IMAGES se passe-t-il? C’est ce que j'ignore encore. Quoi qu'il en soit, l'opposition entre l’image réservée et le fond produit un effet tout à fait analogue à celui de la plaque n° 1. d Trèfle clair brillant. | 1, Circoustance de B en A, Fond moins clair, légèrement luisant. Trèfle noir. qu Circoustance de À en B,. SEC Fond d’un gris rougeûtre, blanchätre. Trèfle un peu moins clair qu’en 1. Circonstance de B en À, p ie Fond gris jaunâtre, moins luisant qu’en 1. | : Trèfle obscur, mais moins qu’en 2. 4. Circonstance de À en B, Fond d’un gris rougeûtre, plus blanchäâtre que 2, La production de l’image par la réserve s'explique pour cette plaque de la même manière que pour la plaque n° 1; seulement l'opposition est plus grande, parce que le cuivre ammoniaqué est plus mat encore que le cuivre iodé, et la couleur en est moins prononcée. 4o. Observation microscopique. Par rapport au cuivre pur, le cuivre ammoniaqué présente moins de différence au mi- croscope que le cuivre iodé; cela provient principalement de ce que les sillons se montrent encore dans le cuivre ammoniaqué. 41. L'eau mise sur le cuivre ammoniaqué paraît ne lui rien enlever de matière soluble sensible à l’hématine et à la teinture de violette, du moins en opérant comparativement avec une plaque de cuivre non modifié. L'eau passée sur l’enduit ammoniaqué à plusieurs reprises ne paraît avoir produit aucun effet lorsque la plaque est complétement séchée. En passant du coton humecté sur le cuivre modifié, il se colore sensiblement en vert bleuâtre, tandis qu'il ne produit GRAVÉES, DESSINÉES OU IMPRIMÉES. 557 presque rien sur le cuivre non ammoniaqué. Le coton bleu verdâtre, touché par le cyano-ferrite de cyanure de potassium acidulé , se colore fortement en marron. La solution de cyano-ferrite ne produit aucun effet sur l’en- duit. Si on verse sur l’enduit une goutte d’acide acétique, d’a- cide phosphorique, etc., aussitôt apparaît le cuivre métalli- que, et le cyano-ferrite versé dans l’acide produit un précipité abondant rouge marron. L’enduit a donc été dissous. L’a- cide retient, en outre, de l’ammoniaque. En passant à l'acide la moitié d’un cercle ammoniaqué produit sur une plaque carrée, lavant cette moitié, puis la passant à l’émeri; elle se confond alors avec le cuivre pur des angles de la plaque, tandis que la moitié simplement passée au tripoli mouillé d’eau pure montre toujours une image distincte du cuivre métallique. Enfin, on fait dispa- raître l’image au moyen de l’eau acidulée. Plaque exposée à l’iode, puis à l’ammoniaque, trèfle réservé (n° 3). q P P ; 42. Le cuivre exposé au contact de l'iode d’abord, puis à celui de la vapeur d’ammoniaque fluor, prend une couleur brune plus foncée que le n° 2, même lorsque celui-ci a été exposé à l'air et au soleil. Nous ignorons ce qui se passe entre le cuivre iodé et l’am- moniaque. : Trèfle clair, brill éculaire, 1. Circonstance de Ben A, or Re LE EU Fond moins clair, plus brun que n° 2 et n° 1, luisant. ci à 144 5 Trèfle noir, 2. Circons nu B, L PRÉC Fond d’un jaune brun. Trefle clair, un peu moins brillant spéculaire qu'en 1"* cire. k* Circonstance de B en À Fond d’un gris brun, non luisant, si la lumière n'est pas vive, , Trèfle brun, moins obscur qu’en 2° cire. 4. Circonstance de A en B, Fond d’an gris jaunâtre, plus clair qu’en 2° cire. 558 DE LA REPRODUCTION DES IMAGES 43. Observation microscopique. La différence est tout à fait analogue entre le cuivre pur et le cuivre iodé puis am- moniaqué, qu'entre le cuivre pur et le cuivre simplement iodé de la plaque n° 1; seulement le cuivre iodé et ammo- niaqué tranchant davantage par sa couleur brune, l’image est plus apparente. Plaque exposée à l'iode avec deux trèfles réservés, exposée ensuite à l'ammoniaque avec un seul trèfle réservé (n° 4). A4. Cette plaque représente plus que les effets obtenus par le procédé de M. Niepce, puisque le trèfle réservé, que je nommerai trèfle pur, permet de comparer la surface du cuivre non modifiée avec la surface du cuivre modifiée seu- lement par l’ammoniaque, laquelle surface présente les clairs, et que je nommerai trèfle ammoniaqué. | Tréfle pur, brillant spéculaire, Trèfle ammoniaqué mat jaunätre. ;1. Circonstance de B en A, } ; À ( Fond moins clair, plus brun que n° 1 et n° 2, luisant. Trèfle pur, noir. Tréfle ammoniaqué mat, se détachant très-faible- 2. Circonstance de À en B, ! ment du fond en gris. Fond d'un jaune brun. Trèfle pur, un peu moius brillant qu'en 1. 3. Circonstance de B en À, { Trèfle ammoniaqué, mat, un peu moins clair qu'en 1. {Fond d’un gris brun, non luisant si la lumière n’est pas vive. Vas pur, bien moins obseur qu’en 2e circ., fond plus clair mais 4. Circonstance de À en C, très-peu. Trèfle ammoniaqué, plus clair ou plus gris que le fond. Ainsi, 1l y a cette différence essentielle, que dans la se- conde, et surtout la quatrième circonstance, le trèfle ammo- niaqué paraît plus clair que le fond, tandis que le trèfle pur paraît plus obscur ; mais dans la quatrième la différence est très-faible. CES S 7 GRAVÉES, DESSINÉES OU IMPRIMÉES. 55g 45. Un point bien remarquable, qu'il s’agit d'examiner, c’est l'intensité de la résistance que le cuivre modifié par le contact de l’iode ou de l’ammoniaque, et par le contact suc- cessif de l’iode et de l’ammoniaque, présente lorsqu'on sou- met le métal au frottement d’un flocon de coton imprégné d’eau pure et de tripoli. Plaque n° 1. 46. Lorsqu'on passe au tripoli une plaque n° 1 dans le sens longitudinal, aussitôt qu’elle vient d’éprouver l’action de la vapeur d’iode, la modification disparaît, et le cuivre soumis à l’action de la vapeur ammoniacale présente une surface homogène. La modification que le cuivre vient d’éprouver de la part de l’iode n’a donc pas de résistance au frottement du tripoli humide. Mais il en est autrement lorsque la plaque, après avoir été soumise au contact de la vapeur d’iode, est abandonnée à elle-même pendant 48 heures dans un lieu éclairé. Si le des- sin a perdu de sa netteté, cependant en passant la plaque au tripoli dans le sens longitudinal, l’image du trèfle est con- servée, quoique le mat du fond ait disparu, et que celui-ci ressemble au cuivre pur. Si on passe de nouveau au tripoli la plaque dont je parle, la surface en paraît homogène; cependant, en la regardant sous certaines inclinaisons dans une chambre à parois noi- res, on peut apercevoir le trèfle. Après avoir fait dispa- raître tout vestige d'image au moyen du tripoli, on parvient souvent à la faire reparaître en soumettant la plaque à la vapeur de l’ammoniaque. J'ai eu l’occasion de constater par l’odorat le dégagement de l’iode dans cette circonstance. 560 DE LA REPRODUCTION DES IMAGES Enfin, on peut, au moyen d’un nouveau passage au tripoli, faire disparaître tout vestige d'image. Plaque n° 2. 7. La plaque n° 2, passée au tripoli, a présenté les effets suivants : : . Trefle apparaît en clair, mais vision peu distincte, à cause de l'inten- 1. Circonstance de B en A. F2 De a ? ë 1 sité de la lumière. 4 Trop d'obscurité, cependant, dans certains moments, l’image appa- 2, Circonstauce de À en B, E : V4 P : 9 BE 2RE) rait uu peu moins obscure encore que le fond, Trèfle apparaît en clair, mais faiblement, cependant peut-être la 3. Circonstance de B en A. vision est-elle plus distincte qu'en 1, par la raison qu'il y a moins de lumière réfléchie spéculairement. Trop d’obscurité, quoique moindre qu'en 2, pour avoir une vision \4, Circonstance de À en B, distincte ; cependant, dans quelques moments, le trèfle paraît moins obscur que le fond. En définitive, dans les plaques n° 2, dont le trèfle a été ré- servé,le fond, malgré le passage au tripoli, a toujours paru plus mat que la partie réservée. Dans le cas où la plaque n'aurait été exposée que quelques minutes à la vapeur de l’ammoniaque fluor froide, l'image dis- paraitrait par le frottement du tripoli, et il.pourrait arriver qu'une nouvelle exposition à l'ammoniaque je fit reparaitre. Plaque r° 3. 48. Les résultats sont analogues aux précédents. Trefle brillant, bien plus visible que le trèfle du n° 2. 1. Circonstance de B en A, ! Fond moins brillant que trèfle et que le fond n° 2, différent encore du fond n° 2 par une couleur d’un gris jaunâtre, c k ps à { Trèfle obscur, tres-peu visible, un peu plus que le fond: ce fond est 2. Circonstan s 1S RL stiUtS {sensiblement plus clair que le fond du n° 2. 3 Gi £ LE " [ Trèfle brillant, se détachant du fond, à peu près comme en tre cire., . Circonstance de h A TEA ré L— [| fond moins jaunâtre. | Tréfle invisible ou peu visible, mais fond aussi clair qu'en 2 et un 4, Circonstance de A eu B, c peu plus mat et plus jaune que le fond n° ». GRAVÉES, DESSINÉES OU IMPRIMÉES. 561 Plaque n° 4. 49. J Trèfle pur et trèfle ammoniaqué, se détach: ès-faibl ir } 2. Circonstauce de B en À. | I que, tachant très-faiblement en clair le trèfle pur est un peu plus apparent, Trèfles très-peu visibles, surtout le trèfle ammoniaqué, a cause de 2. Circonstance de À en B, l'obscurité. | 1 CRAN { Apparence a peu près analogue à 1, sauf que les trèfles sont un peu plus apparents. \ 4. Circonstance de À en B. | Plus de clarté qu’en à, mais trèfles invisibles ou peu visibles. Lorsque le trèfle réservé lors du passage à l’iode à été découvert pendant l'exposition à l’ammoniaque, il y a moins d'opposition entre le trèfle et le fond, qu’il y en a lorsque le trèfle a été préservé du contact de l’'ammoniaque, ainsi que cela a eu lieu pour le n° 3. 5o. Lorsqu'on examine au microscope, soit à la lumière diffuse, soit au soleil, les plaques n° 1, n° 2 et n° 3, passées au tripoli, on n’apercoit pas de différence sensible entre le cuivre pur et le cuivre qui a été simplement iodé ou ammo- niaqué, ou successivement iodé et ammoniaqué. 51. Justifions maintenant ce que j'ai dit de lapplication de la théorie des effets optiques des étoffes de soie à l'expli- cation des effets optiques des plaques de cuivre présentant des images produites par le procédé de M. Niepce de Saint- Victor. 52. L'opposition la plus grande que l’on puisse faire naître dans une étoffe monochrome, est d'opposer le satin par la chaïne au satin par la trame, par la raison que lorsqu'un des deux apparaît le plus brillant, en vertu de la réflexion spé- culaire dont il est doué, l’autre réfléchit la lumière spécu- HR AXX: 71 562 DE LA REPRODUCTION DES IMAGES laire dans un sens où elle n'arrive pas à l’œil du spec- tateur. On obtiendrait un effet correspondant à celui-ci, en op- posant sur une plaque de cuivre, par exemple, une image à raies parallèles extrêmement fines à un fond également rayé, mais dans un sens perpendiculaire aux raies de l’image. Cet effet n’est pas celui des images de M. Niepce de Saint- Victor. 53. On peut produire des effets bien sensibles sur des étoffes de soie, quoiqu'ils ne le soient pas autant que ceux dont je viens de parler, en opposant sur fond de satin par la chaîne des images dont l’armure se rapporte au taffetas. En effet, supposons l'opposition de ces deux tissus dans une même étoffe, voici ce qu'on remarquera : en regardant l’étoffe de manière à voir le satin à son minimum de clarté dans la deuxième circonstance, le taffetas sera vu éclairé, parce que la trame qui le constitue apparaîtra avec le maxt- mum d'éclat dont elle est susceptible; mais par la raison que cette trame est mêlée de chaîne, et que dans le taffetas l'effet de la chaîne domine sur celui de la trame, toutes cho- ses égales d’ailleurs, le contraste de l’image taffetas avec le fond satin sera, dans la circonstance dont nous parlons, moindre que si le contraste eût résulté de l’opposition d’un satin par la trame au satin par la chaine formant le fond de l'image. 54. Je vais appliquer cette théorie aux images de M. Niepce telles que nous en avons étudié les effets sur les plaques n° 1, n°2, n°3, en distinguant le cas où elles n’ont pas été passées au tripoli du cas où elles l'ont été. née ft niet. GRAVÉES, DESSINÉES OU IMPRIMÉES. 563 PREMIER CAS. Plaques n° 1, 2 et 3, non passées aû tripoli. 55. La grande opposition existant entre la surface du cuivre poli dans un même sens d’une part, et d’une autre part, celle du cuivre iodé ou ammoniaqué, ou iodé d’abord et ammoniaqué ensuite, que l’on observe si bien au micros- cope, indépendamment de toute couleur, démontre parfai- tement que la première surface avec les sillons fins et pa- rallèles, réfléchit la lumière à la manière du satin, tandis que la seconde, plus ou moins grenue, la réfléchit à la manière du taffetas. DeEux1ÈMEe cas. Plaques n° 1, 2 et 3, passées au tripoli. 56. L'opposition des images de M. Niepce deSaint-Victor est bien plus faible après le passage des plaques au tripoli qu’elle n’était auparavant, par la double raison que l'opposition de la couleur entre les deux parties de cuivre a diminué, et que l’action du tripoli a sillonné la surface de cuivre que les réactifs avaient rendue grenue. Dès lors on conçoit parfaite- ment la raison des effets suivants : La vision dans la première et même la troisième circons- tance est peu distincte, à cause du vif éclat de la lumière ré- fléchie; elle est peu distincte encore dans la deuxième cir- constance, parce qu’alors peu de lumière arrive à l'œil du spectateur. Il résulte de cet état de choses, qu'il existe des positions intermédiaires entre A et B, fig. 4, où la vision des images est plus distincte qu’elle ne l’est en celles-ci. On pourra aisément s’en convaincre en se plaçant successivement en C DIE ' 564 DE LA REPRODUCTION DES IMAGES et en C, c'est-à-dire, dans des directions telles, que CP fait avec PA un angle de 45°, et EP avec PA un angle de 135. Effectivement, en C la plaque est moins obscure qu’en A, et la vision du trèfle est plus distincte; en E, où la lumière réfléchie spéculairement est moindre qu’en B et plus grande qu'en C, l'opposition du trèfle et du fond étant portée au maximum, l’image apparaît de la manière la plus distincte; enfin, en D, où l'angle DPA est de 45°, la vision est moins distincte qu’en C et en E. frop obscur. A 2® CIRCONSTANCE Moins obseur qu’en A, vision plus distincte. = 451 C 1 18900E € Maximum d'opposition et de 7 vision distincte. ñ 17€ CIRCONSTANCE. B Trop brillant. 4® CIRCONSTANCE. 22 3° CIRCONSTANCE. B [el (ep Cr X E 135 - D go 566 DE LA REPRODUCTION DES IMAGES 57. Reprenons maintenant le procédé de M. Niepce, pour en expliquer les effets, conformément aux actions chimiques et aux principes de la réflexion de la lumière que nous ve- nons de rappeler. Lorsqu'on a appliqué un dessin iodé sur une plaque de cuivre, l’iode quitte le papier pour le métal; l’iodure de cui- vre reproduit les traits et les ombres du dessin, et le cuivre non iodé les clairs. L'action de l'iode est donc la même que dans l'expérience précédente, où une plaque de cuivre avec un trèfle réservé a été exposée à la vapeur diode. Les traits sont parfaitement distincts et continus; mais l’iodure de cuivre s’altérant à l’air et à la lumière, et la surface du cuivre y perdant son brillant métallique, l’image n'est pas dans une condition sa- tisfaisante de conservation. Si on passait la plaque au tripoli légèrement, l’image serait faible; et en la frottant beaucoup, elle disparaîtrait. 8. Lorsqu'on vient à exposer à la vapeur de l’ammonia- que la plaque de cuivre iodée, la vapeur agit, comme je l’ai dit, 1° Sur les clairs, en abaissant beaucoup la couleur propre au métal, et en lui ôtant tout brillant spéculaire ; 2° Sur le cuivre iodé, en en foncant la couleur. Ce résultat, pour être obtenu, ne demande que deux ou trois minutes de contact du métal avec l’ammoniaque. L'iodure éprouve une modification dans sa couleur et dans sa composition; mais, comme Jje l'ai fait observer, les traits ne sont pas purs. 59. Si on passe la plaque au tripoli, le cuivre pur ammo- niaqué conserve son gris blanchâtre et reste mat, tandis GRAVÉES, DESSINÉES OU IMPRIMÉES. 