A ÉTAE ur DC ses VE I" “es Digitized by the Internet Archive in 2011 with funding from California Academy of Sciences Library http://www.archive.org/details/mmoiresdelasocit39soci eL " VRAR 48 1 HE fl FA Ltd FA ju A LRU ARR À i \ HU er AR 4 ! 4 l , \ [ L Î À \ [! i 4 | MÉMOIRES DE LA SOCIÈTÉ DE PHYSIQUE ET D'HISTOIRE NATURELLE DE GENÈVE Volume 39 (1917-1923) GENÈVE PARIS GEORG & Gie G. FISCHBACHER BALE et LYON méme maison 33. rue de Seine Le LR TT _ x" & sc. 9 Lis MÉMOIRES SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE D'HISTOIRE NATURELLE DE GENÈVE MÉMOIRES DE LA SOCIÉËTÉ DE PHYSIQUE DE GENÈVE Volume 39 (1917-1923) GENÈVE PARIS GEORG & Gi: G. FISCHBACHER BALE et LYON méme m aison 33. rue de Seine 1917-1925 GENÈVE — IMPRIMERIE ALBERT KUNDIG TABLE DES MATIÈRES du Volume 39 (1917-1923) FASCICULE 1 (1917) Rapport du Président de la Société de physique et d'histoire naturelle de Genève pour l’année 1916, par M. A. Bacu . : Le genre Nemertesia, par M. M. Benor. FASCICULE 2 (1917-1919) Rapport du Président de la Société de physique et d'histoire naturelle de Genève pour l’année 1917, par M. Arnold Prcrer. Rapport du Président de la Société de physique et d'histoire naturelle de que pour l’année 1918, par M. F. Barrezrr FASCICULE 3 (1920) Rapport du Président de la Société de physique et d'histoire naturelle de Genève pour l’année 1919, par M. J. Car Les nappes d'eau souterraine de l’Arve, par M. Raoul Bossier. Avec 2 planches . FASCICULE 4 (1920) Etude sur les Infusoires tentaculifères, par M. E. Pexarp. Avec 50 figures . FASCICULE 5 (1920-21) Rapport du Président de la Société de physique et d'histoire naturelle de Genève pour l’année 1920, par M. J.-L. PREvosr . Etude du colmatage du Val des Dix, par M. Raoul Bossier. + 1 ice Recherches sur un cas d'hérédité « sex-linked », la Drosophile à œil « barred », par M. Emile Guyénor FASCICULE 6 (1921) Vérification expérimentale de la Formule de Lorentz-Einstein, par MM. Ch.-Eug. Guye, S. Rarnowsky et Ch. Lavaxouy. Avec 3 planches et 11 figures. FASCICULE 7 (1922) Rapport du Président de’ la Société de physique et d'histoire naturelle de Genève pour l’année 1921, par M. Léon-W. CoLcer . DE LS k Géologie de la Zone de Chamonix comprise entre le Mont-Blanc et les Aiguilles ne par Edouard ParéJas. Avec une carte et 13 figures . titi 107 121 151 231 255 261 274 QÙ ee O9 TABLE DES MATIÈRES . FASCICULE 8 (1923) Rapport du Président de la Société de physique et d'histoire naturelle de Genève pour l’année 1922, par M. Amé Promr : 2. 2. "443 Esquisse de la carte des régions éruptives au nord du Tage, par Paul Caorrar. Avec 2 planches ét LIpOTTAIE NE PE CE RE Rapport du Président de la Société de physique et d'histoire naturelle de Genève pour l’année 1923, par M, Raoul GAuTIER +. . on. ,. . 4069 Pages MR 220 TABLE ALPHABÉTIQUE DES AUTEURS Bacu, A. — Rapport du Président de la Société de physique et d'histoire naturelle de Genève pour l’année 1916 à k BarrezLt, F. — Rapport du Président de la Scttets de te : d Hs ne relle de Genève pour l’année 1918. CL Ro C Bevor, M. — Le genre Nemertesia . Borssier, Raoul. — Les nappes d’eau ne de l ne » ) Etude du colmatage du Val des Dix. Carz, J. — Rapport du Président de la Société de Une et d’ Loue at NÉCNe de Genève pour l’année 1919. . Caorrar, Paul. — Esquisse de la carte des régions ér ne au nor d du Mage. CozLer, Léon-W. — Rapport du Président de la Société de physique et d'histoire naturelle de Genève pour l’année 1921 . GauTiER, Raoul. — Rapport du Président de la Société 1 Hoi ë d Hoi naturelle de Genève, pour l’année 1923 . Guye, Ch.-Eug., Rarnowsky, S. et Lavancuy, Ch. — Véieation pére de la Formule de Lorentz-Einstein Guyexor, Emile. — Recherches sur un cas d’hérédité «sex-linked », la Det à œil « barred » . Ur Parkas, Edouard. — Géologie de la Poe 4 CHamoe comprise ne le Mont- Blanc et les Aiguilles Rouges. Pexarp, E. — Etude sur les os nie es. ; Picrer, Amé. — Rapport du Président de la Société de physique 4 d ot LE relle de Genève pour l’année 1922. Picrer, Arnold. — Rapport du Président de la nr Le ne . d Hire naturelle pour l’année 1917 . Prevosr, J.-L. — Rapport du Président de je Société de physique “ d Noire Te relle de Genève pour l’année 1920. Ta : "ME ALTEe 469 pe . | ce n'a C2 LT FA OS PEER MÉMOIRES DE LA ET D'HISTOIRE DE GENÈVE Volume 39 FASCICULE 4. NATURELLE a — ————— par A. BACH LE GENRE NEMERTESIA par M. BEDOT RAPPORT PRÉSIDENTIEL POUR L'ANNÉE 1916 GENÈVE GEHEORG & Cie BALE et LYON méme maison. SOCIÈTÉ DE PHYSIQUE | Prix : Fe. 5 TABLE DES MATIÈRES DU FASCICULE 1, VOLUME 39 Pages Rapport présidentiel pour Pannée1916; par À. Bach "20 MR TR Pl Le genre Nemerlesi: par M. BEDOrT : © 1. 2, SN MC MD MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE ET D'HISTOIRE NATURELLE DE GENÈVE VOLUME 39, FASCICULE 1. RMPPORT PRÉSIDENT DE LA SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE D'HISTOIRE NATURELLE DE GENÈVE POUR L'ANNÉE 1916 MONSIEUR LE PRÉSIDENT, MESSIEURS ET CHERS COLLÈGUES, Ayant à vous rendre compte de la marche de notre Société pendant l’année écoulée, je commence par vous rappeler les grandes pertes que nous avons éprouvées par les décès de MM. Prosper de Wilde, Auguste Wartmann et Théodore Turret- tini, membres ordinaires, et William Ramsay, membre honoraire de la Société. La vie et l’œuvre de nos regrettés collègues seront retracées dans les notices biogra- phiques dont il vous sera donné lecture tout à l'heure. Malgré la crise effroyable déchainée par la guerre mondiale et qui, par contre- coup, atteint aussi la Suisse n’aspirant qu'à vivre dans la paix et la civilisation, l’activité de notre Société marque un progrès appréciable non seulement sur l’année 1915, mais encore sur l’année d'avant la guerre. Une petite statistique vous MÉM. SOC. PHYS. ET HIST, NAT. DE GENÈVE, VOL. 89 (1917). 1k 9 RAPPORT DU PRÉSIDENT fera saisir la situation. Pour mesure de l’activité de la Société nous avons pris, d'une part, la fréquentation des séances par les membres ordinaires, d'autre part, le nombre des communications scientifiques faites à la Société pendant l’année. Voici les chiffres : Fréquentation Nombre des séances des communications. Année 1915 182 24 1914 176 21 1915 192 26 1916 234 34 C'est-à-dire, comparativement à l’année 1913, l'année écoulée présente une augmentation de 29 ?/, sur la fréquentation et de 26 ?/, sur le nombre des commu- nications. Il se peut que cette recrudescence d'activité de notre Société soit le résultat indirect de la crise: dans le désarroi causé par les événements tragiques, les regards se tournent involontairement vers les valeurs qui ne trompent pas, et la science en est une des plus sûres. A l'assemblée générale du 20 janvier, vous avez appelé à la vice-présidence M. le D' Arnold Pictet ct vous avez nommé M. Etienne Joukowski secrétaire de la Société, MM. Jean Carl et Roger Delessert, membres du Comité des Publications. A la même séance vous avez décidé d'ouvrir un concours pour le prix quinquennal Augustin-Pyramus de Candolle, prix qui n’a pas été décerné depuis 1910. Pour l'examen des travaux des candidats vous avez nommé une commission composée de MM. Casimir de Candolle, Chodat et Briquet. A la séance du 2 novembre M. Ca- simir de Candolle à présenté au nom de la Commission un rapport tendant à attribuer le prix à M. Gustave Beauverd, conservateur de l’Herbier Boissier, pour sa monographie sur le genre Melampyrum. Adoptant les conclusions de votre com- mission, vous avez décerné le prix de Candolle à M. Beauverd. Sauf erreur, c’est la première fois depuis sa fondation que ce prix a été attribué à un botaniste genevois. Au cours de l’année, nous avons reçu M. Henri Lagotala membre ordinaire de la Société, et votre Comité à admis comme associés libres, MM. William Turrettini, chimiste, et Hahn, professeur à Nancy. D'autre part, c’est avec un vif regret que j'ai à enregistrer les démissions de M. le professeur Louis Bard, membre ordinaire, et de M. Alexis Lombard, associé libre, démissions offertes pour des raisons de convenances personnelles. L'effectif de notre Société comprend donc, au 1° jan- vier 1917, 63 membres ordinaires, 12 membres émérites, 35 membres honoraires et 25 associés libres, POUR L'ANNÉE 1916 3 Nous avons tenu pendant l’année écoulée 14 séances, dont 2 ont été consa- crées, conformément au programme tracé par votre Comité en 1915, à des confé- rences d'ordre général. MM. les professeurs Robert Chodat et Charles-Eugène Guve ont bien voulu entrer dans les vues du Comité et accepter de nous faire des conférences, le premier, sur les idées modernes de génétique, le second, sur la méthode statistique dans les sciences physiques et chimiques. Comme il était à prévoir, les conférences ont eu un très vif succès. Je saisis ici l'occasion de remercier encore une fois les savants conférenciers de nous avoir exposé des idées générales qui intéressent tout homme de science quelle que soit sa spécialité, Il est à espérer que la pratique des conférences générales entrera dans les habitudes de la Société. Aux 12 autres séances, 32 Communications ont été faites, qui représentent une somme très considérable de travail expérimental. Grace au dévouement de notre honorable secrétaire, les comptes rendus de nos séances ont paru régulièrement dans les journaux quotidiens, ce qui a tiré notre Société de l'effacement volontaire dans lequel elle s'était complue antérieurement. Un de nos collègues qui a rendu des services signalés à notre Société, M. Frey- Gessner, a fêté, le 19 mars dernier, son 90% anniversaire, Votre Comité s’est associé à cette fête tout intime par la remise d’une adresse de félicitations et de sympathie à notre vénérable collègue. L'Université de Berne nous à convié dernièrement au jubilé de M. le profes- seur Studer, notre membre honoraire, qui à accompli sa 40% année de professorat. L'invitation nous étant parvenue quelques jours avant la fête et entre deux séances, votre Comité à pris sur lui de déléguer au jubilé notre collègue, M. le professeur Bedot, et l’a chargé de présenter au jubilaire, au nom de la Société, une adresse dans laquelle nous lui exprimions toute notre estime pour son œuvre scien- tifique et pour sa personne. A l'assemblée de la Société Helvétique, à Schuls, notre Société était représentée par nos collègues, MM. Frédéric Reverdin et Jean Carl. Votre Comité des Publications a tenu 4 séances pendant l'année écoulée. IT à fait paraitre les fascicules 4 et 5 du volume 38 des Mémoires et le volume 32 des comptes rendus. Il à acccordé l'échange à l’University of Iinois, à Urbana, Etats-Unis. L'honorable secrétaire du Comité des Publications vous présentera un rapport plus détaillé. Dans la séance de ce soir vous aurez à nommer le vice-président pour l’an- née 1917 et deux membres du Comité des Publications en remplacement de MM. Amé Pictet et Auguste Bonna sortant de charge. Le Comité vous propose pour la vice-présidence M. Emile Yung et pour les Publications MM. Pidoux et Bach. 4 RAPPORT DU PRÉSIDENT NOTICES BIOGRAPHIQUES PROSPER DE WILDE (1855-1916) Le 10 avril 1916 mourait à Genève, apres une longue vie de travail et d’'hon- neur, Prosper de Wilde, professeur émérite de l'Ecole Militaire de Belgique, professeur honoraire de l'Université de Bruxelles. M. de Wilde était un de ces très rares hommes de science qui ont rapidement fait leur carrière scientifique sans avoir suivi la filière toujours longue, souvent pénible. Né le 17 juillet 1835 à Mortzeele (Flandres orientales), il était destiné par ses parents à la carrière de notaire. Les projets de sa famille reçurent méme uu commencement d'exécution, car le futur professeur de chimie débuta dans la vie comme clerc de notaire. Doué d’un esprit clair et avide de savoir, se sentant attiré vers les sciences, de Wilde ne tarda pas à abandonner le notariat, pour lequel il ne se découvrait aucune vocation, et chercha à se frayer un chemin par ses propres moyens. Il se rendit à Bruxelles où il réussit à obtenir la place d'aide à l'Ecole Vétérinaire de l’Etat. Sa vive intelligence et sa passion pour la chimie attirèrent sur Jui l'attention de Stas et de Melsens qui le seconderent de leur mieux dans ses efforts. Ses progrès furent tellement rapides qu'en 1859, âgé à peine de 24 ans, il était déjà répétiteur de chimie et de physique à la même Ecole. Dans ces fonctions qu'il remplit jusqu'en 1861, il montra de remarquables aptitudes à l’enseignement des sciences, et lorsqu'il fallut nommer, la même année, un professeur de chimie et de physique à l'Institut Agricole de l'Etat, à Gembloux, ce fut de Wilde qui obtint la chaire. Ainsi il eut le bonheur de voir, à l’âge de 26 ans, grande ouverte devant lui, la carrière à laquelle il aspirait. Il pouvait d'autant plus être fier de son succès qu'il le devait à son talent, à sa persévérance et à sa puissance de travail peu ordinaire. Tout en donnant ses cours, le jeune professeur ne cessa pas de s’instruire et POUR L'ANNÉE 1916 5 surtout de se perfectionner dans sa branche préférée, la chimie. Profitant d’un congé un peu prolongé, il alla travailler pendant huit mois au laboratoire de Wurtz. à Paris. En 1868, Prosper de Wilde fut nommé professeur de chimie générale à l'Ecole Militaire de Belgique comme successeur de Stas et sur la recommandation de celui-ci. Peu de temps après il était appelé à la chaire de chimie générale à l'Université libre de Bruxelles et à PEcole Polytechnique, chaire qu'il occupa jusqu’en 1904, date de sa retraite. De caractère sociable, causeur intéressant et agréable, de Wilde fréquentait volontiers les congrès et réunions scientifiques et sut gagner par ses qualités l'estime et la sympathie de tous ceux qui l'approchaient., Il venait très souvent aux réunions de la Société Helvétique des Sciences Naturelles, qui le nomma, en 1902, membre honoraire. Homme simple et cordial, il appréciait infiniment la cordiale simplicité qui caractérise les réunions de cette Société et en constitue le charme particulier. Ayant pris sa retraite en 1904, de Wilde vint se fixer dans la ville de Genève qu'il apprit à connaitre et à aimer lors de ses précédents séjours en Suisse. Il se fit recevoir membre de notre Société et de la Société de Chimie de Genève dont il fréquenta régulièrement les séances. IT y fit aussi des communications scientifiques. Les dernières années de sa belle et verte vieillesse furent assombries par le malheur aussi cruel qu'immérité qui frappa sa patrie. Mais pas un mstant 1l ne douta du triomphe du droit et de la justice, base et idéal de la vie politique et sociale. Pour ses malheureux compatriotes, chassés de leurs foyers par la violence criminelle de l’envahisseur, de Wilde fut d’une bonté et d’une douceur incompa- rables, Nombreux sont ceux qu'il réconforta et qui lui doivent d’avoir échappé à la misère morale et matérielle. Passant en revue l’œuvre scientifique de Prosper de Wilde, nous avons à constater que l’enseignement supérieur des sciences était sa véritable vocation à laquelle il donna la meilleure partie de son activité. Ses recherches scientifiques furent relativement peu nombreuses. La liste de ses publications comprend 24 tra- vaux d'ordre expérimental, dont 4 publiés aux Archives des Sciences Physiques et Naturelles pendant les dernières années de sa vie, De Wilde s’ntéressa surtout à la chimie industrielle et fit breveter plusieurs procédés. A côté de son professorat et de ses recherches scientifiques, de Wilde S'OCCUpPA de questions d'hygiène publique et d'économie politique. Les lecteurs des journaux de Genève se rappellent sans doute ses articles dans lesquels il combattait avec beaucoup de verve les idées socialistes qu'il qualifiait d'utopie dangereuse. Une belle intelligence et un noble caractère disparaissent avec Prosper de Wilde. 6 RAPPORT DU PRÉSIDENT AUGUSTE-HENRI WARTMANN (1854-1916) Auguste-Henri Wartmann appartenait à une lignée d'hommes de science. Son grand-père, Louis-François Wartmann (1793-1862), était astronome; son père, Elie-François Wartmann (1817-1886), était physicien, professeur à l'Université de (renève, Né en 1854, notre regretté collègue fit ses premières études à (renève et alla ensuite à l'Université de Bale étudier la médecine. Sa thèse de doctorat en méde- cine à pour titre: Aecherches sur l'enchondrome, son histologie, sa genèse, Genève et Bale, H. Georg, libraire-éditeur, 1880. Ses études terminées, 1l se rendit à Strasbourg où il travailla sous la direction de plusieurs professeurs éminents dont il garda toujours les meilleurs souvenirs. De retour à son pays, il s'établit à Genève et, tout en donnant des soins à sa clientele, il se mit à collaborer à des œuvres humanitaires et d'utilité sociale. IT Y déploya une activité inlassable qui dura jusqu’à sa mort. Pendant quelques années 1 occupa les fonctions de médecin des Bains de Lavey. Il profita de son séjour dans cet établissement pour faire quelques observations sur la radioactivité des eaux de Lavey. Dans l’armée, le docteur Wartmann arriva au grade de colonel (1903) et fut médecin en chef de la 1° division de 1899 à 1909. IT aïmait la vie militaire et il comptait de nombreux amis dans l’armée. Lors de la mobilisation générale, au mois d'août 1914, le colonel Wartmann fut chargé de l’organisation et de l’instal- lation des étapes à Bümplitz et s'acquitta de cette tache avec son talent habituel. Peu de temps après il fut désigné pour une importante mission militaire, mais la maladie cruelle mit fin à sa carrière. Auguste Wartmann était une nature d'artiste richement douée et qui recher- chait le beau dans divers domaines de l’activité humaine sans se cantonner d’une facon exclusive dans aucun. I s’intéressait vivement aux sciences, mais il ne se livri pas à des recherches scientifiques personnelles. IT $'occupa avec ardeur de l'œuvre de la Croix-Rouge et manifesta au sein du Comité une grande activité. Bon violo- niste, éleve du violoniste Henry, aimant passionnément la musique, il prit une part active aux manifestations de Ja vie musicale à (Grenève, Comme membre du POUR L'ANNÉE 1916 7 Comité du Conservatoire depuis 1890, il suivait avec sollicitude les progrès de cette institution et donnait des conseils toujours écoutés parce qu'ils étaient le fruit d’une longue expérience. Il succéda au docteur Barde à la présidence du Comité des Concerts d'abonnement. Quelques jours avant sa mort, il y présidait une séance. Bon médecin, bon musicien, Auguste Wartmann était aussi savant héraldiste. A Genève, il était considéré comme une autorité en matiere de blason. I professa même un cours d’héraldique à l'Ecole des Arts Industriels, au grand profit des élèves auxquels il montrait combien dans l'héraldique l’art décoratif était intime- ment lié à l’histoire. Le docteur Wartmann fut un membre dévoué de notre Société. De 1891 à 1903 il remplit les fonctions de trésorier et fut appelé à la présidence en 1904. A l'occa- sion du centenaire de notre Société il écrivit en 1890 une note historique intitulée: « Coup d'œil rétrospectif sur le premier siècle d'existence de la Société de Physique et d'Histoire Naturelle de Genève >. La note est très bien faite et montre que notre collègue savait manier la plume avec élégance. Ce fut aussi lui que le Comité Central de la Société Helvétique chargea de rédiger l'historique de la Société pour le volume du centenaire. La mobilisation de 1914 et l’aggravation subite de son état de santé l’obligèrent à y renoncer. M. le professeur Emile Yung voulut bien le remplacer. Pendant les derniers mois de sa vie Auguste Wartmann fit preuve d'une force d'âme peu commune. En sa qualité de médecin, il se savait atteint d’un mal qui ne pardonne pas. Néanmoins, jusqu’à la fin, il ne voulut rien changer à ses occupations. Tous ceux qui l’ont approché à cette époque tragique de sa vie ont emporté un sentiment d'admiration pour sa noble et stoïque résignation à l’inévitable. Auguste Wartmann laisse de bons souvenirs et d’unanimes regrets chez ses contemporains. THÉODOREIIURRETTENT (1845-1916) Le 7 octobre 1916, Genève a perdu, en la personne de Théodore Turrettini un de ses meilleurs citoyens et un ingénieur distingué dont les travaux furent appréciés bien au delà des frontières du pays. Né à Genève, en 1845, il fit ses études secondaires classiques au College, pour se vouer ensuite aux études techniques à l'Ecole d'Ingénieurs de l'Académie de Lausanne. où il obtint. en 1867, le diplôme d'ingénieur-constructeur, En 1868, il S RAPPORT DU PRÉSIDENT fait un stage aux ateliers Siemens et Halske à Berlin, afin de parfaire ses connais- sances dans le domaine, alors nouveau, des applications de électricité. Un an plus tard, âgé de 24 ans, il prend en mains la direction de la « Société genevoise pour la construction d'instruments de physique et de mécanique ». II à occupé ce poste jusqu'à la fin de sa carrière. Particulièrement porté à s'intéresser aux applications de Ja science, c’est dans cette voie surtout qu'il à travaillé aux ateliers de la « Société genevoise >», qui comportent deux branches principales: d’une part l’ins- trument de physique destiné aux travaux de laboratoire et plus spécialement aux mesures de précision, d'autre part la grosse mécanique. Il convient de citer, entre autres objets dont Théodore Turrettini s'est personnellement occupé, un compresseur étudié en collaboration avec Colladon et qui a trouvé une importante application dans les perforatrices employées avec succès au percement du tunnel du Gothard, de même que dans les machines à glace à anhydride sulfureux (système Raoul Pictet). Attentif à tous les progres de l’électrotechnie, il assiste en 1872 à Vienne aux premières expériences de transmission de force électrique à distance. En 1880, il va faire un séjour en Amérique, pour étudier avec Edison la question, nouvelle à cette époque, de l'éclairage au moyen de lampes à filament de charbon. En 1883, à l'exposition de Zurich, il collabore activement à l'installation d’une transmission de force électrique à distance. Ces questions d'ordre technique n’empéchaient pas, d'ailleurs, Pactif directeur de la «Société genevoise > de suivre de près Ja construction des instruments de précision, dont l'élément fondamental est la machine à diviser, rectiligne ou circu- laire. Le perfectionnement de ces machines, résultat d’une longue suite de correc- tions, à permis d'arriver à construire des étalons de mesures linéaires et des instruments géodésiques d'une haute précision. Théodore Turrettini a publié dans les Archives en collaboration avec M. C.-E. Guillaume, une note sur une règle géo- désique de quatre mètres qui à été utilisée par les services topographiques de divers pays. Mais tous ces travaux, si importants soient-ils, ne constituent pas l’œuvre capitale de Théodore Turrettini. Son esprit de décision, son audace, sa puissance de travail et surtout le pro- fond amour qu'il avait voué dès sa jeunesse à sa ville natale et aux solides traditions de civisme qui ont fait le fond de son éducation première, toutes les qualités qui font l’homme d'action et le bon citoyen, devaient le conduire à accomplir cette œuvre: l'utilisation de la force du Rhône, réalisée d’abord à l'usine de la Coulouvrenière et plus tard à l’usine de Chèvres. Ce travail a porté le renom de Théodore Turrettini bien loin de Genève, comme en témoignent les importantes usines similaires dont les études ont été faites depuis lors avec sa collaboration. POUR L'ANNÉE 1916 ) I importe de dire que jusque-là, la transmission de la force se faisait par cables et seulement à de faibles distances. La réalisation pratique des petits moteurs hydrauliques à haute pression (moteurs Schmid) fit faire un pas de plus dans cette voie, et c’est ce procédé qui fut appliqué pour transmettre la force de l’usine de la Coulouvrenière aux ateliers de Ia Ville. C’est en 1882, en automne, que la question de l’utilisation de la force du Rhône entre dans sa phase décisive. L'étude et l'exécution de ce projet constituent, en effet, le programme précis avec lequel Théodore Turrettini assume cette année la charge de Conseiller administratif. Le 21 novembre 1883, lendemain du jour où furent accomplies les dernières formalités pour la concession, on se mettait à l'œuvre pour l’asséchement du bras gauche du Rhône, Il n’est pas possible d'entrer ici dans le détail de ces travaux, rendus particulièrement difficiles par l'obligation, où l’on se trouvait vis-à-vis des Etats riverains du Léman, de maintenir les variations de niveau du lac dans des limites déterminées. Les difficultés furent grandes, et c’est surtout pendant cette période, sous la menace de crues pouvant rompre le barrage, que le chef de l’entreprise dut se donner corps et âme à la tâche dont il avait accepté la lourde responsabilité et faire appel à toute son énergie. La construction du bâtiment des machines, du barrage à rideaux et l’instal- lation des turbines et des pompes fut exécutée progressivement. Cinq turbines avec leurs pompes furent mises en marche et l’usine inaugurée le 17 mai 1886. En 1888 six nouvelles turbines étaient mises en service, et enfin, en 1890, l'usine était pourvue de dix-huit turbines de 210 chevaux effectifs, et destinées à utiliser une puissance brute totale de 5400 chevaux. Rien n'a été négligé pour donner toute sécurité à des constructions où le béton a été utilisé dans des conditions non encore expérimentées. Il y à lieu de mettre en relief ce fait que, dans son ensemble, l’entreprise à marché conformément au programme que lon avait tracé pour chaque campagne, et que chaque série de travaux fut livrée, à peu d'exceptions pres, à la date fixée d'avance, quoique l’on ait eu à compter avec limprévu, comme 1] arrive toujours dans des travaux de cette nature. Tel fut le cas lors de l’épidémie de typhoïde de 1884 qui contraignit à entreprendre d'urgence la prolongation vers l’amont de la prise d'eau potable. L'usine fut installée pour alimenter deux réseaux : lun à basse pression, com- prenant la distribution de l’eau potable, et l'autre à haute pression, destmé à fournir la force hydraulique. Pendant la période 1887-1902 Théodore Turrettini à publié dans les Archives des Sciences physiques et naturelles deux notes sur l'érosion et le transport par l'eau, trois sur les variations du niveau du lac en rapport avec le fonctionnement du barrage de (Genève. Les MÉM. SOC. PHYS. ET HIST. NAT. DE GENÈVE, VOL. 89 (1917). 10 RAPPORT DU PRÉSIDENT Parallèlement avec les travaux du Rhône fut exécutée la construction du grand égout collecteur, œuvre utile entre toutes au point de vue de la salubrité publique. Entre temps, la transmission de la force électrique à distance réalisait d’im- portants progrès. Le développement de diverses branches de l’industrie et princi- palement la nécessité de remplacer le charbon par l'électricité comme force motrice pour le réseau des tramways, qui prenait une extension considérable dans le canton, mettaient en premier plan la préoccupation d'étudier la construction d'une nouvelle usine à Chèvres. Cette idée avait d’ailleurs pris corps depuis plusieurs années au cours des travaux de la Coulouvrenière. A Chèvres le problème se présentait sous un aspect nouveau. La puissance disponible était plus grande, environ 18000 chevaux. Si la question du maintien du niveau du lac n'avait pas à intervenir, on devait compter avec des difficultés d’un autre ordre, et notamment avec l'apport, parfois très important au moment des crues de l’Arve, de matériaux qui pouvaient obstruer ie canal d’amenée et toute la partie amont de l’usine. | Ici encore, les travaux qui ont duré sept ans, de 1893 à 1899, ont été conduits avec le soin et la méthode que Théodore Turrettini savait apporter à toute chose. Les étapes principales du travail furent, en résumé, les suivantes: en 1893, cons- truction du barrage ; en 1894, construction du bâtiment ; de 1895 à 1899, instal- lation des machines comprenant quinze turbines de 1200 chevaux avec alternateurs. Le 19 mars 1896, avec trois alternateurs installés, on fit l'essai de léclairage électrique du théâtre, et le 27 avril eut lieu l’inauguration officielle de l’usine. Le Conseil administratif de la Ville de Genève à publié en 1900 un ouvrage intitulé: Usine de Chèvres. De la préface, signée de Théodore Turrettini, nous extrayons les passages suivants qui caractérisent l'esprit de l’auteur et Ja nature des travaux qu’il à eu à conduire, «Le Conseil administratif pense apporter sa pierre à l’édifice de la science en mettant sous les yeux des ingénieurs de tous pays l'exécution d'un travail qui présentait des difficultés considérables, en leur montrant le système adopté pour mener à bien la création de la force et sa distribution dans toute l’agglomération genevoise... …Au moment où il à fallu créer de toutes pièces cette grande installation, il n'existait dans le monde entier aucune usine de cette importance qui eût passé par la période de tâtonnement nécessaire. Il fallait donc ouvrir la voie. On ne pouvait pas, comme maintenant, profiter de l'expérience des autres. » Ce que l’auteur n'a pu dire lui-même, c’est que les expériences faites à Genève n'ont pas tardé à porter leurs fruits bien loin au dehors, ainsi qu’en POUR L'ANNÉE 1916 11 témoignent les nombreuses expertises qu'il fut appelé à faire en Suisse et à l’étran- ger, et parmi lesquelles il faut citer en premiere ligne celle qu'il a faite aux travaux du Niagara. Il faudrait, pour être complet, citer encore d’autres travaux, et en particulier ceux qui rentrent dans le cycle de son activité comme citoyen genevois et comme citoyen suisse; tels sont la construction du pont de la Coulouvrenière, qu'il a personnellement dirigée ; l’organisation de l Exposition nationale suisse de 1896; et tout ce qu'il à fait comme officier supérieur d'artillerie, En outre, il fut administrateur ou ingénieur-conseil d'un grand nombre d’en- treprises diverses, et collabora activement aux installations hydroélectriques d’Awvi- gnonnet sur le Drac, de Séchilienne sur la Romanche, du Bournillon, du Martigny- Châtelard, de la Lonza. Telle fut, dans ses grandes lignes, Pactivité hors de pair que Théodore Turrettini a déployée sa vie durant, contribuant pour une forte part, par la création et le perfectionnement des services publics, à améliorer les conditions matérielles de la vie pour tous ses concitoyens. Mais, dans cet ordre d'idées, le côté matériel n’a pas été seul l’objet de ses préoccupations. À une époque où tous les jours se faisaient plus aiguës les controverses et les luttes de classes, il n’est pas resté en dehors de ces questions. Il à introduit, aux ateliers de la « Société genevoise », la participation de tous les ouvriers, après une année de service, aux bénéfices de l’entreprise, au prorata du salaire annuel considéré comme capital-actions. Ceux qui ont longtemps travaillé sous sa direction s'accordent à rendre hommage à la part de cœur qu'il apportait à toute collaboration, sans parler du soin méticuleux qu'il donnait à toute besogne, petite ou grande, dont il avait assumé la charge. Exigeant pour les autres, au point de vue du fini du travail et de la régularité, 1l ne l'était pas moins pour lui-même. En 1912, après quarante-quatre années d'activité intense et ininterrompue, l'infatigable travailleur fut terrassé par la maladie et dut renoncer à sortir de sa demeure. Sans cesser de recevoir presque quotidiennement des nouvelles des divers travaux auxquels il prenait naguère une large part, et qu'il a suivis jusqu'à ses derniers moments avec une parfaite lucidité d'esprit, il dut, chaque jour un peu plus, limiter ses rapports au cercle de ses proches, dont l’affectueuse sollicitude à tout fait pour adoucir les souffrances d'un homme né pour l’action et que la maladie réduisait à une immobilité presque complète. Au dire de tous ceux qui l'ont approché pendant cette douloureuse période, 1l a vécu ses quatre dernières années sans Jamais proférer une plainte, et n'a cessé de faire rayonner sur son entourage la lumière d’un monde intérieur de certitude et de bonté, où lui-même avait trouvé un refuge. 12 RAPPORT DU PRÉSIDENT WILLIAM RAMSAY (1852-1916) La personnalité du grand savant anglais étant très connue, je me borneraï à rappeler brièvement quelques dates de sa belle carrière. Né en 1852, à Glasgow, Sir William Ramsay y fit ses études universitaires et alla les compléter à l'université de Tübingen, en Allemagne. En 1880, il fut nommé professeur de chimie à l'université de Bristol, et sept ans plus tard, en 1SS7, il fut appelé à la même chaire à l'université de Londres. Après une longue série de travaux physico-chimiques qui le mirent au premier rang des savants de son temps, Ramsay étudia de concert avec lord Raleigh le résidu que lon obtient en éliminant un à un les gaz connus de l'air atmosphérique etisola. en 1894, l’argon. L'année suivante, il découvrait dans la clévéite, minéral uranifere, la présence d'hélium, qui n’était connu jusqu'alors que par la présence d'une raie dans le spectre solaire. Etudiant les résidus de la distillation fractionnée de l'air liquide, Ramsay y découvrit successivement, de 18935 à 1898, d’autres gaz nobles, le crypton, le xénon et 1e néon, qui, comme largon et l’hélium, sont dépourvus de toute affinité chimique. En étudiant lémanation du radium, Ramsay constata qu'elle se transforme partiellement en hélium. C'était le premier exemple d'un corps dont les atomes se détruisent spontanément en libérant une quantité énorme d'énergie. Ramsay eut l’idée d'employer cette énergie pour effectuer la transmutation ou la dégradation des éléments. I fit des expériences très délicates et annonça même la dégradation du cuivre en lithium, du plomb en carbone, etc. par l'énergie de Pémanation. Malheureusement, les résultats annoncés par Ramsay n'ont pas été confirmés par d’autres expérimentateurs opérant sur des quantités bien plus grandes d’émanation que le savant anglais. Malgré cet insucces, le nom de William Ramsay restera parmi les plus grands que l'histoire de la science ait eu à enregistrer. ACTIVITE SCIENTIFIQUE DE LA SOCIETE LISTE DES TRAVAUX PRÉSENTÉS AUX SEANCES. Conférences. M. KR. CHODAT. Conceptions modernes de la genèse et de lhérédité. \E. Ch.-Eug. GUYE. Le principe d'évolution dans les sciences physico-chimiques,. POUR L'ANNÉE 1916 13 Astronomie. M. Fr. LE COULTRE. Sur les comètes Mellisch et Taylor. Physique. M. MarGor. Nouvel hygromètre à condensation. MM. SaRasiN et TOMMASINA. Sur l'effet Volta obtenu à l'aide de la radioac- tivité induite. Deux communications. MM. SCHIDLOF et TARGONSkI. Etudes sur le mouvement brownien, Cinq communications. M. Ch.-Eug. GUYE. Sur l'équation de la décharge disruptive et la possibilité de trois sortes de potentiels explosifs. Le même. Sur l'hypothèse d'un champ électrostatique moléculaire dans les gaz comprimés soumis à l'influence de la décharge disruptive. M. BRINER. Conclusions auxquelles on arrive par l'application des équations thermochimiques aux températures très élevées. M. Raoul PICTET. Sur l'emploi du gaz à l'eau. Chimie. M. Amé PICTET. Action des catalyseurs sur le pétrole. Le même. Sur les rapports du pétrole et de la houille. M. Ph.-Aug. GUYE. Sur la pyrogénation du pétrole. M. MONNIER. Sur une réaction très sensible des persulfates et des perchlorates. Le même. Etude des terrains des marais de Covery. Le même. Sur les engrais ferrugineux. M. Fr. REVERDIN. Recherches sur la m-phénylènediamime. M. Bacu. Réactions de la peroxydase purifiée par ultra-filtration. M. Reicu. Cyelisation, avec départ d'acide nitreux, que subissent certains corps sous l'influence des alcalis. Géologie. M. Raoul BoissiER. Sur les alluvions charriées par l’Arve. M. CoLLer. Sur le calcul des alluvions transportées par les cours d’eau. 4 . , . RAPPORT DU PRESIDENT POUR L ANNÉE 1916 Botanique. M. BriqQuEr. Etudes sur la morphologie du genre Adenostyles. Le méme, Sur l'appareil agrippeur du fruit dans le genre Bidens. Le méme. Sur la morphologie de diverses Célastracées. Deux communications. M. CHopar. Etudes faites au laboratoire du jardin alpin Linnaea. MM. Casimir et Augustin DE CANDOLLE. Sur la ramification des Sequoïa. Zoologie. M. LEUBA. Etudes sur un batracien de Colombie. Physiologie. M. PREVOST. Expériences sur le cœur de la grenouille MÉMOIRES DE LA SOCIÈTÉ DE PHYSIQUE ET D'HISTOIRE NATURELLE DE GENÈVE VOLUME 39, FASCICULE 1. D'EMGSE IN/RE NAME ER AELS IA PAR M. BEDOT Le moment n'est pas encore venu d'entreprendre une revision complète et définitive des Némertésies, car ce genre renferme un trop grand nombre d'espèces insuffisamment connues. Mais il n'est pas sans intérêt, cependant, d'examiner l’ensemble des renseignements que l’on possède sur ce groupe d'Hydroïdes et de chercher à établir un peu d'ordre dans sa systématique. LE GENRE NEMERTESIA ET LES GENRES VOISINS Les espèces que l’on fait rentrer actuellement dans le genre Nemertesia ont été décrites autrefois sous les noms génériques de Nemertesia Lamouroux (1812), Nigellastrum Oken (1815), Antennularia Lamarck (1816), Cymodocea Lamou- roux (1816), Lowenia Meneghini (1845), et Heteropyxis Heller (1868). Parfois même, on les a placées dans les genres Sertularia, Plumularia, Tubularia, et Aglaophenia. Le nom de Nemertesia, qui a la priorité, doit être définitivement adopté. 16 M. BEDOT Le seul caractère d'après lequel on distinguait autrefois les Nemertesia des Plumularia était Ta disposition des hydroclades qui, chez les dernières, étaient toujours placés sur deux rangées aux côtés de Ja tige, tandis que chez les Nemer- tesia on trouvait des verticilles de deux ou plusieurs hydroclades décussés qui formaient de nombreuses rangées le long de la colonie. Mais ce caractère n'a pas une valeur absolue car, d'une part, les hydroclades sont parfois dispersés sans ordre sur la tige au lieu d’étre arrangés en verticilles, et, d'autre part, ils peuvent également (surtout chez les jeunes colonies) former deux rangées sur les côtés de la tige, comme chez les Plumulaires. ALLMAN (1871) a heureusement attiré l'attention sur un caractère beaucoup plus important: c’est le nombre des canaux du coenosarque. Chez les Nemertesia, la tige (qu’elle soit fasciculée ou non) renferme toujours plusieurs canaux endoder- maux, tandis que chez les Plumularia il n'y en à jamais qu'un seul. Nous avons donc un caractère qui semble permettre de distinguer nettement ces deux genres. Malheureusement, beaucoup d'espèces ont été déterminées autrefois d'apres le nombre et la disposition des hydroclades et sans prendre en considération les canaux endodermaux, souvent difficiles à observer lorsque les colonies sont mal conservées. Il y à encore quelques genres qui, par certains caractères, se rapprochent des Nemertesia. Le genre Hippurella établi par ALLMAN (1877). et étudié par FEWKES (1881), a été adopté par NUTTING en 1900. D’après ALLMAN, « The genus Æippu- rella unites in itself the characters of à Plumularia and of an Antennularie or Antennopsis >. NUTTING, dans la diagnose qu'il en donne, dit que les hydroclades sont < pinnate on the proximal portion of the stem, but scattered on distal portion». Mais, comme le gonosome à une disposition toute spéciale et que, d'autre part, on n'a aucun renseignement sur les canaux endodermaux, on ne peut, pour le moment, faire aucun rapprochement entre les /lippurella et les Nemertesia. En établissant le genre Antennopsis, ALLMAN (1877) s'appuyait surtout sur la disposition des hydroclades qui étaient dispersés. Il faisait également remar- quer que la tige ne renfermait qu'un simple canal endodermal, tandis que les Antennularia en ont plusieurs, mais il ajoutait que lon ne connaissait pas encore suftisamment les Antennopsis pour savoir si cette disposition constituait un véritable caractère générique. NUTTING à admis le genre Antennopsis, dans lequel il comprend les espèces dont les hydroclades sont dispersés et la tige ne renferme qu’un seul canal endo- dermal. Ce dernier caractère les distingue nettement des Nemertesia. Mais le genre Antennopsis devra être soumis à une revision complète, car les espèces qu'il renferme actuellement présentent des différences très grandes dans la structure de LE GENRE NEMERTESIA 17 la tige, le mode d'attache des hydroclades, la forme des hydrothèques et la dispo- sition des nématothèques. On n'avait pas songé, jusqu'à présent, à rapprocher les Polyplumaria des Nemertesia. BILLARD, dans son étude des Hydroïdes du SiB0GA (1913), a fait à ce sujet intéressantes observations. A propos de la Z’olyplumaria cornuta (Bale) il dit entre autres: < Les hydroclades, dans la partie proximale de la tige, ont une disposition pennée, mais dans le haut ils s'insèrent suivant trois rangées et même parfois forment des verticilles de trois, comme dans le genre Nemertesia: ce qui accentue la ressemblance c'est qu'aussi le coenosarque est canaliculé; cependant on doit conserver cette espèce dans le genre Polyplumaria à cause de Ia ramifica- tion de l'hydroclade primaire et parce que la disposition pennée est la plus fréquente et qu’elle est constante pour les branches; mais ceci montre encore combien les genres sont reliés les uns aux autres par des termes de passage >». Chez une autre espèces, à laquelle BILLARD donne le nom de 7°. siboqae, «le coenosarque montre des tubes anastomosés >». De nouvelles recherches sont nécessaires pour arriver à se rendre compte des relations qui existent réellement entre les l’olyplumaria et les Nemertesia. On n'a pas de renseignements sur la disposition des canaux du coenosarque de ?olyplu- maria flabellata qui est lespèce la plus connue de ce genre. La disposition pennée des branches ne peut pas être invoquée comme caractère distinctif de ces deux genres, car on l’observe également chez Nemertesia ciliata Bale. En revanche, il semble que l’on doive attribuer une plus grande importance à la formation des phylactocarpes des lolyplumaria, que l'on considérait autrefois comme de simples hydroclades secondaires, mais qui prennent, chez P. cornuta (Bale) et P. sibogae Billard, une forme très spéciale. Dans l’état actuel de nos connaissances, ce carac- tère suffit pour distinguer les Nemertesia des Polyplumaria, mais il n'est pas im- possible que de nouvelles recherches sur les Nemertesia intermedia, paradox«, hexasticha et johnstoni, dont nous parlerons plus loin, montrent que, chez ces espèces, la formation d'hydroclades secondaires est en relation avec celle des gonothèques. Les genres Sciurella (ALLMAN ISS3} et Sibogella (BILLARD 1915) sont très voisins de Nemertesia et, chez eux, la tige renferme plusieurs canaux endodermaux. Le caractère distinctif des Scéurella est la forme lobée des gonothèques qui, en outre, portent de nombreuses nématothèques. Les hydrothèques sont tres profondes. La seule espèce connue est S. indivisa Allman:; KIRKPATRICK (1890 à) et BILLARD (1910 et 1913) s'accordent pour lui donner comme synonyme Artennularia cylin- drica Bale (1884). Quand bien méme on ne connait pas les gonothéques de cette MÉM. SOC. PHYS. ET HIST. NAT. DE GENÈVE. VOL. 89 (1917). 3 18 M. BEDOT dernière espece, on doit adopter la manière de voir de ces auteurs, car rien dans la description d'A. cylindrica nw'empèche de la considérer comme synonyme de S. indivisa, à laquelle elle ressemble d’une façon frappante par la forme de ses hydrothèques. La ?. eylindrica de KIRCHENPAUER (dont on ne connaît pas Îles vonothèques) a également des hydrothèques semblables à celles de S. endivisa, nais elle se distingue de cette espèce par la disposition de ses hydroclades. BILLARD (1910) «ne voit pas l'utilité de conserver le genre Sciurella pour une seule espece dont tous les caractères sont ceux du genre Nemertesia >». 1 la nomme donc Nemertesia indivisa. Le nom d'Antennularia indivisa employé par LAMARCK (1816) était déjà tombé en synonymie de N. «ntennin«. La S. éndivisa à cependant un caractère qui permet de la maintenir dans un genre distinct: c'est la présence de nématothèques sur les gonothèques. Il est vrai que, chez les Plumularia, on à des espèces dont les gonothèques portent des néma- tothèques et d’autres qui n’en ont pas. Mais il n’est pas certain que ce caractère, lorsqu'on l'aura mieux étudié chez toutes les espèces, ne puisse pas servir à établir des coupes dans le genre /lumularia. Il y à encore une autre Némertésie qui a des gonothèques armées de némato- thèques: c'est Antennularia fascicularis Alman (1883). Mais la position systéma- tique de cette espèce parait douteuse et BILLARD (1908) nous apprend que, malheureusement, le type n'existe plus dans les collections du British Museum. Les gonothèques armées sont placées non pas à l’aisselle des hydroclades, comme chez les autres Némertésies, mais sur les hydroclades, au-dessous des hydrothèques,. Les hydroclades prennent naissance sur les tubes extérieurs de la tige comme chez Antennopsis scotiae Ritchie. RITCHIE (1907) fait du reste remarquer que l’archi- tecture générale de cette espèce ressemble à celle d’'Antennularia fascicularis Allman (qu’il indique sous le nom d’'Antennopsis fascicularis). On serait, en effet, tenté de mettre ces deux espèces dans le même genre. Il faudrait, pour cela, être certain que |A. fascicularis n'a qu'un seul canal endodermal. ALLMAN ne parle pas de ce caractère, Mais il faut remarquer qu'après avoir décrit À. fascicularis (1883, p. 24) il fait allusion à la distinction qu'il avait établie autrefois (1877) entre Antennularia et Antennopsis et qu'il basait principalement sur le mode de répartition des hydroclades. Il reconnait que ce caractère n’2 pas une valeur géné- rique et ajoute: « When, therefore, no other difference of greater importance exists, [believe it will be best to follow the earlier systematists, and combine all such forms under à single genus of which the well known À. antennina may be taken as the type >. Cela semblerait montrer qu'ALLMAN n'attribuait plus d'importance à la disposition des canaux endodermaux et n'avait pas estimé qu’il fût nécessaire d'en parler. LE GENRE NEMERTESIA 19 Quoi qu'il en soit, et étant donné que l’on n'a pas de renseignements sur l’arrangement des canaux du coenosarque de la tige, on ne peut pas être absolument certain que cette espèce soit une Némertésie et, plutot que de la placer à côté d'espèces dont elle diffère beaucoup, il semble plus naturel de la mettre (au moins provisoirement) dans le genre Antennopsis, à côté de l'Antennopsis scotiae, avec laquelle elle présente beaucoup d'analogie. En outre, nous conserverens le genre Sciurella pour les espèces qui présentent les caractères des Nemertesia, mais qui en diffèrent par le fait que leurs gonothèques portent des nématothèques. Le genre Sibogella à été établi par BILLARD (1913) pour une espèce, S! erecta, qui à une ramification spéciale, < [La tige donne naissance à de nombreux petits ramules disséminés tout autour, parfois très serrés, ce qui donne une apparence de Nemertesia: les hydroclades sont portés par ces ramules et sont eux-mêmes situés dans différents plans. La tige est canaliculée ». Il semble donc ressortir de la des- cription de BILLARD que les Sibogella sont des Némertésies chez lesquelles les hy- droclades ne prennent pas naissance directement sur la tige, mais sur des ramules disposés avec une certaine régularité en rangées longitudinales. La Nemertesia ciliata de BALE (1914) présente une certaine ressemblance avec la Sibogella erecta. Grace à lextrème obligeance de M. Brr°6s, de Sydney, j'ai pu étudier un échantillon de cette intéressante espèce. Elle porte des branches placées des deux côtés de la tige principale dans un méme plan, mais les hydro- clades se trouvent aussi bien sur la tige principale que sur ces branches. L'état de conservation de la colonie que j'ai examinée ne permettait pas de voir les canali- cules du coenosarque. Néanmoins, il convient de laisser cette espèce dans le genre Nemertesia. BALE (1915) a décrit également une N. ciliata var. cruciata qui est: «similar to the type, except that the hydrocladia are mostly in pairs, each pair alternating in position with those above and below >». Ce caractère différentiel n’est pas assez important et constant — ainsi que nous le verrons plus loin — pour permettre l'établissement d'espèces où de variétés nouvelles. Il convient donc de faire rentrer cette var. cruciata dans les synonymes de N, cilialu. Nous avons vu que les Sciurella et les Sibogella se distinguaient assez nette- ment des Nemertesia, mais qu'elles s’y rattachaient par un caractère très important: la tige pluricanaliculée. On pourrait peut-être les considérer comme formant des sous-genres, ou encore élever les Antennularides au rang de fanille comprenant les trois genres Nemertesia, Sciurella et Sibogella. Maïs, en attendant que ce groupe soit mieux conau, il est préférable de n'introduire aucune modification importante dans sa systématique et de conserver simplement à côté des Nemertesia les deux genres Sciurella et Sibogella. 20 M. BEDOT LES CARACTÈRES SPÉCIFIQUES DES NEMERTESIA Les caracteres dont on se sert pour la détermination spécifique des Nemer- tesia sont de valeurs diverses. Autrefois, on attribuait une importance prépondé- rante au nombre et à la disposition des hydroclades ainsi qu'à leur mode de seg- mentation. Dans ces dernières années, les observations de nombreux auteurs ont montré que, chez une même espèce, les verticilles ont un nombre variable d'hydro- clades et que ceux-ci peuvent méme étre disposés sans ordre régulier sur la tige. Ilest vrai que, lorsqu'on examine des Némertésies provenant d'une méme localité, on remarque souvent une certaine uniformité dans le mode de répartition des hydroclades. En revanche, en comparant un grand nombre de colonies de la même espèce, mais de régions et de profondeurs diverses, on voit qu'elles présentent, à cet égard, une extrême variabilité. BROCH (1914) à observé à ce sujet que, chez une seule et même espèce CN. hartlaubi}, on pouvait trouver un nombre constant d’hydroclades dans tous les verticilles d’une branche et d'autres nombres dans les verticilles des autres branches. On ne peut donc attribuer à ce caractère qu'une tres faible valeur pour la détermination des espèces. Il ne semble pas que l’on ait, jusqu'à présent, accordé une assez grande inportance systématique à la disposition générale de la tige. On rencontre souvent, dans les descriptions, des termes tels que: fige simple, tige composée, qui peuvent amener des confusions. Nous en verrons des exemples plus loin. Chez les Némertésies, la tige — qui est toujours pluricanaliculée, c’est-à-dire renferme plusieurs canaux endodermaux — peut être ramifiée on non, Ce caractère n'a pas une valeur absolue, car on trouve souvent des N. ramosa sans branches, D'autre part, HINCKS (1868) dit que N. antennina a une tige et d'autres auteurs ont confirmé cette opinion. Les branches, qui sont placées sans ordre apparent chez N. ramosa, tendent à prendre une disposition régulière chez N, ciliata Bale, Lorsque la tige ne porte aucune branche et n’est pas ranifiée, on dit qu'elle est simple. En outre, chez certaines espèces, telles que N. antennina, N. belini, etc. la üge est toujours formée d'un seul tube ou cylindre de périsarque, tandis que chez d'autres, telles que AN. ramosa, elle se compose de plusieurs tubes de périsarque LE GENRE NEMERTESIA 21 accolés. Dans ce dernier cas, on dit que la tige est fusciculée, Ce terme est préfé- rable à celui de polysiphonique employé autrefois par KIRCHENPAUER (1878). Pour les tiges formées d’un seul tube de périsarque, on ne peut pas admettre le terme de simple puisqu'il s'applique déja aux tiges non ramifiées et il est préférable, pour éviter toute confusion, d'adopter le terme de figes non fasciculées. Dans sa monographie des Hydroïdes du Japon (1913), STECHOW a résumé dans des tableaux les caractères distinetifs des Hydroïdes. Le genre Nemertesia à comme diagnose: < Stamm aus emem Bündel vieler Tuben bestehend (Zusammen- gesetzt) >», et le genre Artennopsis : « Stamm einfach >. Le genre Antennopsis, tel qu'il est compris aujourd’hui par NUTTING, RITOHIE, BROWNE et autres, se distingue de Nemertesia par le fait que son coenosarque ne renferme qu'un seul canal endodermal, comme c’est le cas chez les Plumularia. Mais latige des Antennopsis, de même que celle des Nemertesia, peut étre composée d’un seul où de plusieurs tubes périsarcaux, soit être fasciculée ou non. On voit done que, dans la diagnose de STECHOW, le terme de , s'applique à toutes les tiges, fasciculées ou non, qui renferment plusieurs canaux endodermaux. Dans sa description d'Antennularic variabilis, BROCH (1905) dit que la tige est », soit com- posée dans la partie inférieure et simple dans la partie supérieure. Il est évident que le terme de composé (zusammengesetzt) n'a pas la mémeacception ici que dans la diagnose de STECHOW, qu'il ne se rapporte pas au nombre des canaux endoder- maux, mais à celui des tubes périsarcaux, et que, par conséquent, il s'applique aux tiges fasciculées. : On rencontre parfois, chez les auteurs anglais qui décrivent des Némertésies, le terme de «Stem compound > qui peut également être interprété de différentes manières. E.-T. BROWNE (1907) en décrivant la N. norvegica de G.-0. SARS, qu'il place dans le genre Antennopsis, dit: <'The specimens.… have à simple, monosiphonie stem. BONNEVIE, however, states that the main is compound, which L'interpret to mean à fascicled stem.» Mais BONNEVIE (1899, p. 96) attribue un < Hydrocaulus compound » aussi bien à À. norvegica qu'à À. antennina et Ton sait que chez cette dernière espèce la tige n'est pas fasciculée. Le mot , pour BONNEVIE, doit s'appliquer non pas à une tige fasciculée, mais à une tige dont le coenosarque renferme plusieurs canaux endodermaux. Il semble donc que l’on devrait abandonner les termes de »onosiphonique, polysiphonique, composée, zusammengesetzt compound, qui manquent de précision, et adopter la terminologie suivante pour la tige: ss M. BEDOT “= jen sihnple == sans branches : ranafiée — avec branches : unicanaliculée = renfermant un seul canal endodermal (Plumularia, Anten- nopsis) È pluricanaliculée — renfermant plusieurs canaux endodermaux anastomosés (Ne- mertesia, Sciurella, Sibogella — Polyplunmarta ?) : fusciculée — formée de plusieurs tubes périsareaux accolés : non fasciculée — formée d'un seul tube de périsarque. Bien que l’on ait observé quelques cas de ramification peu développée, chez des espèces à tige non fasciculée (ainsi que nous Pavons vu plus haut), 11 faut remarquer, cependant, que les espèces dont la ramification est normale et bien développée ont généralement une tige fasciculée. Cela donne à la colonie une plus grande solidité. Chez les espèces ramifiées, les branches sont, le plus souvent, disposées sans ordre apparent. Une seule espèce fait exception à cet égard: c’est la N. ciliata dont les branches, placées régulièrement sur les côtés de la tige, se trouvent toutes dans un seul et même plan. Ce caractère permettrait à Jui seul de la distinguer des autres Némertésies. Le mode de segmentation de la tige n'est pas un caractère auquel on puisse attacher une grande importance, car il varie suivant l’âge et la région des colonies que l’on examine. Les hydroclades, lorsqu'ils sont régulièrement verticillés, sont généralement placés à la partie distale des segments. Mais, la segmentation peut S’effacer dans la région distale de Ja tige où l’on n’observe plus de relation entre le nombre des verticilles et celui des segments. KIRCHENPAUER (1876, p. 29), en décrivant N. antennina, parle d’un bourrelet circulaire qui se trouve à l’extrémité distale des segments de la tige et sur lequel les hydroclades prennent naissance. Quelques auteurs ont donné à cette disposition la valeur d'un caractère spécifique. Or, lorsqu'on compare des colonies de développe- ment et d'âges différents, on remarque que chez celles dont les verticilles com- prennent un très grand nombre d'hydroclades, les apophyses finissent par étre en contact les unes avec les autres. Leurs bases se confondent alors et forment le bourrelet circulaire. Mais, lorsqu'il n’y à qu'un petit nombre d'hydroclades dans les verticilles, on ne voit aucun bourrelet, IT est probable que les choses se passent de Ta méme facon chez toutes les espèces de Némertésies. Au niheu de la face supérieure de la région axillaire des apophvses, se trouve une ouverture, le pore apophysaire. Sur un petit espace, autour de cette ouverture, le périsarque est tres mince et se soulève parfois pour former une petite élévation LE GENRE NEMERTESIA DE au sommet de laquelle se trouve le pore, et que BILLARD nomme le #4melon basal. Cet auteur (1913, p. 59 note) l’a observé chez Sibogella erecta et NUTTING (1900) le mentionne chez À. geniculata Sous le nom de «tooth like projection >. QUELCH (1885 a), qui en parle dans sa description d'A. profunda, croit qu'il représente le point d'attache d’une gonothèque. BROCH (1912, p. 29) dit qu'on le trouve chez toutes les Nemertesia et méme chez Plumularia caulitheca : 1e considère comme une sarcothèque sessile. SPENCER (1890, p. 132), qui a étudié cet organe chez sa Plumularia procumbens, reconnait qu'il n’a pas de relations avec les gonothèques. Il croit qu'il sert à permettre l'introduction et l'expulsion de l'eau occupant l'espace compris entre le périsarque et lectoderme, lorsque les polypes se contractent. Toutes les espèces de Nemertesia que] ai observées avaient des pores apophysaires, mais le #amelon était plus ou moins développé et souvent même faisait défaut. De nouvelles recherches sont nécessaires pour déterminer exactement la nature et les fonctions de ces organes qui sont directement et largement en communication avec les canaux endodermaux et pourraient, peut-être, être considérés comme des pores excréteurs. Les hydroclades sont généralement simples. On a observé quelquefois des hydroclades secondaires. Ces cas sont très rares chez la plupart des Némertésies, mais KIRCHENPAUER (1876) a décrit quatre espèces chez lesquelles les hydroclades secondaires semblent être beaucoup plus fréquents. Dans la diagnose de N. inter- media, il ne cite pas ce caractère, mais, dans les renseignements qu'il ajoute au sujet de cette espèce (p. 21), il dit que les gonothèques femelles sont fixées à l’ais- selle d'hydroclades secondaires. En revanche, les diagnoses d'A. paradoxa, hexas- ticha et johnstoni mentionnent clairement la présence d'hydroclades secondaires. Chez N. paradoxa les colonies mâles et femelles sont différentes. Les «femelles ont souvent des hydroclades de longueurs diverses, pour la plupart très longs et alors, ce qui est rare chez les males, pourvus d'hydroclades secondaires...» N. hexasticha présente . Une bonne figure (pl 8, fig. 23 a) montre un hydroclade primaire portant trois hydroclades secondaires. N. johnstoni, comme nous le verrons plus loin, est peut-être synonyme de N. hexasticha. KIRCUENPAUER en a représenté (pl 8, fig. 26 c) un hydroclade primaire avec trois hydroclades secondaires portant chacun une gonothèque à sa base. 24 M. BEDOT On est done amené à admettre que Fapparition d'hydroclades secondaires, qui est très rare chez certaines Némertésies, devient fréquente chez d'autres espèces et tend à prendre l'importance d'un caractère spécifique. I serait intéressant d’avoir de nouvelles observations à ce sujet. Si réellement, chez N. hexasticha, les hydro- clades secondaires sont portés seulement par des hydroclades spéciaux, plus longs que les autres et sur lesquels ils occupent la place des hydrothèques, on se trouve- rait en face d'un caractère nouveau, important au point de vue systématique, et qui aurait peut-être quelque analogie avec l'apparition des phylactocarpes chez d’autres Plumularides. La segmentation des hydroclades présente deux modes différents que Pon peut distinguer sous les noms de segmentation homonome et segmentation héléronome. Dans le premier mode, tous les segments, où articles, sont semblables et portent une hydrothèque, tandis que dans le second les articles hydrothécaux sont séparés par des articles intermédiaires dépourvus d'hydrothèques. Chez quelques espèces, ce caractère semble avoir acquis une certaine fixité et ses variations sont si peu fréquentes qu'on peut les considérer comme accidentelles. Mais cela n'est pas toujours le cas et l’on trouve des espèces chez lesquelles ce caractère est extrémement variable et semble parfois ne s'être pas encore fixé. Le N, belini nous en offre un exemple. Chez elle, la segmentation hétéronome n'est jamais régulière. On peut trouver es hydroclades sans articles intermédiaires, soit à segmentation homonome., Le plus souvent, cependant, 11 Y a des articles intermédiaires, mais 11S ne sont Jamais aussi nombreux que les articles hydrothé- ‘aux, desorte qu'il n’y à pas une alternance régulière, soit une hétéronomie parfaite. Chez les espèces à segmentation hétéronome, l'hydroclade peut commencer par un article hydrothécal, où par un œrticle apophysaire intermédiaire (article basal de BILLARD), c’est-à-dire par un article sans hydrothèque, situé entre l'apo- physe et le premier article hydrothécal. Ce caractère ne semble pas pouvoir rendre de grands services pour la distinction des espèces, car il est également tres variable, Les articles apophysaires intermédiaires paraissent être formés par sépa- ration de la partie distale de lapophyse. Chez N. belini, où on les trouve dans ja proportion de 42 °/,, ls sont plus nombreux dans la région proximale que dans Ja région distale de lhydrocaule. On indique souvent, dans les descriptions des Némertésies, la position qu'occupe l'hydrothèque sur le segment hydrocladial qui la porte. I se peut que ce caractère ait une importance spécifique, mais il convient, en létudiant, de tenir compte du mode de segmentation des colonies. La longueur des segments des hydroclades (ct de la tige) présente des varia- tions qui sont dues probablement à l’action du milieu, soit aux mouvements de l'eau. LE GENRE NEMERTESIA 25 Chez les espèces telles que AN. belini, où l'hétéronomie des hydroclades n'a pas la régularité que l’on observe souvent chez N. antennina des côtes euro- péennes, les articles intermédiaires semblent s'être développés aux dépens de la partie distale des articles hydrothécaux et dans le but d'en augmenter la solidité. En conséquence, la position relative de l’hydrothèque sur le segment n’est pas toujours la même, Suivant qu'il s’est formé ou non un article intermédiaire, elle est placée au milieu ou au tiers proximal de l’article. Les épaississements internes du périsarque (septal ridges, internal annulations de NUTTING) sont également des formations destinées à renforcer certaines parties des hydroclades. Leur développement ne présente aucune régularité. Jai montré (1916) que chez N. incerta ces épaississements étaient bien visibles sur quelques articles hydrothécaux, tandis qu'ils manquaient complètement sur d’autres. Il ne semble donc pas que l’on puisse leur donner la valeur d’un caractère spécifique. Le nombre et la position des nématothèques sur la tige, les apophyses et les hydroclades sont des caractères auxquels on attribue une grande importance pour la distinction des espèces. Mais, là encore, on observe que le mode de répartition de ces organes, très régulier chez certaines espèces, montre, chez d’autres, de nom- breuses variations. Il est impossible, par exemple, d'indiquer exactement leur nombre chez N. belini où les segments hydrothécaux en ont de un à cinq au-dessous, de un à trois au-dessus de lhydrothèque (outre les deux nématothèques supracalycinales) et de un à quatre sur les articles intermédiaires. On sait, du reste, que les nématothèques se détachent très facilement et que leur absence est souvent due à un mauvais état de conservation. Il est très probable que certaines espèces ont été établies d’après des exemplaires où elles étaient incomplètes. Les Plumularides possèdent en général une paire de nématothèques auxquelles ALLMAN a donné le nom de supracalycinales. Etant donné qu'elles se trouvent placées le plus souvent sur les côtés de l'hydrothèque, il est plus naturel de les désigner sous le nom de nématothèques pleurohydrothécales, pour les distinguer des nématothèques médianes situées au-dessus de l'hydrothèque. Ces nématothèques supracalycinales où pleurohydrothécales manquent où sont remplacées par une seule nématothèque chez quelques espèces de Némertésies dont nous parlerons plus loin. Plusieurs auteurs croient que leur absence est accidentelle ; si lon peut prou- ver qu'elle est normale, ce serait alors un bon caractère spécifique. Les renseignements que l’on possède sur le gonosome des Némertésies sont encore très incomplets. Cela provient surtout du fait que la plupart des espèces ont été décrites d’après des échantillons conservés à l'alcool et fixés d’une façon très insuffisante. On a dû alors se borner, le plus souvent, à indiquer la forme extérieure MÉM. SOC. PHYS. ET HIST. NAT. DE GENÈVE, VOL. 89 (1917). I 26 M. BEDOT des gonothèques (qui est même inconnue chez beaucoup d'espèces), sans pouvoir en déterminer le sexe, On ne doit pas oublier non plus que la forme de ces organes peut varier suivant leur état de développement et de conservation. Chez N, paradoxa, d'après KIRCHENPAUER (1876, p. 93), il y a des colonies males et des colonies femelles que lon pourrait prendre pour des espèces diffé- rentes si elles ne s'élevaient pas de la même hydrorhize. Il serait intéressant de savoir sile mème fait ne se présente pas chez d’autres espèces. On voit que les caractères sur lesquels est basée la systématique des Némer- tésies sont tous tres variables et que leurs variations n'ont pas encore été suffisam- ment étudiées pour permettre des conclusions certaines. Il importerait surtout de se rendre compte des variations que peut présenter une espèce suivant la profon- deur et l’état du milieu dans lequel elle vit. Malheureusement, on n'a pu étudier, jusqu'à présent, qu'un petit nombre d'espèces des grands fonds et leur état de con- servation laissait souvent à désirer. LES ESPÈCES QUI RENTRENT DANS LE GENRE NEMERTESIA Parmi les nombreuses espèces de Némertésies qui ont été établies jusqu'à ce jour, il y en à quatre que l’on peut tout de suite mettre de côté et considérer comme indéterminables, vu l'insuffisance de leur description. Ce sont: Antennularia cyathifera Dana (1846-49), À. triseriata Pourtalès (1869), Nemertesia plumosa Kirchenpauer (1876, p. 20) et À. dichotoma Haller (1890). On à reconnu, depuis longtemps, que À. indivisa Lamarck (1816) — N. anten- nina L.,et que À. arborescens Hassal (1845) — N. ramosa Lx. BILLARD (1906), qui à pu étudier l'échantillon type de la AN. jan de LAMOUROUX, à constaté que c'était une N. ramosa. Les espèces auxquelles GRÆFFE (1884) et MARKTANNER (1890) donnaient le nom d’A. janini ne sont probablement que des variétés de N. antennina. STECHOW (1909) à reconnu que son À. dendritica (1907) était la même espèce que celle à laquelle BILLARD à donné le nom de N, perrieri et dont nous reparle- rons plus Join. N. antennina est la plus commune de toutes les Némertésies et celle qui a été le mieux étudiée, Il n'est donc pas étonnant qu'on en ait décrit plusieurs LE GENRE NEMERTESIA 27 variétés. Celles que JOHNSTON nomma d'abord (1832) Antennularia antennina var. let var. 2, et plus tard (1834) var. indivisa et var. ramosa. correspondent à N. antennina et N. ramosu. Nous allons d’abord parler des espèces qui sont synonymes de N. antennina ou qui s’en rapprochent le plus. N. pentasticha de PIEPER (1880) ne diffère en rien de N. antennina. Dans la diagnose latine de cette espèce, PIEPER parle de < Sureuli plures monosiphonii >. Plus loin, il dit que de l'hydrorhize s'élève + ein kurzer mehrrühri- ger Stamm, aus welchem einige wenige Aeste hervorgehen, welche nach einmaliger Teilung gerade in die Hühe schiessende, einrührige Stmmechen bilden.… > Ilest probable qu'il s'agit bien de colonies non fasciculées. mais formant une touffe dans laquelle les hydrocaules étaient accolées à la base (ce qui arrive par- fois), de façon à donner Pillusion d’une tige composée. Du reste, tousles caractères de cette espèce montrent qu'ils’agit bien de N. antennina. Aucune raison importante n’empéche de considérer également FA. octoseriata de JÂDERHOLM (1896) comme synonyme de AN. antennina. I en est de même pour l'A. cruciata de PIEPER, ainsi que nous le verrons plus loin. La diagnose que KIRCHENPAUER donne de À. antennina Var. minor ne men- tionne aucun caractère qui puisse la distinguer de la N. antennina typique. Il ajoute: «Cette forme se distingue de la N. antennina en partie par le fait qu’elle est plus petite, au plus 12 cent. de long, en partie parce qu'il lui manque la seg- mentation marquée (deutliche Gliederung) qui à valu son nom à cette espèce, Chez N. antennina les hydroclades sont fixés à de petits prolongements en massue (Kegelformig) qui, réunisen verticilles de huit à dix autour de la tige, y forment un bourrelet en anneau visible à l'ail nu. Cet anneau ne se trouve pas chez cette variété; les hydroclades sont bien en verticilles, mais seulement de quatre à six dans chaque cercle, et leur partie inférieure n’est pas aussi épaissie que chez A. antennina : ils font plutot l'effet de s'élever directement de la tige, sans ordre. Cependant, ces différences ne sufhsent pas pour établir une nouvelle espèce >. On à vu plus haut que ce bourrelet en anneau, dont parle KIRCHENPAUER, est un carac- tère qui n'a pas d'importance au point de vue spécifique ; il en est de méme pour la longueur de la tige et le nombre des hydroclades. Deux des Némertésies nouvelles qui ont été décrites par NUTTING dans sa belle monographie des Plumularides de l'Amérique (1900), À. pinnata et À. ame- ricana paraissent se rapporter à N. antennina où à une variété de cette espece, Ainsi que je l'ai dit plus haut, la fasciculation de la tige me parait être un caractère important pour la détermination des espèces, M. le professeur NUTTING, sur ma demande, à examiné à ce sujet les nouvelles espèces de Némertésies amé- 28 M. BEDOT ricaines qu'il à décrites et nr'a fait savoir qu'elles avaient toutes une tige non fasciculée, Je tiens à exprhner 161 ma vive reconnaissance à ce savant naturaliste pour l'amabilité avec laquelle 11 a bien voulu me donner tous les renseignements qui pouvaient m'étre-utiles. BILLARD a déjà montré que FA. pinnala devait être considérée comme syno- nyme d'A, antennina. Je me range à cet avis, car je ne vois aucun caractère qui puisse distinguer cette espèce (qui mesure 3 pouces et n'a pas de gonosome) d’une jeune colonie de N. antemmina. Après avoir décrit À. americana, NUTTING dit qu'elle est très voisine d'A. antennina mais qu'on peut l'en distinguer parce que, chez elle, Fapophyse n’est pas séparée de la première hydrothèeque proximale par plus dun nœud, carac- tère qui parait être constant, et par le fait qu'elle vit dans des eaux plus profondes (106 à 680 m.). La profondeur de l'habitat ne peut pas servir à la détermination des espèces. Quant à l’autre caractère, indiqué par NUTTING, il montre que A. œmericana peut avoir où bien des apophyses portant une hydrothèque, ou bien des apophyses sans hydrothèques suivies d'un article hydrothécal. Or, ces deux cas se rencontrent chez N. antennina où, il est vrai, le second est normal et de beau- coup le plus fréquent. DRIESCH (1891) et BILLARD (1901) ont même vu parfois chez À. antennina des apophyses avec une hydrothèque. BROCH (1903, p. 10 et 1912, p. 29) soutient qu'_A. americana est SYnonyme d'A. antennina. Y dit avoir examiné des colonies chez lesquelles quelques hydro- clades étaient semblables à ceux d'A. œmericana et d'autres à ceux d'A. antennina. Cette espèce, ainsi que nous le verrons plus loin, doit être considérée comme une variété de N. antennina. La grande variabilité des caractères d'A. antennina conduit insensiblement à l'apparition de formes qui semblent être plus où moins définitivement fixées et ont été distinguées spécifiquement. Les dimensions des articles hydrocladiaux peuvent varier, Lorsqu'ils s’allongent, on a la var. longa de BILLARD (1904). Dans ce cas, la position de la nématothèque de l'article imtermédiaire varie et se déplace vers l'extrémité distale. On voit souvent apparaitre une seconde nématothèque sur l’article mtermédiaire. Les colonies chez lesquelles cette disposition est fréquente, sans cependant se présenter sur la majorité des articles, à recu de BILLARD le nom de N, perrieri Var. antennoides, tandis qu'il considère les formes qui ont toujours deux nématothèques sur Particle intermédiaire comme appartenant à une espèce distincte qu'il nomme N. perrieri. STECHOW (1909), admettant les idées de BILLARD, avait créé une N. perrieri var, treqularis pour l'Antennularia trregularis de QUELCH (1885). Cette varicté comprenait les formes chez lesquelles l'article intermédiaire à deux nématothèques LE GENRE NEMERTESIA 29 est souvent (mais non pas toujours) remplacé par deux articles à une seule néma- tothèque. Plus tard (1913) STECHOW modifia ses idées à ce sujet, ainsi que nous le verrons plus loin. D'autre part, J'ai donné le nom de N. belini à une forme chez laquelle les variations dans le mode de segmentation des hydroclades et dans le nombre des dactylothèques sont non pas seulement accidentelles, mais constantes. Cette espèce a, sur les articles hydrothécaux, de une à cinq nématothèques médianes proximales et de zéro à trois distales, et, sur les articles intermédiaires, une à quatre nématothèques. Au point de vue du mode de segmentation de l’hydroclade, nous venons de voir que l’hétéronomie typique consistant dans Palternance régulière des articles hydro- cladiaux et intermédiaires se modifie parfois par l'augmentation de ces derniers. Dans certains €as, au contraire, on observe une düminution du nombre des articles intermédiaires qui se montre, d'abord, dans la région proximale des hydroclades, C’est ce qui se passe dans la variété de N. antennina à laquelle NUTTING avait donné le nom d'A. american«. On peut discuter la valeur que lon doit attribuer à ces variétés ou espèces et se demander si elles ne représentent pas seulement les différents aspects que peut prendre une seule et même espèce lorsqu'elle est soumise à l'influence de milieux différents. I nous semble, cependant, que dans l’état actuel de nos connaissances, nous avons tout avantage à déterminer exactement les stades de cette évolution et à les distinguer en leur appliquant des noms spécifiques qui pourront plus tard être supprimés si on le juge nécessaire. Mais, avant de réunir toutes ces formes sous une seule et méme dénomination spécifique, 1l conviendra, cependant, de les étudier de plus près, de ne pas se borner, comme on la fait trop souvent, à déterminer les caractères d’une colonie d'après l'examen d'un petit nombre d'hydroclades, mais en s’efforçant d'arriver à fixer la valeur et la fréquence des variations qu’elles présentent. En effet, ces variations prennent une importance plus où moins grande suivant qu'elles sont rares ou fréquentes dans une même colonie. On peut actuellement réunir dans un groupe, que nous appellerons le groupe antennina, un certain nombre d'espèces et de variétés, entre lesquelles on trouve une série de stades intermédiaires, mais qui présentent en commun les caractères suivants: Tige droite, non fasciculée ; hydroclades à segmentation hétéronome; gonothèques ovoïdes, portant à leur extrémité libre un couvercle aplati, plus où moins incliné sur le coté. L'espèce type de ce groupe, N. antennina, a une segmentation hétéronome des hydroclades très régulière, c’est-à-dire que lon trouve toujours un article intermédiaire entre deux articles hydrothécaux; il y à toujours (outre les deux 30 M. BEDOT nématotheques pleurohydrothécales) deux nématotheques médianes, lune sur l’article hydrothécal, au-dessous de lhydrothèque, et l'autre sur l’article inter- médiaire, Chez beaucoup de colonies de cette espèce, ces caractères ont une grande fixité et leurs modifications ne se montrent que dans une proportion excessivement faible. Mais cela n'est pas toujours le eas. Les variations les plus fréquentes concernent principalement le mode de seg- mentation des hydroclades et le nombre des nématothèques médianes. On peut alors voir apparaitre l'une ou l’autre des modifications suivantes : a) diminution du nombre des articles intermédiaires: b) allongement des articles hydrocladiaux ; c) formation, aux dépens de l'article hydrothécal ou de Partiele intermédiaire, d'un deuxième article intermédiaire : d) formation de nématothèques médianes supplémentaires qui se placent soit sur les articles hydrothécaux, soit sur les articles intermédiaires. Ces modifications se présentent isolément où shnultanément sur un plus où moins grand nombre d'hydroclades d'une colonie. On ne doit donc en tenir compte, pour l'établissement d'espèces nouvelles, que dans le cas où elles se trouvent sur la grande majorité des hydroclades et donnent à l’ensemble de la colonie un faciès différent de celui du type. Nous placerons, comme bonne espèce, à coté de la N,. antennina, la N, perrieri de BILLARD qui à foujours deux nématothèques sur Particle intermé- diaire. En outre, nous réunirons sous le nom de N°, antennina var. trreqularis, toutes les espèces et variétés chez lesquelles les modifications du type primitif, men- tionnées plus haut, S'observent parfois, mais ne paraissent pas encore avoir acquis la valeur dun caractère spécifique, et qui sont en quelque sorte intermédiaires entre N, antennmina et N, perrieri. Nous aurons donc comme synonymes de cette variété : À. érregularis Quelch, A. americana Nautting, A. antennina var. longa Billard, A. perrieri vax. antennoides Billard et A. perrieri Var. trreguluris Stechow. Si l’on fait abstraction du mode de segmentation des hydroclades, on voit que le nombre des nématothèques médianes, entre deux hydrothèques voisines, est tou- jours de deux chez N. antennina, de deux ou trois chez N. antennina var. irrequ- laris. et de trois chez N. perrieri. Mais, chez les espèces du groupe antennina, ce nombre peut encore augmenter et l’on arrive alors à la forme spécifique que jai décrite sous le nom de AN, belini, où 11 est toujours supérieur à trois, et le plus sou- vent de cinq. STECHOW en 1909 admettait l'A. perrieri de BILLARD et plaçait son À. dendri- Hica parmi les synonymes de cette espèce. Il reconnaissait la plupart des variétés LE GENRE NEMERTESIA 31 créées par BILLARD et donnait à |A. irregularis de QUELCH le nom d'A. perrieri var. #rreqularis. Plus tard, STECHOW (1915, p. 93), modifiant sa manière de voir, rétablit comme bonne espèce N. érregularis (Quelch) et lui donne comme synonymes non seulement NN. perrieri et ses variétés, mais encore toutes les variétés de N. antennina décrites par KIRCHENPAUER et BILLARD, auxquelles il ajoute l'A. octoseriata de JÂDERHOLM. Voici comment il s'exprime à ce sujet (p. 94): « BILLARDS verschiedene Va- rietäten gehüren alle em und derselben Art an, nicht zwei Arten, N, antennina und N. perrieri, Wie man nach seiner Namengebung annehmen kôünnte. Sämtliche neu- eren Autoren (QUELCH, JÂDERHOLM, BILLARD, STECHOW) sind sich nun darin einig, dass diese Form von AN. antennina als besondere Art abgetrennt werden muss und nicht bloss eme Varietät von ihr ist, wie ihr erster Beobachter KIRCHEN- PAUER annahm. Diese Art muss daher den Namen N. érreqularis führen. Ihre Varietäten dürfen nicht, wie BILLARD es tut, als Varietäten von N. antennina bezeichnet werden, sondern müssen Nemertesia irregularis (Quelch) var. anten- noides, bezw. var. longa heissen. > Il ne nous semble pas que l’on puisse adopter l'opinion de STECHOW et cela pour les raisons suivantes : a) Si l’on rencontre fréquemment des Némertésies du groupe antennina chez lesquelles la disposition des nématothèques médianes présente des variations, d’au- tre part on voit des colonies où ce caractère est fixé de façon à établir un type déterminé, C’est le cas pour la N, perrieri, Ce type doit donc être distingué par un nom spécifique. b) On peut établir facilement la diagnose de N. antennina et de N. perrieri. Il ne serait pas possible de faire de méme pour N. érregularis, car cette espèce, telle que la comprend STECHOW, ne représente pas un type spécifique, mais bien un ensemble de variations du type N. antennina et N, perriert auxquelles cet auteur a ajouté À. antennina var. minor Kirchenpauer, À. antennina Var. longa Billard et À. octoseriata Jäderholm que lon ne peut pas séparer de N. antennina. c) STECHOW admet les var. antennoides et longa pour la NN, érreqularis. On ne voit pas pourquoi ces variétés pourraient être établies aux dépens d’une espèce dont les caractères ne sont pas déterminés, et ne seraient pas rattachées plutôt aux espèces voisines dont le type est bien défini. Nous croyons done qu'il est préférable de considérer À. #rregularis non pas comme une espèce, mais comme une variété de N. antennina et d'enlever de sa synonymie (telle qu’elle est établie par STECHOW) toutes les formes qui se rattachent incontestablement à N. antennina et _N, perriert. D'autre part, nous avons mentionné plus haut, au nombre des modifications qui 22 M. BEDOT se présentent dans le type anfermmina, la réduction du nombre des articles intermé- diaires. Elle se montre déja chez VA. americana que nous avons placée dans les synonymes de N. antennin«a var. irregularis. Ce caractère devient dominant chez la N. éncerta Bedot. Mais les gonothèques de cette espèce sont en forme de corne d'abondance, et non pas ovoides: c’est la raison pour laquelle nous ne la placons pas dans le groupe antennina. Les N. hexasticha et johnstoni de KIRCHENPAUER, chez lesquelles on trouve certains caractères qui les rapprochent de N. antennina, ont également des gono- thèques dont la forme diffère de celles de cette espèce. En revanche, 1l est possible que de nouvelles recherches permettent, plus tard, de faire rentrer dans le groupe antennina la N. paradora Kirchenpauer dont nous avons déjà parlé et les N. geniculata et rugosa de NUTTING. L D'après NUTTING, À. geniculata se distinguerait par les caractères suivants. Les hydroelades sont dispersés sur la tige, mais présentent souvent une tendance à l’arrangement en verticilles. Is sont placés sur de longues et épaisses apophyses < which have à distinct tooth-like projection on the upper surface >. La portion distale de la tige est géniculée. Les gonanges ovoïdes ont une ouverture latérale. Les autres caractères indiqués sont semblables à ceux que lon observe chez N. antennina. La tooth-like projection mentionnée par NUTTING paraît, ainsi que nous l'avons vu plus haut, être le mamelon basal qui se rencontre, plus où moins développé, chez toutes les Némertésies (comp. NUTTING, 1900, p. 18-19 et p. 71, pl. 10, fig. 3). Bien qu'elle soit très voisine de N. antennina, cette espèce s’en distingue donc par sa tige géniculée et par la position latérale de l'ouverture des gonothèques. A. rugosa Nutting est caractérisée surtout par un épaississement du périsarque de la face inférieure et externe des hydroclades qui forme des cloisons (septal ridges) incomplètes et irrégulieres. Les internaæuds sont très longs et irréguliers et portent parfois plus d’une hydrothèque. Les processus de Ta tige (apophyses), auxquels les hydroclades sont attachés, sont très courts (unusually short) et chacun d'eux à une protubérance épaisse (swollen) sur sa surface supérieure. Le gonosome est inconnu. NUTTING ne donne pas d'indications précises sur la disposition des nématothèques médianes et se borne à dire qu'il y en a deux ou trois entre deux hydrothèques adjacentes. En résumé, on peut actuellement faire rentrer dans le groupe antennina les formes suivantes : N. antennina (Limé), N. antennina var. irregularis (Quelch), LE GENRE NEMERTESIA de N. perriert (Billard), N. belini (Bedot). En outre on doit considérer comme espèces très voisines de celles qui forment ce groupe : N. paradoxa (Kirchenpaucr) et N. geniculata (Natting). N. ramosa est, avec N. antennina, l'espèce qui a été le plus souvent et le mieux observée. MEREJIKOWSKY (1882) lui donnait, par erreur, le nom d’Antennularia ramulosa. Depuis que l’on à étudié les variations qui se présentent habituellement chez N. ramosa, surtout relativement au nombre et à la disposition des hydroclades, on peut, sans hésiter, inscrire parmi ses synonymes À. profunda Quelch (1885) et A. simplex Allman (1877). ALLMAN à attiré l'attention sur deux < processus en forme de dent » au sommet desquels sont fixés les nématophores supracalycinaux d’A, sompler. I S'acit, en réalité, de petits mamelons plus où moins développés sur le côté des hydrothèques et que l’on peut très bien observer chez N. ramosa. BILLARD (1906) a créé une N. ramosa var. plumularioides à laquelle il attribue les caractères suivants : + Les hydroclades allongés sont espacés et, au lieu de former des verticilles touffus, ils se détachent soit isolément, soit par deux; plus rarement 1ls sont verticillés par trois. Dans les deux premiers cas, ils sont placés le plus souvent dans un même plan, et certaines colonies ne différent en rien des véri- tables Plumulaires.. Parfois les hydroclades sont disposés dans deux plans rectan- gulaires. D'ailleurs, il peut exister diverses dispositions le long d'une même tige... L’hydrocaule porte de nombreuses dactylothèques caulinaires >. Les hydroclades offrent des articles intermédiaires, mais ils Sont rares et portent une dactylothèque, tandis que l’article hydrothécal précédent n'en à pas. BILLARD ne dit jas si la tige est fasciculée et n’a pas observé les gonothèques. I s’agit donc, très probable- ment, d’une jeune colonie, mais il n’est pas certain que ce soit une variété de N. T'UNOSE. La N. incerta que j'ai décrite (1916) montre une disposition des hydroclades qui ressemble beaucoup à celle de N, ramosa var. plumularioutes, mais sa tige simple, non fasciculée, et la forme de ses gonothèques, empéchent de la rattacher à N\. ramosa. Elle se distingue également de N, norvegica par la structure de sa tige et la disposition des nématothèques !. ! Je saisis cette occasion pour corriger une erreur qui s’est glissée dans la description que j'ai donnée de cette espèce (1916). A la page 8, ligne 4, il faut lire: N. norvegica au lieu de N. ramosa. MÉM. SOC, PHYS. ET HIST. NAT. DE GENÈVE, VOL. 89 (1917). LA 34 M. BEDOT Parmi les Némertésies décrites jusqu à présent, il y à cinq espèces chez les- quelles, au dire des auteurs qui les ont découvertes, on ne trouve pas la paire de nématothèques supracalycinales qui s’observe chez toutes les autres espèces. On sait avec quelle facilité les nématothèques se détachent des colonies qui n’ont pas été péchées et conservées avec beaucoup de soins, ce qui permet de croire que, sou- vent, leur absence est purement accidentelle, Néanmoins, nous ne pouvons pas, a priori, admettre que ce cas ne puisse pas se présenter normalement. Les cinq espèces en question sont: N. hexasticha, cruciata, johnstonr, norte- gica et variabilis. N. hexasticha Kirchenpauer (1876) se distingue de toutes les autres Némer- tésies connues par le fait que les segments hydrothécaux sont complètement dépour- vus de nématothèques et sont suivis de segments intermédiaires portant une néma- tothèque. Mais cette espèce montre d’autres caractères importants. Sa tige est monosiphonique, c'est-à-dire non fasciculée. À côté des hydroclades, généralement tres courts, s’en trouvent d'autres, longs, qui portent soit sur toute leur longueur, soit sur leur moitié inférieure, des hydroclades secondaires. Ses gonothèques, en forme de bouteille à col, sont fixées à l’aisselle des hydroclades primaires où secon- daires. La N. johnstoni Kirchenpauer (1876) à beaucoup d'analogie avec N. herasticha. Elle a souvent des hydroclades secondaires: ses gonothèques sont en forme de bouteille à col et paraissent, d'après la figure que KIRCHENPAUER en donne (pl. 8, fig. 26 c), être fixées à la base des hydroclades secondaires. Les seuls caractères qui la distinguent de N, hexrasticha sont le nombre des hydroclades des verticilles et celui des nématothèques. Chez N. johnsloni, il y à deux hydroclades par verticille, tandis que chez N. herasticha 1 y en a trois. Nous savons main- tenant que ce caractère est trop variable pour qu'on puisse lui attribuer une valeur spécifique. Chez ces deux espèces, les segments intermédiaires des hydroclades portent une nématothèque. Quant aux articles hydrothécaux, ils sont dépourvus de nématothèques chez N. hexaslicha, tandis que, chez N. Johnston, 1s en ont deux placées lune au-dessous, l’autre au-dessus de lhydrothèque. Malheureuse- ment, KIRCHENPAUER n'indique pas la place exacte qu'occupe la nématothèque distale. D’après la figure qu'il donne (pl. 8, fig. 26 D), on ne peut pas savoir si cette nématothèque est médiane ou placée à côté de lPhydrothèque. Dans ce dernier cas, on pourrait admettre qu'il y avait deux nématothèques supracalycinales et que l’une des deux s’est détachée. I est fort probable que ces deux espèces de Nemertesia n'en forment qu'une et que les échantillons d’après lesquels elles ont été établies étaient mal conservés et avaient perdu la plus grande partie de leurs nématothèques. LE GENRE NEMERTESIA 3) La N. cruciatu Pieper (1881) parait également avoir été établie d’après un échantillon dont les nématothèques étaient incomplètes. Les hydroclades ont des segments intermédiaires avec une nématothèque et des segments hydrothécaux avec une nématothèque médiane proximale et une nématothèque latérale, à côté de l'hy- drothèque. Tous les autres caractères mentionnés par PIEPER sont ceux d’une N. antennina à verticales de quatre hydroclades décussés. Nous croyons donc que l’on peut considérer N. cruciala comme synonyme de N. antennina, en admettant que la colonie étudiée par PIEPER avait perdu une partie de ses nématothèques supracalyeinales. La Némertésie que G.-0. SARS (1874) à décrite sous le nom d’Æ/eteropyris norvegicu est encore une espece au sujet de laquelle on manque de renseignements précis. Les hydroclades sont divisés en articles de grandeurs différentes, mais por- tant chacun une hydrothèque accompagnée de trois nématothèques placées comme suit : une au dessous de l’hydrothèque, une autre à l'extrémité distale de Particle, et la troisième derrière lhydrothèque. Cette dernière ne peut pas être considérée — ainsi que nous l'avons fait pour AN. cruciata — comme étant lune des deux nématothèques supracalyeinales (autre ayant disparu). La description de SARS a été confirmée par BONNEVIE (1899) qui à étudié trois exemplaires de cette espèce, récoltés par la NORSKE-NORDHAVS EXPEDITION. Dans le tableau des espèces étudiées, cet auteur dit que les nématophores sont placés sur une seule rangée et jamais par paires. Nous devons done admettre ce caractere qui est important au point de vue spécifique. Ajoutons, d’après BONNEVIE, que les hydroclades sont dispersés (scattered) sur la tige et que l'hydrocaule est « compound >. BILLARD (1906, p. 217) a cru avoir retrouvé cette espèce dans la Méditerranée. Au cours de la description qu'il en donne, il dit entre autres : « BONNEVIE n'indique qu'une dactylothèque suprahydrothécale, mais il en existe deux, et, si on ne les voit pas toujours, c’est que l’une ou même les deux peuvent être tombées... Cette espèce, par la succession des articles de l'hydroclade et par la disposition des dactylothe- ques, est très voisine d'A. ramosa et pourrait peut-être être considérée comme une variété à articles plus longs et plus minces, à épaississements internes du périsarque des hydroclades. La forme de la gonothèque est semblable. > BILLARD admet done que le caractère distinctif de cette espèce, soit la pré- sence d'une seule nématothèque derrière l'hydrothèque, remplaçant les deux néma- tothèques supracalyeinales, repose sur une erreur d'observation. C’est un point important qui demande de nouvelies recherches. Ki, dans les exemplaires qui ont été étudiés par SaRS et BONNEVIE, les nématothèques étaient au complet, il con- vient de maintenir N. norvegica comme bonne espèce, distincte de celle de BILLARD: maiss'il existe normalement une paire de nématothèques supracalycinales, 36 M. BEDOT comme BILLARD l’admet, on doit la considérer comme synonyme, où tout au plus comme une variété de NN, ramosa. Les différences qu'elle présenterait avec cette derniere espèce seraient de peu d'importance. En effet, la longueur des articles hydrothécaux est, on le sait, très variable, Chez N. ramosa, BILLARD leur donnait comme dimensions moyennes, en 1904 (p. 224) 500 , et, en 1906 (p. 215), 610 à 700 ». Les mensurations que j'ai faites sur de nombreuses colonies de régions diverses m'ont donné des chiffres variant entre 416 et 768 v. La N. norvegica de BILLARD avait des articles hydrothéeaux de 700 à 950%. Quant aux épaississements internes du périsarque, c’est un caractère tres individuel et auquel on ne peut pas attribuer une valeur spécifique, ainsi que nous l’avons vu. Ces caractères ne sembleraient done pas assez importants pour empécher d'établir une synonymie entre À. ramosa et A. norvegica. H faut cependant re- marquer que la forme des gonothèques représentées par SARS chez À. norrvegicea différe de celle que l'on observe généralement chez N, rœmosa, bien que BILLARD les trouve semblables chez les deux espèces. Iest vrai que la gonothèque de N. ra- mosa, dans le spécimen que représente HINCKS (186$), rappelle un peu celles qui sont figurées par SARS. BROWNE (1907), en étudiant les Hydroïdes récoltés par le < HUXLEY » dans le solfe de Biscaye, à trouvé une espèce qu'il identifie avec PL norvegica de SARS. Mais, ayant reconnu que les tiges étaient < simples et monosiphoniques » il Ja met dans le genre Antennopsis sous le nom d'A. norvegica. La disposition des hydro- clades est pennée chez les jeunes colonies et devient irrégulière plus tard. Tous les segments hydrothécaux ont trois nématophores : «two situated in front of the hydrotheca and one behind it ». Il ne semble pas certain que l'espèce dont parle BROWNE soit la même que celle de SaRs et de BONNEVIE. En effet, illa place dans le genre Antennopsis (à tige unicanaliculée) en donnant au terme de < stem compound > employé par BONNEVIE un Sens qui, ainsi que nous l'avons vu (p. 21) est tres discutable. On voit donc que de nouvelles recherches sont encore nécessaires pour que l'on puisse établir nettement les caractères de N, norvegica et sa synonymie. Chez VA. variabilis de BROCH (1903) les segments hydrocladiaux ne portent que deux nématotheques, Pune au-dessous, l'autre au-dessus de l’hydrothèque, mais, ajoute Pauteur, < très souvent l’une ou l’autre peut manquer >. À part cela, cette espece semble présenter les mêmes caractères que N. rorvegica. Les gonothèques de cette dernière sont , tandis que chez N, variabilis 11S sont « ovales, fortement recourbés avec ouverture oblique (schief) à lextrémité distale >. Il est difficile de comprendre, d'apres ces deux descriptions, en quoi consiste réellement leur différence, BRocn LE GENRE NEMERTESIA 37 ajoute que À. variabilis se distingue des autres Antennulaires par ses nématophores particuliers et très petits. Malheureusement, il ne donne pas de description et de figure détaillée de ces nématophores dont il n'indique pas les dimensions, de sorte qu'on ne peut pas savoir en quoi ils se distinguent de ceux des autres Némertésies. Cette espèce ressemble beaucoup à une N, ramosa qui aurait perdu une partie de ses nématothèques. Il y à trois Némertésies qui se distinguent de toutes les autres espèces par le fait que leurs hydroclades, à segmentation homonome, portent sur chaque article une nématothèque médiane au-dessous de l’hydrotheque et deux supracalycinales. Ce sont: N. sntermedia, À. japonica et N. tetrasticha !. Les seuls renseignements que nous ayons sur les deux premières espèces sont dus aux auteurs qui les ont découvertes, KIRCHENPAUER (1876) et STECHOW (1907 et 1909). Leurs descriptions paraissent à première vue différentes, mais, en les étudiant de plus près, on voit qu'elles peuvent très bien se rapporter à la même espèce, Voici un état comparatif des diagnoses de ces deux espèces : N. intermediu. A. japonica. Tige droite, peu rameuse, polysi- phonée. Verticilles de 3, pas tres réguliers. Les hydroclades alternent, mais pas très exactement. [Is forment 6 ran- gées, non pas droites, mais tournant au- tour de la tige. Tige non ramifiée, sans internœæuds visibles, sauf un petit nombre qui se présentent irrégulièrement. Verticilles de 3, placés de telle façon que deux d’entre eux ne sont éloi- enés lun de l’autre que des ?/, de la circonférence et que le troisième, qui leur est opposé, est éloigné de chacun des deux premiers par une longueur égale aux /, de la circonférence. Les verticilles sont alternants, de sorte que le clade isolé se trouve placé alternativement à droite et à gauche et toujours dans l’espace qui sépare les deux autres placés l’un près de l’autre. Cet arrangement forme une ligne droite non spiralée le long de la tige. ï On a vu plus haut que l’Antennularia cylindrica de Bazx, qui offre la même disposition doit être placée dans le genre Scrella. 38 M. BEDOT Hydroclades longs, articulés, les ar- Clades tres longs, ayant jusqu'à vingt tieles longs portant tous des polvypes. thèques,indistinctement segmentés obli- quement, mais composés seulement d’ar- ticles portant des thèques; non visible- ment épaissis à la base. I ny a pas d'internœuds entre la tige et le premier thèque. Périsarque très épais ; chaque article avec 9 forts septes parmi lesquels, cependant, il n'y en a qu'un petit nom- bre qui traversent completement lar- ticle. Hydrotheques cupuliformes placées Thèques petites, cupuliformes, aussi au milieu des articles. profondes que larges, dune longueur égale au !/, de celle de l'article, un peu plus près de l'extrémité proximale, com- plétement attachées. Nématothèques bithalames, infun- 1 nématophore médian placé sur un dibuliformes, au nombre de 3 dans bourrelet au-dessous de la thèque, 2 chaque article, soit 2 latérales à l'ou- latéraux au-dessus delle, 1 au com- verture de l'hydrothèque et 1 à lex- mencement de chaque clade et égale- trémité inférieure de l'article. ment 1 de chaque côté de laisselle. > paires dans chaque verticille de la tige. Gronothèques eyathiformes pédicel- Gronothèques mconnues. lées. On voit que ces deux descriptions different surtout par le fait que les auteurs n'ont pas porté leur attention sur les mémes caracteres. KIRCHENPAUER donne des figures de N. intermedia ; 1 a observé la fascicula- tion de la tige et les gonothèques. En revanche, il ne parle pas des nématothèques caulinaires et dit peu de chose de la disposition des hydroclades. Ce dernier point à été étudié de très près par STECHOW qui, malheureusement, ne figure pas son espèce, ne dit rien de la fasciculation de la tige et n'a pas pu observer les gonothèques. La disposition des hydroclades de À. japonica est intéressante, mais il ne me semble pas que l’on puisse en tirer un caractère spécifique. En effet, cette question n'a pas été étudiée à fond chez les Némertésies. Les observations comparatives que J'ai pu faire sur un grand nombre d'hydrocaules de N. belini m'ont montré que les LE GENRE NEMERTESIA 39 hydroclades étaient arrangés de façons très diverses et que souvent une disposition qui paraissait être caractéristique se rencontrait sur une hydrocaule et ne se présentait pas sur d’autres hydrocaules de la même touffe. C'est la raison pour laquelle je ne crois pas que l’on puisse attacher d'impor- tance au fait que chez N. intermedia les hydroclades forment des rangées non pas droites, mais tournant autour de la tige, tandis que chez À. japonica ces ran- gées forment une ligne droite, non spiralée le long de la tige. J'ai observé ces deux dispositions chez N. belini. D'après KIRCHENPAUER, les hydrothèques sont attachées au milieu des articles et, d'après STECHOW, un peu plus près de l'extrémité proximale, Cette distinction n'aurait de valeur que si elle était accompagnée d'autres caractères spécifiques. En résumé, je ne crois pas que, dans l’état de nos connaissances, on soit en droit de distinguer ces deux espèces. Nous les réunirons donc sous le nom de N. inter- media. Remarquons encore que KIRCHENPAUER attribue à cette espèce des gono- thèques cyathiformes, soit en forme de coupes. Sur la figure qu'il en donne (pl. 7, fig. 23 b) on voit trois gonothèques dont l’une (en bas) est bien cyathiforme, mais paraît être incomplètement développée, tandis que les deux autres ont lextrémité libre rétrécie en forme de col. Il y à encore une Némertésie à segments homonomes qui possède trois némato- thèques, une médiane proximale et deux supracalyeinales: c'est N, tetrasticha (MENEGHINI 1845). Aucun auteur n'en a donné jusqu'à présent une description complète, Elle à été trop souvent déterminée uniquement d'après le nombre et la disposition de ses hydroclades, ce qui est insuffisant puisque nous savons aujourd’hui que la disposi- tion < tétrastique >» peut se rencontrer chez la plupart des Némertésies. D'après BROCH (1912, p. 31), les gonothèques sont oviformes (eiformig), ce qui permet de supposer qu'elles sont semblables à celles de N. ramosa, et qu'elles diffe- rent de celles de N. 2rtermediu. DRIESCH (1891) à observé que la tige était fasciculée, que les verticilles étaient composés de deux ou trois hydroclades, et que la disposition typique des articles hydrothécaux comprenait : une nématothèque au-dessous de lhydrothèque et deux nématothèques supracalycinales. IT fait remarquer en outre (p. 472) que: «bei À. tetrasticha wurde nicht selten und Zwar, wenn überhaupt, in unteren Stockteil an allen Fiedern, im oberen nur proximal die 7amosa-Ordnung beob- achtet >. Ce qui revient à dire qu'il n’est pas rare de trouver des articles hydro- thécaux de A. tetrasticha portant une némathothèque médiane au-dessus de lhydro- thèque. D'autre part, DRIESCH ajoute : < Bei À. r«mosa ist nicht ganz selten die distale 10 M. BEDOT Eimzelnematophore durch einen Einschnitt abgetrennt, also die antennina-Ordnung vorhanden, doch nur nn distalen Fiederteil: bisweilen fehlt sie (tetrasticha- Ordnung). >» J'ai eu l’occasion d'observer, à Naples, plusieurs colonies de N, ramosa chez lesquelles de nombreux articles hydrothécaux n'avaient pas de nématothèque mé- diane distale, tandis que d’autres en étaient pourvus. En comparant les descriptions qui ont été données de N, fetrasticha, on arrive à la conclusion qu'il s'agit ou d’une N.ramosa ayant perdu une partie de ses nématothèques médianes distales, où d'une variété de cette espèce. En attendant de nouvelles recherches à ce sujet, nous la laisserons figurer parmi les N'emertesia Comme espèce douteuse, BUSK (1851, p. 119) à donné le nom d'Antennularia cymodocea à une espèce provenant du sud de l'Afrique, mais il la décrivit d’une facon si sommaire et incom- plète que KIRCHENPAUER (1876, p. 30) et BALE (1884, p. 146) la considéraient comme une espèce douteuse, Ce dernier auteur ajoutait qu'elle était peut-être synonyme de N. decussata. KIRKPATRICK (1890) à pu examiner les types de BUSK et a montré que cette espèce était la même que celle à laquelle KIRCHENPAUER donnait le nom de N. decussata. BILLARD (1910) à confirmé ces observations. On sait maintenant que le mode de segmentation des hydroclades et la disposition des nématothèques sont semblables à ce que lon voit chez N. antennina. Mais N. cy- mocdocea diffère de cette dernière espèce par le fait que sa tige est fasciculée et que les gonothèques se terminent par un Col. BILLARD ajoute: <1es épaississements in- terhydrocladiaux sont aussi plus fortement accentués et 1l existe souvent un faible épaississement correspondant au fond de lhydrothèque ». UTCHIE (1907, p. 542) à décrit sous le nom d'Antenrularia hartlaubi une espèce qui parait être synonyme de N, cymodocea. I dit qu'elle se rapproche par sa structure générale d'A. decussata, À. johstonti et A. irregularis. Mais cette com- paraison est basée sur la disposition et le nombre des hydroclades, caractère qui, ainsi qu'on l’a vu, n'a pas grande valeur spécifique. Il ajoute que « cette espèce se distingue de celles citées plus haut par le fait qu'elle a des septes internodaux très fortement prononcés >», Ce caractère est déjà indiqué sur la figure que donne KIR- CHENPAUER (1876, pl. 2, fig. 24) d’un hydroclade de N, decussata et nous venons de voir que BILLARD Fa également mentionné. RITCHIE n’a pas vu les gonothèques de son espèce. Il ne semble donc pas possible de distinguer A. hartlaubi de A. cymodocea. Mais cette question de synonymie se complique du fait que BROCH (1914) a donné une nouvelle description de N, hartlaubi d'après l'examen d'exemplaires pourvus de gonothèques < ovales with a large oblique aperture at the summit >. La LE GENRE NEMERTESIA 41 forme de ces gonothèques (dont BROCH donne un dessin) ne correspond pas à celle que KIRCHENPAUER décrit et figure chez N. decussata. Mais, en revanche, elle est semblable à celle que l’on observe chez N. antennina. BROCH termine sa description en disant que N. hartlaubi « is elosely allied to Nemertesia antennina (Lin.), from which it is distinguished by the arrangement of its hydrocladia and its colours >. Ces caractères n'ont pas assez d'importance pour autoriser une distinction spécifique. Nous arrivons donc à cette conclusion que l'Antennularia hartlaubi de RITCHIE est, de même que N. decussata Kirchenpauer, synonyme de N. cymodocea (Busk), tandis que l'espèce décrite sous le nom de N. hartlaubi par BROCH est synonyme de N. antennina. On doit, selon toutes probabilités, faire rentrer dans le genre Nemertesia l'es- pèce que JÂDERHOLM (1904) à décrite sous le nom de Plunularia duseni. L'arran- gement de ses hydroclades peut permettre de croire, à première vue, qu'il s'agit d'une Plumularia. Voici, en effet, ce qu'en dit l’auteur: < Am unteren Theile des Stammes sind sie nämlich fiedrig gestellt und liegen in einer Ebene, während sie in oberen Teil der Kolonie von allen Seiten des Stammes entspringen und demnach radiär geordnet sind ». On sait, actuellement, que la disposition plumularoïde des hydroclades peut se rencontrer non seulement chez de jeunes colonies de Nemertesia, mais aussi dans la région proximale de la tige de certaines espèces (N. ramosa var. plumularioides Billard). Aucun des autres caractères mentionnés par JÂDERHOLM ne peut em- pêcher de placer cette espèce dans le genre Nemertesia. N. dusenise distingue de N. antennina par la forme de ses gonothèques ovoïdes terminées par un col étroit. Elle a des épaississements périsareaux accusés. Après la revision très sommaire que nous venons de faire, on voit qu'il reste, dans le genre Nemertesia, 19 espèces dont la plupart sont insuffisamment connues. De nouvelles recherches permettront probablement de diminuer encore ce nombre et de caractériser d’une facon plus exacte les formes réellement distinctes et leurs variétés. En attendant, nous donnerons la synonymie de ces espèces, et leur diagnose basée sur les caractères qui semblent avoir le plus de valeur. MÉM. SOC. PHYS. ET HIST. NAT. DE GENÈVE, VOL. 89 (1917). 42 | M. BEDOT TABLEAU DES ESPÈCES Genre Nemertesia Lamouroux 1812. 1. N. antennina (Linné) 1758. Sertularia antennina Linné 1758. Nemertesia (Serlularia) antennina Lamouroux 1812. Nigellastrum antenninum Oken 1815. Antennularia indivisa Lamarck 1816. Cymodocea simpler Lamouroux 1816. Nemerlesia antennina Lamouroux 1816. Autennularia antennina Fleming 1828. Anltennularia antennina var. indivisa Johnston 183%. Plumularia rerticillata Thompson 1848. Nemerlesia antennina var. minor Kirchenpauer 1876. Antennularia penlasticha Pieper 1880. Antennularia cruciala Pieper 1881. ? Antennularia janini Graelle 1884. Antennularia octoseriata Fäderholm 1896. Antennularia pinnala Nutting 1900. Nemertesia hartlaubr sec. Broch 191%. Tige non fasciculée. Hydroclades à segmentation hétéronome portant sur l'ar- ticle hydrothécal : une nématothèque proximale et deux pleurohydrothécales ; sur l’article intermédiaire : une nématothèque. Gronothèques ovoides, à extrémité distale tronquée et portant un couvercle in- cliné sur l’axe. 2, N. antennina var. irreqularis (Quelch) 1885. Antennularia trreqularis Quelch 1885. Antennularia janini Marktanner 1890. Antennularia americana Nutting 1900. Antennularia antennina var. Billard 1901. Antennularie antennina var. longua Billard 190%. Antennularia perrieri var. antennoides Billard 190%. Antennularia cnltennina var. longa Billard 1906. Antennularia perriert var. trreqularis Stechow 1909. p.p. Nemerlesia irreqularis (Quelch) sec. Stechow 1913 Nemertesia irreqularis var. antennoides Stechow 1943. Nemertesia irreqularis var. longa Stechow 1943. LE GENRE NEMERTESIA 43 Tige non fasciculée, Hydroclades à segmentation hétéronome irrégulière, por tant sur l’article hydrothécal : une nématothèque proximale et deux pleurohydro- thécales ; sur l’article intermédiaire : une seule némathothèque où une nématothèque proximale et une distale qui peuvent être parfois réparties sur deux articles inter- médiaires. Gonothèques ovoïdes, à extrémité distale tronquée et portant un couvercle in- cliné sur l'axe. 3. AN. belini Bedot 1916. Tige non fasciculée. Hydroclades à segmentation hétéronome irrégulière, por- tant sur l’article hydrothécal : de une à cinq nématothèques proximales, deux pleu- rvhydrothécales et de zéro à trois distales ; sur l'article intermédiaire de un à quatre nématothèques. Gonothèques ovoïdes, à extrémité distale tronquée et portant un couvercle in- cliné sur l'axe. 4. N. ciliata Bale 1914. Nemertesin ciliata var. cruciale Bale 1915. Tige fascieulée, à ramification régulière ; les branches sont placées des deux côtés de la tige dans un seul plan. Hydroclades à segmentation hétéronome portant sur l’article hydrothécal : une nématothèque proximale et deux pleurohydrothé- cales : sur l’article intermédiaire : une nématothèque. Des épaississements périsar- CAUX. Gonothèques campanulées (BALE). D. N. cymodocea (Busk) 1831. Antennularie cymodocea Busk 1851. Antennularta decussala Kirchenpauer 1876. Nemertesia decussata Kirehenpauer 1876. Antennularia hartlaubr Ritchie 1907. Tige fasciculée. Hydroclades à segmentation hétéronome, portant sur l'article hydrothécal : une nématothèque proximale et deux pleurohydrothécales ; sur lar- ticle intermédiaire : une nématothèque. Des épaississements périsarcaux. Gonothèques ovoïdes, pourvues à leur extrémité libre d’un col à ouverture étroite. 6. N. duseni (Jäderholm) 1904. Plunmularia duseni Jäderholm 1904. 4 M. BEDOT Tige non fasciculée. Hydroclades à segmentation hétéronome, portant sur l’ar- ücle hydrothécal : une nématothèque proximale et deux pleurohydrothécales ; sur l’article mtermédiaire : une nématothèque. Des épaississements périsarcaux. Gronothèques ovoïdes, pourvues à leur extrémité libre d'un col à ouverture étroite, 7. N, geniculata (Nutting) 1900. Antennularia geniculala Nutting 1900. Tige non fasciculée, gémiculée dans sa région distale, Hydroclades à segmen- tation hétéronome, portant sur l’article hydrothécal : une nématothèque proximale et deux pleurohydrothécales ; sur l'article intermédiaire: une où deux nématothèques. Gonothèques ovoïdes, avec un couvercle sur le côté. Cette espèce est très voisine de N, antennina et de sa var. trregularis. 8. N. hexasticha Kirchenpauer 1876. Antennularia herasticha Kivchenpauer 1876. Tige non fasciculée, Hydroclades à segmentation hétéronome. Pas de néma- tothèques sur l’article hydrothécal, mais une nématothèque sur l’article intermé- diaire. Souvent des hydroclades secondaires. Gonothèques ovoïdes, pourvues à leur extrémité libre d’un col à ouverture étroite. 9. AN. incerta Bedot 1916. Tige non fasciculée. Hydroclades à segmentation homonome, portant sur l’ar- ticle hydrothécal : une nématothèque proximale, deux pleurohydrothécales et une distale. Les articles hydrothécaux ont souvent de nombreux épaississements périsar- Caux, mais peuvent aussi en étre entièrement dépourvus. Gonotheques en forme de corne d’abondance. 10. N. intermedia Kirchenpauer 1876. Antennularia intermedia Kirchenpauer 1876. Heteropyris intermedia Kirchenpauer 1876. Antennularia japonica Stechow 1907. Tige fasciculée. Hydroclades à segmentation homonome, portant sur l'article hydrothécal: une nématothèque proximale et deux pleurohydrothécales. Des épais- sissements périsarcaux. Parfois des hydroclades secondaires. Gonothèques cyathiformes? ou ovoïdes, à col et ouverture étroite. (Comp. la figure donnée par KIRCHENPAUER et sa description.) LE GENRE NEMERTESIA Ma) 11. NN. Johnstoni Kirchenpauer 1876. Antennularia johnstoni Kirchenpauer 1876. Plumularia johnstoni Kirchenpauer 1876. Tige non fasciculée. Hydroclades à segmentation hétéronome, portant sur Par- ticle hydrothécal: une nématothèque proximale et une distale ; sur Particle inter- médiaire : une nématothèque. Des épaississements périsarcaux. Parfois des hydro- clades secondaires. Gonothèques ovoïdes, pourvues à leur extrémité libre d’un col à ouverture étroite. 12. N. norvegica (G. 0. Sars) 1874. Heteropyris norvegica G. 0. Sars 1874. Tige fasciculée (2). Hydroclades à segmentation homonome, portant sur lartiele hydrothécal: une nématothèque proximale, une au-dessus de lhydrothèque et une distale. Des épaississements périsarcaux. Gonothèques en forme de corne d’abondance. 15. N. paradoxa Kirchenpauer 1876. Antennularia paradoæa Kirchenpauer 1876. Tige non fasciculée. Hydroclades à segmentation hétéronome, portant sur l’ar- ticle hydrothécal : une nématothèque proximale et deux pleurohydrothécales; sur l’article intermédiaire : une nématothèque. Les colonies Gfet © different. Chez les cf les hydroclades sont très courts. Chez les © on trouve un certain nombre d'hy- droclades plus grands qui portent des hydroclades secondaires, ce qui est rare chez JESreT. Gonothèques: Gfovoïdes, à extrémité distale tronquéc et portant une ouver- ture inclinée sur l'axe ; © ovoïdes, pourvues à leur extrémité libre d'un col à ouver- ture étroite. 14. N. perrieri (Billard) 1901. Antennularia perrierr Billard 1901. Antennularia dendriltica Stechow 1907. Tige non fasciculée, Hydroclades à segmentation hétéronome, portant sur lar- ticle hydrothécal: une nématothèque proximale et deux pleurohydrothécales; sur l’article intermédiaire : une nématothèque proximale et une distale. Gonothèques ovoïdes, à extrémité distale tronquée et portant un couvercle in- cliné sur l'axe, A0 M. BEDOT 15. N. ramosa Lamouroux 1816. Sertularia antennima ÿ Linné 1758. Aglaophenia gracilis Lamouroux 1816. Antennularia ramosa Lamarek 1816. Cymodocea ramosa Lamouroux I816. Nemertesia janint Lamouroux 1816. ? Tubularia fruticulosa Schweigger 1819. Cymodocea comata Lamouroux 1821. Serlularia selicornis Hogg 1827. - Antennularia janini Blainville 1830. Antennularia antennina var. ramosa Johnston 183%. Antennularia arborescens Hassal 1843. Heteropyris rumosa Kirchenpauer 1876. Plumularia gracilis Kirchenpauer 1876. Antennularia sompler Alman 1877. Antennularia ramulosa Merejkowsky 1882. Antennulari profunda Quelch 1885. Tige fasciculée, Hydroclades à segmentation homonome, portant sur l'article hydrothécal : une nématothèque proximale, deux pleurohydrothécales et une distale. Gonothèques ovoïdes, à extrémité distale tronquée, avec un couvercle plus ou moins incliné sur l’axe qui peut être lui-même un peu recourbé. 16. NN, ramosa var. plumularioides (Billard) 1906. Antennularia ramosa var. plumularioutes Billard 1906. Tige? Hydroclades à segmentation irrégulière. Lorsqu'il n’y à pas d'article intermédiaire, Particle hydrothécal porte: une nématothèque proximale, deux pleu- rohydrothécales et une distale. Lorsqu'il ÿ à un article intermédiaire, il porte une nématothèque et alors l'article hydrothécal précédent n'a pas de nématothèque distale. Gonothèques : ? 17. N. rugosa (Nutting) 1900. Anlennularia rugosa Nutting 1900. Tige non fasciculée. Hydroclades à segmentation très variable et imdistincte. Outre les deux nématothèques pleurohydrothécales, 11 y à deux ou trois médianes entre deux hydrothèques voisines. Nombreux épaississements périsarcaux ; apo- physes renflées. Gonothèques : ? LE GENRE NEMERTESIA 47 18. N. fetrasticha (Meneghini) 1845. Aglaophenia tetrasticha Meneghini 1845. Lowenia telrasticha Meneghini 1845. Heteropyxis letrasticha Heller 1868. Plumularia tetrasticha Kirchenpauer 1876. Nemertesia letrasticha Carus 188%. Antennularia tetrasticha Quelch 1885. Tige fasciculée (sec. DRIESCH). Hydroclades à segmentation homonome, portant sur l’article hydrothécal: une nématothèque proximale et deux pleurohydrothécales : il peut s’y ajouter (sec. DRIESCH) une nématothèque distale qui est parfois placée séparément sur un article intermédiaire. Gonothèques ovoïdes (sec. BROCH). Cette espèce est probablement synonyme de N. ramosu. 19. N. cariabilis (Broch) 1905. Anltennularia variabilis Broch 1903. Tige fasciculée. Hydroclades à segmentation homonome, portant sur larticle hydrothécal: une nématothèque proximale et une distale. Gonothèques ovoïdes, à extrémité distale tronquée et portant un couvercle in- cliné sur l’axe qui est lui-même recourbé. AS 1871 1577 1883 1554 1914 1915 1915 1901 1904 1906 1908 1910 1913 1530 1899 1905 1912 M. BEDOT INDEX BIBLIOGRAPHIQUE ALuman. G.J. À Monograph of the Gymnoblastie or Tubularian Hydroïdes. London. ALLMAN, G. J. Report on the Hydroida collected during the exploration of the (ulf- Stream by L.-F. de Pourtalès. Mem. Mus. comp. 2001. Harvard College. Vol. 5, n° 2, 66 pp., 34 pl. ALLMAN, G.J. Report on the Hydroida dredged by H. M. S. Challenger during the years 1875-1876. P. 1. Plumularidae. Ex: Rep. Scient. Results Voyage Challenger (Zool.) Vol. 7, 55 pp., 20 pls. London. Baze, W.M. Australian Museum. Catalogue of the australian Hydroïd Zoophytes. Sydney. Baze, W.M. Report on the Hydroïda collected in the Great Australian PBight and other localities. IL. Ex: Biological results of the fishing experiments carried on by the K.J.S. « Endeavour » 1909-1914. Vol. 2. P. 4, pp. 166-188, pl. 35-38. Sydney. Base, W. M. 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A. dendritica A. dichotoma À A A A À A . fascicularis . . geniculata . hartlaubr. . hexasticha . indivisa . . intermediu TABLE DES Pages. 15 ») - 47 16, 18, 19, 21, 22 18 36 18, 19 16, 18 , 30, 32, 42 18, 21, 27, 28, 42 TE EE 21 2 27 19 “1 indivisa 49 19 A — 28, 30, 12 31 16 46 42 26 37 40, 43 10, 43 30, 45 26 18 23, 32, 44 1,43 23, 44 18, 26, 42 n/ . longa Minor 19 1 r'AaMmost 19 1@ NY _- 1 = Qc ESPÈCES CITÉES Pagas. Antennularia srregularis. 28, 30,31, 40, 49 A. jan 26, 42, 46 À. japonica. 37, 38, 39, LA A. Johnston. 23, 40, 45 À. norvegica . 21, 36 A. octoseriula 27: 91, 49 A. paradora 23, 45 A. pentasticha 42 A. perriert 30, 45 À, perriert var. antennoides 30, #2 A. perrieri var. trreqularis 30, 31, 42 A. pinnata 27, 28, 4? A. profunda 23, 33, 16 A. ramosa 35, 36, 39, 46 A. ramosa var. plumularioides . #6 A. ramulosa. 33, 46 A. rugosa 32, 46 A. simplex 33, 46 À. tetraslicha 39, 47 A. triseriata 26 A. variabilis 21, 36, 37, 47 Cymodocea . 15 C. comata 16 C. ramosa 46 C. sumpler 42 Heteropyxis 15 H. intermedia . … 4h H. norreyicu. 35, 36, 45 I. ramosa 16 H, letrasticha A7 D2 Hippurella . Lowenia. L. tetrasticha Nemertesia. N. antennina. 29, 3 M. Pages. 16 15 18, 20, 22, 25, 26, 0, 31, 32, 33, 35, 40, 41, 42, 44 2 N. (Sertularia) antennine. h N. antennina var. irreqularis. N. belüu. N. ciliala . N. cdiala var. cruciata N. cruciata N. cymodocea N. decussala. N. dusenr. N. geniculata N. hartlaubr. N. hexasticha N. incerta N. indivisa . V. intermedin. N. irreqularis N. treqularis var. N. irreqularis N. janini. . johnstoni . N. norvegica. N. paradoru. N. pentasticha N. perrieri . N.perrierr var. anlennoides . NV. antennina var. minor . 20224, 20, 20) 90934; var. longa . 30 1924 42, 17,19, 20, 29, 43 20, 17, 23, 24, 32, : 20,192 1728293788. anlennoides . 17, 23, 32, PASS 0030 17, 23, 26, 32, 26, 28, 30, 31, : BEDOT Pages. N. perrieri var. twreqularis 28 N. plumosa LCR Re . 26 N. ramosa. 20, 26, 33, 36, 37, 39, 40, 46 47 AN. ramosa var. plumularioides 33, 41, 46 N. rugosa D N. telrasticha . . . . . 37, 39, 40, 47 N. variabhilis 34, 36, 47 Nigellastrum . 15 N. antenninum . MONS Plumularia. 19,16, 18,21, 22 P. caulitheca 23 P. cylindrica 18 P. dusent. L1, 43 P, gracilis 16 P, johnstont . VE) P. procumbens 23 P. telrasticha 47 P. verticitlata 19 Polyplumaria . 17; 22 P. cornula 17 P, flabellata . 17 P. sibogue 17 Sciurella 17,18, 19, 22 S. indivisa 17, 18 Sertularia 15 S. antennin«. 42 S. antennina p . 46 S. selicornis . 0. UD Sibogella 17, 19, 22 S. erecta . 