ad LS DA N TR X LR Danser Se RU 4 s = + LLLTERE . LS 2 % an, Fée. N x = ns L " an} \ Ds Ne « * ES ALL TN Dave Le à < LIN à » M : on ù "n, né pe * LI 0RAS « soc, Ai, Var; SLT UT Sais: | S LA, 1, "7 da Aa, n a TS « Dhs ARS Sa ee . DT A L'ie. Te Pés. n _… DS Mt spa 9e .. nu AS UN Le ns he. , “Am DL a te, PO Va àà = ae ins à “ v | = Aéra ) né D en Mur, TN (es # cet PS ul t MÉMOIRES | SOCIÈTÉ D'ÉMULATION EE DOURS SEPTIÈME SÉRIE ÉUITIÈAME VOLUME . 1903-1904 BESANCON IMPRIMERIE DODIVERS ET Ci Grande-Rue, 87 1905 MÉMOIRES SOCIÈTÉE D'ÉMULATION É D'OLCRS Si} Erile Joe ’ di (5 Sel ET E 1 Jel AUETE MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ D'ÉMULATION DU DOUBS SEPTIÈME SÉRIE RU UV LENCO D CONTE 1903 -1904 LE? 2 re RE NUE UE LR ef" Ç a rss à 1 NN | CARRE D) NA Ze EN TZ) A RES RSS D CS F BESANCON IMPRIMERIE DODIVERS ET Ci Grande-Rue, 87 …— 1905 _ 1. NS HUE Hole so S ENT MÉMOIRES DE LA SOCIÊTÉ D'ÉMULATION DU DOUSS 1903 - 1904 PROGES-VERBAUX DES SEANCES 535 im —— Séance du 17 janvier 1903. PRÉSIDENCE DE MM. NARGAUD ET FRANCEY. Sont présents : BUREAU : MM. le docteur Nargaud, président sortant; Francey, président élu pour 1903 ; M. Thuriet, deuxième vice-président ; Fauquignon, trésorier; Kirchner, archiviste ; A. Vaissier, vice- secrétaire. MEMBRES : MM. Ponnet, Bernard, (Gellard, À. Girardot, Guillemin, docteur Ledoux, Lieffroy, Em. Louvot, Nardin, chanoine Rossignot, Vernier. En l’absence de M. Jules Gauthier, secrétaire déceunal, re- tenu par raison de santé, M. le vice-secrétaire donne lecture des procès-verbaux des deux séances des 17 et 18 décembre dernier. M. le president remercie la Société de la bienveillance de chacun de ses confrères pour lui rendre agréable et facile l'exercice du mandat annuel qu'ils lui avaient confié. En renou- velant le vœu de ses prédécesseurs de faire appel à la jeunesse TT studieuse pour continuer à enrichir le patrimoine intellectuel de notre chère Franche-Comté et maintenir la Société d’Emu- lation au rang distingué qu’elle occupe dans la province, M. le Président félicite la Compagnie de l’heureux choix qui va placer à sa tête un des membres les plus appréciés du barreau de la ville, M. Edmond Francey, qu'il invite à ce moment à venir prendre sa place pour la tenue de la séance. M. Francey exprime à son tour des sentiments d’un attache- ment égal à une Société dont il fait partie depuis 20 ans et aux intérêts de laquelle il ne négligera rien pour répondre aux marques d'estime qui viennent de lui être témoignées. En pre- nant pour la première fois la parole dans ses réunions, il ex- prime le regret d’avoir à signaler un deuil récent pour la Com- pagnie par suite de la mort soudaine de M. Ch. Rain, élu membre correspondant à la dernière séance. Fils d’un magis- trat dont l’honorabilité et les talents ont laissé dans la ville d'excellents souvenirs, M. Ch. Rain, en qui le goût des études utiles s’associait à celui des lettres et des arts, nous permettait d'espérer de sa part un avantageux concours. Passant ensuite à l’ordre du jour, M. le Président donne lec- ture de la première partie d’un important travail de M. Jules Gauthier sur les Héraults d'armes et les Armoriaux franc-com- tois. Le blason paraît chez nous vers 1187 apporté par un légat impérial, c’est-à-dire par un baïlli de Frédéric Barberousse ; au xI11° siècle, tous les gentilshommes l’ont adopté, au xIve siècle les roturiers l’adoptèrent à leur tour et, sans être marque de noblesse, toutes les familles bourgeoises, issues du peuple, le portent au XvirIe siècle. M. Gauthier continuera cette étude pour laquelle il est des mieux documenté. MM. Gauthier et Vaissier déposent une proposition ayant pour but de décrire les Cloches antérieures à 1802 qui sub- sistent dans les églises, chapelles et communautés du Doubs. Au point de vue de l’histoire, de l’épigraphie et de l’armorial franc-comtois ces bronzes, dont le nombre a été sensiblement réduit par la Révolution, qui les transforma la plupart en ca- nons, sont des monuments fort intéressants. ‘On peut er dire — VII — autant des Croix de pierre, de fer, même de bois, qui jalonnent les limites de chaque commune, de chaque paroisse et, çà et là, l'emplacement de crimes ou d'accidents Leur statistique, avec l’indication du nom des lieuxdits où chacune de ces croix est plantée serait des plus utiles aux recherches historiques et archéologiques. La Société décide qu'une démarche sera faite auprès de lPautorité diocésaine pour obtenir son adhésion et sa coopération bienveillante au questionnaire relatif aux cloches et aux croix, dont la Société fera les frais. Getlte proposition est adoptée. Le Musée d'archéologie ayant reçu le don d’une sculpture en marbre blanc, profil découpé en bas-relief d’une tête laurée, M. Vaissier constate que ce morceau, d’une soigneuse exécu- tion, est bien le complément d’un de ces médaillons en pierre Jaspée et polie que l’on voit encore au nombre de cinq dans le corridor de létage du Palais Granvelle. Ces fonds de médail- lons, dédiés aux empereurs Othon, Vitellius, Vespasien, Tibère et Domitien, portent tous, à leur centre, une saillie carrée en forme de boulon qui correspond exactement à la noyure prati- quée au revers du bas-relief donné au Musée. M. Vaissier a, de plus, reconnu dans le champ du médaillon, auprès des n° 8, 9, 10, 11 et 12 gravés, un petit briquet de Bourgogne également gravé, qui serait comme la signature de l'artiste, à savoir du sculpteur Landry, de Salins, lequel avait fait pour Madame de Granvelle, femme du chancelier, éonstructeur du Palais, la fourniture de trois douzaines de pièces analogues (V. BÉCHET, Recherches historiques sur la Ville de Salins, 1830). M. Nardin remet pour le musée d'archéologie une hipposan- dale et une applique cireulaire € en bronze provenant de La voie romaine de Colombier-Fontaine. | On procède ensuite. à la proposition et à l'admission | en qualité. de : Membre résidant : de M. l'abbé F.-X. PERROT, curé de Mandeure, présenté par MM. À. Vaissier et le chanoine Rossignot. Le Président, - Le Vice-Secrétaire, Ed. FRANCEY. ; VAISSIER. — VII — Séance du 15 février 1903. PRÉSIDENCE DE M. EDMOND FRANCE. Sont présents : BUREAU : MM. Ed. Francey, président ; Gauthier, secrétaire ; Fauquignon, trésorier; Vaissier, vice-secrétaire; Kirchner, archiviste Memgres : MM. Bernard, Blondeau, Cellard, Courtot, Lieffroy, Nardin, chanoine Rossignot, D' G. Vaissier, Vernier. Après avoir dépouillé la correspondance, M. Gauthier fait re- marquer quil serait utile de consigner au procès-verbal de la séance les conditions arrêtées pour la Pension des frères Grenier. | Cette pension triennale fondée par le testament de M. Edouard Grenier, décédé le 5 décembre 1901, devait, dans sa pensée, re- présenter une rente de 2,400 francs qui serait attribuée à un jeune franc-comtois pauvre, pour lui permettre de poursuivre ses hautes études dans le domaine des lettres, des sciences ou des arts. La somwme léguée était un titre de rente roumaine de 2,400 francs de revenu. La Société d'Emulation a dû se confor- mer aux dispositions légales et transformer ce titre en rente française; le nouveau titre à 3 0/0 produit 1,500 fr. de revenu. Après un examen la Société, d'accord complet avec l’exécuteur testamentaire du fondateur, a décidé que les intérêts de ce titre seraient capitalisés jusqu'au moment où une rente de 1,800 francs nets permettrait de servir la pension et d’accom- plir, dans la mesure du possible, les intentions bienfaisantes des deux frères Grenier. M. Jules Gauthier donne lecture d’une étude intitulée : Les Cloches franc-comtoises. La première trace des cloches se trouve dans le rituel de saint Prothade, composé au vrie siècle, pour les deux cathédrales de Besançon; au xirIe siècle, 750 pa- Ne roisses, 30 abbayes, 100 prieurés ont des cloches ; les guerres et les invasions les dépendent à maintes reprises ; le grand maître de l'artillerie de Louis XIV, au lendemain de la con- quête de 1674, oblige toutes les églises de Besançon à payer la rançon de leurs beffroys ; au xvirI® siècle, le nombre grandis- sant des paroisses et des succursales et l'amour propre de clocher en multiplie le nombre. Ees lois de 1791 confisquent les cloches des chapitres et monastères supprimés pour les transformer en gros sous. Celles de 1793 ne laissent à chaque église paroissiale qu’une seule cloche et transforment le reste en canons pour la défense de la patrie. Centralisées à Besan- con, 1,600 cloches sont alors dirigées sur la fonderie de Pont- de-Vaux, dans l’Ain, et des 500,000 kilogrammes de bronze fournis par cette conscription de cloches franc-comtoises on fabriqua environ 800 canons de campagne. On comprend la ra- reté des cloches antérieures à 1802 ; en très petit nombre elles remontent aux xve et xvie siècles ; il en reste dans les trois dé- partements comtois 100 à 150, des xvrr° et XvirI° siècles ; un re- cueil de leurs inscriptions, de leurs emblèmes, de leurs armoi- ries aurait un grand intérêt pour l’histoire régionale. Au nom de M. Vendrely, membre correspondant, M. Kirch- ner dépose sur le bureau un travail sur la Flore comtoise : - Flora Sequaniæ exsiccata, 22e fascicule d’une série déjà inscrite dans les Mémoires, qui v prendra place à son tour. M. le Secrétaire termine verbalement une communication sur les Armoriaux et les Héraults d'armes franc-comtois. Un groupe de membres émettent le vœu que dans la restau- ration et consolidation de l'Eglise abbatiale de Montbenoit, en- treprise à frais communs par le Département et cinq communes co-paroissiales, des ordres précis soient donnés par l’adminis- tration départementale pour que rien ne vienne altérer le style et le caractère d’un édifice des plus précieux et pour que le mobilier : stalles, statues, vitraux, retable, chaire ne subis- sent aucun outrage ou dégradation. Sur le vote unanime de lassemblée, le bureau est chargé de communiquer ce vœu à l'autorité compétente. — X — Sont proposés, pour faire partie de la Société comme mem- bres correspondants : M. l'abbé Brune, curé doyen de Mont-sous-Vaudrey. eor- respondant du Comité des travaux historiques, présenté par MM. l’archiprêtre Burlet et le chanoine Suchet. M. Barbey (Frédéric), archiviste paléographe à Paris et à Val- leires, canton de Vaud, présenté par MM. Jules Gauthier et Guignard. M. d’Hotelans (Raoul), maire de Novillars, présenté par MM. Octave d'Hotelans et J. Gauthier. Le Président, Le Secrétaire, Ed. FRANCEY. Jules GAUTHIER. Séance du 7 mars 1903. PRÉSIDENCE DE M. EDMOND FRANCEY. Sont présents BOREAU : MM. Francey, président ; Thuriet, vice-président ; Gauthier, secrétaire ; Vaissier, vice-secrétaire; Fauquignon, trésorier ; Kirchner et Maldiney, archivistes. MEMBRES : MM. le docteur Bruchon père, docteur Ledoux, Lieffroy, docteur Girardot, Macherey. de La Société d'histoire vaudoise, qui vient de se fonder à Lau- sanne, demande à entrer en relations d'échanges. Adopté. M. le Président donne lecture d’une notice biographique sur M. Louis Bouvard, avocat à la Cour d'appel de Besançon, mem- bre résidant de la Société depuis 1868 se Il fait ressortir avec une grande délicatesse de touche les hautes qualités du jurisconsulte, de ladministrateur et du lettré qui, malgré de très rares loisirs, trouvait encore le moyen de s'intéresser à l'art sous toutes ses formes et dans toutes ses applications. —— XI — M. le Secrétaire communique une étude sur les Livres de raison de paysans franc-comtois. Longtemps l'instruction fut médiocre dans les campagnes et le paysan, à la différence du gentilhomme, qui écrivait sur les marges des psautiers les an- nales de sa famille, des commerçants ou des bourgeois qui mettaient leurs remarques à la suite de leurs livres de comptes, se bornait à compter à la veillée ses minces souvenirs person- nels. Il vint un jour pourtant où il prit la plume, et, tout en en- registrant des documents de second ordre, sut mettre dans sa courte autobiographie de curieux détails de mœurs, tout un pe- tit tableau d'intérieur rural. Antoine Morel, de Flangebouche, au xviie siècle, Adrien Sarrazin, de Landresse et François Mil- lot, de Recologne, au XvitIe siècle, sont de ces modestes chro- niqueurs villageois, d’où l’histoire pourra dégager quelques lignes intéressantes à divers points de vue. M. Vaissier, comme corollaire de sa récente étude sur Porte- Noire, lit une note sur l’époque probable de la destruction par- tielle desmonuments de Vesontio, qui dut précéder d’un certain nombre d'années la venue de l’empereur Julien dans les Gaules et en particulier dans la Séquanie vers l’an 560. De l'étude et de la discussion du texte grec trop laconique, mais inexacte- ment traduit par les historiens modernes, il semble résulter que sous le choc d’une invasion venue d’outre-Rhin et qui dé- truisit Mandeure, Besançon, un instant abandonné, puis réoc- cupé par les troupes romaines, sortit fort amoindri. M. Gauthier donne une description de la cheminée monumen- tale, en marbres polychrômes avec cariatides en marbre noir, huit bas-reliefs en marbre blanc, un motif central accosté de deux pyramides, deux colonnettes et deux termes, que le mé- decin Casenat fit sculpter en 1565 pour décorer le rez-de-chaus- sée de sa maison de la rue du Clos, no 25. Vers 1860, les héri- tiers de M. Dusillet en firent présent au Musée de Dole. Avec ses bas-reliefs figurant les quatre évangélistes, dont saint Je patron des médecins, quise livre à un examen urosco- pique, trois scènes de la Bible, dont Moïse législateur et une scène allégorique de la vie humaine, ce petit monument dé- = on — paysé a ceci de remarquable qu'il fut sculpté pendant le der- nier et long séjour que fit à Besançon et au Comté de Bour- gogne le cardinal de Granvelle, et qu'il appartient au style inspiré d’une façon générale par les travaux d'art dus à l’initia- tive du prélat. En outre de deux inscriptions latines, le dernier bas-relief cité porte la signature PH.F...D, qui, tout énigma- tique qu’elle demeure par son laconisme, peut faire soupçonner deux choses : la première le nom du sculpteur, qui serait peut- être Journot dit FHGENIX, un des fondeurs de bronze les plus célèbres de la province dans le troisième quart du xvre siècle ; la seconde le nom de la ville : Dole, où se trouvait centralisée, par le fait même des carrières de Sampans, de Boisset et par le voisinage de Dijon, l’industrie des marbres ou Part de la sculpture. Après un vote en leur faveur, M. le Président proclame Membres correspondants : M. l'abbé BRUNE, curé de Mont-sous-Vaudrey. M. Frédéric BARBEY, archiviste paléographe, à Paris et au château de Valleires (Suisse). M. Raoul d'HOTELANS, ancien officier, maire de Novillars. Le Président, Le Secrétaire, Ed. FRANCEY. Jules GAUTHIER. Séance du 25 avril 19053. PRÉSIDENCE DE M. ALFRED VAISSIER. Sont présents : BUREAU : : MM. À. Vaissier, remplaçant le présidentemipe: ché; Gauthier, secrétaire ; Fauquignon trésorier. MEMBRES : MM. Bonnet, Bernard, Girardot, E. Louvot, Nar- din, Parizot, l'abbé Rossignot, Rouget, Vernier. ire M. l'abbé Rossignot, conservateur de la Bibliothèque de lAr- chevêché, rend compte des fouilles opérées en sa présence à Aroillières (Haute-Saône), qui ont mis en évidence les fonda- tions d'une métairie ou centre d'exploitation rurale, représenté par trois groupes d'habitations à proximité de la Voie antique conduisant de Pierrecourt à Bourbonne, dont les vestiges sont encore très nets sur bien des points. On a trouvé dans ces fon- dations un moyen bronze de l’empereur Claude Ier. M. Rossi- gnot offre au Musée, par l'intermédiaire de la Société, cette monnaie et deux hachettes en porphyre vert de Chazoy, trou- vées l’une, la plus petite, à Argillières, l’autre à Fontenay-la- Aie M. Vaissier entretient sommairement la Société d’une explo- ration d’un tronçon de la grande Voie de Vesontio à Epoman- duodurum et au Rhin dans la traversée de Voillans (Doubs), l’ancien Velatodurum. M. l'abbé Paul Druot, membre corres- pondant de la Société, qui a entrepris et dirigé ces fouilles, en rendra prochainement un compte détaillé. M. Gauthier communique un document latin imédit intitulé : De antiquitate et nobilitate urbis Vesuntine, composé en 1552, au mois de mars, par Hugues Babet de Saint-Hippolyte, l’ami et le professeur des deux lettrés comtois qui lui firent hon-. neur : Gilbert Cousin et Jean Natal, originaires, le premier de Nozeroy, le second de Toulouse (Jura). Ce morceau de littéra- ture latine fut composé avec ce double objectif de remercier la cité de Besançon dont les gouverneurs avaient procuré un asile à la vieillesse pauvre de Babet, dont la notoriété comme éduca- teur et comme philosophe avait dépassé les limites de la pro- -vince, et de préparer, pour célébrer une vieille et noble cité, un résumé historique qui devait prendre place dans la Cosmo- oraphie de Sébastien Munster, qui parut à Dole en 1552. Mais Munster mourut avant la publication de sa Cosmographie, le texte de Babet n’y fut pas inséré et seule une planche gravée sur bois, dont le dessin avait été envoyé de Besançon par Ba- bet y parut, gravé par deux maîtres aux monogrammes C.S$. et R M.D. dont on pourra peut-être éclaireir l’anonymat. En tous — XIV — cas cette représentation de la cité de Besançon, publiée en 1542, est la première image à vol d'oiseau de cette ancienne capitale. C’est à Babet qu'on le doit, comme on devra, en 1552 et 1561, à Gilbert Cousin les vues analogues de Nozeroy, de Pontarlier, de Bletterans, de Poligny, de la Rivière, qui parai- tront dans ses œuvres, insérées par Hogenberg en 1575. dans une nouvelle Cosmographie avec les armes et la devise de ce second élève d’Hugues Babet. La Société décide que la description de Besançon composée par le vieux professeur de Saint-Hippolyte et illustrée d’une ou deux reproductions des vues cavalières de la cité au xvr siècle, preudra place dans le volume des Mémoires. | M. le Secrétaire rend compte d’un intéressant volume publié récemment par M. Paul Cottin, conservateur-adjoint à la Bi- bliothèque de l’Arsenal, à Paris, sous ce titre : Sophie de Mon- nier el Mirabeau. On connaît l'aventure piquante, sinon morale, de Sophie, épouse d’un vieux mari qu’elle sut rendre ridicule, et de Mirabeau, prisonnier au fort de Joux de 1774 à 1776. Tout un roman d'amour s’ébauche et s’échafaude à partir de 1775 entre le prisonnier et la femme du président de la Chambre des comptes et se termine au mois d'août 1776 par la réunion aux Verrières-Suisses, à l'hôtel du Lion d’or, de Mirabeau et de l’é- pouse infidèle. Toute une correspondance chiffrée de 1776 à 1781 jusqu'à présent inédite, entre Sophie et Mirabeau et leur entourage, renouvelle l'intérêt d’un épisode souvent esquissé et étudié depuis cent ans sans mériter aux deux personnages mis en scène beaucoup de sympathie ni beaucoup d'estime. M. Leloir, avait déjà établi à la charge de Mirabeau de nombreux prélèvements (12,000 livres) sur la caisse de l’infor- inné président Monnier ; M. Cottin plaide les circonstances atténuantes pour Sophie, plus passionnée mais plus franche et plus loyale que son sédueteur et qui, dans d’autres conditions, serait devenue, avec un mari Jeune, intelligent et bon, une femme accomplie et une excellente épouse. Est proposé pour faire partie de la Société comme membre correspondant : SN M. Roux (Roger), juge suppléant au tribunal de Vesoul, pré- senté par.MM Francey et Maurice Thuriet. Le President. Le Secrétuire, VAISSIER. Jules GAUTHIER. Séance du 23 mai 1903 PRÉSIDENCE DE M. EDMOND FRANCEY. Sont présents : BUREAU : MM. Francey, président ; Nargaud, vice-président ; Gauthier, secrétaire; Vaissier, vice-secrétaire ; Fauquignon. trésorier ; Kirchner, archiviste. MEMBRES : MM. P. Drouhard, Berdellé, Bonnet, Boussey, V. Guillemin, docteur Ledoux, le chanoine Rossignot, l'abbé Rossignot, Rouget, H. Savoye. La Société belfortaine d'Emulation demande des renseigne- ments Sur la constitution de la Société et ses relations officielles et de service avec la Municipalité. On décide des diverses ré- ponses à faire parvenir à Belfort. M. Alfred Marquiset envoie un volume de vers intitulé Gray- loiseries. M. Victor Guillemin est prié d’en rendre compte. M. le Président annonce la mort de M. Jean Petit, sculpteur, membre honoraire de la Compagnie, récemment décédé à Pa- ris. M. Thuriet est prié de rédiger une notice sur cet artiste distingué. Il est donné lecture d’un compte rendu fort élogieux sur un volume de M. Roger Roux, juge suppléant au tribunal de Ve- soul, ayant pour titre : Le travail dans les prisons. Cette étude très remarquable contient un exposé très complet de la ques- tion et des conclusions très nettes sur le sens dans lequel doivent être désormais conçus et préparés les règlements péni- — XVI — tentiaires. Des remerciements seront adressés à l’auteur pour son aimable envoi. M. le Maire de Besançon, président du Conseil de directiou de la Caisse d'Epargne, fait connaître le refus de M. le Ministre du Commerce d'autoriser la Société d’'Emulation à posséder un livret pouvant contenir le chiffre maximum de 15,000 francs, cette faveur n'étant accordée qu'aux Sociétés de bienfaisance. La Société décide que M. le trésorier fera chaque année rem- ploi des 1,500 fr. de revenu de la pension Grenier en rente 3 0/0, jusqu’à reconstitution du capital suffisant pour produire {,800 fr. de rente. M. le secrétaire communique un curieux livre d’heures du xve Siècle, particulièrement intéressant parce qu'il a appartenu à Jean Jouard, président du Parlement de Bourgogne sous Charles-le-Téméraire, mort assassiné par les Dijonnais révoltés en 1477. Ce personnage, dont la carrière est précisée par quel- ques notes marginales et autographes insérées au calendrier du livre d'heures appartenant à la bibliothèque publique de Vesoul (manuscrit n° 13), est représenté dans une miniature du fol. 222, en robe rouge avec hermine, agenouillé aux pieds de saint Mammès, martyr, patron du diocèse de Langres, auquel Jouard appartenait par ses origines. Au bas, les armoiries suivantes : d'azur à la face d’or et trois pommes de même, ne laissent aucun doute sur l'authenticité du portrait, le seul que nous possédions du président Jouard, un des magistrats les plus intéressants de la cour de Bourgogne sous les deux derniers dues. M. Gauthier présente ensuite une-épave de la bibliothèque de Granvelle, recueillie à la bibliothèque de Vesoul. Cest un volume imprimé à Venise en 1553, contenant les œuvres de Pé- trarque, et couvert d'une riche reliure mosaïque à quatre cou- leurs, richement gaufrée et dorée, portant en exergue espagnole le nom de son premier propriétaire : ESTE LIBRO ES DE MARTIN DE GANTE. Les deux premiers feuillets ont été à demi déchirés pour faire disparaître la marque armoriée que le car- dinal de Granvelle faisait apposer sur tous ses livres. Les volu- + NTI — mes ayant appartenu au célèbre diplomate et bibliophile sont rares. Je n’en connais d’autre qu’un petit volume acheté à Be- sançon par le duc d'’Âumale en 1878, et qui repose dans le ca- binet des livres de Chantilly; ce sont les Opere di Hierony. Benivrani comprese nel presente volume, imprimées à Venise en 1532 et revêtues d’une élégante reliure de peau verte avec filets et rinceaux Un troisième volume in-folio, qu'on pouvait voir il y a quelques mois dans la bibliothèque des Capucins de Besan- çon, très élégamment relié, était une Elucidatio in omnes Psal- mos.… Parisiis apud Joanem Boigny... sub santo col. .. si 1540. La signature À. Perrenot episcopi atrebatensis ne laissait aucun doute sur sa provenance, l'ex libris ad usum capucinorum conventus Bisuntini (XVIIe s.) aucun doute sur l’époque de ce précieux volume sorti du palais Granvelle. Il sera intéressant de reproduire en autographies ces trois reliures perdues pour nos collections. Nicolas Perrenot, le chancelier, marquait ses livres d’un aigle à deux têtes, en sa qualité de secrétaire d'Etat de l'Empereur. La bibliothèque des Capucins de Besançon possé- dait à cette marque un Catalogus annorum atque principium imprimé vers 1940, in-4o orné de figures sur bois. À Vesoul, on peut feuilleter, en outre, une Historia de gentibus septen- trionalibus, Plantin, 1558, in-12, vraisemblablement à Nurem- berg, un Firoksuaov in-80, imprimé à Paris en 1546 chez Weckel. Ils portent tous deux la marque à l'aigle du chancelier, et le se- cond est revêtu de l'ex libris manuscrit de Jean Boudieu de Sa- lins, contemporain du cardinal Au British Museum, sous le n° 21,935 des manuscrits additionnels, repose à jamais le livre d'heures du chancelier dont j'ai récemment photographié,déerit etpubliélessuperbes miniaturesexécutées en Flandre vers 1534. A côté de lui, divers manuscrits volés naguère par un érudit peu délicat que le nom a protégé contre la punition mais non con- tre la divulgation de ses méfaits. Telles sont les seules épaves que j'ai retrouvées hors de Besançon dans les principales biblio- thèques d'Europe ou de Franche-Comté. M. le secrétaire donne lecture d’une curieuse lettre publiée à Besançon vers 1730, qui décrit le cérémonial fort piquant de « réception et d'intronisation du procureur des Etudiants bizon- B — XVII — tins'». Cette pièce pourra être imprimée dans lun des pro- chains volumes des Mémoires. La séance se termine par la présentation d’un texte épigra- phique de 1557, qui contient l'acte de naissance de la rue Sainte- Anne, de Besançon, qui tire son nom d’une chapelle dont on vient de retrouver et de placer au square archéologique Île titulus que voici : A. LHONNEUR. DE. DIEV. DE. LA GLORIEVSE. VIERGE. MARIE. SA. MÈRE ET. DE. MA. DAME. SAINCTE. ANNE HOVNORABLE. HOMME. IEHAN. BLANCHETESTE. ET. REGONDE. BELVILLAIN. SA. FEMME. CITOYENS DE. BESANCON. FV. EDIFIÉE. ET. FONDÉE LA. PNTE. CHAPPELLE AN. 1557. PRIEZ. POVR. EVLX. (Dimension 1" de larg. sur 056 de haut.) Ce Jean Blancheteste était un notable chirurgien de l’époque. Après un vote en sa faveur, M. le Président proclame : Membre correspondant : M. Roger Roux, juge suppléant à Vesoul. Le Président, Le Secrétaire, ED. FRANCEY. JULES GAUTHIER. Séance du 20 juin 1903. PRÉSIDENCE DE M. EDMOND FRANCEY Sont présents : BUREAU : MM. Ed. Francey, président ; Thuriet, vice-prési- dent; Gauthier, secrétaire; Vaissier, vice-secrétaire; Fau- quignon, trésorier ; Kirchner, archiviste. — XIX — Memgres : MM. Bernard, Blondeau, Cellard, Guillemin, Lambert, Savoye, Vernier. Des remerciements et des excuses seront adressés à la Société Neuchâteloise des Sciences naturelles, dont le président avait très gracieusement convié la Société d'Emulation à se faire re- présenter à sa réunion générale annuelle, tenue aujourd'hui même aux Brenets. M. l'avocat général Thuriet, donne lecture d’une notice bio- graphique du sculpteur Jean Petit, né à Besançon au Palais Gran- velle, le3 février 1819, mort à Parisle6 mai 1903 Cefils d’ouvrier dut à un travail persévérant de devenir un praticien des plus dis- tingués, et s’il n’atteignit pas plus haut, comme d'illustres compatriotes tels que Perraud et Clésinger, des bustestrès res- semblants, des bas-reliefs pleins de mouvement, enfin la fière statue du cardinal de Granvelle, qui fut son œuvre capitale, et le dernier effort de son ciseau, assurent à Jean Petit un souvenir des plus honorables. La Société décide que le portrait de l'artiste et la statue de Granvelle illustreront la biographie de Jean Petit, que M. Thu- riet s'engage à développer un peu pour le volume des Mémoires de 1903. M. Gauthier donne lecture d’une étude critique intitulée : Du degré de confiance que méritent les généalogies historiques. Ce morceau, lu au nom de la Société d’Emulation au Congrès de l'Association franc-comtoise tenu à Montbéliard en août 1901, - prendra place dans le volume des Mémoires de 1902 actuelle- ment sous presse. M. Victor Guillemin donne communication d’un compte rendu du volume de poésies portant le titre de : Grayloiseries, offert à la Société par un de ses membres, le comte Alfred Marqui- set. L'humour et le style de ce franc-comtois distingué sont mis pleinement en lumière par le rapporteur, et des remerciements sont votés à l’un comme à l’autre. M. Vaissier met sous les veux de l’assemblée les originaux et les moulages de deux statères d’or de l’époque gauloise, trou- D vés en Franche-Comté, conservés au petit séminaire de Vaux- sur-Poligny et communiqués par un professeur de cet éftablis- sement, M. l'abbé Marant. Le droit des deux monnaies, en electrum ou or faible, porte plus ou moins défigurée la tête d’Apollon, empruntée aux monnaies grecques. Le revers est emprunté aux mêmes types, il porte, conduisant un char, un guerrier dont l’unique cheval à tête humairie est lancé au galop enjambant un autre guerrier armé d’une lance et d’un bouclier étendu sous les roues. Ces deux monnaies, au même type, constituent deux variantes intéressantes ; l’une d'elles, moins bien gravée, étant la contre-épreuve retournée, en négatif, de la première. D’après l’Album des monnaies gauloises publié par M. de La Tour, ces pièces rares appartiennent à la peu- plade des Aulerci Cencmanni, c'est-à-dire la région dont Le Mans fut la capitale. Le Président, Le Secrétaire, Ed. FRANCEY. JULES GAUTHIER. Séance du 18 juillet 1903. PRÉSIDENCE DE M. EDMOND FRANCEY. Sont présents BUREAU : MM. Frañcey, président, Gauthier, secrétaires Vaissier, vice-secrétaire ; Fauquignon, trésorier. MEMBRES : MM. Bonnet, Nardin, l'abbé A. Rossignot, H. Sa- voye. Après le dépouillement de la correspondance, M. le Prési- dent se fait l'interprète de la Société pour adresser à M. Bour- din, médecin-major au bataillon d’artillerie de forteresse, ses plus chaleureuses félicitations pour la croix de la Légion d’hon- neur qui lui a été remise à la revue du {4 juillet. Il fait ressor- tir, avec beaucoup d’à propos, que non seulement M. le docteur Bourdin est un praticien fort distingué dont on vient de ré-. SD. 0 ere compenser les mérites, mais de plus un érudit et un chercheur qui fait honneur à la Franche-Comté et à la Société d'Emula- tion du Doubs. Sur la proposition de M. le Président, la Société adresse à M. le docteur J. Bruchon, qui sort d’une longue maladie, l’ex- pression très vive de la sympathie et de la haute estime d’une Compagnie dont il fut le président et dont il reste un des membres les plus dévoués. Communication est donnée d’une lettre de M. le Président de la Société d'Emulation du Jura, annonçant la réunion du Con- grès de l’Association franc-comtoise à Lons-le-Saunier le 5 août prochain, et y convoquant tous les membres de la Société d’'E- nmulation du Doubs. Il est décidé qu'on donnera à cette convo- cation une large publicité, et dès à présent plusieurs adhésions ou promesses de lectures sont recueillies et envoyées à Lons- le-Saunier. Remerciements et excuses sont adressés à la Société d’his- toire et d'archéologie de Neuchâtel, dont la réunion annuelle, à laquelle la Société d'Emulation était conviée, se tient aujour- d'hui même à Landeron. M. Almand, chef de bataillon du génie, actuellement en con- gé à Baume, son pays natal, envoie un intéressant travail sur L'Egypte, à la Société dont il est dès longtemps le corres- pondant fidèle ; ce morceau, d’un grand intérèt d'actualité, est retenu pour la séance publique de décembre. Il en sera donné lecture par un suppléant si M. le commandant Almand ne peut se déplacer lui-même à cette date. -M. le Secrétaire communique une série de renseignements sur un érudit de réelle valeur, Charles Duvernoy, né à Montbé- liard le 1or novembre 1774, mort à Besançon le 19 novembre 1850. Ancien juge de paix, bibliothécaire de la ville de Montbé- liard de 1818 à 1838, il fut employé, de {826 à son départ de Montbéliard, au triage et au classement des archives princières qui dormaient depuis l'annexion de 1793 dans le château de la maison de Wurtemberg. Mais au contact de ces trésors histo- XLR riques ses goûts de collectionneur s’éveillèrent et sa conscience ne sut pas résister à des tentations que l'absence de toute sur- veillance administrative laissa transformer en actes de dilapi- dation. À côté des collections partagées, par ordre du Ministre des finances, entre les départements du Doubs et de la Haute- Saône d’une part, les Archives nationales de l’autre, Duvernoy, d’une main légère, fit un quatrième lot, et l’on trouve à Stutt- gard, à Neuchâtel, à Montbéliard, à la Bibliothèque de Besan- con et dans maintes collections privées des épaves de ses lar- cins. Comime autrefois abbé Guillaume, comme dans le dernier siècle les Libri, et les Chavin de Malans, Duvernoy a été néfaste dans son passage aux Archives de Monthéliard, dans ses visites aux Archives du Doubs ; malgré ses qualités d’érudit, après de pareils actes, qui laissent peser des doutes sur la loyauté de ses écrits historiques, son nom perd l’auréole indispensable pour donner à sa mémoire l'estime qu'elle eût pu mériter. M. Nardin confirme par des exemples probants, tirés de ses recherches et observations personnelles, l’opinion émise sur Duvernoy, et cite des correspondances échangées entre ce dernier et son compatriote Fallot, qui très innocemment s’em- ploya à Paris à écouler des autographes ou des documents dé- robés à Montbéliard. M. Gauthier met sous les yeux de ses confrères un objet qui se rattache à l’histoire franc-comtoise et aux luttes politiques qu'inaugura à Besançon la nomination du Parlement Maupeou. Avocats, magistrats évincés, clercs de procureurs se liguèrent de 1771 à 1774 pour chansonner les parlementaires qui sié- geaient à Besancon. L’un de ceux que l’on ménagea le moins fut le procureur général Claude-Hippolyte Doroz esprit mé- diocre auquel on prèta des àneries légendaires. Or un sculpteur très habile, Certainement comto's,inspiré par quelqu'un de ces ralleurs du pouvoir qui avaient berné les conseillers nommés par Maupeou, traduisit d’un burin spirituel sur les deux plats d'une rape à labac taillée dans le buis l’un des couplets consa- crés à Doroz. On y voit, d’un côté, un moulin à vent avec cette devise topique : Quo flavit bene est (pourvu qu’il vienne du vent au moulin), méchanceté qui englobe à la fois tout le Parle- XXIe ment complaisant, de l’autre,un magistrat en costume de palais embrassant un'âne, avec cette légende : Similis simili gaudel, qui n’est qu’une paraphrase résumée des vers suivants : L'âne voyant Doroz ne se sentit pas d’aise Le prend au col, le baise Et lui gratte le dos, Doroz dit : Cette bête est un peu familière ! Excusez-moi, dit l'animal, Je ne croyais point faire mal En embrassant mon frère. Cette rape à tabac de 1771 est un véritable document histo- rique, mais dans ce petit bijou, exécuté avec entrain et finesse, le côté artistique dépasse de beaucoup l'intérêt d’une anecdote dès longtemps oubliée. Procédant à ses élections la Société nomme : Membres résidants : M. ROCARDET, Jean, Directeur des contributions directes à Besançon, présenté par MM. Francey et Gauthier. M. GAZIER, Georges, Conservateur de la Bibliothèque publi- que de Besancon, présenté par MM. Gauthier et Vaissier. Le Président, Le Secrétaire. Ed FRANCE. Jules GAUTHIER. Séance du 2% octobre 1903. PRÉSIDENCE DE M. THURIET, Vice-Président. Sont | présents BurEAU : MM. Thuriet, président; Gauthier, secrétaire ; Vaissier, vice-secrétaire ; Kirchner, archiviste. MEuBREs . MM. Berdellé, Cellard, Guillemin, docteur Ledoux, l'abbé Rossignot, Rouget, IT. Savoye. — XXIV - En l'absence de M. Francey, M. Thuriet, vice-président, oc- cupe le fauteuil de la présidence. Il annonce à la Société les décès de M.Henri Bruchon, docteur en médecine, et de M. Cos- son, ancien trésorier général, membres résidants. Il se fait l'interprète ému des regrets que ces morts causent à Lx So- ciété et leur expression en sera transmise aux familles de ces anciens confrères. M. le Secrétaire rend compte du quatrième Congrès de l’As- sociation comtoise, tenu à Lons-le-Saunier le 5 août, avec un éclat exceptionnel et un progrès évident sur les précédents Congrès. Grâce au dévoué concours de la Société d'Emulation du Jura, de son distingué président, M. Mias, de M. Abel Gi- rardot, conservateur des musées, de M. l'abbé Perrod, de M. Libois, archiviste départemental, l’organisation ne laissait rien à désirer. M. le docteur Chapuis, maire de Lons-le-Sau- nier, avait mis l'Hôtel de Ville à la disposition des congressistes et siégeait à la place d'honneur à côté de M. Philippe Berger, de l’Institut, professeur au Collège de France, dont l’amabilité, le tact parfait, la parole vive et élégante ont fait le succès de la réunion. La section dhistoire, présidée par M. Berger, celle des sciences par M. l'ingénieur en chef Barrand, celle d’archéolo- gie par M. l'abbé Paul Brune, curé de Mont-sous-Vaudrey, ont entendu communication de nombreuses lectures apportées par des membres de toutes nos Sociétés savantes. Le banquet, préparé à l'hôtel de Genève, a réuni 80 convives, et a été l’oc- casion de plusieurs toasts prononcés avec autant d'à propos que d’aimable abandon par MM. Berger, Chapuis, Mias, Gau- thier. On a bu à l’union toujours plus absolue et plus profitable de tous les bons vouloirs comtois, mis au service de la petite et de la grande patrie. Au sortir du banquet, séance publique, puis inauguration d’une plaque commémorative de la naissance de Philibert de Chalon, vice-roi de Naples, sur la façade de l'Hôtel de Ville, emplacement de l’ancien château des Chalon; discours de M. Berger, de M. Ulysse Robert, promoteur du monument, de M. Mias, de M. le Maire de Lons-le-Saunier. Avant de se séparer, l’Association franc-comtoise a choisi — XXV — Besançon comme le lieu du Congrès de 1904, élu M lavo- cat général Thuriet président du Congrès, et M. Gazier, con- servateur de la Bibliothèque de Besançon, secrétaire général. M. l'abbé Auguste Rossignot lit une très intéressante biogra- phie de l’orientaliste Guillaume Pauthier, originaire de Mami- rolle (1801-1873). Cette étude, faite avec infiniment de précision et d'esprit, est retenue pour être lue dans la séance publique de décembre. M. l’abbé Rossignot est prié de rechercher un portrait de Pauthier, qui prendrait place avec à-propos à côté du charmant portrait littéraire dû aux recherches et à la plume de notre distingué confrère. Sont proposés pour faire partie de la Société, et admis comme : Membres correspondants : M. Prosper QUENOT, instituteur à Orchamps-les-Dole (Jura), présenté par MM. Vaissier et Sire ; M. le comte LIONEL DE MOUSTIER, au château de Bournel, et à Paris, rue de l’Alma, 17, présenté par MM. le marquis de Moustier et le duc de Marmier. M. Marcel PERRONNE, ancien conseiller de Préfecture à Dijon, présenté par MM. Thuriet et J. Gauthier. Le Président, Le Secrétaire, M. THURIET. Jules GAUTHIER. Séance du 2% novembre 19053. PRÉSIDENCE DE M. NARGAUD, Vice-Président. Sont présents : BUREAU : MM. le docteur Nargaud, premier vice-président ; Thuriet, deuxième vice-président ; Gauthier, secrétaire ; Fau- quignon, trésorier ; Kirchner, archiviste. me PUAVI EE MEMBRES : MM. Baudin, Dodivers, Bonnet, Gazier, Nardin. Parizot, Rocardet, l'abbé Rossignot, Savoye, Souchon. Après le dépouillement de la correspondance lassemblée décide l’insertiou d’un supplément de la Flora Sequaniæ exsic- cata de M. Vendrelv. M. le secrétaire lit une notice biographique sur M. Ulysse Ro- bert, membre honoraire de la Société, décédé subitement à Paris le 5 novembre, et fait ressortir les titres du défunt à la recon- naissance des érudits et au bon souvenir de ses compatriotes. La Société fixe au jeudi 17 décembre la date de la séance pu- blique annuelle, et charge son bureau des instructions et des démarches nécessaires ; elle décide qu'aux trois lectures déjà retenues : discours présidentiel, biographie de l’orientaliste Pauthier, par M. l'abbé A. Rossignot; voyage en Egypte, par M. le commandant du génie Almand, on joindra une communi- cation sur la photographie des couleurs (avec projections), qui sera demandée à M. Maldiney. MM. Fauquignon et H. Savoye sont priés de s’entendre avec M. Colomat pour le diner intime du jeudi soir à 7 heures, auquel sera invité M. le docteur Du- four, de Lausanne, membre honoraire. M. le secrétaire communique un travail qui ne paraîtra pas dans les Mémoires, ayant pour objet : Les Anciens pouillés et La géographie historique de l’ancien diocèse de Besançon. À côté des pouillés déjà connus, le plus récent, celui du P. André de Saint-Nicolas (ou pouillé des Carmes), composé de 1700 à 1714, le plus ancien du xIv* siècle, conservé par un collecteur de la dîime apostolique, et, s’interposant entre eux deux, les pouillés connus sous le nom de Luxeuil, de Saint-Vincent, de Montbe- noit, d'après d'anciennes copies déposées dans ces monastères, il existe certains fragments très précieux, transcrits du XIe au xX1ve siècle sur les marges, ou feuillets de gardes, des lection- naires pontificaux, livres liturgiques divers. Une transcription de ces fragments a été faite au xirr° siècle dans les manuserits 711 et 712 de la Bibliothèque de Besançon sans aucune mé- thode; on n’y a attaché jusqu'ici aucune importance, et ils en re NN ID ont beaucoup. Qu'on en juge. Le diocèse de Besançon à calqué ses divisions ecclésiastiques ou décanats sur des divisions ci- viles remontant à l’époque romaine, et perpétuées à l’époque barbare dans les divisions des pagi ou comtés mérovingiens puis carolingiens. Or, un fait inconnu jusqu'ici, c’est que les chefs-lieux de ces ministeria romains, restés ministeria ecclé- siastiques (c'est-à-dire archidiaconnés ou décanats), se Sont dé- placés aux xIe-x1Ie siècles, voire même peut-être au XIII. — Exemple : le ministerium Faverniacense ou archidiaconné de Faverney avait pour siège primitif la ville romaine de Corra, Corre, ministerium corrense; le ministerium luxoviense avait pour chef-lieu primitif la ville romaine de Portus, Port-sur- Saône ministerium portense; le ministerium Rubeimontis, ou archidiaconné de Rougemont, avait pour siège le ministerium Longæ Villæ, c’est-à-dire la station romaine de Longevelle-sur- le-Doubs, que certains textes appellent aussi décanat de Blus- sans, du village qui fait face à Longevelle, sur la rive gauche du Doubs. Autre chose que nous apprennent nos fragments de pouillés très anciens et très inconnus, c’est que l’archidiaconné de Traves, de Treva, s'appelait aussi au xrre siècle : ministerium Constantini. Qu'on rapproche ces deux mots et on aura le type probable : de Treva Constantini, nom que devait porter ce châ- teau féodal d’une haute antiquité, jalon possible d’une délimi- tation territoriale établie par Constantin, après ses victoires et ses trèves avec lés Alamanni. La publication prochaine des pouillés du diocèse de Besançon marquera une étape et un progrès dans la géographie historique du diocèse de Besançon et de l’ancienne Séquanie. M. Gauthier lit une étude archéologique et historique de l'Eglise Saint-Maurice de Besançon, reconstruite de 1350 à 1555 aux frais de Nicole Bonvalot, femme du chancelier Nicolas Per- renot de Granvelle, et de M. et Mme Lulier de Baucourt, par le maitre architecte Richard Maire. Il produit un plan détaillé de l'édifice copié aux Archives nationales de Paris dans un recueil compilé par la congrégation de lOratoire en 1686, et donne un grand nombre de détails sur la reconstruction de l’église ac- tuelle, effectuée de 1705 à 1719 par l'architecte entrepreneur CN NII Jacques Tripard. Nombre d'artistes ont collaboré au décor des deux édifices successifs ; ce furent, au xvre siècle, les sculpteurs Jean et Raymond Julyot,les peintres verriers Rately et Triboulet, Fu XVIIe, le sculpteur Chambert,le peintre Adrien Richard et bien d’autres encore La monographie de Saint-Maurice de Besançon gagnera de nombreux détails à ces nouvelles recherches. tirées de deux dépôts : les Archives nationales et les Archives du Doubs. Sont proposés et admis au titre de : Membres correspondants : M. René BOUTON, juge suppléant au tribunal civil de Baume- les-Dames, présenté par MM. l’abbé Paul Druot et Vaissier ; M Victor MAIRE, capitaine au 22e régiment colonial, sur la présentation de MM. A. Vaissier et J. Gauthier. Le Président, Le Secrétaire, D' NARGAUD. JULES GAUTHIER. Séance du 16 décembre 1905. PRÉSIDENCE DE M. EDMOND FRANCEY Sont présents : BUREAU : MM. Francey, président ; Dr Nargaud premier vice- président ; Thuriet, deuxième vice président ; J. Gauthier, se- crétaire ; À. Vaissier, vice-secrétaire ; Fauquignon, trésorier ; Kirchner, archiviste. MEMBRES : Berdellé, docteur Bourdin, Cellard, l'abbé Paul Druot, Gazier, docteur À. Girardot, capitaine Maire, Henry Michel, le chanoine Rossignot, l'abbé À. Rossignot, De Truchis, docteur G. Vaissier, Barbey, correspondant. — XXIX — ; Les principales autorités de la ville convoquées à la séancé publique ont adressé à M. le président leurs remerciements ou leurs excuses ; M. le général Corbin, gouverneur, assistera à la séance publique. MM. le Général en chef, l’Archevèque, le Préfet s’y feront représenter par des délégués. En remplacement de MM. Jean Petit et Ulysse Robert, mem- bres honoraires décédés, l'assemblée élit, sur la proposition du bureau et par acclamation, MM. Just Becquet, sculpteur, et Ernest Courbet, trésorier de la ville de Paris, que leurs tra- vaux, l’estime et la sympathie générale dont ils jouissent re- commandaient en première ligne aux suffrages de leurs conci- toyens et confrères M. l'abbé Paul Druot, curé de Voillans, lit une étude accom- pagnée de plans, croquis et photographies sur le tracé et la construction de la Voie romaine du Rhin (de Besancon à Man- deure) à travers les cantons de Baume et de Clerval, de Luxiol à Rang-lez-lIsle. Ce travail intéressant, composé à vue du sol et après divers creusages qui ont donné le profil et la configu- ration exacte de cette importante voie antique, est retenu pour les Mémoires. M. le docteur Albert Girardot consacre à la mémoire de M. Alexandre Vézian, ancien Doyen de la Faculté des Sciences de Besançon, ancien Président de la Société d’Emulation du Doubs, une notice biographique résumant tous les titres du dé- funt au souvenir reconnaissant des Comtois (1825-1903). M. Gauthier expose à grands traits l’histoire du bourg de Marnay (Haute-Saône), tête de pont sur la limite du départe- ment du Doubs, où durant tout le Moyen-Age et jusqu’à nos jours se sont accomplis nombre de faits de guerre. En 1240, Marnay appartenait au chef de la maison de Chalon, le comte Etienne, qui l’avait remis”en apanage à sa fille Béatrix, mariée à Simon de Joinville, père du futur historien de Saint Louis, et qui vint y mourir en 1241. La maison de Joinville y vécut de 1241 à 1350 et prit part à tous les évènements politiques de la région ; en À 54 la maison de Chalon y était rentrée et donna au bourg de Marnay ses premières franchises. ee La Société discute et vote le budget de 1904 présenté par M. le trésorier Fauquignon. Projet de budget pour l’année 1904. RECETTES. 4. Subvention du département du Doubs . . . . 300 fr. 92; — de la ville de Besançon. . . . . . 400 3. Cotisations des membres résidants 250 4. —— — correspondants . . . 500 5. Droits de diplômes, recettes accidentelles . . . 150 6. Intérêts du capital en caisse et rentes . . . . 600 Total. : 70) RMSeOO re DÉPENSES. 4, Impressions. RAPPEL NN ORNE CEA ER SAS DURE 2. Frais de bureau, chauffage, éclairage et aménage- mente SIN. AU SR PER De D HTAIS TerSÉanCce DUbDIUUE MERE RENE 100 4. Traitement et imdemnité pour recouvrements à l’agént de MiSociété er CES Ne 200 5eCréditpourrecherches ScentQueS en 250 Fotal: sun CES UD Tr Les chiffres du budget sont adoptés à l’unanimité. M. le Président propose à la Société de faire tirer et de dis- tribuer à tous les membres résidants le plan de Besançon de 1618, dessiné par Jean Maublane, gravé par le Dijonnais Nico- las Spirain, dont le cuivre original est conservé au Musée ar- chéologique ; la dépense sera minime, 10 à 15 centimes par exemplaire environ. Adopté. M. Henri Michel, à l’occasion d’un Menu par lui dessiné pour le Congrès des vins, tenu récemment au Palais Granvelle par la Société d'Agriculture du Doubs, fait une communication sur les vieilles constructions de l’Hôpital du Saint-Esprit de Besan- — XXXI — con et donne d’ingénieuses explications des motifs de décora- tion du pilier en forme de bâton noueux qui soutient la galerie de bois d’une cour intérieure. On le prie de réserver pour les Mémoires une note et un dessin résumant son intéressante communication. Procédant à l'élection du Bureau pour l’année 1904, la So- ciété nomme : Président annuel : M. Maurice THURIET, avocat général, deuxième vice-président. Premier vice-président : M. Edmond FRANCEY, avocat, pré sident en exercice. Deuxième vice-président : M. PARIZOT, inspecteur honoraire des Enfants assistés. Vice-secrélaire : M. Alfred VAISSIER, conservateur du Musée archéologique. Trésorier : M. FAUQUIGNON, receveur honoraire des Postes et Télégraphes. Archivistes : MM. KIRCHNER et MALDINEY. Le Président, Le Secrétaire, Ed. FRANCEY. Jules GAUTHIER. Séance publique du 19 décembre 1903. PRÉSIDENCE DE M. ED. FRANCEY. Sont présents : BUREAU : M. FRANCEY, ayant à sa droite M. le général Cor- BIN, gouverneur ; à sa gauche M. THURIET, deuxième vice-pré- sident, M. le lieutenant d'état-major BOUIcC, représentant M. le général DECKER, M. JALOUSTRE, chef de cabinet, délégué par M. le Préfet du Doubs ; MM. GAUTHIER, secrétaire ; M. VAISSIER, vice-secrétaire ; M. l’abbé ROSsSiGNOT, M. le capitaine Victor MAIRE, M. MALDINEY, archiviste de la Société. — NO Dans la salle, remplie par une assistance nombreuse de dames en élégantes toilettes et d'invités, MM. BARBEY, BER- DELLÉ BERNARD, BoNNET, l'abbé Paul DRUOT, GAZIER. docteur LEDOUX, DODIVERS, PARIZOT, le chanoine ROSSIGNOT, SIMONIN, docteur G. VAISSIER, CELLARD et plusieurs autres membres de la Société La séance, ouverte à deux heures est close après lecture des morceaux suivants : La Société d'Emulation du Doubs en 1903, par M. le Président Ed. FRANCEY. L’Orientaliste Guillaume Pauthier, de Mamirolle (1801-1873), par M.l’abbé Auguste ROSSIGNOT. Voyage en Egypte, par M. le commandant du génie, M. V. ALMAND (lecture faite par M. Victor MAIRE). La photographie des couleurs, état présent de la question, par M. MALDINEY (avec projections par M. J. DODIvVERS). | Le Président, Le Secrétaire, Ed. FRANCEY. JULES GAUTHIER. Séance du 16 Janvier 190%. PRÉSIDENCE DE MM. MAURICE THURIET ET ED. FRANCEY. Sont présents BUREAU : MM. Francey, président sortant; Thuriet, prési- dent nouveau ; Parizot, vice-président ; Gauthier, secrétaire; Vaissier, vice secrétaire ; Fauquignon, trésorier ; Kirchner et Maldiney, archivistes. MEMBRES : MM Gaston de Beauséjour, Blondeau, Bonnet, Boname, Cellard, Dodivers, Gazier, D: Girardot, V. Maire, Mauvillier, Montenoise, Nardin, Rouget, chanoine Rossignol, l’abbé À. Rossignot, Simonin, de Truchis, Vernier. — XXXII —- M. le président Francey ouvre la séance et remet le fauteuil à M. Maurice Thuriet, nouveau président. Celui-ci remercie la Société d'Emulation de lui confier la direction de ses travaux, félicite M. Gauthier de son élection de correspondant de l’Insti- tut et M. Fauquignon de sa nomination d’officier de l’nstruction publique. M. le comte de Truchis présente,accompagnée de nombreuses photographies et des plans soigneusement exécutés, la restitu- tion du Château de Cicon, dont les ruines couvertes de sapins dominent le second plateau des montagnes du Doubs. Cette étude, très consciencieuse, est retenue pour les Mémoires. M. le secrétaire interprète divers documents inédits relatifs au Château de Belvoir qui fut, de 1636 à 1641, le séjour très fré- quent et très prolongé du duc Charles de Lorraine et de Béatrix de Cuisance, en qui s’éteignirent les deux races illustres de Cuisance et de Vergy. Ces documents donnent la physionomie exacte du mobilier d’un château qui, sans être une forteresse redoutable, reste cependant un des rares manoirs de nos mon- tagnes qui furent indemnes des invasions franco-suédoises. Le bureau de la Compagnie communique à la Société le règle- ment en douze articles qu’il a élaboré pour la pension des frères Grenier dont la constitutiona été homologuée par l'autorité pré- fectorale en 1902, six mois après le décès de son fondateur, M. Edouard Grenier. Ce règlement, après lecture, est homologué pararSociété en voici lei texte. Règlement de la pension des frères Grenier ARTICLE PREMIER. — Il est institué sous letitre de Fondation des frères Grenier une pension triennale qui sera donnée au concours au jeune franc-comtois né dans un des trois départe- ments du Doubs, de la Haute-Saône ou du Jura qui donnera le plus d'espérance sérieuse dans la carrière des sciences, des lettres ou des arts. ART. 2. — Pour être admis à concourir, les candidats devront C — KXXIV — avoir À8 ans au moins, %3 ans au plus, au 4er janvier de l’année du concours, et jouir d’une médiocre fortune. ART. 3. — Le concours sera annoncé trois mois d'avance par des insertions répétées dans les journaux de la province. ART 4. — Le chiffre de la pension, qui sera payée par tri- mestre au candidat choisi, sera de 1,800 fr. par an. Si par une conversion ou autre évènement similaire, le chiffre de la rente était réduit, la pension sera suspendue jusqu’à reconstitution du capital. ART D, Les candidats fourniront comme pièces justifica- tives de leur demande leur extrait de naissance sur timbre, leur diplôme de bachelier ès-sciences ou ès-lettres ou des certificats équivalents, soit sur le terrain pédagogique, soit sur le terrain artistique : certificats de professeur de dessin, peinture ou sculp- ture chez qui ils auront étudié. En outre ils produiront l'extrait d'impositions directes de leur père et mère. ART. 6. — En dehors de ces certificats, le Jury d'examen aura le droit de faire comparaître devant lui les candidats pour les interroger. ART. 7. — Le Jury une fois constitué par le bureau de la So- ciété d’'Emulation du Doubs: président, vice-président, secré- taire, vice-secrétaire, trésorier, archivistes et le représentant de la famille Grenier, accrédité par le testament et, à son défaut, choisi parmi les parents les plus proches de la ligne paternelle. ART. 8. — Les membres du jury prendront individuellement. l'engagement d'honneur de ne se décider dans leur choix que surles mérites des candidats et surles dossiers qu’ils présentent. ART.9. La décision sera prise aux deux tiers des votants et l'épreuve durera jusqu’à ce que le quanlième soit obtenu. ART. 10. — Le Conseil d'administration de la Société trans- formé en jury, avec l’adjonction des représentants de la famille Grenier, aura droit de surveillance et d’exclusion sur le pen- sionnaire Grenier qui se rendrait indigne par sa conduite, par sa paresse ou ses manquements professionnels des bienfaits de la fondation. | ART. 11. — En cas de dissolution de la Société, la pension des frères Grenier subsistera telle qu’elle est constituée, mais remise des titres affectés à sa dotation sera faite aux parents = KXKXV — ou groupe de parents les plus rapprochés de la ligne paternelle des héritiers Grenier qui pourvoiront à sa continuation. ART. 12 — Il est entendu que le Conseil d'administration tiendra la Société au courant du choix, des travaux et des suecès du titulaire de la pension Grenier. Ce règlement est ratifié par l’unanimité de la Société. M. le président fait distribuer aux nombreux assistants les exemplaires du plan de Besançon en 1618, tirés à leur intention. Sont proposés et proclamés élus, après un vote en leur faveur, comme : Membre résidant : M. PIDANCET, avocat, présenté par MM. Francey et Nargaud. Membre correspondant : M. Lucien FEBVRE, élève de l’Ecole normale supérieure, pen- sionnaire de la fondation Thiers, à Paris, présenté par MM. Ver- nier et Gauthier. Le Président, Le Secrétaire, M. THURIET. Jules GAUTHIER. Séance du 10 février 190%. PRÉSIDENCE DE M. MAURICE THURIET. Sont présents : BUREAU : MM. Thuriet, président; Parizot, vice-président: Vaissier, vice-secrétaire ; Kirchner, archiviste MEMBRES : MM. Bonnet, Bourdin, Boussey, Cellard, Gazrer, Ledoux, Magnin, V. Maire, Nargaud, Pidancet. — XXXVI — M. le président exprime, au nom de la Société, de sympathi- ques regrets sur la perte d’un de ses plus estimables membres, du vénérable Chanoine Suchet, décédé après une longue car- rière, consacrée au bien et au travail littéraire où il témoigna jusqu'à la fin d’une vigoureuse intelligence. À la prochaine séance, M. l’abbé Auguste Rossignot lira une notice sur la vieet les œuvres de ce digne prêtre qui, à partir de 1894, a tenu à as- sister aussi souvent qu'il le pouvait, à nos réunions mensuelles. M. Ch. Blondeau, utilisant des récits contemporains, en par- ticulier le journal ou notes manuserites de l’avocat Grimont, reproduit dans leur abondant détail les fêtes populaires qui ac- compagnèrent la rentrée des membres du Parlement de Franche- Comté à Besançon après leur exil de 1759. Il est intéressant de faire connaître les particularités locales de ces manifestations où l’opinion publique ayant pris parti contre le pouvoir royal applaudissait avec enthousiasme aux courageuses résistances des parlements. Mais il ne l’est pas moins de remarquer avec M. Blondeau que ces mêmes parlements, après l’élimination de ceux de ses membres sur lesquels on avait versé le ridicule, ne tarda pas à tromper l'attente du vulgaire par son entêlement, et par l’enregistrement d’édits trois fois repoussés par les rema- nants eux-mêmes : « Trente ans après, observe judicieusement l’auteur, ce même peuple se soulèvera et, d’un seul coup, ren- versera le trône et les institutions séculaires du royaume. » Ce travail est retenu pour les mémoires. Dans une nouvelle lecture, M. Pabbé Paul Druot reprend, en la complétant, son intéressante EÉlude de la voie romaine dans les cantons de Baume-les-Dames et de Glerval: 19 Détails nou- veaux sur la composition matérielle et la façon même de cette remarquable chaussée qu'on peut considérer comme une via calceata puisque la chaux entre pour moitié, avec le sable, dans le massif des cailloux sur toute l’épaisseur de la xoie ; 2° Réfu- tation d’une thèse soutenue par M. Stéphen Leroy, tendant à expliquer l'étrange variante qui existe entre l'itinéraire d'Anto- nin et la Table théodosienne au sujet des stations de Loposagium (Luxiol) et de Velatodurum (Voillans) par la reconnaissance ns XXII d’une deuxième voie qui se dirigeait sur Mandeure en passant par Vellerot-les-Belvoir, qui serait Velatodurum. Partisan d’une voie unique passant soit par Luxiol, soit ensuite par Voillans pour expliquer la variante des documents, notre confrère soup- çonne une erreur de mensuration ou de copiste dans le chiffre donné par la Table de Peutinger. M. l’abbé Druot est invité à Joindre ces intéressants compléments à son précédent travail en les accompagnant d’une carte sommaire et d’un croquis abso- lument typique, d’une coupe de la chaussée prise sur le terri- toire de Voillans. Sont présentés et admis comme : Membre résidant : M. Alfred GRENIER, inspecteur des forêts à Besançon, pré- senté par MM. Thuriet et Jules Gauthier. Membre correspondant : M. JOURDAIN, président du tribunal de Belfort, présenté par MM. Thuriet et Nargaud. Le Président, Le Vice-Secrétaire, M. THURIET. VAISSIER. Seance du 26 mars 1904. PRÉSIDENCE DE M. PARIZOT, vice-président. Sont présents : BUREAU : MM. Parizot, président ; Gauthier, secrétaire ; À. Vaissier, vice-secrétaire, Kirchner archiviste. MEMBRES : MM. Gaston de Beauséjour, Boname, Bonnet, Bour- din, Boussey, À. Boysson d’Ecole, Chapoy, Gazier, À. Girardot, — XXXVII — Montenoise, Nardin, Nargaud, chanoine Rossignot, l'abbé A. Rossignot. M. le président dépose sur le bureau un volume intitulé : Jé- rusalem, spirituelle relation d’un pèlerinage exécuté en 1893 par M. l'abbé F. X. Perrot, curé de Mandeure, un des correspondants de la Société. Est joint au même envoi, une brochure du même auteur, parue cette année sous ce titre : Mon village, étude sur les causes de la dépopulation des campagnes. Des remercie- ments seront adressés à l’auteur ainsi qu'à M Alfred Marquiset qui a fait l'envoi d’une brochure intitulée : Mon premier livre. La Société a reçu le rapport général sur l'Exposition univer- selle de 1900, par M. A. Picard, commissaire général, envoyé par le Ministère du commerce. Cette superbe publication en huit volumes, illustrés de nombreuses phototypies, est un véritable monument élevé à la science et à l’art contemporains. M. Gazier communique une étude originale sur cette double question intéressant la biographie franc-comtoise : Où sont nés à Besançon les deux économistes et philosophes célèbres P. Four- rier et P.-J. Proudhon. Pour le premier, la démonstration est faite : une maison formant l’angle sud de la ruelle Baron sur la Grande-Rue est le berceau avéré de l’inventeur de la phalange ; une gravure parue dans un almanach de 1848 a, de son vivant même et sous ses yeux, reproduit la maison du xvit siècle oùil naquit et qui disparut pour faire place à la rue Moncey. Quant à Proudhon, que certains faisaient naître, qui à Burgille-les- Marnay, qui à la Mouillère, il est né tout simplement rue du Petit-Battant (ancien numéro 930, aujourd’hui 37, dans une mai- sonnette achetée par l’ouvrier tonnelier, père du philosophe, peu de mois avant son mariage. Après avoir restitué au Petit- Battant sa principale gloire, M. Gazier fait justice de l’erreur d’un contemporain qui prétendait que Proudhon fut enfant na- turel, alors que-son extrait de naissance prouve sans conteste possible sa parfaite légitimité. Ce travail très consciencieux et très concluant est retenu pour les mémoires. nee 0,4 DO ns M l’abbé Auguste Rossignot donne lecture d’une biographie très complète de M. le chanoine Jean-Marie Suchet, décédé le 17 février dernier, et fait revivre, en quelques pages finement touchées, la spirituelle physionomie d’un érudit, d'un homme de bien qu’entouraient l’estime et la sympathie générale. Né à Pesmes en 1817, tour à tour professeur à Marnay, vicaire à Pon- tarlier, curé à Amblans, professeur au collège Saint-François- Xavier, de 1850 à 1863, supérieur du séminaire d’Ornans, de 1863 à 1873, curé de Saint-Jean de Besançon, de 1873 à 1890, M. Suchet s'était retiré dans sa stalle de chanoine titulaire, non pour se reposer, mais pour consacrer aux bonnes œuvres et aux lettres les quinze dernières années d’une vie vouée tout entière au de- voir et au labeur. L'étude de M. Rossignot prendra place avec une bibliographie détaillée de M. Suchet dans un des plus pro- chains volumes des Mémoires. M. le secrétaire, sous ce titre: cinq tableaux franc-comtois du Musée de Dijon, décrit quatre jolis tableautins de Gaspard Greseli (1720-1756) représentant les scènes enfantines que tra- duisait si bien son pinceau. Ces tableaux dont les titres pourraient être ainsi définis : l’£ducation, la Tentation, le Marchand de dentelles, le Nid de peraäreaux, sont exquis de coloris et de com- position. Un cinquième tableau: Le siège de Besançon en 1674, par Van der Meulen, est la grande toile officielle représentant l’armée de Louis XIV canonnant, avant l'assaut, le corps de place tel qu’on le voit dans la gravure célèbre de Baudoin. MM. Gauthier et Vaissier font passer sous les yeux de la So- ciété les planches phototypiques reproduisant les pièces d’hon- neur des co-gouverneurs de Besançon au XvIe et XVIIe siècles ; ces planches et le travail qu’elles escortent prendront place dans les publications de la Société. Le Président, Le Secrétaire, A PARIZOT. JULES GAUTHIER. a — Séance du 14 mai 1904 PRÉSIDENCE DE M. MAURICE THURIET. Sont présents : BUREAU : MM. Thuriet, président ; Vaissier, vice-président : Kirchner, archiviste. MEMBRES : MM. Berdellé, Bernard, Cellard, V. Guillemin, Ga- zier, À. Girardot, Magnin, Nardin. M. Vaissier annonce la récente découverte de vestiges de l’époque gallo-romaine dans un jardin avoisinant la promenade des Glacis d’Arènes. C’est d’abord une sorte de caveau en pierre de vergenne soigneusement construit en deux assises et dont la couverture avait été dès longtemps brisée et écartée. Des os- sements trouvés au fond sont ceux d’un gros animal, dépôt vraisemblablement très postérieur à la construction, fondée sur un banc de roche parfaitement nivelé sur une grande étendue (banc du bathonien supérieur, selon M. A. Girardot). À côté de cette logette était enfoui, la tête en bas, le très haut relief d’un personnage jeune et portant des fruits dans le pan de son man- teau. Cette figure d'assez bonne conservation est un Priape des Jardins. Un enfant nu est à ses pieds. Sur la proposition de M. le président, une photogravure de cette figure mythologique ori- ginale et de bonne facture pourra accompagner utilement la no- tice de M. Vaissier dans le volume des Mémoires. M. le Dr Ant. Magnin fait ensuite une intéressante conférence sur les Rouilles des Céréales dont il a bien voulu rédiger ce compte-rendu sommaire : « Après avoir analysé les recherches de M. Erickson sur la multiplicité des rouilles et la possibilité de leur transmission et de leur propagation par d’autres moyens que les spores et les écidies des Epines vinettes, Boraginées et Nerprums, M. Magnin — XLI — rappelle les observations de 1869, ses communications antérieu- res faites à la Société de botanique de Lyon (1873-1885), à l’As- sociation française pour l'avancement des sciences (1883), et notamment à la Société d'Emulation du Doubs en 1888, M. Ma- onin concluait à cette époque que: 1° on s’exagérait le rôle nuisible attribué au voisinage immédiat des Berberis dans la production et la propagation des rouilles; 2° on s’illusionnait sur les résultats qu’on obtiendrait en prescrivant la destruction des Berberis, même dans des régions étendues ; 3° qu'il fallait se préoccuper surtout de l’état de réceptivité de la plante tenant à diverses causes, conditions de climat, de sol, de culture, ap- titudes de certaines races, etc. » Ces conditions données, il y a plus de trente ans, dans ses premières communications, il y a plus de quinze ans, pour les autres, sont entièrement confirmées par les observations récen- tes des agronomes. M. Prunet, pour les environs de Toulouse (1902), M. Mareschall pour la Belgique (1903), par exemple, arri- vent aux mêmes conclusions : influence très faible ou nulle du voisinage des Berberis, nécessité de se préoccuper plutôt des conditions culturales des races réfractaires, etc. » M. Magnin termine par des considérations sur la réceptivité, la prédisposition et l’'immunité chez l'homme, les animaux et les plantes et conclut qu'un des rôles les plus utiles des Instituts botaniques doit être de rechercher et de créer au besoin par les _ procédés aujourd'hui bien connus de la sélection et de l’hybri- dation des races locales, adaptées étroitement aux conditions du climat et au sol dela contrée, et résistant aux diverses maladies, aux divers parasites qui peuvent les atteindre. M. Magnin de- mande enfin qu’on laide à faire une enquête sur les diverses espèces de rouilles et les dégâts qu’elles causent dans le dépar- tement du Doubs. » Il est à souhaiter que la Société d'agriculture s’empresse de répondre au désir formulé par M. Magnin. Les applaudissements qui accueillent sa savante communication justifient sa prochaine publication dans les Mémoires. A l'issue de la séance, M. Vaissierinviteles membres présents Se REMSS à se rendre au Musée pour examiner la sculpture gallo-romaine dont il vient de parler. Le Président, Le Secrétaire, M. THURIET. VAISSIER. Séance du 25 juin 1904. PRÉSIDENCE DE M. MAURICE THURIET. Sont présents : BUREAU : MM. Thuriet, président ; Vaissier, vice-secrétaire ; Maldiney, archiviste. MEMBRES : MM. Boussey, Gellard, Gazier, Nardin, l'abbé Ros- signot, H. Savoye. M le président annonce que M. Ledoux prépare pour une prochaine séance une notice sur M. le Dr J. Bruchon, un de nos membres les plus distingués et ancien président, décédé le 2 avril dernier M. le Dr Ant. Magnin, craignant de ne pouvoir assister à la présente séance, nous fait part de son intention de se rendre à Paris pour la fête juhilaire que tiendra prochaisement la Société de botanique de France. Si la Société d’Emulation lui en ex- prime le désir, il la représentera volontiers comme son délégué dans cette réunion générale. Cette proposition est accueillie avec reconnaissance. L'ordre du jour appelle une délibération sur l’organisation du Ve congrès de l'Association franc-comtoise à Besançon qui doit se tenir, d’après ce qui a été décidé l’année dernière, dans la première semaine du mois d'août. Il est admis que l’ouverture du Congrès aura lieule lundi 1er août. Sur les observations de M. RON CUS Gellard sur les inconvénients qui résulteraient de Ia limitation de la session à une seule journée, on décide que là veille et le surlendemain il sera possible aux étrangers qui le désireraient de prolonger utilement leur séjour. Suivant les usages précé- dents, les séances générales ou des trois sections d'histoire, d'archéologie et des sciences se tiendront dans le même local, soit le palais Granvelle, et le banquet chez un restaurant. Pour l’organisation des détails, une commission composée du bureau, auquel s’adjoindront MM. Gazier, secrétaire général du Congres, Dr Ledoux, Cellard et Savoye, avisera dès maintenant aux mesures à prendre et à préparer les éléments d’une délibé- ration à une séance spéciale le samedi 9 juillet à 5 heures du soir dans la salle de la Société. M. le président lit un extrait relatif à la période du siège de Besançon par Louis XIV, en 1674, tiré d’une publication auto- graphiée par M. le capitaine Jeanneney, étude résumant l’histoire militaire de la place, au point de vue stratégique, des deux con- quêtes, du blocus de 1815 et de la guerre de 1870-1871 aux en- virons de Besançon. Sur la demande de la Société historique et biologique de Saint- Malo, l'échange des publications annuelles est consenti avec _ cette compaguie. Est présenté et admis comme : Membre résidant : M. Eugène CHARMOILLAUX, étudiant à la Faculté de Besançon, présenté par MM. Boussey et Gazier. Le Président, Le Secrétaire, M. THURIET. VAISSIER. a OUEN Eee Séance du 9 juillet 190%. PRÉSIDENCE DE M. LE VICE-PRÉSIDENT PARIZOT. Sont présents BUREAU : MM. Parizot, président, Gauthier, secrétaire, Vaissier, vice-secrétaire ; Fauquignon, trésorier. MEMBRES : MM. Cellard, Charmoillaux, Dr Ledoux, l'abbé Rossignot, Savoye. Après le dépouillement de la correspondance, lettre d’excuses de MM. Thuriet, M. le secrétaire donne communication de di- vers documents relatifs au congrès de l’Association franc-com- toise du 1er août prochain. Et d’abord la lettre circulaire en- voyée aux présidents des diverses sociétés franc-comtoises ; ensuite la convocation aux membres des diverses sociétés ; en- fin une lettre-rapport de M. Gazier, secrétaire général du con- grès, sur l’ensemble des mesures déjà prises et sur les diverses questions de détail à régler d'urgence. Ces divers points font l’objet de délibérations successives qui seront communiquées par M. le président du Congrès de 1904 à la Commission spé- ciale qui sera très prochainement convoquée. 1° Emplacement des séances du Congrès. — La Société estime que les séances générales et de sections seront tenues au Pa- lais Granvelle ; celles de l’archéologie dans la salle de la So- ciété d'Emulation, celles des sciences dans la salle de l’Aca- démie ; la grande salle du Palais serait attribuée à la section d'histoire ainsi qu'aux réunions plénières du matin et du soir. 2° Banquet. — Pour deux raisons, proximité du Palais Gran- velle et tradition constante, la Société souhaite que le banquet (midi), se tienne salle Colomat, aux Grands Carmes. 30 Durée du congrès. -- Une journée, conformément à la tra- = UN dition, sauf à organiser une excursion à courte distarice, pour le lendemain, comme en décidera la Commission. 