0.86-/, MEMOIRES BE ti SOCIETE IIHPERIALE ACADEMIOIE BE CHERBOURG. fteliiion et lIOBtiiur, CltKRB4»l R<^. FBIARDEM, im|ii'imeiii'-libiaii'i', rues drs (ioidoiwi; ^'i TnHr-CiiiiTC MEMOIRES BE LA tt 1 w r WuWll I1"PES!ALE ACABEinpS DE CHERBOURG. p.'^si. UwA^lf^iii^Sisi!!^^^^ MEMOIRES DE LA SOCfili^T^ IIP£RIAL£ agademique OE CHERBOURG. I Religion et Honneur. FEUARDENT, impriraeur-libraire, rues des Corderiei ct Tour-Carrie. LISTE DES PHEPHBRES DE LA Soci(l(i lyipirialc Acadeiniquede Cherbourg. Burean. Annies de reception . 1829 Directeur M. Noel, ancicn maire de Cherbourg. 1831 Secretaire M. Delacliapelle, professeur de philosophic au college, doc- teur-6s-leUres. 1832 Tre'sorier-Archiviste. M. de Pontaumont, inspec- teur-adjoint de la marine. Associ^s titiilaircs. 1807 MM. Claslon, ancicn principal dii college. 1829 Asselin, docteiir en medecine. 1831 Lc C* dii Monccl, direclcur de la ferme-icole de Martinvasf. 1843 Lc Maislre, receveur particulier des finances. 71 LISTE DliS MKMBRES 4846 Lesdos (Alex.), secraaire de la sociele d'agn- culture. — ■ Do Bi rmon, capitaine de frigate. — , Le Jolis, negocianl. 1850 Jardin, aide-commissaire de la marine, 1852 De Rostaing, capitaine de fregate. 1853 Denis-Lagarde, inspecteur-adjoint de la marine. — D'Aboville, capitaine de vaisseau. — Le Sens (Victor), commis des directions de tra- vaux de la marine. — Frigoult, regent au college. 1854 Besnou, pharmacien de la marine de r^ classe. — De Lapparent, ingSn'' des constructions navales. — Loysel, docteur en m^decine. 1855 Mangin, ing^nieur des constructions navales. — Dufour, president du conseil de sanlt^ de la marine. 1856 Guiffard, docteur en droit. Assocl^s honoralres. 1855 De Tocqueville (Hippolyte), ancien officier sup6' rieur, a Nacqueville. — Digard de Lousta, sous-agent comptable des matiferes de la marine. Assoc&cs correspondiints. 1810 MM.|Cauchy, membre de I'Institut a Paris. 1815 Le Tertre, bibliotli(5caire a Coutances. ^329 Lc baron de la Gatinerie, commissaire gelacliapellc a continue jusqu'ii la fin de sa vie a se livrer a cos etudes pleines de clianne el d'interet : il a laisse en nianuscrit deux opuscules termines, savoir : Catalogue aJpJuibetique des genres, avec tableau analylique des especes et des varie'tes des plantcs phanerogrames qui croissent aux environs de Cherbourg, 1832; Catalogue vietliodiquedes Lichens recueillis dans I'arrondissernent de Cherbourg, ISaS. Malgr(5 cette application aux etudes scientifiques , M. Delachapelle ne negligeait pas les devoirs et les affections de famille; il aimaitaussi les relations de la socicle. On appre- ciait en lui la droiturc du caractere, et les ressources d'une instruction variee. Avec un caractere vif et une physionomie parfois un pcu severe, il avait une bont6 parfaiteel une sen- si hi lite profonde. M. Delachapelle a succombi a Cherbourg le 20 avril 1834 aux suites d'une affection du cceur, mala-die qui ne lui avait rien Ote de la vivacite de ses sentiments, ni de la clarte do son intelligence. Quelques jours avant sa mort, il avait puise dans I'acte le plus solenirel de la religion, au pied memo des outels, la force et la consolation dont le cbretien senile besoin, laissant ainsi a son digne fils et a son petit-fils une memoire toute d'honneur et un noble exemple a suivre. L. DE POMAUtilONT. •i-SK' NOTICE StR M. lABBE AUGER Messieurs, le 3 decembre fS'ii est mort dans une vcrte vieillesse un de nos assoeit^s correspondants, un professeur dont le noni est un souvenir venere parmi ses anciens Aleves, el qui resla doue jusqu'au dernier jour d'une intelligence elevee, etendue et serieuse, d'un esprit ferme et distingu6. Auger (J.ean-Bapliste-Amand) naquit a St-Valcry-en-Caux le 26 octobre 1784. Eleve a V&co\q centrale de Rouen, il y obtint, le 15 Ibermidoran VIII, le grand prix dc la classe de niatht'mali{iucs et, le 15 thermidor de I'annee suivante, le prix de celle dcs Icttres. Age de 17 ans, il se rendit a Paris, subitavec distinction, le 2 messidor an XII, I'exanien pour le grade de cbcf d'insti- lution et ouvrit a cette q)0(]ue, rue d'Assas, sous le noni d'instilution Bernard ct Auger, un pensionnatqui ne tarda X\1V AOTICE pas, a cette date de regeneration morale inauguree par le Consulat, h obtenir toute la con fiance, des families. En 1812, il quilta cclte position pour aller an seminaire dc Rouen recevoir Ics ordres sacres; dans le courant de 1813, il fut nomme vicairede Saint-Francois au Havre el y resta jusqu'en 182 L Ce fut en cclte annee qu'il revint a Paris fonder unc nouvelle instilution (1) qui, comrae la premiere, donnait iin soin special aux principes religieux et monarchiques. Peu de temps aprfes, en 1822, je fus place dans celle maison, oil je ne tardai pas a vouer a M. Auger un atlachement que j'ai ete heureux de conserver toujours. En 182.'5, Mgr Frayssinous appela M. Auger au poste de proviseur du eollege royal de Versailles. En 1829, il passa h la cure de S'-Antoine de Compiegne, oil le roi Louis-Philippe le nota plusieurs fois pour un evecli6. Malgre cette designa- tion honorable, M. Auger ne parvint point a I'episcopal, bien qu'il reunit certainement toutes les qualites h la fois soli- des, serieuses, dislinguees et meme prudentes et miti- gees qui sont si rwjcessaires dans Tadministration d'un diocese. L'autorite ecclesiastique se borna a lui conferer le litre dechanoine honoraire a Beauvais eta Baycux et a lui promettre, dans les derniers temps de sa vie, une place de chanoine de second &rdre au chapitre imperial dc Si-Denis. En 1843, ildonna sa demission de lacuredc Compiegne et revint a Paris se livrer cxclusivement aux etudes qu'il aimait eta la predication. Les sermons qu'-il prononca aVec succes dans les diverses,eglises de Paris ne montent pas a moins dc cent cinquantc. II devint secretaire de la societt} de Saint- Gregoire de Tours et vice-president dc I'lnstitut historique. (I) Rae du Bac, w" 88, au coin de celle de \arenncs. sun M. 1, ABBK ALULR. XXV h' Investigateur, iournt\\ de cette sociotii, contient de noiii- breux et savants articles historiqiies this a la plume de M. Auger. On y sent un esprit sur, prepare a luisir par la rtifle- xion et par I'habitude des fortes lectures. C'est sur ces titres, Messieurs, et a ma demande, que vous avez bien voulu conferer, le 7 mai 1847, ii men venerable maitre et ami le diplume d'associe correspondant. J'ai vu M. Auger pour la dcrniiire fois en juin 1833 a Paris. Sur lui la trace des annees 6lait legere : ii soixante-neuf ans sa santeetaitparfaite; il etait rcste grand, bien fait de taille, d'unc pbysionomie forte et spiritiielle. Pendant les beures de causerie intime queje passai alors avec lui, il me paria avec un vif interet de Cherbourg, qu'il avait visile pendant les fetes imperiales d'aoiU 1813, et de quelques-uns de m)s confreres avec lesquels il s'etait trouve en rapport a cette epoque. L. BB PONTAUMONT. -u»5i,H.2*=^c~ ■^i;j^ SUR M. OBET Ancien medecin en chef de la marine. Louis-Jean-Marie Obct, ancien medecin en chef de la marine, est nc a Morlaix le 13 Janvier 1777. Son pere, issu lui-mcme d'une de ces families brelonnes, forte race qui voue presque tous ses enfants a la mer, parvint au grade de chef de division, aprfes s'etre fait remarquer par uneintrt^pi- dite froide et des talents qui I'avaient rang(3 parmi nos meilleurs marins avant la revolution et devaient plus tard attirersur lui I'altention, alors que du camp de Boulogne I'empereur Napoleon nienacait les cOles d'Angleterre, car plus d'une fois il parvint a degager el a conduire a Iravers les flottcs ennemies les convois qui, de tous nos ports de I'ocean, venaient se reunir au rendez-vous commun. Lc temps, la fortune et les circonstancesne lui permettaient pas de donner a scs enfants ccltc education qui plus tard est NOTICE SLi; M. oiii:T Kwn (Icvcnue une nocessilc absoliie. Co n'CivAi pas d'ailleiirs I'epoquc dos (Etudes forles el siiivies: pcriode orageuse dc nos annalcs, tout enseigncrnent somblait dcsorgiuiise, et ce no ful qu'a son amour du travail, a la distinction nndircllc de son gout et de sn& habitudes que le jcune Obe t dul I'instruc- tion classique qu'il acquit et supplea aux lacuncs quclais- saient dans I'education I'abscnce de toute ccolc au milieu de la confusion gencralo, plus tard Ics cssaisd'une reslaui'ation incomplete dos etudes. Combien peu out eu ce courage! Et pourquoi ne pas le dii'e : les hommes de cette generation ([ui firent de si grandes choses au commencement de ce siecle, cHaient generalement peu leltres. II leur manquait cette forte instruction premiere que le vieux sjstcme d'educalion avaitdonncaleurspredecesseurset que Tuniversile reconsti- tuee devaitdonnera ceuxqui vinrentapres eux. C'cstii cette cause qu'il faut attribuer I'inferiorite litteraire si sonvent reprochee aux annees qu'illuslraient tant de haul faits, et que devait suivre une renaissance veritable, lille de plus tranquilles destinees. Pour lui, ce qu'on ne lui avail pas enseigne, il sut le conquerir par son travail, bienlol devenu niaitre par une voie personnelle et jdiis courte dcces con- naissances qui lui manquaient, il en conscrva I'amour pen- dant sa vie entiere, delassement et cliarme de ses vieux jours. Sa famille le destinait a la medecine navale. II debute a Brest commc chirurgien auxiliaire; assisle en celte qualite au combat du 13 prairial; devient enlretenu en 1796; cmbarque successivcment surces vaisseauxaux nomsrelen- tissants : le Terrible, \cHoche, Vlntre'pide, ]g Formidable. La et depuis lorsqu'il fut nomme chirurgien de 2^ classe et servit sur Ic vaisseau Yimpcrial, il put voir tout ce que laissail a desirer Ic service dc sante. Plus tard il mcsurail XVVIII NOTICE les progrcs do noire hygiene navale, et aimait a comparer I'etat de.s vaisscaux de cetle epoqne avec celui qu'ils olTrent dc nosjours. Cette merveilleuse proprete, ce hixe de precau- tions, cet art ingenieux qui tire parti de tout, ces liopitaux de bord oil tout est rcuni pour le bien-otre des malades, I'ordreet la metliode qui president aujourd'hui au traitement des hommes, quel que soit rencombrement, les ressources enlln dont on dispose et qu'on sait inellre en oeuvre, lout contraslc en effet avec ce qui existait alors. Aussi, quelle morlalite quand sevlssait une epidemie! quel affaiblissernent des equipages devunt Icquel les medecins restaient impuis- saiils. Nous retrouvons M. Obet en l^OS, chirurgien de ■l"'^ classe, et en 1810 non)m6 proCesseur d'anatomie a I'liopital Saint- Bernard dans ce port d'Anvers cree par les Francais, arsenal immense que le genie de Napoleon destinait a un si grand avenir. Le corps des cliirurgiens de la marine n'elait pas encore r^ellement constitue, et le concours ne presidaitpas a Tavanrement. Depuis, les cbaires de professeurs n'ont plusele chezeux que le prixde lettresserieuses et de travaux scientifiques eprouves. Mais parmi les professeurs et les chefs sortis de la ]'" institution, il en est qui ont laisse leui* trace dans le corps : tel fut M. Obet, tel le niedecin en chef Fleury sous les ordres duquel il scrvita Anvers etqui devait succomber a Toulon, pendant le cholera, victime d'un zeleet d'nne ardeur que I'age et les infirmiles n'avaient pu glacer. Anvers presentait a cette epoquo une animation extraor- dinaire. La, se confondaient les ouvriers du pays et ceux que fournissait nos ports : le calme des populations braban- connes etait anime par la vivacite francaise ; les edifices maritiines, les casernes s'elevaicntcomme parenchantcment; les bassins de carrenage sc crcusaient;. a peine une cale se sin M. olil'.T, \\IX dcssinait-ellc, qti'un nouvean butimcnt apparaissait, pcnrlant qu'iine floUe deja formidable stationnait dans I'Escaut ct que tout obLHssait a Timpulsion de cette volonte crealrice, dont les deslins ctaient alors si brillanls. Depuis, celle ceuvre des Frangais a ete arieantie; nos immenses bassins out elecombles ou transforiiU'S en docks pacifiqucs ; tout mouvement mililairc a disparu: qu'on se figure Brest devenant port de commerce. L'escadre et Tarmfie envoyaient tons leurs malades, ct ils 6taicnt nombrenx, a I'hdpital St-Bernard qui recevait egale- mcnt les ouvriers du port et les prisonniers anglais. Places sur CO vaste llieatre, les mcdecins de la marine de\aient promptement acquerir unegrande experience. Les epidemics s'y succedaient, les plus graves operations s'y pratiquaient journellement, toules les miscres humaines s'y donnaient rendez-vous, triste et lamentable spectacle: mais c'est la que se formerent pkisieurs cbirurgienseprouves, qui furent dissemines dans les ports de France, lorsqu'il nous fallut abandonner cette conquete aux jours de nos revers. Les tendances de M. Obet I'inclinaient du cOte de la medecine, proprement dile, plutdt que vers les operations, et lorsqu'il fut envoye a Cberbourgen 1841, il servit dans notre port on sait avec quelle distinction, ct de combien de conside- ration el d'estinie il avail sn s'entourer. II pouvait pretendre a un legime avancement: on le lui olTiitmeme, mais il le refusa pour roster dans notre ville, qui etait devenue sa patrie adoptive. II y avail ele nomnie officier de la legion d'bonneur. Cette retraitedont il avail marque I'heurc en refusant do se dcplaccr, ne fut cependanl pas le repos: il se livra a Texercice dela medecine civile, et y dt^ploya toutes les qua- lites d'un veritable praticien. Nature peu brillanto, mais X\X NOTK.K exactc, mcUiodiquo, lenanttfos grand comptede la tradition, jl soiiriait parfois, qiiand on exagcrait devant lui les nicr- veilles des decouvcrtes modernes, an courant dcsqucllcs il savait se tenir: mais il les jugeait et ne se laissait cntrainer qu'ii bon escient. Pcu enthonsiastc, il croyait a fa grando part que prond la nature dans la giierison dos maladies, dispose quelquefois mcme a I'exagcrcr un pen ct a s'en rapporter a sa puissance. Hatons-nous de dire qu'il tHait Irop eclair(5 pour s'y abandonner aveuglcmcnt, et qu'il trouvait un terme judicieux entre cette activite intenipestive et inquietc, qu'il qualifiaitde desaslreuse el une expectation par trop optimiste. C'esl la, en cffct, qu'est le vrai. II parlait peu de ce qu'il faisait et ne posscdait pas I'art de se fairc valoir: peut-elre dedaignail-il de le montrer. II ne provo- quait le suffrage de personne, ce suffrage venait le trouver. Qu'on ne croiepas cependant, qu'a I'occasion, il ne sut sortir de sa reserve modcste et silencieusc. Mais il ne parlait que lorsqu'il avait quelquc chose a dire, n'ecrivait que lorsqu'ilavait quelque observation nouvelle et utile a faire connaitre. II lui aurait fallu un peu plus d'initiative pour rfiveler sa valeur reelle. Le bagage litteraire et scientifique d'un parcil homme, doit toujours etre leger. C'est souvent un merite: et il est si facile de le rendre plus lourd ! voyez quelle sobriete de developpement, et pourtant quelle ncltete, quelle precision il a apporle dans la description de I'angisso couenneuse dont il avait observe une grave epideniie a Cherbourg meme. II dit lout ce qu'il faul, rien de plus. C'esl le praticien exact, qui raconto scrupuleusement et sim[)lement ce qu'il a vu el a su bien voir. Avantquc I'ana- toniie patiiologique dc celle redoulable affection fiit aussi g6neralcmenl connue qu'elle Test aujourd'hui, il la decrit minutieusement, signale son developpement rudimentaire. SUR M. OBET. XXM le moJe d'apparition dc celte exsudation transparenlc, inoffensive en apparence, qui recouvre les amygdales, Ic voile du palais, rarritTe-gorge, qu'il fautsavoir reconnaitro, conibattre des le debut et detruire sur place; car elle va s'organiser en veritable membrane, gagner de proche en prociie, atteindreles voics aeriennes ou se propagcrdans les voies digestives. Personne n'a mieux fait ressorlir le carac-' lere specifique de celte maladie, et en prouvant- que cette espece de formation nouvelle n'est pas toute raffection, demontre que comme dans le croup, cc fleau des meres, si rapprochc de Tangine couenneuse, il y a au-dessous de ce caractere anatomique grossier, un etat parliculier d'inflam- mation et de spasme, qui fonde une grande partie du danger. De meme lorsqu'il insiste sur le caractere contagieux dc I'angine couenneuse. On le conteste, que ne contestc-t-on pas? Mais la, comme pour les fievres tjphoide, on suit de proche en proche rinflucnce contagieuse. Seulementil faut savoir la reconnaitre; ce qui n'est pas toujours si facile qu'on pourrait le penscr. Etrange maladie, a laquelle cer- taines families semblcnt predisposeesl On cite une race princiere, dont cinq generations ont pay6 un tribut fatal a I'angine et au croup. Personne enlin n'a mieux que M. Obet, demontre quelle doit etre I'activite du traitement et la lumiere, dgute la specificite de la maladie I'l^clair. En 1833, il public une notice sur le cholera qui avait sevi il Cherbourg en 1832. En 1837 il insere dans lesannales marilimes une esquissc biographique sur M. Fleury. C'est dans cet opuscule qu'il sail trouvcr, pour parler dc son premier maitre, des accents partis du coeur, et qu'on reconnait tout ce qu'il y avait d'alTectueux ctde sensible cliez cet excellent homnie si r^servdd'habitudeet si peuexpansif. XXXII xNOTICK SLH M. (H1KT. Dans Tin fin ie variele des caractores, on en rencontre de pareils qui vivent beaucoup en eux-memes pour ainsi dire, qui par une sorte de pudeur native sent aussri soucieux de caclier les lemoignages de leur emotion que d'autres le sont d'en Jeter I'expression a lous les vents. Qui dira dequel c6te se trouvent la force et la profondeur des affections? M. Obet couvrait sa vie privee d'ombre et de silence. Eprouve par de cruels malhours de famille, jamais sa serenite n'en parut alt^r^e; il fallait enfin qu'il rencontrat une parfaite commu- naute de vues et d'opinions pour qu'il se laissat entrainer a quelque epanchement, et se souciant fort peu de contredire, il semblait assister a tout comme un temoin desinlcresse. Etpourtantil ctail fidele a ses affections; il suivait avec interct et I'ceil de la sympathie ces generations qui se succe- daient devant lui et dont il avail suceessivement soulagc les douleurs. II etait reste Tami de tous ceux qui I'avaient approche; lis lui conserveront un souvenir de cceur et de reconnaissance; le temps enfin n'emportera pas dans son cours souvent oublieux et ingrat la memoire de cet homme de bien qui nous laisse I'exemple d'une vie pure ethonorable, consacrce tout entiere a raccomplissement du devoir. Docteur DUFOUR. NOTICE HISTOBIQUE suu LA SOCIETE ACADEMIQUE DE CHERBOURG, PAR 91. JVOEL, Directenr. Lue a la seance publique du I" mai 1855 (cenlihne anniversaire). Messieurs , Un siecle nouveau commence aujourd'hui pour la Societ6 Acadcmique de Cherbourg. La premiere st^ance dont les registrcs dcs proc6s-verbaux nous ont conserve le souvenir, porte la dale du 1" mai 1755. D6ja plusieurs reunions 8 NOTICE HISTOniQfE avaient eu lieu, mais elles avaient pour but la constitution de la SociiHd et la redaction des statuls, et ce n'est qu'a cette (■'poque que commencent les seances ou se firent des lectures scientifiqueset lilteraires. Chose digne dc remarque, Messieurs, Cherbourg comptait alors 6000 anies a peine, et cette ville semontrait plus avancee que la pluparl des grandes cites du royaume qui n'avaient point encore d'academies. II n'y en avail que deux dans toute la Normandie, a Rouen et a Caen. Point de grandes administrations conime dans ces deux dernifires villes, peu de commerce, aucun de ces grands Iravaux qui lui amenerent plus tard des hommes laborieux et instruits. Cherbourg 6tait done reduit a sa population sedentaire et c'est dans ce petit nombre d'habitants que se rencontrferent quelques amateurs des sciences, de la litte- ralure et des arts, qui re'solurent d'eriger en cette ville une assemble'e philosophique. Telles sont les expressions consignees dans le proces-verbal de la premiere riiunion, qui remonte au 14 Janvier de la meme anntie. La redaction des statuts primitifs et les noms des fonda- teurs attirent d'abord notrejuste attention. Deja, j'ai eu I'oc- casion de parler des uns et des autres etje serai oblige de r6p6ler quelquefois ce que j'ai dit dans des articles separes. Mais dans cette seance, qui emprunte quelque solemniti au souvenir seculaire qui nous occupe, vous avez di^slrt^ un ta- bleau liistoriquede laSocictedcpuissonorigine, etce tableau manquerait d'ensemble, si je n'y comprenais les hommes honorables qui fonderent cette Soci6te et les statuls qui nous r^velent I'esprit dans lequel eut lieu cette creation. La premiere pens6e des fondateurs est pour la religion : « On aura pour elle, disent-ils, un profond respect et on » n'enlrera jamais en dispute sur scs mystercs. » Les statuts veulent ensuite qu'on honore leRoi el I'Etat el SUR LA SOClExi. 3 qu'on n'en parle jamais qu'en Ir^s bons ternies. Telle est U simplicile de redaction avec laqiiclle ces sonliriictits soiit exprimes. L'arlicleS est remarqnable par la naivete du style et de la pensce. « On 6vitcra, dit-il, toute cabalc et Ton conservcra » la meilleiire union possible dans la Societe; sans disputes, » termes fdclieiix, ni railleries a I'c^gard les uns des autres, » au sujcl des vices d'espril et de corps. » *Ainsi la prevoyance ne se borne pas aux difTormitcs phy- siques qui d'aillcurs saccordent souvent avec les plus I)ril- lantcs qualiti's de I'esprit; mais elle s'etend encore aux singularitcs, aux bizarreries qu'on rencontre quelquefois cliez les homnies de science el de travail. Tout est done prevu dans le dcssein d'une union durable. Les discussions rcli- gieuscsetpoliliqucs.quidivisentsi profondcnientlcslionimcs, n'auiont pas lieu. Les railleries qui blessent, les propos qui huniilienl, les vorites m(}ine qui peuvent ofTenser, sont ban- nies dc la reunion. Les paisibles discussions sur les sciences et la liltdrature sont seules permises, etcelles-la doivent en- gendrer une union qui ne feraqu'augmenteravec I'habitude de se voir, de sc; communiquer ses pensees et de concourir ensemble, dans une proportion si petite qu'elle soil, aux progres de I'esprit bumain, II metarde. Messieurs, de vous faireconnaltreces hommes simples el studieux a qui nous devons I'existence de notre Societe. Voici d'abord quels claicnt Icurs noms et leurs litres : L'abbe Anquetil, premier directeur; Voisin, profes- seur d'hydrographie, premier secretaire; Dolaville, medecin; Groult, procureur de I'amiraule; Avoiuc de Chantcreyne, receveur de I'amiral ; el Pierre Freret, artiste. Deux de ces noms onl disparu el n'onl gu6re laiss6 dc tracea quo celles de Icur inscription sur Ic tableau des i NOTIdF, IHSTOriiyrE fomJatoiirs. Co sonl MM. I'abbe Anquelil et Voisin do la Iloiigtic. On doit cependant a ce dernior uiie histoire de Cherbourg asscz esliineo, ct qui a ete editee en 't83o, avec continuation jusqu'a cette epoque par M. Verusmor. Quant aux autrcs, lis soot encore vivants parmi nous, et ils ont conserv6 pendant longtcnips d'honorables represen- lanls dans cette enceinte academique. M. Delaville etail un niedecin distingue. L'Academie lui dut de frequents rapports sur I'ai't qu'il professait, 3es nxinioires sur la botanique ; il s'occupa beaucoup des sondes et du varecb. Les registres de voire Society nous apprennenl aussi qu'il s'occupait de poesie et citent avec eloge une epitre de sa composition sur I'lnd^pendancc. M. de Cbantereyne etait egalemcnt un des niembres les plus zeles de la Societo. L'bistoirc de Cherbourg et de la presqu'ile a ete le principal objet de ses travaux. On lui doit une chronologie des grands buillis du Cotentin, un catalogue du gouvernement de Cherbourg depuis Henri 1", roi d'Angleterre, et divers memoiresnon moins interessants. Quel que soit le nicrite des travaux dus aux menibres que je viens de citer, leurs nonis s'effacent, au moins en partie, devant celui de M. Groull, qui parait avoir eu la plus grande part dans la formation de la Soc>ete et qui, pendant tout le cours de sa longue et laboricuse existence, n'a pas cesse d'en etre un des plus fermes et des plus constants appuis. M. Groult n'otait passeulemenl un travailleur infatigable, un magistral intfegre, un savant d'une reputation europeenne; c'etait mieux que cela encore, c'etait un liomm'e de bien d'une admirable simplicite de moeurs, d'une bienfaisance inepuisablc, aussi actif a secourir les pauvres et a cherclier tout ce qui pouvait adoucir Icur misere, qu'a etendre ses investigations dans le vaste champ des connaissance humainGR. SLU l.\ SOCIETE. « M. r.roult clait verse dans les sciences exactes ct dans riiistoire nalurellc; inais ce fut la legislation marilime (jui occupa pai'liculiereinent Ions scs instants. En 1770, ii presenta a racadeinic do Rouen un nouveau comnientaire sur I'ordonnance de 1681, compose do 6 volumes in-4°. II parail que, pour arriver a ce resiiUat, Tauteur avail passe cn« revue plus de 50,000 ordonnances, arrets ou reglenients concernant cctte branclic de la legislation'T A ce long travail, M. Groult en ajouta un autre qui ne lui demanda pasmoins de recluMxIies ct de patience; il composa des tables extremenient etendues deslois de la marine, qui t'taient el avaient ete en vigueur chez tons les peuples mari- linies, anciens et modcrnes. « La reputation de M. Groult, » dit une note redigce peu de temps aprt;s sa mort, se » repandit dans toule I'Europe. » II obtint du gouvernement le tilre de docteur en droit maritime ct la faveur d'etre rem- bourse, sur momoires, des depenscs que lul occasionnaient cbaque annee ses travaux et ses rccberches. Le dernier des fondateurs dont j'ai indique les noms etait un artiste du nom de Freret. Depuis un siecle, cette famille est en possession de fournir aux beaux-arts des bommes de nierito, I'lusieurs de ses membres, peintres ou sculpleurs, ont laisse dans Cberbourg des travaux eslim^s. M. Louis Freret, lilsdu fomlateur et membre lui-m6mede cette Societe, se distinguu surloutdans la peinture des fruits el lies (b'urs. La reine, en 178o, le nomma son peintre du. neurselrangeres. U!ie copiedu brevet a etc deposee dans nus arcbives par noire confrere M. Victor Lesens. Telsfurent, Messieurs, les fondateurs de noire Societe. Tel ful le noyau autour (huiucl \inrent se grouper uncertain nombre d'antros membres. Toulefois ce nombre fut rcstrcint dans les [iremieres anmies, ce (|ui n'emp^Hiia pas les seances 6 NOTICE lilSTOniQCE d'etre nuiltipliL'cs ct bien remplies. II en est peu oil on ne retrouveic noin de M. Groult, Iraitant lies questions d'aslro- nomie, do mecdniquc, do pliilosoijliie, de gnomoniqiie ct de geograpliie. En 1758, il hit un niL^nioirc detaille sur la descente dcs Anglais a Urville. De 1761 a 1767, on remarqiie line interniplion dans les seances de la Sociele, r(5diiite a un petit nombre par la nioi t de quclques nns de ses mcmbres. On scntit alors le besoin dtt faire appcl a tons les homines zelos et studieiix, iiabiiant la ville ou les environs, capables de donncr aux seances im nouvel aliment. Qiiinze noms nouveanx fiireut inscrilssur le tableau de la Socicte. Painii ces noms, on remarque celui de Guillaume de Bric- queville, ancicn major de la milice duVal-de-Saire, qui ha- bilait son chateau de Breltoville, a peu de distance de Cher- bourg. Ce nom se retrouve a diverses pages de notre histoire depuis les croisades jusqu'ii la celebre balaille de la Mosco- wa, et le busto du petit-fils de Guillaume de Bricqueville orne une de nos places publiques. Le but qu'on s't'lait propose par cet accroissement de la SociLH6 fut atteint. Le seances devinrenl tres multipliees; on en compte quelquefois une par semaino, souvent deux ou trois par mois. Les slatuts voulaicnt qu'a la premiere entree d'un membre nouvellement elu , le rccipicndiaire fit un discours de remerciement et que le president lui repondil. Cette disposition fut executee, comme elle I'uvait etc dans la premiere annee de I'existence de la Society. L'annee 1763, vit in.scrirc parmi ses membres un nom illustre, celui de I'abbe de Beauvais, qualifie dansk' proces- verbal, de predicateur du roi, liccncie es-lois el vicaire g(5ne- ral du diocese de Noyon. Plus lard, il devint cvcque de Seoe/. Ses talents oraloires lui laissent encore une grande SUU LA SOCIETY. 7 place aprt^s les princes de la Chaire. Mais c'est surtout, par la hareliesse de son langagc devantles Puissances deia terre, par sa courageuse perseverance a flelrir leiirs d^sordrcs, par I'energie avec laquelle il s'cleva centre les scandales de la Cour, en presence de Louis XV lui-meme, qu'il attira sur lui raltonlion de scs contcmporains, ct qu'il s'est ainsi prepare Tadniiralion de la poslcrite. Je ne puis nVempechcr de rcpeler ici ces m^morables paroles qu'il prononca devant le roi, dans un sermon sur la C6ne (1) : « Sire, mon devoir de minislre d'un Dieu de v^rit6 m'ordonne de vous dire que vos peuplos sont malheureux, que vous en etcs la cause, ct qu'on vous le laisse ignorer. » Cost encore a lui qu'on doit celte grande pensile, dont la presence royale n'arreta pas davantage la courageuse ex- pression : « Le peuple n'a pas le droit de murmurer, mais il a Ic droit de se taire, et son silence est la lecon des rois. » (^2) J'ai cru devoir ciler ces deux passages remarquables parce qu'on les trouve dans un bien petit nombre de biographies, et que le sermon lui-meme d'oii ils sonl tir^s manque dans les oeuvres de I'auteur imprimes en 1807. M. de Bcauvais etait n6 a Cherbourg. II se Irouvaitdans celte ville a rd-jjoque de sa reception, etle proctis-verbal de la seance ou il fut admis porle sa signature. II y vint ensuite com me eveque, en 1776, et il assista a la seconde seance publique qui cut lieu le 25 septembre. Le compte-rendu de celte seance dit qu'il la termina par un discours eloquent, dicle par I'amour de la religion, de la patrie et de I'honneur, devise de cctle Societe. (1) Diographie ivoderne, publiee par Eymery en 1816. (2) Dirtionnaire de la Convermtion, —FA'a. 1852. Tome U, p. 633. 8 -XOTICE niSTORIQUE La Societe acaJcmiquc ne se bornait pas a des lectures souventsterilcs. On Irouve dans le registrc des proces-vcrbanx a la date du 3 juin 1760 : « La Compagnie s'cst transportce a la poinle d'Equeiii-dreville, sni" Ic fort Choisel, pour observer le passage de V6nus siir le disque du soleil, avec deux teles- copes de reflexion, de 16 pouces, deux lunettes de 4 pieds, un octant de reflexion et pkisieurs montres et pendiiles qui avaient (5te regies surla m(5ridienne de M. Groult, le menie jour et la veille. Dans Ics seances sulvantes, M. Le Vallois communique des observations sur le passage d'une comete. M. de Bricque- ville fait connaitre un noaveau procede pour pressurer les pommes. M. Desnoeltes annonce une gi-alification qui vient de lui Hre accord(5e par le contr61eur gent^ral pour la rtHissitede son troupeau de moutons anglais. La Societe, comme on le voit, faisait marcher de front la thfiorie et les applications de la science. En 1771, M. Tillct, membre de I'Academie des Sciences, fut envoye par le gouvernement pour prendre des rensei- gnemenls sur les avantages et les inconvonients de la fabrication des soudes. Ce fut a la Societe Acadi^mique qu'il s'adressa. II assista a plusieurs de ses seances el rccut de MM. Groult et Delaville , de nombreux documents sur I'objet de sa mission. Peu de temps apres, M. Voisin de la Ilougue, presentau la Societe une carte hydrographique des cotes do la Hague et du Val-dc-Saire, qu'il avail dress6e a I'aide des capitaines, pilotes et marins pratiques du port de Cherbourg, et M. Blondeau, profcsscur d'hydrographie a Brest, consulte la Societe, de la part de rAcademie royale de marine, sur un ouvrage qui se prepare et qui doit porloj- pour litre : Le Nomcau Flambeau dc la Mcr. SUR LA SOCIETK. 9 La Soci(5lo Acatleniique jusqu'on 1773 ii'avail cii, pour sos reunions publi(|ues et privees, d'aulre aulorisalion que celle de radminislralion locale. A celte epoque son existence fut consacree par le roi Louis XV, ainsi qu'il resulte d'une lettre de M. BcVtin, minislre secretaire d'Elat, ayant le deparlement de la Normandie, qui fut transmise par Tinlermc'diaire de M. I'intendant de la generality de Caen. Dans cetle lettre, qui fut enregislrec sur le plumitif de rH6tel-de-Ville, le roi permetdeux seances publiques chaque ann6e. II paraitqueM. Tillet, menibrederAcademiedes Sciences, dont nous venous deparler, et M. de Brequigny, membre de I'Academie frangaise et de celle dcs Inscriptions el Belles- Lettres, qui avail eu aussi des rapporls avec la Societe eurent une assez grande part dans la favour qui lui etait accordee. Aussi les voit-on, pcu de jours apres la reception de la lettre du niinistre, adniiscomme menibres de la Societe, sous le litre d'associes libres. La seance publique du mois de septembre de cette menic annee donne lieu a deux remarques, qui toucbent a la constitution et aux liabiludcsde la Societe. Le R. P. Don Blancbard, religieux hcnedictin de la Congregation de Saint- ftfaur, denieurant a Beaumont-en-Auge, kit une ode laline en riionneur de la Societ6. Les etrangers etaient done adniis au meme titre que les babitants. lis se deplacaient souvent et de loin pour assister aux seances de la Societe. On voit au rcgistre des procfes- verbaux la signature de M. Corbet, vicaire superieur de la grande maison des Cordeliers, a Valognes ; Tliierry, prHre gradu6de I'Universite de Caen; Beziers, cure de Saint-Andre de Bayeux; Moysant, docteur en medecine a Caen; Hue de Caligny, ingenieur en chef a la Ilougue , et d'autres noms encore iitrang«rs a la ville. 10 XOTICE HISTORIQl'E l.ii SocitHii avail done unc importance qui s'etcndait au loin, puisqu't'lle attirait a elle, malgre la difficultc des com- munications, nn certain nombred'etrangersqui ntecraignaienl pas de franchir dcs distances assez grandes pour prendre une part active a scs Iravaux. Nous vcnons de voir qu'a la 2° s5anc3 publique dc I'annee 1773, Don Hlanchr.i'd iut unc ode laline. On y fit d'autres lectures qui iToiai. ui [tm bien j»Uis a la portde d'un grand nonibi'e d'audileurs. On cntendil, par cxoniple, une disser- tation de M. Delaville sur la niatiere qui sort de nourriture et d'accroissi^raent aux p'.antcs, el un memoirs sur la Meridieniie par iM. Groult. l.a Society inspirait done autant d'interet au dedans qu'au debors, puisque malgre !e caracl^re serieux qu'offraient ses stHinces publiques, die trouvait le moyen d'attirer des audi- teurs deux fois cbaque annee. Tous les proces-vorbaux qui precedent la seance publique dont je viens dc parler soiit ecrils de la mememain, qui ^tait sans doute celie de M. Voisin de la Hougue, premier secretaire. Cependant il parait qu'il assista encore a une seance d'octobrc. II mourul le '24 novembre suivant, et fut remplace par M. do ChaTitcreyne auquel fut donnele litre de secretaire perpetuel, etqui, d'apies ridentil6 des ccritui"es, remplissait deja ces fonctions depuis quelque temps. Dans I'annee 1774, une letlre de M. de Boynes, ministre (le la marine, adresst^e a M. Dienis, direclour de la Societe, jmprima a ses travaux un nouveau cacbet d'utilite. Elie avail arrelt5 qu'elle donnerait cliaquo annee un prix au jeune marin qui aurait le mieux repondu aux questions les plus difliciks sur I'bydrograpbie. Puis, elle avail demande au gouvernement la faveur d'exempter ce jeune bomme, soil d'une campagne au service, soil d'uneannee de navigation SL'K LA SOCIKTE. 1 I au commerce, on eiifin d'une annee d'age. Le ministie annonceque le roi accorded laSoci6t6cet honorable privilege, sous reserve toutefois d'exan)inerdans chaquecas parliciilier, si raccomplissement de cette promesse peut s'accorder avec I'int^ret du service. Conformemcnt a cede disposition, plusieurs marins furent examines dans chacune des Irois ann(5es qui suivirent. Des prixfurenldistribnespubliquemcntetdosdispensesaccordt^es. Les deux premiers a qui cells faveur profita, et dont les noms sont cnnsignes au regislro , furenl MM. Mauger et Poslcl. Plus lard, il est encore queition d'examens, luais non plus de dispenses. La gueire avec I'Angleterre augmenta les nt^- cessil^s du service et donna lieu sans doute ii rapplication des reserves failes par le roi. Laleltredu m inistrede la marine est poslerienredequelqnes jours seulemcnla la mort de Louis XV, elquand il dit qu'il a rendu coniple au roi de la demande faite par la Sociele, il est probable qu'il s';igil encore de ce monarque. La Societe Academique luidevait trop pour ne pas payer h sa memoire un jusle honimage. Aussi designa-t-elle un de ses meinbrcs, M. I'abbe Postel, pour prononcer son oraison funebrc le jour du service solennel qui devail fitre celebre en I'eglise de cette ville, pen do temps apres. Par uneco'incidence remarquable,cefut encore nn membro de la Societe, Monseigneurl'eveque de Senez, qui fut charge de prononcer le m6me discours devanl ce jeune roi, dont les precoces vcrluscommcncaient un regno si plein d'esperances el que les passions rcvolutionnaires devaient terminer par de si alTreuses realiles. L'orateur sacre, dit un de ses biographes, rappelle, dans I'exorde do son discours, unc circonstance frappanle qui en rend le d^but imposant ct presque bossu«5tique. Dans son 12 NOTICK HISTORIQUE sermon sur la Cene, dont il a dt^ja 6te qiiostion, M. do Boau- vais, paraplirasant cc passage de I'l^critiire : Encore quarante jours el Ninive sera delruile: avail paru predire au roi Louis XV une mort prochaine, conlrairement aux apparences qui luiprometlaienlunepluslongue vieetccpendantlaprediclion fut lilteralenicnl accompUc. Le roi mourul quaranle jours apres. C'esl il cPlte circonslance que fait allusion I'illustre evcquo dont le noin honoreaun si liaut degrela Sociele Academique de Cherbourg: «Sire, dil-il au roi, dans I'oraison funebre de Louis XV, quand j'annoncais, il y a peu de temps, la divine parole dcvant voire augiiste aieul ; qui eut prevu le coup terrible donl il elait menace? Deja le glaive invisible de la mort etait done suspendu sur sa tele. Helasl qui eut pens(5 que nous aurions pu lui dire alors dans un sens si lilleral : Encore quaranle jours , adhuc quadragitila dies, encore quaranle jours el vous serez porle dans le scpulcrc de vos peres; el celle meme voix, que vous entendez en ce moment, sera I'interprele du deuil de voire peuple a vos funerailles. » Vous me pardonnerez. Messieurs de m'clre etendu si longuemenlet a deux reprises ditTerentes sur un seul de nos predecesseurs, maisil s'agil du plus illustre, el en rappelant ses tilres a I'admiralion de la posterite, nous faisons rcjaillir peut-etre quelqu'honneur sur la ville qui fut son berceau et sur la Sociele dont il voulut bien elre membre. Lesannees qui suivent nc pr^sentent rien d'important. On remarque la mort de M. de Bricqueville arrivce dans le mois de novembre 1775 et la resolution prise par la Sociele de se transporter toute enliere en la commune do BrelteVille pour assister a ses funerailles. II est remplace quclques jours apr6s par son fils Claude-Marie, mestre de camp de cavalerie, dont la reception est conslalee par sa signature a la dale du 18 avril suivant. SUU I, A SOClftTF. 13 ■ Lfi Soci('t(\ voiilanl cncourager les etiules, dt'cidc qu'clle donnerii iles i)rix aux elevos ilos classes de latin, o( cliaqiic ann6e son dirccteiir preside v. la distribution generalo dcs prix. Les st5ances conlinuent sans interruption jiisqu'en 1779 on dc nouveaux slatiits sont adoptes. Les modifications inlro- duilesnesont pas assez importantes pour etremenlionnees ici; j'y remarque seuleinent nne indication plus netle du but que se propose la Societe. Les sciences, les letlres et les arts, niais principalement riiisloire naturelle el civile du pays, le coninierco, la navigation etl'agriculture, tel est son program- me. Elle doit se reunir tons les vendredis de cbaque seniainc et deux seances publiques doivent avoir lieu, I'tme le premier vendredi apres la Quasimodo el I'aulre le premier vendredi de septembre a 3 lieures du soir. Parmi les signatures qui consacrent I'adoption de ce nou- veau reglement, on remarque un nom qui a acquis une grandc celebrite, et qui reveille en nous des souvenirs a la fois tristes et glorieux : le souvenir des cv^nements qui preparerent le regne sanglant de la Convention et celui de la balaille dc Jemmapes, qui fut comme le prelude de celte longue serie de victoires qui illustrerent nos armes pendant vingt ans. Ce nom est celui de Dumourier. Dans une notice sur les ancicns membres de la Societe-, j'ai parl6 longucmcnt de cet homme c6l6bre, qui fut successive- mentetsouventaia fois, militairc, ecrivain, diplomate, caplif a I'cti'anger, prisonnicr a la Bastille, orateur dans les clubs, allid des demagogues, defcnseur d'uneroyauteexpirante, sou- mis immediatement a hiRepublique (jui lui succede, gene- ral de gcs armies, vengeur du nom francais contre I'agres- sion 6trangere et tcrnissanl sa gloire par les circonstances Goupablcs d'une defection, qui mit fin a sa carri(^re politique. H NOTICE HISTORIQt.E Do nombrciix d(^lails tie peuvent entrcr dans le cadre qui m'est trac(5 aiijonrd'hui. Cost principalement comme membre de ia Soci6te Academique que je dois parler du general Dumotiiier. J'y ajouterai seulement quelques cir- constances qui se raltachent a son S(5jour dans cetle ville. L'enceinte d'une modeste reunion scienlifique elait assur6- nient un Iheatie bien 6lroit pour I'hommequi s'eleva plus (ard a de si hautes positions et qui excrga une si grande influence sur de si grands evenements. Cepinidantle regislre de nos proces-verbaux revele deja Ics qualiles qui se deve- lopperent plus tard, sous I'empire des circonstances graves au milieu desquelles la France fut bienlot entrain^e. C'est que riiomme superieur porte partout, dans les petiteschoses comme dans les grandes, le cachet deson genie. Dumourier, peu de temps apr^s sa nomination, fut nomm6 dirccteur de la Society, et a partir de ce jour son nom se retrouve a cliaque page du regislre. La geographie, la stalis- tique, la guerre, la politique, la marine, le commerce, les mcBurs des peuples au milieu desquels il avait vccu, furent success! vemenl Tobjet de ses etudes el de ses communications a la Societe. On remarqueparticulierement : un memoiresnr la position de Cherbourg et dela Hougue relalivenent a relabhssemcnt d'un port royal dans la Manche; des considerations sur la marine marchande a Cherbourg, les manufactures el I'agran- dissemenl de ce port ; puis enfin, dans le meme ordre d'idees, un mimoire sur le commerce ancien et nouveau de celte ville et sur les nouvelles branches qu'il serail intt^-essant d'y etablir. Les seances de la Sociele furent interrompues en 1783, et on doit s'en 6tonner avcc un membre aussi z^l6 que Dumourier, qui, il faut le dire, avait puissammentcontribue SUR LA SOCIETE. 45 adonneraux Iravaux acadt^mi(|ues la suite et rim poi lance qii'ils avaicnt ac(]uis dcpuis [ilusiiMirs aii!i(^es. Get honimc, dont lo cor[isaussi hicn que riinagiualion ne pouvait snufTrir un instant de ropos, n'en conlinua pas moins de se livrer a iinc foiile de conceptions qui fiircnt todtos I'objet de memoires, la plupait adrcsses au gouvernenient. II n'y cut pas un projet concernant los travaux do la rade et du port auquel il ne piit part, et cependant il n'ctail ni ingenieur ni marin; mais son genie, second^ parson infali- gable activile, suppleaiten lui aux connaissancesacqtdses. Observatcurattentif, il cHudiait avec soin tousdesphenonienes que la mer olTraitsans cesse ases regards, bravant les dangers d'nne tempetepouren connailre mieux les elTets, inlerrogeant les marins pour juger par la pratique des assertions de la Iheorie, suivant les ouvriers dans leurs travaux afin de n'i- gnorer aucun detail, parcourant lous les lieux delapresqu'ile pour en bicn apprccier les ressources; puis, reunlssant ces idees, les fecondantpar son imagination, discutant scs projels aveccliali'ur et lullant pour li'ur adoption contre les prcjug^s des masses ou ['opposition jalouse des superieurs. Tel fut Dumourier, pendant iin s6jour de onze ans dans cette ville. Dans scs memoires, il parle beaucoup de ce qui s'est passe a Cherbourg au commencement de la Revolution el de la part qu'il a prise aux evcncmcnts. II etait important de rcclicrcher dans les souvenirs confcm- porains une mesure de la confiance que doivent inspirer ses assertions. J'aidonc interrogelospersonnesageesquiravaient connu el qui avaicnt ^Me k^moins des fails, etjedoisdire qu'olles n'ont pas loujours rec(;nnii Texacte verite dans les r^cils dc Dumourier. Je renvoie au 2^ volume denos mdmoi- rcs pu!)li6cn 1835 pourdc p!usam[)les details a ce sujel. J'ajouterai seulcmcnl que los rapports privOs du coniman- f6 NOTICE IlISTOUIOUE dant do Clierboiirg avec les liabitantsonl laissiJ des souvenirs peij favorablcs. Indt'porulamiiiont de I'opinion qui le faisait consiJeier coiiiinc autcur des (roubles qui avaient afflige la ville, on Ic trouvail fier, d'un abord difficile, ct agissant tou- joursa la manifired'un despote. On rapporte qu'un bourgeois passant un jour a cote delui surlequai, il lui jcta son chapeau dans le port, parcequ'il ne le saluait pas. Plus tard lorsque le peuple acquit une certaine autoiite, ce caraclere iuipetueux s'adoucit On lui reprochasa noblesse, et il vintun jour de parade sur la place, prouver aux officiers de la milice qu'il n'etait pas noble. Ce sontla de ces faiblesses qu'on rencontre souvent a c6te des plus hautos qualiles et qui semblent avoir et6 placees au coeur de Tbomme pour lui rappeler que la perfection n'ap- partient pas a rhumanite. Quoiqu'il en soit, Dumourier n'en est pas moins une des grandes figures de la fin du XVIII* siecleet un des souvenirs qui honorent le plus la Sociel(5 Acadcmique de Cberbourg. Je terminerai celte digression, peut-etre un peu longue, sur notre illustre coUegue, en repetant que tous les historiens sont d'accord sur la superioritc de ses talents, sur I'^tendue et la variete des connaissances dont son esprit 6taitorne; que plusieurs d'entre eux admirent son intrepidite en face des boulets de I'ennemi, son calme au milieu des orages de la place publique, sa perseverance a hitter contre un torrent qui ravageait tout sur son passage, et qu'enfin I'un de ces ecrivains, a la fois hoainie d'tHat et grand orateur politique, apres avoir blam^ son indecision sous le rapport des principes, loue chez lui une vertu qui pent excuser bien des torts, I'amour de la patrie. Nous sommes a I'epoque oil I'attention du gouvernement fixee sur Cherbourg, comme position marUinie, provoque SUR I,A SOCIETE. 17 d'Cs Eludes ct fait eclore des pi'ojets doiit la ivalisalion d(iit accroitre la grandeur ct la puissance du pays. La SocieU; Acadcniique nc pouvait manqner de prendre part a ces Ira- vaux. Outre le parallele entre la Hougue et Cherbourg, par Dumourier, dont j'ai deja parle, on remarque un discours de M. de Colleville sur I'utilite d'un port de roi dans cclte derniere ville; un memoirc, par M. Noel, sur la construction et sur la nieilleufc disposition des digues pour les rendre capables de resistor aux efforts de la mer, memoire qui avail deja remporte le prix propose en 1778 par Tacadeniie de Caen, el qui avail valu a I'auteur une place d'associe de celte compagnie. J'ai deja dit que les seances de notre Societe furent inter- rompues en 1783. La derniere indiquee est a la date du 30 raai; la cause de cette interruption n'est pas connue. Peut- 6tre doit on I'attribuer au petit nombre de membres auquel la Societe etait reduite. Un des proces-verbaux qui precedent ne porte que cinq signatures parmi lesquellesse trouvecelle d'un ofiicier de marine qui probablenient ne tarda pas a abamlonner Cherbourg. La Revolution qui survintbientot, etqui cmporta avec olle toutes les Societes litleraircs, ne pouvait perniettre a cellc de Cherbourg uneprompte reconstitution; aussi cenefut qu'en 1807qu'elle rcprit ses travaux. A cette epoque il cxistait cinq membres residant a Cher- bourg parmi lesquels se trouvait encore M. Groult, un des fondateurs de la Societ(V Les quatre aulres membres etaient : MM. Vastel, Noel, Postel et Lambert. lis se reunirent de nouveau et s'adjoignirent un certain nombre de membres parmi lesquels on remarque M. Delaville, fils du fondateur, alors maire de Cherbourg etplus tard depute, a qui Ton doit I'organisation de radministration municipale sur les bases 2 \S NOTICE HISTOniQUE dont les principales subsistent encore aujourd'hiii, qui a laisse a ses successeiirs une voie ouverte aux perfectionne- ments el leur a marqu6 un but que les circonslances n'ont nialheureusement pas pennis d'atleindre encore coniplele- ment. M. Delaville etait, connme son pere, un medecin dis- tingue et tres suivi. Malgre ses doubles occupations qui lui prenaient un temps considerable, il trouva encore le nioyen de travaillerpour la Society, et le registre des proces-verbaux indique souvent des lectures faites par lui sur divers objets scienliflqucs. La Soci6t6 admit a la meme epoque M. Asselin alors sous- prefet de Vire et qui avait administre la ville de Cherbourg dans les temps les plus difficiles de la Revolution. On lui doit une edition originale des poesies d'Olivier Basselin, cbanson- nier de ce pays, dont les Vaudevircs ont probablement donne naissances aux Vaudevilles. Tout en cultivant la poesie, M. Asselin s'occupait encore de I'histoire, des antiquites, de la nuniismatique. Nos stances commenosmomoiresont souvent 6t6 enricbis de ses travaux. II a legue en mourant sa biblio- tbeque a la ville de Cherbourg. On remarque encore parmi les noms do celle epoque, celui de M. Delaroque, a qui on doit un grand nombre d'observations meteorologiques ; celui de M. Cachin a qui fut confiee la direction superieure des travaux du port mili- taire et de la rade et qui nous a laisse un memoire sur la digue comparee au Breakwater de Plymouth; celui de M. I'abbe Demons, savant modeste et laborieux a qui nous devons une histoire manuscrite de Cherbourg deposee a la bibliothe- que, et enfin le nom de M. Duchevreuil dont le cabinet d'antiquiteset d'hisloirenaturelle, ainsi que la bibliotheque, achetes apres sa mort, ont forme le noyau des collections qui existent aujourd'hui a rH6tel-de-Ville. SL'n LA SOCIETE. |9- La Society, dans sa constitution noiivelle, arrcla qu'niic! colisation annuelie serait payoc par cliacun tic scs nicnibros pour faire face ases depenses au nombre dcsquelles se Irouvc I'impression d'un rcsum6 sur les principaux ouvrages pr^- sent6s alaSoclet6depuisle9septembre 1807, el d'une notice sur chacun deses membres. En lisantce resume, on rcgrette que la Societe n'ait pas conserve dans scs archives plusieurs des ouvrages qui ne sont connus aujourd'hui que parleurs litres. Je citerai, outre ceux que j'ai pr^cedemment indi(|ues, un memoire, par I'abbe Demons, sur un ancien monument eleve du temps de Charles VII, roi de France, dans I't^glise de la Sainte-Trinite de Cherbourg, qui s'y voyait encore avant la Revolution et qui exprimait, dit la notice, la pietS de ses habitants, leurpatriotismcetleur aversion pour la domination anglaise. Depuis la reprise des stances jusqu'en 1814, M. Groult, rnalgr^ son age avanc6, fut encore un des membres les plus z»Mes et les plus laborieux de la Societt^. Dans cet intervalle, il prosenta, enlre autres travaux, vingt cartes qu'il appelle polygraphiques et qui comprennent lastatistique de la jires- qu'ile du Cotentin ; un plan de la descente des Anglais dans I'anse d'Urville, en 1758, dont il avail ete temoin oculaire; un memoire sur la ligne de demarcation a etablir enlre la navigation au long-cours, au grand et au petit cabotage; des remarques sur la direction, robliquit6 et le parallelisme de certains climats compares avec la production veg^tale et animale, et enfin un tableau barometrique de I'indigence accompagne d'observations en ce qui conccrne la ville de Cherbourg. L'annee 1813 qui precede celle de sa morlest la seule oil Ton remarque I'absence de son nom. Accable sous le poids du travail et des ann<5es, son z6le dul c6der sans doute a 80 HISTORIQt'E NOTICK I'affaiblissement de ses forces, et les seances de la Soci^tS s'en ressentirent, car il n'y en eut que cinq dans Ic cours de celteannee. Cellesqui suivirent jusqu'en 1817 offrent encore plus de vide et semblent prouver que M. Groult fut jusqu'a la fin de sa vie I'ame de la Societe qu'il avail contribue a fonder 59 ans auparavant. En 1817, le 21 aout, M. Vastel lut un discours lendant a rendre les stances plus r^guliferes et oil il fit vivement sentir la perte de M. Groult et de quelques aulres membres. Mais cet appel eut peu de succ6s et les seances furent tres rares jusqu'en 482<, oil elles furent interrompues de nouveau pendant plusieurs annees. Avant d'arriver a I'epoque oii cessa cette interruption, je dois mentionner encore le testament de M. Groult en ce qui concerne la Societe. Dans cet acte de derniere volonte, il l^gue a I'Academie un exemplaire de tous livres, cahiers, notes, papiers, memoires, etc., qui se trou vent en double, sur la legislation de la marine, le surplus devant ^tre remis a la bibliolbeque de sa famille. II exprime encore le d(^sir que loute sa collection en imprimes et manuscrits soitrassembl^e dans un meme lieu, qui pourrait etre distrait et separe de celui de I'Academie, le tout a la volonle de ses h6ritiers. Malheureuseraentcevoeu n'apasregu jusqu'ici d'execution, I'extreme difficulty de faire un depouillement dans cetle immense quantite de papiers et de les classer ensuite en a 6t6 la cause. Apres una interruption de huit annees, la Societe reprit ses travaux, le 27 avril 1827, sous la direction de M. Duche- vreuil. II n'y avail plus alors que hull ou dix membres qui s'adjoignirenl bientol de nouveaux collegues. Une ann^e s'etait a peine (^coul^e qu'elle perdail son savant et respec- table president. M. Duchevreuil ^tait naturaliste aussi bien SUR LA SOCIETE. 8f qu'antiquaire distingut^. II avail reuni une collection de coquilles, d'antiquites, de niMailles, de fossiles, et une biblioth^que qui furent I'objet d'une deliberation prise par la Society. Elle emitle vceu que cette collection fijt aclietee par la ville el transmit ce voeu au maire qui a son tour le r6f6ra au conseil municipal. Une commission fut nommee pour faire I'inventaire deces diverses collections, et le conseil, sur sa proposition, vota les fonds necessaires pour I'achat du cabinet tout entier, les medailles exceptc^es. Un des membres de la Soci6t6 voulut bien se charger gratuitement des fonctions de bibliotliecaire et il la remplit exactement jusqu'a sa mort. L'annee suivante, la Sociel(5 fut encore rheureuseinterm6- diaire d'une olTre qui cnrichit la ville d'une autre collection bien prt^cieuse et qui cette fois ne devait occasionner que des frais d'installation. Un genereux inconnu fit 6crire a I'un de noscoUegups qu'il avait I'intention d'envoyer de bons tableaux si on voulait bien leur r6server une salle convenable. La Socieleemit acesujetun voeu pressantet motive et le transmit k I'administration qui s'empressa de raccueillir. Toutefois quand le nombre des tableaux envoy^s et annonc^s futassez grand pourexigcr la construction d'un local plus etendu, le conseil municipal, presse qu'il etait parunefoulede dispenses urgentes, hesita, et la Society, dont plusieurs membres appar- tenaient a I'administration et au conseil, ne fut pas sans influence sur la determination qui mil en noire possession une belle collection de peinture, qui ferait bonneur a des villes beaucoup plus considerables que la n6lre. Cette importante acquisition, Messieurs, a un double litre pour arrfiter nos regards; d'abord, par la part qu'y prit la Societe et, en second lieu, par I'honneur qui resulte pour elle d'avoir compt6 parmi ses membres I'auteur modeste et desint(5ress6 d'une munificence sans t^gale. 23 ■ NOTICE HlSTOItlQl^E J'ai cil6 des noms illiistres, des noms qui ont retenti aa loin siir la scene du monde et que le burin de I'histoire associera dans un long avenir aux grands evenements dont ils furent contemporains; mais aucund'eux nedoit inspirer, il avail achete la plupart des tableaux qu'ils nous a donnes, et apres une depense aussi considerable, il lui restait apeine une modeste aisancc. M. Henry n'agissaitsousl'inrmenced'aucun sentiment personnel, car il voulaitresterinconnu, el pendant plus d'une annee nous n'avons pu que soupconner la main qui s'ouvrait sur nous avec une si grande lib(5ralit6. Enfin M. Henry n'a pas hosite a se d^pouiller de son vivant, afin d'assurer a scs concitoyens la jouissance immediate d'une collection destin(}c a repandre parmi eux le gout des beaux- arts. I sen LA SOCIETE. 23 Tout nous parlo de lui danscelte enceinte (1), son oeuvre en couvre tons Ics murs. Le buste que nous apercevons au milieu de cette galerie est I'expression fidele de ses traits et on ne pouvait lui donner un plus digne vis-a-vis que celui de I'abbo de Beauvais, Je regrette, Messieurs, de ne pouvoir m'^tendre d'avantage sur cc sujet; de ne pouvoir, par exemple, faire connaitre plusieurs passages de la correspondance qui s'6tablit pen- dant plusieurs annees entre M. Henry et le chef de I'admi- nislration municipale : niais j'cn ai ditassez, je crois, pour justilier ce que j'ai avance, en citanl M. Thomas Henry comme ctant de ceux dont le nom honore le plus notre Soci^te. En 18^2, la Societe Academique recut pour la premiere fois une subvention du conseil general et elle s'enipressa de I'utiliser en prcparant I'impressiond'un volume dememoires qui parut rann(5e suivante. Ce fut pour ses travaux une 6re nouvelle; j usque lalesfaibles ressourcesprovenantde lacoti- sation de ses menibressuffisaient a peineasesautresdepenses quelque fut leur peu d'importance. Le vote eclaire du conseil prouvait qu'a ses yeux les interets materiels n'etaient pas les seuls qui fussent dignes de son attention. La Societe y repondit en redoublant d'elTorts et en publiant bientut un second volume. Depuislors ces publications se sont succedti a des intervalles plus ou moins rapprochfe, suivant I't^tat financier de la Societe et I'abondance des materiaux qu'elle jugeait dignes de rinipression. Ces ineinoires constituent aujourd'hui et seront desormais I'histoirc de la Societe. Dans les volumes deja publics les (I) Celte lecture a ele faite dans le musee Henry. Sur le milieu fl'un des cotes se irouve Ic buste du foadateur ct ci» fac* celui dc I'abbc de Beauvais. S"! NOTICE HlSTORIQt'E sciences exactes avec leiirs applications diverses, les sciences iiaturelles, l;i pliilosopliie, la lilterature du moyen age, riiistoire et paiticulierement celle du pays, la statistique, la marine, radininislralion et la poesie ont fourni leur contin- gent. Parnii les auteurs de ces divers articles je citerai soulement ccux dont il ne nous reste plus que le souvenir; MM. Asselin, Javain, Pinel et Lefebvre qui ont ete appeles successivement a I'honneur de pr(5sider vos stances; M. Couppcy qui en a ete longtemps le secretaire et qui a toujours et(Sun de nospluslaborieux collaborateurs; M. Delachapelle iiqui Ton doit plusieurs articles sur la botanique; M.Ragonde enleve jeune encore a scs doubles fonctions de professeur et de bibliothecaireet aux travaux archeologiques dont il faisait une etude speciale; M. Lenionnier, professeur d'hydro- graphic; MM. Laurent deClioisy et Lamarcbe, capitaines de vaisseau. Ce dernier s'6lait livre pendant plusieurs annees a des observations metcorologiques dont il a consigne les resultatsdans nos m^moires. Ces honorables collegues ont 6te presque tons Tobjet de biographies particulicres egalemenl publiees. Jesuis heureux de trouverici une occasion nouvelle de rendrea leurm^nioirc rhommage de nos souvenirs et de nos regrets. Depuis le commencement de ce siecle, 6poque a laquelle un gouvernement reparateur permit a laSociete deserecons- tiluer, scs reunions oITrent a peine un vide de quelques ann(^es. Depuis 26 ans, les S(5ances se sont succMd sans la moindre interruption. Independamment des travaux auxquels la Societe s'est livree et que je viens d'enumerer, elle a ete souvent consultce par I'administration sur des objets qui renlraienldans ses attributions et elle s'est toujours empressee lie repondre a ce tiimoignagc de confiancc, Parnii les souve- SLR I.A SOCIKTK. 2» rains et les princes qui onl visile' noire ville el qui lui ont fait riionngur de la recevoir, ii en esl plusieurs qui lui ont donn6 (les marques d'eslime et d'inleret. Quolques modifications ont eu lieu dans les statuts de la Sociele dcpuis 1837. J'ai dit que la premiere pensee descs fondaleurs, en posant les bases de leur association, avail t^t6 pour la religion. La Society, unsi6cle apres, a voulu prouver qu'elle ctail rest(^e fidele a celte pensee et elle a decide que dans le mois de novembre de cbaque annee une niesse mor- tuaire seraildite pour les membres dt^c^dt^s depuis sa fonda- tion. Toulri^eemmenf, voulantdonner a sos Iravaux unenouvcllc impulsion, elle a introduil dans son reglement une disposition qui institue des jetons de presence et qui assure a sess(5ances une plus grande assiduite. Ces jelonsqui sortent des ateliers de la Monnaie, oil la malriceestrestee en depot, sont frappt^s avec un soin qui leur permet de pretendre a une place dans la meilleure collection numismatiquc. J'ajoulerai encore, avant determiner, que la SocitM6, en relation avec un grand nombre de compagnies de l'Euroj>e et meme de I'Amerique, a recu d'elles beaucoupde commu- nications qui sont venues enricbir ses archives. Messieurs, celle lecture a dt^passc^ de beaucoup les limites ordinaires, et je crains que, depuis longtemps deja, elle ne fatigue la bienveillanle attention dont elle est I'objet. Men excuse est dans le desir que vous avczexprim6 devoir repro- duire dans celte seance anniversaire I'liistorique de la Soci^te aussi completque possible, pendant le premier siecle de son existence. Le simple expos6 qui pr6cMe, quclqu'abrc'g(5, quelqu'in- complet qu'il soil, prouvera, je I'esp^re, que si les academies 2G NOTICE HlSTORIQt'E (le province ne peiivent jeler un grand t^clat, ellesontcepcn- dant un dcgre d'utilitc qui leur merite quolqu'int(^rt?l. N'eussenl-elles pour effel que d'unir dans un lien commun uncertain nombre d'liommes, de dissiper des preventions, de rapprocher des dissidences, d'eteindre peut-elredesini mi- ties sans cause serieuse, d'excitcr dans les esprits la noble emulation du travail, d'adoucir par I'etude Ics chagrins dc la vie, do reproduire aux yeux de la generation presente les exeaiples de palriotisnie et de verlu que pent fournir I'his- toire du pays; assurement, Messieurs, ce serail d^ja un resultaldont personne ne pourraitmeconnaitre I'importance. Mais Ja ne se borne pas la Ukhe des societesacad(5miques. Elles peuvent contribucr dans une certaine mesureau progress dcs connaissances humaines; favoriser cliez de jeunes hom- nics, qui s'ignorenleux-aiemes, le developpenientdes facultes qui doivent un jour lionorerle pays lout entier; elles peuvent apportera I'adniinislration un concours utile, etje vouscnai cit^plusieurs exemples; enfin c'est ii elles surtout qu'appar- tienl I'etude du pays au centre duquel elles sont placees, et c'est avec cette quantite de mat6riaux divers prepares par dies et arrivant de toutes parts, que les grands historiens, que les savants laborieux peuvent elever a la science des monuments complels et durables. Poursuivons done, Messieurs, I'oeuvrc de nos devanciers. Si leurs travaux ont brille par le reflet qu'a repandu sur eux I'eclat de noms illustres, nous pouvons revendiquer aussi pour re|)oque actuelle de glorieuses confraternites, qui appartiennenta cette contree aussi bien qu'ii la Societe. Deja elles ont contribue a enrichir nos memoires (I ), et nous ne ;i) Voir, eiilre autres, un Memoire sur le Paupi^risme, par M. A. de Tocqueville, membre de 1 Acadcmie Francaise, vol. de 1835. m.K LA SOCIETE. 