19, 23 Tubularia 15 T. fruticulosa 46 Ra Le … , ù Le PUBLICATIONS DE LA SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE ET D'HISTOIRE NATURELLE DE GENÈVE La Société peut disposer de collections complètes de ses Mémoires. (Tomes 1-38 et volume du centenaire.) Pour traiter, s'adresser au secrétaire des publications. (Adresse de la Société : M. le secrétaire des publications de la Soc. de physique, P. A. : au Muséum d’hist. naturelle, Genève, Suisse.) Comptes rendus des séances de la Société (in-$°). Tomes I-XXXIIT (1884-1916). Prix Fr. 30 Liste des publications des membres de la Société (1883) in-8° avec supplément (1896) Prix 0 2, 2 Or APR LEURS A OR ELEC Ds C ER LS ee 2 D SEE AT M NC GSM EEE CAMES COSRSRR INT ONCE Imprimerie Albert Kündig, Genève (Suisse). MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE ET D'HISTOIRE NATURELLE DE GENÈVE — — D @-— — Volume 39 FASCICULE RaPPORT PRÉSIDENTIEL POUR L'ANNÉE 1917 par M. Arnold PICTET RaPPORT PRÉSIDENTIEL POUR L'ANNÉE A9ÏS par M. F. BATTELLI GENEVE GEHORG & Cie BALE et LYON méme maison. Prix Er. TABLE DES MATIÈRES DU FASCICULE 2, VOLUME 39 Rapport présidentiel pour l’année 1917, par M. Arnold Prcrer . Rapport présidentiel pour l’année 1918, par M. F. Barrezzr. Page MÉMOIRES : A DE LA SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE ET D'HISTOIRE NATURELLE DE GENÈVE VOLUME 39, FASCICULE 2 RAPPORT DU PRESIDENT DE LA SOCIÈTE DE PHYSIQUE D'HISTOIRE NATURELLE DE GENÈVE L'ANNÉE 1917 M. Arnold PICTET MESSIEURS ET CHERS COLLÈGUES. Alors que tout autour de nous la guerre continne à déchainer ses atrocités, apportant ses restrictions Jusque dans notre petite République, qui n'aspire qu'à vivre dans la paix et la civilisation, notre Société à poursuivi son activité avec le meilleur zèle. Le rapport de mon prédécesseur, M. A. Bach, vous avait fait remarquer que l’année 1916, en ce qui concerne la fréquentation de nos séances et le nombre des communications présentées, s'était signalée par une sérieuse augmentation sur 1915, etil avait attribué cette recrudescence d'activité à un résultat indirect de la guerre: dans le désarroi causé par les événements tragiques, les regards se portent vers les valeurs qui ne trompent pas et la science en est une des plus sûres. L'année 1917 à heureusement confirmé ce résultat, car le nombre des travaux apportés aux 15 séan- ces que nous avons eues n'est pas inférieur à celui de 1916. Nous avons tenté l'essai de mettre à 4 h.!/, de l'après-midi nos séances d'été MÉM. SOC, PHYS. ET HIST. NAT, DE GENÈVE, VOL. 89 (1917). fl D RAPPORT DU PRÉSIDENT qui jusqu'alors nous réunissaient à 2 heures. Mais il ne semble pas que cette inno- vation puisse être considérée comme fournissant un avantage, car les deux séances de juin et de juillet de cette année tenues sous le nouveau régime, se sont montrées légerement moins fréquentées et actives que les deux correspondantes de 1916, qui avaient eu lieu à 2 heures. Nous pensons qu'il faudra néanmoins poursuivre encore cet essal. A l'assemblée générale du 18 janvier 1917, vous avez élu à la vice-présidence M. le Prof. Yung, auquel nous sommes heureux de confier dès ce jour les destinées de notre Société en qualité de président. Vous aviez en outre composé votre comité des publications de MM. Pidoux, Bach, Carl, et de Lessert, dont le mandat vient à expiration. Aujourd'hui, vous aurez à élire un vice-président pour 1918 — et votre comité est unanime à vous proposer M. le Prof. Battelli, ainsi que quatre membres du comité des publications, pour lesquels nous désignons à vos suffrages: MM. Brun, sriquet, Briner et Arnold Pictet. M. Perrot, comme secrétaire des publications, M. Augustin de Candolle, comme trésorier et M. Joukowsky, comme secrétaire des séances, conservent encore dans notre comité les charges qu'ils ont si utile- ment remplies jusqu'à maintenant, Notre dévoué secrétaire, M. Joukowsky, ayant entrepris un voyage durant une partie de l’année, et étant heureusement de retour au milieu de nous, à été remplacé pendant son absence par M. le D'J. Carl, auquel nous adressons ici nos remerciements. Votre Comité des publications s’est réuni plusieurs fois pour traiter de l’admi- nistration dela Société et notamment il est entré en pourparlers avec le Comité des Archives des Sciences physiques et naturelles au sujet de la publication du compte rendu de nos séances dans ce périodique. Ces pourparlers n'ayant pas encore abouti devront continuer en 1918. La Société baloise des Sciences naturelles nous a fait l'honneur de nous mviter à la célébration de son centenaire, à laquelle nous avons été représentés par M. le D'J. Carl, tandis qu'à F Assemblée de la Société Helvétique, à Zurich, notre Société avait pour délégués M. le D'J. Briquet et votre Président. Au cours de l’année qui vient de se terminer, nous avons reçu deux nouveaux membres ordinaires, MM. Raoul Boissier et Sigmund Reich, et enregistré deux démissions associés libres, MM. Henri d'Auriol et Emile Veillon. En revanche, nous avons élu membre honoraire le Prof, Hugo de Vries, le distingué botaniste hollandais, à l'occasion de sa nomination à l'éméritat de l'Université d'Amsterdam. Mais la mort à durement frappé à notre porte ; à côté de deux de nos membres honoraires les plus émérites, elle nous à enlevé trois dévoués amis, dont un parmi nos plus jeunes, deux parmi nos doyens et je vais essayer maintenant de relater les traits Satlants de leur vie. LEE] POUR L'ANNÉE 1917 )) NOTICES BIOGRAPHIQUES ALFRED MONNIER (1874-1917) La mort à fauché impitoyablement dans les rangs de nos jeunes professeurs universitaires. Après Francis Pearce mort prématurément en Guinée, c’est Alfred Monnier, son successeur dans sa chaire, qui part au moment même où il avait acquis la plénitude de son talent et où il autorisait par ses travaux et son activité les meilleures espérances. Alfred Monnier est né en 1874 à Nyon. Son père, Denis Monnier, le distingué professeur de Chimie analytique à l'Université, avait laissé une réputation dans cette discipline et son fils avait de qui tenir. Alfred Monnier fit ses études au col- lège de Genève; il a laissé parmi ses camarades le souvenir d'un garçon fort intel- ligent, à l'esprit éveillé, joyeux compagnon d'ailleurs, Be manquant ni de finesse ni méme d'une certaine causticité; mais, au demeurant excellent ami, toujours prêt à rendre service et à payer de sa personne quand il fallait tirer d'affaire un camarade dans l'embarras, Au Gymnase, il fut un élève moyen; ce n’était, en effet, pas le type d’un premier de classe: il avait parfois l'humeur frondeuse et sa personnalité s’accommodait assez mal avec les cadres étroits fixés par un programme Imvariable. Néanmoins il subit avec succès ses examens de maturité et c'est à partir de ce mo- ment qu'il prit véritablement son essor. Il avait un goût immodéré pour Fa chimie, tout en s'intéressant aux autres sciences auxquelles il consacrait parfois Son temps. Mais il est incontestable que la chimie l’attirait particulièrement ; aussi, lorsqu'il entra à l'Université, sa voie était-elle toute trouvée et c’est sous la direction de son père, comme guide de ses premiers pas, qu'il commença les exercices pratiques et qu'il débuta dans l'étude de Panalyse. »0 RAPPORT DU PRÉSIDENT La science ne l’occupait pas exclusivement: de bonne heure Monnier avait montré des dispositions réelles pour la musique. Encouragé par Bergalone qui était un ani de la famille, il commenca fort jeune le solfège et le violon et acquit rapide- ment une virtuosité qui Jui permit, plus tard, de Jouer dans les meilleurs orchestres, C’est pourquoi Monnier avait conservé à son maitre une amitié et une reconnais- sance profondes et la famille Bergalone fut pour lui en quelque sorte une seconde famille: c’est certainement le coup que lui porta la nouvelle de la mort du D' Ber- valone, son frère de lait, qui fut en grande partie la cause de sa maladie et de son déces. Après quelques années d’études universitaires, Monnier passa ses examens de baccalauréat ès sciences, puis devint assistant au laboratoire de chimie anlytique que dirigeait son père. Après la mort de celui-ci, en 189$, Monnier resta comme premier assistant dans le service de son successeur, le professeur Duparce ; déjà il se distinguait par une capacité pédagogique exceptionnelle et par une grande habileté dans lPexpérimentation. C’est comme assistant qu'il écrivit, avec son professeur, M. Duparc. et son collègue Degrange, ja première édition du Traité de chimie analytique qualitative qui parut en 1900 et qui eut trois éditions successives, la dernière en 1914: le succès de cet ouvrage, auquel Monnier avait largement par- ticipé, fat pour lui un stimulant. En 1903, 1 quittait l'Université, appelé au poste de professeur de chimie à l'Ecole d'horticulture de Châtelaine et à la direction du Laboratoire officiel d'essais et d'analyses agricoles du canton de Genève; c'est en grande partie dans cette Institution que va désormais se développer son activité. Son enseignement, dès le début, est solide, clair et original; il sait intéresser ses élèves et leur communiquer l’enthousiasme qui lanime, Son laboratoire est rapidement organisé et bientot les analyses affluent de telle façon qu'il faut lui adjoimdre un assistant sans lequel il ne peut venir à bout de l’énorme travail qui lui incombe, 1 s'intéresse à notre agriculture, prend contact avec nos agriculteurs, s'occupe d’une série de questions vitales pour la prospérité agricole de notre canton et acquiert bientôt dans ce domaine une notoriété de bon aloi. On le consulte à chaque instant sur les modifications à introduire dans le cycle de nos cultures et lui, infatigable, donne toutes les indications nécessaires, entreprend des expériences pour résoudre les questions qui lui sont posées, lorsque les documents lui en font défaut. Malgré cela, 11 trouve moyen de travailler au point de vue scientifique et publie chaque année une série de mémoires dont plusieurs ont été fort remarqués. y a lieu de citer parmi ceux qui se rapportent plus spécialement à la chimie agricole, ses essais sur les agents stimulants de la végétation, ses recherches sur l'in- fluence du sel de manganèse sur le développement des végétaux, ses expériences sur l'accroissement des végétaux et l'absorption des substances minérales, publiées POUR L'ANNÉE 1917 07 en collaboration avec le professeur Chodat et M. W. Deleano; puis ses nombreuses publications sur les engrais et leur action, notamment sur l’azotate de calcium, sur le sulfate de manganèse, sur la cyanamide, les nouveaux engrais azotés synthéti- ques, l’utilisation des gadoues, ete. La majorité de ses travaux à été publiée dans le Journal d’'Horticulture ou les Archives des sciences physiques et naturelles. Monnier a résumé tous ceux sur la chimie agricole dans un petit ouvrage intitulé: Principes de Chimie horticole. Les travaux de chimie agricole n’empéchaient pas Monnier de s’adonner à la chimie pure et c’est naturellement la chimie analytique qui faisait Pobjet de ses préférences. Il travaillait en artiste, faisant ses réactions avec élégance et préci- sion, imaginant des procédés d'identification nouveaux et dans les cas compliqués et difficiles, trouvant toujours la véritable solution. Le Prof. Duparc avait en Monnier une confiance absolue et motivée; il l'avait vu à l’œuvre; aussi, lorsque lui-même était appelé à trancher quelque question difficile, priait-il Monnier de répéter indépendamment ses expériences. Tel fut en particulier le cas pour la ques- tion brûlante de l'identification de la thuyone dans les liqueurs, au moment où furent, dans divers pays, promuleuées les lois d'interdiction de l’absinthe. Monnier répéta indépendamment toutes les expériences qui avaient été faites par M. Duparc et les confirma. Le résultat de ce travail fut une note publiée, en collaboration, dans les Annales de Chimie analytique de Paris, qui fut la base de certaines dispo- sitions prises par les différents gouvernements dans la législation concernant la prohibition de labsinthe. Parmi les travaux de chimie pure que Pon doit à Monnier, il convient de citer sa méthode d'analyse de la cyanamide, qui est devenue classique; ses procédés de dosage volumétrique avec le chlorure de titane comme indicateur, sont actuellement d’un emploi général ; puis les recherches qu'il a publiées quelque temps avant sa mort sur l'identification des perchlorates et en général des persels et Putilisation du bleu de méthylène dans ce but. Ce travail fut très remarqué; il valut à son auteur les félicitations de nos autorités fédérales compétentes. La question résolue par Monnier était en effet de première importance pour la sécurité dans la fabri- cation de certains explosifs. On sait que quelques explosions qui se sont produites au cours de la fabrication de la poudre noire, provenaient de traces de perchlorates qui se trouvaient incorporées au salpêtre et que l’on ne pouvait identifier, Monnier, par un procédé aussi élégant que rapide, est arrivé à identifier des traces infini- tésimales de ce corps dangereux et sa méthode est appelée à devenir classique. L'activité de Monnier dans l’enseignement universitaire date de 1906, époque à laquelle il s’inserivit comme privat-docent de chimie agricole. Dès Ie début son cours fut fréquenté par un auditoire qui lui resta toujours fidèle et ce fut pour lui DS RAPPORT DU PRÉSIDENT un réel plaisir de compter dans cet auditoire un certain nombre d'élèves que rien n'obligeait à suivre son cours, à une époque où méme les cours réglementaires sont souvent délaissés par les étudiants. Il était d’ailleurs très aimé de ses élèves qui appréciaient son savoir et ses qualités de cœur. Tous se rappellent son activité comme Président de FAssociation des anciens élèves du laboratoire de chimie analytique de PUniversité. I fut le erand organisateur des revues dont le public genevois se rappelle et qui contri- buërent à enrichir la caisse de secours de lassociation qui, dans les périodes de crise que nous traversons, fut durement mise à l'épreuve, Monnier était lame de cette association, il S'y était dévoué entièrement, ne lui marchandant ni son temps ni ses efforts et, quand il s'agissait d'aider les jeunes élèves qui, ayant terminé leurs études, cherchaient une situation dans l’industrie, il n'épargnait aucune démarche et faisait pour eux ce quil n'aurait pas fait pour lui-même, En 1911,il fut nommé professeur extraordinaire de Chimie appliquée aux gites métalliferes et succéda à son collègue et ami Francis Pearce. Il donna régu- lièrement son enseignement qui portait soit sur la préparation des minerais, soit sur leur analyse technique, soit encore sur les explosifs de mine, sans cependant aban- donner son cours de chimie agricole. C’est alors qu'il collabora à la seconde partie du Traité de technique minéralogique et pétrographique publié par M. le professeur Duparc. Monnier avait organisé dans le laboratoire de Chimie analytique de l'Uni- versité des travaux pratiques d'analyse par voie sèche, qui furent fréquentés par de nombreux étudiants qui purent apprécier ses qualités d’expérimentateur et de chimiste. Plusieurs de ses élèves lui demandérent de diriger leurs travaux pendant les vacances et Monnier les acceptait toujours dans son laboratoire de Châtelaine, où ils avaient l’occasion d'apprendre bien des choses nouvelles pour eux sous Ja con- duite du maitre documenté et toujours bienveillant. Monnier est mort en pleine activité; rien ne pouvait faire soupçonner cette fin rapide: il faisait quelques jours avant sa mort des projets pour entreprendre de nouveaux travaux et bien qu'il parût fatigué depuis quelque temps, il ne se sentait pas malade. La nouvelle de Ia mort presque subite de son ami le docteur Berga- lone Pimpressionna très fortement et le lendemain il s’alitait pour ne plus se relever. , Le décès de Monnier laisse un vide qui ne sera pas aisément comblé; indé- pendamment de ses qualités de cœur qui Jui ont fait tant d'amis, Monnier était une valeur scientifique. Ses facultés l’appelaient à un brillant avenir ; fils d’un chimiste réputé, 11 était lui-même chimiste de talent; ses idées étaient Justes et fécondes et POUR L'ANNÉE 1917 9 il est parti au moment même où il pouvait rendre les meilleurs services à la science et à son pays. Tous ceux qui l’ont connu rendront hommage à sa mémoire et son exemple sera cité comme celui d’un savant capable et modeste dont notre Université et notre Société garderont le meilleur souvenir. EDOUARD SARASIN (1843-1917) Celui dont le nom vient d’être prononcé, un Genevois de vieille roche, à joué dans son pays un grand rôle comme patriote et comme homme de science. Né le 20 mai 1843, Ed. Sarasin descendait d'une famille noble française, réfu- giée à Genève au XVI siècle, qui à produit un grand nombre d'hommes distingués. Après avoir suivi l’Institut Rochette, puis le Gymnase, Ed. Sarasin entra à l'Académie et alla ensuite compléter ses études universitaires à Paris comme externe à l'Ecole polytechnique, où il eut le privilège d’avoir comme maitres Regnault, Bravais et Delaunay ; ensuite 11 se rendit aux Universités de Heidelberg et de Berlin, où 1l reçut les leçons de Bunsen et se la avec le physicien Magnus, pour lequel il avait une sincère admiration. À Genève, ses maitres furent J. L. Soret et surtout Aug. de la Rive. Ed. Sarasin à étendu son activité dans une quantité de domaines les plus divers, associant à ses goûts passionnés pour la physique et la mécanique, Pamour de son pays, l'affection des siens et un dévouement ardent aux œuvres de dévelop- pement artistique, littéraire et moral. Sa belle propriété du Grand-Saconnex, pour laquelle il avait une grande affec- tion, fut le point de départ de sa carrière politique ; la Société des Instruments de Physique et de Mécanique, à laquelle il voua son activité durant toute sa vie, fut le début de sa carrière seientifiqne. Ed. Sarasin venait de rentrer à Genève, en 1867, ses études terminées, lorsque Auguste de la Rive lui proposa de l’associer aux recherches qu'il poursuivait dans son modeste laboratoire de la rue de l'Hôtel de ville: et c'est sous la conduite de ce maître éminent, qui avait reconnu dans le jeune physicien une sérieuse aptitude scientifique, qu'il fit ses premiers pas dans la science expérimentale. Cependant, à cette époque, on était loin de connaitre les progrès de l'outillage, 60 RAPPORT DU PRÉSIDENT dont le perfectionnement, de nos jours, est le plus précieux auxiliaire du travail scientifique, Mais, Sarasin, qui se révele observateur habile et expérimentateur adroit, ne semble nullement arrété par cela dans ses premières recherches. Celles- ci portent sur a décharge électrique dans les qaz raréfiés et leurs résultats donnent déjà une idée de la patience de leur auteur. On sait qu'Auguste de la Rive s'était intéressé tout particulièrement à cette catégorie de phénomènes et que les mouvements pris par ces décharges, sous lac- tion d'un aimant, Jui avaient permis de donner une explication très plausible du mou- vement des aurores boréales. Ed. Sarasin avait été initié à ces curieux phénomènes par l’éminent professeur et consacra deux années à ces délicates questions. C’est alors que fut fondée la Société genevoise des Instruments de Physique et de Mécanique ; Sarasin, qui était un des mieux placés pour s'intéresser à la ques- tion du développement et du perfectionnement de Poutillage de précision, en fut l’un des fondateurs, en 1867, et appartint Jusqu'à sa mort à son conseil d'adminis- tration, qu'il présida depuis 1902. D'autres physiciens genevois du reste s'étaient occupés de cette société; c’étaient Louis Soret, L. de la Rive, Adolphe Perrot; le jeune physicien trouve au milieu d'eux un appui excellent dans la direction de ses travaux ; ensemble, ils aménagent un laboratoire à la rue Dufour, tout proche du batiment de la Société des Instrumeiits de Physique, et c’est là que s’écoulent désormais de longues heures laborieuses de recherches, qui sont la source de toute une série de travaux d'Ed. Sarasin, notamment sur les ondes hertziennes, à l’étude desquelles il s'associe avec Lucien de la Rive. Henri Hertz, le jeune et génial physicien de Bonn, vénait de démontrer en 1889 que les perturbations électromagnétiques se propagent avec la même vitesse que la lumière, Frappés de limportance de cette constatation, les deux physiciens genevois décidèrent de reprendre ces recherches et, après avoir répété les expé- riences du savant allemand, ils furent amenés à la découverte de faits nouveaux et importants, parmi lesquels le plus remarquable est ce qu’ils appelèrent la résonance multiple, un phénomène caractéristique des ondes électromagnétiques et des ondes de la télégraphie sans fil qui en sont un cas particulier. En 1893, ces recherches, qui demandaient à être vérifiées sur une beaucoup plus grande échelle, purent être poursuivies au Bâtiment des Forces motrices de Ja Coulouvrenière. De tous les travaux d’'Ed. Sarasin, c’est celui-là qui a le plus contribué à fixer son nom à la postérité. Les années de travail écoulées au laboratoire de la rue du Four furent des plus fécondes pour la science. Sarasin y collabora aussi avee Louis Soret à des recherches d'optique dont les résultats figurent encore, bien qu'ils soient vieux de HO ans, en premiere ligne dans les manuels de physique. POUR L'ANNÉE 1917 61 Plus tard, le laboratoire de la rue du Four ayant été démoli pour faire place à d’autres constructions, Sarasin s’en organise un dans les bâtiments mêmes de la Société des Instruments de Physique et nous l'y trouvons avec deux collaborateurs de mérite, MM. Th. Tommasina et Jules Micheli, étudiant principalement les phé- nomènes de radioactivité induite, découverte par MM. Elster et Geitel, et qui les amenèrent à constater entr'autres propriétés intéressantes un phénomène semblable à l'effet Volta. L'activité qu'Edouard Sarasin a vouée à la Société des Instruments de Physique est grande, tant comme administrateur que comme homme de science ; il Jui consa- era le plus grand dévouement et lui apporta sans cesse son souci d'intégrité et d'équité, s’efforçant, surtout dans la suite lorsque la concurrence poussa la société à la fabrication d'objets de second ordre, à maintenir son renom de précision, Une de ses dernières sorties, avant sa mort, avait été pour se rendre à son Conseil d’ad- ministration. Ses recherches sur les gaz raréfiés, ainsi que ses rapports avec les maitres de la science genevoise à cette époque, amenèrent Sarasin à la Société de Physique et d'Histoire naturelle où il à joué, durant toute sa vie, un rôle aussi sympathique qu’actif. Reçu membre vers 1868, il fut toujours un des plus assidus aux séances, fonetionna comme secrétaire pendant 22 ans, de 1869 à 1890, apportant à cette charge le même zèle, la même attention, la même précision qu'il vouait à tout ce dont il s'occupait ; il fut président en 1892. Les travaux qu'il a présentés aux séances de la Société de Physique sont très nombreux. Les premiers, ceux relatifs à la décharge électrique dans les qaz raréfiés, furent suivis de la publication d'importantes études, en collaboration avec J. L. Soret, sur le spectre d'absorption de l’eau et sur l'indice de réfraction de l'eau de mer. Ce sont du reste ces dernières recherches qui orientèrent notre éminent col- lègue dans une voie où il devait acquérir une grande notoriété. Vers 1884, la Société de Physique et d'Histoire naturelle ayant institué une com- mission pour l'étude de la transparence de l’eau du Lac Léman, Ed. Sarasin en fit partie avec H. Fol. Ces deux savants commencèrent par déterminer dans le grand lac, en avant d’'Evian, la limite de la profondeur de la pénétration de la lumière, au moyen d’un appareil spécial, imaginé par eux, composé d'une boîte métallique dans laquelle la plaque, en gélatino-bromure rapide, était soustraite à Ja lumière durant sa descente et automatiquement exposée à la profondeur voulue. Des résul- tats très précis furent ainsi obtenus. Plus tard, le physicien et le zoologiste se ren- dirent à Villefranche où un aviso de la marine française ayant été mis à leur disposition, ils purent poursuivre leurs expériences dans les meilleures conditions possibles. MÉM. SOC. PHYS. ET HIST. NAT. DE GENÈVE, VOL. 89 (1917). 62 RAPPORT DU PRÉSIDENT Les résultats de ces recherches furent exposés à la Société de Physique et d'Histoire naturelle et publiés dans ses Mémoires. Ils montrèrent nettement qu’au delà d'une profondeur de 400 mètres, dans la Méditerranée, la pénétration de la lumière pouvait être considérée comme nulle, tandis que c'est déjà à partir de 200 mètres que léclairement commence à faire défaut dans le Léman. Parmi lest ravaux présentés à nos séances, 1] convient de mentionner encore celui que Sarasin poursuivit en 1894 en collaboration avec le Prof. Kr. Birkeland, un de nos membres honoraires les plus autorisés, qui précéda notre collègue de quel- ques jours seulement dans la tombe; ces recherches avaient porté sur la réflexion de l'onde électrique au bout d'un fil qui se termine par une plaque métallique et firent également l'objet d'une note insérée dans les comptes rendus de PAcadémie des Sciences de Paris. Ensuite, il s'occupe de la radioactivité de l'air qui s'échappe des puits souf- fleurs et qu'il étudie au Grand-Saconnex, dans un lit de gravier se trouvant dans le sous-sol de l’un de ses champs; ces observations montrèrent que l'air sortant du puits est notablement plus radioactif que l'air au-dessus du sol. Dans ce domaine on lui doit encore, avec MM. le professeur C. E. Guye et J. Micheli, Pétude de la radioactivité des eaux de Lavey-les-Bains, qui ont été trouvées radioactives dans une proportion importante, C’est à cette époque encore que notre Société eut l’hon- neur d'entendre une très intéressante communication de L. de la Rive et d'Edouard Sarasin sur leurs expériences relatives aux interférences des ondulations électriques par réflexion normale sur une paroi métallique, et, plus récemment, les travaux de notre collègue avec M. Tommasina sur quelques faits nouveaux en radioactivité induite. Enfin nous lui devons la publication de recherches personnelles sur /& con- ductibilité de l'air atmosphérique et sur la télégraphie sans fil. Sarasin laisse dans notre Société un grand, un pénétrant souvenir; il fut un collègue toujours aimable. Conservateur absolu des anciennes traditions de la Société de Physique, auxquelles il estimait qu’elle devait sa force et son importance dans le monde de la science, il se prétait à contre cœur aux innovations, mais il savait les accepter en homme qui reconnait le mérite des autres. Sa parole était toujours écoutée et lorsqu'il prenait part à une discussion, c'était avec modération et dans un esprit de conciliation, qui lui permit d’aplanir parfois des difficultés et lui valut l'amitié de chacun de ses collègues. N'intéressant également aux autres communications que celles ayant trait à la physique, il ne manquait pas, le cas échéant, de présenter un rapport sur chaque sujet qu'il estimait devoir intéresser la Société. Aux jeunes, débutant dans la carrière scientifique, 11 ne ménageait pas ses encouragements, se montrant pour eux accueillant et sympathique, toujours prét à donner un conseil, à montrer la bonne voie à suivre. Avec les autres, dont la POUR L'ANNÉE 1917 63 carrière était faite, il entretenait les relations les plus amicales. Sa place au milieu de nous restera toujours empreinte du meilleur souvenir. Le nom d’'Ed. Sarasin restera longtemps attaché à celui de la Société Helvé- tique des Sciences Naturelles, non seulement du fait des six années pendant les- quelles il assuma la charge astreignante de la présidence du Comité central, que par son assiduité aux Sessions annuelles. Avec son ami F. Forel, avec Th. Studer, Hagenbach-Bischoff, il était une des physionomies habituelles et des plus sympa- thiques de ces réunions. [Il en fit partie dès 1865 et représenta plusieurs fois notre Société à l'assemblée des délégués ; souvent il y fut appelé à la présidence de la section de physique, où il fit part du résultat de plusieurs de ses travaux, notam- ment, avec J.-L. Soret, sur la polarisation rotatoire du quartz, qui constitue encore à l’heure actuelle la détermination la plus importante et la plus parfaite de cette curieuse propriété des cristaux de quartz; sur les indices de réfraction du spath d'Islande, sur la transparence de l’eau, sur des expériences faites à l'aide de l'élec- troscope à aspiration d'Ebert, ainsi que plusieurs autres encore, La Société Helvétique l'appela à la présidence de la session de 1904 qui eut lieu à Genève. Chacun de nous se souvient encore de la belle réussite de cette réumion et de la charmante réception qu'il offrit à cette occasion dans sa belle pro- priété du Grand-Saconnex, entouré de sa famille et aimablement secondé par Madame Sarasin. | Le discours présidentiel du savant physicien genevois avait porté sur ses tra- vaux relatifs à l’étude du phénomène des seiches, ces oscillations si curieuses qui se manifestent sur la plupart de nos lacs. A lexemple des anciens physiciens de notre cité, Sarasin s'était passionné pour toutes les questions qui touchent à la géophysique de notre beau pays, et c’est dès 1879 qu'il collabora avec F. Forel et Ph. Plantamour à l'étude de ce phénomène des seiches ; il avait imaginé un lim- nimètre transportable qui permit d'enregistrer ces ondes sur un grand nombre de lacs. Avec Ph. Plantamour il étudia d’abord ces oscillations à Sécheron; ensuite, sur le bras transversal que forme le lac de Lucerne entre Stansstad et Kussnacht, le phénomène des seiches fut étudié au moyen de l'appareil portatif, montrant ainsi que cette partie du lac oscillait pour son propre compte comme un bassin secondaire ; il compléta plus tard ses recherches à La Tour-de-Peilz dans une propriété appartenant à sa mère, puis à Neuchätel et à Yverdon. Les travaux effectués par Forel et Sarasin sur les seiches eurent d’ailleurs l'honneur de faire l’objet d’un rapport au Congrès international de Physique de 1900, et le limnimètre imaginé par Sarasin fut adopté par l'Académie de Bavière et la Société de Phy- sique italienne pour l'étude des seiches des lacs allemands et italiens. En 1911, le siège de la Société Helvétique passa de Bâle à Genève ; avec le 64 RAPPORT DU PRÉSIDENT professeur Chodat comme vice-président et le professeur Ph.-A. Guye comme secré- taire, Ed. Sarasin fut nommé président du Comité central jusqu'en 1916. La Socicté Helvétique venait de créer l'institution de son Sénat, que le nouveau président eut à diriger dès le début, et dont il rédigea chaque année, durant sa présidence, les rapports et les procès-verbaux des séances. Comprenant combien l’organisation de la Société Helvétique et son développement étaient importants pour l'avenir scien- tifique de notre pays, il consacra le meilleur de ses forces au Comité central où, bien qu'admirablement secondé par ses collaborateurs, il exerça dans plusieurs cir- constances une action personnelle opportune par son esprit de modération et d'impartialité. Nous devons maintenant relater une des belles pages de la vie d'Ed. Sarasin ; c'est celle qu'il à consacrée à la Direction des Archives des Sciences physiques et naturelles. Comme directeur de cette publication, il à exercé sur la science en Suisse et à l'étranger une grande influence. On sait avec quelle activité, quel dés- intéressement, quelle aimable courtoisie, jointe à des relations scientifiques éten- dues, il savait obtenir la collaboration de physiciens éminents, tels que Hertz, Poincaré, Einstein, Curie, Ramsay, Spring et de tant d’autres. Appelé à la direc- tion du périodique en 1890, après la mort de son prédécesseur J.-L. Soret, il lui à consacré le meilleur de son temps; il fut, on peut le dire, l’âme très vivante des Archives, qui lui doivent en grande partie le renom dont elles jouissent en Suisse et à l’étranger, ainsi que de leur Comité de rédaction, au sein duquel il était très aimé et écouté. Sarasin à publié la majeure partie de ses travaux dans les Archives, après en avoir préalablement communiqué les résultats aux diverses Sociétés auxquelles il a surtout voué son assiduité. Nous avons déjà relaté la plupart d’entre eux en parlant du rôle qu'il a joué dans ces Sociétés ; aussi ne reviendrons-nous pas à leur sujet. Nous nous bornerons à rappeler que les mémoires qu'il à signés ont largement fait connaitre son nom comme celui d’un physicien de mérite. Il fut encore l’auteur d'une remarquable notice sur la vie et les travaux d'Henri-Gustave Magnus. Le périodique des Archives, qui à acquis depuis 120 années dans la littéra- ture scientifique européenne la place en vue que l’on sait, évoque le souvenir tou- chant de la collaboration qu'apporta à son mari l'épouse dévouée et intelligente qu'était Mme Edouard Sarasin. En maintes occasions et notamment dans l’établisse- ment des tables, elle s’associa de tout son cœur à l'œuvre considérable de la direc- tion de cette publication. Tyndall écrivait à quel point il avait été flatté d’avoir eu Madame Sarasin comme traducteur et chaque savant dont les relations avec son mari l’amenaient au Grand-Saconnex, ne pouvait que se louer de l’accueil aimable quoique simple qu’elle leur faisait, POUR L'ANNÉE 1917 6) A cette époque, malgré le don remarquable qu'il possédait pour organiser son travail et répartir l'emploi de sa journée, Sarasin, dont le temps devenait trop limité entre ses occupations scientifiques et ses devoirs de magistrat, trouva auprès de son épouse, non seulement une aide précieuse, sans laquelle il n'aurait pas tou- jours pu faire face aux exigences multiples de sa carrière, mais encore un soutien moral, une grande joie, dont il se montra constamment reconnaissant. Le départ de cette compagne dévouée, quelques semaines avant lui, devait porter à sa santé déjà ébranlée par une vie chargée et bien remplie, un coup fatal. En dehors de ses recherches et de ses travaux scientifiques, Ed. Sarasin à mis largement son activité et son intelligence au service de la chose publique. Dès son retour à Genève, suivi de près de son mariage, nous le trouvons fai- sant partie du Conseil municipal du Grand-Saconnex ; peu après, le 20 octobre 1871, ses électeurs l’appellent à la Mairie, qu'il devait diriger pendant 45 ans, avec un inlassable dévouement. Mis aux prises, dès le début de sa magistrature avec les luttes confessionnelles, il s’'employa de toutes ses forces à apaiser le conflit. Et ce protestant ardent, qui affirmait avec force ses convictions, sut si bien se faire aimer de ses administrés, sans distinction de confession, qu'il présida pendant près d’un demi-siècle aux destinées d’une commune catholique. Les Genevois se souviennent encore de quelle touchante cérémonie et de quelle expression de reconnaissance venant de toutes parts, fut accompagnée sa démission, il y à un peu plus d’une année. Pendant près de 25 ans, entre 1878 et 1916, Ed. Sarasin a siégé au Grand Conseil. Député très assidu, mais non polémiste, pratiquant la seule politique d’un homme profondément attaché à son pays et à ses institutions, prenant un vif inté- rêt aux débats, ses avis et ses conseils étaient écoutés avec déférence par ses collè- gues. I fut l’auteur du projet de loi constitutionnelle créant le referendum commu- nal, qu'il eut beaucoup de peine à faire triompher contre une forte opposition, mais que personne aujourd'hui ne songerait à critiquer. Cependant, il connut au Grand Conseil une grosse déception. Elevé dans lPat- mosphère des traditions genevoises protestantes, unissant dans son amour l'Eglise et la Patrie, la séparation de l'Eglise et de l'Etat fut pour lui un douloureux épisode de l’histoire de notre Cité. De toute sa ferveur, il n’avait cessé de protester contre la suppression du budget des cultes. Ed. Sarasin s’est encore occupé activement de l'administration du Journal de Genève, au comité duquel il appartint pendant une quarantaine d'années et qu'il présida vers 1878. Il prit également une part active à l’organisation de l'Exposi- tion nationale suisse de Genève de 1896, dont il fut membre du Comité central et président très actif du comité du groupe 24 de PArt moderne. Il avait du reste hérité de son grand-père, le syndie Rigaud, un goût prononcé pour les Arts qu'il 66 RAPPORT DU PRÉSIDENT cultiva durant son séjour d'étudiant en Allemagne et qui l’amena plus tard à fré- quenter l’Athénée, où il se Hiait avec Lugardon et d’autres. I] faisait partie de la Classe des Beaux-Arts. Aunultaire,ses goûts scientifiques le poussèrent vers le Génie, oùilfut capitaine. Le général Dufour venait à cette époque d’instituer le corps spécial désigné sous le nom d’ « Etat-Major du Génie >» et le physicien de Genève y fut incorporé jus- qu'à la dissolution de ce corps; après quoi il reprit le commandement de son unité. La gloire de Genève, cette république intellectuelle comme on l’a dit souvent, a été établie, dans le domaine scientifique, autant par ceux de nos savants qui ont tra- vaillé en dehors de notre Université que par ceux qui y ont professé. Sarasin fut certainement un des représentants les plus autorisés de cette science extérieure à notre Alma mater; mais cela ne la pas empéché de lui être particulièrement dévoué, ainsi qu'à sa Faculté des Sciences où 11 comptait de nombreux amis. Très attaché aux anciennes traditions qui ont fait la force de notre Cité, et ayant à cœur leur prospérité toujours croissante, 1] voua aux études supérieures tout son intérêt et une bonne partie de son temps. C’est pour reconnaître ces services et pour ren- dre hommage au mérite scientifique de ce savant que l'Université de Genève lui décernait en 1909, à l’occasion du Jubilé universitaire, le diplôme de Docteur ès- sciences honoris Cause. Sarasin s’occupa activement encore de plusieurs institutions locales et parmi celles d'encouragement aux Arts, aux Lettres et aux Sciences, deux sociétés gene- voises ont tout particulièrement à se louer de son appui et de son activité. C’est d’abord la Société auxiliaire des Arts et des Sciences, dont il fut membre fondateur en 1888 et dont il fut président à maintes reprises. C’est ensuite la Société Académique de Genève. Fondée en 1888 par un comité d'initiative composé d'étudiants, sous la présidence de M. Charles Borgeaud, la Société Académique, bien qu'accueillie favorablement dans le public, se trouva placée dès l’origine dans une situation délicate, quant à ses rapports avec le Dépar- tement de l’Instruction publique et le Corps enseignant universitaire. Pour diriger cette Institution à ses débuts un homme de valeur était nécessaire et le comité d'initiative, heureusement inspiré, n'hésita pas à en confier la présidence pendant la première année à Ed. Sarasin. Il s’acquitta de sa tâche avec tact et avec toute la conscience qu'il vouait aux choses qu'il prenait en mains, apportant à l’organi- sation première de la Société les fruits de son expérience administrative. Il resta 18 années dans le comité, qu'il présida encore en 1902-1905. Celui qui écrit ces lignes et qui eut tout particulièrement à travailler avec Sarasin pendant cette seconde année de présidence, garde de ce savant un souvenir ému. Bien qu'il fût très minutieux jusque dans les plus petits détails, remontant POUR L'ANNÉE 1917 67 dans chaque question jusqu'aux sources originelles, c'était toujours un plaisir de se trouver sous ses ordres et il n’est personne qui eut jamais à regretter d’être en rap- port avec lui. La Société Académique doit à Ed. Sarasin une bonne partie de son importance d'aujourd'hui. Sarasin était le type de l’ancien (Grenevois tel que l’a décrit Philippe Monnier : ardent patriote, aimant son pays, maire de son village, s'intéressant à la campagne et à ses habitants, à son domaine, homme de science en rapports suivis avec les savants de son pays et de l’étranger; excellent cœur, attirant à lui l’amitié et la confiance, se montrant aimable avec chacun, il cherchait avant toute chose à con- tenter tout le monde. C’est un beau et noble caractère qui nous a quittés. Il laisse à ses enfants et petits-enfants qu'il chérissait, comme à tous, un lumineux exemple de vie consacrée au bien de ses semblables et au travail. Sa science et son savoir restent vivants au milieu de nous en la personne de son fils, notre collègue Ch. Sarasin; qu'il veuille bien recevoir ici l'expression de notre pro- fonde sympathie. EMILE FREY-GESSNER (1826-1917) Depuis un demi-siècle, la plupart des Genevois qui se sont intéressés aux In- sectes, tant en amateurs qu'en entomologistes de science, ont connu, aimé et apprécié Emile Frey-Gessner, et plus d'un parmi ceux qui allaient journellement à P'Uni- versité où à la Bibliothèque publique, où qui simplement se promenaient aux Bastions, se souviennent d’avoir aperçu à la fenétre de son laboratoire au Museum d'Histoire naturelle laimable physionomie de cet entomologiste distingué, absorbé dans ses travaux. E. Frey-Gessner est né à Aarau le 19 mars 1826. Son père était le colonel Fred. Frey-Hérosée qui devint plus tard conseiller fédéral. Tout en poursuivant ses études primaires, le jeune Frey occupe déjà ses loisirs à rassembler des collections d'his- toire naturelle, principalement d’Insectes, qu'il apprend ainsi à connaitre de bonne heure. Entré plus tard dans la section réale du collège d’Aarau, il y étudie la mé- canique, sans pour cela que sa passion pour les sciences naturelles en soit diminuée, puis il entre comme apprenti, et ensuite comme volontaire, dans la maison Escher- Wyss & Cie à Zurich, où 1l resta 5 ans. 68 RAPPORT DU PRÉSIDENT C'est à cette époque qu'éclata la guerre du Sonderbund. Frey-Hérosée est colonel, chef d'état-major ; Emile Frey est lui-même capitaine et devient adjudant de son père pendant la durée de cette période troublée, mais heureusement de courte durée, de notre histoire nationale. Ayant été camarade du général Herzog, il pour- suivit dans la suite sa carrière militaire jusqu’au grade de lieutenant-colonel. Après la guerre, le père du jeune entomologiste ayant été nommé Conseiller fédéral, la famille vint s'établir à Berne, tandis que Frey-Gessner entreprenait en France, en Angleterre et en Ecosse un voyage d’une année. Puis, de retour en 1858, nous le retrouvons à Aarau comme directeur technique d’une filature de coton appartenant à son oncle et où il travaille durant une quinzaine d'années. Bien qu'occupé toute la journée de ses fonctions de directeur, il ne négligea pas pour cela l’histoire naturelle. Très actif et grand travailleur, il avait amassé par voie d'échange et d'achat une très belle collection d’Insectes, tant exotiques qu'indigènes, contenant quantité d'espèces rares et de cotypes, qui Jui ouvrit le chemin de la carrière scientifique où il devait désormais se placer en bon rang. En effet, cette collection, que l’on venait souvent consulter, fut le noyau de relations étendues avec des entomologistes éminents, tels que Pictet de la Rive et Henri de Saussure. Cependant la carrière technique et industrielle était loin de satisfaire Frey- Gessner dont les goûts pour l’histoire naturelle devenaient toujours plus ardents. Amateur passionné des Alpes, des courses de montagne, membre très actif du Club alpin avec lequel il franchit la plupart des passages des glaciers valaisans, toute son âme le pousse au culte de la nature et c’est pour lui un regret de ne pouvoir, faute de liberté, récolter lui-méme les Insectes, les étudier sur place dans les diverses manifestations de leur vie si captivante. Sur ces entrefaites, en 18695, un incendie détruisit la maison paternelle ainsi que la belle collection, fruit de tant de patience et de labeur. Frey se décida alors à quitter l’industrie. Après quelque temps passé à Zurich, au Polytechnicum, où il a comme professeur Oswald Heer, Arnold Escher de la Linth, Heinrich Frey, Pau- teur des Lépidoptères de la Suisse, tous hommes de mérite, il se voue durant Six années à l’enseignement secondaire, à Seeingen, à Lenzbourg, puis à Brugg où il rendit de grands services. Ce fut alors pour lui une joie sans pareille que de se sentir maître de soi-même pendant ses vacances, de pouvoir s’adonner complètement à ses goûts, fréquenter les réunions d’entomologistes où il complète ses connaissances et communique les résultats de ses recherches, entreprendre des courses et des chasses. C’est sur- tout dans les Grisons et le Tessin qu'il se rend de préférence; il y poursuit avec assiduité des études faunistiques et fait d’intéressantes observations sur les mœurs POUR L'ANNÉE 1917 69 des Insectes. Ce sont les Hémiptères qui éveillent en premier lieu son intérêt. On lui doit du reste plusieurs notes sur des matériaux concernant cet ordre, récoltés dans le Tessin et la Haute-Engadine, ainsi qu'une esquisse d’un catalogue des Hé- miptères du Haut-Valais et des Grisons. Mais Frey-Gessner ne se contenta pas de collectionner et d'observer ; il publia d'autres travaux qui le firent remarquer. Ce fut alors, en 1872, qu'Henri de Saus- sure l’appela à Genève. Le Conseil administratif venait de faire construire, aux Bastions, le nouveau Museum d'Histoire naturelle et Frey-Gessner fut nommé con- servateur de la section d’Entomologie dans ce Musée. Ainsi se réalisait un de ses vœux de pouvoir consacrer sa vie au milieu de vastes et belles collections d’Insectes et d'y trouver les éléments capables de satisfaire ses aspirations de recherches et de travail. C’est à Genève, en s’occupant des collections de Henri de Saussure, que Frey prit goût aux Orthoptères et aux Hyménoptères dont le savant Genevois s'était fait une spécialité ; il se mit alors activement à l'étude de ces deux ordres, principale- ment du point de vue de la répartition géographique concernant la faune paléarcti- que et celle de la Suisse. Les Orthoptères de l’Argovie et du Valais firent l’objet de deux mémoires et ceux des Pays Balkaniques et de la Province d'Oran de diver- ses notes. Mais ce sont surtout ses travaux sur les Hyménoptères qui appelèrent l’atten- tion des entomologistes. Encouragé par Henri de Saussure, Frey-Gessner entreprit en 1876 un voyage en Sicile. La faune entomologique de ce pays, excessivement riche et dont il rap- porta un abondant matériel, le surprit par ses affinités avec celle du Tessin et du Valais. Les vallées de nos Alpes, surtout celles qui sont orientées dans la direction du levant au couchant, dont les vastes escarpements rocheux, exposés toute la jour- née au soleil, sont des condensateurs de chaleur, offrent un climat qui sous bien des rapports imite celui des régions méridionales de l'Europe. C’est pourquoi la flore et la faune des Alpes suisses ont pris un aspect particulier méditerranéen que Frey ne tarda pas à remarquer, pour ce qui est des Hyménoptères, et que d’autres obser- vèrent après lui pour les autres classes d’Arthropodes. Ses travaux, dans cette étude comparative des Insectes de Sicile avec ceux du Valais et du Tessin, sont parmi les plus remarqués; et tous ceux qui s'intéressent à cette question de l'élément méditer ranéen dans la faune suisse sauront gré à cet auteur de Pavoir approfondie. Frey fut ainsi amené à la Société Murithienne où, membre assidu et zélé, il se fit un grand nombre d'amis. Son activité scientifique s’est principalement portée à la Société Entomologique suisse dont il fut un membre très actif et au Comité de laquelle il appartint depuis ; : = , MÉM. SOC. PHYS. ET HIST. NAT. DE GENÈVE, VOL. 89 (1917). 9 70 RAPPORT DU PRÉSIDENT 1889. I fut nommé président d'honneur en 1907, Cependant, depuis trois où quatre ans, il avait dû, pour raison de santé, renoncer bien à regret à prendre part aux assemblées et aux courses de la Société. Dans ses travaux sur les Hyménoptères, Frey à poussé aussi loin que possible l'étude de la répartition géographique des espèces et de leur variation. Une partie des matériaux qu'il rapportait de ses vacances à servi et servira encore de base à ses collègues de la Société Entomologique suisse pour la réalisation de l’œuvre éminemment utile, la Fauna insectorum Helretiae, que publie actuellement cette société. Frey se chargea dès 1898 des Apides et c’est à ce groupe qu'il consacra les 25 dernières années de son activité scientifique. Les 454 espèces et 52 variétés d’Abeilles qui habitent la Suisse ont été dé- crites avec soin, notamment au moyen de tableaux synoptiques. En outre, les deux volumes dont se composent les Apidae Helvetiae contiennent une foule de notices concernant la variation des espèces ainsi que leur biologie, l’époque du vol, les plantes sur lesquelles elles butinent. L'auteur connaissait du reste très bien la flore des Alpes. La grande exactitude de toutes les données de cet ouvrage le place au premier rang de ceux relatifs à la faunistique comparée. Bien avant lui, d’ailleurs, Jurine et Imhof, dont les travaux sont devenus clas- siques, s'étaient occupés de la faune des Hyménoptères de la Suisse et c’est encore un mérite de Frey, que de s'être chargé du travail aussi utile qu'ingrat de la révi- sion de leurs types. Frey-Gessner a fourni encore une importante contribution à la Fauna insec- torum Helvetiae sur les Guëpes dorées, les Chrysidides, ces Hyménoptères para- sites à la connaissance desquels il à apporté toute une série d'observations inédites concernant leur distribution et leurs mœurs. Les Bulletins de la Société Murithienne et de Ia Société Entomologique suisse ont en outre publié plusieurs notes de Frey-Gessner sur les Bourdons alpestres, dont la grande variation rend très difficile la distinction des espèces. La collection de Bourdons qu'il avait rassemblée et qu'il a donnée au Museum est souvent con- sultée par les hyménoptérologues de passage à Genève. On lui doit encore une importante étude sur les mâles des Anthrena, sur les Dermestes, sur la nidification et les mœurs de Chalicodoma muraria, ainsi que de nombreuses observations sur les Lépidoptères, les Orthoptères et les Diptères. Le Bulletin de la Société Entomologiste suisse à encore publié de lui une notice nécro- logique sur W.-Gustave Stierlin. Frey consacra plus de quarante années de son activité à notre Museum d’his- toire naturelle, auquel il rendit de grands services, notamment dans le classement définitif des Hyménoptères et le classement provisoire des autres groupes. Il y à POUR L'ANNÉE 1917 71 peu de temps, le Directeur et le personnel de cet établissement, ainsi qu'une délé- gation de la Société Entomologique suisse, s'étaient associés d’une manière tout intime et pleine de sympathie à l’anniversaire de ses 90 ans. Notre Société s'y était associée à son tour par l'envoi d'une adresse. Très connu en Suisse et à étranger, c’est à lui qu'on s’adressait pour la détermination de spécimens et la facon à la fois aimable et complaisante avec laquelle il s’acquittait de ce travail lui valut quan- tités de relations dans le monde scientifique. C’est ainsi qu'il devint membre hono- raire de la Société Entomologique de Londres. Sa valeur comme entomologiste était notoire. C’est pour la reconnaitre, ainsi qu’en égard des services qu'il rendit à la science, que l’Université de Genève, à l’occasion du Jubilé de 1909, lui avait décerné le diplôme de Docteur ès sciences Aonoris causa. Frey est entré à la Société de Physique et d'Histoire naturelle en 1895, d'abord comme associé libre, puis plus tard, en 1901, comme membre ordinaire. I n'eut pas l’occasion de présenter de ses travaux à notre société, mais il lui a rendu, plusieurs années durant, le service d'assurer la réception, l'inscription et Ja réparti- tion à la Bibliothèque publique, de nos publications d'échange. Il s’acquitta de ce travail méticuleux avec toute la précision et la conscience désirables. Il fut encore membre de la Société Helvétique des Sciences Naturelles de- puis 1851. Ce savant a créé une école d’entomologistes ; il forma une nombreuse phalange d'élèves qui étaient devenus ses amis. Sa mort laisse un grand vide parmi eux, mais son souvenir restera impérissable dans leurs cœurs. KR. BIRKELAND (1867-1917) Kr. Birkeland, Professeur de Physique à l'Université de Christiania, est décédé à Tokio le 18 juin 1917 à l’âge de 50 ans. Il était surtout connu dans Île grand public par l'invention, en collaboration avec Eyde, d'un procédé pour la fixa- tion de l'azote atmosphérique au moyen de l'arc électrique. Son système repose sur l'emploi du courant alternatif et d'électrodes creuses en cuivre, refroidies par un courant d’eau et placées dans un champ magnétique. Quand on fait passer le courant, on obtient un are en forme de disque dont le diamètre peut atteindre 79 RAPPORT DU PRÉSIDENT jusqu'à trois metres pour une puissance de 1000 kilowatts et au travers duquel on fait passer l’air à traiter. Mais, à côté de ces travaux de science appliquée, Birkeland laisse une œuvre importante en Physique et en Météorologie. Après avoir fréquenté l'Université de Christiania, 11 vint compléter ses études à Paris, où il suivit en particulier les cours de H. Pomcaré, et à Bonn, où il travailla au Laboratoire de Hertz. Il entra alors en relations avec notre regretté collègue Ed. Sarasin, avec lequel il collabora dans des recherches sur la réflexion de l'onde électrique à l'extrémité d'un fil conducteur. Ensuite ses recherches S'orientèrent vers les rayons cathodiques et l’influence qu'exercent sur eux les forces magnétiques. Les phénomènes du magnétisme ter- restre et des aurores boréales attirérent alors son attention, et il prit une grande part à l'installation d'observatoires magnétiques spéciaux, dans les régions arcti- ques, à partir de l'année 1900. Il a consigné la plupart des résultats qui y ont été obtenus dans deux gros volumes en anglais : The Norvegian Aurora polaris Expe- dition, 1902-1903. Pour expliquer les phénomènes observés, Birkeland ne craignit pas édifier des théories souvent hardies sur là production de l'aurore boréale et des orages magnétiques, là constitution interne du soleil et la nature des taches solaires, le soleil envisagé comme aimant et comme source d'électricité, Pour appuyer ses déductions, il entreprit des expériences de grande envergure, que lui permettaient d’ailleurs ses ressources personnelles, comme celles qu'il a effectuées sur un globe magnétisé (terella), placé dans un vide élevé, sur lequel il dirigeait des décharges électriques, destinées à représenter la décharge de corpuscules par le soleil. Il obtint ainsi des phénomènes ressemblant d’une facon frappante aux diverses formes de l’aurore boréale. La plupart de ses recherches dans ce domaine ont été expo- sées dans les comptes rendus de l'Académie des sciences de Paris et les Archives des Sciences physiques et naturelles de Genève. Dans ses dernières années, il s'était consacré particulièrement à des recher- ches sur la lumière zodiacale, pour lesquelles il fit de longs séjours en Egypte et dans d'autres parties de l'Afrique, C’est sans doute dans la même intention qu'il s'était rendu récemment au Japon, où il est mort prématurément, laissant imache- vée une œuvre marquée au coin d’une grande originalité. (D’après la Æevue générale des Sciences). SI wo POUR L'ANNÉE 1917 AD. VON BAEYER (1835-1917) A. von Bæyer, né le 31 octobre 1835 à Berlin, a débuté de bonne heure dans la carrière de chimiste, car à l’âge de 12 ans, vouant ses loisirs à des expériences de chimie dans la maison paternelle, il fit déjà sa première découverte, un sel dou- ble de carbonate de cuivre et de carbonate de soude. Après avoir terminé ses études au (Gymnase Friedrich-Wilhelm, à Berlin, nous trouvons le jeune chimiste, en 1856, à Heidelberg, travaillant assidûment chez Bunsen, puis ensuite dans le laboratoire du privat-docent Kekule, qui fut plus tard le grand réformateur de la chimie organique et que von Bæyer suivit à Gand. De là, il revint dans sa ville natale où, en 1864, il présenta à l’Université de Berlin sa thèse de doctorat sur les Combinaisons méthyliques de l'arsenic. Nommé peu après professeur extraordinaire à la suite de ses travaux sur l'acide urique, il devint encore maître de chimie à la Gewerbe-Akademie, où il rencontra nombre de savants célèbres tels que Græbe, Liebermann et Victor Meyer. Von Bæyer s'était révélé un expérimentateur et observateur excellents et c’est à la Gewerbe-Akademie qu'il poursuivit ses recherches sur lacide urique, sur les réductions de l'acide phtalique, sur les phtaleïnes et sur l’acide mellique, de méme que celles sur l'élimination de l'eau et son importance dans la vie des plantes, puis sur la formaldéhyde ; ces travaux le placèrent en bon rang dans le monde des chimistes. Il fut alors, en 1867, le principal instigateur de la Société chimique allemande qui compte aujourd’hui plus de 3400 membres. Appelé en 1871 à la chaire ordinaire de chimie à la nouvelle Université de Strasbourg, von Bæyer y crée l'Institut de chimie, où ses travaux sur la fluo- resceïne deviennent le point de départ de la découverte de Péosine et des autres couleurs de résorcine; c’est là qu'il eut comme élève Emile Fischer, Pun des plus célèbres chimistes contemporains. Von Bæyer ne resta pas longtemps à Strasbourg. Désigné comme succes- seur de Liebig, à Munich, en 1873, il occupe ardemment ses débuts à l’organisa- tion du laboratoire de chimie, puis, pendant 10 années, poursuit ses recherches sur lindigo qui l’amènent à en établir la constitution et plusieurs autres syn- thèses. C’est en 1880 que la fabrication de l’indigo synthétique fut entreprise, mais 74 RAPPORT DU PRÉSIDENT le procédé Bæyer, trop coûteux, fut remplacé par d’autres qui assurèrent à cette nouvelle industrie un grand développement. La fabrication de l’indigo artificiel, à laquelle le nom de Bæyer est associé, est certainement la plus belle conquête de la chimie organique dans le domaine des colorants. Von Bæyer fut alors annobli et recut le titre d'Excellence. On lui doit en- core, à cette époque, des travaux remarquables sur les combinaisons polyacétylé- niques, sur la constitution du benzène, sur les camphres et les terpènes. Agé alors de 75 ans, l’éminent chimiste clôt une si belle carrière entièrement consacrée à la science par ses recherches typiques sur la constitution des colorants du triphényl- méthane. Ce fut un des grands maitres de la chimie expérimentale, qui a exercé une influence prépondérante non seulement dans le domaine de la chimie, mais encore dans celui des sciences naturelles dans leur ensemble. Ayant reçu la médaille d’or de Davy, puis le prix Nobel en 1905, associé étranger à l’Académie des Sciences de Paris, il entretint sans cesse des relations amicales avec plusieurs savants suisses ; 1} fut nommé membre honoraire de notre Société à l’occasion du Congrès de la nomenclature chimique qui eut lieu à Genève en 1892 et qui avait réuni un grand nombre des représentants les plus illustres de la chimie; von Bæyer avait Joué un rôle très actif à ce congrès. Il est mort le 20 août 1917, à l’âge de 82 ans, dans sa propriété de Tutzing, au lac de Starnberg. ACTIVITÉ SCIENTIFIQUE DE LA SOCIÉTÉ LISTE DES TRAVAUX PRÉSENTÉS AUX SÉANCES. Physique. M. Alex. MULLER. Tube à rayons X pour recherches de laboratoire. M. Ch.-E. GuyE. Exposé de quelques-unes des conséquences du principe de relativité. — Théorie de Ja rotation de la décharge électrique par un champ magnétique. Chimie. M. Alexis BACH. Sur la spécificité du ferment qui réduit les mtrates en pré- sence d'aldéhydes. SC POUR L'ANNÉE 1917 7 Minéralogie. M. Albert BRUN. Quelques résultats obtenus par l'analyse spectrale de quel- ques sulfo-arséniures suisses. -— Nouveaux résultats obtenus par l'analyse de diverses roches, — Etude de certains sels volcaniques par l’analyse spectrale. M. M. GONSALVES. Etude pétrographique des roches du Tunnel du Simplon. Botanique. M.J. BriQueT. Recherches sur l’organisation des Hélichryses. — Sur la structure des bractées involucrales et palléales dans les espèces européennes du genre Pidens. | — Critère différentiel des bractées involucrales et palléales dans la calithide des Composées. —— Recherches sur la structure de la fleur chez les Composées. — Sur les nacelles palléales, l’organisation de la fleur et du fruit dans le Filago gallica. — Recherches sur la dissymétrie foliaire hétérogène chez les Ombellifères. —— Recherches sur les phénomènes de dissymétrie dans les feuilles. Zoologie. M. E. YuxG. Les Cladocères du Lac de Genève. —— Sur les anomalies de la coquille de lEscargot de la vigne. M. Arnold PiCTET. Premiers résultats de ses recherches sur le croisement des races Cobayes angora albinos et ordinaire coloré. -_ Recherches sur l’origine des races géographiques de quelques Lépidopteres. — Les migrations de Pieris brassicae en 1917 et leurs conséquences. M. J. CaRz. Distribution des Ecrevisses en Suisse. Physiologie. Mie I, STERN. Les effets vasoconstrieteurs et vasodilatateurs de quelques extraits animaux. M. E. YuNG. Expériences sur les colorations vitales chez divers Crustacés. 76 RAPPORT DU PRÉSIDENT MM. E. YUNG et A. BRUN. Premiers résultats d'analyses chimiques du Planc- ton du Léman. M. Arnold PICTET. Résistance des Lépidoptères à la compression, à Pasphy- xie et au froid. Embryologie. M. E. BuJaRp. Trois cas d'inclusion d’un œuf dans un autre. Psychologie. M. Ed. CLAPARÈDE. Sur l'Ergographie bimanuelle. gogral MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE ET D'HISTOIRE NATURELLE DE GENÈVE VOLUME 39, FASCICULE 2. RAPPORT DU PRESIDENT DE LA SOCIÈTE DE PHYSIQUE DOHISPOLRE NATURELLE" DE GENEVE L'ANNÉE 1918 PAR F. BATTELLI MESSIEURS ET CHERS COLLÈGUES. Un voile de tristesse s’est étendu cette année sur notre Société. Aux premiers Jours de février, nous avons eu la douleur de perdre notre président, M. je prof. Yung. Nous ne l'avons vu qu'une fois s'asseoir au fauteuil présidentiel; il était ter- rassé quelques jours après par une mort foudroyante. Et au cours de lété dispa- raissait un de nos doyens les plus vénérés M. Casimir de Candolle. Nous avons eu le grand privilège de pouvoir le compter jusqu'aux derniers temps de sa vie parmi les membres les plus attachés à notre Societé et les plus assidus à nos réunions. Nous avons encore à déplorer au cours de l’année la mort de M. J.-M. Crafts de Boston, membre émérite! ; de MM. Pierre Blaserna et Johanne Coaz, membres honoraires et de MM. William Favre et James Odier, associés libres. 1 La notice biographique concernant J.-M. Crafts n’a pas pu paraitre dans le présent rapport. MÉM. S0C. PHYS. ET HIST. NAT. DE GENÈVF, VOL. 89 (1919). 10 78 RAPPORT DU PRESIDENT Nous reviendrons tout à lheure sur la vie et les travaux de nos collègues dis- parus. Les difficultés des communications entre les différentes nations ont réduit nos relations avec les Sociétés savantes des autres pays. Nous avons adressé une lettre de félicitations et de souhaits à l'Université de Lund à l’occasion du 250° anniver- sare de sa fondation. Les sociétés scientifiques et les naturalistes suisses n’ont pu, cette année, fra- termiser et travailler ensemble à l’occasion de leur réunion annuelle, qui S’annonçait brillante, convoquée qu’elle était aux bords ensoleillés du lac de Lugano. La terri- ble épidémie de grippe faisait rage à ce moment, et le congrès a été supprimé. La vie de notre Société à été marquée cette année par la mise à exécution d'un projet, que nous appelions de nos vœux depuis fort longtemps. Grâce à une heureuse entente avec les Archives des Sciences physiques et naturelles, le compte rendu de nos séances à pu paraitre périodiquement en fascicules trimestriels. Notre secrétaire M. le D' Joukowski s’est attaché avec une attention soutenue à la réali- sation de ce progrès important. Notre vieille Société à tenu ainsi à s'adapter à la vie moderne, qui exige la rapidité des échanges dans le domaine matériel aussi bien que dans l’intellectuel. Nous avons le ferme espoir que les savants de notre ville voudront profiter lar- gement des avantages de notre publication périodique, en venant plus nombreux et plus souvent que par le passé nous apporter les fruits de leurs recherches. Que le nombre des 36 publications qui ont été présentées au cours de cette année, puisse être notablement dépassé dans les années qui vont suivre. Dans la séance de ce soir vous aurez à nommer le vice-président pour l’année 1919, le secrétaire des Publications, et un membre du Comité des Publications en remplacement de M. Briner, sortant de charge. POUR L'ANNÉE 1918 79 NOTICES BIOGRAPHIQUES EMILE YUNG! (1854-1978) L'œuvre scientifique, considérable et variée, marquée au coin d'une grande érudition, que laisse Emile Yung, à pour origine la volonté extraordinaire dont il fit preuve dès son enfance pour vaincre les difficultés que lui valut l'interruption for- cée de ses études secondaires. De ce savant modeste on peut dire en effet, en toute sincérité, que ce fut un se/f made man, et c’est précisément ce trait caractéristique de cette vie, uniquement consacrée au développement de la science, que nous vou- drions faire ressortir au début de cette notice destinée à honorer la mémoire de celui qui fut notre ami et notre collègue dévoué. Né à Genève le 6 juin 1854, nous remarquons déjà Emile Yung au collège in- dustriel et commercial de notre ville, qu'il fréquenta jusqu'à la 4° classe, en 1867 et à Gelterkinden dans le canton de Bâle. Déjà l'esprit du collégien qui, comme tant d’autres, débute par une collection de Papillons, s'ouvre aux beautés de la na- ture et aux sciences naturelles, lorsque des revers de fortune atteignant sa famille viennent mettre un frein à son besoin d'apprendre en le contraignant à entrer, comme commis, au Bureau de l’Enregistrement et du Timbre. Cependant Yung ne renonce pas pour cela à son rêve de poursuivre ses étu- des; malgré les circonstances qui l’en empéchent il tient à acquérir une situation lui permettant de s’adonner aux recherches scientifiques, vers lesquelles il se sent ardemment attiré. Des notes manuscrites écrites au jour le jour dès cette époque — il avait alors 14 ans —— montrent à quel point sa volonté est tenace, son esprit est impatient d'apprendre, son aptitude est grande au travail. Tout son temps de ! Notice par M. le Dr Arnold Pietet. 80 RAPPORT DU PRÉSIDENT liberté y est consacré; levé chaque jour, été comme hiver, à six heures, sinon à cinq, il poursuit de lui-même avec acharnement, avant de se rendre à son bureau, un programme d'instruction secondaire, qu'il se donne la tache d'accomplir coûte que coûte, Tel matin il pioche la physique, tel autre la chimie: tantôt ce sont la zoologie ou les mathématiques, la botanique ou la géographie, et c’est de tout son cœur qu'il se consacre à cet ardent labeur, d'où seul dépendra lavenir brillant qui l'attend. Ce journal intime, écrit à un àge où d'habitude l’on n’a pas encore approfondi les exigences de la vie, établit deux points qui méritent d’être relevés du caractère d'Emile Yung à cette époque. En premier lieu, c’est la précision et l'abondance des détails qu'il apporte à la narration de ses journées ; lame du savant consciencieux et méticuleux qu'il de- viendra dans la suite s’y révèle presque à chaque ligne et c’est d’ailleurs ce souci d'exactitude et de précision qui à dirigé toute sa vie scientifique. En second lieu, dans ses récits, le Jeune commis montre nettement que ses goûts s’orientent surtout vers la chimie et la physique, à l’étude desquelles, peut- être parce qu'elles lui demandaient une attention plus soutenue, il s’adonne avec plus de soin qu'à celle des autres branches. Nous verrons d’ailleurs qu'il garda long- temps cette prédilection, qui fit de lui, plus tard, à coté du z0ologiste et du psycholo- oue, l’auteur d'importants travaux sur la physiologie des animaux. Mais là ne se borne pas son activité. Sa journée finie à l’Enregistrement, Yung ne songe nullement au repos et au délassement ; 1] occupe au contraire ses soirées, de 1868-1871, à suivre des cours à Ecole industrielle et, chaque fois qu'il le peut, les conférences publiques déjà nombreuses à cette époque. On peut dire que si l’ins- truction qu'il reçut à l'Ecole industrielle, eut, ainsi qu'il l'écrivait, une grande in- Huence sur son développement scientifique, les conférences lui inculquèrent les prin- cipes de ce talent de vulgarisateur et de conférencier que nous lui avons connu. Il faut lire le récit de sa première lecon pour juger de l'élan impulsif qui le dirigea dès lors. D'ailleurs, une autre circonstance devait encore fournir au Jeune naturaliste les éléments destinés à compléter son orientation vers la science. Grand ami de la famille de Mare Thury, dont les fils ainés étaient ses contemporains, il bénéficia lar- sement de ce contact avec l'illustre physiologue. C’est du reste de cette époque que date la fondation de leur petite société, Les amis de la Varappe, avec Jaquerod, des Enstruments de physique, Margot, qui fut ensuite préparateur à l’Institut de physique, notre collègue et ami, M. Albert Brun et d'autres, pour lesquels la mon- tagne et surtout le Salève n'avaient point de secret; ces excursions constituaient déja de précieuses lecons pratiques histoire naturelle : mais Yung y acquit en- POUR L'ANNÉE 1918 81 core cette admiration si prononcée pour la beauté des sites naturels, cette ame de poète si richement empreinte d'idéal, que plusieurs de ses livres mettent en relief. C’est de cette époque encore que datent les premières armes du commis à lEn- registrement dans la chimie expérimentale. Avec Jaquerod, Margot et les Thury, il avait organisé un petit laboratoire dans les greniers de Ia maison qu'habitait sa mère à la rue de la Paix; c'était une pièce si étroite qu’à peine pouvaient se tenir à la fois les expérimentateurs, dont la passion de la recherche se donna quand méme libre essor. Un jour ils pratiquaient le mélange détonnant de l'acide chlorhydrique ; mais, leur fenêtre ne recevant pas de soleil, ils avaient imaginé d’attacher la bou- teille à une ficelle et de la balancer vers la ruelle voisine qui, elle, était mondée de lumière. L'explosion fut formidable et ébranla tout le quartier. Une autre fois ils faillirent mettre le feu à la maison en manipulant un bâton de phosphore. Aussi, dès lors, l’usage du laboratoire fut-il interdit et il fut décidé que le jeune Yung se des- tinerait au barreau ! Les cinq années passées au Bureau de Enregistrement furent les plus amères que vécut Yung, dont l'esprit était trop ambitieux d'apprendre et le caractère trop actif pour se satisfaire de cette existence administrative. C’est alors qu'une heu- reuse aubaine survint sous la forme de la mise au concours d’une place de maitre de sciences et de géographie au collège de Montreux. L'occasion était trop belle d’en- trer dans l’enseignement pour la laisser échapper; aussi ne manqua-t-il pas de s’ins- crire pour les examens afférant à l'obtention de cette place. C'était en 1873. Ces examens, ainsi qu'il l'écrivit lui-même, ne furent pas très bons, sauf en ce qui concerne la chimie et la zoologie; mais cela n’empécha pas la commission chargée de les apprécier de désigner Emile Yung pour occuper le poste, considérant sa vo- lonté de travail et la persévérance dont il avait donné la preuve, comme une garan- tie qu'il accomplirait consciencieusement sa tache. Dès lors sa vie fut transformée, son rêve réalisé. Yung a gardé de Montreux un souvenir idéal dont il aimait à parler et que lon retrouve, vivant, dans le livre qu'il consacra à cette localité, Montreux lui doit beau- coup également, notamment la création d'un petit musée d'histoire naturelle, car, pendant les trois années qu'il y enseigna, il ne ménagea ni sa peine, ni Son Savoir ; il en rapporta également quelque chose de grande valeur pour lui, l'interruption de ses études régulières l'ayant privé d’un diplôme. Le gouvernement vaudois, en effet, en égard de ses trois années d'enseignement Jui accorda le diplôme de ma- turité, indispensable pour l'admission aux études universitaires. Nous devons mentionner encore un autre trait du caractère de Yung, que mettent en évidence ses notes manuscrites: c’est de m'avoir jamais négligé le temps S2 RAPPORT DU PRÉSIDENT ‘ laissé Hbre par les vacances pour fournir à son esprit les éléments nouveaux capa- bles de compléter son instruction et pour entrer en rapport avec les maitres de la science à cette époque, C’est ainsi qu'en 1874 il se rend à Paris, où bien que simple instituteur, il est accueilli fort aimablement par Henri S'e Claire-Deville, par Berthelot et par le chi- miste Dumas, alors secrétaire perpétuel de l'Académie des sciences, avec lequel il resta d’ailleurs longtemps en relations. Berthelot trouva méme que les aptitudes du jeune naturaliste pour la chimie étaient telles, qu'il lui offrit une place d'aide dans ses laboratoires, que Yung ne put malheureusement pas accepter. I rencontre en- core Milne-Edwards, Claude-Bernard et de Quatrefages, dont l'influence à égale- nent bien contribué à son orientation scientifique. Et c’est encore cette année qu'il entra en contact avec Carl Vogt; le célèbre professeur faisait alors une excursion au Mont Blanc pour y étudier les organismes de la neige rouge et il avait emmené avec lui le jeune instituteur de Montreux. L'année suivante, c’est l'Allemagne qui lattire pour visiter les Instituts uni- versitaires, à Freibourg et notamment à Heidelberg, où il passe des journées d’un intérêt captivant dans les laboratoires de Kirchhof et de Bunsen, les deux imven- teurs de l'analyse spectrale. Kirchhof à méme lobligeance de répéter devant lui toutes ses expériences les plus fameuses et un soir Yung put analyser lui-même, au moyen des raies spectrales, la composition chimique d’; de la constellation du Cy- one et y noter les uns après les autres 14 métaux différents qui ont tous leurs ana- logues sur notre globe. C’est l’année 1876 qui marque maintenant une date importante dans la vie de Yung, car ce fut celle de son retour à (renève. Carl Vogt lui écrivait en effet pour lui offrir la place de préparateur dans son laboratoire, avec appointements de 1S00 francs, et le jour où il pénétra dans cette Université, où il devait enseigner pen- dant 39 ans et au renom de laquelle il contribua largement, fat un jour de grande, d'indicible émotion. Grâce à son diplôme de maturité vaudoise, dont il obtient faci- lement l'équivalence à Genève, le voilà étudiant régulier. Dès lors sa vraie carrière commence; peu à peu ses goûts de chimiste se muent en ceux du zoologiste et 11 dé- bute dans l’enseignement universitaire par un cours libre sur la fhéorie physique du microscope et les dernières modifications apportées à cet instrument. Cependant, bien que ses études et ses travaux demandassent quelque repos, le jeune étudiant, fidèle à ses traditions, n’en continue pas moins chaque année ses voyages d'instruction personnelle pendant les vacances. Ayant récolté de ja chimie allemande des fruits dont il se souvient, il désire en recueillir de semblables de Ja zoologie allemande, dont pourront profiter ses études, et le voilà, en 1877, à Stras- bourg. L'Université vient d'y étre montée en grand par le nouveau gouvernement POUR L'ANNÉE 1918 S3 et grace aux recommandations de Vogt, il se voit ouvrir toutes grandes les portes des laboratoires des maitres les plus autorisés. C’est d’abord chez Wäldeyer, professeur d'anatomie, où il fait de l’histologie en compagnie de Leboucq, et où il étudie les nouvelles méthodes de coloration. dont il fit, dans la suite, largement bénéficier notre Institut de zoologie et d’anato- mie comparée. C’est ensuite chez Recklinghausen, professeur d’anatomie-pathologi- que, très aimable, accueillant, original, où il $’initie aux méthodes de préparation en usage à cette époque. Entre temps, c’est la zoologie et la paléontologie qu'il travaille au Musée, sous la conduite de son directeur, Schimper, un vieillard, qui bien qu’appartenant à l'école de Cuvier tenait Vogt pour un savant de rare mérite. Puis il passe à l'étude de l'embryologie chez Alexandre Gütte, jeune encore, mais déjà célèbre par son ouvrage sur lembryologie du Bombinator, et y trouve Frédé- ricq, qui devint le célèbre professeur de Liège et avec lequel il resta toujours en relations amicales. C’est dans les laboratoires de Gütte que Yung pratiqua une étude embryogéni- que approfondie du Phylloxera, en vue du Congrès international phylloxérique qui se tint alors à Strasbourg et auquel Carl Vogt et Victor Fatio avaient été délégués par le Conseil féderal suisse. Si nous nous étendons sur ces voyages d'étudiant, c'est que nous estimons qu'il est bon de faire ressortir ici toute l'influence qu'eurent sur Pavenir de Yung les relations qu'il acquit de cette facon avec la plupart des sommités de la science, car c’est précisément la diversité des disciplines dont s'occupaient ces maitres qui lui permit ensuite d'entreprendre cette œuvre si féconde et variée, embrassant la physiologie, l'anatomie, la psychologie, où l’expérimentation servait en même temps de base et de contrôle, que son cerveau admirablement organisé sut mener si large- gement à bien. En France, ce fut à Roscoff, où il alla pour la première fois, en 1878, avec Carl Vogt, et où il retourna constamment dans la suite, qu'il entra en contact avec l'élite de la zoologie française, les Lacaze-Duthiers, les Delage, les Pruvot, les Edmond Perrier, les Gravier et d’autres encore ; il avait du reste une sympathie marquée pour la science française, dont il admirait le génie d’invention; il en avait une tout aussi marquée pour cette contrée merveilleuse, pour les Koscovites, pour toute cette Bretagne, dont il a si bien su faire ressortir le caractère, dans son livre Sous le ciel breton. A cette époque Yung termina ses études et fut reçu Docteur ès sciences natu- relles, le 28 mai 1879, à la suite d'examens brillants et de la présentation d’une thèse Sur les fonctions et la structure intime du système nerveux des Crustacés : il devint assistant de Vogt, puis maitre d'Histoire naturelle au Gynmase de Geneve, 54 RAPPORT DU PRESIDENT et privat-docent chargé de donner un cours sur les Théories de l'évolution : 11 eut encore la suppléance de Vogt pendant les sessions du Conseil national. Arrivé au terme de cette première étape de sa carrière, le jeune docteur fit encore un Stage d'étude en 1880 à Tena, auprès du célèbre Hæckel, pour lequel il conçoit une grande admiration et avec lequel il est resté en constantes relations. Dans la suite, l’auteur de l'Aistoire de la Création disait volontiers que Yung avait été son meilleur élève. Et cette méme année encore il se rendit pour la premiere fois à la station zoologique de Naples, où 1l rencontrait Arnold Lang, plus tard profes- seur de zoologie à l'Université de Zurich, et Parraud, Guglielmi et Alex. Herzen, avec lesquels il visitait longuement l'Italie. I faut avoir lu le récitmanuscrit qu'écrivit Yung de ce voyage en Italie, poussé jusqu’en Sicile, pour comprendre à quel point ses sentiments de poëte s’alliaient bien à ceux du zoologiste, pour apprécier, à leur juste valeur, les beautés de la faune marine, pour laquelle il avait une prédilection. C’est pour l’étudier qu'il fit usage du scaphandre, «cet admirable appareil d’un immense secours pour le natu- raliste > écrivait-il, «<.J’en ai fait un bon apprentissage et cependant je ne puis supporter qu'une pression de 15 mètres. L'effet produit aumoment où l’on s'enfonce dans l'élément liquide est magnifique; le décrire est impossible. Rien, absolument rien, ne peut donner une idée de Ia beauté incomparable des couleurs de la mer. Partout du bleu, mais du bleu de mille nuances diverses, azuré de jaune, de vert, de lilas, d'orangé. Les teintes sont fraiches, vives, bien plus belles qu’elles ne parais- sent au contact de l’air >. De tous ces voyages, de toutes ces relations, on conçoit que Yung ait acquis les bases capables de faire de lui un maitre dans l’enseignement supérieur. Comme assistant de Vogt, il rendit en effet de grands services à l’Université de Genève et à ses étudiants, qu il savait entrainer à aimer la science. Ceux qui eurent le privi- lege de le connaitre alors et de faire leurs premiers pas en Zoologie sous la conduite de ce chef sympathique et aimable, lui gardent un souvenir ému; que de fois ils quittaient avec joie leur travail pour faire cercle autour de lui et l’entendre déve- lopper ses théories sur les grandes questions biologiques; dans cet exposé, Yung dévoilait toute l'originalité de son érudition, toute l'étendue de ses connaissances et la clarté merveilleuse de ses idées. Comme on le voit, il devint rapidement au laboratoire le bras droit de Vogt, qui, en toute confiance, ne tarda pas à lui en abandonner la complete direction. Yung fut alors nommé professeur suppléant de Zoologie générale et, en 1886, professeur extraordinaire chargé de donner des cours sur les théories évolutives du reene organique, sur l'anthropologie et sur les facultés mentales des animaux. Ces leçons se poursuivirent jusqu'en 1895, époque à laquelle Yung, succédant à Carl POUR L'ANNÉE LOIS 8!) Vogt, devenait professeur ordmaire de Zoologie et d'anatomie comparée et directeur des laboratoires rattachés à cette chaire. La plupart d’entre nous se souviennent encore sufisamment des cours de Yung et sont restés assez profondément pénétrés de la science de ce maitre et de son incomparable faculté d'initiation, pour qu'il soit besoin d'en parler longuement : il se consacra à son enseignement sans défaillance jusqu'au dernier jour de sa vie, car, le jour même de sa mort, il avait comme de coutume fait son cours et dirigé le laboratoire, où 11 donnait encore une conférence avec projections lumineuses. Apres avoir relaté les méthodes de travail et d'instruction personnelle, qui firent d'Emile Yung une des premières personnalités de Genève, nous devrions analyser son œuvre scientifique; mais celle-ci ayant déjà fait l'objet d'analyses dans les journaux locaux, ainsi que dans un article détaillé qui va paraitre dans les Actes de la Société helvétique des sciences naturelles, nous ne saurions, dans la crainte de faire double emploi, nous étendre à nouveau sur ce sujet. Nous nous bornerons en conséquence aux grandes lignes de son immense activité. L'œuvre scientifique d'Emile Yung s’est orientée dès le début de sa carrière dans deux directions principales, la physiologie des animaux et leur anatomie ; mais on peut dire qu'il à toujours poursuivi ces deux disciplines parallèlement Fune à l’autre, de manière à en tirer des conclusions d'ensemble, Car il était hautement pénétré de l’idée, dominante aujourd'hui, des relations qui existent entre la fonction et l'organe, celle-là déterminant celui-ci. Aussi voyons-nous continuellement ses travaux suivre cette direction. Mais Yung n’en fut pas moins un zoologiste de grand mérite, très au courant de la structure et de la classification des animaux, dont il aimait à comparer l’enchai- nement dans la série, I aimait également leur vie, sachant pénétrer leurs fonctions mentales, leurs sensations ; 11 fut également un psychologue de talent, dont les recherches se porterent même fréquemment jusqu'à la psychologie humaine. Ce qui le fit surtout connaître, dans le monde savant, c’est sa qualité maitresse d’expérimentateur. Au début de sa carrière, le transformisme, et plus spécialement le transformisme lamarckien, avait déja cette tendance de demander à l'expérimen- tation le contrôle de la spéculation pure, mais Yung se servait de l'expérience également comme d’un moyen de donner une direction à ses recherches, qui se portèrent principalement sur l'influence qu'exercent les divers facteurs de l'ambiance sur le développement et la croissance des animaux. Cependant il ne s’est pas excln- sivement confiné dans la biologie expérimentale, car son esprit chercheur, sa sagacité jointe à une intuition marquée, ne tarderent pas à lui révéler les relations qui existent entre le genre de vie de l’animal et son organisation histologique et à lui faire entrevoir une série de problèmes auxquels il s'est voué, et où il s’est révélé MÉM. SOC, PHYS. ET HIST. NAT. DE GENÈVE, VOL, 89 (1919). 11 56 RAPPORT DU PRÉSIDENT un histologiste adroïit et précis. Dans ce domaine ses travaux sur les mécanismes de la digestion sont devenus classiques. Yung s'est fait un nom en physiologie et, parmi les travaux physiologiques les plus remarqués qu'il laisse, nous devons mentionner un mémoire consacré à ses recherches sur la Grenouille et intitulé : De l'influence des différentes espèces d'ali- ments sur le développement de lu Grenouille, qui fut couronné en 1883, par l'Uni- versité de Genève (Prix Davy). Puis, un second mémoire : Contribution à l'histoire physiologique de l'Escargot, qui fut couronné par FAcadémie des Sciences de Belgique à la suite d’un concours, en 1886, et pour lequel il obtint une médaille d'or. Yung avait du reste étudié à fond l'Escargot des vignes, sous tous les rapports, biologie, physiologie, anatomie et variation : il s'était pour cela mis en rapport avec une quantité d’éleveurs de ce mollusque, dans le but de faire un travail statistique sur la proportion entre les lévogires et les dextrogires, et sur d'autres questions relatives à la malformation, le déroulement de la coquille, l'aptitude à la régéné- ration de celle-er. C'est principalement dans le domaine de la faune marine et lacustre et surtout dans l’étude du plankton d'eau douce, que s'affirme le rôle de Yung comme zoologiste. Passionné des richesses naturelles de notre beau pays, il avait voulu en connaitre les animaux, tout particulièrement ceux qui, imperceptibles, vivent dans les eaux douces. Son rêve de jadis avait été d’instituter à notre Université une station de zoologie lacustre; ce rêve se réalisa pleinement, lorsque, à lPoccasion du jubilé universitaire de 1909, la Société académique de Genève, avec laide de Mn IT. Cla- parède, la fille du célèbre naturaliste, et grace à une souscription publique, put acquérir un bateau à moteur qui fut aménagé pour la recherche zoologique et baptisé l'Z£douard Claparède. C'est sur ce petit bateau, dont la silhouette originale s’est si souvent montrée le long de nos rivages, que Yung put continuer toute une série de travaux précédemment commencés sur le plankton du lac Léman; ceux-ci touchaïent principalement aux variations de la répartition des organismes, suivant la profondeur, là température et les saisons, et pour les pousser à fond, il bénéficia largement de la pratique du travail au filet fin et à la drague qu'il avait acquise dans ses croisières depuis Roscoff, Concarneau, Naples, Villefranche, Banyuls et plus récemment en 1908, lors d'un voyage en Scandinavie et au Cap Nord, et d’une station de recherches à Bergen. Mentionnons encore qu'une large part de son inlassable activité a été consacrée à la publication d'ouvrages d'enseignement, dont, en particulier, le Traité d'ana- lomie comparée pratique, qu'il rédigea en collaboration avec Carl Vogt et dont les deux volumes, traduits plus tard en allemand, ont été et sont encore un des meilleurs POUR L'ANNÉE 1918 87 auxiliaires du travail des étudiants au laboratoire. En dernier lieu, depuis quelques années, avec la collaboration de collègues dévoués, il rédigeait son Traité de zoologie, dont une certaine partie est fournie par des dessins et des documents OTISINAUX. Yung ne se contenta pas d'enseigner la science à l'Université ; il voulut encore la répandre à flot dans le grand public, et ce fut là une des causes principales de sa popularité et de l’estime dont il était entouré, non seulement dans sa ville natale, mais dans toute la Suisse romande. L'activité qu'il déploya comme conférencier mé- rite que l’on s'arrête un peu à la relever, car le nombre des séances qu’il donna un peu partout est considérable. Il parlait indifféremment de tous les sujets se ratta- chant à la biologie, et toujours avec une abondance d’objets de démonstration et de projections lumineuses. Son talent remarquable de vulgarisateur, son esprit ouvert et large, et la facon claire et précise dont il S'exprimait, mettaient les problèmes biologiques, même les plus compliqués, au niveau de toute intelligence; il acquit ainsi une notoriété Justement méritée dans les milieux populaires, comme aussi dans le monde intellectuel. Aussi peut-on lui savoir gré des services qu'il rendit de cette facon à son pays, notamment dans les cours du soir qui se donnèrent de ISS5 à 1892 à Académie professionnelle, au Musée Rath, où il traita en plusieurs séances de l'Anthropologie et de l’Histoirenaturelle de l’homme et d'autres sujets. Les < conférences du mardi», comme on les appelait, furent d'ailleurs l’origine d’un mouvement qui se créa en vue d'étendre l’enseignement supérieur dans les classes qui ne peuvent en profiter dans la journée, ainsi que cela se pratique en Angleterre, et Yung contribua large- ment à l'extension de ce mouvement, Il enseigna encore à l'Université ouvrière et à l'Ecole Vinet à Lausanne. Comme chroniqueur scientifique, il laisse encore un nom, car il entretenait beaucoup de journaux locaux et de revues de la Suisse romande, de sujets variés d'actualités scientifiques ou de comptes-rendus de congrès et d’assemblées; dans ces récits, son style, toujours agréable à lire, savait, comme dans ses conférences, mettre à la portée de chacun les questions de science pure dont s'occupaient les réunions de savants. Yung laisse aussi une belle œuvre littéraire, car c'était un fervent admirateur de son pays et il jouit pleinement des joies intimes que procure lincomparable beauté de la nature. Dans des pages élevées, empreintes dun grand idéal et d’un vrai sentiment de poète et pour Panalyse desquelles la plume dun homme de science est incompétente, il à témoigné avec sérénité de cette admiration. Nous ne saurions passer sous silence Île rôle scientifique important que Yung à joué en Suisse. Président en 1906 de la Société zoologique suisse, vice-président de 35 RAPPORT DU PRESIDENT l’Institut national genevois et président depuis 1903 de sa Section des sciences, il en a été, on peut dire, l'âme très vivante. I venait d’être élu Président de Ia So- ciété de Physique et d'Histoire naturelle pour l'année 1918, dont il ne présida que la première séance et depuis longtemps la Société vaudoise des Sciences naturelles l'avait nommé membre honoraire. Mais c’est à la Société helvétique, à laquelle il appartenait depuis 1880, que son nom reste le plus attaché, car il lui à voué une bonne part de son activité, comme membre de Ja Commission du Concilium bibliographicum, qu'il présida de- puis 1913, de celle des Mémoires et de la Commission scientifique du Parce natio- nal, ainsi que par son assiduité aux sessions annuelles. Membre du comité annuel de la session de 1902, à Genève, il fut vice-président de celle du Centenaire en 1915 et membre de la Commission historique du Centenaire. Chacun se souviendra du rôle qu'il joua à cette session, comme auteur du Coup d'œil historique sur l'activité de la Société helvétique «les sciences naturelles (en collaboration avec le Dr. Carl). Nous voudrions encore consacrer à son activité civique, à laquelle il se voua sans se ménager, la part de cet article qu'elle mérite; mais, obligé d'en limiter l'étendue, nous nous bornerons à signaler qu'ayant sa ville natale en grande affec- tion, 1l fut toujours heureux de contribuer à sa prospérité. Et maintenant embrassons d'un coup d'œil d'ensemble Pœuvre considérable de cette vie, toute de travail et de modestie. Non seulement dans son pays, mais dans presque toutes les parties du monde, le nom d'Emile Yung est marqué comme celui d’un pionnier de la science et de la vérité; partout ses travaux sont respectés, son autorité reconnue, sa valeur appréciée. Aussi la plupart des institutions scientifi- ques ont-elles tenu à rendre hommage à cette œuvre, en lui conférant une distinc- tion honorifique ou en l’appelant comme membre honoraire. En premier lieu, €est son pays qui reconnait ses mérites, en le désignant comme délégué aux divers congrès internationaux auxquels il prit part ; en outre, le Conseil fédéral le désigna, en 1891, pour faire partie d'une commission interna- tionale chargée d'explorer la mer à Banyuls. Puis sa ville natale à son tour lui confie le soin de rédiger, pour le livre du Centenaire de Genève-Suisse, la partie de cet ouvrage relatant le Développement scientifique de (renève. A l'étranger, c'est l’Institut de France, où 11 compte de sérieux amis, qui le nomme Associé-étranger : et, plus tard, à l’occasion du Jubilé de Lamarck, le voici créé Chevalier de la Légion d'Honneur, puis, en 1914, membre correspondant de l'Académie des sciences pour la section d'anatomie et de zoologie, en remplace- ment de Metchnikof: il éprouva une immense joie de cette distinction qui Compte parmi les plus hautes que puisse ambitionner un savant. Pour nous. le souvenir d'Emile Yung restera en outre longtemps vivant comme POUR L'ANNÉE 1918 89 celui d’un collègue aimable, toujours accueillant d’un sourire, d'un ami complaisant, avec lequel il était agréable d’être en relations et d’un maitre dont la science nous dirigea souvent. IT est mort en pleine activité, laissant une œuvre trop inachevée, Le 2 février, après une journée de grand labeur, il se rendait à Lutry pour y poursuivre ses re- cherches à bord de son cher bateau, l'Ædouard Claparède : mais, sur le perron de la gare, là mort enlevait brusquement à la-science, à son pays et à sa famille, cette intelligence remarquable. CASIMIR DE CANDOLLE! (1836-1918). Au début de l’année 1836, Augustin-Pyramus de Candolle, gravement malade, avait dû suspendre toute activité scientifique depuis deux mois entiers, ne voulant pas rester alité, n'ayant plus la force de marcher, ne pouvant ni manger, ni dormir. < J'étais, dit-il dans ses Mémoires et Souvenirs, dans ce triste état, lorsque j'éprouvai une secousse morale qui me fit du bien. On vint me dire, au milieu de la nuit (le 20 février), que ma belle-fille venait d'accoucher d'un fils, et peu d'heures après on m'apporta cet enfant que j'avais vivement désiré: on le plaça un instant sur mon lit. Je lui donnai ma bénédiction de grand’ père et de parrain, car il reçut les noms de Anne-Casimir-/yramus. Le plaisir que je ressentis fut très vif, et je puis presque dater ma convalescence de ce jour. > Tels sont les auspices sous lesquels Casimir de Candolle commença sa longue existence, ils étaient bien faits pour préluder à la belle et laborieuse carrière de botaniste qui fut la sienne ! Né à Genève le 20 février 1836, fils ainé d'Alphonse-Pierre de Candolle et de Jeanne-Victoire-Laure Kunkler, C. de Candolle fit ses premières études à Genève, à institution Delapraz ; il passa de là au Collège pendant deux ans. puis au Gymnase libre. De 1853 à 1856, il poursuivit ses études à la Faculté des sciences de Paris, cultivant spécialement la chimie, la physique et les mathématiques, prenant succes- sivement les grades de bachelier ès sciences (1833) et de licencié ès sciences (1836). Entre temps, il avait fait (1854) un assez long séjour en Angleterre dans la maison ! Notice rédigée par M. le Dr J. Briquet. 90 RAPPORT DU PRÉSIDENT de Berkeley, ce qui lui permit d'entrer en relations avec plusieurs botanistes anglais enunents, tels que les Hooker père et fils, Balfour, Bentham, Clarke. De retour dans sa ville natale, C. de Candolle se mit à la botanique, guidé par les conseils et la haute expérience de son père. Il n’a dès lors quitté Genève que pour des voyages occasionnels. Ceux-ci le conduisirent dans le Midi de la France et le ramenèrent souvent à Paris et en Grande-Bretagne, où l’attiraient tant la consultation des herbiers en vue de ses monographies que ses relations d'amitié et de famille. En 1859, il fit un voyage en Algérie et plus tard en Espagne. En 1873, il se rendit en Grèce et à Constantinople. Une expédition en Egypte fut arrêtée dans la vallée du Nil par la guerre du Soudan. C. de Candolle était d'ailleurs grand amateur de courses de montagne, et nombreuses sont les cimes des Alpes dont il à fait l’ascension. À Genève, C. de Candolle habitait la ville en hiver et passait les mois d'été au Vallon ou à Bellevue, mais en toute saison, le meilleur de son temps s’écoulait dans la maison de Ja Cour St-Pierre, où son grand pere etson père avaient réuni les immenses herbiers et la classique bibliothèque que tous les botanistes connaissent, Du vivant d'Alphonse de Candolle, on rencontrait le plus souvent C. de Candolle à Fherbier, debout, l'œilrivé à sa loupe montée, le scalpel ou les aiguilles à la main, analysant Ia fleur ou le fruit de quelque Méliacée ou Pipéracée. Absorbé par son travail, réservé, quelque peu distant, il paraissait à l'observateur superficiel ou occasionnel, n'étre que le visiteur par excellence de cet asile de la science, Mais ceux qui le connaissaient de plus près savaient quel intérêt il apportait aux trésors scientifiques accumulés par Pyramus et Alphonse de Candolle. Aussi. lorsque le 4 avril 1895, la mort eut ravit son père, C. de Candolle entra sans effort dans son rôle d’héritier d’un patrimoine scientifique unique en son genre, Non seulement il perpétua les traditions de sa famille quant aux facilités Hbérale- ment accordées à tous ceux — et ils étaient nombreux — qui avaient recours aux collections et à la bibliothèque Candolléennes, mais encore il S’efforça de tenir ces dernières au courant des progrès de la science. L’énorme multiplication dans le nombre des voyageurs rendait difhcile pour un particulier l'achat de toutes les collections acquérables, non seulement pour des motifs budgétaires, mais encore à cause de la place nécessaire pour les loger. C’est ainsi que C. de Candolle fut amené à concentrer son effort sur les collections intertropicales, sans d'ailleurs négliger entièrement celles de provenance extratropicale. Méme réduits à ce cadre, ses herbiers ont pris une telle extension, qu'il a dû successivement annexer à son musée, chambre après chambre de Ja vieille maison paternelle, Quant aux livres, C. de Candolle $S'est fait un point d'honneur de se tenir au courant des publications. I suffisait de lui signaler un ouvrage intéressant, manquant à sa bibliotheque et dont la consultation était désirée, pour qu'il en fit immédiatement l'acquisition. Le public POUR L'ANNÉE 1918 91 scientifique en général et les botanistes genevois en particulier lui doivent une profonde reconnaissance pour les immenses services qu'il leur à ainsi rendus. Ce qui double cette reconnaissance, c’est la bonne grâce avec laquelle il faisait lui-même les honneurs de son sanctuaire, la courtoisie avec laquelle il accueillait en tout temps ses visiteurs, la simplicité aveclaquelle il se mettait à la disposition de ceux-ci pour rechercher quelque livre ou quelque brochure sur les rayons où dans les fiches de sa bibliothèque. Il semblait presque parfois qu'on lui faisait plaisir en le dérangeant ! Les trois générations passées des de Candolle présentent ce caractère général d’avoir travaillé avec acharnement à l'édification d'un édifice commun : le dévelop- pement de la botanique systématique dans le cadre d'une classification naturelle. Inauguré par Pyramus de Candolle, le Prodromus à été comme le bréviaire, l'ex- pression concrète de cette tendance. Poursuivie par Alph. de Candolle, la gigantes- que entreprise d’une description méthodique de toutes les plantes connues à été poussée par lui jusque vers la fin des Dicotylédones. C. de Candolle à encore parti- cipé à la rédaction du tome XVI du Prodromus : 11 à dirigé ensuite avec son père, puis seul, la publication des Monographiæ Phanerogamarum (9 vol., 1878-1896). Mais à côté de ce caractère commun aux trois générations, chacune d'elles à pré- senté des traits propres qui la différencient des précédentes. — Pyramus de Candolle est l'esprit puissant, embrassant l'encyclopédie des connaissances bota- niques de son temps et la présentant dans des traités admirablement ordonnés. Doué d’un talent d'analyse exceptionnel associé à une remarquable faculté din- tuition, il faisait surgir comme par magie les groupes naturels du chaos des faits de détail. En recherchant, sous les variantes qui caractérisent les divers représentants d'un groupe naturel, le « plan floral > commun qui exprime la parenté de tous les membres du groupe, il a créé en grande partie la morphologie comparée et préparé l'avènement futur des théories évolutionnistes. — Alphonse de Candolle est moins purement naturaliste que son père; il n’est morphologiste que secondai- rement ; il est physiologiste en raisonnant surtout sur des données numériques pa- tiemment accumulées; il est essentiellement statisticien. C'est en cette qualité qu'il renouvelle la géographie botanique, dont la naissance est principalement associée au nom d'Alex. de Humboldt. Alphonse est aussi un juriste qui résume clairement les principes de la phytographie et codifie les regles de la nomenclature botanique. — C. de Candolle enfin localise son travail systématique dans un petitnombre de famil- les naturelles. Cette spécialisation est la conséquence des progres de la science. Le temps n’est plus où un seul homme puisse entreprendre la description de tout le règne végétal. La vie est trop courte et la masse des faits est devenue inconmen- surable, Par ailleurs, l'étude des œuvres de C. de Candolle montre que les travaux 99 RAPPORT DU PRÉSIDENT systématiques, auxquels il s'est cependant livré toute sa vie, répondaient moins à sa tournure d'esprit que ce n'était le cas pour son pere et surtout pour son grand”-- père. En revanche, C. de Candolle renoue la tradition de Pyramus en cultivant Ja morphologie, encore que dans un esprit bien différent. Il innove en introduisant l'anatomie comparée en systématique. Enfin, il fait œuvre de physiologiste dans plusieurs mémoires de valeur traitant de sujets peu connus à l'époque où ils furent écrits. Passons sommairement en revue les travaux de C. de Candolle à ces divers points de vue. La première monographie de C. de Candolle est celle des /uglandacées, insé- rée dans le Prodromus (1864) et complétée par un mémoire publié la même année dans les Annales les sciences naturelles. C’est une petite famille dont l’organisation soulève d’intéressants problèmes morphologiques, traités d’ailleurs par l’auteur avec une extrême prudence, puisqu'il nese prononce même pas positivement sur la question de savoir si les Juglandacées sont réellement apétales où non. Pour lui, les affinités de ce groupe doivent être recherchées dans les Terebinthales, opinion qui était déjà celle de Pyramus de Candolle et qui peut se soutenir par des arguments d'un certain poids. Dans la suite, C. de Candolle n’est guère revenu sur cette famille si ce n'est en 1914 à propos de la description d’un nouvel Ængelhardtia de V Améri- que centrale. — La petite revue des Hyricacées, insérée dansle lrodromus, date de la même époque. — Lestravaux de C.de Candolle sur les Pipéracées ont une toute autre importance. Amorcée par des descriptions préliminaires (dans le Journal of Botany, 1866) et par une dissertation anatomo-morphologique, sur laquelle nous revien- drons, la monographie des Pipéracées parut en 1869 dans le Prodromus. C’est un travail qui à exigé de son auteur un gros effort si l’on songe que les descriptions portent dans le genre Piper sur 635 et dans le genre Peperomia sur 389 espèces. L'auteur englobe parmi les Pipéracées la petite famille des Saururacées (mainte- nant le plus souvent séparée): il fait disparaitre une foule de genres créés par son prédécesseur F.-A.-W. Miquel et insuffisamment motivés. Depuis cette époque, C. de Candolle à été universellement salué comme le connaisseur par excellence des Pipéracées. De toutes les parties du monde dans lesquelles cette famille est repré- sentée, les matériaux afuaient vers lui pour être déterminés. Année après année, l’auteur décrivait les nouveautés arrivées entre ses mains, et cette belle série d’ar- ticles, disséminés dans les périodiques les plus divers, s'est allongée jusque peu avant sa mort. C. de Candolle à laissé une succession bien difficile à reprendre; il s’écoulera du temps avant qu'un second botaniste de son mérite se soit acquis l’ex- périence du savant défunt: nombreux sont, hélas, les musées dans lesquels les Pr- péracées vont S'entasser sans trouver leur maître! — Les Méliacées ne sont entrées POUR L'ANNÉE LOIS 0 que plus tard dans le champ de travail de C. de Candolle. Cette famille m'avait plus été traitée dans son ensembie depuis l'époque de Pyramus de Candolle (1824) et d'Ad. de Jussieu (1830) et les matériaux S’étaient énormément accumulés. Aussi la monographie qu'en fit notre auteur en 1SS3 (dans le tome I des Monographiæ Phanerogamarum) constitue-t-elle un monument capital qui a servi de base à tous lestravaux ultérieurs sur ce groupe. Pendant l'impression de son travail, C. de Can- dolle avait publié (dans les Transactions of the Linncan Society de Londres, 1877), un court article sur la distribution géographique des Méliacces. C’est un des rares cas dans lesquels l’auteur à touché à la phytogéographie. La revue des Méliacées du Brésil parue en 1878 dans le Æora brasiliensis de Martius n’est qu'un extrait de la Monographie: par contre, l’auteur est revenu plusieurs fois, et jusqu’à la fin de sa carrière, sur cette famille, pour en décrire de nombreuses espèces nouvelles. — Enfin, C. de Candolle à décrit à réitérées fois des Bégoniacées nouvelles, dont l'étude lui était facilitée par les travaux antérieurs d'Alph. de Candolle sur cette famille et par les originaux nombreux que lui fournissait son herbier. Dans le domaine de Panalomie, C. de Candolle à débuté par un travail sur La production naturelle et artificielle du liège dans le chène-liège, qui inaugurait sa carrière de botaniste, travail paru dans les Mémoires de la Société de physique et d'histoire naturelle en 1860, et qui révélait un observateur attentif et habile. Dès 1866, il s’était livré à des recherches anatomiques (Mémoire sur la famille des Pipéracées), recherches qui portaient essentiellement sur la disposition et la course des faisceaux dans la tige et dans la feuille chez les Pipéracées: il les a poursuivies dans sa Théorie de la feuille (LSGS) et développées dans son Anatomie comparée des feuilles dans quelques familles de Dicotylédones (1879). Les points sur lesquels s’est porté son attention sont essentiellement: la nature ouverte où fermée du sys- tème fasciculaire principal, la présence ou l'absence de faisceaux intracorticaux et de faisceaux intramédullaires. I recherche < s'il existe quelque corrélation entre la structure interne des feuilles et les caractères externes qui, d'habitude, sont seuls utilisés pour la classification >. Bien que l’auteur se soit limité volontairement à un nombre restreint de caractères, c'était là une innovation, dont les travaux effec- tués depuis lors par de très nombreux auteurs ont montré l'importance capitale. Ce sera toujours un des mérites de C. de Candolle de figurer, après Duval-Jouve et Radikofer, parmi les initiateurs de l’anatomie systématique. I n’a d’ailleurs cessé dans la suite de suivre avec intérêt le développement, devenu bientôt considérable, de cette nouvelle branche de recherches, mais il n’y a plus contribué lui-même que par quelques notes et articles (par exemple, la Contribution à l'étude du genre Al- chimilla, 1893). Les premiers travaux de C. de Candolle sur la structure de la tige et de la MÉM. SOC. PHYS. ET HIST. NAT. DE GENÈVE, VOL, 89 (1919). 12 94 RAPPORT DU PRÉSIDENT feuille des Pipéracées l’ameneérent dans sa Théorie de la feuille (1868), à aborder divers problèmes de morphologie générale, et à définir R feuille comme un au point de vue des théories évolutionnistes (emarques de tératologie végétale, ISIT) — mais ces cas sont rares. Le plus souvent notre collègue évitait d'aborder ces sujets dans la conversation. Sa réserve en ces maticres était méme telle que nous n'oserions pas caractériser, méme et surtout sommairement, ses idées philosophiques. D'ailleurs, extrémement indépendant en matière de science comme dans tous les autres domaines, 11 ne se laissait jamais influencer par l'opinion prédominante où par les théories du Jour, quelles que fussent les autorités qui les présentaient, poursuivant avec persévérance POUR L'ANNÉE 1918 97 la ligne de conduite qu'il estimait juste et vraie, Ce culte désintéressé de la vérité, auquel il est resté fidèle toute sa vie, est un des beaux côtés de son caractère. Enfin, il y aurait lieu — pour étre quelque peu complet — de rappeler que C. de Candolle à contribué à l’histoire de la science par sa belle biographie de Marc Micheli (1902), par une notice sur la vie et les travaux de C.-B. Clarke (1906), et par ses trois rapports annuels comme président de la Société de physique et d’his- toire naturelle (1883, 1892 et 1897). On peut en dire autant des très nombreux comptes rendus bibliographiques qu'il a fournis aûx Archives des sciences physiques et naturelles. C.'de Candolle s’est toujours rigoureusement tenu à l'écart de la politique. Il a constamment soutenu de toutes ses forces les entreprises destinées à développer la vie scientifique dans notre pays : les Archives des sciences physiques et naturelles (du Comité de rédaction desquelles il était un membre assidu), la Société académique et l'Université, spécialement l'Institut botanique, la Société de lecture, la Société auxiliaire des sciences et des arts, la Société des arts, la Société botanique de Genève (qu'il a présidée plusieurs fois), la Société helvétique des sciences natu- relles, la Société botanique suisse, d'autres encore en ont fait mainte fois lexpé- rience. Il à fait partie de 1869 à 1874 de l’ancienne commission administrative de l’'Herbier Delessert et a souvent témoigné de son intérêt au Jardin botanique. Reçu membre de la Société de physique et d'histoire naturelle en 1861, il en à été pré- sident trois fois (1882, 1891 et 1896) et suivait assidüment nos séances. C. de Can- dolle était un désintéressé et un modeste : rien ne trahissait chez lui la recherche de la célébrité; il avait la réclame personnelle en horreur. Malgré cela, sa haute valeur à été reconnue par un grand nombre de corps scientifiques en Suisse et à l'étranger. Parmi les sociétés qui l'ont appelé à figurer au nombre de leurs membres, citons : les Sociétés des sciences naturelles des cantons de Vaud, Valais et Bâle, li Société botanique de France, la Société des sciences naturelles de Cherbourg, la Société botanique d'Edimbourg, la Société impériale des naturalistes de Moscou, la Société royale d'horticulture de Londres, la Société linnéenne de Londres, la Société royale de botanique de Belgique, la Société botanique du Brandebourg, la Société botanique allemande, l'Association britannique pour l'avancement des sciences, ete. etc. Il était docteur Lonoris causa des universités de Rostock (1877). Genève (1899), Aberdeen (1906) et Upsal (1907). La vénération des botanistes pour C. de Candolle à trouvé son expression dans la dédicace du genre Casèmirella Hassler, de la famille des Tcacinacées ; parmi les espèces qui portent son mom, citons un lichen le Biatora Casimiri Müll. Are. découvert par C. de Candolle Tui-méme au sommet de la Dent-du-Midi (Valais. 3260 m.). C. de Candolle avait épousé, le 27 août 1865, Mile Anne-Mathilde Marcet, fille 98 RAPPORT DU PRÉSIDENT du conseiller d'Etat et professeur François Marcet. De cette union sont nés deux fils et deux filles. IF a eu la joie de voir un de ses fils, notre collègue Augustin de Candolle, continuer la tradition de la famille en se vouant à la botanique : exemple bien rare d’une vocation scientifique se perpétuant pendant quatre générations suc- cessives. Au cours de sa laborieuse carrière, C. de Candolle à joui presque constamment d'une excellente santé. IT avait conservé jusqu'en 1916 la vivacité d'allures qui lui était propre et une ardeur au travail toute juvénile, Quand vint la longue et pénible maladie qui Pa emporté, il continua jusqu'au bout à lire les revues scientifiques, à correspondre, employant les phases de répit que lui laissait son mal à poursuivre l’étude de nouvelles Pipéracées, soignant les intérêts de sa bibliothèque et de son herbier. Après de longues souffrances stoïquement supportées, il s'est endormi pai- siblement dans son cher Vallon, le 3 octobre 191$. Avec lui s’est éteint un homme de haute valeur, un savant qui faisait honneur à son pays et au nom qu'il portait, un ami aux conseils et à l'expérience duquel on était sûr de pouvoir en tous temps recourir. Nous apportons encore une fois 161 à sa famille, et spécialement à notre collègue M. Aug. de Candolle, hommage de notre profonde sympathie. PIETRO BLASERNA Le fondateur de l'institut de Physique de Rome était né en 1836 à Fiumi- cello près de Gorizia. Né ainsi sujet autrichien, Blaserna fit ses études à Vienne, où il prit ses gra- des universitaires. Mais il est bientôt attiré vers Paris, où il travaille sous la direc- tion de Regnault. Il rentre dans sa vraie patrie, l'Italie, et il y fait une carrière rapide et bril- late en occupant successivement les chaires de Physique à Florence, à Palerme et finalement à Rome. Fixé ainsi dans la capitale, Blaserna, comme tant d’autres sa- vants italiens, est attiré par la politique. En déployant une activité intense, il mène de front ses devoirs de professeur et ses occupations d'homme public. Il fonde à Rome le grand Institut universitaire et il préside l’Accademia dei Lincei; il est secrétaire du Comité international des poids et mesures: il publie des travaux intéressants sur Pélectricité, la compressibilité des gaz, la couronne so- lire, etc. POUR L'ANNÉE 1918 99 Comme homme publie, Blaserna prend une part importante dans les conseils de son pays; il est nommé sénateur, et dans ces dernières années, élu vice-prési- dent de cette haute assemblée, charge qu'il remplissait au moment où éclata le grand conflit mondial. Blaserna fut un chaud partisan de la décision que FItalie choisit de prendre part à la lutte à côté des grandes puissances libérales de l'Occident. Blaserna entretenait des relations très étendues parmi les savants et les hom- mes cultivés du monde entier, et il aimait particulièrement à rappeler les rapports d'amitié solide le liant avec plusieurs savants genevois qui avaient tenu à le rat- tacher à notre Société en le nommant membre honoraire en 1871. JOHANN-WILHELM-FORTUNAZ COAZ7! (1822-1918) Le doyen des naturalistes suisses, Jean Coaz, naquit le 31 mai 1822 à Anvers, où son père, le capitaine grison Jean Coaz était au service hollandais dans le 31% régiment suisse, qu'il quitta d’ailleurs peu après (1825) pour rentrer dans sa patrie avec le grade de major. Le jeune Jean suivit les écoles de Coire ; il était destiné à la carrière forestière, et comme il n'existait pas alors en Suisse d'école appro- priée, il fit d'abord un stage pratique chez le maitre-forestier de Coire et chez lPins- pecteur cantonal, puis il alla continuer ses études à l'académie forestière de Tharand, où il suivit l’enseignement de Rossmässler, Cotta et Pressler. Il travailla ensuite quelque temps en Saxe dans diverses entreprises d’arpentage et d'exploitation de forêts. L'activité de Coaz en Suisse se divise très naturellement en trois périodes. Dans la première (1844-1851), il a été occupé à des levers topographiques dans les hautes alpes grisonnes; dans la seconde (1851-1873), il a été forestier en chef du 1 Notice rédigée par M. le Dr John Briquer. — L'auteur à utilisé les documents suivants : J. Coaz, Aus dem Leben eines Schweizerischen Topographen von 1814-1851. [Jahrbuch des S. A. C., vol. LIT (1918)]}; A. Bernoup, Docteur J. Coaz. [Echo des Alpes, vol. LIV, p. 402-405 (1918)]; C. Scurœrer, Oberforst- inspektor Dr Joh. Coaz, 1822-1918, ein Nachruf. [Schweizer Schriften für allgemeines Wissen, n°9 ( 1919)|. Les épreuves de cette dernière biographie, extrêmement complète et accompagnée d’un index des publi- cations de Coaz, ont été obligeamment mises à notre disposition par M. le professeur C. Schræter : nous lui en exprimons nos vifs remerciements. 100 RAPPORT DU PRÉSDIENT canton des Grisons ; dans la troisième enfin (1879-1914), il a été inspecteur en chef des forêts de la Suisse. Cette carrière représente soixante-dix ans de travail au ser- vice de l'Etat, dont quarante à la tête du service fédéral des forêts! Comme topographe sous les ordres du général Dufour, Coaz avait son bureau fixe à Genève, au rez-de-chaussée du petit batiment de la Porte de Neuve, mais la plus grande partie de son temps s’écoulait sur le terrain. Coaz à préparé sept feuilles entières et partielles de FAtlas topographique suisse (Davos, Closters, Bergün, Haute et Basse-Engadine, Misox). I faut lire dans le compte-rendu qu'il à donné lui-même, âgé de 96 ans, dans le Jahrbuch du Club alpin suisse, le récit de ses expériences dans les hautes alpes grisonnes à cette époque. Pas de cartes, pas de refuges, bien peu d'hôtels. Les uns après les autres, il fit, en véritable pionnier de l’alpinisme et de la topographie, l’ascension de la plupart des hauts sommets de cette région. Son ascension de la cime de la Bernina (4035 m.), vierge jusqu'alors, en vingt heures de dure grimpée, est un tour de force qui apparaît dans la sobre et modeste narration de Coaz comme quelque chose de tout naturel. À Page de 78 ans, Coaz a fêté le 50° anniversaire de son ascension à la Bernina en escaladant le Weismies (4031 m.) en Valais, et à l’âge de 90 ans il assistait, sans l'appui même dun bâton, à l'inauguration de la cabane de la Silvretta. On ne voit plus guère dal- pinistes de cette trempe! Indépendamment des remarquables travaux purement topographiques de cette époque, Coaz à écrit de nombreux articles d’alpinisme et de folklore se rapportant principalement au canton des Grisons et il à continué à le faire jusqu’à la fin de sa vie, avecla très courte interruption motivée par la guerre du Sonderbund, pendant laquelle 1! fonctionna comme secrétaire particulier du gé- néral Dufour. Lorsque Coaz reprit sa vocation de forestier en 1851, il avait devant Iui un imposant champ de travail: 140,000 hectares de forêt maltraitée et de forêt vierge; pour tout secours: un seul adjoint ayant une instruction scientifique. Tout était à créer: cours pour le personnel forestier subalterne, organisation de l’exploitation, reboisement, mesures contre la déforestation. Pendant cette période extraordinaire- ment active de sa vie, Coaz habitait Coire où il devint fondateur de la section Rhstia du Club alpin suisse et fut bientôt avec Theobald, Killias, Kaiser, Lorenz et d’autres, l’âme de la Société grisonne des sciences naturelles. C'est aussi à cette époque (1852) qu'il épousa Pauline Lütscher, dont il eut trois fils et trois files. L'expérience acquise au service cantonal désigna Coaz en 1875 aux autorités fédérales pour remplir le poste d'inspecteur forestier fédéral en chef, Il dut alors venir habiter Berne, où il résida jusqu’en 1914, date à laquelle il prit sa retraite et retourna à Coire dans son canton d'origine. Ici encore l’activité de Coaz fut in- lassable, Ce fut lui qui élabora l’avant-projet de loi fédérale relatif à la surveillance ssl ss À. POUR L'ANNÉE 1918 101 forestière; puis, la loi une fois adoptée, il dut en assurer l'exécution, ce qui était entouré de mille difficultés de nature technique et politique, résultant des conflits de compétence entre la Confédération et les cantons. Mais Coaz était doué de Péner- gie et de la ténacité qui caractérisent les montagnards: soutenu constamment par les autorités fédérales qui dotèrent convenablement son administration, il fit du service forestier fédéral un service modèle. Le role de Coaz comme inspecteur en chef était très varié. Relevé des emplacements réguliers d’avalanche (la Suisse en compte 9368!); protection des forêts et des cultures, contre les avalanches, en construisant au point de rupture de ces dernières; reboisement:; construction de routes ; mensuration de forêts; surveillance de la chasse et de la péche: telles étaient les tâches qui lui mcombaient. À côté de cette prodigieuse activité professionnelle, Coaz était un naturaliste enthousiaste. Il à herborisé pendant près de SO ans dans les Alpes suisses et connais- sait bien la flore de notre pays, à laquelle il à apporté de nombreuses contributions (entre autres la découverte du Primula glutinosa et du Cortusa Matthioli). Son bel herbier, admirablement tenu, à été donné par lui, encore de son vivant, au musée botanique de l'Ecole polytechnique à Zurich. I avait une prédilection pour les Conifères, dont il à introduit beaucoup d'espèces à Coire. En 1866, 11 à publié un article intéressant sur le repeuplement végétal du terrain laissé libre par le retrait des glaciers (traduit en français dans les Archives des Sociétés physiques et naturelles. pér. 3,t. XVII), sans compter de nombreuses autres notes de botanique forestière. Il à même laissé un manuscrit prêt à être imprimé sur les arbres exotiques des jar- dins de Coire et sur la culture dela vigne dans les Grisons. Enfin, on ne saurait ou- blier que c’est à son instigation qu'ont été exécutées plusieurs publications très im- portantes, en particulier les Recherches sur la répartition des plantes ligneuses croissant spontanément en Suisse, publication éditée avec luxe par le Département suisse de l'Intérieur, et dont trois livraisons formant un fort volume in-4°, admira- blement illustré, ont paru jusqu'ici. Coaz a encore été un initiateur en matière de protection des animaux et des plantes. Il avait préparé le terrain aux aspirations récentes dans ce domaine en pu- bliant avec son adjoint Schünenberger le bel Album des arbres de la Suisse (25 feuilles in-folio avec texte, Berne 1896-1900), puis dans un format plus modeste, avec Muhmenthaler, les Baum- und Waldbilder aus der Schweiz (3 séries, Berne, 1908-1913). Très importantes aussi sont ses publications sur les dégats dus à la neige et aux eaux, sur les torrents, les avalanches et les glaciers. Parmi les travaux classi- ques de Coaz se rapportant à ce sujet, il faut citer les suivants: Die Lacinen der Schveizeralpen (Berne 1881, 147 p. in-8, 5 tableaux, nombreuses illustrations) : MÉM. SOC. PHYS. ET HIST. NAT, DE GENÈVE, VOL. 89 (1919). 