40 Invitations. — Les invitations au banquet seront limitées : au maire de la ville, auquel revient de droit la place d'honneur en face du président ; aux membres d'honneur de la Société : premier président, archevêque, procureur général, général commandant le corps d'armée, préfet du Doubs, recteur et ins- pecteur d'académie. 99 Horaire. — La Société est d’avis que l’heure d'ouverture du Congrès soit fixée à 9 heures du matin. Sur la proposition de MM. Parizot et Gauthier, un crédit de 200 francs est mis à la disposition du Congrès pour frais géné- AUX M. le trésorïer avisera aux démarches à faire pour le meilleur emploi de cette somme en tenant compte des invités etc.; le prix à débattre avec le restaurant Colomat oscillerait de 6 fr. à 6 fr. 50. Une sous-commission de trois membres : MM. Vaissier, Sa- voye et Cellard, est chargée d’aviser à la confection d’un menu artistique qui serait confié à l’imprimeur de la Société. M. le secrétaire fait une brève communication sur une En- seigne révolutionnaire bisontine qui dut figurer dans les fêtes de l’Etre suprême, de la déesse Raison et dans les cortèges of- ficiels du département du Doubs, sous la Première République. Cette enseigne se compose, comme morceau essentiel, d’un bonnet phrygien rouge avec cocarde tricolore, de grande dimen- sion, soutenu d’une hallebarde argentée qui s’emmanchait dans un grand bâton. Emportée de la préfecture du Doubs en 1848, par le préfet James de Mentry, cette pièce intéressante, échouée à Nuits-Saint-Georges (Côte-d'Or), sera rapatriée par les soins de MM. Vaissier et Gauthier, pour prendre place au Musée ar- chéologique, à côté du relief de la Bastille. = KL Est proposé et admis en qualité de : Membre résidant : M. JEANNENEY, Capitaine au 60e de ligne, présenté par MM. Tauriet et Clavey. Le Président, Le Secrétaire, Ad. PARIZOT. JULES GAUTHIER. Séance du 19 novembre 190%. PRÉSIDENCE DE M. MAURICE THURIET. Sont présents : BUREAU: MM. Thuriet, président; Parizct, vice-président ; Gauthier, secrétaire; Vaissier, vice-secrétaire; Fauquignon, trésorier; Kirchner, archiviste. MEMBRES : MM. Berdellé, Blondeau, Bonnet, Cellard, Gazier, Guillemin docteur Ledoux, H. Mairot, Nargaud, Pingaud, Ho- cardey, docteur Roland, abbé Rossignot, Rouget, docteur G. Vaissier. M. le président rend compte du Ve congrès de l’Association franc-comtoise qui s’est tenu à Besançon au commencement du mois d'août, selon ce qui avait été décidé à la session dernière à Lons-le-Saunier en 1903. La Commission nommée au mois de juillet pour préparer la ré- ception des délégués des sociétés du dehors et obtenir les locaux pour les séances, de tracer un programme pour la visite des monuments et des musées, enfin d'arrêter le menu du banquet a rempli Son mandat pour l’exécution duquel le bureau avait été invité à s’adjoindre MM. Savoye, Cellard. et D'Eedoux. be Congrès s’est tenu le lundi, 1" août, à 9 heures du matin dans EN TISSSS la grande salle du palais Granvelle. IL était composé d’une soixantaine de personnes. Quatre sociétés savantes de la pro- vince y était représentées. Les congressistes se sont groupés en trois sections : histoire, archéologie, sciences. Un compte-rendu détaillé sera publié dans le prochain volume des mémoires. À 11 h. 4/2, séance plé: nière où l’on a discuté les vœux qui avaient été émis dans les sections. Parmi ces vœux, il a été décidé qu’une Biographie comtoise, sorte de dictionnaire historique contenant des notices sur la vie et les œuvres de tous les personnages un peu mar- quants dans les lettres, les sciences ou les fonctions publiques, serait dressée en collaboration par toutes les Sociétés savantes de la région de Franche-Comté et que toutes les notices seraient centralisées à la Société d’Emulation du Doubs. Un autre vœu a été approuvé, à savoir qu'il serait créé à la Bibliothèque de la ville, un dépôt de toutes les photographies intéressant la Franche-Comté, personnages, monuments, paysages. À midi 1/2, banquet salle Colomat; les toasts ont été portés par le président de la Société d'Emulation, par M. Perreau, ad- joint, remplaçant le maire de la ville, par M. Trigant-Geneste, remplaçant le préfet, par M. Roux, président de la Société d’E- mulation de Montbéliard, par M. le aocteur Marceau, président de la Société d'histoire naturelle et par M. Vieille, président dela Société des architectes du Doubs. La séance publique a eu lieu à 3 heures de l'après-midi, dans la salle Granvelle. Outre le dis- cours du président, il y a eu cinq lectures : de M. Ch. Beauquier, sur les Conventionnels du Doubs ; de M. Gazier, une analyse et des fragments d’une œuvre inédite de Charles Nodier ; de M. Faivret, de Dole : César à Vesontio; de M. Ch. Sandoz, sur la conservation du monument de l’hôtel de ville de Besançon; enfin de M. Gaiffe, professeur au Lycée, sur Arnould Mussot, auteur dramatique bisontin äu XvIrIe siècle. Après ce rapide exposé du Congrès de Besançon en 1904, M. le président tait connaître que le siège du Congrès de 4905 sera Belfort, et que le président élu pour cette réunion est M. Phi- lippe Berger, sénateur, membre de l’Institut, professeur au col- lège de France, président de la Société belfortaine d’Em ulation. — KEVUI — M. le docteur Ledoux lit une Notice sur M. le Docteur J. Bru- chon, ancien président de la Société, et fait revivre en termes émus et d’une façon très précise une figure sympathique à tous les bisontins. Le parfait homme de bien qui fut notre président s'était signalé par son zèle éclairé et persévérant dans lexer- cice de son art et par son excellent enseignement de professeur à l'Ecole de médecine. Esprit très ouvert sur toutes les ques- tions sociales, littéraires et artistiques de son temps, M. J. Bru- chon fut sincèrement attaché à la Société d'Emulation et sut lui prodiguer, en maintes circonstances, son entier dévouement. La Société reconnaissante, encore émue des grandes douleurs qui affligèrent les dernières années de son ancien président, décide, sur la proposition de M Jules Gauthier, qu’un portrait de M. Bruchon sera placé en tête du travail de M le docteur Le- doux. M. Gazier, bibliothécaire de la ville, donne lecture d’une inté- ressante étude sur les Evéques constitutionnels du Doubs, en utilisant des documents inédits provenant de la correspondance de l’abbé Grégoire, que le père de l’auteur, M: Gazier, secré- taire du Comité des travaux historiques, a eu la bonne fortune de recueillir. Ce travail fort suggestif qui comprend de nom- breuses lettres de Seguin, de Demandre, de Moyse, de Row et de beaucoup d’autres prêtres ou évêques constitutionnels, pré- sente sous un jour nouveau, même après l’ouvrage magistral de M. Sauzay, la figure des évêques de notre département pen- dant la période révolutionnaire, et nous fait connaître les négo- ciations auxquelles leur élection a donné lieu. La Société ap- prouve avec empressement la publication de cette contribution à notre histoire locale. M. le Président faitla communication suivante : « Depuis notre dernière réunion, la Société d’'Emulation a eu » la douleur de perdre trois de ses membres les plus estimés. » M. Henri Coulon n'était pas seulement le doyen des avocats » du barreau de Besançon, c'était encore le doyen de notre so- » ciété à laquelle il appartenait depuis 1856. Très affable et très » serviable, M. Coulon ne comptait que des sympathies parmi nX DIX; » nous. Bien que son activité fut absorbée par les affaires du » palais, il assistait fréquemment à nos séances et venait tou- » Jours s’associer à nos banquets. » M. le comte Edouard Mareschal de Vezet était des nôtres » depuis 1859. C’était le digne représentant d’une honorable et » vieille famille bisontine. | » Nous avons encore à déplorer la perte d’un collègue plus » jeune : M. Léon Béjanin, mort avant l’âge, miné par le chagrin » que lui causa la perte d’une fille chérie. M. Béjanin consacrait » ses loisirs à la peinture et spécialement au paysage. Il était » depuis plusieurs mois président de la Société des Amis des » Beaux-Arts. Nous envoyons aux familles de nos collègues dé- ; funts l’expression de nos vives doléances. » M. le Président donne lecture d’une demande de modification aux statuts déposée par MM. Bonnet, Ledoux et Nargaud, an- ciens présidents. Cette demande est renvoyée à une commission spéciale composée de MM. H. Mairot, Blondeau et Gazier. M. Kirchner est chargé de faire un rapport sur le volume : Sur la Végétation des lacs du Jura, offert par M. Magnin, professeur _ à la Faculté des sciences. L'ouvrage intitulé: Armand Marquiset : Histoire de ma vie, ; offert par M. le comte Alfred Marquiset, sera présenté à M.le docteur Baudin, pour lui demander un compte-rendu ou notice bibliographique. Sont proposés, puis élus et proclamés : Membres résidants : M. Adrien LECLERC, conseiller à la cour d'appel de Besançon, présenté par MM. M. Thuriet et Clavey. M. GAIFFE, professeur au Lycée Victor Hugo, présenté par MM. Gazier et Ledoux. Le Président, Le Secrétaire, M. THURIET. A. \VAISSIER. D Séance du 17 décembre 190%. PRÉSIDENCE D4 M. MAURICE THAURIET. Sont présents : BUREAU: MM. Thuriet, président; Parizot, vice-président ; Vaissier, vice-secrétaire ; Fauquignon, trésorier ; Kirchner, ar- chiviste. MEMBRES : MM. Berdellé, Blondeau, Bonnet, Bourdin, Cel- lard, Gazier, Dr Ledoux, Pingaud, abbé Rossignot, Savoye, De Truchis. M. le président Thuriet donne communication de la première partie d’une Etude sur les Discours de rentrée, Spécialement sur ceux quiont été prononcés devant le Parlement de Franche- Comté et devant la cour d'appel de Besançon. Une récente dé- cision des pouvoirs publics a mis fin à l’usage fort ancien qui consistait à ouvrir l’année judiciaire par un discours d’apparat. Après avoir établi l’origine de cette tradition qui disparait, M. Thuriet en a signalé les principales manifestations dans l’histoire du Parlement de notre province. fl à cité notamment les discours prononcés en 1775, lors de la réinstallation de lan- cienne magistrature, après la chute de Meaupou. Il a fait en- suite [a revue rétrospective des discours prononcés depuis lins- titution de la Cour d’appel de Besançon jusqu'en 1902, en si- gnalant plus particulièrement ceux dont le sujet a trait à l’his- toire locale ou à des personnages comtois. M. Vaissier, saisissant l’occasion de la trouvaille récente de la sculpture gallo-romaine de Champforgeron représentant un Priape jeune, dieu des jardins, en fait le sujet d’un rapproche- ment avec une des plus précieuses acquisitions du musée d’ar- ‘chéologie, à savoir le vase en verre violet, décoré de figures en émail blanc ciselé comme un camée. Là, c’est le Priape barbu, aux oreilles pointues personnifiant la fécondité qu’on pourrait + appeler animale, tandis que le haut relief de Champforgeron personnifie plutôt la fécondité végétale. Castan qui, il y a 20 ans, n’a pas essayé de pénétrer le sens allégorique probable de la décoration du vase, en à toutefois donné une très bonne des- cription. L'intérêt d’une cérémonie priapique figarée, peut-être unique dans son espèce, mérite d’être remémoré et d'être pro- posé à l’étude des archéologues les plus compétents ; aussi est- ce dans cette vue que M. Vaissier, répondant à la demande de M. Furtwengler, éminent directeur de la Glyptothèque de Mu- nich, lui a adressé trois photographies des différentes faces de l'œnochoë priapique, documents plus sûrs et plus complets que la simple esquisse du développement de Ia seène, publiée en 1876, dans nos mémoires. M. Magnin présente les premières pages d’un Conspectus [a- miliarium regni vegetabilis, envoyé par notre confrère, M. Ven- drely, et donne des explications sur le plan suivi par l’auteur de cette nouvelle classification du règne végétal. Considérant l’im- portance à attribuer aux caractères oradatifs et évolutifs, M. Ma- gnin fait cependant des réserves sur les principes qui paraissent avoir guidé M. Vendrely dans l'établissement des grandes divi- sions de sa classification ; il pense, avec la grande majorité, si- non la totalité des botanistes actuels, qu’on ne peut plus main- _teniraujourd’hui les polypétales superovariés en tête de la série descendante des familles ; leur infériorité comparée aux gamo- pétales est démontrée par de nombreuses raisons d'ordres di- vers, tirées de l’organographie, du développement, des lois de la taxinomie, de la paléontologie etc (voir Heckel, Rev. sc. 1886, p. 337; de Saporta, Guillaud, rev. sc. 1880, p. 536 ; À. Magnin, végét. du Lyonnais, 1886, p. 696, 497 etc.). M. Henri Mairot fait connaître les conclusions de la Commis- sion nommée à la séance précédente pour examiner une ques- tion de modification au Règlement, proposée par MM. Bonnet, D's Ledoux et Nargaud. À l'unanimité, la Commission a estimé que cette proposition méritait d’être prise en considération, que les conditions de ladjonction des anciens présidents au bureau de la Société pour la solution de certaines questions intéressant — LILI — sérieusement l’avenir de la Société, adjonction qui a déjà lieu dans la pratique, devaient être fixées d’une façon précise. Elle a pensé toutefois qu'il n’était pas nécessaire pour cela de de- mander une révision des statuts de la Société approuvés par le Conseil d'Etat, et qu'une mention au procès-verbal des séances suffirait pour engager à ce sujet les membres de la Société. M. Bonñet, en opposition avec ces conclusions, croit nécessaire une modification des statuts eux-mêmes, et désireux d'obtenir des renseignements complémentaires, demande à la Société d’ajourner à une prochaine séance sa décision sur cette ques- tion. La Société faisant droit à sa requète, ajourne le vote sur la proposition de modification au règlement présentée par MM. Bonnet, Ledoux et Nargaud. Après un rapport verbal de M. le trésorier Fauquignon sur l’état financier de la Société, il est décidé que le budget pour l’année 1905 sera le même que celui de l’année 1904. Aux regrets exprimés à la dernière séance sur la perte de plusieurs membres décédés récemment, M. le président rappelle qu'il faut joindre ceux à la mémoire de M. Jules Larmet, ancien adjoint au maire et membre de la Société depuis vingt ans: M. l'abbé Rossignot qui avait été prié d'examiner l'ouvrage offert à la Société, intitulé: N. D. de Gray depuis 1620 et publié par M. le chanoine Louvot d’après les manuserits de l’auteur, le chanoine Villerey, ancien curé de Gray, signale l'intérêt de cette publication en raison de l’importance historique du pèlerinage célèbre en l'honneur d’une image vénérée à l’époque des pestes du xvire siècle. | L'ordre du jour appelant l'élection du bureau pour l’année 1905, la Société procède à cette nomination par acclamation. M. Jules GAUTHIER, notre secrétaire décennal, appelé aux fonctions d’archiviste de la Côte-d'Or, ayant quitté Besançon, est d’abord nommé par la Société secrétaire décennal honoraire. —= II = Bureau pour l’année 1905. Président annuel : M. Adolphe PARIZOT, inspecteur hono- raire des Enfants assistés. Premier vice-président : M. Maurice THURIET, avocat général. Deuxième vice-président : M. le D' Ant. MAGNIN, doyen de la Faculté des Sciences. Secrétaire décennal : M. Georges GAZIER, conservateur de la Bibliothèque de la Ville. Vice-secrélaire : M. Alfred VAISSIER, conservateur du Musée archéologique. Trésorier : M. FAUQUIGNON, receveur honoraire des Postes et Télégraphes. Archivistes : MM. KIRCHNER et MALDINEY. RE 1 À anne RAPPORT SUR L'OUVRAGE DE M. le D' ANT. MAGNIN LA VÉGÉTATION DES LACS DU JURA Le gros volume, que le Dr Magnin vient d'offrir à la So- ciété d'Emulation, est le premier ouvrage d'ensemble qui ait été publié sur les lacs du Jura au point de vue botanique. Fruit de nombreuses excursions, de sondages parfois pé- nibles et laborieux, de longues et minutieuses études, il com- prend deux parties distinctes. Dans la première, l’auteur a exposé en détail la flore de 74 lacs Jurassiens, depuis les bassins rocheux du Doubs aux Brenets jusqu'au lac du Bourget en Savoie, avec des plans et des schémas indiquant la topographie de tous ces lacs, ainsi que leurs diverses zones de végétation: (phragmitaie, nu- pharaie, potamaie, charaçaie. Cette partie sera très utile à consulter à l’avenir.) Dans la seconde partie, plus générale et plus philosophi- que, il étudie les ressemblances et les différences qui carac- térisent la végétation de chacun de ces lacs, et 1l en recher- che les causes. On y trouve une intéressante comparaison de ia flore lacustre du Jura avec celle des régions voisines, Vosges, Alpes, Plateau central, et même Pyrénées. Le cha- pitre qui suit a des remarques générales sur le milieu aqua- tique et le milieu lacustre Cette seconde partie est aussi re- marquable au point de vue de la synthèse que la première l’est au point de vue de l’analvse. Le volume se termine par des considérations fort curieuses sur l’évolution des lacs, dont la durée serait limitée, et qui, RSA es passant par différents stades, seraient successivement des lacs à talus et à eau profonde, des lacs à beine et à mont, pour finir par ne plus être que des étangs ou des marécages. Tel est, brièvement résumé, le contenu de cet important ouvrage, qui a reçu un accueil chaleureux et enthousiaste parmi les sommités du monde savant. M. le professeur Ma- gnin y a consacré 10 années d’études et de patientes recher- ches (de 1890 à 1900). Mais le sujet est si vaste que, malgré toutes ses peines et ses efforts, 1l n’est pas épuisé; 1l reste en effet à étudier les microphytes, le plancton végétal, la zone profonde des cladophores., M. Magnin nous promet un second volume qui traitera de ces matières. Nous souhaitons que le temps et la santé lui permettent de mener à bonne fin cette entreprise. Ajoutons enfin que la partie bibliographique à été l'objet de soins particulers et que l'ouvrage est orné de nombreuses photogravures, dont plusieurs très bien réussies. Besançon, 30 novembre 1904. Sos ee CUVE K, 4 6 LA SOCIÉTÉ D'ÉMULATION DU DOUBS EN 1908 Discours d'ouverture de la séance publique du jeudi 17 décembre Par M. Edmond FRANCEY PRÉSIDENT ANNUEL MESDAMES, Gé MESSIEURS, Lorsqu'une année s'achève, il nous plait et il nous est utile de jeter une vue d'ensemble sur l’œuvre qu'elle a vu s’accomplir dans notre société, sur les progrès réalisés par _le travail continu de ses chercheurs. Des documents nouveaux apparaissent, qui jettent la lu- mière et la vie sur des coins, encore tout remplis d'ombre et de mystère : le passé du sol natal ressuscite, par frag- ments, du linceul où le temps l’enveloppait. Les travaux iso- lés s’agrègent par leffet d’une inspiration commune; le bourdonnement de l’abeille devient le bruit de la ruche. La source des efforts individuels se découvre : dans les généra- üons disparues, dans les vestiges de leurs monuments et de leurs mœurs, nous cherchons à nous mieux connaitre, à nous mieux comprendre. En suivant la chaine, invisible au regard superficiel, qui nous relie à nos ancêtres, nous dé- couvrons mieux le sens de la vie moderne. De même que la science de l’étvmologie permet de saisir en toutes ses À 0) PR nuances la valeur des mots, ainsi l’histoire de notre province nous en fait pénétrer davantage la richesse et la variété et, si jose dire, le suc intime. Et dans la résurrection de ce qu’on croyait mort, palpite une mystérieuse poésie, qui émeut l’âme du savant, lorsque ses doigts touchent à la pous- sière des vieux parchemins. Ces impressions exquises, vous vous êtes imposés, Messieurs, la noble tâche de les commu- niquer à vos concitoyens. Vous voulez que la vue d’un vil- lage comtois, d'un rocher aride, d’une ruine attristée, peu- plent vos âmes de vieilles légendes et fassent revivre les choses et les êtres évanouis. La fin que vous poursuivez est généreuse et morale; votre but est de restituer à ce qui n’est plus, par vos patientes recherches, son caractère de vérité historique et scientifique. Le volume de vos mémoires de 1902, qui vient de paraitre, Gontient les œuvres les plus intéressantes, dont mon pré- décesseur et ami, le savant docteur Nargaud, vous a fait l’année dernière, à pareille époque, dans un éloquent dis- cours, une complète analyse. L'année 1903 a marqué une étape de plus dans la belle carrière que vous vous êtes ouverte. Mais avant de se réjouir des fruits de vos labeurs il faut penser aux champions dis- parus et saluer les morts. Nous avons le devoir de leur rendre hommage, de les révéler une dernière fois, pour éveiller chez les uns des souvenirs attendris, et pour les rendre familiers à ceux qui, nouveaux venus, doivent en les remplaçant recueillir leur tradition. : est Louis Bouvard qui, pendant de longues années, a fait partie de la société, lui qui en fût devenu l’oracle si le barreau, l'administration municipale et hospitalière n’eussent absorbé Ïa plus grande part d’une incroyable puissance de travail. C'est Maurice Cosson, ancien trésorier général du Doubs, ancien député des Vosges, naturalisé à Besançon franc-com- tois. Par l'amour qu’il a porté à notre province, par l’ama- by" LE er bilité de son caractère, sa courtoisie, son tact parfait, il a mérité la sympathie et l'estime de tous. Cest Jean Petit, le sculpteur. né en 1819 dans ce palais de Granvelle, dont son œuvre préférée, la statue du célèbre cardinal, embellit la cour intérieure. Fils d’un ouvrier, il lui a fallu conquérir, à force de travail persévérant, le droit d’être un véritable artiste. La gène des premières années ne la pas empêché de multiplier ses créations : statues, bustes, bas-reliefs qui vont enrichir nos collections publiques. Hom- mage aussi à l’œuvre de sa bonté, à ces fondations généreuses en faveur des enfants du peuple, qui témoignent d’une vo- cation pour l’art et à qui il a voulu épargner les secrètes dé- tresses d’une âme ardente, aux prises avec la pauvreté. Alexandre Vézian, qui fut président de la société d'Emula- tion du Doubs en 1875 et plus tard conseiller municipal. Doyen de la Faculté des sciences, aimé des jeunes généra- _tions qu'il a formées, il est devenu un des maitres de la géo- logie. Ses travaux ont enrichi nos mémoires. Par un juste retour de notre reconnaissance, ils enregistreront sa vie d'homme de bien, de savant distingué, sous la plume de notre confrère M. le docteur Girardot, Ulysse Robert, membre honoraire, inspecteur général des _ bibliothèques et des archives, qui à mis son érudition si sûre et si étendue au service de la direction du catalogue géné- ral des manuscrits des bibliothèques de France, en même temps qu'il pubhait l’histoire et le bullaire du pape Calixte IT, les testaments de l’officialité de Besançon. la vie de Philibert de Châlons. Eugène de Beauséjour, membre correspondant, ancien magistrat à Dole, à Vesoul, à Lons-le-Saunier, à Besançon. Gendre de l'historien Edouard Clerc, il a puisé à son contact le goût des études historiques. Parmi ses publications, je si- gnalerai notamment l'histoire du bailliage de Vesoul et des magistrats qui y ontsiégé. M. Léon Viellard, le grand industriel de Morvillars, admi UE ee nistrateur de la Compagnie de l'Est, dont les rares qualités d'intelligence et de savoir se sont déployées dans des direc- tions si diverses. Erudit, M. Viellard a publié un ouvrage re- marquable sur la trouée de Belfort et ses souvenirs histo- riques. [1 nous a donné une étude sur la maison féodale d'Orsans. | M. Jean-Baptiste Morlet, ancien négociant, ancien conseil- ler municipal, membre de Ia Chambre de commerce, qui a donné tout son dévouement à l’assistance publique et à l’ad- ministration municipale. [1 fut, chez nous, le promoteur gé- néreux de l’établissement du téléphone. Longue, vous le voyez “est -latthste de nos "refsreties membres. Mais si l’âge de ceux qui s’en vont, n'empêche pas les larmes de couler et si la mort de l’homme de bien est toujours prématurée, du moins avons-nous la conso- lation de penser que la plupart de ceux dont j'ai cité les noms ont parcouru une pleine carrière et donné la mesure de leurs talents. J'arrive au bord d’une tombe qui vient à peine de se fermer - Sur un jeune homme, à l’âge où les preuves données se pa- rent de toutes les promesses de l’avenir. Un caractère de franchise et de loyauté, une bonté, une douceur sans bornes, une haute valeur scientifique, nous rendent plus douloureu- sement cher encore le souvenir d'Henri Bruchon. La sym- pathie s’épanouissait autour de lui comme elle va à son vénéré père, dont il avait si bien suivi l'exemple. Nous Pa- vions accueilli avec joie parmi nous ; il nous apparaissait comme une recrue précieuse et ses premiers travaux avaient justifié nos espérances, Sa perte laisse parmi nous un vide immense, comme elle a laissé au cœur de sa famille, dont il était le juste orgueil, un mguérissable chagrin Je salue maintenaint les nouveaux venus. Dans les lignes imparfaites qui viennent de retracer si brièvement les morts, ils ont vu la tâche à remplir, Ils emploieront, comme Pont fait leurs prédécesseurs, les qualités dont ils ont bien voulu M nous assurer le concours, en continuant les progrès qui n'ont pas cessé un instant de signaler la marche en avant de la Société d’Emulation. Leurs créations viendront s'ajouter à celles qui constituent notre richesse acquise. L'année 1903 à vu éclore, elle aussi, des œuvres nom- breuses et toutes intéressantes à titres divers. M. Alfred Vaissier, dont il serait superflu aujourd’hui d’en- treprendre l’éloge, et qui sait recueillir, avee une merveil- leuse divination, pour en faire sortir l’histoire, les moindres débris répandus dans notre sol, nous a donné encore toute une série de notes sur des points mal élucidés. Il a su déterminer l’époque probable à laquelle les monu- ments de Vesontio ont été partiellement détruits {avant la venue de l’empereur Julien en Séquanie vers l’an 360 de notre ère). Il conclut à une invasion venue d’outre-Rhin, anéantissant Mandeure, puis, détruisant, en partie du moins, Besançon, qui abandonné par les troupes romaines, réfugiées sans doute au delà de la Saône, ne retrouva jamais son an- cienne splendeur. Deux statères d’or pâle des Auberci Cenomanni, c’est-à- dire du peuple gaulois qui habitait la région du Mans, re- trouvées aux environs de Poligny, lui ont permis d'affirmer que longtemps avant César, au lendemain de la mort de Phi- lippe de Macédoine et d'Alexandre, un commerce très actif reliait le nord et le midi, l’est et l’ouest de la Gaule indé- pendante. M. Jules Gauthier, une fois de plus, nous à offert de nou- velles preuves de son incroyable activité. De l’heureux mé- lange de sa vaste érudition et du sentiment si vif de la poésie qui s'attache aux choses anciennes, nous avons vu Jaillir encore de nouveaux joyaux. Je signale l'étude sur «les cloches franc-comtoises » his- toire à grands traits des carillons « tréseaux » et bourdons qui, du xrI° siècle à nos jours, ont animé les beffrois des vieilles églises et dont la plupart ont péri, au cours des âges, nee tantôt dans les incendies, tantôt dans les pillages des guerres d'autrefois, pour être anéantis par centaines en 1792-1793 quand la conseription des cloches transforma en canons le bronze des clochers. Les armoriaux el les hérauts d'armés francs-comtois, étude sur les praticiens d'art héraldique, qui, à parür des derniers ducs de Bourgogne, pénètrent en Franche-Comté, y font école, dressent des recueils de noblesse, colhgent les armoiries et battent souvent monnaie sur la vanité, matière imposable s’il en fût. Malgré ses côtés puérils en apparence, l’art héraldique à tenu trop de place dans les siècles écou- lés pour que sa Connaissance ne soit pas indispensable à qui veut explorer le passé. C’est un critérium auquel on doit et on devra maintes découvertes en matière d'art et d’archéo- logie. Livres de raison des puysans francs-comtlois. Saisies sur le vif, les confidences sincères et modestes, que quelques paysans des montagnes ou de la plaine confient, au xri° ou _xiH° siècle, à quelque cahier, renseignent mieux, sur la vie de nos aieux de village, que les documents, si nombreux dans nos archives, émanant des notaires où des greffiers ne s’oc- ecupant que du terre à terre des contrats : vivant dans la pau- vreté et surtout très laborieusement, le paysan à fait souche de descendants robustes et'donné à son pays, dans toutes les catégories sociales, des héritiers qui lui font honneur. La cheminée du médecin Casenat de Besancon, exilée au musée de Dole. Curieux souvenir artistique d’un contempo- rain et d’un commensal du cardinal de Granvelle, ce précieux morceau de sculpture polvchrome, avec bas-reliefs, colonnes et ornements d'architecture, inscriptions, emblèmes, a de plus le mérite de mettre au concours un petit problème à résoudre, celui des initiales: PH. K. D. qui doivent repré- senter le prénom et le nom de quelque artiste dolois de 1565. Traité latin de l’antiquité et de la noblesse de la cité de Besançon, par Hugues Babet, de Saint-Hippolvte. Ce lettré SR qui fut le professeur de Gilbert Convers et de Jean Matal, fut aussi leur précurseur dans la louange du pays comtois et fit entrer dans les cosmographies, éditées de son temps, à Bâle ou en Allemagne, les premières descriptions du bre comté de Bourgogne, Il v a, dans cet ordre d'idées, nombre de choses nouvelles à retrouver et à mettre en lumière dans l’œuvre de nos rhéteurs de la Renaissance. Epaves de la bibliothèque de Granvelle, retrouvées dans les bibliothèques du château de Chantilly, de la ville de Vesoul, et d’une communauté religieuse de Besançon, sous forme de belles et curieuses reliures, d’un grand caractère, enserrant de superbes éditions de classiques flamands, alle- mands ou vénitiens. Inscription inédite de 1557, donnant l’origine du nom de la rue Sainte-Anne à Besancon. Après avoir flagellé les pillages d’un collectionneur indé- hcat, qui fut au xvurr* siècle le fléau des bibliothèques et des archives comtoises, M. Gauthier à révélé d’autres pillages accomplis au x1x° siècle par un érudit de valeur, atteint de cette kleptomanie qui amoindrit fâcheusement les dépôts publics. Son nom devra, tôt ou tard, être publiquement honni, ne fut-ce que pour éviter le retour d’exploits de ce genre. Les Pouillés du diocèse de Besançon du x1° au xIrr° siècle, étude de géographie historique, précisant un certain nombre de faits inédits. Notice sur l’église Saint-Maurice de Besançon, ses recons- tructions et ses embellissements de 1550 à 1719, faisant connaître nombre d'artistes oubliés et d'objets d’art disparus. Marnay aux X VIIP et XIX° siècle, première page de mono- graphie d’une charmante bourgade très voisine de Besançon, qui mire encore dans l’eau de l’Ognon les derniers vestiges d’un beau château de la Renaissance. ‘ M. l’abbé Auguste Rossignot, bibliothécaire de l’archevéché, dont nous allons applaudir une biographie des plus atta- M ee chantes et des mieux établies de l’orientaliste Pauthier, ori- ginaire de Mamirolle, ne s’est pas borné à rendre à notre distingué compatriote un hommage mérité. Il nous a rendu compte de fouilles très curieuses qu'il a pratiquées dans la Haute Saône sur le territoire d Argillières, et qui ont mis en. évidence, près de la route romaine de Pierrecourt à Bour- bonne, trois groupes de métairies et d'habitations, contempo- raines de l’empereur Claude IF, c’est-à-dire du 1xr° siècle. M. Maurice Thuriet, qui collabore activement à la biogra- phie provinciale, que l'Association franc-comtoise, dont il vient d’être nommé président, s'efforce de nous donner, a consacré à Jean Petit, le sculpteur vigoureux que nous venons de perdre, une étude biographique très complète, et a mis en lumière, avec un grand talent, ce qu’un fils d’ou- vrier, dénué d'appui et d'argent, a pu faire pour rivaliser avec un maître du ciseau. La notice de M. Thuriet défendra de loubli le nom du sculpteur, qui trouvera dans la posté- rité reconnaissante plus de justice qu’on ne lui en a rendu de son vivant. | M. Victor Guillemin qui, dans le volume de nos Mémoires de 1902, à publié une savante et complète étude sur la pein- ture anglaise, nous a lu, cette année, une étude sur l’aimable poète Alfred Marquiset, notre associé, dont la verve et Ia muse élégante ont donné déjà à notre théâtre comtois tant d'œuvres originales et spirituelles. M l'abbé Druot a consacré une consciencieuse étude à la voie romaine de Vesontio à Mandeure, qui traverse les cantons de Baume et de Clerval, par Luxiol, Autechaux, Voillans, l’Hopital-Saint-Lieffroy, Rang-les-L’Isle. L’explo- ration a été faite par lui avec beaucoup de méthode et de sagacité. Ses creusages et ses observations fort judicieuses, ajoutent d’intéressants jalons à la carte de la Séquanie romaine. | | Après nous avoir parlé de Pactivité qui règne dans nos séances et dont les fruits se retrouveront en 1904 dans notre RO volume de Mémoires, laissez-moi, mesdames et messieurs, vous entretenir un instant de l’œuvre collective de la société en 1903. La Société d'Emulation, après avoir réalisé le capital de la pension des frères Grenier constituée par le dernier survi- vant, le poète Edouard, a décidé que cette pension triennale serait de 1,800 francs par an et que, dans ce but, les intérêts, aujourd'hui de 1,550 francs environ, seraient capitalisés jusqu'à ce que pareille rente puisse être régulièrement servie. Le délai nécessaire permettra incessamment d'étudier dans le sens le plus libéral et le plus conforme aux inten- tions des généreux donateurs, les conditions d'une fondation, dont notre Société s’honore d’être à jamais la dispensatrice. En 1899, la Société d'Emulation a fondé l'Association franc- comtoise, c’est-à-dire le groupement, en un étroit faisceau, de toutes les sociétés savantes de notre ancienne et chère province. Tour à tour, à Dole, à Montbéliard, à Gray, l’Asso- cilation a tenu ses pacifiques assises. Cette année c'était à Lons-le-Saunier où quatre-vingts congressistes, présidés par M. Philippe Berger, de l’Institut, professeur au Collège de France, notre compatriote et notre collègue, ont aeclamé l’union si nécessaire, pour le progrès de la science et le maintien de cet esprit provincial, qui est une grande force du patriotisme national L’an prochain, au mois d'août 1904, l'Association se tiendra à Besançon et ce sera à vous, Mes- sieurs, à donner à cette fête l'ampleur qui convient. C’est votre nouveau et distingué président, auquel je vais remettre le pouvoir, que votre collaboration m'a rendu facile, qui aura l'avantage de présider l'association franc-comtoise et qui fera avec vous, avec notre Jeune et aimable bibliothécaire, M. Gazier, secrétaire général du Congrès, les honneurs de notre vieille capitale aux délégués venus des bords de la Saône, du pied des Vosges et du Jura. Le succès du Congrès de Lons-le-Saunier et des trois réunions qui l’ont précédé, est un augure favorable pour ses succès futurs, et la Société A0 d'Emulation peut se flatter d’une initiative qui n’a pas trouvé _et ne trouvera jamais de détracteurs. Dans la mesure de ses forces, la Société d'Émulation a mis tout son dévouement, depuis soixante années, à déve- lopper la prospérité artistique et scientifique de notre ville. Elle a enrichi le Musée d'archéologie, après avoir fondé et doté le Musée d'histoire naturelle, après avoir libéralement distribué ses ressources à nos bibhothèques, à nos labora- toires. La lutte pour la vie, si âpre aujourd’hui, engendre l’indiffé- rence aux choses de l’art et l’égoïsme. Il nous appartient, Messieurs, de lutter de toutes nos forces contre ces ferments de corruption et de dépérissement intellectuel et moral. Cherchons à grouper autour de nous la Jeunesse avec sa sève et son entrain, les hommes plus mürs, avec leur science, leur sagesse et leur influence Nous sommes sûrs d'être secondés dans notre tâche par le concours de tous nos concitoyens. Les marques de sympathie et d'estime que les hauts fonctionnaires de notre ville, présents et absents, ont bien voulu nous donner, nous sont une précieuse garantie. Qu'us reçoivent l'expression de notre sincère et respectueuse gratitude. Depuis bientôt vingt ans que j’appartiens à la Société, je n°v ai Vu que travail et entente. La lecture de vos mémoires, qui forment déjà une petite bibliothèque, décèle cette har- monie qui règne au mieu des plus nobles préoccupations. Fasse l’avenir que de si louables efforts restent féconds et que votre initiative continue à s'exercer au grand profit des sciences, des lettres et des arts, dans cette vieille cité dont vous écrivez les annales, dont vous ressuscitez les traditions, les gloires, les monuments ! LE PROFESSEUR ALEXANDRE VEZIAN | Par le D' Albert GIRARDOT Séance du 16 décembre 1908. MESSIEURS, La Société d'Emulation du Doubs a perdu, au mois d'août dernier, l’un de ses membres les plus anciens, M. le profes- seur Alexandre Vézian, qui lui appartenait depuis plus de quarante ans, et qui avait pris, autrefois, une part active à ses travaux et à ses publications. M. Vézian était né à Montpellier, le 29 avril 1895 ; il avait _ fait ses premières études au prvtanée de la Flèche, où son père l’avait placé, le destinant à l’état militaire ; il s’y était fait remarquer par sa vive et précoce intelligence, et par une aptitude très marquée pour les sciences d'observation. Celles- ei prirent bientôt plus d’attrait pour lui que la carrière des armes, et il quitta la voie dans laquelle sa famille désirait l’engager, pour se consacrer à l’enseignement et entrer dans l’université. Il y débuta comme professeur de physique au lycée de Bourg, et, après deux suppléances, l’une à la fa- culté des sciences de Clermont, l’autre à celle de Rennes, il fut chargé du cours de minéralogie à la faculté des sciences de Besançon, le 2 décembre 1859: puis il devint titulaire de la chaire de géologie et de minéralogie, le 15 janvier 1862. En 1878, il fut nommé doven de cette faculté, et conserva “one le décanat jusqu’à l’époque de sa retraite ; il reçut, en 1881, la croix de chevalier de la Légion d'honneur. La carrière scientifique de M. Vézian ne fut pas moins brillante que sa carrière universitaire, et elle l’eût été da- vantage encore, s’il se fût moins tenu à l'écart, par le fait d’une modestie excessive et d’une véritable répugnance à se mettre en avant. Ses premiers travaux de géologie sur la province de Barcelone attirèrent l'attention sur lui, et son Prodrome qui parut quelques années après, obtint du monde savant l’accueil le plus favorable. Cet ouvrage considérable n’est pas seulement un abrégé de géologie, comme l'indique trop modestement son auteur, mais un véritable traité de cette science, dans lequel il passe successivement en revue : la cosmogonie du globe, les phénomènes dont le siège est à l’intérieur de Pécorce terrestre, ceux dont le siègeestà lex térieur de cette écorce, la formation des montagnes, la stra- ügraphie, les modifications de la flore, de la faune et du cli- mat au cours des temps géologiques; enfin, la géologie systématique. Le Pradrome renferme sur toutes ces ques- üons des indications très complètes et des aperçus nouveaux, pour le moment où il fut composé; aussi son succès fut grand lorsqu'il parut et il eut rapidement trois éditions, en 1861, 1863 et 1865. Quelques années plus tard, en 1873 et en 1874, M. Vézian publia, dans les Mémoires de notre So- ciété, une étude très étendue sur le Jura franc-comtois, sorte d'histoire géologique de cette partie du massif, comprenant l'examen de son dépôt, dans un bassin bien défini de la mer jurassique, de sa structure, des phases qu'il a traversées de- puis l’achèvement de sa sédimentation jusqu'à l’époque ac- tuelle, et l’exposé des phénomènes dont 1l a été le siège pendant cette dernière période. Ge travail, présenté au con- grès des sociétés savantes, en 1875, valut une médaille d’ar- gent à son auteur; il témoigne, comme le Prodrome, d’un labeur intense et prolongé et d’une grande activité intellec- tuelle, Cette activité, toutefois, ne se borna pas à la publica- ee CU: tion de ces deux ouvrages ; M. Vézian fit paraitre aussi, soit dans notre Recueil, soit dans le Bulletin de la Société géolo- gique de France, ou dans celui de la section du Jura du Club alpin, plusieurs notices concernant les assises secondaires de notre province et, dans l'Annuaire du Club alpin francais, une « Esquisse de l’histoire géologique du Mont-Blanc », ainsi que divers articles sur les montagnes, leur formation, leur rôle géologique et les théories orogéniques. Quelques années déjà se sont écoulées depuis la publica- tion de ces travaux, pendant lesquelles la science a progressé d'une manière, pour ainsi dire prodigieuse, et certains d’entre eux sont aujourd'hui de beaucoup dépassés; bien des idées qui lui étaient propres, ou qu’il avait adoptées, ont été re- connues fausses puis abandonnées. On ne saurait voir là, toutefois, une marque d’infériorité; ses travaux ont subi Ja destinée commune à toutes les œuvres scientifiques qui sont comme des degrés, sur lesquels la science s'appuie, puis qu’elle franchit et laisse derrière elle, en s’élevant sans cesse plus haut; aussi, pour apprécier la valeur du savant, ne faut-il pas le juger au point de vue du temps actuel, mais de celui où il écrivait. D'ailleurs, si les théories se sont modi- fiées, si l’invraisemblance de quelques-unes des hypothèses qu’il défendait a été démontrée, ses observations person- nelles demeurent d’une exactitude incontestable et n’ont rien perdu de leur justesse. M. Vézian entra dans notre Société en 1860, dès son arrivée à Besançon ; il vint y continuer la tradition des recherches de géologie, auxquelles elle a toujours fait bon accueil: comme ses prédécesseurs, Numa Boyé, Etallon, Lory, Pi- dancet, pour ne citer que ceux-là, il contribua à augmenter étendue de nos connaissances sur ce pays, non sans jeter quelque éclat sur notre Compagnie; il fut toujours dévoué à ses intérêts, enrichit ses Mémoires d’un remarquable travail et la présida deux fois, en 1863 et en 1875. Il laissera parmi nous le souvenir d’un confrère bienveillant et de relations agréables, qui aimait la science et cherchait à la faire aimer, et qui fit honneur à notre Association ; aussi ne devions-nous pas le laisser disparaitre sans lui adresser ici un dernier adieu. … L'ORIENTALISTE GUILLAUME PAUTHIER (1801-1873) Par M. l’abhé Auguste ROSSIGNOT BIBLIOTHÉCAIRE DE L'ARCHEVÊCHÉ MEMBRE RÉSIDANT Séance publique du 17 décembre 1908 Le 11 mars 1873 mourait à Paris un de nos compatriotes, qui a laissé un nom comme orientaliste, et dont aucune pu- blication franc-comtoise n’a parlé à cette époque. Cet homme est Guillaume Pauthier, connu dans son pays natal sous le nom significatif de Pauthier le Chinois. Si nous en croyions la Grande Encyclopédie, il serait né à Besançon en 1801 : or, il est né à Mamirolle le 12 vendémiaire an X (4 octobre 1801), comme en font foi ses actes de naissance et de baptème (1). (4) Acte de naissance de Guillaume Pauthier : « Du douze du mois de vendémiaire, an dix de la République. Acte de naissance de Jean-Pierre- Guillaume Pauthier, né le douze, à trois heures du soir, fils de Pierre- François Pauthier et de Jeanne-Baptiste Bideaux, profession de proprié- taire, demeurant à Mamirolle, mariés, présenté par Jean-François Pauthier, oncle. Le sexe de l’enfant a été reconnu pour être garcon. « Premier témoin, Joseph Bouteillier, âgé de trente-trois ans, domicilié à Mamirolle. » Second témoin, Jeanne-Pierrette Bideaux, âgée de vingt-quatre ans, domiciliée à Bouclans. » Sur la réquisition à nous faite par François Pauthier, oncle. » Et ont signé, à l'exception du second témoin, qui a dit être illetiré. » Signatures : J.-F. PAUTHIER, Jh BOUTEILLIER. » Constaté par la loi, par moi, Joseph MERCIER, maire de Mamirolle, faisant fonction d'officier de l'état civil. Les an, mois et jour que dessus. « Signature du maire : Jh MERCIER. » nee cou En 1873, le neveu de G. Pauthier, M. Xavier de Ricard, publia le Catalogue des livres chinois composant la biblio- thèque de son oncle, avec une courte notice biographique où, le considérant surtout comme savant, 1l énumère toutes ses publications. M. Léon Séché a écrit, il y a deux ans, une we d'Alfred de Vigny, où il parle assez longuement de Guil- laume Pauthier, lequel étant entré de bonne heure dans l’a- mitié du poète, y demeura jusqu’à la fin et fut l’un de ses exécuteurs testamentaires. [Il nous montre Pauthier sous une autre face, et ces deux ouvrages se complétant, nous pour- rons en tirer une notice qui ne sera point sans quelque in- téret. Pauthier appartenait à une famille aisée de Mamirolle, et il fit sans doute quelques études dont sut ürer profit son ar- deur au travail. À l’âge de vingt-deux ans il était soldat au oot de ligne, où Alfred de Vigny servait comme capitaine. Celui-ci était d’un caractère mélancolique et rêveur; il fré- quentait peu les officiers de son régiment, et il trouva dans Pauthier un esprit sympathisant davantage avec le sien, car Pauthier était poète à ses heures, c’est-à-dire qu'il rimait. Etant apparenté au général Donzelot — son frère avait épousé la nièce du général — 1l devint très vite caporal et sous- officier. Sa liaison avec Alfred de Vigny commença dès 1825. Au mois de mars de cette année, le 55€ régiment était envoyé de Strasbourg à Pau. Vigny était en train décrire son poème de Satan. Il ramassa sa plume et son manuserit, mit le tout, avec sa petite Bible, dans le sac d’un soldat de sa compagnie et partit. Ge soldat, dont il parle dans une lettre à Brizeux, était Guillaume Pauthier. Celui-ci raconte qu’en arrivant à Nancev, le poëte, avec qui il avait causé tout le long de la route, lui fit la surprise de lui donner un billet de logement d'officier dans une bonne maison bourgeoise (1). Alfred de Vignv encouragea les premiers essais de son (1) CF. Alfred de Vigny et san temps, p. 108. ae el soldat, persuadé qu'il était, qu’un jour où l’autre. après ces tâtonnements, sa personnalité finirait par s’accuser. Ceux qui seraient curieux de connaître les essais de ce poète- soldat n'auraient qu’à feuilleter le Mémorial Béarnais de l’année 1824. Ce journal paraissait à Pau, où de Vigny et Pauthier tenaient garnison. La protection du général Donze- lot ne valut pas seulement à celui-ci de l'avancement, mais aussi des faveurs exceptionnelles, comme celle de faire suivre de son nom et de son grade de caporal ou de sergent les pièces de vers qu'il publiait dans les journaux. Alfred de Vigny et Pauthier n'étaient pas plus faits l’un que l’autre pour la vie militaire, mais si Pauthier n’était point un sol- dat, il n’était pas plus un poète. Ayant achevé son service, il continua cependant ses publications. En 1895 et 1836 pa- rurent, chez Maurice, à Paris : les Helléniennes, en faveur de la cause des Grecs, et les Mélodies poétiques et Chants d'amour. Le titre seul de ces ouvrages fait songer aux Mes- séniennes et aux Méditations, dont Pauthier s'était effective- ment inspiré, mais la poésie était médiocre. Voici quelques vers des Helléniennes : Une muse chère à la France Naguère a reproduit ses sublimes concerts. Sur l’aile de Tyrtée elle a franchi les mers, ; Portant aux fils des Grecs la gloire et l'espérance. Quels chants ont retenti sur les murs de Crissa? Quel luth harmonieux les redit dans Athène ? Ce sont les beaux accents du chantre de Messène ‘1, Et les accents plaintifs de la belle Héléna (?). Regardez ! la voilà cette Grèce superbe Dont le sol protecteur formait des demi-dieux ! Ses dieux mêmes, ses dieux ont disparu sous l'herbe, Mais il y reste encore la croix, fille des cieux! (1) Alfred de Vigny. (2) Casimir Delavigne. ) 24 "jets Levez-vous, fils d'Argos! levez-vous, fils d'Athènes! : O Sparte, tes héros suivent Léonidas! Courez ; entendez-vous la voix de Démosthènes ? Voyez--vous ce guerrier? C’est Epaminondas! Voici maintenant un extrait des Mélodies poétiques : La brise du désert à fait pâlir la fleur Que l’aurore arrosait de sa main virginale. Elle était l'amour de mon cœur. Elle était le parfum de l'aube matinale Elle m’apparaissait comme un rêve charmant, Comme un flambeau brillant au sein d’une nuit sombre. Cette illusion d’un moment, ; Cette extase d'amour a disparu dans l'ombre. Hélas! pour mériter ton cœur et ton amour, Aux champs de l'avenir, j'allais chercher la gloire ! Et je voulais qu’à mon retour Tu pusses t’applaudir et montrer ta victoire. Mais quand tu seras seule, hélas! pense à celui Qui vit fleurir pour toi le printemps de sa vie, Et qui se voit seul aujourd’hui, Arraché loin de toi comme une herbe flétrie. À ces poésies, qui ne révèlent pas un sentiment poétique bien original, il faut en ajouter quelques autres, publiées dans différents Recueils, tels que l’Album et le Petit Album frane-comlois, et la pièce sur le Dévouement de Decèze, récompensée d’une médaille dor par l’Académie de Besan- con, en 1829. Douze concurrents s'étaient présentés ; deux pièces seulement furent remarquées, et Pauthier partagea le prix avec M. Charles de la Villette, de Besançon, connu de- puis, dans le monde des lettres, sous le nom de Charles de Bernard. Le rapporteur reconnait que Pauthier, pénétré de son sujet, a bien disposé sa composition et qu'il a su placer son héros de manière à attirer les regards sur lui. Il signale dans cette pièce un excellent esprit, une marche vraiment = A9 logique, un style généralement harmonieux et élevé, uné versification toujours facile, quelquefois élégante, mais il y trouve des taches nombreuses et paraissant voulues. En voici quelques passages : L'Europe avait sonné l’allarme ; Les rois entre eux s'étaient ligués, Et par leurs bataillons en arme Leurs peuples étaient subjugués. Alors, de terreurs affranchies, Se reposaient les monarchies ; Soudain, dans l'univers surpris, On entendit un bruit immense ; C'était le vieux trône de France Qui s’écroulait sur ses débris. Pauthier fait parler Decèze dans les vers suivants Entendez d'avance l’histoire Qui redira les vœux si purs De ce bon roi dont la mémoire Sera chère aux siècles futurs ! Eloignez d’effrayans présages ! Songez au jugement des âges, À leurs arrêts réprobateurs ! Louis n’a-t-il plus de refuges ? Je cherche parmi vous ses juges, Et je ne vois que ses accusateurs, En 1830, Pauthier rencontra Paulin-Pàris et entreprit avec lui la traduction des œuvres complètes de lord Byron. Cette traduction fut publiée en dix volumes chez Dondey-Dupré ; elle porte le seul nom de Paulin-Pâris, mais les quatrième, cinquième et sixième volumes sont exclusivement l’œuvre de Pauthier ; sa collaboration est nettement établie par son traité avec le libraire et par des notes provenant de lui. Cependant une nouvelle direction allait être donnée aux études de Pauthier, Sous la chaude et puissante in Tia ue de son capitaine, il avait produit trop hâtivement, et peut- être füt-il devenu plus tard un vrai poète, bien qu'on Île soit de naissance : nascuntur poetae. En tout cas, les essais aux- quels il se livra ne lui ont pas été nuisibles ; ils ont formé son style en le rendant plus souple et plus facile : mais lo- rientaliste est. chez lui, bien supérieur au poète. Ce fut sur les conseils d’Abel Rémusat que Pauthier s’a- donna à l’étude des langues orientales. IT avait enfin trouvé la voie dans laquelle il allait s’'illustrer. « Et comme un bon- heur n'arrive jamais seul, dit Léon Séché, le général Don- Zelot lui confia dans le même temps l’administration de son château de Ville-Evrard, ce qui lui permit d'étudier en toute liberté d’esprit le sanscrit et le chinois » (1). Une série de publications sur les Indes et la Chine cons- titue l’œuvre proprement dite de Pauthier ; M. de Ricard en donne la liste complète. Il commença, dès 1829 et 1830, par quelques articles publiés dans le jouraal le Globe. En 1831, il fit paraitre un mémoire sur l’origine et la propagation de doctrine du Tao. Cet ouvrage suscita une première polé- mique entre Pauthier et Klaproth. De part et d’autre il y eut des mots assez vifs dont on retrouve les traces dans le Jour- nal asiatique. Pendant les années suivantes, de nouveaux articles de Pauthier parurent dans le même journal, dans le Gabinet de lecture et dans la Revue encyclopédique. Une Description historique et géographique de la Chine suivit de près, et en 18537 fut publiée, chez Didot, la traduction du Ta-Hio où Grande étude. Elle était en regard du texte chi- nois, imprimé en caractères mobiles fondus sous la direc- tion de Pauthier ; ce ne fut pas le moindre des services qu’il rendit à l’étude de cette langue. En 1840, il publia, en un fort volume in-8°, à deux colonnes, les Livres sacrés de l'Orient, voulant, dit-il, révéler à l'Europe les trois civilisa- tions : chinoise, parle Chou-King ; indienne, par les Védas, (1) Alfred de Vigny et son temps, p. 270. RONA et musulmane, par le Koran. Sa prétention est quelque peu exagérée et il nous parait émettre une contre-vérité lors- qu'il affirme que l'Orient, ignoré pendant de longs siècles, est devenu tout à coup l'arbitre des destinées de l’Europe qui, engourdie d’épuisement et de lassitude, sent le besoin d'aller puiser de nouveau sa vie au soleil de l'Orient. Cette publication fut récompensée par une médaille d'or de 2,500 francs, décernée à Pauthier par lInstitut, dans sa séance du 30 juin 1842. Une véritable aptitude pour l’étude des languesne devait pas tarder de susciter à Pauthier des contradicteurs. Les contradictions lui viennent de celui dont ilne devait guère les attendre, et elles furent si vives, qu’elles font soupcon- ner leur auteur de jalousie. Quelques pages traduites du chinois par Pauthier en furent l’occasion. Stanislas Julien, _ professeur de langues orientales à l’Institut, en fit la cri- - tique dans le Journal asiatique où elles avaient paru. Pau- thier lui répondit et la querelle s’envenima. Le but évident de Stanislas Julien était d’écarter Pauthier de l’Académie des inscriptions et belles-lettres, à laquelle celui-ci avait posé, prématurément peut-être, sa candidature. Les pamphlets succédèrent aux pamphlets et la querelle dura plusieurs _. années. Elle semblait depuis longtemps apaisée lorsqu’en 4871, sans aucune provocation, Stanislas Julien recommença ses attaques contre Pauthier qui, cette fois, se présentait avec des titres sérieux à l’Institut. Pauthier y répondit et releva les imputations mensongères lancées contre Abel Ré- musat, son ancien maitre. Mais n'insistons pas sur ces pé- nibles incidents et revenons aux travaux scientifiques de notre orientaliste. I] serait trop long et fastidieux de les énumérer tous chaque année 1l fait paraitre quelque publication nouvelle. En 1841, ce sont des documents officiels sur la Chine; en 1842, c'est un Essai sur l’origine et la formation similaire des écritures figuratives chinoises et égyptiennes. Le mé- 09 Le moire sur linscription de Si-gnan-fou, stèle chrétienne du vire siècle; des études et observations sur la civilisation et les coutumes chinoises, sur la géographie de ce pays, sur la grammaire ei les alphabets chinois et japonais, se succèdent sans interruption ; mais l’œuvre capitale de Pauthier est la publication du Livre de Marco-Polo, citoyen de Venise. Marco-Polo, né à Venise vers 1250, était d’une famille de voyageurs. Son père et son oncle avaient déjà pénétré jusque dans la Tartarie, lorsqu’en 1268 ils l’emmenèrent avec eux. Le jeune Vénitien gagna les bonnes grâces du Grand-Kan et fut envoyé par lui en mission à Pékin. Il visita la Chine, la Tartarie, l’Inde, le Thibet, pays alors inconnus des Occiden- taux, À son retour à Venise, il fut reçu avec honneur, et on lui confia le commandement d’une galère. Il fut fait prison- nier dans une rencontre avec les Gênois. Pendant sa capti- vité, il mit en ordre les notes qu’il avait recueillies et les publia. Longtemps on l’accusa d’exagération et de men- songe : mais les découvertes modernes ont confirmé son ré- cit, et l'ouvrage de Pauthier n’a pas peu contribué à en éta- blir toute la véracité. Cet ouvrage n’est pas une simple tra- duction. Il s'ouvre par une introduction de 156 pages, qui est à elle seule tout un livre historique, et le texte de Marco- Polo est suivi de six appendices, d’un index analytique, géographique, historique, et d’un glossaire des vieux mots français. : À toutes ces publications de Guillaume Pauthier on pour- rait ajouter de nombreux articles insérés dans le Journal asiatique et autres revues scientifiques. Mais ce que nous venons de dire suffit à nous donner une idée de tout ce que peut produire un travail assidu ; aujourd’hui où notre vie est si agitée et répandue sur un trop grand nombre d'objets, nous avons peine à le comprendre. En 1848, Pauthier fit diversion à ses études par une incur- sion dans la politique: aux élections législatives 1l posa sa candidature dans le département de Seine-et-Oise. Malgré la one protection de Lamartine il échoua, et l’année suivante il ne fut pas plus heureux. Cependant, à sa qualité d’orientaliste, il avait pu ajouter celle de cultivateur, puisqu'il gérait le do- maine du général Donzelot. Il s'était mème donné la peine de paraître dans les réunions publiques, et, croyant remplir un devoir politique, il avait fait imprimer une Nouvelle dé- claration des Droits et des Devoirs de l'Homme, qu'il avait répandue à des milliers d'exemplaires. [l faudrait la lire pour comprendre toute sa droiture et toute la générosité de son cœur, Mais ses sages paroles dépassaient l’entendement des populations auxquelles elles s’adressaient, et Pauthier, qui était gros, trapu et chevelu comme un Gaulois, ne sut pas sans doute les faire valoir de sa voix lente et embarrassée. Elles ne produisirent pas plus d'effet sur le corps électoral que du sanscrit ou du chinois, Son ancien capitaine, Alfred de Vigny, ne fut pas plus heu- reux que lui. Bien que, à partir de 1850, Vigny eût cherché les faveurs du nouveau régime, Pauthier ne lui en demeura pas moins fidèle ; car, dit Léon Séché, quand il s'était donné c'était pour toujours. « Depuis qu'il était sorti du régiment, son admiration pour son ancien capitaine n'avait fait qu'aug- menter : 1l l’aurait suivi jusqu'au bout du monde. Non qu’il partageât toutes ses idées et qu’à l’exemple de Pandore, il trouvât que le brigadier avait toujours raison ; mais 1l avait gardé envers lui quelque chose de la déférence du sergent pour son capitaine, et bien qu'il fut plus hibre avec Gigoux, avec Proudhon, avec Chaudey, ses bons amis de la Franche- Comté, c’est encore à Vigny qu’il allait de préférence conter ses peines. Et Vignv, qui souffrait déjà du mal terrible qui devait l’emporter, trouvait dans son cœur des paroles de consolation qui servaient de baume aux blessures de Pau- thier (1). » Alfred de Vigny mourut au mois de septembre 1863. Quand on ouvrit son testament, Pauthier fut très touché (1) Alfred de Vigny et son temps, p. 281, OL d'apprendre qu'il lavait choisi pour son exécuteur testa- mentaire, mais il le fut davantage encore du legs qu'il lui avait fait de son épée d’académicien. À cette époque, Guillaume Pauthier fit une courte trève à ses travaux ordinaires pour publier une brochure de 154 pages sur les Iles loniennes pendant le gouvernement du général Donzelot. C'est un juste hommage rendu à un homme qui fut généreux pour lui et au loval soldat dont vous voyez ici le portrait (D). On pouvait croire que le moment d’une juste récompense était arrivé pour Pauthier. Depuis longtemps il était membre de la société asiatique et faisait partie de son conseil d’adini- nistration. En 18792, il avait été chargé d’un cours supplé- mentaire de géographie et d'histoire à l'Ecole spéciale des langues orientales ; et la mort, en enlevant Stanislas Julien, avait fait disparaitre le plus grand obstacle qu'il eût rencontré sur sa route. Mais il ne devait pas tarder à être frappé à son tour. Pauthier était resté à Paris pendant les deux sièges et, pour son âme ardente et sensible, la double calamité de la guerre civile et de la guerre étrangère fut une dure épreuve. À peine put-il ouvrir le cours dont il était chargé, et, déjà malade dès ses premières leçons, il mourut le 11 mars 1873, à l’âge de soixante-douze ans. À la séance du 29 juin 1873 de la Société asiatique, un de ses collègues, Ernest Renan, lui rendait, dans son harmo- nieux langage, le témoignage suivant: «Le caprice de la mort nous oblige justement à rapprocher de M. Julien l’homme qui semblait destiné à être son émule et que de regrettables animosités séparèrent de lui. M. Guillaume Pauthier, malgré un réel mérite, malgré de vrais services rendus à la science, (1) Lecture de cette Notice a été faite dans la grande salle de l'Hôtel de Ville de Besançon, en face du portrait du général Donzelot, faisant ne de la galerie des généraux franc-comlois. “TOR n'a jamais occupé dans son pays le rang dont il était digne ; sa carrière à toujours été troublée et sa vie empoisonnée par les plus tristes mécomptes. Nous avons le devoir strict, après la mort de deux confrères qui nous laissent un égal regret, de ne pas réveiller des controverses que nous avons tout fait pour étouffer... L’érudition étendue de M. Pauthier lui eût assuré des droits au haut enseignement. Certes, il n’égalait pas Julien dans ce don spécial, départi à lui seul, de voir dans une phrase chinoise ce qui s’y trouve et rien que ce qui S'y trouve ; mais il avait plus d'instruction comparative ; moins souvent il se réfugiait derrière cette phrase péremptoire, si familière à Julien : « Je ne m'occupe pas de cela. » Sa curio- sité était ouverte, éclairée ; il recueillait avec ardeur et bon- heur. Son travail sur Marco-Polo, sa dissertation sur lins cription de Si-gnan-fou resteront dans la science. Sa mé- moire vous sera particulièrement chère, messieurs. Après notre respecté président, personne plus que M. Pauthier n’a donné à la Société asiatique de son temps et de son activité. Les épreuves de ces dernières années lui furent cruelles comme à tant d'autres. Le siège, la Commune, dont il vit à Passy, qu'il habitait, les scènes les plus terribles, l’ébranlè- rent au physique et au moral. Le découragement fut chez lui si fort, que nous cessâämes presque de le voir. Il avait soixante et onze ans, quand un accident subit l’enleva. Disons de cœur à cet honnête, franc et loyal confrère un sympathi- que adieu (1). » La parole de l’auteur de la Vie de Jésus, si elle est agréable, manque souvent de précision. Nous avons voulu savoir quel accident subit enleva Guillaume Pauthier ; nous avons appris par son neveu, M. Xavier de Ricard, qu'il mourut d’une at- taque d’apoplexie depuis quelque temps prévue. Si les travaux de Pauthier n’ont pas été récompensés, pen- (1) Journal asiatique, T° série, t. IL, p. 18. AOOG dant sa vie, comme ils le méritaient, il ne faut pas que ses compatriotes négligent sa mémoire. Nous croyons donc que la Société d’Emulation, qui aïine à célébrer toutes les gloires comtoises, lui devait le tardif mais juste hommage que nous sommes heureux de lui rendre aujourd'hui. EN EGYPTE BEN CARE À ASSOUXAN Par M. V. ALMAND CHEF DE BATAILLON DU GÉNIE MEMBRE CORRESPONDANT Séance publique du 17 décembre 1903 (”) Le « Melbourne » file à toute vitesse pour arriver à Suez avant la nuit. Les deux rives du golfe sont visibles : celle de droite, plus éloignée, est une ligne continue de hautes falaises blanches plongeant dans l’eau bleue en arrière de laquelle se dessine, sur un fond de brume, la silhouette indécise du massif sinaïtique; celle de gauche, faite de collines ro- cheuses et de dunes de sable, laisse voir les échancrures des vallées qui la coupentet les promontoires abrupts qu’elle en- voie dans la mer. Les passagers impatients, consultent la carte marine sur laquelle le commandant trace chaque jour le chemin par:- couru et cherchent à contrôler, avec des jumelles, les indi- cations vagues qu'elle donne sur les reliefs en vue. Enfin la ligne foncée des palmiers des « Aioun Moussa (1) » barre à tribord le jaune clair de la plage déserte; le djébel Atakah dresse au couchant ses escarpements sombres et en (*) En l'absence de l’auteur, lecture de cette Notice a été faite par M. le capitaine V. MAIRE, du 22€ régiment colonial. (1) Sources de Moise! ion face, dans la direction de la marche, une ville blanche et rose sort des flots | Elle monte rapidement sur la mer, longtemps sans sup- port visible; peu à peu une côte basse se dessine fermant tout l’horizon, des bouées avancent vers nous l’entrée du canal, le port de Suez se précise et bientôt l’immense pa- quehbot s’immobilise sur ses ancres. À Ismailia le désert cesse d’être seul maître. L’oued Tou- miliot déjà verdoyant, permet l’accès facile de la terre de Gessen, antique domaine de Jacob et de sa descendance Une des premières stations, Ramessès, y marque le point où les Hébreux, opprimés par Sésostris, construisaient pour lui, en briques séchées au soleil, une grande ville disparue, boule- vard de lEgyie contre ses ennemis de Syrie. -Zagazig, non loin des ruines de Bubaste, est le centre de la culture du coton; toute la région, plane comme la Beauce, . n’est qu'un immense jardin Coupé de bouquets de palmiers, d’acacias ou de sycomores. Les fellahs vêtus de bleu sont aux orne. sèment, binent ou irriguent avec l’eau des canaux d’où lextraient de _ rustiques norias ; de longues files de chameaux, des buffles, des ânes, des chevaux. des troupeaux de moutons couvrent les chemins et en soulèvent la poussière; d'innombrables villages aux maisons basses, délabrées, faites du limon du Nil, éveillent l’idée d’une population extr èmement dense dont la vie-est réduite à ses primitifs éléments. Les Pyramides apparaissent, dominant l'horizon, Elles s'imposent aux regards qui ne les quittent plus jusqu’à ce - que dans le fracas habituel, le train entrant en gare, elles dis- paraissent derrière les maisons du Caire. * X # Le Caire a progressé du Sud au Nord par villes succes- sives jJuxtaposées aujourd’hui plus ou moins ruinées, — 5 L’antique forteresse de Babylone, bâtie par les prisonniers assyriens ramenés d’Asie par Sésostris, cache derrière ses vieux murs une cité minuscule, presque morte, peuplée de coptes et de juifs. Abon Sargah y est une vénérable basilique dont la crypte fut la demeure de la Sainte Famille fuyant la persécution d’'Hérode. Boutros, notre guide, est maronite; il nous irtroduit à ce titre, sans hésiter, derrière l’iconostase d’Abon Sargah où, tout en psalmodiant l'office, un prêtre copte allume et lui présente un cierge pour nous faciliter l'examen d’antiques peintures, de vieilles boiseries en cèdre sculpté. Notre qua- lité de français rapidement constatée nous vaut, au surplus, de visiter le monument sous la conduite de la propre fille de l’officiant ; elle nous conte dans notre langue la sainte histoire dont l’église consacre le souvenir. En 640 de J.