567 que le cuivre iodé devient brillant comme le cuivre pur. Or, comme le premier est dénué de brillant spéculaire et qu’il est blanchätre, il n’est point étonnant qu'il fasse les clairs du dessin ; tandis que le cuivre iodé, qui a repris toute l’appa- rence du cuivre pur, produit les ombres du dessin lorsque la lumière spéculaire qu’il réfléchit ne peut arriver à l'œil du spectateur; et c’est alors que la vision de l’image est la plus distincte. L'image de M. Niepce est donc alors tout à fait analogue aux images photographiques sur métal, où les ombres sont produites par le métal doué du poli spéculaire. 60. L'image que présente la plaque de cuivre, après le contact de l’iode et celui de l’ammoniaque, et après avoir été polie, est fort différente de l’image produite simplement par l'iode. Celle-ci est beaucoup plus perceptible, et l’est dans bien plus de positions que la première; et d’un autre côté, les clairs et les ombres rappellent plutôt la peinture, c’est-à-dire que les traits ont disparu de plus en plus depuis l’impres- sion de la gravure iodée, jusqu'au passage au tripoli de la plaque iodée d’abord et ammoniaquée ensuite. 61. Puisque les clairs de la plaque simplement iodée sont le cuivre nu, et que les ombres de la plaque iodée, ammoniaquée et polie sont, sinon le cuivre absolument pur, du moins du cuivre bien moins modifié que le cuivre ammoniaqué, il doit nécessairement y avoir des positions identiques pour les deux dessins, où les clairs et les ombres apparaîtront d’une manière inverse. C’est en effet ce que l'expérience confirme parfaitement, en regardant convenablement une plaque de cuivre, dont chaque moitié présente le même dessin obtenu 568 DE LA REPRODUCTION DES IMAGES par les deux procédés dont nous comparons les résultats. Pour cela, on se place dans l’embrasure d’une fenêtre; la plaque est tenue d'abord verticalement, de manière que le plan idéal où elle se trouve fasse un angle dièdre de 135° avec une des vitres, puis on la regarde dans le sens de la lumière incidente et non dans celui de la lumière réfléchie, en l'inclinant très-légèrement vers le ciel. Je mets sous les yeux de l'Académie une plaque de cuivre, sur les deux moitiés de laquelle on a imprimé une même gravure passée à l’iode. La moitié qui est à la droite du spectateur présente le dessin simplement iodé ; la moitié qui est à sa gauche, après avoir recu l’iode de la gravure, a été exposée à l’'ammoniaque, puis passée au tripoli. C'est la preuve expérimentale de ce que j'ai avancé plus haut (30). On voit, d’après cela, combien il est nécessaire, pour s'énoncer avec précision lorsqu'il s'agit de décrire des images analogues à celles dont je parle, de dé- finir les positions où on les observe, quand il s’agit de les qualifier d’inverses ou de directes, ou, ce qui est la même chose, de négatives ou de positives. RÉFLEXIONS. 62. Un fait, à mon sens bien remarquable, après la cémen- tation du métal par la vapeur d’iode, la vapeur d’ammonia- que, etc., cémentation en vertu de laquelle le poli donné jus- qu'à une certaine profondeur n'efface pas le dessin, c’est le fait que, le poli ayant été poussé plus loin, mais seulement ce qui est suffisant pour faire disparaître l'image sous toutes les inclinaisons, cette image redevient sensible par l'exposition du métal à une vapeur, celle de l'ammoniaque, par exemple. GRAVÉES, DESSINÉES OU IMPRIMÉES. 569 En effet, supposons le trèfle réservé dont le fond a été passé à l’iode, puis effacé avec le tripoli jusqu’à la disparition de l’image. Comment la surface du cuivre en apparence ho- mogène, exposée à l’ammoniaque, présente-t-elle un trèfle plus blanc que le fond? L'effet n'est-il pas remarquable, soit qu'il soit produit par l’iode resté dans le cuivre, lequel em- pêche le métal de blanchir par l’ammoniaque, comme cela a lieu pour le cuivre pur, soit, ce qui est bien moins proba- ble, que, tout l’iode ayant été enlevé par le frottement du tripoli à l’état d’iodure, les particules de cuivre situées au- dessous de la couche iodée aient subi un arrangement tel, qu'en absorbant la vapeur d’ammoniaque elles ne produi- sent pas un composé aussi blanc que les particules du cuivre pur. Enfin, fait bien remarquable encore : c'est que la moditi- cation ait lieu dans le sens perpendiculaire à la surface de la plaque soumise à la vapeur. Action de vapeurs autres que celle de l’iode sur les surfaces métalliques. 63. M. Niepce de Saint-Victor a constaté que le chlore gazeux et sec, dans lequel on plonge un papier imprimé, se fixe sur les noirs. Il en est de même de la vapeur qui se dé- gage de l’eau de chlore ; mais le papier exposé à cette vapeur n'imprime pas d'image sensible sur le cuivre; il faut l’ex- poser à la vapeur de l’ammoniaque fluor pour la faire appa- raître. Dans tous les cas, les effets du chlore sont bien plus faibles que ceux de l’iode. Un imprimé plongé dans l'eau de chlore, appliqué contre un papier de tournesol bleu, reproduit l'impression en lettres EX Le 72 570 DE LA REPRODUCTION DES IMAGES rouges , parce qu'il s'est produit vraisemblablement de l’a- cide chlorhydrique. M. Niepce, en chauffant de l’hypochlorite de chaux à sec dans une capsule de porcelaine, a observé quelquefois que les premières vapeurs dégagées donnent au papier imprimé la propriété de reproduire les lettres en rouge, et que les va- peurs dégagées plus tard, étant absorbées par le papier blane, reproduisent les lettres en bleu sur fond blane, le chlore ayant décoloré le tournesol. 64. Le brôme n’a pas paru à M. Niepce avoir d'action bien sensible pour se porter sur les noirs d’une gravure. 65. Une gravure exposée 5 à 10 minutes à la vapeur du soufre contenu dans une capsule de porcelaine chauffée par une lampe à alcool , de manière à produire une vapeur qui ne contient pas d’acide sulfureux sensible à l’odorat et au papier de tournesol, acquiert la propriété d'imprimer une image parfaitement nette sur une plaque de cuivre, contre laquelle on la presse pendant 10 minutes. La vapeur qui à été absorbée par les noirs forme les ombres de l’image, et le cuivre métallique en fait les clairs. 66. La vapeur de l’orpiment produit le même effet. 67. Le résultat est encore le même en employant le bisul- fure de fer; mais l'opération est plus difficile. 68. Une gravure plongée dans un flacon de gaz sulfhydri- que absorbe ce gaz par les noirs, et lorsqu'on la presse contre une plaque de cuivre, l’image est reproduite en sulfure. 69. Lorsqu'on expose une gravure à la vapeur de l’acide azotique d’une densité de 1,34 pendant cinq minutes environ, et qu'on l’applique ensuite contre une plaque de cuivre, ce ne sont pas les noirs, mais les blancs qui cèdent au métal la GRAVÉES, DESSINÉES OU IMPRIMÉES. 571 vapeur qu'ils ont absorbée. Le résultat de l'impression sur la plaque de cuivre est une matière blanchätre et mate cor- respondant aux clairs de l’image, tandis que le cuivre métal- lique correspond aux ombres. La preuve que les blancs ont absorbé la vapeur acide, c’est qu’en appliquant la gravure sur un papier de tournesol, le dessin est produit en bleu sur un fond rouge, si l’exposition de la gravure à la vapeur acide a été faite convenablement. Cette expérience ne prouve pas que les noirs n'ont pas absorbé la vapeur acide; car les phénomènes seraient encore les mêmes, conformément à ce que j'ai dit (28, 4°), dans le cas où les noirs, attirant la vapeur plus fortement que ne le font les blancs , la conserveraient , tandis que les blancs la céderaient à d’autres corps. L'existence d’une attraction élec- tive de la vapeur acide , relativement à une série de corps, n'en existerait pas moins. 70. Enfin, j'ajouterai que les noirs des plumes de pie ou de vanneau , qui absorbent l’iode et qui le cèdentau cuivre, ne prennent pas acide azotique; car ces plumes, plongées dans cet acide, impriment au contraire leurs parties blanches sur le métal. 71. Si on met quelques grammes de phosphore dans une capsule de porcelaine à une température de 18 degrés en- viron, et qu'on expose une gravure à la vapeur qui s’en exhale pendant 5 ou 10 minutes, la gravure, appliquée contre une plaque de cuivre, n’y imprime pas d'image sensible; mais celle-ci se manifeste par l'exposition de la plaque à la vapeur de l'ammoniaque fluor , et l'aspect en est des plus agréables. Les clairs produits par le cuivre ammoniaqué sont d’un blanc vaporeux remarquable. Quant aux ombres, elles seraient , Fr 72. 572 DE LA REPRODUCTION DES IMAGES suivant M. Niepce, le produit de la vapeur phosphorée fixée au cuivre. L'image ainsi produite n’est pas susceptible de résister à l’action du tripoli. 72. Il paraît bien , d'après cette expérience , que les noirs d'une gravure exposée à la vapeur du phosphore brülant lentement , absorbent une matière capable de se porter sur le cuivre et de s'opposer à ce qu’il devienne blanc par l’am- moniaque. Mais quelle est cette vapeur ? Elle ne paraît pas être acide ; du moins, la gravure appliquée contre un papier bleu de tournesol ne le rougit pas. 73. Il serait bien curieux de rechercher si la matière active de la vapeur de phosphore est différente réellement de l’a- cide phosphatique. S'il en était ainsi, l'étude des images de M. Niepce de Saint-Victor conduirait, dans certains cas, à distinguer des matières différentes, où jusqu'ici on n’a ad- mis qu'une espèce de corps. Et, à ce sujet, je rappellerai combien nous sommes peu avancés dans la connaissance des odeurs de plusieurs matières métalliques, telles.que celles du cuivre, du fer, de l’étain, et de plusieurs de leurs composés. 74. M. Niepce de Saint-Victor a produit avec l'iode des figures sur le fer, le plomb, l’étain, le laiton et l'argent ; mais avec ce dernier métal , il a substitué l'exposition à la vapeur du mercure à l'exposition à la vapeur de l’ammo- niaque fluor. 75. Il y a, sans doute, de l’analogie entre certaines images de Moser et certaines images reproduites par les procédés de M. Niepce; mais il me semble très-difficile de la définir, en voyant la diversité des procédés indiqués par le physicien allemand , et surtout le manque de développement d’une analyse précise des effets de chaque sorte de procédé, et si 9 GRAVÉES, DESSINÉES OU IMPRIMÉES. 573 l'on considère en outre l'intention bien évidente où il est de ramener en définitive les phénomènes qu'il décrit à des ac- tions physiques et non à des actions chimiques. Toutes les expériences de M. Niepce, bien plus circonserites à la vérité, sont au contraire essentiellement fondées sur des effets de contact, produits entre des corps placés dans des circons- tances qui relèvent de la chimie. Et en cela même elles viennent à l'appui de l’opinion de M. Fizeau, qui, rejetant Ja théorie des radiations d’une lumière latente, pour expli- quer la production des images de Moser, l’attribue à des émanations de vapeurs dont la matière est déposée à la sur- face du corps qui donne son image à la surface d’un autre corps placé vis-à-vis du premier. TROISIÈME CATÉGORIE D'EXPÉRIENCES. Reproduction des images du foyer d’une chambre obscure, au moyen d’un com- posé d’argent, appliqué sur un enduit d’amidon ou d’albumine au lieu de l'être sur du papier. 76. Si les images produites sur papier au moyen d'un composé d'argent sensible au contact de la lumière, laissent tant à désirer, l'inégalité de la surface où apparaît l'image en est la cause, puisqu'il y à impossibilité que les détails sy peignent avec fidélité. Sans doute, cet inconvénient a fait préférer à son usage en photographie les plaques métal- liques, malgré leur cherté, leur poids et l'effet de la réflexion spéculaire. Dans cet état de choses, M. Niepce de Saint- Victor a eu l'heureuse idée d’enduire des plaques de verre 574 DE LA REPRODUCTION DES IMAGES transparent ou dépoli d’une couche mince d’amidon cuit ou d'albumine de blanc d'œuf, et de s’en servir au lieu de pa- pier. Les épreuves négatives, ou, pour parler plus correcte- ment, éwerses , qu'il a obtenues, ne permettent pas de dou- ter qu'il n'ait atteint le but qu'il s'était proposé. Il emploie 5 parties d'amidon délayées parfaitement dans 100 parties d'eau, auxquelles il ajoute 5 parties d’une solu- tion renfermant 0,25 d’iodure de potassium; c’est cet amidon cuit qu'il coule sur des plaques de verre où il sèche rapide- ment , soit au soleil , soit à l’étuve. Où bien il ajoute l’iodure de potassium à du blane d'œuf frais parfaitement limpide, et ce liquide est coulé sur les pla- ques de verre. Ces plaques sont ensuite imprégnées dela liqueur d’acéto- nitrate d'argent de M. Blanquart-Évrard , puis soumises à l'action de la lumière dans la chambre noire, conformément au procédé décrit par cet auteur. L'Académie prendra une idée du perfectionnement apporté -dans la photographie par les manipulations précédentes, en voyant les épreuves inverses obtenues par M. Niepce de Saint-Victor. On a tout lieu d'espérer que, dans beaucoup de cas, il sera possible de reporter l’image sur bois ou sur pierre lithogra- phique , sans qu’il soit nécessaire de la reproduire d’abord par le dessin pour la graver ensuite sur boïs, ou en tirer des épreuves au moyen de la lithographie. RÉSUMÉ. Les recherches dans lesquelles M. Niepce de Saint-Victor GRAVÉES, DESSINÉES OU IMPRIMÉES. 575 a fait preuve de tant de persévérance et de talent, me pa- raissent devoir fixer l'attention des savants sous les rapports suivants : 1° Sous le rapport de l'attraction élective avec laquelle une même vapeur peut être fixée par différents corps. Ainsi , l'iode a plus de tendance à se fixer à plusieurs ma- tières noires qu’au papier blanc, soit qu'il agisse à l’état de vapeur, soit qu’il agisse à l’état de solution liquide. Dans le premier cas, les noirs agissent à l'instar des solides poreux condensant des vapeurs ; dans le second, comme des mor- dants fixant des matières colorantes à des tissus. D'un autre côté, les matières noires cèdent leur iode à l'amidon , et celui-ci le cède enfin à des métaux ; 2° Sous le rapport de l'attraction élective de certaines va- peurs qui se fixent au papier blanc de préférence aux parties noires d’une encre grasse, ainsi que cela arrive à la vapeur de l'acide azotique ; 3° Sous le rapport de la rapidité avec laquelle peuvent réagir une vapeur et des corps solides aussi compactes que le sont les métaux, comme on l’observe entre la vapeur de l’ammoniaque fluor et le cuivre , par exemple ; 4° Sous le rapport de la distance à laquelle une vapeur qui se dégage de la matière d’une image est susceptible de repro- duire cette image sur un plan où la vapeur vient à se con- denser ; 5° Sous le rapport de l'influence très-diverse que différents solides pourraient exercer sur l’économie animale, après avoir été exposés à une même vapeur. Qt 76 DE LA REPRODUCTION DES IMAGES Malgré l'étendue des détails précédents, il me reste, pour remplir la tâche que je me suis prescrite, à dire quelques mots de l’auteur des recherches dont je viens de parler. Si l’Aca- démie est toujours disposée à accorder son approbation et ses encouragements à ceux qui lui communiquent des faits nou- veaux, cette disposition ne doit-elle pas se manifester surtout lorsque ces faits lui sont présentés par une personne qui, étrangère à la classe des savants , est engagée dans une car- rière où tout le temps de celui qui la suit appartient à l'État? Telle est la position de M. Niepce de Saint-Victor, digne à tous égards de porter le nom de son oncle, Joseph-Nicéphore Niepce, à qui revient l'honneur d’avoir fixé , dès 1826, les images de la chambre noire sur un métal enduit d’une ma- tière sensible à la lumière, le bitume de Judée préalablement dissous dans l'huile de lavande. M. Niepce de Saint-Victor, à sa sortie du collége , s'engagea , et entra comme simple ca- valier à l’école de Saumur. Deux ans après , il passa maréchal des logis dans le 1° régiment de dragons, où il devint succes- sivement sous-lieutenant et lieutenant , sans cesser d’y rem- plir les fonctions d'instracteur. Il y a cinq ans, l'administra- tion de l'armée ayant manifesté l'intention de changer en couleur aurore la couleur distinctive rose des premiers régi- ments de cavalerie, à la condition cependant de ne pas dé- faire les uniformes déjà confectionnés, on apprit au ministère de la guerre qu'un lieutenant de dragons en garnison à Montauban disait avoir trouvé le moyen de remplir cette condition difficile. Ce lieutenant était M. Niepce de