27 ferons pas en vain un appcl nouvcau a Icur science et iilour patriolisnie. Avecle concoursde ces homnies {Miiinents, avoc les efforts perseverants du plus grand nombre, avec le zele de tons, nous conserverons Ic depot qui nous est confie et nous le transmetlrons a nos successeurs avec cet espoir fonde que le second siecle de la Soeiete Academique ne sera pas indignedu premier. C-rr^^-^^ DISCUSSION HISTORIQIE SUR LA DIGUE DE CHERBOURG, PAR 91. IVOEL, Direcfeur. Lue en seance publique , le 3 avril 1854. Messieurs, Une discussion s'est 61ev6e dans le sein de votre Socieli sur un fait hislorique reUilif a la digue de Cherbourg, cl a donne lieu a un travail redigo par un de nos collogues ainsi qu'ii des rccherclies dont le rosultat n'est pas aussi complet qu'on pourrait le dcsirer, niais qui sulTit cependant, dans inon opinion, pour arriver a la connaissance de la v^ritC. 3l) DISCUSSION mSTOIUQUE Vous vous rappelez que la discussion a eu pour origine un document enianant d'une source qui lui donnait quelque importance, et qui faisait remonler jusqu'ii Tillustre Vauban Ic projet de la digue telle qu'elle existe aujourd'liui. On suit que ce grand homme, qui a eu la gloire si rare d'unir a la vertu la plus pure le plus vaste gi5nie, est venu a Cherbourg; que, non seulement, il s'est occup(5 des fortifica- lions, dont il existe a la mairie un plan signe de sa main, mais qu'il a porte son attention sur la marine et sur tout ce qui pouvait ajouter a la puissance et, a la prosp6rit6 de son pays. II est done naturel qu'on lui ait attribue I'idee d'uno ceuvre gigantesque, qui repondaitsi bien a la grandeur do ses conceptions et a I'ardeur de son patriotisme. Si Vauban est elTcctivement I'auteur de ce projet, il aura acquis un nouveau titre a la reconnaissance du pays, mais un titre qui paraitra peu a cote de tous ceux que lui ont deja m^rite ses immenses services. Si au contraire cet honneur doit revenir a un autre, il est plus important encore de le constater et de dissiper tous Ics doutes, car la France aura droit de s'enorgueillir en ajoutant a ses grandes superiorites intellectuelles une superiority de plus, et si cet autre appartient a notre contree, ce sera pour nous un devoir de le signaler a la reconnaissance du pays tout entier. Pour alteindre ce but, le moment actuel m'a paru oppor- tun, et les considerations que je viens d'exposer me serviront d'excuse, si je donne quelque etendue a cette discussion. Le document qui se presente naturellement a notre pre- mier examen est un memoire altribu6 a Vauban, existant dans les archives du genie militaire a Cherbourg, et qui a eld insere dans le dernier volume de vos memoires. sun LA DIGUE i)K ciiEftnoiJiu:. :{| Mallieurcusomonl cc travail ne porle aiicnne trace assiirei- de celle illuslre oiigine, ot n'csl pas sigiiiJ. M. dc Tcicqiie- ville, que nous aurons I'occasion de citei plus tard, pense que son style est infc^rieur a celui du a-lebre ingcnieur. Quoiqu'il en soil, ce travail a ele compose a I'epoque oii Vauban vint a Cherbourg, et s'il n'a pas cte ecrit par lui, tout porle a croire qu'il exprime au moins ses idees et ses VUGS sur ce port de mer. Le plan, porlant sa signature, qui existe a la mairie, vient a I'appui dc celte opinion; car il existed'evidents rapports entre ces deux documents, el Tun paraiten referer entierementa I'autre. Ce memoire contient une description de la presqu'ile da Cotentin, principalement sous le point de vue strategique; il expose I'^tat de la ville, des fortifications, du port etde la rade, et eniin il indique les travaux a faire et les vues de I'auteur sur I'avenir probable de Cherbourg; or, il ne resulte pas de I'ensemble de ce memoire que Vauban eut Tintention de proposer sur cc point de la cute la fondation d'un arsenal mililaire.il considt^rait le port comme tres bien situe pour la course, et il pensait qu'avec des travaux on pourrait le niettre en 6tat de recevoir des navires marchands de 4 a 500 tonneaux et des fregates d'un rang inferieur, mais sa pensee ne va pasau-dcla. Quant a la rade, non seulemenl le memoire ne fait aucunc mention d'une digue, mais il exprime implicitement I'idde que ce travail serait inutile : car, dit-il, « la rade, quoiqu'un peu foraine, est de si bonne tenue que, de memoire d'homjne, au dire des gens de mer les plus entendus de ce pays-ci, n'y a peri un vaisseau, quoiqu'il y en ait eu de mouillosdesonze mois de temps. » II he pent etre douteux que Vauban n'ait consid(5r6 comme tres important I't'tablissement dans la Manche d'un grand 51 BISCt'SSION HISTOniQlIE arsenal en face des cdtes anglaises.ctqu'il n'en aitfait I'objet de ses rapports au gouvernement. Mais il paralt qu'il accor- dail la preference a la Hougiie, et que nieme il a existe un projet de sa main sur ce point dii littoral. En 1756, des commissaires envoyes sur les lieux reprirent ce projet et lui donnerent nieme une extenlion plus grande, raais la paix qui survint fitbientot oublier lanecessitt5 qui lui avaitdonn6 naissance. Ces fails resiiUent d'un rapport fait a 1' Academic des Sciences en 1819 sur un memoire de M. Cachin, relatif a la digue de Cherbourg. Le d6p6t descartes et plans de la marine renferme plusieurs documents qui ne sont pas completement d'accord avec ce qui precede, car il en resulterait que Vauban se serait aussi occup6 de travaux a faire pour ameliorer la rade de Cher- bourg. D'apres M. de Tocqueville, deux plans attributes a cet ingenieur indiquaient plusieurs projets:le premier consistait dans la construction de deux digues, I'une de 200 toises, partant du Homniet, I'autre de 600 toiscs, partant de Tile Pelee; le deuxieme projet aval t seulement pour objet de couvrir la fosse du Galet par une digue de 250 toises. Des recherches que j'ai faites depuis peu dans les archives de la direction des fortifications prouvent que ce n'est pas sans raison qu'on attribue ces plans ou au moins I'un d'eux a Vauban. Parmi un grand nombre de pieces, dont aucune malheu- reusement n'emane de cet homme illustre, j'ai Irouve une lettre de M. Saint-Germain, ministre de la guerre en 1777, oil il s'exprime ainsi en parlant de Cherbourg: « J'ai vu que ce point important avait attir6 I'attention de » Vauban, et qu'il avait eu I'idee de couvrir la rade au nord » par deux m61es partant du Horamet et de I'ile Polde. SUR LA D16UE DE CHERnOURfi. 33 » On ni'a fait voir un 2*^ projet de Vaiiban, auqiiol il » paraissait donner la preference. II consisio a creuser dans » le Pr6 dn Roi un bassin qui communiquerait par unc » eel use avec la fosse du Galet. » Ainsi en admeltant commc ^nianant bien de Vauban le niemoire cite plus haul, il s'ensuivrait que cet ingcnieur aurait change d'idce sur Cherbourg. Dans ce niemoire, la rade n'a pas besoin d'etre ferm(5e, et le port ne doit etre araeliore que dans la vue de recevoir dcs navires niarchands d'un nioyen tonnage ou des biitiments de guerre qu'il appelle fregates, et auxquelles il donne de 12 a 30 canons. D'apres la lettre du ministre, il s'agit d'un etablissenicnt maritime propre a recevoir des vaisseaux de guerre. Quoiqu'il en soit, ce dernier document ne parait pas fixer d'une manierc precise la part qui doit elre attribueea Vauban dans les projets sur Cherbourg, et jusqu'ici rien n'indique la pens(^e audacieuse d'une digue jetee en pleine mer a une licue du rivage. Pour achever de faire penetrer dans tons les replis de celte question une vive lumiere, il faudrait connaitre tout ce que Vauban a (^critsur Cherbourg, et malhcureusement on n'en retrouve aucune trace. Les rccherches les plus minuticuscs et les plus persev^rantes faites par M. de Tocqueville, aux minist6res de la marine et de la guerre, et jusque chez les h^ritiers du celtbre ingenieur ne lui ont rien appris. M. Meunicr, officier du genie tres distingue, employe a Cher- bourg vers I'epoque du commencement des travaux, a vu un travail de Vauban sur la position de Cherbourg caracti^risue par cette epilhetc d' audacieuse, qui, depuis, a (tl& reproduite si souvent. Ce precieux travail n'a ete retrouv6 dans aucun di^pot public ni ailleurs: II est a craindre qu'il n'ait 6le 3 3'4 DISCUSSION HISTORIQUE conserve par cet ofTicier ou par quelqu'autre ingenieur jusqu'au niomein oil la mort les a surpris, et qu'il ne soil reste cnseveli et oublie dans des papiers de famille comme propricte privee. II exisle encore un document qui a ete seulement indique par M. de Tocqueville et qu'il serail utile de consulter. C'est un proces-verbal du 13 avril 1665, conslatant qu'une com- mission nomm^e par LouisXIVs'etaittransport6eaCherbourg et qu'apres avoir reconnu la necessite d'une digue de 600 toises, elle avail recule devant I'^normite de la depense et I'incertitude du succfes. II ne serait pas impossible que Vauban fit partie de cette commission et qu'il n'eut 6niis I'idee de cette digue. Nous avonsfait desdemarches pour obtenir une copie de ce proces- verbal, et nous esp6rons I'obtenir. Mais en admeltant qu'il r«5alise la supposition purement gratuite que je viens de faire relativement a Vauban, nous savons d6ja que le travail projet(^ a cette ^poque etait bien eloign^ de presenter un d6veloppement aussi considerable que la digue dont nous venons de voir I'achevement, et il est a remarquer que la longueur de 600 toises dont parle le proces-verbal de 1665, est la m6me que celle indiqut^e dans le plan mentionn6 plus haul, ce qui semblerait 6tablir I'identite entre ces deux docu- ments. D'ailleurs ce n'est pas comme le dit notre collogue, avec une grande raison, ce n'est pas a ces courtes jet6es que Ton pourrait appliquer les expressions de la note r^cemment inser^e au Monileur, et a laquelle nous devons cette discu- sion. Ce travail est gigantesque, dit la note. II ne fallait rien moins que les travaux et les tentatives les plus hardies du genie humain pour rester victorieux dans cette lulteacharnee SUR LA nifiUE 1>F. CURRBOl'RG. 3S E CIlKltBOlltG. 49 Le recueil des buIlcstlespapcsclonne,u I'arlicle derabbayc de Cherbourg, sous la dale de 1330, une bulle de Jean XXII qui confirme le patronage qui etait aUribue a celte abbaye sur les 6glises de Sideville, des Pieux, du Theil at de Sainle- Genevi^ve. Elle est datee d' Avignon du 3^ jour des Ides de Janvier, 14* ann^e du pontificat. En 1380, Guillaume de Melun, comte de Tancarville, etait capitaine des chateaux de Cherbourg et de Rouen. En 1404, Charles VI rendit aux abb^s de Cherbourg une chapelle et un manoir qu'ils possedaient dans I'interleur du chateau et que les Anglais leur avaien* pris. En 1418, le roi d'Angleterre Henri V etablit Guillaume Hungerfort capitaine de la villeet du chateau de Cherbourg, avec droit de punir les nialfaiteurs. [RoUes normands, R. \ , p. 266.) iiW, Radalpfius Hillary habet lilleras regis (Henri V) de donations capellee infra castrum de Cherburg. (Rolles cit^s, p. 335.) 1450, appointement fait entre le connetable de Richemont et le comte de Clermont, d'une part, et le capitaine anglais Thomas Glower, d'autre part, pour la remise de la ville et du chateau de Cherbourg au roi deFrance. (Extraitd'un vidimus du 29 ddcembre 1468, depos6 aux archives departementales h St-Lo.) En 1470, Jean Dufou etait capitaine de Cherbourg; sa fille, Robine Dufou, 6pousa Nicolas Du Monccl. En 1514, les Anglais descendent a la fosse du Gallet a Cherbourg, et en 1520, aux Rases-Bannes a Urville. En 1562, suivantTouslain de Billy, f. 591, Robert Boutran, docteur en th^ologie et chanoine de Coutances, etait cur6 de Cherbourg; Voisin-la-Hougue ne le mentionne pas. En 1692, Guillaume de Mons, sieur du Broc, 6tait lieute- 4 150 PALEOGRAPHIE nant-g6neral dela viconil<5 de Cherbourg, Valognes et Barfleur. (Minutes de M^ Langlois, notaire a Valognes.) Le 12 Janvier 1694, Jean Postel, cure d'Octeville, est mis en possession de la chapelle Saint-Sauveur-sur-Cherbourg. (Minutes de M« Langlois.) En 1722, la population de Cherbourg 6taitde 800 families; en cette ann^e 1853, elle est de 28,012 habitants. En 1793, Cherbourg est mis en etat de si6ge par le repr6- sentant Le Carpentier; la famine s'y fait sentir avec force. (Letlre dudit repr^sentant a la Convention, en date du 11 novembre.) • Une elegante 6glise, moiti6 romane, moiti6 ogivale, a 6t6 batie par souscription dans le quartier de la Poudriere. Elle est sous le vocable de Notre-Dame-du-Vceu. Un beau tableau, dfl a la pieuse gen6rosit6 du pinceau de M"* de Beaudrap, y represente la scene si connue qui a donnS naissance a Tantique chapelle du Voeu que cette eglise remplace. Elle a 6te erig6e en paroisse par decret du 2 septembre 1850, et inauguree le 21 mars 1852. Une autre Sglise, sous le voca- ble de saint C16ment, patron des marins, s'616ve en ce moment dans le quartier des Mielles. On 616ve en 1854, rue Loysel a Cherbourg, une sallede spectacle sous les fondations de laquelle on a scelle I'inscrip- tion qui suit : « Dans la deuxiSme ann^e du r6gne de I'Em- » pereur Napoleon III, le XII juin MDCCCLIV, sous I'admi- » nistration de M. Joseph-Etienne Lud6, chevalier de la » Legion-d'Honneur, maire de la ville de Cherbourg et » membre du conseil general du departement de la Manche, » la premiere pierre de ce theatre a 6t6 pos6e par le propri^- » taire, M. Alexandre-Frangois-Gervais Loysel, docteur en » m^decine, en pr^sencede M. Dominique Geufroy, archi tecte, » etdeMM. Bienaim^Groset AugusteLehot, entrepreneurs. DE CHEKnOfRG. 51 » Sous cette pierre sont deposes , dans une boite en plomb : » un exemplairedu present et unes6rie de monnaiesjusqu'a » un franc, au millesime de MDCCCLIV et h Teffigie de » I'Empereur regnant. » Les hauteurs qui avoisinent Cherbourg sont de gres dur ou de schistes. Elles sont elev6es au-dessus du niveau du quai du commerce, savoir : leRoule del 08 metres; laFauconnitVe, sa partie Sud, de 95 metres, saparlie Nord, dite la roche Martel, de 39 metres; Saint-Sauveur, de 68 metres. Au XV1I« si6cle, on comptait parmi les habitants notables do Cherbourg la famille de la Haye, qui portait d'argenl charge d'un coeur de gueules accompagn^ de sept hermines au chef d'azur; celle de Le Berseur, qui avait d'azurala fleur-de-lis d'or soutenu d'un croissant d'argent (en 1666 Herve Le Berseur, alors age de 22 ans, 6tait commandant du chateau de Cherbourg); celle de Le Fillastre, qui portait d'argent au hfitre de sinople soutenue d'un croissant de gueules. Etat dies revenns de I'abbaye du Voeu de Cherboarg. (Titulaire M. I'abbe Dampierre, i75S.) {" La ferme du Manoir abbatial et t(5nements des Fourches, afferm^s a Charles Laniepce, dit Lerouvillois, par bail pass6 devant M^ Nicollet, notaire a Cherbourg, le 5 aoiit 1753, au prix annuel de 1,440 livres. 2° Les pieces des Greniers et de la Perruque, avec les pr6s d'Enfer et de I'lsle, aflfermf^s a Guillaume et Jean Rommy, fr^res, par bail devant le meme notaire, le 5 aoilt 1753, au prix de 410 livres. 3° La maison, le jardin et les pres Gaudeboust , les vergers et les clos de la chapelle de Nolre-Dame-du-Voeu, affermSs i Guillaume 52 PAI.EOGRAPHIK Quoniam, par bail devant le m6me notaire, le 6 aout 1753, au prix de 450 livres. 4° Les pr(5s de la Chauss^e et de la Queue-des-Pr6s, afferm^s a Louis-Nicolas Noel, par bail devant le meme notaire, le 5 aoiit 1753, au prixde 187 livres. 5° Le pre Bouillon, affcrm6 a Charles Legangneur, par bail devant le meme notaire, le Saout 1753, au prix de 180 livres. 6° Le pr6 d'Enfer, afferm^ a Pierre Lair, par bail devant le mgme notaire, le 5 aoiit 1753, au prix de 60 livres. 7° Le clos et le pre du Macon , avec le pre du Bas-de-la-Chaussee, afferm^s a Guillaunie Claston, par bail devant le meme notaire, le 5 aout 1753, au prix de 325 livres. 8° Une piece en herbe nomm6e la Commune, avec les deux petits pr^s y attenant, afferm^ea Simon Fleury, par bail devant le meme notaire, le 6 aout 1753 , au prix de 350 livres. 9° Le clos de la VielUe-Chapelle, alTermS a Jacques Lefebvre , par bail devant le meme notaire, le 5 aout 1753, au prixde 100 livres. 1 0° Quatre pieces de terre, nommees les Queneches, afferm^es h Pierre Lefranc, par bail du 5 aout 1753 , au prix de 200 livres. 11° Trois pieces de terre, nommees les Daiziers, afferm^esa Jean Leclerc, par bail du 5 aout 1753, au prix de 75 livres. 12° La pi6ce du Gallet, afferm6e a Jean H^laine, par bail du5aout1753, au prix de 70 livres. 13° Cinq champs de terre en la campagne d'Equeurdreville, affermes h Pille- moy, par bail du 11 avril 1753, au prix de 41 livres. 14° La ferme de la Baronnie de Ste-Genevi6ve, gage pleige, casua- lites et dimes dans ladite paroisse'el celle de la Pernelle, afferm^es a Barbe-Francoise Martin, veuve de Pierre Langlois, par bail devant ledit M* Nicollet, notaire a Cherbourg, le 4 aoiit 1753 , au prix de 5010 livres. 15° Ferme et gage pleige de la baronnie de Neuville-au-Plain , afiferm^e a Nicolas Simon, par bail devant le mfime notaire, le 5 aoiit 1753, au prix de 1020 livres. 16° Le moulin seigneurial du Bas du DE CHEHBOURG. 53 Roule, aflfermo a Guillaiiine Lepetit, parbail du 5 aout 1753, au prix de 1200 livres. 17° La dime de la paroisse d'Octe- ville-sur-Cherbourg, afferm^e au cure dudit lieu, par bail du 6 aout 1753, au prix dc 660 livres. 18°Lesdimesdes paroisses deSideville, Nacquevilleet Notre-Danied'Alleaume,alTerm6es a FranQois Vastel, par bail du 6 aout 1753, au prix de 880 livres. 19° Les dimes des paroisses de Vasleville, les Pieux et leTheil, affermees a Nicolas Simon, par bail du 5 aout 1733, au prix de 2730 livres. 20° Les dimes des paroisses- de Jobourg, Beaumont et Urville-Hague, afTermees a Nicolas Simon, par bail devant M* Roger, notaire a Paris, le16 juillet 1733, au prix de 1150 livres. 21° Les dimes de la paroisse de Gatteville, afTermties a Bon-Pierre Lamache, par baildevant M^ Nicollet, notaire a Cherbourg, le 6 aout 1753, au prix de 1580 livres. 22° La dime de la paroisse du Rozel, alTermee a Jacques-Antoine Lecomte, cur<5 dudit lieu, par bail notari6 du 5 aout 1753, au prix de 75 livres. Le total de ces fermages s'elevait a 18,203 livres. Les rentes foncieres en argent dues a ladite abbaye montaient annucllement a 1,867 livres II sols. Les rentes seigneuriales en grains et autres denr(5es, dues a la meme abbaye, se payant annuellement au lerme de Saint-Michel, consistaient en 600 boisseaux de froment (me.sure de 12 pots), 4 boisseaux d'orge (meme mesure), 3 pains, 40 poules, 2 chapons et 12 ceufs, savoir : dans la paroisse de Cherbourg, 70 boisseaux et 8 pots de froment; dans cello d'Octeville, 306 boisseaux 2 pots de fro- ment; dans celle de Digosville, 15 boisseaux 9 pots de froment; dans celle d'Acqueville, 6 boisseaux 9 pots de froment. Ces denrees cHaient dvaluees, savoir : le pol de fio- raent, a 2 sols 6 denicrs, tl I'orge au tiers, suivaut le prix commun et ordinaire des grains dans le pays; le pain, a 3 deniers la livre; la poule, a 5 sols; Ic cliapon, a 10 sols; la 54 PALlEOGRAPHIE douzained'ceufs, a 1 sol 6 deniers, suivant les anciens prixet I'usage de percevoir. Le total de ces rentes endenr^es, con- verlies en argent, revenait a 915 livres 10 sols 6 deniers. Les droits casuels, seigneuriaux et feodaux des paroisses d'Octe- ville et d'Equeurdreville, ceux des autres paroisses etant compris dans les baux des fermes de Sainte-Genevieve, Neuville-au-Plain et le Theil, pouvaient produire, ann6e commune, 45 livres. Le total du revenu dc I'Abbaye de Cherbourg etait done en ladite ann^e 1753, de 21,031 livres 3 sols 10 deniers. Equeurdreville. — Dans le XII® siecle, I'eglise d'Equeurdreville etait sous le patronage de I'abbaye de Saint-Lo. En un acte latin de septembre 1226, on lit le passage suivant: « Nous, Mathieu Bristout, prfitre, etQuentin, mon » frfere, avons assigneet concMe a I'abbe et aux religieux de » Cherbourg une pifece de terre situ6e au Mont-Estein, dans » la paroisse d'Octeville-sur- Cherbourg , lequel champ » Robert Bristout, notre pfere, a eu de Gaudefroy, I'Anglais, » et lequel champ a fait partie du fief de Bopvassal. Nous » avons fait I'assignation et la concession auxdits religieux » de deux champs en enclave, qui sont situes enlre les » marais d'Equeurdreville etlecAewm ro^/a/, lesquelsdeux » champs Durand, notre frere aine, avait donnas en aumOne » aux mfimes religieux. » L'abbaye du Vceu de Cherbourg avail beaucoup de dimes a Equeurdreville, qui, dans les chartes latines, porte le nom de Esquerdrevilla ou celui de Scheldrevilla. En 1598, messire de Sainte-Marie d'Equilly habitait Equeurdreville (Roissy f" 69), et Jean Lcsceilliere en 6tait cur(5 en 1692. DE CHEKBOIJKG. 55 L'eglise d'Equeurdreville, donlla nef a ete allongee depuis <818, conliont des inscriptions tumulaires qui ont 6te res- taurees par M. Duchevreuil, anliquaire distingue, qui poss6dait en cette commune une habitation oil il avait r6uni una bibliotlieque pr6cieuse par rapport a I'histoire de la Normandie. Hainneville. — Le noni paleographiquedeHainneville est Haynevilla. Louis XI, en 1465, donna a I'abbaye de Saint-Sauveur le patronage de l'eglise de cette commune, qui 6tait sous le vocable de Notre-Dame. En 1692, maitre Jean Mahieu en 6lait cure. En 1625, M. Louis Gigault, ecuyer, 6tail seigneur et patron de Hainneville. II portait d'azur au chevron d'or accompagn6 de trois losangesen argent. Sa famille compta, dans la suite, au nombre de ses membres Bernardin Gigault, cree en 1668 mar^chal de France, et Jacques Gigault, archeveque de Paris en 1746. On remarque en cette commune, ci peu de distance de la route imperiale qui conduit au fort de Querqueville , une petite cbapelleavec une statue de sainte Anne. Cette chapelle a remplac6 une statuette qui, en 1816, etait plac^e si pr(^s de la mer, que j'ai vu le flot batlre au pied de la niche qui contenait cette statuette. Depuis cette 6poque, la mer a fait de si rapidcs progrfes sur cette plage, qu'on ,a du enlever ce petit monument et le remplacer par celui qui existe aujour- d'hui. Querqueville. — Querqueville estd(5signe sous le nom de Kcrkavila, dans une charte du XIP siecle, par laquelle le comte de Susse.\ fait des donations a I'abbaye de Lessay. (Archives du de'partemeni de laManche.) 36 PALEOGRAPHIE En 1420, apres la redililion du chateau et de la ville de Cherbourg, ordre est donn6 au balUi du Cotentin et au vicomte de Valognes de laisser jouir paisiblementde son fief Guillaume de Querqueville. fReg. de Henri V, edit. Vaultier, p. 64.J En 1540, GuillaumedeSaussey donne la cure de Querque- ville a Robert Bavent. (Toustain de Billy, Hist, eccl., f" 566.J Le27 aout 1813, I'lmp^ratrice-reine et regente visita la cute de Querqueville. On pr(5tend qu'en 1811 I'Empereur civait manifesto I'intention d'elever sur cette cote un palais pour le prince imperial, roi de Rome. Sur cette cote est un fort qui pent tenir garnison. Dans le choeur de I'eglisede Querqueville, on lit I'inscrip- tion tumulaire de Pierre-Augustin Barbou, mousquetaire gris, et patron du lieu, decide le 7 mai 1753. Cette eglise est sous le vocable de Saint-Germain , et formait autrefois prieure. Non loin de cette Eglise, on rcmarque une cliapelle dite de Saint-Germain, qui parait remonteraux temps merovingiens. M. Asselin, directeur de la Society Academique de Cherbourg, a donn6, dans le tome I" des memoires de cette Society, un article sur cetle ancienne construction. En septembre1847, M. Leopold Delisle decouvril dans la meme chapelle une pierre tumulaire plate sur laquelle est figur^e une longue croix, a I'un des cflt^s de la quelle on lit ce mot isole JUUSQUH. La mer a fait de grands ravages sur la c6te de Querque- ville, oil Ton a trouve a mer basse des traces d'habitations et de forets. En 1840, on decouvrit dans cette commune, au milieu du chantier aux granits prepares pour la digue de Cherbourg, une douzaine do belles mddailles de Faustina jcune, Antonin et Marc-Aurele. DE CHEHB01RG. .'j7 All XVIF sit'Cle, on complait parmi los notables liabilatils de Querquevillo MM. de Bazun. Teurth^ville-Hagnc. — Cctte commune comple 1200 habilanls ct a uno supeificie de i22l hectares. II y a a Teurtheville un castillon sur une elevation voisine de la lande de Heauville, el dominantTanclenne voie romaine d'Omonville-Hagne a Portbail. En 1833, on trouva une assez grande quantite de tuiles romaines en faisant des tcrrasse- ments prt>s de ce castillon. M. Dubosc, archivisle palt^ographe du departement, a Iev6 le plan de co monument. A la fosse du Chatel, qui en fait partie, on a decouveit beaucoup de briques et deux poids tres-anciens. De ce point la vue est tr6s etendue. En creusant le canal d'un moulin a liuile, a Teurtli6viIIo, M. Gossclin, capitaine dela garde nationalede la commune, decouvrit une quantite considerable de fers a mulet el une meule romaine. Dans la piC'ce nommee les Tols, proche 1 eglise, on a trouv6 plusieurs cercueils en tuf. Teurth6ville a trois foires consid(^rables cbaque annee , le 3 mai, le 30 septembre et le 16 octobre. Celte commune etait renomm^e par scs associations de sorciers et par les fails surnalurels qui s'y passaient a r<5poque od le marquis de Saint-Simon-Beuzeville en etait seigneur. Une voie romaine conduisaitde Portbail a Omonville- Ilague, qui sont les deux plus anciens ports dont il soil fait mention dans I'hisloire du d^partement. Cette voie passait pr(!s du castillon de Teurtbeville-Hague. Non loin du -liameau de Iloulbcc, prh du bras de la Divetle qui s^pare Teurtheville de Sidevillo, dans un terrain bas, on a trouve, en 1823, trois tertres Ires rapprocht^s cl Itortant Ic nom de Hougues. lis ^laient jadis sO-pares par des M P\I.EH1E foss6s d'eau courante qui out 616 combles pendant la jeunesse de Jacques Diesnis, vioillard de ce hameau, qui, en 1823, donnait ces details avec beaucoup d'intelligence. 11 disait que son pere, morta 85 ans, avail vu tirer beaucoup de terre du sommet de celte hougue pour la porter dans un foss6 voisin, qui n'est encore qu'imparfailement comble. On y a trouve du charbon, une ancre et beaucoup de poutres de chfine, dispos6es en palissades. La tradition les fait remonter a I'occupalion anglaise 1418-1450). II est probable que ce terrain, aujourd'liui propri6t6 prtvoe , avait 6t6 autrefois confisquesur les Anglais, car les proprietaires payaient une rente a radmiuistration des domaines. Sur la ferine de Launay a Tejirlh6ville , en une piece de lerre 61ev6e nonimee la Grande-Croute, M. Le Blond, niaire de Sideville, vit decouvrir, en 1797, en relevant un fosse, une centaine de coins romains en bronze. Dans divers travaux que j'ai fail executer sur ce domaine, de 1848 a 1854, je n'ai rien trouv6 qui put faire suite a celte trouvaille. Dans le bois de Neret, on remarque deux menhirs et une fontaine dite des Fees. II existe, en celte commune, une maison fort ancienne du nom de Boguenville, qui serail peul-etre le Bojoredivilla de la charte de Richard II, qualrieme due de Normandie, en 997. Teurtheville porte le nom de Tordevilla dans les charles lalines de celte date et des epoques posterieures. L'^glisede Teurtheville est sousle vocable deNotre-Dame. Les abbess de Monlebourg et de Saint-Sauveur, et en dernier lieu la famille de Saint-Simon-Beuzeville, en avaienl eu le patronage. On voit encore dans les vitraux de la fenetre sud du choeur, la plus voisine de I'aulel, quelques traces des armes de celte famille, qui sont de sinople a trois lions d'argent rampants. Au sud du choeur, on remarque trois DE CHEHnOLRO. 59 gargouilles qui appartiennent au XV* siecle, cl an nord, une porle mur6e et en partie disparue dans le sol qui paralt elre de la nieme (^poque. Deux chapitoaux du choeur conservenl encore des restes d'anges en pri^re. Dans le cimetiere on voit un calvaire qui, par son ornementation, rappelle I'epoquede la mission a Cherbourg, en 1821, Cette commune eut, en 1693, un cure nomme messire Sibran, dont I'abbe Trigan nous a laisse un bel eioge. 11 mourut el fut inhume a Teurtheville, en avril 1700. Au lieu dit de Gristot existait une chapelle dans laquelle saint Thomas de Cantorbtiry oflicia plusieurs fois. Sideville. — Le nom paleographique de cette commune est Sidevilla. Son eglise est sous le vocable de Saint-Ouen, et les abbes de Cherbourg 6taient ses patrons. On note parmi ses cures, aux dates de 1366 et de 1692, Nicolas de Boulbert et messire Etienne Rualem. Jean Blondel, natif de Sideville, 6tait grand bailli du Cotentin en 1337. II avait eu pour bisaieul Jean Blondel, poss(5dant en 1216 une vavassorie (en Normandie c'6tait un tenement qui tenait le milieu entre les fiefs et les rotures) a Sideville, et 20 livres tournois de rente au droit de Perrine d'Ecaillegrain, son 6pouse. Sideville eut pour seigneur, en 1528, Michel Lecoq, qui portait d'azur au chef d'argent charg6 d'une molette de gueulcs et de deux boutons de conterie (verroterie de Venise). On compta au nombre de ses successeurs Julien de Ravalet, qui etait originaire de Brelagne et attach^ a M. le due d'Estouteville. Une branche de cette famille Ravalet avait achete la seigneurie de Tourlaville. M. Ravalet de Sideville mourut a Bayeux en 1733; son frere, qui portait le nom de Tourlaville, habitait aussi Boyeux, et mourut, vers la mfime 60 I'aleoghapiue cpoquc, sans iaisscr de descendance. Lcurs armes etaient d'azur a la fasce d'argent chargee de trois croix de gueules et accoinpagnte en chef de deux croissants d'argent et en pointe d'une rose de meme. Le sable dorc de Sideville est excellent pour niouler. Uartinva»t. — En 1283, le patronage de I'^glise de Marlinvast elait en litige; plus tard, ce patronage demenra au seigneur du lieu. (Toustainde Billy, Hist. eccl. f^Sii). Le choeur de cette egliseest ronian. Elle est sous le vocable de Nolre-Dame. U existail autrefois a Martinvast deux chapellesdediees a saint Andre et a saint Eioy. Non loin de I'eglise sont les restes du vieux chslteau de Martinvast, qui se trouvent aujourd'hui enclaves dans la belle ferme module de M. le general comte du Moncel. Au lieu dit de I'Oraille est une roche a trois pieds, qui passe dans le pays pour un reste de dolmen. Au XVIP siecle, on comptait parmi les habitants notables de Martinvast Francois du Moncel, chevalier de Malte, et Antoine du Moncel, cornette au regiment du marquis de Marines; ils portaient de gueules a trois losanges d'argent. On y remarquait aussi la famille d'Yvetot, qui avait d'azur a la bande d'or accompagnee de deux coquillcs de mfime. OcteTille-snr-Cherbonrg. — En 1140, Roger de Magneville vendit a I'imperalrice Malhilde les terrcs qu'il poss(5dait a Octeville-sur-Cherbourg. (Recueil des Chartes, reg. 4, f 6CkJ En 1420, Henry V, roi d'Angleterre,,confirma aux abb(5s du Voeu de Cherbourg la donation qui leur avait ^te faite du boisdu Fay, aOcteville. (Rolles normands, reg. I, f° 3I9.J UE ciiKnnoinu. G1 En 1583, Gilles Avoye, ot on IG92, Jean rost.l (Haiont Curtis d'Octeville-siir-CIierbourg. L'6glise d'Ocleville est romane. Elle est sous le vocable de saint Martin , et avait pour patrons les abbos du Voeu de Cherbourg. Son choeuret sonclocher sonl rcmarquables. Sur le mur exl^rieur, au sud, est un bas-relief represenlant la cene. A son chevet on remarque des corbeaux bizarres. Cette commune pr6sente de plus une petite chapelle ditc de Saint-Sauveur, qui a appartenu autrefois aux abbess de Cherbourg. Le bienheureux Barth6!emy Picqueray y a un tombeau v6n6r6 par les populations de la localitc. La construction du fort d'Octeville remonte i\ 1793. On avait aussi etabli a cette epoque une batterie sur le monl du Tronquet, qui domine a Test la route des Pieux. AuXVII" sifecle, on comptait parmi les notables habitants d'Octeville la famille de Cabourg, qui portait de sable a la bande d'argcnt chargte do trois tourteaux de gueules. ToRPlavillc. — En 1145, une chapelle des Flamands, a Tourlaville, avait ete accord(5e par le papc Eugene III a Algare, eveque de Coutances. Elle (itait probablement situee entre la redoute et le rocherdes Flamands, ou estaujourd'liui un 6tablissement de pyrotcchnie. Unechartede 1256 indique dans cos parages un fiefnomme Grossum Fossatum; c'est peut-etre le lieu dit Longuemare. Le fief aux Flamands, les noms de Trottcbecque et de Bourg- bourg sont autant de souvenirs de la colonie de Brabangons qui, bien avant1308, trafiquaient a Tourlaville. II y avait aussi des Juits qui ont laisse leur nom a une rue de cette commune. Pour ces marchands, le terme de la foire de Montmartin etait une epoque de paiement. Le fief aux Fla- mands s'etendaitdcpuis le pont aux Charetles jusqu'a celui C2 PALEOGRAPHIE de Cherbourg et ii I'eau de la Divetle. Suivant I'exlrait de charte, qui est cite ci-apr6s, on serait porte a croire que ce fief faisait partie de celui de Senoviile. « Le jeudi devant la Saint-Michel 1308 (17 octobre), Mgr Yon Dubuisson, cheva- lier, seigneur de Senoviile, donne a I'abbaye de N.-D.-du- Voeujouxte Cherbourg, pour lesalutde sonameet decellede Jeanne, sa femme, de Jean Dubuisson, son pere, et de Luce, sa mere, demi-livre de poivre a prendre a Tourlaville sur Denis Grosparmy, au fief que Ton nomme lefief aux Flamands, etune paire d'6perons de fer etle cuir dus acausedumoulin dudit Jean Dubuisson , assis sur I'eau de Trottebecque, vers le bois du Mouchel. » En 1400, les Anglais pillerent Tourlaville. En 1495, Jeanne de France, femme de Louis XII, donna h Robert d'Anneville le fief-ferme de Tourlaville, pouren jouir ainsi que I'avait fait GuillaumeDufou, capitaine du chateau de Cherbourg. En 1 502, Guillaume Porphyre, cure de Tourlaville, permute avec Richard Lelouey, chanoine de Coutances, dont les neveux furent plus tard bienfaiteurs del'eglise de Brillevast. En 1536, Jean Vippart, ecuyer, 6tait seigneur de Tourla- ville, Ozevilleet Silly (Arch, du chateau de Bricquebec). Dans UQ aveu rendu au roi Henri II, en 1549, les religieux de I'abbaye de Cherbourg parlent de leur droit de gravage « depuis la riviere d'Yvette fsic.J, passant pres et joignant la muraille et enclos de Cherbourg, jusqu'au ponl aux Cha- rettes qui soulait 6tre I'endroit et voie a venir du grand chemin venant de la placode Tourlaville, et passant par devant la maison quifut aPignard et de present a Jean Guiffard. » Les mfimes religieux avaient, suivant ledit aveu, une saline i Tourlaville. Les details relatifs au crime commis, en 1602, par deux DE CHKHBOURff, 03 enfants de la famille des Ravalet, qui elail a celte ('poqiic titulaire du fief seigneurial de Tourlaville el proprii'laire do son beau chateau, on t(5te en partieextraitsd'un livre intitule: Histoire tragiquedenotre temps, par F. de Rosset, Rouen, 1700, in-12, page 112. Le fils et la demoiselle de Ravalet, condamn^s a etre d(5icapites par sentence du2 decembre 1603, s'appelaient Julien et Marguerite. Rosset ne les d^signe que sous les pseudonymes de Lizaran et de Doralice, noms que M"* Scudt^ry avail mis a la mode. lis subirent leur peine en place deGr6ve. Julien mourul le premier, etsa sceurquelques mois aprtss, parce qu'elle 6tait enceinte au moment de son arrestation a Paris, oil elle 6tait allee pour se d(5rober aux poursuites de son mari et de sa famille. Leur condamnation est mentionn^e dans un ouvrage qui se trouve a la biblio- th^que municipale de Cherbourg, et qui a pour litre : La connestablie et marechausse'e de France, ou recueil de tons les edicts, declarations et arrets, par Pinson de la Martini6re, Paris, Rocolet, 1661, in-i", p. 1009. Un Ravalet de Tourlaville etait alors abbe de Hambie et grand chantre de la cathedrale de Coutances. II r^signa ces dernifires fonctions en 1602, et fonda le college de Coutances avec plusieurs autres 6tablissements d'uiilite publique. La redoute de Tourlaville fut construite pour la premiere fois en 1692, et fut demolie par les Anglais en 1758. Celle qui existe aujourd'hui a 616 faite en 1778. A ladescenlede 1758, les Anglais frapperent une forte contribution sur la manufacture des glaces de Tourlaville. Messire Faulain, cure de Tourlaville, rebalit la nef de r^glise a ses frais. II mourul le 17 Janvier 1739, apres avoir et6 pendant un demi-siecle cure de cette commune. (Vie de M. Pate, cure de Cherbourg, par Vabbe Trigan, p. 466. J L'ilePelee, oiiestanjourd'hui lefortimp6rial,6tait,en 1560, C4 PALEOGRAPHIE siiJAant I'opinion do M. de Gcrville, le point le plus avance d'un promontoire qui tcnait a la cote de Tourlaville. Cepro- montoire dispaiut, dit-il, sous les invasions de la mer, dans le courant du XVIP siScle. En 1700 on ne pouvait plus y parvenir qu'acheval, en suivantune lignede rochersdevenus sous-niarins. Celte opinion pent etre contest^e, parcequedes ouvrages qui datenl du XV^ siecle presenlenl d6ja ce rocher com me une ile. Onopposerait aussiacette assertion la citation suivante extraite d'un livre en caract^res gothiques, iraprimS a Rouen en 1483, ct ayantpour titre: Le Grand Rouiier du Pilotage, par Pierre Gracie dit Ferrande: « Se tu pauses en lest nordest dc lisle Pel6e qui est devant Chenebourg en amot de luy a unze brasses a beau fons cest assavoir coquail e caillouches et desseubs lille et nulle raaree ny court ne de flaux ne de jusent. » fPage H6, %. 4.) On opposerait encore a I'opinion deM. dcGerville le passage suivant extrait du Petit Flambeau de la Mer, par Bougard, lieutenant sur les vaisseaux du roi : « Au proche de Cherbourg au N. E. de la ville environ unedemi-lieue est une rangee de rocbersqui vont le long de la terre bien trois longueurs de cable que Ton nomme I'ile Pelee, ils sont presque toujours sur I'eau si ce n'est de grand mer ff" J8.J » Ces deux ouvrages sont a la bibliothfequc de la ville de Cherbourg. En 1777, MM. Decaux et de Ricard Qrent le premier plan du fortactuel, qui fut termine en 1784. En 1780, une ecole de canonniers garde-cotes existait a Tourlaville, et avail pour commandant M. d'Horicy. En 1824, on trouva au bameau Quevillon 50 medailles romaines. A la meme epoque, on decouvrit deux medailles d'or a la ferme du Maupas, et plusieurs aulres medailles romaines en bronze aux Mielles et a la Pierre-Butee. En 1829, on a trouvii pris dela redoute despoids remains, DK CUEUBOLKG. 6^ tlestuiles, des meiilcs, dos medaillcs ot une epingle d'ivoii'ti. Non loin dc cette redoute, il avuit exisle autrefois une cliapelle dite de la Madelaine. En 1831 , a la icrnic dc la Boissayc, dans la piece de la Meulettc, on trouva dcs traces d'liabitations, des tuiles romaines et des debris de mcules. En 1832, dans une piece sablonneuse appartenant ii k famille Godelle, el situce proclie de la redoute, on a trouve une petite figurine en pierrc oUaire et une meule roniaine. La figurine est au cabinet de la ville de Clierhourg. En 1834, on a decouvert, en delricbantle boisdes Meulcltes a la Boissaye, des fondations a ciment remain, dont laparlie superieure etait formee de briques posees a plat otcimenlees.. Un appartemcnt, qui fut deblayc avec soin dans celte cons- truction, a olTcrt beaucoup de petils compartiments de la menie macounerie. Un cote de cette piece avait 6 metres de longueur. La tradition de la locality rapporte qu'une rowfe dcs Romains, venanl par Sauxemesnil et par les Ecocheux ou elle croisait la route de I'Archc, arrivait a la Glaccrie.et de la a Cherbourg. , , „ . Tourlaville donnc, comme on le voit, dcs preuves.de eon. ancienne importance. Aucun lieu de I'arrondissement de Clierbourg n'cn ofTre une aussi grande quantite, notamment en la parlie qui estentre le hanicau Quevillon, la redoute et le bassin du commerce. Celtoscrie de decouvertesacommenc6 en 1741, oii, pour debut, on niit k nu, en travaiUant sur la pente de la montagne du Roule, un tombeau avec une urne, . beaucoup de medailles et dcs ornements d'or. Dans les memes parages, on trouva cette belle figurine en bronze qui ^nrichit aujourd'liui le cabinet de la ville de Cherbourg, et ces liaussc-col d'or qui, lombes en des mains ignoranles, , ont etc fondus, a relerncl regret dcs anliquaires. Beaucoup;^ 66 PALEOGRAPIUt (le traces romaines onl ^te decouverlcs dansla dM-ection du lieudit de Grandcamp, oil Ton remarque encore aujourd'hui les lignes d'un camp tres vaste. De ce camp, la vue plane sur la bale de Cherbourg et sur le lieu ou 6tait la station du Corialum romain. 11 y a 70 ans, on voyait encore un pav6 remain long d'un kiloni6tre, et qui, sous le nom moderne de Chauss6e d'Adam, passait dans les bois de la Pierre-But^e. II a 616 detruit en 1782, dans les d^frichements faits par MM. Doumerc et Baillio, qui venaient d'acheter ces bois de la maison de Bourbon. Ce pav6 se reliait a la voie romaine du vieux Cherbourg a Coutances, en passant par Soltevast. Sur les diff6renles hauteurs de Tourlaville, la niineralogie est tres vari^e. A la Roque-Luce et a la Glacerie, on trouve le poudingue quartzeux et la baryte; a I'eglise de Tourla- ville, le st^aschiste; a la lande Saint-Maur, la baryte. On remarque sur la lande Saint-Gabriel un beau cromc- leck. Je I'ai dessine en 1847, II y a pr6s du village de la Glacerie deux rochesdruidiques remarquables; onlesnomme dans le pays la Roque-Risbec et la Roque-Luce. Le chateau de Tourlaville date en grande partie du XVP si^cle. II appartient aujourd'hui a la famille Clerel de Toc- queville. M. Th. du Moncel nous a donn6, sous le litre de Manoir de Tourlaville {Paris, iSoO, grand-aiglej, un album remarquable, qui contienl les principales vues de ce curieux chateau et quelques-unes des deplorables scenes de f6odalit6 dont il a 6te le theatre. II exisle aussi sur ce vieux msinoir une petite publication qui a pour tilre : Histoire myste'rieuse du chdteau de Tourlaville. Au XVII* siecle, on comptail parmi les habitants notables de Tourlaville, la famille de Franquetot (de Coigny) , qui portait de gueules a la fasce d'or chargee de trois etoiles d'azur, accompagn^c de trois croissants d'or. Ces armes se D£ CHERBOLRG. 67 voient encore clans une tics sallos du clutleau de Tourlaville, oil elles sont peinles sur les boiscries au milieu de diverses allegories. A la mCme ^poque, les families de Hennotet de Houtteville habitaient aussi Tourlaville. GatleTillc — Suivanl une cbarle latine du roi d'An- gleterre Henri III, en date de mars 1268, concession est faite a Tabbaye de Montebourg du c6tti droit de tousles poissons a lard qui seraient pris ou qui echoucraient surlescOles com- prises entre les con fins de Tevecbcde Coutances et I'eglise de Gatteville, sur le fief de Gautier Broc, avec toutes les redcvances et dimes y affectocs. Cette donation ne ful pas maintenue; car nous retrouvons au Livrc blanc, f" 49, que pendant le XIV^ siecle I'eglise de Gatteville dependait des chanoines de Coutances et des abbes du Voeu de Cberbourg. II yavaitalors deuxcures auxquelles cesautorit«5s nommaient scparement. En 1372, Robert de Bazan, de Virandeville, se rendit adjudicataire, par suite de decret, du fief de Gatteville qui avait ete saisi sur le seigneur du lieu. L'annee suivante, Colin Bazan , fils de Robert, epousa Jeannette de Gatteville, fille dudit seigneur d^posscde, et adopta pour luiet les siens les arraes de Jeannette, qui etaient d'azur a deux jumelles d'argent surmontees d'un lion de meme passant, arm6, lampass6 et couronne d'or. Leur fils Nicolas epousa Guille- metle, fille de Jean de Beuzeville-sur-le-Vey. Le fief de Gatteville demeura dans la famille de Bazan jusqu'au milieu du XVI* siecle, epoque a laquelle il passa dans la famille Le Tellier de la Lutbumiere. Nous avons sous les yeux un bail par lequel Ce dernier alTerme leditdomainc, en i575, a un nomme Jafques Bourel. Nous notons , comme autre piece justificative dc proprietti, une leltrc du 10 mars 1615, par 68 PALEOGRAPHIE laquelle unlaLulliumiei-e, seigneur de Galteville, (5erit h M. de Crosvillc, de Goubcrville, pour convenir du jour de la fdfnpure de la mare de Gallemare. Henri de Matignon , ayant Spouse une hcriliere des Le Tellier de ia Luthumiere, devinl proprictaire du fief de Galteville, dont il rendit aveu au roi Lbiiis-le-Grand en 1678. Sa veuve pr^'senta le meme aveu eh 1683. M. le due de Valenlinois-Matignon vendit, en 1747, cc domaine h M. Hoock, quil'a transmisa sa descen- dance, reprt^sentee aujourd'hui par MM. de Saineenne et de Gerando. L'^glise de Galteville date du XIP siccle, ctavait autrefois poUr patrons les abb(5s du Vceu de Cherbourg, qui, en celle quality, touchaient encore en 1733 les petiles dimes de celle paroisse, afTermces au prix de 1580 livres. Gatleville posst^dait anssi un prieure dont les batiments exislenl sur la place de I'eglise. Ce prieure, qui ctait a la nomination du chapitre de Coulances, sur prt^senlaliofi rbyale, valait 6000 livres derevenu, en y comprenant les grandes dtmes. Avanl 1789, un abbede Saint-James, ancien capiiaine de dragons el chevalier de Saint-Louis, qui avail servi avec distinction aux journees de Fontenoy ct de Law felt, etait titulaire de ce prieur6. L'Sglise de Galteville est sous le vocable de saint Pierre et (ie saint Lubin. On y voit trois inscriptions; I'une qui est dansle choeur, porteces mots en caractcres gothiques : Priez pour leS bienfaiteurs de ce'ans, el deux autres qui sont pres de Tautel de la Vierge el qu'on ne peut plus dechidrer. No'n loin de celte ^glise est une petite chapellefortancien- ne, qui est dedi6e a la Vierge. C-etle chapelle n'est ouverte qu'h cerlaincs fetes de I'annee. n existe a Gatleville une ancienne ferme connuc sous le nom de Broc. C'itait probablement la residence de Gaulier DE CIIERUOUnC. 69 BroG,que nous avons vii figurerpliis liaut, a la datecleI268. H y avail jadis une chapelledomeslique, qui sert aujourd'hui de grange. Devant la poi'te a crtineaux de granit de cetle ferme est un poirier st^culaiie appel6 vulgairement Poirier de Chicane. Je soupconne que ce vieil arbre n'a rien de commun avec le chene dc Vincennes, sous lequel Louis IXrendaitla justice. Autour de I'^gise de Gatteville on a trouv^ beaucoup de cercueils creuses dans le roc granitique, et qui devaient renjonter aux XIIP el XIV® si6cles. Au village deDenneville, en deniolissant une vieillecheminte dans une maison appartenanl a M. Loysel, avocat, on trouvj^, 11 y a 33 ans, une seric d'anciennes monnaies, dont les plus r^centes (^talent de Louis XIIL 11 y a a Gatteville deux phares qui sont visiles chaque annee par un grand nombre de tourisles parisiens. Oncomplait autrefois en cettecomniune.parmises notables babitants, M. de Hen not ( 1666) ; M. Hoock (1747) ; M. de Bonvalet, sieur de Duri^cu (1789.) Nicolas Dairaux, proviseur du lycec Cbarlemagne a Paris en 1814, naquit a Gatleville le 31 juillet 1759. le Rozcl. — II est parle d'un Hugues du Rozel dans line cbartc de Guillaume-le-Conqu«5rant, rendue en 1077 en fuveur de I'abbaye de Saint-Elienne de Caen. fGall. Christ., XI, inst., col. 67.; En 1082, ce mome Hugues fait en ces termes une donation a ladite abbaye : Ego Hugo de Rozel trado canobio B. Stepliani terras de Grainvilla (lieu citi, col. 74). Le Livre noir, au f 224, signale un Patrice du Rozel qui lient dc lloger Baron un lief dans le Nottingham, a la condi- tion defournir un soldat urnic au roid'Anglctcrre. 70 PALEOGRAPHIE Le cai'lulaire de Saint-Sauveiir, au f° 13, mentionne un Robert du Rozel, Adivise, sa femme, Raoul et Malvesin , leurs enfants, qui rendcnt un acte, en presence de Roger-le- Vicomle, a une date qui peul etre reporlee au commencement du XI* siecle. Les chartes de I'abbaye de Blanchelande ne nientionnent pas encore aux annees 1154 et1157 les dimes du Rozel, qui, ainsi que nous le verrons ci-apres, appartinrent dans la suite a ce monastere. Par accord fait en 1207 cntre le chapitre de Coutances et I'abb^ du Voeu de Cherbourg, il fut convenu que les fruits des6glisesdu Rozel, de Gatteville et de Barfleur seraient partages entre tes contractants, qui feraient leur possible pour se defendre mutuellement. (Toustain de Billy, Hist, des Eveq., f° 207.; Le livre des fiefs de Philippe-Auguste, au f° 2, parle d'un Robert de Malvesin qui tient au Rozel un denii-fief a charge de service. Ledit Robert donne au chapitre de Coutances un quartier de froment de rente a prendre au Rozel sur Guil- laume de Cleville, fils Anquetil. Le cartulaire de Saint-Sauvcur mentionne, au f° 63, sans dale, un Guillaume de Malvesin qui donne a I'abbaye de ce lieu une mine de froment de rente a prendre sur son fief de Vaindil au Rozel. Plus tard, cettedonalion fut confirmee par Hugues de la Haye et par Luce, sa femme, heriticre dudJt Malvesin. En 1222, Luce du Rozel, veuve de Ilugue de la Haye, chevalier, donne a I'^glise de Coutances six quartiers de fro- ment a prendre sur son moulin du Rozel. (Billy, Hist, eccl., f 236.) Parmi les chevaliers et ^cuyers qui recurent I'ordre de se trouver a Saint-Germain-cn Layc en 1236, pour le service du DE CHERBOURfl. 71 roi, sont menlioniios Guillaumc el Raoul de Malvesin ; mais leur residence n'est pas indiqu6e. (Laroque, Arriere-ban, rOles 20 ct 21. ) Guillaume de Malvesin figure dans ce ban en 1242. A peu pres dans le mcme temps Raoul, son frfere, parait parmi les chevaliers normands qui comparurent a Chinon. (Idem, p. 29. ) En 1238, Eustache, 6v6que de Coutances, confirme aux religieux de Blanchelande les portions de dimes du Rozel qui avaient ete conc6d(^es par Vivien. (Billy, f° 312.) En 1260, accord est pass6 entre I'abMdu Voeu de Cher- bourg etlechapitre de Coutances pour le patronage alternatif du Rozel. (Billy, f° 289.) En 1270, le cur6, nomm6 Sanson, est install^ par ce chapitre. Laroque, a la page 49 de I'arri^re-ban, ann^e 1271, parle de Mathieu du Rozel, chevalier de la baillie de Constanlin, qui fait sa part du service de Guillaume de Vernon, son suzerain. En 1280, h la fete de saint Clement, le chapitre de Cou- tances mandc au doyen des Pieux d'installer Pierre, fils Richard Pernellc, en la cure du Rozel, vacante par le d6ces de Robert de H^auville. En 1383, Eustache, eveque de Coutances, confirme i I'abbaye de Blanchelande des dimes au Rozel. ^'Gall. Christ., coll. 882.) Le cartulaire de Saint-Sauveur fait mention, M'annee 1288, d'un Richard de Pierreville, pr6sent6 a la cure du Rozel par le chapitre de Coutances, et a Tann^e 1292, par Johanac, femme de Monscignor Robert Rosel. Par actc passe en mars 1293, Robert Berlran, baron de Bricquebec, donne a I'abbaye du Voeu jouxte Cherbourg le patronage de Teglise de Saint-Paul du Rozel avec les droitures et apparlcnances. (Billy, f''324.) Ledit baron donna en mcme tf PALEOCnAPHIE temps a cello abliaye Ics patronages du Mesnil-au-Val el de Hard in vast. Vers la mcme epoquc, Jonrdain de Barneville donne a lafHte abbaye feglise de Saint-Pierre du Rozel ( ecclesia ytM Petri de Rosello), et le prieure de la Taiile. (Arch, de I'Empire, cart, de la Taiile, n° 307.) Roissy, dans son /lrmo^rm^, mentionne dans le vicomte id« Valognes, a I'ann^e 1598, une famille du Rozel qui avail d'argent a la fleur de lys de sable accompagnee de trois rameauxdesinople. L'aveu rendu h Louis XV, en 1723, par M. de Matignon au sujet de sa baronnie de Bricquebec, declare que les barons do cc lieu ont donnc el aumOne a I'abbaye du Vceu de Cher- bourg les eglises et presbyteres du Rozel, de Saint-Paul des Sablons et de Vasteville. ^^'Les etals de la nreme baronnie pour les annees 1723 et 1787 indiquent que le Rozel etait un fief tenu de Bricquebec par moitie de haubert. II appartenait alors a la famiUe de Ilcnnot et passa ensuite par mariage dans celle de Bignon. En 1839, on decouvrit, en executant des terrasscnionts sur la ferme deBecdoisel, douze disques romains en marbre. Dans le cimeliere, on remarque un tombcau en granit qui, par sa forme, rappelle celiii de Chaleaubriand. Ce tom- beau porle I'inscription funeraire de M. Armand-Jer(jme Bignon, no en 1769, niorten 1847. "•■Au chevetde I'eglise on lit celte autre inscription : Cetfe sacristie aete faite batir par M. Jean-Charles VauUier, sicur du Vivier, cur6 du lieu, en I'an 1763, et Jacques Vilot etant Iresoricr en charge. L'eglise du Rozel est petite et n'a qu'unc simple campa- nille, mais elle possede sept tableaux, doni Irois sont fort remarquablcs. Au premier coup-d'ceil, on rcconnail quo cos DE ciiEnimrnr.. 73 trois tableaux apparliennent a I'ccolo de Rubens. Celui qui se prcsenle aux regards en ejilrant dans I'eglise, est liaut dc 1 metre 50 centimetres et long de 2 metres 50 centimetres, ct retrace la scene qui suivit la decollation de saint Jean- Baptiste. On saisit de suite, h la pompe du coloris et a la richesse de la composition , la maniere du noble niailre anversois. De tout temps le genie llamand a excelle dans la peinture d'interieur. II a su donner une lumiere sans cgale a ces meubles d'ebene ou le jour miroite dans de ricbes cise- lures, sur les sieges de cuir de Cordoue aux pieds tors, aux tables recouvertes de tapis de Turqnie, oil s'epanouissent les radieux fruits de rautomne. La scene se passe a Jerusalem dans le palais d'Ht^rode-Antipas, letrarque de Galilee pour les Remains. Herode, coiffe d'un bonnet a calotte rouge et a bandeau de fourrurc, porte une ample robe de velours gris a pelerine d'bermine, que couvre a moilie une riche pelisse de cetle meme fourrure. Une massive cbaine d'or pendasoncou, et une cordeliere a large torons suspend a son c6te un sabre arabe incruste de pierreries. Des brodequins en maroquin orange et a bordure de pourpre defendent sa jambe dontle genou est nu. Le tetrarque est assisau baut bout d'une table de banquet; sa main droite, passee dans sa barbe brune et touflfue, soutient sa belle tele. Sa femme Herodiade est assise a sa droite, sous un dais dc velours vert a franges d'or. Elle est coilTee de cette toque de velours noir qu'on retrouve dans tous les tableaux de Rubens, el porte la robe de satin orange qui etait adoptee au XVIl= siecle par toutes les dames des grandesmaisonsdesPays-Bas. L'^clatante blancbeur de son cou, qui n'a rien de galileen, mais qui rappelle les beaux types flamands, est rcliauss6e par un petit collier et par une riviere de grosses perlcs cl dc pierres precieuses qui voilenl a demi son sein. 74 PALEOGRAPHIE En face du te'trarque s'avance Salome, fiUe de sa femme, Elle est vfitue d'une robe 6carlate brod^e d'or. Sa pose est majeslueuse, et sa belle IHe blonde se pcnche capricieuse- nientversHerodeavecun voluptueuxsourire.Ellelui presents un plat d'argent qu'elledi^couvre, et qui contient la tfile livide de Jean-Baptiste. Comme personages accessoires dans le tableau, on remarque derriere Salom6 un nain a rapi6re au cote, qui tient un tam- bour de basque et 61oigne avec une baguette un levrier aussi haut que lui. Au bas de la table est assis un vicillard qui, dans sa surprise de la scene qui s'offre a lui, tient elev6e, sans la porter a ses levres, une coupe dont le vin, d'une couleur riche et limpide, donne lieu a un heureux effetde lumi^re. Presde lui est une matrone qui parait partager son ^tonnement. Le fond du tableau est occupe par Ic personnel dj service en la salle du banquet, ou tout retrace non I'ordon- nance des palais de I'empire romain, mais bien celle des chateaux des Pays-Bas ou d'Espagne au temps de Rubens. Deux valets apportent, I'un un paon roti auquel on a restitu6 son brillant plumage, et I'autre, qui est africain, une corbeille de fruits. Derriere Herodiade se tiennent deux soldats remains et une cameriste prele a lui donner une assiette d'argent. La table, vide de plats, attend un nouveau service, et ne laisse voir qu'un homard a I'une de ses extremites. Dans le choeur, on remarque un tableau de la meme t^cole, qui represente I'adoration des Mages. Au seuil d'une Stable en ruines, une vierge blonde et fraiche, vetue d'une robe ecarlate dont la partic infcrieure disparait dans un mantcau gris, tient, debout sur sesgenoux, I'enfant Jesus potele et souriant. Pres d'eux est saint Joseph, a barbe argentee, enveloppddansun mantcau gris qu'il ramenesursa poitrine. Deux mages, nu-tcte, sont prostcrncs aux picds du divin DE CHEnBOL'RG. 7o enfanl : I'un, qui liii presente une coupe d'or, est drape dans un mantcau orange et blanc rehauss6 d'or; I'aulre est vetu d'une sorte de damaltique de pourpre, dont la queue tralnanteest portee par un petit page a pourpoinl espagnol et a fraise. Le troisieme mage, dont le visage africain est ombrag^ d'un epais turban, est reste debout, et semble exprimer des actions de grace. Les gens de la suite des mages forment groupe au deuxieme plan. Ce tableau a les memes dimensions que celui dont nous venons de parler. Dans la nef, en face du tableau d'llerode, est une autre toile, haute de 2 m. 50 c. et large de \ m. CO c. On y voit, au premier plan, un eveque renvers6 sur le sol ; sa mitre et sa crosse sont lomb(5es pr6s de lui. Un bourreau I'a saisi et lui a coupe la langue; le sang coulesur la barbe blanche du prelat. Un autre bourreau tient cetle langue avec une tenaille et la jette a un chien. Au second plan, on apercoil la rude figure d'un cavalier remain, dont le cheval se cabre malgre les efforts d'un soldat qui cherche a le maintenir. Au ciel est une troupe d'anges qui apportent la palme due au martyre. Dans le lointain est un paysage montagneux. Celte toile represenle le martyre de .saint Lievin, patron de Gand. Irlandais do naissance, Lidvin venait d'etre dlevc a I'episcopat dans son pays, lorsque son saint zele le porta a quitter son si^ge pour se livrer a la conversion des pa'iens. II se rendit en Flandre en 635, ctfut honorablcment recu a Gand par saint Florbert, abbedumonaslerc de Saint-Pierre, quel'illustre saint Amand avail fonde dans cette ville naissante. Li^vin precha I'dvan- gile dans les environs d'Alost, et opera de nombrcuses con- versions parmi les populations do cette contree, oil regnait un culte melange barbare des superstitions romaines et germaniques. Le martyre altendait Lievin au milieu des succes de sa parole eloqucntc. Par ordre d'un proconsul, on 76 PALKOCItAPIllE le saisil a Esschen, village dc la Flandre orientale; on lui arracha la langue qu'on jeta aux cliiens. II mourut le i2 novenibre 657. Ses reliques furent transferees en 1007 par ErcmboUl, abbe de Saint-Bavon. Sa fete est celebr^e a Gand le 12 novembre de cbaque annee. (Felix Bogaerts, Hist, du culte des saints en Belgique, p. 401 ; — Juste ct Caillau, Hist, de la vie des Sai^its, t. 4, p. 257.) Cetle toile est unc copie du magnifique tableau de Rubens qui existe au musec de Bruxelles, et qui a (5te grave, au temps de cc grand maitre, par Bolsmert et P. Pontius. — (Lettre de M. Felix Bogaerts a I'auteur, en date d'Anvers du 2juillet 1850.) Les trois tableaux decrits ci-dessus et plusieurs autres ont (5te donnes a I'eglise du Rozel au commencement de ce siecle, ot proviennent d'Anvers, oil ledonateur (1) occupait alors des fonctions du gouvcrnement francais. Ce don avail 6te fait a Teglise du Rozel en consideration de son cur^, M. Vaullier- Desaulnais. Ces tableaux sont travailles sourdement par I'humidite des murs de cette petite t'glise etsoulTrent depuis longtomps. On remarquait autrefois parmi les notables habitants du Rozel les lords Russel, plus tard dues de Bedfort; les maisons GirotdesMoustiers (1464); de Hennot et Blondel (1666) ; et la famillc Bignon, qui comptait au nombre de ses membres le vertueux Jerome Bignon, avocat general au parlementde Paris (1626), qui porlaitd'azur alacroix decalvaire d'argent cantonnee de quatre flammes de memo ct accolee d'un ccp de vignc de sinople, et I'abbe Terray, intcndant-genc^ral des batiments sous Louis XV. (1) Pere dc I'aulcur do ces notes. UK ciiiiRHOi'ur.. 77 FlnninnTllle. — Celle commune porta d'abonl le rioin dc Saint-Gerniain-dc-la-Mer, parcc que son ^glise, dedice h Saint-Germain d'Ecosse, fut dans le principe batie pros de la mer. C'est ainsi que le vicomte Neel la designe dans la charle qui commence par ces mots : In nomine S. Trinitalis ecclesiam S. Germani de Mari... Depuis, celte 6glise fut appelee S. Germain-de-Direthaimi, a cause dufief de Direth, appartenanta I'abbaye de Saint-Sauveur, sur lequel elleetait balic. Au verso du 10« feuillct du Livre noir on lit : Et hec terra est apud S. Germanum de Direlb. Dans la confirmation donnee par le roi d'Angleterre, clle porte le nieme nom. Enfin cllc rccut celui de Flamanville, que portait un de scs ha- nicaux. Pendant la domination normande en Angleterre, un Roger de Flamanville avail dans le Yorkshire un fief qu'il tenak dc Roger de Mowbray. (Livre noir, f 309). En 1201, accord est fait entre Leboud de Flamanville ct Raoul Desmonts, qui reclaniait la moitit^ du moulin de Can- lereyne a Flamanville. (Rolles normands, t. 1, f°242.) L'eglise de Flamanville etait primitivement sous le patro- nage des abbi's de Saint-Sauveur. En 1417, Raoul Dugail en olait cure ; il cut pour successeur Jean Lemoine, qui permuta avec Guillaumc Desmoitiers, chapelain de Saint-Pierre etde Saint-Paul. Vers 1483, Jean d3 Bazan etait seigneur de Flamanville, ct son fief relevait de la baronnie d'Orglandes. II pretendit que son pere avail et6 patron de Flamanville avanl 1417, mais que scs titres avaient He delruits pendant Ics guerres. En 1503, apr^s de longues procedures, Jean de Bazan transigea avec I'abbaye de Saint-Sauveur ct rcnon^a a ses pretentions de patronage. Mais en 1533, les Irois fils de Jean de Bazan acheterent dc Jacques de Pouilly, seigneur dQ Treauville, une part de patronage a Flamanville. Cela fait, "78 PALKOOHAPIIIE Jacques de Bazan, profitant de ce droit, nomina cure Jean, son fiere; I'abbe de Saint-Sauveur, de son cOtt^, nomma a la meme fonction Jean Troussey, son frere, qu'il fit passer de la cure de Brix a celle de Flamanville. En 1524, Jacques de Bazan transigeaavec Jean Troussey elsedesista. r/lrc/ttt^e* de I'abbaije de Saint-Sauveur. J L'ancienne ^glise de Flamanville etait a Dielelte. M. Herv6 de Bazan, marquis de Flamanville, grand bailli du CotenliU) leguaune somme pour conslruire celle qui existeaujourd'hui, et qui date de 1669. L'abbe de Saint-Sauveur donna son consentement a celte translation, a la condition que I'abbaye ne serait tenue a aucune depense pour I'enlretien du choeur de l'ancienne eglise qui fut convertie en simple chapelle. Lcs archives de Saint-Sauveur contiennent un dossier qui pr(5sente les noms de quelques cures de Flamanville. On y note Hugues Lemoine, cur6 au temps de la fondation de I'abbaye de Saint-Sauveur; Pierre de Grosville, qui lui succ6da. Apres ce cure 11 n'y eut que des moines jusqu'au concile deLatran. Guillaume de la Hougue fut cure en 1280; Raoul du Gal, en i417; Simon Boisard, qui rcsigna au suivant, Jean Leproux ; Jean Lemoine, qui obtintce benefice du pape element XI, etant a Rome lorsque Jean Leproux mourut (1444) ; Guillaume Desmoitiers, qui permuta avcc le precedent; Jean Delabarre, qui fut nomme parle roi en 1490 pendant la duree du litige dont nous avons parle; Jean Troussey, cure en 1522; Nicolas Troussey, par resignation de Jean, son frere; Thomas Lebarbanchon, cure, mort peu de temps apres sa nomination. Eustache Lebouet, religieux de Saint-Sauveur, obtint du pape le h^neRce per obitum, tandis que Pierre Lebouet, son frere, se faisait nommer par rabb6 de Saint-Sauveur. Ce dernier conserva le benefice. Apres un long procos enlre Nicolas Passart, nomm6 par Jean DE CHEKBOtnC. 