-C. et l’an 20 de l’hégire, Amrou assiège Baby- lone. La forteresse prise, il édifie une mosquée à l’emplace- ment de sa tente (en arabe : fostat), sur laquelle des colombes ont posé leur nid. La ville de Fostat a été le premier Caire. La mosquée d’Amrou n’a pour elle que son antiquité et encore n'est-ce qu’un souvenir, Car elle à été incendiée plu- sieurs fois; une fontaine sans eau, un palmier, quelques ar- bustes récemment plantés ornent sa cour. Les galeries ser- vant d’abri pour la prière étaient, dans le principe, suppor- tées par 366 colonnes de marbre enlevées aux monuments romains du voisinage ; il en reste une centaine. En 879, Ahmed ibn Touloun construit une nouvelle ville au nord de Fostat et une mosquée semblable à la Kaaba de la Mecque. Ce monument grandiose, très beau malgré son délabrement et son abandon, possède un minaret sans doute unique dans son genre; son escalier est extérieur, en vis au- tour d’un massif central. À En 973, le vizir du sultan fatimite Moniz, Gohar, fixant dé- finiivement la résidence des califes, fonde un nouveau quartier, Kasr el Kahira, du nom de la planète Mars ea passant au méridien le jour où l’on en pose les fondements, La mosquée de Kasr el Kahira, érigée en université par le calife el Aziz a pris le nom d’el Azar. Edifiée en plein quartier arabe, on y arrive de façon pit- toresque en cherchant son chemin à travers un dédale de ruelles étroites et sinueuses. Sur le seuil de la porte des Bar- biers, il faut chausser des babouches afin qu'aucun contact impur ne souille les parvis du Prophète et sans autre prépa- ration, un guide très officiel doublant le nôtre, nous intro- duit dans la grande cour où une foule bourdonnante s’agite. Les étudiants de tous les âges, de toutes les races de l[s- lam, accroupis à la mode orientale, ont en main des tablettes ou des feuillets imprimés ; chacun travaille pour son compte et répète à haute voix la lecon qu’il apprend, le haut du corps oscillant d'avant en arrière pour forcer Pattention. La présence d’infidèles comme nous ne cause aucun émoi, aucun dérangement, et nous avons toutes les peines du monde à trouver un passage à travers les rangs pressés. Si l'application est extrême, elle n’est pas absolument générale ; c’est pour beaucoup, en effet, l’heure du déjeuner et pour quelques uns celle de la sieste : ces derniers étendus sur les dalles dorment à poings fermés à côté de leurs camarades. Les professeurs tiennent cercle sous les galeries de la mosquée assis au milieu d’un auditoire attentif, tantôt sur le sol, tantôt sur un siège élevé. Leur parole est abondante, rapide, leur geste rare et bref. | Le cycle des études exige de trois à six années ; l’enseigne- ment se résume dans l'étude du Coran renfermant toute science. Les étudiants diplômés peuvent à leur: tour devenir professeurs, cheicks de mosquée, cadis ou greffiers dans leur pays d’origine. Les ruelles qui avoisinent l’université sont habitées par d'innombrables libraires et marchands de comestibles tenant ainsi à la disposition des huit mille étudiants qui la fréquen- tent, la nourriture du corps et celle de Pesprit. nn TE Leg PTE SE ee PR Mae Sans transition, par une porte basse percée dans le rem- part, nous passons du bruit et de l'animation d’el Azar, à l’ab- solu silence de la cité des morts. La nécropole du Caire occupe au pied de la colline du Mokattam une vallée aride si bien cachée, qu'aucune rumeur de la grande ville n’y parvient. A côté d’enclos pleins des tombes des gens du peuple, se dressent les mausolées des riches, les mosquées funéraires des califes, pour la plupart décrépites et ruinées ; celles du sultan Barkouk, de Kait Bev. sont néanmoins dans leur quasi abandon, des monuments d’un très grand art, autrement in- téressants que la mosquée rococo du dernier Khédive Tew- fik, leur très lointain successeur. Les derniers tombeaux dont certains, éventrés, béent à la surface du sol, vont jusqu’au pied des pentes de la citadelle, non loin de la mosquée du sultan Hassan. Ce superbe édifice, construit en 1356, a une cour inté- rieure presque carrée, bordée de salles ouvertes grandes comme des travées de cathédrale. La plus vaste, aménagée en sanctuaire, sert de vestibule à la chapelle dans laquelle le sultan Hassan repose sous une coupole haute de 55 mètres. Tout est noble, d’une décoration sobre et élégante dans ce monument grandiose, le plus beau qui soit au Caire. Une succession d’escaliers et de rampes permettent d’ac- céder à la mosquée de Mohammed Ali, terminée en 1857, sur un éperon du Mokattam, au milieu de la citadelle ; do- minée par deux minarets d’une sveltesse remarquable enca- drant une coupole majestueuse, faite de marbre et d’albâtre, heureusement éclairée, richement ornée, elle est sans con- iredit le plus bel exemplaire de larchitecture musulmane moderne. Son emplacement a d’ailleurs été admirablement choisi et d’un coin de l’esplanade qui lui sert de support, l’œil em- brasse un merveilleux panorama. En face, les Pyramides pointent dans le ciel et se déta- chent plus sombre sur sa couleur d’or du désert lybique, Ag + 460 Le fuyant vers le sud en s’estompant dans une brume qui flam- boie sous l’ardent soleil. Le Nil paraît comme une coulée bleue entre deux lignes jaunes tracées dans les cultures et les bois de palmiers. [1 disparait aux premiers faubourgs derrière les maisons de la ville dont les rangs se pressent à nos pieds. Le Caire n’est qu’une surface grise d’où émergent les dames, les minarets, la masse des mosquées, les longues lignes des palais ; les très nombreux jardins, les façades blanches des monuments neufs, marquent seuls de teintes plus vives l’é- tendue un peu terne du décor. Ç * x x Le ministre de France à, par la voie des journaux du Caire, invité ses compatriotes à assister avec lui à la messe consu- laire de Pâques. Nous n'avons garde de manquer à ce devoir patriotique et si nous ne pouvons nous Joindre au cortège officiel, nous sommes du moins, à l’heure fixée, dans l’église paroissiale du Manski où la nation française est réunie. Précédés par les cawas chamarrés d’or et armés d’une haute canne à pomme d'argent, le ministre, les consuls, les” députés de la nation, tout ce que le Caire compte de Français, font leur entrée dans l’église franciscaine brillamment déco- rée et illuminée pour la circonstance. Le Père gardien officie assisté de tous ses religieux. Des honneurs particuliers, plusieurs fois séculaires, sont rendus au ininistre pendant la messe ; on lui présente à baiser le livre des Evangiles et la paix, cérémonies qui paraissent sin- gulièrement intéresser l’assistance. Celle-ci composée de ca- tholiques de tous rites, de toutes races et nationalités, ne semble pas considérer la protection française comme vaine et son attitude au passage du cortège n'est pas celle qu'inspire la seule curiosité. : Nous sommes descendus dans le seul hôtel français du Caire et encore nos voyageurs et touristes le trouvent vieux jeu; il est resté un lieu où, comme dans l’église du Manski, AAC 7e la colonie se réunit pour les fêtes et cérémonies officielles, quand la place manque à son cercle ou à la résidence de France. On y cause beaucoup de nos affaires et de notre situation dans le pays. | | La bonne harmonie et l’entente ne sont pas les qualités qui distinguent nos compatriotes et cette division toujours regrettable l’est infiniment dans cette Egypte où lunion serait Si nécessaire pour maintenir nos positions menacées et déjà si entamées, depuis que les Anglais l’administrent et disposent à leur gré de ses destinées. Ün excellent observateur a écrit dernièrement que dans les affaires extérieures, nos passions parlaient plus haut que l'intérêt national; si nos échecs d'ensemble découlent de cet état d'esprit, il n'est pas douteux que dans les limites d’une moindre France comme sont nos colonies à l'étranger, ces passions ramenées à la mesure de querelles d'intérêt et d’amour-propre donnent les plus fâcheux résultats. Nous perdons du terrain en Egypte comme partout el cependant en cette fête de Pâques, c’est bien une gaieté fran- çaise qui se répand dans les rues du quartier d’Ismailhyeh, déjà si français d'aspect; partout on entend le parler de France, on crie les journaux français, de grandes affiches annoncent que ce soir une troupe française jouera la comé- die au théâtre de l’Esbékiyeh. *X € * La visite des Pyramides se joint à celle de Memphis et de la nécropole de Sakkara dont à vrai dire, elle fait aussi partie ; elle demande dans ces conditions une assez dure journée. Un train nous dépose dès la première heure à Hélouan- les-Bains, ville factice, sans intérêt, édifiée au voisinage d’une source sulfureuse, sur un site où les malades et hiver- neurs ne peuvent perdre, ni un souffle de vent, ni un rayon de soleil, — 34 — ..Hélouan-est relié au -Nil par une route tracée à: iravers 2 kilomètres de désert; elle aboutit sur la berge à uné guin- guette tenue par un Grec où l’on peut attendre la fin des longs pourparlers engagés par le drogman pour régler le passage en barque. Mieux vaut encore contempler lé vieux fleuve d'Egypte. Une flotille dont les bateaux sont chargés jusqu’au bord de doura de blé, de gros amas de paille, des- cend lentement le Nil dont les eaux d’un bleu pâle paraissent immobiles : les grandes voiles sont tendues, mais la brise est morte et voici que les rameurs, debout, font mouvoir les avirons pour accélérer sa marche. On dirait un tableau sorti d’un mastaba amplifié et mieux peint, exécuté par un artiste d'il y a cinq mille ans, tant il est vrai de dire que rien n° a changé dans le pays des Pharaons. A À Bedrachem. sur l’autre rive, des âniers ant été convo- qués. Ils forment un groupe bruyant, grossi de tous les enfants du village criant : bakchiche ! bakchiche! où chacun fait valoir les qualités exceptionnelles de sa bête. Sans s’'émou- voir, le drogman désigne dans le tas les bêtes qui nous con- viennent. Nous enfourchons tout aussitôt les moules baudets harnachés sommairement de lanières multicolores et de ficelles garnies de verroteries bleues; en une galopade endiablée, durement pressée du bâton, ils nous amènent en peu de temps à l'emplacement de Memphis. Il n’en reste rien, du moins pour les profanes ; il y a beau temps que les temples et les palais de la capitale du Nôme, du € mur blanc » ont fourni les matériaux de construction âes mosquées et des remparts du Caire. Dans un très joli bois de palmiers qui a poussé sur les ruines amoncelées de l’antique cité, on montre deux statues de Ramsès II. Ce sont des colosses, étendus sur le dos, longs de 10 mètres environ. L'un, en partie brisé, ne se voit bien qu’en montant sur sa vaste poitrine ; l’autre, mieux conservé, est visible du haut d’une passerelle échafaudée En GRR par-dessus. Ces deux ‘statues, la dernière surtout; sont admirables. La physionomie souriante du Pharaon, ses veux si doux et grands ouverts, la grâce sereine répandue sur ses traits, nous retiennent longuement auprès du favori d’Amon, fils du Soleil, gardien de la Vérité. | Sa pure beauté nous poursuit et son tranquille sourire nous accompagne dans la visite de l’immense nécropole cachée sous le sable, de Sakkara aux pyramides de Gizeh. Les merveilles des mastabas de Ti, de Méri, du Sérapeum, ñe parviennent pas à atténuer l'impression faite sur nous par la troublante image de Sésostris. Une nouvelle course, de deux heures cette fois, au grand soleil, dans le sable jusqu'aux pyramides d’Abausir, puis à travers les champs cultivés, dans la plaine du Nil, nous conduit au Sphinx et aux Pyramides. Celles-ci dominent l'étendue de leur masse et sont très imposantes, presque harmonieuses et belles, tant qu’elles restent sur le piédestal naturel que leur fait le ressaut de la chaîne lybique. Mais à mesure qu’on en approche et surtout quand, ayant gravi la berge, on se trouve sur le même plan, leur énormité seule saisit l’esprit confondu devant un tel amoncellement de pierres et la vanité du si prodigieux effort de leur mise en œuvre. | : Au Sud de la grande Pyramide, sur le chemin conduisant de Memphis au cœur même de la nécropole, se dresse à moitié enfoui dans le sable, taillé dans un roc haut de vingt mètres, le grand Sphinx, image d’Harmakis ou du Soleil le- vant ; éternel gardien de ce vaste cimetière, il personnifiait, au milieu de tous ces morts, l’idée de la résurrection qui, comme la lumière du matin, inlassable, triomphe toujours de l’ombre et de la nuit. Lorsque, montant du temple de granit, à peine exhumé des sables, on contemple la silhouette du Sphinx s’élevant peu à peu sur le ciel, on a le sentiment que rien ne saurait ne à rendre la majesté tranquille, la paix, la sécurité profonde qui remplissent ses grands veux tournés vérs l'Orient. Un tramway électrique permet de rentrer au Caire par la route de Gizeh, ombragée d’acacias et de sycomores. Les Pyramides, tout à l’heure si accablanties, reprennent. à me- sure qu'on s'éloigne, toute la sévère beauté que leur donne leur forme géométrique et le cadre incomparable du désert dans lequel s ’aténuent leurs dimensions. Le palais de Gizeh, aujonrd? hui vide des. collections d'an- tiquités qui ont fait son renom, est entouré d’ un parc or- ganisé en jardin botanique et zoologique, où la faune du Soudan est déjà très richement représentée. C'est Je bois de Boulogne duel et là large avenue qui y conduit depuis le pont du Nil est parcourue par les brillants équipages des riches Égyptiens, à défaut des hiverneurs de marque, qui ont fui déjà devant les premiers souffles du Khamsin. ue L'Egypte est un don du Nil, a dit Hérodote. Le fleuve, en effet, a créé le sol de la région cultivable en apportant cha- que année trente millions de mètres cubes de limons, en déposant une couche d’alluvions de 15 à 20 mètres d’épais- seur et en créant un délta de 200 kilomètres de front sur presque autant de profondeur. ; ‘Le delta commence au Caire ; les branches du Nil, les ca- naux alimentés par un grand barrage établit un peu en aval, se développent en éventail, se croisent dans tous les sens, arrosent cette région extraordinairement fertile, où l’on peut faire trois récoltes par an, et dont la richesse augmente d’añnée en année. Fa 5 - En amont du Caire, la vallée s’allonge sur 800 kilomètres jusqu’à la première cataracte ; sa largeur varie dans -cét‘in- tervalle entre 2 et 16 ic es. pour se réduire à un ravin, grand comme le fleuve, avant d'arriver à Assouan. -On sait que là crue du Nil fertilise annuellement cette vallée ;:toutes les parties atteintes par les eaux se couvrent de maisons, d'immenses étendues de canne à sucre, créant ainsi cette oasis unique au monde, au contraste violent avec l’aridité absolue du désert, au milieu duquel elle développe ses méandres. | | La saison avancée n'autorise que le chemin de fer pour remonter la vallée du Nil, du Caire à Assouan, et encore, son utilisation n’est pratique que pour un voyage de nuit. VPle train qui nous emporte s'enfonce dans la nuit lumi- neuse après que nous avons pu contempler à loisir le ma- gnifique décor d’un couchant embrasé, sur lequel les Pvyra- mides se dessinent dans une gloire, et d’un Orient où, dans une atmosphère bleue, teintée de rose, se trace la silhouette délicieusement pale du Caire, du Mokattam et de la chaîne arabique. Nous nous réveillons à Hag Hamadi au bruit de la tra- versée du Nil sur un pont métallique. La vallée, encore large, très peuplée, est semée de bosquets de palmiers, mais la verdure des champs a disparu, la moisson est faite par- tout, et jusqu à Louksor elle a revêtu la livrée fauve de ses berges. Les ruines de Thèbes gisent sur les deux rives du Nil : la droite était réservée aux vivants et possède les grands tem- ples ; la gauche, plus spécialement affectée aux morts, ren- ferme les tombeaux. Sur le bord du fleuve, à peine exhumées du sous-sol de la ville, se dressent les colonnades du temple de Louksor. Elles étonnent par leur nombre et leurs dimensions, mais l’œil en saisit facilement l'ordonnance malgré les construc- tons successives ajoutées par les divers Pharaons. Ramsès IT, revenant de guerroyer en Syrie, fit construire une dernière cour, qui se trouva constituer l’entrée du mo- En re nument édifié par ses prédécesseurs. Cette cour est fermée par un gigantesque pylone dont la face extérieure porte en « reliefs en creux » les épisodes de la campagne, et en par- ticulier, ceux de la bataille de Qadesch Six colosses représentant Ramsès II et deux obélisques, dont l’un est à Paris, étaient dressés en avant de ce pylone. Le coin N.-0. de la cour, vers l'entrée, est encore sous les décombres jusqu'à hauteur des colonnes intérieures ; de la plate-forme ainsi conservée, sur laquelle s’élève une mos- quée, on a une vue saisissante de l’ensemble des cours et des colonnades. | Tout l’intérieur du temple, long de 260 mètres, célèbre sur ses parois et dans ses chapelles la gloire d’Amon, dieu de Thèbes et protecteur de ses rois Des obélisques, une avenue bordée de sphinx, retrouvée dans la ville et ses jardins, conduisait au grand temple de Karnak, la merveille de la Haute-Egypte. Il est malheureu- sement bien ruiné, mais la salle hypostvle, en partie debout, suffit pour donner une idée du monument disparu et remplir de stupeur l'esprit le mieux préparé à concevoir de telles créations. Prenez douze colonnes Vendôme, faites-en une allée de dix mètres de largeur et, de part et d'autre, disposez en quinconce cent vingt-quatre autres colonnes de dimensions moindres mais encore gigantesques, donnant avec les pre- mières une surface couverte en terrasse de cent deux mètres sur cinquante-et-un ; ornez les colonnes et les murs de la salle ainsi obtenue de représentations religieuses, proces- sions et offrandes aux dieux; peignez sur le plafond, fait de dalles jointives, la nuit étoilée : vous aurez ainsi reconstitué cette œuvre titanesque des Pharaons de Thèbes, panthéon commémorant les exploits de Séti I, de Ramsès IT, vain- queur des « vils Khiti », de Sheshang [, qui pilla, sous Ro- boam, le temple de Jérusalem, et de tant d’autres, en même 26 00 temps quil glorifiait la triade illustre : Amon, Maut et Khansan. Faut-il ajouter que l’on parcourt 3.800 mètres en faisant le tour du temple, qu'il a 1,400 mètres de longueur du Nord au Sud et 560 de l'Est à l'Ouest. La petite ville de Louksor est perdue dans l'immense Thèbes ; ses habitants, coptes et fellahs, presque tous fabri- cants d’antiquités, vivent de la crédulité et de l'enthousiasme des touristes. 2 C’est dans une vallée calcinée dont les parois fauves ren- voient la chaleur et la lumière du soleil, au fond d’un ravin découpant sur le ciel, comme à l’emporte-pièce, une bande d’un bleu éclatant, que s'ouvrent, dans le roc, les tombes royales. On ne pouvait choisir, pour la dernière demeure des fils de Rà, un lieu d’une plus sinistre grandeur. où la puissance du Père se manifeste avec plus d'éclat, car c’est vraiment le royaume du soleil que cette vallée des Biban el Moulouk. Le tombeau de Setil, le plus remarquable, est d’abord une succession de corridors et d’escaliers, que suivent des chambres de toutes dimensions, puis d'autres corridors, d’autres escaliers, et encore des chambres, sur cent mètres et plus de longueur. Toutes les scènes du «livre de l'Hadès », du voyage des morts dans l’autre vie, sont retracées et ré- pétées sur les parois en peintures terrifiantes, dont l’éclat n'a rien perdu depuis cinq mille ans qu’elles ont été exécu- tées. Au fond d’une de ces syringues, un Pharaon repose dans son sarcophage ouvert ; on ne peut dépasser le seuil de la chambre mortuaire, et rien n’est impressionnant comme la vue lointaine de la momie royale éclairée par la lumière blanche d’une lampe électrique. ge Un sentier très dur conduit au sommet de la falaise orientale de la vallée des Tombes, au-dessus des escarpe- ments formidables qui dominent la plaine de Thèbes. Le panorama est d’une superbe magnificence : la vallée du Nil, semblable à une fournase où l’air flamboie, ne se voit qu'à travers une brume argentée estompant les détails. Au loin, la chaîne arabique est blanche de lumière, et tout à nos pieds, presque sombres par contraste, s’amoncellent les ruines des grands temples de Gournah, du Ramesseum, de Medinet Aban, et se dressent dans leur impassible séré- nité, les deux colosses de Memnon, seuls debout au milieu d’une si complète dévastation. Contre la falaise à pic, aux assises dorées, s’étagent les terrasses du temple de Der el Bahant. fl est dû à une femme remarquable, la reine Makéré, sœur, épouse et corégente de Thautmosis LIT. Les promenoirs de ce temple abritent les surprenantes re- présentations d’une expédition au pays de Pount, aux ré- gions de l’encens et des bois précieux. Les bateaux de la reine naviguent sur la mer Rouge, dont les animaux sont reproduits dans la transparence de ses flots verts, abordent aux terres lointaines, chez des peuples dont les maisons co- niques se dressent à l'ombre des palmiers. *+ + # En amont de Louksor, le Nil se tient presque constam- ment le long de la chaine arabique, reportant à l'Occident la plaine fertile, dont la largeur va en diminuant progressi- vement jusqu’au djébel Silsileh (la chaîne), barrant le cours du fleuve à la manière d’une chaine dont il a rompu quelques anneaux. Jusqu à Assouan, les rives plus encaissées, sont merveil- leusement colorées et pittoresques. La zone cultivée se ré- duit à unebande étroite au-dessus du fleuve, dont les eaux sont élevées pour l'irrigation à laide de norias; tout le Ver Ur | 4 | rire terrain utilisable est habilement aménagé en vue d’une culture intensive, comme dans les oasis. D'ailleurs la phy- sionomie de la région change complètement et prend nette- ment le cachet saharien. | À notre arrivée, le soir, l’atimosphère est embrasée; le khamtin soulève d’épais nuages de poussière, le soleil dispu- rait dans une brume épaisse et les palmiers des jardins, échevelés, courbés par le vent, donnent à Assouan laspect de toute ville du désert assaillie par la tempête de sable. La nuit est superbe, claire, sans un souffle d'air, affreuse- inent chaude; on entend le concert laientable des grince- ments des sakiehs (norias) semblable, dans Pile d'Eléphan- Une, à celui des fauves hurlant à la lune. Assouan est la porte Sud de lPEgvpte; sa population nu- bienne diffère profondément de celle de la vallée du Nil avec laquelle elle sympathise peu. Les Nubiens s’expatrient néan- moins volontiers au Caire et à Alexandrie, avec le but de re- venir au pays après avoir amassé un petit pécule. Cette sauvage vallée du Nil, presque sans verdure, rava- gée par un soleil implacable, au delà de la première cataracte jusqu’à Ouadi Halfa, leur tient au cœur à l’égal de la plus sé- duisante patr'e. Des Bicharins, bédouins du désert, frères des Somalis, peut-être des Abyssins, au profil superbe, aux traits fins et pleins de noblesse, campent à Assouan pendant la saison des touristes. Ils vendent des verroteries et toute une pacotille spéciale fabriquée sous la tente avec le poil de chèvre, la peau de chameau et les coquillages de la mer Rouge. Le Nil s’est fait un chemin à travers un plateau granitique qui a découpé en îles et ilots obstruant son cours, sur près de dix kilomètres de longueur, du Sud de Chellal à Assouan. La première cataracte, aujourd’hui détruite par l’incessant travail d’érosion du fleuve, n’est plus qu’une succession de rapides auxquels on a remédié par un canal latéral. On va à Chellal par la voie du désert, à âne ou en chemin 70 ee de fer : elle aboutit à un coude du Nil transformé en lac par la construction d’un grand barrage, port de Chellal où l’on s’embarque pour la visite, autrefois classique, des ruines de Phil®æ. Hélas! le site merveilleux, tant admiré, tant célébré depuis Strabon jusqu’à nos jours, s’est banalisé par l’invasion de l’activité européenne ; les monuments de Philæ, si beaux, si harmonieux, ne seront bientôt plus qu'un souvenir. L'ile est sous l’eau, et, à cette époque du plus bas niveau, c’est à peine si le temple d'Isis émerge en son entier ; on en peut visiter quelques salles, mais Pavant-cour ne s’explore qu’en barque et linscription du grand portail rappelant l'ex- pédition de Bonaparte et le raid de Desaix à la poursuite des Mamelucks, s'élève de peu au-dessus des eaux. Un escalier donne accès à la terrasse du temple et permet d'apprécier l'étendue du danger et l’imminence du désastre ; dans un avenir prochain ce qui subsiste des ruines s’écrou- lera et Philæ aura disparu. Si le barrage, long de 1,500 inètres environ, que Jes An- he viennent de construire, devait assurer sans conteste la prospérité de l'Egypte, la vallée du Nil ne manque pas assu- rément de temples superbes pouvant atténuer le regret de la perte de ceux de Philæ, mais cette œuvre très grande, com- parable aux Pyramides par l’entassement des matériaux, n'est destinée qu'à faire fructifier de gros capitaux engagés dans la culture du coton. Lors des crues médiocres, il n’y aura plus, dit-on, d'inondation pour les terres du iellah, con- damné à mourir de faim. SRG : Nous aurions les famines d'Egypte comme nous avons celles de l'Inde. : Que tous les dore protecteurs de la terre de Pharaons écartent ce sinistre présage. A Le retour au Caire demande un jour et une nuit. .- Il nous restait pour compléter ce rapide voyage à visiter le musée des antiquités égyptiennes récemment installé dans un palais magnifique, à Kasr en Nil, digne de l’admirable collection due en grande partie à deux éminents français, Mariette et M. Maspéro. Que dire de ce musée unique en toutes ses parties, tant par les documents qu'il renferme que par la façon dont ils sont présentés; les chefs d'œuvre abondent dans toutes les salles où la statue en bois du Cheick el beled, celles du Scribe de Sakkara, de Ra-hoteh, de Nefert, de Khéphren, la tête de la reine Taia retiennent entre tous l'attention. Les momies des grands rois de Thébes, retrouvées pèle- mêle dans un puits de Deir el Bahari, reposent ici dans leur cercueil ; Seti [, Sésostris, Ramsès Il, le buste libre de ban- delettes, ont d’admirables traits ennoblis par la majesté de la mort. Nous ne pouvons saluer ces vénérables dépouilles sans ressentir une profonde émotion faite du regret de voir ces pauvres morts hors de leurs tombes violées, exposés à l’irré- vérencieuse curiosité des foules et du respect que nous ins- pire le glorieux passé qu'ils représentent, si loin dans la durée qu'il semble toucher à l’origine du monde. * ve J'ai eu le très grand avantage de visiter l'Egypte avec un aimable et obligeant camarade ; nous nous séparons au Caire. lui pour rentrer en France, moi pour gagner Port Said et Jaffa. S1, dans les lignes qui précèdent, j'ai pu d’une façon bien imparfaite et sommaire résumer nos impressions, je reste seul pour conclure. Je serai bref. Si nous avions connu l'Egypte, les Anglais n'y seraient pas aujourd’hui à peu près les maitres. res Il est encore possible d’atténuer, sinon de réparer, notre échec et de maintenir du moins notre situation actuelle. Les intérêts matériels et moraux engagés dans ce pays, sans le nom de la France, sont considérables et doivent être sauve- gardés, Il n’y faut que de la bonne volonté. Il est à désirer que tout Français qui voyage, à n'importe quel titre, visite l’'Egvote, pour se convaincre de la nécessité d'agir. Il y trouvera encore comme une autre France, de fortes impressions d’art et un grand exemple de développe- ment économique et d'administration à méditer. Baume-les-Daimnes, le 1° août 1903, Es LA VOIE ROMAINE DU RHIN ET SES STATIONS DANS LES CANTONS de BAUME-LES-DAMES et de CLERVAL (Doubs) Par l'Abbé Paul DRUOT (Séances du 16 Décembre 1903 et du 16 Février 1904). Ce n’est pas une question nouvelle que celle des voies romaines en Franche-Comté. De nombreuses et savantes études ont été faites à ce sujet et en particulier sur la Voie des Provinces Germaniques où du Rhin, par d’éminents archéologues. Mais quelques-uns d’entr'eux, malgré leur compétence, semblent avoir étudié litinéraire de cette dernière voie plutôt sur une carte que sur le terrain même et en ont donné souvent un tracé absolument fantaisiste. Il était intéressant de réfuter ces erreurs et de relever la position exacte de cette grande route pendant qu'il en est encore temps, car ses dernières traces ne tarderont pas à disparaitre. En maints endroits et surtout lorsque la voie était en talus, à mi-côte d’une colline ou d’une dépression de terrain, elle a été envahie par la terre végétale et se trouve recouverte par des champs cultivés ; ce n’est alors que la pioche à la main qu’on peut arriver à la découvrir. Dans d’autres parties, lorsqu'elle était en levée, les habitants des pays qu’elle traversait, après l'avoir creusée, en ont tamisé le cassage afin d’avoir et du sable ou de la groise pour leurs constructions, et des pierres pour leurs prestations, avec He l'avantage appréciable de les avoir toutes cassées. Parfois elle disparait sous des ronces et d'épais buissons, ou est empruntée par nos chemins actuels. En tous cas, dans un avenir peu éloigné, il sera absolument impossible de la reconnaître. Ce sont ces considérations qui m'ont porté à suivre pas à pas son parcours dans les cantons de Baume- les- Dames et de Clerval (laissant à d’autres le soin de létu- dier de Besançon à Sechin et de Rang à Mandeure). J'ai pu ainsi fixer le tracé exact de cette voie, en relever les particularités, et en même temps rechercher lemplacement des différentes mansions, celle de Velatodurum en parti- culier. Mais auparavant il n’est pas inutile de rappeler sommaire- ment l’origine de cette route. De l'avis unanime des archéologues, ce grand travail fut commencé par Agrippa, gendre de Pempereur Auguste, dans les derniêres années qui ont précédé l’ère chrétienne, plus de vingt ans après la mort de Jules César) et fut terminé en l’an 40 de notre ère, selon les uns, mais plus vraisemblablément en l’an 98, ]a première année du deuxième Consulat de Trajan, d’après la borne milliaire de Mathay. Elle reçut certainement de notables améliorations sous le règne de cet empereur. C'est donc à tort que la dénomination populaire de Chaussée ou Levée de Jules César, a été donnée à cette voie. Vesontio ou Besançon, capitale de la Séquanie, devint bientôt après la conquête des Gaules un centre romain important. De nom- breuses routes partant de Lyon, de Chalon-sur-Saône, sans compter celles qui venaient d’autres villes telles que les voies de Langres, de Milan par Genève et Pontarlier, par exemple, aboutissaient à Besançon. Dans-cette ville, selon M. Ed. Clerc, toutes ces routes semblaient se fondre en une seule beaucoup plus importante qui se dirigeait vers la Germanie, par Mandeure, la trouée des Vosges et Argentorat où Strasbourg. D’après les textes anciens, le fragment de voie qui fait l’objet de cette étude BEC TE br LR 7 PP était emprunté simultanément par la route d'Aoste à Stras- bourg et par celle d’Augst à Langres. C’était la Voie du Rhin qui a coûté un travail considérable comme on peut s’en ren - dre compte en étudiant les particularités de sa construction. Aussi n'est-il pas étonnant que les légions romaines aient mis tant d'années à l’établir, Tracé de la Vore. Cette voie, d’après Dunod (1), devait sortir de Besançon par un pont dont les traces ont disparu mais qui existait près de Bregille. Après avoir quitté à Palente le territoire de Besançon, elle passait entre le Doubs et la grande bourgade romaine des Andiers, près de Thise et continuait par Roche, la Malmaison /mala mansio), Roulans et Sechin, suivant presque continuellement jusqu’à cet endroit le tracé de la route actuelle de Besançon à Baume-les-Dames. À partir du centre de Sechin, la voie romaine prend une autre direction Elle s’écarte encore davantage de la vallée du Doubs que jusque là, depuis Roche, elle a suivi à plus d'un kilomètre de distance. Par une pente extrêmement douce elle gagne le plateau qui forme la partie Nord-Ouest des cantons de Baume-les-Dames et de Clerval, sur la rive droite du Doubs. | Le choix de cet itinéraire, le soin que les ingénieurs romains ont pris d'éviter toute vallée étroite et profonde indique de façon certaine que cette voie était avant tout une route militaire, un chemin stratégique, comme nous dirions aujourd’hui Du reste, le savant Perreciot, qui dans le cou- rant du xvine siècle s’est livré avec tant d'ardeur et de persévérance à l'étude de Baume-les-Dames et de ses environs, s'en était rendu compte dans ses recherches archéologiques. Il avait remarqué au-dessous de Grosbois (1) Dunop. Histoire des Séquanois. T. I, préface p. xIx. Je une portion de chaussée romaine qu’on peut voir en partie encore aujourd’hui et qui est indiquée sur la carte de lPEtat- major, chaussée qui s’écarte de la voie du Rhin pour se diriger vers le Doubs. Il pensait à tort que ce devait être un premier essai de la route dès lors abandonné par les ingé- nieurs romains. Voici ce qu'il écrivait à ce sujet : « Un reste de chaussée de 350 toises qui se trouve au-dessous de Grosbois, donne à penser que la Voye romaine avait d’abord été tracée par Baume et que ce ne fut que l’extrème difficulté des lieux et le danger des défilés qui fit changer le plan et qui engagea à tourner les montagnes de Baume; que le plus grand objet des Romains dans la construction des voyes militaires était de faciliter la marche des troupes, il n’est pas étonnant qu'ils aient sacrifié l'intérêt d’une petite ville à l’avantage d’avoir une route plus facile ». Si la première partie de l’assertion de Perreciot, qui fait injure à la perspicacité et au talent indiscutable des ingénieurs romains, est contestable comme on le verra plus loin, la seconde est assurément des plus logiques, et cette réflexion d’une grande exactitude pour tous ceux qui connaissent cette partie des cantons de Baume- les-Dames et de Clerval ainsi que le cours très encaissé du Doubs. De Douvot et Fourbanne jusqu’à Clerval la vallée, au point de vue militaire, est fort périlleuse : à droite, le Doubs bordé par des montagnes abruptes, à gauche des rochers à pics comme de vraies murailles. D’où l’impossibi- lité à une armée surprise ou poursuivie de fuir ni d’un côté ni de l’autre. C'est ce que Jules César lui-mème avait remarqué Dans ses Commentaires (1) il indique plusieurs voies qui conduisaient où Arioviste était campé, lorsque l’ar- mée romaine s’empara de Besançon, l’une entr'autres, qui . (4) 3. CœSsaRr. De bello Gallico, lib. [.…. «qui se ex his minus timidos existimari volebam, non se hostem vereri sed angustias itineris el ma- gnitudinem silvarum quæ inter eos et Ariovistum intercederent.. . timere dicebam. » L “e % = ; à | i . 0 A0 était la plus courte, remontait le Doubs du côté de Besançon et de Clerval par des défilés et d’épaisses forêts. Les Ro- mains, hommes pratiques. avaient donc vu le danger et c’est pourquoi ils évitèrent ce défilé si étroit, abandonnèrent le vieux chemin gaulois dont parlait César et créèrent une nouvelle route, celle qui nous occupe. S'ils s’écartent du Doubs, dès Roche, s'ils ne suivent pas le tracé de la route actuelle au sortir de Sechin pour appuyer sur la gauche et ne retrouver la vallée du Doubs qu’à Clerval, c’est que la vallée s’élargit alors (Clerval en étant réellement la clé du côté de Baume, suivant son étymologie, clavis vallis) et n'offre plus le danger d’une attaque imprévue et désastreuse pour une armée en marche dans un long défilé sans issues. Cette autre portion de route qui s’écarte de la voie principale à partr du milieu du bois du Grand-Val, qui passe sous Grosbois, cette vie puvée que les habitants de ce village par une délibération du 10 juin 1746 (1) demandaient l'autorisation de détruire et que Perreciot prenait à tort pour un premier essai de route abandonné, ne serait-ce pas plutôt un raccordement militaire reliant à la voie du Rhin, Baume et plus sûrement encore le camp de Buremont qui plus tard protégea cette ville, alors simple bourgade sans doute, et l’entrecroisement de quatre autres routes romaines de créa- tion postérieure et dimportance momdre que la voie de Mandeure, Sans vouloir de parti pris, comme Perreciot, faire de Baume un centre romain à l’époque de la création de la voie du Rhin ou une ville ancienne de quelque importance, il n’est pas admissible non plus que ce ne fût alors qu'une simple villa, comme l’affirme l’abbé Besson (2). Les traces de chemins celtiques du Corneillet et de la montagne de Framont sur le versant de la Boussenotte, indiquent égale- ment que Baume existait et avait une issue au Nord-Est pour (1) Arch. municip. de Baume-les-Dames BB. 24. (2) Abbé BESSON. Mémoire historique sur l'abbaye de Baume, p. 31. 1 > | 4 +) rejoindre la voie du Rhin du côté de Clerval entre la Vieville et Autechaux. 13 : | L'hypothèse de Perreciot ne semble donc pas soutenable : cette portion de chaussée n’était certainement point le résul- tat d’une tentative maladroite des ingénieurs romains, mais un chemin conduisant à Baume depuis la grande voie ; ce n’est que l'avantage d’une sécurité plus grande et non la difficulté des lieux qui fit passer la route du Rhin au nord de Grosbois. Son établissement eût été du reste tout aussi facile en remontant continuellement la vallée du Doubs depuis Roche et le Petit-Vaire (1). Il'est donc bien visible qu’on l’éloigne de cette vallée dan- gereuse et c’est à dessein qu’en sortant de Sechin, elle suit en bordure sur toute sa longueur le côté méridional du Bois du Grand-Val, Grosbois se trouvant sur sa droite, passe à peu de distance de Fontenotte, laisse le bois Orgier-Combe sur sa gauche, et de là se poursuit vers Luxiol, le Loposa- gium de la Carte théodosienne. De Luxiol la voie est suivie parrallèlement ou empruntée par le chemin vicinal actuel conduisant de ce village à Autechaux, mais jusqu’à 500 mètres seulement de la ferme de la Vieville, près de laquelle elle ne passe pas, contrairement à ce qui a toujours été écrit jusqu’à présent Elle oblique alors vers le Nord-Est et coupe transversalement le canton de champs dit Liévaux. C’est là que récemment, au bord de la chaussée, on a retrouvé des substructions et des escaliers, emplacement probable de l’ancienne Vieville (viæ villa) ; puis la voie s'engage dans les Malplanches à l’état de mauvais chemin de défruitement et vient aboutir sur la route de Baume-les-Dames à Rougemont qu’elle traverse à angle droit au point de jonction du chemin de Verne. Cent mètres plus loin elle oblique sur la gauche (1) En plus de ce tronçon dont parle Perreciot, il existe à Grosbois éga- lement, une portion de route romaine parallèle à la voie du Rhin et qui semble avoir été abandonnée à cause de sa rapidité. On laurait rectifiée en lui faisant longer le bois du Grand-Val. et laisse à sa droite le château et le village d'Autechaux. Elle atteint à cet endroit le point culminant de son parcours entre Besançon et Mandeure et se dirige ensuite en ligne droite vers la forêt dite Bois du Fossé ou plus commu- nément Bois d’Athée qu’elle suit presque en bordure dans sa partie méridionale. Jusqu'à ce bois depuis la route de Rougemont elle disparaît sous les champs cultivés, sert ensuite, pendant un demi-kilomètre, de chemin de déboi- sement entre le bois communal de Sous-la-Velle et le commencement du Bois d’Athée, puis se poursuit d’une facon très visible pour sortir du territoire d’Autechaux entre les lieudits la Crochère et la Combe Saint-Germain, De la Vieville à cet endroit, la voie est pour ainsi dire d’une horizontalité parfaite qu’elle conserve en traversant le terri- toire de Voillans où elle longe en ligne droite le sommet de Champrave, contourne et la Vèze, et la Combe Pagnev, et la Combe aux Tovons, traverse à mi-côte et directement la Combe Thesin, passe à l'extrémité de lAïgle, décrit alors un long demi-cercle dans le vallon de Ranthes pour éviter une déclivité un peu prononcée. Ces courbes nombreuses, ce soin avec lequel les Romains ont fait le tracé de la voie du Rhin, dans son parcours sur le territoire de Voillans, pour conserver son horizontalité remarquable, porteraient à contre- dire les assertions de M. de Matty de Latour. Le savant ingénieur prétendait que les Romains paraissaient avoir ignoré l’usage des courbes à grand ravon et que leurs aligne- ments droits étaient réunis par des raccordements courbes très courts. Îlest vrai que M. de Mativ n’a pas étudié toutes les voies romaines, que leur tracé n’est pas dû au même ingé- nieur et que celui qui a dirigé les travaux de la voie du Rhin l'a fait peut-être avec plus de soins et de science que d’autres. En tout cas, de Sechin aux Glauderey la voie ne présente aucune déclivité appréciable malgré les nombreux accidents de terrain. Bref, à partir de cette dernière courbe de Ranthes dont le PE OrEES rayon est tres grand, elle rémonte lé Devant de Bermont. Après:quoi, elle coupe à angle droit l'ancienne route dé Eyon : à Strasbourg’; ‘dite des [htendants, route qui n’emprunte: là : voie romaine sur aueuh point:de son parcours depuis Sechin, contrairemént à l’affirmation de FAnnüaire du Doubs de 18892, daps note concernañt: lx commune de Voillans. Elle : traverse-énsuite en ligñe droite le communal-de la Levée, - ainsi dénommé justement à cause du passage de la Levée de Jules César. À partir de l’extrémité de cette pelouse où elle a été totalement défoncée, elle est encore utilisée actuelle- ment comme chemin vicinal de Voillans à Clerval par le Creux d’Alouettes, haméau peu important à proximité d’un creux très-profond (1). Au sommet des Glauderey, la voie romaine perd brusquement son horizontalité qu’elle n'aurait pu conserver qu’en faisant un long demi-cercle de plusieurs kilomètres. Elle descend alors en ligne droite la rampe rapide de 10 à 12 0, du chemin du Boulot, abandonné depuis einq ans comme chemin vicinal, pour aboutir à lHôpital- Saint-Lieffroy. Elle passe sous la maison commune et une partie des habitations de ce village puis remonte assez rapidement et directement la Côte des Pins et le sommet des Vignes de la Craie sur Clerval. Il est visible encore qu'on a cherché à lui faire suivre les crêtes, les plateaux découverts et quand il v a un vallon à contourner, c’est aux trois quarts de sa hauteur ou à son sommet qu'on le lui fait côtoyer. Et cependant pour la facilité du roulage, il eût été plus pratique à cet endroit de lui faire suivre dès l’'Hôpital-Saint-Lieffroy le tracé du chemin actuel jusqu'à Santoche et Pompierre. C’eût été la plaine pendant six kilomètres. Mais les mêmes A) Une ieale lésee “veut que le carrosse de Jules César y ait ee englouti accidentellement. Un des propriétaires de ce hameau eut récem-= ment un moment de grande émotion en croyant ramener à l'extrémité d'un harpon, une des roues de ce fameux char. Déception profonde, quand il reconnut que c'était une roue de sa propre voiture qu'un mauvais plai- ‘à sant avait précipitée dans ce gouffre, quelques années auparavant ! Do raisons stratégiques qui avaient fait abandonner à Roche la vallée du Doubs, font éviter à l'Hôpital la vallée trop étroite qui se dirige sur Clerval entre la Planoise et le bois de Montfort que très vraisemblablement dominait déjà l'antique Château de Ranustal. _ De sorte que l’Hôpital-Saint-Lieffroy se trouve au bas de deux rampes assez prononcées de ladite voie et formerait comme la pointe inférieure d’un V majuscule. L'Hôpital- Saint-Lieffroy (hospitium, gîte) fut certainement une man- sion romaine. M. Oudot ancien conseiller général et qui récemment encore y était propriétaire d’une ferme impor- tante, m'a rapporté qu'il avait trouvé lui-même et recueilli en cette localité de nombreuses monnaies impériales. La position de cette station, son étymologie, semblent indiquer que c'était surtout un relai (mutalio) rendu nécessaire par les rampes de la voie pour doubler les attelages et per- mettre aux convois de gravir la pente de la Planoise et sur- tout celle du Boulot. En sortant des vignes de Clerval, la voie du Rhin, tou- jours pour éviter deux déclivités, fait une courbe, un demi- cercle complet dans la direction du Bois du Bannal dans le vallon qui va sur Fontaine, puis se dirige en ligne droite sur Pompierre. Dès qu’elle a dépassé le chemin de Clerval à Soye, elle est très visible et figure sur la carte de lEtat- Major. Elle sert de chemin rural jusqu’au bois du Vernois. Complètement dépouillée de son massif supérieur dans son parcours sur la lisière de ce bois, 1l n’en reste que;l'assise pavée. De là elle est empruntée jusqu'à Pompierre par le chemin de Santoche, l'antique Centusca du Chroniqueur de Cuisance (1). La chaussée traverse ensuite Pompierre, passe sous le cimetière et l’église : on la perd complètement de vue de léglise à la sortie du village. Elle reparait alors très visible et sert de chemin rural à travers les champs (4) BozLanp. Légende de St-Ermenfroi, 25 sept. — JU jusqu'à la Maisonnette du garde-barrière du chemin de fer de Besançon à Belfort, traverse obliquement la voie à gauche de ce passage à niveau, coupe de même le canal du Rhône au Rhin et arrive en face de Rang-les-l’Isle où elle passait le Doubs. C’est là que j'ai arrêté mes investigations. J'indi- que rapidement, pour mémoire, d’après M. Clerc, son tracé à partir de ce village. Après avoir traversé l’ilot qui fait face à Rang elle passe au-dessous de lIsle-sur-le-Doubs, évite le méandre de la rivière, laisse Blussans sur sa gauche, gagne Colombier-Châtelot, Saint-Maurice, Dampierre, Vou- jeaucourt où elle franchit le Doubs et finalement arrive à Mandeure après avoir passé une seconde fois cette rivière sur un des ponts de cette antique cité alors très importante qui succomba sans doute sous les coups d’Attila en #1. Tel est le tracé précis de cette ancienne voie qui desservit la Franche-Comté depuis la domination romaine jusqu’au milieu du xvur° siècle. C’est le tracé indiqué autrelois par Bergier, curé de Flangebouche (1), Trouillet curé d'Or- nans @) et, dans le milieu du x1x' siècle, par M. le Président Clerc 6) avec quelques erreurs de détail. C’est donc à tort que certains auteurs, l'étudiant seulement sur une carte, lui ont fait remonter la vallée du Doubs, dès Roche, en mon- tant par Baume-les-Dames, dont ils faisaient le Loposagium de la Carte thédosienne, ou même par la rive gauche du Doubs, comme Dom Jourdain (1). Trompé par un rapproche- ment de noms, une illusion philologique, cet auteur suivi par plusieurs autres, comme nous le verrons, s’obstinant à faire de Velatodurum de l'Itinéraire d'Antonin, Vellerot-les- Belvoir, y faisait passer la voie du Rhin qui en est éloignée de plus de dix kilomètres. ; (1) BERGIER. Biblioth. de Besançon, fonds de l'Académie, concours de 1756, m. 17. (2) TRouILLET. Biblioth. de Besançon, fonds de l'Académie, concours de 1756, m. 17. (3) Ed. CLERC. La Franche-Comté à l’époque romaine. (4) Dom JourpaiN. Biblioth. de Besançon, même concours, m. 17. aprpe reine GILET oùf 210N 2 s19 Soir) © AT se, o 1 :ansysepn (e) pidnr 7 * AVANATO P © SANVE SAT ANNYE °P suoquer 59, 5% 240 Roaoy}2iA0 DULe LOT a1OA E[ *P SAINOIIP] RS PR RE ES 2e ‘sqno( np uone[Uug,p ayewoc ‘(Sanoq) Sue||IOA E euIPWOy 8101 | 2p ednon oeuf ÿ D te. er Ce QT 3 DO AU: FR TA SUR » 0 - WE LAS re as , n. INR 1,18, ns SY AN? ot) A See 1 4: ñ < / + D = FN VZ 1071h À — Rs EN E Ë den he Sy n° 3) # 4 CUS SEL > . RSR se = t . nec / FN A Te AL . Mr s LS . à = PP - . — TZ, - —, TE 77 Te MT ER = a ni c3 MERS YA er nn AU «7 Ls # 5; Ye ne LU de À ; 2 À IC se ARTE SST> x S ? D En Mode de Construction. La voie des Provinces germaniques est également inté- ressante à étudier dans son mode de construction et on est justement frappé de la somme considérable de travail qu'a demandé son établissement. Bergier, d’après Vitruve, et postérieurement M. Clerc, trop confiant dans les affirmations du précédent, préten- daient que les chaussées romaines étaient formées de quatre couches superposées donnant ensemble une épaisseur cons- tante d'environ trois pieds. . La première de ces couches (statumen ou fondation) aurait été composée d’un ou deux rangs de grosses pierres _novées dans du mortier. La seconde (rudus) était en pierres plus petites, posées à plat, rangées avec ordre et cimentées comme une maçon- nerie de blocage. La troisième (arena ou nucleus) était un béton de gravier et de chaux. Enfin la quatrième était la surface de « marchement » et dans les cités, aurait été soit un pavé, soit une mosaïque, soit un lit de ciment analogue à notre asphalte ou au maca- dam. Si ces données ont pu être exactes pour certaines voies, elles ne le sont nullement pour la voie de Besançon à Man- deure, ou dans plus de cinquante coupes étudiées sur des points différents des cantons de Baume et de Clerval, on ne trouve que deux couches bien distinctes : une fondation en pierres faite partout de même manière, puis un agglomérat d'épaisseur et de composition variables suivant la confor- mation du sol et les matériaux que les Romains avaient à leur disposition. OO Fondations. La chaussée repose donc sur toute sa longueur sur une fondation qui est une vraie maçonnerie de blocage, formée d'un massif de pierres de grosseur moyenne et d’une épais- seur de vingt-cinq centimètres. Ces pierres de surface aplanie, ces «têtes de chat » comme disent assez exactement nos cultivateurs, étaient disposées romme des pavés, peu régulièrement cependant, et maçonnés avec du mortier de chaux. Elles formaient un pavage bien nivelé dans toute la largeur de lemprise qui, en moyenne, était de cinq mètres cimquante centimètres. On ne s’attachait pas à rendre Je sol horizontal dans le sens de la longueur, aussi le pavage suivait-il les ondulations du terrain sur lequel la voie devait passer. Certains auteurs ont prétendu à tort que ces fondations étaient simplement reliées avec de la terre, d’autres au contraire comme M. Ed. Clerc, avec du ciment. La vérité est que ces pierres étaient réellement maçonnées avec du mortier. C’est à peine si, aujourd'hui, on peut les extraire. Par suite de l'humidité qui, dans la suite des siècles, a traversé la chaussée, il s’est formé des infiltrations et une formation de carbonate de chaux qui a rempli les interstices des fonda- tions, en a soudé ensemble toutes les pierres qui forment un bloc presque indestructible. Dans quelques endroits, lorsque les ouvriers rencontraient le roc, leur travail était simplifié; ils l’umifiaient simplement et s’il se trouvait un espace, une fissure entre deux roches, ils y intercalaient au mortier quelques pierres placées de champ. Près de Colombier - Châtelot, en pratiquant des fouilles pour extraire du sable, on a cru reconnaitre qu'il y avait sous la chaussée romaine des dalles et des rochers présen- tant des ornières profondes et on en a conclu que c'étaient RO — des vestiges d’ancien chemin gaulois. Il est fort admissible que les Romains se soient servis, quand ils les rencontraient des chemins qui existaient avant la conquête de la Séquanie. Ils les ont utilisés dans ce cas uniquement comme assise des nouvelles voies qu'ils construisaient. Massif supérieur. Sur ces fondations se trouvait un massif supérieur, un agelomérat dont l'épaisseur varie suivant les endroits entre quarante-cinq centimètres et deux mètres. Cette profondeur différait suivant les ondulations du terrain et des fondations, car c’est en mettant davantage de béton dans les parties plus creuses que les Romains arrivaient à réduire et à régulariser les pentes. Ce massif se compose toujours de couches successives — de nombre et d'épaisseur variables — de pierres cassées, ou de graviers, ou de cailloux roulés, ou même de gros sable de rivière : le tout amalgamé par du mortier de chaux et ensuite damé et roulé, L’usure du cassage semble- rait indiquer que chaque couche aurait été livrée rnomenta- nément à la circulation, et que l’ensemble n'aurait pas été fait du même coup, mais dans un laps de temps assez court cependant puisqu'on ne remarque aucune ornière dans le béton. L’examen de plus de cinquante fouilles indique ce mode de construction et c’est à tort que Bergier et Trouillet, dans leurs manuscrits présentés au Concours de 1756, pré- tendent que la chaussée n'était que de la pierre pulvérisée provenant de recharges successives comme on opère de nos jours. La coupe transversale d’une de nos routes nationales offre un aspect tout différent. Les Romains se servaient des matériaux qu'ils avaient à portée de la main. Sur le territoire de Voillans, leur béton était fait avec des pierres cassées de la grosseur de celles qu'on emploie aujourd'hui pour les prestations et ces pierres étaient noyées dans du mortier où la chaux figure pour moi- st ee tié. Dans certains autres endroits la proportion de chaux est cependant moins forte et certaines couches de béton indi- quent en même temps la présence de terre argileuse comme matière agglomérante, mais c’est là une rare exception. On préférait évidemment le mortier de chaux, seulement il fallait trouver à proximité des calcaires et du bois pour les cuire, ce qui était le cas pour la région baumoise, où le combustible était abondant. Quant à la nature des pierres employées, elle dépendait de ce que les Romains trouvaient dans chaque finage, et, comme le fait remarquer M. de Matty, cela était bien nécessaire en présence de l'énorme quantité de maté- rlaux que nécessitait le mode de construction adopté. En voici une preuve palpable. De Santoche à Rang la pierre cassée disparait totalement du massif de la chaussée. La proximité du Doubs procure aux Romains une matière plus commode à la fabrication de leur béton, et l’'agglomérat qui pariois atteint jusqu'à deux mètres d'épaisseur est fait uni- quement de chaux et de sable de rivière, en couches super- posées d'épaisseur très variable, dont le tout forme un seul bloc d’une dureté extraordinaire. La somme de travail, de matériaux nécessaires, ainsi que le prix de revient d’une telle méthode peuvent paraître fantastique à quelqu'un qui n’a point vu la coupe d’une voie romaine. Et ce- pendant rien n’est plus vrai: les voies romaines étaient à proprement parler des viæ calceatæ, des chaussées (1) des chemins faits à la chaux. La constatation en est facile le long du bois du Vernois, derrière Santoche, plus que partout ailleurs, et la simple vue de ce béton, tout de sable, convain- crait rapidement ceux qui s’obstinent à croire que les voies romaines étaient établies comme les nôtres. (4) De ce qui précède, l'étymologie du mot chaussée vient plutôt de calæ,via calceata, chaux, chemin fait à la chaux, ce qui est aussi l'opinion de Diez, que du féminin du participe passé de calciare, calciata via, terre pressée, foulée, comme le prétend M. le D' Meynier (Mémoires de la Société d'Emulation du Doubs, 1900, p. 240). NDS Si cette affirmation rencontraitencore quelques sceptiques, je les renverrais à la consciencieuse étude de M. de Matty de Latour sur ce sujet. Le savant ingénieur, qui a étudié plus de sept cents coupes de voies romaines différentes, conclut également que ces routes étaient construites à la chaux. J’ap- porte encore deux documents irréfutables à lappui de cette thèse: | C’est tout d’abord une analyse chimique de deux échantil- lons de mortier pris à Voillans, section des Arbres brülés, le 21 mars 1903, sur la voie romaine du Rhin, l’un dans les fon- dations, l’autre au milieu du massif de béton épais à cet en- droit de 80 centimètres seulement (1). Or le bulletin de l’ana- lyse (2) qui en a été faite à la Station agronomique de Fran- che-Comté dénote la présence de 50 grammes 35 pour cent de chaux dans l’échantillon du bas, et 49 grammes 56 pour cent de chaux dans l’échantillon du massif supérieur. C'était donc un mortier fait à parties égales de chaux et de sable, C’est la preuve scientifique et mcontestable de cette méthode de construction, telle que je viens de lexposer. Le même bulletin d'analyse ajoute que cette composition chimique est loin d’être celle du ciment romain, dont on ne trouve au- cune trace dans les deux échantillons, ce qui détruirait lo- pinion de M. Ed. Clerc qui prétendait que les pierres servant (1) Cette coupe est présentée au croquis de la planche ci-jointe. (2) Bulletin d'analyse n° 41. — Matière analysée : Deux échantillons de substances supposées être du ciment romain : 19 Echantillon dénominé bas : 20 Echantillon dénommée milieu : MRAULADC AC PEMII LL 90739 Chaux p:0/0 0, ACTUS 49 gr 56 Acide silicique °/u....., 595 Acide silicique °/°.,..... 48 Magnésie °/...,, ee UOTE Magnésie °/o ....... QE 007 éxvde defer 0/,.,2..21,., tour Oxyde de fer 0 .,.... . Osr9 Cette composition chimique est loin d'être celle approchée d’un ciment romain. Les analyses faites sur ces substances donnant un maximum de chaux égal à 60 °/, rapporté au ciment sec et décarbonaté. La même détermination faite sur l'échantillon bas) sec et décarbonaté a donné 88 °/, de chaux. I n'y à donc aucun espoir d'assimilation. Besançon, le 24 avril 1903. Le Directeur de la Station, PARMENTIER Prix : 30 fr. De u de fondation aux voies romaines étaient reliées entre elles par du ciment, alors qu’en réalité il n’y a que de la chaux. Voici maintenant une autre preuve non scientifique, mais qui cependant a sa valeur. C’est un simple fait d'observation. Le 13 mai 1903, sur la même voie de Besançon à Mandeure, à 600 mètres de distance du champ où j'avais prélevé les échantillons dont il vient d’être question, un manœuvre était occupé à creuser la voie au lieudit « le Champ Rond » pour en extraire le sable, selon l'habitude de nos cultivateurs quand ils ont quelques constructions à faire. Or sous le mas- sif même du béton, sur les pavés servant de fondations, que trouva-t-il ? Le squelette complet d’un cheval étendu très na- turellement. D’après sa position et les grosses pierres dont - il était recouvert, il est évident que ce cheval, victime d’un accident quelconque ou amenant les matériaux nécessaires à la construction de la voie, fut laissé sur place par les lé- gionnaires ou les ouvriers. Et ceux-ci, pour ne point se don- ner la peine de creuser une fosse afin d’enfouir le cadavre, Pont simplement noyé, pour ainsi dire, dans la couche pro- fonde de béton dont ils composaient le massif de leur route en cet endroit. Preuve évidente de cette façon de construire, car si les Romains avaient procédé comme de nos jours à l’établissement de leurs voies, il leur eût été absolument impossible d'y laisser le cadavre d’un cheval abattu. Quant à la surface de marchement ou partie supérieure de cet agglomérat, elle a disparu. Mais il ne semblait pas qu’elle devait différer sensiblement de celle nos chemins. M. de Matty croit que la surface des voies romaines une fois éta- blies, comme on vient de le voir, était simplement caillou- tée et entretenue par des rechargements successifs dans des conditions analogues à nos routes actuelles. En général, si la base de la voie du Rhin était de 5 mètres 50, sa surface supérieure ne dépasse guère quatre mètres en moyenne. On est vraiment étonné de la somme colossale de travail qu'a exigée la construction de cette voie et il n’est pas éton- — 61 — nant que, sur tout son parcours, on remarque sur ses fonda- tions des ornières très visibles, comme elles sont indiquées sur le croquis (voir PI.). Bien parallèles, elle sont de soixante- quinze à quatre-vingts centimètres d’écartement. La plupart du temps on en remarque cinq et même six sur la largeur de l'emprise. Comme ces ornières sont bien marquées et profondes de cinq à sept centimètres, 1l est probable que la voie pavée a dû être livrée au roulage avant de recevoir soti massif de béton. Ne proviendraient-elles pas aussi de l’é- norme quantité de matériaux qu'il a fallu amener sur de lourds chariots pour construire l'agglomérat supérieur. Les deux hypothèses sont parfaitement admissibles. Prix de revient kilométrique. À titre de curiosité, je termine la description de cette voie en rappelant que l'ingénieur de Matty de Latour évalue à 86.000 francs au minimum, aux prix actuels, la dépense kilométrique d’une voie ainsi composée. Les voies romaines étaient construites le plus souvent, soit par les légions pendant les heures de paix qui suivaient les conquêtes, soit par des corvées, la main d'œuvre ne comptait guère. Telle est la voie du Rhin, remarquable dans son tracé, extraordinaire dans son mode de construction, vrai travail de Romains, c’est le cas de le dire. On n’est pas étonné que les siècles l’aient appelé via, la grande voie, et dans nos campagnes elle est encore aujourd’hui la vie romaine. Emplacement des Stations. En étudiant cette partie de la voie des Provinces germa- niques, il était curieux de rechercher quel pourrait être exactement l'emplacement des deux seules stations qui v sont indiquées sur les cartes romaines. Conformément à l'opinion de Perreciot, e'est sur son trajel Lopoiee dans le canton de Baume-les-Dames qu'il faut les placér sans aucune hésitation. Ce savant, dans un de ses manuscrits, dit en effet : « Il est probable que le territoire de Baume a été cultivé dès la plus haute antiquité. Il était fertile et étendu, dans une position avantageuse pour le commerce nécessaire entre la montagne et le plain pays. Son voisinage était rempli de villages sous la dénomination romaine : Lopasagium et Vellatudurum sont nommés dans l’Itinéraire romain et dans la Carte de Peutinger entre Besançon et Mandeure, et on trouve des tuiles romaines dans presque tous les territoires des environs de Baume. » Quoique cette question ait été controversée et que le calcul des distances indiquées par ces documents ne donne pas exactement la position géographique de ces deux stations, la situation topographique, les trouvailles archéologiques, et peut-être aussi l’étymologie de ces noms, fournissent des indices précieux et incontestables. Avant de les exposer il ne me paraît pas inutile de rappeler la bibliographie de cette intéressante question d'autant plus que les ouvrages qui en parlent sont très rares, même la plupart encore à l’état de manuscrits. Deux documents de l’époque romaine nous signalent la voie du Rhin et ses stations. L'un est la Carte théodosienne ou Table de Peutinger, établie vers l’an 230, selon M. Ed. Clerc, plus vraisemblablement après l’an 337, selon le P. Dunod et M. Auguste Longnon. Cette Table donne un tracé schématique des voies de l’Empire Romain à cette époque, les étapes ou mansions, leurs distances intermédiaires et indique entre Besançon et Mandeure la seule station de Lopo- sagio, dont l'emplacement n’est plus contesté aujourd’hui. Loposagium . On s'accorde généralement à reconnaître que Luxiol, village situé à 6 kilomètres au nord de Baume-les-Dames ARDENNE est le Loposagium des Romains et rares sont les auteurs qui placèrent cette mansion autre part. Du reste les raisons qu'ils apportent à l’appui de leurs thèses viennent d’une similitude de noms plus ou moins vague et d’interprétations étymolo- giques celtiques non moins risquées, comme on va en juger. « En sortant de Besançon, écrit Chevalier de Poligny (!), la voie, après avoir côtoyé le Doubs de plus près que ne le fait la route actueile et après avoir passé par la Malmaison et les Longeaux amenait à Loposagium dont le nom indique une hauteur sur un lieu où il y a un passage, ce qui paraît fixer cette station auprès de la montagne d’Aigremont, au-dessus de Laissey, station des mieux placées et des plus commodes, éloignée de Besançon d’environ quatre lieues et quart, ce qui correspond aux treize milles romains attribués à ce poste qu’on ne peut placer ni à Soye ni à Luxiol. » Chevalier soutient encore la même thèse dans le mémoire qu’il présenta à l’Académie de Besançon pour le concours de 1756 sur les voies romaines en Franche-Comté (?), « Loposa- gio, écrivait-il, est un nom composé de sagio, passage, et de lopo. Ce dernier mot n'est-il point écrit pour polo ? Polus, hauteur, montagne élevée, sagio, passage de rivière, ce qui convient parfaitement à Laissey et au quartier sous le château de Roulans. » Chevalier ignorait peut-être que Laissey n’était point sur la voie romaine. Dom Jourdain (3) place Loposagium à Passavant : « Je ne vois, dit-il, aucune analogie entre Luxiol etle Loposagium de la carte, » Il en découvre plutôt dans Passavant, et le calcul” des distances satisfait trop facilement cet auteur : « Ce lieu est à treize lieues gauloises de Besançon et à dix-huit de Mandeure, ce qui répond exactement aux nombres marqués (1) CHEVALIER. Histoire de Poligny, 1, p. XLXHN. (2) CHevaLtrer, Bibliothèque de Besançon, fonds de l'Académie ma- nuscrit, 17. (3) Dom Jourpaix. Biblioth. de Besancon, fonts de l'Académie ma- nusce, 17, OR sur la carte pour ces deux distances. Je pourrais aussi trouver quelque affinité entre les mots de Loposagium et de Passa- vant, si J'étais instruit dans la langue celtique. » Quand même il eût été, Dom Jourdain n'aurait pu corroborer son opinion d'arguments sérieux, attendu qu'aucun vestige de voie romaine n'a été relevé sur le territoire de cette commune. Et je suis très étonné que l’Académie bisontine ait couronné son travail alors que seul d’entre tous les concurrents et les archéologues, il mentionne une voie dont on ne trouve aucun indice, dont on n’a aucun souvenir dans le pays, qui, par suite, est très problématique, et qu’au contraire il ne signale aucunement sur sa carte des routes romaines, la voie du Rhin, passant par Luxiol, Voillans, l’'Hôpital-Saint-Lieffroy, telle que nous l’avons décrite précédemment et si visible encore aujourd'hui. Il se contente d'indiquer par un pointillé douteux une voie longeant le Doubs et passant par Baume-les-Dames. Cluvier et Valois (1) opinent pour Soye, voyant dans le nom de ce village une certaine ressemblance avec les derniè- res syllabes de Loposagium. Cette opinion est absolument. inexacte, car on peut certifier en toute assurance que la voie romaine en question n’a pas passé par Soye. D’Anville (2), M. Bial G), récemment M. Espérandieu (4), avant sans aucun doute étudié de très loin la Voie du Rhin, s’obstinent à lui faire suivre les rives du Doubs et font de Baume-les-Dames la station de Loposagium. Walckenaer (5) est moins affirmatif dans cette erreur ; il ne peut pas dire si c’est Baume-les-Dames ou Saint-Ligier, hauteur qui domine cette ville au Nord et qui, autrefois, en était un quartier important. On peut opposer à ces auteurs (D) Ad. Varors. Notitia Galliarum p. 120. (2) D'ANVILLE. Notice sur l’Ancienne Gaule, p. 149. (3) M. Braz. Mémoires de la Société d'Emulation du Doubs, 1862, p. 401. (4) M. ESPÉRANDIEU. Revue épigraphique, n° 101, avril 1901, page 180. ) (5) WALCKENAER. Géographie ancienne des Gaules, t. LIL, p. 93. le même démenti formel qu'aux précédents. La voie du Rhin, comme nous l'avons vu, en étudiant son tracé, ne pas- sait pas plus à Baume qu’à Soye, et c’est le cas de rappeler cette réflexion pleine de justesse de M. Ed. Clere (1 « Privés des connaissances qui ne peuvent s’acquérir que par des études toutes locales, les savants étrangers à notre pays éprouvent un insurmontable embarras dans Pappli- cation des itinéraires romains aux localités modernes. La nécessité les force à chercher les stations anciennes dans les villages dont le nom leur offre quelque analogie avec le nom écrit dans la carte de Peutinger ou l'itinéraire d’An- tonin, en calculant au hasard les distances, et souvent en dehors du tracé réel des voies romaines ». Bergier, dans le mémoire qu'il envoya au Concours de 1756 dont il est parlé précédemment, n’ose affirmer mais croit que Luxiol est l’ancien Loposagium. Dunod (2) sans en donner la raison, n'hésite pas à dire que Loposagio c'est Luxiol, et il écrit ce nom Lucio tel qu’il est encore prononcé dans la région. Sont de cet avis tous les autres auteurs qui out traité des voies romaines en ie Conté : M. Ed. Clerc (), dernièrement M. J. Gauthier (4), au xve siècle, Trouillet qui, dans son mémoire du Rs de l’Académie, semble avoir étudié avec un soin particulier la voie de la Germanie : « Lucio, dit-1l, où nous plaçons la première mansion (Loposagium) n est plus qu'un village, au couchant, à une petite lieue de la ville de Baume. Sa posi- tion dans un terrain élevé et aquatique nous parait exprimée par son nom gaulois Loposagio. Ce lieu était considérable. On y trouve des ruines de grands bâtiments, des briques anciennes, des marbres gravés, et le peuple v conserve une (1) Ed. Crerc, La Franche-Comté à l’époque romaine, p. KT. (2) Duxop. Histoire des Séquanois, préf, p. XI. (3) Ed. CLERC. Ouvrage cité, p. 109. (4) J. GaurTuier. Mémoires de la Société d'Enul. du Doubs, 189) p. 301. 66 — vieille tradition que c'était un passage pour les armées ro- maines. La voye s’y fait encore remarquer. Dernièrement on trouva dans les champs de ce village un marbre gravé qui fut cassé par les laboureurs avant qu’on ait lu l'inscription ». Cent ans plus tard, M. Ed. Clerc citait un fait identique : ne serait-ce pas. le même tiré de l’auteur précédent ? De nombreuses monnaies romaines y ont été trouvées au siècle dernier. Tous ces vestiges, ces découvertes archéo- logiques et la position topographique agréable de ce pays, ainsi que l'abondance de l’eau, chose si précieuse pour une étape, donnent la certitude que Luxiol est réellement l’an- cienne station de Loposagium mentionnée par la Table de Peutinger. C’est également l'identification adoptée récem- ment par M. Ernest Desjardins (î) et Auguste Longnon (? dans leurs géographies de la Gaule romaine. | Velatodurum. Si la question semble définitivement élucidée pour Lopo- sagium, il en est loin d’être de même pour Velatodurum, l’unique station indiquée sur litinéraire d’Antonin entre Besancon et Mandeure. Cet itinéraire, qui est la première carte romaine que nous possédions (si toutefois on peut donner le nom de carte à une simple nomenclature des voies de l’Empire romain), indiquait les stations principales ou relais que l’on y rencontrait, et, en chiffres, la distance intermédiaire entre chacune d'elles. Ce livre de poste certainement antérieur à la Table de Peutinger selon Dunod, Trouillet et le plupart des auteurs, aurait été dressé pour les généraux à la fin du mm° siècle, après l’an 286 à en croire M. Aug. Longnon. Or, sur cet itinéraire, il-n’est pas question merde (1) M. Ern. DESJARDINS. Géographie hist. et admin. de la Gaule ro- maine. t. IV, p. 142. | RE | ps (2) M. Aug. LONGNON. Atlas géoyraphique texte, p. 29. rs Pa de Loposagium, et seul Velatuduro y est cité entre Besan- con et Mandeure Certains archéologues trompés par le calcul des distances, d’autres par l’interprétation étymo- logique de ce nom, placèrent Velatodurum un peu de tous les côtés, même en dehors de la voie du Rhin et de toute autre voie romaine. Jusqu'à ces temps derniers, les auteurs étaient unanimes à ne reconnaitre qu’une seule voie allan de la capitale de la Séquanie à Mandeure. Ils s'étaient tou- jours accordés à dire que Loposagium et Velatodurum étaient deux gites placés sur cette même voie à laquelle ils avaient fait suivre souvent un parcours imaginaire pour donner raison à leurs thèses : récemment il a élé émis une opinion toute nouvelle : l'existence de deux routes diffé- rentes allant de Besançon à Mandeure lune avant Velato- durum sur son parcours, lPautre Loposagium, opinion peu admissible contre laquelle militent de très sérieuses objec- tions, comme nous le verrons. Velatodurum a été placé : 10 sur La voie du Rhin, pour des raisons différentes, très curieuses souvent, à Rang, à Porn- pierre, à l'Hôpital-Saint-Lieffrov, et à Voillans. 20 En dehors de cette voie, à Viéthorey et à Vellerot Mais tout l’intérèt de la discussion se reporte sur Vellerot et Voillans dont les partisans sont nombreux de part et d'autre. Aussi ne citerai-je, que pour mémoire, les auteurs des autres identifications. Trompé tout à la fois par le calcul des distances indiquées par une fausse application de linterprétation étymolo- gique, M. Ed. Clerc (1) prétend que Rang est l’ancienne station Velatodurum : « De Pompierre, la voie mène à Rang-sur-le-Doubs, où lon doit reconnaitre le Velatodu- run de l'Itinéraire, dont le nom de Rang ne conserve que la dernière syllabe défigurée. » Chose très invraisembla- ble, car la désinence dun étant assez commune dans les (1) Ed. CLERC Ouvrage cité, p. 110. Lee noms de lieux gallo-romains; même en Franche-Comté nous devrions avoir, dans ce cas, deux ou trois Rang. Ce qui a poussé cet archéologue à émettre cette opinion, c’est, dit-il «que la désinence durum indique un lieu sur une rivière, et : le calcul des distances nous y coRAmiE Ce n'est qu'à Rang que la route rencontre une rivière à traverser. D’ailleurs de Besançon à Rang il y a en réalité 50 kilomètres ou 22 lieues et demie gauloises. » Faux calcul, car en suivant le tracé exact de la voie du Rhin, le xxn° mille (ou 48 kilom. 890) serait au delà de lHôpital-Saint-Lieffroy, vis-à-vis Clerval et . non à Rang qui est à 56 kilomètres de Besançon. Sans en donner la raison, d’Anville (1) veut que ce soit Pompierre, Pont-de-Pierre, écrivait-1l. L’Hôpital-Samt-Lieffroy est l’ancien Velatodurum ue Chevalier (2): « Ce- dernier lieu, dit cet auteur, que l'Itiné- raire met à XXII milles de Besançon, est suivant cette distance (en milles romains, l'Hôpital près de Viéthorel : la voie y passait et non à Voillans (première erreur !) On dira ci-après qu’une branche de chemin depuis Langres venait près de ce poste rentrer dans la voie principale (deuxième erreur : cette route, qui passait à Uzelle, Mancenans, rejoignait la voie du Rhin vers l’Isle-sur-le-Doubs). C’est pourquoi vraisemblable- ment, continue Chevalier, il portait le nom de Velatuduruim, via, lata, turum, Viéthorel, poste ou entrée de la grande voie. Viéthorey a encore été désigné dans les Mémoires de Ja Société d'Emulation du Doubs @). Peut-être, comme il m'a été dit, v voyait-on une étymologie celtique, différente de la précédente (vel, thodeure, ruisseau). Malheureusement pour l'exactitude de cette interprétation, Viéthorey ne possède aucun ruisseau, manque d’eau très souvent et (1) D’anvizze. Notice sur la Gaule, p. 643. (2) CHEVALIER. Histoire de Poligny, t. [, p. xuix. : (3) Mémoires de la Société d'Emulation du Doubs, 1899, p. JOIE O0 surtout se trouve à 6 kilomètres de la voie romaine, ét n'y était nullement relié. Sur son territoire on ne retrouve aucun vestige de chemin antique. On ne doit donc pas hésiter à rejeter cette identification. Je n'hésite pas à émettre la même affirmation au sujet de Vellerot-les-Belvoir , malgré ses nombreux partisans, qui apportent plutôt à l’appui de leurs thèses des rapprochements - étymologiques que des documents topographiques. Parmi ceux-ci il faut citer Schæpflin (1) qui a vu une cer- _taine ressemblance entre Velatodurum et Vellerot et avec assurance fait passer dans ce village la voie du Rhin qui en est éloignée de plus de huit kilomètres et qui se trouve sur la rive opposée du Doubs. Le même identification a été adoptée par Dom Jourdam dans son travail présenté au Concours de 1756. Il faisait passer une voie venant de Genève au Rhin par la Séqua- nie, par Pontarlier, Etray, Evsson, Vercel, Vyt-les-Belles- voyes (@) « où elle se réunissait, dit-il, à la grande route de Besançon au Rhin et suivait les stations qui sont marquées - dans la Table théodosienne et l’Itinéraire d’Antonin ; » et, en parlant des stations désignées sur ces deux documents il ajoute : “ rien n’empêche que ce ne soient deux gîtes - distingués qui se trouvent sur la même route », assertion qui fait supposer que Dom Jourdain ignorait la voie passant par Luxiol, puisqu'il ne le signale pas et qu'il fait suivre à la voie du Rhin la rive gauche du Doubs par Passavant, Vellerot : « Voicy les raisons qui me portent à donner la préférence à cette direction :. .., 2e Je ne trouve aucune analogie entre Voillians et le Velatodurum de l'Itinéraire, (l) SchœPFLIN. Alsatia illustrata, t. 1, p.199, (2) L'origine du nom de Vyt-les-Belvoir vient de la proximité de cette localité avec le château et le pays important alors de Belvoir; c'est done à tort que Dom Jourdain écrit que « le village de Vy-les-Belles-Voyes par- rait avoir recu sa dénomination de son emplacement sur une grande route, Ce nom vient du latin Via.» (Concours de 1750). NO 3e La distance de Voillians à Besancon est toute différente de celle de Velatodurum par rapport à la même ville. 