Saint- Victor. Mandé à Paris pour répéter son procédé devant une commission nommée par le ministre de la guerre, le résultat en fut tel qu'il l'avait annoncé; un peu plus tard , l'exécution GRAVÉES, DESSINÉES OU IMPRIMÉES. D7e qu'on en fit en grand dans plusieurs régiments eut un égal succès. [] faut savoir que jamais M. Niepce, avant cette épo- que , ne s'était occupé de teinture. De retour à Montauban, M. Niepce commenca à se livrer aux recherches dont l’Académie connaît maintenant les ré- sultats. Convaincu que Paris lui offrirait plus de ressources pour les continuer que les garnisons de province, il demanda son admission dans la garde municipale, quoiqu'il sût bien qu'en changeant d'arme il perdrait de ses chances à l’avan- cement. En considération de ses bons services, on fit droit à sa demande. C'est depuis son séjour à Paris que j'ai pu apprécier ce que l'intelligence de M. Niepce a de qualités rares et distinguées , par les confidences qu’il m'a faites de ses tra- vaux ; le plus grand nombre ont été exécutés au quartier de cavalerie du faubourg Saint-Martin , dans la salle de police, qui, étant pour ainsi dire constamment libre , à cause de la sévérité du choix des hommes appelés à composer la garde municipale, a pu recevoir ainsi la nouvelle destination que M. Niepce lui a donnée. Ces détails sur un homme qui pendant vingt-trois ans a constamment satisfait à toutes les exigences de la profession militaire, sans jamais reculer devant aucun sacrifice que son goût des recherches scientifiques lui a imposé, ne paraîtront pas déplacés, et j'ose espérer que l’Académie accordera un témoignage d'estime à M. Niepce de Saint-Victor, qui honore doublement le titre d’officier francais. MAX. 2 ne CAM IAA LUGEMEAIAENRCI HAT LAS (agen. 206 etrotmiods etaient, ans net os, 250. no og 9199 Pier port, Miismistoup riovse Auébil as otit sbaqubbo 1619 'e #0, sup cruise éapnocumonssq le. Maéduninelf. & 11014 1 an eo ldmensdnisue tits SirashénA'hamoh s4daradaon Au ropeasi sh alor tiématto Juliet supiugaienon) 2tthe bouresb D st du sbarotiterg 281 aipsénneon ele silade tupionp .sl6qiorni bug et enrb noter bn ft us 426 sobres 20 hatbisq: fl smith Juusgos dore enh # do szonvrocenôd be sh aonter bison ail tres LNTS ie} oup cars sr throÿoe, tbe 2 q9b 310.4, 66 CUT S énilsupsh # 19qai 2 ab shit ao p 80 1908 qq sue 4b atipt sit d'upiesoasbüäuos megane sin 1 b'rsihisppus éfunaxé bi 440 patois sulq 21:26 log obiollsestentebl.tardisatee eriodus ha algten shsb must -atdibirgmindténon o%ih CTTITONT 04 199% 0 brieg &l 49204109 ñ ebloquR-eanymon e9b 210da 15h liée spnoisaitesh oléonst enr riorsost 04 2,.91$qiou noob 840) saqif M au -etout-dgouv Jashbandg: sup temoin sue alitàab ea > noiezdorq sb eo0nomizs288l. 281101 6 Ha Se Hs Metop rod empaniinone goofe durable aoure, etre motiiahsa où éeoqri ls tulzonpiitasinc slonorlosx e8b3ños ALT CHI OS E snmobérk' up 4 JHAIeI JÉO4 19 298148 b à] 54} bronodiop ot ainehbeql M éoigrtans.b s2sapromss + ut isodait $iodio boit sl 1aomstduab ES RAA ROLE OA VV RARE SR LD LAS LE RS LAS EE VAR LA D RAR VOLE LE LR RARE LA LR LL DELLE LOUE LE LE LEA ES AAA MAMA LAS MÉMOIRE SUR L’ANALOGIE DE COMPOSITION ET SUR QUELQUES POINTS DE L'ORGANISATION DES ÉCHINODERMES ; Par M. DUVERNOY. Lu, pour la I" Partie, dans la séance du 17 janvier 1848. INTRODUCTION. Les sciences d'observation, et celles des corps organisés, en particulier, se composent : È 1° Des faits observés; | 2° De léur interprétation, qui peut être plus ou moins su- jette à discussion ; 3° De leur généralisation, qui doit être l'expression som- maire de leur existence, quant à leur nombre, et le résumé ou la déduction logique de leur interprétation. Le mémoire actuel comprend, si je ne me trompe, ces trois Sôrtées de notions scientifiques. Je Vai écrit à l’occasion de la rs lettre de notre collègue M. Agassiz, que j'ai eu l'honneur de communiquer 73. 4 580 DE L'ORGANISATION à l'Académie dans sa séance du 7 novembre dernier, et du Résumé d'un travail d'ensemble sur l'organisation, la clas- sification et le développement progressif des Échinodermes dans la série des terrains, que M. Agassiz à fait connaitre lui-même à l’Académie, dans sa séance du 10. août 1846. Presque immédiatement après avoir pris connaissance de cette dernière communication, dans le Compte rendu de cette séance, que je recevais à cent lieues de Paris, j'adressai à notre collègäe quelques observations écrites : 19 Sur les rapports qu’il annonçait avoir découverts entre le test des Oursins ét lés partiés tégumentaires des Astéries ; 2° Sur la tendance à la composition bilatérale qu'il avait cru reconnaîtré dans un Certain nombre d’'Échinodermes, et plus particulièrement parmi les Oursins et les Æolothuries , tout en convenant de leur forme ou de leur composition rayonnée. Ma lettre était du 4 septembre 1846. J'espérais qu'il en, serait fait une mention quelconque dans la publication ultérieure de ce Résumé, qui a paru plus tard dans les Ænnales des sciences naturelles (numé- ros de novembre et décembre 1846). Le silence complet gardé à son sujet me faisait attendre le moment favorable pour rétablir, historiquement parlant, la succession des faits découverts, et des idées qui ont pu faire faire quelques progrès à la science, dans cette direction. La lettre de notre collègue m'en fournissant l’occasion, je n'ai pu m'empêcher de la saisir. Ma communication he sera pas d’ailleurs simplement his- torique; elle comprendra quelques études nouvelles qui ser- viront peut-être à étendre ou à mieux analyser des faits déjà connus. DES ÉCHINODERMES. 581 RTS CET RS RE ER Enan an En nu ann vaut QE ne HART SENS DST MÉTRO LOU un Le LAN CANAL RE TR DSC ETES CEE ETES PREMIÈRE PARTIE. RÉSUMÉ HISTORIQUE. Il y a peu de temps qu'on avait généralement l'habitude de considérer les parties dures des Oursins comme une en- veloppe extérieure, comme un fest, comparable à celui des Crustacés, ou comme une coquille. Si les naturalistes français se servent encore de la première dénomination, les natura- listes allemands emploient de préférence la seconde. Ni l’une ni l’autre ne sont exactes. Le test est proprement une production dure, extérieure et superficielle du derme, qui peut s'en détacher par la mue. La coquille est de même une production extérieure du der- me; elle est recouverte par une sorte d’épiderme. Les parties dures des Oursins sont, au contraire, revêtues extérieurement par la peau, et intérieurement par une sorte de péritoine qui tapisse la cavité viscérale, que ces parties dures interceptent. Mon vieil ami, le célèbre Ziedemann, auteur d'une Mono- graphie anatomique sur les Holothuries, les Astéries et les Oursins, que l’Académie a couronnée en 1812, avait bien re- connu ces deux membranes (1). (x) Une peau blanchâtre recouvre toute la partie extérieure de la co- quille , à l'exception des tubercules articulaires arrondis. Elle sert consé- 582 BE L'ORGANISATION Il a vu, de plus, que les Oursins ont vingt séries de pièces calcaires, réunies par de véritables sutures ; que le nombre de ces pièces, par série, augmente avec l’âge ; et que cette augmentation en nombre, jointe à l'accroissement des pièces anciennes en étendue, explique l’accroissement ou le déve- loppement, en tous sens, dont les Oursins sont susceptibles, avec leur forme sphérique. Mais l'illustre correspondant de l'Académie n'avait pas tiré de ces faits anatomiques, qui avaient besoin d’ailleurs d'une analyse plus complète, les conséquences que l’on pou- vait en déduire sur l'analogie de composition du squelette intérieur des Æstéries et des Oursins. M. de Blainville, déjà en 1825, dans l’article Oursin du Dictionnaire des sciences naturelles (1), reconnaît, comme M. Tiedemann, que « l'enveloppe extérieure qui détermine « la forme d’un Oursin est formée, dans la plus grande par- « tie de son étendue, par deux membranes, lune externe, « plus épaisse, l'autre interne, si mince que le nom de pelli- « cule lui convient parfaitement, et entre lesquelles existe « un test assez épais, solide, parfaitement calcaire, composé quemment à assujettir les piquants. Cette peau est iritable dans l'état de vie : les piquants se redressent quand elle se contracte; ils s'inclinent plus ou,moins vers la coquille dans son état de relâchement. — Puisqu il n y a pas de muscles particuliers qui redressent les piquants ou les fléchissent, on peut comparer la peau irritable contractile qui redfesse où abaisse les piquants, et les assujettit à la coquille, aux muscles cutanés des Manimi- féres qui redressent les cheveux oules poils: (Page 88 de cette Monogra- phie:) (x) Tir8s, p: 61-64: DES ÉCHINODERMES: 583 « d’un très-grand nombre de petites pièces polygones, etc. » Ces deux auteurs célèbres s'accordent encore sur la cause qui met les baguettes en mouvement. « Ces organes, dit M. de Blainville, articulés en genou sur « les mamelons du test, sont mis en mouvement dans tous les « sens, par la {ame externe de l'enveloppe cutanée, qui s’at- « tache à la circonférence du bourrelet de leur base, et qui «m'a paru plus forte, plus évidemment musculaire, aux épi- « nes de la base de l'Oursin. Par la dessiccation, il m’a été pos- «sible d'y apercevoir des fibres musculaires distinctes, et « quelquefois même des muscles proprement dits. Il en « existe surtout pour les mouvements de l'appareil muscu- « laire. » On trouve, à ce sujet, dans le T. Il des Mémoires de M. Delle-Chiaje , sur les Animaux sans vertèbres, publié à Naples en 1825, un progrès sensible dans les termes, qui en indiquerait un dans les idées. Les pièces qui composent l'enveloppe des Oursins y sont appelées ossicules : cet auteur nomme périoste la membrane qui les unit et qui remplit leurs intervalles avant leur com- plet durcissement ; il désigne leur ensemble sous: le nom de boîte osseuse (scatola ossea). Toutes ces expressions sont répétées dans ses /nstitutioni di anatomia e fisiologia comparata (T.1), qui ont paru en 1832. Dans un Prodrome d’une Monographie des Radiaires ou des Échinodermes (1), lu à la Société d'histoire naturelle de (x) Mémoires de la Société des sciences naturelles de Neuchâtel, T. I. Neuchâtel, 1835. 554 DE L'ORGANISATION Neuchätel, le 20 janvier 1834, M. Agassiz donne d’intéres- sants détails sur le mode d’accroissement des Oursins et sur le durcissement successif du test, à partir des pièces buccales ou anales vers le plus grand diamètre de l'animal. Il a reconnu, comme M. Tiedemann } que les pièces du test sont moins nombreuses chez les jeunes que chez les vieux ; contre ce qu'affirme M. Delle-Chiaje. Autour de l'anus, la membrane qui unit toutes les plaques et qui s'étend'sur ‘leur surface, en formant une capsule articulaire autour de la base des piquants, est plus molle, ajoute M. Agassiz, et plus spon- gieuse que dans la partie inférieure, où les plaques sont déjà soudées entre elles; et les piquants s'élèvent au centre, à peu près de la même manière que se forment les bois de cerfs. Ils ne deviennent mobiles qu'après avoir atteint un’certain de- gré de développement. Dans ce premier mémoire, M. Agassiz insiste beaucoup sur la tendance à la forme symétrique des Spatangues ; \si- gnalée depuis longtemps par M. de Blainville. | Il entre ensuite dans les détails des analogies qu’il trouve entre les Oursins et les Astéries. Mais ces analogies ne com- prennent pas la véritable détermination ‘de ‘leurs parties dures, et la distinction de celles-ci, du derme proprement dit. Elles ont évidemment pour but de ramener la forme rayonnée des Astéries, considérée dans l'ensemble du plan de compo- sition de ces animaux, à la forme cylindrique des Æolothuries ou sphérique des Oursins, et à conduire ensuite à l’idée de la forme de parité bilatérale que l'auteur pense avoir trouvée dans certaines Æolothuries et dans les Spatangues, parmi les É'chinides. DES ÉCHINODERMES. 585 Cependant M. Charles Desmoulins (1) démontrait, dans un ouvrage consciencieux sur les Échinides, que chez tous, même chez les Spatungues, auxquels on n’attribue que quatre ambulacres, la même composition du test (prétendu) pouvait être constatée. La Notice sur quelques points de l'organisation des Eurya- les, que M. Agassiz a communiquée à la même Société de Neuchâtel, le 18 janvier 1837, n’a pas avancé les questions que j'ai cherché à résoudre quelques jours plus tard, de- vant la Société d'histoire naturelle de Strasbourg. Le 1° février 1837, je pris à tâche de démontrer, à cette Société, et de développer les idées dont voici l’apercu : « 1° La peau des Oursins recouvre non-seulement les sé- « ries de plaques qui composent leur prétendu test, mais «elle se prolonge (au moins) sur la tête de leurs baguettes « ou de leurs piquants. « 2° Ceux-ci sont articulés par arthrodie, avec les saillies « arrondies de ces plaques, et leur présentent une surface « articulaire tout unie, entièrement analogue à celle des os « (des membres) des Vertébrés. « 3° Chacune de ces articulations est affermie par une « capsule ligamenteuse, semblable aux capsules articulaires « (des membres) des Vertébrés. « 4° Entre la peau et cette capsule ligamenteuse, il y a de « petits muscles qui s'attachent d’une part à la base de cha- (1) Études sur les Échinides, par Charles Des Moulins; à Bordeaux, 1835-1837, in-8°. TXX. 74 586 DE L'ORGANISATION « que piquant, et de l’autre à la plaque qui lui fournit son « tubercule articulaire. « 5° L'existence de ces muscles sous-cutanés, celle de la « peau qui revêt de toutes parts les parties dures; la nature «séreuse de la membrane qui tapisse intérieurement la ca- «vité formée par ces mêmes parties dures, et qui renferme « les viscères, m'ont conduit à la détermination de ces par- «ties dures et osseuses. Je les ai comparées à la partie pé- « riphérique du squelette des Tortues. « Les Oursins, ai-je ajouté, auraient donc un squelette in- «térieur, mais périphérique, c’est-à-dire superficiel. Ce « squelette serait composé de plusieurs séries régulières de « vertèbres et de côtes, articulées entre elles par sutures. « Les Oursins seraient, sous ce rapport, aux Échinodermes, « ce que les Tortues sont aux autres Reptiles. « Cette détermination, continuai-je, des parties dures des « Oursins établit d’ailleurs un nouveau rapprochement très- «important entre ces animaux et les 4stéries. Il y a long- « temps qu'on a reconnu, dans ces dernières, un squelette «intérieur. Dans les Æstéries qui ont cinq rayons, il y a « proprement cinq colonnes vertébrales. Ces différentes co- « lonnes, dont le nombre varie dans les différentes espèces «et dans les genres de cette famille, avec celui des rayons, « sont plus ou moins libres vers leur extrémité caudale, et « soudées par leur extrémité buccale. « Les Æstéries (à rayons libres) sont donc les Serpents des « Échinodermes, mais des Serpents sans tête, à plusieurs corps « et à une seule bouche. « Les Holothuries, qui ont été réunies par G. Cuvier, avec « beaucoup de raison, aux Oursins et aux Astéries, n'ont plus DES ÉCHINODERMES. 587 « qu’un rudiment de ce squelette intérieur , auquel viennent « aboutir les cinq longs muscles aplatis qui doublent leur « peau; et sur lequel s’appuient les tentacules qui garnissent, « à l'extérieur, l’orifice de la cavité buccale. « Il résulte encore de ces considérations, ai-je dit en ter- « minant, que les Échinodermes pédicellés, qui sont de véri- « tables animaux rayonnés, pourraient étre envisagés comme « composés d'animaux symétriques , surtout dans leurs or- « ganes de relation et de génération, dont les corps sans tête « seraient réunis dans toute leur longueur (les Oursins, les « Holothuries) ou libres dans une étendue plus ou moins « grande de leur partie postérieure (les Æstéries) (1).» Ces idées sur la véritable détermination de la peau et du squelette des Oursins, comparé au squelette intérieur des Astéries, et au rudiment de squelette intérieur des Zolothu- ries, étaient la déduction logique des faits anatomiques. Elles montraient, avec évidence, l’analogie de composition des quatre Ordres de la classe des Échinodermes, dans les limites que j'ai adoptées pour cette classe ; elles analysaient leur forme rayonnée, en la ramenant à la forme symétrique multiple, et faisaient voir dans cette classe supérieure des Zoophytes, comme cela était démontré pour la classe supérieure de l'Em- branchement des Mollusques, et pour les classes supérieures de celui des Articulés, des traces du plan de composition dans l’arrangement des parties dures des Vertébrés, relati- vement aux parties molles. Mais ce ne sont que des traces, qui n'infirment pas, à notre avis, les grandes différences qui (2) Voir le Journal de l'Institut de 1837, p. 208 et 209. 