15 102 RAPPORT DU PRÉSIDENT Statistik und Verbau der Laiwinen in den Scluceizeralpen (Berne 1910, 126 p., in-4, 78 pl., carte). Enfin, Coaz a rendu un très grand service, non seulement aux forestiers, mais encore aux naturalistes en général. lorsqu'il a donné la bibliographie forestière complète se rapportant à la Suisse (Bibliographie des Schveiz. Forstiwesens, fase. V,9c de la Bibliogr. nat. suisse, 150 p. in-8, Berne 1894, et supplément p. 151- 231, Berne 1907), ainsi que la bibliographie se rapportant à la péche (même recueil, fasc. V, 9, c, Berne 1898). Coaz avait atteint l'age d'un patriarche (97 ans) lorsqu'il s’est éteint paisible- nent le 18 août 1918, et cependant rien dans son extérieur n'aurait pu faire prévoir son extraordinaire résistance aux atteintes de Page. D’apparence plutôt chétive, il présentait une tête aux traits délicats: seuls la vivacité du regard et le menton décidé trahissaient l'énergie qui résidait en lui. Bienveillant, imposant le respect par la seule vertu de son expérience et de son caractère, laborieux, homme du devoir, tel à été Jean Coaz. Coaz à joué un grand rôle dans la vie des sociétés suisses, petites et grandes. Il a été le premier président de la section Rhætia et, en 1865, le président central du Club alpin suisse. À la Société helvétique des sciences naturelles 11 à été long- temps membre, puis membre honoraire de la Commission des glaciers, et a fonc- tionné de 1886 à 1892, comme membre du Comité central à Berne. Il était mem- bre des Sociétés des sciences naturelles des cantons des Grisons, Bale, Berne, Fri- bourg et Vaud, sans compter de nombreusesautres associations. Il avait été élu mem- bre honoraire de la Société de physique et d'histoire naturelle de Genève en 1902. Parmi les corps scientifiques étrangers qui ont tenu à faire figurer Coaz sur leurs rôles, rappelons l'Académie d'agriculture de France, dont il était membre corres- pondant. L'université de Berne avait décerné à Coaz le grade de docteur honoris ITTETTE JAMES ODIER'! M. James Odier, né à Genève en 1832, faisait partie de notre Société depuis 1864. I était le doyen de nos associés libres. Par sa personnalité, son labeur, ses relations, James Odier à honoré notre ville. ! Cette note biographique ainsi que la suivante sont dues à l’obligeance de M. le prof. J.-L. Prevost. POUR L'ANNÉE 1918 103 Apres un séjour aux Etats-Unis d'Amérique, il revint à Genève avec des vues nouvelles et un vif esprit d'entreprise. Il ne tarda pas à occuper une des places le plus en vue dans nos cercles financiers. Il fut administrateur et président d’un grand nombre de sociétés et il n’est pour ainsi dire pas une création où un emprunt d'in- térêt général auxquels il n'ait été appelé à coopérer. Doué d’une culture étendue, il ne cessa, en dehors des affaires, de s'intéresser aux sciences naturelles. Il affectionnait en particulier les insectes dont il avait une belle collection. Alpiniste zélé et grand chasseur, il parcourut longtemps nos mon- tagnes et nos vallées d’où il rapportait des trésors d'observation. WILLIAM FAVRE M. William Favre, né à Genève en IS4HS, était membre associé libre de notre Société depuis 1876. IT à acquis la reconnaissance éternelle de ses concitoyens par la donation à sa ville natale de la superbe propriété de la Grange. Sans se spécialiser en aucun domaine William Favre avait acquis une culture générale étendue. Il $'occupait avec prédilection de travaux d'histoire, et surtout de questions militaires. Type accompli de gentilhomme, il était foncièrement bon et charitable. Il s’est notamment à plusieurs reprises employé à remédier à certaines crises de chômage en faisant exécuter de grands travaux dans sa propriété, pour v occuper les ouvriers sans travail. C’est un grand philanthrope qui disparait. ACTIVITÉ SCIENTIFIQUE DE LA SOCIÉTÉ LISTE DES TRAVAUX PRÉSENTÉES AUX SEANCES. Astronomie-Météorologie. M. Raoul GAUTIER. Quelques anomalies climatologiques de l'hiver et du prin- temps 1918. Le même, La Nova Aquilae, observations faites à Genève et ailleurs. 104 RAPPORT DU PRÉSIDENT Physique. M. C.-E. GUYE. Table pour le calcul des masses longitudinales, transversales et cinétiques dans la relativité. M. A. SCHIDLOF. Sur la vitesse de propagation d'un signal optique dans un milieu absorbant. Le même. Encore une fois les sous-électrons. Le même, Sur la méthode des Gabeln. Le même, Remarque sur la photophorèse négative. M. Alex. MULLER. Note sur la limite du spectre des rayons X et la loi des quanta. Chimie. M. BRINER, Sur la vitesse d'oxydation de l’oxyde d'azote en relation avec le probleme industriel de la récupération des oxydes d'azote. Le même, A propos de la formation de l’ammoniaque aux températures élevées. M. Amé Picrer. Essai de synthèse dans le domaine des sucres. MM. Amé PiCrer et Mare CRAMER. La distillation de lalbumine dans le vide. M. Jean SARASIN. Distillation de la cellulose et de l'amidon dans le vide. Géologie et minéralogie. M. H. LAGOTALA. Sur la géologie des environs de St-Cergue. M. REINHARD. Interprétation tectonique du gisement de pétrole de Santa- Clara-Valley, en Californie. M. R. SaBoT. La méthode de Fédoroff et son application à la détermination des Feldspaths. Botanique. M. John BRIQUET. Sur la morphologie et la biologie du genre Micropsis. D. C. Le méme, Les bractées paléales et l’organisation Horale du genre Psilocarphus Nutt. Le même. Sur la morphologie et la biologie de la fleur et du fruit du Diaperia prolifera Benth. Le méme, Les fruits du Diaperia multicaulis Benth et Hook. POUR L'ANNÉE 1918 105 M. B. P.-G. HOCHREUTINER. L’allongement des nœuds du Cratoxylon flori- bundum Vill. (Guttiferse.) Le même. Une ascidie terminale chez un plant de chou-fleur. Le même. La fonction «lodiculaire >» des corpuseules hypogynes chez les Guttifères. Zoologie. M. AÏf. BÉTANT. L'action du sulfate de cuivre sur le plankton. M. Arnold PICTET. Sur l’origine du dimorphisme sexuel chez les Lépidopteères. Le même. Intervention de l'élévation de température pour provoquer l’éclosion des Papillons. Physiologie. Embryologie. Psychologie. M. EF. BATTELLI. Méthode pour préciser le point d'application des substances chimiques dans la profondeur des centres nerveux. Le même. Méthode pour rétablir le rythme normal dans les cœurs en trému- lations fibrillaires. M. N. BETCHOV. Systématisation branchiale des nerfs craniens. Le même. Vitesse de propagation des ondes du pouls veineux chez l’homme. M. Ed. CLAPARÈDE. Sur une méthode de mesure de la connaissance d'une langue étrangere. Le même, Les deux formes fondamentales de l'acte de l'intelligence. MM. L. STERX et Raymond (AUTIER. Passage simultané des substances dans le liquide céphalo-rachidien et dans les centres nerveux. Les mêmes. Le passage dans le liquide céphalo-rachidien de substances mtro- duites dans la circulation et leur action sur le système nerveux central chez les différentes espèces animales. MM. L. STERN et E. RoTHLIN. Effets de l'application locale du eurare sur les différentes parties du cervelet. RS . a : DE Ne nl à à Pa LE : [ | on L +. o J ee DUT L » e : ï LL Nude sd k KCA de Las . \ Re LR Le AC pr WA to LS = — un à É at; ANT » h de ge ÉA D CRT US PUBLICATIONS DE LA SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE ET D'HISTOIRE NATURELLE DE GENÈVE La Société peut disposer de collections complètes de ses Mémoires. (Tomes 1-38 et volume du centenaire.) Pour traiter, s'adresser au secrétaire des publications. (Adresse de la Société : M. le secrétaire des publications de la Soc. de physique, P. A. au Museum d’hist. naturelle, Genève, Suisse.) Comptes rendus des séances de la Société (in-8°). Tomes I-XXXV (1884-1918). Prix Fr. 35 Liste des publications des membres de la Société (1883) in-8° avec supplément (1896) Prix ann. FAT cs et OR Eh RER INSEE re ET 6 Imprimerie Albert Kundig, Genéve (Suisse). MÉMOIRES SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE D'INSDOLRE NATURELLE DE GENÈVE Volume 39 FASCICULE <> RaPPORT PRÉSIDENTIEL POUR L'ANNÉE 1919 par J. CARL LES NAPPES D'EAU SOUTERRAINE DE L'ARVE par Raoul BOISSIER (Avec 2 planches.) GENEVE GEORG & Cie BALE et LYON méme maison. INT RMS Ye one BUG NT AU Fa, CE Le Er : 'E Ar. DS ; À H he. u “it Et S "1e ] | PE UET NS : A à LES ; _ 0 ù HA 0” it . . s TABLE DES MATIÈRES DU s FASCICULE 3. VOLUME 39 Rapport présidentiel pour l’année 1919, par M. J. Cac. . . . . . . . . . Les nappes d'eau souterraine de l’Arve, par M. Raoul Borssrer (av: c 2 planches) . ? . . le + 2 + M Es € n à Li i Le ; À L ‘ LL nd # . ë PRES ne £& ; Bb, 2 6 e : Li à 2 » MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE ET D'HISTOIRE NATURELLE DE GENÈVE VOLUME 39, FASCICULE 8. RAPPORT DU PRÉSIDENT DE LA SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE ET D'HISTOIRE NATURELLE DE GENÈVE POUR L'ANNÉE 1919 PAR J. CARL ne NN Re — MESSIEURS ET CHERS COLLÈGUES, L'année écoulée débuta pour notre Société sous d’heureux auspices. Trois membres ordinaires, actifs dans les laboratoires de notre université, vinrent grossir nos rangs. L'Europe occidentale étant retournée à l’état de paix, on pouvait espérer que les études scientifiques reprendraient tous leurs droits et qu’il en résulterait une recrudescence rapide de l’activité des sociétés savantes, au moins dans les pays neutres. Cet espoir ne s’est pas réalisé complètement. Les préoccupations pratiques continuèrent à dominer sur les aspirations d'ordre idéal et le progrès réalisé sur les années précédentes fut peu sensible, si on peut en juger par la fréquentation de nos séances et le nombre des communications qui y furent pré- sentées. Cependant, dans les pays qui nous environnent, la vie scientifique com- MÉM. SOC. PHYS. ET HIST. NAT. DE GENÈVE, VOL. 89 (1920). 14 108 RAPPORT DU PRÉSIDENT mence à sortir de sa torpeur et les relations avec ies sociétés savantes de l'étranger se sont en partie renouées. Plusieurs de celles-ci ont été très sensibles à l'offre que nous leur avons faite, de reconstituer dans leurs bibliothèques les séries de nos publications qu'une aveugle fureur avait détruites. À la séance annuelle de la Société helvétique des sciences naturelles, qui eut lieu à Lugano, nos membres ont eu l’occasion de reprendre contact avec leurs col- legues suisses et de donner leur adhésion provisoire à une modification importante dans les rapports de nos sociétés cantonales avec la Société helvétique. Désormais nous participerons à la direction de celle-ci d’une manière plus directe et plus eff- cace. Dans une de nos dernières séances, vous avez par votre vote unanime scellé le nouveau pacte et désigné comme porte-paroles au sein du sénat de la So- ciété helvétique, MM. A. Brun et L. W. Collet. Notre Société était représentée à Lugano par MM. Amé Pictet et Frédéric Reverdin. M. Charles Sarasin à bien voulu apporter nos félicitations et nos vœux à notre membre honoraire, M. le prof. AIlb. Heim, à Zurich, à l’occasion de son 70% anniversaire, Un autre membre honoraire, M. le D' Fritz Sarasin, à Bâle, a célébré le 3 décembre, dans l'intimité, son 60% anniversaire; votre président lui a adressé à cette occasion, par télégramme, vos félicitations. M. John Briquet représenta notre Société à Lausanne, à la fête du centenaire de la Société vaudoise des sciences naturelles. Enfin, votre président fut convié à la remise à l'Université du buste de M. Casimir de Candolle; il se fit votre interprète pour rappeler tout ce que notre Société doit à quatre générations de cette famille de savants. Si notre Société n'a pas brillé pendant l’année écoulée par le nombre des tra- vaux qui lui furent présentés, elle à en revanche pris sous ses auspices l’exécution d’une œuvre de grand intérêt scientifique et pratique. Dans la première séance de février, notre dévoué secrétaire, M. Joukowsky, signala la présence aux archives de l'Etat de l’original d’une carte du canton de Genève levée par le général Dufour en 1837, à l'échelle de 1 : 12500. IT fit ressortir les grands avantages de cette carte et insista sur l'utilité de sa publication. Notre Société adhéra sans hésitation à cette idée et désigna une commission chargée de faire les premières démarches et les études préliminaires en vue de la publication. Les membres de cette commission, MM. Joukowsky, Emile Chaix et Collet, se mirent immédiatement en rapport avec les autorités cantonales d’une part et avec la maison d'édition Kümmerly et Frey d'autre part. L'intérêt que nos autorités portent à cette entreprise, la bonne volonté qu'ont mise MM. Kümmerly et Frey à l’exécution d’une épreuve et surtout la compétence et le dévouement de notre commission, font bien augurer du résultat final. Dans Pétat actuel de la question, il ne s’agit pas seulement de publier la carte à courbes de niveau levée par le général Dufour, mais d’y introduire en même POUR L'ANNÉE 1919 109 temps la planimétrie actuelle sur la base du cadastre et de doter le public genevois d’une carte moderne, répondant aux besoins les plus divers. Notre Société, dégagée de toute responsabilité matérielle, conservera la haute surveillance de l'exécution de cette œuvre. Qu'il me soit permis d'exprimer en votre nom aux membres de la commission de la carte Dufour, et à son infatigable rapporteur, M. Joukowsky, en particulier, toute notre gratitude pour le grand dévouement dont ils ont fait preuve dans cette première étape de leur mandat. Dans la seconde année de leur existence indépendante, nos comptes rendus ont affirmé leur vitalité grâce aux soins éclairés que M. Joukowsky voue à leur rédac- tion et grâce aussi à la bonne volonté que la plupart des auteurs mettent à observer les règles adoptées pour la publication. Notre Société à élu en 1919 deux membres honoraires, M. Paul Choffat, géo- logue à Lisbonne, et M. A. Jaquerod, physicien, recteur de l'Université de Neu- châtel. La mort, qui épargna notre Société dans les premiers mois de l’année, fit ensuite des lacunes très sensibles dans nos rangs. Nous déplorons le décès de trois membres honoraires, MM. Paul Choffat, Emile Fischer et Alfred Werner, de deux membres ordinaires, MM. Sigismond Reich et Edmond Weber, et d’un associé libre, M. Pierre Pictet. Nous retracerons tout à l’heure la carrière scientifique de nos collègues disparus. Vous êtes appelés ce soir à désigner le vice-président pour 1920, ainsi que trois membres du comité. Nos trois secrétaires et notre trésorier veulent bien consentir à rester à leur poste. J’exprime à ces dévoués collaborateurs ma profonde recon- naissance pour l’aide que j'ai trouvée auprès d'eux pendant l’année de ma présidence. NOTICES BIOGRAPHIQUES EDMOND WEBER (1864-1919) Le 1° décembre, nos membres furent surpris d'apprendre le décès de leur col- lègue Edmond Weber. Une maladie interne incurable eut raison de cette nature robuste dans l’espace de six semaines. Edmond Weber était né à Genève le 8 novembre 1864. Il fréquenta le collège de notre ville, où il noua de nombreuses et solides amitiés. Inscrit à l'Université dès 1883, il cultive au début à la fois les lettres et les sciences, acquiert en 1884 le diplôme de bachelier ès lettres et, une année plus tard, celui de bachelier ès sciences 410 RAPPORT DU PRÉSIDENT physiques et naturelles. A cette époque, il se sentait attiré vers la médecine; mais en cours de route, l’enseignement de Carl Vogt et l’encouragement direct que lui prodiguait sans cesse ce savant éminent, l’enthousiasmèrent pour la zoologie. C'est aux Rotateurs, petits invertébrés habitant nos eaux douces, qu'alla dès le début son intérêt. Les premiers fruits de ses recherches se trouvent déposés dans sa thèse de doctorat intitulée: « Notes sur quelques Rotateurs des environs de Genève », parue en 1888. Ce premier essai suscita de la part d’un collègue anglais anonyme une critique très acerbe, qui montre surtout que le jeune naturaliste s'était risqué sur un terrain encore peu déblayé, où l'expérience technique joue en outre un rôle considérable. Cet insuccès, plus apparent que réel d’ailleurs, ne fut pas de nature à détourner Weber de son étude préférée. Toute sa carrière scientifique est vouée à la connaissance des Rotateurs, dont il suit jour par jour les progrès, en corrigeant ses premières conceptions et en étendant toujours plus le champ de ses observations personnelles, qu'une absence prolongée des bords du Léman ne semble pas avoir interrompues. Ses études universitaires terminées, Weber fit un stage de six mois à la station zoologique de Naples. Ensuite il occupa pendant une série d’années le poste de conservateur des pêches maritimes à la station zoologique de Villefranche, où 1l se fit vivement apprécier par le directeur de la station, le professeur Korotnef. Ville- franche fournissant à cette époque à nos laboratoires universitaires le matériel pour l’enseignement de la zoologie, Weber se trouve de ce fait en relations suivies avec de nombreux collègues, qui sont unanimes à reconnaître les beaux résultats de ses méthodes de fixation et de conservation de la faune marine. Lorsqu’en 1895 le nouveau directeur du Musée de Genève entreprit la réorga- nisation de nos collections, Weber fut appelé à l’assister dans cette tâche. La grande expérience technique et administrative qu’il s'était acquise à Villefranche le désignait tout particulièrement pour ce poste. Les fonctions absorbantes d’assis- tant au Musée, pendant la période de réorganisation, ne purent le distraire cepen- dant de ses préoccupations scientifiques. Le lac, les étangs et les marais du canton, ainsi que les mousses de nos forêts, lui avaient fourni pendant les étés de 1888 à 1890 un matériel assez riche et varié, pour qu’il pût entreprendre l'étude mono- oraphique de nos Rotateurs sur une base très large. Cette étude fut publiée en 1897-98 dans la ARevue suisse de Zoologie ; elle comprend plus de 500 pages et 15 planches coloriées. L'auteur s’y est appliqué à décrire chaque espèce d’une façon très exacte, quoique concise, et à éclairer les diagnoses par un nombre consi- dérable de croquis; la partie synonymique et bibliographique de ce travail se trouve à la hauteur de la partie descriptive. Une étude de cette envergure, à laquelle tous les spécialistes reconnaissent un caractère très personnel, ne pouvait POUR L'ANNÉE 1919 111 manquer de stimuler les recherches sur ce groupe. En facilitant grandement la détermination des espèces, elle permit en outre aux hydrobiologistes de prêter aux Rotateurs toute l'attention qu’ils méritent, en raison de leur grande fréquence dans les eaux douces et de leur très intéressante variation locale et saisonnière, Grâce à leur reproduction dans un ouvrage de détermination moderne et très répandu, la « Süsswasserfauna Deutschlands, Oesterreichs und der Schweiz », les figures des Rotateurs dessinées par Weber intéresseront un nombre toujours plus grand de chercheurs et porteront au loin le nom de notre collègue. Pendant les vingt ans qui suivirent la publication de sa monographie, Weber fit surtout œuvre de bibliographe et d'iconographe, en collectionnant sur fiches les figures et les diagnoses de Rota- teurs parues dans des périodiques et des ouvrages rares. Cette collection, qui constitue un complément très utile de sa monographie, facilitera considérablement la tâche d’un successeur dans cet ordre de recherches. Constamment mis à contri- bution par des collègues spécialisés dans la même branche, Weber ne cessa de les aider de ses conseils dans des questions de bibliographie ou de synonymie. A son tour, il à trouvé dans la personne de Mie G. Montet une collaboratrice avisée et consciencieuse, lorsqu'il s’est agi de l’étude des Rotateurs pour le « Catalogue des Invertébrés de la Suisse », que publie notre Muséum. Ce fut sa dernière publication. Une revision des familles de cet ordre, qu'il avait préparée avec soin, ne put voir le jour à cause des grandes difficultés de publication qu'amena la guerre. Enfin, un mémoire concernant la taxonomie de nos campagnols, pour lequel il avait réuni des documents photographiques, reste machevé. Dans ses fonctions d'assistant au Muséum, qu’il exerça pendant vingt-quatre ans, Weber fit preuve du même esprit d'ordre et d’exactitude minutieuse qui l'avait guidé dans ses études sur les infiniment petits. Nos sociétés scientifiques n’ont jamais exercé sur lui un grand attrait. Dans la nôtre, il ne comptait pas parmi les membres assidus à nos séances et n’occupa aucune charge en vue; en revanche il nous a rendu, depuis la maladie de M. Frey- Gessner, de grands services en assumant le controle et l’inscription des périodiques que nous recevons en échange de nos publications. Son sens pratique et Sa servia- bilité s’affirmèrent une fois de plus dans l’aide qu'il prêta à l’organisation de nos dépôts dans les sous-sols de la bibliothèque publique. 112 RAPPORT DU PRÉSIDENT SIGISMOND REICH ! (1883-1919) Sigismond Reich est né en 1883 à Sieradz (Pologne russe). Il fit ses premières études au (Gymnase de Kalisch, puis suivit des cours de mathématiques aux Uni- versités de Berlin et de Zurich. Mais il abandonna vite cette branche pour la chimie, De 1904 à 1909, il fréquente les laboratoires de l'Université de Berne, et y est reçu docteur en philosophie, avec une thèse de chimie minérale, faite sous la direction du professeur Friedheim. C'est toutefois la chimie organique qui Pattirait surtout. Il vint létudier à Geneve en 1909 etne quitta plus dès lors notre Université. Assistant au laboratoire de chimie organique en 1911, privat-docent en 1914, lauréat de la Société suisse de chimie en 1917, il n’a cessé de se consacrer à des recherches d'ordre purement, scientifique. Naturalisé (renevois en 1912, il s’intéressait vivement à tout ce qui touche à notre vie intellectuelle. Il ne fut cependant reçu membre ordinaire de la Société de physique et d'histoire naturelle qu’en 1917. Ses fonctions d'assistant, auxquelles il $’est entièrement voué pendant huit ans, répondaient bien à ses aptitudes. Reich était, en effet, particulièrement doué pour l’enseignement; son esprit tres clair, ses facultés d'exposition, son enthou- siasme pour toutes les questions de la chimie, faisaient de Jui un maitre hautement apprécié des nombreux étudiants dont il eut à diriger les débuts, et plus tard les travaux de doctorat. Une vingtaine de thèses sont sorties de cette collaboration. Elles roulent presque toutes sur des sujets de stéréochimie, qui était le sujet de prédilection de Reich, et en particulier sur le problème de l’empéchement stérique. Il en avait proposé une solution ingénieuse, et il s’'appliquait à la corroborer par des observations aussi nombreuses que possible, mais qui exigeaient du temps et des recherches aussi variées que délicates. Malheureusement ce travail de longue haleine, qu'il avait entrepris avec ses élèves, et qu'il poursuivait avec une patience et une persévérance inlassables, fut brusquement interrompu par une grave maladie, dont Reich fut atteint dans l'été 1918. Les soins que lui prodigua une épouse dévouée ne parvinrent pas à enrayer les progrès du mal, et notre collègue y succombait le 11 octobre 1919. La mort de Reich à été une très grande perte, non seulement pour notre Ecole de chimie, mais pour la science en général, car les travaux qu'il à fait ! Notice rédigée par M. le Prof. Amé Pictet. POUR L'ANNÉE 1918 113 paraître dans ces huit dernières années dénotent un esprit clair et original, ainsi qu'une grande habilité expérimentale, et laissaient prévoir pour leur auteur un brillant avenir scientifique. PAUL-LÉON CHOFFAT! (1849-1919) Né à Porrentruy le 14 mars 1849, Paul-Léon Choffat à fait ses premières études dans sa ville natale, de 1861 à 1868, à l’école cantonale. D'après une auto- biographie que possède la famille du défunt, c'est par des courses faites avec les professeurs Ducret et Thiessing, de cette école, qu'il à pris le goût de la géologie. De 1871 à 1874, il suit les cours de l'Ecole polytechnique, à Zurich, où il fut nommé privat-docent en 1875, puis en 1876 à l'Université. Il a conservé ces fonc- tions jusqu’en 1883, date de sa démission. C’est en 1874 que commence la série des publications de Paul Choffat sur le jurassique supérieur du Jura. Ses travaux sur le terrain, qui se distinguent dès le début par le souci de la précision, ont contribué pour une très large part à établir sur des bases solides la connaissance des faciès et ont abouti à la synthèse d’un mouvement de déplacement vers le S.-E. de la limite des faciès septentrional et méridional au fur et à mesure qu'on monte la série stratigraphique. L'auteur en a donné dans les Archives des Sciences physiques et naturelles de 1875 un résumé qui marque la date où la lumière s’est faite sur cette importante question. La consé- quence en fut la suppression du terme de corallien dans Ia nomenclature stratigra- phique. La série des travaux sur le jurassique est longue et les publications qui s'y rattachent se trouvent dans divers périodiques suisses et étrangers. Elle représente la première et très féconde période de recherches, et s’échelonne de 1874 à 1897. Mais, dès 1879, Paul Choffat agrandit beaucoup son champ d'action en entrant comme collaborateur au service géologique du Portugal, où sa connaissance des terrains jurassiques était de nature à apporter un précieux concours. C’est en 1885 que débute la suite des publications sur la géologie du Portugal, dont la première est un aperçu sur les établissements géologiques du pays. Viennent ensuite des notes qui constituent un plan d'organisation des travaux sur le terrain, des notices nécrologiques sur les savants qui ont étudié la géologie du Portugal, ainsi qu’une bibliographie complète qui à paru par fascicules. Parallèlement avec les travaux précédents, Paul Choffat poussait ses recherches sur les terrains jurassiques et crétacés ainsi que sur les roches éruptives, sans ! Notice rédigée par M. le D' E. Joukowsky. 114 RAPPORT DU PRÉSIDENT perdre de vue les études géographiques qui s’y rattachent intimement. Les impor- tants resultats de ces recherches sont consignés dans des mémoires parus de 1880 à 1904; quelques-uns portent, à côté du nom de Choffat, ceux de divers collabora- teurs, parmi lesquels nous trouvons celui de Perceval de Loriol. Les matériaux recueillis étaient variés et si abondants, qu'aucun homme n’eût pu prétendre les étudier à lui seul, étant donné le degré actuel de la spécialisation. On retrouve dans la partie stratigraphique, des synthèses sur le problème paléogéographique dont nous avons déjà parlé: les limites de faciès septentrionaux et méridionaux dans les mers secondaires. Le nom de Paul Choffat restera lié à la connaissance de ces questions. Ses recherches ont porté sur des domaines variés et appartiennent à toutes les branches de la géologie. La diversité de ces recherches et les résul- tats qu’elles ont donnés sont la preuve de belles qualités d'adaptation. Il serait trop long de donner une liste complète des travaux de Choffat. Nous renvoyons à la liste qu'il en a publiée dans les « Communications du service géolo- gique ». Pour caractériser son activité au Portugal, il suffit de dire qu'on peut, à bon droit, le considérer comme le principal artisan de la constitution du service géologique de ce pays. Il est désirable que lesprit scientifique qu’il y à apporté et qui s’est manifesté dans les belles cartes que ce service a publiées, reste toujours le œuide des travaux qu’on y entreprendra. Ses récoltes sur le terrain alimenteront encore des travaux, sans parler de l’œuvre synthétique, qu'il laisse à peu près achevée, sous le titre de + Carte des régions éruptives au Nord du Tage », et qu'il avait l’intention de publier à l'échelle de 1:100000. Des circonstances spéciales, indépendantes de sa volonté, en ont retardé la publication. [l est permis d'espérer qu’elle se fera, et l’on peut dire plus : il faut qu’elle soit faite, tant par raison d'utilité que comme hommage à la mémoire d’un travailleur infatigable et consciencieux qui n’a pas trouvé, vers la fin de sa carrière scientifique, la déférence à laquelle il avait droit. EMILE FISCHER (1853-1919) Dans l'intervalle de deux ans, la chimie organique a été privée de deux de ses représentants les plus féconds et les plus illustres. Les noms d’Adolf Bayer et d'Enile Fischer resteront à jamais associés par l’ampleur du travail qu’ils ont accompli comme par l'impulsion qu'ils ont donnée à leur science. Descendant d’une famille de commerçants, Emile Fischer semblait destiné à se POUR L'ANNÉE 1919 115 vouer au commerce. Mais son penchant naturel lattirant vers les études, il quitta l'apprentissage pour s'inscrire à l’Université de Bonn et, deux ans plus tard, à celle de Strasbourg, où Adolf Bayer venait d'organiser l’Institut de chimie. En qualité d'assistant de Bayer il se révèle déjà bon observateur et expérimentateur habile. La découverte de la phénylhydrazine, qu'il fit à Strasbourg, devint le point de départ d’une grande série de synthèses très importantes. Lorsque son maitre fut appelé à Munich, en 1875, Fischer l’y suivit. A côté de ses recherches sur les hydrazines, il réussit à établir la constitution des colorants du groupe de la rosani- line. Ces succès lui valurent un appel comme professeur ordinaire à Erlangen, qu'il quitta en 1885 pour prendre la direction du laboratoire de chimie de Wurzbourg. La période de 1884 à 1894, la plus féconde de toute sa carrière, est marquée par une orientation nouvelle de ses recherches. La synthèse des principaux pro- duits du monde animal et végétal devint le but ultime de ses efforts. Lorsqu'il quitta Wurzbourg pour occuper à Berlin la première chaire de chimie de l'Empire allemand, Fischer, âgé alors de trente ans seulement, avait déjà résolu l’énigme de l'acide urique, élucidé la constitution des monosacharides et ouvert la voie à la syn- thèse des glucosides qui devait consacrer sa réputation mondiale. Ce travailleur infatigable à, pendant toute sa carrière, réussi à poursuivre simultanément plusieurs problèmes des plus difficiles et à les scruter jusque dans leurs plus fines ramifica- tions. Les études sur les glucosides qu’il continue à Berlin jusqu’à la fin de sa vie, ne l’empéchent pas de reprendre les recherches sur l'acide urique dans ses rap- ports avec le groupe des xanthines, qui se trouvent dans le noyau des cellules et y jouent sans doute un rôle biologique important. Après avoir démontré, à Erlangen déjà, que la purine constitue la base commune de lacide urique et des xanthines, il réussit à obtenir la purine en partant de l'acide urique, à établir par la voie expérimentale les affinités de structure entre cet acide et les xanthines et à synthé- tiser plusieurs xanthines et quelques-uns de leurs dérivés, comme la théobronime et la caféine. Ses études sur les purines et les sucres culminent dans la démonstra- tion expérimentale des rapports qui existent entre ces deux groupes de corps en apparence si étrangers les uns aux autres. Enfin les protéines, les corps chimiques les plus compliqués qu’on trouve dans la nature, deviennent à leur tour une de ses urandes préoccupations. Il contribue à la compréhension de leur strncture par l'analyse d’abord et réussit ensuite dans la synthèse des polyleptides les plus compliqués. La renommée que valurent à Fischer ses succès dans la construction synthé- tique des sucres fait souvent oublier les énormes services qu’il a rendus à l’industrie, à la technique et à la médecine, Nous avons déjà fait mention de l'intérêt qu'il MÉM. SOC. PHYS. ET HIST. NAT. DE GENÈVE, VOL. 89 (1920). 15 116 RAPPORT DU PRÉSIDENT porta de bonne heure aux matières colorantes et aux dérivés de lhydrazine. Dans un domaine plus restreint, on lui doit la découverte des qualités de l’éosine comme colorant différentiel des tissus animaux. Au cours de recherches poursuivant un but purement scientifique et comme par hasard, Fischer enrichit la pharma- copée de nombreux remèdes, parmi lesquels le véronal, un soporifique découvert en collaboration avec Mering, et la sajodine, sont les plus connus. La thérapeutique par l’arsenic lui doit un nouvel essor: depuis quelques années et grace à des combinai- sons introduites par Emile Fischer, Pemploi du iode, du brome et de larsenie en thérapeutique à perdu une grande partie de ses inconvénients. En initiateur, il parti- cipa pendant la guerre à l'exploitation de lPazote de l'air pour la fabrication de l'acide nitrique et à celle du gypse pour la fabrication de l'acide sulfurique. La fabrication de la glycérine par la fermentation et la synthèse industrielle du caout- chouc s’attachent également à son nom. IT est permis d'espérer que ces conquêtes dépasseront le but immédiat qui leur était assigné et honoreront le nom du grand chimiste en contribuant an bien-être d’une humanité revenue à des instincts paci- fiques. (D’après Chenuker Zeitung, N° 106 et 133. 1919.) ALFRED WERNER (1866-1919) Aux deux grands promoteurs de la chimie organique que furent Bayer et Fischer, succéda de près dans la tombe le réformateur de la chimie inorganique, Alfred Werner. Sa mort prématurée signifie pour la science et pour la science suisse en particulier une perte irréparable. Né à Mulhouse en 1866, Werner fit ses premières études de chimie à l'Ecole technique de Carlsruhe. Iles continua et les acheva à l'Ecole polytechnique fédé- rale sous la direction de Lunge, dont il fut ?’assistant pendant une année, Dès lors il ne quitta Zurich que pour compléter son instruction au Collège de France, où l’enseignement de Berthelot exerça sur lui une action déterminante. Admis en 1892 comme privat-docent à l'Ecole polytechnique fédérale, il passe bientôt à l'Univer- sité de Zurich en qualité de professeur extraordinaire. Deux ans plus tard, âgé de vinet-neuf ans seulement, il est promu professeur ordinaire de chimie morganique à la haute Ecole zuricoise, dont il deviendra une illustration et à laquelle il vouera toute sa carrière. Dans sa thèse de doctorat, dont le titre : « Beiträge zur Theorie der Affinität und Valenz » indique tout un programme, on trouve déjà en germe quelques-unes POUR L'ANNÉE 1919 117 des conceptions géniales qui lui vaudront plus tard le prix Nobel. Des études expé- rimentales entreprises avec Hantzsch le conduisent ensuite à la découverte de l’isomérie dans l’espace chez les combinaisons azotées et élucident d’un coup la stéréochimie de l’azote. Dès la premiere année de son professorat, Werner établit sa célèbre théorie de la coordination, qui, en dépit de l'accueil sceptique qu’elle rencontre d'abord, ne tarde pas à se substituer à la théorie des valences formulée par Kekulé. Pour Werner, l’affinité chimique ne se présente pas comme une force agissant dans une seule direction, mais comme une force émanant de la surface d’atomes sphériques et rayonnant dans tous les sens pour constituer autour de l’atome deux zones d'action. La molécule constituée d’un nombre déterminé d’atomes n’est pas nécessairement saturée; grace à ses valences libres, elle peut s’incorporer dans d’autres molécules ou s'ajouter à celles-ci. Les deux catégories de combinaisons qui en résaltent, les combinaisons de substitution et les combinai- sons d’addition, telles que les conçoit Werner, suffisent pour classer les combinai- sons inorganiques les plus complexes. Les acides oxygénés eux-mêmes, jusqu'alors isolés, rentrent dans le rang à côté des acides halogénés, des sulfato-acides et d’autres. En un mot, la nouvelle notion de lafhinité chimique aboutit à un système inorganique bien circonserit et harmonieux. En ce qui concerne les combinaisons de substitution, Werner avait été frappé par le fait que le nombre des molécules étrangères qui viennent se grouper autour de l’atome métallique est le plus souvent 6, rarement 8 ou 4. En partant de ce nombre 6, Son «nombre de coordination », Werner imagina la disposition de ces molécules autour d’un octaëdre, dont elles occupent les sommets. L'octaèdre devient ainsi le polyèdre fondamental des combinaisons inorganiques. Une grande partie de l’œuvre scientifique de Werner, ainsi que des centaines d’études spéciales faites sous sa direction, sont consacrées à la démonstration expérimentale de cette hypo- thèse qui ne tarda pas à se révéler extrémement féconde. Poussée à ses dernières conséquences par Werner lui-même, elle devait le conduire à la découverte de sels de cobalt, de chrome et de fer optiquement actifs. Le pouvoir rotatoire que l’on croyait surtout dévolu aux molécules organiques, s'étend ainsi à bon nombre de Corps Inorganiques. = Des plumes plus compétentes que la nôtre feront ressortir toute la portée des conceptions stéréochimiques nouvelles dues à cet esprit à la fois révolutionnaire et créateur, et leur répereussion sur le développement des sciences voisines, la physique et la minéralogie en particulier. Un appel à Wurzbourg, le prix Nobel pour la chimie et d'innombrables distinctions de la part de sociétés scientifiques et d’univer- sités vinrent témoigner à Werner de l'estime dont il jouissait dans le monde des savants. Aucun de ces hommages cependant ne semble avoir touché cet homme 418 RAPPORT DU PRÉSIDENT modeste autant que celui que lui rendit la petite république qu'il servait en réali: sant en 1909, par la création d’un nouvel institut de chimie, les conditions maté- rielles nécessaires à l’enseignement et au développement ultérieur d’une branche, au progrès de laquelle 11 avait le plus contribué. (D’après Neue Zürcher Zeitung.) ACTIVITÉ SCIENTIFIQUE DE LA SOCIÉTÉ LISTE DES TRAVAUX PRESENTES AUX SEANCES Astronomie et Météorologie. M. GAUTIER, R. Nouvelle baisse extraordinaire du baromètre et records de basse pression à Genève. — Id. La Nova Aquilæ. Indications complémentaires. Physique. M. GUYE, Ch.-E. L'équation de la décharge disruptive dans les mélanges de DAZ. M. MÜLLER, Al Recherches sur le spectre des rayons X. M. SCHIDLOF, A. et MALINIAK, St. Transformations subies par des gouttes d'huile maintenues en suspension dans différents gaz. Chimie. MM. BRINER, E. et NAVILLE, Ph. Sur la fixation de l’azote sous forme d'oxyde par l'arc électrique agissant en dépression. Géologie et Pétrographie. M. BRUN, A. Une roche engendrant le fer oxydulé magnétique par le chauf- fage. — Id. Les éruptions du Galoeng-Goeng en 1818 et du Kloet en 1919, d’après les documents hollandais. MM. CoLLET, L.-W. et REINHARD, M. Sur l'existence d’une lame de cristallin dans le sédimentaire de la Jungfrau. . POUR L'ANNÉE 1919 119 MM. CQLLET, L.-W., REINHARD, M. et PAREJAS, Ed. La géologie de la Jungfrau. MM. DurarC, L. et GROSJIEAN, M. Sur les gites aurifères du Callao (Véné- zuéla). Géographie physique. M. CHaix, A. Coulées de blocs (Rock-glaciers, Rock-streams) dans le pare national suisse de la Basse-Engadine. MM. CozLer, L.-W. et MELLET, R. Le lac Ritom (Haute Leventine, Tessin) Provenance de l'hydrogène sulfuré. Abaissement du niveau du lac de 30 m. M. JoukowskY, E. Une carte topographique peu connue : Le canton de Genève à 1: 12,500, équidistance 4 m. — Id. Rapport de la commission de la carte du canton de Genève à l'échelle de 1 : 12,500. M. PAREJAS, Ed. La formation des continents et des océans d’après la théorie de Wegener. | Botanique. M. BRIQUET, J. Les pseudoglandes et les trichomes involueraux des Char- dons. — Id. Quelques points de la morphologie et de la biologie foliaires des Colu- melliacées. — Id. Le stigmate et la biologie orale des Hydrangea américains. — Id. La structure foliaire des Hypericum à feuilles scléromarginées. — Id. Les tri- chomes foliaires des Centaurées Phrygiées. M. CHoparT, R. La panachure et les chimères dans le genre Funkia. M. HOCHREUTINER, B.-P.-G. La parenté des Guttifères et des Hypéricinées. — ÏId. Sur les relations de parenté des Guttifères avec d’autres familles végétales. — Id. Le carpocratère, un nouvel organe du fruit des Malvacées. Zoologie et Paléontologie. M. Bepor, M. Le développement des colonies d’Aglaophenia. M. REviLuiop, P. L'état actuel de nos connaissances sur les Chiroptères fos- siles (note préliminaire). 120 RAPPORT DU PRÉSIDENT POUR L'ANNÉE 1919 Anatomie et Embryologie. M. Bugarp, E. Une déformation des mâchoires chez le rat albinos. Id. À propos d’un cas d’opocéphalie chez le cobaye: les synotocyclopes et Les strophocéphales. Physiologie. M. BATTELLI, F. et Mie SrERN, 14 Action des cytotoxines sur les différents tissus animaux. — Id. Transformation des acides fumarique et malique par les {ISSUS ANIMAUX. Mie STERN, L. et M. GAUTIER, Rd. Rapports entre les liquides céphalo-rachi- dien, sous-arachnoïdien et ventriculaire. MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE ET D'HISTOIRE NATURELLE DE GENÈVE VOLUME 99, FASCICULE 3 LES NAPPES D'EAU SOUTERRAINE DE L'ARVE PAR Raoul BOISSIER (Avec 2 planches.) INTRODUCTION En étudiant les alluvions transportées par les eaux de l’Arve pendant les années 1915 et 1916, mon attention fut attirée par les variations de niveau de la nappe d’eau souterraine, qui est utilisée par la Société des Eaux-d’Arve pour l’alimenta- tion en eau potable d’une partie du canton de Genève (rive gauche du Rhône). Mon étude sur le charriage des alluvions de l'Arve terminée, j'ai entrepris une longue série d'observations dans les cinq puits forés par la Société des Eaux d’Arve, dans l'Ile de Vessy. Mes observations ont porté sur les variations du niveau de l’eau de chaque puits, ainsi que sur les variations du niveau de l’Arve. A cet effet, j'ai exécuté, avec la collaboration de M. Pesson, ingénieur au Service fédéral des Eaux, un nivellement de précision pour rapporter les lectures effectuées dans les puits aux lectures faites en hauteur absolue au limnimètre placé dans l'Arve, sous la passerelle de l’Usine, pour mes recherches sur les alluvions. Simultanément j'ai mesuré la température de l’eau de chaque puits, ainsi que celle de l’eau de l’Arve, tout en prélevant des échantillons pour la détermination de la dureté de l’eau. Ayant constaté des variations de température dans l’eau de surface de diffé- rents puits, j'ai effectué des sondages thermiques dans chacun des puits, à différen- 1 Etude sur le charriage des alluvions de l’Arve, publiée dans les Annales Suisses, d Hydrographie, du Service Fédéral des Eaux, dans un Mémoire de M. le professeur L.-W. Collet et de Pauteur. 129 R. BOISSIER di ju tes profondeurs. À cet effet j'ai utilisé un thermomètre à renversement, le Rich- ter, vérifié par le Bureau fédéral des Poids et Mesures à Berne, et mis obli- geamment à ma disposition par le Directeur du Service Fédéral des Eaux. M. L. Reverdin a bien voulu s'intéresser à mon étude et effectuer pour moi des pêches de plancton dans l’Arve et dans les puits, pour déterminer si une communication existait entre la rivière et les puits, le lecteur trouvera ses résultats à la suite des miens. Enfin, j'ai trouvé un aimable collaborateur en M. Joukowsky, qui s’est fait une spécialité de la géologie du canton de Genève et qui a voulu bien expliquer à la fin de ce court mémoire, mes résultats, ainsi que ceux de M. Reverdin, en se basant sur la disposition des terrains fluvioglaciares de Ja région, les puits étant bétonnés et leur coupe géologique étant inconnue. Qu'il me soit permis de remercier ici sincèrement M. le professeur L.-W. Col- let de l’intérêt qu'il à porté à mes recherches et des conseils qu’il m'a donnés. Ma gratitude va aussi à la Direction de la Société des Eaux d’Arve, ainsi qu'à M. Fausch chef mécanicien de PUsine de Vessy qui ont tout fait pour faciliter mes recherches. Laboratoire de Géologie de l'Université de Genève, mai 1920. Raoul BOISSIER. Variations du niveau de l’Arve et des puits. Avant d'étudier les niveaux de lArve et des puits, jetons un rapide coup d'œil sur le régime de la rivière. Le cours de lArve peut être divisé en deux parties bien distinctes. Le premier tronçon, de la source jusqu'au Fayet, possède un régime alpin caracté- risé par des basses eaux en hiver (minimum en mars), une crue au printemps, et des hautes eaux en été, et une décrue en automne, Le deuxième tronçon comprend la section du cours d’eau dans sa traversée des Hautes Alpes cal- caires et des Préalpes, soit du Fayet à (renève. Cette partie possède un régime subalpin, très marqué à Genève, consistant dans la superposition du régime préalpin, dû aux précipitations atmosphériques, au régime alpin dù à l'influence des glaciers dans le bassin d'alimentation. A Genève, les niveaux de l’Arve commencent à monter dès le mois de mars, sous l'action des affluents préalpins. Quand cette action commence à toucher à sa fin, arrive lapport des aflluents alpins, soit des glaciers. Les débits continuent donc à augmenter pour atteindre leur maximum en Juin ou juillet. LES NAPPES D EAU SOUTERRAINE DE L'ARVE 12% A ce moment les torrents préalpins étant dans leur période d’étiage d'été, le niveau de l’Arve commence à baisser. En septembre, l'apport glaciaire diminuant, nous arrivons à une période de débit relativement faible pour octobre et novembre. Puis l’action des crues d'automne qui se produisent dans les afluents préalpins se fait sentir et provoque durant la fin de novembre, décembre et commencement de jan- vier, une nouvelle période de hautes eaux. Bien que nous ayons étudié les variations du niveau de lArve et des puits pen- dant trois ans, nous baserons nos comparaisons avant tout sur l’époque s'étendant de la fin de février aux derniers jours d'avril 1919. À ce moment de l’année, l’Arve sort de son étiage d'hiver par une série de crues assez brusques pour entrer dans sa période de hautes eaux. En examinant les courbes de la planche 1, on remarque immédiatement que l’on peut diviser les cinq puits, au point de vue des variations de niveau, en trois groupes. Le premier groupe comprenant les puits IV et V, possede des variations de niveau assez semblables à celles de PArve, avec pourtant des pointes moins accentuées. Le deuxième groupe, auquel appartiennent les puits Let IL, est caractérisé par des variations beaucoup plus faibles. On retrouve néanmoins l'allure générale de la courbe de lArve avec un certain retard dans l'apparition du minimum et du maximum. Le puits IT représente le troisième groupe. Nous retrouvons l'allure générale de la courbe de l'Arve en partie masquée par des oscillations provenant de variations brusques du niveau, dues au pompage. Il semble résulter de cette première série d'observations que les puits IV et V sont plus directement en relation avec les eaux de lArve que les puits I et IT. Les variations dues au pompage dans le puits IT, empêchent toute conclusion pour le moment. Remarquons, en terminant ces comparaisons, les hauteurs absolues du niveau de l’eau de l'Arve et dans les puits. L'eau des puits IV et V est à peu près au même niveau — comme le montre le graphique de la planche L La différence par contre, est plus prononcée entre les puits E et IL Enfin nous constatons, — et ceci à son importance, — que le niveau des puits [V et V est environ de 5 m. inférieur à celui de l'Arve, et celui des puits [ et IT d’envi- ron 8 m. Le niveau de l’eau dans ce dernier groupe de puits est done d’en- viron 3 m. inférieur au niveau de l’eau dans les puits IV et V. Quant au puit IT, dont le niveau est à peu près d’un mètre inférieur au niveau des puits Let IT, il représente un eas anormal. Nous avons en effet vu plus haut que les variations de son niveau étaient dues au pompage. Il en est de même pour la hauteur abso- MÉM. SOC. PHYS. ET HIST. NAT, DE GENÈVE, VOL. 89 (1290). 16 124 R. BOISSIER lue du niveau de l’eau. Nous avons eu l’occasion de vérifier cette assertion. Le pompage ayant été arrêté, pour cause de réparations, durant deux heures, nous avons pu déterminer la hauteur absolue du niveau normal de l’eau dans le puits [TT et chose intéressante, nous avons constaté que Peau dans les puits I, IT et-IIT est au même niveau. (Voir pl. 2, fig. IT). Pais l’on pompa durant deux heures dans le puits IF et ce fut le niveau de ce dernier qui devint le plus bas faisant baisser ses deux voisins Let IT. En faisant abstraction du pompage, nous arrivons donc à la conclusion que nous avons deux groupes de puits bien distincts. Le groupe comprenant les puits V et IV et l’autre groupe comprenant les puits L, IT et IT Cette conclusion est con- firmée par le fait que le niveau des puits IV et V n’a pas été influencé par le pom- page effectué dans le groupe des puits EL, IF et TIT. En résumé nos observations sur les niveaux de l’eau dans l’Arve et dans les puits nous permettent de constater que le niveau de l’eau n’est pas le même dans les deux groupes de puits. IT nous reste donc à rechercher les causes de cette dif- férence de niveau d'environ 3 m., ce que nous ferons en étudiant tout d’abord les températures, puis les duretés de l’eau des puits et de lArve. La température de l’eau de l’Arve et des puits. D'une manière générale l'allure de la courbe de la température de lArve épouse celle des variations du niveau. En effet, à l’étiage d'hiver nous trouvons les plus basses températures dans l’eau de surface 0,5°, et durant les hautes eaux d'été le maximum qui peut atteindre 15,5°. Nous signalerons cependant quelques exceptions à cette règle, à savoir qu'une crue rapide due à la fonte des neiges, dans les parties basses du bassin d'alimentation, provoque un abaissement de tempéra- ture qui se marque dans la courbe (voir planche 1) par une pointe en sens inverse de celle du niveau. Les pluies d'hiver, dans la partie basse du bassin d’alimenta- tion, provoquent, par contre, un réchauffement de Peau. Les températures de surface, mesurées dans les différents puits. confirment l'existence de deux groupes de puits, déjà mise en évidence précédemment par nos observations sur les hauteurs du niveau de l’eau. Voyons maintenant les résultats des sondages thermiques effectués dans les puits à différentes profondeurs. La température de l’eau des puits I IL, IV et V ne varie pas en profondeur, ce qui n’est pas le cas du puits IE Dans ce dernier, en effet, nous trouvons une au de surface plus froide que l’eau de fond. La différence peut atteindre 1,3°. Nous tenons à répéter ici que cette étude de la température de l’eau en profondeur à été effectuée au moyen d’un thermomètre à renversement de Richter, permettant de travailler avec précision: LES NAPPES D'EAU SOUTERRAINE DE L'ARVE 195 Nous arrivons done à la conclusion que le puits IT possède des eaux de tempé- ratures différentes, ce qui nous permet d'admettre l'existence de deux nappes d’eau souterraines, de provenance différente, qui se superposent dans ce puits. [/eau de surface possède une température se rapprochant de la température de l’eau des puits V et IV, tandis que la température de l’eau de fond se rapproche davantage de la température de l’eau des puits Let IT. Ces résultats intéressants demandent à être confirmés par une autre méthode, c’est la raison pour laquelle nous allons abor- der dans le chapitre suivant la question de la dureté de l’eau de l'Arve et des puits, les méthodes par coloration à la fluorescéine et ou par titrations après injection d'eau salée ayant dû être écartées étant donné l’utilisation de l’eau. Dureté de l’eau de l’Arve et des puits. Nous avons mesuré la dureté de l’eau de PArve et des puits par la méthode hydrotimétrique, basée sur l’action d'une solution alcoolique de savon sur les sels de chaux. L'examen des graphiques de la planche 2 nous permet des constatations inté- ressantes. Tout d’abord la courbe de la dureté de l’eau de l'Arve, comparée à celle des variations du niveau de l’eau nous montre que la dureté est inversément propor- tionnelle au débit. Cette loi énoncée pour la première fois par Baëff! se comprend aisément. En hiver, en basses eaux, l'Arve est certainement presque uniquement ali- mentée par des sources dont l'eau est très minéralisée, En hautes eaux, — que ce soit à la suite de pluies dans les parties basses du bassin d'alimentation ou pendant la fonte dans le bassin glacier, — les matières en solution sont en très faible pro- portion, Car nous nous trouvons ici en présence d'un cas de ruissellement, tandis qu’en hiver les sources représentent les résurgences de cireulations souterrames. Si nous étudions maintenant les courbes de la dureté de l’eau des puits L, IT, IV, V, du fond et de la surface du puits II et de Peau de PArve (planche 2), nous remarquons que les graphiques des puits IV et V et de Ja surface du puits TT ont la même allure que celui de la dureté de l’eau de lArve. Par contre les courbes des puits [, IT et du fond de l’eau du puits IT ont une allure toute différente de celle de l’eau de l’Arve, avec une dureté plus forte. Ces constatations confirment et précisent les résultats des observations faites sur les variations du niveau de l’eau et sur la température de l’eau des puits et de l’Arve. Elles les confirment en ce sens que nous avons la preuve de l'existence de 1 B. Baërr. Les Eaux de l’Arve. Recherche de Géologie expérimentale sur Pérosion et le trans- port dans les rivières torrentielles ayant des affluents glaciaires. Thèse de Doctorat. Université de Genève, 1891. 126 R. BOISSIER deux nappes d'eau souterraine, et les précisent en montrant que l'eau de la nappe supérieure est de l’eau de l'Arve qui a légèrement augmenté en dureté en traversant rapidement les alluvions de cette rivière. La nappe imférieure que nous trouvons dans les puits FE, IF et dans Le fond du puits IT, est par contre beaucoup plus miné- | f | | {ll |) { Fig. 1. — BOUTEILLE D'ECKMANN !. 1. Appareil en position de descente (ouvert) vu de face. 2. Même position, vue de profil. 3. Appareil en position de remontée (fermé). ralisée que l’eau de la nappe inférieure. L'eau de cette nappe à donc cheminé sou- terrainement dans des alluvions, beaucoup plus longtemps que celle de la nappe supérieure et s’est chargée de sels de chaux. Elle provient probablement d’mfiltra- tions lointaines d’eau de l'Arve, comme semblent le montrer les températures et les ! Cliché aimablement prété par le Service fédéral des Eaux. LES NAPPES D'EAU SOUTERRAINE DE L'ARVE 197 variations de niveau. Cette eau doit avoir eu le temps de se filtrer dans sa longue traversée des alluvions. En terminant, nous tenons à dire que nous avons effectué nos prises d’eau en profondeur au moyen d’une bouteille à renversement d'Eckmann, qui nous à été aimablement prêtée par le Service fédéral des Eaux (voir fig. 1). CONCLUSIONS Nous arrivons aux conclusions suivantes : 1. Il existe deux nappes d’eau souterraines en relation avec l'Arve. Une nappe supérieure, s’écoulant daval en amont, sens probablement dû au pompage, alimen- tant les puits V et IV et que l’on retrouve à la surface du puits IE. Une nappe infé- rieure, alimentant les puits Let IF et le fond du puits IIT, s’écoulant dans le sens de l’Arve. 2. La nappe supérieure est directement alimentée par l'Arve. La température, la dureté de son eau, se rapprochent beaucoup de celle de cette rivière. La dureté augmente légèrement dans le sens du courant de la nappe. 3. La nappe inférieure — provenant vraisemblablement d'infiltrations lointaines de l’Arve dans des alluvions fluvio-glaciaires formant son lit, — possède une tem- pérature beaucoup plus constante que celle de l’eau de lArve et contient beaucoup plus de matières minérales en dissolution comme le prouve sa dureté plus élevée. ANALYSE DES EAUX DES PUITS DE L'USINE DE VESSY au point de vue biologique, par L. REVERDIN. M. Raoul Boissier m'ayant mis au courant de ses recherches relatives à Pori- gine des eaux des différents puits de l'usine de Vessy, je me mis à son service pour examiner ces eaux au point de vue planctonique. M. le professeur E. André à bien voulu me prêter quelques-uns de ses filets, je lui adresse ici mes remerciements. Les eaux des puits pouvaient peut-être contenir des éléments planctoniques; si tel était le cas, il s'agissait de se rendre compte si ces eaux étaient toutes identi- ques quant à leur richesse en organismes, puis de comparer les résultats avec ceux fournis par l'examen des eaux de l’Arve elle-même. Lors d’une première visite de l'usine de Vessy, au mois d'avril 1919, notre attention se porta sur un flacon de verre placé dans l’intérieur même de Pusme. Ce [28 R. BOISSIER facon est alimenté directement par l’eau sortant de la conduite principale. Il est destiné à montrer la pureté des eaux puisées dans les puits. Si l’eau qui en sortait était parfaitement claire, par contre, Pintérieur du flacon était remlpi d'une matière jaunätre, en Tongs filaments ténus, agités par le courant. On nous dit que c'était tout simplement de l'huile qui était entrainée dans la conduite et qui chassée par le mou- vement de l’eau prenait cette forme filamenteuse et se fixait sur les paroïs du réci- pient. Ayant fait vider le flacon pour recueillir un peu de cette matière jaune, notre étonnement fut grand lorsque, sous le microscope, nous avons pu constater que le dépôt était presque uniquement formé par lPaccumulation d’une Diatomée, le Dia- toma hiemale var. Mesodon, dont les frustules restent attachées les unes aux autres en longues chaines, Cette espèce ne se rencontrant que dans les eaux courantes froides, nous pouvions déjà conclure que Peau des puits devait nécessairement avoir certains rapports avec l'eau de l'Arve elle-même. À côté de cette Dratomée, nous avons trouvé aussi, dans le dépôt du flacon, quelques filaments d’Ulothrix en parfait état ainsi que quelques colonies d’Aydrurus. Ce dernier genre, abondant dans l'Arve, venait confirmer notre opinion; l'eau de la conduite principale renfermait quelques-uns des éléments typiques de Peau d’Arve. Dès lors l'examen planctoni- que des différents puits S'imposait. Nous avons fait des analyses aux périodes suivantes: au mois d'avril, d’oc- tobre et décembre 1919; elles portèrent sur les puits IE, IV, V, sur l’eau d’Arve et sur le dépôt du flacon. Le résultat des diverses analyses planctoniques est donné dans le tableau ci- joint, dans lequel les signes employés ont les significations Suivantes : + — Présence de la même espèce en bon état de conservation. — — Présence de la même espèce plus où moins détruite. O — Absence complète. Arve Puits Genres et espèces : Il IV V Flacon £ l'OPITOQUTA + à: + . à : . O O + O © We. 1. — O O & |Ulothris . . . .". . . — + + + < Shigeoclonium . . . . . = O O SS CSN ONE AN ENT Ve O — + O CUT A TOR EN EE — + —- + LES NAPPES D'EAU SOUTÈRRAINE DE L'AKVE 129 Arve Puits Genres et espèces : Il IV V Flacon Diatoma hiemale var. Mesodon (a + + AE Synedra Ulna, Y. amphirrhyn- chus, Ehb.. . . . .. O O + à) 7 ynedra Ulna var. undulata . . + O O EE ) Gyrosigma acuminatum, K'ütz O O +- O È Navicula gracilis var. levis, R li ERP RE O O qntn O Navicula lanceolata, Kütz . O @ O O Ceratoneis Arcus, Kütz . . -} -} + O Hantzschia amphiorys, Grün O e) + O CAMSMIGCS NE nn Le, | — O + O L'état de conservation des différentes formes peut être facilement déterminé. Les algues vertes peuvent monter des chromatophores déformés; les diatomées peu- vent être réduites à leur valves; l'Hydrurus peut se présenter sous forme de masses amorphes contenant des cellules dont les vésicules contractiles ne sont plus en activité. L'inspection du tableau ci-dessus montre les résultats suivants: on trouve dans les puits les mêmes éléments que dans l’Arve, mais toujours en quantité plus faible, Le puits V possède le plancton le plus riche en espèces vivantes: on rencon- tre encore plusieurs éléments vivants dans le puits IV ; ils deviennent très rares dans le puits IT. Le dépot du flacon ne contient que des formes capables de se fixer. Pour expliquer cette répartition, nous devons admettre que la filtration de l’eau d’Arve dans les puits varie. Si elle est faible pour les puits V et IV, elle est au contraire très prononcée pour le puits IT; autrement dit, les puits IV et V sont en communication plus rapide avec lArve que le puits IT dont la relation doit être beaucoup plus éloignée. Ces résultats viennent donc confirmer, par une autre méthode, les conclusions auxquelles est arrivé M. Boissier. 130 R. BOISSIER NOTICE GÉOLOGIQUE par E. JOUKowskY. Les faits observés par R. BOISSIER et L. REVERDIN s'expliquent aisément par la disposition des terrains observée en différents points du canton, et en par- ticulier sous la pile de rive droite du Pont Butin, à 1 km. en aval de la jonction du Rhône et de l'Arve. Un réseau de vallées préwurmiennes, taillées dans 1a molasse marneuse, à été comblé par le retour offensif du glacier wurmien, qui a déposé dans les parties pro- fondes une puissante moraine de fond, se continuant, selon toute probabilité, sur les flancs des coteaux molassiques par une pellicule morainique de moindre épaisseur. Après le retrait de ce glacier, dont une cuvette profonde se trouvait à l’emplace- ment actuel de la plaine basse de Plainpalais, il $’'est formé sur la moraine de fond un dépôt marneux d'épaisseur variable, sur de grandes surfaces, mais discontinu dans son ensemble. Ce niveau est imperméable, On y trouve fréquemment des lignites et parfois des mollusques brisés. Après cela, une nouvelle progression du glacier rhodanien qui s'était retiré, a donné lieu à la formation de l’alluvion ancienne qu'il convient de considérer comme de la moraine, dont l'élément marneux à été constamment emporté par les eaux de fusion du glacier. Cette alluvion est perméable, et l’eau qui la traverse s'arrête sur la marne à lignites; celle-ci constitue ainsi une séparation entre ces eaux et celles qui se frayent un passage au-dessous de la marne, dans les dépôts morainiques superficiels abandonnés par le glacier wurmien au moment de son retrait. La marne n'étant pas un horizon continu, des communications peuvent exister par-ci par-là entre les deux niveaux aquifères. L'existence d’une marne à été constatée juste sous le revêtement du puits 3, à la cote 381.80, (point », fig. 2, pl. 2). Dans ce puits, on voit l’eau sortir du gra- vier qui forme les parois du fond du puits, et lorsqu'on déplace un caillou immédia- tement sous le béton, l’eau se trouble et l’on voit couler une marne jaune. C’est par l'existence d’une telle couche marneuse qu'il convient d'expliquer les deux niveaux aquifères de Vessy, entre lesquels la construction du puits à pu d’ailleurs établir une communication, autour de la partie bétonnée. Limnimétriques urs 12] æ ï il iveaux let Temyératures LA l eau de : 389L I I I Niveau [ 368 I [ Û CC Co LA = © ù ù ù ù Ù = CT ee 7 ee ee ee ee eu ou eu eu eus Deus eus ous eu Deus Deus us eus eut ne De On | Mem. Soc. phys. el hist. nat, Genève. T. 59 (1920) Temp. |Puits V , : ACTA iveau Puits V 4 OP s Niveau EG V2 : RC N= NA CO + % Q A< Temp.| Puits I — — + = 7 é Niÿeau Puits|I ant, EN "Ni eaù Pas À pe x F2 BUMI = + Le] lit de l’Arve S S LS es Thermométriques l Chose RS ES Call: es Ce 1h Le A sl: 3644 site, El i ? Ch Où . 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ROUONCIHN OO CES) ES LARE CHE CCR ACTE LE OPA ONE £ 1 BED LEE FR xx XX x a ] - Le x* + al 3col Nivehu Puits III fx ne x x | bat 4x X x Û x 4 LE 6 d x + xl 4 Ù xxx Xx rxX+l + X Xx +|+ " x x * + * | X+ i *+, # + À ab LD «xA x (| ÿ Temp. ford Puits II x A + x x, SE | F LÉFEE É 45. ++ Los ++ ++: +++ het + + Hp pp Et. +. ++ K+ + ” { FAR Re Eng 31 ce Put trs xttttelers+sirs Si ++ et ] + ter ;- Fond du Puits I = FonH du Puits|III the té bete +l4 + FR GES HE LS AVRIL à Raoul BOISSIER. — LES NAPPES D'EAU SOUTERRAINES DE L'ARVE t& *& ' _ LS » Last ÿ Ed + > Fe x 2 + SX Le, e Far = ARE Le UTP (N %+e ... ta . Let à us, æ' / pes. 15 GRAV. ET IMP. SADAG Raoul BOISSIER. — LES NAPPES D'EAU SOUTERRAINES DE L'ARVE PUBLICATIONS DE LA SOCIÈTÉ DE PHYSIQUE ET D'HISTOIRE NATURELLE DE GENÈVE La Société peut disposer de collections complètes de ses Mémoires. (Tomes 1-38 et volume du centenaire.) Pour traiter, s'adresser au secrétaire des publications, (Adresse de la Scciété : M. le secrétaire des publications de la Soc. de physique, P. A.: au Museum d’hist. naturelle, Genève, Suisse.) Comptes rendus des séances de la Société (in-$°). Tomes I-XXXVI (1884-1919). Prix Fr. 35 Liste des publications des membres de la Société (1883) in-8° avec supplément (1896) PRIX LS 22 0 NS ME M DIRE TT PE RTE O0 DER STE A6 Imprimerie Albert Kundig, Genêre (Suisse), MÉMOIRES SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE D'HISTOIRE NATURELLE DE GENÈVE — 2 — — Volume 39 FASCICULE 4 ÉTUDE SUR LES INFUSOIRES TENTACULIFÈRES par E PENARD (Avec 50 figures.) GENEVE GEORG & Cie BALE et LYON méme maison. TABLE DES MATIÈRES FASCICULE 4. VOLUME 39 PDU pe. | PR ve : : L AAA RES À AR L 2% _ = L - 4 Es | ne L ue : _ - ‘4 AE & nn L + re -E- — ai “#3 é | AE Re U : TR ‘Je 7 es 7unS , L L FI + - Pa L e az » l'Me y» x « - : . : D Li - lai Lure Pr 4.3 D? se ‘ i - Fr ». : 0 a F PR + E 20 e = { = Ÿ : 0 «2 ‘ - 1 . : P + Ê,æ# LR. "2 ÉA/A $ À ' Le os E] su : … 4 « Pn . nu : ê el a. LL A: « [= 0 + D : à , _ + > d. ” : Û ; n , e À - à 4 , 27, — & L &" o 4 Les Le, v MÉMOIRE DE LA SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE ET D'HISTOIRE NATURELLE DE GENÈVE VOLUME 39, FASCICULE 4. ÉTUDES INFUSOIRES TENTACULIFÈRES E. PENARD Dr ès sciences. (Avec 56 figures.) Mes observations relatives aux Infusoires Tentaculifères devaient à l’origine former le dernier chapitre d’un ouvrage de longue haleine, maintenant à l’impres- sion!, sur les Infusoires d’eau douce en général. Cependant, les Tentaculiferes cons- tituent un groupe si homogène, et dont les afhnités avec les Infusoires ciliés restent si peu évidentes, que beaucoup de naturalistes n'hésitent pas à les considérer comme un groupe tout à fait à part, et à en faire l’objet de travaux séparés. Je suis heureux alors de pouvoir suivre ces auteurs dans cet ordre d'idées, en publiant ici le résultat de mes recherches. Les 42 espèces dont il sera question dans ces pages ne sont pas les seules, ajoutons-le bien vite, qui m'aient passé sous les yeux; j'en ai vu d’autres, que les circonstances ne m'ont pas permis d'étudier, ou bien qui ne m'ont rien montré de nouveau; par contre, il en est quelques-unes, d’ailleurs très peu nombreuses — une demi-douzaine en tout — qui seront prises en considération, bien que j'aie eu locca- sion de les déerire ailleurs; mais je n'hésite pas à résumer ici brièvement les carac- 1 Etudes sur les Infusoires d'eau douce, un fort vol. grand in-8v, avec environ 1200 figures dans le texte, Genève, Atar édit. ‘ MÉM. SOC. PHYS. ET HIST. NAT. DE GENÈVE, VOL. 39 (1920). 17 132 E. PENARD tères de ces quelques especes ; toutes, en effet, ou presque toutes, ont été retrou- vées, soumises à un examen complémentaire, et ce contrôle à permis soit de con- firmer certains points restés jusque-là plus ou moins obscurs, soit de constater des faits nouveaux et parfois d’un réel intérêt. Tokophrya quadripartita (CLAP. et LACHM.) BÜTSCHLI 1889. Podophrya quadripartita CL. et L. 1858-60. Corps revétant vaguement la forme d’une pyramide quadrangulaire, arrondi aux angles, boursouflé et plissé sur les côtés, rétréci fortement en arrière. Tenta- cules fasciculés, disposés en 4 groupes à la face apicale. Vésicules contractiles au nombre de 3, dont 2 en avant et 1 en arrière. Noyau central, sphérique en principe, plus souvent ellipsoïdal, cordiforme ou triangulaire. Tige forte, striée dans sa lon- gueur, et elle-même 2 ou 3 fois aussi longue que le corps. Taille de l'animal très variable, le plus souvent 60 à 110 y. Mes observations relatives à cette espèce datent du printemps de 1914, puis ont été brièvement contrôlées en 1918. Dans les deux stations visitées, Rouelbeau (1914) et l’Ariana (1918), les colonies vivaient sur les Æpistylis ; on peut parler de colonies, en effet, car les animaux s'y trouvaient en nombre immense, attachés non seulement aux tiges des Epistylis, mais aussi les uns sur les autres, en touffes com- pactes, où bien même en séries linéaires, comme l’indique la fig. 8. «Je crois avec BÜTSCIHLI contre SAND », dit COLLIN, à l'existence constante de trois vacuoles contractiles ; 11 y en à six seulement quand il existe un embryon » ; FILIPIEW, en 1910, décrit également trois vésicules, «zwei derselben vorn zwi- schen den Tastenbündeln, die dritte dagegen in der Mitte des Kôürpers ». Peut-être aurait-il fallu placer la troisième vésicule un peu plus en arrière, mais c’est bien également ce nombre de trois que j'ai constaté comme normal; ces vésicules, ajou- tons-le, deviennent fort grandes, se vident sur les côtés du corps et battent à inter- valles assez éloignés, toutes les 75 secondes environ. Cette espèce, comme le dit COLLIN, varie peu; mais l'individu, cependant, est sujet à des modifications de forme, dont l’une est assez curieuse (fig. 7). Le savant français, en effet, à propos de quelques préparations que Je lui avais envoyées, à bien voulu m'écrire à ce sujet: < Jai reçu dernièrement de M. ! Toutes les localités citées au cours de cet ouvrage se trouvent dans les environs de Genève; le plus souvent des marécages (Rouelbeau, Pinchat), ou bien de petits étangs (Florissant, Ariana) ; plus rarement de vieux murs ou des bois (Chêne, Vessy), où les mousses abritent une faune spéciale. ÉTUDE SUR LES INFUSOIRES TENTACULIFÈRES 133 REGNARD (Institut Pasteur) communication de 2 Clepsines du Dahomey, couvertes d’un revêtement dense d’une race assez spéciale de cet Acinétien; c’est une sorte de variété « longicollis >, où le style est surmonté d’une longue tige protoplasmique plus ou moins incurvée, servant de base flexible au corps proprement dit. Cette dis- position est en germe dans les exemplaires que vous n’envoyez, mais sans atteindre Jamais ce degré d’étrangeté que je représente ici. » COLLIN m’envoyait, en effet, trois croquis, identiques à ce que l’on voit ici dans la figure 7, dessinée d’après des individus provenant de mes récoltes, et sans doute les préparations envoyées par moi ne montraient-elles pas ce « degré d’étrangeté >» que j'avais pourtant constaté de mon côté. J’en ai vu, d’ailleurs, de plus étranges encore, où la «tige protoplas- Fig. 1. — Tokophrya quadripartita. mique », très mince, arrivait à elle seule au double de la longueur du corps; mais en même temps j'ai pu m'assurer qu'il n’y avait pas là de variété spéciale; c’est encore la Tokophrya quadripartita, mais dont la partie inférieure, par suite de cir- constances encore obscures et sous la dépendance, semble-t-il, des qualités — ou plutôt des défectuosités — du milieu (plusieurs jours de » après la récolte), s’est énormément allongée, entrainant même parfois avec elle le noyau, qui s’est allongé à son tour. Ces individus, en fait, sont affaiblis, ce qui ne les empêche pas, d’ailleurs, de produire coup sur coup des embryons, même jusqu’à trois à la fois (fig. 7). Cette espèce est, en effet, très prolifique, et il n’est pas rare de rencontrer dans le sac incubateur plusieurs embryons ovoïdes, à 4 ou parfois à 5 (?) rangs de cils, et en outre, pourvus à leur extrémité antérieure (postérieure pendant la nage) d’un petit faisceau de cils courts et raides, qui fonctionne comme gouvernail (fig. 5, 10). Parfois, lorsqu'il est seul, l'embryon est de proportion énorme, remplissant les 134 E. PENARD deux tiers de l'enveloppe. Suivons l’un de ces embryons dans les premiers stades de sa transformation en adulte. À peine s'est-il abattu sur le soutien qu'il à choisi. qu'on le voit S'y raffermir par la sécrétion d'un bourrelet, et à l'intérieur du bour- relet se dépose une matière mucilagineuse et granulée en même temps, qui dureit à sa surface et s'élève sous la forme d’un cylindre. Les cils battent encore 20 secon- des, puis s'arrêtent; 5 minutes plus tard, le cylindre, ou la tige, à déjà la moitié de la longueur du petit animal; ce dernier possède encore sa couronne de cils, mais ces cils sont Imertes, granuleux, et vont tomber en poussière (fig. 5); l'animal reste invaginé sur sa tige, ou bien s’est déja dégagé ; trois minutes encore, et les quatre 6 “LQ Lo Fu, Pa LR Fig. 2. — Tokophrya quadripartita. faisceaux de tentacules ont apparu; le cylindre est maintenant une tige vraie, opa- lescente, ponctuée sous sa paroi de tout petits grains bleus (nutritifs?) et cette tige repose sur un étoilement de radicelles très fines, parsemées de poussières et de petites bulles (fig. 61). Enfin, 15 minutes environ après la fixation, nous avons déja un Acimétien typique, encore jeune et de forme ovoïde, mais dont la tige, normale, striée nettement dans sa partie antérieure, a trois fois la longueur de l'animal. On remarque, dans la fig. 6 qui représente un individu dont l’âge est de 8 minutes environ, le noyau accompagné de 2 micronucléi, brillants, striés en long (fig. 4, plus grossis). Dans la fig. 9 vent par hasard en contact, ils se soudent par une partie de leur surface, sans perdre , Nous avons un cas de conjugaison. Lorsque deux individus arri- ! En suite d’une déformation de lanimal, lune des paires de faisceaux semble, dans cette figure, être reportée en arrière; en réalité, sur l’adulte à forme normale, les 4 faisceaux sont à la partie anté- rieure du corps, comme lPindique la fig. 2. ÉTUDE SUR LES INFUSOIRES TENTACULIFÈRES 159 leur individualité, et peuvent rester ainsi 24 heures et plus, pour se séparer enfin ; lorsqu'ils sont jeunes et encore plastiques, ils s’allongent et se recourbent méme parfois très fort sur leur tige pour se rapprocher l'un de Pautre; mais, il faut l’ajou- ter, la soudure reste toujours aléatoire, et souvent, les animaux renoncent à leur projet et se rétractent bientôt sur eux-mêmes en abandonnant le contact. Dans la fig. 9, on voit dans le couple en conjugaison deux embryons, l’un à côté de l’autre, et dont tout d’abord il n'existait pas trace, même après conjugaison achevée; ils se formèrent indépendamment et simultanément dans chacun des individus, et une fois mürs partirent à quelques minutes de distance, chacun par le pore maternel, sans que le couple déployé semblàt s'inquiéter d'eux. Tokophrya lemnarum (STEIN) G. ENTZ 1902. Acineta lemnarum STEIN 1859. Corps pyriforme, ou vaguement pyramidal, un peu comprimé sur les côtés, plissé, flexueux, étiré en arrière ; pourvu de tentacules fasciculés disposés en deux groupes lâches sur les bords de la face apicale. Vésicule contractile unique, très grande, s’ouvrant sur le côté à la partie antérieure du corps. Noyau central, sphé- rique ou ellipsoïdal. Tige forte, striée en long dans sa partie antérieure, et de 2 à 4 fois aussi longue que le corps. Longueur, sans la tige, 35 à 120 2. « (Gr. ENTZ (1902) discute fort longuement, d’après les exemplaires trouvés par lui dans le lac Balaton, la question de savoir s’il faut où non homologuer T°. lem- narum avec T. cyclopum. I considère comme caractéristique de la première espèce, outre la taille beaucoup plus grande et le style bien plus long par rapport aux dimensions du corps: &) le tégument épais. souvent ridé, parfois soulevé imférieure- ment chez certains exemplaires, tout à fait comme la loge d’une véritable Acineta ; b) un macronucléus ovoïde, réniforme ou rubané (non sphérique comme chez T. cyclopum) ; c) enfin plusieurs micronucléi (trois à cinq) au lieu d’un seul. > Tels sont les termes dans lesquels s'exprime COLLIN, qui croit lui-même devoir main- tenir, au moins provisoirement, autonomie complète de Tokophrya lemnarum. Après une étude comparative minutieuse, je ne puis à mon tour que me déclarer en faveur de l'autonomie de 7°. lemnarum ; tige au moins deux fois aussi longue que dans 2! ceyclopum, taille bien plus forte, corps plus allongé, pyriforme, bosselé, à tégument épais, vésicule contractile unique. Cette vésicule est très grande (fig. 2), ou en tout cas, elle finit par le devenir, et ne bat qu’à intervalles éloignés ; elle se vide sur le côté, à la partie antérieure du 136 E. PENARD corps; le canal bien distinct, à paroï forte, qui la fait communiquer avec l'extérieur, et que l’on voit faire une légère saillie soit dans la vésicule elle-même, soit sur le tégument, coïncide généralement avec une légere dépression creusée dans ce der- nier (fig. 3). Les tentacules forment deux larges faisceaux, opposés l’un à l’autre aux deux pôles de la face antérieure un peu allongée (fig. 5, où l’animal est vu d'en haut par la face apicale), mais chacun de ces faisceaux est en réalité double, formé de deux sroupes, entre lesquels les tentacules sont devenus rares. | COLLIN dit à propos de Ia tige dans T°. cyclopum: < Le style n’est nullement Fig. 3. — Tokophrya lemnarum. ici < creux et homogene < comme l’affirme à tort SCHEWIAKOFF (1893), mais au contraire, rempli par un faisceau strié massif >. Dans la 7. lemnarum J'ai toujours considéré la tige comme creuse, mais très épaisse, la lumière Interne ne consti- tuant qu'un canalicule étroit; elle est striée dans sa longueur, mais les stries, tres nettes dans la région de raccordement au corps, disparaissent plus en arrière. L’embryon cilié (fig. 4) est ovoïde, à 4 rangs de cils; dans certains indi- vidus je Jui ai vu distinctement deux vésicules contractiles. La T. lemnarum est très prolifique; à peine a-t-elle libéré un embryon, que l’on voit s’en dessiner un nouveau, et elle en produit jusqu’à la fin, alors que maigre et décharnée elle a déjà perdu ses réserves de nourriture, ces sphérules pales dont le corps était auparavant bourré; les embryons l’épuisent (je parle d'individus en captivité et privés de nourriture), et quand le dernier s’en va, poussé par les con- tractions du corps très marquées dans cette espèce et qui rappellent tous les phéno- ÉTUDE SUR LES INFUSOIRES TENTACULIFÈRES 137 mènes de l’accouchement, la mère est flasque et ridée, quitte cependant à se refaire rapidement si l’occasion lui en est offerte. J'ai vu un individu, devenu de la sorte maigre et décharné, vider entièrement en 4 minutes deux petits infusoires, ct reprendre immédiatement sa belle santé. J'ai surveillé sur trois individus les phénomènes consécutifs à la capture des proies; ils se sont contrôlés les uns les autres — comme d’ailleurs ils en ont contrôlé un grand nombre étudiés sur les Tentaculifères les plus divers —, et il me suffira de relater l’une de ces trois observations: Le 7 juin à 9 h. 58, un Infusoire (Urocentrum) arrive par hasard en contact avec un tentacule d’une Tokophrya plus petite que lui, et brusquement il s'arrête stupéfié; en quelques secondes, une demie-douzaine de tentacules se sont abattus sur lui, se recourbent, se raccourcissent, augmentent du triple de leur largeur pri- mitive, s’évasent en trompette à leur sommet, et déjà l’on voit un courant puissant passer, entrainant des petits grains et des particules de toute sorte. La Tokophrya mesure 45 4 en longueur et 32 & en largeur; elle n’est nullement comprimée, en eau libre sur lamelle évidée. À 10 h. 03, la proie est aux deux tiers vidée; la Tokophrya mesure 53 : en longueur et 37: en largeur. | À 10 h. 09, l'Urocentrum est presque vide; un seul tentacule y adhère encore et l’on voit au point d'adhésion de petits mouvements se produire, comme si la proie devait se détacher. La Tokophrya mesure 68 >< 40 ». À 10 h. 12, l'Urocentrum, réduit à l’état d’une vessie gonflée, renfermant des grains de rebut et le noyau déformé, bascule dans tous les sens, poussé par les ten- tacules, qui s’allongent et reprennent leur état normal; puis à 10 h. !/,, la vessie éclate en poussières et tout disparait. . Il me faut insister sur cet éclatement que l’on voit se produire dans nombre d’Infusoires après absorption de leur contenu par les tentacules de leur ennemi: à mesure qu’il se vide, l’Infusoire se réduit dans sa taille, mais cela dans les pre- miers temps seulement ; plus tard, quand sa vésicule contractile ne fonctionne plus, il se distend par osmose, en même temps il se désagrège et se voit réduit à l’état de mince pellicule, qui finira par éclater. Je voudrais à ce sujet attirer l’attention sur un phénomène accessoire qui pourrait avoir une certaine signification : assez sou- vent, au moment où le tentacule abandonne la proie vide, on voit cette proie non pas simplement abandonnée sur place, mais lancée au loin, comme par un «souffle >» ou «un jet» dont le tentacule aurait été responsable. Est-ce là un fait réel, ou bien y a-t-il eu illusion de ma part? Malgré son nom, la Tokophrya lemnarum n’affectionne pas spécialement les Lemna; c’est sous les feuilles des Nénuphars que je l'ai récoltée, et toujours abon- oc ê 138 E. PENARD dante, dans ce petit étang de Florissant que M. H. Romieux, le botaniste distingué, a mis à mon entière disposition, et qui n'a livré tant d'Infusoires intéressants. Tokophrya actinostyla (COLLIN). Tokophrya cyclopum var. actinostyla (COLLIN) 1912. Corps vaguement cylindrique, 2 !/, à 3 fois aussi long que large, arrondi en avant, creusé à son extrémité postérieure d'une dépression dans laquelle s'insère la tige: cette dernière, très courte et ne dépassant que rarement Île quart de la longueur de l’animal, est entourée à son point de raccordement avec le corps, d'un réseau de baguettes rayonnantes, renfermées elles-mêmes dans une sorte de capsule membraneuse, et qui refoulent devant elles le corps protoplasmi- que. Tentacules disposés en deux faisceaux lâches sur les côtés de la face apicale. Cytoplasme normalement teinté de jaune par de nombreux petits grains dorés. Vésicule contractile dans la partie antérieure du corps, et s’ouvrant sur la face apicale. Noyau central, sphérique ou ellipsoïdal. Longueur, sans la tige, 87 à 120 y. Dans le chapitre qu'il consacre à la tige, et plus particulièrement aux « for- mations suprastylaires > chez les Acinétiens, COLLIN, à la p. 112 de son Mémoire classique, écrit les lignes suivantes: « J'ai fait connaitre (1908) chez Tokophrya cyclopum une structure. que je croyais alors commune à tous les grands exem- plaires adultes de l’espèce en question. Ayant dû par la suite abandonner cette maniere de voir inexacte, je désigne aujourd'hui comme var. actinostyla (nov. var.) l'ensemble des individus considérés, On aperçoit déjà, chez Les très jeunes individus, des tigelles squelettiques continuant à croître après que la croissance de la gaine à pris fin, et repoussant devant elles la matrice scopulienne qui se déprime en dôme. La cavité close de toutes parts qui est formée grandit avec les tigelles qui s’y épa- nouissent en une gerbe irradiée et s’élargit en même temps par leur écarte- ment, >» J'ai trouvé à Pinchat, en 1916, puis à Rouelbeau, en 1918, et toujours sur des Cyclopes, cette forme très caractéristique, mais qu'il ne n’est décidément pas pos- sible d'envisager comme une simple variété de T° cyclopum ; je crois qu'il faut l’éle- ver au rang d'espèce, en l'appelant Tokophrya actinostyla (COLLIN). En effet, les # à / Dit ÉTUDE SUR LES INFUSOIRES TENTACULIFERES 139 caractères distinctifs sont très nets, et parfaitement constants; même en faisant abstraction du plus typique d’entre eux, de cet appareil suprastylaire (que lon retrouve chez T. cyclopum quelquefois indiqué, mais alors toujours à l’état pour ainsi dire embryonnaire), on peut constater les traits différentiels suivants : a) La forme est toute spéciale, très allongée, souvent presque cylindrique (fig. 1). b) La tige, très large, est toujours extrémement courte, ne mesurant presque jamais plus du tiers de la longueur du corps; cette tige n’est pas élar gie à SON point de fixation au substratum, et repose sur un tout petit disque réfrmgent. Fig. 4 — Tokophrya actinostyla. c) Les tentacules, en deux groupements très larges dont chacun représente en réalité deux faisceaux rapprochés, sont extrémement nombreux; on en compte envi- ron 50 sur chacun des deux groupes (fig. 2). d) Le cytoplasme est jaunâtre, grâce à la présence normale de poussières et de granulations dorées. La fig. 1 donne une idée assez exacte de l’apparence particulière de l’animal ; dans la fig. 3, l'appareil suprastylaire est représenté avec plus de détails ; on y voit au centre un large bouton, en forme de mûre, d’où partent des baguettes radiaires, renflées à leur sommet, et qui vont soutenir une sorte de sac arrondi. L'animal est alors raccordé, non directement à sa tige, mais à un sac, qui lui fournit peut-être un appui de plus ample surface, et même, si j'ai bien observé, pourrait faciliter — comme dans un roulement sur billes — le déplacement du corps, que lon voit volon- MÉM. SOC. PHYS. ET HIST. NAT, DE GENÈVE, VOL. 89 (1920). 18 140 E. PENARD tiers penché sur sa tige. Dans la fig. 4, le sac est vu d’en haut; les baguettes ren- flées semblent garnir la sphère tout entière, tandis que dans la fig. 3 on voit qu’elles ne concernent qu'un hémisphère en réalité. Dans la fig. 8, qui représente un indi- vidu très jeune (1 ‘/, heure environ après la fixation de l'embryon cilié), l'appareil est dans un état encore peu avancé. L'embryon est allongé (fig. 5), et possède quatre rangées de cils, qui sont tou- jours tournés en avant lorsque le petit être s'échappe du corps maternel; le noyau y est caractéristique, en forme de müre, à grains très volumineux qui diminueront de volume et augmenteront de nombre avec la croissance ; dans la fig. 6, l'embryon Fig. 5. — Tokophrya actinostyla. vient de se poser ; les cils se désagrègent, la tige a déjà 5 » de longueur. La fig. 7 représente le même individu 20 minutes plus tard; la tige a 124 et le corps en mesure 15; mais à 254 la tige cessera de croître, tandis que le corps ira jusqu’à 125y à lui seul. Tokophrya cyclopum (CLAP et LACHM.). Podophrya cyclopum CLaP et LACHM. 1860-61. Corps ovoïde ou pyriforme, rarement cylindroïde, parfois creusé à sa partie postérieure d’une légère dépression dans laquelle s’insère le pédoncule; ce dernier, cylindrique, évasé à son sommet, court, ne dépassant que très rarement la longueur du corps. Tentacules droits, capités, disposés en deux groupes läches, dont chacun peut être considéré comme formé de deux faisceaux rapprochés. Cytoplasme grisà- tre. Noyau sphérique ou ellipsoïdal. Vésicule pulsatile grande, dans la partie anté- rieure du Corps. Longueur du corps 30 à 60 4 en général. Le plus souvent sur Cyclops. ÉTUDE SUR LES INFUSOIRES TENTACULIFÈRES 441 C'est là un Tentaculifère très commun, que l’on ne peut manquer de trouver, à chaque instant, sur les Cyclops, et plus rarement sur d’autres Entomostracés, même sur de petits Mollusques. Mes observations sur cette espèce ont été plutôt superficielles, et ne m'ont conduit à aucun résultat nouveau; et si je consacre ici quelques lignes à cet organisme, c’est que dans une des localités visitées, le marais de Pinchat, je l’ai trouvé sous une forme particulière, qui me l'avait fait prendre tout d’abord pour un type spécifique nouveau. En réalité, cette forme anormale était due à un phénomène assez rare, auquel COLLIN consacre les pages 187 à 189 de son Mémoire, la < transformation totale en embryon», et cela non pas «absolument totale >, comme dans les formes qui se reproduisent par division Fig. 6. — Tokophrya cyclopum. externe (Sphærophrya, Podophrya) où l'embryon ne laisse aucun reliquat derrière lui, simon le style et la loge si l’espèce en est pourvue (Metacineta), mais avec aban- don de toute l’ancienne cuticule. « En dépit des apparences, dit COLLIN à ce propos, l'individu mobile n’est en aucune façon un < stade mobile > du précédent; c’est un nouvel individu, autrement orienté... Le phénomène de la transformation totale en embryon, sous quelque aspect qu'il se présente, doit étre interprété comme ayant la valeur d'une véritable division, mais d’une «division abortive. Le rejeton supérieur (embryon) est ici seul viable et absorbe à lui seul toute la substance active, l’exem- plaire inférieur (ou parent) étant réduit à presque rien, voire même entièrement « virtuel » dans le cas des Sphærophrya ». A Pinchat, les Cyclops portaient, en nombre assez restreint d’ailleurs, des Tokophrya de forme anormale, et qui se préparaïient sans doute à la transforma- tion; tantôt, comme dans la fig. 1, l'individu était simplement ramassé sur lui- même; tantôt (fig. 2) on le voyait absolument globuleux, et sa cuticule, bril- lante et en apparence épaissie, simulait un kyste, mais l’animal conservait ses ten- tacules déployés, et produisait même des embryons ciliés ; tantôt, enfin, la cuticule 149 E. PENARD lisse avait revêtu la forme parfaite d’un kyste, dans lequel le cytoplasme tout entier s'était converti en un embryon cilié (fig. 3); et ce dernier, après avoir pivoté long- temps sur lui-même, se faisait jour au dehors par le pôle supérieur de l'enveloppe tégumentaire amincie et désagrégée dans cette région spéciale, et S'échappait en abandonnant derrière lui cette enveloppe tout entière. Tokophrya glomerata sp. n. Corps pyriforme, plus où moins allongé, étiré dans sa partie postérieure; cette dernière insérée sur une tigelle extrémement courte, presque nulle, n’atteignant pas au delà de la 10° partie de la longueur de l'animal. Sur la face apicale, deux faisceaux lâches de tentacules peu nombreux, élargis et subconiques à leur sommet. Noyau sphérique, central. Vésicule contractile normalement en arrière du noyau, exceptionnellement en avant. Les animaux se rassemblent en colonies serrées, for- mant un capitule de 10 à 20 individus et plus encore, qui rayonnent autour d'un centre Commun, Longueur du corps à l’état d’allongement, 20 4. Les deux colonies se rapportant à cet organisme que j'ai seules trouvées, à Pinchat, et dont l’une comprenait 21 individus et l’autre un nombre plus considérable encore, Hottaient en eau libre, mais elles devaient avoir été détachées d’un soutien quelconque, car toutes deux étaient hémisphériques, les animaux dis- posés en rayonnant autour &'un centre de matière Jjaunâtre et poussiéreuse, dépôt sans doute mucilagineux, et d’ailleurs très peu abondant. Transportées sur lamelle évidée, ces colonies se fixèrent l’une sur le porte-objet, l’autre sous le cover. Tout d'abord, après le transport, les différents individus se montrèrent globuleux, ramassés sur eux-mêmes, mais ils s’allongèrent très vite en forme de massue. La face antérieure, légèrement déprimée, porte deux faisceaux — parfois très lâäches et paraissant n’en faire qu'un — de tentacules peu nombreux, courts, plutôt forts, élargis à leur sommet en un cône très allongé que termine un bouton arrondi (fig. 4). Sur la colonie examinée à un faible grossissement, on voit tous ces tenta- cules, comme une auréole, arriver à peu près à la méme hauteur (fig. 1). Le corps de chacun des individus est rattaché à la région centrale de Ia masse visqueuse commune par une véritable tigelle, mais si étroite et surtout si courte qu'on ne se rend compte de son existence que lors de la dislocation de la colonie (fig. 2) (sur cette colonie fixée sous le cover, chaque tigelle figurait un point brillant) ; ÉTUDE SUR LES INFUSOIRES TENTACULIFÈRES 143 en fait, les imdividus semblent à première vue parfaitement sessiles, et très étroits à leur point de fixation. Ils sont lisses, à plasma clair et pur dans lequel on remar- que des grains incolores; le noyau, rond, granulé, se détache nettement à la vue. La vésicule contractile, bien distincte également, se voit normalement dans la par- tie antérieure du corps lorsque l’animal est arrondi, mais quand il est allongé elle se trouve reportée en arrière. Dans ces deux colonies, gardées en bonne santé du 10 au 13 avril, il a dû se produire des divisions, car le nombre des animaux y a augmenté, mais je n'ai pas pu suivre le phénomène, sauf partiellement sur l’un des individus, qui à été trouvé Fig. 7. — Tokophrya glomerata. le 12 avril très repu, très gros, légèrement étranglé en son milieu, et pourvu de ? noyaux et de 2 vésicules contractiles (fig. 2); mais les circonstances étaient défa- vorables, car au 13 avril, l'animal, pourtant sain et avec tentacules déployés, avait à peine changé. Il semble, en tout cas, qu'il s'agisse 1à d’une division vraie, sans production d’embryon eilié; dans la fig. 3, on remarquera un mdividu plus vigou- reux que les autres, et dans lequel il semble qu'un embryon fasse hernie à la face antérieure ; mais les détails en étaient très peu visibles et c’est à la constatation pure et simple du fait que j'ai dû me borner. Tokophrya gracilipes sp. n. Corps largement ovoïde, un peu comprimé latéralement, étiré en arriere, et. portant sur ses côtés, à gauche et à droite de l’extrémité antérieure, deux faisceaux très lâches de tentacules longs, droits, élargis et subconiques à leur extrémité anté- rieure. Tige très mince, pleine, à peu près de même longueur que le corps, renflée 144 E. PENARD brusquement à son point de fixation en un large coussinet en forme de cloche. Noyau sphérique, central. Vésicule contractile grande, au-dessus du noyau, et s’ou- vrant sur la face apicale. Longueur 18 à 35 y. Ce petit Tentaculifére s’est montré à différentes reprises, en juillet et en octobre 1916, dans le Sphagnum mouillé de la tourbière de Valavran. Le corps est arrondi, légèrement comprimé, étiré en arrière en un bouton protoplasmique clair dans lequel s’insère la tige ; cette dernière, très mince mais pleine, solide et rigide, et dont la longueur est à peu près celle du corps, s’est montrée, dans tous les indi- Fig. 8. — Tokophrya gracilipes. vidus observés, renflée à son extrémité basale en une sorte de cloche, un peu jaunâtre, laquelle repose à son tour sur un disque adhésif chitineux très mince (fig. 1). Les tentacules, en deux larges faisceaux partant des bords de la face apicale (fig. 2), revétent une structure particulière, augmentant de largeur d’arrière en avant, et lorsqu'ils ne sont pas longuement déployés, leur tête se montre conique et spiralée (fig. 3). La vésicule contractile, très grande, s’ouvre dans une dépression de la face antérieure (fig. 1). La fig. 4 montre les tentacules occupés à vider un gros Infusoire; on y voyait des petits grains s'engager dans le tube, le renfler au passage, puis arrivés au niveau du corps tripler brusquement de vitesse en se précipitant tout droit jusque vers le milieu du cytoplasme; il y avait là, semblait-il, d’abord un obstacle à franchir, un ÉTUDE SUR LES INFUSOIRES TENTACULIFÈRES 14) resserrement, au delà duquel le canal devait reprendre son calibre normal et se continuer bien loin dans le plasma. C’est ià un phénomène — ou un détail de struc- ture — que nous aurons encore à constater, et sur lequel nous reviendrons plus au long (v. p. ex. Metacinela mystacina). L'animal se reproduit surtout par embryons internes, ellipsoïdaux, qui n’ont paru posséder quatre rangs de cils. Dans la fig. 5, il s’agit sans doute d’une division, mais que je n’ai pas pu suivre jusqu'au bout, l’animal, au milieu des débris, s’étant perdu pour ne plus être retrouvé. Tokophrya muscicola PENARD 1914. Corps ovoïde, légèrement comprimé latéralement, à contours anguleux, pourvu d’une membrane particulièrement épaisse et à double contour bien net, légèrement opalescente, et que percent de distance en distance des tentacules vigoureux, courts, au nombre d’une vingtaine, répartis sur le corps entier et suivant une certaine régu- larité, mais laissant libre l’extrémité postérieure du corps, laquelle s’étire en un pied subconique, recourbé, creux, dont la longueur égale à peu près la moitié de la masse totale de l’animal. Noyau central, sphérique ou ellipsoïdal. Vésicule contrac- tile au-dessus du noyau. Longueur 23 à 30 y. Mousses. Les mousses des bois, des troncs d'arbres, des murs, hébergent toute une série de Tentaculifères sur lesquels l'attention n’a été que très peu attirée jusqu'ici, et qui mériteraient pourtant d’être connus. Adaptés à des alternances rapides de dessèchement et d'humidité, ils ont pour la plupart un revêtement spécial, très épais, et de nature très variée, si bien qu’on à peine à les ramener à des types connus. En attirant au commencement de 1914 l'attention sur ces organismes muscicoles, j'en avais décrit quel- ques-uns, les faisant rentrer, un peu à l’aven- ture et conscient d’une ignorance alors presque absolue des Tentaculifères en général, dans Fig. 9. — Tokophrya muscicola. des genres dont il faudra probablement Îles sortir; mais peut-être vaut-il mieux, aujourd'hui encore, les laisser provisoire- ment où 1ls sont. La Tokophrya muscicola est l'un de ces organismes aberrants, Au mois d'avril 146 E. PENARD 1914, COLIN! voulait bien n'écrire à ce sujet: Oserai-je me permettre une remar- que encore, au sujet de « Tokophrya > muscicola, qui me semble être plutôt une Podoplhrya, tant par la disposition générale des suçoirs (qui ne sont pas fasciculés) que par l'allure générale du corps et la forme du pédoncule? Mais ce n’est là évi- demment qu'une ; pour émettre un avis motivé, il faudrait connaître à la fois l'embryon et les kystes où au moins Fun des deux. > Tout est fort vrai dans ces Tignes; mais aujourd’hui, j'irai plus loin encore; il n'y à pas là de Tokophrya, mais pas davantage, semble-t-11, de Podophrya: quelque chose d'autre, un genre, que Je ne saurais où placer lui-même, Acineta papillifera KEPPEN 1888. Logette triangulaire, plus longue que large, comprimée, tronquée à angle droit à Sa partie antérieure, ouverte sur sa face apicale en une fente qui s’élargit à ses extrémités pour laisser passer deux faisceaux de tentacules droits, vigoureux, rela- tivement peu allongés, distinctement capités, insérés sur deux mamelons eux-mêmes légèrement rétractés en dedans sur la face apicale. Le corps est suspendu dans l'enveloppe, laissant un vide entre le protoplasme et le fond de la logette. Tige pouvant attendre le double de la longueur de l'animal, droite, creuse, reliée à len- veloppe par un appareil de fléchissement spécial. Cytoplasme renfermant normale- ment des petits grains jaunätres. Noyau sphérique ou ellipsoïdal, accompagné d’un micronoyau volumineux. Vésicule contractile dans la partie antérieure du corps, et s'ouvrant à la face apicale. Longueur de la logette 100 à 120 »; longueur de la tige 165 y. Mousses. Ce beau Tentaculifere à passé longtemps pour spécial à Peau salée ou tout au moins saumatre, jusqu’au moment où KEPPEN (188$) l’a indiqué dans l’eau douce aux environs de Kief. En le retrouvant moi-méme, en 1913, dans la mousse au pied d’un tronc de chêne, j'avais été fort étonné; mais C'était un exem- plaire unique et en même temps incomplet, déchiré, et l’on pouvait se demander si en définitive l’eau du lavage des mousses, provenant des conduites de la Ville de Genève, n'était pas en cause: mais tel n’était pas le cas, car au printemps de 1916 1 Ce sont là les dernières lignes que j'ai reçues de cet aimable correspondant auquel des travaux de la plus haute valeur promettaient un avenir brillant et qui trouvait en effet la gloire, à peu de temps de là, dans les plaines de la Marne. ÉTUDE SUR LES INFUSOIRES TENTACULIFÈRES 147 je l'ai retrouvé, et dans la mousse encore !, sur un vieux mur au «Chemin de la Montagne >»; c'était, également cette fois, un exemplaire unique, mais parfait, avec sa tige entière, creuse, légèrement évasée à son point de fixation. Dans le plasma clair, on voyait ces poussières et ces petits grains jaunes qui sont caractéristiques de l'espèce; le noyau (fig. 3), ovoide, bien distinct, se montrait fortement vacuolisé, avec petits grains clairs entre les vacuoles; le micronucléus, tout près, était nette- ment visible, fait exceptionnel chez les Tentaculifères où on ne l’aperçoit jamais bien net sur le vivant. « L’Acineta papillifera >, dit COLLIN, « se reconnait toujours avec facilité, grâce à un détail de structure qui n'appartient qu'à elle: l'appareil de fléchisse- Fig. 10. — Acineta papillifera. ment au sommet du pédoncule. » Cet appareil a été décrit fort exactement soit par KEPPEN (1888) soit par MARTIN (1909), mais ces auteurs y décrivent chacun une structure un peu différente; KEPPEN indique une paire de « papilles » opposées, laissant entre elles un vide dans l’intérieur du coussinet ou renflement de flexion : MARTIN parle d’un « tube de raccord > ; COLLIN regarde comme vraisemblable que «sur l’animal très jeune, le style et la loge sont d’une seule venue et les fibrilles du faisceau squelettique se continuent de lun à l’autre, sans aucune trace d’inter- ruption »; plus tard, le faisceau fibrillaire se détruirait et les deux papilles, accolées tout d’abord étroitement l’une à l’autre, se sépareraient. Si l’on compare entre elles la figure que j'ai donnée de cette espèce en 1914 avec celle que l’on trouve ici, on ! Inutile, après ce contrôle, de mettre en cause l’eau du lac, que j'emploie depuis 30 années, sans qu’elle ait jamais renfermé le Tentaculifère en question. MËM. SOC. PHYS, ET HIST, NAT. DE GENÈVE, VOL. 89 (1920). 19 118 E. PENARD y constatera une certaine différence; dans la première, la bande axiale grise tra - versait le coussinet tout entier (pour aller probablement rejoindre un faisceau axial de la tige); dans la seconde (fig. 4) la bande grise, où « papille > caractéristique, est libre, détachée du fond du coussinet, mais montre encore à son extrémité un filament très fin, qui sans doute, à l’origine, rejoignait le faisceau axial du pédon- cule. Cette papille, il faut l'ajouter, n'a paru striée dans sa longueur. La fig. 2 montre la logette par la face apicale; on voit qu'elle est comprimée, et en méme temps, qu'elle n'est pas ouverte par sa face tout entière, mais que la membrane d'enveloppe s’y replie en dedans, pour ne laisser libre qu’une fente élar- gie à ses commissures autour des faisceaux de tentacules. La fig. 3 laisse également deviner ce reploiement de là membrane d’enve- loppe ; mais elle montre autre chose encore, la vésicule contractile et la eurieuse disposition du canal qui relie cette dernière avec le dehors ; au Heu de s'aboucher avec le pole supérieur de la vésicule, ce canal, en effet, s'allonge, se recourbe et va en chercher le pôle inférieur ; et alors, on voit la vésicule s’y vider par dessous, et dimi- nuer toujours plus d’ampleur, non pas de bas en haut comme c’est le cas en général, mais de haut en bas, cela pendant que le liquide renfle au passage le canal de sortie (fig. 6, «, b, ce, d). Cette curieuse disposition n’a, je crois, été remarquée dans aucun Tentaculifere, et parait paradoxale, mais Jai pu n'assurer qu'elle existe bien réel- lement. Acineta fluviatilis STOKES ISS5 (1888, p. 312). Logette triangulaire-allongée, comprimée, acuminée en arrière, tronquée brus- quement en avant, ouverte à sa face apicale en une fente qui S'élargit à ses extrémités pour laisser passer deux faisceaux de tentacules droits, capités, relativement courts, partant de deux mamelons latéraux fortement rétractiles. Cette logette est parcou- rue sur ses deux faces d’une dépression longitudinale médiane, que borde à gauche et à droite un renflement nettement accusé. Cytoplasme remplissant la logette entière; il est généralement plus où moins rempli de petits grains dorés. Noyau sphérique, central. Vésicule contractile dans la partie antérieure du corps, et s’ou- vrant sur la face apicale, Tige droite, mince, généralement un peu plus longue que la logette. Longueur de la logette 65%; largeur 32 2. A la page 3541 de son ouvrage elassique (1912) COLLIN S’exprime en ces termes: « Acineta grandis KENT, fluviatilis STOKES, lacustris STOKES, aequalis STOKES, cuspidata KELLIKOTT, forment toute une série d’espèces d’eau douce à ÉTUDE SUR LES INFUSOIRES TENTACULIFÈRES 149 deux faisceaux de tentacules, correspondant assez aux espèces marines préci- tées. Mais en l’absence de documents concernant leurs embryons, nous ne pouvons encore savoir s'ils sont à rattacher phylogénétiquement au groupe de À. tuberosa, ou bien aux Tokophrya pourvues d'une loge rudimentaire, telles que T° lemnarum ». Ce doit bien être l’Acineta fluviatilis de STOKES que j'ai trouvée dans lété de 1918 à l’Ariana, fixée presque toujours à des conferves qui pullulaient sous les Nénuphars. Cependant STOKES est un peu trop avare de renseignements, et comme il indique une tige très courte, n'arrivant pas au delà du tiers de la longueur du corps, l'identification n’est pas certaine. La forme de lAriana rap- pelle en même temps, et même de beaucoup plus près, cette Acinela que GRUBER (1914) a trouvée en grande quantité sur des Conferves au bord du lac de Cons- tance, mais dont il n'indique pas les caractères et à laquelle il na pas rattaché de Fig. 11. — Acineta fluviatilis. nom. Peut-être aussi la < forme naine >» d’Acineta tuberosa que COLLIN représente à la page 111 de son volume, serait-elle encore lAcineta fluviatilis de SToKEs. En tout cas, la jolie petite espèce dont J'ai fait l'étude est certainement autonome, et ses caractères particuliers la feront toujours reconnaitre facilement. La logette, conique, deux fois aussi longue que large à l’état complètement développé, est comprimée latéralement, mais cela d’une manière assez spéciale: la compression concerne surtout une plage médiane, que borde de chaque côté un ren- flement latéral; ainsi constituée, cette logette vue par la tranche, est simplement fusiforme (fig. 2), mais si l’on fait tourner quelque peu la préparation (fig. 4), elle revêtira l'apparence d’une logette double, que lon croirait volontiers en cours de division. Vue d'en haut, ce sera à peu près la fig. 8. Dans la fig. 6, nous avons encore autre chose, une logette en voie de croissance; sur lindividu spécialement consi- 150 E. PENARD déré, elle mesurait 264 le 13 juillet, et en atteignait 31 le lendemain matin; la croissance est donc assez lente, mais peut-être faut-il attribuer cette lenteur aux conditions défavorables dues à l'isolement. Les tentacules, forts et courts, prennent naissance aux côtés de la logette sur deux renflements très nettement dessinés; mais lorsque ces tentacules se rétrac- tent — ce qu'ils font volontiers et tres rapidement — les renflements disparaissent. et même à leur place on finit par trouver une concavité; très souvent aussi, l’un des faisceaux se trouvera déployé, tandis que l’autre se verra tassé dans un creux (fig. 3). Le eytoplasme est clair et pur ; il renferme presque toujours des petits grains dorés, analogues à ceux que nous avons vus dans Acineta papillifera. La vésicule contractile se trouve sur une ligne médiane à quelque distance de la face apicale ; elle est reliée avec le dehors par un canal élargi lui-méme en arrière en une poche = assez vaste, d'un aspect tout particulier; dans la fig. 7, on voit en a la vésicule encore peu gonflée, et très voisine d’un diverticule de la poche; en b, un peu plus tard, la vésicule distendue va tout juste se vider et remplir la poche dont les parois se sont largement écartées l’une de l’autre. Bien qu'ayant examiné dans le courant des mois de juillet et d'août un nombre d'individus assez considérable, jamais à cette époque il ne m'est arrivé de constater la division; mais à la fin de décembre, dans une eau très froide où flottaient des glaçons, il s’en est montré plusieurs cas; cependant, il ne m'a pas été possible de les étudier tout au long, et je me contenterai de reproduire en quelques traits, dans la fig. 5, ce que j'en ai pu voir sur l'individu le mieux examiné; à 10 h. 10, l’em- bryon s’y trouvait nettement dessiné, avec des lignes ciliaires qui m'ont paru être au nombre de 6 (2); à 11 h. 05, c'était une boule, ou plutôt un ellipsoïde, déjà libre, mais dont je p’ai pu suivre plus loin les évolutions. Periacineta lacustris STOKES Acineta lacustris STOKES 1886 (1888, p. 314). Logette allongée, subeylindrique où subvasiforme, 2 !/, ou 3 fois aussi longue que large, comprimée, légèrement convexe où ondulée à son bord apical; étirée à son extrémité postérieure en un pied tres court, creux, évasé à son point de fixation; ouverte à sa face apicale pour laisser passer, aux deux angles de la tron- cature, deux faisceaux de tentacules longs, fins, nombreux, capités. Cytoplasme remplissant la logette entière sans pénétrer dans le pied. Noyau en boudin court. Vésicule contractile unique, antérieure, s’ouvrant sur la face apicale. Longueur 100 % environ. .ÉTUDE SUR LES INFUSOIRES TENTACULIFÈRES 19/ La diagnose relative à cette espèce est le résultat des observations que j'ai pu faire sur un unique individu; et les renseignements obtenus se bornant à fort peu de chose, javais à tout hasard conservé mes notes sans l'intention de les publier, lorsque l'ouvrage de STOKES n'a fait connaitre l’Acineta lacustris, à laquelle on peut assimiler cet organisme, trouvé à l'Ariana en octobre 1918. C’est bien là, me semble-t-il, une forme autonome, mais qu'il faudrait plutôt rapporter au genre Periacineta de COLLIN, créée pour + les Aciné- tiens pourvus d’une loge qui est fixée directe- ment au substratum, Sans l'intermédiaire d'un pédoncule structuré (style proprement dit). La base de la loge s’atténue au-dessus du point de fixation, et se termine en pédoncule, au lieu d’être adhérente par toute la face basale, comme par exemple dans les Solenophrya >. Ce n’est pas là, malgré une ressemblance apparente, la Podophrya buckei de KENT 1882 _) que nous allons retrouver, mais peut-être bien cette Periacineta lacustris correspond-elle pour- Fig, 12. — Periacineta lacustris tant à la Periacineta buckei telle que COLLIN l’a étudiée et reproduite dans la fig. 92 de son grand ouvrage (p. 354). Si tel était le cas, il y aurait eu confusion et là Periacinete buckei COLLIN devrait deve- nir Periacineta lacustris (KENT) (Acineta lacustris STOKES). ? Periacineta buckei (KENT) COLLIN 1912 Podophrya buckei S. KENT 1882. Logette grisätre, mince, droite, 3 ou 4 fois aussi longue que large, comprimée sur ses côtés, légerement excavée sur son bord antérieur, arrondie en arriere puis prolongée en un pédoncule extrémement court, presque nul. Sur la face apicale. 2 faisceaux de tentacules forts et relativement peu allongés, tronqués à leur extré- mité sans renflement appréciable. Cytoplasme remplissant la logette entiere, sauf la pointe postérieure. Noyau allongé, droit, longitudinal, Vésicule contractile tres rap- prochée de la face apicale, sur laquelle elle va s'ouvrir. Longueur 65 y. Comme pour l'espèce précédente, ce n'est malheureusement encore que par un CE] seul individu que j'ai pu connaitre cette espèce. L'animal allait à la dérive, attaché 152 E. PENARD à une petite particule ou fibre végétale en décomposition; mais J'ai pu le conserver trois jours en bonne santé, [ne n'a pas été possible d'identifier cet unique exem- plaire avec la Periacineta buckei telle que COLLIX lenvisage (qui serait plutôt lAci- nela lacustris de STOKES, comme nous venons de le voir) mais il me semble plutôt que nous avons là la Podophrya Buckei de KENT (1882), soit Hallezia Buckei de SAND (1901). L'apparence est en effet toute différente de celle de l’organisme étudié par COLLIN: l'enveloppe, plus étroite, à bords rectilignes, fortement comprimée (fig. 2, coupe transversale), est grisâtre, rugueuse plutôt que Hsse, terminée en ar- rière par un prolongement pointn, étroit: en avant, elle est excavée sur les côtés; le noyau est plus allongé, les tentacules sont plus courts et plus larges. .) A ce propos, j'attirerai l'attention sur la fig. 5 qui montre la partie antérieure Fig. 13. — Periacineta buckei. de Panimal telle qu'elle était au moment précis où Je vins à découvrir ce dernier. Un petit Infusoire vint sous mes yeux se précipiter sur l’un des faisceaux, et les tentacules S'appliquèrent immédiatement sur lui, mais en s’élargissant au point de contact en une ventouse particulièrement développée, un disque aplati dont le dia- mètre était du triple au moins de celui du tube dont elle constituait l'extrémité. Periacineta triangularis sp. n. ? Acineta urceolata STOKES 1885 (1888, p. 313). Logette en forme de triangle équilatéral, fortement comprimée, prolongée en arriere en un pied très court, presque nul; ouverte à ses angles antérieurs en deux orifices par lesquels sortent deux faisceaux de tentacules longs et fins, capités, pre- nant naissance sur un mamelon terminal. Cytoplasme remplissant la logette entière, mais sans pénétrer dans le pied. Noyau sphérique, central. Vésicule contractile dans la partie antérieure du corps, et s'ouvrant sur la face apicale. Longueur et largeur, 40 à 65 y. La Periacineta trianqularis vivait en compagnie de lAcineta fluviatilis, à l'Ariana, dans l'automne de 1918, et tout d'abord j'avais cru pouvoir la consi- dérer comme n’en représentant qu'une forme particulière; peut-être y avait-il là, ÉTUDE SUR LES INFUSOIRES TENTACULIFÈRES A semblait-il, des individus jeunes, où la logette n'aurait pas atteint sa croissance entière; mais 1} m'a fallu bien vite revenir sur cette opinion; la forme de triangle équilatéral est définitive; le pied reste toujours extrêmement court, c'est un simple petit prolongement de l'enveloppe, et non pas une vraie tige; de plus, les deux faisceaux de tentacules — minces, mais fortement capités, — prennent naissance non pas Simplement aux côtés de la face apicale, mais aux deux angles antérieurs du triangle, et dans une sorte de poche (fig. 1, 4) où de troncature de la pellicule d’enveloppe; cette dernière, en effet, se replie sur la face apicale, mais en laissant à gauche et à droite un vide cupuliforme pour le passage des faisceaux (fig. 2); c’est Fig. 14. — Periacineta triangularis. là une disposition assez curieuse, que nous retrouverons, modifiée, dans Periaci- neta Gammarti. Le corps, très fortement comprimé latéralement (fig. 2, qui montre en même temps la face apicale et le repli de l'enveloppe), renferme un gros noyau arrondi, très peu visible au milieu des grains qui remplissent le plasma, puis une vési- cule contractile, qui vient déverser son contenu à la face apicale; mais dans les deux occasions où j'ai pu observer la formation d’un embryon (fig. 3), on voyait cette vésicule, repoussée assez loin et sur le côté, s'ouvrir dans le sac embryonnaire. Cette espèce rappelle l’Acineta urceolata de STORES (1883), sur laquelle les renseignements sont très incomplets, et dont la vésicule contractile est donnée comme postérieure. Periacineta gammari Sp. n. Logette urcéolée, comprimée, souvent aussi large que longue et parfois même plus, légèrement convexe en avant, arrondie en arrière puis étirée en un pied large, très court, creux. Face apicale ouverte en une fente qui Ss’arrondit sur les deux 154 E. PENARD angles latéraux, en méme temps que la cuticule d'enveloppe s’y soulève de chaque côté comme une sorte de cuvette, par laquelle se font jour deux faisceaux de tenta- cules fins, très mobiles, souvent rétractés en spirale, à extrémité à peine capitée. Cytoplasme clair, remplissant la logette entière mais sans pénétrer dans le pied. Noyau sphérique, central. Vésicule contractile dans la partie antérieure du corps, latérale mais S'ouvrant par un canal diagonal au centre de la face apicale. Longueur 35 à 40 4; largeur relativement tres variable. Sur les pattes de Gammarus pulex. Ce petit Tentaculifère semble être resté inaperçu jusqu'ici; où en tout cas, s’il a été décrit ce n'est que d’une manière tres insufhsante, car il n'a été impossible de le ramener à aucune forme connue; et pourtant il n’est pas rare, toujours sur les Gammarus, où il ne manque presque jamais ; mais à vrai dire, il y est si bien caché entre les grosses épines qu'on trouve à la jointure des pattes, et si fortement atta- ché à son hôte, qu'on ne le distingue qu'avec difhculté; pour bien le voir, il faut briser, dilacérer les pattes des (ammarus, et alors seulement pourra-t-on l’étudier. La forme est assez variable: toujours plus ou moins campanulée, tantôt plus longue que large (fig. 1) et tantôt plus large que longue (fig. 4), la logette se ratta- Fig. 19. — Periacineta gammari. che au soutien par un pédoncule large mais extrémement court, presque toujours invisible sur Panimal si bien caché, et lon à beaucoup de peine à déterminer si ce prolongement figure une tige réelle (fig. 3, 6), ou s'il appartient à la logette elle- méme (fig. 1), autrement dit, si nous avons une Acineta ou une Periacineta ; mais en dépit des apparences, qui conduiraient trois fois sur quatre au genre Acineta, je crois bien m'être convaincu qu'il y à là une Periacineta en réalité (voir p. 156). L'enveloppe est assez fortement comprimée sur ses côtés, et se replie sur la ÉTUDE SUR LES INFUSOIRES TENTACULIFÈRES 455 face apicale, en laissant deux larges ouvertures (fig. 5) par où passent les tenta- cules; mais de plus, la pellicule s’y relève, autour des deux faisceaux, en deux larges oreillettes, plus ou moins évidentes suivant les individus, et qui, suivant l’orienta- tion de l’animal, se présentent sous des aspects assez différents, tantôt comme des roues (fig. 2), tantôt comme de simples collerettes (fig. 3, où l’animal est vu exacte- ment par le côté; dans la fig. 2 il était vu de trois quarts). Les tentacules se déploient avec une grande rapidité, et peuvent atteindre environ deux fois la longueur de l’animal; ils se rétractent tout aussi vite, en quel- ques secondes, » en accordéon », suivant l'expression très juste dont COLLIN s’est servi pour un autre Tentaculifère. Dans la fig. 4 on en voit trois occupés à vider une petite Larvulina variabilis, qui vient de s’abattre tout à coup sur les deux faisceaux à la fois. La vésicule contractile, à la partie antérieure du corps, est toujours un peu de côté; elle se vide dans un canal qui va s'ouvrir au centre de la face apicale, et qui ne se voit guère qu'au moment où le liquide le dilate en passant; comme dans quelques autres Infusoires, ce canal mérite à peine son nom, c’est plutôt un pas- sage voûté, un vide laminaire, dont le plafond est durci en une plaque résistante, Dans la fig. 6, nous assistons à la formation d’un embryon cilié, d’ailleurs presque mür et qui va bientôt s'échapper; libéré (fig. 7), il est ovoïde, très large, et si j'ai bien observé, possède six couronnes de cils; mais il me reste des doutes sur l’exactitude de mes observations, concordantes, il est vrai, sur deux individus différents, mais rendues incertaines par le temps très court — deux ou trois secondes seulement — pendant lequel les petits êtres ont pu être suivis après leur libé- ration. Thecacineta cæpula sp. n. Logette incolore ou très légèrement jaunûtre, lisse, délicate, cordiforme, com- primée de haut en bas et plus large que longue, à face inférieure étalée puis creu- sée par-dessous d’une dépression qui sur un point central se renverse pour former un pédoncule très court, creux, lequel va se fixer au substratum par l'intermédiaire d’une plaquette adhésive. Cette enveloppe est ouverte en un large orifice apical, des bords duquel partent en rayonnant dans tous les sens des tentacules longs et fins, capités, nombreux. Cytoplasme ne remplissant qu'une partie de la logette. Noyau sphérique ou ellipsoïdal, subcentral. Vésicule contractile latérale, dans la partie antérieure du corps. MÉM. SOC. PHYS. ET HIST, NAT. DE GENÈVE, VOL. 89 (1920). 