4e La ressemblance entre les noms de Velutosdurum et de Vellerot est de beaucoup plus sensible et la distance de cet endroit à l’égard de Besançon suffit pour remplir le nombre de vingt-deux lieues gauloises que l'Ttinéraire donne à cet interval. » Nous verrons dans la suite que Dom Jourdain a changé d'opinion. Samuel Schmitt qui, je crois, est l’auteur du mémoire en latin présenté au même concours, partage la manière de voir du précédent : « Velatudurum Antonini nec levi conjecturâ quæritur in Vellerot, minus dextre in Voillant. » Walckenaer désigne aussi Vellerot. Plus récemment ont émis la même opinion Ernest Desjardins, Auguste Longnon dans ieurs ouvrages de géographie ancienne, ainsi que M. Bial et d’Arbois de Jubainville qui fait de Velatu-durum « la forteresse de Velatus ou Veladus » Vellerot-les-Belvoir (Doubs). Dans le Bulletin de la Société grayloise d'Emulation de l’année 1903, M. S. Leroy, professeur d'Histoire à Gray (), dans une très intéressante étude sur les Milliaires trouvés dans la Séquantie, reprend la théorie de Dom Jourdain, mais il ne se contente pas comme cet auteur d'une seule voie passant par Passavant et Vellerot. De la différence de sept kilomètres qui existe dans les mesures indiquées par l'Ttiné- raire et la Carte théodosienne et du doute qui plane sur l'emplacement exact de Velatodurum, M. Leroy conclut hardiment, et il est le premier à le faire, que « deux voies romaines ont successivement relié Besançon à Mandeure. » « La première, dit-il, indiquée par l'itinéraire d'Antonin, (1) La partie de cette étude concernant le travail de M. Leroy a été l'ob- Jet de là communication faite à la Société d'Emulation du Doubs à la séance de février 1904, | — 71 — remontait la vallée du Doubs à quelque distance de la rive gauche ; elle se confond en partie dans sa direction générale avec la route départementale qui va de Besançon jusque vers Vellevans. Son parcours qui était de 75 kil. 550, était coupé par la station de Velatodurum, aujourd’hui Vellerot-les- Belvoir. » « La seconde voie romaine, postérieure à la précédente, était plus courte d'environ 7 kilomètres puisqu'elle mesurait 68 kil 890 d’après la Table de Peutinger. Elle serrait de plus près le cours du Doubs, qu'elle longeait pour ainsi dire, à droite cette fois, pendant les deux tiers de son parcours, avant de le franchir vers Rang, et la station intermédiaire s'appelait Loposaqium, aujourd’hui Luxiol. » . Je concède volontiers à M. Lerov que Vellerot-les-Belvoir fut une station romaine — on y à trouvé des tuileaux et des monnaies — et que la voie dont il parle existait probable- ment, sur une parte du parcours désigné par lui, mais elle n'allait pas à Mandeure, Le président Clerc lui-même, à ’autorité duquel M. Leroy fait appel, n’a pu en donner un tracé certain ; la carte qui accompagne son ouvrage sur lu Franche-Comté à l’époque romaine ne porte qu’un pointillé douteux jusqu'à Aïssey. Il en conteste inême l'existence quand 1l dit que Schœpflin « trouve Velatodurum à Vellerot en traçant dans notre moyenne montagne une voie militaire purement idéale. » Il est vrai que les tuileaux et monnaies Lrouvés assez nombreux à Aïssey, Vellevans, Randevillers, Sancev et Vellerot ont donné à penser que ces localités devaient être desservies par une voie dont il ne reste qu'un seul tronçon visible entre Tournedoz et Lanthenans, Certains auteurs ont cru pouvoir alfirmer que c'était la voie des salines venant de Saulnot (Hte-Saône) par Genev, l'Isle, Lanthenans, Tournedoz, le col de Ferrière, seul passage possible de la chaine du Lomont en cet endroit, que de là elle descendait sur Vellerot, Sancev, Randevillers, Vellevans, et suivait ensuite la route actuelle de Besancon, Malgré ces hypothèses, il me parait peu admissible qu’on puisse placer Velatodurum et Loposagium sur deux voies différentes. Et voici les objections que je fais à la thèse de M. Leroy : 10 L'itinéraire d’Antonin, de même que la Table de Peutin- ger ne signalent que les routes militaires, chaussées impor- tantes, viæ calceatæ. Or, de Besançon à Mandeure il n’en existe qu’une de ce genre, celle dite du Rhin, la plus importante de la Séquanie ; inaugurée en 98 d’après les muilliaires de Mathav : étonnante dans sa construction, comme nous l'avons vu; elle passait par Roulans, Sechin, Luxiol, Pompierre, etc. La voie des Salines au contraire, par Vellerot et Lanthe- nans, n'était qu'une simple voie commerciale de création bien postérieure, route secondaire, non calceata, chemin gaulois réparé et entretenu. Si c’eût été une via calceata les habitants de ces pays en connaïîtraient le parcours. Sur le plateau du Lomont, éloignés de toute rivière et du Doubs, les indigènes de Vellerot, Vellevans et autres lieux, manquant de sable pour leurs constructions, auraient certainement défoncé et exploité, comme on le fait à Voillans, la vieille voie romaine sur les points où elle n'aurait pas été empruntée par ‘les chemins actuels ; or, il n’en est rien, ni à Vellerot, ni avant ou après. Or comment pourrait-on expliquer que cette voie d’impor- tance moindre comme construction, moins directe comme trajet, moins commode par suite des nombreux accidents de terrain, de rampes plus fortes, fut signalée en l’an 286 sur l’Itinéraire d’Antonin, et que l’autre plus importante, plus directe, mieux établie, calceata, antérieure à l’autre qui exis- tait dès l’an 98, d’après les milliaires de Mathay, voie militaire comme Je le démontrais plus haut, fut omise sur cette carte établie surtout pour les généraux de |’ Bino es il me ne qu’il y a là une objection sérieuse, | ARS tr 2° Vellerot-les-Belvoir ne répond pas aux conditions topo- graphiques, comme le prétend M. Leroy, c’est-à-dire au calcul des distances indiquées sur l’Iinéraire. La route dé- partementale de Besançon à Vellevans ne peut pas être plus directe ; Vellevans se trouvant à 42 kil. de Besançon, Vellerot par Sancey) en est à 55 kil. Or je ferai remarquer que, par suite de la différence d'altitude et de la dépression du sol, il est impossible, de Vellevans et Randevillers, d’aller plus _ directement à Vellerot. Cette distance (55 kil.) ne répond pas aux 22 milles, 48 kil. 890), de l’Itinéraire. De Vellerot on pouvait se rendre autrefois à Mandeure en empruntant deux voies romaines connues : 1° la voie de Pierre-Pertuis que la route des salines traversait à Lanthe- nans ; on n'avait alors qu'à passer par Hyémondans, Dam- belin, Pont-de-Roide et Mathay — ou 2° celle du Rhin que ladite voie des Salines traversait entre Blussans et l'Isle. La distance de Vellerot à Mandeure ne répond point par ces deux tracés aux x11 milles intermédiaires entre Velatodurum et Mandeure. Il n’y aurait qu’en suivant la route actuelle de Vyt, Valonne, Dampjoux, Villars et Pont-de-Roide que le calcul des distances serait exact; mais cette voie n'est pas connue, 1l n’en a jamais été question, par conséquent elle est très problématique. Il n’en serait certainement pas de même si c’eût été une voie reliant réellement Mandeure à Besançon. 3° Vellerot-les-Belvoir ne répond pas non plus aux condi- tions phonétiques. M. Leroy veut absolument que le nom de Vellerot vienne de Velatodurum. Pour le prouver, il énumère douze noms anciens dont la désinence est durum, il fait une étude très approfondie sur les transformations de ces mots, il en tire des règles et les applique à Velatodurum. « Après avoir supprimé, dit-il, le T intervocalique dont la chute est normale, nous aurons quelque chose comme Vellère ou Velleure et si nous ajoutons le suffixe diminutif oT nous aurons naturellement Vellerot. » Et M. Lerov termine. son une es travail en disant que sa solution « a pour elle l'autorité de M. Longnon. l’érudit français le plus autorisé à l’heure actuelle dans ces questions de géographie ancienne » Il était intéressant de consulter M. Longnon lui-même à ce sujet et d’avoir l’opinion de ce savant professeur du collège de France et de l'Ecole pratique des Hautes-Etudes, dont la compétence en toponomastique est indiscutable. Or elle n’est pas favorable à la thèse en question. Si cet auteur dans sa carte de la Gaule sous la domination romaine porte Vellerot, c’est qu'il l’a mis de confiance, d’après Ern. Desjardins, car il prétend «que Velatodurum à pu donner à la rigueur Veleur, Veler, d’où le diminutif Vellerot mais que Vellerot est bien plus certainement le diminutif de villare, et qu’il ne faut pas lui chercher une autre origine. » Pour résoudre la question de façon définitive, il serait nécessaire d’avoir les formes anciennes de Vellerot. Malheu- reusement nous n’avons pas de dictionnaire topographique du Doubs. Je trouve du moins dans le dictionnaire de l’Yonne, région qui peut au point de vue philologique se rapprocher de la nôtre, un Vellerot représenté en 1184 par Viüllertus;: en 1255 par Villertum ; en 1267 par Vüllerot ; en 1399 par Vellerot, Valerot ; en 1574 par Vellerot (1). Aucun de ces noms anciens ne se rapproche de Velatodurum. Du reste le nombre des localités portant le nom de Vellerot et de ses variantes Villerot, Villeret, indique suffisamment qu’elles tirent leur étymologie du commun villare, qui a été rendu en vieux français par villar, viller, villier, vellar, veller. 4 Enfin voici une dernière remarque qui a son intérêt En suivant minutieusement au curvimètre le tracé de la voie de Mandeure par Loposagium (Luxiol), en tenant compte de toutes les courbes que je connais pour avoir parcouru cette voie pas à pas, on arrive à Mandeure avec un total de msn (1) Collection des dictionnaires topographiques. Yonne, par M. Quant, 1872. DER, ARR 75 kilomètres et demi, seule distance exacte et vraie depuis Besançon, et non pas de 68 kil. 890, comme le voudrait le calcul des distances intermédiaires données par la Table de Peutinger. Pour obtenir ce résultat de 68 kil. 850, il faudrait que la route allât à peu près en ligne droite de Besançon à Luxiol et de Luxiol à Mandeure ce qui est topographiquement impossible par suite des accidents de terrain. D’où je conclus : 4° qu'il v a erreur de mensuration ou de copiste dans les chiffres donnés par la Table. 2° La distance exacte de Besan- çon à Mandeure en suivant le tracé de la Table par Luxiol étant de 75 kil. et demi, la distance donnée entre ces deux mêmes villes par l’Itiméraire d’'Antonin en passant par Vela- todurum étant identiquement la même, soit 75 kil. 556, je conclus aussi, de cette égalité de longueur qu'il ne s’agit pas de deux voies différentes, mais bien de la même route dési- gnée et par l’'Itinéraire d’Antonin, et par la Table de Peutin- ger. Il y a la simple différence d'indication d’un relai intermédiaire, le premier ayant été détruit ou chargé pour une plus grande commodité de service, dans le laps de temps qui s’est écoulé entre l'établissement de la première et de la seconde de ces deux cartes que nous possédions de la Séqua- nie sous la domination romaine. Velatodurum n’est donc pas Vellerot puisque la voie de l’Itinéraire n'y passe pas. Serail-ce Voillans ? Dunod, dans son Histoire des Séquanois (1) l’affirme sans donner les raisons qui le poussent à émettre cette opinion : « Velatodu- um. est une mansion qui avait été changée au temps des cartes de Peutinger, postérieures à l'Itinéraire, et Voillans est un village auprès de Luciol, Loposagio, nommé dans ces cartes.» Dom Jourdain, qui a varié dans sa manière de voir, aban- donne Vellerot pour Voillans : « Voillans, écrit-1l, se trouve assez exactement à la distance de XxX11 milles italiques attri- bués à la première station au dela de Besançon, en fixant la MT. L'p. XIX: RP valeur du mille au tiers de la lieue de 2.400 toises. Voillans est accompagné, au midi et au nord et sur l'alignement de la voie, de deux villages qui portent l’un le nom d’Autechaux, l’autre celui de l'Hôpital, dénominations qui annoncent que la voie passait proche du premier et que l’autre était un gîte (hospitium). On conclut de ces circonstances que Voillans est le Velatodurum de l’Itinéraire. » : C’est aussi Voillans pour Trouillet, et Bergier qui ont pris part au Concours de 1756. Tous deux confondent avec raison les roùtes portées sur l’ftinéraire et la Table, et mettent Velatodurum et Loposagium sur la même voie. M. Laurens (1) copiant textuellement Bullet (2) voyait dans Velatodurum l’étymologie celtique be/, vel : fer ; toddur, heu où l’on fond, où il v a un fourneau. Il en concluait que c'était Voillans, car il y avait des mines de fer fort abondantes, où le fer se trouvait pur en certains endroits. L'exploitation du minerai a duré jusqu’au milieu du xixe siècle et faisait la fortune .des habitants de ce pays. Je ne crois pas qu'il y ait eu jadis des fourneaux à Voillans. Le calcul des distances ne peut fournir une indication . précise en faveur de Voillans, qui se trouve à 6 kil. du point marqué par le xx mille. Il est vrai qu'il en est a peu près de même de Luxiol et qu'on ne doit pourtant pas hésiter à en faire la station de Loposagium, malgré une différence de 4 kilomètres. Je me garderai bien de faire venir de Velatodurum léty- . mologie du mot Voillans. Cette forme indique de prime abord une origine germanique dont la notation ancienne se termi- nait par hing ou hingen. Quant à l’origine tirée du latin Velatus, quelque séduisante qu’elle paraisse, il faut y renon- cer. Velatus a donné voilé mais ne peut donner Voillans, car on ne sait ce qu'un suffixe germanique ou celtique ms (1) Annuaire du Doubs, 1853, Notice sur le canton de Baume. (2) BuzLET. Mémoire sur la langue celtique, T, 191. LR fi viendrait faire à côté d’un mot latin qui n’est pas même un substantif mais seulement un qualificatif. Par contre si Voil- lans ne peut venir de Velatus, il n’en est pas de même de Velatodurum. Au lieu de voir dans ce dernier nom un terme celtique duros, ou douros, et d’en faire « le fort ou la forte. resse de Velatus » il me semble plus logique et plus simple de n’y trouver qu'un nom latin composé d’un substantif et. d’un adjectif : velatum, durum. Et alors dans ce cas, par suite de la signification de ces deux mots et leur parfaite adaptation à la topographie de ce pays, je suis tenté de croire que Velatodurum, la station de l’Itinéraire, a été réellement bâtie sur le territoire même de Voillans. Qu'on donne en effet à la désinence durum la signification de rocher, ou celle de cours d’eau, ruisseau, ou tout autre sens comme localité ou petite forteresse, le qualificatif de velatus, caché, convient admirablement bien à toutes ces versions. Si l’on vient de Besançon ou de Mandeure en sui- vant la voie romaine, il faut arriver sur Voillans pour l’aper- cevoir au fond de cette petite vallée de forme oblongue, à mi-côte de laquelle serpente la voie du Rhin. Cet endroit est réellement caché aux regards. Il devait l’être encore davan- tage au moment de la conquête de la Séquanie : l’humus épais et fertile qui recouvre son territoire indique suffisam- ment que les flancs de ce vallon étaient boisés autrefois. Très souvent les noms des lieux ont été tirés de leurs curiosités naturelles. « La terre, dit le D'J. Meynier, avec les reliefs, les dépressions, et les cavités que présente son sol, avec l’eau qui coule ou stagne à la surface, et celle qui entoure ses continents et ses îles, avec la végétation qui la recouvre, devait être, pour la nomenclature territoriale, d’une grande ressource (1), » Ne serait-ce pas le cas pour Voillans et qui en ferait certainement le Velatodurum des (4) Dr JS. MEYNIER. Mémoires de la Société d'Emul, du Doubs, 1897, p. J48. Tee Romains. Non loin du lieu dit Colombot, où l’on a trouvé autrefois de norubreux tuileaux, des substructions, des traces d'un ancien cimetière, une source, qui prend naissance à proximité d'Autechaux, s’engouffre presqu'immédiatement dans un entonnoir, d’où son nom Bief-dans-terre. Après un parcours souterrain de 1.800 mètres, ce bief jaillit abondant dans un bas-fond, sous un rocher bien caché à quelques cents pas de Voillans et devient un ruisseau qui traverse le village dans toute sa longueur. Chose curieuse : ce ruisseau arrivé à la dernière maison du pays, se précipite dans un creux et fournit une chute de vingt-sept mètres de profondeur qui actionnait autrefois les trois roues superposées du très ancien moulin seigneurial de Voillans. Ce moulin bien modernisé aujourd'hui est mû par une turbine posée à vingt-cinq mètres sous terre. Puis ce ruisseau disparait totalement dans ce profond et étroit entonnoir de pierre. Des recherches, des expériences récentes, de tréquents effondrements du sol, prouvent que ce ruisseau à un lit souterrain jusqu'au lieudit la Malcombe. De là, toujours sous terre, 1l va sortir à une altitude bien inférieure à Hyèvre-Paroisse où il reparait seu- lement et actionne encore un moulin. N'est-ce point vraiment capable de frapper l’imagination. Cette curiosité naturelle a attiré récemment l’ettention de hardis spéléologues. Cest donc bien le velatum duvrum (1) par excellence, ruisseau caché, dans son parcours d’Autechaux à Voillans et de Voillans à Hyèvre. C'est une simple hypothèse que j'émets. Du reste, pourquoi l'étymologie de Velatodurum ne vien- drait-elle pas de deux termes latins, alors que partout dans le voisinage on ne trouve que des noms d’origine romaine comme la Vieville,viae villa ; Montby, monts viue; Fontaine, (4) La désinence durum que jusqu’à ces temps derniers on a toujours fait venir, non sans raison, de dubrum ou duvrum ruisseau, rivière, me semble plus admissible que toute autre interprétation, attendu que toutes les localités dont les noms se terminent par durum sont sur un cours d’eau. LC A fontana ; Clerval, Clavis vallis ; l'Hôpital, hospitium, etc. Les Romains créant une étape sur leur grande route lui ont donné simplement un nom suivant leur langue, nom tiré de la topographie du terrain, ou de la chose qui les v a frappés. Les trouvailles archéologiques viennent à l’appui pour donner la certitude qu’une mansion romaine a existé sur le territoire de Voillans. Une statuette de divinité achetée autre- fois par M. le Marquis de Moustier, des ustensiles de ménage et divers autres objets offerts au Musée archéologique de Besançon par M. Pol Jacquard, des tuileaux nombreux, recueillis par : M. Buhard, au Prélot à proximité du village ; trois pièces d’or de Néron, Adrien, Marc-Aurèle, trouvées en 1845, par Simon Petit, dans un murger des Combes de Vaux et reçues plus tard avee empressement comme paiement d'impôts par un collectionneur, M. Delacour, _percepteur à Baume, cinq pièces d’or également découvertes depuis en Ranthes, une autre à Champraye, non loin de la chaussée, quelques-unes acquises par M. Vuilleret, sans compter une pièce d'argent à l'effigie de Trajan qu'on a montée en broche ; enfin de nombreuses monnaies de bronze et instruments divers, sont des documents sérieux qui indiquent bien l'emplacement d’une mansion détruite, car les pièces d’or ne se perdent pas si fréquemment au bord d’un chemin et surtout si nombreuses au même endroit. - Les murgers qu’on rencontre assez multipliés à peu de distance de la voie, et composés en partie de moellons, ne seraient-ils pas aussi des restes d'anciennes demeures détrui- tes. La vaste pelouse, dénommée « La Levée de Jules César », qui domine le vallon et la voie sur un long parcours ne serait-ce pas, également l'emplacement d'un ancien camp ou poste de surveillance ? La voie romaine, objectera-t-on, ne passe pas à proxi- mité du ruisseau. Cest vrai, la voie en est éloignée de 300 inètres au moins et se trouve à un niveau plus élevé. Mais il est évident qu'elle v était déjà reliée par le chemin actuel qui conduit du village aux Arbres-Brûlés. L’usure et le délite- ment des roches qui le bordent au sortür de Voillans et qui servent de soubassement aux murs de clôture du Château, rappellent les chemins celtiques ; et étonnante largeur de la chaussée romaine au lieudit « le Champ rond » est un indice probable que ce chemin rejoignait la voie du Rhin à cet endroit. Telles sont les raisons basées sur la topographie et de nombreuses observations, qui donnent la certitude que Vaillans a été une station romaine, sans grande importance, il est vrai, composée de maisons échelonnées le long de la voie, depuis le Bief-dans-terre jusqu’à la Levée, et que cette mansion était très vraisemblablement le Velatodurum de l’Itinéraire d’Antonin. Trouillet prétend avec ra son que cette étape a été remise à Luxiol. Choisie probablement comme relai parce qu’elle était à égale distance de Besançon et de Mandeure, elle a sans doute été abandonnée dans la suite à cause de la dis- tance et de la déclivité du terrain depuis la voie au ruisseau, Les Romains lui ont préféré Luxiol, seul autre endroit, où, de Sechin à Rang, (c’est-à-dire dans toute la longueur de la traversée de la voie sur le plateau des cantons de Baume et de Clerval), l’eau soit abondante et limpide. A cette condition importante pour l'établissement d’une étape, s’en joignait une autre: la voie passait à proximité même de la source et nul détour n’y était nécessaire comme à Voillans. Velatodurum abandonné d’abord par les Romains, détruit. par les Barbares, n’a laissé, aucun souvenir pendant de longs siècles, et n’a pas même conservé son nom à notre village actuel de Voillans. bâti dans la suite sur son emplacement. Société d’'Emulation du Doubs, 1903-1904. NOTICE SUR LE STATUAIRE JEAN PETIT (1819-1903) AS CIM OMAURICE" TETURIET Séance du 201juin 1903: Au commencement du mois de mai dernier, la Société d'Emulalion perdait un de ses membres honoraires les plus distingués, dont le nom et l’œuvre ont jeté quelque éclat dans le monde des arts. Le sculpteur Jean Petit était né à Besançon le 9 février 1819. Son père était un ouvrier couvreur qui logeait avec sa famille au palais Granvelle. on ne sait au juste à quel titre ni à quel étage (1). L’enfant fit donc ses premiers pas sous les arcades de la vieille cour où soixante-dix-huit ans plus tard il devait voir ériger son œuvre de prédilection. Le voisinage de l’école municipale de dessin décida peut- être de sa vocation. Comme les Gigoux, les Baille, Îles Machard, les Giacomotti, les Chartran, il fréquenta dès l'enfance cette école qui à été pour Besançon une pépinière d'artistes, Encouragé par ses maitres qui avaient remarqué ses heureuses dispositions, Jean Petit part pour Paris à 1) Le Palais Granvelle était alors propriété particulière, [ne fut acquis par la Ville de Besançon qu'en 1864, +0 l’âge de quinze ans, dénué d’argent, mais riche d’espé- rances. Quel courage et quelle foi dans son art ne fallait-il pas à ce jeune homme pour affronter ainsi, sans protecteurs et sans fortune, les pénibles débuts d’une carrière difficile entre toutes. Petit se met avec ardeur au travail : il suit en 1834 et en 1835 les cours de sculpture à l’école des arts décoratifs où il est médaillé; il est admis par concours en 18360 à l’école des Beaux-Arts, devient l'élève de David d'Angers, honneur recherché par tous les débutants, et, sous la direction de ce maitre travaille au fronton du Panthéon. Dès 1838 il aborde le concours du prix de Rome; il est reçu le premier en loge, mais une grave maladie l’oblige à interrompre la composition définitive (1). | Joseph Droz, de l’Académie française, qui déjà s'intéresse au jeune sculpteur, déplore ce fâcheux contre-temps dans un billet adressé à Charles Weiss : (Je ne veux pas, écrit-il, laisser partir notre jeune compatriote Petit sans lui donner quelques mots pour vous. Nous avons été cruellement con- trariés ; le triste état de ce jeune statuaire l’a mis dans l'impossibilité de continuer ses travaux depuis plusieurs mois et de se présenter au concours où il aurait eu tant de chances de succès. Sa désolation, vivement partagée par David et par moi, a encore augmenté son mal. L'air natal le rétablira et il reviendra poursuivre sa carrière, obtenir les succès dont le rendent digne son talent, sa persévérance, son àme noble et pure. Nous désirons beaucoup que la ville de Besancon lui continue son bienveillant intérêt. C’est de cœur que Je vous recommande ce jeune homme; ayez, je vous prie, la bonté de le mettre en relations avec les per- sonnes qui peuvent lui être utiles. » L'année suivante, Petit obtint le second grand prix avec un bas-relief représentant « Le serment des sept chefs devant Thèbes » Le journal le National, dans son numéro du (1) Cette composition avait pour sujet: Alexandre-le-Grand malade — 83 — 19 septembre 1839, louait en ces termes l’œuvre du jeune artiste : « M. Jean Petit, qui est élève de M. David, avait inmontré dans sa composition un talent qui, à nos veux, aurait dû le faire préférer à tous ses rivaux ; 1l n’a obtenu que le second grand prix. Les têtes de ses personnages, qui étaient peut-être un peu trop grosses, sont sans doute cause qu’on ne lui a pas accordé la première place ; seules elles peuvent expliquer la rigueur des juges à son égard. Du reste, la composition même de sa page était la plus com- plète et la plus sculpturale de toutes... Le modelé était d’un beau travail où la fermeté n’enlevait rien à la finesse. Assurément on peut le dire : c'était là un talent, sinon sans défaut, au moins müûri et à qui il fallait se hâter d'ouvrir le chemin des Alpes et les études de la villa Médicis. » Hélas! Jean Petit devait rester sur ce demi-succès. Au concours suivant, aucun artiste ne fut admis à l’honneur du orand prix. Le sujet donné aux concurrents était la statue d'Ulysse lendant la corde de son arc. Les critiques d’art louërent la facture habile et hardie de l’ouvrage de Petit, mais furent d'accord pour trouver une trop grande ressem- blance entre son Ulysse et le Philopæmen de David d’An- oers. « Sans cette fatale réminiscence, disait le Constitu- tionnel du 23 septembre 1840, et s’il n’eût pas été élève de M: David, M. Petit aurait obtenu le premier prix; mais les juges, avec raison ce nous semble, n'ont pas cru qu'un élève dût pousser à ce point la docilité aux leçons du maitre. » David, en envoyant à là municipalité de Besançon le moulage de cette œuvre, écrivait non sans une pointe de dépit : «Il n’y a pas eu de grand prix cette année, à léton- nement de beaucoup d'artistes. Mais certes si Institut ne s'était pas montré si sévère, il n'eût pu donner le prix qu'à M. Petit. » Les brillants débuts du jeune sculpteur avaient attiré sur lui l'attention de ses compatriotes, Dès 1842, Charles Weiss dans une correspondance affectueuse continuée jusqu'à sa Shi mort, lui témoigne d’un intérêt qui se transforme bientôt en une profonde et solide amitié. Joseph Droz lui continue son appui et ne manque aucune occasion de le louer. Weiss lui- même l’atteste dans une lettre quil écrit à Petit le 10 juin 1842 : « M. Droz est en ce moment à Besançon; il vous porte le plus vif intérêt et j'ai eu le plaisir de l'entendre parler de vous à M. le Maire, dans une assemblée respec- table avec tout le zèle et toute la chaleur de l'amitié. J'aurais pu dire les mêmes choses, mais je ne les aurais pas si bien dites... » Ainsi recommandé, Petit obtint de la municipalité bisontine une subvention pendant trois ans (1839 à 1841). Victor Hugo était intervenu pour solliciter ce secours en faveur de l’artiste pauvre. On en trouve la preuve dans une lettre de Weiss à Petit datée du 8 décembre 1848; le savant bibliothécaire écrit à son cher Phidias, comme il se plait à l'appeler : « M. Victor Hugo vous connaît et vous aime de- puis longtemps. J’avais oublié que le grand poête a écrit au Conseil municipal de Besançon en votre faveur une lettre qui émut vivement les pères conscrits de notre cité. » En 1844, l’Académie de Besançon, ensuite des démarches de Joseph Droz, attribua la pension Suard à Jean Petit. On peut affirmer que jamais subsides ne furent mieux placés ; ils étaient mérités à un double titre, car ils encourageaient un labeur opiniâtre et ils venaient au secours d’un véritable dénûment. | Petit exposa pour la première fois au Salon en 1844. Son envoi comprenait deux groupes en plâtre représentant des sujets religieux et plusieurs médaillons, d’une facture éner- gique, parmi lesquels celui du philosophe Jouffroy et celui du maréchal Moncey. L’année suivante, il exposait un buste de Charles Nodier et, en 1846, il obtenait au Salon une mé- daille d’or pour ses bustes en marbre de Joseph Droz et de l'abbé Boisot. Cet'e dernière figure est particulièrement remarquable par la grâce de l'attitude et la finesse du mo- — 85 — delé; c’est une des plus parfaites qui soient sorties des mains de l’artiste. Petit qui avait été si près d'obtenir le prix de Rome consi- dérait l'Italie comme la terre promise et ne désirait rien tant que de visiter cette éternelle patrie de PArt et d'y compléter ses études par la contemplation des chefs d'œuvre de lAnti- quité et de la Renaissance. Ses premières économies furent consacrées aux frais de ce vovage qui dura près d’une année et qui eut pour étapes Milan, Pise, Carrare, Pérouse, Venise, Florence, Naples, Pompéi et surtout Rome, où il fit le buste du pape Pie IX. | Malgré ses succès, Petit avait à lutter avec les difficultés de la vie. Affranchi des préoccupations matérielles de lexis- tence, son talent aurait pu s'épanouir en plein idéal et son ciseau aurait sans doute produit quelques belles œuvres de plus; mais l'artiste se voyait obligé d'accepter des corn- mandes de travaux décoratifs et de se résigner à des collabo- rations anonymes dont un autre avait la gloire et le profit. En 1849, il exécute avec M. Deligand quatre statues en plâtre de dimensions colossales pour la décoration du pont de la Concorde, à l’occasion de la fête nationale du 4 mai. L'année suivante, pour la même circonstance, il accepte de faire avec deux autres artistes 18 statues allégoriques En même temps, il collabore avec Simard aux travaux de décoration du grand salon du Louvre et il sculpte, d’après une esquisse de ce maître, pour le tombeau de Napoléon Pr un bas relief en marbre représentant la Création de la Cour des Comptes. Lors de la fète nationale du 15 août 1852, 1 exécute seul pour l’ornementation de la place des [nnocents quatre énormes cariatides supportant les tribunes des grands corps de PET. Ces figures, qui ne devaient vivre qu'un jour, portaient néan- moins un caçghet d'art qui valut au statuare les éloges de la presse. Une certaine renommée venait à Pelil qui commencait en- fin à recevoir des commandes de PEtat. [les avait longtemps En ne “attendues en vain et il faisait part à Weiss de ses démarches infructueuses dans des termes qui méritent d’être cités : « J'avais la naïveté de croire, écrit-il à son ami le 4 décembre 1848, qu'il suffisait d’avoir fait des études consciencieuses pour arriver à la connaissance approfondie de son art et d’a- voir obtenu quelques succès pour mériter la faveur de M. le Ministre. Mais vaines illusions, ce n’est pas tout cela que l’on demande ; ce sont des protections et de hautes protec- tions encore, non pas prises dans la classe artistique qui nest absolument rien, mais parmi les hommes politiques, qui disposent de tout. Je l’ai vu par ce qui m'est arrivé ces temps derniers. J'avais adressé une pétition à M. le Ministre dans laquelle je lui demandais des travaux, en Iui exposant mes titres au nom desquels je sollicitais sa bienveillance. Je n’eus pas de réponse. Je m'adressai au Directeur des Beaux- Arts pour savoir où en était ma demande; je ne fus pas plus heureux. J’insistai pour avoir audience et toujours pas de réponse. Je hasardai enfin une dernière lettre que j'adressai à son domicile et dans laquelle je lui rappelai toutes les pré- cédentes, mais elle eut le même sort que toutes les autres. C’est alors que jallai trouver M. Robelin pour lui conter mes tristes aventures et le prier de m'indiquer les moyens que je devais employer pour me faire entendre. Il sourit.de ma crédulité et me dit que je pétitionnerais ainsi toute ma vie sans plus de succès si je n'employais pas linfluence de quelques personnages puissants. En effet, il me fit avoir une lettre de son ami Victor Hugo avec laquelle je me présenta à M. Charles Blanc, directeur des Beaux-Arts, qui me reçut cette fois avec tous les égards que lui imposait une telle re- commandation. Mais malheureusement il était trop tard pour qu'il pût satisfaire ma demande, les travaux étant donnés et le budget entièrement dépensé. > Instruit sans doute par l'expérience et sachant mieux sv prendre, Petit fut plus heureux les années suivantes. Sur la recommandation de Scribe, il fut chargé d'exécuter pour la LEPROE Ps décoration de la façade de l’hôtel de ville de Paris la statue du Premier Président de Thou (mai 1849). Ce travail lui fut payé 9,000 francs. [l modela pour les appartements de l'Empereur un buste du roi Louis Bonaparte, qui fut admiré au Salon de 1853. Il cisela ensuite pour la façade du Louvre et des Tui- leries la statue du peintre Lebrun (1854-1855) et des figures en marbre représentant Mars vainqueur (1853-1855), Persée, vainqueur de Méduse (1), le Laboureur (1855-1857), Castor et Pollux (1865-1865) le Poète ou le Chantre de la Nature (1868). La plupart de ces ouvrages rappellent par leur sujet comme par [1 manière dont ils sont traités Les plus beaux morceaux de l’art antique. Entre temps, Petit contribuait avec Millet et d’autres statuaires à la création d’un monu- ment colossal élevé, sur une place d’Ajaceio, à la mémoire de Napoléon [et de ses frères : c’est lui qui fut chargé d'exé- cuter la statue du roi Louis Bonaparte qui se dresse à Fun des angles de ce monument. Il éleva, au cunetière du Père Lachaise, le mausolée de Louis Duport célèbre danseur et créateur Jde ballets ; au pied du buste de Duport, l'artiste a figuré deux statues en marbre représentant Zéphyr et Ther- psychore. En 1865, Petit tailla le fronton ouest de l'Opéra. On y voitles Muses de l'architecture et de l’industrie assises dos à dos, tandis que les génies de l'antiquité et du travail jouent à leurs pieds. Cet important ouvrage lui fut payé douze mille francs. Ilest impossible de eiter tous les bustes et tous les mé- daillons qui sont sortis des mains de lPartiste. Son buste en marbre de Joseph Droz a été jugé digne d’orner la salle des séances de l’Institut. L'école des Chartes à de lui un buste de Quicherat ; le moulage de cette œuvre figure dans la salle de l’Académie de Besançon qui possède aussi le buste (1) Cette composition, qui ful très remarquée an Salon de 1863, était pri- mitivement destinée à orner une des niches du rez-de-chaussée de la cour du Louvre. Elle est actuellement au Palais de Fontainebleau, Le QU en marbre de J.-B. Suard (D La bibliothèque de notre ville renferme plusieurs œuvres remarquables de Petit : le buste de l’abbé Boiïisot, son fondateur (2)}, ceux de Charles Nodier et de Francis Wey; les médaillons en marbre de Charles Weiss et d’Auguste Castan. Au Musée de Besançon, on peut voir ses trois compositions pour le prix de Rome ainsi que le modèle en plâtre du fronton de l'Opéra. Jean Petit avait dressé-en 1842 pour sa ville natale un projet de monument à la mémoire du Maréchal Moncev et, en 1858, l’esquisse d’une statue équestre de Vercingétorix, destinée à orner la fontaine de la place de l’Etat-Major. Ces œuvres n'ont jamais été exécutées. En revanche, Je sculpteur eut la satisfaction de voir élever, en 1897, dans la Cour du Palais Granvelle, son œuvre la plus importante, la statue du Cardinal, ministre de Charles-Quint et de Phi- lippe II. Par son testament, Charles Weiss avait légué à la Ville une somme de 30,000 fr, pour l’érection de ce monu- ment, en désignant pour l’exécuter son vieil et fidèle ami Petit; la Ville vota de son côté une subvention de 10,000 fr. L'artiste a représenté le Cardinal debout, majestueusement drapé dans sa robe et protégeant de sa main droite étendue la couronne de la maison d'Autriche. Cette statue a grande (1) Weiss avait donné à Petit d’utiles conseils pour cette œuvre, Il lui avait indiqué où 1l trouverait le meilleur portrait de Suard ; il Jui avait dé- conseillé de prendre comme modéle le portrait légué à l'Académie de Be- sançon : « Ce portrait représente M. Suard dans la dernière vieillesse, lui écrivait-1l le 43 octobre 181%, et si vous faites son buste d’après ce modele, la postérité n'aura pas une idée des traits et de la physionomie d'un des hommes les plus beaux et les plus spirituels de France. Quel parti la sculp- ture peut-elle tirer d'une tête à perruque ? » (2) Le 1% octobre 1845, Petit écrivait à M. Weiss: « Le marbre que J'ai acheté pour l'exécution du buste de l’abbé Poisot est admirable jusqu’à présent et s’il ne survient pas de défauts pendant le cours du travail, chose que l’on ne peut prévoir, j'ose espérer qu'avec l’aide de cette belle matière et avec tout le cœur que je mettrai pour reproduire dignement les traits d’un compatriote aussi généreux que l'était Boisot, l’on reconnaitra l’admi- ration de l'artiste pour l’illustre personnage qui avait été si longtemps ou- blié el qui va enfin reparaître par votre noble et heureuse pensée. D ce SE allure. On peut admirer sans réserve la noblesse de l’atti- tude, mais on trouve généralement que les traits n'ont pas la vigueur et l’accentuation qu’on remarque dans les por- traits du Cardinal, notamment dans ceux d'Antoine Moore et du (raetano. Il y a un peu trop de mollesse dans les lignes du visage et dans les boucles de la barbe, trop uniformément frisée. Le piédestal de la statue devait être orné de deux bas- reliefs dont l’un représentait Granvelle remettant à don Juan d'Autriche, à son départ pour Lépante l’étendard de la chrétienté. Il_est permis de regretter que ces bas-reliefs dont Petit avait dressé la maquette n'aient pas été exécutés. Le monument auquel l'artiste travaillait dès avant 1870 ne fut mis en place qu’au mois de mai 1897. À défaut d’inaugu- ration officielle, un punch d'honneur fut offert au vieux sta- tuaire bisontin, dans la grande salle du Palais Granvelle, par les Sociétés savantes et artistiques de sa ville natale (1) qui, à cette occasion, sollicitèrent unanimement pour lui la croix de la Légion d'honneur, Leur démarche resta sans succès ; elle n’était pourtant que le rappel d’une proposition dont l'artiste avait été l’objet en 1870, alors qu’il faisait partie pour la quatrième fois du jury de concours de l’école des Beaux-Arts et des grands prix de Rome. Mais Petit était un modeste et un isolé qui n’appartenait à aucune coterie artis- tique ou politique et les protections qui lui manquaient en 1848 pour obtenir des commandes de l'Etat lui firent aussi défaut pour la décoration: 1l à dû se dire que les choses n avaient pas changé depuis cinquante ans. Replié sur lui-même, il se contenta de soulfrir en silence de linjuste oubli dans lequel en haut leu on laissait son talent. Ses compatriotes l'en avaient consolé par des témoi- gnages d’estime auxquels il attachait le plus grand prix : l'Académie de Besançon l'avait élu membre correspondant en 1856 et la Société d'Emulation, à laquelle il appartenait (1) Mémoires de la Soc. d'Ernul. du Doubs, T° série, T. II 1897. 00 depuis 1866 l'avait nommé membre d'honneur en 1896. Jean Petit est mort à Paris, dans son domicile de la rue Denfert-Rocnereau le 6 mai 1903, à l’âge de 84 ans. Peu de temps avant sa mort il avait donné à la bibliothèque de Be- sançon les maquettes de plusieurs de ses œuvres, un groupe de menus objets, en particulier d'anciennes garni- tures de meubles ainsi qu’une intéressante collection de minéraux, qui à trouvé place au Musée d'histoire naturelle, enfin ses livres et ses correspondances, parmi lesquelles de nombreuses lettres de Charles Weiss, de Joseph Drez, et du peintre Edouard Baille. Chose remarquable chez un artiste d’humble origine, qui n'avait pas fait d’études secondaires, Petit savait manier la plume presque aussi bien que le ciseau ; lAcadémicien Droz louait en ces termes les qualités de son style : « Je ne veux pas négliger de vous parler d’un rapport sous lequel votre lettre m’a fort intéressé : elle est écrite avec facilité; il y a du naturel dans vos expressions, jamais de recherche ; et je n'ai aperçu ni un mot impropre, ni une phrase incorrecte. Cela suppose en vous un esprit juste et la justésse d’esprit est nécessaire dans tous les arts : sans elle on voit malet par conséquent on ne peut être vrai dans aucun genre de compositions. » Jean Petit a légué par son testament à la Ville de Besan- çon, en mémoire des encouragements et des secours qu'il avait reçus d'elle aux jours misérables de ses débuts, une somme de dix mille francs dont la rente servira à soutenir pendant trois ans les efforts d’un jeune homme se destinant à la carrière arüisuüque. Il légua en outre à l'Académie de Besançon une autre somme de 10,000 francs pour la création d’un concours annuel de beaux-arts dont les sujets seront re- latifs à l’histoire du pays comtois. Il était resté très attaché à sa ville natale où il aimait à venir se retremper et où il avait compté de solides amitiés : celles de Weiss, d’Auguste Castan et d'Edouard Baille. Par contre, il ne parait pas avoir été en relations suivies avec d’autres artistes comtois. Lors- — 91 — qu’il avait son atelier rue de l'Ouest, 16, à Paris, il fut le voisin de Clésinger, son aîné de cinq ans, quiavait été comme lui élève de David; mais leurs goûts et leur. genre de vie étaient trop dissemblables pour qu’une sympathie véritable unit ces deux compatriotes. Aussi bien, l'ami intime de Clé- singer, Armand Barthet, dans des articles de critique parus vers 1846, avait exercé sa verve railleuse sur Jean Petit et cherché à ridiculiser ses efforts consciencieux. Petit avait des allures réservées et timides ; il était d’une taille au-dessous de la moyenne et d’unecomplexion délicate. Dans sa jeunesse, il avait été souvent malade; à plusieurs reprises Weiss et Joseph Droz lui conseillèrent de ménager sa santé altérée par les excès de travail et sans doute aussi par les privations. Droz lui écrivait à la date du 1°" décembre 1845 : « Parmi les jeunes artistes de mérite, j'en ai connu très peu dont les commencements n’aient pas été difficiles. J'ai remarqué que la faiblesse de santé n’est pas dangereuse pour ceux qui ont une bonne conduite. Sous ce rapport, il n'y a pas de recommandation à vous faire ; je ne connais pas d'âme plus pure que la vôtre ; vous êtes digne d’aimer le beau, car vous êtes bon et sage. » Le jeune homme, dont la santé était si chancelante, grâce à la pureté de ses mœurs et à la régularité de sa vie, mourut octogénaire. Ce n’élait pas seu- lement par son mérite artistique que Petit avait su conquérir l'affection si précieuse de protecteurs tels que Joseph Droz et Charles Weiss ; c'était aussi par les qualités de son cæur ; l'honnêteté, la franchise, la bonté et la douceur se lisaient sur sa physionomie qu'a fidèlement représentée le peintre Henri Martin dans le portrait de l'artiste légue au Musée de Besançon. Dans la pléiade des artistes franc-comtois, Jean Petit oc- cupe un rang des plus honorables. Sans doute il ne saurait être comparé ni à Perraud ni à Clésinger ; il n'eut jamais comme ces maitres de belles envolées d'art ; le génie ne Pa- vait point touché de son aile. Il s'inspirait des chefs d'œuvre "00. de l’antiquité et se plaisait plutôt dans leur imitation que dans des créations originales et hardies. Ses ouvrages ont les qualités de la sculpture païenne ; ils en ont aussi les défauts. S'ils sont remarquables par la pureté des lignes et la beauté plastique, ils manquent en général de chaleur et de mouve- ment Rompu à toutes les difficultés de la statuaire, Petit eut au plus haut degré amour de son art. On peut juger d’un mot sa vie et son æuvre, ce fut un honnête homme et un vaillant artiste ! Société d’'Emulation du Doubs, 1903-1904. LE CARDINAL DE GRANVELLI ea | à ” Ÿ- En ï jp ! F2 F ÿ Fee TQ 1 ÿ! œ Ki & } _ 7 | ñ 3 Er À # 24 Fe ï 2 ; = F ,.. KL? { \ Era & 1 'j ; _ ; “ % ‘ = HAE CAT A LOERUr EX | DES PRINCIPALES ŒUVRES DE JEAN PETIT 1839. Le serment des sept chefs devant Thèbes, bas relief qui valut à son auteur le second grand prix de Rome. — Au musée de Besançon. 1839. Télémaque, esquisse ; Idomiénée, esquisse ; Alexandre-le-Grand malade, esquisse. — Au musée de Besançon. 1839. Médaillons de Raphaël, de Michel-Ange et de Jean Gou- Jon. — Ornent la façade d’une maison de la rue Cambon, à Paris. 1840. Ulysse tendant la corde de son are, Statue. — À lécole de dessin de Besançon. 1841. Buste de Jacques Cœur. — Orne la façade d’une maison de la rue Rambuteau. 1842. Projet de monument à la mémoire du maréchal Mon- cey, donné à la ville de Besançon. 1844. Ange gardien protégeant le sommeil d’un enfant, groupe en plâtre; 1844. Méduillons du maréchal Moncey ; de l'archevêque de Reims, Gousset ; du philosophe Jouffroy. La Vierge et l'Enfant Jésus x'offrant en holocauste, groupe en plàtre ; Buste de J.-B. Suard. — A l'Académie de Besançon, con 1845. Buste en marbre de Charles Nodier. À la bibliothèque municipale de Besançon. 1846. Buste en marbre de Joseph Droz, de l’Académie fran: çaise ; Buste en marbre de l’abbé Boisot. — A la pipi ianne municipale de Besançon ; Huit médaillons de personnages franc-comtois, notam- ment ceux de Charles Weiss, de Viancin, de Ch. de Saint-Juan et du marquis de Falletans. 1847. Buste du pape Pie IX. 1848. Buste en marbre de M. Robelin. 1849-1850. Statue de de Thou, premier Président au Parlement de Paris. — Au musée de la Ville de Paris. 1850. Buste en marbre de M. Charles de Rotalier. thèque de Besançon. Biblio- 1851-1852. La Création de la Cour des Comptes, bas-relief en marbre ornant le tombeau de Napoléon Ier, aux Inva- lides. Martin de Gray (médaillon). 1853 La résurrection du Christ, bas-relief. 1853. Buste en marbre du roi Louis Bonaparte; Buste en marbre de Joseph Droz. — Salle des séances de l’Institut de France ;: Médaillon en plâtre de Mme Juliette de Latour. 1854-1855. Statue en pierre du peintre Lebrun. — Fait partie de la galerie des hommes illustres. place du Car rousel. 1854-1856. Buste de Louis Duport. — Au cimetière de l'Est, à Paris. Zéphyr et Therpsichore, Statues en marbre ornant le mo- nument funèbre de Louis Duport. Même cimetière. 1855-1856. Mars vainqueur, statue en pierre. — Façade dn vieux Louvre. ÉLUS 1856-1857. Le Laboureur, statue en pierre. — Façadé du vieu» Louvre 1857. Buste en marbre de Wlle Michelot; Buste de Mlle Léa Lehaut ; Buste en plâtre de M. Florentin Laudet ; Médaillon en marbre de Charles Weiss. - A la biblio- thèque de Besancon. 1858. Esquisse d’une statue équestre de Vercingétorix (projet de fontaine monumentale). — Au musée de Besançon. 1863. Persée, vainqueur de Méduse. — Au Palais de Fontai- nebleau. 1863. Buste du géologue Nerée-Boubée. — Au cimetière de Bagnères-de-Luchon. 1$64. Statue du roi Louis Bonaparte. — Fait partie du mo- nument de la famille Napoléon, à Ajaccio; Médaillon du Premier Président Loiseau et de Gustave Oudet. 1865-1865. Castor et Poilux, statues en pierre. — Façade du Palais des Tuileries. 1866-1867. Les Muses de l'Architecture et de l'Industrie. — Fron- ton ouest de la façade principale de l'Opéra. 1868. Le Poëte ou le Chantre de la Nature, statue en pierre, sur la facade du Louvre. 4875-1897. Le Cardinal de Granvelle, statue en marbre élevée dans la cour du palais Granvelle, à Besançon. 4876. Médaillon en marbre de M. Jules Quicherat. 1882. Buste en marbre de Jules Quicherat. — À lécole des Chartes. 1883. Buste en marbre de Francis Wey, — À la bibliothèque de Besancon, cu 96 4 1884. Résignation, statue. 4892. Médaillon en marbre PE Castan. — A la biblio- thèque de Besançon. LA RENTRÉE DU PARLEMENT DE FRANCHE-COMTÉ Aprés ME x den 1759 Par M. G. BLONDEAU SUBSTITUT DU PROCUREUR DE LA RÉPUBLIQUE MEMBRE RÉSIDANT Séance du 16 Février 1904 Trois ans s'étaient écoulés depuis que le Parlement de Franche-Comté, pour avoir refusé lenregistrement de la déclaration du roi établissant un nouveau vingtième, avait vu délivrer contre trente de ses membres récalcitrants des lettres de cachet. Les parlementaires frappés avaient pris en silence la route de l’exil, mais un tel coup d'autorité avait eu un retentisse- ment immense non seulement dans la province mais encore dans tout le royaume. L'opinion publique avait pris nette- ment parti contre le pouvoir royal, Tandis que plusieurs par- lements ne craignaient pas d'adresser au roi les plus coura- oeuses remontrances, la plume des pamphlétaires ne ces- sait de déverser le ridicule sur les conseillers restés en place (1) que l’on appelait les «rémanants » ou les «filleuls de (1) Le plus célèbre de ces pamphlets est un poème lyrique dû à la plume du jésuite Talbert frère d’un parlementaire exilé: Langrognet aux enfers Un des exemplaires, très rare aujourd'hui de cet opuscule, illustré de gra- vures assez légères, est conservée à la bibliothèque municipale de Besancon Ce dépôt public possède également une gravure satirique de la mème épo:- que représentant une séance solennelle du Parlement. On y voit les tau - i ne M. de Bovnes ». Cet intendant dont les intrigues avaient réussi à lui faire attribuer le poste de premier président du Parlement, s'était rapidement attiré le mépris des magistrats et la haine du peuple par son arrogance, son ambition, et son despotisme. Accusé à Juste titre d’avoir sollicité du roi l’exil des trente membres de sa compagnie, méprisé de ceux même qui avaient suivi ses conseils, accablé sous le poids du ridicule jeté sur sa personne et sur son nom, il avait enfin compris que sa situation n'était plus tenable et démissionné le 24 avril 1761. Cette détermination eut le plus heureux résultat ; le chan- celier ouvrit les veux; il vit que la voix de la conciliation était ouverte et que la rigueur devait faire place à la clémence. Le retour des exilés pouvait seul calmer l’effervescence des esprits. Aussi le {er août les proscrits reçurent-ils l’ordre de se réunir à Belfort pour y attendre les ordres du roi. Sur ces entrefaites, la nomination à la première présidence de M. Per- renet de Grosbois, magistrat de carrière et homme de valeur, arrivée le er septembre 1761, fut bien accueillie par tous. Bientôt, des lettres patentes rétablirent le Parlement de Franche-Comté dans la même situation qu'avant le conflit et permirent aux proscrits de quitter la terre d’exil. | Leur retour à Besançon fut pour eux un triomphe qui. on s’en rendit compte plus tard, dépassa les limites de la sage raison, « L'opinion publique, dit M. Estignard (1), considérait encore le Parlement comme le défenseur du droit de la na- tion et les exilés comme des martyrs de la cause populaire. Toutes les misères furent oubliées, comine si la main du Parlement reconstitué eût pu répandre sur la province teuils des exilés restés vides ; les conseillers et les autorités présentes sont représentés sous les traits de perroquets et autres oiseaux dans des allures diverses. (4) Le Parlement de Franche-Comté, de son installation à Besançon a sa suppression 1674-1790 tome I, p. 340. Hg des prospérités sans nombre et y ramener l’âge d’or. » La réception fut magnifique. Indépendamment de la rela- tion officielle qui en fut adressée au chancelier (1) et de quel- ques notes laissées par le père Dunand, nous possédons sur cette matière deux documents très intéressants : le journal de Grimont, dont une copie est conservée à la bibliothèque municipale de Besançon (2), et un joli petit tableau qui décore la bibliothèque de l’ordre des avocats au Palais de Justice de notre ville. La Biographie Universelle ne signale point parmi les ou- vrages de lPavocat au parlement ce volumineux journal qui embrasse les trente dernières années de l’ancien régime. Pourtant cette histoire anecdotique renferme des documents les plus intéressants, non seulement sur les évènements importants de la province et du royaume, mais encore sur les menus faits, les incidents de la vie journalière et même la chronique scandaleuse de l’époque. Les détails qu’il rapporte sont des plus curieux au point de vue des mœurs et des habitudes de cette haute société de Besançon, légère et frivole, à laquelle Grimont appartenait par sa naissance et qu’il rencontrait dans le salon de madame de Faltans. Au début du deuxième tome le journal nous donne le récit, d'autant plus exact qu'il est pris sur le vif. des fêtes qui eu- rent lieu lors de la rentrée des parlementaires. La plume alerte et souvent mordante du chroniqueur sait à merveille décrire la marche des événements et Fétat d'âme de ses con- termporoins. Dans le style emphatique et bourré de métaphores à lan- tique, déjà en faveur à ce moment, le bon Grimont rapporte (1) Gonix. — Rapport du 3 décembre 1761 indiqué par ESTIGNARD comme se trouvant aux archives du Doubs, mais que nous n'avons pu retrouver. (@) Manuscrits n° 1039, loine IT. — 4100 que «les exilés arrivèrent à Besançon avec un triomphe plus éclatant que Camille ne l’a jamais eu à Rome après avoir sau- vé le Capitole ». Malgré la précaution que l’on avait prise de retarder jus- qu’à la nuit l’entrée en ville des parlementaires, de scinder en deux parties le cortège et d’espacer de quatre Jours (6 et 10 novembre 1761) la marche du premier et du second, la population toute entière se porta les deux fois sur leur pas- sage « Vers les neuf heures du soir, écrit un témoin, (1) on entendit le premier bruit de boîtes pour donner le signal. Ah! monsieur, quel instant! il ne fut personne qui ne sentit dans ce moment son cœur comme se détacher pour aller au de- vant de ces messieurs et se donner en reconnaissance. Les acclamations, les cris continuels de vive le roi, vivent nos illustres exilés, qui accompagnaient les voitures, nous les annoncerent. » Le cortège pénétra en ville, dit Grimont, par « la rue Battant nommée par les bourgeois de cette rue, la rue du triomphe, parce que c’est par cette rue que messieurs les exilés arrivèrent. » Les bousbots s'étaient mis en frais d'imagination pour dé- corer leur quartier. « Dans le milieu de cette rue, il y avoit un ange que l’on descendoit et qui arrestoit les voitures pour donner à chaque exilé un lorier pour prix de leurs victoires, pour rappeler Camille, qui pour sauver Rome a quitté son exil et que messieurs les exilés se sont fait exiler pour sau- ver la patrie.» L’assimilation entre le guerrier romain et les pacifiques magistrats à perruques n’était pas des plus heu- reuses, mais On n’y regardait pas de si près! « En réjouissance de leur retour, continue le chroniqueur, les plaisirs, la jove et les réjouissances se poussèrent à un si haut degré que c’étoit comme un fanatisme répandu chez les grands comme chez les plus obscurs plébaihains Il n’y avait plus de rang, de dignité, tout étoit pelle melle, on ne gardoit (1) Esrianarb. Ibide, page 340. — 101 — aucune mesure, tous chantoient, dansoient ensemble et c’étoit à qui mieux mieux. Tout ne résonnoit dans la ville que du nom des exilés ». « On n’entendait plus que le son des clo- ches, des timbales, des trompettes, que les symphonies les plus harmonieuses, que le bruit de l'artillerie ». (1) «M. Bizot, conseiller au bailliage et président de Besan- con, demeurant rue Charmont, fit tirer quatre muids de vin. À quiconque iroit crier devant chez lui, trois fois vive le roi, il faisoit donner une bouteille. Ainsi fut vendu son vin.» « Devant la boutique de chez un M. Charmet, orfèvre Grande-rue, il y avoit un cœur enflammé au milieu duquel il y avoit un robinet par lequel il y couloit du vin pour ceux qui buvoient à la santé des exilés, » C’était alors la mode dans les jours de réjouissances pu- bliques, de placer aux façades des maisons des baaderoles de toile tendues au moyen de baguettes de buis et sur lesquelles étaient peintes des allégories et des inscriptions. Il v en eut de tous les genres. Les notes du père Dunand en donnent quelques spécimens dont les auteurs s étaient piqués d’éru- dition. € Sur un écriteau au puits du marché onlisait: CEt resti- tuam judices tuos ut fuerunt prius, et conciliarios tuos sicut antiquitus, post haec vocaberis civitas Just, urbs fidelis. » — Isaie Ch. IV. 26. Je ne garantis pas l’exactitude de la citation. Chez un avocat: € Tibi impuis eraptam cœlum redidit justi- tiam. » Sur la façade de l'hôtel de l'Evêque de Ran : Hic nobilitas vera in virtile micat Hic virtus vera in nobilitate fulget Chez le médecin Meillardet, le vieux cliché virgihen: « O prœsidium, o dulce decus nostrum! ». Les étudiants en droit et en médecine de l’école des béné- (1) ESTIGNARD. Jbidem, page 541. 402 dictins ne pouvaient mieux faire que de tirer du sujet de leurs études un trait d'esprit; leur écriteau disait : Cum,justitia lætilia Cum lætitia sanitas Sequanis restituntur Les vignerons de Battant eux-mêmes avaient fait de l’éru- dition, à leur manière, en patois bisontin : Rome n’a Jaimé eu qu'un Caiton Main nous en an trente ai Besançon. Les allusions satiriques aux évènements présents ne de- vaient pas manquer. « Un marchand de tabac rue du Cha- teur (1) a mis une grande statue, menant par la main deux enfants qui tenaient des pipes et du tabac, et l’homme sem- blait leur dire : Fumez fillieux, et fumez fort C’est du tabac de Belfort. L’ex-premier président devait naturellement servir de point de mire aux épigrammes populaires Les écriteaux ne l’'épargnaient point. « Au coin de la rue d’Aresne, dit Gri- mont, aux fenesires de chez un nommé Marchand, il y avoit un tableau sur lequel étoit peint un champ, et au bout il v avoit une borne avec cette inscription en patois de Besançon : Au bout la boyne ». Tandis que les pièces d'artillerie annonçaient l’arrivée du cortège, la ville s’illumina de mille feux. Jacquemard était en- touré de guirlandes de Jampions et on lui avait mis en main «un drapeau rouge jaune et noir qui est la livrée de la Cité ». Aux fenêtres de presque toutes les maisons ce n’était que lanternes en papier colorié, lignes de petites chandelles à lu- mière vacillante et transparents lumineux. (1) Manuscrits de DUNAND. — 103 — « Un parüculier, continue Dunand, avait acheté un cent de lampions pour illuminer le front de sa maison ; sa femme lui demanda comment il les arrangeroit. Lui qui n’avoit au- cun dessin, lui répondit bonnement: j’en mettrai trente en haut et le reste en bas La compagnie saisit cette idée pour en faire un écriteau qui fut aposé dans lillumination : trente en haut, le reste en bas » Allusion au nombre des exilés. « Au coin de la rue d’Arennes vis-à-vis le Pilory, ceci étoit peint et dans le dernier cadre il v avoit une main sortant d'un nuage qui montroit une borne qui étoit tout au bout de la peinture. [l y avoit six transparents à six fenêtres : Vive, vive lou roy, Et nosiés (nos sieurs) trente comtois Fidèles ai duë et au roy Et que maudit set Las maichans bourgeois. Au bout lai boëne, Le lendemain on ajouta: Il faut jettié lai boëne au mourgie » (au murger). Le caustique Bizot n'avait pas oublié son transparent lu- mineux que nous connaissons déjà, (1) dans lequel il fait ex- pliquer par Jacquemard à un vigneron de la rue Battant Îles causes de la Joie générale. « Quand le dernier exilé fut arrivé, pour faire allusion à la signification de notre Utinam, on y ajouta tout de suite une grande bande où était peint en grosses lettres d’or : Adim- pletum est ». Les réjouissances commencées le jour de l'entrée en ville du premier cortège. se prolongèrent non seulement jusqu’à l’arrivée du second, mais encore durant six semaines entières. Le lundi 16 novembre 1761, (2) le parlement au complet (1) La Jacquemardade, poëme épi-comique et son auteur le conseiller Biz0T, par M. Vaissirr. - Mém. de la Soc. d'Emulation du Doubs, 1900. (2) Et non le 12 comme l'écrit GRIMONT, — 104 — fit sa rentrée dans la grande salle du Palais de Justice et ins- talla M. Perreney de Grosbois comme premier président. En raison de cette cérémonie et «de l’affluence du monde », qui devait se porter «au devant de ces évènements » l'assemblée municipale s'était réunie dès le samedi précédent. Le maire Dunod de Charnage, après avoir constaté l’heureux effet produit sur lPesprit de la population bisontine, avait invité le conseil à délibérer sur «ce qu'il y avait à faire dans ces cir- constances de plus convenable et de plus décent. » L’assem- blée avait décidé que le lundi suivant, jour de foire «pour éviter les désordres et accidents », il serait ordonné «aux mar- chands tanneurs de conduire et exposer en vente leurs cuirs dans la cour du Palais Granvelle pour cette fois seulement, _ avec défense d’en exposer dans celle de l’hôtel de ville, » — délicate attention pour les narines des parlementaires. De plus, 1l serait défendu € aux marchands faïenciers, pains d’é- pices, taillandiers et autres de placer leurs banes et bou- tiques portatives dans la galerie du Palais, au devant de l’hôtel de ville et sur la place Saint-Pierre. » Ils devaient se réfugier « sur la place Saint-Maurice, sans encombrer la Grande Rue, les dessertes de l’église et la ruelle (actuelle- ment rue de la Bibliothèque). » Il fut en outre décidé que les commissaires iraient «faire visite de la part de la compagnie à chacun de MM. les con- seillers du Parlement qui avoient été exilés et qui demeurent dans l’étendue de leurs bannières pour leur témoigner sa joie de leur heureux retour.» Enfin la municipalité, désireuse de s'associer aux réjouis- sances populaires, décida 1° que le lundi suivant « la façade de l’hôtel de ville, le pourtour et la coquilie de la fontaine » seraient Qilluminés en lampions dez les six heures du soir, de la façon la plus galante . MM. les commissaires de l'hôtel» pourraient (imaginer. 20 Que « dès cette heure, roue » ferait « couler une aire — 105 — de vin de deux muids pour le peuple à la place de la fontaine de l’hôtel de ville.» 3° Que «les timbales et trompettes de la ville» seraient «placées au clocher de Saint-Pierre sur un théâtre avancé hors de la fenêtre qui donne sur la place, pour y annoncer la joye publique par des fanfares » 40 Que l’on enverrait «trois torches de goudron par cha- cun des réchauds qui sont posés aux angles des rues, pour les faire brûler dez qu'ils feraient nuit, en invitant les propriétaires des maisons d'y mettre des torches de goudron successivement pour que le feu y soit entretenu. » Comme on le voit, le conseil de ville avait bien fait les choses. Dunod de Charnage y avait tenu personnellement la main pour atténuer la mauvaise impression produite sur le peuple par ses relations polies plutôt qu'amicaies avec l’ancien intendant et premier président de Boynes. Le 16 novembre l'enthousiasme populaire ne fit qu'aug- menter. Tous les habitants, en vêtements de fête, étaient dans la rue, acclamant les magistrats qui arrivaient au Palais en robe dans leurs voitures. A l'issue de l'audience solennelle les vétérans centrèrent au Parlement et félicitèrent tous les magistrats revenus. » Les exilés eurent nôn seulement la visite des commissaires municipaux mais encore celle de tous «les grands et bour- geois de la ville » ; les enfants de chaque rue leurs portèrent des cœurs de bonbons et de pain d'épices Les petites filles de la rue Saint-Vincent portaient une statue de Thémis sur un brancard avec un étendard sur lequel on lisait: Thémis a gagné son procès, elle a en poche son arrest; l’une d'elles fit ce curieux et naïf compliment : « Messieurs, le rapport que nous avons à votre retour, nous oblige aujourd’hui à vous _ donner des bouquets, mais où trouver des fleurs qui soient di- gnes de vous, et d'ailleurs n'étant point dans la saison (on était en effet au cœur de l'hiver). Je me trompe, je çait des jardins sans couleurs qui produisent des fleurs en toute sai- — 106 — son, vous êtes ces Jardins (!), vos vertus sont des fleurs, j’en compose des bouquets pour vous en faire des dons. » L'archevêque de Choiseul donna un grand diner auquel il invita le premier président de Grosbois, les parlementaires exilés et le duc de Randan gouverneur de la province pour essayer une réconciliation inter pocula ; mais, dit Grimont, «sa démarche fut vaine » ; les convives restèrent froids et la réunion ne (ut égavée que par l’entrée des vignerons qui, au dessert, vinrent offrir à l'archevêque «une glane de raisins blancs aussi frais que si on venoit de les cueillir. » Cependant le gouverneur Jui-même avait tenu à marquer sa bienveillance et à laisser libre cours à l'enthousiasme po- pulaire. Il avait donné «l’ordre au major de la place d’aver- tir les sentinelles et patrouilles de laisser passer tout le monde sans feu et sans arrêter personne. » Quelques jours après, la joie redoubla à l’arrivée d’un per- sonnage que Grimont appelle « M. de Clairon ancien prési- sident à la cour des comptes à Dole », mais qui était en réa- lité le chevalier d'honneur de Grammont. Celui-ci, continue Grimont «avait été exilé pour avoir parlé trop ouvertement des affaires du Parlement et pour avoir dit à M. Michoté, pré- sident au Parlement, Johannes foutrus. » Le latin dans les mots brave l'honnêteté ; le président $’était cru insulté (cela est facile à comprendre), et avait porté des plaintes à M. de Boynes. L’ex-premier président était le fils ou peut-fils d’un caissier du fameux Law; aussi Grimont ne manque-t-il pas l’occasion de lui décocher au sujet de cet incident un de ses traits les plus malveillants. Celui-ci, dit-il «qui était muni d'autant de lettres de cachet qu’on avait signé de billets de banque sur le dos de son grand-père Bourgeois, du temps de l’agio, dans la rue Quinquempois, en envoya une à M. de _Clairon pour le faire taire. » «Ce gai chevalier fit sa rentrée à Besançon d’une façon originale. Il arriva avec «une balle de nez de bois de toutes les grandeürs et grosseurs suivant les personnes à qui il les Dr destinoit et leurs noms étaient écrits dessous. » — Certai- nement celui de lex-président ne devait pas être des moindres | Cest à cette époque que se place l’anecdote connue de la promenade triomphale de Jacquemard dars les rues de Be- sançon pour répondre à une fanfaronnade de lex-premier président. Durant l’exil des parlementaires, de Boynes avait parié que ceux-ci ne rentreraent que si Jacquemard allait à la comédie. Bizot, l’auteur de la Jacquemardade, qui était pour ainsi dire l’âme du mouvement populaire en faveur du Parlement, releva le défi. Il se mit à la tête des vignerons de Battant, promena l’automate sur un cheval et le conduisit au palais Granvelle pour assister au spectacle. Dunand ra- conte qu'on lui fit une ovation et qu'on le reçut comme un erand seigneur. Le lendemain soir, le vieux sonneur fut porté en triomphe sur un char orné de lampions et de torches allumées. Cette chevauchée fut suivie d’autres cavalcades non moins pittoresques. La plus curieuse fut certainement celle des femmes des celliers ét des charrons que Grimont raconte ainsi: «madame Poupet femme d’un sellier et madame Dé- marteaux femme d’un charron, toutes deux habillées en ama- zone à, cheval se trouvaient à la tête de cette cavalcade; dans le milieu étoit un carrosse attelé de six chevaux et après le carrosse se joignoit une cavalcade de loueurs de chevaux. Et étant ainsi, ils furent rendre visite à messieurs les exilés qui les reçurent, ainsi qu'ils avoient reçu tous ceux qui allaient leur rendre visite, » Grimont ne dit pas quel compliment mesdames Poupet et Démarteaux adressèrent aux exilés, mais il continue : «Une autre fète plus brillante et plus belle qui ont paru jusqu'alors fut celle des laboureurs du côté de Saint-Claude. Cette fête était touchante, elle faisait couler des larmes de joie. L’on vit arriver par la porte de Battant plusieurs charrues attelées avec des bœufs sur lesquelles charrues étoient des loriers, — 108 — et aux cornes de chaque bœuf étoit cette inscription : nous apportons l’abondance. Ils étoient encore enjolivés de rubans. En passant devant chez les exilés, ceux qui conduisoient les Charrues s’arrêtoient et disoient : voici notre champ, et quand ils passoient devant la porte des rémanans, ils disoient: nos champs sont francs et ne semons point dans les terres main- mortables. Ce spectable étoit si touchant que l’on eut dit que la famine avoit été et étoit encore dans la ville, et que cette fête étoit comme une corne d’abondance qui rentroit dans cette ville, qui depuis trois ans étoit dans la plus grande mi- sère » « Ge fut le procureur Nicod de Besançon qui étoit maistre de poste, qui fournit les chevaux sans aucun imtérèt et qui plusieurs fois les conduisit lui-même. » «Les cavalcades couraient toutes les nuits les rues ; un jour, dit Grimont, (il serait plus exact de dire une nuit), «trente Jeunes gens montèrent à cheval dans le dessein de se bien divertir ; aussi ne se trompèrent-ils pas. En arrivant dans la rue de Battant, dite rue du Triomphe, ils aperçurent que dans le milieu de la rue il v avait uue table où des mar- chands de vin et les vignerons soupaient ensemble et bu- valent à la santé des exilés. I1s montèrent jusqu'où étoit le fes- ün et ils y furent reçus à bras ouverts ; on les fit boire à la santé de messieurs les exilés et à chaque coup que l’on bu- voit pour marquer sa joie, on cassoit un verre. » On voit que cette coutume existait chez nous bien avant que nos amis les Russes nous en aient donné le spectacle qui a si fort étonné nos contemporains. À cette époque de réveil du sentiment national, on vit non seulement les notables, mais encore le clergé joindre son en- thousiasme à la joie naïve du peuple « M. de Chenecey, con- tinue Grimont, chanoine de la paroisse S'-Paul, faisoit de son mieux chorus avec la cavalcade. Après quoi, elle rentra à trois heures du matin on ne peut plus satisfaite de la manière obli- geante avec laquelle elle avait été reçue. » -UOSUES2Œ € JUAW2IEX NP 221JU2H UT d LESUT ° 5: ERIQUAN MINE VAL _SAIFNAS ONOCL KE — 109 — «Monsieur de la Corée pendant cet entrefait de réjouis- sance arriva à Besançon pour y être intendant. Il fut curieux de se promener par les rues le soir pour voir par lui-même ces fêtes continuelles. En passant sur la place St-Maurice, malgré la quantité de monde il fut reconnu au clair de lune, il fut arrêté et fut obligé de danser avec tout le monde et on ne cessait de crier : Vive la Corée, au diable de Boynes. » «Malgré la rigueur de la saison, on ne faisait que danser sur toutes les places » Ces danses appelées branles étaient accompagnées de chants composés pour la circonstance. Les rémanants et principalement de Boynes en faisaient les frais. Grimont cite un de ces branles « chanté sur Pair de frelove frelovi, à la paternité duquel il ne fut peut être pas étranger. Dans une versification exécrable, le poète-amateur raconte _l’exil des parlementaires : Quand Bourgeois quitta le pays Il fut frelove, frelovi Il comptait bien revenir Il fut frelove, frelovi.