588 DE L'ORGANISATION existent dans le plan général d'organisation de chacun des quatre grands Embranchements du Règne animal, diffé- rences universellement reconnues, depuis la première ré- vélation que la science en a recue, en 1812, du génie de G. Cuvier. Le 6 novembre de la même année 1837, M. Agassiz m'é- crivait de Neuchâtel : « Je vous suis personnellement obligé « pour votre Notice sur les Échinodermes. Je Y'ai lue avec « d'autant plus de plaisir, que je m'occupe moi-même, en «ce moment, d’un travail sur cette classe d'animaux. Les « recherches que vous y avez consignées sont..... mar- « quées au coin de la plus parfaite vérité. Quant aux « principes dont vous partez, je dois vous avouer que je ne « les partage pas, non plus que les conséquences que vous en « tirez.» C'est qu’en effet notre collègue, au lieu d'analyser, comme je l'avais fait, la composition des Oursins et des Holothuries, pour y trouver la forme rayonnée des Étoiles de mer, avait cherché, dans son Prodrome (1), à faire la synthèse de celles- c1, pour les ramener à la forme sphérique des Échinides, où cylindrique des Æolothurides. Dans la comparaison qu'il avait faite des plaques du pré- tendu test des Oursins avec les parties tégumentaires des 4s- téries, il n’était pas question de distinguer la peau et ses dépendances, des parties appartenant au squelette. Enfin, loin de voir la forme symétrique, dans chaque rayon d'une (1) Mémoires de la Societé des sciences naturelles de Neuchâtel , T. I. Neuchâtel, 1835. DES ÉCHINODERMES. 58g Astérie, où dans les parties correspondantes d’un Oursin ou d'une Aolothurie, M. Agassiz cherchait à retrouver les traces de ce qu'il appelle la forme de parité bilatérale, dans l’ensem- ble ou dans tout le corps d’une Æstérie, d’un Oursin ou d'une Æolothurie. Il n’en fut pas de même de tous les autres naturalistes. Je trouve, entre autres, mes idées sur la composition sy- métrique multiple des Étoiles de mer adoptées dans l’un des ouvrages élémentaires qui ont été publiés pour l’ensei- gnement des colléges royaux; il est de 1840 (1). Quant aux faits anatomiques qui avaient servi à ces dé- ductions théoriques, ils ont été reproduits dans tous leurs détails, quelques années plus tard, par M. Valentin, dans sa Monographie anatomique du genre Echinus, qui a paru en 1841 (2). 1° L'auteur y désigne la peau de ces animaux sous le nom de membrane pimentée. (Le traducteur aurait dù dire pig- mentée ou colorée.) Elle s'étend, dit-il, sur l'articulation du piquant et sur le piquant lui-même ; elle repose immédiatement (ce sont tou- jours ses expressions) sur la surface des muscles. 2° Les muscles (motores aculei) vont de la surface articu- laire d’un piquant vers le pourtour du tubercule corres- pondant. (1) Lecons d’histoire naturelle, etc., par M. L. Doyère, professeur d'histoire naturelle au collége royal de Henri 1V. Paris, 1840, pages 316 et 317. J (2) Monographies anatomiques ; 1" Monographie. Neuchâtel, 1841. 59o DE L'ORGANISATION 3° La capsule articulaire est une membrane articulaire très- forte. 4° Il existe entre le, piquant et la tête une sorte d’ar- throdie. J'ai dû être flatté, en lisant cette intéressante Monogra- phie, d’y voir confirmés, par un anatomiste aussi distingué que M. Valentin, les faits principaux que j'avais annoncés quatre années auparavant. Voici d’ailleurs, en peu de lignes, ce que cet auteur a ajouté à nos connaissances, en se plaçant, comme à son or- dinaire, sous le point de vue de la structure microscopique de ces mêmes parties. 1° Il a vu que les fibres musculaires des petits muscles moteurs des piquants ont des lignes transversales distantes, et qu'on aperçoit quelquefois entre celles-ci d’autres lignes transversales, qui rappellent les fibres musculaires des Ver- tebrés. 2° Il a mesuré le diamètre des fibres de la capsule articu- laire, et il a trouvé qu'il variait de 0,001 à 0,005 de pouce. 3° [l'a vu que les plaques étaient composées de réseaux calcaires, qui ont pour base un squelette organique d’un tissu fibreux : ce sont ses expressions (1). 4° [s’est assuré que les piquants sont formés de deux substances calcaires, l’une simple (je pense qu’il a voulu dire compacte, homogène), l’autre réticulée. 5° On n'y reconnaît pas, non plus que dans les plaques, la structure intime qui caractérise les os des Vertébrés. 1) Monogr. anat., p. 18, et pl. IE, fig. 18 et 19. DES ÉCHINODERMES. 591 Ils en diffèrent encore, sous le rapport de leur composi- tion chimique, par l'absence des sels phosphoriques (1). 6° Enfin, M. Valentin a vu la peau (que son traducteur appelle toujours membrane pimentée) revêtir toutes les par- ties du test; et il n’a pu observer à sa surface, non plus que M. Forbes, l'épithélium vibratile, annoncé par M: Ehren- berg (2). J'avais sans doute été ému à la réception de la lettre de notre collègue, M. Agassiz, du 6 novembre 1837, de ne pas avoir son assentiment sur ma manière d'envisager le plan général d'organisation des Échinodermes. Mais comme des raisonnements que je crois justes, et non l'autorité person- nelle, quelque respectable qu’elle soit, peuvent seuls ébran- ler et changer mes convictions, je n’en avais pas moins per- ———_—_—.——_——— (x) Voici l'analyse chimique des plaques à l'état frais, due à M. Brunner: Carbonate de chaux. . . . . 86,81 pulate dechanx, . … . . . 1,38 Carbonate de magnésie. . . . 0,84 Autres sels et perte. . . . . 1,14 Substance organique . . . . 9,83 CL, oil A ii GS Les piquants n’en différent que par une plus grande proportion de car- RTE ES ten TR CE RH ee 0 RP 7 Et par une moindre quantité de substance organique. . . 7,59 (2) On trouve en effet la phrase suivante de cet auteur célèbre dans les Archives de Müller pour 1834, p. 578 : « Tous les piquants de l’Echinus « saxatilis sont recouverts d’une peau (Haut) à cils vibratiles. » 592 DE L'ORGANISATION sisté à enseigner, dans tous mes cours, la doctrine que j'avais adoptée à ce sujet (1). Aussi fus-je très-agréablement surpris, à la lecture du Ré- sumé déjà cité, d'y lire les doctrines actuelles de l’auteur (page 180 du tome XXIITI des Comptes rendus) sur l'iden- tité de composition des Asteries et des Oursins, et (page 201) sur la forme rayonnée bien évidente de ceux-ci, dont la bou- che est le centre autour duquel tous les organes sont dis- posés. Dans la lettre que j'adressai à notre collègue, aussitôt que jeus pris connaissance de ce Résumé, après lui avoir ex- primé combien j'étais heureux de le voir se rapprocher de mes doctrines, que je crus devoir lui rappeler, je cherchai à les lui développer, entre autres, dans le quatrième para- graphe, ainsi conçu : «Il me semble qu’il était nécessaire, pour ne pas être « embarrassé dans la détermination du plan de composition « des Échinides, de distinguer, comme je l’ai fait (2) dans mes « cours, les divers systèmes principaux de leur organisme « singulier, soit ceux de relation ou de la sensibilité et du « mouvement, soit ceux de génération, soit ceux de nutri- « tion. » J'ajoutai dans le cinquième paragraphe : « 5° Cette analyse des systèmes d'organes, qui sont tous trois rayonnés dans les Stellérides (nonobstant, à mon (1) Voir entre autres l'extrait de mon cours fait au Collége de France en 1846. Revue zoologique du mois de février 1846. (2) Revue zoologique, février 1846. DES ÉCHINODERMES. 593 \ « avis, l’orifice anal), qui perdent cette forme dans le canal « alimentaire chez les Crinoïdes et les Échinides ; qui n’en «montrent de traces chez les Aolothurides que dans le sys- « tème nerveux, les longs muscles du corps, le rudiment de « squelette et les tentacules buccaux; cette analyse, dis-je, « facilitera d’ailleurs l'expression plus précise de votre sys- « tème ou de vos idées ingénieuses, sur le passage de la forme « rayonnée à la forme symétrique ou bilatérale. » Ces observations, restées sans réponse, ont cependant continué de changer les idées de notre collègue, si j'en juge par le paragraphe suivant de sa dernière lettre à M. de Humboldt : «Je crois pouvoir démontrer aujourd'hui que les pièces «solides des Astéries sont identiques avec celles des Oursins, «tant par leur arrangement que par leurs rapports avec « Les parties molles........ ... D'où je conclus qu'il y a «identité morphologique et physiologique entre le sque- «lette des Æstéries et celui des Oursins. » J'ai dû être flatté en lisant ces lignes, écrites le 30 sep- tembre 1847, comme en prenant connaissance de celles qui sont imprimées dans le compte rendu du 10 août 1846, de la conformité qu’elles ont avec ma publication du mois de février 1837. Elles montrent que, pour les rapports essentiels que ja- vais compris, il y a plus de dix années, entre les parties du- res des quatre Ordres qui composent la classe des Échino- dermes , les études savantes, multipliées, approfondies de notre collègue, lui avaient fait abandonner les négations de sa lettre du 6 novembre 1837, pour adopter ma manière de voir, du moins dans les parties essentielles, l'existence d’un NS 75 594 DE L'ORGANISATION squelette intérieur, chez les Oursins, analogue à celui des Astéries. Nous voilà donc parfaitement d'accord sur les faits, de- puis les Recherches anatomiques de M. Valentin, entreprises à la sollicitation de M. Agassiz, et même pour leur inter- prétation (1). Il faut dire que, si cette interprétation varie suivant les observateurs, c’est qu’ils sont trop souvent en- traînés par des idées préconçues, ou par celles qui prévalent momentanément dans la science qu'ils cultivent. C'est ainsi, pour ne pas sortir de mon sujet, que M. Sars, auquel on doit de précieuses découvertes sur les animaux maris inférieurs, a cru voir la forme bilatérale dans quatre appendices de fixité, transitoires, qui paraissent à une cer- taine époque du développement d’une espèce d’ÆAstérie (2). Le corps de la larve de cette espèce, dans ses métamor- phoses successives , de sphérique devient un peu oblong; germe ensuite successivement à l’une des extrémités de son plus grand diamètre, quatre appendices de fixité, au moyen desquels cette larve s'attache aux parois de la poche incuba- _trice de sa mère. Le corps de la petite Astérie se développe indépendam- ment de ces appendices ; s’aplanit comme une cible, en re- prenant une forme circulaire plus régulière; puis il montre une partie centrale, toujours circulaire, comme encadrée dans (x) Il ne reste plus que quelques dissentiments au sujet de leur géné- ralisation , que le temps pourra faire disparaitre. (2) La même que MM. J. Müller et Troschel lui ont dédiée plus tard sous le nom d’£Echinaster Sarsüi. DES ÉCHINODERMES. 595 cinq lobes arrondis, qui vont en se séparant de plus en plus, à mesure de l'accroissement de la petite Astérie, pour en former les rayons. Lorsqu'elle est devenue pentagonale, de circulaire qu'elle était, les quatre suçoirs, réunis par paires, à l'époque de leur plus grand développement, existent encore attachés au bord de l'étoile dans l’angle de deux lobes ou de deux rayons rudimentaires. Ces organes transitoires ne tar- dent pas à s’atrophier, et disparaissent successivement de même qu'ils s'étaient développés (1). Leur apparition, comme organes accessoires, et leur exis- tence momentanée, n’ont rien changé à la marche naturelle du développement du corps de l’Astérie, qui s’est montrée dès le principe sous la forme sphérique, ou arrondie et apla- tie, et conséquemment avec les éléments de la forme rayon- née. Pour conclure de la disposition apparente de ces ap- pendices transitoires, à la forme bilatérale du corps de l’Astérie, il faut avoir oublié la circonstance qui était prédo- minante dans cette observation, pour ne voir que sa partie accessoire. Les observations toutes récentes de MM. Dufossé (2) et. Derbes (3) sur ce développement des Oursins, jointes à celles- ei sur les Astéries, me paraissent au contraire confirmer l'i- dée que, dès le principe de son développement, tout animal a les caractères de l’'Embranchement auquel il appartient. (x) Fauna littoralis Norwegiæ, von M. Sars. Erser Heft. Christiania, 1846, p. 47 et suiv. ; et pl. VIII, fig. 1-43. (2) Annales des sciences naturelles , 3° série, 1847. (3) 1bid., même année. TO 596 DE L'ORGANISATION «Chaque animal, avait très-bien dit G. Cuvier, est lui- « même dès le germe, et ses caractères de Classe (ce mot est « pris ici pour classe supérieure, c’est-à-dire Embranche- « ment) se montrent presque dès les premiers instants où il « apparaît à l'œil; on voit les vertèbres, dès les premiers « jours de l’incubation d’un Vertébré, etc. (1). » … (x) Lecons d' Anatomie comparée, 2° édit., t. I, p. 35. DES ÉCHINODERMES. 597 RARES AR LE RR AE ER ARLES ARAAE LE LRU LE LEE VER LE LE LEE LE SEA VE LE LR LS ARS LAVER RE LE LUE RARE RAT AS LE ARS AURA RARE EX AT RUN à DEUXIÈME PARTIE (1). DÉTERMINATION COMPARÉE DES DIVERSES PARTIES DU SQUELETTE DES ÉCHINIDES ET DES ASTÉRIES. S I. Le squelette des Échinides et celui des Astérides sont ab- solument comparables, ainsi que je l’ai écrit en février 1837 ; mais pour que cette comparaison soit exacte, il faut com- mencer par reconnaître les différents rayons dont se com- pose la boîte osseuse, quelle que soit sa forme, qui constitue le squelette périphérique des Échinides. Ces rayons sont faciles à reconnaître dans les Cidarides ou les Oursins réguliers, où ils sont arrangés comme des méri- (x) Cette seconde partie a été lue à l’Académie des sciences dans la séance du 28 février 1848. Voir le compte rendu de cette séance, p. 266 et suivantes. Les parties II, IIL et IV comprennent de nouvelles études sur les faits indiqués dans le titre de ce Mémoire. Ces nouvelles études ayant pris beaucoup plus d'extension que je ne‘l'avais d’abord prévu , me forcent de changer le titre de simple Vote, que j'avais d'abord donné à ce travail, en celui de Mémoire, dont les troisième et quatrième parties feront le sujet d'une lecture prochaine. 598 DE L'ORGANISATION diens, et sont régulièrement soudées les uns aux autres, du pôle où est la bouche, au pôle où se trouvent l’anus et les orifices des organes génitaux. Chacun de ces cinq rayons est symétrique, et se compose, dans la partie moyenne, d’une double série de pièces osseu- ses, que l’on doit déterminer comme les vertèbres; et, dans ses parties latérales, d’une série d’autres pièces osseuses, que l'on doit déterminer comme les côtes. Celles-ci se soudent avec la partie correspondante du rayon voisin, et composent ensemble la région dite inter- ambulacraire; tandis que la région que l’on nomme ambu- lacraire est la partie vertébrale d'un même rayon. Les diverses pièces vertébrales ou costales, dans la no- menclature que nous avons adoptée, sont de même forme dans chaque série; elles ne diffèrent que par les propor- tions, qui vont en diminuant de l’équateur de la boîte osseuse à l’on ou l’autre pôle. La composition rayonnée est absolument la même dans tous les autres Échinides réunis dans les familles des Cly- péastroïdes, des Cassidulides et des Spatangoïdes, telles que M. Agassiz les a reconnues et caractérisées. Nous prendrons, pour le démontrer, une espèce de cette dernière famille, le Spatangue cœur, que l’on regarde géné- ralement comme s’éloignant beaucoup de la forme rayonnée, et se rapprochant le plus de la forme symétrique. Son squelette se compose de cinq rayons, comme celui de l’'Oursin comestible. Ces rayons ont de même l’orifice buccal pour point de départ; mais comme cet orifice est transversal, et un peu en arrière du bord de la boîte osseuse, dans la face inférieure, on peut y distinguer un rayon impair et DES ÉCHINODERMES. 