20 156 E. PENARD Diamètre transversal 33 4; diamètre antéro-postérieur 18 . Mousses. Je n'ai malheureusement rencontré qu'un exemplaire se rapportant à cette espèce, dans les mousses de Ta tourbière de Valavran ; mais comme il m'a été pos- sible de l’examiner plusieurs heures durant, et que l'animal se présente sous des dehors très caractéristiques, je n'hésite pas à le décrire. COLLIN à créé le genre Thecacinela pour un certain nombre de Tentaculifères «< qui possedent comme enveloppe pro- tectrice une « coque » et non une « loge (p. 348) > et il < réserve le nom de coque aux enveloppes terminées supérieurement par un bord libre, et au contraire celui de loge aux enveloppes qui se trouvent. par en haut au contact de la face supérieure du corps et con- Fig. 16. — Thecacineta caepula. tinues avec celle-ci. » Dans les leriacineta, nous avions une loge; dans l'organisme qui nous occupe actuellement, nous avons certainement une coque, et c'est au genre T'hecacineta qu'il faut alors le rapporter. La fig. 1 donne une idée assez exacte de l’enveloppe, dont la forme rappelle- rait vaguement celle d’un oignon; dans la fig. 2, on voit l’animal d'en haut, et les tentacules, en un seul faisceau, rayonnent dans tous les sens. Solenophrya calyciformis sp. n. Logette en forme de gobelet, droite, incolore, une fois et demie aussi longue que large, arrondie en arrière mais reposant sur un prolongement pédieux plissé, ridé, incolore, presque nul dans sa hauteur mais dont la largeur arrive aux trois quarts de celle de Penveloppe. Cette dernière est ouverte en avant, et à angle droit sur l’axe longitudinal, sur sa largeur tout entière, et même se montre légèrement évasée, laissant à nu la face apicale du corps, que borde une couronne de tentacules fins, nombreux, très longs, capités. Cytoplasme remplissant la logette entière, mais sans pénétrer dans le prolongement pédieux. Deux vésicules contractiles, latérales, près de Pextrémité antérieure du corps. Longueur de la logette 55 y; largeur 26 y. La forme de la logette est ici celle d’un large gobelet, sub-cylindrique, très légerement évasé à son bord supérieur, à peine resserré en arrière pour reposer ÉTUDE SUR LES INFUSOIRES TENTACULIFÈRES 157 sur le soutien par sa face basale presque entière ; il n’y à pas de compression laté- rale, mais cependant la coupe transversale de cette logette fournit une figure qui se rapprocherait quelque peu d’un carré (fig. 2). Le cytoplasme, dans lequel on voit de nombreux petits grains jaunes, remplit l'enveloppe entière, sans pourtant y adhé- rer ; les tentacules, très nombreux et très longs, sont capités, et prennent naissance sur toute la face apicale, le centre excepté. Deux vésicules contractiles, dans la partie antérieure du corps, fonctionnent régu- lièrement. Je n'ai pas pu distinguer le noyau, caché par les granulations qui remplissent le plasma, et il ne m'a pas non plus été possible d'observer l'embryon cilié. Mes observations ne se rapportent malheureusement qu'à deux individus, trouvés l’un le 6 juillet et l’autre le 12 du A D Lt même mois, dans l’étang de l'Ariana. Il y aurait, à propos de la membrane de l'enveloppe, un détail à vérifier : sur l'un des deux individus, cette enveloppe m'a paru piquetée où guillochée de petits points symétriquement disposés, un peu comme dans les Arcella; mais peut-être y avait-il confusion avec des poussières agglutinées. Solenophrya dubia sp. n. Enveloppe hémisphérique-sacciforme, dépourvue de pied, chitmoïde, Hexueuse, ondulée-plissée, plastique, largement ouverte en avant mais susceptible de se replier quelque peu sur la face apicale. Cette dernière porte un nombre assez considérable de tentacules longs et minces, coniques à leur extrémité, disposés vaguement en 4 faisceaux très lâches et qui semblent se fondre les uns dans les autres, mais laissent libre la région médiane de cette face antérieure. Cytoplasme remplissant à peu près l’enveloppe entière, sans y adhérer nulle part. Noyau central, sphérique, ou ellipsoidal. Généralement trois vésicules contractiles, dans la moitié postérieure du corps, et dont l’une, plus grande, semble être seule la vésicule normale. Diamètre 55 ; hauteur 40 y. Mousses. La dénominatiou que j'ai cru pouvoir affecter à cet organisme est due à la QE] grande ressemblance qu'il présente avec la Sol. bulbacea, Si bien que J'ai tout d'abord hésité à séparer les deux formes; mais mes doutes n'ont pas tenu devant 158 E. PENARD des observations prolongées; l’enveloppe seule est à peu près la même, tout le reste est bien différent. Le corps, globuleux en principe, mais comprimé à son pôle antérieur, est entouré d’une sorte de cupule ou de sac, qui se moule sur lui, et le recouvre même à son bord apical; et cette enveloppe, incolore, lisse, Hexueuse, d'apparence chiti- noïde, repose directement sur le substratum, sans doute attachée par une matiere glutineuse, mais sans l’aide d’un pédoncule distinct. Les tentacules se montrent disposés sans ordre sur la face apicale, mais en y regardant de plus près, on y reconnait des faisceaux, au nombre, semble-t-il, de quatre, mais reliés les uns aux autres par des tentacules plus clairsemés. Is revé- tent une apparence spéciale; leur extrémité est renflée en une sorte de manchon cylindro-conique, lui-méme élargi en un bourrelet convexe à son bord antérieur (fig. 4). Les vésicules contractiles semblent varier en nombre; tout au moins, sur lun Fig. 18. — Solenophrya dubia. des deux imdividus observés, et qui a été conservé trois jours, en voyait-on quatre tout d’abord; puis, plus tard, dans l'après-midi, on n’en trouvait plus que trois (fig. 1), et enfin, dès le second jour il n’en restait que deux, dont Pune, plus grande, semblait être la principale et fonctionnait avec plus d'activité que Pautre. Le noyau est normalement sphérique, et si dans la fig. 1 on le voit allongé, avec les granulations qui le remplissent disposées en trainées, c’est sans doute qu'il n’a pas encore repris sa forme normale, après avoir envoyé un lobe dans l'embryon qui va se détacher. Cet embryon (fig. 3) est ovoïde, relativement allongé, et muni de lignes ciliai- res serrées, dont le nombre m'a paru être de 6 au moins, sans que j'aie pu nr'assu- rer du fait. Les vésicules contractiles y étaient au nombre de 4 (fig. 1), mais l’em- bryon libéré n’en montrait que trois, ou par instants deux seulement. La fig, 2 montre — on aurait peine à le croire — un petit Infusoire, un Myc- ÉTUDE SUR LES INFUSOIRES TENTACULIFÈRES 159 terothrix, réduit à l’état de vessie sphérique après avoir été capturé par un tenta- cule. Tout son contenu avait passé peu à peu dans lAcinétien, même à son tour le noyau, qui s'était allongé pour franchir lobstacle ; mais à l'exclusion des grains d’excrétion, inutiles, qui restèrent jusqu’à la fin dans la vessie maintenant vide. On voyait le tentacule s’agiter en déplacements flexueux, et la grande sphère creuse qu'il portait à son extrémité évasée semblait tourner sans arrêt sur elle-même, sui- vant une ligne allant d'un pôle à l’autre, en glissant sur l’évasement du tentacule. En réalité, la sphère était immobile, et l'illusion était due aux petits grains qu’elle renfermait, emportés par un courant circulaire causé sans doute par l'aspiration, et dont les uns venaient s’engloutir dans le canal, les autres continuant leur route et remontant vers le pole apical. A la fin, loutre vide, réduite à une pellicule extré- mement fine, creva d’un coup. La Solenophrya dubia s'est trouvée dans les mousses d’un mur, à Malagnou ; deux seuls individus, malheureusement, mais dont l’un à été conservé trois Jours; à la fin du second jour, il retira tous ses tentacules, s’arrondit en un kyste lisse, sous son enveloppe plissée, et en resta là. Solenophrya bulbacea sp. n. Enveloppe cupuliforme ou vagement hémisphérique, tres déformable dans sa partie postérieure où elle est tantôt prolongée d’un mamelon de fixation, tantôt au contraire déprimée et flexueuse. Largement ouverte et un peu évasée à son bord antérieur, elle semble se prolonger en avant en une sorte de second revêtement, constitué par une épaisse couche de mucilage bourré de poussières et de paillettes, et que les tentacules ont à traverser pour s'épanouir au dehors. Ces tentacules, qui partent sans ordre de toute la surface apicale, sont longs et minces, capités. extrème- ment mobiles, devenant fusiformes Fin) 19 2 Solenophrya bulbacea. ou même subconiques hors de la ré- traction. Cytoplasme grisätre, ne remplissant pas enveloppe entière. Noyau sphé- rique, subcentral. Vésicule contractile unique, latérale et dans la moitié postérieure du corps. Diamètre 45 à 50 , y compris l'enveloppe. 160 E. PENARD Cette espèce, de même taille que la précédente, la rappelle à premiere vue de tres près, mais elle en differe nettement en réalité, par ses tentacules à forte tête ronde, par son revétement antérieur mucilagineux, par sa vésicule contractile uni- que. Je lai trouvée à Florissant, aquatique et non pas muscicole, et très rare, trois ou quatre individus seulement ayant pu être examinés. L'enveloppe est presque identique à celle de la So. dubia, transparente, inco- lore ou bien un peu jaunâtre, bosselée, terminée en arrière par un renflement adhé- sif; en avant, elle est béante, mais alors, toute cette face apicale est recouverte d'une sorte de manteau mucilagineux, très épais, et rempli d'une infinité de pous- sières et de paillettes minuscules: c’est Jà un tégument spécial, qui recouvre lani- mal mais ne se prolonge pas dans intérieur de l'enveloppe. Les tentacules, longs et minces, et disposés irrégulièrement sur toute la face apicale, sont très mobiles, S’allongeant et se rétractant continuellement, et prenant alors une apparence assez curieuse : tantôt 1ls se renflent en fuseau (fig. 1, 2), tan- tôt ils s'élargissent en une sorte de massue plissée en travers, terminée par un gros bouton, et reposant par une base étalée sur Ie manteau mucilagimeux ; puis on les voit plus en arrière se continuer tout droit, et fortement rétrécis, à travers le man- teau, jusqu'au corps proprement dit, Cette configuration spéciale provient du fait que le tube axial du tentacule opère normalement et tout droit son retrait, tandis que la gaine externe, retenue par l'enveloppe mucilagineuse, est obligée de se plisser, de se ramasser sur elle-méme pour se conformer au mouvement. Solenophrya micraster PENARD 1914. Capsule jaunâtre, chitineuse, comprimée dans le sens antéro-postérieur, dépourvue de tige, arrondie-pentagonale dans son contour. Face apicale creusée de 5 larges rayons figurant ensemble une étoile régulière, et de l'extrémité desquels sortent faisceaux de tentacules peu serrés, fins, capités. Cytoplasme ne remplis- sant pas l’enveloppe entière. Noyau rond ou ellipsoïdal. Vésicule contractile sur l’un des côtés, à mi-hauteur du corps. Diamètre 50 à 45 y, rarement jusqu’à 56 y. Mousses. C’est en 1914 que j'ai décrit ce petit Tentaculifère, particulier aux mousses, et bien que j'aie pu contrôler en 1915 mes observations, sur des exemplaires pro- venant soit des localités primitives (murs et troncs d'arbres à Bougeries, Troimex, Frontenex), soit d'un tronc d'arbre à Laney, où la capsule était la même, mais plus lisse, plus fortement colorée, et sans rides, je n'ai pu obtenir aucun renseignement nouveau. ÉTUDE SUR LES INFUSOIRES TENTACULIFÈRES 161 Cet organisme est particulièrement adapté aux alternatives de sécheresse et d'humidité; la logette représente une capsule presque partout fermée, car même les cinq fentes caractéristiques en étoile sont revêtues d’une mince cloison, ne Jais- sant ouvertes que leurs extrémités pour laisser passer les cinq faisceaux de tenta- cules (fig. 1, et fig. 2, l'animal vu de côté). Comment se fait la sortie de l'embryon cilié, si du moins il s’en forme ici? Après ramollissement de la cloison tendue entre les rayons? Malheureusement, cet embryon, je ne l'ai jamais trouvé. Dans une communication particu- lière que COLLIN voulait bien me faire à propos des Tentaculifères muscicoles, il me disait, en avril 1914 : « J'aurais quelque propension à inclure dans le genre Metacineta votre < Solenophrya micraster », avec son ouverture penta- lobée si caractéristique; ceci malgré l'absence totale de partie basale amin- Fig. 20. — Solenophrya micraster. cie formant pédoncule. Du reste, ce dernier caractère est sans grande importance, > [e) C’est bien, en effet, au genre Metacineta que je serais aujourd'hui dis- posé à rapporter cet organisme — à moins qu'il ne faille créer pour lui, comme pour d’autres Tentaculifères muscicoles, un genre spécial —; mais pour arriver à des conclusions quelque peu sûres, il faudrait observer les phénomènes de repro- duction, et pour l'instant, mieux vaut laisser à cet organisme sa dénomination pro- visoire. Solenophrya flavescens PENARD 1914. Enveloppe arrondie, subsphérique, un peu aplatie à sa face inférieure. Klle constitue un revêtement très épais de grains jaunâtres extrémement petits noyés dans un ciment plastique. Au point d'attache sur le substratum, ce revétement s’amin- cit, et parfois s’entr'ouvre pour laisser à nu la cuticule visqueuse. Tentacules très fins, capités, assez longs, se faisant jour au travers de lenveloppe soit mdividuelle- ment soit par groupes, et sans ordre régulier. Noyau sphérique ou allongé, subcen- tral; vésicule contractile au voisinage du noyau: parfois une vésicule accessoire. Diamètre 38 à 50 2. Mousses. Nous avons encore iei un de ces petits Tentaculiferes adaptés à une vie spé- ciale, à la brusque humidité succédant à la sécheresse, et que l'on trouve dans les 462 E. PENARD mousses sur les troncs d'arbres et les vieux murs. En comparant cette espèce aux Solenophrya micraster et massula, je disais en 1914: « Mais ici, au lieu d’une enve- loppe parcheminée et de nature chitinoïde, nous avons un revétement épais de grains Jaunâtres extrémement petits, de moins de 1, noyés dans un ciment plastique, et qui, tassés les uns sur les autres, constituent une membrane feutrée qui se pré- sente comme vaguement striée en travers. Vue perpendiculairement à son épais- seur, cette enveloppe se montre alors comme recouverte d’une ponctuation très fine, qui rappellerait celle des Arcella parmi les Rhizopodes. » Depuis 1914, je n’ai pas revu cet organisme, et c’est à ma première des- cription qu'il me faut renvoyer pour de plus amples détails. Notons seule- ment que les tentacules, très fins, se Fig. 21. — Solenophrya flavescens. font jour sur un point quelconque de la surface, entre les grains, qu'ils désa- grégent lorsqu'ils sont plusieurs à repousser l'enveloppe devant eux (fig. 1). Dans la fig. 2, l'animal est vu de côté, fixé à quelque brindille de mousse par sa pellicule un peu gluante, sur un point où le revêtement feutré s’est écarté et a laissé le corps à nu. Dans l’intérieur se trouve une grosse masse grisatre, dont la nature m'a échappé, et qui représente peut-être un bourgeon; en tout cas, j'ai observé dans cette espèce de véritables actes de division inégale, qui sont relatés dans mon Mé- moire de 1914. Solenophrya massula PENARD 1914 à. apsule jaunâtre, chitinoïde, rugueuse et couverte de particules siliceuses d’origine étrangère; vaguement hémisphérique, à contours bosselés et Inégaux, reposant sur le substratum par sa face inférieure aplatie. Tentacules longs, fins, capités, se faisant jour à la face supérieure de l'enveloppe, par 2 (ou parfois 4) ori- fices très étroits, sous la forme de deux (ou quatre) faisceaux composés chacun d'un tres petit nombre d'éléments. Noyau sphérique. central. Vésicule contractile dans le voisinage du noyau. Diamètre 25 y. Mousses. Personne, en rencontrant ce minuscule Tentaculifère, ne s’imaginerait avoir affaire à un être organisé; on n’y verrait tout d’abord qu'une petite masse Jaunâtre, ÉTUDE SUR LES INFUSOIRES TENTACULIFÈRES 1 63 une coque chitineuse, recouverte de particules siliceuses de nature étrangère, telles par exemple qu’on les connaît dans les Rhizopodes du genre Pseudodifflugia ; mais si l’on observe attentivement cette masse inerte on en verra sortir, par de petits ori- fices percés dans la paroi (fig. 2) deux, trois, où même quatre faisceaux de tenta- cules très fins, capités. Dans une seule occasion, j'ai pu voir dans le cytoplasme un noyau arrondi, et tout près, une vési- cule contractile (fig. 1). N'ayant pas retrouvé cet organisme, je ne puis que renvoyer à mon Mémoire de 1914 pour les détails supplémentaires, qui n’ajou- teront d’ailleurs que peu de chose à ce que nous venons de voir. Encore ici, on pourrait se de- mander par où se fait la sortie des embryons ciliés, dont l’existence est au moins vraisemblable? Peut-être pourrait-on mettre en cause la face inférieure de Ia logette, très mince, lisse, et qui pourrait se résorber temporairement. Discophrya cothurnata (WEISSE) LACHMANN. Acineta cothurnata WEISSE 1847. Corps rigide, très fortement aplati sur ses côtés, en forme de raquette, tron- qué vers le bas pour se prolonger en un pied très large, en éventail, dont les côtés ne font que continuer la courbe générale du corps. Ce pied est finement strié dans sa longueur et présente également quelques sillons transversaux ; il se fixe au sup- port par un étroit bourrelet, opalescent. Tentacules forts, peu allongés, à peine élargis à leur extrémité, et prenant naissance, en nombre restreint, des deux côtés de l’arête latérale du corps. Noyau en ruban rameux, envoyant des branches dans le corps entier. Vésicules contractiles au nombre d’une douzaine, petites, réparties dans toutes les régions du corps, mais surtout au voisinage de l’arête latérale. Longueur 155 à 220 », y compris le pied ; largeur 110 à 150 y. « CLAPARÈDE et LACHMANN, STEIN aussi, trouvaient assez abondamment ce superbe Acinète sur les racines des Lentilles d’eau en diverses localités ; malgré des recherches attentives, je n'ai jamais pu l’observer. « Ainsi s'exprime COLLIN en 1914; plus heureux que lui, j'ai pu en observer quelques exemplaires, en octobre MÉM. SOC. PHYS. ET HIST, NAT. DE GENÈVE, VOL. 89 (1920). 21 104 E. PENARD 1917, puis en avril 1918, également sur les racines des Lentilles d’eau (Lemna polyrhiza, rapportées de létang de Grossee non loin de Zurich, par M. H. ROMIEUX). La forme est à peu pres celle d’une raquette, où mieux encore, e’est presque exactement celle des Nebela parmi les Rhizopodes: un disque très fortement aplati, qui se continue en un large pied, sillonné en travers et strié dans sa longueur, à stries d'autant plus visibles qu'elles sont plus rapprochées du point de fixation. Dans le cytoplasme, grisätre et rempli de granulations claires, se montrent une dizaine de vésicules contractiles, surtout près des bords, mais quelques-unes aussi plus à l'intérieur. Elles s'ouvrent chacune au dehors par un canal étroit (fig. 3), et se reforment au moyen de petites vacuoles, qui d’abord avaient fait couronne autour de la vésicule dilatée, et après la systole viennent se confondre en une seule. Le noyau est étroit, mais très allongé, en ruban rameux (fig. 1): et dans un certain sens, on peut le considérer comme amiboïde, car d’une observation à l’autre, sur un méme individu, on le trouve un peu changé: très peu, cependant, et il faut plusieurs heures pour que la différence y soit nettement apparente. Les tentacules garnissent les deux côtés du corps, partant aussi bien de l’une des faces que de Pautre (fig. 2, où l'animal est vu à peu près par la tranche); ils sont peu allongés, mais larges, et terminés abruptement, plutôt # par une cupule que par un bouton; la O . ; = ne @ : lumière interne, le canal à paroi fibreuse Oo | 9 | | dont COLIN a si bien démontré l’exis- 4 l | f] tence, s'y voit quelquefois distincte- A BTOC D (ESF OH ment. La fig. 4 est assez significative Fig, 28. — Discophrya cothurnata. sous ce rapport; elle montre les chan- gemnents capricieux qui peuvent se pro- duire sur un méme tentacule au cours de l'observation ; en &, le tentacule est sim- plement capité; en b, on voit dans le bouton terminal un vide, il semble que ce bou- ton se soit creusé en cupule; en €, le vide à disparu, mais on remarque un léger étranglement ; en d, le bouton s'est rétracté, le tentacule est largement ouvert: en e, les parois se sont fermées à nouveau, mais en f, il semble qu'une petite masse de plasma (mucilage ?) déborde le canal interne; en g, le tentacule vient de se rétracter brusquement, et a pris une forme de verre à pied, qu'il revêt d'ailleurs volontiers dans cette espèce, généralement après un dérangement subit; en h, le tentacule repousse, et j'ai cru voir, dans ces occasions-là, le canal interne se remplir peu à ÉTUDE SUR LES INFUSOIRES TENTACULIFÈRES 169 peu, mais très lentement, d’un mucilage clair qui monte dans le tube, et arrivé à son bord se confond avec lui, en contribuant à la formation de la « tête ». Dans la fig. 3, nous avons autre chose, un tentacule qui vient d'appréhender une Frontonia leucas — bien plus grosse que la Discophrya — et en aspire le con- tenu. Il s’est tout entier élargi, dilaté en ventouse à son extrémité, et l’on voit le tube interne se prolonger en arrière jusque bien loin dans le cytoplasme; c’est là, 1l faut le dire, un cas exceptionnel; sur le vivant, le tube interne ne peut que très rarement être suivi au delà de la cuticule d’enveloppe; dans le cas actuel, on ne le distinguait que sur le tentacule en action; et quant aux éléments vermiformes que l’on voit glisser les uns à la suite des autres dans le tube, c’étaient là des tri- chocystes de la Frontonia, qui passaient en un courant continu dans le cytoplasme de la Discophrya ; et, il faut noter ce point important, sans jamais faire explosion ; il leur eût fallu pour cela le contact de l’eau pure, et, toujours noyés dans un milieu d’une certaine densité, ils n'avaient pas l’occasion d’éclater. Puisque nous nous sommes arrêtés quelque temps aux tentacules, je voudrais terminer ces réflexions par quelques considérations générales, non pas sur le phé- noméène de la succion, dont nous traiterons plus tard (v. Choanophrya), mais sur la capture même de la proie. On à beaucoup discuté, et l’on discute encore, pour savoir si le tentacule est gluant, ou si l'adhésion à la proie capturée est comparable à l'effet d’une simple ventouse. À mon avis, la viscosité existe, même très forte, mais elle n’est que tem- poraire, et, mieux encore, elle n’est que facultative. Quand on voit un Infusoire cilié arrêté net dans sa course par un tentacule, et alors même que ce tentacule ne s’est pas encore élargi en ventouse — car il ne se dilate qu'une fois la capture accomplie —, on ne peut se défendre de croire à une viscosité puissante. Mais en même temps, une autre action se fait sentir, une action stupéfiante, dont on ne peut douter non plus ; l'Infusoire s'arrête net, ses cils cessent immédiatement de battre, et tout au contraire ils n'en battraient que plus fort s'il n’y avait là qu'un arrêt accidentel ; un seul tentacule suffit à arrêter un Infusoire plus gros que le Tentacu- lifere lui-même, mais en général, si la proie en vaut la peine, il en vient bien vite un autre, ou plusieurs autres, s'ajouter au premier; c’est que l’adhérence n’était pas suffisante; la matière stupéfiante, lorsqu'il s'agissait d’une grosse proie, n'aurait suffi que pour un instant, et cette proie aurait repris vie, les cils se seraient remis à battre, et l’Infusoire se serait échappé. Le venin, en effet, n’est pas nécessairement mortel; tout dépend de la quan- tité, et j'ai vu de petits Infusoires, capturés, stupéfiés, morts en apparence, puis bien vite abandonnés comme ne convenant pas, reprendre peu à peu leur vie; quel- ques cils commencent à battre, puis d’autres plus nombreux, et finalement lInfu- 166 E. PENARD soire s'éloigne, malade mais viable encore, et si la vésicule contractile y à gardé son activité, il peut compter sur la guérison. Cette vésicule continue du reste très longtemps à fonctionner, et probablement même après la mort; c’est ce que j'ai remarqué surtout chez les Vorticelles, où l'animal était déjà réduit par la succion à l'apparence d’une outre aux trois quarts vide, cependant que la vésicule, très grossie, se vidait, pour se reformer lentement et se vider de nouveau. Cependant, si nous ne pouvons faire autrement que de reconnaitre au tenta- cule une certaine viscosité, il nous faut admettre en même temps que cette visco- sité n’est que facultative, cesse d'exister, pour ainsi dire, brusquement et comme par un acte voulu. Comment, en effet, expliquer ces cas extrémement nombreux où des Flagellates, Péridiniacées, même TInfusoires, viennent frôler les têtes des tenta- cules sans être le moins du monde englués? les Coleps, beaucoup d'Hypotriches, et d’une maniere générale les Infusoires dont la cuticule est dure, sont refusés, à moins qu'ils se soient pris au défaut de la cuirasse, dans la gouttière péristomienne chez les Vorticelles ou dans le sillon de la ceinture dans les individus errants, dans la fosse adorale chez les Stentors? Et combien de fois n’ai-je pas vu les embryons ciliés des Tentaculifères eux-mêmes circuler dans le fouillis des tentacules pater- nels? I y à plus, même ; on constate parfois une véritable sélection; c’est ainsi que j'ai vu la Dyscophrya scyphostyla capturer coup sur coup les Askenasia elegans — il est vrai très nombreux dans cette station spéciale —, et refuser les autres [nfu- soires, où bien les prendre pour les renvoyer aussitôt. Pour les Askenasia, les ten- tacules étaient donc visqueux; pour les autres organismes, ils semblaient ne pas l'être. Un exemple assez typique également est celui de la Tricophrya epistylidis, dont nous nous occuperons bientôt: j'ai souvent trouvé à Florissant cette espèce sous forme de petites colonies de trois ou quatre individus confondus les uns dans les autres, et sur ces colonies ou îlots se déployaient, librement fixées à la colonie elle-même, au milieu des tentacules, des Vorticelles dont j'ai pu suivre les ébats pendant deux jours entiers. Elles devaient être utiles, même, au Tentaculifère, en attirant de petits organismes par lagitation de leurs cils: mais des Vorticelles de même espèce, venant, à l’état errant, à passer dans le fouillis des tentacules, étaient capturées et vidées en un instant. Discophrya scyphostyla COLLIN 1912 Discophrya elongata CI. et L. var. scyphostyla COLLIN. Corps rigide, très fortement comprimé latéralement, extrêmement variable de forme suivant les individus ; normalement droit et de 2 à 3 fois aussi long que large, ÉTUDE SUR LES INFUSOIRES TENTACULIFÈRES 167 souvent étalé en éventail, ou même allongé dans le sens transversal et devenant 2 fois aussi large que long. Il repose sur un pied épais et très court, dilaté en cupule évasée, strié dans sa longueur. Tentacules courts, larges, non capités, peu nom- breux, disposés sur les côtés et tout près de l’arête latérale, soit solitaires, soit en petits groupes fasciculés. Noyau en boudim allongé, dans le grand axe du corps. Quelques vésicules contractiles (de 3 à 6 en général) disséminées sans ordre dans le cytoplasme. Longueur très variable, en moyenne 130 pour les individus allongés. Ce magnifique Tentaculifère était extrémement abondant sous les feuilles des Nénuphars, à Florissant, dans l’automne de 1918. L'animal, toujours très fortement aplati dans le sens longitudinal, est extra- ordinairement variable de forme, tantôt semblable à une longue raquette, tantôt rappelant un large éventail, et les fig. 1 et 2, qui semblent montrer les deux extré- mes, pourraient être exagérées encore dans les dimensions relatives qu’elles indiquent, si l’on voulait tenir compte des cas très exceptionnels; quant à la fig. 3, elle donne une idée de ce qu'est l’animal vu par la face apicale. Mais quelle que soit la forme, l’animal repose toujours sur un pied très court, creusé en une véritable cupule, dans laquelle il se trouve comme un œuf dans son Co- quetier. Les tentacules, courts, lar- Fig. 24. — Discophrya scyphostyla. ges, non capités, répartis en petits groupes des deux côtés de l’arête latérale, sont presque identiques à ceux de la Discophrya cothur- nata dont nous venons de traiter, et j'ai pu controler sur eux toutes mes obser- vations concernant cette dernière espèce. Les vésicules contractiles, reliées avec le dehors par un petit canal droit et tubulaire, sont au nombre de deux, trois, où au maximum six, réparties sans grande régularité. Le noyau est long, droit, très finement granulé, d’une pâte plus fine et plus 168 E. PENARD pure qu'on ne le trouve dans les Tentaculifères en général; un micronucléus, petit, d'un bleu opalescent, pourvu d'une membrane, se voit quelquefois sur les individus très clairs. L'étude de la cavité embryonnaire, de la formation graduelle du jeune indi- vidu, et des phénomènes allant de pair avec la libération de ce dernier, est iei d’un intérêt véritablement palpitant, mais en même temps les observations présentent une suite ininterrompue de difficultés. Ces phénomènes, malgré les recherches de CLAPARÈDE et LACHMANN, faitement connus; COLLIN, à son tour, à essayé de les décrire, mais ses explica- de STEIN, de BÜTSCHLI, ne sont encore que très impar- tions — si claires en général et qui ne le sont plus ici — se ressentent de l’incerti- tude des renseignements. «J'espère du reste revenir >», dit-11 en concluant, < dans un prochain travail, sur tous ces cas intéressants qui méritent une étude beaucoup plus attentive ». Fig. 25. — Discophrya scyphostyla. Loin de moi de vouloir aujourd'hui prétendre à des renseignements définitifs ; ces phénomenes m'ont beaucoup occupé, mais pour rester sur bien des points une énigme. I me semble pourtant que les résultats acquis méritent d’être rapportés. Je passerai sous silence, cependant, les premiers stades de la formation du jeune indi- vidu au sein de la cavité embryonnaire, pour en arriver au moment où, sous lappa- rence qu'il gardera jusque près du moment de là libération, l'embryon va bientôt se disposer à partir. La fig. 4 nous donne une vue d'ensemble de la cavité incuba- trice, sur le plancher de laquelle repose le jeune animal. A gauche, nous voyons se détacher sur le vide de la cavité, une petite lumitre, un orifice arrondi qui s’étire vers le bas en une fente recourbée en point d'interrogation; cest par là, par toute cette fente, que l'embryon cilié se fera jour au dehors. À droite nous voyons un bouton clair, proéminent, une sorte d’ombilié, appliqué non pas à ÉTUDE SUR LES INFUSOIRES TENTACULIFÈRES 169 embryon lui-même, mais à Ja paroi de la cavité incubatrice, ct ce bouton, malgré les apparences qui sembleraient indiquer un résultat tout contraire, sera presque le premier à se faire jour au dehors; une fois l'embryon sorti, le bouton sera tout en avant (fig. 7), et c’est lui qui plus tard constituera le disque de fixation. Dans le bas de la cavité, nous remarquons une ceinture de lignes ciliaires ser- rées, au nombre de cinq ou six, qui parait tout d'abord devoir entourer la masse embryonnaire à sa base; mais il n’en est pas ainsi; cette masse embryonnaire, si nous pouvions l'examiner par la face opposée, s'y montrerait partiellement soudée à la paroi, faisant corps avec elle, et les lignes ciliaires, qui en poursuivant leur course le long de la paroi avaient décrit une courbe autour de l'ombilie caractéris- tique, trouvant plus loin le chemin fermé sont obligées de revenir sur elles-mêmes, remontent sur la masse embryonnaire, et y continuent leur course, légèrement descen- dante, juste au-dessus des lignes inférieures (fig. 4) et sur la même face qu'elles: puis elles se replient encore sous l’autre extré- mité de l'embryon, reviennent également sur elles-mêmes et rejoignent Parc inférieur. Autrement dit, il y à bien là un anneau, une ceinture, mais au lieu de poursuivre une route circulaire, cette ceinture se rabat sur elle-même, l’une de ses moitiés se superpo- Fig. 26. — Discophrya scyphostyla. sant à l’autre dans le même plan. Toutes les stries de l'anneau sont ciliées, et c’est dans la région antérieure (à gauche dans la figure) que les cils paraissent être les plus longs et les plus forts: ils y battent et se répandent en ondulations flexueuses, jusque sous le toit de la cavité. Mais quand on les voit tout d'un coup redoubler d'activité, le moment est proche, l'embryon va s'échapper, il faut concentrer toute son attention sur les événements : et alors, on assiste à un spectacle étonnant: L’extrémité supérieure gauche (dans la figure) de la masse embryonnaire s'al- longe, commé pour s’introduire dans lorifice de sortie et l’élargir; mais avant même que cette pointe gauche arrive à l'ouverture, la partie droite de la masse, d’anguleuse qu’elle était, s’est aplanie, et alors, on voit un fort mouvement de cils se produire, l’ombilic grimper d’un trait le long de l'embryon et arriver à l’orifice de sortie, la paroi postérieure se décrocher et courir le long du plafond, le plan- cher antérieur faire de même; en un clin d'œil, en une seconde à peine, tout est bouleversé; l’ombilie est maintenant dans un tube (fig.5), en méme temps que le corps embryonnaire s'étale et que les lignes ciliaires s’écartent, et deux secondes 170 E. PENARD après, l'embryon cilié se voit libéré (fig. 7), rattaché pourtant au cytoplasme interne par un lambeau, un pont qui finit par se rompre, dernier reste de cette région laté- rale par laquelle la masse embryonnaire était restée en liaison avec le reste du Corps. Tout cela est si rapide, que les faits semblent tenir du prodige ; mais après avoir répété mes observations, l’œil fixé tantôt sur lombilic, tantôt sur la paroi, j’en suis arrivé à une explication, qui, sans me satisfaire, me parait exacte dans ses grands traits, et qui pourrait être rendue à peu près compréhensible par les dia- grammes schématiques de la fig. 9: en &, nous avons la cavité incubatrice, au mo- ment où la masse embryonnaire s’allonge pour rejoindre lorifice de sortie ; les lignes grasses indiquent les nappes mouvantes et ciliées qui vont se dévaginer; en b, la dévagination à commencé, sur les deux bords de la fente de sortie ; une vague ciliée court sur la masse embryonnaire; lombilic est à moitié chemin, mais au- dessus, la nappe supérieure, le plafond, court également; il semble qu’une force énigmatique, puissante (imbibition brusque?) agissant d’arrière en avant, à pénétré la cavité, détaché les nappes accolées à la paroi, et pousse maintenant l'embryon, dont la masse interne se modifie coup sur coup; mais en bas, sur le plancher, cet embryon reste encore attaché au parent. En €, la dévagination est plus avancée ; en d, elle l’est plus encore, et le stade correspond à peu près à ce que nous voyons dans la fig. 5; en e, la partie antérieure de l'embryon s’élargit et s’allonge, et en f, tout est dévaginé, mais la masse entière va se remanier en un embryon discoïde. De « à f, ou si l’on veut, de la fig. 4 à la fig. 7, trois secondes ont suffi ! La fig. S montre l’embryon libéré; il est bordé d’un ruban à cinq ou six ran- gées de cils, latéral et en même temps rapproché d’une face qu’on peut appeler ventrale, qui porte à l’une de ses extrémités (antérieure lors de la sortie et de la course, postérieure dans le sac embryonnaire) le bouton ou l’ombilie qui fournira le point de fixation. On y voit deux, et parfois trois vésicules contractiles; le noyau y est ellipsoïdal, plus où moins allongé déjà. La cuticule est déjà très résistante, si bien qu’on peut, par compression, l’isoler presque parfaite après en avoir exprimé le contenu. Le jeune animal peut courir une journée entière, puis se fixe par le bouton caractéristique (fig. 6), qui sécrète immédiatement un pied, et très vite on voit quel- ques tentacules pousser aux extrémités. La forme est encore celle de la larve, allon- gée, mais elle pourra changer plus tard. Choanophrya infundibulifera HarroG 1902. ? Acineta ferrum-equinum (EHRENB.) ZENKER 1866. Corps sphérique, d'un rouge de brique plus où moins accusé, porté sur un pédon- ETUDE SUR LES INFUSOIRES TENTACULIFÈRES 171 cule très large, cylindrique, tubulaire, droit ou plus souvent un peu recourbé, aussi long et parfois plus long que le diamètre de l'individu. Les tentacules, en très petit nombre, sont irrégulièrement répartis à la surface, mais presque toujours dans la moitié antérieure du corps, et quelquefois groupés d’un seul côté. Ils sont courts et très larges, tubulaires, soit ouverts et évasés à leur extrémité, soit fermés et rétrécis en forme de dé à coudre; très mobiles et se rétractant avec formation de replis transversaux bien nets. Noyau sphérique, central, Vésicule contractile dans la moi- tié antérieure du corps. Diamètre très variable, en moyenne 50 % chez l'adulte. Pièces buccales de différents Cyclops. «Se distingue par ses larges stentacules (larges à la fois par la gaine et par le tube interne) susceptibles de se dila- ter en entonnoir à leur extré- \'R\ mité, pour engloutir des parti- cules volumineuses qu'ils atti- rent à distance en fonctionnant à la façon d’une pompe aspi- ratrice.» Telle est la brève diagnose que COLLIN consacre à la Choanophrya, qu'il à : : _e Fig. 27. — Choanophrya infundibulifera. trouvée fixée sur les pièces buccales de Cyclops coronatus, et sur laquelle il à fait de nombreuses observations. Avant lui ZENKER (1866) avait déjà étudié cette espèce, dans laquelle il croyait voir l'Acineta ferrum-equinum de EHRENBERG ; plus tard, HARTOG (1881), s’en était occupé, et en 1902 consacrait à cet organisme une « note préliminaire » importante, mais qui, à ma Connaissance, n’a pas encore eu de suite; c’est donc là un Tentaculifère aujourd'hui bien connu, sur lequel mes observations, tout en confirmant en tous points plus particulièrement celles de COLLIN, ne nv’ont guère apporté de renseignements nouveaux; aussi trai- terai-je de cette espèce d’une manière d'autant plus brève que les faits les plus importants, concernant les tentacules, par exemple, seront examinés dans la Ch. subsessilis, où tout se passe de la même façon. [Se] MÉM. SOC, PHYS, ET HIST. NAT. DE GENÈVE, VOL. 89 (1920). 2 179 E. PENARD ZENKER et COLLIN ont tous deux trouvé la Ch. infundibulifera sur le Cyclops coronatus ; &’est bien sur ce même Copépode — si mes déterminations sont exactes — que je lai moi-même le plus souvent rencontrée; mais elle s’est montrée sur d'autres Cyclopes encore, et même sur un Diaptomus, où elle était en colonies plus fournies que partout ailleurs. Cet organisme est toujours fixé sur les pièces buccales de son hôte, générale- ment en petits groupes, qui proviennent de ce que les embryons ciliés viennent volontiers se poser au pied même des adultes. Trois où quatre groupes sont la règle sur un méme Cyclope, mais quelquefois, on les trouve si nombreux qu'après avoir coloré au carmin toute la machoire du petit Crustacé,des points rouges serrés, dont chacun représente une Choanophrya, dessinent assez exactement le contour de la bouche. Le corps est sphérique, et repose sur une tige tubulaire, large, creuse, de longueur variable, mais qui n'arrive que rarement à dépasser le diamètre de lani- mal; dans la fig. 1, on la voit relativement plus longue, parce que nous avons là un exemplaire encore peu avancé en âge; dans la fig. 3, elle est bien plus longue encore, car l'individu est tout jeune ; en 2, c’est le contraire, le pédoneule est très court, mais le petit organisme n'a qu’une heure d'existence, et la tige y poussera rapidement pour s'arrêter plus tard et laisser le corps sphérique augmenter seul de volume, Dans l'intérieur, on trouve un plasma grisâtre, mais presque toujours si bien rempli de petits globules d'huile rouge, que la teinte générale d’un rouge de feu peut servir de caractère spécifique. Le noyau est sphérique, à peu près central; la vésicule contractile, unique, se trouve sur le côté. Nous reviendrons plus tard sur les tentacules, en traitant de la Ch. subses- sulis ; jetons cependant un coup d'œil sur la fig. 1, où nous voyons un petit Infusoire attiré par une trompe évasée; mais 1l est trop gros, il ne peut être aspiré; le ten- tacule s’allonge et se rétracte en un mouvement perpétuel; l’Infusoire est tantôt en contact avec la trompe largement ouverte, et tantôt il en est séparé (dans ce cas particulier, l’Infusoire fut plus tard abandonné). Dans la fig. 4, nous avons un tentacule fortement rétracté, mais le tube interne se voit distinctement (chose exceptionnelle sur le vivant) pénétrer dans l’intérieur du corps; il renferme une petite algue emportée dans le cytoplasme; plusieurs de ces petites algues, dans cet individu, ont été aspirées coup sur coup. Aux côtés du tentacule sont représentées des stries ; c’est, en effet, comme une surface striée, analogue à celle des Vorticelles, que m'est apparue la cuticule; HARTOG (1906) à montré le premier que la cuticule était rayée dans son épaisseur, mais COLLIN y voit, plutôt qu’une striation, une structure alvéolaire, que les réactifs lui ont montrée nettement. ÉTUDE SUR LES INFUSOIRES TFNTACULIFÈRES 173 L’embryon (fig. 5) est allongé, ellipsoïdal, et pourvu de quatre rangées de cils; pendant la course, on voit traîner en arrière deux ou trois cils très gros et très longs, souvent soudés en un seul; un examen minutieux m'a convaincu qu'ils par- taient de la rangée postérieure de la ceinture ciliée, dont ils ne constituent que des éléments particulièrement développés. Choanophrya subsessilis sp. n. Corps identique à celui de Choanophrya infundibulifera, mais noiratre, bru- nâtre ou quelque peu verdâtre, jamais rouge ; de taille inférieure à celle de cette dernière espèce; solitaire ou en colonies beaucoup moins serrées, et porté sur un pédonceule non plus allongé et cylindrique, mais extrêmement court, n'arrivant que rarement à égaler le quart du diamètre du corps, mince, brillant, non tubulaire, - s’élargissant à son point de fixation au support. Diamètre, 40 à 45 ». dans les grands individus. Mes observations sur les Choanophrya remontent pour la plupart au printemps de 1914; dès cette époque, j'avais cru y remarquer deux formes distinctes, l’une déjà connue, à long style creux, l’autre, qui semblait nouvelle, à style très court, mince, et probablement plein; ayant eu alors recours à l’amabilité du meilleur des juges, voici ce que COLLIN me répondit à ce sujet: «Ce que vous m'indiquez pour la forme brévistyle de Choanophrya sur Cyclops viridis, me rappelle un fait que j'ai eu souvent à constater pour les Discophrya des Coléoptères aquatiques: le faciès très particulier que prend une même espèce (ou des formes très voisines?) selon l'hôte étudié; il y en à ainsi quelques-unes dont je n’ai point fait mention dans mon travail, faute de les avoir étudiées d'assez près pour préciser leurs caractères. » Ces indications m'avaient alors paru suffisantes; mais plus tard, en retrouvant sur tel ou tel Cyclops tantôt l’une de ces espèces (à Rouelbeau, par exemple, et dans la même récolte, Ch. infundibulifera toujours sur Cyclops fuscus, Ch. subses- silis toujours sur Cyclops viridis). en constatant que les transitions dans la forme et la structure de la tige ne se montraient jamais, en apprenant à connaitre d’autres caractères différentiels de moindre importance, mais constants et qui me permet- taient de décider au premier coup d'œil à quelle forme j'avais affaire, la conviction finit par s'imposer qu’il y avait là deux organismes spécifiquement différents. Dans la Ch. infundibulifera, nous l'avons vu, la tige est longue, large, creuse, et COLLIN, qui l’a étudiée à fond, lui a reconnu toute une structure compliquée, un faisceau strié tubulaire, une substance axiale, un < disque suprastylaire » à mode 174 E. PENARD de formation curieux; dans la Ch. subsessilis, nous avons une tigelle très courte, fig. 1), arrivant au quart de la longueur du corps, mince, un peu élargie en arrière, brillante, creuse peut-être à l’origine mais qui paraît pleine en général; et si bien cachée dans le fouillis des appendices masticateurs de l’hôte, que l’animal en parait sessile, Mais ce n'est pas tout: La Ch. infundibulifera est rougeitre. elle vit en colo- nies, en touffes serrées; la tige tient si fort au soutien que l’animal se déchire plu- tôt que de l'emporter ; dans la Ch. subsessilis, la taille est un peu plus faible, les individus sont solitaires où en tout cas rarement groupés, la teinte générale est noi- ratre, et la tigelle se détache facilement du substratum. Pour toutes ces raisons, il me semble qu'il y a lieu de distinguer cette forme brévistyle comme ayant la valeur d'une espèce, à laquelle Ie nom de subsessilis pourra convenir. Fig. 28. — Choanophrya subsessilis. La teinte, avons-nous dit, est noirâtre: en réalité, le terme n’est pas tout-à-fait exact; sous un fort grossissement, c’est un gris sale, souvent un peu jaunâtre ou verdàtre, tout cela provenant des inclusions du plasma, grises, jaunes, souvent ver- tes grace à la présence de particules végétale ou même de Zoochlorelles très petites (différentes de la Chlorella vulgaris). La cuticule m'a paru distinctement striée (fig. 6), plutôt qu'alvéolaire comme l’a indiqué COLLIN. La vésicule contractile, généralement unique (j'en ai vu exceptionnellement trois), s'ouvre sur l’un des côtés du corps, et cela suivant un mécanisme assez curieux: au moment où elle arrive à son état d'expansion maximum, on voit se des- siner un petit canal, ou plutôt une lacune, bordée en apparence de deux parois, ÉTUDE SUR LES INFUSOIRES TENTACULIFÈRES 475 supérieure et inférieure, l’inférieure plus épaisse que l’autre (fig. 7 &); la vésicule commence à s’y vider, lentement, puis tout d’un coup (fig. 7b) il se produit une sorte de déclanchement, la paroi imférieure s’abaisse (7 €) et l’on à l'impression que c’est le canal lui-même, en s’élargissant, qui provoque un appel de liquide, plutôt que d’être ouvert de force par la poussée venant de la vésicule. Une fois vidée, la vési- cule disparait pour un temps, pendant que le canal s’abouche avec le dehors et y évacue son contenu. L'embryon (fig. 5) est identique à celui de espèce précédente, et comme lui, porte en arrière deux ou trois longs cils qui partent de la dernière ligne ciliaire pour fonctionner comme gouvernail. Le nombre des tentacules est très variable, mais ne dépasse probablement jamais le chiftre de 12; dans l'individu très jeune (fig. 3) il n’en existe tout d’abord qu'un seul, qui peut arriver à son développement complet avant qu'en ait apparu la moindre trace d’un second. Is sont répartis sans ordre sur la moitié antérieure de la sphère. Très larges, nettement tubulaires, ils montrent à leur intérieur un canal axial largement ouvert, entouré de sa gaine propre; ils sont susceptibles d’un élargissement considérable dans leur partie antérieure, évasés en cupule où même, très rarement, à bord renversé en arrière, ou bien au contraire fermés par rap- prochement des parois (fig. 1); ils peuvent être d’une mobilité extréme, s’allon- geant ou se retractant en quelques secondes, et pendant la rétraction, 1ls se plis- sent très régulièrement soit en anneaux superposés, soit en « accordéon », de préfé- rence dans la région basale, pendant que le canal ou tube interne, resté droit, s’en- fonce dans l’intérieur du corps. C’est un spectacle intéressant que de voir, au milieu des débris d’un Cyclope écrasé, les tentacules s’allonger et se retirer, pousser devant eux des masses de mucosités ou au contraire les attirer dans leur trompe largement ouverte; des grains, de particules de toute sorte courent le long du canal, sans le déformer lorsqu'ils sont de faible volume, ou bien en renflant le tube tout entier ; et alors, on voit courir le renflement du sommet à la base du tentacuie, le canal s’ouvrant devant l’objet capturé et se refermant derrière lui (fig. 4 à, b, c). Y a-t-il là une action propre du tube, un mouvement péristaltique comme on l’a maintes fois supposé, ou un simple élargissement des parois très souples? C’est ce que je n’ai pas pu décider ; mais en tout cas, le tentacule a ses caprices ; je Pai vu, par exemple, plutôt que de se distendre trop fort, continuer à aspirer un globule d'huile trop volumineux, et qui alors se coupait bout par bout, en gouttelettes qui se succédaient dans le canal; dans une autre occasion, une particule amorphe, minérale en apparence, et trop grosse également, fut attirée jusqu'au milieu du canal, puis ne put aller plus loin; je la vis rebrousser chemin, revenir à l'ouverture et disparaitre au dehors; il fallait bien là, soit un mouvement péristaltique (que je 1476 E. PENARD n'ai pas cependant constaté), soit un courant de retour, une poussée venant d’en bas. Pendant tout ce temps, quand les tentacules poussent et tirent à lenvi, lani- mal lui-même, — lorsqu'il est isolé du Cyclope — se balance, éprouve des mouve- ments de nutation; mais ces déplacements, suivant toute vraisemblance, sont en fait des reculs, résultant de la poussée même des tentacules contre les paquets de muci- lage, tantôt à gauche, tantôt à droite et un peu partout. C’est ici, dans ce chapitre relatif à la Choanophrya, que je voudrais consacrer quelques lignes au mécanisme de la succion dans les Tentaculiferes en général. Qu'il y ait une succion véritable, un acte d'aspiration, on n’en peut plus douter aujourd'hui (v. COLLIN, 1914, p. 256 à 265); mais quant au mécanisme intime, il n'est pas encore expliqué. < Les diverses explications proposées jusqu'ici et dont aucune, je crois, n'est encore à vrai dire pleinement satisfaisante, sont au nombre de quatre... » dit COLLIN à ce sujet, et il examine les unes après les autres les théo- ries de HERTWIG (mouvements alternatifs de montée et de descente des tentacules), de MAUPAS (déviation de la Cyclose de l’Infusoire capturé, en un courant qui passe à l’Acinète et en distend les parois), de EISMOND (appel de liquide causé par les contractions de la vacuole contractile). Aucune de ces trois théories n’a résisté à la critique, et COLLIN n'hésite pas à les rejeter ; quant à la quatrième, celle de HAR- T0G, d'après laquelle « Ta tendance aspiratrice est seulement expression d'un cou- rant de diffusion dù à la sécrétion instantanée, par le corps de lAcinète, de subs- tances d’une haute puissance osmotique », elle lui parait +< beaucoup plus intéres- ? sante >; mais, dit-il, , indiquent même une puissance < musculaire » éle- vée; mais comment expliquer alors qu’en faisant le vide à son intérieur, la boule ÉTUDE SUR LES INFUSOIRES TENTACULIFÈRES 4177 n’augmente pas, où n’augmente que très peu, de volume? ce serait Ià un résultat pourtant nécessaire de l'aspiration! La question me semble cependant mériter d’être examinée de plus près: En premier lieu, ce serait urie grosse erreur que de s’imaginer que tous les tentacules sont ensemble en action; seuls fonctionnent comme aspirateurs ceux qui sont fixés à une proie, ou tout au moins qui l’attirent à eux; les autres sont fermés : dans la Choanophrya, la chose est distinetement controlable, on voit les parois du canal interne s'appliquer l’une à l’autre, solidement, et fermer toute communication avec le dehors; dans d’autres groupes à tentacules relativement épais (Discophrya, etc.), on peut constater, avec un peu plus de difficulté, le même fait ; et dans tous, on peut supposer qu'il en est de même, car ce canal axial à paroi fibreuse, dont COLLIN à si bien démontré la présence, doit exister dans tous; et à ce propos, on pourrait se demander st cette «gaine sidérophile > (COLLIN) qui borde le tube interne à son entrée dans le cytoplasme, ne pourrait fonctionner elle aussi comme sphinc- ter? Dans quelques occasions, j'ai vu un objet entrainé dans le tube, éprouver quel- que difhculté à franchir le passage (voir Tokophrya gracilipes, Metacineta mysta- cina) au niveau de l’ectoplasme, puis se précipiter plus loin une fois l'obstacle franchi, comme s’il y eût eu là une sorte de sphincter. En second lieu, la lumière interne du tentacule est très étroite (toujours à l'exception de Choanophrya) : le liquide qui doit y passer est de quantité compa- rable à celui qu’un tube de verre de deux millimètres d'ouverture amènerait dans un globe dont la capacité serait de un litre ; en supposant le récipient en caout- chouc et le liquide arrivant sous pression modérée, il faudrait un temps très long pour que la sphère ait par exemple doublé le volume, c’est-à-dire ait acquis un dia- mètre de ?/,, Supérieur à ce qu'elle était auparavant, et le changement pourrait passer inaperçu. Or le corps du Tentaculifère augmente de volume, on n’en peut douter, d’une manière à peine sensible quand un seul tentacule est en cause, plus rapidement quand deux ou trois d’entre eux fonctionnent à la fois, et l'augmentation du dia- mètre de la sphère peut se mesurer facilement (voir p. ex. Podophrya fira). Mais alors, il faut le dire, les mensurations donnent un chiffre trop faible: ce chiffre ne serait juste que si l’on ne considérait comme facteur de l’accroissement que les substance nutritives, semi-solides, etc. ingérées, à Pexclusion des parties liquides inutiles ; la Choanophrya, prise comme exemple extrême, engloutit des volumes énormes d’eau et devrait renfler à vue d'œil, et pourtant, l’acceroissement de volume n'excède en aucune façon celui que l’on constate dans n'importe quel autre Acinétien. Comment expliquer la chose? l’animal se remplit, le fait est mdiscutable, puis- qu’on peut voir jusqu'à 3, 4 et à Infusoires aussi gros que lui passer entierement 178 E. PENARD dans son corps; il augmente de volume, mais pas autant qu'il le devrait, I faut alors, semble-t-il, de toute nécessité qu'à mesure qu'il aspire il se débarrasse d’une partie de la substance aspirée, que, plus particulièrement, le liquide inutile entré par un tentacule soit immédiatement expulsé; mais comment ? Par la vésicule contractile ? ce serait là une proposition acceptable! en prin- cipe, si les faits ne la contredisaient pas du coup! la vésicule contractile, quelle que soit l’activité des tentacules pendant la succion, n’en subit pas l'influence — j'ai pu à maintes reprises contrôler directement le fait ——: elle n’en bat ni plus vite, ni plus lentement; et dans la Chounophrya, où l'on peut compter, normalement, de 40 à 50 secondes entre deux battements, ce serait à 2 secondes, où même moins, qu'il faudrait calculer le rythme nécessité par les événements. Par le tégument ? — Mais le tégument est plutôt, dans tous les Infusoires, pré- posé à l’endosmose, et ici c’est une exosmose qu'il faudrait. Par les tentacules, ceux qui ne sont pas occupés? on par une action mécani- que, une force régionale opposée à celle d'où résulte l'aspiration? Nous n’en savons rien, mais des expériences seraient à faire; un milieu coloré à l'encre de Chine, peut-être? mais méme là des résultats nuls ne seraient pas probants; il faut une attention très soutenue pour distinguer, dans les Rhizopodes, par exemple, le petit nuage blanc qui se forme lors de l'expulsion du liquide clair dans la masse noirâtre, et dans le cas actuel, l'effet serait probablement encore moins évident. Trichophrya epistylidis CLAP. et LACIHM. 1860-61. >orps aplati, pentagonal ou hexagonal dans le jeune âge, puis se déformant rapidement pour ne plus revêtir aucune forme précise; étalé sur le support par sa face inférieure, bordé de lobes où mamelons en nombre variable, et dont chacun porte un faisceau de tentacules extrémement longs, fins, capités. Noyau d’abord sphérique, puis se déformant en méme temps que le corps et devenant allongé, lobé, ranifié. Vésicules contractiles en nombre variable, jusqu'à une douzaine et plus, disséminées sans ordre dans le cytoplasme. Diamètre 80 à 170 y. Ce n’est pas sans une certaine hésitation que je me suis décidé à identifier avec la Trichophrya epistylidis de CLAPARÈDE et LACHMANN un Tentaculifère que l’on trouvait en grand nombre dans l'étang de l’Ariana en décembre 1918, ram- ! Elle découle, semble-t-il, assez naturellement de la théorie de Ersmoxp. ÉTUDE SUR LES INFUSOIRES TENTACULIFÈRES 179 pant sur les débris et les feuilles mortes du fond. Car il rampe certainement ; ou plutôt, l’expression est inexacte, il se déforme, très lentement, et dans des observations successives, 11 se montre tantôt plus allongé et tantôt plus compact, ou bien il a poussé des lobes là où ils n'avaient pas existé. La figure que donnent CLAPARÈDE et LACHMANN représente un individu tout particulièrement allongé, en limace, tel en fait que je n’en ai jamais observé; mais l'organisme doit bien être le même, une masse sans forme spéciale, pourvue de lobes plus ou moins accusés, dont chacun porte un faisceau de tentacules; et dans le cytoplasme un noyau sans forme précise non plus, puis des vésicules contractiles au nombre de 6 à 12 en général. A l’état très jeune, quand deux ou trois heures au plus se sont écoulées depuis le moment où l'embryon cilié s’est posé, la forme est toujours symétrique, et les lobes, au nombre de cinq ou aussi de six, sont bien nets et à égale distance les uns des autres ; le noyau, de rond qu'il était dans la larve, s’est déjà allongé, déformé (fig. 4) et les déformations en sont si rapides qu'on peut les suivre de l'œil; les petits CT Ne î Fig. 29. — Trichophrya epistylidis.' grains qui le remplissent tout entier, semblent se précipiter, allongent les rameaux, repoussent l’enveloppe nucléaire, et c’est presque une amibe que le noyau repré- sente actuellement. Plus tard, tout se calme dans le petit être, de nouveaux lobes font leur apparition, et toute symétrie finit par être effacée. L'animal, très vorace (la fig. 2 le montre vidant une Vorticelle), est très pro- lifique aussi; les embryons s’y forment coup sur coup, quelquefois plusieurs en même temps, dans une large cavité incubatrice (fig. 2). [ls sont ovoïdes, avec des cils très serrés, répartis sur des sillons au nombre d’une demi-douzaine au moins, mais que je n’ai pas pu compter exactement; avant de se fixer, la larve s’aplatit, et MÉM. SOC. PHYS. ET HIST. NAT. DE GENÈVE, VOL. 89 (1920). 23 A 180 E. PENARD devient discoïde, rappelant quelque peu les embryons du Dendrosoma radians (fig. 3). Souvent les individus se réunissent à deux ou à trois, s’enchevetrent les uns dans les autres, et forment ainsi de petites agglomérations, d'où l’on voit rayonner de toutes parts, S’entrecroisant les uns dans les autres, les faisceaux de tentacules, qui peuvent devenir extrémement longs. Dans la fig. 1, qui représente un groupe composé de trois individus, les petites sphères que l’on voit en haut et à gauche ne sont autre chose que des Urnula, qui choisissent volontiers cet organisme comme hôte; les Vorticelles qui se déploient (probablement Vorticella nebulifera) ont vécu 4 jours sur ce terrain curieusement choisi, mais sans être Jamais molestées et comme utiles à leur hôte, tandis que si par hasard une Vorticelle de la même espèce venait à passer tout près, elle était appréhendée et vidée en un clin d'œil. Il peut être intéressant de remarquer que cette Trichophrya epistylidis, très abondante à lAriana, manquait sur les Æpistylis, pourtant communs dans ces sta- tions; tout comme d’ailleurs l'Urnula epistylidis, qui par contre affectionnait la Trichophrya. La Trichophrya sinuosa de STOKES pourrait bien n’étre pas autre chose que la Trichophrya epistylidis, et je ne serais pas trop surpris si la Sfaurophrya elegans de ZACHARIAS rentrait dans le cycle de cette même Trichophrya. Trichophrya myriophyili sp. n. Corps très clair, opalescent, lenticulaire ou fortement renflé, mamelonné, défor- mable et quelque peu extensible, fixé au support par toute sa face inférieure; pourvu à sa face antérieure de quatre faisceaux lâches de tentacules très fins et qui peu- vent arriver à une longueur extraordinaire (jusqu’à 10 fois le diamètre du corps), nettement capités. Noyau central, sphérique ou ellipsoïdal. Deux et quelquefois treis vésicules contractiles, dans la moitié inférieure du corps. Diamètre très variable, 40 % en général; rarement jusqu’à 66 y. Ce Tentaculifère était très abondant, en 1915, parmi les Myriophyllum de l'étang de Florissant, où je l’ai d’abord étudié comme une variété de 7. epistylidis ; il faut remarquer, ici encore, que jamais il ne s’est rencontré sur les Æpistylis, d'ailleurs abondants aussi, et que par contre, on le trouvait presque toujours fixé sur les étuis des Slephanoceros. Cependant, après avoir étudié plus tard la Trichophrya epistylidis vraie, j'ai dû me convaincre qu'il y avait là deux types spécifiques différents. Comparée à cette dernière, l'espece qui nous occupe actuellement est plus petite de forme, plus ÉTUDE SUR LES INFUSOIRES TENTACULIFÈRES 181 ramassée, tantôt aplatie, tantôt fortement renflée (fig. 2, 3, 4); le noyau est arrondi, (quelquefois pourtant un peu allongé et sans forme précise), les vésicules contrac- tiles sont au nombre de deux ou de trois, très rarement de quatre ou de cinq dans les très jeunes individus, et les tentacules disposés primitivement en 4 faisceaux mais plus tard se rapprochant les uns des autres et réduits à 2 groupes làches, sont susceptibles d'atteindre une longueur extraordinaire; cela du moins après quel- ques heures de tranquillité absolue, sur lamelle évidée, par exemple. C’est ainsi que dans l'individu représenté par la fig. 5, alors que le corps, dans sa plus grande largeur, mesurait 33 y, les tentacules à eux seuls arrivaient à 287 %. Ils sont alors, surtout dans leur moitié distale, d’une finesse extraordinaire, et méme à un fort grossissement, l’œil, pour les suivre, doit se baser sur le point distal, la tête arron- die et alors visible qui les termine, et suivre de là leur raccordement à la partie du tentacule plus large et plus rapprochée du corps. L’embryon cilié est en général très gros; la fig. 6 le représente dans sa poche incubatrice, peu avant la libération, et sous un volume qui serait, il est vrai, relati- Fig. 30. — Trichophrya myriophylli. vement trop fort si dans cette figure la mère représentait un adulte; mais dans le cas actuel cette dernière était elle-même très jeune; et cette observation, confirmée par plusieurs autres (car les jeunes à peine développés commencent à produire des embryons) serait de nature à montrer que les embryons ciliés sont d’une taille à peu près constante, quel que soit le volume du parent '. 1 Il y aurait en tout cas des exceptions; nous en avons constaté une, par exemple, dans la Toko- phrya quadripartita (p. 133). Ré 182 E. PENARD L'animal, quand il est bien nourri, est très profilique, et j'ai pu assister maip- tes fois à la Hbération de l'embryon, ovoïde, à 4 rangs de cils (fig. 6); la sortie est d’abord lente et pénible, puis une fois tous les cils dégagés, la rapidité s’accentue, et le petit être part comme un boulet, reste un instant sur place, en se balançant, court une minute à peine, et se fixe (presque toujours sur la paroi inférieure du couvre-objet) en s’étalant; les cils battent une minute encore, et quand ils s’arrê- tent inertes, les tentacules ont déjà poussé, nombreux, tout autour du disque (fig. 7). Un embryon, par exemple, qui s'était échappé à 2 h. 35, se posa à 2 h. 38; à 2 h. 39 les cils ne battaient déjà plus, et les tentacules se voyaient comme autant d’épin- gles piquées jusqu'à la téte autour d’un disque; à 2 h. 42, c'était la fig. 7; à 2 h. 50 la longueur des tentacules avait doublé; à 6 h. l’animal revêtait la forme normale de l'adulte, ou plutôt du < jeune », à tentacules plutôt indifféremment groupés. À Florissant, la nourriture consistait exclusivement en un Infusoire spécial, le Strobilidium gyrans, un morceau de choix, paraît-il, et quelquefois l’on en voyait deux ou trois exemplaires capturés à la fois: en un quart d'heure, ils étaient com- plètement vidés, par deux ou trois tentacules qui se balançaient et secouaient l’outre vide avant de s’en débarrasser, puis cette dernière finissait par éclater. Quant à la nourriture absorbée, elle se transformait avec une rapidité incroyable en grains de réserve caractéristiques, tels qu'on les trouve normalement dans les Tentaculifères, et l'animal, de bleu cendré qu'il avait été à l’état non repu avait passé, tout en augmentant de volume, à une teinte générale noirûtre. Trichophrya lycoperdon sp. n. Corps subsphérique, non déformable, plus large que long, généralement étiré en arrière en un mamelon adhésif, ou simplement visqueux sur sa convexité posté- rieure, couvert sur ses côtés et à sa face antérieure de tentacules serrés, relative- ment courts en général mais susceptibles d’un allongement considérable, très fins et nettement capités à leur sommet puis s’élargissant insensiblement vers leur base qui devient conique ; à l’état de rétraction, ils figurent des aiguillons vigoureux, droits ou recourbés. Noyau sphérique, central. Une grande vésicule contractile dans la partie inférieure du corps. Diamètre 25 à 45 4; hauteur 22 à 35 y. Quand on examine ce Tentaculifère par sa face apicale, on le confond volon- tiers avec une Sphærophrya, et plus particulièrement avec la Sph. soliformis; mais il suflit de déplacer quelque peu l'animal pour constater que toute la partie infé- ETUDE SUR LES INFUSOIRES TENTACULIFÈRES 183 rieure de la sphère est nue. Plutôt qu’une sphère, d’ailleurs, c’est un sphéroïde de révolution, plus large que haut, souvent un peu étiré en arrière en un petit mame- lon glutineux, ou bien dépourvu de renflement spécial et retenu au soutien par une sorte de byssus. La pellicule tégumentaire, très dense, est étirée — sauf en arrière, où elle est ïisse — en un nombre toujours assez considérable, mais très variable également, de prolongements ou aiguillons très larges à leur base, pointus, droits ou recour- bés, généralement assez courts mais susceptibles à l’occasion d’un allongement con- sidérable, et qui ne sont autres que des tentacules; lorsqu'ils sont très allongés, ils deviennent extrêmement minces dans toute leur moitié distale, mais pour se renfler de nouveau peu à peu à leur extrémité, et s’y terminer en une tête très nette. Sur les tentacules courts, cette tête manque, l’extrémité est tronquée ou simplement arrondie. Le noyau central, arrondi, est très peu visible ; la vésicule contractile, un peu en arrière de la ligne médiane, n’est en général pas beaucoup plus distincte ; mais susceptible d’une forte dilatation, elle apparait bien nette à son état d'expansion maximum. 1 2 J'ai remarqué dans cette espèce que les boulettes qui remplissent le plasma sont chacune composées d’un certain nombre de petits grains; elles rappellent celles Fig, 31. — Tricophrya lycoperdon. des Vorticelles, où chacune des sphérules nutritives constitue en fait un amas de microbes capturés. La Trichophrya lycoperdon habitait les détritus végétaux, au fond de l'étang de l’Ariana, en individus clairsemés. Trichophrya melo sp. n. Corps subsphérique, plus large que long, non ou à peine déformable, en géné- ral fortement aplati à sa face antérieure; parfois prolongé temporairement à son pôle inférieur en un bouton adhésif, ou bien à convexité basale simplement vis- queuse. La face apicale porte sur ses bords 4 faisceaux de tentacules serrés, droits, longs, capités, chaque faisceau partant le plus souvent d’une protubérance plus ou 184 E. PENARD moins nettement marquée. Noyau sphérique, central. Deux vésicules contractiles, l’une à la partie antérieure, l'autre, plus petite, dans la moitié postérieure du corps. Diamètre 45 à 60 #; hauteur 30 à 40 y. Comme dans l'espèce précédente, le corps représente ici un sphéroïde de révo- lution, mais beaucoup plus comprimé, surtout à sa face antérieure qui peut être si bien aplatie, que vu par le côté l'animal parait cupuliforme (fig. 2). En arrière, il se termine Ja plupart du temps par un petit prolongement très étroit (fig. 1), sim- ple bouton de fixation, qui d’ailleurs peut manquer, et seule une matiere visqueuse retient alors l’animal fixé aux débris organiques qui garnissent le fond. Les tentacules sont groupés en 4 faisceaux, généralement bien distincts, quel- Fig. 32. — Trichophrya melo. quefois peu nets; dans les jeunes individus, on ne voit guère que deux groupes, qui se disloquent plus tard; mais toujours ces tentacules, assez longs, capités, partent d’une région antérieure, la plus évasée du corps, et souvent chaque faisceau y des- sine une proéminence nettement distincte. Le noyau est central, à gros grains, parfois à grandes parties moléculaires noyées dans un plasma finement cendré. Les vésicules sont au nombre de deux, lune antérieure et l’autre postérieure; dans Pembryon, on les trouve à peu près sur une même ligne, fonctionnant alter- nativement. Cet embryon, ellipsoïdal, relativement très allongé, m'a semblé muni de 6 ran- gées de cils (fig. 3), mais la seule observation que j'ai pu faire ne m'a pas paru suffisamment précise, et peut-être n'y en a-t-1l que cinq. ÉTUDE SUR LES INFUSOIRES TENTACULIFÈRES 185 Cette espèce a été trouvée à Pinchat, dans un des fossés qui bordent le marais. en un nombre très restreint d'individus. Trichophrya variabilis SAND 1899. Corps clair, opalescent, sphérique en principe mais presque toujours for- tement déformé, allongé, lobé, recourbé, et quelque peu amiboïde mais ne modi- fiant que lentement ses contours. Tentacules très fins, courts, à peine capités, visqueux, disséminés à la surface du corps et ne montrant que peu de tendan- ces à une disposition radiée. Noyau sphérique, central. Une grande vésicule contractile à la partie antérieure de l’animal, et généralement une autre, ou plusieurs, accessoires, plus en arriere. Diamètre 21 à 40 ». SAND a décrit en 1899 une Trichophrya amaboïdes, trouvée dans la mer à Concarneau, « animée de mouvements amæboïdes comparables à ceux des leuco- cytes, appréciables seulement en dessinant l'animal de minute en minute >» ; puis en même temps, il décrivait une espèce d’eau douce, Trichophrya variabilis, « de forme très variable, libre, mais sans mouvements amæboïdes, et possédant de 20 à 30 ten- tacules divergeant de toutes les parties du corps >». Le petit Tentaculifere que j'ai rencontré de temps à autre à l’Ariana, dans l’été et l’automne de 1918, me paraît correspondre à cette Trich. variabilis ; la taille est à peu près la méme, et les deux organismes semblent identiques dans leurs traits généraux. Sphérique en principe (fig. 2) mais ne se rencontrant que très rarement telle. la Trichophrya variabilis revêt les apparences les plus diverses: tantôt elliptique (fig. 1), tantôt anguleuse, allongée, pyriforme, lobée, elle change de forme conti- nuellement ; non pas que ces changements se traduisent rapidement à la vue, mi même qu'ils soient < appréciables en dessinant l'animal de minute en minute >», mais si l’on garde, par exemple, un individu toute une journée en observation, on y trou- vera d’une heure à l’autre les changements les plus divers. ne semble pas qu'il v ait de pied, de région spéciale affectée à la fixation, mais l'animal parait gluant, et probablement dans la fig. 5 faut-il voir un individu adhérent à une fibre végétale par un prolongement visqueux. Les tentacules, très minces. faiblement capités, partent d’une région quelcon- que du corps et s’allongent dans les directions les plus diverses. Sur la plupart des individus observés, mais non sur tous, la surface des tentacules paraissait cendrée ou couverte de ponctuations, et sous un très fort grossissement on y reconnaissait 186 E. PENARD des petits grains (fig. 4), ovoïdes, de 1 » à peine en longueur, et dont toute l’appa- rence était celle de microbes; ils rappelaient exactement ces corpuscules caracté- ristiques de la Chlamydomyxa, sur lesquels on à émis des opinions variées. Les tentacules sont susceptibles de déplacements assez rapides, et lorsque par exemple l'animal est dérangé, ils se rétractent en quelques secondes. Le noyau, peu visible, est sphérique. Dans la partie postérieure du corps, on trouve une grande vésicule contractile; mais une ou deux autres, plus petites, peu- vent se rencontrer plus en avant. La fig. 2 représente peut-être un cas de division inégale, et j'en ai vu d’autres, où les deux individus étaient égaux ; mais dans aucune occasion il ne m'a été pos- sible de voir se poursuivre les événements, et peut-être n’y avait-il là qu'une fusion temporaire de deux individus. Je n'ai jamais vu Pembryon, ou plutôt, je n’en ai pas vu en place, dans une cavité incubatrice, et les deux ou trois petites larves de forme ovoïde-allongée, que javais tout d’abord cru pouvoir rapporter à cette espèce étaient peut-être autre chose; même taille, même noyau, même vésicule contractile, mêmes sphérules inter- nes, telles qu’elles caractérisent les Tentaculiferes, mais alors, cet embryon — si jai bien observé — eût été holotriche, garni de lignes ciliaires qui paraissaient couvrir le corps entier. La fig. 5 concerne autre chose encore, un kyste sans doute, trouvé parmi les Trichophrya variabilis, et qui ne pouvait représenter qu'un Acinétien, car des ten- tacules, bien caractéristiques, y étaient dispersés ca et là, en ordre régulier; peut- être un individu en cours d’enkystement? Mais ce qu'il y avait de plus curieux, c'était un revêtement de petits éléments solides, en forme de gobelets, régulière- ÉTUDE SUR LES INFUSOIRES TENTACULIFÈRES 187 ment distribués, évasés à leur ouverture, et dont le fond, qui parassait ouvert éga- lement, traversait la paroi du kyste pour aller s'appuyer au plasma (fig. 6). Au centre, On voyait un gros noyau rond, accompagné d’un micronucléus; sur le côté, une grande vésicule contractile. Ce n’est du reste que sous toutes réserves que je figure ici ce kyste bizarre ; non pas que mes observations manquent d’exactitude, car les détails s'y sont mon- trés fort nets, mais parce qu'il pourrait se rapporter à un autre Acinétien. Dendrosoma radians ÉHRENBERG 1837. Corps sans forme spéciale, s’allongeant et s’étalant sur le support en lon- gues branches ou stolons d’où s'élèvent de distance en distance des bras cylindri- ques, simples ou parfois divisés, et qui portent chacun à leur sommet renflé un bou- quet de tentacules serrés, droits, capités. Toute la masse, sauf l’extrémité des bras, est revêtue d’un étui feutré, jaunâtre, formé de particules de toutes sortes engluées dans un mucilage sécrété par l’animal. Cytoplasme grisätre, renfermant un grand nombre de petites vésicules contractiles disséminées un peu partout et jusque dans les bras. Noyau en cordon très allongé, rameux, pénétrant dans toutes les expan- sions du corps et envoyant des branches jusqu’au sommet des prolongements. Longueur extrêmement variable, et pour ainsi dire indéfinie, jusqu'à plu- sieurs millimètres, «Taille forte», dit BÜTSCHLI (Protozoa, p. 1932), « jusqu'à 2,4 millim. d’après KENT; en principe la structure est celle de Trichophrya epistylidis, mais cette espèce devient beaucoup plus grande; les courts prolongements lobés de cette dernière s'élèvent ici librement en longues branches verticales, qui peuvent elles- mêmes développer des prolongements, ces derniers produisant même aussi des rameaux de 3° ordre >. Des rameaux de 3° ordre, je n’en ai pas vu, et quant à la taille, les plus longs fragments que j'ai examinés (fig. 1) ne dépassaient pas 1200 y; mais c’étaient là des stolons déchirés par le scalpel, au grattage des feuilles des nénuphars; la taille de 2 millim. n’a certainement rien d’exagéré, et mon inpres- sion, en fait, a été qu'aucune raison ne s’opposait à une croissance indéfinie sous la feuille protectrice. Il n’y à du reste «pas de raison pour attribuer à ce genre les caractères d’une colonie, comme on l’a maintes fois prétendu >; et je ne puis que confirmer l'opinion de BÜTSCHLI sur ce point. En résumé, la masse principale du corps est représentée par un stolon, couché sur le substratum, et d’où partent de distance en distance et sans aucun ordre pré- MÉM. SOC. PHYS. ET HIST, NAT. DE GENÈVE, VOL. 89 (1920). 24 ISS E. PENARD cis des prolongements, dont les uns restent couchés et ne font que croître en rameaux ou stolons de 2° ordre, et les autres se relèvent en un tronc, divisé lui-même en deux où trois rameaux à son sommet: chaque rameau portant un faisceau de ten- tacules capités. Le cytoplasme, jaunâtre partout sauf à l'extrémité des rameaux où il est plus clair et dans lequel on constate une circulation générale ou cyciose, très peu intense mais bien nette, renferme un nombre considérable de petites vésicules contractiles, puis un noyau tres étroit, véritable cordelette dont les ramifications pénètrent dans les lobes et dans les bras, se prolongeant même jusque tout près du sommet de ces derniers. Fig. 34. — Dendrosoma radians La masse générale du corps, qui paraît nue à première apparence, est en D ? réalité renfermée dans une pellicule mince, transparente et incolore, dont on cons- tate par exemple très nettement l'existence lorsqu'un accident —- assez fréquent dans cet organisme — vient à froisser l’un des bras; le plasma se déchire alors, et o se rétracte sur lui-méme des deux côtés de la déchirure (fig. 3), laissant en vue la pellicule qui reste continue et n’a pas souffert. Mais en outre, l'animal est recouvert dan étui, d’un fourreau mucilagi- neux, d'autant plus épais qu'il est plus rapproché de ce qu’on peut appeler la base, la masse plus compacte de lindividu:; et dans ce mucilage s’empâtent une infinité de granulations et de particules de toute sorte, d'origine étrangère, qui for- ment une croûte plus ou moins épaisse. Sur les bras jeunes, cependant, le fourreau manque. Il nous reste à parler des phénomènes de reproduction: HICKSON et Waps- WORTH (1909), dans leur beau travail sur le Dendrosoma radians, ont traité le sujet tout au long, mais en insistant avant tout sur la structure intime du sys- ÉTUDE SUR LES INFUSOIRES TENTACULIFÈRES 189 tème nucléaire, et les observations d'ordre plus général que j'ai pu faire à ce sujet ne seront pas sans quelque utilité. Le premier indice que l’on ait de la formation d’un embryon est un renflement du stolon, dans une région quelconque de sa longueur; bientôt plusieurs petites vési- cules contractiles apparaissent dans le renflement, toutes sur une même ligne arquée, laquelle occupe, non loin du bord renflé, une aire diamétralement opposée à celle où se trouve le noyau, recourbé lui-même parallèlement à l’autre bord du renflement. En dehors des petites vésicules, un sillon circulaire apparait et se creuse, circonscrivant une masse arrondie qui reste encore rattachée au cytoplasme dans le voisinage du noyau; ce dernier envoie un prolongement dans la petite masse, qui ne tardera pas à se dessiner bien ronde, renfermée dans une véritable poche ou cavité. Fig. 35. — Dendrosoma radians. Dans la fig. 2, nous avons alors l'embryon, tel qu'il est en ce moment, avec ses vésicules contractiles toutes d’un même côté, et son noyau arrondi. Une fois libre de toute attache, à l’intérieur de la cavité, l'embryon commence à se mouvoir; iltourne lentement sur lui-méme, se déforme, et les lignes ciliaires. qui s'étaient tout d’abord montrées sous la forme d’une ceinture inférieure, et qui redeviendront telles plus tard, semblent mamtenant par instants équatoriales (fig. +); quelques minutes encore et l'embryon sortira brusquement, les cils en avant. On remarquera dans cette fig. 4 une protubérance de la cuticule maternelle, percée en son milieu, d’un orifice par lequel passera le petit être en sortant; c’est là la trace de la membrane soulevée au passage d'un premier individu, et le second, né très vite après le premier, utilisera cette même voie. A peine au dehors, l'embryon prend une forme qui lui est caractéristique, à peu près discoïde, mais d’ailleurs un peu variable, à convexité plus ou moins forte, avec lignes ciliaires infères ou plutôt inféro-antérieures (fig. 5, et fig. 6 pour la larve 190 E. PENARD vue d'en haut), et prend sa course. Mais il ne court pas longtemps: C’est ainsi que l'individu représenté par la fig. 6, sorti du parent à 5 h. 40, se voyait à 5 h. 50 déjà posé, et tel que le montre la fig. 7; il s'était largement étalé (sous le couvre objet); les cils de la ceinture étaient immobiles ; la plupart, d’ailleurs, n’existaient plus, en partie résorbés, semblait-il,.ou tombés en poussière, et tout autour du jeune animal, une couronne serrée de petits tentacules courts, nettement capités avait fait son apparition. La fig. 8 (et fig. 9, sur une vue de côté) montre le même exemplaire à 7 h.50:; deux ou trois petits tentacules latéraux étaient encore en vue, et deux prolongements très courts, à tête arrondie et surmontée d’un faisceau de tentacules normaux, se montraient déjà. Dans la fig. 10, c’est encore le même jeune individu, mais tel qu’il était devenu le lendemain aux premières lueurs du matin ; l’un des prolongements semblait s’être rétracté, l’autre s'était allongé tout droit, comme un bras déjà normal de l’adulte; les vésicules contractiles se voyaient encore groupées pour la plupart dans une même région, mais, il faut l'ajouter en passant, à cet âge déjà, elles peuvent être dispersées, comme j'ai pu le vérifier sur d’autres individus !. Le Dendrosoma radians se trouvait abondant à l’Ariana en décembre 1918, dans l’eau glacée et sous les feuilles des nénuphars déjà envahies par cette nappe visqueuse qui annonce la décomposition. Dendrosoma gammari sp. n. Corps sans forme bien définie, montrant une souche principale allongée, étalée sur le support, et d’où s'élèvent plusieurs bras ou prolongements cylindriques, qui se renflent quelque peu à leur sommet et y portent un bouquet de tentacules droits, nombreux, capités, fort longs et rayonnant dans toutes les directions. Le corps entier, jusqu'à l’extrémité des bras, est revétu d’un feutrage jaunâtre de granulations et de particules étrangères prises dans un mucilage visqueux. Vésicules contractiles généralement en très petit nombre, trois ou quatre sur les jeunes individus. Noyau allongé, poussant des ramifications dans les lobes et les bras. Longueur 170 à 280 y. Pièces de la hanche de Gammarus pulex. HICKsON et WADSWORTH (1909) mentionnent dans leur Mémoire un Den- drosoma que STEIN avait incidemment indiqué comme « Dendrosoma astacr >» et que l’on trouve attaché aux appendices de lAstacus fluviatilis; mais en l’absence de toute description comme de toute figure les auteurs anglais pensent que c'était là ! Les observations ont en effet été contrôlées, à différentes reprises, et toujours les événements se sont succédé de la même façon. ETUDE SUR LES INFUSOIRES TENTACULIFÈRES 191 simplement le Dendrosoma radians. À mon avis, ce Tentaculifère, dont ni BÜT- SCHLI, ni COLLIN ne citent même le nom, pourrait bien être autre chose, peut-être même ce Dendrosoma qu’il me faut décrire maintenant; mais les informations étant nulles, c’est d’un Dendrosoma gammari que je crois devoir parler. Ce Tentaculifere, de taille infiniment plus faible que le D. radians, vit sur les pattes du Gammarus pulex, où plutôt sur une région déterminée des pattes, près de leur point d’attache au corps, et presque toujours couché dans le fond d’un sil- lon (fig. 2). Si l’on se reporte à la fig. 1, on y reconnaitra sans doute un Dendrosoma, mais de forme plus massive que dans l’espèce précédente, de taille infiniment moins con- sidérable, à rameaux moins nombreux, moins longs et bien moins nettement séparés Fig. 36. — Dendrosoma gammari. du corps; plutôt que des rameaux, ce ne sont que des lobes. Le noyau, bien qu’al- longé et reproduisant vaguement la forme de l'animal, est plus compact également. On voit presque toujours un certain nombre de vésicules contractiles, les unes extre- mement petites, deux ou trois autres plus grandes, quelquefois même une seule, comme dans la fig. 3 qui représente un très jeune individu, et dans lequel la vési- cule se montrait reliée avec le dehors par un canal en forme de croissant, plutôt une fente, qui s’ouvrait pour laisser passer le liquide. Le corps est recouvert d’une mince couche de mucilage, où sont empâtées des granulations et des particules étrangères (fig. 1). La fig. 4 est destinée à rendre plus claire une observation d’un genre parti- culier: après avoir dilacéré un (ammarus pour mettre en vue un Dendrosoma, je trouvai dans le voisinage immédiat de ce dernier une petite colonie de Vorticelles, 192 E. PENARD que le scalpel venait incidemment de rapprocher de lAcinétien; et immédiatement deux d’entre elles furent appréhendées, chacune par un tentacule, et chacune aussi à son point le plus faible, la rainure péristomienne. Malgré des mouvements vio- lents, aucune d'elles ne parvint à se dégager: plus tard, un troisième tentacule (que l’on voit à droite sur la figure) S’allongea démesurément, pour aller à son tour attein- dre une troisième Vorticelle; et alors, ce tentacule (comme du reste un autre resté inactif) se renfla d’une manière toute spéciale à sa base (fig. 5), sans que j'aie pu en deviner la raison. Quant aux Vorticelles, elles furent rapidement vidées, ne gardant à leur intérieur que le noyau et quelques petits grains; mais ce qu'il y avait de plus curieux à observer, c'était une véritable lutte entre l’une des Vorticelles, inerte et distendue de 2 et de 3 fois sa longueur primitive, et le tentacule qui s’efforçait de la retenir; en effet, si la Vorticelle était morte, son pédoncule ne l'était pas, et cherchait obstinément à se rétracter, décrivant des évolutions fantastiques. Finale- ment le tentacule làcha la proie déjà vide, mais y resta un instant encore rattaché par un fil glutineux, très fin, qui se rompit à son tour. Cette espèce doit être assez rare; je ne lai trouvée qu'à Thônex, et sur un nombre très restreint de Gammarus : Sur dix de ces petits Amphipodes, à peine un seul en montrait-l. Dendrocometes paradoxus STEIN 1859. Corps arrondi, lenticulaire, fixé au support par sa face basale tout entière. Sur les côtés et à peu près à mi-hauteur de la convexité libre se détachent plusieurs bras (2 à 4 le plus souvent) cylindriques, larges, qui se bifurquent ou se divisent en 3 branches se divisant elles-mêmes et se redivisant encore, la dernière ou 3° ramification se montrant sous forme de tentacules cylindro- coniques, non capités, invaginables à leur sommet. Noyau ellipsoïdal plus ou moins allongé. Une grande vésicule contractile, excentrique, sous la face con- vexe. Diamètre, 80%; rarement jusqu'à 100 y. Ce curieux Tentaculifere, que l’on trouve uniquement sur les branchies des Gammarus, mais sur lesquelles il ne manque pour ainsi dire jamais, à fait l’objet de travaux poussés fort loin, et dont les deux derniers, ceux de PLATE (1886) et de HICKSON et WApsWORTH (1904) sont les plus complets. Mes observa- tions ne m'ayant pas fourni de résultats bien nouveaux, je ne traiterai que briève- ment du sujet, me contentant plutôt de quelques explications sur les figures que j'ai cru devoir donner. ÉTUDE SUR LES INFUSOIRES TENTACULIFÈRES 193 Les fig. 1 et 2 donnent une idée de l'animal examiné par le côté; dans la seconde on voit une cavité Incubatrice, dans laquelle se forme un embryon. La fig. 3 montre l’un des bras, terminé par trois « doigts pointus » ; en 4 la partie mobile des doigts, le cône, s’est invaginée. A la suite d’une commotion forte, ou par exemple du transport sur une nouvelle lamelle, la rétraction eût été plus prononcée encore, et les trois doigts, plissés jusqu'à leur base, eussent formé ensemble ‘une sorte de moi- gnon plus où moins arrondi. A-dessous, dans les fig. 5 et 6, nous avons la vésicule contractile, en commu- nication avec le dehors par un canal tubulaire, dont les parois ne sont qu'une inva- gination de la cuticule; le tube pénètre, pour ainsi dire, jusque dans la cavité vési- culaire, y dessinant de ses bords appliqués lun à l’autre une petite pointe; lors de la systole, l'ouverture en sera forcée (ou bien, peut être sera-ce la pointe elle-même qui en élargissant ses bords, livrera passage au liquide ? dans Frontonia leucas. nous avons décrit ailleurs une action de ce genre). 37. — Dendrocometes paradoxus. Le rythme de la vésicule est très lent dans cet organisme; une pulsation toutes les deux minutes environ, et quand l'animal est fatigué, ou bien isolé sous le couvre objet, et déjà quelque peu asphyxié, on peut garder l’œil une demi-heure entière à l'objectif sans constater de pulsation; mais un apport d’eau pure rendra très vite à la vésicule son activité. Le noyau est ovoïde-allongé, et parait souvent strié dans sa longueur, les gra- nulations qui le remplissent étant orientées suivant son plus grand axe (fig. 1): PLATE n’a pas vu de micronucléus, mais HICKSON et WaDSWORTH l’ont nettement distingné, et l’ont même trouvé plus volumineux qu'il ne l’est dans beaucoup de Ciliés; il y en a du reste, d’après eux, plusieurs, généralement trois. Pour mon compte, je l’ai vu nettement dans la larve ciliée (fig. 14) ainsi que sur un jeune indi- vidu; mais sur l'adulte, il m'a échappé. Les phénomènes de division, ou plutôt de bourgeonnement interne avec libéra- tion d’embryons ciliés, sont assez fréquents, mais beaucoup moins que ceux de trans- formation totale, au cours desquels l'individu tout entier, moins la cuticule, revêt la qe PE TRS RES 194 E. PENARD forme de larve ciliée et va chercher un autre terrain de fixation. Ces phénomènes sont probablement en rapport avec les circonstances ambiantes ; incommodé, par exemple, par le séjour en eau peu aérée, attaché à une branchie qui ne fonctionne plus, il quitte sa demeure, et quelquefois l’on voit tous les individus partir les uns après les autres, jusqu'à ce qu'il n’en reste plus un seul. L'animal quitte ainsi son enveloppe avec la plus grande facilité du monde, mais cela après une succession de phénomènes dont les détails dans leur phase ultime tiennent encore un peu de l’énigme. Il rétracte d’abord tous ses bras, qui se raccourcissent, lentement, sans plisse- ment, de sorte que bientôt — après quelques heures — on ne verra plus, par exem- Fig. 38. — Dendrocometes paradoxus. ple, que le moignon du dernier d’entre eux, comme une protubérance lisse, à laquelle adhèrent parfois quelques bribes échappées à la résorption (fig. 7): enfin tout est lisse, l’animal est réduit à l’état d’un disque fortement convexe, relevé sur l’un des côtés en une double lèvre bordant une fente étroite (fig. 8). Pendant ce temps, un embryon s'était formé dans l’intérieur, presque iden- tique en apparence à celui que nous avons vu dans Discophrya scyphostyla (à laquelle nous pourrions renvoyer pour les détails), et tout d’un coup, comme dans cette dernière également, un grand changement s'opère; cette sorte de bec dont ou voyait l'embryon pourvu s’avance, les lèvres de la fente s’écartent devant lui, et l’on voit courir la masse totale de lPembryon, sous les parois, en arrière, par dessus, par dessous, tout cela s’empressant vers la fissure. La larve sort les cils en avant, mais après une seconde à peine et à demi libérée, elle a déjà revêtu la forme que montre la figure 11, une sorte de coupe, sur laquelle se dessinent fortement les lignes de cils; une seule seconde encore, et ÉTUDE SUR LES INFUSOIRES TENTACULIFÈRES 195 nous avons la fig. 12 (de côté, c’est la fig. 10), la larve ciliée déjà typique, et qui n'a plus qu'à se détacher. Elle se détache du reste immédiatement, lais- sant derrière elle un paquet de plasma inutile, ou de simples déchets granu- leux. La pellicule d’enveloppe, pendant ce temps, à diminué de volume comme un ballon qui se serait détendu en chassant l'air qu'il renfermait; une fois abandonnée, elle a l'apparence indiquée par la fig. 13. La larve est discoïde, convexe sur le dos, légèrement concave à sa face inférieure, cette dernière munie de 4 rangées de cils séparés par trois bourre- lets; mais tout cela beaucoup plus compliqué qu’on ne le représente générale- ment; dans ces rangées concentriques, on remarque (à gauche dans la figure) sur un point spécial une solution de continuité, sur un autre une bifurcation; Fig. 39. — Dondrocometes paradoxus. à droite et en bas se dessine un arc rentrant, ou fossette d'où sort un large faisceau de longs cils, indépendants des autres et qui peuvent rester immobiles alors que tous ceux des sillons battent vivement". De côté, suivant l’orientation, la larve se montre comme dans la fig. 15 ou bien la fig. 9, et sous d’autres aspects encore; mais elle est toujours dis- coïde-allongée, avec lignes de cils infères. Libérée, elle peut errer fort longtemps, tout au moins lorsqu'elle est isolée en eau pure, sous le couvre-objet; et dans un cas spécial, je lai vue courir 26 heures avant de se décider à se poser. 1 Cette fossette ciliée rappelle celle de l'embryon des Spirochona, un Péritriche, mais que lon à peut-être tort de considérer comme tel. MÉM. SOC. PHYS. ET HIST. NAT. DE GENÈVE, VOL. 89 (1920). 2 196 E. PENARD A peine fixée, on la voit s’étaler, perdre ses cils, et bientôt se montrent 2, 5, 4 petites dents, qui grandiront, s’allongeront en un large tube au som- met duquei se dessineront trois rameaux, puis ces rameaux se diviseront à leur tour, et enfin, nous aurons les bras au complet, après 3 ou 4 heures, on par- fois après toute une nuit. La conjugaison, longtemps regardée comme douteuse, à été observée par PLATE, qui l’a du reste trouvée très rare, et dit que les deux individus res- tent environ deux jours unis par un pont de plasma, et y échangent leur subs- tance interne, Pour mon compte, pendant longtemps j'ai dû reconnaitre que les conjugaisons qui semblaient se présenter n'étaient qu'apparentes, dues à l’en- trecroisement des bras de deux individus très rapprochés; mais plus tard, j'en ai trouvé un cas certain, deux exemplaires liés non pas par les bras mais par un large pont, avec fusion des deux cuticules d’enveloppe. Dans une autre occa- sion, le phénomène s’est montré à nouveau, deux individus déployés, unis lun à l’autre; mais alors, un peu plus tard, tout le contenu de l’un des individus passa dans le corps de l’autre, ne laissant en arrière qu'un sac vide. De deux animaux il S'en était formé un! Podophrya fixa (0. F. MÜLLER) EHRENB. 1838. Trichoda fixa O. F. MÜLLER 1786. Corps sphérique, muni d’un pédoncule droit ou légèrement recourbé, creux, un peu élargi à ses deux extrémités, en général aussi long que l'animal et rare- ment plus. Tentacules minces, droits, dilatés en cône à leur extrémité et répartis en nombre relativement peu considérable sur toute la surface du corps. Noyau central, sphérique ou elpsoïdal. Vésicule contractile grande, dans la partie antérieure du corps, et rejetée un peu sur le côté. Diamètre 40 à 70 y. Toutes mes études sur les Infusoires se sont poursuivies suivant une mé- thode spéciale, et aussi, pourrait-on dire, en trois temps: 1° Observation pure et simple de l'organisme considéré provisoirement comme «nouveau >»; 2° Re- cherches bibliographiques, identification de l'espèce, comparaisons; 3° contrôle sur le vivant, rectifications éventuelles. Pour l'espèce qui nous occupe actuellement, la Podophrya fixa, cette mé- thode a été suivie à la lettre, mais pas jusqu'au bout: le troisième temps, le contrôle, a été négligé, soit en partie parce que les circonstances rendaient ÉTUDE SUR LES INFUSOIRES TENTACULIFÈRES 197 impossible une continuation du travail, soit surtout parce que les résultats de mes observations m'ont paru s'accorder si bien avec les faits rapportés par COLLIN dans maintes pages de son grand volume, que ce contrôle en devenait presque inu- tile. D'autre part, aujourd'hui même et en préparant ce chapitre, est arrivé à ma connaissance l'excellent Mémoire de F. M. RooT (1914) sur la l'odophrya collini; et alors, aujourd'hui et pour cette espèce spéciale, je voudrais négliger l'auteur américain, négliger COLLIN, négliger, en fait, les « deux derniers temps >» et rendre compte de mes seules observations, résumant en quelques pages les 34 petites feuilles de notes et les 80 figures prises en étudiant cette espèce; aussi bien les comparai- sons que d’autres pourront faire auront-elles leur utilité, plus évidente peut-être que si le contrôle venait de moi. Fig. 40. — Podophrya fixa. Laissant de côté la morphologie de l'animal, nous examinerons brièvement les phénomènes de Division, de Transformation totale de lindividu en larve ciliée, de Fragmentation en individus multiples, de Parasitisme et d'Enkystement. La division! est extrêmement fréquente ; on peut l’observer à chaque ins- tant. Le corps commence par s’étrangler quelque peu dans le sens équatorial, de sorte que la tige semble porter non pas une seule sphère, mais deux sphères l’une sur l’autre, la supérieure légèrement déviée sur le côté (fig. 1). La sphère supé- rieure se creuse légèrement à son pôle apical, et dans le creux commencent à appa- ! Rappelons pourtant que Corn la considère — à juste titre, car nous trouverons plus tard des cas de division vraie — comme un « Bourgeonnement externe », qui simule quelquefois une « division transverse », égale ou sub-égale, quand le volume de l'embryon se trouve être considérable par rapport au volume du parent ». 198 E. PENARD raitre des sillons, très serrés, au nombre d’une douzaine au moins, et sur lesquels de petites saillies vont se développer en cils. Le noyau s’allonge, et va bientôt se couper: une vésicule contractile se forme dans la sphère nouvelle. La ceinture ciliaire, cependant, se dessine toujours plus nette, et va rejoindre, mais sans la dépasser jamais, la constriction déjà très avancée qui sépare les deux sphères l’une de l’autre; les cils y battent lentement, tous ensemble sur une même ligne trans- verse du ruban comme s'ils étaient liés les uns aux autres; les tentacules sont par- tout bien développés, sauf, bien entendu, dans le champ ciliaire, qu'ils ont aban- donné. Cependant, l'embryon s’allonge, dans le sens de la ceinture ciliaire, et en même temps s'opère une compression latérale; le petit être devient elliptique, aplati, et la ceinture revét de plus en plus la forme d’une bordure, courant autour de l’em- Fig. 41. — Podophrya fixa. bryon maintenant aplati et allongé en raquette. Les tentacules se rétractent lente- ment, finissent par n'être plus qu'un bouton; la vésicule contractile devient fort grosse, prend temporairement des contours bizarres, et tout près d’elle le corps se déprime, en un « creusement de compensation » ; le noyau s’allonge, prend une posi- tion transverse qu’il gardera longtemps, et se montre strié dans sa longueur. Enfin, la forme définitive est acquise, celle que montre la figure à (qui représente une transformation totale, mais dont le résultat est identique à celui de la division), les cils se mettent tout à coup à battre vivement ; l'embryon se détache, part la vési- cule contractile en avant, quelques tentacules, très courts, trainant en arrière; et disparaît en tournoyant. Le phénomène tout entier, à partir de la première indication de la division, de la première trace d’étranglement, a duré 2 heures environ; dans le cas représenté ETUDE SUR LES INFUSOIRES TENTACULIFÈRES 199 par la fig. 1, où la division était déjà fort avancée à 4 h. 30 lors de la rencontre, l'embryon partit à 5 h. 05. = La transformation totale de l'individu en larve ciliée est très fréquente égale- ment, plus encore peut-être que la division. Les phénomènes y sont absolument les mêmes, et la seule différence consiste en ce qu'il ne s'opère pas d’étranglement, et que la ceinture ciliaire, au lieu de s'arrêter en chemin, fait le tour complet de l'individu ; mais en raison de la tige, qui s’opposerait à son passage, cette ceinture n'est pas tout à fait méridienne, mais légèrement en biais sur l’axe unissant les deux pôles, et passe près de la tige sans la toucher; c’est ce que montre la fig. 3, puis encore la fig. 4 qui représente l’animal dans une phase un peu plus avancée et avec une orientation différente, alors que laplatissement commence à se produire, et que les tentacules sont déjà aux trois quarts rétractés. Dans la fig. 5 on voit, un peu plus tard, l'individu cilié se détacher brusquement de son pédoncule et partir. Après avoir couru pendant un temps fort variable, quelques heures ou quel- ques minutes suivant les circonstances, l'individu cilié, qu’il provienne de division ou de simple transformation, se fixe ; à peine s'est-il abattu, qu’on voit pousser tout près de la ceinture dont les cils commencent déjà à se résorber, une petite protu- bérance, une gouttelette limpide, dans laquelle est un grain brillant (fig. 6); ce grain se dissout, la protubérance fait place à un tube, qui s’allonge rapidement. C’est ainsi que dans l'individu représenté par cette figure 6, à peine le tube était-il distinct à 2 h. 05; à 2 h. 15, il mesurait le quart de la longueur de l’animal déjà sphérique et où les tentacules repoussaient ; à 2 h. 20 il était tel que le représente la fig. 7; à 2 h. 23 c'était la fig. 8; mais à partir de ce moment, les choses allèrent plus lentement, et à 3 h. seulement la tige, à peu près terminée, était ce que montre la fig. 9; tout d’abord, à son intérieur, on voyait un parenchyme incolore, parsemé de lacunes ou vacuoles allongées, puis plus tard ces lacunes disparurent pour faire place à des grains brillants. Dans cette station de Pinchat où la Podophrya se montrait abondante, un autre Infusoire ne l'était pas moins, an cilié, la Séylonychia mytilus ; et c'était alors à cette seule Stylonychia que la Podophrya s'attaquait; même, presque exclusivement à une variété très grande, qui atteignait 300 4 en longueur. La Podophrya prenait alors presque toujours sa proie par le défaut de la cui- rasse, la face ventrale à la hauteur du bas du péristome, et s’enfonçait elle-même si bien dans l’Infusoire, qu’elle s’y trouvait à moitié englobée (fig. 10); presque com- plètement rétractés, les sucoirs, très courts, pénétraient dans la Séylonychia, tandis que sur l'hémisphère libre ils restaient déployés en longs tentacules. Pour absorber sa proie la Podophrya prend son temps; elle grossit toujours plus, et, devenue très volumineuse, elle se divise, en deux parties égales; le plus 200 E. PENARD souvent, le nouvel individu se met lui-même à consommer sur place; puis une nou- velle division se produit, et souvent c'est deux, trois, où quatre Podophrya que lon trouve occupées à se nourrir, toutes dérivant du premier parent. Pendant tout ce temps, la Stylonychia est restée inerte; elle n’est pas morte, sa vésicule contractile fonctionne, et de temps à autre quelques cils ont un batte- ment. Sur un de ces Infusoires, capturé par la l’odophrya au moment où il commen- çait à se diviser, cette division suivit tranquillement son cours jusqu’à la fin; mais les deux individus ne purent se séparer; le lendemain, ils vivaient encore, toujours unis; le surlendemain Fun d'eux était mort, l’autre, déformé, boursoutlé, allait bien- tot périr, mais dégagé de la Podophrya par la pointe d’une aiguille, puis trans- porté en eau claire, 1} reprit vie et activité. Comparée à la Podophrya, la Stylonychia 50 est en effet d’un volume énorme, et si deux ou trois ennemis ne la consomment pas à la fois, 415 1 elle résiste pendant deux jours, immobile, mais vivante encore, Comme le serait un animal sous l’action du curare. Le plus souvent, cependant, elle finit par se désagréger et mourir. Ris 040) — Polophiia fxa, On trouve aussi, assez souvent même, des Podophrya en plein cytoplasme de la Stylo- nychia, à l’état de parasites vrais; c’est tout d'abord une grosse boule, unie, sans tentacules: puis cette boule se divise, et les produits se divisent encore, même Jusqu'à la 4° division, d’où résultent 16 individus très petits. Dans la fig. 12, on voit dans une grande vacuole, trois masses accolées l’une à l’autre et de même volume; produit sans doute de division, Mais bien souvent, ces boules internes, au lieu de multiplier à l'intérieur de la Stylonychia, sont éliminées, et arrivées au dehors, elles commencent à se diviser, soit en segments égaux, soit aussi en parties plus petites; ce dernier fait parait cependant être accidentel, peut- être n'y faut-il pas voir un bourgeonnement. Plus souvent, les deux individus nés d'une première division n’en restent pas là: ils se divisent eux aussi, puis les pro- duits se divisent encore, et alors d’après les procédés normaux, avec formation d'une ceinture ciliaire, production d'un embryon allongé, une répétition, en fait, d’une exactitude parfaite, de ce que nous avons décrit pour les adultes (fig. 1); ou bien, ce sont des transformations totales ; et nous avons devant nous des lodophr'ya parfaites et à tentacules déployés, mais sans tige et tout à fait naines. Pour citer un exemple, nous suivrons une Podophrya, de 38 » de diamètre, qui attaqua une grosse Stylonychia le 14 avril à 4 h. de l'après-midi. Voici, dans leur laconisme originel, les notes que j'ai prises à ce sujet: ÉTUDE SUR LES INFUSOIRES TENTACULIFÈRES 201 14 avril. 4 heures. Capture; Podophrya, 38 » en diamètre. 15 avril. 8 h. Infusoire cilié inmobile mais vivant; les cirrhes battent de temps à autre. Podophrya T2 5. 12 h. Stylonychia vivante; Podophrya T6 v. 3 h. Séylonychia inerte: la Podophrya s'est divisée en deux. 6 h. Même état. 16 avril. 9 h. 7 Podophrya, dont une très grosse, 6 très petites, à côté de la Stylonychia tombée en poussière. 10 h. 12. La grosse Podophrya se divise; l'une des petites également. Il serait mutile de relater plus au long lexpérience, qui se poursuivit d'heure en heure jusqu’au soir; divisions, transformations totales, petits individus libres ou à tige, tout se montra; puis le 17 avril à 9 h. ‘/,, on ne voyait plus que de très petits individus, au nombre d’une vingtaine (d'autres avaient dû s'échapper), mais aucun ne se divisait plus. Mais 11 nous faut revenir un peu en arrière, et considérer des phénomènes dans lesquels il n’est pas absolument certain que la Podophrya fixa fût en cause; il s’agis- sait peut-être d’une autre Podophrya? Voici les faits: Dans l’intérieur de certaines Stylonychia, on rencontrait, au lieu des lodophrya typiques, où même avec elles (fig. 11 où la Podophrya fira s’est divisée en 8 segments) une masse volumineuse, noirätre, à gros grains, à noyau central peu visible, et à vésicule contractile sur le côté. Parfaitement lisse, cette masse est globuleuse, ou bien vaguement pyriforme: parfois elle s’allonge, et se divise, le plus souvent en 5 parties inégales (fig. 12). Après quelque temps la Séylonychia rejette cette boule spéciale, par déchirure de sa face ventrale, et la sphère éliminée reste inerte au dehors, lisse, sans chan- gement, pendant un jour ou même deux, puis finit par se diviser en deux ou en trois segments, sans qu'un seul tentacule, sans qu'une seule ligne ciliaire semble appa- raitre Jamais. Ces sphérules ainsi obtenues sont alors destinées à l’enkystement, où en tout cas, dans les cinq expériences que j'ai faites à ce sujet, c’est par l’enkystement que tout s’est terminé. On voit alors, sur ces boules inertes, apparaitre tout d'abord une courte tigelle (fig. 13), mince, et presque en même temps, au pôle opposé à la tige, se montre un gros bouton brillant (fig. 14). Très vite, autour de la tige s'étend une nappe hyaline, une cupule qui grimpe sur la sphère, s'étale en une arête et bientôt va durcir, des- sinant la première partition du kyste (fig. 14); puis la nappe continue à grimper, forme une nouvelle arête, ou deuxième partition (fig. 13); elle monte encore, et en forme une troisieme (fig. 16); puis vient la construction de la collerette, ce rebord 202 E. PENARD tubulaire, évasé, qui termine le kyste à son pôle antérieur, et c’est alors qu'entre en action le gros bouton brillant, qui à peu à peu grossi, et maintenant figure une sorte de moule autour duquel se dépose le mucilage dureissant. Lorsque la solidi- fication est terminée, le bouton brillant se rétracte lentement (en 2 ou 3 heures), et disparaît, laissant le kyste achevé. Pendant que tout cela se passait, la tige s'était de son côté creusée, élargie, était devenue un tube, conique, rayé de partitions en forme de coins (fig. 17), et la surface du kyste s'était tout entière couverte de stries longitudinales, allant d’un pôle à l’autre, mais visibles surtout comme de faibles rainures, entre les arêtes caractéristiques du kyste maintenant parfait, un kyste typique de Podophrya. Podophrya soliformis (LAUTERBORN) PENARD 1918. Sphærophrya soliformis LAUTERBORN 1908 (Sphærophrya sol. LAUT. 1901). Corps sphérique, porté par un pédoncule étroit, creux, droit, étalé à son point de fixation sur le support, légèrement dilaté à son point d’attache au corps, et dont la longueur dépasse normalement de très peu le diamètre de l'animal. Tentacules très nombreux, en général courts et arrivant tous à peu près à 1a même hauteur, capités, très fins à leur sommet puis s’élargissant vers leur base et y devenant enfin coniques. Noyau sphérique ou ellipsoïdal, central. Vésicule contractile à peu près vers le milieu du corps. Diamètre, 40 à 63 . Toutesles Podophrya peuvent se rencontrer dépourvues de tige; parfois même quand on trouve cette dernière c’est à titre d'exception, et c’est pour ne l’avoir pas vue que LAUTERBORN, en 1901, a décrit sa Sphærophrya sol., devenue en 1908 Sph. soliformis, le nom de sol s'étant trouvé préoccupé. En 1918, j'ai publié sur cette espèce un travail d’une certaine étendue, auquel je ne puis que renvoyer pour les détails; mais cependant, après avoir revu cet orga- nisme et y avoir constaté quelques faits nouveaux, je reviendrai brièvement sur le sujet. « Les tentacules, disais-je, extrêmement nombreux et serrés sur toute la surface du corps, sont ici particulièrement mobiles et changeants ; très courts en général, ils peuvent cependant s’allonger plus que ne l'indique LAUTERBORN, et sur des indi- vidus laissés dans une tranquillité complète, on les voit attendre en longueur bien plus que le diamètre du corps ». Plusieurs des observations que j'ai faites plus tard sur des individus isolés et laissés longtemps dans une tranquillité que rien ne pou- ÉTUDE SUR LES INFUSOIRES TENTACULIFÈRES 203 vait troubler, m'ont fourni des résultats bien plus curieux encore; ces individus, examinés à un faible grossissement, paraissent entourés, à une distance assez con- sidérable, d’une auréole de microbes, que l’on voit par instants s’agiter; ces micro- bes ne sont pas autre chose que les têtes des tentacules, et ces derniers atteignent en longueur quatre ou cinq fois le diamètre du corps (fig. 2), rétrécis lentement de la base au sommet, et terminés par une tête renflée, relativement fort grosse, allongée en larme (fig. 3); et sous la tête, le tentacule n’est qu'un filament d’une finesse si extraordinaire qu’on à beaucoup de peine à le distinguer ; à peine y mesure-t-1l un quart de », et l’on se demande comment ce peut être là un tube avec canal inté- rieur. Le moindre courant passant dans le voisinage agite toute cette chevelure, et en outre, les tentacules balancent de leur propre chef leur pointe de côté et d'autre; bien plus, ils se rétractent ou s’allongent, avec une rapidité telle qu’on a Fig. 43. — Podophrya soliformis. peine à comprendre cette opinion courante, qui veut qu'il faille un temps très long, des heures mêmes, pour l’exécution de ces changements ; en réalité, J'ai vu le long tentacule représenté dans la fig. 2 se rétracter en deux secondes jusqu'à devenir identique au petit prolongement qu'on voit à droite tout près de lui. La fig. 4 est une première indication de la transformation totale en embryon cilié; la fente en forme de croissant correspond à la cavité incubatrice des Tenta- culifères en général: mais ici tout se passe d’une manière particulière: le creux, largement ouvert, reste très peu profond, une ceinture de cils y prend naissance (dans ma première communication, je n'avais fait que la deviner), dans une gout- tière circulaire (fig. 5); puis plus tard, après un quart d'heure au plus, quand la sphère se sera allongée à angle droit sur la tige et aura l'apparence d’un « pois- MÉM. SOC. PHYS. ET HIST. NAT, DE GENÈVE. VOL, 89 (1920), 26 204 E. PENARD son-girouette >», la cemture ciliée se dévaginera très rapidement, l'animal se décro- chera, pour s’en aller les cils en avant. Bientôt d’ailleurs il se posera, s’abattra sur son disque, s'arrondira en sphère et poussera une tige, laquelle, il faut le remar- quer, sera de la sorte virtuellement à angle droit sur la tige précédente. À la page 6 de mon Mémoire (1918), j'avais cité un cas de division vraîe, par parties égales; mais ce cas unique restait encore un peu problématique; il pouvait y avoir eu contact accidentel de deux individus, etc., et je m'étais gardé d’insister, Cependant le fait était exact, la division pure et simple est possible, Le 1° décem- bre 1918, à 5 h. !/, Je trouvai un individu un peu allongé, et étranglé dans son milieu; l’étranglement devint toujours plus fort, et à 4 h. !/, c'était une division achevée, sans qu'une ceinture ciliaire eût jamais apparu. Ajoutons que dans ce cas particulier, l’un des nouveaux individus resta sans changement (tout au moins jusqu'à 7 h. du soir, puis tout se perdit dans la nuit), l'autre se transforma tout entier et devint piseiforme; à 7 h. il avait pris sa course, on ne le trouvait plus. Podophrya palmigera sp. n. Corps sphérique, opalescent sur ses bords, porté par un pédoncule très étroit, et de longueur à peine égale à celle du corps. Tentacules extrêmement nombreux, fins, capités, d'épaisseur partout égale. Vésicule contractile grande, vers le milieu du corps. Noyau fusiforme, brillant, divisé nettement en quatre ou cinq fuseaux lon- gitudinaux. Diamètre 50 y. Ce Tentaculifere, de mème taille à peu près que la Pod. soliformis, la rap- pelle si bien à première vue qu'on à peine à l’en séparer. Cependant, l'apparence en est un peu différente, la cuticule en est plus brillante, opalescente, le cytoplasme renferme des petits grains brillants que l’autre espèce ne montre pas: la tige, très mince, courte, est reliée au corps par un mamelon clair dans lequel on voit un erain brillant, Mais deux éléments surtout sont caractéristiques: les tentacules, qui sont plus longs, plus serrés, d’égale épaisseur de la base au sommet, et le noyau, toujours très visible, qui présente une structure toute particulière: de forme allon- oée, brillant, il rappelle une graine de dattier (fig. 2), et semble être divisé dans sa longueur en faisceaux longitudinaux, qui s’écartent les uns des autres dans une région centrale pour y laisser place à un grain spécial, bleuâtre, un centriole, lequel rougit facilement par le carmin, tandis que le reste du noyau ne se colore que beaucoup plus lentement. ÉTUDE SUR LES INFUSOIRES TENTACULIFÈRES 205 Les phénomènes de division et de transformation totale en embryon cilié sont les mêmes ici que dans la Pod. soliformis ; la fig. 3, par exemple, montre la larve avec sa couronne de cils et ses arêtes longitudinales: le noyau qui tout d'abord s'était mis en travers, près de l’extrémité antérieure du corps, est devenu longitu- dinal; la vésicule contractile, très grande, est en arrière, Dans la fig. 4, l'embryon vient de se poser, et les tentacules ont fait leur apparition; la partie inférieure du corps est lisse et la tige commence à se montrer. Fig. 44. — Podophrya palmigera. La Podophrya palmigera était commune dans l'étang de l'Ariana, au mois de septembre 1918. Podophrya comosa sp. n. Corps subsphérique ou plus précisément pyriforme, fixé par son extrémité rétré- cie sur un pédoncule très étroit, creux, Jaunâtre, droit, 2 fois aussi long que le corps, et fortement élargi en cupule à son extrémité attenante au corps lui-même. Tenta- cules extraordinairement nombreux, constituant une véritable chevelure de fila- ments très minces, très longs et à tête terminale très petite, tout particulierement mobiles, se rétractant en une spirale nettement accusée. Noyau grand, fusiforme, brillant, parcouru de fortes stries longitudinales. Vésicule contractile dans la moitié inférieure du corps. Longueur 56 :; longueur du pédoncule 105 y. 206 E. PENARD Cette espèce est d'apparence très caractéristique. De taille légèrement supé- rieure à celle de la Pod. palmigera, ele est portée par un pédoncule plus long et plus grêle, un peu comprimé (à coupe transversale elliptique, fig. 35 b), légèrement jaunâtre, d'apparence chitineuse; le noyau, fusiforme, brillant, est strié dans sa lon- gueur, comme dans lespèce que nous venons d'étudier, et laisse voir dans son inté- rieur un espace vide, fusiforme également, sur l’un des côtés duquel est un centriole opalescent (fig. 4 «, et fig. 4b, qui montre, vu suivant son grand axe, le noyau bril- lant): la vésicule contractile est très grande, dans la moitié inférieure du corps. Mais ce qu'il y a de plus curieux dans cette espece, ce sont les tentacules: Très longs et très fins, terminés par une tête ronde très petite. se touchant les uns les Fig. 45. — Podophrya comosa. à autres par leurs bases brusquement élargies (fig. 3), ils sont en nombre immense, 400 ou 500 peut-être, done un chiffre infiniment supérieur à celui de 100 que l’on considère comme un maximum dans les Tentaculiferes, et forment ensemble une véritable brosse, ; on les voit continuellement en mouvement, s’allongeant tout droit, ou se rétractant dans une spirale serrée (fig. 2); beaucoup semblent brisés net, en deux parties distinctes, mais ils se dresseront bientôt. Je n'ai malheureusement pu examiner que trois individus se rapportant à cette espece ; ils étaient isolés parmi les Podophrya soliformis et palmigera, mais leur longue chevelure, à éléments fins et serrés, les en distinguait dès le premier coup d'œil. ÉTUDE SUR LES INFUSOIRES TENTACULIFÈRES 207 Sphærophrya pusilla CLaP. et LACHM. 1858-60. Corps très petit, pâle, délicat, sphérique, entouré de tentacules en nombre très variable, extrêmement courts mais pourvus d’une tête ronde relativement tres volumineuse. Il est fixé sur un pédoncule à peine distinct, égal tout au plus au quart du diamètre du corps, brillant, lisse, élargi à ses deux extrémités. Noyau cen- tral, sphérique, volumineux. Une vésicule contractile, en avant et sur le côté du Corps. Diamètre 17 ». A la page 1926 de son ouvrage classique (Protozoa, 1889), BÜTSCHLI fait sui- vre la diagnose relative au genre Sphærophrya de quelques remarques, dont nous extrayons les suivantes: < Unter den parasitischen Formen kann ich hüchstens 2 Arten unterscheiden, von welchen eine die Stentoren, die andere, welche wohl mit der Sph. pusilla CLAP. und L. identisch ist, alle übrigen umfasst >; et plus loin: «.Jedenfalls ist es recht schwierig, die frei lebenden Sphaerophryen von ungestiel- ten Podophryen zu unterscheiden; es bedarf weiterer Forschungen, um diesen Punkt und damit die Gattung überhaupt ganz sicher zu stellen ». D'autre part, COLLIN (1914, p. 401) donne pour le genre Sphærophrya les indications suivantes: Faiblement caractérisé par rapport au précédent (Podo- phrya) par l'absence de pédoncule, ce genre comprend un nombre d'espèces décrites assez considérable, mais peu de formes bien définies et suflisamment certaines. Les unes vivent librement, d’autres sont parasites ». Comme formes parasites, COLLIN indique alors 2 espèces, Sph. sol. MECZNIKOW (S. paramæciorum MAUPAS, S. uro- stylæ MAUPAS, S. stylonychiæ S. KENT), et Sph. stentoris MAUPAS 1881. Quant à la Sph. pusilla de CLar. et LACHM., il P’inclut dans les formes libres; «le nom créé par ces auteurs, dit-il, l’a été pour une forme libre qu'ils ont vue s'attacher exté- rieurement aux Oxytriches, mais non pas pénétrer à leur intérieur >. Ce doit bien être pourtant la Sphærophrya pusilla que j'ai rencontrée, à Pin- chat en 1915 et plus tard en 1918, puis à l’Ariana, et toujours sur — où aussi dans — la Stylonychia mytilus ; car elle y était bien parasite, temporaire tout au moins. Considérons-la tout d'abord en parasite, dans l’intérieur de la Séylonychia : C’est une petite boule, lisse, sans tentacules, pourvue d’une vésicule contractile, et dans laquelle le noyau n’est qu'une tache indistincte. La taille, très variable, peut être calculée à 50 y au maximum, Cette boule se divise en 2, en 4, en 8, puis en un 208 E. PENARD nombre de segments bien plus considérable encore, car une Stylonychia isolée dans la soirée avec une seule sphère parasite peut se retrouver le lendemain matin infectée par 100 embryons au moins. Ces embryons, tout ronds, sans vésicule contractile et sans tentacules, sont alors renfermés tous ensemble dans un vaste sac, allongé (fig. 1), pourvu suivant toute apparence d'une paroi propre, que la Séylonychia à sécrétée pour s’isoler de l'ennemi. Mais bientôt ces embryons s'allongent, prennent une ceinture de cils, et commencent à s’agiter, pour courir enfin sans trève ni repos dans le sac, et cher- cher à en sortir. Pendant longtemps, la lutte est sans succès, mais enfin une déchi- rure se produit, sur la face ventrale de la Séylonychia, et les petites larves s’échappent. Fig. 46. — Sphærophrya pusilla. La fig. 2 représente une de ces larves, autrement dit, l’état mobile de la Sphæ- rophrya pusilla; c’est un petit être de 17 “ environ de longueur, ovoide ou plutôt cylindroïde, trapu, muni dans sa partie antérieure d’une large ceinture de cils, très longs, disposés en rangées serrées (au moins 6, et peut-être plus): de la dernière rangée partent deux ou trois cils Spéciaux, beaucoup plus longs que les autres, qui vont ensemble trainer en arrière pendant la marche; la vésicule contractile est antéro-latérale; le noyau se voit en arrière de la ceinture; dans le cyÿto- plasme on trouve toujours quelques grosses sphérules brillantes; des tentacnles, enfin, se montrent dès le premier instant, si courts que leur tête arrondie, très grosse, en parait sessile: la plupart sont en arrière et sur les côtés, mais quelques- uns peuvent se montrer dans la partie antérieure du corps. Que deviennent ces petits embryons? Si je ne m'en tenais qu'à mes observa- tions de 1918, dont les résultats ont été jusqu'ici seuls en cause, 11 me faudrait gar- der sur le sujet un silence presque absolu ; en effet, ces observations ont porté cette année-là sur des individus isolés en lamelle évidée, soit seuls, soit avec leur Sfylo- ÉTUDE SUR LES INFUSOIRES TENTACULIFÈRES 209 nychia, et dans leur prison liquide ïls ne se fixèrent pas; je les vis courir, alors, toujours les mêmes, cherchant en vain où se poser, pendant 2, 3 et même 4 jours, sans paraître du reste particulièrement souffrir. D'où prenaient-ils leur nourri- ture, tandis que tout près, la Séylonychia, vivante encore, et libérée de tous ses para- sites, mourait peu à peu d’inanition ? Mais en 1915, j'avais déjà fait quelques observations sur cette même espèce ; j'avais trouvé plusieurs individus immobiles, pourvus de tentacules rayonnants, peu nombreux et très courts; et ces petits Acinètes se divisaient à la manière des Zodo- phrya, avec ceinture ciliaire pour le nouvel individu. Sur les restes encore vivants d'une Stylonychia malade, j'en avais trouté 6, avec ou sans tentacules, sessiles à première apparence, mais en réalité fixés soit par un tout petit bouton, soit par un prolongement très court, mais déjà véritable pédoncule. La fig. 3 représente quelque chose d’un peu différent; à première vue, il ne semblait pas qu'il y eût là notre Sphærophrya. C'était une petite boule, lisse, un peu plus grosse que les embryons qui couraient tout autour, attachée à la face ventrale d’une Stylonychia (captive en lamelle évidée et malade déjà) par un prolongement court, brillant, plein, un peu élargi à sa base et aussi à son sommet, et qui péné- trait jusque dans le plasma de l'hôte, sous la pellicule perforée; la boule était par- faitement lisse, sans trace de tentacules; dans le plasma très clair et très pur, on voyait un grand noyau central, puis, plus haut, une vésicule contractile. Ce premier examen avait eu lieu à 7 heures du matin; à 9 h., quelques petits tentacules avaient poussé (fig. 3); cependant, la Séylonychia ayant été quelque peu malmenée, fit explosion, éclata en mille fragments, à l’un desquels la Sphærophrya resta pourtant attenante; mais alors, au lieu de pousser des tentacules en nombre toujours plus grand, tout au contraire, elle retira ceux qu'elle avait déjà, s’entoura d’une ceinture ciliaire, lutta pour se détacher de la tigelle, et, abandonnant der- rière elle, partit comme une flèche, sous la forme de ces larves ciliées dont il vient d’être question plus haut. La Sphærophrya pusilla peut done se former une tige, rudimentaire si l'on veut, mais une tige, et peut-être, là aussi, n’y a-t-il qu'une Podophrya, dans laquelle cette tige resterait à un état pour ainsi dire embryonnaire; dans lexemple cité, elle était molle encore lors du départ de l'individu cilié, et pendant les efforts que ce dernier faisait pour se dégager, je la vis s’étirer, s'allonger quelque peu. Sphærophrya doliolum sp. n. Corps sphérique ou sacciforme à l’état de parasite, pourvu d’un noyau cen- tral, sphérique, volumineux ; près de ce dernier, un micronoyau bien distinct. Vési- 210 E. PENARD cule contractile unique, sur l’un des côtés. La sphère incluse dans le corps de l'hôte se divise ou bourgeonne rapidement, pour produire de petits groupes d'individus serrés les uns contre les autres. À l’état errant, l’animal revêt la forme d’un ton- neau, et porte 5 sillons annulaires, très espacés, couverts de cils longs et peu ser- rés; au pôle postérieur, une couronne de tentacules courts et très larges, non capités. Diamètre à l’état globuleux 27 à 33 2. Nous avons vu que BÜTSCHLI ne reconnaissait comme certaines que deux Sphærophrya parasites; l'une d'elles est la Sph. pusilla, autre, qu'il ne nomme pas, doit être cet «< Embryon de Sfentor » que STEIN à décrit et figuré en 1867, et pour lequel MAUPAS, sans lavoir trouvé lui-même, à créé le nom de Sphærophrya stentoris. Fig. 47. — Sphærophrya doliolum. C’est bien tout d’abord comme Sph. stentoris que j'avais considéré un Tentaculifère qui provoquait en avril 1915 une véritable épidémie parmi les Stentor niger de Pinchat!:; mais plus tard, après avoir consulté la littérature relative au sujet, avoir constaté que STEIN indique et figure une couronne de cils longs et fins n’intéressant que le pôle antérieur, et avoir trouvé moi-même dans le Stentor polymorphus, à Rouelbeau, une Sphærophrya dont l'embryon différait en effet de celui de Pinchat par sa ceinture ciliaire unique, j'ai dû reconnaitre qu'il y avait là quelque chose de nouveau. Peut-être bien faudrait-il au moins rapprocher l'espèce actuelle de cet < embryon > trouvé par STEIN dans le Stentor cœruleus, ! En juin 1917, ce même Stentor y était tout aussi abondant, mais sans aucun parasite. ÉTUDE SUR LES INFUSOIRES TENTACULIFÈRES 211 pourvu de deux lignes de cils, mais pour que ce fût le même, il faudrait admettre que STEIN à mal vu, car ici, les lignes ciliaires, très nettes, sont au nombre de trois, et disposées d’une manière toute particulière, à une très grande distance les unes des autres, comme les cercles d’un tonneau. La Sphærophrya doliolum, ainsi pouvons-nous l'appeler, était très abondante à Pinchat, et se montrait uniquement dans le Sfentor niger, tantôt entièrement incluse dans l’intérieur de ce dernier, et alors sous forme de boule, tantôt faisant hernie à l'extérieur par une déchirure de la cuticule; cela surtout dans les cas très nombreux où la Sphærophrya formait une sorte de colonie, un groupe compact de sphères soudées les unes aux autres, et résultant suivant toute apparence d’une prolification d’un seul individu primitif (fig. 1). Ces boules (fig. 5), de 25 à 35% de diamètre en général, claires, légèrement opalescentes, renfermaient un noyau central, volumineux, sphérique, rempli de petits grains entre lesquels étaient disséminés des nucléoles plus gros, d'un bleu pâle, que le carmin colorait plus vite que le reste. À quelque distance se voyait un micronucléus, bleuàtre, pourvu d’une membrane distincte dont Ia masse centrale était séparée par un espace clair. Une vésicule contractile fonctionnait paresseu- sement. Sur beaucoup de ces bouies, on pouvait suivre le cours du bourgeonnement ; c'était d'abord une simple convexité, sur laquelle apparaissaient quelques cils, dis- posés sur 3 rangées; tout près, une petite vésicule fonctionnait déja (fig. 3); peu à peu cette convexité se creusait sur les bords d’une gouttière toujours plus pro- fonde, et l'embryon se montrait tel, par exemple, que dans la fig. 6, dessiné à 2 h. 30 de l’après-midi. Suivons plus loin ce même individu : à 2 h. 55, c'était la fig. 7, peu changée dans son apparence générale, mais le noyau s'était allongé et pénétrait dans l’embryon ; à 3 h. 35, les deux noyaux étaient complètement séparés, ramas- sés chacun en une sphère, et l'embryon, parfait dans sa forme, n'était plus lié au parent que par un pont: le jeune animal était pour ainsi dire couché, son axe longi- tudinal faisant un angle droit avec celui du parent. Tout d'un coup les cils jusque là paresseux redoublèrent d'activité, et le petit être se décrocha, partit comme un obus, droit devant lui, les cils en avant, et trainant en arrière toute une couronne de tentacules, qui s'étaient formés dès avant sa hbération (fig. 2). Sous cette forme mobile, la Sphærophrya (fig. 4), de TS à 22 , de longueur, est ovoide, deux fois aussi longue que large, et porte trois sillons annulaires, tres espacés, le premier se trouvant non loin de l'extrémité antérieure, le second un peu en avant du milieu du corps, le troisième en arrière de la ligne médiane; ces trois sillons, bien visibles, portent chacun des cils longs mais peu serrés, MÉM. SOC. PHYS. ET HIST. DE GENÈVF, VOL 89 (1920). 