…. Puis il apostrophe vertement l’ancien premier président : RUE Tu as trop pillé le pays, Toy seul s’y est enrichi, Les exilés te l’ont promis Te faire rendre compte aussi... La vérité t’a chassé d’icy, Le Palais est réuni, La justice va tout son crédit Tous les avocats ont repris Leurs études avec plaisir... Dauxiron plaide, Grimont aussi, Huot et tous ses amis, Et tout le tableau s'ensuit... Va-t-en au fleuve de l'oubli. Si réellement ces vers sont dus à l'inspiration de l’avocat- poète, on comprend sans peine, la note suivante du journal, dans laquelle l’auteur se chansonne lui-même : — 110 — Le sieur Grimont a été sifflé Dans deux tragédies qu'il a voulu jouer ; Pour le pauvre Griruont il n’est plus de remède, Cet homme faible et languissant Dans Gaston était expirant, Mais il est mort dans Tancrède. Ces infortunes littéraires ne paraissent pas avoir altéré sa santé ; heureux et vengé par le retour de ses amis, il les ou- bliait au milieu de Pallégresse gènérale. Comme il était d'usage aux plus graves évènements de l’époque «chaque corps de métiers, pour remercier Dieu, d’avoir délivré la province d’un fléau aussi terrible que l’avoit été M. de Boynes, » fit célébrer une messe solennelle avec grande musique, en action de grâces. Le service fini, chaque corps en particulier, fesoit son parti pour boire à la santé des exilés. « Les servantes de chaque quartier, dit Dunand, ont fait faire un service solennel, aux grands Carmes. Elles por- taient un grand écriteau qu’on plaça à la porte de lPéglise et sur lequel on lisait : Joignez chrétiens, joignez vos prières aux nôtres, À nos trente seigneurs nous voudrions bien servir Mais comme ils sont sans taches, ils n’ont rien à blanchir. Nous prierons Dieu pour eux, et laverons pour d’autres. Les volaillères en ont fait dire une aux Clarisses, et sur la porte de la cour, il y avait la représentation d'un coq avec cette inscription: « Au plus hardi ». Il n’est pas jusqu’au corps de métier des travailleurs noc- turnes et odoriférants qui n’ait voulu faire parler de lui en publiant l'annonce d’une prétendue manifestation d'autant plus méchante qu’elle était d’un goût plus douteux. « Les gadoires de la cité + raconte le caustique avocat, : touchés de compassion de laffliction où sont tous messieurs les réma- nants qui ne se montrent plus, et auxquels il parait que per- sonne ne pense plus, ont délibéré de leur donner un plat de — 111 — leur métier, sans que messieurs les cy-devant exilés puissent y prendre aucune part. En conséquence ils s’assembleront le jour de l'anniversaire de la mort de monsieur de Belisle (protecteur de Bourgeois de Boynes), le 24 janvier 1762 dans la salle des pas-perdus des parfums, où ils donneront une fesie assortie de tout le goût, la délicatesse, et Ja pro- preté convenable à leur profession, qui commencera vers la minuit qui est l'heure ordinaire à vaquer à leur ministère. Elle sera précédée dès le matin dudit jour par un service solennel uniquement pour messieurs les rémanants ». La prétendue cérémonie est annoncée comme devant avoir heu dans l’église des Jésuites (qui sont à la veille de leur expulsion); un catafalque est dressé au milieu du chœur où est représenté «effrayant et au naturel» l’ancien premier président et intendant «ceint d’une corde et couché dans un cercueil ». Le drap noir est «orné de billets de banque signés sur le dos d’un nommé Bourgeois dans la rue Quimquem- pois». En haut on lit «en gros caractères cet anagramme : A de Boynes nez de bois». Les fonctions d’officiants sont réservées aux personnages amis des rémanants. Chacun est désigné nominativement avec une allusion méchante au rôle qu'il à rempli dans les derniers évènements. Les présidents de chambre, conseillers, chanoines, abbés, professeurs, avo- cats et professeurs se coudoient avec les dames de la société qui sont «les pleureuses en grande robe noire» tous ont leurs places réservées ; chaque stalle décorée aux attributs conve- nables à celui qui doit loccuper. L’on y voit des seringues, des enseignes de cabaret, des fouets de poste, des licols de chevaux, des balles de citrons, d’oranges et de mercerie, des bancs et couteaux de bouchers, papiers, terriers, en main- morte, comptes de fermes, le tout si expressif que, sans équivoque, chacun se placera dans la stalle qui lui est desti- née. » Enfin le maire de la ville est censé autoriser spéciale- ment l'affichage de ce programme. Cette élucubration macabre est de beaucoup la plus cruelle- Lo ment mordante et parfois la plus injuste de toutes les satires qui émaillent le récit de ces longues réjouissances. . Ce ne fut que la rigueur de la saison qui mit fin à toutes ces fêtes», durant lesquelles dit Grimont il n'y à eu aucune dispute parmi les grands ni parmi les petits. Le tout se passa dans la plus grande union possible.‘ En écrivant ces lignes le chroniqueur oublie à dessein les mésaventures arrivées à deux des rémanants et dont il donne quelques lignes plus loin le récit : « Monsieur Michotté, doyen des présidents du parlement, étant dans sa chaise à porteurs, fut insulté par la populace au sortir du Palais et faillit être assommé à coups de pierres; il fut contraint de se sauver chez Monsieur le duc de Randan, et il fut encore plusieurs fois insulté par les servantes, lavandières, et autres de cette espèce. » Maréchal « prieur d’Audeux, conseiller clerc au Parlement reçut de la part de la bourgeoisie des invectives atroces ainsi que tous les rémanants. Un jour. venant de souper 1l étoit dans une chaise à porteurs, 1} fut arresté et l’on pria les por- teurs de mettre à bas la chaise, ce qu'ils firent. Des Jeunes gens prirent la chaise et sautèrent le prieur dedans jusqu’à ce que le jeu ne leur plaise plus ; il fut secoué d'importance » (on dirait en termes militaires : 1l fut passé à la couverture !). De plus il fut arresté un soir par des servantes et elles le fouettèrent tant qu’elles purent. Ainsi finit son sort, et n’étant plus regardé de personne, il fut contraint de se défaire de sa charge. » Il ne rentre pas dans ce cadre, déjà trop étendu de relater le récit fait par Grimont de la noble résistance des avocats, contre l’abus de l’autorité royale à l’égard des magistrats du Parlement. Maigré les rigueurs qui frappèrent plusieurs de ses mem- bres, le barreau bisontin resta fidèle à ses traditions d’indé- pendance et de liberté. Aux injonctions du premier prési- dent et de la cour de paraître à la barre après l'exil des trente, ils apposèrent un refus formel et se laissèrent con- RD à — 113 — damner à l'amende. Plusieurs démissionnèrent ; il fallut le départ de M. de Boynes pour les faire sortir du silence. Cest pour conserver le souvenir de ce noble dévouement à la magistrature et rappeler aux jeunes stagiaires leurs de- voirs professionnels qu'une main érudite eut l’heureuse idée de sauver de la destruction un curieux document de l’époque. Il y a quelques années, sur les conseils de son frère, M. Gauthier fit, pour le conseil de l’ordre dont il était alors bâtonnier, l’acquisition d’un petit tableau qui orne mainte- nant la bibliothèque des avocats au Palais de Justice. Cest un dessin à la plume rehaussé d'encre de chine, sur papier, de vingt centimètres sur trente, très finement exé- cuté, entouré d'un cadre en bois sculpté et doré qui est son contemporain. Dans une salle du Parlement aux tentures fleurdelysées, sur un siège élevé de trois marches surmonté du buste de Louis XV, est assise la déesse de la justice, à sa droite, un amour alé présente les attributs Judiciaires : le faisceau que surmonte la hache des licteurs et la balance. D'un geste gra- cieux, Thémis tend les bras aux parlementaires que lui pré- sente le premier président de Grosbois. Celui-ci drapé dans l’hermine et coiffé de la perruque à marteaux tient par la main un des trois présidents de chambre. Ceux-ci sont suivis des parlementaires en costume d'audience solennelle dont le cortège se déroule au delà d’une porte entr’ouverte sur- montée de l'aigle bisontin. Cette scène est couronnée par un cartouche ovale où on lit ces mots: Lx dono senatus patriæ redditi M.DCC.LXIT. Les figures des personnages en raison de la jeunesse que le dessinateur leur a donnée, ne paraissent pas être des por- traits. Cependant cette allégorie constitue une œuvre d’une valeur réelle par son cachet artistique, le soin et le talent avec lesquels elle a été exécutée. Malgré nos recherches il nous à été impossible de découvrir le nom de l'artiste qui en est l’auteur. Sans aucun doute ce petit dessin parait avoir été Se) — 114 — destiné à orner le salon de quelqu'un de ces exilés auxquels le peuple avait fait de si bruyantes ovations. Mais les plus beaux jours ont leur lendemain : à peine réins- tallés les exilés firent il est vrai casser par le parlement les arrêts rendus en leur absence, mais bientôt ils oublièrent leur ancienne indépendance et la raison même de leur popularité. «Avec politesses sur politesses, dit Grimont, ils firent comme font ordinairernent les chats, le coup de patte vient après ». Réconciliés avec les rémanants grâce à l’habiteté du premier président, les exilés firent cause commune avec leurs ennemis d'hier. Le peuple apprit bientôt avec stupeur que le parlement entier avait enregistré l’édit sur les cuirs trois fois refusé par les rémanants eux-mêmes. De ce retour des choses d’ici-bas, Grimont tire une morale philosophique des plus justes. «A l’instant chacun ouvrit les veux. et l’on vit clairement que l’on étoit dupe de sa bonne foy et croyance et que lon étoit bien aveuglé sur le compte des exilés. Car l’on s'était figuré que leur exil venoit pour avoir voulu soutenir les intérêts de la province et par consé- quent du peuple.Mais après avoir examiné les choses de près, on vit qu'il y avoit autant d’entêtement de leur part pour les chambres assemblées que M. de Boynes pour le contraire. On doit pardonner cette erreur au vulgaire qui se laisse aisé- ment persuader et qui tombe toujours dans de pareils fanatismes. » . Ce que Grimont n’a pas vu dans cet enthousiasme exagéré du publie bisontin, c'est le réveil du sentiment de liberté con- ire le despotisme royal et Parrogance de ses représentants. Ces manifestations presque méridionales, cet engouement subit de toute une cité, c'est l'espérance joyeuse d’un peuple écrasé d'impôts, accablé de vexations qui a cru entrevoir la fin de ses maux. Trente ans après, ce même peuple se soulèvera et d'un — 115 — seul coup renversera le trône et les institutions séculaires du rovaume. _ Grimont prendra pour toujours la route de l'exil, et peut- être, dans la fièvre de ses veilles, rêvera-t-il, lui aussi, d’un retour dans la cité bisontine par la € rue du triomphe. » LES RUINES DÙ CHATEAU DE CICON PAR Le Vicomte A. De TRUCHIS DE VARENNES MEMBRE RÉSIDANT Séance du 16 Janvier 190%. Quand on va de Besançon à Morteau, on traverse un vaste plateau qui s'étend entre le Doubs et la Loue. Une sombre ligne de crètes et de mamelons, couverts de sapins, domine ce plateau et en borne lhorizon au sud-est. En quittant l’'Hôpital-du-Grosbois, on aperçoit cette chaine de montagne à droite. Elle apparait de plus en plus distincte à mesure que l’on se rapproche du Valdahon et d’Avoudrey. Presque au milieu s'élève un sommet couronné de sapins cente- naires, profilant sur le ciel leurs silhouettes finement dé- coupées, et, en avant, sur une pente verdoyante, brille le toit rouge d’une ferme. C’est le mont de la Vèche et, au- dessous, Cicon. Pour s’y rendre, il faut, en quittant le Valdahon, traverser successivement le village d'Epenoy, coquettenient planté sur un coteau parmi les tilleuls et les frênes, et celui de Rantechaux, dissimulé dans un repli de terrain où ses mai-. sons se groupent gracieusement dans la verdure autour de son église moderne. L'ancienne église est un peu sur la gauche. De nombreuses transformations ont enlevé tout caractère original à cette petite construction, aujourd’hui désaffectée et sans clocher. À quelques pas plus loin se — 117 — trouve l’ancienne maison seigneuriale. Elle est en assez mauvais état, mais pourtant encore habitée. La qualité des moellons, plus que les soins du propriétaire, en a, jusqu’à présent, assuré la durée. Mieux conservée assurément, bien que paraissant datée de la même époque, est la maison sei- gneuriale d'Epenoy. De Rantechaux, on descend à Vanclans, au pied même des sombres massifs que nous voulons aborder, Laissant à droite, dans un vallon, le village disséminer ses maisons entre des prés plantés d'arbres, le chemin que nous suivons s'élève rapidement par lacets au flanc de la montagne. En cinq cents mètres à peine, il atteint la lisière des bois, Avant d'y arriver on voit sur la gauche, tout en haut des prés, la ferme de Cicon. Par derrière, une arête boisée se prolonge presque jusqu'en face du chemin. Les sapins clairsemés, qui en garnissent l'extrémité laissent voir derrière eux les rochers sur lesquels s'élevait autrefois le château de Cicon. Au-dessous, la montagne s’infléchit en deux gradins succes- sifs dont le dernier laisse à droite un passage dans un col. En pénétrant dans la forêt, le chemin côtoie la gauche d’une combe profonde d’où s'élancent les longs fûts de sapins majestueux. Bientôt 1l franchit le col par une brèche faite de main d'hommes et contourne la montagne [Il débouche alors brusquement dans une étroite vallée au milieu de laquelle il bifurque. À gauche, il la remonte, et à droite il s’enfonce dans le massif montagneux. Une ancienne croix de pierre Oimeice carrefour. Elle y fut placée, il y a une vingtaine d'années, lors de la reconstruction des fontaines de Van- clans, dont elle provient. Sur la gauche du carrefour on voit de nouveau les rochers qui supportaient le château de Cicon et que l’on a contour- nés. De ce côté le flanc rapide de la montagne est déboisé. Rien n'arrête la vue le long des prés qui le tapissent et s’é- tendent en bas jusqu'à l’autre versant de la vallée. Depuis le château la surveillance du chemin était donc facile. Mais — 118 — plus loin les sapins reprennent possession de la montagne. Ils la garnissent dans toute sa hauteur et ils masquent ainsi les rochers à ceux qui descendent la vallée. Derrière la croix s’élève la masse sombre du mont de la Vèche. Ce mont est entièrement boisé et, par dessus les rochers de Gicon qu’il domine, il dresse en face de la plaine la noire colonnade de ses vieux sapins A ses pieds le chemin remonte la vallée. Après l'avoir suivi pendant quelques centaines de mètres, nous le quit- tons pour prendre à gauche, sous bois, un chemin moins fréquenté et revenir à flanc de coteau aux ruines de Cicon. La rampe qui y mène est peu rapide. Ce chemin parait mo- derne, il a, sans doute, été fait pour desservir la ferme de Cicon. Au moment d’attemdre le sommet de la montagne, il en traverse le faite dans une profonde crevasse agrandie et creusée à coups de mines ; mais tandis qu’il tourne à droite vers la ferme, nous avons à gauche, sur la cime des rochers emplacement du château féodal. On v accède aujourd'hui par un sentier, que l’on prend au sortir de la tranchée et qui s'élève sur le flanc nord de la montagne ; c'était l’ancien chemin du château. En quel- ques pas, on est au sommet, et l’on pénètre dans l’enceinte des ruines en passant entre deux rochers qui, actuellement, émergent du sol d’un mètre environ. On se trouve alors sur une crète très étroite qui s'étend du nord-est au sud-ouest. Du côté du nord-est, cette crête se prolonge régulhère- ment en s’élevant légèrement jusqu’à la tranchée, qui livre passage au chemin de la ferme. Au Sud-Est, après l’entrée du château, elle est, de nouveau, fendue par une crevasse à parois verticales, large de cinq à six mètres. Au delà elle se poursuit encore un peu et elle s'arrête brusquement pour dominer à pic les prés et les bois, qui, de trois côtés, s'étendent à ses pieds. La partie nord-est, comprise entre les deux tranchées + — Ho mesure cinquante-quatre mètres de long. Des buissons et de petits arbustes y forment, par endroits, un taillis assez épais, malgré cela, on reconnait très facilement les vestiges des murs qui s’élevuient sur cet emplacement ; bien qu’ils soient recouverts de gazon, ils émergent encore de vingt à quarante centimètres. Deux murs parallèles, distants de douze mètres s’étendaient de chaque côté sur les bords extérieurs de la crête, allant du rocher qui surplombe le chemin moderne aux deux rochers qui encadraient l'entrée. Un premier mur transversal formait avec le plus rapproché de ces derniers une cour ou salle de huit mètres de long, un second mur transversal était à dix mêtres du premier, et à dix mètres plus loin, il v en avait encore un troisième. Leurs fondations dessinent ainsi l'emplacement de deux pièces semblables de dix mètres sur douze. Elles étaient suivies d’une quatrième cour ou salle ne mesurant que cinq à six mètres de large. Dans le milieu est creusée une exca- vation rectangulaire dont les murs en moellons réguliers sont parfaitement conservés. Cette excavation mesure exac- tement trois mètres dix centimètres dans le sens trans- versal et quatre mètres dans le sens de la crête. Le bord supérieur du mur, du côté de l'Est, est entaillé en son mi- leu d’une échancrure de soixante-dix centimètres de large. Elle était probablement destinée à donner passage à une échelle ou à un escalier de bois. Cette excavation qui devait servir de citerne, est en partie comblée maintenant ; néan- moins elle a encore deux à trois mètres de profondeur. Au delà de ia cour où elle se trouve, existe encore une espèce de terre-plein surélevé de cinquante centimètres environ qui mesure douze mètres sur chacun de ses côtés. Il est formé par le rocher au bas duquel passe le chemin moderne. Sur toute cette partie devaient s'élever les bâtiments du château servant de logements. La partie sud-ouest, qui domine de plus de deux mètres la partie nord-est est beaucoup moins étendue. Elle mesure — 120 — seulement vingt-quatre mètres de long sur sept à huit de large. Sa superficie n’est pas tout entière sur le même plan L'on avait conservé et utilisé sans les déformer les rochers qui émergeaient du sol pour y asseoir les murs extérieurs. Depuis, les éboulements et les ruines ont laissé un sol très inégal, qui ne permet pas de se rendre compte de la dis- position des constructions qui avaient été élevées sur cet emplacement. Au nord d’une plate-forme de seize mètres sur huit, on trouve un rocher un peu plus élevé qui en forme le point culminant et qui surplombe la tranchée. Le sommet de ce rocher peut avoir quatre mètres sur six. Une dépression ovale, en forme de cuvette, produite soit par une excavation en partie comblée, soit par un éboulement par- tiel dans une cavité inférieure, occupe le centre de la plate- forme. De celle-ci, on descend à l'Est sur une terrasse triangulaire qui est à un mètre plus bas et qui mesure sept mètres sur huit. Flle format dé ce core tlexrémute du château. On ne voit pas sur cette partie, comme dans l’autre, des vestiges de murs. Pourtant c'est là que les constructions ont subsisté le plus longtemps ; et au commencement du dix-neuvième siècle il y avait encore des ruines importantes, restes d’une tour carrée formant donjon, dont font men- tion les reprises de fief du seizième et du dix-septième siècle. Mais les murs se sont effondrés dans le vide et sur les trois côtés, en bas des rochers, les talus qui en garnis- sent le pied sont par place, entièrement recouverts de moellons et de pierres de taille. Leur abondance montre que les murs devaient être fort épais et probablement aussi très élevés. Au contraire au bas de la parte nord-est, on n’aperçoit ni sur un flanc ni sur l’autre les vestiges d’ébou- lement de murs. Les constructions y avaient peut-être été moins importantes, ou leur destruction étant beaucoup plus ancienne, la terre et le gazon ont tout recouvert. Le panorama que l’on a de l'extrémité méridioniale des — 121 — ruines situées à 916 mètres d'altitude, est des plus étendus. Du côté du Sud, au delà des pentes de la Vèche, et par dessus les massifs de sapins qui couvrent les mamelons les plus rapprochés, lon aperçoit le Montpelé qui domine Bugny, et en arrière le Larmont et les monts du Laveron. Plus"à droite se profilent successivement sur le ciel les sommets de Déservillers, de la Roche de Haute-Pierre et du Poupet. Enfin si l’on se tourne vers le Nord-Ouest, puis vers le Nord, on domine le vaste plateau de la moyenne montagne dont l’horizon est borné par les sommets d’A- mancey, Châtillon-sur-Lizon Cademène, Malbrans et de l'Hô- pital; plus loin par ceux de Pugev et de Montfaucon, par la chaîne des Lomonts, et enfin par le Peu de Laviron et les Monts de Pierrefontaine. De la Vèche, dont le nom vient du mot allemand wache, guêt, ou wachen, veiller, surveiller, le panorama est encore plus vaste, La vue s'étend plus à PEst et peut errer sur Île Chaumont, et sur tout le massif jurassique, qui, au delà de la vallée supérieure du Doubs, forme de ce côté la frontière suisse Il était donc facile aux sires de Cicon de se préserver des surprises de l’ennemi et de répondre aux signaux d'alarme de leurs sujets demandant aide et secours. Au sorür du château, l’ancien chemin faisait un lacet sur le flanc nord de la montagne et contourüait le château en passant au pied même des murailles et des rochers Les as- saillants se trouvaient ainsi pendant tout son parcours eXpo- sés aux attaques des défenseurs du donjon. Ce chemin rejoi- gnait non loin de la croix du carrefour, dans la vallée qui s'étend au pied de la Vèche, celui que nous avons suivi pour arriver. Par suite de la croissance d’arbustes et de brous- sailles sur ses bords, cet ancien chemin est, par endroits, ré- duit à l’état d’un sentier très étroit et difficilement praticable. La terrasse qui termine au Sud-Est l'emplacement du chà- teau est supportée par un rocher à pic. À quelques mètres — 10 > plus bas, sur le côté regardant le col, s'ouvre une grotte dont l’orifice a deux ou trois mètres de haut et à peu près la même profondeur. Au fond sur la gauche, est à mi-hauteur une cre- vasse assez étroite qui s'enfonce dans la montagne et parait s'élever en tournant. On y voit la trace très visible de l’écou- lement des eaux qui s’y produit après les pluies. Des enfants et des Jeunes gens s’v sont glissés à diverses reprises et ont tenté de l’explorer. Quelques-uns sont, dit-on, parvenus à la suivre pendant une dizaine de mètres, mais un courant d'air qui la traverse, ou le vol des chauves-souris que l’on déran- geait, ont toujours éteint les bougies dont ils se servaient, et les ont contraints à ressortir sans en avoir atteint l'extrémité. La crainte de lPéboulement des rochers assez friables en cet endroit et la terreur inspirée par de vieilles légendes, ont aussi contribué à entraver ces investigations qui n’ont jamais été très sérieusement entreprises. [l eût du reste été bien étonnant que cette grotte placée en un point aussi intéressant par les souvenirs historiques qu'il peut invoquer, n'ait point inspiré liinagination superstitieuse des anciens habitants de la région. Ils ont réuni en une même légende la vouivre gardienne des trésors et des grottes, et le souvenir de la des- truction du château. La grotte, disent-ils, communique par son étroite crevasse à l’intérieur des caves du donjon, où lors du dernier siège, le châtelain avait enfoui l'or et les objets précieux qu'il pos- sédait. Les assaillants incendièrent le château dont les ruines comblèrent l'entrée supérieure des caves depuis lors introu- vable. Après la mort du châtelain, qui s'était évadé par la crevasse, une vouivre prit la garde du trésor. Elle habite tou- jours au fond de la crevasse et ne sort que la nuit. Le trésor qu’elle protège ne lui a jamais été dérobé. Mais les sires de Cicon lui avaient-ils réellement confié une aussi délicate MISSION ? Il est bien vrai qu’en 1343, Jean de Chalon-Arlay, qui ve- nait d’avoir son château de Chatel-Guyon pris, brülé et dé- | | | — 123 — moli par les troupes du duc Eudes IV, vint pour se venger, mettre le siège devant les châteaux de Cicon et de Durfort (1), Tous deux appartenaient à Jean de Cicon, vassal dévoué du duc, à qui il venait d’en faire hommage. Le château de Dur- fort fut surpris et pris ; celui de Cicon fut seulement assiégé, et comme Jean de Cicon reconnut le tenir en fief du comte de Montbéliard, l’un des confédérés, il fat momentanément délivré. La continuation des hostilités entre Jean de Chalon- Arlay et le duc de Bourgogne, ramena les partisans du sire d'Arlay sous les murs de Cicon en 1345, et KEudes [IV envoya inutilement ses baillis, Jean de Montaigu et Foulque de Ville- frey pour le débloquer (2). Cicon tomba entre les mains de Jean de Chalon qui le fit occuper incontinent, en confia la garde à un châtelain et s’appropria tout ce que Jean de Cicon possédait dans cette seigneurie. Après la mort du duc Eudes, le belliqueux chef des confédérés, s'étant allié avec le roi de France et jugeant ce château inutile, donna en 1354 à son bailli Jean de Saugey () l’ordre de faire conduire au château d’Arguel tout le blé, le vin et les autres provisions qui Sy trouvaient et de le «démolir de fond en fond ». Cet ordre ne fut que partiellement exécuté, et le château, plus où moins démantelé resta debout. Quelques années plus tard, en 1365, Louis d'Arguel, le plus jeune fils de Jean de Chalon-Arlay le vendit avec la chatellenie pour 1600 florins de Florence au comte Etienne de Montbéliard, La petite-fille de ce dernier, Jeanne de Montbéliard, fiancée dès 1397 à Louis de Chalon- Arlav, apporta tous ses biens à cette puissante maison qui rentra ainsi en possession de la seigneurie de Cicon. Le châ- teau en fut restauré en 1406 sur les ordres de Jean IT d’Arlav son futur beau-père. Son fils, Guillaume d'Orange, vendit (1) Archives du dép. du Doubs. — Comptes. B. 446 (2) Jbidem. B. 440 (3) Tbidem. Inventaires des titres de la maison de Châlon, 0. cette seigneurie en 1472 à Guillaume de Cicon, seigneur de Demangevelle (1). Quand, en 1479, Louis XI entreprit d’annexer le comté de Bourgogne à la France, il rencontra une grande résistance de la part des Comtois. La montagne en fut le dernier théâtre. Charles d’'Amboise, à la tête d’une nombreuse armée fran- çaise l’envahit au printemps de l’année 1480, et, dans une cam- pagne qui dura trois mois, 1l força toutes les bourgades et démolit tous les châteaux. Cicon ne devait pas échapper aux coups de ce vindicatif vainqueur, qui, pas plus que son mai- tre, n’était disposé à oublier la démarche faite au mois d’oc- tobre précédent par Thibaud de Cicon, chantre de St-Etienne et les délégués de la ville de Besançon auprès de Claude de Toulongeon, le lieutenant du prince d'Orange. Le grand- chantre était le frère de Guillaume de Cicon, seigneur de Demangevelle qui avait racheté la seigneurie de Cicon quel- ques années auparavant. Aucun des documents contempo- rains qui mentionnent les lugubres exploits d'Ambroise ne parle de la résistance du château de Gicon. Il est donc pro- bable que, contrairement à la légende, Guillaume de Cicon ne s’v était pas retiré et que le général français put facile- ment assouvir sa vengeance en incendiant le château pas ou mal défendu. Ce château ne fut pas restauré, mais grâce à leur solidité les murs restèrent debout et en 1584, nous dit l’inventaire de la seigneurie de Cicon il v avait encore : (un bien antique «donjon, une grosse tour carrée et autres édifices et manoirs «présentement et de longtemps, par fortune de feux et hos- «tlité des guerres ayant régné en ces pays et comté de « Bourgogne ruynés et démolis, demeurant à cette cause «inhabitables (2) ». | Les vestiges de ces ruines si anciennes peuvent encore (1) Bibl. de Besançon. -— Droz n° 35, fo 256. (2) Archives du Doubs. B. 24. Reprise de p j. — 195 — offrir un certain intérêt archéologique. L'emplacement du château à lPextrémité d’un éperon dominant tout le pays en- vironnant, les circuits du chemin d'accès et la disposition des différentes parties des constructions présentent une grande analogie avec ce que l’on observe dans les ruines des autres châteaux franc-comtois et suisses de la même époque. Je serais heureux si la description bien sommaire que j'en donne pouvait être utile à ceux qui voudront écrire Fhstoire de quelques-uns de ces châteaux, LE Docteur J. BRUCHON ANCIEN PRÉSIDENT DE LA SOCIÈTÉ D'ÉMULATION DU DOUBS Par M. le Dr LEDOUX Séance du 19 novembre 190%. MESSIEURS, Quand la Société d'Emulation du Doubs appela le docteur Bruchon (1) à présider ses assemblées en 1897, elle voulut servir les intérêts de Pinstitution. En rendant hommage au mérite d’un de ses plus anciens membres, elle jugea que la sympathie, la confiance, le respect qu’il mspirait à tous ses concitoyens, contribueraient puissamment à l’autorité dans la direction et à la prospérité de la Compagnie. Vous n'avez pas oublié, Messieurs, combien vous eûtes à vous féliciter de l’excellence de cette élection C'est que, comme vous l'aviez prévu, notre collègue apporta, dans l’accomplissement de sa mission présidentielle, toutes ces qualités d’exactitude, de bienveillance, de dignité qui, pendant sa longue carrière, l’ont fait toujours et partout distinguer et honorer. Bien nombreuses étaient les familles qui proclamaient la solliei- (1) BrucHON, Just-Charles-Joseph naquit à Besançon le 2 septembre 1828. Docteur en Médecine (1854), professeur suppléant à l'Ecole de Médecine de Besancon (1857), il fut nommé, le 28 janvier 1868, titulaire de la chaire d’anatomie et poursuivit son enseignement jusqu’en 1895; longtemps médecin-adjoint de l’hôpital Saint-Jacques, médecin en chef du Lycée de 1870 à 19092, il présida l'Association des Médecins du Doubs de 1896 à 1901, la Société de Médecine de Besançon et de la Franche-Comté à plusieurs reprises, et, en 1897, la Société d'Emulation du Doubs, à laquelle il appar- tenait depuis 1860 ; officier d'Académie et de l’Instruction publique, il fut promu chevalier de la Légion d'honneur en 1897. Le docteur BRYCHÈN mourut à Besançon le 2 avril 1904. LA Société d'Emulation du Doubs, 1903-1904. Docteur J. BRUCHON 1828-1904 407 = tude active et scrupuleuse du médecin en même temps que la prudence et l1 sagacité de ses conseils. Dans les services publics dont 11 avait la charge. à l'hôpital, au Lycéê, son concours n’était pas moins trés hautement apprécié. Professeur d'anatomie à notre Ecole, il enseigna devant bien des générations d'étudiants cette science difficile, aride en raison de sa précision, de ses minuties, que seuls sont capables d'imposer à l'attention et de rendre intéressante une méthode rationnelle et un véritable talent dans l’art de l'exposition. Pendant plus de trente ans, chaque jour de son semestre de cours, le savant se révéla un maître, vraiment digne de ce nom. Puisque l’anatomie est, avant la clinique, le solide fondement des études médicales, le D' Bruchon a puissamment contribué à doter notre province d’un corps de praticiens instruits qui tous proclament unanimement leur admiration et leur gratitude à l'égard de celui dont les lecons attiraient sur l’Université bisontine un nouvel éclat re- mémorant celui qui avait fondé sa réputation au XvrIe siècle. A Ja Société de Médecine, il avait d’autres juges, ses confrères. Quand il v communiquait observations et ré- flexions (1), la sûreté d'examen du D' BRUCHON, la rectitude de son jugement, la logique de ses déductions, la netteté de ses conclusions, préparaient une discussion qui ralliait bien vite à son opinion. [l convient de signaler chez lui cette faculté pressentant la voie qui conduira la science à ses pro- grès futurs : quand on ne soupçonnait guère encore la con- tagion de la tuberculose, et bien avant sa démonstration expérimentale (1865), le D' BRuCHON pubiiait, en 1858, un mémoire documenté sur La transmission de la phtisie pul- monaire sous l'influence de la cohabitation. L'Association générale des Médecins de France poursuit (4) Devant l’Assemblée des Médecins du Doubs, le D' NarGAUD, son président, a publié la liste des principaux travaux du D' BRUCHON sur des sujets de Médecine (Revue médicale de Franche-Comté, 1904, p. 135 n° d'août). — 198 — le triple but de développer l'esprit de solidarité confrater- nelle, de protéger les intérêts de la famille médicale vis-à- vis dés pouvoirs publics, de venir en aide, par secours ou pensions viagères, à ceux de ses membres atteints d’im- fortune imméritée, maladie, vieillesse. Une telle œuvre ré- pondait trop bien aux sentiments du D' BRUCHON pour que son adhésion empressée parmi les premières ne lui soit pas acquise davance L'Association générale, fédération de sections départementales, compte depuis 1859 une $So- ciété de plus en plus nombreuse et prospère dans le Doubs. Celle-ci pouvait-elle placer à sa tête un directeur plus auto- risé pour la représenter, plus capable de la bien gouverner que le D' BRUCHON ? Après cinq années d’une brillante pré- sidence, il refusa, en 1901, une reélection qui aurait réuni l'unanimité des suffrages s’il n'avait motivé, trop justement, son désir de retraite par Paffaiblissement de sa santé. À tous ces mérites s’en, ajoutait un autre spécialement estimé dans notre Compagnie Le Dr BRUCHON aimait son pays comtois, sa ville natale Avec une curiosité sans cesse en éveil, il s’intéressait à l’histoire aux événements contem- porains, il se préoccupait de lavenir de Besançon. fl souhai- tait le renom attracuif de ses établissements d’instruction, et, en associant au sien le nom de son fils dans cette fonda- tion, dotait notre Université d’un capital de 2,000 fr. dont les intérêts serviront à décerner un prix triennal à un Jeune étudiant en médecine ou en sciences naturelles. Ainsi sa générosité se plaisait à stimuler le zèle des labo- rieux dès leurs débuts. Mais lattention assidue que des hommes tels que le D' BRUCHON accordent aux travaux éclos dans les Sociétés savantes ne sont-elles pas le meilleur en- couragement des initiatives? [Il était le fidèle auditeur ou lecteur des études sur notre province qui enrichissent la iongue série de nos publications. fl accueillait avec empres- sement notre volume annuel, qui lui faisait interrompre l'examen d'œuvres historiques, littéraires, scientifiques, ar- — 1929 — tistiques, auxquelles il se plaisait à demander la distraction de ses travaux professionnels. De cette culture, son esprit avait. tiré une érudition, un bon sens critique, un goût du beau, une sagesse de pensée que sa parole correcte, son style sobre et précis rendaient séduisants. Je ne serai contre- dit par aucun de ceux qui ont lu les travaux ou entendu les allocutions du D' BRUCHON. Quand, lors de l'inauguration du buste de l'amiral Devarenne sur l’une de nos places publiques, il prononça l'éloge de son ancien condisciple auquel un attachement réciproque et intime l’unit toujours, quand, devant une nombreuse assemblée de Médecins comtois, il rappela les rares vertus et énuméra les bienfaits du Dr Coutenot, un autre ami de toute sa vie, sa voix s’anima d’accents qui firent vibrer l’âme de tous ses auditeurs. Ainsi presque chaque jour des sympathies nouvelles, des amitiés plus chaudes s'étaient formées autour du noble caractère du Dr BRUCHON et ambitionnaient, pour la récompense de toute une carrière vouée au bien, la félicité d’une vieillesse langue et sereine, Ses confrères désiraient profiter long- temps encore de ses conseils. f[ei, nous souhaitions le béné- fice pour notre Société du fruit de loisirs laborieux. fl aurait joui de cette vie de famille qui faisait son bonheur et lui était si précieuse. [Il aurait éprouvé cette suprème satisfac- tion de voir son bien-aimé fils continuer son œuvre, avec la même élévation de conscience et de savoir. Tous ces es- poirs s’évanouirent, hélas! quand le coup foudroyant qui abattit Henri Bruchon en pleine jeunesse, en plein succès, blessa à mort le cœur du malheureux père. Bien peu de mois s’écoulèrent avant que la tombe ne les réunit pour l’étérnité, avant que la fatalité nous obligeñt à les associer encore dans notre inoubliable deuil comme ils Pavaient été dans notre affectueuse et respectueuse estime. Si la modestie du D' BRUCHON a refusé la publicité d’élo- gieux adieux au jour des obsèques, solennelles par la tris- tesse et le nombre des assistants, la Société d’Emulation du 9 — 130 — Doubs tient à consigner dans ses annales l’expression de sa reconnaissance à l'égard de son ancien président. Le dis- ciple, le confrère et, je crois pouvoir ajouter, l'ami du D' BRUCHON auquel vous avez confié le soin pieux d’être votre interprète, a-t-il su traduire tous ses regrets, tous vos regrets dans un hommage digne de celui dont nous déplo- rons la perte? Mais d’autres, et ils sont nos collègues en cette Société (1), ont dit ailleurs excellemment et complète- ment ce que fut le D' BRUCHON. Si ma voix est restée insuf- fisante, à votre gré, elle renforcera du moins ces témoi- gnages qui tous concordent pour affirmer que la mémoire du D' BRUCHON doit être conservée à Besancon comme celle d’un parfait homme de bien, (4) MM. les docteurs BAUDIN, NARGAUD, PRIEUR, dans la Revue mé- dicale de Franche-Comté, devant l’Assemblée des Médecins du Doubs, et à la séance solennelle de rentrée de l’Université de Besançon. Societé d'Emulation du Doubs, 1903-1904. PRIAPE JEUNE (Dieu des Jardins) (NCusce de Besancon.) Gr ge mere minerai EU DIEU: DES JARDINS (sculpture gallo-romaine) ET PANOCHOËE PRIAPIQUE (en verre) du Musée de Besançon Par M. Aifred VAISSIER Séances des 14 mai et 17 décembre 1904. Au milieu d’une de ces petites propriétés en nature de jardins, autrefois en vignes, qui enserrent à distance respec- tueuse le corps de la place de Besançon, au glacis d'Arènes, heudit à Champforgeron {parcelle 1483 du plan cadastral) on découvrait l’année dernière une sculpture gallo romaine d’un caractère si particulier qu'il y a lieu de mentionner en même temps des vestiges non moins inattendus, qui accompagnè- rent sa mise au jour. La pioche des terrassiers, au cours du creusage d’une cave, s’arrêtait à deux mètres de profondeur sur une surface ro- cheuse très dure mais si parfaitement nivelée, bien que légè- rement inclinée, qu'on la croirait préparée de main d'homme et cela sur une étendue qui dépasse les limites de la propriété. En élargissant les côtés de la fouille on rencon- tra, renversé en pointe, le bloc de pierre tendre sculpté qui sera l’objet principal de cette notice. Dans la même fouille, à un mètre cinquante environ de dis- — 132 — tance apparut, dressé verticalement, un encastrement de forme cubique de huit pierres de taille assemblées à clés, en deux assises égales de 50 centimètres. (1) Le vide intérieur ménagé par ces sortes de margelles reposant sur le banc de roche, est de 0,60 dans un sens et de 0,75 dans l’autre. Un indice que la construction était faite pour rester sous terre, c'est que les faces extérieures sont rustiquées, tandis que les parois intérieures sont finement taillées. La cavité était comblée de terre et d’une très grosse pierre provenant, sans doute, des débris d’une couverture dont la coupe était visible sur la tranche verticale de la fouille. Au fond, on ne recueillit qu'un groupe d’ossements brisés qui ont appartenu à la carcasse d’un cheval. Le travail ayant été fait en l’absence de toute préoccupation archéologique, ce ne fut que par un rapport subséquent que l’on apprit qu’à une distance de deux à trois mètres on re- marqua lassise inférieure d’une construction analogue quoi- qu’un peu plus allongée dont on utilisa aussitôt un des élé- ments pour en faire une marche d'escalier. Malgré l'absence d’ossements humains, ou de poterie, à l'exception d’un fragment de tuile à rebord, serait-on mal venu à voir dans ces vestiges des caveaux de sépultures à in- cinération dépouillés de longue date ? Des fouilles présuma- bles au plus près voisinage confirmeront peut-être un jour cette hypothèse qui n’a rien d’étrange quand on sait que sur plusieurs points de ce pourtour de la ville, jusqu’à la gare de la Viotte et même au deià, des cimetières de même nature ont été constatés à plusieurs reprises. Quoi qu'il en soit, il ne reste pas moins à trouver une explication acceptable de la présence singulière du débris sculpté dont voici la descrip- tion à l’appui de notre figure. (PI.) Le bloc en pierretendre, très blanche et à grain fin, mesure (1) La pierre employée est celle dite de vergenne presque exclusivement recherchée pour les bons travaux à l’époque gallo-romaine à Besançon. M — 133 — 0,82€ de hauteur. Il est facile d’v reconnaitre le réemploi d’un tambour de colonne de 0,60 de diamètre, d’après les canne- lures rudentées qui sillonnent la face du revers.Sur un des lits de pose apparait encore un trou de gougeon central (1) Un personnage, en très haut relief, décore la face opposée aux cannelures. À première vue on y reconnait le style et ‘les procédés de facture de l’époque romaine. L'œuvre très estimable, sous le rapport artistique, est en outre fort cu- rieuse par son sujet peu banal, et, en dépit de quelques mu- tilations, se trouve être une des mieux conservées qui soient sorties du sol de Besancon. Sur une plinthe inférieure de 0,07 d'épaisseur se tient de- bout, les pieds joints et le corps adossé sur un fond aplani et légèrement incliné en arrière, un adolescent assez court de bras et de jambes, très lourdement drapé: longue robe de dessous à manches et ample manteau ou pièce d’étoffe accrochée sur l’épaule droite. Au premier aspect, on dirait un enfant habillé trop à l’avantage. Aussi est-il peu de visiteurs qui ne s’y trompent en croyant y voir une figure de femme assise : quelque déesse de l’Abondance ! Le visage, en partie mutilé, est encadré de feuilles de vigne d'où pendent des grappes de raisins. Les deux bras coudés supportent à pleines mains, dans un vaste pli du manteau, un étalage de fruits variés où figurent encore des raisins. La charge fléchit de part et d'autre, tandis que sa partie centrale est retenue par un support horizontal et proéminent, mais ostensiblement dissimulé par la robe de dessous. Cet appui ainsi voilé et épousé par de beaux plis symétriques qui en (1) Pour compléter la description de ce tambour de colonne réemployé, il importe de signaler une profonde échancrure qui se voit au revers en travers des cannelures. Ces entailles s'observent souvent dans les ruines des villes antiques. Avant la chute des vieilles murailles et des colonnades, des pièces de bois v avaient été engagées pour constituer des abris ou de pau- vres habitations. Ce simple détail a son importance, car il témoignerait d’une époque de ruine ayant précédé l'exécution de notre sculpture. — 134 — dissimulent la forme n’est pas emprunté; il appartient bien en propre au personnage dont l’état particulier est au mieux qualifié par le poète: | re CONStANUOTE ERA Quam nova collibus arbor inhæret. HORACE, Ep. xII Ce n’est pas tout; au pied du jeune gallard est assis un Eros nu et vu de dos ; cet enfant s'appuie de la main droite sur le sol, pendant que de la gauche il s'accroche à la drape- rie pour l’écarter de dessus sa tête, laquelle s'engage sous le vide. Il est regrettable que cette figure accessoire curieuse- ment fouillée, en raison des ajours des bras qui ont disparu soit en partie brisée. Toutefois ce qui en reste, sous la chute de l’étoffe soigneusement évidée, lamorce des mains surtout, permet de saisir la justesse d’un mouvement fort bien compris. L'introduction du petit acteur est une variante originale et peut être unique comme conservation des représentations analogues en pierre, la plupart très dégradées, à savoir celle du Priape, considéré iei comme le dieu des Jardins, plutôt que celui de la Virilité féconde. De cette abstraction personni- fée de la Fécondité, surtout animale dans le principe, mais plus tard végétale, il existe une foule de figurations d'autant plus sommaires qu’elles sont plus anciennes, depuis la forme élémentaire d’une grande pierre conique des temps préhisto- riques jusqu'aux hermès grecs ou termini romains, non moins impudiques, où la tête barbue du Priape, confondue avec celles de Bacchus ou de Mercure, sont acceptées parmi les œuvres artistiques. Ces bornes de pierre, dressées le long des chemins, servaient de poteaux indicateurs, ou de limites aux propriétés qu’elles devaient décorer plus tard. Le type plus spécialement consacré à Priape se rencontrait dans les lieux champêtres et dans les jardins où la gaîne: — 135 — amincie du terme, inclinée sur son piédestal, rappelle une primitive sculpture sur bois que l’on peignait en rouge pour effrayer les oiseaux à la façon d’un vulgaire mannequin. Par- fois l’image était abritée sous une toiture de planches en forme de chapelle. Hommes et femmes, sous le pin sacré, venaient procéder à des sacrifices, apporter leurs offrandes et faire des libations avec accompagnement de musique. La superstition populaire s’accommodait sans répugnance de la grossièreté du symbole, ainsi que le confirment nombre de pierres gravées très en faveur aux premiers siècles. À ce témoignage où la fantaisie artistique avait une grande part, il nous appartient de joindre 1e1 celui d’une pièce rare de notre Musée, aussi précieuse qu’un bijou, cette ænochoë priapique en verre violet ornée de figures en émail blanc ci- selées comme celles des camées. Il y a vingt ans (1) Castan nous en donnait une remarquable description, accompagnée d’une esquisse exacte du développement de la panse du vase. La cérémonie priapique où figurent quatre personnages et deux idoles attend depuis, son interprétation ou un commen- taire quelconque. | Dans la partie centrale de la composition, à l’opposite de l’'anse, une malencontreuse brisure a fait disparaître les deux tiers du corps du célébrant ou mieux d’une prêtresse munie d’une longue torche (funale) allumée et renversée. Ce flam- beau aurait-il quelque signification funèbre? Rien n’est pré- paré sur l’autel adossé à une colonne surmontée de la figure d’une divinité inconnue, peut-être d’Aphrodite, sans bras et entièrement vêtue. La flamme de la torche refluant sur le sol au pied du monument, auquel est fixé le thirse garni d’une mitra, témoigne de l’accomplissement d’un rite de purifica- tion plutôt que d’un sacrifice. À droite, sous un pin sacré, est un trépied supportant trois (1) Mémoires de la Société d’Emulation du Doubs, 1886, 6ne série, Bip. 229; — 136 — vases ; on voit émerger de celui du milieu une petite plante. Serait-ce le développement d’un germe apparaissant comme un symbole de renaissance que surveille et salue un superbe jeune faune debout tout en garnissant de l’écharpe de fête (mitra) le pedum où massue recourbée et noueuse. Sur la gauche, et comme en contraste avec ces préparatifs cérémonieux, un groupe de deux personnages représente le public devant un Priape barbu et d’un naturalisme outré. Ce- lui-ci dressé sur sa gaine dans une attitude très vivante avance le bras droit pour verser à un second faune, en- tièrement nu comme le précédent, un breuvage, du vin sans aucun doute, que le buveur absorbe à longs traits. Le nez plongé dans la coupe et le bras élevé perpendiculairement, ce faune très convaincu communique son enthousiasme à un petit enfant de sa race qui, les deux mains tendues, se gran- dit sur la pointe des pieds pour réclamer sa part. Il n’en faut pas plus pour exprimer la pleine vie sensuelle et bachique. En amortissement, sous l’anse du vase, le masque de Méduse ne figure-t-1l pas ici comme un symbole de la fata- lité antique présidant à la continuité ou l’immortalité de la vie sur Ja terre. D'après cette interprétation proposée afin d’en provoquer une meilleure (ce que nous vous souhaitons) le Priape joue- rait ici le rôle mythique et fort ancien qui lui était attribué. Sur notre vase le dieu, avec ses oreilles pointues et sa barbe de satyre, est bien en famillé avec son fervent adora- teur, l’homme animalisé à la queue de cheval. Il ne ressem- ble guère au jeune dieu des jardins de Champforgeron, moins prétentieux et plus discret dans l’ostention du membre qui caractérise chacune des deux figurations. L’étalage des fruits dans un pli du vêtement si fréquemment employé comme attribut pour les images de Pomone, de Vertume ou de Sylvain ne pouvait manquer de s'adapter au type du jeune fils de Bac- chus et de Vénus, d'autant mieux que l’arrangement même fournissait aux artistes une ressource appropriée pour enca- — 137 — drer le signe distinctif priapique d’une pittoresque façon. On ne saurait expliquer la découverte d’une semblable sculpture d’un genre, si non lascif, du moins exprimant la dissipation, qu’en admettant l’existence de jardins d'agrément au pourtour de la ville antique. Si jamais on acquiert par de nouvelles fouilles la confirmation de l'attribution des pe- tits caveaux de Champforgeron à des restes d’un très ancien lieu de sépulture, 1l faudra reconnaitre qu'après un état d’a- bandon du champ de repos, la base solide d’un monument funéraire aura été uthisée pour lérection d’un autel à Priape, dans un milieu qui n'avait plus rien de funèbre. Plus tard quelque bon chrétien voyant dans cette idole encore debout l’image du démon, laura renversée de son pié- destal et enfouie, avec indignation, la tête en bas. En reparaissant aujourd'hui cette œuvre originale, plus complète que ses congénères très maltraitées par le temps, nous renseigne tant sur l’art galio-romain que sur la turpi- tude d’une superstition populaire au moins jusqu’au Hi siè- se denotre ère. LE CHANOINT SUCHET 1819 - 1904 Par M. l’abbé Auguste ROSSIGNOT BIBLIOTHÉCAIRE DE L'ARCHEVÊCHÉ Séance du 26 mars 1904. Le lundi 8 février 1904 s’éteignait doucement, à l’âge de quatre-vingt-cinq ans, un des prêtres les plus connus et les plus sympathiques du diocèse de Besançon. Par sa bonté, plus encore que par les diverses situations qu’il a occupées, M le chanoine Suchet s'était fait de fidèles et nombreux amis. Une foule composée de personnes de tous rangs se pressait à ses obsèques et rendait un hommage bien mérité à celui qui sut allier le zèle et la charité du prêtre aux labeurs de la science M. Suchet appartenait à l’Académie de Besan- çon depuis quarante ans, mais il s’intéressait à toutes les manifestations de la vie intellectuelle en Franche-Comté, et depuis l’année 1894 il était membre de la Société d'Emulation du Doubs. Celle-ci lui doit done un souvenir et, ayant reçu des marques particulières de l'amitié du vénéré chanoine, je suis heureux d’avoir été mvité à lui payer cette dette. Jean Marie Suchet naquit le 8 janvier 1819, d’une famille modeste mais honorable qui habitait le joh bourg de Pesmes, sur les rives de l’Ognon. Comme cette rivière, qui dans son long cours ne quitte pas notre province, M. le chanoine Suchet, par sa naissance, par son caractère, par ses études, par son amour du sol natal. par sa vie tout entière appartient à la Franche-Comté. fn LE CHANOINE SUCHI 1819 - 1904 Société d'Emulation du Doubs, 1903-1904. — 139 — Avant commencé ses études de bonne heure, il les acheva brillamment et il n’était encore que clerc minoré lorsqu'il sortit du séminaire de Besançon. Marnay, Pontarlier, Am- blans, le collège saint François-Xavier, le séminaire d'Ornans, la cathédrale, le chapitre : telles sont les étapes de sa vie sacerdotale Il n'avait que vingt-et-un ans lorsqu'il fut envoyé comme professeur au séminaire de Marnay. Il nous dit quelque part (1), que pour rassurer son inexpérience on lui affirmait qu'on n’est pas obligé de savoir tout ce qu’on enseigne : paradoxe qui renferme une part de vérité en ce sens que la nécessité d'enseigner oblige d'apprendre ce qu’on ignore, Mais si cette méthode est profitable au profes- seur, il faut bien convenir qu’elle l'est moins aux élèves. Pendant les quatre années qu’il passa à Marnav, M. labbé Suchet put donc compléter son instruction classique et se perfectionner dans les lettres humaines, humaniores litterae. Devenu prêtre, il fut envové comme vicaire à Pontarlier. Son heureux caractère, l’agrément et les pointes de son esprit le rendirent bien vite populaire. Cest alors qu'il essaya sa plume dans quelques articles de journaux et que, suivant la méthode scolastique qui de la discussion fait jaillir la lumière, il collaborait, dit-on, à deux feuilles locales d'opinions opposées qui accueillaient tour à tour l’attaque et la réponse. On était en 1848. Pour marquer lestime qu'ils avaient pour leur jeune vicaire, les Pontissaliens lélurent conseiller municipal, et il ne fut pas sans exercer une heureuse influence dans l’assemblée communale. Après cinq ans de vicariat, M. Suchet fut nommé curé d'Amblans, près de Lure. Il s'installa dans cet humble village comme s'il avait dû y demeurer toute sa vie, et jusqu’à la fin il conserva le meilleur souvenir de la popu- (1) Association des anciens professeurs et élèves du Séminaire d’Ornans, Réunion du 11 juin 1902, page 16. — 140 — lation chrétienne et honnête qui lui avait été confiée. Toutefois ses études et sa science le désignaient pour un autre poste. En 1850, M£' Mathieu ouvrait le collège catho- lique de saint François-Xavier et en confiait la direction à M. l’abhbé Besson, futur évêque de Nîmes. Celui-ci demanda le concours de M. l'abbé Suchet qui le lui prêta pendant treize ans, remplissant les fonctions les plus diverses. « Vrai frère Jacques, dit-il, jv fus tour à tour, professeur de cin- quième professeur de seconde, puis chargé de la petite classe de français, ensuite, qui le croirait ?... économe et enfin préfet des études (1). »» Comme économe, il eut à sur- veiller la construction de la chapelle, se faisant à la fois architecte, entrepreneur, ouvrier et conduisant à bien ce travail que chacun peut encore admirer aujourd’hui. L’apti- tude qu’il montra pour des fonctions si diverses, attira sur M. Suchet l’attention du cardinal Mathieu et, en 1863, il le nomma supérieur du séminaire d'Ornans. Dans ce nouveau milieu, les qualités dont il avait fait preuve s’exercerent largement ; il y déploya une activité persévérante et, après quelques années, l'établissement dont il était chargé devint des plus prospères. Il y régnait un accord admirable entre les maîtres, et les élèves appréciaient justement le zèle, la bonté et le dévouement de leur supé- rieur. Jusque dans ses corrections, quelquefois un peu dures, mais toujours tempérées par la bonté, il apportait le plus grand tact. Tous ceux qui nt passé au séminaire d’Ornans à cette époque en conservent le meilleur souvenir. Les choses allèrent ainsi jusqu’à la guerre franco-allemande, Alors le séminaire fut transformé en ambulance; pendant quatre mois on y recueillit plus de deux mille malades et ce fut une occasion pour le supérieur et plusieurs de ses pro- fesseurs de montrer leur charité et leur patriotisme. Après la reconstitution du séminaire, M. Suchet laissa cet établis- (1) Zbidem, page 16. — 141 — sement entre les mains de M. Saunois pour aller où l’appelait la confiance de son archevêque et s'appliquer à la direction d’une grande paroisse après avoir, pendant vingt-quatre ans, travaillé à l’enseignement et à la formation de la Jeunesse. É Ce fut pendant treize ans, de 1874 à 1887, qu'il administra la paroisse de Saint-Jean,s’acquittan ttoujours de ses fonctions avec le même zèle et le même succès. Selon la parole de saint Paul, il se fit tout à tous; aussi tous l’aimèrent comme un ami et comme un père, et pour ceux qui furent ses parois- siens, il fut toujours M. le curé; jusqu'à la fin ils ne lui don- nèrent pas d'autre nom. Les écoles de sa paroisse attirèrent particulièrement ses soins ; il fonda les unes et soutint les autres. Son ministère à l’égard des pauvres ne fut pas moins touchant ; sans fortune personnelle, la confiance qu'il inspi- rait lui ménagea des ressources et il soulagea une foule de misères. En 1887, M. Suchet, dont la santé paraissait chancelante, donua sa démission de curé pour demeurer chanoine. Mais sa retraite ne fut pas inactive : c’est dans l’étude des belles- lettres, et surtout de l’histoire franc-comtoise, qu’il trouva son plus doux repos. Dans le cours de sa longue carrière, M. l'abbé Suchet a publié de nombreux travaux de plus ou moins lon- gue haleine, des livres, des brochures, des articles de revue se rattachant tous à l’histoire de la province Pendant son professorat au collège Saint François-Xavier, il collabora à la Vie des saints de Franche-Comté. Dès la fondation des A4n- nales Franc-comtoises, il ne cessa de donner à cette revue des articles nombreux et toujours intéressants: on n’en compte pas moins de trente-cinq dans la première série et il y en à quatorze dans les nouvelles annales. Au milieu des plus actifs travaux de son ministère il ne déposa pas sa plume. Sur la demande de M8 Paulinier, il fonda en 1876 La Se- maine religieuse du diocèse de Besançon et la dirigea pen- dant un an. Dix-sept ans plus tard, lors de la nomination du — 149 — second directeur, M. abbé Jeannin, à la cure de Notre-Dame, M. Suchet reprit cette direction et la conserva du commen- cement de l’année 1889 jusqu’à la fin de 1900, sans cesser pourtant de travailler aux Annales Franc-comtoises et d’être toujours assidu aux séances de l’Académie. Il fut plusieurs fois élu président de cette société et c’est à ce titre qu’en 1897, il prit la parole à l’un de vos banquets pour céiébrer l'union, qu’il réalisait en sa personne, des deux sociétés sœurs, l’Académie des sciences, beiles-lettres et arts et la Société d’Emulation.lIlfut souvent, à l'Académie, chargé des rapports sur les concours d'histoire, travail qui répondait parfaitement à son goût et à ses aptitudes. Ajoutons enfin qu'ayant été nommé supérieur des sœurs de la Retraite des Fontenelles il écrivit la vie de leur fondateur, le Vénérable P. Receveur. Voilà quelques-uns de ses nombreux travaux. M. Suchet était un érudit donnant beaucoup plus au fond qu’à la forme. Mais si sa science était de ion aloi et ses juge- ments toujours sûrs, son style était schbre, précis et correct ; on le lisait avec intérêt parce qu'il écrivait avec méthode et clarté. En 19092, il célébra les noces de diamant de son sacerdoce au séminaire d’Ornans, à la prospérité duquel il avait tant con- tribué. Il y fit le récit de sa longue carrière devant une nom- breuse réunion de collaborateurs et d'élèves anciens et nou- veaux, témoignant aux uns sa sympathique reconnaissance et donnant aux autres de sages et utiles conseils. Nous aurions pu nous contenter de reproduire cette autobiographie; mais à côté de la vérité il y règne une trop grande modestie. M. le chanoine Suchet s'était acquis un certain renom à propos de ses mots pleins de sel et d'esprit. Comme il Pa dit de lui-même, étant fils de cloutier il lui était permis de faire des pointes; mais s’il avait son franc parler, si d’un trait il fustigeait un vice ou un travers, c'était toujours sans blesser la charité chrétienne. Il n’était pas de ceux qui ne savent pas sacrifier un mot lors même qu’il pourrait froisser. Il apportait — 143 — tant de bonté en toute chose que ceux-là même qui étaient l’objet de quelque trait de sa part ne lui en ont jamais con- servé rancune. Combien on était édifié, en ces dernières années, de le voir trainant ses pas que l’âge avait rendus plus lourds, pour se rendre à la cathédrale, à sa chère bibliothèque du chapitre, à l'Académie, toujours portant la bonté dans son regard, une certaine finesse sur ses lèvres et, sur son front l’éclat d’une intelligence toujours jeune. L’heureuse vieillesse digne de faire envie à tous ! Saluons en M. le chanoine Suchet un modèle de piété et de dévouement, un exemple pour tous les travailleurs et le type du vrai Franc-comtois. (1) (1) La Société d’'Emulation avait décidé qu'une bibliographie des ou- vrages de M. Suchet suivrait cette courte notice. Mais l'impression des Mémoires de la Société ayant été retardée, cette bibliographie devient sans objet, puisqu'elle ne pourrait être que la répétition de celle qui a étè faite par M. Pingaud pour les Mémoires de l’Académie de Besançon, déjà publiés. Cettte bibliographie comprend deux parties. Dans la première figurent les travaux historiques de tout genre, insérés par M. Suchet dans divers re- cueils locaux: les plus importants de ces travaux ont recu une nouvelle pu- blicité par des tirages à part. M. Pingaud n’en énumère pas moins de quatre- _ vingts. La seconde partie concerne des écrits de valeur moindre tels que no- tices nécrologiques, rapports, allocutions, etc, publiés dans des journaux ou revues de Franche-Comté. Cette bibliographie a été faite avec le plus grand soin et il serait difficile d’en donner une plus complète. Les Mémoires de la Société d'Emulation n’ont publié de M. Suchet que le toast qu’il porta, au banquet de 1897, comme président de l’Académie de Besançon. Il y célèbre l’union des deux sociétés savantes, dont mieux que tout autre il pouvait parler, puisque, comme membre des deux sociétés, il réalisait cette union en sa personne. LES MAÏSONS NATALES D 1 FOURIER ET DE PROUDHON Par M) Cr GAZ TER CONSERVATEUR DE LA BIBLIOTHÈQUE DE BESANCON Séance du 26 Mars 1904. L'Université Papulaire de Besançon ayant décidé d’hono- rer la mémoire des illustres comtois Fourier et Proudhon par l’apposition de plaques commémoratives sur leurs maisons natales, il nous à paru utile de réunir tous les documents susceptibles de nous renseigner d’une façon précise sur le lieu de leur naissance. On se rappelle les discussions qui s’élevèrent entre érudits de notre ville, quand on voulut ren- dre le même hommage à Victor Hugo, et l’on sait que quel- ques personnes contestent encore aujourd’hui que la maison située 140 Grande Rue ait vu naitre le grand poète. Nous avons voulu éviter qu'il en fût de même pour les deux so- ciologues bisontins, dont l’œuvre a exercé une influence si profonde sur le développement de notre société contempo- raine. La question peut paraitre à certains d’un bien minime intérêt : peut-être du moins ceux qui croient que de petites causes sortent parfois de grands effets, penseront-ils que cette étude n’est pas absolument stérile. Les recherches faites pour connaître exactement où est né — 145 — Fourier n’ont présenté aucune difficulté. Son acte de nais- sance conservé dans les registres de la paroisse Saint-Pierre atteste déjà son origine bisontine : il est ainsi conçu: «Fran- çois-Marie-Charles, fils de monsieur Charles Fourier, négo- ciant à Besançon, et de dame Marie Muguet, son épouse, est né et a été baptisé le sept avril mil sept cent soixante et douze. Son parrain est monsieur François Muguet le jeune, négociant à Besançon, et sa marraine mademoiselle Jeanne- Marie-Françoise Fourier, sa sœur, Ont signé: Vernerewy, vicaire de St-Pierre, Fourier, François Muguet le jeune», En outre les disciples de Fourier s'étaient préoccupés, il y a plus d’un demi-siècle, de conserver à la postérité les détails les plus circonstanciés sur la maison natale de leur maitre. Voici en effet une description de cette maison qui ne laisse rien à désirer : elle est empruntée à l’'Almanach phalanstérien pour 1848. (1) «La maison où Fourier naquit à Besançon et où il passa ses quinze premières années, formait dans la Grand’Rue l’an- gle sud de l’ancienne ruelle Baron. Elle dut disparaître par- tiellement en 1841, lorsque ce petit passage étroit et obscur: fut remplacé par la belle et large rue Moncey. Ce fut alors qu’un compatriote et disciple de Fourier, l’auteur de Solida- rité, (2) voulant faire revivre au moins par le crayon la pre- mière demeure d’un homme qui restera grand parmi les hommes, se chargea d’en lever le plan et d’en retracer la dis- tribution telle qu’elle existait au temps où l’habitait notre maitre et d'en reproduire l'élévation principale.» Une petite gravure de l’Almanach placée à côté de cette notice, donne en effet le dessin de la maison de Fourier, jolie demeure du (1) Almañach phalanstérien pour 1848, Paris. Aux bureaux de la Dé- mocratie Pacifique et à la Librairie sociétaire, rue de Beaune 2, et quai Voltaire 25. p 121-195 L'article est signé P. de B. (Paul de Boureulé). (2) Le capitaine Hip. Renaud. Cf. Ch. Pellarin, Charles Fourier, sa vie et sa théorie. 10 — 146 - xvIe siècle, percée au rez-de-chaussée d’une grande baie, éclairée au premier étage de deux fenêtres à baies géminées, plus une demi-fenêtre isolée, surmontées d’arcs en accolade. Il existe de cette maison une autre lithographie fort bien faite, qui a été éditée vers la même époque par la Eibrairie phalanstérienne, établie à Paris, 2 rue de Beaune, et dont un exemplaire subsiste à la Bibliothèque de Besançon. L'au- teur de l’Almanach ajoute encore les indications suivantes : « Le rez-de-chaussée était entièrement occupé par les maga- sins et les bureaux du père de Fourier qui était marchand de draps. La famille habitait le premier étage : et cette demi- fenêtre isolée, du côté opposé à la ruelle Baron, éclairait la chambrette du jeune Charles. Il était né dans une petite pièce tout à fait semblable et contigué, la chambre de sa mère, située en arrière sur la cour. Et l’on peut dire avec exactitude que ces deux pièces existent encore, car la mai- son n’a été abattue que sur la droite, pour être rétrécie et habillée de deux façades nouvelles ». Ces renseignements si précis ne peuvent donc laisser aucun doute sur la maison où Fourier naquit, maison qui porte aujourd’hui le n° 83 de la Grande Rue. Proudhon n'a pas été comme Fourier un chef d'école: c'était un esprit trop indépendant pour chercher à soumettre les autres à une discipline intellectuelle quelle qu’elle fut. On s'est donc moins préoccupé de tous les détails de sa biogra- phie, et c’est ce qui explique les affirmations contradictoires que l’on trouve sur le lieu exact de sa naissance. (1) (1) Mme Catherine Henneguy, fille aînée de Proudhon, qui conserve pieu- sement la mémoire d’un père vénéré, a bien voulu nous communiquer tous les renseignements écrits ou oraux qu’elle possédait sur cette question. M. Bizot sous-inspecteur de l’enregistrement à Besançon, M. Vouillot, em- ployé à la mairie de Besançon, M. le chanoine Rossignot, curé de la Made- leine, M. E. Droz, professeur à la Faculté des Lettres, nous ont fourni tous les documents dont nous nous sommes servis, et c’est à eux que revient tout le mérite de ce travail. — 141 — Un joli petit village de la Haute-Saône, situé près de Mar- nay, sur les bords de l’Ognon, Burgille-lès-Marnay, revendi- que l’honneur de l’avoir vu naïître, et ses habitants montrent encore avec orgueil la maison de Proudhon. Ils peuvent ci- ter, à l'appui de leurs dires, les quelques lignes suivantes écrites par Proudhon le 30 octobre 1849, de Sainte Pélagie où il était alors enfermé: «Je n'aurai de repos que quand je pourrai m'établir sur les bords de l’Ognon et finir ma vie là où elle a commencé.» — En fait, Proudhon a seulement passé une grande partie de son enfance à Burgille chez les parents de sa mère Catherine Simonin. C’est là qu’il a puisé ce goût si ardent de la nature qui apparait dans toute son œuvre et qu'il a traduit parfois en des pages d’une poésie charmante. La naissance de Proudhon à Besançon est indiscutable et constatée par les registres officiels, Voici en effet son acte de naissance, tel qu'il est conservé à la mairie de Besançon où l’a découvert M. Vouillot: « L’an 1809, le 17 janvier, à neuf heures du matin, Nous Charles-Antoine Seguin, adjoint dé- légué du maire de Besançon, faisant les fonctions d’officier publie de l'Etat civil, avons constaté la naissance de Pierre- Joseph, né le 15 dudit, à six heures du soir, fils de Claude- François Proudhon, commis négociant, âgé de 29 ans, et de Catherine Simonin son épouse, âgée de 54 ans, demeurant à Besançon, 6° section, présenté par ledit sieur Claude-François Proudhon. Le sexe de l'enfant a été reconnu être masculin en présence de François-Joseph Proudhon, traiteur, grand- oncle de l'enfant, âgé de 57 ans, demeurant à Besançon et de Jean-Claude Fournier, traiteur, âgé de 53 ans, demeurant à ladite ville, témoins qui ont signé avec nous après lecture. (Suivent les signatures) ». Comme on le voit, cet acte donne comme seule indication du domicile des parents de Proudhon la mention sixième sec- tion. On sait en effet que, depuis la Révolution jusqu’à la fin de Empire, les registres de l'Etat civil se contentent de faire — 148 — connaitre la section d’origine, sans donner d’autres rensei- gnements. Ce fait, déjà remarqué pour Pacte de naissance de Victor Hugo, a été la cause de la polémique qui s’est élevée au sujet de la maison natale de l’illustre poète. Cette absence de précision des actes officiels a amené le même résultat pour Proudhon : aujourd’hui deux opinions sont en présence qui du moins sont d’accord pour le faire naitre dans la 6° section. Pour les uns en effet, Proudhon serait né dans le quartier de la Mouillère, dans une maison démolie en 1814 ; pour les au- tres l’habitation qui porte actuellement le n° 37 de la rue du Petit Battant est incontestablement celle où il a vu le jour. Cette maison est la dernière de la rue, contre le talus des fortifications. Ceux qui soutiennent le fait de la naissance de Proudhon à la Mouillère s’appuient sur une autorité fort sérieuse, celle de Sainte Beuve lui-même, dans son livre intitulé Proudhon, Sa vie et sa correspondance (1) 1838-1848. « Pierre-Joseph Proudhon, écrit en effet Sante Beuve, naquit le 15 janvier (et non juillet) (2) 1809, dans un faubourg de Besançon à la Mouil- lère. Ses père et mère y étaient occupés à la grande brasserie de M. Renaud. Le père, bien que cousin de M. le professeur Proudhon, jurisconsulte de Dijon, et d’une branche cadette de la même famille était garcon brasseur ; la mère, belle et forte fille de la campagne y était servante pour les gros ou vrages. À l’époque du blocus de Besançon, en 1814, le quar- tier de la Mouillère, bâti sous les murs de la ville, dut être détruit pour la défense de la place: la brasserie disparut avec les autres habitations. Le père de Proudhon s'établit dans le faubourg de Battant, quartier des vignerons. Il y avait acquis une maison. [Il y fit dela tonnellerie pour son compte ». (1) Paris, Lévy, 1872, in-16. (2) Il est curieux de constater que Proudhon n'était pas lui même très bien fixé sur la date de sa naissance. Dans ses Mémoires sur sa vie commu- niqués par sa fille Mme Catherine Henneguy, et publiés dans la Revue So- ciahste (août 190%), il écrivait: «Je suis né à Besançon le 15 juin 1809». — 149 — Pour quiconque a tant soit peu pratiqué Sainte Beuve, il est certain que l’illustre critique n’a rien avancé à la légère, et qu'il na pas inventé de toutes pièces les renseignements circonstanciés qu’il donne ici. Du reste avec sa précision ha- bituelle, il nous indique les sources auxquelles il a puisé : «Je dois infiniment, dit-il, (l) pour tous ces premiers détails de la vie de Proudhon à M. Weiss (2) Iui-même, particulière- ment à M. Oudet, avocat distingué de Besançon, qui a bien voulu répondre à toutes mes questions, interroger pour cela autour de lui ou se souvenir lui-même, et m'envoyer des notes précieuses, des extraits de correspondance. M. Beauquier auteur d’un article sur Proudhon publié dans un journal étran- ger, a bien voulu également mettre à ma disposition tous les matériaux qu'il avait réunis sur son célèbre compatriote bisontin ... ». Weiss et Oudet n’ont rien laissé des notes com- muniquées à Sainte Beuve, mais nous possédons l'article de M. Beauquier qui a été publié dans la Revue littéraire de la Franche-Comté. (3) Il suffit de le lire pour se convaincre que Sainte Beuve s'en est servi. «Dans un faubourg de Besançon, écrit M. Beauquier, de l’au- tre côté du Doubs, à la Mouiilère, 11 y avait au commence- ment du siècle une vaste brasserie. Le propriétaire, M. Re- naud, entretenait à son service, en qualité de garçon brasseur, un ouvrier lourd, trapu etrustaud, en somme fort peu avenant. En même temps se trouvait à la maison, pour faire le gros ouvrage, une fille de la campagne, d’un extérieur agréable aux manières simples et aisées, à l'intelligence ouverte. On la nommait Catherine. Comment se fit-il que le grossier ou- vrier sût plaire à cette belle fille? Nous ne nous chargeons (1) Sainte-Beuve, pt énolert: (2) Ch. Weiss, nee one de la Bibliothèque de Besançon de 1812 à 1866, l’un des principaux collaborateurs de la Biographie Universelle de Michaud, (3) Année 1857, 1. v. p. 65 et 19. — 150 — pas d’être l’'Œdipe des mystères de l'amour. Quoiqu'il en soit, Catherine se laissa séduire, et bientôt elle mettait au monde un robuste garçon qui fut baptisé sous le nom de Pierre-Joseph et qui devait être notre célèbre philosophe. Le maître de la brasserie qui s’intéressait à Catherine, dont les qualités étaient vraiment au-dessus de sa condition, exigea que le séducteur l’épousât. Peu après le jeune couple s’établissait à Battant, dans le quartier des vignerons, quartier qui a le mieux con- servé cette rude physionomie franc-comtoise si fortement em- preinte dans le caractère et dans le style de Pierre-Joseph Proudhon. Le père fit de la tonnellerie et fut bientôt à même, avec ses économies, et en escomptant un peu l’avenir, d’ache- ter une petite maison, ce qui pouvait se faire dans ce temps de bon marché légendaire, moyennant deux à trois mille francs. Mais ce bien être relatif ne dura pas longtemps ». Ainsi pour M. Beauquier, qui s’est fait l’écho de traditions bisontines, pour Sainte Beuve, et aussi en général pour tous les historiens qui ensuite se sont occupés de Proudhon, ce dernier serait né à la Mouillère dans une dépendance de la brasserie Renaud, démolie en 1814, lors du blocus de Besan- con. Nous laissons de côté ici, pour y revenir dans la suite de cette notice, l'indication, d’ailleurs erronée, de la naissance. illégitime de Proudhon. L'autre opinion qui veut que Proudhon soit un fils de Bat- tant n’a pas pour elle l’appui d’historiens aussi éminents. Par contre les traditions populaires se trouvent d'accord avec les documents officiels pour nous convaincre qu’elle est plus conforme à la vérité historique. Il ne faudrait pas dire aux vieux habitants de Battant, dont quelques-uns sont encore fiers d’avoir connu Proudhon, qu’il n'est pas né dans leur quartier. Mais, fait autrement probant, la même opinion s’est conservée également chez les enfants de Proudhon. (1) (1) Mme C. Henneguy a toujcurs entendu dire dans sa famille que son père était né à Battant. — 151 — On pourrait croire cependant que cette idée est née de ce fait que, depuis 1815 incontestäblement, les parents de notre philosophe ont habité au n° 37 de la rue du Petit Battant Il existe en effet dans les registres de l’état civil l’acte de décès en date du 3 août 1815 d’une petite sœur de Proudhon, âgée de 4 mois «fille de Claude-Francois Proudhon brasseur, et de Catherine Simonin, époux domiciliés rue du Petit Battant 930 ». Or le n° 930 de la rue Battant correspond au n° 37 de la rue du Petit Battant, et se lit du reste encore aujourd'hui au-dessus de la porte d'entrée de cette maison. D'autre part nous avons des lettres de Proudhon lui-même à ses parents avec cette adresse (1). À Mas nous possédons des pièces officielles qui établissent d'une façon indiscutable selon nous, que les parents de Prou- dhon habitaient déjà cette maison de Battant quand naquit Pierre Joseph. Un document fort caractéristique a déjà été mis en lumière par M. le chanoine Rossignot dans son Histoire de l’église de Sainte-Madeleine de Besançon (2), C’est l'acte de baptême de Pierre-Joseph Proudhon conservé dans les registres de cette paroisse, ainsi conçu : € Pierre-Joseph, fils de Claude-François Proudhon, commis marchand, et de Catherine Simonin, son épouse, a été baptisé le 17 janvier 1809, Il a eu pour par- rain François-Joseph Proudhon, et pour marraine Anne-Pier- rette Simonin, épouse de Claude-Louis Simonin, illitérée. Ont signé : Proudhon, Proudhon, Dumain, vicaire ». On sait que le baptème doit être administré dans la paroisse des pa- rents de l’enfant. Or si le quartier de Battant ressortissait, en 1809 comme aujourd’hui, à la paroisse de la Madeleine, alors comme aujourd’hui, le quartier de la Mouillère faisait partie (1) Cf. Sainte Beuve. p. 182 note. Il cite une lettre de Proudhon du 11 novembre 184% adressée à M. C.