59g deux rayons pairs. Le premier est perpendiculaire à la lèvre la plus rapprochée du bord de la boîte osseuse. La paire qui vient immédiatement après ce rayon part de cette même lèvre, sur les côtés, et se dirige vers la péri- phérie, en s’arquant un peu du côté du rayon impair. Les deux autres rayons partent de chaque commissure de la bouche, et se portent, en s’écartant très-peu l’un de l’autre, vers le bord le plus éloigné de cet orifice, où se trouve l'anus. Ces cinq rayons sont de longueur fort inégale à la face in- férieure de la boîte osseuse, à cause de la position de la bou- che, qui est ici très-excentrique; ils convergent régulièrement, du côté supérieur, vers le centre de la voûte que forme la boîte osseuse, et où se trouvent les quatre orifices des orga- nes génitaux et le pôle génital. Ils se composent de même des séries de pièces vertébrales et costales que nous avons reconnues dans les Qursins ré- guliers. Les pièces vertébrales diffèrent peu entre elles pour la forme, et même pour les dimensions, du moins à la face in- férieure. À la face supérieure, elles diminuent à mesure qu'elles convergent vers le pôle génital. Mais les pièces costales destinées à remplir les intervalles des rayons et à réunir ces rayons entre eux, sont d'autant plus grandes, que ces rayons sont plus écartés l’un de l’autre. Soudées entre elles à la face inférieure, sans doute pour la solidité des mouvements, elles sont peu nombreuses; mais elles correspondent de nouveau aux pièces vertébrales, par leur nombre, dans la face supérieure de la boîte osseuse. La boîte osseuse des Spatangues présente donc une com- 600 DE L'ORGANISATION position identique avec celle des Cidarides. On y démontre de même cinq rayons, qui vont de la bouche au pôle supé- rieur ou génital. Chaque rayon se compose également de deux séries de pièces vertébrales, qui en forment la partie moyenne, et de deux séries de pièces costales, qui sont réu- nies par suture aux deux côtés de celles-ci. Les pièces vertébrales à travers lesquelles communiquent les appendices vésiculeux externes de toute espèce, soit tac- tiles, soit respirateurs, soit locomoteurs, avec les organes internes correspondants, ont, à cause de ces connexions, plus de constance dans leur forme et leur nombre, que les pièces costales qui n’ont pas cet emploi. Mais la position excentrique de la bouche a entraîné de l'inégalité dans la longueur des rayons, des différences plus ou moins grandes dans l’étendue des intervalles qui les sé- parent, et dans les dimensions des pièces qui remplissent ces intervalles. Il en résulte que ces rayons ne sont plus sy- métriques, et que cette asymétrie se remarque uniquement dans la partie costale de chaque rayon. Le déplacement de l’anus, qui s’est séparé du pôle génital, pour se poser entre les pièces costales de deux rayons, n’in- flue presque en rien sur la forme et les dimensions propor- tionnelles de ces rayons et des pièces qui les composent. Aussi peut-il être percé à l'extrême bord, ou bien s’en éloi- gner plus ou moins pour occuper sa face inférieure ou supé- rieure : cela ne forme pas un caractère différentiel impor- tant; les Zoologistes systématiques l'ont reconnu dans quelques cas. Ce qui vient d’être dit montrera qu'il en est autrement de la position de la bouche, de laquelle partent les cinq DES ÉCHINODERMES. 6o1 rayons qui composent toujours la boîte osseuse des Échini- des, pour converger vers le pôle génital. Lorsqu'on s’est appliqué à ne voir dans les Spatangues que la différence dans leur forme générale, et surtout dans la position de la bouche et de l’anus, sans reconnaître leur composition rayonnée, formée de même de cinq rayons; on s’est arrêté, selon nous, à la surface, aux premières appa- rences, sans voir ce que cette comparaison des Oursins réguliers et des Spatangues , et par suite, de tous les Échi- nides , présentait de plus important, relativement à l’uni- formité de sa composition rayonnée. $ IL. Après ces préliminaires sur la composition générale du squelette des Échinides, nous pouvons entreprendre de le comparer avec celui des Astérides, sans craindre de ne pas être compris. Afin de rendre les détails dans lesquels nous allons entrer plus faciles à saisir, nous avons fait dessiner (1) la coupe d’un rayon libre de l’Æstérie glaciale (2) (Asteracanthion glacia- lis, M. et T.) faite près de la base; celle d’un des cinq rayons (1) C’est M. Focillon, licencié ès sciences naturelles , et mon prépara- teur au Collége de France, qui a exécuté ces dessins avec toute l'intelli- gence et toute l'exactitude désirables. (2) PL I, fig. r. HPEXX 76 602 DE L'ORGANISATION soudés de l’Æsteriscus palmipes, M. et T., (1) et celle de la coupe d’un rayon de l'Oursin comestible (2) en indiquant par les mêmes lettres les parties comparables et exactement correspondantes. La coupe de l'Oursin représente celle d’un rayon qui se compose de l'aire dite ambulacraire dans sa partie moyenne et de la moitié des deux aires inter-ambulacraires sur les côtés. Ces dernières sont les côtes, et la partie moyenne la colonne vertébrale de ce rayon symétrique. On reconnaîtra facilement que les pièces moyennes (a et b), dans les deux espèces d’Æstéries et dans l’Oursin (3), forment ce qu'on regarde depuis longtemps, dans les Æstéries (4) comme le corps de la vertèbre ; que la pièce latérale (c) est une sorte de côte, très-courte dans les Astéries, très-longue dans l'Oursin; qu’à l'extérieur de cette dernière pièce se voient, dans l’Oursin, plusieurs séries de petites pièces (d) destinées à soutenir les piquants ; que ces mêmes pièces, rapprochées dans l’Oursin, sont plus ou moins distantes dans l’Æstérie, et que chacune d’elles correspond de même à un piquant, et est destinée à le soutenir. Dans un rayon séparé d’Astérie, le squelette est aussi su- perficiel, dans toutes ses parties, que celui de l'Oursin, éga- (ONPIEL; fs 2° CREME: (3) Elles sont traversées par un ou deux canaux, établissant la commu- nication entre les pieds vésiculeux (p. p.) et les vessies internes corres- pondantes (v.). (4) Voir, dans l'ouvrage cité du célèbre Tiedemann, l'explication de la fig. 1 de la pl. IX. Q DES ÉCHINODERMES. 603 lement recouvert par la peau, et revêtu en dedans par le péritoine, lorsque la cavité viscérale s'y prolonge. Seulement, dans certaines espèces (l’Æstérie glaciale), c'est la partie vertébrale proprement dite qui est la plus super- ficielle; tandis que les parties costales sont séparées de là peau par des renflements de tissu fibro-celluleux, formant ces tubercules que les piquants traversent, et qui semblent leur.servir de gangue. Je ne comprends pas, d'après cela, pas plus que M. Agas- siz, qu'on ait pu regarder la partie vertébrale proprement dite d’un rayon comme formant un squelette interne, et les parties latérales qui viennent s'y joindre, sur les côtés, comme constituant un squelette superficiel : cette différence n'existe pas. L'ensemble de toutes ces pièces, dans les Astéries, com- pose un squelette interne, ainsi que Je viens de le dire, mais superficiel, ou périphérique, comme chez les Oursins (1). Dans l’Astérie à rayons libres, les deux bords internes des (x) Voici les expressions de M. J. Müller : « Les Astérides sont des Échinodermes en étoile ou polygonales, le plus généralement de forme pentagonale, qui, outre un squelette cutané, ont un squelette intérieur , qui manque à tous les autres. « Ce squelette consiste en autant de séries d'articles réunis par des articulations, qu’il y a de bras, et part toujours du côté ventral de l’en- veloppe commune, et particulièrement de la bouche. « Chez les Astérides, ces séries d'articles forment le plancher du sillon ventral, et le squelette de la peau s'appuie des deux côtés du sillon sur ces vertèbres , de telle sorte qu'il en résulte une cavité viscérale dans la- quelle se prolongent les cœcum de l'estomac, et en partie les organes ge- nitaux , etc. » 76. 6Go4 DE L'ORGANISATION parties costales du rayon se soudent entre eux pour inter- cepter une division de la cavité viscérale que comprend cha- que rayon. Dans l’Oursin, ils se soudent aux parties correspondantes du squelette qui appartiennent aux deux rayons voisins, de manière que les cinq rayons ne forment qu’une seule cavité viscérale commune. Quelque chose d’analogue a lieu dans l’Æstérie à rayons soudés, sauf que la cavité viscérale est bornée à la partie centrale du pentagone, et que la cavité des rayons est inter- ceptée par des colonnes osseuses qui vont d’une face à l’au- tre, et qui aboutissent à des pièces isolées du squelette péri- phérique, les analogues de celles qui soutiennent les piquants dans l’Æstérie à rayons libres. Cette disposition rappelle les cloisons osseuses qui divisent la cavité viscérale des Oursins aplatis, tels que ceux de la famille des Clypéastres. Dans l’Oursin, toutes les parties du squelette sont telle- ment articulées par suture, que leur ensemble forme une vé- ritable boîte osseuse, laissant seulement un vide aux deux pôles pour des pièces accessoires appartenant à la bouche ou aux organes génitaux, ou autres, qui conservent une cer- taine mobilité, soit entre elles, soit relativement au reste du squelette. Dans un rayon d’Æstérie, au contraire, l’ossification est incomplète; l’ensemble n’est encore que membraneux ; c'est un périoste général, dans lequel il se forme autant de capsules de même nature qu'il doit y avoir de parties distinctes, restées cartilagineuses , ou plus ou moins ossi- fiées. DES ÉCHINODERMES. 605 La plupart des pièces durcies ne sont que cartilagineuses. Au lieu de se toucher, elles sont comme dispersées dans l’é- tendue de ce squelette membraneux. L’aspect de la série des pièces médianes, dans la cavité du rayon, est frappant de ressemblance avec la colonne verté- brale d’un Vertébré, considérée dans la cavité viscérale en général, ou dans les cavités thoraciques ou abdominales de ceux qui les ont séparées. Cette comparaison incontestable, par sa justesse intuitive, oblige de considérer lOursin comme ne montrant, de toutes parts, que sa face dorsale; et l’Æstérie, comme ayant sa face dorsale précisément du côté que l’on a désigné jusqu'ici comme la face abdominale. La position du cordon nerveux principal de chaque rayon de l’Æstérie, le long de la ligne médiane du sillon, entre les rangées de pieds, sous la peau et au côté dorsal des vertè- bres, semble corroborer la détermination que nous venons d'indiquer. Cette position relative est, en effet, celle du canal verté- bral qui manque ici. Mais dans les Oursins, il faut le reconnaître, les mêmes relations sont changées. Le principal cordon nerveux de chaque rayon est en dedans du squelette, dans la cavité vis- cérale, où il est joint au tronc vasculaire qui envoie des branches à la double série de vésicules respiratrices, en rap- port avec les pieds vésiculeux. Cette position relative, si différente, qui semble transfor- mer les moelles épinières des Æstéries en autant de cordons sympathiques dans les Oursins, montre que, dans ce cas, il n'y a que la disposition et les connexions générales qui soient 606 DE L ORGANISATION changées, et nullement les distributions particulières et les usages fonctionnels. Concluons-en qu'il y a, dans les compositions organiques dont nous cherchons à apprécier les ressemblances, de très- évidentes et très-nombreuses analogies, plutôt qu’une iden- tité complète, $ I. DES PIQUANTS DANS LES ÉCHINIDES. Dans les Échinides, les piquants sont constamment articu- lés à un tubercule arrondi , plus où moins saillant, apparte- nant à l’une des plaques vertébrales ou costales, comme une épiphyse appartient à son os chez les Vertébrés. La facette articulaire du piquant est plus ou moins concave, pour se mouvoir sur la convexité de ce tubercule, que l'on peut dé- tacher assez facilement de la plaque à laquelle il ap- partient. Dans le Spatangue cœur (1),la partie articulaire de chaque piquant se compose d'une grande surface (a), inégalement conique, couronnée par une crête (b), à laquelle s’attachent les muscles (c) de l'articulation ; son sommet est un tubercule sphérique (c), formant proprement la facette articulaire; au milieu de ce tubercule, il existe une fossette pour l’attache d'un ligament (d), semblable à celui qui fixe la tête du fémur (1) PL, fig. G- 1,2 et 3. DES ÉCHINODERMES. Gor chez l'Homme et les Mammifères, au fond de la cavité arti- culaire correspondante du bassin. C'est autour de ce tubercule que s'attache la capsule arti- eulaire (4); elle se fixe d’autre part à la couronne de petits tubercules (f) qui entourent la base du mamelon articu- ‘laire (g) de la plaque. On voit de même, au pôle de ce ma- melon, une fossette (2) pour l’attache de l’autre extrémité du ligament rond. Il n’existe pas, dans les Vertébrés, d’articulation plus par- faite, pour la liberté des mouvements en tous sens, et mieux armée de muscles pour les produire, sinon avec une grande force, du moins dans toutes les directions, puisque de petits muscles entourent complétement cette articulation, et peu- vent la fléchir de tous les côtés. La distance entre leur attache au piquant et le point d'ap- pui de ce levier facilite encore leur action. Dans le genre £chinus (1) la partie du piquant entourée par les petits muscles (i) est plus régulière; elle est couronnée par un cercle de tubercules (b), auxquels viennent aboutir les cannelures du piquant, et qui donnent attache aux pe- tits muscles qui enveloppent aussi de toutes parts cette arti- culation. La saillie articulaire (a) du piquant a, dans son som- met, une fossette articulaire plus marquée ( /), dans laquelle pénètre le tubercule (d) de la plaque correspondante du squelette. Cette fossette n’a pas de trou pour l'attache d’un ligament rond. Nos espèces n'en présentent pas davantage dans les tubercules des plaques. Si quelques-uns paraissent Re (x) PI. UT, fig. H-4. 608 DE L'ORGANISATION en avoir, c'est par accident, lorsque le durcissement n’est pas complet dans l'axe du tubercule, comme à sa circonférence ; aucun ligament d’ailleurs ne s’y attache. Dans l’Oursin comestible et, selon toute apparence, dans toutes les espèces de ce genre, le ligament rond de l’articula- tion manque. Il en résulte que les piquants sont beaucoup plus caduques que dans les Spatangues, et qu'après la mort les Oursins propres en sont très-souvent dégarnis en grande partie, tandis que les Spatangues ont conservé les leurs. Il en résulte encore, ce que nous démontrerons dans le paragraphe suivant, que les piquants sont, chez le Spatangue cœur, les principaux organes du mouvement ; tandis que, chez les Oursins propres, ils paraissent partager plus égale- ment cette fonction avec les pieds vésiculeux. La coupe transversale d’un piquant d’Æchinus esculentus montre une partie axillaire incolore. Autour de cet axe ,‘il y à un premier rang de lames minces, également incolores, qui forment comme des rayons séparés par des intervalles vides et réunis à leur bord par une lame circulaire. Au delà de cette lame, elles se continuent plus épaisses et montrent deux couleurs qui semblent indiquer encore deux autres époques d’accroissement. Ces prolongements de la première série de lames man- quent aux petits piquants, qui n'ont que cette première série et l'axe incolore qu’elles entourent. Le tubercule articulaire de la plaque sur lequel se meut chaque piquant, faisant partie du même appareil de mouve- ment, le complétant, se développe avec lui, paraît comme une épiphyse sur chaque plaque, dont on le détache facile- ment. DES ÉCHINODERMES. 