79 (leBazan, et Pierre Bouct, noinm^ par I'abbe de Sainl-Sauveur la question resle pendante sur la possession du benefice en <532. On remarquait a Flamanville plusieurs monuments drui- diques, que les exploitations de granit ont fait disparaitre en grande partie. II y en avail au lieu nomme le Cotil, au Gros-Nez pres de la vigie, aux Castias, et un autre a la Grizelee. Pres de la falaise nommee le Mont-du-Roc, on remarque les restes d'une galerie druidique dont quelques jambages sont encore en place, niais dont les tables sont tombees. En 1833, ont trouva, entre les hamcaux de Cabrcs et de Siautot, quelques coins en bronze. En mars 1406, cut lieu la vente du fief de Flamanville, par I'abbe de Blanchelande a Colin deBazan. L'acte futpass6 par devant Jeban Breton, garde du seel des obligations de la vicomte de Coutances, par Guillaume Tolissac, clerc labellion jure du siege de la Haye-du-Puits , en presence du pere en Dieu I'abbe de Blanchelande et de frere Thomas de Saint-Lo , procureur du convent, et de Colin Bazan , ecuyerdu lieu de Flamanville. Leprixdecette vente demeura fix6 a 1,200 ecus d'or et un ecu pour vin. Lesdits religieux tenaient ce fief de Robin de Benois, ecuyer. Cette vente comprenait tous les droits et honneurs attaches a cette terre. En 1654, au mois de mars, Louis-le-Grand erigea le fief de Flamanville en marquisat en favour de Hervieu de Bazan, baron de Flamanville, grand bailli du Cotentin. Les motifs de cette concession scraient les services rendus : 1° par I'impe- trant, en qualila de volontaire dans I'arm^e francaise en IloUande, et aux sieges de Saint-Jcan-d'Angely , Clarac, Montauban, Saint-Antonin , la Rochclle et I'ile de Rhe, et a la d(5faitc des Anglais, oil il aurait et6 blcsst^ ; 2° par Jean de 80 PALEOGRAPHIE liazan, chevalier Je rordre de Saint-Jean-de-Jerusalem, qui aurait ct6 tue surlegallion dc Malte lorsde labalaille navale de la Rochelle; 3" par Guillaume de Bazan-Flamanville, capitainc a la balaille de Sedan, comniandanl Ics enfarits perdus de Tarmt'e. Lesditcs lellres reconnaissent comnie niouvances du nouveau niarquisat les ficfs de Grosville, Ipeville, Preslreville, Siouville, les Pieux etTreauville. Le chateau de Flamanville, bati par la famille de Bazan, apparlienl aujourd'hui a M. de Sesmaisons. Biville. — L'c^glise de Biville (Binivilla), qui date du XIIP siecle, est sous le vocable de saint Pierre etavait autre- fois pour patrons les prieurs de Vauville. II exists a la bibliothcque iniperiale ( Saint-Germain, Residu 96, n° 5 ), deux cliartes curieuses relatives a Biville ; dies ont 6t(^ decouvertespar M. Leopold Dellsle. (Histoire de Marmoutier, part 2, t. I", n°' 296 el 297.) On voit figure dans ces chartes Guillaume, roi d'Angieterre, qui se qualifie de comte du Cotentin, Robert Bertran, vicomle du meme territoire, Richard, vicomte d'Avranches, Heudon, frere de N^el de Saint-Sauveur, plus tard vicomte du Cotentin, Onfroy de Bohon et autres heros de Hasting. Biville fut le berceau de Thomas Helye, chapelainde Louis IX. Quelques auteurs ont etabli que Jean de Beaumont, chambellan de Saint-Louis, nienlionncdans la chronique du sire de Joinville , etait seigneur en totalite ou en partie de Beaumont en la Hague. lis concluent de la que ce fut ledit chambellan qui prcsenla Thomas Helyc a Louis IX; car s'il en <5tait autrement, disent-ils, comment cxpliquer que le roi eulpu decouvrirle saint homme dans sa solitude de Biville? Les adversaires decctte opinion repondent que le chambellan cite par Joinville tirait son nom de la ville de Bcaumont-sur- ])T CHEUBOIKG. 81 Oise, dont la gentKilogie se trouvedans I'liisloiredo la maisoii de France parle pore Anselme; qu'il parailra procliaincmcnl a Amiens un volume in 4'> relalif a I'liistoire de Bcaumonl- sur-Oise, et qu'un chapilrc y est reserve au chambellan de saint Louis. Nous trouvonsen efTet qu'au regnc de ce prince, Beaumont en la Hague avail pour seigneur un chevalier nomm6 Juhel ; niais rien ne dit qu'il en fut seigneur en tolalite. On Irouve a I't^glise de Biville, dans un petit -errfo en parchemin format in-12 lacereenpartieetquiparait remonter au XIII* ou au XIV* siccle, la no'te suivante : « Anno eodem r> (1259) die IV januarii arripuit iter ad curiam roma- » nam honoratus vicarius altaris B. Marie Conslanc. » pro canonizacione bcali Thome de Binivilla de man- » daio dni J. de Essayo, Const, epi. » Thomas Hclye mourut au chateau de Vauville le vendredi 49 octobre 1257, dans unc chambre situt'e au-dessus de la porte cocheredudit chateau. Cetlc portea elcabattue en 1785. Le tombeau de ce saint personnage se trouve dans I'eglise de Biville. II est en marbre blanc et porte laleraleuient ceite inscription : « Ce marbre a cte donnc par messire Jacques- » Francois Dugardin, ocuycr, chevalier de I'ordre royal et » niilitaire de Saint-Louis, lieutenant-colonel au corps royal » d'artillerie, seigneur et patron de cede paroisse. » Get officier superieur etait en effet, en 1786, seigneur de Biville, du chef de sa femme, nee de la Haye. Le tombeau a cte fait par M. Pierre Freret, sclupteur a Cherbourg. En septcmbre 1845, M. I'abbe Lebriseux, alors vicaire de Biville, me montra en detail la chasuble ctl'etole de Thomas Hil'lye. Cet ornement.dont toutcsles hisloircs dcnotro localile donnent la description, etait rcnfermc dans unc boile en clK'nc portant inlerieuremcnt cctte inscription : « Bofte 6 82 I'AI.KOr.RAPUIE » (lonnee par J. IT. Adoubedan, caijilaiiie garde coslc, sei- » gneurde Rou\ille et des Pieux ensa partie, 1764. » Thomas Helyeaeu plusicurs biographes. Clement, presque son contemporain, et qui avail ete lemoin do I'enqufite faite par Teveque de Coutances Raoul Desjardins, nous alaissesa vie. L'auleur dedie son ouvrage au cur6 de Bivillc, son ami. li s't'lend beaucoup sur les etudes d'Helye a Paris et sur son voyage en Terre-Sainte. Get ouvrage de Clement se trouvait dans un volume en parchemin, conserve dans les archive* de reglise de Biville. C'est le premier document vise en I'enquete faite par M. de Blanger, grand vicaire de Mgr Lomenie de Brienne, evfique de Coutances en 1692. Ce manuscrit comprenait en outre deux autres vies de Thomas H61ye : I'une en prose, sans nom d'auleur; I'autre en vers par Jean H61ye, parent du bienheureux. M. Leverrier, cure de Biville avant 1789 et auleur d'une notice latinemanuscrite sur Thomas Helye, declare quele registre qui comprenait les trois biographies ci-dessus indiquees a et6 perdu. SuivantM. I'abbe Demons, auleur d'une histoire manuscrite de Cher- bourg, un savant anglais, M. Dybdin, aurait laiss6 de ce vieux registre une copie qui serait aujourd'hui a la biblio- Ih^que imp6riale. Toustain de Billy, en son histoire cccle- siastique, i° 304, et M. Couppey, dans les memoires de la Society Imperiale Acad6mique de Cherbourg (tome de 1843), onl donn6 des details inleressants sur Thomas H(5Iye. Enlre deux monticules appck^s les Huches, on remarque encore les resles de deux lombelles qui onl ete coupces par la route de Ste-Croix a Biville. Pres du village de Vinebus, en un lieu nomm^ la Mine, appartenant a la famille Groult, on a trouve un assez grand nombre de monnaies de Trajan, petit bronze. On apergoit sur le chemin qui rnene do Slc-Croix a Biville ni: cnERBoiiir,. ti una croix de granit qui porte celle inscription : cette croix flit reconslruite par Couetde la Haye et son Spouse en 1807. On remarquedans le cimetiere de Biville les tombeaux de la famille Coquoin et d'un cure mort en 1815. Biville passe pour etre une des communes les plussalubres du departement de la Manche. Les centenaires y ont 6le frequents, et Ton cite meme une fcmme du nom de Renep qui y mourut en 1697, ii Tagc de 116 ans. On comptait autrefois parmi les notables habitants de Biville la famille Dugardin, qui portait d'azur charg6 d'un aigle d'argenl becque et grifTe d'or etau soleil d'or, et celle de Beaudrap, qui avail d'azur au chevron d'argent accompagne de deux (5toilcs d'or posccs en chef et au croissant d'or en pointe. MEDAILLES £T MONMIES RECIEILLIES DANS IE DEPARTEMENT DE LA MANCflE PENDANT LES ANNIES 1852 ET I85S, PAR IVI. DEI\IS-LAOARDE, Chevalier de I'ordre imperial do la L^gion-d'Uonn«ur, Membre titulaire de la Soci^tS Acad^mique, Le sol dii departemenlde la Manche s'est toujours nionlre fecond en enfouissements nuinismatiqucs : si Ton consulte les notes laissees par riionorable M. de Gerville, on peut se convaincre qu'il n'estpas, pour ainsidire, une seule localite, dans les six arrondissenients qui le composent, qui n'ait fourni son contingent aux collections particulieres form(Jes dans le pays. Plusieurs fois dd'ja, les nienioires publics par la Socicte Acadeniique de Cherbourg ont donne le rocit des principales d(icouvertes qui avaient 6t6 successivement op^recs : nous venons aujourd'hui feurnir quelques renseignementsde plus a ccux qui tentcraient un jour d'(5crire I'liistoire numisma- liqiie du dopartcment. 86 MEDAILLES liT MONNAIES RECL'EILLfES La Feiiillie. — Cnntou de Lcssay. — Dans les premiers jours du niois de mai 1832, un cultivaleur du village de La Feuillie , canton de Lessay ( Manche ) , renconlra, en executant une tranchee dans son jardin , un vase en lerre de mince fipaisseur d'oii s'cchappa une masse considerable de petiles pieces de monnaie. Recueillies presqu'en totalilo par une personne arrivee sur les lieux asscz a temps pour en empC^cher la dispersion , ces monnaies purent etre examinees a loisir etil fut constate que le tresor se composait d'cnviron 8,000 pieces de billon, com- prises entre le regno de Philippe P"", roi de France et celui de Philippe-le-Hardi, ainsi qu'il resulle de I'inventaire ci- apres : niounalcs royalcs. I — Philippe I". — Monnaie frappec a Etampes. 22 — Louis VI. — Au type d'Orleans, 17; — de Man- tes, 1; — d'Etampes, 2; — de Pontoise, 2. 4 — Louis VIL — ChateaulandonetBourges : les Irois dernieres avec Teffigle du prince. 363 — Philippe- Awjuste. — 249appartenaienlaratelicr d'Arras dont il y avail deux varietes; lesautresa ceux de Paris, au nombre de 106; — de Montreuil, 15; — de St-Omer, 4; — de Peronne, 7; — 182 ofTraient au revers le chatel ct la legende S C S Martinus. 183 — Louis VIIT. — Cos pieces qui peuvcnlindistlncte- ment appartenir aLouis-le-Gros eta son flls, aussi bien qu'a Louis Vill, ctaient toutcs desParisis. 4215 — Louis LX. — Avec la k\gendc Turonus ou Turo- 'nis Civi ou Civisien generald'une bonne conser- vation, on y remarquait d'asscz nombrcuses varieties dans la forme des Icttres. DA.NS LE DEHARTE.MENT DE l\ MANCIIE. 87 637 — Pliillppe-le-HardL — 624 dcniers toiirnois et 13 oboles au nieme type : sur un asscz grand uoinbrc de ces pieces le noin du roi est ecrit avec I'h cur- sive. Iflouualcs scigticnrinle«. 950 — Saint-Martin de Tours. — Dcniers de type uni- I'oriiie, mais de fabrique dilTerentc. 393 — Herbert P', comte du Mans — 1016 a 1035; — ou Herbert II — lOol ix 1062. — Monogramine varit^ : il est vraiseniblable qu'un grand nombre de ces pieces apparliecit au regno de I'un ct de I'autre llerbeit; maisil est constant aujourd'hui quel'^mis- sion de ces pieces a etecontinutie apres eux et c'est cc que confirme le bon elat do conservation de beaucoup d'entre clles. 10 — Robert, comic do Dreux — 1132 a 1184. —C'est ce prince qui fut la souclic des dues de Bretagne, a partir de Pierre Mauclerc. 2 — Sanson de Mauvoisin, archevt^qiie de Reims. — 1138 a H62. — L'une de ces pieces elaitd'une conservation parfaite. 6 — Henri, 3" fils de Louis-le-Gros, archeveque de Reifnsden62 a 1176. 25 — Guillaume de Champagne , aux blanches mains, cardinal-arcbeveque do Reims, oncle maternel de I'liilippe-Aiiguste ct regent du royaume en 1190, pendant la troisicmc croisade — 1 176 a 1202. 2 — Albe'ric de HautriUars, arclie\eiiue de Reims do 1207 a 1219. 16 — Ele'onorc dc Vermandois — 1167 a 1214. tS MEDAILLES KT MO.N.NAIES RECL'EILLIES II — Guillaume III, comte de Pontliicu — 1191-1221.' — inonnaics IVappces a Abbeville. 14 — llayiaond, cointc de Toulouse — 1194-1222^. 5 — Renaud de Dainmartin, comte de Boulogne — 1190 ;i12l4, — fait prisonnieren Vilik labalaille de Bouvines et inort au cbateau de Peronne en 1227. 'f — Thibault, comte deCbampagnc — 1201 a 1233. 2 — Simon, vicomte de Cliateaudun — 1264. — Las deux exemplaires recueillisde celterare et curieuse monnaie ofTrent dans la legende du droit une leg^re difference avec I'exeniplaire mentionne a la page 102 du Manuel de Niinusmatique de M. A. de Bartlielenjy : au lieu de Sitnon, on y lit : Simonis vicoines — au revers : castri Duni; cbatel avec croissant au-dessus et au-dessous. 131 — Alphonse, comte de Poitiers et de Toulouse, frere de St-Louis — 1241 a 1271. — II existait un as.sez bon nombre de varietes dans les monnaies do ce prince dont Ic nom est ecrit, tanlot Alfumsus, tan- tiOt .4 yj/bur^, &u sculementindique parson iniliale; 2 sont au monogramme d'llerberl, 36 portent au revers la legende Pictavicntsis, 33 celle de comes Tolose etsur 38 autres, on lit de Riomensis. 24 — Charles d'Anjou, autre frere de St-Louis, comte d'Anjou,de Provence et roi deSicilc — 1243 a 1285; — dcs deniers de Ce prince, les plus remarquablcs dans la trouvaille sont : un exemplaire sur lequel Charles [uend la (jualincalion de roi de Sicile avec I'o ujunogramine d'llerberl; un autre avec celle do co;nle d'Anjou, roi ile Sicile, au revers de la clef et Ju Un; uu '}'■ Oil se voft Ic tiionogrammo d'HcrbCft DAN.s I.F. DliHAIlTEMEM Lili LA MA.NCIIE. 89 avec la logendc Anger inns dobles ; Irois ;ivcc lo lucmc manogruiame et la dusigiiation do Uil. regis ■I'rancic: uii seul cnfiii avec Ic monograimnc do Fouhjucset la legondo Carol comes Andegav" 'I"j — Jean IclXoux, l"dii nom, due do Brolagnc — 1237 a'!286 — le rovers porte un ecusson Iriangiilaiio avec rocliiquelo do Dreux au quarlier d'hennincs. Ell resume, lo depot Irouvo ii La Feuillie se composait de Monnaies royales 5623 Id. seigneuriales i627 Total. 7'2o2 ct n'cn devait pas comportor moins do 8,000, si Ton ticril tomple de celles qui, au premier uioment, ont ele necessai- rcment dispersees. Les pieces les plus inleressantcs de cc depot sent entrees pour la plupart dans le cabinet de Tun des membres de la Societo Academi(iuo de Cherbourg. 11 existait jadis a Lessay uno abbayc considerable donl lo territoirc du village do La Feuillie etait une dependance. Le Iresor decouvert en 1832 aurait-il quelques rapports avec les anciens habitants de I'abbayc? — On pent raisonnablement le supposer. La date dc son enfouissemenis parait devoir remontcr au regno de Philippc-le-Ilardi ( 1270 a 1283 ) , cependant, a en juger par la forme de cerlaincs lettres dans un bon nombre de pieces signecs du nom de Philippe, il serait possible qu'il cut C'te pratique dans les premieres ann(5es de son successcur Philippe-lc-Bel dont il ne conlient neanmoins aucuno monnaie qui puisse lui eire allribuec avec certitude. *alM. Belgique (commc en HoUande et en Angleterre ) , une ville ceintede murailles el dont /a 6oitr(/eo/5tc, libre etarme'e, se gardait else fjomernait elle-meme, sauf les droits reserves ausouverain (1). Ccci pose, il est clair que le titre de baron qui , comme on vient de le voir, equivalait a celui de bourgeois libre, de franc bourgeois, ou franc tenancicr, fut donn6 a nos ancetres des le moment oii ils obtinrcnt la faveur de garder eux-memes Icur ville et leur chateau. Il est certain, d'aprtis tous les hisloriens do Cherbourg, que la milicc de cette ville fut cons- tiluee libs le XI" sitjcle, par Guillaume-le-Conqu6rant, pour la garde de la ville et surtout du chateau. Or, la garde du chateau de Cherbourg etant confiee aux seuls habitants do cette ville, indique pour eux, des cette cpoque, un^talde liberie. L'existence dcce fail se trouvc mieux prouvce dans Ic courant du XIP siecle, oil nous voyons, pour la premiere fois, le mot de commune applique a Cherbourg, ainsi qu'il (1) Belgique monumentale, ville de Gand, pages 28 et 36, tome I"'. — De Gerville, Etudes sur le departement de la Manche. au mot Cherbourg. — Des le X" siecle, les bourgeois de cinq ports d'Angle- terre, porlaient le titre de barons et prenaient rang parmi la noblesse du royaume. Primltivement, il n'y ea avail que cinq, inais leur nombre fut, dans la suite, porte a 8. Ce sont 1° dans le cornt^ de ivent : Douvres, Hylhe, Rorcney, Sandwich; 2» Dans celui de Sussex : Hastii.gs, Rye, Scaford et Winchelsea. (Bouillet, Diction, hist.). Voy. aussi I'ouvrage intitule ; Beauties of Kent, page 101;2. d'histoiue I.UCXI.F.. 9f resulle dc ce passage lire des rccherches sur Ics anciens chateaux de la Manclie, par feu M. dc Gervillo : « Au niilieu dii XIE"* siecle, diL-il, le seigneur de la paroisse de Martinvast, faisait, avec la commune de Cherbourg , le service du a Henri, due de Norniandie et roi d'Anglelerre. » cum com- niunia de Coisarisburgo cum cquis et armis [\). Ainsi, Ics bourgeois de Cherbourg furenl rendus libres par Guillaume-le-Conquerant, pour garden le chateau et la ville et pour les engager a se tenir toujoui's prets a repousser ies invasions el les tentalives de la France. Dans le siecle suivant, Cherbourg fut crigeen commune. Cette ville depuis lors eut un elat de prosperite loujours croissant. Henri l^'' fitaugmenler les fortifications du chateau. Sa fille, Timpera- trice Mathildc, vint souvent a Cherbourg et le regno de son fils Henri II, fut pour cetle ville, dit un hislorien (2), un temps de pai,\ et de splendeur. Ce prince y sejourna fre- quemment el y passa souvent les grandes solenniles de Tannic avec la reine Eleonore et une cour nombreuse el brillante. Enfin, ce mcme prince, loi-squ'il n etait encore que due de Normandie, vers \ 150, aliii d'encourager les efforts conimer- ciauxdesncgociants cherbourgcois, leuraccorda le privilege decommercer une fois I'an avec I'lrlande. Lorsqu'il futdevenu roi d'Anglelerre (H74), il Ic leur confirma par une seconde charte. Jcan-sans-Terre, en 1200, et Philippe-Augusle, en 1207, u'nilcrent ce souverain anglo-normand, en ratifiant cette concession par de nouvcau.x actcs. Voici rextrait de la charte de M.3O, concernanl le port de (1) Recherches sur Ics anciens chdteaux du d^partement de ta Manchz, par M. de Gerville, page 48. Caen 1825. (2) Idem — arlicle : Clidtcau de Cherbourg. 100 FRAGMENTS Cherbourg: « Nulla navis de totd Normannid debet eschip- pare ad Hiberniam nisi de Rothomago, exceptd undsold, cui licet eschippare de Ceesarisburgo semel in anno. » C'est-a-dire : « La villede Rouen pourra seule, dans toute la Normandie, t^quiper des navires pour I'lrlande; une seule fois par an, Cherbourg pourra en exp6dier un pour celte con- tr6e. » (I). Du temps de nos ducs-rois, Cherbourg avail des relations maritimesavec I'Angleterre et la Flandre; les croi- sades developp^rent aussi son commerce et son Industrie. D'aprfes ce qui prdcMe, nous avons vu que le titre de pair- k-baron existait anciennement dans les institutions de la Belgique et de la Hollande; que les expressions de baron en frangais, freeman en anglais et poorter en hollandais, 6quivalaient, pourceux a qui on Icsdonnait, a cellesd'homme libre ou de franc-bourgeois ; que les habilants de Cherbourg ont joui, dfes le XI* si^cle, du priviliige de se garder cux- memes, Ce qui constituait pour eux un ^tatde liberty, etat qui leur donnait la prerogative de s'intituler barons ou francs-bourgeois; que le nom de commune est appliqu6 a Cherbourg, d'une maniere absolue, dans le XIFsiecle; qu'enfin le port de Cherbourg jouissait des M50 du privilege de commercer une fois I'an avec I'lrlande, Par const'quent, il resulte de ces faits, que le titre de pairs-a-barons, donn6 i nos ancetres, remonte au moins au XIP siecle, et que les prerogatives soi-disant accordees aux Cherbourgeois, scion les uns, par Charles-le-Mauvais, roi de Navarre et seigneur de Cherbourg, en 1366, et selon les autres par Charles VII, roi de France, n'eiaient que la confirmation de privileges beaucoup plus anciens. (1) Le Vidimxks de cette charte se irouve aux Archives municipales de Rouen. d'histoire locale. fOf JGLISE DE LA SAINTE-TRINITl - FONTS BAPTISMUX. Dans leurs ouvrages intitult5s : Guide du Voyageur d Cherbourg, MM. de Berruyer et Fleury ont donnti la des- cription des objets remarquables de l'(^glise Sainte-Trinit6. M. Til. Dumoncel a aussi decrit savammenf, dans la Revue Arche'ologique dude'partement de la Manche, les curieuses particulariU^s architectoniqucs de cette ineme egiise, mais aucun de ces aiiteurs n'a pai'16 des fonts baptismaux qui cependanl ofTrent de I'int^ret, lant sous le rapport de leur configuration que par les sculptures qui s'y trouvent. Voici la description de ce petit monument avec I'explica- tion de ses myst^rieux synibolcs : la piscine, de figure octo- gone, est en pierre calcaire eta la forme d'unecoupe antique; sa bauteur est de 1 m. 2 c. Le p^rimelre de la parlie superieure mesure 3 m. 10 c. A la partie inferieure, on remarque une inscription en relief, sur une bande octogone, dont le pcrimetre est dc 2 m. 6 c. La bauteur des leltres, est de 0 m. 08 c. Le pourtourest orne de diverses sculptures; on y voit des dragons, des sir^nesdont I'une a le visage d'une fonime et le corps d'un oiseau (1) et I'aulre, la figure d'uno (1) Tous les peintres el les sculpleurs representent les sirenes coinmemoitio femmes et moitie poissons, mais ii tort, dit iN'apoleoa Landais, car les poetes et les auleurs les plus recommandables les depeignenl tiioilie femmes ct moilie oiseaux. Pline les place parmi les oiseaux fabuleux, et Ovide lour donne des visages de fliles, avec des plumes ct des pieds d'oiseaux. f02 inAG.MENTS femnie ct le corps d'un lion. Enfin, on y remarque un per- sonnagevelu liiUant conlre deux griflons. Dans le dragon cliaciin reconnait I'cnnemi du genre htimain. II est represenle sur Ics fonts baptismaux pour marquerquerhommc, etant, par le pt^che originel,soumis a I'empire du demon, est rogcnerS par la grace sanclifiante et les vertus infuses que lui communique le bapleme. Quant aux griffons et aux sirenes, il ne faut pas s'etonner de les voir figurer sur un monument consacr6 auculte. Le griffon avail He adopte commc ayanl les qualites qui con- viennent a un gardlen, et comme doue du pouvoir d'eloigner les mauvais esprits; aussi remarquons-nous, sur nos fonts baptismaux, deux griffons luttant centre le prince des tene- Lres. Lebec acere du griffon, disentcerfainsauteurs, marque la prudence; les ailes, tout en exprimanl la diligence, signiflent aussi le pouvoir spirituel s'elevant sur les ailes de I'esprit au-dessus des temporalites terreslres. La sirene 6tait remblerne de la vie spirituclleet de la vie naturelle du Chre- tien (I). Son image placee sur les fonts baptismaux rappelait, comme le poisson, leseauxdu bapteme, ou les fideles, disent Jes Bcnedictins, sent regener^s et acquierent la vie spirituelle de la grfice , commc le poisson est cngendre dans I'eau ct ne pent vivre bors de cet element. » La sirene, sous la forme du lion, marquait .sansdoule que lechretien devait combattre I'esprit malin avec force ct courage. Les lettres de I'inscription, flcurics ct d'un genre fort gracieux, annoncent le XV* siecle. L'inscription est ainsi concue : Aqua regcnerans. Pons salutis et veritatis, C'est- a-dire : Eau regeneratrice. Source de sahit el de veritt>. (1) Vocabulaire des symboles et des altribiiis religievx, par M. I'abbe Crosnier, cbanoine Ac Nevers. d'uistoire locale. 103 Les fonts bapUsmaux sent, avec lachaire,le tablcau'reprc- sentant la visife des saintes femmes au tombeau de Jesus, et la cloche qui est aujourd'hui la seconde, les sculs objcts qui aientechappo au vandalisme revolulionnaire. Le baplistt;rc de noire cgiise etait anciennement place sur la droite de la grande nef, en entrant parle porlail principal, entre les deux premiers piliers et en face de la seconde fenetre dont le vitrail, en verres de couleurs , represcntait le bapleme de notre Seigneur. Les fonts baptismaux avaicnt ete ensevelis sous les deconi- bres provenant de la d6vaslalion de roglisc, ct c'esta cetle particularity que Ton en doit la conservation. m. FRERET, ARTISTES. Notre premier devoir est de rccucillir ct dc conservcr pour I'histoire locale, les fails contcmporains digncs d'atlen- tion, afin de dissipcr des doutcs, soil en reproduisant de vicux tilres, soil en faisant connaitre les noms d'hommes distingues dont la menioirc nc man(|ucralt pas dc lumber dans I'oubli , si Ton n'en consignait le souvenir. C'est done pour parvenir a cc but que nous donnons la copie d'un diplOme aussi intirossant uu point de vue histo- rique, qu'il est honorable pour cclui qui en est robjet. Get 104 FRAGMKNTS actecstrelatifaun artiste cherbourgeois, aujourd'liui inconnu ou oublie, qui s'occupait d'art avec asscz de zele et de talent pour etre nomme, en 1785, peintrede la reine Marie-Antoi- nette. Nousvoulonspaiier ici de feu M.Lonis-BarthelemyFreret, artiste peintre. Get homme distinguii fut 61u membre de la Socicte Academique en 1808 (1). 11 a peint plusieurs sujets de nature morte, (2) et quelques tableaux de fruits qui ont etd graves; I'un deceux-ci existeencoredansles appartements autrefois occupes par Maiie-Antoinctte, a Versailles. II composa aussi Ics plans des jardius de Trianon. Get artiste excellait surtout dans I'art de pcindre les fleurs. Le gout le plus delicat, le coloris le plus brillant, le pinceau le plus nioelleux, joints a une imitation parfaite de la nature, lefirent distinguer de ses rivaux; et la reine, pour le rt^compenser de son zele et de ses Iravaux, Ic nonima son peintre de fleurs tHrangercs. Voici la copie du brevet que Sa Majoste lui accorda : « Aujourd'hui premier jour de juin mil sept cent qualrc- vingl-cinq. La rcineetanta Versailles, d^sirant favorablcment traitor le sicur Louis-Bartbelemi Freret, sur le rapport qui iui a 6te fait de sa person no et de ses talents, Sa Majeste lui aaccordti et lui accorde, par le present brevet, le titre de son peintrede fleurs etrangeres, voulant qu'il puisse s'en quali- fier dans tons actcs publics et particuliers, et qu'il jouissc du dit tilre aux bonneurs, prerogatives ct autres avantages qui peuventyetre allacbes. Et pour assurance de savolonte, Sa Miijost(5 m'a commando d'cxpodier au siour Freret, le (1) iM. Pinel a donne la biographie de M. L. B. Freret. (a) La Socjete acadi'miquc possedc deux de ces tableaux. bHISTOIRE LOCALE. 105 present brevet qu'elle a signt^ de sa main et fait contresigner par moi consciiler d'Etat, conseiller secretaire des comman- dements de la reine et de ses niaison et finances. » Sign6 : « Marie-Antoinette. » Sign6 : « Beaugeard. » La famille de cet artiste a encore donne a la vjlle de Cher- bourg plusieurs hommes de m6rite. i° M. Pierre Freret, p^reduprt^c^dent.l'undesfondateurs de la SocioteAcadeniiquede Cherbourg, estauteurdutombeau ^leve dans Teglise de Biville (Hague) en I'honneur du bicn- heureux Thomas-Helie et do la chaire de I't^glise Saintc- Trinite de Cherbourg (1). 2" M. Frangois-Armand Freret, sculpteur. Le mus^e naval de Brest, conserve plusieurs de ses ceuvres. Les travaux de cet artiste sent compares, a juste litre, a coux de Puget. Les magnifiqucs sculptures du maitrc-autel de I'eglise Sainte- Trinitt'", sontde cet artiste, ainsi que Telegante et gracieuse viergequidecore I'une des chapelles laleralcs de celtc meme t^glise. On lui doit aussi la statue ct les divers ornementsdu canot construit a Cherbourg en 1811 pour Napoleon I", les ciselures de la fonlaine des Caveliers et le frontispice du fort imperial. 3° M. Pierre Freret, peintre de marine et de genre, a compost divers tableaux qui ont ete graves, entrc autros, ceux qui represcnlent les memorables combats de noire compalriote, le contrc-amiral Troiide. 4° M. Louis-Victor Freret, ancion maifrc sculpteur de la (1) Celte chaire pleine de gout el d'elegance, est le seul morceau de sculpture qui ait echappe ;i la main devaslatrice et sacrili'ge des vandales de 1793. lis la conscrv6reiit pour y faire la lecture dis jouriiaux, les jours dc decade. 106 rRACME.NTS d'histoihe locale. marine an port Je Cherbourg, fils de Francois-Ai'mand, est auteurde la statue dc sainte Anne placee dans la chapelle des fonts de rc"^glise Sainle-Trinile. Get artiste, qui liabite actucllement I'Angleterre, a cisele en 1850 des candelabres destines au prince royal de Suede. Ces niagnifiques pieces d'art ont etercproduitcs dans le journal intitule : The illus- trated London News, du 23 novcmbre 1850. 5° M. Leon-Louis Frcret, fils du precedent, pensionnaire du Conservatoire imperial de musique, est jusqu'a present le seul de nos concitoyens qui ait obtenu ce litre. G"* Enfin, M. Armand-Auguste Freret, frere du precedent, ex-pensionnaire de la ville de Cherbourg et ancien eleve de I'Ecole des beaux-arts, se distingue aujourd'hui parde char- mtints Iravaux et promct de devenir, comnie ses peres, un artiste de merite. Quoique ires jcune, le jury de I'Exposition generate des produits de I'industrie et des arts du departe- ment de la Manche, lui a accordc en 1852 une niedaille de bronze. II a encore obtenu le succcs le plus brillant a I'Expo- sition des beaux arts, ouvcilc a Avranches le 19juillct 1854 ; le jury de celte Exposition lui a deccrne une medaille d'or. NOTICE HISTORIQUE SUR BARTH^LEMI PIGQUEBEY, PRETRE DE CDERBOURG AU IW SIECLE, ET sun LES EBUITAGES DE SAI?iT-S ET DE SUOT-ACIIARD, PAR n. A.-E. LESI>OS, ~r~tsar La villc de Cherbourg peut, ajusle litre, revendiquer I'honneur de coinpler parmi ses citoyens, ct a diverses i^poques, des personnages qui so sont rcndus iliustrcs par leiirs vcrliis el par leiirs talents. A une epoquc, riclic en <08 NOtlCU sill LES EKMITAGES tout genre de gloire pour la Franco, au XV'IP siicle, il en parut un, surtout, tlont la vie futconsacr^e specialementet uniquc- ment a h bienfaisancc. II rechercha toutes les infortunespour les soulager, mais il se montra d'une maniere toute particu- liere I'appui et le consolaleur des pauvres. Ce fut un ange que le ciel donna pour un temps a nos ancfitres; ils ont a.lmirt^ ses vertus et nous en ont legui^ le souvenir, tachons aussi de ie transmettre a nos descendants afln que son noni soil elernellement beni. Messire BartliiJlemi Picquerey naquit a Cherbourg, le 10 oclobre IG09,derniere annee du regno de Henri IV. Sonpere, Thomas Picquerey, et sa mere, Perrette Le Pesqueur, vivaient dans cet etat de fortune que Ton appelait alors la bonne bourgeoisie. Leur merite personnel etait reconnu et proclamed'une voix unanimc paries habitants de notre cite, lis jouissaient par consequent, au milieu de leurs contem- porains, de la consideration et de I'estime qui rcndent la reputation solide. En 1621 , la peste se declara a Cherbourg. Soit quelle y eut 6te apportee par un navire marchand revcnu de Larochelle, soit que Ton ne sut pas reclleinent comment elle s'y etait introduile, il est toujours certain qu'elle fit de grands ravages, non seulement dans I'inti^rieur dcs murs de la ville, mais encore dans les campagnes, puis enlin par toute la province de Normandie. Cherbourg semblait elre un lieu de predilection pour cc fleau. Des rues elroites, torLueuses et malpropres; des passages sombres et plus sales que les rues, sous des maisons agglom^rees et mal baties, ou I'air et la lumi^re penetraient a peine; un port vasle et informe, offrant, amcrbasse, un receptacle de bones puanteset parconsequent insalubres; enfin, autour de la ville et du chateau, des fosses remplis d'eaii stngnante et d'immondiccs, lout cela contri- T)E SAI.NT-SALVF.LR ET SAI.NT-ACHAUD. U)'.) buait inclubitablement au rctour frequent de la conhigion. Aussi, etait-ce pour la sixieme foisqii'cUe vcnait decimer la populalion, seulement depiiis le commencomenl du XVI* siecle, et dans un inlervalle dc 1 17 annees. Elle avail paru en 1504, 1317, 4046,1534 611592, maisen1621 elle s6joiirna plus longtemps, jusqu'en 1623, et fit perir un plus grand nombre de viclimes. Un capticin de Cherbourg, le frcre Claude, qui s'etait devoue au service spirituel et corporel des pestif^res, mourut alors en remplissant celle sublime fonclion. Croyanl trouver un prt^servalif centre le fl^au, beaucoup de Cherbourgeois se retirerent dans les campagnes. Thomas Picquerey fut de ce nombre. II conduisit safemmeet six onfants qu'il avait a Martinvast, oil il poss^dait une petite ferme. Mais ce fut en vain, le mal qu'ils cherchaient a fuir les atleignit dans leur retraite. Le p6re, la m^re et qiiatre enfants en moururent. Barlhelemi et une soeur ainee, nommee Catherine, furent les seuls qui revinrenten sant^. (]et eveneraent changea d'une maniere 6tonnantc le jeune Picquerey. Prt'cedemment on avait remarque en lui un enfant vif, etourdi, ardent jusqu'a la colere, fuyant comme un supplice I'application aux choses s(?rieuses, et cependant d'une sensibilile excessive, mais alors on le vit devcnir lout- ii-coup doux, sageetsludieux. II s'adonna ra6mea la pratique de la piet6 avec une fervour que Ton rencontre raremenl^ cet age. Sa soeur lui servit de miire. Elle se maria et eut plusieurs enfants. Dans ce temps brillait a Cherbourg un professcur de bcllps-leltrcs, eleve de I'universite de Caen, et qui avait c'tii . rcQuavocatau parlement dc Rouen. II s'appelait M. Pierre Lcroux. Par sa conduite irrcprochable et son savoir dtendu, il s'etait acquis la confiancc des families, ct beaucoup dc ^^0 NOTICK SUK I.ES ERMITAGES jeunes gens suivaient ses lecons. Ce fut aupres de cet excel- lent mailre que Barthelemi commenca ses etudes, pour les conlinucr a Montebourg, el les aclievcr a Caen. A seize ans, il suivait Ic cours de philosophie dans celtc ville. S'etant lie avec les capucins, il prit la resolution d'enlrer dans leur ordre. II quitta done la philosopliie pour la regie de saint Frangois. L'annee du noviciat expiree, sur le point d'accorn- plir sa profession , il balanca, puis quitta la communaute, pour reprendre ses etudes, et devenir prfitre seculier. II etait 'dans sa dix-huitieme annee. Mais, pour etre plus libre, il revint a Cherbourg mettre ordre a ses affaires temporelles. II donna sa fortune a sa soeur, et ne se reserva qu'un revenu indispensable pour n'etre a charge a personne. Dt^livrt; de soins et de soucis, il retourna continucr son cours de philo- sophie a Caen. En 1628, il se rendita Coutances pour rccevoir la tonsure, mais Mgr Bourgoin, mortdepuis trois ans, n'avait pasencore de successeur r^el. CarLeonor de Matignon, abbede Lessay, nomm6 par Louis Xfll, eveque, au si6ge vacant , n'etait pas encore pretre, et n'etait age que de 21 ans. Les vicaires generaux, adminislrateurs du diocese, adresserent Barthe- lemi Picquerey a Mgr Francois de P«iricard, 6v6que d'Avran- ehes, qui lui donna la confirmation et la tonsure. En 1631, 11 fut fait sous-diacre ii I'abbaye de Montebourg, par rabb(3, qui etait eveque du Puy. Un protre de Saint-Malo, M. Buisson, avait, a cetto epoque, une reputation do saintetejustement meritee qui s'etcndait au loin. II consacrait son temps et sa fortune au soiilagementel al'instructiondesenfants pauvres. Barthelemi voulut le connaitre afin dese former a son ecole. II alia pn^s delui, elypassa trois mois. En 1632 il retourna a Montebourg pour etre ordonne diacre. Enfin, en 1633, apr^s avoir etc I)K SAINT-SA.LVELK KT SAIN i'-ACIIAKK. Mi sacre a Alenc-on, Mgr. Loonor P"" de Malignon fil son entree solennelle a Coutances le 15 decenibre, ct, le 17, ilc(^lebra sa premiere ordinalion dans la cadiedrale. Barlhelemi y fut fait pretre , ct, le jour de Noel, il dit sa premiere messe a Cherbourg. Tout aussitdt il rcgut de I'ov^que le pouvoir dc confesser. Bientutil fit un nouveau voyage a Sainf-Malc, ety sd'journa encore trois mois. Ayant complete son instruction dans I'exercice dcs vertus 6vangeliques, il revint a Cherbourg meltre sa science en usage, afin de s'amasser ces tresors que la rouille n'attaque point , ct que les voleurs ne peu\ent enlever. Ce fut une bonne fortune pour MessireRaoul Grisel, cure de I'eglise Saintc-Trinite, de rencontrer un coop^rateur tel que Barthelemi Picquerey. L'enfance altira d'une manierc specialc sa sollicitude. II savait quo les principes de verlu grav(['s dans I'esprit et dans le coeur, des la plus tendrc jeu- ncsse , y prcnnent I'acine, et se dtH-eloppent pour porter des fruits dans Tagc virii, et voila pourquoi il s'appliqua, dans le commencement, et toujours, sans perdre jamais courage, a I'augusle fonction de predicateur des enfanls. A I'cxemple de Jesus-Christ, il (!:tait iieureux an milieu d'eux. II aimait a y jouir de la purete et de I'innocence qui font, de ces faibles et interessantes creatures*, les angcs de la terrc et la joie dcs families. C'est ce souvenir, reste dans notre population, qui a rendu son tombeau pr^cieux aux meres, surtout quand elles redoutent les maladies auxquelles les enfants succom- bent frequemment. L'eglise n'etait pas Ic seul endroitoii Barthelemi catc^chisat. Lorsque le temps elait beau , tout lieu lui devenail propice. On rapportc qu'il tit eriger a ses frais une belle croix en pierre sur une place qui se trouvait entre les murs forlifit^s H2 NOTICE Silt l.ES KKMITAGKS. de la villc cl lo faubourg, c'cst-a-ilire a I'cuiplacemenl que la rue de la Fontaine occupc aujourd'hui, et qui, pourcette raison , futappels^e longlempsrue Croix-de-Carrcau. Barth6- lemi voyant la de frequcntcs rt'unions dont le but hii paraissait blamablc, voulut , par I'erection du signe sacrt'', imposerle respect, et dt^truire tout rassemblenient dangereux pour les mceurs. II y venait de temps en temps avec sospetits disciples, ou bicn il les conduisait a Octeville, surla bauteur de Bellovue, ou 6tait une petite cbapelle en mines, autrefois sous le patronage de Sainte-Honorine , et qui a laissc son nom a la rue qui descend de cette hauteur vers la rue du Faubourg. Une autre cbapelle en ruines etuit parfois aussi le but des promenades et des instructions de noire pretre. Ello se trouvait entre la rue de I'Abbaye ct la mer, non loin de Chantereyne, oii la tradition nous apprend que debarqua la reine Matbilde. Elle etait sous I'invocation de saint Tbomas, archeveque de Canlorb^ry. (I) Les instructions de Rarth^lemi Picquerey, sa bienfaisance, sa vie austere ne lardtrent pas a 6veiller I'attention des habitants de Cherbourg, el a populariser son nom. Iln'avait point de recherche dans son langage. II s'cHudiait a etre simple, vulgairc meme pour etre bien compris. Possedanl la lelire et I'esprit de I'Ecriture sainte, 11 savait mettre a la portee des intelligences le moins developpees les sublimes enseignements que renferme ce livre divin. Mais ce qui le rendait pcrsuasif, c'est qu'il pratiquait rigoureusement lui- meme tout ce qu'il disait. Dans le tribunal sacre il avail une telle onction pour reprendre et pour conseiller, que Ton entrait en participation de I'amour qu'il 6prouvait pour Dieu et de I'horreur qu'il ressentait pour le vice. Mais ou il paraissait surfout pen^tri^ de la grandeur de son minist^re, (1) On en trouvera plus loin la notice DK SAINT-SAL V EUR KT SAINT-ACHARD. i]'i c'itait a Tautel. On dit que souvent il cnlrait dans iinc con- templation si profonde au moment oil la presence de Dieii s'effectue reellcment et mysterieusement, qu'il fallait Ic prd- venir afin que le sacrifice ne fut pas interronipu. II ne celebra jamais la messe par habitude. On pent du reste dire que sa vie fut une communion continuelle avec Dieu. J'ai dit les ravages de la peste en 1621; en 1626, clle etait encore revenue desoler pendant six mois la population de Cherbourg, qui ne s'l^levait peut-etre pas au-dessus de 5,000 ames, ct au nombre dcs victimes fut le euro, Messire Gralicn Bouillon, quimourutle 15du mois d'aout, jour de I'assomp- tion de lasainte Vierge. Parsuitedecette longuereapparilion du fl^au destructeur, on voulut purifier THotel-Dieu ; Ic feu y prit par accident, et il fut reduit en cendres. Privcs de ressources, les habitants no purent s'occuper de sa recons- truction avant I'annoe 1639, et son achevement n'eut lieu que loTigtemps apr6s. Les pauvres maladcs 6taient done roduits k la position la plus alTreuse que Ton puissese figurer. On en voyait quelquefois d'etendus dans les rues ou dans ces passages sombres et malproprcs dont il nous reste des vestiges assez norabreux. La, les malades elaient en danger de p6rir si la pitie ne parlait pas pour eux. Frappe de ce trisle spectacle, Barlhelemi, comme un autre Vincent de Paul, fut ingenieux a les secourir. II sortait silencieusement de sa maison, parcourait les rues, visitait tous les recoins ou il croyait trouver des malheureux delaiss6s. Si le succes repondail a son altente, il les cmmenait choz lui oil ils trouvaient tout ce qui Icurelaitnt'cessaire. II se privaitmeme de son lit pour ne pas pcrdre I'occasion de soulager ou de sauver un infortune. Savaii-il une famille dans la dtHresse, des ouvriers sans travail, d(;s chagrins sans consolation, des quorellcs dont los suites pouvaionl 61re funcslos, ila\isait S 114. NOTICE suit I.ES RUMlTAfiF.S anx moycns ilc rcmcdier h (out. Ricn n'ocliappail a sos investigations : sa cliarite etait indpuisable. On I'appela le hon mcssirc Barthelcmi. Les paroisses de la Hague et du Val-de-Salre resscnlirent aussi les effets de son zele apostolique. A la dcmandc des cures, il y faisait de temps en temps des missions, ou bien il prcnait part a celles que d'autres pretres y clablissaient. En quclque lieu qu'il parut, son genre de vie etait toujours le mcme. On ne le vil jamais s'asseoiraune table splendidc: la nourriture la plus commune lui suffisait. Apres vingt-quatre annexes de travaux, d'auslt^riti^s ct de bonnes oeuvres, sa sanle s'affaiblit a lei point que Messire Michel Groult, cure de Cherbourg, crut devoir lui adresser de paternelles reprimandes, pour avoir porte si loin I'exces de son zcle et de sa fervour. II avoua son tort, et, ne se cro- yant plus utile, il prit la r(5solution de vivre desormais dans la I'etraite. Deja il avait 6prouv6 quelque allrait pour la solitude, et peut-6tre les ermitages de la montagne du Roule oil il allait de temps a autre lui en donn6rent-ils I'idce. Dans cctte intention, il projeta la recdification de la petite chapclle de Bellevue dedi^e, comme on I'a vn, a la vierge sainte Honorine. Quoi que ce simple et modeste monument fut un Icmoignage respectable de piet6, peul-etre meme de reconnaissance, personne ne tenait a honneur d'enreclamer la propriele. Cependant elle devait dependre de I'^glise paroissiale d'Octeville, etotre du ressort des seigneurs abbes de Nolre-Dame-du-Voeu. Cette chapelle etait tombce en ruines, parce qu'elle n'avaitaucune espece de revenus pour etre entretenue et desscrvie. Bartlielemi ne rencontra pas d'obstacles pour accomplir son projet. Il fit venir de Caen cinq statues en pierrc calcaire pour les placer centre le mur du fond, el Tautel en avanl. La jjrincipale, ccllc du DE S.M.NT-S.UVEUH KT S\I.\T-Af;UARn. M^j Christ SOUS Ic nom ile Sainl-Sauveur, dc grandeur a pcu pres nalurellc, fut placecau milieu; les autrcs, plus pelilcs, reprt^sentant Notre-Damc, sainte Ilonorine, saint Eutrope ct saint Sulpice, sur les C(3tt5s. Ce sont ccs niemcs images que Ton voit encore aujourd'ljui. En 16o9, conimc Ic porte I'inscription placi^e au dessus de la balustrade du cliceur, la chapelle etant completement reedifiee rcqul Ic iioni de Saint-Sauveur qu'elle a conserve jusqu'a present. Barllielemi fit en outre construire aupres un petit ermitage pour sa residence, puis entoura de nuirs le terrain qui ctaiten avanl, comme pour en former un cimetiere. Le voila done qui s'installc dans sa solitude. Desormais tranquille, independant, il pent, au sein de I'oisivctti, voir coulerdes jours heureux, sans soucis etsans regrets. II peut recourir a tout ce qui contribue aubien-fitre, userdeschoscs avec raod(}ration, en un mot, mcttre en pratique tous les prtceptes d'unc sagesse douce el pliante. Telle ne fut pas sa maniere de vivrc. Pendant 23 ans environ qu'il sejourna a Saint-Sauveur, son application constante fut de marcher sur les traces des anachoretes dont I'histoire de I'Eglise nous retrace les austerites. II dormait peu, et encore, souvent la terre etait son lit de repos. II jeiinait continuellemcnt, ct quand riieure de ses rcpas etait venue, du pain sec ct do I'eau lui suflisaient, a moins que, sur I'avis des medecins, ses superieurs n'exigeassent de lui qu'il apportat de I'adou- cissement a ce regime. Son vetement ne se faisait remarquer que par la grossierete du drapdontilelaitforme.il etait frequemment en prierc ct en contemplation. Toutefois, il ne negligea point do faire servir son minislerc h I'utilild du prochain. Ayant obtenu la permission de ctiliibrcr publique- Jiicnt I'officc, et de precher dans sa chapelle, on y vinl de loules parts. Ses instruction.'; et sescatechismcsetaienl suivis \\G NOTICE SLR I.ES EnMlTAGES aussi bien par les grandes personnes que par Ics enfants. La difiicullc dcs chemins n'arretait pas le zcle. Lcs pretrcs dcs paroisses environnantes y allaienl aussi celebrer les saints mysteres. Dans son crmitageBarthelemi recevait souventdes person- nes dc Cherbourg , ct d'ailleurs, qui venaient lui exposer leurs chagrins, leurs inquietudes, et recueillir ses consola- tions et ses conseils. Des marins avaient recours a ses prieres pour se niettre en voyage, ou venaient, apres une navigation prospere, le charger d'en rendre graces pour eux a Dieu. Des meres de famille reclamaicnt son intercession pourobtenir du ciel la santfi de leurs epoux ou de leurs enfants cheris. II etait, coinnie on le voit, un pretre dans lequelon avait une grande confiance, il etait I'ange protecteur de Cherbourg. Cependant on ne vitjamais d'honinie plus humble. Fidele a la parole du Maitre, il se regarda toujours conime un servi- teur inutile. II etait courtois pour les h6tes qui venaient partagerson logementet sa table. Les privations etaient pour lui , I'abondance pour eux. Sa sceur, ses nieces ou quclque autre femme pieuse avaient soin de pourvoir a ce qui lui etait necessaire, niaisaucune no residait danssa maison. II lui arrivait de temps en temps de quitter sa solitude pour remplir lcs devoirs de son etat en viile, visiter sa famille, ses superieurs ecclesiastiques, les ermitages de la rnonlagne du Roule et renouveler ses courses apostoliqucs dans les campagnes. II parcourut de nouveau, ctavcc succes, les paroisses de la Hague. II accompagnadans le Val-de-Sairc le celfebrc Pere Eudes, fondatenr dc la congregation connue dans ce temps sous le nom de missionnaires, qui, plus tard, porta celui d'Eudislcs, ct rendil dcs services incontestablcs, non seulemcnt dans la chairo, mais encore dans I'enspignc- ment. DE SMM-SAUVKLR ET SAINT-ACIl.VItD. H? Rai'tliL'lemi clait un tres dovot scrviteiir de la Viorge, c'olait ce qiii lui faisait tMilroprendre de tomps en toDips le pelcrinage des deux clia[)ellcs de la niontagne du Koule, dont elle etait la patronne. II y avail a rermilage du bas de la Montagne, dit de Noire- Dame-de-Grace , un cordelier donl la conduileelaitpeuen rapporl avecson etat. Barlhclenii luiadressa plusieurs fois des remontrances, afin de prevenir le scandale qui a^sulte loujours pour Ic public, el au detri- ment de la religion, de I'opposilion que Ton rencontre enlre la doctrine el la conduite. Barthelemi recourut en vain a Icut ce qu'un zele charitable lui suggera, le religieux ne tint cornple de rien. Implique dans un proces criininel qui fiil inteiitc centre un juge du pays, ii fut decrete de prise de corps, el s'enfuil de la province. l':nlin parui le temps oil Bartlielemi dcvait donner des preuvesirrcciisables de ['accord qui existail entre ses paroles ot ses actions, el faire voir un esprit ferine et un cceur noble. Se declarer bautemenl el sincerement pour le parti de la verlii, faire de la vertu la jdus pure Ic mobile de toutes ses actions, s'elever dans la prati(]uc de la vertu i\ un degre tel que Ton se trouve au-dessus du comnuin des bonimes, c'est s'assurer dans tons les temps des chagrins et des inimities. Non (|ue la vertu ne soil en elle-meme un bien,et le mcilleur de tous, mais, d'apres le cours ordinaire des choscs humai- ncs, I'ideala plusde prix que la realite. Le capriceet rinteret personriel jouent un si grand rule dans les fails moraux, qu'il ne faut pas etre surpris de toutes les contradictions que renconlrenl les bommes les plus vcrlueux. Ceci devrait etre nn paradoxe, mais I'Evangile I'a predit, et I'liistoire I'a con- lirnic par des arguments que Ton ne pent refuler, a mnins que denier les fails les plus aiillienli(]iies narlbi'leiiii dont la vie rlait loiile do desink'rcssemcnt el tie sacnliccs. 11.8 NOTICE SUR LES ERMITAGES Barlhelcmi qui montrait constamment rEvangile en prati- que, fut aussi soumis a de penibles epreuvcs. Railleries, calomnies, outrages, persecutions, rien ne lui fut epargne. Sa foi ardenle, sa candeur, son humilitt', lui atlircrent la liaine de deux sortes de personncs, dcs hypocrites ct dcs libertins. Sa conduite, pour Ics premiers, contraslait d'une manicre Irop frappante avec la leur propre, de sorte qu'ils se dt'chainerent contre lui avec I'apparence du zele. Les autros, ennuyes de I'entendre toujours faire la guerre aux vices qui leur otaicnt chers, raccablt-rent , a Icur tour, sous )c poids dcs humiliations et dcs opprobrcs. II y avait bien des honnetes gens qui nc croyaicnl pas lout cc qu'on lui prt'taitde mal, mais pusillanimes, comme lesont ordinaire- incnt Ics honnetes gens, ils n'osaient prendre a coeur sa jus- tification. Jusquc dans le sein du sanctuairc il rcncontra I'ingratitudc pour prix de ses bienfaits. Sa reputation fut tenement tcrnic par s:'senncmis, que, par prudence, il recut ordre de scs superieurs, de ne plus entendre de confessions, lis etaicnt bien convaincus dc son innocence, mais ils cru- rcnt, par ccttc concession, apaiser les rumeurs, et cc fut un tort. Get honime paraissait incapable de sc relevcr dcsormais. Cependant rien n'annoncailcn lui la moinJrc impression penible. Uctait rcste inebranlable, sans loutefois affecter des sentiments qui fusscnl I'indice d'un amour propre blessc. Au milieu de ses tribulations, il conserva lout I'esprilde la eliarilc chrclicnne, non sculemcnt il ne voulail pas que Ton parlat mal dc ses enncmis en sa presence, mais encore il t'tait prct a les bien servir. Sous des dehors negliges, gros- siers si Ton vent, il avait Tame grande comme celle do Fenelon. Tl rcfusa dc se dcfendre, se rcposant sur Dieu seul du soin de sa juslificalion. Son esperancc nc fut pas decuo ; If jour dc la justice [larul, et celle queuve muiilra sa vcrlu DE SAINT-SAUVEUll Ef SAINT-ACIIAKU. 110 tlaiiri lout son eclal. Rcconnu et proclame innocent, il ivprit sans ostentation les travaux augiistes do son minisliTc. U recut ses nouveaux pouvoirs dc rodicial de Valognes. '<=' Tant de douceur et tant de grandeur d'anie ne peuvent so rencontrcr que chez un disciple de Jesus-Christ. Jamais la philosophic, mOine a ses t^poques les plus briUantes, au point de vue moral, n'a enfante de tels caracleres et de telsactions. Cetait lii aussi ce qui servait puissamment a Barthelemi pour ohtcnir des succos dans ses instructions et dans ses controverses. J.es rapports commerciaux de Cherbourg avec I'Angleterre contribuerent a, y porter le nom et la saintete do Barthelemi. Des pretres de cc pays vinrent pour leconnailrc, et ils s'en retournorcnt remplis d'admiration, apri's avoir ete temoins de ses grandes vertus, et principalement de sa conduits en vers ses enncmis..;.;«a^'■,l^ .:.• Vers la fin dc juillet 1685, 11 faisait paver le sancluaire dc sa polite chapelle, et ne pouvant, jusqii'a ce que ce travail fut termine, y dire la messo, il resolut d'allcr a I't^glise d'Oc- leville. II etait deja souffrant, et la fatigue sc joignant au njal qu'il ressentait, il tomba en faiblesse. On le rapporla a Saint-Sauvcur, et il ne se releva point. II sentit que sa nialadie etait mortelle : la crainte s'^mpara de son esprit. Sa foi Vive, son amour ardent lui faisaientrogarder savie entiere comme depourvue d'aclions meritoires pour le cicl. Dos soinscontinuels lui furent prodignes pendant sa maladie, par Tune de ces nieces, et beaucoupde pcrsonnes le visilerent. 11 flit 32 jours malade, et dix jours avant sa mort, il tMait dcvenu compUHement aveugle. Use pre|)oraii paraitrcde\a[.t Dieu av(!c une attention scrupuleuse, el il eut conliance dans sa justice equitable et misi^riconiicu.sc. Enlin, muni des dei'- niers sacroiiifnls, apn-s avcir vucow [lard-um;' a ses cnne- 120 NOTICE SUR LF.S ERMTTAGKS mis tout le mal qu'il en avail rccu, ce vent^rabie pretre passa du lemps a Teteniile, le 2 seplembre 1683, dans sa 76^ ann^e et dans la 52* de son sacerdoce. Aussitot que la nouvelle desa mort futconnue a Cherbourg et dans les environs, on vint en foule a Saint-Sauveur, pour eontempler una derniere fois ses traits. Le lendemain un nonibreux clerg(?, tant de la ville que de la campagne, se reunitafin de lui rendreleshonneurs funebres. La chapelle ^lant trop petite, et Taffluence des fldeles considdrable, on ejtposa le corps du defunt,^ revetu des habits sacerdotaux, en dehors, vis-a-vis de la porte, a I'endroit nifime oii il avail demande qu'on Tenterral. La, cliacun pouvait le voir facile- menl. Sa figureetait decouvertc, et semblail etre, onlrapporte Ics temoins, ceUe d'une personne calme et endormic. Le cure de Cherbourg , Messire Jacques Gaudobout, et ses Aicaires auraient voulu le faire transporter dans le choeur de rcglise Sainte-Trinite, inais on respecta ses dernieres recommendations. L'ofTice fut celebre par le cure de Tonne- ville, M. Grisel, qui fit aussi Vi'loge {\» bon Messire que Ton appcla des lovs le bienlteureux Barlketcmi. On hii' erigea le tombeau de pierre calcaire qui existe encore anjourd'hni, Aulant il avail apporto dc precautions pour eacher ses vertus, aulant s'emprcssa-l-on deles recherchor Gl d'en publier Ics mcritos. II I'ulrcGonnu qu'un hommo qui avail observe aussi fidt'lemcnt Ics prcceplesellcs conseils evangcliques devait elre un pui.ssant intercesseur aupres de Dieu. Son tombeau alliranl de jour en jour une plus grande affluence de pelerins, et parliculicremcnt de meres dc famille avec leurs pelils cnfants, on ne tarda pasii agrandir la chapelle afin de le mellre a couvcrt. Col agrandisscment se fit avanl Tannoc 1700 par les parents du bienheureux Barthe'lcmi aides dc la gi'iicrosik- piibliquc. Dopuisce temps l)E SAI.NT-SAUVEUR ET SAIN T-ACHAUD. \il jusqu'ii la Revolution, lacliapelle deSaint-Saiivcuraloujours etc ouverteaux fidi'les. Etant alors propricteprivee, elle a pu echapper au vandalisme revolutionnaire, el nous etre con- serves telle que nous la voyons proscntemcnt, apirs avoir (5te loutpfois entretenueet reslauree par les proprietaires. lis ont ete hcureuxdela rendre au culte, et lis ont acquis des droits a la reconnaissance du public. Dans le temps des Rogations, on s'y rend en procession de diverses paroisses, le 24 aoul, /tHe de saint Barthelemi, apotre, on y ccl6bre I'officedu jour, et, a la demande des personnes pieuses, qui regardent le bienheureMX Barthelemi comme I'ogal des saints que Ton lionore dans reglise, on y dit qiieUjudois la messc et on a recoursii son intercession. 122 NOTICE SUI\ LES EUMIT.VGES LERMAGE DE SAIM-ACHARD OU SAWT-TITOJIAS ET LA LEPROSERIE DE CflERBOmG. Entre la rue actiiellc de rAl)baye et la mcr, non loin dtt lieu appele Chantereyne, il cxislait au XH'^ siccic, sinon avanl, iin ermilage qui avait pour patron saint Acliard. Dans la plaine qui cntourait eel edillcc religieux, et oil Ton a fonde les magnifiquos iHablissementsdu port militairo, il se tenait a la saint Martin d'hiver, le M de novembre, une foire qui s'appi-'lait foire Acbard, fcria Achardi, selon les anciens documents bistoriqucs. Le ruisscau, dit de Cbantcreyne, etait la liniite de Cberbourg et d'Equeurdreville : la parlie de la plaine qui se trouvait en deca s'appelait commune de Cherbourg, elcelle qui etaitau dela commune d'Equeur- drecille. L'ermitage de saint Acbard se trouvait dans /« commune de Cherbourg. Vers le milieu du Xl" sieclc, sous le regne de Guillaume- le-Conqucrant et I'episcopat de GefTroy de Montbrayja lepre etait connue dans le Colentin, et, dans lesiecle snivant, elle devint beaucoup plus commune. Dans le but de soulager, aulant qu'il etait possible, les malbeureiix atteints de cette nialadie liorrible et incurable, on reconnut la necessite d'elablir a I'ecarl, des niaisons de refuge que Ton appela leproseries, ladreiiesou maladrcrics. DE SAl.NT-SALVECK ET SAl.NT-ACH AftD. 123 La villeileClicrbourgciit sa l(''[iroscrie, et on la construisit aiipresde reniiitage desaint Achard. Lesdeuxetablisscments n'en formercnt plus, di's lors, qu'un soul. 11 ful arrelo que le chapelain auiait pour lui les oblations; qu'ii partagerait la moilio du tcrrage de la foire avec la cbapclle et que I'aulre moitie reviendrait aux leproux. Le cliapelain etait oblige de rendre ii ces infortunes tous les devoirs que la religion pres- crit a scs ministres. Pres de la cliapclle etail le ciinetierc dcs lepreux. Quand on se rcportc au temps oil la lepre etendait ses ravages, ct que Ton arrele scs yeux siir les regies qui etaient imposecs aux personnes affoclees dece mnl, on t'ltrouve de tristcs emotions. Des que les premiers syinplomcs sc mani- feslaient, I'individu elait sur le champ separe de ses sem- blablcs, 11 devenait un objet d'horreur pour ses parents et pourscs amis. Jlaisla religion le prenait sous sa garde tulc- laire, ct plus il etait a plaindro, plus celte fille du ciel s'efTorcait de lui offrir ses consolations ct de rcnlourer de soins. C'etait au cure du lieu oi^i demeurait le malade qu'otait devoluc la charge de le sequcslrer, et de Ic conduire a la leprosorie. Lii, personne n'clait admis sinon ceux (pii, par elat, etaient obliges dc rendre aux malades les devoirs S[)iriluels et corporels. Lorsque Ic chapelain celebrait la mcsse, il I'olTerloirc, il .v" tournait vers les lepreux pour Iciir adresser quchjucs paroles de consolation, et leurrappeler en meme temps toules les prescriptions severcs qui Icur etaient imposecs, etaiixquci les il fallaitrigourcuscmentscconformcr. Chez les Israelites, les pretrcs etaient aussi charges du soin dcs lepreux. Tout le mondc sail le parti ([ue M. Xavier de Maistre a tire do celte situation p6nible a hKnielle se Irouvaient rediiits ces infortunes. .M. de Maislrcare|)roduit detrop leellesdouleurs, 124 NOTICE SUU LES ERMITAGES et, son talent, d'accord avec laverite, a faitsouvent rt'i)andre des larmes aux lecteurs sensibles. C'est indubilablement par suite des precautions severes qui furent prises au moyen age, et de la sequestration des nialades altcinlsdelalepre, quecetleau a fini par disparaitre de noire pays. Malheureusement il n'en est pas ainsi pour d'autres contrees oii 11 parait revenir avec son intensity d'autrefois. On dil qu'il jette aujourd'hui la desolation dans la Norwege. L'erniitage de saint Acliard fut annexe par Henri II, roi d'Angleterreet due de Normandie, a I'abbaye de Notre-Daine- du-Voeu qu'il aclieva, etdont I'inauguration eut lieuen H81. Possesseurs de l'erniitage de saint Acbard, les augustins de Nofre-Daiiie du-Voeu en changf''rent bienlot ie patronage. Ce flit Thomas Becquet, arciieveque de Canlorbery, et clia- noine regiilier deleurordre qui endevint le nouveau patron. II etaiten grande veneration dans lo Cotenlin et dans le Bes- sin; on so rujip^lait le sejour qu'il y avail fail, la vie sainte dorit il avail donne rexeinple, el son recent niarlyre interes- sait vivenient en sa favour. II est probable que les augustins no niircnt pas saint Thomas a la place de saint Acbard sans rassentimenl du roi Henri, cau.se direcle ou indirecle de la mort du prelat. I. a chose arriva indubilablement apres la penitence qu'il fut force d'accom|)!irau lombcau du saint, pourlui faire amende honorable, el se racbeler du crime donl il etail I'auleur. D'apres le cardinal Baronius, Thomas fut marly rist^ le 29 dccembre lITo, et, d'apres le breviaire du pape Clement Vlil, ce ful le meme jour, mais en I I7i, ce qui est reconnii plus exact. Tres peu de temps apres .sa mort Alexandre HI lecanonisa. II ne serait pas impossible que le noni de saint Thomas de Canlorbery eiit ile donne a la cliapelle sainl UK SAI.NT-SAL:VEI:K ET SAl.NT-ACIIAIin. 