-F. Proudhon tonnelier, rue du Petit Battant, 91, à Besançon. (2) Besançon, Bossane, 1902, in-18. p. 247. — 152 — de la paroisse de Bregille, actuellement paroisse St-Martin des Chaprais. La démarcation des paroisses et succursales de ja ville de Besancon fut en effet ainsi fixée à la suite du Concordat «30 La paroisse de Ste Magdeleine contiendra le pont et toute la partie de la ville renfermée entre la rivière du Doubs et les remparts de Battant, Charmont et Arenne, v compris Île fort Griffon... La succursale de Bregille dépen- dant de la paroisse de Saint Jean comprendra le village de Bregille et toutes les maisons situées entre les monts de Bre- gille et le côté droit de la route de Vesoul ». Il est donc déjà bien difficile d'admettre que Proudhon ait été bapüsé dans une église dont ses parents n'étaient pas les paroissiens. En réalité d’autres documents qui nous font connaître le domicile des parents de Proudhon avant leur mariage, et nous disent à quelle époque ils firent l'acquisition de leur maison de Battant, semblent ne laisser subsister aucun doute à ce sujet. Claude-François Proudhon figure dans un registre de dénombrement de 1796 (1) comme âgé de 16 ans et habitant chez son oncle Vernier maçon, rue Battant n°953. I] ne semble pas avoir quitté ce quartier, car, quand il voulut se marier, il produisit un certificat de résidence à Besançon, conservé au- jourd’'hui dans les Archives du greffe du tribunal civil, ainsi rédigé : « Nous soussigné agent de police des 6e et 7e sections certifie que le nommé Proudhon Claude-François réside sur la 6° section n° 954, depuis plus de deux ans, pourquoi nous lui avons délivré le présent pour lui servir. Besançon le 1°" fé- vrier 1808. Signé Détrey ». Quant à sa fiancée, elle n’ha- bitait pas davantage avant son mariage dans le quartier de la Mouillère. Comme en fait foi son certificat, joint à celui de son futur époux «Je soussigné agent de police de la seconde section certifie que Mlle Catherine Simonin, originaire de Cordiron, demeurant rue du Clos, n° 283, est depuis sept ans (1) Arch. départ. L. 608. —_ 153 — en cette ville en qualité de fille de soins. Besançon 18 janvier 1808. Signé Rudt». Les recherches faites avec la plus sûre méthode par M. Bi- zot, sous-inspecteur de l’enregistrement et des domaines, dans les archives des notaires, ont prouvé enfin que lors de leur mariage, les parents de Proudhon étaient propriétaires de la maison n° 930 de Battant.M. Bizot a eu en effet la bonne fortune de retrouver un acte notarié, passé le 25 octobre 1807, devant M. Renaud qualifié d'avocat notaire à Besançon, acte enregistré aux actes civils publiés en la même ville le 27 du même mois (vol. 387, fo 68 vo, case 1re) aux termes duquel «Madame veuve Joseph Vuillemin, née Jussey Jeanne-Louise, demeurant à Arcev, canton de l’fsle-sur-le-Doubs, a vendu à Claude-François Proudhon, ouvrier marchand à Besançon, rue Battant, une petite maison appartenant à la venderesse du chef de ses père et mère, située à Besançon, rue du Petit Battant 930, touchant de couchant Claude-Louis Perrot, du levant et par derrière les fortifications, par devant la rue, la- dite maison composée d’une cave voûtée, deux pièces au rez- de-chaussée, une cour et une écurie, au premier deux pièces et un grenier au dessus. L'entrée en jouissance et le paie- ment des impôts doivent avoir lieu à compter du 1° janvier 1808. Le prix fixé pour la vente est de 1.000 francs payables le 1e" août suivant avec intérêts à 5 °/, à compter du jour de l’entrée en jouissance ». François Proudhon devait donc entrer en jouissance de cette maison le 1° janvier 1808. Or c'est un mois après, le 3 février de la même année, qu'il devait épouser Catherine Simonin. Est-il téméraire de penser que ces deux évènements n'étaient que la conséquence l’un de l’autre ? Evidemment le mariage prochain de François Proudhon était la cause de Pachat fait par lui d’une petite maison à Battant. Nous avons vu qu'au moment de leur union, les deux conjoints habitaient l’un à Battant, l’autre rue du Clos, Peut-on supposer qu'un modeste ouvrier se soit décidé, à la veille d’entrer en mé- = 494 — nage, à faire la grosse dépense de l'acquisition d’une maison, sinon pour s y installer ? Remarquons d’autre part, qu’il n’a- vait même pas alors la somme disponible pour payer sur le champ les 1.000 francs qui le rendaient propriétaire. Il avait besoin d’un délai de 10 mois pour solder sa dette, et peut-être comptait-il sur les économies faites par la laborieuse com- pagne qu'il devait épouser, pour se libérer, Quoiqu'il en soit, le Ter août 1808, il avait entièrement payé le prix de sa mai- son de Battant. [Il en était donc lindiscutable propriétaire, quand le 15 janvier 1809 naissait Pierre-Joseph Proudhon. M. Coindre dans son beau livre Besançon qui s’en va repro- duit la maison de Proudhon, en ajoutant cette mention qu’elle est aujourd’hui démolie. En réalité il suffit de comparer son dessin et la maison actuelle du n° 37 de la rue du Petit Bat- tant, pour se convaincre qu'il y à là une erreur. La rue à seulement été surélevée, ce qui a eu pour effet de couvrir presque entièrement la porte qui donne accès à la cave. De plus on à ajouté depuis deux étages au bâtiment primitif, et on à détruit le petit hangar voisin qui servait d'atelier de tonnellerie au père de Proudhon. Mais la maison de Prou- dhon est bien encore, sauf ces légères modifications, celle qui est signalée dans l’acte de vente de 1807. Le propriétaire actuel, M. Champion, a bien voulu nous en faire les hon- neurs avec la plus entière bonne grâce Nous y avons re- trouvé les 2 pièces au rez-de-chaussée et au 1°r étage situées l’une derrière l’autre, et séparées par une mince cloison, et la cave voûtée, telles qu’elles sont indiquées dans Pacte no- tarié. De cette fastidieuse énumération de textes, nous pouvons encore tirer l’affirmation de la naissance absolument légitime de Proudhon qui avait été contestée à tort. Le rapprochement de la date du mariage de ses parents (3 février 1808) et de celle de sa naissance (15 janvier 1809) nous dispense d’insis- ter davantage sur ce point. Au reste tout ce que l’on sait du caractère de Catherine Simonin, plus âgée de 6 ans que = 455 — son mari, aurait pu suffire à écarter l’idée d’une séduction: cette accusation doit avoir eu sa source dans la fareur des passions politiques qui se déchainèrent plus d’une fois contre Proudhon. En résumé, nous croyons que les textes que nous venons de citer, suffisent pour établir d’une façon certaine la nais- sance de Proudhon à Battant. Si certains historiens et Sainte Beuve lui-même sur la foi des renseignements qui lui furent fournis, l'ont fait naître à la Mouillère, cela provient sans doute de ce que la tradition leur avait appris que le père et la mère de Pierre-Joseph s'étaient connus à la brasserie Renaud. L'un y travaillait comme ouvrier brasseur, lPautre comme fille de soins : on en a conclu que tous deux habitaient également dans cette brasserie. En réalité, le domicile de François Proudhon et de sa femme était non loin de là, mais de l’autre côté des fortifications, à Battant, et l’on peut sans crainte inscrire sur la plaque commémorative placée sur le n° 37 de la rue du Petit Battant cette inscription : Jei est né Pierre-Joseph Proudhon. — 156 — UNE PAGE INÉDITE DE PROUDHON Au cours de nos recherches, la fille tant aimée de Prou- dhon, aujourd’hui Mme Catherine Henneguv, a bien voulu nous communiquer la page suivante qu’elle a trouvée dans les papiers de son père. Ce document est pénétré d’une émo- tion si profonde, et est en même temps si caractéristique du génie de Proudhon, que nous n'avons pas hésité à le donner 1ci à la suite de notre notice : Mardi 29 mai 1860 « Je reçois en même temps la nouvelle de deux morts: celle de mon frère Charles-Joseph Proudhon, né le 1er mai 1816 à Besançon, celle de Melchior Proudhon, mon parent, frère de Mr Droz, né le 13 février 1767, mort par conséquent à l’âge de 93 ans 2 mois. Mon frère est mort le 25; mon vieux pa- rent le 13. » Je m'attendais depuis longtemps à ces deux décès : mon frère était atteint d’une maladie incurable, et depuis quelques jours, j'ai déjà dû prendre des mesures et écrire en prévision de l’évènement. Je me trouve légalement tuteur de deux gar- cons, dont l’un à 13 ans, l’autre 16. La mère, qui dépasse la cinquantaine est sourde et incapable, je crois, de gagner sa vie. » À cette heure, je reste seul de ma famille ; ce qui m'est le plus poignant, est que tous les miens sont morts dans le malheur : mon père, ma mère et mes deux frères. Mais la conscience à été bonne: ils ont connu comme moi, l'amitié et les franches joies du devoir, de l'indépendance et de la famille. Nous n'avons pas été heureux ! Comment finirai-je AT à mon tour”... Que je dure encore dix ou quinze ans; que J'achève mon œuvre telle que je la médite et je suis content. Le surplus n’est rien. Pauvre frère! Pauvre mère! Pauvre père ! J'aurais voulu cependant leur procurer un peu de bien- être : ils y comptaient, ils avaient droit d’y compter. Je leur ai manqué ! Je ne crois pas qu’il y ait précisément ce que l’on appelle égoïsme dans mon fait; il y a eu du tempérament. Mes tribulations viennent de là. » Mon parent Proudhon, prêtre en 89, entré dès ce moment dans le mouvement révolutionnaire, président du club des Jacobins, emprisonné après la Terreur, plus tard frère ora- teur et vénérable de la loge des francs-maçcons de Besançon, dans laquelle j'ai été reçu, homme remarquable dans tout le cours de sa vie par la grande fermeté de son caractère, mon parent n’a pas soutenu son caractère jusqu'au bout: il n’en faut accuser que la vieillesse. Depuis deux ou trois ans, il était retombé en enfance: une espèce de cafard apostat de la république s était emparé de lui. Obsédé de toutes parts, il a fini par se confesser, recevoir la communion, en un mot se réconcilier avec l'Eglise. L'esprit prêtre, dans lequel il avait été élevé, et que le déisme robespierriste n'avait fait qu’en- retenir, lui est revenu. Je le regrette, mais l'Eglise a recueilli là un pauvre trophée. » Le vieux Proudhon était aisé ; il m'avait témoigné de lami- tié, et je la luirendais. Mais sa mort ne me laisse pas un sen- timent aussi profond que celle de mon frère. Je n’ai pas servi les miens comme je l’aurais fait si, après 1848, la réaction avait été moins âpre et moins longue. A présent, je ne puis pius reculer, pas même pour mes filles, et je ne le ferai pas » Allons, en avant, et vengeance, dût-elle ne venir que cent ans après ma mort ! » LES PIÈCES D'HONNEUR DES CO-GOUVERNEURS DE BESANCON (XVI-XVIII SIÈCLES) Par M. Jules GAUTHIER ARCHIVISTE DU DÉPARTEMENT DE LA COTE-D'OR Séance du 26 mars 1904. Un diplôme de Charles-Quint, daté de Tolède, le 8 mai1534, concéda à la ville impériale de Besançon Île droit de battre monnaie pour récompenser son dévouement et sa fidélité à l’Empire, sa constance dans la foi, son mépris des sectes nou- velles, particulièrement celle de Luther. (1) Jusques alors, à trois époques différentes, la cité avait vu fonctionner divers ateliers monétaires. Les Mérovingiens y avaient frappé des friens d’or, les Carolingiens des deniers d'argent ; enfin les archevêques de Besançon, en vertu d’un diplôme de Charles le Chauve, du 18 novembre 870, y avaient créé au xIe siècle la monnaie estevenante, qui eut cours Jus- qu’au xve siècle sur les deux rives de la Saône, mais surtout et presque exclusivement au Comté de Bourgogne, c’est-à- dire dans leur diocèse. Le diplôme de 1534, concédé malgré ces archevêques et contrairement à leurs privilèges, était une mesure politique en — (1) PLANTET et JEANNEZ, Essai sur les monnaies du Comté de Bour- gogne, 1855, 277, — 159 — destinée à fortifier Besançon contre les idées nouvelles et à lui procurer les ressources nécessaires pour devenir, à la frontière ouest de l’Empire, un boulevard de la Chrétienté. L'hôtel des monnaies ne fut organisé et ne fonctionna qu’en 1537: un général, deux maîtres, deux gardes, un essayeur, un tailleur ou graveur des coins, tel fut au début son person- nel, modifié depuis par la suppression de l’emploi de géné- ral, exercé dès lors par le corps de ville. () Le type des monnaies fut ainsi réglé: au droit la tête de l’empereur, au revers les armes et le nom de la cité avec le millaire, et chose étonnante, il ne varia plus, sauf quelques différences de module, de métal ou de décor; de 1537 à la conquête française, c’est-à-dire durant cent trente-sept ans, la tête de Charles-Quint eut les honneurs du balancier mu- nicipal. Des marchés de neuf, six, trois ans, quelquefois de moins encore, étaient passés pour la fabrication des monnaies ; les initiateurs du monnavage furent deux Piémontais, Jean Bear et Bertin Varambert, de Chieri (qui firent d’ailleurs dans la cité souche d'honnèêtes gens, élevés plus tard aux honneurs municipaux et même nobilhaires), les autres officiers furent immédiatement et dorénavant prélevés sur le personnel, nombreux alors, des orfèvres bisontins Le premier graveur institué fut Pierre Du Chemin, qui grava certainement les espèces émises en 1537, mais on découvrit tardivement qu’il était lié aux sectes calviniste ou luthérienne et qu'il s'était occupé de faire imprimer à Genève des bibles françaises ; on le poursuivit ; il s’échappa en 1538, et l’on eut grand’peine à recouvrer auprès de sa femme les coins des monnaies ; (2) son successeur fut Godefroy Flamand. En réglant la fabrication des monnaies, en novembre 1537, les cosouverneurs avaient décidé que les entrepreneurs de la fabrication offriraient chaque année aux Quatorze et à leur (1) Délibérations municipales de Besançon,3-15 novembre 1537 (BB,19). (2) Délibération du 1% juillet, 1538 (BB, 20). — 160 — président une pièce d'honneur en argent fin, pesant 2 onces, la première pièce d'honneur devant être livrée le 18° mai 1538 : il n’est pas resté de trace de cette pièce, peut-être à cause du départ du graveur huguenot, mais nous avons celle de 1547 qui doit être conforme au prototype aujourd’hui disparu. Le buste en profil de l’empereur, couronné et cuirassé à l’an- tique, est d’un faible relief, la légende et l’écusson munici- pal du revers sont mieux traités. Quant à l’auteur de la pièce de 1547, ce ne peut être, au vu des monnaies sorties de son burin, que le graveur Godefroy Flamand, un orfèvre au tailla les coins à Besançon de 1538 à 1570. (1) En 1564, un second type de pièces d'honneur à l'effigie de Ferdinand [° apparaît, gravé sans doute en 1556 à l’avène- ment de ce prince à l’Empire. La facture en est meilleure et plus ferme que celle de la pièce de Charles-Quint ; le médail- leur novice qu'était au début Godefroy Flamand s’est façonné ou s’est inspiré d'un meilleur modèle : expression de la phy- sionomie, détail des rides, de la barbe, de la chevelure et de l’armure que porte l’empereur sont assez habilement rendus. Mais dans le revers, l’habileté du graveur aux prises avec de simples ornements, comme dans son métier habituel d’orfè- vre, s’est donné libre carrière, en groupant dans une élégante composition les armes d’'Embpire, les armoiries de Besançon, les sept écussons des sept quartiers de la cité. Au centre, l'aigle à deux têtes, emprisonnée dans les contours d’un blason, porte en cœur l’écu municipal; au-dessus, la cou- ronne impériale est sommée du mot VESONTIO, et les sept (4) « Item peira ledict maistre auxdictz sieurs gouverneurs, pour le droict de général, à chascun desdictz gouverneurs, chaseun an, le premier jour du mois de may, tant que ladicte monnoye baptra, une pièce d'argent fin, pe- sant deux oncez, que seront marquez de tel coing qu'il plaira auxdictz sieurs gouverneurs... (à partir du 4er mai 1538)... et fourniront lesdits sieurs le coing desdictes pièces. » Délib. du 5 novembre 1537 (BB, 29). V. A. Cas- tan, Not. sur Briot (Mém. de la Soc. d’'Em. du Doubs, 1878. 118). Le mai- tre de la monnaie fournissait à ses frais les pièces des Quatorze, la ville celles des Vingt-Huit et du président, 1587 (Arch mun.. lay. 89). — 161 — bannières avec leur variété de pièces et de décor sont frater- ternellement reliées par des entrelacs, agrémentés de têtes barbues autour d'une banderole centrale circulaire sur laquelle on lit: PLEVT A DIEV, la devise municipale. En 1579, le graveur Flamand est mort, (1) et l’on doit assi- gner à son successeur Charles d'Argent, orfèvre habile, sinon le revers de la pièce d'honneur qui n’est autre que celui de 1564, avec la surcharge d’une date, du moins le type d’un nouvel empereur, Rodolphe IT, élu en 1564. Le nouveau coin a les inconvénients de tout portrait exécuté autrement que d’après l'original, il est faible et sans relief; on trouverait certainement dans les recueils ou les collections de numis- matique allemande, ou peut-être dans les portraits gravés de l'empereur Rodolphe, le prototype dont Charles d'Argent a tiré sa médaille, Il suffit de confronter le type impérial de 1579 avec celui de 1586 pour attribuer la paternité de ce dernier à Charles d'Argent : il n’est du reste qu'une réduction de la pièce d’hon- neur de 1579, et nous savons par des textes positifs que Charles d'Argent était graveur de la monnaie de Besançon longtemps encore après 1586. (2) Mais le revers, tout en étant inspiré et réduit, à vue du revers gravé jadis par Godefroy Flamand, ne manque pas d'originalité. Au centre l’écu de Besançon s’est développé, expulsant l'aigle impériale, tout en gardant pour cimier la couronne d’'Empire et la devise : PLEVT A DIEV. Mais les sept écussons des bannières, séparés par des têtes Renaissance, à draperie, en forme de mentonnières sont spirituellement traités et constituent un élégant décor, Sur la pièce d'honneur de 1601, nouveau type à l’avers et (1) Sa veuve Jeanne Agnus réglail compte avec l'Hôtel de Ville en 1574- 1575 (Arch. mun., layette. 89). É (2) En 1587, la: ville paye x11 fr. pour façon de la pièce d'honneur à Charles d'Argent (Arch. mun., layette 89), 11 en au revers, tous deux en fort rélief. La tête de l’empéreur Rodolphe IT (c'est toujours lui qui règne) émerge vigoureuse, toujours tournée à droite. Charles d'Argent vieilli aurait-il emprunté un burin plus jeune, ou aurait-il par un adroit sur- moulage préparé, pour être fondu dans le sable, son type direct obtenu d'Allemagne? Avec une certaine hésitation pour l'effigie elle-même, nous n’hésitons nullement à reconnaître dans le revers de 1601, contenant simplement l’écu munici- pal, sans ornement accessoire, sinon la devise récemment créée de DEO ET CESARI FIDELIS PERPETVO, le travail du Bi- sontin Charles d'Argent. En 1614, pour créer une pièce d’honneur à la ressem- blance de l’empereur Mathias (élu en 1612, on s’adressa à Montbéliard, à François Briot, l’auteur, d’après Castan, de la délicieuse aiguière et des plats d’étain si merveilleux qui l’accompagnent dans les collections du musée de Cluny (1). Le coin de cette pièce utilisé en 1615 et sans doute jusqu’à la mort de Mathias en 1619, n’a laissé aucune trace, aucun produit connu ; il nous en reste probablement le revers dans le Vesontio de Jean-Jacques Chifflet publié en 1618, dont nous extrairons ce passage, en le traduisant : « Quand l’ad- ministration d’une année a fait approuver sa gestion, 1l est d'usage à Besançon que les Quartorze et même les Vingt- Huit reçoivent sur la caisse publique des pièces d’argent dites d'Honneur, les unes pesant deux onces, les autres le double. Ges pièces d'honneur portent d’un côté le visage de l’empereur régnant, de l’autre les armoiries de l’Empire ro- main, de Besançon, et des sept quartiers, groupés comme on le verra dans notre planche (2) ». - (4) Les origines monthéliardaises de Nicolas et de François Briot par A. CASTAN (Mémoires de la Société d'Emulation du Doubs, 1879, 114). — Ce travail, sur un point du moins, l’origine montbéliardaise des Briot, a été réfuté par M. A. TuETEY, dans une autre étude, très documentée, parue en 1880. (2) J.-J. CHIFFLET, Vesontio, 1618, pars I, 112. — 163 — Or, la planche gravée sur cuivre par Pierre de Loisy, le Vieux, en 1618, porte un revers analogue au revers de 1564 et de 1579, mais en différant par la suppression de certains détails, têtes barbues Renaissance, etc. La médaille affecte un module de 52 millimètres, il y a lieu de supposer que Jean-Jacques Chifflet a fait reproduire le type en usage au moment où parut son livre, c’est-à-dire le type gravé par Nicolas Briot à Montbéliard. Quand Ferdinand IT eut succédé à l’empereur Mathias, la monnaie de Besançon produisit une nouvelle pièce d’hon- neur dont l’effigie a beaucoup de caractère, tout en trahis- sant dans mainte partie l’inexpérience de son auteur ; le buste de Ferdinand, encadré dans une collerette droite et plissée et emprisonné par en bas dans une armure sur la- quelle flotte une écharpe et pend la Toison d’or, supporte une mâle figure, couronnée de lauriers. Pas de signature, pas plus que de date, ni au droit ni au revers, inspiré (mais non copié) par les revers de 1564, 1579, 1586. Ce revers ne manque pas de saveur. L'auteur de cette pièce, une des plus curieuses de celles que nous étudions ici, en a donné une réduction, dont le module tombe de 52 mm. à 34; le motif de cette réduction était de multiplier à moins de frais, en cuivre, en argent, même en or, le type de la pièce d'honneur dédiée à Ferdi- nand If. Mais en émettant cette pièce réduite, le graveur la signée, 1l l’avait même primitivement datée, sans doute de 1619 ou 1620, et a retranché de son trousseau les deux der- niers chiffres en laissant très visibles, même sans loupe, les initiales C. P. Ces initiales correspondent avec le nom du graveur de la monnaie bisontine en 1620-1655 Claude Poux ou Poulx, de Besançon, voilà donc l’auteur de la pièce d’hon- neur de Ferdinand IT retrouvé sans le moindre doute. Au milieu des guerres de 1632 à 1643, le monnayage fonc- tionna toujours, mais il est permis de croire que, la pauvreté étant à son, comble, l'émission des pièces d'honneur ne se — 164 — fit pas avec une parfaite régularité, le pain devant passer avant le luxe ! On renonça momentanément à la confection des pièces de grand module et une décision du 12 mai 1640 porta que dé- sormais les pièces d'honneur remises aux gouverneurs se- raient en or (1). C'était la conséquence logique de cette fabri- cation en trois métaux, dont deux précieux, appliquée aux petites médailles ou jetons de Ferdinand IT; Claude Poux grava dans le même module la petite médaille de Ferdi- nand IT, d’une exécution peut-être un peu plus lâchée et moins artistique. La physionomie du nouvel empereur est moins guerrière et la collerette en point de Flandre, qui re- couvre en partie son armure, nuit au caractère du buste, au moins autant que l’absence relative de relief. Quant au re- vers : l'aigle d'Embpire à deux têtes, l'aigle de Besançon à deux colonnes et les sept quartiers de la cité, c’est une réé- dition du revers de Ferdinand [T, faite avec un nouveau coin, certaines variantes l’attestent. Ferdinand IT[ mourut en 1657. Claude Poux avait cessé, le 12 avril 1655, d'être graveur de la Monnaie, Pierre de Loisy le Jeune le remplaçait, plus habile à tirer d’une planche de cuivre de jolies estampes ou à modeler au repoussé de fines enseignes de confrérie ou des lampes d’ar- gent pour les sanctuaires. On lui doit la pièce d'honneur de Léopold Ier, élu en 1658. L’avers représente une tête laurée, presque imberbe ; les épaules sont drapées dans une écharpe voilant à demi une cuirasse, le relief est faible, l'exécution un peu molle, la lé- gende médiocrement équilibrée. Quant au revers, c'est le produit du dernier coin ciselé par Claude Poux. En 1664-1665, Pierre de Loisy grave les pièces de circons- lance créées pour célébrer la réunion de Besançon à la (1) Délibérations municipales de Besancon, BB, 76. sr À ©) — 165 — Franche-Comté, c'est-à-dire au royaume d’Espagne, par échange avec Frankenthal. La pièce principale est une effigie de Philippe Ier, plus vigoureuse et plus colorée que la plate médaille de l'empereur Léopold Son revers, représentant une vue cavalière de Besançon, avec la boucle du Doubs et la montagne de Saint-Etienne, est une heureuse création. En 1668, Charles Labet fait l'effigie du roi et les pièces de la Saint-Jean (1), Il avait succédé dès 1667 au graveur Pierre de Loisy. En 1671, ce fut Labet qui burina une dernière figure, celle de Charles IT, ce petit roi d'Espagne aux longs cheveux, aux veux ronds et perçants, comme tous les infants que peignit Velasquez ; la figure n’est point mauvaise, malgré sa petite dimension (2). Ce fut, sous le régime de l’autonomie franc-comtoise, la dernière pièce d'honneur que se distribuèrent les co-gou- verneurs de Besançon. En 1674, le monnayage municipal disparaissait avec la plupart des franchises et privilèges, dont le cours des âges avait rendu les Bisontins si fiers. Une Monnaie royale reprit dès 1679 la suite de la fabrication de l'Hôtel des Monnaies de la cité et se prolongea à l'Hôtel de Ville, à quelques chômages près, jusqu'à sa suppression finale, par édit du 31 mars 1772 (3). Sous le régime de la conquête française, les cogouver- neurs avaient cessé d’être élus et étaient remplacés par une municipalité nommée ; il n'était plus question de pièces d'honneur, et les membres de la municipalité rece- _ (L) On doit à Charles Labet une gravure représentant Antoine-Pierre [er de Grammont, montrant le Saint Suaire (v. nos Notes iconographiques sur le Saint-Suaire de Besançon, 188? Arch. mun. de Besançon, layette 90). (2) Jean Laude, taillandier, fait deux trousseaux pour les pièces d’hon- neur, à 2 francs l’un et donne quittance le 14 juin 1671 (Arch. munic. lavette 90). _ (3) Recueil des édits de Franche-Comté, publié par le conseiller Droz; Notes sur l'histoire municip. de Besançon, par feu A. CaAsrTAN, 367. — 166 — vaient en échange une gratification annuelle äe 6 livres. Le 21 décembre 1738, par un retour à l’ancien usage, le Corps de ville décida que chacun de ses membres, outre le secré- taire, recevrait désormais, le 1e janvier de chaque année, une médaille d'argent du poids de quatre onces, portant d’un côté l'effigie du roi, et de l’autre les armoiries de la cité La réalisation de cette délibération eut lieu dans le cours de 1739, ce fut le millésime inscrit sur la première émission de pièces d'honneur à l'effigie de Louis XV : un buste assez grossier, exécuté sans doute par le graveur de la Monnaie, représentant le roi avec de longs cheveux rat- tachés par un ruban, le visage d’un enfant, un habit brodé et le grand cordon des Ordres. Au revers, un cartouche rocaille, renfermant les armes de la cité avec la légende : VESONTIO CIVITAS REGIA et la date. Le type de cette pièce d'honneur était encore en usage en 1751. I ne fut plus re- nouvelé, et l'usage de semblables distributions était complè- tement tombé quand survint la Révolution française (1). Pour faire honneur à des personnages qualifiés dont la ville avait reçu ou espérait quelques services, pour distri- buer à quelque concitoven ou à quelque société locale, une récompense ou des prix, Besançon fit confectionner au XVIIe siècle un certain nombre de Jetons ou médailles d’ar- gent ou d’or devenus fort rares, et dont il est uüle de faire mention. Signalons entre autres une médaille du prix des Arts, en or, accordée annuellement à l’Académie de fe- sançon, dès 1753 @), un jeton d'argent frappé pour le maré- chal, duc de Lorges, et sa femme, Elisabeth-Philippine de (1) En 1772, l’Intendant de Franche-Comté avait supprimé toutes les allocations que s’attribuaient les membres du corps municipal de Be- sancon (29 décembre, Délibérat. municip , BB, 189). Le 2 janvier 1759, 21 médailles de 4 onces sont distribuées, BB, 172. (2) Cette médaille dont le coin est conservé à la Monnaie de Paris, per- tait d'un côté les armes de la ville, de l’autre cette légende: PREMIVMN AR- TIVM IN ACADEMIA VESONTINA. — 167 — Poitiers, en 1768 (1), une médaille d'argent accordée en 1789 à un jeune philanthrope (2). Mais une série qui se rattache plus directement à nos pièces d'honneur est la série considérable des jetons de bannières et de jetons de cogouverneurs, frappée parallèlement aux jetons de compte de Besançon, de 1693 à 1671. Des jetons de compte, en cuivre ou laiton, rarement en argent, qui fu- rent gravés et frappés par l'Hôtel de Ville de Besançon, de 1541 à 1671, nous nous bornerons à dire que dans la variété des 13 types connus, trois souverains sont représentés par leur effigie, leurs armes, leurs titres: Charles-Quint (1541- 1592), Ferdinand II (1626-1630) et Charles IT, roi d’Espagne (1671). Les jetons de bannières et de cogouverneurs, tout à fait connexes à notre série de pièces d'honneur, méritent une plus longue mention. Ils furent inaugurés en 1693 et incisés ou gravés de 1623 à 1648, par Claude Poux, l’artiste émérite dont nous avons plusieurs fois déjà prononcé le nom et si- gnalé les œuvres, particulièrement les belles pièces d'honneur de Ferdinand If. Après avoir groupé les sept bannières dans un revers, Où il réunissait comme en une synthèse les sept quartiers de Besançon, la cité, l'Empire, caractérisée par une réunion d’armoiries, Claude Poux établit une série de jetons pour chacune des sept bannières dont la réunion formait la cité. Dans une couronne d’olivier ou de laurier, il plaça successivement l’aigle de Saint-Quentin, la clé de Saint- Pierre, le griffon ailé du Bourg, la clé et les croissants de Chamars, le coupé de Battant, la croix fleurdelisée de Char- mont, le lion d’Arènes. Comme revers, il imagina de donner (1) V. la description de ce jeton sous le n° 16 de l'Annexe. (2) Ce jeune homme nommé Marie-Simon Dubet, élève de quatrième, avait offert à la caisse des subsistances locales, en 1789, 60 francs, fruit de ses économies., La médaille d'argent qui lui fut donnée portait d’un côté les armes de la ville: VESONTIO CIVITAS ; au revers dans une couronne de chêne : PREMATVRÆ VIRTVTIS CIVICÆ PRAÆMIVN — 168 — à ces emblèmes, en 1693 et 1695, les armoiries de la ville‘en- serrées dans un écu découpé à l’allemande : en 1624, un buste de Charles-Quint. La légende resta constante: GETZ DES COMPTES POVR BESANÇON. Et de la sorte, chacun des sept quartiers représentés an Conseil par quatre notables, dont deux gouverneurs, prit une personnalité, grâce à ces jetons, et la vanité aidant, les cogouverneurs eux-mêmes voulurent en faire autant. L'Hôtel de Ville les autorisa à en faire graver, à leurs frais, bien entendu, en inscrivant d’un côté leurs ar- moiries personnelles, avec des devises soit traditionnelles, soit composées pour la circonstance, en donnant comme re- vers commun à ce coin des gouverneurs d’une même année les armes de la cité, ou quelquefois ces armes mêmes enri- chies en cœur des armes d'Autriche ou d’Espagne. Et de la sorte se conistitua tout un ensemble de jetons intéressant 57 familles patriciennes de Besançon, dont 106 gravés par Claude Poux, de 1693 à 1648, 90 gravés par Pierre de Loisy et Claude Labet, de 1665 à 1671, qui forment, par leur grande rareté, un trésor fort appréciable pour l’histoire numismatique de la ville impériale. En 1690, Claude-Joseph de Loisy, le descendant d’un des graveurs qui avaient multiplié les jetons armoriés des gou- verneurs, imagina pour le nouveau Corps municipal nommé et non pius élu qui se composait d’un vicomte-maïeur, de 3 échevins, 16 conseillers et un secrétaire, une grande réno- vation des jetons annuels, sous la forme d’une grande gra- vure que nous décrirons rapidement. (1) Une aigle éployée (Besançon) portant en cœur l'écu de de France, avec Ordres et couronne, et tenant au bec une banderole avec le mot VrINAM deux fois répété, porte dans ses serres deux colonnes transforméés en pilastres, pour re- (1) Cette gravure de 1690 et 4planches sur cuivre additionnelles sont conservées à la Bibliothèque publique de Besançon. — Cf. sur les Loisy, notre étude publiée dans le Congrès des Beaux-Arts de 1892. AGO — cevoir chacune dix armoiries. Au bas, un 21° écu, celui du secrétaire, à droite, à gauche, en bas, dans des ovales, les écussons des sept bannières. Ajoutons que chaque écu, aussi bien des 21 membres du magistrat que des 7 bannières, est surmonté d’une banderole avec les noms des uns et des au- tres Par le nom du vicomte-maïeur, M. Philippe, cette gra- vure est datée de 1690. Pour les années suivantes, afin d'uti- liser la gravure de 1690 par des reports, Claude-Joseph de Loisy avait gravé de nouveaux pilastres portant naturelle- ment les noms de nouveaux conseillers de ville ; l'usage ne tint pas. Nous arrêterons 1c1 cette étude sur les pièces d'honneur et jetons des cogouverneurs de Besançon, en exprimant un vœu que l’avenir réalisera certainement, sinon pour nous, au moins pour d’autres : Sur 6.000 pièces d'honneur proprement dites, et plus encore, en 6r ou en argent, qui sont sorties de la Monnaie de Besançon, de 1547 à 1673, et de 1739 à 1779, nous n’en connaissons guère qu'une vingtaine, soit en tout 12 tvpes différents. En tenant compte de la destruction fatale de l’immense majorité des pièces en métal précieux, il est certain qu'en mainte collection publique ou privée de France ou d'Europe ont été recueillies un certain nombre au moins d'autres épaves similaires. (D) La nomenclature que nous joi- gnons à cette étude, les planches et reproductions qui l’ac- compagnent permettront quelque jour de repérer et de rapa- (1) Les pièces d'honneur frappées à Besançon avaient fait école dans Ja province de Franche-Comté dès le xvie siècle. À Dole, dès 1589, on conver- tit en médaille les âges du magistrat (Délib. municip. de Dole 1589, 15 Janvier et 11 juin 1591). En 1622, le 4 janvier et le 4 septembre, sur la pro- position du maïeur, on prend la délibération suivante : (Fut résolu que se- ront faittes des médailles d'argent esquelles sera insculpée l'effigie du rov nostre souverain d’un côté el les armes de la ville d'autre, et pour ce faire seront employés les gages de deux ans » (Délib. municip. de Dole, 16°2). À Lons-le-Saunier, en 1710, des médailles d'honneur sont décernées aux maires, échevins et conseillers, lorsqu'ils quittent lexrs fonctions (ROUSSET, Dict. du Jura III, 548). À Orgelet, en 1713, le corps de ville fait frapper une pièce d'honneur signalée par Chabouillet, mais que nous devons dé- ci trier ensuite, car c’est le but final auquel doivent tendre toutes nos recherches, ces précieux souvenirs de l’ancien monnayage de la vieille et petite République de Besançon. crire : Médaille ronde, de 56 mm , bordée de filets. Dr. Buste de Louis X VI. cuirassé et en perruque, tourné à droite: LVDOVICVS MAGNVS FRAN ET NAV REX PP. — Rev. Dans un cartouche ovale sommé d’une couronne com- tale trois épis d’orge (Orgelet: : ORGELET 1718 (Cabinet des médailles. B.N. — Nous signalerons encore sans les faire entrer dans la même catégorie, les médailles distribuées aux pauvres d’Arbois, comme autorisation de men- dier, en 1709 (elles étaient frappées aux armes de la ville). [Bousson pr MaiRET, Annales d’Arbois, 452.] — 171 — DESCRIPTION DES PIÈCES D'HONNEUR ET DES JETONS AUX ARMES DES BANNIÈRES ÉMIS PAR LA CITÉ DE BESANÇON DE 1547 A 1768 Pièces d'honneur 1. — 1547. Charles-Quint. — Méd. argent, ronde de 47 mm., _ bordée d’un filet. Dr. Buste tourné à droite, l’empereur, couronne en tête, re- vêtu d’une cuirasse à l’antique. CAROLYS : V : IMPERATOR. Rev. Dans un écu à l’allemande, une aigle éployée tenant deux colonnes appuyées sur ses serres étendues; sur les flancs une date : 15 47. Hh DEO : ET : CESARI : FIDELIS : PERPETVO : (Cab. des médailles, B. N., publ. par CHABOUILLET dans le Trésor de numismatique et de glyptique, médailles allemandes, pl. XXI, 7 (texte p. 39). 2. — 1564. Ferdinand I. — Méd. argent, ronde, de 52 mm., bordée d’un grènetis. Dr. Buste cuirassé, tourné à droite, tête coiffée de longs che- veux, front dégarni et ridé, barbe courte. HX DEO . ET. CES . FIDEL . PERPET . 1564 Rev. Au centre, dans un écu sommé de la couronne impé- riale, l'aigle à deux têtes portant en cœur les armes de Be- sançon. Au-dessus : VESO NTIO. Sur une banderole presque circulaire entourant l’écu, la devise : PLEVT : À : DIEV. Autour, les pointes des écus convergeant vers le centre, sept écussons po armoriés des sept quartiers de Besançon, disposés dans l’ordre suivant : Saint-Quentin, Saint-Pierre, Chamars, le Bourg, Bat- tant, Charmont, Arènes, et reliés par des lacs et des mufles de lions. (Cab. des médailles, B. N.; publ. par CHABOUILLET dans le Trésor de numismatique et de glyptique, méd. allem., pl. XXII, 12 ; texte, p. 43-44.) 3. — 1579. Rodolphe II. — Méd. argent, ronde, de 52 mm., bordée d’un grènetis. Dr. Buste cuirassé, tourné à droite, tête laurée, barbe courte 4 RVDOLPHVS.II.D.G.RO.IMP.AV.GE.ET.BO.REX Rev. Même que le précédent, avec adjonction en haut de la date 1579. (Gab. des médailles, B. N.) 4. — 1586. Rodolphe IT. — Méd. argent, ronde, de 43 mm., bordée d’un filet. Dr. Buste cuirassé, tête laurée, réduction du type précédent. 4 RVDOLPHYS : II : D : G : RO IMP : GE : ET : BO : REX (entre 2 filets) Rev. Au centre, dans un écu découpé à lallemande, les armes de Besançon, au-dessus la couronne impériale surmontée de la devise : PLEVT A DIEV; autour les sept bannières liées par des rubans et séparées par des têtes barbues (Une seule modifica- tion est la suppression dans l’écu de la bannière d’Arènes des deux coquilles mises en chef, qui rappelaient la chapelle de Saint-Jacques d’Arènes). : (GCabinel des médailles, B. N., et Bibl. publ. de Besançon.) 9. —— 1601. Rodolphe II. — Méd. argent doré, ronde, de 90 mm. (poids 55 gr.), bordée d’un filet. Dr. Buste cuirassé à l’antique, tourné vers la droite, sur lPé- paule un mufle, sur la poitrine la Toison d'Or; tête chevelue et barbue, non laurée. — 173 — —- RVDOLPHNVS . II. D.G.RO IMP.GE.ET . BO : REX (entre 2 filets). Rev. Dans un écu découpé à l’allemande, les armes de Be- sançon. Hh DEO : ET : CESARI : FIDELIS : PERPETVO : (entre filets). (Musée archéologique de Besançon.) 6. — 1619-1637, Ferdinand II. — Mëd. argent, ronde, de 52 mm., bordée de baguettes perlées. Dr. Buste cuirassé, avec écharpe et Toison d’Or, tourné à droite ; tète laurée, moustache royale, ample collerette fraisée BERDINANDMNS IT". D. G. RO". IMP .S,. A .'GER . HVN : ET. BOH. REX Rev. Au centre, l’aigle à deux têtes, chargée en cœur de l’aigle aux deux colonnes, armoiries de Besançon. Au-dessus, couronne impériale avec ce mot: vESONTIO. Autour: entre deux baguettes perlées, les armoiries des sept bannières dis- posées comme celle des nos 2, 3 et 4, mais séparées par des fleurons réunis en bouquets. (Gabinet des médailles, B. N.) 1, — 1619-1637. — Médaille ronde ou jeton, or où cuivre rouge, 34 mm., réduction de la précédente, bordée d’un grè- netis. Dr. Buste cuirassé, avec collerette, collier de la Toison d’Or et écharpe, tourné à droite ; tête laurée et barbue. FERDINANDO .II.D.G.RO.IMP.S. A. ETC. Sous le buste : 16..C.P. [Claude Poux], graveur. Rev. Aigle d Empire, portant en cœur les armes de Besançon, couronne impériale : VESO NTIO, aïmes des sept bannières, réduction du type précédent. (Goll. particulière de J. Gauthier.) 8. — 1037:1657. — Médaille ronde ou jeton, or ou cuivre rouge, 32 mm., bordée d’un grènetis. A ee Dr. Buste cuirassé, avec collerette en dentelle rabattue, col- lier de la Toison d'Or et écharpe tourné à droite ; tête laurée. moustache et royale. FERDINANDO III. D.G.RO.IMP.S.A.ET [Claude Poux], graveur. Rev. Identique au précédent, sauf que le mot VESON TI0 est ainsi sectionné et que l’écu de la bannière de Battant porte dans la partie inférieure un rinceau, pour différencier le second canton d’un coupé. (Coll. particulière de J. Gauthier.) 9. — 1658-1705. Léopold I. — Médaille ronde ou jeton, or ou cuivr. rouge, 32 mm., bordée d’un grènetis. Dr. Buste cuirassé à l’antique, avec écharpe ; tête à longs cheveux, laurée et imberbe, tournée à droite. LEOPOLD9Y.1.D.G.IMP.S.A.ET (entre deux grènetis). [Pierre de Loisy|, graveur. Rev. Même que le précédent. (Coll. particulière de J. Gauthier.) 10 — 1664. Philippe IV. — Jeton d'argent, 28 mm., bordé d’un grènetis. Dr. Buste cuirassé à l’antique, avec écharpe et Toison d'Or, tourné à gauche, cheveux longs, moustache et royale. PHILIPPVS IV.REX HISPANIARVM Rev. Vue cavalière de Besançon, avec la boucle du Doubs et la montagne Saint-Étienne. th MAGNO.SVB.REGE. LIBERA. VESONTIO [Pierre de Loisy|, graveur. (Coll. particulière de J. Gauthier.) 11.— 1664. Médaille ronde ou jeton d’or, d'argent et de bronze, 28 mm., bordée d’un grènetis. Dr. Tête de Philippe IV avec légende (même que le numéro précédent). | Rev. Chronographe inscrit sur trois lignes, entre deux groupes de rinceaux. BISVN-TINORVM DELICIÆ [MDCLxI (Bibl. publique de Besançon.) 12. — 1665. Jeton d’or, d’argent, de cuivre, 28 mm, bordé d’un grènetis. Dr. Un lion debout (l'Espagne) tient un écu : armoiries de Besançon, qu'un aigle planant (l'Empire) laisse tomber, dans ses griffes, allusion à l'échange de Besançon contre Frankenthal. X LIBERA VTRIMQVE Rev. Sur une borne, trois têtes adossées (allusion aux trois Corps municipaux), 1665. %X CONSVLTORVM %*% SOLIDITAS (Goll. du comte Mareschal de Vezet, Bibl. et Musée de Be- _sançon.) 43: — 1665. Jeton de cuivre ou laiton, 28 mm., bordé d’un grènetis. Dr. Deux tours (à gauche celle de Castille, à droite celle des armoiries de M. de Castel-Rodrigo, négociateur de la réunion de Besançon à l'Espagne), au-dessus les armoiries de Besançon. & SECVRITAS . CIVITATIS Rev. Armoiries diverses des co-gouverneurs bisontins pour l’année 1665. (Coll. particulière de J. Gauthier.) 14, — 1671. Charles II. — Jeton d'argent ou de cuivre rouge, 28 mm., bordé de grènetis. . Dr. Buste drapé, avec la Toison d'Or, figure d’enfant avec très longs cheveux, tourné vers la droite. — 176 — .1671 . CAROLVS . IT. HISP . REX Rev. Aigle éployée de Besançon, tenant dans ses serres les deux colonnes. VESONTIO . CIV. REG . LIB. (Goil. particul. de J. Gauthier, Bibl. et Musée de Besançon.) 45. — 1750. Louis XV. — Médaille d'argent ou cuivre ar- genté, ronde, de 71 mm., bordée. Dr. Buste vêtu d’un habit brodé, jabot et grand cordon des Ordres, tête couverte d’une chevelure bouclée, rattachée sur le cou par un ruban ; figure imberbhe. UD XVI ER INA REX Rev. Dans un cartouche rocaille, les armes de Besançon. VESONTIO . CIVITAS . REGIA . 1751 (Cabinet des médailles, B. N. ; Bibl. et Musée de Besançon ; Coll. particul. de M. Roger d'Épenoux, à Besançon.) 46. — 1768. Jeton d'argent offert par la cité au maréchal de Durfort et à sa femme, Élise-Philippine de Poitiers, rond, 29 mm. bordé de grènetis. Dr. Sur un manteau ducal, avec deux bâtons de maréchal en sautoir, deux écus : Durfort de Lorges et Poitiers ; TUTATUR ET ORNAT. Rev. Sur un cartouche de style Louis XV, dans un ovale, les armes de Besançon. Au-dessus, VTINAM ; sur une banderole, à l’exergue : CIVITAS VESONTINA 1768. (Musée et Bibl. de Besançon ; ce dernier établissement con- serve en outre le coin du revers, en acier.) LA PHOTOGRAPHIE DES COULEURS État présent de la Question Par M. MALDINEY PROFESSEUR DE PHYSIQUE A L'ÉCOLE DE MÉDECINE ET DE PHARMACIE DE BESANCON Séance du 16 décembre 1904. MEsDAMKS, MESSIEURS, C’est un précepte banal de la sagesse des nations que «des goûts et des couleurs, point ne faut disputer », ce qui si- gnifie que la couleur est un de ces nombreux sujets sur les- quels les hommes ne s'entendent pas. La couleur est-elle donc chose si rare qu’on n’en puisse rien dire de précis ? Il faudrait n'avoir Jamais vu lever l’aurore pour ignorer de quelles nuances charmantes elle teint ses voiles. Tous, du moins, nous savons dans quelles pourpres éclatantes se couche le soleil, On peut dire de ces visions sans formes arrêtées, comme le ciel ou les nuages, que la couleur est leur seule beauté. Sans la couleur, les pierres précieuses qui brillent des couleurs du saphir, de la topaze et de l’éme- raude, ne sont plus que des cailloux vulgaires. Les eaux de la mer, des fleuves et des rivières, roulent un azur dont nos yeux ne se déshabituent jamais ; dans nos verres, nos bons vins du pays font étinceler les rubis et les grenats. Les fleurs ézayent nos regards de leurs nuances infinies ; la cuirasse, 12 2 liste les ailes des insectes, l’armure des poissons, le plumage des oiseaux éclatent de mille feux qui passent du violet au pourpre, du rouge au bleuâtre, du bleuâtre à tous les tons du vert. Je ne sais si Pascal a raison, ni s’il est vrai que « le nez de Cléopâtre » a changé la face du monde ; mais nous savons. tous, et vous n’ignorez pas, mesdames, que ce sont les roses de votre teint le jaistouvle bleuede vos veulent souvent fixent nos destinées, à nous trop heureux hommes | C’est aussi par la couleur que vous ajoutez à votre beauté : par les soies chatoyantes où vous taillez vos vêtements, par vos bijoux, etc. Et, l’oserai-je dire ? c’est encore à la couleur que vous avez recours pour réparer des ans l’irréparable outrage ! Toutes les passions, tous les états de notre âme, tous les accidents de notre vie intérieure et sentimentale, la couleur les exprime : la peur pâlit notre face, la pudeur rougit le front des jeunes filles, la colère et la rage empourprent les joues des hommes. La couleur enveloppe toutes choses : c'est elle qui fait le plaisir des veux, et pour tout le monde, aveugle qui ne voit plus les couleurs ou la sublime lu- mière est, de tous les hommes, le plus malheureux. Vous voyez quelle place la couleur tient dans l’univers, et quel rôle elle joue dans la vie des mortels ! Aussi la foule de ceux qui se sont intéressés à cette chose légère et charmante est-elle innombrable. Le psychologue, le physiologiste, le physicien, le chimiste, le peintre, l’homme et surtout la femme du monde, et jusqu’au photographe s’en sont occupés. Tous en disent des merveilles depuis des siècles, mais ce n’est guère que de nos jours qu’on s'est attaché à donner une théorie scientifique et complète des couleurs. Et, malgré des expériences très ingénieuses, malgré d’admirables découvertes, le dernier mot n’est pas encore dit. En vous parlant de la couleur ou des couleurs au point de # — vue du physicien et du chimiste, je serais entrainé trop loin et je sortirais peut-être de la question que la Société d'Emu- lation du Doubs a bien voulu me faire l’honneur de vous exposer dans cette courte séance : LA REPRODUCTION PHOTOGRAPHIQUE DES COULEURS OU PHOTOCHROMIE. Le problème de la photographie des couleurs est un de ceux qui, depuis l’origine de la photographie ont le plus cap- tivé l’attention des savants et des chercheurs. Il n’est pas un photographe qui, en voyant l’image produite sur la glace dépolie d’une chambre noire, n’ait regretté de ne pouvoir la fixer ainsi avec ses couleurs réelles, avec sa variété de tons et sa richesse des nuances, que nul pinceau n’a jamais égalées. Le problème présente d'autant plus d'intérêt que la pho- tographie ordinaire, non seulement ne rend pas les couleurs elles-mêmes, mais encore ne donne pas des tons noirs dont l'intensité soit en proportion avec l’action des diverses cou- leurs sur l’œil. Ainsi, le bleu, qui est une couleur foncée _pour l’œil, est une couleur claire sur l'épreuve photogra- phique ; le rouge, qui est, au contraire une couleur claire pour l'œil, vient presque noir dans la photographie ordi- naire. L’addition de certaines substances colorantes aux émul- sions sensibles, a permis d’atténuer ce défaut dans une cer- taine mesure, d’orthochromatiser les plaques ; mais malgré tout, on n’est pas encore parvenu à préparer des plaques présentant pour les diverses couleurs une sensibilité qui soit exactement du même ordre que celle de l'œil. À défaut d’un procédé purement photographique pour obtenir l'image colorée, on a essayé d'obtenir des épreuves en couleurs, par l'application à la main, de couleurs ordi- — 180 — naires sur l'épreuve noire, cette dernière étant simplement destinée à indiquer les contours ou à fournir les demi-teintes. Ces divers procédés (photomimiature, photopeinture, photo- aquarelle, etc.), ont tous l’inconvénient de mettre la colora- tion de lépreuve à la merci du sentiment personnel de l'artiste ; l'image ainsi traitée n’a plus le cachet de rigou- reuse exactitude qui caractérise une œuvre photographique : c'est un tableau où les teintes sont plus ou moins inexactes, et où les contours eux-mêmes sont le plus souvent faussés. Ges procédés imparfaits n’entrant pas dans notre exposé, nous les laisserons donc de côté. Notre intention n’est pas ici de rappeler en détail toutes les tentatives faites en vue de fixer photographiquement les couleurs des objets sur des couches sensibles. Il y aurait un long et intéressant ouvrage tout entier à écrire sur ce sujet. [l est néanmoins impossible de passer sous silence quelques noms illustres qui marquent les étapes de cette difficile carrière. Disons d’abord qu'il v a deux méthodes propres à la re- production des couleurs avec le concours de la photogra- phie : la méthode de photographie directe, par voie chi- mique ou par voie physique, et la méthode de photographie indirecte où procédé trichrôme, photographie à laide de trois couleurs. PROCÉDÉ DIRECT DE PHOTOCHROMIE Voie chimique Déjà, en 1810, Seebeck, professeur à Iéna, avait abordé la question et essayé d’impressionner, à l’aide d’un spectre solaire, un papier recouvert d’une couche de chlorure d’ar- gent. Ses expériences eurent peu de retentissement, et il faut arriver jusqu’en 1839 pour les voir reprises sérieuse- ment par John Herschel et par Edmond Becquerel. | Herschel mit en œuvre non seulement le chlorure d’ar- ai é — 181 — gent, mais encore l'iodure et le bromure du même métal, ainsi que des produits naturels tels que la racime de gaïac. Certaines couleurs semblèrent, bien que passagèrement, se dessiner sur ces papiers sensibles. C’étaient déjà des résul- tats de nature à encourager les chercheurs, étant donné que Pon était alors au début de la Photographie ; mais ces résul- tats furent bien dépassés par ceux d’Edmond Becquerel. En 1848, cet illustre savant (physicien français) réussit, en employant une lame de plaqué d'argent recouverte d’une couche de sous chlorure d'argent violet, à obtenir sur cette couche, impression de toutes les couleurs du spectre solaire. Malheureusement les couleurs ainsi réalisées s’effaçaient si l’on exposait l'épreuve à la lumière. Essavait-on de fixer dans ur bain fixateur quelconque ? toute coloration dispa- raissait. L’impression de toutes les couleurs spectrales était un grand pas fait en avant et qui suffit à placer le nom de Becquerel en tête de toute histoire de la photographie des couleurs. Mais les insuccès au point de vue du fixage, in- succès que n'avaient pu surmonter la science et lhabileté expérimentale de ce grand physicien, étaient l’obstacle aux- quels devaient désormais se heurter tous ceux qui abor- dèrent la photochromie par la voie chimique de la méthode directe. Les essais nombreux de Niepce-Saimt-Victor, de Poitevin, etc., n’ont pu arriver à obteuir la fixation des couleurs. Dans toutes ces expériences faites par voie chimique, on cherchait des substances susceptibles de s’impressionner chromatiquement sous l'influence directe des couleurs cor- respondantes : dans l’état actuel de la science ce problème n'est pas encore résolu. Procédé physique. — Méthode Lippmann Be’ 2 février 1891, M. Gabriel Lippmann, professeur de physique à la Sorbonne, présentait à ses collègues de l’Aca- démie des sciences, la première photographie directe du one spectre solaire avec toutes ses couleurs reproduites et fixées d’une façon inaltérable. C'était un simple morceau de verre sur lequel était venue se peindre la radieuse lumière, la multiple couleur désormais conquise. Et c’est ainsi que comme en un conte de fées, conte dont la fée est la science féconde et bienfaisante, un homme à créé d’une pièce une science nouvelle, tout simplement parce qu'il a su dire : ceci sera, puisque cela doit être ; que la couleur soit et la couleur fut. Disciple de la méthode philosophique, de cette méthode grâce à laquelle Pascal redécouvrit la géométrie, Leverrier révéla sa planète, Lippmann par un simple rai- sonnement que l'expérience vint confirmer, découvrit Ja méthode physique permettant de reproduire et de fixer les couleurs. La science photographique fut ainsi amenée par cette dé- couverte à ajouter une nouvelle gloire à notre domaine in- tellectuel, sans qu'aucune autre nation puisse venir nous objecter un autre inventeur. Cest de plus un triomphe pour la science française, car ce mode de reproduction des couleurs du spectre à l’aide de lames minces formées par des plans d’argent, constitue une matérialisation réalisée par un savant français, de ces ondes lumineuses conçues pour la première fois par le puissant génie d’un autre phy- sicien français des plus illustres, Augustin Fresnel. Donnant un nouvel exemple de ce beau désintéressement scientifique dont nos savants français semblent avoir le noble privilège, M. Lippmann a voulu que tout le monde pûüt s'engager librement et sans contrainte dans la voie qu'il avait ouverte, et, relusant de couvrir par des brevets sa découverte pourtant bien personnelle, il a mis sa méthode de photographie des couleurs dans le domaine public. Aussi, de nombreux travailleurs se sont-ils acharnés à perfec- tionner la méthode interférentielle ou lippmannienne, ap: portant chacun leur pierre à l'édifice dont le savant profes- seur de la Sorbonne avait jeté les invariables fondations. p 9 a 1) == — | La méthode employée par M. Lippmann ne diffère de la méthode de photographie ordinaire qu’en ce que le chassis négatif de l'appareil photographique renferme du mercure contre lequel s’appuie en contact intime, la face albuminée ou gélatinobromurée de Ja plaque sensible. Les rayons lumi- neux, après leur passage dans l’objectif, traversent le verre de la plaque, puis la substance sensible, et, frappant le mer- cure qui est en contact parfait avec elle, se réfléchissent et déterminent dans la couche sensible, d'après le phénomène d'optique physique des interférences, une série de plans al- ternativement lumineux et obscurs. Ces plans, également espacés les uns des autres pour une même couleur simple, sont en plus grand nombre dans le violet que dans le bleu, et diminuent jusqu’au rouge, car le nombre des vibrations lu- mineuses qui produisent la couleur violette est plus grand que pour le bleu, et amsi de suite jusqu’au rouge. Après développement de la plaque, dans tous les plans lumineux formés ainsi à l’intérieur de la couche sensible, nous aurons un plan métallique formé par l'argent réduit, tandis que dans les plans obscurs, le sel sensible non réduit, étant enlevé au fixage par l’hyposulfite, nous aurons des plans transpa- rents d’albumine ou de gélatine qui sépareront entre eux les plans métalliques obtenus. La lumière se réfléchissant sur cette série de lames minces métalliques nous donnera une couleur déterminée par le nombre qu'il se sera formé de ces lames dans la couche sensible, C’est exactement ce qui se passe pour la nacre par exemple, qui est formée d'une série de plans ou lames calcaires séparées par de l’eau ou de Pair. MM. Lumière, de Lyon ont obtenu à l’aide de ce procédé de magnifiques résultats, et nous avons pu admirer, dans une séance analogue à celle d'aujourd'hui, il y a dix ans déjà, les beaux spécimens (paysages, portraits, fleurs, etc.), qu'ils avaient bien voulu mettre gracieusement à notre disposition pour être projetés (Séance publique du 13 dé- cembre 1894). — 184 — En suivant exactement les formules et les manipulations indiquées par MM. Lippmann et Lumière, l'amateur photo- graphe arrivera certainement à des résultats encourageants, et il sera tellement émerveillé de voir les nuances et les couleurs se mettre à leur place sur son cliché, qu’il recom- mencera sans se lasser. On peut objecter à cette méthode qu'il est regrettable de faire une épreuve seulement chaque fois. Nous répondrons : patience, 1l y a 60 ans, on se contentait d’une épreuve da- guerrienne; aujourd'hui, contentons-nous d’une épreuve lippmannienne. Ce procédé, par ses délicatesses de manipulations ne sau- rat encore être classé parmi les méthodes industrielles de copie photographique. Toutefois. il ne faut pas désespérer de l’avenir de la science et de la patience des expérimenta- teurs ; il se peut qu'un simple tour de main suffise pour rendre pratiquement uülisable industriellement dans quel- que temps, cette méthode qui constitue une découverte de physique des plus remarquables de notre époque. Ainsi donc, en résumé, il n’y a pas encore lieu de classer les reproductions directes des couleurs actuellement connues, parmi les procédés courants de photographie industrielle PROCÉDÉ INDIRECT Procédé aux trois couleurs ou procédé trichrome C’est à deux français, Charles Cros et Louis Ducos du Hauron, que revient l'honneur de la découverte de ce pro- cédé indirect de reproduction photographique des couleurs. Sans se connaitre et sans avoir eu la moindre relation, ils eurent presque en même temps la même idée, et, pour sur- croit de curieuses coïncidences, 1ls présentèrent chacun à une même séance de la Société française de photographie (7 mai 1869), l'exposé de leurs deux méthodes, sœurs ju- melles. Des documents qui furent depuis produits dans le — 185 — débat, il résulte que la priorité des recherches et de la dé- couverte revient à Ducos du Hauron. C'est lui surtout qui a poursuivi le développement de la méthode indirecte de pho- tographie des couleurs, et qui a montré quelle pouvait être la fécondité de ses applications à l’industrie. Quels sont les principes qui ont guidé et dicté le choix de trois couleurs dans cette méthode? Permettez moi de vous les résumer rapidement. On montre, en physique, que la lumière blanche n’est pas simple, mais qu'elle est composée d’une multitude de cou- leurs, de nuances, ou comme l’on dit, de radiations simples. L'expérience se fait de la façon suivante : par un trou rond percé dans le volet d’une chambre obscure, laissons péné- ter un rayon de lumière blanche ; en recevant ce rayon sur une feuille de papier blanc, nous v verrons une tache ronde, mn blanche. Si maintenant nous plaçons sur le trajet du rayon lumineux, un prisme de verre triangulaire, la tache blanche, ronde, produite auparavant sur l’écran par le rayon de lu- mière blanche, se trouve remplacée par une bande allongée présentant en une suite de couleurs vives, toutes les nuances de l’arc en ciel ; c'est ce que l’on nomme le spectre solaire et nous avons, dans cette expérience, fait l'analyse de la lumière blanche. Parmi ces couleurs présentées par le spectre solaire, on en distingue sept principales, qui sont, en commençant par celle qui est la plus déviée, le violet, puis l’indigo, le bleu, le vert, le jaune, l’orangé et le rouge. Ces couleurs super- posées l’une à l’autre reproduisent la lumière blanche. On peut même, ramener ces sept couleurs principales, à trois seulement : l’orangé, le vert et le violet Combinées deux à deux, ces trois radiations ou couleurs, permettent de repro- duire toutes les autres: par exemple, l’orangé et le vert, par leur addition, reproduisent le jaune. L’addition des trois radiations, orangé, vert et violet, reproduit le blanc. _ Ces trois radiations : orangé, vert, violet, sont appelées — 186 — par les physiciens, des radiations primaires, parce qu’elles peuvent, en les additionnant entre elles, reproduire toutes les autres. Les chimistes sont des gens plus matériels que les physi- ciens ; les radiations impondérables, impalpables ne sont pas leur fait. Le physicien s'occupe de radiations colorées, le chimiste étudie des couleurs matérielles solides ou liqui- des, des substances colorantes naturelles où artificielles, et qu'il appelle des pigments. Quand la lumière blanche tombe sur ces pigments, une partie de la lumière est réfléchie, tandis qu'uné autre est absorbée par le pigment. Ce papier est blanc parce qu'il envoie toutes les radiations colorées. Un tableau noir vous parait noir parce qu’il les absorbe toutes. Un pigment opaque est jaune parce qu'il réfléchit certaines radiations colorées, l’orangé et le vert dont les impressions s’additionnant sur la rétine de l’œil, donnent la sensation du jaune; le violet est absorbé. Si le pigment est transparent, un verre Juune par exemple, nous dirons qu’il tamise les radiations orangées et vertes (Ge qui donne, par addition, du jaune) et qu’il ab- sorbe ou soustrait les radiations violettes. Un verre rouge nous apparait rouge parce qu'il laisse passer les radiations orangées et violettes (ce qui donne du rouge par addition) et absorbe les radiations vertes. Un pig- ment rouge opaque réfléchit les radiations orangées et vio- lettes (ce qui donne, par addition, du rouge) et absorbe le vert. Le pigment bleu réfléchit les radiations vertes et violet- tes et absorbe l’orangé. Ceci nous explique pourquoi il semble v avoir désaccord entre le physicien et le chimiste. Si on additionne des pig- ments vert et orangé qui sont des radiations primaires pour le physicien, on n’obtiendra pas du jaune comme il obtient en additionnant ses radiations vertes et orangées., On na qu’une teinte assombrie, parce qu’une partie des radiations — 187 — orangées d’une part et vertes de l’autre sont absorbées par chacun des deux pigments superposés. Pour le chimiste, il existe trois pigments primaires qui par leur mélange deux à deux. permettent de reconstituer toutes les autres couleurs. Ces trois pigments sont le rouge, le jaune et le bleu. Par une rencontre curieuse, il se trouve que ce sont précisément ces trois couleurs que l’on obtient par addition deux à deux des trois radiations primaires colorées du physicien, qui deviennent les trois primaires qui servent à composer le violet, le vert et l'orangé quand il s’agit de pigments. L’anomalie apparente qui existait entre physicien et chimiste s'explique ainsi par la sous- traction ou absorption de certaines radiations qu’opèrent les pigments. Donc en résumé, si les radiations orangé, verte, violette sont des radiations primaires, il faut admettre que les pigments jaune, rouge, bleu sont des pigments primai- res. La parole est maintenant au photographe. Le photographe est un homme ingénieux et logique. Sur les données qui lui sont fournies par le physicien et le chimiste, il fait un raisonnement bien simple : Quand je place une pla- que M. l’abbé BRUNE, curé de Mont-sous-Vaudrey, présente les photographies de trois statues de l’école dijonnaise du xve siècle, déposées dans le couloir de la maitrise de la cathédrale de Besancon. Ce sont une grande et superbe Vierge et l’enfant Jésus, Sainte Barbe et une autre sainte _indéterminée. Elles faisaient autrefois partie, bien que plus ancienne du retable de la chapelle Saint-Denis, à la cathé- drale. M. l'abbé Brune compare ces statues à la Vierge bour- guignonne de Baume-les-Messieurs et à celle d’Arbois, une des perles du musée de Cluny, et fait ressortir les différences qui existent entre la statuaire dijonnaise et les ateliers de Troyes, également représentés en Franche-Comté. bPaNSéancerest lévée à 41 h:1/2. IV. Section des Sciences Président : M. MERLE. Assesseurs : M, CLEMENÇOT, professeur au lycée de Lons- le-Saunier, M. le docteur MARCEAU, président de la Société d'histoire naturelle du Doubs. Secrétaire, M. MALDINEY, professeur à l'Ecole de médecine de Besançon, chef de tra- vaux à la Faculté des sciences. M. MERLE, ingénieur des Ponts et chaussées, donne lec- ture d’une note sur Le minerai de fer en Franche-Comté. Après une courte introduction géotectonique, M. Merle passe en revue les différents gites ferrugineux au point de vue de leur formation et de leur gisement, ainsi que de l’exploita- tion à laquelle ils ont donné lieu, et fait connaître les réser- ves qu'ils constituent pour l'avenir. M. CLÉMENÇOT présente une Méthode de dosage de l’aci- dité des moûts et des vins au inoyen de son calcarimètre. = = En principe, la méthode consiste à traiter à chaud le liquide acide par un excès de calcaire. On recueille l’eau chassée par le gaz carbonique. L'expérience est recommencée avec un liquide acide d’un titre connu et une règle de trois permet de déterminer l’acidité en acide sulfurique On peut encore multiplier le volume d’eau recueillie par un coefficient spé- cial. Pour le vin, l'expérience se fait par Comparaison avec un liquide acide à titre connu et dont la teneur en alcool est la même que celle du vin. La comparaison des résultats avec ceux obtenus avec une liqueur titrée de potasse montre que cette méthode volumétrique gazeuse présente les meilleures garanties, M. le docteur MARCEAU fait une communication sur la Structure du cœur des mollusques et celle des muscles ad- ducteurs des acéphales. Les muscles adducteurs des Lamel- libranches sont formés en général de deux parties, l’une, d'aspect vitreux et douée de contraction rapide, l’autre d’as- pect nacré et douée de contraction très lente. Ces deux parties dont les fonctions sont différentes ont aussi une struc- ture spéciale. La part'e nacrée est formée de fibres d’un assez fort diamètre, munie de fibrilles parallèles à l’axe de la fibre et anastomosées parallèlement. La partie vitreuse est formée de fibres d’un plus faible diamètre dont les fibrilles sont enroulées en hélice à la périphérie de la fibre. La dispo- sition hélicoïdale des fibrilles est favorable à la rapidité de la” contraction. Le cœur des mollusques est constitué par des fibres striées ordinaires anastomosées en réseaux chez les Céphalopodes et certains Gastéropodes. Chez d’autres Gastéropodes et des Lamellibranches, les fibrilles striées sont plus simples; elles sont dépourvues de disques minces et ordonnées parfois en lignes transversales obliques. M. MALDINEY fait connaitre l’état actuel de la question de Legs — la Photographie des couleurs et de celle de la Télégraphie sans fil. La séance est levée à 11 h. 1/2. V. Séance plénière À onze heures et demie, les trois sections se rassemblent à nouveau, sous la présidence de M. M. Thuriet, dans la grande salle du Palais Granvelle. L'Association renouvelle un vœu déjà exprimé ‘dans les Congrès précédents et relatif à la rédaction d’une Bio- graphie franc-comtoise. Les membres des diverses Sociétés savantes sont invités à rédiger le plus tôt possible les notices des personnages franc-comtois qui sont dignes de figurer dans cette Biographie. La Société d’'Emulation du Doubs se charge de centraliser ces notices et un comité nommé par elle assurera l’unité de cette œuvre collective. Un échange de vues a lieu entre M. Ch. BEAUQUIER et -M. Jules GAUTHIER au sujet de la rédaction d’un Diction- naîre topographique du Doubs. L'Association émet le vœu que cet instrument de travail, si nécessaire aux érudits, soit prochainement publié. Le Secrétaire donne lecture d’une lettre de M. GobARD, professeur au lycée du Puy, qui, empêché d’assister au Con- grès, demande aux membres du Congrès d'émettre le vœu suivant : Que par le concours des municipalités et des So- ciétés savantes locales, les catalogues des musées qui n'ont pas encore été livrés à l'impression le soient dans le plus court délai possible. L’utilité de ce vœu est unanimement re- connue, mais M. VAISSIER, conservateur du Musée archéo- — 246 — logique de Besançon et M. FEUVRIER, conservateur du Musée de Dole, font connaître les difficultés matérielles et finan- cières qui ont empêché jnsqu’à ce Jour la publication de ces catalogues. L'Association estime que le plus sûr moyen d'aboutir serait sans doute d'inviter les diverses Sociétés sa- vantes à pubher elles-mêmes dans leurs bulletins annuels ces catalogues, qui seraient ensuite tirés à part et mis ainsi à la disposition du public. Sur Ja proposition de M. MALDINEY, président du Photo- Club de Besançon et de M. Georges GAZIER, conservateur de la Bibliothèque de Besançon, l’Association invite les Sociétés savantes et les amateurs à déposer à la Bibliothèque publique de Besançon toutes les épreuves photographiques et cartes postales qui présenteraient un intérêt quelconque sur Ja. Franche-Comté. Ainsi serait constituée une précieuse collec- tion de documents sur les monuments, les paysages, les mœurs, les coutumes et les fêtes comtoises. Aujourd'hui que lPutilité de l’enseignement par l’image est unanimement éconnue on peut dire quetce Sera Nponr eleve nie source de renseignements la plus sûre pour notre époque. L'Assemblée choisit Belfort pour le lieu de sa réunion de 1905. À l'unanimité, M. Philippe BERGER, membre de l’Institut, sénateur du Haut-Rhin, professeur au Collège de France et président de la Société belfortaine d’Emulation, est élu prési- dent pour le prochain Congrès, avec M. DuBAIL-RoOY, secré- taire de }a Société belfortaine d'Emulation, comme secrétaire général. La séance est levée à midi. “For VI. Banquet À midi et