609 $ IV. DES PIQUANTS DANS LES ASTÉRIES. L’Astérie glaciale (Asteracanthion glacialis, J. M. et T.) à des piquants considérables (1), soit à sa face dorsale, soit à sa face ventrale, entre lesquels s’en trouvent de moindres dimensions (2). Tous font partie du squelette; ils reposent tous sur l’un des tubercules appartenant à ce squelette (3). Comme ces tubercules, ils se développent dans une capsule comparable au périoste et de nature analogue. On dirait même qu'elle se continue avec celle du tuber- cule, pour laisser libre une partie de sa base, formant une facette articulaire un peu concave, qui se meut librement sur le sommet correspondant du tubercule, sur lequel le piquant est posé. Ces mêmes piquants sont recouverts par la peau qui est contractile, et me paraît être le seul moyen de les mouvoir. Il y a donc une analogie très-grande entre les piquants des Astéries et ceux des Oursins, et les différences viennent de celles qui existent entre le squelette, plus complétement ossifié chez les derniers, beaucoup moins ossifié chez les premiers. Il en résulte que les piquants, chez les uns (les Oursins), font partie des organes du mouvement, tandis que, chez les (1) Fig. 1,ee,e'e’. (2) Fig. 1, e”, e”. (3) Fig. x, d. TT: XX, 77 610 DE L'ORGANISATION autres (les Æstéries), ce ne sont plus que des armes défensives. Sous ce rapport, nous avons découvert un arrangement particulier et très-remarquable dans l’Æsteriscus palmipes, M.et T. On observe, de chaque côté de la double série des pieds vésiculeux, quatre rangées de piquants réunis par paires; chaque paire s'articule sur un même tubercule, et paraît devoir se rapprocher par la pointe, dans les contractions de la peau (1). La série la plus près des pieds vésiculeux est plus longue que les pieds; la série externe est de la même longueur. Ces deux séries de pinces sont évidemment des armes défen- sives, arrangées pour protéger les pieds vésiculeux contre les animaux marins qui en feraient leur proie. Cette explication deviendra plus évidente, lorsque nous aurons démontré, dans la 7roisième partie de ce mémoire, l'usage des Pédicellaires, dont cette espèce d’Astérie est de- pourvue, mais qui existent chez d’autres espèces d'un cer- tain nombre de genres de cette famille. (x) PL I, fig. 2, e ete”, et fig. 2 bis, qui représente une de ces paires de piquants grossis, DES EÉCHINODERMES. Gii AR LADA 2 MS DA SSSR AA AU AS ANSE USSR RSA LS AURAS SAARAE AT AA SARA SERA LA LAS VAR AAA AN ET AN TROISIÈME PARTIE. DES PÉDICELLAIRES. $. V. DES PÉDICELLAIRES EN GÉNÉRAL. Les Pédicellaires que l’on rencontre à la surface du corps des Oursins et d’un certain nombre d’espèces d’Æstéries, ont été le second sujet de mes études. Ce sont de petits corps de quelques millimètres de long, composés, le plus souvent, d’une tige et d’une tête en forme de pince à trois ou à deux branches, attachés aux téguments de ces animaux. Leur usage est encore problématique, quoique l'opinion que ce sont des organes appartenant aux téguments pré- vale en ce moment, et puisse être démontrée. C’est à O. F. Müller, l’auteur célèbre, entre autres, de la Zoologie du Danemark, qu'on en doit la découverte. Il les nomma et les décrivit, dans cet ouvrage, comme des animaux d’un aspect singulier, qu'il avait trouvés entre les piquants de l'Echinus saxatilis. I] en distingua et il en figura trois espèces : ce sont ses Pedicellaria globifera, tridens et tri- phylla. (PI. XVI, fig. 1-9.) 612 DE L'ORGANISATION Dans la première édition des Animaux sans vertèbres, qui a paru en 1801, Lamarck classait le genre Pédicellaire, avec les Corynes et les Hydres, parmi les Polypes nus, et ci- tait, pour exemple, la Pedicellaria globifera de Müller, qu'il regardait comme le type de ce genre. G. Cuvier assigna la même importance aux Pédicellaires, dans la première édition de son Règne animal, en conser- vant le genre Pedicellaria de O.F. Müller et de Lamarck, et il le classa de même parmi les Polypes nus, avec les Hydres, les Corynes, etc.; en avertissant toutefois que divers auteurs les regardaient comme les organes des Oursins. En 1825, M. de Blainville crut devoir consigner, pour l'histoire de la science, dans le Dictionnaire des sciences na- turelles (T. 37), au mot Pédicellaire, les caractères de ce genre et des trois espèces décrites par O. F. Müller, telles que cet auteur et Lamarck les avaient admises; il ajouta même une quatrième espèce, la Pedicellaria rotifera, décrite par Lamarck. Mais il eut soin d'exprimer ses doutes sur l'in- dividualité animale des trois premières espèces, et la certi- tude qu'il avait acquise, d’après ses propres observations, que la quatrième espèce avait été faite avec les cirres tenta- culaires du pourtour de la bouche des Oursins, sur lesquels Lamarck avait cru découvrir cette espèce prétendue. Dans la même année (1825) M. Delle-Chiaje émettait l'o- pinion que les Pédicellaires sont, sans aucun doute, les or- ganes des Oursins. Selon cet auteur, ces prétendus polypes font partie intégrante du corps des Oursins; ils leur servent à s'attacher aux objets environnants et à saisir les animalcu- les dont ils peuvent se nourrir. Ils ont un pédicule osseux, articulé à un condyle, comme » DES ÉCHINODERMES. 613 les piquants. Leur extrémité libre se compose d’un groupe de fibres se distribuant à trois pièces osseuses, longues. grèles, ponctuées et articulées. Celles de l’'Echinus spatangus sont plus petites que les Pédicellaires de l’Echinus edulis. Dans V'Echinus neglectus, elles ressemblent au fruit du fusain (1). M. Valentin, dans sa Monographie anatomique du genre Echinus, déjà citée, distingue trois formes de Pédicellaires, . analogues aux trois espèces queO.F. Müller avait nommées. Ce sont les Pédicellaires gemmiforme, ophicéphale et tridactyle. Ces dernières se voient particulièrement, selon cet obser- vateur, autour des piquants des aires interambulacraires. Leur longueur moyenne est de 0",0044, et celle de leur tête de 0",0005 à o",oo1. M. Valentin rejette l’idée que ces di- verses formes appartiendraient à des degrés différents de développement d’un seul et même organe, attendu qu'il n’en à pas trouvé les formes intermédiaires. Dans une note de cette Monographie, ajoutée par M. Agas- siz, ce savant émet l'hypothèse que les Pédicellaires des Oursins seraient une première forme de leurs petits. Une année après, en 1842, M. le professeur Erdl publiait, dans les ÆZrchives d'histoire naturelle de H. F. Erichson, des observations détaillées sur la structure et les phénomènes vitaux des Pédicellaires, qui l'ont conduit aux mêmes con- clusions que MM. Delle-Chiaje et Valentin. La peau de l’'Oursin se continue sur la tige, la tète et les branches de ces organes tégumentaires, et paraît de même (x) Memorie sulla storia et notomia degli animali senza vertebre , etc. , in-4°, p. 324. Napoli, 1825. PI. LIV, fig. 18 et A, pour cette dernière forme. 614 DE L'ORGANISATION ponctuée de taches colorées. Il distingue trois formes de Pé- dicellaires; c’est dans l'Echinus saxatilis qu'il les a observées. La première forme répond à la Pedicellaria globifera d’O.F. Müller, et à la Pedicellaria gemmiformis de Valentin. La tête se compose de trois valves, formant un bouton à peu près sphérique quand elles sont rapprochées, et montrant, lorsqu'elles sont écartées, au centre de l’extrémité de la tige qui les supporte, une fossette, sorte de ventouse triangulaire. La peau qui les revêt, en dedans, a des cils vibratiles. Ces trois valves ont des mouvements continuels, lorsque l'animal est encore plein de vie, au moyen desquels l'organe s'ouvre et se ferme alternativement. La tige mème se fléchit ou se redresse. M. Erdl a vu les mouvements des valves per- sister pendant quelques minutes, après avoir détaché l'or- gane du corps de l'Oursin. Il distingue cette première forme comme sa première sorte d'organes à valves : sa seconde sorte est, selon lui, une forme transitoire de la première à la troisième. Il l'appelle organe à valves foliacées. Les trois valves mobiles de la tête sont en forme de feuilles, à bord denté en scie. La tige est plus roide que dans la première sorte, quoi- que couverte de même d’une peau colorée, pourvue de cils vibratiles ; elle se fléchit en spirale. Les valves se meuvent avec moins de vivacité que dans la première sorte, et leurs mouvements cessent aussitôt qu'on a séparé l’organe du corps de l'Oursin. Cette sorte d'organes à valves foliacées répond à la Pedicellaria triphylla d'O.F. Müller, et à la Pe- dicellaria ophicephala de Valentin. Les valves se touchent dans toute leur longueur , quand elles sont rapprochées, et leurs dents s’engrènent les unes dans les autres. DES ÉCHINODERMES. 615 La troisième sorte d’organe distinguée par M. Erdl, est sa Pédicellaire à pinces en tenailles; c’est la plus grande des trois. Elle est colorée dans toute son étendue. Chacune de ses trois branches, qui sont étroites, allongées et recourbée; en pointe à leur extrémité, a trois arêtes, dont les deux laté- rales sont dentées en scie. Rapprochées, elles ne se touchent que par leurs extrémités. Leurs mouvements sont prompts et énergiques. L'auteur a observé de ces organes sur toute la surface du corps de l’Oursin, entre ses piquants, et entre ses pieds vési- culeux ou ses suçoirs. Î[l a trouvé ceux de la première sorte plus nombreux dans l'hémisphère buccal ou inférieur, et moins nombreux dans l'hémisphère anal, où ceux de la troisième sorte existent en plus grand nombre. Les moins nombreux étaient ceux de la forme intermédiaire, en feuilles. M. Erdl les regarde comme des organes préhensibles, sai- sissant une proie proportionnée à leur volume, et la trans- mettant de proche en proche jusques à la bouche, pour ceux du moins qui sont éloignés de cet orifice, et pour ainsi dire au pôle opposé du corps. Il a vu des Véréides de plusieurs pouces de long, tellement saisies par ces organes, qu'ils se sont détachés du corps, plutôt que de lächer prise, lors- qu’il a essayé de mettre ces Véréides en liberté. Les observations de MM. Delle-Chiaje et Valentin, celles en dernier lieu de M. Erdl, ont avancé très-sensiblement la connaissance des Pédicellaires, relativement à leur structure et à leur nature, comme organes des Échinides. Il manque cependant un travail d'ensemble, exécuté com- parativement sur un grand nombre d'espèces de l’ordre des Échinides, pour déterminer si leur existence est générale; 616 DE L ORGANISATION ou si elle caractériserait certains genres, ou seulement quel- ques espèces d’autres genres, ainsi que MM. J. Müller et Tro- chel l’ont vu pour les Zstérides. Il faudrait s'assurer si leur forme et leurs proportions va- rient selon l’âge et le sexe? Si certaines formes, sous lesquel- les elles peuvent se présenter dans le même individu, occu- pent de préférence telle ou telle partie du corps? Si leur présence enfin, quant à leur nombre, comme relativement à leur forme, a quelque constance, dans tous les individus d'une même espèce et dans les différentes parties de la sur- face de leur corps où elles sont attachées ? En attendant que ce travail d'ensemble soit exécuté par une main habile, ayant à sa disposition une des grandes collections de ces animaux, je demande la permission d’ap- porter, au profit de la science, mon modeste tribut d’obser- vations et les conclusions que j'ai cru pouvoir en tirer. S V. PÉDICELLAIRES DES ÉCHINIDES. Jai observé les Pédicellaires de deux espèces du genre Echinus, les Echinus esculentus et miliaris (1), et d’une espèce de Spatangue , le Spatangue cœur (2). (1) Encye., pl. 133, fig. r et 2. (2) Mes exemplaires de l'Æ. esculentus viennent de Brest, Ils ont 0",080 d'un pôle à l’autre, et o",1 10 de diamètre à l'équateur. Les piquants sont vert-clair, les plus grands ont leur extrémité violette. La peau montre en- core des traces d'un rouge carmin, après un séjour de plusieurs années dans l'alcool. ‘ DES ÉCHINODERMES. Gi Les Pédicellaires de l'Oursin comestible sont de trois sortes : 1° Les plus nombreuses, mais en même temps les plus petites, ont une tige assez longue, à proportion de la tête, qui est ovale et fermée de trois valves qui figurent assez bien une tulipe. La tige se compose d’une partie osseuse grêle et cylindri- que, un peu élargie à son extrémité basilaire, par laquelle elle s'articule à un petit tubercule du squelette, et à l'extrémité opposée, au delà de laquelle cette tige n’est plus qu’un dou- ble tube membraneux transparent. Le tube extérieur est formé par la continuation de la peau; l’intérieur appartient essentiellement à l’organe; c’est la partie contractile. Nous croyons pouvoir regarder, comme le premier déve- loppement de cette forme, celle qui est représentée dans notre planche IT (fig. I, «), et son développement complet, celle figurée (a'). Ici l’on voit au milieu des trois valves principales, trois autres valves plus petites. D’autres Pédicellaires, beaucoup moins nombreuses, ont les divisions du bouton, ou de la tête, élargies et allongées en forme de feuilles, comme celles représentées par M. Erdl PI. IL, fig. 5 et 6. Nous les regardons comme une forme transitoire, comme un degré de développement de la forme définie que présente la figure (c). On reconnaît encore, dans ce premier degré de développement, la forme désignée par M. Valentin sous le nom d'ophicéphale. Nous ferons remarquer que la peau se prolonge encore sur tout l'organe, même autour des valves, et que le tube membraneux et musculeux qu’elle recouvre s’en distingue par sa forme en spirale (fig. I, 8). Cette forme Tex: 78 618 DE L'ORGANISATION rappelle les contractions, dans ce sens, que ce tube exerce dans l’état de vie. | Dans la forme définie, qui est figurée en (c), les trois branches de la tête sont très-allongées, grèêles, excepté à leur base, qui est très-élargie, sans aucune dentelure : lors- qu’elles sont rapprochées, elles ne se touchent que par envi- ron le dernier tiers de leur longueur. Le pied ne nous à rien offert de particulier, Le tube membraneux a sa partie tégumentaire beaucoup plus large que celle formée par la paroi musculo-membraneuse appartenant à la Pédicellaire. Celle-ci se continue avec le pédicule osseux, qui est long, grèle et élargi à ses deux extrémités. Ces Pédicellaires à tenailles sont les plus grandes. Nous en avons trouvé qui avaient 0°,006 de long, y compris la tête, qui mesurait 0°,0025. Toute la surface de l'Oursin, principalement à la base des piquants des aires ambula- craires, où interambulacraires, de ceux rapprochés des pieds comme des autres, en était armée. Lorsque les Pédi- cellaires tiennent par leur pied à un tubercule osseux, celui- ci est adhérent à la peau. Dans la seconde espèce d’E£chinus, \ Echinus miliaris, dont les exemplaires étaient beaucoup plus petits que ceux de la première, nous avons trouvé les formes variées représentées dans la fig. Il, &, b, c, d, e. Ces diverses formes nous ont paru indiquer évidemment différents degrés de développe- ment, depuis la première (a), qui est la plus simple, jusqu’à la forme (e), qui est la forme définitive dans cette espèce. On remarquera combien les proportions de la tête aug- mentent dans ces divers degrés de développement. Dans la Pédicellaire de la figure I, ç, nous avons trouvé des lambeaux DÉS ÉCHINODERMES. Gi de membranes qui paraissaient avoir enveloppé les branches de la pince encore peu développées. La figure IT, d, est la dernière transition, avant de passer à la forme définitive, à laquelle cette forme conduit évidemment. Dans celle-ci, les branches de la pince sont creusées en cuiller et dentées à leur bord; elles peuvent se toucher dans la plus grande par- tie de leur longueur, lorsqu'elles sont rapprochées. Les formes des Pédicellaires que nous avons observées sur le Spatangue cœur nous ont offert des différences analo- gues ; elles sont représentées, avec exactitude, figure III, 4, b, ce, d, de notre planche II. Il est impossible, à ce qu'il nous semble, de ne pas se laisser aller à l'idée que les trois premières ne sont que des degrés de développement de la quatrième, qui nous a paru la forme définitive. Celle-ci se distingue par les branches de la pince, qui sont grêles dans la plus grande partie de leur longueur, très-élargies à leur base, et en spatule à leur ex- trémité par laquelle elles se touchent. La figure P' repré- sente une de ces Pédicellaires prise entre les pinces de sa voisine. On en rencontre assez souvent qui ont ainsi l'air de se dévorer l’une l’autre. Si l’on compare les trois formes définitives que nous ve- nons de décrire, et qui sont représentées dans notre planche, avec les formes analogues des Pédicellaires de l'Echinus saæatilis décrites par M. Erdl PI. II (fig. 8 et 9), à celles de l'Echinus brevispinosus , Risso, représentées PI. IV (fig. 45 à 50) du mémoire de M. Valentin, on ne pourra s'empêcher de penser que ces différentes espèces du même genre Echï- nus ont chacune des formes de Pédicellaires qui leur sont propres. 