12.") Aclianl loi's de rinaugiiration de I'abbaye de Nolre-Damc- du-Voeii, dont I'eglise fiit consacive, en M81, par Henri, cveque de Bayeux, assiste des dvequcs d'Avranches et de Bath, Ic diocese de Coulances (5tant alors sans Cveque. Ce que j'ai rapporte sur les revenus de la chapelle saint Achard on saint Thomas et de la leproserie de Cherbourg se trouveconfirme par Jean de Lessey qui occupa le siege epis- copal de Coutances dans la secondemoltie XIIP siecle,jusqu'a I'annee 1274, epoque dc sa mort, et qui fit r^diger une slatislique de lous les etablissements religieuxdeson ressort. II en reconnait I'abbaye de Notre-Dame-du-Vceu pour pro- prietaire. Dcpuis Tanncc 1293, elles durent 6prouver les niemcs malheurs que I'abbaye et ne plus 6tre relevdes. Au XVII* siecie la chapelle saint Thomas se voyait encore, mais aban- donn6e; au XVIIP on n'en connaissait plus que I'emplace- ment. Scsruinesreunies a cellesde la leproserie et recouvertes de sables ou de terres, qui, avec le temps, s'y etaient amassees, portaient le nom de bxUtes saint Thomas. II y avait pres dcla un cimetiere pour les personnes etrangercs a la religion catholique et un lieu reserv(5 pour deposer les restes de ccUes qui se suiciduient. NOTICE m L'OIIIGINE ET lETABLISSEllESI DE LA FOIRE SAINT-CLAIR, DE OUERQUEVILLE. FAR M. Air-(;i.\ni. 1^1 Ccttc IcKre-patcnlc t'laiL scollet.' de circ verle, avec lacs do soie verte ct cramoisio. II ne sera sans doiite pas inutile d'cxpliqiior ici cc que Ton entendait par le conduit desfoires, celte expression sub conductu refjio, etant employee dans la cliarte du roi Philippe. En ces temps de ti-oubles el de d6sordres ou les vols a main armeeetaient cliose commune, il etait n^cessaire, afin d'engager les marchands a s'exposer aux chances d'une longue route, de leur olTrir unc garanlie pour Icur suretd personnclle el celle de leurs denrees. On leur accorda done le privilege d'etre indemnises de toules les perles de cette nature qu'ils pouvaient eprouver, soil dans le cours de leur voyage, soil pendant leur sejour au lieu de la foire. Ainsi, s'ils ctaient voles en chemin, le seigneur de la lerre oil le vol avail ete commis, clait oblige de rembourser le dommage; si le vol avail liou dans unc liOtcllerie, c'6tail al'hOte atenir compte au marchand de la soustraclion faite chez lul; el s'il arrivail que I'hdte ne fiit pas solvable el qucle marchand se Irouvat dans une ville de loi, oo dernier pouvail encore avoir recours conlrelehauljuslicierde la ville. Cos privileges, comme on le voil, elaient d'uno grande importance. D'un autre cuto, pour prevenir les abus, pour empecher que sous la protection du'conduit, dcs ventes et transactions n'eussent lieu avant que les dennU^s fusscnt parvenues sur remplacemcnt de la foire, tout marchand qui les portait ailleurs, ou les deployail ct vendail on route, elait saisi et misenlrc les mains du seigneur, ot Ton confisquaitses mar- chandises au profit du roi. Telle olait la nature du conduit desfoires, ainsi^quc nous le voyons par un manuscrit de la Cour des comptcs de Paris, cite par Ducange dans son Glos- saire de la basse lalinite (I) ; et ces privileges se Irouvaient ;i; Voir Ip Glossaire Je Ducange, a I'arlicle ^undiinr. 132 NOTK'.E si;r }.K accordes aux marcliands de In Saint-CUur, en vcrtii dc la charle royale. Pourquoi le jour de la f^te de saint Clu-r fut-il choisi par Herbert Carbonnel pour Tetablissement d'une foire a Nac- queville? Le motif en sera facilement compris par les pcrson- nes quelque pen famili6res avec rhistoire de notre pays. On saitenelTel, qu'apres(5t:-e venu d'Anglcterrea Cherbourg vers le milieu du IX'= s\bc\e, sainLClair se retira dans la forfitexis- tant alorsa NacqueviUc, ou il vecul deux annecs avant de se rendre au monastere dc Madwin. Apr6s son martyre, les divers lieux qu'ils avait habites et rendus celeb res par ses miracles , regurenl la visite de nombreux pelerins , et la grande v^n^ration voui^e a son culte y fit bient6t (5tablir des ehapelles sous son invocation. La chapelle Saint-Clair dc Nacqueville fut sans doute une des premieres qui furent jilevees en son honneur; du moins elle existait deja au com- mencement du XIIP si6cle, puisqu'en Tan 1231, elle fut assuree aux religicux de I'abbaye de Notre-Dame-du-Voeu prfes Cherbourg, a condition qu'ils paieraient 10 sols au chapitre de Coutances (1)* J'ai trouve dans les archives de I'figlise de Nacqueville, une charle latine datt5e du vendredi d'avant la fete Saint-Pierre-es-Liens de Tannce 1253, par laquelle Richard do Saint-Martin donne a I'abbe et aux religieux de Notre-Dame-du-Voeu, 18 deniers de rente pour le salut de son dmc, et en outre , donne et concede a Dieu et a la chapelle du bienheurcux Clair de la paroisse de Nacque- ville, un boisseau de froment de rente annuelle, a prendre (1) Voir I'liistoire manuscritede I'abbaye ile Notre-Dame-du-Vcou, par I'abbe Demons, p. m. {Bibl. de Cherbourg.) FOIRE SAINT-CLAIR. i^J soi-lemoulin ilc Nacqueville, pour entretenirle luminairc dans ladile cliapclle (i). De semblables dons dcvaient etre frequents, ear en I'an 1264, I'eveque de Coulances, Jean d'Essey, lermina un proces entre les chanoines rdguliers de Cherbourg et le cure de Teglise Sainl-Laurent de Nacque- ville, aij sujetdes offrandes faites a la chapelle de Saint- Clair (2). le Livre noir (3) nous apprend que le curti de Nacqueville avail dix sols siir cette chapelle; d'apr^s le Livre blanc (4), il recevait vingt sols le jour de la fete de saint Clair. L'abb(5 du Voeu, patron de la chapelle Saint-Clair, en percevait les rcvonus, ct y faisait celebrer I'office divin deux fois par an, aux fetes de saint Clair ct de salute Catherine. On voit par cequipreci'do, qu'au nioyon-;igo cette chapelle etail un lien de pelerinage Ires frequente, particiilierement lojoiir de la fotedii saintniartyr; c'etaitdoncunecirconstanco des plus favorables pour y tHablir une foire a cclte memo t'poque, et c'osl ainsi du rcste qu'onl pris naissance la plupart des assemblces qui ont lieu dans nos paroisscs le jour de la fete patronale. Mais on comprend qu'en cotte circonslance lesreligieux de rAbbayc de Cherbourg, qui jouissaicnt dt^ja (1) Voir le texte a Tappendicp n" 2. page 138. (•2) RouAiJ.T, al)rege de la vie des evi'ques do Coiitance.s, p. 219. (3) Ecclesia de Naquevilla; patronus Ep. Const. Abbas Ccpsaris- burgipercipit duas garbas, rector tercium cum allakigo et habet decern solidos in capella S. Clari et valet XIV Hbras, abbas Cesa- risburgi IV Ubras, capella ibidem XL solidos. Livre noir a2"8;. (4) In parrochia (de Nacquevilla) est quedam capella. Dictus abbas (de Voto) percipit fructus scilicet offertorum et ibi facit celebrare bis in anno die S. Clari el S. Kalcrinc. nidus abbas est patronus- dicte capelle. rector percipit in dicla capella XX solidos in festo S. Clari et solvit pro circata VIl solidos et pro capa ejis- I'lpi V nuliilos. Livra bkuic. •f34 >OTicE sun LA du revcim de la chapelle ct reliraient un grand prollt de rimmense concours des pieux visilcurs, dcvaientse trouver iiiteresses dans ceUe aflaire ; c'csl ce que prouve un acte ins(ire dans le manuscrit que je possede. En effet, les religieux de Cherbourg pretendirent d'abord que Herbert Carbonnel ne pouvail etablir une foire pres de la chapelle Saint-Clair, ou lis possedalent certains droits, entre autres le droit do haute justice; cepcndant, comme en detinilhe cctlefoiredcvait leuretre avanlageuse a eux-memes en attiranten cetendroit un plus grand nombrede personnes et par consequent plus do chancer de dons et profits, ils prirent enlin un arrangement avec le seigneur des Marestz, et a cc sujet un compromis fut passi aux assises de Valognes tenues par Robert Jacob, lieutenant du bailli du Cotentin, le mardi d'apres le dinianche oil Ton clmnte L^tare Jemsalem de I'annee 1317, entre Guillaume Carbonnel, chevalier,, agissant au noni de son frere Herbert, et Here Roger Le Rous, attorney, c'est-a-direavocat del'abbe de Notre-Damc- du-Voeu pres Chiresbours (telle elait alors I'orthographe du nom de notre ville). L'abbe conscntit a cc que le seigneur des Marestz tint la foire autour de la chapelle , ct si I'emplace- ment ne suffisait pas, sur les terrains environnants, sans prejudice toutefois des droits de haute justice ct autres que I'abbaye y pouvait cxcrcer, et a ccttc condition que lo seigneur des Marestz ne piit jamais eloigner Tassemblee des alentours dela chapelle; en outre, Herbert Carbonnel devait s'engager, pour lui et ses succcsseurs, a donner en heritage ii I'abbaye du Voeu, cinq sols lournoisde rente a prendre sur les Emoluments ou taxes de la foire (II. :\) Voir lo It'xle a liippciidix u^ ^■^, page 1^8. FOIUK SAIMT-CLAFR. 133 yuelles claicnt ces taxes? Ouelles 6taiont les impositions pii'levees par les seigneurs sur les marchands qui venaient aux foires? Ces redevances connues sous le nom general de Coutumes des foires, tHaient dc diverse nature et variaient suivantles localites. Dans un aveu de Tan 1463 rclatif aune autre foire de notre pays, la Saint-Nazaire de Greville, nous voyons que le seigneur de celle paroisse avait « droict » prendre sur chacua eslallier deux deniers tournois ; sur » chacun mercier venant a cheval, deux escheveaulx de fll, » ctdesaullresapied, deux eguilles; sur chacun verrier, ung » voirre a pied et un sans pied; sur chacun saulnier, de la » chartde ung boisseau et de la somme ung quarsonnicr; et » de chacun poller, ung pot a ancc ct raullre sans ance; et de » chacun tavernier, ung gallon de hoire, tel qu'il aura » apportee a la dicle foire, fors Ic premier arrive qui ne pale » lien. » (I) Jene sals si le sei'gncur des Marcstz percevait ces diverses taxes, mais il prenait certaincment un denier de chaque marchand entrant dans la foire, ce qui etaitspecia- lotnent nomme le droit de coutume; puis en oufreun second denier etait exigc des etaleurs, comme droit de siege ou terragc. Je vols par un acte du 17 juillet 1336 (2), qu'en celle tnemc annexe plusieurs elaleurs se reftiserent a payer ce second denier sous prctoxte qu'ils ('talaient a lerreet non sur des tables, ct pretendirent ne devoir acquilter que le denier de coutume. Unc enquete ftit ou\erte a ce siijet par le senechal de la seigneurie des Marestz, et comme il fut iirouve que de tofit temps le droit de terrage avait t5!e requis aiissi bien de ceux qui deposaient Iciirs iiiarchandises a (1) rSolcs sur les ancieniies foires du tlopartcmeiit dc la M;inchc, par M. Leopold Delisie (Annuaire de la Mandie, 1«5'.', p. o3h;. rl: \o\v le lexto a rapjieiidix, ii" 1, page 1 !0. 136 NOTICE SUR LA terre flue ile ceux qui se servaicnl do tables ou etaux, ces inarchands furent condamni's a payer le droit aux fcrmiers de la foire. Tels sont les documents que j'ai pu rccueillir sur laSaint- Clair au moycn-age. A partir de I'an 1318, cettc foire s'est tenue le 17 el le 18 juillet de chaque annee, sur le territoire de la seigneurie des Marais, aux alentours de la chapelle Salnt-Clair de Nacqucville. En ccs jours, les religieux de I'abbaye du Voeu y cel^braient los ollices, etlisaient I'evan- gile sur la tete des personnes qui venaient implorer I'inter- ccssion du Saint, particulierement dans Tespoirde recouvrer la vue : cc^remonie qui devait, comme on le pcnse bien, etre accompagnee d'une olTrande. Get otat de cboses dura jusqu'a I'epoque de la revolution du siecle dernier; aiors, en vertu d'un dt'cret dont je n'ai pu connailre ni la date, ni la tcncur, ni les motifs, la foire SainL-Clair fut enlevee a la commune de Nacquevillc, et transferee sur le territoire de Querqueville au lieu oii elle se tient actuellement le 16 juillet; mais, malgr^ ce changemenl, elle a encore conserved son ancienne denomination dans nos campagnes ainsi qu'aux lies Anglo- Normandes, oil elle est toujours connue sous le nom de la Saint-Clair-des-Maraiif. lOIRE SAI.NT-CLAIK. i31 APPEiNDiCE. K» 1. Miilippus dei gracia francorum et navarrte rex. Inter cetera virliitum praiconia quibus regalem excellenciam condecet vcnustari illud credimus esse nee minimum si ad ea quae reipiiblicse utililatem prospiciunt se iiberaleni exhibeat et benignam. Sane ex parte dilecli nostri magisfri Ilerberti CarbonelH clericl domini pro majori parte villae de sancto Laurencio de Nacquevilla nobis extilit humiliter siipplicatum ut nos in villa ipsa nundinas ibidem tenendas anno quolibet de cetero in vigilio et in die festi sancti Clari de benignitale regia concedere dignaremur Nos igltur atlendentes quod exinde ulilitas non modica toti patriae provenire poterit ac eciam quod ipsas nundinas sine nostri et alterius prejudicio ac eciam incom- modo possumus concedere quodque eciam feodum nostrum quod in villa praedicla tenet a nobis meliorari jtoterit et eciam aiigmenlari prout per informaUonem de mandato nostro factam nobisque reportatam nobis evidenter appaniit prwdictas nundinas in villa pra-diota tenendas dc cetero in pntdictis vigilio et die festi sancti riari anno quolibet ordinamus statuimuset auctorilate nostra regia concedinius per presentes ac omnes el singulos mcrcalores quos ad dictas nundinas venire conl'gerit una cum mercaturis eorumdem quas ad dictas nundinas adducent vel aportabunt adduci vel aportare facient stib roiidtirtu regio ac speciali garda regia suscipimus ve- niendo ad diclas nundinas et in ipsis morand* et de eis redeundo ipsnsque ab omnibus injuriis violentiis oppressionibus et jacturis perballivum Constantini qui pro tempore fuerit deffendi volumus et mandamus. (Juod nt firmum et stabile permaneat in futurum pre- <;pntibns literis nostrum fecimus apponi sigillum salvo tamen in eninihus jure nnstro et eciam quolibet alieno. .Vctum Parisiis anno domini inille.simo trecenlesimo decimo octavo mcnse maii. Per diiniinum regem ad relaciononi thcsaurarii llcmonsi«. J. ID. Tr.Mi'i.o. 438 NOTICE SLR LA ]\'° 2. Nolum sit omnibus presentem cartam inspecluris quod ego Ricardus do sancto marlino filius quondam RadulQ de sancto martino mililis pro salute anime mee et antecessorum meorum dedi et concessi in puram liberam et perpetuam elemosinam viris religlosis abbati et conventuj beate marie de veto iuxta cesaris burgum decern et octo denarios annuj redditus ad festum beati niichaelissuperdomumquamWillelmusboistardtenebatdemesitam apud naquaviliam inter duas vias ante domum Willelmi pepin. cum homagio dicli Willelmi boistard quidlctis abbati et conventuj reddet redditum supradictum. volo siquideni et concede quod predict! abbas et conventus super dictam domum et situm ipsius possint facere plenam iusticiam cum necesse eis fuerit pro redditu supra- dicto vel super campum de siquet iuxta domum thome sansonis situm in parochia supradicta. Iterum dedi et concessi in pur;im et perpetuam elemosinam deo et capelle beati clari de parrochia de naquavilla unum bussellum frumenti annuj redditus ad luminarc dicte capelle. habiendum et percipiendum in portione niea niolen- dini de naquavilla. in quo molendino dicti religiosi plenam possunt et debent facere iusticiam si necesse fuerit pro predicto frumento. hec autem supradicta tenementa ego et heredes mei garantizare manutenere et deffendere contra omnes absque ulla reclamacione a me vel heredihus meis super biis facienda. datum et actum anno dominj Mo. CC™". L"'". quinto die veneris ante festum beati petri ad vincula. I\° 3. Es assises de Valloingnes devant Robert Jacob tenant le leu au bailly de Costentin le mardy continue du lundy dapres le dimenche que Ion chante I.etare Jerusalem Ian mil Irois centz dix sept furent prescntz frcro Roger le Rous aclornc dliommes relligieux labey de FOIRE SAI-ST-CLAIR. 139 nostre dame du Vou jouxte Chiresbours et procurateur au conuent dicelluy leu dune part et iiionsienr Guillaume Caibonnel cheiiallier seigneur de Canisi disant que il estoit pour niaistre Herbert Car- bonnel clerc son frere Auec ceu quit auoit debat enlre lesdictz relligieux et ledict maistre pour une foire que ledict niaistre voulloit esleuer par la vertu dvne grace que le Roy nostre sire lui auoit donnee dauoir foire et de leuer coustunie au jour sainct Clair a viie assemblee qui assemble a la chapelle sainct Clair en la parroisse de sainct Laurens de Nacqueuille ledict actorne et procureur metlanl debat quauoir ne lui pouuoit par plusieurs rai- sons qu'il proposoit Et apres plusieurs raisons proposez entre ledict actorne procureur dvne part et ledicl clieuallier dautre IIz firent accord sur ce en la maniere qui enssuit Cest a scauoir que ledict actorne et procureur saccorda que la foire fust en leu dessus diet et saccorda sy ainsy estoit que la place ne fust assez grande pour sullire la foire que ladicte foire se puisse cslen- dre es procbains lieux dillec entour de ladicte paroisse saouf le droict de la haulte justice et des appartcnances qui appartiennent et peuuent appartenir ausdictz relligieux et saouf ce que ledict niaistre Herbert puisse remuer ne trestourner lassemblee dentour ladicte cbajielle ne laport dicelle chapelle Et pour cest accord ledict cheualiier au nom susdict maistre Herbert saccorda tous contant et sobligea pour luy el pour ses hoirs que ledict abey et conuent et lous siiccesseurseusscnt a heritage cinq soulz de tournois dannuelle rente sur ladicte fuire sy foire y a et que eulx y puissent faire justice i-ur ladicte foire et sur les emolumentz dicelle et ensement ledict clieuallier sobligea pour luy et pour ses hoirs acquicter les- dictz cinq soulz se ledict mestre allant ne voulloit aller allencontre Et promist et sobligea ledict cheuallier faire faire et confesser audicl maistre Herbert assignement de tenir les choses dessusdictes fermes et aslables sans aller enconlre et sy ledict niaistre Herbert ne voulloit faire et tenir eulx reuendront au poinct et en leslat a la proclialne'assise de Vallongnes cen que cest accord face ne nctorge en prejudice a nulle des parlz El a ecu ful present Robert du boys escuier qui sobligea a faire accorder et tenir laccord dessusdict esdictz relligieux sy ledict maistre Herbert le voulloit tenir. Donne comme dessus sans sigucs et apparoist auoir este scclle tn queue. liO NOTICE SUR LA \° 4. Lan mil cinq cenU cinquanle et six le dix huict™'- jour de juillel au foirage saincl Clair deuant rnoy Jean Anquelil lieutenant du seneschal de la seigneurie des Marestz pour noble homme Jean de Grymouuille sieur dudict lieu Fourneuilie et Tournebu Sest pre- senle Jacques ouistre pour luy et Olliuier pigeon son compaignon ftTiiiiers de la coustume de ladicte foire lequel en la presence dudict sieur a diet el remonstre que les nstalleurs du mestier de tenneur et cordonnier estoient refusantz payer chacun ung denier pour le siege el place ou ils auoienl chacun deulx estalle leur marcbaiidise au controire de lusage accouslume par cy devanlfaict par leurs semblables Et que cejourdhuy les estalliers tant du mestier de boucher de serreurier que autres estalliers ont cejourdhuy faict le payement de chacun ung denier pour ledict siege demandant ledict sieur pour lui donner adjonction Sur quoy apres que par lesdictz gens desdictz mestiers de tenneur el cordonnier parlant par Jean letellier Jean chymenel Thomas de saincl gern)ain Germain le scelliere Thomas feronnet Guiliaume baubigny Guillaume dancel Jean Lenepueu Guillaume perier Thomas le maingnen pour eulx et les autres cejourdhuy estalliers qui se viendront nommer eust esle dictquilz su vouUoient deffendre et soustenoient quilz ne debuoieut aulcune chose pour ledict siege que scullement chacun ung denier de coustume El que par ledict sieur de ouistre eust esle requis eslre presenlemenl informe de la maniere de payement faict par cy deuant du droicl dudict siege tanl par lesdictz tenneurs et cordon- niers que aultres estalliers a y ordonne que presenlemenl sera precede a enqucrir lesdictz estalliers suiuant ce presence des dessus- dictz lire le rapport scauoir est a Cardin rose Germain laquesne Louis guillemelles du mestier de boucher Nicollas leuesque Henry feuillye du mesnil Denis le carpentier de fibonnier lesquelz font et ont faict leur estat conlre lerre comme font lesdictz tenneurs et cordonniers et reserue lesdictz bouchers qui se garnissenl de tables ainsy quilz voient bon estre lesquelz ont diet et rapporte sur ce deubment jurez qu'ils ont accouslume payer cbacun ung denier pour la place de leur eslal et ung denier de coustume Duquel rapport a esle accordo letlre audict sieur de ouyslre et ordonne que les porsonne;; ayantz faict la cueillelte de ladicte coustume et estallage FOIHE SAINT-CLAIR. 141 par cy deuant seront faictz venir pour estre de ce inquis saoul ce faict ordonner quil appartiendra et la matiere partant mise aux prochains plees de ladicte seigneurie lesquelz gens de mestier ont paye audict ouistre le denier de coustume saouf la question dudict denier destallage Et donne en mandement a chacun des prouostz de ladicte seigneurie adjourner telles personnes que du party desdlctz sieurs dOuytre leur seront requis a comparoir auxdictz prochains plees et aultres enssuyuantz iaiit que mestier sera a la fin dessusdicte Faict comme dessus. Signe Anquetil. VOYAGE D ALGER A SMYRRE EN 1830, ?AR HI. le D' DUFOIJR, Tresidrnt du Consfil .1o Sunlit dc la Merine a Cherbour Offieiir bres inscriptions dites marhres d' Arundel, conservees a Oxford en Anglelerre. M. de Choiseul-GoufTier a decrit les grottes d'Antiparos qui fournissaient le plus beau marbre. Ne pouvant les visiter nous dumes nous contenter de celles de Paros meme. La premiere que nous visitamos a peu d'elevalion el est peu considerable. Le temps a revelu d'une teinte brune ccs marbres negliges depuis tant de siecles et qu'on ne visite qu'a la lueur de torches dont la fumce laisse sur les parois des carrieres comme de funebres sillons; engraltant l^gere- menton voit apparaitre lour eblouissante blanciieur. II faut reiuarquercepcndant que cc marbre n'a pas phis d'eclat, de finesse et n'est pas susce|)tible d'un plus beau poll que celui de Carrare; par cxempie, ce qui le caracterise c'est unesorle de transparence, et la coulcur legerement fauve et don'e qu'il prend avec Ic temps ct sous los rayons du soleil. d'alger a smyrne. 153 Prfes (I'une des ouverturcs de la carri^rc apparall un petit bas-relief sans importance, que les Grecs appellent les Nymphes el qu'un anglais avail voulu enlever en creusant tout autour une rainure profondc. Mais la carriore qui suit, bicn plus exploitee jadis, attira tout autrement notre attention. L'entrfieen est majestueuse et de chaque cote s'etendenl de longues et vastes galeries. En avancant nous nous trouvames bientfll dans une obscurity profonde, mais les moines d'un couvent voisin, guides ordi- naires de ces solitudes, apportirent d'enormes torches dont nous suivimes lalumicre. Nous marchions sur uneterre fine et noire. Sur nos tetes s'elevaient des voiitcs dans les parois dcsquclles il 6tait facile de reconnaitre la trace desderniers travaux et pour ainsi dire des derniers coups de ciseau. De distance en distance 6taient menagees des ouvertures soil dans les flancs , soil au sommct de la montagne, veritables puits de la profondeur dcsqnels des machines puissantes enlevaient les blocs. De chaque cOte des galeries les travail- leurs avaient amoncele des debris qui embarrassaient la voie. L'eauqui decoule, chargeede calcaire,a travers les fissures des routes, a fini par reunir tous ces debris en une masse cornpacte. Cello qui filtrc plus lentementa convert toutes les parois de slalactiques. Vers le milieu de notre promenade souterraine nous vimes la voute sVlever a droite au point d'etre prcsqvie hors de vuc. L'obscurite qui r^gnail dans cetle pi'ofomle crevasse nous fit penserqu'elledevaitalteindre le milieu de la hauteur de la montagne dans les flancs de laquelle les carrieres ont et6 creusees. La pale Incur de nos flambeaux qui venail troublerlanuit de ces retraites, la vuc dc ces moines si dilTerenls de leurs pores, le rctenlisscmcnt do nos voix donnaicnt a celte scene 154 V0YAG6 unc singiiliire Amotion. De tous c6\H on voyait dcs noms graves sur les parois, traces du passage des voyageurs loin- tains, nous y luines une foule de signatures vulgaires parmi lesquellesquelqucs noms celebres apparaissaient. G'est ainsi que nous y Irouvames ceux de Thomas Moore ct de Strafford Canning; parmi ceux des Francais existait celui de M. Dosrotours. Mais c'^taient ceux des Anglais qui etaient en majorite. Nous dessinames les n6tres avec la fum(5e de nos flambeaux, apres huit jours I'humidite les aura effaces. En voyant inscrits sur les monuments de I'ancienne Grece ces noms de voyageurs presque tous venus de I'Occident, comment ne pas etre frappd de la bizarrerie du destin qui pousse vers ces vestiges les enfants des r(^gions encore barbares lorsque florissait la civilisation helienique? Qui aurait dit aux brillants alh^niens qu'un jour les liabilanis de la Gaule, bcritiers de leur propre genie, vicndraient sur leur tcrre nalale rcchercber la trace de leur passage, les temoignagosdc leur grandeur, et enseigner leur passe a leurs fils di'generes? Nous quitlames avec regret ces cavcrnes qui sc prolon- geaient bien au delh, mais qui , interrompues par des ebou- lemenls, n'auraienl pu au prix de beaucoup de fatigue, nous offrir d'autres aspects. Notre scjour so prolongeait a Pares. Nous dumes au calmc qui s'obslinait a regner d'assister a unc scene biblique. Un jour nous remarqutlmes parmi les femmes turques un grand mouvement et nous les vimcss'avancer vers Ic commandant et so jcler a scs plods, puis ellcs se mirent a parlor avec volubilite et prosque toutcs ensembles; quelques-unes montraicnt tour a tour leur sein ct leurs enfants. L'interprete aussitot appel6 expliqua que ces pauvres femmes s'etant imagine quo si nous reslions a Paros c'est que nous nous y I D ALGER A SWYRfJE. 153 trouvions bicn, venaicnt supplier lecapilainede Ics conduire au plus vite en Asie. Voyez, disaient-elles, nos mamellcs sont dcssechces et nos enfantsdep6rissent. On leur fit entendre avec beaucoup de peine qu'il fallail accuser le calme du retard dont elles se plaignaient. Le 5 septembre nous pumes cependanl reprendre la mer. Le lendemain traversant lentement le canal qui separe Scio de I'Asie, nous pumes reconnaitre sur cette fie si fertile et si belle dontle terrain s'eleve par une pente adoucie des rivages de la mer aux montagnes de I'intcrieur, nous pumes reconnaitre les traces d'une recentc devastation. L'ile s'tHait en elTet revolt(5e pen de temps avant notre arrivee et la porte avail confiele soin de la clifitier a un de ses gL^n(5raux les plus cruels. Les maisons ^taient noircies par I'incendie, a moitie renversees par les boulets au milieu d'immenses champs d'oliviers el de forets d'orangers. Le soleil versail sa lumi^re sur cette scene de meurtre el de pillage. Nous detournions nos regards de celle lerre si rficemment arrosiie de larmes et de sang pour les reporter vers la cole dc I'Asie mincure. La se Irouvait le termc de notre mission et nous debarquames nos passagers sur les lies d'Ourlac que trois lieuesseulement separenl de Snnrne. Plusieurs de ces turcs parureni vivement emus en nous quittant et s'efTorQaienl de fairecomprendre la reconnaissance dont lagen(5reuseconduite des Fran(:ais lesavait penelres; quant aux femmes ne craignant plus de se devoiler elles saisissaicnt nos mains et les pres- saienl en pleuranl. En quclqucs heures ils eurenl improvise un petit camp. Nous les y visilames le lendemain et nous pumes rccucillir encore des protestations qui devaicnt elre sinceres. NOTICE SUR LES ANCIENNES FABRIQUES DE DRAPS . DE CHERBOURG, PAR m. Augnste LE JOLIS. (Lue ii la Societe academique de Cherbourg, dans sa seance publique du 3 avril 1851.) Messieurs, Dans le cours de I'exislcnce d'une villc, il est des institu- tions qui, aprfis avoir dure un certain nombre d'annees, quelquefois des sieclcs, disparaissent sans laisser d'aulres traces de leur passage que quelques lignes dans les annaies de la cite. De ces institutions, les unes sont de nature imous faire mieux comprcndre les niceurs cl les usages d'un temps 438 FABRIQUBS DE DRAPS d(5ja loin de nous; ellcs presenlent ainsi un inttirct tout sp(5cial a riiislorien. D'aulres furcnt utiles et concoururcnl au bien-otredu pays; dcquelque modesleimportancequ'ellcs puissent paraitre, il est juste d'en conscrver le souvenir. C'esl surtout aux academics de province qu'il appartient d'enregistrer ces fails, de rassembler ces materiaux de I'histoire locale, de recueillir avecun soinpieux les traditions de nos ancfitrcs. Si done il arrive a noire connaissance quelque particularite de Thistoire do notre ville qui»ail echapp(5 jusqu'alors aux reclierches de nos dcvanciers, il est de notre devoir de la lirer de I'oubli, cl de lui rcstituer une place dans les recits du passe. C'esl ce motif, Messieurs, qui m'engagc a vous entrctcnir aujourd'hui d'une branche do commerce autrefois importanle a Cherbourg, inconnue maintenanl, cl sur laquelle aucun des historiens de notre ville n'a donne de details circons- tancies : je veux parler des manufactures do draps qui florissaient dans nos murs au XVII*' siecle. On lit dans la Vic de M. Pate, cure de Cherbourg : « Sa plus grande curiosite etait de savoir si les draps se » vendaicnl a Paris, et aux foires de Caen et de Guibray, » carc'elait cette marchandise qui faisait subsister les pauvres » de Cherbourg.... et on le voyait aillig(3 et inquiet quand » ce commerce n'allail pas bicn. » — Dans son histoire manuscrite de Cherbourg, M. de Chantereyne sc borne a dire qu'il y avail dans notre ville une bonne manufacture de draps. Une citation toulaussi laconiquesevoitegalemcnt dans un manuscrit de notre bibliolheque. Enfin, on lit le passage suivant dans VAnnuaire de laManche pour I'an XI : « On fabrique dans cette ville (Cherbourg) des draps et des » toiles de lin. » Voila, Messieurs, les seules indications DE CHERBOUnC. 159 que Ton rencontre chcz nos chroniqucars sur Vexislcnce de cetle Industrie h Cherbourg. Mais dans une liassc de diaries etautrcspiijcesliistoriqnes recucillics autrefois par M. de Chantereyne, et qui ont cl6 derni^renient offertes a notre bibliotlieque communale en mSme temps que les memoires inedits de ce savant sur I'his- toire de notre pays, j'ai remarqu6 un cahier portant ce titre : « Statuts do la manufacture de draps de la ville de Cher- » bourg, du 10 avril 16G8 »; et par la lecture do ses statuts, j'ai pu merendre comptede I'organisation et de riniportance que prt^sentaient ccs fabriques voila bientot deux sitcles. C'est une analyse rapide de ce document que je vais avoir I'honneurdevous presenter; maisauparavant,jecrois devoir, Messieurs, indiquer ici en peu de mots a quelle occasion ces statuts avaient du etre rodiges. Sous Ic regne de Louis XIV, le conseil royal de commerce, grace surtout a Tiniliative de Colbert, porta une attention loule speciale sur les manufactures d'ctoiTes de laine, et prit diverscs mcsures pour reglcmenler la fabrication ctla vente des draps dans toulc I'etendue du royaumc. Dos statuts, liomologu^s par le conseil d'Etat, furent mis en vigueur dans la plupartdes viilesmanufacturieres.et, surunnouveau rapport de Colbert, le conseil royal de commerce rendit un arret, en date du 14 mai 1667, portant que ces rcglements scraient executes rigoureusement en tons lieux, « afin que toutes les pieces de m(}me etofTe fussent uniformes dans tout leroyaumecn lours longueur, largeur et qualite ». Pour arriver a ce resultat il fut ordonne que chaque piece de draperie, avantd etremise en vente, seraitsoumise a I'examen domailrosjures, (jui cnconslateraicntlaqualit^ ctle mctrage, clcnsuitcy apposcraicnt le plomb royal indiijuant que cotte piece satisfail aux conditions exigees par les statuts. IfiO FABRIQUES Dli DRAPS L'execution de ces mesures rencontra des obstacles dans certaines contrees, nolamment en Normandie et dans d'aulres provinces avoisinantes, ou Ton continuait a fabriqiier des 6tofTes plus etroites que ne le comportaient les reglcments : cequi moliva un nouvel arret du conseil.el une ordonnance royale, en date du 14 avnl 1669, enjoignit de reclief I'ordre aux maires, eclievins et juges de police, de tenir exactement la main aTexecution de I'arret du 14 mai 1667, de faire visiter les pieces d'etoffes exposces en ventc dans les foires et marches, etde saisiret confisquer celles qui ne porleraicnt pas I'empreintc du sceau royal. Au mois d'aout do la nieme annee, le roi altribua exclusivement aux maires et echevins, la juridiction des manufactures de draperies; mais, dans certaines villes, les officiers des presidiaux clicrcherenta cmpietcr sur les pouvoirs ainsi conferes aux echevins, et il ful necessaircqu'une nouvelle ordonnance intervint pour niettre fin a ces conflits. Get arret, rendu en conseil d'Etat preside par le roi a Saint-Germain-en-Laye, le 27 juillet 1770, con- firme aux maires le droit de juridiction sur les manufactures, et dt^fend aux officiers des presidiaux, ainsi qu'ii tous autros justiciers, « de rien entreprendre sur ladite juridiction, » troubler ni emp^cher lesdits maires et echevins en I'exer- » cice d'icelle, directementou indirectement, a peine d'inler- » diction et de 100 livres d'amcnde, enjoint auxdits » maires et echevins de vaquer incessamment a I'exercice de » ladite juridiction et de tenir la main a l'execution des » regiementsgen(^raux des manufactures; etaux maitresdes » requetes departis par Sa Majest(5 dans les provinces, do » leur donner toute protection n^cessaire, ordonnc qu'a » la diligence des maires et echevins, tous les conlrevenants » au presentarreteserontassignes en conseil en vertud'icclui, » pour voir declarer Icsdilespeines encourir centre eux; etc.* 1)K CriKllBOLRG. 1 G1 l)e plus, lo roi sc rcseivait cxclusiveinont Ui connaissancR, en son conscil royal de commerce, tics appcls qui pour- raiciitctrc formules a cctte occasion. II m'a paru utile, Messieurs, de rappcler ces fails generaux qui peuvent servir a I'lnlelligence dece qui va suivre. Pour obeir a I'ordonnance du 11 mai 1667, Ics mailres drapiers do Cherbourg sc reunirent, le 10 avril 1668, par devant Philippe Loliier, sieur dc Noiremare, et Jean Samson, sieur dc Saint-Jean, maireset echevins de cctlc ville, el arn"- terent des statutset r(^glements contcnus en 43 articles. Le debut de ces statuts est tellenient remarquable par la naivete de la redaction et par I'esprit religieux qui y domine, que je crois devoir le reproduire ici textucllement : « Statuts et reglemenls pour les manufactures de » draperies qui se fabriquent dans la ville et faux- » bourgs et banlieue de Cherbourg, pour Clre observes » a I'avenir sous le bon plaisir du Roy et de sa jus- » lice, par les marchands et maitres dudit etat, » com me ensuit : « Art. 1. 11 est exprcssemcnt defendu a tous maitres dc » manufactures dc draperies de travailler ou faire travaijier » aucuns ouvriers pour quelque sujet ou pretexte que ce » soient, les jours de dimanche, ffites annuelles, f6tcs de la » Vierge et des Apotres, a peine de 10 livrcs d'amende, ni » d'aller au cabaret pendant leserviccdivin, sous lesmcnics » peincs. » Art. 2. Comme aussiii tous maitres de moulins eta tous » les foulons, de faire ti'availler aucun mouiin a drap, les » jours de dimanches et fetes specilk^es, depiiis un minuit » de la veille jiisqu'a I'autre, a peine de 4 livres d'amende. » Art. 3. Defenses tres expresses sont failes a tous maitres » de manufactures et a tous ouvriers d'cxposer en venlo, II 16 i FABKIQUES DE DRAPS > comme aussi a tous marcliands de celte ville et des faux- j> boiirgs et environs d'icelle, et a tous marchands forains, » d'acheter ou de faire achcter par qui que ce soit aucunes » pieces de rnarchandises les jours de fetes ci-dessus, a » peine de confiscalion d'icelles au contrcvenanl et de 100 » -livres d'amende. T> Art. 4. Tous mailrcs travaillant ou fuisant travailler » seront obliges de se trouver a I'eglise la veille du jour et x> iHe de Monseigneur saint Nicaise, en oclobre, oil se » diront les premieres vcpres, et Ic lenjemain, au service ^ solennel qui sera dit et ctMebr6 en ladile eglise, et le jour » suivant y sera dit un service pour le repos des ames des » defunls maitres dudit metier, auquci, comme aux autrcs » services, seront tenus se trouver tous les maitres de la » communaule, a peine de 5 sols d'amende conlre chacun » defaiUanl; .... et, arrivant Ic d6ces d'un dcsdits mailres » du metier ou deleursfemmes, leur corps sera accompagne » des maitres jures en charge, qui seront a celte tin avertis » et tenus en avertir tousles autresmaitresde la communaule i> pour s'y trouver pareillement, et d'y faire porter les torches i> ct luminaires accoutumes apparlenant a la confrerie. » Les articles suivantsindiquent dc quelle fagon sera constitu6 le corps du metier des mailrcs drapiers, tisserandset foulons. Tous ceux qui auront prouve par actc aulhentique qu'iis ont travaill(^ avant le 1" Janvier 1666, seront consideres comme maitres, inscrits comme tels sur les regislrcs de la communaule, preleront sermcnt, et prendront par ccrit . I'engagement de se conformcr aux statuls; il leur en sera donne acte par le.greffierde la ville, auquci ils paieront une somme de 10 sols pour tout droit. Ceux qui auraienl negligd de remplir ces formalites un mois apros la publication des staluts, ne seront plus admis comme maitres, etdevront faire 1)E CHEKDOLRG. 1 C3 iin appiviitissage comme il est Jit plus bas (ail. o]. Lcs fils ties maitrcsseronlJispensesd'exhiberaucun brevet d'appnn- ti?sage pGurvu qu'ils aienl Iravailli^ deiix ans ch'Z leurs parents ct (|ii'i!s aienl altciiU i'age c'c loans. Ilsscronlrecus s;;ns payer aucunc re'ribution (art. 7]. I-esvcuvcsdes mailrcs jciiiront des iiiemcs droits que leurs maris (art. 8). Les maitrcs et ouvriers efrangcrs qui vicndronl s'etablir ii Cherbourg, devront fournir la prcuve qu'ils elaient deja regiis mailres dans une autre localite, sinon i's scront tenus de faire deux annees d'apprentissage; lors de leur reception dans le corps, ils paieronl a la confrerie une somme de 30 sols, plus une livre de cire, el 15 sols a cliacun des niaitrcs jures, « sans aucuns I'rais de fistin ni de presents » (art. 6). Chaque mailre ne pourra prendre qu'un seul apprenti par an et il devra, sous peine de 60 sols d'amende, presenter aux maitres jures le brevet d'appremissage passe par devant nolaire (art. 9j. S'il vient a mourir avant que le temps de ses apprenlis soil acliev(^, sa veuve pourra les'gardcr chez elle; sinon elle les remellra enlrc Ics mains des jures qui scront obliges de leur procurer un autre maitrcoii ils iinironl Icur temps d'apprentissage (art. M). Apres qu'il aura aclievii ses deux annees d'apprentissage, i'aspiranl a la maitriso presenlera aux jures son brevet sur lequel aura ele apposee la quittance de son mailre constalant qu'il a Lien et duement servi pendant ce temps; alors les mailres jur^s en cliarge lui ordonneront un clief-d'ocuvre qui sera rc^u par eux el par six aulres anciens mailres. Si Ic chef-d'oeuvre esltrouvcbien fail, I'aspirant sera rocu maflre, et pretera scrment en celte qualite (ait. 10 :; m;!is avant d'etre inscrit sur lo regisfrc du corps, il paicra 30 sols a cIuKiuc mailrejure et lo sols hcliacun des sixaulres mailres pli'.s i livres pour le service de la confrerie; il paicra en 464 FABRIQl'ES DE DRAPS oulre 13 sols au greffier pour delivrance de son brevet signe . par les maires et echevins de la ville; « ct ne pourront les » mailres jurcs et ancicns pretendre recevoir ou accepter » dudil aspirant aiicun don do lestin ci present, tant avant » la reception dudit niailre qu'aprcs, el seront tenus » lesdits mailres en charge les refuser ct nieme empecher, » a peine de 48 livres parisis d'amende » (art. 12). Char|ue annee, le jour de la fete du patron du metier, tous les mailres s'asscmbleront pour proceder a I'election de Irois jures, donl un jnaitre drapier, un tisserandet unfoulon, qui seront charges de gerer les affaires de la con frerie, de faire c^lcbrer les services religieux, d'inspecter les manufac- tures, et de visiter les pieces de draperie. Ces jures preleront serment par devant les maires-6chevins; ils seront aides dans leurs fonctions par trois mallres-adjoinls qui passeront jur6s en litre I'annee suivante (art. 13). Les jures feront leurs visiles ordinaires tousles quinze jours, pour voir si les ouvriers n'emploient point des lainesde mauvaise qualitc, ou ne commeltenl point de fraude dans leur fabricalion; its visiteronl egalcment les magasins pour s'assurer qu'ils ne renferment point des laines ou des ctofTes defectueuses, auquel cas ces marchandises seraient confis- quees, et une amende infligee aux fabricanls et aux d^len- teurs. lis pourront faire ouvrir de force' par le minislere d'un huissier, les^iiagasinsdonlonlcurrefuscraitrentree(art. 14). En oulre les jures feront chaquc annee six visiles g(^nerales, tant en ville que dans les faubourgs el la banlieue, et dresse- ront un 6tat do tous les ouvriers, ouvrit;res el apprentis employes dans les ateliers, ainsi que du nombre de metiers en activil6 de fabricalion; chaquc maitre leur paiera 3 sols pour chacune de ces visiles (art. 13). Les jures ne pourront enlreprendrc de proccs: s'illcur DE CHERBOUnG. 165 survenait quelque affaire extraordinaire, ils en refereraienl a six anciens maitres et prcndraient leur avis par ccrit (art. 34). lis s'assemblcront avec leurs anciens deux fois par an pour examiner los affaires gen^ralcs, arreter leurs comptes et les conimuniqiier aux niaires et cchevins (art. 35). lis transcrironl sur un registre les statuts, d6crets etordonnances concernant les manufactures, tiendront le r61e des maitres etapprentis, et remetlront les archives en bon etat a leurs successeurs (art. 36). S'il leur arrivait de causer quelque desordre et de troubler les ouvriers dans leur travail, ils seraient interdits pendant six mois et paieraient 100 livres d'amende (art. 29). Dans le cas oil des differents s'(51everaient cntre deux maitres, on entre ccux-ci et leurs ouvriers ou apprcntis, les causes seront porlees devant I'un des (jchevins et les jures en charge et jugces au bureau du corps; et si I'une dos parlies veut appeler dece jugement devant une autre juridiction, il versera auparavant une somme de 30 livres a la caissc de la communaute, somme qui lui sera cependant rcslituee en cas d'infirmationdu premier jugement (art. 41 et16). L'art. 16 reproduit les prescriptions de I'ordonnance royale du 14 mai 10G7. Un jour par semainc, il sera ouvcrl un bureau oil toutcs les pieces de drajicrics fabriquees, soit a Cherbourg, soit dans les environs, seront apportees et soumises a Texamcn des jures assistes des eclievins. Toute pifece qui sera reconnue de bonne qualite, bien travaillee par le tisserand et par le foulon, et enfin confornic aux r^giemcnts, sera marquee du sceau royal « oil s(;ront cm- » preints d'un cote les amies do Sa Majcste, ct autour » d'icelles gravd's ces mots : Lotiis XJV, restaurateur des » manufactures ; et do I'autrc c6lo seront marquees les > armes do ladile villc de Cherbourg, o( autour ces mots : 166 FABRIQUES DE DRAPS » Fabri(]uc de Cherbourg. » Si la piece d'etuffe est recon- nue de naiivaisc qualito on mal confeclionnec, file sera immediatoment coupi'C en qinUrc morceaux. ct rcndue au propric'liiiro qui ne pourra remployer que pour son usage ot cclui do sa familie, sauf toutcfois sod rccours conlrc Ic tisserand on Ic foulon a qui la faule scrait imptilablo. Los contt'Stations qui pourraicnl s'tie\er a cetle occasion seraient reglocs seance tonanle ct sans frais par les jurcs ct Ics cchevins. Ce meme article defend expressemcnt ii tout fabri- cant de vendre aucune piece avant qu'elle n'ait ete soumise a la visile ct marquee du plomb royal, a peine de confiscation de la niarcliandise pour la f"' fois, de 100 livres d"amcnde pour la 2" fois, el on cas de recidive, sous peine d'etre degrade de son litre de mail re. « Et en ouire, defenses sont » failes a toutcs personnes, de quclque qualile et condition » qu'elles soient, de donncr retrait, preter lours noms ct » adrcsscs, pour favoriscr en ladiie \ille, faubourg ct ban- » lieue de Clierbourg, aucuncs marchandises de draperie » defendues , comme aussi cmpecher ni fairc empechcr » aucun maitre ouvrier de travailler auxdites manufactures, » a peine d'etre precede extraorditiaircmmt conlre lui, ot » de 100 livres d'amende » (ait. 1G). Les statutss'occupent cnsnite de la fabrication des etoffes, pt reglcnt le nombre des fils de clialne, la laizc ct la longueur que doivent pres^Vcr les pieces des divorses cspeces de draps. Les diaps blaucs Tins auront, suivanl I'usage, 48 porlees de 30 fi's cliacune, soil 1 4i0 fils; les drops de secondc lainc tanl blancs que gris, 45 portecs ou i3o0 fils; ceux de Iroisiemo laine, 42 porliH^s ou 1360 fds. Cluque piece doit avoir 5-3 auncs de longueur d'attachc au metier, el une auno Irois quarts de largeur, pour conserver, au retour du nioulin, une largeur d'uiic aune, y compris les lis (art. 17 a 20). DE CHERBOURG. f67 Les tisscranJs brodoront au metier, sur le clief dc hipit!ce, lenom dii fabricant auquel elle appartient, el aucun drap no pouna elre envoyo au foulon avant qu'il n'ait 61q visits par Ics juros, sous peine de 60 sols d'amende (art. 21). Diverses amondcs sent furmulees contre les tisserands qui « par negligence ou par malice » laisseraient toniber des fils {2 sols), ou feraient « de vilaines lisiercs » (b sols), on rendraienldas pit'cos non convenabiemenl parees (2 sols), ou n'auraient point bien tendu la cbaine ni frappo c^galement le chef (5 sols); enfin contre ceux qui, tout en travaillant pour un fabricant, feraient des pieces de drap pour Icur propre compte (art. 22, 23, 25, 26). Les fonlons doivcnt rcndre les draps egalement foules et couverts; il leur est formcllement interdit de se 'scrvir de cardesau lieu de chardons pour legarnissage, ct une amende de 60 sols sera infligiie a ceux cbez lesquels on trouvcrait des cardes (art. 31). lis ne pourronl mettre du droguet a fouler en meme temps que des draps fins, de peur que ceux- ci ne se trouvent deleriores par suite de la mauvaise qualittJ de la lainc ctde la teinlure du fil qui enlro dans les dro- guets. Los contrevenants a celtc prescription paieront 20 livres d'amende et leurs t'tolTcs seront confisquees (art. 32). Enfin, s'il est rcconnu que Ton a hali^ ou etirc des pieces de drap afin de les allonger, ces pieces seront c^galcmcnt con- fisquees, ct une amende de 20 livres prononcee contre le maitre drapier qui aurait donne un parcil ordrc; « et s'il se » trouve quccesoitla faulc du foulon, outre qu'il sera prive » de son foulage, il sera condamne pour la premiere fois a » 60 sols d'amende, el en cas qu'il recidive, applique au » carcan deux bcures enliores au milieu de la place, allendu » la qualile du forfail » (art. 33). Aucun tisserand nf peul quitter son maitre qu'il u'ait io8 KABnrQCES DE DftAf'S auparavant termine I'ouvrage commenc6, el par centre, un niailre ne peul renvoyer un ouvricr sans I'avoir prevenu troisjoursa I'avancc (art. 27). L'art. 28 merite d'etre cite textuellement : « Tons oinriers » qui quillerontleui" travail pour aller en debauclie paieront » 10 sols d'amende. Defenses sent faites a tons eabareliers » de leur donner a Loire pendant les jours de travail hors » les lieures de diner et de souper, a peine de lOlivres » d'amende et de tenir prison krois jours durant » (art. 28). L'article 30 n'est pas moins remarquable : « Si aucun y> manufacturier metune autre marque on applique la siennc » ii d'autre marchandise non fahriquee en ladite ville et » faubourg de Cherbourg, il sera mis au carcan pendant six » lieures avcc un ecriteau au dos, contenant la faussete par » lui commis'e, et condamne a 50 livres d'amende. » L'article 24 defend (^galemenl a lout maitre drapier de faire fabrjquer chez lui des eloffes pour le compte d'un autre, a peine de confiscation de ces eloffes et de 20 livres d'amende. Je dois encore transcrire en entier les articles suivanls relatifs a la vente des laines : « Nul ne pourra acheter aucu- » nes laines dans les abords ni avenues de ladile ville de » Cherbourg ni dans les marches, qu'apres deux lieures » apres-midi, altcndu que le marche n'ouvre qu'a midi, » pour donner lieu aux ouvriers d'acheter desdiles laines cc » qui leur sera besoin ; el defenses sonl faites aux regresliers » de fabriquer ni faire fabriquer aucunc piece ni morccau » de marchandises, a peine centre le conlrevenanl de 30 » livres d'amende et confiscation de la dite marchandise » (art. 37). — Defenses Ires expresses sent faites a loules » personnes, sous quclque pretexte que ce soil, d'exposcr » aucun fil de laine ou laine prcte a filer, en vente dans les * marches et en lous autres lieux, soil dans des maisons DP. CHEUBOfRG. 169 » pailiculiercs de la ville, fauxbourgs et banlicue de Cher- » bourg et environs d'icclle, sans en donner avis aux niaitres » jures; et on cas qu'il en soil trouve, ceux qui les aiiront, » tant rachclcur que le vendcur, seronl condamnc's en 40 » livres d'amende, et la marchandise confisquce sur cclui » aiiquel elle appartiendra » (art. 38). Les ouvriers, ainsi que Ics maitrcs que lour indigence obligerait de Iravailler a facon pour complc d'autres mailres, ne pourront s'approprier les niarchandiscs el uslcnsilcs qui lour seront confies, sous peine d'etre « punis corporeliemenl comme voleurs doinestiqucs. » Ces objels nc pourront non plus elre saisis chez eux, soit pour cause dodettes, soil pour tout autre niolif; mais les iiroprietaires aurontle droit de les rcprendre,nonobslantloulessaisiesct oppositions (art. 39). Conformeincnt aux arrets du conseil d'Etat des 4 juillct 1604 et 26 novcmbre l66o, les rnatieres, oulils et metiers servant aux manufactures, nc pourront clre saisis sur les fabricanls pour quelque dette que ce soit, si cc n'est pour le loyer des maisons qu'ils occupent; en consequence, il est defendu cxpresst'mcnt h tons collecteurs des tallies et de riuipol du sel, comme a loutes autres personnes de faire saisir sous aucunpretcxleles rnatieres elustensilcs garnissant une manufacture en aclivile defabricalion, eta tons liuissiers et sergenls d'en opcrer la saisie, sous peine d'interdiction, de 500 livres d'amende, el de tous deepens, dommages et interets (art. 40). Conime il a ete dit plus liaut, les mattres jures sontcbarges de la consultation de toutes les contraventions et dc rap[di- Cfilion des penalites. Les amendes percues en exi^culion des articles du reglement (!;laient parlagecs et distribuees comme suit : un quart pour la confrerie du metier, un quart a I'hopilal de la ville, le troisieme quart aux mailres jurt"'S, et lo dernier (juarl au denonciateur ^art. i2<. no KABRIQL'ES DE DRAPS Chaque mois, il sera tenu un conseil de police auquel assisterunt los mairos el echevins de la ville, les mailrcs juresen charge ct ISanciens maitrcs. Lesjur^sy rendront complede leiir gcrilioii et dii resultat dcs visiles qu'ils auront failes dans les aleliei's, « pour Ic tout donuer par la compa- » gnieson avis pour parvenir a pcrl'eclionnorlesditesnianu- » factures ct empeclier les abus qui s'y commeltent , el du » lout en informer Mgr de Colbert, conseiller ordinaii'e du » roi en son conseil royal clde tous sesconseils, commandeur » el grand Iresoricr de tous sos ordres, conlruleur-general » des llnances, surinlendanl de Sa Majcste ct des manufac- » lures de France » (art. i'i). Ce dernier paragraphe indiquo clairement quel interet Colbert porlait aux manufactures, et quelle influence il avail exercee sur les arrets du conseil royal de commerce. Telle est, Messieurs, I'analyse des statuls de la manufac- ture de draps de Cherbourg. Ces statuls nous monlrcnl que cette fabrication etaiten pleine activite au milieu du XVIF siecle, etqu'elle devait 6tre imporlante el occuper un nombre assez considt^rable d'aleliers. Le passage de la biographic du cure Pate, que j'ai rapport(5 en commcFicanl, nous apprend d'aiileurs que le commerce des draperies eiail alors I'unique ressource de la population ouvriere de noire ville; ct je cilerai encore, comme preuve de I'iraporlance de cette fabrique, un document in(5dil, extrail d'un manuscrit de la bibllollit'que communale, et dont je dois la comuiunication a I'obligeance de noire collegue, M. Victor Le Sens. « Valognes et Cherbourg furenl autrefois renommes pour » leurs draps qui avaienl du corps el de la finesse; il s'en » fabriquait il y a 30 ans 2,000 pieces a Cherbourg et presque » autanl a Valognes. Presenfemcnl les deux villes en four- DE CHERBOl'RG. 471 » nisscnt encore cnsemblo trois on qiiatro cuts. On fait » mainteriant a Cherbourg iinc autre elolTc do laine appcloe » Mclinr/e, cl qui vaut tlopuis 4 livi'cs jiisqu'ii 4 livrcs 13 » sols raiine. Les trois on qualres cents iiic-ccs qui soi'lcnt » annuelicment de ces fabriqncs, sont consonimccs siir les » lieu\. II s'y fabriquo encore qiiclqncs Idileiies, comme » conlils e!, monchoirs, dont le piincipal debouclie consiste » dans la conlrcbande qui s'en I'ailaux tics de Jersey, Guer- » nescy et Aurigny. — Cherbourg reccvait autrefois de ces » lies des hiines qui passaicnt par conlreliande; c;r cllcs » jouissaienl a droit de licence do cent miilicrs do laine que » la metropolc leur acrordait; et cetle favenr dimnail lieu a » I'exportaticn fraiululeusc du double cl nu^me dii triiile. » Cede laine etrarigere, ajoutee a la nnlrc en quantilect en » qnalite, se repandait a diverses fabriqncs dc la Basse- » Norniandie. — Depuis le li-aile de commerce de 1782 , les » Anglais ont supprimj cc di'oit de licence, et noussommcs » privi's do cellc rossdurce. » Colic note, qui parait avoir etc ecrite pcu dc temps apres la date dc 1782, indiquc deja acette epoquc la decadence de la manufacture dc Cherbourg, qui finil par disparaitre com- pletementau commencement decc siecle, cl dont maintcnant il resic a peine un vague souvenir. II cxisle, je crois, a Saint-Picri'e, aux Pieux cl a Bricquc- bec, un petit nombre de lisserantls qui fabriijncnt encore des draps Ires grossiers pour la consommalion locale; mais aux en-iirons uiemes de Cherbourg, on no Ironve plus d'auire trace de cette Industrie qu'un soul moulin a fouion situoa Tourluville, el qui est emphivc uniquemcnt an fonloge des droguets que font tisser les habitants de nos campagnes. NOTICE SUR L'ARGHIPEL D£ MENDAM OU DES MARQUISES, 1853 — 1854, PAR HI. Eoei.esta:v JARDIJV , Aide-Commissaire de !a Marine, Uembre de plusieurs Socidt^s savantes. Depuisle commencement du siecle, les voyages sur mer dans toiites les parlies du globe sont devenus lellement fre- quents, que les points les plus eloign^s ont d6ja fail I'objet de nombreux volumes dans lesquels sont relates avec les moindres circonstances, les moeurs et les costumes des peuplades sauvages. 174 NOTICK J'cssaierai ccponJant d'ajoiiter qnclque cliose a ce qui a di-ja elt^ ocril sur I'arcliipd de Mendana ou dcs Marquises, elen [wrticulier sur I'ilc de Nouka-IIiva, la [jrincipole da groupe. Aya:it lialjite ccltc i!o pendant plus de quinze niois, j'ui pu, grace a la facilito des relations avcc les indigenes, penetrer souvent dans leui's cases, dormir sous leur toit, prendre part a leur repas, assislcr a leurs fetes, a leurs ceremonies publiquos, nridentificr nourainsi dire avec eux, Bien que le contact des Europeens ait modifie un pen dans la bale de Taio-llae, occupee par les Fi'ancais, les habitudes de ces indigenes, ccpcndant il y a tri)p pcu de tcn)ps que nuus nous trouvons au milieu d'eux, pour qu'ils aient pu les abandonner enlierement. Je n'enlreprendrai pas de faire Thisloirc de Tarchipel des Marquises, si toutefois on pout appeler liistoire d'un pays la reunion de quelqucs fails isoles a grande distance les unsdes autres, el rapportes par des voyageurs plus ou moins credules, plus ou moins passionnes. Qu'il me suflise de dke que cet arcliipel, decouvert en -1595, par Mindana, naviga- teur cspagnol, envoyc^ a la recherche des lies Salomon, fut baptise par lui du nom de Las MarquJ'sas de Mendoce, en I'honneur du marquis de Mendoce, vice roi du Perou, gou- verneur general des possessions espagnoles sur la cole orientale d'Amerique. (I) Les iles furent ensuile reconnucs par Cook en 1774, visitees en 1791 par Ingraham, americain de Boston, en 1792, par Hergesl, qui faisait parlie de la division de Vaucouvert, cinq ans aprtis, par un navire ameri- cain charge de missionnaire; en 1804, par le capitaine russe Krusenstern; en 1800, par Marchand; en 1813, par David (1) Voir la note n" i, a la fin de la notice. SIR l'archipei, he me.nda.na. 175 Porter, qui fit la guerre aux naturcls ct s'elablit dans la baie que nous occupons dfpuis 1843. Quant a I'liistoiie interieuro du pays, elle se resume en guerres de Iribus a Iribus, d'ile a ile, et cc qu'on raconte est tellement pcu interessant qu'il ne fait point regrctter ce qu'on ne connait pas. Lcs lies de Tarcliipel soul, en commcr.cant par le Nord, Tile Masse, I'lle Ghana), Nouka-IIiva (on ecrit aussi Nukuhiva etNuhiva)etqui s'appeile t^galomenl ileMarchand, Uapouou lie Baud, Roa-Huga ou ile du Solide, O-Ilitao ou ile Crislina, dans laquelle se trouve la baie de Vailaliu, 0-Hivaoa ou ile Dominique, Onateya ou ile San Pedro, enfin 0-Hitaoya ou lie Madelaine. Quelques ilots peu distant de ces iics sent peu ou point liabiles; ils servent de relraite aux nombreux oiseaux de mer qu'on rencontre dans ces parages de I'Oc^an Pacifique. II s'en faut ^galemcnt de beaucoup que loutes les parties dcs lies ci-dessus indiquees soient habitues par les indigenes; la constitution pliysiijuedu pays s'y oppose d'une maniere invincible, car elles sont toutes com[)Osees de liautcs monta- gnes et de profondes vallecs, et il est rare de Irouver une surface unie d'un kilometre cane. Ailleurs ce sont d'enormos blocs basaltiqucs qui s'elevent perpendiculairement, ct dont le sommet se perd dans les nuagcs, ce sont des quartiers dc rocliers entasses lcs uns sur les autrcs ct prosentant le chaos le plus complet. (1) Les flancs de ces monlagnes sont quel- quefois arides et sans aucune trace de verdure, quclquefois (1) Nous parlerons de la geologie et de la mineralogie des Marquises dans un article .'special consacr^ a Ihisloire nalurclle de eel arcbipoi. 176 -NOTICE converts d'une brillanle vegelalion. C'est au pied des hauls cocotiers, el a I'ombre des arbres a pain que s'elevent les cases des nalurels, disseminees au gvd du possesseur, dans toute la vallee ou sur le versant de la montagne. C'est ce qui fait qu'il n'y a pas a proprement dire de villages, et que les localites se distinguent entre elles par le nom des vallees. En 1843, la France avail etabli a Vaitahu, dans Tile de 0-Hitao ou Crislina , un poste sous la dependance dnquel elait celui de Taio-Hae dans I'ile de Nouka-Hiva, Vaitahu a 616 abandonne a cause de son mauvais mouillage, et les nalurels, dontquelques-unsavaientembrass61ecalholicisme, ont sans doute oublie les lecons des missionnaires, qui ont quilts celle place pour Taio-Hae, un an environ apres. I'abandon par les Francais. En meme temps qu'on s'elablissait a Vaitahu, on jetait aussi a Taio-Hae les fondemenls d'une nouvelle colonie, qui n'eut guere plus d'existence que la pr6c6dente; le 17 d6eem- bre 1849, la Sirene emportait le pavilion frangais de I'ile de Nouka-Hiva. On reviut cependant a Taio-Hae, eton s'y eta- blitdenouveau le28 mai1830;en 18o3,on fit de nombreux travaux, on eleva un penilencier, on jeta les fondemenls d'une vasleeglise (1), des routes furenl ouverles, et les eta- blissements deja existants furent repares, maisde nouvelles considerations politiques et surtout la prise de possession de la Nouvelle-Caledonie vinrent encore modifier les vues du gouvernement sur Nouka-Hiva. La corvette YAveniure emporta en Caledonie tout ce qui ctail susceptible d'etre transports, et lorsque nous revlnmes sur VArtemise, au commencement de 1855, nous eumes la douleur de voir (\) Voir le Phare de la Manche du 23 juillet 1851. sift L'AftCHII'KI. [)E MENnVNA. HT ()ue presqiie Ions les travaux qui avaient6te executes pendant les seize mois de noire sejour dans la baie, n'cxislaient pour ainsi dire plus, les routes etaient abandonnees, et couverles en partie de broussailles, le silence regnait la ou i'on voyait line activity incessante, et partout la nature reprcnait ses droits un moment usurpes. Nous n'avons maintenant (en ]S'6^) aux Marquises qu'un seul poste, celui de Taio-IIae, et Ton comptea peine dans les aulres iles quelques europecns, dont le commerce so borne a la vente de vivres frais aux navires baleiniers qui vont s'y ravitailler. II est inutile d'cntamcr une discussion sur la maniere dont se sont peuplees les Marquises, ainsi que les archipels voi- sins; des volumes enticrs seraicnt pcniblemcnt elabores pour rcproduirc les preuves donnees par les savants, qui veiilent que les habitants des arcliipels dc la Polynesie soient venrs d'Amcrique, et par ceux qui souliennenl le conlraire. II vaut niieux rapporter des faits dont on peut rcconnaitrc I'exacti- lude, sans se lancer dans le vasle champ des hypotheses, qui ne donnent aucun rcsuUat. Le naturel des Marquises, de mOme que celui des iles de la Sociele, marchc en lete de sa race, qui parait 6lre la mon- golique (1). Nous ne pouvons mieux fairc que de ciler tex- tuellement le savant naturaliste Forster, lorsqu'il visita ccs iles a la fin du siecle dernier. « Les habitants des Marquises, dit-il, sont les plus beaux » hommes du grand Ocean, apres ceux des iles de la Societe. » En general leur teint est plus hazane, parce qu'ils vivent » sous les 9° 57' suil, par consequent pluspresde la ligne. » lis sont d'aiileurs plus accoutiinies a ne point se couvrir .1} Elt^ments de zoologie par M. .Milne Edwards. 