quart, dans [a grande salle du Restaurant Colomat, une table brillamment dressée et servie réunit dans un banquet cordial soixante congressistes environ. Avec le Président avaient pris place à la table d'honneur, M. PER- REAU, professeur à la Faculté des Sciences de Besançon, adjoint au maire de Besançon, représentant M. le Maire empêché, M. TRIGANT-GENESTE, secrétaire général de la préfecture du Doubs, M. A. Roux, président de la Société d'Emulation de Montbéliard, M Ch, BEAUQUIER, député du Doubs, M. Jules GAUTHIER, archiviste de la Côte-d'Or, M. SANDOZ, conseiller municipal de Besançon, M. LEBEUF, directeur de l'Observatoire de Besançon, les Présidents et délégués des Sociétés, etc. Le menu, photocollographié par M. Delagrange, avait été orné d’un charmant dessin de la Porte-Rivotte dû à l’illustre peintre bisontin E. [senbart, et d’une belle photographie de la porte et du cloître du Palais Granvelle. Au dessert, M. M THURIET remercie les pouvoirs publics de la bienveillance qu'ils ont témoignée aux organisateurs du Congrès de Besançon, et porte un toast aux membres des Sociétés savantes franc-comtoises qui ont bien voulu ré- pondre à l’appel de l’Association. M. PERREAU, adjoint au maire de Besançon, dit l'intérêt que porte la municipalité de Besançon à toutes les manifes- tations scientifiques et littéraires de ce genre, dignes de tous les encouragements. M. TRIGANT-GENESTE, secrétaire général de la préfecture du Doubs, 'au nom de M. le Préfet empêché, lève son verre en l'honneur des congressistes. — 248 — M. À. Roux, président de la Société d'Emulation de Mont- béliard, au nom des Sociétés savantes de la Franche-Comté, et M. le D' MARCEAU, président de la Société d'Histoire na- turelle du Doubs au nom des Sociétés savantes de Besançon boivent à la prospérité de Association franc-comtoise. Enfin M. VIEILLE, président de la Société des architectes du Doubs, émet le vœu que des plaques commémoratrices soient apposées sur les monuments publics et les maisons célèbres, rappelant les grands évènemènts de l’histoire de la Franche-Comté dont ils ont été le théâtre. M. PEr- REAU, adjoint au maire de Besançon, reconnaissant l’utilté de cet enseignement démocratique, prend l’engagement de soutenir ce vœu auprès de qui de droit, sitôt que l’état des finances municipales le permettra. VII Réunion pubiique À trois heures, séance publique au Palais Granvelle. On remarquait sur l’estrade, aux côtés de M. M. THURIET, MM. Ch. BEAUQUIER, À. Roux, À. LEBEUF, Jules GAUTHIER, Ch. SANDOZ, D' MARCEAU, PARIZOT, VAISSIER, MALDINEY, Roger Roux, GAIFFE, les abbés RossIGNoT et PERROD, Georges GAZIER, etc., etc. M. M. THURIET prend le premier la parole. MESDAMES, MESSIEURS, Quand l’an dernier, à pareille époque, vous avez choisi la ville de Besançon comme lieu de réunion du einquième Congres des Sociétés savantes de Franche-Comté, et quand vous avez confié à la Société d’Emulation du Doubs, repré- sentée par son président et par un de ses membres les plus actifs, le soin de préparer vos laborieuses assises, vous avez — 249 — fait à l’ancienne ville libre et à l'association largement ouverte qui lui a emprunté sa devise et ses armes, un honneur dont toutes deux apprécient hautement le prix. Pour vous témoigner leur reconnaissance, elles se sont elforcées l’une et l’autre de vous ménager une réception digne de vous. Notre premier souci devait être de vous procurer un logis convenable. La municipalité de Besançon, toujours soucieuse de fa- voriser tout ce qui touche à la science, nous eût volontiers ouvert les salles de l'Hôtel de Ville, celles de la Bibliothèque ou du moderne Kursaal; mais nulle part, J'en suis sûr, l'hospitalité ne pouvait vous Ôtre plus agréable que dans cette vieille demeure des Granvelle qui évoque tant de souvenirs historiques et qui a été de tout temps, dans la cité bisontine, l’asile préféré des lettres et des arts. Ah! si les merveilles qui s’y trouvaient réunies 1l y a trois siècles y étaient encore aujourd’hui, quel magnifique musée vous auriez sous les yeux! quel vaste champ d’études s’offrirait ici même à vos esprits chercheurs ! Trois générations d'hommes d'Etat, amateurs d'art et protecteurs d'artistes, avaient depuis le milieu du xvi* siècle entassé dans les salles et dans les dépendances de ce Palais une foule d'objets artistiques et de curiosités déjà rares pour l’époque : livres précieux, fines estampes, manuscrits riche- ment enluminés, tapisseries de haute lisse, de satin damassé ou de fantaisie, meubles sculptés, toute une collection de médailles grecques et romaines, des ivoires, des bronzes et des marbres antiques, des statues et des bas-reliefs, un torse de Jupiter échu depuis au musée du Louvre et surtout une magnifique galerie de tableaux où l’on admirait, parmi des chefs-d’œuvre d'Albert Durer, d’Holbein, de Léonard de Vinci, du Titien, du Corrège et du Tintoret, un grand _ nombre de paysages et de portraits dus aux pinceaux d’ar- tistes italiens, flamands et comtois. — 9250 — Toutes ces richesses sont décrites dans un inventaire dressé en 1607, apres le décès du dernier des Granvelle, par Claude Boitouzet, docteur ès droits et chanoine en Péglise métropolitaine de Besançon. La minute de cet inventaire vient d’être acquise, il y a quelques jours, par la Biblio- thèque municipale. En parcourant ce précieux document, on croirait feuilleter le catalogue d’un des plus beaux musées du monde. Lors de la réunion de la Franche-Comté à la France, tous les trésors d’art, que le chancelier Perrenot et ses suc- cesseurs, le cardinal et les comtes de Cantecroix, avaient soigneusement disposés sous ces lambris, étaient en grande partie déjà dispersés ; le nom des Granvelle était éteint depuis 10 ans, mais leur palais, d’une somptueuse architecture fla- mande, était encore la plus spacieuse et la plus opulente de- meure de ja cité, et quand Louis XIV vint en Franche-Comté pour affermir sa conquête, en Juin 1683, ce fut 1ei qu'il installa sa cour et qu’il transporta pour quelques jours, avec son cortège de courtisans, la pompe et létiquette de Ver- sailles. Vous êtes, messieurs, à une place que le Roi-Soleil a foulée de ses hauts talons et de sa canne enrubannée! En devenant au xviri® siècle la résidence des gouver- neurs de la province, le palais Granvelle hélas ! dépouillé de sa précieuse parure mobilière, n’en conserva pas moins son cachet intellectuel. Un gouverneur, doublé d’un lettré dé- licat, le duc de Tallard, y fit aménager une salle de spec- tacles à une époque où la ville n'avait pas encore de théâtre, et il y réunit, en 1752, un cénacle de beaux esprits qui prit le nom d’Académie des sciences, belles-lettres et arts de Besancon. De nos jours, cette historique demeure est encore le siège de cette même Académie qui v est née; elle donne aussi asile à la Société d’'Emulation du Doubs et à l'Univer- sité populaire ; elle abrite de remarquables collections artis- tiques; l’école de musique y modulait naguère encore ses ot symphonies et, sur un des bas-côtés de lédifice, une élé- gante vitrine entretient une exposition de peinture sans cesse renouvelée. Aussi, est-il vrai de dire que les sciences, les lettres et les arts voisinent ici fraternellement et forment un véritable fover intellectuel où votre place était marquée. Une :éunion d'élite comme celle d'aujourd'hui ne peut que jeter un nouveau lustre sur le vieux palais Granvelle et ajouter une page brillante à son histoire. Vous tous qui êtes ICI, messieurs, vous êtes venus des divers centres de la Franche-Comté, du pays de Montbéliard ou de l'Alsace mu- ülée, animés d’un même idéal, qui est le culte désintéressé de la science, Joint à l'amour du pays natal. Les associations que vous représentez contribuent, chacune dans sa sphère d’action et par les moyens qui lui sont propres, à la gloire de noirewpetite patrie comtoise. Les unes recherchent les richesses minéralogiques du sol jJurassique, en étudient la faune et la flore; les autres s'efforcent de mettre au jour les vestiges archéologiques, enfouis dans cette terre que César arracha aux Gaulois et les barbares à Rome, et qui fut foulée au moyen âge par tant de dominations successives. Grâce à leurs recherches historiques, nos Sociétés entre- tiennent pieusement les souvenirs qui relient le passé à la vie moderne; elles font revivre dans le décor familier de nos villes et de nos faubourgs les faits et gestes de nos aïeux ; elles nous initient à leur vie naïve et souvent misérable; elles nous émeuvent au spectacle de leur courage et de leurs souffrances devant les fléaux quiles décimaient : la guerre, la peste et la famine. L'idée fut heureuse de grouper en un jour de chaque année ces associations sœurs, afin de donner à leurs membres la possibilité de se connaître, de s’estimer, d'échanger leurs idées, de se communiquer leurs décou- vertes ou de rechercher des collaborations. Cette réunion annuelle n’aurait-elle pas d'autre utilité que de marquer un réveil de lPesprit provincial qu'il faudrait — 9592 — se féliciter de l’avoir entreprise ; mais elle a une portée plus haute et des résultats plus tangibles. Elle nous permet d’é- laborer en commun des œuvres utiles à la région, d’entre- prendre des travaux de longue haleine qui exigent du temps, de la patience, une continuité d'efforts, une somme de tra- vail et d’érudition qu'un seul homme ou même une seule société ne pourrait fournir. Notre association franc-comtoise donne une impression de force en même temps qu’elle éveille le sentiment de la solidarité ; elle peut émettre, le cas échéant, dans le domaine des choses de l'intelligence, des vœux qui auraient d'autant plus d'autorité près des pouvoirs publics qu’ils émaneraient d’une élite plus nombreuse. Montrer les avantages de nos congrès, n'est-ce pas déjà faire l'éloge de celui quien a eu l'initiative et qui présida avec tant de compétence et de distinction nos trois premières assemblées. Vous ne me pardonneriez pas, messieurs, de ne pas rappeler ici les tres de M. Jules Gauthier à notre recon- naissance. Je ne voudrais ni blesser sa modestie ni diminuer les mérites d'aucun de vous, mais je crois exprimer une vé- rité en disant qu'il est, parmi nos contemporains et depuis la mort d'Auguste Castan, l’érudit qui a le plus étudié et qui connaît le mieux la Franche-Comté et son histoire. Et c'est sans doute parce que les annales de notre pro- vince n'avaient plus de secret pour lui que sa laborieuse ac- tivité a cherché des aliments nouveaux dans le riche dépôt des archives du duché de Bourgogne, actuellement confié à ses soins vigilants. La réputation scientifique de M. Jules Gauthier a reçu cette année une haute consécration : l’Aca- démie des inscriptions et belles-lettres l’a élu membre cor- respondant., Ainsi s’est trouvé réalisé le vœu que formulait, il Y a un an, au milieu de vous, M. Philippe Berger. J’ose à peine, Messieurs, prononcer le nom de mon émi- nent prédécesseur à ce fauteuil, tant je crains que vous n’é- tablissiez, entre le président de l’année dernière et celui de cette année, une comparaison qui me soit par trop défavora- 9 si ble. C'était une rare bonne fortune pour votre quatrième Con- grès d’avoir à sa tête un membre de l’Institut, dont le nom a une sihaute et si universelle notoriété dans le monde savant, et qui eut l'honneur d’être le collaborateur et lémule d’Er- nest Renan dans l’étude des textes et des inscriptions sémi- tiques et de lui succéder dans la chaire d’hébreu au Collège de France. Comme s’il prévoyait que ses concitoyens du ter- ritoire de Belfort allaient lui créer de nouveaux devoirs et de nouvelles occupations en lui conférant le plus élevé des man- dats législatifs, M. Berger s'était excusé dès lan dernier de ne pouvoir accepter la présidence de la réunion d’aujour- d’hui ; mais en décidant ce matin que le sixième congrès se- rait tenu l’an prochain à Belfort, vous avez Justement resti- tué au savant professeur la première place. Ainsi, les regrets que nous cause aujourd'hui son absence sont atténués par l'espoir de le revoir dans un an parmi nous. Quelqu'un que nous ne verrons plus, c'est le compatriote éminent qui a tenu, lui aussi, un des premiers rôles au con- grès de Lons-le-Saunier, où il s’est prodigué pour honorer la mémoire de ce Phihbert de Chalon, vaillant homime de guerre autant qu'habile diplomate, dont 1l s'était fait l’histo- rien. En voyant alors M. Ulysse Robert se dépenser avec tant d’ardeur pour la gloire de son héros, qui eût pu penser qu’on assistait à une des dernières manifestations de son acti- vité et de son esprit? La mort l’a terrassé avant que l’année n'ait fini son cours, avant que lui-même n'ait achevé sa tâche. Par son travail opiniâtre, Ulysse Robert s'était fait un nom dans la science, en même temps que par son seul mé- rite il s'était élevé, jeune encore, au poste envié d’inspecteur général des archives. Il incarnait véritablement les solides qualités de la race comtoise : la puissance de travail, la téna- cité, la pénétration de l'esprit, le robuste bon sens, la probi- té scientifique. Il avait au plus haut degré l'amour du sol na- tal et tous ses travaux eurent pour but de mettre en lumière quelques unes de nes gloires locales. Resté Comtois au mi Cotes lieu de Paris, cet enfant des montagnes du Doubs n'avait pas de plus grand bonheur que de se retrouver avec des compa- triotes, et c’est au milieu d’eux, au cours d’un banquet de l'Association des Gaudes, que la inort est venue le sur- prendre. Ulysse Robert, dont le souvenir ému plane sur cette assemblée, nous a légué plus d’un exemple à suivre. Cest en nous efforçant de l’imiter dans sa vie laborieuse, dans ses patientes études. dans son attachement profond pour la Franche-Comté que nous arriverons à rendre notre associa- tion prospère, à contribuer au progrès de la science et à la grandeur de la patrie ! » Après ce discours, fréquemment interrompu par des applau- dissements, M. FEVRET fait une communication très savante et documentée sur César à Besançon. La parole est ensuite donnée à M. Ch. SANDOZ, conseiller municipal de Besançon, qui plaide en ces termes la cause de la Restauration de l'Hôtel de Ville de Besancon. MESDAMES, MESSIEURS, _Je ne saurais prétendre ni au titre d'archéologue, ni à celui d’historien, et, dans ces conditions, il peut paraitre à mon auditoire distingué qu'il y a quelque prétention de ma part à traiter ici un sujet qui, pour être développé comme il devrait, mérite une érudition que je ne possède pas. _ Je solliciterai donc votre extrême indulgence. Elle me sera accordée, je l'espère, lorsque vous saurez le mobile au- quel j'obéis en prenant la parole devant cette docte assem- blée : c'est tout simplement d'obtenir l'appui de votre asso- ciation en faveur du maintien et de la restauration de notre — 955 — Hôtel de Ville, dont un certain nombre de personnes récla- ment la démolition. Un vote municipal récent à, il est vrai, décidé provisoi- rement le statu quo ; on fera toutefois quelques travaux, en vue de la consolidation et l’aménagement des parties du bâ- timent sectionnées pour l’établissement de la rue qui, depuis la restauration du Palais de Justice, sépare celui-ci de l'Hôtel deViIIe Mais un semblable ajournement ne préjuge rien, car il se peut que, d'ici quelques années, une proposition de démoli- tion surgisse à nouveau. [l est donc nécessaire de provoquer, parmi nos associations comtoises, un courant d'idées en fa- veur de la restauration en question et je ne pouvais mieux m'adresser qu’en commençant d'abord par une société qui a pris pour programme : Servir, aimer et faire aimer la patrie comtoise ; unir dans son culte et dans son amour tous les Francs-Comtois. Un publiciste distingué, Arduin Dumazet, vient de faire paraître la partie de son ouvrage intitulé « Voyage en France » qu'il a consacrée à notre province Nous ne pour- rions chercher à meilleure source limpression d’un savant et d’un écrivain sur notre ville. - Voici quelques lignes extraites des pages intéressantes à tous points de vue qu'il a écrites sur notre cité, et qui ré- sument l'impression qu'elle lui a causée : .« Besançon peut être comparée aux anciennes cités du- » cales d'Italie. On a respecté les artères d'autrefois, leurs » vieux hôtels sculptés aux grilles de fer forgé, ornés de » fontaines où le xvire siècle a apporté sa grâce mytholo- » gique. » Le square archéologique est une chose charmante. Une » partie curieuse est le vieux quartier de Battant dont les » rues surpeuplées offrent d’amusants tableaux. » Ainsi donc, ce qui est intéressant à Besançon pour le visi- nn teur, ce ne sont pas nos constructions modernes, du reste, à peu d'exception près, sans grand caractère artistique. Ce qui retient son attention, et j'en ai fait souvent l'expérience, c'est tout ce qui subsiste du vieux temps, ce que Gaston Coindre a si bien retracé ou ressuscité dans son beau travail d'artiste et d'écrivain sur notre antique localité. Faites-vous le cicérone d’un étranger; ni le Kursaal, ni les bâtiments de l'Université ou autres monuments neufs ne retiendront son attention. Mais il stationnera longuement devant le Palais Granvelle, examinera l'Hôtel de Ville, le Palais de Justice, les vestiges de l’ancien monastère des Bénédictins, l'Hôpital, la jolie chapelle du Refuge, etc. La fontaine de la place Labourey, celle de la place de PEtat-Major ne lui diront rien de particulier; il admirera par contre la jolie fontaine de la rue Ronchaux. œuvre des sculpteurs Devosges et Perette, celle de la Sirène à l’angle de la rue des Archives, du statuaire Luc Breton, ou la fon- taine des Carmes, du sculpteur Claude Luller. S'il est entré en ville par Battant, les hautes et monumentales portes mo- dernes de ce quartier le laisseront indifférent; mais il ira visiter à Rivotte la porte flanquée de deux tourelles, der- nière des portes de la fortification espagnole, et qui avec la curieuse maison Mareschal du xvi* siècle, donne à ce quar- tier un intérêt que ne lui assureraient pas des constructions nouvelles. Promenez votre visiteur sur les nouveaux quais. Ni les écoles Veil-Picard, ni la Synagogue, ni les constructions modernes de cette partie de la ville ne l'intéresseront. Par contre, il s’extasiera sur le pittoresque du vieux bas- tion d’Arènes, avec ses escaliers, ses murs casematés, ses hauts parapets, surmontés d'arbres gigantesques. «Oh! mon- » sieur, me disait, il y a quelques années un Jourpaliste » américain auquel je faisais visiter la ville, et qui s’extasiait » devant ce bastion, j'ai lu ce matin dans un journal de Be- » sançon qu'on voulait démolir les fortifications. C’'est-très » bien pour une partie, mais est-ce qu’on va aussi démolir » ceci? Oh! je vous prie, Monsieur, dites bien à vos compa- » triotes que chez nous, en Amérique, nous paierions bien » cher, des millions, Monsieur, pour avoir quelque chose » d'aussi intéressant. » L'étranger encore promènera ses regards curieux sur le vieux quai Vauban, de la tour du Saint-Esprit aux remparts de Chamars. Le pont de Battant vous vaudra de sa part quel- que question, il n’en fera aucune sur les ponts de Bregille, de Saint-Pierre ou de Canot. Et combien tout cela intéresserait davantage encore nos visiteurs, si quelque habitant leur racontait l’histoire de toutes ces vieilles choses. Il est vrai que cela n'arriverait pas souvent, car nous autres nous la connaissons si imparfaitement l'histoire de notre ville et de ses anciens monuments ! C’est peut-être à cause de cela que l’on rencontre si peu de personnes qui s'intéressent à la conservation de ceux-ci. C’est aussi pour ce motif, évidemment, que la proposition de démolition de l’'Hôtel-de-Ville en vue d’un agrandissement de la place Saint-Pierre, a pu trouver quelque écho parmi nos conci- toyens. Les démolisseurs, outre ce motif d’agrandissement de la place donnent également pour raison l'amélioration, au point de vue du coup d’@il, qu'offrirait l’ensemble, une fois la mai- rie rasée. Nous verrons plus tard ce que serait cette prétendue. amélioration. Mais en attendant, permettez-moi de vous faire un peu l’histoire de l'Hôtel de Ville. La mairie féodale était située sur la place Labourey. Plus tard et jusqu’au milieu du xiv* siècle, le logis communal fut un hôtel loué à la famille Porcelet, formant le n° 8 actuel de la rue Pasteur. L'extension du territoire de la commune nécessitant un logis plus spacieux, on fit choix à cet effet d’une maison face 17 — 9258 — à l'église Saint-Pierre, puis on y adjoignit deux immeubles voisins par la suite. En 1393, on démolit ces trois vieilles maisons et, sur leur emplacement, fut édifié un Hôtel de Ville neuf dont on poussa les dépendances jusqu’à la rue Saint-Vincent. Cet Hôtel de Viüle avait un beffroi sur lequel fut placé, en 1440, la première horloge publique. Il devait avoir aussi une galerie extérieure, car nous voyons qu'en 1465, il est pro- cédé à une reconstruction des galeries de l'Hôtel de Ville d’où avait prêché un moine, le frère Vincent Périer. Enfin, en 1469, on construit une tour y attenant pour la garde des privilèges de la cité. En 1544, la construction d’un nouvel hôtel communal est décidée et un premier corps de bâtiment est édifié en 1569, par les soins du maçon Richard Mayre et du char- pentier Outhenin Ronsares, tel qu’il se présente aujourd’hui avec ses pierres à bossage et son architecture sans symétrie, mais originale. En 1582, pour compléter, on reconstruit le deuxième corps de logis en abandonnant les plans primitifs du maçon Mayre, et en chargeant Hugues Sambin, le célèbre archi- tecteur bourguignon, élève de Michel Ange, de cette nou- velle construction. En 1586, le maçon Pierre Vitte opérait au nom de la Ville le toisement et la réception de ce second bâtiment, auquel, en 1588, on adjoignait une chapelle. Dans ce second corps de logis était également installé le prétoire où se rendait la justice civile et criminelle. Les proportions restreintes de ce délicieux ouvrage de la Renaissance sont ce que Hugues Sambin avait voulu pour un logis situé dans une cour. C’est une considération qui mérite de retenir l'attention. S’il avait été destiné à être mis en façade sur rue ses proportions eussent été toutes diffé- rentes évidemment. Diverses délibérations municipales nous apprennent que, faisant suite au second corps de logis, se trouvait un verger 1209 — dans lequel plus tard fut installé le tir de l'arc et à l’arbalète. De là le nom de rue de l’Arbalète donné encore actuellement à la rue qui y conduisait, Au bout de ce verger, et en façade sur la rue Saint-Vincent, on avait édifié Arsenal (très impor- tant pour l’époque) que possédait la ville, car elle mettait sur pied 4,000 combattants pour la défense de son territoire et elle possédait une assez forte artllerie. Voila sommairement l’histoire de la construction de l'Hôtel de Ville de Besançon. Quand dans une ville on veut démolir quelque chose en vue d’un agrandissement, on devrait toujours chercher à se rendre compte, jusque dans les moindres détails, de ce que sera le nouvel état de choses; autrement on s’expose aux plus désagréables surprises. C’est pour avoir négligé cette sage précaution, qu’il y une douzaine d'années le Conseil municipal d'alors, déci- dant, sans étude préalable sérieuse, la démolition des rem- parts Saint-Pierre-Glères, créait un état de choses, en cet endroit, du plus déplorable effet. Au lieu de se borner à raser les énormes parapets de la fortification à hauteur de la berme, ce qui, au point de vue du résultat cherché était équi- valent. et nous eût procuré une jolie terrasse ombragée par des plantations d'arbres et soutenue par les murs à tracé bastionné des anciens remparts, on dépensa près de 200,000 francs pour gratifier la ville d’un nouveau mur de soutènement disgracieux, qui enserre le lit du Doubs et enlaidit considérablement cette partie de la ville. Supposons donc la démolition de l'Hôtel de Ville accom- plie, que voyons-nous? Une place de forme rectangulaire allant du péristyle de l’église Saint-Pierre au Palais de Jus- tice et partagée à peu près en son milieu par la chaussée de la Grande-Rue. Ce terrain offrirait une telle déclivité qu’il se terminerait nécessairement par des escaliers descendant vers le Palais de Justice. [Il est entendu n’est-ce pas que cette démolition se ferait, disent ses partisans, dans lintérêt 060 d’un embellissement par la mise en façade au premier plan de ce dernier bâtiment. Eh bien, voyez-vous celui-ei enterré et auquel on accéderait par des escaliers de cave! Ça ne se- rait déjà pas précisément quelque chose de bien gracieux. Mais ce n’est rien encore, car si nous considérons l’encadre- ment de cette portion nouvelle de la place par les construc- tions mises en vue par la démolition de la Mairie, que voyous-nous”? À une extrémité l’église Saint-Pierre, bâtiment lourd et sans style dominant et écrasant la façade du Palais de Justice qui lui fait face à l’autre extrémité. Puis, sur les côtés latéraux de cette même parüe de la place, d’un côté le hideux bâtiment qui est à l'entrée actuelle de la rue de lArbalète, de l’autre, les constructions bizarres et sans alignement de la rue de lArsenal, et, dans la pers- pective de la partie qui subsisterait de ces deux rues, des recoins malpropres, puis une obliquité de lignes qui ferait paraître le Palais de Justice comme mis de travers sur cette place. Pauvre Palais de Justice, déjà si écrasé par le long toit couvert d’ardoises, dont on l’a affublé et qui est un bel ana- chronisme, les adjonctions nouvelles qui encadrent la partie ancienne de sa façade n’ont rien ajouté à lintérêt de l’œuvre d’Hugues Sambin, au contraire. Mais, me dira-t-on, l'Hôtel de Ville est d’un effet disgra- cieux. — Dans sa forme présente, c’est vrai. Mais abstrac- tion faite du toit impossible qui le recouvre, 1l offre comme architecture une grande originalité, accentuée encore par le bossage des pierres de taille de sa façade extérieure. Lorsqu’à sa couverture on aura substitué un toit élégant sur lequel s’élèveront de grands louvres et un gracieux beffroi, le tout dans le style du xvie siècle, cela modifiera l’aspect de l’ensemble. Il ne faudra pas par exemple le re- couvrir en ardoises, mais en tuiles vernissées formant des dessins en losange aux couleurs de la ville, ainsi que cela se — 961 — faisait au xvIe siècle et comme certainement cela existait sur le toit primitif. Quant à la place Saint-Pierre, en la transformant en un joli square ouvert, avec des plantations d'arbres encadrant les deux passages en croix qui la traversent on ferait plus pour son embellissement qu'en démolissant l'Hôtel de Ville. Voilà au point de vue esthétique ce que j'avais à dire en faveur du maintien de ce monument et de sa restauration extérieure. Quant à sa réfection intérieure, elle peut être obtenue sans dépenses excessives, si l’on maintient la disposition actuelle des locaux, sauf quelques modifications, telles que la construction d’un grand escalier desservant les bureaux, et la transformation en locaux du passage en arcades qui conduisait autrefois au Palais de Justice. Il resterait à construire alors le bâtiment en aile sur la cour du côté droit. Toutes ces modifications permettraient l'installation des services municipaux proprement dits dans des conditions excellentes de commodité et de facilité d'accès au public. Mais d’autres considérations militent encore en faveur de cette conservation. _ Dans cette petite patrie bisontine, où les uns nous sommes nés, où d’autres y ont vécu de longues années, pre- nant intérêt à tout ce qui contribue à sa renommée, soulever cette question de démolition de l'Hôtel de Ville c’est oublier tout ce passé si passionnant à étudier d’une ville qui, pen- dant des siècles n’a cessé de lutter pour la défense de ses libertés et le maintien de ses privilèges. C’est dans la maison communale que se sont débattues les lois de la petite république bisontine, que se sont signés les traités historiques de la Franche-Comté. C'était la mai- son du peuple, car c’est le peuple qui élisait par un suffrage à deux degrés ceux qui allaient le gouverner. Cest là que — 262 — les pauvres, les faibles, les opprimés sont de tous temps venus chercher secours ou appui. Les villes, de quelque pays que ce soit, qui ont une his- toire professent une véritable vénération pour leur maison communale, bien que souvent celle-ci n'offre pas le moindre intérêt architectural. Voyez Mulhouse et son petit Hôtel de Ville. [l est laid, et bien exigu pour une grande ville de cette importance, mais 1l a une histoire ; il a été le siège d’une magistrature municipale française, et le drapeau français y a flotté à une époque que ses habitants n’ont pas oubliée. Allez donc dire aux Mulhousiens que pour raison d’embellhs- sement on va Jeter à bas leur Hôtel de Ville. Allez en Suisse, le pays républicain par excellence, et voyez avec quel soin nos voisins restaurent tous ces vieux bâtiments historiques, en leur conservant le cachet de l’épo- que de leur construction, Jusque dans les moindres détails. Notre Hôtel de Ville est le témoin vivant du passé de Be- Sançon ; sa disparition serait une atteinte portée, je le répète, à l'importance du rôle de notre vieille cité dans l’histoire. C'est done à combattre toutes propositions qui pourraient être faites ou à soutenir toutes tendances à créer un mouve- ment d'opinion en faveur de cette démolition que je vous de- mande, Messieurs, de vous grouper en une union commune. M. GAIFFE, professeur au lycée de Besançon à fait connai- ire en ces termes, la vie, l'œuvre d’Un dramaturge bisontin au XVIIIe siècle, Arnould-Mussot. MESDAMES, MESSIEURS, Il n’est pas donné à une ville, ni même à une région, de produire un homine de génie par siècle dans chaque genre : si, dans l’art dramatique, la Franche-Comté peut citer avec orgueil, au xix® siècle, l’auteur de Ruy Blus, et, dans un — 9263 — -rang plus modeste, mais très honorable encore, celui du Moineau de Lesbie, si, au xvu°, elle a donné le jour à Jean Mairet, qui fournit dans sa Sophonisbe le premier modèle de la tragédie régulière en France, il faut convenir que le Xvir° siècle n’est pas, à beaucoup près, aussi glorieux pour notre province : dans les études que je poursuis depuis plusieurs années sur le théâtre de cette époque, je n'ai guère rencon- tré que irois noms de dramaturges franc-comtois : Falbaire de Quingey, auteur de l’Honnête criminel, un drame anti- clérical qui eut son heure de vogue au début de la Révolu- üon; Gabiot de Salins, grand brocheur de mélodrames à la douzaine, et plagiaire sans vérgogne ; enfin mon héros d’au- jourd’hui, Arnould-Mussot, dont le talent littéraire n’est pas beaucoup plus relevé, mais dont l’existence accidentée nous permet de pénétrer dans quelques recoins curieux de la so- ciété parisienne à la fin de l'ancien régime (1). Auteur de dixième ordre, mais en même temps acteur et directeur de troupes, Arnould fut mêlé, en effet, de très près à la fondation et aux pénibles débuts de l'Ambigu-Co- mique, qui, avec plusieurs autres petits théâtres, fit, entre 1760 et 1791, une concurrence acharnée aux scènes privilé- giées et subventionnées, Assez de personnes sont curieuses _dece qui se passe aujourd'hui dans les coulisses de nos plus humbles théätricules, pour s'intéresser à ce qui S'Y passait il y a plus d'un siècle ; et ce recul dans le temps donne d'au- ire part à un sujet assez frivole en soi quelque chose d'an- tique et de vénérable qui le rend digne d’être présenté à un auditoire aussi grave que celui de l'Association franc-comtoise. Jean-François Mussot, né à Besançon, le 4 juin 1734, appartenait à une des familles les plus estimées de la ville: (1) Cf. Archives Municipales de la ville de Besançon (Registres des Paroisses). — Almanachs forains (1773 à 1787). — Mémoires secrets de Bachaumont, t TT et sq. (Maveur de Saint-Paul). — Le Chroniqueur désœuvré ou l'Espion des Boulevards, Londres 1782-1783, 2 vol. — Biographie Universelle, Art. AKRNOULD. — 9264 — son père, Jean-Claude Mussot, était avocat au Parlement, et nous le retrouvons en 1745, investi des fonctions de bâton- nier; sa mère, Madeleine Arnould, était aussi, semble-t-il, d'une famille d’honorable bourgeoisie parlementaire. Comment le jeune homme, élevé dins les principes d’une étroite austérité provinciale, füt-1l pris de la passion irrésistible du théâtre ? Assista-t-1} à Besançon aux brillantes représentations don- nées alors dangla Grande Salle du Palais Granvelle ? Y en- tendit-1l le comédien Armand, du Théâtre-Français, qui, en 1753, gratifia les Bisontins d’une première sensationnelle, celle du Pelit Maitre raisonnable, comédie dont 1! était . Pauteur, et dont notre bibliothèque municipale possède le texte ? Toujours est il que le jeune Mussot abarndonna la vie régulière pour l’existence errante des histrions, la vénérable toge pour les oripeaux bariolés du comédien, la paisible cité bisontine pour la capitale tourbillonnante, et son nom paternel pour celui d’Arnould, qu'il emprunta à la famille de sa mère, pour abriter l’infamie encore attachée à son nouvel état. Il fait ses débuts d’acteur et d'auteur sous la direction d’Audinot, ancien comédien du Théâtre italien chargé de recruter pour le prince de Conti une troupe théâtrale, di- sent les biographes les plus bienveillants, un sérail, assurent les mauvaises langues du temps. Tandis qu'il fait jouer, en 1763, un petit opéra comique, le Savetier Dupé, sur un théâtre des boulevards, il interprète les principaux rôles du répertoire, et se trouve bientôt assez habile pour dégros- sir et former aux belles manières et à la diction classique les débutants assez novices qu'engageait Audinot. Celui-e1 quitte Versailles et lIsle-Adam, — résidence du prince de Conti, — pour fonder un théâtre à lui, l'Ambigu- Comique, sur ce fameux boulevard du Temple, où la mode — 9265 — conduisait alors Parisiens et Parisiennes, en quête de di- vertissements variés et nouveaux. Au début, ces audacieux concurrents du célèbre Nico- let, sont obligés de se borner à un modeste spectacle de marionnettes; car ces trois grandes scènes. — Opéra, Français et [aliens - répriment jalousement toute tentative de concurrence directe. Mais les deux associés ont une idée de génie : Audinot fait tailler une douzaine de bonshommes grotesques dont chacun est la frappante caricature d’un de ses anciens camarades de la Comédie italienne : Arnould compose une petite pièce où sont impitoyablement mis en lumière les ridicules des comédiens privilégiés ; et voilà comme une fois de plus, avec les plus pauvres moyens, lesprit français triomphe encore de la tyrannie vaniteuse et de l’injuste monopole. Un beau jour, un grotesque et amusant petit gnome, le nain Moreau, vient mêler ses cabrioles à celles des marion- nettes, qui n'ont pas un pouce de moins que lui; puis ce sont des enfants de huit à quinze ans qui jouent de petites comédies parfois assez peu appropriées à leur âge. Excel- lente pépinière de futurs artistes dramatiques ! disent les amateurs de théâtre. Affreuse école de lbertinage, gron- dent les censeurs moroses. Agréable et prometteuse collec- ton de fruits verts ! murmurent en dodelinant de la tête les vieux courtisans blasés. Le 9 avril 1772, Journée mémorable, les petits comédiens d’Audinüt sont appelés à faire admirer leurs talents devant le roi lui-même et Mme du Barry: ils se transportent à Choisy pour y jouer : Ii n'y a plus d'enfants, saynète de Nougaret, qui mérite un peu trop son titre: La Guinguette, de Pleinchesne, tableau de mœurs populaires dans la ma- nière de Valé. enfin le Chat botté, pantomime réglée par notre compatriote Arnould lui-même. La séance se termine par la Fricassée, contredanse fort polissonne, disent les We- motires secrets, et tandis que la favorite rit aux éclats devant — 966 — ce spectacle d’une gaité toute plébéienne, le monarque reste, comme toujours, figé dans son mutisme morose. L'histoire d’Arnould-Mussot continue à être celle du théâtre auquel son sort est attaché : vozue extraordinaire auprès du publie élégant, lutte incessante contre le mono- pole des grands théâtres ; l'Ambigu représente des ballets- pantomimes qui éclipsent les divertissements chorégraphi- que de l'Opéra et de petites pièces touchantes et jJoveuses, qui, pour avoir éte le plus souvent refusées par l’aréopage du Théâtre Français, n’en sont pas plus mauvaises, au contraire. En 1785, Audinot, dépossédé de son privilège par Gail- lard et Dorteuille, se transporte pour quelque temps, avec une partie de sa troupe, à la Muette, en plein Bois de Bou- logne ; et les paysans de Passy, d'Auteuil et de Chaillot — où sont-ils aujourd’hui? — protestent contre l'atteinte que va porter à leurs mœurs candides la présence d’une troupe d’histrions débauchés. Mais l’'Ambigu ne peut vivre sans Audinot et sans Ar- nould, son compère ; au bout de queiques mois, ils rentrent triomphalement dans leur ancien théâtre. Cinq ans après, la Révolution vient compromettre la régularité des recettes et aussi la bonne harmonie qui régnait Jusque là entre les deux fondateurs de l’Ambigu : dès 1795, ils se séparent, et Ar- nould depuis longtemps souffrant, meurt la mêine année. Ce Bisontin transplanté à Paris s'était-il quelquefois souvenu de sa petite patrie? Y était-il revenu ? Ses conci- toyens avaient-ils quelquefois applaudi ses pièces sur leur scène provinciale ? Autant de questions qu'il nous est im- possible de résoudre, vu la pénurie des documents concer- nant le théâtre à Besançon à la fin du xvui° siècle. Si Arnould ne fut ni un Voltaire, ni un Beaumarchais, ni un Sedaine, on ne peut du moins lui refuser le mérite de Ja fécondité. Weiss, dans l’article détaillé qu'il lui à consacré dans la TES — 267 — Biographie Universelle, ne mentionne pas moins de cin- quante-deux pièces à son actif, dont la plupart ne furent pas publiées : la Bibliothèque Nationale en possède douze, dont plusieurs ne figurent pas parmi les quinze que cite Quérard ; et la Bibliothèque municipale de Besançon en à huit, réunies dans un recueil assez élégamment relié (1), La plupart de ces productions appartiennent au genre de la pantomime, qu'Arnould contribua puissamment à re- nouveler et à perfectionner. Ne pouvant représenter des opéras, comme l’Académie Nationale de musique, ni des draïnes, comme la Comédie- Française ou la Comédie-Ttahenne, le Théâtre de PAmbigu résolut d'emprunter aux pièces qu'il ne lui était pas permis d’imiter directement, les éléments qui semblaient exercer sur le public la plus vive attraction. Les pantomimes d'Arnould sont des mélodrames à grand spectacle, dans lesquels le dialogue est remplacé par des gestes animés, des évolutions militaires, des ballets, des changements à vue et toutes les splendeurs d’une luxueuse mise en scène. Bientôt, du reste, la parole s'y glissera su- brepticement, et l’on verra apparaître — ironie des mots ! — des pantomimes dialoguées contre lesquelles la Comédie- Française fera entendre des protestations indignées. Arnould, lui, s’abstient scrupuleusement de faire parler ses personnages ; il n’est pas embarrassé du reste, pour re- tenir, par d’autres moyens, lattention du spectateur. Il met en scène les sujets les plus divers; tantôt, il les emprunte à la féerie, comme dans le Chat Botté; tantôt à l’histoire, comme dans les Quatre Fils Aymon, où le Moyen-Age appa- rait avec ses tournois, ses combats en champ clos, ses châ- teaux-forts pris d'assaut, sans préjudice de quelques réjouis- (4) Catalogué général des livres imprimés de la Bibliothèque Natio- nale, t. IV. p. 528. — Bibliothèque Municipale de Besançon : Belles- Lettres, 3801. Cf. Quérard, Art. Mussor. — 9268 — sants anachronismes auxquels le public ne prenait pas garde. Dans l'Homme au Masque de Fer. la vérité nistorique est traitée fort cavalièrement, mais quelles passionnantes aven- tures que celles de ce comte de Vermandois, fils de Louis XIV et de Mlle de la Vallière, rival amoureux du Dauphin lui- même, injustement emprisonné, transporté des îles Sainte- Marguerite à la Bastille, où, grâce à un passage secret, il communique avec le souterrain où gémit sa bienaimée ! Et la poursuite nocturne, au cours de laquelle 1! tue un de ses geôliers et le gouverneur de la Bastülle lui-même, et la fuite éperdue à travers les forèts, les montagnes et les hameaux inconnus! Et le retour triomphal, au milieu des vassaux, parmi lesquels il va finir en paix son existence accidentée | Une autre fois, c’est à Molière qu'on emprunte un de ses sujets ; et le Grand Festin de Pierre nous offre un Don Juan sans paroles, en attendant que Mozart propose à admiration européenne un Don Juan en musique. Quant à la Forêt-Noire, c’est une tragique histoire de fille séduite, d'enfant abandon- née et de voleurs de grand chemin; du Pixérécourt sans le dialogue, c'est-à-dire du meilleur Arnould excelle à profiter de toutes les occasions que lui offre l’actualité. En 1783, il met en scène. dans une série de tableaux ironiques la chanson de Mal Brough s’en va-len guerre, alors en pleine vogue. La même année, il représente une aventure réelle dont les journaux avaient fait grand bruit: l’histoire d’une jeune fille qui, attaquée par deux malandrins, dans la forêt de Villers-Cotterets, avait été sauvée par un brave et vertueux maréchal-des-logis ; le héros assista en personne à l’une des représentations de la pantomime, et dut, aux exclamations de l’assemblée, monter sur la scène pour v être couvert de fleurs. Dans l’Héroïine américaine, nous assistons aux amours infortunées d’une Jeune sauvage, qui comme plus tard Sélika et Lakmé, Azviadé et Rarahu, s’éprend de la plus folle passion pour un Européen volage et cruel. Il n’est pas jusqu’à la Mort du capitaine Cook qui n’ait — 969 — été mise en pantomime, avec danses et cérémonies sauvagés, et, pour finir, la pose solennelle d’une croix sur le lieu où fut massacré le célèbre navigateur. Notre compatriote ne s’est pas borné à ce seul genre: on possède de lui une amusante parodie, la Complainte des Bar- mécides, destinée à célébrer la chute retentissante d’une des plus mauvaises tragédies de la Harpe ; la correspondance de Grimm raconte avec humour la déconvenue du maiheureux poète, qui, ayant mené sa femme aux Boulevards, rencontra dans les plus humbles boutiques de sanglantes allusions à ce four noir ; telles ces cannes à la Barmécide, qui moyennant une légère pression sur un bouton habilement dissimulé, fai- saient entendre un coup de sifflet strident. Mentionnons encore une curieuse comédie, Le Portefeuille ou la Fille comme il y en a peu, composée en collaboration avec Audinot: c’est l’histoire — réelle aussi — d’une courti- sane éminemment vertueuse, qui, traquée de toutes parts, et par ses créanciers et par un propriétare aussi rapace que libertin, rapporte fort honnêtement à monsieur le commis- saire un portefeuille de cinquante mille écus qu’elle vient de trouver. Or, — voyez le miracle ! — le propriétaire n'est autre que le père de son amant; le bonhomme, fort ému, ne va pas jusqu’à proposer à la tendre et héroïque Rosalie d’épou- ser son fils, mais il lui donne du moins les moyens de vivre honorablement Tout cela n’est à coup sûr ni Marion Delorme, nm la Dame aux Camélius, mais c’est une amusante et sincère peinture de mœurs, Comme on n’en trouvera plus, trente ans plus tard, quand l’Empire, puis la Restauration, auront jeté leur lourd et hypocrite manteau de décence pharisienne sur Île théâtre comme sur tout le reste. J'ai gardé pour la fin une piécette fantaisiste que je considère comme le chef-d'œuvre d’Arnould et qui manque à nos collections bisontines : le Sérail à l’Encan, dont le hasard, dieu des collectionneurs, m'a permis d'acquérir un exemplaire ; sur une donnée badine et sentimentale, qui rappelle les Trois Sullanes, et semble parfois annoncer Na- mouna, cet ouvrage renferme, avec un agréable défilé de houris de tous les aspects et de toutes les nationalités, une suite ininterrompue de ces plaisanteries piquantes que le beau sexe pardonne volontiers, car elles visent ces défauts aux- quels une femme tient plus qu'aux plus admirables vertus : la coquetterie, la légèreté, la jalousie, tout ce qui constitue proprement le charme féminin. Il y a, dans ce petit acte, des tirades fort bien venues, qui montrent ce qu’aurait pu faire Arnould avec plus d’é- tude et. de loisir Voyez plutôt entquelstenmesniencad chargé de vendre le sérail d’un vizir disgracié, annonce aux acquéreurs la mise aux enchères d’une chanteuse italienne : « Numéro trente-trois. La signora Léonore Varina, dont le gosier brillant à fait pendant longtemps les délices de l’fialie. » Vingt amants, poignardés pour elle, à Naples, attestent ses talents ; autant de lords ruinés par elle, en Angleterre, ont dûment constaté le pouvoir de ses charmes. » En France, idolâtrée, chantée, chansonnée, inoculée, gravée, sculptée, imprimée dans tous les journaux, déchirée par toutes ses rivales ; rien ne manquait à sa gloire. Mais l’inoculation altéra ses traits, un petit collet altéra ses mœurs, la musique germanique altéra sa voix, les petits soupers altérèrent sa santé, et, pour comble de malheurs, un gen- tilhomme provençal, plus altéré d’argent que d'amour, al- téra si bien sa fortune, que, forcée d'abandonner la France pour retourner dans sa patrie, un corsaire algérien la reprit sur un pirate anglais qui venait de s’en emparer, et nous la vendit. » | Voilà parler bien longtemps sans doute d'un compatriote (1) Le Sérail à l’Encan, sc. XI. Ac HÉONA rer I obseur, qui n'eut d'autre gloire que d'amuser, pendant quelques années. l’oisiveté du publie parisien. Après tout, il avait quelque esprit, et se recommandait par d’eutres esti- mables qualités : il n’y a pas un mot contre ses mœurs dans l’'Espion du Boulevard, qui déverse l’ordure sur presque tous les acteurs des petits théâtres d’aiors : les Almanachs forains ne parlent de lui qu'avec les plus grands éloges. Peut-être v eut-il chez cet humble cabotin plus de fi- nesse intellectuelle et plus de tenue morale que chez maint personnage officiel, pompeux et chamarré, solennel et vide, auquel les biographies consacrent de complaisantes et co- pieuses notices. M. Ch. BEAUQUIER, député du Doubs, donne le résumé d’une étude qu’il prépare et qui paraîtra prochainement sur les Conventionnels du département du Doubs. M. Georges GAZIER, conservateur de la Bibliothèque de Besançon, lit l’étude suivante sur Un manuscrit autobiogra- phique inédit de Charles Nodier : MESDAMES, MESSIEURS, Après les savantes communications que vous venez d'entendre, vous serez peut-être étonnés de voir se clore un congrès sérieux par celle que je vais vous faire, et qui est d’un caractere beaucoup moins austère. La faute n’en sera pas tant à moi qu’à un de vos plus grands et aimés compatriotes, Charles Nodier. Et ce que vous n’excuseriez pas de ma part, vous le lui pardonnerez, j'en suis sûr, car c’est à lui que je laisserai la parole le plus souvent possible — ce dont vous ne vous plaindrez pas Ce Franc-Comtois, plus français par là qu’espagnol, ne dédai- gnait pas la verve gauloise, et son élégant badinage vous fera — 50 — sourire sans vous irriter, d'autant que je le ferai taire quand il dépassera la mesure. Le manuscrit dont je voudrais vous entretenir dans ces quelques courts instants appartient à la Bibliothèque de Be- sançon, mais n'avait pas été identifié Jusqu'à ce Jour. Il se trouvait au milieu de hasses de papier dont le classement n'avait pas encore été complètement achevé. Il se compose de quelques feuillets qui semblent avoir été arrachés d’un cahier. La fin a disparu et il y a des lacunes dans la partie qui nous reste. Sur la feuille de couverture se trouvait inscrite au crayon la mention : Nodier, suivie d’un point d’in- terrogation. | Un rapide examen a suffi pour nous convaincre qu'il était bien l’œuvre de l’illustre comtois. La comparaison de l'écriture du manuscrit avec celle de Nodier était déjà une preuve suffisante, mais, en outre, là personnalité de l’au- teur apparaît assez clairement pour qu'aucun doute soit possible. L'auteur se nomme à un moment donné Charles Anonyme Trois étoiles, faisant allusion aux circonstances particulières de sa naissance, et donne la date de cet évène- ment, 29 avril 1780, date confirmée par les registres de r’état- civil. Il parle encore de divers faits dont on retrouve le récit dans ses « Souvenirs de jeunesse. » Enfin son style, si per- sonnel et original suffirait à le faire reconnaître à une pre- mière lecture, comme vous allez vous en rendre compte. D'autre considérations dans le détail desquelles je ne puis vous faire entrer, permettent de dater d’une façon certaine la composition de ce manuscrit écrit par Nodier dans la seconde moitié de l’année 1799, entre le commencement de juillet et la fin de septembre, avant et après le [8 brumaire. Nodier, âgé de 19 ans, était alors bibliothécaire adjoint de 1 Ecole cen- irale de Besançon, mais sa jeunesse et son inexpérience lui faisaient considérer ce poste comme une sinécure, et la lit- térature et d’autres plaisirs moins nobles l’attiraient davan- tage. C’est même à ce moment qu'il se laissa entrainer, avec d’autres camarades, à la petite manifestation bien connue du .22 thermidor an vu, sur la place Granvelle. Vous savez comment ses amis et lui s’amusèrent ce jour là à parodier sur cette place, devant un public nombreux, une séance d’un club jacobin. La police s’émut, les jeunes conspirateurs furent arrêtés, enfermés à l’hôtel de ville et traduits devant le tribunal criminel. Îls furent acquittés, car on mit sur le compte d’une légère excitation produite par des libations un peu trop copieuses cette espièglerie sans conséquence, Mais Nodier perdit, semble-t-il, sa place à la bibliothèque, A la fin de son manuscrit, il dit quelques mots de ses déméèlés avec la police, démélés qui arrêtèrent pendant quelque temps la composition de son petit travail : » Il y a un mois que je n’ai écrit! Un mois que je n’ai pu écrire | » La police a trouvé mauvais que je portasse des cheveux courts et un bonnet de maroquin. » Je me suis brouillé avec la police... » La police m'a fait rouer de coups par deux cents de ses affidés et Je n'ai rien dit. » La police a décerné contre moi un mandat d’arrèt et je me suis sauvé. » La police me fait rechercher, et me voici... Comment diable voulez-vous qu’on écrive... » Le manuscrit de Nodier est ainsi intitulé : » Moi-même, roman qui n’en est pas un, tiré de mon por- tefeuille gris de lin, » Pour servir de suite et de complément à toutes les pla- titudes littéraires du xvirI° siècle. » Comme tous les ouvrages de l’époque, celui-ci débute par une épitre dédicatoire. Mais à qui Nodier peut-il bien dédier une telle œuvre”? Il se pose à lui-mème cette question : 18 «A qui? » Si Je dédie à un homme en place que la première révolu- ton peut conduire à Synamari (c’est là, en Guyane, que ve- naient d’être déportés les proscrits du 18 fructidor), on m’ac- cusera d’avoir conspiré, » Si Je dédie à un auteur, il me dédiera le premier de ses ouvrages, et je serai obligé de le lire. » Si je dédie à un journaliste, il dira du bien de moi, et je serai déshonoré.…. » Non, je ne ferai point d’épitre dédicatoire. Je n’écris à personne et pour personne. J'écris parce que j'ai la manie d'écrire et j'ai tort. Mais je ne ferai point souffrir le publie de ma manie et j ai raison. » J’intitulerai mon ouvrage quand il sera fini. » C'est donc pour lui seul que Nodier veut écrire et c’est de lui seul de qui 1l veut parler. Vous ne vous étonnerez pas alors si le premier chapitre de son roman a pour titre: Mo, petit pronom que Nodier n’a jamais voulu trouver haïssable. « J'avais 19 ans passés, dit-il, quand j'ai écrit ceci. J'étais amoureux, sage, pédant, débauché, studieux, indolent, bi- zarre, inconstant, original, quand j'ai écrit ceci. J'avais un _ accès de folie quand j'ai écrit ceci et c'est pour cela que jai ÉCHL: » Une jeune fille se lève dans la foule et demande si je suis beau ou laid? Ni l’un ni l’autre. » Un philosophe, si je suis athée ou catholique? Ni l’un mi l’autre. » Un politique, si je suis jacobin ou chouan? Ni l’un ni l’autre. » Je suis bon par caractère, libertin par étourderie, pares- seux par goût, amoureux par caprice, joueur par désœuvre- ment, malheureux par imagination, modeste par amour- propre, et je barbouille du papier quand je n’ai rien de mieux à faire, — 975 — » Tout ignorant que je suis, Monsieur, j ai reçu ce qu'on appelle de l'éducation. On m'a donné un maitre de musique, et J'ai fini par savoir la gamme assez couramment. On m'a fait apprendre des langues et j'ai oublié le français en appre- nant le latin. On m'a enseigné les mathématiques et je suis très sûr que deux et deux font quatre par une raison toute simple, dont je ne me souviens plus. J'ai abandonné lhistoire naturelle pour la chimie, la chimie pour le dessin, le dessin pour la littérature, la littérature, le dessin, la chimie et lhis- toire naturelle pour une précieuse, la précieuse pour une prude, la prude pour une comédienne, la comédienne pour le trente et quarante, le trente et quarante pour une femme mariée, et j’achève mon éducation. » Il y a plus, Monsieur, j'ai fréquenté le beau monde et je m'y suis ennuyé. J’ai vu représenter tous les drames de Me- nier, toutes les tragédies de Chénier, tous les opéra scomico- larmoyants de Marsollier, et je m’y suis ennuyé! J'ai lu les discours de la Harpe, les madrigaux de Demoustier, les ro- inans de Duminil, et Je m'y suis ennuyé comme à une séance de l’Institut. » J'ai vu, ce qui s'appelle vu, le beau sexe du bon genre; j'ai filé le parfait amour, j'ai distillé l’élixir de la galanterie ; j'ai entendu nos merveilleuses faire de l'esprit à la journée ; Japplaudissais en baillant, et j'ai failli mourir d’ennui, pa- role d'honneur. | «Je me suis lancé dans un autre monde. Je suis devenu le pilier des tavernes et je me suis délectablement enivré. J'ai passé mes journées à table avec des libertins et mes nuits...» Ici, je suis obligé de m’arrêter dans ma lecture, car No- dier a beau dire que ce n’est pas pour les demoiselles qu’il écrit, il reconnaît lui-même que son quart d'heure de liber- tinage est arrivé. Et ce quart d'heure va durer des heures entières et'inspirer presque tout le reste du manuserit. Le voilà, en effet, qui entame l’histoire de ses amours, et, sur — 916 — ce chapitre il est intarissable et entre dans un luxe de dé- tails que vous trouveriez exagéré. Je puis du moins vous lire les quelques lignes où 11 nous met au courant de sa première passion, au reste toute platonique. «Le 12 juillet 1795, je vis pour la premiêre fois Sophie. Je m'aperçus pour la première fois le 12 juillettde lan 4795 qu'il y avait de jolies femmes au monde, et pour la première fois, je fus amoureux le 12 juillet de lan 1795. Pendant les. six premiers mois, je fis les doux yeux à Sophie, pendant les six mois d'aprés, Sophie me fit presque les doux yeux. L'année suivante elle me bouda, parce que trop longtemps je ne lui faisais que les doux yeux. L'année suivante, un fat parut, me débusqua, lui fit les doux yeux pendant un mois...» Et Nodier fut négligé. Mais Nodier ne fut pas longtemps aussi timide ! « J'avais 16 ans, nous dit-il, les cheveux bouclés, le teint fleuri, le menton cotonné. Les femmes commencçaient à dire de moi: voilà un joli enfant, et je commençais à dire d'elles : voilà de jolies femmes. » Bref, un jour Nodier rencontra, c'était en 1796, la femme d'un proconsul, d’un représentant en mission. Cette femme aimait la comédie, et Nodier alla de temps à autre déclamer chez elle et répéter avec elle des petites pièces de salon. Tous deux jouèrent ensemble des rôles d’amoureux et bien- tôt Nodier nous avoue qu'il joua supérieurement son rôle. Il le joua même si bien que des choses qui n'étaient pas dans la comédie se passèrent. Et Nodier fut tout fier d’avoir, dès sa première chute « trompé » (il emploie un autre terme que je laisse à Molière), «trompé, dis-je, vingt-cinq mil- lions de Français dans la personne de leur représentant ». La bienveillante protection du représentant et de sa femme fit nommer Nodier secrétaire d’un général. Le gé- néral avait sa chambre au rez-de-chaussée, la femme du général logeait au premier et Nodier au second étage. Mais 'ore un Jour le hasard, ou quelque démon le poussant, fit que Nodier se trompa d'étage. Le même démon amena en même temps le général chez sa femme, et notre pauvre jeune homme reçut un billet de logement pendant neuf jours, au pain et à l'eau, dans la maison d’arrêt de Besançon. Il perdit sa place, mais non moins la sympathie de la générale qui s’appliqua ensuite à le consoler de son mieux. Mais j'en ai déjà assez, sinon trop dit, sur ce chapitre, et je vous fais grâce de tout ce qui concerne Elisabeth, Juliette, Louise, la belle Marianne, etc.., etc. Je pourrais bien sans danger vous lire le chapitre 9, intitulé le « meilleur du livre », mais c’est une page blanche, uniquement marquée de points d’interrogations, d’exclamations, de parenthèses, de vir- oules, de points et de traits. Ce chapitre rappelle ce fameux sermon d’un orateur qui oublia en montant en chaire le dis- cours qu'il devait prononcer. Il ne perdit pas cependant contenance pour si peu, et se contenta d’accumuler des ad- verbes, des prépositions et des conjonctions : Mais... si... car... donc... vraiment... en effet... prononcés d’une voix tonnante et suivis d’éloquents silences. [l eut, dit-on, beau- CHuprde SUCCES. Je me contenterai, en terminant, de vous lire quelques extraits où Nodier nous parle de sa vocation littéraire et de son goût d'écrire. [l se propose. dit-il, de faire un livre et ce livre, selon lui, Imtéressera tout le monde. « Les joyeux y riront avec moi, les mélancoliques v pleu- reront quand je pleure et cela ne m'arrive pas souvent. » Les jacobins le prôneront parce que je ne suis pas chouan et les chouans parce que je ne suis pas jacobin, » Les jeunes filles promettront à leur mère d'éviter soi- oneusement les chapitres licencieux, et ne liront que ceux-là. » Je plairai aux médisants, aux sages, aux gens sensibles, aux roués. Si le ciel permet que quelque journaliste bien lourd dise du mal de moi, je reviendrai à la mode, on me Poe vantera, on m'élèvera aux nues, on me réimprimera peut- être.» Mais Nodier n’a pas toujours cette confiance que son livre plaira à tous. Même si son ouvrage est bon, il craint les cri- tiques qui lempêcheront de réussir. « Un zoile s’élève contre moi, il trouve le sujet froid, la conduite extravagante, le style plat, tout l'ouvrage détesta- ble. Le public répète ses déclamations et mon livre est déprisé. » Un démagogue me dénonce sourdement au censorat de la police. fl a vu à toutes les pages des outrages aux républicains, des provocations à la royauté, des indices de conspiration. On ne me lit pas... pour cause... mais on me condamne et mon livre est séquestré. » Un tartufe... m'accuse hautement d’être le pervertisseur de la Jeunesse, le corrupteur de la morale publique et mon livre est lacéré. » Les folliculaires, les jacobins, les cagots hurlent en chœur et mon libraire est à l’hôpital. » Triste et fatale existence que celle d’un écrivain. Il croit avoir imprimé à ses productions le sceau de l’immortalité. il leur survit ; 1l compte sur la gloire, on le dénigre. Il espère acquérir à force de travaux l’aisance d’une heureuse médio- crité et 1l meurt de faim dans un galetas. [1 ne peut rien pu- blier, rien écrire qui ne froisse un parti, qui ne choque une Opinion. » Aussi Nodier déclare-t-il qu'il ne se fera pas imprimer. Ou s’il mét un livre au jour, ce livre traitera de la fidélité des épouses, de la vertu des comédiennes, du désintéressement des fournisseurs, c’est-à-dire, ajoute-t-il, qu'il ne sera com- posé que de papier blanc. Et il ajoute cette fière déclaration : « Moi, je resterai inconnu dans un grenier, avec mon écri- oO toire et mes bouquins... Je ferai des couplets qu’on ne chan- tera pas, des comédies qu’on ne jouera pas, des livres qu'on enverra à l’épicier. . je barbouillerai du papier sans relâche et Je porterai encore pendant deux ans mon habit brun qui est troué au coude.» Heureusement, Charles Nodier n'a pas tenu parole. I] s’est fait imprimer pour le plus grand charme de ses contem- porains et de nous-mêmes, et 11 v a trouvé, par surcroît, l’ai- sance et la gloire, C’est pourquoi vous m’excuserez de vous avoir présenté cette œuvre de Jeunesse, de première jeu- nesse, du délicieux conteur, et si même, comme c'est possi- ble, sinon probable, 1l a inventé une grande partie de ce qu'il nous raconte, son récit a encore assez de grâce pour mériter d’être au moins signalé. La séance est ensuite levée par M. M. THURIET, qui dé- clare clos le V° Congrès de l'Association Franc-Comtoise. VIII. Visite de la Ville Après la séance publique, les congressistes se sont divisés en plusieurs groupes. Les uns ont visité les Musées de pein- ture et d'archéologie, si renommés et à juste titre, les Mu- sées Vuillemot, Grenier et Victor Hugo ; les autres sont allés au Musée d'histoire naturelle ; l’un des plus riches de France, gräce aux legs importants qu'il a reçus. D’autres enfin ont parcouru les salles de notre belle Bibliothèque municipale, célèbre en France et à l’étranger par la quantité et la rareté des livres qu’elle possède, et par les inestimables œuvres d'art de toute espèce qu’elle renferme. Le lendemain 2 août, les congressistes ont été voir le beau panorama qu’on peut admirer du haut de la Citadelle, dont M. le général gouverneur de Besançon avait, par une mesure — 280 — gracieuse, autorisé l’accès. Puis ils se sont rendus à la Ca- thédrale où le fameux tableau de l’Annonciation de Fra Bar- toloméo, le tombeau de Carondelet et la jolie petite chaire dentelée du xve siècle où prêcha Saint François de Sales, ont longtemps retenu leur attention. M. le chanoine de Jallerange a bien voulu les introduire ensuite dans le Palais de l’Arche- vêché et dans les appartements somptueusement restaurés et ornés par le cardinal de Rohan. Enfin la curieuse pendule astronomique de la cathédrale leur a montré une fois de plus l’habileté et le goût de nos vieux horlogers bisontns. Le soir, M. Lebeuf directeur de l'Observatoire a fait aux congressistes avec la plus parfaite bonne grâce, les honneurs de l'établissement qu'il dirige avec tant de compétence et de succes. Bref, ceux-ci ont quitté Besançon emportant le meilleur souvenir de leur réunion dans la vieille cité comtoise et 1ls se sont donné rendez-vous pour l’an prochain à Belfort. bé és > — 981 — LISTE DES MEMBRES DU CONGRÈS MM. Maurice THURIET, avocat général près la Cour d'appel de Be- sançon, président de la Société d'Emulation du Doubs, Prési- dent du Congrès. Georges GAZIER, Conservateur de la Bibliothèque Publique de Besançon, Secrétaire général du Congrès. PERREAU, professeur à la Faculté des Sciences de Besançon, adjoint au maire de Besançon. TRIGANT-GENESTE, secrétaire général de la Préfecture du Doubs. L. AUBERT, à Besançon Dr BAUDIN, membre de l’Académie de Besancon, CH. BEAUQUIER, député du Doubs. BONNET, pharmacien, à Besançon. Abbé P. BRUNE, curé-doyen de Mont-sous-Vaudrey (Jura). Dr BRUNSCHWIG, membre de la Société de médecine de Be- sançon. D' BLONDON, à Besançon. CELLARD, architecte, à Besançon. CLÉMENÇOT, professeur au lycée de Lons-le-Saunier. P. CORDIER, agent principal de la Compagnie d'assurances l_« Union », à Besançon. D' P. CORLIER, médecin-major des troupes coloniales. D' CosTE, bibliothécaire, à Salins. Henri COULON, avocat, à Besançon. Abbé DruoT. DuBaAIL-Roy, secrétaire de la Société belfortaine d'Emulation, à Belfort. FAUQUIGNON, trésorier de la Société d’Emulation du Doubs, à Besançon. FEUVRIER, professeur au Collège de Dole. FEVRET, professeur au Collège de Dole. Abbé FROMOND, curé de Crissey (Jura). ' — 9289 — GAIFFE, professeur au lycée de Besançon. J. GAUTHIER, archiviste de la Côte-d'Or. Jules GROS, ancien député du Doubs, à Besançon. GRÜüÜTER, dentiste, à Besançon. LEBEUF, directeur de l'Observatoire de Besançon, professeur à la Faculté des Sciences de Besançon. Dr LEDOUx, membre de l’Académie de Besançon. Chanoine LOUvVOT, curé doyen de Gray André MAIRE, à Paris. MALDINEY, professeur à l'Ecole de Médecine de Besançon, chef de travaux à la Faculté des Sciences. D' MARCEAU, président de la Société d'histoire naturelle du Doubs. À. MERLE, ingénieur des ponts et chaussées, à Besançon. MONNIER, professeur au lycée de Vesoul. G. MOURET, ingénieur en chef des ponts et chaussées, à Be- sançon. Abbé MourLor, curé de Servigny (Doubs). L. NARDIN, à Besançon. PAJOT, professeur au lycée de Belfort. PARIZOT, vice-président de la Société d’'Emulation du Doubs, à Besançon. Abbé M. PERROD, aumônier du Lycée de Lons-le-Saunier. PICOT D’ALIGNY, conseiller général du Jura. H. ProsT, élève de l’Ecolie des Chartes, à Paris. QUINET, receveur des postes et télégraphes en retraite, à Dole. Abbé ROSsSIGNOT, bibliothécaire de l’Archevêché de Besançon. Albert Roux, président de la Société d’'Emulation de Montbé- liard, à Montbéliard. Roger Roux, substitut du procureur de la République, à Ve- soul. Ch SANDOZ, conseiller municipal, à Besançon. H. SAVOYE, artiste peintre, à Besançon. VAISSIER, membre de l’Académie de Besançon, conservateur du Musée archéologique de Besançon. VIEILLE, président de la Société des Architectes de Besançon. VUILLERMET, directeur de la Revue viticole de Franche-Comté et de Bourgogne, à Poligny (Jura). — 9283 — Adhérents qui n'ont pu assister au Congrès MM. Ph. BERGER, membre de l’Institut, sénateur du Haut-Rhin, professeur au Collège de France. GUILLEMIN, président de l’Académie de Besançon. Dr MAGNIN, doyen de la Faculté des Sciences de Besançon. MAIRE, président de la Société grayloise d’'Emulation, à Gray. Abbé BABEY, curé doyen de Foncine-le- Haut (Jura). Dr BERTIN, à Gray. P. FEBVRE, professeur honoraire de l’Université, à Besançon. L. FEBVRE, ancien élève de l'Ecole normale supérieure, agrégé de l’Université, pensionnaire de l’Institut Thiers. L. GASCON, professeur au petit lycée de Lyon. GIRARDOT, professeur au lycée de Lons-le-Saunier. Ch. GoODARD, professeur d'histoire au lycée du Puy. L. LEBRUN, répétiteur au lycée Victor Hugo. P. NICOLLE, bibliothécaire-adjoint de la Ville de Besançon. À. PIbOUX, archiviste-paléographe, docteur en droit, avocat à Dole. M. PIGALLET, archiviste du département du Doubs. Général K. SCHNEEGANS, membre de la Société d'Emulation de Montbéliard. VIT. rose TABLE DES MATIÈRES MRÉUMONpIéRIÈre ER NE AR Et Section d'histoire. — Communications de MM. Payor, l’abbé FROMOND, H. PROST, l’abbé PERRoD, A. Roux, l'abbé RossiIGNorT, le D' BLONDON, Jules GAUTHIER . . Section d'archéologie. — Communications de MM. GIRARDOT, GROSJEAN, FEVRET, FEUVRIER, VAISSIER, l'abbé BRUNE . . Section des Sciences. — Communications de MM. MERLE, CLÉMENÇOT, le D' MARCEAU, MALDINEY . Séance plénière. — Vœux présentés au Congrès. — Décisions relatives au Congrès de 1905 . Banquet ER Ta Re Re Re" RÉUNION pUbIIque, MANN ERA Discours de M. THURIET, président de l'Association . Communication de M. Ch. SaAnpoz : La Restauration de l'Hotel de Ville de besanroneot ete Communication de M. F. GAIFFE : Un dramaturge bison- tin au XVIIIe siècle, Arnould-Mussot . Communication de M. Georges GAZIER : Un manuscrit au- tobiographique inédit de Ch. Nodier VIIL. Visite de la Ville par les Congressistes, . , . . , ., Piste} des Membres du Conores PP NOR RNA LE LIVRE DE RAISON D'ÉMMANURL-SINON POURCHET Lecture faite au Congrès des Sociétés savantes (Association Franc-Comtoise) Par M. l'abbé Auguste ROSSIGNOT BIBLIOTHÉCAIRE DE L'ARCHEVÊCHÉ J'aurais voulu, Messieurs, vous présenter un manuscrit qui m'a intéressé à première vue, mais n'ayant pas eu le temps d’en faire une étude complète, j'y jetterai avec vous un coup d’œil rapide. [ s’agit d’un livre de raison, et vous savez que, depuis une trentaine d'années, on a beaucoup étudié ces documents qui sont aussi précieux pour les historiens que pour les éco- nomistes. Ils sont, avant tout, des livres de comptes. mais à côté du prix des divers objets de consommation, on Y trouve tout ce qui concerne la famille, la communauté, la paroisse, la province et même la nation [ls nous exposent, dans toute leur réalité, les multiples manifestations de la vie religieuse, économique, intellectuelle, politique et sociale des siècles passés. L'auteur du Livre qui m'est tombé entre les mains est un sieur Emmanuel-Simon Pourchet, d’'Aubonne, petit village situé sur le second plateau des montagnes du Doubs, à gau - che de la route de Mouthier à Pontarlier, canton de Mont- benoit. Il fut commencé en 1747 et continué par son pre- mier auteur et ses héritiers jusqu’en 1801. Sur les 406 pages qu’il comprend, 193 seulement sont consacrées aux évène- — 9286 — ments de chaque jour. À partir de la page 194, il n’est plus guère qu'un recueil de recettes et de remèdes. Une douzaine de pages sont consacrées aux généalogies des principales familles d’'Aubonne. Beaucoup d'observations relatives à la culture, aux semailles et aux autres travaux agricoles y sont contenues. Îl renferme aussi de nombreux préceptes mc- raux et des avis qui sont dits utiles à tous. A coté du sentiment de la propriété individuelle qui est un des plus développés chez les habitants de nos campa- gnes, on voit aussi, non moins vif et non moins jaloux, celui de la propriété commune dans nos villages et paroisses. C’est par des considérations générales sur la propriété que s'ouvre notre manuserit. « La terre destinée par le créateur aux besoins de l’homme, fut abandonnée à ses paisibles travaux : après la chute. d'Adam, seul avec sa compagne dans cette immensité, il posséda d’abord tout. Et la division du globe, fille de l’esprit d'intérêt et de propriété, ne commença ensuite qu’en faveur des différents parts qui se réunirent en société ; mais bien- tôt chaque particulier voulut jouir, et de là est venu que l’on appelle la terre de Jean et celle de Pierre, ete. La com- modité des établissements a excité l’envie, et pour se dé- fendre on s’est ligué., De là sont venues les nations. Les vainqueurs aux dépens des vaincus, qui ont été faits leurs serfs, se sont divisés entre eux leurs conquêtes. De là sont venus les seigneurs et les sujets. « La religion de Jésus-Christ a ensuite réuni nombre de ses adorateurs sous la bannière d'un de ses saints, pour ne faire qu'une société où tout était en commun, et une circon- férence de plusieurs lieues n’a souvent formé qu'une seule paroisse composée quelquefois de huit ou dix villages qui étaient pour lors des hameaux de Ia paroisse. La suite des temps les fait ensuite partager leurs terrains, de sorte que presque tous ces dits hameaux font chacun leur commu- nauté. Depuis une grande partie de ces dites communautés — 987 — ont bâti des églises. Telle serait l’église de Saint-Gorgon, une des plus anciennes du bailliage de Pontarher ; elle était la paroisse de plusieurs hameaux tels seraient : Aubonne, Are-sous-Cicon et autres. Aubonne est ainsi nommé à cause de l’abondance et de la bonté de ses fontaines. » Les biens communs étaient, dans la plupart des com- munautés des montagnes du Doubs, assez considérables, pour qu’on n’adimit pas quiconque à en jouir. « Avant la conquête française, nous dit Simon Pourchet, les commu- nautés de villages exigeaient un prix des habitants qui venaient s'établir dans leur communauté pour avoir une lettre d’'habitantage, lesquels avaient des privilèges de plus que les étrangers, » Les lettres d’habitantage étaient ana- logues à celles de bourgeoisie. Les unes et les autres ont été supprimées ; mais elles avaient leur raison dans les services rendus. Aujourd'hui encore, dans notre bonne ville de Be- sançon, et ailleurs, ne faut-il pas certaines conditions de sé- jour pour avoir droit à