2 219 E. PENARD Au pôle antérieur, on trouve un petit disque bleuûtre, bien net, formant parfois une Saillie plus ou moins considérable, mais qui s’affaissera plus tard ; c'est là le bouton adhésif glutineux qui fixera l'animal. Autour du pôle postérieur se voit une couronne de tentacules, très courts, très larges, légerement coniques: non capités, tronqués à angle droit à leur som- met, un peu comme ceux du Dendrocometes. Mentionnons enfin un gros noyau central, une vésicule contractile, active, un peu en arrière où à n-hauteur du corps. Cet embryon cilié, que devient-11? I court, et se fixe, sans doute, sur un nou- veau Stenter, pénètre vraisemblabiement dans son intérieur, et se gorge par osmose de sucs nutritifs; mais il ne m'a pas été possible de surprendre le phénomène sur le fait. Sphærophrya natans sp. n. Corps tres clair et délicat, sans forme précise, bosselé ou creusé de dépressions plus ou moins profondes, pourvu de quelques rares tentacules très fins, capités, et pouvant attein- dre une longueur considérable, de 6 à 10 fois le diamètre de l'animal. Fig. 48. — Sphærophrya natans Noyau sphérique, volumineux. Deux vésicules contractiles, l’une dans la partie antérieure, l’autre dans la partie postérieure du corps. Diametre 25 v. En l'absence de toute indication sur la structure de l'embryon dans ce petit Tentaculifère, ce n'est qu'à titre tout à fait provisoire que je l'indique comme Sphæ- rophrya : et si j'ajoute que deux représentants de lespèce ont été seuls trouvés, il semble qu'il eût mieux valu le laisser ignoré; mais après avoir vainement cherché à le revoir, je me suis résolu à lui consacrer quelques lignes: tel qu'il est, on l'identifiera toujours avec facilité, et de plus sa nature essentiellement pélagique le rend intéressant. Il est pélagique, en effet, et peut-être est-ce pour des raisons hydrostatiques que les tentacules — très peu nombreux, à petite tête ronde — sont si fins et si longuement déployés. Le corps est sans forme précise, ramassé sur lui-même, tres lentement déformable; et dans exemplaire particulièrement étu- ÉTUDE SUR LES INFUSOIRES TENTACULIFÈRES 913 >) dié, il se montrait creusé d’une profonde cavité, d’un puits, qui disparut plus tard. Un noyau rond, très net, volumineux, à gros grain, est à peu près central; une vésicule contractile fonctionne activement, à la partie antérieure du corps; une autre, plus petite, s’est montrée près du noyau; mais je ne lai pas vue fonctionner. C’est dans l’eau du Léman qu'ont été trouvés ces deux individus, où plutôt, dans les conduites de la ville de Genève, qui vont prendre leur eau en plein lac; probablement les pêches pélagiques l’auraient-elles fait récolter à cette époque (25 juin 1918) en nombre assez considérable. IT est fâcheux que je n'aie pas pu les exécuter. Metacineta mystacina EHRENBERG. Cothurnia mystacina EHRENBERG 1831. Metacineta mystacina, var. brevipes SAND. Logette incolore ou légèrement jaunatre, d'apparence vasiforme ou trapézoï- dale suivant l'orientation, un peu plus longue que large, tronquée obliquement en avant puis s’allongeant en une double pointe antérieure; face apicale divisée par des invaginations de l'enveloppe en 3 et plus souvent 6 valves que séparent d’étroites fissures. La partie postérieure de cette logette S’étire en un pédoncule cylindro-conique, qui se termine en une petite plaque fixatrice. Le corps, ovoiïde ou quelque peu élargi, est suspendu dans la logette, dont il occupe à peine la moitié. Tentacules longs, capités, se faisant jour au dehors par les fissures de la face apicale. Noyau ovoïde ou sphérique, avec un micronoyau adjacent. Vésicule contractile unique, dans la partie antérieure du corps. Longueur totale, y compris la tige, 50 à 52 w. Largeur 28 ». «Je ne connais de cette espèce unique, éminemment variable, à la fois marine et d’eau douce, que la forme courte et trapue (var. brevipes SAND), que j'ai trouvée sur les conferves et les plantes aquatiques en diverses localités. J'ai toujours vu six fentes réunies en étoile au centre, telles que les figure STEIN (1854), donc six valves triangulaires, dressées ou rabattues, au sommet de la coque >. Tels sont les termes dans lesquels s'exprime COLLIN (p. 410) au sujet de la Metacineta mystacina, et presque à la même époque, dans une communication particulière, il me disait: < On trouve chez M. mystacina toute la gamme des transitions depuis la forme /ongipes de LIEBERKÜHN, BÜTSCHLI, etc., à celle très « brevipes > rencontrée par vous à Châtel >», 214 E. PENARD Est-il bien sûr, cependant, que cette extrême variabilité soit seule en cause, et qu'il ne se soit pas détaché d'un type primitif des formes spéciales, aujourd’hui fixées, et qui mériteraient d'étre considérées à part? Les Metacineta alata, acumi- nata, Stagnatilis, flexilis de STOKES, angularis et flos de MASKELL, n’étaient-elles pas autre chose que des formes éphémères de Ia variabilité? COLLIN lui-méme n’a trouvé que la variété breripes, et moi-même, après avoir récolté mcidemment, il y a 20 ans déjà — et alors que seuls les Rhizopodes n’occupaient — la var. longipes et rien d'autre, pourquoi dans ces 6 dernières années n’ai-je revu que la var. bre- vipes ? Pourquoi, dans les Sphagnum de Chatel-S'-Denis, en 1912, cette espèce se trouvait-elle uniquement représentée par une forme très petite, très élégante, si bien < brevipes > qu’elle était devenue sessile, et à 3 fentes en étoile ? 2 Fig. 49. — Metacineta mystacina. Pour ces raisons, ce n’est pas sans quelques réserves que je traiterai comme d'une Metacineta mystacina pure et simple cette variété brevipes dont j'ai fait l'étude à Florissant et qui correspond, semble-t-il, tout juste à la Metacineta acu- minata de STOKES. L'auteur américain, il faut le dire, a quelque peine à rendre claire la struc- ture de l'enveloppe: ; et si nous prenons BÜTSCHLI, SAND, BLOCHMANN, DELAGE et tant d’autres encore, nous trou- verons la méme diagnose, simplifiée et très claire en apparence, mais Imexacte en réalité, ÉTUDE SUR LES INFUSOIRES TENTACULIFÈRES 215 STOKES a eu le mérite de ne pas s’en tenir à une première observation, et de chercher à expliquer la structure en réalité très compliquée de la logette; il n’a pas trop bien réussi, parce qu'il n'avait pas très bien compris. Mes observations, je me hâte de le dire, restent bien insuffisantes encore, mais pourtant, elles me parais- sent de nature à jeter quelque jour sur la question; et peut-être une comparaison quelque peu triviale aidera-t-elle à la compréhension: Si nous nous en rapportons aux données habituelles, nous pouvons comparer la logette à un sac de papier, dont on aurait entaillé profondément le bord avec des ciseaux, pour obtenir en définitive une couronne à six larges dents; et ces dents, rabattues à l’intérieur et se regardant alors par leurs pointes, laisseraient entre elles six fentes en étoile. Fig. 50 —- Metacineta mystacina. En réalité, il en est autrement; le rebord n’est pas découpé à son ouverture, mais simplement plissé en dedans; et toute la structure de la Metacineta pourrait être comparée à celle d’un sac, d'une souplesse, d'une plasticité extraordinaires dans sa partie supérieure, et qu'une main très habile aurait d'abord un peu com- primé sur deux côtés opposés, pour replier ensuite en dedans le rebord tout entier, en disposant si délicatement les replis qu'il en résulte des < valves >» séparées par de profondes fissures; en même temps, les valves ne seraient pas égales (par le fait que la coupe transversale de l'enveloppe est ellipsoïdale); on en trouverait deux petites, triangulaires, et deux grandes, trapézoïdales, mais cependant, 11 y aurait six faisceaux de tentacules, deux d’entre eux plus élevés que les autres, et la figure schématique 5 pourrait en indiquer la cause: on y reconnait, vu d'en haut, à peu près le toit d’une maison, avec, à tous les points de jonction des lignes du toit, un faisceau de baguettes, soit 4 faisceaux aux angles latéraux et 2 au faite. Cet essai d'explication n’est certainement pas juste encore, mais il se rapproche de la réalité, tout au moins pour cette variété (AZ. acuminata de STOKES) sur 216 E. PENARD laquelle à porté mon étude ; il donne en tous cas une idée de l'extrême complication des replis, et si l’on ajoute que la pellicule d’enveloppe est si délicate qu'elle est sujette aux modifications temporaires les plus inattendues, on pourra comprendre pourquoi les individus, soit comparés les uns aux autres, soit orientés dans diffé- rentes directions, présentent des apparences si déconcertantes. Les fig. 1, 2 et 3, par exemple, ont été prises sur le méme individu: dans la fig. 4, nous en avons un autre, vu de trois quarts et d'en haut, et sous un aspect tres fréquent; dans cette figure, les lignes pomtillées indiquent les bords vrais des valves invaginées, tels qu’on les trouve en abaissant peu à peu l'objectif; ces bords mêmes sont quelque peu mobiles, et d'un instant à l’autre on les verra changer: : quant à la longue fente médiane, — Je faite du toit dont il à été question plus haut, — elle parait être libre, sans que la pellicule y ait éprouvé d’invagination. Fig. 51. — Metacincta mystacina. Ajoutons que cette structure si compliquée est caractéristique de Padulte ; l'individu tout jeune, et qui s’est fixé depuis peu, est d’une régularité parfaite, comme nous le verrons bientôt. « La reproduction >», dit COLLIN, « a lieu exclusivement par embryon externe formé à la face apicale du corps, puis S'échappant entre les valves, dès sa libé- ration. La prétendue «scissiparité », avec sécrétion immédiate d'une loge, décrite autrefois par GRUBER (1879) et acceptée par SAND (1901), ne représente bien cer- tainement que le développement anormal d'un embryon non bbéré et aussi en partie les stades mis à rebours de la conjugaison totale >. De son côté, BÜTSCHLI (p. 1926) dit simplement < Vermehrung durch freie Knospung; der Schwärmer anscheinend total bewimpert >». Ces appréciations demandent à être rectifiées, et nous allons revenir sur le sujet ; mais considérons tout d'abord la division: Je ne lai constatée que dans des cas assez rares, et toujours alors comme division égale, chacun des individus se couvrant de cils; ils sortaient l’un après lPautre, sous la forme de cette larve (fig. 7) dont nous reparlerons bientôt, Plus souvent, j'ai rencontré, à l’intérieur ÉTUDE SUR LES INFUSOIRES TENTACULIFÈRES 217 de logettes renflées, dilatées, soit un individu très gros, étranglé en son milieu, avec noyau allongé et en forme de $, en cours de division: soit 3 individus et quelques heures après 4 (fig. 6) soit même jusqu'à 8 individus, serrés les uns contre les autres, distendant énormément l’enveloppe commune, déployant par toutes les fentes — dis- posées alors sans aucune symétrie —- des faisceaux de tentacules, et complètement dépourvus de cils; mais je n'en ai pas vu partir un seul, et par exemple ce groupe de 4 masses bien distinctes, chacune avec sa vésicule contractile, que montre la fig. 6, est resté tel du 12 au 14 juillet, avec longs tentacules et plein de vie (ce jour-là, il m'a fallu l’abandonner). Assez souvent, j'ai pu assister à la transformation totale en individu cilié, avec production d’une larve identique elle aussi à celle que représente la fig. 7. Quant au bourgeonnement, je lai observé dans cinq ou six occasions dif- férentes ; une protubérance se montrait sur le corps plasmatique, grossissait, s’arrondissait, se séparait toujours plus du parent, et n'était plus unie à ce dernier que par un pont (fig. S); finalement le pont se coupait et l'embryon, dépourvu de toute trace de cils, allait se loger dans une poche toute prête pour le recevoir; cette poche, où plutôt cette nouvelle enveloppe, qui n’était autre qu'une portion de l'enveloppe si fine et si plastique de la mere, s'orga- nisait autour du jeune individu, lequel restait fixé sur le parent comme il Peût été sur tout autre corps étranger. C’est ici qu'il nous faut rappeler certains phénomènes sur lesquels GRUBER a le premier attiré l'attention, mais dont COLLIN à donné une explication différente de l’auteur allemand. < Un curieux bourgeonnement apical d'un adulte par un autre, avec sécrétion immédiate de la loge du bourgeon, aurait lieu selon Gruber (1879) chez Metacinela mystacina et aussi d’après SAND (1901) chez Paracineta divise et chez P. hvadiana. Aucun de ces trois exemples (hàâtons-nous de l'ajouter) n'a pu être suivi en entier sur le vif et SAND, en particulier, n'a jamais assisté à la Sépara- tion de l'individu jeune. Le fait s'explique fort aisément, car il s'agit ici sans doute... d’un bourgeonnement abortif, au cours duquel Pembryon,ne parvenant pas à se libé- rer, se développe sur place en adulte >. Sans exprimer moi-même d'opinion sur la signification du phénomène en tant que normal où anormal, j'attirerai l'attention sur les conclusions différentes aux- quelles arrivent les observateurs. STEIN parle d’embryons ciliés, qui resteraient à l'intérieur de l'enveloppe maternelle; GRUBER, semble-t-il, à vu des bourgeons api- caux secrétant eux-mêmes leur logette; et moi-même, j'ai assisté à des phénomènes de bourgeonnement avec remaniement de l’enveloppe maternelle, qui fournirait elle-même l'enveloppe du jeune individu. Dans la fig. 9, nous avons un kyste, le seul que j'aie observé; la logette, poin- 318 E. PENARD tue, paraissait fermée par le haut, avec valves appliquées les unes contre les autres: le kyste, sphérique, montrait une enveloppe externe, grisatre, couverte d’aiguillons courts et acérés; plus à l’intérieur, il semblait y avoir une enveloppe interne très fine. Un gros noyau n’était que tres peu distinct; une vésicule contractile fonction- nait encore, à intervalles très éloignés. Quant à la fig. 10, elle concerne un individu + dégénéré >. Au commencement denovembre, en effet, et sans cause appréciable, beaucoup des Metacineta semble - rent passer à un état maladif; le pied disparaissait peu à peu (mais pas toujours, et la fig. 10 en est la preuve), le corps s’arrondissait en boule, sans qu'il restât trace des angles et des pointes caractéristiques, et des lignes méridiennes apparais- saient, perlées, percées de petits trous, par lesquels sortaient les tentacules, dans Fig. 52. — Metacineta mystacina. la partie antérieure de la sphère. C'était là un Tentaculifère, nettement caractérisé, et dans lequel il était bien certainement impossible de reconnaitre la Metacineta mystacina, mais toute une série de passages fut peu à peu constatée et mes obser- vations ne me laissèrent aucun doute; c'était une transformation graduelle de l’en- veloppe anguleuse en une capsule sphérique, où si l’on veut, de la forme normale en une autre toute différente, sur laquelle il ne n'a pas été possible d’avoir des ren- seignements ultérieurs. Peut-être y fallait-il voir un phénomène précurseur d’un enkystement. Considérons maintenant lPembryon cilié: à l’origine, et dans le cours de la division, il semble bien que les rangées de cils, très nombreuses, forment une cein- ture régulière, mais plus tard une torsion se produit, en même temps qu'un allonge- ment de la larve; et cette dernière revêt alors une forme assez particulière (fig. 7): elle est allongée, convexe sur le dos, légèrement déprimée sur une face qu’on peut appeler ventrale, et qui montre en son centre une sorte d’ombilie, et les stries ciliai- ÉTUDE SUR LES INFUSOIRES TENTACULIFÈRES 219 res, contournées, un peu tordues, y dessinent sur les côtés des séries de lignes dia- gonales, qui, grâce à la transparence de la petite larve semblent se croiser entre elles. | J’ai pu suivre en plusieurs occasions les premières phases au moins de la for- mation de la logette ; l'observation en est des plus intéressantes, et COLLIN, qui les a étudiées également, n’exagère en rien quand il en parle comme d’une « métamor- phose féerique >», qui transforme dans l’espace de frois minutes une larve ciliée en un individu fixé, dressé sur sa tige, et à logette bien reconnaissable déjà. Mes obser- vations confirment pleinement celles de COLLIN, mais tandis que cet observateur à vu ces phénomènes se dérouler sur un individu examiné par le côté, je les ai suivis d’en haut, sur des larves qui venaient de se fixer sur le porte-objet (ou aussi d’en bas, sur des exemplaires attachés à la paroi inférieure du cover). Voici quelle est alors la marche des événements: la larve ciliée s’abat d’un coup, s’arrondit (fig. 11), les cils cessent de battre et semblent s'émietter en pous- sières ; en même temps l'embryon s'étale et l’on voit apparaitre dans une région centrale un petit grain brillant, qui grossit, et s’entoure d'un halo dont le bord va peu à peu rejoindre —- à vue d'œil — le disque ciliaire resté bien arrondi; ce grain, c’est le pied; ce halo, c’est le mucilage qui se dépose et durcit immédiatement en une pellicule d’enveloppe; et il a suffi d’une seule minute pour que cette pellicule ait rejoint le bord du disque primitif, et que de petits tentacules, radiaires, se soient déjà formés (fig. 12). Tout d’un coup, cependant, le plasma se rétracte, quitte les bords de l'enveloppe discoïde, sauf en six points différents sur lesquels il y reste attaché (fig. 13), et déjà on y voit six faisceaux de tentacules; enfin, presque en même temps, l'enveloppe s’étend à ses deux pôles pour se rétrécir sur les côtés; elle prend un aspect hexagonal-allongé (fig. 14 et 15, portion plus grossie) qui perdra cependant bientôt sa belle régularité (fig. 16); (lallongement n'est pas nécessaire; quelquefois, le contour reste exactement hexagonal et restera tel pendant des jours entiers). Toute cette transformation, reproduite par la fig. 11 à 16, n’a pris que quatre minutes de temps, mais plus tard, les événements marcheront beaucoup plus lentement. Ajoutons que tout en se développant en largeur, le petit être croissait en hauteur, et que si nous pouvions voir de coté l'individu représenté par la fig. 16, nous lui trouverions déjà la forme d’une coupe, à peu près deux fois aussi longue que large, telle que COLLIN l’a représentée à la p. 186 de son grand ouvrage. A partir de ce moment, mes observations ne m'ont rien montré de précis; sans doute, une déformation doit se produire, les deux pointes polaires, vrai- semblablement, s’allongeront plus que les autres en hauteur, et en même temps se rapprotheront du centre; mais c’est ce que je n'ai pas pu voir, et cela pour deux MÉM. SOC. PHYS, ET HIST, NAT, DE GENÈVE, VOL. 89 (1920). 98 2920 E. PENARD raisons : d'abord parce que, l’œil plongeant d’en haut (ou d’en bas) dans l’axe de l'animal, à peine à se rendre compte des changements produits en hauteur, ensuite parce que dans aucun des cas observés la construction de la logette n’est arrivée à son terme; les individus, emprisonnés sur lamelle évidée, fixés presque toujours sous le couvre-objet, et laissés à jeun, éprouvaient un arrêt de développement et jen ai conservé qui après trois jours, bien portants en apparence, se montraient tels encore qu'ils l’étaient devenus après les cinq premières minutes de leur exis- tence. Dans beaucoup d’entre eux, cependant, on remarquait un fait nouveau, et assez significatif: de chacun des faisceaux de tentacules, lesquels ne dépassaient guère en longueur le diamètre du corps, il s’en dégageait un, un seul, que l'œil pouvait suivre Jusqu'à une distance extraordinaire (maximum observé 240 y, pour 23 , de diamètre de l'animal), d’une finesse extrême, et terminé par un petit bou- ton brillant. On aurait pu croire que l'animal cherchait par là à étendre aussi loin que possible le rayon de son activité; mais il faut aussi faire la part de l’immobi- lité complète; tous ces individus étaient restés 24 heures et plus sous le couvre- objet, sans être aucunement inquiétés. Toutes ces observations ont été faites à Florissant, dans l'été de 1918; les individus y étaient extrémement nombreux, presque toujours attachés aux filaments d’une Spirogyra. Très voraces, ils se nourrissaient presque exclusivement du Stro- bilidium gyrans, souvent bien plus gros qu'eux-mêmes, et vidaient leur proie tout entière en une demi-heure. Dans les tentacules fortement élargis, on voyait courir les petits grains nutritifs, qui, arrivés au niveau du corps, subissaient un temps de retard, comme arrêtés par une constriction du tube, puis se précipitaient dans le cytoplasme. Quant au Strobilidium, brusquement immobilisé dès le premier con- tact, il se transformait peu à peu en un sac d'autant plus gonflé qu’il perdait plus de son contenu, mais la vésicule contractile continuait à battre faiblement, même quelque temps après la mort. Après incorporation d’une proie si volumineuse, la Metacineta, énormément grossie, distendait son enveloppe, et c’est alors surtout que je l'ai vue se diviser. Urnula epistylidis CLar. et LACHM. 1858-60. Logette urcéolée ou pyriforme-conique, large, tronquée en avant et à bordure antérieure se repliant en dedans pour ne laisser à la face apicale qu’une fente plus ou moins étroite, À sa pointe inférieure cette logette s’étire en un pied très court, creux, dirigé obliquement vers le point de fixation, et reposant sur un petit disque adhésif. Le corps, arrondi, est suspendu dans la logette dont il oceupe la plus grande partie; sur l’un des côtés de la face apicale prennent naissance de 1 à 4 ten- ÉTUDE SUR LES INFUSOIRES TENTACULIFÈRES 29/1 tacules grisätres, cendrés, pleins, non capités, souvent renflés en massue vers leur extrémité antérieure, très mobiles, se rétractant, s’allongeant et ondulant conti- nuellement. Noyau sphérique, central. Vésicule contractile unique, dans la partie postérieure du corps. Longueur de la logette 24 à 50 y. « Les Urnula n'avaient été trouvées, ou au moins reconnues, par les anciens auteurs que sur le style des colonies d’£pistylis… Des travaux plus récents ont fait connaitre la présence d'Urnula (très probablement identiques comme espece à U. Fig. 53. — Urnula epistylidis. epistylidis) vivant en ecto-parasites ou ecto-commensaux sur d’autres Acinètes : Dendrosoma radians, Metacineta mystacina, peut-être aussi Tokophrya quadripar- tita ? » Tels sont les termes dans lesquels COLLIN s'exprime au sujet de cette espèce, qu'il semble d’ailleurs n'avoir pas observée personnellement. Pour ce qui me con- cerne, c'est sur Trichophrya epistylidis que je l'ai trouvée, à Pinchat, au printemps de 1918, et jamais sur les Æpistylis qui étaient pourtant abondants. Ajoutons à titre de curiosité que la Trichophrya, malgré son nom spécifique, se montrait elle-même toujours libre, fixée indifféremment à tout au monde, tout sauf lZprstylis ! La forme de la logette, telle au moins que je la connais (d’après CLAP. et LACHM. comme d’après ENGELMANN in BÜTSCHLI, Protoz. pl. 77, fig. 2 a à c) n’a jamais été représentée d’une manière exacte. On la figure trop étroite, presque tubu- laire, rétrécie et non pas élargie à son bord; en réalité sa forme est celle d’une clochette, ou plutôt, vue par sa face large, elle rappellerait la griffe d’un félin (fig. 1, 7); par sa face étroite, elle varie un peu d'aspect, simplement conique, ou ellip- tique-acuminée, suivant l'orientation (fig. 4). MÉM. SOC. PHYS. ET HIST. NAT. DE GENÈVE, VOL. #89 (1920). 28* 299 E. PENARD A son bord libre, la paroi de la logette n’est pas simplement découpée, elle se réfléchit vers l’intérieur, et STEIN était dans le vrai quand il disait qu’« à l’origine, la paroi de la coque se rabat vers l’intérieur, se continue avec la pellicule du corps et tient celui-ci suspendu librement dans la capsule »: COLLIN, en citant ainsi le texte, ajoute: < Si ce dernier détail, dont les anteurs suivants (SAND 1901, HIcK- SON et WADSWORTIH 1909) ne font plus aucune mention, était reconnu exact, on devrait en conclure que Penveloppe d'URNULA est une « loge >» et non une < coque >. Ce détail est effectivement exact, comme il en résulte de mes observations, faites dans l'ignorance absolue des travaux de STEIN comme de ceux de HICKSON et WADSWORTH, que je n'ai connus que plus tard; mais la cupule ne n'a paru que rabattue vers l’intérieur, sur ses deux côtés larges, de manière à former deux replis ou lèvres minces, qui laissent entre eux une fissure, par où sortent les tentacules. Ce sont ces tentacules qui ont le plus attiré l'attention des observateurs. CLA- PARÈDE 6t LACHMANN, qui d'ailleurs ne reconnaissaient pas un Tentaculifère dans leur Urnula, les ont déjà fort bien décrits; ils les ont vus s’agiter, s'étendre, se rétracter, y ont distingué les petits granules de surface < constamment en mouve- ment comme dans les pseudopodes des Rhizopodes; on les voit couler pour ainsi dire, tantôt dans un sens tantôt dans l’autre ». HICKSON et WADSWORTH ont exa- miné ces pseudopodes avec som: «They are relatively very long and flexible », disent-ils, < moving actively with curious serpentine curves as if in search of food. They do not terminate in a sucker.. When partly retracted or not fully extended they show à spiral marking, and terminate in à spindle-shaped, or sometimes bluntiy club-shaped extremity >. Mes recherches confirment absolument celles des auteurs anglais; mais sur quelques points Spéciaux. j'aurais certains détails à ajouter. Le plus souvent, un seul tentacule est en vue: ou bien, après un instant on en verra se former un second, puis un troisième, et jusqu’à quatre ou peut-être plus. Ils partent tous, non pas des cotés du corps et un peu en arrière de la face apicale, comme Pont figuré CLAPAREDE et LACHMANN, et non plus < from the distal surface or apex >» comme le veulent HICKSON et WADSWORTH; mais d’une région spéciale, sur l'un seulement des cotés, où 1ls constituent, lorsqu'ils sont rétractés, une masse allongée, couchée sur la face apicale (fig. 7) sans se confondre avec cette face même; masse dans laquelle tous les tentacules sont — ou paraissent être — fondus en un seul magma. De ce point latéral, le tentacule s’allonge, jusqu’à atteindre 3 fois la longueur de l'animal: il est mou, plein, parfois d’une méme épaisseur de la base au sommet (fig. b), plus souvent terminé par un élargissement fusiforme, épais (fig. 6), sur lequel on voit des grumeaux, des grains pales en saillie sur la surface. Cette partie antérieure et fusiforme du tentacule est très mobile, s'allonge et disparait en ÉTUDE SUR LES INFUSOIRES TENTACULIFÈRES 225 tant que renflement spécial, puis se renfle de nouveau; elle peut agir seule, sans que le reste du tentacule participe au mouvement, et cette pointe spéciale, lorsqu'elle est à proximité de débris, semble les fouiller et y prendre quelque chose, à la manière de la langue d’un fourmilier. Le tentacule tout entier peut également se ramasser sur lui-même, devenant plus épais et plus raboteux à mesure qu'il se rétracte (rarement en spirale) et finit par n'être qu’un moignon, lequel à son tour disparait complètement dans la masse générale, semble si bien se fusionner avec le magma dont il à été parlé plus haut, qu'il n’en reste plus aucune trace. 7 Pts à QI 7777 & FN) T7 KE \ Ne Fig. 54. — Urnula epistilidis. Déployés, les tentacules se démènent comme les longs bras d’un poulpe, décri- vant par exemple une demi-circonférence en une seconde de temps : ou bien, ils res- tent immobiles, recourbés vers leur hôte ou la «tête > plongée au milieu des débris. La fig. 3 en représente un qui, étalé sur un filament végétal en décomposition, S'y était positivement élargi en raquette, et s’y montrait couvert de granulations. Aucun observateur n’a jamais vu de canal axial, n’a constaté de circulation de grains à l'intérieur, et bien que mon attention ait été attirée tout spécialement sur ce point, je n'ai jamais rien découvert qui permit une assimilation avec un tentacule d'Aci- nétien; toujours la pointe est fermée, jamais on ne la voit s’ouvrir: et en définitive, mes observations m'ont conduit à formuler ma pensée en ces termes: Si nous ne connaissions rien des Tentaculifères où si F'Urnula epystilidis était seule à repré- senter la classe tout entière, les traités de Zoologie pourraient bien donner sur cet organisme les renseignements suivants: «Ces Protozoaires agissent à la maniere des Fourmiliers, plongent leurs tentacules dans les débris, et les retirent chargés de grains. » Tout cela serait faux... probablement; mais l'Urrula se nourrit fort bien, produit coup sur coup jusqu'à 8 embryons presque à moitié aussi gros qu'elle même, et reprend à chaque fois son volume; alors, comment? 29%: E. PENARD Il nous reste à examiner les phénomènes de reproduction: d’après BÜTSCHLI, comme d’ailleurs d'après CLAPARÈDE et tous les anciens auteurs, elle se fait < durch freie Abschnürung einer ziemlich ansehnlichen, vorderen Knospe, welche total bewimpert sein soll >: suivant HICKSON et WADSWORTH, l'individu se divise par fission oblique en deux parties, l’une généralement plus grande que l’autre. La plus petite se couvre de cils et devient holotriche, puis s'échappe; la plus grande reste, ou peut rester, dans la logette. Ce serait là, en définitive, le mode de division des Podophrya, avec embryons externes : et cependant, je dois avouer que toutes mes observations semblent mon- trer autre chose, des embryons internes, formés à la manière de ceux par exemple des Tokophrya. Indubitablement, lembryon se détache du parent, et reste libre dans la logette pendant un temps assez long: mais si l’on suit le phénomène dès ses débuts, et si lon examine alors l'animal par la face apicale (fig. 9), on verra tout d'abord cet embryon inclus dans le cytoplasme, et dans une région latérale de ce dernier, et on lui reconnaitra une large ceinture de cils. Plus tard, cette mince couche de substance maternelle, cette nappe fine qui l’a séparé longtemps du vide de la logette, se déchirera, se rabattra sur les côtés (fig. 8), et l'embryon sera libre; mais pendant un instant encore on le verra s’agiter près du parent, avant de s’élancer au dehors. «< L'embryon d'Urnula Epistylidis >, dit COLLIN à la p. 149 de son Mémoire, «parait avoir sa place à côté du précédent (Metacineta mystacina), par sa forme ovoïde et ses rangs de cils obliques qui couvriraient, dit-on, toute la surface du corps. HICKSON et WADSWORTH ont revu récemment cette espèce (1909), mais pour ce qui concerne la structure de embryon, ils s’en tiennent aux données antérieures de CLAPARÈDE et LACHMANN dont ils reproduisent les figures sans y rien ajouter. Elles sont malheureusement tout à fait insuffisantes ». Mais Pembryon d'Urnula n’est pas holotriche: plutôt se rapprocherait-il de celui des Tokophrya (fig. 11); seulement, les lignes de cils, très nombreuses (7 ou 8 probablement), diagonales, lui donnent une apparence particulière; et de plus, au lieu de faire le tour de la larve en une courbe continue, elles se rejoignent sur l’une des faces (fig. 12) en faisant entre elles un angle plus ou moins fermé. A l’époque de mes observations, où toutes ces Urnula se voyaient fixées, par- fois au nombre de 5, 6, ou plus encore, sur les Trichophrya qui ne les molestaient d’ailleurs en aucune facon, les naissances se produisaient coup sur coup, et d’une seule Urnula j'ai vu sortir jusqu'à 8 embryons, mais, il est vrai, dans l’espace de 2 jours. Ces larves se fixaient après un instant très court, tout près de la mère ou d’une autre Urnula, et se construisaient, en 4 heures de temps, une logette complète; la fig. 10 représente un jeune individu qui pouvait être agé d’une demi-heure, et dont ÉTUDE SUR LES INFUSOIRES TENTACULIFÈRES 9295 la coque, très basse et que l'animal moulait tout en grimpant, est arrivée à la moitié de sa hauteur normale ; dès ce moment, il pouvait y avoir un tentacule, car j'ai vu d'autres individus, tout aussi jeunes, qui le possédaient déja; mais tout d’abord, il n'y en à qu'un, qui peut être déjà tres long. HiCKSON et WADSWORTH ont assisté aux toutes premières phases de la fixation, qui m'ont échappé, et y ont relevé un fait très intéressant, la production de deux ou trois tentacules capités très petits, mais dont l’existence n’était que de deux ou trois minutes, et qui disparaissaient plus tard. Le fait n’a rien d’anormal en lui-même; cette production temporaire de tentacules très petits et fugaces, tout autour des larves fixées, n’est pas très rare, et nous l'avons plusieurs fois constatée (Dendrosoma radians, etc.); mais dans l'Urnula, où les tentacules définitifs ne sont pas des tenta- cules vrais, au sens donné à ce mot dans les Acinètes en général, l'observation des auteurs anglais est d’un intérét tout particulier. Physaliella collini PENARD 1920. Fig. 55. — Physaliella collini. Corps ovoïde ou plus souvent revétant la forme d’une outre, dépourvu de ten- tacules mais étiré à son extrémité antérieure en un prolongement tubulaire très court qui perce l'enveloppe de l'hôte (Callidina) et s'étale au dehors. Cytoplasme très pur, homogène ou renfermant quelques petits grains brillants. Noyau sphérique, très volumineux. Pas de vésicule contractile, ou bien elle n’est que temporaire. Le corps produit, dans l’intérieur même de l'hôte, par bourgeonnements successifs, des agglomérations d'individus. Longueur 30 à 50 ». Parasite dans Calhidina socialis. 2926 E. PENARD Cette espèce à fait l’objet d’un mémoire spécial (PENARD 1920), auquel je ne puis que renvoyer; mais il ne sera pas inutile de résumer ici en quelques lignes les caractères de ce Tentaculifère particulièrement curieux. Il est curieux, en effet, et même étrange, par le fait qu'on y chercherait en vain, à aucune époque de son existence, la moindre trace de tentacule; et les em- bryons seuls, dont les caractères sont nettement ceux des Acinétiens, peuvent nous faire reconnaitre le groupe auquel nous devons rapporter l’animal. C’est un parasite, un parasite interne, et qui ne se montre que dans la Calli- dina socialis, commensale elle-même de l Asellus aquaticus. On y voit sous la forme de vésicules (fig. 1), plongées dans le parenchyme de l'hôte (fig. 3), et communi- quant avec le dehors par un canal ou prolongement tubulaire (fig. 4), évasé et strié à son ouverture (fig. 10). Très souvent, on trouve le parasite en véritables colonies, où les individus dérivent les uns des autres par bourgeonnement, et vont chacun percer leur orifice particulier dans la paroi du Rotateur. Dans la fig. 11, par exemple, nous voyons (d'en haut) un bourgeon unique, soudé encore à la masse prinei- pale; dans la fig. 12, c'en est un autre, relié au parent par un pont qui se rompra plus tard; dans la fig. 6, trois individus sont réunis en un groupe compact. Considérons de plus pres Fig. 56. — Physaliella collini. l'individu solitaire (fig. 1). Dans un plasma très pur, nous trou- vons un grand noyau sphérique, et tout près, un micronucléus, très pale et rare- ment visible. Nous n'y voyons pas de vésicule contractile, aucune du moins qui soit normale pour l'individu ; mais très souvent, il en existe une, très petite, au voisi- nage d’un sac ou d’une cavité creusée dans le cytoplasme et reliée avec l'extérieur par le canal dont il a été question plus haut. Ce sac, c’est une cavité incubatrice, et la petite vésicule contractile — qui d’ailleurs fonctionne normalement mais à mter- valles éloignés — n'est là, semble-t-il, que grace à la présence de la cavité incu- batrice elle-même. Sur la paroi de cette cavité on voit se dessiner, toujours dans le sens longitu- dinal, deux stries annulaires, puis deux autres, et toutes se couvrent bientôt de cils (fig. 1, 4, 5, etc.). Plus tard apparait dans la cavité même une protubérance, sur- montée d’un gros bouton brillant (fig. 9); cette petite masse grandit, se renfle entre ÉTUDE SUR LES INFUSOIRES TENTACULIFÈRES 297 les sillons, et bientôt les cils battent tout autour de la protubérance en longues ondu- lations. Enfin, c’est un embryon, qui s'échappe par l'ouverture tubulaire, en empor- tant avec lui la ceinture de cils. Il a la forme d’un œuf de poule (fig. 13); en avant, on y voit un large disque bleuatre, l'ancien bouton brillant; puis viennent quatre, ou peut-être cinq, lignes circulaires revêtues de longs cils, dont quelques-uns, se détachant des autres, sem- blent trainer en arrière. À l’intérieur, on trouve un gros noyau cendré, puis, en arrière, une vésicule contractile, bien normale cette fois, en rapport sans doute avec la vie libre que la larve va mener quelque temps. Malheureusement, je n’ai pu suivre aucune de ces petites larves ciliées ; mais il n'est arrivé d'en trouver de tout récemment fixées, sur le Rotifère même dont elles étaient sorties. L'une d'elles à pu être examinée quatre jours, pendant lesquels on vit peu à peu son contenu passer dans le corps du Rotateur et sy orga- niser en individu sacciforme normal (v. loc. cit.). J'ai trouvé la Physaliella collini dans les deux stations où j'ai pu récolter l’Asellus aquaticus, c'est-à-dire à la Pointe-à-la-Bise sur les rivages du Léman, et sur les bords du Rhône à la Jonction, tout près de Genève. 298 E. PENARD LISTE DES PRINCIPAUX OUVRAGES CONSULTÉS ANDRE, E. Catalogue des Tnvertébrés de la Suisse. Infusoires. Museum d’hist. nat. de Genève, fase. 6. 1912, AWERINZEW, S. Astrophrya arenaria n. g. n. sp. Zool. Anzeiger, vol. 27, 1904. 3ürscuLi, O. Ueber den Dendrocometes paradoxus, Zeit. f. wiss. Zoot., Bd. 2$, 1877 Bürscazr, O. Bronn's Klassen und Ordnungen des Thierreichs, Bd. 1, Protozoa, Abth. 3, Infusoria, 1889. Cozun, B. Quelques remarques sur Tokophrya cyclopum, Arch. Zool. expér. (4), t. 8, notes et revue, 2, 1908. Cou, B. Etude monographique sur les Acinétiens, Arch. Zoo. expér., t. 48, n° 5, et t. 91, n° 1, 1911 et 1912. Decace et Hérouarp. Trailé de Zool. concrète, vol. 1, 1896. Eisuoxp. Zur Frage des Saugmechanismus der Suctorien, 2001. 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Solenophrya calyciformis. LES INFUSOIRES TENTACULIFÈRES INDEX Solenophrya dubix. Solenophrya flavescens. Solenophrya massula. Solenophrya micraster. Sphaerophrya doliolivm. Sphaerophrya natans. Sphaerophrya pusilla. T'hecacineta caepula. Tokophrya actinostyla. Tokophrya cyclopiom. Tokophrya glomerata. Tokophrya gracilipes. Tokophrya lennarum. T'okophrya muscicola. Tokophrya quadripartita. Trichophrya epistylidis. Trichophrya lycoperdon. Trichophrya melo. Trichophrya myriophylli. Trichophrya variabilis. Urnula epistylidis. ed bd bd OO OO Œ OO 1 © HR © OU SO ROOMS OT : » Ce ve” RL é4 DA cs : " - mr a —— ——————————— PUBLICATIONS DE LA SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE ET D'HISTOIRE NATURELLE DE GENÈVE La Société peut disposer de collections complètes de ses Mémoires. (Tomes 1-38 et volume du centenaire.) Pour traiter, s'adresser au secrétaire des publications. (Adresse de la Scciété : M. le secrétaire des publications de la Soc. de physique, P. A.: au Museum d’hist. naturelle, Genève, Suisse.) Comptes rendus des séances de la Société (in-$°). Tomes I-XXX VI (1884-1919). Prix Fr.35 Liste des publications des membres de la Société (1883) in-8° avec supplément (1896) PIX UE nas À RDA ds Es gr tte M NE ERNEST Er D Imprimerie Albert Kundig, Genêve (Suisse). JUN 42 1921 MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE ET D'HISTOIRE NATURELLE DE GENÈVE Volume 39 FASCICULE 5 RAPPORT PRÉSIDENTIEL POUR L'ANNÉE 1920 par M. J.-L. PREVOST ÉTUDE DU COLMATAGE pu Var bes Dix par Raoul BOISSIER REcHERCHES sur UN cas D'HÉREDITÉ © SEX-LINKED », LA DrosobuiLe À ŒIL € BARRED » par Emile GUYÉNOT Professeur à l'Université de Genève. GENEVE GEORG & Cie BALE et LYON même maison. Prix : Fr. G TABLE DES MATIÈRES DU FASCICULE 5, VOLUME 39 Pages Rapport présidentiel pour l’année 1920, par M. J.-L. Prevosr . . . . . . . . 281 Etude du Colmatage du Val des Dix, par M. Raoul BoissiER . . . . ; + 255 Recherches sur un cas d'Hérédité « sex-linked », la Drosophile à œil « Dos », par ; 261 ME MIeCGUTYÉNOTAE NE Ta CNE MÉMOIRES u DE LA SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE ET D'HISTOIRE NATURELLE DE GENÈVE VOLUME 39, FASCICULE 5. RAPPORT PRÉSIDENT DE LA SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE D'HISTOIRE NATURELLE DE GENÈVE POUR L'ANNÉE 1920 PAR J.-L. PREVOST MESSIEURS ET CHERS COLLÈGUES, L'année 1920 s’est malheureusement signalée par la perte de plusieurs de nos collègues les plus distingués, soit parmi nos membres ordinaires, soit parmi nos membres honoraires. J'aurai à retracer la vie scientifique de ces savants. Nous avons d’autre part plusieurs recrues d'hommes qui se sont fait connaître par leurs œuvres. La fréquentation de nos séances à été relativement faible comme le nombre des communications (27). Il est facheux de constater que chaque année, le nombre des communications à notre Société tend à diminuer comme la fréquen- tation de nos séances. Cela provient, il est vrai, surtout de ce que nombre de sociétés plus spécialisées que la nôtre sont nées à Genève, groupant autour d'elles MÉM. SOC. PHYS. HIST. NAT. DE GENÈVE, VOL. 89 (1921). 29 292 RAPPORT DU PRÉSIDENT les chimistes, les botanistes, les entomologistes, les médecins, ete. Si la division du travail peut provoquer une activité scientifique plus grande, ces diverses créations ne rendent pas notre société superflue, Comme le faisait remarquer M. le Prof. Claparède dans son rapport présidentiel (1915), plus que jamais au contraire, il est nécessaire d'avoir à coté des associations spécialisées un organe central, où les hommes appartenant aux disciplines les plus diverses, puissent se rencontrer et maintenir ces liens qui Justement, en raison de l’inévitable division du travail, risqueraient de se dénouer. A cette occasion, nous recommandons à nos collègues de vouloir bien annoncer de leur propre chef les communications qu'il serait de leur intérêt de publier, pour contribuer au bon renom de nos publications. Nous avons, récemment encore, reçu une preuve de l'intérêt qu'on porte à l'étranger à nos travaux dans le fait que nous avons reçu une demande d'échange et une demande d'achat de la série complète de nos mémoires. La Société helvétique des Sciences naturelles s’est réunie à Berne le 4 juil- let 1920. Vous avez délégué à son sénat M. Brun et comme suppléant M. Collet. M. Brun souffrant, à été suppléé par M. Collet. À cette séance a été discutée la question d'adhésion de la Société helvétique au Conseil international de Recherches. Après en avoir référé au Conseil fédéral et avec son consentement, le Sénat de la Société helvétique des Sciences naturelles accepte l'invitation reçue et adhère au Conseil international de Recherches. Il considère que cette nouvelle organisation contribuera largement au progrès scientifique et qu'elle marque un premier pas vers le rétablissement de la collaboration internationale. Il espère fermement que le Conseil international de Recherches réunira comme son nom l'indique, le plus tôt possible, tous les pays où la science est en honneur. Dans cet ordre d'idées, la Société helvétique des Sciences naturelles, tout en déclarant son adhésion, se réserve pleine liberté dans ses relations avec les institutions scientifiques, les sociétés et les savants appartenant à des pays qui ne font pas encore partie du Conseil international des Recherches. Notre Comité de publication s’est réuni cinq fois. Il a eu à s’occuper des publi- cations de M. Raoul Boissier, sur les nappes souterraines de l’Arve et de M. Eugène Penard sur les infusoires tentaculifères. Ces travaux constituant avec le rapport présidentiel pour 1919 de M. Carl les fascicules 3 et 4 du volume 39 de nos Mémoires. Le Comité continue à étre en relations avec la famille de feu Paul Choffat, à propos de certains travaux du défunt dont il est désirable d'assurer la publica- tion. Nous rappellerons à ce propos que Paul Choffat a légué à diverses institu- POUR L'ANNÉE 1920 038 tions genevoises une importante collection de cartes topographiques et géologiques qui pourront rendre de grands services aux personnes intéressées. L’exécution de la carte du canton de Genève à l’échelle 1/12500 par le général Dufour, est en cours d'exécution. MM. Kümmerly et Frey ont bien voulu entreprendre la publication à leurs risques et périls. Ils ont passé une convention avec la Société de Physique conférant à celle-ci la direction scientifique du travail. Le Département des Travaux publics a bien voulu se charger de faire le rapport du cadastre actuel. On prévoit l'éventualité de publier deux cartes, l’une physique donnant seulement la topographie et les cours d’eau avec l'indication abrégée des noms de localités, l’autre complète. Les courbes de niveau sont en noir, les eaux en bleu et la planimétrie en brun foncé. La carte comprend 16 feuilles dont 2 de titres. Les feuilles 7, 10, 11 de la carte physique sont prêtes et le report de la plani- métrie pour la feuille 7 est en cours d'exécution à Berne. La réduction photogra- phique à l’échelle de 1/12500 des 900 feuilles au 1/1000 et au 1/500 du cadastre est terminée. La feuille 11 portant la ville avec ses anciennes fortifications, Sera publiée dans sa forme originale. L'éditeur désire terminer toute la publication à la fin de 1921. M. Charbonnier, ingénieur cantonal, a demandé à votre Président si la Société de Physique serait disposée à céder la jouissance du petit pavillon qu'elle à ins- tallé à l'Observatoire pour un sismographe qui depuis plusieurs années n’est plus utilisé, afin d'y installer éventuellement un service de télégraphie sans fil chargé de la réception des dépêches concernant la météorologie et la circulation aérienne. Après examen de la question, M. le Directeur de l'Observatoire étant d'accord, nous avons accepté la chose tout en faisant des conditions relatives au transport du sismographe dans un local approprié, et à son rétablissement si le service de télégraphie sans fil était supprimé. La question est d’ailleurs restée en suspens jusqu’à nouvel ordre. Votre Président à été invité par la Société de Géographie, le 10 décembre, à une séance solennelle en l'honneur du D" Friedtjof Nansen à l’Athénée. Il s'y est rendu pour représenter notre Société. M. Louis Reverdin, docteur ès-sciences, à été nommé trésorier, en remplace- ment de feu Augustin de Candolle. Ont été élus membres honoraires: M. A. Brachet, prof. d'anatomie à Bruxel- les; M. A. Désiré Walker, prof. de physiologie à Londres: M. Yves Delage, prof. à la Sorbonne; MM. Peach et Horne, géologues, à Edimbourg. 23/4 RAPPORT DU PRÉSIDENT Membres ordinaires: M. Pierre Revilliod, zoologiste ; M. Raymond Gautier, physiologiste; M. Louis Reverdin, anthropologiste ; M. Maurice Cérésole, chimiste ; M. Swigel Posternak, docteur en médecine. Nous avons à déplorer la mort de plusieurs de nos collègues. Parmi les mem- bres ordinaires, M. le prof. Théodore Flournoy, Genève; M. Augustin de Candolle, Genève; M. Emile Ador, Genève; M. Emile Burnat, Vaud; M. le prof. Béraneck, Neuchâtel; M.le docteur David Sulzer, établi à Paris; M. James-M. Crafts, prési- dent de l’Institut technologique de Boston. En outre, M. le prof. Righi, Bologne, M. le prof. Norman Lockyer, Londres; M. le prof. Yves Delage, Paris, membres honoraires. M. Georges Darier, membre associé libre, à donné sa démission. Vous êtes appelés ce soir à désigner le vice-président et deux membres du comité de publication pour 1921; M. Collet, qui avait été nommé l’an dernier, à préféré céder son tour de président à votre rapporteur et à être porté ainsi pour l’année 1921. Nos trois secrétaires et notre trésorier ont bien voulu consentir à rester à leur poste. NOTICES BIOGRAPHIQUES AUGUSTIN DE CANDOLLE (1868-1920) A. de Candolle fut membre de la Société de Physique depuis 1900. Richard-Emile-Augustin de Candolle, second fils de Casimir de Candolle et d’Anna-Mathilde Marcet, naquit le 8 décembre 1868 à Watson on Thames (Angle- terre). Après avoir fait ses premières études à Genève, il fut envoyé par son père en Angleterre où les de Candolle avaient depuis longtemps des attaches de famille puisque l'arrière grand-père maternel d’Augustin, Alexandre Marcel, était anglais quoique d’origine genevoise. Il entra en 1883 à Rugby et resta dans cette école jusqu’en 1887 dont il sortit en très bon rang. Après un séjour à Francfort-s/M, il suivit ses études de droit à Heidelberg et à Leipzig de 1890-1893. De retour à Genève, il se voua à la botanique suivant les goûts traditionnels de sa famille depuis quatre générations. Son mariage avec M1 Louisa de Saugy en 1895 le fixa définitivement à Genève. Comme ceux de ses devanciers, les travaux d’Augustin de Candolle ont été principalement orientés vers la botanique systématique. Son pre- POUR L'ANNÉE 1920 239 mier mémoire dans ce domaine était consacré à l’étude d’une collection faite par Mocquerys sur la côte orientale de Madagascar, dans cette étude de Candolle montrait qu’à côté de la systématique, il ne perdait pas de vue les problèmes que soulève « l'insularité » ancienne de Madagascar. La présence à l’Herbier de Candolle d’une grande série de plantes rapportées du Tonkin par Balansa amena ensuite Aug. de Candolle à s'occuper de la flore tropicale si riche et si variée, qui caractérise la péninsule indo-chinoise. Dans plusieurs mémoires qu'il publia, il décrivit un bon nombre de types nouveaux intéressants. La connaissance de Tiliaires et des Elaeocarpies l’amena à collaborer aux travaux de M. Hochreutiner sur l'Insulinde et à donner à M. Elmer une utile révision des Elaeocarpus des Iles Philippines. Dans un domaine différent, on doit à A. de Candolle un intéressant mémoire sur la biologie des capsules monospermes (1908) dans lequel il discute avec clarté l'interprétation biologique de ces capsules. On peut en dire autant de l’article sur la parthénogénèse chez les plantes d'après des travaux récents (1905), dans lequel de Candolle offre des qualités de lucidité, d’objectivité, de pondération dans la discussion de cette question. Appelé dès Le 1% janvier 1912 aux fonctions de Consul britannique à Genève, de Candolle ne put se consacrer alors à ses recherches botaniques et dut réserver toute son activité à ses hautes fonctions consulaires. Pendant huit années, il les remplit avec conscience et la compétence que lui donnaient ses connaissances juridi- ques. IT se montra un administrateur de premier ordre pendant la période difficile de la guerre. Nombreux sont ceux qui ont eu recours à lui et qui lui gardent un reconnaissant souvenir des services rendus. Bien avant de devenir Consul, Aug. de Candolle s’est fait apprécier par ses qualités d'administrateur. Il a rempli pendant plusieurs années les fonctions utiles et ingrates de trésorier de la Sociéré de Physique et d'Histoire Naturelle qu'il a présidée en 1914. Au comité des Archives des Sciences physiques et naturelles, 11 a rendu d’éminents services. Enfin il a présidé la Société de Botanique de (renève en y faisant de fréquentes communications sur des sujets très divers. Il a manifesté à maintes reprises son intérêt pour l'Université et diverses autres institutions genevoises. Il s’est aussi vivement intéressé aux réunions de la Société helvétique des Sciences naturelles et de la Société de Botanique, s’associant à son père dans les réceptions qu'il offrait à ces Sociétés. A. de Candolle avait l'intention de se consacrer à la continuation de l’Herbier 236 RAPPORT DU PRÉSIDENT et de la bibliothèque qui lui est attenante, suivant ainsi la tradition de sa famille depuis quatre générations. La mort survenue le 9 mai 1920 l’a malheureu- sement empêché de donner suite à ses projets !. THÉODORE FLOURNOY (1854-1920) Théodore Flournoy fut membre de la Société de Physique dès 1890. Théodore Flournoy est né à Genève le 15 août 1854. Il y mourut à la suite d’une longue maladie, le 5 novembre 1920. Sa famille paternelle était originaire de la Champagne, elle avait acquis la bourgeoisie de (renève au début du XVII: siècle. Sa mère était sœur du professeur Edouard Claparède, le savant naturaliste bien connu, pour lequel il conserva un souvenir toujours vivant et dont il partageait la curiosité scientifique, la précision et la passion désintéressée pour la vérité. Entré à l’Académie de Genève en 1871, Flournoy s’inscrivit d’abord à la Faculté des Sciences, prit son baccalauréat ès-sciences mathématiques, puis passa un semestre à la Faculté de Théologie où il s’initia à l'étude de l'Hébreu. ITse rendit ensuite en Allemagne pour y étudier la médecine, à Fribourg en Brisgau, puis à Strasbourg. C’est dans cette Université que, élève de von Reckling- hausen, il passa une thèse importante et bien connue, intitulée Contribution à l'étude de l’embolie graisseuse, à une époque où cet accident des fractures était presque ignoré. Se rendant à Leipzig, le jeune docteur s’adonna avec passion à l'étude de la philosophie, où les cours de Wundt attirèrent son attention sur une science toute nouvelle, la psychologie expérimentale ou psychologie physiologique comme on l’appelait alors. L'œuvre de Kant semble avoir été décisive pour sa pensée. La distinction radicale que Flournoy, d’après Kant, à toujours faite entre le croire, attitude essen- tiellement personnelle et morale fondée sur des jugements de qualité et de valeur à l'endroit des suprêmes réalités inaccessibles à la raison discursive et le savoir, organisation des phénomènes dans les formes indifférentes, amorales, imperson- nelles de la pensée scientifique, à inspiré tout son enseignement. Elle à été le fil d'Ariane qui lui a permis de se hasarder d’un pas sûr, et sans se perdre jamais dans les domaines embrouillés de la psychologie de la religion, du spiritualisme ou des phénomènes dits Supra-normaux. ! Extrait d’une nécrologie due à M. J. Briquet. POUR L'ANNÉE 1920 287 Après Leipzig et un séjour à Paris, Flournoy revint définitivement à Genève en 1879. En 1885 il s’inserivit comme privat-docent à notre Université et y professa un cours sur la philosophie de Kant. L'hiver suivant son cours porte sur l'Histoire de la philosophie des sciences. En 1888 il inaugura son enseignement de Psychologie physiologique et expose magistralement dans un opuscule, qui est un petit chef d'œuvre, quels sont les principes de cette scinee nouvelle (Métaphysique et psychologie. Genève, 1890, 2e édition, Genève, 1919). Il yimontre notamment que ses progrès dépendent de Son émancipation de la métaphysique et de l’admission du principe du parallélisme psycho-physique qui assure à la psychologie la neutra- lité philosophique dont elle a besoin pour accomplir son programme positif. Cet ouvrage eut beaucoup de retentissement ; on y admira la rare clarté rehaussée de verve et d'humour avec laquelle son auteur avait exposé les problèmes les plus ardus et indépendance d'esprit dont il avait fait preuve. En 1891 une chaire extraordinaire de psychologie expérimentale avec labo- ratoire est créée pour lui à l'Université. Cette chaire, à la demande de Flournoy, fut rattachée à la Faculté des Sciences; c’est la première fois que cette discipline s’est trouvée officiellement séparée de la philosophie. C’est la Société de Physique et d'Histoire Naturelle, dont Flournoy fit partie depuis 1890, qui reçut l'hommage de ses premières recherches scientifiques. En 1890, il faisait une communication sur l'audition colorée et en 1892 présentait les résultats de l’enquête poursuivie en collaboration de son élève Ed. Claparède sur le même phénomène, enquête d’où est finalement sorti son bel ouvrage sur les Phénomènes de Synopsie (Genève et Paris, 1893). Les premières expériences poursuivies au laboratoire de psychologie ont porté sur les temps de réaction et ont donné lieu à des notes communiquées à nos séances. Elles ont fait l’objet d’une brochure (Observations sur quelques types de réaction simple. Genève, 1896). Nous ne pouvons insister ici sur les résultats obtenus, non plus que sur les recherches sur les illusions de poids, les hallucinations sur l’action du milieu, sur l’idéation sur les temps de lecture et l’omission, sur l'association des chiffres chez les divers individus, parues dans l’Année psychologique (1895-1896) et présentées au congrès international de psychologie à Munich en 1896. Flournoy s'était aperçu que pour rendre compte de l’activité mentale, il ne fallait pas se borner à explorer le contenu de la conscience, mais qu'il fallait encore faire appel au subconscient, aussi voyons-nous notre collègue s'intéresser d’une façon toute particulière à toutes les manifestations de ces forces agissantes quoique Fe) 19 , 238 RAPPORT DU PRÉSIDENT cachées de la personnalité (messages spirites, somnambulisme, romans subliminaux, cryptomnésies, glossolalie, télépathie, automatismes divers; Le livre intitulé Des Indes à la planète Mars, Genève, 1900, nouvelles obser- vations sur le même sujet (Archives de Psychologie, I, 1902) est une étude que Flournoy fit sur ce sujet, comme son mémoire Esprits et médium, 191 1, est l’analyse et l'enquête qu’il fit sur la même question. Citons en outre ses mémoires sur Les principes de la psychologie religieuse, Observations de psychologie religieuse, Une mystique moderne (Arch. de Psycho- logie, 1902-1915). Le génie religieux, 1909. Très lié avec le psychologue américain William James, il écrivit sur ce savant un mémoire La philosophie de W. James, St. Blaise, 1901. En 1901 il avait fondé en collaboration avec Ed. Claparède les Archives de Psychologie, cette publication bien connue dans laquelle il publia dès lors ses recherches et un grand nombre de bibliographies. Lors de la célébration à Genève du centenaire de Darwin en 1909, il parla d'une façon très originale de Darwin philosophe. En 1909 il avait présidé le VIe Congrès international de Psychologie, qui s'était tenu à Genève. En dehors de son œuvre écrite, Flournoy a exercé une grande influence non seulement sur les étudiants, mais sur tout le publie cultivé de notre ville par son enseignement oral, qui réunissait des qualités qui souvent s’exelnent: la vie, la clarté, la profondeur, le pittoresque. En lui, la Science et notre Université perdent un maître de valeur vraiment exceptionnelle. ÉMILE ADOR (1845-1920) Néle 2 octobre 1845, Emile Ador fit ses premières études à notre Académie ; il alla les compléter à Edimbourg et à Londres, puis s'étant résolu à les diriger du côté de la chimie, il entra en 1868 à la Gewerbe-Akademie de Berlin. Il y trouva des maitres et des collègues tels que Bæyer, Græbe, Liebermann, Oppenheim, avec lesquels il entreprit ses premiers travaux originaux. C'était l’époque, une des plus brillantes de l’histoire de la chimie, où toutes les recherches étaient tournées vers l'étude des composés aromatiques tirés du goudron de houille. Ce fut aussi cette voie que suivit Ador, et qu'il ne quitta plus désormais. Sa première publication, faite avec Bæyer, sur l’aldéhydine, date de 1868. Elle fut suivie en 1870 d’une seconde, sur l’acide sulfobenzoïque, avec la collaboration d'Oppenheim. POUR L'ANNÉE 1920 239 En 1871, Ador quitta Berlin pour Zurich, où il fut l'élève de Victor Mever. C’est sous sa direction qu'il fit un travail important sur le biphtalyle, qu'il présenta comme thèse, et qui lui valut le grade de docteur en philosophie. Revenu à Genève en 1872, il devint le collaborateur, puis le gendre du profes- seur Marignac, [le remplaça pendant les années 1874-1878 dans son cours de chimie organique. Il semblait donc tout désigné pour lui succéder définitivement. Mais cette attente fut déçue. Lorsque Marignac prit sa retraite en 1878, Ador ne posa pas sa candidature à la chaire de chimie. Dépourva d’ambition personnelle, il crut mieux servir les intérêts de notre Université en proposant à sa place, et en recommandant chaudement son ancien collègue de Berlin, Carl Græbe, qui venait de se signaler par une découverte de premier ordre, et qui se trouvait momentané- ment sans situation officielle. Ayant ainsi renoncé à la carrière professorale, Emile Ador ne se désintéressa point du développement de nos études de chimie, Il continua, au contraire, à y participer d’une façon aussi active qu'efficace. Il fut chargé avec le professeur Denis Monnier et l'architecte Bourrit, de dresser les plans de la nouvelle Ecole de Chimie, dont la création avait été décrétée en 1877. Il fut, en 1878, un des fonda- teurs de la Société de Chimie de Geneve, I prit part au Congrès de nomenclature qui se réunit dans notre ville en 1892. Il fonctionna comme expert auprès du jury de l'exposition de Vienne en”1873 et présenta à cette occasion au Conseil d'Etat un rapport sur les progrès de la Chimie. Il fit partie dès 1874, du comité de rédaction des Archives des Sciences physiques et naturelles. Enfin il était, au moment de sa mort, un des plus anciens membres de notre Société, dans laquelle il avait été reçu en 1875. Dès son retour à Genève, Ador avait repris, dans un laboratoire qu'il avait installé à la rue du Stand, les recherches de chimie organique qu'il avait com- mencées à Berlin. Il S'appliqua surtout à développer et à étendre le procédé de synthèse, si précieux pour la chimie aromatique, qui venait d’être découvert par Friedel et Crafts. En collaboration avec son ami Albert Rilliet, il publia, de 1874 à 1880, une série de travaux dans ce domaine, qui dénotent tous une grande habi- leté d’observateur et d'expérimentateur. Depuis 1880, Ador avait abandonné ses recherches de laboratoire pour s’oc- cuper surtout d’affaires industrielles et financières, Mais il suivait toujours avec intérêt les progrès de la science. Il resta pendant longtemps chargé de rendre compte de ceux de la chimie dans le bulletin bibliographique des « Archives », et il aimait à s’en entretenir avec ses collègues plus jeunes, qui profitaient des sages conseils de son expérience et des ressources de son érudition. MÉM. SOC. PHYS. ET HIST. NAT. DE GENÈVE, VOL. 39 (1921). ; 30 240 RAPPORT DU PRÉSIDENT À la mort du professeur Marignac, survenue en 1894, Ador rédigea pour nos < Archives > et pour les « Berichte » de Berlin, des nécrologies très complètes et intéressantes de son beau-père. Puis il compléta son œuvre en rassemblant et en rééditant l’ensemble des travaux de lillustre savant, qui étaient disséminés dans divers périodiques et s'échelonnaient sur une période de plus de 40 années. Les deux gros volumes des œuvres complètes de J.-C, Galissard de Marignac, publiés sous les auspices de notre Société comme hors-série de nos Mémoires, font le plus grand honneur, non seulement au chimiste éminent aux travaux duquel ils sont consacrés, mais aussi à celui qui à su les conserver et les faire revivre. La Société de Physique et d'Histoire Naturelle, perd en Emile Ador un de ses membres assidus et dévoués, fidèle gardien des anciennes traditions scientifiques genevoises et qui fut de bien des manières utile à leur maintien et à leur dévelop- pement. EMILE BURNAT (1828-1920) Burnat fut membre ordinaire de la Société de Physique 1889 et émérite 1902. Enule Burnat, né à Vevey, le 21 octobre 1828, appartenait à une ancienne famille vaudoise qui à donné à la magistrature, à l’armée et à l’église de nombreux représentants depuis le XVT® siècle, Il suivit jusqu'en 1842 les lecons de lPnstitut Sillig à Bellerive. C'est à cette époque, àgé de 14 ans, qu'il prit goût à la bota- nique et à la chimie et se décida à suivre sa carrière d'ingénieur en se préparant à l'Ecole Centrale. En 1845, ilse rendit à (Genève pour y suivre les cours de l'Académie, travail- lant spécialement les mathématiques avec le Prof. A. Pascalis. Son goût pour la botanique s’y accentua sous l’influence de de Candolle, dont il suivait les cours et pour lequel il garda toute sa vie une profonde vénération; de Edmond Boissier, de Reuter, avec lequel il herborisait avec passion comme il le fit jusqu'à l'âge de 85 ans. Avec ses amis. il fonda une Société des Sciences des Etudiants de Genève dont faisaient partie entre autres Louis Soret, Duval, Gaston Rochette et d’autres. Burnat y lut le 7 décembre 1846 une notice sur les genres Orobanche et Phelipea, travail qu'il fit à l’âge de 18 ans et qui est déjà remarquable, résumant ce que lon savait à cette époque sur la biologie de ces singulières plantes parasites. Après avoir terminé avec succès ses études à l’Académie de Genève, il se rendit en 1847 à Paris où il entra à l'Ecole Centrale. I y travailla sous la direction du mathé- mathicien Théod. Olivier, du physicien Léon Claude, Aug. Pictet, du chimiste J.-B. Dumas. POUR L'ANNÉE 1920 241 En 1851, Burnat sortait de l'Ecole Centrale premier de sa promotion avec le diplôme d'ingénieur ex-æquo avec Molinos dans la spécialité de la métallurgie. Cédant aux propositions de son oncle Jean Dolfuss, le nouvel ingénieur entra dans l'établissement Dolfuss, Mieg & Co à Mulhouse et ne tarda pas à trouver en la personne de sa cousine Emilie Dolfuss, celle qui devait être la fidèle compagne de sa vie. Pendant 16 années, E. Burnat développa à Mulhouse une activité féconde dont témoignerent non seulement la prospérite croissante de l'établissement auquel 1} vouait ses soins, mais encore un grand nombre de mémoires (87) de physique industrielle parus dans les Bulletins de la Société industrielle de Mulhouse. Malgré la résistance de ses associés qui tenaient à conserver son COnNCours, Burnat se décida à quitter l'industrie à laquelle il resta cependant associé jusqu’en 1872 pour se retirer en 1S6S à Mont-sur-Vevey, dans une propriété dont lui avait fait don son grand-père en 1865. I y fit construire un chalet et se livra dès lors à ses études favorites de botaniste. En 1871, au cours d'un séjour à Cannes, il se lia avec Thuret et Bornet, les deux botanistes d'Antibes célèbres par leur décou- verte des organes sexuels et de la fécondation chez les Algues, et ce sont eux qui l’engagerent à entreprendre Pétude de la flore des Alpes maritimes. Burnat se livra dès lors à ce travail et fit de nombreux voyages d'exploration destinés à réunir les matériaux nécessaires à sa flore, voyageant tantôt seul, tantôt en compagnie de plusieurs botanistes suisses: E. Boissier, W. Barbey, Mare Michel, J. Briquet et d'autres. Tout en s’occupant spécialement des Alpes maritimes, Burnat se créa une collection générale européenne, lune des plus riches que l’on connaisse. Il complétait les cartes très insuffisantes par des observations personnelles mesurant avec soin l'altitude de la région qu'il observait. Burnat étendit ses voyages à la chaine des Alpes tout entière jusqu'à la Syrie et à la Carinthie, à ia Péninsule Ibérique, les Baléares, à l'Algérie, à la Corse, à l'Italie, la Grèce et la Turquie jusqu’à la Bithynie. À la fin de 1917, son herbier comptait 210,408 numéros, tandis que la bibliothèque spéciale comportait 3000 volumes renfermés dans un bâtiment que Burnat avait fait construire à cet effet. Burnat légua ce riche matériel à la Ville de Genève. Ses collections furent transportées à la Console et installées en 1906 dans le jardin et dans le Conser- vatoire botanique. Les nombreux travaux botaniques de E, Burnat se rapportent essentiellement à la systématique de divers groupes tels que les Rosa, les Hieratium et la Flore des Alpes maritimes dont il à écrit les quatre premiers volumes. Les qualités de 212 RAPPORT DU PRÉSIDENT Burnat étaient l’exactitude, la clarté et une grande érudition. Il était l’homme non des théories mais celui des faits bien observés, exactement comparés et scrupu- leusement pesés. Nombre de corps scientifiques l'ont fait figurer parmi leurs membres d’hon- neur. Les Universités de Zurich et de Lausanne lui avaient décerné le grade de Doctor honoris causa à l’occasion de son 80° anniversaire. Peu avant la guerre, janvier 1914), le Gouvernement français lPavait fait chevalier de la Légion d'honneur. En dehors de son activité scientifique, Burnat eut à remplir plusieurs fonctions municipales et cantonales dans lesquelles il montra toujours son dévouement à la chose publique, sa régularité dans l’exercice des diverses fonctions qui lui étaient confiées. Nous n'insistons pas sur sa bonté, sa charité et sur les bienfaits qu'il a répandus sur ceux qui l’entouraient. ! EDMOND BERANECK ? (1859-1920) Béraneck à été associé libre de notre Société depuis 1897. Né à Vevey en 1859, Edmond Béraneck fit ses premières études à Lausanne. C’est à l’Académie de cette ville qu'il s’initia à la zoologie et fit ses premiers travaux sous la direction du professeur Du Plessis. A l’âge de 24 ans, quoiqu'il sût bien que le cycle de ses études universitaires n'était pas terminé, les nécessités matérielles de la vie Pobligèrent à assumer la double tâche, assez lourde, de professeur de zoologie au gymnase et à l’Académie de Neuchâtel. Ce ne fut d’ailleurs pas une interruption de ses recherches person- nelles. Il organisa, en effet, son enseignement de maniere à pouvoir travailler trois jours par semaine à Genève, sous la direction du professeur Hermann Fol, et obtint le grade de docteur en 1884. En 1886, il consacra quelques mois à s'initier aux méthodes allemandes auprès de Hæckel à Iéna. Plus tard, nous le voyons à Roscoff et à Villefranche se livrer à l'étude de la faune marine et en particulier, sous l’impulsion de Hermann Fol, à celle du développement des Métazoaires supérieurs. Ce sujet le retint long- temps et fit l’objet d’un cours libre qu'il professa à l'Université de Genève en 1893. Mais entre temps des circonstances indépendantes des préoccupations purement scientifiques imprimerent une orientation nouvelle à ses travaux. Dans un but i Extrait d’une nécrologie de J. Briquet. ? D'après un article nécrologique de M. Bedot, Revue suisse de Zoologie, vol. 25, 1920. POUR L'ANNÉE 1920 243 philanthropique, il entreprit l’étude bactériologique de la tuberculose pulmonaire, et travailla en 1894 avec Léon Massol, directeur du laboratoire de sérothérapie et de bactériologie de la Ville de Genève. Ces études conduisirent Béraneck à la découverte de la tuberculine qui porte son nom ; ce produit à fait l’objet d'assez nombreuses publications et a donné des résultats très appréciés. Lors de la transformation de l'Académie de Neuchâtel en Université, Béraneck dut abandonner ses travaux à (Geneve et continuer ses recherches dans les laboratoires fort rudimentaires dont il disposait à l'Académie de Neuchâtel. Pour faire ressortir le trait dominant du caractère de cet infatigable cher- cheur, il suffit de dire que des offres de capitaux lui furent faites pour pousser plus loin l’étude de sa tuberculine, sous condition d’en tirer profit matériel. Par principe, il n’hésita pas à refuser. Il convient de rendre hommage à tant de modestie et de désintéressement. DAVID SULZER (1858-1918) Le D' Sulzer à fait partie de la Société de Physique comme membre émérite depuis 1897, étant membre ordinaire dès 1892. Le D' Sulzer est né le 18 juin 1858 à Winterthur (Zurich). Son pere, le D' Sulzer fut un homme important dans le canton de Zurich et conseiller d'Etat. Son grand-père paternel fit campagne dans les armées de Napoléon. Jusqu'en 1876, il resta à Winterthur au Collège, puis alla à Strasbourg au Collège protestant où il finit ses études. Il revint ensuite à Zurich commencer ses études médicales qu'il termina le 8 août 1882 par sa thèse inaugurale sur liridectomie dans le glaucome primitif. Il s'était déjà orienté vers l’ophtalmologie sous la direction de Horner. Il se rendit ensuite à Utrecht à la clinique de Donders où 11 prit le goût à l'étude de l'optique physiologique et c’est de son séjour en Hollande que date l’orien- tation générale de ses recherches scientifiques. En 1882, une guerre coloniale éclate en Hollande. Il s'engage pour 5 ans comme médecin militaire dans Farmée hollandaise et part pour Java. Son séjour aux Indes néerlandaises se prolonge jusqu'en 1889; il revient en Europe. Sa première installation en Europe fut à (Genève où, en 1892, il obtint le grade de privat-docent d’ophtalmologie à la suite d’une thèse brillamment soutenue. 941 RAPPORT DU PRÉSIDENT En 1891,ilacheta avec le D' Valude des héritiers de Warbomart, les Annales d'Oculistique et collabora dès lors très activement à cette importante publication. En 1898, à 40 ans, il s'installe à Paris, repasse ses examens de doctorat qu'il couronne par sa thèse sur le Zona ophtalmique. Naturalisé Français en 1913, il a l’occasion de payer sa dette à la nation qui l’a accueilli et noblement il ne faillit pas à ce devoir. Il s'engage des septembre 1914 comme médecin auxiliaire et il est envoyé peu après dans un Convoi sanitaire. Le surmenage qu'il éprouva pendant les phases mouvementées de sa vie dans les trois dernières années ne fut pas étranger à la fatigue cardiaque dont il com- mença à ressentir les premières atteintes à la fin de 1917. Il essaya du repos, mais il était trop tard et le 9 février 1918, il succombait à une crise d’angine de poitrine dans sa 60° année. Pendant le cours de son existence à Paris, Sulzer avait occupé quelques années le poste de Chef de service à la Fondation ophtalmologique Rothschild. Les travaux très nombreux de Sulzer, dont une partie est cataloguée dans les Mémoires de notre Université, sont dirigés vers l'optique physiologique, qu'il a étudiée au laboratoire de Donders, puis ensuite à celui de Javal à la Sorbonne, où il poursuivit ses recherches sur Ia forme de la cornée humaine qui aboutit à l'invention d’une cornée artificielle ayant un but spécial. Toutefois, 11ne fut pas exclusif, et en dehors de ses deux thèses qui sont des ouvrages de chnique pure, on peut citer parmi ses travaux de nombreux mémoires qui ont trait à des observations de clinique spéciale. Toutes ses recherches et travaux furent condensés dans les articles magis- traux que Sulzer à publiés dans l'Encyclopédie française d'ophtalmologie. Sulzer à contribué activement aux progrès scientifiques de l’ophtalmologie, tant par ses recherches personnelles que par la part importante et toujours remarquée qu'il prenait aux réunions scientifiques en France et à l'étranger. I à en outre joué un role fort utile en résumant dans les Annales d'oculistique les publications étrangères et une connaissance complète de plusieurs langues donnait à ses analyses une valeur particuliere. Tous ceux qui ont connu Sulzer pendant son trop court séjour à (renève, garderont de cet excellent collègue et savant, d'une remarquable honorabilité professionnelle, un souvenir affectueux et regretteront qu'une mort prématurée ait mis trop tôt un terme à une belle carrière scientifique. ! Tiré en partie d'un article du Dr Valude, paru dans les Archives d'oculistique, avril 1918. POUR L'ANNÉE 1920 24) AUGUSTE RIGHI! (1850-1920) Décédé subitement le 8 juin de cette année à Bologne, où il était né le 27 août 1850, Righi avait fait ses études dans les écoles de cette ville. En 1871, on l'avait nommé assistant de physique à l'Université. Deux ans après, il ensei- gnait cette science à l’Institut technique de la même ville. En 1875, 11 fut recu membre de l’Académie des sciences de Bologne. Ensuite, après avoir été pendant une année privat-docent à l'Université, il obtint la chaire de professeur ordinaire de physique à l’Université de Palerme. Il passa de cette dernière à celle de Padoue en 1885 et quatre ans après à celle de Bologne où il est resté jusqu’à la fin de sa carrière. Les services qu’il à rendus à la science ont été reconnus tant en Italie qu'à l'étranger, ainsi qu'en témoignent les diverses distinctions dont il à été l’objet. En Italie, il reçut la médaille pour le mérite civil et fut nommé sénateur. La Royal Society lui a décerné le prix Hughes et la Royal Institution Va nommé membre honoraire. I] était correspondant de l’Institut de France. Sans parler d’autres titres honorifiques qui lui avaient été conférés, il convient de rappeler que dans le discours commémoratif prononcé à l’Académie des Sciences de Paris, par le Président, celui-ci annonça que Righi allait être nommé associé étranger. I] était membre honoraire de notre Société depuis 1898. Un bref aperçu des publications de Righi suffit pour montrer la variété et l'importance des travaux de ce physicien génial, de cet expérimentateur hors ligne. Il à parcouru tous les champs de la physique, mais c’est surtout dans ceux de l’électricité statique et dynamique, du magnétisme et de l’électro-magnétisme que s’est exercée sa sagacité clairvoyante. Les notes et mémoires sur ces sujets sont très nombreux. Th. Tommasina en à donné des analyses dans les Archives des Sciences physiques et naturelles. Righi étudia successivement, entre autres sujets, les phénomènes de Hall, de Kerr et de Zeemann, les ondes hertziennes, les rayons de Rôüntgen, la radioactivité. Ses expériences très démonstratives sur les «ombres électriques » et sur les « phénomènes photoélectriques >» placent Righi au premier rang des fondateurs de la théorie moderne de l’ionisation. Les études qu’il pour- suivit après 1883 sur le phénomène de Hall, lui firent découvrir de nouveaux phénomènes : la grande variation de résistance du bismuth sous l’action du champ magnétique, la variation analogue de la conductibilité caloritique et, ce qu'on ! Notice nécrologique de M. Th. Tommasina. 21.6 RAPPORT DU PRÉSIDENT appelle « l'effet Righi > qui est analogue à l'effet Hall, le flux calorifique étant substitué au courant électrique. Puis dirigeant ses recherches sur le phénomène de Kerr, il mit en évidence les caractères de ce phénomène et y découvrit une loi de symétrie qui fut plus tard confirmée. En 1897 paraissait une des œuvres principales de Righi: L'ottica delle oscillaziont elettriche, studio sperimentale sulla produzione di fenomeni analoghi ai principali fenoment ottici per mezzo delle onde elelttromagnetiche. L'auteur en à donné lui-méme un important résumé, dans les Archives des Sciences physiques et naturelles de la méme année. La découverte et l'étude de Ia polarisation magné- tique du chlore date de 1899. La commission d'organisation du Congres interna- tional de Physique, qui eut lieu à Paris en 1900, chargea Righi de la rédaction du rapport sur les ondes hertziennes. On sait que Marconi, l'inventeur de la télégraphie sans fil, conçut l’idée géniale de cette importante application des ondes hertziennes pendant son stage comme élève de Righi au laboratoire de Physique de l'Université de Bologne. Déjà par ses expériences publiées en 1893 et 1897, Righi avait fait connaitre un nouveau système d'appareils avec lesquels il avait étudié les oscil- lations électriques à très petite longueur d'onde, le cabinet de physique de notre Université possède un de ces appareils, don de nôtre regretté collègue Edouard Sarasin. On considère l’ensemble des expériences qui ont mérité le nom «d'optique des oscillations électriques >», comme une démonstration expérimentale complète de la théorie électromagnétique de la lumiere. En 1908, dans une note à l’Académie dei Lincei, il faisait connaître l’exis- tence probable d’une nouvelle espèce de rayons, les rayons magnétiques. Après en avoir étudié la nature, il communiqua à la Société française de Physique une note: « Sur quelques phénomènes dus aux rencontres entre électrons et 1ons «, et une autre aux Lincei: « Sur le mouvement d’un électron autour d’un ion dans le champ magnétique ». [Il y présentait son hypothèse sur la nature des rayons magnétiques, qui suppose chaque élément de ces rayons constitué par un électron tournant autour d'un ion. Son ouvrage: La materia radiante e à raggi magnetici, paru en 1909, montre la grande variété des expériences qu'il à faites pour mettre en évidence les propriétés de ses rayons. D'autre part, ces mêmes expériences le conduisirent à la découverte de phénomenes nouveaux, tel que celui des rotations iono-magnétiques (1914) dont la théorie qu'il a donnée à été aussi confirmée. Des autres faits nouveaux, dus à la propagation de l'électricité dans les gaz soumis à l’action du champ magnétique, que la théorie ordinairement admise ne pouvait expliquer, lui firent imaginer la théorie de la « magnéto-ionisation >, fondée sur le fait, établi expérimentalement, que le champ magnétique favorise l’ionisation par choc. Toute cette série de travaux du plus haut intérêt scientifique forme le contenu POUR L'ANNÉE 1920 217 de son dernier ouvrage paru en 1918: 7 fenomeni elettro-atomici sotto l'azione del magnelismo. Auguste Righi a donné à sa patrie, qui ne pourra oublier ni son nom, ni son œuvre, une gloire de plus dans ce monde supérieur de la pensée, qui est le seul ayant connu jusqu'ici la concorde entre les nations. Sir NORMAN LOCKYER ! (1836-1920) J.-Norman Lockyer était le dernier survivant du groupe de savants qui ont fondé l'astronomie physique après les féconds travaux d'analyse spectrale de Bunsen et Kirchhoff en 1859. Né en 1836, Lockyer à débuté comme astronome amateur. Entré au « War Office >» en 1857, il y fit une carrière rapide et brillante grâce à ses capacités administratives et à son énergie, mais 1] consacrait tous ses moments de loisir à l'astronomie dans son observatoire privé de Hampstead qu’il abandonna en 1873 pour prendre la direction, officielle cette fois, des laboratoires et de l'observatoire de physique solaire de South Kensington, en qualité de professeur de physique astronomique au Royal College of Science. C’est en 1868 que le nom de Lockyer à été rendu célèbre dans le monde entier, en même temps que celui de Janssen, par leur découverte de la méthode d'observer les protubérances solaires en plein Jour. Tandis que son émule français arrivait spontanément à cette découverte, en observant, au spectroscope, l’éclipse totale de soleil du 18 août 1868, Lockyer y était parvenu par le raisonnement, deux ans auparavant. Il supposait, dans sa communication à la Royal Society du 15 novembre 1866, que les protubérances étaient dues à des gaz incandescents entourant la photosphère solaire et que l’on pourrait distinguer ces protubérances dans le spectre d'émission à raies brillantes de ces gaz. Lorsqu'il apprit, par les premières dépêches des observateurs de l’éclipse de 1868, que le spectre des pro- _tubérances contenait les raies brillantes de l'hydrogène, il hâta la construction d’un spectroscope à forte dispersion qu'il avait commandé, et put effectivement observer des protubérances solaires en plein midi dès le 20 octobre. Par un curieux hasard son rapport, adressé à la Société Royale à Londres et à l'Académie des Sciences de Paris, a été lu à la séance du 26 octobre 1868 de cette dernière assemblée, quelques minutes avant celui que Janssen avait adressé de Guntoor ! Notice nécrologique de M. Raoul Gautier. MÉM. SOC. PHYS. ET HIST. NAT. DE GENÈVE, VOL. 89 (1921). 31 2148 RAPPORT DU PRÉSIDENT (Indes anglaises) et où il relatait les observations de protubérances qu'il y avait faites pendant et après l’éclipse du 18 août. La découverte était assez importante pour être partagée entre les deux astronomes. Lockyer à reconnu tout autour de la photosphère solaire la chromosphère d’où émanent les jets et nuages lumineux nommés protubérances. Il à également découvert que la raie jaune D, du spectre de la chromosphère n’appartenait à aucun élément chimique connu et à nommé elium l'élément inconnu qui, comme chacun sait, à été trouvé seulement une trentaine d'années plus tard par lord Rayleigh et Ramsey dans la clévéite. Voué de plus en plus dès lors à l’étude du soleil, Lockyer a poursuivi, avec une rare énergie, par la méthode spectroscopique, l'observation des phénomènes solaires et l’étude des spectres des éléments dans son laboratoire. Toujours il menait ces études parallèlement, en soumettant ses résultats à une critique sérieuse. En produisant les vapeurs des éléments par des sources de chaleur différentes (flamme, arc, étincelle électrique), Lockyer à établi l'importance de certaines raies spec- trales qui n'apparaissent dans le spectre qu'aux plus hautes températures. I les à appelées raies renforcées (enhanced lines) et a basé sur cette découverte l'hypo- thèse qu'à des températures plus élevées encore, toutes les raies disparaitraient à l'exception de ces raies renforcées. C’est durant la première phase de ses beaux travaux que Lockyer est venu, en 1875, à Genève et qu'il a été nommé membre honoraire de notre Société sur la proposition d'Emile Gautier. Cette même année, il fità la Société de Physique une intéressante communication sur ses travaux d'analyse spectrale. Tout naturellement, Lockyer s’intéressait aux observations que l’on peut faire durant les éclipses totales de soleil. Il organisait les expéditions partant d’Angle- terre et il en a dirigé huit en personne dans différentes régions du monde. Nous avons eu le privilège, M. J. Pidoux et moi, de le voir à l’œuvre lors de l’éclipse du 30 août 1905 à Palma de Majorque, et nous avons pu admirer la merveilleuse organisation de son expédition et le talent avec lequel il utilisait le concours, non seulement de ses collaborateurs ordinaires, mais des officiers et de l'équipage du croiseur mis, cette fois comme lors des éclipses antérieures, à Sa disposition par l’Amirauté britannique. Malheureusement pour l'expédition anglaise, comme pour la nôtre, beaucoup plus modeste, des nuages ont fortement nui aux succès de nos travaux. ! En 1913, les instruments de South Kensington qui n'étaient logés que dans de légers baraquements en bois et en métal, furent transférés à l'Observatoire de Archives Sc. phys. et nat., 1905, t. 20, p. 650. POUR L'ANNÉE 1920 249 Cambridge, et Lockyer dut tourner son activité d’un autre côté. Il fonda alors, avec la collaboration de quelques amis, un observatoire privé, muni de beaux ins- truments, à Salcombe Regis, Sidmouth (Devon). C’est là qu'il s’est éteint le 16 août 1920 à l’âge de 84 ans. A côté de ses travaux astronomiques, dont nous n'avons pu relater ici qu’une faible partie, Lockyer s’intéressait à une foule d’autres questions, à l'archéologie en particulier. Il fut un conférencier très apprécié et un éducateur scientifique de son pays par le journal hebdomadaire illustré Nature qu'il avait fondé en 1869 et au cinquantenaire duquel il lui à été encore donné d'assister en novembre 1919. Avec Sir Norman Lockyer disparait une belle figure de pionnier de Ja science astro-physique après une longue et fructueuse carrière. JAMES MASON CRAFTS! (1839-1917) Né à Boston, le 8 mars 1839, J.-M. Crafts avait montré de bonne heure un goût prononcé pour les sciences. Après des études poursuivies dans sa ville natale jusqu'en 1859, il fréquenta les universités de Fribourg, Heidelberg et Paris, où il entra en rapports personnels avec Helmholtz, Kirchhoff, Bunsen, Wartz et Friedel ; c’est au laboratoire de Waertz qu'il se lia d'amitié avec Friedel. De retour dans son pays, nous le trouvons en 1866-67 dans l’inspection des mines, en 1868-71 comme professeur de chimie à l’université de Cornell ; il passe ensuite à l’Institut Technologique de Boston où il occupe la chaire de chimie or- ganique pendant trois ans. Des raisons de santé l’obligent en 1874 à prendre un congé durant lequel il se fixe une première fois à Paris, dont l'atmosphère scientifique avait pour lui un très grand attrait. Ce séjour devait se prolonger jusqu’en 1891, avec de nombreux voyages et stations à l'étranger. C’est de cette époque que datent ses premiers travaux en collaboration avec Friedel en chimie organique (composés organo- siliciques, synthèses au moyen du chlorure d'aluminium, etc.). Au cours de séjours à Genève, surtout pendant la belle saison, d’abord au laboratoire d’Ador et Rilliet, puis à celui de Graebe, il effectue ses premières re- cherches de chimie physique sur les densités de vapeurs à très haute température, sur un nouveau thermomètre à gaz, sur les corrections des points d’ébullition, recherches qui furent alors très remarquées. ! Nécrologie extraite avec autorisation du Journal de Chimie Physique. 250 RAPPORT DU PRÉSIDENT Rentré aux Etats-Unis, J.-M. Crafts reprend en 1892 l’enseignement de la chimie organique à l’Institut Technologique de Boston et le poursuit pendant cinq ans, pour assumer de 1898 à 1900 les fonctions de Président de cet Institut; il s’y fit remarquer par ses dons remarquables d'administrateur. À partir de 1900, il resigne ses fonctions officielles pour motif de santé et reprend ses chères études de laboratoire ; il les poursuit dès lors avec une inlassable énergie, autant que ses forces le lui permettaient. C’est ainsi qu'il aborde ses re- cherches remarquables sur les points fixes de thermométrie entre 1000 et 400° et sur les tensions de vapeur de Peau, de la naphtaline et de la benzophénone, publiées dans le Journal de chimie physique en 1913 et 1915. Il est inutile d’insister sur l’im- portance de ces beaux mémoires dans lesquels on admire tour à tour lextraordinaire habileté expérimentale, le sens merveilleux des causes d'erreur, et la remarquable conscience de l’expérimentateur. La guerre mondiale n'a pas encore permis à l’opi- nion scientifique d'apprécier ces travaux comme ils le méritent. Avec le recul du temps ils seront certainement considérés comme des œuvres magistrales dont la documentation restera classique. Peu après la publication de ses travaux de thermométrie, Crafts devait inter- rompre ses recherches de laboratoire. IT est décédé le 20 juin 1917 dans sa pro- priété de campagne de Ridgefield, Connecticut. Dans la liste des 134 publications scientifiques de Crafts, la majorité concerne la chimie organique, et la plupart représente des collaborations avec son ami Friedel; 37 notes et mémoires touchent à la chimie physique dont 1l fut un des premiers à reconnaitre l'importance dès que cette discipline se constitua en science indépendante sous l'impulsion de Van’t Hoff et d'Ostwald. Crafts avait été membre ordinaire de la Société de physique depuis 1879. En 1893 il devint membre émérite. YVES DELAGE (1845-1920) La biologie vient de perdre un de ses représentants les plus dinstingués. Yves Delage, membre de l’Institut, professeur à la Sorbonne et directeur de la Station biologique de Roscoff. Né en 1854 à Avignon, Delage vint à Paris étudier la médecine et les sciences naturelles. Sous la direction de son maitre, Lacaze-Duthiers, 1l se voua tout d’abord aux recherches de zoologie et débuta par de remarquables travaux sur l'appareil circulatoire des Edriophthalmes et sur l’évolution de la Sacculine. Son POUR L'ANNÉE 1920 291 attention se porta ensuite sur des groupes très différents du règne animal, dont il étudia avec autant de soins l’anatomie et l’histologie, que la physiologie et l’em- bryogénie. Les résultats de ses travaux sur les Eponges ont profondément modifié les idées que l’on se faisait du développement de ces animaux. Ce qui permet de considérer Delage comme un des savants les plus remar- quables de notre époque, c’est non seulement l'étendue de ses connaissances et la sûreté de son jugement, mais encore le soin avec lequel il à évité l’écueil de la spécialisation, pour explorer les domaines les plus divers de la science. Et partout, la trace de son passage à été marquée par d'importantes découvertes. Dans ses études sur la fécondation et la parthénogénèse expérimentale, Delage obtint des résultats d’une grande importance et arriva à faire vivre jusqu'à l’âge adulte des Oursins provenant d'œufs fécondés artificiellement. Une cruelle maladie des yeux, supportée avec un courage stoïque, obligea Delage à renoncer aux travaux de laboratoire et à orienter son activité vers l’étude de la biologie générale. En 1895 parut son livre sur l’Hérédité et les grands pro- blèmes de la biologie générale. Dans cette œuvre capitale, qui eut une influence considérable sur la direction des recherches biologiques en France, Delage a résumé et soumis à une critique serrée toutes les théories biologiques et a exposé ses idées personnelles dans la dernière partie qui traite de la théorie des causes actuelles. La publication de cet ouvrage donnait un état exact des résultats auxquels les recherches biologiques étaient arrivées. Mais Delage comprit que, pour entrainer les chercheurs dans la voie qu'il avait tracée, 1l fallait leur faciliter le travail en leur exposant chaque année les derniers progrès de la biologie. C’est alors qu'il entreprit la publication de l Année biologique qui rend des services inappréciables en donnant le compte rendu critique des travaux paraissant chaque année en France et à l'étranger. Parmi les œuvres importantes de Delage, il faut encore citer le Traité de Zoologie concrète pour lequel il s'était assuré la collaboration d’'E. Hérouard, et dont 5 volumes ont paru. La mort de ce grand naturaliste est un deuil cruel pour la France et pour la Science universelle!, ! Notice rédigée par M. M. Bedot. [Ra SC 19 RAPPORT DU PRÉSIDENT ACTIVITÉ SCIENTIFIQUE DE LA SOCIÉTÉ LISTE DES TRAVAUX PRÉSENTÉS AUX SÉANCES. Mathématiques. M. C. CAILLER. Conférence sur les origines du principe de relativité. Chimie. MM. L. DUPARC et AGATSTEIN. Sur l’azoture de magnésium. MM. P. WENGER et HEINEN. Etude de la solubilité des chloroplatinates de Potassium, Rubidium et Césium en vue de la séparation des métaux alcalins. M. $S. POSTERNAK. Sur la constitution chimique et la synthèse du principe phospho-organique de réserve des plantes vertes. M. Al. EPSTEIN. L'activité d’un ferment en fonction de la tension superficielle. Géologie, Minéralogie, Pétrographie. MM. R. BoIssiER, L. REVERDIN, E. JOUKOWSKY. Les nappes d’eau souter- raines de lArve. MM. L.-W. CoLLer et M. REINHARD. Relations entre le massif des Aiguilles Rouges et celui de l'Arpille (Valais). M. E. JoukowskyY. La formation du Petit Lac (Léman). MM. L. Duparc et MABuUT. Sur les roches vertes de la Syssertskaia datcha (Oural du Sud). M. R. SABoT. La technique de Fédorof. Simplification au cours du travail et des reports. — Id. Les mâcles des feldspaths. M. Ep. PAREJAS. La partie S. W. du synclinal de Chamonix. — Id. Dogger fossilifère du Col de Balme (synclinal de Chamonix). MM. L.-W. CoLLET et Ep. PARÉJAS. Le chapeau de sédimentaire des Aïguil- les Rouges de Chamonix et le Trias du massif des Aiguilles Rouges-Gastern. — Id. Géologie du Schwarz Münch (massif de la Jungfrau). Botanique. MM. R. Caopar et L. CaRISs0. Une nouvelle théorie de la myrmécophilie. POUR L'ANNÉE 1920 959 M. J. BRIQUET. Sur la présence d’acarodomaties foliaires chez les Cléthracées. — Id. Sur l'organisation et l’édaphisme des feuilles éricoïdes chez les Pertya phylicoïdes. Zoologie. M. Arn. PiCTET. Recherches démontrant la non hérédité des caractères acquis. M. A. NAVILLE. — L'origine des mitochondries chez les embryons de batra- ciens anoures. Anatomie et Embryologie. M. Eug. BuJARD. Un cas complexe d’hermaphrodisme vrai chez le porc. Physiologie. Mie JL, STERN. Changements d’excitabilité des centres respiratoires bulbaires sous l’action de quelques substances médicamenteuses. Mie L. STERN et M. R. GAUTIER. Rapports entre les liquides céphalo-rachidien, sous-arachnoïdien et ventriculaire. M. F. BaïTELLI et Mie L. STERN. Influence de la pression d’O, sur les oxydations. produites par les tissus animaux et par les ferments oxydants. — Id. L’excitation chimique des centres nerveux intraventriculaires. — Id. Oxydations et réductions fermentatives. — Id. Rôle général de la succinoxydone et de la fumarase dans les tissus animaux. M. Eug. BuJaRD. Injection de substances colorées dans les ventricules céré- braux et dans les espaces sous-arachnoïdiens. MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE ET D'HISTOIRE NATURELLE DE GENÈVE VOLUME 39, FASCICULE D. ÉTUDE DU COLMATAGE DÜ VAL DES DIX PAR RAOUL BOISSIER INTRODUCTION En Suisse, le problème de l’utilisation de Ja houille blanche est de plus en plus à l’ordre du jour. Cette question est en effet si intimement liée à l'avenir économique de notre pays, qu'il n’est pas de palier, dans un cours d’eau, qui ne soit l’objet d’un projet de bassin d’accumulation et qu'il n’est pas dans nos monta- gnes de lac dont on n'ait projeté de surélever le niveau. Mais comme la plupart de nos cours d'eau ont un régime glaciaire, soit avec étiage d'hiver, il est de toute importance de créer des réserves d’eau nous permet- tant de disposer d'énergie électrique durant la saison froide. Nous pouvons utiliser des lacs existants, dont le niveau est surélevé par un barrage, des plaines allu- viales transformées par un barrage en lacs artificiels, où des cours d’eau barrés dans une gorge, La création d’un bassin d’accumulation nécessite des études très diverses où le géologue et l'ingénieur ont toute une série de problèmes à étudier de tres près. Or, dans tout projet accumulation d'eau il faut tenir compte des conditions géographiques du lieu, ainsi que des conditions géologiques!. Ce ne sera qu’une ! Les forces hydrauliques de la Suisse (vol. 5): Forces hydrauliques disponibles. Dr L-W. Corxer, Berne, 1914. Se 1S MÉM, SOC. PHYS. ET HIST. NAT. DE GENÈVE, VOL. 39 (1921). 256 RAOUL BOISSIER fois ces conditions étudiées que lon pourra savoir si un bassin d’accumulation peut être créé. La Société de la Dixence ayant projeté la création d'un bassin d’accumulation au Val des Dix, nous avons été chargé de l'étude de la durée du remplissage du lac par les alluvions. Le Val des Dix, qui n'est que le prolongement du Val d'é- rémence (canton du Valais), se présente d’une façon très avantageuse pour l'amé- nagement d’un vaste bassin d'accumulation. Voyons maintenant si cet emplacement satisfait aux conditions que nous venons d'énumérer. Au point de vue géographique nous nous trouvons en effet en présence d’une plaine alluviale, limitée en aval par un verrou rocheux, qui représente un lac creusé dans la roche en place par les glaciers et qui à été comblé par les alluvions de ses afluents. L'alimentation est assurée par une série d'afluents provenant de glaciers d'une étendue de 15,21 kni° ; le bassin de réception est de 43,16 km°. Le remplissage du futur lac par les alluvions fait l’objet de cette étude, et nous renvoyons le lecteur aux pages qui vont suivre. Quant aux questions géologiques, nous devons examiner si le bief à créer est étanche ; d'après Argan, le bassin est impérméable. Le barrage reposera sur le verrou de roche en place, formé par les micaschistes et gneiss qui franchissent la vallée. ÉTUDE DU COLMATAGE Le lac projeté aura près de 1 km. et demi de long avec une hauteur de retenue probable de 39 mètres, Nous avons basé nos calculs sur les données suivantes : 1. Une série d'observations exécutées dans le courant de l'été 1919, et com- prenant des prises d'échantillons d'eau sur la Dixence et ses afluents. 2, Deux séries d'observations de 24 heures pour déterminer les variations diurnes dans la teneur en alluvions en fonction du débit. Ces observations sont nécessaires dans un torrent à régime glaciaire où le débit dépend avant tout de Ja température de Pair. 3. Des courbes de l'appareil enregistrant continuellement les variations du niveau de l’eau et de la courbe des débits établie par le Service fédéral des Eaux au moyen de jaugeages exécutés au moulinet. 4. D'expériences faites sur des torrents glaciaires analogues, et notamment sur le Trient. ETUDE DU COLMATAGE DU VAL DES PIX 27 Matières charriées. En nous basant sur ces données, nous avons déterminé le transport total des matières en suspension du 1° juin au 7 octobre 1919, période pendant laquelle le torrent charrie tout spécialement. Le reste de l’année, les débits sont très faibles _et l’eau est presque claire. Pour la Dixence comme pour les autres cours d’eau que nous avons étudiés, nous avons constaté que la courbe de la teneur en sable varie comme celle du niveau de l'eau. Cette conclusion, je m'empresse de le dire, n’est pas applicable à tous les cours d’eau, elle ne concerne que les torrents et cours d'eau glaciaires. Au moyen de nos différentes prises d'échantillons, et à l’aide des séries de 924 heures, nous avons reconstitué la courbe de Ja teneur en matières en suspension dans l’eau de surface pour toute la période pendant laquelle les eaux du torrent sont chargées d’alluvions. En traduisant nos courbes en chiffres, nous arrivons aux résultats suivants : PÉRIODE DU 1°’ JUIN AU 7 OCTOBRE 1919 Matières en suspension Matières en suspension MOIS en eau, en surface, en kg. passant dans le profil Débits en m° par mois. complet en kw. Juin 9,1904339 15.674.293 14.753.664 Juillet 1999208 1.998:3829 10.458.720 Août 8.541.165 13.663.861 14.234.400 Septembre 2.385.667 9.817.067 4197910 Octobre 120.450 192.720 1.048.896 Total 25.842.981 41.348.770 47.653.056 Nous trouvons ainsi pour la période $’étendant du 1% juin au 7 octobre, un charriage d’alluvions se montant à : 41.348.770 kg. Nous pouvons approximativement fixer, en nous basant sur d’autres cas assez semblables, le poids de matières charriées pendant le reste de lPannée à 500.000 kg. au maximum. Ce qui nous donne pour l’année 1919 : 41.818.760 ke. Chiffre que nous arrondissons à 42,000.,0000 kg. soit 42000 tonnes. 238 RAOUL BOISSIER Ce qui nous donne, en adoptant une densité! de 1,5 : 28.000 mr, Le bassin étant de 45,16 km nous avons donc une ablation annuelle de 28000 648 7 n° us —— — 648,7 m° par km. 43, 16 En | | Pour nous rendre compte de Ia durée du colmatage du lac projeté, nous nous sommes servi d'une courbe donnant le volume de la retenue, Afin de pouvoir mieux suivre la sédimentation, nous avons construit les courbes de la planche ci-jomte. L'une de ces courbes nous permet de nous rendre compte de Ia diminution de volume de la retenue due au colmatage pendant les cent premières années. L'autre courbe, à une échelle différente, donne une idée du remplissage complet du lac et son allu- vionnement aux différents niveaux. Nousn'avons pas fait de réduction pour la décantation incomplète des alluvions dans le lac, car dans le cas particulier, toute Peau d'été, c’est-à-dire toute Peau contenant des alluvions devant étre retenue, il n'y à pas lieu de réduire le cube charrié. Matières roulées sur le fond. I reste la question des matières roulées sur le fond. D'après nos calculs sur l'Arve, le rapport entre le cube charrié en suspension et celui roulé sur le fond est de 4,8 : 1. D’après l'étude faite par M. L.-W. CoLLET®? à la Souste, sur le Rhône, en amont du barrage de Chippis, ce rapport est de 1: 1. Dans le cas du Rhône à la Souste, nous nous trouvons en présence d’un cours d’eau dans la partie supérieure à son bassin d'alimentation, où Ja pente est encore forte et par conséquent le charriage des galets roulés encore considérable, Dans le cas de l’Arve à Genève, par contre, nous sommes dans la partie tout à fait infé- rieure du bassin d'alimentation de ce cours d'eau, et la quantité de matériaux entrainés en suspension dans l’eau est de beaucoup plus considérable que celle des galets roulés sur le fond. Dans le cas qui nous occupe il est probable que nous devons nous rapprocher du rapport 1: 1. Voyons ce que nous donne la formule de WILLEM qui à été contrôlée par COLLET”, et que cet auteur admet comme appli- cable dans le cas d'un cours d'eau coulant dans des alluvions, ce qui est précisément le cas de la Dixence. ! Pour la question de la densité des alluvions, je renvoie Le lecteur à l'étude de L.-W. Cozrer: Le charriage des allurions dans certains cours d'eau de la Suisse: Annales suisses d'IFydrographie, vol. 2, p. 12. Berne, 1916. ? Dr W.Correr. Le charriage des alluvions dans certains cours d'eau de lu Suisse : Annales suisses d’'ITydrosraphie, vol, 2, Berne 1916 3 bed, ÉTUDE DU COLMATAGE DU VAL DES DIX 259 La formule de Wilhelm est: D h25Q Q est le débit moyen de la rivière considérée. J sa pente. 4 le volume moyen de gravier qu’elle entraine annuellement. En 1919, pour la Dixence, nous avons: Q— 1,71 m° par seconde. J — pente par mètre. Distance du glacier de Durand au profil d'étude — 5200 m. Altitude du haut du bassin à Seïlon . . . . — 2280 2150 > Altitude au profil d'étude. Différence d'altitude — 130 m. 150.000 5.200 Je — 0,025 Q— 2 MAT 25 —=2%8358m Nous avons donc Ie rapport 28.000 1,25 02568 D OT D'après ces différentes données sur le rapport entre le cube charrié en sus- pension, et celui roulé sur le fond, nous croyons pouvoir admettre en toute sécurité et au #arinmeum un rapport égal à 1 : 1. Nous pouvons prévoir qu'à chaque affluent correspondra un petit delta à partir duquel les matières fines se répandront dans le lac. En tenant compte de ces dernières données notre graphique peut étre utilisé sans autre changement que la réduction de moitié des durées de remplissage, c'est-à-dire qu'en 750 ans, au lieu de 1500, le lac sera rempli. CONCLUSION En terminant nous tenons à faire remarquer que le cube des galets charriés représente un maximum et qu'il est probable que le lac aura, toutes choses égales d’ailleurs, une durée de plus de dix siècles, 260 R. BOISSIER. — ÉTUDE DU COLMATAGE. ETC. On nous demandera certainement si nous avons tenu compte dans nos calculs de la variation de la teneur en alluvions des eaux avec l'augmentation de la pro- fondeur. Nous avons en effet attiré en 1916! l'attention des géologues et des géographes sur le fait que la charge en alluvions augmentait de la surface vers le fond. Pour la Dixence, nous avons tenu compte de ces variations quoique nous ayons eu affaire à un torrent glaciaire de faible profondeur. L'expérience nous à montré, que même dans de tels cas, il y avait une forte différence entre la teneur des matières en suspension à la surface et dans les couches d’eau sous-jacentes. Nous donnerons pour terminer un tableau qui permet de se faire une idée de Ja réparti- tion des alluvions dans le profil en travers du Trient, torrent ayant beaucoup d'analogie avec la Dixence. RÉPARTITION DES ALLUVIONS DANS LE PROFIL EN TRAVERS DU TRIENT Hope en mètre 1 00 2 3 ï 5 6 Allavion r 0.219 0,325 0.591 0.725 0.343 0.320 | Alluvion mi-profond —— | — ee 0.655 — — Alluvion fond — | 0.610 0.658 3 220 AS | LA : = x L Les quantités d’alluvions sont données en grammes par litre. ! Raoul Borssier. Archives des sciences physiques et naturelles. Genève, avril 1916, p. 831 à 533. PL MÉM. SOC. PHYS. ET HIST. NAT. DE GENÈVE, VOL. 39 (1921). 3NH39'A3Y 1 % AIVIWWNN H1LIT AU] d FES . anuaau e| 2p aWn|OA eu SUOIIUU S#7 0# 07 ( 01 ç 0 eu suotjpiu € à Ü 006 008 oo 009 00g 00» ooc 007 où eW2p SJaI|IIW U2 anUa7au 8] ap aUunton 0 OZ1Z je OLIZ O0 : Fi tu] SLI S gt Mi esse D à 'RERE LS 0812 à Ÿ DITITITT ITA DR ee È ee. ne rRNN | à TA CKKKN À 4 a je … % 7 | 44 ne ; ns RSR ULIUWIII 0612 0 . a MARNE RAA QURNN RON 09 ss D An re Ce ue LT LLLL IL LES Hi N 09 oczz PRESS 2 S LPS OISE DORE ES 7 +4 A PS cé Le > DTA | _—. EL 007 | 59 SCzz 24404 12 COLLIDU LA 4 TP Fi es DUBLIN LL MX NU MN KILL NN u os ul n3 DELILELIENEEEIELEELLEEN TETE Te re RaouL BOISSIER. — ÉTUDE DU COLMATAGE DU VAL DES DIX. 0"! CP L + MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE ET D'HISTOIRE NATURELLE DE GENÈVE VOLUME 99, FASCICULE D Recherches sur un cas d'Hérédité « sex-linked », la Drosophile à œil « barred » PAR Emile GUYÉNOT Professeur à l'Université de Genève Les recherches qui font l’objet de ce mémoire ont été effectuées sur des Dro- sophila ampelophila, mutation «< barred eyes » que Th. H. MorGAN eut l’obligeance de m'adresser en 1913. Le mode d'hérédité de cette mutation a été l’objet d’un tra- vail de SABRA COoLBY TICE!, en 1914. Les Drosophiles normales ont des yeux hémisphériques, formés par la réunion d'ommatidies pigmentées de rouge sombre. Les yeux barred ont leurs ommatidies limitées à une aire en forme de barre où bande transversale, à bords plus ou moins irréguliers. L’œil présente alors, sur un fond incolore, une bande rouge dont l’épais- seur et les contours sont assez variables. Ce caractère est apparu une seule fois, chez un mâle, au cours de croisements entre mouches à ailes longues et à ailes rudi- mentaires, dont les yeux étaient normalement constitués. Au point de vue héréditaire, l'œil barred est un caractère dominant sex- linked, c’est-à-dire lié à la distribution du chromosome X. Le mâle, n'ayant dans le type Drosophile qu'un seul chromosome X, est nécessairement homozygote pour tous les caractères sex-linked. Les femelles peuvent être homozygotes où hétéro- zygotes. Dans les croisements entre œil barred et œil rouge normal, les femelles .. hétérozygotes ont un aspect intermédiaire que j'appellerai œil réniforme. Toute la 1 Sapra Cogy Tice. A new sex-linked character in Drosophila. Biol. Bullet. Vol. 26, p. 221-280. 1914. 262 EMILE GUYÉNOT moitié inférieure de l'œil est pigmentée, l'aire dépourvue d’ommatidies formant une simple encoche dans le bord supérieur de la zone pigmentée. Cette circonstance per- met de reconnaitre immédiatement les individus hétérozygotes. Je rappellerai d’abord le schéma des deux croisements fondamentaux entre œil barred et œil rouge, tel qu'il résulte de Pexplication chromosomique donnée par MorGaN et des recherches effectuées par SABRA COLBY TICE, 1% croisement. P D rouge X d' barred F, © réniformes + rouges F, © rouges + © réniformes + S rouges + barred. Explication chromosomique. R X(r) — X(r) en X(b) — 0 F, X(r) — X(b) + X(r) — 0 EF, X(r) — X(r) + X(r) — X(b) + X(r) — 0 + X(b) — 0. 2me croisement. P © barred X rouge F, ® réniformes + G barred F, © barred + © réniformes + 3 barred + rouges. Explication chromosomique. P ND) == N(0) >< X(1) — 0 1 X(b) — X(r) + X(b) — 0 F, X(b) — X(b) HE XD) — X(r) + XD) — 0 + X(7) — 0. Technique. — Yes mouches à œil barred expédiées par MORGAN en vrac, dans un flacon, furent réparties par couples en 15 tubes d'élevage sur de la levure stérilisée où de la banane crue. Dans la plupart de ces tubes, les mouches ense- mencèrent des moisissures et, par suite des mauvaises conditions qui en résultérent, moururent sans descendance. Trois tubes seulement purent être conservés. Fun fournit une descendance barred absolument pure. Les deux autres montrèrent une proportion assez élevée de & à yeux rouges et de © réniformes, Comme je suis cer- tain, en raison de la technique très perfectionnée employée pour la manipulation des mouches, qu'aucune contamination n'avait pu être apportée, ce résultat tient évidemment à ce que le flacon d'envoi renfermait, avec les barred pures, quel- UN CAS D'HÉRÉDITÉ & SEX-LINKED » 263 ques. ® réniformes que mon absence de pratique du matériel ne m'avait pas permis de reconnaitre. Cette circonstance fut d’ailleurs heureuse, car elle me permit, par le croisement entre © réniformes et ; rouges, d'obtenir une lignée pure rouge amé- ricaine. Lignée barred et lignée rouge américaine furent amenées en condition asep- tique par une méthode que j'ai précédemment décrite! et ne tardèrent pas à se mul- tiplier intensément. J'ai eu entre les mains, de janvier à août 1914, plusieurs dizaines de milliers de mouches appartenant à ces deux lignées qui se sont maintenues sans modifications. La plupart des essais dont je vais rapporter les résultats ont dû être abandonnés, en août 1914, et n’ont, pour cette raison, fourni que des chiffres très inférieurs à ceux qui auraient pu être obtenus. I série. — Croisements Barred >< Rouge américaine. Les deux croisements fondamentaux m'ont fourni des résultats identiques à ceux rapportés par SABRA COLBY TICE. Croisement © rouge >< barred: 927 © réniformes ? + 1025 Z rouges — 1952. Croisements © barred >< 3 rouge : 1740 © réniformes + 1682 GS barred — 3422. 1 © avait les yeux entièrement rouges, sans trace d'échancrure. Le croisement des individus F, de chaque série donna les 4 types F, prévus. Je me suis attaché surtout à l’étude de la deuxième génération et j'ai voulu notamment me rendre compte si les individus F, provenant du croisement P: © rouge >< J barred étaient identiques à ceux du croisement P réciproque : © barred X< J rouge. Je désignerai les deux catégories d'individus par la notation suivante: PS parred < rouvre. 20) P — © rouge >< Z barred { ® barred e b | O rouges DURS Q réniformes © r | O réniformes Q r* 1@ Fox barred £ b | g rouges g R* . J rouges R + barred o' b* 1 Bullet. biolog. France et Belgique, 1917. 290 étaient d'aspect presque barred, mais se comportèrent comme des réniformes vraies. MÉM. SOC. PIIYS, ET HIST. NAT. DE GENÈVE, VOL. 89 (1920). 59 264 EMILE GUYÉNOT Entre ces 8 types, 16 croisements étaient possibles: 1— QR* K< g R*. Sur onze couples formés, cinq restèrent stériles. Les autres ont fourni les résultats suivants : Couple 1 1350 © rouges 25 J rouges — 1200 de DU » 220 » — 449 » 3 49 » 68 > dir » 4 200 » Dot — 437 D 49 » 49 » 11008 9 156 » 152 » 1280 Totaux S06 831 » 1027 L'étude des trois générations ultérieures montra que l’on avait bien affaire à une lignée rouge pure. Croisement 3:@ R* >< KR. Sur quatre couples formés, trois restèrent stériles. Couple 1 95 © rouges 1047 rouges — 199 La lignée rouge ainsi obtenue se maintint pure comme la précédente dans les générations ultérieures. B. Croisements 2 et 4. Croisement 2:@ R* >< g b*. Sur quatre couples, un fut stérile. Couple 1 60 © réniformes 51 J' rouges — 1h » 2 28 » 99 » __— 57 4 181 » 186 » 01 Totaux 269 266 530 Deux des © réniformes du couple 1 avaient presque l'aspect barred. UN CAS D'HÉRÉDITÉ & SEX-LINKED » 269 Croisement 4: Q R*>%X< S b. Cinq couples ont été suivis dont 1 fut stérile. Couple 1 16 © réniformes 12 Ç rouges — 2 GS » 63 » —_ ol » 4 in) » (D » 05 » D LATE » 145 » 0 Totaux 324 280 604 La © du couple 4 mourut accidentellement le premier jour. Deux des © réniformes du couple 2 avaient des yeux presque barred. Dans le couple 5, une des © avait un œil presque barred, une autre avait un œil nettement réniforme, l’autre œil étant entièrement rouge sans trace d'échancrure. Dans ces deux croisements, les résultats sont ceux que permettait de pré- voir la théorie et identiques à ceux que fournirait un croisement P entre deux races barred et rouges pures. Les © presque barred observées ont montré par leur des- cendance qu’elles avaient bien la constitution hétérozygote. G. Croisements 9 et 11. Croisement 9: 9 b >< 3 b. Six couples furent essayés dont un resta stérile. Couple 1 191 © barred 162 J barred Do) » 2 71 » 95 » — 164 » 3 10 » Lil » —, Al » À 90 » 113 » #20) » 6 146 » 176 » + Totaux 508 555 1063 Dans ie couple 4, une des © avait l'aspect réniforme. Il n'a pas été possible d'en suivre la descendance pour savoir si lon avait seulement affaire à une © barred un peu anormale. Croisement 11: Les quatre couples formés demeurerent stériles. La lignée barred obtenue par le croisement 9 et suivie pendant trois généra- tions est restée parfaitement pure. D. Croisements 10 et 12. Croisement 10: © b>x< 3 KR. Sur six couples, quatre furent stériles. Couple 1 213 © réniformes 178 J barred ou » 2 88 » 84 » — 112 Totaux 301 262 563 MÉM. SOC. PHYS. ET HIST. NAT. DE GENÈVE, VOI. 89 (1920). C9 # 266 EMILE GUYÉNOT Dans le couple 1, quatre © avaient le type barred correspondant à une dominance plus marquée. Croisement 12: © b >< g'R*. Un seul couple fécond. Couple 1 D1 © réniformes 49 barred — 00: E. Croisements 5, 7, 14 et 16. La théorie prévoit que la descendance sera formée de © rouges, © rénifor- mes, ; rouges et «' barred en nombres égaux. Croisement 5: 9 r* >< g RX. Cinq couples dont 1 stérile furent essayés. Couple 1: 58 © rouges S83 Q rénif. 61 J rouges 57 J barred == 259 23 22 » 29 » 43 » 43 » = 14/7 #0 29: 29 » 29 » OÙ » 29 » JT su" 4" G » L2 » 25 » 292 » a Totaux 125 [99 19 191 DS8 Croisement 7 : 9r*x< 9 R*. Couple 1 56 © rouges 49 © rénif. 48 S'rouges 57 J barred — 210 2 12 » 18 » 17 » 12 » nr Totaux 68 67 65 69 269 es résultats de ces quatre croise SEST ettement identiques. Les résultats de ces quatre croisements sont nettement ident F. Croisements 6, 8, 13 et 15. a théorie permet de prévoir une descendance formée de © barred, © réni- formes, ;' barred et & rouges en nombres égaux. Croisement 6: 9 r* x g'b*. Coupie 1 94 © barred 29 rénif. 