4S 478 NOTICE » le corps : on voit cependant parmi eux des individus un » pen plus blancs; les femmes, qui sont communenient cou- » vertes, sont prcsque aussi blanches que celles des ilcs dc » la Socicle. En general les hommes sont forts, nerveux et » bien fails, niais aucun n'est aussi charn'u que les Ta'itiens. » Cctte difference provient, je crois, de ce qu'ils ont plus » d'activite. Comme la plupart vivent sur les flancs et au » sommet des hautes montagnes ou leu rs habitations res- » semblent a des repaires d'aigles places sur les cimes inac- » cessibles des rochers, lis doivent avoir naturellcment le » corps grelc et mince, puisqu'ils gravissent souvent ces » montagnes elev(5es et qu'ils rcspirent un air fortvif, dans » des cabanes presque loujours cnvcloppees dc nuages. lis, » ont la barbe noire et de beaux cheveux. Les femmes et les » jeunes gens ont des trails agr6ableset reguliers, etle visage » ovale, mais les hommes fails tatouent leur corps et leur » visage en bandes, en cercles, en ligncs, en echiquier, et » ils serrent ces figures si pres les unes des autres que, » malgre leur regularite, elles les rendent laids. Les jeunes » gens sont pour I'ordinaire tres beaux; ils serviraient d'ex- » cellents modeles pour un Ganym6de. La physionomie des » femmes est douce et intt^ressanie, lout leur corps est de la » symetrie la plus parfaite, les extremites des doigts, des » epaules, el les contours de toutesles formes sont admira- » bles. Leur laille c^gale la taille moyenne des hommes. II y » en a tres pen et peut-elre n'y en a-l-il aucune qu'on puisse » appeler petite. Ces insulaires nous ontparu affables, civils. » et hospitallers. lis ont bcaucoup de legerete qui forme le » caractfere general des nations placecs sous le tropique, » mais noire relache parmi eux ayanlete lrt!S courte, nous » nc pouvons donner des details plus parliculiers (1). » (]) Observalions faites pendant un voynge autour lUi raonde, elc- srn l'akchipkl he mkm)a>a. I7ii tette description de Forster, bien qu'ecrite il y a pros do quatrc-vingls ans, csJ encore (.res cxacle et dopcint fort bien I'etat physique et moral do la population dcs Marquises. II est inutile d'ajouter que la, comnie partout, i! so Irouve dcs filres dilTormcs, mais ils sont on moins grand nombre que parmi les nations civilisees. Cela tient sans doutc a cc que Ic contact des Europoens ne leur a pas encore communique toutcs ces maladies, tristc apanage d'unc longue civilisation, ct qu'ils ne tarderont pas a connaitre, a cause de leur pro- pension effrenec an plaisir et a la volupte. L'indcpendance est le propre du Noukaliivien ; il n'a ni lois, ni ri^glements, ni cet appareil fasliieux quecbez nous on decore du beau nom de justice. Si un naturel derobe a son voisin quclques regimes de bananes, quolques fruits do I'arbre a pain, il est assez puni par la hontedont il se couvrc en passant pour voleur. Lc Tapou soul, dont nous parlcrons plus loin, leur impose quelques obligations morales, ct nul d'entre ceux qui ne sont pas encore convertis n'oscrait en sccouer le joug, ceux mt'me qui ont abjure Icurs ancicnncs croyances ne s'en afiranchisscnt qu'avcc beaucoupdc repu- gnance, tantfon consueiudo valet. Los cases n'ont souvent pas de porte, on pent y cnlrer a toute heure du jouret de la nuit, et la plupart du tcnips, il sutru dc soulever un nu'-chant lambeau d'etoffc pour y avoir acccs. Si vous n'etes pas connu, le kanac (1) en vous voyant enirer, vous dira bonjour, sans se lever de dcssussa natte, si an conlraire vous lc connaissez, dn plus loin qu'il vous (1) Le mot Kanac vienl du sandwichois Kanaka, qui signiDe liomme, penple; ce mot est employe par les F-'uropeeos pour designer I'indigene dcs arcliipel dcs Marquises, des Pauinolu. dc la Sociele, des lies SaudwicJi, etc. 180 NOTICE verra venir, il vous invitera a entrer, iv vous reposer, et ira vous preparer un coco fraichement cueilli. Les indigenes sont aussi libres entre eux que le sont les strangers a leuregard. lis entreronl dans la premiere case qu'ils trouveront sur leur passage, d(5poseront leur fardeau, fumeront leur pipe, el apres s'etre reposes, ils continueront leur route sans plus de c^remonie. Leurs travaux se bornent a bien pcu de chose, et cliaque famille pourvoit a ses besoins. Les bommeselevent la case, les femmes tressent les feuilles de cocotier on enfilent a une longue branche les feuilles de I'arbre a pain qui doivent la couvrir, elles travaillent I'ecorced'arbrcdeslinee aleurservir de v6tement, et lout le monde prcnd part a la recolte des fruits a pain. Si les kanacs dl^venl des pores, ce n'est que pour les fetes, ils n'en tuent jamais pour leur usage parlicu- lier, quoiqu'ils en mangent voloniicrs. Cci animaux leur demandent peu de soin, ils trouvent une nourriture abon- dante parmi les goyaviers qui sont en grande quantite dans rile ; c'est a peu prSs la seule ressource des bailments qui vienncnt seravitailleraux Marquises. II serait cependant trfes facile d'avoir des Iroupeaux de boeufsetde moulons, et le paturagc ne leur manquerait pas. Le gouvernement en possedait un a Vailahu, il a 6te transports en partie a Taili, lors de I'abandon de ce posle. Ce qui reste, et qu'on pent 6valucr a cent letes environ, est pour ainsi dire sauvage. Depuis que nous sommes 6tablis a Nouka-IIiva, le systeme de centralisation frangais a etc essaye dans celte He; avanl notre arrivee, chaque bale, chaque valine , cbaque groupe d'habitants pour ainsi dire, avail son clief plus nominal que r6el, dont rinflucnce el I'aulorite ne se faisaienl senlir qu'en temps de guerre, systeme qui cxislc encore dans les aulres Iks. L« France, en choisissanl doiinitivcment la bale de sua l'archipel dk me^dana. 18f Taio-IIae coinnie point principal de ses possessions aux Marquises, a fait egalement choix, pour roi de I'ile, du chef d'une des valiees dontl'intelligencea paru sup6rieure a celle des autres chefs. A I'egard de la plupart des chefs des aulres bales et vallte du centre, ils peuvent etre compares it nos rois de France au X'' siecle. Te Moana, roi de Nouka-Hiva, est age d'environ trenle ans. U a eu de frequentes relations avec les Europeens et les Amdricains des Etats-Unis. II a visit6 plusieurs archipels de rOct^an Pacifique, et est meme alle jusqu'en Angleterre sur un navirehaleinicr. Ilparletoujoursavecplaisirdece voyage, des nombrcuses choses qu'il a vues, nouvelles pour lui, et qu'il 6tait et est encore loin de comprendre, machines pour la fabrication des etofTes, chemins de fer, bateaux a vapeur, gaz, imprimerie, etc. Ce qui I'a frapp6 le plus dans Londres, c'est la difference enorme dans la maniere de vivre des habi- tants; c'est de voir les uns chaudement habilles, bicn log^s, bien nourris, les autres, au contraire, a peine vetus de me- chants haillons, habitant des repaires noirs et infects, et lendant timidement la main pour recevoirun morceau de pain ou une piece dc monnaie. On congoit ais(5mcnt son ^tonnement, car la mendicite est chose inconnue dans son tie. Te Moana a de grandes proprietes, mais il est loin de les faire valoir toutos a son profit, ou mt'mo d'en tirer quelque k"!nefice. II en fait concession aux autres kanacs, sansaucunc redcvancc fixe. Seulement s'il a besoin dc quclques-uns des produils de ses terrcs, coclions, bananes ou fruits a pain, il les deniandent et on les lui apportc. La tribu des Happas vcnaitjadis en masse chargee de provisions et les ddposait dans sa case. Cetlecoulume parait maintcnant supprimec, ou du moins jc nc fai pas vue mcttrc en pratique. 18-2 NOTICE Vaokt'lui, sa feinine, agee d'en^i^on vingt-sepl ans.esf commcTo Moana, de race royalo. Elleest de beaiicoup siipc- ricorc aux autrcs fcmmes indigenes par rintelligen^e dont elle a donno dcs preiivcs lors des discussions de son mari avec raiitoiite francaise. Elle a beaucoiip d'ai)titude aux travaux'de remme, sail coudre et repasserle linge, et si elle jiouvait sc troiiver en contact journalier avoc uneeuropcenne, olle ne tardcrait pas aacquerir une foule de ces pelits talents d'inlL^riour de menage qui ne s'apprennent guere qu'en les voyant extcuter. Neanrnoins, on trouve chez elle cettc indo- lence qui cacacterise si eminemment les pouples sauvages de la z6ne loriide, ct ce laisser-aller qui marque I'etat primitif de ces nations. Te Moann et Vat'kehu out ete baptises avec leu rs enfants et un grand nombre d'liabitantsdeTaio-Hae, le 29 juin 1853^ ct ont completement renonce a leurs superstitions religieuses; Te Moana a adopte le costume d'un ofUcier de marine, Vaekehu poite la grande robe sans ceinlu;!', mais dans leur manierede vivre, ni I'un ni Tautre n'ont encore rien cbange ct ne cbangerontprobablemenl pas. Lc systeme de gouvernement que notre presence a Nouka- Iliva a modifio, comme on vient de le voir, existe comi)lete- nient dans les autres ilcs; mais si en temps de paix, les chefs des vallees ne se distinguent des aulres liabitants que parce qu'ils possedent un plus grand nombre d'arbres a pain, de cochons et d'ornemenls de fetes; en ten^ps de guerre, au contraire, leur autorite est tres grande. Le chef pent reclamer des victimcs, s'il lejuge necessaireau succes de I'entrepriso, reunit les hommes valides de sa circonscription, s'entend avec la Iribu dont il est I'ami et I'allie, et donne des ordrcs pour I'agression ou pour la d(5fense. Quand la royauteexislait aux iles de Tapou el a Vaitahti, si le roi voulait faire hi SLR L'ARCrilPEL DK MENDANA. 183 guerre i\ une ile voisinc, il r^unissait les chefs des baies et des vallees, leur expliqiiait les raisons qui le d^terminaieiit a la faire, prenail avec eux les dispositions convenables, et envoyait dans le pays un messager, ke'e, charge d'annoncer au pcuple les rosolulions du conseil; chacun alors s'armait else reunissaitau lieu du rendez-vous. Le droit de succession, soitcommo roi, soil comine chef, est ainsi regie : aprSs le d^ct-s du pere rh(5rilage passe au fils ain{5, ou, a dcfaul, a la fiUe ainSe. Le chef peut egale- nient, a d^faut d'h^ritier, adopter un enfant qui estconsiderc conime Ic fils propre ct I'heritier presoinptif. Les naturels appellent cette adoption ikoa. Ce mode d'adoption est tres usite aux Marquises, non seulement parmi les chefs, niais encore parmi les autres habitants ; souvcnl un kanac, bien qu'ayant des enfants, en adopte d'autres, menic avant qu'ils soicnt n(5s. Ces enfants viennent dans la case, y sont nourris, soignes et mis sur le pied de la plus parfaite egalite avec les autres. La mere veritable se separe de son nouveau-ne avec la plus grande facilite. Cependant elle va le voir de temps en temps, mais elle no s'occupe plus de lui. Get usage bizarre et si difierend de nos mocurs fait qu'il est Ires difficile dedebrouillcr la gi'nealogie des families et la parenle veri- table de la parcntc d'adoi)tion, et Ton ne doit plus s'ctonner de la multitude de parents que pout avoir u[i kanac, surtout quand il est Akaiki, c'cst-ii-dire chef. L'usage subsiste encore, pour un (Stranger, de se choisir parmi les naturels un ami qu'ils appellent Tayo, nom qui vientsans doutcdos iles de la Sociele, lequel vous fait des cadeaux ct vous revolt clicz lui, a charge de revanche. 11 prend voire nom et vous prencz Ic sien. Pendant mon sejour a Nouka-IIiva, mon tayo appele Mioi, qui Olait de la tribu des Ilappas, nVMail jilus connu que sous le nom dc commis- 184 ^0T1CE saire dcs liappas; une redingote aboutons d'uQiforme queje lui avals donnee ne conlribua pas peu a lui faire donner ce litre. Dans la c.\.se do votre ami indien vous etes comme chez voiis, et voiis pouvez prendre la meilleure place, si cela vous convient, sans'qu'ilen soil nullement offense; si vous voyagez avec lui, il portera votre leger bagage et vous servira de prc^lereiice aux autres; il vous defendrait au besoin en cas d'agression, ce qui n'arrive guere, surtout a Nouka-Iliva, car les naturels ont pour les blancs un respect dont ccux-ci abusent quclqucfois. Le donicstique des chefs kanacs se compose d'hommes et de femmes, qui s'engagent facilement a leur service pour la nourriture et Ic vetement qu'ils reyoiventen compensation; si ces scr\ileurs ne s'arrangant pas avec leur maitre, qui vit avec eux et de la meme manicre qu'eux, ils lequittent sans plus de facon qu'ils sont venus chez lui. II n'y a pas, a proprement parler, de pauvrcs chez ces sau- vages. Tous les habitants participenl aux fruits que la nature repand dans ces pays en si grande abondance. La vieillesse est (^galemcnl respectee etsecourue; un vieillard, un infirme se trouve-t-il reduit a n'avoir plus de famille, il n'en sera pas pour cela abandonne; il sera recu dans telle case qu'il voudra habitcr, sur d'y trouver accueil, nourriture et place pour dormir. Corabien nous difforons de ces peuplades que nous appe- Ions sauvagcs, et Ton serail tente de se demander Icqucl est le plus barbare, de celui qui ne voit dans son semblable qu'un autre lui-meme, ou de celui qui fermeimpitoyablement sa porte a la vieillesse et a la pauvrete. Les idtiescosmogoniques de ces peuples sont tres peu eten- dues. lis supposenl qu'un hommc, appcloMaui, fitsorlirdes SUR l'ahchihel de mk.ndana. f8.i eaux la lerre lelle qu'elle exisle maintenant. Ilscroient que la teinte bleue de ratinospliere est une matiere solide el que le ciel louche a I'liorizon, c'est ce qui leur fit prendre pour des Dieux les etrangers qui arriverenl les premiers dans leurs lies. lis croient que le soleil tourne autour de la lerre, el il sera diCficilede parvenira leur persuader le contraire, si toutefois on le veutessayer. Quoiqu'il en soil, les vieillards racontent qu'autrefois les nalurcls desirant conserver le soleil plus longlemps sur I'liorizon , parce qu'il n'apparaissait que fori lard, el disparaissail de bonne heure derriere les nion- tagnes, essayerent do rallacher snr le sommet dc I'une d'elles, niais conime ils s'elaient servis de cordcs failes avec des ecorces d'arbres, la chaleur de I'aslre ne tarda pas a les consumer. lis se servirenl alors de clieveux et cruront elre parvenus a rempeclier de disparaitre Irop vile. Les indigenes dc Nouka-Hiva conscrvcnl encore cerlaines tradilions qui ressemblent assez acelles des peuples primilifs, et Ton croirait entendre quelques recils des sagas mytliolo- giques des anciens scandinaves. Aux Naikis, Iribus de I'inle- rieurde Tile, on monlre unepierrc surlaquelle une fcnime appelee Ilakamoelupua divisa le ciel en plusieurs parlies qu'elle distribua aux differentes Iribus de I'ile. Ainsi la tribu desTeis, dans la bale de Taio-llae eut en partage un ciel calmc et sans vent; la tribu des Ilappas, un ciel convert avec de grosse pluieen abondance; les habilanlsde Taioa, baie a I'ouest de celle de Taio-flae, furenl condamnes a un ciel toujours pluvieux; lesTaipis-Moana, dans la baie du Contro- leur, a Test, eurent un ciel gris et pomele; les Taipis-Vai, dans la niCme baie, ne virent le bleu du ciel que par les rares inlervalles d'un nuage general el epais; dans le nord de rile, les Puas, les Alilokas n'eurent que des nuagcs; au centre, les Naikis, un temps continucUemcnl brumeux. I8G NOTICE Cetle repartition ficlive des differentselats de ralmosphere sur I'ile de Nouka-Hiva, correspond elTeclivement a ce qui existe, car en general le temps est nuageux, ct il pieut sou- vent dans certaines tribus qui habitent Ics montagnes ou les gorges profondes des vallees. Les babitanls des Marquises n'ont pas a proprcment diro de religion, a moins qu'on ne veuille decorer de ce tilre I'espfice de culte qu'ils rendcnt a leurs idoles de pierre ou de bois. lis admcttent plusieurs dieux, Etua, qui sont le plus souvent d'anciens chefs deifies apres leur mort. Chaque vallee a son dieu, n'en rcconnait pas de superieur, bien que tous ne soienl pas egalcmont puissants; seulcment le dieu des etrangers est plus grand que les leurs. II est du reste Irfes difficile d'expliquer la niylhologic des naturels des Marquises, point sur lequcl ils sont loin d'etre d'accord, ce qui du reste les interesse fort pen. lis ont I'idee du bien et du mal, recompense ou puni dans une autre vie; mais ils n'interpreient pas cetle idee comme nous pouvons le faive; ainsi les plaisirs des sens, la debau- che, I'ivrognerie, la paresse ne sont jamais consideres chez cuxcomme mal. Qnant a leur etat aprcs leur mort, ils ne savcnt point le preciser; ils pensent cependant que tout ne' ptVit point avec le corps, et que I'amc, kuhane, erre derriere les cases, si Ton ne rend an corps les devoirs funebres; mais ils n'ont la dessus que des idees extrememenl vagues et in- decises, et si on lespresse un pen, ils repondent : Je ne sais pas. Les habitants des Marquises ont des grands pretres el des grandes pretresses (ce sont le plus souvent des femmes), qui parviennent a cette dignite sans beaucoup de difficult^. Quand une place est vacanle, par suite de d6c6s ou aulre- ment, il suffil a un homme ou a une femme de S9 declarer SI;H LAHCnil'KL DK MExNDA.NA. 187 inspiree par le (lieu, de faire quelqiies momeries, et surtout de propager le bruit qu'il succ^de au defunt, pour que les kanacs le croient et radnietlent. lis ne dcuiandcnt pas de plus grandes formalites pour reconnailrc la superiorite el le pouvoir du nouvel intrus. L'aulorite d'unc prelrcsse uncfois Stabile, elle peut aloi-s cxercer son ministcrc, qui consiste a faire descendre le dieu au nioycn d'invocations. Lorsqu'elle se sent inspiree, c'est le soir principaleinent, elle fait elein- dre les luniit-res, elle parle ensuile au milieu des assislanls, ]iour le dicu qui I'anime. Elle decide de la paix ou de la guerre, demarule des viclimcs, cxpulse de la bale lei ou lei individu, en un mot elle prononce, et ses decisions sont irrevocables. Les kanacs n'ont point de feles regidcs el arrivant a des epoques fixes. Suivanl les circonslances, ils decident qu'ils donneront une fete a telle epoquc, invilent longtemps a I'avance leslribus voisines el s'occupenl a reunir les provi- sions necessaircs pour faire la fete, cochons, bananes, fruits i pain, racines de kawa (I). II y a fete pour commcncer la guerre, fete pour cdlebrer la victoire, fete pour se rt'jouir du mariage, de la naissance, du premier lalouage du flis d'un chef, llsont des espcces d'aulels en plein air, qui consistent en quelques figures laides et grimacanles, peinlcs dc diverses couleurs et entouri'es de pieces d'elolles d'(5corce d'arbre. lis out aussi des cases sacr^es oil les femmes n'enlrent jamais; dans ces cases se trouvent des troncs de bois, tiki, qui representenl d'unc manierc grossiere un ^tre liumain. Quelques uns servcnl dc supports a la toilure, comme des cariatides, d'autres sont appcndus a la muraille. II y a de {1) Racine dit riper nielhysticum, 1.. 188 :soriCE ces idoles qui sont sculptees dans une pierre dure ct noir&tre; on en ernporte dans les pirogues pour rendre la pOche favorable. II s'en Irouve aussi dans les morais, taill6es dans une pierre rougeatre el grossiere, quelquefois en pied , quelquefois le buste seul dt^grossi, quelquefois enfln la figure seule indiquee grossierement par quelques lignes. II existe ii Taio-Hae, dans un mora'i desert, une de ces idoles fort bien conservee quoique couverte de mousse; elle est renvers^e de son piedestal et ne tardera pas a elre entiijremftnt cacliee par les broussailles. Dans un autre niorai, conslruit a I'ombre de gigantesques tamanus (1), a nii-cbemin de la valine d'Avao, qui mene aux Naikis, j'ai trouve des Ifiles sculptees, des ossements, des debris decercueils, de tamtams, le tout convert de lichens et de mousses developpes par I'humidit^ de ces lieux oil le soleil ne penetre jamais. Nous avons parle de morais, ce sont des lieux sacres, places ordinairement dans des endroits ^cartes et qui servent de lieu de sepulture. Un enclos ombrage est entoure d'une palissade dont quelques poteaux repr^sentent des figures humaines. Au milieu s'eleve un tertre form6 par des blocs de pierre superposes; au centre une case ou plut6t un toil supports par des piliers couvre les cercueils, papaku, espfeces de pirogues (^levees sur des traverses au dessus du sol (2^),^ et entouri^s de chevelures, d'armes et d'autres richesses de ce genre ayant appartenu au defunt. Les morais sont nombreux dans certaines valines et sont destines a la masse du peuple. Les chefs font batir des cases (1) Calophyllum inophyllum, L. (2) L'usage d'elever les cercueils au-dessus du sol existait chez quelques peuples de I'antiquite. Elien et Appollonius de Rhodes rapportent que les habitants de la Colcbide en agissaient ainsi. SIR l'arcmipei, dk me.ndana. ^89 qui servent tie cavcaux a Icurs families et sont sacrees. Lc cercueil une fois d(''posL', Ics parents n'ont point termini leurs devoirs covers le dcfunt, (upapau; ilslui portent dans des tasses de coco suspendues a la hauteur du cercueil, de la popoi(l), du pore cuit et d'autres aliments qui sont d^vores par les rats. Les insulaires des Marquises font quelquefuis des ffites conim(5moratives en I'lionneur des guorriers decides dans les combats ou des autres morts de distinction. J'ai asssist(5 a une de cos fetes chez les Happas, tribu voisine de la bale de Taio-Hae. Sur un des cdtcs de la Koika, ou place publique de cetle tribu s'clfeve une grande case dans laquellc on grimpe au moyen d'une espece d'echelle de dix a douze pieds. Dans celle case se trouvait une trentaine de kanacs, les uns cou- ches, les autres assis, ceux-ci mangeant, ceux-la dormant, d'autres fumanl, et tous ornes plus ou moins de houppes de cheveux a la ceinture, aux poignets et aux jambes, de pana- ches de plumes et d'autres ornenienls. Au centre de la case, le long de la parol, ctaient suspendus sur un baton, des fusils, des lances, et d'autres armes de guerre, avec des pieces d'etoffe disposees d'une maniere sp(5ciale. Au pied de la lerrasse qui existe toujours devant chaque case, ct que les kanacs appellent pae'-pae, se trou- vaient des pores amencs la pour etre sacrifiC's, cuits et manges par les assistants. La fete du reste consistait comme tonles les fetes kanaques, quel que soit le motif qui les provoque, abattre du tamtam, chanter des ulaula (2), frapper dans ses mains ct sur ses (1) Aliment dont on verra plus loin la nature. (2) Chants de guerre, religieux ou licencieux. 19f> NOTICE bras, manger dii pore, des bananes ct de la popoi, ct s'enivrer dc kawa. C'est uuc occasion pour les femmes de mcllre leurs tapas nouvellpment confectionnecs, et pour tout le. monde, de se rcvc'lir des ornemeuts de fete. Non loin de la case, a Tangle de la place ou koika, s'eteve un massif de maconnerie en forme de cube, dans lequel elaient enfonces deux poteaux converts de mousse et a moitie pourris. C'est la, me dit-on, qu'on attachait le patient, lorsqu'on irnniolait des victimes luimaines, qu'on le sacrifiait et qu'on le decoupait pour le distribucr ensuite a lous les assistants. L'on pea aflirmer, sans crainte de se tromper, que I'usage des sacrifices bumains a a pen pres disparu de Nouka-Hiva, et que les habitants ne reviendront pas a cette coutume barbare, tant que lesFrancais resideront dans I'lle (1). Mais il n'en est pas de meme dans les iles \oisines, et il y a peu de temps encore, a Roa-Huga, on chercbait une victime pour 6tre offerte au dieu, afin de rendrc la sante au chef qui etait dangcreusement malade. En admellant que les indi- genes ne comprennent que tres imparfaitemenl la religion (1) On n'ignore pas qu'avant la venue de Jesus-Christ, les peuples" meme les plus civilises iminolaient des victimes humaines a leurs divinites. La Grece avail son Bacchus Omestes, d'un mot grec gui signifie cruel, qui se nourril de chair humaine; L'ltalieavait Jupiter Latialis, laGaule, son dieu Teutales; Carthage, la Grande-Bretagne, des divinites non nioinscruelles. Cette coutume barbarese prolongea plQsieurs siecles apres. Ciceron, Pline, Porphyre, Laclance, Saint- Clement d'AIexandrie et d'autres auteurs non nioins dignes de foi en rapporlent des exemplcs qu'on ne peul revoquer en doute. Juvenal, dans sa satire XV^ dit posilivement quil est permis de manger de la chair humaine, cCarnibus humanis vesci licet* et Virgile, en parlant des Cyclopes : « Visccribus miserorum et sanguine veseitur alro. ♦ E. liv. Ilf, v. C22. SLR i.'archipkl ve mcndana. 191 calliolique, on doit cependant regarder coinme un bienfait de la civilisation, la presence des missionnaires qui arretent ces barbaries et rendent les habitants plus susceptibles d'entrer en relations avec les strangers qui abordcnt dans leurs bales. La victime a quelquefois un moyen do se sauver, c'est de declarer qu'elle porte le nom d'un chef tapou. Cette simple declaration suffit pour arreter le sacrifice, tant est grand le respect que les kanacs portent a la coutume du Tapou, res- pect qui tienlde la crainteplulut que de tout autre sentiment. Nous en parlerons plus loin. La victime choisie est gardee dans une case particuliere, jusqu'au jour de la C(5r6monie. La elle est nourrie largement de popoi, et I'objet d'une foule d'observances religieuses. Avant le sacrifice, on introduit dans la bouche du patient un large hamecon rccourbe en forme de faucille, fait d'e- caille de tortuc et garni de barbe blanche. On Ic conduit autour de I'autcl, ensuile on I'assomme a coup de casse-lfite, huhic, 11 tombe, et son sang n'a pas eu le temps de figer dans ses veines, qu'il est 6tendu sur des feuilles, au fond du four kanac, et recouvert de pierres rougies au feu, ainsi qu'on le fait pour faire cuire les pores. II s'en faut de beaucoup que les sauvages des Marquises soicnt aussi cruels que I'etaient les Indiens de I'Amerique du Nord; on m'a assur*^ que Ton met la victime a morten la frappant par derriere, afin de lui cviter la vue du coup qui doit terminer ses jours. Une fois cuit, le malheureux est dt'pece et divise en autant de morceaux qu'il y a d'assistants, car il faut que chaque kanac qui participe a la fete, prenne sa partde cet horrible itiH. Les mains et les yeux sont conserv(['S pour les chefs, comme ctant la partie la plus d(!'licato. i f^i Notice On conQoil parfaitenunt que dos peuplades sauvage*, n'ayant point dc police organisee, ont cependant des besoins a salisfaire, des regies a suivre, afin d'^viter I'anarchie, et que les chefs, pour arriver a maintenir I'ordre parmi leurs sujets, doivent regler I'emploi des choscs de la vie; afm de donner plus de pouvoir h leurs decisions, ils ont fait, dans I'interet public, cause commune avec les ministres des divi- nit(5s, et se sont fortifit5s mutucllement, en etablissant une relation intime entre le pouvoir spirituel et le pouvoir tem- porel. C'est ainsi qu'on peut expliquerle pouvoir qu'ont les chefs aussi bien que les grands-pretrcs de lancer des tapous ( I ), c'est-a-dire de regulariser les actes de leurs sujets. On peut en distinguer trois esp^ces; le tapou qui exclul totalement I'usagede certaines choses, cclui qui ne le defend que pendant un certain temps, enfin celui qui consacre des usages a nos yeux plus ou moins bizarres, Chez quelques tribus, les eloffes rouges ne peuvent etrc portees, on ne peut s'asseoir impunemcnt sur un meuble recouvert de cette couleur, chez d'autres, c'est le bleu, chez d'autres enfin , c'est le noir. L'usage de la viande de pore, des poules, de certains poissons, est defendu pendant un temps plusou moins long chez quelques peuplades, il est pcrp(^tuel pour les femmes. II serait trop long d'enumerer tous les tapous qui existent encore chez les naturels des Marquises; il suffira d'en citer encore quelques-uns pour faire connaitre en quoi consiste cette coutume etcombien elle s'altaclie a des choses pu(5riles. II est defendu de cracher au milieu des cases, parce que, si quelqu'un veut vous faire mourir, il n'y aqu'aenlever votre (1) D'autres icrivent tabous. suR l'aiichipel de menbana. 193 salive el la porler au grand-piolre, celui-ci I'enveloppc dans des feuilles d'arbrcs et dans des morceaux d'ecorccs d'arbre, I'enloure de cordes faitesavec le brou du coco ell'enfouit en terre ou le jette dans les broussailles, c'est ce qu'on appelle kaha. D^s ce moment, I'individu qui a craclie commence a d^pi^rir ct, au bout de quelque temps, il meurtinevitable- ment. Cependant s'il pent parvenir a decouvrir qui lui a enlev6 celte expectoration, il essaie de se la faire rend re, en lui faisant des cadeaux, ou s'il trouve lui-meme le kaba, il est sauvS. La pipe qui sert babituellement a un chef kanac est sacr(5e, tapou. Les Fran^ais seuls ou les autres chefs kanacs peuvent s'en servir impunement. Toute pipe fumee dans une case tapou est tapouee par ce seul fait. Un kanac ne pout fumer qu'en dessous de ses vctements, c'est-a-dire que s'il a un mouchoir, les coins d'une piece d'etoffe noues autour de son cou, un collier ou toute autre chose, il passe le luyau de la pipe en dessous. J'ai cependant remarque que les kanacs habilles alafrancaise, c'est-a-dire avec un pantalon et une chemise, nc se font pas scrupule de fumer dans cetelat. Peut-etre le port de vetements elrangers afTranchit-il de celte obligalion. La femme, pour fumer, est obligee de tirer son bras droit de la manche de sa grande robe, si par hasard elle en porte une. II est defendu a un kanac d'allumer sa pipe a une lampe du pays. Si un curopecn a alliimc la sicnnc do cctte fagon, le kanac, le sachant, nepermcltra jamais do fumer dans celte pipe. Lorsqu'on boit un coco, que Ton mange de la popoi ou du kalm (1) il faut faire attjnlion a ne point verscr I'eau de coco (1) Aliment du pays. On en parlera plus loin. On doit prononcor la Ictlre u conimc s'il y avail ou. l:j J 94 NOTICE ni fairc toucher de la popoi sur le pav6 de la terrasse, qui est rendroit oil Ton mange le plus souvent. C'est une infraction aux tapous et qui est punie do la cocit6. On cite la fille de Te Moana devenue aveugle pour cc motif. Un chien ne pent passer impunfiment entre lesjambes d'une femme kanaque, ellc ou lui doit mourir; le choix n'est pas difficile a faire. On demandcra pourquoi dans une tribu , telle chose est defendue pour tout le monde, pendant que dans une autre, elle ne Test que pour les femmes, et dans une troisi^rae elle ne Test pas du tout? Ces anomalies dont il est difficile de rendre compte existent ^galement chez les peuples civilises: Ainsi les Juifs ne mangent pas de pore, les Mahomelants ne hoivent pas de vin; des couleurs d^terminees sent des mar- ques distinctives de telle ou telle classe de la society, sent portees en signe de deuil dans cetle nation, et en signe de r^jouissance et de fete dans cette autre, et si nous ne nous cxpliquons pas certaines defenses chez ces peuples sauvages, c'est que nous ne pouvons remonter jusqu'a I'origine, et en connaitre les motifs. Le tapou relatif a la police du pays est applique par les chefs. Hbs qu'ilestconnu, I'execution en est plus rigoureuse que chez nous celle de la plupart des lois et ri^glements, car une simple amende est la punition la plus commune d'unc infraction a un r^glement de police, tandis que dans rid^e des kanacs I'inobservance d'un tapou est une cause de mort. On m'a raconte qu'une jcunc Indienne elant malade, avait regu d'un Frangais habitant Nouka-IIiva, unorciller en plu- me, pour qu'elle eut la tete moins duremcnt posee que sur le tronc du cocotier, qui lui servait de coussin. Pendant huit jours elle se servil de cetoreillcr et s'en trouva fortbien, SLR L'ARCIin'EL DE MENDANA. 195 mais par malheur une plume sorlit par la couture, alors la jeune fille s'empressa de rejeter rorelUcr bien loin d'elle, et dlt qu'elle allalt niourir parcc qu'elle avail dormi sur un coussin de plume. C'est cc qui anivaen effet. Est-ce la ma- ladiedont elle etait affectce qui fut la cause de son doces, ou ses parents et amis, fanatiques observateurs du tapou, lui auraient-ils fait prendre un breuvage mortcl? Quelqucs per- sonncs nient cettc derniere circonstance dans le casde viola- tion d'un tapou quclconque, d'autresen affirment la possibilile. Les indigenes sont loin de I'avouer, ct disent simplement que le Dieu fait mourir celui qui n'observe pas les coutumes de ses ancetres. Ajoutons en terminant cet article sur le tapou que la oil les Europeens sont etablis, les nalurels commencent a s'afTrancliir de quelques-unes de ces ridicules cxigencess Lestrois actes principaux de la vie de I'homme, la nais- sance, le mariage et la mort, sont marques chez les kanacs par des feles et des rejouissances. La case d'une fern me enceinte est indiquec par un signc particulicr, c'est une grande coquille de nacre suspendue a I'extcricur, au potcau qui souticnt le tolt; sous son lit et dans un angle de I'habi- lation est un amas deplanlesparticuliercsqui sonlfavorables a la conservation de I'enfant dans le sein de sa mere. La femme pendant sa grossesse jouit d'une consideration par- ticuliere. On souticnt sa pipe pendant qu'elle fume, clle ne sc livre a aucun travail , rcste dans sa case , soit accroupic, soit couchee sur sa natte; on lui [irepare la popoi qui est servie devant elle, on lui rend en un mot lous les services que reclame sa position. L'accouchement dcsfcmmes n'est point laboricux. L'usago de ne point emprisonncr leur taille dans un corset, mais de la laisscr se devcloppcr librement, y contribue beaucoup. -196 NOTICE Elles sont assistees pardes femmes, el aussiWt apres la deli- vrance, la m^sre et I'enfanl vont se laver a la rivifere. Ici commence une serie dc tapous : on ne pout allumer de feu dans la case pendant un certain temps, la mere ne pent sortir que quelques jours apr(?s sa delivrance, on regoil les parents, les amis, on lue des cochons, on prepare du kava et de la popoi, on fait en un mot une ffile proportionnce a la richesse du pere de famille. Si I'enfant a ele adopte par une autre famille, il est quel- quefois emporte dans sa nouvelle famille aussitOt apres sa naissance, on I'accompagne en lui souhaitant les choses les plus estim^es par ces peuples sauvages. II s'agit de donner une appellation quelconqueau nouveau- n6. Les kanacs n'ont pas ce que nous appelons des noms de famille; cette necessile de distinction chez les peuples civi- lises ne s'est pas encore fait sentir parmi eux. Le nom donne a I'enfant n'est pas toujours celui qu'il portera plus tard, quelquefois on lui en donne plusieurs, et celui qui prevaut est celui qu'il garde. Ce nom a Ic plus souvent une signifi- cation particuliere; une circonstance quelconque, soil avant soit apres sa naissance, un fait relatif au nouveau-ne , une qualitc physique sont pris pour appellation. Cette coulume rappelle celle des peuples anciens et mome de nos aieux , dont le nom signifiait toujours quelque chose, Ainsi, pour en revenir a nos kanacs, Te Moana, nom du roi de Nouka- Hiva, signiQerimmensit^, la grande mcr, a cause du voyage qu'il a fait en Angleterrc: Makaka, nom du chef d'unc des vallee de Taio-Hae, signifie mediant; Tiiluika , signifie savant; Tutai-Kivi, fiente d'oiseau; Op6-Vahin(^, derri^re de femme, a cause de sa poltronncrie dans une certaine affaire. Les kanacs convcrlis au catholicisme ont regu d'autres noms tir(5s du calendrier, et qu'il a fullu accommoder a leur sua L ARCIIIPKL DE MENDANA. 197 langue, ce qui fait qu'on a souvent de la difiicuUe hies reconnailre. II faut en eflet quelque usage pour retrouver dans Kalolo, Ic noni de Charles que porte Te Moana; dans Tanilao, celui de Stanislas, son Ills; dans Arekiko, celui de Francois, Francisco; dans Nakare, celui d'Alexandrine. L'enfant grandit, libre de ses actions, prenant sa nourri- ture lii oij il se trouvc, peu embarrassede ses vetements et n'ayant d'autre precepteurque la nature et rexemplcdeceux avcc lesquels il vit. II imite d'abord ses parents dans les travaux qu'ils font, Icur vienten aide, quand il est plus age, si toutefois cela lui convient,car iln'y est point forc(5. Arrive a I'age de la puberle, il cherclie a se marier, soit dans sa tribu, soit dans la tribu voisine, construitunecase avecl'aide de ses parents et de ses amis el constitue ainsi un nouveau menage. Le mariage aux Marquises n'est consacre par aucun acte religieux ou civil. Un jcune homnie trouve une jeune fille a son gre, il lui demande : Veux-tu vivre avec moi? Si elle consent, les parents sont avertis de part et d'autre, la jcune fille vient dans la case de son futurepoux, et apporte avec elle des prL^senls. Les families se reunissent, invitent les amis, on tue des cochons, on fait une fete et le mariage est consomm^. Ces liens sacrt5s chez nous, se rompent chez les naturels, avcc autant de facilite qu'ils se sont formd's. La fcmme cesse- t-ellcde plaire a son mari, soit qu'elle mt'ne une vie licen- cieuse, ce qui n'est guere un motif parmi cux, soit pour toute autre cause, le mari la renvoie avec ce qui lui appar- tient et nc tardc pas a convoler a de nouvelles noces, la femmc fait de mCme, et ces deux personnes qui unics par les liens du sang ne pouvaicnt s'accommodcr ensemble, continucnt, s'ils Ic vculcnl, a demcurcr dans la mi^me case, 198 NOTICE et vivenlen bonne intelligence des que leur union a ete dissoutc. Les kanacs se marient fort jeunes, une fille est nubile a douzo ans, passed sa vingt-cinquiemeannee, elle n'estgu^re plus susceptible d'engeiidrer, elle prend de I'embonpoint, et passe au rang des vieilles femmes. Les liommes se conservent un pcu plus longtcmps, mais en sonime les generations se succedent bien plus promplement dans ces pays la que dans notrczOne temperee. Les maladies dcs^^kanacs sont peu nombreuses; les plus frequcntes sont les affections de poitrine, depuis le simple rhunic jusqu'a la phtisie la plus inveteree. Les autres mala- dies internes sont assez rares. L'elephantiasis, si commun dansr les autres iles de la Polynesie ne se rencontre pas fre- qucmment. A quoi attribuer cette difference, si ce n'est a I'usage presque exclusif d'un regime vegetal, car le fruit de I'arbre a pain est la base et pour ainsi dire la nourriture unique du kanac, Le poisson qu'il p^che est en petite quantite, et il ne mange de cocbon que dans les fetes publi- ques ou dans des circonstancesexceptionnclles. Les maladies d'ycux nesont pas rares, il en est de meme des rbumatismcs qu'ils traitent au moyen de frictions. II faut atlribucr la cause de ces deux maladies a la manierede vivrc des sauva- ges. Leurs cases etant mal ou point closes, le vent frais de la nuitles saisit quandils sont en sueur, quelquefois meme ils s'endorment et passentla nuitsur lospierres deleurtcrrasse, enveloppcs seulement d'un leger drap de colon ou d'ccorcc d'arbre, insuffisant pour les garantir. Les plaies d'armes a feu, les contusions se guerissent au moyen de plantes maccreesdansreau ouecraseessimplement, etappliquees en fomentations et cataplasmes; pour le mal de dents, ils pronnent un vieux coco qu'ils rapcnt, sur cette SLR L ARCHIPEL DK MENDANA. 199 rapure, ils mettent un caillou rougi au feu, I'huilesedegage et du residu ils font une petite boule, qu'ils appliquent sur la dent qui les fait souffrir (1). La circoncision chez les kanacs s'opfere a tout Sge. J'ai connu un jeune homme de vingt-cinq ans qui n'avait pu se rt5soudre a celte operation auparavant. On observe a cette occasion de nombreux tapous. Le circoncis ne peut entrer de trois jours dans la case qu'il habile. II ne peut manger seul, SOS mains sont condamnees pendant ces trois jours a la plus complete inaction. II ne peut mettre la ceinture dont il se sert habituellement, il s'enveloppe d'un pagne a la manicre des femmes; I'infraction a un deces tapous serait une cause inevitable de mort. D^s qu'un kanac devient gravement malade, il declare, par une espcce d'intuition que c'est sa derniere maladie, et son imagination lui faisant considerer comme r^el ce qui au d^but ne pourrait bien etre que tr6s problematique, il s'oc- cupe alors des pr(5paratifs de ses funSrailles, discule avec ses parents sur le nombre de coups de fusil qu'il sera tir^, la quantitedecochons aimmoler;il fait Iravaillerasoncercueil, en donne la forme et les dimensions et le fait apporter pres de lui quand il est termin(5. Les raisonnemenlsde nos esprils forts du XVIII^ siccic les ont-ils fait arriver a ce degr6 d'indiffi^rence stoique? Une singuliire habitude existe chez les insulaires des Marquises : au lieu de faciliter a un malade la respiration quand clle est penible, en lui donnant autant d'air que possible, dOs qu'ils voient au contraire qu'il (1) On verra dans une notice sur I'histoire naturelle des Marqui- ses qu'elles sonl les planles dont se servcnt les naturels, dans Jeurs maladies. 200 NOTICE ne respire qii'avec peine, ils lui mettentles mains sur le nez, siir la bouclie, sur les oreilles, afin d'empecher, disent-ils, le principc vital, Tame, kuhane, de quitter le malade. Ces soins empresses sent funestes a ceux a qui on les prodigue, ct le mallieureux vait sa fin accelerce par I'lgnorance de ceux qui Ten tou rent. II faut remarquer ici que les naturels n'accepten:^qu'avec repugnance les secours de notre medecine; ils ne prennent de breuvages, ne font de remcdes prescrits par la science que quand ils ont eu sous les yeux des exemples de leurs Lons resultats. Les coups de fusil etant tird'S et le repas des funerailles termine, tout rentre dans I'ordre accoutume dans la case, ce n'est qu'un habitant de nioins. Si Ton n'a pas execute les ordres donnes par le defunt> son ame reste errante derriere la case, qui est le lieu oii Ton jette les ordures; ainsi erraient autrefois sur les bords du Styx les ames de ceux qui n'avaient. pas d'obole a donner au sombre nocher. Le caract6re insouciant de ces peuples autorise le conjoint survivant a convoler a do nouvelles noces au bout de peu de temps, ccpendanl quelquefois une affection veritable unit les deux epoux; Ton cite la douleurde la grande pretresse do Taio-Ha, Taoua-Mataeva, quand elle perdit son premier marl tu6 dans un engagement avec quclques Sandwicliois qui etaient venus s'etablir a Nouka-Hiva. Pendant huit jours entiers, elle courut nuc et echevelee dans les sentiers de la bale qu'elle habite, et pendant ces huit jours, les habitants furent obliges de se tenir enfermes dans leurs cases, car malheur a celui qu'elle aurait rencontre, il eilt 6te immole aux miines du defunt. rendant mon sejour a Taio-IIae, une baleiniereappartenant ■iX un chef de la Iribu des Ilappas s'etant perdue dans uit I i SUR LARCHIPEL DE MENDANA. 201 voyage de Uapou a Roa-Huga, Ics femmes de celtc Iribu, pour pleurer leurs maris on leurs enfants au nombre de dix, danserent, comnie la grande prctresse, une dansc fun^bre, nueset echeveloes, pendant que les autrcs kanacs, donnaient h leur maniere, un dernier souvenir a ceux qui n'tlaicnt plus. L'on cite enfin I'histoire de celte femnie de 0-Ilivaoha (1) dont le mari avait 6te pris a Roa-Huga et sacrifie comme victime. Ellc offrit jusqu'a quarante cochons pour qu'on la conduisit seulement en vue de I'ile oil son mari avait rendu le dernier soupir. En general, les femmes qui pleurent leurs maris se tracent avec des pierres tranchanles des sillons sur le front, sur les bras et sur la poitrine, mais il faut ajouter que CCS temoignagcs ext^rieurs d'une vive douleur sont bien rarcs, et que, pour ma part, je n'en ai pas vu d'exemple. Nous avons maintenant a parler des soins qu'on donne au cadavre qu'on veut dess6cher, preparation dans laquelle excellent les habitants des Marquises. Des qu'une personne n'est plus, si c'est un chef ou un individu riche, on le revet de ses ornements dc fete, et il resle expose pendant vingt-quatre beurcs dans le cercueil qu'il s'est prepare lui-niOme, la figure decouverlc, et quand la fete funebre est terminee, on le place sur le taou. Le taou est un tronc d'arbre de qualre pieds environ, creuse legeremcnt, et sur lequel est depose le cadavre pendant le travail de la dessication. Le defunt y est p]ac6 assis, la parlie supcrieure du corps rcposant sur les traverses dc deux montanls fichus en terre. La preparation du cada\re se faitde la maniere suivantc : on froltc continuellemcnt la (1) lulre nom de I'lle de la Dominique- 802 NOTICE peau avec la paume de la main, on fait sortir par I'anus les intestins qnand lis sont arrives h un commencement de dt'composition; le ventre se ballonne, la peau se durcit et prend la consistance du parchemin par suite de ces frictions continuelles. C'est ala femme du dt'funt qu'est principale- mcnt devolu le soin de preparer ainsi le cadavre, et elle fera preuve d'une grande affection si, apres avoir travaille pendant plusieursheures a frictionner le corps de son mari, elle se met a manger la popoi sans se laver les mains. Elle reQoit neanmoins le plus souvent assistance de ses parents et de ses amis, et c'est la seule occupation des ha- bitants de la case pendant tout le temps nccessaire a la dessication. Ce travail qui reussil le plus souvent, vu la chaleur et la secheresse de I'air, et le soin qu'on y apporte, est termini au bout d'environ un mois. Le cadavre est alors mis dans le cercueil, entour6 de tapas et dt^pos6 soit dans le morai, soil dans la case construite dans ce but. Dans la valine des Taio-Ha, entouree de montagnes, lescercueils sont d6pos6s dans les anfractuosiles des rocbers les plus convenables. Mais les families ne se s^parent que le plus tard possible du cercueil qui contient I'objet deleurs regrets (1). Les cadavres ainsi dessecb^s se conscrvenl fort longtemps, seulement il arrive que n'^tant enduils d'aucun preservatif, ils finissent par etre altaqu^s par les insectes, et alors ils ne tardent pas a etre reduits en poussi6re (2). (1) Voir la note m 2, a la fin de I'article. (2) II existe au cabinet d'hlstoire naturellede Rio-Janeiro le corps d'un chefkanac ainsi prepare. II est parfaitement tatoue et revelu de ses orneraents. On le voit dans une grande boJte de verre, au milieu d'une des salles; il a sans nul doute ete recouvert d'un preservatif quelconque. suR l'arciiipel de mkndana. 203 Une remarque doit eire faite ici sur le caraclere des habi- tants des Marquises, je veux parler de rindilTerencc avec laquelle lis s'cnlretienncnt de la morf, la voicnt venir sans la desirer, ni lacraindrc, et font, comnic on I'a vu, leurs prt^paralifs ii I'avancc. lis ont bien qiiclqiie idee d'une vie future, mais ils sonl loin d'en faire le sujet de leurs conver- sations et de vouloir approfondir ce myslere, qui du resle ne Ics preoccupe pas beaucoup. lis repondent, quand on les inlerroge la-dessus : o hai hoi, je ne sais pas. II est tres rare que les kanacs se pendent; ils s'empoison- nentavec le sue de Vem (1) qu'ils melent avec dc I'eau de coco, niais ils lefont encore rarement, car ils sont bien peu passionnes. Cependant on cite des exemples de maris qui se sont empolsonnes pour ne pas survivre a leurs femmes et quelques pcrsonnes pretcndenl que c'est ainsi qu'on donne la mort aux violateurs des tapous. A Nouka-IIiva, les guerrcs serieuscs cntre les differentes tribus de I'ile ne sont pour ainsi dire plus possibles a cause de la presence des Francais, mais dans les autres lies de rarchipelellesexistentencore, etsontlc plussouventexcil(5es par les pr^textes Ics plus frivoles , des coclions voles ou autre chose semblable, une parole imprudente de la part d'un chefenversle chef d'une autre tribu, ou bien les motifs les plus barbarcs, la mort d'un grand-pretre ou d'un chef, ou encore pour se procurer des viclimcs. Les kanacs n'ont point appris a ranger des armees en balaille; ilsse font entre cux une guerre d'escarmouche, s'observent pendant des jours, des semaincs, des mois entiers, en se portant derriere (1) Cerbera Manglias, L. Tanghin, de Madagascar. On en exlrait un principc acre el venencux appele Taiialjine. 204 NOTICE des massifs d'arbres ou de pelils monticules, et attendent que leurs ennemis passent pour tirer dessus. Quelquefois aussi, ils combattent en plaine armes de batons, de casse- tetes et de frondes, mais ils preferent a tout les fusils et la poudre, qui sont pour eux d'une tres grande valeur. Les baleiniers americains qui vienncnt aux Marquises pour rafraicbir leurs equipages et acheter des provisions fraiches, trafiquent avec les naturels au moyen de ces objets qu'ils savent leur faire payer fort cher. En general la bravoure n'est point le propre du caractere noukahivien. Des qu'un bomme est tue, d'un c6te ou de I'autre, les deux partis quittent le cbamp de bataille, le vainqueur chercbant a emporter le cadavre,et levaincu, essayant de le lui soustraire. A Nouka-Iliva, oil les armes a feu sont en plus grande quantite que dans les autres lies, j'ai vu quelques kanacs se boucber les oreilles pendant que Tun d'eux ajustait un oiseau, le canon du fusil appuye centre un arbre a pain. On a cite des traits de barbarie de la part de ces sauvages envers les etrangers, niais ce n'etait le plus souvent que de justes represailles envers les Equipages des batiments qui abordaicnt chez eux. J'ai entendu raconter le fait suivant, qui vicnta I'appui dccette assertion : Ily a quelques annees, un baleinier americain jeta I'ancre dans la baie du contro- leur ou des Ta'ipis, et engagca le cbef a lui vendre des cochons, moyennant une redevance qui ne devait etre payee que quand les animaux seraicnt a bord. Le cbef ne soup- Qonnant pas le capitaine de rnauvaisc foi, apporte les cocbons dans sa pirogue, les embarque a bord du navire et y monte lui-meme avec les kanacs qui Taccompagnaient pour recevoir leprix convenu. Quoique Ton fut d'avance blen d'accord a cc sujet, cependant le capitaine trouve encore le moyen de sun l'akchipel de me.ndana. 805 soulcver des dilTicultt^s, afin de gagner du temps. Pen- dant la discussion, il fait appareiiler son navire; une fois sous voiles, il d^niarre la pirogue, et fait jeter a la mer le chef et les kanacs qui ^taient avec lui, et qui ne purent regagnerleur pirogue que parce qu'ils savaient parfaitemcnt nager. Voila assurement un moyen bien commode de payer ses detles; niais ces pauvres kanacs devaient-ils s'attendre a un traitement pareil de la part d'hommes qui se disent civilises? A quelque temps de la, le navire revienl, et le capilaine croyant que les indigenes avaient oublie la supercherie dont ils avaient failli etre victimes ou peut-etre qu'ils no le re- connaitraient pas, descend a terre avec une parlie de son equipage. Aussitot reconnus par les indiens, les matelots sont entoures, serres de pres, les naturels s'en em parent, les massacrent et les mangent. En verite etaient-ils bien coupa- bles? Je ne le pense pas. Un fait arrive, vers la fin de 1854, dans une des iles du groupe, montre encore combien certains individus civilises sont quelquefois plus cruels que ces naturels. Un navire americain avait relach^ dans une de ces iles et deux matelots ^talent descendus a terre avec des objels d'6change. Ils avaient 6t6 bien accueillis et se promenaient sans crainte au milieu des habitants de la baie. lis remonterenl un petit ruisscau, suivis par quelques kanacs qui convoitaient les coutcaux dont ils (5taient porteurset qu'ils ne voulaient pas coder. Ces kanacs renouvellent leurs instances, mais inuti- lemcnt. Enfin, de guerre lasse, ils saisissentle moment ou les matelots sont baisses pour boirc au ruisscau, et leur lanccnt des pierrcs. L'un d'cux est tut3 sur le coup, I'aulrc, gricvcment blessc, parvient cepcndant a regagnerle rivage, et retourne a bord, apportant la triste nouvelle de la mort de son camarade. 206 NOTICE Le capitaine, voulanl tirer vengeance de cello mort, va trouver le chef de la bale el le menace de nietlre le feu a son village, s'il ne lui livre i5as les coupables. Le clief hesilc pendant longlemps, enfln il cede a la peur. Les meurtriers, au nombre de deux, sont iivres et conduits a bord; le capi- taine les fait mettrc dans des barriques qu'il lit ensuite foncer, et les conserve ainsi jusqu'a son arrivee a Taio-Hae. L'equipagc nonmoins inhumain que son capitaine roule de temps en temps ces pauvres malheureux pour les rappeler au sentiment de leur propre existence, mais I'un d'eux refuse obstinemenl la nourrilure qu'on lui fait passer par la bondeet meurt de faim, apres cinq jours de soufTrance. L'autre prend quelque nourrilure et arrive en vie a Taio- Hae. Qu'on eul enchaineces naturels, je le comprendrais, mais les metlre ainsi dans des barriques, c'est une idee qu'un horame civilise aurait dii repousser avec horreur. Ce renou- vellement du supplice de Regulus a quelque chose d'atroce, et une nation qui compte parmi elle des elres aussi barbares devrait les rejeter de son sein. Les Noukahiviens sont en arriere de beaucoup de peu- plades oceanniennes sous le rapport de I'inslruclion. lis n'ont ete visil(5s que fort tard par les Europeens et n'avaient auparavant porle leur altenlion que sur les objels qui sont pour eux d'une utilil^ premiere. Les voyages qu'ils font d'une lie a I'aulre de leur archipel leur ont fait observer les eloiles et distinguer les principales conslellalions. lis en ont determine environ vingl-cinq, parmi lesquelleson distingue : les Pleiades qu'ils appellenlMatakai; Venus, qu'ils appellent Felu-Oalea, ou etoile du matin, et Fclu mahona puipui i le ahihai, etoile du soir; le baudricr d'Orion, Taotoliu; la voie lacl6e, Yao felu, bande d'eloiles. Lefetu kavetou eou est ia SLR l'archipel dk me.>dana.. 207 belle t^oile, voisinc de la lune, que les marins appcllont sa chaloupc. lis font intervenir la divinity dans certains ph(5nomenes celestes, comme les sauvages de i'Anierique au temps de Christophe-Colomb. Pour eux une eclipse de lune est la lune mang(5e par le dieu Makina kaikai ae te Etua, les etoiles filantes sont leursexcr(5[nents, lutai Etua. lis croient que la saison sera abondantc en fruits a pain, si le ciel est clair el si les etoiles brillent en grand nombre, peut-etre la raison en est-elle de ce que la ros(5e est plus abondante par un temps clair que lorsque le ciel est charge de nuages. La p^che a laquelle ils se livrent leur a appris a connaitre les poissons; I'usage journalier dcs plantes comme aliments, ornements ou remedes les a obliges a donner un nom special a chacune d'elles et a distinguer les especes utiles de celles qui sont nuisibles ou de celles qui ne sont d'aucun emploi. J'estime que le nombre des especes botaniques qui^compo- sent la flore de Nouka-Hiva ne d^passe pas cinq cents, tant phanerogames que cryptogames (1). Les oiseaux sont en petit nombre, on n'en compte pas plus de quarante espfices. Quant aux niammiferes, ils sont encore plus liraites, le seul qu'on rencontre est le rat qui peut-etre n'existait pasavantrarrivcedes Europeens. Cook pense que les chiens out toujours existe aux iles de la Socitite, I'espfece qu'on voitaux Marquises est la meme que celle de rarcbipel de la Societe, et qui se lapproche du chien de bcrgcr Les coclions sont tres nonibreux aux Marquises, il s'en trouve (1) Dans ce chiffrc je ne comprends pas les especes microscopi- ques en algues, lichens, champignons, hypoxilons. Chaque jour, meme en France, on en decouvre de nouvelles. — Voir la note page 4. 208 NOTICE de sauvages dans le fond des vallces. L'espece est un peu differente de nos cochons d'Europe, ils onl le museau plus alonge et le corps moins trapu. Comme eux, ils se nourris- sent principalement de vegclaux el surtout de goyaves, leur chair est excellente. Les chevres qui ont et6 apporlees, il y a une trentaine d'annees par les Americalns, ont pullul6 dans les monlagnes de la bale de Taio-Ha, oil elles vivent maintenanta I'^tal sau- vage. 11 ne serait pas difficile d'acclimater a Nouka-Hiva les boeufsetles moutons; aVaitahu, ilen existe untroupeauasse/ considerable, etce serait une grande ressource pour le poste de Taio-Hae, si Ton pouvait en transporter quelques tetes dans labaie. Les insectes sont peu nombreux, la mer est plus riche en crustac(5s, en zoophytes et surtout en poissons dont les kanacs comptent plus de cent trenle especes ou varietes. II pacait que ces naturels connaissent assez bien I'anato- raie du corps humain, je ne puis ralfirnier, n'ayant jamais eu I'occasion de mettre leur science a I'epreuve. Le langage de I'habitant des Marquises so rapporte ii la grande division polynesienne etablie par les linguistes, et a beaucoup de ressemblance avec celui des habitants des Paumotu, des Sandwich, de Taiti, par les uombreuses par- ticules qui modifient lesens dela phrase et qui sont I'ecueil le plus difficile a franchir pour celui qui veut approfondir cette langue. Voici ce que dif Forsler que nous avons d^ja eu I'occasion de citer, au sujet de la langue de la Poly- nfisie. « J'ai renaarque dit-il, qu'en general les langues des « cinq peuples designes plus hautetqui sontccux des iles « de la Society, des iles des Amis, des Marquesas, de Tile de « Paques et de la Nouvelle-Z^elande ne different qu'en un « petit nombre de mots, que la difference de ces mots ne SLR L'AItCHIfEL DE ME.NDANA. 209 «. consistc que dans 1q cliangcment d'un pclil nombre de « voycUcs ou consonnes, et qa'il y en a beaucoiip dans tons « les dialecles qui sonl rest^s absolument los memos. Ces « nations descendenl done loutes de la meme tribu. Lcs dif- « ferenccs des dialecles provicnnent seulement de la difficul- « te de prononccr des consonnes que quelques insulaires « articulcnt plus aisemcnt, pendant que d'autres les ont « entierement omises. » La division geographique des Marquises on deux groupes a fait naitre deux dialecles bien dislincls; cclui du groupe nord, compose des :les Nouka-Iliva, Roa-IIugael Uapou, est beaucoup moins harmonicux et moinscoulanl que cclui des lies du sud. Cependant les habitants de loulcs ces iles se comprennenl Ires-bien. Celte langue est encore a regularisei- et le ptM'e missionnaire residant a Taio-IIae Iravaille avec ardour, depuis qu'il est dans ce pays, a eludier lcs regies qui existent naturellement dans toulc langue, quclqu'informe, quelque primitive qu'ellc soil, et a la reunii' en granimaire. On remarque ici, com me danslous les pays sauvages, que les indigenes ont une propension trfis-grande a adopter les mots titrangers, el cela, par la raison bien simple que, les employant pour se faire comprendre, ils linissent par s'en. servir lorsqu'il parlenl entre eux; bientot pour entendre le veritable langagc de Nouka-IIiva, comme celui de Taiti, il faudra penetrer dans I'interieur, loin des etablissements curopcens, sans quoi Ton n'enlendra que ce qui a 6lc appele le langagc de la plage, oil figurcnt autantde mots francais, anglais clespagnols que de mots propres a ridiOnio du pays (I). Le systcme de numeration des kanacs est le systeme decimal, qui est en cflct le plus naturcl; mais ils s'anvtent il] Voir la note n" 3. n 210 NOTICE au nombre quarante, tofa, quatre fois ilix. Ce chilTre est pour eux un autre point de dt^part, ct ils complent par quarantaines conime nous comptons par dixaines el cen- taines. Ils ont encore un autre point de d<}part pour les nombres plus dleves, c'est une unit6 de deux mille, aprfes quoi ils ne comptent plus et se contenl^t de dire : beaucoup, beaucoup, menui, menui. Ils ne connaissent point leur age; pour les enfants seulement, ils disent combien ils ont de lunes. Qu'ont-ils en effet besoin de savoir quel ^ge ils ont? Ils n'ont a observer aucunes lois, aucuns reglenients, rien n'entrave leur liberie d'action , et la mort n'a pas plus que cbez nous de respect pour la jeunesse. Sous un ciel toujours clement, au milieu d'une riche nature, avec des besoins si restreints , il est naturel que le genie industrieux des kanacs, naturellement portes a I'indo- lence, ne se soil pas developpe d'une maniere remarquable, lis trouvent autour d'eux tout ce qui leur est necessaire pour I'habitalion, la nourriture et le vetement. Quatre pieux fiches en terre au dessus d'une terrasse, recouverts d'une toiture en feuilles d'arbre a pain, ou de cocotiers tressees, font un abri suffisant pour beaucoup de families. Cellesdes chefs sont plussoignees.j'en ai donn6 ailleurs la description (1]. C'est la que les sauvages montrent leur savoir faire architectural, pour disposer lespoteaux quelquefois sculpl(^s les traverses, les chevrons, et lier entre elles ces difTt-rentes pieces avec des cordes de conleurs varit^es qui rcmplacent les chevilles et les clous de nos edifices. Du reste, partout meme disposition dans I'inlerieur, deux troncs de cocotier a moiti6 enfouis dans la terre ct distants I'un de I'autre de quatre pieds environ, le milieu rempli d'herbes sechcs (1) Une ffite chez les Noukahiviens. sLi\ l'arciiipel de me.\ua.\.\. 2n riYouvorlos d'unc nallc, c'cst lii leur lit ct I'enJroil oil ils sommcillent pendant la chaleiir du jour. Leurs vases et uslensiles de miiaage consistent on de grandes calebasses, garnies de tresses et ornees d'osscments sculples, dans des cocos plus ou nioins richement ciseles et principalement dans des jatles, quelquefois tres grandes, faites avcc le bois du calo[)li\ilum. Quand ils ont a cnvelop- per iin objel de faible dimension , ils se scrvcnl de fcuillos d'bibiscus ou de bananier, un bambou de plusieurs metres do long leur sort a prendre de I'eau a la riviere, enfin unc baclie de pierre, qu'ils remplacent avec empressement par line hache en for, et un mechant couteau, completent leur mobiller. Leurs parures sont cnveloppecs et mises en place dans de grands paniers suspendus dans leurs cases, un coffre qu'ils se sont procure pour quelques cochons, renferme leurs eloffes, qu'autrementils suspendentle long des parois. L'inventairede n'importe quelle habitation n'estpas, commc on le voit, long a faire (I). Les naturelsreconnaissant la superlorite des outils venant d'Europe ou d'Amerique les recherclicntavec empressement, ■et beaucoup d'entre eux n'hesiteront pas a donncr pour unc hache ou tout autre instrument de ce genre, un cochon de belle taille, qui est leur nionnaie courantc. lis connaisscnt si pen la valour de Targent, que j'ai vu une jeune indiennc me proposer jusqu'a quarantc francs pour avoir un oiseau rouge, especc do Tangara du Bresil, semblablc a cejui que j'avais donne au ch(.'f de sa tribu. Ellc mc montra d'abord quatre piastres, et voyantqiie je ne lui donnais pas I'objct de scs dcsirs, cc qui du rcsic m'eu.t (1) Voir la note iv J. Ji2 NOTICE ele impossible, elle mil encore deux piastres sur la table. Enfin croyant que mon refus venait de ce que je ne trouvais pas la somme assez forle, elle demanda encore a son mari, qui elait venu avec elle pour conclurc le marcb6, deux autres piastres que celui-ci porlait dans un noeud fait au bas de sa chemise. Elle s'est ensuite retiree tristement, etjenesuis pas encore bien sur qu'cUe n'ait pas suppos6 que je trouvais ses offres trop minimes. Les chefs kanacs tiennent particulierement a avoir des baleinieres, dont la possession leur donne du relief parmi leur peuple. Celui qui n'en a pas encore fera tout son pos- sible pour rfiunir la somme necessaire a I'achat de cette embarcation a un navire baleinier. II vendra des cochons, des cocos, des bananes, et livrera memo sa femme etsa fillc au premier venu, Ces baleiniferes sont payees fort chcr et font peu de service, car les kanacs n'ont pas dans leurs iles ce qu'il faut pour les r6parer, et d'ailleurs ils ne sauraicnt pas le faire. Un charpentier qui viendrait s'otablir a Nouka- Hiva, avec les materiaux necessaires, ne tarderait pas a fairc ses affaires avec les indigenes. Les kanacs recherchent encore avec empressement les etoffes europ^ennes que leur apportent aussi les baleiniers; mais ils n'ont pas perdu pourcela I'habitudedeconfectionner eux-memes de quoi se vetir. C'est pour cela qu'ils cultivent avec soin deux pj^ntes qui croissent naturellement dans leurs Iles. La plus'communSment employee est le ute, murier a papier (1), arbrisseau de 12 a 15 pieds de haut. Com me c'est I't^corce qu'on emploie, il importe qu'elle ne soit point cr6vassee par des branches latcrales qui occasionneraient (1) Broussonetia papyrifera (Vent.). suK l'archipel de memdana. 