78. 620 DE L'ORGANISATION $ VI. PÉDICELLAIRES DES ASTÉRIES. Dans l’Æstérie glaciale, Asteracanthion glacialis, M. et T. (Encyel., PL. 119, fig. 1), on trouve des Pédicellaires sur les deux faces du corps. À la face dorsale, il y en a de deux sortes : les unes, plus grandes, sont disposées assez régulièrement entre chaque série latérale et la série moyenne des tubercules épineux. Il y en a conséquemment deux séries régulières, dont chaque Pédicellaire est assez distincte de la précédente et de la sui- vante, de manière que leur nombre n’est guère, pour chaque série, que de dix ou de douze. Elles ont d’ailleurs une forme et un volume identiques, et elles ne montrent pas toutes ces différences que nous avons observées dans les Pédicellaires des Oursins. Chaque Pédicellaire se compose de deux valves épaisses, de nature calcaire (r), aplaties en dedans, arrondies en dehors, un peu allongées, qui se touchent dans toute leur étendue en se rapprochant. Ces deux valves reposent et se meuvent sur un tubercule de mème nature (%) par une articulation en charnière. Deux muscles externes, un de chaque côté, servent d'abducteurs (2), et deux internes, d’adducteurs pour chacune de ces valves (3). (1) Fig. IV, a. Cette figure représente une Pédicellaire tenant des grains de sable entre ses valves. (2) Fig. IV, @, 1-1. (3) Fig. IV, a, 2-2. DES ÉCHINODERMES. Gar Cet organe est porté par un pédicule court, membraneux, et non calcaire, mais assez résistant, puisqu'il supporte le poids de ce que nous appelons la tête de la Pédicellaire. Ce pied se continue avec la peau de l’Astérie. Des Pédicellaires beaucoup plus petites, extrèmement nombreuses, couvrent les tubercules du milieu desquels sor- tent les piquants. Elles sont groupées irrégulièrement sur ces tubercules (comme on peut le voir dans la fig. IV,b); elles y sont attachées immédiatement, sans l'intermédiaire d’un pédicule. Ces Pédicellaires rudimentaires, qui n’ont l'air, à l'œil simple, que de granulations, peuvent-elles avoir quel- que usage ? Des Pédicellaires développées, analogues à celles de la face dorsale, se voient sur la face inférieure, entre la série extérieure des piquants et les tubercules latéraux. Elles sont en petit nombre. Les plus nombreuses sont entre les pieds et les piquants ; nous en avons compté plus de soixante par série. Ces Pédicellaires sont plus grandes que celles de la face dorsale; leurs branches sont en palette; elles se meuvent aussi sur un tubercule commun, lequel est engaîné par un pied membraneux. Celui-ci est très-ample, en forme de bourse, dans une grande partie de sa longueur, et va en se rétrécissant rapidement avant de se terminer à la peau (1). (1) Notre fig. V, b', représente une de ces Pédicellaires, vue de côté ; b'', une des branches vue de face; 4’, les branches ou les valves et le tu- bercule sur lequel elles se meuvent, dégagés des membranes qui les enve- 622 DE L'ORGANISATION Nous avons aussi rencontré sur cette face inférieure quelques Pédicellaires d’une forme analogue, mais plus pe- tites. Elles nous ont paru de la même espèce, mais se déve- loppant (fig. V, a’). Dans l’Æstérie rouge (Asteracanthion rubens), les Pédicel- laires ont une singulière disposition. Les seules qui soient un peu développées sont groupées irrégulièrement autour et près de l'extrémité des piquants, qui bordent le sillon où se trouvent les pieds. Ces Pédicellaires sont aussi sessiles , c’est- a-dire, sans pied, comme celles rudimentaires des tubercules de l’Æstérie glaciale. Leur forme est plus comprimée, un peu plus allongée, plus en pincette (1). Les autres parties du corps de cette espèce n’en présentent aucune de déve- loppée. La principale différence entre les Pédicellaires des Æsté- res et celles des Oursins, ainsi que l’a observé M. J. Müller, consiste dans le nombre des branches de leur tête. Il y en à deux seulement dans les Pédicellaires des Astéries ; tandis que celles des Oursins en ont trois. Une autre différence remarquable consiste dans l’absence de parties dures dans le pied, qui est uniquement membra- neux et musculeux, et n'a pas de tige osseuse comme celui des Pédicellaires des Oursins. Mais on ne peut méconnaître les analogies qui existent entre les unes et les autres. Ce sont toujours de très-petits loppaient ; «& est une plus petite Pédicellaire, de la même espèce, mais qui n'était pas complétement développée. (x) Voir notre fig. VI. DES ÉCHINODERMES. 623 organes, propres à saisir des objets proportionnés à leur vo- lume. Ces organes sont tellement éloignés de la bouche, qu'on ne peut pas leur supposer l’usage, admis par M. Erdi, deservir d'organes de préhension des substances alimentaires, et de les transmettre de proche en proche, de la Pédicellaire la plus éloignée de la bouche, à celle qui en serait la plus rap- prochée. Voici l'hypothèse à laquelle je crois devoir m’arrèter sur leur usage. Les Pédicellaires, chez les Oursins comme chez les 4sté- ries, sont rapprochées des pieds vésiculeux, et des tentacules respirateurs chez les Æstéries. Ces organes délicats, membraneux, que l'animal ne peut retirer dans sa cavité viscérale, avaient besoin d’être pro- tégés contre les innombrables petits animaux dont la mer abonde. Il me semble que l’on peut regarder les Pédicellaires comme des armes défensives, au moyen desquelles les OQur- sins et les Æstéries repoussent les agressions de ces animalcu- les voraces de toute espèce, en les saisissant entre leurs pinces. Aussi les Oursins, qui avaient le plus besoin de ces armes défensives, à cause de leur peu de locomotilité et de la roi- deur ou de l’immobilité des parties de leur squelette, en sont-ils le plus abondamment pourvus; tandis que les 4sté- ries, plus mobiles, en présentent beaucoup moins dans les espèces qui en sont armées, et qu'un grand nombre en manque. Dans l’état actuel de la science, il n’est plus possible de considérer les Pédicellaires, avec O. F. Muller, comme des 654 DE L'ORGANISATION animaux parasites; pas plus que comme des Oursins ou des Astéries se développant à la surface de leurs parents, suivant l'hypothèse avancée par M. Agassiz en 1844, et qu'il paraît avoir complétement abandonnée en ce moment. Les Pédicellaires n'existent pas seulement dans la classe des Échinodermes; un genre de l’ordre des Polypes cellular- res ou ascidiens , le genre Acamarchis Lamouroux, a une espèce, bien connue depuis Erzis (4. avicularis) qui a, près de l'entrée de chaque cellule, un appendice en forme de téte d'oiseau, dont la mandibule inférieure se rapproche ou s’é- loigne de la supérieure par des mouvements alternatifs, con- tinuels, suivant les observateurs. Ces appendices, dont on n'a pas compris jusqu’à présent, à ma connaissance , ni l’u- sage, ni les analogies, sont les Pédicellaires de ces ani- maux (1). (1) Voir la pl. 69, 2, de l'édition illustrée du Règne animal de Cuvier (Zoophytes ); et, en premier lieu , Jean Ellis, dans son Essai sur l’histoire naturelle des Corallines, pl. XXXVIIT, fg. 7, G, H,1, K,L, etpl. XX, 2, A;et la Fauna pontica de M. Nordmann, pl. 3. DES ÉCHINODERMES. 625 RE QUATRIÈME PARTIE. DES APPENDICES VÉSICULEUX LOCOMOTEURS ,; RESPIRATEURS ET TACTILES QUI GARNISSENT LES PIÈCES VERTÉBRALES DES RAYONS, CHEZ LES ÉCHINIDES. L'un des systèmes d'organes les plus singuliers, les plus exceptionnels, qui distingue la plus grande partie des Échi- nodermes (les Échinodermes pédicellés) est, sans contredit, celui de ces vésicules cylindriques ou coniques, plus ou moins rétractiles et protractiles, qui paraissent dans certaines par- ties de la surface du corps de la famille des Aolothurides ; qui garnissent et limitent, de chaque côté, les aires ambulacrai- res ou les séries vertébrales des rayons, chez les Échinides et les Æstérides. MM. Tiedemann et Delle-Chiaje l'ont décrit et figuré avec détail, et après eux, M. Volkmann (1).— Je l'ai fait connaître dans le tome VI des Lecons d'anatomie comparée (2° édition), qui a paru en 1839, sous le nom de Système vasculaire cutané locomoteur. Les différences que présente ce système, dans ses différen- AMENER SELON GA CE LRQ ER (1) Wiegmans archiv. 1838. . XX. 79 626 DE L'ORGANISATION tes parties, ont besoin d’être étudiées de nouveau dans un certain nombre d'espèces des diverses familles naturelles. Celles qu'il m'a présentées dans l'Oursin comestible (Echinus esculentus) et dans le Spatangue cœur (Spatangus purpu- reus), me le persuaderit. S VII. Dans les Oursins proprement dits, et dans toute la famille des Cidarides , ce système vasculaire sous-vertébral ne pa- raît avoir que des appendices locomoteurs. Ces appendices, connus sous le nom de pieds vésiculeux, sont disposés en rangées régulières, qui vont, comme des méridiens, du bord de l'ouverture du squelette, qui est au pôle buccal, jusqu'à celle du pôle anal. Leur structure musculo-membraneuse, la ventouse qui la termine, leur forme cylindrique, où un peu élargie à leur base; les nombreuses fibres musculaires, disposées circulai- rement, qui constituent leur membrane moyenne, entre la peau qui les recouvre et leur membrane interne qui contient le liquide qui les pénètre, sont bien connus. Dans l’£chinus esculentus où nous les avons étudiés, cha- cun de ces pieds communique avec une vessie correspon- dante, accolée à la même partie du squelette, par deux tubes obliques qui sont la continuation de leur membrane interne et des parois de la vessie, dans laquelle ils s'ouvrent. Ces tu- bes traversent deux canaux de même dimension, percés dans une des pièces vertébrales (1), de telle sorte que leurs (a) PIE, fig. D. DES EÉCHINODERMES. 627 - orifices extérieurs sont plus rapprochés, et leurs orifices in- térieurs plus écartés. Tous les appendices vésiculeux de chaque rayon ont la même structure et le même usage. Ce sont des pieds ou des organes préhensiles et locomo- teurs, qui s’allongent considérablement par la contraction de leurs fibres circulaires, qui parviennent ainsi à dépasser ces piquants, et dont l'animal applique la ventouse aux corps environnants. Îl s'avance vers ces corps par le raccourcisse- ment de ces mêmes pieds, que produit la contraction de faisceaux musculeux longitudinaux que ces pieds renferment et qui s’attachent d'autre part à la pièce vertébrale corres- pondante à la ventouse. La vésicule interne (or) qui appartient à ce pied ne me pa- raît pas devoir contribuer à le raccourcir en le dilatant, par l'impulsion qu’une forte contraction des parois de cette vessie donnerait au liquide qu'elle renferme. L'idée qu'elle lallon- gerait en y chassant ce même liquide, idée répétée dans tous les ouvrages, me paraît encore plus erronée. Je n'ai pu découvrir dans les parois de cette vessie aucune fibre musculaire bien évidente. Le tissu de ses parois, vu à un faible grossissement, m'a paru uniquement granuleux et cellulaire, et non fibreux. Chacune de ces vessies internes (fig. D vr) est un organe de respiration, de forme aplatie, triangulaire, dans l'étendue duquel se ramifient des canaux sanguins. Leurs principaux troncs sont en communication en dehors, par les deux con- duits qui traversent le squelette, avec un pied vésiculeux ; et, en dedans, avec une branche vasculaire (fig. D br), qu appartient au tronc qui parcourt toute l'étendue de la ligne 70: 698 DE L'ORGANISATION médiane d’un rayon pour s'ouvrir dans un anneau vasculaire central, situé autour de l’origine du canal alimentaire. Cet arrangement est bien connu. Il y a, dans la structure de ces vessies, beaucoup d’analogie avec celle des lames branchiales des crabes. Le fluide nourricier que renferme ce système de vaisseaux, de vésicules respiratrices et de pieds, s'y meut par les con- tractions et les dilatations de ces derniers appendices, qui sont, relativement à ce système, comme autant de cœurs, donnant l’impulsion au liquide qu'ils renferment, mais ne la recevant pas de lui. Il y a dans les Oursins, et dans l'espèce, en particulier, que nous venons d'étudier, deux autres espèces d’appendiees, si- tués au pôle buccal, mais qui ne font nullement partie du système vasculaire locomoteur et respirateur. Les uns sont des appendices préhensiles, et sans doute tactiles ; ce sont des tubes membraneux rétractiles et protrac- tiles, au nombre de dix, rapprochés sensiblement par paires, qui ne communiquent pas avec la cavité viscérale, mais qui sont attachés à autant de plaques rondes calcaires , saillantes du côté interne. Ces appendices ont l'extrémité libre terminée en godet, et pourraient bien servir principalement à fixer vers la bou- che la proie que l’animal est occupé à dévorer. L'autre sorte d’appendices, qui n’est pas liée immédiate- ment avec le système vasculaire cutané que nous venons de décrire, se voit, comme nous venons de le dire, au même pôle buccal que les précédents; mais plus loin de l'ouverture buccale, dans le bord de la peau qui remplit le vide en forme de rosette que laisse de ce côté la boîte osseuse. DES ÉCHINODERMES. 629 Ces appendices sont de mème au nombre de dix, rappro- chés par paires entre deux angles de la peau buccale, qui correspondent aux espaces interambulacraires, ou aux deux séries costales appartenant à deux rayons; tandis que les cinq paires de la première sorte, ou les tentacules préhensi- les, répondent aux séries vertébrales de chaque rayon. Les derniers de ces appendices sont des tubes branehus dans leur partie libre, ayant les extrémités de ces branches percées, et s’ouvrant par leur tronc autour de la lanterne ou des arcs osseux qui font partie du squelette et du mécanisme compliqué de la mastication. On les regarde généralement comme les organes qui prennent au dehors le liquide respi- rable et le versent dans la cavité viscérale. Ils appartiendraient, dans ce cas, au système d'organes vasculaires respirateurs et moteurs que nous avons décrit en premier lieu, mais sans avoir de connexion immédiate avec ce système. Ainsi, les Oursins proprement dits, et, selon toute appa- rence, tous les genres de la famille des Cidarides, Acassiz, et de celle des Galérides, que nous proposerons, à la fin de ce travail, de démembrer de celle des Cassidulides , n'auraient, dans la partie vertébrale de leurs rayons, d’un pôle à l’autre, que des appendices moteurs (les pieds vésiculeux) de même structure, en liaison immédiate avec les vessies respiratrices internes et le système vasculaire sous-vertébral. Nous proposerons de réunir ces Oursins dans une pre- mière section des Échinides, sous le nom d’Æomopodes. Cette section comprendrait les familles des Cidarides et celles des Galérides. 630 DE L'ORGANISATION $ VIII. Avant d'examiner plus en détail, sous ce rapport, les quatre familles que MM. Agassiz et Desor viennent de recon- naître dans cet ORDRE des ÉCHINIDES, je dois décrire le même système d'organes vasculaires et respirateurs sous-vertébral, et les divers appendices externes dans le Spatangue cœur. Ici les nouveaux points de vue sous lesquels nous avons étudié ce système nous ont conduit, si nous ne nous trom- pons, à une connaissance plus exacte de leurs différentes structures, de leurs rapports et de leurs fonctions, ainsi qu'à des conelusions importantes sur les familles naturelles de cet Ordre. Il ya, dans le Spatangue cœur, appartenant au même sys- tème vasculaire et liés par les principales branches de ce système : 1° des pieds vésiculeux ou des appendices locomo- teurs; »° des appendices préhensiles et tactiles qui entourent la bouche à une grande distance; 3° des vessies branchiales ou respiratrices internes et externes. Le système vasculaire est ici très-facile à reconnaître par sa couleur noire. Il se compose d’une partie centrale en forme d'anneau qui suit les contours de la bouche ou du pharynx, et de cinq troncs qui partent de cet anneau, en suivant la ligne médiane des cinq séries de pièces vertébrales, et con- séquemment des cinq rayons. Des cinq troncs vasculaires naissent à droite et à gauche, alternativement, des branches transversales, qui vont à la double série de vésicules internes et d’appendices vésicu- k Ë | DES ÉCHINODERMES. 