l’hospitalisation et aux secours du bureau de bienfaisance ? Les délimitations entre les communautés voisines étaient affuüre importante et les livres de raison nous les signalent avec soin. « En 1743, nous dit le sieur Pourchet, les habi- tants d’'Aubonne délimitèrent avec ceux de Mouthier. Il y eut un terrible débat, surtout à la grange de Brasse et au bais de Rappaus. Le bon Dieu veuille qu'aucun n'ait blessé sa conscience. Il fut nommé des arbitres. Monsieur d'Evillers, lieutenant général à Ornans, y estoit, Monsieur l'avocat Teste et autres. Monsieur Maillet de Vuillafans y était pour no- taire. Heureux ceux qui auront bien fait, mais malheureux ceux qui auront blessé leur conscience en ce point ; car ils ont planté une borne proche de la maison des Girardet de là le bois, et l’ancienne s’est retrouvée au-dessus de l’areste derrière chez Girardet ; c’est la seule pierre qu’ils ont trouvée en y faisant leurs coupes. Et les cercles qu’ils ont faits sur Aubonne, aux Combottes Renaud et au-delà du puits de — 988 — Rappaus, ainsi qu’à Brasse, dénotent l’avidité et la soigneuse attention des procureurs spéciaux de Mouthier. » En 1762, une nouvelle délimitation eut lieu. « Il y a dix ou onze ans les habitants d’Aubonne convinrent avec ceux de Saint-Gorgon de planter des limites nouvelles dans les communaux. [ls avaient été limités précédemment, mais il y eut désaccord et les habitants d’Aubonne ne pouvaient pro- duire de titres. Ceux de Saint-Gorgon les cachaïent. Ils con- vinrent avec leur curé, le sieur Détouillon, de l’endroit où il fallait les planter. Quelques jours après, les jeunes gens d’Aubonne s’assemblèrent, réfléchirent, ensuite s’en furent ürer toutes lesdites bornes à mesure que les vieux les plan- taient et ils firent bien, car ils les avaient plantées dans le bas des Combes, et, après bien du remuement, les choses en restèrent à. « Quelques années après les habitants d’Aubonne parta- geant les bois blancs du bois de Solemant, ils convinrent qu’il fallait aller faire du bois à la Pille, au revers des Combes, dessous Saint-Gorgon. Pourquoy ils me firent écrire un mot de délibération que celui qui serait pris, les autres le sou- tiendraient ; ce qui fut fait, car nous y fûmes du même jour. En deux endroits on fit plus de cent voitures de bois ce jour là. Les forestiers de Saint-Gorgon nous reportèrent dix- sept et voilà le procès commencé, qui a duré deux ans. Des- cente se fit par les Messieurs de la gruerie et après bien des frais, on s’arrangea, mais ceux d’Aubonne gagnèrent bien du terrain, » Se rendre ainsi justice soi-même était peut-être: le seul moyen qui put attirer l'attention de ceux qui en étaient chargés et par conséquent le seul efficace pour l'ob- tenir. Après la propriété privée où commune, ce qui intéresse le plus le cultivateur, ce sont les récoltes. Aussi sont-elles, chaque année, enregistrées avec soin : la pénurie, l’abon- dance, les sécheresses, les pluies, les prix du blé et du vin sont exactement notés. De même que les Romains dataient POS les événements par les consulats, le sieur Pourchet com- mence régulièrement son rapport annuel par ces mots : En Pannée ... tel et tel étant syndics, le blé se vendit tant, le vin tant. [l procède ainsi jusqu'en l’année 1790. En voici quelques exemples avec des chiffres qui pour- ront intéresser les économistes : « En 1749, Antoine Sancey et Benoist Sancey échevins, le bled s’est vendu jusqu'à la S. Jean-Baptiste quatre à cinq livres l’esmire et à la Saint- Jean il est allé jusqu’à douze livres, mais il est venu pres- qu'à son prix à la moisson; le vin trente-six à quarante livres. En 1750, Jean-Baptiste Aymonin le vieux et Claude Courlet échevins, le bled environ quatre livres, le vin en- viron trente-six livres. En 1755, Louis Sancey et François Léoutre échevins, voici la bonne année, mes amis, le bled environ trois livres dix sols el le vin vingt livres. En 1757, François Viennet et Joseph Sancey échevins, le bled aux environs de quatre livres, le vin un louis d’or. Mais l’un des premiers jours du mois de may les vignes gelèrent, le vin doubla et même tripla de prix. » Comme Jean-Claude Mercier de Mamirolle, dont j’aiétudié le livre de raison, Emmanuel-Simon Pourchet ne veut pas être ignorant des choses de son pays et il consacre un cer- tain nombre de pages de son livre à l’histoire de la province. Ces notes sont tirées de manuserits assez répandus à cette époque. L’un d’eux, attribué à Claude-François d’Orival, faisait remonter l’origine de Besançon jusqu’à la guerre de Troie : « L’an de la création du monde deux mille sept cent septante-cinq, avant l’avènement de notre Rédempteur, deux mil sept cent soixante-neuf, la cité de Chrysopolis fut édifiée, après la destruction de Troie, par Achil, fils d’'Hec- ior Françion et par des payens, lesquels passèrent la mer et vinrent en Gaule, etc ». Ces pages sont textuellement reproduites par Pourchet et par Jean-Claude Mercier. D’autres évènements plus rapprochés de nous et plus cer- tains sont notés par le sieur Pourchet. Il nous apprend d’a- 19 000 — bord que jusqu’en 1537 Aubonne fut un des vingt villages francs dépendant de Pontarlier. « Tous les villages formés dans l'étendue de l’ancien territoire de Pontarlier s’appe- laient Bouchoyage. Leur hberté originaire était la même que celle de Pontarlier et il n’y avait point de vrai seigneur, en sorte qu'ils n'étaient point gènés pour leur bois comme les voisins. Le droit de bouchovage s’v est conservé plus long- temps. Vingt villages participèrent au droit de cité, tant pour les élections des magistrats que pour l’administration de la commune. Ils n’y ont renoncé qu'en 1537, par un traité où ils sont tous dénombrés. » En 1748, le seigneur d’Aubonne était, pour moitié, le maréchal duc de Randan, en tant que seigneur de Château- vieux, et pour l’autre moitié, Messieurs Marguier d’Aubonne qui tenaient cetle seigneurie par acquisition du roi depuis 1706. Ils l'avaient acquise pour une somme de 1,800 livres. Le seigneur avait droit de haute, moyenne et basse justice pour tous délits, forfaits, battue, rescousse et autres. se commettant sur le territoire de la seigneurie. Les revenus de ladite seigneurie se réduisaient à une cense de six livres estevenantes, appelée la giste d’Aubonne, payable à Chàä- teauvieux, sous peine de trois sous estevenants d'amende. Voici quelques autres faits intéressant la province. La présente année 1784, messieurs les avocats de Besançon sont en procès au conseil avec le parlement au sujet de l’un d'eux qui à fauté, et les avocats veulent le rayer du cata- logue des avocats et le parlement ne veut pas ; ces mes- sieurs les avocats prétendent être indépendants du parle- ment pour cet objet. En conséquence ils sont tous interdits ; pas un ne plaide, ni ne donne avis, si ce n’est comme en. contrebande, en cachette. « En 1674 pareille affaire s'était présentée à propos du nom de Messieurs ou Nosseigneurs à donner à Messieurs du parlement. Les avocats perdirent leur procès. Celui-ci — 991 — sera jugé à la Saint-Martin. C'est le pot de terre contre le pot de fer. » Il ne fut jugé qu’en 1785, mas, comme le sieur Pourchet le prévoyait, les avocats furent condamnés. Nous trouvons mentionnés dans le livre du sieur Pour- chet, des faits plus généraux : « En 1755 la terre a tremblé à plusieurs endroits de l'univers. La ville de Lisbonne a été renversée, quelques maisons à Besançon un peu écroulées, mais peu dans nos environs. C'est dans le mois de novem- bre et encore plus de décembre que cela est arrivé. » Le souvenir des guerres de 1636 était encore vivant du temps de Simon Pourchet ; on le voit à la manière dont il en parle : « Mon ayeul était Denis Pourchet : c'était le temps de guerres presque continuelles. Les Suédois, ceux-là, tuaient tout. Plusieurs camps-volants venaient ravager après eux. M. Franchet traita avec eux pour une somme d'argent. On était comme l'oiseau sur la branche, obligé chaque année plusieurs fois à courir promptement se cacher et quelquefois y rester plus de deux ou trois mois. Ils fesaient du pain comme ils pouvaient, dans les rochers, dans les cavernes ; les habitants de ce temps-là étaient plus curieux de l’argent que des fonds à cause des guerres. Pendant sept ans de temps on n'avait pu semer un grain. » Simon Pourchet nous parle ainsi des évènements de l’an 1789 : « L'année 1789, grand remuement dans le royaume de France. Le roy, se trouvant en besoin d'argent, fit faire une assemblée nationale des trois ordres, qui sont le clergé, la noblesse et le tiers état qui sont les roturiers. Toutes les communautés assemblées ont fait un cahier de plaintes et ont nommé des députés pour s’assembler dans les bailliages, là où on refondra les dits cahiers tout en un seul, pour les porter aux grands bailliages, qu'il y en a quatre dans la pro- vince, et là encore on refondra lesdits cahiers en un seul pour chaque grand bailliage, et on a choisi des députés pour _ Versailles, qui y ont bien des maux. Mais le peuple de Paris — 299 — soutient le i'ers état au péril de la vie, qu’il s’y est déjà bien répandu du sang à Paris, parce que la noblesse et le grand clergé a de la peine à payer comme nous, c’est-à-dire sans privilège. On verra cy après. Mais bien des commu- nautés ont fracassé les châteaux de leurs seignenrs, brûlé les titres, etc. Dans Aubonne on n’a rien fait de tout cela, et je crois qu’ils s’en trouvent bien. Le 29: juillet plusieurs communautés sur les côtes de Vuillafans, y avant quatre à cinq cents hommes, ont descendu audit Vuillafans, ont pris leurs papiers chez M. le châtelain Maillet, les ont brûlés sur la place. Le bruit répandu à Lod, Mouthier, Aubonne et tout le val du Sauget, val d’Usier, val de Maillet, toutes contrées ayant milice bourgeoise sont allées au secours, croyant être l'ennemi, d’une guerre civile formée par la noblesse, mais ayant appris ce que c'était, on a été appaisé. Pas moins chaque communauté garde la nuit. Il y a dix hommes cha- que nuit à Aubonne de garde ; ainsi des autres, à proportion du nombre des habitants. Plusieurs sauvaient déjà des paquets. « Nous avons un bon ministre pour le peuple, nommé M. Necker, que la noblesse ne peut voir, du moins la grande noblesse, mais pas tous ; il y en a encore pour le tiers état ainsi que le petit clergé. « En 1789, l'assemblée des étais-généraux a bien renou- velé des affaires, levé toutes les gabelles ; tous les droits honorifiques des seigneurs supprimés sans indemnité ; le surplus de leurs droits rachetables, etc. Pour ainsi M. d’Au- bonne a Ôté ses bancs de la chapelle, laquelle appartient à présent en toute propriété à la communauté. Cela est bien juste ; il n’y a que vingt ans que la communauté l'avait cons- struite sans que M. d’Aubonne y ait contribué d’un sol. » Il semble qu’arrivé au moment de la terreur révolution- naire, Simon Pourchet n’ait plus osé consigner ses pensées et ses opinions dans son livre de raison. Il ne dit presque plus rien des évènements, sous prétexte qu’il y auraït trop à De dire, mais n'est-ce pas plutôt par crainte de voir son livre tomber entre les mains de gens qui auraient pu le traiter corame suspect ? « Les nouvelles sont si abondantes, dit-il, quon n’en peut rien marquer. C’est le monde renversé ; le tiers état lemporte sur la noblesse et le clergé, de sorte qu'il n’y a plus de noble, plus de seigneur et même de nom, plus de privilège de quelque façon que ce soit pour les deux pre- miers ordres. Le tout sera accordé par le mérite et ceux du tiers état ont autant de droits d’être évêques, archevêques, etc., ainsi qu'aux charges du barreau, le tout au mérite. Cela est bien juste ». Deux mots paraissent résumer toutes ses impressions : « La Révolution a, depuis 4790, fait bien des ravages ; le gouvernement nouveau a réprimé bien des abus. » Nous avons dit que le livre de Simon Pourchet renferme un grand nombre d’observations relatives à la culture et aux travaux agricoles ; il contient aussi de nombreux pré- ceptes moraux et hygiéniques, et il semble, dans sa der- nière partie, n'être plus qu’un recueil de remèdes et de re- cettes. Nous allons en citer quelques passages pour’en avoir une idée. Voici d’abord « un avis salutaire pour le spiritutl et le temporel, sur la sobriété. » « Qu'est-ce donc que la sobriété? c’est une vie d'ordre, de règle et de tempérance. Mais il faut éviter aussi des excès de chaleur, de froid et de travail. L’intempérance fait plus mourir de gens que l'épée. On a l'expérience qu’un homme sobre, sortant de tous ses repas avant encore un peu d’appétit, est exempt de toutes maladies, même de la peste, et mourrait sans être malade, de pure défaillance de nature, comme une lampe qui s'éteint faute d'huile, et qu'un homme sobre peut vivre longtemps, même un siècle. [ y a deux proverbes : l’un est que qui veut manger longtemps doit manger peu, car moins on mange, plus on vit. L'autre est — 994 — que ce qu'on laisse d'aliments fait plus de bien que ce que l’on prend. « De toutes sortes d'aliments aucuns ne conviennent mieux aux personnes infirmes ou avancées en âge qu'une espèce de panade avec un ou deux œufs. On peut vivre de cela seul et d’une vie aussi longue que saine. Boire peu de vin, n'en faire jamais excès, le mêler de quelque peu d’eau, surtout les plus fumeux. La viande n'est pas saine au corps ; l'excès de viande engendre bien des maladies. De trop man- ger de viande bouche les organes ; les veux en sont affaiblis. Pour trouver la juste mesure de boire et de manger, c’est qu'en sortant de ses repas on puisse être en état de s’appli- quer à des fonctions honnêtes, à l’étude, à donner de sages conseils, à paraître en des conversations de gens honnêtes, etc. La nature et la raison demandent que l’on se nourrisse de manière que la faculté animale et la faculté raisonnable ne soient point offensées ; la nourriture doit être uüle à ces deux facultés et non être un obstacle à leurs fonctions ; il faut être aussi en état de s’appliquer après le repas qu’a- vant. La sobriété rend l’homme vigilant, de bon conseil, sage, toujours de bonne humeur avec tout le monde, gai, honnête, etc. » : Voici maintenant une recette que Simon Pourchet donne comme précieuse : « Recette pour le vinaigre des quatre voleurs, qui est un préservatif dans les maladies épidémiques. Prenez de la rue, de la sauge, de la menthe, du romarin, de l’absinthe, de la lavande, de chacun une poignée. Faites les juster dans quatre pintes de vinaigre de vin blanc. Mettez le tout dans un pot de terre neuf, bien couvert, sur les cen- dres chaudes pendant quatre jours. Ensuite passez la li- queur dans une chausse et mettez-la dans des bouteilles bien bouchées avec du liège. Mêlez dans chaque bouteille d’une pinte un quart d’once de camphre. Lavez-vous la bouche, frottez-vous les reins, les tempes avec cette liqueur. Respirez-en par les narines. Quand vous irez à l’air, portez 295 — sur vous un morceau d’'éponge imbibée de la liqueur pour la flairer en toute occasion à l'approche d’un lieu suspect. La bouteille est celle de Paris qui est une bouteille de tiers. » Terminons par cet avis sur l’amitié : « De tous les biens le nombre d'amis est le plus utile, Il faut surtout bien en choisir un entre mille, | L'éprouver une couple d'années, S'il vous aime, s'il sait se taire Le ciel qui vous l’a donné N'a plus de présent à vous faire, DONS FAITS À LA SOCIÉTÉ (4903-4905) Par lé DÉPARTEMENT DU DOUBS AN PE Re 300 f. Par la: VILLELDE:BESANCON ER RE 400 f. Par M. le MINISTRE DE L'INSTRUCTION PUBLIQUE : Bulletin du Comité des Sociétés savantes : Bulletin archéologi- que, 1903-1904 ; historique et philologique, 1904, 1-4, scien- üfique 1904 : Congrès à Bordeaux, 1903. Bibliographie des travaux historiques et archéologiques publiés par les Sociétés savantes de France, t. IV, 3. Rapport général administratif et économique de l’Exposition universelle internationale de 1900, par M. Alfred PICARD, t. lat VII etrpièces annexes Catalogue général des manuscrits des bibliothèques publiques de France : Besançon, t. XXXIII et XXXIV ; t. XLI, 3e sup- plément, Lyon; Orléans, t. XLIII; Arsenal (Paris), Vitry-le- François, Reims, t. XXX VIII et XXXIX. Bibliothèque de l’Ecole des Chartes, t. LXIV et LXV, 1903-1905. Annales du Musée Guimet, t. XVI et XVII, 1905; Revue de l’Histoire des religions, t. L., n6 3 ; Bibliothèque de Vulgari- sation, t. XVI ; Jubilé du Musée Guimet. — Conférences 1903- 1904. Par MM. LE RECTEUR DE L'ACADÉMIE : Séance de rentrée des Facultés de Besançon, 1904. F.-X. PERROT (L’Abbé), membre correspondant : ses deux pu- blications : Jérusalem (aller et retour) ; Mon Village. MARQUISET (le Comte Alfred), membre correspondant: Pre- mière levée ; Armand Marquiset (1797-1859): À travers ma vie, Souvenirs classés et annotés par son petit neveu. — 297 — MAGNIiN (le Dr Ant.), membre résidant : l'Edaphisme chimique — Rapport annuel sur l'exercice 1903 à l’Université de Be- sançon ; — La Végétation des Lacs du Jura, 1904. JEANNENEY (capitaine), membre résidant : Conférence sur l'his- toire militaire de Besançon (Kvri° et xiIx° siècles). LE PRÉFET DU DOUBS : Rapports et procès-verbaux du Conseil général, avril et août 1904. JANET (Charles) : ses notes et observations sur les fourmis et les guépes, 4 broch., 1903-1905. MAUSSIER (P. B), anc. membre de la Société : sa notice sur le chemin gaulois de Roanne à Saint-Just sur Loire. LEBEUF, directeur de l’Observatoire de Besançon: XVe R. Bulletin astronomique, chronométrique et météorologique, 1902-1903 et 1903-1904. BAUDIN (Docteur), membre résidant : l'Année sanitaire et dé- . mographique à Besançon, 1903. COURTOT (J.-G.), membre résidant: Catalogue de sa bibliothèque, ouvrages d’apiculture, 1904 Louvor (chanoine), membre correspondant : Etude sur Notre- Dame de Gray, par M. l'abbé VUILLEREY. MAIRE (capitaine), membre correspondant : Etude sur la Race Man du Haut-Tonkin. PRINET (Max), membre correspondant : Recherches sur la monnaie de Moreium (Morey). — 998 — ENVOIS DES SOCIÉTÉS CORRESPONDANTES (1903-1905) Mémoires de la Société zoologique de France, t. XVI, 1903. Revue de l'Histoire de Versailles, 1905. Mémoires de la Société de l'Histoire de Paris et de l’Ile de France, t. XXX, bulletin 1903. — Lettres de M. de Marville, lieu- tenant-wénéral au ministre Maurepas, 1742-1747, par M. A. DE BOISLISLE, t. Il. Congrès archéologique de France (Société française d’archéo- logie), à Troyes et à Provins en 1902. Journal des Savants, 1903, 1904 et 1905 en cours. Académie des Inscr. et Belles-Lettres, Comptes rendus, 1903-1904. Revue épigraphique (M. ESPÉRANDIEU), 1903, t. V, 1904, 113-114. Revue des Etudes grecques, t. XVI et XVII, 1903-1904. Bulletin et Mémoires de la Société des Antiquaires de France (Mettensia), 1903 et 1904. Bulletin et mémoires, 7e série, t. LIT, 1903 ; — Centenaire, 1904. Revue des Etudes historiques, 69 année, 1903. Bulletin de la Société de botanique de France, 1903-1904; Tables ; Session à Bordeaux, 1904. Comptes rendus de la Société de secours des Amis des Sciences, 1903 et 1904. Revue africaine, 250-255, 1904. Ornis, Société ornithologique, t. XII, 1903-1904. Bulletin de la Société philomatique de Paris, 1902-1903. Société française de Physique, 1903-1904, 1-2. Bulletin de la Société pour la protection des paysages de France, 1903-1904. Société de botanique de France, 1904. Mémoires de la Société d'anthropologie de Paris, LINPASC0S t. V, 1904. Spelunca, 1903, t. V, nos 36 à 39, 1905. Annuaire de la Société philotechnique de Paris, 1903. — 299 — Bulletin de la Société des sc. hist. et nat. de Semur-en-Auxois, 1902-1903. Société d'histoire et d'archéologie de Chalon-sur-Saône. — His- toire de Sancey-le-Grand, par M. L. NIEPCE, t. III. Bulletin de la Société hist. et archéol. de Langres, 1904. Annales de la Société d'Emulation des Vosges, 1903 et 1904. Bulletin de la Société philomatique Vosgienne. Annales de la Société d'Emulation de l'Ain, 1903 et 1904. Le Sillon (Vesoul), 1903-1904. Bulletin de la Société des sciences naturelles de Saône-et-Loire, 1903-1904. Bulletin de la Societé belfortaine d'Emulation, 1903. Annales de l’Académie de Mâcon, 3 5s., t. VIT, 1902; t. VIII, 1903. Revue viticole et horticole de Franche-Comté (Poligny), 1903 et 190%. Bulletin de la Société des sciences naturelles et d'archéologie de l'Ain, 1903 et 1904. Société d'histoire, d'arch. et de Litt. de l'arrondissement de Beaune, 1901 et 1902. Bulletin de la Soc, d’agr, sc. et arts de la Haute-Saône, nos 2 et 3, 1902-1903. Mémoires de la Société d'Emulation de Montbéliard, t. XXX et XXXI, 1903 et 1904. Mémoires de l’Académie des Sciences, Belles-Lettres et Arts de Besançon, 1903 et 1904. Bulletin de la Société Grayloise d'Emulation, n°5 6, 7, 1904. Bulletin des séances de la Société des sciences de Nancy, t. V, 1904. Bulletin de la Société des sciences naturelles de l’ Yonne, t. VIT, 1903 et 1904. Revue Bourguignonne, publiée par l’Université de Dijon, t. XIV, 1-2, 1903-1904; — Le Mystère dela Passion en France du XIVe au XVIe siècles, par M. Emile Roy, 2 vol. Mémoires de la Société Bourguignonne d'histoire et de géogra- phie, t. XX, 1904. Mémoires de la Société d’agr. com. sc. et arts du département de la Marne, 1903. Société d'histoire naturelle d’'Autun, 16e bull., 1903. Bulletin trimestriel de la Société d'histoire naturelle de Mâcon, t. II, 1904. ; Mémoires de la Société académique d'agriculture, sciences, belles- lettres et arts du département de l'Aube, t. XI, 1903. Bulletin de la Société industrielle et agricole d'Angers, 1903. Revue de l’histoire de Versailles et de Seine-et-Oise, 1903. Revue de Saintonge et d’'Aunis, t. XXIV, 1904, t. XXV, 1-2, 1905 et Table. Revue historique et archéologique du Maine, 1903. Bulletin et Mémoires de la Société historique et archéologique de la Charente, 1903 et 1904. Tables : 1840-1900. Bulletin de la Société d'agriculture, sciences et arts de la Sarthe, 1903-1904. Bulletin de la Société Dunoise, 1904, nos 138 à 140, 1905, n° 1. Annuaire de la Société historique et archéologique de Château- Thierry, 1902. Tables, 1864-1900. Bulletin de la Société archéologique, et histoirique du Vendô- mois, t. XLII et t. XLIIT, 1904. Bulletin de la _…. historique el ar Géo anique de l’Orléanais, t. XIII, 1904, Revue de no et d’Aunis, t. XXIII et XXIV, 1904. Bulletin de la Société des Antiquaires de l'Ouest, 2° série, 1903, 1904, t. X. Bulletin de la Société des sciences naturelles de l'Ouest de la France, 1904 et 1905. Académie des sciences, belles-lettres et arts de Rouen, 1902-1903. Recueil des publications de la société hävraise d’études diverses, 1901 et 1902. Mémoires de la Société des sciences naturelles et mathématiques de Cherbourg, 4 série, t. IT et IV, 1903 et 1904. Bulletin de la Société libre d'Emulation, du Commerce et de l'Industrie de la Seine-Inférieure (exercice 1902). — Livre d’or, notices, 1903, 1904. Pac de lu Commission des antiquités de la Seine- Inférieure, t XIE 4 190% Bulletin de la Société académique de Brest, 1903. Bulletin de la Société des ÉLIaURes denPricardrie t- XXIe XXII, 1903, 1904. — 9301 — Bulletin de la Société polymathique du Morbihan, 1903, 1-92. Annales de la Société historique et archéologique de Château- Thierry, 1903. Mémoires de la Société Eduenne, t. XXXI, 1903. Mémoires de l’Académie de Saint-Quentin. t. XIV, 1899-1900. Mémoires de l’Académie nationale des sciences, belles-lettres et arts de Gaen. Tables décennales 1894 à 1903. Bulletin de la Société de statistique du département de l'Isère, Set. 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LIIT, Pouillé historique du dio- cèse de Limoges.) Académie des sciences de Montpellier : Sciences, t. IT et t. IV, 1903 et 1904. alémoires de l’Académie de Nimes, 7e série, t. XXXVI, 1903. Bulletin de La Société des sciences de Nimes, t. XXI, 1903. Actes de la Société linnéenne de Bordeaux, 6e série,t. VII, 1903. Bulletin de la Société d'étude des sciences de Béziers, 1904. 1509 — Mémoires de l’Académie des sciences, belles-lettres et arts de Marseille, 1901-1903. Répertoire des travaux de la Société de statistique de Marseille, 1902-1903. Société des lettres, sciences et arts de l'Aveyron : Procès-ver- baux des séances, t. XIX, 1903. Mémoires de la Société des sciences physiques et naturelles de Bordeaux, 6e série, t. Il, 2; — Procès-verbaux, 1903 et 1904. -- Observations météorologiques, 1903-1904. Bulletin de la Société d’études des Hautes-Alpes, 1904, 1905. Annales de la Société des lettres, sciences et arts des Alpes- Maritimes, t. XVIIT. 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V à VIT, 1905et 41907: Académie des sciences de Berlin (Sitzungsberichte, XLI à LIT, 1903 ; I à LV, 1904. Société d'histoire naturelle de Brême (abhandenlungen), XVII, 3, 1903. Académie des sciences de Munich (sitzungsberichte). 1904, 1-4. Musée d'histoire naturelle de Vienne (Annalen), 1903. — 304 — Annales de la Société impériale et royale de Géologie de l'Em- pire d'Autriche (Verhandlungen), 1904 (Jahrbuch), 1904 et 1905, 2-3. Société botanique de la province de Brandebourg (Verhand.), 1904. Publication de l’Institut grand-ducal de Luxembourg, t. XX VIIT, 190%. New Heidelberger Jahrsbucher (hist. philo.), zu Heidelberg, XII, 2, 41903 XITE 1, 41907 Société physico-économique de Kænigsberg (Schriften), 14903. Société d'histoire naturelle de Fribourg en Brisgau (Berichte), 190%. Université de Tubingue : 3 dissertations, 1903-1904. Memorie della regia Accademia, sce., let. ed arti in Modena, 3e série, t. XIV, 1902. R. Deputazione sovra gli studi di storia patria, miscellanea, 3e s., 1904. 30 = MEMBRES DE LA SOCIÉTÉ Au 30 Juin 19065. Le millésime placé en regard du nom de chaque membre indique l’année de sa réception dans la Société. Les membres de la Société qui ont racheté leurs cotisations annuelles sont désignés par un astérisque (*) placé devant leur nom, conformément a l'article 21 du règlement. Conseil d'administration pour 1905. LP ELLE L'SNOEORPPPTRERE MM. Adolphe PARIZOT, inspecteur honor. des Enfants assistés ; Premier Vice-Président.. M. THURIET, avocat général. Deuxième Vice-Président. MAGNIN (le Dr Ant.); Secrétaire décennal...... Georges GAZIER ; Vice-Secrétaire...... ee A. VAISSIER ; RECDRIERS Lie FAUQUIGNON : DPArORUISLes 2 EE KIRCHNER et MALDINEY ; Secrétaires honoraires... MM. Bavoux (Vital). MEYNIER (le docteur). Membres honoraires (22). MM. LE GÉNÉRAL commandant le 7e corps d'armée (M. le général DECKHERR). LE PREMIER PRÉSIDENT de la Cour d'appel de Besançon, (M. GOUGEON). L’'ARCHEVÈQUE DE BESANCON (S. G. Mgr PETIT). LE PRÉFET du département du Doubs (M, GODEFROY). 20 — so — MM. LE GOUVERNEUR de la place de Besançon (M. le général DE MAIMBPAY). LE RECTEUR de l’Académie de Besançon (M. ARDAILLON). LE PROCUREUR GÉNÉRAL près la Cour d'appel de Besançon (M. MOLINES). LE MAIRE de la ville de Besançon (M. BAIGUE). L'INSPECTEUR d’Académie à Besancon (M: GUYON), rue de Vitre | DELISLE, Léopold, membre de l’Institut (Académie des insecrip- tions et belles-lettres), ancien administrateur général de la Bibliothèque nationale; Paris,rue Neuve-des-Petits-Champs.— 1881. WEIL, Henri, membre de l’Institut (Académie des inscriptions et belles-lettres), doyen honoraire de la Faculté des lettres de Besançon; Paris, rue Adolphe Yvon, 16. — 1890. Durour, Mare, docteur en médecine, à Lausanne, rue du Midi. — 1886. Membre honoraire, 1896. SIRE, Georges, correspondant de l’Institut, essayeur de Ia Ga- rantie, Besançon, rue de la Mouillère, aux Chaprais. — 1847. Membre honoraire, 1896. PINGAUD, Léonce, correspondant de l’Institut, prof. d'histoire moderne à la Faculté des lettres de Besançon, rue Saint- Vincent, 17. — 1874. Membre honoraire, 1896. CHOFFAT, Paul, attaché à la direction des services géologiques du Portugal; à Bordeaux et à Lisbonne, rue d’Arco a Jesus, 113. — 1869. METZINGER (le général), ancien commandant du 15° corps d’ar- mée, membre du Conseil supérieur de la Guerre, à Paris. — 1899. ROLLAND, Henri-Marius, capitaine de vaisseau, ancien général de division du cadre auxiliaire en 4870-71, en retraite à Mar- seille, boulevard National, 20. — 1899. BERGER, Philippe, membre de l’Institut (Académie des inscrip- tions et belles-lettres), professeur au collège de France. — 1899. BERTRAND, Marcel, membre de l’Académie des sciences, inspec- teur général des mines. — 1899. — 307 — PROST, Bernard, inspecteur général des archives et des biblio- thèques, à Paris, avenue du Trône, 3. — 1901. BouUcHoT, Henri, conservateur du cabinet des estampes à la Bibliothèque Nationale, à Paris. — 1901. BECQUET, Just, statuaire, rue de la Procession, 27, à Paris. — 1904. = 08 Membres résidants (1) (123). MM. AuBErT, Louis, directeur des confections militaires, Grande- Rue MAIS HIS06 BADER, bijoutier, rue des Granges, 21. — 1870. BAIGUE (le docteur), professeur suppléant à l’école de méde- cinenrue dela Moule rer BAUDIN, Léon, docteur en médecine, directeur du Bureau d’hy-. oiène de Besançon, Grande-Rue, 86 bis. — 1885. BAvoux, Vital, receveur principal des douanes en retraite, Fontaine-Ecu, banlieue de Besançon. — 1853. BEAUQUIER, Charles, archiviste-paléographe, député du Doubs; Montjoux, banlieue de Besançon. — 1879. DE BEAUSÉJOUR, Gaston, ancien capitaine d'artillerie, place Saint-Jean, 6, — 1897. * BERDELLÉ, ancien garde général des forêts, Grande-Rue, 112. — 1880. * BESSON (Paul), colonel, directeur d'artillerie, à Besançon, rue Mégevand, 4. — 1894. BONAME, Alfred, photographe, rue de la Préfecture, 10. — 1874. BLONDEAU, substitut du Procureur de la République, rue Prou- dhon, 8. — 1895. BONNET, Charles, pharmacien, ancien conseiller municipal, Grande-Rue, 35. — 1882. Bossy, Léon, fabricant d’horlogerie, rue de Lorraine, 9. — 1896. BOURDIN (le docteur), médecin-major au 7e bataillon de forte- resse, rue Charles Nodier, 30. — 1900. * BOUSSEY, professeur agrégé d'histoire au Lycée, président de l’Académie de Besançon, Grande-Rue, 116. — 1883. BOUTTERIN, François-Marcel, architecte, professeur à l'Ecole municipale des Beaux-Arts, rue Saint-Antoine, 4 — 1874. # (1) Dans cette catégorie figurent plusieurs membres dont le domicile habituel est hors de Besançon, mais qui ont demandé le titre de résidant afin de payer le maximum de la cotisation et de contribuer ainsi d'une maniere plus large aux travaux de la Société. — 309 — MM. BOYSSON. D'ÉCOLE, Alfred, rue de la Préfecture, 24. — 1891. BRETENET, chef d’escadron d'artillerie, rue St-Pierre, 15. — 1885. BRETILLOT, Maurice, banquier, membre de la Chambre de com- merce, rue Charles Nodier, 9. — 1857. BRETILLOT, Paul, propriétaire, rue de la Préfecture, 21. — 1857. BURLET (l’abbé), chanoine-archiprêtre, curé de Saint-Jean. — 1881. DE BUYER, Jean, propriétaire, à Besançon et à Saint-Laurent (banlieue). — 1902. CELLARD, Camille, architecte, rue Saint-Pierre, 3. — 1902. CÉNAY, pharmacien, avenue Carnot, 26. — 1897. CHAPOY, Léon (le docteur), ancien directeur de l'Ecole de mé- decine, Grande-Rue, 11. — 1875. DE CHARDONNET (le comte), ancien élève de l’Ecole polytech- nique, à Besançon, rue du Perron, 20, et à Paris, rue Cam- bon, 43. — 1856. CHARLET, Alcide, avocat, bâtonnier de l'Ordre, rue des Granges, D 41810. CHARMOILLAUX, Eugène, étudiant, rue du Clos, 9. — 1904. CHIPON, Maurice, avocat, ancien magistrat, rue de la Préfec- ture, 25. — 1878. CLAVEY, président de Chambre à la Cour d’appel, Grande- Rue, 62. — 1902. CLERC, Edouard-Léon, représentant de commerce, rue du Chas- not, 12. — 1897. COILLOT, pharmacien, rue Battant, 2, et quai de Strasbourg, 1. — 1884. COLSENET, Edmond, professeur de philosophie et doyen de la Faculté des lettres, ancien conseiller municipal, rue Gran- veille, 4 — 1882. CORDIER, Palmyr, agent principal d'assurances, conseiller mu- nicipal, rue des Granges, 37. — 1885. CORNET, Joseph, docteur en médecine, aux Chaprais, rue de laPGassotie, 11: = 1887. COURGEY, avoué, rue des Granges, 16. — 1873. COURTOT, Théodule, commis-greffier à la Cour d'appel; à la . Groix-d’Arènes (banlieue). — 1866. | — 9310 — MM. DAYET, André, receveur d'enregistrement à Besançon ; Fontaine- Ecu. — 1901. DIETRICH (le docteur), rue Saint-Pierre, 20. — 1892. Dopivers, Joseph, imprimeur, Grande-Rue, 87. — 1875. * DREYFUS, Victor-Marcel, doct. en médecine , avenue Carnot çaux Chaprais). — 1889. DROUHARD, Paul, conservateur des hypothèques en retraite, rue Saint-Vincent, 18. — 1879. ; DROUHARD (abbé), chanoine, rue Saint-Jean. — 1883. DUBOURG, Paul, ancien président de la Chambre de commerce, ancien membre du Conseil général du Doubs, rue Charles Nodier, 28. — 1891. Eypoux, Henri-Ernest, administrateur des magasins du Bon- Marché, Grande-Rue, 73. — 1899. FAUQUIGNON, Charles, ancien receveur des postes et télé- craphes, rue des Chaprais, 5. — 1885. FEBVRE, Lucien, ancien élève de l’Ecole normale supérieure. rue des Fontenottes, 6. — 1904. FLUSIN, Georges, industriel, Grande-Rue, 23. — 1898. FOURNIER, professeur de géologie à l’Université de Besançon. — 1899. FRANCEY, Edmond, avocat, membre du Conseil général du Doubs, ancien adjoint au maire, rue Moncey, 1. -—— 1884. GAIFFE, professeur au Lycée, aux Villas Bisontines. — 1904. GAUDERON (le docteur), Eugène, professeur de clinique à l'Ecole de médecine, Grande-Rue, 110. — 1886. * GAUTHIER, Jules, archiviste du département de la Côte-d'Or, membre non résidant du Comité des Travaux historiques et archéologiques et du Comité des Beaux-Arts, au Ministère de l’Instruction publique, à Dijon. — 1866. GAZIER, Georges, conservateur de la Bibliothèque de la Ville; rue de la Préfecture, 10. — 19083. GIRARDOT, Albert, géologue, docteur en médecine, rue Saint- Vincent, 15. — 1876. GRENIER, Alfred, inspect' des forêts, aux Villas Bisontines. — 1904. * GRUTER, médecin-dentiste, square Saint-Amour, 7. — 1880, sine MM. GUILLEMIN, Victor, artiste peintre, rue des Granges, 21. — 1884. HEiTz (le docteur), professeur à l'Ecole de médecine, Grande- Rue, 45. — 1888. HENRY, Jean, docteur ès sciences, Grande-Rue,129. — 1857. HÉTIER, François, botaniste; à Mesnay-Arbois (Jura). 1895. D'HOTELANS, Octave, rue Charles Nodier, 12. — 1890. JEANNENEY, capitaine au 60e de ligne, à Montfaucon. — 1904. KIRCHNER, ancien négociant, quai Veil-Picard, 55 bis. — 1895. * KOLLER, propriétaire, ancien conseiller municipal, ancien membre du Conseil d'arrondissem. de Besançon; au Perron- Chaprais. — 1856. LAMBERT, Maurice, avocat, ancien magistrat, quai de Stras- bourg, 13. — 1879. LEBRUN, Louis, répétiteur au Lycée Victor Hugo. — 1905. LECLERC, Adrien, conseiller à la Cour d'appel de Besançon, place du Transmarchement, 6. — 1904. LEDOUx, Emile (le docteur), quai de Strasbourg, 13. — 1875. LIEFFROY, Aimé, propriétaire, conseiller général du Jura, rue Charles Nodier, 11. — 1864. LIME, Claude-François, négociant, aux Chaprais. — 1883. LoOuvoT, Emmanuel, notaire, Grande-Rue, 14. — 1885. MACHEREZ, À.; rue Granvelle, 5. — 1901. MAEs, Alexandre, serrurier-mécanicien, rue du Mont-Sainte- Marie, 101879. MaAGNix (le docteur Ant.), professeur à l’Université, doyen de la Faculté des sciences, ancien directeur de l'Ecole de médecine, conseiller municipal, ancien adj. au maire, rue Proudhon, 8. — 1889. MaAïROT, Henri, banquier,ancien conseiller municipal, président du Tribunal de commerce, rue de la Préfecture, 17. — 1881. MALDINEY, Jules, chef des travaux de physique à la Faculté des sciences. — 1889. MANDRILLON, avocat, Grande-Rue, 19. — 1894. MARCHAND, Albert, ingénieur, administrateur délégué des Sa- lines de Miserey. — 1888. — 312 — MM. * MARTIN, Jules, manufacturier, rue Sainte-Anne, 8. — 1870. MAssoN, Valery, avocat, Grande-Rue, 102. — 1878. MATILE, fabricant d'horlogerie, rue Saint-Pierre, 7. — 1884. MAUVILLIER, Pierre-Emile, photographe, rue de la Préfecture, 3. —- 1897. MÉTIN, Georges, agent-voyer d'arrondissement, à Canot. — 1868. MICHEL, Henri, architecte-paysagiste, professeur à l'Ecole des Beaux-Arts; Fontaine-Ecu (banlieue). — 1886. MioT, Camille, négociant, membre de la Chambre de commerce, Grande-Rue, 104. — 18372. Mior, Louis, avoué à la Cour d'appel, Grande-Rue, 104. — ISO MONTENOISE, avocat, rue de la Madeleine, 2. — 1894. MOUROT (l'abbé), secrétaire à l’archevêché. — 1899. NARDIN, ancien pharmacien, rue de la Mouillère, 1. — 1900. NARGAUD, Arthur, docteur en médecine, quai Veil-Picard, 17. — 1875. NICKLÈS, pharmacien de 1re classe, Grande-Rue, 128. — 1887. OUTHENIN-CHALANDRE, directeur des Missionnaires d’Ecole; rue de larbréfecture 2221902; * ORDINAIRE, Olivier, consul de France, en retraite, Maizières (Doubs). — 1876. | PARIZOT, inspecteur honoraire des Enfants assistés, rue du Mont-Sainte-Marie, 8. — 1892. PATEU, entrepreneur, ancien conseiller municipal, avenue Carnot. — 1894. PERRUCHE DE VELNA, conseiller à la Cour d'appel, rue du Perron, 26. — 1870. PETITJEAN (l'abbé), aumônier des Enfants assistés, à Ghâteau- farine. — 1905. PIDANCET, avocat, quai Veil-Picard, 31. — 1905. * PINGAUD, Léonce, correspondant de l’Institut, professeur d'histoire moderne à la Faculté des lettres, rue Saint-Vin- BEM AR = NON RÉMOND, Jules, notaire, Grande-Rue, 31. — 1881. — 9135 — MM. | RICKLIN, notaire, rue des Granges, 38; étude : Grande-Rue, 121. — 1879. ROBERT, Edmond, fabricant d’aiguilles de montres, faubourg Tarragnoz. — 1886. ROCARDEY, Jean, directeur des contributions indirectes; rue Charles-Nodier, 4. — 1903. ROLAND (le docteur), professeur à l'Ecole de médecine, rue de l’Orme-de-Chamars, 10. — 1899. ROSSIGNOT (l'abbé), curé de Sainte-Madeleine, rue de la Made- leine, 6. — 1901. ROUGET, directeur de l'Ecole normale d'instituteurs de Besan- con; rue de la Madeleine, 6. — 1902. SAILLARD, Albin (le docteur), sénateur, membre du conseil gé- néral du Doubs, place Victor Hugo, et à Paris, rue N.-D.-des- Champs, 75. — 1866. DE SAINTE-AGATHE (le comte Joseph), avocat, archiviste-paléo- graphe, rue d'Anvers, 3. — 1880. SANCEY, Alfred, négociant, rue d'Alsace. — 1899. SAVOYE, Henri, artiste peintre, à la Bouloie (banlieue). — 1901. SIMONIN, architecte, rue du Lycée Victor Hugo, 13. —- 1892. SIRE, Georges, correspondant de l’Institut, essayeur de la Ga- rantie, rue de la Mouillère, aux Chaprais. — 1847. THOUVENIN, François-Maurice, pharmacien supérieur, profes- seur à l'Ecole de médecine et de pharmacie, Villa St-Yves, à la Croix d’Arènes. — 1890. THURIET, Maurice, avocat général à la Cour d'appel de Besan- con, rue du Perron, 16. — 1901. TRUCHI DE VARENNES (vicomte Albéric DE), rue de la Lue, 9. — 1900. VAISSIER, Alfred, conservateur du Musée archéologique, Grande- Rue, 109: — 1876. VAISSIER, Georges (le docteur), Grande-Rue, 109. — 1898. * VANDEL, Maurice, ingénieur des arts et manufactures, à la Rochetaillée, par Saint-Uze (Drôme). — 1890. * VAUTHERIN, Raymond, ancien capitaine du génie, villa Sainte- Colombe, rue des Vieilles-Pérrières. — 1897. 2 — 314 — MM. VERNIER, Léon, professeur à la Faculté des lettres, rue Sainte- Anne, 10. — 1883. VIEILLE, Gustave, architecte, inspecteur départemental des sapeurs-pompiers, rue des Fontenottes, sous Beauregard, — 1882. WEHRLÉ, négociant, rue Battant, 11. — 1894. oo Membres correspondants (101). MM. * ALMAND, Victor, capitaine du génie, officier d'ordonnance du général Carette; à Marseille. ANDRÉ, Ernest, notaire; rue des Promenades, 17, Gray (Haute- Saône). — 1877. * BARDET, juge de paix; à Brienne (Aube). — 1886. BARBEY, Frédéric, archiviste paléographe; rue de Luxembourg, 932, à Paris, et au château de Valleyres, canton de Vaud. — 1903. BERTIN, Jules, médecin honoraire des hospices de Gray (Haute- Saône), quai du Saint-Esprit, 1. — 1897. BETTEND , Abel, imprimeur-lithographe; Lure (Haute-Saône). — 1862. BEY-ROZET, Charles, propriétaire et pépiniériste; à Marnay (Hte-Saône). — 1890. Bixi10, Maurice, agronome, membre du conseil municipal de Paris ; Paris, quai Voltaire, 17. — 1866. B1Z0S, Gaston, recteur de l’Académie de Bordeaux. — 1874. BOISSELET, Joseph, avocat; Vesoul (Haute-Saône). — 1866. BOUTON, René, juge au tribunal de Baume-les-Dames. — 1903. * BREDIN, professeur honoraire; à Conflandey, par Port-sur- Saône (Haute-Saône). — 1857. * BRIOT, docteur en médecine, membre du conseil général du Jura; Chaussin (Jura). — 1869. DE BROISSIA (le vicomte Edouard FROISSARD); à Blandans, par Domblans (Jura). — 1892. BRUNE (l’abbé), Paul, curé-doyen de Mont-sous-Vaudrev, corres- pondant des Comités des Travaux historiques et des Monu- ments historiques au Ministère; Mont-sous-Vaudrey (Jura). — 1903. * BRUAND, Léon, inspecteur des forêts; Paris, rue de la Planche, AT bis. — 1881. BURIN DU BUISSON, préfet honoraire ; à Besançon, rue Moncey, 9, et à Cramans (Jura). — 1878. CHAPOY, Henri, avocat à la Cour d'appel; Paris (VIe), rue Bona- parte, 595. — 1879; — 316 — MM. CHOFFAT, Paul, attaché à la direction des travaux géologiques du Portugal ; lisbonne, rue d’Arco a Jesu, 113. — 1869. * CLOZ, Louis, professeur de dessin; à Salins. — 1863. * CONTEJEAN, Charles, géologue, professeur de Faculté hono- raire et conservateur du musée d'histoire naturelle; à Paris, rue de Montessuis, 9. — 1851. CONTET, Charles, professeur agrégé de mathématiques en re- traite; Saint-Quentin. — 1884. CORDIER , Jules-Joseph, receveur. principal des douanes: Blamont (Doubs). — 1862. CORDIER, Palmyr, médecin &es colonies, et à Besançon rue des Granges, 3. — 1896. COSTE, Louis, docteur en médecine et pharmacien de fre classe, conservateur de la Biblioth. de la ville de Salins (Jura), — 1866. COURBET, Ernest, bibliophile, trésorier de la ville de Paris, rue de Lille, 1. — 1874. DAUBIAN-DELISLE, Henri, ancien directeur des contributions directes, ancien président de la Société d’Emulation du Doubs; Sauveterre-de-Béarn (Basses-Pyrénées). — 1874. * DEROSNE, Charles, maître de forges; à Ollans, par Cendrey. — 1880. * DEULLIN, Eugène, banquier ; Epernay (Marne). — 1860. DRUOT (l’abbé), Paul, curé de Voirllans (Doubs). —— 1901. DRUOT (l'abbé), Herman, curé de Charmoille (Doubs). — 1901. * DurAy, Jules, notaire; Salins (Jura). — 1875. FEUVRIER (l'abbé), chanoine honoraire, curé de Montbéliard (Doubs). — 1856. FEUVRIER, Julien, professeur au collège de Dole, faubourg d'Azans. — 1893. * FROMOND (l'abbé), curé de Crissey (Jura). — 1902. FILSJEAN (l’abbé), licencié en lettres, curé de Pelousey (Doubs). — 1896. GASCON, Edouard, conducteur des ponts et chaussées en re- traite, président du comice agricole du canton de Fontaine- Française (Côte-d'Or). — 1868. GASCON, Louis, profess. au lycée Ampère; Lyon-Saint-Rambert. — 1889. R — 317 — MM. GAUTHIER, Léon, archiviste paléographe; Paris, place de la Bas- tille, 5: — 1898. GAUTHIER, docteur en médecine, sénateur de la Haute-Saône; Luxeuil (Haute-Saône). — 1886. * GENSOLLEN, Gabriel, juge d'instruction ; Gray (Hte-Saône). — 1902. GEVREY, Alfred, conseiller à la Cour d'appel de Grenoble; rue des Alpes, 9. — 1860. GIRARDIER, notaire; à Dole (Jura). — 1897. GIROD, Paul, professeur, directeur de l'Ecole de médecine de Clermont-Ferrand; rue Blatin, 26. — 18892. * GRENIER, René (le docteur), médecin de la Grande Chancelle- rie de la Légion d'honneur; Paris, 36, rue Ballu. — 1902. GUIGNARD, Fernand, archiviste paléographe; à Dole (Jura). — 1902. © GUILLEMOT, Antoine, archiviste de la ville de Thiers (Puy-de- Dôme). — 1854. D'HOTELANS, Raoul, ancien officier, maire de Novillars. — 1903. HUART, Arthur, ancien avocat général; rue Picot, 9 1870. JEANNOLLE, Charles, pharmacien; Fontenay-le-Château (Vosges), — 1876. JOLIET, Gaston, préfet de la Vienne; Poitiers. — 1877. JOURDAIN, président du tribunal de Belfort. — 1903. LAFOREST (Marcel PÉCON DE), capitaine d'infanterie coloniale; à Rochefort et à Besançon, rue du Chateur, 25. — 1895. LAPRET, Paul, artiste peintre; Paris, 17, rue de Châteaubriand. 1901. LEBAULT, Armand, docteur en médecine; Saint-Vit (Doubs). — 1876. LECHEVALIER, Emile, libraire-éditeur; Paris, quai des Grands- Augustins, 39, à la librairie des provinces. — 1888. LE MIRE, Paul-Noël, avocat; Mirevent, près Pont-de-Poitte (Jura) et rue de la Préfecture, à Dijon. — 1876. LONGIN, Emile, ancien magistrat; rue du Collège, 12, à Dole (Jura). — 1896. Louvor (le chanoine Fernand), curé de Gray, — 1876, , Paris. — lee MM. Mapior, Vietor-François, pharmacien ; Jussey (Haute-Saône). — 1880. | MAIRE, André, étudiant à la Sorbonne; Paris, rue de Sontay, 4. — 1903. Maire, Victor-Louis, capitaine au 29e régiment colonial, bre- veté des langues orientales; rue Mégevand, 13, Besançon. — 1905. MARQUISET (le comte Alfred), rue Gounod, 1, à Paris. — 1897. MASsING, Camille, manufacturier à Puttelange-lez-Sarralbe (Lorraine allemande). — 1891. DE MARMIER (le duc), membre du Conseil général de la Haute- Saône; au château de Ray-sur-Saône (Haute-Saône). — 1867. DE MENTHON {le comte René); Menthon-Saint-Bernard (Haute- Savoie), et château de Saint-Loup-lez-Gray, par Sauvigney-lez- Angirey (Haute-Saône). — 1854. MEYNIER (le docteur), Joseph, médecin principal de l’armée ter- ritoriale ; aux Eterpas-Vallorbe (Suisse). — 1876. * DE MONTET, Albert ; Chardonne-sur-Vevey (Suisse). — 1882. DE MOUSTIER (le marquis), député et membre du Conseil géné- ral du Doubs; château Bournel, par Rougemont (Doubs), et Paris, avenue de Alma, 15 "ST DE MOUSTIER (le Comte Lionel); château Bournel (Doubs) et avenue de l’Alma, 17, à Paris. -— 1903. Paris, docteur en médecine; Paris, rue du Cherche-Mridi. — 1866. PERRONNE, Marcel, ancien conseiller de préfecture ; Dijon. — 1903. * PERROT (l'abbé), F.-Xavier, curé-doyen de Mandeure (Doubs). — 1902. * PIAGET, Arthur, archiviste cantonal et professeur à l'Académie de Neuchâtel (Suisse). — 1899. | Piboux, André, archiviste paléographe, avocat stagiaire, rue du Collège, à Dole (Jura). -- 1901. PiquaRD, Léon, docteur en médecine; à Chalèze (Doubs).— 1890. PIQUEREZ, Charles, explorateur; à Besançon, rue de Fontaine- Argent. — 1898. — 9319 — MM. PIROUTET, Maurice, géologue ; à Salins. — 1898. QUENOT, Prosper, instituteur à Orchamps-lez-Dole (Jura). 1903. RAMBAUD, Alfred, ancien sénateur, membre du Conseil général du Doubs, ancien ministre de l’Instruction. publique et des Beaux-Arts ; Paris, rue d’Assas, 76. — 1881. * REBOUL DE LA JULHIÈRE, au château du Grand-Vaire (Doubs). — 1905. REEB, E., membre correspondant de l’Académie des sciences, président honoraire de la Société de pharmacie d’Alsace-Lor- raine ; à Strasbourg. — 1901. RENAULD , Ferdinand, botaniste, ancien commandant du palais de Monaco, rue des Templiers, à Vence (Alpes-Maritimes). — 1875. RICHARD, Auguste, pharmacien; Nice, rue Miron, 27, et Autet _ (Haute-Saône), — 1876. * RICHARD, Louis, médecin-major de {re classe à Belfort, 5, fau- bourg de Lyon. — 1878. Rrpps (abbé), curé d’Arc-lez-Gray (Haute-Saône). — 1882. ROUZET, Charles-François, architecte; à Dole (Jura). — 1898. Roux, Roger, substitut du procureur de la République; Vesoul. — 1903. Roy, Emile, professeur à la faculté des lettres de Dijon, rue de Mirande, 9. — 1894, Roy, Jules, professeur à l'Ecole des Chartes ; Paris, rue Spon- tini, 9. — 1867. * SAILLARD, Armand, négociant, Villars-lez-Blamont (Doubs). — 1877. SCHLAGDENHAUFFEN, directeur honoraire de l’École de pharma- cie de Nancy, 63, rue de Metz. — 1901. TRAVELET, Nicolas, propriétaire, maire de Bourguignon-lez- Morey (Haute-Saône). — 1857. * TRAVERS, Emile, ancien archiviste du Doubs, ancien conseiller de préfecture ; Caen (Calvados), rue des Chanoines, 18. — 1869. * TRIPPLIN, Julien, représentant de l’horlogerie bisontine et vice-président de l’Institut des horlogers; Londres : Bartlett’s Buildings, 5 (Holborn Circus), E. C., et Belle-Vue (Heathfield Gardens, Chiswick, W). — 1868. — Sp = MM. TuETEY, Alexandre, sous-chef de la section législative et judi- ciaire aux Archives nationales; Paris, quai de Bourbon, 45. 1863. VAISSIER, Jules, fabricant de papiers; Nice. — 1877. VENDRELY, pharmacien ; Champagney (Haute-Saône). — 1863. VERNEREY, notaire, membre du Conseil général du Doubs; Amancey (Doubs). — 1880. * WALLON, Henri, agrégé de l’Université, manufacturier; Rouen, Val d'Eauplet, 48. — 1868. te De. étrmnenn ntm home om me Ce > MEMBRES DE LA SOCIÉTÉ DÉCÉDÉS EN 1904-1905 MM. BÉJANIN, Léon, propriétaire à Besançon. BRUCHON (le docteur), professeur honoraire de l'Ecole de médecine, médecin des Hospices. CHOTARD, ancien professeur, doyen de la Faculté des Lettres de Clermont-Ferrand, à Paris. COULON (Henri), avocat. ErHis (Edmond). GAUSSIN, ancien secrétaire des Facultés, à Blamont. GROSRICHARD, pharmacien. LARMET (Jules), médecin-vétérinaire. MATHEY, pharmacien, à Ornans. RENAUD (Alphonse), sous-chef à la direction générale de l’Enregistrement, à Paris. ROSSIGNOT (l'abbé Auguste), bibliothécaire à l'Archevèché. RIGNY (le chanoine), ancien curé de Saint-Pierre. SAGLIO, directeur des Forges d’Audincourt. SAILLARD (Eugène), ancien directeur des Postes. DE SAUSSURE (Henri), à Genève. SUCHET (le chanoine). DE VEZET (le Comte Edouard). PE A =" 599 SOCIÊTÉS CORRESPONDANTES (474) Le inillésime indique l’année dans laquelle ont commencé les relations. FRANCE. Comité des travaux [historiques et scientifiques près le Ministère de l’Instruction publique cinq exemplaires des Mémoires ee eee, Aïn, Société d'Emulation de l'Ain; Bourg. he Société des sciences naturelles de Ain; Bourg. Aisne. Société académique des sciences, arts, belles-lettres, agri- culture et industrie de Saint-Quentin . . . . Sr Société historique et archéologique de un he. Allier. Société des sciences médicales de larrondissement de Gannat . He : : RE Société d’'Emulation et des Loan arts du Bout 5 Moulins. ë HART En : ; Revue ccniiique nr Ou ne et ii centre de je France "MOULINS Alpes-Maritimes. Société des lettres, sciences et arts des Alpes-Maritimes ; Nice. Alpes (Hautes-). Société d’études des Hautes-Alpes; Gap . 1856 1868 1894 1862 1898 1860 1894 1867 1884 Aube. Société académique de l'Aube; Troyes . Aveyron. Société des lettres, sciences et arts de l'Aveyron; Rodez. Belfort (Territoire de). Société Belfortaine d’'Emulation. Bouches-du-Rhône. Société de statistique de Marseille. : , Académie des sciences, belles-lettres et arts de Marseille Calvados. Académie de Caen. Charente. Société historique et archéologique de la Charente; Angoulême . Charente-Inférieure. Société des archives historiques de la Saintonge et de l'Aunis ; Saintes . Cher. Société des antiquaires du Centre ; Bourges . Côte-d'Or. Académie des sciences, arts et belles-lettres de Dijon . Commission des antiquités du département de la Côte- d'Or; Dijon : A nn ne en du Pr ile Société d'archéologie, d'histoire et de littérature de Beaune . Rd ne Rudi és à ete a Société des sciences historiques et naturelles de ue Société bourguignonne de géographie et d'histoire ; Dijon. Revue bourguignonne de l’enseignement supérieur publiée par les professeurs des Facultés de Dijon. 1867 1876 1872 1867 1867 1368 1833 1876 1856 1869 1877 1880 1888 1891 in Deux-Sèvres. Société botanique des Deux-Sèvres; Niort Doubs. Académie des sciences, belles-lettres et arts de Besan- con. . ne à Société d a de Mondhélias d. Société de médecine de Besançon. Société de lecture de Besançon . Union artistique de Besançon . APT es Société d’histonre naturelle du Doubs ; Besançon. Drôme. Bulletin d'histoire ecclésiastique et d'archéologie reli- gieuse des diocèses de Valence, Gap, Grenoble et Vi- viers;, Romans (Drôme) Eure-et-Loir. Société Dunoise ; Châteaudun . Finistère. SOCIéLÉ ACAUÉMIQUE dE PRET TR Gard. Académie de Nîmes . : M'ÉRSeRe Société d’études des sciences ne de de Re Garonne (Haute). Société archéologique du Midi de la France; Toulouse. Société des sciences physiques et naturelles de Tou- louse . Gironde. Société des sciences physiques et naturelles de Bor- deaux. } , Société dar no ne de Er : Société Linnéenne de Bordeaux . 1901 1844 1851 1861 1865 1894 1900 1880 1867 1875 1866 1883 1872 1875 1867 1878 1878 — 925 — Hérault. Académie de Montpellier. Société archéologique de Montpellier: RAS : Société d'étude des sciences naturelles de Béziers . . Ille-et-Vilaine Société archéologique du département d’Ille-et-Vilaine ; Rennes. Isère. Société de statistique et d'histoire naturelle du départe- ment de l'Isère’, Grenoble . Société Re indice d’ethnologie et d’ oncle Jura. Société d'Emulation du département du Jura; Lons-le- Saunier . Revue viticole de Franche- dore re co) tx Loir-et-Cher. Société historique et archéologique du Vendomois; Ven- dôme . Loire. Société d'agriculture, industrie, sciences, arts et belles- lettres du département de la Loire; Saint-Etienne. Société de la Diana, à Montbrison. . . Loire-Inférieure. Société des sciences naturelles de l'Ouest de la France; Nantes . Loiret. Société archéologique de l’Orléanais ; Orléans . Maine-et-Loire. Société industrielle d'Angers et du département de Maine- et-Loire; Angers. “ets Bibliothèque dela Ville: no due 1869 1869 1878 1894 1857 1898 1844 1895 1898 1866 1895 1891 1851 1855 1857 — 326 — Manche. Société des sciences naturelles de Cherbourg . Marne. Société d'agriculture, commerce, sciences et arts du dé- partement de la Marne; Châlons . : Société d’études des sciences naturelles; De à Marne (Haute-). Société archéologique de Langres. Meurthe-et-Moselle. Société des sciences de Nancy (ancienne Société des sciences naturelles de Strasbourg) . Société d'archéologie Lorraine, à Nancy. Meuse. Société polymathique de Verdun . Morbihan. Société polymathique du Morbihan; Vannes. Nord Société d’émulation de Roubaix. Oise. Société historique de Compiègne. Pyrénées (Basses-). Société des sciences, arts et lettres de Pau. Société des sciences et arts de Bayonne. Pyrénées Orientales. Société agricole, scientifique et littéraire des Pyrénées- Orientales ; Perpignan. | Rhône. Société d'agriculture et d'histoire naturelle de Lyon . Société littéraire, historique et archéologique de Lyon. 1854 1856 1903 1874 1866 1886 1851 1864 1895 1886 1873 1884 1856 1850 1856 IT — Æ Académie des sciences, belles-lettres et arts de Lyon Annales de l’Université de Lyon, quai Claude-Bernard, 18 Saône-et-Loire. Société d'histoire et d'archéologie de Chalon-sur-Saône. Société des sciences naturelles de Saône-et-Loire; Cha- lon-sur-Saône . Société Eduenne ; Autun. Société d'histoire naturelle d’Autun . Société d'histoire naturelle de Màcon. UE RE Académie des sciences, belles-lettres et arts de Mäcon Saône (Haute-). Société d’agr., sciences et arts de la Haute-Saône: Vesoul, Société d'encouragement à l’agriculture; V esoul. Société des sciences naturelles: Vesoul. Société grayloise d'Emulation; Gray Sarthe. société d’agricult., sciences et arts de la Sarthe; Le Mans. Société historique et archéologique du Maine ; Le Mans Savoie. Académie de Savoie; Chambéry . . . . . . . : : Société Savoisienne d histoire et d'archéologie: Chambery Savoie (Haute-). “peietée Horimontane ; Annecy ="... . . . . . Seine. Association française pour l'avancement des sciences Association pour l’encouragement des études grecques eu Frances rue de PAbDaye, 19, Paris. - . . . PuShitui de France;/Paris. =": - ME mi Musée Guimet; avenue du des 30 . RTS Ornis, bulletin du comité ornithologique international ; Paris, boulevard Saint-Germain, 120 Polvbiblion ; rue Saint-Simon, 4 et 5, Paris . : Revue épigraphique, Librairie E. Renoud, rue Bona- parte, 28. He = Société des ee de France; Paris. RS ce — 928 — Société d'anthropologie de Paris, rue de l'Ecole de Méde- cine, 15 PR SET En RUES Société de biologie, boulevard Saint-Germain, 22 . Société de botanique de France ; rue de Grenelle, 24. Société d'histoire de Paris et de l’Ile de France Société philomathique de Paris, rue des Grands-Augus- tn STE Re M RS ee 0 Société philotechnique de Paris, rue d'Orléans; Neuilly- sur-Seine . LÉ ANNEE ÉRIC TRS Je Gi Tee Société française de physique, rue de Rennes, 44. SOCiélétdeecoursides amis Tes ECIENCC RE Société de spéléologie, rue des Grands-Augustins, 7. . Société zoologique de France, rue Serpente, 28 . Seine-Inférieure. Commission départementale des antiquités de la Seine- Inférieure: Rome Lea SE NS TR Académie des sciences, belles-lettres et arts de Rouen Société libre d'Emulation de la Seine-Inférieure ; Rouen. Société havraise d’études diverses; le Havre . Seine-et-Oise. Société des sciences naturelles et médicales de Seine-et- Oise Versailles 2er Sera ete be eee Société des sciences morales, belles-lettres et arts, à NOTES Ale Se Te PR RER somme Sociétédes anhqudreside Picardie "AMIENS EN RE Société d’Emulation d’Abbeville. Tarn-et-Garonne. | Société d'histoire et d'archéologie de Tarn-et-Garonne; Montauban." He a RS AR tee tre et ASE Vienne. Société des antiquaires de l'Ouest; Poitiers . Vienne (Haute-). Société historique et archéolog. du Limousin; Limoges. 1883 1880 1883 1884 1880 1872 1887 1858 1897 1880 1869 1879 1880 1891 1861 1896 1869 1894 1894 1807 1852 Vosges. Société d'Emulation du département des Vosges ; Epinal. Société philomathique vosgienne ; Saint-Dié. Yonne. Société des sciences historiques et naturelles de l'Yonne; Auxerre . ALGÉRIE. Société historique algérienne; Alger . . ALLEMAGNE. Académie impériale et royale des sciences de Berlin (Sitzungsberichte). Se SENTE EE RTE Société botanique de la province de Brandebourg ; Berlin. MALUS y hoiscul Société des sciences Le “ Brême Does schaftlicher Verein zu Bremen). . DA OU Société des sciences naturelles de Fribourg en Brisgau (Bade) . : Société d. sciences nait et N cdicalce ël ba Toute Hesse (Oberhessische Gesellschaft für Natur und Heil- kunde) ; Giessen. Société philosophique et . de ce a ls Le bliothèque de l'Université). : Société royale physico-économique de Lcnicslore Ho nigliche physikalich-ækonomische Gesellschaft zu Kcæ- nigshberg) ; Prusse . DE TR PA TOR ER EEE Académie royale des sciences de Bavière, à Munich (Kœnigl. Bayer. Akademie der Wissenschaften zu Munchen ). Ge Université de Tübingte (à ls be) ALSACE-LORRAINE Société d'histoire naturelle de Colmar. Société d'histoire naturelle de Metz. D Dry Société des sciences, agriculture et arts de la Basse- . Alsace ; Strasbourg . 1870 1879 1877 1866 1892 1853 1898 1861 1865 1901 1860 1895 1880 — 330 — ANGLETERRE. Société littéraire et philosophique de Manchester (Litte- rary and philosophical Society of Manchester). AUTRICHE. Institut impérial et royal de géologie de l’empire d’Au- triche (Kaiserlich-kæniglich-geologische Reichsanstalt) ; Vienne. se SR SL 0 Le sr Et ER TIRR Muséum impérial et idyal d stone Poe de Vienne. BELGIQUE. Académie d'archéologie de Belgique; Anvers,rue Lozane, 29 ÉR ne 2 Académie role de Basique brel te ; Société d'archéologie de Bruxelles, rue Ravenstein, 11. Société des Bollandistes ; Bruxelles, rue des Ursulines, 14. Société géologique de Belgique; Liège . Revue bénédictine de l’abbaye de Maredsous . . ITALIE. . Académie des sciences, lettres et arts de Modène . R. Deputazione sovra gli Studi di Storia Patria; Torino. . LUXEMBOURG. Société des sciences naturelles du grand duché de Luxem- hours eEUXEMOUTARS RER TE PORTUGAL. Direction des services géologiques du Portugal; Lis- Donne, rUa do ATeoNaMeSue AS) AS NE SUEDE ET NORVEGE. Académie royale suédoise des sciences, Stockholm . Kongl. Vetterhets historie och antiquitets Akademian, Stockholm. eee The geological institution of de nee of Dale, Université royale de Christiania . 1859 1857 1889 1885 1868 1891 1888 1876 1892 1879 1834 1854 1885 1869 1898 1895 1877 — 331 — SUISSE. Société des sciences naturelles de Bâle Société des sciences naturelles de Berne . Société générale d'histoire suisse (à la Eblioheque de la Ville), à Berne. : on Nr Société d'histoire et de ologie Geneve. rue de l'Evêché. re Institut national de re ne AR M PES Société vaudoise des sciences D cles. re ; Société d'histoire de la Suisse romande; Lausanne . Société neuchateloise des sciences naturelles; Neuchatel. Société d'histoire et d'archéologie de Neuchatel . Société neuchateloise de géographie : Neuchatel. Société jurassienne d’'Emulation ; Porrentruy . Société des sciences naturelles de Zurich . AL Société des antiquaires de Zurich (à la Bibl. de la Ville). Indicateur des Antiquités suisses (Anzeiger fur Schweize- rische Alterthumskunde), Neue Folge, 1, Zurich. AMÉRIQUE. Société d'histoire naturelle de Boston. Lloyd Library ; Cincinnati (Ohio). Wisconsin Geolog. and Natural History Survey; a. Wisconsin Natural History Society; Milwaukee . Geographical Society of Philadelphia. Academy of St-Louis (Missouri). Institut Smithsonien de Washington . à United States geological Survey; Washington. Musée national; Montevideo. 1872 1855 1880 1863 1866 1847 1878 1862 1865 1891 1861 1857 1864 1899 1865 1904 1901 1901 1896 1897 1869 1883 1901 — 9332 — ÉTABLISSEMENTS PUBLICS (32) Recevant les Mémoires. Bibliothèque de la ville de Besançon. Id. populaire de Besançon. Id. de l’Ecole d'artillerie de Besançon. Id. de l’Université de Besancon. Id. de l’Ecole de médecine de Besançon. Id. du Chapitre métropolitain de Besançon. Id. du Séminaire de Besançon. Id. de l'Ecole normale des instituteurs de Besançon. Id du Cercle miktaire de Besançon. Id. de la ville de Montbéliard. Id. de la ville de Pontarlier. IQ de la ville de Baume-les-Dames. Id: de la ville de Vesoul. Id. de la ville de Gray. Id. de la ville de Lure. Id. de la ville de Luxeuil. Ece de la ville de Lons-le-Saunier. Id. de la ville de Dole. Id” de la ville de Poligny. Id. de la ville de Salins. Id. de la ville d’Arbois. Id. de la ville de Saint-Claude. Id. du Musée national de Saint-Germain-en-Laye. Id. Mazarine, à Paris. Id. de la Sorbonne, à Paris. Id. de l’Ecole d'application de l’artillerie et du génie, à Fontainebleau. Id. du Musée ethnographique du Trocadéro, à Paris. Id. du British Museum, à Londres. (Librairie Dulau et Cie, Londres, Soho Square, 37.) Archives départementales de la Côte-d'Or. Id. du Doubs. HOT de la Haute-Saône. ld. du Jura. TABLE DES MATIÈRES DU VOLUME PROCÈS-VERBAUX. Allocution de MM. NARGAUD et FRANCEY, 4 sortant EL CNE SRE OI ANA De To 0 Dos) JE | Les Héraults d'armes et les Armoriaux Rare: comtois, par MS GAUTAIER ES nu Jus MR RAR ut DVI Bas-relief donné au musée d’archéologie, décrit par M. A DENSSIERS men. RE OA denaqes p. VII DonrausMusée d'archéologie, par M°NARDIN........,...,.k p. VII Règlement de la pension des frères Grenier ..... M Ah P. VII Les Cloches franc-comtoises, par M. J. GAUTHIER... ........ p. VIII Vœu pour la restauration de l'Eglise abbatiale de Montbenoit. p. 1x Notice sur M. Louis Bouvard, par M. FRANCEY,.......,....... Dix Les Livres de raison de paysans re par M. J. CADPAIER M seul, der es SEE NPA AE RME proxi La destruction des none de eo nGon par M. A. We SERRE RP caca nn rangoetue e Ai leet ere De 0 La cheminée nn chiale de ut. au musée de Dole, PAR ME TR GAUTHIER 20 Rs. DR ne DE Xl Fouilies à Argillières (Haute- Re par M. l'abbé ROSSIGNOT . p. XII Une description de Besançon, de Hugues Babet, en 1552, par NUS CAT PAIE RS 20 2. ce mener beats DEEE Sophie de Monnier et Mirabeau, d’après M. Paul Cottin, par M°J GAUTHIER... . RAA RME A nai niches ec D RUN Un livre d'heures du xv° siècle, par M. he GAUTHIER note DID NT Les épaves de la bibliothèque de Granvelle, hors de Done con, par M. J. GAUTHIER. Re A en et nn a De LMI Nues sur le sculpteur Jean Petit, par M. ds a DE XX L'Egypte, par M. le commandant ALMAND .,..... p. XXI Charles Duvernoy, de Montbéliard, par M. J. GAUTHIER..... p. XXI Présentation d’un objet Satirique contre un magistrat du par- lernent Maupeou, à Besançon, par M. J. GAUTRIER..,..... p. XXII Compte-rendu du Congrès de l'Association franc- “corntoise, à ÉGSSle SAN RE ne cn ne cr bieie en De XIV 334 Notice sur M. Ulysse Robert, par M. J. GAUTHIER. ,....,.,, p. XXVI Les anciens pouillés et la géographie historique de l’ancien diocèse de Besancon, par Me Je GAUTENER D OUI L'Eglise Saint-Maurice, de Besançon, par M. J. GAUTHIER... p. XXVIT La voie romaine du Rhin, de Besançon à Mandeure, par Me abbé DRUOT SIP EME PR Re let CD OL PE SD SONUIX Histoire du bourg de Marnay (Hte-Saône), par M. J GAUTHIER. p. XxIx Projet-de budset-pour l'année dO04 FE DARCX Les constructions de l'Hôpital du Saint-Esprit, de Besançon, par M. Henri MICHEL. ..... RE OR PAT RU Un [De LOU Election du bureau pour l’année 1904...,..,...... A US ie NI De oo Séance publique du 19 décembre 1903. A D RO Les ruines du château de Cicon, par M. 1 icone de TRUCHIS p. XXXIII Pe’chateauderBeNon par MENAGADRAIERS 2 PNEU D 00 00 Règlement de la pension des frères Grenier......, RAD EE 0 PARC La rentrée des membres du Parlement de Franche-Comté à Besançon, après leur exil de 1759, par M. Ch. BLONDEAU.. p. xxxVI Les maisons natales de P. Fourier et P.-J. Proudhon, par M. Georges GAZIER ..... EP AN ER AQU AR AE PURE lee AT UD NEO El M le chanoine J.-M. Suchet, par M. l’abbé ROSSIGNOT . AD AOC Description de cinq tableaux franc-comtois du musée de Di- TOR DAME CATRMERE A PMRRTEENS DRE A RER Ne ent DREUX Vestiges gallo-romains, découverts à Be Ter M: A. VATSSIERE St NS EE RON AR RE EE PR RE EE DARAXUE Les rouilles des Cale par M. le Dr \. neun. He AE DU Organisation du a ès de l'Association franc- So de. à Besançon. TR A M D Une SIL Les sièges de bee incon, par M. le capitaine JEANNENEY...... DA AXE Uue enseigne révolutionnaire bisontine, par M. J. GAUTHIER. p. XLV Compte-rendu du Congrès de l'Association franc-comtoise, à BESANCON NE MEN Ets CO RE re Ce DT Notice sur M. le Dr J. do par M. le D LEDOUX. (DVI Les évêques constitutionnels du Doubs, par M. G. ivre CE NU EVIIT a sur les Discours de rentrée dans la ni par . M. THURIET. A te Re en CODE d. . des fi dins e dk le vase priapique du musée de Besan- çon, par M. A. VAISSIER. PR dr Cle Re 2 Dar Proposition de aux ue de la one Le a ta ok Li Budget pour l’année 1905. Se D dre RE DENT Election du bureau pour année 100 ARS TE Re D MLEDI Rapport sur l'ouvrage de M. Antoine Magnin, La a desrLacs dura SparAMEP ARR ARR OP EEE ee DR D- LIN MÉMOIRES. La Société d'Emulation du Doubs en 1903 : dis- cours d'ouverture de la séance publique du jeudi 17 décembre 1903, par M. Edmond FRANCEY, IT ÉRIC I TAUS ER RL RNee LE Le professeur Alexandre Vézian, par M. le doc- MID CGIRARDOT., ..... NT de done CE L'Orientaliste Guillaume Pauthier (1801-1873), HOMME SbbE AUCUSLE ROSSIGNOT …. .:. . +... L Env Egypte : Du Caire à: Assouan, par M. V. ÉMÉMAND lente ne La Voie Romaine du Rhin et ses Stations dans les cantons de Buume-les-Dames et de Clerval (Doubs), par M. l'abbé Paul Drüor (2 planches). Notice sur le staluaire Jean-Pelit (1819-1903) [Catalogue de ses principales œuvres], par M. Maurice THURIET (1 portrait et 1 planche) ..... La Rentrée du Parlement de Franche-Comté après l'Exil de 1759, par M. BLONDEAU ({ planche)... _ Les Ruines du Château de Cicon, par M, le Vicomte PDA DRUCHIS DE VARENNES.....1,....0.. Le Docteur Bruchon, ancien président de La Société d'Emulation du Doubs, par M. le docteur LEDOUX (1 PORTE) RP Un Dieu des Jardins (sculpture gallo-romaine) et l'Ænochoë priapique (en verre) du Musée de Besançon, par M. Alfred VAISSIER (1 planche) .. Le Chanoine Suchet (1819-1904), par M. labbé Auguste ROSSIGNOT (Î portrait). ......... Les Maisons natales de Fourier et de Proudhon, vor Ne GéOrges CGAZIER. .. GR D: p. P. D: p. P: P. P- p. S1 Of 116 126 131 158 144 — 336 — Les Pièces d'honnneur des co-gouverneurs de Be- sancon (XVI-XvIII° siècles) [Description des Pièces d'honneur et des Jetons], par M J, GAUTHIER La Photographie des Couleurs : Etat présent de la Question, par M. MALDINEY (5 planches)....... Les Rouilles des Céréales et leur développement, pare ler docteur nt MAGNNEEe ne NA V® Congrès de l’Association Franc-Comtoise, tenu a Besancon. le 1 aout AIO Re Le Livre de Raison d'Emmanuel-Simon Pourchet par M l'abbé Auguste ROSSIGNOT. ........... DonsrraitsamatSociélé entlODS 100 ERA EEE Re Envois des Sociétés correspondantes............... ...:....… Membres de da Societé au 50 juimd90 RE CT Membres de la Société décédés en 1904-1905..............,.. : Sociétés “correspondantes ie RME re Etablissements publics recevant les Mémoires...........,.... SPSSIPIPPLIPPSIIPIPISR PIE RS DID TU ENT MANTEN PR ete BD B EUEIRI SES & ET < P gRÉNN sé br 12 JA iSuu BESANCON. — TYP. ET LITH. DODIVERS. Extraits des statuts et. au dr à de Là Sc d'Emulation du Doubs, fondée à porn le 1° AUS 1840. | Décret impérial du 22 avril 1863 : « La Société d'Emulation du Doubs, à Besancon, est reconnue comine établissement d'utilité _publique..……, RU re | | re DoRNV as Art. Ler des statuts : « Son but est de concourir activement aux. progrès des sciences. et des arts, et, pour en faciliter le développe- ment, de coopérer à la formation des collections Fee et d’é- ; diter les travaux utiles de ses membres, - » Elle encourage nee les études relatives à à la Franche- : Comté. » Art, 13 des statuts : « La docéle pourvoit à SES PONS au < moyen » do D'une cotisation annuelle payable par chacun de ses membres résidants et par chacun de sés mentbres correspondants ; elle est ‘|. exigible dès l’année même de leur admission. ; .» 20 De la somme de deux francs payabie par les membres vési- dants et correspondants au moment de la remise du diplôme. . » Arl. A7 du règlement : « La cotisation annuelle est fixée à dix “or | francs pour les membres ne et.à six francs ps les membres correspondants, ” | is Art. 23 des . “Les ie la latitude de se libérer de leur cotisation annuelle. en versant un capital dans la caisse de” la Société. je _ » La somme exigée est Le cent francs pour les. membres résir. | dants et de soixante francs pour les correspoudants…. Po | Art. 15 des slatuis : « Tout membre qui aura cessé de payer a cotisation pendant plus d’une année, pourra être considéré come | démissionnaire par le conseil d'administration». Lu Art. 6 du règlement : « Les séances ordinaires s se tiennent. a se | cond samedi de chaque MOIS... » nn Art. 9 du règlement : € La Société nn ie année... un bufetin de ses travaux, sous le titre de Mémoires... » à Art. 13 du réglement : « Le bulletin est remis gratuitement : Dé A chacun des membres honcraires, résidants et corres- AA pondants de la Société, As » Adresse du Préonier de la Dore M. Je on de la Société à Ÿ .d’Emulation du Doubs, Palais Gidavellé, à Done (de . RE : ES : SEEN RE EE RE ES re : re CORRECTE ER Palin à 1 à Se ee RTE Tee : = pobe. Nr, PURE Sprae È eu age RS su Pas D re À ù . S LE Poser eme, … . 4 Viager Dei Ce Se Are us EE SRE RS Se ES, eg mn, Ne A gen A ns, ris N ns rene Pin he ve | vas : Kerr Ÿ MS etes Litet-aeue : 2 ve LR Ne RS : “ : Ses, CS RSR EN, Tr tue eg, ee à sue. < à d “ DU D Ye D à Û vw" eux RS d KE <> TD » a rip = Ve De N vw À LR as Ÿ a % à n VS - . : ? S N " e re png LV % VE ge 7, " res 2 = CE ee je Vheig ve a) ne PS TR ges SR L : RS rage ET SPA ban, RES tas La gg rm re * : pes " \ is $ : : no sms, " TA Ve Ve À RE nr ù K EN be bte, es De A gg Nr “« … Ge ire ti rie: sr nie ets mg, Drau Paie eue TT ES EE tn, KA « LE és pe NT gt re w : - + NE 9 rar PE IR a \ arte Par ù Le UE SR : TR « < « Le TES Re + Km sh S | ne S — : ee LE n° d< D : 4 LE ù v LA Ra ù à, . : ï s ne te anne dE qe Z a "a CPR vs 5 D PAR Les de : . ra g- “ res Po Ce, S DE S .Ù vs S pc ù u e R : h | 4 RS % : ip £ ' Ÿ ù " TV Ver, + , à ” Pa mp \ RSS SOS toner us Ÿ Rd Va eeX arr: | a s C7 ra Ex) ge ER n/ , se UT N > ” LEE Eve So NS TEVRRS se K et À w ta. 127 sm = Era \ Pa Nyse ee R Ÿ S RDC A aq, = | % 3 x . es se D ù K . La > SÈ ù La Lu: DES nn de SLT en). ANS à NY À ge USE à < S à ‘ - res Fe - : à 1 k “ . à N , TV be Ja DORELET LE TT naï ; S » s « ve w: x « KR Tr À Sté : CA % te S RS L > d L ÿ AUTTA Er VER Sa ame vou KT RE $ $ ! ïe à os te Da ren es, NET & Ù Tres < AUS ” : ee ENS . \ Aer Era Vtt T ; '- x : x " 2 à N NS 2 k : s S K Ternes Pa UT S VS n " ESS SENS Des Satan SRE een Ve nv nn = «x, à h ae, » SS % s Sr ARS \e x L ‘ io & Pan S » ù l : , EN Gr ne Name AQaresÀ < à a ù n AN E 2 N " LR \ n ee > Re + À : \ ù EURE Pa DRE ATEN ; Ses ù ù = RS MAMIE TES DA ALUPERSE TES &e > LS ; eu De er he À à 5. ; NS Eee : ne ne RSS À , » : < SNS Kaesse - , * 4 gg EYE os mg “r &. K S A ” L MASCPTENEERS Dry, x C SA