32 J barred 20 Ç rouges — 105 » 0 44 » 3) » di] » 24 » — Jo 2 » 89 » S8 » 76 > tn At «37 » 4 » 3 » 28 > 159 : » Es » D » 39 » 109 Totaux 297 230 240 187 S84 Un essai fait avec plusieurs couples en vrac à donné les chiffres suivants: ® barred 495 © réniformes 535 J barred 495 d' rouges 458 Total 1963 Croisement S: Q9rx x S b. Couple 1 30 © barred 3089 rénif. 29 J barred 32 J' rouges — » 2 Ad » 54 » 39 » 48 > — 185 Totaux ét 84 GS S0 306 Croisement 13:17 b. Couple 1 10 © barred Lerenr 11 3 barre 8 J rouges — 36 dé 2 n > 15 Le 8 » o » —_ 0. es AI, » 124 > 129 > 120 » — 4199 Totaux 134 144 148 136 562 268 EMILE GUYÉNOT Croisement 15: Q r X og b*x. Couple 1 91 @ barred 1149 rénif. 114 barred 91 Z rouges — 410 nn : 15 , 8 » 8 » D » 1 40 Totaux 106 122 122 96 446 lei encore les résultats des quatre croisements sont identiques. Si on additionne les résultats de tous les croisements d’un même groupe on obtient les chiffres globaux suivants: F. 2 F3 ® rouge >< J' rouge 907 © rouges + 935 J rouges — 1836 © barred << g barred 508 © barred + 555 & barred — 1063 @ rouge >< barred b93 © rémif. + 546 G rouges — 1139 @ barred >< g' rouge 392 © rénif. + 311 G barred— 663 Q@ barred 1036 Q@ réniformes 1115 @ réniforme >» J rouge — |! d'barred 1073 J rouges 937 4161 | © rouges 2108 | © rémformes 2199 @ rémforme >< J barred — | d rouges 2131 | J barred 2091 8524 Conclusion. Il résulte des expériences précédentes que les différents types apparus à la deuxième génération se comportent de la même manière quel que soit le croisement P dont ils dérivent. Les individus rouges et barred se comportent comme des individus de race pure. Les © réniformes donnent les mêmes résultats que les hétérozygotes de la 1'° génération. On n’observe aucun mélange des deux races, rien qui rappelle les faits observés par BELLAIR dans ses croisements entre races de Tabacs. La ségrégation des unités héréditaires est parfaite. Les seules anomalies observées se rapportent à la question secondaire de dominance qui généralement incomplète peut être auelquefois absolue (9 hétérozygotes du type barred). UN CAS D'HERÉDITÉ € SEX-LINKED » 9269 Il: série. Croisement répété pendant 7 générations. Dans le but de vérifier si aucun accident dans la séparation des unités héré- ditaires ne pouvait résulter d’une hybridation réitérée, j'ai entrepris une expé- rience qui devait étre fort longue, mais que les circonstances ne m’ont permis de suivre que pendant sept générations. Ayant croisé des © barred pures avec des & rouges purs, j'ai obtenu à la pre- mière génération des © réniformes et des barred. Ces individus F,, croisés entre eux, donnèrent une deuxième génération formée de © et G barred, de © réniformes et de & rouges. Les individus de ces deux dernières catégories, croisés entre eux à nouveau, donnèrent une troisième génération constituée comme la précédente. J'ai croisé à nouveau entre eux les © réniformes et les 4’ rouges F, et ce croisement a été maintenu jusqu’à la 7° génération. Ce croisement © réniformes >< 4 rouges, bien que renouvelé à chaque généra- tion, n'a déterminé aucune modification ni des types observés, ni de leur pourcen- tage. La segrégation s’est faite avec la plus grande régularité. IT série. Croisement barred >< Rouge parisienne. Toutes les expériences qui précèdent ont été effectuées en croisant la lignée barred et la lignée rouge américaine que j'avais extraite des mouches envoyées par MORGAN. Il était intéressant de rechercher si les Drosophila ampelophila à yeux rouges que j'élevais depuis plusieurs années, et qui descendaient d’ancètres capturés dans la région parisienne, se comporteraient dans les croisements comme la souche américaine. Les deux lignées parisienne et américaine étant vraisembla- blement séparées depuis des durées considérables, on pouvait penser qu’une diffé- rence entre elles ne serait pas impossible. J'ai refait les deux croisements fondamentaux entre mouches barred et mou- ches rouges parisiennes et suivi les deux générations filiales. Les résultats, qu'il est inutile de rapporter en détail, ont été rigoureusement identiques à ceux fournis par les croisements avec la lignée américaine. La seule anomalie constatée en F,, fut l'existence de deux © dont l'œil gauche était typiquement réniforme, tandis que l'œil droit était réduit à une petite tache rouge punctiforme, sans que l’on observât aucune trace de la zone incolore habituelle, caractérisée par l'absence d’ommatidies, 270 EMILE GUYÉNOT IV. Observations sur l’ordre de ponte et la loi des grands nombres. L'interprétation des pourcentages observés dans Phérédité mendélienne repose sur l'égalité numérique des différentes sortes de gamètes purs, résultant elle-même des hasards de la réduction chromatique et sur légalité des chances de fécondation de tous les gamètes par un autre gamète quelconque. Aussi, en théorie, semble-t-il que toutes les combinaisons possibles ne peuvent être réalisées suivant la méme probabilité que si l’on obtient de très grands nombres de descendants. Ce nombre parait devoir être d'autant plus grand que le nombre des combinaisons est plus élevé. Il y à là une objection que l’on adresse fréquemment aux travaux de génétique faits sur des organismes dont la faible fécondité limite nécessairement la postérité. J'ai donné dans les pages précédentes des chiffres globaux correspondant à la descendance de couples suivis séparément. Or, j'avais disposé les expériences de façon à pouvoir recueillir des indications empiriques sur les nombres minima de descendants nécessaires pour observer les différents types qui devaient apparaitre et me rendre compte à partir de quel chiffre les pourcentages tendaient à s’égaliser. Dans ce but, tous les couples étaient transportés dans de nouveaux tubes tous les jours ou tous les deux à trois jours. La ponte de chaque couple s’est trouvée ainsi fragmentée en lots d'importance variable. Voici quelques chiffres correspondants aux lots de ponte de 7 couples © réni- formes >< 4 barred. © barred © réniformes © rouges J barred Totaux 1‘ couple () () 0 9 9 nl 9 9 + Do 3 d 2 2 [11] 2me couple à) te) 15 S 31 De COUDIÉ 2 ) 8 | [17] 9 il 2) 0 D de couple 20 20 24 15 10 4 y = D 26 5e couple 2] 17 11 12 GI 20 12 Le Le) ©2 (es Ge couple 7e couple 8me couple CAS D'HÉRÉDITÉ @SEX-LINKED » 2 barred 26 4) 18 11 45 41 © réniformes oO barred © 1 © 47 43 50 g rouges Totaux Voici des chiffres relatifs au croisement © réniformes >< 4 rouges. 1° couple 9me 9 me a] dune pme couple couple couple couple © rouges 16 Q@ réniformes DAri 30 26 og rouges 14 O barred 20 23 14 Totaux rw 101 S1 972 EMILE GUYÉNOT © rouges © réniformes © rouges Œ barred Totaux 6e couple 27 15 22 16 80 7 6 12 6 Di 0 2 Il 0 3 Si l’on examine les plus petits lots qui ont présenté les quatre types, on voit que le nombre de descendants formant ces lots oscille entre 8 et 25. On peut pra- tiquement dire — et cela est confirmé par l’examen de tous les couples dont quel- ques-uns seulement viennent d’être rapportés — que les lots 15 à 25 renferment toujours les quatre types de descendants, suivant des pourcentages évidemment très irréguliers. Dans les lots comportant 50 à 100 descendants, les pourcentages se rapprochent nettement de ceux fournis par des descendances infiniment plus nom- breuses. Ces constatations montrent que l'obtention de nombres considérables n'est pas toujours une nécessité absolue et que des nombres relativement faibles peuvent déjà donner d’utiles indications. Ces recherches confirment pleinement les résultats annoncés par Th. H. Mor- GAN et sont conformes à ses vues théoriques. Entreprises d’une façon tout à fait indépendante et même sous l'inspiration d’une certaine méfiance vis-à-vis des mé- thodes employées par le savant américain, elles contribueront peut-être, par leur publication, à renforcer l’œuvre de MORGAN qui est actuellement lobjet d'apres critiques que je considère comme injustifiées. É Fra K PUBLICATIONS SOCIÈTÉ DE PHYSIQUE ET D'HISTOIRE NATURELLE DE GENÈVE La Société peut disposer de collections complètes de ses Mémoires. (Tomes 1-88 et volume du centenaire.) Pour traiter, s'adresser au secrétaire des publications. (Adresse de la Société : M. le secrétaire des publications de la Soc. de physique, P. A.: au Museum d’hist. naturelle, Genève, Suisse.) Comptes rendus des séances de la Société;(in-S°). Tomes I-XXX VII (1884-1921). Prix Fr. 50 Liste des publications des membres de la Société (1883) in-8° avec supplément (1896) PRIX LE ER OR QU RNA Ets ME ee MMS NES TRS EUR TS RC Sen Tee Imprimerie Albert Kundig, Genève (Suisse). SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE MÉMOIRES DE LA ET D'HISTOIRE: NATURELLE DE GENÈVE ET — Volume 39 FASCICULE G VÉRIFICATION EXPÉRIMENTALE DE LA FORMULE DE Lorenrz-EINSTEIN faite au Laboratoire de Physique de l’Université de Genève par Ch.-Eug. GUYE Professeur de Physique à l’Université de Genève EN COLLABORATION SUCCESSIVE AVEC S. RATNOWSKY et Ch. LAVANCHY Avec 3 planches hors texte et 11 figures dans le texte. ' GENEVE GEORG & Cie BALE et LYON méme maison. Prix : Fr. 20.— Ka FL ES Pr j Je l D :) w ns ETS ‘2 » Lee MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE ET D'HISTOIRE NATURELLE DE GENÈVE VOLUME 99, FASCICULE 6 VÉRIFICATION EXPÉRIMENTALE DE LA FORMULE DE LORENTZ-EINSTEIN FAITE AU LABORATOIRE DE PHYSIQUE DE L'UNIVERSITÉ DE GENÈVE PAR Ch.-Eug. GUYE Professeur de Physique à l’Université de Genève EN COLLABORATION SUCCESSIVE AVEC S. RATNOWSKY «et Ch. LAVANCHY Avec 5 planches hors texte et II figures dans le texte. AVANT-PROPOS Les travaux qui font l’objet de ce mémoire ont été entrepris à la suite des discussions auxquelles avaient donné heu les expériences bien connues de Kaufmann sur la variation d'inertie des corpuscules B du radium. Ces expériences avaient en effet montré la variation d'inertie des corpuscules £ en fonction de la vitesse, maiselles étaient insuffisamment précises pour permettre de trancher la question de savoir si cette variation était conforme à la théorie d'Abraham (électron sphérique, indéfor- mable) ou s’il fallait tenir compte dans cette variation de la contraction de Lorentz- Einstein, conformément au principe de relativité. Les dimensions des clichés obtenus par Kaufmann n'étaient en effet guère plus grandes que celles d’un ongle et les interprétations subtiles données des courbes obtenues concluaient tantôt en faveur de l’une et tantôt en faveur de l’autre théorie. Cependant deux ans plus tard, MÉM. SOC, PHYS. ET HIST. NAT. DE GENÈVE, VOL. 39 (1921). 34 27/4 C.—E. GUYE M. Bucherer entreprit de nouvelles déterminations qui sans permettre de trancher définitivement la question étaient cependant plus favorables à la théorie de Lorentz- Einstein qu'à celle d'Abraham. L'idée me vint alors de chercher à attaquer le problème par l'étude des rayons cathodiques de grande vitesse. Mais la production de ces rayons, que l’on ne peut obtenir que dans des vides très poussés, présente au point de vue expérimental de sérieuses difficultés. En outre, il faut faire choix d’une méthode qui permette avec une exactitude aussi grande que possible de déceler la différence entre les deux théories. Après examen attentif des dispositifs les mieux appropriés au but à atteindre, je me suis arrêté à la méthode que j'ai appelée méthode des trajectoires identiques, laquelle, comme nous le verrons plus loin, présente le très grand avantage d'éliminer dans la comparaison des deux théories, l'évaluation toujours délicate des intégrales de champ. Cette méthode dont la théorie et les avantages ont été exposés en détails dans les deux mémoires dont nous donnerons ci-après des extraits est une méthode de déviation constante. Elle est particulièrement avantageuse lorsque les champs que traversent les rayons cathodiques ne sont pas uniformes; c’est là un point essentiel sur lequel j'ai cru devoir tout particulièrement insister (C. R. de l’Acad., 7 fév. 1910). Je tiens à rappeler toutefois qu’antérieurement à nos travaux M. J. Malassez, sans préciser, comme nous l'avons fait, les avantages que présente la méthode de déviation constante dans le cas des champs non uniformes, avait cependant utilisé une méthode analogue en vue des belles recherches qu'il à effec- tuées à l’instigation de M. le Prof. P. Langevin sur la relation entre le potentiel de décharge et la vitesse des rayons cathodiques (C. R., t. 141, p. 884, 1905). C’est en 1907 que nous avons commencé au Laboratoire de Physique de l’Université de Genève, les premiers travaux relatifs à l’inertie des rayons catho- diques de grande vitesse. Je m’adjoignis alors pour ces recherches l’un de mes étu- diants, M. Simon Ratnowsky, qui fut mon collaborateur dévoué pendant deux années. Le 6 juillet 1909 une communication préliminaire rendait compte des pre- miers résultats obtenus (Arch., t. 27, p. 290, 1909). Mais la revision des calculs ne fut effectuée que plus tard, et le 24 décembre 1909 le communiqué suivant était adressé au secrétaire de la Société de Physique et d'Histoire naturelle de Genève ; lecture en fut donnée en séance du 6 janvier 1910. « Le présent travail a été effectué en collaboration par MM. C.-E. Guye et S. Ratnowsky « par une méthode proposée par M. C.-E. Guye, et caractérisée par le fait que les rayons « cathodiques suivent des trajectoires identiques dans des champs semblables. Les premiers « résultats de cette étude ont été présentés à la Société de Physique et d'Histoire natureile ! Voir aussi C.-E. Guye et S. RarTnowsky, Arch. 1911, t. 31 (4m), p. 295. FORMULE DE LORENTZ-EINSTEIN 975 « de Genève le 6 juillet 1909 ;1ls concluaient à la supériorité de la formule de Lorentz sur celle «d'Abraham. Les résultats que nous communiquons aujourd'hui ont confirmé pleinement « cette manière de voir. Le tableau suivant ! résume 23 séries d'expériences, Hypothèse de Lorentz Hypothèse d’ Abraham D: D. | LL U | “ | | Différences + | #| Différences Vitesse vo vo vo Va des rayons Expérience Calcul Expérience Calcul 64850 | 1025 | 102 | + 0001 | 1021 | 1019 | + 0,002 85400 » 1,047 1,043 + 0,004 || 1,039 1,034 + 0,005 95740 » | 1,064 | 1,055 | + 0,009 | 1058 | 1043 | + 0015 108750 » 1,061 ! 1,071 — 0,010 || 1,054 1,058 — 0,004 116970 » 1,084 1,085 — 0,001 || 1,077 1,068 + 0,009 123175 » 1,093 1,096 — 0,003 1,086 1,076 + 0,010 126050 » 12 1,102 + 0,010 | 1,105 1,081 + 0,024 134000 » 15123 1,118 + 0,005 1,116 1,093 + 0,023 141350 » 1,153 15193 0,000 || 1,126 1,103 + 0,023 144900 » 1151 1,143 + 0,008 || 1139 1,110 + 0,029 152790 » 1,169 1,163 + 0,006 1,157 1,124 + 0,033 « La formule de Lorentz est vérifiée dans la limite des erreurs d'expérience; les diver- « gences avec la formule d'Abraham dépassent ces limites. » C.-E. Guye. S, RATNOWSKkY. Une note plus détaillée concernant la méthode et l’ensemble de tous les résul- tats obtenus (27 séries d'expériences) fut envoyée peu de temps après à l’Académie des Sciences de Paris (séance du 7 février 1910). La conclusion de cette note, après examen approfondi des résultats, fut un peu moins catégorique que celle de la note précédente. Nous croyons bien faire de lareproduire ici, car elle résume de facon définitive la première étape parcourue dans ces recherches. «Il résulte de ces chiffres que des deux formules proposées, celle de Lorentz « paraît seule donner des résultats compatibles avec l’expérience. Les divergences « avec la formule d'Abraham atteignent presque 4 °/,, alors qu'avec la formule « de Lorentz elles sont d'environ 1 à 2 °/;. Le mémoire complet relatif à cette première partie de nos recherches fut publié dans les Archives des Sciences physiques et naturelles, en avril 1911. En résumé, cette première étape avait conduit aux conclusions suivantes: la formule d'Abraham était nettement en désaccord avec l'expérience ; la formule de ! Les chiffres de ce tableau ne coïncident pas tout à fait avec ceux des tableaux définitifs, d’une part parce que ce tableau ne comprend que 23 séries d'expériences au lieu de 27, et d’autre part parce qu’une petite erreur systématique, sans importance pour les conclusions, s'était glissée dans le caicul de la valeur absolue des vitesses. 276 C.-E. GUYE Lorentz-Einstein, tout en étant compatible avec nos résultats, n’était cependant pas vérifiée avec une exactitude suffisante. Je résolus done de reprendre une nouvelle série d'expériences en y apportant d'importants perfectionnements de facon à en augmenter considérablement la précision. Mais, par suite de diverses circonstances et en particulier d’un surcroit d’occupations résultant pour moi de la charge de Doyen de la Faculté des Sciences que j'avais acceptée, cette nouvelle série ne put être entreprise que plus tard (Avril 1913). Une des principales causes d'erreur des expériences précédentes résultait de la variation rapide que subit la dureté du tube au cours d’une même série de mesures ; je décidai donc de substituer à lobservation directe des déviations, un enregistrement photographique beaucoup plus rapide. La méthode ne serait plus, il est vrai, rigoureusement celle des trajectoires identiques, mais il suffirait d’y apporter de très petites corrections, faciles à effectuer par une étude préliminaire, pour rendre à la méthode toute sa sécurité. Les inconvénients des variations de dureté du tube devaient être ainsi consi- dérablement réduits et les résultats obtenus enregistrés photographiquement auraient alors une entière objectivité. En outre la photographie de points de repère fixes tracés sur le fond du tube permettrait d'éliminer les erreurs provenant de lextension ou de la contraction de la gélatine. Telles furent les idées directrices qui ont servi de point de départ à notre second travail. Pour mener à bien cette seconde partie de notre tache, Je me suis adjoint M. Ch. Lavanchy, alors étudiant à l'Université de Genève, en qui j'ai trouvé un collaborateur aussi consciencieux qu'habile. Les résultats de cette seconde série d'expériences furent alors tout à fait coneluants. IIS furent présentés à la Soc. de Phys. et d'Hist. nat. de Genève le 1° juillet 1915 (Arch. 1915, t. 40, p. 166) et parurent aux C. R. de l’Acadé- mie des Sciences le 19 juillet 1915 (C. R., t. 161, 1915, p. 52) sous une forme plus complète, Is ont été communiqués en outre à la Société helvétique des Sciences naturelles le 14 septembre 1915 (Arch. 1915, t. 40, p. 334). Enfin le mémoire complet parut aux Archives des Sciences physiques el naturelles (t. 42, oct., nov. déc. 1916). Mais un périodique tel que les Archives ne pouvait publier ## extenso le relevé complet des diverses données d'expériences qui ont servi à établir les tableaux définitifs. L'importance du sujet nous faisait cependant un devoir de mettre en FORMULE DE LORENTZ-EINSTEIN 277 regard des tableanx où figurent les résultats définitifs, les données directes de l'observation qui ont servi à les établir. Cette publication à malheureusement été beaucoup retardée, en grande partie du fait des circonstances de la guerre ; c’est elle que nous présentons aujourd’hui. Nous avons donc fait figurer dans ce mémoire d’une part quelques considéra- tions générales sur linertie électromagnétique et la dynamique des grandes vitesses ainsi qu'un Court exposé historique des recherches antérieures, d'autre part un extrait des principaux chapitres des deux mémoires dont nous venons de rappeler la genèse. Nous y avons ajouté les données expérimentales directes et les tableaux complets relatifs au calcul des expériences par Ja formule d'Abraham, tableaux que nous avious cru devoir laisser de côté dans le mémoire de 1916 par suite du manque de place et de leur moindre importance. Enfin nous avons joint à cet ensemble, dans un appendice, un résumé des principales formules utilisées dans la théorie de l’inertie électromagnétique et quelques tableaux destinés à rendre plus facile la comparaison des deux théories. Nous espérons que ces don- nées seront de nature à abréger la tache de tous ceux qui seront appelés à effec- tuer des travaux dans des domaines analogues. Genève, le 30 juin 1921. C.-E. G. DYNAMIQUE DES GRANDES VITESSES. LA MÉCANIQUE NEWTONIENNE. — Pendant plus de deux siècles aucune science ne parut plus solidement et plus définitivement assise que la mécanique rationnelle telle que l'avaient créée Galilée et Newton. Il semblait que la simplicité des postulats qui sont à sa base en faisait une science « de tout repos >». Aussi le physicien éprouvait-il une satisfaction toute par- ticulière chaque fois que tel ou tel phénomène venait trouver son explication dans quelque image empruntée au domaine de cette science modèle. A l'heure actuelle, l’importance de la mécanique n’est en rien diminuée, mais ses bases et ses postulats ont été en quelque sorte revisés et élargis. Tel est en par- ticulier le cas de la notion fondamentale de #asse dont nous avons à nous occuper présentement. Ainsi que l’a indiqué M. Langevin, dans le brillant exposé qu'il a fait de cette question!, la notion de masse peut étre introduite en mécanique de trois façons différentes : ! L’inertie de l'énergie et ses conséquences, Journal de physique, p. 553, 1915. 278 C.-E. GUYE 1° La masse peut être envisagée comme coefficient d'inertie ; elle est alors définie par l’expression dv de qui signifie qu'il y a proportionnalité entre la force f qui agit sur un corps et l’aug- mentation de vitesse qu’elle lui communique dans l’unité de temps. l'a, (1) 2° La masse peut être considérée comme capacité d'impulsion, ou de quan hté de mouvement ; l'expression qui la définit est, dans ce cas G —= me. (2) G étant la somme géométrique des impulsions élémentaires, f.dt, communiquées au corps à partir du repos. 3° Enfin, on peut considérer la masse comme capacité d'énergie cinétique ; elle correspond alors à la formule bien connue : l NI — 9 (mm) v?. (3) Dans la mécanique newtonienne, ces trois définitions de la masse conduisent dune même valeur de m, et de plus, ce coefficient m demeure une constante pour un même corps ; il est en particulier absolument indépendant de la vitesse avec laquelle le corps peut se mouvoir. L’INERTIE ÉLECTROMAGNÉTIQUE. — Comme la propriété d'inertie attribuée à la matière constitue un des postulats fondamentaux qui sont à la base de la méca- nique rationnelle, cette science ne s'était guère préoccupée de donner une explication quelconque de cette propriété fondamentale, considérée a priori comme inhérente à la matière. Mais l’étude de l’électromagnétisme n’a pas tardé à montrer que les phénomènes d’induction et particulièrement de self-induction présentaient une grande analogie avec les phénomènes d'inertie et qu'ils pouvaient même fournir une ingénieuse explication de cette propriété, à la condition de prendre comme point de départ les équations du champ électromagnétique, telles que les avaient posées Maxwell et ses successeurs. Le problème d’une sphère électrisée (ou mieux d’un électron sphérique, c’est- à-dire d’une couche sphérique d'électricité) en mouvement illustrait particulière- ment bien cette nouvelle manière de concevoir l’inertie. Rappelons en quelques mots les bases de cette conception et considérons d’abord le cas où la vitesse de déplacement de l’électron reste petite par rapport à l'énorme vitesse avec laquelle se propagent les phénomènes d’induction, c’est-à- dre par rapport à la vitesse de la lumière. FORMULE DE LORENTZ-EINSTEIN 279 1. Cas des faibles vitesses. — Torsque la sphère est immobile elle est entourée d’un champ électrostatique dans lequel se trouve accumulée une quantité d'énergie, laquelle, en vertu de la théorie de Maxwell, peut être calculée par l'expression : PER fKkfæ (4) K désignant la constante diélectrique du milieu, f, la force électrique en un point et dr l'élément de volume en ce point; l’intégrale étant étendue à tout l’espace où se fait sentir l’action de la force électrique. Si maintenant la sphère se meut d’un mouvement uniforme avec une vitesse v, un champ magnétique s'ajoute à ce champ électrique et une nouvelle quantité d'énergie W,, s’accumule sous une forme inconnue dans le milieu qui entoure la sphère en mouvement. La théorie de Maxwell permet également de calculer cette nouvelle quantité d'énergie par l’expression: Me = = / fn di, (5) 2 désignant la perméabilité magnétique du milieu dans laquelle la charge électrique est plongée; f, la force magnétique résultant de son mouvement en un point de l'élément de volume dr. C’est cette énergie W,, que l’on peut alors appeler l'énergie cinétique, du moins dans le cas des petites vitesses où nous nous sommes placés. Or le calcul de l'expression (5) effectué dans le cas d’un électron sphérique conduit comme on sait à la relation : 112 6°» Le ==; — |? ) 2 Ë a | ‘ 9) expression analogue à celle d'une force vive, dans laquelle le facteur entre crochets représenterait précisément ce qu'est la masse en mécanique; c’est la masse électro- magnétique. Cette dernière masse dépend, on le voit, non seulement de la nature du milieu : et de la valeur de la charge e, mais de la loi suivant laquelle cette charge est répartie ; dans le cas particulier de l’électron sphérique, elle est inversé- ment proportionnelle au rayon « de la sphère sur laquelle la charge est supposée uniformément distribuée. Par une généralisation un peu hardie, il est vrai, on pouvait concevoir les corps matériels comme constitués uniquement par des charges positives ou néga- tives. Dans ce cas, la résistance que nous éprouvons à modifier la vitesse d’un corps matériel serait due aux variations d'énergie accumulée dans les innombrables 280 C.-E. GUYE champs magnétiques qui entourent chacune de ces charges. En outre, si ces char- ges positives ou négatives sont toujours séparées les unes des autres par des inter- valles suffisamment grands pour que leurs champs électromagnétiques n’empiètent pas pratiquement les uns sur les autres, quelles que soient les transformations physico-chimiques qui se produiront, l’inertie restera proportionnelle au nombre des charges et la loi de Ia conservation de la masse restera pratiquement satisfaite. Nous verrons plus loin que cette conception particulière de Pinertie à pu d’ailleurs être remplacée par une conception plus générale. 20 Cas des grandes vitesses. — Mais lorsque la vitesse de la charge élec- trique devient très grande, on ne peut plus se contenter de cette première appro- ximation conforme aux conclusions de la mécanique rationnelle. IT résulte en effet des équations générales du champ électromagnétique, qu'en un point d'un champ toute variation de la force magnétique en fonction du temps fait naître une force électrique et réciproquement, toute variation du champ électrique à pour consé- quence la production d’une force magnétique. Lors donc que la sphère se déplace d’un mouvement uniforme en entraînant avec elle son champ électrostatique et le champ magnétique dû à son mouvement, les variations de ce champ magnétique, considérées en un point fixe de l’espace, feront naitre en ce point une force électrique qui se composera avec le champ électrostatique primitif de facon à en modifier la distribution. Les champs magné- tique et électrique réagissent ainsi l’un sur l’autre, comme le veulent les équations de Maxwell et de Hertz. Le calcul exact conduit alors à une expression plus générale de la masse qui devient une fonction de la vitesse # de déplacement de la charge électrique. La masse cinétique (4) est alors définie par l’équation : a _ (W, + W.) — W, — 9 (u) nr, (7) Wet W,,étant les nouvelles expressions des énergies électrique et magnétique accu- mulées dans le milieu qui baigne la charge en mouvement, De plus, si on calcule les trois masses précédemment définies, on trouve pour chacune d'elles une expression différente. Dans le cas d’une sphère chargée superficiellement (électron sphérique), ces trois masses ont respectivement pour expression (Abraham) : 1 La formule (7) suppose que lélectron n’a subi aucune déformation du fait de sa vitesse. Lorsque l’électron subit une déformation du fait de sa vitesse, son énergie cinétique est égale à la variation de l'énergie électromagnétique diminuée de lPénergie qui correspond à sa contraction (Voir en particulier E.-M. Lémeray, Principe de relativité, Gauthier-Villars, 1916). (s FORMULE DE LORENTZ-EINSTEIN 28 l 1° Coefficient d'inertie 3 1 I 1 +8$ + 2 : ; y —= LL 5 og ne = ou masse longitudinale "1 "?4f B “1-8 1—/f% 20 Capacité d’impulsion ou masse transversale ou masse maupertuisienne ”) D — Up 15 l 82 l Gè 1 6 Feu E8 1] 0 PRES D 3° Capacité d'énergie ie SIN I 1 +8 . re u) —= by 55 | 52 108 — = que ou »#asse cinétique CE CIE ER 922 dans lesquelles y, — 34 charge à la vitesse V de la lumière. Il importe de rappeler que ces relations ont été établies dans l'hypothèse d’un mouvement quasistationnaire, c’est-à-dire qu'elles supposent que les variations de vitesse ne sont pas extrêmement brusques. v : ER Ç rapport de la vitesse v de translation de la Développées en série suivant les puissances de £?, les formules (1) deviennent CR RE CS Es — Lo LH +: + og + ONE RATS C0 - | ES? L: + = 8? + A ÿ B° + " . Comme on le voit, les expressions (1) tendent toutes trois vers la même valeur y, lorsque la vitesse de translation de la charge est très petite vis-à-vis de l’énorme vitesse de la lumière. Il en résulte que pour toutes les vitesses que lon considère en mécanique, les valeurs de ces trois masses sont numériquement les mêmes pour un même Corps, ainsi que le veut la mécanique newtonienne. Cette dernière science peat donc à ce point de vue être considérée comme un cas particulier d'une mécanique plus générale, la mécanique électromagnétique. LA MÉCANIQUE DE LA RELATIVITÉ. — Toutefois les formules (1) que nous venons de rappeler ne parurent pas définitives et le principe de relativité devait avoir pour conséquence non seulement de les modifier, mais surtout de les simplifier. On sait en effet que toutes les expériences tentées jusqu'ici en vue de déceler un mouvement de translation rectiligne et uniforme, auquel participent l’observa- teur et tous les corps en expérience ont conduit à des résultats négatifs. Or ce résultat expérimental paraissait difficilement conciliable avec l'hypothèse d’un éther MÉM. SOC. PHYS. ET HIST. NAT. DE GENÈVE, VOL. 39 (1921). 39 282 C.-E. GUYE immobile dans lequel les ondes lumineuses ou plus généralement les ondes électro- magnétiques se propageraient avec une vitesse constante. De cette difficulté est né le principe de relativité exprimé par la transformation de Lorentz ou les équations cinématiques d'Einstein. Pendant longtemps on avait cru que cette impossibilité de déceler physique- ment le mouvement de translation uniforme et rectiligne était due à l’imperfection des méthodes observation, lesquelles auraient dû permettre de constater des DR 9 différences de l’ordre de f? — ( ) ; © étant la vitesse de translation du corps V par rapport à l’éther et V la prodigiense vitesse de la lumière 1. On conçoit qu'il était dans ces conditions indifférent pour le physicien que l’éther fût immobile par rapport à la terre, ou relativement au centre du soleil ou à quelque autre corps (+) puisque toutes les vitesses relatives des corps matériels étaient insuffisantes pour donner au terme 5° une valeur appréciable à l'expérience. Mais les célèbres recherches de MM. Michelson et Morley devaient changer la face de la question et faire sortir les physiciens de leur douce quiétude. La mé- thode employée par ces auteurs, basée sur l’observation du déplacement des franges d’interférences était en effet très suffisamment précise, paraît-il, pour déceler des dif- férences de l’orde de £° si elles avaient existé. Les résultats furent cependant, comme on sait, nettement négatifs. Il fallait donc ou supposer que l’éther était entrainé par la terre — (mais alors que devenait l'explication de l'expérience de Fizeau et comment expliquer le phénomène de l’aberration) — ou renoncer résolument à la théorie des ondulations et aux équations du champ électromagnétique qui la représentent, pour reprendre quelque chose d’analogue à la vieille théorie de l’émission — (mais dans ce dernier cas on aurait à vaincre indépendamment des difficultés nouvelles, toutes celles qui historiquement avaient fait abandonner cette théorie ; c’est ce qu'avait tenté Ritz, sans pouvoir l’achever). En vue de mettre d'accord les résultats déconcertants de lPexpérience de Michelson avec l'hypothese d'un éther immobile, Lorentz et Fitzgerald furent alors conduits à la supposition étrange à première vue, que tous les corps, quels qu'ils fussent subissaient du fait même de leur vitesse de déplacement dans l’éther une petite contraction dans le sens de leur mouvement; de sorte que pour obtenir leur longueur à l’état de mouvement, il fallait multiplier la longueur à l’état de repos par le facteur W per ! Théorème de Veltmann. FORMULE DE LORENTZ-EINSTEIN 283 (facteur de Lorentz); le corps ne subissant d’ailleurs aucune modification dans sa dimension normale à la direction du déplacement". H. Poincaré à fait alors remarquer, dans le cas particulier de lélectron en mouvement, que cette contraction pourrait être attribuée à une pression hypothé- tique uniforme de l’éther, pression supposée indépendante de la vitesse. On peut, en effet, concevoir cette pression comme nécessaire à l'équilibre de Ia charge de l’électron, pour empêcher que ses diverses parties ne se dispersent en vertu de leurs répulsions réciproques ; ce qui revient à supposer, gratuitement 1l est vrai, que les lois générales de l’électrostatique sont applicables aux éléments constitutifs de l’électron comme elles le sont aux électrons eux-mêmes. Quoiqu'il en soit, H. Poincaré réussit à démontrer que sous l’action des forces électrostatiques, des forces électro- magnétiques développées par le mouvement de Pélectron, et de la pression de l’éther, la forme d'équilibre de lélectron était précisément celle qui correspondait à la contraction de Lorentz. D'ailleurs que cette contraction soit le résultat d’une pression hypothétique de l’éther (Poincaré) ou qu'on l’envisage comme une simple conséquence des modi- fications que le principe de relativité impose aux notions que nous nous'faisons du temps et de l’espace, elle a pour effet d'introduire dans le problème électromagné- tique d’une charge en mouvement une modification importante qui se répercute sur les diverses formules. Si l’on tient compte de cette déformation et que l’on effectue le calcul des diverses masses, on obtient alors les expressions (IP) (Lorentz-Einstein) considé- rablement plus simples que les formules (1) Uy —= u9 (1 == B°) | se (11) 9 1 = #3 | (1 — ff)" —1] | (om L Développées en série ces relations deviennent Pa — Po L: No 17 U — 1 + 5 P (2) 1 Lg + Cp + Ts u) —= uv NC A ra EN _ l 0 ar 1 GP 4.6. F SJ ; Il convient de rappeler que l'importance pratique de ce facteur de correction est en général nulle. ; __ km ; Dans le cas du mouvement de translation de la terre (o—27 -}) ,le rayon terrestre ne serait con- see tracté dans le sens du mouvement que de 6 em environ. 281 C.-E. GUYE Comme dans les formules (1) les trois masses y, (1) tendent à devenir égales à », lorsque £* devient négligeable. Elles satisfont donc aux conditions de lu mécanique newtonienne lorsque le terme G° et les suivants sont négligeables ; mais elles satisfont en outre à la formule de Lorentz- Einstein, quelle que soit d'ailleurs l'interprétation qu'on donne à cette relation. Bien que les formules qui précèdent résultent ici de considérations électroma- unétiques, elles paraissent cependant avoir une portée plus générale, En premier lieu les idées que nous nous faisons actuellement de Ia structure des atomes, lesquels seraient constitués uniquement par l'association de charges électriques positives et négatives tendent tout naturellement et de plus en plus à nous faire envisager les diverses forces physiques comme des forces électromagnétiques. Tout porte done à croire que les formules (11) sont applicables à la masse d’un corps quelconque quelle que soit la nature des forces qui agissent sur lui!. On peut également considérer ces formules comme une conséquence du prin- cipe de relativité. Envisagées de la sorte, elles prennent alors une portée beaucoup plus générale et deviennent la base d’une mécanique nouvelle et plus complète que celle que nous possédons depuis Gralilée et Newton; la mécanique des grandes vitesses ou la P] mécanique de la relativité? dont les équations fondamentales sont : . m AV m dv, m dv, 4 = 0 T 0 y 0 z te _r2 dt VÉTRE ee VA TE £° «lé équations qui se confondent avec celles de lamécanique rationnelle classique dans le cas particulier ou £* devient négligeable, c’est-à-dire lorsque la vitesse de déplace- ment du corps reste petite par rapport à l’énorme vitesse de la lumière. Or, ce cas particulier comprend, comme on sait, la presque totalité des mouve- ments que nous pouvons observer où même supposer. Il embrasse toute la méca- nique des ingénieurs et même celle des astronomes et des physiciens dans son " Dans cet exposé, j'ai cru devoir laisser complètement de côté la gravitation et l’interprétation qu’en a donnée M. Einstein par son principe de relativité généralisée; les expériences sur les rayons cathodiques de grande vitesse n’intéressant en effet que le principe de relativité restreinte. Rappelons cependant que Eotsvüs à démontré par des expériences d’une sensibilité admirable la proportionnalité qui doit exister entre la masse pesante (gravifique) et la masse inerte. Ce savant a, comme on sait, montré que la direction du fil à plomb, résultante de la pesanteur et de la force centrifuge terrestres, est indépendante de la nature du corps suspendu. Il faut donc en conclure que les deux masses pesante et inerte sont toujours propor- tionnelles Pune à l’autre. ? On sait que l’anomalie du déplacement du périhélie de « Mercure » est notablement réduite si l’on introduit dans le caleul le principe de relativité restreinte. Elle disparait tout à fait par lPapplication du principe de relativité généralisée. FORMULE DE LORENTZ-EINSTEIN 289 ensemble à lexception cependant dun petit nombre de phénomenes qui ont pu jusqu'ici être étudiés avec une précision suffisante pour déceler une différence entre l’ancienne et la nouvelle mécanique. Au premier rang de ces phénomènes se place naturellement la détermination de la variation d'inertie des électrons du radium et des électrons cathodiques de grande vitesse dont létude présente de ce fait un immense intérêt !. Mais cette variation de l’inertie en fonction de la vitesse n’est qu'une des conséquences du principe de relativité. D’autres, non moins importantes, viennent se greffer sur le nouveau principe, pour en accroître considérablement l'intérêt, alors même que ces conséquences ne peuvent encore étre soumises à un contrôle expérimental décisif, direct. Nous nous permettrons dans cette introduction d'en rappeler une des plus importantes en vertu même de la confirmation que lui ont apportée nos expériences. L'inertie d'un corps serait proportionnelle à son contenu d'énergie, où plus exactement, le contenu d'énergie dun corps (exprimé en ergs) est égal à son inertie (en grammes) multipliée par le carré de la vitesse de la lumière om . (en a): SOIT E—=mNV:. Si l’on à soin, comme l’a fait remarquer M. Langevin, de choisir comme unité de vitesse, celle de la lumière, l’expression devient E— m et le principe de la conservation de l'énergie se confond alors numériquement avec celui de la conservation de la masse. Inertie et énergie deviennent ainsi imséparables lune de l’autre ; ce sont les deux aspects d'une seule et même chose. Comme on sait, la vérification de cette dernière conséquence n’a pu jusqu'ici être faite directement au moyen de la balance. La variation de masse qui devrait dans cette manière de voir théoriquement accompagner le refroidissement d’un corps (par ex.) est bien trop petite pour que l'expérience la plus délicate puisse la révéler. Il suffit de jeter un coup d'œil sur la formule précédente pour s’en convamere. De méme les réactions chimiques les plus puissantes ne dégagent jamais assez d’éner- gie pour produire des variations de masse appréciables à la balance et le principe de la conservation de la masse se trouve de ce fait pratiquement satisfait dans ? Les phénomènes qui ont pu être étudiés jusqu'ici avec une précision suffisante pour faire intervenir le terme en B° sont actuellement encore très peu nombreux. Il convient de citer Pexpérience de Michelson ; le mouvement de la planète « Mercure » ; les mouvements électroniques à l’intérieur de l'atome (Sommer- feld) et les variations d'inertie des électrons du radium ou des rayons cathodiques de grande vitesse. 286 C.-E. GUYE toutes les réactions physico-chimiques observées quelle que soit l’énergie qu’elles dégagent. On à lieu de croire cependant qu'il n’en est pas de même pour Ics réactions intraatomiques de Ja radioactivité, qui proportionnellement à la masse des corps en jeu dégagent d'énormes quantités d'énergie ; c’est comme on sait à cette ingénieuse hypothèse que M. Langevin attribue la raison du fait que les poids atomiques des corps simples ne sont pas des multiples exacts de celui de l'hydrogène. Mais, si cette conséquence des formules de Lorentz-Einstein ne peut étre à l’heure actuelle vérifiée directement par la balance, la dynamique des électrons peut en fournir une preuve indirecte. On peut en effet, en s'appuyant sur le principe de relativité, démontrer que l'inertie d'un corps en mouvement doit être plus grande qu'au repos ; puisqu'à son contenu d'énergie à l’état de repos s'ajoute une énergie cinétique. En d’autres mots, si l’on multiplie la différence entre la masse transversale 4 d’un électron en mou- vement et sa masse au repos v, par le carré de la vitesse de la lumière on retrouve l'expression de l'énergie cinétique de l’électron, conformément à la relation 1 (W)=— {1 — HEIN = (1) v° Il sufiirait de remplacer dans cette expression # et (y) par leurs valeurs déduites des relations précédentes pour avoir une identité. En résumé la vérification de la formule de Lorentz- Einstein pour les électrons de grande vitesse, constitue du même coup une vérification expérimentale indirecte de premier ordre de la relation mN? — E qui réunit en un seul principe le prin- cipe de la conservation de l'énergie et celui cle la conservation de la matière. On conçoit dès lors l'importance que présentent les recherches expérimentales sur l’inertie des charges électriques en mouvement très rapide, puisque à lheure actuelle elles constituent la vérification expérimentale peut-être la plus directe de Pune des conséquences les plus importantes des nouvelles théories ; le parallélisme entre l’inertie et l’énergie. Or, si l’on réfléchit à l'importance de ces vérifications, on reste surpris de la facilité avec laquelle nombre de physiciens ont admis la validité des formules de la relativité pour les charges en mouvement, avant même qu’elles aient été effecti- vement vérifiées par l'expérience. En effet, les expériences effectuées jusqu'ici sur les rayons cathodiques permettaient tout au plus de conclure que les résultats n'étaient pas en contradiction avec ces formules. Pour quiconque veut bien se donner la peine d'analyser les divers travaux qui ont été effectués dans ce domaine, il est aisé de se rendre compte du peu de préei- sion obtenu dans ia plupart de ceux que lon cite le plus souvent. FORMULE DE LORENTZ-EINSTEIN 287 Comment sur un cliché «grand comme l’ongle » peut-on par ex. avec quelque certitude, déterminer par des procédés photométriques l’équation d’une courbe qui s’y trouve tracée assez peu nettement ? Comment garantir qu’un potentiel de 80000 volts à été mesuré à + 80 volts, alors que cette petite différence suffit à valider la formule d'Abraham ou celle de Lorentz-Einstein. Vraiment pour considérer ces vérifications comme satisfaisantes il faut être animé, semble-t-il, d’un très vif désir de voir les faits corroborer des hypothèses séduisantes. On croit facilement ce qu’on désire, a-t-on coutume de dire; c’est une vérité à laquelle n’échappent pas plus les physiciens que les autres hommes. Mais il convient d'ajouter que cette tendance à exagérer la précision des résultats obtenus est surtout marquée chez les physiciens qui ne sont pas spécialisés dans ces recherches délicates: les auteurs même des mémoires ont été bien souvent beaucoup moins catégoriques que ceux qui les citent. Nous reviendrons sur ce point au chapitre suivant. C.-E. G. APERÇU HISTORIQUE. Les travaux effectués sur la variation d'inertie des électrons en fonction de la vitesse peuvent se diviser en deux catégories; ceux effectués sur les électrons 8 du radium et ceux relatifs aux électrons cathodiques. 1. Travaux effectués sur les rayons B du radium — De 1902 à 1906 M. Kaufmann!' a donné les résultats de ses recherches dans une série de commu- nications. Dans ces expériences, les rayons émis par un grain de bromure de radium sont déviés simultanément, dans deux directions perpendiculaires, par deux champs ; un champ électrique et un champ magnétique. En vertu de la nonhomogénéité du faisceau de rayons B, cette double déviation détermine sur une plaque photogra- phique une courbe continue. Par le renversement du champ électrique, on obtient une seconde courbe symétrique de la première. Ce sont les coordonnées de ces deux courbes (approximativement paraboliques) que M. Kaufmann mesurait au microscope. Ces mesures combinées avec celles des champs déviants donnerent des résultats ne vérifiant pas la formule de Lorentz-Einstein, mais concordant bien soit avec la théorie d'Abraham, soit avec celle de Bucherer-Langevin. Les recherches très soignées de M. Kaufmann ont provoqué de nombreuses ! KaurMaNx. Ann. d. Phys. 19, 1906, p. 497, De. RC On nd 288 C -E. GUYE ET C. LAVANCHY discussions! auxquelies ont pris part spécialement MM. Planck, Stark, Heil. M. Heil? conclut de son analyse que les mesures de M. Kaufmann n'arrivent à vérifier la théorie d'Abraham, plutôt que celle de Lorentz, qu'à la condition d’ad- mettre, d’une part, une valeur de = égale à 1,84 >< 107 et, d'autre part, une ) 1 te) ke} y] ) Do erreur possible d'environ 4 °/, sur les mesures de la tension aux plateaux du condensateur produisant la déviation électrique. En 1908, M. Bucherer* à entrepris, par une méthode différente, de nou- velles recherches sur les rayons 5. Le faisceau produit par un grain de fluorure de radium passe d’abord dans une première région où il est soumis à l’action simulta- née dun champ électrique et d’un champ magnétique homogènes. Sous l’influence de ces deux champs, d'une disposition et d’une intensité telles que leurs actions se compensent, les corpuscules conservent, dans cette région, une trajectoire rectiligne. Puis dans une seconde région le champ électrique est supprimé, le champ magné- tique homogène agissant seul: le faisceau y décrit alors une trajectoire circulaire. La déviation ainsi obtenue s’enregistre sur un film photographique. La connais- sance des champs, la mesure de la déviation du faisceau et celle de la distance séparant le film photographique des bords du condensateur permettent de calculer par les formules théoriques, soit d'Abraham, soit de Lorentz-Einsteim, la vitesse £ et la valeur de * correspondante. L'hypothèse exacte sera évidemment celle qui bo donnera pour —, ainsi déterminé, une valeur constante. De ses expériences, Do M. Bucherer conclut à l'exactitude de la théorie de Lorentz-Einstein. Ces recherches ont donné lieu à une longue polémique entre leur auteur et M. Bestelmeyer‘. D’après M. Bestelmeyer, un seul travail effectué avec un seul appareil, était insuffisant pour autoriser l’auteur à formuler une conclusion aussi précise sur une théorie d’une telle importance. C’est dans le but de compléter ces recherches, en s'inspirant des critiques résumées ci-dessus, que M. Neumann’ à linstigation de M. Schaefer, à repris ! Ces discussions ont porté spécialement sur le calcul du champ électrique et sur lionisation pos- sible des gaz résiduels entre les plateaux du condensateur chargés à une différence de potentiel de 2500 à 3000 volts. ? Herr, Dissertation, Berlin, 1909 3 Bucuerer, Phys. Zeit. 9, 1908, p. 753; Verh. d. D. Phys. Gesell. 10, 1908, p. 698; Ann. d. Phys. 28, 1909, p. 514. 1 Voir spécialement BesreLmeyer. Ann. d. Phys. 30, 1909, p. 166 et 32, 1910, p. 231 ; et BUCHERER, Ann. de Phys. 30, 1909, p.974. ® NeumaANN, Ann. d. Phys. 45, 1914, p. 529. Voir aussi ScxAgrer. Verh. d. D. Phys. Gesell. 15, 1915, p. 935 et Phys. Zeit. 14, 1913, p. 1117. FORMULE DE LORENTZ-EINSTEIN 289 la méthode et le dispositif de M. Bucherer, modifié dans ses détails seulement. Les résultats de ce travail vérifièrent à nouveau, et avec une plus grande exactitude, la formule de Lorentz-Einstein dans des limites de vitesses comprises entre B — 0,4 et B — 0,7. L'auteur constate une moins grande concordance pour la région BG — 0,7 à 6 — 0,8, sans cependant arriver à l'expliquer. Par une discus- sion détaillée de ses expériences, l’auteur montre que, pour les grandes vitesses tout au moins, les erreurs de pointé nécessaires pour passer d’une théorie à l’autre paraissent absolument madmissibles, étant donnée Ja précision des mesures", 2. Travaux effectués sur les rayons cathodiques. — Indépendamment des re- cherches de M. Stark ? qui n'avaient pas été effectuées sur des rayons de vitesse suffisamment grande pour permettre la discussion des théories en présence, et qui n'avaient d’ailleurs pas d’autre but que de mettre en évidence la variation de la masse de l’électron avec la vitesse, trois travaux, dont les résultats ont été publiés presque simultanément, ont été entrepris pour étudier la loi de cette variation sur des rayons cathodiques de grande vitesse. Le premier en date est celui de M. l’roctor *._ Le faisceau cathodique, produit par une machine statique, était dévié successivement par un champ électrique et un champ magnétique. La masse et la vitesse des rayons se déduisaient de la con- naissance des champs déviants et de la mesure au cathétomètre des déviations élec- trique et magnétique. Ces recherches, effectuées sur des rayons cathodiques de vitesses comprises entre 12 et 43°/, de la vitesse de la lumière, ont conduit leur auteur à conclure à l'exactitude, aux erreurs d'expérience près, de la formule d'Abraham, celle de Lorentz étant, selon son avis, indiscutablement fausse. M. Hupka*, au contraire, en mesurant, d’une part, le potentiel de décharge à la cathode et, d'autre part, la déviation obtenue par un champ magnétique d’in- tensité connue à trouvé une très grande concordance entre ses résultats et la for- mule de Lorentz-Einstein, et cela dans de grandes limites de vitesse (de 5 — 0,35 à B — 0,53). Mais ses recherches ont donné lieu à de graves critiques de la part de 1 Note additionnelle. — M. Schaefer à indiqué, plus tard, qu’il était parvenu à expliquer lPerreur systématique qui paraissait exister pour cette région. Ayant répété les mesures des clichés douteux au moyen d’un microphotomètre de précision, cet auteur a annoncé de nouveaux résultats en bonne concor- dance avec la théorie de Lorentz-Kinstein (C. ScHarrer, Ann. d. Phys. 49, 1916, p. 934). Il a même poussé les mesures plus loin en utilisant un cliché qui n’avait pas été mesuré avec une précision suffisante au moyeu de l'instrument dont s’était servi M. Neumann. tésumant alors en un seul graphique les résultats de M. Bucherer et ceux de M. Neumann corrigés, M. Schaefer arrive à la conclusion que la théorie de Lorentz-Kinstein peut être considérée comme exacte pour des vitesses comprises entre 0,3 et 0,85 de celle de la lumière. 2 Srark, Verh. 4. D. Phys. Gesell, 5, 1903. p. 241. 3 Procror, Phys. Rev., 30, 1910, p. 53. 3 Hupxa, Ann. d. Phys., #1, 1910, p. 169; Verh. d. D. Phys. Ges. MÉM. SOC. PHYS. ET HIST. NAT. DE GENÈVE, VOL. 89 (1921). 36 200 C.-E. GUYE ET C. LAVANCHY M. Heil ft. Cet auteur à montré qu'il suffirait d’une erreur dans la mesure du potentiel de décharge de # 80 volts, erreur prise d’une façon systématique, pour amener la coïncidence des résultats de M. Hupka, avec l’une ou l’autre des deux théories. M. Heil à en outre calculé à nouveau, d’après les dimensions des appareils, la valeur des déviations produites sur le fond du tube par le champ magnétique. La différence de grandeur entre ces déviations observées et calculées serait voisine de 10/4. Il y aurait donc là une erreur systématique inexpliquée. De l’ensemble de son analyse, M. Heil conclut que les recherches de M. Hupka ne peuvent être considérées comme vérifiant la théorie de Lorentz- Einstein ?. Dans leurs recherches, MM. C.-Z. Guye et S. Ratnowsky* ont utilisé les déviations électrique et magnétique successives du faisceau cathodique produit par une source alternative disposée de façon telle qu’elle donnait aux bornes du tube un potentiel de décharge à peu près constant. Mais, afin de rendre leurs résultats plus comparables, ils ramenaient le faisceau à une déviation toujours la méme. Ainsi, les corpuscules suivaient des trajectoires identiques, et, pour des mesures précises, il n'était plus nécessaire de faire intervenir dans les calculs la connaissance des champs magnétique et électrique en chaque point de la trajectoire. Les résultats de ces expériences meompatibles avec la formule d'Abraham ne vérifiaient qu'impar- faitement celle de Lorentz-Einstein À. Ainsi, de ces trois travaux effectués sur les rayons cathodiques, l’un, celui de M. Hupka, paraissait, à première vue, vérifier avec beaucoup d'exactitude la for- mule de Lorentz-Einstein; mais ses conclusions n'étaient guère acceptables étant données les critiques dont ce travail à été l’objet ; un second, celui de M. Proctor, concluait plutôt à la théorie d'Abraham à lexclusion de celle de Lorentz-Eimsteim; tandis que le troisième, celui de MM. C.-E. Guye et S. Ratnowsky, donnait des Ile, Ann. d. Phys, 31, 1910, p. 519. ? « Mit Hupkaschen Messungen weder die Relativthcorie noch die Kugeltheorie vereinbar ist ». (Loc. cit. p. 530). 3 CE. Guve et S. Rarnowsky, C. R. de l’ Acad. des Se., 150, 1910, p. 326; Arch. des Sc. phys. et nat., 31, 1911, p. 293. ‘ Note additionnelle. — Postérieurement à la publication aux C. R. des résultats de notre dernier travail, M. L.-T. Jones a présenté au Congrès de l'American Phys. Society de San Francisco 2-7 août1915 les premiers résultats d’une étude sur la variation d'inertie des rayons cathodiques. M. Jones a opéré, par l'enregistrement photographique de la déviation simultanée du faisceau cathodique au moyen de deux champs (électrique et magnétique), méthode analogue à celle qu'avait employée cet auteur pour la déter- mination de —. Les résultats obtenus par cette méthode sont plus favorables à la théorie de Lorentz- [0 Einstein qu’à celle d'Abraham (L.-T. Jones, Phys. Rev. p. 52, 1916). Ils confirment donc nos résultats. A noter que l’auteur opère dans des champs aussi uniformes que possible, mais que la valeur du champ électrique dépend de la constante diélectrique du verre du cliché photographique placée sur l’une des armatures du condensateur. FORMULE DE LORENTZ-EINSTEIN 291 résultats voisins de la formule de Lorentz-Einstein et nettement incompatibles avec celle d'Abraham. Il y avait donc un grand intérêt à effectuer de nouvelles déterminations. Ce sont les résulats de ces recherches, entreprises au printemps 1913 au Laboratoire de PUniversité de Genève, qui font l’objet de notre second mémoire. Ces résultats, comme on le verra plus loin, vérifient la formule de Lorentz-Kinstein avec une grande exactitude dans les limites de vitesse comprises entre 23 et 48 ?/, de celle de la lumiere. ‘ C.-E. G. et C. L. Il est toujours très délicat de porter un jugement sur le degré de précision de travaux auxquels on n'a pas participé; aussi nous bornerons-nous ici à quelques remarques générales qui résultent de notre expérience personnelle du sujet et sans lesquelles une saine critique ne peut à notre avis s'exercer Judicieuse- ment. En premier lieu, il est très difficile d'évaluer par le caleul les intégrales de champ avec une précision suffisante pour que l'erreur commise de ce fait ne soit pas du même ordre de grandeur que la différence qui permet de trancher entre l’une ou l’autre théorie; €’est là à notre avis le principal avantage de la méthode des trajectoires identiques. Cette évaluation est particulièrement délicate lorsque les champs, électrique et magnétique, ne sont pas rigoureusement uniformes dans toute l'étendue de la trajectoire des électrons; le problème ne peut guère alors être résolu exactement que par approximations successives, car sa résolution complète suppose la connais- sance préalable aussi exacte que possible de la trajectoire. Lorsqu'il s’agit d'évaluer par le calcul l'intégrale de champ électrostatique, les difficultés sont plus grandes encore. Les perturbations quise produisent au voisi- nage des bords du condensateur (lesquelles dépendent de la forme générale du tube) sont en particulier impossibles à calculer avec précision, comme nous avons pu nous en rendre compte en comparant les résultats de l'expérience à ceux du caleul (voir page 307). Les corrections plus ou moins arbitraires qu'on effectue de ce fait sont done pour le moins très douteuses. Cette dernière difficulté à été, il est vrai, éliminée par divers auteurs et par M. Jones en particulier, le champ électrostatique que traverse le faisceau catho- dique étant théoriquement uniforme; mais alors, par sa présence entre les pla- teaux du condensateur, la plaque de verre du cliché doit, semble-t-il, introduire dans l'évaluation du champ électrique les incertitudes qui peuvent résulter du fait d’un diélectrique solide et de ses charges résiduelles. Les méthodes qui nécessitent la mesure très précise, à la pression atmosphé- 292 C.-E. GUYE rique, d’un potentiel de décharge élevé! sont également très difficilement appli- cables. Enfin les expériences dans lesquelles il n’a pas été tenu compte de la dissy- métrie créée par le champ magnétique terrestre, ou celles pour lesquelles des précautions spéciales n’ont pas été prises pour éviter les perturbations résultant de la présence de charges électriques sur les parois du tube, sont sujettes à caution. Toutes ces erreurs peuvent en réalité être très petites, mais il convient de se souvenir que la différence qu'il s'agit d'évaluer pour trancher entre l’une ou l’autre théorie, est elle aussi, très petite. Il en résulte qu’une expérience dont les résultats sont en conformité avec telle ou telle théorie, ne constitue pas nécessairement une preuve concluante en sa faveur. Beaucoup d'expériences sont douteuses et si la théorie de Lorentz-Einstein n’a pas tardé à trouver plus de résultats en sa faveur, c’est peut-être aussi en partie parce qu'elle est plus suggestive et qu’en vertu même de son prestige on a eu jusqu'ici plus de hâte à publier les résultats qui la confirment que ceux qui l’infirmeraient. C’est cette préoccupation qui nous à engagé à reprendre dès 1913, en colla- boration avec M. Ch. Lavanchy, de nouvelles déterminations, et cela par un dispositif très étudié, éliminant autant que possible la plupart des incertitudes que nous venons de mentionner. Ce sont ces nouvelles déterminations qui font l’objet du second de nos deux mémoires. C.-E. G. ! Pour,des rayons cathodiques atteignant la moitié de la vitesse de la lumière ce potentiel de décharge est de près de 50000 volts. FORMULE DE LORENTZ-EINSTEIN 293 PREMIÈRE PARTIE Expériences de MM. C.-E. Guye et S. Ratnowsky'. MÉTHODE. Choix de la méthode. — Le but que nous nous sommes proposés était avant ! ,» . res . LU. . . tout de déterminer avec le plus de précision possible le rapport — de linertie des l. corpuseules cathodiques de grande vitesse à celle des corpuscules cathodiques de faible vitesse. Il s'agissait donc en premier lieu de rendre aussi comparables que possible les mesures effectuées sur les deux catégories de rayons cathodiques. Cette considération nous à guidés dans le choix de la méthode. ! se > , . . 72 2 . Nous avons utilisé pour la détermination du rapport — la méthode consistant D. à observer la déviation d’un faisceau cathodique sous l’action successive et alternée d’un champ électrique et d’un champ magnétique. Cette méthode est susceptible de donner des résultats très comparables, si l’on a soin d'opérer à déviation constante et à champ magnétique ou électrique variables. Dans ces conditions, on élimine en ! a « LL. . . . . . effet presque complètement du rapport = l'incertitude qui existe toujours sur la forme exacte et la valeur des champs électrique ou magnétique que traverse le corpuscule. C’est précisément à cause de cet avantage que nous avons appelé cette méthode méthode des trajectoires identiques *. En effet, à la condition d'annuler préa- 1 Nous donnons ci-après un extrait des principaux chapitres du mémoire publié aux Archives des Sc. phys. et nat. Avril 1911. ? La méthode de déviation constante a été utilisée antérieurement à la publication de notre travail par M. Malassez dans des recherches entreprises à l’instigation de M. le professeur Langevin. L'auteur ne mentionne pas qu’il ait annulé le champ terrestre; il est à présumer que dans le cas particulier de ces expériences, cette précaution était inutile. 294 C.-E. GUYE ET S. RATNOWSKY lablement le champ terrestre, les corpuscules de grande ou de petite vitesse suivent alors pratiquement la méme trajectoire dans toutes les expériences. On peut dans ces conditions expérimenter sans inconvénient sur de plus grandes déviations. Cette méthode présente en outre l'avantage de ne pas nécessiter la mesure précise, toujours délicate, de très hauts potentiels de décharge (80000 volts envi- lon si l’on veut atteindre la moitié de la vitesse de la lumière). En outre, en ayant soin d’alterner les déviations électriques et magnétiques et en multipliant les mesures, on peut espérer atténuer dans les moyennes l'effet des variations qui se produisent dans la vitesse d'émission des corpuscules, variations qui résultent des changements de dureté du tube ou des conditions mêmes de Ja dé- charge et qui constituent une des principales difficultés des expériences à haut voltage. Trajectoires identiques dans un champ magnétique. — Considérons le cas de rayons cathodiques ayant une faible vitesse d'émission (tube mou). Nous avons pour un point quelconque de la trajectoire la relation bien connue pu” P masse transversale du corpuseule (électron) ; v sa vitesse; , rayon de courbure de — Hve SIN x la trajectoire; H intensité du champ magnétique; + angle formé par la direction de la vitesse avec celle du champ magnétique; + charge du corpuseule. Supposons des corpuscules cathodiques de grande vitesse (tube dur) arrivant au même point, dans la même direction; nous aurons semblablement — H'v'e sin x F la direction du champ H” étant supposée la même que celle de FT. Pour que les deux trajectoires se maintiennent identiques il faut que lon ait 8 = p'; il vient alors PAU EN uv H Si les deux champs magnétiques sont produits par des bobines fixes (sans fer) parcourues successivement, par les courants Let [ces champs seront en chaque point proportionnels aux intensités Let I” et l’on aura p'v en 1 pv 1 I Il est aisé de voir que cette condition peut étre satisfaite simultanément pour FORMULE DE LORENTZ-EINSTEIN 29 tous les points de la trajectoire puisque 4° v' y v sont précisément des constantes pour tous les points de cette trajectoire !. Il importe de remarquer que la démonstration précédente n’est valable qu'à la condition d’avoir annulé préalablement le champ magnétique terrestre ou du moins sa composante déviante, Ce résultat est atteint dans nos expériences comme on le verra plus loin par l'emploi d’un système de cadres compensateurs parcourus par des courants constants. Trajectoires identiques dans un champ électrique. — Dans un champ élec- trique, le corpuscule n’a plus rigoureusement ni une vitesse ni par conséquent une masse constantes, puisqu'il passe d’une surface équipotentielle à une autre surface équipotentielle. Mais pratiquement, dans les limites de nos expériences, ces varia- tions de vitesse n'étaient que de quelques pour mille. Un calcul approximatif nous a montré que les variations qui en résultent sur la trajectoire sont plus petites que celles qui correspondent à la précision de Ia mesure des champs électriques?. Il n’y a donc pas lieu d’en tenir compte. On peut ainsi admettre par un raisonnement analogue au précédent que la relation uv? F — — = — Constante LOI E est pratiquement satisfaite pour tous les points de la trajectoire, F et F' étant les champs électriques au point considéré. Expérimentalement ces champs sont produits en élevant plus où moins la différence de potentiel des armatures du condensateur à l’intérieur du tube. Principe de la méthode. — Tia condition d'identité des trajectoires étant pra- tiquement réalisée, représentons les déviations électriques et magnétiques mesurées successivement sur des corpuscules de petite et de grande vitesse ; nous aurons Déviation électrique Corpuscules de petite vitesse Corpuscules ae grande vitesse eV V' | Ye |A] T (1) y — [A] (3) uv° HU Dévialion magnétique Corpuscules de petite vitesse Corpuscules de grande vitesse A : no L y —=[B] (2) JD (4) uv l (Q 11 n’y a qu’au voisinage immédiat de la cathode, dans l’espace où le corpuscule prend sa vitesse que cette relation n’est pas satisfaite ; mais dans cette partie de la trajectoire très éloignée des bobines magné- tisantes le champ magnétique IT est sensiblement nul; il en est donc de même de la déviation. * Il faudrait que les champs électriques fussent mesurés avec une précision de l’ordre des dix-millièmes. 296 C.-E. GUYE ET S. RATNOWSKY Dans ces expressions y représente ia déviation, la méme dans une même série d'expériences ; FAT est l’intégrale de champ électrique ; soit en première approxi- mation TL fa fr 0 Le 0 (2 mesurée le long de la trajectoire pour une différence de potentiel V — 1 entre les plateaux du condensateur qui crée ce champ ; [Best l'intégrale de champ magné- tique ; soit approximativement x far Hi MH pour l'intensité de courant T — 1 traversant les bobines qui produisent le champ ! représentent respectivement la charge de électron, magnétique. Enfin y © u' 0 sa masse transversale et sa vitesse dans le cas des petites et des grandes vitesses. De ces quatre relations on tire UNIL (D) ver NA DORA vÜ Lo ! L. F : , à A Le rapport “— se déduit donc des valeurs relatives de deux intensités et de lb. deux différences de potentiel mesurées sur le même instrument. (I) Détermination de la vitesse absolue des corpuscules. Mais pour comparer les résultats de l’expérience à ceux que donnent les formules théoriques il est nécessaire de connaître la valeur absolue des vitesses v et v’. Pratiquement il suffira dans chaque série d'expériences de connaitre une seule de ces vitesses pour que toutes les autres soient déterminées par la formule JT. Considérons en effet les formules (1), (2), (3), (4) qui donnent les déviations électriques et magnétiques; elles nous permettent de déterminer en valeur absolue si l’on connaît l’une des constantes [A] ou [B] d’une part et le rapport — D. d'autre part ; les autres quantités étant facilement accessibles à l'expérience. Diverses considérations nous ont engagés à déterminer la constante [ A. Dans ce but nous avons effectué quelques expériences sur des rayons de faible vitesse, en mesurant le potentiel de décharge U et la déviation y. On à dans ce cas la relation bien connue DEEE (u)0* (5) FORMULE DE LORENTZ-EINSTEIN 207 qui, combinée avec l'équation (1), nous donne! [A]=25 À y (6) (y) lb étant très voisin de lPunité?. Le calcul de la vitesse absolue nécessite en second lieu la connaissance du € < ,, rapport — de la charge à la masse transversale de l’électron. Ce nombre est connu 72 par l’ensemble des recherches antérieures sur les rayons cathodiques ; de plus pour les rayons cathodiques de faible vitesse il est à peu près indépendant «des théories proposées. Nous avions adopté, dès le début de nos recherches, comme base de nos calculs la valeur F= € bo Des recherches plus récentes ont conduit à la valeur 1,77 >< 107. Nous verrons plus loin qu’elle peut être sur les résultats l'influence de la valeur choisie. — 1,818 >< 101{(Sinon). Comparaison avec les formules théoriques. — Ta connaissance de la cons- tante [A] et du rapport — pour les rayons lents permet done de déduire la 122 i vitesse absolue » de ces rayons par la formule (1), tandis que la relation (I) donne alors la valeur absolue de la vitesse »'" des rayons cathodiques de grande vitesse. Ces vitesses étant ainsi déterminées, il devient possible de comparer les ! valeurs - fournies par l'expérience à celles déduites des formules théoriques bien U. connues de Lorentz ou d'Abraham relatives aux masses transversales. ! La constante [A] a l'avantage d’être indépendante du rapport — (voir équation (6) tandis que É LL la constante [B] obtenue à l’aide des équations (3) et (2) contient ce rapport soit — Ÿ,/ p W) Be 54/2 ou # On sait que la masse (1) de l'équation (5) diffère d’une petite quantité de la masse transversale des équations (1), (2), (3), (4), mais pour de faibles vitesses la différence est très petite et l’on peut aisé- ment effectuer la correction. Dans ce but on déterminera par l'équation (1) la valeur approchée de la € vitesse © en supposant [A] — - Y, puis on cherchera qu’elle est dans l'hypothèse de Lorentz ou (Cu ; : ; NE / d'Abraham la valeur de w) qui correspond à cette vitesse, Ce calcul est grandement abrégé si l’on a soin be . : : (2) b. . de construire une fois pour toutes les courbes de “— et de — en fonction de v dans les deux hypo- Jo Ho d à ; ; NE ; _—. thèses. Les courbes de | à | sont représentées en réduction à la fig. 5 de ce mémoire. Uo MÉM. SOC. PHYS. ET HIST. NAT. DE GENÈVE, VOL. 89 (1921). 37 298 C.-E. GUYE ET S. RATNOWSKY l Lorentz É | —(g) : 7 (Lorentz) él (le—16*) (7) (Abraham) # | — Es | LR log: Les — | (8) tp, LA 46? | 28 ? 1 —8$ Dans ces expressions G est, comme on sait, le rapport de la vitesse du corpus- cule à celle de la lumiere, 4, la masse pour des corpuscules infiniment lents. EXPÉRIENCES. Nous donnons ci-après (fig. 1) le schéma général du dispositif de nos expé- riences. Fig. 1. — Schéma général du dispositif: A alternateur haute fré- quence; E transformateur élévateur de tension ; B bobine d’induc- tion; DV: ampèremètre et voltmètre primaires; {€ tube cathodique (e cathode, & anode, b bobines produisant le champ magnétique déviant); S soupape; TTT terres; CC’C” commutateurs; Ac batterie d'accumulateurs ; P batterie de piles donnant la tension au condensa- _ teur du tube; M.A.V. milliampèremètre de précision fonctionnant comme ampèremètre avec le shunt $ et comme voltmètre avec la A résistance R. Les commutateurs sont disposés pour la mesure de la déviation magnétique. Production des rayons cathodiques. — Pour produire la tension nécessaire à l'émission des rayons cathodiques, nous avons utilisé le courant d’un alternateur à haute fréquence (1000 à 1200 périodes à la seconde), surélevé dans un premier transformateur et lancé dans le primaire d’une grande bobine d'induction (Fig. 1). FORMULE DE LORENTZ-EINSTEIN 299 Sous le rapport de la régularité de fonctionnement du tube, Palternateur présente, du moins pour les tensions très élevées, un avantage sur la machine élec- trostatique. "Avec cette dernière, le débit est toujours si faible que les décharges latérales extérieures au tube agissent constamment sur le régime de celui-ci. Or, au fur et à mesure que l’on augmente la tension, ces décharges, soit sous forme d’effluves, soit sous forme de petites étincelles, deviennent de plus en plus importantes et compro- mettent la régularité de fonctionnement du tube. Par contre, l'emploi d’un alternateur à l’inconvénient de donner naissance à un faisceau cathodique plus où moins hétérogène. Ce faisceau s'étale en un spectre lorsqu'il traverse un champ électrique ou magnétique. Il en résulte une précision beaucoup moindre sur le pointé. Toutefois, cet inconvénient peut être considérablement atténué, particulière- ment avec les courants de fréquence élevée, comme nous le verrons plus loin. Les conditions de fonctionnement de l’alternateur étaient les suivantes: à la fréquence de 1000 périodes environ, la tension aux bornes primaires de la bobine d'induction était de 80 à 300 volts efficaces. Bien que ce dernier voltage paraisse élevé pour un circuit primaire, les isolements de la bobine le supportent tres bien, grâce à la régularité même du courant alternatif qui ne donne pas lieu à des à-coups de tension, comme il s’en produit avec les interrupteurs. Le courant secondaire de la bobine était amené à la cathode et à l’anode du tube par des conducteurs recouverts d’une épaisseur de 0,5 em. de caoutchouc, de facon à éviter autant que possible les efHuves et les décharges latérales dont nous avons parlé. La tension de ce courant, si on la calcule d’après le rapport de transforma- tion de la bobine, aurait pu atteindre 90.000 volts efficaces; mais avec des courants de fréquence élevée, il est impossible de dire à priori dans quelle mesure les phé- nomènes de capacité ou de dispersion magnétique modifient ce rapport théorique de transformation. Entre l’anode du tube cathodique et la bobine était intercalée une soupape électrique. Une telle soupape a, comme on sait, pour effet d'arrêter l’une des alter- nances du courant de haute tension, de façon à ne livrer passage au courant que dans un sens. Dans le cas particulier où l’on utilise des courants de grande pério- dicité, le courant qui traverse le tube se rapproche peu à peu d’un courant continu, lorsque la capacité formée par les conducteurs et le tube lui-même a quelque valeur. ! Dans le second mémoire nous avons réussi à vaincre ces diflicultés par Pemploi d’une machine électrostatique à gros débit, ce qui nous à permis d'obtenir une plus grande précision de pointé. 300 C.-E. GUYE ET S. RATNOWSKY Le faisceau cathodique peut alors devenir presque homogène, mais cette condition, comme on le verra plus loin, n’est pas indispensable pour effectuer le pointé. La figure 2 ci-après montre, sans entrer dans le calcul du phénomène, com- ment, lorsque la périodicité augmente, le courant qui traverse le tube cathodique doit tendre à devenir constant. À 8 A B: / \ LA F4 + \ \ \ / \ { \ ’ ‘ ! 0 ' ! L À © — O 0. O2 O5 A8 AB ’ ù C ' ’ Ê \ 0 \ ! \ il ! \ \ Û 1 © | ' ; ' À ! x ! ! Î 1 ! Ûl ! O O, Où2 O3 Fig. 2. — Dans cette figure la courbe ponctuée OAO:02A’Os représente la tension secondaire fournie par la bobine dont une alternance seulement peut donner naissance à un courant; la ligne ABCA'’B' représente la ten- sion aux bornes du tube cathodique muni d’une soupape. Les deux pôles du tube commencent par se charger à la différence de poten- tiel maximum A. Le courant que peut débiter la bobine étant toujours grand par rapport à celui du tube, ce dernier continue à suivre la tension de la bobine jus- qu'au point B. A partir du point B, si la soupape fonctionne parfaitement, le tube se décharge comme le ferait un condensateur, et son régime devient indépendant de celui de la bobine jusqu’au point C. De C en A’ Bla tension de la bobine rede- venant supérieure à celle du tube, la soupape laisse de nouveau passer le courant et le régime du tube redevient celui de la bobine. Il est aisé de se rendre compte que la périodicité augmentant, le point A’ se rapproche de A. Il en est de même du point C; l’amplitude des variations de la ten- sion aux bornes du tube devient de plus en plus petite et finit par se rapprocher d’une tension constante, particulièrement si le tube est associé à une capacité, même petite. C’est ce que montre la seconde figure. L'emploi des courants alternatifs associés à un condensateur et à une soupape a d’ailleurs été indiqué et employé par M. Villard pour produire un voltage cons- FORMULE DE LORENTZ-EINSTEIN 301 tant aux bornes des tubes cathodiques. On trouvera dans les publications de M. Villard de précieuses indications sur le fonctionnement des tubes cathodiques". A la condition de ne pas considérer les expériences aux voltages les plus élevés, pour lesquels les mesures demeurent toujours délicates par suite des varia.- tions de dureté du tube, on peut constater que ce dispositif est susceptible d'assurer une très grande constance au régime de fonctionnement d’un tube cathodique. Nous donnons ci-après, à titre d'exemple, deux séries de mesures effectuées, comme tou- jours, à déviation constante. Les valeurs de Let de V proportionnelles aux champs déviants se sont maintenues constantes pendant toute la série des expériences. Cha- que chiffre comporte deux pointés, c’est-à-dire deux lectures au voltmètre et à l’ampèremètre. La durée de chaque série est d'environ une demi-heure. On voit donc que pendant ce temps le régime de fonctionnement du tube s’est fort bien main- tenu et que la vitesse des rayons cathodiques émise est demeurée presque la même. La variation plus grande observée sur les chiffres du voltmètre (V) provient du fait qu'à déviation constante l'intensité du champ électrostatique est proportion- nelle au carré de la vitesse des corpuscules, tandis que le champ magnétique n’est proportionnel qu’à la vitesse seulement. Les fluctuations sont donc, dans ces condi- tions, plus sensibles sur le voltmètre que sur Pampèremètre. Divisions lues sur l’ampèremètre et le voltmètre. Il V Il V 39,85 35,20 39,75 36,10 3975 35,05 39,95 36.05 39.50 34,70 39,70 36,25 39,85 35.05 39,55 36,05 39.50 34,85 39.70 36:10 39.20 34,65 39,30 35,65 39,90 34,85 3960 35,55 39,50 39,70 3900 35,00 Les tubes cathodiques employés ne commencent à s’illuminer d’une lueur verte qu'au voisinage de 6000 volts; mais, dans ces conditions, la tache fluorescente était encore mal délimitée, probablement par suite de la trop grande surface d'émission de la cathode. C’est seulement pour une plus grande raréfaction, lorsque le potentiel de décharge atteignait S000 à 9000 volts, qu'on apercevait une tache lumineuse circulaire nettement délimitée de 0,75 mm. de diamètre, et que lon pouvait com- mencer les mesures. ! VizLarp, Les rayons cathodiques, 1908, p. 7, et Redresseurs cathodiques pour courants indirects, , y » , fl 1 C. R., t. 128, 1899, p. 994, etc. 302 C.-E. GUYE ET S. RATNOWSKY Dans le cas où la raréfaction était poussée à ses dernières limites, nous n'avons pas mesuré le potentiel de décharge. On peut l’estimer approximativement entre 70.000 et 80.000 volts (d’après la puissance des champs déviants et la vitesse cal- culée des corpuscules). La différence de potentiel aux bornes secondaires de la bobine devait natu- rellement être supérieure, puisqu'une partie de la tension était absorbée par la soupape. Nous avons dit tout à l’heure que le faisceau cathodique produit n'était pas en général homogène, et qu'il s'étalait en un spectre lorsqu'on le faisait traverser le champ magnétique ou électrique. Il importe de remarquer à ce propos que la luminosité de ce spectre est nettement décroissante vers la partie la plus déviée. La partie lu moins déviée est donc la plus lumineuse et correspond aux rayons de plus grande vitesse (vraisemblablement sommet de la courbe, fig. 2, du potentiel de décharge); c'est sur elle qu'on effectuait le pointé, D'ailleurs, en réduisant convena- blement la tension de l'alternateur, ce spectre se réduisait à une tache nette, à peu près circulaire, accompagnée dune queue très pâle. 3} Tube cathodique (Mg. 3). — Le tube cathodique employé avait une longueur totale d'environ 80 em. La cathode en aluminium était portée par une tige de 12 cm. à 15 cm. de longueur, placée dans une tubulure de verre. L'anode en relation avec la terre sert en même temps de diaphragme. Elle est constituée par un cylindre creux en aluminium dont la longueur mesurait 7 em., et à l’intérieur duquel se trou- vait le diaphragme. Nous avons cru bien faire de placer le diaphragme à l’intérieur méme du tube anode, afin de le soustraire à toute influence électrostatique. Dans ces conditions, aucune charge électrique induite ne peut exister dans le voisinage immédiat de l’orifice et exercer une action déviante sur le faisceau cathodique. Fig. à L'ouverture du diaphragme était de 0,5 mm. Sa distance à la cathode était d'environ 30 cm. Le fond méme du tube servait d'écran fluorescent, comme le mon- tre la fig. 3. Il n'était par conséquent pas recouvert de papier d'étain, et Fon avait marqué avec beaucoup de soin et après avoir effectué Le réglage complet, deux petits FORMULE DE LORENTZ-EINSTEIN 303 points à l'encre de Chine, distants de 3 à 4 em. environ (fig. 3). C’est sur ces points qu'on ramenait le milieu de la tache fluorescente, soit à gauche, soit à droite, en raodifiant les champs électrique ou magnétique. Un troisième point mtermédiaire correspondait à la position du faisceau non dévié, le champ magnétique terrestre étant annulé. i Le vide. — Le vide était produit à l’aide d’une pompe Gaede, combinée à une pompe rotative auxiliaire. Afin d'éviter le dégagement progressif de gaz par les parois du tube et les pièces métalliques qui se trouvent à l’intérieur, nous avons préalablement chauffé à plusieurs reprises le tube à une température de 100 à 200 degrés, et cela en fai- sant activement fonctionner la pompe. C’est également en vue d'éviter les dégage- ments gazeux que notre tube (comme nous l'avait conseillé M. Villard) ne contenait aucune matière fluorescente spéciale; la tache fluorescente qui servait au pointé, se produisait sur le fond même du tube, Dans les expériences préliminaires faites en employant des écrans enduits de substances fluorescentes, nous avons observé que dès que l’on arrêtait la pompe, le moindre échauffement produisait un dégagement gazeux qui ne permettait pas de pousser le vide autant que le nécessitaient nos recherches. Enfin, pour augmenter le degré de vide, nous avons, dans quelques expériences, ajouté entre la pompe et le tube un refroidissement à air hHquide des- tiné à condenser les impuretés et à diminuer leur tension de vapeur (voir fig. 4). Le champ électrique. — Le condensateur qui sert à produire le champ élec- trique à l’intérieur du tube, se compose de deux plaques d'aluminium disposées aussi parallèlement que possible. Chacune de ces plaques mesure 5,07 >< 3,5 cm. ; elles sont à la distance moyenne de 0,889 cm.; cette distance à été mesurée à la machine à diviser, de façon à permettre un contrôle approximatif. La tension était fournie au condensateur par une batterie de petits éléments (lampe de poche Jupiter) dont chaque groupe donnait approximativement 4,25 volts. La batterie se composait de 400 à 500 de ces groupes (soit environ 2000 volts maximum), auxquels s’ajoutaient 50 petits accumulateurs que lon pouvait introduire ou supprimer rapidement au moyen de deux curseurs à manette, De cette façon, on pouvait effectuer le réglage rapide de la tension de 2 en 2 volts. Le milieu de la batterie était en communication avec la terre; les deux pla- teaux du condensateur étaient done toujours chargés à des potentiels symétriques V V 2 | 2. : SE la trajectoire des rayons cathodiques non déviés était done toujours, comme l’anode et le tube, une ligne de potentiel zéro. Le potentiel de la batterie était très constant et les mesures pouvaient se pro- 301 C.-E. GUYE ET S. RATNOWSKY longer aussi longtemps qu’il était nécessaire, sans que l’on pût constater la momdre variation!. Le champ magnétique. — Le champ magnétique était produit par une paire de bobines parcourues par le courant d’une batterie d’accumulateurs. Ces bobines étaient disposées dans le voisinage du condensateur, de manière que les lignes de force du champ magnétique fussent autant que possible perpendiculaires à celles du champ électrique. Dans ces conditions, les déviations électriques et magnétiques peuvent être observées sur les mêmes repères. Les mesures relatives des champs magnétiques étaient données par le rapport des intensités du courant mesurées sur le milliampèremètre dont nous avons parlé: cet appareil était combiné à un shunt de précision. Les bobines et le tube étaient fixés solidairement sur un même support en bois; ce support ne contenait naturellement aucune partie métallique. Le tout était dis- posé sur une table entre les deux paires de cadres qui servaient à annuler Le champ terrestre (fig. 4). Mesure de Let de V. — L'appareil qui mesurait successivement la tension du condensateur V et l'intensité Ï du courant traversant les bobines, était un milliam- pèremètre de précision de Siemens, combiné à l’aide de commutateurs, soit avec de très grandes résistances soigneusement étalonnées, soit avec un shunt. On pouvait apprécier aisément sur cet appareil 0,1 division. Les plus petites déviations étaient d'environ 35 divisions; l'erreur sur cette mesure pouvait donc atteindre au maxi- mum 1/350, soit 0,25 ?/,?. Nous avons cru bien faire de vérifier l'homogénéité de la division de notre milliampèremètre en l’étalonnant par comparaison avec des résistances convenables en manganine soigneusement contrôlées avec une boîte de précision de Carpentier. Les différences trouvées ont été tout à fait de l’ordre de grandeur des erreurs d’ex- périence. Le tableau suivant permettra de s’en rendre compte: Déviations Dévialions Différences calculées observées 0/0 34,077 34,15 + 0,205 52,012 52,00 — 00 70,625 70,75 + 0,180 89,800 39,90 0 Ti 98,777 98,60 015 108,520 108,20 — 0,29 ? Nous tenons à signaler à propos de l'installation de cette batterie un curieux phénomène de transport de mercure. Les godets servant à mettre en communication les différentes batteries d'éléments étaient reliés par des fils étamés et isolés. Au bout de quelques jours, nous avons pu remarquer que le mercure à été transporté des godets placés au niveau le plus élevé dans ceux qui se trouvaient à un niveau plus bas. Le fil de cuivre étamé fonctionnait done comme un siphon capillaire qui s’amorce de lui-même. Ce phénomène a été étudié depuis par M. A. Tcherniawsky (Arch. des Se. phys. et nat., Juillet 1912). 2 Pour deux séries seulement la déviation n’était que de 20 à 25 divisions. fit FORMULE DE LORENTZ-EINSTEIN 30) Compensation du champ magnétique terrestre. — Nous avons dit que pour donner à la méthode des trajectoires identiques toute sa rigueur, il est nécessaire d'annuler le champ magnétique terrestre. En annulant ce champ, non seulement on rend rigoureuses les considérations précédentes (page 294), mais on assure du même coup la symétrie des déviations gauche et droite. En effet, le faisceau cathodique ayant une longueur totale de 65 cm. environ, la déviation que produit le champ terrestre peut être considérable, particulièrement lorsqu'on expérimente avec des corpuscules de faible vitesse. Cette déviation Fig. 4. initiale est très fâcheuse, car les corpuscules ne suivent pas dans ces conditions des trajectoires symétriques par rapport aux plaques du condensateur ou à la position des bobines ; comme cette dissymétrie initiale n’est pas la même si l’on expérimente avec des rayons de faible et de grande vitesse, elle peut devenir une cause d'erreur systématique. Les mesures effectuées avec des corpuscules de vitesse différente deviennent moins comparables, particulièrement siles champs ne sont pas uniformes, et lors même que l’on a soin d’expérimenter alternativement par déviation gauche et droite. En d’autres mots, pour que la condition des trajectoires identiques soit satisfaite, il faut que le champ terrestre ou du moins sa composante déviante soit annulée. MÉM, SOC, PHYS. ET HIST. NAT. DE GENÈVE, VOL. 89 (1921). 38 306 C.-E. GUYE ET S. RATNOWSKY Pour réaliser là compensation du champ terrestre, nous avons placé le tube dans la direction du méridien magnétique et disposé deux paires de cadres de grande dimension donnant chacune un champ très approximativement uniforme dans l’espace occupé par le faisceau cathodique ! (fig. 4). Ces deux paires de cadres annulaient respectivement Îles composantes horizontale et verticale du champ terrestre. Pour s'assurer de la compensation, on plaçait d'abord une aiguille aimantée dans le voisinage immédiat du tube cathodique, et lon réglait le courant dans les cadres jusqu’à ce que l’aiguille restât en équilibre indifférent. On pouvait ensuite procéder à un réglage plus exact encore par l'observation même des rayons cathodiques. Dans ce but, on faisait varier progressivement le courant dans les cadres jusqu’à ce que le rayon cathodique ne fût plus étalé en un spectre, quelles que fussent les variations produites dans le potentiel de décharge ; c’est-à-dire quelle que fût la vitesse des rayons cathodiques. Lorsque le réglage est atteint, la position de la tache fluorescente sur le fond du tube devient indifférente à ces variations et n'éprouve presque plus aucun déplacement. Un dernier contrôle pouvait être ajouté en soumettant le faisceau ainsi réglé à l’action déviante des champs magnétique et électrique que l’on inversait. On obte- nait alors des déviations gauche et droite égales de part et d'autre de la position initiale du rayon. Protection du faisceau cathodique contre les actions électrostatiques. — Pour protéger le faisceau cathodique contre les actions électrostatiques, nous avons recouvert presque toute la surface extérieure du tube avec du papier d’étain mis en communication avec la terre. Seule, extrémité du tube de verre qui entoure la -athode et le fond même du tube sur lequel venait se produire la trace fluores- cente, ont été laissés à nu. Dans ces conditions, nous n'avons pu déceler aucun déplacement de la tache lumineuse provenant d’une action électrostatique exté- rieure ou intérieure. En effet, ce dispositif fonctionne comme écran électrostatique pour les actions extérieures, et si des charges électriques venaient à recouvrir intérieurement les parois du tube, des charges égales et de signe contraire dues à l'influence en annuleraient approximativement l'effet sur le faisceau catho- dique. ‘ Des mesures sur Puniformité du champ compensateur ont été effectuées par une méthode balistique ; elles ont montré une divergence de 1 !/> °/, entre la position de la cathode et le fond du tube servant d'écran, Cette petite différence est sans importance, attendu que nous avons toujours effectué les mesures en prenant la moyenne des déviations droite et gauche obtenues en renversant les champs électrique ou magnétique. FORMULE DE LORENTZ-EINSTEIN 307 Cette précaution est particulièrement importante avec les rayons de faible vitesse très sensibles aux causes déviantes. Détermination de la constante |A] et valeur de —. — La constante [AT qui 122 figure dans les équations (1) et (3), peut être déterminée par le calcul ou par l’ex- périence. Mais si l’on suit la première voie, il est nécessaire d'introduire des hypo- thèses plus où moins justifiées. Une première hypothèse, absolument insuffisante, consiste à considérer le champ comme constant entre les plateaux du condensateur et comme nul en dehors de ce condensateur. Cette hypothèse nous à conduits à la valeur [A] — 173. Un calcul plus exact peut être effectué en tenant compte du champ extérieur au condensateur. Nous avons pris comme base de ce calcul la formule donnée par Maxwell (Traité d'Électricité et de Magnétisme) et le graphique qui la résume. Mais ce graphique est relatif au cas d’un condensateur illimité dans un sens et éloigné de tout conducteur ; 1 ne correspond pas non plus, au point de vue de la forme du champ électrique, aux conditions de nos expériences, c’est-à-dire au cas d’un condensateur court, placé dans un tube relativement étroit. Le calcul effectué d’après le graphique de Maxwell au moyen d'un intégraphe nous à donné la valeur EM 294. L'expérience était assurément le moyen le plus sûr d'éliminer toutes ces incer- titudes. Nous nous sommes donc décidés à effectuer directement des mesures sur des rayons cathodiques de faible vitesse, de façon à déterminer | AT par la relation pré- cédemment établie : | U D. 1 — 9 RER SR Comme source de rayons cathodiques, nous avons utilisé une machine électro- statique, de Tôüpler, à 20 plateaux. Nous avons, en outre, régularisé le potentiel, soit par la marche uniforme de la machine, soit en fixant sur ses deux pôles deux balais placés en regard l’un de l’autre, à distance réglable. Des aigrettes jaillissaient entre ces balais. Dans ces conditions, nous avons obtenu un potentiel très constant et une décharge régulière dans le tube. Le potentiel de décharge U est mesuré avec un électromètre de Braun soi- gneusement Calibré à plusieurs reprises avec un électromètre absolu de MM. Bichat et Blondlot. La distance y à été mesurée sur le fond du tube, entre les repères, au moyen d’une machine à diviser et d’une lunette ; elle était de 1,987 cm. 308 C.-E. GUYE ET S. RATNOWSKY Trois séries d'expériences nous ont donné les résultats suivants : U volts V volts [A] 9 330 174,0 212,6 15 444 282,6 214,6 13 200 244,5 212:0 Moyenne [A] — 213.3 I importe de remarquer qu'une erreur de 1 pour cent sur [A] entraine une erreur de 0,5 pour cent sur la vitesse v et sur toutes les vitesses v’ (formule IT). ! . . » [22 . e Comme dans la limite de nos expériences le rapport varie encore très lentement [02 avec la vitesse, l'erreur qui en résulte sur ce rapport, n’est, dans ce cas, que de 2 pour mille environ, quelle que soit d’ailleurs l’hypothèse adoptée. L'erreur qui provient du choix de la valeur = dans la détermination des vitesses 22 absolues est aussi très petite. Si, au lieu d'adopter la valeur de Simon — — 1,878 x 107, bo on lui substitue la valeur plus récemment obtenue par Classen et Woltz ! _ 1 : , LL : : : = — 1,77 X 107, l'erreur qui en résulte sur — est d'environ 6 pour mille dans les Lo LL Î conditions de nos expériences, par exemple, entre 80.000 et 147.000 km. sec. Lorentz). Or, cet écart de 6 pour mille serait encore de quatre à cinq fois plus ) ! LI. LU petit que la différence des valeurs | | calculées par les formules d'Abraham et de Lorentz entre les mêmes limites de vitesse. L’incertitude sur la valeur exacte de — n'est donc pas de nature à compromettre les résultats que l’on peut retirer bo de la méthode. RÉSULTATS !. Afin de pouvoir grouper en un seul tableau les résultats obtenus dans toutes ul nos séries d'observations, nous avons fait subir aux valeurs, trouvées directement P. par l'expérience, un calcul de réduction. ! Les valeurs de I et de V, à l’aide desquelles ont été calculés les tableaux ci-après, sont données plus loin (voir Appendice). FORMULE DE LORENTZ-EINSTEIN 309 Dans ce but, les vitesses v et v' étant connues, nous avons calculé par les courbes représentant les formules théoriques (7) et (8) de Lorentz et d'Abraham les valeurs | : | | , | | 2. | Ë | 2.0 0 A =. Lo 16 LT A Toutes les observations étaient alors réduites au moyen de la relation ( L = : LEE ve PA U-0 (os | Po | calculée, soit dans l’hypothèse de Lorentz, soit dans celle d'Abraham. #5 : L ñ se 3 ne . D'ailleurs, | # | est d'autant plus voisin de l'unité que les rayons de compa- bo raison sont plus lents; sa valeur était généralement de 1,03. Les tableaux qui suivent donnent les résultats de toutes les séries d’observa- tions que nous avons faites. Dans le premier, la réduction est faite par la formule de Lorentz-Einstein; dans le second, par celle d'Abraham. Les expériences sont ordonnées d’après les vitesses croissantes, quels que soient d'ailleurs l'ordre chro- nologique et les conditions dans lesquelles elles ont été effectuées. Hypothèse de Lorentz-Eïinstein. LA Fe nm U. Le À \ es Q ne Différences U. U. vo \ L (1) 64 274 1,027 1,024 + 0,003 (2) 85 406 1,047 1,044 + 0.003 (3) 92 856 1,060 1,052 + 0,008 (4) 94 646 1,052 1,054 — 0,002 (5) 96 280 1,072 1,056 + 0,016 (6) 98 199 1,074 1.058 + 0,016 (7) 108 730 1,062 i,072 —_ 0,010 (8) 110 440 1,057 1.075 — 0,018 (9) 115 680 1,095 1,083 + 0,012 (10) 117 150 1.077 1,086 —_ 0,009 (11) 117 990 1,082 1.087 —_ 0,005 (12) 122 020 1.086 1,094 —_ 0,008 (13) 123 660 1,118 1,097 + 0,021 (14) 123 870 1,123 1,098 + 0,025 (15) 124 300 1,103 1,099 + 0,004 (16) 125 840 1,118 1,101 + 0,017 (17) 126 610 1,104 1.103 + 0,001 (18) 127 270 1,118 1,104 + 0,014 (19) 133 970 1,135 1,117 + 0,012 310 C.=E. GUYE ET S. RATNOWSKY v” : [#] Diflérences Ho (Ex (20) 134 380 1,147 1,118 + 0,029 ? (21) 137 700 1,116 1125 — 0,009 (22) 139 920 1,139 1,191 + 0,008 (23) 140 930 1199 1,188 + 0,020 (24) 142 700 1,116 1,197 — 0,021 (25) 142 760 1,155 11197 — 0,002 (26) 148 640 1,172 1,191 + 0,021 (27) 149 500 1,174 1,154 + 0,020 Hypothèse d'Abraham. v' . E | Différences vo FE (1) 64 274 1,024 1,018 + 0,006 (2) 85 406 1,039 1,03 + 0,005 (3) 92 846 1,057 1,040 + 0,017 (4) 94 646 1,049 1,042 + 0,007 (5) 96 280 1,064 1,044 + 0,020 (6) 98 199 1,065 1,045 + 0,020 (7) 108 730 11055 1,057 — 0,002 (8) 110 430 1,054 1,060 — 0,006 (9) 115 680 1,087 1,066 + 0,021 (10) 117 250 1,070 1,068 + 0,002 (11) 117 990 1,075 1,070 + 0,005 (12) 122 020 1,078 1,075 + 0,003 (13) 123 660 1,109 1,077 + 0,032 (14) 123 870 1,110 1,078 + 0,032 (15) 124 300 1,095 1,078 10016 (16) 125 840 ll 1,080 + 0,031 (17) 126 610 1,097 1,082 + 0,015 (18) 127 270 1,109 1,082 + 0,027 (19) 133 570 1,126 1,092 + 0,054 (20) 134 380 1,138 1,093 + 0,045 (21) 137 700 1,110 1,098 + 0,012 (22) 139 920 1,130 1,102 + 0,028 (23) 140 930 1,140 1,103 + 0,037 (24) 142 700 1,110 1,107 + 0,007 (23) 142 760 1,126 1,107 + 0.019 (26) 148 640 1,159 1,117 + 0,042 (27) 149 500 1,167 1,119 + 0,048 Les écarts que l’on constate, même entre les séries voisines, nous autorisent à grouper ces observations par trois et à en prendre la moyenne. Nous avons alors obtenu le tableau final suivant qui à été publié aux C. R. de l'Académie des Sciences (7 fév. 1910) et qui résume toutes nos expériences : FORMULE DE LORENTZ-EINSTEIN 311 Hypothèse de Lorentz- Einstein Hypothèse d'Abraham ae 1 [# | Différences es |] Différences LS Fo Ho Ho Fo 80 845 1,045 1,038 + 0,007 1,040 1,030 + 0,010 96 575 1,066 1,056 + 0,010 1,060 1,044 + 0,016 111 610 1,072 LOT — 0,005 1,065 1,061 + 0,004 119 050 1,082 1,089 — 0,007 1,074 L,071 + 0,003 123 940 A Es 1,098 + 0,017 1,105 1,078 + 0,027 126 570 1,114 1,103 + 0011 1,106 1,082 + 0,024 135 220 1153 1,120 + 0,013 1,125 1,094 + 0,031 141 180 1,136 1,155 + 0,003 1127 1,103 + 0,024 147 000 1,160 1,147 + 0,013 1,151 1,113 + 0,038 = Es EM li] is BE | ET it 1150 U50 1100 Ten MERS APT). _N RAS SSNR SRE SN EN FE A EN EN EN REIRE IES NOEN PE PE EN A CS 1050 EI E = ns 123 || A ES RSR ERREURS RRNRLNEREANNERUSSS REA AaRAR SERIE EEE BE me | 2 2 | | nn IE te PANNE le ANA NE 44 ol | lu E& \ EE — CERN AE NUINIE ee EEE El NUE La (fig. 5) représente graphiquement les résultats consignés dans ce tableau; les croix sont relatives à l'hypothèse de Lorentz, les points à celle d'Abraham. Les deux courbes L et À représentent les formules théoriques (7) et (8) page 298. CONCLUSIONS DE LA PREMIÈRE PARTIE. Avant de formuler notre conclusion, résumons d’abord brièvement les condi- tions expérimentales qui caractérisent nos expériences, conditions qui nous ont permis d'étendre les mesures de la variation d'inertie des corpuscules cathodiques 312 C.-E. GUYE ET S. RATNOWSKY Jusqu'au voisinage d’une vitesse égale à la moitié de celle de la lumière, et cela sans l'intervention de la lumière ultraviolette. Ces conditions sont : 1° L'emploi tte la méthode des trajectoires identiques, qui permet d'opérer sur des déviations relativement grandes, et qui ne nécessite, dans la limite de nos expé- riences, n1 la Connaissance exacte des champs magnétique ou électrique, ni leur uniformité. 2° L'emploi d’un système compensateur annulant le champ terrestre et donnant, par conséquent, à la méthode précédente son maximum de rigueur, en assurant, en outre, la symétrie des déviations gauche et droite. 3° L'emploi d’une source alternative de grande périodicité et de débit appré- ciable, donnant au fonctionnement du tube, particulièrement dans les expériences à très haut voltage, une régularité beaucoup plus grande qu'avec les machines élec- trostatiques de faible débit. Indépendamment de ces trois conditions principales, nous mentionnerons toute une série de mesures de précaution qui nous paraissent indispensables dans des me- sures de précision. Nous citerons particulièrement : a) La protection du tube contre les actions électrostatiques extérieures ou inté- rieures, par l'emploi de papier d’étain à la terre recouvrant extérieurement la presque totalité du tube. b) L’augmentation du degré de vide par l’action simultanée du chauffage du tube et de la double pompe de Graede ; la suppression de toute matière fluorescente autre que le verre; enfin, l’action de l'air liquide destiné à condenser les impuretés et à diminuer ainsi leur tension de vapeur ; la suppression de tout robinet, le tube étant directement soudé à la pompe. c) L'emploi de conducteurs noyés dans du caoutchouc pour amener le courant de haute tension du secondaire de la bobine jusqu’au tube cathodique, de façon à éviter, autant que possible, les décharges latérales. d) La symétrie du champ électrostatique assurée par rapport à l'enveloppe du tube, en chargeant toujours les deux plateaux du condensateur à des potentiels 7 et ne l'enveloppe du tube étant à la terre. e) La mise à la terre du condensateur pendant les mesures de déviation magnétique. f) La vérification de la graduation du milliampèremètre servant à mesurer V et [, ainsi que les résistances employées. g) La comparaison avec un électromètre absolu du voltmètre mesurant le potentiel de décharge (détermination de la constante | A). [a [a FORMULE DE LORENTZ-EINSTEIN 313 h) Enfin, le mode opératoire consistant à expérimenter toujours par déviation à droite et à gauche, en alternant les déviations magnétique et électrique, de façon à éliminer, autant que possible, l'influence des variations de vitesse des rayons cathodiques au cours d’une même série, variations qui constituent la plus grande difficulté des mesures effectuées sur les rayons cathodiques de grande vitesse. D'autre part, nous mentionnons comme principal inconvénient de la méthode le peu d'exactitude «lu pointé; l'écart maximum sur chaque lecture isolée pouvait être évalué à 2/10 ou 3/10 de mm. soit 6/10 sur l’ensemble de deux lectures droite et gauche, et cela pour une déviation de 40 mm. ; done, dans le cas le plus défavorable, l'erreur sur le pointé seulement pouvait atteindre 1!/, °/, environ sur une mesure isolée. Cet écart devait nécessairement être beaucoup moindre sur les moyennes et ne justifierait pas, à notre avis, les écarts observés entre les séries voisines. Ces écarts sont dus, probablement en grande partie, aux variations inévitables et pas toujours compensées de la dureté du tube au cours d'une même série. Les autres causes d'erreur que nous avons cherché à évaluer : erreur prove- nant du chiffre adopté pour la valeur de =; érreur résultant de la variation de vitesse OS du corpuscule dans le champ électrostatique ; erreur provenant de la graduation des instruments de mesures ; toutes ces erreurs se sont trouvées individuellement, dans les limites de nos expériences de quelques pour mille seulement. Elles ne nous paraissent pas suffisantes pour modifier la conclusion qui se dégage de la fig. 5, à savoir que la théorie de l’électron indéformable ne donne pas en moyenne des résul- tats conformes à l’expérience pour les grandes vitesses, Même si l’on substitue à la valeur de Simon celle de Classen et de Woltz, cette substitution aurait pour effet d'augmenter encore un peu la divergence entre cette formule et l’expérience. D'autre part, les résultats de notre travail ne sont pas assez précis pour infir- mer la formule de Lorentz-Einstein. Les écarts observés peuvent, en effet, être envi- sagés comme rentrant encore dans la limite des erreurs d'expérience, surtout si l’on prend en considération le fait que pour obtenir les différents points indiqués sur les courbes de la fig. 5, on a ordonné toutes les expériences d'après la vitesse trouvée pour les rayons cathodiques, quelles que soient l’époque et les conditions dans lesquelles ces expériences ont été effectuées. On n’a donc tenu aucun compte du fait que les expériences isolées qui déterminent une position sur la fig. 3, ont été effectuées sou- vent dans des conditions différentes, par exemple en choisissant d’autres dévia- tions ; les tubes ayant dû, au cours des expériences, être modifiés après perforation, et les cathodes changées par suite de leur détérioration, la position des bobines magnétisantes n'était pas non plus la même dans toutes les séries de mesures. Cette variété dans les conditions des expériences explique en partie pourquoi la MÉM. SOC. PHYS. ET HIST. NAT. DE GENÈVE, VOL. 89 (1921). 39 314 C.-E. GUYE ET S. RATNOWSKY position des points manque de continuité, mais il n’en est que plus remarquable de constater leur rapprochement de la courbe théorique de Lorentz, particulièrement pour les grandes vitesses. Une dernière remarque : les deux catégories de points de la fig. 5 correspon- dent aux résultats expérimentaux suivant qu'ils ont été corrigés, en supposant exacte la formule de Lorentz ou celle d'Abraham. Comme il ne s’agit ici que d’une correction, il est évident que l’on ne peut tirer aucune conclusion du fait que les valeurs expérimentales, corrigées par la formule d'Abraham, s’approchent davantage de la courbe théorique de Lorentz; la différence entre les deux catégories de points est, comme on le voit par la figure elle-même, de l’ordre des erreurs accidentelles. Nous pouvons donc conclure que, des deux formules proposées, celle de Lorentz- Einstein est la seule qui donne, pour les rayons cathodiques de grande vitesse, des résultats compatibles avec la moyenne de nos expériences. APPENDICE AU PREMIER MÉMOIRE. Nous donnons ci-dessous les valeurs moyennes directement observées de V et de I (lectures au voltmètre et à l’ampèremètre). C’est à l’aide de ces valeurs qu'ont été calculés les tableaux qui précèdent. IT convient de remarquer que les chiffres ne sont comparables que pour une même série, la sensibilité du voltmètre et de l’'ampèremètre n'étant pas la même pour toutes les séries ; il en est de même de la déviation y et de la position des bobines qui produisent le champ magnétique. lre série (y — 2,23) 3me série (y — 1,987) 5me série (y — 1,987) l V I V — Re 23,37 509,7 39,93 39,58 UD) Re _. (14) 33,17 962,0 (13) 70,30 104,64 (17) 70.03 102 28 (23) 38,75 1279,0 (9) 67,7 98,49 (16) 7047 102,40 (26) 41,55 1446,0 (18) 68,28 98,75 (19) 74,90 117,00 G6me série (y — 1,987) (20) 76,16 119,69 al 45 28 06 (22) 80.03 133.62 (2) 44 86 4415 (25) 78,74 128,85 é 51.79 57.46 (6) 52,89 59,85 2me série (y — 2,25) (9) 05:50 84,73 : D 7me série (y — 1,987) 34,30 21.43 Û v : (1) 38,86 27,27 89,25 33,64 39.99 28,85 (3). 057,97 58,77 (7) 58,46 1206 (21) 81,162 94,237 (8) GS,71 82,84 (10) 63,87 85,42 (24) 84,16 101,11 (4) 58.65 60,58 (12) 67,04 93,39 (97)2 92:82 JU bre ES - FORMULE DE LORENTZ-EINSTEIN 315 DEUXIÈME PARTIE Expériences de MM. C.-E. Guye et Ch. Lavanchy !. MÉTHODE. Le succès de mesures de haute précision est intimément lié au choix de la méthode employée. Écartant d'emblée celles qui nécessitent la mesure de très hauts potentiels, nous avons adopté après lavoir modifiée convenablement la méthode des trajectoires identiques utilisée antérieurement par MM. C.-E. Guye et $. Rat- nowsky. Le développement qu'en ont donné ces auteurs dans leur mémoire nous autorise à n’en faire ici qu'un résumé suceinct, avant d'exposer les modifications que nous y avons apportées. 1. Méthode des « trajectoires identiques ». — On démontre ? aisément que, dans un champ magnétique, des électrons de vitesse différente peuvent être amenés à suivre rigoureusement une même trajectoire, Il suffit pour cela que lon ait, pour chaque point de la trajectoire, la relation suivante : | I p (D) — ET UÙ u. Ÿ ! reliant les masses - et ’ de deux faisceaux cathodiques de vitesse » et v' et les intensités I et I” du courant produisant le champ magnétique * déviant. Dans un champ magnétique, la force agissante étant toujours normale à la trajectoire, les corpuscules d’un même faisceau ne sont soumis durant tout leur parcours à aucune accélération tangentielle ; ils conservent donc, en tous les points de cette trajectoire, une même vitesse, par conséquent aussi une même masse, Les quantités Y et v sont donc des constantes pour un même faisceau. Il en est de même de 4’ et »’ relatifs au second faisceau. ! Indépendamment des principaux chapitres du mémoire publié aux Archives en 1915, nous avons reproduit dans cet exposé les données directes d'observations et les tableaux complets qui les résument ? CE. Guye et S. Ratnowsky, loc. cit. p. 294. 3 Champ magnétique obtenu évidemment par un enroulement sans fer 310 C.-E. GUYE ET C. LAVANCHY Dans un champ électrique obtenu entre deux plateaux paralléles, au contraire, la force agissante n’est plus tout à fait normale à la trajectoire ; les corpuscules ne conserveront donc ni une vitesse, ni une masse rigoureusement constantes le long de cette trajectoire. En négligeant ! ces variations, et en admettant d'autre part que le champ est bien, en chaque point, proportionnel à la tension des pla- teaux?, on peut considérer comme pratiquement identiques les trajectoires de deux faisceaux animés de vitesses différentes. Il suffit pour cela que les masses y et de deux faisceaux cathodiques de vitesse # et v' et les tensions V et V’ produisant le champ électrique déviant soient liées, pour chaque point de la trajectoire, par la relation : T ! 9 TERLDUE uU* [UTEN 2 Donc, en résumé, des faisceaux de vitesse différente peuvent étre amenés à suivre, pratiquement dans un champ électrique, rigoureusement dans un champ magnétique, des trajectoires identiques. Expérimentalement, la chose n'offre pas de difficulté : il suffit de ramener ces faisceaux quelle que soit leur vitesse à une déviation magnétique et électrique constante. Dans ce cas, les formules (1) et (11) conduisent aux relations tout à fait générales : / TA a IV IT) _— ( D \'O p| ! TT/9 D MIE (IV = ) = Ev absolument indépendantes des valeurs particulières des intégrales de champ. ! l (4 LL } 1 . Les rapports — et ‘— s'obtiendront ainsi par /& comparaison des valeurs (2) 1. relatives de deux intensités et de deux différences de potentiel. La comparaison des résultats expérimentaux avec les formules théoriques nécessite d’une part la connaissance de la valeur absolue d’une vitesse que nous appellerons vitesse de comparaison, laquelle permettra de déterminer la valeur absolue de toutes les autres au moyen de la formule (HT), et d'autre part la con- naissance, pour cette vitesse de comparaison, de la valeur absolue de Pexpression ! (02 > : . , : — (les autres valeurs de — se déduisant ensuite de l'équation (IV). 1.0 0 ! Ces variations sont bien au-dessous des limites des erreurs d'expériences lorsque les déviations ne sont pas par trop grandes, comme un calcul approximatif nous l’a montré. ? Donc en ne tenant pas compte de lPaltération du champ par les phénomènes PA qui, au degré de vide de nos expériences. sont très vraisemblablement sans influence. es ré fi dé. da lt. "te dé À) à à FORMULE DE LORENTZ-EINSTEIN à WL La détermination de la vitesse de comparaison s’obtiendra au moyen de l’équa- tion bien connue: Poe (V) U: — 9 ()0 ; équation reliant la charge :, la masse cinétique (2) et la vitesse v d’un corpuscule cathodique au potentiel de décharge U dans le tube. On en tire immédiatement : ! DA AOL (v') Vu Il suffirait donc de connaitre U et mn pour obtenir la valeur de cette vitesse U. LL de comparaison. Des considérations pratiques développées plus loin nous ont conduits à prendre, pour cette détermination, un chemin un peu différent, suivi du reste déjà par MM. C.-E,. Guye et S. Ratnowsky, et dont nous ne donnons ici que le résumé. On sait en effet que les déviations électrique et magnétique sont liées à la masse y, à la vitesse » et à la tension V ou à l'intensité I par les formules suivantes: eV non . æ— AÀA—— (déviation électrique), (VI) LU nb (déviation magnétique), l uv dans lesquelles À et B sont les intégrales des champs électrique et magnétique, constantes pour une trajectoire déterminée et définies par les équations: Po ne , Lo na A— | dx [ F,dx B = dx | H,dx 0 eo 0 0 «/0 où F, et H, sont les champs électrique et magnétique correspondant respective- ment à V— let [— 1. En combinant la première de ces relations avec l'équation (V), on en tire la valeur de À, ainsi qu'une nouvelle expression de la vitesse v: (VII) er 0 si _. (VII) = Émv. Lay LU L C’est au moyen de cette formule que se caleulait la vitesse de comparaison. Une série de mesures préliminaires permettait de déterminer À, constante qu'il suffisait ensuite d'introduire dans la formule (VIT). 318 C.-E. GUYE ET C. LAVANCHY Donc, en définitive, v ne‘dépendait que du produit des valeurs absolues de DE er de “0 G Lo (2 L Le potentiel de décharge U était lu à l’électromètre. La valeur de = est con- Ho nue actuellement d'une façon suffisamment exacte. Enfin, les formules théoriques [J. 72 . s : . . donnent les valeurs de 2 et ‘© relatives à chacune des deux hypothèses. Ainsi LL LJ. la vitesse pouvait être calculée dans le cas de rayons lents avec une grande exac- titude dans les deux hypothèses. Il importe de remarquer que cette détermination de À doit se faire aux petites vitesses ; Car ce n’est que dans ces conditions seulement que les coefficients d'inertie u et (4) sont voisins de », et très peu différents suivant l'hypothèse considérée, et surtout que le potentiel de décharge, encore relativement peu élevé, peut être mesuré avec une précision suffisante, A . . . g , D. En possession d’une vitesse de comparaison + et de la valeur théorique de — bo correspondante, il était facile de calculer ensuite par les formules (IT) et (IV) l4 : UJ. > toutes les autres valeurs de »’ et de — pour l’ensemble des expériences, donc de 0 comparer les résultats expérimentaux aux formules théoriques. 2. Modifications apportées à la méthode. — Deux avantages principaux caractérisaient la méthode résumée ci-dessus : elle éliminait la mesure des hauts potentiels, puisque la détermination de la vitesse de comparaison se faisait au moyen de rayons lents ; et elle n’exigeait pas la connaissance des intégrales de champ, puisque le faisceau, quelle que fût sa vitesse, traversait des champs sem- blables. Elle était donc particulièrement bien adaptée à des mesures comparatives exactes. Mais il subsistait deux inconvénients importants, inhérents au principe de la méthode elle-même, et signalés déjà du reste par ses auteurs : l'erreur sur le pointé pouvait, sur une mesure isolée, atteindre environ 1 !/, °/,7; et surtout la méthode ne permettait pas des déterminations rapides, la variation de dureté du tube au cours d’une même expérience constituant une difficulté importante des recherches sur les rayons cathodiques de grande vitesse. Nous avons donc cherché, tout en lui conservant ses avantages, à perfectionner la méthode précédente de façon à aug- "En substituant la valeur de A dans la formule (VIII), on retrouve en effet la formule (V'). * Avec le nouveau dispositif, chaque mesure isolée pouvait se faire avec une sensibilité voisine du ! /300. FORMULE DE LORENTZ-EINSTEIN 319 menter le plus possible et la rapidité des déterminations et la précision du pointé. Nous y sommes parvenus en substituant un enregistrement photographique rapide aux tatonnements que nécessitaient quatre lectures directes et successives corres- pondant à des déviations rigoureusement les mêmes. Cet enregistrement photographique entraine un nouvel examen de la méthode des trajectoires identiques. En effet, pour assurer la rapidité des déterminations, nous ne ramenions plus le faisceau à une déviation rigoureusement constante, mais presque constante ; les trajectoires n'étaient donc plus rigoureusement identiques, mais presque identiques. Le raisonnement que nous avons fait plus haut admettait la constance des intégrales de champ. Il n’est donc plus applicable en toute rigueur dans ce nouveau Cas, puisque ces intégrales dépendent des trajectoires elles-mêmes. Nous avons ainsi dû entreprendre une étude expérimentale et préalable de la variation de ces intégrales en fonction de la déviation. Cette étude, détaillée du reste plus loin, nous à montré que nous pouvions considérer encore dans le cas de déviations presque constantes les quantités A et B comme pratiquement constantes ?. Etablissons maintenant nos formules fondamentales en partant des équations de déviation données déjà précédemment (équations VI). Pour deux faisceaux de vitesse # et »' suivant des trajectoires presque identiques, ces équations devien- dront : eV ie. A pe | (IX) "4,9 (déviation électrique), Te im Er À Late el y — B _T | r [22 ee . 7e (X) r' (déviation magnétique), ee um ÙU ; æ et +’ étant des déviations électriques (très voisines), V et V' les tensions corres- pondantes, y et y’ des déviations magnétiques (de même très voisines), Let [' les intensités correspondantes. Faisant en outre À — A'et B— PB’ d'après nos remarques précédentes, on ! Une série de déterminations qui dans le cas du travail précédent pouvait nécessiter un temps souvent très long se faisait presque instantanément par l’enregistrement photographique ; notre dispositif permettait, en outre, comme on le verra, de contrôler les perturbations qui pouvaient se produire dans l'émission cathodique au cours d’une expérience. ? Voir p. 330 et suivantes. 320 C.-E. GUYE ET C. LAVANCHY tre aisément des relations ci-dessus les formules définitives suivantes et directe- ment applicables à nos expériences : : D’ IV' zxy' (XI) TU v V0 ou" VI? 4x" ON TENUE (XI) Dans le caleul de nos expériences x, x", y, y! désignent les doubles déviations électriques et magnétiques. iemarquons enfin que l'étude expérimentale des intégrales de champ A et B en fonction de la déviation permettrait d'utiliser la méthode dans des limites beau- coup plus larges. En désignant par A, et A, B, et B, les valeurs de ces intégrales correspondant à des déviations x, et x, (déviations électriques), et y, et y, (déviations magnétiques) on à les quatre formules : eV To — À, UE (IX”) gr | (déviation électrique), Un — À, —— » [1 D l 19 | _ el Vo — B, = 3 UU Tr. ne (X”) nr (déviation magnétique), Yn — 5 PT u't d'où l’on peut tirer les équations (XT') et (XIT') qui sont une généralisation de nos équations (XI) et (XIT) > v' KR Ve, (XI ) Es SEE = Ty) J « à Levi EE y! LAVE (XI) a u D'OR dans lesquelles K A, I Bb; Nu , JE À, B, Il est facile de voir qu’en faisant dans ces expressions K — 1, L — 1, on retrouve nos formules (XI) et (XITI); en faisant en outre % — %» et Yo — Yn, c'est-à-dire en envisageant le cas où les trajectoires sont rigoureusement iden- tiques, on retombe sur les formules (TT) et (IV). Ces expressions générales nous donnent en outre des mdications intéressantes sur l'influence de la variation des intégrales de champ. On remarque, en effet, que ES DIE FORMULE DE LORENTZ-EINSTEIN 921 les variations relatives L de la constante B interviennent à la puissance seconde ! . 122 ‘ a re r dans le coefficient du rapport —, tandis que les variations K de la constante A n’y U. figurent qu’à la première puissance. Note additionnelle. — Il importe de remarquer que la méthode des trajectoires identiques (avec dévia- tion électrique et déviation magnétique successives) est plus sensible pour décider entre les formules d'Abraham et de Lorentz-Einstein, que celle basée sur la mesure du potentiel de décharge et la déviation magnétique des rayons de diverses vitesses (Hupka). La méthode des trajectoires identiques conduit en effet à l'expression pour le rapport des masses transversales : vu AS nn [ve] sa Tandis que la seconde méthode fournit la relation p' = (7) r 2] b dr: (2) je Ve co Indépendamment de la plus grande difficulté de mesurer avec précision les potentiels de décharge très élevés U’, on voit que le facteur expérimental entre crochets, varie, toutes conditions égales, plus lentement dans le cas de la formule {b) que dans celui de la formule (a), puisque ce facteur formule (b) est multiplié ATX ! vu : : Le _—.—. à ; par le rapport de lequel varie dans le même sens que quelle que soit l'hypothèse admise. U.) En outre, les quantités qui entrent dans la formule & (courant magnétisant 1 traversant les bobines et différences V de potentiel aux bornes du condensateur) peuvent être mesurées avec une très grande précision. DISPOSITIF EXPÉRIMENTAL. Le schéma général (fig. 1) et sa légende explicative donnant avec des détails suflisants la disposition des divers appareils utilisés dans nos expériences, nous passerons immédiatement à la description de chacun d'eux. A T c "ni: | Zèrre mm 27 7èrre Métro Fig. 1. — Schéma général. M, machine statique; B, balais régulateurs; TT, tube cathodique; c, cathode ; à, anode; p, tube relié à la pompe; dd, conducteurs reliés aux plateaux du condensateur; 1, bobines produisant le champ magnétique déviant; A, appareil photographique; €, C, commutateurs-interrupteurs; MA, milliampèremètre; $S, shunt; R, résistance pour le milliampèremètre servant de voltmètre; P, batterie de piles; Ace, accumulateurs. MÉM. SOC. PHYS. ET HIST. NAT. DE GENÈVE, VOL. 89 (1921). 