215 dans lo lissu des solutions de continuitt5. Aussi les Hatureis qui cultivent Ics plantes ont-ils soin d'enlever les bourgeons qui paraissenl le long de la lige prlncipale, c'cst ce qui fait qu'on ne le trouve jamais en fleur dans les iles du grand Ocean, comme le fait observer le naturaliste Forster. Quand I'arbuste est arrive a huit ou neuf pieds de hauteur, on le coupe, et on en detache Tecorce en faisant une incision longitudinale, on enleve ensuite les premieres couches corti- cales qui n'ont pas la nienie adherence entre ellcs que les couches plusvoisines du centre, dont on sesertde preference. Pour rendre ces bandes flcxibles, on les met a tremper pen- dant troisjCurs, on les bat ensuite grossiircment et on les enveloppedans des feuilles de bananier. Cetlet^corce reduite a I'etat do pate reste enveloppee pendant vingt-qualre heures, apres quoi on la bat de nouveau dans tous les sens avec un instrument en bois jaune, dont la surface qui s'ap- plique sur Tetoffe est sillonnee de lignes parallelles peu profondes. Les kanacs nomment cet instrument koukou. On se sert ensuite d'un rouleau en bois de fer, (^galement cannele, Yike, pour donner encore plus d'adherencc entre les dilTerenles parties. Quand la surface d'etolTe a alteint le degr(^ d'amincisse- ment desirable, on la met a secher au soleil, quelquefois on la teint en jaune avec Vekamoa, poudre prepar(5e avec la racine de Vcka (1), el Ton s'en sert ensuite pour s'envelopper pendant le jour et pendant la nuit. Comme cette etofTe ne supporterait pas longtcmps une pluic abondante, sans se detremper et tomber en morceaux, les indigenes qui sont surpris en route par un orage et qui (1) Espcce do Maranu. fU NOTICE ne pouveni se mPltre a Tabri, s'emprcssent de plier leur vuloment et de I'cnveloppor dans des feuilles d'arbres, nc conservant (jiie Ic strict necessairc, pour cachcr leur nudit(i. Les tapas (c'est ainsi qu'on appelle les eloffes en general) que Ton fait pour envelopper la lete, sont plus etirees el par conse(|uent pluslegeres. On distingue parfaitcmenl les fibres corticaies depouiilees de loutesles autres parties; ces {'toffes, d'une blanclicur eclatante, prt'scntenl Taspecl d'un tulle ou d'nne gaze et en ont presque la legorete. La seconde plante que les indigenes cultivent pour faire dcs etoffesest le figuier des banians, Ficus rcligiosa. 219 ment dans ties endroils fort (iloignes dcs habitations, sur le lieu meme ou se fait la recolte; les indigtjnes n'ayanl pas a craindre le vol de ces provisions, preferent alter clierclier de temps en temps ce qui leur faut pour leur nourriture journaliere, plut6t que d'apporter pr6s de leurs cases une recolte complete, ce qui serait pour eux un travail penible. Le fruit de I'arbre a pain ainsi prepare prend le noni de md. Pour s'en servir, on en met une certaine quantilti dans un de ces plats de bois d'arbre a pain, que les naturels appellent koka, on la petrit apr6s avoir vers6 dessus un pen d'eau, pour faciliter la trituration. Dans cet 6tat, la pulpe a la consistance et la couleur de la pate faite avec la farine de mai's. On forme ensuite des pains de 40 a 30 c/m de lon- gueur, 15 a 18 c/m de largeur et 10 environ d'epaissenr. Ces pains sont enveloppes dans des fcuilles d'hibiscus, li(5es avec des lanieres d'ecorce du meme arbre et mis au four kanac oil ils restent environ deux heures. Ce sont la les pains que les naturels cmportent avec eux quand ils vont d'un point a un autre de Tile ou de rarchipcl. Une nouvelle preparation est encore n(5cessaire avant que les naturels y plongent les doigts pour prendre leur rcpas. Les feuilles de I'hibiscus etantenlevees apres la cuisson, on ecrasc le pain dans le plat au moyen d'un pilon en pierrc et en y ajoutant un peu d'eau. La masse entiere etant reduile en une especc de bouillie et rccouverte d'eau fraicbe, la jatte est portOc dans lacour, au devant de la case, ct la, hommes et fcmmcs sc groupent a I'cntour el mangent jusqu'a ce qu'ils soient rassasi^s. Dans quelques cases, tout le mondc mange on meme temps et au mome plat; dans d'autres, les femmes et les enfants ne commcnccnt leur repas que quand les liommcs se sont retires. S'il rcstc fi^iiclque chose dans le plat, on le 520 NOTICE recoovre de feuilles, el le retardataire ou celui qui a faiin trouve toujours de quoi satisfaire son app^tit. Voilfi ce qu'on appelle la popoi md, nouniture habituelle des indig(ines des Marquises, qui y ajoutent quelquefois un morceau de cochon a demi-cuil, qu'ils dechirent avec ies dents ou avec Ies mains, quelques petits poissons crus, un morceau de requin pechci depuis plusieurs jours et, par const^quent, a demi pulrefi6, ou enfin quelques couferves rocueillies sur Ies rochers. On prepare encore le fruit a pain en le faisant cuire aussilOt qu'il a ele cueilli ct en le delayant grossierement avec un peu d'eau et de la popoi ma, c'est ce que Ies natu- relsappellent /?o/?oi met, et donl ils font usage danslasaison des fruits. Elle est plus estimee que la precedente. Le kaku est une autre preparation du fruit a pain et qui ne se fait guere que dans Ies cases des chefs. Le fruit etant cuit sur Ies charbons, on le petrit fortemenl, on racle ensuite une noix de coco et Ton en exprime le jus qui sert k delayer la pulpe. On sort ensuite dans un plat a popoi, et ce mets est fort agreable. Quelquefois on laisse la parlie du fruit durcie par le feu, qui donne a ce niels un gout de noisette. On rappelle alors kaku varao. Les naturels font encore avec de la popoi et du lait de coco un plat qu'ils appellent koci. lis font aussi deux especes dg confitures : la premiere, appelee makiko est du fruit a par- faite maturite et cuit, on le bat avec un peu d'eau et on le met a cuire au four kanac, cnvclopp6 dans des feuilles d'hibiscus; la seconde est appeleo hcikai, c'est du fruit a pain cuit dans du lait de coco, apres avoir 6te envelopp6 dans une feuille de bananicr. Cette confiture est tres estimee des naturels el meme des etrangers. Le mfime fruit, cuit au fort kanac avec un cochon, absorbc les sues qui provicn- SUR L'ARCHlf'EI. DK iMENDANA. 'ii\ ncnt tie la cliair de cot animal et remplace Ires bicn le pain ou les pommes dc tcrrc. La popoi akahua, sc fait avec de la popoi ma ct dii fruit frais. On delaie avec du lait dc coco. On donne aussi i cot aliment le nom de popoi koei et popoi toitea. Comme on pent le voir, le fruit de cet arbre est d'une immense ressourcc pour los indigenes des Marquises ct d'un grand nombre d'autrcs lies de rOc(5anie. II remplace le couscous des negres de la cOte occidentale d'Afrique, ct le riz des Indiens, et sa culture demande encore moins de soins que ces deux graminees, car les habitants de Taio-Hae pretendent qu'on ne pout reussir en plantant I'arbre ii pain, et qu'il faut le laisser venir naturellement. Le seul soin qu'ils prennent est dc debarrasser le pied des jeunes plants des broussailles qui ne tarderaient pas a Tetouffer avant qu'il eiit pris son entier developpement. Le taro ou tao, quej'ai vu cuUiver surunegrandeechelle aux iles de la Socicte et aux Sandwich, est aussi cullive en quclques endroits dans Tile de Nouka-Iliva, mais il s'en faut de beaucoup qu'il soit aussi precieux aux yeux des naturels, et d'ailleurs 11 exige des soins. II en est de meme de la patate douce (1) qu'ils vendent aux strangers. S'ils I'cncon- trent des ignames (2), qui ne sent pas rares dans les lieux montueux et ombrages; ils les deterrent pour les manger, mais ils ne cultivent pas cette plante. La preparation du tao est assez rompliquee. On racle la racine pour la reduire en farine qu'on delaie avec du lait de coco pour en former une pate. Cclte pate une fois cuile est (1) Couvolvulus batatas. (2) Dioscorea alala, e hoi en kauac. 822 NOTICE Iritur^e comme. le nu\ pour faire le kuku. On a prepare a I'avance du jus exlrait de la noix du coco, qu'on reduit en huile, au nioyen de cailloux rougis au foil. Quand la patfi est cuite, on la met dans celte huile sans la meler et ceux a qui ce mets est servi, operent le melange avec leur doigt. On le serl indifTeremment chaud ou froid. La kaikai-tao est du tao cuit simplement dans du lait de coco. Pour les ignames, on les rMuit en farine el en pate, avec de I'eau de coco. On enveloppe avec des feuilles d'hibiscus, el Ton fait cuir au four kanac. Tous ces aliments (5tanl prepares sans aucun des condi- ments dont nous faisons usage, nous paraissent assez fades etinsipides, la popoi ma a un gout aigre auquel on s'accou- tume assez promptemenl, et j'ai entendu dire a un des mis- sionnaires qui en fail sa nourrilure a peu pros habituelle, qu'il pref^rait cette popoi a celle qu'on fait avec le fruit frais, et qui n'a pas la saveur aigre de la popoi conservee. La boisson ordinaire des kanacs est I'eau do la riviere, lis aiment cependant passionn(5ment les liqueurs fermentees, et souvent on obtient pour une bouteille d'eau-de-vie ce qu'on n'aurait pas pour toute autre chose. Aux jours de fete, ils preparent du hava avec la racine d'unc plante de ce nom, le Piper mcthyslicum. Ils machent cette racine, et lorsqu'elle est bien triturte, ils la mettenl dans un plat de bois, dans lequel se trouve de I'eau en proportion avec la quantitt^ de racines machees. lis lavent bien le tout, et quand ils croient que I'eau est completement satur6c, ils jettent le rfeidu. lis prennent ensuite la tige d'une espece de Cyperus, qu'ils broicnt et dont ils se servent pour tamiser I'eau, afin d'enle- ver les parcelles de racine qui auraient pu rosier lors du lavage. Ce travail termine, ils obtienncnt un liquide d'lm blanc sale, d'un gout extrfimement acre et poivrt^, qu'ils SLR L ARCHIPEL DE MSNDANA. ?23 boivent iniirn^dialemcnt dans des coupes de coco. Des qu'ils ont bu, ils se rincent la bouche avec deTeau fralche ct vent se coucber dans les cases oii les femmes n'enlrent jamais. Cetle liqueur est tr^senivrante, stupefiante, et Ton recon- nait facilement ceux qui en font un frt^quent usage, a leur air bebete ,a leurs yeux injectes de sanget k leur peau ecailleusc. Ilaniau, chef de la bale desTaipis-IIumi, est un exemple frappant des d^sordres que Tabus de ce breuvage- peut causer dans Torganisme. Le piper metbysticum que les kanacs appellent hava maoi, est cultive en certains endroits. lis en distinguent trois autres especes ou van(5tes dont ils ne font pas usage. Quelques kanacs, mais en petit nombre, font de I'huile de coco qu'ils brulent dans des lampes en verre ou dans des Scales de ce fruit. lis sonl sous ce rapport tout a fait dans I'enfance et le plus grand nombre pref^re enfiler la graine d'un arbre qu'ils appellent 4wa (1), a des brochettes de bambou. Cette graine tres buileuse briile assez facilement, quoique la clarte soit loin d'etre brillante, et qu'elle donne beaucoup de fumee. Un autre inconvenient de ce luminaire est le soin continue! qu'il faut en avoir, c'est pour cela que dans les cases oii Ton s'en sert, chaque individu se passe la cbandelle a tour de rOle, en enlevant les graines qui ont fourni touteleur huile, et jusqu'a ce que le temps de I'ctein- dre soit arrive. Ceux des indiens qui prt^parent do I'huile de coco on raclent la noix et la font bouillir en y metfant un pen d'eau. L'huile par la chaleur se st^pare et surnage; on la recueille et on s'en sert ainsi. Cette huile est tres limpide plus blanche (I) C'est la noix dc bancoul, Aleurites triloba L. 2'24 NOTICE que riiuilc cVolivc, niais ollc ropand on brulant line odeur clesagreable, donne bcancoup de fiim^e et se congt;le mt}me a pliisieurs degrfis au-dessus de zero, ce qui en rend I'usagc impossible ailleurs que sous la zone torride (I). Nous avons dit plus baut que le vctcmcnt ordinaire de I'habitantdes Marquises consistail, pour Ics liommes en une piece d'etofTe qui leur ccint les reins en passant entre les jambes, et pour les fenimes, en deux tapas dont Tune plus petite, appelee ueu (Nouk.) parco (Tait.) sert de jupon et descend jusqu'aux genoux, tandis que I'autre, kahu, plus grande, est jeteenegligemmentsur lours epaules,afinde s'en debarrasscr facilement; mais quandccs naturels veulent se parcr de leurs ornements de fete, les bommes surtout se couvrent d'ornements bizarres, dont la confection demande beaucoup de temps et de patience. Le principal d'entre eux, complement ncccssaire de toulc toilette soignee, est le supcrbe tavaa compose de plusieurs rangees des plus belles plumes de la queue du coq, disposees en un demi-cercle dont la figure latouee du sauvage forme pour ainsi dire le centre. Cette parure, que peu de kanacs savent composer, est pour eux d'un ties grand prix, et vous offririez souvent une somme considerable, sans pouvoir en obtenir. On s'en procure uu moyen d'(icbanges ou par suite d'une connaissance prolongee. J'ai vu dans des fetes kanaques , des indiens en porter (1) Dans line Iraversee de VArldmise de Taili a Valparaiso, ou s'est servi d'buile de coco pour I'alimentation des lampes, mais arrive a 33o 29' de latitude sud, par une temperature de 12 a 16 degres centigrades, on a ete oblige d'avoir recoups a I'huile a briiler que la corvette avail de France en approvisionnement de prevoyance. SDR i/ahcihpel be mendx.na. m deax, trois et meinc quatre sur la lete, les i'paulcs et les reins. Lors de notre arrivt5e en Oceanic, Ics chefs de Taio- Hae sent vcnus a borJ de ['Artemise revelus do ces ornc- nients, et quand I'amiral Despoinlos y est arriv6 avec la division anglo-franQaise ciijuin 1854, le nombre des visiteurs etait encore plus considerable, les autres Iribus de I'lle ayant (5le avcrties dii jour oil la visite devait avoir lieu. Pendant toute la journee, le pont, la balterie, le faux-ponl de la fre- gaiC ont ete remplis de kanacs, homnies, femmes et enfants, qui ont danse tantotau son dc la musiquedu bord, lanlot au son des lanUams qu'ils avaicnt apportes dans cette intention, et apres avoir bu et mange a volonte, ils se sont retires la plupart (ransformes en europeens, ayant fait avec •les ofliciersel les matelots echange de quelques-uns de leurs v6temenls et portant le reste sous leurs bras. Un autre ornement de tele, qui dcmande aussi beaucoup de travail est le pehue licipipii, espece de diademe compost de plumes de perruche verles et rouges, collees sur une bande legere d'ecorce d'arbrc, au nioyen de la gomme qui suinto de I'arbre h pain. Ce diademe est entoure d'une bande d'etoffe tressce blanc et noir ou d'une rangce de graines rouges de Yabrus prccatorias, appclee vulgairemcnt pois d'Amcri(]ue. II on cxiste encore un autre genre, fait avec desecailles do tortues, dwoupees a jour, ct avec des coquilles d'liultres a pcrles, mais on ne Irouvc guere ces riciies ornc- ments dans I'lle de Nouka-IIiva, qui a ete beaucoup plus visitee que les autres. II faut aller a la Dominique et a la Madelaino, et avoir rendu un grand service a un ciief kanac pour qu'il s'en defasse en voire favour. II faut aux indigenes une patience a toute opreuve et surlout un temps considerable pour arriver, avec un n)anquc compU'ts d'inslrumcnts, a travailior aussi bion qu'ils le font, i26 NOTICE I'ecaille et surlout I'ivoire pour en faire les pipes, les manches des eventails, les ornements d'orcille, etc. 11 y a de ces derniers qui sont si volumincux qu'iis ont besoin d'etre soutenus par un cordon autour de la lete, sans quoi le lobe des oreilles serait dechir6 par ce poids demesure. Les petits sonl decoupt^^s a jour et reprc^sentent des figures hu- niaines assises sur des Ironcs d'arbre ou des denlelures plus ou moins composees. Les grands forment une plaque large comme le fond de la main, de pres d'un pouce d'(^paisseur, unie et par'faitement polie. Les panacbes que les kanacs composent avcc les longues plumes caudales du Pbaeton demandcnt moins de travail, mais n'en sont pas moins chers, parcequ'il faut de quarante a cinquante de ces oiseaux pour composer un panache bien fourni: un beau tua vaut encore quinze ou vingt francs. Les hommes ajoulent encore a leur parure des especes de hausse-cols dont la partie presentee a I'ceil est couverte de pois rouges. L'agrement de ces ornements est quelquefois rehaussepar des 6toiles, des croissants, des triangles d'ecaille de lortue. Pour collier, ils portent soil deux ou plusieurs dents de cachalot ou des defenses de cochon, enfilees et garnies au pied avec des tresses de coco. La reunion de plusieurs barbes blanches, forme un pana- che parahina dont la valeur est Ires grande, et qui ne voit le jour que dans des circonstances solennelles. Les barbes de cette couleur seraientun objetd'importation aux Marquises, dont on lirerait un joli benefice. II ne faut pas oublier un article indispensable a tout sauvage en costume de fete, ce sont les chevelures dont ils se cbargent avec profusion les poignets, les reins, les pieds, ou qu'iis suspendent a leur ceinture, et qui sont dispos^es d'une fagon parliculiftre, suivant leur destination. Avaient- SliR L AHCHIPEL UE MENDA.NA. 227 jls jadis, comme Ics Indiens d(yTAmerique du Nord, I'usage de depouiller les tn'tnes de fcurs ennemis vaincus, et de s'en faire un trophee do leurs victoires, tout porte a le croire; la preuve la plus ccrtaine qu'on puisse nionlrcr du resultat heureux d'une balaille est la possession d'une partie de sou ennemi terrasse; cliez les anciens, c'etait le bouclier, les etendarts; chez nous c'est le drapeau, ce sont les canons; en Asie ce sont les tentes; de la a la mode de porter des chevelures comme ornements, la transition est insensible. Les femmes, partout ailleurs plus recherchees dans leurs parures que les liommes, ont chez les sauvages des Mar- quises, peu d'ornements qui leur soient propres, si ce n'est le tokotoko-pioo, baton de 5 pieds de haul environ, fait en bois de fer el surmont6 d'une houppe de cheveux tresses. Quelques femmes portent des panaches de barbe blanche, des diadomes d'ecaille de tortue et des boucles d'oreille, Quand elles n'en ont pas, elles roulent une feuille d'arbre dans le trou du lobe, afin de Tempficherde se fermer. Elles aiment et recherchenl les bijoux europdens, bagues, colliers, anneaux, 6ping!es, les 6to(Tes Icgeres pour se faire des espt^ces de robes, les mouchoirs de sole qu'elles portent stales sur le dos et non pli^'s en triangle. Aucune d'elles ne porte de chaussure, pas mfime la reine Vaekehu. Quel- ques kanacs en font usage, mais c'est le petit nombre; c'est pour eux un tres grand luxe, et ils s'en dC'barrassent des qu'ils lo peuvent. S'ils vont assisler a une fete dans une tribu voisine, la paire de souliers est attachee sur leurs t^paules avec la chemise et le pantalon, et ils s'arrCtent a quelque distance du village pour faire leur toilette de c<^r6monie. C'est aux Marquises qu'on pout voir Ics plus beaux taioua- ges, et les habitants deed archipel ont un talent tout parti- 5*8 NOTICR culier pour tracer sur leur peau los dessins qu'ils montren't avec orgiieil aiix tlrangers. On peut s'eii faire une idco, si Ton regardc ceiix que la fantaisio ct le desoeiivrement font tracer sur lesbras, les mains et la poitrine des matelots. Seulement il faut supposor ce tatouage couvrant le corps tout enlier, et revetant I'individu des figures les plus fan- tasliques et les plus bizarres. Les parties les plus sensibles du corps bumain n'ecbappent pas a cette torture d'une nou- velle espece, et c'est cbez eux que doit s'appliquer mieux que partout ailleurs ce dicton populaire : qu'ilfaut souffrir pour dlrebcau. Le tatouage remonte a une tres haute antiquite, les prt'trcs de Bacchus se faisaient graver sur la peau une feuillc de lierre, Lucien rapporte que ccux qui voulaient honorer la deesse Isis d'un culte particulier, se faisaient tracer sur le cou etsurlespoignetsdescaracteres niysterieux, c'est ce qui a autorise plusieurs personnes ii considerer les tatouages des peuplades indienncs com me analogues aux hieroglypbes des anciens Egyptiens. Us out avance que les chefs les plus tatoueselaientceuxquiLHaient les plus illustres, ou par leurs ancelres ou par leurs actions personnelles, mais nous noussommesassurt^s qu'il n'enestrien, que les dessins que les sauvages s'imprimont sur la peau n'ont aucune analogic avec Thistoire de leurs aioux ou de leur pays, ou avec leurs histoires partirnlicres; et bien qu'il y ait certains dessins que Ton trace de preference sur telle ou telle partie du corps, cependant Timagination do I'arliste fait seule les frais de la disposition des lignes, des zigzags, des triangles, des cercles qu'on voit traces sur leur peau. Voicidu reste comment se fait cette operation : le (nhuka ou savant, I'artiste indien delaic dans une ecale de coco du charbon d'awa ou alcurites et a\ec une baguette tres fine il fait le dessin sur la partie du corps qu'il s'agit de SUR l'aRCHU'EL ou. me.nd.vna. 229 (alouer, il prend cnsuite un instrument appele to, compose d'un OS d'oiseau tailltJ en forme de peigne a dents Irts fines el lix6 a une lige de roseau, et la main droite armce d'un petit baton, coinmc celui dont se servenl, les peintres pour appuyer ieur main quand ils peignent, il frappe a petits coupssurTinstrument donlles dents sont egalementenduites de la composition noire, en suivant les contours dcssines surlapeau et fontainsi penctrcr ia'peinture assez profon- dement; le sangjailiit souvenl. 11 survient cnsuite un gon- flemcnt de la parlie tatouee, que le patient recouvre quel- quefois de plantes ecrasees. On se fait tatouer tanlut une partie du corps lanlot une autre, il y en a quclqucs-uaes pour lesqucllcs on est oblig<5 de (enir forlcmont rindi\idu, ct pendant qu'on le liitoue, le tamtam resonne, etlos oris du pati(^nt sont pordus au milieu du bruit. Tant que dure le travail ct le temps de la guerison le malade est tapou et tout ce qu'il louche est ^galement lapou. Les dessins que tracent les indigenes surquelques-uns de leurs meublesde bois, pipes, nianchesde baches, flutes, etc. se font avec des morccaux d'ecale de coco failles a angle tvbs aigu et reduils a la flamme de la lampe en cbarbon incandescent. Ce travail n'est ni long ni difTicile. Les vetements europeons sont rechcrches avcc emprosse- raenl. On obtient pour une chemise, une redingote ou un habit garni de boutons d'uniforme bien des choses qu'on n'aurait pas pour la valeurr(5elle du vetement qu'on offre. II n'est pas raredc voirun sauvage avecun habit, sans chemise ni panlalon, ou bien avcc une chemise ou un pantalon seul. J'ai vu choz Ilung-IIiai, ciiefde la Iribu des Taipis-Vai, un kanac aller s'babillor lorsqu'il nous vit venir; sa toilette ne ful pas longue, il mil sur sa lele un chapeau dc sole noire f30 Notice e[ le conserve, pour nous faire honneur, pendant lout le tt'iiips (le nofre sejour dans la case. Tous ces velemenls euro- pcens na paraissenl que les jours de fete, et lu ceremonie termin^e le sauvage s'enipresse de les quitter et de repren- dre son hami. « Tanl de nos premiers ans I'habitude a de force. » Les habitants des Marquises ne font guere de Iravaux d'association. Leurs routes ne sont quedes sentiers, oil deux pcrsonnes ne peuvent marcher de front, la case du chef est la case de reunion , elle est habituellement construite sur un des cotes de la place pubiique ou koika, qui est un espace de terrain en forme de parallelogramme, donile niveau est infe- rieur a celui des terrains environnanls, et enloure de gros blocs de pierre qui rappellent les constructions cyclopeennes; les kanacs d'une tribu se rt5unissent pour faire ce travail, mais cela n'arrive guere maintenant, car d'un cote ces construc- tions sont pour ainsi dire indestructibles, de I'autre la popu- lation des Marquises est loin d'augmenter et le besoin d'en creer de nouvelles ne se fait point sentir, au contraire, on en rencontre fr(^quemment qui sont entierement abandonn^es ctenvahies paries broussailles. Lesseulstravaux d'ensenible qu'ils font actuellement sont les pirogues de guerre et de peche. Chacun contribue a cette derni^re Industrie, les uns en allant abaitre les arbres, en les creusant, pour faire le fond de la pirogue, les aulrcs, en altachant avec des tresses de coco faites par les femnies, les planches qui doivcnt en augmenter la dimension ; ceux-ci en sculptant la (igure ii placer a I'avant, ceux-liien travaillant le mat, les pagaies, les voiles, les cordages d'ecorce d'hibiscus. Pendant ce temps, 11 setravaille ailleurs un grand lilet d'ecorce du mcme arbre, line petite case est construite expres pour les travailleurs, ils ysontrenfcrmes volonlairementjusqu'ace qu'il soil termim^ SIR l'archipel DK me.ndana. 231 et lesabords en sont sacres, tapous pour les femmes. Quand la pirogue et le filet sonttermincs, on fail une fete koika-ika; les hommes qui doivent s'embarquer dans la pirogue lu lancenl a la mer, el porlanl avec eux un dieu de pierre, ils vont peclier le requin dont ils sont Ires friands, ou se rabal- tent SUP d'autre poisson. lis reslent ainsi deux ou trois jours en mer, et a leur retour le produit de la p6che est rapporte religieusement et dislribue entre toutes les families de la Jjaie. Ilspfichent aussiaux flambeaux; quand la nuit est sombre et sans lune, ils vontau large dans leurs pelites pirogues, allumenl des torches de roseaux sees et reviennentlentement vers le rivage, le petit poisson les suit et quand la pirogue louche a terre, un kanac prend la torchc et les autres sont prels et ramassent tout le poisson dans des especes de filets emmanches que nous appelons havanaux ou havenets. lisle d(5posent dans de grands paniers de feuilles de cocotiers et la distribution s'en fait egalement par famille. N'ayant eu , on ecrivant cette notice, d'autre but que de faire connaitre les moeurs et les coutumes des habitants dos Marquises, je n'irai pas discuter les raisons politiques qui peuvent Clre mises en avant pour le maintien ou I'abandon de cette possession francaise en Oceanic, qu'il me sulnse de dire que si Ton voulait fortement coloniser ce groupe d'iies, et le meltre en culture, ce ne serait pas chose impossible, lant s'en faut, les Anglais a I'Ascension nous ont prouv6 ce que peut la voionle de Thomme, mais il faudrail bcaucoup de lemps et de bras, la constitution physique du pays meltra toujours un obstacle Iri-s grand a une culture de denrt^es coloniales sur une grande ^chelle, cnfin, avant de consacrer descapitaux considerables a une exploitation quelconque, de cafti, de Sucre, de riz, de cacao, do I'indigoou de colon. 232 NOTICE il serail necessaire de s'assurer auparavant si la venle Je ces deni'6es sur ui)e place de commerce soil en Europe soitei> Ain(}riquc couvrirail a la fois et les frais de culture ct ceux de transport, qui seroiU loujours fort elevi''S, eu egard a la position du groupe par rapport aux autrcs parlies du monde »u dies pourraient ctre achetces^. NOTES. On lil dans le supplement au I. XI de IHistoire generale Jes Voyages, continuation de labbe Pievosl, cc qui suit, relatif au second voyage de D. Alvare de Mindana, en 1595. Ce second voyage est intitule : Descubrimiento de las Islas de Salomon. Mindana partit de I'ayta, viUe du Perou, avec Fernand Quiros. II aborde a a un grnupe d'lles (juil appcla Marquises de Mendoce, et que iJudJpy (Tuit etre los menies que celies qu'on s'avjsa d'appoler ties de Salomon, sur la ridicule supposition que c'ctait I'Ophir oil les vaisscaux du roi des Hebreux allaient cherclier de lor. I.e narra- tcur continue ainsi : « ... lis nous lancaient des pierrcs a coup de froiide, dont un » soldat eut le bras casse C'etail nnc chose (?pouvantable que y d'entendre le bruit et les cris de loute cctte poi)ulace qui s'en> > barassait dans les canots; les sauvages voulanl tons se cacher les f uns derriere les autres. ... Nous en decouvrimes Irois aulres * que le commandant nomma Sl-Picrr-.-, .Mngdelaino el Dominique. 23i NOTICE > Les deux premieres soiit basses, bien boisees, etd'environ quatre » lieues de circuit. — Je ne puis dire si ellcs sonl habilees ou noii. » La Dominique est plus grande, elle a bien Ireize lieues de tour. » L'aspect en est tout-a-fait agreable, plein de beaux arbres et de » bonnes baies. Elle n'est separee d'une quatrieme nommee I'lle » Chiisline que par un canal limpide et profond, large d'une lieue. » Le commandant nomma toutes ces lies reunies les Marquises de » Mendoce... Cette lie Christine est bien peuplee, haute dans le » milieu, pleine de roches etde vallees, oii les insulaires out leurs » habitations. Le port, faisant face a I'ouest, est en fer a cheval... » Les naturels de cette lie sonl plus basanes que ceux de la » Magdeiaine, d'ailleurs, c'est a peu pres le meine jargon et les » memes usages. L'habitation est disposee en equerre sur deux » lignes, bien pavee d'un cute et de I'aulre, disposee en place » publique plantee d'arbres. Les maisons sont plus elevees que le » sol, couverles a deux eaux. Les portcs sont basses et les fenetres » percees vis a vis dans le mur oppose; elles paraissent communes, » du moins vimes-nous un grand nombre de places h. coucher » marquees dans chaque cabane. Les fcmmes ont le visage et la » main ires jolis, la taille fine, le corsage bien fait, le teint est » passablement blanc, en un mot elles sont mieux que nos plus » jolies femmes de Lima. Elles sont vetues de la poitrine en bas, » d'un fin tissu d'ecorce. Nous vimes pres de la bourgade une » espece de temple ou sanctuairc, forme d'une enceinte de palissades » oil etaient quelques figures de bois mal travaillees, auxquelles les » insulaires presentent pour ofTrande di verses choses comestibles. » ... Leurs pirogues sont fort bien creusees, d'une seule piece, » quilie, poupe et proue, recouvertes de planches et amarrees en » cordages de cocotier. II y en a qui tiennent jusqu'a 30 et 40 » rameurs. lis Iravaillent avec des doloires d'os de poissons, etdes » berminettes de coquillages, qu'ils aiguisent sur de gros cailloux. » Les forces, la stature el I'air sain des insulaires sont de bons » indices de la temperature du climal (1) » (11 Pour plus de details sur la panic historique de ces lies, on pourra consulter I'ouvrage de JLM. Vincendon Dumouliu el Pesgraz. SUR L'AnCHIPF.I. DR MENDANA. 233 2. Oil conserve encore les cercueils dans les cases en les placant sur des traverses, dans lapartie superieure. II y a quelques tapous a observer dans cette circonstance : on ne pent se coucher sur la natte dans la partie de la case ou se trouve le cercucil; on n'y met jamais la lurniere, etc., etc. — II faut signaler ici I'habitude qu'ont les indigenes d'emporler les morts avec eux, ou de les cacher pour qu'ils ne tombent pas entre les mains de leurs enneniis. 3. L'un de nos premiers missionnairesaux Marquises, le P. Mathias G — a publie en 1W3 (1), une grnmmaire dans laquelle il cherche a etablir des regies pour le langage de ces peuples, mais je doule que celles qu'il pose soient bien conslanles, d'ahord parce qu'il a ete trop peu de temps dans I'arcliipel pour pouvoir comprendre le genie de celle langue d'une maniere complete, et qu'ensuite, malgre son desir d'etre exact, il a pu etre induit en erreur par les expli- cations qui lui elaient donnees. Le chapitre de ses lettres oil il traite du langage montre que ce missionnaire desirait faciliter I'etude do la langue marquisienne, et bater la civilisation des indigenes; mais les regies qu'il donne ont besoin d'etre confirmees par de nouvelles eludes. II a paru, la mume annee, (2) un Vocabulaire oceanien-francais et francais-oceanien des dialecles des lies Marquises, Sandwich, Gambler, etc., par I'abbe Boniface Mosblech. Si cc vocabulaire eut etc fait avant notre arrivee aux Marquises, il n'aurail pas reiiferme un aussi grand nombre de mots, car beaucoup d'objets dont nous nous servons (itaient inconnus aux habitants de ccs lies, et il a fallu creer des mots pour les exprimer dans leur langue. Pour les (1) Chez Gaume freres. (2) Paris, Jules Renouard et C'- libraires-editcurs. f36 NOTICE. Glioses qui lonibent sons les sens, la difaciiltL- n'eslpas Ires grando, niais pour les idees nielaphysiques ou morales auxquelles ces indigenes n'avaienl jamais songe, ellc est quelquefois insurmon- taMe; aussi nos riiissionnaires ont-ils beaucoiip de peine a se faire comprendre quand ils veulent leur expliqucr les dogmes du Chris- tianisme. Le P. Dordillon, qui est dans I'archipel des Marquises depuis plus de huit ans, travaille avec perseverance a un dictionnaire de celte langue. II la connait deja fort bien, et cependant il avouc qu'il est souvent embarrasse pour s'exprimer dans les instructions reli- gieuses qu'il leur fail, a cause de la difficulte de traduire sa pensee, I'expression propre manquant, et I'cbligeant a se servir de peri- phrase. Le dictionnaire du P. Dordillon sera aussi complet qu'il est possible et coniprendra les noms de toules les especes d'ani- maux, de vegetaux et de mineraux determines par les naturels. On remarque aux Marquises un assez grand nombre de mots qui tirent leur origiue de I'angiais. Ainsi les naturels appellent iepe, navire (en anglais ship); ■manua, batiment de guerre (man of war; ; tara, piece de cinq francs (dollar); f,ele, cloche (bell); karai, verre (glass^; pulue, faire sorlir (pull away). Le francais et le latin leur en ont fourni aussi une grande quantite : glace, kakalci; heure, hora; niilre, mitera; myrrhe, vnra; inyrte, mureta; vinaigre, rineka; vin, vino; analheme anatema, elc; le latin : encens, libano, et plusieurs mots de la lithurgie. Ces noms modernes sont indi- ques dans le dictionnaire de I'abbe Mosblech. 4. Les amateurs de curiosites ne seront peut-etre pas faches de connaitre les noms indigenes des differents objets qu'on peut se procurer aux iMarquises, soitau moyen d'echanges, soit d'une autre facon. En voici la nomenclature : (1) (1) On a deja fait observer qu'il faul prononcer la letlrc v comme i'il V avail ou. suit l'arcmii'Ki. de menda.na. $37 Casse-tete, e uu. (l) Tambour, e pahu. HacLe en pierre, e toki. Pagaie, e Aoe. Conque de guerre, e patoka. Fronde, e tnaka. Baton de f6le, e tohotokopioo. Cocos sculptes, e ipu a e/ii |'A'e«u to/. Echasses, e tapuvae. Plat a popoi, e kooka. Rape a coco, e /ip/ca c/a'. Pilon a popoi, e Aea tuki popoi. Instrument pour tatouer, e taa patu tiki. Flute ordinaire, e pu, Fliile avec laquelle on joue a I'aide du nez, c pu ihu, Ornement de tete en plumes, e tavaha. Un autre, e p4ue. Un autre, e peW ftei pipit. Un plumet en plumes de phaeton, e tua. Id. en barbes blanches, e pava. Des boucles d'oreillesgrandes, e hakai ei. fd- petiles, e putaiata. Ornements des oreilles, e Kouhau. Chevelures des mains, e topepu. Id. des pieds, e poe. Id. des reins, e hope moa. Id. rondes, e tilipakeki. e pohutu. Diademe en ecaille, e poekaha. Ornement en pois rouges, e E^ UO€€\ClE, I LE CUISINIER ET LA GRUE. La frayeur quelquefois donne aux gens de I'esprit. A ce sujet, voici ce que Ton trouve ecrit Dans le Decameron, ouvrage de Boccace , Conteur naif et plein de grace. A Florence vivait un opulent seigneur, Guido Cavalcanti, passionn6 chasseur. Un matin, son faucon lui ramene una grue Grasse, potelee et dodue Un mets de prince; a son cuisinier La bete est envoyee et doit, de son diner, Eire le plat d'honneur ; par les ordres du maltre, Notre artiste fera paraitre Dans ce rOti tout son talent. Du signer Guido, cependant, L'humeur agreable et civile Le fait ailer iiors de la \ille 2o6 FAALES ET CO.NTES IMITES DE Visiter de nombreux amis ; II ne doit que le soir, retourner au logis. Depuis une heurc et plus, a la broche fixee, La volaille , en tournant, d'une oJcur embaumee Parfumait la maison et tous les alentours, Quand Brunette survient, Brunette les amours Du despote de la cuisine. Du r6li, cuit a point, la succulente mine Fit sur la signora si grande impression, Que succombant a la tentation, Elle exige que d'une cuisse Son soupirantlui fassedon. Moi, dit I'autre, que je pt5risse Si j'y consens, pour qui me prendrait-on ? Brunette soyez raisonnable, ^ Ne me rendez pas miserable En exigeant ce que je ne puis vous donner. Mais elle, de I'abandonner, Jure, s'il ne fait droit a cette fantaisie. Bref, le pauvret craignant de perdre son amie, Plus encore que le baton, D'une cuisse fait I'abandon. Du diner, cependant, I'beure clait arrivee; Sur la table bientot la grue est apportee. — Que veut dire cela? quel est I'impertinent Qui, de cette volaille, a pris, impudemment, Un membre ! s'(5crie en colere Le mattre de ceans. De notre pauvre pauvre here, On pcut se figurerct le trouble et I'efTroi. — Monseigncur... ^coutcz... Monseigneur.. croyez-moi... I LESSl.NG , <;0KT11E KT BOCC.VCE. Sj Lc bon Diou n'a donne qu'une cuisse ii la grue? — Qu'une cuisse, maraud!... mais demain a ta vue, J'en veux exposer un lioupeau Et prends garde, alors, a ta peau Si de plusd'un seul pied nous les trouvons pourvucs. — Or il faut savoir que les grues Se rassemblent, le soir, sur le bord des etangs, Par un epais taillis mis a I'abri des vents, Et qu'ajant ramene sous elles Un de lours pieds et sousleurs ailes. Insert leur long col, elles passent la nuit Debout sur un seul pied. — De grand matin, sans bruit, Maitre et vuletarrivent a portee D'une troupe encore plongee Dans un profond soinmeil. — Voyez, maitre, voyez, Elles n'ont qu'un seul pied el si vous m'en croyez, II faitfroid, retournons do ce pas a la ville. — Le detour n'est pas malhabile, Repoad Guido, mais attends un moment. Observe quel sera d'un cri I'l^venement. — Endant alors sa voix : Hal Ha ! Ha ! Chaque grue, Baissant son autre pied, disparait u la vue Du coupaijle deconcerle. — Ell bien ! maitre iVipoii, comment sera traite L'auteur d'un si liardi mensonge? — De grace... un moment... mais j'y songe? Hier (juand j'ajiportais lo plat, Yous ne ciialcs pas Ha ! Ha I llien d'etonnant que la cuisse caclice A vos regards ne se soil pas moutroe I — n r\»l.C5 KT OONTES DE LESSilXG, 60ETHR F.T BOCCACE. 25S Ce trait d'esprit, arrache par la peur, Mil Guido de si belle humeur ^ue de son mailre queux il pardonna I'offens* El !e boo raot, bientot, circiila dans Florence. C^ RENSEIGNEMENTS sun L'IGLISE SAIHTE-TRINITI DE CHERBOURG, AVAI^T 1794, RECUEILLIS ET MLS EN ORDKE , PAR I/eglise Sainlc-Trinile fiit pillciM-'l devastcc hi l9.j:itiviiM' 1791. — Doiirot (lies Basses-Alpos;, roprtscnlr.i'.tdii poiiple, fill cri\nyi! a ChnLoiirg poiii' y al)olii' leLHillo I'li Clirisl. La veillo (111 pillagv, il avail ordonne a Ions los ciloycn.s tlo se (1) Nous devons rs,-* prt'cieux renscignsment* a M. \ iclor Isselin, in're flii ssv.int oiieiitalisto. 26a HENSrifiNEME.NTS SUR u'eUMSE retinir k Icnrlemain a I'^glise, afin d'y lenir une assembles federative. Dcs sept heures du malin, il fut ordonneatoutes Ics personnes qui en avaicnt Ics clefs, de les remetlre a la [Daison coiniiiune. La municipalitt^ et les niembres du dis- trict se rcndirent a I'eglise avec Bouret etDelisle, son secre- taire. Le cortege et le peupleetant assembles dans le temple, le syndic du district monta en chaire, et, apres avoir donn6 lecture des journaux de la Convention el de ceux de Hebert, connu aussi sous le nom de pere Duchesne, il arracha le saint Esprit qui etait plac6 sous lecouronnementde la chaire, en disant : Que fait ici ce pigeon? Mors la devastation com- menga. Des forcen(5s s'l^slancenl vers le choeur, en brisent les portes et les balustrades, renversent I'aigle et le vautour qui couronnaient le lutrin, montcnt sur I'autel et en enfoncent le tabernacle. Les uns prennent les ciboires et mangent les hosties ou se les jettent a la tete, les autres s'emparent de I'oslensoir et s'en partagent les debris. Les autels furent renversds. On abattit les images. On lacera les tableaux, les draperies des chapelles, les bannieres, les ornements des pre- tres. On mit en pieces le monument nomine vulgairement le Paradis, les orgues,lesstalles, les bancs, lesconfessionnaux, les cloches, les vitraux des fenetres. On renversa le calvaire. Enfin, quelques joursapres, on depava I'eglise etdes macons furent appelcs pour ani^anlir de nombreux bas-reliefs et pour piquer des inscriptions qui se trouvaient ca et la, tant a I'intericur qu'a I'extiMieur de I'eglise. On doit allribuer ki plus grande parlie de ces desaslres aux jeunes conscrits de Valognes, qui lenaienl alors garni- .son a Cherbourg. SAINTE-TRIMTE DE CHEKBOIRS. 261 I. Ic Chflenr. — Le choeur cHait ferme par des balui- Irades en bois tie cliene, faconnees en batons de vignc etcou- ronnecs par uno frise a jour. II y avail qiiarante-luiit sialics aiissi en chene, richcmenl scluptees. Les volutes des accou- doirs figuraicnt des langiies de bceuf, et le dessous, qui L'lail a jour, formail une belle denlelle. Le lulrin, d'un tra- vail grossier, elait couronne par iin aigle dticliirant un vau- tour. On voyait sur Tautcl une chaire d'exposilion entour(5e de quaire colonnes unies, percees ajouret dort^es. Le tableau de conlre-table, qui etait d'un grand uii'rite, representait deux anges annoncant a Sara qu'elle enfanterait un fils. L'autel elait surmonte des trois personnes de la sainte Tri- nile {!). II elait peint en noir, el to u les les sculptures en etaienl'dorees. Aux deux cijles du choeur, et au-dessus de chacune des portes lalerales, il y avail un fort beau tableau : celui dcdroite representait saint Francois-de-Sales, etcelui de gauche, saint Cliarles-Borromee. Le derriere de ces tableaux elait peinl et convert de fleurs de lis d'or. Au-dessous des enibases des colonnes, sur les credences, c'laient les portraits de Jesus et de la Viergc : on les atlribuait ii Raphael. Les piliers du choeur etaienl orn^s du portrait de sainte Cecile et de tableaux representant les quaire fins de I'liomtne : la .niorl, le purgatoire, le paradis et I'enfer. .Vnbe, €ftzci£ix. — Le jube so connposait de trois pcumeiiux, dont deux, de forme carree, elaicnt orni'-s d'une guiriande; le troisieiue, celui du milieu, etait cinlrt^ i.'t (]) Le jour si baliilenicnt niennge pour cilairor le triangle rayon- nam qui sunnoiUe le mailrc anlcl esl I'ouvrage de M. Frcret. sculpteur. Ce trav;iil a ete execute en 180a. AvanI cetle epoque. les bnluslrailes a claire-voie faisnient le tour iln ciia'ur, donl deux iu'lilt's feii'Hrcs ojivalcs eclairaient le clicvet. ro|:ro3ent:;i[ on bas-relief la Madeleinea denii-coucli5eeleva»l 311 tele \t'!s lo Cbrist. l.e ci'ucitix elait iiri clief-d'cieuvre de soiilptiia^ Deux SMclc.-, I'lm a droile et Taiitre ii gaiiclic, porlaienl, comme aijjoiird'liui, los sl;Uucs de saint Jean ct do la Yiergc Bi. r.hapeiSc Salsst-JIcfJBJ-BKptBstc. — En dehors dii c'licewi-, dii cote de repilre, el en avant de Tun dcs deux l»ilie!'s de I'entree, se trouvait rautel de suint Jcan-Baplisle. Au-desiiis de la corniclie, on voy;:!! ce saiot, une croix a la main, ii'vefa d'unc peau de moulon et accompogn6 d'un agnoau conclic a scs picds. A sos cfites, elaient ies evangel is- les saiiilJean el saint Malliieu. Le tableau de conlrc-table ropreseiiiail la nalivile de saint Jean-Bapliste. Sur Ies gra- dinsde Taulel, il y avail deux pelites statues , I'unede saint Zacharie et I'autre de sainio Elisabctb. @SS. Ciijspelle cle la SaaEste-Vieii'gc. — De I'au- Ire cute de I'enti'ee du cbccur, etaiH'autt'l de la Vicrgc, etabli paralielenient h celui dc saint Jean-Bapliste. Stir la cornicbe on voyait Marie tenant I'enfant Jesus, el ayant aupres d'elie Ies propheles Isaie et Jereniie. Lc cou'.'onnen'tciit dc Fautel purlait tiuati'C pctits anges posant sur sa tete un diailemc de douze ctoiies. Le tableau de contre-table, representant sa nalivile, elait accompagni^ fles statues de saint Joachim et de sainle Anne. ■ BV. ChapelSe Saias^- JJaefiEscs. — Pres du lane actucl des marguillers, elait I'autel de saint Jacques ( I ). Ce saini, qui porlait le costume des pelerins, tenait un baloa (II A ci;llo chapelle (eiKiit un b;inc rjui h\'., en 177«, IVibjot d'lin loiTj dobat onlrc M. Dumourioz, coinmniidaiil a Clicrbuiirg, el la euro, Ies r'cbovins, Ies mai-gnillers et Ies confreres Je la Merge (!a ligliso P;iiiilo Trinite. \ HAl.NTE-lRIMTE DE CHEKBOUftG. 263 d'oii poiulait line gourde. II a\ail iin cliapeau ii la Henri IV, orne d'line coqiiillc. A sa droile, on reniarquait la statue de sainte Appoiine cl ii sa gauche celle de saint Maiir, abb^; aupres de cc dernier se trouvait saint Gilles, ayant a ses pieds I'atlribut qui le caracterise. v. Chnpclle Sninte-Catheriuc. — Parallelemenl a I'autel Saint-Jacques, pres de la cliaire, c^ait I'autel de sainte Calhei'ine. Cette sainte tcnait los instruments de son marlyre et avait a ses cotes saint Sever et saint Nicaise. Le premier de ces saints 6U\\l le patron des tisserands. Celui des lisseurs qui faisait la toile la plus fine, deposait aux pieds de sa statue une canette ou fuseau de fil. Saint Nicaise elait le patron des drapiers. VI. ChapeUe dn §>aiut-Sacreiueut (i). — Dans lii nef de gauche, en entrant par le grand portail, on voit encore la chapclle du SaintSacrement; mais, avanl 1794, il y avait, au lieu de la cornichc actuelle, une frise sculpt(^c en dentelle. On y rcmarquait trois tableaux donl les [lersonna- gesetaientde grandeur nalurelle. Celui du milieu reprteen- tait la cene de J. C. avcc sesap6tres. A droite, on rcmarquait le sacrifice d'Abraham, et a gauche le prophete Elie dans le desert, couclie sous un arbre. L'autel, a la romaine comme colui d'aujnurd'liui, avait un tnbcrnacle d'une grande sini- plicite, en bois dj chone. Un ange adorateur ctail place de chaque cote. Une balustrade en fer ferniait le sanctuaire. vsi. €Siitp4>9Ee cSc J!esus. — En monlant sur la gauciie, on trouvait la cliapellc de Jesus. Elle supportait un (i; I.a coiii-triiclion d'lino cliiiiielle iiarcillc :i colle du Saiiit-SucrG- ment aun.it i'ni'. exrcutoc sans la rofonle ^'(.■iieralii do.'; cloches (pii f>u( lien en ]"l, el qui avail epuise les ressnurces du la faliriiiuf iNot« lirc^e d'uri nieiiioire jioiUnt la dal« du II ()i|iilir« i77S.i 204 HtNSEIGM'ML.NTS SUU l'uGLISE roiironnc'inent represenlanl un Ecce Homo accompagnc de tlrux iiDgos h genoiix : cliaciin d'oux len.iit un coiissinet cliiirg6 tlos JivcTi inslrumenls dc la passion. Siir Icsembasei (It's colon rics, en dehors, on voyait la slaliie de sainlc Margiierito, celle de saint Clair el un bas-relief de sainle AvoJc dans sa prison. Jesus au jardin des Oliviers etait le sujct du tableau de conlre-lable. Au-dessus de la porle laterale de cette chapelle, sur renlablemenl exislant encore anjonrd'lini, on remarquait d'enormcs statues en pierre ealeaire, represenlanl les deux premieres personnes dc la saiiile Trinite; un triangle en fer, scoUe derricre le dos de ces statues, soutenait le saint Esprit. Sur Ic-s piliers, a droiLe de I'autel, etait adosse saint Ck^mcnt, pape, ayant une ancre a ses picds, et au dcvant de lui unc petite fregatc du nom cYEole, suspendue a la voute. VJS3. CiaapeSIc Saigic-Si^ljasficM. — Plus loin, du nieiuc cute, etait unc chapelle dediee a saint Sebaslien, et connue aussi sous le noni de chapelle de saint Frangois. On y obscrvail la statue de rilluslro martyr, accompagnet de celle du patron des cordeliers et d'un gioiipe reniarquabic. Une tour a la porte de laquelle se lenait debout sainte Barbe consicrnee a la vuc de son p6rc foudroye a ses pieds, lei etait le sujet dc cc groupc. Au-dossus des gi'adins de I'aulel, il y avail deux rangs do bas-reliefs, en a!!)alrc, represcntant des chevaliers. Contre I'un des piliers de I'arcade qui formait I'enlree de la chapelle, so Irouvail la slatu3 de saint Crcpin. ax. CSiapelSc SaiiBi-FacB'rs. — La dernicrc cha- pelle de la nef du Nord, situt^e a I'endroit oil est acluelltnient la poitede la sacristie, etait dedii'C a .saint Pierre. Surie liaut de. la cornjrho, assis sur un Irone et re\etu des insignes do la japaute, les autres apolres. renlouraicnl avec leurs atlri- luU>. Le tableau dc contre-tablc represcnlait saint Pierre a S.U.NTi:-TRI.MTE UK CHKRBOUna. 903 genoiix pleurant ses peclics. Sur le pilier do dioitc, h ren- Irt^e meme ilu choeiir, on voyait saint Nicolas hi-nissant den enfants; on y remarquait aiissi la statue 6qiicstre dc saint Martin coupant un pan de son mantcau et le donnant a un pauvre. En face de Tautol, ctait snspendue a la voOle uiie petite barqne de pcche dii hord dc iaquellc pondait un filet, allusion a I'elat primitif des disciples du Saiivenr. X. Chapcllc SaSiai-l^lafhcI. — Dans le liaiU de la nef de droite, et pros da clioeiir, se Iroiivait la clinpello de saint Michel. Sur la corniche, on remarquait le prince d(! la milice celeste, arme d'une lance et percanl Satan, qu'il lenait sous ses piods. A ses coles elaienl les statues de saint Come et de saint Damien. Le tableau de contre-table represontait I'Arcliange foulant ajux pieds Tennemi du genre liumain. Sur les gradins de Taulel, il v avait deux rangs de petits bas- reliefs en albatre, dans le genre de ccux de la chapelle Saint-Sebastien. On y voyait encore les statues de saint Denis et de saint Romy. XI. Chapelle dn Saiut-Sepulcrc. — En descen- dant du mijine cote, on arri\ail a la cbapelle du Saint- Sepulcre. Le couronnement portait le relief de la Resurrec- tion. Le tableau dc contre-table avait pour sujet la visile des sainlcs femmes au tombeau de Jesus. Ce tableau, actuellc- nient place a raulcl des morls, fut sauve des mains des vandales de ITOi par les soins du sieur Robin, lulliier, qui s'emprcssa dc le rendre h I'cglise, aussitOt que le culle y fut retabli. II a iHe restaurcel modilie dans sa forme, primili- venient plus large que haute, par le peinti-e Langevin, qui y a ajoute de la toile pour y faire une lerrasse et un ciel. Sous I'embrasure dc la croisee, il y avait un pclit caveau, en f(u-me de tombeau, avec des statues en pierrc calcaire, qui repri^senlaient Jesus inoit el couclic dans un linct'uil, Jrsrpit S5S SEXSEUiNEMENTS SUR l'EGI.ISE (I'Aiiinalliicel Nicoilirne tenant les coins du suaire, clacconi- pagnes (!e la Vierge, de saint Jean et des Irois Madeleines. M. I'abbti Demons nous apprend, dans son Histoire reli- (jiev.se da Cherbourg, qu'il exlste aux archives de I'^glise Sainte-Trinitii iin conlrat, portanlla date du 16juin 1644, ivlatif a la cliapelle du Saint-Sepulcre. Cetle piece constate que par un accord fait enlre Charles Le Sens, seigneur ct ])atron de Cosqueville, d'une pari, ct le clerge, les uiarguil- lors, !c mairc et les 6chevins de Cherbourg, d'aulre part, ledil seigneur de Cosqueville, scs hoirs el descendants en ligne droite, auront leur seance et sepulture avcc tons droits honorifiques en ladile cliapelle, par preference a tous a litres (1). XII. CissajJcHe Saireft-EiSesBMe. — Plus has, du ni<5me c6te, on trouvait la chapelle de Saint-Etienne, vulgai- remcnt connue sous le nom du Rosaire. Sur la corniche, on voyait saint Elienne niontant au ciel. Le tableau de contre- table represcntait la V'ierge ct I'enfant Jesus dislribuant des chapclels a saint Dominique ct a saintcThcrese. Dans I'em- brasure de la croisee, il y avail une statue de saint Eloi. Le tabernacle renferniait un ange en argent, porlanl une petite chassft contenanl un morceau du bois de la vruie croix. Le jour de Paijues et la s^inaine suivante, on cxposail cct ange sur I'aulel de saint Jacijiies. Enlre les offices, un enfant de choeur criait de lemps en tem[)s aux fiddles : Vencz adorer le bois de la vraie croix; et cliacun s'emprcssait d'y aller deposer son on'ramlo. XSBB. CDsapelle Sstinte-Aiiite. — Enfin, la derniere cliapelle de la ncf du sud otail dediee ii sainte Anne. La md're (1) Demon'!, nUt. civ. r! rrl. de Cherfr., p. SI. SAl>TK-TRIMll£ DE CHKHUOUUi;. f(»7 do la Vicrgo ensoignait a liro ;i sa fillc, qui etait ii g<^noux ii bOS piods, el saint Joacliim sc Icnait dcljoiit dcrricre elle (ll. IflouHsueiit tie I'Assosnptiou. — Dans lo liaul de la voiile de la grande ncf, dovant la croisoe, on nprrcevait un monument appele bizarrement jiar quel(]nc's-iins la Grippe'e, ct [)av il'tiulrcs Notre-Damc-MoiUec ou le Paradis. Cc monnment roprosenlait lo paradis tcrrcstrc. On y remar- quait Adam ft Eve parmi des arbrcs, ct, a une ccrlaine liauteiir, on voyait dcs personnages de mediocre grandeur, inns par des ressorts ct figurant I'Assomption de la sainlc Vierge ct son couronnement dans le ciel. Marie elait cnvi- ronnec d'line infinite de pelits anges tenant des flambeaux, qui, lorsqu'ils etaicnt allumes, donnaient a ce mecanisme un as[)ect toul-a-fait hicrviMlleux. Les demolisseurs do 1794 eurent l);>aucoup de peine a detruire celle niacbine cons- truileavec line extreme solidite. ©raises. —Les buffels d'orguos, composes d'un quart do jeu, elaicnt place's a I'enlree de regliso commc ceux d'aujourd'liui. Le premier prenait les deux tiers de la nef, et le second, place an-dessus, occupait une grande partie de sa largeur et s'elevait presquc jusqu'au haut de la vonlc. Le couronnement consislait en une statue represenlant la rt'surreclion du Sauvcur, 'enant sa croix ornee d'une bande- role. Deux anges, a genoiix a ses coles, sonnaient de la tromprtle. C'JjaiiT . — La cliairc d'aujourd'liui est celle qui exislait avanl la premier.; revolution. On la consei'va dans le^but de servir a la lecture des journ;uix, les jours de decade. Cotte cliaire, cxeculee par I'iorre Frerel, est pleine de gout et d'ek'gancc. 'i; Toutes les statues de Irgliseet^icnlpeintesdcdiversescouleHi-s 508 nE.XSElGNEME.NTS SL'R I.'kGLISE Chapes. — II y avail dans notre eglise Ircize jcux de chapes, dont unesurtout, do velours aniaranlhe avec brode- ries d'or, se faisait rcmarquer par sa rare beaule el par sa grande ricliesse; surson dossier, d'lin bleu d'azur, elaient brodees les Irois personnes de la Trinite. On pensail commu- n^ment qu'elle avail ete donnec a I'liglise par FranQois V^, lors de son voyage a Cherbourg, en 1332. Biaainicrc. — La banniere, de damas rouge, represen- tait la sainte Trinity, palronne de Cherbourg. Balustrades iuterictires. — La claire-voie du choeur en faisait aulrefois le lour, mais la portion qui se trouvait au chevel fut demolie en 1809, pour la construction du nouvel autel. La balustrade de la grande nef, du cold de I'evangile, etait decorec d'unc superbe danse macabre. Parmi les personnages, on en remarquait.qni porlaient la tiare el la mitre. 11 n'en reste plus pour indice aujourd'hui que le tambour du squelette qui les conviait a la morl. Les grands bas-reliefs qui ornaient la ciaire-voie du cOte de l'(5pilre, repr(^sent;iient Adam et Eve dans le paradis terrestre el des seines de la pa^-iion, notammenl Jesus au Jardin dos Oliviers, puis dcvant Pilate, le Sauveur traversant le torrent de Cc^dron, etc., Judas pendu a un arbre, enfin une ville fortifiee, que nous voyons encore el qui est Jerusalem. Balustrades e:e:ierBeiires. — L'une des claires- voies exteiicures, au sud de reglisc, offrait une serie de medallions, de forme ovale , rcprescntant les busies des saints apotres Pierre et Paul etd'autres illustres personnages. €Iefs de Toistc. — Ourlques clefs de voute portaient des blasons ciseles; d'aulres, des angcs el divers allribuls. L'une de ces clefs, dans la nef du sud, represente une fortercsse. A cause des qualre tours dont ellc est llanquee, nos p6rcs y voyaient, dil-on, le donjon du chateau de SAINTE-THIMTK DE f.JlEUBOina . SCt Cherbourg. En efTct, cet edifice avail qiiatre tours, et \c relief dont nous parlons pcut Lion, si I'on vcut, en tHre rimage. Cloches. — II y avail six cloches (1). Cinq ont disparu dans \ii revolution. La premiere, qui est aujourd'hui la seconde de notre eglise, fut conserveo pour Tannonce des decades. Ellc porlait I'inscription suivante : L'an 1774, nommee Charles, par M?"' Charles Maurice, prince de Monaco, comlede Valentinois, grand d'Espagne, gouverneur de la villc el citadelle de Cherbourg, en Basse-Normandie, ropresente par M. Jean Dutot, subdeiegue, portcur de sa procuration. Jean le Therouilly, licencie os-lois, nous a benites (sic), etant marguillers en charge MM. Demons de Garanlot, Couey-du-Cmiaysel, negociant, et de Laire, direc- leur de la posle. Dubosq I'aine nous a faites (sic) (2). Ostensoii*. — L'ostensoir etait en vermeil, et la croix qui le surmonlait avail unc couronne enrichie d'un beau brillant du prix de 3000 fr. Ce diamanl avail ete donne a I'cglise par M. Deshayes, commissaire g(5neral, ordonnateur de la marine a Cherbourg (3). Croix, Lainpes, Chandeliers, etc. — II y avait cinq croix en argent. Trois appartenaienl au tr^sor de I'eglise, el Ics deux autres aux confreres de Jesus el de la Yicrge. II y avait encore deux lampes ct deux chandeliers (1) Ces cloclies avaient el6 fondues a Cherbourg, en 1774, dans le jardin des frercs des Ecoles chrtjlieunes, Iransforine dopuis en cour de l'Il6lel-de-VilIe. (2) Nous devons la copie de celle inscription a .M. labbe Demons. (3) Ce renseignement est du a .M. Auguste Fontaine, ancien Lijoutler. 57M BE.N8K1GNF.MF.NT« SI R LEGIvlSr. d'iicolyle, enfin des encensoirs et doiix paix. Tous cos olijels fiircnt rcmis a la coiiimuno par ordrc du syndic dii disliici, pour t'tre converlis en nionnaios. Fasids foaptismaiBx. — Les fonts baplismanx (Jfaient places siir la droite de la grande nef, entrc Ics deux premiers pilicrs, proclie du portail principal (1). "ViiraHs. — L'eglise sc faisait reinarqucr par ses vitraux peinls, ofi'rant un grand nombre de sujots religieux. Lc vitrail de la seconde des fenelres de la nef de droite repr6- sentait le baptfime de Notre-Seigneur. On sc rappellc quo les fonts baptismaux etaient places devant celle fenetre. Clerge. — Le clerge de l'eglise Sainte-Trinile ctait compose d'un cure, d'un viraire, de vingt pretres habitues, de deux sacristains tonsures, do six enfants de chcBur ct d'un bedeau. CoMfrci*ic«. — Independamment des confr^ries de la Sainte-Trinite et de la Sainte-Vicrge, dont parlent nos histo- riens, il en existait encore Iroisaulres fort utiles a l'eglise . c'etaient celles de Jesus, de saint Pierre et du Saint-Sacre- mcnt. Confreres «lc Jlesus. — I.es confreres de Jesus por- taient les morts. Leurbanniere, dc damas rouge, representait J'esus au jardindes Oliviers. lis etaient revetus, dans les ffites solennelles, d'un chaperon dc damas blanc, orne du monc- gramme du Christ. Quand lis assislaiont aux inhumations, ce chai)eron etait noir et brode des niemes insignes. Les confreres, dans leur chapslle, avaient un banc d'ocuvre su'r- inonted'une croix accompagnee de deux chandeliers. Confreres de sniut Pierre. — Les confi^res de saint Pierre portaient les lanterncsaux processions du Sainl- (1) Voyez la note sur ce petit monument, p. ioi. SAINTE-ThlMTK BP. ClIP-HBOl R« . 271 Sacrement, ct lorsqu'on allait adiiiinislror le viiiti(|iie aiK Rialades. lis avaicnt dcs cliaporons do daiiias rouge, oriit'^s de deux clefs brodees en fil d'or, postV^s en saiitoir et siir- tnont^es d'une tiaro. lis s'assemhlaiont dans la cliapelle de leiir saint patron. Confreres dii Saint-Sacs'cnierai. — Les confre- res dii Saint-Sacrcment avaient un chaperon de damas blanc, orne d'un ostensoir brodo en fil d'or. lis porlalent le dais a la Fetc-Dicu et lorsqu'on sortait pour donner la com- munion aux malades. Leur banniere, de la mfimc couleur que leurs chaperons, offrait le nieme dessin. Leur banc- d'oeuvre, semblable a celui des confreres de Jesus, faisait face au banc actuel des marguillers. Toutes les confreries sortaient, bannit^res en tele, aux processions de I'Ascension, de la Fete-Dieu et de I'Assomp- lion, ce qui faisait to plus belelTet, lorsqn'un peuple tout entier y assistait avec les sentiments de la plus sincere piete^, et chanlait, commc le clerge, les hymnes sacrees, avec I'ac- ccntdu plus vif enlhousiasme. Fete de la Pentecote. — A la fete de la Pentecdte, ilelait d'usage dans I'eglise Sainte-Trinite de donner la liberte a un pigeon, et dejeter, paries ouies des voules, des t^toupes eiiflamm^'es, pendant I'ofTice divin. La colombe, comme on le sait, figurait la desccnte du saint Esprit sur les ap(jlres, et les langucs de feu signiliaient que par la predi- cation de I'Evangile I'Espril-Sainl allait eclairer eleuibraser I'univers. Fete cic saint Jrenn-Baptistc. — La veille de la f6le de saint Jcan-Raplisle, on entassait, en forme de pyra- mide, sur la place du Rempart, du bois de cordc et des fagots auxquels Ic cure, accompagne du clerge, des marguillers ct du Ir^sorier de I'eglise, vcnait pioccssionnellement meltral» 572 KKNSF.lCi.NEME.MS SIR L ECiLlSE fell, apres Ics premieres Y(?prcs, en chantanl riivmne clu jour Saint-Jean. Cettc CL^-efnonie, qui avail aussi lieu presque par loule la France, rcniontaitaux plus anciens temps dc la monarchie; c'etail un restc de la fete solslicialc du soleil dans sa plus grande exaltation. A Paris, le roi lui-meme, accompagne des grands de sa cour, venail mettrc Ic feu an biicher. L'hisiorien Dulaure nous apprend que le plus ancien lemoignage de la participation des rois iicette c^remonie remonle a I'an 1471. « Louis XI, dit-il, en cetteannee, vint satisfaire a cet usage, aTimilation des rois ses predecesseurs. Presque tousles rois, dans la suite, suivirent cet exemplc. Henri IV el Louis XIII y manqucrent rarement. Louis XIV ne s'y trouva qu'unc scule fois, en 1648 (1). » De nos jours, il ne nous reste plus de la Saint-Jean que la danse sous la conronne de fleursdes champs, oiise reunil, par les soirs d'el^, uns bruyanlc jeu- nesse. Lc clochctcar des trepasses.' — Lorsqu'unc personne etait decedcc, un enfant de I'liospice civil, armc d'unc sonnelte, convert d'un bonnet carre , vetu d'une soutane et d'une tuniquc noire, sur le dos de laquelle (5taient brodes deux tiblas places en sauloirs et surmontes d'une tete dc mort, faisait retentir les rues de sons lugubrcs, et criait : Priez Dieu pour les fuleles trepasses et particuliere- mcnt pour I'anie de N.... Apres avoir enonce les nonis, prenoms, qualil^s et demcuredu defunt, il faisait connalire I'heurede Tinhumation et n'omettait pasde dire si lc d^c'di apparlcnail a une confrerie quelconque (2). (1) Dulaure, Histoire de Paris. (21 Sur la demande de la famille du defunf, on lendait dc noir U porle de sa demeure Celtc lenlure extericurc etait ornee dua 9AINTE-TRIMTE DE CHERBOURG. f73 Cet usage est fort ancien. Una pifece de vers, intitulee /e^ Crieries de Paris, composee au XIV^ siecle par Guillaume de La Ville-Neuve, en fait mention. Cette coutume, ^tablie dans plusieurs villes de France, s'est conserv^e dans celle de Paris jusqu'au rfegne de Louis XIV (\ ). Ancien poptail dc I'onest. — L'ancien portail principal, plein d'elegance et de k^gerete, n'avait 6te elev6 que jusqu'a la premiere galerie. II se composait de trois entrees ex6cut6es dans le style ogival. La premiere occupait le centre, la seconde faisait face au nord et la troisieme au sud. On remarquait, entre les nervures de I'arcade cenlrale, de charmantes ciselures, entre autres, un petit cenlaure et d'autres figures bizarres. Le dessin qui nous est reste de ce portail et qui est deposS a rH6tel-de-Ville, ne nous presents que I'arcade latSrale sud, qui, comme celle du nord, n'offrait rien de particulier. Au-dessus de I'entree principale, on voyait, comme aujourd'hui, une statue en pierre calcaire, representant le Sauveur du monde (2). Christ et de larmes brod^es en laine blanche. On tendait aussi de noir I'appartement du decede. Voici les frais que la famille avail a payer dans ce cas : Pour la tenture placee a la facade de la maison Of. 25 Dans I'interieur 0 75 Pour le drap mortuaire 0 26 Total 1 f. 25 Cette retribution appartenait a la confrerie de Jesus. On I'em- ployail a I'enlretien de la chapelle des confreres et au paiemenl, pour ceux-ci, dune messe basse, qui se celebrait tous les dimanch«s, a sept heures du matin, a I'autel de Jesus. (1) Dulaure, Histoire de Paris. (2) Quoique ce portail n'ail ele deinoli qu'en 1824, nousavonscru devoir en parlerici, parce qu'il a'est nullepart aussi coroplelemont decril. 