631 leux externes qui sont attachés en dedans et en dehors de la partie vertébrale des rayons. 1° Les pieds vésiculeux du Spatangue cœur sont peu nom- breux dans les quatre rayons qui ont des branchies externes. J'en ai compté douze à quatorze au plus par rayon, dans la paire la plus longue, et seulement dix dans la paire la plus courte. Les pieds du rayon qui manque de branchies internes sont beaucoup plus nombreux ; il y en a trente-quatre. Leur forme est cylindrique, allongée. La ventouse qui les termine n’est pas en forme de disque, séparé du pied propre- ment dit par un étranglement. On observe, à travers la peau très-mince et transparente qui les recouvre, une couche de fibres musculaires, ou plutôt de faisceaux musculeux, qui les entourent comme autant d’anneaux, et doivent les allonger en se contractant (1). Chacun de ces pieds n’a qu’un seul canal de communica- tion avec une petite vessie interne appliquée contre la paroi viscérale de la même pièce vertébrale du squelette. Ce mème canal se continue dans une branche vasculaire qui se rend immédiatement dans le tronc commun qui règne depuis l'anneau buccal jusqu’au pôle génital, le long de la ligne mé- diane de! chaque rayon. Ce canal unique, tandis qu'il y en a deux dans les pieds vésiculeux des Échinides que nous appellerons Homopodes , n'est pas la seule différence que présente cet appareil dans les Oursins et les Spatangues. Les vessies sont plus petites, et leurs parois sont évidemment musculeuses; les fibres de cette G) PL UN, fig. Bet Bp. 632 DE L'ORGANISATION nature y sont disposées dans différents sens, pour les contrac- ter dans toutes les directions. 2° Appendices tactiles. Des appendices d’une autre nature, assez nombreux, garnissent chaque rayon à son origine au- tour de la bouche. Il y en a huit dans le rayon locomoteur, onze où douze dans la paire antérieure, et six ou sept dans la paire postérieure des rayons respirateurs. Ces appendices tactiles, ou ces tentacules, sont cylindri- ques ou un peu coniques, et terminés par un disque, au pourtour duquel sont implantées, en plus grand nombre, et sur lequel sont attachées en moindre nombre, beaucoup de papilles qui donnent à l’extrémité libre de ces tentacules l'aspect d'une houppe (fig. C t.). Chacune de ces papilles est conique et fixée par le sommet du cône ; elle est soute- nue par un petit bâton calcaire de forme cylindrique. La base du tentacule est fixée à une proéminence (tb, fig. C) de la pièce vertébrale correspondante. Il se compose de la continuation de la peau, de fibres circulaires très-peu prononcées, et de muscles longitudinaux qui vont du tuber- cule que venons d'indiquer au disque terminal. Ce tentacule a, comme les pieds vésiculeux, un seul canal de communication avec une vessie interne (vt), plus volumi- neuse, mais de même structure que celles de ces pieds, et dans les mêmes rapports, par une branche vasculaire trans- versale (br), avec le tronc vasculaire vertébro-radial. Nous ferons remarquer ici une très-grande différence en- tre les palpes de l’'Oursin comestible et ceux du Spatangue cœur. Dans le premier, ils n'ont aucun rapport avec l'appa- reil vasculaire compliqué que nous décrivons; tandis que dans le dernier ils en font une partie essentielle. DES ÉCHINODERMES. 633 3° Appendices respirateurs. La troisième espèce d’appen- dices que nous avons à décrire dans le Spatangue, est celle qui appartient à cette partie des quatre rayons dorsaux qui dessinent autant de pétales. Ces appendices sont des branchies externes (1), de forme triangulaire, circonscrites par deux canaux principaux qui en font le tour, et qui communiquent encore entre eux, par un certain nombre de branches transversales, plus ou moins divisées en rameaux. Chacune de ces branchies externes se continue par deux canaux membraneux, qui traversent obliquement deux ca- naux osseux de la pièce vertébrale (ps) correspondante, avec une branchie interne beaucoup plus considérable, mais de même structure; et celle-ci a sa branche vasculaire trans- versale qui se rend dans le tronc radial commun (2). Ces vessies, ainsi que les vaisseaux du même système, ren- ferment un sang noir, composé de nombreux globules (3), de forme lenticulaire, ayant chacun un noyau considéra- , (:) PL INT, fig. A. Cette figure représente les deux branchies, ou vessies respiratrices interne (pr) et externe (vr') correspondantes, et leurs rapports. (2) La fig. E donne une idée nette de l’ensemble des branchies in- ternes, appartenant aux quatre rayons. On y verra qu'elles n’ont pas un égal développement, et que leur étendue est proportionnée à l'espace qu'elles peuvent occuper depuis les trous de communication, jusqu à la ligne médiane du rayon. Elles disparaissent plus tôt vers le pôle génital, du côté antérieur de chaque rayon , que dans la rangée opposée. J'en ai compté vingt et une dans la rangée antérieure, et quatre ou cinq de plus dans l’autre. (3) Fig. J. XX: 80 634 DE L'ORGANISATION ble, qui paraît contenir plus particulièrement la matière colo- rante. Ces globules ressemblent beaucoup à ceux observés par M. de Quatrefages dans la Synapte de Duvernoy. Leur diamètre est de 0"",008. Ainsi, les trois espèces d’appendices que nous venons de décrire dans le Spatangue appartiennent à un même système vasculaire, contenant un sang à globules noirs. Ces appendices sont modifiés pour trois usages différents, la locomotion, le toucher et la respiration. CONCLUSIONS. Si je ne me trompe, voici les améliorations dans les idées, et par suite dans la nomenclature, dans la classification des Échinides et dans leur physiologie, que les observations ana- tomiques dont il est question dans ce Mémoire, pourront introduire dans la science. 1° Chaque rayon d’'Oursin ou d’Échinide se composant, dans sa partie moyenne, de deux séries de pièces osseuses vertébrales, portant des pieds vésiculeux, où des branchies externes, il sera plus exact de nommer cette région verté- brale, que de l'appeler ambulacraire. 2° La région dite interambulacraire sera la région cos- tale, composée de deux séries de côtes appartenant aux deux rayons voisins. Cette région, dans les Échinides, ne porte que des piquants et n’a pas d’appendices vésiculeux. DES ÉCHINODERMES. 635 3° L'ordre des Échinides, dans la méthode que je propose, se diviserait en deux sections : celle des Échinides homopodes, dont la région vertébrale est uniforme dans chaque rayon, et n’a, d'un pôle à l’autre, que des pieds vésiculeux ; Et celle des Échinides exobranches, qui ont tous une rosette à cinq ou quatre pétales, plus ou moins prononcés, dans la face dorsale et la partie vertébrale de leurs rayons, et des bran- chies externes, au lieu de pieds vésiculeux dans cette partie. Dans les Échinides de cette dernière:section, il y a une dou- ble série de trous dans les pièces vertébrales, qui dessinent les contours des pétales ; tandis que dans le reste de la partie ver- tébrale des rayons, qui porte les pieds vésiculeux ou les appen- dices tactiles, chacun de ces appendices ne répond qu'à un seul trou percé de même dans une seule pièce vertébrale. 4 La première section comprend deux familles : celle des Cidarides, telle que MM. Agassiz et Desor l’ont circonscrite; et celle des Galérides, que j'ai proposé de démembrer des Cus- sidulides des mêmes auteurs ; elle se composerait des Échini- des de cette famille que MM. Agassiz et Desor appellent à am- bulacres simples ; c’est-à-dire qu'ils manquent de rosette dor- sale, et conséquemment, d’après nous, de branchies externes. Déjà M. Desor, dans sa Monographie du genre Galérite, avait fait pressentir les rapports qui existent entre ce genre et les Cidarides. L'anatomie, qui m’a fait apprécier le carac- tère important indiqué par la présence de cette rosette, ma de suite conduit à l'intelligence et à l'appréciation organique et physiologique de ce rapport, et à mieux classer ce groupe des Cassidulides. 5 Notre seconde section des Échinides comprendrait : A. La famille des Cassidulides, qui ne se composerait plus 80. 636 DE L'ORGANISATION que des genres à rosette dorsale, c’est-à-dire à branchies ex- ternes ; B. La famille des Clypéastroïides ; C. Et celle des Spatangoïdes, telles que MM. Agassiz et Desor les ont circonscrites et caractérisées. 6° L’accroissement des piquants me paraît avoir lieu par époques et par couches, qui se recouvrent successivement au moyen d'un périoste sous-cutané. (Voir la 2° partie, page 608.) 7° Les Échinides homopodes ayant un grand nombre de pieds vésiculeux, qui répondent à autant de branchies inter- nes, ces pieds doivent être leurs principaux organes du mou- vement. M. Tiedemann a vu l'£chinus saxatilis s'élever, au moyen de ces pieds, le long des parois verticales des bocaux dans lesquels il les conservait. 8° Dans les Échinides exobranches, le nombre des pieds vésiculeux est petit, les piquants sont plus nombreux, leur articulation mieux affermie. Ces piquants me paraissent de- voir être, pour les Échinides de cette section, les principaux organes moteurs. 9° Leurs branchies externes, qui existent simultanément avec les branchies internes, contribuent sans doute à une oxygénation plus complète de leur sang, et à donner aux muscles des piquants plus de puissance. 10° Leur sang est noir et composé de nombreux globules, variant un peu dans leur diamètre, ayant un gros noyau au milieu, qui renferme plus particulièrement leur subs- tance colorante, comme dans les animaux supérieurs. 11° Les pieds vésiculeux et les branchies correspondantes dans les Æchinides homopodes forment, avec les branches DES ÉCHINODERMES. 657 vasculaires et les troncs médians des rayons auxquels ces branches se réunissent, et l'anneau vasculaire circumpbha- ryngien dans lequel s'ouvrent les cinq troncs radiaux, un système sanguin moteur et respirateur, dans lequel le sang doit avoir un mouvement de va-et-vient, qui lui est im- primé par les contractions et les dilatations des pieds vésiculeux. Les vessies respiratrices ne me paraissent pas y contri- buer, quoiqu'on leur ait attribué jusqu'ici l'érection des pieds vésiculeux. 12° Les organes de respiration externes et internes des Échinides exobranches appartiennent au même système vas- culaire, mais ne contribuent pas au mouvement du sang dans ce système. Les pieds vésiculeux , au contraire, ainsi que les appendi- ces tactiles, qui font partie de ce même système, et dont la vessie interne correspondante à chacun de ces appendices a des fibres musculaires évidentes, sont ici les organes d’im- pulsion du fluide nourricier. 13° Les Pédicellaires sont des organes de défense des Échinides et des Astérides qui en sont pourvues. Ils préservent des attaques des myriades d’animalcules voraces qui abondent dans la mer, les pieds vésiculeux et autres appendices membraneux de ces animaux. Ces organes paraissent avoir des formes différentes daris chaque espèce. Ils ont des caractères distinctifs généraux dans les Échini- des , chez lesquels leur pince a constamment trois branches, et dans les 4stérides, où elle n’en a plus que deux, ainsi que l'ont déjà dit MM. J. Müller, Froschel. 638 DE L'ORGANISATION Leur pédicule a d’ailleurs une tige calcaire dans les Échi- nides, qui manque dans les Astérides. Ce pédicule peut même disparaître entièrement dans ces dernières. Les différentes formes de Pédicellaires qu'on observe dans un même individu, sont le plus souvent différents de- grés de développement de ces organes. 14° Les organes en forme de tête d'oiseau de certains Polypes cellulaires, sont les Pédicellaires de ces animaux. ( Voir page 624.) EXPLICATION DES FIGURES. PLANCHE I. Fig. 1. Coupe transversale d’an rayon d’Asteracanthion glacialis, 3. M. et T. Fig. 2. Mème coupe de l'A4steriscus palmipes, J. M. et T. Fig. 2 bis. L'une des paires de piquants (e”) grossie. Fig. 3. Même coupe de l’Echinus esculentus, L. Dans ces trois figures principales : a et b sont les pièces vertébrales. c, une pièce costale. d, série de pièces destinées à soutenir les piquants ; elles sont rappro- chées dans l’Oursin et séparées dans les Astéries. DES ÉCHINODERMES. 639 e,e', e”, sont les piquants. P; P, les pieds vésiculeux. v, v, les vessies internes qui répondent à ces pieds. e ete”, fig. 2, sont les deux séries de piquants, arrangés et articulés par paires sur un même tubercule , en dehors de la série des pieds vésiculeux d'un même côté, et pouvant former la pince, pour protéger ces pieds, en place des Pédicellaires, qui manquent dans cette espèce. (Voir p. 610.) PLANCHE II. PÉDIGELLAIRES DES Oursins ET DES Astéries. Fig. L. a, & ,b, c, Pédicellaires de l'Oursin comestible (Echinus escu- lentus, L.) Fig. IL. a, b,c, d, e, Pédicellaires de l'Echinus miliaris. Fig. IL. @ , b, L', c, d, Pédicellaires du Spatangus purpureus. Fig. IV. a, b, Pédicellaires de l'Asteracanthion glacialis, face dorsale. Fig. V. à, b', b', b", Pédicellairés de la même espèce , face abdo- minale. Fig. VI. Pédicellaires de l’Asteracanthion rubens, face ventrale, pres des pieds vésiculeux. PLANCHE III. Fig. G. 1, 2, 3. Détails de l'articulation d'un piquant du Spatangue cœur. Fig. H. 4. Mêmes détails pour l'Echinus esculentus. (Voir p. 606-608.) Fig. A, B, B', C, E, F. Sont relatives aux pieds vésiculeux, aux appendices tactiles, aux appendices respirateurs et äux branchies du Spatangue cœur et de |’ Oursin comestible. Dans toutes ces figures, (vr) indique une vessie respiratrice ou une branchie interne; (w'), une branchie externe; (pv), la pièce vertébrale percée par un ou deux canaux, qui vont d’une vessie interne, respiratrice ou non respiratrice, à une branchie externe, à un appendice tactile ou à 640 DE L'ORGANISATION DES ECHINODERMES. un pied vésiculeux ; (br) est une branche vasculaire qui va d'nne vessie 5n- terne au vaisseau médian de chaque rayon, dont la coupe est marquée (c). Dans la figure B, on voit un pied vésiculeux (p)qui communique avec une vessie interne (9p) par un canal unique , percé à travers la pièce ver- tébrale (pv). La figure B' est l'un des pieds de l'abdomen, comme celui de la figure B, mais moins contracté ; (d) est son extrémité fixe, et (e) son extrémité libre. Cette figure devrait être dans une position verticale. La figure C représente un des appendices tactiles, tels qu'on les voit autour de la bouche du Spatangue cœur : (£) est cet appendice; (sb) le tu- bercule de la pièce vertébrale (pv) auquel il s’attache ; (wt) la vessie interne qui correspond avec cet appendice par un canal unique. La figure E montre la paroi interne supérieure, et F la face interne in- férieure de la boîte osseuse du Spatangue cœur; on a marqué, par les chiffres 1-21, les branchies internes des quatre rayons, qui répondent aux branchies externes. Ces branchies internes ont été dessinées avec beau- coup de soin dans leurs proportions relatives. Les vessies des pieds du rayon médian sont au nombre de 17 de chaque côté, dont les deux premiers se vôient au plancher de la boîte osseuse (lg. F), etles autres au plafond de cette même boîte (fig. E). Les rayons postérieurs en ont cinq d'un côté, à ce même plancher, et deux à la voûte, indiquées par les chiffres 1-7. Ces vessies et les pieds qui leur correspondent sont encore en plus petit nombre dans les rayons pairs antérieurs. Dans les cinq rayons, les vessies les plus rapprochées de la bouche ap- partiennent aux appendices tactiles (fig. C). Elles sont au nombre de neuf dans le rayon antérieur impair ; de onze dans chaque rayon pair antérieur, et de sept dans chaque rayon pair postérieur, indiquées par ces chiffres (fig.F). Mémoires de l'Académie des Sciences. Tom. XX. PLAT fr 2 à | Fig] elfe 2 P -lo He AT Tolin near - 3 Re Pièces correspondantes du Squelette des ASTERIES et des OURSINS a Û s EY ax me: | Le * LL 4 E ï 1 er A - . Nr Li Ü ” AR Me a È LA : s é * - / Le + « L Mémoires de l'Acada PI IT LT Focilien delinésnit PEDIC BLLAIRES des À STÉRIES ts” LYS = Fig. J. l'Acadérm 6m X Appendices tactiles locomoteurs et respirateurs de ECHINIDES fe te nu 1 æ Eu Q j k CHARS f RS ec RENE ae,