40 229 C.-E. GUYE ET C. LAVANCHY 1. Machine électrostatique. — La tension aux bornes du tube cathodique était fournie par une machine de Wimshurst à S plateaux. Entrainée par un mo- teur à une vitesse de 1100 à 1500 tours, cette machine nous à donné une tension et un débit suffisants pour produire sans utilisation de lumière ultraviolette l'émission de rayons cathodiques d’une vitesse voisine de la moitié de celle de la lumière. Il est presque inutile de rappeler que les machines électrostatiques jouissent d’un avantage énorme sur les transformateurs, quelquefois employés ; elles donnent en effet une tension beaucoup plus constante que ces derniers, même munis de com- mutateurs tournants et de soupapes; l'émission cathodique est done beaucoup plus régulière et surtout plus homogène. On sait d'autre part la dificulté que l’on éprouve à obtenir un bon fonction- nement des tubes cathodiques des qu'il s'agit de produire des rayons de grande vitesse. Nous y sommes parvenus en réglant le degré de vide dans le tube, en même temps que la tension et le débit à la cathode. Nousutilisions la machine électrostatique de la façon suivante: une fois le degré de vide obtenu dans le tube, nous interrompions le fonctionnement de la pompe; puis le débit et la tension étaient réglés au moyen d'un système de balais B dont on pouvait faire varier le nombre et l’écartement. Ces balais fonctionnent en effet à la facon d’un circuit dérivé et permettent d'obtenir par leur réglage tel débit ou telle tension que l’on désire au tube cathodique. Pour chaque vitesse cathodique, nous sommes arrivés, par des tâtonnements souvent très longs, à régler le degré de vide dans le tube, la vitesse de rotation de la machine, et enfin l’écartement et le nombre des balais qui donnaient à l'émission son maximum de stabilité. Dans ces conditions, la tache que produisaient sur le fond du tube les rayons cathodiques déviés était très approximativement circulaire (comme le diaphragme). Cette tache conservait dans toutes nos mesures, aux gran- des comme aux petites vitesses, une forme toujours la même. On avait ainsi la preuve de la grande homogénéité des faisceaux utilisés (voir planche 6, fig. 2). 2. Tube cathodique. — Nous avons, après un certain nombre d'essais, adopté pour notre tube définitif la forme donnée par la figure ci-dessous (fig. 2). Ce tube à une longueur totale de 80 cm. environ. Son diamètre, qui est de 3 em. au voisinage de la cathode, augmente près de l’anode; et c’est dans un cylindre de 8 cm. @e diamètre environ que passe le faisceau dévié. Pour faciliter le montage et le réglage des pièces placées à son intérieur, le tube était composé de deux parties réunies par un rodage ; un disque en verre égale- ment rodé le fermait à son extrémité. Les Joints de ces trois pièces ont été rendus parfaitement étanches au moyen d’une cire blanche, sorte de cire à cacheter très fine et très adhérente. FORMULE DE LORENTZ-EINSTEIN 323 La cathode € était en aluminium. D’autres métaux, essayés au cours de nos recherches préliminaires, et notamment le cuivre et le laiton, nous donnèrent rapi- dement, par suite de leur désintégration, des dépôts métalliques sur la paroï interne des tubes qui devenait ainsi conductrice. L'anode était constituée par un cylindre de laiton B relié à la terre, Un diaphragme d percé à son centre d’une ouverture circulaire de 0,2%® de diamètre et fixé à l’intérieur du cylindre anode limitait l'émission cathodique à un très mince faisceau. À ce tube anode était directement fixé un second cylindre de laiton D, de plus grand diamètre, et destiné à supporter les pièces du condensateur produisant la déviation électrique. Nous avons eu outre recouvert de papier d’étain, également relié à la terre, la partie du tube comprise entre l’anode et le fond ; cette partie est recouverte de hachures dans le schéma général (fig. 1). Aiïnsi les rayons cathodiques pénétraient, à une distance de 10° environ de la cathode, dans un cylindre de Faraday constitué par les cylindres B et D et par le papier d’étain; dans ces condi- tions, le faisceau cathodique était soustrait sur la presque totalité de son parcours à l’action des champs électrostatiques extérieurs. On avait fixé sur la plaque de verre fermant le tube un écran E au tungstate de calcium, cette substance jouissant de la propriété de donner, sous l'influence du faisceau cathodique, une fluorescence bleue très actinique au point de vue photographique. Sur cette substance étaient tracés deux repères permettant, comme on le verra plus loin, de déterminer Péchelle des clichés photographiques obtenus dans les mesures. Enfin, le vide à l’intérieur du tube s’obtenait par une pompe Graede combinée avec une pompe à enveloppe, dispositif du reste très courant actuellement dans les laboratoires. Nous avons remarqué très nettement, quoique d’une façon qualitative seulement, au cours de nos recherches préliminaires, la relation existant entre la distance cathode-anode et le degré de vide nécessaire à l’émis- sion d’un faisceau cathodique de vitesse déterminée !. Ce sont en partie ces constatations qui nous ont amenés à adopter plusieurs des dimensions de notre tube. Nous avons ainsi, ! Voir à ce sujet les recherches de M. Hirsch, Phys. Zeit, 1907. Fig. 2. 324 C.-E. GUYE ET C. LAVANCIIY sans qu'il soit nécessaire de faire usage d'air liquide ou de charbon, et sans l’inter- vention d'éclairage ultraviolet !, obtenu des rayons de très grande vitesse. 3. Champ électrique. — Le condensateur produisant le champ électrique était composé de deux plateaux PP de laiton de forme spéciale (fig. 2). Les dimensions étaient approximativement les suivantes: 2,4 << 5m, La surface de ces plateaux n’était pas plane, mais cintrée. Cette forme spéciale parait présenter plusieurs avantages. Elle rend la méthode des trajectoires identiques plus rigoureuse qu'avec un condensateur plan, puisque la forme des surfaces équipotentielles se rapproche ainsi de celle de la trajectoire parcourue par les faisceaux cathodiques. La force agissante étant alors, en chaque point, plus exactement normale à la direction de marche de l’électron, celui-ei conserve, pendant son passage dans le champ élec- trique, une vitesse plus rigoureusement constante. Enfin, cette courbure à surtout un avantage pratique: en éliminant l'incertitude provenant du passage du faisceau ‘athodique très près des bords des plateaux, elle permet d'opérer avec sécurité sur de plus grandes déviations. Dans nos expériences, la distance des deux plateaux était de 4,5" à l'entrée du faisceau et de 9% environ à l’autre extrémité. Ces plateaux étaient supportés par deux tiges métalliques fixées elles-mêmes au moyen d’anneaux d'ébonite au cylindre D (fig. 2). Ces tiges étaient mises en relation avec l'extérieur par deux fils conducteurs traversant le verre. Le cylindre D pouvait être retiré du tube sans trop de difficultés; nous sommes arrivés ainsi à faire un réglage très exact de nos plateaux avant leur mise en place, ce qui est absolument impossible quand ces derniers sont fixés directement et définitivement au tube. La différence de potentiel au condensateur était fournie par une batterie de piles sèches pour lampes électriques de poche. Nous disposions d’un ensemble de 250 piles, de trois éléments chacune, donc d’une tension pouvant s'élever jusqu'à environ 1000 volts. Le milieu de la batterie était à la terre ; nous étions sûrs ainsi T de charger les plateaux symétriquement aux potentiels + + et — —. Une telle batterie donne une tension tres constante, surtout si l’on à soin de remplacer au fur et à mesure les éléments défectueux. On verra sur le schéma général la disposition des interrupteurs et des com- mutateurs permettant d'obtenir la déviation électrique au-dessus et au-dessous de la position du faisceau non dévié. 4 Champ magnétique. — Le champ magnétique était fourni par une paire de bobines placées de façon à produire une déviation verticale du faisceau catho- ! Remarquons que soit M. Proctor, soit M. Hupka n’ont obtenuleurs grandes vitesses qu’en éclairant la cathode avec un faisceau de lumière ultraviolette. FORMULE DE LORENTZ-EINSTEIN 32) dique, et parcourues par un courant provenant d'une batterie d’accumulateurs de grande capacité. Nous avons adopté des bobines d’un petit diamètre, 8% environ, car elles ont l'avantage de donner un champ magnétique très faible dans la région voisine de la cathode, région dans laquelle les électrons prennent leur vitesse. Une étude expé- rimentale nous à en effet montré que l’action de ce champ, au voisinage de la ca- thode, était tout à fait négligeable, étant données les grandes dimensions de notre tube et les faibles dimensions des bobines. 5. Compensation du champ magnétique terrestre. — Te champ magnétique terrestre agit évidemment sur le faisceau cathodique et produit, aux petites vitesses surtout, une déviation très appréciable. Le seul moyen d'éliminer son action est de le compenser par un champ contraire aussi homogène que possible, L'importance de cette compensation, ainsi que le mode utilisé ont été exposés antérieurement. Comme nous avons utilisé à cet effet le dispositif même dont se sont servis MM. C.-E, Guye et S. Ratnowsky, nous nous dispensons d'y revenir en détail. Rappelons seu- lement qu’il se composait de deux systèmes de cadres perpendiculaires, de tres grandes dimensions, dont l’un compensait la composante horizontale, l'autre la composante verticale du champ terrestre (voir p. 305). Il importe de remarquer que, laxe du tube ayant été orienté dans le plan du méridien magnétique, la déviation du faisceau cathodique par le champ terrestre était horizontale. Une petite erreur de compensation déplaçait done légerement la trajectoire dans le sens horizontal; et comme nos mesures s’effectuaient sur des déviations verticales, l'influence de cette erreur était pratiquement nulle. Malgré cela, l'intensité du courant passant dans les bobines compensatrices à été contrôlée fréquemment au cours des mesures et maintenue constante, ceci afin d'assurer une parfaite symétrie au dispositif. 6. Mesure de V'et de L — Nous venons de décrire le dispositif permettant d'obtenir des champs électrique et magnétique convenables. Voyons maintenant l'instrument dont nous nous sommes servis pour la mesure de la tension V et du courant [| produisant ces champs. Nous avons repris le milliampèremètre de Siemens et Halske déjà utilisé par MM. CE. Guye et S. Ratnowsky. Cet instrument pouvait fonctionner soit comme voltmètre pour la mesure de V par Padjonction d’une grande résistance, soit comme ampèremetre pour celle de F'au moyen d'un shunt convenable. Le schéma général (fig. 1) montre la disposition des connexions, des interrupteurs et des commutateurs 326 C.-E. GUYE ET C. LAVANCHY permettant de mettre ce milliampèremètre en communication soit avec la batterie de piles, soit avec les accumulateurs. Il fallait, pour éviter toute erreur systématique, vérifier avec un soin tout par- ticulier la graduation de l'instrument, Ce controle, nous l’avons fait à diverses reprises au cours de nos expériences. L’homogénéité de l’échelle à toujours été trouvée exacte, aux erreurs d'expérience près bien entendu. Voici du reste à titre d'exemple deux séries de mesures effectuées dans ce but, la première au début de nos expériences, la deuxième à la fin. 1° série. 2 série. M — — = = — Ôobservée Scalculée | Sobservée S calculée Sobservée Ô calculée 140,95 140,9 54,75 4,66 100,70 100,74 121710 1207 H1:65 91:19 69,69 69,62 109,60 109,56 49,18 40,19 67.45 67,42 98,65 98,65 39,40 39,36 38,79 38,74 89,75 89,65 | 35,13 85,15 32,00 31,95 61,60 61,60 34,03 99293 29,15 29,18 La graduation de ce milliampèremètre permet, grace à sa netteté, de faire des lectures au dixième de division, Et comme sur l'instrument nos mesures les plus faibles étaient encore supérieures à 30 divisions, on pouvait donc dans la grande majorité des cas mesurer Let V à moins de ‘/, °/,. Insistons aussi sur le fait que dans le cas de nos mesures les valeurs relatives de V et de I'interviennent seules dans les calculs; on pourrait même done se dis- penser de vérifier les indications absolues du milliampèremètre. Enfin, les grandes résistances branchées en série sur le voltmètre ont été à diverses époques soigneusement contrôlées avec une boite Carpentier de haute précision. Ainsi l’idée d’une erreur systématique appréciable provenant de l’instrament de mesure doit, nous semble-t-il, être complètement écartée. 7. Dispositif photographique. — L'appareil photographique employé était muni d’un objectif à grande ouverture et à court foyer. Sa forme générale ainsi que sa position par rapport au tube sont données par la figure schématique ci-après (fig. 3). ‘ FORMULE DE LORENTZ-EINSTEIN 3 AA La plaque photographique était portée par un châssis; celui-ci, engagé dans une glissière, pouvait subir au moyen d’une vis © un déplacement latéral. Un res- sort R, dont l'extrémité s'engageait dans une série de ecrans, permettait de faire pro- gresser ce châssis d’une quantité toujours la même. Ainsi chaque cliché était capable d'enregistrer tout un ensemble de déterminations, puisque une seule de ces déter- minations, composée de deux déviations électriques et de deux déviations magné- tiques. toutes quatre verticales, n'utilisait qu'une bande très étroite de la plaque photographique. En outre un écran E, dans lequel était découpée une fente f cor- respondant à la région où venait se former l’image des traces fluorescentes, proté- geait le reste du cliché contre les rayons de lumière diffuse qui auraient pu pénétrer dans l'appareil. Cet appareil pho- tographique était lui- même fixé à un socle SE suffisamment lourd Re et massif pour évi- ter tout déplacement, une fois la mise au ROLE Las Fig. #. — Dispositif pho- Les dimensions et tographique.--Æ, écran; v, vis la disposition des ap- de déplacement du cliché; R, nm, ressort d'arrêt; f, fente. pareils étaient telles que l’image sur le cliché photographique avait très approximativement les dimensions de l’objet. C’est ainsi que les deux points de repère tracés sur le fond du tube à une distance de 69,2mn étaient distants sur nos clichés photographiques de 69,3" pour une partie de nos mesures et de 68,4% pour l’autre partie. Ces points de repère, indiqués sur la fig. 2 et visibles sur les reproductions de clichés (pl. 6), étaient constitués par deux croix tracées en noir sur la plaque fermant le tube avant l'application de la poudre blanche de tungstate de calcium. On les photographiait au commencement et à la fin de chaque série de mesures effectuées sur une même plaque. A cet effet, un éclairement rapide de l'écran au moyen d’une lampe électrique ordinaire produisait sur le cliché une bande noire et deux petites croix très nettes, quoique peu intenses. La distance de ces repères nous donnait l'échelle du cliché. On obtenait ainsi facilement le rapport de la grandeur de l’image à l’objet ; et il était possible de faire subir aux mesures la correction nécessitée par un changement de cette échelle, changement qui aurait pu provenir soit d’une nou- velle mise au point éventuelle, soit d'un déplacement accidentel d’une partie du nn 328 C.—E. GUYE ET C. LAVANCHY dispositif photographique, soit enfin d’une modification très peu probable de la couche de gélatine du chiché au cours du développement !. La fluorescence produite sur le tungstate par un faisceau de petite vitesse étant très intense, on obtient facilement dans ce cas une rapidité d'opération suffisante avec des plaques ordinaires. Dans ces conditions, les plaques Wellington, Bleues Lumière, nous ont donné d'excellents résultats. Mais aux grandes vitesses, il est de toute importance, pour réduire le temps de pose au minimum, de prendre des plaques photographiques d'extréme sensibilité. Nous avons alors utilisé exclusive- ment les marques Capella, plaques italiennes, et Violettes Lumière. A la rapidité d'impression photographique devait correspondre un maniement rapide du dispositif. A cet effet, les commutateurs et interrupteurs étaient placés de façon telle qu'ils pouvaient être manœuvrés très commodément, même dans l’obseu- rité, de telle sorte qu’une détermination, composée d'une double déviation ma- gnétique et d'une double déviation électrique, se faisait, avec un peu d'habitude, en moins de cinq secondes ; exceptionnellement la pose à été plus longue pour les très grandes vitesses, environ dix secondes. Dans ces conditions, la variation de dureté du tube n'avait plus que fort peu d'importance. Pour rendre les clichés plus compréhensibles, nous devons encore faire diverses remarques. Les déviations magnétique et électrique étant toutes deux verticales, on ne peut les distinguer nettement qu'à la condition de les faire d’inégale gran- deur. Toujours la plus grande déviation est la déviation magnétique !, et la plus petite la déviation électrique. Enfin, on verra sur nos clichés une petite flèche voi- sine de l’un des deux points de repère : elle indique l’ordre dans lequel ont été faites les diverses déterminations. Donc en résumé, avec notre système photographique, nous obtenions sur cha- que cliché tout un ensemble de déterminations (en général de 10 à 18). Chacune de ces déterminations comprenait à points disposés verticalement : le point central correspondait au faisceau non dévié, les deux points extrèmes à la double déviation magnétique et les deux points intermédiaires à la double déviation électrique. Cet ensemble de déterminations était effectué sans apporter de modification au fonctionnement de la machine statique et sans faire agir la pompe de Gæde; la * Au cours de nos mesures, un déplacement accidentel à été nettement constaté par ces variations d'échelle: celui du tube lui-même par rapport au reste du dispositif. Nous avons alors dû abandonner la première série de déterminations et en reprendre une nouvelle. ! La déviation magnétique a été choisie la plus grande parce que, d’une part. la méthode des tra- jJectoires identiques est alors tout à fait rigoureuse, ce qui ne serait peut-être plus le cas pour de très grandes déviations électriques (influence des bords du condensateur), et parce que, d'autre part, cette déviation magnétique entre au carré dans nos formules fondamentales; elle doit donc être connue plus exactement. FORMULE DE LORENTZ-EINSTEIN 329 vitesse du faisceau restait donc sensiblement constante. Une lecture de l’intensité aux bobines et de la tension aux plateaux faite au milliampéremeètre au commence- ment et à la fin de la série, ainsi que la photographie des points de repère fournis- saient avec la mesure des déviations les divers éléments nécessaires aux calculs. 8. Mesures des déviations sur les clichés photographiques. — Le faisceau dévié produisait sur le fond du tube, done sur le chehé photographique qui est son image, de petites taches très approximativement circulaires (voir planche 6). I fallait donc mesurer sur les clichés (négatifs) les distances de €es taches correspondant à la double déviation électrique et à la double déviation magnétique. Nous avons essayé, au cours de nos recherches préliminaires, plusieurs pro- cédés de mesure. Et, quoique les centres des taches ne fussent pas nettement définis, des mesures faites au moyen de méthodes différentes donnérent exactement les mêmes résultats. Du reste, l'œil est particulièrement sensible à un défaut de symé- trie; et, soit que nous centrions sur la tache un petit rond tracé sur une lame transparente, soit que nous cherchions la position du centre de la tache par rapport aux traits d’une règle graduée au !/,, de millimètre et appliquée sur le cliché, soit même que nous centrions la tache au moyen d'une carte perforée d’un orifice cir- culaire, les mesures donnaient des chiffres extrêmement concordants. Voici, à titre d'exemple, deux séries de mesures préliminaires effectuées sur une même distance par les deux premiers procédés, que nous avons plus particulièrement étudiés : Centrage d'un rond. Règle au ‘/,, de nom. 210 22,15 22,05 22,10 22,15 22,10 22,15 22,20 24,4 ND Moyenne 22,11 Moyenne 22,14 Nous nous sommes arrêtés en définitive, pour nos mesures, au procédé de la règle graduée au !/,, de mm., de beaucoup le plus pratique. En admettant une approximation égale à !/,, de mm. pour chaque lecture, ce qui n’est nullement exagéré, nous pouvions compter sur une précision voisine du 100 Sur la lecture d’une détermination isolée. Et comme nos calculs étaient faits avec des valeurs correspondant dans la majorité des cas à des moyennes obtenues sur un ensemble de plus de 10 déterminations, les erreurs d'expérience devaient s’éliminer en grande partie, MÉM. SOC, PHYS. ET HIST. NAT. DE GENÈVE, VOL. 89 (1921). {1 330 C.-E. GUYE ET C. LAVANCHY Cette méthode de mesure est encore très longue; et nous avons reconnu dans la suite que l’on atteignait une précision tout aussi grande en procédant d’une autre façon. On tendait le long du cliché deux cheveux fins placés de telle façon que leur distance représentat aussi bien que possible l’ensemble des déterminations enregistrées sur cette plaque photographique. Au moyen de la même règle au !/,, de mm., on faisait deux lectures de cette distance ; lune en regard de la première détermination, l’autre en regard de la derniere, Cette facon de déterminer la dis- tance moyenne était très rapide et ne diminuait pas la précision d’une façon appré- ciable. Toute la seconde partie de nos résultats à été calculée au moyen de chiffres obtenus par ce procédé-là. Il importe de remarquer, enfin, que nous avons éliminé de nos résultats, avant leur mesure, les clichés n'offrant pas une régularité suffisante. Le fonctionnement du tube peut, en effet, subir accidentellement un brusque changement au cours d’une expérience; aussi les quelques plaques sur lesquelles ne se trouvaient pas au moins trois déterminations successives, correspondant à une vitesse très approxima- tivement la méme, étaient écartées d'emblée. Cette élimination nous permettait de ne conserver que les clichés présentant le maximum de sécurité, ceux pour lesquels la dureté du tube s'était maintenue constante. MESURES PRÉLIMINAIRES. Variation des Constantes À et PB. — Nous avons dit dans la partie théorique que les intégrales de champ A et B peuvent être considérées comme pratiquement constantes, même pour des déviations qui ne restent pas rigoureusement identiques. Nous allons donner maintenant quelques détails sur l’étude expérimentale entreprise pour rechercher l'ordre de grandeur de la variation de ces quantités À et B en fonction des déviations x et y. Ces recherches ont été effectuées sur des faisceaux cathodiques de vitesse rela- tivement faible, le tube fonctionnant dans ces conditions avec le maximum de régu- larité; car il est nécessaire de maintenir une vitesse aussi constante que possible pendant un ensemble d'observations. Au reste, les faibles erreurs provenant des petites variations accidentelles de vitesse, variations qu'il n’est jamais possible d'éviter complètement, n’ont plus d'influence sur les moyennes par le fait du grand nombre de mesures effectuées. Voyons successivement comment nous avons mis en évidence la variation des constantes À et B. a) Constante A. — Soit une série de déviations électriques 2,,#,,..., 4, FORMULE DE LORENTZ-EiNSTEIN 991 effectuées sur un faisceau cathodique de vitesse constante », et obtenues en portant respectivement les plateaux du condensateur aux tensions V, , V,,..., V,. Ces déviations nous donnent les équations: e V T5 — À, = —" ; Tous e V _ T, = A, F — ) (XI) pu. Ÿ e V, Ty —— RE l. (is On en tire les relations suivante A es pr ni EN (XIV) \ CR - ; A eme À, H 0 V, ! relations qui nous montrent que lorsqu'on connaîtra les valeurs des tensions V,,V,,..., V, correspondant à des déviations &, , &,,...,4%,, On pourra aisé- A, FR. | ne ment calculer le rapport 3 Pour les diverses valeurs des déviations. 0 Le tableau et le graphique ci-après (fig. 4) donnent en résumé les résultats des mesures destinées à mettre en évidence cette variation. TABLEAU st GRAPHIQUE . À} Ty À 0 53.9 | 1.001 . 5 _. | É. 46.7 | 0.999 40.0 | 0.998 33.0 | 0.999 0 10 20 30 40 50 | 60 . ; : . LS A Fig. 4. — Tableau et graphique représentant la variation du rapport Fa en fonction de la déviation électrique 4» in C.-E. GUYE ET C. LAVANCHY Sur ce graphique, nous avons porté en abscisses les valeurs en m/m. des dévia- | ;  tions +, et en ordonnées les valeurs de _" ’. 0 nous avons rapporté toutes les autres, est très voisine de 50 mm. C’est autour de 2 La déviation moyenne x, , à laquelle cette déviation que généralement nous opérions, Un nombre assez grand de dévia- tions s’écarte d’une façon très sensible de cette valeur; cela tient principalement à deux causes : d'abord à notre souci d'opérer rapidement, et secondement au mode de réglage ! du potentiel V de la batterie de piles. Quoi qu'il en soit, le graphique établi mtentionnellement à très grande échelle nous montre que dans la région des déviations utilisées, région couverte de hachures, la quantité À peut être considérée comme pratiquement constante ?. D) Constante Bb. — Procédant d’une mamere absolument analogue dansle cas de la constante B, nous obtenons des relations semblables qui nous donnent la variation de BD Te . ; ; — en fonction de la déviation magnétique y,. Les résultats de cette étude sont de Ô même résumés par le tableau et le graphique (fig. 5). Le TABLEAU GRAPHIQUE B, Un B. NS : 1.010 R 61.8 | 1.001 56.9! 1.000 1.000 Re 52.8 | 0.998 | = 18.3 | 0.999 | | NX 0:990: 44,3 | 0.997 0 710 20 30 40 50 ; ; Bu su ete Fig. 5. — Tableau et graphique représentant la variation du rapport g. (‘1 fonction de la déviation magnétique yn. ! Ce réglage se faisait de 25 en 25 volts approximativement. ? Exceptionnellement un cliché isolé a été conservé tout en ayant une déviation électrique qui se trou- vait en dehors de ces limites ; sa mesure nous à donné æ — 34,05 m/m.; nous n'avons pas effectué Ja cor- rection qui, du reste, comme on le remarque par le graphique, est encore très faible et négligeable devant d’autres erreurs plus importantes. FORMULE DE LORENTZ-EINSTEIN 393 La déviation moyenne y, est dans ce cas voisine de 57 mm. On voit bien que dans la région couverte de hachures s'étendant de part et d'autre de cette déviation moyenne et représentant la région utilisée la variation de B est pratiquement nulle ?, Donc, en résumé, nous pouvons considérer les quantités À et B comme prati- quement constantes pour lensemble des dévialions que nous avons utilisées. Ce résultat nous autorise à élendre suns modification, à des déviations presque cons- tantes, le principe de la méthode des trajectoires identiques, et à prendre pour for- mules fondamentales les relations (XD) et (XIP) dans lesquelles ne figurent pas les intégrales de champ. 2. Délermination de la vitesse absolue des rayons de comparaison. — Rap- pelons que la vitesse d’un faisceau cathodique est donnée par la formule (VU) v—4/2= Po y. X by L Sa détermination revient done à la connaissance des valeurs de — , de — et de A. ù Quant aux quantités æ et V, leur mesure n'offre aucune difficulté. a) Valeur de — .-- De nombreux travaux ont été entrepris depuis quelques la ) années pour déterminer avec exactitude la valeur de — ; on peut actuellement sans 0 craindre une erreur notable admettre pour cette valeur 1,77 >< 107, C'est ce chiffre que nous avons introduit dans nos calculs. e L. ; ne k | b) Valeur de “—.— Cette valeur, du reste fort peu différente pour les 110 faibles vitesses suivant l'hypothèse considérée, se calcule par les formules théoriques rappelées précédemment. c) Mesure de A. —TLa valeur de À est liée comme on sait, au potentiel de décharge U par la relation (VID A—2=—7x 1 A titre exceptionnel deux clichés ont enregistré des déviations tombant en dehors des limites don- nées par la région couverte de hachures: y — 60,80 m/m. et y — 44,18 m/m. Encore ici, il n°y avait pas lieu d'effectuer une correction. 594 C.-E. GUYE ET C. LAVANCHY Sa mesure est très délicate, car elle nécessite la détermination de potentiels assez élevés, quoique très inférieurs à ceux mesurés dans la méthode de M. Hupka. Ces potentiels U étaient très voisins de 14.000 volts. Ils auraient donc pu être encore mesurés avec précision au moyen de lélectromètre absolu de Bichat- Blondlot. Malheureusement, cet appareil ne se prête guère à des lectures rapides, telles qu'elles doivent être effectuées aux bornes d’un tube cathodique. Nous avons donc préféré nous servir pour ces déterminations de lélectromètre sous pression de MM. C.-E, Guye et A. Tcherniawsky! qui ne fournit, il est vrai, que des valeurs relatives, mais qui est à lecture beaucoup plus rapide, et qui peut ensuite étre étalonné facilement avec un électromètre absolu. Cet électromètre sous pres- sion fonctionnait très normalement niéme pour des potentiels bien supérieurs à ceux que nous avions à mesurer, On choisissait du reste, pour effectuer les mesures, le moment où la régularité de l'émission cathodique était la plus grande possible. Les tableaux, donnés plus loin, montrent quel était le degré de régularité de fonc- tionnement du tube dans ces expériences. L’étalonnage de l’électromètre sous pression à été ensuite effectué avec beau- coup de soin au moyen d’un électromètre absolu Bichat-Blondlot et pour la région méme de l'échelle que nous avions utilisée dans nos mesures sur les rayons catho- diques. Au voisinage de 14.000 volts, l’électromètre sous pression nous permettait d'arriver à une précision minimum de lecture de !/,,,. D'autre part, les lectures au Bichat-Blondlot pouvaient être faites à environ !/,,,. On se rend compte aimsi de la précision que nous pouvions atteindre sur la moyenne des mesures, précision qu'il nous aurait été tres difficile, sinon impossible, d'obtenir s'il s'était agi de mesurer des potentiels beaucoup plus élevés. La détermination de À nécessite encore la connaissance du rapport 7 de la (u) masse transversale à la masse cinétique, ces deux masses étant des fonctions de la vitesse calculables par les formules théoriques. Il suffit donc de calculer pour chacune des hypothèses et par la relation fe, : V2 i G) | que l’on peut aussi écrire cr o=/2ut.t, bo (u) ! C.-E. Guye et A. Tonerniawsky, Arch. des Sc. phys. et nat., 35, 1915, p. 565. cc FORMULE DE LORENTZ-EINSTEIN 339 la vitesse v des faisceaux utilisés pour cette détermination pour obtenir ensuite par 22 (1) . . . . e . 4 . bo : faire par approximations successives de la façon suivante. En faisant :— — 1 dans (u) (V'") on obtenait une première valeur de # qui nous permettait de calculer celle du les formules théoriques la valeur de -— . Le calcul exact de # pouvait aisément se Ho 2 DS À / : T — correspondant. Introduisant cette dernière dans la même équation (V'”), [ rapport LMD . : . U on calculait une nouvelle valeur plus approchée de v, puis de nouveau de — . On (u) b. — pour chacune (u) ÿ des deux hypothèses avec toute la précision que l’on désirait. D'ailleurs, pratique- pouvait ainsi déterminer cette vitesse v, donc aussi le rapport ment, la troisième approximation se confondait toujours avec la deuxième. Ainsi, la valeur de A pouvait être exactement calculée par la formule (VIT). Les expériences qui ont servi à la déterminer ont été effectuées au début et à la fin de nos séries de mesures; les tableaux ci-dessous résument ces expériences et donnent la valeur de A calculée dans l'hypothèse de Lorentz-Einstein. Les tableaux ci-dessous (un pour chaque série de mesures) résument les va- leurs de À calculées en partant de l'hypothèse de Lorentz. On y trouve en outre toutes les valeurs expérimentales relevées à cet effet : 1" série de mesures. a | U | Y | R | À | 5 49.55 | 13660 | 45.00 | 43040 | 6899 O3 49.55 13430 » 6839 — 0.73 | 49.40 13600 » » 6849 —_ 0,59 49.75 13660 » » 6939 070 | 49.49 13670 » » 6897 + 0.10 49.56 | 13680 ) ) 6906 | + 0.23 | 49.48 13690 » » GSS5 (07 49,58 13650 » | » 6901 + 0.15 Moyenne: 6890 a = déviation en mm; U — potentiel de décharge en volts; V — division du milliampèremètre fonctionnant comme voltmètre ; R + résistance en ohms en série sur le milliampèremètre; A — constante cherchée; A’ — constante corrigée de la différence d'échelle des clichés ; à — différence en ?/, avec la valeur moyenne. 330 C.—E. GUYE ET C. LAVANCIY Dm série de mesures. 47.91 15880 | 44.50 | 43040 6849 6957 + 0.53 48.9) 13600 | 44,50 » 6802 6889 —— 0.16 47.65 | 15830 | 44.60 » 6757 GS43 — 0.82 47.05 | 14070 | 44.60 » 6S14 6901 + 0.00 47.95 13880 | 44.70 » 6832 6920 + 0.28 47.55 1 14010 | 44.60 » 6825 6912 | + O.I8 Moyenne: 6813 6900 Comme nous Pavons dit, nos deux séries se différencient par un changement d'échelle, Les deux tableaux ci-dessus n'étant pas immédiatement comparables, on a fait subir aux valeurs de À obtenues pour la seconde série la correction nécessaire. Il est bien évident que les calculs de Ia vitesse de comparaison doivent être conduits en partant de la valeur de À non corrigée. Lie calcul de correction que nous venons de faire ayant été effectué seulement pour vérifier la concordance des déterminations effectuées à des époques fort différentes. L'examen de ces deux séries montre nettement que les différences entre les diverses valeurs de A ne dépassent jamais l’ordre de grandeur des erreurs d’expé- rience ; et que des mesures effectuées à un long intervalle de temps ne donnent aucune différence sensible ; la différence entre les moyennes de ces deux séries est en effet très voisine de !/,,,, précision plus grande que celle à laquelle nous avions droit d'espérer. Dans l'hypothèse d'Abraham, la valeur de A est à pee Es puisque, comme il est facile de le voir, la divergence ne porte que sur le rapport ! ss , et cela pour des rayons relativement lents (voir formule VIT). Nous avons par des calculs identiques à ceux donnés plus haut obtenu les valeurs suivantes qui se rapportent ainsi à la théorie d'Abraham : 1" série (au début) 2% série (à la fin) 6909 6859 6849 6812 6860 6758 6949 6825 6906 6841 6916 6824 6896 6910 Moyenne : 6900 Moyenne : 6823 résultats presque identiques à 6890 et GS13 obtenus par l'hypothèse de Lorentz. FORMULE DE LORENTZ-EINSTEIN O7 On voit done combien le choix de l’hypothèse à peu d'influence sur la cons- tante À lorsqu'on la détermine par les rayons lents de comparaison. d) Mesure de la vitesse de comparaison. — Après avoir ainsi obtenu tres exactement la valeur de À, nous avons procédé à un second groupe d'expériences qui devaient nous donner tous les éléments nécessaires à la mesure de la vitesse de comparaison. Dans ces expériences, nous n'avions plus à mesurer le potentiel de décharge puisque la vitesse se calculait par l'équation (VIT). I suffisait d’enregis- trer les déviations électrique et magnétique et les tension et intensité produisant les champs déviants. Toute l'attention pouvait ainsi être portée sur le réglage du fonc- tionnement méme du tube de façon à obtenir pendant toutes les mesures des rayons homogènes, de vitesse aussi constante que possible. Le calcul a été conduit également par approximations successives. Nous donnons ci-après, à titre de renseignement, le tableau complet des valeurs expérimentales relatives aux rayons de comparaison et cela pour la pre- mière des deux séries de mesures qui constituent l’ensemble de nos résultats : œ y | V I 51.98 5.24. | 47.05 34.90 51.44 56.48 47.05 00.00) D39 56.45 47.05 39.60 51.48 56.43 47.00 35.65 51 30 56.38 47.00 39.09 91:19 26.08 47.00 20:91) SHARE) 56.03 47.00 39.40 51.08 29:00 47.00 30-00 51.15 56.03 47.00 39.60 912€ DD 10 46.85 30,40 51-930 55.80 46.90 39.45 51.20 99.91 46.90 39.50 91,39 56.09 46.95 39.90 51.19 DD 70 46,95 39.60 DIAU 59.70 46.95 39.60 D0.81 55.60 46.95 39.60 H0 99 Dh102 46.95 99.99 51.20 95.58 46.95 3.50 51.44 55.74 46.95 35.45 2:59 36.45 46.95 9) 00 53.08 26.88 46.95 32.60 MÉM. SOC. PHYS. ET HIST. NAT. DE GENÈVE, VOL. 89 (1921). 42 339 C.-E. GUYE ET C. LAVANCHY v y V I 51.28 59.60 46.95 32.40 50.89 55.65 46.95 39.45 50.96 D9.50 46.95 30.45 50.69 55.42 46.95 35.45 50.95 D5.65 46.95 39.40 51.05 55.70 46.95 30.30 90.56 55.70 46.93 20:99 O2 56.8 46.70 39.00 51.50 615 46.70 35.50 50.88 99.43 46.70 30.4) 51.53 55.98 46.70 99:20 51.50 59.89 46.70 99,20 52.53 56.39 46.70 39.30 50.24 55.36 46.70 32.40 50.41 D5.38 46.70 30.99 50,58 20100 46.70 39.49 20.43 55.57 46.70 30.30 51.26 56.14 46.70 3.00 Chaque valeur des doubles déviations x et y de ce tableau résulte en général d’une moyenne provenant de # mesures faites sur les clichés au moyen de la règle au !/,, de mm. Les valeurs de V et de LE, qui sont remplacées ici par les indications de l’appareil de mesure lui-même, proviennent chacune de 2 lectures faites lune avant l’autre après l’enregistrement des 4 déviations correspondantes !. Ce tableau montre nettement la régularité d'émission que l’on parvient à ob- tenir en expérimentant sur les rayons mous, et la constance très grande de la vi- tesse du faisceau pour tout l’ensemble de ces mesures. Nous avons groupé ces valeurs expérimentales 10 par 10, après les avoir classées dans l’ordre des déviations électriques croissantes (le tableau précédent a été établi suivant l’ordre chronologique). Ce classement nous donnait à très peu près l’ordre des vitesses au contraire décroissantes. En effectuant les moyennes sur chaque groupe de 10 valeurs, nous avons ainsi obtenu 4 valeurs moyennes de x, y, Vetl. C’est à partir de ces moyennes que l’on a calculé les 4 vitesses de compa- raison (5) en admettant exacte la théorie de Lorentz-Einstein. Ces résultats sont donnés dans le tableau suivant: 1 Les chiffres qui figurent dans les colonnes V et I représentent les indications du milliampèremètre fonctionnant alternativement comme voltmètre et comme ampèremètre pour la mesure de la tension du condensateur et pour la mesure du courant produisant le champ magnétique. La symétrie complète des formules fondamentales (XV) et (XVI) rend inutile toute réduction de ces indications en valeur absolue. FORMULE DE LORENTZ-EINSTEIN 339 pe CN ASE 50.64 | 55.52 | 46.83 | 35.44 | 0.2291 51.10 | 55.82 | 46.97 | 35.44 | 0.2283 51.32 | 56.00 | 46.94 | 35.50 | 0.2277 52.10 | 56.25 | 46.83 | 35.39 | 0.2257 Moy. 51.29 | 55.90 | 46.90 1 35.44 | 0.2277 Enfin la moyenne de ces 4 valeurs :! constitue la vitesse de comparaison à laquelle on à rapporté toute la première série de nos résultats. Les moyennes de +, y, V et [ sont les autres éléments nécessaires ! [7A n_… . AE aux calculs de ‘— et de G' pour tout autre faisceau. On voit done que ces éléments D de comparaison résultent d'environ 160 doubles déviations tant électriques que magnétiques et de près de 80 lectures, soit de V soit de T. La détermination de la valeur de: comparaison nécessaire au calcul de la denxième série des résultats à été conduite d'une facon identique. Le tableau ci- dessous résume les lectures de V et de T faites au nilliampèremètre, ainsi que les mesures effectuées sur les clichés, non pas directement au moyen de la règle au !/;, de millimètre, mais par le procédé du cheveu tendu, ce qui était plus rapide. x 50.28 48.15 45.43 ÿ D1eJ0 D1.05 50.33 49,90 49,75 49,54 48.04 46.05 47.91 48.55 47.69 47.05 47.95 47.30 Moy. 48.65 y. V I 56.65 45.80 306.40 99:00 45.30 36.40 54.05 45.20 36.90 29.66 4500 39.05 59.06 45.60 39.00 26.36 45.48 36.20 96.13 45.45 36.30 56.18 45.45 36.80 56.28 45.50 30.30 59218 45.40 30.50 54.20 45.25 34.80 53.66 14.50 34.95 53.98 44.50 34.97 D3.39 44.60 34.93 09.19 44.55 34.95 D3.48 44.65 34.98 23,80 44,55 34.95 54.84 45.09 35.69 ! Rapportée à la vitesse de la lumière prise comme unité 3/10 C.—E. GUYE ET C. LAVANCHY Les valeurs moyennes de chaque colonne de ce tableau résultent ainsi de me- sures effectuées par ce moyen sur 17 clichés. C’est à partir de ces valeurs que lon a calculé la vitesse de comparaison, relative à la seconde série B — valeur fort peu différente de celle qui à servi au calcul de la première série. Enfin, les calculs précédents répétés en partant de la constante A déterminée dans le cas où l’on admet exacte la théorie d'Abraham, nous ont fourni les deux valeurs moyennes suivantes de la vitesse de comparaison GB, légèrement différentes de celles que l’on vient de calculer ‘: 0,2281 , Is 6 0,7284 QUE, MU B—10,2288 En résumé, on voit que la vitesse de comparaison à été déterminée avec un soin tout particulier, et que la moyenne définitive résulte d'environ 200 doubles déviations électriques et magnétiques du faisceau cathodique. Le grand nombre de mesures élimine presque totalement les erreurs fortuites, dont la principale résulte toujours de l'instabilité de l'émission cathodique. Il eût été, semble-t-il, beaucoup plus pratique de mesurer le potentiel de décharge relatif aux rayons de comparaison eux-mêmes, et de se dispenser d’effec- tuer la mesure de la constante À, puisque la détermination d'une vitesse revient toujours en définitive à celle des éléments de l'équation : (V) Ue 1 — 9 (2) ee Si nous avons choisi cette méthode, c’est qu'elle nous permettait de séparer les difficultés. Dans un premier groupe de mesures, celui qui nous à donné À, nous pouvions vouer tous nos soins à la détermination de U et de V sans avoir à nous préoccuper de maintenir la vitesse » des rayons rigoureusement constante. Nous pouvions entreprendre ensuite le deuxième groupe qui nous donnait la mesure de 2, y, V et [relatifs à la vitesse de comparaison, cette fois sans avoir à lire le poten- tiel de décharge au tube cathodique. 1 On peut remarquer du reste qu’il n’est pas absolument nécessaire de déterminer la constante A se rapportant à l'hypothèse d'Abraham pour calculer la vitesse de comparaison correspondante, On obtien- drait aussi cette seconde vitesse en partant de l'équation: On voit en effet aisément que le rapport des vitesses & (Lorentz) et 5 (Abraham) est simplement égal au : … (b) (1) ; rapport inverse des coefficients -— de Lorentz et -— d'Abraham. D) 1 vo \V 0 FORMULE DE LORENTZ-EINSTEIN 311 RÉSULTATS ET CONCLUSIONS DE LA DEUXIÈME PARTIE. Afin de mieux faire ressortir la façon dont nos résultats se rattachent aux données directes de l'expérience, nous pouvons, par une transformation très simple, mettre nos équations fondamentales sous la forme : Lx 1 V'y' XV Tete qVy (XV) IT | ou (XVI) CRE # a | VE Lo Et Lo Lx V'y? . Rappelons que dans ces expressions les lettres affectées d'un indice désignent des grandeurs relatives aux rayons cathodiques étudiés, celles non affectées din- dice correspondent aux mêmes grandeurs pour les rayons cathodiques lents de Comparaison; Get G' sont les vitesses des rayons cathodiques rapportées à celle de la lumière, prise comme unité ; u' et » les masses transversales correspondant à ces vitesses ; y, la mass@ transversale pour des rayons infiniment lents. Enfin V, V’, IL 1", sont les tensions et les courants qui produisent les déviations magné- tiques et électriques du faisceau cathodique ; +, æ', y, y', les déviations corres- pondantes enregistrées photographiquement. Les quantités entre crochets ne concernent que les rayons de comparaison ; elles ont été déterminées une fois pour toutes pour chacune des deux séries d’expé- riences que comporte ce travail. Suivant que l’on adoptera pour ce calcul l'hypo- thèse de Lorentz-Einstein ou celle d'Abraham, ces quantités entre crochets auront naturellement des valeurs un peu différentes, puisque les rayons de comparaison ne sont pas infiniment lents. L'ensemble de nos résultats comprend en définitive deux séries de valeurs ! : L. a. ; ns. de £’ et les valeurs correspondantes — obtenues ainsi que nous venons de l’indi- Lo quer par les formules (XV) et (XVI). Dans chacune de ces séries les expériences sont ordonnées suivant les vitesses croissantes des rayons Cathodiques étudiés, sans avoir aucun égard à l’ordre chronologique dans lequel ces expériences ont été effectuées. Nous nous bornerons à rappeler que ces tableaux résultent des mesures effectuées sur 150 clichés, comprenant environ deux mille doubles déviations (électriques et magnétiques). 115 & 3 8 DD 342 C.-E. GUYE ET C. LAVANCHY Quant aux valeurs des vitesses de comparaison qui figurent à la première ligne de chaque série, elles résultent également d’un très grand nombre de mesures faites dans des conditions expérimentales particulièrement faciles et favorables, puisqu'il s’agis- sait de rayons cathodiques lents, ainsi que nous l'avons exposé au cours de ce mémoire. Pour rendre plus facile la comparaison entre les deux formules nous avons résumé les données qui précèdent dans le Tableau général ci-contre, lequel résulte de toutes nos expériences. Pour obtenir ce dernier tableau, nous avons d’abord classé, par ordre de vitesse croissante et sans distinction de série, tous les résultats des deux tableaux précé- ! » LJ. > : . dents. En effectuant les moyennes des valeurs de G' et de — groupées six par six, nous 1.0 ._ LORENTZ-EINSTEIN + ABRAHAM ee RAYONS DE COMPARAISON | \ \ LIIIITINNIT LUE & = = e a 020 025 0.30 035 0.50 Fig. 6. avons obtenu en définitive vingt-cinq valeurs de £' et les valeurs correspondantes Dh s de'- et cela pour les deux hypothèses. 110 Le tableau ci-après résume donc toutes ces valeurs moyennes. Il nous à permis d'établir le graphique de la fig. 6 où les valeurs de G' sont portées en abscisses et ! L. ; A les valeurs de — en ordonnées. Les courbes L et À tracées sur la fi gure repré- 10 L ! . ne rie LL . ; sg sentent d'autre part la variation théorique de — dans les deux hypothèses envisagées. L.0 FORMULE DE LORENTZ-EINSTEIN 3143 Tableaux Complets des Résultats. Les tableaux qui suivent résument pour nos deux séries d'expériences, d’une part les données directes d'observation (page de gauche), d'autre part les résultats obtenus en prenant comme base pour le calcul des expériences, soit la formule de Lorentz-Einstein, soit celle d'Abraham (page de droite). Dans ces tableaux, nous avons adopté les désignations suivantes: Tableau de gauche. — La première colonne donne Pindication du numéro du chché. æ double déviation électrique exprimée en mm. y double déviation magnétique exprimée en mm. V lecture faite au milliamperemètre fonctionnant comme voltmètre et donnant la différence de potentiel des armatures du condensateur, placé à l’intérieur du tube. FR résistance en ohms intercalée dans le circuit du voltmètre. I lecture faite au milliampéremètre fonctionnant comme ampèremètre pour la mesure du champ magnétique déviant. à distance des deux repères photographiés, servant à fixer exactement l'échelle du cliché. Tableau de droite. — B ‘vitesse des rayons cathodiques, la vitesse de la lumière étant prise pour unité. u masse transversale d’un électron de vitesse £. ”, masse d'un électron supposé infiniment lent. La seconde colonne donne la valeur du rapport ; tel qu'il résulte des données expérimentales ; dans la troisième colonne figure la valeur de ce même rap- port tel qu'il ressort des formules théoriques. ou A différence entre le rapport 2 déduit de l’expérience et la valeur du même rap- port déduit des formules théoriques. Tous les calculs ont été effectués, en partant soit de la formule de Lorentz- Einstein, soit de celle d'Abraham. 31/4 C.-E. GUYE ET C. LAVANCHY 1 SÉRIE No r ) V R Il û des plaques. 51.29 | 55.90 46.90 43040 35.44 69.31 43 52.84 58.61 60.93 » 41.78 69.40 44 51.64 58.01 60.95 » 41.91 69.43 39 51.05 55.42 61.18 » 40.51 69.45 36 50.96 55.68 61.17 » 40.87 69.28 37 50.98 55.73 61.20 » 40.84 69.30 38 51.18 56.20 61.16 » 40.96 69.28 35 50.88 55.62 61.13 » 40.73 69.28 31 49.03 55.11 61.40 » 41.40 69.28 45 52.74 58.47 74.95 » 46.25 69.45 46 49.61 56.19 75.05 » 46.03 69.43 55 51.71 55.34 39.70 85070 45.77 69.38 53 51.86 55.34 39.95 ) 45.85 69.35 54 52.06 55.70 39.80 » 45.77 69.75 48 47.42 54.45 75.23 43040 45.95 69.40 59 49.06 53.44 39.80 85970 45.35 69.35 52 43.63 52.24 74.99 43040 45.90 69.38 75 52.43 57.40 44.65 85970 50.03 69.60 69 52,92 57.25 44.95 » 50.00 69.40 76 52.03 57.46 44.30 » 50.00 69.45 71 52.78 57.22 44.93 » 50.00 69.45 68 51.74 56.60 45.00 » 50.05 69.25 70 52.37 57.12 44.93 » 50.00 69.45 50 43.62 52.11 75.60 43040 45.95 69.40 51 42.89 51.73 75.25 » 45.90 69.38 78 51.90 59.33 47.65 85970 53.95 69.45 79 51.79 59.26 47.65 1 53.95 69.48 “] 52.26 59.49 47.90 » 53,95 69.48 80 51.58 59.18 47.55 ) 53.95 69.45 94 53.925 58.58 50.13 ) 54.18 69.40 95 51.65 57.53 50.15 » 54.10 69.40 86 48.98 57.60 47.80 » 53.98 69.40 90 50.73 2770 50.05 » 54.60 69.40 82 46.55 56.90 46.03 » 53.93 69.45 91 50.40 57.35 50.05 54.60 69.40 92 50.38 57.50 50.08 54.60 69.38 87 48.05 56.88 CRU 76 » 53.98 69.35 93 50.40 57.43 50.03 » 54.55 69.43 96 50.93 57.65 50.05 » 54.05 69.40 7 50.30 57.25 50.00 » 54.05 69.40 124 52.78 57.17 53.29 » 53.81 69.70 FORMULE DE LORENTZ-EINSTEIN 34) {re SÉRIE Théorie pe LorenTrz-EINSTEIN Taéonte D'ABRAHAM È : observé b' théorique A 6 | - observé | We théorique A vo V0 Ho Vo (0. 2277) 2: (1.027) = (02284) nu (1.021) — 0.2556 1.031 1.034 — 0.003 0.2563 1.025 1.026 — 0.001 0.2582 12089 12035 + 0.000 0.2589 1.029 1.027 + 0.002 0.2584 1.045 12099 + 0.010 0.2591 1.039 12027 + 0.012 0.2584 1.049 1035 + 0.014 0.2591 1.043 1.027 + 0.016 0.2589 1.045 14085 + 0.010 0.2596 1.039 1.027 + 0.012 0.2591 18039 1089 + 0.004 0.2598 1N0PS 1.027 + 0.006 0.2593 1.043 12085 + 0.008 0.2600 1027 1.027 + 0.010 0.2634 1.043 1037 + 0.006 || 0.2641 1.037 1.028 + 0.009 0.2839 1081 1.043 — 0.012 0.2847 1.025 1083 — 0.008 0.2919 1.038 1.045 — 0.007 0.2937 1.032 12039 — 0,003 0.2930 1.043 1.046 — 0.003 0.2938 10 1.036 + 0.001 0.2935 1.043 1.046 — 0.003 0.2943 12087 1.036 + 0.001 0.2937 1.041 1.046 — 0.005 0.2945 1.035 1.036 — 0.001 0.2971 1.048 1.047 + 0.001 0.2979 1.042 1.037 + 0.005 0.3018 1:059 1.049 — 0.010 0.3027 1.033 1:08 — 0.005 0.3077 1.050 12051 — 0.001 0.3086 1.044 1.040 + 0.004 0.3084 1.046 1.051 — 0.005 0.3095 1.040 1.040 + 0.000 0.3088 1.052 1051 + 0.001 0.3097 1.046 1.040 + 0.006 0.3089 1.046 1.051 — 0.005 0.3098 1.040 1.040 + 0.000 0.3093 1051 1.052 — 0.001 0.3102 1.045 1.040 + 0.005 0.3093 1.050 1.052 — 0.002 0.3102 1.044 1.040 + 0.004 0.3094 1:037 1.052 — 0.015 0.3105 1091 1.040 — 0.009 0.3106 1.050 1.052 0:00? 03115 1.044 1.041 + 0.003 02125 1.050 14058 — (0.003 0.3134 1.044 1.041 + 0.003 0.3187 1.056 1.055 + 0.001 0.3196 1.050 1.043 + 0.007 0.3190 15050 1.055 + 0.001 02199 1.050 1.043 + 0.007 0.3191 1.052 17055 — 0.003 0.3200 1.046 1.043 + 0.003 0.3192 1.057 1.055 + 0.002 0.3201 1.051 1.043 + 0.008 0.3213 1.065 1.056 + 0.009 0.3222 1.059 1.044 0015 0.3259 1.068 1.058 + 0.010 0.320608 1.062 1.045 + 0.017 0.3287 12095 1.059 — 0.004 0.3296 1.049 1.046 + 0.003 0.3291 1.064 1.059 + 0.005 0.3300 1.058 1.047 + 0.011 0.3293 1.065 1.059 + 0.006 0.3302 1.059 1.047 + 0.012 0.3293 1.070 1059 + 0.011 0.3302 1.064 1.047 + 0.017 0.3305 1.066 1.060 + 0.006 (03314 1.060 1.047 + 0.015 0.3306 1.062 1.060 + 0.002 03315 1.056 1.047 + 0.009 0.3307 1.065 1.060 + 0.005 0.3317 1,059 1.047 + 0.012 0.3309 1.049 1.060 — 0.011 0.3319 1.043 1.047 — 0.004 0.3324 1.051 1.060 — 0,009 0.3334 1.045 1.048 — 0.003 0.3328 1.067 1.061 + 0.006 0.3338 1.061 1.048 + 0.013 MËM. SOC. PHYS. ET HIST. NAT. DE GENÈVE, VOL. 89 (1921). 45 346 C.-E. GUYE ET C. LAVANCHY à | 1 ) V R Il ù des plaques. | ns) 47.45 56.38 47.90 85970 53.93 69.40 84 48.05 57.08 47.95 » A0 69.35 112 55: 05 De 00 57.85 » 99.89 69 103 46.93. 251 70 50.03 » 55.00 69. 106 47.99 Hole 51-25 » 54,80 69. 108 53.30 56.25 57.60 » 55.90 . 69. 98 50.40 55:09 54.15 » 54.93 69. 99 49.78 55850 HOUDD » 54.90 69. 107 46.72 55.58 50.00 » b4%,05 69. 105 48.35 55428 6225 » 54.85 69. 100 49.85 56.05 53,2 » 54.95 69. 104 49.60 55.40 53.65 » 54.93 69. 101 48.88 55508 52,80 » 54.95 69. 123 52745 56.28 5750 » 56.05 69. 110 52.20 55.43 57.88 » SAIS 69. 111 51.93 55.40 57.88 » Lire 69. 109 61:95 Solo 57.80 » 5540 69. 114 50.00 54.38 SA) » 55.88 69. 113 50.18 54.60 D 7/10 » 55.80 69. 120 49.40 54.10 p.10 » DH , 69. 145 49.58 54,28 57.70 » 55.85 69. 121 49.35 54.30 57290 » 55.90 69 129 a De 57.48 62:39 » 59.03 69. 147 48.13 53.38 57:79 » 55.88 69. 126 52.45 57.02 62.40 » 59.10 70 118 47.83 53.40 57.80 » 55.90 69. 119 47.30 52.98 57%05 » 55,90 69 130 51.90 56.80 62,40 : » 59.05 69. 131 49.75 5519 6225 ) 59.05 70. 127 47.54 54.03 62.40 » 59.10 70. 125 46.58 59:35 62.43 » 59.10 70. 129 b 45.85 52.78 62.35 » 59.03 69. 132 52.23 57.43 1600 » 64.55 69. 138 5475 57229 7100 » 64.060 69. 138 51.33 57.18 AP4D » 50.00 69. 134 51465 57420 FERA AS) » 64.50 GE 139 512359 57.2 71.40 » 64.38 69. 139 50.40 56.80 11025 » 64.95 69.: 136 50.43 50.9 71.50 » 64.84 69.45 140 49,38 55,58 71233 » 64.77 69.30 137 49.28 56.03 71.48 » 64.94 69.85 141 47.58 54:79 HAT » 64.73 69.35 116 34.05 44.18 57.75 » 55.95 69.70 FORMULE DE LORENTZ-EINSTEIN 347 Tuaéorie DE LORENTZ-ÉINSTEIN TH£oRIE D'ABRAHAM £ Ê observé . théorique A f | - observé Ê théorique | A 0.3332 1.062 1.061 + 0.001 0.3342 | 1.056 1.048 + 0.008 05929 1.049 1.061 — 0.012 0.3343 1.045 1.048 — 0.005 0.3405 1.059 1.064 — 0.005 0.3415 1.053 1.050 + 0.003 0.3411 1.070 1.064 + 0.006 0.3421 1.064 1.050 + 0.014 0.3419 1.067 1.064 + 0.003 0.3429 1.061 1.051 + 0.010 0.3433 1:07 1.064 + 0.007 0.3443 1.065 4,051 + 0.014 0.3435 1.064 1.065 — 0.001 0.3445 1.058 12051 + 0.007 0.3436 1.064 1.065 — 0.001 0.3446 1.058 12091 + 0.007 0.3436 1.059 1.065 — 0.006 0.3440 1.053 1051 + 0.002 0.3438 1.068 1.065 + 0.003 0.3448 1.062 1,05 + 0.011 _0.3440 18055 1.065 — 0.010 0.3490 1.049 1.052 — 0,003 0.3444 1.065 1.065 + 0.000 0.3454 1084 1.052 + 0.007 0.3446 1.063 1.065 — 0.002 0.3456 15057 1.052 + 0.005 0.3475 1.065 1.066 — 0.001 0.3485 1.059 12108 + 0.006 0.3480 1.069 1.066 + 0.003 0.3490 RE: .063 1#053 + 0.010 0.3489 1.070 1.067 + 0.003 0.3499 1.064 12058 + 0.011 0.3503 1067 1.067 + 0.000 06915 1.061 1.054 + 0.007 0.3545 1.073 1.069 + 0.004 0/39599 1.067 2055 + 0.012 0.3548 1.064 1.069 — 0.005 0.3558 1.058 16055 + 0.003 0.3564 11077 1.070 02007 0.3574 107% 1.056 + 0.015 03971 1.070 1.070 + 0.000 0.3581 1.064 1.056 + 0.008 0.3576 1.069 107 — 0.002 0.335806 1.065 1.056 + 0.007 0.3593 1.062 1.071 — 0.009 0.3603 1.056 «1007 — 0.001 0.3618 1.074 1.072 + 0.002 0.3628 1.068 1.058 + 0.010 0.3623 1.067 1.073 0.006 0.3633 1.061 1.058 + 0.003 0.3646 - 1.067 1.074 — 0.007 0.36506 1.061 1.059 + 0.002 0.3649 1.075 1.074 + 0.001 0.3699 1.069 1.059 + 0.010 0.3651 1.058 1.074 — 0.016 0.30661 1.052 1.059 — 0.007 0.3708 12019 1.077 — 0.004 0.3718 1.067 1.061 + 0.006 0.3788 1,077 1.080 — 0.003 0.3799 1.071 1.064 + 0.007 0.3819 1.082 1.082 + 0.000 0.3830 1.076 1.065 + 0.011 0.3838 1.083 1.083 + 0.000 0.3849 1.076 1.066 + 0.010 0.3865 1.074 1.084 — 0.010 0.3860 1.067 1.067 + 0.000 0.3865 1.084 1.084 + 0.000 0.3866 1077 1.067 + 0.010 0.3866 1.087 1.084 + 0.003 0.3877 1.080 1.067 + 0.013 É 0.3873 1.083 1.085 — 0.002 0.388 1.076 1.068 + 0.008 D 0.3903 ao 1.086 — 0.015 0.3914 1.064 1.069 — 0.005 0.3903 1.082 1.086 — 0.004 0.3914 PEUPS 1.069 + 0.006 0.3904 1.087 1.086 + 0.001 03915 1.080 1.069 + 0.011 0.3914 1.100 1.087 + 0.013 0.3925 1.093 1.069 + 0.024 0.3969 1.092 1.090 + 0.002 0.3980 1.085 1.071 + 0.014 0:3993 1.095 1.091 + 0.004 0.4004 1.088 1.072 + 0.016 0.4228 1.112 4105 + 0.009 || 0.4240 1.105 1.082 + 0.023 318 C.—E. GUYE ET C. LAVANCHY 2m SÉRIE , des plaques # | Y Y | R I do — 48.05 54.84 45.09 43040 35.69 68.45 292 52.88 57205 98:55 » 52.00 68.45 250 52.93 576110 94.00 » 52.410 05E50 254 51.068 26.45 93525 » 51.95 68.45 251 49.15 55223 94.93 ) 02/02 68.45 261 51539 55.08 61.10 105610 66:39 68.30 281 59176 60.80 67.75 » 73120 68.15 295 50.93 55.98 021" » 67,50 68.40 200 50.38 54.63 61.75 » 66,00 68.35 305 48.73 5550 GT.00 ) 67.95 68.39 267 48.18 DS 60,50 » C7 68.30 Poil 48.03 54.65 60.75 » 67.45 68.25 280 D2P11S 58.88 66.70 » 72:95 68.40 283 53.60 59.10 68.70 » ZE to) D, 68.20 272 50.85 55.60 65.50 » 69.25 68.25 276 49.95 56.08 64.20 » 69.65 68.30 254 45.38 52.20 72.40 » 65.20 68.45 275 49.13 55108 64.50 » 69.70 68.30 280 517 00) 58.18 68.20 ) 3.20 68.15 274 49.20 DOS 64.060 » 69.55 68.35 273 49.40 Dhe11S 65.00 » 69.35 68.40 304 46.73 54.10 61:55 » 68.08 68.45 278 50.03 59.40 66.00 » 75.20 68.25 292 48.00 53.18 64225 » 67.45 68.45 208 46.15 52.93 62.8 » 67.60 68.35 294 47.50 53.48 63.45 » 67.50 68.35 300 48.20 53:08 65.08 ù 67.95 68.40 302 47.38 53.80 64.30 » 68.90 68.30 279 a 49.5 59:13 66.90 ) 19220) 68.30 287 48.55 57.20 65,75 » 73.00 68.3 303 46.58 53219 63.20 » 68.60 68.45 285 48.70 57.18 66.50 » 78.110 68.35 299 45.65 59210 63.40 » 740,15 68220 28/4 47.63 57.80 66.50 » 75.00 68.30 255 41.98 50:15 72.40 » 65.40 68.45 282 46.75 54.88 68.27 » 73.30 68.20 293 434 T0 50.90 3.0 » 6729 68.45 291 43.38 54.83 63.50 » 73.05 68.40 288 44.15 54.70 64.90 » 9: 10 68.30 279 b A5AÛS 55,90 67.50 » 75.20 68.30 289 42,23 53.063 64.10 » 93.00 68.40 De a Le Le à à. : FORMULE DE LORENTZ-EINSTEIN 949 | ‘ É 9me SÉRIE Tagorie pe Lorenrz-EINSTEIN Tukorte D ABRAHAM 5 “ observé te théorique AN à observé | # théorique | A (0.2281) = (1.027) _ (0. 2288) _ (1.021) _ 0.3110 1095 1.052 + 0.005 023119 1.049 1.041 + 0.008 0.3118 1.054 1.052 + 0.002 0.3127 1.048 1.041 + 0.007 0.3141 1.055 1.053 + 0.002 0.3150 1.049 1.042 + 0.007 0.3266 1.044 1.058 — (0.014 0.3275 1.038 1.046 —— 0.008 0.3925 1.091 1.087 + 0.004 0.3936 1.084 1.070 + 0.014 0.3969 1.088 1.090 — (0.002 0.3980 1.081 1.071 + 0.010 0.3979 1.090 1.090 + 0.000 0.3990 1.083 1.072 + 0.011 0.3999 1.087 1.091 — (0.004 0.4010 1.080 1.072 + 0.008 0.4019 1.095 1.092 + 0.003 0.4030 1.088 1#078 + 0.015 0.4029 1 .093 1.093 041000 0.4040 1.086 1.074 + 0.012 - 0.4029 1.098 1.093 + 0.005 0.4040 1.091 1.074 + 0.017 0.4056 1.098 1.094 + 0.004 0.406067 1.091 1.075 + 0.016 0.4063 1.096 1.095 + 0.001 0.4074 1.089 1.075 + 0.014 0.4066 1.098 1.095 + 0.003 0.4077 1.091 1.075 + 0.016 0.4068 1.099 1.095 + 0.004 0.4079 1.092 (#07 0 017 0.4088 1.100 1.096 + 0.004 0.4099 1095 1.076 + 0.017 0.4097 1.105 1.096 | —+ 0.009 0.4109 1.098 1.077 + 0.021 0.4106 1.100 1.096 + 0.004 0.4118 1,095 1m077 + 0.016 0.4108 TO 1.097 + 0.004 0.4120 1.094 1.077 + 0.017 0.4113 1.101 1.097 + 0.004 0.4125 1.094 1.077 02017 0.4115 1.101 1.097 + 0.004 0.4127 1.094 1077 + 0.017 0.4134 1100 1.098 + 0.002 0.4146 1.093 1.078 + 0.015 0.4149 1.101 1.099 + 0.002 0.4161 1.094 1.079 04015 0.4155 1.106 1.099 + 0.007 0.4107 1::099 1.079 + 0.020 0.4161 1.091 1.100 — 0.009 0.4173 1.084 12079 + 0.005 0.4166 1.101 1.100 + 0.001 0.4178 1.094 17079 = 0.015 0.4166 1.105 1.100 + 0.005 0.4178 1.098 1.079 + 0.019 0.4171 1.096 1.100 — 0.004 0.4183 1.089 1.080 + 0.009 0.4172 1.101 1.100 + 0.001 0.4184 1.094 1.080 + 0.014 0.4178 1.100 1.101 — 0.001 0.4190 1.093 1.080 07018 0.4199 1.096 1.102 — (0.006 0.4211 1.089 1.081 + 0.008 0.4228 1.100 124105 — 0.003 0.4240 1.093 1.082 + 0.011 0.4230 1.102 1.103 — 0.001 0.4242 1.095 1.082 +. 0.013 0.423 1.109 1.103 + 0.006 0.4244 1.102 1.082 + 0.020 0.4298 1.116 1107 + 0.009 0.4310 1.109 1.085 + 0.024 0.4310 1 AD 1.108 + 0.001 0.4322 1.102 1.085 + 0.017 0.4319 à EH 1.109 + 00.02 0.4331 1.104 1.086 + 0.018 0.4334 TOUS 1.109 — 0.004 0.43406 1.098 1.087 + 0.011 0.4349 1.120 1.110 + 0.010 0.4361 1015 1.087 + 0.026 0.4384 TMS à M + 0.005 0.4396 1.111 1.089 + 0.022 390 C.=E. GUYE ET C. LAVANCHY No ; Œ | » Y R I ô des plaques. 290 | 42.95 54.15 64.60 105610 73.00 68.40 310 49.05 56.85 75.50 ) 77.90 68.30 314 48.70 56.58 75.50 » 77.95 68.30 315 47.05 56.23 73.55 ) 78.10 68.30 313 18.88 56.98 75.50 ÿ 77.95 68.30 298 41.17 51.35 64.65 ) 71.25 68.40 195 50.15 55.28 101.30 85970 78.10 68.50 312 47.85 56.05 76.00 105610 78.00 68.40 311 45.40 54.80 74.45 j 77.95 68.30 206 46.63 54.75 76.60 ) 77.70 68.40 279 c 10.98 52.68 67.75 ) 76.20 68.30 309 45.85 54.60 76.18 ) 77.90 68.30 307 45.58 54.18 76.60 + 77 68.35 239 54.57 58.18 90.00 ; 82.5 68.45 238 52.97 57.11 90.40 ï 82.65 68.48 197 47.14 52.76 101.07 85970 77.40 68.53 198 49.27 55.04 105.28 ) 80.60 68.58 308 44.50 53.05 78.25 105610 78.00 68.35 226 45.95 55.02 81.20 ” 81.00 68.38 228 49.15 54.99 89.20 ; 82.88 68.45 236 49.73 55.00 91.05 ) 83.00 68.40 297 48.37 53.40 89.35 ” 81.00 68.45 199 46.49 53.3 105.00 85970 80.45 68.58 237 48.63 54.53 90.80 105610 82.95 68.45 224 44.17 53.36 82.35 ) 81.05 68.40 235 48.59 54.29 90.90 » 82.60 68.38 229 46.60 52.69 91.05 : 82.55 68.43 FORMULE DE LORENTZ-EINSTEIN 391 Tagorte DE LORENTZ-EINSTEIN Théorie p'ABRAHAM Le observé théorique A p . observé : théorique PAS 1:107 tte — 0.006 0.4398 1.100 | 1.089 + 0.011 AA) ACTE + 0.001 0.4428 1.108 1.090 + 0.018 1.119 19145 + 0.004 0.4435 à 1.091 + 0.021 1.128 114 AS + 0.013 0.4436 1.121 1.091 + 0.030 07 1140 — 0.009 0.4450 1.100 1.091 + 0.009 1105 1417 + 0.006 0.4466 1,116 1.092 + 0.024 1P414187 1.118 — 0.001 0.4487 REUTAKE) 1.093 + 0.017 dd 1,119 — 0.002 0.4500 10 1.094 + 0.016 1.128 AM + 0.007 0.4545 1.121 1.096 + 0.025 1.122 18125 — 0.001 0.4563 184518 1.097 + 0.018 1127 1.123 + 0.004 0.4566 1.120 1.097 + 0.023 1.120 1.125 — 0.005 0.4590 1 1.098 + 0.015 1.120 1.126 -— 0.006 0.4618 118 1.099 + 0.014 AS 4,427 —- 0.009 0.4635 à D 1.100 + 0.011 1.124 1.129 — 0.005 0.4649 124107 (POI + 0.016 1 129 ITS — 0.002 0.4690 1.122 1.103 + 0.019 HALO 1.132 — 0.001 0.4706 1.124 1.104 + 0.020 1.124 L152 — 0.009 Q,4715 LUI 1.104 + 0.013 11452 1.134 + 0.018 0.4732 AS) 17105 + 0.040 1149 10484 + 0.015 0.4736 1.142 18405 + 0.037 4.139 1.138 + 0.001 0.4782 1,132 1.108 + 0.024 1.143 1.139 + 0.004 0.4800 1,190 1.109 + 0.027 19135 1.140 — 0.005 0.4810 14198 1.109 +. 0.019 1,139 1.142 — 0.007 0.4839 1.128 1.111 + 0.017 1.136 1.142 — 0.006 0.4839 1.129 D 1 D + 0.018 1132 1.142 — 0.010 0.4848 1125 141211 + 0.014 ; 199 1.147 + 0.006 0.4917 1.146 15419 + 0.031 359 C.-E. GUYE ET C. LAVANCHY Tableau général’. THÉORIE DE LORENTZ-EINSTEIN THÉORIE D'ABRAHAM 6! © obs. | © cale. A G' obs. | — cale. A Po Ho Ho | 0 ae F | (0.2279) — |(1.027) (0.2286) _ (1.021) | = 0.2581 1.041 | 1.035 | + 0.006 | 0.2588 | 1.035 | 1.027 | + 0.008 0.2808 1.042 | 1.042 | + 0.000 | 0.2816 | 1.036 | 1.033 | + 0.003 0.3029 1.046 | 1.049 | — 0.003 | 0.3088 | 1.040 | 1.039 | + 0.001 0,3098 1.048 | 1.052 | — 0.004 | 0.3107 | 1.042 | 1.040 | + 0.002 0.3159 1.054 | 1.054 | + 0.000 |! 0.3168 | 1.048 | 1.042 | + 0.006 0.3251 1.059 | 1.058 | + 0.001 | 0.3260 | 1.053 | 1.045 | + 0.008 0.3302 1.063 | 1.060 | + 0.003 | 0.3311 | 1.057 | 1.047 | + 0.010 0.3356 | 1.060 | 1.062 | — 0.002 | 0.3365 | 1.054 | 1.049 | + 0.005 0.3433 1.066 1.065 + 0.001 0.353443 | 1.060 1.051 + 0.009 0.3462 | 1.065 | 1.066 1 — 0.001 | 0.3472 | 1.059 | 1.053 | + 0.006 0.3551 | 1.070 | 1.069 | + 0.001 | 0.3561 | 1.064 | 1.055 | + 0.009 0.3630 1.067 1.073 — 0.006 0.3640 1.061 1.058 + 0.003 0.3813 | 1.079 | 1.082 | — 0.003 | 03824 | 1.072 | 1.065 | -L 0.007 0.3894 | 1.085 | 1.086 | — 0.001 | 0.3905 | 1.078 | 1.069 | + 0.009 0.3972 1.091 | 1.090 | + 0.001 | 0.3985 | 1.084 | 1.072 | + 0.012 0.4044 1.096 | 1.094 | + 0.002 | 0.4055 | 1.089 | 1.074 | + 0.015 0.4097 1.101 | 1.096 | + 0.005 | 0.4108 | 1.094 | 1.077 | + 0.017 0.4147 1.100 | 1.099 | + 0.001 | 0.4159 | 1.093 | 1.079 | + 0.014 0.4186 1.100 | [101 | — 0.001 À 0.4198 | 1.093 | 1.080 | + 0.013 0.4270 1.110 | 1.106 | + 0.004 | 0.4282 | 1.103 | 1.084 | + 0.019 0.4382 1.114 | 1.112 | + 0.002 & 0.4394 | 1.107 | 1.089 | + 0.018 0.4468 1.120 | 1.117 | + 0.003 | 0.4481 | 1.113 | 1.093 | + 0.020 1 0.4591 1.122 | 1.126 | — 0.004 & 0.4604 | 1.115 | 1.099 | + 0.016 0.4714 1.137 | 1.134 | + 0.003 | 0.4727 | 1.130 | 1.105 | + 0.025 0.4529 1.139 | 1.142 | — 0.003 { 0.4842 ‘ 1.132 | 1.111 | + 0.021 La discussion de ces résultats est grandement facilitée par l’ensemble des considérations développées soit dans ce mémoire, soit dans celui de M. C.-E. Guye et S. Ratnowsky où les avantages sénéraux de la méthode ont été exposés de façon détaillée et résumés en particulier dans les conclusions du premier mémoire, Ces avantages ressortent d'ailleurs en grande partie de l’inspection même de nos formules fondamentales (XV) et (XVT). Ce tableau a été communiqué à l’Académie des Sciences dans sa séance du 19 juillet 1915, C.R., 161, 1915, p. 52; les valeurs placées entre parenthèses sont relatives aux rayons de comparaison. Les résultats préliminaires avaient été présentés à la Société de Physique et d'Histoire naturelle de Crenève le 19° juillet 1915. PC ESS NN TUE FORMULE DE LORENTZ-EINSTEIN d10 Nous: ISSONs ar ces for $ : les valeurs absolues Nous reconnaissons, en effet, par ces formules que les valeurs absol ! LI. > ; .,e de £' et — ne dépendent en définitive que d’une seule valeur absolue: celle de la bo vitesse 6 des rayons lents de comparaison. Cette grandeur ne dépend elle-même en valeur absolue, que de la valeur adoptée pour — et du potentiel de décharge U des rayons lents de comparaison. U.0 La première de ces grandeurs est actuellement bien connue, particulièrement par les recherches de Classen ; la seconde peut être déterminée avec une grande exac- titude puisqu'il s’agit d’un potentiel de décharge relativement bas. Il en résulte que l'incertitude qui peut entacher les valeurs entre crochets des formules (XV) et (X VIT) doit être très faible. Indépendamment des conditions par- ticulièrement favorables dans lesquelles ces déterminations sont effectuées, elles ont comporté un très grand nombre de mesures, de façon à éliminer aussi complètement que possible les causes d'erreur qui peuvent provenir des variations de dureté du tube au cours d’une expérience, si rapide soit-elle. D'autre part l'examen des formules (XV) et (XVI) nous montre que toutes les grandeurs expérimentales (soit V, V’, IL L',x, x’, y, y') qui figurent dans ces for- mules sont disposées symétriquement au numérateur et au dénominateur de ces ! re LL ; expressions. Les valeurs de S' et de — ne dépendent donc pas des valeurs absolues D.0 de ces grandeurs, mais seulement de leurs valeurs relatives, quelle que soit l'échelle à l’aide de laquelle elles ont été mesurées. Si l’on ajoute que les grandeurs V, V’, I, I’ d’une part ont été mesurées sur le méme instrument, dont la division avait été soigneusement vérifiée, que, d'autre part, les déviations x, +", y, y' enregistrées sur les clichés ont été mesurées à l’aide de la méme règle divisée, que léchelle de ces clichés était déterminée par la photographie de deux repères fixes, ce qui éliminait toute erreur provenant d’une contraction ou d’une extension de la gélatine, on se rendra compte que l'erreur systématique qui peut entacher les résultats doit être extrêmement petite; les erreurs accidentelles étant en partie éliminées par le grand nombre des mesures effectuées. En résumé, 1l ressort des tableaux et du graphique qui précèdent, ainsi que des considérations que nous venons de développer, que la formule de Lorente- Einstein relative à la variation de l’inertie en fonction de la vitesse 8e trouve vérifiée avec une grande exactitude par l’ensemble de nos mesures. La répartition à peu près indifférente des écarts positifs et négatifs, jointe au grand nombre de mesures effectuées semble bien indiquer, en outre, que la formule de Lorentz-Einstein représente une loi très exacte que des détermina- MÉM. SOC. PHYS. ET HIST. NAT. DE GENÈVE, VOL. 89 (1921). 44 334 C.=E. GUYE ET C.° LAVANCIIY tions individuellement plus précises ne parviendraient pas aisément à mettre en défaut. En particulier si lon fait la moyenne algébrique des écarts À pour chacune des deux théories (tableau général) on trouve : Lorentz-Einstein Amy — + 0,0002 Abraham Any" 00112 L'écart algébrique moyen avec la formule d'Abraham est incomparablement plus grand qu'avec celle de Lorentz-Einstein, pour laquelle cet écart est insignifiant. FORMULE DE LORENTZ-EINSTEIN 339 APPENDICE Nous donnons ci-après un certain nombre de formules et de tableaux destinés à faciliter les calculs qu’il est nécessaire d'effectuer en vue de la réduction des expériences suivant l’une où l’autre des deux théories. Nous y avons joint quel- ques unes des expressions les plus usitées dans la théorie de l’inertie électro-magné- tique de l’électron. W. Ne (W) el I. FORMULES Les diverses lettres employées dans ces formules ont les significations suivantes masse de l’électron aux très faibles vitesses — 0,900 >< 1077 gramme. masse longitudinale. masse transversale. masse cinétique. charge de l’électron en U.E. Ses = 4,78 X< 10°, charge de l’électron en U. E. Ms: — 1,593 >< 10%. rapport de la charge à la masse de lélectron aux très faibles vitesses — 5,31 x 107. rapport de la charge à la masse de lPélectron aux très faibles vitesses — 111 10: : es 10 CD vitesse de la lumière — 3 >< 101, sec | ; cm vitesse de l’électron en rer vitesse de l’électron, la vitesse de la lumière étant prise comme unité. énergie électrostatique de l’électron au repos. énergie électrostatique de l’électron en mouvement. énergie magnétique de l’électron en mouvement. énergie cinétique de l’électron. énergie de contraction de l’électron. MÉM. SOC. PHYS. ET HIST, NAT. DE GENÈVE, VOL. 89 (1921). 44* 396 C.—E. GUYE ET C. LAVANCHY K constante diélectrique. 4 perméabilité magnétique. a rayon de l’électron supposé sphérique (hypothèse d'Abraham); a — 1,880 X 107" (charge de l’électron en surface). a — 2,256 XX 10" (charge de l’électron en volume). Ucss potentiel de décharge en U.E. M. Un potentiel de décharge en volts. $ 1. — Formules relatives aux très faibles vitesses. La théorie de la relativité, en accord avec la formule de Lorentz-Einstein, ne spécifie généralement rien sur la forme de l’électron et la répartition de sa charge. Mais si l’on établit la comparaison entre les deux théories représentées d’une part par la formule de Lorentz-Einstein, d'autre part par celle d'Abraham, on suppose fréquemment que l’on a affaire à un électron de forme sphérique, déformable en fonction de la vitesse dans le premier cas, indéformable dans le second. Cette supposition conduit aux relations suivantes, quelle que soit alors la théorie admise puisqu'il s'agit de très faibles vitesses. Electron sphérique aux très faibles vitesses. Masse de l’électron au repos. 24e? Qxe? 1 Un = = = —— charge en surface () $ 3aV® 34 8 ) 4} e° 4} c? 5 9 — en Es harge en vol 2 u = charge en volume e de 5 aV? 5 «a (charg ) ; € : AN (3) Woo Ska — 9ka =; de Ve (charge en surface) (4) Wi—= RER — PU V? (charge en volume) 0—5Ka 5ka 4(k>) 9 } LOGS HE 6 1 = or ee (5) We — Rav = 94 — gH0Ÿ — 56° V? (charge en surface) 9 p2 9 ., p2 1 1 = 4€ 3 220 2 9 w Y7o — Pr RS RES DE hi es D Q2 NE aroe6 6 r à (6) Ne — Save = 5 a = 94% — gb V? (charge en volume) TRS RS ST FORMULE DE LORENTZ-EINSTEIN 397 $ 2. —— Formules applicables aux vitesses quelconques. A. THÉORIE DE LORENTZ-EINSTEIN. 3 Masse longitudinale. nl ge) * 7 Masse transversale. u = po(1 — 6? ÿ (8) : ; 9 mot Masse cinétique. (u) = vy 8 [ (1 nn Le 1] o) n RP 9 , Fo Lo Lo FE EN ÊUTS Formules développées pour le cas particulier où les vitesses restent petites par rapport à celles de la lumière. SN So 4 7. (12) M — “| lESF + 6 si GE au : 1 L2 Lane OCT EE “te Le + 3 3.5 5.7 (14) (2) =, [1 + 1 SET 4. GÊ" _ c 1 60 “1e 1 Diverses formes d'énergie de l’électron (en ergs). D Energie électrostatique de l’électron au repos. A 3 9 (15) W, —= 10 V° Energie électrostatique de l’électron en mouvement. (16) Wen ge [ve Energie magnétique de l’électron en mouvement. nr (17) Mn elv 390 C.-E. GUYE Energie de contraction de l'électron en mouvement. | [= ler (18) Lo] = p9 ee v Energie cinétique de l'électron. (19) QU SPA OT ES LS (20) W)= WW) +W, —[w] Expressions des diverses formes d'énergie de l’électron en fonction de sa masse transversale y et de sa masse à l’état de repos ». 3 ' 3 — f° (21) Wim? ne + (22) (23) WoW — Ë = . Fe E | vs 94 W. — 1 2 V? >| — l 1 V? 25 (2 ) M — 9 PP Lu] 7 4 bo — u ( ) Potentiel de décharge U correspondant à diverses vitesses G des rayons catho- diques (voir Tableau). 1 () 9 472 “ 1 po (u) ci g Us — 5. B° Ve Vu 3 10 = LL S 9 T0: pour (&) et G° (voir Tableaux). Lo Po B. THÉORIE D'ABRAHAM. (Electron sphérique indéformable) Masse longitudinale. _ af 'ÉROPRRE | Pa ne] 3 los (= fes CLS ro | (26) Masse transversale. 3 [1+/f 1 - ne ee on Masse cinétique. a ol 1 +8 (ul Po ge Ë 108; — | (28) EU FORMULE DE LORENTZ-EINSTEIN 399 Formules développées pour le calcul dans le cas où les vitesses restent petites vis-à-vis de celle de la lumière. 6 9 12 m = m1 +58 ++ TE +] (29) 6 9 12 U LL + + GE ro + . (30) 3 5 3 = | 1 +58 +56 +58 +. (31) Diverses formes de l'énergie de l’électron (en ergs). Energie électrostatique de l’électron au repos. T2 (32) Ne A Energie électrostatique de l’électron en mouvement. A Em ci 1 + f (33) Ne—= — g lo = 28 lo 08e] 20 1 N°2 Energie magnétique de l'électron en mouvement. k 3 1 + B° Il + B 9 (34) Ne — 8 Lo | 728 log, rec — ve Energie cinétique de l’électron. 3 +6 , (33) (WI 5 | 5 loge —$ 1] V (56) (W) — (W, — W,) », et par M. Guyénot sur «un cas d'hérédité «sex linked», la Drosophile à œil , a décidé leur publication avec le rapport présidentiel pour 1920, comme fascicule 5 du volume 39 de nos Mémoires. Enfin le mémoire de M. Ch. E. Guye sur la «vérification expérimentale de la formule de Lorentz- Einstein > forme le fascicule 6 du même volume. Une série de nos Mémoires à pu être complétée par notre Secrétaire- Correspondant, M. Perrot. Je l’en remercie. Les travaux de mise au net pour la publication de la Carte Dufour au 1: 12500 ont été terminés avec l’année 1921. Il s'agissait du report du Cadastre (qui est à l'échelle du 1 : 1000 ou du 1 : 500) sur la carte et de la revision de cette dernière sur le terrain. Ce travail considérable avait été confié en 1920 par votre Commission, d'entente avec le Département des Travaux Publics, à M. l'Ingénieur Joukowsky dont nous eûmes à déplorer la perte cet été en suite d’un accident, Si la carte Dufour peut être publiée avec le Cadastre réduit à son échelle, nous le devrons avant tout à ce dévoué collaborateur, travailleur infatigable autant qu'habile technicien. Que MM. Philippe et Denis Choffat reçoivent ici nos remercie- ments pour s'être spontanément offerts à parachever ce travail dans les délais fixés. AE RET TT POUR L'ANNÉE 1921 307 Une adresse de félicitations a été envoyée à notre illustre membre honoraire M. Noelting, à l’occasion de son 70° anniversaire. La Société pro Fauna et Flora Fennica, une de nos correspondantes, à reçu nos compliments et nos vœux à l’occasion du centenaire de sa fondation. M. Briquet, ancien Président, à représenté notre Société cet été, en l’absence de votre Président, au 100° anniversaire &e la fondation de l’Académie de Savoie. Il à remis une adresse de félicitations au nom de la Société de Physique et de l’Institut national genevois. Votre vice-président, M. Amé Pictet à assisté à la cérémonie de la remise du buste d'Emile Yung et votre Président à représenté la Société de Physique à une réception de la Société des Arts. Enfin, M. Raoul Gautier à représenté notre Société à la manifestation organisée en l'honneur de M. le Professeur A. D’Espine, quand il a pris sa retraite. Admirateur d'Horace Bénédict de Saussure, ce fut pour moi un grand plaisir que de vous présenter la biographie! de ce grand savant genevois, due à la plume autorisée d’un ancien Président de la Société Royale de Géographie de Londres et de l’Alpine Club: M. Douglas W. Freshfield. Admirablement secondé par M. Henri F. Montagnier, — collaborateur de notre collègue M. Albert Brun dans son exploration des volcans des Canaries —, l’auteur s’est acquitté de la noble tâche qu'il avait entreprise avec une rare distinction. Membre du «< Board of Education >» de Grande-Bretagne, c'est-à-dire de la Commission de l’Instruction Publique, l'explorateur du Caucase et du Kangchenjunga ne s’est pas borné à dire ce que de Saussure fit dans différents domaines. Il à voulu montrer à côté du savant que nous connaissons, l’homme et le citoyen que nous ignorons. Et cette vie d'Horace Bénédict de Saussure peinte avec amour par un explorateur anglais, passionné de notre pays, nous montre qu'un savant n'a pas que des devoirs envers la Science, mais encore envers ses semblables et son pays. Vous avez témoigné votre reconnaissance à M. Freshfield en le nommant « Membre Honoraire >» par acclamations. Permettez-moi en terminant de faire un vœu, qui est le vôtre, c’est que la traduction en français du beau volume de notre illustre honoraire, qui est presque terminée, trouve un éditeur. ! Douauas W, Fresartezn with the collaboration of Henry K. MoxraGnier. T'he life of Horace Benedict de Saussure, London, Edward Arnold, 1920. 308 RAPPORT DU PRÉSIDENT NOTICE BIOGRAPHIQUE THÉODORE LULLIN DE CANDOLLE (1853-1921) Encouragé par ses trois beaux-frères, Charles Soret, Augustin de Candolle et le D' d'Espine, Théodore Lullin de Candolle entra dans notre Société en 1897. En 1895 il avait publié dans les «Archives» des Recherches sur la chute d'une goutte d'eau. I obtint au cours de ce travail des photographies, très remarquables pour l’époque, montrant les formes successives que prend une goutte d’eau, en vibrant pendant la chute. Une des meilleures épreuves se trouve, encadrée, au Laboratoire de Physique de l'Université. Plus tard il inventa un Rhéomètre hydraulique destiné à l'étude des courants profonds dans un lac ou dans la mer (Archives, t. IV, p. 179. 1897). Son habileté à saisir par la photographie les phénomènes des liquides en mouvement, le porta à étudier des empreintes que l’on obtient en faisant tomber de l’eau goutte à goutte sur une plaque de verre recouverte d’un liquide visqueux. I publia ce travail dans les Archives (p. 451-458, 1898) sous le titre de < Description d'un phénomène ümitant les taches solaires ». Malgré l’intérét que Lullin portait aux questions scientifiques et la façon dont il se tenait au courant par des lectures et des réflexions approfondies, il ne fut pas un hôte assidu de nos séances. D'un caractère très réservé, il ne se donnait pas en dehors du cercle de ses intimes. Après la mort d’Augustin de Candolle, 1l s’intéressa beaucoup au sort qui devait être réservé à l’Herbier et à la Bibliothèque des de Candolle. La solution adoptée et sa ratification par la Ville de Genève lui causèrent une vive satisfaction. (D'après les notes de M. F. Louis Perrot). ACTIVITÉ SCIENTIFIQUE DE LA SOCIÉTÉ LISTE DES TRAVAUX PRÉSENTÉS AUX SÉANCES. Mathématiques, Physique mathématique. M. D. MiRIMANOFF. La transformation de Porentz-Einstein et le temps universel de M. Ed. Guillaume. POUR L'ANNÉE 199] 309 M. Rolin WAVRE. Développement d’une fonctionnelle dont l'argument est une fonction harmonique et son interprétation dans quelques problèmes de physique mathématique. Mécanique appliquée. M. G. TIERCY. Sur la transmission d’un effort tournant constant dans les mécanismes à ressort. Le même. Sur les fusées en chronométrie. Le même. Sur les courbes roulantes dans le problème de la fusée d'horlogerie. Le même. A propos d’une définition de la simultanéité de deux phénomènes, M. Fernand Turrettini. Etudes de graduations circulaires. Physique. MM. C.-E. GUYE et A. ROTHEN. Rotation de la décharge électrique dans les gaz sous l’action d’un champ magnétique. M. A. SCHIDLOF. Sur l’emploi de la machine d’Atwood pour la démonstration expérimentale des principes de la dynamique. Chimie. M. Amé PiCrETr. Essais de synthèse de disaccharides. Le même. Recherches sur l’amidon. Botanique et Paléobotanique. M. A. LENDNER. Le parasitisme du Spinellus macrocarpus Karsten. M. H. A. R. LINDENSEIN. Une flore marine sapropélitique de lOrdovicien de la Baltique. Zoologie. M. J. Cars. Un Orthoptère nouveau pour la Suisse. M. R. Cuopar. La génétique dans un croisement de poules. M. E. GUYÉNOT. A quel moment a lieu la réduction chromatique ? M. André NAVILLE. L'évolution des phénomènes de division nucléaire au cours du développement du muscle chez les Batraciens anoures. (Note préliminaire). 370 RAPPORT DU PRÉSIDENT M. Arnold PICTET. Action du mieu et hérédité. (Expériences avec des Lépidopteres). M. Arn. PicrEr et Mie FERRERO. Recherches de génétique dans des croise- ments de Cobayes. (1° partie). Les mêmes. Recherches de génétique dans des croisements de Cobayes (2° partie). Les mêmes. Recherches de génétique dans des croisements de Cobayes. (3° partie). Géologie. MM. À. BuxToRrr et L. W. CoLLET. La Nappe de Morcles. MM. Léon-W. COLLET et Ed. PARÉJAS. Stratigraphie du Sédimentaire autochtone de la Jungfrau. [. Bajocien, Bathonien, Callovien. M. H. LAGOTALA. Première note sur la géologie de la Faucille (Jura français). M. H. A. R. LINDENBEIN. La kuckersite, Etude d’un dépôt marin phytogène du Silurien inférieur de la Baltique. Genèse et caractère chimique. MM. L. Duparc et G. FAVRE. Sur la tectonique et le minerai de fer d’'Aïn Babouche (Algérie). M. Ed. PAREJAS. La géologie du synclinal de Chamonix. Le même, L'influence de la forme du rebord hercynien des Aiguilles Rouges Arpille sur la tectonique du synclinal de Chamonix. Le même. Sur le Trias de la bordure nord-ouest de la zone de Chamonix. Le même. Sur la tectonique du Mont-Joly (Haute-Savoie) et des régions voisines. Minéralogie et Pétrographie. M. Alb. BRUN. Sur les péridots collectionnés de 1900 à 1906 dans l'ile de Zeberget (Mer Rouge) et appartenant à M. Ch. Haccius, à Genève. M. L. DupaRC. Sur l’origine de l’Epidote dans certains granites. Météorologie et Astronomie. M. Raoul GAUTIER. Eclipse partielle du soleil du 8 avril 1921. Le même. 1921, une année météorologique exceptionnelle. M > LESRE LS IL POUR L'ANNÉE 1921 37/1 Physiologie. MM. Fr. BATTELLI et L. STERN. Transformation de l’acide malique en acide fumarique par les tissus animaux. Histologie. M. A.C.F. D'ErERNOD. Les différentes instances des formations squelettiques. Médecine. M. Maurice Roc. L’insuffisance hépatique et l'épreuve du salicylate de soude. Philosophie scientifique. M. Raoul PiCTET. Essais de philosophie scientifique. MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE ET D'HISTOIRE NATURELLE DE GENÈVE VOLUME 39, FASCICULE 7. GÉOLOGIE DE LA ZONE DE CHAMONIX COMPRISE ENTRE LE MONT-BLANC ET LES AIGUILLES ROUGES PAR Edouard PARÉJAS PRÉFACE La région étudiée dans le présent travail est comprise entre le massif du Mont- Blanc et celui des Aiguilles Rouges; elle s'arrête à Martigny (Valais) au NE et au Bon Nant, dans la vallée de Montjoie (Haute-Savoie), an SW. Nos levés ont été reportés sur les feuilles 526 (Martigny), 525 (Finhaut) et 525bis (Col de Balme) de l'Atlas Siegfried agrandies au 1 : 25.000, et sur les feuilles 160#7(Valloreine), 160b:s (Annecy) et 1690 (Albertville) de la carte française au 1 : 50.000, Nous avons utilisé aussi la belle carte des environs de Chamonix au 1 : 20.000 de H. et J. Vallot. Nous nous sommes servi de la toponymie des cartes officielles (Atlas Sieg- fried et Carte de l'Etat-Major au 1 : 80.000) et celle de la carte du massif du Mont- Blanc au 1 : 50.000 par Barbey-Imfeld Kurz. La nomenclature qui figure dans l'ouvrage de M. Ch. Vallot, « Le massif du Mont-Blanc, Paysages caractéristiques et documentaires, tome [ >, nous a rendu également quelques services. Nous avons appelé Col des Tseppes (Vallée de Trient), la dépression située entre Carraye et le Point 2012. A l'Est des Tines (Vallée de Chamonix) au pied des pentes qui portent la Flégère, on connait sousle nom de « Les Rafforts » un rocher calcaire quiétait exploité autrefois comme pierre à chaux. Les chalets édifiés au sommet de MÉM. SOC. PHYS. ET HIST. NAT, DE GENÈVE, VOL. 489 (1922). 46 37/4 EDOUARD PARÉJAS l'abrupt qui domine la Villette (Vallée de Montjoie), portent le nom de «+ Sur le Scex ». En présentant ces quelques résultats de mes levés géologiques sur la bordure nord du Mont-Blanc, je tiens à témoigner à mon cher maitre Monsieur le Professeur L. W. Collet, une profonde reconnaissance. En 1919, il à bien voulu m'introduire dans cette étude, puis la diriger et la faciliter de toutes façons. Enfin, je ne saurai oublier l'honneur qu'il m'a fait en m’'appelant dans son Laboratoire et en m’'asso- ciant à plusieurs de ses travaux. Je dois aussi des remerciements sincères à M. le Professeur M. Reinhard pour l'intérêt qu'il à porté à mon travail et les précieux conseils qu'il n’a donnés. M. le Professeur KE. Chaix et Messieurs Jullien m'ont autorisé à reproduire de superbes clichés; qu'iis reçoivent ici l'expression de ma gratitude. Genève, Laboratoire de Géologie de l'Université. Mai 1922. EDOUARD PARÉJAS. LS ” PREMIÈRE PARTIE STRATIGRAPHIE Au point de vue stratigraphique, il y a lieu de considérer, dans la zone méso- zoïque de Chamonix, deux séries distinctes: 1° la série autochtone des Aiguilles Rouges ; 2° la série parautochtone, formée des terrains déposés entre les Aiguilles Rouges et la bordure cristalline nord-occidentale du Mont Blanc actuel. A. LA COUVERTURE AUTOCHTONE DES AIGUILLES ROUGES Le Carbonifère et le Permien des Aiguilles Rouges faisant actuellement l’objet d’une étude de MM. COLLET et REINHARD, nous nous limiterons dans cette descrip- tion aux terrains secondaires et tertiaires. Soumise au paroxysme tertiaire du plisse- ment alpin, la couverture mésozoïque des Aïguilles Rouges a été laminée ou même, en certains endroits, complètement raclée, en sorte que, sur la bordure SE de ce massif hercynien, il n’en subsiste que trois lambeaux : 1° entre la Tour de la Batiaz et le Sommet des Vignes, près de Martigny ; 2° entre le Col de la Forclaz (Valais) et Montroc dans la vallée de Chamonix et 3° entre le Col de Voza et le hameau de la Gruvaz dans la vallée de Montjoie ou de St Gervais. Trias. Le Trias est peu représenté sur la bordure S E des Aiguilles Rouges, soit qu'il n'ait pas été déposé, soit qu’il ait été arraché avec toute la série autochtone. Nous n’en connaissons que deux afleurements : 1° entre Montroc et les Posettes ; 2° entre le Col de Voza et la Gruvaz dans la vallée de St Gervais. 1. Le Trias de Montroc et des Posettes. L'existence du Trias sur le versant N W de la vallée de Chamonix a été long- temps problématique. A. FAVRE dans la coupe détaillée des Posettes qu’il publia en 1859 (11) et qu'il rectifia et 1867 (12) donna comme triasiques les schistes rouges et verts et les grès du Permien. Il s’étonna de ne point trouver les cargneules dans Ç + : 3706 EDOUARD PAREJAS leur voisinage, mais il plaça à la base du Jurassique des grès micacés et des schistes argileux noirs plusieurs fois alternants. GERLACH (14) qui refit la coupe de FAVRE déclara n'avoir vu trace de Trias dans la région des Posettes. La bordure SE des Aiguilles Rouges semblait donc dépourvue de Trias dans la vallée de Cha- monix quand nous avons pu identifier ce terrain dans deux coupes caractéristiques. Dans la forêt de mélèzes, au dessus de Montroc, au Nord de l’entrée du tunnel des Montets, on voit, de haut en bas, la série renversée suivante : 1. Schistes verts et lie de vin du Verrucano. Permien. 2. Quartzite pélitique blanc, 1 m | Ne 3. Argilites vertes écrasées, 0,80-1 m | DA TIEMAU 4. Argiles schisteuses noires (faciès des schistes à Æquisetum), contenant d’abord de minces lits gréseux puis, à la partie supérieure, des banes de calcaire dolomitique de plus en plus épais (de 1 à 10 cm). Epaisseur 2 m. Trias supérieur. b. Argovien calcaire (Schiltkalk). Si l’on monte du Tour dans la direction de la carrière des Posettes, un peu avant de parvenir à cette dernière et au sommet des pentes d’éboulis, on peut relever de haut en bas : 1. Grès et schistes rouges. Permien. 2. Conglomérat grossier à galets de quartz en concordance apparente avec le Permien. Puis, alternance d’argiles schisteuses noires (schistes à Æquisetum) et de bancs gréseux de moins en moins grossiers. 10 m environ. (Trias supérieur). 3. Bajocien transgressif. A Montroc, le Trias est complet, quoique fortement aminci; il présente tous les termes que nous avons décrits, M. COLLET et moi au Belvédère des Aiguilles Rouges (7). Le Trias des Posettes par contre, est incomplet, il ne représente que le niveau des schistes à Æquisetum, transgressif sur le Permien. La présence, à la base du Trias, de conglomérats et de quartzites ne signifie pas qu'il s'agisse du Trias inférieur. Les éléments grossiers alternent stratigraphi- quement avec les schistes à Equisetum du Trias supérieur. Celui-ci est transgressif, les couches de base ont l’âge de la transgression!. Il à dû se passer là, à une plus petite échelle, le phénomène constaté sur la bordure orientale et méridionale du massif central français (4), et notamment au sud de Brives où le Trias supérieur, transgressif sur le Permien débute par des grès grossiers et des conglomérats qui ne sont pas contemporains des grès vosgiens mais bien triasiques supérieurs. Le fait de la transgression, puis le faciès alternativement grossier et argileux du ! Ceci rectifie ce que nous publiions récemment (33) à savoir que les conglomérats quartzeux des Posettes appartenaient au Trias inférieur. GEOLOGIE DE LA ZONE DE CHAMONIX 977 Trias des Posettes, témoignent du voisinage d’un littoral, les lits de grès corres- pondant aux crues des cours d’eau tributaires. En effet, à un kilomètre plus au NE, dès l’Alpe de Balme et jusqu'aux Tseppes, le Trias manque stratigraphiquement. Trias inf. 1e = Cargreules e! calc doommiques EE ÉGERBIES, © 6 Sinemurign s , Fees ————— Toarcien 56 9 À gron Pr éme =- Hi WAS) ? Dépôts neritiques =] Depots bathyaux Fig. 1. — Paléogéographie de la zone de Chamonix pendant le Trias et le Lias. Echelle 1 : 1.000.000 env. AR, Aiguilles Rouges; MB, Mont-Blanc; B, Belvédère des Aiguilles Rouges; SG, Saint-Gervais; C, Chamonix ; M, Martigny; Bo, Col du Bonhomme. Pour tenir compte du plissement alpin, la région du Mont-Blanc a été déplacée d’une dizaine de kilo- mètres vers le S.-E. En réalité c'est au double de cet espace que correspond l’écrasement de la zone inter- médiaire de Chamonix. Mais le caractère schématique des esquisses paléogéographiques nous à permis cette liberté de dessin qui n’ôte d’ailleurs rien à leur signification. 378 EDOUARD PARÉJAS La région de Balme se trouvait donc sur la côte d’une de ces îles triasiques basses et allongées du géantichinal helvétique, qui ont persisté pendant le Lias et que la transgression bajocienne a recouvertes très rapidement (fig. 1 n°° 1-3). Plus étendue au Trias inférieur et peut-être réunie à cette époque à la partie émergée du Mont- Blanc, l'ile de Balme s’immerge en partie au Trias supérieur sous la mer envahis- sante des schistes à Æquisetum. Les mêmes schistes terrigènes signalés au Col du Jorat par de LOYSs (19) et au Belvédère des Aiguilles Rouges par COLLET et PARÉJAS (7) formaient avec ceux de Montroc et dés Posettes comme une auréole autour de cette terre triasique émergée. 2. Le Trias du Col de Voza et de la Gruvaz. Au S W du Col de Voza, la ligne du tramway du Mont-Blanc coupe en tran- chée une puissante série triasique en repos sur le Carbonifère du Prarion. Du S W au N E, on observe le long de la voie : Quartzites. Argilites. Calcaire dolomitique. Cargneules. Quartzites 10-15 m. Calcaire dolomitique 10 m environ. Calcaire dolomitique bréchiforme et calcaire dolomitique compact en alter- nance tectonique. 50 m environ. 8. Lias moyen. Les termes 1 à 4 constituent une première série triasique peu épaisse, les couches 5 à 7, une seconde série plus épaisse. Cette duplication est peu favorable à I IOMOULRÉS 1, NO une étude stratigraphique, aussi, franchissant le torrent de Bionnassay puis l’éperon du Champel, nous parvenons au nord de la Gruvaz dans un ravin que côtoie le sentier conduisant de la Villette aux chalets de « Sur le Scex ». Nous y observons de bas en haut : 1. Schistes chloriteux et séricitiques profondément altérés, rappelant le Verrucano (Permien ?). 2. Arkose, grossière à la base et contenant des nids de calcaire brun; les éléments de 2 cm de diamètre sont fréquents mais, vers le haut, s’intercalent des argilites vertes puis viennent des quartzites plaquetés. 15 m. Trias inférieur. 3. Cargneule bréchoïde et gréseuse à éléments schisteux, chloriteux. Les afeurements en sont visibles sur le versant gauche du ravin. La présence d’une zone d’altération permienne sous les quartzites du Trias inférieur, est la règle dans la région de St-Gervais. Les schistes chloriteux Re CAL nt GÉOLOGIE DE LA ZONE DE CHAMONIX 379 verts de la Gruvaz, que nous assimilons au Verrucano, après MICHEL-LÉVY (27) ou, à leur défaut, les micaschistes du substratum sont fortement décomposés et con- tiennent des inclusions d’un calcaire gréseux brun souvent spathique. Ces poches sont en tous points semblables à celles qui criblent les gneiss d'Erstfeld, à la Scheidnôssli (16) et à celles de la zone d’altération des Aiguilles Rouges que M. COLLET a observées sous les quartzites triasiques de la région de Barberine. Tout porte à croire que, sur la pénéplaine permienne, les schistes cristallins ont été localement arénifiés à une profondeur considérable et que dans ce milieu ameubli, des dépôts lagunaires se sont infiltrés en poches, en nids irréguliers, qui ont cimenté à nouveau les décombres. Aïnsi s’expliquerait le faciès souvent étrange de ces schistes cariés dont on devine encore la structure mais qui sont imprégnés d’un dépôt calcaire introduit à posteriori. Sur ce milieu en décomposition, le Trias débute par un puissant complexe d’arkoses grossières à quartz roses, dont les éléments ont été fournis en abondance par la surface d’altération. Puis le grain devenant plus fin, on passe à des quartzites où des stratifications torrentielles sont visibles. Une intercalation d’argi- lites vers le haut (Gruvaz) et les quartzites reprennent. Au-dessus viennent des cargneules bréchoïdes polygéniques, des brèches et des calcaires dolomitiques. La note dominante de cette série est la puissance et la grossièreté du Trias inférieur. Quelle différence de style avec la série de Montroc et du Belvédère où les éléments fins sont bien représentés et où il n’y a trace de cargneules. Dogger. Le Lias manque stratigraphiquement à la couverture autochtone des Aiguilles Rouges dans la région de la Croix-de-Fer, à Montroc et au Belvédère. Il n'a pas été déposé ; le Bajocien (30) transgresse sur le Carbonifère aux Preises et aux Chalets de Balme et sur le Trias à Montroc et au Belvédère. Entre le Col de Voza et le Bon Nant, l’autochtone a été réduit au seul Trias par le charriage de la nappe de Morcles-Aravis. La question de savoir si le Lias a existé sur cette partie des Aiguilles Rouges ne peut donc que se poser. Le Dogger des Preises. 14 Souvent interrompu par les éboulis et les dépôts glaciaires locaux, le Dogger autochtone peu épais se poursuit des abords du Col des Tseppes! à Montroc dans la vallée de Chamonix en passant par les Preises, la borne-frontière N° 7 et le N W de l’Alpe de Balme. A 200 m au SE du Chalet des Preises, dans le ravin qui descend au N du ! Dépression située entre Treutse à l’Aille et Carraye au N de la Croix de Fer. 330 EDOUARD PARÉJAS Pt 2066, on peut noter la coupe suivante au dessus des grès et des schistes ardoisiers carbonifères : De bas en haut : 1. Calcaire échinodermique gris-foncé ; à la base, il est plus grossier et con- tient des grains de quartz détritiques et de rares et minuscules inclusions triasiques 1 m à 2 m 50. 2. Calcaire dur, compact, bleuté à la cassure, brun-jaune à la surface; finement échinodermique et pyriteux. Il est souvent marqué de taches irrégulières plus claires, roses ou jaunes. 0,20 à 0,30 m. Une série très semblable est visible à la même hauteur dans le ravin qui des- cend directement des chalets de Catogne. Le niveau 1 est stérile et représente probablement le Bajocien inférieur. Le niveau 2 nous à fourni la faune suivante : Stepheoceras Humphriesianum Sow. 5 ex. Zone à Emileia Sauzei. Garantia Sp. 19: Parkinsonia acris Wetzel 1 >» Parkinsonia Parkinsoni auct. 2 » ( Zone à Garantia Garanti. Oppelia subradiata Sow. 1 » | Lytoceras tripartitum Rasp. 1 » Bathonien inf. ? Phylloceras sp. 1e Traces de Bélemnites et de Cancellophycus. KILIAN et REVIL (18) citent d’après P. LORY, Lytoceras tripartitum à la base du Bathonien ou au sommet du Bajocien du bassin du Drac; dans les Basses-Aïlpes, cette espèce est commune dans la zone à Oppelia fusca. La faune des Preises se classe donc dans le Bajocien moyen et supérieur et probablement aussi dans le Bathonien inférieur. On ne peut s’empécher de compa- rer à ce groupement faunistique ceux très semblables, des Cols Lombard et de Martignare au nord du massif du Pelvoux et celui de l’Alpe d’Arsine près de Vil- lard d’Arène, cités également par KILIAN et REVIL (18) dans leur étude si complète des Alpes Occidentales. Par contre, au point de vue lithologique, on ne saurait assimiler le Dogger des Preises à celui de lOisans et de la Basse Maurienne où règne le faciès bathyal du géosynclinal dauphinois avec ses marno-calcaires foncés et ses calcaires noirs schisteux. Le Dogger autochtone de la Croix de Fer formé de calcaires échinodermiques, surmontés de couches zoogènes à Ammonites est fran- chement néritique ; c’est que nous nous trouvons ici dans la bordure nord-occiden- tale de la grande dépression des Alpes françaises. Il faudrait plutôt rechercher les homologies dans les calcaires spathiques de Corenc et de Bouquéron près de Gre- noble, à l’extrême limite du faciès dauphinois vers l’ouest. GÉOLOGIE DE LA ZONE DE CHAMONIX 331 La présence de Lytoceras et de Phylloceras place la faune des Preises dans la province méditerranéenne, mais il est probable que ces deux genres sténothermes sont parvenus par flottage dans le milieu néritique qui les contient. La faible épais- seur de ce dépôt (0,20 à 0,30 m), qui représente plusieurs zones paléontologiques, témoigne d’une sédimentation extrémement lente. Elle prouve aussi, comme d’ail- leurs l’absence du niveau de loolithe ferrugineuse, qu’il n'y avait à cette époque aucune terre émergée dans le voisinage. Une émersion subséquente est probablement cause de l’absence de la plus grande partie du Bathonien. Du côté suisse, le Jurassique moyen des Preises s'apparente nettement avec celui de la couverture des vieux massifs des Aiguilles Rouges, de Gastern et d’Erst- feld et notamment avec le Dogger que nous avons décrit avec M. COLLET dans le sou- bassement de la Jungfrau (8). Jurassique supérieur. Le Callovien et l’Oxfordien semblent manquer au-dessus du Dogger, incomplet lui-même, ou tout au moins nous n'avons pas réussi à découvrir une faune de ces étages ni à reconnaitre les faciès qui leur sont habituels. ARGOVIEN. Dans le soubassement autochtone de la Croix de Fer et dans la vallée de Cha- monix jusqu'à Montroc, au-dessus du Dogger, nous avons partout constaté une série de calcaires représentant les deux termes de l’Argovien helvétique. A la base, des calcaires grossiers, grumeleux, subconglomératiques, tachetés de jaune par des inclusions d’ankérite, répondent au signalement du Schiltkalk. Ce niveau qui surmonte directement le Dogger parait transgressif. C’est l'Argovien calcaire dont l'épaisseur tres faible, varie de 0,50 à 1 m. Au-dessus, l'Argovien schisteux (Schiltschiefer), épais de 30 m en moyenne, comprend des calcaires schisteux, parfois légèrement grumeleux, bleuâtres à la cassure, argentés ou blan- châtres sur le lit, et de toucher farimeux. Il est intéressant de paralléliser ici quelques épaisseurs de lArgovien du géantichinal helvétique. E Vätiis Vallée de la Synclinal de | Autocht, de la (M. Blumenthal Reuss Fernigen | Croix de Fer et Tolwinski) (W. Staub) (A. Heim) (Ed. Paréjas) Argovien schisteux | A Aa ahAl -5 20-3 0 - 20 30 m. moy. (Schiltschiefer) 1-50 m 0-30m 1 ) m 3 à Argovien calcaire ne | er (Schiltkalk) 1-3 m 0,50 -1 m |0,25-1 m |0,50-1 m MÉM. SOC, PHYS. ET HIST. NAT. DE GENÈVE, VOL. 89 (1922). 47 382 EDOUARD PARÉJAS Il est frappant de constater combien, pendant l’Argovien, les conditions de sédimentation ont été semblables sur le géanticlinal helvétique entre le Rhin et la vallée de Chamonix. MALM. Au-dessus des schistes de l'Argovien, les calcaires du Malm, forment des abrupts sur le versant de la Croix de Fer qui descend vers les Jeurs et le Châte- lard; ils se traduisent par ces longues trainées d’une blancheur inusitée qui tra- versent les pâturages des Preises, de Catogne et de Balme. Le Malm de la Croix de Fer est rarement compact mais plaqueté par la pres- sion subie; c’est un calcaire bleu foncé à cassure conchoïdale ou esquilleuse. Comme généralement le Jurassique supérieur autochtone a été fortement étiré ou empilé en lames superposées, l'évaluation de la puissance du Malm est difficile. Une moyenne de 100 m peut être admise. Le faciès, comme l'épaisseur, varie aussi en raison de l'effort tectonique éprouvé. Dans les zones disloquées, le Malm se marmorise, sa couleur s’éclaireit et passe au gris-pâle. PORTLANDIEN. Dans le ravin des Preises et dans celui de Catogne que côtoie le sentier conduisant de l’alpage des Preises aux Chalets de Catogne, on remarque que le Malm passe à un complexe de marnocalcaires très schisteux, blanchâtres, contenant des intercalations de banes plus durs, épais de 20 à 350 em et des calcaires échinodermiques. L'aspect de ces couches rappelant celui du Portlandien autochtone de Saint-Maurice, nous les attribuons, avec réserve, à cet étage. Crétacé. 1. Crétacé des Preises. Dans le ravin des Preises, le Jurassique supérieur est surmonté par une ving- taine de mètres de calcaires compacts foncés à cassure conchoïdale mais de toucher légèrement farineux. Au-dessus viennent les formations que nous assimilons au Sidérolithique éocène. Il faudrait en conclure que ces calcaires foncés représentent le Berriasien, si l’absence de faune et l'état d’écrasement de la roche ne laissaient planer un doute qu’il sera difhcile de dissiper. LUGEON et OULIANOFF (26) attribuent au Crétacique une série de schistes noirs au haut desquels apparaissent des bancs isolés de calcaires oolithiques surmontés par des calcaires en plaquettes. Cette série se termine, d’après ces auteurs, par un complexe rappelant l’Aptien sidéro - lithisé des Alpes vaudoises. Nous ne pouvons nous rallier à cette dernière opinion GÉOLOGIE DE LA ZONE DE CHAMONIX 333 en l’absence des termes intermédiaires du Barrémien et de l'Hauterivien par exem- ple, dont nous n’avons trouvé nulle trace. Dans le soubassement de la Croix de Fer, il s’agit bien de la couverture autochtone des Aiguilles Rouges que l’abrasion éocène a trouvée incurvée en voûte au-dessus du bombement de ce massif. On sait en effet que la transgression nummulitique recoupe des terrains de plus en plus jeunes si l’on s'éloigne vers le NW à partir de la région axiale des Aiguilles Rouges: il devait en être de même vers le SE. Or, la région de la Croix-de-Fer est proche de la culmination du rebord hercynien; il est peu probable que l’Aptien ait été ménagé en ce point. L'Aptien est sidérolithisé, il est vrai, dans la nappe de Morcles mais cette dernière s’enracine dans la zone plus interne de Chamonix, done au SE des Preises; il n'y à rien d'étonnant à ce que là, l’abrasion éocène l’ait atteint. Le Crétacé du soubassement de la Croix de Fer, si notre supposition est juste, doit être limité au Berrias. 2, Crétacé autochtone de la Bâtiaz. (Voir pl. 7, coupe 1.) Dans la plus grande des deux carrières de la Bâtiaz on exploite des calcaires phylliteux gris-verdâtres et des calcaires marmorisés contenant des lentilles minus- cules d’un marbre vert et rouge qui est très semblable au marbre bigarré de Grin- delwald et aux dépôts analogues visibles dans le soubassement du Münch et de la Jungfrau. Il s’agit là de formations sidérolithiques infravalanginiennes. Or, on sait qu'à Saint-Maurice le Valanginien échinodermique transgresse sur un Berriasien raviné, surmonté de dépôts sidérolithiques. Il est probable que ce phénomène s’est produit aussi sur le versant SE des Aiguilles Rouges. C’est donc avec une certaine vraisemblance que nous pouvons attribuer les niveaux 4, 5 et 6, d'une épaisseur totale de 17 m à l’Infravalanginien. Tertiaire. La seule région où nous ayons reconnu ce terrain avec quelque certitude dans l’autochtone des Aiguilles Rouges est encore le soubassement NW de la Croix de Fer (voir coupe de la Croix de Fer, p.405 et pl. 7, coupe 3). LUGEON et OULIANOFF (26) signalent au-dessus d’une couche siliceuse verdätre et de calcaires sidérolithisés dont ils font de l’Aptien, un complexe de schistes terreux roses ou gris et des cal- caires qui pourraient être nummulitiques. Cette formation locale, visible sous le sommet de Carraye, cesserait vers le SW d’après ces auteurs. En réalité, elle se poursuit dans cette direction comme nous allons le voir. Les divers éléments de la coupe des Preises à Catogne, relativement bien conservés dans un ensellement du rebord hercynien, sont soumis à un écrasement si intense en arrivant au col des 39/4 EDOUARD PARÉJAS Tseppes, que les faciès en deviennent méconnaissables. Toutefois les formations sidérolithiques tertiaires y sont bien caractérisées. Sur le versant des Tseppes de la Pointe de Carraye, une masse de calcaires éboulés montre des poches emplies de bolus, des oolithes et des grès ferrugineux. Ce minerai, exploité il y a plusieurs siècles, étaient fondu en aval du village de Trient au lieu dit « La Ferrère » ; on y trouve encore des talus de scories. La destruction des forêts qu’on employait comme combustible, dit la tradition, arréta l'exploitation. Pour se faire une idée plus exacte des formations tertiaires autochtones, reprenons Ja coupe du ravin de Catogne. Au sommet du niveau dont nous avons fait du Berrias probable, on retrouve sous forme de grès ferrugineux, en trainées, épaisses de quelques centimètres, le Sidérolithique éocène des Preises, puis les calcaires siliceux verdâtres qui sont aptiens pour LUGEON et OULIANOFF et que nous considérons comme du Nummulitique inférieur. Au-dessus, vient une quarantaine de mètres de marnes schisteuses noirâtres qui contiennent des calcaires lités, char- bonneux, parfaitement semblables aux couches à charbon priaboniennes que nous avons trouvées, M. COLLET et moi, dans la base de l’Eiger (Station Eigergletscher) et du Môünch (Katzentiefe.) Paléogéographie de la bordure méridionale des Aiguilles Rouges. Au Trias inférieur, la mer envahit les Aiguilles Rouges, transformées en une pénéplaine, à l’exception d’une terre qui subsiste dans la région de Balme. Le littoral de cette île se trouve aux environs de Montroc. | Au Trias supérieur, le pays s’affaisse légèrement. Les schistes à Æ£quisetum transgressent vers le NE et la côte de l’île de Balme recule jusqu'aux Posettes. Pendant le Lias, des surfaces considérables s’exondent de nouveau; ce terrain manque dans le soubassement de Ia Croix de Fer et au Belvédère. Mais la trans- gression bajocienne submerge rapidement toutes les terres émergées. La mer, qui reste peu profonde jusqu’au Bathonien, se retire (lacune du Bathonien supérieur, de l’Oxfordien et du Callovien) jusqu à l’Argovien inférieur, où se déposent des cal- caires grumeleux subconglomératiques. Elle subsiste et s’approfondit pendant le Malin et le Berriasien. Mais une exondation courte s’est probablement faite avant le Valanginien puis jusqu’à l’Eocène, l’altération des faciès ne nous permet pas de préciser davantage, Tout au plus peut-on reconnaitre, après les formations sidéro- lithiques éocènes, le retour de la mer avec les calcaires priaboniens. GÉOLOGIE DE LA ZONE DE CHAMONIX 3839 B. LES TERRAINS PARAUTOCHTONES Nous étudierons sous ce titre, les sédiments mésozoïques déposés au SE des Aiguilles Rouges, entre cette chaine et le Mont-Blanc puis ceux de la bordure NW de ce dernier massif, entre Martigny (Valais), et les Contamines (Vallée de Montjoie, Haute Savoie). Nous avons montré dans une publication récente (31) que le « Synclinal de Chamonix > des auteurs est une zone complexe qui, en plus de la couverture sédi- mentaire des Aiguilles Rouges, déjà décrite, comprend au moins trois plis anticli- naux déjetés vers le NW et désignés, de l'extérieur à l’intérieur, par les lettres A, B, C. L'élément À, formé des terrains déposés dans une région proche des Aiguilles Rouges, chevauche la couverture autochtone de celles-ci; le pli B est médian et les terrains qui ont alimenté le pli C se sont déposés au voisinage du Mont-Blanc; ce pli C n’est séparé de ce massif cristallin que par la couverture de ce dernier ; nous désignerons cette série, la plus interne de la zone de Chamonix, sous le nom de série de bordure. Comme les faciès varient dans les deux sens, longitudinalement du NE au SW et transversalement, du Mont-Blanc aux Aiguilles Rouges, les trois éléments tectoniques et la bordure nous fourniront un excellent canevas paléogéographique. Trias. Le Trias repose partout en concordance apparente sur les schistes cristallins du Mont-Blanc. Par analogie avec le Trias des Aiguilles Rouges et de la zone helvétique, nous attribuons au Trias inférieur les quartzites et les argilites qui les surmontent, et au Trias moyen et supérieur, les cargneules, les gypses et les cal- caires dolomitiques du sommet de la série. Examinons quelques coupes caractéris- tiques du Trias de la bordure du Mont-Blanc. I Trias du versant SW du Col de Tricot. A environ 120 m au-dessous du Col, sur le versant de Miage, le Trias, renversé de 50° sous les micaschistes du Mont-Blanc, se présente comme suit de haut en bas: 1. Micaschistes. 2, Quartzite psammitique verdâtre 3 m. 3. Argilites vertes 1 m. 4. Alternances de lits de quartzites et d’argilites 10 m environ. 5. Argilites vertes 1 m. 6. Quartzite pélitique calcifère, blanc tacheté de brun 4 m. 7. Argilites noires 4 m. 336 EDOUARRD PAREJAS 8. Cargneule bréchoïde 10 m environ. Le Trias inférieur est bien représenté dans cette localité; il se distingue par sa puissance et l'abondance des quartzites. Il. Trias du Col de Tricot. On peut relever dans cette dépression la coupe suivante à partir du Cristallin. 1. Schistes cristallins du Mont-Blanc. (Le) Zone d’écrasement 0,50 m. 3. Quartzites laminés 1 im. 4. Alternances de lits de quartzites et d’argilites vert-jaunâtres 1,20 m. 5. Calcaire dolomitique brun chocolat 1 m. 6. Argilites noires et vertes avec des intercalations de lits gréseux au sommet 3 m. 7. Calcaire dolomitique brun chocolat, écrasé, 0,50 m. 8. Cargneule bréchoïde (éléments : argilites et calcaire dolomitique) 5 m. Cargneule gréseuse à grain fin en bancs de 20 à 30 cm séparés par des lits bréchoïdes 2 m. 10. Cargneule bréchoïde grossière, formant une tête rocheuse surmontée d’une © croix, 1,50 m. Cette cargneule passe à 11. Calcaire dolmitique grumeleux, vacuolaire 2 m. 12. Cargneule bréchoïde grossière (éléments : calcaire dolomitique). 13. Eboulis du Col de Tricot. Cette série diffère de la précédente par son caractère moins grossier. Les quartzites malgré le laminage qu'ils ont subi sont beaucoup moins puissants; le niveau N° 6 de la coupe précédente ne se retrouve pas ici. Les calcaires dolomi- tiques en outre apparaissent plus tôt dans cette localité. II. Trias de la Griaz. Si des Houches on remonte le ravin profond de la Griaz, à mi-distance entre les barrages des Arandelys et le Col du Mont Lachat, on peut relever sur la rive droite la série renversée suivante : De haut en bas : 1. Schistes micacés séricitiques du Mont-Blanc. 2, Argilites noires 4 m. 3. Alternances de lits de brèches à éléments de calcaire dolomitique avec des cargneules gréseuses 15 m. 4. Calcaire dolomitique. 5. Gypse saccharoïde 20 m. GÉOLOGIE DE LA ZONE DE CHAMONIX 387 Cargneule bréchoïde (éléments : cale. dol. et gypse) 1-2 m. Calcaire dolomitique, bréchoïde au sommet sur 50 cm. Total 2 m. Schistes blanc-jaunâtres sériciteux (Schistes dorés) 0,10 m. Calcaire dolomitique à surface ravinée 0,20 m. Rhétien. Calcaire siliceux gris subquartzitique. Cette coupe montre d’abord l'absence des quartzites du Trias inférieur puis, fait important, la série triasique débute par le niveau des argilites noires signalées dans la région de Tricot (N° 7 coupe I et N° 6 coupe IT). Il semble que cette région émergeait lorsque se déposaient les quartzites de Tricot puis que la A EE l mer des argilites noires a gagné vers le NE sur un pays plat qui s’affaissait. On peut aussi relever la zone épaisse de gypse (N° 5) qui manque à la bordure du Mont-Blanc entre le ravin de la Griaz et les Contamines. IV. Trias de la vallée de Chamonix. A la hauteur du village du Tour, sur la rive gauche du torrent issu du glacier du Tour, on voit de haut en bas, la série renversée suivante : 1. Porphyres gneissiques du Mont-Blanc. 2. Cargneule bréchoïde (éléments : cale. dol. et gypse) 10 m environ. 3. Gypse saccharoïde contenant à la partie supérieure des intercalations régulières de banc argileux gris 15 m. 4. Calcaire dolomitique 3-4 m. 5. Lias inférieur. Marnes schisteuses noires à pyrites. Cette coupe qui résume la plupart de celles qu’on peut faire entre les Houches et le Col de la Forclaz près de Trient, montre à la base des cargneules. La mer des argilites ne semble donc pas avoir dépassé au N la région des Houches. La partie NE de la zone de Chamonix ne s’est immergée qu'au Trias moyen et les dépôts qu’elle porte sont essentiellement lagunaires (fig. 1, n°° 1-3). Si l’on suit la bordure du Mont-Blanc des Contamines à la Forclaz de Trient, on constate que le Trias perd ses quartzites de base à partir du Col de Tricot; au- delà de la Griaz il est dépourvu du niveau des argilites et se trouve dès lors réduit aux termes supérieurs lagunaires. L’envahissement progressif par la mer s’est fait apparemment de l'W à l'E. LES DÉPÔTS TRIASIQUES DE LA ZONE DE CHAMONIX 1. Les quartzites. D’après DUPARC et MRAZEC (10) «les quartzites paraissent représenter le terme le plus constant » du Trias. Or, on la vu, entre Martigny et les Con- tamines, ce niveau est limité à la seule région du Col de Tricot-Miage. 338 EDOUARD PARÉJAS Les éléments des quartzites de Tricot sont allochtones: ils proviennent de régions émergées plus ou moins éloignées; nous n'avons pas réussi jusqu'ici à trouver dans leur soubassement cristallin une zone d’altération. Sur les Aiguilles Rouges, par contre, les quartzites de base se sont en général formés ir situ, aux dépens de leur substratum profondément arénifié. Leur puissance est relativement faible, 1 à 3 m, alors que des épaisseurs de 10 à 15 m sont fréquentes sur les Aiguilles Rouges. 2. Les argilites. Le niveau des argilites est constitué par des schistes argileux verts ou noirs qui contiennent parfois des lits gréseux ou bien alternent avec les quartzites. Les argilites noires surmontent les vertes dans la règle. Il est à noter que dans la région étudiée nous n'avons pas rencontré les argilites rouges qui sont fréquentes dans le Trias des Aiguilles Rouges-Gastern. Faut-il attribuer cette lacune à l’absence sur le Mont-Blanc des schistes lie de vin du Permien auxquels les argilites rouges auraient emprunté leur fer et leur coloration? Nous n'avons en outre jamais relevé des ripple-marks; mais leur disparition pourrait être expliquée par le laminage intense, exercé sur les sédiments par le plissement alpin. Leur épaisseur varie de 4 m dans le ravin de la Griaz à 10 m environ sur le versant SW du Col de Tricot. 3. Les cargneules. La plupart des auteurs considèrent la cargneule triasique comme le résultat d’une dissolution partielle du calcaire dolomitique, dissolution qui lui aurait donné une tex- ture vacuolaire. TERMIER (43) et COLLET (6) l’envisagent comme un sédiment détri- tique, une brèche partiellement dissoute. Collet à prouvé le bien-fondé de son opinion en montrant le caractère polygénique de certaines cargneules bréchoïdes alpines. Nos observations dans la zone de Chamonix et sur la bordure des Aiguilles Rouges où les cargneules sont bien développées, nous ont permis de compléter ces définitions et de serrer la question de plus près. Nous avons trouvé en effet des cargneules de types lithologiques variés qui peuvent trouver place dans les trois catégories de roches détritiques de Haug. a) Cargneules pséphitiques. Nous rangeons dans cette classe les cargneules bréchoïdes et conglomératiques, polygéniques ou non. b) Cargneules psammitiques représentées par les cargneules gréseuses plus ou moins grossières, polygéniques où non, les cargneules sableuses siliceuses. c) Cargneules pélitiques auxquelles nous rapportons les cargneules à grain fin et les cargneules marneuses. a. Les cargneules bréchoïdes polygéniques sont les plus fréquentes. Elles con- EE GÉOLOGIE DE LA ZONE DE CHAMONIX 389 tiennent souvent de très gros éléments. Nous avons mesuré des galets de calcaire dolomitique de 80 cm de longueur dans le Nant de Molliez (Vallée de Montjoie), un fragment d’argilite verte de 17 cm dans le Nant du Tarchet près de Saint-Ger- vais et des quartz blancs de 10 à 20 cm. On rencontre fréquemment aussi des galets de gypse, de quartzites (La Rosière, Grassonay), de schistes verts sériciteux et de gneiss variés. b. Les cargneules gréseuses sont abondantes sur le versant gauche de la vallée de Chamonix entre Argentière et Les Tines. c. Les cargneules marneuses sont onctueuses au toucher, un peu micacées et sont généralement incluses en lentilles dans les cargneules gréseuses. Les différents types passent les uns aux autres latéralement et verticalement et la cargneule peut passer à son tour au calcaire dolomitique (Col de Tricot). Voici les faits d'observation ; les conclusions sont faciles à tirer. La cargneule n’est pas un résidu de dissolution, car on ne peut considérer comme tel une roche qui contient des galets de gypse (Grassonay) ou d’autres éléments très solubles. Ce n’est pas non plus le résultat d’une lixiviation des calcaires dolomitiques car, en plus du calcaire, il entre dans la constitution des cargneules bréchoïdes et gréseuses des gypses, des quartz, des argilites, des quartzites, des schistes sériciteux et des gneiss variés. Mais la cargneule n’est pas uniquement une brèche. Elle présente toutes les textures, des plus fines aux plus grossières. Le caractère souvent vacuolaire de cette roche doit être considéré comme secondaire car les vides sont dus à la corrosion par les agents atmosphériques. Is sont localisés à la surface corrodée ou dans les parties voisines de cette sur- face. Hors des atteintes des dissolvants, la cargneule est parfaitement compacte. Le volume total des vacuoles d’une cargneule dépendra de la grosseur de ses élé- ments constitutifs et de leur solubilité. La cargneule n’est pas un tuf calcaire ancien. La continuité et l’extension de ce dépôt, sa stratification parfois, sa texture exempte de concrétions primaires, son faciès, en un mot, excluent cette possibilité. Ce n’est pas non plus un tuf récent, car en plus des raisons précédemment énoncées, les cargneules sont souvent plissées et charriées, elles forment des couches géologiques; elles aflleurent parfois au pied de pentes qui ne contiennent trace de carbonate de chaux. Il se présente, il est vrai, des cas où le diagnostic est peu aisé, mais la difficulté ne résiste pas à un examen attentif. Nos observations nous ont conduit à considérer les cargneules triasiques comme des sédiments détritiques magnésiens déposés en milieu lagunaire. Elles sont formées d'éléments grossiers, moyens ou fins. Leur couleur varie du jaune très pâle à l’orangé. La région superficielle des cargneules pséphitiques surtout MÉM. SOC. PHYS. ET HIST. NAT. DE GENÈVE, VOL. 89 (1922). 48 390 ÉDOUARD PARÉJAS peut prendre, lorsqu'elle est corrodée, une texture vacuolaire par la dissolution d’une partie des éléments constitutifs. Le terme de cargneule est générique, il doit ètre complété dans chaque cas, quand il s’agit d'établir une diagnose lithologique précise. En effet, ce terme, pas plus que celui de mollasse qui désigne les dépôts néogènes subalpins, ne correspond à un type de sédiment nettement défini. 4. Les gypses. Les gypses de la zone de Chamonix à texture fine ou saccharoïde, blancs ou plus rarement jaunâtres ou verdâtres témoignent d’une sédimentation lagunaire franche. Ils sont stratifiés et contiennent souvent comme au Tour et dans le Nant de la Griaz des intercalations régulières de zones argileuses, indice d’un régime caspien avec apport périodique de troubles. Leur épaisseur peut atteindre 30 m. Ils ne forment qu’un niveau unique dans la série triasique et sont généralement sur- montés par des cargneules. Les principaux affleurements de gypse se voient en amont des Granges près des Contamines, à la montée des Chalets de Miage à l’Alpe de Truc, dans le Nant de la Griaz, en pointements sporadiques dans les forêts entre le torrent de la Griaz et celui du Bourgeat, au pied de la Montagne de Taconnaz et de la Montagne de la Côte, près du Tour, sur le versant gauche de la vallée, dans le Nant Noir près des Herbagères, enfin au SE du Col de la Forclaz. Les gypses paraissent limités à la bordure du Mont-Blanc entre le Col de la Forclaz et la Griaz; de là ils passent au cœur des plis internes. 