18 274 RENSElGiNEMENTS SUR l'eOLISE SAINTE-TRINITE. Portall du siid. — Autrefois ce portail avail deux belles pontes ogivales d'unegrande richessed'ornementation, qui s'ouvraient sur la nef mfime de I'^glise, c'est-a-dire, a I'endroit ou sont places maintenant les benitiers. EUes ve- naient se fermer sur un pilier carr^, festonn6 dans le m^rnc gout que les murs d'alentour et surmont6 d'une Vierge assise tenant sur ses genoux le Christ mort. Le porche, garni de chaque c6te d'un banc en carreau, etait pav6 de pierres tumulaires, dont la plupartservent actuellement de marches a la chapelle de J^sus et a la sacristie. Pierres tumulaires. — Nous ne parlous pas ici des pierres tumulaires, parce qu'elles sont dScrites dans YHistoire de Cherbourg, de M. I'abbS Demons; dans les Guides du Voyageur, de MM. de Berruyer et Fleury, et enfin dans la Revue arche'ologique du departement de la Manche. CONSTATATION DE LA NATIiBE U'liNE PARCELLE MICROSCOPIQUE DACIER fiaus I'os d'lm remplacaut soiipconuc d'amputation volunUirc de rindei droit , P.li> !VI. BESIKOV, •i Vliarniaclon en chef Jc la marine, Moinbre de plusieurs soci(it£s savantea. — =5»€©STATATIOi\ DE LA NATURE d'uNE curieuseela la constatation mattM-ielle du delit, conslatation qui ne me seinbic pas sans importance en raison de la masse sur laquelle j'avais a agir, et du mode employe pour arriver ii la preuve. Le nomme M., r^cemnient admis comme remplacant, cnlre a riiOpital presentant unc section de I'indcx dela main droite op^ree un peu au-dessous de I'articulation de la premiere ct de la seconde phalange. 11 attribue cette mutilation a un accident, a Taction d'une roue de voiture mise en mouvement par lui en jouant avec deux individus qu'il declare ne pas connaitre. D'aprc's ce militaire, le doigt se serait trouve saisi entre I'anglo d'une rnaison et cette meme roue tournant avec lapidite. Les caracleres qu'offrenl la section eveillent de suite I'at- tention du prevot de chirurgie et laissent supposer que cette mutilation est volontaire. « La partie d^tachfie m'est remise a I'effet d'examiner une » petite parcelle brillante, d'eclat metallique ou micace. » Cette partie devant 6tre conservee comme piece a convic- » lion el la description devant en etre faite par les chirur- » giens appelos a donner les premiers soins a M., je me » bornerai a etablir qu'il exisle vers la partie de I'os misi » nu une petite parcelle visible a I'ceil, brillante, d'un aspect » qui rappelle racial de I'acier ou du mica. » La determination de la nature chimique de cette » pircelle brillante ne me semblant pas avoir pour but » unique de constater si elle est const itue'e par du fer, » dans le cas special dont il s'agit, jc me pose cette » question. » Si cette particule est du fer d Vetat metallique, est- » elle constitue'e par du fer doux tel que celui qui sert a PAUCELLE MICHOSCOPIQUE d'aCIER. 277 » ferrer les roues de voitU7'es ou bien est-elle forme'e » d'acier et alors pouvant provenir de I'e'bre'chage d'un » instrument, tranchant ? » Pour resoudre celte grave question, je proc6de aux » cssais qui vont suivre et qui ont donne lieu a un rapport » dontje vous prcsente ici la substance. » Apres avoir avec la pointe d'un cure-dent d6tach6 la » petite parcelle angulcuse entree en partie dans le tissu dc » I'os, j'approche un aimant ai'titiciel pour la saisir, a I'ins- » tant elle se precipite sur cet instrument, ce qui me fait » deja pressentir sa nature que I'examen chimique devra » venir conflrmer plus tard. » Toutdevait fairepenser que c'etait du fer metallique et » rien ne peut faire supposer que ce puisse elre du cobalt » ou du nickel. » Pour le savoir positivemenl et determiner meme si cette » parcelle est de fer doux ou bien d'acier trempe, j'ai tente, » malgre la pctitesse extreme (1/20 de milligramme au plus) » de mctlrc a profit lapropriete coercitive de I'acier pour le » fluidc niagnetique, et I'experience directe, faitc avec toutes » les precautions qu'exige unc pareille masse, m'a demon- » ire avec neltctiJ qu'apres avoir subi le contact de I'aimant, » elle avail conserve la propriete magn^lique et qu'elle atti- » rait alors la limailie de fer. » L'essai compuratif dc la limailie de for doux dontje me » suis servi est venu confirmer par ses propriett's negatives » une action contraire; cette petite parcelle, que j'ai conser- » v6e, conimc piece a conviction, se presenle sous la forme » d'une petite plaque, d'epaisseur inegale, comme cunei- » forme, tics mince, tr(>s brillante, quand onl'a bienessuvee » et ajant peut-etre quclquo chose d'analogucii une dent da » scie Ires tine. 278 CONSTATATIOX DE L\ NATURE d'u.NE » Examinee a la loupe et au microscope, sa cassure est » greniie comma celle de racier, landis que la limaille de y> fer doux soumise aux memes instruments ofTre una sorte » de transparence a travers laquelle on distingue I'aspect » libreux et tordu d'une corde a boyau ou d'une petite » masse de chlorure ammonique gris. » Ces proprie'tes physlqxics me pcrmettent de penser » qvc cette porcelle est de I'acier et non du fer doux » corroyc par le martelage et le laminaxje. » Ne voulant pas detruire cettc piece de conviction pour » en demontrer la nature chimiqua, je recherche avec soin k » I'aide de la loupe s'il ne scrait pas encore rest^ quel- » qu'alome de ca metal, et je decouvre enfin un petit point » noir, moins brillanl, qua je detache et enlove avec una » aiguille aimant microscopique, d'un poids et d'un volume inappreciable » (au plus de 4/100 de milligramme), est traitce dans una » capsule de porcclaine neuve par deux gouttcs d'acida » ciilorhydriqua pur. Get acide concentre la noircitdc suite* » Tatlaque ensuita, lui fait perdre son brillant metalliquc, » comme il le fail avec I'aciar, tandis qua la fer doux, essaye » comparativement, conserve son eclat ordinaire et est aussi » plus vivement altaque. » L'addition d'une goutte d'acide azotique rend Taction » vive et le liquide evapore avec precaution prend une belle » couleur jaune d'or qui laisse une tcinle scmblable sur la » surface do la capsule; repris par I'eau dislillee, ce rcsidu » du traitemcnt estsoumis aux reactifs appropries etdonne » ios rcsultats suivants : » Cijano fcrrurc do potassium. — Procipilc bleu franc, > bion not. PARCELLE MICROSCOPIQUE d'aCIER. 279 » Acide taunique. — Pr5cipit6 bleu franc, bien net. » Sulfocijamire potassique. — Couleur rouge sang, » bien nelte. » Ammoniaque liquide. — Precipit^ jaunatre, sans que » la liqueur qui surnage prenne de teinte bleue. » Conclusion. — D'apr^s les doubles caract^res physi- » ques et ciiimiques qui precedent, je dois conclure : » 1° Que les deux petiies parcelles me'talliqnes sont de » meme nature, de meme provenance. » 2° Qu'elles sont constituees par de lacier trempe et » nan par du fer doux. » 3° Qu'en consequence it n'est nullement probable » qu'elles puissent provenir d'eclat de fer doux ayant » servi au ferrement d\me roue de voiture. » 4" Qti'il y a lieu de supposer qu'elles doivent pro- » venir d'un instrument tranchant en acier trempe'. » EXTRAIT D'UiV RAPPORT MfiDICO-LEGAL SUR UN CAS D'INFANTICIDE PAR COMBUSTION DANS UN FOUR d'un enfant nouveau-ne. PAR M. BESIVOir, Pliarmacicn en chef de la Marine, Bembre dc plusieurs Soci^t^s savantcs. La conslatation dc rcxistence dii sang sur les vetcmcnts d'un assassin et de sa victimc, conslitue I'un dcs problemes les plus delicals de la cliiniie judiciaii'e. Le criminel, en effet, a inlcret a apportcr la plus grande promptitude a aneantir un Element souvent fort utile, s'il n'est parfois e&sentiel, de I'accusalion qui pese sur lui. II so hate de laver ses vetcmcnts, afin dc fairc disparaitrc les indices dc son crime. suR v?i CAS d'infaxticide pau gomuustio.n 28f Tel est Ic point de depart d'unc note fort interossanle, presentee par M. Morin, professeur de I'ecole de niedccine de Rouen, a I'academie de cctte ville. Une affaire niMico-legale, un infanticide par suite de la combustion d'un enfant nouveau-ne dans un four, ni'a fourni I'occasion de remarquer qu'il n'est pas toujours impossible, non apros le lavage, mais plus encore apres la carbonisation d'un lissu de fibre ligneuse, de fournir a la justice, sinon une preuve irrefragable, du moins des indices accusateurs d'un meurtre, alors que Ton aurait a operer sur un tissu d'essence ligneuse, s'il etait impregnc^ de sang ou de matieres albuminoides riches en sang. Pour mieux faire comprendre le mode operatoire, apprecier les difficullcs qui peuvent surgir, je crois convenable de donner litteralement le cas dans lequel je me suis trouve et dont j'ai pu sortir avec bonheur, puisque les dtibats et I'aveu de I'inculpc^e ont apporte la confirmation absolue de I'induction que j'avais tiree. Mais com me cette affaire est locale, qu'elle est peut-etre unique en son genre, jevous demandc la permission de vous donner I'extrait detaille des phases de ce drame. II s'agissait d'examiner : 1° deux charbons qui ont paru formes, fun de matieres animates et vi^getales, I'autre, de matiere puremcnt animale; 2° les debris d'un tissu brule; 3° de pelits fragments d'os calcine a blanc, et de rechercher quel 6tait le V(5ritable caract6re de toutes ces matieres saisics dans I'affaire do la fillc N..., accusee d'avoir donn6 la mort a son enfant ct d'cn avoir briile le cadavre dans le four de SOS rnaitrcs. J'entre en matiere. 282 llAl'I'OFtT MEDICO-LEGAL SUR UN CAS EXA1MEN DU PAQLET i\° 1. Ce paquet conlient moins d'un gramme d'une substance grisc, moilie en poudre, moili(5 encore masse caverneuse, fortlog^re, qui ne peutprovenirde la combustion imparfaile d'un morceau de bois : au contraire, son aspect laisse supposer qu'elle pent etre le r(5sultat de la combustion d'une substance qui a eprouv6 la fusion avant de se carboniser, puis s'est tumefioe, com me le ferait une subtance animate; elle est actuellement inodore, Insipide; la portion caver- neuse est tres friable. La partie pulverente est un peu plus grise ; elle parait en partie de meme provenance, et elle laisse voir a I'ceil nu dcs parcelles blanchatres, comme organiques, ayant de I'analogie avec des debris d'os calcines et ne ressemblant guere aux residus que peuvent donner les fibres ligneuses semi-incinerees. La loupe et le microscope y laissent apercevoir des parcelles allongees, caverneuses, analogues b. des debris d'os calcines en poudre grossiere. Pour m'assurer de la nature chimique de la cendre, il est precede aux experiences qui vont suivre. DETERMLNATION DE LA NATURE DES SELS SOLUBLES. Action de I'eau dlstillee. — L'ebullition prolongee avec I'eau distillce pure donne, apres filtration, un liquide com- pletement limpide et incolore, comme le dissolvant employe. II est extremement alcalin aux papiers reactifs, eu egard a la quantitc minime (Os'-.l) sur laquelle j'ai pu operer. Soumise aux reactifs appropries, ce liquide donne les rcsul- tats qui suivent. Papier jaune dc curcuma. — Rougit fortcmcnt D L\I ANTICIUE PAR COMBLSTION. 28;i Courant d'acide carbonique. — Pas de prt^cipite do carbonate calcique. Acide percliloriquc cl alcool. — Preci pi to grenu, no- table. Oxalate d'ammoniaquc — Rien de sensible. Azotate d'argent. — Precipile blanc, insoluble dans I'acide azotique, soluble dans Tammoniaque. Azotate de baryte. — Rien. Ammoniaque. — Precipite blanc, linger, en flocons, ana- logue a un sel de magnesie. Eau de chaux. — Trouble notable. Deduction. — De la limpidile de la liqueur, de son alcalinile prononcce, il resulte : \° Que la decomposition organiquea ete complete; 2" Qu'il ne reste que la partie minerale melee d'un peu de charbon ; 3° Que les reactions qui precedent denotent la presence dcs sels habitucls des cendres de vegetaux; ^° Que I'alcalinite prononc(5e de la liqueur, la notable proportion de potasse d^celee par I'acide perchlorique, la precipitation par I'eau de chaux, feraient croire a la presence d'une proportion notable de carbonate de potasse; 50 Que ce dernier element laisserait supposer par la reaction alcaline prononcte qu'il produit avec le papier jaune de curcuma, qu'il y a en combustion d'une substance riche en potasse, tel que du genet a balais ou de I'ajonc que Ton emploie le plus ordinairement pour cbaulTor les fours dans les campagnes. liXAMEN DE LA I'ARTIE LNSOLUIiLE. Incineration incomplete, Icnte comme unc substance 284 RAPPOKT MEDICO-LEGAL SUR UN CAS azote'e fortement etphosphale'e. — Environ un decigramme de cette cendre est placee sur unc plaque de platine lamine recourbce en capsule plate pour completer I'incineration ct determiner la nature du charbon et en deduire I'origine. La plaque etant port6e au rouge, aa lieu de scintiller comme Ic fait lo charbon de bois, de se consumer avec rai)idite cl de laisser pour residu une cendre fine, tres divisee, ce produit change peu d'aspect, s'incinere avec la plus extreme Icnteur el rneme raclion est encore incomplete apres une heurc de chauffe au rouge vif. II laisse unc cendre grenue, anguleuse, comme le produit employi^. Pareil essai est fait concurremment avec du charbon do bois en fragments bien plus volumineux. L'incineration marche avec la plus grandc promptitude; elle se termine en quelques minutes en brulant avec de vivos scintillations. La cendre n'a rien de grenu, elle est homogene, blanc- grisatre, tres tenue, ires legere. Le produit saisi qui constitue le paquet n° 1 dans celtc experience presenle, au contraire, toutes les phases d'inci- neration d'une substance organique fortement azotee, egale- ment riche en phosphate, qui, par la demi-fusion qu'il eprouve, forme, a bien dire, vernis a la surface des molecules charbonneuses, les preserve ainsi de Taction oxydante de I'air et cnraie la marche de rincimiralion. Cette nianiiire de se conduirc de cette sorte de cendre me donne lieu dc rechercher de suite les elements essentiels des OS et des matieres albumino'ides qui les accompagnent dans I'organisme. D'apres I'litatde decomposition complc'tc de I't^lement orga- nique ainsi que me I'a prouve la limpidite de la liqueur de traitcmcnt par I'cau distillee, il ne me rcste qu'a rechercher la presence de I'azotc dans le charbon, clement qui ne so d'i infanticide par COMBlSriON. 'iH'i h'oiive pas dans le charbon dc bois, ainsi que do constater la presence d'un pbosphale qui existe en giando abondance dans les tissus animaux. ct qui est au contraire peu abondant dans le r^gne vegetal. Recherche de I'azote. — Pour cela, je dispose dans un tube ferme d'un boul, par coucbcs successives, un petit fragment dc potassium et une partie de cendrcs dont j'em- ploie environ cinq centigrammes Je soumels ce melange ainsi stratifn^ a la lampe a alcool jusqu'a ce qu'il ait atteint le rouge obscur. Je laisse refroidir. Apres avoir brise le tube, j'ajoute un peu d'eau distillce pour op(irer la dissolution du sel soluble. A I'instant je suis frappp6 de I'odcur alliacee qui se degage et qui est due a la decomposition d'un pliosphure alcalin forme qui se dissocie en hydrogene phosphor^ qui s'ecbappe. Aucune lueur phosphorique ne se manifeste. Je neglige a dessein de la provoquer en acidulant la liqueur et cela a cause du but que je me proposals dans cet essai de constater la presence de I'azote en formant ainsi un cyanure potassique simple que pourrait decomposer I'acide. La solution est jetee sur un petit filtre, ct la liqueur limpide et transparente, sans couleur aucune, qui en resulte, estadditionnee d'une goutte de persulfate de fer, lequel, en raison de I'exces de potasse form(5, precipite I'oxyde de fer sous la forme d'un depot ocrace que I'instillation dequelques gouttes d'acide cblorbydrique dissout. La liqueur reprend alors sa transparence, mais bientot elle passe au vert, puis au bleu-verdatre. Par la concentration sur une plaque de porcelaine, il se forme une zone jaunatre avec rexcOs de persulfate, puis au centre une seric de zones d'un bleu franc ct vif. Un second essai identique est fait sur environ un deci- 286 RAPPORT MEDIC0-LE6AL StR UN GAS gramme. La liqueur qui en resuUe est reunie au residu dc la premiere operation dans un tube ferm6 portant le n° 4 et dcstinee a servir de piece de conviction. Du charbon de bois divisfi, traite de la meme maniere et avec les memes precautions, ne donne lieu a aucune des manifestations ci-dessus relatdes. Point d'odeur phosphoree, point de couleur bleue, point de depot. La liqueur roste legerement jaunatre comme la colore le persulfate ajoute. Recherche d'un phosphate. — La manifestation de I'odeur alliacee ou phosphoree me conduit tout directement a y demontrer la presence d'un phosphate. Pour cela, je prends le residu de mon incineration pre- miere; je le traite par un leger exces d'acide azotique pur. Je le fais bouillir quelques minutes, j'6tends d'eau distillee, je filtre et 6vapore presqu'd siccite pour chasser I'excSs d'acide, mais laisser I'acide phosphorique a I'etat trihydrique, Je reprends par I'eau distillee; le liquide qui en provient est parfaitement limpide et transparent. J'ajoute quelques gouttes d'azotate d'argent ammoniacal, qui y determine de suite un precipite jaune pale abondant; j'ajoute deux a Irois gouttes d'acide acetique pur, pour dissoudre le phosphate dechaux ou ammoniaco-magnfeien qui pourraits'y trouvcr. Par la dissolution, qui en est operee, la belle teinte jaune du phosphate d'argent apparait. L'addition d'un exces d'acide azotique en operant alors la dissolution de ce sel, vient preter un nouveau concours a la constalalion dont 11 s'agit. Phosphate d'argent jaune. — Ce dep6t n'est point con- serve comme pi^ce de conviction, parce que, comme la plu- part des sels d'argent insolubles, il perd sa couleur jaune a la lumiere qui le rend olivatre. Phosphate de plomb. — Globule a facettes. — Enfin line autre petite portion de cclle cendre est traitce par I'acide D'lNFANTlClDE PAH COMBUSTION. 287 acetif|ue pour dissoudre le pliosplialc de cliaux et de inagno- sie; la liqueur acide elendue d'eau dislillcc est Irailcc par I'acetale de plomb qui y determine un precipite blanc fort abondant. Jete sur un filtre, puis lave, le idL'pdt soumis au chalumcau donne lieu a la formation du globule blanc, fusi- ble, cristallise a facettes, qui caractcrise le pliosphate de plomb. De ces diverses experiences chimiques resulte : i" Que I'incineration de cette matiere charbonnee, au lieu de marcher avec la promptitude qu'ofTre le charbon vegetal provenant du bois, est au conlraire lente et mfime incomplete au bout d'une heure; que cette action semblc attester de la presence d'un charbon azote, pou\ant provenir de matieres animales; 2° Que Taction du potassium vient confirmer avec la plus grande neltete I'opinion qui precede et de plus, elle fournit la certitude qu'il y existe un charbon azote, que ne donne pas la combustion du bois des landes, des fougeres, etc. qui pourraient avoir servi a chauffer un four; 3** Qu'il est probable que cette espece de cendre ou de matiere demi incin^ree a du provenir, en grande partie, de la presence simultanee d'un element organique animal; i° Que la manifestation de I'odeur de gaz phosphor^ qui s'est produite vient corroborer cette maniere de voir ; 5" Que les moyens chimiques les plus caracteristiqiies des phosphates en attestent la presence a des doses anormalcs, comparalivement ix celles que donneraicnt des cendres des bois de chauffage ordinaii'cs; 6" Que cette reunion de caractercs donne lieu de penser que la petite masse charbonncuse et pulvciulenle a ete en partie formee par la combustion simultanee de hbrcs ligneu- ses et de matieres animales riches en phosphore; 288 HAl'I'OUT MEDICO-LEGAL SLH V^ CAS 1° Qu'en tenant compte de I'observalion microscopique qui est apportee an debut, en outre do la matiere aniinale qui a dii eprouver la fusion par suite de sa decoinposilion au feu, il y existe des parceiles blanches, caverneuses qui ressemblent a des portions d'os completement calcines. NoTA. L'aspectde ce charbon et les essais qui precedent peuvent laisser supposer qu'il provcnait de la combustion dela tete de I'enfant; mais bien que les Elements pbosphores y soient abondants, il n'etait pas possible, en raison de I'al- calinite de cette cendre d'oser avancer, meme avec doute, une telle provenance. PAQUET N° 2. L'ouverture du paquet nous laisse voir une sorte de cendre blanc-grisatre, melee de portions encore adlierentes, noires, charbonneuses , reticulees , a raailles regulieres, carrees, qui laissent voir bien nettement qu'elles proviennent d'un tissu organique assez fin. Eau distiUee. — Rien de special. — Cette cendre est legerement alcaline, se dissout en notable proportion dans Teau distillee et cette solution essayce aux reactifs appro- pries n'a donne lieu a aucune remarque speciale. L'on y reconnail la presence des sels alcalins, carbonates, hydro- chlorates, sulfates de polasse, de sonde, de chaux, etc. Acide azotique. — Pas de phosphate nettement demontre. — Traitee par Tacide azotique pur en leger exces, elle donne une efferversence considerable; reprise par I'eau distillee la solution concentree avec precaution, puis traitee par le nitrate d'argent ammoniacal, il ne se ma- nifeste aucune nuance jaunc, qui puisse fairc supposer la pr(;sence d'un phosphate. I d'infamicide pah comijlstion. 289 Toutefois raffusion Ae rammoniaque liquiJey dt^tcrinine iin nuage blanc, d'une malierefort It^g^re qni, vue an micros- cope, simule un depfltde phosphate ammoniaco-mapn('sien, niais ce seul caractere ne nous permet pas d'avoir une con- viction assez nette pour affirmcr d'une maniere absoiuo que c'est un phosphate, et la quantity est telicment petite quc> malgre la sensibility des autres reactifs habituels dcs phos- phates, il n'y a pas a songer a y avoir recours, surtout oblige que nous serlons de fractionner la liqueur di'ja en quantite bien minime. Action dupatassium. — Azote parfaitement caracte- rise. -^ Une petite portion est soumise a Taction du potas- sium comme lo paquet n" 1 ; elic donnc lieu dans les cir- conslances convcnables a un depot fort notable de bleu do Prussc, lorsqu'on y instille quelques gouttes d'un sel fer- rique. De lacendre de lissu organique traitee de la memo maniere ne nous fournit, au contraire, aucune reaction analogue, qui, comme nous I'avons dit, caracterise les substances orga- iiiquesquaternaires plus speciales au regne animal. La presence do I'azotc etant done bien constatee comme il vient d'etre rapporte, il reste done a savoir si ce lissu provienl d'une substance animale, de laine, par exemple, ou bien si ce lissu etant en lin, chanvre ou colon, il so scrail trouve tache ou impregncde matii-res albiiminoulcs aniiuales lellcs que do Talbuminc, de la fihriue, du sang, etc. Tout difficile qu'il soil de r^soudre ce probleme qu'aucune demonstration direcle ne pent eclairer, voyons si I'induction ne pout, au conlraire, par exclusion, nous pcrmeltre d'arri- \cr au moinsa dcs probabilites. Est-ce un tissu de laine on de fibres litjneuses?—' L'induction conduit a rejeter la presence dc la laine. — * 19 290 MAPPORT MKDICO-LEGAL SLR L'N CAS Nous rappelant que les parties charbonneuses noires, adhe- rentes encore, laissent parfaitemenl distinguer les maillesdu tissu, Ton est de suite port6 a exclure la possibilite de I'exis- tence d'un tissude nature aniinale, laine, poils, etc. En effet, un tel tissu en brulant, se ful tourment^, recroquevill(^, filt resl6 sans souplesse, se fut enormement boursouffle, eut mfime ^prou\6 la fusion , fut devenu caverneux , comme la petite masse entiere du paquet n° 1 . II n'aurait jamais pu conserver la nettete des mailles que Ton distingue encore parfaitement. L'aspect du charbon serait aussi tout different et il ne serait pas noir mat comme celui-ci. Ce tissu a-t-il pu ^Ire mi-partie laine, nii-partie fibres ligneuses? Les observations qui pr^c6dent d(5ja conduisent a la negation. En effet, on ne file pas, gen^ralement, ensemble les fibres v(^getales et animales. Dans les tissus mi-l'un, mi- I'autre, lachaine et la trame sont de deux mati^res diff6- renles, de sorte qu'alors la fibre animale en se tordant, en se decomposanl, ne pouvait laisser voir nettement lefii dont elle faisait la base. L'on ne verrait tout au plus que ie fil du ligneux en suposant encore (ce qui me semble inadmissible) que I'influence de la decomposition animale n'eut pas fait un tout, une masse dans laquelle les Elements organiques des deux r^gnes se seraient confondus. Incineration. — L'absence complete d'une substance textile animale etantadmise, nous continuons nos recherches k I'effetd'L'lucider la seconde phase de la question, el arriver a d^montrer si ce tissu ^tant de fil vi^getal a du 6tre impregne de quelques substances azot^es , devant expliquer la presence de Tazote a dose 61evce que nous a fourni la reaction au potassium. Pourcela, nous procedonsa I'incineration complete d'une portion de la mali&re charbonneuse noire, et d'apr^s la d'infanticide PAn comblstion. 291 tnarchc de roperalion, nous sommes portcs a penser que cc tissu n'a pu Otre forme de laine ou produit analogIl^^ inais qu'cn jugeanl par la Iciiteur de la reaction, ce charbon en fil tenu ne saurait 6tre de fibre vegetale seiile et pure. L'essai au potassium permcltrait done en outre de penser que ce tissu a pu et du 6tre impregne de quelques niatieres albumino'idcs du regne animal. Une nouvelle portion de ccndre est encore Iraitee par I'acide azotique, lessivce a I'eau distillee, evaporee avec precaulion, elle donne une liqueur d'un beau jaune d'or dans laquelle I'alTusion d'une goutte d'une solution tres etendue de sulfocyanure alcalin determine une belle et richc couleur rouge sang, qui est tellcment prononcee que Ton sedemande si ce fer provient de la teinture de ce tissu en brun ou ennoir (quoique la cendre pure soit assez blanche) plutot que d'oser I'attribuer au fer normalement exislant dans le sang. C'est ce que rinstruction pourra eclairer en s'assurant dansl'interrogatoire si ce tissu elait en laine, et dans le cas de la negative, si le tissu vegetal titait ou non teint soit en bleu, soit en noir ou brun, ou en couleurs mfilees. Pour nous assurer si ce tissu n'auraitpas 6te teint en bleu au moyen du bleu de Prusse (ce qui n'est gucre probable) nous tentons Ics essais suivants : Si ce tissu a pu rtre teint au bleu de Prusse, il cut peut- t'tre pu so faire que Taction desalcalis existanl normalement dans les fibres ligneuses, ou provenant de la teinture ou encore du lessivage, eut par suite de leur mise en liberie par la decomposition ign^e, reagir posterieurement sur le bleu de Prusse employe comme matiere colorante, alors il sc serait forme un cyanurc triple, jaune (cyanoferrure alca- lin). Mais I'addilion d'un pcu de solution dc persulfate de 293 RAPPORT MEDICO-LEGAL SLR UN CAS fcr, en restant miielte, vient demontrer que cette transfor- malion ne s'esl pas produile. Nous avons fait de nouveau bouillir una autre petite por- tion de cendre avec de la potasse a I'alcool bien pure, dans le cas oil contre toute espt?ce de probabilite, le cyanure ferrique (bleu de Prusse) n'eiit pas ete decompose, malgr6 la chalenr 61evee qui avait du etre produite par la combustion dans le four. Quoique ayant pris toutes les precautions qu'exigent des recherches aussi delicates, nous n'avons rien constate qui nous puisse faire croire a I'emploi du bleu de Prusse com me element de teinture. Enfin TebuUition de cette cendre avec I'alcool absolu a donn^ lieu a un residu parfaitement blanc qui, par le sel ferrique, est encore resle absolument muet; d'oii ces Irois cssais nous forcent a rejeterl'id^ed'une teinture au bleu de Prusse. En resumant les diverses inductions et experiences qui precedent, noussommes conduits a penser: i° que le paquct n°2 estconstitue par une partic de cendre grisc, melee a des portions noires, charbonnees, qui annoncent qu'un tissu organique lui a donne naissance; 2° que ce tissu devait etre en fibre ligneuse; 3° que le potassium prouve avec la plus grande evidence qu'il y existe de I'azole en quantite Ires notable, qui doit provenir d'une substance riche en cct element, ayant constitue ou impregn(!: ce tissu; 4" qu'il y existe en outre du fer en notable proportion, mais non a Te-tatde compost cyanure; 5° que s'il clait demonfre que le tissu azotiferc eut et6 en fibres ligneuscs ( lin , chanvre , coton), la presence de I'azote en aussi notable proportion ferait penser qu'il a dii 6tre impregne de matieres organi- ques animates, aibumine, cbair musculaire, sang, etc.; 6" que dans le cas oil il serail prouv(5 que ce tissu 6tait d'origine d'infamicide par combustion. 293 vegtHale, non teint en bleu, briin ou noir, surtout qu'il fut blanc, il y aurait lieu de penscr que celle matiere albumi- noide serait du sang ou riche en sang, inais que cette derniere induction ne saurait etro emise qu'avec la plus grande reserve. Paquet n° 3. — Apres avoir rompu les scelles et ouvert renvcloppe Ton Irouve une pelile bolte tres plate en carton gris, carree, donl la couverture est separee. Elle contient des' fragments d'os profondenicnt alteres par la calcination , blancs a I'extorieur pour la plupart et laissant encore voir au centre du charbcn provenant de la decomposition de la matiere organique qui entre dans leur constitution. Aucun d'eux n'estentier, soit qn'ils aientele recueillis en cct etat, soit que pendant Ic transport, ils so soient brises en se heurtant mutuoUement. Malgr6 leur etat de division , j'ai procL^d6 a I'examen de ces portions d'os afin de voir si par comparaison , Ton ne pourrait arrivcra dScouvrir les os principaux d'un squelette d'enfant. Ayant sous les yeux un squelette d'un enfant de 9 niois, j'ai cru remarquer suffisamrnent d'anatogie dans les formes encore existantes, dans la grosseur proportionnelle ou pres- qu'egale pour tenter d'en faire une sorte de classemenl, sur la verification duquel il est de mon devoir d'appeler I'atlen- tion de la justice et I'opinion des hoinmrs plus competenls. Pour faciliter cc dernierlravail j'ai reciieilli et \?,oh\ ciiaqu'- 6it5ment y. examiner en lui donnant un n°d'ordroe; v-^; que suit ledtHail : N° 1. Partie inf^rieure des deux femurs. N° 2. Extremite superieure d'un tibia. N° 3. Parties du corps des deux humerus. N" 4. Partie d'un des os iliaques. 294 RAPPORT MEDICO-LEGAL SUR UN CAS N" 5. Portion eie I'orbite. N" 6. Portion suptrieure d'un humi5rus. N'' 7. Portions de c6les. N° 8. Os du roclier droit et gauche. N" 9. Extrcmite superieure et interne du tibia gauche. N° 10. Portion d'os du crane. N° II. Extremit(53 inferieures des deux tibias. Css divers (Aliments de conviction ont ensuite t^l6 emballes isoliL'raent avec une precaution exli'Ome puis renfermes dans une boite commune. L'etat actuel de ces divers organes ne pouvant laisser aucun doule sur leur essence, leur aspect ne pouvant faire supposer que la defense puisse contester la nature chimique de ces debris de charpente aniniale, j'ai pense que I'analyse chimique ne pouvant pas apporter unebien grande lumiere sur I'origine de ces os et par rapport a la position dans rechelle animale de I'etredontils const! tuaient la charpente, je n'ai pas cm devoir y procc^der el je crois de moo devoir d'en deduire les motifs. L'analysc des os d'adulte et d'enfant a ete faite, mais non pas du tout sous le point de vue de la difference dans la proportion des substances minerales entre elles, notamment des phosphates et carbonates calcaires et magnesiens qui ea font la base essentielle. Reess n'a, en etTet, etabli que la proportionnalitt; de la matiere organique et de la partie mini^raleincrustante. Dans le cas dont il s'agil ici, toule la partie organique a disparu. Pour deduire deTexamen chimique, atlentif, quel- quc chose de concluant, il faudrait analyser concurremment les os d'un squelelte d'un enfant de 9 raois, pour comparer entre eux les os suppost^scorresponclantscttigalcmenl privtJs do U'ur matiere oi'gani(iue. 1) INFANTICIDE PAR COMBLSTIOX. 895 Mais ne devienJrail-il pas fort difficile de se procurer un quelette semblable? Je dois faire observer que si I'idenlil^ de composilion hiniique fournissait un Element de plus a la conviction, la lissemblance dans les resultats ne dcvrait pas faire exclure I'une maniere absolue la similitude d'origine, car ii est certain qu'il pent se Irouver dcs anomalies, des variantes dans la composition chimique d'apres I'etat de sant(5, de constitution de I'enfant et de la mere ; Ton serait done con- duit a juger surtout d'apres le mode que j'ai employe ci- dessus, la reconstitution partielle du squelette. En resumt^, jc dois done me borner a 6tablir ici : 1° Que Ic paquet n" 3 contient des fragments d'os dont la matiere organique a ete enlevee par une chaleur tr6s ^rte; 2° Que certaines parties de ccs debris de I'organisme animal me semblent presenter de I'analogie de forme, de grosseur avec lesos d'un squelette d'enfant de 9 mois, mais que si ma sp6cialite m'interdit de prononcer et d'affirmcr, ma conscience me fait un devoir d't^veiller a ce sujet Tatten- lion de la justice ; 3° Que I'examen chimique n'apporterait un clement essentiel de conviction que s'il (itait fait comparativement avec des os d'un enfant nouveau-n(5 ; 4° Que les resultats obtenus dans des conditions aussi absolues pourraient encore donner lieu a discussion sur Ics inductions a en liror, en raison des variantes qu'auraient peul-etre pu leur faire cprouvcr les divcrses phases de la grossesse, la constitution organique de la m6re et par suite de I'enfant. Conclusions ge'ne'rales. 1" Lc paijuct n° I est une matit-ro churbonnee el dcmi 29G n.vpi'ORT Slit u.\ CAS u'inkanticide. iriciiViiree qui no saurait etre attribuee ii la combustion impat'failc d'uiio substance ligneuse, consequemment elle n'est point de charbon dobois. I.a pai'tie grise n'est point non plus constituce par des cendi'es de bois seulemcnt. L'examen chimique approfondi y demonlre avec ncttete la presence des elements plus essentiellcment constitulifs des lissus animaux, phospbates et azote. Le microscope y fait apercevoir des debris fins qui res- semblcnt a des parccUcs minimes d'os calcines. Tout concourt pour faire penser que cclte raatiere a da en grande partic etre produite par la decomposition d'une uiatiore organique animate, chair et partie d'os. 2° L?paquetn° 2 contient une sorte de cendre qui ne saurait provenir de la combustion seule de bois divers; mais les parties noires, encore adh(5renles prouvent netlemenl par la conservation des mailles qu'elle provienl d'un lissu d'essence vegelale. Si I'instruction arrivait a prouver que ce tissu n'a pas etc teint, ce qui a toutes les probabilites d'etre, il y aurait lieu d'affirmer qu'il etaitimpr^gne de matieres organiques forte- ment azotees, telles que les substances albuminoides de I'organisme animal, peut-elre meme de sang. Que tout concourt a prouver que ce tissu n'a pu etre fait de matieres animales textiles, laines, etc. (1). 3*^ Le paquet n° 3 me semble contenir des frogmenfs d'os calcines qui ont de I'analogie avec ceux d'un enfant nou- veau-ne. (1) La deposition d'un temoin oculaire, la declaration de I'accusee ont jiislifie complelement I'inductlon de la presence du sang sur un linge blanc. MEinOIRE SUR UN PROCEDE EMPLOYE EN ASGLETER8E Pour la coiisorvation dcs hois, toiles et curdiigos. PAR ni. A. IIIA]V€li\, lag^nicur de la marine, Associii titulaire. Bien dos lecherclics out ct6 faites jusqu'ici, surtout dans ces dernieres annees, aliii de trouver un procede qui pre- servul Ics bois de la proinpte deterioration a laquelleils sont sujets dans les usages, pour ainsi dire univcrsels, auxquels ils sont employes. Parmi les nombreux moyens qui ont etc soumis au public, trois nierilent d'etre cites, qui scmblaient avoir des cbances de succes : -I" le procede d'iuiniersiou dans une solution de sublime corrosif, invente, je crois, 298 CONSERVATION par un M. Kyan en Angleterre, proct^de couteux, dangereux pour les hommes charges de la preparation des bois et aussi, assure-t-on, pour les personnes qui vivraient dans des habitations construites avec des bois ainsi prepares; 2° le procMii d'injection d'un sel conservateur dans les arbres sur pied, au moyen de la force naturelle qui fait circuler la seve, precede du a M. Boucherie et qui a I'incon- v6nient de ne pas atteindre le coeur des arbres de fortes limensions; 3° enfin, un precede Au a M. Payne, en An- •leterre, et qui consiste a injecler dans les bois deux sels lont la double decomposition donne lieu a la formation d'un sulfate de chaux insoluble, qui bouche en quelque sorte hermetiquement tons les pores et les rend inaccessibles h rhumidite. Ce moyen detruit la cohesion des fibres et, des que la pi6ce prepart^e est soumise a un effet quelconque, I'adhi^rence des cristaux de sulfate de chaux disparait el le bois redevient, comme auparavant, accessible a I'humidite. Le proced6 dont j'ai a rendre compte, et qui est du a Sir William Burnett, directeur general du service de sante dans la marine anglaise, a ete eprouv6 par plusieurs anntes I'experience et, s'il ne resout pas compltJlement le probleme, lu moins a-t-il sur tons les autres des avantages positifs qui le rendenl digne d'etre experiments en grand. Ce precede consiste a introduire dans les bois, au moyen d'une forte pression, une dissolution de chlorure de zinc et a reniplacer autant que possible la seve par cette dissolu- tion. Les pieces de bois a preparer sent placees dans un grand cylindre en tole, dans lequel on commence par faire le vide, puis on introduil la dissolution et on la force jus- qu'a une pression de 10 a 12 atmospheres. Pour les toiles et cordarges, une simple immersion suffit. D'apres des temoignagcs aulhentiqucs et des experiences DES BOIS. 299 nombreuses et de natures lr6s-diverses, dont j'ai He h nienie de juger les resultats, j'ai du acqucirir la conviction que le clilorure de zinc jouit reellement do la propriete de pre- server de toute deterioration des substances ligncuses placd'cs dans des conditions oil les mgines substances non pre|)ar6es auraient etc rapidement detruitcs. Get effct preservateur est nioins sensible sur les cordages de cbanvre que sur los bois et sur la toile, mais il existe cependant. J'ai vu des planches minces el des pieces en toile a voiles qui, aprtis avoir subi la preparation, avaient etc placees, pendant plusieurs niois, sur Ic sol d'une cave tres-humide, (1) a cote d'autres planches de memes dimensions tirees des memes madriers et d'autres morceaux de toile decoupes dans la meme piece qui n'avaient point ete prepares. Les premiers i'taient parfaitement sains, les seconds offraient des traces evidentes de deterioration; quelques parties, meme, etaient completement pourries. Le contact m6me d'une pi^ce pourrie est sans elTel sur une piece preparee, ainsi que me I'a demontre le resultat d'une experience faile a cet effet par le chirurgien en chef de I'arsenal de Portsmouth. Incombusiibilite corruptive des bois. — La disso- lution de chlorure de zinc jouit de deux autres propriet^s importantes; elle rend le boistresdifiicilement inflammable et si, dans un batiment en bois, on la melange avec les eaux de la cale, elle les preserve pour longtemps de toute corrup- tion et empfiche ainsi la production de cette odeur repous- sante qui est un des fleaux des maiins. Cette derni^re propriete a ele mise ii profit a bord du vactli royal Victoria (1} Cette cave fait partie du palais de Sommcrset-IIouse et est situce en contre-bas du niveau de I'eau a une petite distance du bord d« la I'aniise. 300 CONSERVATION and Albert el j'ai vu a Soutampton Ic paqucbot a vapour YOriental, de 450 chevaux, a bord duqucl ce precede est applique aussi avec succes. Quant a la premiere propriete, elle n'cst pas inoins prt^cieuse et on pourrait eviterde grands sinistres en I'utilisant dans la construction des toitures, hangars, etc. Pour nie rendre comptc de Taction du ciilorure de zinc sur le bois, action a laquelle est du TelTet preservateur, j'ai fait nioi-aieme unc experience dont voici le rfeume : Experience. — De petits morceaux de bois de pin prt^pa- resetd'autrcsexaclement semblables, n,on prepares, ontet6 plonges separement dans une decoction de boisde campeche que Ton a fait bouillir pendant 1/4 d'heure; puis ils ont ete retirt^s ct laves. La teinture avail a peine mordu sur le bois non prepaie ; celui , au conlraire, qui avail 616 impregne de cblorure de zinc, avail pris une couleur d'un rouge brun tres fence. Des morceaux semblables aux precedents, apres avoir ete teints et laves de la nieme maniere, ont ete plonges pendant un quart d'heure environ dans I'eau bouillante. La couleur du bois non prepare a etc trouv^e presque entierement effa- cee, celle du bois prepare avail a peine change. Enfin, de petits morceaux de bois pr6par6s et en lout semblables a ceux des experiences precedentes ont ete laves d'abord, puis plonges dans I'eau bouillante, oil on les a maintenus 1/4 d'lieure. Apres quoi ils ont ete teints comme les precedents el lav^s a I'eau bouillante. Neanmoins, la couleur en est restee sensiblement la m6me que si tous ces lavages n'a\aient point eu lieu. 'Conclusion. — On semble etre en droit de conclure de ces fails que Ic cblorure de zinc se combine chimiquemcnl avec lu aialierc ligneuse du bois ct (jue, bien que cc scl soil DES BOIS. 301 soluble dans I'eair en enormos pioportions, Ic compose qu'il forme avec Ic bois est coiupletenicnt insoliiblo, mciiic dans I'eaii bouillante. II n'y a done pas a craindre qu'une piece de bois ou une voile une fois preparoes pordent, par un st^jour prolonge dans I'eau, Ics qualites que leur a commu- niqu^cs le sel prcservatcur , et Ton congoit comment la niatiere ligneuseayant change de nature, dcvicnt capable dc resister a des causes dc destruction auxquclles elle n'cut pu resister auparavant. Depenses. — Quant aux di'penses qu'occasionnerait I'em- ploi du procedc de Sir \V. Burnett, ellcs sont de peu d'im- portance et si Ton considerc I'cconoinie qui rcsuUerait pour la marine de I'usage d'un procedc elTicace de conservation, il y a peu a s'en preoccuper. Voici, neanmoins, quelques ciiiffres qui donneront une idee de ce que ces depenses pourraient 6tre. 11 resulte d'un assez grand nombre cVope- rations faites surdiverses natures de bois, dans le» ateliers de la compagnie qui exploite le brevet de sir W. Burnett, a. Londres, que: Un metre cube de chene sain absorbe en moyenneGO litres dc la dissolution; un metre cube de pin d'Ecosse sain absorbe en moyenne de 90 a 120 litres dela dissolution; un nif'tre cube de pin d'Ecosse, atleint d'un commencement de dtcomposilion, absorbe en moyenne de iSO a 200 litres dc la dissolution. Or, la dissolution de zinc se compose dc 1 kilogramme de chlorure pur pour 100 litres d'eau ; un metre cube de cbene absorberait done GOO grammes de -chlorure de zinc et un metre cube de pin du nord environ 1 kilogramme. J'ignorc quel serait le prix du chlorure dc zinc fabri(]ue en grand; ce prix doit etre peu eleve. Les proprietaires du brevet dc Sir W. Burnett le vcndcnt 2 f. oj le kilogramme. Mais il y 302 CONSERVATION a sur ce prix au mois 70 p. % de benefice, et il n'esl pas douteux qu'en France on se procurerait ce sel, a moins de i franc le kilogramme. On pent done, pour 6tre sur de rester au-dessus de la v^rite, admettre que cliaque metre cube absorberait I'un dans I'autre un kilogramme de sel, c'est-a-dire couterait, en raatieres, un franc de preparation, somme infiniment petite, si on la compare a celle qui represente le prix du m^tre cube de bois. Les depenses en oulillage, installation et main-d'opuvre, sont pen elev^es aussi; j'en parlerai apres avoir decrit un des ateliers des arsenaux anglais. Application en Angleterre. — L'amirautt^ Anglaise a adopts le proc6d6 de Sir W. Burnett, et dans les deux ports de Portsmouth et de Chatam, elle a donne des ordres pour que tons les bois employes, soit aux constructions navales, soil aux constructions des ateliers, hangars, etc., fussent d^sormais prepares d'apres ce precede. Un atelier a ^t6 6tabli pour cet objet dans chacun des ports que je viens de citer. Voici en quoi il consiste: Appareil. — Un grand cylindreen tole, fabriqu^ comme une chaudit!re a haute prcssion, d'une longueur de 15 a 16 metres etd'un diametre de I"* 80 environ, est plac(5 horizon- talement sous un hangar. L'une de ses extremil^s, au moins, doit se trouver devantun espace libre assez vaste pour qu'on puisse aisement faire entrer dans le cylindre et en retirer les plus longues pieces de bois. Cette extremity est termint^e par une plaque de fonte fortement boulonnee au cylindre et dans laquelle se trouve une porte que Ton pent fermer her- metiquement. Un rouleau en fonte port(5 sur deux supports fondus avec la plaque de tetc, permet de manoeuvrer avcc facility les pieces que Ton vcut preparer. Le cylindre est DES BOIS. 303 plac^ sur le sol, il y est mainlenu sur un lit de maconnerie ou de toiilc autre mani(5re. A c6le, on a creust^ unc fosse revfitue en magonnerie hydraulique d'une capacile au moins double de celle du cylindre. C'est dans celte fosse, dont le fond communique avec celui du cylindre, par un tuyau muni d'un robinet, que Ton conserve la dissolution de chlorure de zinc. On la recouvre d'un plancher volant qui fait partie du sol de I'alelier. Deux syslemes de pom pes sont ^tablisdans cet atelier, savoir, un systenie de deux petites pompes a air conjuguees et une double pompe foulante. Si i'emplacement qu'on a choisi se trouve dans le voisinage d'une machine a vapeur qui marche toule la journee, on pent emprunter a cette machine la force necessaire pour manoeuvrer les pompes, car ce travail no dure que fort peu de temps, sinon une petite machine de 4 a 6 chevaux est necessaire. Enfin, le cylindre doit etre muni, en outre, d'un barometre, d'une soupape de sflrete et d'un robinet pour chasser I'air, et la fosse d'un moyen de jaugeage quel- conque. Operation. — Voici mainlenant comment on opere pour preparer le bois. Les pieces a preparer ayant ete introduites dans le cylindre, on ferme la porte de la plaque de tete et on I'assure solidement de maniere k ce qu\;lle rt^siste au vide eta la pre.>sion. Cela fait, on embraye le mouvcment des pompes h air de maniere a faire dans ie cylindre un vide de 67 a 68 centimt'tres de mercure. Lorsqu'on a oblenu ce vide, on ouvre le robinet du tuyau qut fait communiquer le fond de la fosse avec le cylindre et la dissolution se pr^cipite dans ce dernier. On laisse travailler les pompes pendant tout le temps que le cylindre met a se remplir et Ton est assurti qu'il est plein lorsque les pompes a air commencent k cra- cher de I'eau. On ferme alors !e robinet de la fosse el la 304 CONSERVATION communication avec les pompes ii air que I'on anvtc et on met en mouvement les pompes foulautcs qui forcent dans Ic cylindre I'eau d'une bache que Ton remplit aux depens do la dissolution de la fosse. On a soin en meme temps d'ouvrir le robinel a air pour chasser I'air provenant de Timperfec- tion du vide ct qui a du s'accumuler dans la partie supti- rieure du cylindre. Lorsque la soupape de siirete, chargee a 10 atmosplieres, commence a se lever, on arrete, et si Ton n'a cu a preparer que des bois de faibles dimensions, comme des bordages, des planches etc., on pent ouvrir le robinet qui ferme la communication avec la fosse, laisser ecouler la dissolution et retirer le bois pour le metlre a secher. Si le bois contenu dans le cylindre est de fort equarrissage, il faut maintenir la pression pendant deux heures. Dans le premier cas, I'operation tout entiere, le bois suppose en place dans le cylindre, ne dure guere plus d'une lieure. Outillage. — Je mesuisinforme du prix auquel pourrait revenir routillagc d'un atelier comme ceux de Chatam et de Portsmouth. En comprenant la machine dans cet outillage, la dispense totale atleindrait a peine en Angleterre -1,000 livres sterling. Mais en France, il faudrait s'attendre ii cc que celte somme ne fut pas moindre que 30,000 francs, somme insignifiante si Ton considerel'immense economic qui resulterait pour la Marine de I'emploi d'un procedc cffi.;ace pour la conservation des hois. Chatam et Porsmouth. — Je viens de decrire la manicrc d'operer usiteedans Tatelier de la compagnica Londres; elle differc un peu de celle que I'Amiraute a ordonne de suivre il, Chatam et a Porstmouth. Dans ces deux ports, les mouve- incnts de bois se font dans la journee; le matin, on vide le cylindre rcmpli la veille, cl dans I'apres-midi on le remplit do nouvcau de hois a preparer, de sorte que I'opt^ration ne DF.S UOIS. 30o se fait que dans Ics deux derniorcs hourcs de la joiirnoe de (ravail el la pression est maintenue, pendant toute la nuit, dans le cylindre qii'on ne vide que le matin, h rarriv6e des ouvriers. L'Amiraute anglaise s'est sans doute prt^occupee de la question de savoir si, en suivant la m6thode i-ecom- mandee par la compagnie, on parvenait a faire penetrer la dissolution jusqu'au cueur des plus fortes pieces de bois. Cette question est, en etTet, d'une haute importance et 11 y a tout lieu de croirequ'aux yeux de I'Amiraute, elle n'a pas el6 resolue d'une mani6re satisfaisante; il est peu probable, en eflfet.qu'une pression del Oatmospheres maintenue pendant deux heuresseulementsulTise, memeavec'un vide prealable, pour pousser la dissolution jusqu'au centre d'une piece d'un fort equarrissage, surtout si cette pi6ce est en chene d ur. Coeur des arbres. — J'ai du chercher a eclaircir mcs doutes sur ce sujet : Une piece de chene anglais, parfaite- inent saine, et d'un grain compact, longue de 4 a 5 metres et d'un diametre de 0"45 environ, apres avoir subi la pre- paration au moyen du chlorure de zinc, a etc sciee dcvant moi par le milieu, et au coeur des deux bouts fraichcment coupes, deux fragments de bois ont cte dcHaclit^s. L'un a (5te analyst devant moi, dans le laboratoire altenant aux ateliers do la compagnie, et le rfeultat de cette analyse ne ra'a pas paru concluanl; j'ai rapporte I'autre en France et je I'y ai analyse moi-meme, avec i'aide d'un homme competent, sans pouvoir y trouver les moindres traces d'un sel de zinc. Cette derniere analyse, ayant ete faite avec lout le soin possible, est devenuepour moi une preuve positive que la dissolution de chlorure de zinc n'attoint pas le centre des fortes pieces de bois, lorsquc la pression n'est maintenue que pendant quelques instants. Reussit-on completement lorsqu'on la niaintient pendant 12 heures? Je n'ai jusqu'ici pour m'aider 20 306 CONSERVATION a repondre a celte question que Texemple de I'Amiraule anglaise, qui offre une grande presomption pour raffirmativo, mais qui ne saurait tenir lieu d'une preuve certaine. Du resle, cette preuve, si elle existe, il est facile de I'obtenir; que Ton introdiiise,a defaut de cylindre, dans une chaudiere a haute pression, un troncon de plancon de 50'=/'° d'equar- rissage, puis, qu'apros y avoir fait le vide par un moyen quelconque, on y force avec une presse Iiydraulique une dissolution de chlorure de zinc, faite dans les proportions voulues, il sera facile d'y maintenir, pendant -12 heures, une pression de 1 0 atmospbtires et d'analyser, apres cette t^preuve, une portion du coeur de la piece. Si I'analyse ne denote pas la prt^sence du zinc, cela prouvera que douze heures de pression ne sufTisent pas et on pourra recommencer I'expe- rience en gardant la pression pendant 24 heures, car, a mes yeux, la question n'est guere qu'une question de temps. Dans le cas ou Ton reconnaitrait qu'il faut, pour rt5ussir completement, maintenir pendant 24 heures le bois sous une pression de 10 atmospheres, on pourrait adopter ce laps de temps sans augmenter beaucoup les depenses: un second cylindre devrait etre joint au premier et la fosse qui contient le liquide devrait 6tre faite plus grande. Mais il ne serait utile ni d'avoir d'autres pompes, ni d'augmenter la force motrice, et le nombre d'homme attach(i a I'atelier res- terait le m6me, chaque cylindre n'etanl plus vide et rempl que dedeux jours Tun. Je croisaussi que, danstous les cas, il serait bon de garder le vide pendant quelque temps dans le cylindre avant d'y inlroduirc la dissolution de zinc, afin de permettre a I'air contenu dans les pores du bois de s'e- cliapper plus completement en entrainant la s6ve. Etat da bois soufnis au proccde. — Une question in- tiressante qui se presente ici, c'est celle de savoir dan.s quel DES BOIS. 307 etaton doitclioisirle boispour le soumeLlrca la pivparalioii; doit-il6treprisvertencoreoutoiit-a-faitsec?Seloii moi.lebois, pour subir une preparation eflicace, doit etrc de coupe assez rccentc, car alors Ics pores en sont ouverls et il est plus facile d'en extraire la seve ct de la remplacer par un autre liquidc; un bois bien sec dont les fibres se sont reserrees de inaniere afaire disparaitre, pour ainsi dire, tous les canaux de la sive, doit olTrir do grandcs difficulles a une parcille preparation et il y a certains bois durs avec lesquels ello devient impossible. Le bois employe doit done etre de coupe reccnte; de plus, il doit etre travaille ou au moins degrossi; cela est economique, car le cube en est considerablcment rcduit; en outre, on est bien plus sur de saturer completc- ment les pieces dont I'eqiiarrissage est beaucoup moindre. J'ai vu a Cliatam, en magasin, la membrure complete d'unc fregale dcstinee a etre mise sous pen sur chantiers; celle membrure avail ete preparee par le precede Burnett, aprcs avoir tHe travaillee, et elle elait doposoe sous un liangar afin de s'y scclier pendant six mois, avant d'etre montee. Ce . temps suffit, a ce qu'il parait, pour qu'il n'y ait plus aucun inconvenient a employer le bois prepare, et en sccliant, il travaille asscz peu pour que le parage ordinaire soil sufll- sant, lorsqu'on vient a niontcr le biiliment en bois tors. Quant aux bordages, leur epaisscur etant comparativement faiblc, on pent les preparer longtemps a I'avancc, lels qu'on les debile pour le magasin. Dans le cas ou Ton reconnaitrait qu'avec les precautions presentees par I'Amiraute anglaisc, on reussit i\ saturer com- pl(^temcnt dcs bois de fort equarrissage, il deviendrait inte- ressant d'appliqucr to procede a la conservation des bois de mature, ct alors, pour (iviter de fausses depenscs, il con\ien- drait dc porter tout d'abord les dimensions du cvUndrc a 308 r.ONSF.RVATION ce qn'cllcs devraient etre pour qu'il put reccvoir la plus /orte piece de bois de mature. A Chatam, lorsque j'ai visite cat arsenal, retablissement d'un cylindre supplementaire de 95 pieds anglais, destine arepondre a ce besoin, elait en projet. Je lerminerai, en enoncant d'une maniere concise les consequences principales a tirer des considerations qui precedent: Conclusions. — 1° Le procede du a Sir William Burnett est reellemenl efficace pour la conservation des bois, toiles, etc., lorsqu'on peutsaturer completement ces substances du liquide preservateur ; 2° Ce proced6 est facile a employer unc fois que les appa- reils convenablcs sonl ctablis, et il ne donne lieu qu'a une depense insignifiante, si on en compare le cbiffre a celui qui represente la valeur du bois prepart^; 3° II n'est pas suffisamment etabli que les moyens meca- Tiiques employes suffisent pour saturer jusqu'au centre les plus fortes pieces debois; mais une experience facile est proposee pour eclaircir ce point important; 4" Enfin, I'exemple donne par I'Amiraute anglaise est un argument puissant en faveur de I'adoption du procede, sinon d'une manifere generale, au moins pour les bois de moyenne et petite dimensions. Paris, le Novembre 1845. L'Ingenienr de la Marine, Signe : A.m. Mangin. P.-S. — Application en France. Marine. — Bien que les conclusions de ce mtimoire fusscnl favorablcs au procedd de DES BOIS. 309 SirVV. Uurnctt, il n'yapasetedonnesuite: lacompagnic qui exploitait cc proct^de avail des pretentions infiniment trop ^levees pour qu'on put songer a entrer en arrangement avec elle. II n'a mfime et6 fait depuis aucune experience dans les arsenaux de la marine, ni pour constater les proprietfis prcservatrices du chlorure de zinc, ni pour determiner le meilleur mode de saturation des bois. Chemin de fer. — Aujourd'hui, le brevet que Sir W. BurneU avait pris en France est expire el son precede, qui est lombe dans le domaine public a recu la sanction de I'experience. L'usage s'en est repandu, et des compagnies de chemin de fer (entr'aulres celles d'Orleans et de Bordeaux) I'ont adopte pour la preparation des traverses, poleaux de leiegraphe, etc. Ce precede, ainsi qu'on a du le remarquer, se compsse de deux parties dislinctes : 4° De remploi de moycns mecaniques particulicrs pour saturer les bois 2° De I'emploi de ciilorure de zinc comme ageni prescr- vateur. Autres proccde's. — Bien que depuis 1845 de nombreux essais aient cilc fails dans le but de trouver un mode do preparation des bois a la fois efilcace et economique, les moyens adoptes par Sir W. Burnett sont encore ceux qui mc paraissen I devoir etre preferes. On trouvc dans les annates des Ponts-et-Chaussees de Mars et Avril 1830, le rapport d'une commission d'inspccteurs divisionnaires des Ponts-et- Cliaussees, cbargee de constater les rt'sullats des essais fails par M. Boiichcric pour la preservation dos bois, rapport dans lequel sont decrits avec soin les divers nmyens d'injcclion successivemenl Icntes par eel invcntcur. Aucun ne parait sur, economique, expcdilif, comme le procede anglais. Cu 310 CONSERVATION DES BOIS. sont des moycns pour ainsi dire primitifs. Quanl a la liqueur a injecler dans les bois pour les preserver de la pourriture, elle peut etre autre que la dissolution do chlorure de zinc. 11 rcsulte en effet du rapport que je viens de citer que le sulfate de cuivre dissous dans la proportion de i k. 508 par hectolitre d'eau, jouit de pro- priet^s conservalrices tres positives. L'elTet preservateur de ce sel est-il de plus longue duree que celui du chlorure de zinc? C'est une question que I'experience n'a pas, a ma connaissance, encore resolue, et, tant qu'elle restera inde- cise, celte dernifere substance aura sur le sulfate de cuivre nn avantage qui n'est point a negliger, celui du prix de revicnt. Cherbourg, le 10 Fevrier 1853. L'lncjenieur de la marine, Signe : Am. Mangin. CATALOeiiE METHODIOIJE DES LICHENS RECUEILLIS DANS L'ARRONDISSEMENT de: cherbocro. PAR IH. P.-A. DELACUAPELLE. 1853. Quelque petits qae fussent CPs objeti, iU itairnt digues de mon atteDlion,puisqu'iU avaicot niriti cclle de la netiirp. BERNlRum D* SAi:ches a I'int^rieur. P. Enteroleuca. Croute mince, grise, grenue; scutelles d'abord planes et bordees, puis convexes et rugueuses, sans bardurc: sur I'i^corce des arbres. B. Laehenee. P. Synolhca. Croute d'un vert noiratre : sur les vieillcs barrieres, a Cherbourg. B. Laehenee. tttt Scutelles noires a I'ei^lcrieur, rouges interieurement. P. Sanguinaria. Croute grenuo ou ridee, grisc, plus on moius glauque! En ouvrant une des scutellcs, on remarque L)ES LICHEiNS. 327 un point rouge a la base, ce qui distingue facilement celte espece : croit sur les rocliers. ttttt Scutelles noiratres, recou vertes d'une poussicre plus ou moins glauque. P. Albo-Coerulescens. Croute blancbo ou grise, fendillee. Les scutelles, dont le disque est recouvert d'une poussiere glauque, ont le rcbord prive de poussiere et paifaitement noil- : croit sur les pierres de granit, a Flamanville. La Var. b. Turgida; a Octeville. P. Siiacea. Croute mince, unie, d'un rouge d'ocre; scu- telles d'abord planes avec un rebord, puis convexes ou dif- formes : croit sur les roches scbisteuses, chemin de laLoge; trouve par M. B. Lacbenee. P. Margaritacea. Croute d'un blnnc grisaire, cntouree d'une ligne noire; scutelles a rebords proeminents, recou- verles d'une poussiere blanclie : menie localite. B Lachon'- P. Epipolia. Croute blanche, epaisse, grenuc, fen I les scutelles sont litiniis|)heriqu('s , prcsijiie ^! bu.tii.M^s, recouvertes d'une poussiere grise, trt>s adb^rente : sur un raur pres de la cbapelle Sl-Sauveur. B. Lachenee. P. Sulphurea. Lecanora Sulphurea, Bctan. gall. Croiile jaune, epaisse; scutelles convexes, diflormes, recouvertes d'une poussiere d'un jaune bleuatrc : roches granitiques a Fcrmanville,;;cflte du Val-dc-Saire. f : Obs. La bordure formd'e par la croute manquant souvcnl dans cctte espece, je I'ai conservec dans le genre Patellaria. I'. Crelacea. D. C. 11. fr. P. Speirea,Vnr.Crcf(i(ca. Dub. Bot. gall. Croute continue, luilvcruleiile, d'un blanc d* lail : .surMcs picrrcs, a Ocle\ille. 328 CATALOGUE -'•yyttt Sculellcs ile couleur faiive ou brune. P. Iiicana. Croute epaissc, d'un aspect vein, blanclic, glaiique lorsqu'elle est liumide, grisc etant sechc. Les scu- lelles, qui sont trc;srares, sont d'unc couIpim' brune, avec un rebord cntier el plus pale qut; le disquc. Cetle cspece, comi- inunc au pied des vieilles souches, se rencontre presque toujours sans sciitelles : acctelat, ellc a etc dt^crito par differents auteurs sous le nom de Lepra incana. P. Viridescens. Croute grenue, verdalre, d'un aspect pul- verulent, s'etendant irregulieremenl sur les vieilles ecorces, et nicme sur les mousses. Les sculcUes sontd'abordconvexes et sans rebord, puis hemisphcriqucs etridees. Croit sur les vieus pommiers, environs de Cherbourg. P. Vernalis. Croute grenue, inegale, d'un vertgris; scu- telles planes ou concaves, a rebord proeminent dans leur jeuncssc, puis convexe et sans rebord. On rcmarque des points noirs epars sur le disquc des scutcUcs. Croit sur recorce des vieux arbres, a Ocleville. La Var. b. Spba^roidca, P. Rosclla de D. C, se distingue par ses scutelles devenant globuleuses et agglomerces. Trouve sur de vieux arbres a Digosville. B. Lacbenee. P. Rivulosa. Croiile d'un brun cendre, entouree d'uno ligno noire ; scutelles brunes, noircissant par la dessication, planes dans ieur jcunesse, devenant oonvexes et irregulieres en vieiilissant. Couville, sur les roches quartzcuses. La Var. Decussata, Achar.; nioiitagnc du Roule. P. Decolorans. Var. Granulosa, Dub. Bot. Gall. Croute continue, grenue, d'un grls blanchatre: montagnedu Roulc. ttttttt Scutelles rouges ou rouge-brun. P. Pacbycarpa. Croiitc grenuo d'un vert ]^"d\e, blan<;hissani; DES LICHENS. 329 par la dessicalion , et s'ctendant irrogulioremcnt siir les mousses, oii elle croit. Les sciitollcs sont concaves, avec un rebord proeminent dans leiir jouncsse; grandcs, un pen bombccs et sans rebord, en vieillissaiit. CroU sur ia niousse, foretde Britiiiebec et aii Vrelot. P. CEruginosa. Crofilc mince, conleur d'un vert de gris pale; sculelles, d'abord planes, devenant dans Icur vieillcsse convexes et ridees, sans bordiirc. Croit sur la lerre, parmi lesvieilles souclies : monlagne du Roule. P. Ferruginea. Croiite arrondie, cendree, un peu grenue; scutelles d'un rouge brique, concaves a rebord proemirient, puis convexes, deformees, avec un legcr rebord persistant: sur Tecorce des arbres. P. Lamprocbeila. Celtc espece, qui resserable a la precti- denle, croit toujours sur les rocliers, ce qui la distingue sufTisamment. La Var. Ca3sio-ru(Ta B. g. a etetrouvee sur un mur dc la rue des Macons, a Clicrbourg, par M. B. Lacbenee. P. Micropliylla, Var. Picina. Croiite d'un aspect noiratre, gelalineuse, formee de granules presses, commc imbriques. Les scutelles sont noircs, planes. Donjon de Bricquebec, mai -1846. B. Lacbenee. tttttti't Scutelles jaunes. P. Lucida. Croiite pulverulente, d'un jaune vcrdatre; sculelles un peu enfoncecs dans la croiite: croit sur les rocbers, a la grande Fauconniorc, ct sur les falaises de Greville. B. Laclienee. RinZOCARPON. S. C. (Patellarja, Bot. gall.) Les especcs de cc genre no se dislinguent de celles du pre- '.V-U) > CATALOUIE codcrit (juc par los lignes noires qui so croisent a la surface do ki croijto : ellos croisscnt loujours sur les pierres. R. Geographicutn. D. C. —Patellaria geographica Bot. gall. Taclies jaunes, brillantes, placees sur une croule noire, lellemeut mince qu'elle ne paralt qu'une coloration de la pierre, et servant de bordure a ces tachcs. Les scutelles, d'un noir mat, avec un leger rebord, viennent toujours sur la parlie noire do ce lichen. Commun sur les rochers. R. Confervoides. D. C. —P. Atro-Alba. Bot. gall. Dans cette cspece, une croiite d'un gris blanchatre se devcloppe sur la pellicule noire qui sert a la plante de base et de bor- dure. Les scutelles, noires, sont un pcu bombecs, avec un rebord peu apparent. Rochers sur la montagne du Roule. LeRhizocarponasteriscum.D.C. — Patellaria Atro-Alba, Bot. gall., var. Dentritica: une a deux scutelles, petites,au centre d'une laclie noire, de la base de laquelle rayonnent des filets noirs, rameux, qui donnent a ce lichen la forme d'un asterisque. Croit sur les rochers quarlzeux, landc de Bruneval. B. Lachenee. R. Arrneniacum. Cette espece ne dilTere du Rhizocarpon geographicum que par ses ecaillcs qui sont d'un jaune orange: sur les pierres. LECANORA. Scutelles sessilcs, planes ou con vexes, entourees d'une bordure formee par la croutc. -f Scutelles jaunes. L. Vitellina. Croiite grenue, (Sparse, d'un jaune brillant; scutelles de meme couleur, d'abord planes, puis convexes : croit sur les rochers, ii la Fauconniere. DES LICHENS. 33f L. Citiina. Croulcd'iin aspect pulverulent, indclcrininee, tl'un jaune vif. Cette cspece, Ires-cominune sur les murs, est presque loujours privee de scutellos, lesquelles sont d'uu jaune plus fence que la croute. Le Lecanora Linckii, Clicvall., croissant sur les arbres, trouve a Brix, par M. Lachi}nee, sur un vieil arbre, doit elre consldere comme une variete du L. Citrina. L. Luleo-Alba. Croute nuUe; scutelles d'abord planes, puis convexes, avec une bordure du meme jaune que le dis(]ue: croit sur I'ecorce des arbres. La variete b. Aurantiara differe du type par la couleur des scutelles, qui sont d'un jaune plus foncequela bordure: celle-ci souvent blancliit sur les bords. L. Cerina. Croute indeterminee, blancbe ou grise; scutelles d'un jaune de cire, avec une bordure d'abord recouvertc d'une poussiere blanche, puis devenant grise: croit sur I'ecorce des vieux saules. B. Lachenee. L. Lutescens. Croute pulverulente.'d'un vertjaunatre; les scutelles, qu'on trouve rarenientsur cette espece, sont d'une couleur carnee, brunissant par riige: croit sur les arbres, aux environs de Clierbourg. B. Lachenee. L. Ehrartiana. Croute rid(5e, grenue, fendillee, d'un blanc verdatre: sur I'ecorce des arbres, monlagne du Roulc. La var. Polytropa, sur les pierres. L. Chloroleuca. Croiitc grenue, blanchatre; scutelles agglomerc^es, concaves, d'un jaune verdatre. Rare. i 1 Scutelles d'un brun fauvc. L. Subfusca. Crodle phis ou nioins grenue, grisatre; scu- telles planes a bordure cntiere et epaisse; commun sur I'ecorce des arbres. 332 CATALOGUE La var. a. Argenlata, Acli. Syn. Lich. p. 157, a h croftle orbiculaire, blanche, tn*s lisse, et )cs scutelles planes avec line bordure Ires enlierc: se trouve siir les arbres, pr^sde la Glacerie. La var. Atrynea, croit sur Ics pierres. L. Scnipulosa. Croiite dt'temiinee, grise, verruqueuse, fendillce; sculellcs de couleur cirejaune, brunissant en vieillissant; bordure entiere, puis sinueuse. Celtc espece, qui a bcaucoup dc rapporl avec la precddente, est la Var. b. dii Lecanora sulpluirea d'apris Achar. melh. p. 169. Croit sur les vieux arbres, au Maupas. B. Lachent^e. L. Varia. Croiito irregulicre, a surface inegale, d'un jaune verdalre; les scutelles a disque variantdu jaune au rouxbrun, sont nombreuscs, a bordure llexueuse et crenelee. Sur le bois denude et les vieilles barrieres. B. Lacbenee. L. Craspedia. Croute blanche, grenue, inegale; scutelles d'un rouge-brun en vieillissant: sur les rochers granitiques, Cosqueville et Angoville. L. Epibryon. Croiile blanche, irregulierementetendue sur les mousses; scutelles d'un brun niarron, planes: a la Jouannerie, a Octeville. B. Lachepee, L. Retorrida. Croute d'un gris verdatre, grenue ; sur les pierres. Environs de Cherbourg. B. Lachenee. fft Scutelles rouges ou roses. , L. Ilaimatommn, Ach. Syn. p. 178. Croute epaisse, fen- dillee, pulverulente, couleur de soufre; scutelles enfoncees, d'un rouge sanguin, d'abord planes, puis convexes:sur les rochers, a la grandc Fauconniere. tttt Scutelles fauves, devenant bruncs ou noiratres. L. Brunnea. Croute grenue, gelalincusc, d'un brun noi- BKS Lir.ME.NS. .333 I'Atre; scutelles fauves, devenant d'un brun fonce en vieillis- sant: sur la terre et los fosses, au village de la Loge. ttttt Scutelles coulcur de chair, pales, ou reconvenes de poussifire. L. Turner!. Croute grenue, pulverulente, d'un blancsale, verdatre; scutelles espacees, grandes, epaisscs, a disque un peu concave, d'un rouge pale. La bordure, epaisse, est d'abord entitire, puis crenelee : sur I'ecorce des vieux arbres, a Flamanville. L. Albella. Croute blanche, mince, cartilagineuse: sur Tecorce des arbres, montagne du Route. L. Parella. Croute tres blanche, grenue, verruqueuse, fendill^e; scutelles de la couleur dela croute, larges, a bor- dure entiere et epaisse : sur les troncs d'arbres et les pierres. La Var. b. Tumidula differe de I'espece par sa croute plus mince, par ses scutelles plus convexes, et par la bor- dure moins epaisse: croit sur I'ecorce des arbres. La Var. Palescens, beaucoup plus rare, croit sur les rochers el sur I'ecorce des arbres, a Flamanville. L. Tartarca. Croute epaisse, grenue, blanche, nn peu cendree; scutelles larges, planes ou un peu bombees, do couleur de brique pille, a bordure ondult'e: sur les rochers, montagne du Roule. L. Glaucoma. Croute grenue, d'un gris blanchatre, fen- dillee; scutelles enfoncees dans la croute, d'abord planes, puis bombees, a disque poudreux, variant dc couleur depuis le. rouge jusqu'au brun noir : sur les rochers, a Flamanville. L. Angulosa. Croute membrancusc, grise, d'abord lissc, puis ruguensc et fendillee; les scutelles, a disque pale, recouvertcs d'une poussicre glauque, se trouvant deforni(5es par leur rapprochement: crotl sur I't-corce des arbres. . 334 CATALOGUE L. Subcarnea. Celle cspeco, qui croit siir les rochers, a bcaucoiip de rapport avcc la precedente. B. Lachun6c. L. Hageni. Croule Ires mince, membraneuse, d'un blanc grisatre ; sculelles devenant brunes en vieiilissant : sur rccorcc des arbres. « tffttt Scutelles noires. L. Coarctata. Ach. Syn. p. f49. Croute etendue, irregu- liere, un peu rugueusc, grise, fendillee en petites arroles; scutelles a disque enfonce dans la croute, a surface plane, k bordure elevee, un peu poudreuse, (^Iranglee de place en place, de manierea former comme un cbapelet aulour du disque. Croit sur un mur, cbemin dela Loge; tres rare. L. Atra. P. Tephromelas, fl. fr. Croute arrondie, grenue, «n peu ridee; sculelles eparses, a bordure un peu proemi- nente. Celte espece est commune sur les rocbers ct I'ecorce des arbres; elle difTere du Lee. Sabfusca par la couleur noire de ses sculelles. La Var. b. Confragosa, Ach. se distingue par la teinte verdatre de sa croute : croit sur les vieux troncs d'arbres, a Virandeville. B. Lach^nee. La Var. Grumosa, Ach. ; croule d'un gris-blanchatre. fffff R^'ceptacles places sur une croute formee par dos ccailles ou folioles plus ou moins appliqu6es, mais libres, au moins sur le bord de la croute. rSORA. Ecailles planes ou convcxes, dislinclcs, croissant sur une croute pulvernlentc tres legere. DES LICHEN?. 333 P. Vesicularis. Croiitc pnlverulenlc, noiralrc, croissant sur la terrc ou parmi les mousses; porlanl dcs tubercules foliaces, distincts, a lobes obtus et renfles d'lin gris sale ; scutelles noires placees sur lecot^ de ces luberculesicommun dans les mlelles de Cherbourg. P. Lurida. Croule formee de folioles rondos ou lobecs, imbriquees, se relevant a leur exlremile superieure, de cou- leur livide, brune en dessus et moins foncee en dcssous. Scutelles d'un brun dcvenant noir. Sur un mur pres de la cliapelle Saint-Sauveur a Cherbourg. Mur pres le manoir a Equeurdreville. Chemin de I'eglise, a Querqueville. B. Lachenee. P. Candida. Differe du P. Vesicularis par ses tubercules foliaces, reconverts d'une poussiere blanche, adherente. Moins commun. SQUAMARIA. Croute large, irreguliere, form(5e. d'ecaillcs ou folioles epaisses, souventimbriquees, portant a leur surface des scu- telles qui ne sont point enfonc^es dans la croute. S. Crassa. Ecailles<5paisses, planes au centre, lobees sur les bords, d'un vert jaunatre, blanches sur les bords, en dessous; scutelles nonibreuses, rousses, a rebord blanchatre. Falaises de la Hague, juin 18.^2. B. Lachfinee. PLACODIUM. Croute orbiculaire, adherenle, grcnue au centre; les scutelles naissent sur la parlic grenue; les folioles qui rayonnent du centre a la circonf(5rcnce nc sont visiblcs que sur les bords. :j36 t:\TALOGUE p. Ochrolencum. Croiite d'un jaune vcrdatrc, orbiculairo, n'(5tant souvent visible qiiesur les'bords, le centrese detrui- sanl par I'agc. Lcs scutelles sont d'un brun fauve, a bordurc moins foncee en couleiir. Croit sur les roches de granit, a Flamanville. P. Albescens. Croute rugueuse, putverulente, d'un blanc sale; scutelles ramassces au centre de la croilte, pressees, anguleuses, couleur de chair devenanl brunc. Commun sur les pierres el les niurs. La Var. b. Disperniura differe de Tespece par sa croule presque nuUe, par ses scutelles eparses, etdevenant prcsquc noires par la vetuste : meme habitat, niais plus rare. P. Canescens. Croiitc blanchatre , farineusc, arrondie ; scutelles d'un noir bleurure, a bordure blanche dans leur jeunesse, etsans bordure lorsqu'elles sont vieilles. Commun sur I'ccorce des arbres et sur les pierres. P. Fulgens. Croiite d'un jaune citrin, en rosette orbicu- laire; scutelles d'un rouge orangfi, eparses sur la croute. Cette espece, que j'ai Irouvee croissant sur la terre, dans les dunes, pres de la redoute de Tourlaville, se fait remarquer par la couleur brillante des scutelles, ctla belle teinte jaune de la croute. P. Murorum. Croiitc verdatre 6tant humide, d'un jaune obscur etant seche, grenue, a folioles elroites et convexes, visibles seulement sur lcs bords; scutelles nombreuses, ramassees au centre de la croute : se Irouve sur les murs. La Var. Obliteratum, plus commune que le type. P. Elegans. Cette espece differe de la precedente par la couleur rouge-orange de la croute, par les folioles ecartees les unes des autres, et par les scutelles petites, planes et eparses : sur les rochers, a Flamanville. P. Candicans. Croute rugueuse, blanche, a folioles ridees, DKS MCHENS. 337 dilatiJcs sur les Lords; scutcUes noirtUres, rccouvcrles d'une poussitre glauquo. Rare. P. Candelariuni. Ne doit pas etre confondu avec Ic Par- melia Candelaria. M. Chevallior, fl. parisienne, Ten st'paro avec raison : il se rapprochc dii Phcodium Murorum. COLLEMA. Foliolcs de forme variable, d'une consistance gelatineiise ; d'lin vert noiriitre (!'tant fratclies, raides et fragiles etant soches; qiielquefois liljrcs.jmbriqiiees ou dressces, qnelque- fois indislinctes, et no presentant ii la vueqii'iinc croiite grenue el gelalineusfc. Feiiilles libres, pen epaisses. f Sculellcs brunes. C. Nigrescens. Folioles Iranslucidcs, mollcs, flexibles et papyracees, formant une rosette ridee; scutelles d'un brr.n roussatrc: comiiiun sur I'ecorce des arbres. (]. Furvum. Ccttc espccc dilTore do la procedente par ses foliolcs couvcrtes, en dessus, de pelils grains nombrcux et opaques: sur Tecorce dos arbres. B. Lacbencc. C. Jacobea^fotium. Folioles membrancusesd'un vert fonce, crepucs, decbiquclees; scutelles d'lui brun pourpre, a bor- durc analogue fiux foliolcs: sur Ics murs couverts dc terre, a Tourlavillc. ft Scutelles rouges. C. Lacerum. Folioles d'un vert glauque elant bumidcs, 22 338 fiATALOQlE grises olant sechcs, minces, dressees, irregulieremcnt den- telees, crepues; scntelles peu nombreuses, pctitcs el rouges: parnii les mousses, chemin dos Rueltes au t^lcgraphe, Cherbourg. 2 Folioles epaisses, formant un gazon de folioles redrcs- s6es, imbriquecs ou peu distinctes. C. Fasciculare. Croute d'un vert fence, formee de folioles courtes, lobees ou crenelees, plissees; scutelles a disque plane, rougeatre, un peu pediculees : sur les fosses, a Sur- lainville : Murs du fort de Vauville ; oct. 1844. C. Crispum. Folioles lobees, crenelees, arrondies, dres- sees, formant une rosette d'un vert fence; les folioles, distinctes seulement sur les bords, le centre n'ayant I'aspect que d'une croCite grenue. Les scutelles sont eparses, rou- geatres, planes et trtis grandes. Sur la terre, dans les Mielles de Cherbourg. La Var. a. Pulposum se distingue par la reunion de ses scutelles au centre de la croute. Dans la Var. v. Cristatum, loutes les folioles sont distinctes. Ces deux varietes se trouvent sur la terre humide et parmi les mousses. La Var. Granulatum, sur un mur pres de la chapelle Saint-Sauveur. C. Tenuissimum. Cette esp^ce forme un petit gazon ras, imbriqut^; les folioles sont lineaires, mullifides, dentelees, tr^s serrees: les scutelles sont eparses, planes, d'un roux brun: crolt sur les murs et la terre humide. B. Lachfin^e. C. Nigrum. Voycz Patellaria nigra. ENDOCARPON. Frondcscarlilagineuses, duros, arrondies presqueen bou- WKS i.it;i!F;>s. 3.i<.» clier, Ic plus souvcnt sc|jarces, queUiuefois rassemblees, lisses en ilessous; rucopUu'lcs renfcniics dans re[iaissoiir de lafronde, el no s'annongant a rcxlerieurque par une peLilo' elevation • term fnee'par un oiillco. E. Fluvialile. Cettc ospece forme'sur. les pierres inondccs de larges plaques de folioles, a lobos arrondis, releves, d'un gns-verdalre a I'exterieur, roussatre en dessous : emit siir les pierres au fond dc la riviere Divello, pres le pont du Ronle, et dans un ruisscaii, au pied de la falaise, a Greville. E. Tephroides. rolioles pclites, d'une couleur grise en dessus, noire en dessous, un peu enfoncees dans la Icrre, a rcbord irregulicr, cr6nele : sur la Icrrc et parmi les mousses, sur le donjon de Bricqucboc, et dans les cn\ irons. E.Pulchellum. Hook. LenormandaJunger mania, Delise. Folioles d'un blanc-grisalre, a lobes creneles, relevcs sur Ics bords, isolecs on rounies, et formant uncespe'ce de roscllo irregulit're : croit sur les mousses ; asscz commune sur les arbres et les rochers, sur les toulTes de la Jungermania Tamari.\i, a Ilerqueville. B. Laclienee. Obs. Le genre Lenormanda a ete forme aux depens du genre Endocarpon. Acliarius, synon. Lichen, p. 100, rcgarde I'Endocarpon viride qui sert de type a ce nouveau genre, comme uneespece doutcuse, n'y ayant apercu aucune.tracc de fructification. PELTIGERA. Feuille simple, lobi'e ; scutelles jjlanes, adiierentcs par toule leur face inferieure, placees a rexlreniiltJ des lobes, ordinairemcnt divis^s en forme d'ongle. ;■ Scutelles reni formes, placees sur lebord inferieur des lobes, et recourbees en dessus. 3iO CATALOGUE P. Resiipinala. Foliolcs lobces, incisees, cl'iin verl-grisalrc pn (Icssiis et de couleur pale en dessous : crolt au pied de la inontagne du Houlc , au pied dcs vicux arbres, panni les mousses. ' P. Parisis. Feuille plissee, lobee, parsem^e au centre de pulvinulcs granifornies : la face superieure est d'un brua clair, I'inferieurc, nuc,d'un brun-noirutre au centre, se fondant vers les bords en une nuance plus pale que la face superieure : croit parmi les mousses, pres du hameau Que- Yillon. P. Loevigata. Celle espece, qui a beaucoup de rapport avec la precedente, en differe surtoutpar sa structure plus petite : meme localite : sc trouve aussi a Brix, au pied des arbres. B. Lachenee. ft Scutelles placces sur le bord superieur des lobes. P. Horizontalis. Fcuillcs larges, lob(5es, d'un vert-blcuatre t'tant humidcs, gris-blancliatre etant scches. Les lobes por- tant les scutelles a leur extremite ont la forme horizontale : sur les rochers, parmi les mousses, au pied do la montagne du Route. P. Polydactila. Dans cetti^ espece les scutelles sont plus nombreuses que dans la precedi'ute ; elles sonl portees sur des languetles redressees et verlicales : dans le bois.de la Pierrc-Butee. P. Canina. Cctte espece, tres commune, differe de Thori- zontalis par des scutelles asccndantes, et des cspcces Pelti- gera et Polydaclyla par scs lobes arrondis, et des scutelles moins nombreuses. P. Srutata, Fcuillcs a lobes arrondis, sinueux, crepus, d'un gris cendrc sur la face superieure, rinfericureblancbe, DKS LICHENS. 34 f prcsque sans veines; Ics lobules porlant Ics scutelles sont courts et redresses : crolt sur los vieillcs souches, parmi les mousses, pros du liamcau Qiieviilon. STICTA. Fcuillc membrancuse, lobce oii inciseo plus ou moins profondement. La face supericure est iiue, r(5ticulee, ou couvci'te d'asptirilcs pulverulcntes , portant dcs scutelles fixces seulement par le centre; la face inferieure est garnie d'un duvet ftlus ou moins epais, laissant apercevoir des points glabres, cnfonces (Cyphelles), ou dcs veines anasto- mosees. t Cyphelloes. S. Sylvatica. Feuilles redressees, sinuees, lobdes irregulie- lement, brunes en dessus, recouvertes eh dessous d'un duvet noiratre entouranl des cyphelles blancbes. L'odeur desa- greable qu'exliale ce lichen le fait aisemcnt reconnailre : croit au pied des arbrcs, parmi les mousses, prt'-s de la Glacerie. S. Dufourii. Feuilles i lobes arrondis, dt^cliiquetis sur les bords : la face superieure est d'un brun olivatre, avec des laches de grains noirs; la face inferieure est garnie d'un duvet, brun vers le centre, dcvenanl d'un jaunc sale vers les bords : les cyphelles sont blanches. Celte espece rare a 6ic trouvoe dans la foret de Bricquebcc, et parmi les mousses, au l)icd dela monlagnc du Iloule. S. Fuliginosa. Feuilles arrondics, pcu divisecs, d'un gris cendr(5 en dessus et marquees de grains noirs nombreux, couverles en dessous d'un duvet noiratre : ci.miinuu paiiui 342 CATALOGUE les mousses, siir les roclijrs, an pied de la monlagne du Roule. S. Lim]):ila. FeuiUos cntii'res ou divisces en lobes courts ct arronJis, formant nrie rosolto orbiculaire : leiir face SLipcrifuro est lisso, d'lin gris roussatre, et mahjue de piil- viniiles griscs, presque pulverulenles, disposes principale- ment siir les bords; la face inferieiire garnie d'un duvel briin cntoiirant des cypliclles blancbes : au pied des vieux arbres, dans lesbois pros de la Glacerie. S. Aiirata. Feuille elendue, divistJe en lobes arrondis, sinueux, creptis el redresses; la face siiperieuce nue, lisse, d'un vert sombre a I'etat frais, devenanl d'un rouge de bri- que par la dessication. Le bord des lobes est reconvert d'une poussiere d'un jaune brillant, qui en dessine les contours; la f.ice inferieure est garnie d'un duvet brun au centre, so fondant ct devenant fauve aux extremites des lobes. Les cypbellcs sont nombreuses, et do la m^me couleur brillante que lapoiissiere don ties lobes sonlrecou verts. Troncs de\^eux lietres, dans un petit bois pres du chateau de Flamanville. Cypliclles doutouses.ou nullos. S. Herbarea. Feuilles divisees en lobes courts et arrondis, sinuds et crC-pus sur les bords, formant une rosette orbicu- laire, qui atteint jusqu'a 13 centim. de diametre; la face sup6rieure est d'un vert gai etant humide, d'un brun oli\e Otant s.-'clie; la face inferieure, blancliatre ct colonneuse : croitsar les arbres, sur le revers nord de la monlagne du Roule. S. Glomulifera. Celte espece, qui a beaucoup d'analogie avec la precedente, soil par la division et la disposition dts feuilles, soil parson eiendue, s'en distingue facilcmcnt i^ir la DES LIGHE.N'S. 343 coulcur, qui est d'un vert glauque, a I'etat frais, et surtout par les paquets d'un vert-brun, assez gros, "composes de fiiaments rameux, serres et entrecroises que Ton remarque aux aisselles et sur Ics bords des lobes : sur le tronc dej arbres, nieme localiltS que le S. Herbacea. S. Scrobiculata. Feuille large, (Plaice en lobes arrondis,' bossel^e, reliculee, glauque en dessus, garnie do paquets pulv(5rulents d'un gris blancbatre ; la face inferieurea duvet court, noiratre au centre, et jaune cliamois vers les bords : conimun sur les arbres et les rochers, parmi les mousses; au pied de la montagne du Roule, Cherbourg. S. Pulmonacea. Feuille grande, etalee, a lobes profonds, anguleux, rameux, tronques au sommet, creusee en r^seaux nombreux; la face supt^rieure d'un vert olive ou brun, I'in- ferieure d'un roux clair, glabre sur les saillies, noire ct poilue dans les creux. On remarque souvent des paquels tirineux, d'un gris de plomb, sur les bords des feuilles, et les lignes brillantes de la surface superieure. Comraun sur les arbres, et parmi les mousses, sur les rochers. S. Linita. Ach. syn. Lich. p. 234. Feuilles a lobes courts, arrondis, a surface reticulee, un peu luisante, d'unocouleur olivatre, devenant d'un brun niarron par la dessication; la face inferieure garnie d'un duvet, brun au centre, devenant plus pale sur les bords. Acharius fail observer que cette plante, a cause de la forme arrondie qu'olfre son ensemble, et par d'aulres din'cronces, doit eirc separee du S. Pulmonacea. Troncs d'arbres dans la forel de Bricquebec. B. Lachenee. PARMELIA. F(?uille disposuc gend'ralemcnl cii rosollo adlierenlc, libve 5ii , CATALOGUE sur Ics boi\ls, iinbriquee du centre a lacirconforence, divisce . en lobes plus ou moins arrondis, ou laciniee, sonvent munie en dessous do fibriUes radicales. Lcs scutellcs sontfixecs sur la face supericurc par un poinl conlral. Y Sculelles rouges, rouge-brun, ou brun-fonce. P. Perlata. Feuillcelalee, divlsee en lobes courts et arron- dis, crepus sur les bords, formant une large rosette, d'un blanc-grisatre etant seche, d'un glauque verdalre etant iiumide, sur la face superieure, I'inferieure d'un brunclair, plus fonce sur les bords. Celte espece est trcs commune sur lcs arbres el sur les rocbers. La Var. Ciliata se distingue par les poits noirs quibordent le dessous dcs lobes. La Var. Celrarioides est plus irregulieremcnt arrondie; la couleur de la face superieure, d'un blanc glauque, la face inferieure noire et luisante, parsemee de points tubcrculeux, remplagant les fibrilles dont on n'apercoit aucune trace : sur les rocbers, parmi les mousses, pres du liameau Q.uevillon, a Tourlaville. P. Caperata. Feuille divisee en lobes larges et arrondis, formant une large rosette, irreguliere, ridee et fronceedans le milieu, d'un vert-jaunatre en dessus, noire el presquegla- bre en dessous: commune sur les arbres et sur lcs rocbers, P.Borreri. Feuille diviscc en lobes peu saillanls, plisses, arrondis el creuses aux extremites , formant une rosetlo presque adh^rente, d'un gris-blenatre, recouvcrts au centre de pulvinules grises. La face inferieure cstnue sur les bords, de couleur pale, plus fonceeel munie denombreuses fibrilles bruncs vers le centre. Ce licben est rare dans nos environs. P. Saxatilis. Feuilles iinbriqnoes, divisces en lobes sinucs. DES LICHENS. 3i 40 (l^coup(^s, arrondis aijsommet; !a face siipoiieure est mar- quee de lignes anastomosecs, grenues, imilant une espt'ce de broderie. Ce lichen, qui est d'un gris cendrii dans sa jeuncsse, devient, en vieillissani, d'un bi'.un-noiratie. Com- niun sur les rochcrs. La Var. Aizoni, Delise, plus rare dans nosen\ irons, se distingue par les pulvinulcs grisalres qui recou\rcnlpresque partoul la face superieura de ce lichen. P. Omphalodes. Celte cspece diilOre de la precedenle, par sa surface lisse, sans lignes de poussiere, et par sa couleur d'un brun-olivalre : conimun sur les rochcrs. La Var. Panniformisse reconnait au\ nombreuses folioles, courles, en forme d'ecailles, imbriquees, un pen redrcssees, et recouvrant la totalite de la plante : croit sur les rochers granitiques, a Fiamanville. P. Olivacea. Feuille d'un brun olive, etalee en rosette, pulverulente au centre, luisante sur le bord des lobes : com- mun sur les rochers. La var. Fuliginosa se fait remarquer par la poussiere noire et grenue qui recouvre prcsque la face superieure du lichen. Dans la Yai'. Delisei, les lobes de la feuille sent etroits, enlremt'd«^s et non adherents. Cette variele croit a Marlinvast, prcs de la Landelle. B. Lachenee. P. Conspersa. Feuille divisee en folioles etroiles,Vlt^cou- pees, sinueuses, planes, arrondicsau somniet, imbriquees en uno rosette orbiculaire, quebjuefois irreguliere, d'un jaune verdalre lisse. Cette cspece resscmblc par sa couleur au Parmelia Caperata, mais elle est bcaucoup plus petite danstoutes ses parties. Tres commune sur les rochers mari- limes, u Sciotol, falaisesde Flanunnille. La Var. b. Stenophylla se tail rctonnaitre jiar sa forme 3 16 CATALOGLK irregiiliere, et par ses folioles allongeos, pinnatifides, fle- xiieiises, etentremeloes : croilsur les rochers de la montagne dii Rou!e. P. Recurva. Cette espece forme siirles rochers une rosetle adiierente de toutes parts ; la feuille est decoupee en lobes rameux, lineaires, convexes endessus, d'un gris jaunatre, d'un aspect pulverulent : environs de Cherbourg. P, Sinuosa. Expansion irreguliore, peu adiierente; feuille divis^e en lobes allonges, pinnatifides, a sinus larges el arrondis : les lobes s'elargissent aux extreinites et se decou- pent en lobules crepus; la face superioure est lisse, d'un blanc glauque ; en vieillissant I'extremite des lobes s'arron- dit, se boursoufle et se couvre d'une poussiere grise; la face inferieure est noire, recouverte de fibrilles nombreuses. Croit sur les rochers de la montagne du Roule. P. Despreauxi. B. g. P. Pseudosimiosa (Nob.). Cette espece nouvelle, que j'ai signalee dans nion Cataloguedes Lichens, Caen, 1826, se fait remarquer par son expansion peu adh^- rente, en rosette formee d'une feuille divisee en lobes lineaires, sinueux, planes, de couleur jaune-verdatre sur la face superioure; le sommet des lobes se renfle dans un age avance, et se couvre d'une poussiere jaunc. La face infe- rieure est noii'e et recouverte de fibrilles de meme couleur, qui d^passent les bords de la feuille. CettJ espece, Ires-voisine du Parmclia sinuosa, en difffere par sa couleur qui ne change pas sensiblement par la dessicalion, et par sa taille qui n'alleint jamais plus de 2 a 3 pouces de diamelre. Croit sur les rochers de la montagne du Roule. P. Loevigata. Ach., est considere par le Bot. gall., comme line forme du P. Sinuosa : se trouve avec le precedent. P. Physodes. Feuille imbriqiice, d'un jaunc glauque en DES LICHENS. 317 dessus, glabrc et d'un beau noir en dessous, a folioles olroites, decoupecs, convexes, obtuscs, renflces au soinmot: commun sijr les rochers de la montagne du Roule. La Var. Vittata sc distingue par ses folioles pinnalifides, dlduses, planes, lineaires: memo localite. P. Dialrypa. Celta cspece se 'distingue bien du P. Pliy- sodes, en ce queries folioles sonl percees d'un rang do Irons arrondis, et que la face inferieure estordiiiaircmcnllilanfhe el Iibreuse": commun dans la mOuie localitc que le pr^'cedent. P. Lanuginosa. Celleespece, disposee on rosette irreguliere, d'un blancjaunalre, est recouverte d'une poussit're grenue de meme couleur, qui ne laisse distinguer les lobes de la feuille qu'a leur sommct: la face inferieure est recouverte d'un duvet noir bleuatrc. Ce liclion croit sur la tcrre, parmi les mousses, sur les rochers liumides, vallee de (Juiucampoix. P. Clementiana. Ce lichen forme une rosette orbiculairc etquelquefois irr^guliere, blanche, "grenue: les lobes, qui ne sonl distincls qu'a la circonfcrence, sont lacinies, croneles et planes; la face inferieure est aussi blanche, munie seu- lemcnt de quelques fibrilles noircs : croit sur le tronc des vieux pommiers, a Herqueville, canton de Beaumont. B. Lachenee. P. Aleuriles. Feuille en rosette irreguliere, ridee, plissd'e, a folioles planes, arrondies, crenelees, d'un blanc vcrdalrc dans sa jeunesse , brunatre en vicillissant , couverte , excepte sur les bords, d'une poussiere grenue, adhercnle ; la face inferieure est de la meme couleur, et porte quelques fibrilles noiratres: se trouvc sur les vieilles barrieres el sur le bois denude. P. Speciosa. Feuille divis(''een folioles longties, incis^es, rameuscs, d'un gris blanchatre, glabres; los bords drs lobes 348 CATALOGUE releves, cripus ct bordes d'unc poussiere grisiitrc; la face inf(irieurc, brune an centre et garnie do fibrilles, nue ot blanche sur lesbordsi^sur les rocliers, parnii les mousses, a Toiirlavillc, pres du hameau Quevillon. P. Aquila. Feuillc diviscc on lobes allonges, convexes, formant une large plaque imbriquee, dont les foHoles sont elargies au sommet; en dessus, de couleur brun marron, glabre; cdi dessous, de couleur pale, et souvent munie de librillcs : commun sur les'rocbers, a Fiamanville. ft Scutellcs noires. P. Cycloselis. Feuillc divisee en folioles etroilcs, lin^aires, non ciliees, disposee en rosette assrz reguliere, d'un gris glauque, souvent pulverulente; la face infericure est spon- gicuse, fibreuse et noire : croit sur les troncs d'arbres, sur la route du Roule. fff Scutelles saupoudrees d'une poussiere grise. P. Pulverulenta. Cette espece forme une large rosette, a folioles imbriquees, decoupeos, planes, obtuscs, un peu elar- gies au sommet]; d'un gris roux t^lant seches, d'un vert gai 6tanl fraiches, ou lorsqu'on les humecte; la face infericure est convene d'un duvet noir; la bordure des scutelles est d'abord entiere, puis cr(5nelee : tres commune sur les arbrcs, route de Oucrqueville. P. Aipolia. Cette espece forme une rosette irreguliere; sa couleur est gris-cendre : cequi la distingue de la pr6ct^dente, c'est qu'elle ne cbangc point de couleur par I'humidite : croit sur le tronc des arbrcs, h Tourlavillc. P. Slcllaris. Feuillc decoupeecn roliolcs lineaircs, incisees, DES LICHENS. 349 planes on convcxcs, d'un gris-cenJrc en dessus, blancliatrc el a fibrilles; noiriitre en dessous. Cette espi^ce est disposec en une rosetle orbiculaire, au centre do laquelle sont pla- cces les scutelles, a bordure entiere, proeminentc, ct de la couleur de la feuille. Croit sur les arbres, a Tourlaville. P. Coesia. Fenille adherente, divisce en foliolcs lincaires, deconpees, portant sur leurs bords des paquets de poussierc grenue, bleuatre : la face superieure est d'un blanc ccndr6, rinferieure, herissee de polls noiratres; les scutelles, a rebord blanc : croit sur les pierres el parmi les mousses; .rocliers au pied de la montagne dn Roule. Observ. — Je n'ai jamais vu eel iciien sur I'ccorce des arbres. P. Albinea. Rosette irregulierement arrondie, a folioles etroites, a lobes nombreux, convexes, creneles el fascicules au sommet; la face superieure est blanche el nue; I'infe- rieure est de la meme couleur, ct munie de fibrilles egale- ment blanches: j'ai tcujours trouve ce lichen prive de scu- telles. Mur pres de la grande Fauconniere; peucommun; trouve aussi a Bretteville et a Ilardinvast par M. B. Lachentie. P. Farrea. Cette espece forme une rosette orbiculaire d'un gris blancbatre; les folioles sont laciniees, a lobes courts, incises, creneles, a bords relev^s, reconverts d'une poussiere grenue; la face inferieure est blanche, munie de fibrilles d'un brun noir : sur les vieux murs, a Bretteville, rare. B. Lachfinee. tttt Scutelles jaunes. P. Parietina. Ce lichen forme une rosette a.ssez reguliere, et so distingue facilement par sa belle couleur jaune; c'cst un des plus communs : on le trouve sur les arbres et sur Ic? 3-"i0 f.ATALOGlC pieiTcs. Siir Ifs rocliers niaritimcs des I'ijlaiscs de Flaman- ville, il se fait remarquer par ses larges plaijues d'un jaune orange trcsbrillant ; serait-ce une Var. ? V. Candelaria. Plaque. peuclcndue, adhcrenle, d'un jaurio palo, it fulioles dislinctes, seulement a la circonference; a lobes largi's et obtus, planes cL un peu ondules : croit sur les murs du cbateau de Tourlaville. La Var. s. L^xhnea fPhyciaPygmea, BorydeSl-Vincenl?). Ce lichen, par sa petitesse, peut ecliapper a I'observalion, et, au premier aspect, ne parait qu'une tache jaune, niaisen Texaminant a I'aide d'une loupe, on reconnait aiscment qu'il est forme de feuilles rampantes, presque imbriqueeset libres, decoupees profondement en lobes lineaires s'elargis- sant aux extremites, qui sont crenelles ct renflees : la face superieure est d'une belle couleur citrine; I'inft^rieure, blanche : je n'y ai jamais vu de scutelles : croit sur I'ecorce des arbres, pres de Cherbourg, rare. PANNARU. DifTiljre du genre Parmelia par les scutelles, qui, dans le genre Pannaria, sont adherentcs par toute leur face infc- rieure. P. Rubiginosa. Fcuille adhcrenle, imbriquee, divisee en lobes divergents, sinueux et a bords crispes; d'un gris sale a la surface superieure; I'inferieure couverte d'un duvet bleu noiratre; scutelles centrales nonibreuses, a disquebrun el a bordure blanchatre el crenelee : sur le tronc des arbres, a Octeville, presde la Jouanncrie. P. Phimbea. Feuille dispost^e en rosette orbiculaire, regu- li^re, de couleur deplomb sur la face superieure, I'inferieure DES LICHRNS. ,3 > I garnie d'un diivcl f'pais d'un bleu noiraire; Ics lobes de la feuille arrondis, crencles, pianos, rayonnaiit du ccnire a la circonfiirence; scutclleseparses, brnnes, a bordure do meinc couleur et tres entiert; : cominun sur les arbres, au Yrctot et dans laforctde Bricqiicbec. La Var. Myriocarpa se distingue par ses scutelles pins pelites, tri'S nombreuscs et rapprochces : sur les troncs d'ar- bres, a Virandeville et aux environs de Cherbourg: trcs rare. P. Conoplea. Feuille decoupee en lobes courts, creneles, releves et crepus, recouverts d'une poudre de couleur gris de plomb; les scutelles, d'un brun fauve, sont irregulieremont convexes, souvent tuberculeuses, et sans bordure apparente : la face inferieure de ce lichen est couverte d'un duvet laineux, epaiset d'un bleu noiraire : sur les troncs d'arbres, parmi les mousses, dans le bois de la Prevallerie , a Octc- ville. tttttt Folioles libres, plus ou moins dressees et dispo- sees en gazon, glabres sur les deux faces, divisees en lanie- res qui portent des receptacles scutelliformes, et sur leurs bords des paquets farineux, PIIYCIA. Feuilles membrancuscs ou cartilagineuses, souvent bossc- Ides irreguli^rement, planes ou canaliculees, nues ou ciliecs sur leurs bords. t Feuilles ciliees, scutelles visiblcs. P. Chrysopbtalma. Feuilles d'abord blanches, puis dcvc- 3>2 GATALOGLK nant jaunes, profondeinent dccoupecs eii folioles, duclii- quetees et ciliees ; les scutelles son t jau nes dans leur jeunesse ; en vieillissant, elles deviennenl d'un rouge dore. Ce lichen, rare, croit sur les branches d'arbres, dans un bois taillis sur la raontagne du Roule. P. Ciliaris. Feuilles blanches en dessous, vert glauque en dessiis, divisees en lanieres etroites, rameuscs, canaliculees en dessous; les scutelles, a disque noiratre, plane, a bordure blanchatre : commun surrccorce des arbres. P. Tenclla. Cctle espece, qui a del'analogie ilvec la prcce- dente, est beaucoup plus pelite dans toutcs scs proportions; la couleur de son feuillage est d'un gris cendre sur les deux faces : nicme localile que la precedente. La Var. Leplalea. Feuillage vert t^tant humide, gris et un pcu pulverulent etant sec; imbrique et formant, ainsi que le P. Tenella, des rosettes comma les Parmelia, mais leurs feuilles ne sont pas adherentes : sur les arbres, dans les jardins, a Cherbourg. -j-f Feuilles ciliees, scutelles manquant ordinairement. P. Flavicans. Ce lichen forme une toufTe serree, a feuilles dressces, menues, tres rameuses, a lanieres dichotomes, a rameaux aigus, divergents et irreguliers, legerement con- caves en dedans : sa couleur est d'un jaune dore, la face inferieure un peu plus pale : commun sur les rochcrs, u Fiamanviile. P. Leucomcla. Feuilles diffuses, sc divisant en folioles allongees, cuneiformcs, elargies et bifurquees au somniet; d'une couleur blanc glauque sur la face supcrieurc; I'infe- rieurc, d'un blanc mat : croit parmi les mousses, dans les bois, rare. OES MOHENS. I.'j.l fft Feuillcs Don cilices, scutellcs manquaiU ordinairc- nient. P. Prunaslri. Feuille nioUu el membraneusc, pendante, ridfie et bosselee irregulicrement; d'un Llanc cendre en dessus, plus blanche en dcssous; divisec en Ian teres droites ct lin^aires, garnies sur leurs bords de petits paquets])ulve- rulents, blancs, Eombreux : conimun sur tousles arbrcs. P. Glauca. Feuille large, 6tal6e, lisse, glauque en dessus, ■noire endessous; a lobes tri^s larges, presque imbriques, crepus, farineux a rextreniit^ : croit sur les rochers, au revers nord de la montagne du Roule. La Var. B. Fallax, ne differe de I'espece que parce qu'elle est blanche par places, en dessous. RAMALINA. Ce genre, detache du precedent, en differe seuleraent en ice que, dans le Ramalina, les scutelles sont formees enliere- ment par la substance rnemc de la feuille, et tr6s souvent d'une couleur analogue. 7 Scutelles \isibles. R. Fraxinea. Feuille carlilagineusc, d'un vert gris sur les deux faces, ridee et bosselee, ordinairenient simple, afolioles qui vont en s'elargissant ; on n'y remarque point de paquets farineux : les scutelles, qui sont d'une couleur analogue a la feuille, sont nombreuses eteparses sur les deux faces. Com- inun sur les arbrcs, R. Fastigiata. Cette espece nc differe de la precWenle qu'en ce qu'elle est plus petite, plus touffue;, cl que ses scu- 23 3o4 CATALOGUE telles sont placOes au sommet des ramcaux : croit sur les arbres, dans nos environs. La Var. Calicaris, plus rare, se distingue par les appen- dices foliaces qui se trouvent sous les scutelles. La Var. Exasperata se fait reniarquer par ses rameaux comprimcs, dilates, et par ses scutelles concaves et meme en forme de coupe : cette variete a ete trouv^e sur le tronc des arbres, a Brettevilte, par M. B. Lachfinee. R. Scopulorum. Les feuilles, comprimees, lisses, planes, lineaires, un peu lacuneuses, d'un blanccendre, divisees en rameaux entiers, amincis au sommet, naissent par groupes serres; les scutelles, de la meme couleur que la feuille, sont eparses vers I'extremite des feuilles. (La saveur tres amere de ce lichen le fait aisement reconnaitre). Commun sur tous les rochers de nos cotes. La Var. D. Cornuata se fait remarquer par la couleur noire de la base des feuilles. Le Ramalina Calicaris de Linn, est leR. Scopulorum dont les receptacles sont munis d'un eperon en dessous. La Var. Divaricata, B. gall., sur les rochers maritimes, a Fermanville, trouvee par B. Lachenee. ff Scutelles manquantordinairement. R. Farinacea. Feuille cartilagineuse d'un gris cendre, glauque ou blanche des deux cOtes, allongde, et divisee en folioles bifurquees, larges aleur base et pointues au sommet, garnies sur les bords de gros paquets pulverulents : commun sur les arbres. R. Polymorpha. Cette esp^ce forme sur les rochers de petites touffes serrees ; les feuilles sont planes , d'une couleur pale, cendree, le plus souvent munies de petites Dies LinifENS. 355 caviiSs longitudinales, divisccs enlranicaux lineaires aigus, Ic plus souvcnt terminus par un petit rendement convert de poussiere : commiin sur Ics picrrcs et sur les niurs. ttttttt Receptacles tubcrculeiix oii en ecussons, places sur des liges nues ou garnies d'ecailles ou folioles. ROCCELLA. Tigcs pleines, cylindriques, nn pen comprimees, d'une consislance coriace, portant des paquets epars de poussiere blanclic; receptacles lieniisphcriques, sessiles, (manquant ordinairement). R. Phycopsis. Tigcs nombrenscs arquees et fasciculees au sommet, a rameaux courts et divcrgents, formant un gazon serre : les tiges et les rameaux sont munis de paquets fari- neux. Ce lichen est d'une couleur brun dair, lie de vin, mais la poussiere blanche qui le recouvrc lui donne un aspect gris blanchutre : se trouve sur les murs des maisons, a Qucrque- ville et a Flamanville, quclqucfois sur les rochers. USNEA. Tiges rameuses, faibles, axiferes, a ecorce ci ustacee. Les rticeptacles, en forme de bouclier, sont souvent cilies sur lours bords. U. Florida. Tige ferme, en branches capillaires, divergen- tes, herissees de fibrillcs perpendiculaires a I'axe des bran- ches, qui portent a leur extremitede larges sculellcs munies sur les bords de cils ravonnanls. Ce lichen est d'un vert 356 CATALOGIE cendre oujaunatre; il presenteune toufTe droite : commun sur les arbres el les rochers. La Var. Rubiginea, Achar. Synon. p. 305, se fail remar- quer par la couleur rougeatre des tiges et des rameaux, principalement a laparlie inferieure de la plante : commun au pied de la montagne du Roule. U. Plicata. Tiges longues, pendantes, a rameaux entre- laces, blanchatres, munis de fibrilles, inclines sur leur axe; les sculelles portent de longs cils rayonnants : sur les bran- ches d'arbres. U. Ceratina. Tiges rugueuses, couchces, pendantes, a rameaux et fibrilles la plupart inclines a leur axe; la couleur de ce lichen varie du gris verdatre au rouge brique : croit sur les troncs d'arbres. B. Lachen^e. U. Barbata. Tiges tres rameuses, courtes, branchues, a filets simples et perpendiculaires a leur axe ; les scutelles sont convexes, a rebord entier, sans cils rayonnants; la cou- leur de ce lichen est le jaune verdatre : se tronve sur les vieux arbres. SPH(EROPHORUS. Tiges libres, rameuses, lisses, croissant en groupes arron- dis sur la terre et sur les rochers : les receptacles, qui sont globuleux, sont places au sommet des rameaux. S. Fragilio. Dans cette espece, les tiges forment un petit gazon arrondi, se diviSent par bifurcation, et leurs rameaux alteignent le meme sommet. Commun sur la terre et les rochers; falaises de Flamanville. S. Globiferus. Les tiges sont irreguliercment rameuses, les rameaux, etalt^s; les suporieurs, un pcu divergents, ce qui donne a ce lichen I'aspect d'un petit arbre : croit avec le precedent, et au pied de la montagne du Roule. DES LICIIfflSS. 357 S. Gompressus. Cette espece se distingue facilement des pr^cMentes par sa couleur plus blanche et'surtout par ses tiges et ses rameaux, qui sont visiblement comprim^s : rochers pres du hameau Quevillon, a Tourlaville. STEREOCAULON. Tiges libres, rameuses, arrondies, diargees de paquets gnenus, d'un aspect plus ou moins pulverulent. St. Pascliale. Tige tortueuse, rameuse, ferme, blanchatre, a rameaux divergents, ciiargees de papiiles pulverulentes; receptacles aplatis, irreguliers, noirs, places au somniet des rameaux. J'ai trouve cette espece dans une crique de rochers, sur les falaises de Flamanville. St. Nanum. Tiges filiformes, rameuses, surtout vers le sommet : toute la planle est recouverte. d'une poussiere blanche, cotonneuse. Cette esp6:e croil en abondance entre les pierres des vieux murs de cloture, pr6s des falaises, u Flamanville. St. Condyloideum, Tige d'un blanc-jaunatre, ii rameaux courts etdifformes, recouvertsde protub(5rances graniformes qui masquent presque partout la tige et les rameaux. Les receptacles, qui sont convexes , sont places au sommet: crolt sur les pierres, dans une ancienne carriere de scliiste, au Roule, chemin de la Loge. CENOMYCE. Tiges creuses, simples ou ramifiees, nucs ou garnies d'e- eailles ou folioles, 6vasees au sommet en entonnoir, ou ter- minecsen pointes aigiies : Receptacles subcrcux, convexc*^ 338 , C#ALOGUE fl solitaires' ou agglorrK^Tcs , places a rextremite destiges ou rameaux. f Tiges nues, fistuleuses, simples ou rameuses, a rameaux tous terminus en pointe aigiie : les receptacles sont charnus, portes sur des pedicules tr6s courts et cylindriques places a I'extremite des rameaux (Cladonia). C. Rangiferina. Tige Ires rameuse, rameaux divises vers le sommet^en especes de pinceaux courbes du meme cote : comrnun sur la tcrre parmi les mousses. La Var. y. Tenuior (Delise) est beaucoup plus petite dans toutes ses parties; I'extremite des rameaux rayonnante et pencliee : parmi les rochers, au pied de la monlagne du Roule. C. Sylvatica. Tige rameuse, droite, de la meme couleiir que Tcsptee precedente; rameaux fascicules au sommet, dresses ou b. peine penches : parmi les mousses et les rochers au pied du Roule. C. Racemosa. Tige droite, rameuse, a rameaux fourchus et divergents : les rameaux sont subules, presque toujours redresses, mais jamais penches du meme cote. On remarque sur la tige des ecailles foliacees : la couleur de ce lichen est un blanc-verdatre. Meme localite que le precedent. La Var. Foliosa sc fait remarquer par ses tiges munies d'ecailles foliacees, par le sommet de ses rameaux, fourchus lorsqu'ils sont sterilcs, et presque en corymbe dans les fertiles. C. Furcata. Cette espece qui a beaucoup de rapport avec la precedente, en differe par ses tiges allongees, subulees et peu rameuses : croit parmi les mousses, dans les bois de la monlagne du Roule, ainsi quo les varietessuivantes : Subu- DES LICHENS. 359 lata, lige rameuse, lisse, ranieaux filiformes, entremeles, fouroh'js et recourhp.s au sommet; fi. Spinulosa, rameaux allonges, a ramuli's aiffus, redresses ; Y. Spadicea, lige et rameaux de conlcur brunc, munis d'^cailles foliacees, glau- ques en dessus el blanches en dessous. C. Papillaria. Croiite grenue d'un blanc cendr^, surmontee de petiles tiges fructifferes, venlrues : sur la terre, a Martin- vast, aux environs du Dolmen, B. Lachent5e. C. Pungens. Tiges et rameaux raides, nombreux, formant une touffe de couleur gris-cendr(^, brunissanta I'extremit^ des rameaux. Y Var. Nivea, se distingue par ses tiges et ses rameaux greles, llsses et d'un blanc assez pur : croit sur la terre des vieux murs. C. Uncialis. Tige droite, d'un blanc jaunalre, a rameaux dichotomes, courts, se terminant ordinairement en deux poinles divergenles. La Var. b. Adunca, Achar. Syn. p. 277, en differe par I'extremite de ses rameaux, radieset tcrmines en crochet croissent sur le revers nord de la montagne du Roale. ft Tiges fistuleuses, naissant sur des feuilles radicales; epanouies au sommet en un entonnoir portant sur sesbords des receptacles tuberculeux souvenl agglomer^s (Sphoero- phorus). f Receptacles fauves ou bruns. C. Turgida. C. Varecha, Ach ; C. Candelabrum, Ehrli. Sciphophoi'HS dijfusus, D. C. fl. fr. Feuilles pinnatifides, etroites, arrondies, formant sur la terre ud jjazon epais, d'un vert glauque en dcssus, blanches 360 CATALOGUE en dessous : les receptacles sont places aulour de I'entonnoir qui termine les tiges. C. Gracilis. C. Lemocyna, Acli ; Sciphophorus Cornutus D. C. fl. fr. — Tiges cylindriqiies rameuses, se lerminant, les unes en pointe, et alors steriles; les autres, en entonnoir etroit, et porlant des receptacles d'un brun fonce : revers iiord de la montagne dti Route. La Var. Elongata se distingue par ses tiges plus longues et moins rameuses. C. Squamosa. C. Sparassa, Achar. ; Scypli. Pixidatus, Yar. Ventricosus, D. C . fl. fr. — La lige, ecailleuse e^ grenue, se diviseen rameaux renfles, ayant aleurs princi- pales divisions des ouvertures d'ou partent leurs dernit^res ramifications, et formenl autour de ces ouvertures une esp6ce de couronne ; meme localite. C. Delicatd. Cette es[)ece, qu'on ne Irouve que sur le bois pourri, forme de petits gazons defeuilles, vert-pale en dessus, blanchatres en dessous ; les pedicelles, ouverts au sommet, un peu comprimes ; les receptacles, globuleux , fauves, deviennent noirs dans leur vieillesse. C. Cornuta. Var. Radiata ; Scyph. Pixidatus, Var. radiatus, fl. fr. — Tige allongee, cylindrique, blanchatres pulverulente, evas6e en entonnoir portant sur ses bords des digitations rayonnantes : dans les bois et les rochers. C. Coniocreia. Feuilles petites, arrondies, crenelees, tiges peu rameuses, la plupart simples, glabres et verdatres a la bas3, pulverulcntis et blanches au sommet : rare, croft sur la terre, parmi les mousses. B. Lachenee. C. Pixidata. D'une rosette de feuilles lobees, crenelees, quelquefois detruites, et alors ne consistant qu'en une base granuli'e, s'elevent des pedicelles simples, courjs, s'evasant. 1»ES LICHK.XS. 361 (le la base au soinmet en un entonnoir pres(iue enlier sur les bords, et portant des rt^ceptacles de loriiie tres varices: commun. La Var. fimbriata. C. fiinhriaia, Acb. DilTere par les bords de son entonnoir qui, au lieu d'etre entiers, sont dechiquetes. C. Pocillum. Thaleayant I'apparence d'une croute bomo- gene, compos^e de folioles ^paisses, lacini6es, imbriquees, luisantes, de couleur olive rougeatre: tiges courtes, minces, evasees en entonnoirs etroits, non perces; les lubercules fructileres, petits et d'un brun noir. Cetle espece se rap-, proehe de la precedente, et peut en etre consider^e comme une variete. Croit sur les pelonses seches, dans les Mielles de Tourlaville. C. Yerticillata. Folioles nombreuscs, red ressees,dt5cou pees et crenelees, d'un vert pale en dessus, blanches en dessous: toutes les tiges sont evasees en entonnoirs larges et denti- cules; dans un age avanc^, le bord des entonnoirs se garnit d'ecailles foliacees. D'apres Poiret, suppl. Encycl. meth. p. 364, ce serait une vari(5te du Scyphophorus pixidatus ou Cornutus s. D. C. (1. fr. Croit dans les Mielles, rare. C. Endivioefolia. Scyphophorus convolutus, D.C. 11. fr., feuilles en touffe large, rccoquill^cs et redressees vers le sommet; blanches et concaves en dessous, d'un vert jaumitre et convexes en dessus: les entonnoirs sont simples, en forme de toupie allongee. Croit dans les licux aridos. C. Coespitilia. Feuilles norabreuses, serrees, toutes dres- s6es, formant sur la terre un gazon ras et epais, duquel s'elevent des tiges simples, tr6s courtes, lisses, Evasees au sommet en entonnoirs pen marques, couronnes par des lubercules convexes, souvent agglomores. Croit sur la terre, parmi les rochers, au pied de la monlagne du Roule. 3:; 2 GATALOGL'E ' ' ft Receptacles rouges ou rouge-brun. C. Coccifera, Tiges tres courtes, de couleur blanc verdatre, evasees en entonnoirs ; Ics receptacles sont d'un rouge vif, un peu p^dicelles : croit sur les vieux murs de cloture, aux environs de Cherbourg. C. Defoi'mis. La tige est plus haute que dans I'espece precedente ; elle est d'un blanc jaunatre, se termine en un entonnoir, etroit, creneli^, puis s'agrandissant et se lac(5rant en lanieres larges et portant des receptacles d'un beau rouge, sou vent agglonieres: croit dans les bruyeres. C. Bacillaris. Tiges greles, simples ou rameuses an som- niet, quelquefois sterlles; lesfertiles s'evasent et deviennent rayonnantes, d'un blanc cendr6 et d'un aspect poudreux; receptacles d'un beau rouge : croit sur les vieilles souches, montagne du Roule. C. Bellidiflora. Tiges cylindriques, raides, d'un blanc rembruni, couvertes d'ecailles foliacees, ces tiges toutes evastes en entonnoirs etroits, garnis sur leurs bords de receptacles trt>s rapproches et rougeatres. La Var. Polycephala, se distingue par le somniet de ses tiges, qui se divise en rameaux courts, surmontes de recep- tacles agglomeres: menie localite. ISIDIUM. Tiges tres courtes, reunies et formanl une croute epaisse, mamelonee en dessus. I. Corallinum. Croute epaisse, grenue, comme mamelonee a la surface, d'un blanc grisatre: croit sur les rochcrs gra- niliqucs ii Flamanville. DES LICHENS. 3G3 I. Westeringii. Cclte espece, que j'ai trouvee dans la niOriie localite que la precedente, on dilTere par sa croute fcndillee en areoles nombrcuses et i)ar la couleiir roiigeatre de cctte croute. I. Coccodes. Croute mince, fendillt^e, irroguliere, d'un grls jaunatre, fornii^e de grains tres rapproches : croit sur V^covcQ des arbres. COMPARAISON DES DISTANCES ENTRE NEW-YORK ET LES PORTS DE CHERBOURG ET BREST, ET IRAC£ DES ARCS; -"^^•©et^s- L'arc de grand cercle de New-York a Cherbourg est de 49° 48' 10" qui, pour 20 lieues marines par degre, font 996 lieues pour la plus courte distance de ccs deux points. L'arc de grand cercle de New-York a Brest est de 48° 25' <0", ou 968 lieues; difference 28 lieues en faveur de Brest. Mais, d'autre part, de Paris a Brest 11 y a 90 lieues marines, et seulement 54 de Paris a Cherbourg; difft^rence 36 lieues en faveur de Cherbourg; en sorte qu'en definitive, la distance de New-York h Paris serait encore plus courte par Cherbourg que par Brest. 366 DES DISTANCES DE NEW-VORK Sans doutc, le port de Brest est le fplus occidental de France, mais I'arc do grand ccrole de New-York a Paris passe fort au nord do Brest, puisqu'il coupe son meridien (6° 49' 0.) par plus de 50° de latitude nord, traverse la pro- vince de Cornouailles dans la partie meridionale de I'Angle- lerre, et passe memeau nord de Cherbourg. A cause de lenr construction particuliore, les cartes marines donnent unc idee tres fausse des lignes de plus courtc distance, dans los latitudes elevees, et c'est seulement sur un globe terrcstre qu'on peut se faire une idee exacte des arcs de grand cercle, ou lignes les plus direcles. Sans doute, on ne navigue pas toujours en suivant les arcs de grand cercle, surtout I'liiver, niome avec des vapours; mais cnfin, il est bon de connaltre malhematiquement les distances et les routes directes, pour qu'au moins certains ports ne se prevalent pas des apparences, au detrirnent d'autres qui, par le fait, sont plus sur la route. C'est dans ce but que nous presentons a la societe Academique les calculs de trigonometrie splierique dont nous avons donno les resultats; ce globe et ces cartes marines sur lesqueiles nous avons trac6 les arcs de grand cercle dont nous vcnons de parler. Depuis qu'il est question de paix.'on se preoccupe des paquebots transatlantiques et nous avons voulu eclaircir ce point special des lignes de New-Vork et du Canada etablies rdcemment, et qui plus particulierement inleressent Cher- bourg. CALCULS DES DISTANCES. Connaissant la longitude et la latitude de deux lieux com me Cherbourg et New-York, on demande Tare de la A f.HERnOlRfi KT RK1£ST. 3G7 terre snpposee sph^rique, intercepteenlre ces deux lieux, ou ce qui revient au meme leur distance (voir le prohleme XXXIV dans Gueprate, revolution d'un triangle spherique obliquangle ABC). Cette question donne lieu au cas dans lequel connaissant deux cfltes b et c, et Tangle compris A, il s'agit de trouver le Iroisieme c6te a. Abaissant Tare perpendiculaire P" sur le c6t6 c, on calcu- lera le segment S par cette proportion R ; cos. A : : tang, b ', tang. S. le segment S' est done connu pulsqu'il est ^gal a c + S; puis on obtiendra le cute a, par cette proportion cos. S \ cos. S' : : cos. b \ cos. a. Tatitndp [de Cherbourg N. 49" 38' 31" Lauiuae ^j^ New-York N. 40" 40' Complement j ^^ Cherbourg o\x b = 40" 21' 29" latitude I de New-York ou c = 49" 20' T.r.„;f„rio (de Cherbourg 0. 3° 57' 18" Longitude ^ ^^ New-York 0. 76° 18' 32" Difference en longitude = 72" 21' 34" Angle au pole ou A = 72° 21' 34". Log. cos. A= 9,481507 Log. cos. 8'= 9,913938 Log. tang. 7*. = 9,929320 Log. cos. i!» = 9,881962 Log. tang. S= 9,410827 Comp. log. cos. S 0,013944 S = 14° 26' 30" Log. cos. a = 9,809844 c = 49° 20' a = 49° 48' 10" S' = c—S= 34° 53' 30" X par 20 lieues marines. (latitude N.=:48° 23' 14" 996', 03 de ^''^^Mlongil'^' 0. — 6° 49' Cherbourg a New- York. a = 48° 23' 20" 968', 44 de Brest a New-York. .'3tJS OES DIRTAX.ES DE .\EW-YOHK DU TRACE DES ARCS DE GRAND CERCLE. \° Connaissant deux coto i el c ct Tangle compris A, on oalculera Tangle B ; 2° Avec les deux angles A el B, el le cole b oppose a Tun d'eux, on calculera le Iroisleme angle. Pour determiner la posilion des points intermfidiaires, soil x'ou x", x'" etc. du cult^ a, on formera aulanl de triangles A Cx', A Cx",elc. donl les deux donnees i el C sonl cons- tanles el la troisieme, Tangle au pole, A', ou A" ou A'" etc. est fournie par la difference en longitude du point C avec les points x', x" etc. II suffiraqueles angles au polcsoient dedixendixdegres, et ce sera Taffaire de quelques minutes seulement. 3° On calculera done le c6le c\ etc., avec les deux angles C el A', et le compris b. Les cotes c',c",c"' etc. ainsi obtenus, 6tant autant de coni- plemenls de latitudes, on aura les latitudes des points inlermediaires x', x", x'" etS^' dont on avail clioisi les m^ridiens, en adoplant les angles A' A" A'" etc., dMuits des diilerences en longitude (de dix en dix degres). On aura ainsi le trace (si nous pouvons nous exprimer ainsi) de Tare de grand cercle, qu'on pourra porter sur loutes esp(^ces de cartes geographiques ou marines. Ainsi, nous avons trouve pour le tracfi de Tare du grand cercle de Cherbourg a New- York : Points X' x« I"' Long. 0. = 10° 20° 30° Lalit. N. = 30»47'28" 51° S3' 38" 52° 11' 28" A OHEKBOURG ET nUF.ST. X'' XVI XVII 50" 60" 70° ZC,^ 40" ;il" 30' 5" 50° 6' 3i" 47° 35' 16" 43" 49' 18". L'arc dc grand ccrclc de New-York a Paris, coupe le meridien (3° 57' 18" 0.) do Cherbourg, par 49° 47' 18" de latitude Nord; et celui dc Brest par 50° 22' 10" N. Cherbourg, le 7 mars 1856. Le Capitaine de Fre'gate, E. DE ROSTAI.Ve. 54 TABLE. Listc (los mcmbrcs Jo la Sociclt t SlaUits (lu 5 jiiiii ISoi XllL Notice biogiapliiqne siir M. P. A. Dclacliapcllo, ]);ii- M. de I'onlaiiiiioiil XIX Notice biograpliique sur M. I'abhe Auger, par M. de Pontaiiinont XXI If Notice biograpliique sur M. le D' Obet, par M. le D"^ Dufour XXVI Notice liistorique sur la Societc impciiale acadenii(iue de Gherbouig, par M. Noel 1 Discussion liistorique sur la digue de Cherbourg, iiar le meme i<) Taleograpliie de Cherbourg ct do scs environs, par iM. de Ponlaumont 4:3 Medaillescl monnaics recueillies dans le deparlcnient de la IManche (18.j2-53), par M. Denis-Lagarde. . . . s:i Fragments d'hisloire locale, par M. le Sens <)7 Notice liistorique sur Bartheleuiy Pic([ucrcy el sur les ennilages de Sl-Sauvcur et de St-Acliard, par M, Lesdos 107 372 TABLE. Notice sur la foire St-Clair, par M. Lo Jolis 127 Voyagn d'AIgoi' a Smyrnc, par M. le D'' Diifoiir 143 Notice sill" les ancicnncs fabriquos ilc draps de Ciier- bourg, par M. Le Jolis 157 Notice siir i'arcliipel de Mcndana, par M. Jardin 174 Recherche biograpbique siir M. Desbayes, commissairc general de la marine, par M. dc Pontaumont 239 Fables ct contcs, par M. de Lapparent 243 Rcnseignements sur I'eglise Saintc-Trinite de Cher- mivg avant 1794, par M. Le Sens 259 Constalation de la nature d'unc parcelle d'acier etc. par M. Besnou 275 FAlrail d'un rapport medico-logale, par le nieme 280 Memoire sur un precede employe en Angleterre pour la conservation des bois, etc., par M. Mangin 297 Catalogue metliodique des Lichens de I'arrondissement de Cherbourg, par M. P. A. Dclachapcllc 309 Comparaison des distances par Tare de grand cercle enlre New-York et Cherbourg cl Brest, par M. Ros- taing 36a -^1 WIN. m i