5. Les calcaires dolomitiques. Les calcaires dolomitiques sont, avec les cargneules, le niveau le plus fré- quemment représenté. Ordinairement compacts, à grain fin, gris ou blancs, ils peuvent prendre un aspect vacuolaire comme au Col de Tricot. Ils alternent irrégu- lièrement avec les cargneules et les gypses mais c’est généralement par un banc de calcaire dolomitique que se termine le Trias. Les calcaires 5 et 7 de la coupe I du Col de Tricot, à patine brun chocolat rappellent les « dolomies capucin > de l’extré- mité SW du Mont-Blanc. Soumis à une friction intense sur les plans de chevauchement, ils se méta- morphosent et donnent des marbres compacts, satinés, souvent rosés ou jaunâtres (La Forelaz et ravin du Lavanchi). Lias inférieur. RHÉTIEN. Dans le ravin de la Griaz, entre le Trias supérieur et l’Hettangien, se montre un complexe de sédiments grossiers que, par analogie avec les dépôts rhétiens du GÉOLOGIE DE LA ZONE DE CHAMONIX 391 Col des Fours et du Col du Joly, nous assimilons à cet étage (fig. 1, n° 4). Le Trias renversé se termine par un banc peu épais de calcaire dolomitique raviné. Au-dessous, on voit de haut en bas: 1. Calcaire siliceux gris subquartzitique contenant des galets arrondis de cal- caire dolomitique 0,60 m. 2. Calcaire gréseux plaqueté devenant marneux 0,60 m. 3. Marnes noires rouillées 0,40 m. 4. Calcaires gréseux noirs, durs devenant quartzitiques, avec intercalations de minces lits de schistes argileux noirs 6 m. 5. Marnes schisteuses noires (Hettangien). Ce Rhétien est nettement transgressif mais la fraicheur du calcaire dolomitique qui lui sert de base, montre que l’émersion a été de courte durée. Plus au NE, à la Rosière, près d’Argentière, on peut noter au-dessous du Trias renversé de la bordure du Mont-Blanc : 1. Argiles noires rouillées, 2 m. 2. Calcaire siliceux gris, subquartzitique, plus de 2 m. Eboulis, quelques m. 3. Calcaire noir avec minces pellicules marneuses. 4. Argiles noires rouillées, 1 m. 5. Quartzites gris écrasés, 2,50 m. 6. Calcaire gréseux gris-bleu, quelques cm. 7. Marnes schisteuses noires (Hettangien). La parenté entre cette série et celle du Nant de la Griaz est frappante; les faciès sont identiques dans les deux localités. Il est fort probable qu'il s’agit là encore du Rhétien. Dans la région SW du massif, au Col des Fours, sur la carapace du Mont- Blanc, le Rhétien épais comporte des conglomérats surmontés par des formations sidérolithiques!. Nous concluons de ces faits, qu'au Rhétien, le Mont-Blanc était représenté par un bombement dirigé du SW au NE qui s’est exondé progressive- ment ; la région culminante étant restée plus longtemps hors de l’eau que la bordure, ainsi s'explique encore une fois l’état de fraicheur des calcaires dolomitiques ravinés de la Griaz. A la Rosière, le Rhétien détritique prouve aussi l’existence plus au sud, d’une terre émergée. Et comme au nord, dans la région de l’Aïguillette de Vallorcine, le Trias et le Lias manquent sur les Aiguilles Rouges, comme au Belvédère le Lias n’a pas été déposé, un sillon se marquait au Rhétien entre le bombement du Mont-Blanc et celui des Aiguilles Rouges. C’est le premier indice de l’individualisation de la zone de Chamonix, qui jouera pendant le Lias le rôle ! Ce faciès sidéroiithique a été observé par M. CozLer et moi-même au cours d’une excursion aeadé- mique en juin 1921. 392 ÉDOUARD PARÉJAS d’un petit géosynclinal. C’est la première fois également que le Mont-Blanc s’affirme comme unité tectonique. HETTANGIEN. L'Hettangien est représenté partout par des marnes schisteuses noires, pyri- teuses ou, plus rarement, par des calcaires marneux ou des argiles noires. Nous avons recueilli une faune assez restreinte mais caractéristique dans les localités suivantes: Ravin de la Griaz (Bordure): Schlotheimia angulata Schl. 3 ex. » Charmassei d'Orb. 1 ex. Mont Lachat (Versant N Pli C): ° angulata SchI. 4 ex. Col de Tricot (Pli C) : Caloceras sp. 1 ex. Schlotheimia angulata Sch]. 4 ex. » Charmassei d'Orb. 3 ex. Rhynchonella Deffneri Opp. 1 ex. Tous ces fossiles sont pyriteux. La zone à A/satites laqueus est probablement indiquée par l’exemplaire de Calcoceras mais la plus grande partie de la faune se range dans la zone à Schlothei- mia angulata. 1. Répartition des faciès. Région NE. En raison de l’absence de fossiles il n’est pas possible de séparer l’'Hettangien du Sinémurien entre le Col de la Forclaz et les Houches. Les marnes schisteuses noires prédominent dans cette région; mais notons que dans le ravin de la Chenalette (Versant N de la Croix de Fer, pli B) le faciès est argileux, et qu'au Col de Balme (bordure), des marno-calcaires plaquetés sont à la base du Lias. Région SW (fig. 1 n° 5). A partir de la Griaz vers le SW, l'Hettangien se différencie paléontologiquement mais le faciès reste vaseux. Partout ce sont des marnes schisteuses noires sauf au Col de Tricot (Pli C) où des calcaires marneux gris, plaquetés représentent l’Hettangien. L'épaisseur de ce terrain ne paraît pas dépasser 30 m. RITTER (38, p. 96) fait débuter la série liasique par un horizon de peu d’épaisseur de schistes noirs qui, dit-il, se trouve localisé à l'extrémité méridionale du Mont Blanc. Mais comme nous venons de le voir, les schistes de l'Hettangien sont la règle sur toute la bordure NW du Mont Blanc. Remarquons à ce propos que la subdivision du Lias dauphinois en un Lias cal- caire inférieur et un Lias schisteux supérieur, se trouve ici en défaut. On verra cet inconvénient se reproduire pour une partie du Sinémurien. Comme, en l'absence des GÉOLOGIE DE LA ZONE DE CHAMONIX 393 fossiles, on peut facilement confondre le Toarcien et l'Hettangien, une tectonique basée uniquement sur les caractères lithologiques risque fort d’être inexacte. 2. Paléogéographie. L’Hettangien correspond dans la zone de Chamonix à un régime bathyal. Toute la région s’est affaissée rapidement à partir du Rhétien. Un premier maximum liasique de profondeur est atteint pendant l'Hettangien, qui uniformise, tous les dépôts dans le faciès vaseux bathyal. SINÉMURIEN. Cet étage est représenté par des marnes schisteuses, des marnocalcaires ou des calcaires échinodermiques qui nous ont fourni la faune suivante : Ravin dela Griaz (Bordure): Arietites (Coroniceras) cf. rotiformis d'Orb. 1 ex. Pecten sp. 1 ex. Mont Lachat (versant N, Pli C) : Arietites (Coroniceras) cf. rotiformis d'Orb. Dex Arietites (Coroniceras) cf. Bucklandi Sow. 5 ex. Waldheimia cor Lam. 1 ex. Chalets de Miage (Pli C): Arietites ( Arnioceras) ceras Giebel 1 ex. Ces fossiles caractérisent la zone à Arietites Bucklandi. Les Chondrites sont fréquents dans la partie supérieure de l'étage. 1. Répartition des faciès. Comme il a été dit, l’Hettangien et le Sinémurien ne sont pas séparables dans la partie NE dela zone de Chamonix où le Lias inférieur est uniformément vaseux (fig. 2). À partir des Houches, vers le SW le Sinémurien devient plus calcaire. Au Mont Lachat, les Arietites se trouvent encore dans des marnes schisteuses noires, mais à Miage, déjà, ils sont inclus dans des calcaires plus ou moins marneux, même faiblement échinodermiques. Au Mont Joly, le Sinémurien est représenté par des calcaires bleus, un peu spathiques (fig. 3). L’épaisseur du Sinémurien, très écrasé dans la zone de Chamonix, est difficile à déterminer ; elle doit certainement atteindre de 80 à 100 m dans la vallée de Montjoie. 2. Paléogéographie. Au Sinémurien, les grands fonds subsistent au NE de la zone de Chamonix (fig. 1, n° 6); à partir des Houches, les calcaires prennent la place des marnes, ils ‘AU9 0098 + L 20H ‘BUI-AESSEUUOIG 2p UOIS9I 8] SUP SEIT np adn0;) — ‘€ SLA ‘AUS 009% : I 2118494 ‘1U981Y-JUONT, 9P UOIS91 VI SUP SVT np adn09 — ‘Z SLA EE ‘uerouu uerouu ? 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La pro- fondeur diminuait donc du NE au SW le long du massif du Mont-Blanc. Lias moyen. CHARMOUTHIEN. Le Sinémurien est toujours surmonté, dans la zone de Chamonix, par une puissante assise de calcaires finement échinodermiques plus ou moins quartzeux, gris bleuâtres, où l’on décèle fréquemment des Bélemnites et des sections de tiges de Pentacrinus. À la surface corrodée, ils sont souvent zonés de bandes claires, blanchâtres et de bandes foncées, bleutées; les premières sont en relief, les dernières restent en creux. Sous le microscope, les zones claires montrent une forte proportion de grains de quartz ; la calcite est plus abondante dans les zones foncées. Le caractère rubané est surtout manifeste à la base de cette série de calcaires; en montant on voit les zones devenir plus épaisses; de 1 à quelques cm qu’elles mesuraient, elles atteignent de 20à 30 cm et la roche prend un nouvel aspect; les zones foncées, altérées, se découpent en parallélipipèdes arrondis aux angles, en sorte que les parois constituées par ce Lias moyen font quelquefois l'effet de murs de pierre sèche. Soumises à une pression violente, dans les plis internes de la zone de Chamonix par exemple, les zones calcaires plus tendres se laminent, acquièrent une schisto- sité sur laquelle se déplacent les bancs quartzifères plus durs. La partie inférieure de ces calcaires zonés doit probablement appartenir au Charmouthien. (fig. 1, n° 7), DOMÉRIEN. Dans la partie supérieure des calcaires zonés, les Bélemnites sont plus no m- breuses (fig. 1, n° 8). Malheureusement elles sont fréquemment tronçonnées. Nous avons revu nos déterminations de 1920, et sur un matériel plus considérable prove- nant du Mont Lachat (versant S) nous avons identifié : Delemnites paxillosus Sehlot. 4 ex. » Milleri Phill. 3 ex. » cf. Zieteni Werner (— breviformis Zieten) 1 ex. D’après Phillips et Werner il faut attribuer cette faune au Domérien. A ces calcaires zonés domériens succèdent quelquefois des calcaires échino- dermiques grossiers, non zonés qui forment le sommet de la Croix de Fer (pli B.) et de la Pointe du Van (Pli C), mais ce niveau n’est pas constant; le suivant l’est davantage. 396 EDOUARD PARÉJAS Au-dessus se placent des calcaires siliceux gris ou bleus passant à des quartzites à grain fin de même couleur. Ce niveau dur, épais d’une trentaine de mètres à la Rosière près d'Argentière et de 30 à 50 m au Mont Vorassay, se marque par des abrupts dans la topographie et donne lieu à des cascades dans les ravins. Souvent patinés en orangé ou en jaune, ces quartzites domériens peuvent être confondus de loin avec les roches triasiques, mais le lichen silicicole Lecidea geographica Schaer qui les recouvre permet de les identifier plus facilement. Ce faciès relativement grossier s’observe au Tour, dans le Nant Noir, puis au S du Col de la Forclaz sur la bordure immédiate du Mont Blanc. Dans le pli B, il forme une grande partie de l’arête W du Mont Vorassay; on le recoupe sur le sentier qui va du Pavillon de Bellevue au glacier de Bionnassay et enfin, faisant partie du même pli B, les quartzites domériens sont visibles dans un petit ravin de la Pointe du Van, parallèle au Lavanchi, au sud de ce dernier. RITTER (38, p. 98) a signalé au Col du Bonhomme (Plan des Dames), un horizon liasique bréchiforme riche en Bélemnites et contenant des débris de calcaires dolomitiques et de schistes satinés; il s’agit là, sans doute, du Domérien. Nous y avons trouvé plusieurs exemplaires de Belemnites Zieteni Werner (— breviformis Zieten), Ce niveau grossier auquel succèdent des quartzites blancs est évidem- ment côtier, il est du même âge que les quartzites lhasiques de la zone de Chamonix. Au-dessus des quartzites, le faciès des calcaires échinodermiques reprend sur quelques mètres; ensuite viennent des calcaires noirs à grain fin, à cassure conchoïdale ou esquilleuse que l’on pourrait facilement prendre pour du Malm; ce niveau existe au Mont Lachat, au Col de la Forclaz, à la Batiaz (socle de la Tour). Dans ce complexe on relève quelquefois des marnocalcaires noirs, tendres, d’appa- rence charbonneuse, peu épais. Nous avons relevé cet horizon à l'extrémité infé- rieure de la tranchée du chemin de fer, au-dessus du Pavillon de Bellevue (Pli B.), puis au Col de la Forclaz. Il est probable que l'horizon N° 13 de la coupe de la Batiaz (p. 410) placé dans la même position qu'à la Forclaz appartient aussi au Domérien. En raison de la violence des phénomènes tectoniques qui ont affecté la région de Chamonix et les replis nombreux du Lias de cette zone, nous considérons comme approximatif l’ordre de la succession des faciès qui vient d’étre donné. Nous insis- tons avant tout sur la variété des dépôts du Lias moyen et son caractère statigra- phique. Le Domérien, on le voit, est néritique et montre une diversité de faciès qui s'oppose franchement au caractère bathyal des formations adjacentes. L'épaisseur du Lias moyen de la zone de Chamonix paraît attemdre de 100 a 120 m. : (9 GEOLOGIE DE LA ZONE DE CHAMONIX 397 PALÉOGÉOGRAPHIE DU LIAS MOYEN. Au Lias moyen, les fonds marins se relèvent sur la bordure N du Mont Blanc les dépôts deviennent de plus en plus néritiques. Aux dépens de colonies énormes de Pentacrinus, s’élaborent des calcaires échinodermiques épais. Le point culminant de cette ascension se marque au Domérien. Le faciès, d’organique qu'il était devient détritique quand les quartzites se déposent dans toute la zone. Une émersion s’est même produite dans la région axiale du Mont Blane, le Domérien côtier du Plan des Dames l'indique clairement. Le sillon de Chamonix continue donc à jouer au Lias moyen le rôle d’un géosynclinal entre le Mont Blanc qui se hausse de nouveau et les Aiguilles Rouges dépourvues de Lias. Lias supérieur. Sur la bordure N du Mont Blanc, le Lias supérieur est formé par une série très épaisse d’argiles schisteuses rarement marneuses et de schistes argilogréseux localisés surtout dans le synclinal de Voza entre les éléments À et B de la zone de Chamonix. TOARCIEN. Le passage du Domérien au Toarcien se fait par des intercalations dans les argiles, de banes de calcaires marneux de plus en plus espacés vers le haut. A la base, le Toarcien est représenté par des argiles schisteuses noires, bril- lantes, souvent rouillées ou irisées, très fissiles et fragiles, dans lesquelles l’érosion travaille largement. Dans la moitié supérieure de cette série s’intercale parfois un niveau de calcaires marnogréseux, roussätres à la surface. Altérées et oxydées, ces argiles prennent une teinte brun clair. L’épaisseur du Toarcien dépasse certaine- ment 100 m (fig. 1, n° 9). Le seul organisme que nous ayons découvert dans ce complexe est Posidono- mya Bronni Voltz. Seize exemplairès ont été trouvés près du hameau des Belles Faces sur le chemin muletier des Houches au Col de Voza, puis un exemplaire au Col même dans les rochers qui afleurent au SE de la station sur le versant de Bionnassay. La présence de ces fossiles, puis l'extrême ressemblance du faciès avec celui du Toarcien helvétique, nous inclinent à attribuer, en partie tout au moins, à cet étage, les argiles de la base W du Mont Vorassay, du Col de Voza et des envi- rons du Tour. MÉM. SOC. PHYS. ET HIST. NAT. DE GENBVE, VOL. 89 (1922). 49 GS de) ® 9 EDOUARD PARÉJAS AALÉNIEN. 1. Région de la Croix-de- Fer. Sur la série précédente, dans cette région, en contact franc, se superpose un complexe épais de schistes grumeleux argilogréseux, gris où brunâtres qui contien- nent des nodules lenticulaires plus durs, pyriteux au centre; ces nodules sont caractéristiques pour l’Aalénien haut alpin et dauphinois (fig. 1, n° 10 et fig. 2). Les schistes gréseux de la Croix de Fer, fortement replissés, contiennent des banes ou des lentilles alignées de quartz blanc. Ces intercalations de quartz suivent la direc- tion générale N E-$ W des plis et jalonnent les zones de dislocation; on peut les suivre sur plus d’un kilomètre de Carraye à l’Arolette. Elles résultent de l’écrase- ment et de la recristallisation du quartz des grès aaléniens. A. Favre leur attribuait une origine aqueuse (12, $ 519). 2. Région de Saint-Gervais. Le faciès relativement grossier de l’Aalénien ne se retrouve pas plus au S W, sur la bordure du Mont Blanc, et l’absence de faune ne nous à pas permis non plus d'identifier cet étage entre le Col de Balme et les Contamines. L’érosion l’en à fait disparaitre. Mais HAUG (15) et RITTER (38) ont décrit dans la région du Mont Joli des argiles schisteuses, à nodules pyriteux, contenant des ammonites aaléniennes. Ces schistes noduleux succèdent aux argiles toarciennes du Synclinal de Voza (fig. 3). 3. Puléogéographie. Nous avons vu qu'au Domérien néritique de la zone de Chamonix correspond un mouvement ascensionnel, puis une émersion du Mont Blanc. Cette oscillation positive ne dure pas. Le Toarcien voit le massif gagner à nouveau la zone bathyale. C’est un second maximum de profondeur qui s'établit sur le Mont Blanc, répétition exacte de la plongée hettangienne. Parvenons maintenant à l’Aalénien, Nous avons vu qu’il fallait voir deux faciès distincts sur la bordure N du Mont Blanc, un faciès argilo-gréseux au NE (fig. 2) et un faciès bathyal au SW (fig. 3). Pendant que l'extrémité SW du massif se maintient dans le régime profond à l’Aalénien, il semble que dans la région NE s'amorce un léger exhaussement indiqué par le faciès plus grossier de la Croix de Fer. 4 ah Ed à EE NT GÉOLOGIE DE LA ZONE DE CHAMONIX 309 Avec l’Aalénien s'arrête la série des dépôts mésozoïques parautochtones qui ont conservé des caractères stratigraphiques utilisables. I'érosion a enlevé le reste. Les derniers chapitres de l’histoire géologique de la zone de Chamonix et du Mont Blanc sont écrits dans les séries plus jeunes des Fiz et des Aravis, charriées sur l'avant pays hercynien. Il serait intéressant de savoir si l’oscillation positive constatée dans l’Aalénien de la Croix de Fer se continue au Dogger et si elle se marque par des différences de faciès entre le Bajocien du Haut Giffre et celui des Aravis, par exemple. MICHEL-LÉVY (27) a signalé et figuré au Mont Lachat et au Mont Vorassay du Dogger et des schistes oxfordiens, mais nous avons démontré que paléontologi- quement ces terrains appartenaient respectivement au Lias moyen et au Lias infé- rieur. C’est au Lias qu’il faut aussi rapporter le Dogger indiqué par DUPARC et MRAZEC (10) et H. DOUVILLÉ (9) dans la vallée de Chamonix. Résumé paléogéographique. Ainsi que l’a montré HAUG (15) le Lias de la zone de Chamonix appartient entre Martigny et les Contamines au faciès dauphinois. La série, d’un caractère généralement bathyal (argiles, marnes, marnocalcaires) est interrompue à deux reprises au Rhétien et au Lias moyen par des sédiments néritiques (calcaires échinodermiques et quartzites). L'étude de la succession des faciès permet de se rendre compte de ce qu'était la bathymétrie des mers liasiques dans la zone de Chamonix. Explication de la figure 4. I. Au Trias inférieur, l'extrémité NE du Mont Blanc, dépourvue des quartzites de base, émerge jusqu’au Col de Tricot où ce faciès fait son apparition. IL Puis, le pays s’affaissant quelque peu, la mer gagne vers l'Est sur les terres exondées jusque là. Dans le Nant de la Griaz les quartzites manquent; le niveau des argilites transgresse sur le Cristallin. IT. La profondeur diminue encore au Trias moyen et supérieur, des lagunes se forment partout, où se déposent les cargneules et les gypses. Puis un mouvement ascensionnel exonde de larges surfaces ; les calcaires dolomitiques de la Griaz sont ravinés et des formations continentales se déposent au Col des Fours. 4, Dépôts néritiques.- 400 ÉDOUARD PARÉJAS \ roix d NE Croix de Fer He W X. Aalénien. IX Toarcien. VIII. Domérien. VII. Charmouthien. Croix de Fer M? Lachat © mm 1 ‘ VI. Sinémurien V. Hettangien. M © M» /f — LaRosière LaGriz LB /23/AN0c COCO EEE EE OT IV Ce RE TE ST) oies + 0 de re eve UE US US : A ARE RSR Re 1 Rhétien. III. IL. Le CI 2 Ms L:l4 Es Fig. 4. — Bathymétrie des mers triasiques et liasiques dans la zone de Chamonix. Echelle 1 : 500.000. 1. La mer. — 2. Substratum cristallin de la zone de Chamonix. — 3. Régions émergées du Mont Blanc. — Trias moy. et sup. Trias inf. Argilites. Trias inf. Quartzites. 5. Dépôts bathyaux. L’épaisseur des sédiments a été négligée et les profondeurs ont été exagérées. GÉOLOGIE DE LA ZONE DE CHAMONIX AO IV. L’émersion rhétienne qui à alimenté les dépôts grossiers de la Rosière (Argentière) et du ravin de la Griaz est suivie d’un mouvement de descente rapide. V. Tout le massif plonge et atteint à l’Hettangien un premier maximum de profondeur. Les marnes à Céphalopodes pyriteux caractérisent cet étage. VI. Au Sinémurien, l'appareil se soulève par le SW. Les dépôts restent bathyaux dans la région de la Croix de Fer, tandis qu'on observe des calcaires marneux plus ou moins échinodermiques à partir du Mont Lachat vers le SW. VII. L’ascension devient générale avec le Charmouthien. La profondeur diminue sur toute la bordure du Mont Blanc; partout se déposent des calcaires échinodermiques à Pentacrines. VIII. Au Domérien, le point culminant de l’oscillation est atteint. Des cal- caires échinodermiques grossiers se forment. Le Mont Blanc émerge à nouveau et l'érosion continentale alimente des dépôts épais de quartzites. IX. Mais peu à peu le faciès redevient vaseux et, au Toarcien, c’est l'immersion générale ; les grands fonds sont la règle (argiles schisteuses) ; un second maximum de profondeur marque cette oscillation négative. X. L’Aalénien présente une atténuation de ce régime bathyal dans la région de la Croix de Fer où le faciès est argilo-gréseux. Nous voyons là l’amorce d’un nouveau mouvement d’ascension du fond de la mer. Dans la région des Contamines, par contre, le faciès reste franchement bathyal (argiles schisteuses à nodules du Mont Joly). Les mouvements verticaux de la bordure NW du Mont Blanc. 1. Les oscillations. De l'examen de la bathymétrie des mers triasiques et liasiques il ressort que les mouvements qui ont affecté la bordure nord-ouest du Mont Blanc peuvent se décomposer en deux systèmes d’oscillations de périodes différentes. Ce sont : 1° Une ondulation longitudinale qui se manifeste par un balancement rythmé des extrémités de la chaine du Mont Blanc. Les élongations maxima de ce mouve- ment ondulatoire paraissent avoir été atteintes au Trias inférieur, au Sinémurien- Charmouthien et à l’Aalénien (fig. 5, n° 2). 2° Les oscillations d'ensemble qui affectent solidairement toute la région étudiée (zone de Chamonix, bordure N du Mont Blanc). C’est un balancement 4092 EDOUARD PARÉJAS vertical qui détermine alternativement des émersions et des approfondissements marins généraux (fig. 5, n° 1). Les émersions se marquent pour le Lias au Rhétien et au Domérien et les grands fonds règnent pendant l'Hettangien et le Toarcien. Comme le montre la fig. 5 la période du second mouvement est relativement courte; les oscillations d'ensemble sont donc les plus rapides. 1. Oscillations d'ensemble (rapides). 2. Oscillations longitudinales (lentes) Fig. 5. — Les oscillations de la bordure NW. du Mont Blanc pendant le Trias et le Lias. L’ondulation longitudinale paraît avoir été produite par la transmission lente d'un effort, perpendiculairement à la direction de la poussée pennique. On sait, d’après ARGAND (3) que le segment central de l'arc alpin réagit plus rapidement que les segments latéraux sous l'effort des géanticlinaux alpins en marche. Ne faut-il pas voir dans le relèvement simultané vers le NE des Aiguilles Rouges et du Mont Blanc au Trias inférieur, une conséquence de la proximité du segment central. Quant à l’exhaussement de la région de Miage et des Contamines au Sinémurien- Charmouthien, peut-être est-il le contre coup de ce gauchissement triasique qui, transmis lentement le long de la chaine parvient, atténué et retardé, au Lias moyen, à l'extrémité SW du massif. 2. Dédoublement du géanticlinal helvétique. SWIDERSKI (42), par l'observation des faciès de la couverture des massifs de Grastern et de l’Aar, a été amené à subdiviser le géanticlinal helvétique en deux géantichinaux secondaires pendant le Lias et le Bajocien. Nous avons vu qu'il en est de même au Lias dans la région de Chamonix. Dès le Rhétien, le Mont Blanc se différencie et se sépare du rebord hercynien des Aiguilles Rouges par un sillon peu profond. Ce chenal se marque encore au Domérien puis nous perdons sa trace. Il est fort probable qu'il subsiste au Lias supérieur mais à partir du Dogger, absent dans la zone de Chamonix, la question reste ouverte. Le géosynelinal dauphinois gagne de ce fait en complication. Déjà accidenté par le Dôme de la Mure (18), il GÉOLOGIE DE LA ZONE DE CHAMONIX 403 se bifurque à partir de la région des Fours en une branche nord ou de Chamonix et une branche principale sud ou de Courmayeur qui se rejoignent vraisemblable- ment près de Saxon. 3. Transgressions et régressions. Nous avons dit que les Aiguilles Rouges et la zone de Chamonix étaient soli- daires pendant le Trias; ces deux unités oscillent en concordance de phase. Ega- lement relevées dans leur extrémité NE, elles subissent dans cette région la même transgression du Trias supérieur. Mais, à partir du Lias inférieur, leurs tendances divergent ; les Aiguilles Rouges se destinent au rôle d'avant pays rigide, la zone de Chamonix, malgré le premier gauchissement du Mont Blanc, confine déjà au géosynclinal valaisan. Ce dernier en effet, s’approfondit des le Rhétien entrainant avec lui la zone de Chamonix. Mais pendant que la mer liasique transgresse ici, elle est en régression sur les Aiguilles Rouges. Transgression dans le géosyncelinal, régression sur l'avant pays, voilà une confirmation de plus de la loi de Haug. DEUXIÈME PARTIE TECTONIQUE INTRODUCTION Le phénomène du recouvrement des terrains sédimentaires de Chamonix par le massif du Mont-Blanc parut si extraordinaire à de SAUSSURE et à ses successeurs immédiats, qu’ils ne se demandèrent pas quel pouvait être l’arrangement intérieur de ces couches sédimentaires. Ce n’est qu'en 1848 qu'ALPHONSE FAVRE fit du sillon mésozoïque de Chamonix, un synclinal simple. Et le « synelinal de Chamonix » devint désormais célèbre, tant par la grandeur des phénomènes qu’il montre, que par la proximité immédiate de la plus haute cime des Alpes. M. LUGEON (22), le premier, met en doute la simplicité du «synelinal» et lui suppose une complexité que cette étude à pour but d'affirmer et de démontrer. La présence dans cette zone de deux séries sédimentaires différentes par leurs composants et leurs faciès, l’exis- tence de plusieurs plis compliqués, nous portent à considérer comme désuète et inexacte l'appellation de « synclinal» et à la remplacer par celle, plus générale, de «zone de Chamonix ». I. LES PLIS DE LA ZONE DE CHAMONIX Nous avons démontré dans une publication antérieure (31) que, dans la région du Mont Lachat et du Col de Voza, la zone de Chamonix était compliquée par trois plis À, Bet C, charriés sur les Aiguilles Rouges. Comme le profil trans- versal passant par la Croix de Fer et le Col de Balme est très caractéristique, nous l’étudierons pour commencer, puis nous lui comparerons ceux que l’on peut observer au NE, jusqu'à Martigny d’une part, et vers le SW jusqu'aux Contamines, d'autre part. GÉOLOGIE DE LA ZONE DE CHAMONIX 405 1. LA RÉGION DE LA CROIX DE FER. Si l’on monte de l’alpage des Preises à celui de Catogne, en suivant le ruisseau qui descend de ce dernier, puis en continuant par les crêtes, de la Pointe du Van à la Croix de Fer, on note la coupe suivante: (pl. 7, coupe 3 et fig. 6). d >< JS GS 4r4 ST < KR 2 : io AE TE Fig. 6 — Le massif de la Croix de Fer, vu du Six Jeur. a, Col des Tseppes ; b, Pointe de Carraye; ce, Pointe du Van; d, Croix de Fer; e, Arolette; f, Cirque de Catogne; g, Chalet des Preises ; À, Chalet des Lanches. 1, Carbonifère et Permien de l’Arpille ; 2, Dogger ; 3. Argovien ; 4, Malm ; 5, Crétacé; 6, Tertiaire ; 7, Lias moyen ; 8, Lias supérieur x--->%x, Plan de chevauchement de la nappe de Morcles. On voit, sur cette figure, se dessiner nettement l’ensellement de la Croix de Fer. 1. Carbonifère. Grès et schistes ardoisiers sur lesquels se superpose une série autochtone normale (2 à 9) représentant la couverture sédimentaire de l’Arpille. Série autochtone : 2. Dogger. Calcaires échinodermiques surmontés de calcaires zoogènes à Céphalopodes, 1,50 m (voir p. 380). 3. Argovien calcaire 1 m. 4, Argovien schisteux 30 m environ. 5. Calcaires du Malm déterminant un abrupt franchi par une cascade, 100 m. La petite combe située au pied des pentes qui soutiennent le Cirque de Catogne est excavée dans le Malm. 6. Portlandien: a) Calcaires marneux très schisteux, blanchâtres avec inter- calations de bancs plus durs de 20 à 50 cm. — b) Calcaires schisteux avec zones échinodermiques. MÉM. SOC. PHYS. ET HIST, NAT. DE GENÈVE, VOL. 39 (1922) 50 A06 EDOUARD PAREJAS 7. Sidérolithique éocène: a) Lentilles et trainées de grès ferrugineux quel- ques em. — b) Calcaire siliceux verdâtre à patine jaune, 6 m. Ce niveau est situé au coude du sentier de Catogne le plus rapproché du ravin, en aval de la confluence des deux petits torrents venant du cirque. 8. Priabonien. Marnes schisteuses noirâtres contenant des calcaires lités charbonneux 40 m. 9. Calcaire gris marmorisé 5 m. Ce niveau qui porte les traces d’un écrasement manifeste termine la série autochtone. Série parautochtone : 10. Toarcien. Argiles schisteuses, rouillées, irisées 3 m. 11. Calcaire spathique à inclusions jaunes 2 m. 12. Domérien. a) Argiles schisteuses noires 2 m. — b) Calcaire marneux noir, charbonneux passant à €. — c) Calcaire grossier, laminé, bleuté, tacheté de jaune 10 m environ. — d) Calcaire finement spathique, zoné. — e) Calcaire spathique bien lité et quartzites pélitiques bleutés formant avec le verroa du Cirque de Catogne, 5-6 m. 13. Toarcien. Argiles schisteuses noires, visibles à l'extrémité SW du verrou. 14. Aalénien. Schistes argilo-gréseux, grumeleux, gris ou bruns à nodules lenticulaires pyriteux. L’Aalénien termine la série normale charriée, mais cette série est compliquée par deux plis plus internes qui se marquent par la succession suivante (fig. 7): 15. Domérien. Calcaires échinodermiques grossiers de la Pointe du Van. 16. Lias inférieur. Argiles noires du ravin de la Chenalette dans lesquelles s’insère une écharde de gneiss mylonitisés (cœur du pli B). 17. Domérien et Charmouthien. Calcaires échinodermiques grossiers du sommet de la Croix de Fer et calcaires zonés. IS. Dans le Nant Noir: Lias inférieur. Argiles et marno-calcaires formant la dépression au NW de l'hôtel du Col de Balme (cœur du pli C). 19. Lias moyen. Calcaires spathiques zonés charmouthiens et quartzites domériens patinés en rouge orangé qui, de là butte portant l'hôtel, descendent comme une large nervure vers les Herbagères et se coincent dans le Lias inférieur tout au bas du Nant Noir. 20. Lias inférieur. Marno-calcaires et argiles. 21. Trias. a) Gypse. — b) Cargneules bréchoïdes 10 m environ. 22, Schistes cristallins du Mont Blanc. Au-dessus de la couverture autochtone de l’Arpille, la série normale A charriée est done composée du Domérien n° 12, du Toarcien n° 13 et de l’Aalénien ———— TION GÉOLOGIE DE LA ZONE DE CHAMONIX 407 n° 14. Un coussinet d’argiles toarciennes n° 10 entraîné sous les calcaires domériens plus rigides, a facilité sa translation rendant par cela même quasi invisible le contact mécanique. Nous avions parlé d’un pli A dans nos publications précédentes, mais cette notion est inexacte, car ce Toarcien n° 10 ne constitue pas un flanc renversé à proprement parler. Pendant son mouvement en avant, l'élément résistant (Lias moyen) s’est enrobé dans les schistes argileux du superstratum dont une partie a réussi à fluer sous lui. Mais plus loin, ce plan de chevauchement de lélément A, caractérisé par des surfaces listriques, des brèches de friction, par la marmorisation du substratum, est visible sur le chemin qui va des Chalets de Catogne aux Tseppes à l'endroit où il traverse le ruisseau au NE du Pt 2066 (Atlas Siegfried, feuille 525); il passe au Nord du sommet de Carraye, puis descend dans le ravin du Lavanchi. Là, s’inter- cale sur le plan, à l'altitude d'environ 1680 m, un complexe épais de Trias, formé de bas en haut par : 1) Calcaire dolomitique marmorisé et cargneules, 3 m; 2) calcaire dolomitique bréchiforme dont la texture est d’origine tectonique, 13 m. Ce Trias, ne se poursuit pas jusqu’au haut du ravin; sur la rive droite de celui-ci, au point où un sentier est taillé dans la paroi qui se continue jusqu'au sommet de Carraye, on observe sur le Permien un complexe de cristallin mylonitisé! qui résulte de l’écorchement ou du rabotement superficiel de la cuirasse de l’Arpille mise à nu. Au-dessus viennent des calcaires schisteux noirs (5 à 7 m) et enfin les calcaires broyés de la paroi; ces deux dernières formations pourraient être domé- riennes. La lame triasique à donc disparu ici, de même que l’autochtone. Ce dernier reparait toutefois un peu plus haut, sous le sommet de Carraye et au Col des Tseppes. Le cirque de Catogne est excavé dans l’Aalénien du synelinal très replissé qui sépare l’élément A du pli B. Les complications que LUGEON et OULIANOFF indiquent dans l’Arolette et que nous connaissions déjà, puis les replis qui sont décelés par les zones quartzeuses (voir p. 398) expliquent la puissance apparente de cet Aalénien. Un second pli (pli B) se marque dans le ravin abrupt de la Chenalette, par la présence d’un coin efhilé de Lias inférieur n° 16 qui s’insinue entre les parois de la Pointe du Van et celles de la Croix de Fer. Si l’on remonte le lit du ruisseau de la Chenalette depuis le sentier du Col de Balme, on ne tarde pas à rencontrer sur la rive gauche, une masse de gneiss biotitique qui ue garde pas longtemps sa fraicheur. En effet, peu au-dessus, cette roche prend une patine rousse et montre des traces manifestes d'écrasement. Plus haut encore, dans les argiles du Lias inférieur (n° 16) mises à nu par une écorchure ‘Il s’agit peut-être de la première des deux lames de gneiss que LuGeon et Ourranorr (26) signalent dans le massif de la Croix de Fer. 408 EDOUARD PARÉJAS de terrain sur le versant droit, s’insère une lame de gneiss laminés presque méconnaissables. Cette esquille, connue de nous depuis longtemps, a été signalée par LUGEON et OULIANOFF (26); elle forme le cœur du pli B ou de la Chenalette. La Croix de Fer est taillée dans une lame synclinale de Lias moyen (n° 17) qui, écrasée, s’effile par le bas et se termine au-dessus de la Coûta. Sa pointe extrème qui flottait là dans les schistes liasiques inférieurs, glissant sur ces derniers, s'est effondrée dans le Nant Noir et, râclant son substratum, à mis à jour les gneiss mylonitisés de la Chenalette. Ce cristallin forme donc le promontoire de la Coûta tout entier. Les calcaires échinodermiques de la Croix de Fer, amincis, se pour- suivent au SW jusqu'à un piton surmonté d’une croix, visible au N du Col de Balme. A partir de là, ils cessent brusquement. Au col, ils n’existent plus; la même disparition affecte le Lias moyen de la Pointe du Van. Dans le Nant Noir, plaqué contre les dalles abruptes de la Croix de Fer et donnant lieu à un replat bien visible au-dessus du torrent, on retrouve le Lias inférieur (n° 18). C’est le cœur du ph anticlinal C ou du Nant Noir, séparé par le synclinal de Lias moyen n° 19 des couches 20 et 21 en repos sur le cristallin du Mont Blanc. En résumé, la coupe du massif de la Croix de Fer montre, au-dessus de la couverture autochtone de l’Arpille, une série normale charriée — c’est l’élément parautochtone externe À — puis deux plis secondaires internes, B et C. Le cœur du pli B est formé par un coin de gneiss, visible dans le ravin de la Chenalette. 9 ME :COLUDE LA HORCILAZ: Si l’on suit du N au $ Le «bisse >» (aqueduc) qui arrive du glacier de Trient, on relève la coupe suivante (pl. 7, coupe 2) : 1. Schistes cristallins de l’Arpille. 2. Mylonite de cristallin et de sédimentaire; 10 à 30 cm. 3. Argovien. Calcaires schisteux gris, grumeleux, à inclusions jaunes. 4. Calcaires marmorisés rougeâtres ressemblant aux marbres de Saillon signalés à la Batiaz (voir coupe de la Batiaz n° 8). 5. Schistes calcaires broyés et redressés, exploités en carrière. Epaisseur de 3, 4et.0, 15 a: 6. Trias. a) Cargneule à éléments gypseux et calcaires 0 à 0,30 m. b) Complexe formé d'éléments triasiques, de lentilles de calcaires dolomitiques transformés en marbre saccharoïde 1 m. 7. Schistes calcaires séricitiques 0,50 m. 8. Marbres bleutés et jaunâtres 3 à 4 m. 9. Domérien. «) Marnocalcaires noirs, charbonneux; b) calcaires schisteux Fig. 7. Col de Balme et Croix de Fer. Lm Lias moyen. Ju Lias inférieur. T Trias. Se Schistes cristallins. Cr Lame de Gineiss My Gneiss mylonitisé. Eb Eboulement, Bi Anticlinal de la Chenalette, C Anticlinal dn Nant Noir. Ep, Pareias. Géologie de lu zone de Chamontr, Phot Jullien Frère Fis. 8. — Le Tour et le Col de Balme, ls Lias supérieur. lin Jia< moven. Fa Daias inferieur. T Trias. Se Schistes cristallins du Mont Biance. a Cone dun torrent de Balme. b Cône de drainase périphérique Cône du torrent de Verménaz, 1 Moraine de fond dn Glacier de Balme., Moraine latérale du Glacier de Balme. ae Phot. EF. Chaîx TUUCI VAUIOUOPISOT &aJl{BoorT X “ueuedns SEUT ST ‘Usiow SEUT UT “AINOLISFUL SEUT UT ZOA 9p [09 2 ‘JEUDUT JUON p *ABSSBIO A quo JOOUT, op [09 q ‘JuuouT JUOTT "ABSSEIO À JUOIT 0 39 JUUOUTT JUOIL 0[ ‘UZO A 9D 10) 2T — ‘OI SI uso “jou (Al pus SEUT ST OUOJUIQQUE SUR VALUE, ep od[V à “OUAONIEA ap oJof[UBLT q "se OUI 9P [0 Up oûA ÉXIUOWEU.) 6p DORA — ‘( sde UVILLUL 0 GÉOLOGIE DE LA ZONE DE CHAMONIX 109 foncés, légèrement gréseux, pyriteux; c) calcaires foncés à grain fin; à cassure conchoïdale; d) calcaires durs, subquartzitiques, alternant avec des zones schisteuses, L'ensemble, épais de plus de 50 m, est replissé. 10, Charmouthien. Calcaires finement spathiques zonés. 11. Marnes schisteuses et marnocalcaires noirs 0,50 m. 12. Calcaire plaqueté gréseux 0 à 3 m. 13. Lias inférieur. Marnes schisteuses noires 12 m. 14. Trias. a) Calcaire dolomitique; b) Cargneules bréchoïdes à éléments gypseux et calcaires. Epaisseur du Trias, 5 m. 15. Domérien ? Calcaire marmorisé zoné et quartzites 2,50 m. 16. Lias moyen. Calcaire marno-gréseux noir 3 m. 17, Lias inférieur. Schistes noirs 4 m. 18. Trias. Cargneule et gypses. Ces derniers sont visibles surtout à Proz du Sex. 20 m environ. 19. Schistes cristallins du Mont Blanc. Les couches 3, 4 et 5 appartiennent à l’autochtone de l’Arpille. Le plan de charriage de l’élément À est marqué comme dans le ravin du Lavanchi par du Trias broyé (n° 5). Le Domérien n° 9 est l’homologue de celui du verrou de Catogne et représente la base de la série externe A. Le pli B n’est pas discernable dans le complexe liasique moyen épais (9 et 10) en raison de l’exiguité des afHleurements. Le pli C par contre est marqué par le Trias n° 14. 3. LA COMBE ET LE VIGNOBLE DE MARTIGNY. Au delà de Proz du Sex, vers le NE, le glaciaire et les éboulis ne laissent percer aucun affeurement mésozoïque jusqu'au dessus du Fay. La route de Martigny à Trient entaille au N et à l’E du Fay, puis au N de la Fontaine, des calcaires spathiques plus ou moins schisteux du Lias moyen. Le chemin du Cergneux à Ravoir (Cheseaux) présente quelques pointements intéressants; le Lias moyen apparaît dans les écorchures du talus du chemin. A lendroit où ce dernier est coupé par un couloir dirigé vers les Rappes, (à mi-distance entre { de Martigny et b de Combe AS), on voit le Lias moyen zoné et plaqueté, renversé sous l’Arpille, buter directement contre les cornéennes de ce massif. L’autochtone manque donc ici, et la série charriée A entre en contact avec l’Arpille par le Lias moyen. Les afleurements plus étendus situés l’un au NW du Cergneux (F de la Fontaine), l’autre au N de ce village (0 de Combe) montrent le même phénomène, Au NE du Plan Cerisier, dans les pentes abruptes qui dominent la Dranse, à partir du point A10 EDOUARD PARËEJAS où ce torrent heurte le vignoble de Martigny et jusqu’à la Batiaz, c’est le Lias moyen qui règne. L'autochtone reparaït très écrasé et doninué au NE du Sommet des Vignes, d'où il descend rapidement vers la Batiaz. 4. LA BATIAZ. Dans cette intéressante localité on peut relever la coupe suivante du NW au SE (pl. 7, coupe 1): Petite carrière. 1. Schistes cristallins de l’Arpille. 2. Plan de décollement avec lentilles du substratum, brèches de friction et quartz visible au sommet de la carrière. 3. Calcaires schisteux clairs, argentés sur le lit, contenant des bancs plus compacts 6 m. 4. Calcaire bleu foncé, gréseux, faiblement échinodermique, en gros bancs, 3 m, séparé de à par un plan de friction avec brèche. Grande carrière. 5. Calcaire étiré gris-verdâtre phylliteux 3 m. 6. Calcaire gris, laminé, marmorisé contenant sur une faible épaisseur des pellicules vertes et rouges 4 m. 7. Calcaire gris-verdâtre phylliteux 10 m. La coupe est reprise sur le chemin qui descend de la Tour au village de la Batiaz. 8. Marbres plaquetés, veinés, blancs, jaunes, rosés et verts 21 m. Aptien, d’après M. LUGEON. 9. Calcaire marmorisé gris; 3 m. 10. Calcaire gréseux finement lité et calcaire gris-bleu, compact, légèrement échinodermique; 3 m. 11. Après 4 m de terre végétale, calcaire bleu foncé, lité ; 1 m. 12. Calcaire broyé, à patine jaune. 13. Marnocalcaire noir, charbonneux 0 à 30 em mêlé avec 14 sur un plan de friction. Lias ? 14. Lentilles de cargneules et de calcaires dolomitiques broyés ; quelques em ; Trias. 15. Calcaires lochseitisés, bréchiformes par places; 12 m. 16. Calcaires bleus, foncés, lités ou compacts à Bélemnites. Domérien pp. 17. Calcaires échinodermiques zonés à Pentacrines formant avec 16 le socle de la Tour. Lias moyen. Su à dà dm à He :he«&R —= R (fig 13, I). L’angle d'incidence étant plus petit, le frottement sur le talus s'accroît et l’autochtone s’y trouve laminé, amineï. I'altitude plus grande détermine une composante verticale qui prédomine sur l'horizontale. Aussi le flux, parvenu sur le palier supérieur ne dispose-t-il plus d’une force suffisante pour le décollement global de l’autochtone. Ce dernier n’est que partiellement décollé, les couches compactes jouent à différents niveaux sur les couches schisteuses. On 198 ÉDOUARD PARÉJAS observe des pincements et des duplications. Ce cas se trouve réalisé dans la région comprise entre le Col de la Forclaz et l’Alpe de Balme où les plongements varient de 90 à 40° et entre la Bâtiaz et les Rappes où ils passent de 75 à 90°. Nous avons signalé, en effet, dans ces régions, un laminage intense sur le plan d’affrontement et des décollements nombreux dans l’autochtone de la Croix de Fer. Sur la carapace des Aiguilles Rouges, entre Martigny et St-Maurice, les décolle- ments restreints sont la règle. La translation de l’autochtone sur le Trias resté en place à été décrite pour la première fois par SCHARDT (48) sous la Dent du Midi, puis ce méme phénomène à été observé sous les Dents de Morcles par LUGEON (23) et au Col du Jorat par de Loys (19). 3e ças (fig. 13, IIT). Le plan d’af- frontement atteint à un moment donné la verticalité, il devient perpendiculaire à la poussée tangentielle. +” vaut 90° et posons R”—R. Les deux composantes, verticale et horizontale, n'existent plus Fig. 13. — Déformations subies par la zone ettout l'effort se concentre en un seul d’affrontement, au passage d’une nappe. et point sur l’obstacle. Celui-cine pouvant résister est enfoncé. Un temps d'arrêt puis, la poche une fois remplie par les remous, la matière continue à s’écouler par le haut, mais après avoir laminé et réduit à rien la couverture autochtone dans la zone de choc. Sur le «palier supérieur, la série en place se décollera et se pincera tout comme dans le cas précédent. Ce troisième cas s'illustre fort bien par les deux défoneements des Aiguilles Rouges de Chamonix et de l'Arpille et par l’absence presque constante de l’autochtone dans ces régions en éventail. Les décollements locaux sur les culminations décrits par de Loys au Col d'Emaney (19) et par COLLET et PAREJAS (7) dans le chapeau sédimentaire du Belvédère, semblent aussi se justifier par les considérations précédentes. Les phénomènes tectoniques sur la bordure du Mont Blanc. Le Mont Blanc chevauche la zone de Chamonix dont les éléments internes plongent uniformément de 45 à 50° sous le massif. Les terrains mésozoïques, au contact, ne montrent pas des traces d'un dynamométamorphisme bien intense ; on trouve, par exemple, au Col de Tricot, des Ammonites bien conservées à moins de GÉOLOGIE DE LA ZONE DE CHAMONIX 129 50 m du Cristallin. Un léger plan de friction se marque entre le Mont Blanc et le Trias dans cette localité (voir p. 386). Sur le versant SW du même col, un phéno- mène plus important se manifeste, c’est l’intrusion d’une écharde de gneiss dans les quartzites triasiques de base visiblement bousculés eux-mêmes. Plus au SW dans le ravin de Cugnon, nous avons déjà signalé (p. 418) un plan de friction au contact du Mont Blanc. On pourra s'étonner de ce que les effets de la résistance des Aiguilles Rouges n'aient pas été plus considérables sur le sédimentaire de la bordure interne, mais le Mont Blanc, sous la poussée pennique s’est résous en lames dont le jeu à absorbé la plus grande partie du travail résistant. Les coins cristallins de la zone de Chamonix extrémement comprimés par la poussée ont aussi contribué à amortir le choc. il O9 MÉM. S0C. PHYS. ET HIST. NAT. DE GENÈVE, VOL. 39 (1922. TROISIÈME PARTIE MORPHOLOGIE A. LES FORMES ET LES DÉPOTS GLACIAIRES La topograhie révèle dans la région de Trient et de Chamonix plusieurs niveaux glaciaires qui se marquent par des replats ou des cirques sur le flanc des vallées. Le détail de cette étude ne peut toutefois être poussé très loin dans la vallée de Chamonix en raison de l'insuffisance cartographique. Un premier niveau, aux environs de 1500 m semble jalonné par le Col de la Forelaz (1523 m), les Jeurs (1400-1200 m), le Col des Montets (1445 m), la terrasse de < Sur le Rocher » (1364 m), la Forclaz du Prarion (1556 m). Un second niveau se marque entre 1950 et 2100 m avec le plateau de l'Arpille (2082 m), Bovine (1972 m), les Prélayes (2019 m), les Herbagères (2039 mi), le Col des Tseppes (2012 m), Treutse à l’Aïlle (1996 m), le Cirque de Catogne (2066 m), l'Alpage de Balme (1973 m), le Cirque de Loriaz (2008 m), la terrasse inférieure de la Flégère (1877 m), le Montenvert (1910 m) et l’Alpage de Blaitière (1926 m). Un troisième niveau existe probablement à 2400 m et se dessine au-dessus du Col de Balme sur l’arête NW des Grandes Autannes; il forme le grand cirque au SSW du Col de Balme, la crête des Charmoz (2471 m), le Plan de lAi- guille (2300 m) et la terrasse qui longe le pied des Aiguilles Rouges (fig. 9). Les niveaux de 2400 et 2000 m appartiennent probablement aux glaciations antéwürmiennes, celui de 1500 m au Würmien. Les derniers stades du retrait wWürmien se traduisent par des dépôts souvent bien conservés. Ainsi la route de Martigny au Col de la Forelaz coupe au NW des Rappes, un fluvio-glaciaire puissant à galets de protogine. Sur le flanc droit de la Combe, une moraine latérale importante s’amorce à l’est des Fratzes et descend par les points 871 et 692 jusqu'au Brocard. Plus à l’est une seconde moraine double extérieurement la première entre le Châtel et Combarigny. A la hauteur de la —@—@—@—@—— ra GÉOLOGIE DE LA ZONE DE CHAMONIX 131 Caffe (1276 m), un talus de moraine frontale supporte les prairies du Mintset; le Col de la Forclaz et la terrasse de Proz du Sex sont jonchés de blocs parfois énormes de protogine. Il reste à citer dans cette région les cordons morainiques frontaux de la Giète (1883 m) sur le sentier de la Forclaz à Bovine. Le Col de la Forclaz (1530 m) qui domine Trient (1304 m) par une paroi de 200 m environ représente une vallée suspendue qui, au Würmien probablement, recevait un bras divergent du glacier de Trient; les blocs de protogine épars dans le vallon, le fluvio-glaciaire des Rappes semblent le prouver. La vallée de la Forclaz abandonnée par le glacier devint une vallée morte où ne circule plus actuellement qu'un maigre torrent, souvent à sec. Le glacier de Trient s’encaissa dans la vallée principale et au stade de Daun, peut-être, stationna en amont du village actuel de Trient. L'église et les plus anciennes habitations de cette localité sont construites sur une superbe moraine frontale, signalée déjà par A. FAVRE. Dans le massif de la Croix de Fer, les formations glaciaires Jocales sont très nettes. Les chalets des Herbagères (2039 m) sont établis sur la moraine frontale d’un petit glacier issu du Col de Balme et dont une moraine latérale est encore visible à l'E du Col. Un fragment de cordon latéral se voit encore au NW du Point 2127 puis une série de moraines, de névés s’échelonnent de cette cote Jusqu'à la hauteur du Point 2409. Sur le versant NW du petit massif, un glacier daunien s’alimentait entre les crêtes de l’Aiguille, de l’Arolette, de la Croix de Fer et de la Pointe du Van, et descendait dans la direction de Catogne et des Esserts. Trois cordons morainiques latéraux sont visibles entre les Lanches et les Preises. Les chalets de ce dernier alpage (1748 m) sont bâtis sur un talus morainique frontal, riche en galets striés qui marque un stationnement du petit glacier de Catogne. Au N de la borne-frontière n° 6 la barre inférieure de Malm autochtone en partie recouverte par de la moraine porte, à sa partie supérieure, près de l’inter- calation d’Argovien schisteux sur lequel elle se redouble, des stries glaciaires superbement conservées. Le cirque qui abrite l’Alpage de Catogne est lui-même dû au surcreusement des schistes du Lias supérieur par le glacier local, derrière le verrou solide des calcaires du Lias moyen. Une tourbière occupe la partie aval de ce cirque. Sur le versant SW du Col de Balme, un glacier plus important, probablement daunien aussi, le glacier de Balme (34), alimenté par le cirque limité par les arêtes des Grandes Autannes et de la Pointe de Beron, descendait vers Charamillon et le Tour. La région de Balme appartenait aussi au bassin d'accumulation de ce gla- cier car tous les alpages supérieurs sont couverts d’une moraine de fond souvent LE ÉDOUARD PAREJAS épaisse (fig. 8, d). Le seul point où une moraine latérale soit encore visible est à l'E des lacets inférieurs du chemin muletier qui du Tour conduit au Col de Balme (e). La langue terminale devait se loger entre cette moraine latérale gauche et les pentes qui soutiennent les Posettes à l'altitude de 1500 m environ. Pendant le sta- tionnement, un drainage périphérique édifiait un cône d’alluvions qui domine encore au N la plaine du Tour (b). Le glacier de Balme disparu, rien n’alimentait plus ce cône éphémère. En même temps, au contact des schistes cristallins du Mont Blanc, la Creuse de Verménaz ou Vormaine s’excavait rapidement dans le Trias et le Lias inférieur ; le torrent issu de cette gorge récente construisait l'immense cône quioccupe la presque totalité de la plaine du Tour (c). Le torrent de Balme, de son côté, joignait à ces alluvions, son cône plus restreint (a). Une nervure sur laquelle le village du Tour est bâti se marqua à la rencontre des deux cônes et la double décli- vité qui en résulta, refoula latéralement le lit des torrents de Balme et du Tour. Quant au cône de drainage périphérique, sectionné à VE par le torrent de Balme et à l'O par celui de Verménaz, il n’en subsiste plus qu'un talus bastionné, haut d'une cinquantaine de mètres au-dessus des champs du Tour. Deux grosses moraines latérales obstruent la vallée de Chamonix ; une ancienne moraine latérale droite du glacier d’Argentière forme la colline du Planet, puis plus loin la moraine latérale droite du glacier des Bois resserre la vallée en amont des Times obligeant l'Arve à de tumultueux rapides. Peu de faits intéressants dans la vallée de Sf-Gervais; citons pourtant la moraine de fond épaisse qui couvre la croupe du Pavillon de Bellevue, les trois anciens cordons morainiques latéraux droits du glacier de Bionnassay visibles entre le Planey et le village de Bionnassay, et les moraines de névés, très développées dans la combe au NE du Col de Tricot. Sur le plateau de Truc, la moraine de fond à colmaté des entonnoirs dus à la dssolution du gypse, il en est résulté, au sud des chalets, un petit lac et des sta- gnations d’eau. B. L'ÉROSION La présence, au contact des schistes cristallins du Mont Blanc, du Trias et des marnes du Lias inférieur, terrains peu résistants à l’érosion, à déterminé une série de cols et de profonds ravins sur la bordure du massif. Ces dépressions caractéris- tiques se succèdent dans l’ordre suivant, du SW au NE: Col de Truc (1800 m) environ, Col de Tricot (2133 m), Col du Mont Lachat, Nant de la Griaz, Creuse de Verménaz ou de Vormaine, Col de Balme (2201 m), Nant Noir. Les calcaires du Lias moyen des plis B et C, exceptionnellement les calcaires . cye GÉOLOGIE DE LA ZONE DE CHAMONIX 19 sinémuriens (Truc), S'érigent au NW de chacun de ces cols en une petite sommité souvent abrupte. Tels sont le Mont Truc (1833 m), le Mont Vorassay (2295 m), le Mont Lachat (2111 m), le groupe de la Croix de Fer (2346 m) et de la Pointe du Van (2283 m). Dans le synclinal de Lias supérieur, siège d’une érosion facile et rapide, se sont taillés Ia Combe de Bionnassay, le Col de Voza, la Vallée de Chamonix et le Cirque de Catogne. Le verrou de Catogne, la Pointe de Carraye, les buttes qui portent les ruines de la Bâtiaz et de Saillon sont dues au Lias moyen de la série externe chevauchante. Quant au Col de la Forclaz et au vallon de Martigny-Combe, ils sont dus à une érosion sensiblement égale de tous les éléments de la zone de Chamonix Toutefois, l’abrupt qui supporte l’alpage de Proz du Sex au SE du Col de la Forclaz est taillé dans le Lias moyen des plis internes. CONCLUSIONS GÉNÉRALES A. STRATIGRAPHIE. Nous avons établi dans la zone de Chamonix l'existence de deux séries strati- graphiques différentes par leurs faciès et leur évolution; 1° la série autochtone, couverture des Aiguilles Rouges, et 2° la série parautochtone déposée entre le rebord hercynien des Aiguilles Rouges et le Mont Blanc actuel. 1. Série autochtone. — Dans le Trias de Montroc et des Posettes, dont l’exis- tence était ignorée Jusqu'ici, nous avons retrouvé le niveau des schistes à Equisetum. Cet horizon du Trias supérieur transgresse aux Posettes sur le Permien, marquant ainsi le littoral d'une île triasique, l'Ile de Balme. Pendant le Lias, les Aiguilles Rouges formaient, dans la région étudiée, une terre émergée, plus tard envahie par la transgression bajocienne. Les Ammonites découvertes dans le Dogger du sou- bassement de la Croix de Fer nous ont permis de reconnaitre plusieurs des zones stratigraphiques de HAUG. L’Argovien autochtone se montre avec les mêmes facies et la méme épaisseur que celui de Ia Suisse centrale et orientale. La série auto- chtone présente des lacunes nombreuses — Trias inférieur, Lias, Callovien-Oxfor- dien, Crétacique supérieur — suivies par autant de transgressions — Trias supérieur, Bajocien, Argovien, Nummulitique. Cette discontinuité dans la sédimentation, le caractère souvent néritique des dépôts, sont la règle dans la couverture des Aiguilles Rouges. 2. Série parautochtone. — Cette série généralement bathyale se rattache au type dauphinois. La transgression des trois niveaux du Trias s’est faite aussi sur la bordure N du Mont Blanc et cela de PW à l'E. Nous avons signalé pour la première fois la présence du Rhétien dans la vallée de Chamonix, puis déterminé paléontologiquement l’Hettangien, le Sinémurien, le Domérien et le Toarcien. En observant la répartition des facies, nous avons pu établir la bathymétrie des mers triasiques et liasiques. Au Trias inférieur l'extrémité NE du Mont Blanc se relève, probablement grace à sa proximité plus grande du segment central de Pare alpin. Cette extrémité S’affaisse au Sinémurien, tandis que la région SW est affectée à son tour par un mouvement d'ascension. Avec l’Aalénien, le NE se relève encore une fois. À ce balancement longitudinal relativement lent, s'ajoute un mouvement GÉOLOGIE DE LA ZONE DE CHAMONIX A3) oscillatoire général plus rapide qui provoque l’émersion du Mont Blanc au Rhétien et au Domérien. Les phases d’affaissement se marquent à l’Hettangien et à l’Aalénien par l'établissement d’un régime bathyal généralisé. La zone de Chamonix a joué pendant le Lias le rôle d’un géosynelinal entre le Mont Blancetles Aiguilles Rouges. Le Mont Blanc se gauchit pour la première fois au Rhétien; c’est done à cette époque qu'ilse différencie tectoniquement du rebord hercynien. Le géosynelinal dauphinois se divisait à partir du Col des Fours en une branche nord ou de Chamonix et une branche sud ou de Courmayeur. B. TECTONIQUE. 1. La zone de Chamonix. — Le + synclinal» de Chamonix des auteurs est une zone complexe dans laquelle on peut reconnaître une série externe parau- tochtone À, charriée vers le NW sur les Aiguilles Rouges. Cette série est compliquée par quatre plis secondaires plus internes, B, C, D et E, moulés chacun sur un coin cristallin. Aïnsi que l'ont démontré BUXTORF et COLLET, les coins de gneiss de la zone de Chamonix sont les homologues de ceux du Lôtschental sur lesquels S’enracine la nappe du Doldenhorn. 2. La nappe de Morcles. — La série externe A n’est autre chose que la racine de la nappe de Morcles ; cette dernière s’enracine dans la zone de Chamonix. Sur le plan de chevauchement, on trouve parfois des lames triasiques puis dans la vallée de Saint-Gervais, une lame de Carbonifère arrachée au Prarion (Aïguilles Rouges). Cet élément qui à cheminé entre l’autochtone et la nappe est l’homologue des mylonites de Morcles dont la provenance est moins lointaine que ne le supposait M. LUGEON. Les gneiss mylonitisés de Morcles sont donc simplement une écaille détachée de l’Arpille par la nappe de Morcles dans la zone d’affrontement. 3, Les Aiguilles Rouges. — T'obstacle opposé à l'avancée de la nappe — les Aiguilles Rouges — était compliqué par deux culminations axiales (Arpille et région de Chamonix), deux ensellements principaux (Intervalles Gastern-Aiguilles Rouges et Prarion-Belledonne) et un ensellement secondaire celui de la Croix de Fer. Comme la résistance à l’avancement d’une nappe est proportionnelle à l’altitude de l'obstacle au-dessus du niveau de poussée, les déformations ont été plus violentes devant les culminations. En effet, sous la culmination des Aïguiiles Rouges de Chamonix et celle de l’Arpille, le rebord résistant à été enfoncé versie NW, donnant ainsi localement une structure en éventail aux Aiguilles Rouges. Dans ces régions, où l'effort tectonique à été le plus violent, la série autochtone à complètement disparu par laminage. D’autres phénomènes, comme les décollements partiels dans 1306 ÉDOUARD PARÉJAS l’autochtone du Belvédère, des cols du Jorat et d'Emaney, le cisaillement des cal- caires du Lias moyen de la Croix de Fer au Col de Balme, les replis désordonnés visibles dans les environs de la Bâtiaz, sont tous déterminés par la forme de l'obstacle. C'est dans l'intervalle Prarion-Belledonne que la nappe de Morcles-Aravis acquiert sa portée maximum (22 km). Dans cette région, l’autochtone de lavant pays hercynien s’est décollé, au-dessus du Trias, sous la pression du front de la nappe puis, chassé en avant, il constitua les plis du Genevois. Les Klippes des Annes et de Sulens ont été de ce fait transportées passivement vers le NW. Le pli et les fractures transversales du Salève sont d'âge insubrien et liés à lavancée de la nappe de Morcles-Aravis. GÉOLOGIE DE LA ZONE DE CHAMONIX 437 BIBLIOGRAPHIE . ARGaND, E. Le rythme du proplissement pennique et le retour cyclique des encapuchon- nements. P.V. 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Bajocien . 380, 384 Balme, col de 392, 406, 412, 431 » ile de Fat 378, 384 BADUEU LE A7 Bathonien TOPIC 380, 381 DATA IAREENL ON RL CN 410 Bellevue, pavillon de 396, 414 Belvédère, le. 379, 428 BECRASIEN ES PO TI e 0382 BIOIAYAlE ES A CR D 0. 413 Bionnassay. . TT. 421, 424, 432 BOIS ICS AT RE e AlS Bonhomme, col du . . . . . . . . 396 Bouchet le OO nn 15 Bourpeat le 1390 Calcaire capucin. . . . . . . . . 390 » dolomitique . 376, 378, 386, 387, 390 » échinodermique. (Lias) 393, 395 » » (Dogger) . . . 380 » » (Jurassique sup.) 382, 410 Callovien . . . . . . . . 0 3681 Cargneule, 386, 387, 388 Carraye 384, 407 Catogne . . . . Chamonix, vallée de Champel, le . Charbon liasique » tertiaire Charmouthien Chenalette, la Coins cristallins. Contamines, les . Côte, montagne de la Coûta, la . Crétacé Croix de Fer. Cugnon. . Dogger. Domérien . Equisetum, schistes à. Forclaz, col de la . Fours, col des. Géanticlinal helvétique Genevois, plis du . Géosynclinal dauphinois . Granges, les Grassonay . Griaz, la Gruvaz, la . Gypse Herbagères, les Hettangien. . Houches, les . Lachat, mont. Lavanchi (Trient) Lias . Pages. 405, 387, 412, 399, 406, 407, 417, 418, . . . 882 398, 405, 495, 396, 408, 386, 391, .. 878, 386, 390, 393, 395, 413, 396, 379, : 431 433 415 396 384 395 407 494 416 390 408 384 440 Lias inférieur . Lias moyen Lias supérieur. . Malm. ; Martigny-Combe. Martigny (vignoble). Megève Miage:. Lun 5 … Mont Blanc, apparition. » paléogéographie , oscillations Montroc ; Moreles, nappe de Mylonites . Noir, nant Ormai. Oxfordien. Portlandien . Posettes, les . Preises, les Proz du Sex. Quartzites, Trias » Rhétien » Domérien ÉDOUARD Pages. 390 395 397 382, 384 .. 409 409, 424 . . . 495 385, 393, 417 392 399 .. 401 375, 412 411, 418. 424 407, 415, 423 406 382 375, 412 379, 382, 405 409, 433 . 376, 378, 385, 386, 387 391 396 PAREJ AS Rafforts, les . Rhétien Rosière, la Saillon Salève, le. : Sidérolithique, Rhétien . » Berriasien » Eocène . Sinémurien Sommet des Vignes . Taconnaz, montagne de Tertiaire . Toarcien . Tour, le . Transgressions . » Trias , Rhétien . Trias Tricot, col de Trient Truc, le . Tseppes, les . Van, Pointe du . Verménaz Verrucano Villette, la Vorassay, Mont . Voza, col de . Pages 412 ; 390 391, 396, 413 411 426 391 383 353 393 410 390 383, 384 ‘ «fer 387, 412, 431 403, 384 376 SN TMS 375, 384, 385 385, 399, 414 384, 431 416 407 396, 406 419, 432 379 378 MAMA 378, 397, 413 TABLE DES MATIÈRES Page PAPRACHEN CN CUR 1 | < 1873 : Répartition des faciès 2. Paléogéographie . : Dune ; ; PREMIÈRE PARTIE 1. Répartition des Fe | 2. Paléogéographie . STRATIGRAPHIE Lias MOYEN : A. La couverture autochtone des Aiguilles Charmouthien Rouges. Domérien Paléogéographie 4 Da moyen . Trias . . . = + + 375 | Lras supérieur 1. Le Trias de Monoc et de Poicte . =. 375 Toner 2. Le Trias du Col de Voza et de la Gruvaz 378 Aalenien DoGGEr ; 5 4 «4 +, +4 97 1. Région de la Dar de Fer Le Dogger des Preises + + + + + + ST) 2. Région de Saint-Gervais . JURASSIQUE SUPÉRIEUR . . . . . . . 5961 3. Paléogéographie . Argovien + . + + : 81 | Résumé PALÉOGÉOGRAPHIQUE. Malm . . . . . . . . . : : 382 | Les MOUVEMENTS VERTICAUX DE LA DR ODRN Portlandien . . . . . . …. —. … 382 pu Mont Branc CRÉTACÉ . . + + + + + - 382 1. Les oscillations 1. Crétacé des Preises + + + + + + 882 2. Dédoublement du no Dale que 2. Crétacé de la Bâtiaz . . . . . . 383 3. Transgressions et régressions DERTIAIRE M 1 309 PALÉOGÉOGRAPHIE DE LA PORDURE MÉRIDIONALE DES AIGUILLES ROUGES. . . . . . . 34 DEUXIÈME PARTIE B. Les terrains parautochtones. TECTONIQUE TriA8 . . 385 I. Trias di versant sw de Col Fe Tricot . S6a DENON IL Trias du Col de Tricot . . . 386 | 1 Et en CR 386 A. Les plis de la zone de Chamonix. IV. Trias de la Vallér de Granontx oo 387 1. La région de la Croix de Fer. Les dépôts triasiques de la zone de Chnohte 387 2. Le Col de la Forclaz 1. Les quartzites . . . . . . . 387 3. La Combe et le Vignoble de Haine 2. Les argilites . . . 0.7 500 4 La Batiaz 3. Les cargneules . . . . . ,. . 388 5. La Vallée de Chohons 4. Les gypses . . . en 7 390 6. Le Col de Voza et le Mont Tuto 5. Les calcaires dnitquée + Fo90 7. Le Mont Vorassay et le Col de Tricot LIAS INFÉRIEUR. . . . . . . . . . 390 8. La Montagne de Truc et la région des RETIENS SU 390 Contanines Hettangien .… . . . . . . . . . 392 | ConsIDÉRATIONS GÉNÉRALES Pages. 392 395 298 999 393 395 395 399 397 397 397 598 398 398 398 399 401 401 402 403 404 405 408 409 410 412 413 114 416 415 419 GÉOLOGIE DE LA ZONE DE CHAMONIX Pages. Pages. B. L'influence de la forme de l'obstacle sur la tectonique de la zone de Chamonix. TROISIÈME PARTIE 1. La bordure SE des Aiguilles Rouges . 420 2, La couverture autochtone des Aiguilles MORPHOLOGIE Rouges. . . . . . . . . 422 A. Les formes et les dépots glaciaires. 430 3. La nappe de Morcles . . . . . . 424 L’ B. L'érosion. 432 ARRACHEMENT ET LA TRANSLATION DE LA COU- VERTURE DE L’AVANT-PAYS. . . . . . 425 | CONCLUSIONS GÉNÉRALES. . . . . 434 CONSIDÉRATIONS THÉORIQUES . . . . . . 427 | BIBLIOGRAPHIE . . . . . . . . 4387 LES PHÉNOMÈNES TECTONIQUES SUR LA BORDURE INDEX ALPHABÉTIQUE Lo, 250 pu Monr BLanc . . . . . . . . 498 | TABLE DES MATIÈRES. . . . . . 441 000‘06 :€ LE adno ! SG oueg PL Oo. LesTines Les Bois z - s ay» s04 So 7 [l OT? MN ñ É zedewus| 3 2 ap ôsnai Géologie de la Zone de Chamonix. 000001: G.u 2dn07 Ed. Paréjas, 7 IT ;7 {ey2e7 {uoN MNM (EPS - 363 00067 :1 9.u adno) (l 4 , 4 s6ue SEL 0P 12 Kes$euof ,W Col de Voza Pavillon de Bellev 00006:€ Z.u edac) 2 ee" - _— Pr AS me 2e ce om en PE 0000G6:€ g.u odnon lu 000! _ saurwe{uo”) 27 MN ep au0) Mém,. Soc. phys. et hist..nat. Genève Vol. 39 (1922) Cd #. Fr Fa FX = Aig* de la Flbriaz: "N 7. / f 2 A È es Rafforts CG y e LesTines Les Bois d TPS z v £ 3 ESQUISSE TECTONIQUE œ ê \ DE LA É \ E à È ZONE DE CHAMONIX X 2 * Us £ PAR ED. PAREJAS LS © SRE < ES Echelle 1 : 50000 ; nù d : ® Le Légende de la Carte Légende des Coupes £ de ÈÆ Autochtone d - : 5 à £ RS pl AU ReuSe Son SRE Aalénien s É NS (Jurassique-Tert.) AGENTS = É ù = EX 4 FR] Lias supérieur Et] Nummulitique Toarcien LUE NS ARS $ ; KES c N LE Lias moyen fe sidéroithique Suren capter sl. ë ASS à SRE Lias inférieur = Aptien 4 L f e X VE L p Me ias inférieur ° \ AIN À Ë M: Crétacé inférieur | Trias ss Fe à SAS LK Ê FT a ANSE QI Carbonifère Er Jurassique supérieur QU Carbonifère PI ERSR N \SN VE + N ‘eZ ie EL : L Aiguilles Rouges Sè o. NS j TA Aiguilles Rouges Dee Argovien x pee SE v& N ES Frs Sch. cristallins du 2 1 Ÿ Mont-Blanc Dogger ÿ { | None Elan “as Coins cristallinsdela p? Cale Dos Coins cristallinsdela pe Zone de Chamonix LA | “* "25 ?rOYSS Zone de Chamonix e de la Zone de Chamonix. INSTITUT GÉOGRAPH. DE KUMMERLY & FREY, BERNE. PUBLICATIONS SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE ET D'HISTOIRE NATURELLE : DE GENÈVE La Société peut disposer de collections complètes de ses Mémoires. (Tomes 1-38 et volume du centenaire.) Pour traiter, s'adresser au secrétaire des publications. : (Adresse de la Société : M. le secrétaire des publications de la Soc. de physique, P. A.: : | au Museum d’hist. naturelle, Genève, Suisse.) Comptes rendus des séances de la Société (in-$°). Tomes I-XXX VII (1884-1921). Prix Fr. 50 Liste des publications des membres de la Société (1883) in-8° avec supplément (1896) ] A DS CR A EN AR Cr à RE CL ae P vu A TD (9 | AT Cr | PS | | ———— | Dan 2e ne a IR de VON D DS 2 RER ARE RE OR A + LT D A D AE D » (tel était le nom de la corvette) ne rentra pas immédiatement en Europe, ou plutôt elle prit pour y revenir le chemin de l’école ; elle entreprit le tour du monde et y consacra deux années entières. Ce voyage, fait en compagnie de savants distingués, fut précieux pour l'instruction du jeune naturaliste (Studer avait alors 29 ans). Il en rapporta une foule de trouvailles en coraux, oiseaux, mammiferes, dont il s’empressa, à son retour, de doter le musée de Berne et qu'il mit plusieurs années à étudier et à classer. Studer fut nommé en 1876 professeur de zoologie à l'Université de Berne; il le resta pendant 45 ans. Son enseignement, très clair et dénué de pédanterie, sa grande érudition, son extrême bienveillance, attiraient beaucoup d'élèves et un très grand nombre de thèses de zoologie sont sorties de son laboratoire. À côté de la zoologie, Studer s’occupa aussi de paléontologie comparée. Il publia en particulier plusieurs mémoires sur les races de chiens préhistoriques. Il dressa avec Victor Fatio le catalogue des oiseaux suisses. Studer participait volontiers aux congrès scientifiques. [1 était fidèle aux réunions de la Société helvétique des sciences naturelles, dont il fut le président central de 1887 à 1892. Il présida aussi le sixième congrès international de zoologie à Berne en 1904. IT fut recteur de l’Université de Berne en 1891, docteur honoris causa des Universités de Lausanne et de Genève, Notre Société l'avait nommé membre honoraire en 1887. Arrivé au terme de sa carrière en pleine santé de corps et d'esprit, atteint seulement d’une assez forte surdité, Studer prit sa retraite au printemps 1921. Quelques mois plus tard, le 12 février 1922, une courte maladie l’emportait brus- quement, à l'age de 77 ans. 454 RAPPORT DU PRÉSIDENT AUGUSTUS DÉSIRÉ WALLER (1856-1922) Né en 1856, le D' A.-D. Waller était membre honoraire de notre Société depuis 1920. Il était fils d’Augustus Waller, le physiologiste bien connu, qui fut également membre de la Société de physique pendant plusieurs années. Désiré Waller, après avoir suivi le collège de Genève, se rendit en Angleterre, où il étudia dans les universités d’Aberdeen et d'Edimburg. Il termina ses études à Leipzig, dans le laboratoire de Ludwig, puis à Paris. Il fut nommé professeur de physiologie à Londres, dans l’école de médecine des femmes à St. Mary’s Hospital. Waller s’est distingué surtout par ses recherches de neuro-physiologie. I les fit au début dans un laboratoire particulier qu'il avait installé dans son domicile. Habilement secondé par Me Waller, il étudia surtout les phénomènes électriques chez les animaux et les plantes. Il contribua plus tard à créer le laboratoire de physiologie de l’Université de Londres. Il y institua des exercices pratiques et gratuits pour les médecins qui désiraient se perfectionner dans cette branche, et mit à leur disposition son temps et sa riche bibliothèque. Tous les travaux de Waller offrent, à côté de leur originalité, une grande rigueur scientifique. [is sont remarquables par l'exactitude dans leurs moindres détails. Cette qualité apparait surtout dans l'étude qu'il fit de la durée du réflexe patellaire comparé au réflexe du tendon d'Achille. Il put, par des mesures déli- cates, démontrer la simultanéité de ces deux réflexes et prouver que le premier doit être considéré comme un pseudo-réflexe dépendant du tonus musculaire. Ses recherches sur les courants cutanés et rétiniens, sur la circulation et la respiration, sur les anesthésiques, sont universellement connues. Waller aimait les réunions scientifiques; on le rencontrait habituellement dans les congrès de physiologie, où il intéressait ses collègues par ses démonstrations et par énergie avec laquelle il soutenait ses opinions. L’Académie des Sciences de Paris lui décerna le prix Monthyon, celle de Bologne le prix Aldini. Il devint fellow de la Royal Society en 1892. Il mourut le 11 mars 1922 d’une hémorragie cérébrale. EMILIO NOELTING (1851-1922) Emilio Noelting était un grand ami de Genève et de la Suisse. Bien que natif de St. Domingue, il était devenu un des nôtres par les longs séjours qu'il fit à POUR L'ANNÉE 1922 Â55 Zurich et à La Plaine, et par les amitiés qu'il forma avec plusieurs des membres de notre Société. Il avait fait ses premières études à Paris. Il y subit avec succès, en 1870, son examen d’entrée à l'Ecole centrale, mais, la guerre étant survenue, il quitta la France et se rendit à Zurich. Il entra d’abord dans la section de méca- nique du Polytechnicum fédéral, mais il la quitta bientôt pour celle de chimie. Sous l'influence de maitres tels que Kopp et Victor Meyer, il devint passionné pour cette science. C'était l'époque des grandes découvertes dans le domaine de la chimie aromatique. Noelting s’intéressa tout particulièrement au développement de ce chapitre spécial, il y apporta lui-même, dès 1874, des contributions importantes ; il en fit le sujet de sa thèse de doctorat, qui fut reçue en 1873 par l'Université de Zurich. Ayant ainsi terminé ses études académiques, Noelting entra comme chimiste dans une teinturerie de Lyon. Il ne tarda pas d'y découvrir de nouveaux colorants artificiels du groupe de la résorcine. Ces brillants résultats intéressèrent tout par- ticulièrement un ami des teinturiers lyonnais, P. Monnet, qui était fabricant de matières colorantes à La Plaine, canton de Genève. Celui-ci résolut de s'attacher le jeune praticien et, d'accord avec ses patrons, il lengagea comme chimiste de recherches. Noelting resta quatre ans chez P. Monnet et Cie. Ce fut pendant ce séjour dans notre canton qu'il fit paraitre, en collaboration avec son ami et collègue Frédéric Reverdin, son premier ouvrage sur la constitution de la naphtaline, et qu'il fonda avec MM. Reverdin et Emile Ador la Société de chimie de Genève. La carrière de Noelting fut donc à ses débuts d'ordre essentiellement tech- nique. Nul doute qu'elle ne le fût restée sans un événement imprévu qui vint, en 1880, en changer brusquement le cours. À cette date, l'Ecole municipale de chimie de Mulhouse se trouva privée de son directeur par la démission de (roppelsræder. Le comité de la Société industrielle de Mulhouse, dont dépendait cette école, s’adressa, pour le remplacer, à Noelting. Son choix ne pouvait mieux tomber; Noelting, déjà connu par ses publications et ses découvertes, possédait une instruc- tion théorique autant que pratique; ses goûts le portaient d'autre part plutôt vers le professorat que vers l’industrie. Il se rendit done avec joie à l'appel très hono- rable qui lui était adressé, et ii prit, au commencement de l’année 1880, la direc- tion de l'Ecole de chimie de Mulhouse. Il la conserva pendant 34 ans, et durant cette longue série d'années il sut, par son travail Continu, par son habile administration, par ses hautes capacités de professeur et de savant, élever l'Ecole de Mulhouse à une réputation européenne et en faire un centre incomparable d'enseignement de la chimie tinctoriale. Le nombre des élèves, qui était de 35 en 1879, s’accrut progressivement jusqu'à près 156 RAPPORT DU PRÉSIDENT d'une centaine. A deux reprises il fallut construire de nouveaux laboratoires. Un grand nombre de thèses de doctorat, près de deux cents publications originales, montrent l’activité qui s’y déployait et l'impulsion vigoureuse que Noelting donna à son enseignement. Presque tous ces travaux sont relatifs à l’étude des composés aromatiques et des matières colorantes qui en dérivent. Noelting était considéré dans tous les milieux scientifiques et industriels comme une des premières autorités dans ce domaine. L'entière confiance que l'en avait, non seulement dans sa grande compétence, mais aussi dans sa droiture et dans la sûreté de son jugement, lui valut de devenir chimiste conseil de plusieurs grandes entreprises industrielles et d'être chargé d’un nombre considérable d’expertises. Mais la guerre allait de nouveau interrompre cette utile carrière. Au commen- cement de 1915, Noelting, qui n'avait jamais craint d'afficher ses sympathies pour la cause des Alliés, fut expulsé militairement d'Alsace. Il se réfugia en Suisse ; après un court séjour à Lausanne, il revint se fixer à Genève. Il y retrouva ses anciens amis et de nouveaux collègues, qui lPaccueillirent avec joie. Laborieux et infatigable, il voulut s'y remettre au travail. Une salle du laboratoire de chimie organique put étre mise à sa disposition ; il vint occuper avec quelques assistants et s’y livra à des recherches qui lui avaient été demandées par deux compagnies industrielles, l’une française et l’autre italienne. Au lendemain de l'armistice, Noelting réintégra avec une intime satisfaction son domicile de Mulhouse. L'Ecole de chimie avait rouvert ses portes, mais il n’en voulut point reprendre la direction. Il la confia à son fidèle collaborateur et ami M. Eugène Wild et il se contenta de reprendre ses recherches personnelles dans un laboratoire qui lui avait été réservé. Il les poursuivit jusqu'à son dernier souffle ; sa dernière publication est datée de l'été dernier, et il en corrigeait les épreuves lorsque la mort vint le surprendre, pendant une villégiature à Meran (Tyrol), le 6 août 1922. GEORGES LEMOINE (1841-1922) Georges Lemoine, membre honoraire de notre Société depuis 1913, est décédé subitement à Paris, le 13 novembre dernier, dans sa 82% année. Il était professeur de chimie à l'Ecole polytechnique et Inspecteur général des Ponts et Chaussées. Ses travaux s'étendent de 1874 à 1898; ils ont trait presque uniquement à la chimie minérale et spécialement aux recherches de mécanique et de dynamique chimiques. I fut un précurseur dans ce domaine et on doit le considérer comme un POUR L'ANNÉE 1922 457 des premiers en date des physico-chimistes, à une époque où ce terme n'était point encore usité. Son esprit, d’une culture essentiellement mathématique, le portait vers l'observation des caractères généraux des corps et la recherche des lois qui régissent leurs actions réciproques. Il fit connaître tout d'abord celles de l'équilibre chimique entre l'hydrogène et la vapeur d’iode, type de dissociation dans les sys- tèmes homogènes gazeux. Il étendit ensuite son étude au bromhydrate d’éthylène. Il résuma en 1883 ces premiers travaux dans un ouvrage qui porte le titre: « Traité des équilibres chimiques ». Plus tard, Lemoine s’occupa de la décomposition catalytique de l’eau oxygénée par les oxydes et par le charbon, des transformations allotropiques du phosphore, de l’action photochimique de la lumière, de la dissociation de l’iode et du car- bonate de chaux, etc. Ce fut lui aussi qui prépara pour la première fois le sesqui- sulfure de phosphore, composé non toxique, qui est employé en France depuis 1898 pour la fabrication des allumettes. Enfin on a de lui une longue série d'observations d'hydrologie, allant de 1866 à nos jours, et qui ressortissent à ses fonctions dans le corps des Ponts et Chaussées. Lemoine était un savant consciencieux et sagace, professant un culte pour la science désintéressée et possédant un esprit pondéré et un Jugement très sûr. Il était membre de l'Académie des Sciences depuis 1899 et la présida en 1921. ACTIVITÉ SCIENTIFIQUE DE LA SOCIÉTÉ LISTE DES TRAVAUX PRÉSENTES AUX SEANCES Mathématiques. G. TIERCY. Problèmes de dynamique et géodésiques d’hypersurfaces. —— Sur les fusées d’horlogerie. Physique. Ed. GUILLAUME. Transformation de l'énergie rayonnante à l’aide de lellip- soiïde d'onde. C.-E. GUYE. Sur l'extension de la loi de Paschen aux fluides polarisés. — La loi de répartition des vitesses moléculaires et les actions de surface (2 communi- cations). 458 RAPPORT DU PRÉSIDENT C.-E. GUYE et R. RÜDY. Nouveau mode de détermination des diamètres molé- culaires par la rotation électromagnétique de la décharge dans les gaz. C.-E. GUYE et H. WEIGLÉ. Sur l'élimination de l’inégale répartition des ions au voisinage des électrodes dans les expériences sur le potentiel explosif. — Sur la loi de Paschen dans l’anhydride carbonique aux pressions élevées. A. JAQUEROD. Détermination rapide de la marche d’une montre ; application à l'étude de la pression atmosphérique. R. DE SAUSSURE. Sur la définition einsteinienne de la simultanéité (3 commu- nications). A. SCHIDLOF. Sur la simultanéité de deux événements. — Les preuves empi- riques élémentaires de la théorie de relativité restreinte CG. TIERCY. A propos de la définition de la simultanéité de deux phénomènes. Chimie. P. BALAVOINE. Etude analytique des cidres. H. BARBIER. Transpositions moléculaires dans la nitration de composés aro- matiques. F. BATTELLI et L. STERN. La carnisaporine et le sarcochromogène des tissus animaux. E. BRINER et G. MALET. Vitesse d’oxydation et densité de l’oxyde d'azote. E. BRINER et A. TRAMPLER. Recherches sur la saponification catalytique des STaIsses. E. BRINER et F. WINKLER. Propriétés et électrolyse des azothydrates alcalins. P. CASTAN. Sur un disaccharide de synthèse. E. CHERBuLIEZ. Nouvelles synthèses de pyrimidines. — Détermination du degré de dissociation d’un électrolyte par l'étude de la conductibilité. E. CHERBULIEZ et KE. FEER. Dérivés formaldéhydiques de Ja 2,5-dicéto- pipérazine. E. CHERBULIEZ et O. SCHNAUDER. Action du chlorure de sulfuryle sur les organo-magnésiens. F, CHopar. Les lipoïdes et la coagulation du lait. R. Cuopar et E. ROUGE. Sur un type d’oxygénase répandu dans le règne végétal. R. Caopar et F, Wyss. Nouvelles recherches sur la tyrosinase. L. Duparc et R. BUMBACHER. Sur l’amalgamation de l’or dans les minerais quartzeux et sulfurés. L POUR L'ANNÉE 1922 459 L. DupaRc et S. FRANCO. Sur l’azoturation du calcium. L. DUPARC et DE LUZERNA. Sur une source nouvelle de platine dans les schlichs de chromite. L. Duparc et L. RAMADIER. Sur l'entrainement de l’arsenic et de l’antimoine par l’alcool méthylique. AMÉ PICTET et R. JAHN. Sur un nouveau produit de décomposition de l’amidon. F. REVERDIN et H.-P.-A. ROETHLISBERGER. Réaction de quelques dérivés nitrés de la p-phénétidme. M. RossiIGNOL et E. BRINER. Expériences sur la fabrication de l’acide sulfu- rique par le procédé des chambres. P. WENGER et H. STEHLI. Nouvelle méthode de dosage du mercure à l’état de calomel. P. WENGER et J. THomis. Dosage des nitrates par la méthode Dewarda et méthode acidimétrique nouvelle pour la séparation des nitrates et des nitrites. Géologie. L.-W. COLLET. Sur la présence au Vénézuela d’'aptien à faune méditerranéo- alpine. — Sur la présence de Stepheoceras Humphriesi Sow. dans la dalle nacrée de la Faucille. J. FAVRE. Les Valvata post-glaciaires et actuelles du bassin de Genève. M. GYysiN. Etude de quelques caractères des plagioclases. E. JOUKOWSKY et H. LAGOTALA. Quelques observations sur la topographie préwurmienne du bassin du Petit-Lac. — Une vallée préwurmienne aux environs de La Sarraz. E. PARÉJAS. La structure de l'extrémité SW du Mont-Blanc. — Sur quelques déformations de la nappe de Morcles et de son substratum. M. REINHARD. Géologie de la région orientale du Vénézuela. Botanique. J. BRIQUET. L’androcée des Carduacées à filets unis. — Le mélanérythrisme floral chez le Daucus carota L. ot RS | MÉM. SOC. PHYS. ET HIST. NAT, DE GENÈVE, VOL. 89 (1923). 460 RAPPORT DU PRÉSIDENT POUR L'ANNÉE 1922 Zoologie. . Arnold PICTET et A. FERRERO. Hérédité de la panachure chez les cobayes agoutis. — Hérédité de la longueur des poils chez les cobayes. — Constitution génotypique du cobaye à rosettes (un cas de tétrahybridisme). K. PONSE. Disparition et récupération des caractères sexuels secondaires males par castration et greffe chez Bufo vulgaris. — L'organe de Bidder joue-t-il un role dans le déterminisme des caractères sexuels secondaires du crapaud ? O. SCHOTTÉ. Influence des nerfs sur la régénération des pattes antérieures des tritons adultes. — A quel moment les pattes des tritons récupèrent-elles leur pou- voir régénérateur après la section de leurs nerfs ? — La régénération est-elle liée à l’innervation motrice ou à l’innervation sensible? — Le grand sympathique, élément essentiel du systeme nerveux sur la régénération des pattes de tritons. Physiologie. F. BATTELLIL. Méthode pour obtenir l’émission complète du liquide des vésicules séminales chez le cobaye. F. BATTELLI et G. DE MORSIER. Action des courants électriques industriels sur le cœur. — Mécanisme des trémulations fibrillaires. F. BATTELLI et L. STERN. La contracture par les courants alternatifs. — Les ferments complexes ou enzymones dans l'organisme. H. FLOURNOY. Le phénomène de la déformation dans les suggestions post- hypnotiques. L. STERN. Modifications fonctionnelles de la barrière hémato-encéphalique dans quelques conditions pathologiques expérimentales. L. STERN et F. BATTELLI. Production d'hormones par les glandes endocrines in vitro. L. STERN et G. DE MORSIER. Contribution à l’étude des fonctions de la rate. Anthropologie. E. PiTrTARD. Découverte d'un crâne dolichocéphale dans le plus vieux néoli- thique palafittique suisse. E. PITTARD et M. GINSBERG. La taille humaine et les influences des milieux. nn al. . MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE ET D'HISTOIRE NATURELLE DE GENÈVE VOLUME 39, FASCICULE 8. ESQUISSE CARTE DES RÉGIONS ÉRUPTIVES AU NORD DU TAGE PAR Paul CHOFFAT MISE "AU" POINT DES CONTOURS DES TERRAINS SÉDIMENTAIRES ET DE L'ÉCHELLE DES COULEURS PAR Joseph et Philippe CHOFFAT SOUS LA DIRECTION DE E. JOUKOWSKY Avec deux planches et un portrait AVANT-PROPOS Par lettre du 5 mars 1919, PAUL CHOFFAT, membre honoraire de la Société de Physique et d'Histoire naturelle de Genève, s'était adressé au secrétaire pour étudier la possibilité de publier sa carte des régions éruptives au nord du Tage. Le comité de publication n'hésita pas à accepter, en principe, la publication de cet important ouvrage, qui devait être la synthèse de travaux très détaillés, poursuivis sur le terrain et au laboratoire pendant de longues années. L'œuvre était pres d’étre achevée lorsque la mort de l’auteur vint en interrompre le cours. Désireuse de donner suite à ce projet, la famille Choftat reprit les pourparlers avec la Société et recueillit dans un volumineux dossier de notes, avec la collabo- ration de géologues désignés par Paul Choffat lui-même, tout ce qui pouvait être utile à l'achèvement d’une carte à l’échelle de 1:100.000, dont l’auteur avait fait remettre un avant-projet à la Société. Nous eûmes la satisfaction de constater qu'on se trouvait en possession de tout le nécessaire pour mettre au point la publi- cation de cette carte, non pas, il est vrai, telle que l’auteur l'avait conçue, avec une 462 PAUL CHOFFAT détermination exacte de toutes les roches éruptives, mais dans une forme plus résumée ; si la nature de certains filons reste indéterminée, les contours de la presque totalité de ces filons ont pu être figurés. Les terrains sédimentaires, du Lusitanien au Quaternaire, ont été au contaire très fortement condensés et leur role se borne à situer l'éruptif dans la série stratigraphique. Un simple coup d'œil sur la carte permet de reconnaitre que la phase éruptive a suivi le Crétacé supé- rieur et précédé l’Oligocène. La carte a été établie uniquement d’après les documents laissés par Paul Choffat, où il est fait mention des collaborateurs et des auteurs auxquels des données ont été empruntées ; dans la plupart des cas, il a contrôlé lui-même ces données sur le terrain. Le fond topographique à été dessiné spécialement d’après les minutes originales, en ne donnant que les contours, le réseau hydrographique et quelques cotes, de manière à altérer le moins possible les teintes géologiques. Ainsi conçue, la carte géologique donne une idée suffisante de l’étendue et de la diversité des travaux de l’auteur, sans anticiper sur les documents beaucoup plus détaillés, déposés au Service géologique du Portugal, que ce Service publiera sans doute plus tard à l’échelle de 1:40.000 ou de 1:20.000. Pour le soin minutieux qu'ils ont apporté à l'exécution des planches, nous devons des remerciements à MM. Kümmerly et Frey, à Berne. CARTE DES RÉGIONS ÉRUPTIVES AU NORD DU TAGE AG3 NOTICE EXPLICATIVE D'APRÈS LES DOCUMENTS LAISSÉS PAR PAUL CHOFFAT Lorsqu'il se décida à préparer la publication de sa carte des régions éruptives au nord du Tage, à l'échelle de 1:100.000, l'auteur, déjà souffrant, s'était arrété à cette solution, parce que la publication de ses levés originaux, à l’échelle de 1:20.000, représentait une grosse entreprise, demandant encore de la fatigue et du temps pour être mise au point. Ces levés comportent, en effet, une série strati- graphique très détaillée, basée pour le Tertiaire sur les recherches de BERKELEY COTTER, dont une partie à été faite en collaboration avec Paul Choffat ; pour le Crétacé et le Jurassique supérieur, ce sont les études stratigraphiques et paléon- tologiques bien connues de Paul Chotfat qui ont servi à établir les subdivisions. Pour ces terrains secondaires, le nombre des subdivisions régionales n’est pas grand et ne comprend guère, comme termes spéciaux à la région étudiée, que les couches d'Almargem et le Bellasien, dont les premières représentent par leur partie inférieure l’Aptien, tout le reste avec le Bellasien tout entier, étant l’équi- valent du Mésocrétacé. Pour ces terrains, Paul Choffat avait commencé une étude très détaillée dans la région entre KEriceira et Mafra, ce qui est visible sur la carte par les nombreux contours qui figurent dans la teinte verte du Mésocrétacé. Les terrains tertiaires ont été figurés avec beaucoup de détail : le Burdigalien est subdivisé en quatre sous-étages, et l’un de ces sous-étages en deux zones ; l'Hel- vétien comporte deux sous-étages, comprenant à leur tour huit zones; le Tortonien, deux sous-étages. Les contours géologiques de toutes ces subdivisions figurent sur le report à 1:96.000, mais l'échelle est trop petite pour qu’il ait été possible de doter chacun des termes d’une couleur spéciale. Le Quaternaire comprend des formations de dunes près des côtes, et des allu- vions récentes le long des cours d’eau. En ce qui concerne les roches cristallines, dans un premier avant projet d'échelle des couleurs, Paul Choffat placait toute la série éruptive, y compris Îles roches batholitiques du massif de Cintra (granites, syénites, gabbros), entre le 464 PAUL CHOFFAT Turorien et l’Oligocène. Cela correspondait à une notion acquise depuis fort longtemps! sur l’âge des granites de Cintra. Depuis lors, l’auteur a toujours été préoccupé du problème de préciser cet âge, et il a fait bien des excursions dans la région pour serrer la question de plus près, mais il ne paraît pas qu'il soit arrivé à la résoudre complètement. Il laisse à ses successeurs un intéressant problème. Les indications qu'il à données sont résumées dans la phrase suivante : « J’age de lintrusion du granite est limité, vers le haut, par la présence de cailloux granitiques dans les conglomérats oligocènes ou burdigaliens. Z{ est donc soit antérieur, soit contemporain de l'émission de la nappe basaltique. >» Y nous a paru préférable de donner séparément l'échelle des roches éruptives, dont seuls les basaltes, à ce qu'il semble, sont d'âge nettement déterminé par leurs rapports constants avec le Turonien, qui leur est inférieur, et lOligocène qui repose sur eux. Ce fait ressort clairement des coupes imprimées, mais inédites ?, dont Paul Choffat a fait don à quelques-uns de ses correspondants. Cela se voit aussi fort bien sur la carte. Nous nous sommes arrêté à une échelle résumée suffisante pour bien situer les roches cristallines dans la série sédimentaire sur un fond topographique à 1:96.000 établi spécialement dans ce but, en faisant abstraction d’un grand nombre des contours de sous-étages et de zones qui se voient sous une même teinte, cela pour deux raisons. D'abord il eut été pratiquement très difficile d'établir une échelle claire pour quarante termes différents, sur des surfaces parfois de quelques dixièmes de nullimètres de largeur. Déjà à l'échelle que nous avons adoptée, certains éléments se voient à peine, par suite de la petitesse des surfaces. Ensuite, et ceci est la raison principale, une échelle plus détaillée nous aurait conduit à emprunter trop de choses aux notes et aux planches inédites et aurait ainsi pu nuire à une publication à plus grande échelle. Telle que nous la publions, la carte donne une idée de l'importance des travaux inédits de Paul Choffat, et montre tout l'intérêt qu'il y aurait à ce que ces travaux fussent achevés. Ceci parait encore réalisable si un géologue qualifié, expérimenté dans les travaux sur le terrain et capable d'en supporter les fatigues, possédant d'autre part une solide préparation dans les diverses disciplines intéressées, se chargeait de reprendre le travail de Paul Choffat, en prenant pour base les observations nombreuses et précises que l’auteur à consignées dans un riche dossier de notes manuscrites. Ces notes étaient destinées à la publication d’une description générale de la région, et ! P. Caorrar. Age du granite de Cintra. Communicaçdes Secç. Trab. geol. de Portugal I, n° 1, p. 155. Lisbonne, 1885. ? P. Cuorrar. Cénozoïque, PI. I (inédit). LÉ coeie CARTE DES RÉGIONS ÉRUPTIVES AU NORD DU TAGE 469 n’ont pas d'utilité immédiate en ce qui concerne les roches éruptives, objet prin- cipal de notre carte, en ce sens qu’elles ne donnent pas de détermination microsco- pique précise des minéraux de ces roches. Paul Choffat préparait une importante suite de monographies régionales, sous le titre « Géologie du Portugal >», dont il voulait faire paraître un résumé dans la série: < Handbuch der regionalen Geologie », publiée à Heidelberg. Un grand nombre de planches de coupes et de vues photographiques sont tirées. De ce nombre, 25 concernent la région figurée sur l’esquisse cartographique que nous publions. Si l'œuvre avait pu suivre son cours normal, tous ces documents auraient servi à illustrer une monographie détaillée de la région située au nord de l'embouchure du Tage. Un simple coup d'œil sur les vues photographiques des dykes et des sills qui afeurent le long du littoral, suffit à un géologue pour com- prendre qu’on se trouve là dans une région qui se prête admirablement à l'étude des rapports des roches éruptives et de leur couverture sédimentaire, et l’on comprend que Paul Choffat ait lui-même qualifié le massif de Cintra de « Joyau de la pétrographie ». | Afin de laisser à l’œuvre le caractère que nous voulons lui donner, celui d’un hommage à la mémoire d’un géologue qui à fait honneur à la science qu'il a cultivée une bonne part de sa vie comme collaborateur au service géologique du Portugal, et en reconnaissant que la carte qui parait aujourd’hui est inférieure à ce qu’elle eût été, achevée par l’auteur lui-même, nous nous abstenons de tout commen- taire sur les interprétations tectoniques qu’elle peut suggérer. Nous croyons préférable de livrer aux appréciations de ses pairs l’œuvre telle que l’auteur la laissée. Il est utile toutefois, et même nécessaire, pour qui veut y trouver tout ce qu'elle peut donner, de connaître les coupes imprimées, mais non publiées, dont la trace est figurée sur la carte et dont le schéma réduit (pl. 8) renvoie aux numéros de ces planches inédites. Plusieurs de ces coupes montrent un développement remarquable des süls, dont certains atteignent jusqu'à 10 kilomètres avec une épaisseur variant de 96 à 5 mètres, comme c’est le cas pour le sill-laccolithe de labradorite d’Ancos, très nettement visible sur la carte. Nous avons reporté sur celle-ci un très petit nombre de noms, afin de ne pas encombrer le dessin. Entre autres, nous avons reporté tous les noms cités dans la dernière note de Paul Choffat « Sur les roches éruptives, filoniennes et intrusives de la région située au nord du Tage! >, en particulier ceux des deux importantes failles, Moinho da Matta et Dona Maria, qui déli- mitent les trois tronçons du massif de Cintra-Caneças. 1 CO. R., tome 162, 1916, p. 981. 466 PAUL CHOFFAT Les planches imprimées mentionnées plus haut, ainsi que les notes manus- crites, donnent beaucoup d'indications précises sur la structure du massif cristallin de Cintra et sur la nature des roches éruptives des sills et des filons, au sujet des- quelles Paul Choffat à correspondu avec M. Lacroix, auquel nous devons les déterminations pétrographiques. Des nombreuses roches mentionnées (granite, microgranite, gabbro, diabase, basalte, labradorite, porphyrite, syénite, micro- syénite, trachyte, orthophyre, trachyandésite, comptonite, teschénite) nous n'avons pu mettre en évidence que les éléments suivants: la nappe basaltique et un assez grand nombre de basaltes filoniens, en soulignant, par une différence de teinte, la distinction que l’auteur avait faite lui-méme entre ces deux modes de gisement; des labradorites: des trachyandésites. Enfin le granite, le gabbro et la syénite dans le massif de Cintra. Tout ce qui n'a pu être déterminé, quant à la nature de la roche à été figuré en noir. C'est là une grosse lacune qu'il a malheureusement été impossible de combler. D'ailleurs, on aurait rencontré de très sérieuses difficultés à distinguer, par des teintes spéciales, toutes les catégories de roches sur la carte à l'échelle de 1:96.000. On aurait pu, dans une certaine mesure, apporter une correction à l'insuffisance de la carte en extrayant des notes manuscrites des croquis et des indications précises sur les gisements de certaines roches: mais ici encore, nous ne voulons pas entrer dans les détails pour en laisser la primeur à la publication qui, tôt ou tard, sera faite à une échelle plus grande par les soins du Service géolo- gique du Portugal. Nous ne mentionnerons que deux faits importants pour la compréhension des rapports du massif granitique avec le manteau sédimentaire, C’est d’abord, sur la bordure nord du massif, un chevauchement très net du granite sur un Jurassique renversé et plongeant à 45° au sud, et, en d'autres points, la présence dans le granite de nombreuses enclaves calcaires et gréseuses de grandes dimensions. L'une de ces enclaves gréseuses est attribuée à lAptien. De nombreux croquis, toujours dans cette série de planches médites, illustrent admirablement l’enchevétrement, parfois très compliqué, des granites et des roches d’épanchement avec les strates plus où moins disloquées du Jurassique supérieur. Lors même qu'il n’a été possible de préciser la nature du magma que pour une partie des roches intrusives d’après les documents dont nous disposions, le trait caractéristique de la carte est précisément de donner une image nette des rapports tectoniques entre ces roches et les terrains sédimentaires qu'elles ont traversés sous forme de sills, de filons transverses et parfois aussi de laccolithes. Au premier coup d'œil, on est frappé du contraste entre la région des stlls inter- stratifiés dans les couches jurassiques, à l’est du massif de Cintra, et la région située plus au nord, où des filons à disposition radiale recoupent les couches du CARTE DES RÉGIONS ÉRUPTIVES AU NORD DU TAGE 67 Mésocrétacé sans subir l'influence de la structure de ces terrains. Combien plus clairement encore apparaitraient ces rapports dans une monographie complète, accompagnée d'une carte à grande échelle et de toutes les coupes et vues qui lui étaient destinées. Qu'il nous soit permis, en terminant, d'exprimer le vœu que cette publication soit faite dans un avenir pas trop éloigné. Il est désirable qu'un géologue entre- prenne les revisions nécessaires sur le terrain, et la détermination pétrographique précise de la riche série éruptive du massif de Cintra et des contrées avoisinantes. Deux ou trois années de bon travail sur le terrain et au laboratoire, et ce géologue serait largement récompensé de sa peine. Beau début de carrière que d'achever une telle œuvre en trois ans, et grand honneur aussi pour un jeune, que d'associer son nom à celui de Paul Choffat. E. JOUKOWSKY. MÉM. SOC. PHYS. ET HIST, NAT, DE GENÈVE. VOL. 89 (1923). ot (eo) Mém. Soc. phys. et hist. nat. Genève, Vol. 39 (1924) PROFILS relevés sur le terrain par Paul Choffat PAUL CHOFFAT RÉGION ÉRUPTIVE AU NORD DU TAGE LITH. KUMMERLY # FREY. BERNE Le trait discontinu marque les traces des profils manuscrits, le trait double les traces des profils imprimés, mais non publiés, et portant les titres SERRA DE CINTRA et CENOZOIQUE Profils 1 à 5 : SERRA DE CINTRA, PI. 1 CI! à CHI: CÉNOZOIÏIQUE PI. Il CH : id. PI. {ll AùàH : id. Pi. V Les chiffres entourés d’un cercie sont les numéros des feuilles de la carte à 1:20 000 Je 0 1 ém. Soc. phys. et hist. nat. Genève, Vol. 39 (1924) PI.9 PAUL CHOFFAT Esquisse de la Carte géologique de la RÉGION ÉRUPTIVE AU NORD DU TAGE COLLABORATEURS ET OUVRAGES CONSULTÉS. Pour le Miocène: collecteur Antonio MENDES, sous la direction de J. C. Berkeley COTTER. Pour les autres terrains: collecteur Romño de MATTOS, sous Ia direction de Paul CHOFFAT, en utilisant les contours géologiques tracés antérieurement sur la carte à 1:100.000 par Carlos RIBEIRO, Nerp DELGADO et Paul CHOFFAT. R Ti OR a |) QE has À} ü NX F :| en DOTE EE st ie 2 ue LITH. KUMMERLY & FREY BERNE Échelle 1: 96000 Terrains non déterminés Quaternaire Pliocène ! Tortonien Miocène non subdivisé Helvétien Burdigalien Oligocène Turonien Bellasien et couches d'Almargem Crétacique inférieur Portlandien Kimeridgien Jurassique sup. non subdivisé Lusitanien | Nappe basaltique Brèche basaltique | Couches à fossiles terrestres intercalées dans la nappe (Zone Amoreira Famoes) Basaltes, Labradorites, Andésites, Trachyandésiles, Trachytes, Diabases, etc. Syénite Trachyandésite Gabbro Labradorite Basalte Granite Le Faille Profil relevé sur le terrain cn Direction et pendage des couches Les labradorites, basaltes, trachytes et toutes les roches figurées en noir forment des laccolites, des dykes, des sills et des filons. MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE ET D'HISTOIRE NATURELLE DE GENÈVE VOLUME 39, FASCICULE 8. RAPPORT PRESIDENT DE LA SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE D'HISTOIRE NATURELLE DE GENÈVE POUR L'ANNÉE 19923 PAR Raoul GAUTIER MESSIEURS ET CHERS COLLÈGUES, L'activité scientifique de notre Société à fait de grands progrès durant ces dernières années; cela continue, je suis heureux de le constater ici. Si, pour les seize séances de l'exercice 1922, mon distingué prédécesseur, M. Amé Pictet, a enregistré la présentation de 68 travaux originaux, nous avons entendu 64 commu- nications au cours de nos seize séances de 1923, avec quelques rapports en plus. Le rendement scientifique à méme augmenté assez régulièrement du commencement à la fin de l’année, puisque, le 20 décembre dernier, nous avions treize communi- cations à l’ordre du jour ; probablement un record. J'ai eu la curiosité de feuilleter les rapports présidentiels d'il y à une trentaine d'années, et notamment celui que je vous présentais, il y a 28 ans, lorsque vous m'aviez fait l'honneur de m'appeler pour la première fois à la présidence durant MÉM. SOC. PHYS. ET HIST. NAT. DE GENÈVE, VOL. 39 (1923). 58* 470 RAPPORT DU PRÉSIDENT l’année 1895, qui précédait celle de notre Exposition nationale suisse à Genève. On comptait alors en moyenne 66 communications pour 17 à 18 séances. C'était déjà une période très active de notre Société. Nous sommes donc revenus actuellement à l'état florissant ancien, avec quelques variantes cependant : il y avait alors un peu moins d'interruption du travail scientifique pendant les vacances: ce qui m'amène à faire la remarque que lactivité de nos membres est de plus en plus liée à la vie universitaire, au cours du semestre, été comme hiver. E£ c’est logique, puisque les laboratoires de notre Université sont la source principale des travaux qui nous sont présentés. De ces travaux vous trouverez la liste, par ordre de matières, à la fin de ce rapport. [la été établi sur le Compte-rendu de nos séances tel qu'il parait, trois fois l'an, soit comme Supplément aux Archives des Sciences physiques el naturelles de (Genève, soit en fascicules successifs publiés séparément et qui constitueront cette année le quarantième volume de nos Comptes-rendus. AFFAIRES ADMINISTRATIVES Dans la séance du 18 janvier vous aviez élu Vice-Président notre collègue M. Robert CHODAT qui vient de prendre la présidence. Sur la proposition du Comité de publication, vous avez adopté, le 15 mars, une modification aux articles 7 et 11 du Règlement, augmentant de l’ancien prési- dent le nombre des membres du Bureau, comme cela se fait dans plusieurs des autres Sociétés savantes genevoises. De ce fait M. Aimé PICTET à fait partie, pour cette année encore, du Bureau, et vous avez nommé, à sa place, le 19 avril, membre du Comité de publication, M. A. SCHIDLOF. Nous avons eu le bonheur de ne perdre aucun membre ordinaire cette année. Mais nous en avons reçu plusieurs qui nous avaient fait des communications scien- üfiques et auxquels je souhaite de nouveau la bienvenue. Ce sont, rangés par ordre chronologique: MM. Pierre CASTAN, Pierre BALAVOINE, et Gaston MERMOD. Nous avons en revanche eu le chagrin d'enregistrer la mort d’un de nos mem- bres honoraires, Giovanni CAPELLINI, paléontologiste notable dont la mémoire sera rappelée plus loin par une notice due à la plume compétente de M. Eug. PITTARD. Nous avons d'autre part augmenté le nombre de nos membres honoraires, fortement réduit ces dernières années, de huit nouveaux collègues que nous sommes heureux et honorés de compter maintenant parmi nous. Ce sont: fttente 1 À POUR L'ANNÉE 1923 A7] M. George Ellery HALE, directeur de l'Observatoire du Mount Wilson en Californie, astronome ; M. le professeur A. S. EDDINGTON, directeur de l'Observatoire de Cambridge (Angleterre), astronome : M. Leonardo TORRES Y QUEVEDO, membre de l’Académie des Sciences de Madrid, directeur du Laboratoire d’Automatique, ingénieur-physicien:; M. Hans SCHARDT, professeur de géologie à l'Université de Zurich et à l'Ecole polytechnique fédérale ; M. Maurice LUGEON, professeur de géologie à l'Université de Lausanne : M. Maurice CAULLERY, professeur de zoologie à la Sorbonne (Paris) ; M. Louis JOUBIN, professeur au Muséum d'Histoire naturelle de Paris : M. le D'H.-G. STEHLIN, paléontologiste à Bâle. Nous avons perdu par démission deux de nos Associéslibres. MM. Henry FATI0, à Genève et Ettore CARDOSO, à Naples. Mais nous avons enregistré un nouvel Associé libre dans la personne de M. Edmond ODIER, à Genève. Vous avez décidé, sur la proposition du Comité de publication, de donner, à partir de l’année 1923, un aperçu de notre activité scientifique dans nos journaux quotidiens. Nos séances sont annoncées et, de temps à autre, notre dévoué Secrétaire des séances y fait imprimer un résumé, par ordre de matières, des communications qui nous sont présentées. Sans vouloir empiéter sur le domaine de notre Secrétaire correspondant, dont vous allez entendre le rapport, je tiens cependant à indiquer brièvement ici que le fascicule 8 et dernier du Vol. 39 de nos mémoires est sous presse et paraîtra pro- chainement. Il contiendra le rapport présidentiel pour 1922, puis le mémoire de Paul CHOFFAT, notre regretté membre honoraire, Esquisse de la Carte des régions éruptives au nord du Tage”, mise au point par MM. Joseph et Philippe CHOFFAT sous la direction de notre collègue M. E. JouKkOWSKY, enfin le présent rapport présidentiel. Le Comité de publication, qui s'est réuni sept fois au cours de cette année, a aussi accepté pour le début du Vol. 40 un mémoire de MM. Louis DUPARC et Max REINHARD, “ Etudes sur la détermination des plagioclases ?. La publication de la carte Dufour de notre Canton au 1 : 12 500°, dont nous parlait, il y à deux ans, dans son rapport, notre président de 1921, M. L.-W.COLLET, est en bonne voie. La revision du cadastre de la ville à été achevée en septembre par M. Joukowsky, et a été suivie en décembre d’une revision sur le terrain par MM. Emile Chaix, Joukowsky etJ. Favre. Au cours de l’année nous avons eu l’occasion de participer ou de nous faire représenter aux solennités ou aux réunions suivantes: 172 RAPPORT DU PRÉSIDENT Le 12 mai, par une collation, aux réunions à Genève de la Société suisse de Physique et de la Société suisse de Géophysique, Météorologie et Astronomie, aux- quelles plusieurs d’entre nous ont pris une part active. Le 6 juin, par un télégramme, à l'anniversaire de 75 ans de notre illustre membre honoraire, M. Emmanuele PATERNO DI SESSA, professeur de chimie à Palerme d’abord, et actuellement à Rome. Du 31 août au 2 septembre, nombreux ont été les membres de notre Société qui ont pris part à la réunion de la Société helvétique des Sciences naturelles à Zermatt où nous étions représentés officiellement par notre collègue M. L.-W. Collet, notre délégué. Je constate, comme coïncidence curieuse, que lorsque je présidais notre Société en 1895, la S. HS. N. s'était aussi réunie à Zermatt. Le 11 octobre, votre président a été invité et à assisté à la séance annuelle de l’Institut national genevois. Je vous ai également représentés, le 24 novembre, à un diner offert par la faculté des Sciences de l’Université de Lausanne à notre membre honoraire, M. Henri BLANC, dont on fêtait la 40% année d'enseignement. Je lui ai porté nos félicitations et nos vœux. Notre Société était invitée par la Société française de physique à la célébration de son cinquantenaire, à Paris, le 13 décembre. Nous y avons été représentés par notre collègue M. C.-E. Guye qui à offert en notre nom à la Société française de physique une adresse de circonstance. Vous avez lu dans les journaux le succès de l'Exposition de physique et de FT. S. F. organisée au Grand Palais à cette occasion, Enfin, le 16 décembre, la Société soleuroise des Sciences naturelles célébrait son centenaire. Notre trésorier, M. Louis Reverdin, à été porter à cette occasion nos vœux à notre Société sœur de Soleure. NOTICE BIOGRAPHIQUE GIOVANNI CAPELLINI! (1833-1922) Giovanni Capellini, mort le 30 mai 1922, à 89 ans, était depuis 1912, membre honoraire de la Société de physique et d'histoire naturelle de Genève. Mais il était attaché à notre pays par des liens bien plus anciens ‘encore. En effet, il avait été ! Je dois cette notice à la complaisance de notre collègue M. Eug. Pittard. déchet Cr LSié an de Sid SE dd db ét td nd: POUR L'ANNÉE 1923 173 nommé, en 1865, membre honoraire de la Société helvétique des Sciences natu- relles. Professeur de géologie et de paléontologie à l’Université de Bologne, Giovanni Capellini à publié de nombreux mémoires sur les vertébrés fossiles, et s'il a attaché son nom à des travaux de géologie pure et d'anthropologie préhistorique, son œuvre principale reste bien celle qu'il a accomplie dans le domaine de la paléontologie. Il à créé plusieurs nouveaux genres de vertébrés fossiles entre autres: Protosphargis, une gigantesque tortue marine des marbres de Vérone; Felsinotherium Torest, mammnifère précurseur du Dugong, ete. IT a signalé, pour la première fois en Italie, de nombreuses formes fossiles animales et végétales. Deux ou trois groupes, surtout, furent l’objet de ses recherches, entre autres: les Cétacés et les Proboscidiens. Josué Carducci, le poète illustre, à dit de Giovanni Capellini que son mérite principal avait été, comme géologue, d’être un promoteur et un grand propagateur de Ja science. On peut ajouter, après Carducci, que ces qualités exceptionnelles, Capellini les a aussi appliquées à l'anthropologie préhistorique. Tout jeune encore Giovanni Capellini commence son tour d'Europe scientifique. En 1859, il est à Paris, où il partage son temps studieux entre les cours de l'Ecole des Mines et ceux du Muséum d'histoire naturelle. Il étudie sur place le bassin ter- tiaire des environs de Paris. Puis il passe dans les Iles britanniques. Il est bientôt lié avec tous les savants français et anglais. Parmi ces derniers, Falconer, Lyell, Owen. Partout où il séjournait Capellini se créait des amitiés précieuses. Il était l’une de ces admirables natures de qui émane instantanément la sympathie, qui éveille la confiance, qui fait naître l'attachement mutuel. On le vit bien, lorsqu'en 1912 on fêta le cinquantième anniversaire de son enseignement à l'Université de Bologne *. Du monde entier affluèrent des témoignages de sympathie. De la part des académies, des sociétés savantes, des corps politiques, des particuliers. De notre pays, les Universités de Bâle, de Berne, de Genève, lui envoyèrent des adresses, et les géologues suisses, alors réunis à Soleure, se joignirent spontanément, par une dépêche, à ceux qui fétaient ce rare jubilé. Capellini avait réuni, au cours de sa longue vie, d'énormes collections person- nelles, géologiques et paléontologiques. Le musée qu'il avait constitué à Bologne, et que cet infatigable pèlerin scientifique ne cessa jamais d'enrichir — il avait porté ses investigations des Pyrénées à l’Oural et jusque dans les Montagnes Rocheuses — porte aujourd'hui, par suite d’un vote universitaire unanime, confirmé par un décret royal, le nom de « Musée Capellini ». ! Onoranze à Giovanni Capellini, nel 50m0 anniversario del suo insegnamento nell’università di Bologna, Bologna 1912, 174 RAPPORT DU PRÉSIDENT Capellini aida puissammant à la constitution de la carte géologique de l'Italie. Il fut un des promoteurs du Congrès international de géologie dont il suivit avec le plus vif intérêt les destinées, et qu'un jour même il présida. Le goût irrésistible que Capellini portait à toutes les choses de Ia nature le fit s'intéresser de bonne heure à l'anthropologie préhistorique. Il avait assisté aux premières grandes découvertes de cette science. IT était à Paris au moment des débats retentissants relatifs aux trouvailles de Boucher de Perthes et à l'existence de l’homme contemporain des extensions glaciaires. Dès lors il ne cessa de prendre sa part des recherches relatives aux plus lointains passés de l'humanité. En 1862 déjà, il publiait son premier mémoire sur l’anthropologie préhistorique. Avec Edouard Lartet et Gabriel de Mortillet il établit, à la Spezzia, en 1865, les bases du Congrès international d’'Anthropologie et d'Archéologie préhisto- riques, dont la première réunion ent lieu en Suisse, à Neuchâtel, en 1866. En 1912, lors du Congrès de Genève, Giovanni Capellini, le dernier survivant des fondateurs de cet organisme international, prononça un charmant discours, rap- pelant les débuts de ces assises scientifiques qui firent, depuis, une si belle carriere, et qui, pour la seconde fois, choisissaient pour siéger la Suisse. Capellini avait toujours eu avec les savants de notre pays les rapports les plus amicaux. Déjà, en 1857, par l'intermédiaire de Charles Lyell il avait fait la con- naissance d'Oswald Heer, à qui il avait demandé de décrire les plantes fossiles du Val di Magra. Plus tard Heer étudiait, également pour Capellini, les Phyllites cré- tacées rapportées par le savant italien des Etats-Unis, de l'Omaha et du Nébraska. À Genève même, Capellini comptait de nombreux amis. Il m'a rappelé que sa pre- mière visite dans notre ville datait de 1859. Il ne cessait de redire l’accueit char- mant qu'il avait reçu de la part de nos compatriotes: François-Jules Pictet, Alphonse Favre, Alphonse de Candolle, Auguste de la Rive, Henri de Saussure. Il ajoutait qu'il ne pouvait jamais franchir les Alpes sans venir rendre visite à «ses chers maitres SuIsses ». Giovanni Capellini était Sénateur du Royaume d'Italie. La philosophie de Capellini était restée dominée par les travaux de Ch. Darwin. Pour lui, la doctrine de l’évolution telle que l’avait imaginée l'illustre auteur de l'Origine des Espèces, était comme un dogme intangible. L'Italie sa patrie, et la Science, ont perdu en Capellini un homme qui à fait, à l’une et à l’autre, beaucoup d'honneur. TO, Te A POU OS de had. nn al nr POUR L'ANNÉE 1923 A7) ACTIVITÉ SCIENTIFIQUE DE LA SOCIÉTÉ LISTE DES TRAVAUX PRÉSENTÉS AUX SÉANCES Mathématiques, Astronomie, etc. M. G. TiEercy. Note sur les équations de l’électromagnétisme. Le même. Sur une transformation du mouvement circulaire en mouvement rectiligne alternatif. Le même. Sur l'amplitude du mouvement rectiligne alternatif obtenu par l’em- ploi d’une came orbiforme régulière. M. Raoul GAUTIER. Rapport sur les résultats de lexpédition en Australie du Lick Observatory pour l'observation de l’éclipse totale de soleil du 21 septembre 1922. Les prévisions d’Einstein semblent entièrement confirmées. Le même. Rapportsur les travaux récents de la Commission géodésique suisse, spécialement sur le Nivellement astronomique du méridien du Gothard. Physique M. C.-E, GuyE. Remarque sur le rôle du champ moléculaire dans la décharge disruptive. Le même. Sur l'entrainement du gaz dans la rotation électromagnétique de la décharge électrique. M. Raoul PICTET. Sur les définitions des mots chaleur et température. Les caractéristiques de l’éther : volume, poids, inertie. (Deux communications.) Chimie M. E. CHERBULIEZ. Sur les propriétés basiques du groupe nitro. M. Amé Picrer et Mie GaULIS. Sur la distillation de la lignine sous pression réduite. M. Jean SARASIN. La pilocarpine et les imidazols. MM. Eug. BuJARD et F. CHERBULIEZ. A propos de la coloration par la picro- fuchsine. M. P. BALAVOINE. Maultirotation des miels dextrogyres. Le même, Eaux sulfatées calciques de Confignon. 476 RAPPORT DU PRÉSIDENT M. Jacques PICTET. Sur un nouveau disaccharide. MM. E. BRINER, P. FERRERO et E. DE LUSERNA. Recherches sur l’amina- tion catalytique. MM. E. BRINER, W. PFEIFFER et G. MALET. Recherches sur l'accroissement de la vitesse de peroxydation de l’oxyde d'azote aux très basses températures. MM. P. WENGER et M. Parry. Contribution à l'étude de la séparation des métaux alcalins. M. Amé PICTET. Synthèse du maltose. Botanique M. Alb. Frey. Les formes cristallines de Poxalate de calcium dans la plante et les causes qui déterminent ces formes. MM. KR. Caopar et E. ROUGE. Sur l’analogie des anthocyanines et des flavones. M. F. CHoparT. De l’action de l’albumine sur la coagulation du lait par la chymase végétale. MM. A. KOTZAREFF et F. CHopaT. De l’action exercée par l’émanation du radium sur les levures. M. J. BRiQUET. Le Genêt épineux et le Micocoulier de Provence dans le Jura méridional. Le même. Carpologie du Peucedanum palustre. Le même. Carpologie du Crithmum maritimum. M. L. REHrOUS. Sur la phylogénie des Stomates. Zoologie M. E. GUYENOT. A propos d’une récente communication de M. Arnold Pictet et Mie Ferrero. M. J. CARL. Sur un Chironomide nouveau pour la faune du Léman. Le même. Un nouvel habitat du Scorpion en Suisse. Le même, Rapport sur les observations de MM. G. Mermod et F. Brocher sur la fondation des colonies de Polistes gallicus. Le même, Rapport sur un cas de parabiose entre fourmis et abeilles. M. Arnold PICTET. À propos des observations de M. F. Picard sur le filage de la soie par les chenilles. POUR L'ANNÉE 1923 477% M. André NAVILLE. Sur la présence de kystes à Diplozoaires (Octomitus in- testinalis Prowazek) dans la sous-muqueuse intestinale de Tropidonotus natrix Gesn. M. O. SCHOTTÉ. Influence de la section tardive des nerfs sur les pattes de Tritons en régénération. Le même. Régénération et système nerveux chez les larves de Batraciens urodèles. Le même. La suppression partielle de l’innervation et la régénération des pattes chez les Tritons. M. G. MERMOD. La Radule, élément de détermination chez les Mollusques, M. Arnold PicreTr et Mie FERRERO. Recherches sur l’hérédité de Cobayes albinos porteurs d’un facteur de coloration. Mie K. PONSE. Masculinisation d'une femelle de Crapaud. Mre E. WELTI. Le sort des autogreffes chez le Crapaud. La même. Les homogreffes sont-elles capables de persister chez le Crapaud? Mie V. BisCHLER. Rôle du squelette dans la régénération des membres du Triton. Géologie MM. L. Duparc et L. CUISINIER. Sur la géologie et les roches des environs de Bolivar (Venezuela). M. E. Jouxowsky. L'âge des dépôts glaciaires du plateau genevois. M. Ad. JAYET. Sur la présence de la zone à Hoplites dentatus à la Perte du Rhône. MM. Ed. PAREJAS et H. LAGOTALA. Relations tectoniques entre lé Jura méri- dional et les plis du (Grenevois. M. Léon-W. CoLLET. Le Bajocien du Col de Tenneverdze (Nappe de Morcles). Le même. L’Argovien des Hautes Alpes Calcaires (Nappe de Moreles) entre Rhône et Arve, des Aiguilles Rouges et du Mont-Blanc. M. H. BurLer. Le pli-faille du rocher de Leschaux. M. Ed. PAREJAS. Observations sur quelques volcans de la Limagne (Auvergne). MM. L.-W. COLLET et Ed. PAREJAS. Nouveaux aflleurements de mylonites (gneiss) au Lauterbrunnen Wetterhorn et au Trümletental. Minéralogie et Pétrographie M. M. REINHARD. À propos de la détermination des plagioclases par la méthode de Fédorof. Le même. Nouvelles épures et courbes d'extinction des plagioclases. 478 RAPPORT DU PRÉSIDENT POUR L’ANNEE 1923 M. L. Duparc. Les filons de mispickel aurifere de la Montagne Noire. Le même. Sur le gisement de St-Avre en Maurienne. Le même. Sur les filons et les minerais radioactifs d’urane du Portugal. Géophysique et Météorologie MM. Léon-W. COLLET et Raoul BoissiER. Le transport des alluvions dans l’Arve en 1915. M. Léon-W. COLLET. L’ablation sur le versant nord des Alpes. Le même. Sur l’âge absolu de la période post-glaciaire. M. Raoul GAUTIER. Les retours de froid en mai et juin 1923. Le même. Anomalies climatologiques du mois d'octobre 1923. Anthropologie M. L. REVERDIN. La station préhistorique du Sählihôhle-Oben, près d’Olten. Physiologie Mie I. STERN et M. Fr. BATTELLI. Le sort de la carnisapidine et du sarco- chromogène dans l’organisme animal. Les mêmes. Production de substances amères par l’action des ferments digestifs sur les tissus animaux et sur les substances protéiques. Les mêmes. La nature du sarcochromogène et du sarchocrome des tissus animaux. Tératologie M. Eugène BuJaRD. Note additionnelle à la classification des cyclopes et de leurs formes dérivées : les aprosopes. . ï VAE : E : L k Era ile FES. fa Al FA La . LL AA c] | ai N fe EC n La fi n #0 M Ê L , DT a” th. LR È | L Lee = ww L KA APE E : «2 L : vin “ À M HA Le ». A Rat LE ni. NN % D nr PL LE toi LERRC A E A a Æ#. PUBLICATIONS DE LA SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE ET D'HISTOIRE NATURELLE DE GENÈVE La Société peut disposer de collections complètes de ses Mémoires. (Tomes 1-39 et volume du centenaire.) Pour traiter, s'adresser au secrétaire des publications. (Adresse de la Société : M. le secrétaire des publications de la Soc. de physique, P. A.: au Museum d’hist. naturelle, Genève, Suisse.) Comptes rendus des séances de la Sociéte (in-8°). Tomes I-XL (1884-1923). Prix . Fr. 64 Liste des publications des membres de la Société (1883) in-8° avec supplément (1896) Prix ET Te, SUR 4. TONRRORR RE Imprimerie Albert Kundig, Genève (Suisse). 2 à 3 SE te in 3 1853 100 CIENCES LIBRARY Re TU II] ge HU #